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Commission spéciale pour l'étude du bill
29
Loi concernant la copropriété des
immeubles
Séance du 14 août 1969
(Dix heures neuf minutes)
M. BERGERON (président de la commission spéciale
chargée de l'étude du bill 29): A l'ordre, messieurs! Tout
d'abord, je voudrais souhaiter la bienvenue à tous ceux qui
s'intéressent aux problèmes de la copropriété. Nous
tenons ce matin notre quatrième séance. Je pense que pratiquement
tous les organismes intéressés ont eu l'occasion de se faire
entendre, sauf deux exceptions, si les renseignements que J'obtiens sont
exacts. Alors, avant de demander à quiconque voudrait se faire entendre
de s'identifier. Je voudrais d'abord, messieurs les membres de la commission,
vous demander si vous acceptez que le député Lavoie, de Laval,
soit remplacé par le député de Taillon, M. Leduc, et que
le député de Bellechasse, Me Loubier, soit remplacé par M.
Sauvageau. Il y a d'autres remplacements...
M. PAUL: M. le Président, je crois que ces deux collègues
constituent de précieuses et indispensables acquisitions pour notre
commission.
M. LEDUC (Taillon): Je remercie le ministre de la Justice de son
appréciation très juste des valeurs.
M. LE PRESIDENT: Alors, que quelqu'un voudrait ce matin se faire
entendre? Nous avons l'intention, si quelqu'un a des recommandations
spéciales, de les entendre pour ensuite ajourner, et nous poursuivrons
notre étude du bill 29 i une date ultérieure. A ce
moment-là, je pense que nous pourrons procéder article par
article et à huis clos.
M. HARVEY: Est-ce qu'il y aurait moyen de remplacer le nom de M. Tetley
par celui de Mme Claire Kirkland-Casgrain?
M. LE PRESIDENT: Certainement. M. PAUL: Adopté.
M. PIGEON: M. le Président, Je suis Roger Pigeon, avocat. Je
représente la ville de Montréal. Nous aurions des remarques
à soumettre à la commission, surtout en ce qui a trait à
l'article 442 m), c'est-à-dire où le projet prévoit que,
pour fins d'évaluation, de taxation et de cotisation, on nous demande de
procéder à une évaluation séparée de chaque
fraction de l'immeuble. Nous n'avons pas d'objection sur le principe de la
division de la taxe, mais la question de la division de l'évaluation
totale de l'immeuble, c'est-à-dire du terrain et de la bâtisse,
présente pour les estimateurs, au point de vue technique, de
sérieuses difficultés. Je peux continuer?
M. BERGERON: Oui, oui.
M. PIGEON: Maintenant, je ne sais pas si vous êtes prêts
à m'entendre immédiatement là-dessus c'est aux
remarques générales.
M. PAUL: Nous sommes prêts.
M. PIGEON: Voici, il ne faut pas oublier que l'estimateur de la ville a
des devoirs à remplir. Il doit dresser, confectionner son rôle
suivant les exigences de la loi. Actuellement, l'estimateur évalue les
terrains et les bâtisses et, après avoir décrit le terrain
et la bâtisse, il inscrit soit le nom du propriétaire, soit, dans
certains cas, le nom d'un grevé de substitution. A la ville, nous
enregistrons aussi l'emphytéote, que nous considérons, à
toutes fins pratiques, comme un propriétaire. Nous disons ceci je
pense bien que nous sommes tous d'accord en ce qui concerne les parties
communes d'un immeuble détenu en copropriété que
nous ne pouvons pas les diviser physiquement ou matériellement, si vous
voulez. La seule division que nous pourrions concevoir, c'est une division
légale ou juridique, qu'il faut considérer quand même, si
nous voulons reconnaître ou réglementer la
copropriété.
Vous avez ici, dès le début, un problème qui se
pose pour l'estimateur. Car il ne faut pas oublier que les parties communes
d'un immeuble ont une influence, sont interreliées avec les parties
privatives ou indivises qui, elles, peuvent être désignées
assez facilement, même matériellement ou physiquement. Que fera
l'estimateur? Est-ce qu'il évaluera séparément les parties
communes et, ensuite, les fractionnera entre tous les copropriétaires?
Je pense que la meilleure solution en ce qui concerne
l'évaluation des parties communes serait de s'en tenir au droit
enregistré au bureau d'enregistrement, parce qu'au bureau
d'enregistrement, mon nom apparaîtra, le nom d'un copropriétaire
apparaîtra comme étant copropriétaire d'un immeuble dans
une proportion, à titre d'exemple, de l/50e ou de l/100e, suivant le
cas.
Cette fraction, qui n'est qu'une fraction mathématique, qui ne
représente pas la valeur, n'est qu'une relation. Cette fraction
comprendra si j'ai bien compris à la lecture du texte de loi
une quote-part dans les parties communes et aussi une certaine partie
exclusive de l'immeuble.
Ensuite, en ce qui concerne le terrain, c'est assez difficile de dire
qu'un terrain peut être considéré autrement qu'une partie
commune, du moins au point de vue de l'évaluation. Vous savez, on
imagine difficilement un immeuble qui serait construit « en-dessus
» du sol, mais qui en définitive n'aurait pas besoin du sol pour
faire reposer ses fondations. La division que nous faisons dans l'esprit est
peut-être utile, elle peut exister; c'est toujours une division
juridique.
En somme, pour le fractionnement du terrain, nous sommes encore en face
d'une division purement Juridique qui est un peu fictive, qui est
légale, mais physiquement et matériellement c'est absolument
impossible. C'est le deuxième problème au point de vue de
l'évaluation.
Le troisième problème concerne l'évaluation de la
quote-part exclusive détenue par chacun des copropriétaires. Pour
un évaluateur, dans un Immeuble, toutes les parties d'un immeuble, d'une
bâtisse sont reliées entre elles. Je me permettrai cet exemple, M.
le Président: Si vous prenez une automobile et que vous enleviez le
moteur, que vaudront séparément le moteur et la carrosserie?
Parce que lorsque vous réunissez les deux éléments, vous
créez une utilité, un désir pour des acheteurs
éventuels. Et cela ne sera pas la même catégorie que celui
qui achète des carrosseries pour les transformer, pour en faire d'autres
automobiles. C'est un peu la même chose pour les immeubles. Nous avons
exactement le même problème.
En résumé, nous proposerions ceci: Enlever de l'article
442m du projet les mots « d'évaluation et »,
c'est-à-dire que l'article se lirait comme suit: « Chaque fraction
de l'immeuble forme une entité distincte pour fins d'imposition de taxes
et cotisations, y compris les taxes municipales et scolaires ». La loi,
en d'autres termes, ne considérerait plus que, pour fins
d'évaluation, chaque fraction de l'immeuble doive être
considérée comme une entité distincte.
M. PAUL: M. Pigeon, quel serait le critère de base pour fixer
alors l'évaluation d'une partie de l'immeuble si vous ne vous
référez pas au rôle d'évaluation?
M. PIGEON: Nous pourrions, pour le moment, enlever... En enlevant cet
article, qu'est-ce qui va se produire en pratique? Vous savez, il y a un fait
qu'il ne faut pas oublier. La Loi de la copropriété nous arrive
avant les faits et nous sommes obligés d'essayer de faire pour le mieux.
Actuellement, il n'existe pas de marché de fractions d'immeubles; c'est
un fait.
M. PAUL: C'est vrai.
M. PIGEON: Il en existera, le marché se développera d'ici
cinq ou dix ans. Qui peut prédire l'importance de ce marché?
L'estimateur est pris dans la situation où il ne peut faire absolument
aucune comparaison quand il s'agit d'évaluer la quote-part d'un
copropriétaire, parce qu'il n'y a pas de marché. Il est
obligé d'avoir recours à des comparaisons indirectes,
imparfaites, comparer avec des maisons de rapport ou quoi que ce soit. Oui?
M. LE PRESIDENT: Est-ce qu'à ce moment-là l'estimateur ne
pourrait pas se référer î la déclaration?
M. PIGEON: D'accord. Je suis d'accord que l'estimateur doit se
référer à la déclaration. Mais là encore,
vous savez, on est pris dans deux contextes différents. Si j'ai bien
compris le projet de loi, il semble que les copropriétaires ont une
certaine latitude, au début, pour déterminer quelles seront les
parties communes et les parties privatives.
Nous n'avons pas d'objection à ce que l'estimateur s'en tienne
à ce qui est enregistré au bureau d'enregistrement. Nous n'avons
pas d'objection. Le mieux que nous puissions faire pour le moment, 3 cause de
l'absence d'un marché des immeubles de cette nature, est que
l'estimateur évaluera globalement le terrain et la bâtisse et
pourra consigner au rôle la quote-part qui revient dans cette valeur
totale à chacun des copropriétaires. Pour le moment! Et si dans
cinq ans le marché se développe, l'estimateur pourra
procéder autrement.
Sans cela, vous savez, on le force un peu et on le lie par des
méthodes. C'est très difficile, vous savez. Le domaine de
l'évaluation est un domaine tout à fait différent. Prenez
une bâtisse. Si vous coupez une bâtisse en deux, quelle est la
valeur de chacune des parties? C'est assez difficile à dire parce que
chacune des parties est interreliée. Vous coupez d'abord tout un
système de filage et d'ensembles. Et quand l'estimateur vient, par
exemple, pour faire ce qu'on appelle le coût de re-
production ou le coût de remplacement d'un immeuble il se pose
d'autres problèmes.
J'habite, par exemple, le onzième étage. Il est
évident qu'au onzième étage j'ai besoin de plus de tuyaux
pour conduire l'eau chaude qui sert à réchauffer mon logement.
Mais dans un coût de reproduction, quelle est la proportion de ces tuyaux
qu'il faudrait attribuer à l'appartement numéro 11?
Prenez n'importe quel aspect. L'électricité, c'est la
même chose. Il devient physiquement impossible d'évaluer le
coût de remplacement.
Cela enlève à l'estimateur un des aspects qu'il doit
considérer dans son évaluation et qui est exigé par la
jurisprudence. Actuellement, si nous laissons le texte de la loi, tel qu'il
existe, j'incline à croire qu'on s'expose à ce que l'estimateur
soit pris dans une situation où il devra décider lui-même
arbitrairement quelle sera la valeur de la quote-part de chacun des
copropriétaires.
M. LE PRESIDENT: Me Pigeon, advenant le cas d'une vente pour taxes, par
exemple, qu'est-ce qui arriverait, si on enlevait le mot évaluation?
M. PIGEON: M. le Président, je l'ai dit au début, sur le
principe de la divisibilité de la taxe, nous n'avons aucune objection.
La taxe, pour que la copropriété puisse exister, puisse se
réaliser, doit être divisible. Mais il ne faut pas confondre la
taxe avec l'évaluation. L'évaluation, d'accord, sert de base
à la taxation, mais une évaluation, ce n'est pas une taxe. Vous
savez, régulièrement, au bureau de révision, à
Montréal, des contribuables viennent se plaindre de leur
évaluation parce qu'ils prétendent qu'ils paient trop de taxes.
C'est un problème différent, ça.
Le législateur a apparemment décidé, pour le moment
on trouvera peut-être d'autres formules dans dix ans ou dans
quinze ans que la base la plus équitable était la valeur
réelle des propriétés. C'est cela qui existe actuellement.
On trouvera peut-être d'autres bases plus tard, mais on ne le sait pas.
Actuellement, c'est ce qui existe.
M. PAUL: Comment pourriez-vous prévoir dans la loi la
répartition de la divisibilité du montant total des taxes qui
peuvent grever un immeuble détenu en copropriété?
M. PIGEON: Je pense que si la loi disait que chaque fraction de
l'immeuble forme une entité distincte, pour fins d'imposition de taxes
et de cotisations, le problème serait réglé au point de
vue de la taxation.
M. PAUL: Mais comment se fera cette répartition à
l'intérieur de tous les intéressés ou parmi tous les
intéressés?
M. PIGEON: Au début, M. le ministre, l'estimateur aura
évidemment le choix, parce qu'il n'y a pas de marché au
début. Il est fort probable je ne sais pas, moi, que l'estimateur
va décider telle ou telle chose dans telle ville il est fort
probable, dis-je, qu'au début, il prendra la valeur totale de l'immeuble
et la fractionnera suivant la fraction enregistrée au bureau
d'enregistrement entre tous les copropriétaires.
Comment pourrait-il faire autrement? Il ne faut pas oublier... Si vous
avez côte à côte deux immeubles identiques, bâtis sur
des terrains identiques, si l'estimateur, au début, ne suit pas cette
méthode, qu'est-ce qui va se produire? Vous allez avoir deux immeubles
identiques, deux terrains identiques, dont la valeur finale n'est pas la
même. Cela contredit... Pardon!
M. PAUL: Mais s'il prend la même évaluation pour le
terrain, la même évaluation pour l'occupation, le coût de
construction, il est probable qu'il va arriver au même résultat,
si ce sont deux bâtisses identiques. Comment pourrait-il arriver
autrement? A moins qu'il prenne des bases de calcul différentes.
M. PIGEON: Bien, vous savez, la question du taux unitaire au pied cube
ou au pied carré, c'est quelque chose de relatif, parce que quand nous
évaluons avec un taux unitaire au pied cube, eh bien là, il faut
classifier notre construction à ce moment-là.
M. PAUL: Si vous classifiez la construction, vous faites
disparaître l'identique.
M. PIGEON: Pardon? Je n'ai pas saisi.
M. PAUL: Vous avez employé, tout à l'heure, l'expression
« identique ».
M. PIGEON: Oui.
M. PAUL: Mais si vous êtes obligé de classifier les deux
constructions, c'est parce qu'elles ne seraient plus identiques?
M. PIGEON: Je parle de classification, évidemment, aux fins de
rechercher le coût de reproduction d'une bâtisse.
Actuellement, étant donné l'absence d'un marché, je
ne peux pas concevoir qu'un estimateur puisse faire autrement que de
régler le pro-
blême arbitrairement. Il est obligé de le régler
arbitrairement. Si vous lui laissez les mains libres et que le marché
nous indique que, dans cinq ans, la valeur de chaque quote-part ou de chaque
fraction d'un immeuble représente un marché dont la somme des
parties n'équivaut pas à la valeur totale de l'immeuble,
l'estimateur, à ce moment-là, pourra appliquer cette
méthode. Mais, pour le début, je me demande bien quelle
méthode. L'estimation, c'est un problème de comparaison, on part
toujours de comparaison.
Je connais la valeur d'un immeuble à partir de la comparaison. Au
début, il n'y en a pas. Au point de vue du coût de reproduction,
il y a des problèmes techniques qui se posent à tous les niveaux.
L'estimateur peut concevoir l'immeuble autrement. Dans la loi, on crée
des situations, mais dans quelle mesure ces situations correspondront-elles
à la situation de fait?
C'est pour cela que nous ne pouvons pas trouver d'autre solution que de
dire: Voici, vous êtes propriétaire, vous êtes
copropriétaire dans une proportion de tant, qui est une fraction
mathématique, qui ne représente pas la valeur. Si Je dis que vous
avez, par exemple, la moitié de ce que j'ai en poche, cela ne me donne
pas tout de suite ce que j'ai. Il faudrait que je vous dise ce que j'ai en
poche. Cela est une relation, la quote-part. C'est nécessaire, parce
que, sans cela, le droit de copropriété devient quelque chose
d'illusoire.
M. LE PRESIDENT: M. Pigeon, est-ce que ceci obligerait la ville de
Montréal à avoir un dossier pour chacun des
copropriétaires? Est-ce cela que vous voulez éviter?
M. PIGEON: M. le Président, ce que je pense, c'est que si on
laisse le texte de loi tel qu'il est, l'estimateur sera nécessairement
obligé de tenir un dossier pour chaque fraction l'immeuble. Quand il
s'élèvera une contestation, il va nous falloir recommencer, dans
chaque cause, la même preuve. Parce que vous savez, une contestation, en
matière d'évaluation, cela porte sur des faits, pas seulement sur
des opinions. Parce qu'un juge a décidé que mon terrain vaut
$2.50 le pied carré, cela ne veut pas dire que le juge a raison. Il a
décidé suivant la preuve. Mais si j'apportais une preuve
additionnelle, il pourrait changer d'idée. Chez les
copropriétaires qui se connaissent entre eux, je me demande quelle
situation cela va créer, du moins pour le moment.
Alors, cela fera une multiplicité de plaintes, nous allons
répéter les procès et cela fera du mécontentement.
Je pense qu'il serait mieux de dire ceci: Que chacun des copropriétaires
peut se plaindre de son évaluation, que lui a attribuée
l'estimateur, par exemple, disons pour le début, par rapport à
l'évaluation globale de la propriété. A ce
moment-là, la ville devrait être obligée d'aviser les
administrateurs en temps utile, parce qu'ils ont des intérêts
communs dans la copropriété, pour que les administrateurs
puissent intervenir, pour qu'enfin nous ayons une cause où tout le monde
ait eu l'occasion de se faire entendre et un procès où il y a une
décision définitive et finale.
Alors, nous pourrions prévoir qu'un avis malheureusement,
je n'ai pas eu le temps de rédiger l'article, mais je serais bien
disposé à le faire soit envoyé à
l'estimateur. Autrement, on augmente inutilement le travail de l'estimateur
pour aboutir à quoi?
Pour le placer dans une position où il doit décider
arbitrairement en définitive. Vous savez, une évaluation n'est
pas arbitraire. Une évaluation est basée sur des données
qui ont besoin d'une interprétation, sur des comparaisons. Actuellement,
nous plaçons l'estimateur dans une situation, au point de vue technique,
qui me paraît extrêmement difficile et insurmontable.
M. LE PRESIDENT: Selon vous, la déclaration du début ne
peut pas...
M. PIGEON: Je pense que la déclaration du début devrait
servir de guide à l'estimateur pour lui indiquer quelle est ma
quote-part dans l'immeuble. Il doit s'en tenir à cela. Autrement, si on
lui permet de faire n'importe quoi, si on exige qu'il évalue chaque
quote-part séparément, il peut la modifier, cette
quote-part-là. Supposons un exemple, voici ce que j'ai à
l'esprit: J'essaie d'être bref, mais je ne sais pas si je suis plus clair
pour cela. Supposons, par exemple, que je suis inscrit au bureau
d'enregistrement comme propriétaire de l/50ième de l'immeuble;
cela veut dire évidemment le terrain et la bâtisse. Mais
l'estimateur décide à cause de toutes les circonstances
vous savez qu'il y a des impondérables dans l'évaluation
qu'en fait mon l/50ième, ce serait plutôt l/40ième. Alors,
à ce moment-là, il contredit le bureau d'enregistrement. Il fait
une évaluation qui, à mon sens, ne me paraît pas
très légale pour ne pas dire plus.
M. PAUL: Me Pigeon, remarquez bien que nous n'avons pas l'intention de
contester vos opinions, c'est tout simplement dans le but de nous informer.
Mais à ce moment-là, si vous voulez contester cette
évaluation de l'estimateur, vous allez être obligé de
contester l'éva-
luation totale de la bâtisse si vous n'avez pas une
évaluation particularisée.
M. PIGEON: Parfait.
M. PAUL: Vous allez admettre qu'à ce moment-là les frais
vont être excessivement élevés, beaucoup plus
élevés, du moins.
M. PIGEON: M. le ministre, en définitive, même si nous
pouvons concevoir une évaluation séparée, qu'est-ce qui va
se produire dans une contestation? Cette quote-part est inter-reliée
à tout l'immeuble. La ville va être obligée de partir de
quelque chose et de faire la preuve de la valeur de remplacement de cet
immeuble, de sa valeur économique que j'aime mieux appeler la
valeur par le revenu et de sa valeur marchande. Il faut en venir
là, il faut s'appuyer sur quelque chose. Ce sont des choses qui ne
peuvent pas se séparer facilement. La ville à ce
moment-là, le contribuable évidemment intéressé...
ou permettre aussi aux administrateurs de porter plainte, nous n'aurons pas
d'objection. Il faut être juste pour tout le monde. Mais il faudrait que
la valeur de l'immeuble soit décidée une fois pour toutes. Avec
la formule que nous suggérons...
M. PAUL: En portant plainte, il va porter plainte contre la valeur
totale de l'évaluation de l'immeuble.
M. PIGEON: Evidemment. Il va recevoir son compte de taxes. Il va
être taxé sur une portion de l'immeuble total. A ce
moment-là, il y aura un procès sur la valeur totale, mais il
faudrait appeler toutes les personnes intéressées, les
administrateurs qui ont des devoirs vis-à-vis des
copropriétaires. Et nous réglerons le cas une fois pour toute.
Autrement, nous nous exposons à avoir des décisions
contradictoires, pour le moment du moins, surtout que nous n'avons pas de
marché. Peut-être que, dans cinq ans, J'aurai changé
d'idée, parce que je ne le connais pas le marché actuellement. Je
vois un peu les difficultés des estimateurs; j'ai eu l'occasion de
plaider quelques affaires depuis 1961. En fait, Je m'occupe presque
exclusivement d'évaluations et de taxes.
M. LE PRESIDENT: Me Pigeon, le principe de propriété
renfermé dans la copropriété, à savoir que chacun
est propriétaire de sa part, ne pensez-vous pas que, si nous acceptions
votre suggestion, cela irait à l'encontre du principe que chacun des
individus est propriétaire de sa partie?
M. PAUL: Je dois ajouter, avec ce que nous déclare M. le
Président, du même coup: Est-ce qu'il n'a pas le droit, lui, de
voir évaluer sa propre portion de copropriété?
M. PIGEON: Oui, mais sa portion, sa fraction de l'immeuble dont il est
propriétaire, comment allons-nous l'évaluer? Il faut
l'évaluer par rapport au tout. Nous ne pouvons pas isoler les parties
communes on peut les isoler par rapport aux parties exclusives
mais comment va-t-on les diviser entre les différents
copropriétaires? Comment va-t-on diviser le terrain? C'est là que
se pose le problème.
Maintenant, si nous acceptons le principe de la divisibilité de
la taxe, il n'y a plus de problème. Parce que l'évaluation, c'est
seulement la base de la taxe. Et les difficultés que cela
représente, c'est au point de vue de l'évaluation.
C'est très facile de diviser une taxe, même si actuellement
la jurisprudence de la cour Suprême nous dit qu'une taxe est en principe
indivisible. On ne peut continuer avec ce principe-là si on veut
admettre que la copropriété est nécessaire, qu'elle doit
exister et qu'elle doit être recommandée et que les gens la
demandent. C'est évident. Mais, sur le plan de l'évaluation, nous
partons avec rien. Vous nous demandez d'évaluer une
propriété. Vous savez, il y a une autre chose en
évaluation. Je m'excuse, je passe, je ne voudrais pas faire un
traité d'évaluation, M. le Président. M. le ministre, je
ne sais pas tout, il y en a beaucoup plus que je ne sais pas qu'il y en a que
je sais. Mais à tout événement, je vous dis ce que je
sais. Il ne faut pas oublier que la valeur d'une chose n'est pas
nécessairement identique à son prix. Il ne faut pas confondre les
deux. Avec la solution que je vous propose, l'estimateur est à l'abri de
tout cela pour le moment. Quand le marché se développera, il y
aura suffisamment de prix qu'il pourra peser, étudier. A ce
moment-là, rien ne l'empêchera d'évaluer
séparément, s'il le veut. Actuellement, il est obligé de
le faire, et il est dans une situation où il ne peut le faire.
Qu'arrivera-t-il quand nous serons pris dans des contestations et des
procès? C'est le problème. Et cela accumulera une somme de
travail considérable. Ce n'est peut-être pas la meilleure raison
que j'ai à vous donner, mais pour donner quoi? Pourquoi? Est-ce que cela
rendra plus justice à tout le monde? Je ne sais pas. Je me pose la
question.
Et de cette façon, nous maintenons le droit de
copropriété. Au début j'espère que j'ai bien
compris la copropriété en somme, en définitive
il ne faut pas se le cacher comporte l'existence, la coexistence,
si vous voulez,
d'une propriété exclusive et d'une
copropriété, en fait. Et c'est là l'origine de tous les
problèmes au point de vue de l'estimation. Généralement,
vous le savez, M. le Président, la loi intervient toujours après
les faits. Dans ce cas, c'est l'inverse qui se produit. Seulement, si on ne
vote pas la loi de la copropriété, il n'y en aura jamais, parce
qu'il y a un principe du code civil qui nous l'interdit. C'est cela, la
difficulté. Alors, je me demande pourquoi intervenir et lier
indirectement, pour le moment, l'estimateur qui sera obligé de prendre
des décisions arbitraires, qui nous exposeront à des
contestations dont les résultats peuvent être différents,
cahotiques, tout dépend de quelle façon. Il arrive parfois que
les avocats plaident des causes, les gagnent et soient surpris d'avoir
gagné. Vous savez, c'est une question de fait, l'évaluation. Ils
nous font perdre des causes parce qu'on a manqué de preuves. Cela arrive
assez souvent. Alors, si un expert, par exemple, n'a pas mentionné, n'a
pas étudié telle vente et qu'un autre vienne dans un autre
procès contre un autre copropriétaire et que lui les apporte et
les analyse, eh bien, cela va changer l'issue du procès, le
résultat final du procès. Est-ce que cela va donner de l'ordre,
est-ce que cela sera bon pour les copropriétaires? Remarquez bien que je
ne veux pas que la ville fasse un compte de taxes global et l'envoie aux
administrateurs parce que, là. on pourrait mettre en danger la
copropriété même. Si mon voisin est un être
négligent, la ville pourrait vendre tout l'immeuble. Nous sommes contre
ça.
Nous disons: Fractionnons le compte de taxes. Mais, au point de vue de
l'évaluation, à cause des difficultés insurmontables, pour
le moment du moins, je dis simplement que, pour fin de taxation, tout est
divisible. Pour fin d'évaluation, l'avenir le dira. Le marché
nous dira si une évaluation séparée appuyée sur des
données peut se faire.
En résumé, c'est ce que j'avais à vous
présenter ce matin. Je demeure à la disposition des membres de la
commission.
M. LE PRESIDENT: Me Pigeon, nous vous remercions de vos
éclaircissements.
M. PAUL: Vous ne nous avez peut-être pas convaincus, mais vous
nous avez ébranlés pour le moment.
M. PIGEON: Bien, c'est déjà un commencement, M. le
Ministre. Nous ne pouvons pas tout faire le même jour. C'est un domaine
un peu différent, c'est un peu surprenant, vous savez,
l'évaluation. Au début, lorsque la ville m'a confié ce
genre de causes, j'étais souvent scanda- lisé par les opinions
qu'émettaient les experts. Avec le temps je me suis aperçu que,
dans une certaine proportion, ils avaient raison. Et c'est à cause des
difficultés techniques. Il n'y a pas de danger à n'en pas parler.
Si vous en parlez, vous liez les mains de l'estimateur. Et moi, je ne sais pas,
mais je ne vois pas en quoi l'arbitraire peut être utile aux
copropriétaires ou au droit de copropriété. Pourquoi
forcer quelqu'un à prendre une décision arbitraire?
M. LE PRESIDENT: Alors, très bien.
M. PIGEON: Je vous remercie, M. le Président et messieurs les
membres.
M. LE PRESIDENT: Est-ce que quelqu'un d'autre voudrait prendre la
parole?
M. BROCHU: Jean-Charles Brochu, avocat à la ville de
Québec. Je ne puis, évidemment, qu'appuyer ce que mon
confrère, Me Pigeon, a dit. II s'agira, c'est sûr, de
problèmes communs à la ville de Québec et à la
ville de Montréal. Je n'ai rien à ajouter à
l'exposé que Me Pigeon a fait
Je me demande, M. le Président, s'il ne serait pas bon qu'un
mémoire soit présenté par les différentes villes
qui peuvent être intéressées, ainsi que par les organismes.
Je pense, par exemple, à la corporation des évaluateurs qui
aurait peut-être son mot à dire. Je me demande si, à ce
moment, un mémoire commun ne pourrait pas être
présenté à la commission pour exposer tous ces faits et
pour qu'une décision soit prise. Je suggère qu'il nous soit
permis de présenter un mémoire dans le délai qui vous
conviendra, peut-être trente jours.
M. LEDUC (Taillon): Nous n'avons aucune objection à ce qu'un
mémoire commun soit présenté. Comme le mentionnait Me
Brochu, il ne faudrait pas que cela prenne trop de temps, mais dans un
délai raisonnable, un mois, cinq semaines.
M. PAUL: Ce serait un mémoire présenté par la
corporation des évaluateurs?
M. BROCHU: Nous pourrions probablement vous présenter un
mémoire conjoint..
M. TALBOT: M. le Président..
M. LE PRESIDENT: Est-ce que vous voudriez parler devant le micro, s'il
vous plaît?
M. TALBOT: Mon nom est Talbot, je suis
directeur du service de l'estimation à la ville de Québec.
Je représente aussi ici, ce matin, la Corporation des évaluateurs
agréés du Québec, dont le bill 204 n'a été
sanctionné que le 13 juin dernier. Alors, vous comprendrez,
évidemment, que nous n'avons pas eu le temps de nous pencher sur cette
question qui est très importante pour nous. Nous demandons nous aussi la
possibilité de pouvoir soumettre un mémoire dans un mois,
peut-être cinq semaines.
M. LE PRESIDENT: M. Talbot, est-ce que votre mémoire porterait
uniquement sur l'article 442-m)?
M. TALBOT: 442-m), oui.
M. LE PRESIDENT: Cela nous permettrait de continuer notre étude,
si nous voulons finir par l'adopter, cette loi...
M. TALBOT: Oui, c'est exact
M. LE PRESIDENT: ... je pense qu'il faut procéder, parce que si
nous...
M. CADIEUX: Est-ce que cela serait un mémoire conjoint ou des
mémoires séparés?
M. TALBOT: Probablement un mémoire conjoint, avec la ville de
Montréal et la ville de Québec.
M. PAUL: Et la Corporation? M. TALBOT: Et la Corporation.
M. LE PRESIDENT: Alors, je pense bien que nous pourrions continuer
l'étude des autres articles.
M. LEDUC (Taillon): D'accord.
M. LE PRESIDENT: Très bien. Est-ce que quelqu'un d'autre
désire se faire entendre ce matin? Si vous voulez aller au micro, s'il
vous plaît.
M. TALBOT: Henri Talbot, architecte, représentant l'Association
des architectes de la province de Québec.
A la suite de ce que Me Pigeon a dit tout à l'heure, concernant
l'évaluation soit du tout ou des parties, il reste une chose que je
tiens à signaler. C'est que, dans une même bâtisse, vous
aurez divers logements ou diverses copropriétés qui ont des
valeurs variables. Une des parties peut certainement être plus
élaborée, plus coûteuse et plus valable qu'une autre
partie. La même chose arrivera aussi en surface.
Il y a de grandes propriétés, il y aura de petites
propriétés. Il serait difficile, à ce moment de faire une
évaluation globale qui pourrait, par la suite, être
déterminée d'une façon juste pour chacun d'eux. Je crois
qu'il y aurait peut-être avantage à partir de l'unité de la
copropriété. Chaque corpropriétaire aurait son
évaluation et l'ensemble de ces parties ferait un tout, qui serait la
valeur plus approximative du tout que de faire une évaluation de
l'ensemble.
Parce que la valeur de construction de chacune de ces parties peut
être très variable, suivant l'exigence même du
propriétaire ou de l'organisme qui a commencé a faire la
création de cet immeuble. L'immeuble n'est certainement pas
homogène dans toutes ses parties. Un étage peut être
constitué de logements d'une seule pièce; un autre étage
peut être de deux logements, occupant toute la surface de l'immeuble. A
ce moment, cela fait des variantes énormes et aussi une qualité
intrinsèque, pour chacune d'elles, qui est certainement
différente d'une moyenne qui serait peut-être valable dans
d'autres genres de construction.
La même chose peut arriver, concernant la
copropriété, pour d'autres constructions. Vous en aurez une qui
sera plus « standard ».
Cela représenterait peut-être un ensemble qui comporterait
des éléments presque identiques tandis que, pour l'autre, il y
aurait une variation énorme entre les deux. A ce moment-là,
l'évaluation sera certainement difficile à faire, si on cherche
à la faire dans le cas de l'ensemble.
Ce serait aussi injuste pour chacun des copropriétaires d'avoir
une évaluation qui est basée sur des normes qui sont loin de ce
que représente sa propriété réelle. Les
éléments seront alors certainement différents d'une
copropriété à l'autre. A ce moment-là, il sera plus
difficile pour l'estimateur de faire la part des choses, mais il y aura des
moyennes qui devraient servir. Ces moyennes ne seront pas les mêmes dans
le cas d'un logement qui est d'un standard minimum, comparé à un
autre qui serait presque quelque chose de luxueux même. Voyez-vous? Cela
suppose donc des restrictions. Partant du texte actuel de la loi telle qu'elle
a été mentionnée, Je crois qu'il serait plus Juste de
procéder par éléments individuels que d'essayer de
l'englober dans le tout.
Mais chacun des éléments formerait le tout tantôt.
Ce sera, en somme, beaucoup plus jus-
te que d'essayer de faire une évaluation générale
sans tenir compte des particularités de chaque individu, de chaque
copropriétaire qui est là, parce que son habitat est
différent. On peut en faire tellement, des variantes extraordinaires,
que vous pouvez avoir un logement qui va coûter $5,000 et que le voisin,
lui, son coût de propriété sera de $100,000. Ce n'est pas
toujours par la surface elle-même qu'il y aurait cette grande
différence. Ce serait par les éléments divers qui ont
servi à faire la construction, la finition, les diverses qualités
de la finition.
C'était pour mentionner cette chose, M. le Président.
M. LEDUC (Taillon): M. Talbot, je ne suis ni avocat, ni architecte,
peut-être cela explique-t-il un peu les questions que je vais vous poser.
Je fais la comparaison entre ce que vous venez de dire et ce que Me Pigeon a
dit tantôt. Vous achetez, dans cette copropriété, un
logement qui vaut $100,000 et vous déboursez $100,000. Moi, je suis
votre voisin et je paie $10,000. Il y a une évaluation globale au bureau
d'enregistrement. C'est bien indiqué que vous avez $100,000 pour votre
unité et que moi, J'ai payé $10,000. Lorsque vient le temps de
faire la proportion de la taxe, est-ce que vous, qui avez payé $100,000,
n'en payerez pas plus que moi qui en ai payé $10,000 même si cela
n'a pas été évalué individuellement?
M. HENRI TALBOT: Nécessairement.
M. LEDUC (Taillon): Alors pourquoi le faire individuellement
après les arguments que M. Pigeon a amenés, quand il semble qu'au
départ, il puisse y avoir des embêtements sérieux pour
Montréal et Québec, ceux qui nous ont été
exposés tantôt?
M. HENRI TALBOT: Prenons le problème d'une façon
dégagée, en détachant un cas de l'autre. Prenez deux
propriétaires sur le terrain de tout le monde, et prenez une
propriété qui est là, et, à côté, il y
en a une autre, une propriété ordinaire, ce n'est pas de la
copropriété, c'est un propriétaire unique.
Vous avez un propriétaire qui est là, qui a une
propriété de $100,000. L'autre, à côté, en a
une de $10,000. La taxation de celui qui a une propriété de
$100,000 et de l'autre qui en a une de $10,000 ne sera pas la même. Elle
sera en proportion de sa valeur, parce que l'évaluation sera faite elle
aussi en rapport avec l'Importance de sa construction, des qualités de
sa construction et aussi des valeurs marchandes qui sont là et qui sont
importantes, A ce moment-là, l'évaluation ne sera certainement
pas la même dans les deux cas. Ce serait injuste aussi que ce soit la
même pour les deux. Ce ne serait pas la peine de se priver de $90,000
pour celui qui n'a qu'une imposition de $10,000, pour payer le même prix
que le voisin qui en a $100,000. C'est toujours la proportion de la valeur qui
est le grand critère, c'est la valeur réelle de l'immeuble qui
sert à faire l'évaluation.
M. THEORET: Je crois comprendre, à l'examen du texte, que dans la
déclaration de copropriété, on détermine la
destination de l'immeuble, de ses parties exclusives et communes, on y
détermine la valeur relative des fractions. C'est dans la
déclaration de copropriété au début que ce sera
fait, quelle que soit la valeur que l'on donnera à l'immeuble plus tard
par des additions ou des améliorations à la partie exclusive.
Cela ne paraît pas tellement compliqué...
M. HENRI TALBOT: Non.
M. THEORET: Si, au début dans la déclaration, on dit:
Telle partie de l'immeuble aura 5% de la valeur, elle aura, quant aux parties
communes, 5% de la valeur, et si on y ajoute après et qu'on fait de
cette partie exclusive un appartement luxueux, eh bien, il sera taxé en
vertu de 442 m, comme une partie exclusive...
M. HENRI TALBOT: Tel que c'est là.
M. THEORET: Mais, quant à la valeur relative au tout, Je ne crois
pas que cela change, parce qu'on aura donné plus de valeur. Est-ce que
vous comprenez cela ainsi?
M. HENRI TALBOT: Non, Je ne le verrais pas comme cela. Parce qu'en
somme...
M. THEORET: Ce serait peut-être un peu simpliste...
M. HENRI TALBOT: Oui, ce serait peut-être un peu trop passer le
couteau dans tout ça pour planifier la chose et encore pour la
simplifier. Parce qu'il faut penser que c'est un instrument actuellement, que
c'est une loi qui aura des répercussions et qui va permettre à
l'économie, en général, de prendre une direction
là-dedans et qu'il y aura certainement des développements divers.
Il faut penser à toutes les possibilités de cette loi qui va
régir tantôt tout le problème de la
copropriété. Vous allez avoir des lmmeu-
bles de toutes les qualités, c'est bien sûr qu'il y en aura
à différents endroits aussi, et selon les quartiers de la ville.
Si vous n'apportez pas suffisamment de précision dans le cas des
évaluations, vous pouvez aussi empêcher par exemple des valeurs
plus grandes et qui seraient au bénéfice de la ville à ce
moment-là, parce qu'on aurait trop minimisé leur
évaluation et on les aurait mises sur une base générale et
qui serait la même pour tous les genres de bâtiments, tandis qu'il
y a une diversité énorme dans le genre des bâtiments et
dans les coûts des bâtiments.
Dans le cas, par exemple, du spéculateur qui, lui, aurait dans sa
spéculation, prévu de faire une construction qui serait à
un standard très, très réduit, ce seraient les minimums
qu'exigent actuellement les lois de la construction. Dans le cas de celui qui
bâtit dans ce genre-là, par rapport à celui qui fait
quelque chose de plus élaboré et même où vous avez
des copropriétés qui seraient des immeubles presque luxueux, vous
ne pourriez pas avoir les mêmes bases d'évaluation. Il faudrait
que déjà la loi permette, sans énoncer des choses qui
seraient difficiles, à chaque chose d'être évaluée
à sa juste valeur. Comme la loi est rédigée actuellement,
le texte n'est pas si mauvais que cela. Il est assez simple. Il est assez
court. Il dit que vous faites l'évaluation pour chacun des
propriétaires. En somme aussi, juridiquement, le copropriétaire,
comme propriétaire de son milieu, est unique, est seul et,
légalement, il est la seule personne à qui on doit
réclamer des taxes. C'est à lui qu'on va réclamer les
taxes comme individu, taxes scolaires et autres. Il devra, à ce
moment-là, être sûr que sa taxation a été
basée sur quelque chose qui représente réellement
l'investissement de son argent. Parce qu'on peut investir plus ou moins, et
c'est toujours le critère. C'est le coût réel de
l'évaluation qui sert à faire une évaluation de
propriété. Celui qui a une propriété qui n'est pas
grande, qui n'est pas coûteuse a une évaluation et une taxe
inférieures à celui qui en a une plus grosse et avec une valeur
augmentée.
Il y aurait donc tout de suite une justice à établir
vis-à-vis le copropriétaire comme tous les autres aussi, et les
autres propriétés qui sont aux alentours et qui ne sont pas des
copropriétés. Qu'on évalue la valeur de chacun des
éléments, à mon point de vue, nécessairement, parce
que je vois la répercussion. Je vois aussi, dans la pratique, comment on
aura des difficultés pour la construction, si on avait une norme, par
exemple, qui, au départ, nous obligerait, dans la conception du
bâtiment, à chercher des normes, presque toujours les mê-
mes, des choses équivalentes. On ne pourra pas, par exemple, faire un
surplus tout d'un coup, parce que la taxe ne permettrait pas d'en
récupérer quelque chose. Même pour la ville, à ce
moment-là, ce serait déficitaire, si elle ne pouvait pas imposer
le maximum les valeurs qui sont actuellement des
copropriétés.
C'est une remarque tout simplement. Est-ce qu'il y a d'autres
questions?
M. LE PRESIDENT (M. Sauvageau): Merci, Me Pigeon.
M. PIGEON: Je n'ai pas l'habitude de ce genre de séance, si je
vais trop loin, vous me le direz.
M. Henri Talbot, dans ce qu'il vient de dire, semble présumer une
foule de choses. Vous savez, que cela soit le marché de l'Immeuble ou
autre chose, c'est assez difficile de rationaliser un marché, quand vous
faites une étude du marché. Il y a le jeu de l'offre et de la
demande, il y a toutes sortes de facteurs qui interviennent. Et puis
l'estimateur de la ville ne peut toujours pas se substituer à un
copropriétaire et lui dire: Vous avez acheté une quote-part de
150, mais, en réalité, vous valez plus que cela. Au lieu de 1/50,
vous avez 1/40.
Il faut un critère unique si on veut parler de Justice. La base
est évidemment la valeur réelle pour le moment. Nous ne pouvons
pas mettre ce principe-là en jeu. Il faut aussi, au point de vue de
l'évaluation, se laisser guider par les indications du marché
sans se demander si, à un moment donné, le marché est
logique ou illogique. Parce que dans l'analyse d'un marché, on peut
considérer une foule d'éléments, et on ne les a jamais
épuisés non plus.
Alors, mol je décide d'acheter 1/50 de la
propriété; J'ai fait mon choix, à ce moment-là. Je
m'expose à payer les taxes sur 1/50 de la valeur totale de cette
propriété-là. Je ne vois pas d'injustice à cet
effet. Je ne vois aucune injustice. Nos tribunaux, à ce jour, n'ont
jamais aimé considérer la valeur du propriétaire. Est-ce
la valeur du terrain ou de l'immeuble que nous recherchons ou si c'est la
valeur du propriétaire? Si un immeuble est détenu en
copropriété par une compagnie, n'a-t-il pas la même valeur
que s'il est détenu par un individu? C'est la valeur de l'immeuble que
nous cherchons. Sans doute le droit de copropriété peut venir
bouleverser le marché, personne ne le sait. Mais, à ce
moment-là, laissons à l'estimateur le libre choix de se guider
sur le marché.
L'estimateur n'a pas le droit de me dire: Tu as acheté telle
propriété, tu n'aurais pas dû l'acheter, tu as payé
trop cher. Il n'a pas le droit
de me dire cela. Il analyse le marché, et c'est le comportement
des acheteurs. Dans le marché, il y a des hauts et des bas. C'est
indépendant de sa volonté. Quand on fait une valeur, on constate
le marché; on ne le fait pas, on ne le crée pas. L'estimateur ne
crée pas la valeur, il la constate purement et simplement. L'opinion
finale qu'il émet est toujours une opinion sur la valeur. Quand je dis
qu'un immeuble vaut $100,000, cela ne veut pas dire que la valeur... c'est une
opinion sur la valeur. Cela peut varier. On admet même
généralement une marge jusqu'à 15%. Mais, pour une
évaluation bien faite, sérieusement, avec toutes les
données actuelles, la variante peut être de 10%, pas beaucoup
plus. Evidemment, plus l'Immeuble est imposant, plus la marge peut être
différente, parce que cela multiplie les calculs.
Alors, je dis la justice... je fais mon nid, j'achète telle
quote-part. C'est évident que si j'achète un appartement
où la superficie de plancher est plus grande que chez mon voisin, je
vais payer plus cher. Cela est élémentaire dès le
début, mais cela va se réfléter dans ma quote-part finale.
C'est évident.
Qu'est-ce qu'on va faire quand il va s'agir de diviser, par exemple, la
piscine et le terrain de stationnement qui, normalement, devraient être
des choses communes?
Mon immeuble est plus loin du terrain de stationnement que pour le
voisin. Qu'est-ce que l'estimateur va faire pour apprécier ce facteur
dans l'évaluation? Ce n'est qu'un exemple entre mille. La
complexité du problème, de ses difficultés est qu'on ne
peut pas le résoudre autrement que par une décision arbitraire,
à un moment donné.
M. THEORET: M. Pigeon, considérez-vous que l'estimateur sera
lié par cette déclaration qui détermine le prorata ou le
quantum pour chacune des parties par rapport au tout? Pour revenir à
votre exemple, s'il évalue la piscine ou le terrain de stationnement, il
ne l'évaluera pas en fonction de M. X, qui reste au douzième
étage. Il va évaluer une piscine et un terrain de stationnement.
On dira: M. X, au douzième étage, est propriétaire de .2%,
et cela sera sa quote-part. Est-ce que vous concevez cela de cette
fa-çon-là?
M. PIGEON: Je conçois cela de cette façon. Mais je dis
ceci, moi; L'estimateur est lié, non pas par la valeur
déclarée dans le contrat de propriété...
M. THEORET: Non, ce n'est pas une valeur déclarée, c'est
plutôt...
M. PIGEON: ... il n'est lié que par le marché. Il est
lié simplement par la proportion, si vous voulez.
M. THEORET: C'est cela.
M. PIGEON: Autrement, nous exposonsl'es-tlmateur, en fait, à
évaluer quelque chose dont vous n'êtes pas propriétaire.
S'il modifie la fraction, il m'évalue pour un bien que je n'ai pas.
Alors, Je pale la taxe sur un bien que Je n'ai pas, en fait. C'est cela le
problème. C'est pour cela que Je voudrais que l'estimateur s'en tienne
à la déclaration. Il faut laisser une certaine liberté aux
parties.
M. THEORET: Je m'excuse de vous interrompre. Où avez-vous
trouvé cette valeur déclarée?
M. PIGEON: Je l'emploie dans un sens, je veux dire que je prévois
que dans le contrat de copropriété, nous verrons, à un
moment donné, que le promoteur, si vous voulez, a réalisé
par la vente de toutes ses pièces, disons $1 million sur un immeuble.
C'est cela que J'entends par valeurs déclarées. Je devrais dire
plutôt, pour être plus précis, le prix, je devrais parler de
prix plutôt que de valeurs à ce moment-là. Je m'excuse.
M. LE PRESIDENT: Me Pigeon, est-ce que tous les membres de la commission
seraient d'accord afin que le mémoire soit présenté le 18
septembre? Maintenant, je pense que si nous nous référons aux
propos des membres de la commission, ce qui nous inquiète, si nous
acceptons votre point de vue, c'est que personne ne sera
intéressé à entrer dans la copropriété. Je
suis bien prêt à accepter de faire partie d'un groupe d'individus
qui vont acheter une copropriété, mais pour contester
l'évaluation, je suis obligé de prendre le montant global de
l'édifice, et j'ai peur que nous manquions notre coup. Maintenant, vous
dites qu'il va falloir qu'à un moment donné l'estimateur fasse
une évaluation. Sur quoi va-t-il se baser? J'ai drôlement
l'impression qu'il va se référer à la déclaration
du début et cette déclaration-là ne mentionne pas de
valeurs, c'est une proportion de l'ensemble de l'Immeuble.
M. PIGEON: Au début, J'imagine qu'un estimateur moi, du
moins, être estimateur, je tenterais des comparaisons avec ce qui est le
plus comparable possible, soit avec des maisons de rapport et j'ajusterais mes
comparaisons, car il faut peser les comparaisons. Des
comparaisons parfaites entre immeubles, ce n'est pas toujours facile
à trouver.
Je dis que ce qui ferait hésiter les copropriétaires
éventuels à acheter de la copropriété, c'est
surtout et plutôt le danger de voir leurs droits, leurs jouissances mis
en danger parce qu'un autre copropriétaire est négligent. Et
c'est ce qui arriverait en somme si l'on taxait l'immeuble globalement. Mais je
ne veux pas le taxer globalement. Je me dis qu'au point de vue de la valeur,
faites le procès que vous voulez. Sur une quote-part, vous allez
être obligé de vous référer au tout, à
l'immeuble, tous les éléments sont interreliés. Je ne
trouve pas de moyens d'en sortir. Peut-être que d'ici le 18 septembre,
j'en trouverai un. Si je trouve une formule, cela me fera plaisir de vous la
communiquer.
M. LE PRESIDENT: En tout cas, je pense bien que tous les membres de la
commission sont préoccupés par le propriétaire d'une
partie quelconque. Je pense que c'est cela qui fait hésiter des membres
de la commission à votre suggestion.
MME KIRKLAND-CASGRAIN: M. le Président, peut-être M. Pigeon
pourrait-il nous dire ce qui arrive dans d'autres pays ou dans d'autres
provinces où l'on accepte le principe de la
copropriété?
M. PIGEON: J'aimerais pouvoir vous le dire, mais ma documentation n'est
pas complète. Je peux vous dire qu'en Europe,
généralement, vous savez, les principes ne sont pas les
mêmes dans certains endroits. D'après un renseignement que J'ai
obtenu en 1965, Je veux être honnête avec vous, je n'ai pas
obtenu ce renseignement-là hier dans la ville de Seattle, dans
l'état de Washington, l'estimateur évalue globalement l'immeuble
et le fractionne suivant la quote-part assignée à chacun.
Nous avons essayé de prendre des renseignements dans d'autres
Etats, mais à cause du sens qu'il faut donner au mot « assess
», les réponses demanderaient à être
interprétées et il faudrait recommuniquer avec les estimateurs ou
ceux qui ont eu à appliquer, si vous voulez, les lois de
copropriété ailleurs. Pour l'état de Washington, j'en suis
certain, les autres, Je ne pourrais pas me prononcer, je n'en connais pas du
tout.
M. LE PRESIDENT: Pour l'information des membres de la commission, J'ai
ici « the Condominium Act » 1967 de l'Ontario, page 9, paragraphe
11, article 7: « For the purpose of municipal assessment in taxation,
each unit in common interest constitutes the parcel and the common elements do
not constitute the parcel ». Je pense bien que si, dans votre
mémoire, vous pouviez...
M. PIGEON: Je vais essayer d'élaborer sur ce point-là. Je
vais essayer surtout de vous trouver des exemples. J'ai émis certains
principes, je n'ai pas voulu faire perdre le temps de la commission, mais Je
voudrais appuyer ces principes-là. J'ai essayé d'être
clair, mais quelquefois, nous nous méprenons.
M. THEORET: Cela peut alors créer un doute raisonnable dans notre
esprit.
M. PIGEON: J'espère que la prochaine fois, je vais créer
un conflit...
M. LOUIS TALBOT: M. le Président, je ne voudrais pas
éterniser le débat indéfiniment, étant donné
que nous avons eu la permission de produire un mémoire d'ici le mois de
septembre. Je voudrais tout de même réfuter quelques arguments de
mon homonyme, M. Henri Talbot. En fait, son opinion se résume à
ce qui concerne la valeur, pour lui, peut-être par déformation
professionnelle, au fait qu'il rattache cela tout simplement au concept du
coût de construction. Mais la valeur peut être différente du
coût de construction, en plus ou en moins.
Il y a, évidemment, dans le concept de la valeur,
l'élément rendement qui entre en considération et
l'élément marché. Si on devait se limiter strictement au
coût de construction pour trouver la valeur d'un condominium, on serait,
à mon avis, pris avec des difficultés quasi insurmontables. Pour
le type qui est au rez-de-chaussée, par exemple et qui n'a pas besoin de
l'ascenseur, de quelle façon allons-nous faire la location? Le toit,
dans quelle proportion allons-nous le donner à chacun? Celui qui est
tout près de la piscine, qui a un accès direct, de quelle
façon allons-nous lui donner une valeur pour cette partie de piscine ou
cet avantage, si l'on veut? Pour l'escalier, quelle distinction faire entre
celui qui est au rez-de-chaussée et celui qui est au 17e étage.
Autant de difficultés qui, sur le plan physique sont, à notre
avis, quasi insurmontables.
Cependant, si l'on rejoint le concept de la valeur et qu'on s'en va sur
le marché, on sait qu'il est fort possible que l'ensemble des parties
qui sont déclarées au bureau d'enregistrement peut être
inférieur à la valeur totale de l'immeuble, seulement par le jeu
de l'offre et de la demande sur le marché.
A titre d'exemple, dans le moment il y a une pénurie de
logements. Disons que dans les condominiums il y aurait des quatre
pièces, des cinq pièces et des deux pièces. Supposons que
la demande est plus forte pour les quatre pièces. Il est fort possible
que la valeur d'un quatre pièces soit supérieure à celle
qui apparaît au bureau d'enregistrement. A ce moment-là, c'est
à l'estimateur, sur le marché, d'en tenir compte. Mais si l'on
s'en tient strictement au coût de construction, il sera impossible de le
faire. Moi, je suis parfaitement de l'avis de M. Pigeon. Nous croyons qu'il
faut évaluer l'immeuble comme un tout, et, pour fins d'imposition,
évidemment, donner la quote-part à chacun des
propriétaires.
M. BERGERON: Très bien.
M. HENRI TALBOT: M. Louis Talbot a dit des choses qui sont aussi bonnes,
mais il ne faut pas oublier, messieurs, qu'au départ lorsqu'il y a un
terrain, il y a une bâtisse à faire dessus. A ce moment-là,
ce n'est pas l'évalua-teur qui va la faire, c'est l'architecte.
Il nous faudra trouver, messieurs, les normes diverses, même la
finance. Quand je dis trouver la finance, je parle au point de vue de
présenter les coûts de construction. Il nous faudra le faire.
Déformation professionnelle ou non, il nous faudra passer par là
et, à ce moment-là, il y aura toujours les difficultés de
la préparation de ces projets de copropriété où les
éléments divers, les implications, autant la taxation que les
autres choses, sont des facteurs à considérer qui sont pour nous,
souvent, des pierres d'achoppement pour permettre de faire un projet qui sera
rentable tantôt. On ne peut penser simplement à l'architecture. Ce
n'est pas seulement de l'architecture, c'est aujourd'hui aussi de
l'économie. Ce sont des problèmes de finance, et le reste, et
chaque fois, nous sommes mêlés totalement et impliqués
aussi totalement à tous ces problèmes.
Pour ce qu'a dit tantôt M. Louis Talbot, mon homonyme,
l'évaluation est une chose qui vient par la suite. Il peut arriver
qu'à ce moment-là l'évaluation ne représente pas le
même montant que le coût de construction. Cela est certain. Le jeu
de l'offre et de la demande va arriver. Le marché subira des
fluctuations. Un immeuble qui a coûté un certain montant pourra
par la suite par exemple, après cinq ans ou dépendant de la
faveur du public, prendre plus d'importance ou en perdre. Mais il reste tout de
même qu'on devra, de par des lois, actuellement, préparer ces
projets, et c'est avec les textes actuels qu'on pourra peut-être en
faire, de ces constructions. Si, au départ, voyez-vous, on avait des
difficultés insurmontables parce qu'on aurait
légiféré d'une façon qui serait presque un obstacle
à ces constructions, eh bien, ce serait dommage,
nécessairement.
C'est pour cela que j'ai signalé tantôt que le coût
de construction est un problème qui est à l'origine. C'est par
là qu'on commence et c'est par la suite qu'il y a aussi des
évaluations.
On a parlé, à plusieurs reprises, de la quote-part, de la
proportion. Encore là, la proportion doit être valable, et
représentative. Ce n'est pas seulement une question de plus ou de moins
dans les chiffres; cela serait aléatoire. Il s'agit d'aller dans les
choses exactes. Cela sera pris sur un plan, cela sera pris sur les surfaces,
cela sera pris sur les matériaux. A ce moment, il y aura une quote-part
qui sera, au départ, la proportion établie, parce que la
quote-part ne sera pas, par la suite, immuable.
Comme l'a dit, tout à l'heure, M. Louis Talbot, il peut arriver
qu'après un certain temps, une période de cinq ans,
l'évaluation se modifie et que les quotes-parts doivent aussi être
modifiées, parce qu'encore là il serait injuste de les garder. Il
est sûr que c'est un système qui s'imposera et s'implantera
à la suite d'expériences et d'aventures diverses.
M. LE PRESIDENT: Très bien. Est-ce que quelqu'un d'autre veut se
faire entendre?
M. CADIEUX: J'aurais juste une question à poser. La valeur
réelle, c'est le coût d'emplacement et l'offre qu'il peut y avoir.
Je pense que c'est cela qui a été établi comme valeur
réelle. On tient compte du coût de l'emplacement et de l'offre que
peut avoir le marché.
M. PIGEON: Est-ce que c'est à moi que vous posez la question?
M. CADIEUX: Oui, à n'importe lequel des experts.
M. PIGEON: La valeur réelle n'est pas définie dans la loi.
Les tribunaux...
M. CADIEUX: Mais, en pratique, que faites-vous?
M. PIGEON: En pratique, les tribunaux nous ont donné certains
éléments qui pourraient peut-être constituer ce que
j'appellerais une définition descriptive plutôt qu'une
définition essentielle de la valeur.
M. CADIEUX: Oui, mais l'estimateur que fait-il pour établir la
valeur réelle?
M. PIGEON: Bien, l'estimateur doit, autant que possible, traiter tout le
monde sur le même pied. Alors, il doit généralement
appliquer du moins, c'est ce que nous faisons à Montréal
les mêmes normes à tout le monde. Par exemple
l'exemple est peut-être boiteux, parce que le prix ne me vient pas
à l'idée si je dis que mille pieds de deux sur quatre
d'épinette, cela vaut tant, il faut le considérer, quand on
évalue les propriétés, au même prix pour tout le
monde.
Evidemment, l'estimateur est obligé de faire du « mass
appraisal », c'est-à-dire qu'il ne peut pas analyser à fond
l'immeuble dans tous ses recoins. Alors, comme résultat final, vous
aboutirez à une valeur qui est légèrement
inférieure à ce que nous appelons la valeur marchande.
M. CADIEUX: Pour simplifier ma question, si vous payez $20,000 pour une
certaine construction le coût de la construction et que la
demande pour cette construction, un an ou cinq ans après, est de
$40,000?
M. PIGEON: A ce moment, votre augmentation du coût de
construction...
M. CADIEUX: Disons que le coût de construction est encore le
même.
M. PIGEON: ... et vos frais de mise en place se
réfléteront sur le marché. Comment apparaît la
valeur sur le marché? Vous avez, évidemment, un vendeur qui offre
son immeuble 5 $15,000, mais l'acheteur n'est pas prêt S donner $15,000
tout de suite. Alors, des discussions interviennent et on aboutit à une
valeur qui se situera généralement entre les deux.
M. CADIEUX: Entre l'offre et la demande.
M. PIGEON: Entre l'offre et la demande. C'est le jeu de la loi de
l'offre et de la demande. Il est assez difficile de vous donner une
définition essentielle. J'ai étudié ce problème de
la définition de la valeur réelle et je vous assure que je ne
peux pas vous donner autre chose que certains éléments que nous a
fournis la jurisprudence.
Par exemple, quand on nous parle d'une valeur objective, justement, il
ne faut pas tenir compte de la qualité du propriétaire. Il ne
faut pas dire: Monsieur est copropriétaire, cela change la valeur. Non,
c'est l'immeuble que nous évaluons; ce n'est pas le
copropriétaire. Quand nous disons que c'est objectif, en somme, la
valeur, il ne faut pas oublier que, si nous nous plaçons sur un autre
plan, c'est toujours quelque chose de subjectif. Que voulez-vous? Ce sont les
gens qui créent la valeur.
Quand on parle, comme le signalait M. Talbot tout à l'heure, du
coût de production d'un immeuble, à ce moment, nous sommes au
niveau des agents de production. Les agents de production contribuent à
créer une valeur, mais ce n'est pas nécessairement un
élément de la valeur.
Si je me trompe et que je construis un cottage trop luxueux qui brise
l'homogénéité sur une rue, il arrivera probablement ceci,
c'est que je ne pourrai pas obtenir, pour mon cottage, la valeur que
j'obtiendrais, s'il était situé dans un autre quartier, parce que
la propriété n'est pas à sa place. Il y a toutes sortes
d'éléments sur le marché. Est-ce que cela vous
satisfait?
M. LE PRESIDENT: Est-ce que quelqu'un d'autre veut se faire
entendre?
Est-ce qu'on pourrait demander à ceux qui ont accepté de
présenter un mémoire de le présenter pour le 18 septembre
au bureau de M. Armand Bonin? On pourrait peut-être vous demander d'en
faire nous sommes 12 à cette commission une quinzaine de
copies?
M. PIGEON: Oui. Nous pouvons en faire 15 ou 20 copies, comme vous en
voulez, M. le Président.
M. PAUL: M. le Président, je crois bien me faire
l'interprète de tous les membres de la commission pour remercier tous
ceux qui, ce matin ou antérieurement, aux séances du mois de
janvier et du mois de juin, nous ont présenté des mémoires
afin de nous faciliter l'adoption d'une législation qui puisse
répondre aux besoins et atteindre le but visé par cette
législation.
Je ne sais si cela rencontrerait les désirs des membres de la
commission M. le Président, que vous vous chargiez de donner un avis
pour que la séance du 18 septembre soit la dernière quant
à la présentation de mémoires pour que,
subséquemment, nous procédions en tenant des séances assez
régulières pour tâcher d'en finir avec ce projet et
produire notre rapport à la Chambre. D'ici le 18 septembre je
crois que Mme Casgrain et d'autres également siègent à la
commission du bill 10 nous pourrions essayer d'aller de l'avant et de
liquider l'étude du bill 10 pour le 18 septembre. Du 18 septembre au
début de la session, nous pourrions nous attaquer au bill de la
copropriété.
Cela permettrait peut-être, M. le Président, d'ici
là, à ceux qui ont l'intention de présenter
d'autres mémoires de le faire, mais il faudrait
nécessairement inposer une date finale à la présentation
des mémoires.
Je soumets, M. le Président, cette suggestion à madame et
à mes collègues de la commission.
MME KIRKLAND-CASGRAIN: Nous sommes tout à fait d'accord.
M. CADIEUX: Cela coïncide avec les prochaines élections
générales, oui?
M. PAUL: Ah, je n'ai pas entendu dire, encore, qu'il y en avait. Vous
avez l'air inquiet!
M. CADIEUX: Plutôt pressé! C'est juste parce que je veux
changer de côté!
M. THEORET: Je pensais que vous vous demandiez si vous étiez pour
revenir à la commission!
M. CADIEUX: Oh là, là!
M. LE PRESIDENT: Nos travaux sont donc ajournés jusque...
M. PAUL: Pour cette commission, M. le Président, au 18 septembre,
à 10 heures.
(Fin de la séance: 11 h 19)