(Neuf heures quarante-neuf minutes)
Le Président (M. Ouimet): Alors, je constate le quorum. À l'ordre, s'il vous plaît! Bon matin à tous et à toutes. Je déclare la séance de la Commission spéciale sur la Loi électorale ouverte. Je demanderais à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs téléphones cellulaires.
Le mandat de la commission est de tenir des auditions publiques dans le cadre de la consultation générale à l'égard de l'avant-projet de loi intitulé Loi électorale.
M. le secrétaire, avons-nous des remplacements?
Le Secrétaire: Non, M. le Président, je n'ai aucun remplacement à annoncer aux membres de la commission.
Le Président (M. Ouimet): Bien. Alors, nous entendrons ce matin les organismes suivants: le Parti vert et le Conseil du statut de la femme. Cet après-midi, à partir de 14 heures, nous entendrons dans l'ordre le Collectif Féminisme et Démocratie; par la suite, ce sera au tour de l'Administration régionale Kativik et de la Société Makivik de faire une présentation conjointe pour laquelle une interprétation simultanée sera offerte. Enfin, nous compléterons nos travaux aujourd'hui avec la présentation du Mouvement pour une Démocratie nouvelle.
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(9 h 50)
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Je prendrai maintenant quelques instants pour expliquer à tous comment sera effectué le partage du temps d'intervention. Vous constaterez tout d'abord que tous les organismes entendus aujourd'hui disposent tous d'une période d'audition d'une heure. Chacune des périodes d'audition se divise donc ainsi: 20 minutes de présentation de la part du témoin, 15 minutes de questions de la part des députés ministériels, 10 minutes de questions de la part des députés de l'opposition officielle, cinq minutes de questions de la part du député indépendant et 10 minutes de questions de la part du comité citoyen.
Remarques préliminaires
J'inviterais donc maintenant les membres de la commission qui le désirent à formuler quelques remarques préliminaires. Et le partage du temps sera comme suit: les députés ministériels disposeront de 20 minutes; l'opposition officielle, 15 minutes; le député indépendant disposera de cinq minutes; et les membres du comité citoyen disposeront, pour leur part, de 20 minutes.
Alors, M. le ministre, à vous la parole pour ouvrir ces remarques préliminaires.
M. Benoît Pelletier
M. Pelletier: Merci, M. le Président. M. le Président, je tiens d'abord à vous saluer et à vous remercier pour le travail que vous faites pour cette commission depuis ses tout débuts. J'en profite également pour remercier et féliciter le vice-président de la commission et pour remercier tous les membres de la commission, y compris bien entendu ceux qui forment le comité citoyen. C'est un grand plaisir de vous revoir pour cette nouvelle phase en quelque sorte des consultations qui sera cruciale, puisque des centaines de citoyens ont répondu déjà à l'appel de la commission et ont exprimé le souhait de venir se faire entendre pour nous présenter leurs points de vue sur l'avant-projet de loi qui a été déposé par le gouvernement bien entendu, et plus particulièrement sur la question de la réforme du mode de scrutin.
M. le Président, nous allons donc débuter une tournée des régions du Québec, nous allons visiter pas moins de 17 villes du Québec. Et il me fait plaisir de vous informer que plus de 500 personnes ont demandé d'être entendues par cette commission, ce qui en fait une des commissions parlementaires les plus importantes dans l'histoire du Québec. Et ceux qui doutaient que la question de la réforme du mode de scrutin ou que plus généralement la question de la réforme des institutions démocratiques suscite de l'intérêt auprès de la population, je pense maintenant qu'ils ont leur réponse. Nous avons reçu à ce jour plus de 250 mémoires, figurez-vous, et plus de 500 citoyens ont exprimé leurs points de vue déjà par l'intermédiaire d'Internet. Donc, on voit qu'en fin de compte nous sommes en présence d'une commission qui suscite un intérêt certain de la part de la population.
Nous avons envoyé dans tous les foyers du Québec... Enfin, c'est un processus qui a commencé, qui va se poursuivre au cours des prochaines semaines, puisque c'est un processus progressif, mais donc nous avons envoyé dans plusieurs foyers du Québec jusqu'à présent et à la fin nous aurons envoyé dans tous les foyers du Québec une petite brochure, un petit dépliant qui explique en gros quels sont, je dirais, les travaux de la commission et en même temps qui invite les citoyens à en faire partie.
Nous avons en plus, M. le Président, préparé un cahier du participant qui, lui, est plus sophistiqué, qui, lui, est plus élaboré. Eh bien, figurez-vous, M. le Président, qu'à ce moment-ci donc 8 000 cahiers du participant ont été imprimés, et nombre d'entre eux ont déjà été distribués. Donc, nous sommes vraiment en présence d'une opération de très, très grande envergure.
Nous avons tous eu la chance évidemment d'entendre des représentants de partis politiques, le Directeur général des élections et des experts l'automne dernier, dans le contexte des consultations particulières. Ce que j'en ai compris, c'est ceci: d'abord, sur 14 experts qui sont venus témoigner, j'ai compris que 13 d'entre eux étaient favorables à ce qu'il y ait une réforme du mode de scrutin. Attention, je ne dis pas ici qu'ils sont favorables à la position avancée par le gouvernement. Certains sont favorables à cette position mais demandent qu'il y ait des changements, demandent qu'il y ait des précisions, demandent qu'il y ait différentes mesures qui soient modifiées. Ce n'est pas ça que je dis, je ne dis pas qu'il y a 13 experts sur 14 qui sont favorables à la position du gouvernement, je dis qu'il y a 13 experts sur 14 qui souhaitent qu'il y ait une réforme du mode de scrutin, et chacun prend bien soin évidemment d'avancer sa formule, de faire sa proposition, de faire sa suggestion. Alors, vous voyez quand même qu'au niveau des experts il y avait un net consensus en faveur de la réforme du mode de scrutin.
J'ai noté par ailleurs, M. le Président, que les trois grandes formations politiques du Québec, le Parti québécois, le Parti libéral du Québec et l'Action démocratique du Québec, sont venues témoigner et se sont dites en faveur d'un système proportionnel mixte. Encore là, évidemment, les formules peuvent varier d'un parti à l'autre, il faut bien l'admettre, et les partis se feront entendre au mois de mars et viendront davantage étayer leurs propositions. Mais vous voyez que, même au niveau des partis politiques, il y a justement donc un consensus qui se dégage en ce qui concerne la réforme du mode de scrutin, d'une part, et même, d'autre part, en ce qui concerne le mode proportionnel mixte.
Maintenant, M. le Président, notre devoir à nous tous et à nos toutes, ce sera de laisser la parole aux citoyens, de laisser la place aux citoyens afin qu'ils se fassent entendre sur la question parce qu'en bout de piste cette démocratie que nous voulons réformer, c'est la nôtre bien entendu, mais c'est aussi la leur en bonne partie. Et il ne faut jamais oublier que cette réforme des institutions démocratiques dans laquelle le gouvernement du Québec est résolument engagé, cette réforme doit reposer sur des valeurs. Il sera important d'entendre les citoyens. Au-delà de la mécanique en quelque sorte qui est le propre d'un nouveau mode de scrutin, au-delà finalement des détails, il sera important d'entendre les citoyens sur les valeurs qui, pour eux, sont importantes en ce qui concerne la réforme des institutions démocratiques.
Moi, je peux vous dire une chose, M. le Président ? je terminerai avec cela ? c'est qu'en tant que parlementaire je me sens choyé de faire partie de cette commission. Je me sens choyé de faire partie de cette commission à cause de la nature du sujet qui fait l'objet de ses travaux, d'une part, mais également parce que, pour la première fois dans l'histoire du Québec, il y a un comité citoyen, donc formé de huit personnes venant de tous les coins du Québec, qui accompagne les parlementaires dans leurs travaux.
Et je dois également souligner, M. le Président, la très, très bonne atmosphère de travail qui a marqué nos travaux jusqu'à présent, et je tiens à en remercier tous mes collègues, quelle que soit leur formation politique. Je pense que cette atmosphère de travail, en dépit de nos divergences politiques, en dépit même de nos points de vue différents, cette bonne atmosphère de travail témoigne éloquemment du fait que, pour nous tous et toutes qui sommes réunis autour de cette table, la transformation en quelque sorte de la démocratie québécoise, c'est quelque chose vraiment de très important. Et nous savons maintenant en plus que l'opinion des citoyens par rapport à cette réforme, eh bien, elle est fondamentale. Merci.
Le Président (M. Ouimet): Merci à vous, M. le ministre, pour ces remarques préliminaires. Je vais aller du côté maintenant de Mme la députée de La Pinière pour vos remarques.
Mme Fatima Houda-Pepin
Mme Houda-Pepin: Merci beaucoup, M. le Président. Je serai brève. D'abord, pour saluer le ministre, qui est très passionné par cette question de réforme de scrutin, comme nous tous, ainsi que tous les collègues. Je salue les membres du comité citoyen. On a commencé à s'ennuyer de vous, très heureux de vous revoir. Vous dire, M. le Président, tout le plaisir que j'ai à participer à cette commission, commission citoyenne bien entendu, sur un sujet aussi important que celui de la question de la Loi électorale et de la réforme du mode de scrutin.
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(10 heures)
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Comme le ministre l'a dit, nous avons déjà fait une étape avec les experts dans une consultation particulière. Et ces experts sont venus nous présenter des points de vue très élaborés, parfois très pointus, parfois contradictoires, mais, pour nous en tout cas qui avons reçu ces opinions, ça a été très éclairant. Aujourd'hui, nous entamons une nouvelle étape qui est celle de la consultation générale, nous allons donc entendre les groupes. Je voudrais exprimer ici, M. le Président, quant à moi... Et le ministre a fait tantôt référence aux valeurs, parce qu'il faut regarder un petit peu les valeurs qui nous animent autour de ce débat, il y a deux questions qui m'interpellent plus particulièrement.
La première, c'est comment, au-delà de la mécanique, et des processus, et des modalités, comment rétablir le lien de confiance entre les élus et les citoyens. Il y a là un fossé extraordinaire, et nous sommes interpellés au premier chef pour réfléchir en profondeur, nous avons cette opportunité, hein? Parce qu'à tous les jours nous sommes happés par le quotidien, on n'a pas le temps de réfléchir en profondeur. Cette commission, moi, personnellement, je m'attends à ce qu'on puisse avoir des pistes de solution, des orientations pour dire comment, comme élus, hein, que ce ne sera pas seulement à tous les quatre ans que les gens mettent un x dans l'isoloir, mais qu'ils puissent continuer à s'impliquer, qu'ils puissent suivre la politique et suivre un petit peu ce que nous faisons.
Et le deuxième volet, il est corollaire, c'est le taux de participation aux élections. Ça devient anémique. C'est très préoccupant dans une démocratie. On se bat pour avoir le droit de vote, et les gens ne l'exercent pas, pas nécessairement à la hauteur qu'on souhaiterait pour indiquer que vraiment cette démocratie sert les citoyens. Alors, là encore, je ne sais pas quel sera le taux de participation des élections fédérales qui ont eu lieu hier, mais, si je me réfère au taux de participation du 6 novembre dernier au cours des élections municipales, c'est-à-dire il y a des gens qui se sont fait élire avec des taux de participation autour de 30 %. C'est-à-dire on ne peut pas s'empêcher de se poser des questions, j'espère qu'on pourra trouver des réponses.
Et je terminerai en vous disant, M. le Président, que, dans cet exercice où nous voulons réformer notre mode de scrutin dans le sens de l'équité, parce que c'est ça qu'on recherche, qu'il soit plus équitable, plus représentatif, pour moi il y a deux groupes cibles qui méritent en tout cas mon attention, c'est la sous-représentation des femmes et la sous-représentation des Québécois issus des minorités. Donc, là aussi, je vais essayer d'être attentive et vigilante à toutes les initiatives ou les propositions qui vont nous être faites dans ce sens.
Alors, voilà, c'est mes préoccupations que j'ai exprimées devant vous, M. le Président. Je souhaite bonne chance à cette commission et aux travaux que nous entamons à cette étape-ci. Et merci pour votre présidence, M. le Président, parce que vous la menez très bien.
Le Président (M. Ouimet): Merci à vous, Mme la députée de La Pinière. Je me tourne maintenant du côté de M. le député de Trois-Rivières.
M. André Gabias
M. Gabias: Merci, M. le Président. D'abord, pour vous saluer, vous-même, ainsi que tout le personnel de la commission. Heureux de reprendre les travaux. Je salue cordialement le ministre, qui participe activement et est très intéressé à cette importante commission, tous mes collègues, autant du côté ministériel que du côté de l'opposition. Je salue également avec beaucoup de plaisir le retour des gens qui forment le comité des citoyens. Et aussi je souhaite la bienvenue à tous les citoyens que nous entendrons à partir d'aujourd'hui.
Je formule un seul souhait. Jusqu'à maintenant, les travaux de la commission vont très bien, et je formule le souhait que nous continuions dans cette veine, en fait de ne pas nous laisser distraire par toutes sortes d'événements politiques qui sont passagers. Et ce que nous regardons, c'est vraiment l'avenir démocratique du Québec, et je pense qu'il ne faut pas se laisser distraire par des événements politiques passagers qui sont normaux dans le cours de la vie politique de façon à maintenir notre objectif qui est celui de faire en sorte que les élus dans notre Parlement représentent et soient vraiment au service de chacun, de chaque citoyen et citoyenne du Québec.
Alors, merci, et très heureux de reprendre les travaux avec vous tous.
Le Président (M. Ouimet): Merci à vous, M. le député de Trois-Rivières. Nous allons maintenant du côté de l'opposition officielle. Alors, M. le député de Masson, à vous la parole.
M. Luc Thériault
M. Thériault: Merci beaucoup, M. le Président. Alors, mes premiers mots seront à votre endroit pour d'abord vous saluer, saluer le travail que vous faites comme président de cette commission avec mon collègue de Richelieu, qui est vice-président. Je voudrais saluer aussi le travail efficace du secrétariat. Ce n'est pas facile, les opérations logistiques d'une telle consultation. Alors, je salue le secrétaire ainsi que tout le personnel du secrétariat.
Alors, au ministre, qui, on peut se le dire, est assez sympathique dans les travaux que nous avons à mener... Il prend garde de faire en sorte que son pouvoir exécutif ne subordonne pas trop les législateurs que nous sommes. Et c'est remarquable parce qu'ils n'ont pas tous cette préoccupation lors de nos travaux parlementaires. Je salue mes collègues d'en face, la collègue de Duplessis, les gens qui m'accompagnent, qui font aussi un excellent travail.
Les citoyens, alors c'est un plaisir de vous revoir. Et, lors des consultations particulières, on a pu profiter de vos questions éclairantes, et je souhaite effectivement que vous poursuiviez dans cet esprit. Et on va vivre beaucoup ensemble dans les prochaines semaines d'ailleurs, nous tous, on va se transformer en quelque part en une famille élargie.
Cette tournée, cette consultation-là est ambitieuse. Je n'ai qu'un souhait, c'est que la température soit clémente, parce que je regardais l'itinéraire encore une fois et je trouve que nous avons été pas téméraires mais très optimistes dans nos déplacements, et nous tenons, comme opposition officielle, à faire en sorte de se déplacer, et d'aller voir les gens à travers le Québec, et de prendre la peine de les voir chacun dans leur milieu de vie afin de débattre de cette question aussi fondamentale.
D'entrée de jeu, un commentaire donc sur la forme. L'opposition officielle tient à réaffirmer qu'il eût été préférable de procéder à une deuxième phase des états généraux pendant les deux dernières années et demie afin de débattre du choix d'un modèle correspondant sur mesure aux particularités géopolitiques du Québec et aux aspirations démocratiques des Québécois et des Québécoises plutôt que de prendre deux ans et demi pour encadrer et limiter le débat dans un texte législatif dont tous les intervenants jusqu'à maintenant ont critiqué les paramètres, le contenu.
Par ailleurs, je ne veux pas diminuer l'optimisme du ministre, mais, par ailleurs, un récent sondage SOM fait à la demande de l'Assemblée nationale dévoile qu'un Québécois sur deux seulement considère que le débat sur le mode de scrutin est pertinent pour la démocratie québécoise. À propos de cette consultation qui s'amorce, ce sondage révèle que 54 % n'y sont pas intéressés, que, des 46 % qui y sont intéressés, 27 % ne sont pas au courant. À la lumière de ces indications, nous croyons qu'il serait opportun, avant de soumettre l'éventuel projet de loi à la population du Québec pour approbation, de procéder à une vaste opération d'information et de discussion sur la réforme qui sera ultimement proposée.
Puisque l'on amorce une tournée du Québec, l'opposition officielle souhaite entendre la population sur la réforme des institutions démocratiques du Québec en l'invitant à dépasser le modèle suggéré afin qu'un vrai débat ait lieu sur cette question et qu'elle puisse nous permettre de renouer le contact direct avec la population et de renforcer le lien de confiance avec les institutions démocratiques.
À la lumière des consultations particulières, pour l'opposition officielle comme pour de nombreux intervenants, le modèle, tel que proposé dans l'avant-projet de loi, n'est plus une option. Tous les experts entendus ont affirmé que tous les modes de scrutin présentent des avantages et des inconvénients, et, dans la liste des inconvénients, nous savons, dès lors que l'on divise un territoire, on crée un écart entre les suffrages exprimés et l'attribution des sièges, ce que nous qualifierons désormais de distorsion mathématique.
D'ailleurs, rappelez-vous, c'est ce qui faisait dire au Pr Réjean Pelletier qu'analyser le scrutin majoritaire uninominal à un tour avec les lunettes du suffrage universel équivaut à dénaturer l'économie du système en ce que ce mode de scrutin est utilisé dans le cadre des élections générales, c'est-à-dire 125 élections visant, d'abord et avant tout, à déterminer le pouvoir législatif et, par voie de conséquence, la gouvernance. En ce sens, s'il y a distorsion mathématique, il n'y a pas de déficit démocratique.
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(10 h 10)
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À propos de l'adoption de la réforme, considérant que tous les modes de scrutin présentent des avantages et des inconvénients, l'opposition officielle a affirmé à de nombreuses reprises qu'il y a des arbitrages à faire et que c'est à la population de les faire, puisque le droit de vote n'est pas un droit de politicien, ou d'expert, ou d'initié, mais bel et bien un droit d'électeur. Et c'est pourquoi d'entrée de jeu nous réaffirmons le principe incontournable selon lequel le débat sur la réforme du mode de scrutin doit être tranché par la population. Ainsi, elle serait invitée à inscrire son accord ou son désaccord par la tenue d'un plébiscite lors des prochaines élections générales.
À cet égard, nous avons été étonnés, pour ne pas dire renversés, d'entendre le ministre, non moins sympathique, affirmer qu'il n'avait pas dénoté, dans les interventions lors des consultations particulières, la nécessité d'une consultation populaire pour entériner le modèle. Cela démontre selon nous toute l'importance de ces consultations générales afin de s'assurer qu'une réforme aussi fondamentale dépasse les intérêts politiques partisans et qu'elle ne se réduise pas au vieil adage selon lequel on entend bien ce que l'on veut bien entendre.
Nous apprenions, lors du dépôt de l'avant-projet de loi en novembre 2004, que l'application du nouveau mode de scrutin n'était prévue que pour 2011. En juin dernier, le Parti québécois a adopté un programme de pays dans lequel il s'engage, dès la prise du pouvoir, à élaborer une constitution provisoire comportant une réforme des institutions démocratiques incluant une décentralisation des pouvoirs et un mode de scrutin proportionnel mixte. Loin de présumer du résultat des prochaines élections générales, c'est dans une perspective de cohérence avec notre agenda politique que l'opposition officielle entend donc profiter des consultations générales afin d'entendre les préoccupations des Québécois quant à la réforme des institutions démocratiques et invite ceux-ci à dépasser le cadre conceptuel proposé par l'avant-projet de loi. Cela n'amoindrit aucunement l'intérêt que nous portons à la discussion qui s'engage, et, loin de vouloir faire l'économie de cette consultation, au contraire, nous souhaitons en profiter pour entendre les préoccupations des Québécoises et des Québécois sur la réforme électorale, tant du point de vue de la révision du mode de scrutin qu'au niveau des dispositions ayant trait au processus électoral.
Il est de la plus grande importance de ne pas occulter l'autre volet de la réforme, lequel revêt un caractère particulier à la lumière des récentes révélations relatives à des infractions à la Loi électorale québécoise et à la tenue d'une enquête par le Directeur général des élections. En attendant les résultats de l'enquête du Directeur général, nous souhaitons explorer toute piste de solution afin d'assurer le respect des lois québécoises. Il y a lieu de considérer l'opportunité de réviser les règles de financement des partis politiques afin d'assurer le principe de l'équité des moyens des partis politiques, lequel pourrait favoriser l'émergence d'une plus grande pluralité du débat et de la présence dans le débat politique.
Nous devons aussi nous questionner sur l'effet réel des mesures visant à favoriser une plus grande accessibilité au droit de vote dans l'avant-projet de loi. Je pense ici au danger d'une banalisation du droit de vote. Alors que l'on s'efforce de mettre en valeur les plateformes électorales en assurant l'équité des moyens pour les partis politiques par la voie du financement public ? et je fais référence ici à la rationalisation des juges dans l'arrêt Figueroa en 2003 ? les modalités proposées dans l'avant-projet de loi permettraient de voter dès le 27e jour précédant le jour J, alors que la période des mises en candidature ne se termine que le 16e jour précédant le jour J. S'agit-il d'un moyen efficace afin d'augmenter la participation aux élections, alors qu'un des facteurs déterminants du taux de participation est lié aux enjeux électoraux, lesquels ne peuvent émerger au cours de débats qui s'étendent pendant 33 jours de campagne électorale? Il me semble ici qu'il en va du respect du principe du choix éclairé de l'électeur.
Parmi nos autres préoccupations, l'intégrité du vote, le taux de participation, l'identification de l'électeur eu égard aux révélations dans un quotidien québécois, le 1er octobre 2005, concernant l'usurpation d'identité par rapport au permis de conduire, qui est une carte maîtresse pour le droit de vote, et nous sommes préoccupés par l'égalité hommes-femmes et l'atteinte d'une représentation équitable des minorités ethnoculturelles. Ce que nous retenons d'entrée de jeu, ici, c'est que l'avant-projet de loi semble rater la cible en récompensant les candidatures plutôt que les élus.
En conclusion, M. le Président, s'il est vrai que le mode de scrutin doit être taillé sur mesure pour le Québec, il est tout aussi vrai que la situation politique du Québec est surdéterminée par son statut dans la fédération canadienne face à un gouvernement fédéral centralisateur qui, lui, ne modifiera pas son mode de scrutin. Occulter la surdétermination de la question nationale dans ce débat, c'est oublier que l'instauration de modes de scrutin proportionnels a été l'oeuvre de pays et d'États souverains.
L'opposition officielle sera particulièrement attentive aux arbitrages entre les éléments suivants: la représentativité des régions, le pluralisme politique, l'imputabilité et la responsabilité de la gouvernance par opposition aux coalitions formées a posteriori, le principe de l'alternance, la possibilité de sanctionner directement un gouvernement, la possibilité d'élire un parti en fonction de sa plateforme électorale, l'équité des moyens, l'intégrité du processus électoral.
Nous nous réjouissons de la participation des différents groupes qui ont transmis des mémoires et de l'intérêt des citoyens qui ont manifesté la volonté de s'adresser à la commission. Nous voulons les entendre tous et nous ferons tout ce qui est humainement possible pour le faire si effectivement dame Nature est clémente. Loin d'être fatalistes et pessimistes, comme certains qui considèrent que les Québécois sont complètement désabusés de la chose politique, nous pensons que cette tournée de consultation pourra contribuer au maintien de la vitalité des institutions démocratiques du Québec. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Ouimet): Merci à vous, M. le député de Masson. M. le vice-président de la commission et député de Richelieu, il reste à peine deux minutes et quelques secondes.
M. Sylvain Simard
M. Simard: Je vais essayer d'être bref, M. le Président, après vous avoir salué et avoir salué mes collègues des trois côtés, dirions-nous, presque de la Chambre et nos collègues dont nous sommes très fiers, nos collègues citoyens qui se sont joints à nous ce matin et qui font maintenant partie des travaux de cette commission. Saluer particulièrement, évidemment, le ministre pour son écoute. Je pense que le député de Masson l'a souligné, et c'est une des caractéristiques du député de Chapleau, et nous l'apprécions beaucoup.
Quelques brefs commentaires, M. le Président, pour vous dire: Pour ma part, comme pour la députée de La Pinière, ma préoccupation, c'est vraiment la santé de la démocratie. Cette santé n'est pas éclatante. Il y a des signes qui ont démontré, ces dernières années, un recul de la participation, notamment aux élections, mais davantage un éloignement des citoyens par rapport à la réalité politique démocratique. Il faut réfléchir sur l'importance, pour les assemblées élues dans un régime démocratique, de redevenir l'endroit où se définit l'intérêt commun et le lieu où se font légitimement les grands débats de société. Lorsqu'il y a divorce entre la réalité citoyenne et le parlementarisme, il y a lieu de s'interroger sur notre démocratie. L'Assemblée nationale du Québec doit rester le lieu premier des grands débats de société, le forum légitime de la représentation des intérêts des Québécois et des Québécoises.
Et en conclusion, M. le Président, je pense que, moi aussi, je vais écouter très attentivement ceux et celles qui vont venir nous faire des représentations en ayant à l'esprit quelques préoccupations qui me sont particulières peut-être: Comment nous donner de meilleurs moyens pour que la représentation à l'Assemblée nationale présente un visage qui reflète mieux la composition réelle de la société québécoise?
Il y a eu des progrès considérables au cours des 30 dernières années, notamment la représentation des femmes, qui était inexistante ou quasi inexistante, qui est devenue l'une des plus avancées en Occident. Il n'en demeure pas moins qu'il y a encore un long chemin à parcourir. Je signale en passant que le régime, la mécanique électorale a peu à voir avec cette représentation, puisque des pays à représentation proportionnelle ont un très faible taux, dans certains cas, de représentation des femmes, alors que nous avons ici fait des progrès considérables. Mais il faut donc s'interroger plus profondément que sur les questions de mécanique, les questions des régions aussi. On oublie trop souvent que le député, c'est le représentant de ses électeurs, c'est le médiateur entre sa population et le pouvoir.
Et, pour terminer, M. le Président, dernier reflet qui va devenir de plus en plus une préoccupation, je pense, de tous les côtés de cette Chambre, c'est de nous assurer de la participation réelle de tous ces Québécois et Québécoises qui sont venus, au cours des dernières générations, se joindre à nous et qui doivent aussi être présents à l'Assemblée nationale.
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(10 h 20)
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Alors, je pense qu'à la suite du député de Masson, dont j'épouse évidemment tous les propos, qui ont été extrêmement pertinents, j'y ajoute peut-être ces préoccupations qui sont les miennes.
Le Président (M. Ouimet): Merci, M. le député de Richelieu. Je me tourne maintenant du côté de M. le député des Chutes-de-la-Chaudière.
M. Marc Picard
M. Picard: Merci, M. le Président. C'est avec optimisme et enthousiasme que j'entreprends cette deuxième partie de cette commission parlementaire qui, pour moi, est un moment historique, historique parce qu'en effet le choix d'un système électoral est pour une démocratie l'une des décisions institutionnelles les plus importantes. On sait que ce choix a de profonds effets sur l'avenir de la vie politique d'une nation. Or, ces systèmes tirent leur stabilité des enjeux politiques qui s'y greffent et qui en tirent avantage à leur tour.
Donc, le façonnement d'institutions politiques est une tâche délicate qui s'impose non seulement aux nouvelles démocraties, mais aussi à celles qui sont établies depuis longtemps et qui tentent de s'adapter à de nouvelles réalités politiques. En effet, le Québec se doit d'effectuer au moins un examen des acquis de notre régime politique, et ce, afin de valider la qualité de nos institutions et d'y apporter des ajustements, car nos institutions doivent faire face à la nouvelle réalité citoyenne. Or, le nombre de citoyens grandissant qui délaissent les partis politiques pour se réorganiser autour des groupes d'intérêts nous pousse à questionner le modèle actuel. Est-ce la fin du bipartisme? Le multipartisme serait-il une réponse à la nouvelle réalité québécoise? À l'évidence, il serait primordial de pouvoir définir les nouveaux courants politiques que sont la réalité québécoise.
C'est pour cette raison, M. le Président, que je me réjouis de la place réservée dans le processus de consultation à la participation des citoyens. En effet, le comité citoyen qui nous accompagne depuis le début de la consultation nous a démontré, par la qualité de ses interventions, l'importance que l'apport citoyen doit avoir lors des étapes de ce même processus de consultation. D'autre part, le nombre de mémoires reçus de même que le nombre de personnes qui m'ont interpellé dans ma circonscription m'amènent à aborder avec confiance cette nouvelle étape ô combien importante des consultations à venir.
Ces interventions montrent l'importance que les gens accordent à cette question. En effet, les systèmes électoraux sont les mécanismes qui permettent de traduire en sièges les préférences des citoyens. Par conséquent, ils ont une incidence considérable sur de nombreuses facettes de la vie politique. Donc, la façon dont un système électoral traduit des votes en sièges au Parlement peut façonner l'appui du public à l'égard du système dans son ensemble. Pour un bon nombre de citoyens, une élection est la seule forme de participation politique, la seule façon de se faire entendre comme citoyens. Il est donc extrêmement important pour nous que le système électoral soit perçu comme équitable et qu'il réponde aux attentes du citoyen. Si ce n'est pas le cas, la participation aux élections diminuera, le respect à l'égard de la classe politique et de ses élus sera moindre, et par conséquent la démocratie elle-même risque d'être ébranlée.
Or, plusieurs citoyens ont aujourd'hui le sentiment que les partis politiques ne réussissent plus à cerner leurs préoccupations et remettent en question leur confiance envers la politique en général. Pour remédier à la situation, nous devons revoir notre façon de faire. Une réforme de la Loi électorale et du mode de scrutin prend toute son importance, car il est primordial que notre Loi électorale puisse traduire au sein de l'Assemblée nationale les enjeux qui interpellent la population du Québec.
Malgré le rôle essentiel que le système électoral joue en démocratie, il faut toutefois ne pas en exagérer son importance. Au-delà de l'institution et du mécanisme, il y a les partis politiques et les citoyens. Ces deux derniers ont une incidence directe sur le type de gouvernement dont on se dote, sur la culture politique qui va se développer et sur le comportement électoral des Québécois. En effet, le système électoral constitue le véhicule par lequel la volonté citoyenne se traduit en sièges au Parlement et devient le mécanisme par lequel se façonne la concurrence entre les partis politiques.
Enfin, les élections constituent le mécanisme le plus direct de faire entendre la voix des citoyens. Or, lorsque ces mêmes citoyens sont aux prises avec des doutes et des mécontentements face à la politique, c'est vers un changement du mode de scrutin qu'ils vont se tourner. C'est donc notre devoir, en tant que législateurs, de traduire cette volonté populaire par une mise à jour de nos lois. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Ouimet): Merci à vous, M. le député, pour vos remarques préliminaires.
Auditions
Je n'ai pas d'autre demande d'intervention, donc nous allons immédiatement amorcer l'échange avec nos invités. J'invite le ou les représentants du Parti vert à prendre place à la table des témoins.
Alors, M. Paul-André Martineau, vous êtes président de l'instance régionale de Montréal pour le Parti vert, si j'ai bien compris. C'est ça?
M. Martineau (Paul-André): Tout à fait.
Le Président (M. Ouimet): Alors, vous êtes le bienvenu à l'Assemblée nationale du Québec. Je vous cède un temps de parole de 20 minutes, après quoi nous amorcerons une période d'échange avec vous.
Parti vert du Québec (PVQ)
M. Martineau (Paul-André): Merci beaucoup, M. le Président. Tout d'abord, permettez-moi de vous remercier très sincèrement de nous permettre de prendre part à cette consultation historique. Première fois que le Québec remet officiellement en question son mode de scrutin. Sachez que les attentes du Parti vert du Québec sont très grandes. Entre autres, les principes de justice sociale, de démocratie participative et de respect de la diversité sont au coeur de notre projet de société axé sur le développement durable. Une réforme du mode de scrutin pour que ce dernier devienne davantage respectueux de la volonté populaire correspond parfaitement à nos valeurs.
Permettez-moi aussi à titre personnel de vous remercier de prendre part à ces consultations. En fondant, en 1999, le Mouvement pour une démocratie nouvelle, le MDN, en y militant comme de nombreuses autres personnes l'ont fait par la suite, nous voulions que les simples citoyennes et citoyens dont nous faisons partie soient au coeur du processus de révision de leur mode de scrutin. C'est pourquoi je salue l'initiative que vous avez eue, Mmes et MM. les députés, de faire participer à vos côtés des citoyennes et citoyens du Québec. Et à vous, citoyennes et citoyens du Québec, merci de vous consacrer pendant quelques mois à ce processus de la plus haute importance pour la vie démocratique de notre société. Le Québec vous regarde et attend avec intérêt le fruit de vos réflexions.
En créant le Mouvement pour une démocratie nouvelle, l'idée était de créer un mouvement citoyen non partisan qui transcendait l'ensemble des partis politiques. Il s'agissait de regrouper des gens de toutes tendances qui, au-delà de leurs convictions politiques légitimes et louables, croyaient que l'actuel mode de scrutin était injuste et qu'il se devait d'être réformé. Nous avions en tête que la citoyenne et le citoyen se devaient d'être au coeur de ce projet parce qu'ils sont les uniques propriétaires de leur mode de scrutin.
Vous savez que les Québécoises et les Québécois chérissent les valeurs démocratiques. Ils sont très respectueux des opinions et des différents choix de leurs concitoyennes et de leurs concitoyens. Le plus bel exemple a pu être vu en novembre 2001. J'ai eu l'immense privilège d'organiser une conférence de presse à laquelle participaient Claude Ryan, Claude Charron, Jean Allaire, le président de la CSN de l'époque, M. Laviolette, et la présidente de la Fédération étudiante universitaire du Québec de l'époque, Mme Mayer-Périard. Ces personnes bien connues et d'horizons politiques divers déposaient alors une pétition signée par 125 personnalités de la société civile québécoise, toutes tendances politiques confondues, réclamant du gouvernement une commission pour consulter les citoyennes et les citoyens au sujet de l'actuel mode de scrutin québécois. Avec beaucoup de patience, beaucoup de persévérance de la part de l'ensemble des militantes et des militants travaillant pour une réforme du mode de scrutin, nous y sommes maintenant rendus, à cette commission.
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(10 h 30)
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Exactement dans le même état d'esprit et comme la très grande majorité des Québécoises et des Québécois, le Parti vert du Québec croit fermement que réformer le mode de scrutin ne doit pas être une question partisane. On ne maintient pas un système discriminatoire parce qu'il désavantage ses adversaires politiques, de la même façon que l'on ne le modifie pas afin qu'il nous soit davantage profitable. Et encore une fois, et on ne le répétera jamais assez souvent, le mode de scrutin n'appartient pas aux partis politiques ni aux groupes de pression, il est la propriété des électeurs, des citoyennes et citoyens d'un État. C'est à l'ensemble des citoyennes et des citoyens du Québec, toutes tendances politiques confondues, d'avoir le droit de choisir et de modifier une institution politique qui leur appartient intimement. Il y a des principes démocratiques qui comptent plus que tout, et qui sont à la base du fonctionnement de notre société. Il s'agit de respecter la différence, et de voir cette différence comme étant un enrichissement collectif et non pas comme un appauvrissement.
Donc, quels sont les principes que devra respecter le prochain mode de scrutin selon le Parti vert du Québec? Plusieurs militantes et militants du Parti vert du Québec ont fait l'exercice d'établir les principales valeurs qui doivent être respectées par notre prochain mode de scrutin. Sachant que certaines de ces valeurs peuvent entrer en conflit avec d'autres lors de leur mise en application, non seulement il nous a fallu les déterminer, mais aussi identifier celles qui devaient avoir préséance sur les autres.
Selon le Parti vert du Québec, en ordre de priorité, le prochain mode de scrutin doit viser à respecter cinq éléments importants:
1. Une proportionnalité exacte afin de respecter intégralement la volonté populaire;
2. Une proportionnalité semblable pour toutes les Québécoises et tous les Québécois;
3. L'impossibilité d'un renversement de la volonté populaire exprimée au niveau de l'ensemble du Québec;
4. Une représentation égale entre les femmes et les hommes à l'Assemblée nationale du Québec;
5. Un découpage du territoire québécois en fonction des réelles régions du Québec telles qu'elles existent aujourd'hui.
Que signifie cet ordre des priorités? Nous savons que l'application de ces cinq valeurs que nous venons d'énumérer peut parfois être conflictuelle quand vient le temps de définir la mécanique d'un mode de scrutin. C'est pourquoi nous recommandons, en guise d'exemple, que le respect intégral de la volonté populaire ? soit notre priorité numéro un ? ait préséance sur le découpage du territoire québécois aux réelles régions du Québec ? qui est notre priorité numéro cinq ? ce qui ne signifie pas qu'aucune importance n'est accordée au découpage des régions, au contraire, puisqu'il constitue l'une de nos cinq priorités. Toutefois, le respect du découpage du territoire québécois en fonction des réelles régions du Québec ne doit pas se faire au détriment du respect de la volonté populaire.
Pour répondre précisément aux questions soulevées par les documents de réflexion liés à l'avant-projet de loi, voici les recommandations du Parti vert du Québec. Nous acceptons que le nombre de députés à l'Assemblée nationale du Québec varie d'élection en élection; nous acceptons que ce nombre puisse augmenter, si nécessaire, jusqu'à 140 députés.
Nous n'avons pas un mode de répartition des sièges spécifique à proposer. Cependant, à la lumière des principes qui doivent être respectés dans la réforme du mode de scrutin et qui guident notre position, les districts proposés dans l'avant-projet de loi nous paraissent inacceptables.
Que la compensation soit nationale ou régionale, une chose nous semble évidente: il faut absolument élargir les territoires qui serviront à calculer la répartition des sièges de compensation. Une plus grande amplitude est nécessaire afin d'atteindre les objectifs et les valeurs liés à un mode de scrutin proportionnel, et tenter de concilier ce qui peut être conciliable.
Nous voulons qu'un parti politique ayant obtenu un minimum de 5 % des suffrages ait la possibilité d'être représenté à l'Assemblée nationale du Québec.
Nous voulons deux bulletins de vote: un pour élire le député de la circonscription électorale dans laquelle on habite et un deuxième pour choisir le parti politique de notre préférence. Nous nous conformerions ainsi à ce qui se fait dans la plupart des sociétés utilisant un mode de scrutin mixte compensatoire.
Nous voulons des listes fermées pour que l'on respecte l'ordre des candidatures proposé par les partis politiques. Ceci a des conséquences importantes sur la représentation des femmes et des communautés ethnoculturelles. Toutefois, ces listes doivent être constituées de façon démocratique au sein des partis politiques.
Nous voulons que les candidats des circonscriptions puissent aussi se présenter en tant que candidats de liste. Nous voulons que la Loi électorale exige des partis politiques la préparation d'une liste fermée de candidatures assurant une alternance hommes-femmes ou femmes-hommes. Prenons votre exemple, soit l'actuelle composition du comité citoyen qui est paritaire. Il y avait sûrement d'excellentes raisons pour lesquelles on voulait que ce comité soit paritaire. Alors, pourquoi ces raisons ne seraient-elles pas moins excellentes là où nous prenons les décisions les plus importantes pour l'avenir de notre société?
Également, la Loi électorale doit mettre en place des mesures incitatives de nature financière auprès des partis politiques pour les encourager à faire élire davantage de femmes à l'Assemblée nationale du Québec. Même chose pour les Québécoises et les Québécois issus des minorités et des nations autochtones à l'Assemblée nationale du Québec: ils sont partie prenante de notre société, il faut que le Parlement, leur Parlement soit à leur image.
Nous voulons des élections à date fixe, le dimanche.
Nous acceptons volontiers d'accorder un statut particulier aux Îles-de-la-Madeleine et au Nunavik.
Et, pour ce qui est de la mise en application de la réforme, permettez-moi de lire un extrait du document écrit par M. Massicotte et qui constitue le document de discussion du gouvernement. À la page 121, le professeur Massicotte fait un parallèle entre nos prochaines circonscriptions électorales et ce qui a été fait en Grande-Bretagne.
Je le cite: «Rappelons ici que la décision du législateur britannique d'utiliser les circonscriptions uninominales en vigueur à Westminster pour l'élection des "Constituency Members" des nouvelles assemblées parlementaires du pays de Galles et de l'Écosse a permis que les deux lois, sanctionnées respectivement les 31 juillet et 19 novembre 1998, encadrent les élections tenues dès mai 1999. Si l'idée est plutôt de réaliser un découpage inédit ? on parle toujours des circonscriptions électorales ? il faudra alors suivre le processus actuel qui implique l'intervention de la CRE et des audiences publiques, ce qui rend plus aléatoire l'entrée en vigueur du système à temps pour les prochaines élections.»
Donc, vous comprendrez alors que nous voulons que la réforme du mode de scrutin soit prête pour les prochaines élections à date fixe en 2007 ou 2008. À cette fin, pour accélérer la mise en application de la réforme, nous acceptons que l'on prenne la délimitation des circonscriptions électorales fédérales pour les prochaines élections provinciales. Nous voulons aussi une disposition juridique obligeant à des réajustements à la loi sur la représentation populaire après les deux premières élections suivant son adoption.
Bref, l'avant-projet de loi est un bon pas dans la bonne direction. Il faut le bonifier afin qu'il puisse permettre au prochain mode de scrutin du Québec d'être un instrument privilégié grâce auquel l'ensemble des citoyennes et des citoyens pourront se sentir pleinement représentés dans leur Parlement, un Parlement à leur image. Éliminons ce système qui sert une minorité ? les 40 % de citoyennes et de citoyens qui élisent les gouvernements ? et qui impose à la majorité ? les autres 60 % ? un gouvernement qu'elle n'a pas choisi. Dans notre système, une minorité peut obtenir des gouvernements majoritaires; il faut que ça cesse. Dans une proportionnelle, ces gens y seraient toujours, mais il faudrait qu'ils s'accommodent alors des désirs d'autres leaders et d'autres partis politiques pour former la majorité.
n(10 h 40)n Adoptons un mode de scrutin qui va forcer les différents partis politiques à dialoguer et à négocier entre eux afin que le programme du gouvernement issu de ce processus démocratique ait tout au moins l'aval de 50 % des citoyennes et citoyens du Québec.
Et, en terminant, je reprends une citation de Vincent Lemieux, dans l'un de ses articles, et qui correspond parfaitement à l'esprit de ce que devrait être une réforme respectueuse de la volonté populaire telle qu'exprimée par les citoyennes et les citoyens. Il écrit: «Dans une société politique de nature démocratique, les exigences de la représentation doivent primer. La gouverne doit composer avec les contraintes de la représentation et non pas contraindre la représentation de façon à ce qu'elle gêne le moins possible la gouverne.» Je vous remercie beaucoup.
Le Président (M. Ouimet): Merci à vous, M. Martineau, de nous avoir livré et présenté le point de vue du Parti vert du Québec. Nous allons maintenant amorcer avec vous une période d'échange. Je vais commencer avec M. le ministre responsable de la Réforme des institutions démocratiques.
M. Pelletier: Bonjour, M. Martineau. Merci d'être ici, aujourd'hui; merci de votre présentation.
J'ai cru noter que vous disiez du mode de scrutin actuel qu'il était déconnecté. C'est ce que j'ai vu dans les documents que vous avez déposés à la commission. Évidemment, on peut comprendre que c'est un mode de scrutin qui ne favorise pas votre formation politique, et je comprends par ailleurs que vous êtes favorable à une réforme du mode de scrutin.
J'aimerais que vous preniez quelques instants pour nous dire en quoi vous pensez que le mode actuel est déconnecté, parce qu'on a entendu un expert, cet automne, Christian Dufour, qui, lui, est venu nous dire ? au nom même d'un certain nombre d'autres collègues; qui est venu nous dire ? que le système actuel devait être conservé. Alors, j'aimerais vous entendre sur le caractère déconnecté du système de scrutin majoritaire.
Le Président (M. Ouimet): Alors, M. Martineau.
M. Martineau (Paul-André): Oui. Bien, écoutez, d'une part, d'un point de vue personnel, lorsque j'ai commencé à réfléchir sur la question de la réforme du mode de scrutin, on s'entend que c'est suite aux élections de 1998.
Donc, lorsqu'on a un mode de scrutin qui permet au deuxième parti le plus populaire au Québec de gouverner sans qu'il y ait aucun problème, de façon majoritaire, c'est une façon d'être déconnecté de la réalité, c'est une façon de faire en sorte d'avoir des gouvernements qui ne correspondent pas à ce que voudrait avoir la population.
À cette époque ? je n'ai pas refait les calculs pour les dernières élections, mais; à cette époque ? il y avait un seul député pour l'ADQ. Lorsqu'on faisait des calculs pour voir le prorata de votes que les députés recevaient de chacune des formations politiques, il y avait un déséquilibre incroyable. Pour l'ADQ, c'était en termes de centaines de milliers de votes. Pour avoir un député de l'ADQ, il a fallu qu'il y ait des centaines de milliers de voteurs qui s'expriment, parce que la représentation de l'ADQ était disséminée dans certaines régions.
Dans les comtés, pour pouvoir être élu, il faut évidemment avoir une masse critique. Donc, si on n'a pas la masse critique, même si nous avons, jusqu'à un certain point, 20 %... Et, si on prend juste l'exemple du système que l'on retrouve au fédéral, qui est le même que le nôtre, c'est un système qui fait en sorte que, lorsque le Parti conservateur, du temps de M. Charest, avait quand même obtenu un certain pourcentage de voix «from coast to coast», comme on dit, il n'avait obtenu que deux députés.
Donc, c'est une façon de faire en sorte de montrer que le mode de scrutin est déconnecté. Les électeurs votent, leurs votes ne se retrouvent pas dans des comtés où il y a une concentration suffisante de votes pour qu'ils puissent être entendus à leur Parlement. Donc, c'est une façon d'être déconnecté.
Le Président (M. Ouimet): Merci. M. le ministre.
M. Pelletier: J'aimerais savoir également quelle importance vous accordez à la représentation régionale. Je comprends que vous souhaitez qu'il y ait de plus grands districts. Maintenant, quelle priorité donnez-vous à la représentation régionale ou au critère régional par rapport, à titre d'exemple, à l'exactitude mathématique?
M. Martineau (Paul-André): Il faut que les régions soient prises en compte. Ça, c'est sûr et certain. C'est une des priorités, c'est une des valeurs que l'on a mentionnées. Mais il ne faudrait pas non plus que la question régionale cache l'exactitude mathématique de la représentation, c'est-à-dire, si on adopte une carte électorale avec des régions qui fait en sorte que la volonté populaire ne puisse pas être véritablement exprimée par le biais de leurs députés, bien il faut faire attention. Ça ne veut pas dire qu'il faut laisser tomber les régions, d'aucune façon. C'est ça.
Le problème avec un mode de scrutin, c'est qu'évidemment tout le monde ici est d'accord pour dire qu'un mode de scrutin a des avantages, qu'il a des désavantages, qu'il n'y a pas de mode de scrutin parfait. Il s'agit de finalement peser le pour et le contre, quels sont les avantages de l'un, quels sont les avantages de l'autre, et faire un choix, et, au niveau des valeurs que représente chacun des modes de scrutin, de prioriser quelles sont les valeurs.
Donc, pour ce qui est des régions, il faut absolument que les électeurs des régions se sentent concernés par le prochain mode de scrutin, mais il ne faut pas que ce soit au point de faire en sorte que, dans l'ensemble du Québec, la représentation de ce que veulent voir les électeurs au Parlement soit disproportionnée par rapport à leur vote.
Le Président (M. Ouimet): Bien. Merci, M. Martineau. M. le député de Trois-Rivières.
M. Gabias: Bien, dans la même veine... Bien, d'abord, bonjour, M. Martineau. Merci de votre éclairage; votre mémoire est très intéressant. Et je veux continuer sur ce sur quoi vous avez terminé en réponse à la question du ministre. Quelle magnitude voyez-vous? Parce qu'évidemment je comprends que vous parlez d'une compensation nationale, mais il ne faut pas oublier ? et peut-être régionale; il ne faut pas oublier ? l'aspect régional. À partir de là, quelle magnitude, du moins quel nombre de sièges par district vous pensez qui rejoindrait votre préoccupation régionale?
M. Martineau (Paul-André): Écoutez, moi, la réponse que je peux vous donner, c'est une réponse personnelle, ce n'est pas une réponse qui provient du Parti vert, là, je veux que ce soit bien clair. On n'a pas étudié la question au niveau du Parti vert. Moi, personnellement, la seule que je peux vous dire, c'est qu'en lisant les documents de M. Massicotte, moi, je me sentais davantage interpellé par ces régions, ces 16 régions que ces 26 districts, que ces 26 régions. Les 16 régions correspondent davantage à ce que pourrait être une carte électorale respectueuse des régions, au Québec, tout en permettant une plus grande amplitude au niveau des districts. Toutefois, je sais aussi que des personnes comme Henri Milner a travaillé sur une carte électorale où il diminue de 16 à 14 régions. Ça aussi, c'est intéressant. Donc, 26 régions, c'est irréaliste. Faire en sorte que l'on tombe à uniquement quatre régions, comme le document du gouvernement le laisse supposer aussi, c'est aussi irréaliste. Donc, peut-être autour d'une douzaine, 14, dans ces eaux-là.
Le Président (M. Ouimet): Bien. Alors, ça va, M. le député de Trois-Rivières?
M. Gabias: Une question additionnelle, M. le Président?
Le Président (M. Ouimet): Oui, bien, allez-y.
M. Gabias: Ne croyez-vous pas qu'en disant dès le départ que vous seriez d'accord à ce que le nombre de sièges corresponde ou du moins les comtés correspondent aux comtés fédéraux, est-ce que ça ne vient pas enlever de la souplesse dans ce dont on discute après? C'est-à-dire, au niveau de la représentation régionale, ça voudrait dire qu'on s'accorde à dire que vraiment les districts fédéraux correspondent bien aux réalités régionales, correspondent bien aux réalités locales, et on évite de se poser vraiment la question. Alors, ne croyez-vous pas que c'est peut-être un petit peu dangereux dès le départ de calquer les circonscriptions sur les circonscriptions fédérales, et après ça on cherche des réponses correctes sur les autres questions qui sont très importantes, c'est-à-dire la bonne représentation régionale, la bonne représentation locale, le lien avec le député?
M. Martineau (Paul-André): Juste une nuance: nous, ce que l'on propose, c'est que l'on calque les fédérales pour la première, pour accélérer. Par la suite, ce sera à nous de faire en sorte que les 75 circonscriptions correspondent davantage à ce que l'on veut.
La raison pour laquelle je tenais à parler des circonscriptions fédérales, c'est pour reprendre certains éléments de ce qu'avançait le Pr Massicotte pour accélérer les choses, pour la réforme, pour la première. Par la suite, on aura un autre quatre ans pour réfléchir à comment délimiter les circonscriptions pour qu'elles soient davantage respectueuses de ce que l'on veut.
M. Gabias: Parfait. Merci, je comprends mieux.
Le Président (M. Ouimet): Bien. Merci, M. le député de Trois-Rivières. Je vais aller maintenant du côté de l'opposition officielle, je reviendrai vers vous, Mme la députée de La Pinière. Alors, M. le député de Masson, à vous la parole.
n(10 h 50)nM. Thériault: Merci, M. le Président. M. Martineau, vous élaborez cinq principes. Vous avez dit tout à l'heure que l'avant-projet de loi... vous n'avez pas dit que c'était un pas dans la bonne direction, vous avez dit que c'était «un bon pas» dans la bonne direction. J'ai quelques réserves sur cette affirmation-là, et je voudrais la partager avec vous.
Quand vous dites: C'est un bon pas dans la bonne direction, vous êtes conscient que, si on adoptait l'avant-projet de loi tel quel, il consacre ce que tous les experts ont convenu: le tripartisme.
Vous convenez du fait que le pluralisme politique, qui est un des avantages de ce que vous proposez, ne pourrait même pas... mis dans l'arbitrage par rapport à l'alternance politique, puisque l'alternance politique saute, compte tenu du fait qu'on est devant des gouvernements minoritaires qui devraient se coaliser, et que les trois partis formant le Parlement actuellement se coaliseraient selon une surdétermination fédéraliste-souverainiste. Vous êtes conscient de ça, j'en suis persuadé.
Or, comment peut-on dire un bon pas dans la bonne direction, compte tenu de ce que je viens de dire, où un principe qui est un avantage du mode actuel, qui est l'alternance politique qui s'applique ? et peu importent les distorsions mathématiques, il y a toujours eu alternance politique, tout de même, au Québec, malgré cela ? il me semble que c'est vouloir vraiment aller rapidement. Je voudrais vous entendre là-dessus. J'ai 10 minutes, hein, alors je ne veux pas être trop long, et je vous invite aussi à être succinct si c'est possible.
M. Martineau (Paul-André): Oui, je vais être très bref. Oui, je maintiens que c'est un bon pas dans la bonne direction. Essentiellement deux raisons: la première, premier avant-projet de loi en 40 ans, alors ça fait 40 ans qu'on en parle, de la réforme du mode de scrutin. Moi, ça fait depuis 1999 que je patauge dans ce dossier-là, et, enfin, enfin, il y a un avant-projet de loi. Je n'ai jamais dit et je n'ai jamais écrit qu'il fallait adopter l'avant-projet de loi tel qu'écrit, je n'ai jamais dit ça.
M. Thériault: ...oui.
M. Martineau (Paul-André): J'ai dit que c'était un bon pas, c'est un début. La question la plus importante... les deux questions les plus importantes à mes yeux, c'est l'agrandissement des districts, qui est une question de mécanique, c'est-à-dire que le principe du mode de scrutin mixte compensatoire, moi, j'en suis, je suis bien correct, bien à l'aise avec ça, il faut modifier les mécaniques qui sont indiquées dans l'avant-projet de loi, d'une part; et, d'autre part, le deuxième vote: pour s'assurer d'une meilleure représentation des différentes idéologies au Québec, ça prend un deuxième vote.
M. Thériault: Alors là je comprends que ce qui est un bon pas dans la bonne direction, c'est le fait d'instituer une commission et de rendre officiel le débat, et de l'amorcer, de faire en sorte qu'on s'en aille tranquillement vers autre chose que le statu quo, mais que, si vous aviez, demain matin, à statuer sur le modèle en place, il ne vous satisferait pas, puisqu'il ne correspond pas à votre priorité numéro un, puisque vous dites ici que vous visez... ou bien que vous êtes ouvert à la mixité, vous visez dans le fond une proportionnalité pure, c'est ce que vous visez...
M. Martineau (Paul-André): ...on vise.
M. Thériault: ...une chose étant de viser, et l'autre chose étant de pouvoir...
M. Martineau (Paul-André): De l'atteindre.
M. Thériault: ...l'atteindre. Mais...
M. Martineau (Paul-André): C'est ça. Nous, on vise.
M. Thériault: ...néanmoins, en ayant une ouverture vers, une orientation vers une liste nationale et une disposition nationale, alors vous êtes très, très loin de ce qui est sur la table, parce que vous proposez un seuil de 5 %, et qu'à ce titre-là, probablement, selon toute simulation possible, on arriverait à introduire des voix plurielles au Parlement.
Deuxième question, vous avez dit: Le mode de scrutin, c'est la propriété des électeurs. Mais vous êtes prêt à aller très, très vite pour qu'on l'applique avant, avant que les électeurs puissent dans le fond se prononcer et entériner ce changement. Est-ce que vous ne partagez pas les préoccupations de mes collègues de Richelieu entre autres et de la collègue...
Le Président (M. Ouimet): De La Pinière.
M. Thériault: ...de La Pinière sur cette question de rétablissement du lien de confiance? Et est-ce qu'on ne perd pas, par le fait qu'on ne va pas vers... que vous ne privilégiez pas un référendum... Vous dites: Les vertus du système sont telles qu'il faut l'appliquer au plus sacrant. Est-ce qu'on ne perd pas une belle occasion de faire en sorte de prendre le temps nécessaire pour que les citoyens soient partie prenante de la redéfinition des règles démocratiques, au Québec, et que c'est une belle occasion perdue?
M. Martineau (Paul-André): Deux choses. La première, j'aimerais revenir sur votre toute première intervention avant votre deuxième question, parce que, tantôt aussi, M. le ministre faisait référence à certaines personnes qui favorisaient le statu quo, et ces mêmes personnes là, qui laissent supposer que, si on est en faveur d'une réforme du mode de scrutin, c'est parce qu'on est en faveur de l'avant-projet de loi, et que, si on n'est pas en faveur de l'avant-projet de loi, on n'est pas en faveur d'une réforme du mode de scrutin.
Donc, il faut juste faire attention: on peut être en faveur d'une réforme du mode de scrutin, on peut vouloir absolument à 100 % une réforme du mode de scrutin mais être contre l'avant-projet de loi, et ça, c'est... contrairement à ce que certaines personnes, des politologues bien connus, tentent de faire véhiculer, à savoir de jeter le bébé avec l'eau du bain. Donc ça, je tenais à le préciser. Et, dans ce cadre-là, encore une fois, quand je parle d'un bon pas, c'est: au moins nous pouvons en discuter. Pour ce qui est du...
M. Thériault: ...
M. Martineau (Paul-André): Oui? Vous vouliez intervenir. Je ne veux pas jouer au président.
M. Thériault: Bien, c'est parce que j'aimerais effectivement que vous soyez un peu plus succinct, j'ai une troisième question à vous poser.
M. Martineau (Paul-André): Oui. Pour ce qui est du référendum...
M. Thériault: Oui.
M. Martineau (Paul-André): ...le Parti vert n'a pas pris position. La chose que je peux vous dire, la chose que je peux vous dire: Si on veut faire un référendum pour ses vertus pédagogiques, tant mieux, mais il ne faudrait pas qu'une campagne référendaire ou bien qu'une campagne électorale devienne une espèce de foire d'empoigne qui fait en sorte que la pédagogie devient davantage la démagogie. Il faut faire attention avec une campagne référendaire, ça va dépendre des conditions, des conditions que l'on va mettre en place pour s'assurer de cette pédagogie-là.
M. Thériault: Est-ce qu'en Colombie-Britannique il y a eu un tel phénomène que celui que vous appréhendez? Est-ce qu'en Nouvelle-Zélande il y a eu un tel phénomène que celui que vous appréhendez?
M. Martineau (Paul-André): En Nouvelle-Zélande, ils ont eu des conditions, ils ont mis en place des conditions pour s'assurer que justement il n'y ait pas de dérapage à ce niveau-là. Donc, si vous me demandez, aujourd'hui, de vous dire oui ou non pour un référendum...
M. Thériault: Le principe de consulter la population dans une telle...
M. Martineau (Paul-André): Moi, je veux plus que le principe, je veux connaître les conditions grâce auxquelles il va y avoir référendum: Est-ce que les mouvements citoyens vont être dotés de suffisamment de ressources pour se faire entendre? Quels seront les comités du Oui ou du Non? C'est un tas de...
M. Thériault: Ça, c'est le débat sur les modalités d'un plébiscite.
M. Martineau (Paul-André): C'est essentiel.
M. Thériault: Dernière question.
M. Martineau (Paul-André): C'est essentiel pour un référendum.
M. Thériault: J'ai compris, j'ai compris votre point de vue, excusez-moi.
Dernière question. Vous avez parlé de votre intérêt pour faire en sorte qu'on maximise l'égalité hommes-femmes au sein du Parlement. Avez-vous considéré, dans le modèle qui est sur la table, les effets pervers que pourrait avoir, dans une première phase de transition d'un système à l'autre, le fait qu'il y ait des listes attribuées à des districts, et qu'en quelque part les députés sortants actuels se retrouvent en double candidature, et qu'en quelque part cela fasse en sorte qu'il y ait une déficience quant à la volonté qu'on ait d'avoir le plus de candidatures possible dans une première élection qui serait liée à un changement? Avez-vous évalué cela parce qu'il me semble que cela est quelque chose d'assez particulier?
La double candidature, phase de transition, les députés sortants ne vont pas se faire interdire d'avoir une double candidature, et donc c'est la composition actuelle du Parlement qui va se retrouver dans des districts, possibilité de six députés, six candidatures des listes de district, alors que tu as trois députés sortants qui sont en double candidature en plus, alors la représentation, à ce moment-là, est déjà problématique.
M. Martineau (Paul-André): On faciliterait les choses si les régions étaient plus grandes. Plusieurs experts vont vous arriver avec le même...
M. Thériault: Et s'il y avait une liste nationale.
M. Martineau (Paul-André): Ou s'il y avait une liste nationale. Mais on s'entend encore une fois, puis je reviens à ce que je vous disais tantôt, l'actuel avant-projet de loi, avec ses 26 districts, pour nous, il est inacceptable, et ce sont les mots de mon texte, «inacceptable». Qu'on ait des régions plus grandes, et on répond en partie à vos préoccupations concernant la parité hommes-femmes entre autres; ce serait beaucoup plus facile, avec de plus grandes régions, de s'assurer une parité hommes-femmes.
M. Thériault: M. le Président, est-ce qu'il me reste du temps?
Le Président (M. Simard): Oui, bon, c'est maintenant... Il reste quatre secondes. Je pense que ce n'est pas le temps de... il n'y a pas suffisamment de temps. Alors, je vous remercie, M. le député de Masson, et je me tourne vers le député des Chutes-de-la-Chaudière pour les cinq prochaines minutes.
n(11 heures)nM. Picard: Merci, M. le Président. M. Martineau, j'ai lu avec attention votre mémoire. Vous avez, tout à l'heure, indiqué, là, qu'il y avait certains opposants à la réforme qui nous indiquent qu'on a un système d'alternance. Pour moi, ce n'est pas un système, c'est un résultat. C'est un résultat, on change de gouvernement. Donc, j'aimerais vous entendre là-dessus, pour les gens qui me semblent opposés à la réforme, qui nous indiquent que le système d'alternance, c'est un bon système. Vous, qu'est-ce que vous en pensez?
M. Martineau (Paul-André): On laisse supposer qu'avec l'actuel mode de scrutin c'est un système d'alternance puis qu'avec les systèmes proportionnels il n'y a pas d'alternance, ce qui n'est pas le cas. Ce qui n'est pas le cas. Lorsqu'on regarde les pays scandinaves, des fois c'est des gouvernements davantage de centre gauche, des fois davantage de centre droit. Donc, pour moi, ça ne fonctionne pas. Ces mêmes personnes dont vous parlez, ils nous accusent, nous, les réformistes, d'être théoriques et de ne pas être pratiques.
La majorité des pays démocratiques occidentaux ont un système mixte ou bien proportionnel. Le côté pratique, c'est davantage nous qui l'avons, et c'est davantage eux, ceux qui tiennent à garder le mode de scrutin actuel comme nous l'avons, qui vont devenir de plus en plus théoriques, parce que ça devient de plus en plus des systèmes qu'on retrouve dans les livres d'histoire.
Depuis les 50 dernières années, les nouveaux pays nouvellement démocratiques ne prennent pas le mode de scrutin uninominal à un tour. Ils prennent un mode de scrutin proportionnel ou mixte parce que ces modes-là correspondent davantage à leurs besoins.
M. Picard: Donc, qu'est-ce que vous nous indiquez, M. Martineau, si je comprends bien, c'est qu'on aurait des gouvernements de coalition qui changent. La coalition x pourrait changer pour la coalition y. Donc, on aurait un système d'alternance du gouvernement de coalition. C'est ce que je comprends de vos propos.
Mais aussi je voudrais savoir... Vous indiquez... Ça, c'est très, très intéressant parce que les gens, les opposants nous indiquent souvent la stabilité du gouvernement. Vous nous indiquez, dans votre mémoire, qu'en moyenne c'est plus de trois ans, les gouvernements de coalition. Et vous indiquez aussi ? c'est le but de ma question ? qu'il pourrait exister des mécanismes législatifs. Est-ce que vous avez en tête des exemples de mécanismes? Est-ce que vous avez vu, dans d'autres pays, ces...
M. Martineau (Paul-André): Bien, entre autres en Allemagne, un gouvernement ne peut pas tomber s'il n'y a pas déjà une coalition qui est prête à prendre la relève, puis une coalition, c'est 50 % et plus.
Et l'idée derrière tout ça, c'est qu'il faut aussi être intelligent un petit peu en ce sens qu'il ne s'agit pas de calquer bêtement un système qui provient d'un autre pays à la réalité du Québec. Il faut s'inspirer des systèmes qui existent ailleurs, et faire en sorte de l'adapter à notre société, à notre culture, et ainsi de suite.
Donc, lorsqu'on parle de mécanismes, on peut s'inspirer des mécanismes qui se font ailleurs, on peut s'inspirer des défauts que l'on voit ailleurs, et on peut imaginer des mécanismes pour que, nous, on puisse être à l'aise avec un nouveau mode de scrutin.
M. Picard: Merci. Merci, M. le Président. Ça va.
Le Président (M. Simard): Merci. Je me tourne maintenant vers le comité citoyen. Est-ce qu'il restait du temps pour... À ma droite, il restait six minutes. Alors, je m'excuse. Je me tourne d'abord, vous m'en excuserez, vers la députée de La Pinière pour la prochaine intervention.
Mme Houda-Pepin: Merci beaucoup, M. le Président. M. Martineau, merci pour le mémoire fort intéressant. Vous avez campé votre mémoire sur cinq valeurs que vous estimez fondamentales pour l'ossature de la présentation que vous nous avez faite: une proportionnalité exacte, une proportionnalité semblable pour toutes les Québécoises et les Québécois, l'impossibilité d'un renversement de la volonté populaire, une représentation égale entre les hommes et les femmes, et un découpage du territoire québécois en fonction des réelles régions du Québec.
De ces cinq valeurs, laquelle, selon vous, aurait plus d'effet pour rapprocher le citoyen des élus, pour combler le déficit de confiance qui existe entre les élus et les citoyens qu'ils sont censés représenter?
M. Martineau (Paul-André): Je vous dirais la première. Je vous dirais la première, parce que la première se base essentiellement sur la volonté populaire, elle se base essentiellement sur le fait que le Parlement se doit d'être à l'image de sa société.
Donc, lorsqu'on parle d'une volonté populaire, on parle de sa composition en genre, sa composition au niveau ethnoculturel, ses idéologies, ses craintes, ses espoirs. Donc, pour moi, la première demeure essentielle.
Mme Houda-Pepin: D'accord. Donc ça, c'est la proportionnalité exacte, qui est selon quasiment un modèle mathématique, c'est-à-dire: le pourcentage de votes doit correspondre au pourcentage de sièges.
Et vous dites que cette représentation peut aller jusqu'à 140 députés au Québec.
M. Martineau (Paul-André): Bien, nous sommes ouverts. C'est qu'il y a plusieurs personnes, au Québec...
Mme Houda-Pepin: Non, mais laissez-moi donc compléter ma question: Ça peut aller jusqu'à 140. Comment la démocratie pourrait être servie si on augmente le nombre de députés? Est-ce que le problème est vraiment au niveau du nombre? Est-ce que vous estimez qu'à 125, comme on est, à 77, comme le propose l'avant-projet de loi, la démocratie ne serait pas mieux servie? Parce que, dans la population, il y a des gens qui pensent qu'il y a trop d'élus, que ça coûte cher à la population d'avoir autant d'élus. Qu'est-ce que vous répondez à ça?
M. Martineau (Paul-André): L'idée du 140, ce n'est pas parce qu'on veut qu'il y ait 140 députés, c'est qu'on veut donner une souplesse. Avoir 140 députés, ça nous permettrait justement de s'assurer que la première priorité puisse être respectée. C'est ce qui se passe en Allemagne. Donc, l'idée, ce n'est pas de dire que nous voulons 140; nous ne serions pas contre l'idée de se donner, en tant que société, une souplesse permettant la variation du nombre de députés, pour s'assurer que les autres priorités, que ce soit entre autres la proportionnalité, représentation hommes-femmes, puissent être davantage assurées de cette façon-là.
Mme Houda-Pepin: Dernière petite question, M. le Président.
M. Martineau (Paul-André): Oui.
Mme Houda-Pepin: Comment voyez-vous le rôle, les fonctions et les responsabilités entre un député de circonscription et un député de liste?
M. Martineau (Paul-André): Comment je vois les rôles?
Mme Houda-Pepin: Oui. Est-ce qu'ils vont faire la même chose? Est-ce qu'ils vont avoir des rôles différents?
M. Martineau (Paul-André): Non. Selon...
Mme Houda-Pepin: Je suis toujours préoccupée par la question de comment servir la démocratie, comment servir les citoyens, si on ajoute plus de députés, si on a des députés à différents niveaux, etc.
M. Martineau (Paul-André): Bien, de toute façon, lorsqu'on regarde entre autres les documents du Pr Massicotte, lorsqu'on parle à Henri Milner, à M. Blais, et ainsi de suite, à M. Lemieux, on se rend compte que les députés, en Allemagne, ont le même rôle, d'autant plus qu'avec une double candidature les députés de liste, les candidats de liste et les candidats de circonscription se devront d'être sur le terrain. Donc, par la force des choses, ils vont jouer le même rôle, et c'est tout à leur avantage de jouer aussi le même rôle, parce que, lors d'une prochaine élection, ils seront aussi sur la liste et ils seront aussi de circonscription; donc, ils se doivent de faire en sorte de jouer exactement le même rôle que les députés de circonscription.
Mme Houda-Pepin: Donc, vous ne voyez aucune différence dans les rôles et les fonctions de ces députés.
M. Martineau (Paul-André): Personnellement, je ne vois aucune différence, et les faits, en Allemagne et en Nouvelle-Zélande, nous prouvent qu'effectivement il n'y a pas de différence non plus.
Mme Houda-Pepin: Merci, M. le Président.
Le Président (M. Simard): Merci, Mme la députée de La Pinière. J'invite maintenant les membres du comité de citoyens, et je reconnaîtrai d'abord M. Morisset.
M. Morisset (Michel): Alors, bonjour, M. Martineau. À la page 4, vous parlez des Pays-Bas, la Suède, la Finlande, et vous nous dites que ce ne sont pas des pays qui sont instables, dû à...
Alors, ne croyez-vous pas que le Québec, à ce que je sache, n'est pas un pays, et que la fragmentation supplémentaire, disons, dans sa forme actuelle, pourrait amener, disons, un affaiblissement de l'État québécois si c'était dans la forme que vous proposez?
De plus, à la page 6, vous parlez de démocratie. Vous dites que, bon, l'État serait plus démocratique, et pourtant vous dites, à la page 6, que vous voulez une réforme rapide pour le prochain scrutin.
n(11 h 10)n Comment voulez-vous que la démocratie... comment pensez-vous que la démocratie peut être bien servie, si vous ne proposez pas de plébiscite ou vraiment, je dirais, d'éducation de masse, tout d'abord, très grande, de la part des élus? Et comment pensez-vous que la démocratie peut être vraiment servie dans ce cas-là?
M. Martineau (Paul-André): Pour votre première question, bon, c'est un argument que l'on entend souvent, comme quoi un gouvernement de coalition est un gouvernement qui est faible par rapport à un gouvernement... Est-ce que c'est le sens de votre question?
M. Morisset (Michel): Non, ce n'est pas ça, là. Ce n'est pas ça. C'est que ce que j'ai dit, c'est... Vous parlez de... le Québec est une province, et la division supplémentaire du vote, tel que le projet de loi, là, est présenté actuellement, pourrait, disons, favoriser, si vous voulez, par la bande, des incursions supplémentaires du gouvernement fédéral dans les champs de compétence provinciaux, et vous dites que vous voulez que ce mode de scrutin soit accéléré.
En page 6, quand vous dites que vous ne voulez pas nécessairement de plébiscite, pourquoi? C'est ça que je ne comprends pas. D'une part, vous dites: La démocratie...
M. Martineau (Paul-André): Bien, là, j'ai de la difficulté à comprendre votre question aussi, là, en ce sens que, là vous me parlez d'incursions du fédéral dans les champs de compétence provinciale.
M. Morisset (Michel): Oui.
M. Martineau (Paul-André): Là, j'avoue que c'est peut-être le premier... En six ans, sept ans, c'est le premier argument que j'entends. Je ne vois pas en quoi le fédéral pourrait davantage s'inscrire dans les champs de compétence provinciale avec un mode de scrutin différent. Ça, je ne la comprends pas, d'une part.
D'autre part, pour ce qui est du référendum, vous, vous allez avoir la réponse à cette question-là. Si vous sentez qu'il y a un consensus au sein de la population, si les trois partis politiques représentés à l'Assemblée nationale sont capables de s'entendre, de jouer les grands garçons et les grandes filles pour s'entendre sur un prochain mode de scrutin, peut-être qu'on pourrait se prévaloir du pouvoir de l'Assemblée nationale pour réformer le mode de scrutin sans passer par un référendum. Encore une fois, là, je ne prends pas position, j'évoque des hypothèses.
Ma crainte, par rapport à un référendum, et je reviens à ce que j'ai dit au député de Masson tantôt, si on veut que le référendum ait des vertus pédagogiques, il faut s'assurer que, dès le début, on ait des mécanismes qui s'assurent de ces vertus pédagogiques là. Encore une fois, tout le monde sait ici que des campagnes électorales ou bien des campagnes référendaires des fois on passe de la pédagogie à la démagogie. Donc, moi, avant d'acheter un référendum, je veux voir qu'est-ce qu'il va avoir l'air, ce référendum, comment il va être régi, et ça, c'est essentiel.
Le Président (M. Simard): M. Morisset, est-ce que vous aviez d'autres questions?
M. Morisset (Michel): C'est tout.
Le Président (M. Simard): Je vais me tourner vers... Pardon.
M. Boivin (Guillaume): Oui, moi.
Le Président (M. Simard): M. Boivin d'abord, M. Acharid ensuite.
M. Boivin (Guillaume): Bonjour, monsieur. Vous supportez l'idée d'un seuil formel à 5 %. Cependant, même avec un modèle tel que celui proposé par M. Milner, qui implique une diminution du nombre de districts et conséquemment une augmentation correspondante de l'amplitude, on en arriverait, dans les plus grands districts, à des seuils effectifs autour de 7 %, 8 %. Ne doit-on pas conclure que, vos propositions, bien qu'elles soient un petit peu ambiguës sur ce point, impliquent l'ajout d'une correction nationale en plus de la proportionnalité introduite dans les districts?
M. Martineau (Paul-André): Pourquoi pas? Pour ce qui est des régions, ça, c'est selon aussi la répartition d'Henri Milner. Supposons que Montréal, à la place de le couper en deux régions, on en fasse une seule région, là le seuil devient important ? le seuil explicite ? parce qu'il n'y aurait plus de seuil de facto. Mais, nous, on n'est pas contre une correction nationale. Encore une fois, nous, on n'a pas pris position sur une mécanique précise. Nous, on veut parler de principes, de valeurs.
Le Président (M. Simard): Oui, M. Acharid.
M. Acharid (Mustapha): Merci, M. le Président. Merci, monsieur. Vous favorisez la double candidature. Dans le cas où la population va s'exprimer en défaveur d'un candidat, mais ce candidat, en se trouvant dans la liste, va être élu. Est-ce que vous ne pensez pas que la population va être un peu trahie en lui imposant un candidat qu'elle n'a pas voulu être représentée par...
M. Martineau (Paul-André): C'est le risque effectivement, c'est le risque. Actuellement, on ne réussit à élire des députés parfois uniquement qu'avec 35 % des voix. Donc, dans certains comtés, il y a 65 % des gens qui n'ont pas voté pour le député, et ils se retrouvent avec actuellement le député qu'ils ne voulaient pas avoir, à deux tiers. Effectivement, c'est un problème. Sauf qu'on ne peut pas tout avoir, hein, encore une fois, hein? Avec le mode de scrutin, avec des mécaniques, on ne peut pas tout avoir. Donc, il s'agit de regarder les avantages, les désavantages, puis de faire un choix dans ce qui nous est offert.
Laissez-moi vous dire que ce serait tellement plus facile, si tout était blanc, tout était noir. La vie aurait été plus facile, pour les militantes et militantes de la réforme, depuis quelques années.
M. Acharid (Mustapha): Merci.
Le Président (M. Simard): S'il n'y a pas d'autre question, je vais vous remercier pour votre collaboration. Je n'ai pas eu de demande. Alors... Pardon? Pardon, Mme Lafontaine.
Mme Lafontaine (Martine): Merci.
Le Président (M. Simard): Excusez-moi.
Mme Lafontaine (Martine): Bonjour, monsieur. J'ai remarqué, à la lecture de votre mémoire, qu'aucun point n'abordait la question concernant le vote des jeunes. J'aimerais savoir si votre parti a des incitatifs à nous proposer pour augmenter la participation des jeunes.
M. Martineau (Paul-André): Honnêtement, on n'a pas étudié cette question-là, on s'est concentrés essentiellement sur les questions soulevées par les documents de réflexion de l'avant-projet de loi.
Mme Lafontaine (Martine): Merci.
Le Président (M. Simard): Alors, voilà, M. Martineau, je vous remercie pour votre collaboration, pour être venu, au nom du Parti vert, nous présenter votre point de vue, le point de vue du Parti vert, qui ne s'était pas fait entendre à l'automne, sur la réforme du mode de scrutin.
Et nous suspendons notre séance pendant quelques minutes, le temps pour que le prochain groupe s'installe.
M. Martineau (Paul-André): Merci beaucoup.
(Suspension de la séance à 11 h 17)
(Reprise à 11 h 18)
Le Président (M. Simard): Les deux intervenantes sont avec nous, elles sont habituées de venir en commission parlementaire. Le Conseil du statut de la femme a, si je ne me trompe, passé plusieurs mois même, en commission parlementaire, cette année. Alors, vous connaissez sa présidente, Mme Diane Lavallée, à laquelle je souhaite la bienvenue, ainsi qu'à Mme Lucie Desrochers, qui a travaillé plus spécifiquement sur ce mémoire, si j'ai bien compris.
Alors, vous avez 20 minutes pour nous présenter l'essentiel de votre rapport, et ensuite vous connaissez le processus habituel des commissions parlementaires.
Conseil du statut de la femme (CSF)
Mme Lavallée (Diane): Bonjour, M. le Président, M. le ministre, Mmes et MM. les députés de la commission.
Depuis plus de six décennies, les femmes du Québec n'ont eu de cesse de s'affirmer et de participer à la vie démocratique et publique. De haute lutte, elles ont obtenu des gains appréciables sur les plans social, économique et politique. Ces gains, nous devons les préserver, les maintenir et les conforter pour l'atteinte d'une plus grande égalité entre les femmes et les hommes. Nous nous réjouissons donc de ce que le gouvernement affirme d'entrée de jeu, dans sa réforme, l'objectif d'une représentation équitable entre les femmes et les hommes à l'Assemblée nationale ainsi que celles des personnes issues des minorités ethnoculturelles.
Dans l'univers politique québécois, les femmes représentent 32 % des membres députés de l'Assemblée nationale, la plus féminine de toutes les assemblées canadiennes. Il s'agit là d'une bonne performance dont nous ne pouvons par contre nous satisfaire et qui ne peut certainement subir de recul. À elle seule, l'adoption d'une loi ne peut résoudre le partage inégal du pouvoir; c'est pourquoi on souhaite qu'elle puisse inspirer une dynamique aux partis politiques qui ont une responsabilité dans la correction du déficit démocratique, car ce sont eux en définitive qui peuvent le plus souvent consentir les efforts pour permettre à plus de femmes d'être candidates et bien sûr élues.
n(11 h 20)n Le conseil est donc en accord avec la proposition de majorer l'allocation annuelle des partis politiques autorisés qui, aux dernières élections, ont présenté 30 % et plus de candidates.
Notre accord s'étend également au principe de la majoration du remboursement des dépenses électorales mais recommande des améliorations au chapitre des modalités d'application et aussi de l'administration de la mesure. Je vous en parlerai plus tard.
Enfin, le projet de loi propose de majorer le remboursement des dépenses des candidates à un siège de circonscription dont le parti a présenté 30 % et plus de femmes si ces candidates ont obtenu au moins 15 % du vote ou si elles sont élues. Bien que ça représente certains mérites, je pense que le principal défaut de la modalité proposée est de créer plusieurs catégories de candidates: celles des grands partis qui recueillent suffisamment de votes pour toucher éventuellement une majoration et celles des plus petits partis qui n'obtiennent pas suffisamment d'appui populaire, même s'ils ont eu le mérite de présenter des femmes.
Conjuguée avec les modalités de la proportionnelle mixte, la mesure créerait en outre aussi deux classes de candidates dans un même parti: les candidates à un siège de circonscription qui auraient droit à la mesure et les candidates à un siège de district qui, elles, n'y seraient pas admissibles. À notre avis, toutes les candidates ont le même mérite en s'engageant dans une campagne électorale. Nous croyons donc que le maintien de la proposition de l'avant-projet de loi, dans son libellé actuel, aboutirait à une autre forme d'inéquité.
L'objectif d'équité, selon nous, serait mieux servi si la majoration était calculée sur les dépenses du parti et versée à l'instance nationale du parti plutôt qu'à la circonscription. Selon nous, une telle organisation est davantage en mesure d'utiliser ces sommes de façon structurante et efficace, sans compter que la reddition de comptes serait aussi facilitée. Un plus grand nombre de partis politiques pourraient ainsi avoir accès à ce soutien financier, car il est beaucoup plus facile pour ces derniers de rassembler 1 % du vote à l'échelle nationale qu'exiger que leurs candidates recueillent au moins 15 % des votes dans les circonscriptions.
Enfin, la prime supplémentaire de 5 %, prévue dans le cas où la candidate visée est élue, est un indicatif judicieux et suffisant à notre avis pour permettre de consolider et même accélérer la tendance d'un plus grand succès électoral des femmes ici, au Québec. Compte tenu des sommes parfois importantes qui seraient versées aux partis avec toutes ces nouvelles dispositions, il nous semble intéressant de penser à des mécanismes de reddition de comptes plus exigeants afin d'assurer la saine gestion des fonds publics et de garantir que ces fonds soient utilisés aux fins pour lesquelles ils ont été alloués.
On privilégie donc la création de fonds particuliers où les incitatifs financiers pourraient être versés de même que des sommes allouées par le parti ou celles souscrites par des sympathisantes ou des sympathisants. Pour tous les partis ayant reçu des sommes de l'État, nous préconisons un suivi de comptabilité adéquat de même que la diffusion publique des mesures favorisant l'élection des femmes. Nous insistons pour que, sans attendre le résultat d'un éventuel projet de modification du mode de scrutin, la Loi électorale soit immédiatement amendée pour y intégrer le principe de la représentation équitable des femmes et des hommes dans les élections et les mécanismes financiers de soutien.
On profite aussi de ce moment privilégié qui nous est donné pour formuler deux propositions qui s'inscrivent dans la continuité de recommandations passées, et qui permettraient aux femmes et aux hommes ainsi qu'aux parents de jeunes enfants d'entreprendre une course électorale sur un même pied d'égalité. On propose au législateur d'inclure, dans son avant-projet de loi, le droit à un congé non rémunéré à l'occasion d'une investiture d'un parti à une élection législative, municipale ou scolaire.
D'autre part, il est aussi important d'apporter des améliorations dans la prise en compte des dépenses des candidates et des candidats, en créant deux types de dépenses: les dépenses électorales et les dépenses personnelles qui incluraient, elles, les frais de garde. Les candidates et candidats parents et non-parents auraient ainsi des chances égales.
À ce point de mon exposé, j'arrive donc à la question primordiale que sous-tend la présente consultation: conserver le mode de scrutin majoritaire ou plutôt privilégier un mode de scrutin proportionnel mixte? Tout aussi démocratiques l'un que l'autre, ces deux modes de scrutin offrent des avantages différenciés. Si le premier met l'accent sur la stabilité gouvernementale et la capacité du gouvernement à prendre des décisions plus peut-être rapidement et efficacement, le deuxième favorise la représentativité des divers courants d'opinions portés par un plus grand nombre de partis politiques présents à l'Assemblée nationale. Le conseil tranche en la faveur de la stabilité gouvernementale, donc du scrutin majoritaire.
Notre choix, nous en sommes pleinement conscientes, se distingue de celui adopté par une grande partie du mouvement des femmes, qui voit dans le monde du scrutin proportionnel des vertus susceptibles de favoriser l'élection d'un plus grand nombre de femmes. Cette affirmation se fonde principalement sur les succès remportés dans les pays du nord de l'Europe où, à l'exception de l'Islande, les femmes représentent entre 38 % et 45 % de la chambre basse.
À l'instar de l'Union interparlementaire et du Conseil de l'Europe, nous croyons que le mode de scrutin n'a pas de vertu en soi pour ce qui est de l'élection d'un nombre plus ou moins élevé de femmes. Un tour d'horizon plus élargi démontre que des démocraties occidentales où l'on applique la proportionnelle se retrouvent très loin derrière le Québec en ce qui a trait à la place des femmes au Parlement. Voyons quelques exemples: 23 % et 21 % des femmes élues parmi les élus au Luxembourg et au Portugal; 17 %, en République tchèque; 15 %, en Israël; 13 %, en Irlande et en Grèce; bon, 12 %, en Slovénie; Roumanie, Brésil, c'est inférieur à 10 %. D'autres démocraties comme l'Espagne, la Nouvelle-Zélande, l'Allemagne, le Mexique, l'Italie, pour ne nommer que celles-là, ont choisi pour leur part le mode de scrutin mixte, avec des résultats de représentation féminine qui varient entre 36 % et 9 %. Le Québec fait donc bonne figure avec un taux de représentation de plus de 32 %, un taux similaire à celui obtenu par l'Allemagne, dont le mode de scrutin mixte a inspiré la proposition actuelle de l'avant-projet, et qui se retrouve, je vous rappelle, l'Allemagne, au 14e rang sur 187 pays pour sa représentation féminine de par l'Union interparlementaire. Ces chiffres démontrent qu'aucune relation de cause à effet entre le mécanisme électoral et la représentation féminine dans les Parlements ne peut tenir la route sans une analyse plus globale du contexte politique historique, de la culture politique, de la situation des femmes aussi dans ces différentes sociétés.
Dans les pays nordiques, qui sont abondamment cités par les groupes féministes, la forte représentation de femmes, plutôt qu'uniquement liée au mode de scrutin, est redevable d'un ensemble de facteurs dont une culture politique attachée de longue date à des valeurs de justice, d'égalité, à une vie associative aussi très développée. Sous la pression de féministes qui ont choisi de militer activement au sein des partis politiques, ces derniers se sont imposés des règles qui favorisent l'introduction de femmes candidates à leurs élections. Dans d'autres pays, la loi oblige les partis à présenter un certain pourcentage de femmes parmi les candidats. C'est le cas en France notamment, avec la loi sur la parité, la Belgique et aussi l'Argentine.
Au Québec, les candidates et les candidats sont choisis lors d'une investiture. Rien n'empêche toutefois la direction d'un parti d'indiquer sa préférence pour une candidate, de fixer des objectifs de candidature féminine tout en laissant les membres libres dans leur choix final. Pourquoi ne pas utiliser, quand les règles du parti le permettent, le parachutage à la faveur d'une plus grande équité, si les règles adoptées par les membres, comme je le disais, le permettent?
On est bien loin ici de la culture des règles contraignantes que se sont données les pays qui s'imposent des quotas de candidatures. D'ailleurs, les politiciennes québécoises, qu'on a maintes fois rencontrées, se sont pour la plupart toujours montrées très réticentes à être considérées le résultat d'un quota. Dans ce sens, la réponse est, pour nous, ailleurs en amont du système électoral. S'il y a encore si peu d'élues, c'est qu'il y a trop peu de candidates.
Les considérations socioéconomiques, les relations entre les femmes et le pouvoir et le monde politique en général, l'accueil qu'elles y trouvent, lorsqu'elles s'y aventurent, font que la marche des femmes vers le pouvoir se transforme trop souvent en traversée du désert.
Que faut-il faire ou changer pour que les femmes soient plus nombreuses à solliciter un poste représentatif? On a quelques pistes à vous suggérer.
Premièrement, ce serait sortir des chemins battus pour atteindre les femmes là où elles se trouvent. La politicologue Évelyne Tardy a découvert que les femmes passent généralement par l'action sociale avant de cheminer vers l'engagement politique, municipal notamment, contrairement aux hommes, qui préparent leur entrée en politique en s'associant avec les chambres de commerce ou des associations sportives. Nous encourageons donc les partis à bifurquer de leur trajectoire habituelle et à prendre le temps de se familiariser avec les lieux où les femmes exercent leur profession, dans l'action sociale souvent et communautaire.
La politicologue a également démontré que les hommes sont deux fois plus nombreux que les femmes à être sollicités pour se porter candidats, au sein de nos deux grands partis politiques, et je vous dirais, ils répondent deux fois plus vite oui.
Soutenir les femmes dans leur cheminement. Pour y arriver, bien, la formation, la sensibilisation constituent selon nous une voie prometteuse, tel que l'illustre l'accueil enthousiaste face au programme À égalité pour décider qui a été mis en oeuvre, en 1999, pour inciter les femmes à être plus nombreuses dans les différents lieux de pouvoir. Il s'agit là d'une initiative gouvernementale exemplaire qui donne aux femmes le coup de pouce nécessaire pour renforcer leur habilité décisionnelle, acquérir les compétences, la confiance nécessaires leur permettant d'assumer des fonctions politiques.
n(11 h 30)n D'autres initiatives comme la formation individuelle et les clubs politiques féminins, proposées notamment par le Groupe Femmes, Politique et Démocratie, pourraient servir pertinemment de source d'inspiration pour les partis politiques.
Avec tous ces exemples d'actions à entreprendre, vous constatez que les efforts pour accroître le nombre de femmes au pouvoir doivent être dirigés ailleurs que dans le mode de scrutin. Mais nous ne pouvons passer sous silence les inquiétudes particulières que soulève pour nous le mode de scrutin proposé, ce mode de scrutin proportionnel mixte qui permet à une personne d'être à la fois candidate à un siège de circonscription et d'être inscrite sur la liste produite par son parti dans le même district. Cette personne pourrait, même si elle est défaite dans la circonscription, se retrouver député. Elle pourrait de plus se voir confier des responsabilités de plus en plus importantes... qu'un collègue ou qu'une collègue élus démocratiquement. N'y a-t-il pas risque que la légitimité de ces membres à l'Assemblée nationale ne soit entachée?
La double candidature favoriserait-elle les femmes candidates? On peut certes en douter si l'on considère que les femmes ne représentaient que 27 % des candidats aux dernières élections générales. Il y a fort à parier que, transportée au scrutin proportionnel, la dynamique persistera à l'avantage des hommes. L'exemple de l'Allemagne nous permet d'envisager que la double candidature deviendra une règle. En 2002, plus de 80 % des candidats et candidates des grands partis à un siège de circonscription étaient aussi inscrits sur la liste de leurs partis.
Devant cette éventualité, qui peut nous garantir que les partis ne placeront pas les hommes, qui sont déjà en majorité, et les vedettes, qu'elles soient régionales ou nationales, déjà candidats à des sièges de circonscription ? encore là, souvent des hommes ? en première place sur la liste pour l'élection d'un siège de district? Dans ce cas, les hommes risquent d'être plus nombreux que les femmes à avoir une double candidature. N'y a-t-il pas danger que les bénéfices escomptés grâce aux mesures d'incitatifs financiers soient annulés par des effets négatifs anticipés des modalités du nouveau mode de scrutin proposé? Nous le craignons, et la pire des hypothèses consisterait à ce que des partis présentent des femmes en grand nombre, encaissent les primes mais les inscrivent deuxième, troisième, quatrième rang sur les listes, amenant ainsi un recul du succès électoral des candidates actuelles. Un scénario extrême, je vous dirais, mais possible, évoqué aussi par la politicologue de l'Université d'Ottawa Manon Tremblay. Voilà autant de questions réalistes et de réponses hypothétiques qui incitent à la prudence.
Pour ce qui est du modèle du scrutin et l'influence collective des femmes sur les décisions politiques, le conseil s'interroge quant à l'incidence du mode de scrutin sur la capacité des femmes d'influencer collectivement les décisions politiques. À cet égard, Denis Monière rappelle une notion bien connue en sciences politiques: chaque fois qu'on passe de scrutin majoritaire à scrutin proportionnel, on assiste à une multiplication des partis politiques. Dans un tel système, la majorité parlementaire nécessaire à l'adoption de lois exige des négociations, des alliances ou la composition de gouvernements de coalition. En outre, les partis idéologiques, éventuellement ceux susceptibles de porter les espoirs du mouvement des femmes, ont tendance à se fractionner puis à se combattre les uns et les autres beaucoup plus que les partis d'intérêts, qui ont justement intérêt à ne pas diviser leurs forces.
La multiplication des partis à l'Assemblée nationale modifierait la dynamique actuelle, obligerait les représentantes du mouvement des femmes à s'adresser à un plus grand nombre d'interlocuteurs eux-mêmes engagés dans une dynamique permanente de négociation. Les interventions du mouvement des femmes à l'échelle nationale nous semblent beaucoup plus directes et moins complexes lorsque les interlocuteurs aussi sont limités.
Par ailleurs, nous croyons que les femmes n'ont véritablement aucun avantage à éparpiller leurs forces dans les partis qui peuvent partager certes leur vision, mais elles n'obtiennent, dans le meilleur des cas, qu'un nombre symbolique de sièges. L'affaiblissement de l'influence réelle du mouvement des femmes est à craindre si un changement radical survient dans l'exercice de la politique québécoise. Qui plus est, les grands partis politiques pourraient voir diminuer la représentation des femmes, déjà peu nombreuses au sein de leurs rangs, si les forces féministes étaient éparpillées dans les divers partis. Face à cette éventualité, comment croire que les femmes serviraient leurs intérêts par un tel éclatement et y gagneraient au change?
Cela étant dit, le scrutin majoritaire, malgré ses défauts au regard de la représentation, n'a pas si mal servi la population féminine au Québec pour ce qui est de la capacité du gouvernement à prendre des décisions fermes en faveur de l'égalité des sexes. Depuis une trentaine d'années, plusieurs lois importantes pour l'amélioration des conditions de vie des femmes ont été adoptées parce que le gouvernement était stable et majoritaire. Aurions-nous pu voir l'adoption de lois préconisant l'équité salariale, le raffermissement progressif des normes du travail ou favorisant la perception des pensions alimentaires et le partage du patrimoine familial si le gouvernement avait dû en négocier non seulement leur pertinence, mais leurs modalités avec plusieurs partis d'orientations diverses? La réponse ne peut évidemment qu'être hypothétique encore là.
Lâcher la proie pour l'ombre ? et je termine là-dessus ? l'expression trouve ici toute sa force et illustre la mesure de nos craintes. Bien qu'aucun laboratoire en politique nous permette de mesurer les effets d'un changement aussi radical, nous croyons que remplacer le mode de scrutin majoritaire par le mode de scrutin proportionnel mixte pourrait s'avérer pour les femmes une longue marche dans un désert où les mirages du succès politique sont plus nombreux et plus réels que les oasis électives. Je vous remercie de votre attention.
Le Président (M. Simard): Merci beaucoup, Mme Lavallée. Et j'invite maintenant le ministre à poser les premières questions.
M. Pelletier: Merci, Mme Lavallée, Mme Desrochers. Vous avez fait une présentation solide, très solide même, et je vous remercie justement de ce témoignage que vous rendez à la commission, je vous remercie de l'intérêt que vous manifestez pour les travaux de la commission.
Un organisme comme l'organisation Collectif Féminisme et Démocratie soutient que la réforme du mode de scrutin va permettre l'élection d'un plus grand nombre de femmes à l'Assemblée nationale. Plus d'une centaine de mémoires reçus par la commission disent la même chose. Vous nous dites le contraire. Donc, j'imagine, vous leur dites qu'ils ont tort, forcément. C'est ce que je dois comprendre. Il n'y a pas un mode de scrutin au monde qui pourrait permettre l'élection de davantage de femmes? Est-ce que vraiment vous êtes obligées de soutenir le mode de scrutin actuel comme vous le faites?
Je ne sais pas, vos propos semblent aller à l'encontre de tout un mouvement que l'on entend de la part de groupes de femmes au Québec qui, eux, sont vraiment favorables à une réforme du mode de scrutin et qui, eux, soutiennent vraiment donc que ça va favoriser l'élection de femmes, ça. Qu'est-ce que vous répondez par rapport à ça?
Mme Lavallée (Diane): Bien, effectivement, on est très, très conscientes des différences entre notre perception des dangers, je dirais, d'un transfert de mode de scrutin majoritaire à proportionnel plutôt que des vertus. Et ce qu'on a tenté de vous illustrer, c'est qu'il est faux de donner tant de vertus au mode de scrutin pour l'élection de femmes. On a essayé de vous faire voir que, dans des pays où effectivement il y a un mode de scrutin proportionnel, il y a des représentations féminines, je dirais, inférieures au Québec. Et le mode de scrutin en soi n'est pas à regarder seul, il faut y voir aussi la culture politique d'une région, d'un pays, et les succès sont davantage liés aux mesures qu'ont prises les partis, aux disciplines que se donnent les partis politiques pour aller chercher plus de femmes. Et je sais qu'au Québec les partis font des efforts et que, plusieurs fois, vous vous retrouvez avec une fin de non-recevoir de la part des femmes pour toutes sortes de motifs, et, nous, on pense que c'est davantage sur le pourquoi les femmes n'y vont pas qu'il faudrait travailler et enlever des obstacles à leur volonté de participer à la question politique plutôt que de réformer un mode de scrutin en pensant que ça va être magique.
Il y a beaucoup de choses qui rebutent les femmes en politique. Qu'il y ait un scrutin proportionnel, le fait qu'elles n'ont pas été socialisées dans une culture de pouvoir d'affrontement qu'elles perçoivent en politique, ça ne changera pas la donne. Le fait que des femmes ont encore beaucoup de difficultés à concilier famille et travail, qu'il n'y a pas un partage équitable des tâches nécessairement dans le couple, ce ne sera pas, demain matin, enlevé par une réforme du mode de scrutin. On pense qu'il y a beaucoup de choses à faire qui pourraient inciter les femmes ou enlever des obstacles autres qu'une réforme du mode de scrutin, parce que non seulement on trouve que les solutions sont en amont du processus, mais que le processus en soi amène un éparpillement des femmes.
Le fait qu'il y ait présentement... Il y a eu, aux dernières élections générales, en 2003, 27 % de femmes qui se sont présentées, un score, je vous dirais, là, intéressant. Ajoutons à ça un engouement pour les femmes parce qu'il y aurait une proportionnelle, je leur donne 4 % de plus même, qu'il y en ait 31 % qui se présentent aux prochaines élections mais qui sont divisées dans de multiples partis qui, à la limite, pour une bonne partie, ne risquent même pas de faire élire une femme, hein... Parce qu'il faut voir que les grands partis ont beaucoup plus de chances parce qu'ils ont plus de moyens aussi, et, dans ce sens-là, quelle va être la force des femmes éparpillées dans... À la limite, certaines pourront être élues, dans le meilleur des cas, en minorité. Elles risquent de se retrouver dans des partis qui ne risquent pas d'être au pouvoir ou d'être une opposition significative, avec ce qu'on comprend aussi du pouvoir qu'a une opposition significative. On pense qu'on va diluer, nous, la force des femmes et du mouvement des femmes dans un mirage autour d'une proportionnelle qui serait susceptible d'accroître le nombre de femmes ou l'intérêt des femmes pour la politique.
n(11 h 40)n Nous, on a des certitudes, je vous dirais, que le mode de scrutin actuel a amené passablement d'avantages pour les femmes. Il a permis à faire élire le plus de femmes à l'Assemblée nationale, le plus de femmes qu'on n'a jamais eues dans l'histoire du Québec. On se compare avantageusement à beaucoup d'autres démocraties qui ont choisi le scrutin proportionnel, et en plus des lois ont été votées progressistes, favorables à l'égalité. Je vous dirai que, dans un contexte comme ça, je préfère un tiens que deux tu l'auras. Et, comme on trouve que ça nous a bien servies, le risque de changement et les reculs possibles, c'est des hypothèses qu'on fait au même titre que les femmes font des hypothèses qu'une proportionnelle va avoir tellement d'engouement qu'il y en aura plus, plus d'élues, plus dans des positions de pouvoir significatif.
Nous, la lecture qu'on fait, l'analyse qu'on fait des autres démocraties, de la culture politique au Québec, de la force du mouvement des femmes, de l'intérêt pour les femmes de la politique, les obstacles qui les empêchent d'y aller ne nous amènent pas à privilégier cette voie-là.
M. Pelletier: J'ai cru comprendre que vous craigniez que la double candidature finalement défavorise l'élection de femmes à l'Assemblée nationale. Pourtant, si on regarde ce qui se passe en Écosse, on se rend compte que la double candidature est utilisée autant par les femmes que par les hommes et qu'il y a à peu près autant de femmes élues que d'hommes. Or, le modèle écossais est justement le modèle dont s'inspire l'avant-projet de loi. Est-ce que ça ne vient pas contredire justement votre argument?
Mme Desrochers (Lucie): Non, je ne crois pas parce qu'on permet à des personnes finalement d'être candidates dans un siège de circonscription et d'être sur la liste du parti, et actuellement les hommes sont très majoritaires parmi les candidats. Donc ça, on ne pense pas que ça va changer parce qu'il y aura un nouveau mode de scrutin. Donc, c'est très probable que cette dynamique-là va faire en sorte que les hommes vont se retrouver en première, deuxième, troisième place, et les femmes vont être... Il va certainement s'en trouver en première place, là, je ne nie pas qu'il y en a un certain nombre, mais statistiquement il y a un plus grand nombre d'hommes qui va se retrouver en situation d'éligibilité que les femmes.
Et actuellement il faut savoir qu'au Québec on a un très bon succès électoral des femmes, en ce sens qu'avec le temps les femmes se sont réparties... ou les grands partis politiques se sont ouverts aux candidatures féminines. Ça s'est passé début des années quatre-vingt, les femmes se sont réparties assez équitablement entre les partis qui font élire des députés et les partis plus mineurs qui ont, mettons, moins de chances, alors qu'auparavant on trouvait les femmes pratiquement systématiquement dans des candidatures sans espoir. Donc ça, c'est un progrès de dire que, les femmes étant bien réparties, elles connaissent un succès général aux élections qui est très bon. Autrement dit, les femmes ne perdent pas plus souvent leurs élections que les hommes, les candidates. Alors, c'est cette dynamique-là, pour nous autres, qui est un acquis important, qu'on risque de voir s'affaiblir par cette dynamique-là qui ferait en sorte que des personnes occuperaient deux postes de candidature.
En fait, un des travers qu'on reproche souvent au scrutin majoritaire, c'est ? vous l'avez probablement entendu ? les hommes monopolisent les postes de candidature. Donc, ce serait encore plus vrai, puisque, étant majoritaires encore parmi les candidats, ils se retrouveraient plus souvent que les femmes en première place sur les listes, dans les districts.
Mme Lavallée (Diane): Parce que, comme ils sont majoritaires, comme Lucie vient de le dire, on présume que les personnes qui se présenteront dans les circonscriptions, qui feront une lutte serrée, sûrement souhaiteront être en priorité sur la liste du district, hein? Et, comme majoritairement ce sont des hommes, on pense que majoritairement les hommes auront une double candidature et auront encore donc plus de chances d'accéder au pouvoir et de se faire élire que les femmes qui, à la pratique même, on le voit au Québec, représentent 27 %, là, dans le meilleur des mondes, à l'heure actuelle, de candidates, qui pourraient se retrouver, elles aussi, dans une double candidature mais à 27 %.
Le Président (M. Ouimet): Bien. Alors, Mme la députée de La Pinière, ça va?
Mme Houda-Pepin: Non, je n'ai pas encore posé de question, M. le Président.
Le Président (M. Ouimet): Ah bon.
Mme Houda-Pepin: Vous venez d'arriver, c'est mon tour. C'est mon tour.
Le Président (M. Ouimet): Alors, vous êtes la prochaine. Voilà.
Mme Houda-Pepin: D'accord, c'est ça. Alors, je voudrais d'abord saluer Mme Lavallée, Mme Desrochers, les représentantes du Conseil du statut de la femme, vous remercier pour votre mémoire très fouillé, parce que vous présentez toujours des mémoires assez bien documentés.
Une voix: Merci.
Mme Houda-Pepin: Et vous avez aussi un certain nombre de constats que vous posez. Le premier, c'est que la situation de la femme, en termes de représentation politique, s'est beaucoup améliorée dans le cadre du système actuel. Et en effet, quand on se rappelle, faut-il le rappeler, il y a à peine 40 ans, lorsque la première femme a fait son entrée au Parlement et qu'elle est venue pour louer un pied-à-terre à Québec, elle ne pouvait pas signer son bail, ça lui prenait la signature de son mari, d'où la loi qui a été adoptée, n'est-ce pas, pour le statut de la femme mariée. Donc, c'est très important de se situer dans le contexte, et donc, aujourd'hui, on est à 32 % de représentation féminine. C'est quand même respectable comparativement aux autres législations, que ce soit au Canada ou ailleurs dans le monde.
Et en même temps, Mme Lavallée, dans votre mémoire, vous dites que c'est la culture politique qu'il faut changer finalement, hein? Et les mesures qui sont proposées dans l'avant-projet de loi, vous êtes d'accord, notamment en ce qui a trait au soutien financier qui est donné aux partis pour favoriser le recrutement et l'élection de plus de femmes dans l'échiquier politique.
Je voudrais savoir ? et j'en profite, puisque que vous êtes là ? si le principe de l'égalité est un principe fondamental qui doit s'appliquer particulièrement dans des institutions comme les partis politiques, qui doivent changer leur culture politique pour appliquer ce principe, pourquoi faut-il les soutenir financièrement pour qu'ils fassent plus de place aux femmes?
Mme Lavallée (Diane): Ce qu'on dit, c'est de financer les partis qui font les efforts parce qu'on pense qu'un parti peut faire des actions beaucoup plus structurantes que de donner, mettons, dans une circonscription... Comme la formation notamment de ses militantes parce qu'on pense qu'un des premiers bassins à travers lesquels les partis ont intérêt à puiser, c'est à travers leur membership, à travers leurs militants locaux, régionaux, et d'avoir des incitatifs ou des actions structurantes pour elles, que ce soit de la formation, formation de clubs politiques pour les habiliter et les former à devenir éventuellement des candidates qui pourront un jour briguer une investiture. On pense qu'ils ont intérêt aussi à faire des actions comme d'investir aussi ailleurs, de rechercher ailleurs que dans les cercles habituels politiques, davantage économiques, des candidatures valables: à travers le mouvement des femmes, à travers les chercheurs universitaires, des chercheuses, parce qu'il y en a. Et les femmes sont maintenant présentes dans plein de secteurs d'activité, très, très performantes, très compétentes, très scolarisées, et donc on pense qu'il y a des filières différentes à explorer, et les partis peuvent investir des énergies à cet égard. Et on pense que de soutenir les partis aurait un intérêt.
Mme Houda-Pepin: Merci pour la réponse. Est-ce que vous pensez, Mme Lavallée, qu'une présence plus accrue des femmes en politique pourrait rehausser l'image de la politique?
Mme Lavallée (Diane): Moi, je le crois. C'est clair que, comme les femmes représentent 51 % de la population et que nos Parlements sont démocratiques et devraient tendre vers une représentation plus égale de la population, plus il y aura de femmes, plus il y aura de diversité et plus il y aura de diverses communautés aussi, ce sera plus représentatif de la société dans laquelle on vit, et donc, oui, je pense que ce sera peut-être un attrait additionnel pour les gens pour s'impliquer en politique. Et je pense que c'est un gage de démocratie aussi de chercher une représentation égale des hommes et des femmes qui ont souvent... Pas toutes, là, les femmes ne sont pas monolithiques. Vous le voyez avec nous aujourd'hui, on n'a pas qu'un courant de pensée. Et c'est le cas des femmes qui se présentent en politique dans des partis différents, avec des préoccupations différentes et qui amènent des vécus souvent différents de par leur socialisation.
Mme Houda-Pepin: Ma question, Mme Lavallée, ne touchait pas l'équation représentation versus plus de démocratie. C'est normal que, lorsqu'on reflète le pluralisme de la société, on est plus démocratique. Ma question était par rapport à la présence des femmes en politique: Est-ce que ça change quelque chose? Parce qu'actuellement il y a un déficit de démocratie, de perception dans la relation des électeurs par rapport aux élus. Si on avait plus de femmes en politique, est-ce que ce serait une piste à explorer? Est-ce que c'est là que résiderait une des solutions, c'est-à-dire d'avoir plus de femmes pour mieux améliorer la relation?
Le Président (M. Ouimet): Il reste à peine 30 secondes pour la réponse. Mme Lavallée.
Mme Houda-Pepin: 30 secondes, Mme Lavallée.
n(11 h 50)n Mme Lavallée (Diane): Mais je pense que ça ne peut qu'aider à la démocratie et à l'image, je pense, de la politique en général.
Mme Houda-Pepin: D'accord. Merci.
Le Président (M. Ouimet): Merci, Mme la députée. Donc, du côté de l'opposition officielle, M. le député de Masson.
M. Thériault: Merci beaucoup, M. le Président. Mme Lavallée, bienvenue, Mme Desrochers. À la question du ministre, vous avez répondu que vous étiez consciente du fait que vous abordiez et vous teniez une position qui allait à l'encontre d'une position qui s'avère de plus en plus majoritaire. Alors, je vous dis que je vous trouve courageuse et que je pense qu'un débat démocratique sur un débat aussi fondamental, dans un débat aussi fondamental, implique des prises de position courageuses, sinon c'est la pensée unique.
Toutefois, dans la lecture de votre mémoire, j'ai été particulièrement surpris de voir un certain nombre de choses. C'est peut-être des détails, mais je vais commencer par les détails parce qu'il y a quelque chose de fondamental. Vous dites, dans votre recommandation première: À l'instar de l'article 1 de l'avant-projet de loi, que la Loi électorale affirme l'objectif d'une représentation équitable des femmes, alors qu'on a entendu jusqu'à maintenant le concept d'égalité. Et je me demandais pourquoi vous aviez privilégié le concept d'équité plutôt que d'égalité, compte tenu du fait qu'au fond, s'il y a 51 % des femmes, l'équité, ce serait qu'il y ait égalité. Y a-t-il une raison particulière ou si c'est rien qu'une préoccupation sémantique de ma part?
Mme Desrochers (Lucie): Bien, si je me rappelle bien, la déclaration d'ouverture dans la loi parle de représentation équitable, donc ce qui indique qu'il n'est pas question de forcer quoi que ce soit pour arriver à un pourcentage. Mais quand on regarde l'objectif... Parce que, bon, on met sur pied des incitatifs financiers pour aider les partis, etc., et c'est une mesure temporaire. Donc, on n'est pas dans l'idée que c'est l'égalité qui doit fonder la représentation nécessairement. C'est une mesure temporaire, c'est une sorte de mesure d'accès à l'égalité. Et, étant temporaire, elle prendra fin quand les femmes représenteront 50 % de l'Assemblée. Donc, l'objectif d'égalité, il est là, mais il n'est pas véritablement un fondement.
M. Thériault: Autre petit détail, dans vos mesures, vous parlez d'une bonification à partir de 30 % de représentation, de candidatures, etc. Compte tenu du fait qu'on est à 32 %, vous n'avez pas été tentées de parler de 35 % peut-être pour créer une incitation plus grande ou...
Mme Lavallée (Diane): Je pense que, si les efforts sont faits pour ça, souvent ils peuvent être dépassés, hein? Ce n'est pas le maximum. Il ne faut pas le voir comme étant le maximum souhaité, c'est le minimum. Mais ce serait...
M. Thériault: Alors, allons au fond d'un problème que vous soulevez, qui n'est pas soulevé par l'ensemble du courant Féminisme et Démocratie, à ce que j'ai lu jusqu'à maintenant. Vous remettez en question les vertus du changement de mode de scrutin en essayant de considérer les effets pervers associés à la transition vers un nouveau mode de scrutin. À la page, là, 36, vous parlez de l'élection de transition et, au premier paragraphe, vous posez une série de questions où vous dites grosso modo qu'entre autres la double candidature, qui est privilégiée par plusieurs personnes, et nommément en plus un seul vote, là, alors fait en sorte qu'il y aurait un effet pervers parce qu'on ne peut pas... il serait tout à fait exact de présumer que ce sont les députés sortants qui vont avoir préséance.
D'autre part, à la page 38, vous dites: «...si, de façon systématique, les femmes se retrouvaient en deuxième, troisième ou quatrième place sur les listes pour l'élection des députés de district, le mode de scrutin, au lieu d'améliorer les choses, comme plusieurs l'espèrent, serait responsable d'un recul du succès électoral actuel des candidates», c'est-à-dire que lié donc à la problématique de la transition, d'une propension à ce qu'avec double candidature, un seul vote, les députés sortants aient préséance, on se retrouve en plus avec une distribution compensatoire par district, donc c'est fermé. On pourrait donc avoir autour trois députés de...
Mettons, prenons un district à cinq circonscriptions, trois de circonscription. Si les trois députés sortants sont des hommes et que ces hommes-là veulent être en double candidature, il est fort possible que le premier candidat de district et le deuxième candidat de district ne soient pas nécessairement des candidats liés au parti qui aura eu la plus grande pluralité dans le district. Alors, ça crée un certain nombre de problèmes quant à la possibilité de maximiser la présence des femmes.
Ça, vous avez situé ça... Ça a attiré mon attention parce que, moi, honnêtement, je ne l'avais pas vu, ça. Alors, j'aimerais ça que vous... Est-ce que j'ai bien compris ce que vous dites, d'abord? Et est-ce que c'est seulement dans une transition que ça apparaîtrait ou vous pensez qu'il faudrait, à ce moment-là, si on veut bonifier cet avant-projet de loi, faire sauter les districts, faire sauter la distribution régionale et avoir nécessairement une liste nationale? Je parle du point de vue d'améliorer, maximiser la présence des femmes.
Mme Lavallée (Diane): Pour ce qui est de l'élection de transition, là, il y a des choses là-dedans, y compris dans l'élection de transition, parce qu'on passerait, là, de 125 à 77 dans le nombre de circonscriptions. Donc, c'est sûr qu'il y aurait un travail à faire, de pouvoir... entre les élus ou les candidats, les candidats des partis actuels pour diminuer le nombre de personnes qui seraient présentées dans les circonscriptions, bon, comme, oui, il y aura... Il n'y a pas de garantie que les femmes y gagneraient, dans cette lutte de pouvoir interne, je vous dirais, aux partis, je ne pense pas que l'histoire nous montre qu'elles sont toujours gagnantes dans les luttes internes des partis, mais il reste qu'il y aurait beaucoup... Effectivement, les hommes risquent d'être bénéficiaires de ça parce que, de toute façon, ils sont en plus grand nombre aussi à l'heure actuelle, hein, comme élus, et y compris... Ça, c'est pour la transition. Il y a un risque effectivement puis qu'en plus...
Mais la double représentation demeure pour nous un risque permanent. À partir du moment où... le jour où les femmes seront représentées également, il y a moins de risques, mais, à partir du moment où on sait qu'il y a 27 % de personnes qui se sont portées candidates, tous partis confondus, aux dernières élections, comme je vous dis, à la limite, il y en aurait 31 %, elles sont encore minoritaires et elles seront selon nous minoritaires à se retrouver dans une double candidature. Donc, les hommes se retrouvent majoritairement en possibilité d'avoir une double candidature, donc des chances additionnelles de se voir attribuer un poste électif, contrairement aux femmes. Je ne sais pas si tu veux compléter.
Mme Desrochers (Lucie): C'est correct.
M. Thériault: Bon, le temps presse, ma collègue de Duplessis veut intervenir. Mais, avant de lui passer la parole, question systématique que je pose systématiquement: Advenant le cas où ? vous êtes contre, là; mais advenant le cas où ? on doit tabler sur un nouveau mode de scrutin, là, un plébiscite, le fait que la population tranche le débat, est-ce que vous voyez ça d'un bon oeil?
Mme Lavallée (Diane): Bien, moi, je pense que...
M. Thériault: Est-ce que c'est nécessaire?
Mme Lavallée (Diane): On a des institutions démocratiques. La commission parlementaire est un endroit démocratique où vous entendez différents courants, et je pense que vous avez sûrement entendu toutes sortes de richesses d'intervention qui permettront au législateur, je pense, de faire un choix. Le mode de consultation, je pense, appartient au gouvernement. Et l'intérêt, moi, que je vois, c'est d'avoir ouvert à une commission parlementaire d'une durée assez importante, et je pense que le débat a cours au Québec effectivement, là, largement.
M. Thériault: Donc, vous êtes contre, en principe, avec un plébiscite pour trancher le débat?
Mme Lavallée (Diane): Ah, je n'ai pas de position, on n'a pas pris de position là-dessus du tout.
M. Thériault: O.K. C'est beau.
Le Président (M. Ouimet): Merci. Écoutez, je ne voulais pas induire la députée de Duplessis en erreur, mais il reste 1 min 30 s.
Mme Richard: Merci, M. le Président. Mmes Lavallée, Desrochers, c'est dommage qu'on n'ait pas beaucoup de temps, j'aurais aimé vous poser énormément de questions. Je tiens à vous féliciter pour votre mémoire. Je l'ai lu à plusieurs reprises et je me suis retrouvée dans votre mémoire, comme femme, dans plusieurs des interrogations que vous aviez.
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(12 heures)
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Comme je n'ai pas beaucoup de temps, je vais vous poser une question. Vous savez que, dans l'avant-projet de loi, on parle de jumeler certaines circonscriptions, et je vous dirais que je n'ai pas vu grand opposition à cela. Étant moi-même une députée d'une des circonscriptions les plus grandes au Québec, étant une femme, étant la première femme élue sur la Côte-Nord, je vous dirais que, si on doit faire un agrandissement de ma circonscription, j'aurais énormément de difficultés. Vous savez, les députés qui viennent des régions, ce n'est pas ? je ne veux pas minimiser; ce n'est pas ? le même travail qu'un député qui vient d'un comté urbain. Les gens s'associent beaucoup à vous, il faut une implication dans le milieu. Donc, je vous dirais qu'on parle beaucoup aussi de conciliation travail-famille. Et je vous dirais que, pour une jeune femme mère de jeunes enfants, je vois très, très mal comment moi-même, je pourrais inciter des femmes à venir en politique avec tous ces facteurs. Malheureusement, je ne trouve pas qu'on tient beaucoup compte de ça, je n'en ai pas entendu beaucoup parler dans les gens qui sont venus déposer des mémoires. J'aimerais vous entendre là-dessus, parce que, vous savez, il y a quand même un travail de mère, de femme, d'épouse et...
Le Président (M. Ouimet): Mme la députée, malheureusement le temps est écoulé. Peut-être Mme Lavallée aura l'occasion de se faire entendre là-dessus mais dans le cadre d'une autre intervention. Je suis désolé. Je dois aller du côté de M. le député des Chutes-de-la-Chaudière.
M. Picard: Merci, M. le Président. Mme Lavallée, Mme Desrochers, vous avez indiqué tout à l'heure que le mode de scrutin n'a pas d'impact sur le nombre de femmes lors de la présentation et vous insistez par la suite en indiquant que, si on change le système, bien ça va peut-être pénaliser. J'aurais une question: Est-ce que vous avez pris connaissance de l'étude de l'Union européenne qui a été... l'étude qui a eu lieu en 1997, qui est une étude internationale, qui démontrait que, sur 162 pays, les pays où il y a 25 % et plus de femmes, c'est des pays qui utilisent le système proportionnel ou mixte et inversement, dans les pays où il y a 10 % ou moins, là c'est des systèmes majoritaires ou mixtes? Je voudrais savoir si vous avez pris connaissance de cette étude-là. Il est vrai qu'au Québec... Il y a deux exceptions à ma connaissance, au Québec et au Vermont, dans les systèmes majoritaires, où il y a plus de 25 %. Donc, j'aimerais savoir si vous aviez pris connaissance de l'étude puis comment vous interprétez les résultats de l'Union européenne, là, tout simplement.
Le Président (M. Ouimet): Mme Lavallée.
Mme Desrochers (Lucie): Oui. Bien, je n'ai pas nécessairement pris connaissance de l'étude en particulier dont vous parlez, mais je suis bien au courant de ces données-là. Quand on compare comme ça les performances d'un mode de scrutin ou d'un autre, il faut bien remarquer au départ que les scrutins majoritaires sont plus rares aussi, donc les occasions de comparer sont plus rares.
Mais ce que j'aimerais dire, c'est que les personnes et les femmes qui viennent vous dire que le mode de scrutin proportionnel favorise l'élection des femmes, c'est que souvent ils l'associent à des interventions très directes des partis dans l'élection pour favoriser l'élection des femmes, par exemple les partis où souvent la loi du pays va obliger la constitution de listes ayant un certain pourcentage de femmes. Bon, là, on tombe dans les questions de quotas. Au Conseil du statut de la femme, on a toujours été contre ce type d'intervention là parce qu'en bout de course il y a un danger réel que la crédibilité des femmes élues soit affectée.
Donc, il faut bien voir que, je dirais, les espoirs qui sont placés dans le scrutin proportionnel, il n'est pas dans la mécanique elle-même, il est dans les à-côtés que certains pays qui ont des modes de scrutin proportionnels se sont donnés ou encore, plus souvent, des partis dans ces pays-là se sont donnés. Mais il faut aussi reconnaître que, pour en arriver là, d'abord il faut trouver que c'est souhaitable, ces interventions-là, et il faut aussi que les partis politiques aient des actions très centralisées dans le choix des candidates et des candidats, ce qui n'est pas le cas ici. Et on pense qu'ici c'est une richesse finalement, la démocratie qui existe à l'intérieur des partis, pour le choix des candidates et des candidats, qu'ils ne soient pas imposés d'en haut. Donc, pour être sûr des résultats, parce que souvent c'est ça, ça prend une mécanique qui est assez directive, et ça, le conseil ? et ce n'est pas la première fois que le conseil intervient sur les questions d'accès des femmes au pouvoir ? n'est jamais allé dans ce sens-là.
Le Président (M. Ouimet): Bien.
M. Picard: Merci.
Le Président (M. Ouimet): Merci, M. le député. Maintenant...
M. Picard: Il ne me reste pas de temps, M. le Président?
Le Président (M. Ouimet): Il reste 1 min 30 s.
M. Picard: O.K. C'est beau. Merci. Vous dites que vous êtes contre la création de quotas. Lorsque vous préconisez peut-être une majoration des dépenses, vous n'avez pas l'impression de créer cette notion de quota de femmes pour certains partis politiques qui pourraient être tentés, là? Parce que ça revient souvent, les femmes disent: Nous, on ne veut pas être catégorisées dans des quotas. Mais là, avec une majoration des dépenses, vous ne voyez pas un danger?
Mme Lavallée (Diane): Nous, ce qu'on voit dans une majoration des dépenses, c'est de récompenser les efforts qui sont faits par les partis qui visent une égalité de représentation, qui sont convaincus que, pour notre démocratie, c'est sain de faire les efforts qu'il faut pour aller recruter les femmes, donc faire les efforts de sortir des sentiers habituellement tracés, les filières avec lesquelles on va chercher les nouveaux candidats pour aller... donc faire les efforts additionnels pour aller chercher les femmes. Et ça ne veut pas dire aller chercher une femme, là, pour aller chercher une femme, je pense que des femmes potentiellement très compétentes, candidates, il y en a dans toutes les régions du Québec, avec toutes sortes d'idéologies, je dirais. Et ce qu'on incite, nous, par le biais de financement des partis, c'est de récompenser les partis qui font ces efforts, et ce n'est pas de dire: Il faut que vous ayez 50 %, ou 32 %, ou 35 %, c'est: Faites les efforts maximums puis soyez transparents, dites-nous comment vous avez utilisé l'argent en plus.
Le Président (M. Ouimet): Bien. Alors, merci, Mme Lavallée. Je me tourne maintenant du côté du comité citoyen, j'ai Mme Proulx qui s'est inscrite. Mme Proulx.
Mme Proulx (Mélanie): Merci. On a déjà abordé le sujet de ma question, M. Thériault entre autres. Je voudrais quand même vous entendre approfondir. Vous pensez que 30 %, vous le dites vous-même, là, 30 % comme seuil, ça va récompenser les partis qui présentent déjà les 30 % de femmes. Est-ce que vous ne pensez pas qu'on devrait plutôt les inciter en augmentant un peu, 35 %, 40 %? Est-ce que ce ne serait pas une chance d'augmenter justement les femmes à l'Assemblée plutôt que de juste les récompenser, ceux qui présentent déjà? Parce que vous dites qu'il n'y a pas assez de femmes à l'Assemblée. Je suis d'accord avec vous, d'ailleurs, là.
Mme Lavallée (Diane): C'est ça. Bien, l'objectif, c'est qu'ils en recrutent plus, là. Parce que c'est une vérité de La Palice: s'il n'y a pas assez d'élues, il n'y a pas assez de candidates. Donc, récompenser les efforts pour aller chercher les candidates, et les candidates qui se feront élire aussi parce qu'il y a une prime aussi à l'élection. Ça, on trouve ça important. Et on ne pense pas que la culture, au Québec, des partis fait en sorte qu'ils vont chercher les femmes et qu'ils vont les mettre dans des comtés où ils savent qu'ils vont perdre, là. Le constat qu'on fait des dernières années dans les élections, ça n'a pas été le cas. Les partis font les efforts pour aller chercher des femmes pas pour juste aller chercher des femmes, mais pour accroître une diversité d'opinions, des femmes compétentes, capables d'assumer le pouvoir avec, oui, ce que ça comporte de difficultés de concilier famille-travail aussi. Parce que je ne pense pas que le travail d'un élu est de tout repos avec les longues heures, et tout ça, et je pense que plus il y aura de femmes, souvent, je vous dirais, de jeunes aussi... Vous devez le constater au sein de vos formations... veulent s'impliquer socialement, veulent s'impliquer politiquement mais veulent aussi se réaliser sur le plan personnel... Et je pense que la classe politique a intérêt à tenter de changer les règles du jeu pour aussi faire en sorte que des femmes ou des jeunes puissent avoir plus de possibilités de s'impliquer politiquement.
Mme Proulx (Mélanie): Merci.
Le Président (M. Ouimet): Merci, Mme Proulx.
Mme Lavallée (Diane): Et l'autre chose, pour augmenter le 30 %, nous, on pense que déjà des efforts d'aller en chercher 30, si déjà ça permet de financer les partis, qui pourront se créer un fonds pour faire des actions pour voir croître le nombre de candidates élues dans leurs partis, bien tant mieux. Si vous montez le seuil et qu'il y a des fonds en moins qui pourraient être versés pour ça, nous, on pense que c'est un seuil minimal intéressant.
Mme Proulx (Mélanie): ...vous demandez de justifier les fonds qui auront été reçus?
Mme Lavallée (Diane): Oui, parce qu'on se dit: Les fonds qui auraient été reçus, c'est de l'argent de l'État, donc qu'il y ait une reddition de comptes. Et de dire ce qui a pu être fait avec, ça pourrait être des exemples aussi à donner à d'autres partis. Les bons coups d'un peuvent servir à l'autre, et on trouverait ça intéressant d'avoir de la transparence aussi pour dire ce qui a été fait avec les sommes qui ont été recueillies pour justement faire des plans d'action spécifiques dans les partis pour accroître le nombre de femmes.
Le Président (M. Ouimet): Bien, merci. Alors, maintenant, M. Boivin.
M. Boivin (Guillaume): Bonjour, mesdames. Bien que n'étant pas dénué d'intérêt, je vais vous avouer que votre point de vue me donne l'impression d'être basé sur une analyse strictement unidimensionnelle. Ce n'est pas mauvais en soi, mais il faudrait le savoir pour savoir comment l'accueillir. Avez-vous, dans votre réflexion, intégré d'autres considérations que l'enjeu de la représentation des femmes? Si oui, lesquelles? Et où cela se retrouve-t-il dans votre mémoire?
Mme Lavallée (Diane): Bien, écoutez, on est le Conseil du statut de la femme. Donc, la lunette, je vous dirais, à travers laquelle on fait nos analyses, c'est pour améliorer la situation des femmes, améliorer le pouvoir des femmes, le pouvoir réel en politique. Et c'est la base et, je vous dirais, le paradigme à travers lequel on a regardé le projet de loi, on a regardé les législations ailleurs, on a regardé les différentes formes de démocratie dans d'autres pays pour savoir si ça servirait les intérêts des femmes, parce que c'est l'objectif que vise le Conseil du statut de la femme de par sa mission. Et donc, oui, c'est clair qu'on est teintées de l'intérêt des femmes, c'est notre mission.
Le Président (M. Ouimet): Merci, M. Boivin. Mme Loucheur.
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(12 h 10)
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Mme Loucheur (Yohanna): Bonjour. Je voulais revenir à la question des incitatifs, mais, bon, une de mes questions a été posée à plusieurs reprises, donc je ne vais pas revenir à cet aspect-là. Mais je me demandais... Par rapport aux craintes que vous avez exprimées par rapport à un mode mixte compensatoire, notamment la double candidature et ces choses-là, il y a plusieurs personnes qui nous ont dit avoir une très nette préférence pour que les incitatifs s'appliquent aux élues et non pas aux candidates, et je me demandais si justement ça, ce ne serait pas une façon de s'assurer que les partis justement n'aient pas simplement des femmes en bas de liste mais bel et bien à des endroits où elles ont une chance d'être élues et qu'à ce moment-là les incitatifs seraient une façon d'assurer ça. Qu'est-ce que vous en pensez?
Mme Lavallée (Diane): Nous, on est d'accord à ce qu'il y ait une bonification quand elles sont élues bien sûr, mais ce qu'on pense, c'est que le problème majeur, c'est d'accroître le nombre de candidates. Parce que l'électorat n'est pas sexiste au Québec. Il y a peut-être des sexistes dans la population, mais l'électorat ne l'est pas. En 2003, je vous rappellerai qu'il y a eu 27 % de femmes candidates, et 30 % se sont retrouvées élues. Donc, le problème est d'aller accroître le nombre de candidatures, selon nous. On fait le pari, puis, à la lecture de ce qu'on constate au Québec, plus elles sont présentes et nombreuses comme candidates, plus elles seront élues, plus elles seront nombreuses élues. Et tant mieux si elles sont élues puis elles dépassent.
Puis, nous, pour ce qui est du pourcentage de majoration si elles sont élues, on propose un autre mode. On dit: Le 5 % devrait être donné au parti qui a fait élire soit 30 % de femmes ou supérieur ? c'est ça? ? au nombre de candidatures hommes. Sur l'indice de succès. Et ça, c'est comme un double incitatif.
Le Président (M. Ouimet): Oui, Mme Loucheur.
Mme Loucheur (Yohanna): À la lumière de ce que vous venez de dire, et notamment de la culture politique au Québec effectivement et du taux de succès des candidates, je comprends mal vos craintes par rapport au mode mixte et à la double candidature. Vous prenez pour acquis qu'il n'y aura que des hommes en tête de liste ou que des hommes dans des candidatures où ils ont effectivement une chance d'être élus. Est-ce qu'il n'y a pas une certaine contradiction à ce niveau-là? Je me demande si vos craintes ne sont pas exagérées à ce niveau-là. Est-ce que la population québécoise accepterait qu'un parti ne fasse élire que des hommes finalement dans une élection comme ça? Ça me paraît assez peu probable.
Mme Lavallée (Diane): On ne pense pas qu'il ne ferait élire que des hommes, mais ça n'accroît pas le nombre de chances pour les femmes, c'est plus ce qu'on veut dire, compte tenu que majoritairement ce sont les hommes, là, qui se présentent, à 73 %, candidats, 27 % les femmes. Et avec la double candidature on présume que les femmes ne seront pas plus dans une double candidature que le pourcentage de femmes qui se présentent, 27 %. Donc, à sa face même, c'est moins de possibilités pour elles... ce n'est pas plus de possibilités en fait de se faire élire.
Mme Loucheur (Yohanna): Mais pas moins nécessairement.
Mme Lavallée (Diane): Mais, si on veut accroître, je pense qu'il faut inciter sur tout ce qui permettrait d'accroître le nombre de femmes qui se présenteraient candidates susceptibles d'être élues; donc, par toutes sortes d'incitatifs, de formations, d'aller investir dans d'autres lieux et former les femmes à l'action politique.
Mme Desrochers (Lucie): Actuellement, on a atteint, je vous dirais, un certain niveau de succès pour les femmes. Il y a un équilibre, et c'est cet équilibre-là qu'on craint qu'il soit brisé en introduisant de nouvelles mécaniques, là. En gros, c'est ça.
Le Président (M. Ouimet): Bien. Merci. Il reste à peu près deux minutes pour M. Morisset.
M. Morisset (Michel): Bonjour, Mme Lavallée. Alors, je vous félicite pour votre mémoire. Et aussi, comme j'ai eu le plaisir de vous connaître au temps de la SPIIQ, alors, Mme Lavallée, je voudrais comprendre, advenant la réforme, la réforme courageuse qui a été proposée par le gouvernement, advenant, par exemple, qu'il y ait consensus... Je comprends mal, vous qui avez été dans le milieu... active syndicalement... Vous n'êtes pas sans savoir que, lorsqu'il y a une entente ou un consensus, ce serait bon d'avoir quand même un plébiscite. Je ne comprends pas c'est quoi, votre crainte, par rapport à ce qu'il y aurait un plébiscite. Vous ne semblez pas être d'accord avec ça, qu'il y ait un plébiscite en bout de ligne, là, pour approuver une... réforme.
Mme Lavallée (Diane): On ne s'est pas prononcés, monsieur, là-dessus, on n'a pas pris position. Les membres du conseil d'administration du Conseil du statut de la femme n'ont pas pris position, pas plus pour que contre. Je veux dire, on n'est pas contre toutes les formes de consultation démocratique. Je pense qu'il appartient au Parlement, au législateur de décider de la forme de consultation qui lui convient. Nous, on ne s'est pas prononcés là-dessus. Puis on n'est pas contre les référendums, on n'est pas contre ça, mais, comme je vous dis, je n'ai pas de position de mon conseil d'administration pour vous l'apporter ici, aujourd'hui.
Le Président (M. Ouimet): Merci. Il reste une minute. Mme Proulx.
Mme Proulx (Mélanie): Effectivement, pour en revenir à la question de M. Boivin, votre considération, c'est la représentation des femmes, c'est clair. Est-ce que ça prime sur les autres considérations comme la volonté populaire? Parce que je pense que c'est prouvé, là, que le mode majoritaire ne représente pas la volonté populaire, est-ce qu'on doit quand même garder ce mode-là? Vous dites être pour le statu quo, là, est-ce que ça prime sur le reste des considérations?
Mme Lavallée (Diane): Bien, comme représentante des femmes, pour voir qu'est-ce qui servirait davantage les intérêts des femmes, c'est sûr que c'est ce qui prime. On a vu aussi toute la question aussi de la fragilité des gouvernements qui ne se retrouvent pas dans des gouvernements majoritaires, ça fractionne le pouvoir. Et, nous, on pense qu'un fractionnement du pouvoir va diluer, va éparpiller les femmes dans des partis où elles risquent d'avoir moins de pouvoir et donc d'avoir moins d'influence sur des projets de loi ou des projets qui serviraient les intérêts. Puis les femmes, c'est quand même 50 % de la population, et je vous dirais que beaucoup de législations qui ont été apportées au Parlement qui servent les intérêts des femmes ont servi les intérêts de l'ensemble de la population du Québec. Que ce soient les diverses mesures de conciliation famille-travail, l'assurance parentale, beaucoup de revendications qui ont donné lieu à des projets de loi de l'Assemblée nationale ont été amenées par les femmes mais ont eu aussi comme effets des effets très positifs pour les hommes. On ne pense pas que ça peut nuire.
Le Président (M. Ouimet): Bien. Il reste deux minutes. Je sais que la députée de Duplessis demande un consentement pour reprendre le deux minutes qui n'avait pas été pris lors de l'intervention. Est-ce que j'ai un consentement? Oui.
Alors, Mme la députée de Duplessis.
Mme Richard: Merci beaucoup, M. le Président. Mme Lavallée, je sais qu'on n'aura peut-être pas le temps de répondre à la première question, je voudrais vous demander... Vous savez, on a eu des groupes qui sont venus ici ? je l'ai entendu, j'ai moi-même, avec Mme Lamoureux, eu un échange ? on nous dit que, si on privilégiait des femmes sur les listes, ça ferait avancer la cause des femmes, ça les amènerait plus en politique, on aurait une surreprésentation. Ne croyez-vous pas que c'est illusoire dans l'avant-projet de loi d'amener ça, que, bon, même l'égalité entre l'homme et les femmes sur une liste ferait en sorte qu'on ait plus de femmes en politique?
Mme Desrochers (Lucie): Est-ce que vous parlez des listes avec hommes, femmes alternés, des choses comme ça? Bien, c'est ce qu'on a dit tout à l'heure, on est contre ce type d'intervention pour la bonne raison que ça vient, en bout de ligne, affecter... En tout cas, ça risque sérieusement d'affecter la crédibilité des femmes, parce que, quand les femmes élues de cette manière-là vont arriver au Parlement pour siéger à l'Assemblée nationale, ce ne sera pas long que les commentaires vont dire: Bien, on sait bien, tu es le résultat d'un quota, tu es une femme, on n'avait pas le choix de te mettre... Il faut absolument éviter ces choses-là. Le chemin qu'on prend est évidemment plus long mais, à notre avis, plus sûr.
Le Président (M. Ouimet): Bien. Merci. Alors, compte tenu de l'heure, je vais suspendre les travaux jusqu'à 14 heures. On peut laisser nos documents et les effets sur la table, les portes seront verrouillées. Alors, les travaux sont suspendus. Merci.
(Suspension de la séance à 12 h 18)
(Reprise à 14 h 5)
Le Président (M. Ouimet): S'il vous plaît! La Commission spéciale sur la Loi électorale reprend ses travaux, et je demanderais à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs téléphones cellulaires.
Je vous rappelle que le mandat de la commission est de poursuivre les auditions publiques dans le cadre de la consultation générale à l'égard de l'avant-projet de loi intitulé Loi électorale.
Je vois que les représentantes du mouvement Collectif Féminisme et Démocratie ont déjà pris place. Alors, Mme Emmanuelle Hébert et Mme Louise Paquet, c'est bien ça?
Mme Hébert (Emmanuelle): Oui.
Le Président (M. Ouimet): Je vous souhaite la bienvenue, au nom de tous les collègues autour de la table, à l'Assemblée nationale du Québec. Je vous cède un temps de parole de 20 minutes, après quoi nous ouvrirons une période d'échange avec vous.
Collectif Féminisme et Démocratie (CFD)
Mme Paquet (Louise): Merci beaucoup de nous accueillir aujourd'hui. Alors, nous allons vous présenter très succinctement l'analyse, la vision du Collectif Féminisme et Démocratie. On va parler brièvement de notre vision de la démocratie, ensuite de la réforme du mode de scrutin, et bien sûr ça ne vous surprendra pas que nous allons insister un peu plus sur la question de l'égalité entre les femmes et les hommes.
D'abord, notre vision de la démocratie. On a trouvé important, dans le cadre de cette consultation-là, de ne pas seulement venir se prononcer sur des modifications à caractère technique, mais d'essayer d'appuyer cela sur une réflexion alimentée par des chercheurs et chercheuses au niveau de la philosophie politique au plan international, de regarder les études empiriques qui s'étaient faites ailleurs.
Très brièvement, quand on regarde la démocratie, on peut dire finalement que c'est l'histoire de l'inclusion. Alors, inclusion au départ parce que la démocratie est partie d'un petit groupe de gens, une élite d'hommes, il faut le dire, et graduellement, après de longues et difficiles luttes, s'est toujours élargie de plus en plus pour intégrer un plus grand nombre de gens. Pensons aux luttes des peuples colonisés, à la libération des esclaves, aux luttes des ouvriers, ouvrières, des paysans, les luttes des Noirs, des femmes, des autochtones, des luttes qui ont amené finalement que de plus en plus de gens ont eu accès à la pleine citoyenneté.
Notre vision de la démocratie, c'est une vision large qui dépasse la situation des femmes. Si vous avez lu notre mémoire, vous avez vu qu'on se prononce sur un ensemble de sujets. Pour nous, la démocratie, c'est d'en arriver à ce que nos institutions représentent les identités idéologiques ? quand on parle des courants d'idées qui circulent dans notre société ? les identités socioculturelles, les identités aussi territoriales.
Notre démocratie ne va pas si mal, on pourrait donner plein d'exemples qui peuvent nous rassurer sur la qualité de la démocratie au Québec, mais, en ce qui nous concerne, elle reste un processus inachevé, et la réforme du mode de scrutin, la réforme électorale s'inscrit pour nous comme un moyen pour améliorer nos institutions démocratiques.
On constate qu'il y a un déficit démocratique important dans notre société, un déficit de représentation et un déficit de participation aussi. On s'est d'abord, je dirais, concentrées sur le déficit de représentation, mais on est convaincues que, si on améliore ou si on solutionne une partie de ce déficit-là, on peut aussi en partie corriger le déficit de participation.
En ce qui concerne la réforme du mode de scrutin, notre choix, c'est la proportionnelle, mais pas n'importe laquelle. Le gouvernement a mis sur la table une proposition qui est un système mixte compensatoire; il aurait pu y avoir d'autres scénarios, bien sûr. Nous, on s'est situées dans ce cadre-là.
Alors, dans le cadre d'un système mixte proportionnel, ce qu'on voit, c'est qu'il doit y avoir cinq grands résultats qui sont atteints par la réforme du mode de scrutin. Je les nomme. Un des premiers résultats, c'est que le nouveau mode reflète la volonté populaire ? je ne ferai pas un long exposé là-dessus, vous connaissez la situation actuelle, les distorsions qui sont créées par le scrutin majoritaire uninominal; un autre résultat, c'est que l'Assemblée nationale soit le reflet du pluralisme que l'on retrouve dans notre société, donc d'un plus grand nombre de courants politiques ? le monde québécois ne se divise plus seulement en bleu ou en rouge; représentation aussi des régions du Québec, parce que le Québec, c'est un grand territoire, et la constitution de ses régions doit être représentée; représentation de l'égalité entre les femmes et les hommes, qui nous semble être un objectif de société que l'on doit atteindre le plus tôt possible; et représentation aussi de la diversité que l'on trouve dans notre société, parce que la société québécoise est maintenant enrichie, depuis plusieurs années, par l'arrivée de nouveaux arrivants et des gens donc de la diversité ethnoculturelle et des minorités visibles.
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(14 h 10)
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Donc, dans un cadre proposé, qui est le mode mixte proportionnel compensatoire, on est d'accord avec le modèle proposé s'il y avait deux votes qui seraient accordés: l'un pour permettre aux électeurs et électrices d'exprimer leurs préférences dans leur circonscription, l'autre pour permettre aux électeurs et électrices d'exprimer leurs préférences pour le parti de leur choix. Une autre condition: si la compensation est calculée au niveau national afin que tous les votes comptent et afin d'éliminer les distorsions. Troisième élément: il faut absolument que les mesures qui sont actuellement proposées pour l'égalité entre les femmes et les hommes ainsi que pour la représentation de la diversité ethnoculturelle soient sérieusement améliorées.
Un petit mot sur la proportionnelle. Plus tôt, Mme Desrochers, du Conseil du statut de la femme, disait que certaines personnes pensaient, dans le mouvement des femmes, que la proportionnelle était magique. En ce qui nous concerne, la proportionnelle n'est pas magique; la proportionnelle est efficace parce qu'elle facilite la mise en place de mesures positives. Et les pays qui ont le mieux réussi en termes de représentation des femmes sont les pays qui joignent à la fois... qui jumellent représentation proportionnelle et mesures positives. Si on pensait que la proportionnelle est magique, on ne vous proposerait pas plein de mesures à intégrer dans la loi.
Alors, en ce qui concerne la question des femmes, un rappel important: les Québécoises ont eu accès à la citoyenneté tard. Rappelons-nous que le droit de vote et d'éligibilité a été accordé en 1918 au niveau du gouvernement fédéral; au Québec, après une très longue lutte, le droit de vote a été accordé en 1940; la première femme a été élue à l'Assemblée nationale en 1961; il a fallu attendre 1976 avant qu'on retrouve plus d'une femme à l'Assemblée nationale; et, à ce moment-ci, il y a 40 femmes à l'Assemblée nationale, soit 32 % de l'Assemblée.
Nous trouvons important de parler de l'égalité. Qu'est-ce que c'est, l'égalité? L'égalité, ce n'est pas de traiter tout le monde de la même manière. L'égalité, c'est assurer à tous et à toutes l'accès aux résultats visés. L'égalité de droit ne suffit pas. L'égalité de droit, nous l'avons depuis 1940. Nous avons le droit de nous présenter, nous avons le droit de voter. Il faut passer d'une égalité de droit à une égalité de fait. J'insiste sur ce point-là, parce que vous allez l'entendre, je pense, souvent répété au fur et à mesure de la consultation et de la tournée que vous allez faire dans les régions.
Tous les citoyens, toutes les citoyennes ne partent pas du même point. C'est pour ça qu'on considère que l'État doit agir pour assurer que tous aient accès à des meilleures conditions de vie, à un meilleur salaire, à un meilleur travail. Le gouvernement du Québec l'a déjà fait.
Prenons l'exemple des prêts et bourses. Pourquoi il existe des prêts et bourses? C'est parce qu'on considère qu'il y a des étudiants qui n'ont pas les mêmes possibilités que d'autres pour avoir accès à l'éducation, et, comme on considère que l'accès à l'éducation est un droit, le gouvernement a mis en place des programmes de prêts et bourses pour aider les étudiants qui n'étaient pas en position de faciliter et de pouvoir accéder à ces services-là.
Pourquoi le gouvernement, avec l'accord des partis politiques, a mis en place une loi sur l'équité salariale? Parce qu'il a été analysé qu'il y avait une discrimination systémique qui se faisait. Certains corps d'emplois qui étaient monopolisés par des femmes faisaient l'objet finalement d'une sous-évaluation, et on y trouvait des salaires plus bas que les compétences que les gens avaient.
Pourquoi il y a eu la mise en place de programmes d'égalité en emploi au sein même du gouvernement? C'est parce qu'il a été évalué là aussi qu'il y avait de la discrimination systémique qui se faisait en embauche et que les femmes et les personnes de la diversité ethnoculturelle ou des minorités visibles n'avaient pas les mêmes chances d'accès à ces emplois-là.
Ce sont quelques exemples pour démontrer que, quand on reconnaît un objectif de société, quand on reconnaît que certaines personnes sont dans des situations dans le fond d'inégalité systémique, l'État est en droit, est légitimé d'agir pour corriger ces situations-là. Il peut corriger soit par des lois, soit par des programmes, soit par des mesures.
En ce qui concerne la sphère politique et la sphère du pouvoir, on sent comme un blocage, comme si c'était un des derniers bastions où on dit: Non, il ne faut pas toucher à ça. On entend souvent les arguments puis on les a entendus un peu ce matin: Bien, c'est le problème des femmes. C'est parce que les femmes ne veulent pas y aller, bon. Elles n'ont pas assez confiance en elles. Alors, il faut qu'elles investissent plus les partis. Faisons confiance à la bonne volonté des partis et puis laissons aller le cours naturel des choses, puis tout va s'arranger. Bon. On peut bien mettre quelques petites mesures financières, puis ça devrait s'arranger.
En ce qui nous concerne, la question de la sous-représentation politique des femmes, c'est un problème collectif, et la réponse doit l'être aussi. C'est une question de justice et de démocratie. Ça nous concerne tous et toutes, tant les femmes que les hommes. Et, pour en arriver à cela, à la suite de l'analyse rigoureuse que nous avons faite, on est arrivés à la constatation qu'un mode proportionnel faciliterait la mise en place de mesures positives.
Et on ne serait pas les premiers parce qu'il y a maintenant 100 pays dans le monde où on retrouve des mesures positives de différentes sortes, c'est bien évident. Je le disais tout à l'heure, ce sont les pays qui ont réussi le mieux, au niveau de la représentation des femmes, qui ont à la fois un mode proportionnel et des mesures.
Les recommandations du collectif. Première recommandation, c'est que l'égalité soit inscrite comme un objectif de société à l'intérieur de la loi. À partir de là, que le gouvernement mette en place une vaste stratégie, une stratégie globale qui prévoit à la fois des mesures législatives, à la fois des mesures incitatives pour en arriver à l'égalité d'ici trois élections.
Parmi les mesures les plus importantes, l'alternance sur les listes. Il est très difficile ? on l'a regardé aussi dans notre analyse ? dans le mode majoritaire, d'arriver à des mesures qui encadrent la représentation des femmes, alors que, par la liste, il est plus facile. C'est pourquoi nous proposons l'alternance entre les sexes sur la liste. Cette mesure législative, on propose qu'elle soit donc obligatoire.
Autre chose. On propose une mesure. Que les partis politiques, en tant qu'intermédiaires publics de la démocratie, qui reçoivent du financement de l'État, soient obligés de préparer un plan d'action en matière d'égalité. C'est une mesure qui ne coûte rien, mais c'est une mesure qui peut avoir un immense impact pour changer la culture politique dans les partis et pour encourager ou accélérer le mouvement en faveur des femmes.
Par rapport aux mesures qui sont proposées, la mesure de bonification de l'allocation annuelle des partis, on propose qu'elle soit accordée en fonction des élues et non pas des candidates, afin de récompenser le vrai résultat que l'on cherche à atteindre, c'est-à-dire plus de femmes élues. On propose que la bonification qui soit donnée soit accordée à partir de 35 % d'élues et on propose que cet argent-là aille dans un fonds dédié à l'égalité dans chaque parti pour réaliser le plan d'action qu'ils se seront donné.
La mesure de remboursement des dépenses électorales, on propose aussi qu'elle soit accordée à partir de 35 %. Mais cette fois-ci, on est d'accord avec le fait qu'elle s'applique aux candidates.
On propose que les mesures soient maintenues trois élections après l'atteinte de l'égalité, mais que dans l'intervalle on procède à des évaluations après chaque élection afin de corriger le tir, s'il y a lieu.
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(14 h 20)
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Enfin, un point très important. À ce moment-ci, on ne sait pas dans quel délai la réforme électorale, la réforme du mode de scrutin pourra se réaliser. On demande à ce que toutes les mesures favorables à l'égalité, qui ne sont pas liées spécifiquement au mode de scrutin, puissent être déjà incorporées dans la Loi électorale, donc avoir un plein effet pour la prochaine campagne électorale.
En conclusion, je dirais que, et vous l'avez vu, il y a eu une large mobilisation qui s'est effectuée dans le mouvement des femmes. C'est une opération qui a commencé il y a maintenant trois ans, il y a beaucoup de formations qui ont été données par le collectif. La présente consultation et le fait qu'il y a eu tant de participation démontrent que ça suscite beaucoup d'espoir chez les femmes et le mouvement des femmes. Alors, pour nous, la question de l'égalité, c'est une question de justice sociale, de démocratie. On souhaite qu'il y ait une véritable volonté politique de passer à l'action pour atteindre ce qu'on souhaite le plus, c'est l'égalité de fait.
Alors, on peut répondre aux questions, Emmanuelle et moi, sur les questions qui touchent plus les femmes ou encore ? je ne l'ai pas abordé là particulièrement, mais ? les questions aussi plus générales sur le mode de scrutin.
Le Président (M. Gabias): Merci, Mme Paquet, merci, Mme Hébert. Alors, je demanderais maintenant du côté ministériel. M. le ministre.
M. Pelletier: Merci, mesdames, d'être ici, aujourd'hui. Merci de votre présentation. Et je vous félicite aussi pour tout ce que vous faites et tout ce que fait votre organisme en ce qui concerne l'éducation de la population, en particulier en ce qui touche à la réforme des institutions démocratiques et la réforme du mode de scrutin. Je sais que vous faites un travail colossal, et je peux vous dire que, ce travail-là d'éducation, si je puis dire, populaire, tout le monde sait que c'est un travail extrêmement important. Le député de Masson en parle d'ailleurs souvent, puis avec raison. Et vous y contribuez beaucoup, à tout cela, et à nouveau donc toutes mes félicitations.
Vous avez sûrement entendu tout comme moi, ce matin, le Conseil du statut de la femme qui finalement a rejeté assez donc clairement l'ensemble de vos arguments, notamment vous avez entendu le Conseil du statut de la femme venir dire qu'il ne croyait pas en quelque sorte qu'une réforme du mode de scrutin pourrait favoriser l'élection de femmes. C'est une des choses qui ont été dites par le Conseil du statut de la femme. J'aimerais savoir comment vous réagissez par rapport à ce témoignage-là que vous avez entendu, puisque vous étiez présentes, et... C'est ça. Quelles sont donc vos réactions par rapport à tout ça?
Mme Hébert (Emmanuelle): Bien, écoutez, stupeur et déception un peu, au premier abord. En fait, on s'attendait d'un comité qui a un rôle aviseur qu'il ait un peu un rôle de phare, et on a été un peu surpris, premièrement, que le mémoire s'appuie sur des recherches internationales et empiriques qui à notre sens datent un peu. Il nous a semblé aussi que c'était une vision un peu réductrice. Bien que ce soit son mandat de se préoccuper de la situation des femmes au Québec, sur plusieurs points, il nous a semblé qu'il y avait d'autres aussi objectifs qui étaient importants quand on parle de la réforme du mode de scrutin. Il nous a semblé qu'ils avaient en fait une analyse très différente de la nôtre sur les modes de scrutin, sur ce qu'est un scrutin majoritaire, comment ça fonctionne, ce qu'est un scrutin proportionnel. Qu'ils aient des critiques, on en a nous aussi sur le mode de scrutin. On a été un peu surpris qu'ils n'aient rien à proposer, qu'ils choisissent le statu quo. Et finalement, évidemment, la base de leur analyse comme quoi un mode de scrutin est neutre, à notre sens ce n'est pas vrai, comme notre mémoire a pu vous le montrer.
En fait, il nous semble que c'est aussi un cadre d'analyse très individualiste, c'est-à-dire que, pour nous, la sous-représentation des femmes, ce n'est pas que le problème des femmes, c'est aussi un problème de société. C'est lié à une discrimination systémique, oui. C'est aussi lié à des règles de jeu qui sont liées à un mode de scrutin, le recrutement, effectivement. La culture politique, hein, on s'entend, je crois, nos deux organismes, sur le fait qu'il faut la modifier, mais, nous, on croit que le mode de scrutin proportionnel participe à modifier cette culture-là, notamment avec des gouvernements de coalition.
Alors, écoutez, on ne veut pas trop s'attarder sur nos réactions, on aimerait plutôt parler de notre position, mais ce qui est sûr, c'est qu'à notre sens il y a un lien qui ne s'est pas fait entre l'établissement d'un mode de scrutin proportionnel et la facilité d'implanter des mesures pour améliorer la représentation des femmes. Pour nous, ça, ça semble évident, alors que, pour eux, ils rejettent ce constat-là.
Et je vous inviterais à voir dans notre... Dans notre mémoire, à la page 34, il y a un tableau ici, hein, les 15 pays qui ont le plus haut taux de femmes. Et, sur les 15 ? en fait, il y en a même 17 ? ils ont tous un mode de scrutin proportionnel soit de liste ou mixte, à part Cuba, et, pour nous, ça nous semble assez révélateur. Et encore une fois on ne croit pas que c'est magique, le mode de scrutin, on croit que ça facilite la mise en place de mesures et que ça facilite les résultats liés à ces mesures-là. Voilà.
Le Président (M. Gabias): M. le ministre.
M. Pelletier: Si je vous pose la question tout simplement: Pourquoi faut-il changer le mode de scrutin actuel? Parce que je comprends que vous êtes favorables à une réforme évidemment, mais pourquoi faut-il changer le mode de scrutin actuel?
Mme Paquet (Louise): Bien, au départ ? et là globalisons, là, parce qu'on a parlé plus de la question des femmes, mais c'est une question de démocratie ? on veut d'abord que le mode de scrutin élimine les distorsions que l'on trouve actuellement avec le scrutin majoritaire, où la volonté du peuple ne se reflète pas dans la façon dont on approprie le nombre de sièges en fonction du nombre de voix ? vous savez de quoi nous parlons. Et on veut ensuite y retrouver une plus grande diversité; c'est pour ça que le pluralisme nous semble être un objectif important, retrouver plus de courants politiques représentés à l'Assemblée nationale pour participer à la délibération. Et les régions, bien sûr elles y sont déjà, et c'est important qu'elles continuent d'y être. Puis enfin les femmes et la diversité ethnoculturelle. Parce qu'il est important que la population, quand elle regarde ses élus, elle dise: Je me reconnais dans cette assemblée parce que cette assemblée-là me représente.
Changer le mode de scrutin, c'est finalement changer pour mieux, dans notre esprit, et c'est pour ça qu'avec vous il y a une proposition sur la table. Nous, on propose des modifications à cette proposition-là pour en arriver à une meilleure démocratie. Mais c'est sûr que ça ne règle pas tout, il y a bien d'autres choses dans nos institutions politiques qui pourraient être changées, mais là on parle du mode de scrutin, mais c'est quand même un élément fondamental, ça permet de choisir ses élus.
Mme Hébert (Emmanuelle): Si je peux me permettre de rajouter, moi, j'ai eu la chance d'être membre du Comité directeur des États généraux sur la réforme des institutions démocratiques, en 2002-2003, qui était aussi connu sous le nom de la commission Béland, et on a fait, comme ce que vous vous apprêtez à faire, le tour du Québec pour aller entendre ce que les citoyens avaient à dire sur les institutions politiques de façon générale. Et je crois qu'une chose est claire, c'est que les citoyens ne croient plus, même s'ils sont encore attachés à leurs députés, ils sont encore attachés aux institutions politiques, il y a une énorme cassure au niveau de la confiance, au niveau du cynisme. Les gens nous disent peut-être pas avec des mots théoriques ou intellectuels comme dans les universités, mais ils nous disent clairement qu'ils ne vont pas voter parce que ça ne donne rien. Ils nous disent clairement qu'ils ne se sentent jamais représentés, que PQ, PLQ, ADQ, c'est tout pareil, que de toute façon ils n'y sont pas.
Et, pour moi, et je crois aussi pour les gens qui sont membres du collectif, c'est important, c'est l'une des raisons de réformer le mode de scrutin. On a les mêmes institutions politiques depuis bien longtemps, et le mode de scrutin, c'est l'un des derniers que l'on n'a pas réformés. On a changé la loi sur le financement des partis politiques, on a modifié plein de choses, mais pas celui-là. Or, c'est bien un mécanisme qui est important pour que les gens se reconnaissent et aient confiance que leur vote donne quelque chose et que les décisions qui sont prises... pas «les touchent», parce qu'évidemment les décisions les touchent, mais qu'ils s'y retrouvent. Voilà.
Le Président (M. Gabias): Merci. J'invite maintenant la députée de La Pinière à vous adresser des questions.
Mme Houda-Pepin: Merci beaucoup, M. le Président. Alors, Mme Hébert, Mme Paquet, bienvenue à la commission. Merci pour votre mémoire. Ça fait partie des documents qu'il faut lire et relire, n'est-ce pas, parce qu'il y a... vous avez fait un effort de recherche considérable, je vous en félicite.
Et vous dites que le modèle mixte compensatoire peut être excellent si des conditions précises y sont respectées. Quelles sont les conditions qui vous semblent essentielles à conjuguer avec le mode de scrutin mixte compensatoire pour que le résultat soit au rendez-vous?
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(14 h 30)
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Mme Hébert (Emmanuelle): Est-ce que vous parlez spécifiquement pour les femmes ou de façon générale?
Mme Houda-Pepin: Oui, oui, bien sûr, pour les femmes.
Mme Hébert (Emmanuelle): Pour les femmes, eh bien, l'une des premières, c'est que l'égalité soit inscrite comme un objectif dans la loi et non pas l'équité. Il y a aussi le fait qu'il y ait l'alternance sur les listes, homme-femme; un plan d'action qui oblige les partis politiques à utiliser l'argent qui leur serait distribué à bon escient. Louise, qu'est-ce que j'oublie?
Mme Paquet (Louise): Dans le fond, c'est un peu toutes les mesures dont on a parlé. Ce sont peut-être les principales. Mais les mesures financières, en ce qui nous concerne, sont en appui, je dirais, des mesures principales que sont les mesures législatives: l'égalité dans la loi, l'alternance sur les listes et l'obligation aux partis politiques de se donner un plan d'action, mais en leur laissant la liberté de mettre ce qu'ils veulent dans le contenu du plan d'action.
Mme Houda-Pepin: L'idée du plan d'action me semble intéressante, ce que vous suggérez. Cependant, lorsque vous dites... Vous la limitez seulement aux femmes, surtout lorsqu'il s'agit d'exiger des partis politiques qu'ils fassent rapport annuellement au Directeur général des élections. Est-ce que ce ne serait pas plus équitable que ce plan d'action porte sur les clientèles sous-représentées, par exemple les minorités, et que le rapport qui soit fait ne porte pas seulement sur l'évaluation de la place des femmes en politique, mais aussi des minorités ethniques et culturelles?
Mme Hébert (Emmanuelle): Oui. Mais d'ailleurs on le recommande, je crois bien. C'est dans une de nos recommandations que l'argent qui serait distribué aux partis, dans le cadre des mesures d'incitation financière pour la diversité ethnoculturelle, soit aussi lié à un plan d'action qui, lui, soit aussi redevable.
Mme Houda-Pepin: D'accord. Donc, vous n'excluez pas les deux plans d'action.
Mme Paquet (Louise): Deux plans d'action, deux rapports.
Mme Houda-Pepin: Ah! d'accord, très bien, vous séparez ça comme ça.
Mme Paquet (Louise): Puis deux mesures financières.
Mme Houda-Pepin: Deux mesures financières.
Je voudrais revenir à la question que j'ai posée tantôt aux gens du Conseil du statut de la femme sur... Est-ce que le fait d'avoir une représentation plus égalitaire des femmes en politique, ça va changer l'image de la politique? Actuellement, la perception qu'on a de la politique, c'est que c'est un monde pas très attrayant, pour le moins que l'on puisse dire. La relation de confiance n'est pas là. Est-ce que ça va changer quelque chose s'il y a plus de femmes en politique, selon vous?
Mme Paquet (Louise): Moi, j'aurais tendance à répondre que ça va changer l'impression parce que la question est sur l'impression. Puis je vais répondre avec mon impression parce que c'est dur d'être objective. J'aurais tendance à croire que, oui, s'il y avait plus de femmes, ça pourrait changer cette impression-là. Et il est possible qu'avec plus de femmes... En tout cas, s'il y a une chose certaine, c'est que, les préoccupations des femmes, il y aurait probablement plus de femmes qui en parleraient ou qui les défendraient à l'intérieur des divers partis.
Mais, ceci dit, il y a toutes sortes de femmes puis il y a toutes sortes d'hommes, alors je ne veux pas non plus sexualiser certains types de comportements qui seraient plus à caractère éthique ou pas. Je pense qu'il faut tenir compte que les qualités humaines se divisent également entre les deux genres humains.
Mme Houda-Pepin: Très bien. C'est beau.
Le Président (M. Gabias): Merci. Alors, j'invite maintenant le député de Masson.
M. Thériault: Alors, Mmes Paquet et Hébert, bienvenue. Remarque générale sur votre mémoire. Je dirais que ce qui m'a le plus impressionné, ça a été l'assise sociopolitique, historique, voire même, je dirais, de l'ordre de l'anthropologie philosophique, l'assise donc du concept d'égalité, et, à ce titre-là, je pense que c'est une des forces de votre mémoire. Toutefois, je suis préoccupé par le débat.
Et d'abord je tiens à souligner que je suis très heureux de voir que non seulement vous vous êtes prononcées pour le principe que la population tranche le débat, mais en plus vous êtes allées plus loin et, plutôt que de vous contenter de dire que ce serait prématuré de faire ce débat sur ces modalités de cette consultation, vous avez même proposé un certain nombre de mesures encadrant l'objectif que nous aurions d'aller vers un plébiscite ou le fait que la population puisse trancher, et je vais donc considérer attentivement ces propositions. Et je suis heureux de voir que, d'entrée de jeu, vous décidez, vous, contrairement à d'autres tenants du changement qui à mon avis pèchent par non pas la partisanerie d'un parti politique, mais la partisanerie du changement. Un changement, oui, mais pas à n'importe quel prix, c'est un peu ce qui est en filigrane de votre mémoire.
Et, contrairement à un des fondateurs du Mouvement pour une démocratie nouvelle, qui était porte-parole du Parti vert ce matin, d'entrée de jeu, vous ne dites pas que le projet de loi qui est sur la table est un bon pas dans la bonne direction. Ce que je comprends de ce que vous nous dites dans votre mémoire, c'est que... oui, un modèle proportionnel mixte compensatoire, mais pas n'importe lequel. Et peut-être que vous rejoignez, à ce moment-là ? vous pourrez faire un commentaire sur mon commentaire; peut-être que vous rejoignez, à ce moment-là ? le groupe qu'on a vu avant vous, le statut du conseil de la femme, qui peut-être a réduit son analyse au statu quo, comparativement au projet qui est sur la table. Mais, eu égard au projet qui est sur la table, ce que je comprends de ce que vous dites, y compris pour les considérations d'avancement de l'égalité des femmes en politique et y compris pour une Assemblée nationale plurielle, rien de ce qui est sur la table actuellement ne vous satisfait.
Mme Paquet (Louise): Oui, on va nuancer. D'une part, la proposition d'un mode de scrutin mixte compensatoire, c'est ce qui a été mis sur la table, et on s'est situées dans ce cadre-là. Dans ce cadre-là, on a essayé de voir, puis pas juste la question des femmes, comment les cinq résultats pouvaient être atteints le mieux possible. Et c'est pour ça qu'on est arrivées à deux éléments essentiels sur le mode électoral, qui étaient l'octroi de deux votes et une compensation de niveau national, parce que ça permettait d'atteindre à la fois le respect de la volonté populaire, de garder la représentation des régions, d'avoir une liste suffisamment longue pour permettre d'avoir l'alternance entre les femmes et les hommes et d'intégrer la diversité ethnoculturelle, et puis l'intégration du pluralisme. C'est ce qui nous a amenées à ces deux éléments fondamentaux là dans un modèle mixte, qu'on voyait comme les caractéristiques fondamentales. Tel qu'il est, avec les districts et un vote, il ne nous satisfait pas, ça, c'est très clair.
En ce qui concerne les mesures pour les femmes, où est-ce qu'on va, c'est qu'on va un peu plus loin. On vous en propose certaines législatives et on amène certains aménagements dans les mesures financières, les incitatifs financiers.
Quant à la question de l'échéance, bon, il est clair pour nous qu'on souhaite que cette réforme-là aille chercher sa légitimité auprès de la population. Ça nous semble un changement suffisamment fondamental dans nos institutions démocratiques pour justifier un référendum. Par contre... Et je peux comprendre l'empressement d'autres gens qui vont venir ici en disant: On ne veut pas que ce soit remis aux calendes grecques. Et, avec les partis politiques, je suis obligée de dire que, quand on regarde l'histoire du débat sur la réforme du mode de scrutin, la tendance est qu'on en parle, mais, woups, c'est reporté à plus tard. On en parle, et c'est reporté à plus tard. Alors, il ne faut pas se surprendre qu'il peut y avoir un certain scepticisme en ce qui concerne cette question-là.
Nous, ce qu'on propose, c'est que, s'il y a un référendum, il se tienne dans les meilleurs délais, et on a évalué que ça pouvait être lors de la prochaine élection générale. Par contre, il y a des choses à regarder. On a mis des éléments à regarder qui nous semblent importants, par exemple deux questions: une pour évaluer est-ce que les gens veulent une réforme du mode de scrutin, puis une pour évaluer est-ce qu'ils sont d'accord avec le nouveau modèle proposé. Mais le nouveau modèle proposé, la question demeure entière: Qui va travailler à bonifier peut-être la proposition qui est sur la table ou en apporter une autre qui serait encore meilleure? Ça, la question demeure sur la table.
Le Président (M. Ouimet): Mme Hébert, vous vouliez ajouter?
Mme Hébert (Emmanuelle): Oui. Je voudrais juste ajouter aussi que, pour le référendum, vous l'avez dans nos recommandations, mais un autre point important, c'est aussi toute la question du budget. Et ça, il y a des leçons à apprendre au niveau de la Colombie-Britannique, et ce n'est pas... Oui, je suis pour le changement, mais ce n'est pas une position partisane pour le changement, c'est-à-dire qu'il y a quand même des leçons à tirer de là. Donc, il y a des conditions très précises.
M. Thériault: Tout à fait. Les experts sont venus nous dire, et on entend souvent mais on passe très vite là-dessus, qu'il n'y a pas de mode de scrutin parfait, que tous les modes de scrutin comportent des avantages et des désavantages. On nomme souvent certains désavantages du statu quo. Quels seraient d'après vous les désavantages d'un mode de scrutin proportionnel mixte?
Le Président (M. Ouimet): Mme Paquet.
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(14 h 40)
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Mme Paquet (Louise): Bien, ça dépend des modalités, là. Ce n'est pas un mode proportionnel mixte. Celui qui est là ? j'aimerais mieux parler de celui-là, parce qu'il y en a plusieurs, là ? ça dépend où... Il y a la question de ne donner qu'un seul vote. Ça, c'est clair que c'est un problème. Ça limite la liberté de l'électeur, de l'électrice si la personne veut voter pour un candidat ou une candidate qui est différent de son choix de parti politique. Il nous semble que deux votes donneraient une encore plus forte légitimité aux gens qui vont être élus sur la liste, via la liste. La compensation au niveau du district est vraiment incorrecte.
M. Thériault: Quels seraient les désavantages de ce que vous proposez?
Mme Paquet (Louise): Ah! de ce que nous proposons ? excusez-moi. Bien, en ce qui concerne les deux votes, aucun désavantage. C'est très facile, puis, là où ça s'est fait, ça se vit très bien, et les gens comprennent très bien qu'ils peuvent voter deux fois, puis ils peuvent voter de la même manière ou ils peuvent voter de façon différente.
En ce qui concerne la compensation, bien, là, il y a un grand débat qui va commencer, parce que je pense que ça va être une question au coeur de vos réflexions: Où est le niveau idéal de la compensation dans un modèle mixte?
On a choisi la compensation nationale, comme je le disais tantôt, parce que c'est celle qui permet qu'il n'y ait pas de distorsion. Mon vote, en Estrie, va s'additionner avec son vote, à Montréal, avec un autre vote, à Québec ou en Gaspésie. En faisant 25 districts environ, c'est comme si on fait 25 élections individuelles qui n'ont pas de lien les unes entre les autres, et on reproduit le même défaut du scrutin majoritaire uninominal actuel: que les votes ne s'additionneront pas d'un district à l'autre. Donc, il va y avoir beaucoup de votes perdus, donc il va y avoir des distorsions encore importantes. Dans ce sens-là, c'est vraiment insatisfaisant.
La difficulté qu'on a eue ? puis on a cherché, et on ne prétend pas avoir le modèle parfait ? avec la compensation nationale, c'est que, même en disant... ? vous avez vu notre recommandation, qu'on veut que toutes les régions soient représentées dans la première moitié de la liste, les femmes, les hommes, en alternance, la diversité ethnoculturelle ? ...c'est comment on peut faire le lien pour que les femmes et les hommes qui vont être sur la liste nationale... s'assurer qu'ils soient bien enracinés dans des circonscriptions, dans des régions précises. Admettons que, ça, je reconnais que ce n'est pas parfait, puis, si quelqu'un peut trouver une solution encore meilleure que la nôtre, j'aimerais bien ça.
Mais je veux juste dire, pour finir...
Le Président (M. Ouimet): Il reste une minute.
Mme Paquet (Louise): O.K. La question... Un modèle de proportionnelle régionale ? et là je ne parle plus de modèle mixte ? qui aurait été mis sur la table, aurait pu permettre aussi de rallier l'ensemble de nos objectifs, les cinq grands résultats, mais, comme la proposition n'est pas là, bien... Dans un modèle mixte compensatoire, quand on dit qu'on ne rajoutera pas de siège, bien c'est difficile d'atteindre tout ça si on ne rajoute pas de siège à la fin, puis si on veut qu'il n'y ait pas de distorsion, puis si on veut que toutes les régions se reconnaissent sur la liste, puis si on veut l'alternance entre les femmes et les hommes, puis la diversité et le pluralisme.
Je ne sais pas si j'ai bien répondu dans le sens de... Il y a des limites effectivement, là. Mais, si vous trouvez une meilleure formule, nous, on est très intéressées à la regarder.
Le Président (M. Ouimet): Bien. Merci. Alors, c'est tout le temps qui était imparti pour l'opposition officielle. Je vais maintenant du côté de M. le député des Chutes-de-la-Chaudière.
M. Picard: Merci, M. le Président. Mmes Hébert et Paquet, j'ai apprécié grandement la clarté et la précision de votre mémoire, mais je vais faire encore un petit bout de chemin avec la question de mon collègue de Masson. Il y a des experts qui nous ont dit: O.K., 26, comme vous dites, il y a trop de districts. On reprend le modèle... Actuellement, on vit un modèle à 125 petites élections. Là, on réduit à 26. Il y a des gens qui nous ont dit 14, mais... Puis, vous, vous dites... bien, vous n'êtes pas les seuls à dire: Le Québec, une région, puis on y va comme ça.
Ce matin, il y a un groupe qui nous disait: Peut-être qu'on pourrait faire une réforme puis la faire évoluer d'ici les prochaines huit années, mais je ne sais pas si c'est la bonne solution, là, de faire évoluer... Parce que, c'est vrai, comme vous disiez tout à l'heure, Mme Hébert, on en discute beaucoup au Québec, mais ça ne bouge pas, point. J'étais pour vous dire: Ça ne bouge pas rapidement. Ça ne bouge pas, point ? on va prendre les vrais termes.
Mais les propos qu'on a entendus, à venir jusqu'ici, c'est que la proportionnelle... d'avoir un seul district au Québec, là, il semble que c'est trop gros pour l'instant. Ce serait quoi, là... Pouvez-vous quantifier, là? Le 26 est inacceptable, selon vous. On a eu du 14, on parle des régions administratives. Vous êtes-vous penchées sur cette question?
Mme Hébert (Emmanuelle): Bien, premièrement, le concept d'évolution, là, moi, en termes de mode de scrutin, je n'y crois pas beaucoup. Je crois que les députés ici et les citoyens commencent peut-être à comprendre que c'est une question qui n'est pas évidente à l'intérieur même des partis politiques, et donc je pense que... S'il y a un pas à faire, faisons-le pour vrai, parce qu'on ne sait pas quand est-ce que le prochain pas sera fait.
Quant à la distribution et à l'amplitude, il y a beaucoup d'études qui ont été faites, notamment Norris, qui démontrent que, pour qu'il y ait vraiment un impact au niveau des femmes, de la représentation des femmes, et aussi au niveau du pluralisme, il faut un minimum de sept sièges de proportionnelle. Donc, à partir de ce moment-là ? ça répond partiellement à votre question ? nous, on continue de penser que la répartition nationale, il reste que c'est celle qui a la plus grande amplitude, donc celle qui réduit le plus les distorsions, qui permet le plus le pluralisme politique et aussi la représentation égalitaire hommes-femmes et de la diversité ethnoculturelle, mais les études démontrent qu'il faut un minimum de sept sièges.
Mme Paquet (Louise): Et, juste en complétant, c'est que, si on est dans une logique où ça prend sept sièges compensatoires de liste, dans un ratio 60-40, ça voudrait dire 10 sièges de circonscription; là, il faut penser à des régions qui auraient 17 sièges. Bien, là, ça ne fait pas beaucoup de régions, là...
Une voix: ...
Mme Paquet (Louise): ...ça ne fait pas beaucoup de régions, et là ça devient des régions qui sont complètement dénaturées par rapport à ce qu'on appelle des régions au Québec. Et c'est pour ça que tantôt je vous disais: Dans un modèle mixte, on arrive à la compensation nationale comme solution, même avec certains défauts. Sinon, le modèle qui permettrait d'avoir un minimum de sept sièges de liste pour permettre qu'il y ait une... Quand on parle d'alternance, il faut qu'on soit capables d'avancer sur la liste. Dans le modèle qui est là, seule la première personne en tête de liste a des chances d'être élue, alors quand même qu'on a l'alternance, il faudrait avoir le siège du début en tête. Mais à sept sièges ça permet d'avancer sur la liste, et à sept sièges ça permet un minimum aussi, d'avoir un pluralisme, ça permet que les seuils soient plus bas.
Alors, si on avait été dans le cadre d'une proportionnelle régionale pondérée au national, avec le vote de tout le monde, ça aurait pu se faire. Mais, dans le modèle qui est là, nous, on ne voit pas comment ça peut se faire. Alors, je m'excuse pour les explications techniques, mais je pense qu'il faut aller là aussi.
M. Picard: Merci.
Le Président (M. Ouimet): Il reste un peu moins d'une minute.
M. Picard: O.K. Un autre point: les élections à date fixe. Vous amenez un principe d'avoir une élection à date fixe mais avec une période, là... si besoin est, on pourrait la faire fluctuer. Ma question est très simple: Est-ce que vous avez vu ça ailleurs dans le monde? Et une sous-question: Est-ce que vous avez pensé à la journée du vote, si vous aviez... Parce qu'on a entendu des gens qui nous disent: Le dimanche, ce serait mieux; d'autres, c'est le lundi.
Mme Hébert (Emmanuelle): Pour la journée du vote... On a mis nos efforts sur le mémoire, on n'a pas vraiment réfléchi à la journée du vote, on laisse ça au Directeur général des élections.
Quant à la période, à moins que je ne me trompe, je crois qu'en Colombie-Britannique ils ont aussi une période de jeu, là, de deux, trois semaines, qui permet de s'ajuster. Mais je crois que, même si ça ne se faisait pas ailleurs, ça ne me semble pas renversant nécessairement comme position. Mais je crois qu'en Colombie-Britannique c'est ça.
M. Picard: O.K. Merci. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Ouimet): Bien. Merci, M. le député des Chutes-de-la-Chaudière. Maintenant, du côté de notre comité citoyen, Mme Loucheur.
Mme Loucheur (Yohanna): Bonjour. Je voulais revenir à ce que vous disiez à propos du système proportionnel qui permet, contrairement à ce qu'on a entendu ce matin, qui d'après vous permet ou facilite l'adoption de mesures incitatives pour augmenter la représentation des femmes. Et, en regardant un peu les exemples qui sont donnés, en tout cas dans le résumé qu'on a, la seule mesure qui me paraît être directement liée à un système avec un élément proportionnel, c'est la présence de listes où on peut effectivement exiger l'alternance, et ce qui en soit a un impact sur la représentation.
Les autres mesures que je vois, notamment sur le choix des candidats ou candidates, ces choses-là, ne me paraissent pas liées nécessairement au mode de scrutin, me paraissent des mesures qu'on pourrait mettre en place même sans changer le mode de scrutin. Puis je voudrais vérifier que j'ai bien compris ou peut-être avoir d'autres exemples de mesures qui, pour vous, sont directement liées, qu'on ne pourrait pas mettre en place sans changer le mode.
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(14 h 50)
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Mme Paquet (Louise): Toutes les mesures incitatives financières ? c'est vrai, ce que vous dites ? d'ailleurs on demande qu'elles soient mises en place. Tout ce qui n'est pas de l'ordre spécifiquement du mode de scrutin, on demande qu'elles soient mises en place très, très rapidement, sans attendre, pour qu'elles soient effectives dès la prochaine élection. Mais les mesures législatives et l'alternance sur les listes sont liées au mode de scrutin. Pourquoi elle est fondamentale? C'est qu'à partir du moment où vous avez une liste, c'est que vous donnez un cadre égalitaire. On présume, puis on s'entendra pour dire qu'il y a autant de femmes que d'hommes compétentes. Les partis s'entendront pour savoir si c'est Marie, Sylvie, ou Claire, ou bien Pierre, Jacques, Serge, comment se fera l'ordre.
Mais, à partir du moment où on a un cadre égalitaire, imaginez-vous qu'à chaque fois qu'il y a un siège de liste accordé, bien, on a une femme, un homme, une femme, un homme, une femme, un homme, ou un homme, une femme, un homme, une femme. Alors, la mesure, elle est ? comment je dirais ça? ? effective, elle amène un changement immédiat, parce que le cadre fait, crée l'égalité.
On s'est penchées sur... Dans notre mode de scrutin majoritaire uninominal, qu'est-ce qu'on peut faire? On a regardé un peu, puis on arrivait à des choses très difficiles d'application, puis on arrivait à dire: Comment on peut faire que le cadre favorise qu'il y ait l'égalité? On dit: On numérote toutes les circonscriptions, et puis là, bien, les paires, ce seront les femmes; les impaires, les hommes. Oui. Là, ça ne marche pas, ça, dans la vraie vie, là.
Mme Hébert (Emmanuelle): Un homme, une femme par circonscription.
Mme Paquet (Louise): Oui. Un homme et une femme par circonscription. On va avoir l'égalité, mais là on va avoir une très grosse assemblée puis... Non. Bon. À chaque fois qu'il y a un député sortant qui quitte la politique, on rend obligatoire que ce soit une femme. Hélala! Oui. Ce que je vous dis, c'est qu'on a regardé des choses comme ça puis, à chaque fois, on disait: Dans notre mode majoritaire uninominal, ce n'est pas possible d'arriver avec un encadrement comme ça à moins, par exemple, de faire ? je sais que le CSF, eux autres, ils sont d'accord avec cette mesure-là ? le parachutage, que le chef ou l'exécutif dise: Là, il y aura des femmes, puis on impose des femmes à des places. Nous, ça ne nous semble pas très démocratique.
Donc, les mesures incitatives peuvent aider pour qu'il y ait plus de femmes, je dirais, partout, y compris dans les circonscriptions puis sur les listes. Mais la mesure, la proportionnelle a l'avantage qu'elle nous donne une porte pour amener un cadre qui, lui, est égalitaire et qui va nécessairement amener plus de femmes. Je ne sais pas si ça répond clairement à votre question. Donc, nous, oui, les mesures législatives. Mais c'est vrai, ce que vous dites. Toutes les mesures qui sont d'un autre ordre que liées au mode de scrutin peuvent être mises en place dès maintenant, mais l'alternance sur les listes va donner un cadre qui va permettre d'avancer beaucoup plus rapidement que les mesures financières, à notre avis.
Mme Loucheur (Yohanna): Et, pour vous, les mesures financières vont avec, par exemple, le plan d'action.
Mme Paquet (Louise): Oui.
Mme Loucheur (Yohanna): Donc, c'est ça. Quand on parle de mesures financières, on parle aussi d'un plan d'action pour les partis.
Mme Hébert (Emmanuelle): Oui. Sinon, il faut s'assurer que l'argent, parce que ça pourrait représenter des sommes assez importantes, que cet argent-là ne serve pas ? je caricature ? à peinturer des locaux, mais bien à mettre des structures en place à l'intérieur des partis politiques pour changer la culture de recrutement, d'investiture, etc., et vraiment mettre sur pied des programmes de mentorat, des comités de recrutement de femmes solides. Et ça, c'est très important, parce que sinon on passe à côté de l'objectif complètement.
Le Président (M. Ouimet): Bien. Merci, Mme Loucheur. M. Morisset, maintenant.
M. Morisset (Michel): Alors, bonjour, Mme Hébert; bonjour, Mme Paquet. J'ai le privilège d'être entre deux circonscriptions, l'une du Parti libéral, qui est une femme, et du Parti québécois, qui est une femme aussi.
Ceci étant dit, je me pose la question par rapport à ce que Mme Hébert a dit, qu'il y avait un désaveu de la part des jeunes que voter ADQ, voter libéral, voter qui que ce soit, c'est tout pareil. Ne croyez-vous pas que, pour atteindre l'objectif, disons, de la votation, par exemple pour amener les jeunes à voter plus, on ne pourrait pas faire comme on fait actuellement dans les écoles, par exemple les écoles secondaires, début secondaire?
Aujourd'hui, les enfants apprennent par projets, ils n'apprennent plus par bourrage de crâne. Alors, est-ce qu'il ne pourrait pas y avoir, par exemple, des gens qui pourraient se déplacer et les initier, par exemple, en faisant des petits projets, les initier justement au mode gouvernemental? Et, à long terme, ce serait beaucoup plus profitable que des mesures financières ou des mesures... Parce que finalement, si on veut des politiciens, bien, il faut que les enfants soient politisés.
Mme Hébert (Emmanuelle): Bien, je suis d'accord avec vous. Je pense que le besoin d'éducation citoyenne ou civique, peu importe le nom, c'est une priorité. D'ailleurs, aux états généraux, le rapport du comité directeur en avait fait une priorité. Je pense aussi qu'en ce qui concerne le mode de scrutin c'est indispensable, mais je ne pense pas qu'on doit faire l'un ou l'autre. Je crois qu'il faut, oui, avoir des mesures financières pour agir maintenant, dans les partis politiques, puis avoir des résultats concrets dès les prochaines élections, parce que... Moi, mon fils est à l'école primaire, puis il fait des élections, puis ils vont parler, puis ils fonctionnent par projets, mais, mon fils, il va avoir 18 ans dans 12 ans, tu sais. Moi, je ne veux pas attendre 12 ans. Je pense qu'il faut commencer tout de suite, mais que l'un ne va pas sans l'autre. Donc, c'est essentiel, mais ne choisissons pas entre les deux, prenons les deux.
Mme Paquet (Louise): À la fois l'éducation civique, citoyenne...
Mme Hébert (Emmanuelle): Oui.
Mme Paquet (Louise): ...et à la fois...
Mme Hébert (Emmanuelle): Les mesures financières.
Mme Paquet (Louise): ...pour le futur, et à la fois des mesures pour atteindre notre objectif d'égalité d'ici trois élections.
Mme Hébert (Emmanuelle): Voilà.
Le Président (M. Ouimet): Bien. Ça va, M. Morisset? Mme Loucheur, il reste du temps.
Mme Loucheur (Yohanna): J'ai noté quelque part... dans les mesures par rapport aux minorités ethnoculturelles, si j'ai bien compris, vous proposez d'exclure complètement de ces mesures-là la minorité anglophone, et j'aurais voulu comprendre un peu mieux votre position là-dessus, d'une part, confirmer est-ce que c'est bel et bien ce que vous proposez.
Mme Hébert (Emmanuelle): Bien, en fait, ce qu'on déplore, c'est que cette mesure-là, la façon dont c'est défini... Et on est conscients qu'il y a plusieurs définitions de la diversité ethnoculturelle, des minorités visibles; est-ce que c'est une définition statistique, sociologique, anthropologique, politique? Mais ce qu'on trouve, c'est qu'en fait les groupes qui sont réellement victimes de discrimination raciale, et qui sont racialisés, et qui sont victimes de racisme au niveau politique, et qui sont des minorités politiques, c'est-à-dire souvent les gens de la minorité ethnoculturelle et les minorités visibles, soit finalement ne profitent pas de cette mesure-là à leur pleine mesure, si je peux dire, parce qu'on ne croit pas que la minorité anglophone soit...
Mme Paquet (Louise): Soit une communauté qui ait été en manque de pouvoir...
Mme Hébert (Emmanuelle): Oui.
Mme Paquet (Louise): ...disons-le clairement comme ça, au Québec. Je pense que c'est des gens qui ont eu accès au pouvoir, et ce n'est pas du tout du même ordre que les personnes qui sont des minorités visibles ou qui sont les Québécois et Québécoises issus de l'immigration.
Le Président (M. Ouimet): Bien. Merci. Il reste une minute et quelques secondes. Mme Proulx.
Mme Proulx (Mélanie): Bonjour. Le Conseil du statut de la femme nous disait, ce matin, qu'une alternance hommes-femmes ou femmes-hommes sur les listes augmenterait le nombre d'élus mais se ferait au détriment de l'opinion qu'on a de ces mêmes élus ou de la légitimité qu'ils ont au sein de l'Assemblée nationale. J'aimerais ça savoir ce que vous en pensez.
Mme Paquet (Louise): Rapidement. Moi, je ne crois pas, parce qu'il va y avoir des hommes aussi qui vont être élus par la liste. Alors, tu vas dire: Ah, toi, tu es député de liste. Ça va être un homme, ça va être une femme, et puis, au fur et à mesure que ça va devenir intégré dans la vie... Comme on le voit en Allemagne, des gens, à une élection, sont élus député de circonscription, à une autre élection, ils passent par la liste. Ça voyage, si je peux dire. Alors, ça ne deviendra pas une question de discrimination, pas du tout.
Juste mentionner un dernier point, parce que j'avais demandé à quelqu'un de regarder le journal. On est dans un scrutin majoritaire uninominal au fédéral. Quand on dit que, si on laisse aller le cours naturel des choses, les choses vont évoluer toujours dans le bon sens, eh bien il y a eu des élections fédérales hier, il y avait moins de candidates présentées par les partis politiques qu'à la dernière élection, et on se retrouve avec une baisse de femmes à la Chambre des communes. Donc, dans un scrutin majoritaire uninominal, il n'y a rien qui nous garantit que le cours naturel des choses va faire en sorte qu'on va toujours nécessairement aller de mieux en mieux, vers plus d'égalité, d'où l'importance d'implanter des mesures.
Le Président (M. Ouimet): Merci. M. le député de Trois-Rivières, il reste trois minutes.
M. Gabias: Oui. Merci, M. le Président. Je voudrais revenir sur la présence de personnes représentant les minorités ethnoculturelles et la présence de candidats provenant des régions, et j'essaie de voir comment il est possible, avec ce que vous proposez, de concilier les deux. Et je remarque, à la page 52, que vous proposez, en ce qui concerne la présence de candidats provenant des régions, que la première moitié de la liste soit composée de candidats provenant des régions, bien qu'il puisse être difficile d'identifier ce qu'est une personne qui provient d'une région, mais mis à part ça... alors que, sur la question des personnes représentant des minorités ethnoculturelles, vous n'allez pas si loin. Vous parlez de mesures incitatives pour les partis, mais vous n'imposez pas de présence de candidats sur la liste.
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(15 heures)
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Mme Paquet (Louise): On demande que la diversité ethnoculturelle soit en bonne position sur la liste. On n'était pas capables de... Parce que, nous, on n'a pas reconnu le 20 % qui intégrait les anglophones. Là, il faudrait voir c'est quoi. C'est-u 8 %, 12 %? Supposons que c'est 12 %. Bien, ça pourrait être de dire, mettons: Un nom à tous les huit noms pourrait être une personne de la diversité ethnoculturelle. Mais on n'était pas sûres de la définition et du pourcentage que ça représente dans notre société. Supposons que ce serait 12 %, bien, là, ça voudrait dire un nom à tous les huit noms, qui pourrait être une personne de la diversité ethnoculturelle.
Quant à la question des régions, bien, vous le savez, il y a une tension importante entre la métropole et les régions. Et, quand on parle de compensation nationaliste, nationale, le premier réflexe des régions, c'est de dire: Bien, où on va être, nous? Est-ce que ça va être juste du monde de Montréal et de Québec? Alors, c'est une façon de dire que toutes les régions seront représentées dans la première moitié de la liste. C'est évident que ça ne veut pas dire que toutes les régions... parce que ça dépend du nombre de sièges compensatoires qu'un parti aura. Mais, s'il y a huit sièges compensatoires, bien il y a au moins huit régions différentes qui vont être là. Si un autre parti a 20 sièges compensatoires, bien ce sera 20 personnes de différentes régions qui seront là ? c'est un peu pour ça qu'on a essayé de concilier ? puis l'alternance entre les femmes et les hommes.
Mme Hébert (Emmanuelle): Et aussi on a tenu compte... Juste un petit point. Dans notre réflexion sur comment faire pour assurer que les régions soient représentées, on a quand même tenu compte que, comme c'est un système mixte, l'identité territoriale ou régionale, elle est déjà assurée par 75 comtés, là, on ne part pas de rien. Donc...
Une voix: ...
Mme Hébert (Emmanuelle): 77, oui, avec les deux sièges. Donc, on ne part pas de rien. Et on voulait justement s'assurer que c'était là, et donc c'est pour ça qu'on a pris la nationale aussi.
Le Président (M. Ouimet): Bien. Alors, merci, M. le député de Trois-Rivières. Mme Paquin, Mme Hébert, merci beaucoup de votre participation, et sachez que votre contribution à nos travaux a été fort appréciée. Je vous remercie infiniment.
(Changement d'organisme)
Le Président (M. Ouimet): Alors, je demande maintenant aux représentants de l'Administration régionale Kativik et de la Société Makivik de bien vouloir s'approcher et de prendre place à la table des témoins.
Alors, Mme Emudluk, vous êtes présidente de l'Administration régionale Kativik et présidente de la conférence régionale des élus. Et, M. Pita Aatami, vous êtes président de la Société Makivik et président de la compagnie d'avion, également, First Air. Welcome to the National Assembly. Je salue également la présence de votre député, notre collègue député d'Ungava, qui vous accompagne dans vos déplacements ici même, à l'Assemblée nationale. Et je sais que le député de Richelieu tenait à vous dire un petit mot d'introduction.
M. Simard: Bonjour, welcome in Québec City, bienvenue ici. La Commission des institutions, il y a maintenant près de deux ans, a effectué un mandat d'initiative dans le Nord-du-Québec, et nous avons eu le plaisir de vous rencontrer. Mme Emudluk, c'était Johnny Adams qui était, à ce moment-là, à votre place. Nous avons passé des journées extraordinaires à Kuujjuaq. Et l'un des débats fondamentaux, ça a été la question de la création d'une circonscription spéciale pour vous dans la prochaine Assemblée nationale. Et nous vous avions dit, à ce moment-là, que nous espérions que rapidement il y ait un geste de l'Assemblée nationale pour donner suite à vos demandes, et je pense qu'aujourd'hui nous franchissons, dans cette direction-là, une étape importante. Alors, je suis très heureux de vous revoir ici, à Québec, comme nous vous avions invités à venir. Vous êtes ici chez vous.
Le Président (M. Ouimet): Bien. Merci, M. le député de Richelieu. So, Mrs. Emudluk, maybe you would like to introduce to the assembly the people that accompany you.
Des voix: ...
Le Président (M. Ouimet): On a un petit peu de bruit derrière, de fond.
Administration régionale
Kativik (ARK) et Société Makivik
Mme Emudluk (Maggie): Sorry. I'll be speaking in English. My name is Maggie Emudluk, I'm the chairman, newly elected chairman of the Kativik Regional Government. To my left, here, Mr. Pita Aatami, president of Makivik Corporation; Adamie Alaku, vice-president of Makivik Corporation; and, to my right, the vice-chairman of the Kativik Regional Government. And we also have here with us members of our Kativik Regional Government, executive members, Petah Inukpuk from Inukjuak, Joseph Annahatak, mayor from Kangirsuk, Jean-François Arteau, political attaché to Mr. Aatami, Louis Mercier, political attaché to the Kativik Regional Government executive. We also have Guy St-Julien, Makivik Corporation. We also have a couple of Inuit members who reside in Québec City... So, this is our group today.
Le Président (M. Ouimet): Alors, bienvenue à tous. You are all welcome. And I believe it's Mr. Pita Aatami who will begin the discussions. You have 20 minutes.
M. Aatami (Pita): O.K. Thank you very much. I just wanted to say a few words in French, pratiquer mon français. Mon nom, Pita Aatami, président de Makivik Corporation. Je m'excuse, il est difficile, le français. Je parle anglais. O.K. That's how far I can go with my French.
Thank you very much. I want to thank first of all Mr. Sylvain Simard, député for Richelieu. Like him, I hope we are getting closer to be able to sit, one day, in the National Assembly as full-fledged partners. So, I just wanted to make that comment before I started.
Mr. François Ouimet, president of the special commission of the National Assembly mandated to examine the Electoral Division Act, our deputy, Michel Létourneau, members of the special commission, Mr. Pelletier, the Minister for Intergovernmental Affairs, distinguished invitees. My name is Pita Aatami, I'm the president of Makivik Corporation, the... organization of the Inuit of Nunavik. I am here today with my colleague, Adamie Alaku, member of the executive committee of Makivik, responsible for economic development and representative, as you heard.
The Makivik Corporation is a non-profit organization which is wholly owned by the Inuit beneficiaries of the JBNQA. It was created under section 27 of the Agreement and was established through An Act respecting the Makivik Corporation of the Québec National Assembly in 1978. Makivik is the successor to the Inuit organization which originally negotiated the JBNQA, and it is recognized as the Inuit party to the Agreement.
Makivik's central mandate is to represent the interests of the Inuit of Nunavik and to protect the integrity of the JBNQA. In so doing, it focuses on the political, social and economic development of Nunavik and works closely with the public institutions which exercise jurisdiction north of the 55th parallel.
The corporate head office is in Kuujjuaq, the largest community in Nunavik, located on the southernmost part of Ungava Bay. Makivik also has offices in Montréal, Québec City, Kuujjuraapik, Inukjuak, and Ottawa. Over 100 people are employed at the Makivik Corporation.
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(15 h 10)
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With the Kativik Regional Government, we developed a short brief exposing our arguments towards the creation of an electoral division for Nunavik. I assume that our brief was previously distributed to you in both French and English.
I will then start my presentation by telling you that many, many years ago, our fellow Inuit also had the dream to fully participate to the democracy of our country and of our province. Actually, more than 30 years ago, Inuit from Ivujivik were exactly where I am today and came by skidoo to the National Assembly to ask for an electoral division.
In the early 1970s, when the Inuit negotiated the creation of a nonethnic institution in Nunavik, they took the unprecedented step of subjecting themselves to the legal, administrative and fiscal regimes of Québec and Canada. Unlike all other aboriginal peoples in Québec, they must pay the same income and consumption taxes as other residents of Québec and Canada. We pay all taxes like any other Quebecker, unless you're an Indian. So, we've always asked for equal representation. Up to now, we haven't been successful, but hopefully, after appearing in this committee, we'll have an opportunity to speak as equals in the National Assembly with the rest of our fellow Quebeckers.
Well, we are at the stage where the Government of Québec recognize the importance to have one of their members coming from Nunavik. We are at the stage where the advanced draft bill on Electoral Act proposes, at its section 171, to create an electoral division for Nunavik based on the same exceptional criteria as those of Magdalen Islands. The territory of this Nunavik electoral division would be consistent with the JBNQA, in the sense that all the territory above the 55th parallel will form the boundaries of the new riding.
On behalf of over 10,000 residents of Nunavik, I would like to thank the Members of the Government and of all the political parties of Québec for having finally recognized the importance and the necessity to have an elected representative coming from Nunavik.
In 2002, at the time of the signing of the community and economic development partnership agreement with the Government of Québec, called Sanarrutik, we were very pleased to see an inuksuk being erected at the front of the building of the National Assembly as a symbol of profound respect and mutual collaboration between the Inuit and the Government of Québec. The inuksuk certainly guided our partnership. It is time now that the spirit and the culture of the Inuit of Nunavik be present not only outside the building, but also in the National Assembly.
We want to develop with you the future of our province. We want to share our vision of Québec and be able to voice our concerns in a specific manner. We would like each of you and each of the political parties that you represent to make all the necessary efforts to open the doors of the National Assembly to the Inuit of Nunavik, which you have done in the past when we appeared in front of different committees. All the parties, whether they'd be PQ, Liberal, they've always respected us and they've always wished for us to have a seat in the National Assembly.
Now, I would like to invite my colleague, Adamie Alaku, to address more directly some of the issues you find in the joint Makivik-KRG brief. Merci beaucoup.
Le Président (M. Ouimet): Merci à vous.
M. Alaku (Adamie): Thank you, M. Ouimet, president for this special commission. M. Létourneau, M. Pelletier, and M. Simard, and all the members of the commission, and distinguished guests. As the president mentioned, my name is Adamie Alaku. I control economic development within Nunavik.
Of course, I would like to join my voice to all the Inuit of Nunavik in thanking you sincerely for having included, in the advanced draft bill on Electoral Act, the creation of a specific electoral division for Nunavik. We can now see that many years of constant effort and hard work are being finally rewarded.
Before I give the microphone to our colleagues, the representatives of the Kativik Regional Government, I will briefly introduce you our region, Nunavik.
Nunavik, a unique natural community. Nunavik lies primarily above the tree line. Due to its geography, climate, culture and language, it is part of the Arctic, the only part of Québec to be so. From south to north, it extends from the 55th parallel to the most northerly point in Québec, that being Ivujivik. It is bordered by Labrador to the east and the Hudson Bay to the west. Excluding the category IA and IB lands of the Cree of Whapmagoostui and the category IB-N lands of the Naskapis of Kawawachikamach, it comprises a territory of 500,164 km², or 36% of the total landmass of Québec. No road connects to any of the 14 communities, nor is Nunavik linked by road to the South. These communities lie between 1,500 km and 2,500 km distant from Montréal. Nunavik is therefore quite isolated from the rest of Québec. Its shoreline extends for some 2,500 km.
On a backdrop of tundra and taiga, Nunavik has a significantly varied geography. It is home to majestic mountains, including Mont d'Iberville in the Torngat Mountains, the highest mountain east of the Rockies. The watersheds of its main rivers represent a potential 25% of the total current Hydro-Québec capacity in Québec. Its thousands of lakes and rivers ensure an abundant water supply of fresh water. The region also is blessed with many tourist attractions, most notably the Pingualuit Crater, the Torngat Mountains and the Richmond Gulf.
There are approximately 11,000 permanent residents in Nunavik. Of this number, there are 10,202 Inuit beneficiaries of the James Bay and Northern Québec Agreement residing in the territory as of January 1, 2006. Inuit are distributed among 14 municipalities along the coasts of Hudson Bay, Hudson Strait and Ungava Bay. Kuujjuaq is the largest community with an estimated population of 2,300 people. Aupaluk is the smallest, with 160 residents. There are 98 Inuit living in the Cree community of Chisasibi, south of the 55th parallel. A large portion of the Inuit diet is still supplied from subsistence hunting and fishing.
Nunavik's population growth rate averaged 2.1% over the past five years. Its population is amongst the youngest in the world. And here are some breakdowns: 41% is under age 15, 60% is under age 25, 75% under the age of 35. The average household in Nunavik comprises five members, compared to an average of 3.1 elsewhere in Québec. Life expectancy is 65.7 for Nunavimmiut, compared to 79 for all of Québec. So, I have one...
Inuktitut is the most used native language in Québec, and 99% of the region's Inuit consider Inuktitut as there mother tongue.
Beyond the physical and visible characteristics which differentiate Nunavik from the rest of Québec lies the fundamental difference in the application of law in the region. While the legal statutes of Québec apply throughout the territory, their interpretation is made in the light of the James Bay and Northern Québec Agreement. The signing of this agreement, on November 11, 1975, meant that the governments of both Canada and Québec and the Inuit of Nunavik agreed to make the agreement treaty the lens through which laws pertaining to a variety of fields of jurisdiction would be viewed.
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(15 h 20)
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For example, the municipalities of Nunavik are not automatically subject to the provisions of the Cities and Towns Act or the Municipal Code of Québec. Chapter 17 of the agreement, brought into being by the adoption of the Act respecting Northern villages and the Kativik Regional Government, is the source of all Québec legislation pertaining to Nunavik municipalities.
This legislative distinctiveness explains some of the differences observed in the region compared to the rest of Québec. This is a very important factor to be considered by Québec legislators when considering the electoral redistribution of Québec.
The Government of Québec has no regional or branch offices in Nunavik. Depending on the ministry, Nunavik residents are serviced by personnel located in Rouyn, Sept-Îles, Chibougamau or Montréal. Moreover, depending on the nature of the inquiry, Hydro-Québec offices dealing with Nunavik are as far-flung as Îles-de-la-Madeleine and the Gaspé region.
Despite being near huge hydroelectric generating facilities, the communities of Nunavik are not connected to the Québec electrical grid. The cost of electricity provided by local diesel generators is a limiting factor for economic development as well as for home owners who cannot heat their houses or hot water electrically.
The Société de l'assurance automobile du Québec, the Régie du logement du Québec, the Commission de la construction du Québec and the Commission de la santé et de la sécurité du travail, despite providing important services, are absent from Nunavik.
There is no public transportation system in the region, and effective Internet services are only now beginning to take shape. However, Internet connectivity remains costly and slow by the standards which are enjoyed by all southern Quebeckers.
In conclusion, I would like to thank you once again for giving us this opportunity to present to you our region. We are part of Québec and would like to be at the National Assembly with you. And as we saw last night, when we had the election, all the leaders said they don't want to leave anybody behind in Canada. We want to be like the rest of the Canadians, with the same services and benefits being made available to us.
Thank you very much. And now I will have the former mayor of Kuujjuaq and vice-chairman of Kativik Regional Government, Michael Gordon.
M. Gordon (Michael): (S'exprime dans sa langue). Thank you for the opportunity. Members of the special commission, distinguished invitees, my name is Michael Gordon, as you heard. I'm the vice-chairman of KRG, member of the executive committee of the Kativik School Board and former mayor of Kuujjuaq.
Created in 1978 under the Act respecting Northern villages and the Kativik Regional Government, the Kativik Regional Government is a nonethnic public organization whose jurisdiction covers nearly the entire territory of Québec north of the 55th parallel. Our regional council is composed of representatives of all Inuit communities in Nunavik as well as the chief of the Naskapi Band Council of Kawawachikamach. KRG has 11 departments employing more than 350 people, of which 70% are Inuit. KRG administers some $140 million dollars of federal and provincial public funds through 35 agreements in the areas of municipal affairs, transportation, policing, employment, manpower training, income security, environment, child care services, renewable resources, land-use management, civil security, and economic development. We have, over the past 25 years, worked in partnership with both governments to develop services for our population.
Over and above what my colleague Adamie has provided in terms of information, our region is characterized by a unique and abundant wildlife. Nunavik is rich in minerals and has a huge hydroelectric potential.
The cost of food products in Nunavik is 69% higher than in Québec City. Households in Nunavik spend 44% of their income on groceries, compared to 12% for the residents of the Québec region, a ratio observed in developing countries. It costs close to $400,000 to build a 1,500 square-foot house.
For many reasons, Nunavik is still underdeveloped in terms of infrastructures and economic development. On the other hand, it has great potential and we would like this to be developed in partnership with you.
I will now ask our chairman Maggie Emudluk to speak about the most recent efforts that we have made to promote the creation of an electoral division for Nunavik and to conclude our presentation. Thank you for the time, and I know we're running out of time as well.
Le Président (M. Simard): I know, but you come from so far that we all agree that you should take a few minutes more. Madame.
Mme Emudluk (Maggie): Thank you, Mr. President. Like Michael was saying, we're running behind here.
(S'exprime dans sa langue). Mr. François Ouimet, president of the special commission of the National Assembly mandated to examine this Electoral Division Act, Mr. Michel Létourneau, Member of the National Assembly for Ungava, members of this special commission, and distinguished invitees.
For many years, we have worked at promoting the idea of having an electoral division for Nunavik. And as you have been able to appreciate from my colleagues here and from the brief that we have submitted and tabled, our language, Inuktitut, our culture, our demography, our geography demonstrate that the population of Nunavik is a distinct natural community. We have little in common with the people living in other regions of Québec but we share the same vision to participate to Québec's political life. It cannot be stated strongly enough that Nunavimmiut want to be represented in the National Assembly by one of their own.
Section 171 of the proposed advanced draught bill concerning the Electoral Act constitutes a step forward for the population of Nunavik. At the same time, we wonder what will happen if the National Assembly cannot agree on the overall proposed reform. Are the Members of the different political parties sitting on this commission ready to accommodate our request? Are you ready to compromise on the delimitations of certain other electoral divisions to allow the creation of a division for Nunavik?
In the previous years, Nunavik has found a sympathetic response each time it has made a representation to the commissions responsible for electoral reform. But time has come for Québec to respond favorably, to reciprocate for the ongoing efforts of Inuit to play a greater role in Québec's political life.
This commission may have a tendency to view their mandate primarily in terms of adjusting lines of the electoral map. But, in the case of Nunavik, it has assumed a far broader mandate namely to respond to the Inuit desires to become full participants in the political life of Québec.
We are asking you to treat our request with the same spirit that your predecessors have viewed that of the Îles-de-la-Madeleine over a century ago. In 1895, at a time when virtually no one had heard of Inuit of Nunavik, the electors of Îles-de-la-Madeleine were able to convince their elected representatives of their cause. We are therefore asking the commission to recommend to the National Assembly to adopt the legislative amendments necessary to create an electoral division in Nunavik for the exceptional reasons set forth above.
In closing, on behalf of the residents of Nunavik, I would like to thank you for giving us this opportunity to meet with you today. (S'exprime dans sa langue).
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(15 h 30)
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Le Président (M. Ouimet): Merci infiniment pour cette présentation conjointe. Thank you very much for that joint presentation. Je vais maintenant aller du côté du ministre responsable de la Réforme des institutions démocratiques. Alors, M. le ministre, à vous la parole.
M. Pelletier: Merci, M. le Président. Thank you very much for being here today. Thank you very much for your very strong presentation. I would like to welcome to Québec City all the members of your delegation. I see that this is a very large delegation. A delegation that includes Guy St-Julien is very large indeed. So, hello, Guy, and I'm glad to see you again here. This being said, I would like also to say hello to... au député de l'Ungava. Merci de participer aux travaux de cette commission.
I thought that you have delivered a very strong presentation since you emphasized very much on the importance of a partnership between you and, in fact, us. It's extremely interesting to see that you focus on such a partnership and that you show some interest for electoral reform in Québec since, I should say, unfortunately there are many aboriginals who do not want to participate in the Québec institutions. They don't feel appealed by the Québec institutions and they want to go their way, but not just to go their way but not to participate in any institution that is in fact representative of the «Québécois», of the French-speaking population, of the population of Québec in general, including people of any language. This being said, it's not your case. What I understand is in fact your interest in participating into Québec's institutions, maybe primarily Québec's National Assembly.
So, I would like to hear you about how important for you it is to participate in Québec's National Assembly and Québec's institutions, because once again, I know that I repeat it, but once again most aboriginals are in fact refusing to adhere to Québec's institutions per se.
Le Président (M. Ouimet): Who will take... Yes.
M. Aatami (Pita): Thank you very much. Mr. Pelletier, first of all, we are not «most aboriginals». We're very distinct. Inuit are very distinct. We told you that we're very isolated, and we've been very inviting over the years. We have a lot of non-Native people living with us, roughly 2,000 people live with us now in Nunavik, even though I represent only the Inuit. But it's always been our cause that we wanted to be part of the decision makers of Québec, and what's the best place for us is to be in the National Assembly and be part of the decisions, how we will structure our future in our region. And we've always tried to be in partnership with the French people since they came into my region, in the late 1960s. And we've been very, very inviting and we want the same in return, we want to work with the rest of the province. Just because we're aboriginals doesn't mean that we don't want to be part of what's happening within Québec. We do want to be part of Québec. We've always stated that.
We had the option, during the James Bay and Northern Québec Agreement negotiations, just to be part of Canada, but we opted ourselves to be part of Québec. So, we have municipalities, we have mayors, we are tax-paying citizens. Again, we had the option not to be taxpayers. But we wanted to be taxpayers because we thought, by being taxpayers, that we would be equals to every Quebecker, and that's why we keep fighting to have a voice within the National Assembly, who will be our representative. And when I mentioned that I only represent the Inuit, but I'm not aiming for an Inuk person, I'm aiming for a citizen of Nunavik to be in the National Assembly, whether it be an Inuk or a non-Native, but as long as they have a voice coming from my region.
M. Pelletier: Pita, I know very well that you're very special aboriginals, since you're not First Nations, of course, and since you pay taxes, as you mentioned earlier. So, I know that you're very special aboriginals. But once again I'd like to say that I'm extremely happy to hear you today on this question of the partnership that you want to develop with the rest of the Québec population.
This being said, you have probably noted that, in the draft bill, we are proposing that a constituency be created for Nunavik, could be created for exceptional reasons, on exceptional grounds.
So, do I understand you well if I say that you support the draft bill and would like that draft bill to be adopted?
M. Aatami (Pita): You understand very well. So, if we weren't clear enough, yes, you understood very well that we would accept the draft bill that's being put forward as long as we would be given an opportunity, even though there would be a special clause specifically for Nunavik.
M. Pelletier: Are there other aspects of the draft bill, which do not concern necessarily the Nunavik, that you have analyzed or studied and that you would like to comment on?
M. Aatami (Pita): We're happy with what's been proposed. We would have mentioned it in our brief if we did have concerns. So, we didn't... We are status quo with what's being proposed, on our side.
M. Pelletier: O.K.
Le Président (M. Ouimet): Merci, M. le ministre. Mme la députée de La Pinière.
Mme Houda-Pepin: Merci beaucoup, M. le Président. Alors, je voudrais saluer les membres de la délégation, qui sont venus de si loin pour faire entendre leurs voix, la région de Kativik.
Tout le débat sur la Loi électorale, la réforme du mode de scrutin, au centre de ce débat-là, il y a le principe de l'égalité, l'égalité entre les hommes et les femmes, l'égalité des minorités, l'accès des minorités à l'égalité, et ainsi de suite.
Dans votre région, 90 % de la population, ce sont des populations inuites, donc il y a 10 % de non-autochtones. Je voudrais savoir quel est le statut de ces non-autochtones dans votre région.
Et, compte tenu qu'on parle du principe de l'égalité de la représentativité, est-ce que le principe de l'égalité est assez bien ancré dans la société, dans la région de Kativik, assez ancré pour qu'un non-autochtone puisse vous représenter à l'Assemblée nationale?
Le Président (M. Ouimet): Alors, Mme Emudluk.
Mme Emudluk (Maggie): As my colleague Pita was mentioning earlier, our predecessors opted for public institutions, 30 to 35 years ago, with the James Bay and Northern Québec Agreement. So, public institutions like Kativik Regional Government, the health, education, these are all public. Everybody in Nunavik has access to these services. It's true, 90 % of the population is Inuit, but whoever lives in our region has the same access or has the same rights and privileges as anybody else up there.
Mme Houda-Pepin: Est-ce qu'elles ont les mêmes droits et les mêmes privilèges, les mêmes responsabilités, assez pour qu'un non-autochtone ou une non-autochtone représente la population de votre région à l'Assemblée nationale, selon le principe de l'égalité qu'on vise?
Le Président (M. Ouimet): M. Aatami.
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(15 h 40)
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M. Aatami (Pita): Yes. I'll give an example: in the past, the chairman of the Kativik Regional Government used to be a French person. So, it's equal to everyone, like I said, we treat everybody as our equals. If we think that person can represent us, whether it be an Inuk or a non-Inuk, we'll accept them as long as he or she can be our voice within the National Assembly. So, everybody is equal in our opinion.
Mme Houda-Pepin: Et, du côté du statut de la femme, est-ce que vous pourriez nous dire quelle est la situation? Est-ce qu'il y a des avancées chez vous par rapport aux femmes au niveau des instances décisionnelles locales, régionales, les postes électifs? Quelle est la situation des femmes chez vous?
Évidemment, on peut bien illustrer que madame est là, qui est présidente, mais, derrière vous, quel est le statut des femmes?
Mme Emudluk (Maggie): I guess historically Inuit have been traditionally like any other society, but we're coming out to the modern world. I can take myself on example. I've been a mayor for about eight years, four years ago.
We do have women actively involved in a lot of public jobs, for example, teachers in day cares, traditional jobs like that, but we do have local elected women in municipalities, for example, in the schools. Regionally speaking, it's true there may not be as many women, but we have equal rights or status.
M. Aatami (Pita): If I could just add to that. Maggie is the chairperson for the Kativik Regional Government, which is one of the largest organizations representing the population of Nunavik.
Then, we also have the Kativik School Board, which has a woman as their president also, which represents all the schools in the Nunavik region. Then, our health board, the chairman also is a woman. So, today, they are very, very well represented. So, everybody, we consider the women as a big part of our lives now, because Maggie is the chairman, the health board person is the chairperson also. So, they are in the bigger organization, leading their organizations now. So, I'm an exception, I'm the only man in Nunavik representing one of the organizations.
Mme Houda-Pepin: Alors, en terminant, M. le Président, je voudrais féliciter les membres de la délégation. Je voudrais féliciter les membres de la délégation pour les efforts que vous avez faits pour développer votre région.
Vous êtes loin de nous, mais on vous suit, on vous suit, et on est très fiers de ce que vous réalisez. Puis je suis très contente de voir que vous voulez à la fois sauvegarder votre identité et en même temps tendre la main, bâtir des ponts avec le Québec. Alors, vous êtes les bienvenus.
Le Président (M. Ouimet): Merci, Mme la députée de La Pinière. Je me tourne maintenant du côté de M. le député de Masson.
M. Thériault: Alors, merci, M. le Président. Alors, en tant que porte-parole de l'opposition officielle en matière de réforme des institutions démocratiques, j'ai été particulièrement impressionné et convaincu par le mémoire que vous avez déposé. Convaincu à ce point que, de la même manière que tout à l'heure le groupe Féminisme et Démocratie disait: Bien, nonobstant la mise en application de cet avant-projet de loi, qui est prévue pour 2011, il me semble qu'il y a des mesures qu'on devrait mettre en vigueur le plus tôt possible, lors du prochain scrutin... Et, quant à moi, vous m'avez convaincu au point de penser, à ce qu'il me semble, que l'on devrait effectivement convenir d'un statut particulier pour le Nunavik le plus tôt possible, indépendamment de toutes les mesures et de tout le débat entourant la technicalité de la mise en oeuvre du mode de scrutin.
Et pourquoi je dis ça? Bien, d'abord, à la réponse de Mme Emudluk à ma collègue de La Pinière, j'ai cru constater que vous aviez une option sérieuse au poste de députée de votre nouvelle circonscription, si c'était le cas. Mais, d'un point de vue un peu plus sérieux, je vous dirais: Il y a un vieux principe philosophique qui s'énonce de la manière suivante: «No taxation without representation». Vous avez fait ce choix-là il y a déjà plusieurs années.
Ça vous caractérise comme groupe autochtone à partir du moment où votre communauté vient nous dire qu'elle veut participer à la vie démocratique du Québec, que cela va dans le sens de votre volonté d'intégration et qu'on est devant un débat et un avant-projet de loi qui se préoccupent beaucoup de l'occupation du territoire et de la représentation effective et de la représentativité effective de toutes les régions du Québec au niveau de l'occupation du territoire québécois. Je vois mal comment je pourrais trouver des arguments pour finalement aller à l'encontre de la démarche que vous faites aujourd'hui.
Et on va s'habituer, j'imagine, à ce que vous soyez des nôtres, et on va probablement, un jour, arrêter de trouver que c'est absolument phénoménal que vous vous déplaciez jusqu'à nous. Cela sera peut-être le gage d'une réelle intégration, et on aura, à ce moment-là, développé tous les moyens de vous avoir parmi nous.
Mais il me semble que ce que vous défendez, dans votre mémoire, est tout à fait légitime et va dans le sens des valeurs profondes qui nous rassemblent autour de l'étude de cet avant-projet de loi. Alors, merci beaucoup de votre contribution et de votre participation.
Le Président (M. Ouimet): Merci, M. le député de Masson. Mme la députée de Duplessis.
Mme Richard: Merci beaucoup, M. le Président. Tout d'abord, je tiens à vous saluer, et je vous dirais, d'entrée de jeu, que je vous comprends très bien. Je suis la députée du comté de Duplessis, et j'ai vu, dans votre mémoire ? écoutez, je ne pourrais même pas les nommer ? combien de similitudes avec la Basse-Côte-Nord. Vous savez, la Basse-Côte-Nord aussi a des statuts particuliers, que ce soit au niveau municipal, au niveau scolaire. C'est un peu plus de 5 000 de population, c'est presque semblable, là, à quelques centaines près. Plusieurs villages ne sont pas reliés, eux aussi, par le réseau routier. Et, moi, je vous dirais que je suis d'accord à ce que vous revendiquiez d'être entendus à l'Assemblée nationale. Je trouve que c'est une avancée.
Je voudrais juste revenir un petit peu à quand, bon, vous avez parlé qu'il y avait... que 90 % de votre population, ce sont des Innus, et vous avez 10 % à peu près de non-autochtones. Et vous avez dit tantôt que, bon, peu importe que ce soit un non-autochtone ou un autochtone qui soit un élu à l'Assemblée nationale.
Je voudrais juste avoir une précision. Est-ce que le but de demander, bon, une dérogation pour être reconnue comme une circonscription va avec vos valeurs, oui, innues, mais va au-delà de ça, va pour votre spécificité de votre territoire, va pour une représentation, à l'Assemblée nationale, d'un comté qui est spécifique de par sa géographie, de par son peu d'habitants, etc., ça va au-delà du peuple innu? Je voudrais juste vous entendre un peu là-dessus parce que j'ai des similitudes, et, moi, je vais voir ma circonscription être agrandie, donc vous comprenez l'intérêt que je porte. Mais je suis très sensible à votre cause.
Le Président (M. Ouimet): M. Aatami.
M. Aatami (Pita): Thank you very much. First of all, I just want to correct the translator: we're not Innu, we're Inuit. Innu are Indians. There's always a mistake being made between Innu and Inuit. So, they're Montagnais, you can call them Montagnais, but they're not Inuit. So, I want to make sure that the translator understands that we're not Innu, we're Inuit. I want to make that correction.
And I wanted to agree with the first speaker from the Official Opposition that mentioned that if there's a will, it can be done before the next election. So, I'm very hopeful that this will be in time for the next election, whenever that might be.
And the next speaker, the MNA from Duplessis... When I mentioned that there's 90% of us that are Inuit living... and we have 10%, roughly, that are living with us, they are partners and they know the wishes of the people. I've said that we've had non-Native chairmen of different organizations and we've always supported them, because they know what we're looking for. We have rights under the James Bay and Northern Québec Agreement. I'll always have the rights that I've gained under the James Bay and Northern Québec Agreement. But we have people living with us, they know the wishes, they live with us on a day-to-day basis, they know the wish of the people.
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(15 h 50)
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We have an organization that would support ? how do you call it? ? the protection of our culture and language already; we already have this institution. What we're looking for is a voice for Nunavik, who would be representative for my region, regardless if it's an Inuk or a non-Inuk. So, for us, we will accept anybody as long as we can have someone representing the region and a person who would listen to the concerns of the people of the region. So, I hope I answered your question.
Le Président (M. Ouimet): Merci. Alors, je vais maintenant aller du côté de M. le député des Chutes-de-la-Chaudière.
M. Picard: M. le président, je tiens à vous remercier pour votre présentation. Et ça fait quand même... c'est quand même spécial. Habituellement, lorsqu'on reçoit les gens, les commentaires que nous recevons, c'est que les citoyens sont de moins en moins impliqués démocratiquement, et, vous, la demande que vous nous faites, c'est que vous nous dites: On veut participer à la vie démocratique du Québec. Vous êtes des citoyens du Québec à part entière et vous avez droit aux mêmes avantages et aux mêmes services.
Donc, moi, je représente l'Action démocratique du Québec. Moi, qu'est-ce qui guide mon action en tant que parlementaire, c'est l'équité, l'équité de tous au Québec. Donc, moi, je peux vous assurer que, dans le cadre de la réforme, de l'avant-projet de loi que nous avons sur la table, nous allons appuyer votre demande, tout simplement. C'est un simple commentaire, parce que votre présentation a été très claire et est très volubile. Merci.
Le Président (M. Ouimet): Merci. Du côté maintenant du comité citoyen, j'avais M. Morisset, puis par la suite Mme Proulx.
M. Morisset (Michel): Good afternoon. Alors, écoutez, j'aimerais d'abord vous féliciter pour votre mémoire et vous dire que le Nord-du-Québec, c'est un continent en lui-même parce que... Je vous comprends bien parce que ma grand-mère, moi, est amérindienne. Et puis je voulais vous dire aussi par contre que vous avez un avantage: malgré toutes vos problématiques de distance et de sous-représentativité, vous êtes quand même reconnus comme nation par le gouvernement d'Ottawa, alors que, nous, d'une certaine façon, qui sommes entourés d'une Amérique anglaise, on n'est pas reconnus vraiment comme nation. Et, si j'ai bien compris, vous désireriez en fait, quand même, qu'on vous reconnaisse vous-mêmes, nous. Nous-mêmes, on n'est pas reconnus comme société distincte, et je vous comprends très bien que vous vouliez être reconnus comme société distincte.
Ceci étant dit, vous avez parlé, dans votre mémoire, aussi de problèmes concernant des coûts prohibitifs concernant, disons, vos dépenses en énergie. Alors, vous savez qu'avec les nouvelles énergies éoliennes vous pourriez atteindre plus facilement... En créant votre propre corporation, vos propres compagnies en énergie éolienne, vous pourriez développer vos besoins énergétiques et alimentaires encore d'une façon beaucoup plus rentable.
Ce que je voudrais savoir aujourd'hui, c'est combien de représentants vous aimeriez avoir à l'Assemblée nationale du Québec, qui satisferaient vos besoins, qui seraient représentatifs de toutes vos régions. Merci.
Le Président (M. Ouimet): Merci.
M. Aatami (Pita): Thank you very much, Mr. Morisset. First of all, on the wind energy sector, that's something that we're working on right now. We've set up a committee to look at alternative energy that we can utilize for our benefits in our community instead of using diesel-generated powerhouses. We were at Magdalen Islands, last fall, when they had a wind energy conference. So, we are very seriously looking at that option right now, just for our own benefit, in the meantime, to try to help out with what's happening with the world. So, we are very conscious of what's happening right now, so we are looking at wind energy as an alternative energy for our own needs in the communities. But to try to use it to export it outside of our region, that's something that we will look at in the future, but we're looking at alternative energy for our own needs in the meantime.
As for how many representatives we're looking for, we're starting with one, at least with one. And, if we can have more, we'll be even more... it will be even better for us, but we're looking for one person to represent our region. Thank you.
Le Président (M. Ouimet): Merci. Alors, maintenant, Mme Proulx.
Mme Proulx (Mélanie): J'avoue franchement ne pas connaître vraiment l'histoire du Nunavik et de sa population, alors j'aimerais que vous m'éclairiez. Votre présence ici me semble être la continuité d'une longue lutte quant à vos revendications, et j'aimerais savoir d'après vous pourquoi est-ce que ça n'a pas encore été accompli, pourquoi est-ce que vous n'avez pas encore eu gain de cause quant à vos demandes.
M. Aatami (Pita): I wish I could answer that question: Why our struggles haven't been listened to yet? In our brief, we mentioned that there were some people that went by snowmachine, in 1972, all the way from the northernmost community in Québec, to travel all the way by snowmachine to go to the National Assembly, requesting that we get our own representative. But why they haven't accommodated us? We... ourselves because we've always tried to use Magdalen Islands as an example that they could do it for that region. How come they can't do it for our region? Because we are very isolated from the rest of the province. So, I wish I could answer that question: Why they haven't done it yet? We want to know also why they haven't done it. And Maggie wanted to add to...
Mme Emudluk (Maggie): Yes. I just wanted to add. Back in 2001, there was an association of regions of Québec who met in Sainte-Adèle; there were 300 delegates in that meeting where they supported, by way of petition, for Nunavik getting an electoral district. We've met with previous governments on this electoral reform, with previous premiers of Québec, with other parties, and like Pita was saying: We don't understand why this never really got through. But again we're going for the same cause, for the same reasons. Our reasons haven't changed in the last many, many years.
Le Président (M. Ouimet): Merci, Mme Proulx. M. Boivin, maintenant.
M. Boivin (Guillaume): Considérant la structure, la structure démographique et le taux de croissance démographique de votre population, est-ce qu'on peut considérer que le district à être formé n'aura pas un caractère exceptionnel quant à sa population pour l'éternité? Si je comprends bien, il est possible de penser qu'il atteindra les standards normaux de population d'un comté normal d'ici quelques générations, si je vois bien le rythme de croissance démographique. Est-ce que j'ai raison de le croire et avez-vous des estimations à cet égard-là?
M. Aatami (Pita): In the brief that Adamie talked about, our population is very young, it's one of the fastest growing population in the rest of the Province of Québec. Our demographics are very different from the rest of the province. And to try to answer your question, how long will this be for, I'm always going to come back to the Magdalen Islands. I don't know if they were ever asked that question: Would you have your own riding? for so many years. They've had their own riding for over 100 years. So, I hope that we'll have our own riding for the region for years and years to come. That's the best answer I can give you to try to answer how long we would have this. Would it be specifically for a certain period of time? But by becoming Members of the National Assembly, I feel that we'll even get closer than we are now, because we're very isolated. But a lot of decisions that are made for the regions are made with our knowledge sometimes, but that's changing slowly. But I feel that it's gonna even make us closer by becoming part of the National Assembly, by becoming one of the voices for the Province of Québec.
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(16 heures)
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M. Boivin (Guillaume): You have no idea how long it will take for your population to reach the average of a normal district in Québec?
M. Aatami (Pita): Well...
M. Boivin (Guillaume): Have you ever estimated that, or...
M. Aatami (Pita): Well, at the rate that we're growing right now, we were saying that, 2% on average, you're looking at another 50 years before we're... But look at Magdalen Islands. They were given an exception, they have the same population as we do. So...
M. Boivin (Guillaume): Well, we certainly support right away for you to have such a district, but it won't be an exception for that long. So, I'd say, it's an argument for you.
M. Aatami (Pita): Yes, because in order to get that maximum... not the maximum, but the amount of population needed to get your own riding, it's gonna take us years and years before we get that 25,000 mark... When we signed the James Bay and Northern Québec Agreement, in 1975, which is 30 years ago, we were 5,000 people. So, 30 years later, we're 10,000 people. So, I'm just throwing that number another 50 years before maybe... But we have the cold nights, so maybe that's why we're one of the fastest growing populations.
Le Président (M. Ouimet): All right. Thank you very much.
Je n'ai pas d'autre demande d'intervention, sauf que je laisserais peut-être, avec le consentement des membres, le mot de la fin à notre collègue le député d'Ungava, qui représente nos invités à l'Assemblée nationale présentement. M. le député.
M. Létourneau: Merci, M. le Président. Alors, pour peut-être le bénéfice des nouveaux membres de la commission ou ceux qui ne sont pas parlementaires, bien peut-être expliquer que je représente le comté d'Ungava depuis 1994. Et ce comté-là équivaut aussi à ce qu'on appelle la région Nord-du-Québec, qui compte pour 55 % du territoire québécois. Et il y a deux sous-régions, une sous-région septentrionale qui est le Nunavik et une autre qu'on appelle la région de la Baie-James, où des Québécois, dans les deux cas, cohabitent avec les Cris dans la portion Baie-James et des Québécois cohabitent aussi avec les Inuits dans la partie plus nordique.
Et, moi, je pense... Et je veux accueillir aussi ce geste que la commission fait d'entendre la population, les représentants du Nunavik pour qu'on puisse rapidement donner suite à ce projet-là. J'apprécie l'intervention de mon collègue de Masson qui va dans ce sens. Et il est rare aussi de trouver des députés qui cherchent à se départir de leurs fonctions. Alors, dans mon cas, évidemment, c'est ce que ça représente, mais je pense que le Nord-du-Québec et le Québec seront encore mieux desservis et encore plus représentatifs de l'éventail de sa population et de ses cultures le jour où il y aura, entre autres, un représentant issu du Nunavik et aussi, peut-être pour l'autre portion du territoire dont je parlais, pour la Baie-James, une autre personne issue de ce territoire-là aussi.
Alors, merci pour votre accueil et merci et salutations à mes collègues du Nunavik.
Le Président (M. Ouimet): Merci, M. le député d'Ungava. Donc, sur ces propos, Mrs. Emudluk, Mr. Gordon, Mr. Aatami, Mr. Alaku, and Mr. Adams, and everyone else, members of the delegation, thank you very much for your participation to this parliamentary commission. And I... Yes? Un mot de la fin?
M. Aatami (Pita): If it's all possible, Maggie wanted to add to what I was saying earlier, if she can be given that opportunity just to say a few words. And I just want to correct the translator again: it's not «Nunavut», it's «Nunavik».
Le Président (M. Ouimet): Nunavik. O.K. Thank you. Alors, Mme Emudluk, yes.
Mme Emudluk (Maggie): I just wanted to add to what Mr. Aatami was saying, that it's very hard to compare with the numbers down south when you talk about population. We have different... Our language is different. As your language in Québec is French, ours is Inuktitut. I don't think that's ever going to change. Our culture is different. We're isolated. We're 2,000 miles from Montréal and we travel only by air. There is no road connection. So, I think it's gonna take many, many, many years, more years to come before we... to answer your question, to reach that number. Even if we reach the number that you're talking about, possible numbers that you're thinking of, I don't think we will ever get to the same, be recognized as the same as down south here. I just want to make that distinction. Thank you.
Le Président (M. Ouimet): Thank you very much once again. So, bon retour. Merci. Je vais suspendre les travaux quelques instants.
(Suspension de la séance à 16 h 5)
(Reprise à 16 h 23)
Le Président (M. Ouimet): Alors, à l'ordre, s'il vous plaît! La commission reprend ses travaux. Je vois que les représentants et la représentante du Mouvement pour une démocratie nouvelle ont déjà pris place. Alors, Mme Mercédez Roberge, vous en êtes la présidente. Je vous demanderais peut-être de nous présenter les deux personnes qui vous accompagnent, après quoi je vous cède la parole pour 20 minutes, pour votre présentation.
Mouvement Démocratie nouvelle (MDN)
Mme Roberge (Mercédez): Parfait. Merci beaucoup de nous accueillir ici. Alors, je vous présente mes compagnons, membres également du conseil d'administration du MDN, Martin Dupuis et Evans Desmangles.
Alors, en préambule, j'aimerais, pour commencer, un petit rappel de qui nous sommes, le MDN. On s'est créé en 1999. C'est donc un mouvement qui vient de la base, de la population, et on s'est donné comme mandat de réformer le mode de scrutin dès le départ.
Nos membres sont des individus et des organismes d'horizons variés, notamment de tendances politiques variées. Le MDN est donc non partisan. Malgré leurs différences, nos membres se sont donné des balises d'analyse pour juger des résultats bien concrets que devrait atteindre tout modèle de mode de scrutin.
Alors, cet après-midi, on vous présente les grandes lignes de notre mémoire. Alors, évidemment, je vous inviterais à y référer pour plus de détails.
Au Québec comme ailleurs, l'avancement du débat sur le mode de scrutin résulte en grande partie des efforts constants de différents mouvements sociaux, dont le MDN. Le sujet est désormais abordé dans différentes sphères, dans différents groupes et représente une question de citoyenneté pour bon nombre de personnes. L'existence de votre commission en est un exemple.
Mais il y a quelques constats qu'il faut faire, pour commencer. L'égalité est loin d'être atteinte. La représentation des femmes ne l'est pas. 30 % des femmes députées, vous le savez. 20 % de la population du Québec se déclare d'une origine autre que française ou britannique. 63 % de la croissance de la population active provient des personnes immigrantes, et ça atteindra 100 % d'ici 25 ans. Cependant, 7 % de la députation est composée de personnes issues de la diversité ethnoculturelle.
Le paysage politique contemporain du Québec comporte des courants politiques émergeant qui rejoignent des gens un peu partout à travers le Québec, mais qui rejoignent véritablement des gens. Ces courants politiques ne sont pas concentrés dans l'intérieur d'une seule ou de quelques circonscriptions, donc ces courants-là n'obtiennent pas leur juste représentation. Des idées politiques et des parties importantes de population ne sont pas véritablement entendues ni ne peuvent contribuer à la vitalité du débat démocratique.
Donc, l'adhésion populaire aux décisions prises ici même, à l'Assemblée, est affectée. Est-ce qu'on peut se surprendre qu'une partie de la population ne se sente pas interpellée, pas concernée, ne ressente pas qu'elle est partie prenante des décisions pour l'ensemble? Nous, ce qu'on dit, c'est: Pourquoi pas... Pourquoi l'Assemblée nationale ne deviendrait pas ce lieu rassembleur des visions politiques où le pouvoir se partage dans la juste mesure des appuis consentis par la population?
Depuis près de 40 ans, plusieurs gestes ont permis d'informer la population et de constater l'accroissement de l'intérêt de cette population sur la question du mode de scrutin. Uniquement depuis 1999, il y a eu un momentum ininterrompu. L'intérêt pour la question est non seulement grandissant en nombre, mais aussi en diversification des lieux de l'appropriation. C'est un mouvement international. Il y a une infinité de variantes, de modèles proportionnels, de modèles mixtes, mais quand même 75 % des pays utilisent une forme ou une autre de proportionnelle, des pays qu'on connaît très bien.
Le mode de scrutin majoritaire est en voie de disparition partout. Aucun pays ne le choisit plus. Au niveau des autres provinces, six provinces et le niveau fédéral, tout le monde est en train de le remettre en question autour de nous. Ces démarches-là sont à des niveaux différents, évidemment, dans les autres provinces, mais c'est quand même une preuve que le statu quo ne peut plus se maintenir.
Le momentum institutionnel. Il y a eu les états généraux ? vous vous souvenez que 90 %, à ce moment-là, des gens présents avaient voté pour une proportionnalité et que c'était la première recommandation ? votre prédécesseur, la Commission des institutions et la commission actuelle; il y a quand même eu également un avant-projet de loi déposé, et ça, c'est un geste qui reconnaissait qu'il fallait changer, et qu'il pouvait profiter de l'occasion pour intégrer en même temps des mesures et, comme on dit, faire l'ensemble des travaux à faire.
Un momentum chez les partis politiques. Vous le savez, vos partis politiques ont, à l'intérieur de leur programme, des recommandations là-dessus. Lors de la dernière campagne électorale, 50 des 125 membres qui sont à l'Assemblée nationale se sont engagés à réformer le mode de scrutin dans les deux premières années, et ça, ça veut dire également 59 % du caucus libéral, dont M. le ministre, que je salue. Les gouvernements du PQ et du Parti libéral ont tous les deux mis sur pied un processus de consultation.
Le momentum chez la population maintenant. Vous avez reçu, selon mes informations, 240 mémoires et 500 demandes d'audiences en... pardon, en 2002, 139 mémoires. En comparaison, on voit que la question intéresse de plus en plus. Et en plus ça se diversifie en termes d'origine; la provenance des mémoires est plus variée et rejoint des groupes qui habituellement ne se questionnent pas ou peu sur ces questions-là, sur les questions de démocratie. Le comité citoyen qui est ici provient de 2 300 candidatures, ce n'est pas rien quand même comme intérêt. Si on regarde uniquement du côté individuel, les interventions individuelles et personnelles entre 2002 et 2004, et qu'on regarde les pétitions, les déclarations, les états généraux, et qui étaient des individus, j'ai fait le calcul, 3 800 interventions personnelles, alors...
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(16 h 30)
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Et en plus les sondages montrent régulièrement les attentes de la population et leur degré d'appropriation des valeurs d'égalité, d'inclusion et d'ouverture à toutes les diversités, tant ethnoculturelles que la diversité des idées politiques; 81 % des gens sondés sont d'accord pour permettre aux petits partis d'être représentés à l'Assemblée nationale; 60 %, qu'il est préférable d'avoir des gouvernements qui négocient entre eux; 92 %, qu'on devrait faire quelque chose pour augmenter le nombre de femmes en politique élues; 73 %, pour faire également des gestes pour augmenter la présence de la diversité ethnoculturelle.
Le constat derrière tout ça, c'est clair, la tendance, elle est très nette, la population est prête à ce que des gestes concrets soient posés pour mettre en pratique les valeurs qu'elle porte: égalité, inclusion, ouverture aux idées d'autrui. Ça se résume à cela. Toutes ces réflexions-là, toutes ces actions, des gestes individuels, des mobilisations, des gestes collectifs, institutionnels des partis politiques et de la société civile, c'est une somme impressionnante d'énergie de changement. Le statu quo est inadmissible dans ce contexte-là. Conséquemment, il y a une exigence de résultat notable. L'actuelle consultation a la responsabilité de mener vers des modifications profondes, et l'avant-projet de loi présentement ne nous laisse pas entrevoir de modifications suffisamment profondes.
Le modèle proposé par le gouvernement, de type mixte à tendance majoritaire, contient des déficiences majeures qui doivent être corrigées, car il ne permettra, selon nous, ni l'expression optimale de la volonté populaire ni son respect global. Contrairement à ce qui est annoncé, tous les votes ne compteront pas, et la représentation des idées politiques va dépendre encore essentiellement de la concentration géographique.
De plus, les mesures qui sont proposées ne sont pas suffisantes. Elles ont le mérite d'exister mais ne sont pas suffisantes pour atteindre véritablement l'égalité dans la représentation entre les hommes et les femmes et une présence de la diversité ethnoculturelle convenable, ce qui n'est pas le cas. Conséquemment, l'Assemblée nationale, avec l'avant-projet de loi tel qu'il est, ne refléterait pas vraiment plus qu'aujourd'hui la réalité plurielle de la société québécoise.
Cette large adhésion dénote assurément un consensus quant au refus du statu quo. Il est aussi important qu'on voie que, dans tous ces messages-là, ça dit qu'il est normal, qu'il est légitime, qu'il est nécessaire, qu'il est urgent de procéder au remplacement du mode de scrutin par une forme de proportionnelle. Alors, c'est un rendez-vous avec l'histoire, vous le savez, et il faut le faire pas de façon partielle, en corrigeant partiellement les défaillances, mais d'obtenir un résultat qui va profondément modifier notre système électoral et dans une vision à long terme. Alors, pour nous, les résultats à atteindre et ce par quoi nous analysons le système actuel, l'avant-projet de loi et toute proposition future, respecter la volonté populaire, ni le mode de scrutin actuel ni la proposition gouvernementale n'y arrivent.
Traduire le pluralisme politique, c'est entravé par le scrutin majoritaire, on le sait, et l'avant-projet de loi maintient cette fermeture. Représentation égale des hommes et des femmes, si rien de majeur n'est fait, les hommes et les femmes seront toujours représentés inégalement, et la proposition du gouvernement manque encore la cible. Accroître la représentation de la diversité ethnoculturelle, le système actuel fait piètre figure, c'est sûr, mais l'avant-projet pourrait ne rien changer. Et l'objectif de permettre une juste représentation des régions, le mode de scrutin actuel n'y répond pas vraiment, et le gouvernement propose dans son modèle une surreprésentation géographique qui va se faire au détriment des autres objectifs de la réforme. En résumé, le mode de scrutin ne répond pas aux besoins du Québec, le mode de scrutin actuel n'y répond pas, et l'avant-projet de loi ne vient pas corriger significativement la situation.
Plusieurs formes de proportionnelle et de mixte peuvent mettre un terme aux nombreuses distorsions du système actuel en assurant la correspondance entre le nombre de votes obtenus et le nombre de sièges détenus. Dans le cas d'une mixte, la valeur de la mixte va dépendre énormément d'éléments qui peuvent entrer et sortir, mais surtout de la combinaison de chacun de ces éléments ensemble. Le mandat du MDN n'est pas de recommander une forme ou une autre de proportionnelle mais de s'assurer que le modèle choisi va répondre à nos objectifs bien précis qu'on a nommés. Donc, nous avons évalué l'avant-projet de loi, et notre analyse nous dit surtout qu'il faut cesser de tolérer les déficiences du système actuel. La surreprésentation des uns se fait au mépris de la sous-représentation et de l'absence de représentation des autres. Chaque vote ne pèse pas également dans la balance. Le mode de scrutin qui correspond aux besoins et aux aspirations de la population ne doit pas uniquement corriger les écarts, les distorsions majeures, mais que cessent les distorsions.
Dans sa forme actuelle, l'avant-projet de loi ne relève pas ce défi, et nous croyons que son amélioration est possible et surtout qu'elle est essentielle. On a donc des modifications importantes qui doivent être apportées à la proposition gouvernementale afin de rendre la réforme significative et avoir des résultats probants en utilisant le mode de scrutin par la suite.
Donc, nous disons que ça prend une compensation selon une liste nationale structurée selon plusieurs critères. La répartition proportionnelle des sièges doit être le résultat de l'expression de l'ensemble de l'électorat, pas celui de son fractionnement par districts. Structurer les listes des partis signifiera garantir l'équilibre des listes: des noms de candidates et de candidats issus de toutes les régions dans la première moitié de la liste, une alternance hommes-femmes sur les listes, les candidatures issues de la diversité ethnoculturelle en bonne place sur la liste. Le résultat de ça, c'est que, comme électorat, on va pouvoir juger des gestes qu'auront faits les partis en ces matières. On pourra aussi collectivement porter la responsabilité de la diversification de l'Assemblée nationale parce qu'on aura choisi un parti qui présentait une liste convenable en termes de diversification de territoire, d'égalité hommes-femmes et de diversité ethnoculturelle.
Un bulletin à deux votes distincts. L'électorat doit avoir la possibilité d'exprimer ses choix distinctement et le plus précisément possible: le choix d'une personne qui représentera sa circonscription et le choix d'un parti pour former le gouvernement. La combinaison entre un seul vote et la division du Québec en districts, en 27 districts, ne permettra pas la représentation équitable des partis politiques, petits et grands. Cela engendre la perte de nombreux votes, contrairement aux objectifs de l'avant-projet de loi. Nous croyons que l'identité régionale sera surreprésentée au détriment d'éléments fondamentaux de la mixité du système.
Les bonifications financières aux partis en fonction des personnes élues. Ces mesures concrétisent... concrétiseraient, parce que pour l'instant nous n'en sommes pas là, ces mesures concrétiseraient une décision de société, elles seraient appuyées par un financement public. Il serait donc plus efficient de récompenser les résultats plutôt que les efforts, donc d'attribuer les bonifications selon les personnes élues plutôt que selon les candidatures. Concernant la représentation des femmes, il faudrait débuter la bonification à compter de 35 % et non pas 30 %, ce qui, pour l'instant, récompenserait pour les résultats déjà atteints.
Les bonifications, ça demande un suivi, des plans d'action spécifiques, des rapports sur l'utilisation des argents et de maintenir ces gestes-là trois élections après l'atteinte du 50 % de femmes et 20 % de personnes issues de la diversité ethnoculturelle. Sinon, l'avant-projet de loi pourrait bien enrichir les partis politiques sans que l'égalité de représentation soit atteinte ni que le nombre de personnes issues de la diversité ethnoculturelle soit augmenté.
Bien entendu, il faut aussi aller au bout de cette consultation et consulter ensuite autour du futur projet de loi. Et nous voulons évidemment des résultats dans le présent mandat. Je vous rappelle les engagements pris en ce sens. L'éducation du public et la formation à la participation du débat maintenant et jusqu'à l'utilisation du futur mode de scrutin, la Direction générale des élections et de nombreux groupes en ont déjà fait un bon... Pour ce qui est de la direction générale, son rôle est plutôt à venir.
D'autre part, il y a des éléments qui sont des minimums au-dessous desquels il ne faut surtout pas descendre. La répartition, la proportion 60 % de sièges de circonscription et 40 % de sièges à la proportionnelle, c'est un minimum. C'est déjà un compromis face à des pays qui ont 50-50. Et rappelons qu'il y a 77 sièges encore pour représenter les circonscriptions, donc une représentation géographique est toujours assurée par 77 personnes.
Les mesures proposées pour la représentation des femmes et des personnes issues de la diversité ethnoculturelle sont bonifiables, mais leur existence et leur pertinence ne doivent pas être mises en question. La vraie question à se poser, c'est: Lesquelles?, et non pas: Oui ou non aux mesures?
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(16 h 40)
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Après tout ce qui a été fait, il serait impensable que le processus actuel n'arrive pas à un résultat profond et concret. La réforme du mode de scrutin est une démarche structurante pour une société, c'est un geste important de citoyenneté, et ça ne doit pas être subordonné à d'autres considérations que des objectifs démocratiques: respect de la volonté populaire, pluralisme politique, égalité entre les femmes et les hommes, respect et juste représentation des régions et représentation inclusive de la diversité ethnoculturelle. Nous parions que vous entendrez ces mêmes objectifs et les recommandations qui en découlent souvent dans les prochaines semaines et repris par de nombreux groupes et de nombreuses personnes.
Il est manifeste selon nous que l'institution qu'est le mode de scrutin accuse un retard considérable face à l'évolution de la société québécoise. Il est urgent d'agir, et c'est normal, pour véritablement faire de l'Assemblée nationale ce lieu rassembleur du pluralisme social, politique et démographique du Québec.
Le Président (M. Ouimet): Il vous reste un peu moins de deux minutes, alors je vous inviterais à conclure.
Mme Roberge (Mercédez): C'est tout à fait parfait. On ne peut que s'interroger sur ce qu'il advient des aspirations de la volonté populaire de toute une population qui, pour l'une des raisons qu'on a nommées, ne se reconnaît pas dans son institution politique. Les distorsions, les inéquités, le non-respect de la volonté populaire sont inhérents au mode de scrutin actuel majoritaire. Ce n'est pas des accidents de parcours lorsqu'on voit des distorsions, ça se reproduit à chaque élection. Le statu quo n'est donc vraiment pas une solution à envisager, pas plus que de reconduire les mêmes défauts sous une autre appellation.
Puisque les choix exercés auront une répercussion à long terme sur l'ensemble de la société, l'exercice ne doit pas être fait à moitié ni aboutir à un demi-résultat. Le processus de réforme du mode de scrutin est un rendez-vous avec l'histoire, vous le savez, avec l'histoire et avec l'électorat québécois. Il faut saisir cette occasion et nous doter d'un véritable modèle proportionnel qui propulsera le Québec vers l'avenir en concrétisant les valeurs et les aspirations que nous portons comme société.
Nous ne prétendons pas que le changement de mode de scrutin soit la seule et unique réponse à tous les problèmes et malaises démocratiques de la société. Cependant, on est convaincus qu'en réformant un instrument aussi fondamental la population va bénéficier d'une Assemblée nationale plus représentative de l'ensemble de l'électorat et va participer à revigorer l'exercice. En d'autres mots, ça ne peut pas nuire. À l'heure du vivre-ensemble, nous affirmons qu'il est temps de se donner les moyens pour véritablement gouverner ensemble. Merci de votre attention.
Le Président (M. Ouimet): Merci à vous, Mme Roberge, pour cette présentation. Je vais maintenant ouvrir la discussion avec vous en cédant la parole à M. le ministre responsable de la Réforme des institutions démocratiques.
M. Pelletier: Merci beaucoup de votre présence aujourd'hui. Merci de votre présentation fort enrichissante. Vous proposez une réforme du mode de scrutin et vous proposez également des mesures bonifiées pour accroître la présence des femmes à l'Assemblée nationale du Québec. Ou du moins vous êtes favorables à l'adoption de telles mesures bonifiées. Nous avons eu l'occasion d'entendre, ce matin, le Conseil du statut de la femme qui ne voyait pas le lien qui pouvait exister entre une réforme du mode de scrutin et l'élection de femmes en plus grand nombre. J'aimerais savoir quelle est votre réponse à cet argument du Conseil du statut de la femme.
Mme Roberge (Mercédez): On n'a jamais dit que le mode de scrutin tout seul pouvait régler la représentation équitable, égalitaire en fait des femmes, sauf que l'instauration d'un mode de scrutin avec liste permet d'exiger des partis de nous présenter, à la population, des candidatures d'hommes et de femmes, nous permet, à nous, de voir et de juger de ce caractère-là, la transparence des listes. Ce n'est pas uniquement l'existence de la liste, mais c'est aussi l'effet que peut avoir la transparence d'un mode de scrutin avec liste où on voit que le parti A m'offre une équipe égale d'hommes et de femmes et le parti B, non. Je peux ajouter ça à mon analyse des programmes des partis, et la question de la diversité ethnoculturelle se présente de la même façon, la transparence des listes.
Et on ne peut pas faire abstraction du fait que les 12 premières places au monde... des 12 premières places, il y a un seul pays qui a un mode de scrutin majoritaire. Ce n'est pas suffisant seul, sauf que c'est aussi un bon rendez-vous pour accompagner le futur mode de scrutin de mesures. Ce serait plus difficile d'instaurer des mesures dans le mode majoritaire que ça peut l'être dans le mode proportionnel. Ça ne résout pas... ce n'est pas une garantie, ça aide et ça va dans le sens de l'amélioration beaucoup plus que le majoritaire.
M. Pelletier: J'aimerais vous entendre sur la question d'une liste ouverte, d'une liste à partir de laquelle les électeurs pourraient faire leurs choix puis choisir tel candidat plutôt que tel autre. Est-ce que c'est quelque chose qui vous semble intéressant en soi, cette idée-là?
Mme Roberge (Mercédez): Ça peut être intéressant, sauf que, lorsqu'on décide d'intervenir pour obtenir des listes en alternance, c'est logique de souhaiter que l'ordonnancement de ces listes-là soit par la suite... serve et ne soit pas redéfait. Donc, nous n'avons pas priorisé jusqu'à présent la liste ouverte parce qu'on préfère que les listes soient des lieux où on peut structurer pour atteindre des résultats, ce qui est plus difficile. Déjà, avec le mode majoritaire, déjà les 77 sièges de circonscription sont la partie la plus floue du système, la plus difficile à prévoir. Elle est imprévisible, donc on ne peut pas savoir quelles circonscriptions vont élire une femme et lesquelles vont élire une personne de la diversité ethnoculturelle. C'est impossible à prévoir. Les listes, en les structurant, nous aident, tant que faire se peut, à organiser, mais c'est pour ça que, nous, on préfère viser sur l'organisation des listes que sur les listes ouvertes dans un contexte de modèle mixte, dans le contexte de l'avant-projet de loi tel qu'il est maintenant. Notre analyse est plaquée à cette proposition. Changez de proposition, et les solutions seront différentes.
Le Président (M. Ouimet): Bien. Merci, M. le ministre. Mme la députée de La Pinière.
Mme Houda-Pepin: Merci, M. le Président. Mme Roberge, M. Desmangles et M. Dupuis, soyez les bienvenus. Je sais que Mouvement Démocratie nouvelle travaille sur cette question-là depuis déjà bien longtemps. Vous avez fait beaucoup, beaucoup de rencontres de consultation, donc votre mémoire reflète en quelque sorte les préoccupations de plusieurs groupes qui vous ont alimentés. Merci donc pour votre présentation.
À la page 27 de votre mémoire, concernant la représentation des diverses origines ethnoculturelles, vous dites: «Proposer des mesures plus contraignantes afin que les partis politiques inscrivent des candidatures de personnes de diverses origines ethnoculturelles en bonne place sur les listes.» Qu'est-ce que c'est que ça, une bonne place?
Le Président (M. Ouimet): M. Desmangles.
M. Desmangles (Evans): Alors, quand on dit une bonne place sur les listes, il faut savoir que les listes sont organisées, fermées. On a l'alternance hommes-femmes, rien n'empêche d'avoir, dans cette alternance-là, au début de la liste, une femme des communautés ethnoculturelles ou un homme des communautés ethnoculturelles. Ce qu'on souhaite, c'est que cette liste-là puisse servir, que les gens des communautés culturelles ne se retrouvent pas à la fin de la liste. L'alternance hommes-femmes, il y a des femmes des communautés culturelles, des hommes des communautés culturelles, alors, en bonne place donc, dans cette alternance-là; on peut d'emblée les mettre presque au premier tiers de la liste.
Mme Houda-Pepin: Parce que, dans votre mémoire, à la page précédente, à la page 26, vous dites: «En alternant les candidatures féminines et masculines ? toujours sur la liste ? en commençant par celle d'une femme.» Donc, lorsqu'il s'agit de refléter l'écart entre les hommes et les femmes, vous voulez que les femmes soient en tête de liste, et, lorsqu'il s'agit de refléter l'écart entre les minorités ethnoculturelles, qui sont aussi sous-représentées, elles sont en bonne place. Alors, vous laissez quand même une grande marge de manoeuvre d'interprétation de ce que c'est qu'une bonne place.
Mme Roberge (Mercédez): Une bonne place d'une liste, c'est évident que c'est le haut de la liste. On connaît... La distribution proportionnelle des listes se passe à partir du haut de la liste en descendant. Évidemment, ce sont des bases. Nous n'avons pas voulu quantifier, chiffrer quelle était la proportion exacte dans la liste parce que la présence de la diversité ethnoculturelle n'est pas aussi chiffrable que l'est l'égalité hommes-femmes, et nous...
Mme Houda-Pepin: Dans quel sens qu'elle n'est pas chiffrable?
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(16 h 50)
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Mme Roberge (Mercédez): Nous demandons 50 % d'hommes, 50 % de femmes. Nous n'avons pas voulu embarquer dans un pourcentage précis et dans un nombre précis de position sur la liste. Il y a cependant, pour nous, l'importance de la transparence, ce qui fait qu'en demandant en bonne place sur les listes et en faisant savoir... Parce que la réforme est une occasion de publiciser et de faire la promotion des valeurs qu'on porte et des gestes qu'on est en train de poser pour le faire, alors il y a beaucoup sur le regard de l'électorat devant une liste où il y a une personne de la diversité en position 40 versus une autre qui fait meilleure figure.
Mme Houda-Pepin: Mais quand même, concernant les données, on sait ? et vous l'avez dit vous-même ? 20 % de la population québécoise n'est pas d'origine ni française ni anglaise. Ça, c'est un. Deux, on a les données. Ne serait-ce que par circonscription, on sait quelles sont les communautés par circonscription et on peut les nommer même avec ce qu'elles représentent en termes de nombre et en termes de pourcentage. Donc, ces données-là existent. Mais je vais aller plus loin. Dans une société où il y a à peu près, mettons, 150 communautés ethnoculturelles différentes, comment est-ce que va se faire le recrutement, la sélection et le placement sur les listes?
Mme Roberge (Mercédez): Les partis politiques ont leurs règles. Nous ne sommes pas en train de revoir les règles inhérentes à chacun des partis politiques. On travaille le mode de scrutin et non pas les règles démocratiques ou non d'un parti plutôt qu'un autre. Ce n'est pas le sujet de l'avant-projet de loi, selon nous.
Concernant les données précises des communautés, oui, ces données-là sont précises, mais vous conviendrez avec moi qu'elles sont changeantes, en pleine évolution. Alors, c'est pour ça que je disais que les chiffres ne sont pas aussi précis que 50 % de femmes et 50 % d'hommes.
Mme Houda-Pepin: Bien. En tout cas, je n'insisterai pas sur la précision des statistiques parce qu'elles sont aussi précises que n'importe quelles données. Ce qui m'importe par rapport à cette question-là, parce que je sais que vous avez certainement réfléchi là-dessus, lorsqu'on dit qu'il faut réparer, en fin de compte, un déficit, hein, parce que les minorités sont sous-représentées, c'est ça, le problème, et on essaie de refléter une certaine équité ou une égalité ? on ne parle pas d'égalité dans le cas des minorités, on parle plutôt d'équité ? c'est quoi, la base? Vous, vous avez réfléchi sur ces questions-là. Comment est-ce qu'on va refléter cette équité entre les minorités qui vont être représentées à l'Assemblée nationale?
M. Dupuis (Martin): Oui. Je ne sais pas si je saisis parfaitement bien votre question, si vous avez en filigrane de cette question-là une approche communautaire, c'est-à-dire que chacune des communautés soit représentée. Si c'est ça qui est dans votre questionnement, ce n'est pas l'esprit des demandes du MDN. Donc, le MDN vise davantage à ce que la diversité ethnoculturelle comme réalité démographique au Québec soit adéquatement et à juste titre représentée à l'Assemblée nationale mais non pas comme délégué de ma propre communauté d'appartenance, mais comme citoyen à part entière, au même titre que vous tous qui êtes assis ici, aujourd'hui, et vous toutes, vous êtes représentatifs de l'électorat qui vous a portés au pouvoir donc, quelle que soit l'origine. Donc, ce n'est pas une approche communauté par communauté, à la recherche d'un quota, par exemple. O.K.? Ce n'est pas l'esprit derrière la revendication du MDN.
Mme Houda-Pepin: Donc...
M. Dupuis (Martin): Et, si je peux juste me permettre un léger retour en arrière sur votre question précédente sur le mode de sélection...
Mme Houda-Pepin: La bonne place, la bonne place.
M. Dupuis (Martin): ... ? la bonne place, effectivement ? dans la présentation initiale de Mercédez, on a insisté sur le fait qu'un modèle est un ensemble de mécanismes qu'on regroupe et qui arrive à un certain résultat, et donc il faut considérer que les mesures incitatives qui ont été mises en place et qu'on cherche à bonifier pour l'aspect de la représentation et de la diversité, il faut les lier, oui, à la question de la liste, mais aussi notre demande à ce que les efforts... non pas les efforts soient récompensés, mais les résultats. Alors, si les mesures sont instaurées en fonction d'un résultat atteint, donc d'une personne élue, il y a, nous présumons, un incitatif pour les partis politiques à faire en sorte que les personnes issues de la diversité qui seront placées sur les listes seront placées en bonne position.
Le Président (M. Ouimet): Bien. Je vais aller du côté de l'opposition officielle.
Mme Houda-Pepin: Est-ce que c'est terminé?
Le Président (M. Ouimet): Il va rester quelques minutes.
Mme Houda-Pepin: Oui. Si vous permettez, je voudrais compléter là-dessus.
Le Président (M. Ouimet): Oui. Alors, complétez le bloc dans ce cas-là.
Mme Houda-Pepin: Surtout que M. Dupuis a donné un élément de réponse qui m'intéresse beaucoup. J'apprécie que vous ayez précisé que, lorsqu'on parle de représenter la diversité ethnoculturelle, on ne parle pas de représenter des communautés, ce n'est pas des gens qui sont élus dans leur communauté pour représenter leur communauté, parce qu'à ce nombre ça prendrait 150 sièges juste pour représenter la diversité. Donc, vous pensez dans le sens de refléter le pluralisme?
M. Dupuis (Martin): Exact.
Mme Houda-Pepin: C'est ça, ethnique de la société québécoise, et c'est une précision très importante. Alors, je vous remercie, et puis réfléchissez sur la bonne place. Merci.
Le Président (M. Ouimet): M. Desmangles, vous voulez ajouter un commentaire?
M. Desmangles (Evans): Oui. En fait, ce qu'il faut comprendre dans cela, ce qu'on cherche... L'Assemblée nationale, en fait c'est un lieu rassembleur. Et aujourd'hui ce qu'on vit, c'est que beaucoup de membres de la communauté ethnoculturelle ne se sentent pas concernés, ne se sentent pas interpellés. Parce que c'est un endroit où ces gens-là doivent se reconnaître, et aujourd'hui c'est absent. C'est l'objectif politique. Moi, je suis ici, aujourd'hui, je ne suis pas mandataire de la communauté noire, je participe dans un effort démocratique pour corriger une situation, donc j'apporte ma contribution, et c'est ça qu'on cherche, c'est l'objectif politique.
Mme Houda-Pepin: Je vous en félicite.
Le Président (M. Ouimet): Bien. Merci. Alors, du côté maintenant de l'opposition officielle, M. le député de Masson.
M. Thériault: Oui. Merci beaucoup, M. le Président. Alors, Mme Roberge, M. Desmangles, M. Dupuis, bienvenue. Je me questionne beaucoup, dans votre mémoire, sur l'omission d'une prise de position de principe à propos de faire adopter ce débat, de faire trancher ce débat par la population par un plébiscite plutôt qu'un référendum, parce qu'on voudrait que ce soit fait pendant l'élection générale prochaine, etc. Je me questionne beaucoup, connaissant votre mouvement, qui s'appelle Démocratie nouvelle, favorisant la participation citoyenne, et ayant entendu, entre autres, un de vos fondateurs représentant le Parti vert, ce matin, qui disait que, s'il ne voulait pas en appeler à la population en ce qui le concernait, c'était qu'il y avait une dérive possible de démagogie dans le débat. Faudrait-il, par crainte de démagogie, qu'on ne fasse aucun débat politique ou est-ce qu'en quelque part la population, bien informée, ne peut pas effectivement, en principe en tout cas, pour un mouvement comme vous, ne pas prendre cette position de principe, alors que vous faites en quelque part un peu un procès d'intention sur la qualité des parlementaires? Parce que vous dites sans le dire, à mots couverts, qu'on est juge et partie, hein? Je n'ai pas vu, dans votre présentation, un grand climat de confiance sur la suite des choses.
Alors, je me dis: Que vous disiez dans votre mémoire que le débat sur les modalités à tenir pour faire un référendum ou un plébiscite qui soit vraiment effectif, puis qui soit correct, puis que ce débat-là, il faudra le faire, puis il faudra définir la forme, ça, je peux en convenir. Mais que votre mouvement, qui s'appelle un mouvement pour la démocratie nouvelle, qui favorise la participation citoyenne, ne se positionne pas en principe d'abord sur l'obligation de consulter la population, ça m'étonne énormément.
Mme Roberge (Mercédez): ...première chose, nous ne sommes pas les verts. Le Parti vert a sa propre position, et ce n'est pas parce que notre fondateur est chez le Parti vert que nous devons avoir un lien avec la position du Parti vert. Ce n'est pas le cas du tout. Mais vous avez dit le mot clé: il faut que la population soit informée. Et l'idée, pour nous, ce n'est pas d'avoir peur de démagogie, c'est de comment s'assurer qu'un référendum, qu'un plébiscite sur une question comme celle-là, qui ne serait pas comme la question référendaire qu'on a connue, où les partis politiques sont bien impliqués, mais sur une question comme le mode de scrutin, comment... Quelles seraient les règles des camps, le oui et le non, envers un modèle? Quelle serait la question? Y aurait-il une sous-question: oui ou non au mode de scrutin proposé, ne donne pas la vraie réponse à oui ou non à la réforme et oui ou non au modèle? On a vu, en Colombie-Britannique et à l'Île-du-Prince-Édouard, une seule question dont on n'est pas capables de comprendre la réponse vraiment.
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(17 heures)
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M. Thériault: Ça va. Sur les modalités, je comprends que vous puissiez dire que l'on doit effectivement clairement identifier les paramètres de cela. Par contre, est-ce que vous pouvez vous positionner, prendre la position de principe que cela est incontournable dans un débat aussi fondamental dans notre démocratie, puisque vous visez à faire en sorte de rétablir justement la participation citoyenne, le lien de confiance des citoyens envers les institutions démocratiques? Est-ce que vous ne trouvez pas qu'il y a là une lacune dans votre position? Et je cherche à savoir pourquoi, nonobstant les modalités... En principe, pourquoi ne pas reconnaître aujourd'hui, d'entrée de jeu, qu'en principe c'est un incontournable?
Mme Roberge (Mercédez): Premièrement, c'est faux que nous n'avons pas misé sur votre rôle comme parlementaires; la Commission des institutions a débuté ses travaux parce qu'on l'a demandé. On a beaucoup travaillé le chemin parlementaire, beaucoup, mais on le travaille en demandant et en outillant la population pour qu'elle y intervienne. Pour nous, je ne veux pas sous-estimer le rôle des parlementaires, loin de là. La façon de voir, c'est que faisons le débat maintenant sur cet avant-projet de loi là, parlons de son adoption à un autre moment. C'est prématuré de parler de comment l'adopter alors qu'on est à l'étape d'un avant-projet de loi sur un mode de scrutin.
M. Thériault: Ça va. Alors, je vois que vous maintenez votre position du caractère prématuré du principe. Excusez-moi, c'est parce qu'on a très peu de temps, l'opposition officielle, pour poser des questions, alors vous me permettrez de poser une autre question.
Et vous parlez dans le sens que cette volonté de changement et de mode de scrutin est entièrement partagée par l'ensemble de la population au Québec. En tout cas, ça sonne comme ça. Avez-vous pris connaissance du récent sondage fait à la demande de l'Assemblée nationale, sondage SOM qui dit que un Québécois sur deux seulement considère que le débat est pertinent pour la démocratie, le débat qu'on tient aujourd'hui?
Puis, à propos de la consultation qui s'amorce, ce sondage révèle que 50 % n'y sont pas intéressés, que, des 46 % qui y sont intéressés, 27 % ne sont pas au courant. Est-ce que cela ne vient pas en quelque part donner un peu d'eau au moulin de la position qu'il faut effectivement, pour mettre la population dans le coup, l'interpeller en lui disant d'entrée de jeu, pendant ce débat, puisqu'on va les voir, qu'elle aura à trancher le débat dont on dit souvent, parmi les gens que vous représentez, que ça fait 40 ans que ça dure et qu'en quelque part il y a déjà un momentum? Moi, je trouve que le momentum est un peu amoindri à ce moment-ci.
Mme Roberge (Mercédez): C'est clair que, dans les chiffres que j'ai nommés, je n'ai jamais dit que des millions de personnes étaient au courant et capables de décider. Et c'est ça justement que, pour l'instant, il est prématuré de regarder dans un référendum. C'est qu'avant de penser à une question référendaire on a besoin d'une campagne d'éducation populaire pour que, le jour du référendum, les gens sachent comment comprendre la question, quoi voter, comment départager. La campagne référendaire n'est pas une campagne d'éducation populaire; elle doit précéder une campagne référendaire, si référendum il y a.
M. Thériault: Merci. Vous dites, à la page 8 de votre mémoire, que le statu quo ne revêt pas seulement qu'une distorsion mathématique, elle revêt aussi... elle a une implication qualitative. Vous dites: «Elles témoignent du fait ? ces distorsions témoignent du fait ? que l'Assemblée nationale ne joue pas suffisamment le rôle auquel nous sommes en droit de nous attendre ? c'est-à-dire ? un lieu de représentation des idées présentes au sein de l'électorat québécois.» Moi, ça m'a fasciné un peu comme déclaration. Je vous demanderais sans trop vouloir vous coincer, mais... Puisque vous l'avez écrit, pourriez-vous me donner cinq préoccupations de l'électorat québécois qui n'ont jamais été discutées à l'Assemblée nationale?
Mme Roberge (Mercédez): Qu'elles aient été discutées, peut-être. Mais il faut voir l'ampleur de la discussion. L'altermondialisation est-elle discutée à l'Assemblée nationale? Le mouvement en altermondialisme, par exemple ? c'est un sujet qui est porté par la population ? est-il à l'Assemblée nationale? Un exemple... Est-ce que tu voulais...
M. Dupuis (Martin): Oui. En fait, si vous permettez, je vais faire un retour sur vos trois questions précédentes. Je sais que vous avez un temps limité dans les questions que vous pouvez poser, mais rapidement j'aimerais intervenir sur certaines choses.
Sur la question du référendum, de la prise de position de principe, je ne sais pas si mes perceptions sont justes ou injustes, mais je semble percevoir qu'il y a en quelque sorte la présomption qu'une réforme du mode de scrutin ne saurait être légitime que si elle est endossée par voie référendaire, donc que l'Assemblée nationale ou...
M. Thériault: ...plébiscite.
M. Dupuis (Martin): En plébiscite, d'accord. Mais donc que l'Assemblée nationale ne serait pas un lieu légitime pour prendre cette décision-là.
De notre côté, il ne nous apparaît pas absolument nécessaire ? ce n'est pas qu'il y a une fermeture à la question, Mercédez a tout exposé les conditions préalables qui doivent exister ? mais n'est pas exclu non plus le fait de procéder par l'Assemblée nationale. Et l'Assemblée nationale, par le passé, a été, à plusieurs occasions, le lieu d'expression d'un large consensus, d'une unanimité en fait au sein ? en tout cas à ce moment-là ? des partis qui étaient représentés. On peut trouver un certain nombre de motions adoptées à l'unanimité sur des questions importantes et de projets de loi adoptés à l'unanimité, et, en ce sens, elle devient un lieu d'expression d'un très, très, très large consensus dans la société tout à fait légitime.
Ensuite de ça... Bon, je vais m'arrêter maintenant parce que j'ai perdu le fil sur la dernière question sur les opinions. J'y reviendrai peut-être.
M. Desmangles (Evans): J'ajouterai pour... Parmi l'ensemble des questions, vous avez parlé de la question référendaire parce que 50 % de la population n'était pas d'accord. Mais avez-vous essayé de poser la question: Est-ce normal que 20 % de la population du Québec représentant, entre autres, les membres des communautés ethnoculturelles ne soit pas présente à l'Assemblée nationale, ne soit pas prise en compte? Est-ce qu'il est normal, pour une société qui prône des valeurs d'égalité, de justice, d'inclusion, de participation, de faire en sorte que cette tranche de la population soit respectée? Est-ce que, comme parlementaires, vous n'avez pas une obligation de faire en sorte que ces citoyens à part entière soient dans les faits...
Le Président (M. Ouimet): Je dois terminer là-dessus, je vais aller du côté des citoyens. Alors, j'avais Mme Loucheur qui s'était inscrite, et puis par la suite M. Acharid. Mme Loucheur.
Mme Loucheur (Yohanna): Oui. Merci. La dernière intervention en fait m'amène à modifier un peu ma question ou à ajouter une sous-question, je ne sais pas. Mais il me semble qu'il y a une bonne partie des mesures qui peuvent être prises pour justement améliorer la représentation des femmes et la représentation des minorités à l'Assemblée nationale qui ne dépendent pas nécessairement du mode de scrutin, et donc je me demande jusqu'à quel point... Et je comprends qu'à travers les listes, à travers un système proportionnel, avec les listes, on peut effectivement peut-être accélérer les choses ou avoir des mesures qui sont pas possibles autrement, mais il y a tout un train de mesures, notamment les incitatifs financiers, que je pense que vous... avec lesquels vous êtes d'accord, qui peuvent permettre d'améliorer les choses sans nécessairement changer le mode de scrutin, ce qui m'amène à la question principale que j'avais.
Je me demandais si vous aviez à nous proposer une définition ou un critère objectif qui permettrait de déterminer l'appartenance d'un candidat ou une candidate à une minorité ethnoculturelle. C'est un point qui semble extrêmement difficile et qui prend une importance énorme si des incitatifs financiers sont rattachés à cette appartenance-là. On peut imaginer des débats, des contestations futures, et personne, jusqu'à présent, n'a pu nous soumettre un critère qui permettrait... quelque chose qui serait acceptable. Est-ce que vous y avez réfléchi?
Mme Roberge (Mercédez): Ce n'est pas dans le mandat du MDN d'aller dans le pointu, et il y a des groupes plus... Je vous souhaite de rencontrer des groupes qui vont pouvoir vous répondre là-dessus parce qu'effectivement ce n'est pas simple. Ce qui semblait dans l'air du temps, c'était une sorte de déclaration. Mais là-dessus effectivement la question est grande. Quand vous dites que les mesures pour les femmes et les diversités pourraient... Ah! Evans me dit que la Commission des droits l'a déjà défini.
M. Desmangles (Evans): C'est très clair, ça existe. Toute la documentation existe là-dessus. La Commission des droits de la personne, il y a des critères spécifiques.
Mme Roberge (Mercédez): Vous voyez? Donc, juste pour continuer sur les mesures pour l'égalité des femmes et la diversité ethnoculturelle, c'est une combinaison. Et puis ce n'est pas uniquement parce qu'il y a des règles de liste, c'est également parce que, comme société, si on se donne un nouveau mode de scrutin, on se donne le temps de l'apprendre, on se donne le temps de voir qu'est-ce que ça veut dire comme... quel message on s'envoie comme société lorsqu'on change un mode de scrutin et qu'en même temps on en profite pour mettre des mesures qui vont corriger des défauts qu'on connaît depuis longtemps et sur lesquels on n'a pas posé de gestes vraiment concrets, vraiment efficaces. Alors, ce n'est pas uniquement la mesure elle-même, mais aussi le message qu'on s'envoie comme société en disant: C'est une institution qu'il est normal de revoir après 200 ans, ce n'est pas du luxe. Tant qu'à la revoir, on doit la revoir en fonction de l'ensemble des défauts qu'on constate à l'Assemblée nationale. Et les mesures seules ne feraient pas toute la différence, le mode de scrutin sans mesure ne ferait pas non plus véritablement la différence, c'est une combinaison. Et utiliser les deux combinaisons est un momentum gagnant pour l'éducation populaire de la population et pour son appropriation de l'institution.
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(17 h 10)
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Le Président (M. Ouimet): Bien. Alors, j'ai M. Acharid, Mme Proulx et M. Boivin. Donc, M. Acharid.
M. Acharid (Mustapha): Merci, M. le Président. Merci à vous. Deux petites questions. Étant donné qu'on va avoir des candidats issus de circonscriptions et des candidats de liste, est-ce que leur rôle ou leur importance va être différente? Ça, c'est ma première question. Ma deuxième question, c'est: La double candidature, qu'est-ce que vous en pensez?
Mme Roberge (Mercédez): Pour ce qui est du rôle des membres de l'Assemblée nationale, l'expérience des autres pays montre que, par exemple en Allemagne, une fois autour de la même table, il n'y a plus de différence. Concernant leur rôle envers la population, il est à définir. Peut-être qu'il n'y en aura aucun et peut-être que, s'il y a un changement, ce sera pour le mieux. Pourquoi vouloir toujours accoler le rôle de représentation à un rôle de représentation géographique? Pourquoi ça ne deviendrait pas des spécialistes de sujets en particulier, des porteurs et des porteuses de dossiers particuliers, les dossiers qui dépassent les divisions géographiques? Alors, peut-être pareil, peut-être différent, mais pourquoi ne pas voir d'autres façons de faire?
Votre deuxième question, sur la double candidature, pour nous, la double candidature, c'est une façon, dans un modèle mixte, de s'assurer que les gestes, les beaux gestes qu'on va poser pour structurer les listes de façon à ce qu'elles soient égalitaires, inclusives... partout, pour s'assurer que, dans les circonscriptions, on retrouve également l'égalité, la diversité. La double candidature nous permet, en agissant sur les listes, de pouvoir également modifier la carte pour ne pas uniquement se fier... Parce que présentement on n'a pas d'image globale de ce qu'un parti propose en termes d'égalité, en termes de diversité ethnoculturelle, par exemple. On sait, après les élections, quels comtés ont, par exemple, porté au pouvoir une personne de la diversité, mais ce n'est pas une responsabilité collective, et on n'a pas de regard collectif là-dessus. Si on agit sur les listes, on agit donc sur la répartition, la distribution. Si on a des listes égalitaires, ça va être distribué partout, dans toutes les circonscriptions.
Donc, pour nous, la double candidature est une prérogative. On suppose que les partis vont s'en servir. La double candidature, qu'elle soit permise permet à chacun des partis d'examiner sa stratégie et de l'utiliser ou non. Mais on peut concevoir facilement que, lorsqu'on est dans une circonscription, qu'un candidat, par exemple, ne veuille pas prendre la chance de ne pas rentrer dans sa circonscription ni ne pas prendre la chance que son nom soit au bon... que la liste arrive à son nom lors de la distribution.
Le Président (M. Ouimet): Bien. Merci. J'ai Mme Proulx et puis, par la suite, M. Boivin. Il reste 3 min 15 s.
Mme Proulx (Mélanie): Je vais essayer d'aller rapidement. On n'a pas abordé la question de la participation des jeunes. Je voudrais savoir si ça fait partie des objectifs du MDN et si vous avez pensé à des mesures qui pourraient augmenter la participation des jeunes à la vie politique québécoise de façon active, à l'Assemblée nationale ou non, simplement en augmentant le vote des jeunes. Est-ce que vous avez réfléchi à la question?
Mme Roberge (Mercédez): Sans que ce soit spécifiquement sur les jeunes, pour nous, c'est évident que le geste de réformer le mode de scrutin et que ce soit pour un modèle qui vraiment va corriger la situation, ça ne peut pas nuire au taux de participation, par exemple. Ça ne peut régler seul le taux de participation, mais ne serait-ce que, pour quelques pourcentages, d'augmenter grâce à la campagne d'éducation populaire autour de l'instauration d'un nouveau modèle... C'est une question d'éducation, les jeunes... Si les jeunes apprennent tôt l'importance de voter et que leur vote sera pris en compte... Lorsqu'on va voter en ayant la conviction que notre vote ne sera pas pris en compte, ça ne peut pas être un encouragement à aller voter. Et, nous, on pense que l'instauration d'un mode de scrutin, la campagne va donner de l'éducation à ce moment-là. Donc, quelques points gagnés là, quelques points gagnés par d'autres mesures, au total on pourrait, par exemple, augmenter le taux de participation des jeunes mais pas uniquement des jeunes.
Mme Proulx (Mélanie): Je suis d'accord avec vous là-dessus, mais j'aimerais savoir davantage, là, comment est-ce qu'on pourrait améliorer les jeunes qui se portent candidats, finalement, là, tu sais. Peut-être que, si on pouvait se retrouver plus, on serait plus représentés aussi à l'Assemblée. Ce serait plus à ce niveau-là que j'aimerais savoir, là.
Mme Roberge (Mercédez): Je sais qu'il y a des regroupements de jeunes qui vont se présenter ici. Ils ont une expertise que je reconnais en la matière, ce n'est... Nous savons reconnaître les expertises des autres là-dedans et nous n'avons pas proposé rien de spécifique pour les jeunes parce qu'on voit ça comme un ensemble.
Le Président (M. Ouimet): Bien. 1 min 15 s, M. Boivin.
M. Boivin (Guillaume): Rapidement. Vous privilégiez, tout comme plusieurs autres intervenants, la majoration du remboursement pour les partis et faire élire des candidates, mais pas d'étendre sur le principe au pourcentage des candidates au départ. Bien sûr, on peut penser qu'il ne faut pas se limiter aux voeux pieux et récompenser les résultats concrets, mais, en ne récompensant pas aussi les efforts, ne risque-t-on pas, premièrement, de perdre l'occasion de favoriser les candidatures féminines dans les petits partis et de surfavoriser économiquement les gros partis qui font élire des députés par rapport à ces petits partis?
Mme Roberge (Mercédez): Je peux comprendre que les petits partis qui ont peu de chances d'avoir des sièges considèrent cette règle-là moins favorable, sauf que notre rôle, à nous, n'est pas de trouver les règles qui accommodent les petits, ou les gros, ou, peu importe, aucun des partis, c'est à eux à porter ça. Mais il y a quand même... les candidatures seront... en proposant des candidatures diversifiées, égalitaires, tous les partis, les petits et les gros, vont bénéficier de la même visibilité que va donner, lors des élections, leur conformité à ces règles-là. Alors, les petits partis aussi vont bénéficier...
Le Président (M. Ouimet): Alors, merci. Il reste 1 min 35 s pour le côté ministériel. M. le ministre.
M. Dupuis (Martin): Si vous me permettez, très, très court, deux éléments.
M. Pelletier: Oui, avec plaisir. Sur mon 1 min 35 s, allez-y.
M. Dupuis (Martin): Deux petites choses. Une de nos recommandations, on n'exclut pas complètement parce qu'on recommande de bonifier, par exemple, le remboursement pour les partis qui ont un certain nombre de candidatures féminines. Donc, l'effort est aussi reconnu; la recommandation 7.4.1 dans notre mémoire complet.
Mme Roberge (Mercédez): ...
M. Dupuis (Martin): Un léger commentaire pas en lien avec les questions qui ont été posées. Évidemment, la question de la représentation égalitaire des femmes et de l'augmentation de la représentation de la diversité monopolise probablement une très large part de vos préoccupations et de votre réflexion, vos questions en sont le reflet. Je veux revenir par contre sur aussi d'autres éléments de la position du MDN. Il y a quatre résultats recherchés: l'égalité hommes-femmes, la représentation de la diversité ethnoculturelle, mais aussi le pluralisme politique, qui est une question extrêmement importante également qui n'a pas eu l'occasion d'être explorée en raison du temps limité puis des questions qui ont surgi. Mais c'est aussi une dimension très importante de nos revendications et de la raison pour laquelle on cherche à avoir une réforme du mode de scrutin.
Le Président (M. Ouimet): Il reste 15, 20 secondes, M. le ministre.
M. Pelletier: Simplement, puisqu'il me reste 15 secondes, vous remercier et remercier votre organisation aussi pour ce qu'elle a fait pour la démocratie québécoise depuis, quoi, 1999, je crois? C'est ça? Et je l'apprécie beaucoup. Et tout ce que vous avez fait également, là, de pression pour que la commission se tienne, vous voyez, ça a porté fruit. Merci.
Le Président (M. Ouimet): Alors, merci à vous de votre participation aux travaux de l'Assemblée nationale. Je vous souhaite un bon retour.
Et, sur ce, j'ajourne les travaux au mercredi 25 janvier, à 9 h 30, alors que la commission poursuivra ses auditions publiques dans le cadre de la consultation générale à l'égard de l'avant-projet de loi intitulé Loi électorale. Merci.
(Fin de la séance à 17 h 19)