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Commission permanente
des richesses naturelles
et des terres et forêts
Programme d'investissements de
l'Hydro-Québec
Séance du mardi 10 août 1976
(Dix heures cinquante minutes)
M. Séguin (président de la commission permanente des
richesses naturelles et des terres et forêts): A l'ordre,
messieurs!
La commission permanente des richesses naturelles et des terres et
forêts, première séance, le mardi 10 août 1976.
L'ordre du jour de cette séance se lirait comme ceci, d'après la
convocation qui nous est parvenue: cette commission siégera aux fins
d'entendre les administrateurs de l'Hydro-Québec relativement au
programme d'investissements de cette société.
Les membres de la commission pour la séance d'aujourd'hui sont M.
Houde (Limoilou), M. Bédard (Chicoutimi), M. Bellemare (Johnson), M.
Bérard (Saint-Maurice), M. Carpentier (Laviolette), M. Ciaccia
(Mont-Royal), M. Cournoyer (Robert Baldwin), M. Faucher (Nicolet-Yamaska), M.
Morin (Sauvé), M. Malouin (Drummond), M. Houde (Abitibi-Est), M.
Perreault (L'Assomption), M. Picotte (Maskinongé), M. Samson
(Rouyn-Noranda).
Le rapporteur sera...? Qui?
Une Voix: Carpentier.
M. Morin: Je propose M. Carpentier si les membres de la
commission sont d'accord.
Le Président (M. Séguin): M. Carpentier
(Laviolette). D'accord?
Des Voix: D'accord.
Le Président (M. Séguin): Le ministre des Richesses
naturelles.
Exposé préliminaire du ministre, M. Jean
Cournoyer
M. Cournoyer: M. le président de l'Hydro-Québec, M.
le président de la Société d'énergie de la baie
James, il me fait plaisir aujourd'hui, à titre de ministre des Richesses
naturelles, de vous accueillir et de vous souhaiter la bienvenue parmi les
politiciens.
Si vous avez été convoqués ici aujourd'hui, c'est
que la commission parlementaire, pour nous, joue un rôle précis et
particulier dans le système démocratique dans lequel nous vivons.
Elle permet, en effet, aux représentants de la population, au nom de
leurs commettants, de poser des questions précises sur la façon
dont un organisme public ou parapublic remplit son mandat, en vertu des
exigences du législateur.
Elle permet aussi de faire le point sur l'état de cet organisme,
de même que sur les objectifs et les moyens qu'il entend prendre afin de
satisfaire les besoins ou les désirs d'une population.
C'est dans cette optique que la commission se propose de discuter
comment l'Hydro-Québec entend satisfaire les besoins du Québec en
électricité en l'an 2000. Ainsi la commission parlementaire
commencera dès aujourd'hui à étudier avec vous les
programmes généraux de l'Hydro-Québec à ce sujet
et, le 24 août prochain, nous prévoyons commencer d'étudier
de façon plus précise les programmes d'investissements
particuliers à la Baie James.
Avant toutefois d'analyser en détail les questions que
soulève cette commission, je propose que nous remontions dans le temps
afin de retrouver le fil directeur qui a motivé la société
québécoise à prendre, à diverses étapes de
son évolution, ses intérêts en mains. Ce n'est pas par
hasard si l'énergie électrique fut à plusieurs reprises au
centre des débats importants, car tous appréciaient depuis
longtemps l'importance de l'énergie électrique dans le
développement industriel du Québec.
En effet, chacune des périodes suivantes suscita des
débats houleux. Tout d'abord, les recommandations de la commission
Lapointe, en 1935, qui concluaient à la nécessité
d'étatiser le service de l'électricité en fonction de
l'intérêt public; ensuite, les enquêtes de la Régie
des services publics en 1940 et 1941. La lutte du Bloc populaire, pendant la
deuxième guerre mondiale, qui engendra dans une certaine mesure, en
1943, le bill 17, d'Adélard Godbout, qui créait la Commission
hydro-électrique du Québec.
Ces actions politiques successives permirent au Québec d'amorcer
la défense de ses intérêts dans un secteur précis.
Il fallut toutefois attendre quinze ans, soit à la fin du régime
de M. Duplessis, pour que l'action timide, selon les critères
d'aujourd'hui, de notre société se concrétise de
façon rationnelle et ferme dans une politique cohérente de
gestion de l'électricité.
L'élection de 1962, plus qu'un simple référendum
sur un thème populaire, amenait la population à rendre jugement
en fonction des intérêts collectifs, en permettant la
nationalisation totale de l'électricité.
Je trace là une revue bien sommaire, évidemment, des
événements survenus pendant un quart de siècle,
période pendant laquelle est étroitement liée la
volonté politique du Québec à un souci de
développement autochtone de ses ressources.
Une analyse plus détaillée de cette période nous
permettrait de dégager une constante qui guide de façon continue
les actions de la société québécoise dans ce
secteur.
En effet, que l'on revoie les objectifs de la commission Lapointe en
1935, ceux de la Régie des services publics en 1940, ceux du Bloc
populaire entre 1942 et 1945, les objectifs d'Adélard Godbout, de Jean
Drapeau, du Parti libéral respectivement en 1943, 1959 et 1962, tous
sont motivés au nom de l'intérêt québécois,
et lorsqu'ils proposent des réformes, ils le font au nom de la
rationalité et de l'optimalité, qu'elles soient techniques,
économiques ou politiques.
Ces critères font sonner à nos oreilles les arguments, les
thèmes de la nationalisation de 1963: l'uniformisation des services et
des tarifs; la diminution des frais fixes; la coordination des investissements;
l'usage optimum des eaux; l'intégration des réseaux; la
création d'un vaste pouvoir d'achat au profit du Québec; la
formation et la promotion de cadres supérieurs
canadiens-français.
Nous pouvons constater aujourd'hui, et tous au Québec s'en
ressentent de façon directe ou indirecte, que ces objectifs ont
été atteints, souvent, de façon intégrale.
La disponibilité, l'uniformité, les bas prix de
l'énergie électrique sont en 1976 une réalité de
tous les jours qui souvent masque des avantages plus profonds qui ont
découlé de cette nationalisation, comme, par exemple, l'expertise
technique qu'ont acquise nos ingénieurs canadiens-français et qui
leur donne une réputation mondiale dans ce domaine. La
réalisation de cette volonté politique ne s'est pas faite sans
sacrifices, bien sûr. Les coûts financiers de la nationalisation ne
sont qu'un exemple du renoncement que le Québec a dû s'imposer, de
façon souvent indirecte, pour contrôler et gérer de
façon optimale un secteur important de son développement
économique et de son bien-être social.
Aujourd'hui, en 1976, treize ans se sont écoulés depuis
que le Québec a senti le besoin de donner un coup de barre dans la
direction de l'intérêt public.
Pendant cette période, l'Hydro-Québec, respectant les
exigences du législateur, a bien assis sa mission, qui était de
fournir de façon générale aux Québécois
toute l'énergie dont ils pouvaient avoir besoin, tel que défini
dans la Loi de l'Hydro-Québec et principalement par les articles 22 et
23: "22. La commission a pour objet de fournir l'énergie aux
municipalités, aux entreprises industrielles ou commerciales et aux
citoyens de cette province aux taux les plus bas compatibles avec une saine
administration financière. "Elle doit établir le tarif applicable
à chaque catégorie d'usagers suivant le coût réel du
service fourni à cette catégorie en autant que cela est
pratiqué. "Les taux et les conditions auxquels l'énergie est
fournie sont fixés par règlement de la commission ou sont
déterminés par des contrats spéciaux intervenus entre,
d'une part, la commission et, d'autre part, les municipalités, les
coopératives d'électricité ou les entreprises
industrielles ou commerciales, selon le cas. Ces règlements et ces
contrats doivent être approuvés par le lieutenant-gouverneur en
conseil."
Et l'article 23: "La commission est tenue de fournir de l'énergie
en gros à toute municipalité qui lui en fait la demande et se
conforme aux dispositions de la Loi de la municipalisation de
l'électricité, chapitre 186, à moins que cette
municipalité ne soit dans un territoire que la commission n'est pas
alors en mesure de desservir économiquement. "Elle doit
également, sous la même réserve, fournir l'énergie
en gros à toute coopérative d'électricité qui en
fait la demande. La commission doit fournir à toute municipalité
qui désire se prévaloir des dispositions du premier alinéa
du présent article tous les renseignements requis pour l'étude du
projet."
Il apparaît évident à tous aujourd'hui que les
dirigeants de l'Hydro-Québec ont respecté à la lettre
l'esprit de cette loi, de sorte qu'actuellement, nous avons au Québec
une disponibilité d'électricité et une structure de prix
qui font l'envie de tout pays industrialisé.
L'analyse rapide de quelques données, soit le taux de croissance
de la demande, le programme d'équipement, les investissements et les
emprunts pendant les dix années qui ont suivi la nationalisation de
1963, permet à la fois de mesurer de façon chiffrée le
progrès de notre société d'Etat mais surtout de placer en
perspective son avenir lié de près à notre bien-être
social.
Ainsi, la puissance installée globale en service en 1963 au
Québec était de 6200 mégawatts. Le taux de croissance de
la demande d'électricité augmentant au rythme d'environ 7 3/4%
pendant la période de 1963 à 1973, l'Hydro-Québec dut la
satisfaire en doublant sa puissance installée. Celle-ci passant en effet
de 6200 MW à 11 000 en 1973, mais à plus de 14 000 de puissance
disponible si on inclut la part de Churchill Falls dans le bilan.
La mise en place de ces programmes d'équipement de nature
hydroélectrique, pour l'essentiel, entraîna des investissements
qui, dans le contexte actuel, nous apparaissent très raisonnables.
En effet, de 1963 jusqu'à 1973, les investissements annuels
moyens de l'Hydro-Québec s'élevaient à moins de $350
millions par année ou totalisaient $3,5 milliards pendant cette
période de dix ans. Sur ce, $300 millions en moyenne étaient
empruntés annuellement pour financer les programmes d'équipement
de l'Hydro-Québec.
Si je peux me permettre de conclure cette période en la
rattachant à l'avenir, nous constatons qu'à un taux de croissance
constant, identique à la période 63-73, on devra
dorénavant investir dix fois plus d'argent annuellement que pendant la
décennie que nous venons d'examiner. En effet, et comme nous le verrons
dans quelques instants, un taux de croissance constant de 7 3/4% exigera
maintenant des investissements annuels d'au moins $3 milliards dans les
années futures.
Qu'est-il survenu depuis 1973 à aujourd'hui qui puisse justifier
une telle disproportion entre deux périodes? L'inflation semble y jouer
un très grand rôle, comme nous l'expliquera sans doute la
Société d'énergie de la baie James le 24 août
prochain lors de la session de la commission parlementaire des richesses
naturelles et des terres et forêts, sur les coûts du projet
hydroélectrique de la baie James.
D'autres facteurs, bien entendu, tels l'éloi-gnement des centres
de production, l'augmentation des coûts de la main-d'oeuvre, les effets
de la
crise pétrolière qui augmenta, dans une certaine mesure,
la pression sur la demande d'électricité, etc.,
contribuèrent aussi à expliquer l'ampleur des investissements
dorénavant requis.
Cependant, auparavant, il convient de revoir en détail les
caractéristiques de développement qui entraînent ces
investissements.
Selon Hydro-Québec, le taux de croissance de la demande sera
généralement le même dans le futur, soit 7 3/4%.
Si cette prédiction s'avérait correcte, elle exigerait,
comme par le passé, que la capacité installée double
environ tous les dix ans.
On se rappellera qu'elle avait doublé entre 1963 et 1973, passant
de 6000 MW à environ 11 000 MW. Elle augmenterait donc à 22 000
MW en 1983, soit dans sept ans, et, par conséquent, à 40 000 MW
en 1990.
Comme on le constate à la lecture des prévisions de
l'Hydro, même un tel accroissement de capacité n'entraîne
pas de surplus prévisible. De fait, d'ici 1983 il est possible qu'au
cours des trois années l'appel du réseau soit supérieur
à la capacité installée.
Du côté de l'offre, on prévoit satisfaire à
la demande à la fois par des installations hydroélectriques, des
centrales nucléaires et des centrales de pointe.
D'ailleurs, l'Hydro-Québec aura l'occasion, au cours de la
journée, de vous expliquer les caractéristiques de l'offre de
l'électricité, au moins jusqu'en 1990.
Les implications financières de tels besoins sont, comme je vous
l'ai mentionné plus tôt, extrêmement importantes.
Ainsi, à compter de 1978, la société d'Etat, de
même que la Société d'énergie de la baie James, bien
entendu, devra investir $3 milliards par année et ce, jusqu'en 1985. De
1985 à 1990, afin d'installer 15 000 MW de puissance, ce qui correspond
à un peu plus que toute la puissance installée actuellement au
Québec, l'Hydro prévoit qu'elle devra investir au rythme de $5
milliards par année.
Si l'on suppose un pourcentage d'autofinancement de 30%, ce qui est
relativement élevé, l'Hydro-Québec devra emprunter de $2,5
milliards à $3,5 milliards par année, d'ici 1990.
Face à l'ampleur et surtout aux implications d'un tel rythme de
croissance, les gouvernements, quels qu'ils soient, s'interrogent, et ce non
seulement au Québec, puisque le problème se retrouve avec une
intensité diverse un peu partout dans les pays
industrialisés.
Ainsi, à la grandeur des Etats-Unis, du Federal Power Commission
à la moindre régie d'Etat, on cherche des moyens de ralentir la
demande, de la déplacer en périodes de pointe, d'améliorer
l'efficacité des formes de production d'énergie, enfin, de
réduire les investissements.
L'Ontario, bien qu'ayant une structure et une situation
énergétique sensiblement différente de celle du
Québec, a dû réduire sérieusement les programmes
d'investissements de l'Hydro-Ontario et tout particulièrement dans le
secteur nucléaire.
Les préoccupations de l'Ontario se sont d'ailleurs traduites par
la création d'une Commission royale d'enquête, au début de
1975, afin de clarifier et de définir, en fonction de
l'intérêt public, quels devront être le rôle et les
objectifs de l'Hydro-Ontario dans l'avenir.
Comme je considère que les préoccupations de l'Ontario
reflètent largement nos propres préoccupations, je me permets de
vous lire intégralement le mandat de cette commission. "The Royal
Commission on Electric Power Planning, has been empowered and instructed to: 1)
Examine the long range electric power planning concepts of Ontario Hydro for
the period 1983-1993 and beyond and to report its findings and recommendations
to the Government, so that an approved framework can be decided upon for
Ontario Hydro in planning and implementing the electrical power system in the
best interests of the people of Ontario; 2) Inquire comprehensively into
Ontario Hydro's long-range planning program in its relation to provincial
planning; to domestic, commercial and industrial utilization of electrical
energy to environmental, energy and socio-economic factors, including but not
limited to matters such as electric load growth, systems reliability,
management of heat discharged from generating stations, interconnecting and
power pooling with neighbouring utilities, export policy, economic investment
policy, land use, general principles on the siting of generating stations and
transmission corridors, efficient utilization of electrical energy and wise
management of primary energy resources; power generation technology, security
of fuel supplies and operational considerations; 3)Deal primarily with the
broader issues relating to electric power plannig, and thus serve to alleviate
the need for re-examination of these issues at subsequent hearings of other
hearing bodies on specific details such as siting, rates, etc.; 4)Consider and
report on a priority basis on the need for a North Channel Generating Station,
a second 500 k.V. line from Bruce, a 500 k.V. supply to Kitchener, a 500 k.V.
line from Nanticoke to London, and a 500 k.V. line in the Ottawa-Cornwall area,
and other projects as may be directed by the Lieutenant Governor in
Council."
Comme vous le voyez, les préoccupations du gouvernement ontarien
sont essentiellement les nôtres, bien que l'Ontario ait choisi, à
date, un mécanisme différent pour clarifier la situation et
recommander des solutions.
Au Québec, cette commission parlementaire vise essentiellement le
même objectif, celui d'examiner comment l'Hydro entend satisfaire la
demande d'électricité en l'an 2000.
Il apparaît cependant que le cadre d'examen des activités
de l'Hydro-Québec déborde largement le secteur de
l'électricité.
Alors que, dans la période qui suivit la nationalisation, le but
premier de cet organisme était de donner une cohérence et une
vitalité au secteur de l'électricité, la période
qui vient pose de nouveaux défis qui sont ressentis tout aussi bien par
population en général que par le gouvernement, et qui exigent la
définition d'objectifs et l'élaboration de priorités
nouvelles.
La croissance prévue de l'Hydro-Québec pose, en effet, des
défis importants, qu'ils soient d'ordre économique ou financier,
ou qu'ils mettent en cause la protection de l'environnement.
Je vous ai donné brièvement plus haut un ordre de grandeur
des investissements nécessaires pour la satisfaction de la demande des
Québécois dans l'avenir. Face à ces chiffres dont
l'importance ne peut être jugée que par les investissements
d'autres secteurs comme l'éducation et les affaires sociales, par
exemple, la population s'interroge et avec raison, d'ailleurs. Car en
définitive elle paie. Elle doit donc être rassurée et
certaine, que ses représentants la représentent
adéquatement en sachant mesurer l'impact des objectifs ou des programmes
poursuivis par les organismes gouvernementaux.
Sous l'aspect de l'environnement, deux questions majeures retiennent
l'attention des Québécois. La première, quels seront les
dommages causés dans l'avenir par la mise en place de l'infrastructure
nécessaire à l'acheminement et à la distribution de
l'électricité vers les consommateurs?
Cette préoccupation des Québécois est relativement
récente. Elle date du projet désormais célèbre, au
moins en électricité, de la rivière Jacques-Cartier. Elle
s'étendit par la suite à d'autres régions, tout
particulièrement aux alentours de Montréal où les projets
de l'Hydro-Québec dans les secteurs de Rigaud et de Châteauguay
suscitèrent et suscitent encore de nombreuses protestations. C'est, je
crois, une prise de conscience saine, mais qui pose des contraintes qui se
traduisent souvent par des augmentations de coût, que cette même
société doit, une fois de plus, absorber.
Deuxièmement, au niveau technique, il semble bien que les
Québécois entretiennent les mêmes craintes, fondées
ou pas, que la population d'autres pays, face à la filière
nucléaire.
Au rythme où nous sommes tenus d'aménager notre
hydroélectricité, il semble, comme l'illustre le programme de
développement de l'Hydro-Québec, que nous devons nous
résoudre à remplir nos besoins avec de l'énergie
nucléaire au Québec, malgré les craintes et les
interrogations, non seulement de la population, mais de certains experts.
Les préoccupations majeures de la population se sont traduites au
niveau gouvernemental par une série d'actions administratives que je
voudrais vous résumer.
De façon graduelle et sectorielle, le gouvernement a, au cours
des années récentes, posé des gestes administratifs visant
à respecter les nouvelles exigences de la population.
Par exemple, dans le secteur de l'environnement, le gouvernement votait,
il y a déjà quelques années, une loi qui exige, entre
autres, que l'Hydro-Québec obtienne un permis du directeur des Services
de protection de l'environnement avant de construire toute ligne d'un voltage
supérieur à 315 kV. Lorsque le directeur a la preuve que les
études d'impact effectuées par l'Hydro-
Québec définissent la solution optimale, il accorde
à ce moment un permis de construction.
D'autre part, nous mettions récemment sur pied un comité
technique interministériel chargé d'étudier tout projet
majeur de l'Hydro-Québec. Ce comité composé de membres
permanents, soit les Services de protection de l'environnement, l'Office de
planification et de développement du Québec et le
ministère des Richesses natuelles, auxquels s'associent d'autres
ministères, selon les caractéristiques des projets, devra
à l'avenir recommander une solution optimale sur tout projet majeur de
l'Hydro-Québec. Suite à leurs recommandations examinées
par le comité interministériel permanent de l'aménagement
du territoire, un arrêté en conseil pourra être émis
à l'Hydro-Québec afin de lui permettre d'entamer des
procédures d'expropriation nécessaires et la mise en chantier de
ces ouvrages.
Au niveau financier, l'approbation des budgets et des investissements de
l'Hydro-Québec se fait bien sûr de façon annuelle et ce,
depuis fort longtemps. De même, depuis déjà un certain
temps, un comité interministériel de fonctionnaires étudie
les programmes de développement à moyen terme de
l'Hydro-Québec et leurs implications.
Ces procédures qui paraissaient satisfaisantes encore tout
récemment sont remises en question face à l'ampleur et à
l'importance des implications tant financières que sociales des budgets
futurs nécessaires au développement de
l'électricité au Québec.
Ce problème qui n'est pas nécessairement particulier au
secteur de l'électricité, mais qui se retrouve à divers
degrés d'importance dans d'autres secteurs de l'activité
économique du Québec, a amené récemment le premier
ministre Bourassa à rencontrer les dirigeants des principales
sociétés d'Etat et organismes paragouvernementaux au
Québec afin de coordonner davantage les objectifs de
développement de la société québécoise. Lors
de cette rencontre, le premier ministre a demandé à chacune des
sociétés de présenter et de faire approuver, annuellement,
son programme de développement afin de s'assurer que les objectifs de
développement de chacune de ces sociétés
s'intègrent parfaitement dans les objectifs généraux de
développement poursuivis par la société
québécoise. Ce mécanisme ou cette procédure, non
plus sectorielle mais générale, répondra certainement
mieux à toute action ponctuelle de l'administration gouvernementale.
C'est un premier pas vers un meilleur contrôle tant des orientations que
des investissements des sociétés paragouvernementales
financées par les deniers publics.
Mais toutes ces mesures, toute cette procédure, ne seront
efficaces que lorsque nous aurons fait un choix entre deux possibilités.
Nous pouvons continuer notre développement électrique de
façon traditionnelle ou nous pouvons l'orienter différemment.
Nous constatons aujourd'hui qu'au rythme de croissance de la demande
d'électricité nous épui-
sons très rapidement nos réserves
hydroélectriques.
A l'avenir, selon l'Hydro-Québec, nous devrions remplacer
l'énergie hydroélectrique par de l'énergie
nucléaire. Comme conséquence, nous perdrons la seule
hégémonie énergétique que nous détenions
jusqu'à maintenant, puisque nous ne contrôlerons aucune des
étapes ou des facettes du développement nucléaire ou de la
technologie nucléaire, dans l'avenir.
Même si nous développons l'énergie nucléaire,
il nous apparaît évident que nous ne disposerons que d'une
quantité limitée d'électricité. Il faudra donc en
faire l'allocation. Nous devons choisir entre une allocation vers le secteur
industriel et commercial ou une allocation vers les besoins domestiques et le
secteur résidentiel.
Au niveau financier, comme vous l'avez vu, nous devrons investir environ
$5 milliards par année bientôt, pour être en mesure de
satisfaire la demande régulière d'électricité, soit
la moitié du budget global actuel du Québec. Un tel
investissement aura évidemment des répercussions dans d'autres
secteurs de l'activité québécoise.
Malgré cela, le programme de développement que nous
propose l'Hydro-Québec est peut-être le programme qui
répond le mieux à l'intérêt québécois.
Il est possible que les investissements publics dans le secteur de
l'électricité soient plus rentables que dans d'autres
secteurs.
Il est aussi possible que nous voulions, face aux changements survenus
dans les valeurs de notre société depuis 1963, reformuler les
priorités d'investissements du Québec.
De toute façon, la question doit être posée.
Devrions-nous poursuivre en 1976 les mêmes objectifs de
développement dans le secteur de l'électricité que nous
avions définis et poursuivis depuis 1963?
C'est à cette préoccupation que les travaux de cette
commission devraient ou devront s'attarder aujourd'hui.
Le Président (M. Séguin): Merci, M. le ministre. Le
chef de l'Opposition.
Remarques de M. Jacques-Yvan Morin
M. Morin: M. le Président, en dépit de la
convocation tardive de cette commission, nous nous réjouissons de la
voir enfin se réunir. Nous la réclamons depuis des mois.
Elle devra se pencher sur les causes, mais également sur les
conséquences de la récente augmentation de $4,3 milliards dans le
projet d'aménagement de la rivière La Grande.
La demande, certes, doit être satisfaite, elle augmente sans
cesse, mais, dans l'esprit des questions que le ministre se posait à la
toute fin de son exposé et aux questions que j'aurais attendues
dès le début de son exposé, nous devons nous demander si
cette demande doit être satisfaite à n'importe quel coût.
N'y a-t-il pas d'autres besoins, au Québec, d'autres besoins sociaux,
notamment, qui sont également importants, dont on doit mesurer
l'importance par rapport au développement hydroélectrique?
Quelles sont les conséquences sociales des investissements
massifs dont l'Hydro et dont le ministre viennent de nous entretenir? Dans le
cas de l'augmentation dont on nous a fait part ces jours-ci dans le coût
de la rivière La Grande, il s'agit d'une nouvelle hausse vertigineuse,
ce n'est pas la première, hausse qui amplifie l'escalade
effrénée et régulière des coûts depuis le
lancement du projet en avril 1971.
Le ministre disait tout à l'heure que le programme de
développement que nous propose l'Hydro-Québec, et dont la Baie
James n'est qu'un aspect, ne constitue qu'un aspect, et peut être le
programme qui répond le mieux à l'intérêt
québécois. Mais, il ajoutait que, devant les changements survenus
dans l'échelle de valeurs des Québécois depuis un certain
temps, il est également possible que nous voulions repenser, puis
reformuler les priorités d'investissements du Québec. J'accepte
tout à fait cette façon de poser le problème. Je pense que
les dirigeants de l'Hydro voudront également se placer dans cette
perspective au cours des heures qui viennent.
Depuis plus d'un an, l'Opposition officielle demande qu'une commission
parlementaire soit convoquée pour étudier en particulier la
question de l'augmentation des investissements sur la Grande, car il est
évident que si ce grand projet devait entraîner une hausse de
coûts sans fin, cela serait de nature à compromettre ou en tout
cas à soulever de très graves questions sur les autres projets
d'investissement. Déjà, en juillet 1975, il nous était
apparu incompréhensible que le gouvernement ne rende pas publique une
nouvelle estimation des coûts. Dans la perspective d'une saine allocation
des fonds publics, dans la perspective d'un examen global des besoins en
énergie, mais également des besoins sociaux et économiques
du Québec, il est inadmissible qu'un gouvernement ayant la
responsabilité d'un projet de l'ordre de $16 milliards, soit près
de deux fois le budget annuel du Québec, agisse de façon aussi
contraire aux règles les plus élémentaires de la saine
gestion. Comment réagir autrement, M. le Président, quand on sait
que depuis deux ans, c'est-à-dire depuis l'été 1974, le
ministre des Richesses naturelles nous a dit à plusieurs reprises qu'il
n'avait aucune idée du coût du projet de la baie James? Dans ces
conditions, il nous paraît évident que le gouvernement actuel joue
mal son rôle d'ultime responsable de la bonne gestion des fonds publics
et que pour cette somme de $16 milliards qui doit être investie par les
Québécois dans le projet, nous risquons fort, malheureusement, de
voir se répéter à ce sujet les événements
que nous avons connus à propos des Jeux olympiques. Je pense que ce
serait de nature à discréditer les efforts qui sont faits pour
assurer l'alimentation en énergie du Québec dans l'avenir que
s'installe dans l'esprit des Québécois le soupçon qui
pèse sur les Jeux olympiques et sur l'avenir de l'utilisation de ces
magnifiques installations.
Par suite du refus de rendre publique une nouvelle estimation en juillet
1975, cette commis-
sion a d'abord été promise, vous vous en souviendrez, pour
la fin de 1975. Dès février 1976, le président de la
Société d'énergie de la baie James nous apprenait qu'il
était prêt et disposé à rencontrer une commission
parlementaire qui pourrait rendre publics les coûts, mais ce n'est qu'en
ce mois d'août, plus de deux ans après la dernière
estimation de $11,9 milliards, que nous avons été appelés
à siéger pour examiner la hausse des coûts. Non seulement
ces délais nous paraissent-ils incompatibles avec une saine gestion des
fonds publics québécois, mais encore faut-il souligner que sous
ce gouvernement se pratiquent des efforts concertés, semble-t-il, pour
dissimuler des données aussi fondamentales que celles-là. Il est
inadmissible, par exemple, qu'on ait soutenu devant cette commission, il y a
à peine un an, que l'estimation de $11,9 milliards tenait toujours et
qu'un an plus tard on nous arrive avec une augmentation de $4 milliards.
Depuis le tout début de ce projet, dont les coûts ont
quadruplé depuis 1971, il semble bien que le gouvernement ait mal
piloté un projet qui avait été lancé, on s'en
souviendra au début, beaucoup plus dans une ambiance politique que dans
une ambiance plus favorable à l'examen objectif des données du
problème.
Dès le départ, nous l'avons répété
à plusieurs reprises, le gouvernement a entraîné
l'Hydro-Québec dans une décision précipitée alors
que les études de base non seulement n'étaient pas
terminées, mais n'existaient tout simplement pas dans le cas de la
rivière La Grande. Cette absence de planification, cette façon
désordonnée, foncièrement désordonnée de
procéder a été reconnue, même implicitement,
à tout le moins, par le ministre des Richesses naturelles qui a
confirmé, lors de sa récente conférence de presse, que le
manque d'études préparatoires a occasionné de nombreuses
modifications dans le projet et, par le fait même, de très
substantielles réévaluations à la hausse.
Cette absence de prospectives, cette absence de planification n'a pas
manqué, d'ailleurs, d'être soulignée par le seul organisme
scientifique, organisme qui d'ailleurs n'était pas impliqué
directement dans le projet et donc un peu libre de dire ce qui devait
être dit, je veux dire le Conseil des sciences du Canada qui estimait que
de substantielles économies allant jusqu'à 25% auraient pu
être réalisées dans des conditions optimales de
planification des investissements.
En second lieu, M. le Président, à peine quelques mois
après le lancement du projet, le gouvernement, par la
présentation du projet de loi no 50, créait une structure
nouvelle, la SDBJ. Et à cette époque, vous vous souviendrez que
cela n'avait pas peu contribué à rendre fort tendus les rapports
entre l'Hydro-Québec et le gouvernement.
Le moment était fort mal choisi puisqu'il était
évident que, de toute façon, l'Hydro-Québec serait
appelée à jouer un rôle de premier plan dans le
développement de la baie James ou de tout autre projet
hydroélectrique au Québec étant donné que l'Hydro
était le seul organisme compétent, de toute évidence, pour
diriger un tel projet. Il ne fait aucun doute que tous ces tiraillements et la
création rapide, improvisée d'une nouvelle structure
administrative non rodée et surtout d'une structure qui ne recevait pas,
du moins dans sa forme originale, l'assentiment de l'Hydro-Québec, ont
nuit à la planification du projet.
J'aurais aimé que le ministre, tout à l'heure, dans
l'étude qu'il faisait des motifs qui ont entraîné
l'augmentation des coûts, fasse état de ces
réalités. En tout cas, nous l'avions fait à
l'époque et nous allons certainement continuer de le rappeler parce que
ces tiraillements du début n'ont pas fini de porter leurs
conséquences.
En troisième lieu, nous demeurons convaincus qu'au nombre des
erreurs commises par le gouvernement dans ce dossier, dans sa façon de
piloter ce projet, se trouve la conception même de la formule de
gérance et de gestion du projet. Dès le début, le
gouvernement a, comme dans bien d'autres domaines d'ailleurs, tenté de
réduire le plus possible le rôle de l'entreprise publique.
Dès le départ, il était évident, et nous l'avons
dénoncé à l'époque, qu'on voulait réserver
la plus grosse part possible du gâteau à l'entreprise
privée. La décision de faire des firmes de consultants
privés, et principalement de Bechtel, les éléments
fondamentaux, principaux de la gérance constituait à nos yeux une
erreur dont on n'a pas fini de se remettre.
Nous continuons de penser que la société
Hydro-Québec était la mieux placée pour accomplir
efficacement et à moindre coût cette tâche fondamentale.
La présence, pour ne pas dire l'omniprésence de
l'entreprise privée, les conditions fort pénibles dans lesquelles
certains contrats ont été négociés et
accordés, alors qu'à peine deux ou trois soumissionnaires
étaient sur les rangs, nous ont toujours inquiétés et
continuent de nous inquiéter.
Encore tout récemment, dans le Soleil du 10 septembre, on
rapportait les propos d'un dirigeant de la SEBJ qui aurait affirmé
et nous aurons sans doute l'occasion de revenir sur cette question au
cours des heures qui viennent que le fait de faire de l'Hydro le
maître d'oeuvre du projet, aurait pu permettre des économies de
l'ordre de 20% du total des coûts. Quand on ajoute cela aux
considérations du Conseil des sciences du Canada, on voit à
quelle conclusion nous sommes conduits.
Ces avis ne sont pas toujours parfaitement scientifiques,
peut-être. Ces chiffres qui ont été avancés,
d'économie de l'ordre de 25% ou de 20%, ne donnent peut-être qu'un
ordre de grandeur, mais ils n'en demeurent pas moins révélateurs
à l'égard de la conception qu'ont certaines personnes de
l'intérieur de l'Hydro, de la façon dont la gérance a
été conçue par le gouvernement.
Et nous continuons de penser que depuis le tout début de ce
projet, le gouvernement porte une très lourde responsabilité tant
sur le plan de la conception, de la gestion administrative, que sur le plan de
la planification dans cette augmentation insatiable des coûts.
Il y a sûrement peu de premiers ministres qui
ont annoncé des projets d'une telle envergure, non seulement en
se trompant de rivière puisque La Grande est située
à 200 milles au nord du site original NBR mais également
en se trompant de quelques petits $12 milliards.
Il y a également très peu de gouvernements qui aient
piloté un projet de $16 milliards sans avoir, pendant plus de quatre
ans, un ministre responsable, vraiment responsable, au fait du projet, qui en
suive l'évolution, et qui soit en mesure d'informer la Chambre, et donc,
l'opinion publique, de révolution des coûts de mois en mois.
Nous aurons certes l'occasion d'étudier longuement les causes et
les répercussions de la récente hausse de $4,3 milliards. A
première vue, je vous dirai tout de suite, M. le Président, que
cette hausse nous paraît excessive. Elle ne peut s'expliquer par une
augmentation significative de la capacité installée, comme on l'a
plaidé ces jours-ci, qui passe de 10 070 MW à 10 190 MW, si ma
mémoire est bonne, soit une augmentation d'à peine 1%. Ce n'est
pas en plaidant l'augmentation de la puissance installée qu'on va
pouvoir justifier une augmentation de cet ordre dans les coûts.
La hausse ne peut, non plus, s'expliquer uniquement par les taux
d'inflation. J'entendais le premier ministre, ces jours-ci, nous dire: Comment
voulez-vous qu'avec des niveaux de hausse de l'ordre de 300% ou 400% dans la
construction ou dans l'ensemble du Canada, cela n'augmente pas de la même
façon à la baie James?
Je crois que c'est induire les Québécois en erreur que de
plaider des chiffres de cet ordre. D'après Statistique Canada, le taux
d'inflation observé depuis 1971, dans les coûts de construction
des centrales hydroélectriques est de l'ordre de 55%, mais pas
davantage; ceci, pour toute la période de quatre ans.
Je voyais dans la Presse d'hier, le 9 août, que le premier
ministre voulait justifier justement la nouvelle estimation de $16,2 milliards
et considérait qu'avec ces augmentations de l'ordre de 300% à
500%, on ne devait pas s'étonner de l'augmentation du coût de la
baie James.
C'est parfaitement ridicule et c'est faux. Depuis quatre ans, c'est bien
55% d'augmentation dont nous avons été témoins et ceci,
spécifiquement pour ce genre de construction. Cela nous en dit long, M.
le Président, sur le genre d'administrateur et d'économiste
qu'est le premier ministre.
Au lieu de chercher à améliorer la gestion du projet, au
lieu de chercher, comme nous devons le faire dans cette commission
parlementaire, à limiter l'augmentation des coûts, il s'efforce
tout au plus de trouver a posteriori des justifications qui nous paraissent
complètement loufoques. C'est prendre les Québécois pour
des imbéciles que de leur proposer des explications comme
celles-là. Si les coûts avaient augmenté de 400% ou 500% au
lieu de 300% il aurait trouvé encore le moyen, sans doute, d'affirmer
que partout au Canada les coûts avaient augmenté de 500% à
700%. On dit n'importe quoi pour justifier une situation inexcusable.
M. le Président, les facéties du premier ministre ne
permettent pas d'expliquer l'escalade effrénée des coûts
depuis le début, d'autant que les évaluations antérieures
contenaient déjà ce qu'on appelait des réserves quant
à l'inflation future: 15% pour l'année 1974 et 9% pour
l'année 1975. Donc, dans les évaluations antérieures se
trouvaient déjà des mécanismes d'augmentation en fonction
de l'augmentation des coûts. Donc, en plus de ce qui était
déjà prévu, qu'on vienne nous proposer des explications
aussi saugrenues que celles-là, cela dépasse proprement
l'entendement. Nous ne manquerons certainement pas de revenir là-dessus
par la suite.
M. Cournoyer: J'espère que vous allez revenir le 24, puis
que vous allez donner une chance aux gars de l'Hydro-Québec de vous
expliquer cela...
M. Morin: J'espère bien que nous allons y venir d'ailleurs
avant le 24. Je vous ai écouté patiemment...
M. Cournoyer: Moi j'avais quelque chose de...
M. Morin: ... pour en venir aux questions fondamentales à
la toute fin de votre exposé.
M. Cournoyer: C'est exposé là...
M. Morin: Moi j'essaie d'en venir tout de suite aux questions
fondamentales.
Le Président (M. Séguin): A l'ordre!
M. Cournoyer: Bien non, vous êtes dans la baie James
par-dessus la tête.
M. Morin: Ecoutez-moi.
Le Président (M. Séguin): A l'ordre!
M. Cournoyer: Vous vous trompez.
Le Président (M. Séguin): A l'ordre!
M. Cournoyer: M. le Président, il se trompe.
M. Morin: Bien.
Le Président (M. Séguin): A l'ordre, s'il vous
plaît! Les corrections se feront en temps et lieu.
Une Voix: Vous avez droit à votre opinion.
M. Cournoyer: Non, votre opinion, je ne voudrais quand même
pas que mon ancien professeur...
M. Bellemare (Johnson): Soyez donc patient.
Le Président (M. Séguin): A l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Bellemare (Johnson): Vous allez être patient pour
moi.
Le Président (M. Séguin): A l'ordre!
M. Cournoyer: Vous, vous aimez cela le re-
garder se tromper, moi je n'aime pas cela, c'est mon ancien
professeur.
Le Président (M. Séguin): A l'ordre, s'il vous
plaît! A l'ordre!
M. Bellemare (Johnson): Ce n'est pas cela que je dis.
Le Président (M. Séguin): A l'ordre! Le chef de
l'Opposition, continuez.
M. Morin: Merci, M. le Président.
Il y a bien d'autres sujets que nous allons devoir aborder et fouiller
à fond au cours de ces prochaines séances. Il y a tout d'abord
les prévisions de la demande et, en particulier, la baisse pour ainsi
dire continue dans la croissance de la demande au cours des dernières
années, baisse qui, à nos yeux, soulève d'importantes
questions quant au taux utilisé par l'Hydro-Québec pour
prévoir les investissements requis au cours des quinze prochaines
années.
Et j'attire l'attention de la commission sur le fait qu'une
différence de 2% sur quinze ans signifie quatre ou cinq Manic 5. Donc,
nous traitons de choses extrêmement importantes. Et une
sous-évaluation comme une surévaluation de la demande peut
entraîner des conséquences financières
considérables. Je vois que le ministre est d'accord avec moi pour une
fois et j'espère qu'il va continuer de l'être.
M. Cournoyer: Sur la dernière phrase, pas sur ce qui a
été dit avant. Sur la dernière phrase, je suis
d'accord.
M. Morin: J'aurais pu, à plusieurs reprises, interrompre
le ministre des Richesses naturelles; j'aurais pu l'interrompre à
plusieurs reprises durant son exposé à l'occasion d'un certain
nombre d'inexactitudes dont il nous a fait part.
M. Cournoyer: J'aurais bien voulu voir cela.
Le Président (M. Séguin): A l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Morin: Je ne l'ai pas fait.
Le Président (M. Séguin): A l'ordre!
M. Cournoyer: Donnez-moi la chance, vous allez le voir.
M. Morin: Je ne l'ai pas fait parce que j'estimais que le
ministre avait le droit d'être entendu jusqu'au bout. De même,
l'Opposition a le droit d'être entendue jusqu'au bout.
Le Président (M. Séguin): A l'ordre! Vous alliez
bien, continuez donc jusqu'au bout.
M. Morin: Merci, M. le Président.
M. Cournoyer: II m'a interpellé, j'ai répondu.
M. Morin: Le programme d'équipement pour les années
1985 à 1990 où, pour la première fois, nous voyons
apparaître deux changements majeurs, est également l'une des
questions que nous avons l'intention d'aborder. Près de la moitié
des nouveaux équipements seront de pointe. La fin de la décennie
des années quatre-vingt verra apparaître une centrale
nucléaire par année. Nous ne sommes pas mécontents de
constater que nos préoccupations nucléaires, qui n'ont jamais,
d'ailleurs, éclipsé nos préoccupations dans le domaine
hydraulique, ont fini par retenir l'attention des spécialistes de
l'Hydro-Québec. Ce sont deux sujets qui avaient fait l'objet de
nombreuses questions et de nombreuses interpellations de l'Opposition dans le
passé. Nous avons l'intention d'y revenir longuement avec l'Hydro.
Enfin, il est un autre sujet j'annonce un peu les couleurs de
l'Opposition pour que ces messieurs de l'Hydro sachent sur quelles questions
nous avons l'intention d'insister c'est la décision du National
Energy Board et ses conséquences économiques pour
l'Hydro-Québec et pour ses clients, les Québécois.
Nous aurons donc l'occasion de nous pencher sur toute la question de ce
qu'on appelle les interconnexions et de demander au président de l'Hydro
ce qui aurait pu inciter le premier ministre du Québec à
défendre et même à favoriser, à promouvoir,
semble-t-il, l'interconnexion avec les Maritimes, alors qu'il est bien
évident, à nos yeux, qu'il est beaucoup plus rentable de
transiger directement avec nos voisins du sud. Enfin, nous aurons, certes,
l'occasion de discuter à fond d'un certain nombre d'autres sujets
importants dont nous avons discuté à chaque commission dans le
passé, c'est-à-dire les emprunts de l'Hydro, les tarifs, à
la lumière évidemment de la nouvelle estimation des coûts
dans le cas de la baie James, des lignes de transmission, etc. Aussi, pour
simplifier le travail de cette commission, voudrais-je proposer que nous
procédions comme nous l'avons fait au cours des années
passées et que nous nous donnions une sorte d'ordre du jour que nous
pourrions peut-être modifier chemin faisant, mais qui pourrait nous
servir de cadre de discussion et qui permettrait, tant aux
députés membres de cette commission qu'aux représentants
de l'Hydro-Québec de préparer leurs interventions et leurs
réponses.
Je proposerai donc, comme par les années passées, que nous
suivions l'ordre du jour suivant: tout d'abord, la demande; en toute logique,
je pense bien qu'il faut commencer par cela. Ensuite, le programme
d'équipement et les coûts, en particulier, naturellement,
l'augmentation des coûts de la rivière La Grande. Ensuite, la
question de la gérance, en particulier, la question de savoir s'il y a
eu un nouveau contrat, comme on nous l'avait laissé entendre au cours
des dernières réunions de cette commission. Ensuite, les tarifs;
ensuite, toute la question de l'exportation des ressources
hydroélectriques.
Je proposerais donc que nous abordions ces questions dans l'ordre
proposé, mais assez rapidement de façon à en venir le plus
tôt possible à la
question qui intéresse à l'heure actuelle le plus les
Québécois, il faut bien le dire, qui est celle des coûts.
Si même on pouvait aborder la question des coûts aujourd'hui
même, j'avoue que, pour ma part, je m'en réjouirais. Etant
donné que nous avons déjè attendu deux ans pour obtenir
cette nouvelle estimation, je pense que les Québécois ont le
droit d'être informés rapidement sur les causes de cette
augmentation et sur ses conséquences.
Enfin, j'aurais une dernière proposition à faire, qui
n'intéresse pas la séance d'aujourd'hui, mais celle de demain.
Là-dessus, je pense que, sans doute, je pourrais avoir l'appui aussi
bien des collègues du côté de la majorité que de mes
collègues de l'Opposition. L'un des problèmes qui dominent,
à l'heure actuelle, l'actualité, lorsqu'on parle de
l'Hydro-Québec, c'est évidemment la question des relations du
travail. Je m'en voudrais de ne pas permettre à cette commission de se
pencher sur ce problème. Je ne pense pas, en tout cas, que nous
puissions ajourner les travaux de cette commission sans en avoir parlé.
Je proposerais c'est une proposition distincte de celle que je viens de
faire quant à l'ordre du jour que nous nous réunissions
dès demain matin pour étudier cette question des rapports de
travail à l'Hydro-Québec.
Je sais que mon collègue, le député de Maisonneuve
et leader de l'Opposition en Chambre, M. Robert Burns, l'a
suggéré à plusieurs reprises, l'a demandé à
plusieurs reprises, sans que nous obtenions de réponse de la part des
ministres concernés.
Il me semble qu'il serait utile, qu'il ne serait pas inutile d'explorer
le problème. Bien sûr qu'on va me dire que la partie syndicale est
absente, mais elle pourrait également être convoquée dans
les meilleurs délais par la suite pour que nous puissions entendre
toutes les parties. Il me semble donc que, dès demain matin, on pourrait
déjà entendre les représentants de l'Hydro-Québec
au sujet de ce grave problème syndical qui est en train de créer,
qui a déjà créé et qui pourrait encore créer
de très graves perturbations au Québec.
Le ministre, ces jours-ci, nous a fait part de ses
jérémiades habituelles. Il a, semble-t-il, échoué.
Il faudrait donc que la commission...
M. Cournoyer: M. le Président...
M. Morin: Je m'excuse. Vous aurez votre tour pour intervenir et
pour nous faire part des conséquences de votre échec. Pour
l'instant, je me contente de dire que cet échec appelle l'intervention
de la commission parlementaire. Je pense que c'est dans le meilleur
intérêt des Québécois. Partout, dans le
Québec, on est aux prises avec les conséquences de cette
grève qui sont pénibles pour plusieurs et non seulement dans les
villes.
J'arrive d'une tournée. J'ai eu l'occasion de constater à
quel point ces événements ont eu pour la classe agricole des
conséquences fort désagréables et économiquement
peu rentables.
C'est la raison pour laquelle je me permets de proposer que, dès
demain matin je ne le fais pas pour aujourd'hui, parce que je me rends
compte que la commission ne serait pas prête à en discuter
nous abordions ce problème. M. le Président, j'ai
terminé.
M. Bellemare (Johnson): M. le Président, est-ce que l'on
discute de la proposition d'abord?
Le Président (M. Séguin): Un instant! Je me demande
si le chef de l'Opposition fait une motion de ce qu'il avance.
M. Morin: Je ne voudrais pas empêcher mon collègue,
le chef de l'Union... Pardon!... l'ancien chef de l'Union Nationale...
M. Bellemare (Johnson): Cela ne me froisse pas.
M. Morin: J'aurais pensé que, dans les circonstances
actuelles, vous seriez tenté de reprendre du poil de la bête!
M. Cournoyer: Ah! Vous ne pensiez pas qu'il ne l'avait pas
perdu!
M. Bellemare (Johnson): Ne faites par le prophète pour
rien.
M. Morin: Non, mais je ne voudrais pas vous empêcher de
faire votre exposé. Je serais prêt, si les membres de cette
commission veulent, bien y consentir, si vous n'y voyez pas d'objection de
procédure, à suspendre mes deux propositions, parce qu'elles sont
distinctes, jusqu'à ce que le...
M. Bellemare (Johnson): ... le député de
Johnson.
M. Morin: ... député de Johnson ait terminé
son exposé.
Le Président (M. Séguin): Si vous aviez
combiné vos deux propositions, je ne serais pas prêt à les
recevoir. Dans le cas présent, vous avez suggéré une
procédure au point de vue de l'étude du détail de ce qu'on
doit faire.
Si vous présentez la motion la première partie,
équipements, coûts, gérance, tarifs, exportation, je pense
que c'est dans cet ordre que vous l'aviez faite, toutefois, vous aurez votre
texte à suggérer, si c'est cela, cela devient tout simplement une
motion. Si la motion est recevable et je la crois recevable
même si notre convocation a été dans le but d'entendre les
représentants de l'Hydro-Québec relativement au programme
d'investissements, on peut peut-être rapprocher ces choses de la raison
d'être de la commission, en pliant un peu les coins.
Si vous la présentez comme motion, je l'accepte comme motion.
Nous entendrons ceux qui auront à dire quelque chose sur votre motion.
Il y aura vote et la commission décidera.
M. Morin: Vous voulez donc qu'on en discute maintenant?
Le Président (M. Séguin): Si vous présentez
votre motion sous forme régulière, je donnerai la parole à
ce moment au ministre et ensuite au député de Johnson.
M. Cournoyer: Etant donné que le député de
Johnson...
M. Bellemare (Johnson): Je ferai ma déclaration...
M. Cournoyer: J'espère que vous n'aurez pas de motion pour
amender cette motion à la fin.
M. Bellemare (Johnson): Sauf...
M. Cournoyer: Je suis assez impatient de vous entendre, vous
savez.
M. Bellemare (Johnson): Rien qu'à vous regarder, je sais
que vous allez comprendre.
M. Cournoyer: Vous allez me comprendre, vous, mais lui, j'ai de
la misère.
Le Président (M. Séguin): Je demanderais au chef de
l'Opposition de présenter sa motion.
M. Bellemare (Johnson): Sur la question de
procédure...
Le Président (M. Séguin): Seulement un instant,
s'il vous plaît! Il va présenter sa motion officiellement. Nous
aurons le texte de la motion...
M. Bellemare (Johnson): Avant que le chef de l'Opposition ne
présente sa motion, j'aurais une objection fondamentale, parce qu'il y a
deux choses bien distinctes. D'abord, il y a la question de demande, le
programme des équipements et des coûts de la baie James. Cela,
c'est le 24 août, c'est dans sa motion.
Mais il y a aussi les relations du travail qui comprennent actuellement
la grève de l'Hydro. Je voterais pour cela. Mais la première
proposition, vu que nous allons revenir le 24 août pour discuter de la
demande des programmes d'équipement de la Baie James, je serais
porté à voter contre cela. Parce que sa proposition va contenir,
comme vous le voulez, les relations du travail...
Le Président (M. Séguin): II y aurait deux
motions.
M. Bellemare (Johnson): Deux motions.
Le Président (M. Séguin): C'est la seule
façon qui me permettrait d'accepter la première. S'il combine les
deux, je ne peux la recevoir.
M. Bellemare (Johnson): D'accord.
Le Président (M. Séguin): Vous voterez pour ou
contre...
M. Bellemare (Johnson): D'accord.
Le Président (M. Séguin): ... une fois que la
motion sera présentée.
M. Bellemare (Johnson): Je suis prêt.
M. Morin: II est bien possible que le ministre et le
côté ministériel acceptent la proposition d'emblée,
auquel cas on pourra tout de suite entendre le député de
Johnson.
M. Cournoyer: C'est peu probable.
M. Morin: Je propose donc... C'est ce que nous avons fait dans le
passé et je vais la formuler.
M. Cournoyer: Vous vivez dans le passé et moi je vis dans
l'avenir.
M. Morin: Ah!
Le Président (M. Séguin): La motion.
M. Morin: Ce n'est pas ce genre de blague qui va vous tirer
d'affaire.
M. Cournoyer: Ce n'est pas une blague.
Le Président (M. Séguin): La motion.
Motion sur l'ordre du jour
M. Morin: Je propose que la commission procède dans
l'ordre suivant, au cours de la présente séance et des
séances subséquentes.
Premièrement, la question de la demande
d'électricité. Deuxièmement, la question du programme
d'équipement et des coûts qui s'ensuivent. Troisièmement,
la question de la gérance du projet de la Baie James, en particulier.
Quatrièmement, la question des tarifs. Cinquièmement, la question
des emprunts. Et enfin, sixièmement, la question de l'exportation de
l'électricité hors du Québec. Je ferai ma seconde
proposition par la suite, si vous le voulez bien.
Le Président (M. Séguin): II y a cette motion. Y en
a-t-il qui veulent s'exprimer sur la motion?
M. Bellemare (Johnson): Voici mon opinion.
Le Président (M. Séguin): Le député
de Johnson.
M. Bellemare (Johnson): Je serais bien d'accord si la
première question dé sa motion portant sur la demande
d'électricité, comme la deuxième, qui comprend le
programme d'équipement et les coûts de la Baie James, pouvaient
être reportées au 24 août, parce que cela va être une
redondance pour rien, on va en parler le 24. Quant à la gérance,
quant aux tarifs, quant aux emprunts, quant à l'exportation des
ressources hydroélectriques du Québec vers l'Ontario, Terre-Neuve
ou vers New York, je pense que cela pourrait être acceptable. C'est
justement les deux premières questions qui vont peut-être me
forcer, à cause de la séance de
commission parlementaire du 24 août, un peu à voter contre;
mais quand il s'agit des quatre autres articles, je la crois
véritablement de mise, aujourd'hui, et c'est un ordre qui pourrait
être fort bien suivi par les membres de la commission.
La gérance, c'est sûr et certain qu'on va en parler
aujourd'hui, les tarifs aussi et les emprunts contractés. C'est dans
l'ordre du jour, comme l'exportation de ressources hydroélectriques vers
les autres provinces ou les autres pays. Cela créerait un certain ordo,
je pense, qui serait de mise. Quant à la demande
d'électricité et ce que cela a dû produire comme programme
d'équipement, et particulièrement les coûts, cela pourrait
être facilement reporté au 24 août, je pense, puisqu'il y a
une convocation qui est faite pour le 24.
M. Morin: Le député de Johnson me permettrait-il
une question? N'estime-t-il pas qu'il serait plus logique de discuter des
coûts et du programme d'investissement avant de parler des emprunts et
des tarifs? Parce que l'un découle naturellement, dans une large mesure,
de l'autre. Deuxièmement, n'est-il pas conscient du fait que le 24
août, dont il a été question dans certaines
déclarations du ministre, ne lie pas cette commission. Le ministre pense
que cela devrait venir le 24 août, mais je pense que cela devrait venir
avant.
M. Cournoyer: On va le demander, on va voter
là-dessus.
M. Morin: Bon, alors, moi, j'estime, en tout cas, qu'on pourrait
demander aussi à ces messieurs de l'Hydro-Québec s'ils sont
disposés à nous parler des coûts du programme
d'investissements, aujourd'hui. Je pense que, quant à eux, ils doivent
être tout à fait prêts à répondre à peu
près à n'importe quelle question dès maintenant.
M. Cournoyer: Oui.
Le Président (M. Séguin): C'est très bien.
Là, vous êtes en train de justifier votre motion.
M. Bellemare (Johnson): C'est-à-dire qu'il m'a posé
une question, vous devriez me laisser répondre.
Le Président (M. Séguin): C'est cela.
M. Bellemare (Johnson): C'est peut-être à moi de
dire si je consens ou non puisque la question m'est posée
directement.
Je dis que le chef de l'Opposition semble vouloir faire un certain ordo
qui, dans l'ensemble, est raisonnable; sauf que s'il y a une promesse formelle
de la part du ministre et de la part des autorités gouvernementales
qu'on siège le 24 août au sujet de la baie James, je dis que cela
va être de la redondance. C'est sûr et certain que ce qu'on va dire
aujourd'hui, on va le répéter le 24 août.
La motion serait acceptable si, pour plaire à tout le monde, on
parlait de gérance, de tarifs, d'emprunts, d'exportation. Ce sont quatre
articles qui vont prendre beaucoup plus que la journée. Cela
établirait un certain ordo dans la procédure parlementaire.
Le Président (M. Séguin): M. le ministre.
M. Cournoyer: M. le Président, dans l'exposé
préliminaire que j'ai fait, j'ai indiqué jusqu'à un
certain point une volonté assez déterminée du gouvernement
de procéder du général au particulier. Je comprends que
c'est une procédure que le chef parlementaire de l'Opposition n'accepte
pas, celle qui veut procéder du général au particulier.
Nous avons demandé à l'Hydro-Québec de se préparer,
ce matin, pour indiquer les prévisions générales de la
demande, celles qu'elle prévoit et qui, en fait, motivent tout le
programme d'équipement qui est en dessous. Là-dessus, je suis
d'accord avec l'expression du chef de l'Opposition qui dit: On va commencer par
la demande, les prévisions de la demande que l'Hydro-Québec
entrevoit dans le futur, je dis jusqu'à l'an 2000, ce qu'on
prévoit d'augmentation de la demande jusqu'à l'an 2000 et,
ensuite, le programme d'équipement d'ici aussi l'an 2000. Ce que le chef
de l'Opposition implique, c'est qu'il tombe immédiatement à la
baie James, alors qu'il ne veut même pas parler du général
d'abord.
M. Morin: Non, je veux bien.
M. Cournoyer: Alors, le général, pour moi, il est
très important.
M. Morin: Quand je parle du programme d'équipement,
d'investissements, je parle de l'ensemble du programme.
M. Cournoyer: Ce qui est arrivé, et je continue
après cela, l'autre article qui se dégage de l'exposé que
j'ai fait, c'était que les implications financières de ce
programme devaient être clairement indiquées. Les implications
financières, cela dépend de ce que l'on fait avec
l'électricité, les surplus, si on les vend ou si on ne les vend
pas, les empêchements qu'on peut avoir à les vendre; ce sont des
sous-articles, en définitive, que je retrouve dans le programme
proposé par la motion du chef de l'Opposition. Si le chef de
l'Opposition veut dire que nous allons entendre l'Hydro-Québec sur les
prévisions de la demande d'ici l'an 2000, ou 1990, si c'est impossible
de le faire d'ici l'an 2000, mais en appliquant le même schème
économique même si, moi, je ne suis pas économiste,
je peux parler des schèmes économiques, cela fait gentil dans les
salons, cela fait beau ce schème économique, vous pouvez
le projeter jusqu'à l'an 2000 assez facilement en pesant sur un bouton
de IBM.
M. Morin: Cela vous rend aussi brillant que le premier
ministre.
M. Cournoyer: Vous savez, avant de vous atteindre, cela va
être long, parce que... Testament! une chance que je veux être poli
avec vous.
M. Morin: II va me ressortir encore l'histoire du...
M. Bellemare (Johnson): Vous êtes vindicatif, ce matin.
M. Cournoyer: Je suis très vindicatif.
M. Bellemare (Johnson): Relaxez donc, comme nous.
M. Cournoyer: Oui, mais moi je n'ai pas deux chefs.
M. Bellemare (Johnson): II faut s'habituer à la critique
un peu.
M. Cournoyer: Je n'ai pas deux chefs, je n'en ai qu'un.
M. Bellemare (Johnson): Comment deux chefs? Je n'en ai qu'un,
moi.
M. Cournoyer: C'est encore vous, n'est-ce pas?
M. Bellemare (Johnson): C'est votre meilleure.
M. Cournoyer: Ce que je cherche effectivement, c'est d'amener une
présentation de la part de l'Hydro-Québec et des questions qui se
situent justement au niveau partisan auquel le chef de l'Opposition voudrait
amener le débat... Je ne veux pas ouvrir ce débat à ce
moment-ci. S'il y a un débat à titre partisan qui pourrait avoir
lieu sur la gérance du projet de la baie James, la façon dont on
entrevoit de régler les problèmes à la baie James, c'est
prévu pour la semaine prochaine. La semaine prochaine, ce n'est qu'une
partie...
M. Morin: Vous dites que vous allez être partisan la
semaine prochaine, mais ce n'est pas cela du tout dans notre esprit.
M. Cournoyer: Je vais me défendre, monsieur, de la
même façon que vous attaquez le gouvernement.
M. Morin: Ce n'est pas partisan. Il s'agit d'un débat
technique.
M. Cournoyer: Laissez-le donc dans le domaine technique. Vous
avez posé des jugements tantôt sur l'Hydro-Québec sans
même avoir posé une désespoir de question à
l'Hydro-Québec.
M. Morin: ... poser des questions. Cela fait trois ans qu'on lui
pose dès questions.
M. Cournoyer: Vous dites: Voici, voici, voici. Vous les avez
devant vous et vous allez voir qu'effectivement si vous leur posez des
questions, dans le général et que vous dites: A quelle place
est-ce que vous situez cette chose-là... J'ai compris M.
Boyd, tantôt, quand je vous ai écouté, quand il dit
qu'il n'aime pas les politiciens. Là, j'ai compris.
M. Morin: Je pense qu'il vous a rencontré beaucoup
récemment.
M. Bellemare (Johnson): Alors, qu'est-ce qu'on décide,
monsieur?
M. Cournoyer: M. le Président, je dis que si la motion du
chef de l'Opposition veut dire: Prévision de la demande d'ici l'an 2000
ou prévision de la demande autant que possible par
l'Hydro-Québec, discussion formelle sur ce problème; après
cela, le programme d'équipement général de
l'Hydro-Québec, dans lequel se situe nécessairement le programme
de la baie James, mais comme un élément de programme, il n'est
pas tout seul le programme de la baie James d'ici l'an 2000 et,
troisièmement, les implications financières pour les
Québécois de tous ces programmes et de cette demande si on y
répond. Je suis convaincu que cela comporte tout ce qui est inscrit dans
le domaine de ce que le chef de l'Opposition suggère.
Le chef de l'Opposition s'inspire du passé. Dans le passé,
vous n'étudiiez pas en passant du général au particulier.
J'ai voulu dire cette année: On va commencer par étudier des
choses générales. On va arriver après... Si vous le
voulez, ça peut être très rapide, ça dépend
de ce qui vous préoccupe. Si vous n'êtes pas
préoccupé par la prévision de la demande, ce dont je doute
fort, il n'y aura pas du tout de problème de financement. On n'en
parlera pas ici, ça ne vaut pas la peine d'en parler.
Bien non, si vous n'êtes pas préoccupé par la
demande et les explications qu'on va vous donner qui sont intimement
reliées à ça, effectivement...
M. Morin: Je vous propose de commencer par ça. Qu'est-ce
que vous proposez si vous n'acceptez pas ma proposition?
M. Cournoyer: Je propose... Je ne peux pas amender votre
proposition. On va voter contre et on va en faire une autre.
M. Morin: Laquelle?
M. Cournoyer: Dans celle que je vais proposer, cela va
être, premièrement, les prévisions de la demande d'ici l'an
2000.
M. Morin: C'est ça que je viens de proposer.
M. Cournoyer: Ce n'est pas ça que vous proposez. C'est
aussi bien de le prendre tout de suite.
M. Bellemare (Johnson): II y a seulement un point sur lequel vous
ne vous entendez pas, c'est celui de la baie James, le no 2. Que le chef de
l'Opposition enlève le deuxième point, les articles 3, 4 et 5
sont admissibles aujourd'hui selon l'ordre désigné par la
commission.
M. Cournoyer: Ecoutez, si je ne connaissais pas maintenant le
chef de l'Opposition, je ne me querellerais pas avec des termes comme
ceux-là. Je désire c'est un désir que la commission
peut rejeter, comme l'a si bien mentionné tantôt le chef de
l'Opposition parlementaire qu'on parle des prévisions de la
demande d'ici l'an 2000, pas de n'importe quelle prévision de la demande
jusqu'à l'année prochaine. C'est celles d'ici l'an 2000 qui
motivent le deuxième article à l'ordre du jour, le programme
d'équipement total de l'Hydro-Québec d'ici l'an 2000.
M. Morin: C'est ce que j'ai proposé.
M. Cournoyer: Ce n'est pas ça que vous avez
proposé.
M. Morin: Ah non? Je voudrais qu'on relise la proposition, M. le
Président.
M. Cournoyer: Très bien.
M. Morin: Relisez la proposition.
M. Cournoyer: Le troisième point, les implications
financières de ce programme. La semaine prochaine ou le 24, on ira dans
les choses précises, particulières. La convocation est pour la
baie James; j'imagine qu'on aura un certain éclairage
général aujourd'hui. S'il y a des questions de détail,
à savoir si ce sont les gérants, si ce sont les contrats à
forfait, ou les entrepreneurs qui ont coûté cher ou si c'est parce
que le gouvernement a mal agi, on verra ça le 24 en étudiant la
baie James.
M. Morin: Je maintiens ma proposition, M. le Président,
parce qu'en somme c'est à peu près ça que j'ai dit.
M. Cournoyer: Moi...
M. Morin: Sauf que, quand on va discuter du programme
d'équipement d'ici l'an 2000, comme dit le ministre, on va
forcément parler un peu, à l'occasion, de la baie James.
M. Cournoyer: Je n'empêcherai pas ça non plus, mais
ce ne sera pas seulement de ça. J'aimerais ça que les
Québécois se préoccupent de tout le programme et pas
seulement de ce dont vous voudriez qu'ils soient préoccupés
aujourd'hui.
M. Morin: Vous allez voter pour ma proposition, si j'ai bien
compris?
M. Cournoyer: Je vote contre votre proposition et je vote pour la
mienne.
M. Morin: Mais, si les deux propositions sont semblables, vous ne
voyez pas un léger exercice d'illogisme là-dedans?
M. Cournoyer: Elles ne sont pas semblables jusqu'au moment
où je découvre qu'en plein milieu du débat vous allez
prendre votre proposition, pour dire: Ecoutez, la gérance, M. Cournoyer,
c'est important, il faut en parler tout de suite. La gérance de quoi,
d'Hydro-Québec? La gérance de la Société
d'énergie de la baie James, celle de la société de
développement, celle du gouvernement ou s'il s'agit du contrat de
gérance de la baie James?
M. Morin: M. le Président, est-ce qu'on peut relire ma
proposition?
Le Président (M. Séguin): La relire serait assez
difficile, à moins que vous n'ayez le texte. La motion consisterait
à dire ceci: Que la commission procède de la façon
suivante, au point de vue de ce que nous avons à faire aujourd'hui: la
demande d'électricité, équipement, coûts,
gérance, tarifs, emprunts, exportations hors du Québec."
M. Morin: Bon, c'est ça ma proposition. Si le ministre
n'est pas d'accord, qu'il nous dise pourquoi.
M. Cournoyer: Moi, c'est parce que je suis d'accord avec ce que
j'ai dit. Si c'est pareil à ce que vous avez dit, je ne vois pas
pourquoi vous n'êtes pas d'accord avec le ministre.
M. Morin: Qu'il fasse un amendement à ma proposition.
Vote sur la motion
Le Président (M. Séguin): On a déjà
des membres de la commission qui se sont prononcés pour ou contre. Je
vais quand même prendre le vote sur la motion telle que
présentée. Que ceux qui... Non, il faut faire un appel. M. Assad,
pour ou contre? M. Bédard (Chicoutimi)? M. Bellemare (Johnson)?
M. Bellemare (Johnson): Je suis obligé de votre
contre.
Le Président (M. Séguin): M. Bérard
(Saint-Maurice)? M. Carpentier (Laviolette)?
M. Carpentier: Contre.
Le Président (M. Séguin): M. Ciaccia
(Mont-Royal)?
M. Ciaccia: Contre.
Le Président (M. Séguin): M. Cournoyer
(Robert-Baldwin)?
M. Cournoyer: Cela me fait plaisir de voter contre.
Le Président (M. Séguin): M. Faucher
(Nicolet-Yamaska)?
M. Faucher: Je ne suis pas obligé, ça me fait
plaisir. Contre.
Le Président (M. Séguin): M. Lessard (Saguenay)? M.
Malouin (Drummond)?
M. Malouin: Contre.
Le Président (M. Séguin): M. Houde
(Abitibi-Est)?
M. Houde: Contre.
Le Président (M. Séguin): M. Perreault
(L'Assomption)?
M. Perreault: Contre.
Le Président (M. Séguin): M. Picotte
(Maskinongé)?
M. Picotte: Contre.
Le Président (M. Séguin): M. Samson
(Rouyn-Noranda).
Je m'excuse vis-à-vis de la commission, au début, je n'ai
pas mentionné M. Assad (Papineau) qui est membre permanent de la
commission des Richesses naturelles. Je l'ai nommé au début? De
toute façon, il n'y est pas.
Je n'ai pas appelé M. Morin. M. Morin (Sauvé)?
M. Morin: En faveur, M. le Président.
Le Président (M. Séguin): La motion est
rejetée. Contre: Neuf. Pour: Un.
M. Morin: Maintenant, j'ai hâte d'entendre la proposition
du ministre.
Le Président (M. Séguin): La motion est
rejetée. Est-ce qu'il y a d'autres propositions? Sinon, je donne la
parole immédiatement au député de Johnson. Le
député de Johnson.
Remarques de M. Maurice Bellemare
M. Bellemare (Johnson): Je vous remercie, M. le Président.
Devant les dossiers d'une telle amplitude financière et technique, les
députés se sentent souvent démunis, submergés,
inutiles et c'est pourquoi ils s'agitent souvent sur des questions de
procédure et de politique.
On en a véritablement un exemple ce matin, par ce qui vient de se
passer. C'est signé par un grand éditorialiste qui dit qu'il y a
des problèmes qui sont énormes dans ces discussions que nous
avons à entreprendre aujourd'hui.
Mais je crois, M. le Président, que pour assurer un bon
parlementarisme, moi qui ai vécu quelques années dans le
Parlement, on devrait plutôt attaquer ces questions, qui sont d'une
grande importance, avec une sérénité qui nous permette de
mettre de côté cet esprit partisan qui fait qu'on assiste à
des débats qui sont futiles et qui ne donnent rien à la
population.
Le parlementarisme veut qu'il y ait une Opposition officielle et un
gouvernement. Le gouvernement, c'est celui qui dirige, quand il en a la force,
et qui donne le ton à la législation en
général.
L'Opposition officielle d'abord et les autres oppositions par la suite
sont là pour exercer un certain contrôle, surveiller certains
travaux et faire certaines indications qui sont propices à
l'intérêt public. C'est cela le parlementarisme.
Si, autour d'une table, on donne l'exemple de gens qui se chicanent, qui
politisent certains débats, il n'en sortira sûrement rien de bon.
Les élections vont avoir lieu à la date que fixera le
gouvernement. A ce moment-là, on règlera cela sur la place
publique.
Mais ici, aux commissions parlementaires, comme de l'autre
côté, à la Chambre, je pense que l'Opposition a le droit de
formuler certaines critiques contre le gouvernement, critiques qui sont
d'ailleurs répétées, en bien des circonstances, par les
journalistes et par les media d'information.
M. le Président, j'entreprends ces séances de la
commission avec beaucoup d'objectivité, vous le verrez par mon
exposé. Je ne veux pas blesser le gouvernement, mais il y a des choses
que le gouvernement et les messieurs de l'Hydro doivent nous dire.
Ce document qui nous a été remis et qui a
été lu par l'honorable ministre des Richesses naturelles pourrait
être signé par M. Giroux, sauf certaines restrictions. J'y vois
là les aspirations d'un ministre vers une nomination possible. On lui
dit: Ne vous pressez pas, M. le ministre.
On a actuellement, dans la province de Québec, un
président qui nous fait honneur par sa compétence et
particulièrement par son expérience qui a produit d'heureux
résultats pour la nation québécoise. Je vous incite, M.
Giroux, à ne pas vous départir de votre siège. J'ai fait
cela un jour et je l'ai regretté par la suite.
M. Cournoyer: Quel siège?
M. Bellemare (Johnson): M. le Président, puisque nous
revenons à des questions d'ordre public particulièrement
très sérieuses parce que la vôtre l'est pas mal
moins le 12 juillet 1976, messieurs de la commission et messieurs de
l'Hydro-Québec, le gouvernement fédéral, par la voix de la
Cour suprême du Canada, émettait un jugement sur la loi
anti-inflation, jugement d'une très grande importance surtout pour nos
ressources naturelles car l'article 109 de l'Acte de l'Amérique du Nord
britannique, notre constitution, nous réserve des droits exclusifs dans
le domaine des ressources naturelles.
Le gouvernement se fait dire par la Cour suprême, même sur
des questions appréhendées, pour assurer la paix, l'ordre et le
bon gouvernement du pays, que le fédéral pourrait
unilatéralement procéder quant à l'article 109 et
décréter que les richesses naturelles n'appartiennent plus
à la province ou procéder de manière que les riches-
ses naturelles soient applicables différemment de l'article 109.
Cela est mon premier point.
Je crois, M. le Président, que c'est une question
extrêmement grave. Celle-là n'est pas politisée; dans
l'intérêt de tous les Québécois, en vertu de notre
constitution, elle devrait être préservée avec tous les
arguments, toutes les prises de position possibles. Je n'entends pas critiquer
aujourd'hui le gouvernement, mais je crois que le gouvernement devrait faire
face à ce jugement qui est très important pour nous autres au
point de vue des ressources naturelles. Ce qui est arrivé dans l'Alberta
peut se reproduire chez nous. Et c'est un pouvoir qui est certainement
discrétionnaire à pareille date. Cela est un jugement de la Cour
suprême qui dit qu'unilatéralement le gouvernement pourrait agir,
même pas pour un fait d'ordre public comme la paix, le bon ordre, la
sécurité et le bon gouvernement; même un fait
appréhendé, dit le jugement.
Je me lève avec toute la force et l'énergie dont je suis
capable pour défendre ces richesses naturelles et
particulièrement l'Hydro-Québec, qui est la plus grande et la
plus belle ressource naturelle des Québécois. Elle ne devrait
jamais être influencée ou ne devrait jamais, par un acte
unilatéral du gouvernement fédéral, être
changée telle qu'elle existe aujourd'hui dans la constitution
canadienne.
Maintenant, M. le Président, il y a un facteur important sur
lequel je voudrais attirer l'attention des membres de l'Hydro-Québec. Le
chef de l'Opposition a dit que demain il y aurait peut-être une
séance sur les relations du travail en ce qui regarde la grève de
l'Hydro-Québec, grève extrêmement déplorable. Tout
le monde se demande véritablement ce que fait l'Hydro-Québec,
pourquoi l'Hydro-Québec n'agit pas, pourquoi l'Hydro-Québec ne
plie pas, ne se rend pas à leur demande. Il y a un fait certain, c'est
que, le 19 décembre 1975, le gouvernement du Québec a fait
sanctionner une loi provinciale concernant les mesures anti-inflation. Selon
les règlements adoptés en vertu de cette loi,
l'Hydro-Québec n'est pas soumise à la Régie
créée par la loi anti-inflation. C'est clair pour ce qui regarde
ses prix et ses marges de bénéfice, mais elle l'est, par exemple,
en vertu d'un règlement, quant au contrôle de la
rémunération. Cela est écrit en toutes lettres dans la
réglementation de la loi que nous avons adoptée le 19
décembre 1975. Je me dis que peut-être l'Hydro-Québec s'est
branchée, a pris cet article du règlement pour dire: Je ne peux
pas dépasser la loi anti-inflation, peut-être. Mais il y a
tellement, dans les négociations qui sont en cours, d'autres sujets qui
pourraient être réglés aussi de façon non
arbitraire. Le gouvernement a donné la preuve que dans plusieurs
conflits d'intérêt public, dans les services parapublics, par la
conciliation, par la négociation, en cédant peut-être par
certains artifices à certaines demandes, il a obtenu un
règlement. Qu'on pense que déjà plus des trois quarts de
tous les employés du secteur public et du secteur parapublic ont
signé des conventions collectives. Pourquoi l'Hydro-Québec ne
ferait-elle pas un effort particulier? S'il y a une commission parlementaire
demain, je ne sais pas, si elle n'existe pas demain cette commission, je
voudrais donner mon avis, c'est que...
Le Président (M. Séguin): A l'ordre! Je voudrais
prévenir le député qu'il est dangereusement hors du sujet
à ce moment.
M. Bellemare (Johnson): Je vais me remettre
méticuleusement dans le sujet en disant ceci: La Loi anti-inflation est
grave, pour l'Hydro comme pour tout le monde, je le comprends, parce que si les
policiers de toute une région, en vertu d'un jugement rendu par les
juges arbitres ont décidé, mon cher monsieur, que la
rémunération des policiers de toute une section de la province
allait à l'encontre de la Loi anti-inflation, et que les policiers sont
obligés aujourd'hui, en vertu de ce décret, de rembourser...
Le Président (M. Séguin): A l'ordre!
M. Bellemare (Johnson): ... je dis que l'Hydro, je reviens
à l'Hydro...
Le Président (M. Séguin): Oui. Je vous ai
corrigé sur la question des...
M. Bellemare (Johnson): Non, mais je dis que l'Hydro a un
problème syndical. C'est un problème...
Le Président (M. Séguin): Oui, mais on ne passera
pas aussi à la police.
M. Bellemare (Johnson): Non, mais écoutez, M. le
Président, vous êtes tellement indulgent pour les autres, je vous
demande simplement...
Le Président (M. Séguin): Oui, mais je l'ai
été joliment dans votre cas.
M. Bellemare (Johnson): Oui, je vous en remercie. Laissez-moi
terminer, ce ne sera pas long, même si cela peut être un peu...
Le Président (M. Séguin): La pertinence du
débat.
M. Bellemare (Johnson): La pertinence du débat, c'est que
l'Hydro devra véritablement, pour une fois négocier, vu qu'il y a
intérêt public. Il y a des cultivateurs qui perdent
énormément, il y a des industries qui sont arrêtées.
Il y a dans la responsabilité de l'Hydro véritablement un point
capital. Je demande s'il n'y aurait pas possibilité de négocier
au plus tôt. Je le demande à la partie syndicale aussi. Vous
savez, j'ai eu trois grèves avec l'Hydro, quand j'étais ministre
du Travail. C'était diacre sous diacre. Il y en avait une pardessus
l'autre. On a fini par régler dans des termes qui étaient
réellement très encourageants pour les deux parties. Demain,
c'est la population qui souffrira de ce bris de bonnes relations entre les
em-
ployés et l'employeur. Cela aura des répercussions
terribles sur l'industrie et particulièrement sur les investissements
futurs. Le Québec ne peut pas se développer sans investissements
futurs. A partir de là, il y a un point d'interrogation sur les
relations du travail et particulièrement sur l'Hydro, sur
l'électricité qu'on fournit aux manufactures. Dans mon
comté, particulièrement, on a été
arrêté trois jours à la Peerless, et cela a causé un
dommage de plusieurs milliers de dollars.
Maintenant, je reviens à la pertinence du débat. Dans
votre texte, M. le ministre, vous avez dit: Ces critères font sonner
à nos oreilles les arguments, les thèmes de la nationalisation de
1963, et particulièrement l'uniformisation des services et des tarifs.
Deuxièmement, vous avez dit de la diminution des frais fixes: Nous
pouvons constater aujourd'hui, et tout le Québec s'en ressent de
façon directe et indirecte, que ces objectifs ont tous été
atteints.
Je m'élève assez fortement contre cela, parce que les
tarifs qu'on paie aujourd'hui, que paie le consommateur, sont augmentés
considérablement depuis trois ans, 10% par année, quand, en vertu
de la loi de la nationalisation, les grands prêcheurs du temps disaient:
Vous allez devenir les coopérateurs, les possesseurs de l'industrie de
l'Etat, de l'électricité. Vous allez être les maîtres
chez nous.
Je me souviens de ces grands discours faits en 1963. Ils disaient: On va
baisser les taux de consommation partout, vous allez être bien, vous
allez être des coopérateurs dans cette grande industrie.
Ce n'est pas ce qui est arrivé. Les taux ont augmenté
terriblement depuis trois ans, 10% par année et ils vont continuer
d'augmenter. Aujourd'hui, une famille ordinaire et c'est dans le rapport
de la compagnie que j'ai devant moi consomme à peu près
700 kilowatts/heure par mois. Pour payer $15 par mois, il faut, je pense,
dépenser 1000 kilowatts/heure. Une famille ordinaire, cela lui
coûte $12 par mois. Mais, avec les augmentations possibles, graduelles,
tous les ans, il n'y a pas une famille dans le Québec qui ne paiera pas
d'ici 1980 au moins $30 par mois, c'est-à-dire $1 par jour, pour
l'électricité qui devait baisser. Non, je n'ai pas besoin de
réponse, l'Hydro va me répondre. C'est sûr et certain.
M. Cournoyer: Non, mais si vous me citez...
M. Bellemare (Johnson): Non, je ne vous cite pas du tout. M. le
Président, ne me dérangez pas, restez tranquille pour deux
minutes. Je dis que l'électricité va sûrement, pour une
famille ordinaire qui consomme de 700 à 1000 kilowatts/heure par mois,
coûter $30.
Vous allez me répondre, c'est sûr, et les
représentants de l'Hydro-Québec aussi: Mais, monsieur, c'est
l'inflation. Tout doit coûter plus cher. On s'en va vers une progression
d'équipement.
Il est sûr et certain que cela est bien logique, mais ceux qui
nous ont dit, cependant, en 1964, que le coût de
l'électricité allait baisser... Ecoutez, les familles sont
déçues un peu et attendent la réaction populaire. C'est un
autre problème qu'on réglera en dehors d'ici.
Je m'étonne fortement, dans la lecture qu'a faite le ministre de
ses épopées valeureuses... Ce n'est pas vous qui avez
écrit cela?
M. Cournoyer: Non. Je parle de mes épopées.
M. Bellemare (Johnson): II y a même des termes que vous
aviez de la difficulté à prononcer comme, par exemple, ce qu'a
fait l'Union Nationale lorsqu'elle était au pouvoir. Le Rapide 7, la
Manicouagan, le barrage Beauharnois, la Bersimis, ce n'est pas vous qui avez
fait cela. Vous n'en avez pas parlé du tout. Cela devrait être dit
cela aussi.
M. Cournoyer: Bien, dites-le!
M. Bellemare (Johnson): Je le dis, là! Je pensais qu'il y
aurait une page pour le barrage Johnson, mais il n'y a rien. Je rétablis
les faits. L'Union Nationale a fait véritablement plus que n'importe
quel gouvernement en ce qui concerne le projet de la baie James, avant. C'est
l'Union Nationale qui a donné le plus gros quota d'énergie
électrique dans la province en construisant tous ces barrages, le Rapide
7, la Manicouagan, le Beauharnois, le barrage Johnson, et qui a changé
le 25 cycles pour le 60. C'est important. C'est une grosse oeuvre. Vous ne
l'avez pas dit, cela. Cela ne fait rien. Je le dis.
Ce que je trouve assez extraordinaire dans votre texte est que je lis
à la page 11: "Si l'on suppose un pourcentage d'autofinancement de 30%,
ce qui est relativement élevé..."j'admets cela "
...l'Hydro devra emprunter de $2,5 milliards à $3,5 milliards par
année d'ici 1980."
Dans un rapport que nous fait l'Hydro-Québec, on dit qu'en ce qui
regarde cet autofinancement, on ne peut dépasser actuellement plus
qu'elle ne s'était fixé, soit 20%. Si vous êtes bien
pratique, vous aviez 20% ou aux alentours. Je pense qu'actuellement
l'autofinancement est de 21% ou de 22%. C'est ce que nous retrouvons
actuellement dans vos états financiers. Mais pour atteindre 30%, je
trouve que c'est forcer la note énormément, surtout en
autofinancement.
Quand on regarde surtout les alliances, les contrats intervenus avec
l'Ontario, Terre-Neuve et la PASNY à New York, on se demande
véritablement où vous allez chercher votre autofinancement,
surtout pour 30%.
Donc, si vous ne réalisez pas les 30%, tel que prévu, cela
sera sûrement encore une augmentation assez extraordinaire. C'est une de
mes questions.
Une autre de mes questions serait la suivante: Si l'Ontario, qui a un
contrat pour 1000 "méganowatts", "mégawatts"...
M. Cournoyer: Mégalowatts...
M. Bellemare (Johnson): ... mégalowatts de...
Cela ne vous fait rien si j'ai de la difficulté à dire ces
mots? C'est en anglais, je pense!
M. Cournoyer: Moi, c'est "Manicouaganne" qui m'aurait
achalé!
M. Morin: Ce n'est pas en anglais.
M. Bellemare (Johnson): Mais si je considère que le
gouvernement de l'Ontario a un contrat pour 50 ans qui se termine cette
année, au mois d'octobre, de 1000 mégalowatts, je dis que ce
contrat devra être renouvelé. A quelles conditions? Quand,
particulièrement? On apprend par les journaux que la PASNY à New
York, au mois de juin 1976, en déposant devant l'Office national de
l'énergie un nouveau contrat d'échange
d'électricité et d'assistance mutuelle, qui a été
conclu la veille avec la Power Authority of the State of New York, change
complètement l'équilibre qui existait, ce qui influencera
énormément le contrat que vous aurez à renouveler avec
l'Hydro-Ontario? C'est une question à laquelle les représentants
de l'Hydro-Québec nous donneront la réponse.
Comment ajuster le nouveau contrat avec l'Ontario et comment ne pas
suivre le contrat de PASNY? S'ils sont vrais, comme d'ailleurs le contrat de
Terre-Neuve, autant on n'a pas le droit de changer le contrat de Terre-Neuve,
autant on n'avait pas le droit de changer le contrat de l'Hy-dro, même si
c'était deux cents le kilowatt. On n'avait pas le droit de changer
pendant 50 ans ce contrat qui nous avait coûté
énormément cher, en installant la Beauharnois, et qui nous avait
coûté une fortune. Mais le contrat disait: Pendant 50 ans, on vous
vendra à deux cents. On n'a pas eu le droit de le changer, pourquoi
aurions-nous le droit aujourd'hui? Pourquoi l'honorable M. Moores aurait-il le
droit de changer le sien, parce qu'il paie $2 300 000 par année?
Je dis qu'en ce qui regarde les contrats, 2 552 000 kWh. Celui-là
est-il correct? M. le Président, en partant de la mise en place de mon
investissement qui force à 22% d'autofinancement, je me demande comment
on va faire pour autofinancer la différence de 3 500 000 000 par
année? Quand on ne peut pas atteindre aujourd'hui plus que 20, 21 ou 22%
actuellement, comment va-t-on s'autofinancer pour l'avenir? Je pense que pour
le moment j'attendrai certaines réponses et j'aurai aussi certaines
questions.
Je dois m'excuser auprès de la commission et des membres de
l'Hydro d'être absent cet après-midi. Ce n'est pas bien important
pour l'Opposition, ni pour le gouvernement, mais j'ai contracté un
engagement avec M. Rouleau, l'homme extraordinaire des Jeux Olympiques à
qui je rends ici un témoignage particulier. M. Rouleau nous a
convoqué à Drummondville pour étudier notre budget de
voirie. Vous savez que pour les députés ruraux, un budget de
voirie, c'est important. On doit y être, pour voir si toutes les
particularités des priorités sont bien établies.
M. Morin: Ce n'est pas $16 milliards.
M. Bellemare (Johnson): Ce n'est pas $16 milliards, non. Mais,
pour nous autres, cela vaut bien des votes aussi. Je m'excuse pour cet
après-midi, je serai obligé de m'en aller. La réunion est
à 4 heures, à Drummondville.
M. Cournoyer: Vous ne pouvez pas vous faire remplacer par M.
Choquette?
M. Bellemare (Johnson): J'ai bien l'intention d'accomplir ma
mission moi-même.
M. Cournoyer: Non, mais après-midi, juste en
attendant.
M. Bellemare (Johnson): D'abord, premièrement ce n'est pas
de vos affaires. Vous n'êtes pas dans le caucus. Deuxième chose,
s'il avait à y être, il y serait ce matin. Je rends un
témoignage particulier à tous les membres de l'Hydro et
particulièrement à son président qui, suscité
peut-être, de la convoitise, de ce temps-ci, la présidence. Mais
je vous supplie, monsieur, ne laissez pas votre job pour rien au monde,
attendez! Merci, M. le Président.
M. Cournoyer: Attendez, M. le Président, il m'aime ici, il
m'aime mieux comme ministre des Richesses naturelles que comme
président.
Le Président (M. Séguin): La commission suspend ses
travaux.
M. Morin: M. le Président, avant que vous ne suspendiez.
Une seconde. Est-il bien clair que la seconde motion que j'avais l'intention de
faire pourra revenir devant la commission dès la reprise de la
séance, à l'effet que nous devrions, demain matin, étudier
la question des relations du travail à l'Hydro?
M. Bellemare (Johnson): Celle-là, je vais voter pour,
sûrement. Je n'y serai peut-être pas cet après-midi, mais je
vous dis d'avance que je voterai pour.
Le Président (M. Séguin): La commission suspend ses
travaux jusqu'à quinze heures.
(Suspension de la séance à 12 h 29)
Reprise de la séance à 15 h 15
M. Séguin (président de la commission permanente des
richesses naturelles et des terres et forêts): A l'ordre,
messieurs!
Avant de céder la parole au président de
l'Hydro-Québec, est-ce qu'il y a d'autres membres de la commission qui
désirent s'exprimer? M. le chef de l'Opposition.
Motion pour l'étude du conflit de travail,
à l'Hydro
M. Morin: M. le Président, je voudrais revenir très
brièvement sur la proposition que je faisais ce matin, la seconde
proposition, qui avait reçu l'appui, vous vous en souviendrez, du
député de Johnson. Il nous paraît en effet que le
gouvernement devrait convoquer, sans délai, une séance de la
commission parlementaire de cette même commission, puisque nous avons
l'honneur d'avoir les dirigeants de l'Hydro-Québec devant nous, pour
entendre les parties au conflit qui sévit depuis déjà
plusieurs semaines à l'Hydro-Québec. Je ne suis pas le seul
à avoir fait cette demande. On se souviendra qu'à plusieurs
reprises le député de Maisonneuve, M. Robert Burns, n'a pas
manqué de le faire.
Il serait normal, à nos yeux, que la commission parlementaire
étudie à fond ce dossier de conflit de travail en vue de
rechercher les moyens d'en arriver à une solution
négociée. Je voudrais attirer votre attention sur le fait que
dans plusieurs conflits récents il a fallu avoir recours à des
lois d'exception pour régler des conflits de travail, ce qui n'est
qu'une demi-solution, parce que cela laisse toujours des traces difficiles
à effacer dans le sillage de telles lois lorsqu'elles sont
adoptées par l'Assemblée nationale.
Il serait plus normal, me semble-t-il, que les députés
puissent prendre, en profondeur, connaissance du dossier des relations du
travail à l'Hydro-Québec de façon que nous soyons en
mesure de porter un jugement éclairé sur la question. L'occasion,
me semble-t-il, est propice, les dirigeants de l'Hydro sont là.
J'imagine que les dirigeants syndicaux ne doivent pas être bien
éloignés non plus. Il me semble que ce serait l'occasion de
permettre, non seulement aux députés, mais à travers eux,
à la population, de se familiariser avec les tenants et aboutissants de
ce conflit qui n'en finit plus. C'est pourquoi, ce matin, j'ai proposé,
pour ne prendre personne par surprise, que nous consacrions la séance de
demain matin à l'étude de ce dossier de relations
ouvrières à l'Hydro-Québec. J'en fais une proposition
formelle de la façon suivante: il est proposé que la commission
parlementaire des richesses naturelles consacre sa séance du 11
août, à l'étude de la question du conflit de travail de
l'Hydro-Québec.
Le Président (M. Séguin): Merci, M. le
député. Est-ce qu'il y a d'autres commentaires sur la motion?
M. Cournoyer: Moi, je peux en faire un commentaire. D'abord, la
raison pour laquelle nous avons convoqué l'Hydro-Québec ici,
c'est une tout autre raison que celle de discuter de la façon dont elle
administre les relations de travail avec ses employés. D'autre part,
comme tout le monde le sait, je pense que personne n'a à s'offusquer du
fait que les travailleurs de l'Hydro-Québec exercent aujourd'hui le
droit qui leur est reconnu par la loi de faire la grève quand ils ne
s'entendent pas avec leur employeur.
Le chef de l'Opposition me dit qu'il voudrait voir en profondeur les
points de litige. Sans aller dans les détails et sans dire pourquoi,
j'aimerais lui montrer que ça peut être long, la profondeur et,
après ça, lui montrer aussi que le ministre des Richesses
naturelles s'occupe d'une certaine manière il n'a jamais dit
qu'il réussirait à convaincre les syndicats, pas plus que
l'Hydro-Québec de ce conflit. Si, effectivement, la motion
pouvait être faite, elle devrait être faite à la commission
du travail, de la main-d'oeuvre et de l'immigration et non pas à la
commission des richesses naturelles.
D'abord, parce que, précédemment, cela a toujours
été la commission du travail et de la main-d'oeuvre qui s'est
préoccupée des problèmes de relations de travail entre
toutes les sociétés, y inclus celles de la société
d'Etat, HydroQuébec. Mais ce serait un mauvais argument s'il
était le seul.
Je ne l'utiliserai pas non plus, mais je le rappelle au chef
parlementaire de l'Opposition. A toutes fins utiles, il semble bien que la
meilleure commission pour étudier le problème des relations du
travail à l'Hydro soit celle qui s'occupe des relations du travail.
J'ai, hier, avec le syndicat, convenu que des négociations
directes, à ma demande, pourraient être tenues entre
l'Hydro-Québec et les syndicats représentant ses employés,
parce qu'il y a quatre syndicats impliqués, comme le chef de
l'Opposition le sait sans doute, sur une liste de points où les
syndicats considèrent qu'il n'y aurait pas lieu de faire intervenir le
ministre là-dedans et à plus forte raison la commission
parlementaire. Cette liste de points est assez longue et je n'ai pas
l'intention de la relire au complet, mais je vous dis qu'elle existe et
fiez-vous-y.
Quant au reste, sur des points majeurs comme ceux qui ont
été mentionnés par le chef officiel de l'Union Nationale,
il est clair qu'une fois les premiers points mis de côté par les
deux parties le syndicat reviendra auprès du ministre pour discuter
davantage sur un certain nombre d'autres points.
Malheureusement, moi, je ne crois pas qu'il soit utile au conflit,
à ce moment-ci de l'étude des problèmes
généraux de l'Hydro quant à son programme
d'investissements pour le futur, de nous attarder aujourd'hui à
l'étude d'un problème de relations du travail qui pourrait
être réglé d'ici peu de temps, si on en croit les rumeurs
à cet effet.
M. Morin: M. le Président, je voudrais bien être
aussi optimiste que le ministre des Richesses naturelles. Je crains que nous ne
soyons au
contraire devant une nouvelle convocation d'urgence, en vue de
l'adoption d'une loi spéciale.
On se souviendra j'attire l'attention du ministre
là-dessus que dans le passé les réunions de la
commission parlementaire avaient contribué grandement, il y a quelques
années, au règlement d'un conflit de travail à
l'Hydro-Québec.
C'est dans cette perspective qu'ayant devant nous ces messieurs je
pensais qu'il était bon d'en profiter et de ne pas attendre d'être
acculés au pied du mur, comme nous l'avons fait dans d'autres conflits
de travail. C'est l'esprit dans lequel j'ai fait cette proposition et je la
maintiens.
M. Cournoyer: M. le Président, pour en répondre,
puisque nous allons sans doute voter là-dessus, je tiens à
rappeler au chef officiel de l'Opposition que les interventions de la
commission parlementaire, dans le cas de l'Hydro-Québec en particulier,
ont été très utiles, j'en conviens, mais pour forcer les
parties à négocier entre elles, ce qu'elles ont accepté de
faire ce matin.
Elles vont négocier, et nous nous retrouverons sans doute ici le
24 août. Mais si effectivement, le 24 août ou avant parce
qu'il n'y a rien qui nous empêche de continuer à siéger, M.
le Président les parties ne rapportent pas progrès, il
sera toujours temps, à cette commission quoique je
préférerais que c'en fût une autre, celle du travail et de
la main-d'oeuvre ou à une autre, de continuer l'étude du
problème, ou encore de faire pression sur les parties.
M. Morin: A ce moment-là, nous serons devant ces messieurs
de la Société d'énergie de la baie James et pas devant
l'Hydro-Québec. Vous me direz: On n'a pas les...
M. Cournoyer: M. le Président, avec tout le respect que je
dois aux gens de la Société d'énergie de la baie James,
celle-ci, comme vous le savez tous, y inclus le chef de l'Opposition, est une
filiale à part entière de l'Hydro-Québec. C'est
l'Hydro-Québec qui comparaît devant nous, avec son
président et son vice-président, qui est aussi président
de la Société d'énergie de la baie James.
Les coûts de la baie James ne touchent pas qu'aux coûts de
la construction de la baie James qui, eux, sont absorbés par la
Société d'énergie, mais ils touchent aussi aux coûts
des lignes de transport d'énergie qui, eux sont absorbés
totalement par l'Hydro-Québec. C'est un projet conjoint d'une seule
entreprise finalement, qui s'appelle l'Hydro-Québec, et, lorsqu'elle
sera ici, je souhaite que le conflit entre l'Hydro-Québec et le syndicat
de ses employés soit réglé. S'il n'était pas
réglé, compte tenu de la possibilité qu'a le chef de
l'Opposition de faire une autre motion à cette époque pour dire
qu'il ne semble pas y avoir grande différence dans les hommes qui sont
en face de nous, qu'ils spnt tous dans la même entité juridique,
est-ce qu'on pourrait étudier le problème des relations de
travail de l'Hydro-Québec et de ses employés? Nous y verrons.
Mais, au moment où je vous parle, l'Hydro-Québec et ses
employés, à la demande du ministre, devraient normalement
reprendre les négociations. Si le chef de l'Opposition veut s'aventurer
dans des discussions sur la sécurité syndicale, la
libération des employés de corps, des enquêtes officielles,
deux membres payés pour arbitrage, comité de négociation
et conciliation avec solde, arbitrage de mésentente, erreurs techniques
dans la présentation d'un grief, intérêt sur le
rétromonétaire, de sanction dans les quinze jours de
l'infraction, ancienneté dans les locaux 1500, 2000 PLTCL, salaires dans
les locaux 1500, 2000 PLTCL, évaluation des emplois, etc., etc. Si le
chef de l'Opposition veut voir tout ça en profondeur, je l'invite
à convoquer lui-même le syndicat et discuter avec le syndicat.
J'ai passé deux jours, la semaine dernière, deux longues
journées, à me faire expliquer chacune des clauses que les
syndicats avaient en conflit avec l'Hydro-Québec; cela a pris deux
jours. Avec tout le respect que je dois au chef parlementaire de l'Opposition,
je n'ai pas l'impression qu'il faille que la commission parlementaire aille
dans le détail de l'administration journalière de
l'Hydro-Québec, pas plus que le ministre n'a l'intention d'y aller.
C'est cela le conflit. Qu'on le veuille ou qu'on ne le veuille pas, quand les
parties que cela s'appelle l'Hydro-Québec et les trois ou quatre
syndicats, c'est trois syndicats qu'il y a vont se rasseoir ensemble et
examiner ce qui fait que l'Hydro-Québec, dans l'image du public, ne rend
plus les services qu'elle devrait rendre, malgré les mandats qu'ont les
deux parties, quand elles vont faire cela toutes les deux, elles vont s'asseoir
et vont régler leurs problèmes avec la possibilité que le
chef de l'Opposition n'ait pas utilisé la balle qui lui restait dans son
canon, c'est-à-dire une commission parlementaire. La minute où
vous allez utiliser cette arme, M. le Président, il ne va en rester
qu'une autre, c'est le Parlement. Je n'ai pas l'intention de passer à
cette étape.
Au moment où on se parle, M. le Président, les relations
sont assez bonnes entre le ministre et le syndicat, même si cela choque
le chef de l'Opposition de temps en temps; elles sont encore assez bonnes pour
que je puisse indiquer au chef de l'Opposition que le syndicat est totalement
d'accord avec la procédure que j'ai suggérée.
M. Morin: Est-ce que le ministre peut prendre l'engagement, si le
conflit n'est pas réglé au moment où la séance du
24 se tiendra, de procéder à entendre les parties? Vous avez
mentionné cela, mais j'ai un peu...
M. Cournoyer: Non.
M. Morin: ... l'habitude de vos propos et de vos promesses et je
ne me fie guère à tout ce que vous pouvez dire. Les
probabilités deviennent des possibilités, les possibilités
deviennent quelquefois de simples hypothèses, et les simples
hypothèses disparaissent. Ce que j'aimerais savoir, c'est si vous pouvez
vous engager à ce que la commission en discute le 24, si le conflit
n'est pas réglé.
M. Cournoyer: Jamais je ne m'engagerai à une telle
entreprise, étant donné que j'ai mentionné, au point de
départ de mes remarques, que normalement les conflits de travail
relèvent de la commission du travail et de la main-d'oeuvre, et non pas
de la commission des richesses naturelles.
M. Morin: C'est bien ce que je pensais.
M. Cournoyer: Vous ferez votre motion dans ce temps, et on peut
espérer qu'elle pourra peut-être dire que la commission du travail
et de la main-d'oeuvre doive se réunir. Ce sera probablement la place
où vous pourrez faire votre discours. Cela ne me fait rien que vous
fassiez votre discours quelque part. Je vous avertis, j'ai hâte de
l'entendre.
M. Morin: Ce n'est pas une question de faire un discours, c'est
une question de tenter de régler un conflit qui est de plus en plus
grave et qui risque d'avoir des conséquences très
sérieuses pour l'ensemble de la population, comme le ministre le sait
très bien.
M. Cournoyer: ... préoccupations.
M. Morin: Je maintiens ma proposition.
M. Cournoyer: Je maintiens mes objections.
M. Perreault: M. le Président...
Le Président (M. Séguin): Oui, sur la motion.
M. Perreault: ... je ne puis être pour la motion pour la
bonne raison que la commission parlementaire des richesses naturelles n'est pas
l'endroit pour négocier une convention de travail. Les points en litige
sont très nombreux, ainsi que le ministre l'a mentionné. Je pense
que cela n'avancerait à rien qu'on vienne déballer tous les
problèmes en cause. C'est pour cette raison que je voterai contre la
motion.
Décision du président
Le Président (M. Séguin): Est-ce qu'il y a d'autres
commentaires? Je suis d'abord prêt à vous dire, messieurs, ce que
j'aurais pu vous dire tout à l'heure, mais je voulais entendre les
débats et les raisons données, de chaque côté, pour
ou contre cette motion. Je dois la déclarer non rece-vable pour les
raisons suivantes: ce matin, dès l'ouverture de la séance,
j'avais fait part aux membres de la commission et au public ici présent,
à l'Hydro-Québec en particulier, que selon le mandat de la
commission, il s'agissait d'entendre les administrateurs de
l'Hydro-Québec relativement au programme d'investissements de cette
société.
A ce moment-là, il y eut une motion faite par le chef de
l'Opposition pour faire une présentation peut-être plus
détaillée que ce qu'il en était dans la motion principale.
C'était acceptable d'après notre mandat. Mais puisque les
négociations ne sont pas terminées et que les négociations
continuent toujours, je vois mal que ce soit la bonne commission ou que
ce ne soit pas la bonne commission l'ingérence d'une commission
parlementaire à ce moment-ci à l'intérieur des
négociations, ce qui ne s'est jamais produit, à ma connaissance,
dans le passé. C'est dire que non seulement on modifie notre raison
d'être en proposant cette façon de procéder à
l'intérieur des négociations, mais on néglige
complètement de poursuivre le but pour lequel la commission a
été demandée.
Sans plus de commentaire, je cède donc la parole au
président.
M. Morin: M. le Président... Le Président (M.
Séguin): Oui.
M. Morin: ... au sujet de votre décision sur la question
de procédure, je veux simplement faire observer que si la commission y
avait consenti, je ne pense pas qu'il y aurait eu d'objection à ce que
le mandat de la commission soit modifié pour que nous procédions
de la sorte. Cela s'est fait dans le passé, chemin faisant, et vous le
savez comme moi, nous aurions pu procéder. Si vous ne voulez pas mettre
ma motion aux voix et la déclarer rece-vable, je n'ai d'autre chose
à faire que de m'incliner, mais je fais cette réserve pour que ce
soit clairement indiqué au journal des Débats.
Le Président (M. Séguin): Tout commentaire que je
pourrais ajouter à ce moment-ci fait partie d'un débat auquel je
n'ai pas le droit, d'après le règlement, de participer. Il y a
deux côtés tout de même je dois le mentionner pour
les membres de la commission à ce que nous discutons. Il y a le
côté hydroélectrique, soit les membres de la commission qui
sont ici et qui ont été convoqués pour une raison bien
spécifique, bien spécifiée et, de l'autre
côté, il y a les membres de la commission qui, peut-être,
eux, peuvent changer le mandat. Mais je peux vous assurer, M. le chef de
l'Opposition, qu'à l'occasion où j'ai présidé ces
commissions, je n'ai jamais, jusqu'à présent, à ce que je
me souvienne, permis une modification ou un changement ou un revirement de la
raison pour laquelle la commission a été appelée en
premier lieu.
Sans plus de commentaire, je passe donc la parole... Oui, M. le
ministre, excusez.
M. Cournoyer: Je ne voudrais pas oublier la motion de ce matin
qui réfère à l'ordre du jour. Je la refais.
J'espère qu'on n'aura pas trop de discussions dessus. L'article 1 est la
prévision de la demande d'ici l'an 2000.
Le Président (M. Séguin): Une nouvelle motion?
M. Cournoyer: Oui, oui.
Le Président (M. Séguin): Là, vous faites
une nouvelle motion.
M. Cournoyer: C'est ce qu'on avait dit ce matin, que je faisais
une nouvelle motion là-dessus.
M. Morin: Voulez-vous que je vous passe le texte de ma motion
pour que vous puissiez la lire?
M. Cournoyer: Non, M. le Président, non. Non, je vais vous
relire ce que j'avais dans les mains.
M. Morin: Parce que vous avez déjà voté
contre.
M. Cournoyer: Je n'ai pas plus confiance en vous que vous n'avez
confiance en moi, mon cher chef de l'Opposition.
M. Morin: C'est peu, alors!
M. Cournoyer: Les prévisions de la demande d'ici l'an
2000, le programme d'équipement d'ici l'an 2000, les implications
financières de ce programme sont les trois sujets, dans l'ordre, que
nous aimerions voir discuter avec les représentants de
l'Hydro-Québec.
M. Morin: Si je comprends bien, la différence d'avec ma
propre motion est que le ministre laisse tomber les tarifs, la question des
emprunts et l'exportation de l'électricité. C'est bien cela?
M. Cournoyer: Non. Je suis beaucoup plus large que le chef de
l'Opposition. Je ne limite pas le débat aux emprunts, au coût et
aux tarifs.
M. Morin: Bien, expliquez-vous.
M. Cournoyer: Les implications financières de ce programme
dépassent et de beaucoup la tarification. Cela dépasse et de
beaucoup le seul problème de l'exportation de
l'électricité. Quant à l'exportation
d'électricité, ce n'est pas parce qu'on aime les gens à
qui on exporte de l'électricité, c'est parce que cela paie. Ce
sont les implications financières de ce programme. Les programmes
d'emprunt sont inclus dedans et je n'en ai pas oublié une.
M. Morin: Autrement dit, la différence entre la motion que
vous venez de faire et celle qu.e j'ai faite ce matin est que, dans les
implications financières, vous incluez tout ce que je détaillais
sous forme de coût, d'emprunt, de tarif.
M. Cournoyer: II y en avait d'autres et ils sont dedans
aussi.
M. Morin: Mais la question de l'exportation?
M. Cournoyer: Je vous jure que l'exportation a des implications
financières, parce que l'Hydro-Québec ne fait pas autrement. Ce
n'est pas une entreprise qui vend de l'électricité aux Etats-Unis
pour le plaisir d'en vendre, parce qu'elle a un surplus quelconque et que cela
l'aide; parce que selon la dernière argumentation que j'ai eue sur la
tarification les tarifs l'an passé, l'Hydro-Québec
espérait vendre ou exporter beaucoup plus d'électricité
compte tenu de ses nouvelles installations. C'est tout intimement relié,
mais c'est intimement relié au programme et le programme lui-même
est immédiatement conséquent à la demande et à son
évolution et ce sont des choses que j'ai voulu ne pas limiter à
la baie James, contrairement...
M. Morin: Voyons donc.
M. Cournoyer: La gérance... Qu'est-ce que vous vouliez
dire dans la gérance?
M. Morin: il s'agissait de la baie James.
M. Cournoyer: Bon. Alors, on en reparlera la semaine prochaine.
Non, l'autre semaine après.
M. Morin: M. le Président...
M. Cournoyer: Maintenant je parle de choses
générales et après cela, la semaine prochaine, on parlera
du particulier.
M. Morin: Si je comprends bien, le seul point sur lequel il y a
désaccord, c'est sur la question de la gérance, parce que pour le
reste, la motion du ministre reprend foncièrement exactement ce que
j'avais proposé ce matin. Ce n'était pas la peine...
M. Cournoyer: Si cela satisfait le chef de l'Opposition et si on
peut entendre les représentants de l'Hydro-Québec avant qu'ils ne
partent, on va dire: D'accord.
M. Morin: Mais, en attendant, y aurait-il moyen que le ministre
accepte, pour éclairer tout le monde, pour qu'on sache où on va,
qu'à l'intérieur des implications financières on distingue
coût, tarif, emprunt et qu'on procède dans cet ordre? C'est ce que
j'avais proposé ce matin.
M. Cournoyer: Si je comprends bien, le chef de l'Opposition
voudrait se limiter à ces seuls articles.
M. Morin: Non, mais c'est pour mettre de l'ordre dans la
discussion et qu'on sache dans quel ordre on peut s'attendre à avoir une
discussion.
M. Cournoyer: Je ne voudrais pas faire une discussion de
sémantique. Chaque fois qu'il va être question d'implications
financières, je ne dirai pas un mot. Si je mets des ordres et des
ordres, remarquez bien que, même si j'ai eu des discussions avec
l'Hydro-Québec, là-dessus, il n'y en a pas eu. Je dis:
L'Hydro-Québec est convoquée ici en vertu d'une convocation
générale. C'est écrit ici: le programme d'investissements
de l'Hydro-Québec.
M. Morin: M. le Président...
M. Cournoyer: On demande à l'Hydro-Québec de nous
indiquer quelles sont ses évaluations de la demande et,
immédiatement après, quel est le programme qu'elle prétend
avoir à établir pour pouvoir rencontrer cette demande, ce que
cela va coûter et quelles sont les implications financières de
cela.
M. Morin: Procédons. Nous avons déjà
suffisamment perdu de temps là-dessus. J'observe simplement que le
ministre a battu la motion ce matin pour le plaisir de la battre.
Procédons.
Le Président (M. Séguin): Je constate que les
commentaires du ministre ressemblent trop à vos commentaires de ce
matin. Or, votre motion, M. le chef de l'Opposition, a été battue
ce matin. Je trouve que déjà nous avons refusé une motion
semblable, dès ce matin; donc, cette motion, je ne devrai pas la
recevoir cet après-midi. Je voudrais m'en tenir, à moins que la
commission n'en décide autrement par vote, au fait que nous allons
entendre l'Hydro-Québec relativement au programme d'investissements de
cette société. C'est la raison pour laquelle la commission a
été convoquée. L'ordre du jour est très simple,
relativement au programme d'investissements de cette société. M.
Giroux.
Exposé de M. Roland Giroux
M. Giroux: M. le Président, messieurs, les commissions
parlementaires ont toujours fourni l'occasion de discuter le bilan de
l'Hydro-Québec. Aujourd'hui...
M. Morin: Pourrait-on avoir le texte? Auriez-vous des textes
disponibles?
M. Giroux: Oui, il est supposé être
distribué. M. Morin: Merci.
M. Giroux: Aujourd'hui, nous avons été
invités à parler de l'an 2000. Voilà bien un sujet qui
peut sembler de la science-fiction, mais à l'Hydro-Québec nous
construisons déjà les centrales pour 1985 et nous planifions pour
l'an 2000. Voilà pourquoi il me fait plaisir d'aborder ce sujet avec
vous. Il montrera aux Québécois de quelle façon nous
planifions l'avenir. Il montrera aussi ce que les gens du Québec peuvent
attendre de nous et ce que nous attendons d'eux.
Si quelques-uns parmi vous désiraient consulter notre bilan de
1975, nous avons apporté à votre intention des rapports annuels
et des rapports d'activité au cas où vous n'auriez pas eu
l'occasion de les consulter.
Je voudrais rappeler, M. le Président, que la prévision
est encore plus importante pour l'Hydro-Québec que pour la
majorité des autres entreprises québécoises. Entre le
moment, par exemple, où l'Hydro-Québec décide qu'une cen-
trale sera nécessaire et celui où cette centrale commence
à produire, il peut s'écouler de six à dix ans à
cause des délais d'ingénierie, sans parler des délais
d'acceptation et de construction qui s'allongent avec les années.
Là où dans d'autres types d'entreprises on peut se
contenter de penser pratiquement jusqu'à cinq ans d'avance au maximum,
l'Hydro-Québec doit penser dix ou quinze ans d'avance et, dans certains
domaines, jusqu'à 25 et 30 ans, c'est-à-dire jusqu'à l'an
2000 et au-delà.
Nos constructions, évidemment, attirent beaucoup l'attention
parce qu'elles sont spectaculaires. Mais elles sont, en réalité,
la conclusion de longues études qui ont demandé beaucoup de temps
et de travail. Ces études sont mal connues du public. Pourtant, M. le
Président, elles sont passionnantes, car elles permettent de planifier
l'avenir.
Nos dernières prévisions indiquent que la demande
d'électricité croîtra à un rythme de 7 3/4% par
année au cours des prochaines années. Je dis bien "un rythme
moyen". Pour un observateur un peu pressé qui regarderait une
année en particulier, ce taux pourrait apparaître contestable.
Voyons l'année 1975, par exemple. A cause du contexte économique
difficile dont nous parlons dans le rapport annuel, la demande d'énergie
électrique n'a augmenté que de 1%. S'il fallait nous fier
à ce taux de croissance, nous aurions dû arrêter notre
programme de construction. Nous aurions fait une grave erreur. En effet, les
résultats des cinq premiers mois de 1976 nous indiquent une augmentation
des ventes d'énergie de 13,4% sur les ventes des cinq premiers mois de
l'année dernière. Devons-nous adopter ce taux de 1% ou celui de
13,4%?
En réalité, la courbe historique de la demande
d'énergie électrique est relativement stable si nous prenons un
peu de recul. Je comparerais ce recul à celui des astronautes pour qui
les montagnes et les précipices disparaissent lorsqu'ils
s'éloignent dans leur navire spatial. Les tempêtes et les ouragans
deviennent insignifiants. Il en est de même pour la courbe de la demande
d'énergie.
Le choix de ce rythme de croissance de 7 3/4% résulte de
conditions énergétiques, économiques et
démographiques. M. Robert-A. Boyd, commissaire responsable de la
planification générale, aura sans doute l'occasion de vous
fournir les explications additionnelles qui seraient requises à ce
propos lors de ses interventions.
La période allant de 1990 à l'an 2000 étant
relativement éloignée, l'Hydro-Québec n'a pas à ce
prononcer de façon définitive, dans l'immédiat, sur
l'ensemble de son programme d'équipement pour ces dix années.
Nous pouvons donc encore considérer différents scénarios
de croissance selon les mêmes variables dont j'ai fait mention,
c'est-à-dire la croissance démographique, la croissance
économique et la croissance énergétique.
Les principaux facteurs qui affecteront la croissance économique
du Québec, entre 1990 et l'an 2000, sont, premièrement, le rythme
de crois-
sance de la population; deuxièmement, le niveau de
productivité de la main-d'oeuvre; troisièmement, le
développement industriel; quatrièmement, le progrès
technologique et, cinquièmement, la disponibilité de
l'épargne pour fins d'investissement. Enfin, dernier facteur qu'il ne
faudrait pas oublier, la conservation.
Selon l'influence de ces facteurs, la croissance réelle du
produit national brut pourrait être plus ou moins forte, ce qui,
évidemment, influencerait la consommation d'énergie.
Le taux de croissance de 7 3/4% que nous avons adopté pour les
prochaines années portera notre puissance installée à plus
de 75 000 mégawatts en l'an 2000. De ces 75 000 mégawatts que
nous prévoyons pour l'an 2000, combien sont destinés aux
Américains? Voilà une question que plusieurs ne manqueront pas de
nous poser. Pourtant, nous avons répondu souvent, la réponse est:
Aucun. Notre réseau est conçu exclusivement en fonction des
besoins du Québec.
Alors, demanderez-vous, si le réseau est conçu pour les
besoins du Québec, où donc pourrons-nous trouver
l'électricité pour l'exportation?
Ces surplus sont une cause directe des problèmes relatifs
à l'implantation d'un programme d'équipement. Ces surplus peuvent
provenir du rythme même de construction, de la surabondance temporaire de
réserves hydrauliques, de la mise en service des premiers alternateurs
ou encore d'une consommation d'énergie inférieure aux
prévisions pour une période significative.
Il importe aussi de savoir que la plupart de ces causes ont leur
contrepartie. Nous pouvons concevoir une situation de pénurie
découlant de circonstances défavorables. Dans un tel cas, il nous
faudrait d'abord tirer le maximum de nos réservoirs, puis mettre en
marche nos centrales thermiques, acheter des réseaux voisins ou
même limiter les livraisons d'électricité.
Heureusement pour nous, nous avons surtout connu des périodes
d'abondance et notre problème consiste à disposer avec avantage
de ces kilowatts-heure.
Il serait donc souhaitable d'utiliser tous ces surplus d'énergie
chez nous. Mais qui veut d'un produit dont le fournisseur peut interrompre la
livraison à volonté? Car n'oublions pas que l'Hydro-Québec
se réserve le droit d'interrompre ses ventes d'électricité
excédentaire. Nous l'avons d'ailleurs fait cette année.
A part les chaudières électriques industrielles qui
permettent à leur propriétaire d'économiser d'importantes
quantités de mazout, aucun débouché ne se présente
chez nos abonnés québécois. Seul un autre réseau
électrique utilisant de façon importante les centrales thermiques
peut acheter nos surplus et payer un prix intéressant, tout en
réalisant des économies de combustible. Or, nos voisins
immédiats, l'Ontraio, le Nouveau-Brunswick et les Etats-Unis
possèdent justement des réseaux de cette sorte d'où
l'intérêt pour nous de transiger avec eux.
Etant donné la nature incertaine des surplus d'énergie,
l'acheteur étranger peut hésiter à inves- tir les sommes
nécessaires à l'établissement de lignes de transport
requises. Aussi, les interconnexions voient-elles généralement le
jour à l'occasion d'une transaction majeure comportant un bloc garanti
de puissance ou d'énergie. Par exemple, l'évolution du
réseau de New York, dont la pointe de consommation se situe en
été, c'est-à-dire au moment où nous consommons le
moins d'électricité, nous a amenés à
négocier avec nos voisins du Sud la vente de puissance
d'été, que nous appelons puissance de diversité.
Cette puissance que nous pouvons garantir pour plusieurs années,
puisqu'elle n'exige aucune nouvelle source de production et qu'elle n'est pas
requise encore par notre réseau, s'accompagne, pour les premières
années, d'un bloc limité d'énergie.
Une fois cette liaison en place, nous aurons une autre ouverture pour
écouler nos surplus éventuels vers les marchés les plus
intéressants, compte tenu, bien sûr, des exigences de l'Office
national de l'énergie en matière d'exportation. Il a
été clairement établi devant cet office je le
rappelle que l'Ontario et le Nouveau-Brunswick possèdent
d'importantes interconnexions avec les Etats-Unis. Ce sont ces interconnexions
qui leur ont permis de revendre nos surplus aux Américains avec
profit.
Les revenus que nous prévoyons retirer de nos exportations
prendront une importance croissante dans les prochaines années et nous
aideront à réaliser notre programme d'équipement.
J'aimerais toutefois insister sur ce point: La production d'énergie
excédentaire n'est pas, en soi, un objectif de l'Hydro-Québec,
mais une conséquence inévitable de la place qu'occupe
l'hydroélectricité dans notre réseau. Profiter de cet
avantage, c'est utiliser au maximum nos installations. C'est donc aussi
alléger le fardeau tarifaire de nos abonnés puisque d'autres les
aident à amortir le coût des équipements en les utilisant
aux périodes où nous n'en avons pas besoin.
Notre objectif d'améliorer la condition de vie des
Québécois nous conduirait, en l'an 2000, à occuper quelque
45% du marché de l'énergie au Québec, si nous acceptons
l'hypothèse de croissance moyenne.
Nous vivons dans un climat rude. Et si nous aimons nous rappeler la vie
austère de nos ancêtres, nous aimons aussi profiter du confort que
notre travail nous a procuré. Ce confort exigera, dans l'avenir, de plus
en plus d'électricité. Nous n'avons pas l'intention d'en priver
les gens du Québec.
Une autre considération qui nous pousse à adopter cet
objectif est le rôle moteur de l'Hydro-Québec dans
l'économie. Prévoir un taux de croissance de la demande
d'électricité inférieur aux besoins réels
équivaut à transformer un pays prospère en un pays
je ne veux pas faire ici de démagogie moins prospère.
Nous avons l'assurance, en suivant cette voie, de travailler au bien de
la communauté. Pour la première fois, grâce à ses
richesses énergétiques, le Québec peut espérer
jouer un rôle de "leader" dans l'économie canadienne.
D'ailleurs, M. le Président, advenant le cas où nous
prendrions la décision de ralentir notre rythme d'investissement, il
n'est pas certain que cela serait bénéfique pour le
Québec. Ainsi, non seulement l'implantation de l'industrie serait-elle
moins favorisée, mais les Québécois s'approvisionneraient
à d'autres sources d'énergie. Le fardeau des emprunts serait
moins lourd, bien sûr. Mais n'oublions pas que le pétrole et le
gaz viennent de très loin. Il y aurait tout simplement un
déplacement de notre richesse nationale si nous préférions
actuellement le pétrole à l'électricité.
Toutefois, nous encourageons la découverte au Québec de
pétrole, de gaz et d'uranium. Quand les richesses hydrauliques seront
complètement épuisées, il faudra bien regarder ailleurs.
Alors, pour conserver notre autonomie, nous devrons trouver d'autres sources
d'énergie. Voilà pourquoi nous consacrons un budget pour la
recherche d'uranium avec SOQUEM et que nous étudions les demandes d'aide
pour la recherche de gaz avec SOQUIP.
Ce taux de 7 3/4% d'accroissement est un outil de gestion et non un
chiffre miraculeux auquel nous nous accrochons. C'est un outil de gestion au
même titre que la nouvelle direction Planification générale
dont nous venons de mettre au point la structure. Et nous travaillons
continuellement à raffiner ces outils et à en créer
d'autres quand le besoin s'en fait sentir.
Nous sommes à mettre au point, M. le Président, un
programme de construction dont je peux déjà vous livrer les
grandes orientations.
D'abord, un mot des nouvelles techniques de production d'énergie
dont on parle beaucoup.
L'Institut de recherche de l'Hydro-Québec, dont la
réputation se répand de plus en plus dans le monde, consacre
annuellement un budget d'au-delà de $1 million à l'étude
de ces nouvelles sources d'énergie. Nous n'avons pas
intérêt à privilégier une forme d'énergie
plutôt qu'une autre, et c'est pourquoi nous suivons continuellement
l'évolution des recherches dans ce domaine: énergie solaire,
énergie de fusion, énergie marémotrice, fusion,
géothermie, piles à combustible et utilisation de
l'hydrogène.
Toutes ces technologies nouvelles ou anciennes nous
intéressent.
Evidemment, à cause de notre contexte géographique,
l'énergie éolienne sera peut-être utilisée avant
toute autre. Notre institut a entrepris cette année un important
programme d'étude à cet effet.
Un nouveau modèle d'éolienne, pouvant entraîner une
génératrice, sera bientôt mis à l'essai avec le
concours du Conseil national des recherches du Canada aux Iles-de-la-Madeleine.
C'est là, ainsi que dans certaines régions du Grand Nord
québécois, que nous avons les plus grands espoirs de voir
utiliser cette forme d'énergie.
C'est aussi là qu'elle serait vraisemblablement la plus rentable.
Une autre éolienne sera installée sous peu à l'IREQ
même. Signalons également que, de concert avec l'université
McGill, l'IREQ et notre service de la clientèle poursuivent une
expé- rience d'utilisation de l'énergie solaire à des fins
de chauffage de quatre habitations domiciliaires à La Macaza. Sans ces
expériences, les prévisions de rentabilité
économique de ces sources d'énergie ne sont que pures
spéculations.
Mais, de toute évidence, l'énergie hydraulique et
l'énergie nucléaire joueront un rôle de première
importance d'ici l'an 2000. Voilà pourquoi nous poursuivons nos
études pour connaître avec précision le potentiel
hydroélectrique que nous pouvons utiliser de façon
économique.
Entre 1985 et l'an 2000, nous croyons pouvoir aménager une bonne
partie du potentiel d'origine hydraulique pour répondre à la
demande de base. Mais les données montrent que, compte tenu de la
technologie actuelle et des contraintes écologiques, quelques 15 000
mégawatts seulement pourraient être aménagés
à un coût inférieur ou égal à celui de
centrales nucléaires équivalentes.
Pour les prochaines années, nous mettrons l'accent sur
l'aménagement du potentiel hydroélectrique. Mais une
première constatation s'impose. L'aménagement du potentiel dont
dispose encore le Québec ne réussira à répondre
qu'à 30% de l'augmentation des besoins d'énergie
électrique prévus en l'an 2000. Il faudra donc faire appel de
plus en plus à l'énergie nucléaire après 1985.
Notre but, dès lors, est d'assurer une transition harmonieuse et sans
heurt entre l'hydroélectricité et l'énergie
nucléaire.
M. Guy Monty, commissaire responsable du programme d'équipement,
pourra vous fournir de plus amples renseignements sur cette question en temps
voulu.
Je crois cependant utile de souligner qu'à première vue il
pourrait sembler séduisant d'aménager d'abord tous les sites
hydrauliques dont le coût d'aménagement est plus faible que celui
de centrales nucléaires équivalentes. Cette option permettrait
peut-être de réaliser des économies dans l'immédiat,
mais globalement elle constituerait une erreur. En effet, une fois
épuisées les ressources hydrauliques rentables, il faudrait d'un
seul coup fournir des efforts énormes sur tous les plans à la
fois pour arriver à lancer un programme nucléaire d'une
importance considérable.
Ce rythme accéléré serait impossible à
soutenir. L'Hydro-Québec ne disposerait pas des ressources humaines
nécessaires et les possibilités de production de l'industrie
québécoise, et même de l'industrie canadienne dans son
ensemble, ne seraient pas suffisantes pour répondre aux besoins.
Même en procédant de manière progressive,
l'importance du programme nucléaire pose le problème du
recrutement et de la formation d'un personnel d'ingénierie,
d'exploitation et de construction compétent et suffisamment nombreux.
Comme nous devons, en ce domaine, compter essentiellement sur nos propres
ressources, l'Hydro-Québec a déjà mis sur pied un
programme de recrutement et de formation.
Ce programme de perfectionnement, nous devrons l'accélérer
si nous voulons avoir un nombre de techniciens suffisant dans les années
à venir.
A titre d'exemple, le personnel d'exploitation affecté aux
centrales nucléaires atteindra 400 personnes vers 1990, 1100 vers 1995
et 2700 en l'an 2000. Pour assurer l'ingénierie des centrales, on estime
qu'il faudra plus de 4000 hommes vers 1990. Quelque 17 000 travailleurs, pour
la plupart spécialisés, seront requis pour la construction des
centrales nucléaires.
Pour former un seul technicien spécialisé dans le domaine
de l'énergie nucléaire, il faut compter jusqu'à quinze
ans. C'est pourquoi nous avons déjà des techniciens qui se
perfectionnent dans ce domaine, en Ontario. Vous pouvez vous imaginer, M. le
Président, tous les mérites qui leur reviennent.
Maintenant que vous connaissez les délais auxquels nous avons
à faire face, vous comprendrez qu'il n'est pas question de construire
une centrale demain matin, même si nous étudions un emplacement
aujourd'hui. Actuellement, nous sommes en train de dresser un inventaire des
sites où il serait possible de construire des centrales, autant
hydroélectriques que nucléaires. Nous devons aussi, dès
maintenant, faire des études du sol et du système
écologique de ces emplacements.
Je voudrais enfin ajouter que nous étudions actuellement la
technologie des réacteurs CANDU et son évolution future. Et pour
nous tenir au courant des dernières découvertes dans le domaine,
nous étudions également les autres filières. D'ici
quelques années, des progrès techniques importants
interviendront. Nous devrons en tenir compte.
Parallèlement, au cours des années à venir, nous
installerons des équipements spéciaux pour répondre
à la demande de pointe. Il s'agira essentiellement de centrales à
réserve pompée et de turbines à gaz. Le
suréquipement d'installations hydroélectriques pourrait
également offrir certaines possibilités intéressantes. La
proportion optimale des divers types d'installations sera
déterminée en tenant compte des facteurs de rentabilité et
du respect de l'environnement.
Ces équipements de pointe constitueront également des
équipements de réserve qui peuvent aider à assurer la
continuité du service si des installations de production tombent en
panne. Il ne faut pas oublier, qu'après 1985, l'accroissement du
nucléaire exigera une plus grande quantité d'équipement de
réserve. Ceci pour que la fiabilité du service puisse être
la même qu'avec les installations hydroélectriques.
Ce n'est pas tout de produire l'électricité, il faut aussi
la transporter aux centres de consommation, puis la distribuer.
D'ici l'an 2000, le choix des corridors de transport deviendra de plus
en plus complexe et constituera un élément déterminant
dans l'élaboration des programmes de production. On visera à
minimiser le nombre de corridors additionnels afin d'assurer au maximum le
respect de l'environnement. Cet impératif influencera aussi le choix des
sites et l'ordre d'aménagement des centrales de production.
D'ici la fin du siècle, une autre question sera examinée
sous un éclairage nouveau, celle des interconnexions avec les
réseaux voisins. Des comités ont été formés
par le gouvernement afin d'analyser cette question. Ces comités
étudieront diverses possibilités dont l'opportunité de
constituer une réserve commune, c'est-à-dire une réserve
à laquelle peut recourir, au besoin, chacun des réseaux
interconnectés.
L'avènement de la production nucléaire modifiera la
situation. Comme les centrales nucléaires ont actuellement un taux de
panne plus élevé que les centrales hydroélectriques, nous
aurons peut-être besoin d'une réserve beaucoup plus forte. Il
pourrait devenir intéressant d'établir des interconnexions avec
des réseaux qui ont déjà une réserve
considérable, particulièrement avec ceux dont la demande de
pointe ne coïncide pas avec la nôtre.
Dans le domaine de la répartition et de la distribution, les
modifications qui seront apportées dans les années à venir
dépendront, pour une bonne part, de l'importance croissante du respect
exigé de l'environnement qui demande des coûts additionnels.
Dans les grandes agglomérations, d'autre part, nous
espérons, grâce à des améliorations techniques,
mettre en service des postes de dimensions réduites qui seront plus
compatibles avec l'environnement.
N'oublions surtout pas que l'évolution du réseau doit
nécessairement s'insérer dans le contexte
énergétique et socio-économique du Québec.
Les choix d'investissement dans le domaine énergétique et
la détermination du rôle de l'électricité dans le
développement du Québec sont une responsabilité du
gouvernement lui-même. Quelle part de notre richesse collective
devons-nous consacrer au développement de nos richesses naturelles, et,
en particulier, au développement de l'électricité?
Voilà une question à laquelle le gouvernement devra
répondre le plus rapidement possible. Car, il faut le dire, quel que
soit le programme envisagé, les enjeux financiers sont
considérables.
A l'Hydro-Québec, nos besoins, jusqu'ici, ont été
comblés par l'autofinancement et par le recours aux emprunts. Ces
mêmes emprunts continueront de combler une bonne partie de nos besoins en
ressources financières. L'idéal serait qu'une tarification plus
audacieuse nous permette de percevoir des revenus suffisants pour maintenir ou
peut-être même accroître notre participation au financement
des projets.
Nos abonnés ont aussi une large part de responsabilité
dans la définition du futur qu'ils souhaitent pour l'entreprise. C'est
eux, en définitive, qui par leurs actions quotidiennes,
définissent des besoins que nous avons pour mandat de satisfaire. Il
leur appartient de faire un usage rationnel des ressources à leur
disposition. Nos campagnes d'information les aideront à trouver les
meilleurs moyens à suivre.
Puisque l'Hydro-Québec appartient à l'ensemble des
Québécois, il leur revient de définir, avec nous, l'avenir
qu'ils souhaitent. C'est dans cette
perspective, par exemple, que nous avons déjà
amorcé un dialogue avec la population locale susceptible d'être
affectée par certains projets. C'est aussi la voie que nous aimerions
maintenir dans les années à venir. Je voudrais enfin souligner
qu'avec ce passage de l'hydroélectrique au nucléaire, les
Québécois de l'an 2000 verront l'Hydro-Québec jouer un
rôle important au niveau international.
En effet, la disparition progressive de nos richesses hydrauliques nous
permettra d'exporter l'expérience unique au monde que nous avons
gagnée dans ce domaine. Les ingénieurs et les techniciens
québécois participeront aux grands travaux de construction de
barrages et de réseaux électriques à travers le monde.
D'autres, qui auront été chercher leur expérience à
l'étranger dans le domaine nucléaire, reviendront construire le
Québec du siècle prochain.
Ce développement économique privilégié qui
attend le Québec est relié directement à la
disponibilité de notre énergie électrique, la seule qui
nous appartienne. Nous croyons, messieurs, que ce serait une grave erreur de ne
pas en profiter.
Merci, M. le Président.
Le Président (M. Séguin): Est-ce qu'il y a des
questions? Le chef de l'Opposition.
Prévision de la demande
M. Morin: Même si l'ordre du jour que vous nous avez
indiqué tout à l'heure est des plus imprécis, je pense
qu'il faut tout de même commencer par l'étude de la demande. Le
président de l'Hydro-Québec y a, d'ailleurs, fait allusion
longuement dans l'exposé qu'il vient de faire. Comme, sur ce point, le
ministre était d'accord avec moi dans la proposition, imitée de
la mienne, qu'il a soumise à la commission tout à l'heure, je
pense que nous serons tous d'accord pour aborder cette première
question.
A coup sûr, il faut répondre à la demande, mais
est-ce un critère absolu? C'est la première question que je
voudrais explorer, tout en me rendant compte que la réponse à
cette question n'appartient peut-être pas tellement aux gens de
l'Hydro-Québec qu'à un gouvernement qui a dans l'esprit une
certaine planification des objectifs sociaux du Québec. Si, par
hypothèse, les ressources hydrauliques étaient limitées ou
si elles venaient à être utilisées complètement et
que nous devions avoir recours à des sources plus coûteuses,
peut-être beaucoup plus coûteuses, n'en viendrions-nous pas
à faire des choix sociaux et à nous demander si répondre
à la demande serait le critère ultime?
Je ne suis pas le seul à penser comme cela. Je voyais,
récemment, des propos du ministre lors de sa conférence de presse
du 3 mars 1976 qui sont au même effet. J'aimerais explorer cela
brièvement avec vous, messieurs, avant d'examiner le taux de croissance
que vous avez choisi, ce taux de 7 3/4, à la lumière des chiffres
des dernières années. Je me permets de citer certains passages
extrêmement intéressants et pénétrants du ministre
des Richesses naturelles lors de sa conférence de presse. "Nous pensons,
disait-il, qu'il y aurait lieu de réviser la structure des tarifs de
l'Hydro pour diminuer les obligations que nous avons maintenant d'avoir des
installations qui soient de nature telle qu'on rencontre une pointe
artificielle, pensées en fonction de réduire la pointe
plutôt que d'augmenter l'énergie de base pour atteindre la pointe.
Je ne sais pas si on se comprend, ajoutait-il. L'Hydro-Québec ne m'aime
pas quand je parle de même. Disons que jusqu'ici on a établi la
pointe de demande. Là, on a construit des barrages pour arriver le plus
près possible de cette pointe. Ils coûtent cher, les barrages,
aujourd'hui. Ils ne coûtent pas ce qu'ils coûtaient il y a vingt
ans. Plus on en fait à cause de la pointe, plus la pointe tend à
s'éloigner. "Nous pensons, ajoutait le ministre c'est toujours sa
pensée que j'essaie de rendre le plus fidèlement possible
qu'au lieu de s'en aller vers une construction de barrages qui se rapprochent
davantage de la pointe on devrait peut-être influencer la pointe pour
qu'elle descende." Nous sommes dans la question de la demande. "Une
tarification, par exemple, qui dirait qu'en hiver, si vous utilisez de
l'électricité aux heures de pointe dans l'industriel..." Suivent
trois points de suspension et une pensée profonde du ministre qui se lit
comme ceci: "L'individu, qu'est-ce que tu veux, ne peut pas décider
quand il va aux toilettes ou quand il n'y va pas." Vous observerez le niveau
auquel se place d'emblée le ministre dans ce débat. "C'est d'une
autre forme d'énergie, disait-il, que je parle; ce que je veux dire,
c'est qu'on peut dire à l'industriel, par exemple: Quand vous utilisez
de l'énergie au-delà d'un certain montant, dans les
journées de pointe prévisibles à l'avance, qui sont
prévisibles, elle va vous coûter trois fois plus cher, cette
énergie-là."
J'achève en citant le paragraphe qui est peut-être le plus
important de cette intervention: "On peut constater qu'aujourd'hui il y a un
taux dégressif. Plus tu en prends, moins ça te coûte cher.
Effectivement, cela devrait être l'envers. Je ne dis pas que cela
devrait, mais les gens, chez nous, étudient la possibilité de
mettre cela à l'envers. Plus vous allez l'utiliser, plus cela va vous
coûter cher, ce qui change totalement ton comportement comme industriel.
J'imagine aussi comme consommateur."
Et la question que je me pose est celle-ci: Dans votre analyse de la
demande, vous êtes-vous demandé si, par moment, il n'y aurait pas
certaines demandes qui sont plus importantes que d'autres? Il y a
peut-être des choix à faire. Je reconnais que c'est plus au
gouvernement de faire ces choix qu'à vous, que votre mandat est de
fournir, de trouver de l'électricité, de répondre à
la demande.
Mais est-ce que vraiment ce critère de la demande est l'ultime
critère? Est-ce cela qui détermine tous vos choix? C'est ma
première question.
Après cela, nous pourrons entrer dans une étude plus
détaillée de votre pourcentage de 7 3/4% que vous appelez la
demande historique.
N'avez-vous pas, au moins par hypothèse, étudié la
possibilité de faire des choix de cet ordre et d'imposer, pour certains
types de consommation qui ne sont peut-être pas socialement aussi utiles
que d'autres, des tarifs qui ne soient pas dégressifs, mais qui soient,
au contraire, des tarifs pénalisant certaines consommations pour en
favoriser d'autres ou, sans aller jusqu'à les pénaliser, tendant
à les décourager pour en favoriser d'autres?
M. Giroux: Le ministre disait qu'on ne peut pas toujours choisir
le temps pour aller aux toilettes; je vais prendre le temps de répondre
à la question avant d'y aller. Il y a deux points qu'il faut bien
regarder.
Nous n'avons aucune objection à ce que les tarifs de pointe
soient augmentés, mais l'expérience et l'étude des
réseaux qui ont utilisé tous ces moyens prouvent que cela ne
baisse pas la consommation.
Je peux vous citer ici un cas qui m'avait frappé
énormément. Lors d'une visite en Suisse, j'ai rencontré
les plus grands fabricants d'appareils de contrôle et je leur ai
demandé s'ils ne seraient pas intéressés à venir
nous expliquer tous les contrôles qu'on peut exercer sur les pointes. Ils
avaient étudié notre marché nord-américain, surtout
notre marché canadien. Ils ont dit: Vous n'êtes pas assez
disciplinés pour vous servir de ces choses.
En deux mots, on peut demander à la population d'acheter des
appareils qui réduiront leur pointe, mais cela impliquera une
dépense. On leur fera dépenser leur argent et les abonnés
ne sont pas prêts à le faire. Ils aiment mieux payer
l'électricité.
L'augmentation des coûts pour faire baisser une demande, est, par
expérience, très exagéré. Il y a un an, on
indiquait à la population que le pétrole coûterait
tellement cher que les voitures iraient au ralenti. C'est le contraire qui est
arrivé et pourtant le prix de l'essence est monté de façon
draconienne.
On a pris des mesures gouvernementales pour réduire l'importation
des grosses voitures. Le seul résultat pratique dans le marché
économique actuellement est que les seules livraisons en retard
concernent les grosses voitures, les voitures de luxe.
On l'a étudié. On peut le regarder. Il y a le choix que le
public doit faire ou qui peut être dicté par le gouvernement. On
répond à une certaine demande ou on prive les gens
d'énergie, mais remarquez bien qu'au point de vue du tarif et à
tout point de vue on ne s'oppose pas du tout à ce que le tarif soit
augmenté à ces heures. Le résultat pratique, tout ce que
cela va faire est que cela va aider l'autofinancement, mais cela ne baissera
pas la pointe.
M. Morin: M. le Président... M. Cournoyer: Un instant.
M. Morin: C'est bien.
M. Cournoyer: J'avais bien sûr donné à titre
d'exemple les possibilités qui s'offraient à nous. Je conviens
avec le président de l'Hydro-Québec que les augmentations de
coût ne sont pas nécessairement les seules choses qui peuvent nous
inviter à diminuer notre consommation, surtout si on continue de
s'enrichir par ailleurs. On ne fait qu'augmenter le coût d'une
denrée essentielle ou que l'on considère comme essentielle.
Il y a certainement, cependant c'est à cause des
discussions que j'ai eues antérieurement une expérience,
soit celle de Bell Canada, qui a changé les habitudes des gens,
strictement en mettant un tarif très bas pour les appels du
dimanche.
Aujourd'hui, on a peut-être des difficultés à
appeler le dimanche, car le monde appelle plutôt le dimanche parce que
cela coûte pas mal moins cher. Cela, très certainement
d'après les informations qu'on possède. Remarquez bien que ce
n'est pas l'Hydro-Québec. L'électricité, t'en as toute la
semaine, t'arrêtes pas cela le dimanche. Ce que nous croyons parce
que nous croyons et on peut en d iscuter longuement c'est d'abord, et le
président de l'Hydro-Québec a totalement raison, que cela ne
relève pas de l'Hydro-Québec de déterminer cela. J'ai fait
exprès ce matin de lire l'article qui régit
l'Hydro-Québec, l'article en vertu duquel l'Hydro-Québec est
obligée de fournir l'électricité à ceux qui en
demandent. Une fois cet article changé, je suis convaincu que c'est une
toute autre forme d'obligation que l'Hydro-Québec a devant elle, si
jamais nous avions le courage comme société non pas rien
que comme gouvernemen t d'accepter qu'il y ait un changement dans ces
obligations de l'utilité publique.
En fait, toute cette discussion que nous avons, je comprends que le chef
de l'Opposition voudrait qu'elle se situe au niveau intellectuel auquel il est
habitué. Malheureusement, l'immensité de la population n'a pas
été à l'université. Il est préférable
parfois de lui indiquer des exemples qui sont un peu choquants pour l'oreille
chaste du chef de l'Opposition. Mais, il reste une chose c'est qu'on ne choisit
pas le temps où on va aux toilettes. C'est un exemple qui frappe sur
certaines situations que nous avons au Québec. On ne choisit pas le
temps où on se chauffe, non plus. Lorsqu'on se chauffe, le moteur
électrique qui chauffe une fournaise doit marcher en hiver, en
particulier.
Quand on regarde les conséquences actuelles chez les
cultivateurs en particulier del'arrêt de courant que nous avons
vécu dans les six ou sept dernières semaines, peut-être
bien six ou sept derniers mois aussi, pour être plus juste à
l'endroit de la société, il est bien entendu qu'il faut changer
profondément un certain nombre d'habitudes avant d'espé-rer une
diminution non pas des besoins mais de l'augmentation prévisible des
besoins. De 7 3/4, pour descendre aujourd'hui, M. le Président, je suis
totalement d'accord avec vous, pour descendre de 1%, il y a un paquet de choses
qu'il faut changer dans le comportement des gens et dans les expectatives
qu'ils ont.
Je le dis avec toute la sincérité et la
naïveté dont je suis capable, nous y avons peut-être
contribué, comme Québécois, en disant que nous en avions
en
masse. Et nous en avions en masse, de l'électricité,
à partirde l'hydroélectricité. Il reste encore un certain
nombre de mégawatts à faire. Le problème que nous avons,
comme société, c'est cela qui est très sérieux,
c'est que leschoix.nous devons les faire maintenant, parce que nous ne
voudrions pas, je pense, nous retrouver dans la situation d'autres pays qui
deviennent totalement dépendants ou presque totalement dépendants
des autres formes d'énergie, parce qu'il y a déjà
longtemps qu'ils ont épuisé leur
hydroélectricité.
Je conviens avec le président qu'il faille à plus ou moins
brève échéance faire face à une demande qui
dépassera les possibilités de l'hydraulique je le sais,
tous les chiffres mènent à cela pour éviter que cet
accroissement continue d'être au rythme où il est actuellement. Et
pour bien illustrer ce que je pense c'est naïf, je ne suis pas un
technicien, je suis un politicien, avec toute la déférence que je
dois à ceux qui n'en sont pas. Je suis un politicien quand je
vois, par exemple, les chiffres que les techniciens mettent à ma
portée, je les interprète avec mes yeux de politicien.
On me dit 2000 mégawatts multiplié par 2, cela ne fait que
4000 mégawatts. Mais 4000 multiplié par 2, cela ne fait que 8000
mégawatts. Et 8000 multiplié par 2 cela ne fait que 16 000
mégawatts. Ce sont des cniff resqui se multiplient bien par deux
à tous les dix ans. Quand vous êtes rendus à avoir de la
difficulté, non pas parce que vous êtes politicien ou technicien,
à les prendre tels qu'ils nous sont donnés à nous, les
caves, on prend cela de même et on dit, C'était facile, M.
Cournoyer, de multiplier par 2 5000 mégawatts. Mais en multiplier 30 000
par 2, cela va être pas mal plus dur. Comme par hasard, cela me frappe
dans le front, comme politicien. 10 000, ce n'est pas grave. C'est comme un
gars qui dit je n'ai qu'un enfant, je vais multiplier par deux, ça ne va
être que deux demain matin. Encore une fois, j'intellectualise le
débat. Mais quand j'en ai 5 et je dis je vais en avoir deux fois plus la
semaine prochaine, cela fait dix. On n'élève pas cela de la
même façon dix enfants et deux enfants. Je m'excuse d'avoir
intellectualisé le débat encore, mais...
M. Morin: Ce n'est pas si mal.
M. Cournoyer: II reste que c'est ce genre de préoccupation
qui frappe le commun des mortels. C'est l'analyse de ces chiffres qui... Je
comprends qu'on doive être rassuré par les techniciens, mais ces
chiffres, pour nous, même si nous ne sommes pas politiciens, si nous
représentons la population de la façon la plus naïve
possible, cela nous étonne et cela nous poigne de front. On se dit:
Où est-ce qu'on s'en va? Je n'aime pas le genre de parallèle
qu'on fait avec les Olympiques. Mais, M. le Président, comme vous le
savez, en face des multiplications de coûts dont on parlera le 24
août, à la séance sur la baie James, si on se fie à
ce qui s'est produit dans une ou presque une décennie qui vient de
passer, quant aux modifications d'évaluation de coûts que les
ingénieurs-conseils peuvent nous donner, si on se fie à cela,
est-ce qu'effectivement, dans la prochaine décen- nie, on aura
l'assurance que les milliards qu'on fait se promener dans l'esprit des gens, ce
sera réellement cela? Je n'ai pas l'impression que cela le sera moi non
plus. C'est pour cela que, même quand on me parle d'un certain nombre de
milliards, il s'agit de scénarios à partir d'hypothèses,
et c'est ce que j'aimerais que l'Hydro-Québec, cet après-midi,
indique clairement. Nous sommes dans le domaine strictement hypothétique
et nous faisons ce qu'il est convenu d'appeler des scénarios. Or, des
scénarios, pour vous et pour moi, M. le Président, on comprend ce
que c'est. Mais, à l'occasion de la commission parlementaire, j'aimerais
que vous vous abaissiez au niveau des politiciens pour expliquer aux
politiciens ce que c'est premièrement qu'un scénario, ce que
c'est que la puissance et ce qu'est l'énergie. Je vous jure qu'on va
vous écouter comme il faut.
M. Giroux: C'est ce qu'on a l'intention de faire. J'espère
que vous comprendrez. Prenons le point que vous mentionniez tantôt. On
regarde souvent des statistiques qui nous frappent, comme la question de Bell
Canada. Bell Canada n'a pas publié de statistiques. Elle a
peut-être des raisons. Je pense qu'elle demande des augmentations de
tarifs. Mais n'oubliez pas une chose. Les compagnies américaines qui ont
accordé l'escompte qu'elles donnent le dimanche ont publié aussi
qu'elles augmentaient le tarif de leurs appels interurbains journaliers. Cela
s'est avéré une chose très rentable pour les compagnies de
téléphone et n'a pas contribué à en baisser
l'usage. Elles ont redistribué et certaines compagnies de
téléphone ont conservé les lignes beaucoup plus ouvertes
pour les appels d'affaires, qui étaient à un taux beaucoup plus
haut et qui ne servaient pas le dimanche. Mais, en électricité,
c'est un peu différent. Quand on demande à son épouse de
ne pas se servir de la cuisinière à cinq heures ou à six
heures, c'est plus embêtant. On dit que cela se fait dans certains pays,
mais cela va prendre beaucoup de temps avant qu'on s'habitue à cela,
à moins que ce nous soit imposé. Du côté de l'Etat
de New York, par exemple, à cause du manque d'énergie, on a
imposé ce qu'on appelle communément des "brown-outs". Il n'y en
avait pas, mais cela n'a pas mis les gens tellement de bonne humeur.
A ce propos, je crois que nous devons émettre strictement des
scénarios et des hypothèses qui décrivent ce que l'avenir
peut refléter pour fournir l'énergie que les abonnés ont
été habitués à avoir. Si une autre imposition est
faite, cela ne peut provenir de l'Hydro qui doit Ta faire. Il a
été clairement établi ce matin que cela doit être
fait par le gouvernement. Cela est arrivé dans d'autres provinces
où le gouvernement a dit: Ces programmes ne se feront pas. Là, on
nous saute sur le dos pour avoir de l'énergie, mais on n'a pas fait, par
ce geste, disparaître la demande.
Si vous le permettez, je vais demander à M. Boyd de faire
l'exposé du programme, tel qu'on le conçoit, on fera toutes les
corrections requises.
M. Cournoyer: Le programme est basé essentiellement sur la
demande?
M. Giroux: Oui.
M. Cournoyer: Forcément. Avant de passer
immédiatement au programme, tout en acceptant la décision du
président, il faudrait peut-être avoir épuisé la
demande.
M. Morin: A mon avis, ce serait plus sage, plus logique en effet.
Depuis quelques instants, je me retrouve assez au même diapason que le
ministre.
M. Giroux: Je m'excuse. Je pense que j'ai dit "programme", mais
c'est "demande".
M. Boyd (Robert-A.): J'aimerais vous parler de la demande. Nous
avons les mêmes préoccupations à l'Hydro-Québec en
général et à la planification générale en
particulier, dont je suis responsable auprès de la commission, que vous
avez exprimées, que M. Giroux a exprimées, au sujet de la demande
et de nos moyens d'y satisfaire.
On reconnaît aussi depuis toujours que notre mission à
l'Hydro-Québec est de répondre à la demande et non pas de
la susciter. Je peux cependant vous expliquer que dans le passé, pendant
un certain temps, on a fait de la promotion. Je pense qu'on peut justifier
cette période, parce que la compétition la suscitait d'une
façon extravagante. On peut dire qu'on a essayé de faire face
à cette promotion d'une façon que j'appellerais
modérée, la raison étant que si on ne l'avait pas fait,
plusieurs rues, dans nos municipalités, auraient été
munies d'éclairage seulement. Tous les autres appareils, chauffage,
cuisinière, eau chaude auraient été au gaz ou à
l'huile. L'électricité aurait entraîné des
coûts très élevés pour l'abonné.
De toute façon, le contexte énergétique a
changé, et depuis un certain temps on fait la promotion de la
conservation. On a une certaine publicité faisant la promotion de la
conservation.
Pour revenir à la question du départ, j'aimerais rappeler
que, dans le domaine industriel et commercial, on a ce qu'on appelle la demande
ou le facteur demande avec des compteurs à demande qui sont là
justement pour inciter l'industrie et le commerce à contrôler leur
pointe. Lorsque ces abonnés établissent une demande, ils sont
pénalisés pour un certain temps à payer un facteur de
demande. Du côté de la consommation résidentielle et, en
fait, du côté de la consommation en général,
à la Planification générale, nous avons maintenant
formé un comité d'étude qui va étudier les
différentes méthodes qui peuvent encourager ou entraîner le
contrôle de la consommation.
Ce n'est pas notre rôle principal, mais je pense qu'on peut, avec
notre personnel, aider dans ce sens à la planification de l'entreprise.
En plus de ça, vous avez remarqué, on en parle dans notre
programme, qu'on a déjà planifié des usines de pointe,
qu'on n'a pas réussi encore à installer, mais dans le programme
proposé, vous allez constater qu'on installe une quantité
importante d'usines de pointe, précisément pour pallier le
problème qu'entraîne cette demande de pointe.
Notre fonction à nous n'est pas d'avoir les plus gros chiffres
possibles, d'avoir des 7 3/4% alors que les autres ont des 7% ou des 6 1/2%.
Notre problème est de répondre à la demande. Les
hypothèses qu'on a employées qui nous donnent 7 3/4% sont des
hypothèses moyennes, je vais vous les montrer sur le tableau tout
à l'heure. C'est ce qu'on pense qui va arriver. Actuellement, à
moins que des coups de barre formidables soient donnés, à moins
que le public accepte volontairement de contribuer à ces coups de barre,
on aura des problèmes il y a une masse globale
d'énergie qui est requise au Québec. L'électricité
en représente le quart, grosso modo. Le reste est surtout du mazout ou
de l'huile, un peu de gaz et très peu d'autre chose. Si, par des mesures
on peut réussir à faire descendre la consommation globale
d'énergie, c'est un bon point de gagné. Ensuite, il restera
à savoir vers quoi les gens vont tendre, évidemment, par des
contrôles ou des méthodes. C'est ce qu'on regarde au comité
de consommation. Dans nos hypothèses, nos scénarios,
appelez-ça comme vous voulez, ce sont des hypothèses, on pense
que notre part du marché sera de 40%, au lieu de 25%.
On n'a rien contre le fait qu'il y ait quelque chose qui fasse que le
public accepte que ce soit 20% au lieu de 25%. Si c'était 15%, ce n'est
pas notre problème. Mais il faut être prêt à faire
face au problème. Cela peut aller à 40% comme à 15%, notre
part du fardeau de l'énergie.
C'est pour cela que notre demande est basée sur des
périodes de dix ou quinze ans d'avance; on regarde même
jusqu'à l'an 2000. C'est révisé annuellement. On fait des
tendances, on étudie le passé, les facteurs économiques,
démographiques, etc., et annuellement, on révise nos projections,
on les corrige vers la hausse ou la baisse, selon ce qui s'est passé
l'année précédente.
Quant à nos programmes d'équipement, on est toujours en
mesure de les modifier. Les accélérer, c'est très
difficile, quelquefois impossible. Les réduire, c'est plus facile. Les
étaler sur une plus longue période les rend plus coûteux.
Si la demande n'était pas là, il y a toujours moyen de
réduire des programmes. Mais le malheur, c'est que si on n'a pas
prévu, d'ici quelques hivers, les abonnés seront forcés de
se chauffer à tour de rôle, il en sera ainsi pour la
possibilité de prendre son bain, quand on aura de l'eau chaude sur telle
rue, il n'y en aura pas sur telle autre, ce sera un problème.
Mais, nous sommes conscients du fait que les programmes qui sont
basés sur nos prévisions de la demande vont être
considérables et vont demander des investissements
considérables.
Par contre, si la part de l'électricité reste à
25%, cela prend les programmes qu'on a là, pour le moment. Si elle passe
à 40%, il faudra peut-être accélérer. C'est un
problème considérable qu'il faut envisager.
J'aimerais vous montrer, si vous le permettez, quelques tableaux...
M. Morin: M. Boyd, est-ce qu'on pourrait vous poser une ou deux
questions?
M. Boyd: C'est M. le Président qui décide.
Le Président (M. Séguin): Certainement,
allez-y.
M. Morin: Je me rends parfaitement compte que vous êtes un
peu prisonnier des choix des politiques gouvernementales en fait
d'énergie. Quant à vous, vous êtes obligés, de par
la loi, de répondre à la demande, que vous aimiez cela ou que
vous n'aimiez pas cela. C'est votre tâche.
Mais je m'étonne un peu de votre 7 3/4%. Je voudrais juste vous
poser une question là-dessus. Vous avez établi cette
prévision de demande sur l'hypothèse d'un taux de croissance
annuel de 7 3/4%. On retrouve ce chiffre tel quel dans l'exposé du
ministre, ce matin, qui tenait pour acquis qu'un tel taux de croissance
demeurerait constant et donc, justifierait des investissements annuels d'au
moins $3 milliards, nous disait-il.
J'aimerais vous demander si, à la lumière de la demande au
cours des cinq dernières années, ce 7 3/4% demeure
réaliste, demeure aussi fondé. Je prends les dernières
années. Les taux de croissance observés ont été les
suivants: 1971: 3,6%; 1972: 5,8%; 1973: 8%; 1974, qui a été une
année record: 10,4%; en 1975, cette chute à laquelle le
président de l'Hydro a fait allusion tout à l'heure, à 1%
et, enfin, en 1976, cette reprise spectaculaire qui durera ou ne durera pas, on
n'en sait rien.
Quand on fait la moyenne de 1971 à 1975, on obtient un taux moyen
de 5,7% et non pas de 7 3/4%. Une première question qui me vient
à l'esprit. Comment avez-vous procédé
peut-être vos tableaux vont-ils nous donner justement une partie de la
réponse pour établir cette moyenne? Est-ce que vous vous
êtes fondés sur une consommation de mémoire d'homme, depuis
des dizaines d'années? Ou est-ce que vous n'auriez pas eu tendance
à vous fier surtout à la croissance des dernières
années qui, peut-être, nous donne une meilleure indication de ce
que sera l'avenir?
Pour ma part, j'avoue que le très faible taux de croissance en
1975, qui est dû, à ce qu'on nous a dit, à une chute de la
demande industrielle, une chute de 13,6% dans la demande industrielle, me
laisse fort perplexe sur vos hypothèses, sur vos projections et sur ce
chiffre de 7,75%.
M. Boyd: Peut-être qu'avant de passer au tableau je devrais
vous référer au document qu'on vous a distribué et qui
s'appelle "prévision de la demande". Est-ce que vous l'avez en votre
possession?
Dans ce document, à la page 1, on vous dit qu'en
considérant les périodes de quinze années
consécutives incluses dans l'intervalle de 25 ans qui va de 1951
à 1975 on obtient des taux moyens d'accroissement annuel qui varient de
7,7% à 8%.
C'est notre expérience. Si vous prenez 1975 pour faire votre
moyenne, je pense que le chiffre que vous obtenez est faux, parce que...
M. Morin: J'en conviens, M. Boyd, mais prenons 1971 à
1975.
M. Boyd: Oui, oui. En 1975, il y a eu un fléchissement de
14% dans les demandes industrielles. Si la demande industrielle avait
augmenté de seulement 4,6%, comme on prévoyait qu'elle devait
augmenter à ce moment, on aurait eu une demande totale augmentée
de 8% pour 1975. Pourquoi ce fléchissement? Ce sont les nombreuses
grèves dans l'industrie lourde qui emploie beaucoup
d'électricité, l'amiante, la pétrochimie, les pâtes
et papiers, etc. C'est cela qui a fait baisser la demande.
M. Morin: J'en conviens.
M. Boyd: Par contre, dès maintenant, je pense que M.
Giroux l'a dit, on constate que, depuis le début de l'année 1976,
c'est monté à 13,4%, l'augmentation globale. Donc, tout de suite,
on est en train de rattraper ce qu'on a manqué en 1975. Et on
prévoit que pour 1976 la demande va avoir augmenté de près
de 10%. Donc, on ne peut pas s'attacher à une année ou deux
années.
M. Morin: Mais cinq années, M. Boyd, 1971 à
1975.
Ce sont les années où on a connu un essor spectaculaire de
la consommation électrique.
M. Cournoyer: Je constate que le chef de l'Opposition est
d'accord avec mon premier ministre pour la première fois de la
journée.
M. Morin: Nous n'avons jamais contesté cela, M. le
Président.
M. Perreault: Cela traduit les activités
économiques.
M. Morin: Bien, dans une certaine mesure ou bien le
chauffe-eau.
M. Perreault: Cela traduit les activités
économiques.
M. Morin: Pas nécessairement, la preuve en 1975.
M. Perreault: C'est cela.
M. Boyd: Je pense que nous ne sommes pas les seuls à
penser de cette façon au Canada, parce qu'évidemment on a des
contacts entre les différentes commissions provinciales et les taux
annuels moyens de croissance de la demande interne de puissance prévue
de 1977 à 1995 pour chacune des provinces sont les suivants:
l'lle-du-Prince-Edouard, 9,3%; Nouveau-Brunswick, 8,2% ce ne sont pas
des provinces bien ri-
ches la Nouvelle-Ecosse, 7,4%; le Québec, 7,7%;
Terre-Neuve, 8,4%; en Ontario, ils ont des problèmes et ce n'est pas
rapporté ici.
M. Morin: II y a là des provinces qui sortent du bois dans
certains cas, qui viennent de découvrir l'électricité. Je
ne sais pas si c'est un critère bien rassurant. Moi, j'avoue que les
cinq dernières années, M. Boyd, paraissent donner une bonne
indication.
M. Boyd: On me donne ici les chiffres; un taux de croissance
annuel moyen de 7,3% pour la période de 1970 à 1974. C'est
à peu près ce que vous voulez avoir. 7,3%, c'est quand même
proche de ce qu'on propose.
M. Cournoyer: 1975.
M. Morin: Est-ce que nous avons les mêmes chiffres pour
1971, 3,6%.
M. Boyd: Je parle de 1970 à 1974.
M. Morin: Quel était le chiffre pour 1970?
M. Boyd: J'ai la moyenne ici. Vous l'avez à la page 3 du
document sur la demande.
M. Morin: Oui.
M. Boyd: Evidemment, j'espère que vous acceptez ces
chiffres comme étant des chiffres qui sont valables.
M. Cournoyer: II parle de 1971, lui.
M. Boyd: Oui, bien, c'est cela; c'est ce que j'essaie
d'expliquer.
M. Cournoyer: Ce n'est pas la même date.
M. Boyd: Oui, c'est cela. C'est ce que j'essaie d'expliquer. Si
vous partez de 1971 à 1975, l'année 1975 n'est pas
représentative; 1971 ne l'est peut-être pas non plus. Quand vous
parlez de 25 ans, je pense que vous avez une meilleure image.
M. Morin: Quand même, cela ne vous a pas amené
à vous poser des questions sur vos hypothèses de 25 ans, ces cinq
dernières années?
M. Boyd: On s'en pose toujours des questions. Annuellement, on
revoit cela. On l'augmente ou on le baisse. On ajuste notre tir constamment.
Dans le moment, on pense que, pour les années 1970 à 1975, c'est
7,2%. Ce n'est quand même pas si loin. De 1971 à 1973, c'est 14,7%
pour cette dernière année. Je pense que, comme on dit, c'est une
hypothèse. Basés sur notre expérience passée, on a
étudié les différents facteurs qui peuvent nous instruire
là-dessus. On a étudié trois scénarios que vous
avez sur le tableau et que j'aimerais vous expliquer tout à l'heure. Il
y a un scénario faible, un moyen et un fort. Vous retrouvez
également cela dans le texte ici.
Est-ce que vous voyez bien? Si vous ne voyez pas... Est-ce que vous
voyez?
Le Président (M. Séguin): Vous pouvez
rapprocher.
M. Boyd: Je vais rapprocher. De toute façon, vous l'avez
à la page 18 du texte qui s'appelle La prévision de la demande.
C'est pour la période 1990 à 2000. Vous avez un scénario
faible, moyen et fort. Une croissance démographique de 0,4%; une
croissance économique de 3,5%. Je pense bien que ce n'est pas tellement
fort. Une croissance des besoins énergétiques de 3,5%. Je ne
pense pas que ce soit exagéré non plus. En ce qui concerne la
croissance des besoins d'électricité pour le réseau
provincial de l'Hydro-Québec, nous pensons, d'après nos
hypothèses, qu'on va avoir un pourcentage d'augmentation de 7%.
Pour le scénario moyen, une croissance démographique de
0,5%; une croissance économique de 4%; une croissance des besoins
énergétiques de 3,75%. Cela nous donne, d'après nos
hypothèses, 7,75% d'augmentation annuelle de
l'électricité. A ce moment, on prévoit, à moins que
les règles du jeu ne changent, que les gens vont avoir opté pour
l'électricité et que l'électricité va
représenter dans cette période 45% de la demande globale
d'énergie. Pour le scénario fort, 0,6% pour la croissance
démographique; la croissance économique, 5%; la croissance des
besoins énergétiques, 4,5%; la croissance des besoins
d'énergie, 8,5%. A ce moment, la part d'électricité
représente seulement 40% du marché. Avant qu'on me demande
comment II se fait que cela descend à 40%, j'ajoute la demande serait
tellement forte qu'on pense ne pas pouvoir toute la satisfaire, qu'on serait
obligé de se contenter d'un pourcentage moins important dans
l'énergie globale du Québec.
Je ne pense pas qu'on puisse mettre tellement en doute les facteurs
énoncés. On peut critiquer ceux-là, si on veut, mais ce ne
sont pas des facteurs très forts dans les concepts
économiques.
M. Morin: Prenons votre scénario faible sur le plan
démographique. Il n'est pas aussi faible que la
réalité.
M. Boyd: Des indications nous prouvent que c'est en train de
changer, d'après les renseignements qu'on a obtenus. Cela change dans le
moment. La pilule est moins effective ou je ne sais quoi mais, apparemment, les
naissances tendent à remonter.
M. Morin: Vous ne trouvez pas que votre chiffre de 0,4 est un peu
fort pour un scénario faible?
M. Boyd: C'est notre hypothèse.
M. Cournoyer: ... il y en a d'autres qui ne sont pas
capables.
M. Morin: La question est que j'aimerais bien
qu'on nous dise, par exemple, quelle a été la croissance
démographique réelle depuis dix ans, par exemple. On verrait si
le chiffre 0.4 a du sens. Je pense que la réalité a
été beaucoup moins que cela. Il y a même des années
où c'était 0.
M. Boyd: Sans doute notre personnel peut fournir les
chiffres.
M. Morin: J'aimerais cela.
M. Boyd: Si on leur donne quelques minutes, je pense qu'ils ont
les statistiques pour nous le dire. On pourra revenir à celui-ci, si
vous voulez.
M. Morin: Oui.
M. Boyd: Je ne le mets pas loin, juste ici.
M. Morin: D'accord. Parce que si votre scénario faible ne
correspond pas à la faiblesse réelle sur le plan
démographique, aux chiffres que j'ai pu voir récemment, on peut
se demander ce que devient votre scénario moyen et ce que devient votre
scénario fort. Cela peut mettre en doute un certain nombre de vos
hypothèses. J'ai hâte d'entendre l'explication de vos experts.
M. Boyd: D'accord. Si on traduit les trois scénarios en
graphique, on voit ici les années. Vous avez 1975 à l'an 2000.
Cela fait des milliers de mégawatts. Si on part de 1990 et qu'on
applique les trois scénarios, on voit quand même que l'influence
n'est pas tellement considérable. Dans le cas du scénario faible,
nous anticipons une demande de 76 915 mégawatts, pour le scénario
moyen, 82 480, pour le scénario fort, 88 404 mégawatts. Donc,
dans les trois cas, ce sont des chiffres importants.
Mais supposons que ce soit 6 1/2 au lieu de 7 3/4. A partir d'ici,
l'influence n'est pas tellement considérable. Nous, on ne la retient
pas, parce que nous ne pensons pas que cela va arriver à moins qu'il y
ait des coups de barre très importants donnés par le gouvernement
pour diriger les besoins vers autre chose et que les gens acceptent aussi de
réduire leur consommation d'énergie globale, c'est une chose, et,
ayant accepté de la réduire, qu'on la conduise vers autre chose
que l'électricité.
Une Voix: C'est intéressant.
M. Boyd: Oui, c'est intéressant. C'est dans le prospectus
que l'Hydro-Québec dépose lors de ses emprunts. Celui-là
est tout à fait récent. Cela a été
déposé en novembre 1975 et ce sont les chiffres qu'on obtient du
gouvernement du Québec. De 1970 à 1974, en utilisant le 1er juin
comme point de repère de chacune des années, le taux annuel moyen
est de 0,5%. C'est la réalité qu'on nous rapporte ici, elle est
de 0,5%.
M. Morin: A un moment donné, cela a été
presque 0.
M. Boyd: Notre chiffre de 0,4 est faible. On était en bas
du chiffre de 0,5 qui est rapporté ici.
M. Morin: Oui.
M. Boyd: Le chiffre de 0,5 est exactement ce qui est
rapporté ici de 1970 à 1974. Vous avez un astérisque ici
qui dit que la croissance aura été supérieure à
cette valeur au cours de la période de 1976 à 1990,
d'après nos indications.
M. Morin: Cela, c'est pour le scénario moyen.
M. Boyd: On a des chiffres qui datent de plus loin. Prenons la
population du Québec au 1er juin, le taux d'accroissement annuel moyen,
de 1964 à 1975, a été de .94% et, de 1971 à 1975,
de .57%. En 1975, il a été de .88%. Quant au nombre de nos
abonnés cela augmente beaucoup plus vite parce que les gens ont deux
résidences, certains, plus chanceux, en ont trois, les jeunes partent de
la maison, etc. Donc, de 1964 à 1975, le nombre de nos abonnements, en
moyenne, a augmenté de 3,32% par année; de 1971 à 1975, de
3,02% et, en 1975, de 2,82%.
M. Morin: C'est une façon de réconcilier nos
chiffres. Votre 0.4% du scénario faible inclut l'immigration et non
seulement la natalité.
M. Boyd: Toute la croissance démographique.
M. Morin: Oui.
M. Boyd: Les immigrants aussi...
M. Morin: Ils consomment de l'électricité, c'est
bien sûr.
M. Boyd: Je pense qu'en utilisant 5, on est en deça de
l'expérience passée. On utilise la moyenne des dernières
années, de 1970 à 1974, tel que rapporté ici dans le
dépliant de l'Hydro-Québec qui est fondé sur les
renseignements fournis par la province. Alors, c'est ce que cela nous
donne.
On me donne une autre statistique qui peut être
intéressante. C'est la consommation d'énergie par abonnement
moyen et par classe. Le domestique et l'agricole ont varié. En plus des
abonnements additionnels, chacun, en moyenne, a augmenté de 3,9% en
1970; de 3,6% en 1971; de 6,9% en 1972; de 7,4% en 1973; de 9,5% en 1974 et de
5,5% en 1975.
A cela, il faut ajouter l'augmentation des abonnements.
De toute façon, j'insiste beaucoup pour dire que ce sont des
hypothèses basées sur des données qui sont
réalistes. Cela peut être erroné. Cela peut l'être en
plus ou en moins. Il y a toujours une possibilité de corriger parce
qu'on fait cela annuellement.
Mais le but de l'exercice n'est pas de commencer tout de suite à
construire pour cette période; c'est de nous indiquer, à nous
d'abord.
de l'Hydro, ce qu'on aura à prévoir si c'est ainsi et
à vous, messieurs, au gouvernement, ce qui s'en vient.
On s'est toujours fait reprocher de ne pas avoir dit ce qui s'en venait.
Ici, on vous le dit. On pense que c'est cela et on a de bonnes raisons de
penser que c'est cela. Cela peut être moins, mais il y aura toujours
moyen, à ce moment, d'ajuster notre tir ainsi si c'est ainsi.
M. Morin: M. Boyd, une ou deux questions. M. Boyd:
Oui.
M. Morin: Vous nous avez mentionné des taux de croissance
anticipée dans d'autres provinces canadiennes, particulièrement
celles de l'Atlantique. Avez-vous les chiffres pour les Etats de la
Nouvelle-Angleterre, en particulier l'Etat de New York, qui seraient
peut-être des points de référence plus probants?
M. Boyd: J'en ai déjà eu. Sans doute qu'on doit les
avoir.
M. Morin: Sur quelle hypothèse travaillent-ils en ce
moment?
M. Boyd: Dans le moment, je ne le sais pas parce qu'ils ont eu
des... On vous montrera, tout à l'heure, ce qu'ils paient pour
l'électricité. Si on allait à cela, d'un seul coup, pour
nous aussi cela ferait pencher la balance, mais on ne pense pas que notre
public est prêt à payer de tels prix.
En fait, puisqu'on en parle, je ne sais pas s'il est là...
M. Morin: C'est parce que vous avez mentionné des taux de
croissance dans les autres provinces...
M. Boyd: Oui.
M. Morin: ... et je pense que l'Ile-du-Prince-Edouard est une
mauvaise référence pour autant que le Québec est
concerné. Ce n'est pas la meilleure que vous puissiez donner, en tout
cas.
M. Boyd: D'accord. Ce n'est pas important. En
Colombie-Britannique, c'est au moins de 8% à 9%. C'est plus fort que
nous, en tout cas.
M. Morin: Oui.
M. Boyd: Exactement. On peut me le préciser, mais je sais
que c'est plus fort que ce que l'on prévoit, et en Ontario, c'est plus
fort que ce qu'on prévoit ou égal. Là, ils ont des
problèmes majeurs et j'aime autant ne pas me baser sur ce qui se passe
dans le moment, parce que ce n'est pas significatif. Mais en
Colombie-Britannique, c'est pas mal élevé et pas mal
prospère. Cela se développe vite et c'est plus fort que nous dans
le moment, de notre pronostic.
M. Morin: II y a une croissance démographique autrement
plus sérieuse que la nôtre.
M. Boyd: Cela croît plus vite.
M. Morin: Si vous aviez des chiffres pour les Etats de la
Nouvelle-Angleterre, cela compléterait le tableau.
M. Boyd: On a un certain nombre de chiffres pour répondre.
On utilise les chiffres de 1974. La consommation moyenne domestique en 1974, au
Québec était de 9520 kWh. American Electric Power, là-bas,
c'est 9246 kWh; pourtant il fait moins froid que par ici. L'année 1964
étant l'indice 100, et on parle de dix ans, c'est maintenant de 179%,
donc cela a augmenté de 79% en dix ans. Southern Company, en Californie
également: 9825 kWh; l'indice, 182.
M. Morin: Oui, mais la Nouvelle-Angleterre?
M. Boyd: J'essaie d'en trouver. Consolidated Edison, 150%.
M. Morin: New York?
M. Boyd: Oui. La ville de New York, 150%.
M. Morin: Sur quoi basent-ils leurs prévisions d'avenir?
Sur quoi fondent-ils leurs investissements? Sur quel genre de taux? Avez-vous
cela?
M. Boyd: Non, je ne l'ai pas. Mais il faut admettre que,
premièrement, ils ont beaucoup plus de gaz que nous en avons, et de
l'huile aussi. C'est un facteur. A part cela, les tarifs
d'électricité qu'ils ont à payer ne sont pas tout à
fait pareils. Cela aussi a une influence.
M. Morin: Je le sais, parce qu'ils n'ont pas conservé et
maintenant ils sont aux prises avec de très graves problèmes.
M. Boyd: Pour une consommation mensuelle de 1000 kWh, l'usage
domestique, nous nous en allons tout de suite aux Etats-Unis, à
l'Hydro-Québec, c'est $17.60. La note, ici, dit: Pour le Canada, ce sont
des tarifs en vigueur depuis juillet 1976. Aux Etats-Unis, ce sont les tarifs
en vigueur en mars 1976. A New York, cela coûte $75.59. C'est un facteur,
dans la poche du citoyen. A Philadelphie, $49.24; à Détroit,
Michigan $36.53; à Chicago, $38.32; Portland, $18.67; San Francisco,
$26.33; au Tennessee, Chattanooga, c'est le TVA$24.09. Si on
revient au Canada, dans les villes typiques importantes, dans leur province:
Saint-Jean, Terre-Neuve, $22.84; Charlottetown, $42.24; Halifax,
Nouvelle-Ecosse, $27.24; Monc-ton, Nouveau-Brunswick, $24.53; Toronto, $17.62
on les bat par deux cents; Winnipeg, $20.00. On a souvent parlé
de Winnipeg dans le passé. On disait qu'ils étaient plus bas que
nous. Maintenant, ils viennent de nous dépasser. Régina, $18.93;
Edmonton, $20.55; Vancouver, $24.98. L'Hydro, $17.60. C'est un facteur qui nous
influence...
M. Morin: Seulement pour compléter les ren-
seignements que vous nous donnez, M. Boyd et qui sont fort
intéressants, est-ce que vous avez des chiffres comparables et aussi
exacts pour l'ensemble de la province de Terre-Neuve, l'ensemble de la
Nouvelle-Ecosse, de l'Ontario, de la Colombie-Britannique?
M. Boyd: Oui. On peut les obtenir d'eux directement ou
peut-être qu'on les a ici, je ne sais pas.
M. Morin: De même pour l'ensemble de l'Etat de New York et
pas seulement la ville de New York, l'ensemble du Michigan, etc.
M. Boyd: Oui, on peut avoir tous ces chiffres-là. Je ne
sais pas si on les a tous ici.
M. Morin: Oui.
M. Boyd: C'est certain que la ville de New York a le tarif le
plus élevé dans l'Etat de New York.
M. Morin: Bien sûr.
M. Boyd: A cause du coût de la distribution, etc.
M. Morin: Oui, c'est pour cela que je vous demandais des chiffres
qui soient plus étendus que ceux-là.
M. Boyd: Voulez-vous que je vous donne des chiffres plus complets
sur le taux de croissance de la population? Par exemple, je vous ai
donné de 1971 à 1974. C'était .5%.
M. Morin: .5%.
M. Boyd: De 1971 à 1975, c'est .7%. Donc, cela remonte. Au
Nouveau-Brunswick, on déclare que de 1971 à 1975 cela a
été de 1,5%. Toutes les statistiques que vous avez
demandées, je ne sais pas si je les ai. Vous en avez demandé
plusieurs, mais on peut certainement vous les fournir à un autre moment,
si vous le voulez.
M. Morin: En particulier, ce tableau qui me paraîtrait
peut-être plus éloquent, qui donnerait non pas seulement New York,
mais l'Etat de New York.
M. Boyd: D'accord.
M. Morin: Cela nous donnerait peut-être une moyenne mieux
étalée.
M. Boyd: Est-ce qu'il y en a d'autres pour nous guider
dans...
M. Morin: C'est surtout la Nouvelle-Angleterre qui
m'intéresse, parce que c'est peut-être les gens qui sont le plus
près de nous, avec lesquels on peut établir les comparaisons les
plus probantes. D'aller se promener à Portland, Oregon, ou en
Californie, je trouve cela moins probant comme chiffres.
M. Boyd: C'est un voyage intéressant, mais à part
cela...
M. Morin: Oui, bien sûr. Sur le plan touristique, vous avez
parfaitement raison.
M. Boyd: A Portland, Oregon, ce qui est intéressant, c'est
qu'on a un réseau majoritairement hydraulique encore. C'est pour cela
qu'on a un tel tarif.
M. Morin: Oui, $18.67.
M. Boyd: C'est un facteur...
M. Cournoyer: M. Boyd, il y a une affaire qui m'énerve un
peu. Il y a déjà un bout de temps que je suis en discussion avec
le gouvernement fédéral et apparemment l'Ontario en arrache bien
gros en électricité. Etes-vous capable de m'expliquer comment
à Toronto on paie $17.62 et l'Hydro-Québec $17.60 alors que nous
sommes à peu près à 99% d'hydraulique, donc avec les
avantages de l'hydraulique, alors qu'en Ontario, les gens n'ont absolument pas
le même avantage hydroélectrique que nous avons ici. Comment
est-ce que cela arrive à $17.62 par rapport à $17.60 au
Québec?
M. Boyd: L'explication qu'on peut donner, c'est qu'à
Toronto c'est un réseau municipal qui a des contrats avec
l'Hydro-Ontario à des conditions qui sont peut-être plus
favorables que d'autres, parce que c'est Toronto. Toronto achète
l'électricité en gros à haut voltage et il y a un
réseau qui est probablement amorti en grande partie, et on peut encore
vendre à ce taux-là. Ils viennent de l'augmenter. Tandis que
nous, l'Hydro-Québec, $17.60 s'appliquent aux Iles-de-la-Madeleine,
à la Gaspésie, l'Abitibi, au Lac-Saint-Jean et partout. Il n'y a
qu'un tarif maintenant pour le secteur domestique. C'est un tarif moyen. En
Ontario, il y a au-delà de 300 réseaux municipaux, des
commissions la plupart s'appellent des commissions municipales
qui toutes achètent l'énergie en gros de l'Hydro-Ontario. Si vous
voyiez le système de tarification, c'est effarant de voir cela, à
l'Hydro-Ontario. L'Hydro-Ontario est obligée de surveiller la
tarification de toutes ces municipalités. J'espère que jamais au
Québec on ne tombera dans un piège comme celui-là. Ce qui
fait qu'en Ontario, tous ces réseaux municipaux ont des tarifs
différents. On a pris celui-là, parce que c'est ce qui se compare
le mieux avec l'Hydro-Québec. Remarquez qu'on n'a pas mis
Montréal, c'est la différence.
M. Houde (Abitibi-Est): Avez-vous un coût moyen des tarifs
de l'Hydro-Ontario pour l'ensemble de l'Ontario?
M. Boyd: Peut-être qu'on l'a; c'est une autre chose qu'on
pourrait vous fournir au besoin.
M. Morin: C'est ça que je demandais tout à l'heure;
ce serait peut-être plus révélateur.
M. Cournoyer: M. le Président, juste une ques-
tion dans la même ligne de pensée. Notre $17.60 est
applicable à tous les consommateurs d'énergie à basse
puissance.
M. Boyd: Quel pourcentage?
M. Cournoyer: On parle toujours ici de l'usage domestique.
M. Boyd: Ce sont des tarifs typiques domestiques, oui.
M. Cournoyer: On essaie de vérifier l'affirmation que j'ai
faite ce matin. Domestique, c'est $17.60; l'industriel se situe à quel
niveau actuellement?
M. Boyd: C'est moins que ça.
M. Cournoyer: C'est moins que ça.
M. Boyd: Mais ce n'est pas facilement comparable d'un autre
côté, parce qu'ici on ne parle que de kilowatts-heures, tandis
que, dans l'industriel, vous avez des compteurs à demande qui peuvent
être très importants pour la facture à la fin du mois. Le
tarif...
M. Cournoyer: Chaque contrat industriel...
M. Boyd: ... moyen industriel, je pense qu'on peut le trouver
dans le rapport annuel de l'Hydro-Québec.
M. Cournoyer: Le tarif moyen industriel.
M. Boyd: Le tarif moyen industriel, oui. Mais autrement, comme
vous le savez, il y a des contrats industriels qui datent d'un certain nombre
d'années. Il y en a qui sont renouvelés, etc. Vous avez des
contrats de différente importance; pour arriver à quelque chose
de comparable à ça, ce serait très difficile. Tout ce
qu'on peut trouver de plus facile pour répondre rapidement, c'est que,
dans l'industriel, en 1975, le revenu moyen par kilowatt-heure à
l'Hydro-Québec, pour le service domestique et agricole, était de
$0.01,68; le service commercial incluant le municipal était de $0.01,64;
le service industriel énergie, souscrite, était de $0.891.
Evidemment, on dira tout de suite que c'est bien moins cher, mais il
faut se rappeler que c'est de l'énergie qui est livrée à
haute tension, ça peut être 12, 25, 110, 300 kV. Notre loi
à l'Hydro prévoit qu'on doit livrer l'énergie le plus
près possible du prix coûtant. Donc, la différence entre ce
prix moyen, le prix domestique et l'industriel, devrait normalement
représenter la différence de vente d'énergie à
l'abonné à 100 volts et à l'abonné haute
tension.
M. Cournoyer: J'imagine que ce sera une autre discussion à
un moment plus éloigné parce qu'on est encore dans la demande et
on est tombé facilement dans le domaine du coût et de la
tarification.
M. Boyd: Je regrette, mais...
M. Cournoyer: Je ne voudrais pas me laisser entraîner,
c'est un exemple que vous avez donné quant à la demande.
M. Boyd: ...c'était pour expliquer une des raisons qui
font que ces gens ont été ralentis à un moment
donné. C'est un facteur de ralentissement, quand c'est trop fort.
M. Perreault: Le coût maintenant pour mille
kilowatts-heures pour nos réseaux municipaux? On a encore quelques
réseaux municipaux dans la province qui font la distribution.
M. Boyd: En général, les quelques réseaux
municipaux qu'on a...
M. Perreault: Joliette, par exemple.
M. Boyd: On pourra vous le donner. Je pense qu'à Joliette
les tarifs sont légèrement plus élevés que ceux de
l'Hydro-Québec.
M. Perreault: J'aimerais les avoir.
M. Boyd: Si vous voulez prendre note de ça, on pourra vous
le donner.
M. Perreault: Merci.
M. Morin: M. Boyd, vous nous dites que vous vous fondez sur une
hypothèse d'un taux de croissance annuel de 7 3/4%. Voulez-vous nous
rappeler, pour les cinq dernières années, quelles ont
été vos prévisions antérieurement? Autrement dit,
en 1971, quelle était votre estimation? Quelle était votre
hypothèse de travail? En 1972, et ainsi de suite. J'aimerais voir si
vous avez adapté vos hypothèses de travail avec une certaine
souplesse à la conjoncture, à l'évolution de la croissance
de la demande.
M. Boyd: On les modifie annuellement. On refait cela
annuellement. En 1971, c'était peut-être 7,5%, quelque chose comme
cela.
M. Morin: Peut-être? Ou...
M. Boyd: Je dis cela de mémoire. On a certainement les
chiffres. Le facteur exact...
M. Cournoyer: La moyenne de 1963 à 1973 a
été effectivement de 7 3/4%.
M. Boyd: Mais les prévisions qu'on a faites en 1970, pour
1971, on a cela. Cela a pu avoir varié légèrement.
M. Morin: Ce n'est pas de cela que je parle. Je ne parle pas de
vos prévisions en 1970, pour 1971. Je parle de votre hypothèse de
travail pour les prochaines années.
M. Boyd: Pour dix ans? Pour cinq ans?
M. Morin: Oui. Quelle était-elle en 1970, en 1971, en
1972? Avez-vous un...
M. Boyd: Oui, on a cela, mais je peux vous dire que c'est
à peu près la même chose qu'on vous donne là.
C'était peut-être 7,9% en fait. En 1971, 1972, on a
planifié, on a discuté des programmes, de nos besoins, et on a
décidé d'aménager La Grande pour nous produire
l'énergie nécessaire entre les années 1980 et 1985.
J'arriverai tout à l'heure à une autre courbe pour
illustrer le fait des surplus dont on parle beaucoup. Il n'y en a pas
tellement. La Baie James a été construite spécifiquement
pour répondre aux besoins du Québec, basés sur une demande
prévue dans les années 1980 à 1985.
Entre les années 1980 à 1985 il nous fallait ajouter 10
000 MW. On a choisi, à ce moment-là, de les prendre à la
baie James.
Une Voix: ...
M. Morin: Oui.
M. Boyd: On peut mentionner le mot tragique. C'était
basé sur environ 7,5%, je pense.
M. Houde (Abitibi-Est): M. Boyd, entre...
M. Boyd: Excusez.
On a ici un tableau indiquant les écarts entre nos
prévisions et la réalité depuis 1963; certaines
années sont en moins et d'autres sont en plus. Si on fait la somme de
tous ces plus et de tous ces moins, pour les années comprises entre 1963
et 1974, l'équation moyenne vous donne 4,6% d'erreur.
M. Houde (Abitibi-Est): D'erreur, en plus.
M. Boyd: D'erreur, en plus, mais sur une période de douze
ans. Ce n'est pas beaucoup par année.
M. Morin: Mais vous me parlez là des prévisions
seulement pour l'année suivante, en 1970, pour 1971? Ou vous me parlez
du taux que vous teniez pour acquis peut-être pour l'avenir?
M. Boyd: C'étaient les taux de prévision qu'on
avait et qu'on corrigeait annuellement.
M. Morin: Bon. Est-ce que vous avez, par hasardje vois que
vous avez un tableau le taux de croissance prévu en 1970, en 1971
et pour les diverses années?
M. Boyd: Je ne les ai pas dans le moment. On les obtiendra.
Certainement qu'on les a au bureau.
M. Morin: J'aimerais obtenir cela si c'était possible.
M. Boyd, nous étions passés à un autre sujet, nous
étions passés au coût du kWh pour usage domestique, ce qui
est relié naturellement à la demande, mais qui est quand
même un sujet un peu différent.
M. Boyd: Oui.
M. Morin: J'aurais une autre question à vous poser.
Supposons que, par pure hypothèse, je voudrais essayer de mesurer ce que
pourrait signifier un écart de 1% dans le taux de croissance moyen que
vous avez projeté dans l'avenir.
Si, par exemple, c'est une question purement hypothétique, qui
nous permettrait de mesurer simplement les conséquences de cela, au lieu
de 8% ou de 7,75%, on avait un taux de...
M. Boyd: A partir de maintenant ou à partir d'ici?
M. Morin: Bien, on peut envisager les deux hypothèses, si
vous voulez, moi, j'aimerais bien entendre votre réponse aux deux
questions. Prenons de 1975 à 1980...
M. Boyd: Je vais répondre à la première.
Nous pensons que c'est impossible de penser à cela pour le moment, et il
est très tard pour influencer la demande d'ici dix ans.
M. Morin: Alors, d'ici 1980?
M. Boyd: On est figé pas mal, il n'y a pas moyen de mettre
la pédale douce.
M. Morin: II n'y a pas d'élasticité
là-dedans, j'en conviens.
M. Boyd: Pas beaucoup. M. Morin: D'accord.
M. Boyd: Ce serait donc à partir d'ici. Je ne sais pas si
on l'a ici, mais je connais les exercices qu'on a faits. Si, au lieu de 7,75%
ou de 7,50%, on avait 6,75% ou 6,50%... on a fait ces exercices. Voulez-vous
ces chiffres?
On les aura, mais on ne les a pas ici.
M. Morin: Oui.
Je prends un exemple très hypothétique pour illustrer mon
propos. Mettons une croissance de 6% au lieu de 7,75%, pourriez-vous nous dire
de quel pourcentage cela réduirait le programme d'équipements
requis? D'après ce que je peux avoir sous les yeux, cela signifierait,
cette différence de 6% à 7,75%, une réduction de l'ordre
de 25% dans le programme d'équipements requis. Donc, les erreurs de 1%
ou de 2% peuvent avoir des conséquences extrêmement importantes
pour le programme d'équipements.
M. Boyd: Je suis d'accord avec vous, mais je vous ai bien
signalé que, de 1975 à 1985, il était trop tard...
M. Morin: Je suis d'accord.
M. Boyd: Pour les années à venir, je suis
entièrement d'accord avec vous que 1,50% et 1,75%, cela peut avoir une
très grande influence, c'est cumulatif, on n'a pas d'objection à
cela. Si c'était 6%, je n'aurais pas d'objection non plus, mais, pour
information, on va vous fournir les chiffres.
M. Morin: Oui.
M. Boyd: C'est évident qu'au lieu d'être comme cela,
je ne sais pas, cela peut être de même, mais même cela, c'est
beaucoup.
M. Morin: Ce serait considérable, et si c'était tel
que vous l'indiquez, je pense que la baisse dans le programme
d'équipements serait encore plus considérable que 25%.
M. Perreault: Je vois, M. Boyd, à la page 15, d'ailleurs,
à votre hypothèse faible, que à la courbe entre votre
hypothèse faible et votre hypothèse forte, il y a 7% et 8,5%.
Dans l'hypothèse forte, vous avez 8,5% de croissance annuelle et 7% dans
l'hypothèse faible.
M. Boyd: Oui, cela est un taux de croissance, comme on a dit tout
à l'heure, de 8,5%...
M. Perreault: Ce qui donnerait 1,5%.
M. Boyd: Puis, celui-là, c'est de 7%. On a là
l'effet de 1,5%.
M. Perreault: Sur la baie James.
M. Boyd: En fait, on a quasiment directement la réponse
là. A ce niveau, 1,5% fait cela.
M. Perreault: C'est sur la baie James.
M. Boyd: Et 88 404 mégawatts puis 77 000 mégawatts,
cela fait l'équivalent de la Grande.
M. Perreault: 8000 mégawatts. M. Morin: C'est
cela.
M. Boyd: Oui, oui, on n'est pas contre cela. On est d'accord sur
cela. Si, on fait cela pour avoir une indication et, en fait, pour informer de
l'état de ce que ce pourrait être, je tiens à rappeler que
si on avait ceci ou que si on avait cela, ce serait encore beaucoup, mais cela
dépendrait d'un tas de facteurs. Peut-être qu'on aurait une
croissance démographique négative, peut-être qu'au lieu de
3,5% de croissance économique, on s'en irait dans la dèche, des
tas de choses, mais, malgré tout, on continuerait de prendre plus
d'énergie, mais on aurait bien de la difficulté à
atteindre cela. Personnellement, mon opinion, c'est que, le gouvernement de
l'Ontario, qui a décidé que cela va être 5,5% à
l'avenir, se met un doigt dans l'oeil jusqu'en arrière. Cela va lui
créer des problèmes.
M. Morin: Mais il y a une commission d'étude sur les
besoins...
M. Boyd: II y en a plusieurs commissions royales et autres et, de
l'une à l'autre, il n'a pas encore trouvé la solution à
ses problèmes. Cela dépasse...
M. Cournoyer: M. le Président, j'espère bien qu'on
comprend que, lorsque le gouvernement de l'Ontario a pris cette
décision, il a décidé de donner l'ordre a l'Hydro-Ontario
de trouver les moyens pour persuader la population qu'il n'augmenterait pas la
production d'électricité à plus que tant,
c'est-à-dire que ce n'est pas seulement un "dream" qu'il a fait.
Même si vous vouliez changer demain matin les comportements des gens, ce
n'est pas par ordre du gouvernement que cela se ferait.
M. Morin: Non, ce n'est pas par ordre du gouvernement, mais c'est
par un certain nombre de choix sociaux exprimés publiquement et qui ont
l'appui ou qui n'obtiennent pas l'appui de la population, mais encore faut-il
que le gouvernement, à un moment donné, se décide,
serait-ce, par des options sociales, qu'il en fasse part à la
population. A l'heure actuelle, ce n'est pas le cas au Québec.
Forcément, il est pris à essayer de mesurer.
M. Cournoyer: Ne faites pas exprès, là. C'est
sérieux, l'affaire.
M. Boyd: Je pense, M. Morin, lorsqu'on fait des courbes de cette
sorte et qu'on les fait en couleur, à part cela, et qu'on met cela dans
un rapport, on signale, on donne l'indication de ce que cela peut être.
On dit que cela pourrait être comme cela aussi. Si on est rationné
dans l'huile au Québec et dans le gaz, si les prix que nous donnent les
gens qui les contrôlent font que n'importe quelle forme
d'électricité, peu importe la source, si c'est encore plus
économique pour le Québec, je pense qu'à ce moment, les
gouvernements, qui seront là, seront obligés de dire: Ce n'est
pas cela qu'il faut, il va falloir cela. Ce n'est pas ce qu'on pense. On pense
que cela va être la moyenne ici. Les hypothèses sont aussi bonnes
comme cela que comme cela. On n'a pas beaucoup de contrôle sur les prix
de l'huile ici et les prix du gaz.
M. Cournoyer: Si les politiciens ont pris cela, vous n'avez plus
le contrôle sur rien.
M. Boyd: C'est cela.
M. Houde (Abitibi-Est): M. Boyd, quand vous faites vos courbes,
vous tenez compte, naturellement, des sources de remplacement de
l'énergie, le pétrole ou l'énergie nucléaire ou
d'autres formes d'énergie?
M. Boyd: On a supposé qu'à cette période,
l'électricité, au lieu d'occuper 25% du champ, occuperait 45% du
champ.
M. Morin: M. Boyd, il y a divers facteurs qui ont
été mentionnés dans les exposés jusqu'ici, qui
peuvent nous permettre de croire que peut-être la demande future
pourrait être encore plus forte, vous avez fait allusion aux courbes
encore plus fortes. Est -ce que vous avez calculé ce que cela
représenterait si d'ici 1990, par exemple, le nombre de foyers
chauffés à l'électricité passait je pense
que c'est une possibilité qui a été
évoquée de 15% à 60%?
M. Boyd: Je pense que ce serait assez phénoménal.
Je ne sais pas si on pourrait rencontrer cette demande, parce qu'actuellement,
avec le nombre de nouvelles résidences qui se construisent, le chauffage
électrique représente environ de 60% des nouvelles
résidences. Dans l'ensemble du Québec, c'est entre 15% et 20%,
peut-être 15% ou 16%...
M. Morin: C'est votre propre texte qui nous dit, à la page
14, le texte sur la demande...
M. Boyd: Oui.
M. Morin: Vous l'avez à la page 14. D'ici 1990, c'est de
façon marquée que l'électricité se substituera aux
autres formes d'énergie pour le chauffage des habitations. Elle devrait
occuper en 1990, si les tendances actuelles se maintiennent, environ 60% du
marché du chauffage pour les secteurs domestiques et agricoles...
M. Boyd: Oui, si elles se maintiennent. Je vous l'ai dit, depuis
quelques années, depuis deux ou trois ans, les nouvelles
résidences sont à 60% électrifiées, dans le moment.
On dit: Si cela se maintient jusqu'en 1990, on aura atteint 60%, parce que
d'ici 1990, cela fait quinze ans. Si cela continuait comme cela, on occuperait
le marché en grand. Je ne dis pas que c'est l'idéal, mais je dis
que c'est une possibilité.
M. Morin: Qui n'est pas souhaitable.
M. Boyd: Evidemment, je parle des nouvelles résidences. Il
y a beaucoup de gens qui convertissent de vieilles résidences. C'est un
problème très sérieux en ce moment, les gens qui
convertissent de vieilles maisons à l'électricité.
Souvent, cela amène des factures très élevées,
parce qu'elles ne sont pas isolées, comme on le recommande. Quand on
parle de conservation, cela fait déjà plusieurs années
qu'à l'Hydro, on incite les abonnés à conserver
l'énergie.
En fait, les facteurs d'isolation qu'on a toujours exigés pour le
chauffage électrique, dans le sens de la conservation, puisque le
gouvernement fédéral l'exige dans le moment et puisque même
le gouvernement provincial, par sa Société d'habitation, l'exige.
Cela, c'est à travers le Canada, l'Association canadienne de
l'électricité. Cela fait au moins trois ou quatre ans qu'on fait
la promotion de ces normes. On demande aux différents gouvernements
d'utiliser ces normes pour conserver l'énergie. Une des grosses
utilisations d'énergie au Canada est le chauffage; il y a bien des cas
où on chauffe le dehors. Il y a des tas de maisons qui sont construites,
avec des hypothèques de différentes formes, qui ne sont
même pas isolées pour chauffer à
l'électricité, au gaz, à l'huile ni à rien. C'est
très mal isolé. C'est peut-être le facteur où on
peut réagir le plus vite pour la conservation; cela et les
automobiles.
M. Morin: Là, je prends votre propre texte. Vous nous
dites que si les tendances actuelles se maintiennent, cela veut dire environ
60% du marché du chauffage pour les secteurs domestique et agricole
alors qu'actuellement c'est de l'ordre de 15%. Dans quelle mesure ces 60%
modifient-ils vos courbes? En avez-vous tenu compte dans l'hypothèse
forte, par exemple?
M. Boyd: Oui.
M. Morin: Est-ce que l'hypothèse forte
reflète...
M. Boyd: Dans l'hypothèse forte, il y a certainement
beaucoup de chauffage et aussi du transport en commun à
l'électricité.
M. Morin: Y a-t-il 60% du marché du chauffage?
M. Boyd: Je ne sais pas qui a fait... Oui, je l'ai dit tout
à l'heure. La pénétration actuelle est 60%. En plus de
cela, il y a de la conversion.
M. Morin: Je ne voudrais pas qu'on se méprenne sur...
M. Boyd: II y a une question: Dans l'hypothèse forte
où on parle de 8 1/2%...
M. Morin: Oui, c'est cela. Je veux savoir si cela inclut...
M. Boyd: ...est-ce que le chauffage, à ce
moment-là, a pénétré à 60%?
M. Morin: C'est cela.
M. Boyd: Je dirais qu'il y a de grosses chances que ce soit le
cas, mais on peut vérifier.
M. Morin: Si c'était possible de vérifier.
M. Boyd: Oui, on peut vérifier et on vous donnera la
réponse.
M. Morin: Pourriez-vous me donner un petit renseignement encore
sur la question de la demande? Il a été un temps où
l'équipement en chauffe-eau, avec toute la publicité qui a
été faite autour de cette amélioration des conditions de
vie, a constitué un facteur de croissance important; est-ce que cela
demeure un facteur de croissance important ou est-ce que, maintenant, la
plupart des maisons étant équipées de la sorte, cela
plafonne comme facteur de croissance?
M. Boyd: C'est encore un facteur de croissance important, mais
moins que cela ne l'a été. Autrefois, le chauffage de l'eau
était au gaz ou à l'huile. Dans bien des cas, c'étaient
des chauffe-eau qui n'étaient pas isolés, alors on chauffait les
sous-sols avec le chauffe-eau. Cela a été un facteur important.
On a fait de la promotion un bout de temps et je pense que c'était
justifié. Je voudrais insister là-dessus un peu. Je l'ai
mentionné tout à l'heure. Il y a eu une période où
l'huile et le gaz faisaient une promotion très forte pour les
chauffe-eau et le chauffage pour les nouveaux projets. Ce qui voulait dire que
si on restait assis et qu'on ne faisait rien pour essayer, dans certains cas,
de pénétrer nous aussi avec ces deux sources, on était
quand même obligé de bâtir des réseaux de
distribution, et tout ce qu'il y aurait eu de raccordé dessus, c'est
l'éclairage.
L'éclairage est un faible consommateur d'énergie. Les
abonnés auraient été obligés de payer plus cher
pour leur 10 kWh d'électricité pour amortir les installations qui
auraient été presque identiques à celles qu'on a
maintenant pour des charges plus importantes. C'est-à-dire qu'au kWh
cela aurait coûté beaucoup plus cher. Pour maintenir une certaine
concurrence dans nos tarifs, il a fallu faire une certaine promotion. Dans le
contexte énergétique qu'on a connu et aussi le contexte
économique, on a décidé d'abandonner ces promotions.
Une Voix: II y en a qui continuent quand même.
M. Boyd: II y a des gens qui continuent quand même parce
qu'ils trouvent que c'est une meilleure forme d'énergie, que c'est plus
propre, que c'est plus flexible, que c'est moins dangereux pour le feu. Il y a
toutes sortes d'avantages en faveur de l'électricité. En plus,
dans le moment, cela coûte moins cher que l'huile.
Même avec nos trois augmentations de 10% de suite, cela
coûte moins cher chauffer à l'électricité dans le
moment que chauffer à l'huile. Je pense que c'est un autre facteur dont
il faut se souvenir.
M. Cournoyer: Sauf aux Iles-de-la-Madeleine. Non. Cela
coûte moins cher pas mal aux Iles-de-la-Madeleine.
M. Boyd: Aux Iles-de-la-Madeleine... M. Cournoyer: Pas mal
moins cher.
M. Boyd: ... ils paient la même chose qu'à
Montréal. Et nous, livrer de l'énergie aux Iles-de-la-Madeleine,
cela nous coûte dix fois ce qu'ils paient. C'est pour cela, M. Cournoyer,
que cela a de l'influence sur les tarifs de l'Hydro-Québec.
M. Morin: M. Boyd, au sujet de vos taux de croissance
projetée, si je comprends bien, d'ici 1990, il y a très peu
d'élasticité. Vous êtes déjà engagé
dans un processus...
M. Boyd: Surtout 1985, 1990, cela aurait peut-être un
certain effet, mais d'ici 1985...
M. Morin: Mais après 1990, vous êtes encore en
mesure de refaire vos projets d'équipement dans la mesure où vos
prévisions pourraient être affectées à la hausse ou
à la baisse.
M. Boyd: Certainement. Tout à l'heure, on vous parlera du
programme d'équipement qu'on prévoit. De 1976 à 1985,
c'est un programme d'équipement qui est approuvé par la
commission à l'Hydro. Il n'y a pas beaucoup de marge de manoeuvre
là-dedans. Il faut marcher avec cela. De 1985 à 1990, M. Monty,
je crois, vous expliquera ce qu'on envisage comme programme
d'équipement, comme programme témoin ou type. Ce n'est pas encore
un programme approuvé. Il faudra prendre des décisions dans
certains cas, avant longtemps, mais c'est un programme type.
Alors, s'il y avait des changements, on peut le changer le mois prochain
ou l'année prochaine.
M. Morin: De sorte que vos 7,75% sont une hypothèse de
travail, mais vous êtes prêt à les remettre en question,
selon les circonstances et pour... Laissez-moi terminer ma question. Et en ce
qui concerne le programme d'équipement, donc il peut être
adapté, du moins, après 1985. Cela n'a pas de conséquence
catastrophiques du point de vue équipement, du point de vue coût.
S'il y a hausse ou baisse, il est encore temps de s'ajuster.
M. Boyd: Oui et on fait cela annuellement. On fait des
ajustements chaque année.
M. Morin: Pourrais-je vous poser...
M. Cournoyer: Seulement une précision parce que je
voudrais bien qu'on comprenne bien la remarque du chef de l'Opposition. Et
surtout, la discussion porte toujours sur une évaluation de la demande,
de laquelle, évaluation, l'Hydro-Québec n'est pas maître.
Elle dit: Voici l'évaluation que nous faisons de la demande en basant le
raisonnement sur un certain nombre de facteurs ou de données. Avec cette
demande, on entendra parler bientôt du programme d'équipement
prévu.
Au moment où on se parle, il est question de demande, toujours,
et on reste dans le domaine de la demande. Cela ne veut pas dire que
l'Hydro-Québec doit ou a dans ses plans de rencontrer les pointes que
nous voyons là, selon l'un ou l'autre des scénarios. Elle
établit la demande et on verra très certainement plus tard le
programme d'équipement.
M. Morin: J'ai bien entendu, mais le programme
d'équipement reflète bien sûr les hypothèses des
taux de croissance.
M. Cournoyer: L'évaluation de la demande. Oui, mais les
taux de croissance qui sont ici, ce n'est pas l'Hydro-Québec qui est
maîtresse de cela. C'est une constatation.
M. Morin: C'est juste. C'est à partir des données
objectives de la situation...
M. Cournoyer: C'est cela.
M. Morin: ... qu'ils essaient de tracer un tableau des taux de
croissance. Là-dessus, il n'y a pas de querelle. Je pense que c'est
clair. Je ne pense pas qu'il y ait des questions sur la demande, M. le
Président.
M. Boyd, si vous voulez, on va s'éloigner un peu des tableaux. Je
ne sais pas si vous pourriez répondre à une ou deux autres
questions pour ce qui est de la demande de pointe en 1975. Je ne sais pas si
c'est à vous que je devrais poser la question, mais elle a
été, en décembre, de 12 478 mégawatts,
d'après votre rapport d'activités, à la page 10.
N'eût été la grève des pâtes et papiers qui
représentait 350 mégawatts de moins, l'Hydro-Québec
était-elle en mesure de répondre à cette demande?
M. Boyd: Oui. Nous aurions été en mesure d'y
répondre.
M. Morin: Parce que, sans Tracy, vous disposiez de 12 644
mégawatts. Je ne sais pas si mes chiffres sont exacts.
M. Boyd: Peut-être que M. Villeneuve peut répondre
à cela plus directement. C'est lui qui dirige le réseau.
M. Morin: C'est pour cela que je me demandais si c'était
à vous que je devais poser la question.
M. Boyd: Je pourrais y répondre aussi, mais lui, il a les
chiffres tous les jours. Peut-être pourrait-il vous répondre.
M. Cournoyer: Je choisirais de répéter la question
que j'ai posée au président Giroux tantôt. On a
peut-être posé trop de questions en même temps. M.
Villeneuve pourrait-il faire la différence entre la puissance
installée et ce qui est demandé à un moment donné,
donc l'énergie fournie; ce qui a été fourni à la
date qui est précisée ici, mais par rapport à la puissance
installée, ne fût-ce que pour les minutes? Je sais que le chef
parlementaire de l'Opposition sait tout cela, mais...
M. Morin: Je n'ai rien dit.
M. Cournoyer: Non, mais je sais que vous savez tout cela.
M. Morin: Je vais entendre les explications avec autant
d'intérêt que vous. Je n'ai pas d'objection à ce qu'on les
donne.
M. Cournoyer: Merci.
M. Boyd: On a parlé de surplus tout à l'heure. En
fait, je peux en parler?
M. Cournoyer: Oui, s'il vous plaît. M. Boyd: Pendant
que...
M. Cournoyer: Cela porte à peu près sur le
même sujet, de toute façon.
M. Boyd: Pardon?
M. Cournoyer: C'est sur le même sujet.
M. Boyd: Oui. On va vous répondre dans un instant. M.
Villeneuve cherche. Ici, si vous vous référez au texte, à
la page 21, on parle des surplus d'électricité. Si on voit cela
vite, à la page 21, il y a deux types de surplus: les surplus de
puissance cela répond peut-être un peu à la question
du ministre tout à l'heure quand la puissance installée
excède temporairement la puissance requise pour satisfaire la demande,
tout en assurant une certaine marge de sécurité ou réserve
et en permettant l'entretien des installations. Il y a ensuite les surplus
d'énergie ce sont deux choses assez différentes qui
se produisent quand les réserves d'eau et éventuellement de
combustible sont supérieures aux réserves requises pour
satisfaire le besoin d'énergie électrique souscrite des
abonnés québécois de l'Hydro-Québec.
Pourquoi avons-nous des surplus à l'Hydro? Vous avez les raisons,
ici. Je crois qu'il y en a cinq qui font que, l'Hydro-Québec
étant surtout un réseau hydroélectrique, on a des
surplus.
M. Perreault: Les principales causes par ordre d'importance?
M. Boyd: Je vais les citer toutes les cinq. Elles sont en gros et
facile à lire dans le texte. La demande de la clientèle
québécoise de l'Hydro-Québec est beaucoup plus forte en
hiver qu'en été.
M. Morin: On pouvait s'en douter.
M. Boyd: C'est un des facteurs importants et tout le monde le
sait; on en a assez parlé dans les journaux, etc. Deuxièmement,
l'hydraulicité dépasse à certains moments la
capacité d'emmagasinement des réservoirs. Quand les
réservoirs sont pleins, c'est de l'argent en banque, mais, plutôt
que cela déborde, on cherche des gens qui peuvent l'utiliser.
Troisièmement, la demande peut être inférieure à ce
qui avait été prévu. On en a parlé tout à
l'heure; on se corrige automatiquement. Quatrièmement, d'importants
blocs de puissance et d'énergie deviennent disponibles en un bref
délai lors de la mise en service de nouvelles installations
hydroélectriques. De plus en plus, les unités sont
considérables; il y en a de 200 mégawatts, 300 mégawatts
qui entrent rapidement au rythme de leur construction. Pour une période
qui est souvent assez courte, on en a de trop. Cinquièmement, il est
souvent justifié du point de vue
économique de devancer l'installation de certains
équipements de production.
Là-dessus, si on était assez riche, je pense que
l'idéal serait de construire le plus vite possible et on trouverait
toujours des gens pour l'acheter. Mais c'est un autre problème. C'est un
facteur qui serait intéressant. Il y a eu des cas, comme à
Churchill Falls, où il a été possible de devancer
l'installation des machines et, avec cela, nous avons eu de l'énergie
où on a fait de l'argent. Ici, on a beaucoup parlé de vente
à l'extérieur et de vendre le surplus. J'ai voulu faire
graphiquement une illustration du peu d'importance relative que cela aura. Vous
avez la légende, ici. Evidemment, le trait plein, c'est l'énergie
souscrite vendue aux abonnés québécois. Le cercle ici,
c'est l'électricité souscrite vendue hors du Québec. Le
bleu, c'est l'électricité excédentaire vendue hors du
Québec et le rouge, c'est l'électricité
excédentaire vendue au Québec. Vous voyez que relativement c'est
peu et plus on avance dans le temps, moins c'est important, relativement.
En 1980, vous voyez que notre production devrait atteindre 92 000 ou 93
000 gigawatts-heures alors que l'énergie excédentaire est
très faible, l'énergie vendue hors du Québec
également. On voit qu'on est passé par une pointe, ici,
d'énergie souscrite, vendue hors du Québec et qu'on s'en va en
diminuant à presque rien. C'était ici les contrats
d'énergie vendue, souscrite à l'Hydro-Ontario et l'énergie
souscrite au Nouveau-Brunswick. Alors, pour l'énergie vendue à
l'Hydro-Ontario, le contrat se termine à la fin de 1976 et je ne pense
pas qu'il y ait renouvellement. Le contrat d'énergie souscrite 300
mégawatts au Nouveau-Brunswick se termine en 1977. Donc, le peu qui
reste ici va se terminer probablement en 1982, ce sont les 800 mégawatts
qui sont vendus en période d'été seulement à l'Etat
de New York.
Graphiquement, je pense que cela remet dans sa perspective ce qui est
vendu en dehors du Québec, choisi une année en particulier qui
est l'année 1980. C'est par hasard que j'ai pris 1980. Vous voyez, cela
déborde et cela sort de la carte. Ce sont les fantaisies des relations
publiques qui nous ont fait cela.
M. Morin: Ce n'est pas gentil, M. Boyd, ce que vous
dites-là. Je suis sûr qu'ils ont voulu vous aider avec leur petit
dépliant.
M. Boyd: Oui, si je l'ai laissé, c'est parce que je
trouvais cela impressionnant.
Alors, vous avez l'énergie vendue à l'extérieur du
Québec, qui représente environ en 1980, 8000 gigawatts-heures,
alors que l'énergie souscrite vendue au Québécois,
à ce moment-là, est de 93 800 gigawatts-heures. J'espère
qu'avec cela on réalisera que les ventes hors du Québec ne sont
pas un facteur important. On a toujours planifié notre réseau
pour la consommation des Québécois mais, occasionnellement, on a
eu des surplus et on essaye d'obtenir le maximum possible pour ces surplus.
M. Morin: On y reviendra, M. Boyd, au mo- ment où on
parlera, justement, d'exportation d'énergie.
M. Boyd: D'accord.
M. Morin: Je compte bien qu'on explorera cette question plus
à fond ensemble.
M. Boyd: Puisqu'on parlait de demande, je voulais...
M. Morin: C'est lié à la demande, d'accord. M.
Boyd: Peut-être que M. Villeneuve est prêt.
M. Villeneuve:: Si je me souviens bien, la question était
de savoir si on aurait pu fournir les 350 mégawatts de demande
additionnelle qui aurait apparu sur le réseau si les industries en
grève avaient fonctionné. C'était le sens de la
question.
M. Morin: Du fait que le 19 décembre, la demande de pointe
était de 12 478 mégawatts.
M. Villeneuve: Très juste. Vous avez la réponse
dans le rapport d'activité, à la page 10: Analyse de la pointe,
où l'on dit qu'au moment où nous avons alimenté cette
charge, la centrale de Tracy était au repos. Cette centrale a une
puissance de 600 mégawatts. Ce qui veut dire que si nous avions
prévu la veille, par exemple, que la charge devait s'élever
à une valeur sensiblement plus élevée, nous aurions
démarré les groupes de la centrale de Tracy. Mais comme solution
à très court terme, s'il apparaît, au cours d'une
journée, une demande supérieure aux prévisions, cela nous
est plus facile d'utiliser la clause de coupure des charges interruptibles, ce
qui peut se faire à quelques heures, ou quelques minutes d'avis, alors
que la centrale de Tracy ne peut produire qu'après 24 heures d'avis.
M. Perreault: M. Boyd, sur votre tableau précédent,
je vois qu'à partir de 1978, il n'y a plus l'électricité
excédentaire vendue au Québec. Est-ce parce que vous
préférez que ce soit vendu à l'extérieur seulement
à meilleur prix?
M. Boyd: Effectivement. C'est parce qu'on n'a pas de contrat dans
le moment qui prévoit la vente d'énergie excédentaire au
Québec. Comme ce n'est pas un facteur dans la détermination de
notre demande ni de nos programmes, il est évident que si on en a, on va
d'abord offrir cette énergie excédentaire aux bouilloires des
pâtes et papier. Il est fort probable qu'on aura des ventes comme on en a
déjà eu. Cela n'a jamais été plus important que
cela. La seule utilisation qui peut être faite à ce jour de cela,
ce sont les bouilloires électriques, par exemple, dans les pâtes
et papier où ils partent leurs bouilloires quand on a de
l'énergie à très bon marché à leur offrir et
arrêtent d'autres formes de production de vapeur.
Pour répondre à votre question, il est fort probable qu'on
en aura ici, mais comme on ne sait pas ce que cela va être, puisqu'il n'y
a pas de
contrat le prévoyant à ce moment, on n'a pas voulu
l'indiquer. Mais ce serait sensiblement, je pense, comme les années
précédentes.
M. Perreault: Vous voulez dire que vos contrats se terminent en
1977 pour la plupart?
M. Boyd: Ce sont des contrats à court terme et souvent des
contrats annuels que nous avons.
M. Cournoyer: M. Boyd, actuellement, il y a dans les airs, des
situations qui sont assez en-( nuyeuses au point de vue politique.
Je sais que' vous n'aimez pas parler de cela, mais, d'un autre
côté, on est ici pour cela.
Par exemple, une possibilité. Je dis possibilité parce
qu'il y a une demande de la part du gouvernement de Terre-Neuve de rapatrier
800 mW. Il y a donc 800 mW qui font partie, si j'ai bien compris, du bilan
hydroélectrique québécois, c'est-à-dire qu'on les a
dans notre bilan. D'autre part, il y a des projets, encore une fois,
strictement hypothétiques, concernant une usine d'uranium enrichi pour
lesquels on parle d'un nombre de rnW qui irait de rien à peut-être
2 500mW.
M. Boyd: Je dirais que c'est au moins 2 500 mW.
M. Cournoyer: II y a aussi certains autres projets qui sont plus
près de nous pour lesquels on parle de 500 mW. Je parle en particulier
des possibilités d'une usine d'aluminium qu'on installerait dans les
environs.
Quels seraient les effets de décisions soit gouvernementales,
soit d'ordre politique sur la demande de l'introduction de ces trois facteurs
par rapport à ce que vous avez comme installation? Si on dit que vous
répondez aux besoins des Québécois avec les installations
que vous avez et avec l'électricité que vous avez achetée
de Churchill Falls Corporation, si vous avez soudainement une réduction
de 800 mW en énergie que vous devriez fournir, plus 2 500 mW,
peut-être, plus loin disons qu'on parlait de 1985
tantôt et encore 500 mW dans le cas d'une aluminerie, qu'est-ce que
vous auriez l'air dans les courbes que vous nous montriez tantôt?
M. Boyd: II nous en manquerait. Pour être plus
précis, les 800 mW que Terre-Neuve veut nous reprendre, c'est
évident qu'ils sont inclus dans nos programmes actuels. Ils vont
être là pour répondre à la demande. Mais, s'ils
n'étaient plus là, il faudrait les remplacer par autre chose.
J'ai donné mon opinion, parce que les vendre au prix qu'ils veulent les
avoir et les remplacer par quelque chose au coût d'aujourd'hui ou de
1980, cela n'a pas beaucoup de sens. Concernant l'autre point, l'usine
d'uranium enrichi consommant 2500 mégawatts on a toujours dit que cela
n'était pas inclus dans nos prévisions et qu'il faudrait
construire autre chose pour répondre à cela.
M. Morin: J'ai une petite anecdote à vous ra- conter
là-dessus, M. Boyd. Vous savez que le gouvernement de Terre-Neuve a
commencé à creuser un tunnel de part et d'autre, du
détroit de Belle-Isle, pour faire passer éventuellement les fils
de transmission d'électricité. Du côté de ce qu'on
appelle joliment la Pointe-aux-Amours, au Labrador, le trou est
déjà rendu à une cinquantaine de pieds de profondeur. Je
suis allé voir cela l'autre jour, parce que je voulais me rendre
compte...
M. Cournoyer: Du trou.
M. Morin: ... de l'avancement des travaux. De l'autre
côté, du côté de Terre-Neuve, on a fait sauter
quelques coups de dynamite, pour impressionner la population. Toujours est -il
que je suis arrivé sur les lieux au moment où on
commençait à boucler les opérations et à fermer les
travaux.
J'ai demandé à l'ingénieur ce qui se passait.
Pourquoi abandonner un si beau et si vaste projet de transport
d'électricité sous le détroit de Belle-Isle? Il m'a
répondu: "Well, it is the fault of the French Government." Voilà
comment on nous juge à Terre-Neuve. J'ai tenté de lui expliquer,
mais j'ai vu que c'était très difficile d'expliquer pourquoi
l'exportation de ces 800 mégawatts, pour le Québec,
représentait un problème.
Mais il semble, à toutes fins pratiques, que le gouvernement de
M. Moores se soit rendu à l'évidence et ait décidé
de suspendre la construction du tunnel. Je ne sais pas si vous étiez au
courant, mais...
M. Boyd: Ce devrait être un vrai Newfee que vous avez
rencontré.
Pour répondre à votre troisième point, concernant
l'aluminerie, je ne pense pas qu'on ait spécifiquement cela dans nos
plans, mais s'il fallait le faire... Au cours des années passées,
on a toujours tenu compte de certains facteurs ou de certaines charges
importantes. 500 mégawatts, c'est peut-être plus que les charges
habituelles, mais, dans nos prévisions, en nous fondant sur
l'expérience, on a régulièrement des charges de 50 100,
même de 200 et 300 mégawatts qui arrivent.
Je pense qu'on pourrait s'accommoder, si c'était jugé
économique et rentable de le faire par le gouvernement. Les questions de
tarifs, c'est une autre affaire.
M. Cournoyer: Etant donné qu'on est dans le domaine de
Terre-Neuve et que ce domaine m'intéresse, comme vous le savez, je
voudrais en sortir le plus rapidement possible pour remettre cela aux gars qui
connaissent cela. J'aimerais quand même essayer de rappeler, pour ceux
qui ont lu la Presse de samedi, que l'intervention du ministre des Richesses
naturelles du Québec n'est venue qu'en réponse à
l'intervention de M. Crosby et de M. Moores, que je ne suis jamais intervenu
dans les relations entre l'Hydro-Québec et la compagnie Churchill Falls
Corporation, à quelque niveau que ce soit. La déclaration, comme
elle était faite, j'avais l'air du gars qui était en fait le gars
poigné.
II est entendu que, politiquement, je ne peux pas accepter ce que
l'Hydro-Québec semble avoir drôlement refusé à
Churchill Falls Corporation. Là-dessus, je veux bien qu'il soit
précisé, pour le bon entendement de tout le monde, que dans ce
domaine en particulier pour d'autres on s'en reparlera
l'Hydro-Québec a refusé avant le ministre des Richesses
naturelles de changer les termes du contrat.
M. Morin: Mais il y a un contrat.
M. Cournoyer: Mais l'Hydro-Québec a d'abord refusé
de changer les termes du contrat. A ce qu'on m'a dit, et là-dessus je ne
veux pas mettre en doute la parole des officiers de l'Hydro-Québec,
c'est qu'on aurait dit: C'est d'accord, si cela ne fait pas avec vous autres,
on va aller régler cela à l'échelon politique. Et c'est
dans ce contexte que j'aimerais replacer la déclaration de M. Boyd de la
semaine passée, II y a des gens qui peuvent politiser un
problème, puis il y en a d'autres qui doivent subir la politisation du
problème. Dans ce cas en particulier je la subis avec plaisir.
M. Morin: Là-dessus, il n'y a pas de très grande
différence entre l'attitude qu'a prise le gouvernement et celle que nous
prendrions. Il y a un contrat. Et même si le Newfee, qui, en l'occurrence
était un ingénieur, M. Boyd, comprenait mal la situation, je
pense que tous les Québécois sont du même avis.
M. Cournoyer: ...Valéry Giscard d'Estaing.
M. Morin: Est-ce que vous avez terminé, M. le
ministre?
J'aurais peut-être une autre question portant sur la livraison des
325 mégawatts qui fait l'objet d'un contrat avec le Nouveau-Brunswick,
lequel expire, si j'ai bien compris, le 31 octobre 1976. Je crois que vous y
avez fait allusion...
M. Boyd: Je pense que c'est en 1977. M. Morin: ...tout
à l'heure.
M. Boyd: C'est celui avec l'Ontario qui se termine en novembre.
Celui du Nouveau-Brunswick, je pense que c'est en...
M. Morin: D'après ce que j'ai, c'est le 31 octobre
1976.
M. Boyd: D'accord, oui.
M. Morin: Puis il y a aussi le contrat de 1000 mégawatts
avec l'Ontario qui expire le 31 mai 1977. Dans le calcul de vos
prévisions de demande, est-ce que vous avez tenu compte du fait que
l'Hydro-Québec n'est plus liée de fournir ces quelques 1320
mégawatts à partir de 1976 et 1977?
M. Boyd: Avec le Nouveau-Brunswick, c'est 300.
M. Morin: C'est 325.
M. Boyd: Pour répondre à votre question, dans notre
programme d'équipement on ne prévoit pas vendre de
l'énergie à l'Ontario ni au Nouveau-Brunswick.
M. Morin: Autrement dit, la réponse précise
à ma question c'est que, ces contrats venant à expiration, vous
n'avez pas l'intention de les renouveler?
M. Boyd: D'accord.
M. Morin: Je regardais votre programme d'équipement
justement et, entre l'appel, qui est la première ligne en haut, et le
surplus ou le déficit qui constitue la dernière ligne en bas, les
marges de manoeuvre sont très serrées.
M. Boyd: C'est cela.
M. Morin: Donc, la continuation de ces contrats serait de nature
à causer des soucis, je pense bien.
M. Boyd: C'est cela, d'accord.
M. Morin: Bon.
M. Boyd: En fait, si vous avez le programme d'équipements,
vous allez voir qu'en 1978, on achète 200 mégawatts du
Nouveau-Brunswick. C'est cette province qui vient nous aider pour une
année.
M. Morin: Oui.
M. Boyd: Je pense que c'est en 1978.
M. Morin: 1979, M. Boyd, 199 mégawatts. Bien. A partir de
1982, avez-vous tenu compte du fait que Pasny devra, à la demande de
l'Hydro-Québec, vous retourner en hiver, évidemment, si le
contrat est mis en oeuvre, si on y donne suite, les 800 mégawatts
livrés par l'Hydro-Québec durant la période
d'été?
M. Boyd: C'est de l'énergie excédentaire dans les
deux cas à ce moment. C'est excédentaire lorsqu'on lui en vend
l'été, c'est excédentaire lorsqu'elle nous en vend.
M. Morin: Oui.
M. Boyd: On ne peut pas en tenir compte dans nos
prévisions.
M. Morin: Voulez-vous dire que vous ne pouvez pas en tenir compte
parce que vous ne pouvez pas compter dessus?
M. Boyd: C'est cela. C'est trop aléatoire. Dans son cas,
cela l'est, dans le nôtre aussi. Pasny serait intéressée
à prendre cette énergie en été, lorsqu'on en
aurait, parce qu'elle utiliserait cette énergie à la place
d'autres formes. Peut-être qu'au
point de vue économique, cela serait intéressant pour
elle. Au point de vue énergétique, cela le serait
certainement.
M. Morin: Oui.
M. Boyd: L'hiver, si Pasny avait des surplus d'énergie,
surtout dans ces années où on aura besoin d'énergie, cela
pourrait être intéressant pour nous d'en disposer, mais nous n'en
tenons pas compte dans nos prévisions, parce que ce n'est pas
sûr!
M. Morin: Si j'ai bien compris, ce contrat va prévoir que
vous garantissez la livraison d'un certain nombre de mégawatts. Vous
allez donner une garantie d'un certain bloc.
M. Boyd: Oui, c'est très peu. M. Villeneuve est notre
témoin expert sur la question.
M. Morin: D'accord, je veux bien.
M. Villeneuve: Si vous me permettez, M. Morin, je pense avoir
déjà expliqué, lors d'une commission parlementaire
précédente, que l'obligation de Pasny de retourner
l'énergie ne comporte pas d'obligation de mettre la puissance à
notre disposition. Autrement dit, l'énergie qu'elle a prise en
été, elle est tenue de nous la retourner en hiver, mais pas
forcément au moment de notre pointe. Ceci veut dire que si elle a pris
une assez forte quantité durant l'été, elle peut
facilement nous la retourner au cours des fins de semaine, ou durant la nuit,
en hiver.
Si elle faisait appel aux 800 mégawatts continuellement pendant
les sept mois d'été, elle serait alors forcée, pour avoir
le temps de nous retourner toute l'énergie, de mettre 800
mégawatts à notre disposition pendant les cinq mois d'hiver. Je
pense que si nous lui disons, comme il est prévu au contrat, que nous
n'avons pas d'énergie a vendre d'une façon finale, elle se
gardera bien de prendre les 800 mégawatts en été
continuellement. A ce moment-là, le retour de l'énergie se fera
sans garantie de sa part quant à la puissance.
M. Morin: A ce moment-là, est-ce que ne disparaît
pas l'un des motifs principaux, l'un des intérêts principaux d'un
tel échange d'énergie, qui serait de vous permettre de
réduire vos investissements?
M. Villeneuve: C'est sûrement vrai, en tout cas
jusqu'à un certain point, mais n'oubliez pas que, dans le contrat de
base que nous avons signé, Pasny va payer l'Hydro-Québec pour
cette puissance que nous mettons à sa disposition
l'été...
M. Morin: D'accord, et cela est un autre avantage.
M. Villeneuve: Oui, et l'échange d'énergie va
être nul. S'il avait été convenu que la puissance
était mise à la disposition de l'Hydro-Québec en hiver, on
aurait pu facilement s'entendre sur des versements pécuniaires nuls.
Nous aurions vendu une quantité X en été que Pasny nous
aurait retournée en hiver, les deux se faisant au moment des pointes
respectives des deux réseaux, mais tel n'est pas le cas, telle n'est pas
l'entente.
Nous avons tout de même signé depuis une convention
d'interconnexion, laquelle prévoit de l'assistance en cas d'urgence.
Nous avons des indications que si nous avons besoin d'un bloc de puissance,
Pasny pourra facilement en disposer en l'obtenant, si nécessaire, des
autres réseaux auxquels elle est raccordée. A ce
moment-là, évidemment, nous paierons un prix fixé par jour
et par semaine pour l'assistance en question.
M. Morin: Je veux bien comprendre. Est-ce que cela ne vous permet
pas de réduire la réserve et donc, indirectement, les
investissements?
M. Villeneuve: Cela pourrait être le cas si nous avions
envisagé le contrat dans ce sens-là, au moment de négocier
le contrat de base, ce qui n'a pas été fait jusqu'ici. A
l'avenir, il n'est pas exclu qu'on convienne, par exemple, pour une
année donnée peut-être pas pour une longue
période, mais pour une année donnée de retarder un
investissement. Ou encore, s'il arrivait qu'un projet soit retardé, pour
toutes sortes de raisons, nous pourrions facilement, à court terme,
négocier l'achat de Pasny d'une puissance allant jusqu'à 800
mégawatts pour passer une période de pointe d'un hiver
donné, par exemple. C'est une chose qui est très possible.
M. Morin: M. le Président, je vois qu'il est dix-huit
heures. J'aurais encore une ou deux questions sur la demande, mais
peut-être pouvons-nous les remettre à tout à l'heure.
M. Cournoyer: Les membres du parti gouvernemental m'ont
exprimé le désir de ne pas siéger ce soir.
M. Morin: Pour quelle raison?
M. Cournoyer: Ecoutez une minute. Ils ne sont pas obligés
de vous dire les raisons.
M. Morin: Bien.
M. Cournoyer: C'est une chose très claire que les membres
du parti au pouvoir m'ont demandé de ne pas siéger ce soir. Comme
je n'avais pas été très agréable envers le chef de
l'Opposition quand il m'a demandé de ne pas siéger aujourd'hui,
j'ai voulu ne pas être désagréable envers les membres de la
majorité. Comme je leur dois plus que je ne dois au chef de
l'Opposition, j'ai accepté ce que les membres de la majorité
m'avaient demandé, ce qui veut dire, M. le Président, que je
proposerais l'ajournement à demain matin, dix heures, en espérant
que tous les députés, membres de cette commission, soient
là à dix heures.
M. Morin: J'avoue que je ne vois pas de raison de ne pas
continuer ce soir. Cela veut dire qu'on va ajouter, quand tout sera dit, une
journée entière, peut-être, au temps que nous demandons,
que nous exigeons déjà des représentants de
l'Hydro-Québec.
Je ne suis pas d'accord. Je le dis, mais visiblement, ce n'est pas moi
qui vais décider cela ce soir. Alors, c'est au président à
trancher la question.
En ce qui me concerne, je pense que nous devrions travailler ce soir.
Cela coûte une fortune, chaque jour, à ces messieurs de l'Hydro
pour venir ici.
Le Président (M. Séguin): La commission ajourne ses
travaux à demain...
M. Morin: Nous poserons toutes les questions que nous avons
à poser.
Le Président (M. Séguin): ... dix heures, à
la salle 91-A, soit à l'étage inférieur. Pas ici, en
bas.
(Fin de la séance à 18 h)