Journal des débats de la Commission des relations avec les citoyens
Version préliminaire
43e législature, 1re session
(début : 29 novembre 2022)
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Le
mercredi 20 novembre 2024
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Vol. 47 N° 56
Étude détaillée du projet de loi n° 74, Loi visant principalement à améliorer l’encadrement relatif aux étudiants étrangers
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15 h (version non révisée)
(Quinze heures six minutes)
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Alors, à l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le
quorum, je déclare la séance de la Commission des relations avec les citoyens
ouverte. La commission est réunie afin d'entreprendre l'étude détaillée du
projet de loi n° 74, Loi visant principalement à améliorer l'encadrement
relatif aux étudiants étrangers. Mme la secrétaire, est-ce qu'il y a des
remplacements?
La Secrétaire : Oui, Mme la
Présidente. Mme Blais (Abitibi-Ouest) est remplacée par Mme Poulet (Laporte);
Mme Gendron (Châteauguay) par Mme Picard (Soulanges); Mme McGraw
(Notre-Dame-de-Grâce) par M. Morin (Acadie); Mme Prass (D'Arcy-McGee) par Mme
Setlakwe (Mont-Royal-Outremont); et M. Bérubé (Matane-Matapédia) par M. Paradis
(Jean-Talon).
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup. Alors, Mmes les élues et MM. les élus,
bienvenue à cette commission. Avant de débuter de façon officielle, je vais
déposer les mémoires qui ont été reçus depuis la fin des consultations
particulières. Donc, les mémoires sont dans Greffier.
Nous en sommes maintenant aux remarques
préliminaires, pour lesquelles chaque membre, je vous le rappelle, dispose de
20 minutes. J'invite d'abord le ministre de l'Immigration, de la Francisation
et de l'Intégration à faire ses remarques. M. le ministre, le micro est à vous.
M. Roberge : Merci beaucoup, Mme
la Présidente. Je salue les collègues des trois oppositions qui sont
représentées aujourd'hui, évidemment les députés de la banquette ministérielle,
la foule qui est venue écouter nos travaux, vous êtes les bienvenus, puis
évidemment les équipes du ministère, qui sont toujours là pour nous soutenir.
Ça fait quand même pas mal de projets de loi que je travaille, on sait très
bien qu'au fil des travaux puis après les consultations particulières, on a des
idées de bonification, on a des idées d'ajustements, d'amendements pour arriver
à un projet de loi qui soit le meilleur possible, puis on a besoin des équipes
des juristes pour nous éclairer là-dedans.
Peu de gens le savent, s'il y en a qui
nous écoutent à la maison, mais la majorité des projets de loi au Québec, après
débats, après discussions, après amendements, après travaux, sont adoptés à l'unanimité.
Je ne peux pas présumer pour ce projet de loi là, ce n'est pas ce que je fais,
mais je veux juste dire que je souhaite qu'on soit constructif. Je m'engage à
avoir une ouverture... Ça ne veut pas dire que j'accepterai toutes les
propositions, mais on va étudier avec sérieux toutes les propositions d'amendement
et de bonification de ce projet de loi là pour arriver à la fin avec quelque
chose qui va servir le mieux possible les Québécois pour les décennies à venir,
parce qu'on sait très bien qu'à un moment donné, dans nos chaises, il y aura d'autres
personnes que nous qui auront à vivre et à appliquer les articles tels qu'ils
seront modifiés puis adoptés.
Le projet de loi qu'on travaille aujourd'hui,
qu'on va commencer à travailler, je pense qu'il est important, particulièrement
dans le contexte qu'on vit. Il faut voir qu'entre 2014 et 2024, sur 10 ans, il
y a eu une augmentation de plus de 140 % des certificats d'acceptation du
Québec, les CAQ, pour les étudiants étrangers, qu'on peut appeler aussi les
étudiants internationaux. En 10 ans, 140 % de hausse, c'est énorme. Il
faut donc se poser des questions.
Dans certains cas, ce sont des
augmentations dans certains programmes, dans certains établissements qui sont
pleinement justifiées. Les étudiants étrangers qui arrivent ici contribuent à
la société, permettent bien souvent de maintenir des programmes qui sont très
importants en région, viennent répondre parfois à des secteurs qui sont en
pénurie de main-d'oeuvre, viennent aussi nous aider à mieux offrir des services
publics aux Québécois et parfois permettent à des étudiants en région de
continuer d'étudier près de chez eux, parce que la présence d'étudiants étrangers
permet de garder des programmes ouverts. Donc, c'est important de le
considérer. D'autres fois... S'il n'y avait pas, des fois, ces présences d'étudiants
étrangers, bien, il pourrait y avoir des programmes en région qui ferment, des
gens qui soient... qui seraient forcés de s'expatrier, de quitter la région,
peut-être pour ne pas revenir, malheureusement, ou qui pourraient renoncer à
leur projet d'études. Donc, c'est sûr qu'on a ces...
M. Roberge : ...là, en
tête. Et il faut voir que l'état du droit actuel, les pouvoirs du gouvernement,
du ministre de l'Immigration actuel sont plus qu'imparfaits. Ils sont carrément
inadéquats. Il y a quelques années, sous le premier mandat du gouvernement de
ma formation politique, la ministre qui s'occupait de l'Enseignement supérieur,
Mme Danielle McCann, a été confrontée à certains abus dans le réseau
d'enseignement supérieur. Elle a voulu corriger la situation. Elle a pris des
mesures en fonction des lois qui nous gouvernent actuellement et elle a été
déboutée en cour. Le gouvernement, avec la loi actuelle, n'a pas la capacité
d'agir de manière chirurgicale, d'agir de manière précise lorsqu'il y a des
abus ou des débordements. Et il y en avait, et il y en a encore.
• (15 h 10) •
La dernière fois, si la situation a pu
être corrigée en partie, bien qu'ensuite certains abus sont revenus, c'est
parce qu'on avait réussi à convaincre le gouvernement fédéral de revoir
l'émission de permis de travail postdiplôme. Laissez-moi vous dire que, pour un
gouvernement qui est nationaliste, ce n'est pas une posture que l'on aime et
qu'on apprécie, c'est-à-dire de ne pas être maîtres chez nous, de ne pas avoir
les leviers juridiques pour agir de manière précise et corriger des situations
parfois qui sont évidentes. On en a vu. On en avait vu au moment de la... où
c'était la ministre McCann qui était la ministre de l'Enseignement supérieur,
mais on a vu, cette semaine encore, dans le Journal de Montréal, il y a des
choses qui sont évidentes.
Au moment où on se parle, le ministre de
l'Éducation et la ministre de l'Enseignement supérieur ont des conversations
avec leur réseau, avec les dirigeants, évaluent avec la ministre de l'Emploi
les besoins de main-d'œuvre dans les différents secteurs, analyse le réseau
pour être certain qu'on est capables de répondre aux besoins de main-d'oeuvre,
de répondre aux besoins de services publics tout en étant raisonnables dans
l'accueil d'étudiants étrangers, considérant qu'on a en ce moment presque
600 000 résidents temporaires sur le territoire québécois, beaucoup,
beaucoup d'étudiants étrangers et internationaux, plusieurs d'ailleurs qui ont
des problèmes à se loger. On a vu que certains étudiants étaient obligés de
faire des sessions à l'hôtel. Plusieurs ont de la misère à se loger, à tel
point que ça fait augmenter les loyers pour tous.
Donc il y a des enjeux. On ne peut pas se
mettre la tête dans le sable. Il y a une évidence que le droit actuel, qui est
la loi actuelle, est inadéquat. On l'a vu lors du dernier gouvernement, lors de
la dernière législature, quand on a vu que le gouvernement a perdu en cours,
quand il a tenté d'agir. Donc, le statu quo n'est pas tenable. J'espère donc
qu'on va être capable d'étudier ce projet de loi là avec tout le sérieux, en
essayant de le bonifier puis de le corriger. Puis je veux assurer mes collègues
de l'ouverture du gouvernement pour toute proposition qui sera raisonnable et
qui viendront améliorer ce projet de loi. Merci.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup, M. le ministre. Alors, je me tourne du côté
du député de l'Acadie, représentant l'opposition officielle. Vous avez 20
minutes pour vos remarques.
M. Morin : Merci, Mme la
Présidente. Alors, bon après-midi, tout le monde, M. le ministre, collègues de
la banquette gouvernementale, les spécialistes qui vous accompagnent, M. le
ministre, les gens de votre cabinet et des ministères. Je salue
particulièrement ma collègue députée de Mont-Royal-Outremont, M. Angers,
notre recherchiste, et les collègues des oppositions qui siègent cet
après-midi.
Je vous dirai, dans le cadre de mes
remarques préliminaires, que c'est un... c'est un projet de loi qui a déjà fait
couler beaucoup d'encre et où, en consultations particulières, on a eu... on a
eu un très grand nombre de groupes. Ça a soulevé énormément d'intérêt parce
que, même après les consultations particulières, il y a des... il y a des
groupes, des associations qui ne sont pas venues, mais qui voulaient envoyer
des mémoires, qui voulaient participer. Donc, ça soulève beaucoup, beaucoup
d'enjeux, je dirais même de passions dans notre société. Et j'écoutais...
J'écoutais M. le ministre dans le cadre de son intervention...
M. Morin : ...pendant le
principe. C'est sûr, Mme la Présidente, que s'il y a des abus, s'il y a des
fraudes, on ne peut pas les cautionner, on ne peut pas les encourager, puis il
faut essayer de régler la situation. Ça, c'est très clair, très clair pour moi.
Mais ce sont des cas quand même qui sont assez isolés. Et quand je lis le
projet de loi, et on va avoir la chance d'en parler, d'en discuter dans le
cadre du travail de la commission, j'ai l'impression que le projet de loi va
vraiment au-delà de ça. Et j'essaie encore, puis je vais vous le dire avec
beaucoup, beaucoup d'ouverture, de candeur, j'essaie encore de comprendre
véritablement ce que le ministre essaie de corriger. Et je m'explique. Ce
matin... et je remercie, je remercie les membres des ministères, et du cabinet
probablement, qui étaient là, je reconnais Mme... qui nous a... qui nous a
parlé ce matin dans le cadre du briefing technique. Je la remercie. Mais là on
nous a parlé d'enjeux pour le ministre de ne pas être capable de contrôler
d'une façon plus ciblée un nombre d'étudiants étrangers. Eh bien, moi, je voulais
savoir pourquoi. Et puis là on nous a dit : Bien, c'est parce qu'il y a eu
des débats à la cour. J'ai dit : Ah! Ah bon? Mais non, mais c'est
possible, hein? Mais j'ai dit : Là, ce serait peut-être très intéressant
qu'on sache pourquoi. Parce que si c'est ça le problème qu'on essaie de régler,
bien là, il faudrait véritablement s'en parler. Alors, on a eu de l'information
qui nous a été acheminée de la part du gouvernement. Je les remercie, sauf que
c'est assez volumineux, là. C'est arrivé récemment, là, en fait, dans les...
dans les heures, là, qui suivent, dont notamment, bien sûr, comme dans tout
litige, une demande introductive d'instance qui fait état de certains... de
certains problèmes, mais... compte tenu évidemment de certaines décisions qui avaient
été prises par le gouvernement. Sauf que, quand on regarde rapidement, puis je
vous le dis rapidement parce qu'on l'a eu, là, il y a quelques temps, certaines
des décisions... ce que certaines parties demandaient, c'était une demande en
injonction provisoire et en ordonnance de sauvegarde, ainsi qu'une injonction
interlocutoire. Et dans... et dans cette demande là, on demandait notamment, à
l'époque, à la ministre de maintenir un statu quo prévalant avant l'arrêté et
de continuer de recevoir et de traiter, de rendre des décisions relativement
aux demandes de certificats d'acceptation du Québec dans le cadre du programme
d'étudiants étrangers. Et ce qu'on se rend compte, par la suite, dans ce que
j'ai pu regarder et lire, c'est qu'il y a eu un jugement sur demande
d'injonction provisoire et ordonnance de sauvegarde de la part du tribunal, de
la Cour supérieure, mais ce que le jugement dit, c'est qu'au fond le ministère
aurait pris un engagement conformément à certaines clauses de la demande
introductive d'instance et il y aurait eu une entente entre les parties.
Qu'est-ce qui était arrivé? Quelle était l'entente? Ce n'est pas très clair.
Ils ont continué à traiter des demandes d'étudiants étrangers. Par la suite,
par la suite, sur le jugement, sur demande d'injonction provisoire et
d'ordonnance de sauvegarde, puis là on n'est toujours pas sur le fond, là, en
fait, ce que les organismes... ici, c'était le collège Canada, ici, c'est le
collège CDI notamment, c'est de vouloir conserver d'une façon urgente un certain
statu quo. Et là, ce qu'on nous dit, il y a une liste d'établissements, c'est
qu'il y aurait eu aussi une entente. Puis la ministre, à l'époque,
défenderesse, s'était engagée à continuer à recevoir, de traiter, de prendre
certaines décisions pour des certificats d'accréditation Québec. Donc, ma
compréhension, puis il y a eu, après ça, une ordonnance sur un jugement de
sauvegarde, mais il n'y a jamais eu, en tout cas, moi, je n'en connais pas,
puis s'il y en a, des documents, mais ça, j'aimerais ça les avoir, parce qu'on
nous dit que ce projet de loi là vise à permettre au gouvernement d'agir alors
qu'il n'a pas été en mesure de le faire. Et donc...
M. Morin : ...ils nous ont dit
que la cour l'a arrêté, mais moi, je n'ai pas trouvé de jugement, au fond.
Donc, le débat, au fond, n'a pas eu lieu. Moi, je tiens à le soulever dans mes
remarques préliminaires. Moi, je ne l'ai pas trouvé. Il existe peut-être, mais
j'aimerais ça l'avoir.
• (15 h 20) •
Donc, pour moi, c'est un enjeu. Parce
qu'au fond qu'est-ce qu'on essaie de corriger? Et, quand on fait référence à
des documents judiciaires, bien, il faudrait voir. Au fond, ce que je
comprends, c'est que le gouvernement a voulu poser des gestes, il y a des
collèges qui se sont opposés, le gouvernement a retraité, puis dire :
Écoutez, on va s'entendre. Bon. Alors, on en est là. Donc, ça, c'est un premier
enjeu parce qu'évidemment, pour régler véritablement la situation, il faudrait
être capable de connaître véritablement quel est le problème et l'enjeu,
première des choses.
Deuxièmement, quand on parle, on nous
parle beaucoup du nombre d'étudiants étrangers, mais moi, les documents que
j'ai... que j'ai, que j'ai trouvés au niveau universitaire, sur l'ensemble du
réseau... On nous parlerait de 57 450, et il y en a également au collégial,
quelques milliers. Donc là, on n'est pas dans un chiffre de 200 000, 250 000.
Là, on est loin de là. Alors, encore là, quels sont les chiffres? Est-ce qu'on
a d'autres informations? On verra, on aura la possibilité d'en discuter avec M.
le ministre. Mais c'est autant d'éléments, pour moi, qui sont en suspend. Et,
je me dis, pour être capable de légiférer d'une façon efficace, bien, il
faudrait qu'on parte sur des bases où tout le monde, où tout le monde s'entend.
Je salue, je salue l'ouverture de M. le ministre. C'est ce qu'il nous disait
d'emblée, et effectivement, au fur et à mesure, nous aurons sûrement des
modifications à lui proposer. Mais je tenais d'abord, puis c'est un peu
l'avantage des remarques préliminaires, d'un peu mettre la table, si vous
voulez, à tout le moins, du côté de l'opposition officielle, pour voir un peu
où est mon... en fait, où sont les informations qu'on a... de l'année puis
qu'est-ce qui arrive. Alors, ça, c'est une chose.
Deuxièmement, il y a tous les mémoires
qu'on a reçus, et ça aussi, c'est un peu rare de... et, croyez-moi, je... ça ne
fait pas 20 ans ou 15 ans que je siège au Parlement, mais j'ai quand
même siégé, pour l'opposition officielle, dans plusieurs projets de loi, mais
c'est rare qu'à peu près tout le monde où il y a un consensus, à l'effet qu'on
dit au gouvernement : N'allez pas là, c'est... vous n'avez pas la bonne
méthode. Et ça va avoir un impact très important sur nos maisons
d'établissement supérieur. Puis ça, je pense qu'il faut aussi le mentionner
d'emblée. Et l'impact que ça peut avoir, on nous l'a... on nous l'a dit,
plusieurs groupes sont venus nous le dire dans le cadre des consultations
particulières du projet de loi n° 74. Le ministre veut s'accorder beaucoup
de pouvoirs avec le projet de loi, d'une part, et, d'autre part, par la suite,
se donne la possibilité d'accepter et d'adopter un nombre important de
règlements. Mais, encore là, ce n'est pas très précis et c'est aussi un élément
qui... comment dirais-je, qui m'inquiète parce que, normalement, un projet de
loi ou une loi devrait servir à apporter une plus grande certitude et non pas
l'inverse.
Dans son projet de loi, plusieurs groupes
sont venus nous dire que ça allait créer plus d'incertitudes. Un de ces organismes-là,
c'est la Commission des droits de la personne et de la protection de la
jeunesse ou... du Québec par la plume de son président, qui nous rappelait,
dans le cadre d'un mémoire, puis on en reparlera éventuellement, mais qui nous
a rappelait que le projet de loi va créer plus d'incertitudes que de
certitudes. Donc, vous comprendrez que, pour moi, comme député qui a un rôle de
législateur à jouer, c'est un élément qui vient me chercher et donc qui
m'inquiète. Ça, c'est un élément.
Par après, on a entendu, et là aussi c'est
assez rare, mais... Mais, dans le cadre des consultations particulières, les
recteurs des universités québécoises sont venus, sont tous venus en commission
parlementaire et...
M. Morin : ...ils nous ont dit
que ce projet de loi là pouvait avoir un impact sur leur liberté académique. Et
là, je vous ferai remarquer que le projet de loi s'intitule Loi visant
principalement à améliorer l'encadrement relatif aux étudiants étrangers. Donc,
ça, c'est une chose, mais, quand on regarde les dispositions du projet de loi,
dans son projet de loi, M. le ministre veut... peut prendre des décisions qui
va avoir un impact sur certains projets universitaires. Parce que, dans son
projet de loi, on parle d'orientations, d'objectifs fixés, de besoins
économiques, de main-d'oeuvre, autant de critères ou d'orientations qui vont
pouvoir être considérés par le gouvernement.
Qu'est-ce que ça va donner sur des
programmes universitaires? On ne le sait pas, mais il y a une chose que je peux
vous dire et qu'on sait, qu'on a entendu, c'est que les recteurs d'université
sont venus nous dire que ça pouvait avoir un impact important sur l'autonomie
puis la liberté académique universitaire. Et ce qui m'apparaît un peu
paradoxal, c'est que le gouvernement du Québec, et là je parle des universités,
pas des cégeps, mais des universités, a aussi une loi pour protéger la liberté
académique. Donc, c'est comme si le législateur, le gouvernement était un peu
en contradiction avec ce qu'il voulait faire.
Donc, je vous dirai honnêtement que c'est
un élément qui a attiré particulièrement mon attention et, j'en suis convaincu,
ma collègue députée de Mont-Royal–Outremont pourra en parler également, parce
qu'elle est la porte-parole de l'opposition officielle, notamment pour des
études supérieures. Mais c'est quelque chose, en tout cas, qui est carrément
venu me chercher. Alors, on aura la chance d'en discuter pendant l'analyse
étude article par article.
Il en va aussi de la réputation du Québec,
je vous dirais. Et ça, La Chambre de commerce du Montréal métropolitain, par la
voix de son président, a été très claire, dans le domaine universitaire, les
étudiants internationaux constituent pour moi un atout et une richesse pour le
Québec, mais évidemment, pour qu'ils puissent venir au Québec, il faut qu'on
soit capables d'avoir des mesures qui va faire une différence. Parce qu'au
niveau... au niveau universitaire, et je vous dirai, particulièrement au niveau
des études supérieures, on est en compétition avec le monde et avec les autres
provinces canadiennes, évidemment. Donc, quand un étudiant étranger décide de
venir ici, c'est parce qu'il a fait une série d'analyses puis qu'il se
dit : Bien, c'est vraiment là. Est-ce que c'est parce qu'il y a un
programme qui est exceptionnel? Est-ce que c'est parce qu'il y a des conditions
de vie qui sont aussi exceptionnelles? Parce que, disons-le, on est chanceux,
là, de vivre au Québec. On est... C'est vraiment... c'est bien, là, notre
société québécoise. Mais là, il ne faut pas mettre des bâtons dans les roues à
ces gens-là pour les empêcher de venir. Et ça, c'est un élément important qui a
été soulevé par la Chambre de commerce du Montréal métropolitain, le fait qu'on
soit en compétition avec le monde.
Et l'autre élément, ça recoupe ce que je
disais également en lien avec la lettre du président de la Commission des
droits de la personne. La Chambre de commerce en parle. Pour que des gens
viennent ici, qu'ils soient attirés, il faut qu'ils puissent connaître un cadre
législatif et réglementaire qui est prévisible, parce qu'ils veulent savoir,
évidemment... S'ils investissent pour venir ici, ils veulent savoir après ça ce
qui va arriver de leurs études, mais est-ce qu'ils vont pouvoir s'établir ici,
etc., travailler, bon. Et le projet de loi apporte ou contribue à instaurer une
incertitude à ce niveau-là, un manque de prévisibilité réglementaire. Et je
vous le dirai bien humblement, ce n'est pas à l'avantage du Québec.
• (15 h 30) •
Donc, il y a... il y a beaucoup d'éléments
qui sont dans l'air. Le gouvernement a fait aussi plusieurs déclarations à
propos de l'immigration. Et ça fait en sorte que, déjà, déjà... et puis il y
avait un excellent reportage hier à Radio-Canada, déjà, le nombre
d'inscriptions d'étudiants étrangers est en baisse dans les universités du
Québec, là, avant même que ce projet de loi là soit adopté...
15 h 30 (version non révisée)
M. Morin : ...c'est déjà fait,
c'est déjà fait. Et permettez-moi, permettez-moi de référer à un article qui a
été publié et qui parlait particulièrement de l'Université du Québec à
Rimouski. C'était aussi l'objet du reportage d'hier. On entendait des gens, on
entendait des étudiants, eh bien ce projet de loi, des mesures gouvernementales,
suscite de l'angoisse chez eux. Parce que, là, ils ne savent plus vraiment quoi
faire et ça a un impact important sur les programmes universitaires. Donc, il
faut être capable, il faut être capable d'équilibrer tout ça dans le cadre d'un
projet de loi puis il faut être capable aussi de s'assurer que le Québec va
demeurer un joueur clé dans le monde et au Canada, en ce qui a trait évidemment
aux études supérieures, aux études universitaires et à la recherche.
Ce que le recteur de l'Université du
Québec à Rimouski disait hier M. Deschênes, et je le cite : «Ça crée
de l'incertitude chez les personnes qui souhaitent venir étudier ici, et, pour
ces personnes-là, ça peut influencer la décision.» On dit dans l'article que ce
constat est partagé par d'autres institutions qui observent déjà une chute du
nombre de nouvelles inscriptions. Université Laval, une baisse de 21 %
notamment. Et il y en a d'autres.
Donc, autant d'éléments qui, pour ma part,
sont inquiétants. Et je comprends la volonté de M. le ministre de le dire...
parce que ça aussi, on a vu un article cette semaine dans les journaux, où il y
a une maison d'enseignement qui a accepté beaucoup trop d'étudiants. Évidemment,
il faut respecter la loi, c'est clair, il faut respecter la réglementation,
mais est-ce que... est-ce que les mesures que veulent se donner le gouvernement
ne sont pas trop larges? Est-ce qu'on a véritablement bien cerné les enjeux
auxquels on fait face pour être capable de les corriger avec un projet de loi?
Bien, j'écoute, M. le ministre, il nous parle d'ouverture. Alors,
effectivement, il va falloir en discuter, il va falloir en débattre, parce que,
moi, quand je lis le projet de loi, j'ai l'impression, comme on dit parfois, qu'on
ne veut pas faire du sur mesure, mais on veut faire du mur à mur. Et je suis
loin d'être convaincu que c'est ce dont le Québec a besoin maintenant, compte
tenu de l'impact qu'on voit déjà au sein de nos universités et compte tenu
également de ce que les recteurs venaient nous dire, qui sont, et je me fie à
eux, évidemment des experts dans la gestion de leurs universités. Moi, ce n'est
pas mon cas, je les écoute avec, évidemment, attention.
Donc, il me reste quelques secondes. Je
termine, je termine là dessus, Mme la Présidente, mais il me semble, il me
semble, que ce projet de loi que le gouvernement veut mettre en place, des
mesures qui ne sont pas nécessairement bien adaptées à la situation que M. le
ministre veut régler, ça, je l'entends, et donc nous l'étudierons avec intérêt.
Merci.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup, M. le député. Je me tourne maintenant du
côté du député de Saint-Henri—Sainte-Anne pour vos préliminaires, 20 minutes.
Mme Setlakwe : ...
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Oh oui! c'est vrai.
Mme Setlakwe : C'est après?
Des voix : ...
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : C'est après, oui, c'est ça. D'accord. On finit et on
revient à vous.
Mme Setlakwe : Très bien.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Donc, j'avais raison. M. le député de Saint-Henri—Sainte-Anne,
vos 20 minutes commencent.
M. Cliche-Rivard : Merci, Mme
la Présidente. Merci, collègues. D'abord, très heureux de vous retrouver aussi
à la CRC, ça faisait un petit moment. Alors, content de vous retrouver. Merci
aux collègues des oppositions, merci aux collègues du Gouvernement. M. le
ministre et ses équipes, bonjour, puis nos équipes à nous aussi à la recherche
de ce côté-ci.
Bon, plusieurs mémoires et plusieurs jours
de consultations, plusieurs jours d'étude dans le cadre du projet de loi n° 74 qu'on étudie, qu'on commence à étudier. Évidemment,
le collègue de l'Acadie en faisait mention, mais c'est c'est vrai qu'on a siégé
même ensemble sur plusieurs projets de loi, mais d'une unanimité comme ça et d'un
ensemble de groupes comme ça et d'acteurs importants, là, disons, quasi-unanimité
pour faire plaisir au ministre, on a rarement vu ça, quand même...
M. Cliche-Rivard : ...et, de
surcroît, dans un niveau, ou dans un élan, ou dans une gravité de concept de
cette mesure-là. Puis là je parle notamment de l'autonomie institutionnelle,
l'autonomie académique des universités et des cégeps, qui... qui est en jeu,
qui a été invoquée être en jeu par plusieurs institutions, et, évidemment, par
le... le... disons, la... la posture ou le rôle important de ceux et celles qui
sont venus nous en parler, notamment des coalitions de recteurs, rectrices, de
fédérations. On a eu droit à... à l'ensemble des têtes dirigeantes des
institutions académiques du Québec pour venir dire au gouvernement de ne pas
aller de l'avant avec ce projet de loi là. C'est quand même frappant, c'est
quand même marquant. Et, vous l'avez dit, Mme la Présidente, d'entrée de jeu,
vous avez déposé des mémoires additionnels, parce qu'il y a beaucoup de gens
qui n'ont pas été entendus, qui avaient des choses à dire.
Donc, je... je salue l'ouverture du
ministre, d'entrée de jeu, qui nous a peut-être annoncé des amendements à
venir, là, je ne sais trop, mais ça a été dans... dans son... dans ces mots.
Là, je... je regarde Greffier, et je n'en vois point, donc j'imagine qu'ils...
ils sauront venir, le cas échéant, mais je pense que ça va être essentiel.
J'entendais le ministre aussi nous parler d'espoir d'unanimité ou, en tout cas,
d'espoir de consensus. C'est vrai qu'une très grande majorité de projets de
loi, ici, on entend ou... on est capables de s'entendre. Encore faut-il... puis
je note son ouverture et sa transparence... encore faut-il qu'on fasse un bout
de chemin dans cette direction-là. Je pense que c'est tout à fait encore
possible. C'est mon souhait. Mais, là encore, faudra-t-il voir les marges de
manœuvre puis les ouvertures, du côté gouvernemental, pour voir si c'est
possible pour nous d'embarquer dans... dans cette... dans cette danse, hein,
disons le comme ça.
Par contre, tout ça vient dans un contexte
d'un climat de suspicion ou d'un climat qu'on ne peut pas prendre hors de son
contexte. Il y a différentes mesures du gouvernement actuel, en matière
d'immigration, depuis 2018, qui nous permettent d'arriver aujourd'hui à
l'inquiétude qui a été véhiculée, qui, souvent, dépasse le projet de loi.
Une... une lecture autonome puis indépendante du projet de loi peut nous amener
à une conclusion X, mais une lecture dans son contexte, dans l'évolution des
annonces récentes, peut nous permettre d'en avoir une autre.
Et je ne peux pas m'empêcher de souligner
la décision initiale, en 2018-2019, d'effacer 18 000 dossiers, 40 000
familles qui ont été laissées pour compte, à l'époque. Dans le contexte, je ne
peux pas ignorer cet... cet élément du narratif. J'en ai parlé aussi dans les
consultations, on ne peut pas ignorer les différentes réformes du Programme de
l'expérience québécoise, qui, à plusieurs reprises, dans des réformes avortées,
dans des réformes pressées, ont, finalement, été annulées, mais pour,
finalement, revenir à un PEQ révisé, l'année dernière, pour qu'on nous apprenne
quelques jours avant le début de l'étude de ce projet de loi là, que,
finalement, le Programme de l'expérience québécoise était suspendu, laissant
des étudiants et étudiantes, quand même, dans un haut niveau de... de stress et
d'incertitude, sans trop savoir ce qui allait se passer post-juin prochain.
Sans parler de la suspension du PRTQ,
de... de voir ce qui se passera avec le fameux PSTQ, qu'on attend aussi depuis
un certain moment. On a étudié les dispositions réglementaires l'année
dernière. Sans parler de... de la réunification familiale, on n'en parle pas
assez, mais des familles déchirées et séparées qui demandent au gouvernement,
depuis un certain moment, de faire un geste en leur faveur pour éviter la
séparation de familles, pour éviter que ces séparations-là continuent. Et,
vraisemblablement, suivant des consultations particulières où plusieurs groupes
ont... ont fait des ajustements, des demandes de correctifs ou de
modifications, puis qui n'ont pas été satisfaits ou... pour l'ensemble de... du
plan, finalement, déposé l'année dernière.
Donc, c'est dans ce contexte-là que les
universités, les cégeps, les groupes sont venus sonner l'alarme, sur la base
d'un... d'un narratif qui se construit et dans lequel il y a un... il y a un
bris de confiance, là, apparent envers où est-ce qu'on va s'en aller avec ledit
projet de loi. Et le ministre sera appelé à préciser ses intentions, puis on va
le faire dans le cadre de l'étude détaillée, parce qu'il y a des inquiétudes
énormes qui ont été formulées par ces groupes-là. Inquiétudes, notamment, sur
la liberté académique, on va avoir beaucoup de temps pour en parler. Mais
l'ensemble des mémoires institutionnels, d'universités ou de...
M. Cliche-Rivard : ...nous
ont parlé de leur indépendance puis de leur liberté académique, notamment, de
développer des programmes, notamment, de prévoir le développement de leurs
facultés, leurs unités ou leur chaire de recherche, le développement
d'établissements ou de programmes, peut-être, satellites quand c'est
applicable, l'ouverture d'un autre établissement, l'ouverture d'un autre
groupe. Et là on se retrouve devant une incertitude qui n'existait pas a
priori.
• (15 h 40) •
Et les universités, les cégeps, dans leur
décision de développer des nouveaux programmes, d'ouvrir à la recherche,
d'ouvrir à l'innovation - l'ETS nous en parlait notamment, mais pas que - vont
se retrouver dans une difficulté. Ils nous expliquaient que ça peut prendre
jusqu'à 10 ans de développer une nouvelle chaire de recherche, un nouveau
programme, et que si, en amont, ces travaux-là n'avaient pas été faits, bien,
aujourd'hui, on ne serait pas en mesure de jouer notre rôle, par exemple, sur
l'intelligence artificielle ou dans plein d'autres domaines, et que le gouvernement,
évidemment, ne devrait pas avoir un contrôle ou ce pouvoir-là, ou ce rôle-là à
jouer, qui dépouillerait les universités, puis les cégeps, les instances
académiques de leur pleine liberté académique. Et on va avoir la chance d'en
reparler dans les prochains jours, c'est certain.
Sur la question des chiffres, Mme la
Présidente, là il y a un débat clair et il y a des réflexions claires à avoir,
puis ça fera l'objet, M. le ministre, d'une demande que j'aurai un petit peu
plus tard pour qu'on parte avec un cadre défini, là, ensemble sur les mêmes
chiffres. Ça pourrait être intéressant, autant sur l'émission des certificats
d'acceptation du Québec, par programme, par établissement, par niveau
d'enseignement, que le corollaire envers les permis d'études finalement
délivrés, et puis de bien comprendre... qu'on s'entende tous sur où est-ce
qu'ils sont, les fameux 123 000 étudiants étrangers actuellement. Les
universités nous ont parlé de 15 000, les cégeps nous ont parlé... Non, c'est
l'inverse, les universités nous ont parlé de 41 000, les cégeps nous ont parlé
de 15 000. On est loin de 123 000, encore faudrait-il qu'on s'entende, là, sur
où sont ces étudiants-là.
Moi, j'ai, avec moi, les chiffres de
l'IRCC, immigration, réfugiés, citoyenneté Canada au 24 juillet qui arrivent à
un total de permis émis à 61 000 pour 2023. Bon, certainement qu'une partie de
ceux de 2022 sont encore là, mais lesquels? Dans quelle proportion? Et il va
falloir qu'on s'assure qu'on dépose ou qu'on développe des politiques publiques
ici, au Québec, sur la base de données factuelles sur laquelle on va
s'entendre. Donc, moi, j'y reviendrai tout à l'heure, Mme la Présidente, mais
ça va faire partie des choses que j'aimerais qu'on établisse, d'entrée de jeu,
pour qu'on ait des discussions efficaces.
Effectivement, au briefing technique de ce
matin, Mme la Présidente, on est revenu sur un cas du début... en fait, de la
fin 2019, du 31 décembre 2019. Je m'en souviens, certains s'en rappelleront.
Moi, j'étais avocat en immigration à cette époque-là. Et il est évident que le
MIFI avait émis un arrêté ministériel avec une certaine liste d'institutions
qui ne pouvaient plus se voir émettre des certificats d'acceptation du Québec.
Le collègue de l'Acadie en parlait. Il y a une procédure sur demande
d'injonction provisoire, ordonnance de sauvegarde et injonction
interlocutoire... mesure interlocutoire qui a été déposé sur la base que la
mesure aurait été pris de manière ultra vires, donc, sans fondement légal, sur
la base de l'article 5052 qu'on étudie précisément aujourd'hui en 2020, Mme la
Présidente... en fait, 2019. Là, le ministre nous dit : Il fallait agir.
En novembre 2024, quand même, connaissant
l'agilité et l'efficacité gouvernementale, s'il avait vraiment fallu agir, on
aurait agi en 2020, pas quatre ans plus tard. Et là, aujourd'hui, on nous sort
comme explication : Voilà. Ce projet de loi là... Puis on nous le sort
aujourd'hui à l'étude détaillée, mais ce n'était pas ça, le narratif du tout.
Aux consultations particulières, c'était plutôt le ministre Miller, fédéral
qui, du haut de son statut, le ministre fédéral, menaçait de ne pas permettre
au Québec de choisir ses étudiants étrangers. Là, aujourd'hui, bon, comme on a
vu que les mesures du fédéral ne touchaient pas du tout le Québec, on change le
narratif, puis là c'est plutôt pour répondre à une injonction de 2020.
J'imagine qu'il va avoir d'autres explications un petit peu plus tard, mais je
salue l'imagination...
M. Cliche-Rivard : ...du
ministre de trouver des explications pour tenter de changer le narratif qui est
très différent parce que le narratif principal, c'est celui d'institutions
académiques qui sont venues nous dire de ne pas aller là.
Et je ne peux qu'aller dans le même sens
que mon collègue de l'Acadie. Il y avait là une injonction, là. Aucun jugement
sur le fond, Mme la Présidente, parce que le gouvernement a décidé de ne pas
contester, et il a décidé d'acquiescer sur engagement aux revendications de
groupes. Est-ce qu'elles sont fondées ou est-ce qu'elles ne le sont pas? Moi,
je ne me prendrai pas à la place de la Cour supérieure, Mme la Présidente n'eut
été que, bon, le juge... les juges ont déterminé qu'il y avait motif sérieux,
certes, mais de décision sur le fond, il n'y en a pas eu. Et je l'inviterais,
parce qu'on parlait d'abus tout à l'heure, je l'inviterais à parler d'abus
allégués, tant et aussi longtemps que ça n'a pas été avéré.
J'en parlais tout à l'heure aussi, Mme la
Présidente, il y a une grande distinction entre les CAQ qu'on peut émettre,
puis le nombre d'étudiants qui vont finalement obtenir un permis d'études, qui
vont se qualifier puis qui vont arriver au Québec. Puis, un des exemples de ça,
puis c'était bien dénoncé avec raison dans les médias parce que, moi, je pense
qu'effectivement il y a des choses à corriger, il y a des abus puis il y a des
problèmes, mais dans un des exemples du Journal de Montréal, il y a un... il y
a un... il y a un collège privé qui s'est vu émettre 12 000 CAQ.
C'est vrai, ça. Ça n'a pas de bon sens. Mais là, quand on a fait le contrôle et
quand on a fait la vérification du nombre d'étudiants finalement inscrits, on
était à 3 300.
Ce que j'essaie de formuler par là, c'est
qu'il y a une grande distinction puis une grande différence entre le nombre de
CAQ émis et le nombre de permis d'études délivrés, puis finalement le nombre
d'inscriptions dans un collège ou dans une université. Et cette trajectoire-là,
elle n'est pas simple à déterminer, Mme la Présidente. L'ÉTS nous a expliqué,
et avec raison, et d'autres groupes nous expliquaient que, si on vient à
limiter en amont, dans l'entrant, le nombre de CAQ délivrés, il n'y a aucune
assurance, démonstration, ou preuve, ou corrélation directe avec le nombre de
permis d'études puis, finalement, le nombre de gens qui viendront vraiment
étudier dans l'établissement.
Et ça, ça m'inquiète parce qu'on pourrait
voir une institution, un cégep, une université, émettre un certain nombre de
CAQ, limiter du côté ministériel avec le projet de loi, mais ne pas se
matérialiser les inscriptions. Et ça, je le soumets au ministre pour
considération. Puis j'aimerais ça savoir, puis on en parlera à l'étude
détaillée. Je me doute bien qu'il aura une solution ou une réponse à cette
proposition-là, mais il me fait un signe d'ouverture, ce que j'interprète, il
me corrigera si ce n'est pas ça, mais je pense qu'il faudra prévoir des façons.
Et un des exemples, c'est qu'il y a une
demande d'accès à l'information du 3 octobre 2024 du ministère sur le
nombre de CAQ émis par cégep, par niveau, par université aussi. Et on voit, là,
dans la corrélation entre le nombre de CAQ émis d'un côté, puis le nombre de
permis d'études délivrés de l'autre, puis les chiffres des universités et des
cégeps dans l'autre, qu'on n'a pas un continuum super précis et clair. Et je
vais nous inviter à faire très attention à ne pas... Puis l'exemple, je reviens
à ça, là, l'exemple probant, 12 000 CAQ, ça n'a effectivement pas de
sens pour un cégep ou une institution de cette taille-là, pour finalement avoir
3 000 inscriptions où, là, je veux dire, ce n'est pas à moi de tracer
la ligne à c'est quoi, le maximum, mais on est quand même dans le quatre fois
moins. Je vous invite à réfléchir à ça dans l'élaboration puis la mise en œuvre
de ce qu'on va travailler.
On y reviendra, mais à mon avis, là, pour
l'instant, il n'y a pas la démonstration qu'on cible... en fait, qu'on vise la
bonne cible. Je pense qu'il y a effectivement des abus. Le ministre l'a
clairement démontré dans deux exemples types, mais peut-être faudrait-il davantage
passer par la voie de la régulation du contrôle, de la Loi sur l'enseignement
privé, des sanctions possibles quand des règles ne sont pas respectées, plutôt
que d'aller tous azimuts venir faire des mesures qui sont larges pour venir à
viser des gens qui, finalement, ne sont pas le problème. Le ministre en a
parlé, j'en suis certain qu'il ne considère pas l'Université de Sherbrooke et
nos universités comme étant des problèmes. Je suis certain qu'il ne considère
pas la très grande majorité des institutions collégiales publiques privées
comme étant des problèmes. Il y a effectivement des joueurs récalcitrants...
M. Cliche-Rivard : ...Maintenant,
y a-t-il lieu de plutôt venir encadrer les permis, venir solidifier les
processus d'enquête plutôt que de venir réguler l'ensemble de l'émission des
CAQ pour les étudiants temporaires? Je pense que, là, la réponse se place
davantage là. Et je sens qu'il y aura une ouverture ou j'espère qu'il y aura
une ouverture du côté ministériel.
• (15 h 50) •
Alors, on a beaucoup de travail à faire,
Mme la Présidente. Je vais m'arrêter là-dessus. Je reviendrai de toute façon
parce qu'on aura, je le sais, quelques motions préliminaires. Mais il est
certain que les revues de presse actuelles nous démontrent qu'avant même
l'adoption du projet de loi on voit, et je titre Radio-Canada, le nombre
d'inscriptions d'étudiants étrangers en baisse dans les universités du Québec,
avant même l'adoption du projet de loi. Alors, il faut croire que des
mécanismes existent, il faut croire qu'il y a d'autres façons d'y arriver qui
ne mettraient pas à mal ou ne mettraient pas en jeu l'autonomie
institutionnelle et académique et la liberté académique des universités, de nos
universités.
Puis, en terminant, Mme la Présidente, un
des éléments les plus forts, puis un des éléments les plus éloquents des
prestations puis des présentations, ça a été le volet sur les établissements en
région, ça a été le volet régional. Et, bon, j'en suis. Moi, je suis un élu de
Montréal, évidemment, mais il n'empêche qu'au niveau national, dans nos
institutions régionales, on a absolument besoin, pour la vitalité économique
des régions, pour la survie de programmes puis pour la survie d'institutions
financières, académiques, absolument besoin de préserver une part importante
dans certains secteurs de l'immigration temporaire, des étudiants étrangers
temporaires qui permettent à des classes d'ouvrir. Et il y a là, pour moi, un
combat qu'on fera de tout instant pour être certains et certaines... Et on a eu
tellement d'exemples éloquents, d'accueils ouverts, chaleureux, positifs et de
réussites qu'on devra s'assurer de ne pas mettre à mal leurs excellents
programmes d'intégration, puis de leur permettre de continuer de faire leur
travail avec brio, puis de leur permettre de continuer d'ouvrir des classes en
région, de répondre aux pénuries de main-d'œuvre en région puis d'attirer des
gens, des néo-Québécois, des néo-Québécois qui veulent s'installer en région.
Donc, assurons-nous, à l'intérieur de ce processus-là, de préserver l'équilibre
régional et de préserver nos Rimouski, nos Rouyn, nos Gaspé qui sont venus en
commission nous dire qu'ils avaient des inquiétudes par rapport à la
présentation du projet de loi. Merci, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup, M. le député. Alors, je me tourne du côté
du député de Jean-Talon pour une période de 20 minutes. Le micro est à
vous.
M. Paradis : Merci beaucoup.
Où le gouvernement voulait-il aller avec ce projet de loi? Ça demeure une
question fondamentale qui a été posée, sans trop de réponses, par à peu près
tout le monde qu'on a entendu en consultations particulières.
Et je dois remercier le ministre, vers la
fin des consultations particulières, d'avoir finalement ouvert son jeu un petit
peu là-dessus, en disant : Bien, écoutez, c'est parce qu'on a essayé de
faire ça avant, une planification régionale, par exemple, des demandes
d'admission au Québec puis des permis, puis ça n'a pas fonctionné. Et,
aujourd'hui, pour que les gens qui nous écoutent sachent de quoi on parle,
c'est qu'aujourd'hui on a eu aussi une réunion très intéressante avec les gens
du ministère qui nous ont expliqué aussi un peu le fond de l'affaire. Mais là
on a reçu, comme tout le monde, là, une liasse de documents aujourd'hui qui
sont vraiment très importants pour comprendre le fond de l'affaire. Encore une
fois, je remercie. Finalement, on l'a su. Mais c'est une question de
transparence. Il y a du mérite à annoncer vraiment ses intentions, à le dire à
l'avance, ce qu'on veut faire et pourquoi on le fait. Et là on vient d'en avoir
des bouts.
Alors, moi, j'ai... je dois l'avouer, je
n'ai pas eu le temps de lire tout ça, j'ai reçu ça aujourd'hui, mais donc ce
sont des décisions des tribunaux dans des cas qui font suite à un arrêté
ministériel où, si on le comprend bien, le gouvernement a tenté de faire ça, a
tenté de planifier puis d'avoir une répartition des demandes pour les étudiants
internationaux puis ça n'a pas fonctionné puis il y a eu des poursuites. Puis
là mes collègues en ont parlé. C'est quoi, les résultats de ça? Il y a eu une
entente. Qu'est-ce que c'est? Qu'est-ce que les tribunaux ont mis ou pas? Mais,
si on l'avait su à l'avance, si on en avait parlé plus franchement, on aurait
peut-être eu des discussions déjà plus fructueuses jusqu'à maintenant. Et il y
a plein d'autres questions qui ont été...
M. Paradis : ...légitimes qui
ont été posées en consultations particulières aussi. Des... plusieurs
intervenants nous ont pointé cette dichotomie entre le nombre de demandes
d'admission puis les inscriptions, disant : Bien là, on a des chiffres de
125 000 personnes sur le territoire, mais le nombre d'inscriptions dans les
institutions d'enseignement supérieur ne correspondent pas. Alors, où sont ces
personnes-là? Que s'est-il passé? Quel est le lien ensuite entre les personnes
qui sont de l'immigration temporaire, donc, des étudiants internationaux, mais
qui ensuite passent au statut d'immigration permanente? Donc, ils viennent
s'installer au Québec. Quels sont ceux qui repartent? Si on avait eu des
chiffres plus clairs, si on avait eu des données du gouvernement, si on avait
eu des explications de ce qu'est la situation, de ce que sont les constats que
fait le gouvernement sur la situation actuelle et ce qu'il veut faire avec ces
constats-là, on aurait peut-être un débat bien différent. Peut-être même qu'on
aurait eu un vote différent à la proposition sur le vote de principe
aujourd'hui au Salon rouge, mais on n'a pas eu ça, encore une fois. Et ça,
c'est quelque chose de récurrent avec ce gouvernement, un manque de
transparence, un manque d'explications puis un manque de clarté sur ce que sont
ses objectifs, ce qu'il veut faire et pourquoi il veut le faire. Est-ce qu'il
répond aux impératifs des sondages du moment ou est-ce que c'est une volonté
d'avoir une planification à court, long et surtout... court, moyen et surtout
long terme?
Parce que, oui, tout le monde nous l'a
rappelé, nous sommes dans une thématique qui demande de la planification à long
terme. Il s'agit d'abord de gens qui font le choix du Québec, qui veulent venir
enrichir notre société en ayant un plan... une idée, un rêve d'études au
Québec. Et ça, ça ne se planifie pas du jour au lendemain. Ça prend du temps,
ça demande de la stabilité, ça demande de la prévisibilité. Or, donc, où le
gouvernement veut-il aller avec le projet de loi n° 74? Où veut-il aller
avec les seuils en matière d'immigration des étudiants étrangers ou étudiants
internationaux?
Quand on lit le mémoire du ministre, on
insiste beaucoup sur la question de la fraude. Puis il y a beaucoup de gens qui
sont venus dire : Il y a un réel problème avec des fausses institutions
d'enseignement, donc qui donnent des passerelles, finalement, à un statut, à un
autre statut d'immigration. Puis là on semble dire : C'est ça que ça veut
régler, ce projet-là. Si c'est le cas, plusieurs personnes sont venues nous
dire : Bien nous, on n'a rien à voir avec ça. Nous, on est des
institutions d'enseignement crédibles, avec des siècles d'histoire, puis on n'a
rien à voir avec ça. Les cégeps sont venus nous dire : Attendez, là, nous,
notre croissance, elle est raisonnable dans les dernières années. Comment ça se
fait qu'on est dans le même panier? Alors, si c'est ça, bien, le projet de loi
n'est pas vraiment utile.
Si, par ailleurs, c'est de chercher à
diminuer le nombre d'étudiants internationaux qui sont sur le territoire, bien,
de quelle façon, en quelle proportion, dans quel nombre? On ne l'a pas su non
plus. Le ministre l'a évoqué à un moment donné dans ses échanges avec un groupe
qui est venu témoigner. Il a dit : Oui, mais là on peut prévoir que, puis
il l'a annoncé sur la place publique. Mais peut-être qu'on aurait eu un débat
beaucoup plus serein si on avait annoncé cette planification-là à l'avance. Le
manque de planification, il génère de l'incertitude, il génère des inquiétudes
chez des personnes qui sont déjà chez nous puis qui se demandent qu'est-ce qui
va se passer demain? Qu'est-ce qui va se passer dans six mois? Qu'est-ce qui va
se passer dans un an? C'est la même chose pour les institutions d'enseignement.
On nous a dit... on nous a parlé de prévisibilité.
Alors, l'année dernière, l'année dernière,
on annonce que le Programme de l'expérience québécoise ne comptera plus pour
les seuils. Et, cette année, un an plus tard exactement, on a dit : Ah!
bien là, attendez un peu, on va faire un moratoire sur le PEQ, sur le Programme
de l'expérience québécoise. C'est ça, le problème. C'est l'absence de
planification, l'absence de prévisibilité. Où est le plan du gouvernement? Où
est le plan de la CAQ? On a eu cet échange-là, le ministre et moi, pendant les
consultations particulières. À un moment donné, il s'est mis à parler amplement
de la planification du Parti québécois. Moi, j'ai trouvé ça extraordinaire. Je
l'ai remercié. J'ai dit : Merci de parler de notre programme, mais je
comprends pourquoi vous parlez de notre programme, vous n'en avez pas. Vous
n'avez pas de planification. Les gens sont venus ici dire : Où est-ce que
vous voulez aller avec ça? Puis il n'y avait pas de réponse. C'est ça que les
gens veulent savoir. C'est important de savoir quelles sont les cibles que le
gouvernement vise. Et actuellement on ne le sait pas.
• (16 heures) •
Et, en plus, avec ça, il y a une autre
question de planification qui est extrêmement importante et qui est
complètement ignorée par ce projet de loi n° 74, c'est celui du
financement. Plusieurs personnes, plusieurs intervenants sont venus nous dire,
en consultations particulières, qu'il y a... qu'il y a un moment où les choses
ont changé. Je pense que, là-dessus, le gouvernement et notre formation
politique aussi, on s'entend, c'est qu'en 2017-2018...
16 h (version non révisée)
M. Paradis : ...18, il y avait
comme une... avant ça, il y avait une croissance, hein, une croissance assez raisonnée
dans les années 2010, mais là, en 2017-2018, soudainement, il y a une
hausse fulgurante des admissions, notamment dans tous les domaines, dans tous
les secteurs de l'immigration et également pour les étudiants internationaux.
Qu'est-ce qui s'est passé? Il y a eu une déréglementation du mode de
financement, ce qui fait que, là, il y a un financement qui pouvait être
obtenu, directement par les institutions d'enseignement, par étudiant
international, ce qui a généré, là, je reprends les mots qui ont été utilisés
par certains, ça a généré une course aux étudiants internationaux parce que c'est
un mode de financement. Et qu'à l'inverse, aujourd'hui, si tant est que le
gouvernement a l'intention de réduire les seuils sans vraiment l'annoncer
encore ou sans avoir la clarté qu'on aurait dû avoir avant ce projet de loi là,
mais là, ça pourrait avoir un impact de définancement. Et ça, ça ne peut pas
être le cas, ça ne peut pas être une manière indirecte ou non annoncée de
réduire le financement, parce que, woups, on est en austérité, on a de la
misère, on a eu un gros déficit. Demain, on ne sait pas ce qu'on va annoncer
dans la mise à jour budgétaire. Mais ça ne peut pas être ça. C'est pour ça que
nous, on dit : Il faut parler du mode de financement en même temps qu'on
parle des questions qui sont abordées par le projet de loi n° 74, de dire :
Si jamais on vise une réduction du nombre pour revenir à des seuils normaux,
pas pour fermer le robinet, revenir à des seuils plus raisonnables, mais qu'on
l'annonce, mais surtout qu'on parle de financement pour ne pas que ça veuille
dire moins d'argent pour les universités, moins d'argent pour les cégeps. Donc,
ça, aussi, il faut en parler. Et moi, je suis curieux d'entendre le ministre,
et ses collègues d'ailleurs de l'Enseignement supérieur, son collègue de l'Enseignement
supérieur et des autres ministères concernés, nous parler...
Une voix : ...
M. Paradis : Sa collègue,
pardon, nous parler de... nous parler de ce plan-là.
Tout ça se passe dans un dans un contexte
plus large. On a souligné, puis ça a été... c'était beau de voir les étudiants,
le corps enseignant, le personnel, les institutions, unanimement venir nous
parler de quelque chose, je pense, qu'on porte tous et toutes ici, c'est-à-dire
cette... que nous parlons de la richesse qu'apportent au Québec les étudiants
internationaux. Et aussi, quand ils... ils choisissent de retourner chez eux,
quand c'est ça, leur plan, aussi, ils deviennent des ambassadeurs du Québec.
Ils deviennent des porte-parole. Ils sont les créateurs de partenariats de
demain. Ils sont ceux qui vont dire : Oui, je connais le Québec. Donc, c'est
quelque chose qui est extrêmement important pour la posture internationale du
Québec et pour aussi l'enrichissement de nos programmes d'études, de nos
programmes de recherche, l'enrichissement de nos sociétés. On l'a parlé
notamment en région, dans certains endroits au Québec, dans certaines
institutions où ils sont, où leur aventure québécoise à titre d'étudiantes et d'étudiants
est importante, est essentielle pour l'avenir du Québec.
On nous a parlé des besoins, des objectifs
de chaque institution, notamment celles des régions qui ont bâti des programmes
qui font appel à ces étudiantes et ces étudiants. Et c'est important. On nous a
parlé de la liberté académique. C'est important de ne pas... de circonscrire
les interventions de telle sorte de respecter les choix académiques des
institutions d'enseignement supérieur. Tout ça, c'est très important.
D'autres sont venus nous parler, par
exemple, c'était significatif, que ce soit le Commissaire à la langue française
qui vienne nous parler en premier, le même qui a produit aujourd'hui un rapport
dans lequel il nous réitère, une nouvelle fois, à quel point la langue d'enseignement
supérieur peut avoir un impact sur le choix linguistique des personnes,
notamment des personnes migrantes, qu'il s'inquiète actuellement d'un certain
nombre de tendances. Il le dit dans son rapport que j'ai consulté tout à l'heure,
il dit : On va continuer à développer nos études, mais il annonce
clairement l'intention qu'il nous a aussi signalée quand il est venu ici... il
suggère, lui, que, parmi les mesures qu'il propose pour assurer la prospérité,
l'avenir de la langue française, qu'il y ait une meilleure répartition des
étudiants internationaux et des effectifs dans les domaines d'études
contingentés ainsi que dans les programmes formant les professionnels qui
serviront une clientèle principalement québécoise, par exemple les soins de
santé, l'assistance sociale, etc. Ça se discute, mais c'est actuellement ce qu'il
propose. Je cite la page 68 de son rapport publié aujourd'hui.
D'autres rapports d'autres institutions
qui sont notamment citées dans la planification en matière d'immigration du
Parti québécois viennent nous parler de questions qui sont importantes dans le
projet de loi qu'on étudie aussi, parce qu'on parle d'une catégorie d'immigration
qui a des liens avec toutes les autres catégories d'immigration. On vient nous
parler donc des services publics, de la question du logement, de la question
des services de francisation. Bon, il y a plusieurs points...
M. Paradis : ...à discuter
là-dedans. Donc, ça se passe dans un contexte vraiment plus large, et la façon
dont on va avoir le débat aujourd'hui est un test d'un certain nombre des
thématiques qu'on a abordées au salon rouge hier. J'étais... j'ai reçu, il y a
quelques quelques semaines, à l'Assemblée nationale, un groupe de
27 étudiants internationaux, 27 étudiants internationaux, puis la
conversation a commencé parce qu'ils me disaient : Oui, mais là on entend
beaucoup de choses, qu'on n'est peut-être pas bienvenus, puis que, là, il va y
avoir des coupures ou qu'on ne veut plus d'étudiants internationaux au Québec.
Puis je leur expliquais qu'il n'y a personne qui prétend ça au Québec. Il n'y a
personne qui dit ça. J'ai sorti quelques données, quelques chiffres. J'ai parlé
notamment de la plateforme de notre formation politique, de ce qui se passait
actuellement au Québec. Les gens sont sortis rassurés, mais c'est l'importance
d'avoir de la clarté sur ce qu'on veut faire, mais des mots qu'on utilise, mais
ils me disaient : J'ai entendu ça, j'ai entendu ça.
La semaine dernière, j'étais à Montréal,
toujours avec des étudiants internationaux puis qui me disaient : Vous
savez, on a tellement entendu des mots, là, comme le racisme, la xénophobie, la
fermeture que, là, il y a des dangers pour les étudiants internationaux, puis
ils disaient : On l'a beaucoup entendu dans certains milieux. Faisons
attention aux mots qu'on utilise dans les débats qu'on a, parce que lui, il
dit... bien là, moi, j'en ai un entre autres qui me parlait, il dit : Oui,
mais moi, après ça, je suis sorti puis je suis allé un peu partout au Québec,
je n'ai vu que de la bienveillance, que de la générosité, de l'accueil. Je vous
parle d'un étudiant international, là. Mais il dit : Ce que j'avais
entendu, c'étaient des gens qui n'arrêtaient pas de sonner l'alarme avec les
mots les plus durs et les plus inquiétants possibles. On leur a dit, là,
racisme, xénophobie, fermeture, etc.
Alors, est-ce qu'il est possible d'avoir
un débat sur nos politiques publiques en matière d'immigration, sans utiliser
ce type d'accusation? Est-ce qu'il est possible d'avoir un débat, qu'on va
avoir ici et qu'on doit avoir, sur les seuils pour les étudiants
internationaux, sans qu'on se fasse des procès d'intention, sans qu'on dise...
Parce qu'on l'a entendu, là, puis on l'a lu dans certains mémoires, on
stigmatise des étudiants internationaux, on stigmatise les immigrants, on les
pointe. Non, on parle de politique publique et on est capable d'avoir ce
débat-là de manière sereine, avec des mots justes, avec des mots bienveillants
et c'est ce à quoi je nous appelle, parce qu'il s'est passé des événements
significatifs dans les derniers jours, dans cette institution. Puis je pense
qu'il y a des Québécoises et des Québécois qui nous disent qu'ils sont fatigués
des procès d'intention, qui en ont soupé, des accusations et des mots
difficiles quand on parle de questions aussi délicates. Et ça, ça vaut pour
tous les côtés.
Donc, je nous fais confiance. Je sais
qu'on est capable de le faire. On le fait très régulièrement. On va le faire
encore une fois aujourd'hui. Cela étant dit, j'ai hâte d'en savoir plus sur la
planification du gouvernement, justement pour qu'on ne sème pas l'inquiétude,
mais qu'on explique où est-ce qu'on veut aller avec ce projet de loi, tant sur
le mécanisme, là, ce qu'on nous dit, qu'on a besoin de ces outils-là pour mieux
faire de la planification, mais surtout sur les objectifs, parce qu'on l'a
entendu. Et nous, en tout cas, de ma formation politique du Parti québécois, je
pense que vous avez eu un échange où j'expliquais quels sont nos objectifs, un
groupe de professeurs des cégeps des régions qui nous disaient : C'est de
la musique à nos oreilles, dire qu'on va protéger les programmes en région,
qu'on va insister sur les régions, qu'on va faire en sorte qu'on planifie
mieux, qu'on évite les excès qu'on a pu connaître dans les dernières années,
mais qu'on va faire mieux là où ça compte le plus. C'est le genre de chose, je
pense, qu'on veut entendre de la part du gouvernement, de la clarté, de la
planification, de la transparence, des explications sur les mécanismes qu'on
veut utiliser avec ce projet de loi n° 74 qui est
devant nous. Nous, en tout cas, on est prêts à en discuter. Merci.
La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) :
Merci beaucoup, M. le député. Alors, je pense que la députée de Mont-Royal—Outremont
veut prendre la parole. Vous avez 20 minutes.
Mme Setlakwe : Merci, Mme la
Présidente. Bien, bonjour à vous tous. À mon tour de prendre la parole, puis je
pense que c'est important de le faire, pas dans l'optique d'étirer le temps,
pas du tout, mais parce que le dossier, il est extrêmement important. La pièce
législative qui a été déposée par le gouvernement a suscité beaucoup de
discussions, une revue de presse importante, des réactions fortes de la part du
milieu de l'enseignement supérieur notamment, et donc énormément d'inquiétudes
ont été exprimées. Alors, je pense...
Mme Setlakwe : ...que
c'est tout à fait opportun qu'on prenne le temps d'exprimer, réitérer ces
inquiétudes, ces préoccupations, et qu'on prenne le temps aussi, avant,
d'étudier le projet de loi, de comprendre surtout la problématique, quelle est
la problématique qu'on souhaite corriger, qu'on souhaite... pour laquelle on le
souhaite, que le gouvernement souhaite se donner les outils. Et je dois dire
que je ne la saisis toujours pas et que ce semble être... La problématique
semble être une cible mouvante, encore cet après-midi. Et je m'explique.
• (16 h 10) •
J'ai entendu le ministre parler de... Et
d'ailleurs, c'est en lien avec la documentation qui a été déposée, là, les
procédures judiciaires. Le ministre a dit, donc, essentiellement qu'il y a
des... qu'il y a des problématiques dans certains établissements, que le
gouvernement a des... que les pouvoirs du gouvernement sont inadéquats, que le
statu quo n'est pas tenable, etc., et qu'il est donc important de pouvoir agir
de manière chirurgicale. Donc, on laisse... Ça laisse sous-entendre qu'il y a
une problématique bien ciblée.
Or, il dit également, il l'a dit également
cet après-midi, qu'en 10 ans, l'augmentation, elle est beaucoup trop
importante. 140 % c'est énorme. Et ça, ce n'est pas la première fois qu'on
entend ça de la part du gouvernement. Le premier ministre, d'ailleurs, quand le
projet de loi avait été déposé, il avait été interpelé par les journalistes, et
sa réaction fut de dire : 120 000! 120 000 sur notre territoire!
Mais c'est énorme! Comme si c'était un fléau, comme si c'était un problème et
comme si c'était inattendu ou, tu sais, que ça suscitait une surprise. Il faut
se rappeler que l'arrivée des étudiants ou l'augmentation de l'arrivée des
étudiants internationaux, c'est quelque chose qui est visé par les objectifs du
gouvernement depuis, donc, pas seulement en enseignement supérieur par le biais
de la... de la stratégie, mais aussi au niveau des autres ministères.
Au niveau même du ministère de la Langue
française, là, on dit, dans le mémo qui a été adressé au Conseil des ministres,
que c'est une volonté affirmée d'augmenter le nombre d'étudiants étrangers
francophones. Ça avait été prévu par le Plan pour la langue française. Et donc
il y a une augmentation du nombre d'étudiants internationaux sur notre
territoire, et ça ne devrait pas être une surprise. Et c'est d'ailleurs quelque
chose qui... En tout cas, soyons clairs, de ce côté-ci de la table, du côté de
l'opposition officielle, notre vision ou la façon dont nous voyons les
étudiants internationaux, elle est très positive. Les étudiants internationaux
ne représentent pas un problème en ce qui nous concerne. Ça, c'est le principe.
Et ça, c'est le principe général, et j'aimerais vraiment que ce soit très
clair, pour des raisons que, nous, nous croyons extrêmement importantes pour la
capacité du Québec à innover sa capacité de recherche. Il y a des impacts sur
l'économie, je vais y venir. Alors ça, il faut que ce soit clair.
Alors, le principe général, les étudiants
internationaux ne sont pas un problème pour nous. S'il y a une problématique
bien ciblée dans certains établissements, bien, qu'on la nomme, et travaillons
sur cette problématique, et assurons-nous, comme législateurs, que le... que
les... que le projet de loi, que les pouvoirs qui seront octroyés, les pouvoirs
de procéder par décret, par règlement, etc., qu'ils soient adéquats, qu'ils
soient mesurés, qu'ils soient... qu'ils ne soient pas excessifs.
En ce moment, la pièce législative qu'on a
sous les yeux, elle est... elle est floue. Et c'est une pièce législative pour
laquelle, Mme la Présidente, nous sommes incapables de dégager une vision
claire. Et dans son libellé actuel, les pouvoirs qui sont octroyés au
gouvernement peuvent avoir des conséquences négatives tellement grandes pour le
réseau de l'enseignement supérieur qu'on a dû voter contre le principe.
Maintenant, le gouvernement doit nous
démontrer quelle est la problématique, encore une fois, et quels sont les
pouvoirs qui sont nécessaires pour répondre à cette problématique-là sans
affecter négativement notre réseau d'enseignement supérieur? Il semble,
honnêtement, en ce moment, Mme la Présidente, sincèrement, là, que le projet de
loi, il est construit sur des bases qui ne se tiennent pas. Ça, je l'ai entendu
d'ailleurs dans plusieurs des rencontres que j'ai eues avec les recteurs, avec
des dirigeants des cégeps. Ce qui s'est dégagé jusqu'à maintenant, ce n'est que
des inquiétudes, que des préoccupations. J'aimerais les...
Mme Setlakwe : ...j'aimerais
les réitérer, c'est extrêmement important, il y a des conséquences, donc,
potentiellement négatives, directement sur nos institutions d'enseignement et
il y a aussi des conséquences beaucoup plus larges sur la société québécoise,
des risques beaucoup plus généraux si les nouveaux pouvoirs sont mal utilisés.
Il faut se le rappeler, et ça a été dit par des collègues, les pouvoirs qui
vont être octroyés par le biais du projet de loi n° 74 vont lier le
gouvernement actuel mais également les gouvernements futurs.
Pour ce qui est des impacts directs sur
nos institutions d'enseignement, on parle ici d'une ingérence dans la
gouvernance des universités. Non, mais c'est sérieux, là, les universités
parlent d'une seule voix et demandent d'être exclues de l'application du projet
de loi. C'est très clair. Tous les mémoires disent la même chose. Et le BCI, le
Bureau de coopération interuniversitaire a signé une lettre datée du
12 novembre. Ils ont senti le besoin. En plus de tous les mémoires, toutes
les consultations, toutes les présentations qui ont eu lieu, ils ont signé une
lettre, ils l'ont adressée à la ministre de l'Enseignement supérieur et au
ministre de l'Immigration, signée par le recteur de l'Université du Québec à
Trois-Rivières. Mais toutes les universités cosignent cette lettre et réitèrent
leur demande, elle est très claire, là, d'être exclues. «Notre demande, c'est
d'exclure les établissements universitaires québécois du projet de loi
n° 74. D'autres avenues peuvent être envisagées conjointement, dans le
respect de l'autonomie universitaire, pour assurer une stabilisation de l'immigration
étudiante au Québec.» Donc, c'est assez clair, Mme la Présidente, que le projet
de loi, dans son état actuel, il suscite des inquiétudes vives si les
universités souhaitent en être exclues et la Fédération des cégeps aussi. Ils
sont venus nous dire : S'il y a des problématiques, elles ne viennent pas
de la part de... elles ne viennent pas de chez nous. Donc, l'autonomie des
institutions sera brimée par ce projet de loi là.
Et d'ailleurs le recteur de l'Université
du Québec à Trois-Rivières, Christian Blanchet, a signé une lettre ouverte la
semaine dernière, qui a paru dans Le Devoir, Une brèche dans l'autonomie
universitaire : «Il est crucial de souligner — je le cite — l'incidence de
ce texte législatif sur l'autonomie universitaire, un pilier fondamental de
notre système d'enseignement supérieur.»
Le projet de loi va donner le pouvoir au
gouvernement d'aller s'immiscer dans ces dossiers-là, dans ces processus de
recrutement qui relèvent de nos universités. Il faut faire également très
attention au manque de prévisibilité pour les institutions. Ils sont venus nous
dire que le processus de recrutement, ce n'est pas un processus qui se fait en
quelques jours. On ne peut pas simplement ouvrir le robinet et fermer le
robinet. C'est un processus qui se fait en continu sur des années. En se
donnant le pouvoir réglementaire, le gouvernement va pouvoir à tout moment
ouvrir... fermer ou ouvrir des programmes de recrutement à l'international. Il
sera ainsi impossible pour les établissements de faire une stratégie fiable de
promotion et de mise en marché de ces programmes.
Dans un contexte de compétitivité mondiale
et de mondialisation des talents, il peut y avoir des effets extrêmement
néfastes, Mme la Présidente. Il y a non seulement, donc, un impact sur les étudiants
eux-mêmes, il y a un impact sur le recrutement des enseignants. Également, dans
la lettre de M. Blanchette, il est venu dire qu'un encadrement politique trop
restrictif rendra le recrutement des professeurs talentueux, qu'ils soient
québécois ou internationaux, plus difficile puisque le développement de leur
recherche pourrait arbitrairement être contraint par des décisions politiques
découlant de cette loi.
Il faut également parler de l'impact
financier sur les institutions. Il faut se rappeler que la politique de
financement, la nouvelle politique de ce gouvernement qui a été déposé en juin
dernier, compte sur la hausse des droits de scolarité pour redistribuer
l'argent dans le reste du réseau. Mais, si les inscriptions sont à la baisse
puis si on vient plafonner le nombre d'étudiants internationaux, bien, il y
aura clairement un impact financier négatif dans tout le réseau. La baisse
d'effectif va toucher tout le monde, donc tout le monde va se partager une plus
petite tarte. Et moi, je vois ici une incohérence, là. Il faut tout regarder ça
de façon interreliée. La nouvelle politique de financement, ce projet de loi
là, on se demande si les différents ministères se parlent, si...
Mme Setlakwe : ...gauche
parler à la main droite. Mais tout ça a été mis de l'avant durant les
consultations. C'est simple, donc, une perte d'étudiants internationaux va
entraîner une perte de subventions.
• (16 h 20) •
Encore une fois, le recteur de
l'Université du Québec à Trois-Rivières, qui dirige le BCI, il est venu
donner... il a donné des entrevues, comme... comme bien d'autres l'ont fait, et
il a parlé de... il a donné... il a donné un exemple. D'ailleurs, je pense que
ça... c'était suite à des discussions qu'il avait eues avec la ministre de
l'Enseignement supérieur. Il disait : Si on réduit de 30 %... parce
qu'on ne connaît toujours pas la cible du gouvernement... si on réduisait de
30 % les étudiants internationaux, cette réduction entraînerait des coupes
budgétaires de l'ordre de 120 à 170 millions de dollars, donc,
disons, 150 millions. Mais il ne faut pas penser que c'est les
institutions financières, directement, là, qui sont si riches, là, qui vont
être impactées. Non, non, ces... ces montants d'argent sont importants pour les
étudiants. Ça va être des coupures qui vont affecter directement l'ensemble du
réseau, les services offerts aux étudiants dans tout le réseau. C'est avant...
avant tout, c'est eux qu'il faut considérer. C'est des programmes qui vont être
fermés, des programmes dans des régions, des programmes qui sont importants
pour les étudiants en région, notamment dans des domaines de pointe, dans des
domaines de sciences, technologie, mathématiques, etc. Il faut penser à ça, et
c'est normal qu'on... qu'on agisse avec prudence puis qu'on... on s'assure
d'avoir une réflexion approfondie avant de donner notre aval, comme le souhaite
le ministre. Et souhaitons qu'à la fin du processus on puisse, de façon
unanime, adopter ce projet de loi là, mais on est vraiment loin d'en arriver
là.
Je continue, là, au niveau de l'impact
financier. Au niveau de la recherche, s'il n'y a pas de chercheurs, bien, il
n'y a pas d'argent pour financer la recherche. Puis là, ici, je ne pense pas
juste à McGill, puis... puis le fait que McGill soit renommé non seulement au
niveau de la recherche, mais au niveau de l'enseignement. À ces deux titres là,
McGill, il est extrêmement haut dans les... dans les palmarès, et il faut en
être très fiers. On peut penser... en région, on peut penser à l'UQO,
l'Université du Québec en Outaouais. Ils sont très performants également, pour
les citer en exemple, au niveau de la cybersécurité. Ailleurs, comme à
l'Université de Sherbrooke, ils sont très performants aussi dans des domaines
nichés. L'institut... Ils ont un institut quantique. Évidemment, il faut
ajouter à tout ça la recherche qui se fait en médecine au Québec, en
collaboration avec nos centres hospitaliers universitaires.
Donc, il faut réfléchir, là. Quand on
parle d'étudiants internationaux, on parle de cerveaux, on parle de cerveaux,
de talents dont on a besoin, ici, dans nos laboratoires de recherche,
notamment, et tout ça favorise l'économie, tout ça est très bénéfique pour le
Québec. Et toutes les universités parlent d'une même voix, le réseau
anglophone, le réseau francophone. Le président de l'UQ, Alexandre Cloutier, il
est venu parler de... du fait qu'il y a une augmentation du nombre d'étudiants
internationaux dans son réseau. Il en est très fier, il en est très satisfait,
il voudrait que ça continue. C'est une... une population étudiante francophone.
Il est très inquiet pour la vitalité des programmes de... il est inquiet pour
la recherche, il est inquiet pour le développement régional, sur l'emploi, sur
les ententes, aussi, avec les partenaires à l'international. Honnêtement, on a
besoin d'être rassurés sur tous ces éléments-là, Mme la Présidente.
Je reviens à la question des incohérences,
non seulement en lien avec la politique de financement, mais le plan
stratégique du ministère de l'Enseignement supérieur dit, noir sur blanc... un
plan stratégique qui date de 2023... que l'internationalisation de
l'enseignement supérieur, c'est souhaité, c'est ce qu'on veut. On veut que le
Québec soit présent, soit compétitif dans cette course mondiale aux talents. Et
donc comment se fait-il que le gouvernement se surprenne qu'on ait comblé
l'écart qu'on avait avec d'autres provinces, que... que les chiffres soient à
la hausse? Encore une fois, quelle est la problématique? Qu'est-ce qu'on est en
train de vouloir faire ici? Qu'on cesse de se surprendre que le nombre
d'étudiants internationaux, généralement, est à la hausse. Il est à la hausse,
surtout, dans les universités et dans le réseau francophone. Au niveau des
universités anglophones, c'est plutôt stable. Donc, encore une fois, il va
falloir qu'on clarifie qu'est-ce qu'on est en train de faire, parce qu'on ne
pourra pas avoir une discussion intelligente, là, puis, avec une cible
mouvante, ça ne fonctionnera certainement pas. D'ailleurs, le premier ministre,
en 2022, avait reconnu le... le statut distinct des étudiants internationaux,
alors c'est une... c'est très difficile à suivre ici.
Et on se demande : Pourquoi est-il
nécessaire d'adopter un projet de loi avec des... des pouvoirs aussi larges,
une vision qui est si... qui est si floue, des cibles qui ne sont pas
définies...
Mme Setlakwe : ... Avec tous
ces... toutes ces inquiétudes qui planent, Mme la Présidente, c'est... c'est
franchement... c'est franchement étonnant.
Il faut mentionner également la baisse
démographique. On dit qu'on a trop d'étudiants - mais c'est ce que le
gouvernement dit - trop d'étudiants internationaux, mais il est clairement
documenté qu'il y a une baisse démographique et que les étudiants
internationaux, puis ce n'est pas juste moi qui le dis, là, c'est encore une
fois dans la lettre du BCI, viennent compenser la baisse démographique des
étudiants québécois.
Ils ont... Ils sont venus dire donc
encore, les universités, bien, d'un, de... Excluez-nous complètement du projet
de loi. Mais soyez très vigilants, soyez très précis, dans les chiffres que
vous utilisez vous devez parler du nombre de personnes inscrites aux différents
cycles d'études, c'est des informations qui sont partagées avec le ministère de
l'Enseignement supérieur, et au niveau des universités c'est 57 440 étudiants
internationaux universitaires inscrits à l'automne 2024. Puis, quand ils
viennent... Donc, ça, c'est un des points importants qu'il faut retenir de leur
lettre, il faut vraiment s'en tenir aux données officielles sur les
inscriptions.
Et, pour ce qui est de la croissance de
140 000 qui s'est... qu'on a vécue donc sur une période de 10 ans, bien,
la part des universités, c'est 57 000, encore une fois, puis que c'est la
croissance effective des inscriptions qui est le seul vecteur à retenir dans
cet exercice d'analyse, qui a donc été de 55,71 % en 10 ans. Ça fait que,
quand... Il faut faire attention quand on parle de 140 %, puis de grandes
surprises, puis de grandes affirmations générales, là. Il va falloir qu'on décortique
tout ça, puis là, ici, je pense à ce que mon collègue de
Saint-Henri-Sainte-Anne a dit, qu'on parte des mêmes chiffres, qu'on parle des
mêmes chiffres, qu'on parle de la même prémisse de base puis qu'on soit très,
très clair sur la problématique. Mais, en ce qui me concerne puis en ce qui
concerne les universités, tous les mémoires pointent dans la même direction, et
le BCI est venu ajouter... en ajouter une couche avec cette lettre co-signée
par tout le réseau : Écartez-nous complètement de ce projet de loi là.
Et puis donc je revenais à mon idée. Je
voulais les citer encore une fois, on peut les citer sur tellement de volets.
Mais, sur la question de la baisse démographique, donc, la croissance du nombre
total des inscriptions, en fait, a été de 3,3 % dans leurs établissements,
les effectifs étudiants totaux, locaux et internationaux, étant passés de
308 000 à 318 000. Écoutez, les chiffres sont là.
Je reviens à... Je reviens au début de mon
intervention. J'aurai d'autres occasions, donc, de parler des conséquences plus
larges, là, sur la société québécoise si on n'agit pas avec prudence dans ce
dossier-là. Mais je... Encore une fois, la question demeure entière :
Qu'est-ce qu'on essaie de faire?
On a entendu... Même dans les deux jours
de consultation, le discours du ministre, avec tout respect, il semble avoir
évolué durant les deux jours. Le premier jour, il semblait y avoir une
problématique, problématique au niveau du logement, problématique au niveau
du... peut-être du français, de la francisation, etc. Jour deux, c'était :
Non, non, c'était... Effectivement, les étudiants internationaux sont une
grande richesse, c'est un atout crucial. Mais il y a des situations abusives de
dérapage, et là, le fédéral vient aussi... vient aussi... donc entre en jeu,
évidemment, parce que c'est une compétence partagée, mais, avec les annonces
récentes du fédéral, c'est ce qui nous pousse à agir, alors là qu'aujourd'hui,
on apprend que c'est plutôt suite à des... avoir été débouté en cour que...
que... qu'on... On s'assoit plutôt là-dessus, là, pour justifier le projet de
loi.
Donc, en résumé, Mme la Présidente, nous,
à l'Opposition officielle, on aimerait vraiment comprendre quel est le
problème, pour qu'on puisse avoir une discussion intelligente puis s'assurer de
mettre de l'avant une solution qui soit adéquate, et puis, pour citer les
recteurs d'université, qu'on ne soit pas en train de prescrire un médicament
avec des effets secondaires indésirables.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup, Mme la députée. Est-ce que d'autres membres
désireraient faire des remarques préliminaires?
Alors, s'il n'y a pas d'autre membre, on
en est maintenant rendu à l'étape des motions préliminaires. J'ai compris qu'il
y a une motion préliminaire qui va être déposée par l'opposition officielle.
Alors, est-ce que vous avez envoyé la motion, pour qu'elle soit sur Greffier?
• (16 h 30) •
M. Morin : Oui. Oui, Mme la
Présidente, la motion préliminaire a été envoyée, pour qu'elle soit sur
Greffier.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : On va l'ouvrir.
M. Morin : Oui, c'est ça.
Elle est peut-être encore dans l'univers, mais elle devrait arriver chez vous à
un moment donné...
16 h 30 (version non révisée)
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : ...si on ne l'a pas, on va suspendre quelques instants,
mais on va regarder par le moyen de. Si nous l'avons... Motion préliminaire,
bon, on va l'ouvrir, puis je vais vous demander, M. le député, d'en faire la
lecture. Allez-y.
M. Morin : Merci. Alors,
motion préliminaire, Mme la Présidente : «Conformément à l'article 244 du
règlement de l'Assemblée nationale, je fais motion afin que la Commission des
relations avec les citoyens, dans le cadre de l'étude détaillée du projet de
loi n° 74, Loi visant principalement à améliorer l'encadrement relatif aux
étudiants étrangers, tienne des consultations particulières et qu'à cette fin,
elle entende la ministre de l'Enseignement supérieur.»
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Alors, je vais vous demander... Vous avez une période de
temps pour expliquer votre motion préliminaire, par la suite, on y va en
alternance.
M. Morin : Oui, tout à fait.
Merci. Je crois avoir une période de 30 minutes, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Exactement, oui.
M. Morin : Voilà. Donc...
Alors, je propose... je dépose... J'ai fait lecture de cette motion
préliminaire, parce qu' à la lecture du projet de loi, bien sûr, qui traite d'immigration,
d'encadrement relatif aux étudiants étrangers, mais quand on regarde le
document, quand on regarde le texte, au fond, on se rend compte qu'il y a une
grande absente, et c'est la ministre de l'Enseignement supérieur, parce qu'à
mon avis ce projet de loi va venir directement impacter son travail, son mandat
en ce qui a trait à l'enseignement supérieur au Québec.
D'ailleurs, quand on regarde le projet de
loi, on dit, entre autres, que «le ministre - n'est-ce pas - pourrait prendre
des décisions - et là je suis à l'article deux du projet de loi - en tenant
compte notamment des orientations, des objectifs fixés au plan annuel d'immigration,
mais des besoins économiques, de main-d'oeuvre, plus besoin de favoriser une
diversité de provenance des demandes de sélection, de considérations
humanitaires, de toute situation susceptible de compromettre la santé, la
sécurité, le bien-être des personnes immigrantes, de la capacité d'accueil et d'intégration
du Québec ou de l'intérêt public».
Donc, d'une part, c'est excessivement
large. D'autre part, d'autre part, ça dit bien que ces décisions-là doivent
être prises, notamment, avec consultation auprès de la ministre de l'Enseignement
supérieur. Donc, quand on regarde ceci, bien sûr, il y a un objectif recherché
par le gouvernement, qui est évidemment d'avoir un impact sur l'immigration,
sur les étudiants internationaux, étrangers. Mais, quand on est... on a écouté
attentivement, en consultations particulières, l'ensemble des groupes, au fond,
on s'est rendu compte que la très grande majorité était des groupes, des
associations, des experts, des hauts gestionnaires, des cadres en lien avec le
domaine de l'éducation et de domaine de l'éducation supérieure au Québec.
L'impact, l'impact de ce projet de loi va
se faire sentir chez la ministre de l'Enseignement supérieur, d'où l'importance,
évidemment, de l'entendre en commission parlementaire pour qu'on soit capable, Mme
la Présidente, de véritablement bien comprendre l'impact qu'aura le projet de
loi sur son mandat et sur, notamment, les universités et les cégeps. Pourquoi
je vous dis ça? Bien, i y a quelques raisons, la première, je le soulignais
dans le cadre de mes remarques préliminaires, le projet de loi est flou, et on
ne comprend... En tout cas, moi, je ne comprends toujours pas ce que le
ministre essaie de régler. Donc, au moins, je voudrais qu'on soit capables, la
commission parlementaire, donc, un organe du Parlement, d'avoir tous les
renseignements, toute l'information pour être capable de faire notre travail,
évidemment, d'une façon efficace, comme parlementaires.
Je vous dis ça, parce que, et ma collègue
la députée de ville Mont-Royal-Outremont y faisait référence, il n'y a pas
longtemps, en fait, très peu de temps, en novembre 2024, après les
consultations particulières, les recteurs, chefs d'établissements
universitaires québécois ont fait parvenir une lettre, d'abord et avant tout, à
la ministre de l'Enseignement supérieur et au ministre de l'Immigration pour
leur rappeler à nouveau, à nouveau, l'impact de ce projet de loi. Et les mots
qu'ils utilisent sont quand même parlants, mais aussi très forts. On écrit,
dans le premier paragraphe, et je me permets de les citer...
M. Morin : ...nous croyons que
cette éventuelle loi aura des effets très négatifs pour nos établissements et
pour le Québec.» Ce n'est pas banal, là. Alors, je tiens à le répéter, «des
effets très négatifs pour nos établissements et pour le Québec». Et là, qui
écrit ça, Mme la Présidente? L'ensemble des chefs d'établissements
universitaires québécois, pas n'importe qui. Kathy Baig, directrice générale de
l'École de technologie supérieure, Maude Cohen, directrice générale,
Polytechnique Montréal, un centre reconnu à travers le monde. Sophie D'Amours, rectrice,
Université Laval, Daniel Jutras, recteur, Université de Montréal. Sébastien
Lebel-Grenier, principal et vice-chancelier, Université Bishop's, Vincent
Rousson, recteur, Université du Québec en Abitibi-Témiscamingue, Graham Carr,
recteur et vice-chancelier de l'Université Concordia, Pierre Cossette, recteur,
Université de Sherbrooke, François Deschênes, recteur, Université du Québec à
Rimouski, Murielle Laberge, rectrice, Université du Québec en Outaouais,
Stéphane Pallage, recteur, Université du Québec à Montréal, Deep Saini,
recteur, vice-chancelier, Université McGill, Alexandre Cloutier, président de
l'Université du Québec, donc, ce qui chapeaute le réseau. Hugo Cyr, directeur
général. L'École nationale d'administration publique, notre école nationale,
qui vise, entre autres, à former des gestionnaires de haut calibre, qui, entre
autres, vont œuvrer au sein de notre fonction publique québécoise. Et ça, on
peut en être très fiers. C'est une école de haut niveau. Et on a au Québec une
qualité au sein de nos gestionnaires, une très grande qualité de gens qui se
dévouent pour la société québécoise. Luc Alain Geraldo, directeur général,
Institut national de la recherche scientifique, ce n'est pas banal. Lucie
Laflamme, directrice générale de l'université TELUQ, Federico Pasin, directeur
HEC Montréal, et Ghislain Samson, recteur, Université du Québec à Chicoutimi.
Toutes ces personnes-là ont signé cette
lettre et, je le répète, ils croient, tous ces gens-là, que «cette loi aura des
effets très négatifs pour nos établissements et pour le Québec». Donc, il me
semble qu'entendre la ministre de l'Enseignement supérieur, à qui toutes ces
personnes-là ont écrit, il est essentiel... ça m'apparaît essentiel qu'on fasse
un arrêt ici puis qu'on l'entende. M. le ministre nous parlait d'ouverture. Je
ne sais pas s'il aura cette ouverture, je l'invite, mais il me semble que c'est
excessivement parlant. Ça commence comme ça.
Et, par la suite, par la suite, tous ces
gens-là nous parlent de l'impact du projet de loi. On nous parle de chiffres,
mais on nous parle aussi, bien sûr, de la cohérence des politiques publiques du
Québec. On souligne qu'ils sont profondément convaincus, et je cite,
«qu'au-delà de la question litigieuse des chiffres...», parce que permettez-moi
de faire un aparté, on en parlait des chiffres, tout à l'heure. Les chiffres,
là, ça se promène de tout bord, tout côté, 120 000, 130 000,
110 000. Écoutez, on y perd... on y perd... j'allais dire : On y perd
notre latin, c'est une langue morte, on y perd notre français quasiment. Ça n'a
pas de bon sens. Au niveau universitaire, c'est 57 450, selon le Bureau de
coopération universitaire. Puis, si on ajoute les 20 000 quelques des
cégeps, moi, j'arrive à 77 600. On est loin des 123 000. Ils sont où,
les autres? Je n'en ai aucune idée. Mais peut-être qu'à un moment donné le
ministre va être capable de nous aider. Je l'invite à le faire, mais...
Mais alors, ils nous disent :
Écoutez, au-delà des chiffres, là, il y a quand même des enjeux de taille. On
nous dit même : «Au niveau, notamment, des projets de recherche soutenus
par la Stratégie québécoise de recherche et d'investissement en innovation,
SQRI, dans lequel l'État québécois investit en finançant divers programmes,
donc, avec notre argent et des bourses, ils seraient très difficiles, voire
impossibles à réaliser dans certains cas sans l'apport des étudiants
internationaux recrutés par nos équipes de recherche.» Écoutez, le langage est
quand même fort. Moi, je tiens... je tiens à prendre du temps, là, pour que le
public qui nous écoute...
M. Morin : ...comprennent,
comprennent ce qu'on est en train de faire ici, puis comprennent aussi pourquoi
nous, de l'opposition officielle, bien, quand je lis les dispositions du projet
de loi, quand je lis ces témoignages, bien, il faut en parler, il faut les
rendre publics, il faut l'expliquer. Ça m'apparaît essentiel.
• (16 h 40) •
Donc, très difficile, voire impossible, de
réaliser des programmes de recherche, des programmes de financement. Puis la
recherche, la recherche au niveau universitaire, c'est fondamental, c'est en
lien avec l'innovation, c'est en lien avec, évidemment, le rayonnement du
Québec. Plusieurs, plusieurs sont venus nous dire, parmi les recteurs et
rectrices d'université : Ce n'est pas juste des étudiants, Mme la
Présidente. Il y a des étudiants aux études supérieures qui oeuvrent dans des
centres de recherche, qui reçoivent des subventions importantes, que ce soit du
gouvernement du Québec ou du gouvernement fédéral. Ces programmes-là fonctionnent
grâce à des sommes donnés pour faire de la recherche. Évidemment, s'il n'y a
plus d'étudiants, bien, ils n'en auront plus d'argent, forcément, ils ne feront
pas de recherche. Ces gens-là vont aller ailleurs, puis le Québec va perdre.
Alors, ça, c'est un élément que je tiens absolument à souligner. Puis ça, là,
ça va avoir un impact directement chez la ministre de l'Enseignement supérieur.
Maintenant, permettez-moi de vous parler
de l'autonomie universitaire. J'en ai parlé tout à l'heure dans mes remarques
préliminaires, mais je veux insister à nouveau sur l'importance de la liberté
académique universitaire. Donc l'autonomie universitaire, ça fait partie...
c'est une composante de cette liberté académique. Et, croyez-moi, j'ai été le
premier à être surpris de lire l'article 3 du projet de loi. Une décision
pourrait être prise pour cibler ou pour faire en sorte qu'on mettrait de
l'avant, dans le plan annuel d'immigration, des objectifs pour des besoins
économiques ou autres, de main-d'œuvre, etc. Alors, qu'est-ce qui va arriver si
le ministre, dans sa planification, décide à un moment donné — je ne
sais pas, c'est une hypothèse — de financer ou d'accepter un nombre
d'étudiants dans un programme plutôt qu'un autre puis que ça a un impact
direct, direct sur des programmes universitaires dans nos universités? Bien là,
on va mettre à mal des efforts qui ont été faits, des investissements, de la
planification, et ça, c'est important puis ça va avoir un impact directement
dans le ministère de l'Enseignement supérieur, ça m'apparaît évident, évident.
Mais il n'y a pas juste ça, il n'y a pas
juste ça. Les recteurs d'université sont venus nous dire, Mme la Présidente,
qu'un programme universitaire, un programme de recherche, ça se développe, ça
prend des années, ça prend des années pour être réalisé. Donc là, dans sa
planification, si le gouvernement change à gauche et à droite de priorité, ça
va devenir tout à fait ingérable. D'ailleurs, d'ailleurs, on le voit, le projet
de loi n'est pas adopté, mais déjà il y a suffisamment d'informations qui ont
été partagées à l'étranger, dans le monde puis au Québec, qu'il y a moins
d'étudiants qui viennent des universités québécoises, ce qui crée un enjeu puis
une pression sur les programmes dans les universités. Encore là, je me répète,
dans les universités. Donc, ce n'est pas uniquement de l'immigration. Alors, ça
va avoir un impact directement chez la ministre de l'Enseignement supérieur.
Alors, c'est important, c'est important de le souligner.
Et ce qu'il faut savoir également, c'est
qu'en plus, en plus, tout dépendant de ce qui va être décidé ici, bien, ça
pourrait avoir un impact sur des ententes de collaboration avec des universités
d'autres pays. Imaginez, vous avez un jumelage entre une université québécoise
et une université en Europe qui facilite le passage, l'attrait d'étudiants
étrangers vers le Québec. C'est un exemple. Prenons un domaine en histoire,
sciences sociales, sociologie. Et le ministre de l'Immigration décide... bon,
je comprends qu'il va devoir consulter ses collègues, mais il décide que, dans
le plan annuel d'immigration : ah! ce n'est pas en lien avec des besoins
trop, trop économiques, ce n'est pas ça qu'il faut, ce n'est pas nécessairement
une priorité. Il n'y a pas de considérations humanitaires, donc, oups., on
coupe les rames. Ces universités-là, elles vont faire quoi? Si vous avez des
programmes de recherche importants dans ces domaines-là, ils vont être quoi?
Ils n'auront plus d'étudiants, donc ils n'auront plus de revenus, donc ils vont
mettre à mal les programmes. Alors, c'est un appauvrissement...
M. Morin : ...c'est une
diminution importante et il faut, il faut le souligner parce que ces
ententes-là, bien, sont présentement en vigueur. D'ailleurs, dans la lettre,
bien, la ministre des Relations internationales était... Évidemment, c'est...
Ici, ça peut avoir un impact. Donc, demain matin, là, woups! ça, ça pourrait
disparaître ou avoir un impact négatif.
Donc, permettez-moi de vous souligner que
ce n'est pas ce qu'on recherche, nous, dans l'opposition officielle, très
clairement, très clairement. Mais également, également, tous ces chefs
d'universités nous disent qu'il y a lieu de veiller, et je les cite, «à ce que
ces établissements d'enseignement puissent accomplir leur mission sans
contrainte doctrinale, idéologique ou morale. Dans cette perspective, s'y
attaquer par le biais en particulier de l'article 5 du projet de loi
no 74 met en cause les fondements mêmes de l'institution qu'est
l'université et, par conséquent, c'est ce que je vous disais, Mme la
Présidente, sa capacité à planifier son offre de formation et de développement
de la recherche à court, moyen et long terme». C'est l'impact que ce projet de
loi pourra avoir s'il est adopté tel qu'il est.
Alors, quand M. le ministre, tout à
l'heure, nous disait : Écoutez, je suis prêt à faire preuve d'ouverture,
moi, j'appelle ça d'une façon très favorable comme porte-parole de l'opposition
officielle en matière d'immigration, ma collègue en matière d'enseignement
supérieur, parce que, quand je lis ce que tous ces gens-là ont écrit et que je
m'attarde à l'impact qu'ils nous décrivent, bien, je me dis : Il me semble
qu'il faudrait... il ne faudrait pas aller trop vite. Il faudrait penser
véritablement à ce qui va arriver si ce projet de loi là est adopté. Donc,
impact sur l'autonomie universitaire, impact sur leur mission de recherche,
notamment fondamentale, impact sur des initiatives où il y a des ententes avec
d'autres universités à travers le monde. Donc, les impacts sont nombreux et ils
sont importants.
On l'a dit, je le répète, les étudiants
universitaires internationaux sont une richesse pour le Québec. C'est
d'ailleurs ce qu'on nous dit ici. C'est une carte gagnante pour le Québec. Moi,
au niveau du développement économique, je trouve qu'une carte gagnante, ça en
dit long puis c'est vraiment important. Je pense qu'il faut tout faire pour
être capable de miser là-dessus, de l'encourager. Ce sont, selon ce que les
chefs d'université nous disent, les immigrants, les étudiants internationaux,
ils les appellent des immigrants modèles. Nos établissements les sélectionnent
avec soin. On investit pour leur accueil, pour leur accompagnement, pour des
activités d'intégration de qualité. Elles sont au plan des stratégies
institutionnelles des prochaines années. Alors, quand je vous disais, Mme la
Présidente, qu'un programme universitaire, un programme de recherche
universitaire, ça se planifie sur des années, bien là, on en a la preuve. Ce
n'est pas moi qui le dis, c'est l'ensemble des recteurs, rectrices des
universités au Québec.
Donc, on ne peut pas venir changer ça en
quelques mois. Ça ne peut pas fonctionner comme ça. Ou bien on comprend mal
comment fonctionne un centre de haut savoir qui est une université, puis qu'on
veut tout changer en l'espace de quelques mois, ou on respecte ceux qui le
font. Puis à ce moment-là, bien, il va falloir d'une façon très, très claire,
réévaluer le projet de loi, parce que c'est antinomique, ça ne fonctionne pas,
ça ne fonctionne pas.
Donc, les étudiants internationaux sont au
cœur des plans stratégiques institutionnels, et en diminuer le nombre met en
cause nos stratégies d'action visant à l'excellence, mais ça a aussi un impact
sur la pertinence sociale et scientifique des contributions, puis notamment au
développement du Québec. Ça a aussi un impact sur la prévisibilité. Je vous en
parlais, Mme la Présidente, dans le cadre de mes remarques préliminaires. Pour
moi, un projet de loi doit être un document législatif qui va d'abord et avant
tout permettre quelque chose qui est prévisible, qui va permettre aux citoyens
et aux citoyennes de s'y conformer, de comprendre ce qui se passe. C'est pour
ça...
M. Morin : ...qu'un
gouvernement, qu'une assemblée législative légifère. Là, on est en train de faire
exactement le contraire. Ce qu'on va créer, c'est une absence de prévisibilité,
ce qui n'est pas une bonne chose non plus. Tous ces gens-là nous disent qu'ils
sont très préoccupés par les effets sur la scène internationale des multiples
changements des dernières années sur les conditions d'immigration. Là, on
déborde, le projet de loi numéro 74, mais c'est aussi vrai.
• (16 h 50) •
Et mes collègues députés en parlaient tout
à l'heure dans leurs remarques préliminaires, il y a des changements à tout
bout de champ, là, puis pas toujours bien expliqués. On a l'impression que,
woups, il y a un petit coup de vent par ici, on s'en va par là, on s'en va par
là. Nous, ce n'est pas pour rien, que, dans l'opposition officielle, on a
demandé un bureau intégré de la planification en matière d'immigration. Ce
n'est pas pour rien. C'est pour que le gouvernement soit capable d'expliquer ce
qu'il veut faire puis qu'on soit capables de comprendre. Ce n'est pas pour
rien, qu'on a demandé au gouvernement d'adopter une loi dans sa planification
pour tenir compte des travailleurs temporaires étrangers. Heureusement, le
gouvernement nous a entendus. Une réalisation de l'opposition officielle. Mais
ça, ça permet une prévisibilité, madame la Présidente, et c'est ça qu'on veut.
C'est ça qu'on veut pour le Québec.
On nous dit également : La réputation
du Québec est déjà lourdement entachée en matière d'immigration étudiante, et
là on dit : Il suffit de consulter les médias sociaux traditionnels
internationaux pour en mesurer l'ampleur. Et donc, là, je fais appel au
ministre, je fais appel à son ouverture. L'effet de refroidissement est
évident. Alors, ce qu'ils nous demandent, et c'est logique, c'est cohérent,
évidemment, c'est de les exclure, exclure les établissements universitaires du
projet de loi pour qu'ils soient capables de remplir leur mission.
Puis, quand on regarde au niveau
universitaire, madame la Présidente, le nombre d'étudiants internationaux par
établissement, et j'ai comme source le Bureau de coopération
interuniversitaire, c'est le chiffre que je vous donnais tout à l'heure,
57 450. Ce n'est quand même pas un chiffre qui est énorme. Puis, quand on le
répartit par université, bien, tout dépendant où on est, on parle de
58 personnes, 435... bon. Évidemment, si vous regardez UdeM, HEC, Poly
Montréal, ça fait plus, bien sûr, c'est 12 000, si vous regardez McGill, c'est
10 000, mais ce sont de très grosses universités, ça va de soi. Mais, quand
vous regardez toutes les universités des régions du Québec, l'Université du
Québec à Chicoutimi, l'Université du Québec à Rimouski, l'Université du Québec
à Trois-Rivières, l'Université du Québec en Abitibi-Témiscamingue, l'Université
du Québec en Outaouais, on parle de 1 000, 400, 1 000, 2 000 personnes. Ce
sont des moteurs de développement de haut savoir pour nos régions, pour nos
régions.
Puis les régions, au Québec, c'est
fondamental. C'est fondamental, que les Québécois puis que les Québécoises
aient accès à des établissements d'enseignement supérieur dans des régions.
Puis je pourrai évidemment vous parler de Sherbrooke. C'est une excellente
université et, évidemment, encore là, en région. Donc, tout ça, tout ça milite
en faveur, à mon avis, et je vous le soumets, de revoir ce projet de loi à la
lumière des informations qui nous sont transmises par l'ensemble des recteurs
et rectrices des universités. Ça m'apparaît fondamental.
Et, quand on parle des centres de
recherche, tout à l'heure, ma collègue, la députée de Mont-Royal Outremont,
parlait de physique quantique à Sherbrooke, mais on peut donner d'autres
exemples de centres de recherche. Une université que je connais un peu plus,
l'Université de Montréal. Pensons au centre de cyberjustice, un centre
exceptionnel, Centre de recherche en droit public, qui a une réputation
internationale à travers le monde. Bien, ça, ce sont des cas concrets
d'universités qui ont été capables d'attirer des chercheurs de haut niveau à
travers le monde pour aider le Québec et le positionner. Donc, ça m'apparaît
tout à fait important, surtout de ne pas poser geste qui va avoir un impact et
qui va avoir un impact, bien sûr, dans le mandat et dans le ministère de la
ministre de l'Enseignement supérieur. Ça m'apparaît tout à fait fondamental.
Et, en plus, en plus, c'est le collègue,
je crois, de Jean-Talon qui l'évoquait tout à l'heure, si le ministre se met à
décider à gauche et à droite...
M. Morin : ...Ça va être quoi
ses orientations? Quels vont être évidemment les objectifs qu'il va fixer? La
réduction possible, etc. Mais quel va être l'impact économique et financier
pour l'université puis pour la région où elle est située? Et ça, là, c'est ce
que je vous disais, Mme la Présidente, dans le cadre de mes remarques
préliminaires, ça, là, l'impact négatif, d'ailleurs, les recteurs entendent,
mais c'est déjà commencé, c'est déjà commencé. Et quand vous regardez l'article
qui a été publié, notamment par Radio-Canada par Sébastien Desrosiers, on voit
qu'il y a déjà une diminution qui a commencé dans les universités au Québec et
que ça a un impact. Et d'ailleurs, d'ailleurs, et ça, je dois le souligner, là,
le narratif du ministre a changé. C'est une bonne chose. Mais on nous disait,
entre autres, et on l'écrit dans l'article : On vous demande de cesser
d'associer des étudiants internationaux à un problème. Et c'est ce qu'avait dit
le recteur de l'Université de Sherbrooke, Pierre Cossette. Je tiens à le
souligner. Donc, ça, ça m'apparaît important. Puis là, ce qu'on nous dit, c'est
que oui, il y a de l'angoisse, et puis là on a des étudiants, puis, permettez
l'expression, je cite, «la plupart des étudiants sont déboussolés» parce qu'ils
ne savent plus quoi faire.
Alors, si on parle de l'Université du
Québec à Rimouski, bien oui, c'est ce qu'on apprenait hier, il y a une forme
d'inquiétude qui est déjà installée, parce qu'en plus, comme je le soulignais,
il n'y a pas juste le projet de loi, là, il y a un moratoire sur le PEQ, il y a
un moratoire sur d'autres programmes, donc ça crée autant de mauvaises
expériences auprès de ces étudiants-là qui vont faire en sorte que...
probablement que certains vont décider d'aller ailleurs, puis ça va être un
appauvrissement pour le savoir au Québec. Moi, je ne veux pas ça, je ne veux
pas ça.
Et on nous signale, on nous signale,
évidemment, le cas d'un étudiant béninois, il dit : Bien là, mon projet
est à l'eau, je suis dans l'attente. Les étrangers qui étudient à l'UQAR, à
l'Université du Québec à Rimouski, plusieurs sont originaires de l'Afrique de
l'Ouest et sont francophones à près de 95 %. Donc, au niveau de
l'intégration, ce n'est pas en français que ça va poser des problèmes, ils
parlent déjà français. Et évidemment ils font vivre la région, forcément,
forcément. Et donc tout ce qu'il faut, bien, c'est éviter justement qu'il y ait
de l'instabilité.
Le recteur de l'UQAR nous dit que la
survie de certains programmes pourrait être menacée advenant une diminution
importante des effectifs internationaux. Alors, imaginez, d'où la pertinence de
faire entendre la ministre de l'Enseignement supérieur. Imaginez, imaginez que
le gouvernement décide de diminuer des seuils, diminuer le nombre de
certificats qu'ils vont émettre, diminuer le nombre d'étudiants étrangers qui
vont venir étudier ici, puis que là on se ramasse avec des universités qui
ferment des programmes, des universités qui perdent, évidemment, des
subventions de recherche parce qu'ils ne pourront pas rien faire avec.
Imaginez. Des gens qui voudraient tout miser sur le Québec, mais qui risquent
d'aller ailleurs, est-ce que c'est vraiment... est-ce que c'est vraiment ça
qu'on veut? Mais moi, j'ai une réponse pour M. le ministre, Mme la Présidente,
la réponse, c'est non. C'est non, je ne veux pas ça comme parlementaire.
Et si, le problème, c'est de régler
certaines admissions dans certains collèges, bien, à ce moment-là, qu'on
s'attaque aux vrais problèmes. Qu'on nous l'explique, puis si c'est ça, là,
bien oui, on va collaborer avec le gouvernement, mais on va régler les vraies
affaires, on ne va pas faire du mur-à-mur sur l'ensemble des universités
québécoises qui nuisent à la réputation et des universités du Québec à
l'international pour régler des problèmes.
• (17 heures) •
Quand on lisait l'article du bureau d'enquête,
mais c'est sûr qu'on ne veut pas, ça, c'est évident, c'est évident. Voyons!
Quand même étonnant qu'il n'y ait personne au ministère qui ait réagi, là. Ça,
c'est une autre chose. Mais bon. Mais bon, laissons-leur le bénéfice du doute.
Mais il n'en demeure pas moins que si on veut véritablement comprendre l'impact
de ce projet de loi, là, les recteurs nous en ont déjà parlé, bien, il faut
absolument entendre la ministre de l'Enseignement supérieur et il faut qu'elle
soit capable de venir témoigner devant cette commission, et puis qu'on soit
capables de dialoguer avec elle. Vous savez, nous, dans l'opposition...
17 h (version non révisée)
M. Morin : ...opposition,
contrairement au gouvernement, comme parlementaires, on a quelques options, et
une des options qu'on a quand on est en commission parlementaire, et je
l'apprécie pleinement, Mme la Présidente, c'est de pouvoir, justement, avoir
des gens qui vont venir nous informer, nous renseigner, avec lesquels on peut
dialoguer, pour que tout le monde, les gens qui nous écoutent comprennent bien
l'impact de ce projet de loi. Et donc c'est la raison pour laquelle je vous
demande de faire entendre la ministre de l'Enseignement supérieur. C'est la
raison, également, pour laquelle j'ai présenté cette motion.
Et je vous soumets humblement qu'avec les
éléments que je vous ai soumis, que j'ai partagés avec l'ensemble des
collègues, avec le constat que font l'ensemble des chefs des établissements
universitaires québécois... et je le répète, on nous écrit que cette éventuelle
loi aura des effets très négatifs pour nos établissements et pour le Québec...
je vous demande de faire entendre la ministre. Merci, madame...
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup, M. le député. Est-ce que j'ai d'autres
interventions? M. le député de Saint-Henri—Sainte-Anne, est-ce que vous
voulez...
M. Cliche-Rivard : Merci, Mme
la Présidente. J'ai 20 minutes, hein, c'est ça?
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : 30 minutes.
M. Cliche-Rivard : 30
minutes, bon. Je n'irai pas dans les 30 minutes, j'en assure le ministre déjà,
mais, quand même, j'ai plusieurs points à soulever. D'abord, oui, je... je
pense que cette motion-là est importante, parce que beaucoup des considérations
qui ont été soulevées dans le cadre de l'étude détaillée touchaient notamment
l'enseignement supérieur, certaines discussions, aussi, sur le volet
enseignement tout court, là... éducation, en fait. On pourrait y revenir
peut-être plus tard, peut-être... peut-être pas. Mais, bref, pour les
institutions d'enseignement, là, cégeps, universités, il y avait quand même
beaucoup de discussions qui ont été établies.
Le point, moi... ou le point, ou le nœud
de l'affaire, ou l'élément qui m'a le plus interpellé, c'est la question de
l'autonomie institutionnelle, de la liberté académique, de la... tout ce qui
concerne, là, l'innovation, le développement, la façon, pour l'université, pour
le... de... de voir et de peaufiner sa trajectoire de développement de
programmes, de développement de technologies, et, bon, toute l'expertise qu'ils
et elles ont, recteurs, rectrices, doyens, pour, sur, souvent, une décennie,
là, tracer des trajectoires, développer des programmes puis développer des
orientations qui leur permettent, qui nous permettent, aux Québécois et aux
Québécoises, de... d'assurer une innovation qui est... qui est fonctionnelle
puis qui est à la... à la hauteur de la richesse de la société québécoise. Et
ça, ça m'inquiète, dans la lecture du projet de loi, puis je ne suis pas tout
seul.
On a relevé quelques mémoires, mais, dans
les faits, une très, très, très grande majorité des mémoires, les institutions
d'enseignement supérieur nous parlent de la liberté académique, de leur
autonomie. Je vais... je vais en citer quelques-uns. L'Université Laval,
McGill, Sherbrooke nous disent : «L'autonomie des universités leur permet
d'être le lieu d'émergence de disciplines et de découvertes dont les retombées
sont mesurables sur la longue durée. La voie qu'emprunte le gouvernement avec
la présentation du projet de loi, dont les règlements pourraient limiter ou
contraindre les universités, menace cette autonomie, qui s'est avérée très
bénéfique pour le Québec par le passé.»
Et, dans ce contexte-là, j'aimerais bien,
moi, entendre la ministre de l'Enseignement supérieur quant à sa vision de
l'autonomie universitaire, notamment, eu égard à la Loi sur la liberté académique,
dans le contexte du projet de loi n° 74. J'aimerais bien voir comment elle
répond à son réseau, comment elle répond aux recteurs, rectrices, aux
professeurs, ainsi qu'aux doyens, doyennes, qui sont inquiets — et là
ce sont des gros mots, là, quand même — de la liberté, et de se voir
limiter ou contraindre, voire menacer l'autonomie, qui s'est avérée bénéfique
pour le Québec. C'est quand même particulier d'entendre ça, et c'est quand même
inquiétant.
Et ça continue : «En souhaitant se
doter du pouvoir d'interdire la venue d'étudiants internationaux sur la base du
choix de programmes d'études, le gouvernement du Québec agit là où les
universités ont déjà la compétence pour sélectionner les étudiants.» C'est
quand même intéressant. «Rappelons que, dans le processus complexe de
recrutement, les étudiants internationaux détiennent une offre d'admission
universitaire, lorsque vient le temps d'obtenir les autorisations
gouvernementales requises, pour ensuite débuter leurs études. En plus d'empiéter
sur l'autonomie de gouvernance académique des universités, le gouvernement,
avec le p.l. n° 74, interdit... intervient — pardon — dans
une chaîne sophistiquée. Celle-ci concerne les universités, la recherche, mais
également les industries et les acteurs de l'innovation situés sur tout le
territoire du Québec. Chercher à régir où étudieront les candidats
internationaux afin de répondre à des besoins...
M. Cliche-Rivard : ...main-d'oeuvre
à court terme ou des priorités gouvernementales changeantes affectera
négativement cette chaîne et la capacité de développement stratégique de nos
institutions». Quand même. Ça, ça vient des recteurs, rectrices de l'Université
Laval, de McGill, de Sherbrooke.
Les cégeps. Un peu le même son de cloche,
Mme la Présidente. La Fédération des cégeps exprime sa grande inquiétude
concernant une possible centralisation du pouvoir décisionnel, reflété dans les
deux notes explicatives suivantes du projet de loi n° 74, et là il le
cite, et un des points soulevés, c'est l'ingérence dans l'autonomie des cégeps,
dans l'adoption des priorités en matière de gestion et de son offre éducative
et d'attraction étudiante des étudiants internationaux. Quand même. C'est le
fondement même, le socle même du développement de leur expertise, à savoir
combien d'étudiants internationaux ils peuvent accueillir dans les cycles
supérieurs de surcroît, dans les chaires de recherche, dans les programmes
d'innovation, dans les deuxièmes, troisièmes cycles aussi, parce qu'ils en
parlent, c'est excessivement important. L'apport d'étudiants internationaux
qu'ils devront recevoir par rapport aux étudiants locaux, dans quel programme,
dans quel objectif, dans quelle pénurie de main-d'œuvre, dans quelle
innovation? Ça fait partie de la compétence, puis de la structure, puis de
l'autonomie fondamentale des universités et des cégeps.
Et ça, j'aimerais entendre la ministre de
l'Enseignement supérieur sur ces considérations-là, sur ces inquiétudes-là,
parce qu'avec le plus grand respect que j'ai pour le ministre de l'Immigration,
ce sont des considérations qui dépassent largement ce qui touche la Loi sur
l'immigration du Québec. Évidemment, on est dans le cadre de la liberté
académique, on est dans le cadre de la Loi sur l'instruction, on est dans le
cadre de la création des différentes universités puis des cégeps et dans leur
vision d'autonomie puis d'innovation. Et donc on est dans la pure réflexion de
la place de l'université, du cégep dans cette société, puis de leur rôle, puis
leur autonomie, et non pas dans une seule bien qu'importante question
d'immigration.
La Fédération québécoise des professeurs
et professeures d'université nous parle aussi : «Autonomie en sursis, un
enjeu de gouvernance et de concentration. Le projet de loi n° 74 soulève
de sérieuses inquiétudes quant à l'autonomie des universités québécoises».
Quand même, ce n'est pas rien, là. «Centralisant le pouvoir décisionnel pour
l'accueil des étudiants internationaux entre les mains du gouvernement et plus
spécifiquement du ministère de l'Immigration et de la Francisation et de
l'Intégration. Il écarte au passage les consultations avec les parties
prenantes clés de l'enseignement supérieur. À ce titre, il risque d'entraver la
capacité des institutions à gérer efficacement leurs programmes et à déployer
une vision d'ensemble pour leur développement. En effet, le p.l. 74 donne
au gouvernement le pouvoir de bloquer l'accueil d'étudiants étrangers
souhaitant s'inscrire dans certains domaines de formation et certains
établissements, ce qui risque de menacer la viabilité de programmes en cause ou
contraignent les universités à réduire l'offre de cours dans ceux-ci». C'est
leur analyse de leurs institutions. «Or, le principe d'autonomie des
universités suppose qu'on leur laisse le pouvoir de déterminer leurs priorités
et, en fonction de celles-ci et des ressources dont elles disposent, de choisir
les programmes qu'elles offrent et la taille des cohortes qu'elles souhaitent
admettre. L'autonomie des universités est cruciale pour garantir une
gouvernance indépendante, équilibrée et en adéquation avec les réalités
locales». Et là, c'est là que ça devient important. «Or, le projet de loi
confère au gouvernement le pouvoir de restreindre l'admission d'étudiants,
étudiantes dans certains programmes en refusant leur permis d'études, ce qui
équivaut à influencer indirectement l'offre de formation. Une telle ingérence
empiète sur une prérogative qui devrait strictement relever des institutions
d'enseignement supérieur». Telles sont les mots. Et je termine avec leur dernier
paragraphe ici : «L'absence de consultation avec le milieu pour la
détermination de cibles qui découleront du projet de loi constitue à ce titre
une lacune importante. En procédant ainsi, le gouvernement prive la communauté
universitaire d'une occasion précieuse de faire valoir ses besoins et
d'apporter son expertise dans l'élaboration de politiques qui influencent
directement le fonctionnement des universités. La FQPPU défend fermement
l'autonomie des établissements d'enseignement supérieur à partir d'une vision
basée sur la concertation et la coopération. Le p.l. 74, s'il limite la
participation du milieu universitaire au processus décisionnel va directement à
l'encontre de nos principes fondateurs». Et là où je pense que c'est d'autant
plus intéressant et important d'entendre la ministre de l'Enseignement
supérieur, c'est justement qu'on a vu tous ses acteurs et tous ses... tout son
écosystème, c'est-à-dire les universités, les cégeps, bien au-delà de
l'écosystème...
M. Cliche-Rivard : ...pas mal
de groupes de consultation qui touchent l'immigration habituellement, en fait
des groupes qui touchent directement habituellement l'immigration,
l'association du Barreau canadien, le Barreau. On ne les a pas entendus parce
que c'était spécifiquement un projet de loi qui touchait les étudiants
internationaux, les institutions d'enseignement supérieur, et ce sont eux et
elles qui se sont manifestées parce que directement touchées par le projet de
loi en majorité. D'où l'importance, je pense, d'avoir avec nous, à cette table
pour commenter, pour rassurer, pour collaborer, pour définir ensemble une voie
de passage, la ministre de l'Enseignement supérieur, notamment aussi eu égard
aux impératifs financiers, à l'impact budgétaire que pourrait avoir une telle décision
sur l'autonomie financière, le développement financier desdits établissements
d'enseignement. Donc, toute la question du financement des cégeps, des
universités liées de près ou de loin, malheureusement ou heureusement, aux
étudiants internationaux, se posera.
• (17 h 10) •
Donc, pour cette raison, Mme la
Présidente, moi, je... ma formation politique va appuyer une telle motion et je
pense qu'on pourrait beaucoup profiter de l'éclairage, de la vision et des
réponses de la ministre de l'Enseignement supérieur. Je sais que le ministre de
l'Immigration est capable de nous en donner des réponses, eu égard à
l'immigration. J'aimerais entendre la ministre dans son carré de sable, dans
son champ d'expertise pour ce qui touche l'enseignement supérieur. Merci.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci, M. le député. Est-ce que j'ai d'autres
interventions? M. le ministre.
M. Roberge : Merci, Mme la
Présidente. Donc, brièvement, pour répondre aux arguments attendus dans les
remarques préliminaires et dans le cadre de cette motion, j'ai entendu des
collègues s'inquiéter du fait que j'avais énoncé plusieurs arguments pour
déposer ce projet de loi là, plusieurs arguments qui viennent justifier le
projet de loi, et qu'au fil des interventions, lors des auditions
particulières, j'ai donné des arguments différents et j'en ai donné d'autres
aujourd'hui.
Donc, est-ce que c'est pour corriger les
erreurs du passé et s'assurer qu'on ne soit pas obligé d'aller devant un juge
pour corriger des abus? Est-ce que c'est parce que le fédéral s'ingère dans
notre champ de compétence, vient imposer des plafonds d'étudiants étrangers,
vient sélectionner des secteurs à partir d'Ottawa sur ce qui devrait être des
secteurs stratégiques au Québec? Est-ce que c'est pour corriger ou empêcher des
abus ou même des fraudes, même l'arrivée d'étudiants... de faux étudiants qui
arriveraient sous de faux prétextes alors qu'en réalité ce sont des gens qui
veulent demander l'asile? Est-ce que c'est parce qu'on a des problématiques de
logement ou des problématiques d'étudiants qui arrivent ici, qui sont
incapables de payer leurs frais de scolarité, même qui fréquentent les banques
alimentaires? Est-ce que c'est parce que, dans la loi actuelle, on n'a pas
notre capacité d'agir? Et mes collègues se disent : Mais, mon Dieu,
comment se fait-il qu'ils changent d'argument comme ça? C'est juste que toutes
ces réponses sont bonnes.
Donc, à chaque argument soulevé, on donne
une réponse appropriée. Et si vous... s'il y a d'autres enjeux qui sont
soulevés, qui viennent justifier le projet de loi, bien, on aura d'autres
arguments qui s'additionneront. Donc, la réponse à votre question, c'est toutes
ces réponses. Et je m'inquiète, en fait je m'étonne de mon collègue de Québec
solidaire, qui nous dit, dans le fond, que ça ne devrait pas être l'État qui
gère sa politique migratoire, ça devrait être les institutions qui décident,
eux, chaque institution décide combien d'étudiants elle devrait admettre. Sauf
que ce sont des étudiants étrangers internationaux qui arrivent sur le
territoire québécois, ce n'est pas normal que ça ne soit pas l'État. C'est
quasiment une approche libertarienne où on veut restreindre le rôle de l'État,
alors qu'il me semble qu'un État national devrait contrôler les leviers de sa
politique migratoire.
Pour ce qui est de la question de la
motion préliminaire, bien, écoutez, je ne pense pas que ça soit nécessaire
étant donné que le projet de loi a été étudié, travaillé en collégialité avec
ma collègue de l'Enseignement supérieur, travaillé ministre avec ministre,
cabinet avec cabinet, équipe avec équipe. Ça a été discuté en Conseil des
ministres. Et, en plus, il est prévu dans les articles de ce projet de loi que,
dans plusieurs cas, les recommandations au gouvernement doivent être faites de
manière conjointe, Immigration et Enseignement supérieur. Donc, nous sommes
très bien attachés, et je pourrai répondre à vos questions au fil des articles,
le cas échéant. Donc, je vais voter contre cette motion.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci. Est-ce que j'ai d'autres interventions? Mme la
députée?
Mme Setlakwe : Oui. Moi, Mme
la Présidente...
Mme Setlakwe : ...Mme la
Présidente, et j'aimerais faire mon intervention au nom du chef de l'opposition
officielle, je crois que j'ai une période de temps de 30 minutes.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : ...parce que le représentant officiel a été le député de
l'Acadie, qui a déjà utilisé son 30 minutes. Donc, il représente le... Ça,
c'est dans la décision... dans l'article 209, décision 209 deux.
C'est dans le livre des décisions. Alors, vous bénéficiez d'une période de
10 minutes.
Mme Setlakwe : Merci, Mme la
Présidente.
Une voix : ...
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : On va suspendre quelques instants.
(Suspension de la séance à 17 h 16)
17 h 30 (version non révisée)
(Reprise à 17 h 36)
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : À l'ordre, s'il vous plaît. La commission reprend ses
travaux. Après avoir vérifié, relu comme il faut l'article 209 du rapport
des... du livre des décisions des commissions, mais en vertu également de l'article 209.3
du recueil des décisions de l'Assemblée nationale, vous avez droit, à titre de
porte-parole, de 30 minutes. Alors, le 30 minutes commence
maintenant.
Mme Setlakwe : Merci, Mme
la Présidente. Donc, je réitère que je prends la parole, dans le cadre de cette
motion, au nom du chef de l'opposition officielle. Cette motion préliminaire,
qui a été déposée par mon collègue le député de l'Acadie, je l'appuie
entièrement. Je pense qu'il est tout à fait à propos de demander d'entendre la
ministre de l'Enseignement supérieur dans le cadre de l'étude de ce projet de
loi no 74. Mme la Présidente, je dirais que... Je n'ose pas avancer un
pourcentage, là, mais disons que la très grande majorité des mémoires qu'on a
reçus, des personnes qu'on a entendues, des représentants d'institutions
collégiales et universitaires sont rattachés au réseau de l'enseignement
supérieur.
Et donc il est essentiel d'avoir la
perspective, d'entendre et de pouvoir questionner la ministre de l'Enseignement
supérieur au sujet de ce... de ce projet de loi là. Qu'est-ce qu'elle en pense?
Et où... Ou comment... Comment répond-elle à toutes les inquiétudes qui ont été
mises de l'avant par les recteurs, par les directeurs des cégeps, par la
représentante... la présidente de la Fédération des cégeps, par les
représentants de l'Association des collèges privés subventionnés, et j'en
passe? Elle doit les prendre, ces inquiétudes, ou les rassurer une à une, donc
les prendre une à une et rassurer son réseau, les personnes qu'elle représente,
les personnes qu'elle est censée défendre. Elle est là pour défendre le réseau
de l'enseignement supérieur. Le réseau est ébranlé. Il y a des inquiétudes qui
ont été exprimées, des préoccupations légitimes. Alors, nous, ce qu'on demande...
Dans le fond, on porte la voix de ces réseaux pour demander à la ministre de
venir s'asseoir en commission avec nous afin qu'on puisse porter la voix, donc,
de ces groupes, de ces institutions, et qu'on puisse, pour le bénéfice, pour
leur bénéfice, pour le bénéfice de la population, entendre la façon... la
réflexion, les réflexions de la ministre et la façon dont elle entend défendre
le réseau de l'enseignement supérieur.
• (17 h 40) •
Je ne veux pas reprendre, là, l'ensemble
des mémoires qui ont été... qui ont été déposés, il y en a plusieurs, mais il
est important qu'on revienne sur la lettre du Bureau de coopération
interuniversitaire, le BCI. On se rappelle, là, que c'est une lettre... C'est
une lettre de... Tout le monde autour de la table devrait la lire, là. C'est
une lettre de quatre, cinq pages, qui vient résumer l'ensemble des arguments,
des inquiétudes qui ont été soulevées dans les différents mémoires. Et c'est
impressionnant de voir, donc, l'ensemble des réseaux parler d'une seule voix.
Cette lettre, elle est signée par le président du BCI. Aujourd'hui, c'est le
recteur de l'Université du Québec à Trois-Rivières. Mon collègue l'a fait, l'exercice,
elle est cosignée par les chefs des établissements universitaires...
Mme Setlakwe : ...Québécois,
et c'est... c'est unanime, là, c'est le réseau de l'Université du Québec. Ce
sont toutes les grandes universités qui ont des facultés de médecine. Je ne
veux pas les renommer, mais ce qu'il faut retenir, c'est qu'elles parlent
toutes d'une même voix. Elles sont toutes du même avis. Elles veulent toutes
être exclues, elles sont toutes préoccupées. Et donc le recteur de l'UQTR met
de l'avant, donc... résume l'ensemble de l'argumentaire. Il énonce que, s'il y
a des problématiques qui existent, elles ne... elles ne sont pas... il ne faut
pas viser le réseau universitaire, il faut agir de façon ciblée pour corriger
les situations problématiques si elles existent, avec les bons outils. Et, il
est venu ajouter un élément, et je l'ai rencontré en personne. Le hasard a fait
que j'avais une rencontre prévue avec lui la semaine dernière. Je me suis
rendue à Trois-Rivières. Et il m'a dit : Il y a un élément dans notre
lettre qui n'a pas été présenté en commission. Alors, je pense que c'est
important qu'on le... qu'on réitère cet élément-là. Et il est venu parler
globalement des métriques et des objectifs d'immigration. Puis ça touche aussi
à l'autonomie, là, des institutions. Quand il dit : Il faut laisser toute
l'autonomie aux institutions pour déterminer toute la gamme de cours et de
programmes qui doivent être offerts dans le réseau universitaire, c'est à ce
niveau-là que ça doit se décider, et non pas au niveau du gouvernement. Il a...
sa crainte, je vais l'exprimer dans mes mots, puis, après ça, je vais lire sa
lettre.
C'est que, si le gouvernement et... ou les
gouvernements, les différents paliers, même ensemble, établissent ou font une
liste de secteurs prioritaires, ça peut être en lien avec des enjeux
économiques, des enjeux de besoin de main-d'œuvre, et si on dresse cette liste
et qu'ensuite on autorise ou on permet, donc, l'arrivée d'étudiants
internationaux en lien avec ces domaines-là, mais on va laisser de côté des
domaines qui aujourd'hui ne sont pas des domaines qu'on peut dire des domaines
chauds ou des domaines pour lesquels il faut... il y a un urgent besoin
aujourd'hui de former... de former les jeunes pour pouvoir répondre à des
enjeux de société d'aujourd'hui. Mais il faut... puis c'est à l'université que
ça se fait, il faut prévoir, anticiper les besoins de demain.
Il donnait... il me citait un exemple.
Yoshua Bengio, tout le monde le connaît, on est donc content de l'avoir chez
nous, au Québec. Il a... d'ailleurs, la médaille de l'Assemblée nationale lui a
été remise... de la présidente de l'Assemblée nationale, lui a été remise cette
année. En intelligence artificielle, si on recule de cinq, 10, 15 ans,
est-ce que le gouvernement aurait mis l'intelligence artificielle sur une liste
de domaines prioritaires, domaines pour lesquels... Tu sais, si on fait une
liste, on dresse une liste des domaines où il y a des besoins de main-d'oeuvre,
pas sûr que l'intelligence artificielle apparaissait sur cette liste-là. La
quantique, là, quand on parle aussi de quantique qui n'existait pas... ce n'était
pas un domaine auquel on pensait, mais cinq, 10, 15 ans, aujourd'hui,
l'Université de Sherbrooke est un chef de file. On a attiré des étudiants
internationaux, surtout, donc, dans les cycles supérieurs. On a un institut
quantique. Les exemples sont... la cybersécurité.
Tout ça pour dire, puis là je vais... je
vais m'en remettre à ses paroles, parce que c'est important. Toutes les
universités nous disent de respecter leur autonomie. Et ce qu'ils disent, c'est
que «le système québécois de gestion actuel de l'immigration est basé notamment
sur l'établissement d'une liste de professions en pénurie. Les personnes
immigrantes qui ont des formations dans ces domaines sont privilégiées. Les
portes s'ouvrent moins pour les autres. Ce sont les besoins d'hier et certains
des besoins d'aujourd'hui qui sont privilégiés. C'est le court terme qui
prime.» Et c'est là qu'il a soulevé l'exemple de Yoshua Bengio. En tout cas,
moi, je le veux, le prochain, Yoshua Bengio ici, chez nous. Je pense que mon
collègue de l'Acadie est d'accord avec moi. Il le disait tout à l'heure,
différemment, il disait : Ces talents-là, s'ils ne viennent pas chez nous,
ils vont aller ailleurs. Il y a une compétition féroce, là, qui est... qui est
en cours pour attirer les meilleurs talents. Et le gouvernement l'a reconnu
dans la... dans la stratégie du ministère de l'Enseignement supérieur.
Je poursuis : «On répète souvent que
les professions d'importance dans sept ou 10 ans sont aujourd'hui
inconnues. Le monde universitaire est le lieu où les professions essentielles à
l'évolution de nos économies et de nos sociétés émergent, au-delà de sa réponse
collective à la pénurie de main-d'œuvre. Ces dernières apparaissent rarement
dans la liste des professions utilisées par les ministères du Québec et du
Canada pour prioriser l'immigration. Or, il importe de protéger l'autonomie des
universités dans leur diversité pour faire émerger des nouveaux programmes à
tous les cycles pour soutenir...
Mme Setlakwe : ...de
nouvelles niches de recherche qui enrichissent ces programmes et nos
connaissances, mais aussi pour enrichir notre population étudiante venant de
partout à travers le monde, dans tous les domaines. Ces étudiants
internationaux amènent de nouvelles perspectives qui permettent l'innovation
par le choc des idées. Ainsi, l'université québécoise peut jouer pleinement son
rôle comme moteur du développement du Québec.»
Donc, voilà. Comme je le disais avant de
citer nos recteurs universitaires, dans le fond, ce n'est pas juste le recteur
de l'UQTR qui amène cet élément additionnel, ce sont tous les recteurs,
rectrices d'université. C'est un élément qui n'avait pas été présenté en
commission et d'où l'importance, oui, de respecter l'autonomie universitaire,
mais l'importance d'avoir la réaction de la ministre del'Enseignement supérieur
à cet élément et ainsi que tous les autres éléments qui ont été amenés en
commission, Mme la Présidente.
J'ai parlé des... Mais juste avant, avant
d'arriver aux cégeps, j'aimerais revenir sur un point, moi, qui m'a été
mentionné en personne lors de mes rencontres, quand je suis allée visiter
différents recteurs, et c'est quelque chose qui a aussi été mentionné, qui
était palpable durant les consultations il y a deux semaines. C'était toute...
L'inquiétude était palpable chez les recteurs, mais ils ont mentionné que
l'ensemble des mesures qui ont été mises de l'avant... Parce que ce n'est pas
juste le projet de loi n° 74, cette mesure s'ajoute à d'autres mesures qui
ont été adoptées, là. Ils ont parlé d'une vingtaine en tout. C'est vrai que les
20 ne viennent pas du gouvernement du Québec. Mais, quand on considère, donc,
l'ensemble des mesures, mais il y en a beaucoup qui viennent du Québec, du
gouvernement du Québec, le gouvernement qui est actuellement en place. On peut
penser à la hausse des droits de scolarité, à la nouvelle mouture de la
politique de financement. On a parlé d'affaiblir les institutions. Ce n'est pas
moi qui le dis, là. On dit que ces mesures viennent affaiblir nos institutions.
C'est sérieux, Mme la Présidente. On a un projet de loi qui suscite ce genre
d'inquiétude, ce genre de préoccupation.
Moi, je ne veux certainement pas escamoter
la réflexion ou je veux vraiment aller au fond des choses pour s'assurer qu'on
n'affaiblisse pas nos institutions universitaires qui font notre fierté. J'en
ai dans ma circonscription, j'ai Polytechnique, HEC, l'Université de Montréal,
mais je suis fière, moi, de toutes nos institutions universitaires. Et elles
forment ensemble un écosystème, un îlot d'excellence. Au fur et à mesure de mes
rencontres, je réalise aussi à quel point elles ne travaillent pas en silo,
elles collaborent ensemble et que, quand il y a un bon coup, disons à McGill,
bien, il y a un impact positif à Sherbrooke et vice versa. Ils se parlent. On
le sentait durant les consultations. Ils sont venus ensemble. Concordia et
Bishop sont venus ensemble. Les quatre universités qui ont une faculté de
médecine sont venues ensemble. On a senti, donc, la force de cet écosystème.
C'est quelque chose qu'on ne peut pas prendre à la légère. C'est quelque chose
qu'on ne peut pas brimer. Et la personne la mieux placée pour venir rassurer la
commission qui se penche sur cette pièce législative, c'est la ministre de
l'Enseignement supérieur. Ça, c'est les universités.
Dans le réseau de l'enseignement
supérieur, il y a aussi les cégeps. On est fiers de nos cégeps au Québec. Il y
a un réseau de 48 cégeps qui... On l'a entendu... On les a entendus
également en commission. Qu'est-ce qu'ils sont venus dire également? On veut
être exclus de l'application du projet de loi. Chez nous, dans nos cégeps, le
recrutement, il est réfléchi, il est ciblé. On a besoin des étudiants
internationaux. On a essayé aussi de voir est-ce que c'est plus en région,
c'est plus à Montréal qu'ils sont importants, dans les grands centres. La
réponse, Mme la Présidente, c'était : Dans l'ensemble du réseau, on a
besoin des étudiants internationaux pour toutes sortes de raisons.
• (17 h 50) •
Je vais me référer à mes notes, là, du
passage de la Fédération des cégeps. Les cégeps sont non seulement des
institutions d'enseignement, mais sont aussi des moteurs de développement,
développement régional, développement économique. On peut penser aussi que
c'est du développement social communautaire. Des communautés entières dépendent
des cégeps, de leurs installations. Et nos cégeps ne peuvent pas fonctionner à
plein régime, nos cohortes, dans nos cégeps, ne peuvent pas être complètes si
on n'a pas les étudiants internationaux. Les étudiants internationaux, il ne
faut pas juste penser que leur... que leur présence, bien, est bénéfique pour
eux. Leur présence est bénéfique avant tout pour les étudiants québécois. Si on
n'est pas capable de former une cohorte complète, bien, on ne pourra pas offrir
des programmes à nos jeunes Québécois qui veulent rester en région. Moi,
j'ai...
Mme Setlakwe : ...Moi, j'ai
grandi en région, j'ai grandi dans la région de... dans la ville de Thetford
Mines. J'ai fait mon cégep là-bas, j'ai fait une formation générale, ensuite je
suis allée à l'université. Mais je sais très bien quelle est la réalité des
régions : les jeunes quittent beaucoup. Et ce qu'il faut faire, c'est les
retenir. Puis il faut garder nos cégeps en bonne santé. C'est le cas à Thetford
Mines, je m'en réjouis aujourd'hui. Mais ce qu'on a entendu, c'est que la
présence des étudiants internationaux nous permet de compléter les cohortes et
ça bénéficie avant tout aux jeunes Québécois qui veulent rester dans leur
région et suivre... avoir une vaste gamme de programmes offerts localement. Et
la Fédération des cégeps est venue dire essentiellement qu'il ne faut pas
couper en région puis il ne faut pas couper dans les grands centres non plus.
Attention, là, de venir imposer, disons, un moratoire à Montréal. Il y a des
domaines nichés, des domaines de pointe, des domaines pour lesquels il faut
absolument former la relève, absolument former les travailleurs de demain étant
donné le vieillissement de la population, étant donné les pénuries dans nos
services publics, au sein de nos entreprises, etc.
Donc, honnêtement, moi, je n'ai pas été
capable de dégager un domaine où... pas un seul où c'est superflu. Il
semblerait que tout est bien réfléchi puis qu'on a besoin de tous ces
programmes dans toutes nos régions et que... Donc, le message qu'il faut
retenir, c'est : Ne coupez pas dans les étudiants internationaux. Dans
notre réseau des cégeps publics, tout va bien. Ils ont des chiffres à l'appui
aussi. Ce n'était pas... tu sais, le pourcentage des étudiants internationaux,
c'était complètement sous contrôle. Ne touchez pas à ça, excluez-nous. Nous, on
ne fait pas partie du problème, on est... tout va bien. C'est une question
d'accessibilité aux études supérieures dans toutes les régions. Si on vient
couper, on va affecter la mission fondamentale des cégeps, on va toucher à
l'avenir des régions.
La ministre de l'Enseignement supérieur,
elle en pense quoi? Est-ce qu'elle peut venir rassurer le réseau et dire :
Non, non, je n'imposerai pas un quota dans les régions puis je n'imposerai pas
non plus un quota dans les grands centres. Est-ce qu'elle peut venir les
rassurer? Il dit... Ils nous disent : Laissez les cégeps s'autoréguler.
Laissons ou préservons l'agilité des établissements. C'est toutes des choses
que j'ai notées suite à leur passage. C'est une belle immigration. Ils sont
formés chez nous. Et ensuite qu'est-ce qu'ils font? Bien, ils s'assurent...
On va se tirer dans le pied si on baisse
les... on baisse les seuils ou on impose des plafonds. C'est le futur des services
publics, c'est les soins. Ces personnes-là vont assurer les soins qui vont être
offerts à la population partout au Québec. Il ne faut pas se mettre la tête
dans le sable, là, il y a une baisse démographique. Notre population vieillit.
On a besoin de ces cerveaux, on a besoin de ces jeunes chez nous.
Je ne peux pas m'empêcher d'ajouter que ce
projet de loi est vu dans le réseau. On me l'a dit, j'étais au cégep de
Trois-Rivières la semaine dernière. Et d'ailleurs ça fait l'objet de revue de
presse. Cette mesure s'ajoute à d'autres mesures qui portent le réseau des
cégeps à dire qu'ils sont en plein tsunami. Et c'est un ouragan qui les frappe,
que jamais le réseau a été autant mis à mal par un gouvernement. Pensons aux
plafonds dans les budgets d'investissement qui ont été imposés le
31 juillet dernier. Encore une fois, ça a été vu comme une atteinte à leur
autonomie, une atteinte à la gouvernance locale. Ce sont les conseils
d'administration localement qui connaissent la réalité locale et qui... c'est des
gens bénévoles, là. D'ailleurs, ils ont signé une lettre ouverte pas plus tard
qu'hier, là, où ils se plaignent du fait que, écoutez, nous, on se réunit, on
connaît les besoins, on établit les montants, on fixe un budget
d'investissement pour l'année à venir, puis qu'est-ce qu'on nous fait un mois
plus tard, on envoie une lettre disant : Hum, vous pensiez dépenser,
disons, 30 millions, mais vous êtes limités à 15. Ça, c'est un exemple,
Mme la Présidente. Et, dans bien des cas, vous le savez, là, vous avez tous des
cégeps, là, dans vos... je regarde mes collègues autour de la table, dans vos
régions, qui... Les 48 cégeps ont reçu la même lettre, moi, c'est ce qu'on
m'a dit, et il y a des plafonds qui ont été imposés dans tous les cégeps. Et,
dans certains cas, ils ont dû mettre un terme à des projets... à des projets de
rénovation, à des projets d'agrandissement. Mais ça va plus loin que ça, ça
empêche les cégeps de faire des achats, de réagir à des urgences. Ça, c'est une
chose. On impose... on a changé les...
Mme Setlakwe : ...au niveau
des heures rémunérées. Tout récemment, par le biais d'une décision, là, de
concert avec le Conseil du trésor, il y a un gel d'embauche aussi qui était
imposé. Donc, on est vraiment en train de vivre... les cégeps, ce n'est pas moi
qui le dis, ça m'a été dit et c'est documenté, ils sont en train de vivre une
période difficile, et là on vient ajouter le projet de loi n° 74.
Donc, eux, ce qu'ils disent, c'est : Laissez-nous notre autonomie, les
choses vont bien. Et d'ailleurs, la population étudiante grandit. On a besoin
d'avoir toute l'autonomie. On a besoin d'avoir les coudées franches. Alors,
essentiellement, ils nous disent : Excluez-nous. Moi, j'aimerais bien que
la ministre de l'Enseignement supérieur vienne réagir à ce mémoire, à tout ce
que je viens de mentionner, qui vient de... qui nous provient de notre réseau
des cégeps. Ça, c'est les cégeps publics.
Il y a aussi les cégeps privés
subventionnés. Puis là on pourra venir... on pourra en venir éventuellement à
une discussion sur les collèges privés. On a eu en consultation l'Association
des collèges privés du Québec, extrêmement inquiets eux aussi. Je saute à la
conclusion de leur mémoire. Eux spécifiquement, ce qu'ils disent, c'est qu'il
faut agir avec prudence dans ce dossier. Donc, nous, on porte leur voix et on
demande au gouvernement d'être extrêmement prudent : «Nous désirons nous
assurer que le projet de loi ne viendra pas fragiliser le réseau collégial
privé et subventionné».
Est-ce que la ministre de l'Enseignement
supérieur pourrait venir répondre à cette préoccupation? Ils ont demandé :
Quelle est l'intention du gouvernement? Ce n'est pas clair. Le projet de loi,
selon eux, n'est pas nécessaire et représente un grand danger. Est-ce que... Où
le gouvernement a-t-il l'intention de couper? Il y a un potentiel de dommages.
Et là ils arrivent aussi à un point bien spécifique, et c'est la disposition du
projet de loi qui change la Loi sur l'enseignement privé pour les collèges
privés et subventionnés. Je vais le dire dans mes mots. Ils disent :
Attention de faire du mur à mur puis attention de donner des pouvoirs larges au
gouvernement, parce qu'il se pourrait que, du jour au lendemain, un collège
privé et subventionné... je vais donner l'exemple du collège Brébeuf qui est
dans ma circonscription, puis je pense que c'est un exemple qui avait été
mentionné durant les consultations. Puis c'est un collège qui est bien connu
puis c'est un collège où il n'y a pas de problématique, là, au niveau des
étudiants internationaux. Je pense qu'il y en a très peu d'ailleurs. Mais, du
jour au lendemain, on pourrait venir imposer un seuil, un plafond. Brébeuf a...
j'ai noté 1 700 étudiants au collégial, et, en vertu du libellé
actuel, on pourrait venir leur dire que, subitement, ce plafond serait réduit à
1 000. Imaginez l'impact. Imaginez l'impact sur un collège comme Brébeuf
et sur tous les autres collèges privés, c'est ça, les collèges privés
subventionnés.
Encore une fois, dans le même esprit, Mme
la Présidente, quelle est la réaction de la ministre de l'Enseignement
supérieur? Est-ce qu'on peut l'entendre? L'ensemble des mémoires, presque la
totalité des mémoires, sont des mémoires déposés par les réseaux, par les
institutions, par les recteurs, les directeurs qu'elle représente, qu'elle a la
mission de défendre.
• (18 heures) •
Aussi, je me permets de réitérer puis ça a
été dit, ça a été documenté aussi, ce n'est pas juste moi qui le dis, les
incohérences qui semblent émaner, là, de ces différentes différentes positions,
d'un côté, on dit que l'internationalisation de l'enseignement supérieur est
une priorité. C'est dans le plan stratégique. Puis là ensuite, le projet de loi
ou, en tout cas, des membres du Conseil des ministres et le projet de loi
envoient le message qu'il faut couper puis qu'il y en a trop. Bon, alors, c'est
très important de faire... d'internationaliser, ou bien il y en a trop puis
c'est un problème, il va falloir qu'on clarifie tout ça? Puis je pense que la
perspective de la ministre de l'Enseignement supérieur serait plus que
pertinente. Également, la nouvelle mouture de la politique de financement
qu'elle a pilotée, qui a été déposée en juin, où il n'y a pas de nouvel argent
qui est investi dans le réseau universitaire, a comme...
18 h (version non révisée)
Mme Setlakwe : ...élément
essentiel, la hausse des droits de scolarité, et on compte sur le financement
qui provient de la clientèle internationale pour venir redistribuer de l'argent
dans l'ensemble du réseau. Mais, du même souffle, on dit, au gouvernement, qu'on
veut réduire le nombre d'étudiants internationaux, qu'il y en a trop, que c'est
donc problématique, parce que c'est sûr qu'il y a une problématique, là, si on
dépose un projet de loi avec des projets aussi larges.
Donc, encore une fois, qu'est-ce qu'on
tente de faire? Est-ce qu'il y a un problème? Est-ce qu'il est ciblé? Et est-ce
qu'on a les bonnes mesures en place pour répondre spécifiquement à ces
problèmes-là? J'aimerais entendre la ministre sur ces différents éléments qui
sont interreliés et qui semblent contradictoires.
Permettez-moi de faire en rafale, là,
le... un sommaire, là, des conséquences plus larges, donc, sur la société et
des risques plus généraux, là, si les nouveaux pouvoirs, tel que stipulé dans
le projet de loi dans sa forme actuelle, sont mal utilisés.
Fort potentiel de nuire aux régions, je l'ai
mentionné, alors qu'on semble dire... le ministre a dit qu'il veut protéger les
régions, mais il va falloir que ça, ça se traduise dans le projet de loi, il va
falloir que le... les pouvoirs du ministre et des ministres, et là j'aimerais
entendre la ministre de l'Enseignement supérieur là-dessus, soient balisés. Le
Québec se donne notamment la possibilité de procéder par décrets. C'est très
large et ce sont des pouvoirs très larges et où le gouvernement va avoir une
très large discrétion.
Fort potentiel de nuire à notre économie.
Il ne faut pas sous-estimer la contribution de ces étudiants-là. Le
gouvernement de la CAQ se dit le gouvernement de l'économie. Moi, je commence à
en douter sérieusement, Mme la Présidente. Ces étudiants, pendant qu'ils sont
ici, ils dépensent, ils font rouler l'économie. Ce doit être chiffré. Plusieurs
travaillent pendant la durée de leurs études, dans le secteur du commerce de
détail par exemple, donc ils comblent la pénurie de main-d'œuvre. Ils
contribuent à la capacité de recherche et d'innovation du Québec. Ça, ça a été
dit et redit. Le projet de loi pourrait avoir un effet négatif sur les
laboratoires de recherche qui recrutent des étudiants aux deuxième et troisième
cycles. Donc, il n'y a pas toujours un lien avec les besoins de main-d'oeuvre,
mais ils sont essentiels à l'innovation. Elle en pense quoi, la ministre de l'Enseignement
supérieur? Les universités sont venues dire : Excluez-nous totalement,
mais, de grâce, excluez les cycles supérieurs, deuxième et troisième cycles. Il
ne faut absolument pas couper au niveau de ces cycles-là.
Juste pour parler de Polytechnique. À la
maîtrise... Une autre belle institution dans ma circonscription. À la maîtrise,
60 % des cohortes sont composées d'étudiants internationaux, 60 %, et
au doctorat, 70 %. Qu'est-ce qu'elle répond, la ministre de l'Enseignement
supérieur, à Maud Cohen, la directrice de l'École polytechnique, qui a d'ailleurs...
Le jour des consultations, elle n'est pas venue, Mme Cohen, mais elle a signé
une lettre ouverte. Ça vaut la peine d'être lu. Moi, j'aimerais que la ministre
de l'Enseignement supérieur nous dise qu'est-ce qu'elle en pense, qu'est-ce qu'elle
répond à Mme Cohen, qu'est-ce qu'elle répond aux HEC, qu'est-ce qu'elle répond
à l'UQO. Il faut absolument l'entendre dans le cadre de ce projet de loi là. Encore
une fois, c'est à la maîtrise et au doctorat où se déploient la recherche et l'innovation.
Mme Cohen a dit dans sa lettre : «Ce sont principalement des étudiants
venus de l'étranger qui contribuent de façon significative aux programmes de
recherche et d'enseignement dans nos universités et industries.» J'ai déjà
mentionné les pourcentages.
Quand je suis allée visiter Polytechnique,
il y a quelques semaines, on m'a mise en contact justement avec des étudiants,
des brillants... des étudiants brillants. Ils étaient autour de la table. J'ai
eu le privilège d'échanger avec eux. Ils m'expliquaient leurs parcours, m'expliquaient
surtout à quel point ils étaient tombés en amour avec le Québec, à quel
point... déjà, là, ils ont... ils ont déniché des emplois, ils ont... ils
performent, ils parlent le français, un français impeccable. Et là j'avais
cette jeune étudiante à mes côtés qui m'a remis une lettre. Là, c'était la
décision aussi par rapport au PEQ. Le découragement, l'inquiétude dans ses
yeux, dans sa voix, c'était... c'était franchement ébranlant. Elle, elle dit :
J'ai... Elle s'est même... Elle s'est mariée. Elle a... Elle est en couple avec
un Québécois. C'est... Tu sais, c'est tout un projet de vie. On se dit :
Quelle incertitude on est en train de leur faire vivre, alors qu'elle contribue
à l'innovation, son expertise est très pertinente, là, dans la...
Mme Setlakwe : ...la
transition énergétique, là. Cette jeune personne, mais des exemples comme cette
jeune dame à la Polytechnique qui veut travailler ici, qui veut s'établir, elle
est mariée, d'ailleurs, qui parle un français impeccable, elle se dit :
Mais on m'a convoité, on m'a... on m'a déroulé le tapis rouge, j'ai choisi le
Québec, et je ne regrette pas, j'adore le Québec, j'adore Montréal. Mais là
qu'est-ce qu'on est en train de faire? On est en train de changer les règles du
jeu en cours de route. Elle est très inquiète et elle me dit : Là, ce
projet de loi là, je ne le... je ne comprends pas. Est-ce qu'on veut... est-ce
qu'on veut... est-ce qu'on veut continuer à accueillir des personnes comme moi?
Alors, je pense que la réponse... En tout
cas, à la Polytechnique, leur position est claire : la ministre de
l'Enseignement supérieur est la personne toute désignée pour venir rassurer,
pour venir expliquer sa vision, pour venir... Je comprends, là, qu'elle va
avoir un rôle à jouer. Le ministre de l'Immigration l'a mentionné, il y a des
décisions qui vont devoir être prises conjointement. Mais il n'en demeure pas
moins qu'ici on essaie de dégager l'intention, la vision, là, l'intention du
législateur. Avec ce projet de loi là, il serait plus que pertinent d'avoir le
son de cloche de la ministre de l'Enseignement supérieur.
Et, bien, en terminant, écoutez, elle
doit, elle aussi, penser à... que c'est important de demeurer attractif et
compétitif. Elle a dû faire la même tournée que moi des universités.
D'ailleurs, elle est, c'est évident, là, encore plus en contact que moi, simple
députée de l'opposition officielle. Il faut absolument entendre sa voix dans le
cadre de ce projet de loi.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup, Mme la députée. Est-ce qu'il y a
d'autres interventions sur la motion préliminaire? Alors, s'il n'y a pas
d'autre intervention, nous allons procéder à sa mise aux voix.
M. Morin : Je vais vous
demander, Mme la Présidente, un vote par appel nominal, s'il vous plaît.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Un vote par appel nominal. Mme la secrétaire.
La Secrétaire : Pour, contre,
abstention. M. Morin (Acadie)?
M. Morin : Pour.
La Secrétaire : Mme Setlakwe
(Mont-Royal—Outremont)?
Mme Setlakwe : Pour.
La Secrétaire : M. Roberge
(Chambly)?
M. Roberge : Contre.
La Secrétaire : Mme Tardif
(Laviolette—Saint-Maurice)?
Mme Tardif : Contre.
Le Secrétaire : Mme Lecours
(Lotbinière-Frontenac)?
Mme Lecours
(Lotbinière-Frontenac) : Contre.
La Secrétaire : Mme Schmaltz
(Vimont)?
Mme Schmaltz : Contre.
La Secrétaire : Mme Poulet
(Laporte)?
Mme Poulet : Contre.
La Secrétaire : Mme Picard
(Soulanges).
Mme Picard : Contre.
La Secrétaire : M. Cliche-Rivard
(Saint-Henri—Sainte-Anne)?
M. Cliche-Rivard : Pour.
La Secrétaire : Mme Lecours
(Les Plaines)?
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Abstention. Alors, la motion est rejetée.
Je crois savoir qu'il y a une deuxième
motion préliminaire qui a été déposée, elle est déjà dans le Greffier. M. le
député de Saint-Henri Sainte-Anne, dès que nous allons l'avoir, je vais vous
demander d'en faire la lecture.
M. Cliche-Rivard : Je vais
attendre que...
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Elle s'en vient. Voilà.
M. Cliche-Rivard : Merci, Mme
la Présidente. J'en fais la lecture.
Qu'en vertu de l'article 244 du
règlement de l'Assemblée nationale, je fais motion afin que la Commission des
relations avec les citoyens, dans le cadre de l'étude détaillée du projet de
loi n° 74, Loi visant principalement à améliorer l'encadrement relatif aux
étudiants étrangers, demande au ministre de transmettre les documents suivants
à la commission, dans le but de dresser un portrait de la situation adéquat et
complet avant d'entreprendre son mandat.
Les informations suivantes sont
demandées :
le nombre de lettres d'admission émises
pour des étudiants internationaux par établissement d'enseignement, par niveau
d'enseignement, par programme et par année, pour les années 2018 à 2024;
le nombre de CAQ émis pour chaque
établissement d'enseignement par niveau d'enseignement, par programme et par
année, pour 2018-2024;
le nombre de permis d'études et le
nombre... émis et en vigueur pour chaque établissement d'enseignement du
Québec, par programme, par niveau d'enseignement et par année, pour 2018 2024;
et
le nombre d'inscriptions pour les
étudiants internationaux par établissement d'enseignement, par niveau
d'enseignement, par programme et par année, pour les années 2018 à 2024.
Donc, je m'exprime, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Bon, juste une seconde, on va vérifier le temps, on va
partir le temps. Maintenant, elle est dans le Greffier. Si vous voulez la lire
à nouveau pendant que je vous cède la parole pour votre 30 minutes.
• (18 h 10) •
M. Cliche-Rivard : Merci
beaucoup, Mme la Présidente. Donc, M. le ministre, ma demande, c'est pour qu'on
parte sur les mêmes bases, là, tous ensemble. Je pense que votre gouvernement
ou le ministère a plusieurs de ces informations-là, sinon toutes, en fait,
je... probablement qu'ils les ont toutes ou, du côté du gouvernement, vous les
avez. J'aimerais ça qu'on commence la discussion avec les mêmes bases, les
mêmes chiffres. Parce que, dans le dossier d'immigration, et vous le savez, on
a déjà discuté là-dessus, là, il y a... bon, il y a Statistiques Canada, il y a
IRCC, il y a le MIFI, il y a plusieurs joueurs évidemment, et là on est... puis
le Commissaire à la langue française nous en fait cette revendication-là aussi
dans son rapport. C'est un petit peu difficile d'y voir clair sur l'ensemble
des chiffres. Bon...
M. Cliche-Rivard : ...La
donnée qu'on a ou qu'on semble avoir, c'est 123 000 étudiants
étrangers temporaires sur le territoire du Québec ou, du moins,
123 000 permis valides, mais ce n'est pas toujours clair, à savoir
les inscriptions, ce n'est pas toujours clair, à savoir combien sont-ils
vraiment. Et ma question vient notamment pour qu'on soit capables d'avoir des
politiques publiques qui soient basées sur les faits sur lesquels on peut
s'entendre, là. Donc, moi, vraiment, dans une logique de collaboration, puis
dans une logique qu'on puisse avoir un portrait commun et conjoint de l'état de
la situation, puis qu'on puisse avancer ensemble, j'aimerais ça que le
gouvernement puisse nous fournir ces données-là pour qu'on puisse, tu sais,
vraiment... Le ministre nous parle souvent de là où il y a des problèmes. Puis
moi, je suis d'accord avec lui qu'il y a certaines institutions qui dépassent
la ligne, là, qui dépassent les bornes, mais ce n'est pas toujours clair de
quoi on parle puis qu'est-ce qu'on cherche à encadrer.
Et donc, là, nos 123 000 en question,
là, et c'est là où je posais la question tout à l'heure de ce que j'appellerais
les quatre étapes. L'étape où l'étudiant international fait une demande
d'admission dans une université, par exemple, et qu'il est admit. Étape un. Le
nombre de lettres d'admission émises par étudiant, par programme, par
établissement, par niveau, par année. Combien de demandes? Là, on va savoir, je
ne sais pas, moi, je ne... je n'ai pas le chiffre, mais peut-être qu'il y en a 500 000.
Je ne le sais pas. C'est l'information que j'aimerais avoir. Ensuite, ces gens
là, sur la base de ladite lettre d'admission et d'autres documents, feront une
demande de certificat d'acceptation du Québec au MIFI. C'est ça qui est en jeu,
essentiellement, dans le cadre du projet de loi aujourd'hui. Maintenant,
combien, là, de... combien de ces demandes-là initialement, là, si je pars avec
l'idée du 500 000 font finalement l'objet d'une demande de CAQ pour qu'on
puisse savoir, finalement, la corrélation : Est ce que 100 % des gens
qui reçoivent une lettre d'admission appliquent pour un CAQ? J'en doute. À une
époque lointaine, mais peut-être pas si lointaine que ça, vous vous souviendrez
peut-être... des gens parmi... dans la salle qui ont fait des demandes
d'admission dans certaines universités, vous en avez probablement faites
plusieurs, peut-être à l'Université de Montréal, peut-être à l'Université de
Sherbrooke, peut-être à l'Université d'Ottawa, peut-être à l'Université McGill,
et vous avez reçu des réponses, vous n'avez probablement certainement pas
accepté toutes ces demandes-là, vous avez choisi l'université, puis les autres
sont restées lettre morte. Bien, vous l'avez refusée, la demande d'admission.
Et donc même chose pour des étudiants internationaux qui peuvent appliquer
dans, ne serait-ce, plusieurs pays, plusieurs villes, plusieurs régions,
plusieurs programmes, plusieurs universités. Alors, combien de ces demandes-là
font l'objet d'un CAQ? Dans quelle proportion, dans quelle institution, dans
quel établissement, dans quelle région? Ça, ça nous permettrait de voir
directement... peut-être qu'on passe, là, je donne les chiffres, mais c'est les
chiffres que je veux obtenir. Peut-être que, tout d'un coup, on passe à
400 000 de notre 500 000 initial parce que, finalement, il y en
a 100 000 qui décident de ne pas le faire. Bon. Et une fois que ça, c'est
fait, là, avec notre CAQ en main, les étudiants internationaux déposent une
demande de permis d'étude auprès du gouvernement fédéral et RCC avec d'autres
documents additionnels. Et là le fédéral émet ou n'émet pas un permis de
travail... un permis d'étude. Combien de permis d'étude émet-il? Combien même
de détenteurs de CAQ déposent des demandes de permis d'étude puis combien n'en
déposent pas finalement? Et combien de permis d'étude sont finalement émis? Ça
nous permettrait très bien d'avoir un portrait global de combien de gens
véritablement obtiennent le permis d'étude. Et peut-être que, là, on serait
rendu à 300 000 dans la délivrance, peut-être même 250 000, parce que
le taux d'approbation de permis d'étude, on sait que c'est très variable selon
les pays d'origine. Et une fois que ça, c'est dit, reste l'étape de finaliser
notre inscription, de se présenter finalement dans ladite université, de choisir
ses cours et d'aller s'asseoir dans la classe pour matérialiser l'inscription.
Quatrième étape. Combien de ces gens là ont finalement commencé leur cours au
Québec par institution? Et est-ce qu'à ce moment-là on est effectivement rendu
à 123 000? Peut-être. Et c'est ce chemin-là, par programme, par
université, par niveau, qui nous permettrait d'établir ou de dresser le
portrait des endroits problématiques, des endroits qui fonctionnent, et qui
nous permettrait d'avoir des politiques publiques basées sur des données
chiffrées importantes. Parce que moi, je regarde la décision, par exemple, du
MIFI du...
M. Cliche-Rivard : ...octobre
2024. Et on voit que le ministère émet des milliers et des milliers de demandes
de CAQ par année, beaucoup plus que de nombre de permis d'études qui sont
finalement octroyés à la fin du processus. C'est normal. Mais combien? Et
combien à quelles institutions? Et là on les a, là, par commissions scolaires,
par cégeps, par universités, par niveaux d'études. Donc, on a une partie de la
réponse, mais, quand on regarde les chiffres d'IRCC, sur le nombre de permis
d'études délivrés, là, j'ai de la misère à dire qu'on puisse travailler sur les
mêmes bases puis et sur les mêmes chiffres, puis ça, ça m'inquiète, Mme la
Présidente.
Parce que, là, quand on fait le cumul des
permis d'études émis au Québec en 2023, c'est 61 191 permis d'études émis.
Bon, le Commissaire à la langue française nous en parle aussi, mais, si on fait
les maths, là, on nous dit «15 000» dans les cégeps, on nous dit
«41 000» dans les universités puis quelques milliers en secondaire, là,
les jeunes qui sont avec des parents accompagnants, là. On n'arrive pas. C'est
ça, une des questions que j'ai pour vous, M. le ministre, pour bien comprendre
la base de nos politiques publiques, puis je pense que vous avez une partie de
réponse, puis tant mieux, pour qu'on sache vraiment, là, nos 123 000, où
sont-ils.
Puis un des éléments, c'est... vous l'avez
vu puis entendu avec moi, M. le ministre, le Commissaire à la langue française,
j'en parlais, nous dit : Selon Statistique Canada, en 2019, le quart,
24 % des titulaires d'un permis d'études postsecondaires au Canada
n'étaient pas inscrits dans un établissement d'enseignement postsecondaire
reconnu, le quart. Dans la moitié des cas, nous ignorons même si les gens
étaient présents ou non sur le territoire et à quel titre. Parce qu'il y a un
taux important de détenteurs de permis d'études qui, pour des circonstances
hors de leur contrôle, ne se présentent pas au Canada. Ça se peut ça aussi.
D'où l'importance du nombre d'inscriptions, finalement, matérialisées dans les
institutions.
Selon IRCC, au 31 décembre, il y
avait 94 795 permis d'études de niveau postsecondaire en vigueur au
Québec. Or, durant cette année scolaire, on comptait 71 347 étudiants
étrangers dans les collèges, un écart de 25 %. Donc, il y a à peu près
20 000 personnes, 23 000 personnes qu'on ne sait pas sont où, mais,
si on base nos politiques publiques, Mme la Présidente, sur des chiffres, comme
nous dit le Commissaire à la langue française, qu'on ne sait pas ils sont où,
comment est-ce qu'on peut fonder des bonnes politiques publiques? Et c'est vrai
que c'est choquant le titre qu'il y a 12 000 CAQ ont été émis pour un
seul... une seule institution ou un seul... un seul cégep. Cela dit, dans les
faits, c'est 3 000 étudiants inscrits. Est-ce que 3 000, c'est trop?
Probablement, probablement pour cette institution précise là, je pense qu'avec
ce qui a été allégué autour de ça, probablement, mais, sur la seule base du
permis du CAQ, des admissions, on n'est pas capable de faire la démonstration
puis le chiffre précis.
Et, moi, ce que je demande à l'équipe
gouvernementale, c'est de nous répondre sur ces quatre volets-là : par
établissement, par niveau d'enseignement, par institution, pour que moi, là, je
sache. Et l'autre élément que j'ai mentionné, c'est qu'il y a l'existence puis
la délivrance des permis, puis il y a les permis en vigueur. Évidemment, quand
vous appliquez sur un baccalauréat à McGill, vous obtenez un permis de trois
ans, le temps de faire votre permis... le temps de faire vos études. Vous ferez
peut-être une prolongation. Ça vous appartiendra, mais votre permis sera valide
la durée de vos études.
• (18 h 20) •
Donc, c'est sûr qu'aujourd'hui, en 2024,
on a des gens qui ont reçu un permis de 2021, qui sont là, qui vont graduer en
août ou en hiver 2025, c'est correct, mais ce cumul-là, d'où sont-ils, les
universités, là, c'est-tu 60 000 comme nous le dit... ou 40 000 comme nous
le dit RCC... IRCC, ou c'est-tu 45 000? De quelle année? C'est la
discussion que j'aimerais qu'on ait pour qu'on parte sur des bases solides puis
qu'on soit capable de se dire : Aujourd'hui, c'est ça, le portrait de
notre immigration temporaire. Sur la base de ces portraits-là, il y aura
certainement des correctifs à apporter, j'en suis, puis on les appuiera, ces
correctifs-là, mais partons sur les mêmes bases. Puis entendons-nous, au
deuxième cycle, à Montréal, à Sherbrooke, il y a x 1 000 étudiants.
Entendons-nous...
M. Cliche-Rivard : ...combien
de ces étudiants-là émanent finalement du nombre de lettres d'admission? Il y
avait combien de lettres d'admission émises pour combien d'étudiants inscrits?
Je pense que ça va nous permettre de répondre à beaucoup d'inquiétudes puis à
beaucoup d'éléments de la part d'institutions qui se pensent visées puis que je
pense, moi, que le ministre n'a pas l'intention de les viser. Il nous le dira.
Je pense qu'il a à cœur nos établissements d'enseignement supérieur. Je pense
que ce n'est pas ces gens-là qu'il veut attaquer. Mais si on pouvait, d'une
façon, mieux encadrer le qui on tend à viser, et qui dépasse les bornes, et qui
ne respecte pas le fin fond du mandat d'institution qui est l'enseignement
supérieur... Vous l'avez dit, M. le ministre, ce n'est pas une business, ça
doit œuvrer à l'éducation supérieure, au développement scientifique, et c'est
ça, la mission profonde d'une université, d'un cégep. S'il y en a qui ne font
pas ce mandat-là, moi, je vais vous suivre pour les remettre à l'ordre, mais
encore faut-il qu'on ait les bonnes données, les bons chiffres, et je pense, à
voir vos équipes s'activer, qu'il y a une partie des réponses qu'on va avoir,
là, ou une partie des chiffres, mais c'est comme ça qu'on va voir là où il y a
des abus dans les dernières années. Merci, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci, M. le député. Est-ce que j'ai d'autres
interventions? M. le ministre?
M. Roberge : Merci, Mme la
Présidente. Je rejoins les préoccupations du collègue. Je pense que c'est une
demande qui est légitime d'avoir davantage d'information, de démêler les
chiffres entre les CAQ, les admissions, les permis d'études, etc. J'ai des
documents ici que je pensais vous partager lors des études pour qu'on avance.
Je n'ai pas toutes les réponses que vous demandez, malheureusement, et c'est
pour ça qu'il faut adopter le projet de loi, parce que l'article 10, 11 et
12 permettent au gouvernement, au ministre de l'Immigration, mais même au ministre
d'Éducation puis au ministre de l'Enseignement supérieur de recueillir ces
informations-là. L'article 10, là, on parle de recueillir les
renseignements nécessaires pour l'éducation, loisir et sport.
L'article 11, on parle justement de recueillir, communiquer aux fins de
l'exercice les règlements. Puis 12, bien, on est en enseignement supérieur pour
recueillir des renseignements, puis être capable de prendre les meilleures
décisions. Des fois, je pense que c'est nécessaire.
Ceci dit, je ne pourrai pas voter en
faveur exactement de la motion parce que... je pense, vous demandez quatre
éléments. Le premier et le dernier, on ne les a pas avec le détail que vous
demandez. Ceci dit, j'ai d'autres informations que vous ne demandez pas, mais
qui sont très pertinentes, que je suis prêt à partager avec vous, que ce soit
le nombre de CAQ qui ont été donnés au fil des années précisément. Ensuite, il
y a le flux et il y a le stock, hein, combien on en fait, combien on en délivre
à chaque année puis combien il y en a sur le territoire québécois. Le flux,
c'est combien à chaque année, le stock, c'est combien on en a en ce moment.
Donc, il y a ces deux informations-là. Il y a le nombre d'étudiants, on l'a à
partir de 2018, la plupart du temps, jusqu'à 2023, comme données fiables.
Parfois, on a des estimations pour 2024. Puis je pense que ça va aider, pas
seulement à vous, mais à tout le monde, de bien comprendre de quoi on parle. Et
vous allez retrouver le nombre de 122 000 dans les prévisions de 2024 puis
le chiffre pour 2023.
Donc là, il nous reste un petit peu de
temps. Je ne sais pas si vous voulez poursuivre là dessus ou suspendre, parce
que je ne pourrai pas voter en faveur de ça, je n'ai pas toutes les
informations. Il faut adopter le projet de loi, paradoxe, pour répondre
exactement à vos demandes. Ceci dit, je m'engage... demain, on se retrouve,
puis vous aurez les informations, vous et puis tous les gens qui les veulent,
pour qu'on puisse poursuivre nos travaux puis bien comprendre à quoi on réfère.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci, M. le ministre. J'ai d'autres interventions? M. le
député de l'Acadie.
M. Morin : Oui. Je comprends
qu'il nous reste quelques minutes.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Six minutes, un peu moins.
M. Morin : Six minutes
environ. Très bien. Je vous remercie, Mme la Présidente. Bien, écoutez, merci.
Merci, M. le ministre, de votre ouverture. Je vais appuyer la motion du
collègue le député de Saint-Henri—Sainte-Anne, parce qu'il me semble pertinent
et important qu'on ait au moins la même base pour qu'on puisse se comprendre
quand on va étudier, article par article, votre projet de loi. Je vais être
très transparent avec vous, je suis un peu étonné que vous n'ayez pas déjà...
M. Morin : ...ces
chiffres-là parce qu'il me semble, à moins que je comprenne très mal, mais il
me semble que quand on regarde les règlements, notamment en matière
d'immigration, sur le programme des étudiants étrangers, et quand on dit «le
ministre consent au séjour d'un ressortissant étranger dans le cadre du
programme des étudiants étrangers lorsqu'il satisfait aux conditions
suivantes», et je suis à l'article 11 du règlement, bien, si vous
consentez, et donc que vous allez émettre un certificat, normalement, il
devrait y avoir quelqu'un dans votre organisation qui les compte. Tu sais, je
ne peux pas croire que vous les émettez et qu'il n'y a pas de dossiers, il n'y
a pas de statistiques que vous conservez à cet effet-là. Donc...
Et puis ce que j'aimerais aussi savoir de
vous, M. le ministre, parce que vous dites : Il y a des... Il y a des....
Il y a des chiffres que nous avons, mais il y en a que nous n'avons pas. D'où
l'importance de la loi et d'adopter le projet de loi. Alors, qu'est-ce que vous
avez là-dedans et qu'est-ce que vous n'avez pas? Parce que quand... quand je
lis votre projet de loi et que je regarde les articles 10 et 11, ce n'est
pas clair, à 10, que ça va vous donner plus de renseignements quant au nombre.
À 11 peut-être, parce que vous pourrez éventuellement, par règlement,
déterminer les renseignements que les organismes doivent recueillir, mais pas
nécessairement vous. Alors, ça m'apparaît vraiment, vraiment nébuleux, tout ça.
Et évidemment j'apprécierais que vous puissiez partager avec nous les chiffres
que vous avez, les renseignements, le nombre de certificats, parce que ça nous
permettrait évidemment de mieux saisir, de mieux comprendre où vous voulez
aller avec votre projet, avec votre projet de loi.
Ça serait important aussi de savoir parce
que, moi, si je me fie aux chiffres du Bureau de la coopération
interuniversitaire, quand on regarde le nombre d'étudiants internationaux par
établissement, eux, ils arrivent à 57 450. Donc, vous devriez avoir dans
vos chiffres en quelque part, si eux ont ces statistiques-là, le même chiffre.
Et ce serait important, je vous dirais, d'avoir aussi des chiffres en ce qui a
trait, bien sûr, aux universités que ce soit au premier cycle, au deuxième
cycle et au troisième cycle, les cégeps et, évidemment, les collèges
d'enseignement privés. Parce que j'imagine que ce que vous voulez faire,
éventuellement, M. le ministre, c'est de savoir et de déterminer en bout de
piste combien il va y avoir de personnes sur le territoire québécois en termes
d'étudiants internationaux.
Je reprends ce que disait le collègue, le
député de Saint-Henri Sainte-Anne. C'est sûr que les étudiants internationaux,
normalement, à moins qu'ils aient identifié un programme très, très, très ciblé
et très spécifique, vont probablement faire des demandes dans plusieurs
universités. Évidemment, en bout de piste, ils n'iront qu'à un seul endroit.
Est-ce que ça veut dire qu'à chaque fois qu'il y a une demande qui correspond à
une maison d'enseignement, vous émettez un certificat d'acceptation au Québec?
J'aimerais effectivement le savoir parce que, dans ce cas-là, c'est sûr que
vous allez vous retrouver avec un nombre de certificats beaucoup plus élevé que
le nombre de personnes qu'il y a sur le territoire. Puis au fond, ce que vous
voulez comprendre, voire évaluer, c'est le nombre de personnes que vous allez
avoir sur le territoire, pas le nombre de documents que vous émettez. Donc, ça
m'apparaît tout à fait important, d'autant plus qu'à chaque fois qu'on parle de
chiffres, que ce soit au niveau du fédéral ou au niveau du Québec, on n'arrive
jamais aux mêmes chiffres. C'est quand même fascinant pour un même programme,
pour une situation qui touche les étudiants étrangers...
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : M. le député de l'Acadie...
M. Morin : ...internationaux.
Voilà.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : ...compte tenu de l'heure, la commission ajourne ses
travaux sine die.
(Fin de la séance à 18 h 30)