Journal des débats de la Commission spéciale sur les impacts des écrans et des réseaux sociaux sur la santé et le développement des jeunes
Version préliminaire
43e législature, 1re session
(début : 29 novembre 2022)
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Le
lundi 16 septembre 2024
-
Vol. 47 N° 2
Consultations particulières et auditions publiques sur les impacts des écrans et des réseaux sociaux sur la santé et le développement des jeunes
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13 h 30 (version non révisée)
(Quatorze heures)
La Présidente (Mme Dionne) : Alors,
bon lundi à tous et à tous. Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de
la commission spéciale sur les écrans... L'impact... les impacts des écrans et
des réseaux sociaux sur la santé et le développement des jeunes ouverte. Donc
je vous souhaite la bienvenue et je demande de fermer vos cellulaires pour ceux
et celles qui seraient encore ouverts. Donc, la commission spéciale est réunie
afin de poursuivre les consultations particulières et auditions publiques sur
les impacts des écrans et des réseaux sociaux sur la santé des jeunes. Mme la
secrétaire, y a t il des remplacements?
La Secrétaire : Non, Mme la
Présidente.
La Présidente (Mme Dionne) : Donc,
nous entendrons cet après-midi. Mme Catherine l'Écuyer, cherche... voyons,
pardon, chercheuse, consultante, conférencière et autrice. La docteure Victoria
Dunckley, physicienne et psychiatre, Mme Caroline Fitzpatrick, professeur
associé à la faculté d'éducation de l'Université de Sherbrooke. Option
Consommateurs. Et finalement, pour terminer cette commission, la Fédération des
centres de services scolaires du Québec. Donc, dans un premier temps, je
souhaite la bienvenue à Mme L'Écuyer, qui est avec nous ici cet après-midi en
visioconférence. Donc, je vous rappelle, Mme L'Écuyer, que vous disposez de 10
minutes pour nous faire votre exposé. Vous pourriez peut-être vous présenter
aussi en entrée de jeu et, par la suite, nous procéderons à une séance de
questions avec tous les membres de la commission. Donc, la parole est à vous.
Mme L'Ecuyer (Catherine) : Merci.
Je vous remercie. Catherine L'Écuyer. J'ai un doctorat en éducation et
psychologie. Je suis avocate. J'ai travaillé dans une entreprise de
communication Micro Cell Fido pendant quelque temps à Montréal et j'ai ensuite
fait des études en éducation, psychologie et je demeure à Madrid. Donc mon
français est un peu rouillé, là. J'espère que ça va se comprendre. Donc je
commence. Mais en fait, tout d'abord, je tiens à vous remercier de créer cette
commission qui a pour but d'aborder une question aussi importante que celle de
l'impact des écrans et des réseaux sociaux sur les enfants et les adolescents.
Pour comprendre comment la technologie affecte nos enfants, il est important de
comprendre comment nos enfants apprend... apprennent, comment ils apprennent et
ce qui est réellement et réellement nécessaire à chaque étape de leur
développement. Donc, c'est important de comprendre. On pourrait les appeler
peut-être les lois naturelles de l'enfant. Montessori dit d'ailleurs :
Lorsque l'enfant montre un comportement inattendu qui nous déplaît, l'adulte
arrive rarement à la conclusion que ce comportement est un cri, une
protestation de la nature, parce qu'on a imposé à l'enfant quelque chose qui va
à l'encontre de sa dignité ou qu'il a été privé de quelque chose d'essentiel
pour son développement. Alors, comment les enfants apprennent-ils? Donc, entre
0 à 6 ans, les enfants apprennent de deux façons. Premièrement, par le biais
des expériences sensorielles de qualité, adaptées à leur rythme interne et
deuxièmement, par le biais des interactions personnelles avec leurs parents.
Comme le docteur Chicoine dirait leur figure d'attachement. De 0 à 6 ans, la
pensée abstraite de l'enfant se développe. Donc, c'est la raison pour laquelle
les enfants n'apprennent pas via un écran. En fait, la littérature pédiatrique
parle d'ailleurs, là, on parle de l'effet déficitaire de la vidéo sur l'apprentissage.
Cet enfant et cet effet, pardon, décrit la difficulté qu'a un enfant à
traduire une image en deux dimensions, donc une image en ligne sur un plan en
trois dimensions, donc dans le monde réel. En autres termes, lorsqu'un enfant
vit une expérience virtuelle, on pourrait parler d'un déficit d'apprentissage.
La littérature pédiatrique parle également de l'effet déplacement. Donc en quoi
consiste cet effet? C'est l'idée. On pourrait dire en langage des affaires, du
coût d'opportunité. Donc, il ne suffit pas de dire que quelque chose ne fait
pas trop mal ou n'est pas trop bon. Une journée dure...
14 h (version non révisée)
Mme L'Ecuyer (Catherine) : ...24 heures,
et ce que les enfants consacrent à des activités... à des activités qui ne
contribuent pas à leur bon développement, bien, on pourrait dire que c'est du
temps perdu pour leur bon développement. On ne doit pas oublier, là, que les
premières années du développement de l'enfant sont des étapes critiques,
notamment pour le développement neurologique. Vous allez peut-être vous rendre
compte que je fais beaucoup de... je parle surtout de la première enfance parce
que c'est le... c'est l'étape où je suis plus spécialiste, là, donc je ne vais
pas rentrer sur la question de l'adolescence.
En effet, la littérature scientifique
souligne une série d'inconvénients lorsqu'un enfant est exposé à un écran dès
son plus jeune âge, donc on peut parler, entre autres, de l'impulsivité, l'inattention,
la perte d'attention, la diminution du vocabulaire, entre autres. C'est la
raison pour laquelle d'ailleurs, l'Académie américaine de pédiatrie recommande
zéro temps d'écran pour les 0 à 2 ans et moins de 1 heure par jour
pour le... pour le... le segment de 2 à 5 ans. L'Association canadienne de
pédiatrie arrive aux mêmes conclusions et affirme clairement : Aucune
preuve... Et ça, c'est une citation que je trouve très intéressante. Aucune
preuve ne soutient l'introduction des technologies chez l'enfant. Ces
recommandations ne sont pas des recommandations, des suggestions ou des
conseils pédagogiques. On pourrait parler... En fait, ce sont des
recommandations de santé publique. Les critères éducatifs devraient être
beaucoup plus restrictifs puisque ce qu'on cherche dans l'éducation, ce n'est
pas d'éviter le mal, mais de viser à l'excellence. Par conséquent, une école
qui aurait des écrans dans ses classes préscolaires ne serait pas une école de
qualité. L'utilisation des écrans devait donc... devrait donc être interdite à
ce stage, même les réseaux sociaux, tout ce qui est associé avec les écrans,
puisqu'on parle d'un enjeu de santé publique.
Pourquoi, alors qu'il s'agit d'un enjeu de
santé publique, l'opinion générale était-elle réfractaire à ce discours
jusque... jusqu'il y a quelques mois? On pourrait dire quelques mois après la
pandémie. Parce que nous sommes confrontés, on pourrait dire, à l'une des
industries les plus puissantes de notre époque qui dispose de budgets illimités
pour nous faire penser que ces produits contribuent au bon développement de nos
enfants. Réalité numérique, santé numérique, enfant numérique, brèche
numérique, avenir numérique, compétences numériques. Ils ont su introduire dans
notre langage quotidien des manières de comprendre le monde qui ont changé
notre mentalité et qui nous ont fait considérer leurs produits comme un facteur
essentiel et incontournable pour l'être humain. Les entreprises technologiques,
qu'elles vendent des appareils, des applications ou des plateformes web n'ont
pas pour mission de fournir des appareils, des plateformes ou des contenus à
leurs utilisateurs ou à leurs clients. On pourrait dire plutôt que leur mission
est de capter l'attention des utilisateurs ou de leurs clients pour vendre ce
temps d'attention aux entreprises qui sponsorisent leurs contenus. Pour ce
faire, ils embauchent les esprits les plus brillants, psychologues, ingénieurs,
qui savent intégrer des améliorations technologiques, par exemple le scroll
infini ou des contenus addictifs pour retenir le plus longtemps possible l'attention
en ligne de leurs utilisateurs.
Pour donner des bons résultats en bourse,
ces entreprises doivent augmenter leur clientèle en intégrant des comptes de
mineurs et en vendant des données à des tiers. Comme disait Milton Friedman, l'une
des icônes bien connues du capitalisme : La responsabilité de l'exécutif
est de diriger les affaires conformément aux souhaits de ses actionnaires, ce
qui consiste généralement à gagner le plus d'argent possible tout en respectant
les lois et les coutumes. En d'autres termes, les dirigeants de ces sociétés
ont l'obligation par la loi de faire passer les intérêts de leurs actionnaires
avant ceux des enfants, et les seules limites à cette logique sauvage, on
pourrait dire, sont les lois que vous édictez pour protéger les enfants qui
sont les plus vulnérables.
Par conséquent, penser que la solution
réside dans ce qu'on parle. Je ne sais pas au Québec si on parle de ça parce
que je ne suis pas très présente dans les nouvelles québécoises, je vous avoue,
là. Bien, en Espagne, on parle souvent d'autorégulation de l'industrie et
dans... et on parle de l'exercice de sa responsabilité sociale, mais je pense
que c'est tout à fait naïf et ce serait ignorer complètement le l'ABC de la
logique commerciale. C'est cette même industrie d'ailleurs qui consacre
plusieurs millions aux budgets de marketing sous la bannière de la
responsabilité sociale des entreprises et qui finance une grande partie de la
recherche sur ces produits, donne des traitements de faveur à certains
directeurs d'école, avec des invitations et des cadeaux, finance des recherches
universitaires sur des sujets susceptibles d'avoir un impact sur leur modèle d'affaires
et sur la réglementation de leurs activités, comme la protection des données.
Elle sponsorise également de plusieurs... de nombreuses conférences dans des
congrès pédagogiques, donne des récompenses pour les enseignants, paie les
honoraires des intervenants dans des conférences destinées aux enseignements...
aux enseignants, pardon, et elle... elle donne aussi des titres fictifs aux
enseignants...
Mme L'Ecuyer (Catherine) : ...qui
utilise des produits en classe pour les établir comme des experts, des titres
qui, selon moi, n'ont pas de base objective, là, «distinguished educators», je
ne sais pas si ça vous dit quelque chose, ou des titres du genre, et investit
aussi dans des publicités qui représentent un pourcentage important des
revenus, de leurs revenus.
Donc, je pense qu'il est bien temps de
mettre de l'ordre dans tout ça. Dans un conflit d'intérêts évident, tous ceux
qui reçoivent des avantages des entreprises technologiques étalent un visage
amical, non, et évidemment parlent un langage qui est très... on pourrait dire
par leur langage, donc, santé numérique, usage responsable, la technologie est
neutre, ça dépend de la façon dont on l'utilise, et, souvent, restent
silencieux sur les inconvénients de leurs produits.
• (14 h 10) •
Donc, je ne sais pas c'est quoi, la
situation au Québec, je vous répète, là, je ne suis pas très présente, mais
ici, en Espagne, on parle du dilemme : interdire ou ne pas interdire.
Donc, selon moi, c'est un dilemme qui est simpliste et qui ne répond pas au
problème fondamental. Donc, il ne s'agit pas de débattre d'interdire ou non
quelque chose aux enfants ni de commencer à lancer... Je ne sais pas, ici,
c'est l'arsenal politique de lutte entre les positions conservatrices et
progressistes. Je pense que ce n'est pas ni progressiste ni conservateur de
laisser les enfants faire ce que l'industrie les incite à faire ou de laisser
les lois du marché passer avant les intérêts de l'enfant.
Il s'agit de protéger les enfants d'une
industrie dont les intérêts ne coïncident pas avec ce qu'exige leur nature.
Donc, laisser les entreprises technologiques décider de ce qui doit ou non
entrer dans une salle de classe ou dans une cantine, ce serait comme confier à
Pizza Hut le soin de préparer le menu des cantines scolaires.
Donc, quelle serait la solution? Est-ce
que... la solution se résume-t-elle à faire d'Internet un endroit plus sûr,
plus sécuritaire. Encore une fois, je pense que nous sommes au niveau des
approches simplistes. Bien sûr, on doit essayer de faire d'Internet un endroit
sécuritaire, mais je pense que... parce qu'Internet, c'est un endroit
merveilleux où un esprit éduqué en mode analogique peut trouver des trésors, on
pourrait dire, mais les efforts des entreprises technologiques pour tenter de
nettoyer Internet ne peuvent pas rassurer les parents en leur offrant une
fausse sécurité. Je pense qu'on doit être réaliste, Internet ne sera jamais un
endroit totalement sûr pour un esprit encore immature. Nos enfants ont un
esprit immature. Donc, pour toutes ces raisons, et c'est difficile pour moi de
résumer tout ce que je veux dire en 10 minutes, je pense que, et c'est toujours
ce que j'ai défendu depuis 2012, la meilleure préparation pour le monde
«online», le monde en ligne, c'est le monde «offline», c'est le monde, c'est le
vrai monde, le monde, c'est la réalité analogique. Donc, je suis prête pour
écouter vos questions.
La Présidente (Mme Dionne) : Merci
beaucoup, Mme L'Ecuyer. Alors, qu'on soit en Espagne, qu'on soit au Québec, je
pense qu'on se pose les mêmes questions. Alors, oui, interdire ou ne pas
interdire. Maintenant, c'est ce à quoi la commission va servir, d'une part,
c'est de se documenter et d'entendre les experts comme vous, là, nous parler
des effets des écrans. Alors, voici où nous en sommes. Est-ce que j'ai un
membre qui souhaite débuter la période des questions? Députée de Hull.
Mme Tremblay : Alors,
bonjour. Merci pour cette présentation. Vous avez terminé, puis je suis un peu
restée, tu sais... je voudrais aller un petit peu plus loin... s'agit pas...
préparer le monde, mais il faut préparer le monde «offline». Vous avez terminé
sur cette phrase. Alors, qu'est-ce qu'il faut faire? Quels sont les moyens
d'action que l'on doit poser pour mieux préparer le monde «offline», comme vous
l'avez dit? Vous ne l'avez pas beaucoup détaillé, mais j'aimerais ça vous
entendre davantage sur cela.
Mme L'Ecuyer (Catherine) : Oui,
bien, ce n'est pas... en fait, c'est préparer l'enfant pour être capable de
gérer le monde «online», mais cette préparation doit avoir lieu dans le
«offline». C'est ce que je voulais dire. Je ne sais pas si j'ai bien expliqué
ce que je voulais dire, mais c'est ça que je voulais dire. Donc, la meilleure
préparation pour être dans le monde «online», c'est être dans le monde offline.
C'est en étant dans le monde «offline».
En quoi ça consiste? Bien, en fait, il y a
plusieurs façons de le faire, là. La première chose, je vous dirais... c'est
impossible de transmettre à un enfant le sens de l'intimité et du privé si cet
enfant-là a un dispositif ou un appareil numérique dans ses mains, avec six,
sept, ou 12 ans, ou 16 ans, même. Donc, c'est important que l'enfant comprenne
en quoi consiste l'intimité personnelle, la pudeur, le sens du privé, le sens
du public, c'est quoi qu'on partage, c'est quoi qu'on ne partage pas. Et ça, ça
se développe dans le monde, dans le vrai monde. Donc, c'est pour ça que je dis
que la meilleure façon c'est de... c'est de retracer, c'est... comment qu'on
dit en français, ce serait d'attendre pour donner un dispositif à l'enfant le
plus tard possible...
Mme L'Ecuyer (Catherine) : ...Une
autre chose qui doit aussi... par exemple, un enfant sur Internet, en fait, on
pourrait parler du point de vue des... neurologique, là, les fonctions
exécutives, par exemple. Une d'elles, c'est être capable de gérer les stimuli,
donc de dire non, de dire oui. Mais pour être capable de dire non, pour dire...
pour être capable de dire oui à quelque chose qui se présente devant nous sur
un écran, l'enfant doit avoir plusieurs qualités. La première qualité, il doit
être capable de dire non aux stimuli. Donc, c'est la... on dit «inhibition» en
anglais, je ne sais pas, en français, la capacité d'inhibition, là. Et la... Et
la deuxième, c'est être capable de reconnaître ce qui est intéressant, ce qui
est pertinent pour l'enfant.
Donc, dans ce sens-là, je vais vous, je
vais vous raconter une histoire rapide. Ils ont fait une étude de l'université
de Stanford il y a quelques années, et ils ont comparé deux groupes
d'étudiants. Donc, il y avait un groupe d'étudiants qui faisait du... la
multitâche technologique intense et un autre groupe d'étudiants qui utilisaient
les écrans, mais de façon... en séquence, là, une chose après l'autre. Ils
comparaient les deux groupes. Je ne vais pas vous raconter toute l'étude, c'est
un peu lent, mais il y avait trois critères. Donc un des critères, c'était la
mémoire de travail, un autre, c'était la capacité d'osciller entre les tâches,
et la troisième, c'était la capacité de reconnaître les informations
pertinentes pour pouvoir décider qu'est-ce que je fais maintenant. Donc, la
conclusion de l'étude, c'était que les enfants... les jeunes, pardon, ce
n'étaient pas des enfants, c'étaient des étudiants universitaires,
imaginez-vous. Donc il disait, le directeur de l'étude qui s'appelle Clifford
Nass, disait que les jeunes qui faisaient de la multitâche technologique
intense étaient tombés en amour avec la non-pertinence. Donc l'irrelevant,
«irrelevancy» en anglais, non?
Donc, je ne sais pas si je m'explique, là,
mais une personne qui est constamment en contact avec un dispositif qui la
bombarde de stimuli constamment, donc c'est une personne qui n'est plus capable
de reconnaître ce qui est pertinent et ce qui n'est pas pertinent. Donc, ça,
c'est la capacité de reconnaître ce qui a du sens, ce qui est... ce qui fait du
sens et ce qui est pertinent. C'est quelque chose qui ne se développe pas en
ligne. C'est quelque chose qui se développe dans le vrai monde. Quand une
personne est consciente de c'est quoi mon... ma mission vitale, c'est quoi
mon... c'est quoi qui donne un sens à ma vie ce matin, c'est quoi ma mission
professionnelle, personnelle et au niveau de ma famille, non? Donc c'est un des
problèmes. C'est qu'avant de développer le sens de la pertinence et le sens de
la vie d'un enfant, c'est qu'on les a... on leur a donné ce dispositif
technologique qui fait en sorte qu'ils perdent le sens. Parce que moi, à
1 heure du matin, je vais avoir 50 ans dans quelques... dans quelques
jours, à 1 h du matin, je me retrouve en train de m'intéresser pour la
nouvelle du bas ou du pantalon de Michael Jackson qui a été vendu pour
300 000 $ dans une «auction» de Christie's, là, et j'ai dit :
Qu'est-ce que je suis en train de faire, d'écouter cette nouvelle-là à 1 h
du matin, non? Puis puis j'ai quand même un certain sens de la pertinence. On
peut s'imaginer un enfant de 12 ans ou de 16 ans qui n'a pas encore
développé le sens de la pertinence, dans le monde virtuel, c'est vraiment un
enfant qui va un peu partout, mais qui n'a pas de direction puis qui perd le
sens de la pertinence.
Mme Tremblay : J'aurais une
dernière question.
La Présidente (Mme Dionne) : Oui,
certainement, Mme la députée.
Mme Tremblay : Alors, juste
en dernière question, vous avez parlé au niveau, bien, de la petite enfance, au
niveau du préscolaire. Donc, préscolaire, c'est quatre, cinq ans, maternelle,
qu'on appelle. Puis là, vous nous dites : C'est un enjeu de santé
publique, donc c'est... ça devrait être interdit. Donc, les écrans, à cet
âge-là, parce que là on dit que c'est autour d'une heure par jour, mais dans la
classe, en tant que tel, à cet âge-là, pour vous, ça devrait être complètement
interdit, peu importe que ça devient un outil...
Mme L'Ecuyer (Catherine) : Oui.
En fait je vais préciser quelque chose que j'ai peut-être mal expliqué. Mais
quand je parle de préscolaire, là, moi, je parle de 0 à 6. Donc, parce qu'en
Espagne, là, on commence... on parle de l'école à quatre mois. Donc, c'est
peut-être... Le préscolaire au Québec, c'est une expression qui est peut-être
consacrée pour parler d'une autre étape, là. Moi, je parlais d'avant l'école
primaire, donc je parlais de 0 à 5. En fait, c'est 0 à 6, là, mais peut-être 0
à 5, c'est mieux, parce que les recommandations pédiatriques parlent de 0 à 5,
ne parlent pas de 0 à 6. Donc, quand je vous dis que c'est... une école ne
devrait pas avoir des écrans dans les salles de classe, vous avez bien raison,
vous me dites : Oui, mais de 2 à 5, on parle d'une heure, on ne parle pas
de zéro. Donc moi, ce que je vous rappelle, c'est qu'on parle d'une heure, mais
on ne parle pas d'une heure parce que ça contribue au bon développement de
l'enfant ou parce que l'enfant peut apprendre par le biais de l'écran, on parle
d'une heure parce qu'on parle aux parents. On dit : ça ne fait pas trop
mal, 1 h, mais attention au contenu, et souvenez-vous que ça ne contribue
pas à l'apprentissage puis au bon développement. Donc, ça, ça veut dire que l'écran,
de 0 à 5 ans, n'a pas sa place dans les salles...
Mme L'Ecuyer (Catherine) : ...place
dans les salles de classe. Donc, ça a sa place, peut-être, quand une maman ou
un papa sont en train de donner les bains. Ils ont trois enfants, ils ont deux
mains, donc ils ont besoin, peut-être, de mettre Dora l'exploratrice pendant
qu'ils donnent le bain à leurs enfants, ou l'abeille Maya, là, qu'on écoutait
quand on était plus jeunes. Mais ce n'est pas la même chose à l'école, parce
qu'on n'envoie pas nos enfants à l'école pour qu'ils voient La Petite Sirène ou
des contenus de Disney. On envoie nos enfants à l'école pour qu'ils puissent se
développer, bien apprendre des choses. Donc, ce n'est pas les... on pourrait
dire que les écrans n'ont pas leur place, de 0 à 5 ans, dans les écoles.
Mme Tremblay : ...
Mme L'Ecuyer (Catherine) : Est-ce
que vous m'entendez? Parce que je pense que le... Je ne vous ai pas entendue,
la dernière phrase.
Mme Tremblay : J'ai
dit : Merci beaucoup pour vos réponses.
Mme L'Ecuyer (Catherine) : Ah!
merci à vous.
• (14 h 20) •
La Présidente (Mme Dionne) : Oui,
on vous entend très bien, Mme L'Ecuyer. Mme la députée de Bourassa-Sauvé.
Mme Cadet : Merci, Mme la
Présidente. Bonjour, Mme L'Ecuyer, merci beaucoup pour votre plaidoyer
aujourd'hui, très intéressant. Dans la continuité des questions de ma collègue,
je m'interrogeais, parce que vous vous êtes, effectivement, donc, beaucoup
concentrée sur la petite enfance, vous venez de préciser 0 à 6 ans. Vous avez aussi
dit, donc : Il faudrait, en fait, comme parents, donner un dispositif à
l'enfant le plus tard possible. Donc, j'aimerais voir... peut-être vous
entendre, donc, sur vos recommandations passé la petite enfance. Parce
qu'évidemment, donc, dans la commission spéciale, on s'interroge, donc, aux
différentes étapes, donc, de la vie d'un jeune, la petite enfance, ensuite,
bon, primaire, secondaire, bon, même, donc, jusqu'à l'âge de 25 ans. Donc, pour
vous, comment est-ce que vous voyez le continuum de recommandations,
dépendamment du niveau de maturité du développement de l'enfant?
Mme L'Ecuyer (Catherine) : Oui,
bien, en fait, c'est une question qui est très complexe pour le peu de temps
qu'on a, mais je vais essayer de répondre à quelque chose que... de... Il faut
vraiment parler du type de dispositif, de l'âge, puis il faut parler du
contexte aussi. Par exemple, si on parle de... Moi, je parle de l'école
surtout, là, parce que c'est ma spécialité, là, je suis spécialiste en théorie
éducative. Donc, quand on parle de l'école primaire, bien, c'est certain que
les écrans peuvent... il y a... interférer avec l'apprentissage de la lecture
et de l'écriture, parce que... Il y a plusieurs études qui confirment que
l'apprentissage de la lecture et l'écriture doit se faire à la main pour avoir
des bons résultats. Donc, on a essayé de le faire à l'écran et sur le...
comment on appelle ça en français, là, le... Mais c'est... on a été
plusieurs...
Moi, je vous le dis, on est dans une
espèce d'expérimentation à grande échelle. C'est aussi simple que ça, là.
L'industrie technologique, quand ils ont rentré les tablettes dans les salles
de classe, il n'y a pas eu de preuve qui a été faite, là. Moi, je suis avocate.
Je vous dis, il y a le fardeau de la preuve, en droit, qui doit être fait, et
le fardeau de la preuve, bien, il est double, dans ce cas-là, puis il est sur
les épaules des entreprises technologiques. Le premier fardeau de la preuve,
c'est de prouver qu'il y a des effets positifs sur l'apprentissage de nos
jeunes pour chaque étape où est-ce qu'on introduit les tablettes dans les
classes. Et le deuxième fardeau de la preuve, c'est de prouver qu'il n'y a pas
d'effets négatifs sur le développement et l'apprentissage des jeunes.
Donc, on est en 2024. Les tablettes ont été
introduites dans les salles de classe à partir... je vous dirais, en 2017. Ça a
commencé... En 2015. Ça a commencé à être très fort en Espagne. Et on est
toujours en train de réclamer les preuves et on est toujours à l'attente, on ne
les a pas. Donc, je pense que ce qu'il y a eu ici c'est une espèce de... on a
fermé les yeux, on a dit : O.K., on va rentrer ça dans les classes, parce
que ça a l'apparence de modernité, de progrès. Et puis là on se rend compte que
ça ne fonctionne pas. Les professeurs se plaignent, les parents sont
déboussolés et les experts, ils disent : Bien, on le savait. En fait, moi,
je peux vous dire que je le savais, parce qu'en 2015 j'ai écrit un livre sur ce
sujet-là puis j'ai dit : Bien, c'est une erreur dont on va se... on dit
«repentir», là. Donc, je pense que ça a été une erreur.
Moi, je pense que, quand... Il n'y a pas
d'âge spécifique où est-ce qu'on peut dire : Une personne est prête. Ça
dépend de chaque personne. Chaque personne a un cycle de maturité différent.
Mais c'est sûr qu'avant 16 ou 18 ans... Je sais que c'est presque... c'est un
scandale, ce que je vais vous dire, là, je suis consciente de ça. En Espagne,
c'est assez scandalisant, ce que je dis, mais ça fait depuis 2014 que je le
dis. Mais là c'est... Je vous avoue que c'est assez moins scandalisant depuis
l'année passée, mais moi, j'ai toujours dit qu'avant 16 ou 18 ans personne ne
devait avoir un «smartphone». Donc, je ne pense pas qu'on doit faire une
interdiction légale du gouvernement, là, mais moi, je parle, là, d'une
recommandation éducative. Donc, je ne pense pas que les parents devraient
acheter un «smartphone» ou un téléphone intelligent à leurs enfants.
Tu sais, il y a plusieurs choses qui sont
interdites, hein? On parle, avant... on ne peut pas acheter de l'alcool, du
tabac, la pornographie avant 18 ans. Bien, pourquoi est-ce qu'on peut avoir un
dispositif qui est tout à fait...
Mme L'Ecuyer (Catherine) : ...qui
rend nos enfants accros avant 18 ans. Donc, moi, je pense que c'est une
erreur. Donc, ça, c'est... ça, c'est mon opinion qui est basée sur la lecture
de plusieurs études, là.
Mme Cadet : Puis là vous
parlez du dispositif. Au Québec, on a beaucoup un débat sur la majorité
numérique, donc, l'accès à la création de comptes sur les différents réseaux
sociaux, donc, qui pourrait se faire, donc, à travers, donc, différents
dispositifs, là, qu'ils soient la propriété de l'enfant ou pas. Sur cet
élément-ci, j'aimerais vous entendre.
Mme L'Ecuyer (Catherine) : Oui.
Bien, moi, je pense qu'on ne devrait pas avoir accès aux réseaux sociaux avant
18 ans, et ça, je suis complètement certaine et convaincue que... on va
finir, ça va être la même chose que l'industrie de la cigarette, là. On a... je
veux dire, pendant plusieurs années, les... des entreprises de cigarettes
vendaient des publicités dans des revues. Je pense que c'est le Medical Journal
of New York. Vous pouvez vous imaginer, pendant plusieurs années, ils ont vendu
des pages complètes de publicité. Donc, je veux dire, ça va prendre du temps,
peut-être, pour qu'on s'en rende compte, mais je pense qu'un jeune qui est sur
les réseaux sociaux avant 18 ans, c'est... c'est destructif. Moi, c'est ma
position. Mes enfants... c'est peut-être personnel, là, mais ils ne sont pas
sur les réseaux sociaux, puis j'en ai... j'en ai une qui a 19 ans, et ils
ont plusieurs amis et ça fonctionne tout à fait bien, il n'y a aucun problème.
Mme Cadet : C'était ça, ma
prochaine question : Est-ce que vous pensez... bien là, vous dites :
Ça fonctionne dans votre cas à vous, mais est-ce que vous pensez que, comme
mesure gouvernementale... que ça peut fonctionner comme interdiction?
Mme L'Ecuyer (Catherine) : Oui,
en fait, il faut faire attention, parce que je suis avocate, donc je vous avoue
qu'il faut faire une grande différence entre un conseil éducatif mis en place
par les parents et une loi qui interdit quelque chose aux parents. Donc, c'est
très délicat, là. Donc, il faut faire attention. Donc, moi, personnellement, il
faudrait que j'y pense un petit peu plus, là, mais j'ai déjà... j'ai déjà
commencé ma réflexion sur ce sujet-là. Moi, je n'interdirais pas la vente de
téléphones intelligents aux jeunes ou aux parents, ou je ne mettrais pas de
sanction aux parents qui achètent ça à leur jeune. Je pense que ça fait partie,
là, de la liberté d'éducation que je défends moi-même. Mais, par contre, oui,
j'interdirais qu'un enfant soit sur les réseaux sociaux, parce que c'est
différent. Je pense que ce qui est en jeu, c'est très différent.
Les réseaux sociaux, le problème, mais je
l'ai expliqué dans mon exposition, c'est... c'est un modèle des affaires qui
capte l'attention des enfants. Donc, il y a un conflit d'intérêts entre les
entreprises technologiques et la santé publique de nos enfants. Donc, je pense
que, oui, le gouvernement, là, devrait prendre des décisions très drastiques.
Puis je pense que, si le Québec le faisait... en Europe, on était... il y
avait, si je me souviens bien, là, la liberté de la Commission européenne
donnait de 14 à 16 ans comme liberté, les États membres de la Commission
européenne de... pardon, oui, décidaient eux-mêmes. L'Espagne a décidé
14 ans en 2000... je pense qu'on était en 2015. Et là, récemment, ils ont
décidé de changer pour 16 ans. Et moi, je suis certaine qu'on va arriver à
18 ans. Donc, je pense que c'est... il va falloir qu'il y ait un pays ou
une province qui soit pionnière pour prendre cette décision-là. Mais ça va être
la... Ça va être la décision qui va être prise, je suis certaine, dans cinq
ans, partout dans le monde.
Mme Cadet : Merci beaucoup,
Mme L'Ecuyer.
Mme L'Ecuyer (Catherine) : Merci
à vous.
La Présidente (Mme Dionne) : Je
passe maintenant la parole à M. le député de Gaspé.
M. Sainte-Croix : Merci, Mme
la Présidente. Merci, Mme L'Ecuyer, de vous prêter à l'exercice. C'est très
enrichissant comme propos. Vous faites état, dans l'une de vos publications, de
la vitesse du développement numérique, tant et si bien qu'on n'arrive même pas
à évaluer l'effet qu'ont les outils, les plateformes sur nos enfants. Ça amène
comme problème que, dans le fond, on n'a pas idée de l'impact sur l'usage,
hein, en fonction de la clientèle qui est ciblée avec le développement
numérique. Ceci dit, ça n'empêche pas les choses d'avancer, ça n'empêche pas des
choses de se faire d'un point de vue commercial. Comment on... comment on
s'outille pour contrer ou minimalement encadrer cet élément-là du développement
numérique?
Mme L'Ecuyer (Catherine) : Bien,
c'est vraiment... c'est très intéressant. Je n'ai parlé de ça, parce que je
n'avais pas le temps, puis je suis contente que vous me posiez la question.
Mais c'est parce que, là, on est en... on est en train de voir là une situation
à deux vitesses. Donc, d'un côté, on a ce que... vous parlez de la situation
commerciale des entreprises, qui va très vite, donc c'est un modèle de... je ne
sais pas, en français, si on dit obsolescence technologique, ça... Vous me
comprenez? Donc, c'est ça. Et puis là, d'un autre côté, on a la recherche, qui
est très lente. Donc, je viens... on vient tout juste de publier un article sur
cette question-là, d'ailleurs, analyste de pédiatrie en espagnol, qui est aussi
publié en anglais, qui traite justement de cette question-là dans un éditorial
de Lancet, il y a une question... Je pense qu'il y a une jeune fille aux
États-Unis qui s'est suicidée suite à une situation sur les réseaux sociaux,
puis justement, l'éditeur de Lancet posait cette question-là. Il disait :
Bien, on a un problème, il y a deux vitesses, l'obsolescence technologique d'un
côté puis d'un autre côté, bien, les...
Mme L'Ecuyer (Catherine) : ...les
lois qui répondent normalement aux conclusions de la recherche, et la recherche
est très coûteuse et très lente, donc... Puis je vais vous dire, elle est très
lente et très coûteuse, puis pas seulement ça, mais je l'ai dit dans mon
exposition, souvent les entreprises technologiques donnent de l'argent aux
chercheurs. Donc, ça, moi, c'est une des mesures que j'ai proposées ici au
gouvernement espagnol. On m'a posé aussi la question, on m'a demandé, comme
experte, de donner une bonne idée, là, puis une des bonnes idées que je leur ai
données, puis malheureusement il y a trop de lobbys, puis ça n'a pas été
possible, mais peut-être qu'au Québec c'est plus facile, ça serait de demander
aux entreprises technologiques de faire ce que les entreprises pharmaceutiques
font aux États-Unis, puis c'est de dire à qui ils donnent de l'argent. Donc, il
y a une espèce de... il y a une base de données, aux États-Unis, où les
médecins doivent dire... je ne sais pas si c'est les entreprises... c'est les
entreprises pharmaceutiques ou les médecins qui doivent dire qui... à qui ils
donnent de l'argent ou de qui ils reçoivent de l'argent, je ne me souviens pas,
mais, si on pouvait faire ça ici, là, au Québec, ou en Espagne, ou partout dans
le monde... Les entreprises technologiques donnent beaucoup d'argent aux
écoles, donnent de l'argent même à certains gouvernements, à des entreprises,
même à des moyens... à des moyens de communication. Ici, là, la presse,
souvent, il y a des contenus qui sont sponsorisés par le... par l'industrie.
Donc, c'est vraiment difficile d'arriver à une situation où est-ce qu'on base
l'éducation de nos enfants, autant à la maison comme à l'école, sur les
évidences.
• (14 h 30) •
Quand je parle d'évidences, là, vous
comprenez, «evidence-based education», là. Je parle de... des preuves, des
études. Donc, c'est très important de parler à... Puis là je vous dirais, tu
sais, que la télévision, par exemple, ça nous a pris 20... 10, 20, 30 ans pour
savoir c'était quoi, les effets. Mais la télévision est arrivée, puis il y a
d'autre chose qui est arrivé. Puis là, quand on est arrivés avec les tablettes
en 2015, Dimitri Christakis, qui était l'expert de l'Académie américaine de pédiatrie,
il a écrit un article qui disait : Bien, tout ce qu'on a dit sur les
recommandations pédiatriques, ça ne vaut peut-être plus pour les tablettes.
Donc, il a posé la question : Est-ce qu'on doit réviser les
recommandations? Bien, évidemment, les recommandations qui sont... qui ont été
publiées en 2018... 2018 n'ont pas été révisées parce que l'effet est aussi
nocif. Mais ça nous a pris de... je ne me souviens pas, c'était quoi, là, 2011
à... Ça a pris plusieurs années avant d'arriver à la conclusion que les
tablettes étaient aussi... créaient aussi des effets négatifs que la
télévision, parce que ce n'est pas passif. Par contre, c'est très... c'est très
addictif parce que l'enfant, c'est sûr... mais c'est les algorithmes qui
parlent avec l'enfant. Donc, l'enfant, c'est... c'est sûr que ce n'est pas
passif, mais c'est comme si on allait le chercher avec un stimuli, donc c'est
pire parce que c'est beaucoup plus addictif. Donc, l'enfant est beaucoup plus
accro sur une tablette que devant la télévision.
Donc, pour revenir à votre question,
c'est... vous avez mis le doigt sur la question. Donc, ici, c'est... la
question, c'est vraiment, là, qu'il faut s'assurer de faire des lois pour que
les entreprises technologiques arrêtent de faire de l'argent en utilisant
l'argumentation pédagogique, scolaire et éducative. Et on doit les obliger à
amener leurs preuves, à faire leur fardeau de la preuve avant de faire de
l'argent avec ça. Parce qu'évidemment, tu sais, Meta, par exemple, bien, quand
c'était Facebook, on se souvient, les nouvelles où est-ce qu'ils voulaient,
eux, introduire les mineurs sur les réseaux sociaux, mais ce n'était pas pour
que les... que le monde soit plus intéressant puis pour qu'on se fasse des
amis, c'était évidemment... J'ai travaillé dans une entreprise de
communication, je vous avoue, tu sais, le modèle... le modèle d'affaires, c'est
très simple, là, c'est d'avoir plus de clients, hein, puis d'avoir plus de
consommation par client. Donc, les enfants, bien, c'est des personnes qui ne
sont pas capables de se... de se réguler, de s'auto... Comment qu'on dit en
français, régulariser, là. Donc, la consommation, c'est sans fin. Donc, si
on... si on est capable d'avoir l'enfant avec un téléphone puis c'est papa ou
maman qui paie, bien, c'est sûr que c'est un modèle d'affaires qui est très...
qui est très lucratif, là.
La Présidente (Mme Dionne) : Merci
beaucoup.
M. Sainte-Croix : Merci, Mme
la Présidente.
La Présidente (Mme Dionne) : Je
passerais la parole maintenant au député de Marquette.
M. Ciccone :...Mme L'Ecuyer. La semaine dernière, on a commencé nos
travaux. On a eu trois, quatre groupes qui nous a... qui nous ont interpelés,
trois, si je ne m'abuse. Sur trois groupes, il y en a un qui était complètement
à l'opposé sur les heures d'écran. Moi, j'aimerais vous entendre là-dessus, sur
les heures d'écran. Je sais que vous avez dit que, de 0 à 5-6, on ne devrait
pas mettre nos jeunes devant des écrans. Cependant, si on parle du secondaire,
si on va plus loin, un peu, en âge, pour vous, c'est quoi, un heure d'écran...
une heure d'écran? Est-ce que c'est...
14 h 30 (version non révisée)
M. Ciccone :...parlait d'outils pédagogiques à l'école. Par la suite,
on parlait de jeux vidéo à la maison, tablettes à la maison, réseaux sociaux.
Et il y a un groupe qui nous disait : Il faut absolument tout calculer ces
heures-là, en matière d'heures d'écran. Un autre groupe nous a dit : Bien,
tout ce qui est pédagogique, il ne faut pas l'inclure dans les heures d'écran
parce que c'est de l'apprentissage. Moi, j'aimerais vous entendre là-dessus.
Mme L'Ecuyer (Catherine) : En
fait, bien, j'imagine que vous avez vu les statistiques, là, États-Unis,
Angleterre, les heures d'écran, c'était sept, huit, neuf, 10. Là, c'est rendu
14, puis Clifford... il disait : Bien, comment ça peut être 14? Parce que
nos enfants doivent dormir, donc. Parce qu'ils faisaient plusieurs choses en
même temps, là, la multitâches technologique. Donc, eux autres, ce qu'ils
faisaient, c'était qu'ils additionnaient les... si j'étais sur un jeu, par
exemple, comment qu'on... sur un jeu vidéo et je faisais mes devoirs sur l'ordinateur,
puis je regardais mes WhatsApp, bien, ils multipliaient par trois l'heure, là.
Donc, ce n'est pas vraiment logique, mais bon.
Donc, il y a plusieurs façons de le
calculer. Moi, je vous dirais que, bien, en fait, moi, je considère que... Je
sais que c'est très, très... c'est un scandale, ce que je vais dire, là, mais
je le dis en 2014, puis je le redis aujourd'hui, puis je suis certaine que ça
va être confirmé, mais les tablettes, ce n'est pas un outil pédagogique. Donc,
ça, c'est un des problèmes, c'est qu'on prend pour acquis, on tient... on pense
que c'est un outil pédagogique. C'est la raison pour laquelle on dit :
Bien, ça ne doit pas être compté comme heures d'écran parce que c'est un outil
pédagogique. Bien, moi, je ne suis pas d'accord. Moi, je pense que c'est une
heure d'écran, ce n'est pas un outil pédagogique, puis les heures d'écran,
bien, on doit... on doit les accepter, comme parent, quand ça a un sens, l'enfant
est prêt pour être en train de faire ce qu'il est en train de faire. Puis ça, c'est
une question de sens commun, mais c'est sûr que le bon sens, là, c'est... c'est
difficile, là. Puis ce n'est pas facile non plus, ce n'est pas... l'idée, ce n'est
pas non plus de faire une loi pour détailler ce qui doit être un temps d'écran,
là, je ne pense pas que ça soit l'idée, mais je pense que... Je veux dire,
moi, j'ai... c'est quoi que je vais faire avec mon téléphone intelligent? Je
vais aller chercher le bus, puis je veux savoir à quelle heure il passe, puis
je veux savoir comment me rendre à tel endroit. Bien, j'ai besoin de mon
téléphone intelligent, bien, ça, c'est un temps d'écran qui a du sens, par
exemple. Bien, je dois appeler une amie parce que j'ai besoin de lui raconter
un de mes... un problème, bien, c'est un temps d'écran intelligent. Je veux
voir un film qui est intéressant, bien, c'est un temps d'écran, c'est
intéressant si c'est tu as une qualité. Donc, je pense que ça, c'est les
parents qui doivent décider ça si c'est... on parle d'un mineur, là. Donc, c'est
une question complexe, mais c'est une question qui... qui a... qui fait partie
d'une casuistique.
Je ne sais pas si j'ai répondu à votre
question, là, mais moi, je suis contre le fait de compter... de considérer la
tablette comme un outil pédagogique. Je pense que c'est peut-être la partie la
plus importante de ma réponse, là.
M. Ciccone :Est-ce que... dans tout ça, là, est-ce que vous excluez
cependant des jeunes qui ont des problèmes d'apprentissage, des jeunes qui ont
des plans d'intervention où ils utilisent justement des laptops, puis on va
mettre Antidote, on va mettre plusieurs... plusieurs programmes pour les aider
à réussir? Est-ce que vous excluez ces gens-là, ces jeunes-là?
Mme L'Ecuyer (Catherine) : Bien,
je trouve ça intéressant. Je vous avoue que c'est une question que j'ai reçue
souvent puis je réponds toujours avec une question, non une réponse, je dis :
Où est-ce qu'elles sont, les études qui disent qu'un enfant qui a des problèmes
d'apprentissage a des meilleurs résultats par le biais d'un écran? Il n'y a
pas... il n'y a pas d'étude sur cette question-là. C'est ça, le problème, c'est
qu'on est toujours en train de prendre pour acquis une série de choses qui n'ont
pas été prouvées. Donc, où est-ce qu'elles sont, ces preuves-là? Il y a
plusieurs applications technologiques qui disent que les enfants qui ont des
problèmes de dyslexie... on dit «dyslexie», en français, c'est ça? Pardon, c'est
parce que j'ai l'espagnol et l'anglais là, à gauche puis à droite, là. Mais c'est
que les enfants qui ont de la dyslexie ont des problèmes de lecture. Moi, je
vous avoue, après avoir travaillé pendant longtemps avec des écoles et avoir
vu, étudié la situation, je vais même me devancer puis je vais vous... je vais
vous amener une hypothèse : moi, je pense qu'il y a... la multiplication
des cas de dyslexie qu'on voit présentement dans toutes les écoles, partout
dans le monde, ça a beaucoup à voir avec la méthode d'apprentissage de la
lecture qui est globale, la méthode globale. La vraie méthode pour apprendre
qui fonctionne, c'est la méthode phonétique, ce n'est pas la méthode globale.
Donc, la méthode globale, souvent, elle arrive par le biais d'un écran. Donc,
je vais vous dire, ici, je pense qu'il faut prendre deux pas en arrière, là,
puis comment mettre en question les principes qu'on donne... qu'on prend pour
acquis.
M. Ciccone :Juste une petite dernière, je peux-tu, Mme la Présidente?
La Présidente (Mme Dionne) : Oui.
Après, je... Oui.
M. Ciccone :O.K., une petite...
M. Ciccone :...dernière rapidement. Tantôt vous avez parlé de recherche
et des fonds, là, qui sont... pour certaines industries, qui sont attribués.
Puis vous l'avez dit, là, les tablettes, tout ce qui est la technologie est
allé trop vite, ça a dépassé la recherche. Qu'est-ce que le législateur, le
gouvernement peut faire pour vous aider dans vos recherches pour que ce soit un
peu plus rapide pour rattraper si c'est possible?
Mme L'Ecuyer (Catherine) : Oui.
Bien, en fait, je m'excuse, je vais vous répéter ce que j'ai dit avant mais je
pense que c'est très important, la transparence au niveau de la financiation
des recherches. Donc ce n'est pas normal que... je ne vais pas nommer des
entreprises mais je pourrais les nommer, là, c'est facile, il y en a quatre ou
cinq, que ces entreprises-là sponsorisent ou... on dit en français
sponsorisent, c'est ça, ou donnent, commanditent des études sur ces
questions-là. Ça devrait être interdit ou ça devrait être très transparent, là,
la financiation. Donc, je pense...
• (14 h 40) •
M. Ciccone :Bien, je ne veux pas vous couper, mais je parle de la
collecte de données. Tantôt on vous a compris. Mais c'est au niveau de la
collecte de données, est-ce que le gouvernement peut faire quelque chose pour
la collecte de données?
Mme L'Ecuyer (Catherine) : Ah
oui! Ah! bien oui, bien oui, bien oui.
M. Ciccone :Bon, c'est ça, je veux vous entendre là-dessus.
Mme L'Ecuyer (Catherine) : Oui,
oui, oui. La collecte de données. Moi, je pense ici qu'on parle de 18 ans,
puis c'est 18 ans, puis 18 ans, puis 18 ans. Le problème, c'est
qu'on a... on a... j'ai d'ailleurs participé à une conférence avec les
procureurs de la Couronne ici, en Espagne, et la présidente, là... ou la
directrice de l'Agence de protection des données de l'Espagne, et tout le monde
était d'accord. On demande des responsabilités aux parents pour les méfaits de
leurs enfants mineurs, d'une part, et d'autre part, on permet aux enfants
mineurs, sans le permis des parents, d'être... d'être sur les réseaux sociaux.
Donc, c'est un train... c'est un accident de train, évidemment, c'est une
collision annoncée, là. Donc ici, je pense que ce serait important, tout ce qui
est collection de données, ça ne pourrait pas être possible avant 18 ans.
Donc, ça, c'est une façon aussi de résoudre le problème des... de l'accès aux
réseaux sociaux.
La Présidente (Mme Dionne) : Merci,
Mme L'Ecuyer. Il nous reste peu de temps alors je céderais la parole au député
d'Hochelaga-Maisonneuve.
M. Leduc : Merci, Mme la
Présidente. Merci beaucoup pour votre présentation. Très apprécié.
Vous faites une distinction entre votre
souhait de ne pas aller dans l'interdiction de la machine, donc le cellulaire.
Vous en fait plus une espèce de directive, à la limite, de santé publique ou du
moins une recommandation. Mais à la réponse à ma collègue tantôt, à la question
de ma collègue sur l'interdiction des réseaux sociaux, là vous avez une
position beaucoup plus tranchée, en disant : Oui, oui, oui, on interdit.
Donc, la fameuse majorité numérique. C'est difficilement applicable, ça, quand
même. Là, je sais qu'il y a des pays qui votent des choses comme ça, la France
notamment, pas loin de chez vous. Comment on applique ça? Parce que vous le
disiez tantôt, c'est interdit, la pornographie, etc. Mais vous savez comment ça
marche, là, vous allez sur un site : Avez-vous 10-huit ans? Oui, puis
c'est terminé, hein? Ça ne demande pas plus d'information que ça. Puis à chaque
fois qu'on fait un pas dans la direction «oui mais peut-être qu'on pourrait
demander», là on bascule dans les données, les données numériques, qui les
ramasse, qui est responsable, l'État, une société privée. Oh! C'est un vaste...
C'est un vaste sujet. Ça fait que... est-ce que vous avez comme une piste pour
dire : Oui, oui, ou est-ce que vous dites : Peut-être que ce serait à
la limite juste mieux de dire, un peu comme sur les sites pornographiés, au
moins, ça fait une... minimalement une certaine barrière symbolique? Au même
titre que ce n'est pas parce qu'on n'a pas 18 ans qu'on ne peut pas
prendre un verre d'alcool fourni par mononcle ou un joint fourni par le grand
frère. Je ne parle pas d'expérience, c'est moi le grand frère, je n'ai pas
fourni de... je n'ai pas fourni de joint à personne dans ma famille, soyez
rassurée, mais vous comprenez ce que je veux dire.
Mme L'Ecuyer (Catherine) : Oui,
oui, je comprends ce que vous voulez dire. Je suis avocate donc je comprends
tout à fait ce que vous voulez dire. Mais comme vous le savez, les avocats, vous
êtes là, plusieurs avocats certainement, mais le droit a plusieurs... a
plusieurs effets, pas seulement d'interdire, mais aussi d'éduquer. Donc, quand
on dit que c'est interdit d'avoir accès aux réseaux sociaux avant 18 ans,
bien, on lance un message. Donc, ce qu'on dit, c'est que les enfants ne sont
pas prêts. Donc, ça, c'est beaucoup déjà.
Donc là, la deuxième question, c'est
comment on met ça en œuvre. Donc, je vous comprends, puis je vous avoue que je
peux même vous mettre en contact avec la directrice de l'Agence de protection
des données, ici, en Espagne, qui s'appelle Mar España. Mar España, c'est une
personne incroyable qui a fait beaucoup, beaucoup de travail sur la question de
la protection des mineurs. Et c'est une personne qui a eu une idée que je ne
peux pas vous expliquer parce que c'est très technique. Mais dans l'Agence de
protection des données en Espagne, ils ont mis en œuvre un certificat numérique
qui fait en sorte que la personne qui se... qui rentre dans un réseau social ou
qui est sur les... en ligne doit s'identifier. Donc... Puis là, il y a comme
une espèce de façon de contrôler l'âge. Je ne peux pas vous raconter en détail
parce que je ne suis pas trop au courant de ça mais je trouve ça très
intéressant. Ma position, c'est plutôt qu'ils ne soient pas sur les réseaux
sociaux. Mais évidemment qu'il faut avoir ces mesures-là de contrôle. Donc,
s'il y a quelqu'un qui est intéressé à la commission, qui veut m'envoyer un
courriel, je peux vous donner le contact de Mar España. Il y a peut-être
quelqu'un de son équipe qui peut communiquer avec vous. Je sais qu'eux ils sont
en communication avec d'autres gouvernements...
Mme L'Ecuyer (Catherine) : ...gouvernements,
avec la Maison-Blanche. Ils ont déjà parlé avec plusieurs gouvernements sur ces
questions-là. Mais si vous voulez, je serais... ça me ferait plaisir. Il n'y a
pas de problème. Et oui, c'est sûr qu'une question, c'est interdire l'accès aux
réseaux sociaux. Puis il y a une autre question qu'il faut faire très attention
pour que l'État ne soit pas trop un État qui s'ingère dans les décisions... de
la famille.
Donc, moi je suis vraiment une défenseure,
là, de la liberté éducative. Donc, je pense qu'interdire qu'un enfant de
17 ans ou un jeune de 17 ans ait un téléphone cellulaire... Bien, un
téléphone cellulaire... C'est sûr qu'un téléphone cellulaire sans Internet, ça
existe d'ailleurs, là. Bien, un téléphone avec une connexion Internet, je pense
que c'est allé trop loin. Donc, moi... peut-être, on pour interdire la vente,
mais la possession, là, d'un téléphone Internet, je pense que c'est allé trop
loin. Puis il y a des téléphones aussi avec... Internet, des Nokia qui ont
WhatsApp par exemple et qui ont certaines. Je m'excuse, l'image est très,
très... C'est parce que je suis en Espagne, puis c'est la nuit ici, là, donc...
Je suis à Madrid...
La Présidente (Mme Dionne) : Mme Lécuyer,
il nous reste à peine 10 secondes, alors... la température tombe bien avec
la fin de votre audition. Juste pour...
Mme L'Ecuyer (Catherine) : Bien,
en fait...
La Présidente (Mme Dionne) : Oui,
allez-y.
Mme L'Ecuyer (Catherine) : Non.
Bien, c'est ça. Je vous remercie beaucoup. Moi, je suis vraiment très contente
que vous ayez fait cette commission-là. C'est vraiment un début magnifique, là.
Puis si vous avez besoin de moi pour quoi que ce soit, je suis tout à fait
disponible. Je vais juste vous dire qu'en 2014, quand mon livre est sorti,
bien, ça a été un peu de scandale, un peu de scandale. Cultiver
l'émerveillement est très... très bien reçu, mais, pour un retour à la réalité,
pas trop bien reçu. En fait, parce que c'était très... c'était peut-être
alarmiste, mais maintenant en 2024, ce n'est pas... ce n'est pas trop
alarmiste. Une relecture du livre n'est pas trop... n'est pas trop alarmiste,
donc...
La Présidente (Mme Dionne) : Comme
quoi vous étiez visionnaire. Alors, malheureusement, c'est tout le temps qu'on
avait, mais, oui, notre secrétariat va entrer en contact avec vous pour les
coordonnées de l'Agence de protection des données, là, qui est fort
intéressant. Alors, merci beaucoup de votre contribution. C'est très apprécié.
Alors, pour ma part, je suspends les travaux pour accueillir notre prochain
témoin. Merci beaucoup.
Mme L'Ecuyer (Catherine) : ...beaucoup.
Au revoir.
(Suspension de la séance à 14 h 46)
(Reprise à 14 h 50)
La Présidente (Mme Dionne) :
La commission est maintenant prête à reprendre ses travaux. Donc, je souhaite
la bienvenue à la Dre Victoria Dunkley. Donc, bonjour, Mme Dunkley, merci de
contribuer à nos travaux. Donc, je vous rappelle que vous disposez de 10
minutes pour nous exposer vos commentaires, et, par la suite, nous procéderons
à une période d'échange avec les membres de la commission. Donc, je vous cède
la parole.
Donc, il y a un petit délai pour la
traduction, j'imagine. Est-ce que vous nous...
Une voix : ...
La Présidente (Mme Dionne) : Ah!
nous allons suspendre quelques instants.
(Suspension de la séance à 14 h 51)
(Reprise à 14 h 54)
La Présidente (Mme Dionne) : Alors,
nous reprenons les travaux. Désolée, petit problème technique. Alors, on
reprend avec la...
La Présidente (Mme Dionne) : ...Dre
Victoria Dunkley. Donc, bonjour, Mme Dunckley. Bienvenue à cette
commission. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour nous
faire votre exposé. Par la suite, nous procéderons à un échange de questions
avec les membres de la commission. Donc, peut-être vous présenter et nous faire
part ensuite de vos commentaires. La parole est à vous.
Mme Dunckley (Victoria L.) : OK. Thank you very much. Thank you so much
for inviting me today. Good afternoon, everybody. I'm Dr. Victoria
Dunkley, and I'm a physician and child and adolescent psychiatrist for over 20
years. And I have specialized in the impact of screen time on the brain for
almost as long. So, 20 years ago, I started noticing that when kids were
playing video games that they were having trouble with focus and impulse
control. And then, obviously, the problem has just gotten worse and worse over
time as more devices came into the picture, handheld devices, smartphones,
iPads, etc., and now social media. But the underlying physiology really has not
changed. So, my focus is really on the physiological impacts of screen time on
the nervous system, how it regulates the nervous system and how those effects
translate into symptoms and dysfunction.
So, we're seeing an
unprecedented increase in mental health disorders and developmental delays in
children, things like attention issues, kids being diagnosed with ADHD,
aggression, delays in learning. And then, in the older children and teens,
we're seeing a lot of depression, anxiety, suicidality, self-harm, cutting,
etc.
So, what I wanted to talk
about was how screen time really triggers... screen time acts like a stimulant.
So, it triggers the fight-or-flight system in the brain and body, and
fight-or-flight can also be freeze, that's the third aspect. And it turns out
that screen time can induce these effects not just in one way, but in multiple
ways. And this is key to understanding how it's causing all these issues.
The first mechanism by
which it causes stress or hyper arousal is that screen time stimulates the
reward pathways very intensely. And this happens even with educational
materials. So, the reward pathways get stimulated, those are the dopamine
receptors, and, over time, the dopamine receptors become desensitized and stop
working as well, so then the child is no longer interested in the natural
world. Other things are boring, they can't seem to get things done because
they're looking for that high level of stimulation.
There's also a lot of
sensory stimulations. The intense and vivid colors, the rapid movements,
changing contents, all of those things also increase arousal levels. Then, we
have the bright and blue light. So, most of you may have heard about how blue
light suppresses melatonin, which is a sleep signal in the brain, but when
melatonin is suppressed, it also affects inflammation in the brain. Melatonin is
a very potent anti-inflammatory. It also protects DNA in the brain, and, also,
it's a hormone regulator. So, all of these things are going on simultaneously
just with suppressing melatonin. And if you block the blue light... screen
lights still suppresses melatonin, even if you block the blue light. So, when
kids are being exposed to screens all day, even if the content is benign, it's
just regulating the nervous system.
Another aspect that
causes stress is multitasking. So, kids are constantly, you know, using devices
to… they're chatting, they're looking things up, they're doing their homework,
they're on social media, they're listening to music, all sorts of things. So,
all of that multitasking is also stressful. It increases arousal, so they keep doing
it. Actually, the multitasking itself can become addictive. So they keep doing
it and they actually... we know that kids are not good at multitasking and they
actually get worse over time. They think they're good at it, but they're not.
Another aspect is the
interactivity. So, all of the touching, scrolling, the rapid responsiveness,
which is also what makes our devices attractive, that also increases arousal
levels...
Mme Dunckley (Victoria L.) : ...that
also increases arousal levels. And also the radiation. So there's radiation
from the screen, from wi-fi, from cell phone signals, from Bluetooth. All of
these things, you know, kind of layer on each other. And those we know also
increase the stress response and also suppress melatonin. So, all of these
things are going on at the same time in a synergistic method.
And you can see if you're looking... if
you have my brief, you can see that a lot of these aspects really don't have a
lot to do with content. They happen just because the screen itself acts like a
stimulant and interacting with the screen acts like a stimulant. And that's
really important, because I think people keep trying to suggest that kids just
need to use it in a balanced way or just do these things and not that, but
what's happening is those things cause issues too. So, that's one of my biggest
take home points.
• (15 heures) •
O.K. So, if you understand how screen time
can increase the stress response, when that happens day in and day out, you get
a child who's overstimulated. And the brain actually kind of shuts down. So the
frontal lobe is the front part of the brain, the more human part of the brain,
and when there's a lot of hyper arousal, the frontal lobe kind of shuts down.
So blood flow shifts to the more primitive part of the brain, and there's less
blood flow up here, where we need it. So, that child starts to behave in a more
primitive manner. They're more defensive, they're more reactive, they can't
think, can't think ahead, they can't plan, they can't look back because they're
kind of in this survival fight-or-flight mode.
And it's very difficult to get out of that
mode without removing all the stimulation. So, what's happening when we see
that poor frontal lobe functioning... And this can look different in different
kids, because the frontal lobe controls mood regulation, executive functioning,
impulse control, and even things like creativity and kindness, so all of the
things that make us human. So, when the frontal lobe gets shut down, any or all
of those aspects can also get shut down. So, kids could be anxious, or they
could just be more impulsive, or they can be aggressive, but that underlying
physiology is is the same, it's really frontal lobe dysfunction.
But a very typical way that a child looks
with too much screen time is that they're irritable, weepy, and they can't
focus. They can't get things done. They have no stress tolerance, they're
easily frustrated. So they may have problems on the playground. They may have
poor eye contact. They are sore losers, so if something goes wrong, they can't
tolerate it. So, they're just very fragile.
And you can't learn, in that state, so
what we're seeing is that kids, you know, are... in general, all the math and
reading scores are going down. They haven't really gone back up since the
pandemic ended, but even before the pandemic, all of those things were going
down. And the reason is because of screens.
So, what I've learned over time, doing
this for 20 years, is that, yes, there's some benefit we know from research, there's
some benefit to just trying to limit screen time, getting screens out of the
bedroom, limit, you know... having parental limits, etc., but much... a much
better intervention, and this, to me, is the gold standard, is that you remove
screens for four weeks altogether. You remove all of that unnatural stimulation
and let the brain kind of reset and heal. So, what happens when you remove all
of that is that the body clock resynchronizes, the stress hormones lower, the
blood flow returns to the frontal lobe. And what you see, within a week in
younger children and maybe by the second week in teens, is a much happier, more
relaxed child. They're better engaged. They make better eye contact. They're
able to learn. You can see their grades go up. I've seen kids, including boys,
start reading. And this is within a few weeks. It's quite dramatic.
And we know also that screen time is
associated with obesity, not just obesity, but things like high cholesterol and
things like that. I have seen children's cholesterol panels improve within six
weeks. So there's dramatic changes and brain chemistry and hormones and all
across the board.
O.K. So, I mentioned that there's all
these trends on the rise, right now, increases in mental health diagnosis, but
not just that, but also kids being put on medication unnecessarily, and...
15 h (version non révisée)
Mme Dunckley (Victoria L.) : ...and the medications themselves have side effects. And we're also
seeing that just in general when kids are being treated, it's just not working.
So, I think my time is
running out. So, I just want to emphasize that school... screen time is
contributing to all of this, both... and having to do homework at night. We
know that light at night from screens is related to depression, not just
depression, but suicidal thinking and actual suicide. So, the recommendations include
allowing children to opt out of 1 to 1 devices... device programs at school for
children to opt out of having to do homework on a computer at night, and then
also to utilize these electronic... or screen... for four weeks to improve, not
just mood and focus, but actually assess children in school because now
you're... now you're returning them to their natural state and you can really
see what's happening. It may not solve everything, but it will get them to the
place where you can actually make change.
So, those are my...
La Présidente (Mme
Dionne) :
...
Mme Dunckley
(Victoria L.) :
Sorry.
La Présidente (Mme Dionne) : Ah...
Le temps est écoulé, Mme Dunckley, mais nous allons poursuivre ces
discussions intéressantes avec une période d'échanges avec les membres de la
commission.
Donc, nous allons débuter cette période
avec M. le député de Marquette.
M. Ciccone :Merci beaucoup, Mme la Présidente. Thank
you, Dr. Dunkley, for being here with us today. You talked about screen time.
I want to hear you on screen time. What age should we put a kid in front of a
screen and, in the same category, how do you... what category you put screen...
Is screen time in school and learning, iPads, social media, video games? Do you
put everything in the same category as screen time?
Mme Dunckley
(Victoria L.) :
OK. So... first question about what age, as we want to delay as much
as possible. I try not to get too much into the details because for some kids
they need to delay as long as possible because they're just more vulnerable.
Kids with any kind of underlying difficulty are going to be more vulnerable and
sensitive. We know from 0 to 3, they should have zero screen time. After that,
it should just be, I mean, to me, ideally, it should be none. You know, if you
aim for none, they're... they're still going to get some, but it'll be much
less. So, kind of... one general guideline that I like to say is : The amount
of screen time right now that kids are getting per day should be the amount
they're getting per week. So, if they're getting two hours per day or five
hours a day or, you know, teenagers are like ten hours a day, that should be
the weekly allowed amount. So, that's... You know, the longer you wait, the
better. Less is more.
And the second question
about how do I categorize everything. In this day and age, I really, kind of,
put it all together. The most important distinction in my mind is if it's
interactive. So, like a... is going to be less stimulating and problematic
than... using, even using learning apps, because they're interactive and
they're closer. So, anything that's closer is also more stimulating and more...
you know, the light from the screen is more problematic. So, I think because
most of it is interactive these days, I would categorize it all together.
M. Ciccone :
Thank you, doctor. I have one final
question for you. Here in our area... I don't know if it's the same thing in
your area, but here in... we have high schools that offers E-sports program.
When... And their explication... the explication is because in the near future
we will have some E-sports Olympic games. We want to prepare them. So, they
offer it in our high school education system. What are your thoughts on that?
Mme Dunckley
(Victoria L.) :
I mean, I don't... I don't think it's a good idea. I think, it's
just kind of compounds the problem. And, you know, a lot of the kids that are
really not doing actual sports might be attracted to something like this. But
to me, it's just compounding the problem, and especially if the schools
offering it. I just think, it's much better to promote natural sports, where
they're interacting with nature and being outdoors and having sunshine and
moving their body. I just think we want to be careful about offering something
that potentially is affecting their physiology and long-term health, really.
M. Ciccone :
Thank you very much, doctor. Thank you.
La Présidente (Mme Dionne) : Merci.
Je cède maintenant la parole à Mme la députée de Châteauguay...
Mme Gendron : ...Yes. Hi, Dr. Dunkley. Thank you so much to be with us today. It was
really interesting to see your point of view, and thank you for your
presentation as well. You talk much about video games, but how about using
social media to communicate? I just want to know your point of view about that.
And how about watch TV on tablet or those other uses we can do it, with,
actually, blue screen, but... yes.
Mme Dunckley
(Victoria L.) :
Well, I think... What was the first part of your question? About
the...
Mme Gendron :
...video games, but how about taking
using social media for communication for children? Like, I mean, children
between, maybe, 6 to 16, you know.
• (15 h 10) •
Mme Dunckley
(Victoria L.) :
OK. So, all of us that have boots on the ground, that are dealing
with, you know, actually interacting with people, with kids, we all agree that
social media shouldn't be happening at all for children, or even teenagers. You
know, our surgeon general has issued... I'm not sure if it's an official
warning, but has talked about issuing an official warning about this. Social
media can impact mental health. But the problem is, even if they're using
social media just to communicate, and there's nothing nefarious going on, the
problem is they're doing that more and more. They kind of have a secret life
that the parent doesn't know about, and which isn't really developmentally
appropriate. And it affects... it's starting to affect their ability to
socialize face to face. So, this was even happening before the pandemic, but,
now, it's much worse.
So, we see kids being
incredibly uncomfortable with face-to-face communication, particularly with
adults. And then you see that play out later when they're trying to go to
college. They're falling apart. They're very fragile. They have trouble making
phone calls. They have trouble interacting with the public. I mean, it's just
causing all sorts of problems, so... And also, just... You know, adolescence is
supposed to be a time of awkwardness socially, where you learn how to interact,
and it's feels awkward at times, but it gets better with practice, and that
practice is being taken away. So, especially when kids are starting so young,
it's just problematic and, you know, amplifying the problem.
Mme Gendron :
OK. But what is your opinion about
using apps at school for education purposes?
Mme Dunckley
(Victoria L.) :
There's very little, you know, to no evidence showing that those
improve any outcomes, and, even if they improve an outcome in the short term,
it doesn't play out over the long term. So, a lot of these apps are overused.
And we know what works. We know that kids need a human connection to learn,
especially kids who are struggling. So, that's the other issue, it's... They
might... You know, kids who are the the most resilient and have the most
advantages, they might be able to tolerate things like that OK. The kids who
really need it are going to get worse. So, that's the other problem. It's like,
if we try to keep using technology to try to help kids who are struggling, it
just makes things worse, and then, we think, oh! maybe, we're just using the
wrong app, when, in fact, just using the app is what's... is making the problem
worse.
Mme Gendron :
Thank you so much...
La Présidente (Mme
Dionne) :
Merci.
Je passe maintenant la parole à Mme la députée de Bourassa-Sauvé.
Mme Cadet :
Merci, Mme la Présidente. Hi, Dr.
Dunkley, thank you so much for being with us today. On the same subject of
EdTech, so, you mentioned the different mechanisms that's... the screen time
that the... the use of, for example, you know... like passive watching or like
the mechanisms that can be effective... offensive online, like, well, endless
scrolling, the rewards in advocation system. And we do also know that some apps
for education sometimes use these same mechanisms, but some don't. So, I wanted
to hear your point of view about that, because you, essentially... like, setting
your recommendations, like eliminate use of learning or... EdTech, and I hear
you about there's no evidence, right, there's no evidence that it actually
helps.
But I wanted to
understand, like, what is your point of view on to which degree does it harm from,
like, the mechanisms that they may or may not use. Because there's EdTech, I
mean, in schools, but it's also sometimes, like, parents themselves, like, will
want to supplement by either, like, well, buying, like, some softwares or going
online and using some apps for the development of their older children. So, I
wanted to hear you on that topic of EdTech.
Mme Dunckley
(Victoria L.) :
Well, I think all of the EdTech programs use those...
Mme Dunckley (Victoria
L.) :
...you
know, to some degree, some might be worse than others. But what we see and, you
know, if we just look at everything as a whole, in the big picture, math and
reading scores are going down. So whatever people are trying to use is not
working. And I see that it's not only not working, but it's just adding to the
problem. And then you have a child who, you know... What I just saw in my son's
classroom, who's in second grade, is that they started to use an app for
reading and for math. And then all of a sudden, my son told me that, in the
middle of the app, which is used across of... the same app is used all over the
world, by the way, in the middle of it, it... they get rewarded by a video
game. The teacher didn't even know this was going on. So I was, you know,
angry. But it's... So, I just think there's so much going on behind the scenes
that we don't know about. And just using any of these, you know, there's
advertisements going on, there's monetization going on. There's tracking and
collecting data, mining data from the kids while they're using it. There's just
a lot of aspects that are... you know, it's a very kind of a dark... dark
situation going on when you look really behind the scenes of what's happening.
And we just know it's not working.
And then say for that
child who's struggling anyway, that, now you're adding a little bit more screen
time. Are they going to sleep a little bit less that night? Probably. So, I
think just... the message should just be less is more and go back to what we
know works.
Mme Cadet :
So, we had some conversations about
like maybe... maybe to classify like the... well, some ed tech apps a little
bit like we do with movies, with good ed techs and bad ed techs, so we can
recognize the mechanisms. But essentially what you're saying is that essentially
all ed tech is created equal.
Mme Dunckley
(Victoria L.) :
I mean, there might be a little bit of variation, but I think the
good ed tech, we still... I still wouldn't trust what those companies are
putting out. And also, the organizations, including my common sense media, they
get... they get money, you know. So, there's always this conflict of interest
going on, even when an organization that we trust is saying... even the
American Academy of Pediatrics, you know, gets money from Google, gets money
from Meta, so I think it's very hard to see objectively if any of these ad tech
programs are really better than others.
Mme Cadet :
We do know that a lot of these
mechanisms and the effect that they have on people, so screen-related stress
or... they also work on adults. Right? So, at which stage of the development
does screen time is more an issue of opportunity cost, so less sleep, less time
to exercise, and at what point is it, like, okay, like this amount of screen
time, it's really, really harmful by itself and not just a matter of
opportunity cost?
Mme Dunckley
(Victoria L.) :
I think it's hard to tease those things apart. We do know that aside
from the opportunity cost, that like, say, for example, for obesity and the
metabolic issues with cholesterol and things like that, we know that... and
separately, or independent of the opportunity cost, it increases the risk of
obesity and high blood sugar and things like that. So, I think there's always
going to be the opportunity cost because it's time, right? And if it's done
every day, even if it's for ten minutes, when you start multiplying those
minutes over days, and weeks, and months, and years, for a developing brain,
you're really... it really is an opportunity cost. And what's happening is all
those costs are being lost where the kid could be making more connections in
the brain and becoming more resilient. And in addition to that...
Mme Cadet :
For kids.
Mme Dunckley
(Victoria L.) :
Yes, for kids, but, you know, adults too. Like an adult is going to
be exposed, you know, their whole life as well. And, you know, the problems
that we're seeing medically with adults is through the roof too. So, I just
think if you just... it's kind of like a mindset, like there's no amount of
safe time, really. It's really about trying to minimize as much as you can.
Mme Cadet :
Your main recommendation is screen
fasting. So, it looks like it's more a recommendation for parents. So where do
you see the state... Like what role the state can play in terms of regulating
the industry or being able to place some barriers?
Mme Dunckley
(Victoria L.) :
I think it... I mean a state can... I feel like it's a place or a
way that a state could mention it. You know, people do listen to like the
pediatricians mentioning to them, you know : By the way, if you keep your
kid off screens for four weeks, their dopamine system is going to reset. And
even if the pediatricians feel like that parents don't listen to them, but just
having messages like that...
Mme Dunckley (Victoria L.) : ...messages
like that, like just mentioning : Hey! you know, this is an option for
you, I think that goes a long way.
Mme Cadet : Question from
me : We talk a lot about banning social media below a certain age. Do you
agree with that recommendation?
Mme Dunckley (Victoria L.) : I
do. I do. I just think it's very hard... even when parents realize it's a
problem, it's very, very hard for parents to get away from it when their child
and the child's friends are all using it to communicate. They... No one wants
to ostracize their child, no one wants their child to feel left out. So, I
think, you know, I think making it really illegal under a certain age and
then... even above that age, it should... there should be significant warnings
about it. It will help parents, give them permission to stay off it for as long
as possible.
Mme Cadet : Thank you, Merci
beaucoup, Mme la Présidente.
• (15 h 20) •
La Présidente (Mme Dionne) : Je
cède maintenant la parole à Mme la députée de Hull.
Mme Tremblay : Oui, bonjour.
Alors, moi, je reviens sur tous les effets, là, négatifs que ça peut avoir chez
les enfants. On se dit de plus en plus, dans le milieu scolaire, que... puis
vous l'avez dit aussi, mais qu'il y a, bon, plus d'enfants TDAH, d'anxiété,
puis vous dites même, là, autistes, même, dans votre... dans votre mémoire,
troubles d'apprentissage, crises de colère. Puis on le remarque aussi, là, dans
les écoles en général, tu sais, on se dit que... vous l'avez dit, plus
d'enfants qui ont une médication, également.
Donc, vous, vous faites un lien quand même
assez direct entre l'utilisation des médias sociaux et ces troubles-là, et même
que vous dites, à certains endroits : Un écran peut même imiter chez un
enfant sans diagnostic ces troubles-là qu'il n'aurait pas nécessairement sans
l'utilisation des écrans. Donc, j'aimerais ça vous entendre vraiment là-dessus,
sur... Nous, on constate, dans les écoles, qu'il y a plus de cela, mais... Le
lien avec les réseaux sociaux.
Mme Dunckley (Victoria L.) : With
social media, is that what you're... OK Yes, so. I think social media, it adds
additional layers. So, on top of all this overstimulating effects of
interacting with their screen and going back to their phone and having those
reward systems hijacked, the additional layers that... added on top of that are
that, you know, pre-teens and teens are extremely vulnerable to the social pull
of what social media can do. So, that need, that developmental need, the stage
they're at is being hijacked. So, their brains light up more and they have a
harder time not using it than a child who is 18 even.
So, to me, it's very problematic. It's
having huge impacts on kids in school, and here, in the US and in California,
in particular, they're really trying to push or they're starting to implement
phone-free schools, and not just not... you know, not letting kids have their
phone in the classroom, but, quote, unquote : bell to bell policies. So,
from the beginning of the day to the end of the day, they're not allowed to use
them. So, that is step one of what needs to happen. And that way they have at
least those eight hours where they're free from having to respond to social
media prompts. So, I think that's one thing that is an important first step.
And then I think not using school issued devices, because they're accessing
social media on their devices and then going home and they're being exposed to
all sorts of things just through the school... the school given devices. So,
all of these things are problematic.
And I think, you know, again, we're trying
to... like, everyone keeps trying to work around it so that there are safety
precautions in place without addressing the root problem, which is the device
and the screen itself. The kids won't... because it's so addictive and it's
built to be addictive, the kids are not going to turn it down if it's in their
face. They can't, they literally can't. So, I think we have to do it for them
and remove it for them and make it so that they can be kids again and interact
in the way they're supposed to.
Mme Tremblay : Ici, au Québec
puis vous avez abordé ça dans votre réponse, aussi, au Québec, on a interdit le
cellulaire en classe, donc, il y a une directive du ministère de l'Éducation
qui est venue interdire en classe. De ce que je comprends, vous, vous iriez
encore plus loin, donc, dans l'interdiction, là, pendant la période du dîner,
par exemple, donc de limiter de plus en plus, finalement, l'utilisation, là,
des outils... bien, peu importe, des écrans en général, même à l'extérieur de
la classe.
Mme Dunckley (Victoria L.) : Yes.
Yes, exactly. And I think that that balance about policy is really important
because lunch is when the kids are supposed to be interacting. And a lot of
times you look around and they're all just sitting on their phones together. So
I think eliminating it from that, you know, the balance.
Mme Dunckley
(Victoria L.) :
...they can't access at all during school hours would be really
helpful. It would... it would force them to interact and give them some relief.
You know, a lot of kids say when they're... when they're forced to give it up
or they can't use it, a lot of them express relief and say that it's... They
can even... during the day, they can see their anxiety come down a little bit
that they're not having to respond and be reliant on it and get that constant
feedback. So, I think the kids may, you know, express some kind of resistance,
and parents, too. But then when we actually enforce it, they feel relief and
they feel better, and they can feel that they feel better.
Mme Tremblay : Dernière
question. En classe, on revient le plus possible à ce que moi j'ai connu
papier, crayons, et, quand on utilise des outils numériques, si on décide d'en
utiliser, il faut que ça ait vraiment un plus à l'apprentissage. Donc, vous
seriez vraiment d'accord avec ça?
Mme Dunckley (Victoria L.) : Yes, absolutely. I think just going back to pen... you know, pencil
and paper, using... If they're using the computer, it's in a computer lab, to
use... to learn skills and occasional use to enhance... enhance learning or
just show them something, using a shared screen on a projector, a projected
wall, something like that, instead of kids having individual devices, that's
also a best practice. I'm glad to hear that.
Mme Tremblay : Merci
beaucoup.
La Présidente (Mme Dionne) : Merci.
Je cède maintenant la parole à Mme la députée d'Iberville.
Mme
Bogemans :
Merci
beaucoup. We talk a lot about the effect of screen time on the brains of the
kids, but I wanted to hear about the effect of presenting screen time to kids
as a reward, either at school or at home. Does it trigger other things than
what you already presented?
Mme Dunckley
(Victoria L.) :
I think it all triggers the same things in the... in the brain. But
I... we recommend not using screen time as a reward because then they're
constantly thinking about getting the reward. So, what happens when you take
the screens away is that they kind of go through a grieving process and then
they're forced to start... you know, accept it, and then they start playing
more outside and being more creative and physical and all those things that...
their brain kind of wakes up. So, when you're using it as a reward, even like,
say, some parents would say ; Well, if you're good this week or you do all your
homework, then you can get some on the weekend. We used to do things that way,
but now we're kind of saying that doesn't work that way. We really want
children to be like self-driven and not interacting or doing what they need to
do just to get that screen reward. So, we want to... we want to... our
recommendation is to avoid doing that.
Mme Bogemans :
You said previously that the goal, one
of like realistic goal for a family would be to turn the hour that one kid
would spend on the day on the... all of the week. What would be the process you
would suggest for that family to make it happen?
Mme Dunckley
(Victoria L.) :
I think doing the screen fast first for four weeks helps break the
habits better than anything else. So, when I do the screen fast, I do allow a
few hours of a slow-paced movie or something like that a week. So, they do get
a little bit of a reprieve and especially if the family can do it together. But
doing that, the four weeks really does help kind of reset the habits. And the,
from there, after that, then they can kind of think about, O.K., how many hours
per week are we going to allow and what is that going to look like? Is it going
to be, you know, gaming? Is it going to be this or that? Obviously, again, less
is more. And some... some parents decide, if they've seen such dramatic
changes, that they just want to continue with no devices, especially for kids
that have autism, you know, ADHD, things like that, they really do function
much better just eliminating it altogether for the long term. But, at least, if
the parents start with those four weeks, then they can just... it's not so
overwhelming and they can see for themselves the difference.
Mme Bogemans :
O.K. Thank you.
La
Présidente (Mme Dionne) : Merci. Est-ce qu'il y a d'autres
interventions? M. le député de Marquette.
M. Ciccone
:
Oui.
Merci. Me, again, Doctor. I'm just... I'm just curious, how was your studies
received in your part of the country? And, in the same question, I know there's
a big lobby, you know, about the screens, and E-games, and all that ,video
games. How is that received on their part?
Mme Dunckley
(Victoria L.) :
I think that the pendulum is starting to swing here in the U.S. and
particularly I think in California. It's still got a long way to go, but I
think, you know, ten years ago...
Mme Dunckley (Victoria
L.) :
...go
when I would give a talk. It was really me trying to make my argument and
trying to convince people that it was affecting their focus and their mood
regulation, things like that. Now we have research showing that. You know, I'm
just... I'm a clinician, so I don't do formalized research, but now there's
research showing that it causes focus problems. If they look at longitudinal
studies, we now have research showing there's delays in language and lower math
or reading scores and things like that with more screen time. We know there's
now a study going on showing that I think they did instead of two... they did
two hours a week of screen time, and, you know, as an intervention very similar
to mine, but they only did it for two weeks. But it was really a feasibility
study to see if they could actually do it. And they did. And they saw a
dramatic... I think it was in preschoolers, in the behavior and the functioning
and learning of those children. So, I think that it's... the time is coming
where the pendulum is swinging. But there's still... it's still a huge problem,
I think, in the... at the community level.
• (15 h 30) •
M. Ciccone :
How strong is the lobby of the video
games and all the apps they're presenting?
Mme Dunckley
(Victoria L.) :
It's huge.
M. Ciccone :
How strong is that? Are they stronger
than we are right now for the ones like yourself who want to control screen
time?
Mme Dunckley
(Victoria L.) :
I mean it's huge. It's David and Goliath. And it's not just the
video game industry. It's the communications industry, and Google, and, you
know, all the big tech players. And they have their tentacles everywhere. So, I
think it really has to come from, you know, the top down, and having like the
surgeon general put out warnings. There's going to be lawsuits and things like
that, like against social media companies. Things like that are going to have
to happen, I think, before, a, people realize what's going on, but also to make
kind of a societal change where we're really viewing this as a problem for
children and trying to protect them for as long as we can.
M. Ciccone :
We had a... last week, we had a doctor
also, does some research, wrote a book, and she said that all the companies
that you mentioned, they should be ashamed of what they're doing to our kids.
What are your thoughts on that?
Mme Dunckley
(Victoria L.) :
Absolutely. Yes, absolutely, you know. And we know that Meta was
doing some research - this is the whole whistleblower incident - was doing
research showing that their... what they were doing was making kids more
depressed, feeling worse and having suicidal thinking. They knew that and they
were doing it anyway, and they didn't change what they were doing. So, then
when they got caught, then they decided not to do that kind of research
anymore, you know. So, things like that, that I think Tristan Harris Center for
Humane Technology, like his group and kind of all the whistleblowers talking
about what's going on inside those big tech companies, we have to pay attention
to that. They're all saying and giving lip service to what they can do and what
they're doing, but behind the scenes, you know, they're still a mega
corporation who are... they're beholden to shareholders. So, I think, you know,
it may be okay to, like, ask them to make changes, but we cannot trust anything
that they're saying, that they're putting in place as precaution.
M. Ciccone :
Thank you.
La Présidente (Mme
Dionne) :
Merci.
Mme la députée de Bourassa-Sauvé.
Mme Cadet :
Merci. You mentioned that even was the
American Association of Pediatrics, like, can be funded by the corporations in
the industry, and what we'll call, well, I guess, tech washing. So, do you
think that there's enough transparency in where, like, all of this funding is
going right now? And would it be helpful to have more transparency, especially,
I mean, given like what you see? You live in California.
Mme Dunckley
(Victoria L.) :
I do think it would be helpful to have more transparency and, you
know, to publicly acknowledge that they are getting funding from these
companies. Because I think what happens is they may have certain positions and
then they kind of... by the time it gets presented to the public, it gets watered
down. So, there's the language of it needs to be balanced, it needs to be...
you know, those kind of... that kind of messaging is because they don't want to
lose their sponsorships and their funding. So, I think paying attention to that
kind of language, when they... when language gets watered down and things, you
know, like that the... everything in moderation, or they need to have balanced
use, or we need to have a more nuanced conversation, you know, things like
that, I think those are red flags to those of us who are kind of in the fields.
I think it's... And it's not to say that those organizations are not doing good
work, too. You know, common sense media is doing good work and so is the
American Academy of Pediatrics. But I still... they still have conflicts of
interests.
Mme Cadet : More time? OK.
La Présidente (Mme Dionne) : Allez-y.
Mme Cadet : And... Thank you. And again...
15 h 30 (version non révisée)
Mme Cadet : And...
Thank you. And again... can intervenes earlier, like you said, that the
recommendations that come from public health authorities are... already have
like a certain sense of authority from the Government. Is there like any other
type of role that the... that states can play in terms of regulating the
industry? Because we know that self-regulation... it seems from what you're saying
that self-regulation from the industry is not enough or even like not even
possible.
Mme Dunckley
(Victoria L.) :
Yes. I mean, I think it should still be done. It's just not going to
solve the problem. I think, you know, have educating health professionals, the
pediatricians, the mental health professionals, as well as the educators is
what's going to happen in terms of having it... You know, I feel like we have
to work around everything. So, I feel like teachers and principals and all
the... you know, that whole... the whole education system needs to know that
less is more and, you know, how to use it. And then, same thing with the health
professionals. So, I think that is one way to kind of work around it and just
not... we just can't rely on regulation. I mean, I think... honestly, I think
the most helpful thing would be making it illegal for minors.
Mme Cadet :
Social media illegal...
Mme Dunckley
(Victoria L.) :
Making social media illegal, making it illegal... upon to give one,
you know, one to one devices in schools. I just think having legal protection
is... would work much better.
Mme Cadet :
Thank you.
La Présidente (Mme Dionne) : Merci
beaucoup. Merci beaucoup, Mme Dunckley pour...
Mme Dunckley (Victoria L.) : Can I just add one more thing?
La Présidente (Mme Dionne) : Oui,
allez-y.
Mme Dunckley (Victoria L.) : With the one to one... or just any school issued devices, there's
also a lot of things happening like porn exposure and... as early as, like,
first grade. So, whether, you know, if it's, you know, a child bringing a phone
or even a school issued device, kids are being exposed to porn by first or
second grade. I mean, it's insane. And then other kids are being exposed to,
like, self-harming videos on social media through school issued devices. So, I
think the school issued devices, that's a huge problem, and there's a lot of
these issues that are going on with minors that can't really be talked about
because they're minors. But it's very, very common for these things to happen,
and it's obviously very disturbing for the parents.
La Présidente (Mme Dionne) : Merci
beaucoup, Mme Dunckley. Merci beaucoup pour votre contribution à ces
travaux.
Alors, pour ma part, je suspends les
travaux quelques instants pour accueillir nos prochains invités. Merci.
(Suspension de la séance à 15 h 37)
(Reprise à 15 h 40
)
La Présidente (Mme Dionne) : Bonjour
à tous, la commission reprend maintenant ses travaux, donc je souhaite la
bienvenue à Mme Caroline Fitzpatrick et Mme Gabrielle Garon-Carrier. Donc,
bonjour, mesdames, bienvenue à cette commission. Je vous rappelle que vous
disposez de 10 minutes pour nous présenter votre exposé. Suite à ça, il y
aura une période de questions avec les membres de la commission. Donc, je vous
cède la parole.
Mme Fitzpatrick (Caroline) : Bonjour
à tous. Je vous remercie, honorables membres de la commission parlementaire,
pour l'opportunité de partager avec vous les travaux de mon équipe sur les
jeunes et les écrans. Je vais commencer en disant que je n'ai aucun conflit
d'intérêts à rapporter. Tous mes travaux sont financés par voie de concours,
par des organismes indépendants.
Aujourd'hui, je vais me pencher sur deux
enjeux : l'utilisation des écrans par les jeunes et l'accès aux réseaux
sociaux et aux jeux vidéo. L'environnement numérique des enfants s'est
transformé de manière dramatique au cours des dernières décennies, et un des
changements les plus marquants est l'utilisation croissante et de plus en plus
précoce des appareils mobiles par les jeunes enfants. L'utilisation des
appareils mobiles se distingue d'utilisation d'appareils traditionnels comme la
télévision, en particulier à cause de leur petite taille et l'incorporation
d'algorithmes personnalisés. Ces appareils favoriseraient une utilisation
solitaire plutôt qu'en famille. En plus, les appareils mobiles se connectent à
l'Internet et ceci fait en sorte que les contenus y deviennent disponibles sur
demande et en quantité illimitée. J'aimerais aussi soulever une autre tendance
générale, c'est que les enfants de milieux défavorisés accumuleraient plus de
temps devant les écrans que les enfants de milieux plus favorisés, et c'est une
tendance qui semble s'amplifier à travers le temps.
Il y a trois raisons pour lesquelles
l'utilisation des écrans par les enfants pourrait avoir un impact sur leur
développement. Tout... tout d'abord, selon le principe du vase communicant,
lorsque les enfants accumulent beaucoup de temps avec les écrans, ils ont moins
de temps à consacrer à d'autres activités comme les échanges et les
interactions avec les autres autour d'eux, jouer à faire semblant et
l'exploration de leur environnement. En plus, nous savons que les enfants
apprennent en imitant des modèles autour d'eux. Généralement, il s'agit de leur
mère, de leur père, de leur frère ou de leur sœur. Mais les enfants peuvent
aussi apprendre à imiter leurs personnages préférés d'une émission de
télévision ou d'un jeu vidéo.
Finalement, les plateformes numériques
emploient souvent des stratégies de récompenses virtuelles. Il peut s'agir d'un
coffre à trésor, d'un... rouge ou d'une récompense pour une utilisation
consécutive, et ces mécanismes pourraient être perturbants pour les systèmes
attentionnels et de la récompense des jeunes enfants.
Mon équipe et moi avons mené une enquête
longitudinale durant la pandémie. Nous avons étudié les habitudes,
l'utilisation des écrans et le développement des enfants lorsqu'ils avaient
trois ans et demi, quatre ans et demi et cinq ans et demi. En voici les
principaux résultats. Nous avons observé un temps d'écran plus important durant
la petite enfance était associé avec un moins bon développement global et un
risque plus élevé de devenir en surplus de poids. Nous avons aussi observé
qu'une utilisation plus fréquente de la tablette serait associée avec le
développement de moins bonnes capacités de gestion des émotions. Et pour
terminer, nous avons aussi observé qu'un temps d'écran plus important serait
associé avec le développement d'un moins bon contrôle volontaire...
Mme Fitzpatrick (Caroline) : ...ce
qui fait référence à la capacité d'avoir un autocontrôle sur nos comportements
et de moins bonnes fonctions exécutives. Les fonctions exécutives sont des...
sont des compétences cognitives qui nous permettent d'organiser nos pensées, de
planifier et de prendre des décisions.
Le temps d'écran des parents semble aussi
être important. Selon nos recherches, les parents, dans notre échantillon, qui
eux-mêmes utilisaient plus fréquemment les écrans, avaient des enfants qui
développaient un moins bon... qui avaient un moins bon développement global.
Nous avons aussi observé que certaines stratégies parentales, comme utiliser un
écran pour calmer un enfant, pouvaient avoir un impact négatif sur le
développement de l'autorégulation chez les jeunes enfants.
Et, pour terminer et possiblement
alimenter certaines pistes de solutions, nous avons observé que les parents qui
mettaient en place des règles et des limites dès l'âge de trois ans avaient des
enfants qui éventuellement passaient moins de temps devant les écrans. Mon
équipe et moi avons aussi étudié l'utilisation des écrans, le temps passé en
ligne et les jeux vidéo chez les adolescents. Comme vous pouvez voir dans le
graphique en bas à gauche, les adolescents passent beaucoup de temps devant les
écrans, beaucoup de leur temps de loisirs devant les écrans, et c'est une
utilisation qui varie selon leurs caractéristiques sociodémographiques. C'est
important de regarder ou d'examiner séparément l'utilisation par les
adolescents, parce que... parce que leur utilisation est différente de celle
des plus jeunes enfants. En particulier, ils sont moins supervisés et passent
plus de temps sur les réseaux sociaux et à jouer à des jeux vidéo. C'est aussi
important de tenir compte des caractéristiques des adolescents. Donc, ils sont
plus impulsifs, plus enclins à la recherche de sensations fortes et ils
deviennent plus sensibles à l'opinion des pairs. J'aimerais aussi souligner
quelques différences garçons filles. Donc, les filles passeraient plus de temps
à utiliser les réseaux sociaux et à clavarder alors que les garçons passeraient
plus de temps à jouer à des jeux vidéo et à consulter des sites sexuellement
explicites.
Donc, à l'aide de l'étude longitudinale
des enfants du Québec, mon équipe et moi avons étudié l'utilisation des écrans
chez les ados et leurs conséquences. Nous avons observé que, pour les filles,
passer plus de temps en ligne serait associé avec une augmentation des
symptômes de dépression majeure et une augmentation au niveau des symptômes
d'anxiété généralisée et sociale. Nous avons aussi observé qu'en début d'adolescence,
pour les garçons et les filles, passer plus de temps à jouer à des jeux vidéo
serait associé avec une augmentation du risque de développer des symptômes de
TDAH qui sont des symptômes d'inattention, d'hyperactivité et d'impulsivité.
Pour terminer, nous avons observé qu'un temps d'écran plus important chez les
garçons et les filles serait associé avec une diminution des comportements
prosociaux qui sont les comportements d'entraide et altruistes envers les
autres.
Je termine avec quelques recommandations.
Étant donné que le paysage numérique des jeunes évolue rapidement, c'est
important qu'on continue à documenter les multiples effets possibles et qu'on
le fasse à l'aide de devis rigoureux comme des enquêtes longitudinales. Pour
les milieux de la famille, je pense que c'est important de continuer à
sensibiliser les familles et les parents sur les impacts possibles de
l'utilisation des écrans. Je pense qu'on doit aussi mettre en place des mesures
pour accompagner les parents dans l'établissement de saines habitudes avec le
numérique. Et troisièmement, si on veut que les enfants et les jeunes passent
moins de temps devant les écrans, on doit s'assurer que les familles ont accès
à des loisirs sans écran abordables dans leur communauté.
Pour terminer, en milieu scolaire, je
pense qu'on doit commencer à plus systématiquement former les élèves et le
personnel enseignant sur les conséquences de l'utilisation du numérique. On
peut aussi travailler avec les écoles pour éviter ou limiter l'utilisation des
écrans pour le loisir dans ces milieux. Et je pense finalement que c'est
important de s'assurer que les écoles soient et demeurent des endroits
privilégiés pour que les jeunes bougent et pour qu'ils soient initiés à des
loisirs sans écran.
J'aimerais remercier les jeunes et les
familles qui ont participé à mes recherches, mon équipe et les bailleurs de
fonds. Donc, je suis aujourd'hui en compagnie de la professeure Gabrielle Garon
Carrier, professeure également à l'Université de Sherbrooke, et nous sommes
heureuses maintenant de répondre à vos questions et d'échanger avec vous.
La Présidente (Mme Dionne) : Merci
infiniment, Mme Fitzpatrick. On n'a malheureusement pas vu les pages défiler de
la présentation, mais les membres de la commission on tous accès, là, via notre
site greffier. Alors, voilà, donc nous sommes prêts à débuter les échanges. M.
le député de Marquette.
M. Ciccone :Oui. Bonjour. Merci beaucoup, Mme Fitzpatrick et Mme Garon
Carrier d'être avec nous aujourd'hui...
M. Ciccone :...Vous avez fait référence dans votre présentation au
contexte familial pour le temps d'écran. Pouvez-vous élaborer un peu plus le
pourquoi de cette différence-là?
Mme Fitzpatrick (Caroline) : Est-ce
vous faites référence à la statistique sur la défavorisation?
M. Ciccone :Exactement, oui, oui.
Mme Fitzpatrick (Caroline) : O.K.
Bien, écoute, c'est des... c'est une situation qu'on essaie encore de
comprendre de manière scientifique, mais on a plusieurs hypothèses. Il y a
l'hypothèse des loisirs abordables. Lorsqu'on est défavorisé, on n'a peut-être
pas accès à d'autres activités sportives, artistiques, créatives qu'on peut
réaliser avec l'enfant, donc l'écran devient une source très immédiate, très
peu coûteuse comme source de loisirs. On sait aussi que les enfants qui
grandissent dans des quartiers, disons, où il y a plus d'espaces verts, où
c'est plus sécuritaire de jouer dehors, les enfants passent plus... dehors.
Mais lorsqu'on est dans un quartier défavorisé, ceci pourrait empêcher ou
devenir un obstacle à passer du temps dehors. Les parents pourraient aussi
vivre plus de stress, ce qui pourrait interférer avec leur capacité de générer
et d'engager les enfants dans des activités qui seraient plus éducatives. Donc
ce sont les hypothèses que nous avons.
• (15 h 50) •
M. Ciccone :Vous avez fait référence dans votre... justement, votre
commentaire, quand il y a plus de parcs, il y a plus d'activités, quand il y a
plus d'offres, les jeunes sont plus poussés à aller vers ces activités-là. Mais
avez-vous... avez-vous une donnée à l'effet... à savoir la différence entre les
jeunes des régions, où il y a un espace plus vert, versus ceux qui sont en
ville?
Mme Fitzpatrick (Caroline) : Écoute,
c'est exactement les données que nous sommes en train de recueillir en ce
moment au Québec. Les données existantes ont été recueillies en Australie.
Donc, nous sommes en train de regarder plutôt dans les milieux urbains, mais on
va comparer selon les caractéristiques des quartiers, à quel point ceci
contribue au temps d'écran dans un échantillon d'enfants qui est moitié
défavorisé et moitié de milieux non défavorisés.
M. Ciccone :Seriez-vous d'accord pour être capable de nous transmettre
ces données-là d'ici... si jamais vous les recevez avant la fin mai, avant la
fin de cette commission-là, ce serait très, très apprécié, si vous pouvez les
faire parvenir à la commission. Ce serait apprécié.
Et en terminant, là, il y a-tu un bon
temps pour utiliser des écrans? Par exemple, pour des jeunes qui ont...
difficultés d'apprentissage, qui ont des plans d'intervention, est-ce qu'il y a
une exception pour ces jeunes-là?
Mme Fitzpatrick (Caroline) : Donc
les travaux que j'ai menés sont basés principalement sur l'utilisation des
écrans pour le loisir. Ceci donc n'enlève pas le fait qu'il existe certaines
applications pédagogiques thérapeutiques d'utilisation des écrans. Et, selon
moi, ce n'est pas ces utilisations-là qui sont problématiques. C'est les
utilisations pour le loisir.
M. Ciccone :Parfait. Merci beaucoup.
La Présidente (Mme Dionne) : D'autres
interventions? Oui, Mme la députée de Bourassa-Sauvé.
Mme Cadet : Merci, Mme la
Présidente. Bonjour, professeure Fitzpatrick, bonjour à vous deux pour... et
merci pour cette présentation.
D'abord, donc, sur la question de mon
collègue au niveau des milieux défavorisés, je pense également... expérience,
donc, l'enjeu, donc, de l'accès à des loisirs abordables, donc, pour pouvoir,
donc, avoir, donc, du temps sans écrans pour compenser, donc, l'accès aux
écrans semble être une hypothèse.
Maintenant, j'aimerais... En fait, là,
j'ai une question peut-être un peu particulière ici. Je me demandais, parce
qu'on... justement, donc, quand on parle, donc, de ces enjeux-là, puis
plusieurs, donc, autres professeurs sont venus avant vous puis nous ont parlé
aussi, donc, de compenser, donc, par d'autres activités, puis manifestement,
c'est le cas, j'aimerais savoir c'est quoi le rôle de l'ennui dans le
développement de l'enfant, donc d'avoir du temps qui n'est pas nécessairement,
donc, organisé à faire, donc, une autre activité pour compenser un petit peu ce
temps sans écrans là?
Mme Fitzpatrick (Caroline) : Je
vais... Je vais répondre en premier et ensuite je vais... si elle le désire, de
ma collègue Gabrielle Garon-Carrier pourra renchérir sur la réponse.
Donc, je pense qu'il y a un continuum de
l'ennui. Un peu d'ennui peut être source de créativité, peut aider les enfants
justement à développer leurs fonctions exécutives, à développer leur contrôle
volontaire, peut être une source de motivation pour créer des jeux. Donc, il
peut y avoir des éléments bénéfiques à l'ennui, un niveau minimum. Mais un
niveau d'ennui trop élevé est stressant pour les enfants. Ça devient source de
stress et ça, ce n'est pas une bonne situation pour les enfants. Donc, on ne
veut pas que les enfants aillent une expérience d'ennui intense, mais
certains...
Mme Fitzpatrick (Caroline) : ...mais
certains moments d'ennui qui amènent à la recherche d'activités plus créatives,
plus enrichissantes peut être bénéfique pour le développement.
Mme Cadet : ...Pre Garon-Carrier,
vous vouliez compléter?
Mme Garon-Carrier (Gabrielle) : Bien,
je vais réitérer en fait la réponse de ma collègue, là. Tout à fait, ça peut
générer des expériences, ça permet à l'enfant aussi éventuellement de se
réguler lui-même, gérer son émotion négative qui est l'ennui. Ça, c'est un
apprentissage qui est très important chez les jeunes enfants et qui ne se
développe pas devant les écrans malheureusement.
Mme Cadet : C'est un peu ma
question... ici. Donc, ce que vous dites, c'est qu'en fait, avec les écrans, vu
qu'on enlève donc toute phase d'ennui dans le continuum d'activités de la
journée d'un enfant, donc ça devient... Donc, on parlait beaucoup, donc, du
coût d'opportunité de faire d'autres activités, mais c'est aussi un défi à ce
niveau-là, parce qu'en fait, on enlève donc cette phase qui peut être bénéfique
d'ennui avec la présence d'écran dès le jeune âge. Parfait.
Ensuite, vous avez fait, donc, des
distinctions, donc, entre les filles et les garçons au niveau, donc, des
symptômes qui peuvent être développés, dépression, anxiété sociale chez les
filles, TDAH, impulsivité chez les garçons, par exemple. Est-ce qu'au niveau
des recommandations, peut-être pas au niveau du temps d'écran, mais... Au
niveau, donc, de la relation avec les écrans, est ce que vous avez donc des
recommandations qui seraient différenciées selon le genre?
Mme Fitzpatrick (Caroline) : C'est
vraiment intéressant comme question. Je ne sais pas si j'irais jusque là, parce
que nous autres, on regarde ici des différences garçons-filles. La situation
est probablement un peu plus complexe. On n'a pas pu mesurer des aspects plus
fins, par exemple, du genre. Donc, je pense que ça serait plus prudent de faire
des recommandations générales à cet égard-là, étant donné que certaines filles
pourraient aussi jouer aux jeux vidéo. Certains garçons pourraient aussi
utiliser les réseaux sociaux. Bien, je pense que c'est important de...
peut-être pour les campagnes de sensibilisation, de garder ça en tête lorsqu'on
peut rejoindre certains publics, que les garçons et les filles peuvent vivre
des conséquences différentes de l'utilisation des écrans.
Mme Cadet : O.K. Merci. Puis
dernière question de mon côté. Bien, évidemment, on parle beaucoup de majorité
numérique. Vous avez probablement donc suivi ces débats-là? Est-ce que vous
vous faites, donc, une recommandation en ce sens? Donc, comment vous entrevoyez
cette potentielle politique publique?
Mme Fitzpatrick (Caroline) : Je
ne suis pas certaine si je me prononcerais sur la majorité numérique.
Mme Cadet : Merci beaucoup.
La Présidente (Mme Dionne) : Merci
beaucoup. J'aurais juste une petite question... Au niveau des études, vous
parliez des études menées par... chez des enfants de quatre ans et demi, cinq
ans et demi. Alors, j'étais juste curieuse de savoir : Pourquoi cet
âge-là?
Mme Fitzpatrick (Caroline) : Le...
Notre rationnel, lorsqu'on a effectué, commencé cette étude-là, c'est qu'on
voulait regarder des enfants d'âge préscolaire et toute la période avant qu'ils
commencent l'école, parce qu'ultimement on voulait comprendre comment
l'utilisation des écrans pouvait influencer le développement global, et leur
ajustement, et leur préparation à l'école.
La Présidente (Mme Dionne) : Merci
beaucoup. Alors, je cède maintenant la parole à Mme la députée d'Iberville.
Mme Bogemans : Comme vos
études portent justement sur les enfants en bas âge, est-ce que vous auriez des
recommandations en ce qui a trait à l'école primaire? Je sais que cinq ans,
c'est pas mal la maternelle, là, mais au niveau de l'école primaire,
idéalement, comment on pourrait bien encadrer nos jeunes?
Mme Fitzpatrick (Caroline) : Bien,
je dirais qu'il y a certaines pratiques qui sont... Encore une fois, je suis
plutôt spécialiste des utilisations d'écrans pour le loisir et je comprends
qu'il y a des bienfaits... des technologies pédagogiques qui peuvent apporter
des bienfaits. Cependant, l'utilisation des écrans pour le loisir, regarder des
émissions de télévision, regarder des films, c'est des pratiques courantes à la
maternelle. C'est des pratiques courantes aussi dans les milieux de garde.
Donc, je pense qu'on peut travailler avec les écoles pour éviter ce genre
d'utilisation là. Il y a également récemment eu un parent qui a écrit, je pense
que c'était au Devoir ou à La Presse qui était très fâché que son école utilise
des écrans comme récompense. Donc, les utilisations pendant les repas, les utilisations
comme récompense, les utilisations pour le loisir sont des choses qu'on
pourrait commencer à... à limiter et à même éliminer, je pense, pour les
tout-petits à l'école.
Mme Bogemans : Tout à
l'heure, vous avez dit que chez les enfants, avec une structure familiale où
l'écran est vraiment encadré, donc à partir de trois ans, vous pouviez déjà
voir l'évolution jusqu'à l'âge de cinq ans et demi finalement, que le temps
d'écran était moindre chez... ces enfants-là, pardon. Comment... Avez-vous des
exemples de cet encadrement-là? Puis si on va avec des recommandations en ce
sens-là, est-ce que ça serait plutôt en termes de santé publique, en termes de
recommandations de l'ordre des pédiatres ou des choses comme ça, qu'on pourrait
renforcer ces bonnes habitudes là?
Mme Fitzpatrick (Caroline) : Donc,
oui. Donc, c'est des... Les pratiques parentales qu'on a étudiées
s'appellent... ça s'appelle dans la littérature scientifique les pratiques
restrictives. Ce n'est pas un beau nom, mais ce que ça...
Mme Fitzpatrick (Caroline) : ...très
concrètement, c'est mettre en place des limites par rapport au temps des
écrans, mais aussi les contenus qui vont... qu'on va éviter, les contenus qu'on
va favoriser et les moments qui vont... où est-ce qu'on veut aussi interdire
les utilisations. Donc, c'est aussi ce que recommande par exemple l'Académie
américaine de pédiatrie, de... la Société canadienne de pédiatrie. C'est
essentiellement l'établissement d'un plan familial qui devrait être mis en
place le plus tôt possible, idéalement avant que les enfants commencent à
utiliser les écrans. Et, ce plan-là peut venir justement spécifier c'est quoi,
les limites de temps pour chaque membre de la famille, mais aussi quels sont
les moments où est-ce qu'on veut ne pas utiliser d'écran et quels sont les
contenus à éviter et à favoriser.
Mme Bogemans : Merci.
• (16 heures) •
La Présidente (Mme Dionne) : Il
y a plusieurs spécialistes, experts qui eux recommandent zéro trois ans, aucun
temps d'écran. Vous en pensez quoi?
Mme Fitzpatrick (Caroline) : C'est...
Oui, je pense que c'est les recommandations justement de John Hutton. Je pense
que le principe de précaution est important à tenir en... à garder en tête. Il
y a très, très peu de recherches qui montrent des bienfaits de l'exposition
précoce aux écrans. S'ils en montrent, c'est dans des circonstances très
spécifiques et précises. Généralement, les enfants apprennent en utilisant les
écrans si le parent est présent et si le contenu est éducatif. Donc, il y a très
peu de bienfaits documentés. Et on trouve au contraire plusieurs études qui
montrent des risques. Donc, par principe de précaution, je pense qu'on risque
très peu en demandant aux parents d'éviter les écrans avec les enfants jusqu'à
l'âge... avant l'âge de deux ans et de limiter et de surveiller de près les
utilisations à partir de l'âge... entre les âges de deux et trois ans.
La Présidente (Mme Dionne) : Merci.
Je passe maintenant la parole à Mme la députée de Hull.
Mme Tremblay : Oui. Bonjour.
Alors, moi, je reviens parce que vous avez étudié beaucoup, là, la petite
enfance. Alors, comment... comment on va... On parle de prévention, mais
comment on va faire pour atteindre vraiment les parents puis que ça s'implante
dans les familles? Parce que je me promenais encore en fin de semaine, puis, tu
sais, je voyais des enfants avec... dans la poussette pendant que le parent
faisait l'épicerie, ils regardaient les réseaux, puis là, ce n'est pas une
exception, là, Si on regarde partout autour de nous, là, les enfants, là, sont
sur des écrans en bas âge, dans les milieux publics, puis probablement chez eux
aussi, là.
Donc, nous, comme... Vous voyez, on a une
commission, en tant qu'État, on a réfléchi à la question. Donc, nous, ça va
être quoi, notre rôle finalement? Et comment on va faire pour atteindre
vraiment les parents, là, donc? Parce que, vous le dites, là, c'est délétère
pour la régulation émotionnelle, ça a un impact qui est majeur. Puis vous
n'êtes pas les seuls à le dire, d'autres recherches l'ont démontré, d'autres
intervenants ici aujourd'hui. Donc, on fait quoi comme État pour atteindre les
parents, pour les conscientiser? Est-ce que c'est une campagne publicitaire ou
on va encore plus loin? Donc, qu'est-ce qu'on doit faire? Quel est notre rôle à
nous?
Mme Fitzpatrick (Caroline) : C'est
certain que, pour un problème complexe de société, comme la surutilisation des
écrans, ça prend des interventions à multiniveaux. C'est insuffisant et
peut-être injuste de simplement demander aux parents de changer leurs
habitudes. Donc, c'est un... Je pense qu'il faut utiliser une approche
collective. Certains... certaines interventions sont en train... en train
d'être pilotées, par exemple en Australie, où est-ce qu'on fait des visites à
domicile, où est-ce qu'on incorpore l'éducation, la sensibilisation au
numérique dans des visites à domicile. Donc, c'est une stratégie qu'on peut
utiliser pour rejoindre les familles. Encore, on peut continuer avec des
campagnes de sensibilisation. Je pense aussi que les écoles peuvent avoir un
rôle à jouer pour faire de la sensibilisation sur l'effet, l'impact du
numérique sur les jeunes. On enseigne l'hygiène de vie à l'école, donc on peut
faire la même chose pour l'utilisation des écrans.
Mme Tremblay : Merci.
La Présidente (Mme Dionne) : Merci
beaucoup, Mme la députée. M. le député de Jonquière.
M. Gagnon : Bonjour,
docteure, bonjour, Mme... j'ai manqué quelques minutes de la présentation.
Alors, si jamais je vous fais répéter, vous pouvez me ramener à l'ordre, il n'y
a aucun problème. On a parlé beaucoup... C'était fort intéressant, là, avec mes
collègues au niveau de l'angle parent et c'est vraiment intéressant, vos
recommandations. Vous êtes en mode sensibiliser, j'aime aussi, là, quand on
commence à l'entendre un petit peu, l'offre de services abordable qui peut...
qui peut permettre, là, de mettre son cellulaire de côté.
Je veux vous amener du côté scolaire au
niveau peut-être de la responsabilité de l'État, là, peut-être davantage.
Vous... vous mentionnez au niveau scolaire de former les enseignants. On a
entendu quelques... on a entendu des gens qui nous disaient que peut-être que
la formation ou la réglementation devrait être unique par école, devrait
être...
16 h (version non révisée)
M. Gagnon : ...devrait être
divisée par centre de services scolaires, par région, peut être au niveau
national, tout dépendamment de l'indice de défavorisation aussi de l'école.
Et je voulais vous entendre, si on
réfléchit, est-ce qu'on doit se mettre tous au même diapason d'une stratégie
nationale de formation ou on doit y aller et le décortiquer, peut-être en lien
avec la géographie, en lien avec l'état du quartier, l'état de l'école, le
conseil d'établissement? C'est un petit peu là-dessus que je voulais
centraliser ma question.
Mme Fitzpatrick (Caroline) : Bien,
je dirais que, bon, présentement, les enseignants ou dans le curriculum de la
formation enseignante, il existe des modules sur l'utilisation saine des
écrans. Et je ne suis pas spécialiste de la formation, mais ce que je peux
dire, c'est que je rencontre beaucoup d'enseignants, je fais beaucoup de
conférences pour les commissions scolaires, je fais beaucoup de conférences
pour les... les spécialistes et les intervenants en milieu scolaire, et tous
sont surpris lorsque je leur présente les conséquences négatives de l'utilisation
des écrans par les jeunes enfants et même par les adolescents. Donc, ce que ça
indique, selon moi, c'est que, dès la formation enseignante, on doit prendre au
sérieux comment on aborde l'impact possible de l'utilisation des écrans pour le
loisir. On sait que les enseignants sont au courant que ce que les jeunes font
avec les écrans à la maison un impact sur leur comportement. On l'a vu en
Ontario avec la «class action» qui poursuit les compagnies de plateformes de
réseaux sociaux. Donc, je n'ai pas la réponse exacte que vous cherchez, mais c'est...
c'est mon expérience que je partage avec vous.
M. Gagnon : Merci.
La Présidente (Mme Dionne) : M.
le député de Gaspé.
M. Sainte-Croix : ...Mme la
Présidente. Vous avez parlé, Mme Fitzpatrick, de la question thérapeutique, j'aimerais
que vous développiez un petit peu là-dessus parce qu'honnêtement c'est notre
deuxième journée, je crois, d'audiences, puis on n'a pas vraiment abordé le
sujet thérapeutique rattaché au numérique. Donc, j'aimerais vous entendre
là-dessus.
Mme Fitzpatrick (Caroline) : Bon,
encore, ce n'est pas mon domaine d'expertise, mais je peux dire que certains
cliniciens utilisent des thérapies par réalité virtuelle, par exemple, pour
traiter... ça peut être des blessures, mais ça peut aussi être certaines
conditions psychiatriques. Il y a aussi des applications spéciales qui sont
développées pour aider les jeunes qui ont des troubles d'apprentissage ou qui
ont un trouble de spectre... du spectre de l'autisme. Donc ça, ce sont des
outils très spécifiques qui n'ont pas... qui ne sont pas conçus pour le loisir,
n'emploient pas des stratégies de renforcement virtuel, ne sont pas créés pour
des gains commerciaux qui peuvent être incorporés, utilisés par les jeunes pour
certains bienfaits.
M. Sainte-Croix : Si vous me
permettez, Mme la Présidente. Donc, je comprends bien que le modèle d'affaires
qu'on nous a expliqué, là, dans les... à travers nos... nos auditions est
complètement différent, et ça, la science va dans le sens que vous amenez là.
On a de la preuve de ça, de l'aspect thérapeutique de certaines applications.
Mme Fitzpatrick (Caroline) : Bien,
encore là, ce n'est pas... ce n'est pas mon milieu d'expertise, mais oui, je
pense que certaines... il y a certaines applications discrètes qui ont été
développées et évaluées, oui.
M. Sainte-Croix : Merci.
La Présidente (Mme Dionne) : M.
le député de Marquette.
M. Ciccone :Merci beaucoup. Je vous écoutais parler, professeur, puis
vous avez... tantôt, suite à une question de Mme la Présidente quand elle
faisait référence aux recherches. Dr Hutton, de 0-3 ans, pas... les jeunes
ne devaient pas être exposés aux écrans. Vous avez dit : Bien de 2 à 3 ans,
ils devraient être... on devrait peut être les limiter. Pourquoi on dit...
pourquoi vous dites limiter? c'est-tu parce qu'à quelque part, avec tout ce qu'on
voit, on est presque résigné à dire : Bien, on est aussi bien de contrôler
que d'empêcher?
Mme Fitzpatrick (Caroline) : Mais
je pense qu'il y a certains enfants, c'est aussi pour ne pas créer une panique.
Donc, un enfant de deux ans qui utilise une tablette pour avoir un Face Time
avec d'autres membres de la famille, ce genre d'utilisation là ne va
probablement pas créer des effets néfastes chez l'enfant et pourrait même
favoriser des liens familiaux.
L'utilisation... Un parent qui travaille
des longues heures, et maman a besoin de 20 minutes pour préparer le
souper, ce n'est pas dramatique si un enfant passe de temps en temps 20 minutes
à regarder une émission. Donc, je pense que c'est aussi pour nuancer un petit
peu qu'une utilisation occasionnelle peut... peut être acceptable.
M. Ciccone :Merci beaucoup d'avoir précisé, professeur. Également, j'aimerais
peut être rentrer sur un... un plancher...
M. Ciccone :...sur un plancher un peu glissant, là. Je veux vous
entendre là-dessus parce qu'on parle beaucoup des jeunes, on parle beaucoup de
la majorité numérique, on parle de la problématique chez les jeunes, on ne
parle pas des parents. On ne parle pas des parents qui souvent, là, sont les
premiers à mettre un écran devant un jeune. Moi, je ne peux pas parler pour
la... je peux vous parler de la génération de mes parents. C'était plus facile,
il n'y avait pas d'écran. Les premiers jeux vidéo Atari et Coleco, qui sont
plus vieux que vous, professeure, c'est... on a commencé avec ça, puis moi j'ai
connu ça. Mais tout ce qui était écran, là, on n'y faisait pas face. Puis nos
parents n'étaient pas... n'avaient pas de décisions à prendre à ce niveau-là,
on jouait dehors. Aujourd'hui, la nouvelle génération de parents, là, depuis
l'installation des écrans, on voit qu'il y a une augmentation de temps d'écran.
Est-ce que nos parents, la nouvelle génération, entrent dans la facilité?
Est-ce que ce n'est pas eux le problème?
• (16 h 10) •
Mme Fitzpatrick (Caroline) : Bien,
c'est sûr qu'il y a une culture numérique qui est différente avec les parents
qui ont grandi eux-mêmes avec beaucoup de technologie, avec les cellulaires,
avec les tablettes. On sait aussi que l'utilisation des écrans par les parents
est un déterminant de la quantité de temps que les enfants vont passer
devant... eux-mêmes devant les écrans. Donc, je pense qu'encore là c'est... ça
prend... Et ce n'est pas parce que les parents veulent mal faire. Il y a des
parents qui pensent que ou qui croient que l'utilisation de la technologie, que
ce soit une tablette ou autre, est bénéfique pour le développement des enfants
parce que ça les initie à la technologie. C'est une croyance parentale qui
existe. Donc, pour moi, ça renforce l'idée qu'on a besoin de continuer à
sensibiliser et accompagner les parents dans les prises de décisions dans
l'établissement de saines routines avec les écrans.
M. Ciccone :Plusieurs nous ont dit que la recherche n'allait pas assez
vite, qu'on n'avait pas assez de données, on se faisait dépasser par tout ce
qui était numérique. Êtes-vous d'accord avec ça?
Mme Fitzpatrick (Caroline) : C'est
vrai que la technologie évolue rapidement. Par contre, ce que je dis parfois,
c'est que, qu'on regarde TikTok ou qu'on prenne Facebook, même si l'interface
avec la plateforme change, les stratégies de renforcement virtuel demeurent
essentiellement les mêmes. Donc, oui, la technologie avance rapidement, on va
bientôt voir l'émergence de réalité virtuelle pour le loisir, cependant, il y a
aussi certaines constantes dans les plateformes qui sont particulièrement
divertissantes, mais en même temps aussi problématiques.
M. Ciccone :Merci beaucoup. Merci.
La Présidente (Mme Dionne) : Il
y a des experts aussi qui nous ont parlé... bien, on parle d'encadrement
justement puis de mettre en place, là, des saines habitudes à la maison. On
pense... Il y a des experts aussi qui nous ont mentionné, bon, le fait
peut-être qu'il y a des parents, des fois, qui l'interdisent durant la semaine
mais qui lui permettent durant la fin de semaine, qu'on assiste à des
comportements un peu boulimiques de la part des enfants. Vous en pensez quoi de
ça?
Mme Fitzpatrick (Caroline) : Bien,
en fait, nous n'avons pas étudié nécessairement cette question-là des
utilisations pendant la semaine et des utilisations pendant la fin de semaine.
Je sais que, selon des études épidémiologiques, la fin de semaine, c'est un
temps où est-ce que les jeunes passent plus de temps avec les écrans, mais
c'est aussi l'opportunité de rattraper l'activité physique, d'être exposés à
d'autres activités. Donc, je pense que ça vient renforcer l'idée qu'on doit
offrir des activités variées aux jeunes.
La Présidente (Mme Dionne) : Merci.
Je passe maintenant la parole à Mme la députée de Bourassa-Sauvé.
Mme Cadet : Merci. Donc, à
nouveau, merci, mesdames. Vous avez parlé de l'utilisation par les plateformes
des stratégies de renforcement virtuel, donc tout ce qui garde, donc,
l'utilisateur, donc, sur les plateformes. J'aimerais voir, donc, vous entendre,
donc, sur, évidemment, donc, le lien de corrélation et de causalité entre ces
mécanismes-là et les différents effets quant à la gestion et l'autorégulation
des émotions. Ici, l'absence de ces mécanismes-là ou une moindre prévalence de
ces mécanismes-là, si ça peut devenir un levier d'intervention pour l'État ou
pour un régulateur?
Mme Fitzpatrick (Caroline) : Donc,
je vais dire des recherches qui sont directement allées mesurer l'impact de ces
mécanismes-là, par exemple sur les récepteurs de dopamine, sont très peu
fréquentes chez les tout-petits. Mais on sait que chez les adultes on peut
observer des décharges de dopamine lorsqu'on joue à des jeux vidéo qui sont
similaires à les décharges observées par des utilisateurs d'amphétamines. Donc,
ce sont des mécanismes qui sont puissants. Encore une fois, ces études-là sont
assez rares chez les adolescents et chez les jeunes.
Je pense absolument que ça peut être un
levier pour encadrer l'industrie. Par exemple, on peut faire en sorte qu'au
lieu d'être obligé de manuellement aller éteindre toutes les notifications sur
notre plateforme, les produits pourraient...
Mme Fitzpatrick (Caroline) : ...les
produits pourraient arriver sans notifications, et l'utilisateur choisit de les
allumer. Les notifications sont, en particulier, dans les éléments
problématiques, dans les éléments les plus communs et courants de renforcement
virtuel. Donc, offrir du «opt-in» au lieu du «opt-out».
Mme Cadet : Merci beaucoup.
La Présidente (Mme Dionne) : Pour
poursuivre sur le commentaire de ma collègue, quel pouvoir on a là-dessus, et
comment... comment convaincre les géants du Web?
Mme Fitzpatrick (Caroline) : Ce
n'est malheureusement pas mon expertise. Je peux partager les connaissances du
mieux que je peux. Je sais qu'une stratégie, peut-être, et ça ne répond
peut-être pas exactement à la question, mais il y a une initiative en
Angleterre du Child Rights by Design. C'est un... Ils ont... C'est un groupe
qui a développé une série de principes basés sur les droits fondamentaux des
enfants, et leur ambition, c'est qu'on demande aux concepteurs d'applications
de respecter ces principes-là, qui sont développés justement pour protéger, là,
le... les enfants et répondre à leurs besoins. Donc, c'est une chose qu'on peut
commencer à utiliser pour dépister des solutions. En Australie, on a également
créé des corps indépendants pour évaluer la qualité éducative et les âges
minimums pour les contenus destinés aux enfants. Donc, vous savez probablement
que c'est... présentement, c'est l'industrie qui détermine si leur contenu est
valeur éducative, ou valeur de loisir, ou valeur de divertissement, et c'est
eux qui déterminent c'est quoi, les âges appropriés pour leurs contenus.
La Présidente (Mme Dionne) : Merci.
Ça mérite de pousser la réflexion plus loin. D'autres interventions de mes
collègues? Alors, je vous remercie infiniment, mesdames, pour votre
contribution à ces travaux. Alors, pour ma part, je vais suspendre les travaux
quelques instants pour accueillir nos prochains invités. Merci beaucoup.
Une voix : C'est un plaisir,
un immense plaisir. Merci. Au revoir.
(Suspension de la séance à 16 h 16)
(Reprise à 16 h 30)
La Présidente (Mme Dionne) : Alors,
la commission reprend maintenant ses travaux. Alors, je souhaite maintenant la
bienvenue à Mme Sara Eve Levac, avocate et analyste chez Option Consommateurs.
Donc, bonjour, Mme Levac. Merci de contribuer à nos travaux. Alors, je vous
souligne que vous avez 10 minutes pour nous présenter votre exposé, et
suite à cela, nous procéderons à une période d'échange et de questions avec les
membres de la commission. Donc, la parole est à vous.
(Visioconférence)
Mme Levac (Sara Eve) : Merci.
Bonjour, Mme la Présidente. Bonjour, Mme et messieurs les membres de la
commission. Alors, je vous remercie de l'invitation et de nous offrir
l'occasion de vous présenter nos observations aujourd'hui. Je m'appelle Sara
Eve Levac. Je suis avocate et analyste chez Option Consommateurs.
Créée en 1983, Option Consommateurs est
une association à but non lucratif qui a pour mission d'aider les consommateurs
et de défendre leurs droits. Notre travail s'intéresse notamment aux pratiques
commerciales des entreprises dans l'univers numérique.
Au cours des dernières années, nous sommes
fréquemment intervenus sur des questions de vie privée, notamment en publiant
des rapports de recherche et en participant à des consultations sur des projets
de loi en matière de protection des renseignements personnels. Nous avons
également initié des actions collectives d'envergure qui se font notamment sur
la protection de la vie privée. Alors, c'est sur la base de notre expertise
acquise sur le terrain et dans nos recherches que nous vous présentons nos
commentaires devant cette commission.
J'utiliserai le temps qui nous est imparti
pour vous présenter cinq recommandations d'Option Consommateurs sur les sujets
qui intéressent la commission spéciale : d'abord, mieux encadrer les
pratiques dans l'univers numérique en reconnaissant l'intérêt supérieur de
l'enfant dans la loi, interdire l'utilisation commerciale des renseignements
personnels des enfants, créer un comité consultatif d'enfants et de jeunes,
prévoir des obligations de divulgation de contenu publicitaire en ligne et
adapter l'information sur le traitement des renseignements personnels aux
jeunes.
Donc, d'abord, nous considérons que la loi
doit offrir des protections plus solides aux enfants dans l'environnement
numérique. Nous recommandons donc que le principe de l'intérêt supérieur de
l'enfant soit intégré à la Loi sur la protection des renseignements personnels
dans le secteur privé, aussi connue sous le... sous le nom de la loi
no 25.
Donc, plusieurs techniques persuasives
peuvent être utilisées pour retenir l'attention des enfants et des jeunes en
utilisant leurs renseignements personnels, comme par exemple le défilement
infini et la lecture automatique de vidéos qui vont leur proposer toujours une
vidéo de plus à visionner ou une publication de plus être consultée selon leurs
intérêts, offrir des cadeaux quotidiens sur une application mobile afin de les
inciter à retourner au jeu grâce aux données sur leur dernière connexion ou
encore l'envoi de notifications les avisant d'une nouvelle publication d'une
personne qu'ils suivent pour encourager leur engagement sur une plateforme de
réseau social.
Donc, l'inclusion du principe de l'intérêt
supérieur de l'enfant permettrait de faire en sorte que, de la conception
jusqu'à la mise en marché, en passant par les fonctionnalités des services ou
produits numériques, les décisions soient prises en considérant à ce qui
favorise le développement global de l'enfant, quelle que soit la façon dont
l'entreprise considère traiter les renseignements personnels.
Prenons par exemple un jeu mobile qui
envoie des notifications à l'enfant s'il ne s'est pas connecté depuis plusieurs
heures afin de l'inciter à y retourner. En ajoutant une obligation de prendre
en considération l'intérêt supérieur de l'enfant, le développeur de ce jeu aura
l'obligation d'évaluer si le traitement de ces renseignements personnels
favorise son développement global, donc son développement psychologique,
cognitif, social, affectif, etc. Et une telle analyse pourrait ainsi conclure
que cette utilisation est inacceptable, considérant que ces jeux peuvent créer
une dépendance chez les jeunes.
Mettre l'intérêt supérieur de l'enfant à
l'avant-plan en matière de vie privée, c'est d'ailleurs une recommandation des
commissaires fédéral, provinciaux et territoriaux à la protection de la vie
privée, incluant la Commission d'accès à l'information du Québec.
Ensuite, nous proposons l'utilisation des
renseignements... l'interdiction de l'utilisation des renseignements personnels
des enfants à des fins commerciales, pardon. Il y a maintenant plus de
40 ans, le Québec a été...
16 h 30 (version non révisée)
Mme Levac (Sara Eve) : ...le
Québec a été à l'avant-garde à l'échelle internationale en interdisant la
publicité ciblant les enfants de moins de 13 ans. Comme la publicité peut avoir
un impact sur les choix de consommation des enfants, pensons à la malbouffe,
par exemple, le Québec a voulu les protéger de l'influence publicitaire.
Pourtant, aujourd'hui, les entreprises comme les plateformes de médias sociaux
peuvent utiliser les renseignements personnels des enfants à des fins
commerciales. Elles vont, par exemple, dresser des profils des enfants dès un
jeune âge afin de leur proposer du contenu ou des produits qui pourraient leur
plaire et les encourager à demeurer sur leurs plateformes. Par exemple, un jeu
vidéo qui détecterait qu'un jeune aurait de la difficulté à progresser pourrait
lui proposer des microtransactions pour favoriser cette progression ou encore
des vêtements virtuels selon ses champs d'intérêt.
À ce sujet, le Comité des droits de l'enfant,
un organisme des Nations Unies, recommande d'interdire par la loi le profilage
ou le ciblage d'enfants de tout âge à des fins commerciales, fondés sur l'enregistrement
numérique de leurs caractéristiques réelles ou déduites. Un rapport de la
Commission d'accès à l'information en 2022 sur la protection des renseignements
personnels des mineurs à l'ère numérique recommandait également d'interdire le
traitement des renseignements personnels de mineurs dans le but de faire de la
publicité ou de la prospection commerciale. Nous considérons que le Québec
devrait suivre ces recommandations.
Ailleurs dans le monde, d'ailleurs, d'autres
juridictions prévoient certaines protections, contre l'utilisation des
renseignements personnels de mineurs à des fins commerciales. En Californie par
exemple, où de nombreuses entreprises de l'univers numérique sont établies, la
loi interdit d'obliger un enfant de moins de 13 ans à divulguer des
renseignements personnels qui ne soient pas raisonnablement nécessaires à la
participation à un jeu ou à une activité en ligne.
Notre troisième recommandation est d'écouter
les enfants et les jeunes par le biais d'un comité consultatif qui leur
permettrait de s'exprimer sur les enjeux qui intéressent cette commission. Les
enjeux qui intéressent la commission spéciale concernent les enfants et les
jeunes. D'ailleurs, dans le cadre d'une consultation menée par le compte du
Comité des droits de l'enfant, bien, les enfants ont souligné l'importance de
la technologie dans l'exercice de leurs droits aux loisirs et aux jeux.
Consulter les enfants permettrait de favoriser leur adhésion aux mesures qui
pourraient être mises en place suivant cette commission. D'ailleurs, d'autres
organismes vous ont déjà encouragés à consulter les jeunes dans le cadre de vos
travaux. De plus, en 1991, avant même que le Canada ne la ratifie, le Québec s'est
déclaré, à la Convention relative aux droits de l'enfant, un traité
international parmi les plus ratifiés au monde, qui prévoit des droits des
enfants. La convention prévoit, entre autres, le droit des enfants d'exprimer
leur opinion sur toutes les questions qui les concernent, et le recours à des
comités consultatifs de jeunes afin d'informer les... les décideurs, pardon, de
leurs opinions sur des enjeux qui les intéressent, est une pratique qui existe
ailleurs. En Alberta, par exemple, un comité de jeunes informe le travail... de
l'Office of the child and youth advocate. Les membres de ce comité rencontrent
notamment les ministres pour leur présenter leurs points de vue sur des enjeux
qui les concernent.
Au Québec, le projet de loi no 37, qui...
prévoit que le nouveau Commissaire au bien-être et aux droits des enfants aura
notamment comme fonction de former des comités consultatifs d'enfants et de
jeunes afin d'obtenir leurs avis sur toute question relevant de ses fonctions.
Quatrièmement, le Québec devrait prévoir
des obligations de divulgation de contenu publicitaire en ligne. Les enfants et
les jeunes d'aujourd'hui consomment du divertissement sur différentes sources
en ligne. Par exemple, sur une plateforme de partage de vidéos, les
influenceurs peuvent promouvoir des produits et des services à travers le
contenu qu'ils diffusent. Un influenceur peut, par exemple, déballer une
console de jeux vidéo reçue gratuitement ou bien recommander un produit
cosmétique dans le cadre d'un tutoriel de beauté après avoir reçu une
compensation d'une entreprise pour le faire. Cette publicité non traditionnelle
peut se mêler au contenu habituel de l'influenceur, et il peut être difficile
pour les jeunes de reconnaître ces publications comme étant du contenu
publicitaire. Une recherche que nous avions menée en 2021 sur le marketing d'influence
nous a d'ailleurs permis de constater.
À l'instar de la France, le Québec
pourrait prévoir dans la Loi sur la protection du consommateur qu'un contenu
publicitaire en ligne doit être identifié comme tel. Il serait également
possible de réglementer les mots-clics à utiliser afin de divulguer clairement
la présence de contenu publicitaire, comme c'est le cas en Allemagne. Enfin, la
loi devrait prévoir que les informations données aux jeunes quant aux
traitements de leurs renseignements personnels soient adaptées à eux. Les
politiques de...
Mme Levac (Sara Eve) : ...confidentialité
informant les consommateurs du traitement, de leurs renseignements personnels
peuvent être difficiles à comprendre, même pour les adultes. Une communication
adaptée permettrait aux jeunes de 14 ans et plus qui sont appelés à donner
leur consentement à la collecte de renseignements personnels, de le faire de
façon plus éclairée. En Europe d'ailleurs, toute information donnée aux mineurs
sur le traitement de ces renseignements personnels doit être rédigée en termes
simples et clairs afin qu'ils puissent facilement saisir l'information. Donc,
merci. Il va me faire plaisir de répondre à vos questions et de discuter avec
vous.
La Présidente (Mme Dionne) : Merci
beaucoup, Mme Levac. Alors, nous allons débuter ces échanges avec la
députée de Bourassa-Sauvé.
• (16 h 40) •
Mme Cadet : Merci. Mme la
Présidente. Bonjour. Merci d'être avec nous aujourd'hui. Merci pour vos
recommandations. Je vais avec la première, donc mieux encadrer les pratiques
dans l'univers numérique en reconnaissant l'intérêt supérieur de l'enfant dans
la loi. Plusieurs des intervenants qui sont passés avant vous, si vous avez
entendu, nous ont, sous une forme ou une autre, donc, exprimé leurs réserves,
donc, quant aux mécanismes de renforcement numérique ou de renforcement
virtuel. Vous les avez nommés dans votre présentation, vous les avez
explicités.
Maintenant, donc, j'aimerais peut-être
vous entendre de façon plus étayée sur le comment. On nous a, par exemple,
parlé d'exemples de... on nous a, donc, parlé de l'exemple du Royaume-Uni qui,
bon, travaille sur une législation de Child Rights by Design, donc d'imposer,
donc, aux plateformes, dès la conception de leurs outils et applications, donc,
la prévention, donc de l'inclusion de ces mécanismes-là. On nous a aussi parlé,
donc, de l'exemple du... de l'Australie qui indique ou qui travaille, donc, à
indiquer la mention du caractère nocif d'une application, comme un système de
classification comme on a, donc, dans... pour les films. Donc, peut-être vous
entendre, donc, sur le comment, qu'est-ce que vous pensez de, notamment, ces
deux propositions-là qui se font ailleurs et si... Comment est-ce que vous
voyez, donc, le Québec emboîter le pas pour mieux réguler la façon, les mécanismes,
là, qui sont employés par les plateformes pour capter l'attention de
l'utilisateur en ligne?
Mme Levac (Sara Eve) : Bon,
bien, l'intégration de l'intérêt supérieur de l'enfant, ça permet, si je peux
me permettre, une protection parapluie. Donc, au lieu de se demander, à chaque
nouvelle technique, est ce qu'on devrait interdire, par exemple, le défilement
infini, la lecture automatique de vidéos, les interfaces truquées. La question
devient, à chaque fois, dès la conception d'un produit, d'un service : Est
ce que ce que je fais est dans l'intérêt supérieur de l'enfant? Et si le
mécanisme a pour but, au risque de créer une dépendance, tu sais, des effets
négatifs sur la santé mentale par exemple, ça devient... la réponse devient
rapidement : Non, ce n'est pas dans l'intérêt supérieur de l'enfant. Donc,
ça permet donc... d'avoir une protection en tout temps sur toutes les pratiques
qui pourraient être mises en place sur l'intérêt supérieur de l'enfant, ça
évite aussi à ce qu'on ait à modifier la loi pour intégrer, par exemple, une
nouvelle pratique qui se développerait dans l'environnement numérique, parce
que l'intérêt supérieur de l'enfant serait déjà prévu, là, dans la loi, pour
protéger les renseignements personnels et tout le traitement qui est relié à ça
pour les enfants.
Mme Cadet : D'accord. Merci.
On nous a aussi parlé... Bon, en fait, donc, on entend parler donc
d'autorégulation de l'industrie. Est-ce que vous pensez que l'industrie, donc,
a la capacité, donc, de s'autoréguler pour prévenir l'inclusion de ces
mécanismes-là dans la conception de leurs applications et plateformes?
Mme Levac (Sara Eve) : Bien,
en fait, nous on considère... Bon, les codes volontaires peuvent fonctionner
jusqu'à une certaine limite, mais nous, on considère qu'une intégration claire
dans la loi, ça permettrait de faire en sorte que les entreprises doivent
prendre en considération l'intérêt super de l'enfant dans toutes les étapes de
la mise en œuvre, de la conception, etc., de tous les produits, là, dans l'univers
numérique.
Mme Cadet : Merci. Ensuite,
votre deuxième recommandation indique interdire l'utilisation commerciale des
renseignements personnels des enfants. Je pense que vous avez bien décrit ce
que... ce que vous voulez dire par là. Ça me fait tout de même penser, donc, à
tout... bien, en fait, à tout l'enjeu, donc, de la majorité numérique. Vous
n'êtes pas sans savoir, donc, que ça fait partie, donc, des délibérations,
donc, de savoir, donc, s'il serait à propos, donc, d'imposer un certain âge
minimum, un seuil minimum pour que les jeunes aient accès, donc, aux
plateformes de réseaux sociaux. C'est une proposition qui fait jaser, mais
surtout, évidemment, donc que la question de l'applicabilité s'impose. Puis
quand on se pose cette question là, bien, c'est surtout au niveau, donc, du
traitement, donc, des données personnelles. Donc, j'aimerais savoir si vous,
vous avez une opinion sur la majorité numérique et, le cas échéant, comment
est-ce que vous voyez le traitement des données personnelles des enfants, s'il
fallait donc y aller avec un mécanisme, là, d'identification du jeune pour nous
assurer que cette mesure-là donc...
Mme Cadet : ...qui est
véritablement mise en place.
Mme Levac (Sara Eve) : Oui.
Je vais vous répondre par quelques considérations sur la majorité numérique. En
fait, ce que je dirais, la première chose, c'est comment on définit la majorité
numérique. Est-ce qu'on définit un peu comme en France, où c'est interdit pour
un mineur de moins de 15 ans, d'ouvrir un compte, par exemple, sur les réseaux
sociaux, à moins que le parent donne l'autorisation? Déjà là, s'il n'y a pas
une interdiction complète, on ressemble déjà au système, un peu comme au
Québec, où, en bas de 14 ans, c'est le parent tuteur qui va gérer les renseignements
personnels. Donc, est-ce que c'est ça, la majorité numérique ou c'est une
interdiction complète? Donc la première question, c'est, comment on la définit,
ensuite, il faut faire la balance. On sait que les réseaux sociaux, les
plateformes numériques peuvent avoir des effets négatifs sur la santé mentale.
Je suis sûre qu'il y a des experts qui sont déjà venus vous expliquer tout ça,
mais aussi des jeunes qui disent que c'est important pour eux l'accès aux
réseaux sociaux. Le CIEL est venu vous dire, la semaine dernière, que, pour
eux, c'était important pour rester en contact avec leurs amis. Il y a des
études aussi qui démontrent ça. Donc, il faut faire la balance avec la
considération.
La troisième chose dont vous parlez, c'est
la vérification de l'âge. Effectivement, il n'y a pas, en ce moment, de
solution miracle sur comment on fait une vérification de l'âge de l'enfant pour
arriver sur les plateformes numériques. Il y a des enjeux de vie privée à
considérer si on met une vérification d'âge obligatoire. Malheureusement, pour
vous, je n'ai pas de solution miracle parce qu'il y a plein de pays qui se
posent, en ce moment, la question. Il faut évaluer, dans le fond, quelles
méthodes protègent la vie privée et arrivent aussi à nos buts de protéger les
enfants en ligne. Parce qu'il y a plusieurs techniques et chacune d'elles peut
avoir des enjeux de vie privée. Je sais qu'en Californie, par exemple, il y a
des entreprises qui demandent une carte d'identité avec une photo à la caméra.
Donc là, on vérifie si c'est bien la personne qui veut s'inscrire. Après ça,
par contre, il faut s'assurer que ces informations-là, est-ce qu'elles sont
stockées dans un endroit, est-ce qu'elles sont bien sécurisées? Souvent, c'est
des services tiers qui vont faire ces vérifications-là à l'entreprise. Donc, il
faut s'assurer qu'il y a des protections mises en place. Il faut considérer
qu'il peut avoir des enjeux de vol, d'identité, du respect de la vie privée sur
le fait que ces informations-là se promènent.
Donc, malheureusement, je n'ai pas de
solution miracle. Je sais que l'Australie se pose la même question en ce
moment. Ils viennent d'écrire... de sortir un rapport récemment sur, justement,
la vérification d'âge, que le Royaume-Uni se pose les mêmes questions. Donc, il
n'y a pas de solution miracle, il faut vraiment faire la balance dans les
techniques qu'on va utiliser.
Mme Cadet : Merci beaucoup.
La Présidente (Mme Dionne) : M.
le député d'Hochelaga-Maisonneuve.
M. Leduc : Merci, Mme la Présidente.
Bonjour, maître. Vous parlez de l'intérêt supérieur de l'enfant, un concept
qu'on pourrait introduire dans une loi. Avez-vous précisé laquelle loi?
Mme Levac (Sara Eve) : Dans
la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé.
M. Leduc : Parfait. Et ça
serait donc... Parce que je me demande qui va trancher ça, ce serait, donc...
Il y a comme une commission, hein, des renseignements personnels.
Mme Levac (Sara Eve) : La
Commission d'accès à l'information du Québec.
M. Leduc : C'est eux qui
seraient appelés à trancher sur x ou y dossiers, qui seraient menés par qui,
donc. Si, mettons, il y a une nouvelle application qu'on n'aime pas, c'est un
particulier qui peut faire une plainte. Comment ça fonctionnerait?
Mme Levac (Sara Eve) : Oui.
Donc, un particulier peut faire une plainte à la Commission d'accès à
l'information, faire une demande d'enquête s'il considère qu'une entreprise ne
respecte ses obligations en vertu de la loi. Mais la Loi sur la protection des
renseignements personnels dans le secteur privé, c'est aussi une loi qu'on peut
évoquer devant les tribunaux de droit commun, donc, par exemple, à la Cour du
Québec. Mais effectivement, là, un particulier qui voudrait faire une plainte
contre une entreprise s'adresserait à la Commission d'accès à l'information.
M. Leduc : Mettons qu'on aime
le concept puis qu'on dit que, pour le futur, parce qu'on ne sait jamais de
quoi le futur est fait, il y aura certainement d'autres nouveaux réseaux
sociaux, d'autres applications, peut-être à même des réseaux sociaux qu'on
connaît. Pour le futur, disons que c'est un concept intéressant. Pour ce qui
nous intéresse, c'est-à-dire ce qui est devant nous en ce moment, vous avez
même parlé de, tu sais, les applications avec le défilement infini, les départs
automatiques de vidéos, les algorithmes, des boutons J'aime, tout ça, sont
apparus, hein. Les réseaux sociaux, à l'origine, ce n'était pas ça, c'est
apparu par la suite. La présentation de Mme Parent nous en bien parlé. On
pourrait adopter des lois qui interdisent ces fonctions-là dans les réseaux
sociaux, ça serait possible?
Mme Levac (Sara Eve) : Oui,
oui. Comme je disais, l'avantage c'est que l'intérêt supérieur de l'enfant
pourrait permettre de protéger contre toutes ces techniques-là qui seraient
négatives peut-être pour l'enfant. Mais il y a des... il y a des juridictions
qui ont commencé à interdire des choses comme les interfaces truquées, donc,
toutes les interfaces qui, dans le fond, affectent la décision lorsqu'on traite
de nos renseignements personnels. Comme si vous allez sur un site Web puis on
vous demande d'accepter les témoins de connexion, puis il y a une option qui
est en surbrillance, qui est plus claire que l'autre, bon, ça c'est une
interface truquée. Il y a d'autres façons aussi. En France, on considère de...
Mme Levac (Sara Eve) : ...les
notifications par défaut. Donc, oui, il y a des juridictions qui commencent.
Ah! et également en Belgique et aux Pays-Bas, on interdit les «loot boxes», les
coffres à butin dans les jeux vidéo. Donc, oui, il y a des juridictions qui
interdisent des techniques précises, mais, encore une fois, si on interdit des
techniques précises, et il y en a des nouvelles, il faut changer la loi ou la
réglementation. Donc, il faut prendre en considération, puis l'intérêt
supérieur serait déjà là comme une protection parapluie pour toutes ces
techniques-là.
M. Leduc : Mais donc, si on
faisait ça, qu'on ajoutait l'intérêt supérieur de l'enfant dans la loi, à
partir du moment où ça entre en application, n'importe qui pourrait dire :
Moi, je voudrais faire abolir les boutons «J'aime» sur Facebook, par exemple.
Et là j'écrirais une plainte à la commission, qui, dans un délai x, devrait
trancher sur, oui ou non, est-ce que la plainte est fondée. Et, si oui, ça se
transforme en directive? C'est un jugement? C'est... Comment ça... Meta
recevrait une petite lettre : Bonjour, nous sommes la commission, nous
avons déclaré qu'à partir de maintenant le bouton «J'aime» est illégal au
Québec? Ça fonctionnerait comme ça?
• (16 h 50) •
Mme Levac (Sara Eve) : Bien,
en fait, la personne ferait une plainte, la commission pourrait... Il y a un
mécanisme de médiation aussi, là, à l'extérieur d'une décision officielle, à ma
compréhension. La commission, ultimement, pourrait, oui, émettre une décision
pour ce cas particulier là, et, si elle disait, par exemple : Nous
considérons que les boutons «J'aime» ne sont pas adéquats, là, bien là,
l'entreprise aurait sa décision pour ce cas particulier là, mais, après ça, on
pourrait, dans le fond, comprendre que le bouton «J'aime» n'est pas quelque
chose qui est dans l'intérêt de l'enfant et qu'il doit... qu'il ne peut pas
être utilisé, là, au Québec.
M. Leduc : Mais ce serait la
commission qui trancherait, il n'y aura pas de loi ou de règlement,
nécessairement, à adopter ici, au Parlement, en conséquence.
Mme Levac (Sara Eve) : Non. À
moins de vouloir expliciter une interprétation de l'intérêt supérieur de
l'enfant en donnant un exemple, par exemple, dans la réglementation ou dans la
loi. L'important, ce serait que la liste ne soit pas exhaustive, parce que
l'intérêt supérieur de l'enfant doit être interprété selon les circonstances et
donc doit pouvoir être... pas figé, là, mais, dans le fond, être à géométrie
variable, là, selon les circonstances, pour pouvoir l'appliquer à chaque cas
d'espèce.
M. Leduc : C'est intéressant
parce que, sauf erreur, les commissaires de cette instance-là sont nommés aux
deux tiers, hein, de la Chambre... ou à simple majorité? Ils sont nommés par la
Chambre, en tout cas, ils ne sont pas décrétés par le bureau du premier
ministre. On vote, on vote en Chambre, pour ça On vérifiera.
Et vous dites «enfant», c'est l'intérêt
supérieur de l'enfant, puis vous... Est-ce que... Ça va jusqu'à quel âge, votre
définition de l'enfant, dans ces situations-là?
Mme Levac (Sara Eve) : Oui,
bien, c'est ça, l'intérêt supérieur de l'enfant, si on prend le concept qui
vient de la Convention relative aux droits de l'enfant, la convention
dit : en bas de 18 ans. Donc, tous les mineurs en bas 18 ans ont le droit
à ce que l'intérêt... leur intérêt supérieur soit une considération primordiale
dans les décisions qui les concernent.
M. Leduc : Parfait. Merci
beaucoup.
La Présidente (Mme Dionne) : Merci,
M. le député. M. le député de Marquette.
M. Ciccone :Oui. Merci beaucoup, Mme la Présidente. Bonjour, maître.
Content de vous entendre. On est ici pour prendre des propositions, d'entendre
des spécialistes. Sans nécessairement vouloir déroger à ma fonction, là, je
pense que je pourrais dire que je suis d'accord avec vos positions, avec vos
observations. Cependant, la question qui revient toujours, puis je fais du bond
avec... sur ce que... je fais un bond avec... sur ce que mon collègue
d'Hochelaga-Maisonneuve a dit. Tout ça est beau, là. Puis vous avez parlé aussi
de la Californie, où il y avait une législation au niveau des corporations,
développeurs qui sont là-bas, Silicon Valley. Ils sont là. C'est facile pour un
État de dire : Bien, vous êtes sur notre territoire, voici la loi, les
règlements, et vous devez les suivre. Ici, au Québec, on est capable de dire,
par exemple, à Saputo, avec les petits gâteaux Vachon, par exemple : Vous
ne pouvez pas faire de la publicité pour aller chercher les jeunes. Ça, on peut
le dire, c'est dans la loi.
Maintenant, ce que vous amenez au niveau
de la publicité, les notifications, c'est correct, il y a un processus que vous
venez d'expliquer, mais comment est-ce qu'on fait pour l'appliquer? Si on
dit : Non, vous n'avez pas le droit, Facebook, de... Meta, de faire ça,
voici la décision qu'on a prise ici, ou même peut-être sous forme de
législation, qu'est-ce qui va empêcher Meta, qu'est-ce qui va empêcher Tik Tok
de continuer à le faire?
Mme Levac (Sara Eve) : Bien,
premièrement, la loi, comme la Loi sur la protection du consommateur ou la Loi
sur la protection des renseignements personnels... dès qu'une entreprise fait
affaire au Québec, elle doit respecter la loi québécoise. Là, pour ce qui est
de faire respecter la publicité en ligne, effectivement, l'environnement
numérique, c'est un énorme carré de sable, là.
Premièrement, ce que je dirais, ce serait
un... C'est plusieurs facteurs, dans le fond, dans la mise en œuvre. C'est sûr
que ce serait important d'augmenter le budget de l'Office de la protection du
consommateur, qui est chargé de surveiller l'application de la loi, donc, parce
que, comme je...
Mme Levac (Sara Eve) : ...disais,
l'environnement numérique, c'est un grand carré de sable. C'est important aussi
de faire de la sensibilisation auprès des jeunes et des parents. Nous, ce qu'on
a constaté dans notre recherche sur le marketing d'influence, c'est que les
jeunes et les parents avaient de la difficulté à reconnaître les publicités qui
étaient incluses dans les... dans les publications des influenceurs. Et l'autre
chose, ça pourrait être également d'augmenter les sanctions dans les cas de
publicité ciblant les enfants. Donc, on parle de... on parle de sanctions, là,
qui sont prévues par la loi qui vont de 2 000 à 100 000 $ pour
une personne morale. Pour un géant du numérique, 2 000 $, ce n'est
pas très dissuasif. Donc, ça pourrait être une façon également, en augmentant
les sanctions, d'augmenter la... le respect, par exemple, à la loi. Dans
d'autres juridictions, en Europe, en Californie, on a renforcé les protections
des renseignements personnels des enfants, et il y a eu des poursuites qui
sont... qui ont suivi avec ça. Donc, se donner les pouvoirs, et avec les
sanctions qui vont avec pour renforcer, dans le fond, pour encourager le
respect, là, de la protection des renseignements personnels ou l'interdiction
de la publicité, là, ciblant les jeunes.
M. Ciccone :Ce que j'entends, maître, c'est que, justement, on mettrait
des normes en place ici au Québec. Il y aurait des sanctions, mais en même
temps, ça amènerait le Québec à toujours être obligé de poursuivre. Parce que,
je veux dire, moi, je ne vois pas Mark Zuckerberg envoyer un chèque à Québec,
là, je ne vois pas Mark Zuckerberg envoyer... enlever les petits onglets de
«J'aime» en dessous du... sur sa page Facebook au Québec. Je comprends que dans
certains pays communistes, là, on va contrôler ce qui rentre par le Web, là, chez
nous, là, mais ici on ne commencera pas à faire ça, là, du moins je l'espère,
là.
Mais, encore une fois, c'est très noble,
ce que vous amenez, mais, pour l'appliquer puis avoir un résultat, je veux
dire, je pense qu'on a encore du travail à faire pour avoir le résultat
escompté, là, parce que c'est beau, ce qu'on dit, c'est beau, ce qu'on espère,
mais de dire à Tik Tok qu'est-ce qu'ils peuvent mettre puis que les
notifications, ils n'ont pas le droit de le faire, puis ils vont se faire
poursuivre... Qui qui va poursuivre Tik Tok au Québec? Qui qui va poursuivre
Meta au Québec? Il n'y a pas grand monde qui peuvent faire ça, là. Vous
comprenez ce que je veux dire? Je ne veux pas être pessimiste, là, mais vous
comprenez que c'est... ça serait difficile d'appliquer ce que vous nous
recommandez?
Mme Levac (Sara Eve) : Bien,
si je peux me permettre, en Californie, qui est l'endroit où les... beaucoup
d'entreprises numériques sont établies, bien là, on commence à intégrer
l'intérêt supérieur de l'enfant puis interdire la prise en bas de 13 ans
sans l'accord des parents. Il y a eu des poursuites contre les géants du Web
qui n'avaient pas respecté ces obligations-là en Californie, là, par exemple.
M. Ciccone :Je comprends que c'est quand même... Silicon Valley, c'est
la juridiction de la Californie. C'est plus facile, contrôler un développeur ou
une corporation qui est sur ton territoire, là. Mais... Bien, merci beaucoup.
Merci beaucoup de votre intervention, merci.
La Présidente (Mme Dionne) : Merci.
Entre-temps, on a fait des vérifications, puis, effectivement, les membres de
la commission sont nommés sur proposition du premier ministre, là, par
l'Assemblée nationale au moins aux deux tiers de ses membres. Donc...
On poursuit avec Mme la députée de
Châteauguay.
Mme Gendron : Oui. Bonjour,
Me Levac, un grand merci d'être avec nous aujourd'hui. Pour encore aller
gratter plus loin en lien avec l'intérieur... pardon, l'intérêt supérieur de
l'enfant, je voudrais savoir de quelle façon vous pouvez voir ça du côté
législatif. On a besoin de données ou, en fait, des rapports pour pouvoir
quantifier ou... bien, qualifier un changement. Si on met justement des
dispositions législatives, une obligation, quel outil on pourrait penser prendre
justement pour quantifier puis avoir des données robustes en lien avec ça?
Mme Levac (Sara Eve) : Je ne
suis pas certaine de bien saisir, là. Ce qu'on proposait, c'était d'inclure
dans la Loi sur les renseignements personnels dans le secteur privé que les
décisions doivent être prises en considération de l'intérêt supérieur de
l'enfant. Est-ce que vous me parlez de mesures de mise en œuvre, de lignes
directrices sur l'application de la...de cette obligation-là?
Mme Gendron : Oui,
exactement. Tu sais, de quelle façon on pourrait voir un impact chez nos
jeunes? Puis il faudrait des rapports pour expliquer un peu l'avantage des
mesures prises et tout ça, là.
Mme Levac (Sara Eve) : Oui.
J'imagine que, si on le met dans la Loi sur la protection des renseignements
personnels, c'est la Commission d'accès à l'information qui va surveiller la
mise en œuvre. Elle pourrait émettre des lignes directrices sur l'application
de cette obligation-là, un peu comme elle l'a fait sur l'interprétation du
consentement déjà dans la loi.
Autrement, ça pourrait être possible de
penser avoir des rapports périodiques justement sur le respect de cette
obligation-là. Je ne sais pas si c'est dans le sens de votre question, là. Je
sais que la tendance, là, au niveau de plusieurs juridictions, c'est de
commencer...
Mme Levac (Sara Eve) : ...à
recommander d'intégrer cette obligation-là dans la loi. Donc, je pense qu'il
est encore trop tôt aussi pour savoir ce qui est fait dans d'autres
juridictions pour surveiller l'application, alors que c'est quand même récent,
là, qu'on l'a inclus, par exemple, en Californie ou en Grande-Bretagne.
Mme Gendron : O.K., je
comprends, mais ... O.K., bien, je vais m'arrêter ici, mais merci beaucoup pour
votre temps, c'est très apprécié.
La Présidente (Mme Dionne) : D'autres
interventions? Donc, on a... Ah! oui, Mme la députée d'Iberville.
• (17 heures) •
Mme Bogemans : Moi, c'était
dans la lignée des influenceurs. Comment protéger le contenu publicitaire? Mais
les enfants sont exposés, entre autres, par YouTube, là, par du contenu qui
vient d'absolument partout, tu sais. Tantôt, mon collègue nommait les outils,
les fonctionnalités, mais, tu sais, concrètement, dans le contenu auquel il est
exposé, est-ce que vous parlez de réglementer sur les influenceurs qui font du
contenu québécois exclusivement, par exemple, ou de manière... l'exposition aux
jeunes du Québec à ce qui se passe à l'international? Parce que c'est un peu
ça, YouTube.
Mme Levac (Sara Eve) : Oui,
bien, c'est ça, encore une fois, dès qu'on est au Québec, on fait affaire au
Québec, la loi va s'appliquer même si c'est un influenceur de l'extérieur du
Québec, par exemple. Il y a des plateformes qui vont déjà faire... prévoir dans
leurs conditions qu'il faut inscrire s'il y a du contenu promotionnel, donc,
dans une vidéo, parce que, oui, les enfants peuvent être exposés à, par
exemple, du placement de produit qui est dans le vidéo lui-même et... alors que
l'influenceur a reçu une compensation pour faire la promotion de produits.
Donc, ce qu'on dit, c'est, un peu comme en France, on pourrait obliger qu'un
contenu publicitaire soit indiqué comme tel, pour pouvoir le reconnaître, hein?
Si on regarde la télé, on voit clairement la coupure, on passe à la publicité,
mais, si on regarde la vidéo d'un influenceur, ça a l'air d'être un ami qui
nous fait des recommandations, donc c'est plus difficile de voir que la
personne a des intérêts à nous... dans le fond, nous recommander un produit,
nous parler d'un produit ou d'un service.
Puis l'autre chose, c'est que, pour que ça
soit clair, on pourrait réglementer pour que cette information-là soit
présentée de façon uniforme. Selon les plateformes, il y en a qui propose des
mots-clics particuliers, mais, dans notre recherche, ce qu'on voyait, c'est que
des mots-clics comme «collab», ou «partner» ou... c'était parfois mal compris.
Puis, en Allemagne, bien, ils ont juste décidé de réglementer pour qu'on mette
le mot «publicité», pour que ce soit clair, là, qu'on est à... on est en face
d'une publicité, là, dans un contenu, là, d'un vidéo.
Mme Bogemans : D'accord.
Merci.
La Présidente (Mme Dionne) : D'autres
interventions? Je pense que ça... bien répondu à nos questionnements. Alors,
bien, si vous voulez donner le mot de la fin, Mme Levac, je vous... je vous
cède la parole.
Mme Levac (Sara Eve) : Oui,
qu'est-ce que je peux rajouter? Bien, en fait, comment on vous le suggérait,
là, pour l'intérêt supérieur de l'enfant, qui est une protection qui peut
protéger, dans le fond, dans plusieurs situations, c'est une... voyons, un
ajout qui est recommandé par les commissaires de la protection de la vie privée.
Il y a le Age Appropriate Design Code, en Grande-Bretagne et en Californie, qui
commence à l'intégrer. C'est aussi une recommandation de la... qui est le
pendant de la Commission d'accès à l'information au Québec, qui le recommande.
Donc, ce qu'on voit, c'est une tendance, là, à intégrer ce principe-là dans les
lois de protection des renseignements personnels pour protéger les jeunes, en
fait, de techniques qui pourraient être négatives, là, qui pourraient les
affecter négativement dans l'environnement numérique, et leur assurer une
certaine protection puis protéger leur développement puis leur bien-être, là,
s'ils utilisent des outils numériques.
La Présidente (Mme Dionne) : Merci
beaucoup. C'est bien résumé. On va certainement pousser cette réflexion plus
loin. Alors, merci beaucoup pour votre contribution à ces travaux.
Et, pour ma part, je vais suspendre les
travaux pour accueillir nos prochains invités. Merci beaucoup, Mme Levac.
Mme Levac (Sara Eve) : Merci.
(Suspension de la séance à 17 h 03)
17 h (version non révisée)
(Reprise à 17 h 09)
La Présidente (Mme Dionne) : La
commission reprend maintenant ses travaux. Alors, nous avons le bonheur d'accueillir,
en cette fin de travaux aujourd'hui, la Fédération des centres de services
scolaires du Québec. Bonjour et bienvenue à cette commission spéciale.
Donc, je vous rappelle que vous avez 10 minutes
pour nous faire part de votre exposé. Par la suite, nous aurons une période d'échange
et de questions avec les membres de la commission. Donc, je vous laisse d'entrée
vous présenter.
• (17 h 10) •
Mme Dupré (Caroline) : Merci
beaucoup, Mme la Présidente. Mesdames et Messieurs les députés, nous vous
remercions également d'avoir institué cette commission spéciale sur les impacts
des écrans et des réseaux sociaux sur la santé et le développement des jeunes.
C'est un sujet qui préoccupe grandement le réseau scolaire. Alors, nous sommes
heureux d'être avec vous aujourd'hui afin d'en discuter.
Je suis Caroline Dupré, présidente-directrice
générale de la Fédération des centres de services scolaires du Québec. Je
ferais peut-être une petite parenthèse pour vous dire que la fédération
représente les 61 centres de services francophones... centres de services
scolaires francophones au Québec. Je suis accompagnée de Dominique Robert,
président-directeur général adjoint.
Alors, dans le cadre de ces consultations,
vous avez eu et aurez l'occasion d'échanger avec de nombreux spécialistes. Les
impacts du numérique sont bien documentés. Afin de mitiger les effets négatifs,
la fédération prône une approche résolument éducative axée sur l'apprentissage
et le développement d'un rapport plus sain au numérique. Pour que cette
vision... cette vision ambitieuse puisse se réaliser, toute la société doit se
mobiliser. Certes, l'école joue un rôle essentiel, mais elle n'est qu'un
maillon dans la chaîne de nos actions collectives. L'utilisation du numérique
étant un phénomène social aux multiples ramifications, tout ce qui est inculqué
et vécu à l'école doit être inculqué et vécu à l'extérieur de l'école. C'est
pourquoi nous souhaitons voir naître une stratégie globale et intégrée pour l'ensemble
de la population québécoise, fondée sur une responsabilité partagée, de façon à
développer un rapport sain et équilibré au numérique. Le fardeau ne peut
reposer que sur les individus et les institutions. Ainsi, l'adoption d'encadrements
fondés sur les connaissances issues de la recherche saura contribuer à une
meilleure hygiène de vie numérique. Nous croyons que cet ensemble de mesures
universelles favorisera un changement durable. Soyez d'ailleurs assurés que
tout le réseau scolaire participera activement à ce nouveau vaste mouvement
social.
Maintenant, vous pouvez certainement vous
demander où l'école se situe-t-elle dans la stratégie globale du numérique. À
cet égard, nous tenons à souligner qu'il est dans la nature même de l'école d'éduquer
plutôt que de proscrire. Il en va ainsi pour toute utilisation du numérique,
dont celle du cellulaire. Selon nous, toute approche prohibitive ne peut à elle
seule régler tous les maux du numérique. La cyberintimidation et la
cyberviolence témoignent bien de l'importance d'adopter des mesures porteuses
qui concernent non seulement les jeunes, mais aussi l'ensemble de la
population. Si le réseau scolaire peut déployer des initiatives préventives et
offrir des services d'accompagnement pour les élèves, son champ d'action se
limite au moment où les élèves sont à l'école. Or, la cyberintimidation et la
cyberviolence ne connaissent ni limite de temps ni limite de lieu. Une même
approche éducative s'applique aussi aux effets du numérique sur la
socialisation. Une interdiction complète du cellulaire dans les écoles à l'échelle
nationale n'entraînera pas automatiquement des changements de comportements.
Nous le réitérons, l'école est le lieu par excellence pour profiter d'une vie
pleine et enrichissante et pour apprendre à socialiser, même avec un appareil
électronique à portée de main.
Je cède maintenant la parole à mon
collègue Dominique Robert.
M. Robert (Dominique) : Le
rôle que peut jouer l'école s'inscrit en étroite cohérence avec sa mission
tripartite d'instruire, de socialiser et de qualifier. Ces trois mandats sont
transversaux en matière d'éducation au numérique. Par exemple, les
apprentissages vont de la maîtrise des compétences de base jusqu'au
développement de la pensée critique pour ultimement agir en citoyen éthique.
Puisqu'il faut nécessairement pratiquer pour devenir meilleur, l'école ne
saurait être un sanctuaire analogique dépourvu d'écrans. Pour une
intégration...
M. Robert (Dominique) :
...des relations harmonieuses. Plusieurs
possibilités existent en fonction du niveau scolaire et des réalités locales.
Néanmoins, le critère fondamental de sélection des outils technologiques doit
demeurer l'appui aux apprentissages, à l'éducation numérique et à la
citoyenneté numérique. L'école ne forme pas seulement les adultes de demain.
Déjà avant même de savoir lire, la majorité des élèves est initiée à certaines
facettes du numérique. Or, chaque jeune n'arrive pas à l'école avec le même
bagage. De nombreuses recherches démontrent d'ailleurs que les inégalités
numériques sont corrélées aux inégalités socioéconomiques. Pour que chaque
jeune ait une chance égale de développer ses compétences, l'école doit combler
les écarts d'appropriation. Bien que nous puissions parfois être étonnés par
l'aisance des jeunes devant le numérique, leur utilisation se limite bien
souvent à des activités ludiques ou relationnelles. Les habiletés productives,
participatives et cognitives restent à développer. Néanmoins, nous constatons,
à l'instar de la Commission française sur les écrans, que l'éducation numérique
est trop... trop fragmentée, pardon, et insuffisante en termes de contenu et de
temps.
Un premier pas pour mieux situer la place
du numérique à l'école serait de former un tout cohérent afin de tracer
clairement la voie à suivre pour tous les intervenants. Le numérique ne peut
être considéré comme un ensemble homogène. Ses impacts varient en fonction de
chaque appareil, de chaque application et de chaque contexte d'utilisation.
Plusieurs chercheurs distinguent d'ailleurs un usage passif d'un usage actif
qui, lui, a sa place à l'école. Or, plusieurs défis se posent en matière
d'utilisation pédagogique. À l'heure actuelle, les études portant sur les
impacts du numérique ne permettent pas de dégager un consensus clair. Mais si
nous... si nous devions en nommer qu'un seul, nous vous dirions : Ça
dépend. En effet, le portrait se complexifie par la diversité des fonctions
pédagogiques du niveau scolaire et des aptitudes préalables des élèves et du
personnel. Alors que la prudence est de mise, nous ne pouvons faire l'impasse
sur l'éducation numérique en classe. Dans ce contexte, le réseau scolaire
entend appuyer ses pratiques sur les connaissances issues de la recherche. Nous
souhaitons donc voir les études se multiplier au cours des prochaines années.
À ce titre, l'Institut national
d'excellence en éducation pourrait proposer en continu des balises en matière
d'utilisation du numérique et pourra compter sur la riche expertise développée
par le réseau scolaire.
Mme Dupré (Caroline) : En
conclusion, la fédération recommande de mettre en place une stratégie globale
et intégrée du rapport des jeunes au numérique fondée sur une responsabilité
partagée. Ce vaste chantier commande de modifier des habitudes bien enracinées
dans toute la population. En somme, le rôle de l'école est double :
apprendre à éviter les pièges et les écueils du numérique tout en enseignant
comment en tirer profit. Nous sommes persuadés que cette grande réflexion
collective nous permettra de poser les jalons d'un rapport plus sain au
numérique. L'école doit faire montre d'exemplarité afin de former des jeunes
vigilants, réfléchis et critiques. C'est avec enthousiasme que les écoles du
Québec vous accueilleront afin de poursuivre vos discussions directement auprès
des jeunes.
Mon collègue et moi tenons à vous
remercier de votre invitation à participer à cet exercice de réflexion et
sommes prêts à échanger avec vous.
La Présidente (Mme Dionne) : Merci
infiniment à vous deux. Alors, on va débuter cette période d'échange avec la
députée de Joliette. La parole est à vous.
Mme Tremblay : Oui, bonjour.
Contente de vous recevoir en commission. Alors, d'abord, je voulais vous
parler, début de votre mémoire ici, d'une grande stratégie nationale,
effectivement, qu'on soit tous et toutes impliqués, l'ensemble de la
communauté. Là, vous dites que le réseau scolaire s'appuie sur des balises
concrètes. Il y a d'autres intervenants du milieu scolaire qui sont venus nous
rencontrer depuis le début de la commission, et notamment un comité de parents,
mais d'autres aussi disaient : Mais il faut quand même laisser de l'espace
à l'école pour gérer, oui, des grandes balises, des grandes lignes, des
directions. Mais, si on prend ces décisions-là, on veut quand même avoir une
liberté d'agir puis des modalités, finalement, propres à chaque milieu, parce que
chaque milieu est différent, que ce soit le milieu socioéconomique, que ce soit
la grandeur de l'école, peu importe. Ça fait que vous en pensez quoi?
Mme Dupré (Caroline) : On est
tout à fait d'accord avec le fait que dans un principe de...
Mme Dupré (Caroline) : ...subsidiarité,
l'école est la mieux placée pour savoir, en fonction des enjeux qui lui sont
propres, quels sont les meilleurs moyens de mettre en action les balises,
cependant, que vous pourriez nous donner à travers les constats que vous ferez
de toute cette vaste consultation à laquelle vous nous conviez.
De fait, les conseils d'établissement,
annuellement, révisent le code de vie, donc des règles de bien vivre ensemble,
dans les écoles. Et d'ailleurs la plupart des conseils d'établissement avaient
déjà choisi, depuis plusieurs années, de baliser l'utilisation du cellulaire en
classe, de le restreindre, par exemple, à certains lieux dans l'école, mais
votre directive est venue appuyer et lancer un message encore plus vaste que
juste aux parents de l'école et aux membres du personnel de l'école. Je pense
que, par la décision que vous avez prise, bien, c'est sorti des murs de
l'école, et tous les gens ont fait le constat que, de fait, possiblement que
nos jeunes étaient surexposés aux écrans puis aux médias sociaux, d'où votre
intérêt aussi de lancer cette commission particulière.
• (17 h 20) •
Mme Tremblay : Donc, vous
avez bien reçu cette mesure-là.
Mme Dupré (Caroline) :
Absolument.
Mme Tremblay : Et puis, si ça
va plus largement, dans l'interdiction totale de l'utilisation du cellulaire
dans l'école, de votre côté, vous en pensez quoi? Il y a d'autres intervenants
qui sont venus puis ils ont dit non. Vous, vous en pensez quoi?
Mme Dupré (Caroline) : Pour
nous, l'important c'est d'éduquer le jeune parce qu'on pense que, quand on
interdit, nos jeunes trouvent toujours une façon, de toute façon, de trouver un
moyen de consulter quand même les appareils. Ce qu'on veut, c'est former des
citoyens aguerris, avisés, conscients puis qui savent faire une utilisation
éthique des appareils électroniques.
M. Robert (Dominique) : Peut-être
en complément, l'école est un des maillons dans la chaîne du numérique. Donc,
l'objectif, c'est que l'ensemble des acteurs, donc évidemment l'école, mais en
continuité, parce que, par la suite, la vie continue à la maison, avec les
amis, à l'extérieur, dans la vie sociale... donc c'est l'ensemble des
intervenants qui doivent effectivement être éduqués, mais on souhaite
qu'évidemment les décisions se prennent dans chacun des milieux, en fonction
des décisions et des réalités locales qui sont propres à chacune des écoles,
notamment par les... que ce soit les inégalités sociales, socioéconomiques ou
autres.
Mme Dupré (Caroline) : Il y a
une recherche qui... que si on restreignait les élèves durant toute la journée,
bien probablement que nos jeunes se retrouveraient à surutiliser les écrans le
soir, malheureusement, même... et c'est déjà le cas, parfois, bien
malheureusement, la nuit. Donc, on ne souhaite pas déplacer le problème non
plus ailleurs, on souhaite vraiment éduquer les jeunes dans l'utilisation.
Mme Tremblay : J'ai une
dernière question. Donc, vous recommandez d'établir comme critère fondamental
d'utilisation du numérique en classe l'appui aux apprentissages. Donc, comme
j'ai dit, il y a plusieurs intervenants, là, qui viennent dire, puis même
l'INSPQ vient dire : Ça ne doit pas être la méthode d'enseignement par
défaut, donc, il faut être prudent. On a l'UNESCO qui s'est prononcée aussi,
qui a dit qu'il y a peu de preuves solides de la valeur ajoutée de la
technologie en éducation, et plusieurs intervenants sont venus dire : Il
faut être excessivement prudent, ça ne doit pas être un outil qui devienne un
outil qu'on utilise de façon régulière, mais bien quand il y a vraiment un plus
à ajouter qu'on ne pourrait pas faire autrement. Alors, vous ne trouvez pas
qu'un peu... votre recommandation 4 va un petit peu trop loin?
Mme Dupré (Caroline) : Bien,
en fait, on s'appuyait notamment sur la Politique d'évaluation des
apprentissages, où on parle d'égalité des chances, et on sait qu'on a des
élèves HDAA, entre autres, pour qui les outils numériques, c'est essentiel à
leur réussite, si on pense à des élèves qui ont une déficience visuelle,
déficience auditive, des problèmes langagiers, de la dyslexie. Donc, pour nous,
de ne pas avoir du tout recours aux outils numériques, c'est impensable, en
termes d'égalité des chances. Donc, c'était vraiment dans ce contexte-là qu'on
appuyait notre recommandation.
Mme Tremblay : Donc, ça
touche vraiment le volet EHDAA, et pas nécessairement, cette recommandation-là,
l'ensemble des élèves de la classe. Vous distinguez les deux?
Mme Dupré (Caroline) : Bien,
en même temps, je vous dirais, il y a quelques années, vous le savez, nos
classes ont été équipées de tableaux numériques interactifs. Puis je suis
heureuse, et nous sommes heureux... quand on a appris que vous alliez aller
visiter les écoles, on était bien heureux de ça, parce que vous allez avoir
l'occasion d'apprécier la façon aussi dont sont utilisés les outils
technologiques au profit de l'apprentissage, notamment le tableau blanc
interactif... numérique interactif. Donc, par exemple, pour guider les enfants
dans une recherche sur Wikipédia... bien, que l'enseignant puisse le
modéliser...
Mme Dupré (Caroline) : ...sur
son tableau numérique, c'est aussi une belle façon, je pense, de modéliser une
utilisation responsable et éthiquement correcte pour les jeunes, puis aussi
d'amener nos jeunes... Je pense que notre grand défi, c'est beaucoup de
travailler sur notre... une de nos compétences transversales qui est celle de
développer le jugement critique.
Donc, si je modélise puis je fais moi-même
comme enseignant des recherches, j'utilise mon tableau numérique interactif ou
mes outils numériques pour guider mon jeune, bien, en même temps, j'ai une
belle occasion de modéliser ou de l'amener à réfléchir ou même de lancer un
débat entre les élèves. Est-ce que cette information-là, elle est vraie?
Comment je peux voir... Comment je peux me valider? Comment je peux savoir
qu'il y a un piège derrière ça? Donc, pour nous, le contexte d'apprentissage
peut être très intéressant aussi dans le développement de la compétence
transversale.
Mme Tremblay : Parfait.
M. Robert (Dominique) : L'objectif,
c'est de s'assurer que le... (panne de son) ...au service de la mission, donc
instruire, socialiser, qualifier, et la cohérence de tout ce qui peut déjà
exister. Ma collègue faisait référence au... à la politique d'évaluation des
apprentissages. Il y a également le cadre de référence qui a été publié, le
cadre de référence de la compétence numérique qui existe. Il y a le programme
de formation de l'école québécoise. Donc, la cohérence de ces trois
documents-là. Et d'ailleurs, ça permettrait... notamment le cadre de référence
de la compétence numérique, qui est utile pour le milieu scolaire, aurait tout
intérêt à être, je dirais, diffusé plus largement, justement pour outiller les
autres acteurs sur les propres... leurs propres compétences. Que l'on soit
parent, que l'on soit citoyen, que l'on soit collègue ou autre, il y a
plusieurs éléments, là, à tenir compte. Donc, on a tout intérêt. Et c'est la
cohérence des documents. C'est l'équilibre dans tout ça qui est visé.
Mme Tremblay : Merci.
La Présidente (Mme Dionne) : Merci.
Je cède maintenant la parole à M. le député d'Hochelaga-Maisonneuve.
M. Leduc : Bonjour. Je
reviens un peu sur la question des interdictions pour bien comprendre les
différents degrés. Alors, si je saisis bien, vous êtes à l'aise avec la
directive actuelle de l'interdire dans la classe, qui est une directive
nationale, mais, après ça, tout ce qui est en haut, donc interdire dans
l'école, interdire dans une... dans un centre de services scolaire ou interdire
au Québec au complet, ça, vous êtes moins à l'aise?
Mme Dupré (Caroline) : En
fait, nous, on appuie le principe de subsidiarité. C'est-à-dire que si l'école
vit des enjeux particuliers puis décide de resserrer un peu plus pour
différentes raisons, parce qu'il s'est passé quelque chose dans l'école, on
pense que les acteurs de l'école sont les mieux placés.
Maintenant... C'est parce qu'on s'est
aussi posé la question : Est-ce que c'est réaliste de penser, pensons à
nos jeunes du secondaire, qu'ils n'auront jamais entre les mains un téléphone
intelligent? La réponse est non. Alors, comment on peut les amener à utiliser
cet outil-là de façon responsable?
Puis, pour... Puis nous-mêmes, on utilise
parfois nos cellulaires dans une activité de socialisation. À la blague, on
disait tout à l'heure, avant de s'en venir, que ce midi, bien, à la cafétéria,
on regardait une vidéo, on discutait de ça, ça a lancé les échanges, des gens
ont fait des recherches pour valider l'information.
Donc, il y a une façon d'amener nos jeunes
à utiliser le numérique pour que ce soit formateur puis que ça soit aussi une
occasion de socialiser. Mais si par exemple, dans l'école, on se rend compte
qu'on a plein de jeunes qui mangent seuls à la cafétéria le midi puis qui sont
isolés dans leur coin avec leurs cellulaires, bien, l'école a une
responsabilité d'intervenir, d'agir, d'aller voir le jeune, de peut-être
l'inciter à s'inscrire à des activités parascolaires. Alors, on pense que
l'école est la mieux placée pour intervenir si jamais il y a des situations qui
semblent être plus complexes pour certains élèves.
M. Leduc : Donc, dans une
ville donnée, il pourrait y avoir, dans le même quartier, une école qui
l'interdit au complet sur sa propre base et l'école d'à côté qui ne l'interdit
pas parce que... Ça, vous seriez à l'aise avec ça?
Mme Dupré (Caroline) : Absolument.
M. Leduc : O.K. Donc, donner
un certain pouvoir aux établissements comme tels de pouvoir le faire, donc pas
une directive nationale, mais certains établissements pourraient le faire au
besoin.
Mme Dupré (Caroline) : Absolument.
M. Leduc : C'est intéressant.
M. Robert (Dominique) : Dans
l'établissement de leur code de vie, par exemple, avec les règles à l'interne,
exact.
M. Leduc : Et là qui
déciderait ça dans l'établissement? Le conseil d'établissement?
M. Robert (Dominique) : Oui.
Mme Dupré (Caroline) : Conseil
d'établissement.
M. Leduc : Avec la direction.
Mme Dupré (Caroline) : Oui,
parce qu'annuellement ils révisent les règles de vie puis ils amènent des
ajustements en fonction de la réalité. S'il y a eu des éléments, là, qui ont
été plus complexes à gérer dans une année scolaire, bien, assurément qu'à la
fin de l'année, quand ils vont réviser le code de vie pour l'année suivante,
bien, ils vont peut-être modifier certaines choses, là, c'est révisé
annuellement.
M. Leduc : Et ça existe déjà,
des écoles, au Québec, qui l'interdisent.
Mme Dupré (Caroline) : Oui,
absolument. Je pense que vous avez vu d'ailleurs le cas de l'école secondaire
d'Oka.
M. Leduc : Oui, c'est ça. Et
est-ce qu'à votre connaissance il y en a qui l'ont... l'ont appliquée,
l'interdiction, et qui ont fait marche arrière...
Mme Dupré (Caroline) : ...Pas
à notre connaissance.
M. Robert (Dominique) : Pas à
ma connaissance.
M. Leduc : O.K. Puis est-ce
que vous faites le pari que ça va se multiplier dans les prochaines années? Si
rien ne bouge, mettons, là, puis qu'on... ça reste tel quel, est-ce que vous
pensez que les écoles vont se multiplier qui auront des interdictions sur leur
propre base?
M. Robert (Dominique) : Je
veux dire, au départ, c'est difficile à prévoir parce qu'évidemment la
directive est relativement nouvelle, mais c'est annuellement que les conseils
d'établissement redéfinissent leur code de vie. Ça va suivre son cours,
évidemment. Récemment, on y a fait référence, là, il y a l'école secondaire
d'Oka qui a... qui a pris la décision de l'interdire. Donc, eux-mêmes, à chaque
année, ils verront, ils vont faire le post-mortem sur la suite, mais c'est en
fonction de leur réalité propre, ils ont choisi d'interdire l'utilisation tout
au long de... sur le terrain de l'école.
• (17 h 30) •
M. Leduc : Dernière
question : Est ce qu'il y a des... est ce qu'il y a des données objectives
qui peuvent être utilisées et mesurer d'une année à l'autre pour voir si ça a
un effet réel? Dans le sens où, autrement, ça reste de la subjectivité, puis je
pense que neuf personnes sur 10 vont dire : Oui, je constate que ça va
mieux, depuis qu'il n'y a plus de téléphones à l'école. Mais concrètement,
est-ce qu'on a des mesurables à votre connaissance?
M. Robert (Dominique) : ...qu'il
y en aura, mais c'est quand même jeune, donc les données sont en cours de
compilation, hein, c'est dans la dernière année scolaire que ça a été mis en
place. Mais après coup, les chercheurs que vous avez rencontrés vont
certainement être en mesure de dégager certaines conclusions. L'objectif, c'est
de voir quels sont les impacts de la mise en place de telle, telle, telle
mesure selon le degré de gradation, là, qui sera appliqué selon les codes de
vie. Mais actuellement, à ma connaissance, on n'a pas de données récentes à cet
égard là, parce que c'est assez nouveau comme directive.
M. Leduc : O.K. Merci
beaucoup.
La Présidente (Mme Dionne) : Si
on continue sur le mesurable, on a des experts qui viennent même dire que,
justement, l'utilisation d'outils numériques à l'école, on devrait vraiment,
là, excusez l'expression anglaise, là, «the less is more», là. Donc, même chez
les enfants qui ont des difficultés spécifiques, est ce que vous avez des
données là-dessus mesurables sur, justement, les taux de réussite ou les
avantages de l'utilisation des outils numériques, surtout chez les enfants qui
ont des problématiques de langage ou autres?
Mme Dupré (Caroline) : Malheureusement
non, ce n'est pas quelque chose dont on a eu connaissance que c'était
documenté. Mais c'est sûr que nous, l'école a comme grand rôle de former nos
citoyens de demain. Donc, un des éléments qui nous préoccupe, c'est aussi
d'éduquer nos jeunes et de les former à utiliser les outils numériques, parce
que quand ils vont arriver sur le marché du travail ou même aux études
supérieures, on ne voudrait pas que ce soit... on essaie de trouver une façon,
là, de le nommer, puis on... le mot qui nous... les mots, qui nous venait en
tête, c'était «analphabète numérique». On ne voudrait pas que l'école ait formé
des analphabètes numériques, parce que ce serait quand même dramatique pour eux
après, de se retrouver dans un milieu de travail puis de ne pas être aussi
performants qu'ils auraient pu l'être si on les avait bien éduqués
numériquement.
La Présidente (Mme Dionne) : Merci.
M. Robert (Dominique) : Peut-être,
en complément à votre question, si je peux me permettre, la technologie est là,
et est là pour rester. L'objectif de l'école, entre autres, c'est de s'assurer
de l'utiliser et d'atténuer les effets négatifs et d'utiliser le plus possible,
dans le cadre éducatif, les aspects positifs qui ont été documentés. Puis je
pense qu'au fil du temps on pourra le documenter encore plus, il y a plusieurs
recherches d'ailleurs auxquelles on fait référence dans le mémoire, et les
chercheurs que vous avez rencontrés y font référence. La clé sera certainement
l'équilibre. Et ça nous fera plaisir, évidemment, d'y participer ultérieurement.
La Présidente (Mme Dionne) : Merci.
On poursuit maintenant avec Mme la députée de Bourassa-Sauvé.
Mme Cadet : Merci, Mme la
Présidente. Bonjour à vous. Merci pour votre exposé. Vous avez bien répondu,
donc, à toutes mes questions, donc, sur l'interdiction du cellulaire à l'école
et le niveau de gouvernance que vous verriez par rapport à ça, donc, ce sera au
niveau du conseil... du code de vie.
Ma prochaine question, donc, était, donc,
sur la même lancée que celle de Mme la Présidente, donc sur l'utilisation,
donc, des technologies numériques à des fins éducatives à l'école. Donc, je
vous entends, en fait, vous, ce que vous dites, c'est que puisque... en fait,
nonobstant le fait que la recherche, comme on nous l'expliquait plutôt, n'a
peut-être pas rempli son fardeau de la preuve quant à... quant aux avantages du
numérique, puisque les étudiants québécois vont être exposés, dans... au sein
de leurs études supérieures et dans leur carrière, bon, on ne veut pas former
des analphabètes numériques, donc c'est l'aspect, donc, de valeur ajoutée qu'on
y voit à l'intérieur du milieu de l'éducation. Donc, deux questions sur les
technologies numériques à des fins éducatives. D'une part, au niveau de la
quantification du temps d'écran. Donc, certains spécialistes sont venus nous
dire : Mais pour nous, donc, quand on parle, donc, de recommandations de
temps d'écran, bon, on le fait vraiment à des fins de divertissement. Donc, on
différencie les fins de divertissement puis les fins éducatives. D'autres nous
disent : Non, il faut le voir, donc, dans son ensemble. De votre...
17 h 30 (version non révisée)
Mme Cadet : ...de ce que vous
voyez sur le terrain puis avec ce que vous nous émettez comme recommandations à
cette fin, comment est-ce que vous quantifiez, donc, le bon temps d'écran et le
mauvais temps d'écran, quand on parle de fins éducatives ou d'emplois encadrés
à l'école?
Mme Dupré (Caroline) : Ce qui
est important à l'école, c'est l'équilibre. On voit mal que toute une journée
un jeune soit exposé à des écrans, qu'à des fins pédagogiques, comme on l'exposait,
dans le cadre d'un travail ou d'un enseignement, que le titulaire de classe est
en train de faire avec les élèves... réfère, par exemple avec le TNI, à une
vidéo qui vient expliquer la formule chimique à appliquer ou qu'on aille
chercher ensemble une information puis qu'on se pose la question sur le niveau
de véracité de l'information qu'on vient de trouver, alors ça, c'est super, c'est
wow, ça ne peut pas être ça toute la journée. Puis de toute façon, dans le
cadre d'une journée en classe, toutes les activités ne se prêtent pas nécessairement
à être toujours sur le numérique. Alors, bon, par exemple, il y a des périodes
d'éducation physique, il y a des périodes de musique où, quand même, on peut
utiliser, oui, le tableau pour suivre une portée ou un rythme, mais l'idée, c'est
de varier. Puis les enseignants sont les mieux placés pour choisir le meilleur
outil d'apprentissage qui va soutenir l'enseignement d'une leçon. Mais je peux
vous assurer, puis vous saurez le constater lors de vos visites, qu'il y a
vraiment un équilibre entre le papier crayon, la tablette, le tableau
numérique, l'activité physique. Et vraiment, là, je suis convaincue que vous
allez pouvoir l'apprécier dans le cadre de vos visites.
Mme Cadet : Merci. Ensuite,
aujourd'hui, on a beaucoup entendu parler de la part, donc, des expertes qui
sont venues à l'écran, des concepts, donc, de mécanisme de renforcement
virtuel, donc le fait que les différentes applications en ligne, notamment les
réseaux sociaux, donc, peuvent employer, donc, certains mécanismes pour capter
l'attention de l'utilisateur. On sait que certains ludiciels emploient ces
mécanismes-là aussi. Est-ce que c'est quelque chose que vous voyez sur le
terrain?
Puis est-ce que vous pensez que l'État ou
le législateur, donc, a un certain rôle à jouer pour encadrer... pour
permettre, en fait, à nos établissements scolaires qui font l'acquisition de
ces ludiciels-là de différencier, donc, ceux qui emploient des mécanismes qui
pourraient être néfastes pour le jeune?
M. Robert (Dominique) : En
fait, tout ce qui vient diluer l'attention, évidemment. Puis les chercheurs...
puis la personne qui était ici précédemment l'a mentionné également, toutes les
notifications, etc., l'objectif, c'est de les atténuer évidemment ou de les
enlever et de les proscrire complètement, puis il y a des différents
mécanismes, là, les notifications.
La nouvelle directive, notamment l'utilisation
du cellulaire autre que pédagogique, en ce moment, là, le cellulaire pendant la
classe en n'étant pas utilisé, bien, on vient se protéger ou se prémunir de ces
aspects-là. Évidemment, à l'extérieur de la classe, bien là, ça... c'est un
autre... c'est un autre phénomène.
Mme Cadet : Peut-être juste
préciser ici parce que là je parle vraiment, donc... je parle de ludiciels,
donc de logiciels qui ont utilisés, donc, à des fins pédagogiques, donc d'applications
qui pourraient être utilisées à des fins pédagogiques puis qui, au passage,
donc, emploient, donc, des mécanismes de renforcement virtuel. Donc, par
exemple, je pense qu'il y avait un exemple qui nous était donné plus tôt où une
application, donc, qui est utilisée vraiment, donc, de façon encadrée en
classe, donc, pourrait, donc, à la fin, une fois qu'on réalise certains
apprentissages, bien, on a droit, donc, à certains mécanismes de récompense à
travers ça. Donc, ça peut être parfois, donc... ce n'est pas nécessairement,
donc, à sa face même, là, mais de façon un peu pernicieuse. Donc, ces
mécanismes-là peuvent s'insérer dans certains logiciels, sachant que le...
bien, tout ce qui... tout ce qui aggrave, là, la capacité, donc, des jeunes,
donc, de se sentir plus interpelés par le numérique, bien, peut avoir, donc, un
effet, donc, à plus long terme sur, bon, la régulation des émotions, etc. Donc,
c'était plus là-dessus, donc pas sur le téléphone cellulaire ou d'autres
emplois qui sont périphériques.
Mme Dupré (Caroline) : C'est
très préoccupant, effectivement. Tu sais, on n'est pas des spécialistes, on n'a
pas porté de recherche sur le sujet, mais c'est clair qu'à l'école on agit
beaucoup, en tout cas, et on tente de le faire le plus possible en amont sur
les dépendances. Mais le numérique peut être une dépendance. Ce n'est pas que
les substances illicites ou l'alcool, c'est aussi le numérique qui peut
devenir... créer un effet de dépendance, notamment par ce que vous dites, le
fait de vouloir acquérir une nouvelle récompense, remporter des étoiles, une
vie, peu importe. Alors, c'est sûr qu'on est sensibles à ça. Puis de fait, tout
ce qui amène une dépendance...
Mme Dupré (Caroline) : ...qui
amène une dépendance, à notre avis, devrait être étudié sérieusement par les
chercheurs.
Mme Cadet : On nous a
aussi... Ah! vous voulez compléter?
M. Robert (Dominique) : Très
rapidement, tout à l'heure, ce que je voulais juste ajouter, c'est, pour
l'élève, notamment, qui recevrait ce genre de notification, ou d'interaction,
ou de communication a posteriori, ce qui est souhaité, c'est de développer la
pensée critique, également, de l'élève, donc d'être capable de discerner dans
la mesure où c'est un... bon, quelque chose qui vient... qui est peut-être
nuisible, puis, aujourd'hui, dans l'instantanéité de l'information...
Nous-mêmes, on est habitués de répondre instantanément à des courriels, ou à
des textos, ou peu importe, mais c'est apprendre, également, ça fait partie des
éléments de changement d'habitudes et de développement de la pensée critique,
qui est un des aspects, là, qui était... qui s'inscrit dans le cadre de
référence et qui est souvent ramené à l'école.
• (17 h 40) •
Mme Cadet : Sur les écrans
récompenses, on a entendu parler à quelques reprises dans le cadre de ces
auditions, on a aussi vu, donc, des lettres ouvertes, donc, de parents qui nous
disent : L'école, donc, ne devrait pas fournir, prévoir ce type d'activité
récompenses là ou, du moins, ne pas le faire aussi souvent. Est-ce que c'est un
phénomène que vous voyez? Est-ce que ce phénomène qui vous préoccupe?
Mme Dupré (Caroline) : Ça
nous préoccupe. Je pense qu'il y a plusieurs années, c'était une récompense
parce que les enfants avaient peut-être moins accès qu'ils ont accès maintenant
à tous ces outils puis à tous ces écrans, mais, aujourd'hui, on en entend
tellement parler, de la surutilisation des écrans, qu'on devrait trouver
d'autres moyens de vivre des activités de récompense avec les jeunes, notamment
les faire bouger, développer leur culture. Donc, il y a assurément une panoplie
d'activités qu'on peut trouver, autres que l'écran.
Mme Cadet : Dernière
question, est-ce que je peux?
La Présidente (Mme Dionne) : Oui,
allez-y.
Mme Cadet : Merci, Mme la
Présidente. Cyberintimidation, on a aussi entendu, donc, des experts ou... des
spécialistes qui sont venus, donc, dans le cadre des auditions, nous dire,
donc, parfois, certains des conflits, donc... on sait, donc, qui naissent en
ligne, notamment, oui, donc, sur les différentes applications périphériques,
mais aussi parfois même, donc, sur, donc, des plateformes d'interactions qui
sont utilisées à l'école, même on disait Google Docs, parfois, il peut y avoir,
donc, des interactions négatives qui commencent là-dessus puis qui se
poursuivent dans le réel, à l'école. Comment est-ce que vous voyez le rôle
d'encadrement de ce type d'interaction là dans le cadre de l'enjeu de la
cyberintimidation à l'école?
Mme Dupré (Caroline) : Même
si on se dit que ça se passe à l'extérieur de l'école, vous le savez comme moi,
l'école se retrouve, de toute façon, à devoir le gérer parce que la chicane,
souvent, ou ce que ça va créer comme conflit, bien, ça va se répercuter à
l'école. Mais on a entendu les membres du personnel nous dire : On aurait
besoin d'être peut-être mieux outillés pour intervenir parce que c'est quand
même difficile, dans un contexte où ce n'est pas l'école qui a acheté... qui a
acheté l'appareil électronique, ce n'est pas l'école qui a permis qu'en dehors
le jeune puisse l'utiliser dans des heures peut-être ou ce n'était pas... ça
dépassait le cadre normal d'utilisation des écrans. Donc, il y a une partie de
la... puis c'est pour ça qu'on dit que c'est une responsabilité partagée. Donc,
on a besoin de peut-être mieux outiller nos intervenants scolaires, mais on
aura aussi besoin de travailler en collaboration avec nos comités de parents,
pour offrir peut-être aussi aux parents des activités de formation, de
sensibilisation, peut-être même des groupes d'échange. Parce que les parents
aussi se retrouvent un peu dépourvus devant l'ampleur de ces situations.
Donc, je pense qu'il faut qu'on soit... on
disait qu'on était un maillon, mais, dans la chaîne, on est tous liés, donc on
doit tous travailler ensemble. Puis d'ailleurs je tiens à saluer l'excellent
travail qui se fait avec la Sécurité publique, donc, particulièrement dans nos
écoles secondaires. On a des policiers et des policières, parrains, marraines
qui viennent soutenir les équipes-écoles, sensibiliser les jeunes aussi aux
conséquences pénales que peuvent amener les situations de cyberintimidation, de
cyberviolence, le... il y a tout un programme, dont vous avez peut-être entendu
parler, qui s'appelle le programme Sexto,aussi, où on fait de la
sensibilisation auprès de nos jeunes.
Mme Cadet : Merci énormément.
Merci pour votre présence.
La Présidente (Mme Dionne) : Bien,
c'est intéressant, ce que vous dites, que, oui, il y a l'école, mais c'est une
prise de conscience sociale et collective, mais est-ce que ça ne pourra pas
être, éventuellement, peut-être, les parents qui diront à leurs enfants :
Bien, tu t'en vas à l'école, tu n'as pas vraiment besoin de ton cellulaire à
l'école? Je... On se questionne puis on se dit : Oui, l'école peut
intervenir, mais il reste qu'éventuellement aussi... Au niveau de la
responsabilisation des parents qui mettront cet encadrement-là auprès de leurs
jeunes, vous en pensez quoi?
Mme Dupré (Caroline) : Bien,
c'est certain qu'il y a quelqu'un qui l'a acheté, le cellulaire, puis ça
s'avère que ce n'est pas l'école, l'école le gère après, mais ce n'est pas
l'école qui l'a... qui l'a acheté...
Mme Dupré (Caroline) : Puis,
mon collègue l'a dit tout à l'heure, je pense qu'on a une prise de conscience
collective aussi à faire sur le fait qu'on a souvent l'impression qu'on doit
pouvoir joindre quelqu'un tout le temps, rapidement, quasi dans
l'instantanéité. Mais appeler au secrétariat de l'école pour faire un message
aux enfants, là, ça existe encore, et ça devrait exister encore. Quand il n'y
avait pas de cellulaires en classe, nos jeunes recevaient quand même des
messages, puis... ou un parent qui veut vérifier quelque chose auprès de son
enfant, auprès de l'enseignant, bien, c'est toujours possible, puis je pense
que, ça, il va falloir peut-être qu'on revienne à ça, là, en se disant :
Bien, quand mon jeune est à l'école, il est à l'école, il est là pour
apprendre, pour socialiser, pour se qualifier, puis, si j'ai des messages à lui
passer, bien, je peux demander au secrétariat de l'école de lui transmettre le
message aussi.
La Présidente (Mme Dionne) : Oui,
puis le... certains enseignants qui m'ont dit que le téléphone sonnait en
classe et que c'étaient souvent les parents, donc... Je cède maintenant la
parole à notre député de Joliette.
M. St-Louis : Merci beaucoup,
Mme la Présidente. D'abord, je vous remercie... je veux vous remercier tous les
deux, pardon, de participer aux travaux de la commission, qui sont très
importants à mes yeux. Je vous ai entendu parler, je l'ai déjà nommé, du bon
côté de la force, les vertus de l'outil pédagogique. Je ne doute en rien du
contenu utilisé dans nos écoles, le mauvais contenu étant peut-être, bon, les
algorithmes qu'on retrouve dans les applications des réseaux sociaux, etc., on
a... Donc, je comprends que vous êtes pour l'utilisation des plateformes
numériques en classe.
D'un autre côté, on a des experts qui nous
disent qu'on doit repousser ça le plus loin possible, parce qu'il y a des
problèmes de régulation du système nerveux avec la mélatonine, la dopamine,
bon, les écrans. Parce qu'on parle beaucoup du contenu, mais il y a aussi le
médium lui-même, là, l'écran bleu, qui vient... qui vient interférer.
On a parlé en commission aussi de la
possibilité d'une majorité numérique. Vous parlez de l'école de façon générale.
Ça commence où puis ça s'arrête où? Est-ce que ce sera la prérogative d'un
professeur d'utiliser les outils au primaire, au secondaire? On comprend qu'à
partir d'un certain âge, on ne veut pas, vous l'avez nommé tantôt, avoir des
citoyens de demain qui seraient des analphabètes numériques, là, et je suis à
la même place que vous là-dessus. Mais est-ce que ce sera de la première année
à la... jusqu'en secondaire V, puis ce sera vraiment le choix du professeur?
Mme Dupré (Caroline) : Bien,
dans le cadre de compétences à développer chez les enseignants, les
13 compétences, le référentiel des compétences des enseignants, il y en a
une qui est sur l'utilisation du numérique. Donc, en principe, nos enseignants
doivent maîtriser l'utilisation du numérique. C'est sûr que nous, quand on
parle du numérique à l'école, on parle du numérique à des fins pédagogiques.
Maintenant, si le travail que vous faites,
les recherches qui sont aussi en cours ou qui se sont réalisées viennent nous
dire, par exemple, que le temps d'utilisation d'un écran devrait être de tant
de temps... Puis, en fait, je fais un... je fais... j'ai une réflexion en tête,
ça fait qu'elle est peut-être un peu boiteuse, mais je pense par exemple à la
consommation d'alcool. Bien, il y a des recherches qui sont venues nous
dire : Tant de verres d'alcool par jour chez une femme, tant de verres
d'alcool par jour chez un homme. Donc, on connaît une limite puis on connaît
aussi les conséquences si on ne respecte pas la limite.
Donc, si on vient nous dire par exemple
qu'un jeune ne devrait pas être exposé plus qu'une heure par jour, disons, à
des écrans, bien, l'école saura le gérer aussi, là, elle saura s'assurer...
l'enseignant saura s'assurer que, dans la planification de ses... de son
enseignement, l'utilisation des outils numériques ne dépassera pas les... ce
que la recherche vient nous dire qui serait le plus opportun pour le jeune.
Mais, pour nous, c'est quasi inconcevable
qu'on n'éduque pas nos jeunes à l'utilisation du numérique. On prône beaucoup
en éducation la modélisation, donc de modéliser les bons comportements puis une
utilisation éthique du numérique. Pour nous, ça nous apparaît essentiel... que
de proscrire à tout prix, parce qu'on sait qu'après ça, en parallèle, le jeune
va aller développer de mauvaises habitudes puis probablement aussi aller
fréquenter des sites qui ne sont pas appropriés pour lui. Donc, on préfère
éduquer, sensibiliser puis intervenir aussi, parce que parfois il faut
intervenir puis recadrer. On pense que c'est ça, le rôle de l'école.
M. St-Louis : Parce qu'il y a
une experte aujourd'hui qui nous a dit que le temps par jour devrait être le
total hebdomadaire. Donc, si un enfant passe sept heures sur son écran dans une
journée, bien, ça devrait être ça au maximum pour une semaine. Maintenant...
M. St-Louis : ...on sait que
les recherches continuent puis que... mais donc ça limiterait le temps
d'utilisation en classe. C'est un peu ça, mon point. Donc, c'est pour ça que je
voulais savoir si... Merci.
La Présidente (Mme Dionne) : M.
le député de Marquette.
M. Ciccone :Merci beaucoup. Bonjour à vous deux. Mes collègues sont
rentrés dans des éléments très, très spécifiques. Moi, j'aimerais regarder la
globalité de notre société. On a entendu des chercheurs, des docteurs qui sont
venus nous interpeler, puis on s'aperçoit que l'avancée technologique a
dépassé, là, la science, là, vraiment, où nos scientifiques n'ont même pas eu
le temps d'aller chercher des données. Même vous, vous venez de le dire, là,
puis j'ai pris votre citation : «Quand la recherche nous dira qu'on ne
peut pas dépasser une heure, on s'ajustera.»
• (17 h 50) •
Moi, ce qui m'inquiète, puis c'est pour ça
que je parle dans la globalité, là... Est-ce qu'on va trop vite? Est-ce qu'on
va trop vite, justement, en donnant... Vous avez parlé tantôt du TNI, des
différentes plateformes éducatives. Encore une fois, il y a des chercheurs puis
des docteurs qui nous ont dit : Bien, on ne sait pas si c'est bon, on ne
sait pas si c'est bon à long terme chez l'enfant.
Alors, pourquoi que, si on ne sait pas, on
prend des chances? Puis je ne dis pas que vous prenez une chance, je ne veux
pas vous mettre responsables, là, mais pourquoi que le système éducatif, avant
d'avoir les données, avoir toutes les réponses, n'attend pas de... Parce que,
je veux dire, on va leur apprendre. Quand on va avoir les données, là, on va
leur apprendre, on va leur donner ce qu'ils ont besoin puis ils vont être
capables de devenir des citoyens qui vont être capables de se trouver des bons
emplois puis ils ne seront pas des analphabètes numériques. Pourquoi qu'on
n'attend pas? Pourquoi qu'on va trop vite?
M. Robert (Dominique) : Je
veux peut-être tenter une réponse sur la question, peut-être, plus large,
effectivement, parce que la technologie, le numérique est là, existe. Les
écoles, ce sont des maisons d'enseignement. Donc, l'objectif, c'est de
s'assurer que les enfants, qui deviendront les adultes de demain, soient en
mesure de bien avancer. Même les adultes d'aujourd'hui, vous le disiez, ça va
trop vite, ça va très vite. Donc, tout le monde. Quand on disait que l'école
est un des maillons, la clé passera fort probablement par une campagne de
sensibilisation. On a fait quelques... plusieurs recommandations, là, dans
notre mémoire, dont une qui est une campagne de sensibilisation pour s'assurer
que, oui, les élèves, les membres du personnel, mais également les autres
acteurs puissent être vraiment... je vais oser utiliser le terme «éduqués»,
mais mettre en place les bonnes pratiques. Ma collègue faisait référence tantôt
avec le nombre d'heures, le nombre de... peu importe, là, d'avoir des
références fiables. Lorsqu'on les aura, ça va permettre de mieux se guider.
Une chose est certaine, c'est que la
technologie existe, et il y a quand même des éléments positifs qu'on veut
conserver, parce qu'il y en a, des éléments positifs. Tout à l'heure, je me
permets, sur la question de votre collègue qui nommait le temps d'écran...
effectivement, et il faut définir qu'est-ce qu'un temps d'écran. Un temps
d'écran sur un iPad, sur un téléphone cellulaire ou sur un TNI, qui est à
l'écran, je présume, en tout cas, de ce qu'on a pu lire, qu'il y a un impact
différent. En bas âge, il y a une question qui a été posée aussi, préscolaire,
de zéro à... bien, peut-être pas zéro, mais en bas âge, un an, deux ans, trois
ans, à proscrire, puis d'y aller de façon... en gradation. En ce moment, la
problématique, c'est que les études ne sont pas concluantes. Et là, à votre
question : Est-ce qu'on va trop vite? Le but, c'est de... d'avancer
ensemble pour s'éduquer dès qu'on aura les bonnes données. Une chose est
certaine, c'est qu'il y a du bon, lui, il faut le garder, et atténuer ce que
l'on connaît déjà qui doit être réduit.
La Présidente (Mme Dionne) : Merci.
Ça fait...
M. Ciccone :C'est terminé?
La Présidente (Mme Dionne) : Oui.
Le temps est terminé. Alors, très belle conclusion. Alors, je vous remercie
beaucoup de votre contribution à nos travaux.
Donc, la commission ajourne ses travaux
jusqu'au mardi 17 septembre à 9 h 45. Donc, bonne fin de journée, tout le monde.
(Fin de la séance à 17 h 53)