Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.
Commission spéciale des corporations
professionnelles
Projets de loi no 250 Code des professions et
autres
projets de loi connexes
Séance du mardi 28 mars 1972
(Dix heures dix minutes')
M. BLANK (président de la commission parlementaire
spéciale des corporations professionnelles): A l'ordre, messieurs! La
séance de la commission parlementaire spéciale des corporations
professionnelles est ouverte. Il y a quorum mais le journal des Débats
n'est pas là pour enregistrer les discussions. Siégeons-nous
quand même ou non? Quelle est la décision des membres de la
commission? Normalement, chaque séance est enregistrée.
Procédons-nous sans enregistrement?
M. TREMBLAY (Chicoutimi): II n'y a rien d'illégal. Nous devions
avoir les services du journal des Débats pour faire l'enregistrement. Ce
service était considéré comme essentiel. Mais nous devons
constater que les employés n'ont pu pénétrer à
l'intérieur du parlement. Ce n'est pas une grève dans un autre
secteur qui va empêcher le Parlement de siéger et de s'occuper du
bien-être de toute la population du Québec.
M. LE PRESIDENT: Les représentants de la Chambre des notaires
sont-ils présents?
UNE VOIX: Non.
M. LE PRESIDENT: Les représentants du Collège des
chirurgiens dentistes sont-ils présents?
M. STEIN (Charles): Oui.
M. LE PRESIDENT: Les représentants de l'Ecole de médecine
dentaire de l'Université Laval sont-ils présents?
UNE VOIX: Non.
M. LE PRESIDENT: Les représentants de la Faculté de
chirurgie dentaire de l'Université de Montréal sont-ils
présents?
UNE VOIX: Non.
M. GUAY: M. le Président, comme il n'y a qu'un organisme de
présent à la commission, je crois qu'il y aurait lieu que ceux
qui ont été empêchés d'entrer ne perdent pas leur
droit de parole plus tard.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Cela va de soi.
M. CASTONGUAY: Je suis d'accord avec le député de
Chicoutimi. La séance devait être normalement tenue et le journal
des Débats devait être en fonction de telle sorte que les
discussions soient enregistrées. Il est très important d'avoir
les services du journal des Débats. Ils permettent par la suite de faire
la synthèse et de voir s'il y a lieu d'apporter des amendements au
projet de loi. Je ne suis pas versé dans les règlements de la
Chambre, mais il y a une règle qui veut que nos travaux soient
enregistrés. Nous ne siégerons pas à l'encontre des
règlements. Pour cette raison, il ne sera pas possible de
procéder. C'est malheureux pour les membres du Collège des
chirurgiens dentistes, pour les députés ici présents et
également pour les autres qui n'ont pu pénétrer dans
l'édifice. On m'informe que les représentants de la Chambre des
notaires ont aussi essayé d'entrer mais sans succès. Cette
situation est déplorable et je partage l'opinion du député
de Chicoutimi à l'effet qu'une grève ne devrait pas paralyser les
travaux du Parlement.
M. LE PRESIDENT: La séance est ajournée sine die.
(Fin de la séance à 10 h 23)
Commission spéciale des corporations
professionnelles
Projet de loi no 250 Code des professions et
autres projets de loi connexes
Séance du mardi 2 mai 1972 (Dix heures douze minutes)
M. BLANK (président de la commission parlementaire
spéciale des corporations professionnelles): A l'ordre, messieurs!
Je vais vous expliquer les nouveaux règlements de cette
commission. Chaque organisme a 20 minutes pour exposer son mémoire et il
y a une période de 40 minutes pour les questions des
députés. Il n'y a pas tellement de discussion après
l'exposé des mémoires, il y a seulement des questions. S'il y a
lieu, nous pouvons prolonger ces périodes.
Je vais donner maintenant la liste des intéressés. La
Chambre des notaires? Présent. Guilde des comptables industriels,
commerciaux et institutionnels? Corporation des bibliothécaires
professionnels du Québec? Corporation des techniciens professionnels?
Corporation des bijoutiers du Québec? Leurs montres ne marchent pas.
Société des conseillers en relations industrielles? La
Société Saint-Jean Baptiste de Montréal?
Présent.
Nous commençons avec la Chambre des notaires. Est-ce M.
Jean-Bernard Coupai qui fera l'exposé? Voulez-vous nous donner votre
nom, s'il vous plaît?
M. LAGACE: Jacques Lagacé.
M. LE PRESIDENT: Vous pouvez présenter votre exposé.
Chambre des notaires
M. LAGACE: M. le Président, MM. les membres de la commission
parlementaire, c'est pour moi un très agrâble devoir et un grand
honneur, en ma qualité de président de la Chambre des notaires du
Québec, de vous présenter au nom de tous mes collègues, le
mémoire de notre corporation sur les projets de loi 250 et 253. Inutile
de vous dire que j'ai le privilège de représenter la plus
ancienne profession du continent nord-américain et que la Chambre des
notaires telle qu'actuellement constituée célébrait, le 2
février 1971, le centième anniversaire de son existence. Les
membres de notre profession ont toujours été en contact constant
avec les individus et les corporations de telle sorte qu'ils ont toujours
perçu l'évolution de la société en en connaissant
les besoins et les aspirations.
Depuis au-delà de trois siècles, les membres de notre
profession ont compris qu'il était de leur devoir d'accorder toute leur
collaboration au législateur et ce, non seulement dans l'élabo-
ration et la rédaction, mais aussi dans la mise en application des lois
projetées et adoptées pour le mieux-être de toute la
population. Mais ils ont aussi compris qu'il était de leur devoir de
faire part au législateur des modifications qui, selon eux, pourraient
être apportées à des projets de loi et ce, dans
l'intérêt de toute la société.
Les membres de notre corporation, en somme, ont toujours estimé
que le législateur était en droit de s'attendre à une
telle collaboration de la part des corporations professionnelles.
Les motifs qui ont inspiré nos prédécesseurs sont
les mêmes que ceux qui nous ont inspirés lors de notre prise de
position à la suite de la publication des projets de loi 250 et 253.
C'est dans ce même esprit de franche collaboration que je disais, lors
d'une causerie prononcée au mois de novembre dernier devant les membres
du club Saint-LaurentKiwanis de Montréal, que les notaires du
Québec, sujets à certaines modifications, accueillaient
favorablement les projets de loi 250 et 253. D'ailleurs, comment pouvait-il en
être autrement puisque les changements et les recommandations contenus
dans les bills 250 et 253 ont déjà été
réalisés au sein de notre profession?
Je dois vous dire, messieurs, que, depuis la publication des projets de
loi 250 et 253, les membres de notre profession, comme d'ailleurs les membres
de toutes les autres corporations, ont fait une étude sérieuse de
ces projets de loi. Aussi, j'ai l'honneur de vous présenter les membres
du comité ad hoc qui a été formé à cette
occasion.
A ma gauche, Me André Labonté, membre de la Chambre des
notaires et président de la commission ad hoc. Me André Cossette,
vice-président de la chambre; Me Jean Tétrault, membre de cette
commission; Me Bérengère Gaudet-Tremblay, secrétaire de la
commission ad hoc. Nous avons aussi le plaisir d'avoir avec nous le
secrétaire de la chambre, Me Jean-Bernard Coupai.
Les membres de ce comité ad hoc connaissent
précisément les amendements que nos membres se proposent de
soumettre à cette commission et se feront un plaisir de vous fournir
tous les renseignements que vous voudrez bien leur demander. Je vous remercie
de votre attention et j'invite maintenant Me André Labonté,
président de la commission ad hoc, à vous donner plus de
détails sur les amendements que nous vous proposons d'apporter à
ces projets de loi.
M. LABONTE: M. le Président, messieurs, nous n'avons pas
l'intention de vous faire un long résumé de notre mémoire,
que vous avez d'ailleurs déjà lu. Nous entendons cependant y
apporter de nouveaux arguments, y faire certains commentaires, et même,
sur deux points, y apporter des modifications.
En ce qui concerne l'attitude générale de la Chambre des
notaires devant ces projets de loi,
vous n'avez qu'à relire les commentaires généraux
de notre mémoire pour vous rendre compte que la Chambre des notaires est
parfaitement consciente des réalités sociales et qu'elle n'entend
pas s'y soustraire.
Or, dans ce monde des corporations professionnelles au Québec
aujourd'hui, il existe deux réalités sociales distinctes que nous
ne pouvons pas ignorer. D'une part, une distribution inéquitable des
droits et privilèges accordés aux différentes corporations
professionnelles. Certaines jouissent de privilèges ancestraux qui en
font de véritables forteresses. D'autres, au contraire, les plus
récentes, ont à peine le droit d'exister. C'est là une
première réalité sociale. D'autre part, dans cette
ère de remise en question, la société n'accepte plus, avec
raison, qu'un organisme, quel qu'il soit, puisse détenir des
privilèges et des prérogatives si de tels privilèges et
prérogatives ne sont pas contrebalancés par un rôle
raisonnable de surveillance et de contrôle exercé par
l'autorité. C'est là une deuxième réalité
sociale. C'est là également, nous semble-t-il, le vide qu'a voulu
combler le législateur en proposant cette législation.
Aussi, comme le disait le président tantôt, la Chambre des
notaires est-elle favorable, en principe, à cette
législation.
Elle y voit une mesure efficace susceptible d'assurer une plus grande
protection du public. Cependant, cet accord de principe de la Chambre des
notaires est sujet à deux conditions. La première c'est que,
évidemment, les grands principes que l'on retrouve dans ce projet de loi
demeurent, dans leur essence, inchangés. La seconde, est que le code des
professions, lorsqu'il sera en vigueur, devra régir toutes les
corporations sans exception, à moins que certaines d'entre elles ne
préfèrent perdre leur statut de corporation professionnelle, car
les réalités sociales sont les mêmes pour toutes les
corporations, qu'on le veuille ou non. Et parce que les notaires, comme bien
d'autres corporations, pourraient eux aussi invoquer avec plus ou moins de
conviction, soit la prétendue violation du secret professionnel, soit la
prétendue ingérence abusive de l'Etat.
Si vous le permettez, messieurs, nous allons insister davantage sur ces
deux points. Qu'en est-il exactement de ces prétendues violations du
secret professionnel et ingérence de l'Etat? S'il est une profession au
Québec qui aurait dû être chatouilleuse quant à une
violation anticipée du secret professionnel et quant à une
prétendue ingérence de l'Etat dans ses affaires, c'est bien celle
du notariat, gardienne séculaire des archives et des documents les plus
confidentiels qui puissent exister en vertu de nos lois. Nous croyons qu'aucun
membre de cette honorable commission ne verrait d'un bon oeil qu'un officier
quelconque, fût-il nanti de pouvoirs directs de la Législature et
eût-il prêté le serment de ne rien dévoiler, puisse
non seulement prendre connaissance de son testament, mais faire circuler sous
le manteau copie de ce dernier.
Pourtant, nous n'avons rien vu, dans le projet en question, qui puisse
amener pareille situation. Sauf peut-être le cas du serment requis par
les officiers. Dans ce serment, l'officier déclare qu'il ne
dévoilera rien sans y être autorisé. Notre mémoire
préconise que cette expression ou ces mots "sans y être
autorisé" soient supprimés ou alors que l'on précise que
l'autorisation ne pourra venir d'autres personnes que de la corporation. Donc,
une fois cet amendement proposé, nous ne voyons rien dans le code qui
puisse être interprété comme une violation au secret
professionnel.
C'est pourquoi nous n'avons pas cru bon, dans notre mémoire
écrit, de faire des commentaires sur l'article 105 qui prévoit
que le comité d'inspection professionnelle a le droit d'examiner et
d'inspecter les dossiers, livres et registres des professionnels. On peut de
suite souligner qu'il s'agit du comité. Ce pouvoir est accordé au
comité et non pas à un seul de ses membres et le comité
est formé de deux membres de la corporation, nommés par cette
dernière, et d'un secrétaire, nommé par l'Etat, mais
après consultation avec la profession intéressée.
Donc, de plus, cet article parle des dossiers des professionnels et non
pas des dossiers des clients des professionnels. Cependant le
législateur devrait apporter une précision sur ce point et dire
clairement ce qu'il entend. Mais même si cette précision avait
pour effet de permettre l'inspection des dossiers des clients des
professionnels, qu'est-ce qu'il y aurait de changé avec la situation
actuelle? Chacune des corporations aujourd'hui possède, soit des
inspecteurs, soit des syndics ou des syndics adjoints qui ont actuellement ce
pouvoir de vérifier les dossiers des professionnels et des clients. Et
pourtant, jusqu'à ce jour, personne ne s'est alarmé de pareilles
situations. Il faut, il nous semble, avoir très peu confiance en la
probité, l'honnêteté et l'intégrité de ses
membres en général et des membres en particulier qui occuperont
ces différentes fonctions, pour imaginer que l'un d'entre eux, avec la
complicité de deux autres, puisse utiliser ce pouvoir pour des fins
inavouables. Nous le disons sans ambages: ceux qui prétendent qu'il y a
ici violation du secret professionnel font de la chasse aux
sorcières.
En ce qui concerne l'ingérence abusive de l'Etat, nous
défions qui que ce soit de nous prouver ou de nous montrer un seul
article, dans le code, en vertu duquel l'Etat délègue des
représentants au sein des corporations professionnelles et en même
temps s'arroge un pouvoir de décision ou de majorité. Bien au
contraire, infailliblement, chaque fois que l'Etat demande de
déléguer des représentants au sein des corporations, il se
met dans un état de minorité. Nous croyons, messieurs, que ces
choses devaient être dites et, puisqu'il s'agit de
l'interprétation d'un projet de loi, il revenait à l'une ou
l'autre des professions juridiques de les dire.
Ce faisant aujourd'hui, les notaires sont conscients d'avoir
assumé envers la société leur
rôle de conseillers juridiques et leur rôle de juristes
impartiaux. Vous permettrez maintenant, messieurs, avant d'insister sur
certaines de nos recommandations, d'apporter deux précisions sur le
mémoire écrit qui vous a été remis.
Vous n'êtes pas sans savoir le très court laps de temps
qu'il a été accordé aux corporations professionnelles pour
analyser ces textes de loi, consulter leurs membres, rédiger un
mémoire et remettre le tout à votre honorable commission dans les
délais impartis. Il est donc normal dans les circonstances que, sous la
pression des derniers moments, il ait pu se glisser des ambiguïtés
ou des imprécisions dans le texte écrit. Ce sont celles-ci que
nous voulons maintenant corriger.
D'abord, l'inspection professionnelle. Nous en traitons dans notre
mémoire aux pages 21 à 24. La position de la Chambre des
notaires, quant à l'inspection professionnelle, est à la
suivante. La Chambre des notaires est d'accord pour être régie par
les articles 102 à 108 du code des professions concernant l'inspection
professionnelle. Cependant, s'il arrivait que ces dispositions soient à
ce point changées dans le projet de loi final, qu'on ne les reconnaisse
plus, dans ce cas, nous préférerions que les corporations comme
la nôtre, qui ont un service d'inspection professionnelle rodé
depuis plus de cinquante ans, puissent devoir les conserver.
C'est dans cette optique et dans cette optique seulement qu'il faut lire
nôtre recommandation à la page 24. En ce qui concerne le
rôle des syndics et syndics adjoints dont nous traitons dans notre
mémoire en page 51, la position de la chambre est la suivante: la
chambre accepte la présence de syndics et syndics adjoints nommés
par l'Etat, tel que prévu au code des professions.
Cependant, ce que nous ne voulons pas, c'est que les individus notaires,
qui occuperont ces fonctions lors de la mise en vigueur du code des
professions, deviennent automatiquement les syndics adjoints prévus au
code. Il s'agirait là, selon nous, d'une expropriation de ces individus
inacceptable.
Or, il arrive que la Chambre des notaires, d'une part, entend conserver
à son emploi, en les désignant sous un autre vocable, ces
mêmes individus qui, d'ailleurs, exerceront les mêmes fonctions
qu'auparavant au niveau de l'enquête disciplinaire préliminaire
jusqu'au moment de porter plainte.
Cette plainte sera alors portée par les syndics et syndics
adjoints prévus au code des professions. D'autre part, nous voulons
laisser ces individus libres, lors de la mise en vigueur du code, de demeurer
à l'emploi de la chambre et d'exercer les fonctions que nous venons de
décrire ou de devenir les syndics et syndics adjoints prévus au
code des professions.
Ces corrections faites, nous insisterons maintenant sur certaines
recommandations de notre mémoire. D'abord, en ce qui concerne les
diplômes requis pour l'exercice et les programmes d'études
universitaires. L'article 169, para- graphes d) et e), prévoit que le
lieutenant-gouverneur en conseil peut édicter des règlements sur
simple consultation de la profession concernée pour déterminer
les diplômes requis pour l'exercice et l'élaboration des
programmes d'études universitaires.
Ce pouvoir de consultation qui est ainsi conféré aux
professions nous paraît nettement insuffisant. Et voici pourquoi. Le
principe essentiel sur lequel repose toute cette législation est
d'imposer à l'avenir aux corporations l'obligation d'assurer d'abord et
en tout l'intérêt du public. Vous admettrez que, de cette
obligation primordiale, découle nécessairement celle d'assurer
à la société des professionnels compétents. Or,
comment les corporations pourraient-elles satisfaire à une aussi
exigeante obligation si elle ne détient qu'un pouvoir de consultation
dans le domaine des diplômes requis et l'élaboration des
programmes d'études universitaires?
Il est, messieurs, un principe essentiel en droit qui veut que, pour
chaque obligation imposée, il est accordé des droits
équivalents. Or, ici, il se passe cette chose étrange que
l'obligation est imposée aux corporations professionnelles mais que les
droits correspondants qui pourraient lui permettre de prendre les moyens d'y
satisfaire sont, eux, conférés au lieutenant-gouverneur en
conseil. Il y a là, selon nous, un déséquilibre
inacceptable.
Ne croyez-vous pas, messieurs, que la profession est l'organisme le plus
apte à connaître les exigences requises pour assurer à la
population des professionnels compétents?
Et ne croyez-vous pas qu'à ce titre les corporations devraient
avoir, dans ce domaine, un pouvoir de recommandation? Nous vous laissons le
soin de répondre à cette question.
Nous traiterons maintenant du comité de discipline et de sa
composition. L'article 10 prévoit que ce comité sera
composé de deux membres de la corporation intéressée et
d'un président qui devra, nécessairement, être un avocat
d'au moins dix années d'exercice. Que cette fonction de président
du comité de discipline soit à temps partiel ou à temps
plein, qui pourra prétendre qu'il est farfelu et irréaliste
d'imaginer que cet avocat se retrouvera, un beau jour, en présence, soit
d'un client, soit d'un ancien client? Il naîtra alors, automatiquement,
un conflit d'intérêts qui nous paraît absolument contraire
à l'intention nette du législateur, que l'on retrouve dans les
notes, que l'on retrouve dans le texte même, de régler, une fois
pour toutes, la discipline au sein des corporations pour le meilleur
intérêt du public. Mais il y a plus grave encore. Non seulement le
projet de loi ne permet pas en de pareilles circonstances de demander à
ce président de se récuser, mais les articles 178 et 180 ont pour
effet de soustraire ce dernier du rôle de surveillance et de
contrôle de la cour Supérieure exercé sur les tribunaux
inférieurs prévu à l'article 33 du code de
procédure civile.
Pourtant, messieurs, notre système juridique
général a prévu aux articles 234 et 242 du code
de procédure civile, la récusation du juge. A l'article
416, celle des experts, à l'article 946, celle des arbitres, mais le
président du comité de discipline, lui, en cas de conflit
d'intérêts, sera à l'abri de pareilles récusations.
Notre système juridique a prévu ce que nous appellerons
l'état de grâce de la magistrature, pour assurer aux justiciables
une justice impartiale. On n'en demande pas tant au président du
comité de discipline. Notre système juridique a prévu que
le moindre litige, fut-il de $1, soit entendu et jugé par un magistrat.
Mais on laissera entendre et juger d'une plainte susceptible d'entraîner
la suspension ou la destitution à vie d'un professionnel, non pas par un
magistrat, mais par un avocat qu'il ne sera même pas permis de
récuser en cas de conflit d'intérêts. Est-ce cela vraiment
que veut le législateur? Nous vous laissons, messieurs, une fois de
plus, non seulement le soin mais la responsabilité de répondre
à cette question en vous soulignant, cependant, que la Chambre des
notaires réclame, avec la dernière énergie, que ses
présidents de comité de discipline, soient des juges de la cour
Provinciale, et en vous faisant remarquer, en passant, que si l'article 110 est
adopté tel que projeté, le Barreau sera la seule corporation au
Québec qui pourra se vanter, si tant est qu'on puisse se vanter d'un tel
privilège, d'avoir un comité de discipline fermé,
c'est-à-dire exclusivement composé de membres de sa propre
corporation. C'en est presque risible quand on songe qu'aujourd'hui, c'est la
même corporation qui... Enfin, passons.
M. LE PRESIDENT: J'aimerais attirer votre attention sur le fait que vous
avez dépassé vos vingt minutes, mais si vous n'en avez pas pour
longtemps, je pense que la commission va vous donner la permission de
continuer.
M. BURNS: Oui, oui, c'est intéressant.
M. LABONTE: Je demande la permission au président.
M. LE PRESIDENT: Vous avez un avocat...
M. LABONTE: Je demande la permission, M. le Président, de
continuer, j'en ai pour cinq minutes.
Le fonds d'indemnisation est prévu à l'article 10. La
Chambre des notaires recommande dans son mémoire que ce fonds ne soit
utilisé que pour indemniser les victimes en cas de malversations et de
défalcations et non pas en cas d'erreurs et omissions communément
appelées en anglais "malpractice". Cependant, si c'est l'intention du
législateur que ce fonds serve également à indemniser dans
les cas d'erreurs et omissions, le projet de loi devrait d'abord le dire
explicitement. Deuxièmement, si tel est le cas, le projet de loi devrait
contenir des dispositions obligeant la corporation professionnelle à
s'assurer auprès de compagnies d'assu- rance reconnues contre les
erreurs et omissions de leurs membres.
Un mot, enfin, sur le secret professionnel. La Chambre des notaires a
été à la fois étonnée et déçue
de constater que le code des professions n'a pas donné suite à
l'une des recommandations du rapport Castonguay-Nepveu, qui voulait que le code
des professions contienne des dispositions régissant et
protégeant le secret professionnel.
Il nous semble que cette législation est le moyen
privilégié pour régler une fois pour toutes et
établir des règles précises, tout au moins dans les
matières sous juridiction provinciale, des règles précises
protégeant le secret professionnel non seulement à l'égard
des témoignages des professionnels devant les tribunaux, mais aussi en
ce qui concerne les enquêtes de police provinciale, les enquêtes de
l'impôt sur le revenu et aussi les enquêtes de l'Office des
professions et des autres organismes et officiers prévues au code. Ne
croyez-vous pas, messieurs, que, si le code avait contenu de telles
dispositions dans le sens des remarques que nous venons de faire, certaines
corporations n'auraient peut-être pas dressé l'épouvantail
du secret professionnel violé?
Je demanderais maintenant à mon collègue, Jean
Tétrault, de vous entretenir des amendements que nous recommandons au
projet de loi 253, qui est celui qui demande notre loi actuelle. Je vous
remercie, messieurs.
M. TETRAULT (Jean): M. le Président, je ne voudrais pas abuser du
temps de la commission, si vous nous autorisez à le faire, il y aurait
quelques corrections, c'est-à-dire des précisions à
apporter à la deuxième partie de notre mémoire en ce qui
regarde plus particulièrement les amendements apportés au bill
253 qui régit notre loi organique du notariat, de façon à
rendre le mémoire plus facilement compréhensible et plus facile
d'analyse.
Je comprends que vous m'autorisez? Merci, M. le Président.
L'article 25 du projet de loi 253 modifie l'article 74 de notre loi
actuelle en ceci seulement qu'il ajoute cinq membres nommés par le
lieutenant-gouverneur en conseil. Quant au reste, on nous laisse le statu
quo.
Nous avons dit tout à l'heure que nous avions accepté les
principes du bill 250, l'esprit qui préside à
l'élaboration de ce code des professions par le législateur. Nous
ne voulons pas, par des amendements particuliers à notre loi organique,
nier ces principes et la façon dont le législateur a jugé
à propos de les appliquer. Nous avons plutôt pris les devants et
nous avons déjà réduit le nombre de membres de notre
conseil. Si nous avions gardé le statu quo, nous aurions porté le
nombre de notre conseil d'administration ou de notre bureau à 50.
C'est-à-dire, trois membres de droit, selon la situation actuelle, 42
membres élus et cinq membres nommés par le
lieutenant-gouverneur
en conseil. Or, par règlement adopté le 31 janvier dernier
(1972) en vertu de l'article 76 de notre loi, qui nous en donne le pouvoir et
conformément à l'esprit du code des professions, comme je le
disais, nous avons réduit le nombre de districts électoraux de 18
à 12 et nous avons réduit le nombre de nos membres élus de
42 à 25 afin d'éviter un surpeuplement du bureau ainsi
reconstitué et après consultation de nos membres. Nous sommes
prêts à accepter la réduction du nombre de membres de
droit, c'est-à-dire nos anciens présidents de trois à un,
le dernier sortant de charge seulement et, en retour, nous vous demandons la
réduction des membres nommés par le lieutenant-gouverneur en
conseil de cinq à quatre.
Il faudra donc modifier le paragraphe 3 de l'article 74 tel que
modifié à l'article 25 du bill 253 de sorte que seul soit membre
de droit au conseil d'administration, au paragraphe 3, le président
sortant de charge pendant le terme qui suit celui de sa présidence. Nous
modifierions également le paragraphe 2 du même article 74,
toujours l'article 25 du bill 253 ramenant de cinq à quatre le nombre de
membres nommés par le lieutenant-gouverneur en conseil et d'ailleurs ce
nombre de quatre serait exactement celui qui est prévu au code des
professions, bill 250, article 76 pour les professions de plus de 1500 membres.
Ainsi, notre conseil ou notre bureau se composerait de quatre membres
nommés par le lieutenant-gouverneur en conseil, un membre de droit et 25
membres élus dans nos districts électoraux pour un total de 30 ce
qui serait de cinq supérieur au nombre prévu à l'article
59, paragraphe c) du bill 250 et je crois que c'est assez difficile d'aller
à un nombre plus restreint de membres élus dans notre code.
Enfin, nous désirons faire ajouter un alinéa qui
prévoirait que les administrateurs soient élus aux dates et pour
la durée fixée par les règlements de la corporation. Ces
questions sont actuellement réglées par notre loi et le processus
d'amendement est extrêmement rigide comme vous le savez, tandis que le
pouvoir d'agir par règlement serait beaucoup plus souple au sein de
chaque profession. D'ailleurs, ce pouvoir est prévu à l'article
61 ainsi qu'à l'article 87 b) du code des professions et en vous
suggérant les amendements, nous nous conformons le plus possible au code
des professions lui-même.
Donc l'article 74 de la loi actuelle du notariat, article 25 du bill
253, serait modifié comme suit ou serait remplacé par le
suivant:
Premièrement, l'ordre est administré par un conseil
appelé conseil d'administration, tel que le texte le dit.
Deuxièmement, le conseil se compose d'un membre de droit,
à savoir le président sortant de charge, de membres élus
représentant les districts électoraux et de quatre membres
nommés par le lieutenant-gouverneur en conseil.
Troisièmement, les administrateurs sont élus avant
l'assemblée générale annuelle des membres de l'ordre, par
une élection à être tenue par le ou les officiers aux
dates, pour les districts électoraux et les mandats n'excédant
pas quatre ans, selon le mode de scrutin et son dépouillement à
être fixé par règlement adopté à cet effet
par le conseil d'administration ou bureau de l'ordre.
Comme concordance à l'article 38 qui parle du quorum et qui fixe
aux réunions du conseil d'administration un quorum de quinze membres,
nous demandons que ce soit de la majorité des membres, vu la
réduction que nous venons de demander, pour faire concordance avec cette
réduction. Alors, le quorum serait donc de la majorité des
membres; il s'agirait d'amender l'article 38, paragraphe 1), qu'il soit
remplacé par: "Le quorum ou réunion du conseil d'administration
est de la majorité des membres et les décisions y sont prises
à la majorité des voix des membres présents, sauf
dispositions contraires dans la présente loi".
Quant au pouvoir du conseil d'administration où l'article 50 du
bill 253 aurait pour effet d'abroger l'article 99 de notre loi actuelle et de
le remplacer par un nouvel article qui donne des pouvoirs plus
généraux, nous préférerions que ce pouvoir de
l'article 99 actuel de la Loi du notariat soit conservé. Il est à
l'effet de donner à la Chambre ou à l'Ordre des notaires le droit
d'agir et d'intervenir dans toute procédure ou procès dans
lesquels l'intérêt général des membres ou
l'intérêt de la profession elle-même est concerné.
D'ailleurs, toutes les professions auraient intérêt à
obtenir ce pouvoir, parce qu'en parlant de l'intérêt
général des membres de la corporation ou de la profession ou de
l'intérêt de la profession elle-même, dans l'optique du bill
250 et selon les principes que le code des professions émet, il
s'agirait bien de l'application vis-à-vis de l'intérêt
public et non pas vis-à-vis de l'intérêt particulier des
membres de la profession. Et d'ailleurs, nous avons soumis un amendement, dans
notre mémoire, au bill 250 lui-même de façon à
incorporer ce pouvoir général dans le code des professions, et
à notre article actuel, notre article 99, si l'article 60 du bill 250
est amendé, nous nous dispenserons, évidemment, de ce pouvoir
spécial; si l'article 60 du bill 250 ne devait pas être
amendé, nous demanderions que le pouvoir actuel que nous avons comme
conseil d'administration pour représenter ou pour intervenir dans
certaines causes d'intérêt public soit maintenu.
Quant à l'article 55, le comité de direction, aussi pour
faire concordance avec la diminution des membres de notre conseil
d'administration, nous voudrions... A l'heure actuelle, l'article 55 du projet
de loi 253 modifie l'article 103 de notre loi organique et nous impose un
comité administratif formé de huit membres dont deux choisis par
le lieutenant-gouverneur en conseil parmi les membres qu'il a nommés au
bureau. Nous estimons qu'un comité de direction formé
de huit membres serait trop lourd, vu la diminution des membres du
conseil d'administration lui-même déjà mentionnée
tout à l'heure et nous voudrions que ce nombre soit ramené
à six, comme c'est le cas actuellement. Cette modification permettrait
deux changements; au paragraphe c), seulement un membre serait nommé par
le lieutenant-gouverneur en conseil au lieu de deux, et au paragraphe b) de
l'article 103, trois membres seraient mentionnés au lieu de quatre. La
composition, encore une fois, de ce comité exécutif répond
exactement à la norme préconisée pour les autres
professions à l'article 90 du bill 250.
Par conséquent, nous recommandons que l'article 55 du bill 253
soit remplacé par le suivant: L'article 103 de ladite loi est
modifié en remplaçant le paragraphe 1 par le suivant: "Le
comité de direction est formé de six membres, savoir: a) le
président et le vice-président de l'ordre; b) trois membres
choisis parmi les membres élus du conseil d'administration; c) un membre
choisi par le lieutenant-gouverneur en conseil parmi les membres qu'il a
nommés au conseil d'administration.
Finalement, en ce qui regarde les élections, la durée du
mandat et les autres stipulations de procédure que nous trouvons
à la section VI du bill 253, aux articles 26 à 32 qui
apporteraient des modifications mineures aux articles 75 à 81 de notre
loi organique particulière, nous n'en avons absolument rien contre ces
modifications. Mais nous voudrions que toutes les dispositionsprévues, savoir la date des élections, les districts
électoraux, leurs représentants, la durée du mandat, le
mode de scrutin, les officiers du scrutin et leurs fonctions soient
déterminés par règlements adoptés à cette
fin par le conseil d'administration. Cette forme de procédure nous
parait plus normale, elle assure une plus grande souplesse, comme nous l'avons
d'ailleurs déjà suggéré plus haut à propos
de l'article 25, ce qui nous permettrait de supprimer de notre loi actuelle
toutes ces dispositions qui la rendent beaucoup plus lourde et à toutes
fins pratiques presque impossible à amender.
Ces amendements sont suggérés aussi dans notre
mémoire, aux articles 62 à 72 du bill 250, de façon
à permettre que chaque corporation puisse adopter sa procédure
quitte à ce que les règlements en question, soient
approuvés par le lieutenant-gouverneur en conseil, en temps et lieu.
Nous recommandons donc que les articles 26 à 32 du projet de loi
253 soient abrogés purement et simplement, puisque le pouvoir d'amender
ces questions sera déjà prévu, au dernier alinéa de
l'article 25 remplaçant notre article 74 actuel, comme nous l'avons dit
à la page 43 de notre mémoire et pour fins de concordance, que
les articles 75 à 81 de notre loi actuelle soient abrogés et
reportés à nos règlements.
Il me reste une seule remarque, M. le président, avec votre
patience. Il s'agit de l'admission à l'exercice. Nous avons
récemment apporté des changements et les universités ont
apporté des changements. La quatrième année de droit,
comme vous le savez, confère maintenant un diplôme de droit
notarial. Nous soumettons que l'article 71 du bill 253 ne tient pas compte de
cette modification en ce qui a trait à l'admission à l'exercice.
En collaboration avec les facultés de droit, ce diplôme de droit
notarial qui vient couronner la quatrième année d'enseignement
universitaire devrait être mentionné à cette disposition.
C'est pourquoi nous recommandons que l'article 71 du bill 253 soit
modifié pour qu'il se lise comme suit: L'article 120 de ladite loi est
modifié en remplaçant les paragraphes c) et d) du premier
alinéa par le suivant: Paragraphe c) Etre détenteur des
diplômes donnant ouverture à une commission conformément
aux règlements adoptés en vertu du paragraphe d) de l'article 169
du code des professions et d'un diplôme d'entraînement
professionnel approuvé par le conseil d'administration; le
sous-paragraphe d) de l'article 71 serait alors abrogé puisqu'il n'y a
plus de certificat attestant que le candidat a suivi un cours de pratique
notariale.
Nos règlements concernant ces dispositions viennent d'ailleurs
d'être amendés, le 31 janvier dernier, et ont été
publiés dans la Gazette officielle no 16 du 22 avril 1972, avec les
dispositions transitoires nécessaires.
Merci, M. le Président et MM. les membres de la commission.
M. LABONTE: M. le Président, messieurs, nous vous invitons
maintenant, à votre tour, à nous poser des questions.
M. LE PRESIDENT: Merci beaucoup. Le Solliciteur
général.
M. FOURNIER: Je remercie la Chambre des notaires de son mémoire
et de sa présentation. Il apparaît clairement que ce
mémoire a été préparé dans un esprit de
collaboration que nous apprécions, lors de la préparation d'une
loi semblable. Le code des professions est une mesure législative assez
considérable et nous avons besoin de la coopération des
différents corps qui sont représentés.
J'aurais quelques questions à poser basées sur le
mémoire lui-même. A la page 13, relative; ment à la
composition de l'office, vous suggérez une liste pour le choix de
certains membres. Cette liste proviendrait du conseil interprofessionnel.
Pourriez-vous nous dire combien de membres, selon vous, cette liste devrait
comprendre pour fins de choix par le lieutenant-gouverneur?
M. LABONTE: Nous demandons que l'office soit composé de cinq
membres, trois nommés par l'Etat et deux à être
également nommés par l'Etat, à même une liste
produite par le conseil interprofessionnel. Je ne sais pas combien il y a
de professions au Québec, mais on pourrait produire une liste qui
correspondrait au nombre de corporations professionnelles.
M. FOURNIER: II y en aurait alors 34; en choisir deux sur 34...
M. LABONTE: Alors...
M. FOURNIER: ... est-ce que c'était l'esprit de votre
recommandation?
M.LABONTE: Non, pas nécessairement, mais de façon que le
choix, évidemment, soit valable. Si on vous présente une liste de
trois, ça ne donnera pas grand-chose.
M. TETRAULT: Nous avons supposé, en faisant cette recommandation,
que le conseil interprofessionnel était reformé selon les
suggestions que nous faisons à la page 15 de notre mémoire et
c'est à la suite de ces suggestions que nous formulons cette
recommandation.
M. FOURNIER: Si nous prenons les page 19 et 21, où vous parlez de
la formule de consultation relativement aux diplômes, en regardant
l'article 169 qui traite de ce sujet et en lisant le paragraphe e) qui
précise qu'il y aura des modalités établissant le dialogue
entre les corporations professionnelles et les universités pour fins de
programmes d'études, votre recommandation veut que ces modalités
de dialogue qui apparaissent à l'article e), c'est vous qui allez les
établir, est-ce que ce n'est pas un peu...?
M. LABONTE: Non, ce n'est pas nous. Nous demandons, au lieu d'avoir un
simple pouvoir de consultation, qu'on puisse recommander deux, trois, quatre ou
cinq projets et que ce ne soit pas simplement de la consultation. Nous sommes
plus en mesure, il me semble, que les facultés de droit ou les
fonctionnaires, pour déterminer les exigences et les besoins requis pour
assurer à la population des professionnels compétents.
Nous voudrions, dans un programme d'études universitaires,
pouvoir recommander des moyens et au moins, pouvoir choisir dans ces moyens, au
lieu d'avoir tout simplement un pouvoir de consultation.
M. FOURNIER: Est-ce que les universités ne demanderont pas le
même pouvoir et alors, tous les deux voudront avoir la recommandation
finale quant aux modalités? Est-ce que ce n'est pas un peu
contradictoire? Nous tentons d'établir un mode de dialogue entre
l'université et les corporations professionnelles et, accepter
d'emblée ce qui vient de la corporation professionnelle, il me semble
que ça déséquilibre un peu l'esprit de ce que nous
proposions à l'article 169.
M. LABONTE: Ce mode de dialogue existe déjà mais il n'est
pas établi ou reconnu dans les lois. Alors je crois que si les
corporations ont le droit de recommander, les facultés également
auraient le droit de recommander et le dialogue se poursuivrait avec des forces
égales.
M. FOURNIER: Je comprendrais la portée de votre article s'il
s'agissait simplement d'établir les diplômes quant au paragraphe
d). Mais quant au paragraphe e), il s'agit du programme d'études.
M. LABONTE: Oui, mais s'il arrive que la faculté de droit, avec
les projets dont on entend parler où elle deviendra la faculté
des sciences humaines et que dans un programme d'étude de droit, on
dise: Un bonhomme pourra faire des sciences politiques, pourra faire de la
sociologie, par contre, telle partie du code civil, ce n'est pas important;
telle autre partie du code pénal, ce n'est pas important, etc., nous
voudrions avoir, non seulement le droit de dire: Consultez-nous, voici ce qu'on
en pense, mais de dire: Ecoutez, messieurs, nous demandons que telle
matière soit enseignée.
M. TETRAULT: Nous avons déjà M. le ministre, ce
problème avec certaines facultés universitaires qui, à un
moment donné, modifient sans consultation avec la corporation
professionnelle leur programme scolaire et éliminent certaines
matières que nous jugeons absolument essentielles à l'admission
à l'exercice de la profession. C'est pour éviter justement ce
problème, qui n'est évidemment pas fait de mauvaise foi,
ça fait partie de tout un réaménagement scolaire, mais
nous avions le pouvoir de fixer certaines modalités ou certaines
règles qui puissent être suivies obligatoirement, nous
éviterions que certaines matières soient éliminées
du programme sans consultation.
M. FOURNIER: Merci. A la page 22, vous touchez à la question du
comité d'inspection professionnelle et vous ne semblez pas vouloir que
l'article 105 contienne un second paragraphe, c'est-à-dire: "A la
demande du bureau, il fait enquête sur la conduite et la
compétence professionnelles de tout membre de la corporation
indiqué par le bureau... fait rapport" et ensuite le dernier
paragraphe "le comité peut porter plainte contre un membre de la
corporation devant le comité de discipline." A la page 22, vous demandez
que le comité ait pour but la prévention et non pas la
répression.
Pourriez-vous nous dire de quelle façon vous fonctionnez dans ce
domaine, étant donné que vous prétendez avoir un
système qui est...
M. LABONTE: Dans notre optique, ça fait plus de cinquante ans que
nous avons un système d'inspection professionnelle qu'on appelle
l'inspection de nos greffes et, d'autre part, un comité ou des
commissions de discipline. Alors, l'inspection professionnelle a pour but
d'assurer que les notaires exercent conformé-
ment aux règlements et, justement, ce sont tout simplement des
mesures préventives.
Si, à l'occasion de ces inspections statutaires, les inspecteurs
se rendent compte d'irrégularités, à ce moment-là,
c'est immédiatement référé ou à la
commission disciplinaire ou au conseil d'administration qui prend les mesures
qui doivent être prises dans les circonstances.
Nous voulons scinder en deux: mesure préventive qui
relèvera de l'inspection et qui aboutira nécessairement, en cas
d'irrégularité, sur la discipline.
M. TETRAULT: M. le ministre, je souligne que notre mémoire doit
être lu à la lumière de la correction que nous avons faite
à la page 23. Nous nous excusons de cette correction mais elle a
été rendue nécessaire justement par les faits que vous a
soulignés, M. le Président, au début de
l'exposé.
M. FOURNIER: Je vous remercie. Fonds d'indemnisation, page 28:
Relativement à ce domaine, vous semblez vouloir que ce fonds
d'indemnisation ne serve que pour fins de défalcation, etc. et ne serve
pas pour fins d'action en dommages. Est-ce qu'il y a un fondement particulier
à cette demande?
M. LABONTE: Nous avons dit dans notre exposé tantôt que, si
le législateur veut que ce soit comme ça, il devra le dire et
prévoir certaines mesures en vertu desquelles les corporations devront
s'assurer. Mais à la Chambre des notaires, nous avons depuis plusieurs
années un fonds d'indemnisation dans les cas de malversation.
Maintenant, les cas d'erreurs et omissions, la population peut en être
victime mais il arrive très souvent que ce ne sont pas
nécessairement des cas d'incompétence. Nous n'avons pas de
contrôle. En d'autres mots, si un professionnel ou un notaire oublie
d'enregistrer un acte, ce n'est pas une question d'incompétence, c'est
une question tout simplement d'erreurs et omissions. C'est la même chose
pour un avocat qui oublie de signifier une procédure, etc.
Alors, imposer ça aux corporations nécessiterait qu'il y
ait de l'assurance, que ce risque soit couvert par de l'assurance, parce
qu'autrement aucun corps professionnel ne pourrait supporter de tels risques.
Je parle d'erreurs, je ne parle pas d'incompétence notoire.
M. FOURNIER: Dans la rédaction proposée du bill 250, une
ouverture est donnée pour un fonds d'indemnisation, sans
précision. Cette précision arrivera lorsque l'Office des
professions demandera la présentation d'un projet. Ne croyez-vous pas
que nous pourrions laisser, pour le moment, l'étendue qui apparaît
dans la loi, de façon que cela soit appliqué graduellement et
peut-être qu'avec le temps ou pour les fins de certaines professions,
cela serait une nécessité que d'avoir un fonds d'indemnisation
couvrant la section des dommages?
M. LABONTE: II m'apparaît assez dangereux qu'une
imprécision comme celle-là soit laissée dans le projet de
loi et soit laissée à la discrétion d'un organisme qui
s'appellera l'Office des professions. J'aimerais beaucoup mieux que cela soit
explicitement prévu dans le texte de loi.
M. FOURNIER: Merci.
M. TETRAULT: Nous suggérerions, M. le ministre, une
définition nous n'avons pas cru bon de l'introduire dans notre
mémoire qui pourrait se lire un peu comme suit: "Un fonds qui a
pour objet de rembourser tout ou partie des biens, deniers ou valeurs qu'un
tiers de bonne foi pourrait perdre du fait d'un professionnel qui
s'approprierait, pour des fins personnelles ou pour d'autres fins que celles
indiquées par son client, tout bien, valeur ou denier à lui
confiés en fidéicommis dans l'exercice de ses fonctions." Il y a
plusieurs professions dont les membres ne reçoivent pas de fonds de
leurs clients et, à ce moment-là, la définition ne
s'appliquerait tout simplement pas.
M. FOURNIER: A la page 43, vous faites référence au quorum
et suite aux remarques que vous avez faites vous-même qui s'appliquent
à la composition du bureau de la corporation, du comité
administratif et du quorum, je dois dire que la rédaction de votre loi
s'est faite alors que vous aviez 42 membres...
M. TETRAULT: Exact.
M. FOURNIER: ... au conseil général et c'est pourquoi les
proportions ont été établies dans cet ordre. Je crois bien
que, comme vous demandez de diminuer votre conseil à 25 membres, nous
pourrions établir la même règle que les autres
corporations, soit quatre membres nommés par l'Etat. Quant au quorum,
cela tomberait à la majorité; le nombre de quinze membres
était basé encore sur le fait. Vous réduisez le
comité administratif à combien de membres?
M. TETRAULT: A six membres, M. le ministre.
M. FOURNIER: A six membres. Et la règle établie dans la
loi est de...
M. TETRAULT: Six membres.
M. FOURNIER: ... quatre membres plus un.
M. TETRAULT: La norme préconisée à l'article 90 du
bill 250 est: "trois membres de ce comité sont les administrateurs
élus désignés par vote annuel des membres élus du
Bureau, l'autre membre de ce comité est désigné par le
lieutenant-gouverneur en conseil parmi les administrateurs". Et le
président et le vice-président...
M. FOURNIER: II n'y a pas de vice-président. Ce que vous proposez
n'est pas tout à fait identique à l'article 90.
M. TETRAULT: Pas tout à fait?
M. FOURNIER: Non.
M. TETRAULT: A moins que...
M. FOURNIER: Vous auriez cinq membres et il y en aurait un nommé
par l'Etat, et dans la loi, c'est quatre et un.
M. TETRAULT: C'est cela.
M. FOURNIER: Est-ce que...
M. TETRAULT: Nous en aurions cinq.
M. FOURNIER: Vous en voudriez six?
M. TETRAULT: C'est parce que notre vice-président a toujours
été, traditionnellement, membre du conseil exécutif et
à ce moment-là, nous aurions tenu, si possible, à avoir
nos six membres, comme c'est le cas actuellement.
M. FOURNIER: Merci. A la page 45, vous parlez d'un diplôme de
droit notarial et vous en avez parlé tantôt. Est-ce que ce
diplôme est décerné par l'université ou par la
Chambre?
M. TETRAULT: II est décerné par l'université
à la fin de la quatrième année d'études
universitaires que nous appelons l'année d'en-trainement
professionnel.
M. FOURNIER: L'année d'entraînement professionnel,
contrairement au Barreau, se fait à l'université?
M. TETRAULT: Elle se fait à l'université. M. FOURNIER: Ah
bon!
M. TETRAULT: Et à la fin de cette quatrième année,
le diplôme de droit notarial vient remplacer, à toutes fins
pratiques, le certificat d'études qui était prévu
précédemment pour les étudiants de quatrième
année.
M. FOURNIER: Et à la suite de...
M. TETRAULT: D'ailleurs, nous prévoyons, M. le ministre, laisser
tomber l'examen, du moment que la transition sera terminée.
Nous avons dans nos règlements qui ont été
publiés dans la Gazette officielle du 22 avril dernier une disposition
transitoire qui indique que l'examen d'admission à l'exercice sera
automatiquement éliminé aussitôt que nos étudiants
auront terminé leur stage de formation.
M. FOURNIER: C'est dans le sens que se dirige le gouvernement pour
éviter le dédoublement de diplômes.
M. TETRAULT: C'est exact!
M. FOURNIER: A la page 50, je comprends que vous avez apporté des
modifications, mais pourriez-vous nous dire en quoi le rôle de votre
syndic diffère?
M.LABONTE: D'abord, nous ne l'appellerons pas syndic, il va agir
strictement au niveau de l'enquête préliminaire. Actuellement, un
client appelle à la Chambre des notaires et il se plaint d'un notaire.
Alors, il faut qu'il y ait un officier qui prenne ça en main et fasse
enquête pour connaître exactement quelle est la situation. Suite
à cette enquête, s'il y a lieu de porter plainte, à ce
moment-là le tout sera référé au syndic
prévu au code des professions. Parce que les appels
téléphoniques ou les lettres vont continuer à arriver
à la Chambre des notaires, il faudra quand même avoir des
employés qui vont s'occuper de faire les enquêtes
préliminaires pour étudier les plaintes faites par les clients.
Si la plainte est fondée, on réfère le tout au syndic
prévu par le code des professions.
M. TETRAULT: II y a, M. le ministre, une partie que l'on peut appeler
"cuisine" de l'affaire, c'est-à-dire le déblayage des faits.
Selon l'expérience vécue à la Chambre des notaires comme
au Barreau j'imagine que, comme dans les autres professions, une
quantité énorme de soi-disant plaintes seraient plutôt des
complaintes, ne sont pas fondées et n'ont absolument rien pour les
soutenir. Si tout était automatiquement référé au
syndic nommé par le lieutenant-gouverneur en conseil, ce dernier
hériterait d'une situation pratiquement impossible à
démêler puisqu'il n'a pas, à l'intérieur même
de la profession, l'expérience que peuvent avoir nos officiers actuels
pour voir ce qui, en réalité, est fondé ou a des chances
d'être fondé. Du moment que ce déblayage des faits a
été accompli par cet officier, si la plainte a des fondements ou
si elle est susceptible d'en avoir, il reste que la procédure
prévue au code des professions peut s'appliquer intégralement,
c'est-à-dire que ce qui n'entre pas à la professions
elle-même peut être immédiatement
référé au syndic parce que la procédure du code des
professions réfère la plainte assermentée directement au
syndic nommé par le lieutenant-gouverneur en conseil.
Nous ne voulons pas faire d'intermédiaire là-dedans. Ce
n'est pas du tout notre intention. Nous voulons seulement que les fonctions
exercées actuellement par ceux de nos officiers permanents qui
répondent aux appels téléphoniques, qui répondent
aux lettres des clients se continuent. Ces fonctions sont nécessaires.
Les officiers qui les exercent ont la compétence voulue pour les
exercer. Si ces officiers deve-
naient du jour au lendemain les syndics nommés par le
lieutenant-gouverneur en conseil, nous devrions nommer d'autres officiers pour
faire le même travail. C'est ce dédoublement ou ce problème
que nous voudrions éviter en suggérant cet amendement à
l'article 108.
Sur les feuilles que nous vous avons remises, il y a justement des
modifications pour rendre notre texte plus clair, nos recommandations
d'amendements plus claires. Nous avons fait distribuer deux feuilles, les pages
50 et 51 qui expliquent mieux ce que nous voulons réellement par cet
amendement.
M. FOURNIER: Merci.
M. LE PRESIDENT: Le député de Montmagny.
M. CLOUTIER (Montmagny): M. le Président, d'abord, je voudrais
noter deux choses: la ténacité de la Chambre des notaires, c'est
la quatrième fois qu'ils essaient de se présenter devant la
commission et pour toutes sortes de raisons les trois premières fois il
y a eu empêchement. Il y a aussi la qualité de leur
mémoire, l'aspect positif qu'ils ont voulu faire ressortir. C'est
évident quand on a constaté avec quel intérêt les
membres éminents du Barreau ont écouté la
représentation de la Chambre des notaires, vous, M. le Président,
le ministre, le député de Maisonneuve que l'on dit l'avocat des
causes désespérées, mais ça, ce n'est pas vrai, ce
n'est pas fin...
M. BURNS: On s'y fait...
M. CLOUTIER (Montmagny): Alors, M. le Président, j'aurais
quelques questions à poser aux notaires. Ils ont insisté sur
l'importance d'accorder des pouvoirs accrus au conseil interprofessionnel
qu'ils ont souhaité voir reconnu par la législation.
Ils ont également fait ressortir l'importance d'avoir une
pondération entre le gouvernement et l'Office des professions, ce
mécanisme du conseil interprofessionnel pourrait servir de
modérateur. Plusieurs organismes ont demandé devant la commission
que l'Office des professions ait davantage de pouvoirs. Est-ce que c'est pour
prévenir ça, ces pouvoirs très étendus qu'aura
l'Office des professions? Je pense que tous les organismes qui sont venus
devant la commission ont plaidé l'importance que l'Office des
professions assume des responsabilités au lieu du gouvernement, qu'il y
ait une délégation de pouvoirs. Je voudrais peut-être que
vous ajoutiez quelque chose sur l'importance que vous voyez pour le conseil
professionnel de servir de modérateur à certains moments.
M. LABONTE: C'est seulement par la suite, une fois que notre
mémoire a été rédigé, que nous avons pris
connaissance des autres mémoires que nous avons pu constater que, dans
certains mémoires, on réclamait des pouvoirs accrus envers
l'office. Lorsque nous avons rédigé notre mémoire, nous ne
le savions pas. Si l'office il est évident
représente le gouvernement, il serait normal, nous semble-t-il, que le
conseil interprofessionnel, qui a des liens déjà nombreux avec
les différentes corporations parce qu'il existe depuis plusieurs
années, puisse devenir un interlocuteur valable auprès de l'Etat
pour faire contrepoids aux pouvoirs de l'office. Une corporation, par exemple,
à la suite d'une enquête ou d'une recommandation de l'Office des
professions pourrait, si elle le juge à propos, et si
l'intérêt des autres corporations est concerné, demander,
au nom de toutes les corporations, au conseil interprofessionnel d'intervenir.
Dans le projet de loi actuel, le conseil interprofessionnel n'a à peu
près pas de pouvoirs. D nous semble qu'il serait normal qu'il y ait un
contrepoids et que ce conseil puisse représenter les corporations
professionnelles à l'encontre de décisions ou à l'encontre
d'enquêtes de l'Office des professions.
M. CLOUTIER (Montmagny): Sur un autre sujet, notaire, d'autres
professions vous touchent de près dans leur exercice, notamment, la
profession d'avocat, les comptables aussi. A certains moments, vous vous
rencontrez dans le champ d'exercice. Est-ce que vous pensez que les
définitions des champs d'exercice de professions ou certaines
réclamations, certaines représentations qu'ont faites devant la
commission d'autres professions qui vous touchent à un moment
donné sont acceptables, ou si cela pourrait réduire
considérablement le champ d'exercice de votre profession?
M. LABONTE: Voici, messieurs de la commission. Nous avions songé,
dans notre mémoire, à aborder ce problème épineux
des champs d'activité, entre autres et particulièrement les deux
professions juridiques. Il y a, chacun le sait, une matière grise
très vaste où les deux professionnels peuvent agir. Nous n'avons
pas cru bon, pour le moment, d'aborder cette question, mais je crois qu'un jour
ou l'autre on devra s'y mettre et on devra une fois pour toutes
délimiter les champs de juridiction entre les deux professions
juridiques, entre les professions juridiques et les comptables s'il y a lieu.
Très souvent, la société ne sait pas trop où se
jeter. Est-ce qu'elle va consulter le comptable, l'avocat ou le notaire? Il
faut bien dire que l'entraînement professionnel est tout à fait
différent. Nous avons un entraînement professionnel universitaire
maintenant reconnu par un diplôme qui forme spécialement le
notaire pour faire certaines choses, par exemple, l'examen de titres, droit
corporatifs, etc. Par contre, le Barreau a également un
entraînement professionnel très spécifique et plus
particulièrement à l'endroit de la procédure contentieuse.
Mais, dès le départ, un avocat ou un notaire peut, du jour au
lendemain, procéder à l'examen des
titres, peu importe l'entraînement professionnel plus particulier
que l'un a pu obtenir et que l'autre n'a pas pu avoir.
Je pense qu'un jour ou l'autre il faudra régler cette question,
dans le meilleur intérêt de la population.
M. TETRAULT: D'ailleurs, M. le Président, si on prend au pied de
la lettre l'article 22 du projet de code des professions, ni l'une ni l'autre
des deux professions juridiques ne pourrait continuer à s'exercer selon
les prérogatives actuelles, si on tient compte de nos compétences
respectives et de notre formation professionnelle respective. Cet article,
évidemment, nous avions pensé pouvoir vous suggérer de le
clarifier, nous y avons finalement renoncé en vous laissant le soin et
la responsabilité de le faire.
Il faudra nécessairement, comme l'a dit mon collègue,
qu'un jour ou l'autre ce problème soit tranché par quelqu'un.
M. CLOUTIER (Montmagny): De toute façon, il est ressorti
nettement devant la commission que la définition du champ d'exercice des
professions était effectivement un des éléments
délicats et difficiles de cette législation. Je pense bien que
vous avez raison quand vous dites que le législateur devra pousser un
peu plus loin son étude et peut-être que c'est l'occasion de le
faire. Les deux professions juridiques, particulièrement, ont
suffisamment de jurisprudence et d'années d'existence, vous l'avez dit
tantôt, vous êtes la plus ancienne corporation professionnelle,
pour qu'à un moment donné il faille pousser un peu plus loin la
précision et la délimitation. Je comprends aussi qu'il faut avoir
à l'idée l'aspect de service au public et, à ce point de
vue-là, je pense que votre profession est suffisamment
décentralisée dans toutes les régions du Québec.
C'est une profession qui est véritablement décentralisée.
Il y a à ce point de vue l'accessibilité du public aux services
professionnels. Je ne veux pas dire que les autres professions ne l'ont pas
mais les professions juridiques, de façon générale, se
sont décentralisées.
Il y a un autre point sur lequel je voudrais poser une question. On a
parlé tantôt des diplômes et des programmes d'étude.
Est-ce que, sans faire allusion à une corporation professionnelle en
particulier, vous croyez que le public n'a pas eu raison, à un certain
moment, de s'inquiéter ou de se poser la question suivante: Est-ce que
les corporations professionnelles ne sont pas trop fermées? Est-ce que
l'admission aux corporations professionnelles n'est pas trop exigeante? Est-ce
qu'on n'influence pas un peu aussi la remise des diplômes, tenant compte,
évidemment, des exigences de la profession? On a fait souvent ce
reproche-là. Est-ce qu'il ne faudrait pas, maintenant, par le projet de
loi 250 et les lois spécifiques, essayer d'atténuer un peu cette
critique que le public a pu faire à un certain moment et ne laisser
aucun soupçon là-dessus?
M. LABONTE: II est possible que la population ait pu avoir des
soupçons là-dessus, je ne sais pas jusqu'à quel point ils
peuvent être fondés ou pas mais, chose certaine, en ce qui nous
concerne, à la Chambre des notaires, nous avons déjà fait
un très grand pas dans ce sens-là. Dès cette année,
à cause du diplôme en droit notarial, pour les étudiants
qui ont suivi les cours, il y a 50 p.c. des résultats d'examens à
l'université qui vont compter pour l'admission à l'exercice et
les autres 50 p.c. pour l'examen de la Chambre des notaires. Dès l'an
prochain, nous entendons supprimer complètement notre propre examen, de
sorte que c'est le diplôme en droit notarial qui permettra l'admission
à l'exercice. Alors, à ce moment-là on ne pourra pas dire
ou on ne pourra jamais prétendre que, chez nous en tout cas, il y a des
obstructions quelconques. Maintenant, si nous demandons justement le pouvoir de
recommander ou avoir des pouvoirs de recommandation au niveau des
diplômes requis, c'est surtout au niveau de l'élaboration des
programmes. Puisqu'à l'avenir c'est l'examen d'université qui
permettra au candidat de devenir notaire, il est normal qu'on puisse surveiller
de près les matières enseignées pour s'assurer qu'on
donnera à la société un professionnel
compétent.
M. CLOUTIER (Montmagny): Une dernière question, M. le
Président, on sait que la Chambre des notaires a un service d'inspection
professionnel qui est à point. Je dirais qu'il a été
très élaboré avec les années et on sait pourquoi:
les membres de la profession se voient confier des fonds extrêmement
importants et ne serait-ce que pour cet aspect spécifique qui
relève de la profession, est-ce que vous diriez que le
législateur y gagnerait à retenir sensiblement vos
mécanismes et vos traditions dans le domaine de l'inspection
professionnelle même si vous avez proposé, au cas où, des
substitutions?
M. TETRAULT: C'est-à-dire, M. le député, que nous
sommes conscients de la valeur de notre système d'inspection actuel.
Nous avons cru que le principe édicté par le code des professions
y ajoutait une dimension que nous n'avons pas à l'heure actuelle, soit
celle qui peut permettre au nouveau comité de discipline institué
en vertu du code des professions, et c'est le deuxième paragraphe de
l'article 105, de faire enquête sur la conduite et la compétence
professionnelles de tout membre de la corporation indiqué par le
bureau.
Selon notre système actuel, que nous considérons assez
perfectionné dans les circonstances, nous ne faisons pas d'enquête
sur la compétence de nos membres. Nous pouvons relever peut-être,
à certains moments, dans la
tenue d'une étude ou dans l'administration d'une étude,
à travers nos règlements actuels, un certain degré de
négligence, si vous voulez. Quant à la compétence
elle-même, c'est-à-dire quant au niveau de compétence
juridique de notre professionnel sujet à inspection, selon notre forme
d'inspection actuelle, nous n'avons rien qui nous permette de le
contrôler ou du moins de faire enquête sur ce niveau de
compétence. Nous croyons que, malgré que notre système
actuel soit suffisamment perfectionné pour protéger le public,
nous sommes en mesure d'y ajouter cet élément de surveillance de
la compétence professionnelle, avec les différentes
modalités et sanctions qui sont prévues aux articles suivants,
comme le stage de perfectionnement, etc. Cela nous ajoutera, comme je vous le
dis, une dimension qui nous permettra d'améliorer cette inspection
professionnelle, tout en conservant ce que nous avions traditionnellement au
niveau de l'application de la loi et des règlements chez nous.
M. CLOUTIER (Montmagny): Merci.
M. LE PRESIDENT: Le député de Dorchester.
M. GUAY: M. le Président, quelques questions assez brèves.
D y a une chose qui m'a fasciné et je me suis toujours posé la
question suivante: Est-ce que tous les notaires sont obligés de faire
partie de la Chambre des notaires?
M. LABONTE: Les notaires actuellement sont connus sous le nom de l'ordre
des notaires et ceci groupe tous les 1300 notaires de la province. Cet ordre
des notaires est régi actuellement par une corporation qui s'appelle la
Chambre des notaires, qui est composée encore actuellement par 42
membres mais qui sera, dès le 11 mai prochain, composée de 25
membres. A l'avenir, avec le code des professions, vous n'aurez que la
corporation professionnelle des notaires ou l'ordre des notaires.
M. GUAY: Dans nos régions, disons qu'on a peut-être un peu
moins de notaires qu'à Québec ou à Montréal ou
ailleurs, est-ce qu'il y a suffisamment de notaires actuellement pour
répondre aux besoins de la population?
M. LABONTE: II semble oui que nous ayons des notaires dans
tous les coins de la province. Mme Gaudet-Tremblay pourrait
répondre.
MME GAUDET-TREMBLAY : Cela dépend si vous parlez d'une situation
idéale ou de la réalité concrète actuellement. Nous
n'avons pas les statistiques que nous avons pu compiler, à la suite
d'une enquête que nous avons faite en 1970. Il y a 45 p.c. de notaires
qui exercent leur profession dans les régions urbaines, 33.5 p.c. qui
l'exercent dans les milieux semi-urbains et 22 p.c. qui l'exercent dans les
milieux ruraux. Il semble que ce ne soit peut-être pas suffisant, si on
tient compte de la distribution démographique actuelle, dans l'ensemble
de la province, où vous avez 25 p.c. à 30 p.c. de population
rurale. C'est plus ou moins accentué suivant les régions, bien
sûr. Il y a des régions qui ont de la difficulté à
avoir des notaires, les régions éloignées, la
Côte-Nord, la Gaspésie, l'Abitibi. On ne peut pas dire qu'il y a
un manque criant, mais il y a des endroits où il n'y a qu'un notaire
dans une ville de 10,000 ou 15,000 de population, alors qu'il devrait y en
avoir deux ou trois. Il semble que les jeunes qui viennent d'être
reçus sont beaucoup plus portés à s'établir dans
les grandes villes, ça représente un gros sacrifice pour eux de
s'en aller dans des régions éloignées. Nous n'imposons pas
de contingentement dans les diverses régions comme cela se fait en
France et en Belgique et dans plusieurs pays européens. Là-bas,
c'est très clairement délimité, il y a tant de notaires
par territoire et la juridiction est exclusive. Chez nous, la Chambre des
notaires n'a pas le pouvoir d'imposer à quelqu'un de s'en aller dans
telle région où il n'y a pas de notaire, c'est laissé
absolument libre.
M. GUAY: Si je posais cette question, c'est parce que des gens viennent
à nos bureaux et nous disent: Tout est rendu chez le notaire, ça
fait un mois, ça fait deux mois, ça fait trois mois, six mois ou
même un an, dans certains cas. Peut-être qu'il est
débordé de travail. Vous me rassurez en quelque sorte par votre
réponse.
Dernière question. En ce qui concerne la qualification
professionnelle, est-ce que les mêmes exigences sont requises pour un
notaire, par exemple, qui exerce une profession à l'extérieur de
la province, soit l'Ontario ou ailleurs, que ce que l'on exige dans la province
de Québec?
M. LABONTE: Dans les autres provinces du Canada ou aux Etats-Unis, il
n'existe pas de notaires. Ce qui existe, c'est un "notary public", qui est tout
simplement un commissaire â l'assermentation et qui ne possède
absolument aucun diplôme universitaire en droit, alors que les notaires
du Québec détiennent une licence en droit au même titre que
les avocats.
M. GUAY: Cela voudrait dire que la province est à l'avant-garde,
si on parle des notaires. Merci.
M. LABONTE: Elle est francophone.
M. LE PRESIDENT: Merci, au nom de la commission, je veux... Vous avez
une question? Le député de l'Assomption.
M. PERREAULT: D'autres groupes sont venus devant nous. Vous avez
mentionné tout à
l'heure que vous désiriez être consultés sur les
programmes de l'université. Il y a d'autres groupes qui sont venus
devant nous et ont suggéré d'être partie officielle avec
l'université pour établir les programmes, que la consultation,
c'était lourd et qu'il serait préférable que votre ordre
ait directement des représentants à la faculté. Que
pensez-vous de ça?
M. LABONTE: Actuellement, il existe la Conférence des doyens de
la faculté de droit où sont présents le Barreau, la
Chambre des notaires et les doyens de la faculté de droit, mais ce n'est
pas institutionnalisé, c'est tout simplement volontaire. Je pense que,
si le projet de loi le précise, ça va devenir une institution qui
sera évidemment très valable, tant pour les professions que pour
le public.
M. PERREAULT: Cela réglerait plusieurs problèmes si vous
étiez présents au niveau de l'élaboration des programmes
à la faculté.
M. LABONTE: Absolument.
M. LE PRESIDENT: Est-ce qu'il y a d'autres questions? Au nom de la
commission, je veux remercier la Chambre des notaires pour son exposé
très intéressant.
M. LABONTE: Merci, M. le Président.
M. LE PRESIDENT: Est-ce que la Guilde des comptables industriels,
commerciaux et institutionnels est arrivée? On passe à la
Corporation des bibliothécaires professionnels du Québec, Mme
Miriam Tees, présidente, et Me Lesage.
Corporation des bibliothécaires professionnels
du Québec
MME TEES: M. le Président, MM. les membres de la commission
parlementaire, mesdames et messieurs, il me fait plaisir de vous
présenter la délégation de la Corporation des
bibliothécaires professionnels du Québec: M. Michel
Thériault, premier vice-président; M. Pierre Matte,
président du comité qui a préparé le projet du code
de déontologie, M. Paul Desrochers, membre fondateur de la
corporation.
Vous savez que c'est une corporation assez nouvelle, les membres
fondateurs sont très importants pour nous. Me Robert Lesage est notre
avocat. Me Lesage va vous présenter notre cas.
M. LESAGE: M. le Président, la Corporation des
bibliothécaires professionnels du Québec a été
constituée par une loi adoptée en 1969; c'est le chapitre 105 des
statuts du Québec, 1969. On ne peut pas mettre en doute qu'il s'agisse
d'une corporation professionnelle. En effet, on peut lire au préambule
de cette loi, si vous me permettez, qu'il s'agissait de la branche canadienne
et de l'Association des bibliothécaires du Québec, que ces deux
corporations ont délégué des pétitionnaires aux
fins de demander à la Législature l'adoption d'une loi
constituant une corporation groupant les bibliothécaires professionnels
et disposant des pouvoirs nécessaires pour sauvegarder les
intérêts professionnels de ses membres, assurer la protection du
public et réglementer l'usage du titre de bibliothécaire
professionnel. On peut aussi y lire que la profession de bibliothécaire
est reconnue universellement et qu'elle est nécessaire au maintien et
à l'avancement des bibliothèques au Québec.
On y lit encore qu'une même organisation professionnelle
adéquate, réunissant tous les bibliothécaires
professionnels et exerçant une certaine surveillance sur la
compétence de ses membres et leur activité professionnelle, est
nécessaire. Et ceci, c'est dans le préambule de la loi
adoptée par l'Assemblée nationale et sanctionnée le 30 mai
1969.
En vertu de cette loi, le conseil d'administration de la Corporation des
bibliothécaires professionnels a des pouvoirs très larges
concernant l'activité professionnelle de ses membres et, en particulier,
si vous me permettez encore de citer l'article 7: "...a le pouvoir, par
règlement, de régir l'admission, la suspension, l'expulsion, la
classification et la discipline des membres de la corporation, les droits
d'admission et les cotisations exigibles des membres". Et je le dis tout de
suite, ces pouvoirs sont sujets à la ratification du
lieutenant-gouverneur en conseil puisque les règlements qui sont
adoptés pour régir l'admission des membres et les cotisations, la
suspension d'émission, doivent être soumis à l'approbation
du lieutenant-gouverneur en conseil.
Le conseil a aussi des pouvoirs pour réglementer l'organisation,
la délimitation, la gestion de sections, l'établissement de
comités et l'administration générale de ses affaires. Le
conseil a aussi le pouvoir de faire des règlements pour
décréter des équivalences de diplômes,
équivalences avec le diplôme conféré par
l'Université de Montréal ou l'université McGill qui
donnent la qualification de base pour devenir un bibliothécaire
professionnel. Et, encore ici, ce règlement décrétant une
équivalence de diplôme doit être soumis à
l'approbation du lieutenant-gouverneur en conseil.
On voit donc que, sous certains rapports, les pouvoirs de cette
corporation professionnelle sont sensiblement les mêmes que ceux qu'on
conférera par le bill 250 à la grande majorité des
corporations professionnelles. Pour être un bibliothécaire
professionnel, pour être membre de la corporation, le candidat doit
détenir un baccalauréat, une maîtrise ou un doctorat en
bibliothéconomie de l'Université de Montréal ou de
l'université McGill ou un diplôme équivalent, comme je
viens de le mentionner, ceci en vertu de l'article 8 de la Loi constituant la
corporation des bibliothécaires professionnels.
C'est donc dire que les membres de cette corporation, les
bibliothécaires professionnels, ont une formation universitaire. Depuis
sa constitution, la Corporation des bibliothécaires professionnels du
Québec a admis 786 membres qui ont droit, en vertu de l'article 13 de
cette loi, à l'exclusivité du titre de bibliothécaire
professionnel. C'est donc dire que la Corporation des bibliothécaires
professionnels se classerait, suivant la nomenclature utilisée dans le
bill 250, comme une corporation constituée pour l'exercice d'une
profession à titre réservé. La loi réserve à
ses membres l'exclusivité du titre de bibliothécaire
professionnel.
Cependant, les bibliothécaires professionnels ont constaté
avec inquiétude et un certain étonnement il faut l'avouer
qu'ils n'étaient pas mentionnés dans l'annexe 1 du bill
250. Ils ne sont pas couverts par le bill 250. Ils vous ont soumis un
mémoire qui s'appuie sur les critères énoncés
à l'article 21 du bill 250 et qui a pour but d'établir que la
profession de bibliothécaire professionnel répond aux exigences
de base qui sont énoncées à cet article 21 pour
déterminer si une corporation professionnelle doit ou non être
constituée.
Je vous soumets que la question ne se pose même pas dans leur cas,
puisque la Législature s'est déjà prononcée, que la
Loi créant la corporation des bibliothécaires professionnels
existe et qu'ils sont déjà reconnus par une loi comme une
corporation professionnelle.
A la lecture du bill 250, la Corporation des bibliothécaires
professionnels a cru que sa charte disparaissait, tout simplement.
Après une étude de la question, nous avons constaté
que le Code des professions ne s'applique pas à toutes les corporations
professionnelles. En effet, on découvre qu'il y a, en quelque sorte,
quatre catégories de corporations professionnelles qui se trouvent
à être établies par le nouveau bill ou qui résultent
de la rédaction du bill 250.
D'abord, vous avez les professions organisées et d'exercice
exclusif. Nous les trouvons en toutes lettres dans le bill 250. Nous
découvrons qu'il y en a une, au moins, qui est une corporation
organisée et qui a pour ses membres l'exercice exclusif de
l'activité professionnelle, c'est l'Association des courtiers
d'assurance de la province de Québec qui n'est pas incluse dans le bill
250. Nous découvrons aussi qu'il existe une autre catégorie de
professions organisées dans une corporation et qui sont les corporations
à titre réservé. Il y en a un grand nombre
d'énumérées dans le bill 250. Nous en découvrons
une qui n'est pas dans le bill 250 j'en ai trouvé seulement une,
il y en a peut-être d'autres qui est la Société des
décorateurs ensembliers du Québec, constituée par le
chapitre 270.
Evidemment, nous avons découvert aussi qu'il existe des
activités professionnelles qui ne sont pas contrôlées
à l'intérieur d'une corporation mais qui sont régies par
l'émission de permis qu'on appelle le "licency" délivré
par l'autorité publique. Là, on peut identifier les courtiers en
immeubles et les agents de réclamation. Alors, cela est la
troisième catégorie d'activités professionnelles qui est
régie d'une façon différente en dehors du bill 250.
Enfin, il y a les activités professionnelles qui ne sont pas
régies, qui ne sont astreintes à aucune restriction, dont les
membres ne bénéficient d'aucune protection et n'ont aucune
obligation envers le public, ainsi en va-t-il des actuaires, des
économistes et des interprètes. Nous pouvons en nommer d'autres.
Certains groupes, d'ailleurs, demandent d'être reconnus comme
professionnels et être sujets à la juridiction de la nouvelle loi.
Mais après avoir fait cette étude et constaté que le
nouveau système n'incluait pas toute l'activité professionnelle
et, nous sentant aussi en bonne compagnie, les bibliothécaires
professionnels se sont quelque peu rassurés mais ne cessent quand
même pas d'être inquiets de leur sort, de leur statut
professionnel.
La Corporation des bibliothécaires professionnels serait
satisfaite c'est ce que je viens vous dire ce matin de conserver
sa loi constituante pourvu que le statut professionnel de ses membres ne soit
pas mis en doute. Je me propose de faire des remarques sur deux points
seulement: l'article 28 du code des professions et la participation
éventuelle de la corporation au conseil interprofessionnel.
L'article 28 du bill 250 est celui qui se rapporte à la
désignation des corporations professionnelles. Il se lit comme suit:
"Seules les corporations auxquelles s'applique le présent code peuvent
utiliser l'expression "corporation professionnelle", une autre expression
comprenant ces deux termes ou une expression donnant lieu de croire qu'il
s'agit d'une corporation régie par le présent code." A
première lecture, il semble bien que toutes les corporations dites
professionnelles devraient être régies par le code. En lisant
l'article 28, c'est le sentiment qui se dégage. Et c'est d'ailleurs la
raison de l'inquiétude de la Corporation des bibliothécaires
professionnels. Nous nous rendons compte, par contre, qu'il n'est pas exact que
toutes les corporations professionnelles soient régies par le code.
Alors, nous pouvons nous demander et je vous soumets que la question est
sérieuse: Est-il sage d'empêcher une corporation professionnelle
qui n'est pas régie par le code de se désigner comme telle? Je
peux aller plus loin. Est-ce que l'article 28 ajoute quelque chose? Est-ce
qu'il a une utilité quelconque? Il est facile pour quelqu'un qui veut
vérifier s'il s'agit d'une profession visée par le code, de lire
l'annexe 1. Est-ce que l'article 28, qui nous crée des problèmes,
ajoute quelque chose?
Nous vous demandons qu'une exception soit établie à
l'article 28 pour couvrir les corporations professionnelles constituées
par une autre loi que le bill 250 et, en somme, étendre la
définition de corporation qu'on trouve à l'article 1 a),
au paragraphe a) de l'article 1. Il faudrait que l'article 28 puisse au moins
couvrir toutes les corporations professionnelles que la Législature a
reconnues. Et une telle réserve s'impose davantage dans le cas de la
Corporation des bibliothécaires professionnels vu l'emploi des termes
"corporation" et "professionnel" dans son nom, la Corporation des
bibliothécaires professionnels. L'article 28 dit qu'on ne peut pas
employer dans la désignation de la corporation une expression comprenant
ces deux termes, les termes "corporation" et "professionnel". Ici, c'est
"bibliothécaires professionnels". Strictement parlant, il n'y aurait pas
interdiction à ce qu'on continue à s'appeler la Corporation des
bibliothécaires professionnels, mais il reste quand même qu'il y a
ambiguïté et une ambiguïté que nous serions très
heureux de voir se dissiper. Alors nous suggérons d'ajouter à la
fin de l'article 28 une disposition qui pourrait se lire comme ceci: Cet
article ne s'applique pas à la Corporation des bibliothécaires
professionnels du Québec. Et si vos légistes ne semblent pas
favorables à pareille inclusion, on pourrait au moins biffer de
l'article 28 les mots "une autre expression comprenant ces deux termes". A ce
moment-là, nous, on se sentirait au moins couverts et non pas exclus.
Alors, voilà pour le premier point que je voulais vous mentionner.
Le deuxième, c'est le conseil interprofessionnel. Nous soumettons
que la Corporation des bibliothécaires professionnels devrait avoir
droit de faire partie du conseil interprofessionnel, même si
présentement elle n'en est pas membre. En institutionnalisant le Conseil
interprofessionnel par le code des professions, on lui donne une mission: celle
de représenter l'opinion générale des professionnels.
Incidemment, il est vrai, comme on l'a souligné, que ce sont les
représentants des corporations qui sont membres du conseil et non pas
les corporations elles-mêmes. D'autre part, ce sont les corporations qui
désignent les représentants et, à mon sens, il ne
paraît pas utile de discuter si les membres doivent représenter
l'opinion de la corporation ou s'ils représentent leur propre opinion. A
mon humble avis, ils représentent l'opinion de la corporation même
s'ils n'ont pas besoin d'une résolution à chaque fois pour
appuyer ce qu'eux s'engagent à faire, pour appuyer leurs
décisions au Conseil interprofessionnel. A tout événement,
le Conseil interprofessionnel, comme je le vois, c'est un conseil qui groupe
les professions, toutes les professions et on peut voir que le bill 250 veut
conférer au conseil interprofessionnel un droit d'être
consulté sur la formation de toute nouvelle corporation professionnelle,
sauf celles qui sont constituées par une loi, c'est-à-dire les
corporations fermées. Nous n'avons aucune objection à ça,
que le conseil interprofessionnel soit consulté pour la constitution de
nouvelles professions, mais il faudrait tout au moins que le Conseil
interprofessionnel groupe les professions qui existent déjà.
Nous sommes d'avis que le Conseil interprofessionnel doit être
représentatif des organismes professionnels, qu'ils soient régis
par le code ou non, ainsi pourra-t-il mieux jouer son rôle d'organisme
consultatif. Et, dans une telle perspective, l'Etat peut y gagner
également dans son pouvoir de surveillance des organismes professionnels
qui ne sont pas régis par le code des professions puisqu'on exige que le
conseil interprofessionnel, en vertu de l'article 19, fasse un rapport annuel
au ministre. Alors, si vous avez toutes les professions, même celles qui
ne sont pas couvertes par le code, dans le conseil interprofessionnel, bien
vous avez par ricochet un contrôle sur ces corporations-là que
vous n'avez pas autrement.
Enfin, disons que le bloc des professionnels doit avoir un forum commun;
que ce soit le Conseil interprofessionnel ou un autre organisme qui va se
superposer à celui-là, il me semble que les professionnels
doivent pouvoir s'exprimer dans un bloc, doivent pouvoir trouver un forum
commun pour échanger des opinions, discuter leurs moyens d'action, et
que c'est le Conseil interprofessionnel qui est l'organisme tout
désigné pour ça.
Tous les professionnels, qu'ils soient régis par le bill 250 ou
non, qu'il s'agisse d'actuaires, de bibliothécaires, devraient avoir un
droit d'être membres, d'être représentés au Conseil
interprofessionnel. J'apporte une nuance. Nous ne croyons pas qu'à ce
droit devrait s'attacher l'obligation d'en faire partie. Nous croyons que la
liberté de participation donne une valeur particulière aux
consultations que le Conseil interprofessionnel peut être appelé
à donner, que cette faculté de participer peut servir de moyen
d'émulation ou de désapprobation pour les corporations
professionnelles, valeur que notre démocratie reconnaît encore.
Quant au droit d'en faire partie, nous soumettons qu'il devrait être
acquis pour toutes les corporations professionnelles, puisque les
professionnels peuvent commencer par se reconnaître entre eux. En
conclusion, les bibliothécaires professionnels ne veulent pas être
des demi-professionnels. Leur corporation existe, ils sont reconnus comme des
professionnels depuis trois ans, ils veulent conserver leur corporation, dans
le meilleur intérêt du public.
C'est par cette corporation que les bibliothécaires
professionnels peuvent défendre leurs intérêts
professionnels pour assurer une meilleure compétence, donner un meilleur
service au public. La loi actuelle permet à la Corporation des
bibliothécaires professionnels de jouer ce rôle et nos clients
sont satisfaits. Effectivement, les mécanismes du bill 250 leur
paraissent assez lourds dans leur application. On ne peut toutefois mesurer
exactement la portée de ces mécanismes ou des obligations que le
bill 250 pourrait imposer à une corporation comme la Corporation des
bibliothécaires professionnels,
si cette corporation-là était sujette au bill,
étant donné qu'on ne connaît pas encore la
réglementation qui va compléter cette législation et vu
les pouvoirs très larges du lieutenant-gouverneur en conseil en vertu de
l'article 169, on ne sait pas exactement ce que sera l'obligation ou quelle
sera la charge des corporations professionnelles.
En quelque sorte, les bibliothécaires professionnels
préféreraient conserver leur loi constituante s'ils sont
assurés de maintenir leur statut professionnel par une exception
à l'article 28 et par leur droit de participation au conseil
interprofessionnel. Notre position suscite ici en quelque sorte certains
commentaires qui nous ont été faits déjà par le
conseil interprofessionnel lui-même lorsqu'il a comparu devant vous, et
je me réfère aux commentaires sur les professions à titre
réservé qui devraient, a-t-on dit, avoir un régime
particulier. Les bibliothécaires professionnels ont déjà
ce régime particulier, le gouvernement ne semble pas vouloir le lui
retirer et nous sommes heureux de la situation. Nous voulons tout simplement ne
pas être tenus à l'écart du bloc des professionnels puisque
nous en sommes. Nous voulons conserver notre statut sans être
éliminés carrément du bloc des professionnels.
M. LE PRESIDENT: Le Solliciteur général.
M. FOURNIER: Je vous remercie des commentaires qui ont été
faits. Ils permettent évidemment de préciser certains termes
employés dans la loi. Vos remarques sur l'article 28 sont certainement
appropriées puisque cet article touche les corporations
elles-mêmes et ne semble pas couvrir les individus. Dans votre loi
particulière, le titre réservé est celui de
bibliothécaire professionnel. L'article 28 ne semble pas avoir
l'extension pour s'appliquer aux individus, ce qui souligne l'importance pour
la commission de recevoir des mémoires des différents
groupements.
Si nous ajoutions à l'article 28, un second paragraphe qui se
lirait ainsi: Sous réserve d'une disposition contraire apparaissant dans
une autre loi. Etant donné que vous avez déjà votre loi
particulière, qui vous donne un titre réservé, est-ce que
cette phrase ou ce paragraphe ne réglerait pas la première partie
de votre problème?
M. LESAGE: Si vous permettez, je pense que cela peut certainement aider.
Maintenant, je me permets de faire un commentaire à l'effet que non
seulement l'article ne couvre pas les droits des individus mais ne couvre pas
les droits reconnus à d'autres corporations que celles qui sont
couvertes par le bill 250, parce que la Corporation des bibliothécaires
professionnels est une entité qui existe et qui a ce nom.
M. FOURNIER: Maintenant, si cette phrase était ajoutée, je
comprends que vous seriez satisfait et que vous n'exigez pas d'assumer toutes
les obligations qui apparaissent au bill 250 parce que les privilèges de
se servir du nom de professionnel ou de corporation professionnelle
entraînent certaines obligations qui apparaissent dans ce bill 250 qui
sont l'office, le Conseil interprofessionnel, le bureau, les comités
administratifs avec certaines personnes nommés par l'Etat, des
administrateurs publics, des comités de discipline, un comité
d'inspection professionnel, etc., il n'y a pas simplement du brio à
cette affaire de professions, il y a des obligations imposées par la
loi. Est-ce que vous préféreriez conserver votre loi sans ces
obligations-là avec la réserve...
M. LESAGE: Si on me permet d'ajouter un mot, oui, la réponse est
oui. On préfère conserver la loi. Maintenant, pour vous dire ce
qu'on désire, parce que si on est ici, c'est pour vous le dire, on
désirerait être nommé dans la loi, dans l'exception, pour
la raison suivante: nous sommes une corporation à titre
réservé seulement. Nous ne pouvons contrôler efficacement
l'activité professionnelle que par l'émulation que l'on fait chez
nous, que par la compétence de nos membres, parce que quelqu'un peut
toujours être bibliothécaire sans être bibliothécaire
professionnel. Or, n'étant pas nommé ou identifié dans le
système général, on risque de perdre justement cette
reconnaissance qui est justifiée dans l'intérêt du public,
qui nous permet d'assurer une meilleure compétence et d'entraîner
des gens à devenir des bibliothécaires professionnels. Alors, si
on ne retrace nulle part notre nom dans la législation en cours, les
bibliothécaires professionnels risquent d'être
considérés comme des demi-professionnels.
M. FOURNIER: Qu'arrive-t-il dans le cas des actuaires dont la
réputation et la reconnaissance sont basées sur le nom dont ils
se servent et ne sont pas dans cette loi-là, vous l'avez vous-même
souligné, ainsi que les économistes, etc.? Ces choses
dépendent beaucoup de la corporation, des membres et leur
compétence quant à la reconnaissance publique. La reconnaissance
publique, évidemment, par une loi, accorde une reconnaissance plus
officielle mais cela n'empêche pas, comme les bibliothécaires,
d'avoir une reconnaissance du public par les fonctions qu'ils occupent et les
services qu'ils rendent à la population.
M. LESAGE: Exactement.
M. FOURNIER: La raison pour laquelle les bibliothécaires,
malgré votre loi, n'ont pas été inclus, c'est que nous
avons tenté d'analyser différents critères qui sont
énumérés à l'article 21 et il a semblé que
ces critères-là n'étaient pas totalement compatibles,
comme par exemple, le préjudice grave ou irréparable, la
qualité person-
nelle des services, etc. Je comprends que vous avez un mémoire
élaboré, vous parlez des dommages au point de vue de la culture,
etc., mais dans l'analyse il nous a semblé que les critères pour
les bibliothécaires ne recevaient pas totalement l'application...
M. LESAGE: Si vous me permettez encore une remarque, sur le premier
point, l'analogie avec les actuaires n'est pas parfaite évidemment,
puisque les actuaires n'ont pas de loi pour les régir et en
conséquence, ils n'ont pas d'obligation non plus. Ils n'ont pas
d'obligation d'assurer la compétence. Notre loi nous oblige en quelque
sorte à assurer la compétence et je demande tout simplement que
l'on soit conséquent.
Si on a une obligation d'assurer la compétence, qu'on nous
reconnaisse comme des professionnels. Ce que vous venez de dire, M. le
ministre, peut peut-être nous être cité tantôt et nous
n'aimerons pas cela, parce que l'article 21 impose des critères,
d'accord, mais des critères qui ne sont pas tous absolus, qui doivent
être pesés et qui ne peuvent pas être satisfaits par toutes
les corporations professionnelles. Je vous soumets que la Corporation des
bibliothécaires professionnels ou que la profession des
bibliothécaires existe mondialement et qu'elle a été
reconnue par cette Législature. Je demande qu'on soit conséquent,
qu'on nous identifie, c'est une identification. On a besoin d'une
identification.
M. FOURNIER: II est difficile de calculer le degré suivant lequel
les critères doivent être satisfaits, mais c'est dans
l'étude de l'ensemble, sans préciser davantage. Maintenant, une
reconnaissance, vous en avez une par vos diplômes universitaires, c'est
déjà une reconnaissance. Je comprends que nous allons avoir
d'autres groupes qui vont venir, comme les diplômés de CEGEP qui
veulent avoir une reconnaissance. Vous avez déjà quelque chose
avec le diplôme universitaire.
M. LESAGE: On a déjà une loi.
M. LE PRESIDENT: Est-ce que M. Desrochers a une réponse?
M. DESROCHERS: M. le ministre, ça fait vingt-quatre
réunions que nous avons au comité consultatif du livre où
je représente les bibliothécaires et la politique du livre engage
le ministère de l'Education, le ministère des Affaires
culturelles et le ministère des Affaires sociales et c'est graduellement
que les membres du comité se sont rendu compte des répercussions
d'envergure de la nouvelle politique du livre. Je me suis appliqué
à expliquer au sous-ministre de l'Education, qui est observateur
à nos réunions, l'envergure des conséquences de la
politique et qu'il faudrait que les bibliothécaires professionnels, qui
sont dans les institutions majeures, dans le domaine du service du livre dans
les maisons d'enseignement particulièrement, puissent collaborer avec le
ministère pour que, étant donné l'envergure des services
à rendre aux professeurs et aux étudiants cette envergure
serait diminuée dans telle hypothèse de 37 p.c. ou de 50 p.c,
consé-quemment à la nouvelle politique du livre les
bibliothécaires professionnels ensemble avec les ministres des Affaires
culturelles et de l'Education assument des responsabilités qu'ils n'ont
jamais eues auparavant. On s'aperçoit qu'avec les bibliothèques
qui vont être engagées dans une informatique dans cinq, dix et
quinze ans, on va avoir dans les bibliothèques des
bibliothécaires professionnels avec d'autres spécialistes qu'on
appelle les informaticiens qui devront apprendre comment ça se passe en
bibliothéconomie et nous, nous aurons à apprendre comment
marchent ces machines-là pour qu'on puisse mettre les ressources des
bibliothèques à la disposition de gens de plus en plus nombreux
dans la province engagés dans les recyclages de l'éducation des
adultes. On n'a jamais eu autant de responsabilités et de
nécessités de collaborer directement avec le ministre de
l'Education surtout, et le ministre des Affaires culturelles en ce qui concerne
le futur rôle des bibliothèques publiques. C'est seulement
récemment que nous prenons conscience des dommages qui pourraient
s'ensuivre si quelqu'un ne s'ajuste pas aux nouveaux programmes du ministre de
l'Education dans les CEGEP. Si, dans la planification du développement
des collections dans un CEGEP, un bibliothécaire professionnel n'a pas
la compétence d'ajuster sur cinq ans et dix ans une planification du
développement des collections, il peut faire un dommage très
grand à un corps professoral et à des milliers
d'étudiants, jusqu'à ce que quelqu'un s'occupe de neutraliser un
directeur des bibliothèques, qui est un poste très important,
comme celui de directeur de bibliothèque de CEGEP. Il est à un
tournant, il peut faire manquer l'université à des milliers
d'étudiants par le fait qu'il a trop orienté la planification
d'un développement des collections en rapport avec des programmes et les
programmes, parfois, changent vite dans le domaine des options. Et c'est
récemment qu'on a appris, dans la profession, que, il y a cinq ans, il y
a dix ans, on n'avait pas ces responsabilités-là.
Désormais, on les a, et c'est l'intérêt public de plus en
plus qui est en cause. La nouvelle politique du livre nous engage à fond
dans la question de l'intérêt du public.
On a cru, en lisant l'article qui définissait les
critères, vivant ce que nous vivons seulement depuis un an, deux ans,
qu'on peut concrétiser ce que nous comprenons désormais à
propos des critères. Nous sentons que, très vite, nous avons
été amenés, surtout par des décisions
gouvernementales, à mûrir et à devenir des professionnels
très soucieux de l'intérêt public et que nous pouvons, si
nous ne faisons pas notre travail comme il le faut, causer des
dommages réels assez considérables. C'est ce qui rend, en
ce moment, assez songeur le sous-ministre de l'Education au comité
consultatif du livre.
Il commence à voir, à mesure que j'explique, quels
seraient les dommages qui s'ensuivraient si le bibliothécaire qui est
là n'explique pas l'envergure de la répercussion qu'on recommande
au ministre des Affaires culturelles qui, à son tour, va la recommander
au cabinet des ministres au sujet de ce qu'on va imposer aux
bibliothèques universitaires par exemple.
C'est un problème d'envergure et je crois que c'est à
nous, bibliothécaires, quand nous en avons l'occasion, de souligner que
c'est peut-être récent mais que c'est réel. Nous avons un
intérêt public que nous n'avions pas auparavant et nous
commençons à devenir très confiants en raison de cela.
M. FOURNIER: Je vous remercie de vos remarques.
M. LE PRESIDENT: M. Matte.
M. MATTE: M. le Président, j'aimerais aussi signaler que, les
bibliothèques deviennent de plus en plus considérables et que le
bibliothécaire en charge de ces bibliothèques administre des
sommes de plus en plus considérables aussi. Il ne s'agit pas non plus
uniquement de culture quand on parle de bibliothèques, il s'agit de plus
en plus et surtout d'information.
Par exemple, un bibliothécaire qui serait en charge ou qui
travaillerait par exemple pour la Bibliothèque de l'Assemblée
nationale, pourrait, s'il n'est pas compétent, saborder toute la
collection, de sorte que les honorables membres de l'Assemblée nationale
ne pourraient pas avoir l'information dont ils ont besoin pour
précisément adopter leurs lois, au moment où ils en ont
besoin.
Dans ce sens-là aussi, celui de l'information, dans le domaine
des bibliothèques publiques, entre autres, dont la population et aussi
les administrateurs publics ont besoin, je pense que c'est assez important
qu'il y ait, en charge, des bibliothécaires qui puissent bien faire leur
travail et surtout une corporation qui puisse contrôler ce travail.
M. LE PRESIDENT: Le député de Montmagny.
M. CLOUTIER (Montmagny): M. le Président, très
intéressantes sont les remarques qui ont été faites
à ce sujet. C'est particulièrement la première fois devant
la commission qu'on fait allusion ou qu'on donne un exposé sur les
quatre catégories de corporations professionnelles. Cela va être
intéressant pour la suite des travaux de la commission
parlementaire.
Je suis un peu surpris cependant, M. le Président, de la
réponse de la corporation professionnelle à la question du
ministre, il y a un instant, pour savoir si elle préférait garder
la loi actuelle et avoir une exclusion que le ministre a élaborée
de façon plus générale, par exemple que la demande de Me
Lesage. J'aurais des réserves sur la formulation par Me Lesage pour que
la corporation soit mentionnée comme exclue.
Cela aurait peut-être un peu un aspect péjoratif, à
savoir que la Corporation des bibliothécaires professionnels craindrait
les contraintes du projet de loi 250. J'aime mieux votre première
affirmation dans le mémoire, à savoir que vous voulez être
inclus dans le projet de loi 250. Cela impose des obligations, je comprends que
c'est une jeune corporation professionnelle qui a peu d'années
d'existence juridique. Vous avez quand même un nombre assez
impressionnant de membres vous êtes rendus à tout
près de 800 membres vous avez fait des études sur un code
de déontologie qui sera appliqué prochainement, vous avez des
travaux assez importants qui sont en marche et vous venez de nous faire une
description des exigences de la profession de bibliothécaire.
Je comprends difficilement que vous ne soyez satisfaits que d'une
protection de ce qui est acquis déjà et que vous ne vouliez pas
franchir l'étape subséquente d'être couverts par la loi
250. D'autre part, j'ai entendu la réponse du ministre il y a un
instant. On dit que, peut-être, vous ne satisfaisiez pas à tous
les critères de l'article 21. Ma question est la suivante? Est-ce que,
à votre avis, dans l'annexe, il y a d'autres corporations
professionnelles sans les nommer parce que c'est assez délicat
qui, peut-être, ne satisfont pas de façon très
explicite et très claire à toutes les exigences de l'article
21?
M. LESAGE: II y en a plusieurs.
M. FOURNIER: C'est probablement parce qu'elles avaient
l'ancienneté.
M. LESAGE: Oui, c'est ça. Nous avons nos droits d'aînesse,
nous aussi.
M. FOURNIER: Je comprends.
M. CLOUTIER (Montmagny): C'est une objection, une explication qui perd
peut-être un peu de force étant donné qu'il y a d'autres
corporations aussi dans la liste qui ne satisfont pas... il est difficile aussi
de satisfaire de façon très claire et très positive aux
exigences de l'article 21. C'est une question d'appréciation. On peut
discuter longtemps de la protection du public ou des dommages qui pourraient
résulter si on n'avait pas recours aux membres d'une certaine
profession. Je pense qu'il y a encore de la jurisprudence à
établir de ce côté et que le législateur devra
donner le bénéfice du doute à une corporation qui veut
assumer certaines responsabilités.
Pour ma part, tenant compte des observations et des échanges qui
ont été faits et des organismes aussi qui viendront devant la
commission, parce que le même problème se retrou-
ve pour les techniciens professionnels que nous entendrons tantôt,
si les corporations manifestent le désir d'être incluses dans le
projet de loi no 250 et qu'elles veulent relever le défi, parce qu'il va
y avoir, quelle que soit la législation qui sera adoptée
je ne doute pas que la législation finale tiendra compte de bien des
représentations qui ont été faites ici un
défi, ce sont des contraintes pour des corporations
professionnelles.
Je pense que le législateur, avant de refuser l'admission,
l'étudiera sérieusement pour voir s'il y a matière
suffisante.
M. LESAGE: M. le Président, si vous me permettez d'apporter une
remarque...
M. LE PRESIDENT: A la réponse de la question...
M. LESAGE: ... à la réponse qui a été
donnée et pour satisfaire le député de Montmagny sur
l'attitude que nous avons prise, c'est que nous sommes d'avis que les
professions à titre réservé, et nous en sommes une,
devraient avoir un régime particulier. Ceci a déjà
été dit devant votre commission. Et tenant compte que le bill 250
ne fait pas un régime particulier pour les professions à titre
réservé, nous avons déjà ce régime
particulier, alors nous voulons le garder. Mais si vous arrivez à
concevoir une législation globale pour les professions à titre
réservé ayant un régime différent des professions
fermées, nous serons très heureux d'être avec les autres
professions à titre réservé.
Maintenant, ces professions à titre réservé ont des
problèmes bien différents des corporations fermées et la
principale raison est que, justement, elles n'ont pas le contrôle de la
pratique professionnelle et elles sont en concurrence avec les autres qui ne
sont pas membres des corporations, concurrence qui est nécessaire dans
l'intérêt du public pour que le public sache qui sont les membres
de la corporation et pour pouvoir, en somme, améliorer le prestige des
membres de cette corporation.
Alors, pour la protection du public, il y a une concurrence entre les
membres d'une corporation à titre réservé et ceux qui n'en
font pas partie. Et cet élément de concurrence, si on le fait
disparaître, je pense, pour ma part je n'ai pas consulté et
je n'ai pas de mandat de vous le dire que l'on va manquer notre coup
pour réglementer les professions à titre réservé
seulement.
On devrait, pour ces dernières, avoir une latitude beaucoup plus
large, un champ d'action beaucoup plus vaste et qui n'exclue pas
l'intérêt des membres eux-mêmes.
M. LE PRESIDENT: Est-ce qu'il y a d'autres questions des membres? Je
veux remercier encore une fois la Corporation des bibliothécaires. Comme
il est maintenant 12 h 15 et que nous devons suspendre nos débats
à 12 h 30, nous n'aurons pas le temps d'entendre un autre organisme. La
séance est donc suspendue jusqu'à 16 heures cet
après-midi.
(Suspension de la séance à 12 h 15)
Reprise de la séance à 16 h 41
M. BLANK (président de la commission spéciale dés
corporations professionnelles): A l'ordre, messieurs! Nous commençons la
séance avec la Corporation des techniciens professionnels.
Etes-vous Me Lafrenière?
Corporation des Techniciens professionnels
M. MARTEL: Je suis Gérard-Yvan Martel, président de la
corporation.
M. le Président, MM. les membres de la commission parlementaire,
la Corporation des techniciens professionnels du Québec s'est
trouvée fort surprise et j'oserais dire déçue de ne pas
être incluse dans le code des professions.
Tenant compte de l'existence de notre corporation professionnelle depuis
plusieurs années, nous avons donc pensé faire part à la
commission de notre point de vue à ce sujet.
La Corporation des techniciens professionnels est parfaitement
consciente de l'obligation pour le Québec de posséder un cadre
administratif et compétent pour contrôler l'exercice de la
profession ainsi que les titres professionnels. Nous sommes également
d'accord pour que le projet de loi 250 soit ce cadre administratif.
Actuellement, nous ne voyons aucune objection sérieuse, si ce n'est le
problème soulevé par la répartition des compétences
professionnelles de chaque corporation ou de chaque profession à
utiliser le projet de loi 250 comme base de discussion dans la structuration
d'une nouvelle corporation ou simplement dans la modification à la
corporation actuellement existante.
Toutefois, M. le Président, notre présence devant vous
aujourd'hui est plus particulièrement axée sur la
nécessité de protéger davantage le public
québécois en incluant dans le code des professions une
corporation qui s'occupera des finissants des CEGEP au Québec et qui
n'est pas, actuellement, comprise dans une corporation existante incluse dans
le bill.
Je demanderais donc à Me Robert Lafrenière de vous
expliquer le mémoire de la Corporation des techniciens
professionnels.
M. LAFRENIERE: M. le Président, MM. les membres de la commission,
il me fait plaisir aujourd'hui, et je considère comme un honneur le fait
d'avoir à parler devant vous au nom de la Corporation des techniciens
professionnels et aussi, jusqu'à un certain point, au nom de la
Fédération des CEGEP de la province de Québec. Nous
devions avoir ici, à cette table, le directeur général du
CEGEP de Limoilou, M. Roland Rochon, qui était tout spécialement
mandaté par le bureau exécutif de la Fédération des
CEGEP pour nous assister au moment de cette présentation.
Malheureusement, M. Rochon n'a pu se rendre ici à cause de
devoirs urgents et importants qu'il a à remplir cet
après-midi.
Je me servirai de la lettre qui nous a été remise par la
Fédération des CEGEP pour appuyer quelques-uns de nos arguments.
Messieurs, bien que les hautes fonctions de législateurs soient souvent
très éphémères et je le dis par
expérience personnelle les lois qu'ils adoptent connaissent une
très longue carrière lorsqu'elles s'avèrent
bénéfiques à la société. Aussi dans le
domaine de la législation, lorsque nous osons exprimer des suggestions,
il faut demeurer extrêmement conscients du fait que ces dernières
doivent être marquées au coin du sens des responsabilités.
Notre corporation sait quelle sera la seule à parler ici, devant votre
commission, d'une corporation professionnelle pour le niveau collégial.
C'est pourquoi, messieurs, je crois opportun de rappeler quelques paragraphes
ou de vous lire quelques extraits de la lettre qui nous a été
adressée par le président de la Fédération des
CEGEP; je me permets de vous lire quelques extraits: "Nous avons
constaté, tout comme les membres de votre corporation, que ce projet de
loi ne tenait pratiquement pas compte des professionnels formés dans les
collègues d'enseignement général et professionnel et que
cela pouvait causer un préjudice grave à une catégorie de
travailleurs dont les services sont d'une grande importance pour notre
société. "La réforme de notre système
d'enseignement qui a amené depuis 1967 la création des
collèges d'enseignement général et professionnel a
vraiment été orientée dans un sens qui milite en faveur de
la reconnaissance du statut de professionnel au détenteur du
diplôme d'enseignement collégial. Les études qui ont
conduit à cette réforme rapport Parent et rapport Tremblay
traduisent de façon non équivoque cette orientation qui
était la voie à suivre, ce que le législateur a reconnu en
instaurant un niveau d'études collégiales complet en
iui-même. On a aussi reconnu que, pour ceux qui poursuivaient des
études au secteur professionnel, ces études constituaient une
phase terminale préparant directement à une fonction de
travail."
Et cette lettre dont nous avons remis des exemplaires à chacun
des membres de la commission est signée par le président de la
Fédération des CEGEP, M. Jacques Laberge.
Le but que nous poursuivons aujourd'hui, messieurs, devant l'honorable
assemblée que vous constituez, n'est pas de discuter le
bien-fondé ou non du code des professions. Déjà certaines
corporations se sont donné cette mission jusqu'à maintenant et il
est à prévoir que d'autres s'en chargeront dans un avenir
prochain.
La requête de la Corporation, au nom de laquelle j'ai l'honneur de
m'adresser à vous, et de déposer devant vous, peut
brièvement être formulée de la façon suivante. Si le
projet du code des professions devenait loi, tel qu'il est ou avec des
modifications éventuellement jugées nécessaires, nous
demandons que les mem- bres de la Corporation des techniciens professionnels de
la province de Québec, que toutes les personnes qui, après
examen, seraient trouvées en possession des qualifications
exigées pour y adhérer et tous les détenteurs de
diplômes d'enseignement collégial, après trois
années d'études, puissent être groupées en
corporation professionnelle sous la juridiction du code des professions. Depuis
une dizaine d'années, les autorités, à tous les paliers,
ont voulu transformer le système d'éducation. On a nettement
distingué les niveaux d'études secondaires, collégiales et
universitaires.
Il est bien entendu que les spécialistes en éducation ont
voulu former une élite professionnelle qui pourrait faire face aux
besoins d'une société dans laquelle la technologie dans toutes
les disciplines est devenue essentielle à son bon fonctionnement. On a
compris qu'à ce sujet les professionns libérables traditionnelles
sont inappropriées et insuffisantes. C'est pourquoi on a mobilisé
les meilleurs cerveaux dans le domaine de l'éducation et on a
consacré jusqu'à des milliards pour bâtir et
façonner à travers la province les collèges d'enseignement
professionnel. L'idée de base dans cette entreprise était donc
sans doute de rétrécir les portes de l'université et de
diriger vers une formation nettement professionnelle 70 p.c. de nos
étudiants pour n'en garder qu'environ 30 p.c. dans la catégorie
d'enseignement général et universitaire.
Après cinq ans de fonctionnement, les prévisions
statistiques du ministère de l'Education nous indiquent en
réalité que, pour l'année 1972-1973, il y aura dans nos
CEGEP à travers la province de Québec, qui sont au nombre d'une
quarantaine, environ 54,318 étudiants au général et 45,602
étudiants dans le secteur professionnel. Ce qui veut dire un pourcentage
de 54 p.c. dans l'enseignement général et 46 p.c. dans
l'enseignement professionnel.
Je pense que les buts recherchés au moment de la formation des
GECEP ont, jusqu'ici, été atteint dans une mesure bien faible. En
somme, on a constaté à un moment donné, que dans les
professions libérales traditionnelles, il y avait plus d'offres que de
demandes. On a donc façonné, à la suite des rapports
Parent et Tremblay, la base des collèges d'enseignement professionnel et
on a dit aux étudiants, aux jeunes: Dirigez-vous vers les
collèges d'enseignement professionnel, parce que c'est là qu'est
l'avenir et, puisque nous sommes entrés depuis longtemps dans une
ère de technologie, puisque dans la province comme dans bien d'autres,
tout est maintenant industrialisé, c'est là que nous avons besoin
de techniciens, de technolo-gues, de professionnels, dans les disciplines
biologiques, physiques et humaines.
M. le Président, je pense que la jeunesse a bien répondu
à l'appel des autorités. Et on a dit à ces jeunes, ni plus
ni moins, qu'en se dirigeant vers les collèges d'enseignement
professionnel, à la fin de leurs études, ils seraient
considérés
comme ayant un statut professionnel.
En réalité, aujourd'hui, ce qui arrive, c'est que
l'autorité civile que vous constituez a eu l'idée d'un code des
professions et, comme je l'ai dit tantôt je ne veux pas ici en
discuter le bien fondé si cette loi est adoptée, la
Corporation des techniciens professionnels veut être incluse dans le code
des professions.
Cette Corporation des techniciens professionnels, M. le
Président, dont je vous parle, est actuellement composée de 7,000
à 8,000 membres dans les différentes techniques que je pourrai
vous énumérer tout à l'heure. Elle a recueilli ses membres
chez ceux qui ont suivi les cours donnés dans les écoles
techniques autrefois et, par la suite, dans les instituts de technologie.
Dorénavant, les membres d'une telle corporation seront recueillis
parmi les finissants de nos collèges d'enseignement
général et professionnel. Par conséquent, on voit
déjà le nombre imposant de membres qu'une telle corporation aura
à diriger. Je pense que nous en sommes à un point où il
faut reconnaître de toute évidence l'intention, le but
recherché par les éducateurs et le but recherché par le
législateur.
Ce serait aussi, je pense, une fausse représentation des
autorités vis-à-vis des milliers de jeunes qui se sont
dirigés vers l'enseignement professionnel que de ne pas les
reconnaître. Sur cette question, je serai bref et je n'apporterai pas
tellement d'argumentation parce que nous avons compris que le code des
professions avait été particulièrement basé sur les
études faites par le gouvernement et l'on trouve les principes dans ces
volumes de l'organisation et de la réglementation des professions de la
santé et du bien-être au Québec.
Nous savons que les corporations professionnelles, dorénavant, ne
doivent pas rechercher d'abord et avant tout, l'intérêt et les
privilèges de leurs membres. Les corporations professionnelles doivent
plutôt tourner leur intérêt du côté de la
protection du public. Or, M. le Président, je soumets ici qu'en ce qui
concerne cette question de la protection du public, la corporation que je
représente, depuis près d'une cinquantaine d'années, a
été la seule qui se soit occupée véritablement des
problèmes des techniciens, tant en ce qui concerne leurs propres
intérêts qu'en ce qui concerne la protection du public.
La corporation que je représente est régie par le chapitre
145 des lois du Québec de 1950. Cette corporation a pour
privilège ou pour droit de protéger l'intérêt du
public et les droits que la loi lui a accordés, soit les titres de
technicien professionnel et de technicien diplômé. Ce qui veut
dire que, pour être membre de cette corporation, il faut être
technicien diplômé ou professionnel.
En somme, depuis des années, la corporation se bat ni plus ni
moins pour empêcher que soit vulgarisé le titre de technicien,
parce que la loi ne nous permet pas de trouver une infraction chez l'individu
qui n'emploierait que le terme technicien pour exercer son activité. Si
l'individu se présente comme technicien diplômé ou
technicien professionnel et qu'en fait il n'est pas membre de la corporation,
nous pouvons le poursuivre, mais si la même personne se dit tout
simplement technicien, il n'y a rien à faire contre elle.
Et vous comprendrez que le seul fait, pour un individu, d'employer le
terme technicien à la suite de son nom laisse supposer et laisse croire
qu'il est diplômé par une autorité quelconque. Par
conséquent, M. le Président, la loi qui nous régit n'est
d'aucune protection pour les membres de la corporation et elle n'est d'aucune
protection non plus pour la société.
Et, en somme, je pourrais élaborer sur le sens du mot
professionnel. Est-ce que les milliers de personnes pour lesquelles nous
demandons ainsi, devant vous, la constitution d'une corporation professionnelle
sont vraiment des professionnels? C'est la première question à
nous poser.
Evidemment, le terme professionnel implique une spécialisation
dans un domaine donné. Il implique aussi des connaissances
intellectuelles et un prestige social. Donc, est-ce que les membres, au nom de
qui je parle aujourd'hui, réunissent ces caractéristiques qui
pourraient leur permettre de devenir membres éventuellement d'une
corporation professionnelle?
Je pense qu'il est temps, M. le Président, que nous abandonnions
cette mentalité désuète de réserver le terme
professionnel aux médecins, aux notaires et aux avocats. A ce
sujet-là, je vous lis trois ou quatre lignes du travail de Me Claude
Sheppard où il dit: "Par un phénomène assez curieux, nos
gens réservent l'étiquette professionnelle à laquelle ils
attachent une nuance de vénération aux médecins, aux
avocats, aux notaires. Cette coutume est née, sans doute, à
l'époque où en dehors du clergé, médecins, avocats
ou notaires composaient à peu près toute l'élite
canadienne-française." A cette époque-là, peut-être
n'avait-on pas reconnu encore les comptables, les ingénieurs, mais
à tout événement, il ne les mentionne pas ici. Je veux
dire que les étudiants qui, aujourd'hui, sortent de nos CEGEP, de nos
collèges d'enseignement professionnel, ont la base d'instruction, ont la
théorie nécessaire pour accéder à une corporation
professionnelle. A ce sujet, je voudrais tout simplement, en prenant le cahier
de l'enseignement collégial pour l'année 1971-1972, vous lire
brièvement ce que l'on dit concernant les techniciens de
mécanique, par exemple. "Les diplômés en équipement
motorisé assisteront l'ingénieur et agiront souvent comme lien
entre celui-ci et l'ouvrier spécialisé. La formation que
reçoit le technicien doit donc lui donner les connaissances voulues pour
lui permettre d'évaluer les problèmes de l'ingénieur ainsi
que ceux de l'ouvrier spécialisé.
A cette fin, le programme a été conçu de
façon à lui donner une formation générale dans
les matières fondamentales, comme la philosophie, le
français, les mathématiques et les sciences; dans les
matières techniques comme l'hydraulique, la thermodynamique, le dessin,
l'électronique, la mécanique des fluides, les techniques de
manutention, l'analyse, le contrôle des prix de revient, etc.
En somme, M. le Président, nos étudiants de 1972 dans les
CEGEP sont des hommes qui ont une formation qui leur permet d'être
renseignés au point de vue de la théorie de leur métier et
d'être renseignés au point de vue pratique. Les ingénieurs
sont à l'échelon de la conception des travaux. Les technologues
sont à la réalisation.
Il faut, je pense, sortir de notre esprit cette idée que nous
avions peut-être du technicien, il y a quelques années, voulant
qu'il s'agisse d'un homme préparé tout simplement pour des
travaux manuels. Aujourd'hui, l'instruction et la formation qui leur sont
données les place à un stade que nous avons créé il
y a environ quatre ou cinq ans en établissant le niveau collégial
qui se sépare nettement du niveau secondaire. Je crois que le niveau
collégial aujourd'hui, dans bien des professions ou dans beaucoup de
techniques, est l'équivalent des cours universitaires. D'ailleurs, je
dois vous dire que les universités reconnaissent les cours qui ont
été suivis avec succès par les étudiants dans les
CEGEP. Ces cours sont reconnus. Les rapports Parent et Tremblay, sur lesquels
est fondée la formation des CEGEP ont voulu que les
cégépiens aient une formation complète.
Je vous rappelle ici, par exemple, les citations que j'ai
rapportées dans le mémoire qui vous a été soumis et
qui sont tirées du rapport Parent: L'enseignement
préuniversitaire et professionnel doit donc prendre une
personnalité propre officiellement et pratiquement reconnue de
tous.
M. BLANK: Me Lafrenière, j'aimerais attirer votre attention sur
le fait que le temps qui vous était alloué est déjà
écoulé depuis cinq minutes.
M. LAFRENIERE: Alors, vous êtes bien bon, M. le Président,
et en considération de cette bonté, je vais essayer
d'abréger.
Le cours préuniversitaire et professionnel devra être
couronné par un diplôme officiel auquel il faudra chercher
à donner tout le prestige mérité. En somme, pour
résumer, l'élève qui devient diplômé du
collège d'enseignement professionnel doit avoir à son
crédit 40 cours. Il y a des cours obligatoires de langue, de
littérature, de philosophie, d'éducation physique et il y a
également des cours de spécialisation de sorte que le DEC ou
diplôme d'enseignement collégial comprend au moins 4,200 heures de
cours. Par conséquent je pense que, de la part du législateur, il
s'agit d'un oubli de ne pas avoir inclus parmi les corporations
professionnelles la Corporation des techniciens professionnels de la province
de Québec.
En résumé aussi, quant aux membres actuels de la
corporation, je veux dire que ce qu'ils n'ont pas acquis en théorie par
la cohésion des études que nous avons aujourd'hui, ils l'ont
acquis dans la pratique parce que la corporation a exigé de ses membres
qu'ils aient au moins dix années de pratique chacun dans leur domaine
avant de les nommer techniciens professionnels. Alors, messieurs, puisque mon
temps pour exposer ce long problème est terminé, je souhaite tout
simplement que la période des questions me donnera l'occasion de dire ce
que je n'ai pas eu l'occasion de dire pendant cet exposé.
M. LE PRESIDENT: Le Solliciteur général.
M. FOURNIER: Je remercie la corporation de son mémoire et des
renseignements qu'elle nous fournit aujourd'hui. J'ai quelques remarques
à faire...
M. LE PRESIDENT: Questions.
M. FOURNIER: Des questions plutôt. Aux pages 17 et 18 du
mémoire, c'est un peu la base des questions que je vais poser, vous
énumérez une série de techniques qui sont
enseignées ou de cours qui étaient enseignés autrefois
dans les écoles techniques et présentement dans les CEGEP. Vous
mentionnez qu'il s'agit de phases terminales d'études. Vous demandez que
l'ensemble des diplômés puissent être membres d'une
corporation professionnelle qui s'appellerait la Corporation des techniciens
professionnels. Si vous regardez le bill 250, on y voit des usages exclusifs
qui sont accordés soit aux avocats, soit aux notaires, et des titres
réservés mais dans un domaine limité. Ici, vous demandez
en fait ce que les universitaires pourraient demander s'ils demandaient la
corporation des universitaires professionnels qui comprendrait l'ensemble des
différentes professions.
Vous demandez que les techniques forestières, les gens qui
s'occupent de techniques forestières, ceux qui s'occupent de techniques
physiques et ceux qui s'occupent de techniques d'administration soient tous
regroupés dans une même profession. Ce n'est pas tout à
fait la façon dont la loi a été faite. Ce matin, le
même problème s'est présenté à propos des
bibliothécaires où il s'agissait d'un groupement identique quant
à leurs activités.
Pourriez-vous nous expliquer comment on pourrait regrouper tous ces
gens-là et ensuite les forcer à avoir, par exemple, un code de
déontologie qui ne serait pas une bible considérable couvrant
toutes les différentes techniques? Pouvez-vous répondre à
cette question?
M. MARTEL: M. le ministre, je pense que la même situation se
présente au niveau des ingénieurs; si l'on regarde les
différentes spécialités des ingénieurs, vous avez
des ingénieurs en chimie, en mécanique, en
météorologie et ainsi de suite. Alors, le code de
déontologie ou la
structure même de la corporation des ingénieurs, la
nouvelle comme l'ancienne, c'est quand même une structure globale en
elle-même et après, elle est divisée en différentes
sections. Je pense que notre philosophie est sensiblement la même. Nous
avons également pris exemple sur des corporations de techniciens qui
existent à l'extérieur du Québec et qui ont une structure
à peu près identique à celle-ci. Ce qui veut dire qu'on
aurait une structure qui est uniforme au niveau des techniciens. Je voudrais
vous faire remarquer en même temps que nous avons exclu les personnes ou
les groupements qui sont déjà couverts par les corporations
existantes. Et à l'intérieur de la structure même de la
corporation, il pourrait y avoir un système de section, de zonage ou de
spécialisation qui serait propre à chaque personne qui travaille
dans un secteur défini, par exemple en foresterie, en métallurgie
et ainsi de suite.
C'est ce qu'on prévoit comme opération.
M. FOURNIER: J'admettrais peut-être une partie du raisonnement si
l'on avait un groupe de techniques qui se rapporteraient à la même
chose. Vous avez les techniques physiques qui se rapportent à ce qu'il y
a dans le génie, mais vous ajoutez à cela les techniques
d'administration, une section comptable, une section de génie et
d'autres sections. Quelle différence ma question, je la posais au
début y aurait-il si nous établissions une corporation
professionnelle des universitaires? Cela grouperait toutes les autres...
M. LAVOIE (Wolfe): Je pourrais peut-être expliquer le
problème et répondre que la première solution que M.
Lafrenière apportait tantôt, c'est que l'ingénieur
conçoit les projets et que le technicien les réalise. Alors, je
pense que c'est pour cela...
M. FOURNIER: Je comprends cette partie-là, mais c'est
l'étendue du domaine de la corporation... Cela couvre tous les domaines
d'enseignement à ce stade du CEGEP.
M. LAFRENIERE: Si vous permettez, je pense, M. le Solliciteur
général, que ce qui vous impressionne ici à bon
droit d'ailleurs c'est la diversification, la diversité des
disciplines techniques que nous devrons éventuellement envisager dans la
constitution d'une corporation professionnelle. Je conçois cette
difficulté également, que je classe cependant dans le domaine des
modalités de l'organisation. Toutefois, nous pourrions ramener à
des titres plus généraux les différentes techniques dans
lesquelles seront appelés à travailler les futurs membres, parce
que le cahier de l'enseignement collégial classe ces différentes
disciplines en cinq ou six disci- plines que l'on appelle techniques
biologiques, techniques physiques, techniques humaines, techniques
administratives et arts appliqués. Alors; en ce qui concerne les
techniques biologiques, puisqu'il s'agit de corporations paramédicales,
déjà quelques-unes sont incluses dans le code des professions
actuel. Vous avez la Corporation professionnelle des physiothéra-peutes,
vous avez la Corporation professionnelle des infirmières, des infirmiers
et je souligne ici en passant que les infirmières et les
infirmiers recueillent aujourd'hui leur formation dans les CEGEP vous
avez aussi les podiatres, vous avez les acousticiens en prothèse
auditive, les denturologistes, vous en avez plusieurs, les techniciens en
radiologie également.
Puisque nous parlons de cette question, M. le Président,
permettez-moi de vous souligner que, dans les corporations professionnelles
déjà constituées sous le code des professions, vous avez
des gens qui prennent leur formation dans nos CEGEP, comme les
infirmières, les radiologistes et ceux-là s'en vont après
leurs études vers une corporation professionnelle, les autres dans les
techniques physiques. J'approuve le souci de l'autorité civile de bien
vouloir protéger l'intérêt du public de même que
l'intérêt des membres d'une corporation en ce qui concerne les
techniques ou les disciplines paramédicales.
En l'occurrence, des techniciens des techniques physiques ont
été lamentablement oubliés. Si nous devons accorder
beaucoup d'attention aux personnes de la société qui en ont le
plus besoin, je pense aussi que nous devrions tourner notre attention vers les
personnes de la société, qui, elles, sont en mesure de travailler
pour la production. Je ne sais pas si j'ai répondu à votre
question.
M. MARTEL: Si vous me permettez, M. le Président, j'aimerais
ajouter quelque chose. Je pense qu'il y a un élément historique
aussi à l'effet qu'on a choisi trois secteurs particuliers à
couvrir éventuellement, si l'autorité le décide. Au
départ, la Corporation des techniciens professionnels oeuvrait
spécifiquement dans les techniques qu'on peut appeler aujourd'hui
"techniques physiques". Au début de tout, c'était essentiellement
le domaine qui était couvert par notre corporation. Cependant, depuis
l'avènement des CEGEP, en 1967, l'ampleur du champ d'activité des
techniciens et des technologues a fait que des gens en foresterie, comme en
administration, se sont rattachés à nous, comme membres
réguliers, même si on doit l'admettre les titres que
l'on offrait à ce moment-là ne cadraient pas essentiellement avec
leur travail ou leurs fonctions de travail. Cependant, lorsqu'on a
évalué notre position quant au bill 250, on a
décidé de choisir trois options au moins qui nous semblaient les
plus compatibles tant avec notre passé historique que notre orientation
future. Il est bien évident,
à l'heure actuelle même, que les techniques physiques
ramènent ou groupent le gros des forces de la corporation et que les
autres techniques, forestières et de l'administration, sont quand
même relativement nouvelles sur le marché du travail.
M. LAVOIE (Wolfe): Est-ce que chaque profession a ses propres structures
et chaque discipline son code de déontologie?
M. MARTEL: Pas à l'heure actuelle.
M. FOURNIER: Une dernière question. Dans le code des professions,
l'article 34 réserve certaines lettres ou certains titres à
certains groupements. Cet article 34 est complété par l'article
35 qui donne quelque peu l'étendue des activités de ces gens qui
ont des titres réservés. De quelle façon est-ce que vous
rédigeriez cet article 35? L'article 34, c'est très bien, vous
l'avez déjà dans votre loi où l'on donne le titre de
technicien professionnel. Mais dans l'article 35 qui définit par exemple
la Corporation professionnelle des comptables en administration industrielle du
Québec: Etablir des prix de revient et faire de la comptabilité
industrielle, de l'organisation, de la gestion des affaires et chacun des
autres domaines, travailleurs sociaux, etc. où il y a une certaine
définition, de quelle façon définiriez-vous le champ
d'activité parce que celle loi comprend un champ
d'activité d'un technicien professionnel?
M. LAFRENIERE: Si je songe à un technicien de génie civil,
déjà les CEGEP ont prévu l'objectif de ce cadre,
l'objectif de son programme. On dira par exemple que le technicien du
génie civil est celui, qui, sous la direction d'un ingénieur, est
apte à exécuter des travaux spécialisés, à
voir à la réalisation des projets et à juger de la valeur
des données à transmettre à l'ingénieur. Concevoir
des idées nouvelles, organiser et diriger des équipes de
techniciens, ça, c'est le rôle de l'ingénieur, mais le
rôle du technicien, ou du technologue puisque apparemment c'est
plutôt ce terme de technologue qui viendra dans la pratique couvrir ces
personnes-là c'est de passer à la réalisation,
à l'exécution, et comme intermédiaire, non pas comme
exécutant manuel. Mais le technicien en génie civil est celui qui
est capable de lire et d'interpréter les plans et devis.
M. FOURNIER: Je comprends très bien l'explication que vous
donnez. Mais votre explication se limite aux techniciens en génie civil.
Mais là, vous voulez une corporation qui couvre une étendue assez
considérable. Vous parlez de génie civil, du champ
d'activité du génie civil, mais le champ d'activité
générale que vous suggérez, parce que votre loi demande
ça...
M. MARTEL: II demeure quand même que les fonctions de technicien
ou technologiste, dans n'importe quelle des techniques physiques, sont
essentiellement les mêmes. Ce qui veut dire que l'article 35 pourrait
dire: La corporation professionnelle regroupe tels gens, faisant telle action
dans tel champ, et faire une nomenclature des champs qui sont inclus. C'est
quand même la même fonction de base, soit faire de la relation, de
la recherche ou de la planification.
M. FOURNIER: Est-ce qu'il faudrait prendre la nomenclature que vous avez
aux pages 17 et 18 du mémoire, tout en précisant?
M. MARTEL: Je voudrais quand même vous faire remarquer qu'à
la page 18 en particulier il y a trois secteurs bien précis sur lesquels
on table. Cela ne veut pas nécessairement dire qu'on va s'en tenir
à cela, selon l'objectif qui est à poursuivre. En ce qui concerne
la page 19, je pense que c'est assez clair dans notre mémoire, c'est une
question de liberté de l'autorité établie qui aura
à définir si, oui ou non, ça cadre avec la politique du
projet de loi 250.
M. LAFRENIERE: En somme, M. le Président, vous nous posez une
question à laquelle il est bien difficile de répondre comme
ça à l'improviste, parce que ça comprend un nombre de
domaines assez différents. En résumé, on pourrait dire que
le technicien ou le technologue est celui qui est l'exécutant d'un plan
conçu par l'ingénieur ou l'architecte et qui détient aussi
parce qu'il faudra, à ce moment-là, poser les exigences
des qualifications un diplôme, le diplôme requis des CEGEP,
des collèges d'enseignement général et professionnel.
M. LAVOIE (Wolfe): Est-ce que les thanato-logues ont demandé de
faire partie de votre corporation?
M. LAFRENIERE: Vous parlez des entrepreneurs de pompes funèbres?
Non.
M. LE PRESIDENT: Le député de Montmagny.
M. CLOUTIER (Montmagny): M. le Président, j'aurais un très
court commentaire à faire, suivi de questions. Un très court
commentaire, c'est celui-ci: le groupe qui est devant nous représente
des effectifs extrêmement importants, on a donné des statistiques
tantôt. Il y a tout près de 100,000 intéressés; il y
a 54,000 étudiants à la section générale et 45,600
à la section professionnelle. Donc, il s'agit d'un groupe de 100,000
futurs techniciens, en plus des 7,000 techniciens professionnels qui
appartiennent à la corporation professionnelle.
Il s'agit donc d'une représentation extrêmement importante
et je pense que la réponse du législateur, à mon avis,
indiquera peut-être si la
législation aussi est prête à considérer le
problème quant à l'avenir. On a une situation présente, ce
sont les techniciens professionnels qui sont regroupés, comme vous
l'indiquez à la page 17, entre une quinzaine d'options. Vous avez
également, dans le cours qui se donne actuellement depuis la
création des CEGEP, beaucoup plus d'options, que vous avez
regroupées aux pages 18 et 19, en trois grandes catégories.
La législation pourra donc ne tenir compte que de ce qui existe
actuellement ou peut-être indiquer une orientation que vous voulez voir
dessinée à la Corporation des techniciens professionnels, ceux
qui seront demain au-delà de 100,000. Vous avez souligné, je
crois, Me Lafrenière, à bon droit, l'étape qui a
été faite dans l'éducation, à savoir qu'on a
construit différents paliers et qu'il y a un groupe important qui s'en
va à un cours terminal qui est le groupement professionnel, et qui, lui,
débouche sur des carrières.
Ce sont des carrières que vous avez décrites: techniques
forestières, techniques physiques et techniques de l'administration.
Mais quant au problème qu'on a soulevé tantôt, c'est le
ministre qui a posé une question à cet égard, je pense que
nous en avons parlé déjà devant cette commission. Cela
s'est présenté pour d'autres aussi, ce regroupement et ce
chapeautage de différentes professions.
On en a parlé quand les comptables et les administrateurs sont
venus devant la commission parlementaire. Le problème s'est posé
alors. Evidemment, ils ne constituent pas des groupes aussi nombreux que celui
que vous représentez, mais ça s'est également posé.
Je vous demande si, étant donné que actuellement, le projet de
loi 250 reconnaît, dans les professions d'exercice exclusif, des membres,
je prends comme exemple les infirmiers et les infirmières, qui
constituent déjà un groupe important au niveau du CEGEP, il y en
a d'autres aussi qui constituent également... Je ne sais pas, vous avez
peut-être des statistiques là-dessus, Me Lafrenière. Est-ce
que vous en avez des statistiques au sujet des étudiants au CEGEP qui,
actuellement, seraient couverts par les professions d'exercice exclusif ou les
professions à titre réservé dans le projet de loi 250?
M. LAFRENIERE: Dans les technique biologiques, dont les
infirmières font partie, nous avons des statistiques qui donnent le
nombre de finissants. Par exemple, en 1972, ils sont au nombre de 2,332, sur un
total de finissants aux CEGEP, pour cette année 1972, de 7,650. Ce qui
veut dire que tous les étudiants finissant en techniques biologiques
s'en vont vers une corporation professionnelle et que les autres sont
laissés pour compte, ni plus ni moins. Je pense bien qu'il ne serait pas
exagéré de comparer le rôle du technicien, du technologue
vis-à-vis de l'ingénieur ou de l'architecte, au rôle que
peut avoir quelqu'un dans une technique paramédicale vis-à-vis du
médecin, par exemple.
Dans les techniques physiques, nous avons cette année 1,833
finissants; dans les techniques humaines, 1,262; dans les techniques
administratives, 2,006; ce qui fait un total de 7,650 finissants. Il ne faut
pas se laisser tromper, évidemment, par les statistiques et je pense
bien que l'honorable député de Montmagny, lui-même un
comptable de profession, sait qu'il n'y a rien de trompeur comme les
statistiques.
Dans le chiffre de 100,000 que nous avons mentionné tantôt
et qui seraient les prévisions pour l'année 72/73, il faut bien
retenir qu'il y a 46,000 étudiants, environ, qui se sont dirigés
vers l'enseignement professionnel. Les 54,000 autres étudiants se
dirigent vers l'enseignement général, c'est-à-dire que
ceux-là feront deux années de CEGEP pour ensuite bifurquer vers
les études supérieures, les études universitaires. Les
autres continueront, après deux ans, dans une troisième
année de spécialisation, ce qui les amènera à un
niveau d'études complet en lui-même, comme dit le rapport Parent,
à une phase terminale qui les rendra mûrs pour le marché du
travail.
M. CLOUTIER (Montmagny): On a déploré souvent que la
proportion des étudiants au niveau du CEGEP qui se dirigent du
côté secteur général était trop forte par
rapport aux étudiants qui se dirigeaient du côté
professionnel. Est-ce que la reconnaissance de ces techniciens dans une
corporation professionnelle ne serait pas de nature, peut-être, à
ajouter un certain prestige à cette profession terminale au niveau du
CEGEP et assurer une meilleure répartition des effectifs?
M. LAFRENIERE: Bien entendu, M. le Président, et j'aurais
même la tentation de répondre par un slogan de certains
organismes: Mettez-y de l'attrait. Ces gens-là savent déjà
que, dans certaines professions libérales que nous connaissons, comme
les architectes, les ingénieurs et plusieurs autres professions que je
pourrais nommer, il y a déjà un nombre de professionnels qui
saturent le marché jusqu'à un certain point. C'est la raison pour
laquelle on a appelé notre jeunesse vers l'enseignement professionnel et
vers les différentes technologies, d'ailleurs dont nous avons besoin
parce que nous sommes dans une ère technologique. Si on fait une
distinction entre certains étudiants qui ont recueilli leur formation
dans les CEGEP, à qui on accorde le statut d'une corporation
professionnelle, et qu'aux autres parce qu'ils sont dans des techniques
différentes, on n'accorde pas ce statut professionnel, il va
certainement, M. le Président, y avoir un mécontentement
manifeste.
Maintenant, et ce n'est pas là tellement le point, je pense
et d'ailleurs ça a été pensé depuis
longtemps que l'employeur lui-même, si le public a besoin
d'être protégé, a besoin d'être
protégé. Je crois que, s'il sait que tel individu qui s'affiche
comme technicien en
génie civil ou en mécanique ou en aéronautique fait
partie d'une corporation professionnelle, déjà l'employeur est en
confiance et peut donner de meilleures conditions de travail à celui qui
accepte un emploi. C'est pourquoi on disait dans le rapport Parent: S'inspirant
du principe qu'un diplôme d'études professionnelles devrait
à la fois renseigner le public, les employeurs et tous les groupements
qui peuvent avoir recours aux services d'une catégorie donnée de
professionnels, à la fois sur le niveau de formation atteint par
l'étudiant et sur le type de spécialisation qu'il a acquise. Par
conséquent, en quelque sorte il faut que le finissant du CEGEP soit
identifié, il ne faut pas faire de discrimination entre certaines
techniques qui, elles, vont vers des corporations professionnelles et d'autres
techniques qui sont laissées pour compte.
M. CLOUTIER (Montmagny): Vous avez entendu ce matin la discussion que
nous avons eue à la commission avec le groupe des bibliothécaires
professionnels. A la lumière de ces échanges, de cette
discussion, est-ce que vous croyez que le projet de loi, tel que
préparé, pourrait contenir une autre section, c'est-à-dire
préciser davantage le rôle de ces corporations professionnelles
à titre réservé? Convient-il qu'on leur attribue davantage
des responsabilités qui seraient différentes peut-être des
professions d'exercice exclusif? Peut-être que ce serait une
troisième section qui pourrait être ajoutée à la
législation et qui pourrait comprendre les différentes options
des techniciens professionnels.
M. LAFRENIERE: II est bien évident, M. le Président, que
les corporations qui seront formées par l'Etat reçoivent des
délégations de pouvoirs de la part de l'Etat, mais tout
dépend de la façon et du sérieux que les corporations
mettront à contrôler l'exercice de leur profession. C'est une
question assez vaste que...
M. CLOUTIER (Montmagny): De toute façon, vous n'avez pas
d'objection à ce que l'on crée deux catégories de
professionnels des professionnels de seconde zone...
M. LAFRENIERE: Non.
M. CLOUTIER (Montmagny): Comme vous l'avez dit tantôt, au
début, autrefois, il y avait une conception du professionnel qui
était limitée à trois ou quatre professions. Aujourd'hui,
évidemment, tenant compte d'une évolution souhaitable, vous avez
énoncé le voeu devant la commission, au début, qu'il y ait
ouverture de ce côté-là et que le code des professions
reconnaisse qu'il n'y ait pas seulement ces trois... D'ailleurs, ce n'est pas
le cas dans la législation actuelle mais, dans cet esprit-là,
vous voudriez que les membres que vous représentez soient compris dans
la législation contrôlée.
M. LAFRENIERE: Je pense qu'il faudrait cesser de monopoliser le terme de
professionnel pour un groupe relativement restreint de travailleurs quand nous
le comparons à tous les travailleurs qui sont nécessaires dans la
société aujourd'hui et particulièrement dans une
société industrialisée et dans une société
technologique. Alors, je crois que...
M. CLOUTIER (Montmagny): Et les 7,000 membres qui sont actuellement des
techniciens professionnels et ceux qui pourraient venir s'y ajouter il y
en a qui sont déjà inclus parce que nous avons parlé
tantôt de tous ceux qui dans les CEGEP seraient inclus par le projet de
loi 250 tous ceux-là s'ajoutent aux techniciens professionnels.
Ils sont prêts à accepter le projet de loi 250 et seraient
prêts à établir, à l'intérieur de la
corporation professionnelle, les structures nécessaires et à
assumer les exigences posées par la législation.
M. LAFRENIERE: Comme cela est dit dans le mémoire, M. le
Président, la corporation est prête à faire les changements
nécessaires qui s'imposent, tant dans sa structure que dans sa
réglementation, pour répondre aux exigences du code des
professions. Quant au code des professions, je ne porte pas personnellement un
jugement sur celui-ci mais je dis que, si ce code doit être
adopté, cela serait une lacune grave de laisser de côté les
techniciens et technologues qui sont des professionnels, non pas une
sous-catégorie ou une seconde zone, mais des professionnels au
même titre que les professionnels de professions libérales
reconnues ou qui l'étaient autrefois. Parce que, si ces professions
libérales étaient reconnues à tel point, c'est parce
qu'elles étaient jugées nécessaires dans la
société. On concevait mal l'organisation d'une
municipalité si elle n'avait pas son notaire, son curé, son
avocat et son médecin. Mais aujourd'hui, la société a pris
de l'envergure et il faut des techniciens et des technologues, sans quoi il y
aurait un blocage quelque part.
M. LE PRESIDENT: Le député de Dorchester.
M. GUAY: Je remarque à la page 4...
M. LE PRESIDENT: II y a une question sur le même sujet.
Le député de Wolfe.
M. LAVOIE (Wolfe): Je voudrais demander au Solliciteur
général s'il n'y a pas d'autres corporations sur lesquelles les
légistes sont à travailler pour concevoir une nouvelle loi
à ce sujet-là. J'ai déjà eu des mémoires
venant de l'Association professionnelle des voyageurs de commerce et d'autres
associations. Est-ce qu'il n'y a pas autre chose en préparation?
M. FOURNIER: En préparation, mais pas pour l'immédiat,
nous avons l'intention d'établir une loi ou "Licensing Act" qui couvrira
une
série de domaines dont certains seront similaires aux
activités de la Commission des valeurs mobilières, qui
émet des permis aux vendeurs de valeurs mobilières. En plus de
cela, il y a les courtiers en assurance qui reçoivent des permis du
département d'assurance. Cela sera un genre de "licency"...
Ce sera un genre de "licensing" qui couvrira un certain groupe. Ce
matin, les représentations qui ont été faites
dépassaient un peu le "licensing" c'était une catégorie un
peu spéciale qui comprendrait les économistes, les
bibliothécaires etc., suivant les recommandations qui ont
été faites ce matin.
M. CLOUTIER (Montmagny): On a appelé cela les activités
professionnelles non régies.
M. FOURNIER: Non régies.
M. LE PRESIDENT: Messieurs, je ne voudrais pas que cette conversation
aille plus loin, étant donné que ces discussions sont
réservées après que nous aurons entendu tous les
mémoires. C'est le nouveau règlement. Je donne la parole au
député de Dorchester.
M. GUAY: Quelques brèves questions. Vous soulignez, à la
page 4 de votre mémoire, un point qui m'intéresse:"Les
mêmes appellations devraient désigner des niveaux de formation
professionnelle équivalents." Vous donnez un exemple: "...l'expression
certificat soit réservée aux études de l'initiation, au
travail; celle de brevet, au niveau de métiers; celle de diplôme
au niveau technique." Quel est le premier but visé par cette insertion
dans votre mémoire?
M. LAFRENIERE: Si je ne m'abuse, M. le député, le niveau
des métiers, il y a quelques années, du moins au temps où
ce rapport Tremblay a été écrit, référait au
niveau secondaire des études. Aujourd'hui, quand on dit que quelqu'un
est diplômé dans une discipline technique quelconque, il est
allé plus haut que le niveau secondaire, et c'est justement à ce
niveau collégial qui a été institué par les CEGEP;
c'est justement ce niveau-là qu'il a fréquenté. C'est ce
qui lui donne un diplôme dans une discipline quelconque, soit en
génie civil, en mécanique, en aéronautique, en foresterie
ou en sciences humaines.
M. GUAY: Ces appellations existent déjà dans...
M. LAFRENIERE: Oui, ces appellations existent déjà dans la
réalité, non pas au niveau de la Corporation des techniciens
professionnels parce que nous avons affaire à nos membres, à des
diplômés, mais cela existe pour les autres niveaux des
métiers, pour l'initiation au travail.
M. GUAY: Je pense que vous insistez sur l'équivalence par le nom,
si je comprends bien.
M. LAFRENIERE: On insiste sur l'équivalence en ce qui concerne,
par exemple, les cours universitaires qui sont les mêmes que les cours
suivis au CEGEP pour les différentes techniques.
M. GUAY: Vous consacrez également un chapitre à la
pénurie de techniciens. Y a-t-il vraiment pénurie de techniciens
actuellement? A la page 9 de votre mémoire.
M. LAFRENIERE: Je pense que, dans certaines spécialités,
effectivement, il y a une pénurie de techniciens et cela est dû,
je pense, à une carence de la planification ou de la projection des
tâches qui seront requises dans la société. Cet aspect
devrait être étudié, parce qu'il ne suffit pas de se lancer
dans des techniques parce qu'on les aime. On pourrait aussi considérer
le fait d'inviter des étudiants à se lancer dans des techniques
parce qu'elles sont nécessaires et qu'elles répondront
tantôt à des besoins.
M. GUAY: Ne croyez-vous pas que c'est plutôt un manque de
planification?
M. LAFRENIERE: C'est ça!
M. LE PRESIDENT: Le député de Bourget.
M. LAURIN: Le cadre que vous tracez est très
général. Incluriez-vous dans votre corporation les
infirmières dont l'enseignement, actuellement, est donné au
niveau CEGEP et qui, si je ne m'abuse, demandent une corporation distincte?
Elles l'ont déjà d'ailleurs.
M. LAFRENIERE: Les infirmières sont déjà incluses
dans le code des professions, la Corporation professionnelle des
infirmières. Comme nous le disons dans notre mémoire, M. le
député, nous serions prêts à absorber ni plus ni
moins...
M. LAURIN: A les récupérer.
M. LAFRENIERE: ... à les récupérer. Mais, je pense
à la Corporation professionnelle des radiologistes, par exemple,
à la Corporation professionnelle des podiatres, des
physiothéra-peutes, toutes ces corporations paramédicales qui
sont déjà constituées en corporations professionnelles. Je
n'ai pas l'impression qu'elles seraient très intéressées
à revenir n'est-ce pas sous un même chapeau d'une
corporation générale qui engloberait les différentes
techniques. Alors, c'est la raison pour laquelle nous n'avons pas
insisté pour...
M. LAURIN: Mais, logiquement, vous le devriez.
M. LAFRENIERE: Logiquement, on le devrait. Le reste dépendrait
des modalités de la
structuration de la corporation, parce qu'au point de vue de la
déontologie, par exemple, disons qu'il y aurait des règles
communes, de même qu'au point de vue de la discipline. Chaque
spécialité pourrait avoir un représentant qui formulerait
les règles particulières pour une discipline donnée.
M. LAURIN: Maintenant que vous avez axé comme il se doit vos
arguments sur la protection du public, puisque c'est là au fond le but
essentiel d'un Office des professions, jusqu'à quel point la protection
du public est-elle assurée par la protection du diplôme
comparativement à la protection du public qui existe actuellement et qui
est effectuée par les comités paritaires, je pense aux plombiers
et aux électriciens, par exemple, ou par les centres de formation
professionnelle ou par la loi de la qualification professionnelle?
Pourriez-vous me donner les analogies et les divergences?
M. LAFRENIERE: Vous posez, M. le député, une question
extrêmement intéressante et aussi très cuisante parce que,
je l'ai mentionné tantôt, ce qui arrive aujourd'hui c'est qu'on
donne le titre de technicien à M. Tout-le-monde ou à n'importe
qui. On engage quelqu'un et on voudrait, dans le genre d'emploi qu'on lui donne
ou dans telle entreprise lui donner un certain prestige, on ne sait pas comment
l'appeler. On l'appelle technicien. J'ai eu connaissance personnellement de
promotion semblable. J'ai eu le cas, par exemple, d'un appariteur dans un
laboratoire qui était appariteur depuis quatre ou cinq ans et, à
la veille de la négociation d'une convention collective, c'était
un bon garçon, on voulait lui donner une chance, alors, on l'a
nommé technicien. Vous avez des techniciens classe 4, par exemple, allez
voir ce qu'il fait ce gars-là, c'est l'homme d'entretien de la
bâtisse, c'est un technicien classe 4. Alors, tous les employeurs et
même le gouvernement, M. le député, se sont servis de ce
terme-là qu'ils ont galvaudé à tort et à travers de
sorte qu'aujourd'hui on ne sait plus à qui on a affaire quand on nous
dit que quelqu'un est technicien. Technicien de quoi, dites-le-nous, de qui, et
diplômé d'où, personne ne le sait. C'est pour ça que
le problème est devenu extrêmement urgent et important. La
corporation, avec la loi qu'elle a, est comme une camisole de force parce que,
si l'individu n'emploie pas l'adjectif professionnel ou diplômé
après le terme de "technicien", il ne peut pas être poursuivi.
M. LAURIN: Et ce problème ne vous apparaîtrait pas
susceptible d'être réglé, par exemple, par la mesure
qu'annonçait le ministre tout à l'heure, une nouvelle loi qui
régirait l'octroi des permis et des licences?
M. LAFRENIERE: Non, parce que nous croyons que le technologue de 1972
porte sur ses épaules des responsabilités tellement lourdes qu'il
faut absolument une corporation qui y voit de près parce qu'autrement,
bien, ça devient tout à fait impersonnel et anonyme et puis la
protection du public ne serait pas suffisamment garantie, à mon avis. Le
technologue ou le technicien aujourd'hui pose des gestes aussi de
conséquence et je ne veux pas minimiser le rôle des
ingénieurs ou des architectes, mais celui qui exécute en somme la
conception de l'ingénieur ou de l'architecte et c'est lui qui a la
responsabilité.
M. LAURIN: C'est lui qui demande à être poursuivi si
l'usager n'est pas satisfait?
M. LAFRENIERE: Ah! voilà, si on tombe dans le domaine de la
responsabilité civile, on va se faire mettre hors d'ordre, M. le
député.
M. LAURIN: C'est parce que l'octroi d'un privilège correspond
toujours à l'octroi d'une responsabilité aussi.
M. LAFRENIERE: Oui. Sûrement que les technologues ou les
techniciens dans une certaine mesure ont un exercice aussi exclusif et c'est
prévu à l'article 5 de la loi des ingénieurs que des
techniciens peuvent, par exemple, exécuter des travaux d'envergure sur
des bâtisses dont le coût serait en bas de $100,000, des
édifices publics.
Quant aux édifices résidentiels, ils peuvent
exécuter certains travaux d'importance dans des bâtisses de dix
logements ou moins. Alors, il y a déjà une espèce
d'ouverture qui est donnée aux techniciens et aux technologues mais
évidemment cela ne va pas plus haut que les normes que je vous ai
mentionnées. Mais dans la pratique, vous savez et je sais que des
ingénieurs emploient des techniciens et des technologues qui
exécutent, à toutes fins pratiques, les fonctions de
l'ingénieur ou de l'architecte.
M. LE PRESIDENT: Le député de Gaspé-Sud.
M. FORTIER: M. Lafrenière, est-ce que tous les techniciens en
radiologie font partie de la Corporation des techniciens professionnels.
M. LAFRENIERE: Non, M. le député. Les techniciens en
radiologie n'en font pas partie, parce qu'ils ont déjà une
corporation pour eux.
M. FORTIER: Est-ce que votre corporation donne, soit un diplôme ou
un certificat à chacun des techniciens une fois qu'ils sont
reconnus.
M. LAFRENIERE: Oui. La Corporation des techniciens professionnels a un
bureau des examinateurs. Et.avant de devenir membre de la corporation, le
candidat doit se soumettre aux examens qu'on lui fait subir par le bureau des
examinateurs de la corporation.
M. FORTIER: Mais tous les techniciens ne font pas nécessairement
partie de votre corporation.
M. LAFRENIERE: Non, actuellement ils sont au nombre d'environ 7,000
à 8,000 mais il y a plusieurs brebis, M. le député, que
nous n'avons pu ramener au bercail parce que, justement, la loi qui nous
régit ne semble pas avoir l'efficacité qu'elle devrait avoir pour
protéger leurs intérêts et protéger le public en
général.
M. LE PRESIDENT: Le député de l'Assomption.
M. PERREAULT: Votre mémoire suggère au gouvernement une
proposition très intéressante à la page 4, sur les
appellations des différents niveaux de formation. Vous mentionnez ici
que le comité serait d'avis que l'expression certificat soit
réservée aux études de l'initiation au travail, celle de
brevet au niveau de métier, celle de diplôme au niveau technique.
Est-ce que cette absence de standardisation n'est pas une des
résultantes de la confusion qui existe dans le public et dans le monde
industriel pour l'employeur?
M. LAFRENIERE: Exactement, parce que l'employeur ne sait pas à
qui il a affaire quand il embauche quelqu'un parce qu'on n'a pas exigé
les différents titres ou diplômes qui peuvent être
décernés par les écoles d'enseignement. C'est une lacune
extraordinaire.
M. PERREAULT: Deuxièmement, en Ontario, est-ce qu'on pourrait
savoir la situation qui existe relativement au technologiste professionnel?
M. MARTEL: En Ontario, les titres sont sensiblement les mêmes que
les nôtres, sauf que l'appellation "technologist" à pris davantage
de valeur relativement à l'industrie. On a trois niveaux, à
l'heure actuelle. Nous avons trois niveaux également. Nous avons comme
niveau de base, technicien diplômé; comme second niveau,
technologue ou technologiste au choix de l'individu, parce qu'on ne veut
pas faire de polémique linguistique et comme troisième
niveau, le technicien professionnel. En Ontario, on a: "Engineering
Technician", "Junior Technologist" et "Senior Technologist" qui est le plus
haut palier. Mais si on prend les niveaux d'éducation, de formation
professionnelle, le technicien professionnel est beaucoup plus
élevé dans l'échelle, expérience et formation
professionnelle, que "l'Engineering Technologist" de l'Ontario.
M. PERREAULT: A la page 20, vous répondez au quatrième
critère de l'article 21. Pour-riez-vous nous donner un peu
d'explications sur les cas typiques qui pourraient arriver?
M. LAFRENIERE: A la page 16...
M. PERREAULT: A la page 20, sur le quatrième critère de
l'article 21.
M. MARTEL: J'ai l'impression qu'à la page 20 on donne
déjà des exemples qui sont assez patents, à mon sens. Si
on regarde la responsabilité d'un technicien ou un technologue en
communication aérienne qui ferait une erreur de jugement, je pense que
les conséquences seraient facilement prévisibles... Quant
à celui qui est en électronique, qu'il soit en
électronique médicale ou en électronique industrielle ou
encore au contrôle, je pense, M. le député que vous
êtes beaucoup plus en mesure que moi de connaître quels seront les
résultats si quelqu'un faisait un mauvais fonctionnement sur une ligne
de 735,000 volts par exemple. Les résultats et les désastres
causés pourraient être extrêmement dispendieux, tant pour la
société que pour la vie des individus. Je pense que nous avons
d'autres exemples, si vous voulez en avoir d'autres.
M. PERREAULT: C'est justement pour le point que vous mentionnez, on n'a
pas assez insisté sur la protection de la vie de l'individu.
M. MARTEL: II est évident que, dans tous les travaux où le
technieien évolue, surtout lorsque ces travaux sont de la conception ou
encore du contrôle, la protection de la vie de l'individu est
extrêmement importante. Là, les techniciens ont une
responsabilité particulière en ce sens qu'ils ont à mettre
en plan ou en marche des données générales qui sont
conçues par l'ingénieur, l'architecte ou l'autre professionnel de
type universitaire. Si, par incompétence ou autrement, on ne peut faire
un travail proprement, la vie des individus est effectivement mise en
danger.
M. LAFRENIERE: Ce que je voulais dire, M. le député, c'est
que le technicien parfois mieux encore que le professionnel qui a
été à la base de la conception d'un projet, non seulement
il a les connaissances théoriques nécessaires, mais il a les
connaissances pratiques, parce que lui sait comment faire fonctionner telle
machine électronique, comment la réparer. Le plus souvent, c'est
le technicien ou le technologue qui s'occupe de cet aspect-là et qui,
beaucoup plus qu'un autre individu dans l'entreprise, peut avoir une action
efficace.
M. PERREAULT: Une dernière question. Est-ce que votre
corporation, à cause de l'absence de titre réservé pour le
terme de technicien, a été témoin ou a eu dans ses
dossiers des cas de fraude de services de techniciens ayant affaire au
public?
M. LAFRENIERE: C'est un fait qui se produit presque tous les jours que
des gens s'annoncent comme techniciens. Même la corporation à ma
connaissance, depuis que j'en suis conseiller juridique, depuis environ un an
et
demi ou deux ans, a poursuivi plusieurs personnes qui
s'annonçaient dans leur commerce, dans leur entreprise comme T.D.,
techniciens diplômés ou T.P. et qui n'étaient même
pas membres de la corporation. S'ils ne l'étaient pas, c'est parce
qu'ils n'avaient pas un diplôme pour leur permettre de faire une demande
d'entrée dans cette corporation. Des centaines et des milliers de
personnes se disent techniciens dans certains domaines et trompent le public,
fraudent de façon flagrante et le plus souvent n'ont pas la
compétence de leur métier.
M. LE PRESIDENT: Le député de Jacques-Cartier.
M. SAINT-GERMAIN: Quelles sont les exigences pour qu'un individu puisse
faire partie de votre corporation? Quelle compétence exigez-vous de
lui?
M. LAFRENIERE: Actuellement, l'exigence, au point de vue de la
connaissance théorique, ce serait un diplômé du CEGEP.
Avant l'instauration des CEGEP, on exigeait qu'un type ait fait trois ou
quatre années dans les instituts de technologie, et avant les instituts
de technologie, dans les écoles techniques. Là, le type qui
posait sa candidature pour devenir membre de la corporation, avec le
diplôme qu'il brandissait, pouvait devenir technicien
diplômé. Mais des techniciens professionnels dont nous parlons,
pour être membres de la corporation, on exigeait qu'ils aient dix
années de pratique ou d'expérience dans leur domaine
particulier.
M. SAINT-GERMAIN: Est-ce que ce sont encore vos exigences?
M. LAFRENIERE: Ce sont encore les exigences, M. le
député.
M. SAINT-GERMAIN: Alors, les finissants des CEGEP, il leur faudrait une
expérience initiale avant de faire partie de la corporation?
M. LAFRENIERE: Les finissants des CEGEP, eux aussi, pourront être
considérés comme des techniciens diplômés.
M. SAINT-GERMAIN: Vous voulez dire immédiatement?
M. LAFRENIERE: Immédiatement, dès leur demande. Quant
à leur accorder le titre de professionnel immédiatement, ce sera
une question de réglementation qui est à venir, parce qu'on ne
peut pas bâtir sans avoir la permission.
M. SAINT-GERMAIN: Mais pour devenir un technicien professionnel, vous
demandez...
M. LAFRENIERE: Dix ans d'expérience.
M. SAINT-GERMAIN: ... dix ans d'expérience.
M. LAFRENIERE: Oui, à un poste de responsabilité dans le
domaine de sa propre discipline. Si, par exemple, quelqu'un veut être
technicien professionnel en mécanique, en génie civil, il faut
que, dans ce domaine de la construction, il ait travaillé pendant dix
ans.
M. SAINT-GERMAIN: Mais c'est loin de la qualification des finissants des
CEGEP.
M. LAFRENIERE: Comme je l'ai expliqué tout à l'heure, M.
le député, on a imposé ces exigences qui paraissent un peu
lourdes peut-être pour pallier la carence ou le manque de théorie.
Si l'on compare l'instruction ou la théorie que pouvait acquérir,
il y a quinze ans, dans une école technique, un technicien avec celle
qui peut être acquise aujourd'hui dans les collèges d'enseignement
général et professionnel, il y a une amélioration
extrêmement marquée. C'est la raison pour laquelle la corporation
exigeait dix années de pratique dans le domaine de sa
spécialité.
M. SAINT-GERMAIN: Les techniciens qui font partie de votre corporation
et qu'on appelle aujourd'hui les techniciens professionnels, ce sont des gens
qui, habituellement, le soir, s'ils n'avaient pas trop de scolarité, ont
été obligés nécessairement, pour maîtriser
leur technique, de suivre des cours de mathématiques, de physique, enfin
selon les techniques qu'ils avaient à maîtriser.
M. LAFRENIERE: La plupart d'entre eux ont été
obligés de passer par ce mot populaire qu'on appelle le recyclage pour
s'ajuster aux exigences de la corporation.
M. MARTEL: M. le député, juste pour clarifier un petit
point, la formation de base requise est de treize années de
scolarité, dont trois années de formation professionnelle et tous
les individus membres de la corporation ont ce minimum requis. Cependant, si
l'individu veut monter dans l'échelle des titres, la deuxième
étape est celle de technologue ou technologiste à qui on demande
une année de pratique reconnue par son employeur. Normalement, comme
vous le savez, la majorité des employeurs des techniciens ou
technologistes sont des ingénieurs ou des architectes ou personnes ayant
un titre universitaire. Ensuite, si l'individu veut continuer à monter
dans l'échelle des titres, il peut accéder au poste de technicien
professionnel, on lui demande alors dix années de pratique reconnue et
on lui demande aussi d'avoir soit un poste responsable administrative-ment ou
encore un poste dans le domaine technique ou parascientifique.
M. SAINT-GERMAIN: Alors, quel serait le titre du finissant du CEGEP qui
ferait partie de votre corporation?
M. MARTEL: A ce moment-là, il est technicien diplômé
de base.
M.SAINT-GERMAIN: Actuellement, si je suis bien informé, ceux qui
suivent les cours dans les CEGEP n'ont aucune expérience, ils ne
travaillent pas en coopération avec l'industrie...
M. MARTEL: Ceux qui suivent des cours dans les CEGEP ont des stages
réguliers à l'intérieur de leur formation professionnelle.
Ce ne sont pas que des théoriciens, ils font du laboratoire et ont
même des sessions à l'intérieur des industries.
M. SAINT-GERMAIN: Est-ce qu'il y a des sessions à
l'intérieur des industries?
M. MARTEL: Certainement.
M. SAINT-GERMAIN: Est-ce que c'est la majorité des finissants qui
les suivent? . M. MARTEL: Dans le domaine des techniques physiques,
certainement.
M. LE PRESIDENT: Je remercie la corporation et le président, son
représentant, son avocat, un ancien législateur de haute classe,
pour leurs mémoires et les réponses à nos questions. Je
pense qu'avec la permission de la commission, on pourrait siéger encore
une demi-heure ou trois quarts d'heure pour finir. Il y a deux autres
organismes à entendre seulement la Corporation des bijoutiers du
Québec ne vient pas la Société des conseillers en
relations industrielles et la Société Saint-Jean-Baptiste de
Montréal. Cela éviterait à ces gens de revenir à
une date ultérieure. Est-ce que j'ai la permission de la commission de
continuer?
Le prochain organisme sera la Société des conseillers en
relations industrielles. Pour les fins du dossier, j'ai reçu une lettre
de la Corporation des bijoutiers du Québec, ou plutôt une lettre
des avocats Lacroix, Bureau et compagnie: "Cher monsieur, nous
représentons la Corporation des bijoutiers du Québec, qui nous
transmet votre lettre du 11 avril dernier pour attention et réponse.
Nous avons déjà avisé le secrétariat, par
téléphone, il y a quelque temps, que notre client ne
désirait pas faire de représentations verbales à la suite
du dépôt de son mémoire. Nous voudrions que vous en preniez
note et avisiez les membres de la commission. Nous présumons qu'une
copie du mémoire sera tout de même remise à chacun
d'eux."
C'est-à-dire qu'aucune présentation orale ne sera faite.
Je parle de la Corporation des bijoutiers.
Je donne maintenant la parole au représentant de la
Société des conseillers en relations industrielles.
Société des conseillers en relations
industrielles .
M. DESLIERRES: M. le Président, M. Four- nier, mon nom est
Jean-Paul Deslierres et je suis régent de la Société des
conseillers en relations industrielles. Notre délégation est
composée d'un certain nombre de nos directeurs. Avec votre permission,
je laisserai immédiatement la parole à notre président, M.
Roger Martin, qui vous fera part de notre mémoire.
M. MARTIN: M. le Président, MM. les membres de cette commission,
c'est un honneur pour moi de me faire le porte-parole des membres de la
Société des conseillers en relations industrielles pour vous
remercier de l'invitation que vous nous avez faite de venir vous exprimer notre
point de vue relativement au projet de loi 250. Etant donné la
brièveté de notre mémoire, j'aimerais en faire la lecture
tout en l'agrémentant de commentaires que je jugerai à propos au
cours de cette lecture. Une fois la lecture complétée,
j'aimerais, avec votre permission, que M. Deslierres, le régent de notre
société, de même que M. Campeau qui en est le
vice-président, puissent venir à mon secours pour répondre
aux questions que vous pourriez me poser.
C'est en 1943 qu'a pris formellement naissance au Québec
l'enseignement méthodique des connaissances nécessaires au bon
exercice de la profession qui a pour objet si nous nous referons
à notre loi actuelle, l'article 2, deuxième alinéa, ou
encore à l'article 35f) du projet de loi 250 qui en est la
réplique d'exercer l'art d'établir, de maintenir et de
modifier les relations entre employés, entre employeurs ou entre
employeurs et employés.
C'est en 1946 que les premiers diplômes au niveau de la
maîtrise universitaire ont été octroyés au
Québec. Actuellement, les diplômes universitaires émis sont
les suivants: le doctorat, la maîtrise et le baccalauréat.
Québec est le premier endroit en Amérique du Nord où
l'enseignement de la profession de conseiller en relations industrielles a
été greffé aux sciences sociales, économiques et
politiques.
Le 12 mai 1961, à l'occasion d'un congrès tenu à
Montréal, les diplômés de l'université de
Montréal et de l'université Laval, titulaires de maîtrise
en relations industrielles, se sont groupés en association et ont
décidé, à l'unanimité, de demander au
législateur la constitution d'une corporation groupant les conseillers
en relations industrielles du Québec.
En 1963, soit 20 ans après le début des cours, la
profession a reçu statut et reconnaissance formelle de la part du
législateur.
La même année, la Loi de la Société des
conseillers en relations industrielles fut inscrite aux Statuts de
Québec sous la référence 11-12 Elizabeth 11, chap. 99.
Le statut initial fut par la suite amendé de façon
à réduire les cinq lettres du sigle MSCRI aux trois lettres
actuelles à savoir: CRI. Les lettres MS voulaient dire: Membre de la
société. Ces lettres ont été jugées
superflues et inutiles, et par conséquent, elles ont été
rayées du statut.
M. LE PRESIDENT: Je m'excuse. Je constate que vous lisez votre
mémoire mot à mot. Ce n'est pas exactement le but de la
présentation verbale. Ce que nous voulons que vous fassiez maintenant
c'est un résumé de votre mémoire. J'espère que tous
les membres, comme ceux qui sont ici, ont déjà lu votre
mémoire. Nous sommes prêts à poser des questions sur ce
mémoire. Nous voulons seulement avoir un bref exposé de ce que
vous pensez être le plus important de votre mémoire.
M. MARTIN: Avec votre permission, M. le Président, comme je le
disais tantôt étant donné la brièveté du
mémoire comme tel, j'ai pensé qu'il serait à propos d'en
faire des commentaires tout au long de la lecture. Evidemment, je viens de
couvrir l'aspect historique de la société. J'en conviens,
mais...
M. LE PRESIDENT: Oui, ce que je veux dire c'est que je suis certain que
les membres l'ont déjà lu. Faites ce que vous voulez, mais vous
avez droit à vingt minutes.
M.MARTIN: Si vous me permettez, M. le Président.
M. LE PRESIDENT: D'accord.
M.MARTIN: L'actuelle Société des conseillers en relations
industrielles du Québec groupe une élite d'environ trois cents
membres. Nous disons élite parce que, sans y être
légalement tenues, ces personnes acceptent de lier leur conduite
à un code de conduite professionnelle spécifique.
Pour être membre de la société, dit notre loi
statutaire, il faut que le candidat: 1) détienne une maîtrise ou
licence en relations industrielles d'une université de la province ou de
l'Université d'Ottawa ou tout autre degré universitaire reconnu
par la société ou ayant une expérience jugée
équivalente par les directeurs subisse avec succès les examens de
la société; 2) remplisse toutes les conditions requises par les
règlements pour son admission. 3) acquitte les cotisations
imposées par les règlements et, enfin, réside ou travaille
habituellement dans la province de Québec.
Actuellement, les membres de la Société des conseillers en
relations industrielles travaillent dans 48 villes différentes; 54 p.c.
d'entre eux à Montréal et 20 p.c, à Québec.
Le siège social de la société étant la ville
de Montréal, les affaires de la société sont
administrées par quinze directeurs et la société des
relations industrielles est membre du conseil interprofessionnel depuis sa
fondation.
La Société des conseillers en relations industrielles du
Québec fait sien le mémoire du CIQ tel que soumis le 8
février 1972 et en particulier par rapport à tout ce qui concerne
les pouvoirs de l'Office des professions, le respect du caractère
personnel des dossiers, le respect du secret professionnel, la nomination
d'assesseurs de la profession concernée auprès du tribunal
d'appel. Nous croyons qu'il serait heureux de remplacer l'expression à
l'alinéa 4 "qui le concerne" de l'article 84, par l'expression "son
propre dossier", expression qui par ailleurs correspond fidèlement
à l'expression du texte anglais "own record". La raison de cette
demande, c'est que nous avons présentement un certain nombre, et un
nombre important de nos membres, qui représentent ou qui peuvent
représenter à la table de négociation plusieurs employeurs
séparés quoique la négociation soit commune à tous
ces employeurs.
Or, il se trouve que les dossiers peuvent, en fait, concerner tous les
employeurs alors que nous voulons que seul le dossier de l'employeur
spécifique soit ouvert à sa demande.
Nous demandons que l'implantation d'un fonds d'indemnisation ne soit de
rigueur que pour les professionnels gardiens de biens d'au-trui.
L'article 27 du bill 250 stipule que chaque corporation a pour
principale fonction d'assurer la protection du public et qu'à cette fin
elle doit notamment contrôler l'exercice de la profession par ses
membres. Nous faisons nôtre cette opinion. Du reste, à ce jour,
l'esprit qui nous anime ainsi que nos activités, nos structures et le
mandat que nous octroie le législateur ont toujours
témoigné en ce sens. Actuellement, en effet, en vertu de notre
loi statutaire, nous avons le mandat explicite d'assurer la compétence
et la probité dans l'exercice de la profession. Jusqu'à
présent, le législateur a mis à notre disposition trois
moyens d'action. Premièrement, loi statutaire; deuxièmement, un
titre exclusif, à savoir conseiller en relations industrielles et, en
abrégé, le sigle CRI, et c'est reproduit à l'article 34f )
du projet de loi 250; troisièmement, un droit légal de censure
quant à tout geste professionnel posé par des non-membres de la
corporation et jugé incompatible avec les buts poursuivis par cette
dernière.
Voir à ce propos l'article 4 de notre loi statutaire qui se lit
comme suit: Cette société est constituée en vue d'aider
à l'avancement moral, professionnel, scientifique, social et
économique des conseillers en relations industrielles de la province et
d'assurer la compétence et la probité dans l'exercice de la
profession. Nous soumettons que ce droit de mise au ban au sujet de la conduite
des non-membres de la corporation nous a été octroyé parce
que dans ce domaine l'exclusivité de l'exercice de la profession est
illusoire présentement.
En effet, la formation même d'un syndicat oblige les officiers
élus à poser des gestes qui relèvent en fait des
activités professionnelles des conseillers en relations industrielles.
Il en va de même dès qu'un employeur a des salariés. Les
relations qui existent entre employeur et employé obligent l'employeur
à poser des gestes qui relèvent des activités
professionnelles de nos
membres. Avec le temps, nous espérons que le législateur
jugera à propos d'octroyer aux membres de notre société
l'exercice exclusif de certains gestes professionnels. Nous demandons le
maintien de notre sigle CRI et nous demandons que l'article 34 f) du projet de
loi 250 se lise comme suit: Nul ne peut utiliser le titre de conseiller en
relations industrielles, ni un titre quelconque comportant cette expression ou
l'équivalent, tel que conseiller en relations de travail, ou s'attribuer
les initiales CRI, s'il n'est détenteur d'un permis valide à
cette fin et s'il n'est inscrit au tableau de la Corporation professionnelle
des conseillers en relations industrielles. Nous soumettons que les expressions
"conseiller en relations de travail" et "conseiller en relations industrielles"
ont normalement cours, tant au niveau provincial, national qu'international et
ont donc une signification identique.
Nous demandons que cette partie de l'article 4 de notre loi statutaire
actuelle soit maintenue et qu'elle se lise dorénavant comme suit, et je
cite notre loi: Cette société est constituée en vue
d'aider à l'avancement moral, professionnel, scientifique, social et
économique des conseillers en relations industrielles de la province et
d'assurer la compétence et la probité dans l'enseignement et
l'exercice de la profession. Si, d'une part, la qualité de
l'enseignement au niveau universitaire n'offre aucun problème, d'autre
part, celle du niveau collégial nous inquiète beaucoup. Des
études spécifiques nous ont d'ailleurs amenés à
faire des représentations auprès des autorités
concernées. Nous soumettons que la protection du public requiert ce
changement.
Au cours de l'année 1970, les membres de notre
société ont été convoqués à une
journée d'étude au cours de laquelle nous avons
étudié le contenu du cours de gestion de personnel offert et
dispensé par un certain nombre de CEGEP de la province.
Le contenu du cours s'est avéré, selon l'opinion des
membres de notre société, inacceptable et l'enseignement,
d'après les rapports reçus, était dispensé par des
personnes un trop grand nombre de compétence douteuse.
Nous prétendons qu'il va de l'intérêt du public, si en fait
l'intérêt ou la protection du public est l'objectif visé
par le projet de loi 250, que nous ayons, en tant que société, un
droit de regard quant à la probité, à la compétence
de l'enseignement dans ce domaine.
Nous demandons que toute nouvelle exclusivité d'exercice
professionnel octroyée à l'une ou l'autre des corporations
professionnelles de cette province ne limite en rien les activités
professionnelles présentement exercées par les conseillers en
relations industrielles.
Nous sommes conscients qu'un certain nombre de corporations
professionnelles demandent l'exclusivité de certaines activités
qui, dans certains cas, pourraient couvrir des zones grises qui sont
présentement occupées par certains de nos membres.
MM. les membres de cette commission, nous sommes prêts à
servir, nous sommes prêts à travailler à assurer au public
un service marqué de compétence et de probité. Nous
demandons simplement au législateur de nous faciliter l'acquittement de
cette tâche en nous octroyant les moyens nécessaires pour ce
faire.
Messieurs, nous vous remercions de votre bonne attention et nous
espérons que nos demandes seront favorablement accueillies.
M. LE PRESIDENT: Le Solliciteur général.
M. FOURNIER: Vous demandez que l'on conserve l'article 4 de votre
ancienne loi, en prétendant que cet article vous donne le droit de
réglementer ou de régir des personnes qui sont
étrangères à votre profession.
M. MARTIN: Si on se reporte à l'article 4 de notre loi actuelle,
il est bien spécifique que le mandat de la société est
d'aider à l'avancement moral, etc., et d'assurer la compétence
et. la probité dans l'exercice de la profession. Habituellement, dans
les autres statuts, nous retrouvons l'exercice de la profession par ses
membres, chose qui a été, dans le temps, voulue comme
étant exclue, si on se reporte aux discussions du Conseil
législatif du temps.
M. FOURNIER : Est-ce que vous prétendez que vous avez des droits,
comme corporation professionnelle, sur des étrangers à votre
corporation professionnelle, en vertu de cet article-là?
M. MARTIN : Effectivement, nous l'avons déjà fait.
Nous avons déjà pris des mesures pour censurer les
non-membres...
M. FOURNIER: Oui, mais de quelle façon les censurez-vous? Quelles
sont les sanctions? Est-ce que vous avez des sanctions devant les tribunaux ou
quoi?
M.MARTIN: Question de fait, dans le cas particulier que j'ai en
tête je n'ai pas toutes les décisions de la
société en tête nous avons fait des
représentations auprès du ministre du Travail du temps pour
censurer une personne qui se disait représentant patronal et qui, selon
nous, était incompétente pour assumer cette fonction.
M. FOURNIER: Oui, mais est-ce que, même sans l'article 4, ces
représentations-là n'auraient pas pu être faites de la
même façon et avec le même succès auprès du
ministre du Travail?
M. MARTIN: Possiblement.
M. FOURNIER: Les conseillers ici me disent que cet article-là
n'ajoute rien aux droits de la corporation, relativement à censurer des
étrangers, tel que vous le mentionnez dans le texte.
M. MARTIN: Avec votre permission, je vais demander l'opinion de M.
Deslierres qui était précisément témoin et qui a
représenté notre société au Conseil
législatif du temps. Il pourra, en fait, vous communiquer les
discussions qui ont eu lieu à ce moment.
M. FOURNIER: Nous sommes simplement...
M. DESLIERRES: Seulement quelques secondes, c'est dans le cadre de la
sécurité du public. Si nous avons la responsabilité
d'avoir un oeil ouvert sur la conduite des gens, même quand ils ne sont
pas membres de la société, nous devrons nous en acquitter tout
simplement et nous prendrons attitude sur les méthodes parfois
frelatées qu'utilisent certains représentants patronaux ou
ouvriers alors qu'ils sont à la fois patrons et ouvriers. Dans la mesure
où ça peut être utile au public, on demande que ce soit
maintenu. Quant à nous, ça ne nous donne rien sauf une
responsabilité de plus.
M. LE PRESIDENT: Le député de Montmagny.
M. CLOUTIER (Montmagny): M. le Président, je jetais un coup
d'oeil tantôt sur le bottin que vous nous avez fait distribuer. Je
remarque que vous avez parmi vos membres le ministre du Travail et je remarque
aussi que vous n'avez que deux dames dont l'une, je crois, nous fait l'honneur
d'une visite ici aujourd'hui à la commission parlementaire. S'il n'y en
a que deux, est-ce qu'il y a une raison particulière, est-ce qu'elles
craignent l'admission au sein de votre auguste profession?
M. CAMPEAU: M. le Président, si vous me permettez, Aimé
Campeau, vice-président de la société. Je pense qu'il n'y
a d'autres raisons que la rareté du personnel féminin dans le
domaine. Peut-être pourrait-on poser la même question aux
députés?
M. CLOUTIER (Montmagny): Excellente réponse.
Je voulais poser une autre question. Vers la fin de votre
mémoire, au chapitre de l'exclusivité, vous dites ceci: "Nous
demandons que toute nouvelle exclusivité d'exercice professionnel
octroyée à l'une ou l'autre des corporations professionnelles de
cette province ne limite en rien les activités professionnelles
présentement exercées par les conseillers en relations
industrielles."
Est-ce qu'actuellement, dans la législation
déposée, les lois spécifiques, il y aurait quelques
définitions de champ d'exercice de la profession qui pourraient entrer
en conflit avec vos représentations?
M. MARTIN: En fait, cette représentation que nous faisons vise
plus spécifiquement, quoique c'est limité à la
connaissance que nous en ayons, cette demande conjointe qui est
déposée et qui concerne les corporations des orienteurs ou
psychologues et des assistantes sociales. Nous croyons que dans les
activités professionnelles de ces corporations, il y a des zones grises
où nos membres, question de fait, oeuvrent actuellement. Quand on parle,
par exemple, de l'embauchage, de la sélection, du placement dans
l'industrie, évidemment, c'est peut-être dans une zone grise avec
possiblement les psychologues.
Nous ne sommes pas opposés à des exclusivités de
ces professions. Tout ce qu'on demande c'est que, si jamais elles
étaient accordées, nous voulons qu'elles soient
spécifiques, pourvu que ça ne limite pas le domaine des
conseillers en relations industrielles tel qu'il est exercé
présentement.
M. CLOUTIER (Montmagny): II est important que vous le précisiez
parce que votre remarque dans le mémoire est très
générale. Je pense que le législateur a besoin d'avoir un
peu plus de précisions sur cette affirmation.
M.MARTIN: Précisément, c'était la demande conjointe
des trois corporations que nous lisions, entre parenthèses.
M. CLOUTIER (Montmagny): Merci.
M. LE PRESIDENT: Le député de l'Assomption, une
dernière question.
M. PERREAULT: J'ai tout simplement une petite question toute courte. Je
vois que vous avez un membre très influent dans votre annuaire, qui est
même directeur du conseil d'administration, M. Louis Laberge,
président, de la FTQ. Je veux savoir si ça aide dans la
négociation?
M. MARTIN: M. le Président, je pense que M. le
député de l'Assomption fait peut-être allusion à
certains événements récents, étant donné que
ces événements sont actuellement devant les tribunaux, je pense
que ce ne serait pas l'endroit pour en discuter.
M. LE PRESIDENT: Je remercie la Société des conseillers en
relations industrielles du Québec pour le bref exposé mais
très intéressant.
M. MARTIN: Merci, M. le Président.
M. LE PRESIDENT: La Société Saint-Jean-Baptiste de
Montréal.
Société Saint-Jean-Baptiste de
Montréal
M. ANGERS: M. le Président, MM. les membres de la commission,
comme président de la Société Saint-Jean-Baptiste de
Montréal, laissez-moi vous présenter d'abord les membres
qui m'accompagnent: M. Dollard Mathieu, président de
l'exécutif de la Société Saint-Jean-Baptiste de
Montréal; M. André Trudeau, vice-président de la
société; M. Gérard Turcotte, secrétaire et M.
Olivier Prat, qui a été le président du comité qui
s'est occupé du mémoire.
Je vous signale que la Société Saint-Jean-Baptiste a
déjà pas mal de problèmes à étudier et
à discuter. Elle ne s'occupe pas toujours de toutes les questions qui
peuvent être évoquées et, souvent, des questions comme
celles-ci ne font pas l'objet de son attention. Je dois vous dire tout de suite
d'ailleurs, vous avez vu le mémoire que nous ne
prétendons pas ici venir parler dans le même sens ou dans le sens
contraire des intérêts qui concernent les corporations
elles-mêmes. Elles sont venues vous exposer leurs problèmes, leurs
difficultés, leurs demandes et nous considérons que c'est
à elles de le faire.
Nous sommes intervenus parce que nos membres ont attiré notre
attention sur l'importance de certaines questions de principe mises en jeu par
le projet de loi et que, comme société nationale, nous sommes
particulièrement intéressés â ce que nous pouvons
appeler la qualité de notre société dans son mode
d'organisation. C'est un peu à ce titre-là, en pensant à
l'intérêt du public et à l'intérêt public que
nous avons décidé d'intervenir à la demande de nos
membres, soit de former un comité ad hoc qui a étudié la
loi et qui, effectivement, a soumis au conseil général le fait
que certaines questions méritaient d'être particulièrement
relevées ou discutées devant vous. M. Olivier Prat a pris la
présidence du comité, il a préparé avec le
comité ce mémoire qui a été soumis au conseil
d'administration, qui a ensuite été discuté avec les
présidents de nos sections. C'est ce résultat que M. Prat vous
exposera dans ses aspects techniques.
Je vous signale que, d'une façon générale, il est
clair que nos membres, comme beaucoup d'autres personnes pensant à
l'intérêt public, sont en général sympathiques
à un projet de loi qui a pour objet de mettre de l'ordre dans le milieu
corporatif et dans le milieu professionnel. Mais, évidemment, il y a des
formes d'ordre qui ne sont peut-être pas acceptables et c'est un peu en
ce sens que nous intervenons pour vous faire certaines remarques sur ce que
nous croyons discutable dans le projet de loi. Je donne la parole à M.
Prat qui expliquera les données du mémoire que vous avez
déjà.
M. PRAT: Je ne voudrais, vu l'heure avancée, reprendre la lecture
d'un mémoire, même court. Je voudrais simplement vous exposer
qu'après plusieurs lectures de ce projet de loi, nous nous sommes
posé sérieusement la question de l'opportunité d'avoir
concentré tant de pouvoirs entre les mains de l'Etat.
Notre suggestion et notre plaidoyer aujourd'hui, c'est qu'on pouvait
aisément réglementer et uniformiser les règles de
procédure présidant à l'accession à une
société, en somme les diplômes nécessaires, le
stage, les examens puisqu'ils sont à peine mentionnés, mais ils
sont quand même sous-jacents, et la surveillance de la qualité des
actes professionnels, la sanction des dérogations à la
déontologie ou à l'éthique ainsi que le droit du citoyen
au secret dans ses relations avec les professionnels, on pouvait faire tout
cela sans, pour autant, laisser ou permettre à l'Etat d'intervenir
à tous les stades.
Nous avons, sur ce sujet, conclu, en un sens, si vous voulez, qu'il y
avait comme une confusion volontaire dans la rédaction de ce projet de
loi entre l'intérêt public et la présence du cabinet ou du
conseil des ministres. A ce sujet et ce sera le seul passage de notre
mémoire que je voudrais lire, parce que le texte en a été
longuement discuté par la conférence des présidents
disons qu'il existe une confusion volontaire et fort regrettable entre la
notion d'intérêt public et l'autorité du cabinet. Nous
soumettons, en effet, que le principe d'autorité découle du
principe de protection, dans la mesure où le gouvernement ne
protège pas seul le public, il ne peut prétendre assumer seul
toute l'autorité. Dans la mesure où, en outre du gouvernement, il
existe des corps intermédiaires, syndicats, comités de citoyens,
sociétés d'entraide telles que la nôtre et encore,
d'ailleurs, ces corps intermédiaires ont tendance à
proliférer, peut-être, mais aussi à trouver une nouvelle
vitalité dans la province de Québec donc ces corps
intermédiaires qui partagent avec le pouvoir politique la charge de
protéger les citoyens contre les abus d'autres citoyens ou de corps
constitués ou même de l'Etat lui-même, dans la mesure donc
où existent ces autres corps qui partagent, il nous semblerait juste que
le gouvernement reconnaisse à ces organismes intermédiaires le
droit de partager les fonctions de contrôle et d'autorité à
l'égard des corps professionnels.
C'est à dessein que nous n'avons pas voulu entrer dans les
modalités d'une reconstruction d'une loi et d'une redéfinition
des charges ou de l'indépendance dont l'Office des professions devrait
jouir à l'égard du cabinet, parce que nous ne sommes ni
équipés ni requis, je pense, par vous, de reconstruire une
loi-cadre aussi importante. Mais nous soulignons qu'en plus de ce défaut
majeur qui affecte le code tel que proposé, il y a les deux
interventions du pouvoir exécutif tant dans le législatif,
à l'article 23, et plusieurs autres mémoires ont soulevé
ce que j'appellerais une incongruité.
Il faudrait absolument que l'article 23 soit aboli et que le corps,
office ou autre qui doit chapeauter l'organisme des professions soit
autorisé à présenter directement à
l'Assemblée nationale les projets d'amendements à la
législation.
D'autre part, nous voudrions également que l'intervention de
l'exécutif dans le judiciaire qui apparaît aux articles 149 et 150
soit définitive-
ment abolie et que l'appel de toutes les décisions des
comités de discipline soit entendu par les tribunaux de droit commun et
non pas par trois juges d'une cour Provinciale, désignés encore
une fois par le cabinet. Ils ne formeraient qu'une autre régie. Nous
croyons que plusieurs auteurs, récemment, ont dénoncé la
prolifération des régies. Nous croyons également que le
public est mieux servi dans la justice qu'il recherche lorsqu'il a affaire aux
tribunaux de droit commun. Donc, ce sont ces éléments que,
très brièvement et seulement au niveau des principes, nous avons
voulu souligner dans notre rapport. Nous sommes maintenant prêts à
répondre à vos questions, à moins que l'un de mes
collègues n'ait autre chose à ajouter.
M. LE PRESIDENT: Le Solliciteur général.
M. FOURNIER: Voici, en examinant votre mémoire et en entendant
vos remarques, je constate la similarité de l'objectif que vous avez
mentionné dans la page 8, soit la demande du retrait pur et simple du
projet de loi. Un seul autre organisme semble ne pas être allé si
loin que ça, mais demande d'être exclu, il s'agit du Barreau. Et
je constate en plus que l'organigramme ressemble étrangement à
celui que le Barreau a préparé pour sa revue.
M. PRAT: C'est exact, M. le ministre. L'organigramme nous avait
été remis au moment où nous avons étudié le
code à la première lecture. Nous avions trouvé que
c'était un exemple assez frappant, je ne sais pas s'il est propre au
Barreau, je crois qu'il est propre à toutes les professions
visées par le bill 250.
M. FOURNIER: Les différents organismes qui se sont
présentés, le Conseil interprofessionnel, etc., ont soumis
certaines représentations relativement à des modifications qui
pourraient être apportées au projet de loi. Vous, vous nous
soumettez deux modifications. D'un autre côté, vous demandez le
retrait du projet de loi et vos modifications ne touchent pas les domaines
particuliers. Vous êtes contre l'intervention aussi grande de l'Etat. Il
y a certainement des modifications qui peuvent être
présentées comme celles qui ont été
demandées, comme la modification des pouvoirs de l'office de
façon à transférer ce qui appartient au
lieutenant-gouverneur en conseil à l'office, en grande partie, etc.
Est-ce que vous ne pensez pas que cette loi-là peut être
bonifiée? Pensez-vous qu'elle est mauvaise dans son essence?
M. PRAT: En ce qui nous concerne évidemment, le fait qu'un
organisme indépendant du cabinet dominerait dorénavant la
structure des professions dans la province de Québec, réparerait
dans une large mesure, ce que...
M. FOURNIER: Si le pouvoir était donné à l'office,
vous ne demanderiez pas le retrait de la loi?
M. ANGERS: M. le Président, voici la question du retrait... Ce
qui est constaté, je crois que vous le verrez par le texte du
mémoire, c'est que tout le long de la loi il y a un esprit. C'est cet
esprit-là que nous avons essayé de souligner. Il y a toute une
série d'articles qui sont énumérés. Il n'y a pas de
propositions dans le mémoire, pas de modifications, parce que
précisément, nous croyons personnellement qu'il y a tellement de
choses à modifier pour éliminer du projet de loi toutes les
interventions, les présences du gouvernement partout, dans tous les
conseils, nomination par le lieutenant-gouverneur d'un représentant ici,
d'un représentant là, l'agencement des règlements, que la
demande de retrait, ce n'est pas une demande de ne pas voter le bill. C'est une
demande que nous trouvons pratique, parce que, quand il y a tellement de
modifications à faire dans un projet de loi, je crois qu'il vaut mieux,
après la première lecture, après avoir entendu tout le
monde, le reprendre et le rédiger, si vous acceptez les propositions et
en refaire l'esprit. A ce moment-là, si vous êtes pour
étudier 150 ou 200 amendements en Chambre, vous n'en finirez plus, il
vaut mieux refaire une rédaction. C'est dans cet esprit-là que
nous demandons le retrait. Ce n'est pas, comme je vous l'ai dit au
début...
Nous sommes d'accord qu'il faut voter un ordre des professions mais
partout dans cette loi l'Etat est trop présent. L'Etat est trop
présent, je ne dirais pas comme souverain, comme régulateur, il
est trop présent comme personne participante dans les conseils et c'est
partout dans le projet de loi. Alors, nous vous signalons la chose et je pense
que, si vous relisez le projet de loi dans cet esprit-là, vous allez
vous apercevoir qu'il y a beaucoup d'amendements à faire, qui sont
presque tous des amendements de concordance, si vous voulez, mais c'est le
problème que cela pose et c'est dans ce sens-là que nous
demandons le retrait. Retrait pour rédiger un texte que vous
représenterez ensuite et qui serait, à mon sens, plus conforme
à l'esprit que nous voudrions voir, plus de liberté, plus
d'autonomie des corps, sans vouloir enlever le droit de l'Etat
d'intervenir.
M. FOURNIER: M. Angers, le projet de loi a été
préparé conformément à une étude des
professions qui avait été faite dans laquelle il est
mentionné, dans l'avant-propos, que le Québec est probablement la
seule province ou le seul Etat où l'Etat lui-même a laissé
totalement les professions entre les mains des corporations professionnelles et
cela ne se retrouve pas dans les autres législations.
A ce moment-là, on dit: II faut établir certains
mécanismes et aussi établir une certaine
uniformité. C'est dans ce sens que la loi a été
faite. Vous dites: Retirez le bill. Mais si, d'un autre côté,
l'office est imbu de pouvoirs de nomination et qu'il y ait certaines
modifications d'espèce, est-ce que ça ne concorde pas avec les
vues que le gouvernement devrait avoir pour mettre de l'ordre dans une telle...
Il y a 200,000 personnes qui sont impliquées dans ça.
M. ANGERS: Je répète, quand bien même vous donneriez
le pouvoir à l'office, ce que nous trouvons plus grave, c'est la
présence des représentants de l'Etat dans toutes les
corporations, dans les comités de discipline, dans le
secrétariat. Autrement dit, il y a dans ce projet de loi-là,
peut-être inintentionnellement, une telle présence de l'Etat
partout que, si je vous renvoyais à certains écrits des
années 1940 à 1950, je serais obligé de vous dire qu'il y
avait à ce moment-là des gouvernements qu'on critiquait
fortement, que les esprits libéraux critiquaient fortement, parce que
leur système était précisément d'introduire des
représentants dans tous les corps intermédiaires de l'Etat. C'est
grave à mon sens, et je ne crois pas, comme l'a dit M. Prat, que ce soit
nécessaire au contrôle de l'Etat. Evidemment, ça commence
par l'office, bien sûr, mais je ne crois pas que ce soit
nécessaire au contrôle de l'Etat et à
l'intérêt public même. Je crois que ce n'est même pas
efficace, parce que je crois que la présence d'un représentant de
l'Etat dans ces conseils peut tout simplement les rendre plus ou moins
inopérants, en faire des espèces de machines qui vont
régler des problèmes officiellement, pendant que les vrais
problèmes se discuteront à l'extérieur dans des caucus
où le représentant de l'Etat ne sera pas. Autrement dit, c'est
comme si j'avais quelqu'un chez moi, dans ma maison, et que je n'aurais le
droit de rien dire contre qui que ce soit. Dans une corporation, on va pouvoir
discuter des problèmes, mais il va y avoir des représentants de
l'Etat partout, c'est toute cette pénétration de l'Etat qui est
à l'intérieur, et non pas comme le souverain qui ordonne et qui
arbitre, que nous avons voulu souligner à votre attention, qui nous
paraît grave et qui ne se règle pas uniquement par l'amendement de
l'office.
M. FOURNIER: Lorsque vous mentionnez les représentants de l'Etat,
nous parlons de représentants du public et nous croyons qu'à
l'intérieur des corporations professionnelles il doit y avoir une
certaine ouverture, que ce ne sont pas des sociétés
secrètes qui agissent à leur bonne guise. Nous croyons qu'il faut
instaurer un système par lequel le public aura une certaine
représentation, où les fenêtres seront ouvertes.
Il ne faut pas penser à une intervention de l'Etat telle quelle.
Ce n'est pas le but et ce n'est pas ce que nous recherchons.
Nous tentons d'établir une participation ou du moins que le
public soit au courant et que sa protection soit assurée.
M. PRAT: L'ouverture à l'égard du public a
été notée comme une amélioration du système
mais nous ne la voyions pas dans le texte tel que rédigé. Si vous
nous parlez du public et si l'office est représentatif du public et que
c'est lui qui délègue et que l'Etat en est absent et ne fait que
superviser d'après son pouvoir souverain, ce que nous ne nions bien
sûr pas, alors nous sommes tout à fait d'accord.
M. ANGERS: Mais, à ce moment-là, comme nous le signalons,
vous ne pouvez éviter le problème. Comme la nomination est faite
par le gouvernement, ça implique beaucoup de choses, c'est que le
gouvernement qui nomme. Alors, demandez aux corps intermédiaires de
nommer des représentants. Je sais que ces temps-ci ce n'est
peut-être pas populaire, mais demandez aux syndicats d'avoir des
représentants. Demandez aux associations de consommateurs de nommer des
représentants.
Autrement dit, comptez sur les corps intermédiaires.
M. FOURNIER: Les élus du peuple ont toujours un mandat quand
même.
M. ANGERS: Le mandat des élus du peuple ne leur donne pas le
droit de faire des choses qui ne sont pas conformes à
l'intérêt public. Nous sommes dans un grand problème,
à mon sens, vous savez. Vous ne pouvez pas empêcher qu'une
nomination du gouvernement soit une nomination du gouvernement. Cela implique
toutes sortes de choses. On ne peut pas l'éviter, vous ne pouvez pas
l'éviter. On ne vous en blâme pas, c'est fait comme ça.
Je crois que c'est là qu'il y a une densité de
pensées à mettre dans cette affaire-là. Si le public doit
être représenté, je ne crois pas que le gouvernement soit
le seul interprète valable des droits du public dans une organisation
comme celle-là. Cela pose d'autres problèmes qui sont très
sérieux, à mon sens. Très sérieux, parce que c'est
un style d'organisation que nous sommes en train de faire. Je vous rappelle que
ce style-là a été je ne veux pas employer de gros
mots mais il faut être objectif sévèrement
critiqué par les esprits libéraux dans les années trente
à quarante et on avait un mot pour ça, n'est-ce pas? Je
n'hésite pas à vous dire que j'ai toujours été
partisan du corporatisme, je le suis encore. Mais dans le temps, si vous voulez
retrouver mes écrits, je condamnais fortement un corporatisme où
il y aurait justement ce genre de délégués de l'Etat dans
les corps intermédiaires qui représentent les
intérêts professionnels.
C'est ce principe-là que ça pose même si je
comprends votre idée, vous croyez que le lieutenant-gouverneur,
ça va être le public vous savez bien que ce n'est pas
complètement vrai, c'est autre chose aussi le lieutenant-gouverneur.
C'est la politique, ce sont les parties, on ne peut pas éviter
ça. Alors, comptez un peu
plus sur les corps intermédiaires, c'est un peu ce qu'on vous
dit.
M. LE PRESIDENT: Le député de Montmagny-
M. CLOUTIER (Montmagny): M. le Président, j'ai eu l'occasion
moi-même de vérifier la véracité des paroles que
vient de prononcer M. Angers, savoir s'il était un apôtre du
corporatisme, j'étais un de ses élèves à ce
moment-là, de 1944 à 1949.
De toute façon, je ne veux pas souligner un aspect
péjoratif, mais disons que la Société Saint-Jean-Baptiste
n'a pas l'habitude d'avoir peur de l'intervention de l'Etat, c'est une
constatation. Là, c'est la forme d'intervention de l'Etat que vous
craignez; ce n'est pas le principe, c'est la forme.
M. ANGERS: Exactement.
M. CLOUTIER (Montmagny): Cet aspect d'ailleurs, vous avez
probablement suivi les travaux de la commission, même si vous
n'étiez peut-être pas physiquement ici, vous avez lu les rapports
des séances de la commission a été souligné
par plusieurs organismes qui sont venus devant la commission. Même si les
corporations professionnelles sont des créatures du gouvernement
en fait, elles doivent leur naissance au gouvernement qui accepte, à un
moment donné, une législation cela ne veut pas dire,
évidemment, que le gouvernement doit être présent partout
par des nominations. Mais, tout de même, on a vécu le
problème dans d'autres législations importantes. Récemment
dans le bill 65 concernant les services sociaux et les services de
santé, on a vécu le même problème. Il n'est pas
facile, même si en principe nous sommes d'accord, autant que possible,
pour que le public lui-même procède à certaines
nominations, à certains choix, en pratique, nous sommes un peu plus
limités dans les modalités. Quand il s'est agi, dans le bill 65,
M. le Président, comme référence, de choisir des
administrateurs au sein des conseils d'administration, il a fallu, à un
moment donné, se résoudre à les puiser dans la
clientèle de ceux qui utilisent les services. Mais ça
entraîne des modalités assez onéreuses et comment les
concrétiser, c'est le problème. A un moment donné,
ça va devenir un problème, même si le législateur a
accepté une telle modalité.
Je pense qu'il faut tout de même avoir un certain
équilibre. Il ne faut pas non plus avoir une crainte
exagérée des nominations, mais quand on les retrouve en trop
grand nombre, c'est là qu'il y a danger d'un contrôle. Mais qu'il
y en ait le moins possible, tout le monde est d'accord là-dessus. Il
s'agit de trouver une ligne de démarcation qui n'est pas facile pour le
législateur. La solution idéale, évidemment, c'est que le
public, la population prenne ses responsabilités, qu'à
l'intérieur des corporations professionnelles elles-mêmes on
trouve des délégués, des gens qui sont prêts
à assumer des responsabilités, à exercer, au nom du
public, ce contrôle. Je pense que là-dessus on s'entend, on est
parfaitement d'accord et j'imagine que le législateur voudra... Je ne
pense pas qu'il soit nécessaire de retirer le projet de loi. Vous avez
écrit ça il y a quelques semaines, avant que les travaux de la
commission parlementaire ne commencent.
Je ne sais pas si vous l'écririez encore si vous aviez
assisté à toutes les séances de la commission
parlementaire. Je pense que le législateur est capable, en bonifiant la
législation à plusieurs endroits, d'éliminer un danger qui
est réel et que vous avez souligné.
Et je pense que nous n'accepterions pas que cela soit l'intention du
législateur d'exercer ce contrôle à partir de l'appareil
gouvernemental, alors qu'il peut s'exercer autrement et que, pour la protection
du public, il n'est pas nécessaire de procéder de manière
que le lieutenant-gouverneur en conseil nomme un tel et paie lui-même les
services rendus. Vous avez véritablement souligné un danger mais
je crois que, pour bonifier la loi, avec les très bons mémoires
qui sont présentés devant la commission en nombre et en
qualité, les suggestions qui seront faites, il sera possible de tirer
une excellente, du moins la meilleure législation possible.
M. LE PRESIDENT: Le député de Gaspé.
M. FORTIER: M. Angers, si je comprends bien, ce que vous craignez dans
cette loi, ce n'est pas seulement la participation de l'Etat mais plutôt
le contrôle. Est-ce que c'est bien cela?
M. ANGERS: Oui, une forme de contrôle... M. FORTIER: Dans le
sens...
M. ANGERS: ... qui est subtile évidemment, parce qu'il est bien
clair que, nulle part, l'Etat ne sera en majorité dans ces conseils.
Mais il est présent partout. A mon sens, l'Etat doit respecter
l'autonomie de ces corps et voir à l'organisation d'un système
qui les amène à fonctionner normalement dans
l'intérêt public, mais quand même, en restant à
l'extérieur et en leur laissant leur compétence, leur
liberté. J'imagine que, dans le projet de loi, on s'est placé
d'un point de vue pratique en pensant aux difficultés administratives,
et autres comme le soulignait M. Cloutier. Mais, nous vous signalons que cela
comporte de graves dangers et qu'il devrait y avoir un moyen de trouver
d'autres solutions pour intégrer le public. C'est vraiment gênant
que le lieutenant-gouverneur, que le cabinet intervienne partout comme cela
pour nommer, pour contrôler, pour surveiller de l'intérieur. C'est
à cela que nous nous opposons parce que cela peut aller très
loin. Une fois parti, pour-
quoi ne pas en mettre partout? Pourquoi n'y aurait-il pas de
représentants du lieutenant-gouverneur en conseil dans les syndicats,
dans les compagnies? C'est le même principe partout,
l'intérêt public est en jeu partout dans ces choses. Cela pose un
grave problème. Nous voulons attirer votre attention sur le
problème que comporte cette habitude de toujours faire des nominations
du gouvernement à l'intérieur des organismes. D'ailleurs,, M.
Cloutier parlait des organismes de santé. Il y a déjà
plusieurs années que nous voyons les choses évoluer, que ce
problème est soumis à notre attention mais, d'une chose à
l'autre, nous avons d'autres questions à régler. Cette fois-ci,
ce sont nos membres qui ont insisté davantage et nous nous y sommes mis.
Je crois que c'est un exemple qui s'applique à bien d'autres
endroits.
M. FORTIER: Est-ce que vous admettez tout de même que le
gouvernement doit avoir une certaine surveillance sur les corporations?
M. ANGERS: C'est incontestable.
M. LE PRESIDENT: Le député de Bourget.
M. LAURIN: Je comprends vos préoccupations qui rejoignent celles
que j'avais exposées, d'ailleurs, dès la première
réunion; éviter un danger qui est celui de la
prolifération anarchi-que des professions d'une part, en créant
un autre danger qui est celui de l'intrusion bureaucratique, tatillonne,
constante, technocratique, de l'Etat à l'intérieur des
professions. Je trouve quand même votre solution peut-être un peu
draconienne, je la trouve moins draconienne après vos explications,
puisque vous dites qu'au fond ce n'est pas le retrait du projet de loi que vous
voulez, c'est plutôt une refonte du projet de loi.
Vous avez dit que vous étiez d'accord sur le rôle de l'Etat
quant à la surveillance, quant à des guides ou des orientations
générales sur les professions, quant à la
nécessité d'une planification des professions par en haut, dans
le sens de l'uniformisation des conditions. Donc, dans ce sens-là, c'est
moins draconien que cela en a l'air à première vue.
Pour ma part, j'aurais préféré, comme vous l'avez
fait souvent pour d'autres projets de loi même si cela comporte un effort
additionnel, que vous nous présentiez des suggestions, des solutions,
particulièrement en ce qui touche les domaines les plus importants.
Par exemple, avez-vous l'impression, à la lecture du projet de
loi 250, que le représentant nommé par l'Etat, à
même les représentations qui peuvent lui être
suggérées par les corps intermédiaires, une fois qu'il est
nommé, agit à l'intérieur des corporations comme une sorte
de représentant de l'Etat qui doit faire rapport à l'Etat, comme
un espion de l'Etat? Par exemple, à supposer que vous auriez pu
étudier tous les amendements que vous aimeriez apporter au projet de
loi, voilà un des points sur lesquels j'aurais souhaité que vous
apportiez une définition plus claire, plus explicite.
M. PRAT: Si nous avons bien lu l'article qui concerne le
délégué ou les deux, trois et quatre
délégués au conseil ou bureau des professions, nous
n'avons rien trouvé qui l'oblige à faire rapport et nous n'avons
trouvé qu'un droit qu'il avait de prendre part aux
délibérations et de voter. Cependant, nous voyons mal qu'un
représentant délégué par l'Etat ne fasse rapport
à personne. Tout délégué doit rendre des comptes
et, d'ailleurs, nous sommes tout à fait d'accord que les corporations
professionnelles doivent rendre des comptes au public. Lorsque nous parlons de
l'Etat et là se pose le débat nous pensons
davantage à un office libre qui fait rapport et qui demande des
améliorations de la législation à l'Assemblée
nationale. Nous demandons une aussi grande séparation que possible entre
le pouvoir exécutif et le pouvoir de contrôle de l'activité
professionnelle ou de la structure professionnelle.
Nous ne sommes pas d'accord, et je m'excuse de le dire comme ça,
sur le fait que de l'Etat doivent provenir les modifications aux structures
dans le sens où le voit le projet de loi 250. Nous croyons qu'il y a un
peu d'excès dans les structures et nous ne voulions pas entrer justement
dans la refonte de la loi. Il nous semble que ces structures finiraient par
peser si lourd qu'elles risquent, par exemple dans le cas des professions
à titre réservé, de créer un exode. Nous avons
assisté cet après-midi et nous sommes en note contraire avec ceux
qui demandaient à entrer dans le cadre du bill 250. Je me demande s'ils
ont bien compris le poids des structures qui pèseront
éventuellement sur la relation que leurs membres ont avec leurs clients,
donc le public, et qui feraient que peut-être les membres en question,
après avoir été tracassés par une administration
technocratique, comme vous le mentionnez, quitteraient carrément les
professions à titre réservé pour former des associations
volontaires où ils ne seraient pas soumis aux mêmes
contraintes.
Donc, toutes ces contraintes forment ce qui est peut-être la
facilité à court terme pour le gouvernement. C'est une
façon d'imposer une règle, mais c'est la facilité à
court terme. A long terme, ce n'est pas du tout la facilité. Nous
croyons que, si l'Etat prend l'habitude d'intervenir à tous les niveaux
des relations humaines dans la province de Québec, la qualité de
la vie au Québec va être radicalement modifiée. Cet
exemple-ci nous a paru suffisamment pertinent pour qu'on le souligne
immédiatement avec une certaine rigueur et avec peut-être des
termes qui sont un peu excessifs, tel que le retrait de la loi. Mais nous
pensons que la refonte qui devrait avoir lieu devrait être en profondeur
avant que l'on ne prenne cette solution de facilité à court terme
comme étant la solution définitive; car, à la fin, on
pourrait se retrouver dans un Etat qui
serait presque irréversible et où le pouvoir, enfin, je ne
voudrais pas citer une boutade, mais on dit que le pouvoir corrompt, le pouvoir
absolu tente infiniment et corrompt infiniment. Alors, il ne faudrait pas qu'on
arrive à cette intervention générale et qu'on adopte cette
solution de facilité régulièrement dans la
législation.
M. LAURIN: Avant de poser ma deuxième question, j'aimerais quand
même pour éclairer celle que je vous posais, demander si, dans
l'esprit du ministre, un représentant de l'Etat à la corporation
est obligé de faire rapport ou s'il est là comme... ?
M. FOURNIER: Ce n'est pas l'intention, la rédaction n'impose
nulle part, c'est une nomination et, à partir de cette nomination,
l'Etat est satisfait...
M. LAURIN: II fonctionne d'une façon autonome.
M. FOURNIER: ... que son représentant représentera
l'intérêt du public.
M. LAURIN: Ma deuxième question, M. Angers ou M. Prat, si vous
aviez eu le temps ou la volonté de présenter des amendements
précis, est-ce que vous auriez recommandé, par exemple, que le
lieutenant-gouverneur en conseil se départisse en tout ou en partie, pas
en tout, mais beaucoup plus qu'il ne le fait dans le projet de loi, de son
pouvoir de réglementation pour le laisser à l'office?
Si oui, sur quels points surtout?
M. PRAT: Nous avions pensé que le pouvoir de
réglementation de l'article 169 soit effectivement
référé à l'office sur recommandation de la
corporation intéressée et avec l'assentiment du
lieutenant-gouverneur en conseil. Encore une fois, en concevant un office
réellement et structurellement indépendant du cabinet, faisant
rapport comme cela a été suggéré, par exemple, par
le conseil interprofessionnel au même titre que le protecteur du citoyen.
Nous voyons ici un office qui ne serait pas formé de trois membres parce
que la tâche de cet office est considérable. Nous croyons que, si
le législateur a pensé qu'une corporation de 500 membres avait
droit à huit administrateurs, celles de plus de 500, à 16 et
à 24, alors l'office, qui aura près de 100,000, peut-être
150,000 si les requêtes de cet après-midi étaient
agréées administrés sous son autorité,
à trois hommes, ne pourra pas avoir suffisamment d'imagination pour
concevoir tous les amendements à la législation, pour analyser et
jauger à leur juste valeur les demandes de réglementation
très précises et au fond très disparates qui lui seront
formulées par toutes les professions. Nous voyons un office beaucoup
plus large et encore une fois beaucoup plus représentatif des
différentes tendances du public.
M. LAURIN: Dans cette optique, réserveriez-vous quand même
au lieutenant-gouverneur en conseil le droit d'approbation final des
règlements rédigés par l'office avant qu'ils ne soient mis
en vigueur.
M. PRAT: Nous avions résumé rapidement les sept principaux
aspects qui touchent l'intérêt public à notre sens,
c'est-à-dire la qualité du membre, donc l'accession à la
profession, la qualité de sa pratique, donc la surveillance, la
déontologie, le secret professionnel, même le fonds
d'indemnisation et la définition de l'indemnisation du public par
rapport à l'acte professionnel fautif. Sous ces aspects, il semble
évident que le lieutenant-gouverneur devra ratifier, de même que
dans le domaine du tarif. On ne doit pas imposer au public une charge
financière sans que le lieutenant-gouverneur ait été
appelé à la ratifier. Dans tous ces cas, nous aimerions que
l'office suggère la législation après avoir
consulté les corporations ou la corporation touchée directement
et que le lieutenant-gouverneur ne touche qu'aux sujets vraiment majeurs et qui
intéressent le public. Certains n'intéressent pas le public, ce
sont des questions de chicanes administratives au sein même de la
corporation.
M. LAURIN: Une dernière question, est-ce que votre comité
a l'intention de continuer son travail, de le poursuivre dans le sens de la
confection d'amendements et de faire parvenir ce travail-là à la
commission?
M. PRAT: Nous serions certainement prêts à le faire.
M. LE PRESIDENT: Au nom de la commission, je veux remercier les
représentants de la Société Saint-Jean-Baptiste. On
ajourne la commission sine die.
(Fin de la séance à 18 h 52)