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Version préliminaire

43e législature, 1re session
(début : 29 novembre 2022)

Cette version du Journal des débats est une version préliminaire : elle peut donc contenir des erreurs. La version définitive du Journal, en texte continu avec table des matières, est publiée dans un délai moyen de 2 ans suivant la date de la séance.

Pour en savoir plus sur le Journal des débats et ses différentes versions

Le mercredi 20 novembre 2024 - Vol. 47 N° 56

Étude détaillée du projet de loi n° 74, Loi visant principalement à améliorer l’encadrement relatif aux étudiants étrangers


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Journal des débats

15 h (version non révisée)

(Quinze heures six minutes)

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Alors, à l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission des relations avec les citoyens ouverte. La commission est réunie afin d'entreprendre l'étude détaillée du projet de loi n° 74, Loi visant principalement à améliorer l'encadrement relatif aux étudiants étrangers. Mme la secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?

La Secrétaire : Oui, Mme la Présidente. Mme Blais (Abitibi-Ouest) est remplacée par Mme Poulet (Laporte); Mme Gendron (Châteauguay) par Mme Picard (Soulanges); Mme McGraw (Notre-Dame-de-Grâce) par M. Morin (Acadie); Mme Prass (D'Arcy-McGee) par Mme Setlakwe (Mont-Royal-Outremont); et M. Bérubé (Matane-Matapédia) par M. Paradis (Jean-Talon).

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Merci beaucoup. Alors, Mmes les élues et MM. les élus, bienvenue à cette commission. Avant de débuter de façon officielle, je vais déposer les mémoires qui ont été reçus depuis la fin des consultations particulières. Donc, les mémoires sont dans Greffier.

Nous en sommes maintenant aux remarques préliminaires, pour lesquelles chaque membre, je vous le rappelle, dispose de 20 minutes. J'invite d'abord le ministre de l'Immigration, de la Francisation et de l'Intégration à faire ses remarques. M. le ministre, le micro est à vous.

M. Roberge : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Je salue les collègues des trois oppositions qui sont représentées aujourd'hui, évidemment les députés de la banquette ministérielle, la foule qui est venue écouter nos travaux, vous êtes les bienvenus, puis évidemment les équipes du ministère, qui sont toujours là pour nous soutenir. Ça fait quand même pas mal de projets de loi que je travaille, on sait très bien qu'au fil des travaux puis après les consultations particulières, on a des idées de bonification, on a des idées d'ajustements, d'amendements pour arriver à un projet de loi qui soit le meilleur possible, puis on a besoin des équipes des juristes pour nous éclairer là-dedans.

Peu de gens le savent, s'il y en a qui nous écoutent à la maison, mais la majorité des projets de loi au Québec, après débats, après discussions, après amendements, après travaux, sont adoptés à l'unanimité. Je ne peux pas présumer pour ce projet de loi là, ce n'est pas ce que je fais, mais je veux juste dire que je souhaite qu'on soit constructif. Je m'engage à avoir une ouverture... Ça ne veut pas dire que j'accepterai toutes les propositions, mais on va étudier avec sérieux toutes les propositions d'amendement et de bonification de ce projet de loi là pour arriver à la fin avec quelque chose qui va servir le mieux possible les Québécois pour les décennies à venir, parce qu'on sait très bien qu'à un moment donné, dans nos chaises, il y aura d'autres personnes que nous qui auront à vivre et à appliquer les articles tels qu'ils seront modifiés puis adoptés.

Le projet de loi qu'on travaille aujourd'hui, qu'on va commencer à travailler, je pense qu'il est important, particulièrement dans le contexte qu'on vit. Il faut voir qu'entre 2014 et 2024, sur 10 ans, il y a eu une augmentation de plus de 140 % des certificats d'acceptation du Québec, les CAQ, pour les étudiants étrangers, qu'on peut appeler aussi les étudiants internationaux. En 10 ans, 140 % de hausse, c'est énorme. Il faut donc se poser des questions.

Dans certains cas, ce sont des augmentations dans certains programmes, dans certains établissements qui sont pleinement justifiées. Les étudiants étrangers qui arrivent ici contribuent à la société, permettent bien souvent de maintenir des programmes qui sont très importants en région, viennent répondre parfois à des secteurs qui sont en pénurie de main-d'oeuvre, viennent aussi nous aider à mieux offrir des services publics aux Québécois et parfois permettent à des étudiants en région de continuer d'étudier près de chez eux, parce que la présence d'étudiants étrangers permet de garder des programmes ouverts. Donc, c'est important de le considérer. D'autres fois... S'il n'y avait pas, des fois, ces présences d'étudiants étrangers, bien, il pourrait y avoir des programmes en région qui ferment, des gens qui soient... qui seraient forcés de s'expatrier, de quitter la région, peut-être pour ne pas revenir, malheureusement, ou qui pourraient renoncer à leur projet d'études. Donc, c'est sûr qu'on a ces...

M. Roberge : ...là, en tête. Et il faut voir que l'état du droit actuel, les pouvoirs du gouvernement, du ministre de l'Immigration actuel sont plus qu'imparfaits. Ils sont carrément inadéquats. Il y a quelques années, sous le premier mandat du gouvernement de ma formation politique, la ministre qui s'occupait de l'Enseignement supérieur, Mme Danielle McCann, a été confrontée à certains abus dans le réseau d'enseignement supérieur. Elle a voulu corriger la situation. Elle a pris des mesures en fonction des lois qui nous gouvernent actuellement et elle a été déboutée en cour. Le gouvernement, avec la loi actuelle, n'a pas la capacité d'agir de manière chirurgicale, d'agir de manière précise lorsqu'il y a des abus ou des débordements. Et il y en avait, et il y en a encore.

• (15 h 10) •

La dernière fois, si la situation a pu être corrigée en partie, bien qu'ensuite certains abus sont revenus, c'est parce qu'on avait réussi à convaincre le gouvernement fédéral de revoir l'émission de permis de travail postdiplôme. Laissez-moi vous dire que, pour un gouvernement qui est nationaliste, ce n'est pas une posture que l'on aime et qu'on apprécie, c'est-à-dire de ne pas être maîtres chez nous, de ne pas avoir les leviers juridiques pour agir de manière précise et corriger des situations parfois qui sont évidentes. On en a vu. On en avait vu au moment de la... où c'était la ministre McCann qui était la ministre de l'Enseignement supérieur, mais on a vu, cette semaine encore, dans le Journal de Montréal, il y a des choses qui sont évidentes.

Au moment où on se parle, le ministre de l'Éducation et la ministre de l'Enseignement supérieur ont des conversations avec leur réseau, avec les dirigeants, évaluent avec la ministre de l'Emploi les besoins de main-d'œuvre dans les différents secteurs, analyse le réseau pour être certain qu'on est capables de répondre aux besoins de main-d'oeuvre, de répondre aux besoins de services publics tout en étant raisonnables dans l'accueil d'étudiants étrangers, considérant qu'on a en ce moment presque 600 000 résidents temporaires sur le territoire québécois, beaucoup, beaucoup d'étudiants étrangers et internationaux, plusieurs d'ailleurs qui ont des problèmes à se loger. On a vu que certains étudiants étaient obligés de faire des sessions à l'hôtel. Plusieurs ont de la misère à se loger, à tel point que ça fait augmenter les loyers pour tous.

Donc il y a des enjeux. On ne peut pas se mettre la tête dans le sable. Il y a une évidence que le droit actuel, qui est la loi actuelle, est inadéquat. On l'a vu lors du dernier gouvernement, lors de la dernière législature, quand on a vu que le gouvernement a perdu en cours, quand il a tenté d'agir. Donc, le statu quo n'est pas tenable. J'espère donc qu'on va être capable d'étudier ce projet de loi là avec tout le sérieux, en essayant de le bonifier puis de le corriger. Puis je veux assurer mes collègues de l'ouverture du gouvernement pour toute proposition qui sera raisonnable et qui viendront améliorer ce projet de loi. Merci.

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Merci beaucoup, M. le ministre. Alors, je me tourne du côté du député de l'Acadie, représentant l'opposition officielle. Vous avez 20 minutes pour vos remarques.

M. Morin : Merci, Mme la Présidente. Alors, bon après-midi, tout le monde, M. le ministre, collègues de la banquette gouvernementale, les spécialistes qui vous accompagnent, M. le ministre, les gens de votre cabinet et des ministères. Je salue particulièrement ma collègue députée de Mont-Royal-Outremont, M. Angers, notre recherchiste, et les collègues des oppositions qui siègent cet après-midi.

Je vous dirai, dans le cadre de mes remarques préliminaires, que c'est un... c'est un projet de loi qui a déjà fait couler beaucoup d'encre et où, en consultations particulières, on a eu... on a eu un très grand nombre de groupes. Ça a soulevé énormément d'intérêt parce que, même après les consultations particulières, il y a des... il y a des groupes, des associations qui ne sont pas venues, mais qui voulaient envoyer des mémoires, qui voulaient participer. Donc, ça soulève beaucoup, beaucoup d'enjeux, je dirais même de passions dans notre société. Et j'écoutais... J'écoutais M. le ministre dans le cadre de son intervention...

M. Morin : ...pendant le principe. C'est sûr, Mme la Présidente, que s'il y a des abus, s'il y a des fraudes, on ne peut pas les cautionner, on ne peut pas les encourager, puis il faut essayer de régler la situation. Ça, c'est très clair, très clair pour moi. Mais ce sont des cas quand même qui sont assez isolés. Et quand je lis le projet de loi, et on va avoir la chance d'en parler, d'en discuter dans le cadre du travail de la commission, j'ai l'impression que le projet de loi va vraiment au-delà de ça. Et j'essaie encore, puis je vais vous le dire avec beaucoup, beaucoup d'ouverture, de candeur, j'essaie encore de comprendre véritablement ce que le ministre essaie de corriger. Et je m'explique. Ce matin... et je remercie, je remercie les membres des ministères, et du cabinet probablement, qui étaient là, je reconnais Mme... qui nous a... qui nous a parlé ce matin dans le cadre du briefing technique. Je la remercie. Mais là on nous a parlé d'enjeux pour le ministre de ne pas être capable de contrôler d'une façon plus ciblée un nombre d'étudiants étrangers. Eh bien, moi, je voulais savoir pourquoi. Et puis là on nous a dit : Bien, c'est parce qu'il y a eu des débats à la cour. J'ai dit : Ah! Ah bon? Mais non, mais c'est possible, hein? Mais j'ai dit : Là, ce serait peut-être très intéressant qu'on sache pourquoi. Parce que si c'est ça le problème qu'on essaie de régler, bien là, il faudrait véritablement s'en parler. Alors, on a eu de l'information qui nous a été acheminée de la part du gouvernement. Je les remercie, sauf que c'est assez volumineux, là. C'est arrivé récemment, là, en fait, dans les... dans les heures, là, qui suivent, dont notamment, bien sûr, comme dans tout litige, une demande introductive d'instance qui fait état de certains... de certains problèmes, mais... compte tenu évidemment de certaines décisions qui avaient été prises par le gouvernement. Sauf que, quand on regarde rapidement, puis je vous le dis rapidement parce qu'on l'a eu, là, il y a quelques temps, certaines des décisions... ce que certaines parties demandaient, c'était une demande en injonction provisoire et en ordonnance de sauvegarde, ainsi qu'une injonction interlocutoire. Et dans... et dans cette demande là, on demandait notamment, à l'époque, à la ministre de maintenir un statu quo prévalant avant l'arrêté et de continuer de recevoir et de traiter, de rendre des décisions relativement aux demandes de certificats d'acceptation du Québec dans le cadre du programme d'étudiants étrangers. Et ce qu'on se rend compte, par la suite, dans ce que j'ai pu regarder et lire, c'est qu'il y a eu un jugement sur demande d'injonction provisoire et ordonnance de sauvegarde de la part du tribunal, de la Cour supérieure, mais ce que le jugement dit, c'est qu'au fond le ministère aurait pris un engagement conformément à certaines clauses de la demande introductive d'instance et il y aurait eu une entente entre les parties. Qu'est-ce qui était arrivé? Quelle était l'entente? Ce n'est pas très clair. Ils ont continué à traiter des demandes d'étudiants étrangers. Par la suite, par la suite, sur le jugement, sur demande d'injonction provisoire et d'ordonnance de sauvegarde, puis là on n'est toujours pas sur le fond, là, en fait, ce que les organismes... ici, c'était le collège Canada, ici, c'est le collège CDI notamment, c'est de vouloir conserver d'une façon urgente un certain statu quo. Et là, ce qu'on nous dit, il y a une liste d'établissements, c'est qu'il y aurait eu aussi une entente. Puis la ministre, à l'époque, défenderesse, s'était engagée à continuer à recevoir, de traiter, de prendre certaines décisions pour des certificats d'accréditation Québec. Donc, ma compréhension, puis il y a eu, après ça, une ordonnance sur un jugement de sauvegarde, mais il n'y a jamais eu, en tout cas, moi, je n'en connais pas, puis s'il y en a, des documents, mais ça, j'aimerais ça les avoir, parce qu'on nous dit que ce projet de loi là vise à permettre au gouvernement d'agir alors qu'il n'a pas été en mesure de le faire. Et donc...

M. Morin : ...ils nous ont dit que la cour l'a arrêté, mais moi, je n'ai pas trouvé de jugement, au fond. Donc, le débat, au fond, n'a pas eu lieu. Moi, je tiens à le soulever dans mes remarques préliminaires. Moi, je ne l'ai pas trouvé. Il existe peut-être, mais j'aimerais ça l'avoir.

• (15 h 20) •

Donc, pour moi, c'est un enjeu. Parce qu'au fond qu'est-ce qu'on essaie de corriger? Et, quand on fait référence à des documents judiciaires, bien, il faudrait voir. Au fond, ce que je comprends, c'est que le gouvernement a voulu poser des gestes, il y a des collèges qui se sont opposés, le gouvernement a retraité, puis dire : Écoutez, on va s'entendre. Bon. Alors, on en est là. Donc, ça, c'est un premier enjeu parce qu'évidemment, pour régler véritablement la situation, il faudrait être capable de connaître véritablement quel est le problème et l'enjeu, première des choses.

Deuxièmement, quand on parle, on nous parle beaucoup du nombre d'étudiants étrangers, mais moi, les documents que j'ai... que j'ai, que j'ai trouvés au niveau universitaire, sur l'ensemble du réseau... On nous parlerait de 57 450, et il y en a également au collégial, quelques milliers. Donc là, on n'est pas dans un chiffre de 200 000, 250 000. Là, on est loin de là. Alors, encore là, quels sont les chiffres? Est-ce qu'on a d'autres informations? On verra, on aura la possibilité d'en discuter avec M. le ministre. Mais c'est autant d'éléments, pour moi, qui sont en suspend. Et, je me dis, pour être capable de légiférer d'une façon efficace, bien, il faudrait qu'on parte sur des bases où tout le monde, où tout le monde s'entend. Je salue, je salue l'ouverture de M. le ministre. C'est ce qu'il nous disait d'emblée, et effectivement, au fur et à mesure, nous aurons sûrement des modifications à lui proposer. Mais je tenais d'abord, puis c'est un peu l'avantage des remarques préliminaires, d'un peu mettre la table, si vous voulez, à tout le moins, du côté de l'opposition officielle, pour voir un peu où est mon... en fait, où sont les informations qu'on a... de l'année puis qu'est-ce qui arrive. Alors, ça, c'est une chose.

Deuxièmement, il y a tous les mémoires qu'on a reçus, et ça aussi, c'est un peu rare de... et, croyez-moi, je... ça ne fait pas 20 ans ou 15 ans que je siège au Parlement, mais j'ai quand même siégé, pour l'opposition officielle, dans plusieurs projets de loi, mais c'est rare qu'à peu près tout le monde où il y a un consensus, à l'effet qu'on dit au gouvernement : N'allez pas là, c'est... vous n'avez pas la bonne méthode. Et ça va avoir un impact très important sur nos maisons d'établissement supérieur. Puis ça, je pense qu'il faut aussi le mentionner d'emblée. Et l'impact que ça peut avoir, on nous l'a... on nous l'a dit, plusieurs groupes sont venus nous le dire dans le cadre des consultations particulières du projet de loi n° 74. Le ministre veut s'accorder beaucoup de pouvoirs avec le projet de loi, d'une part, et, d'autre part, par la suite, se donne la possibilité d'accepter et d'adopter un nombre important de règlements. Mais, encore là, ce n'est pas très précis et c'est aussi un élément qui... comment dirais-je, qui m'inquiète parce que, normalement, un projet de loi ou une loi devrait servir à apporter une plus grande certitude et non pas l'inverse.

Dans son projet de loi, plusieurs groupes sont venus nous dire que ça allait créer plus d'incertitudes. Un de ces organismes-là, c'est la Commission des droits de la personne et de la protection de la jeunesse ou... du Québec par la plume de son président, qui nous rappelait, dans le cadre d'un mémoire, puis on en reparlera éventuellement, mais qui nous a rappelait que le projet de loi va créer plus d'incertitudes que de certitudes. Donc, vous comprendrez que, pour moi, comme député qui a un rôle de législateur à jouer, c'est un élément qui vient me chercher et donc qui m'inquiète. Ça, c'est un élément.

Par après, on a entendu, et là aussi c'est assez rare, mais... Mais, dans le cadre des consultations particulières, les recteurs des universités québécoises sont venus, sont tous venus en commission parlementaire et...

M. Morin : ...ils nous ont dit que ce projet de loi là pouvait avoir un impact sur leur liberté académique. Et là, je vous ferai remarquer que le projet de loi s'intitule Loi visant principalement à améliorer l'encadrement relatif aux étudiants étrangers. Donc, ça, c'est une chose, mais, quand on regarde les dispositions du projet de loi, dans son projet de loi, M. le ministre veut... peut prendre des décisions qui va avoir un impact sur certains projets universitaires. Parce que, dans son projet de loi, on parle d'orientations, d'objectifs fixés, de besoins économiques, de main-d'oeuvre, autant de critères ou d'orientations qui vont pouvoir être considérés par le gouvernement.

Qu'est-ce que ça va donner sur des programmes universitaires? On ne le sait pas, mais il y a une chose que je peux vous dire et qu'on sait, qu'on a entendu, c'est que les recteurs d'université sont venus nous dire que ça pouvait avoir un impact important sur l'autonomie puis la liberté académique universitaire. Et ce qui m'apparaît un peu paradoxal, c'est que le gouvernement du Québec, et là je parle des universités, pas des cégeps, mais des universités, a aussi une loi pour protéger la liberté académique. Donc, c'est comme si le législateur, le gouvernement était un peu en contradiction avec ce qu'il voulait faire.

Donc, je vous dirai honnêtement que c'est un élément qui a attiré particulièrement mon attention et, j'en suis convaincu, ma collègue députée de Mont-Royal–Outremont pourra en parler également, parce qu'elle est la porte-parole de l'opposition officielle, notamment pour des études supérieures. Mais c'est quelque chose, en tout cas, qui est carrément venu me chercher. Alors, on aura la chance d'en discuter pendant l'analyse étude article par article.

Il en va aussi de la réputation du Québec, je vous dirais. Et ça, La Chambre de commerce du Montréal métropolitain, par la voix de son président, a été très claire, dans le domaine universitaire, les étudiants internationaux constituent pour moi un atout et une richesse pour le Québec, mais évidemment, pour qu'ils puissent venir au Québec, il faut qu'on soit capables d'avoir des mesures qui va faire une différence. Parce qu'au niveau... au niveau universitaire, et je vous dirai, particulièrement au niveau des études supérieures, on est en compétition avec le monde et avec les autres provinces canadiennes, évidemment. Donc, quand un étudiant étranger décide de venir ici, c'est parce qu'il a fait une série d'analyses puis qu'il se dit : Bien, c'est vraiment là. Est-ce que c'est parce qu'il y a un programme qui est exceptionnel? Est-ce que c'est parce qu'il y a des conditions de vie qui sont aussi exceptionnelles? Parce que, disons-le, on est chanceux, là, de vivre au Québec. On est... C'est vraiment... c'est bien, là, notre société québécoise. Mais là, il ne faut pas mettre des bâtons dans les roues à ces gens-là pour les empêcher de venir. Et ça, c'est un élément important qui a été soulevé par la Chambre de commerce du Montréal métropolitain, le fait qu'on soit en compétition avec le monde.

Et l'autre élément, ça recoupe ce que je disais également en lien avec la lettre du président de la Commission des droits de la personne. La Chambre de commerce en parle. Pour que des gens viennent ici, qu'ils soient attirés, il faut qu'ils puissent connaître un cadre législatif et réglementaire qui est prévisible, parce qu'ils veulent savoir, évidemment... S'ils investissent pour venir ici, ils veulent savoir après ça ce qui va arriver de leurs études, mais est-ce qu'ils vont pouvoir s'établir ici, etc., travailler, bon. Et le projet de loi apporte ou contribue à instaurer une incertitude à ce niveau-là, un manque de prévisibilité réglementaire. Et je vous le dirai bien humblement, ce n'est pas à l'avantage du Québec.

• (15 h 30) •

Donc, il y a... il y a beaucoup d'éléments qui sont dans l'air. Le gouvernement a fait aussi plusieurs déclarations à propos de l'immigration. Et ça fait en sorte que, déjà, déjà... et puis il y avait un excellent reportage hier à Radio-Canada, déjà, le nombre d'inscriptions d'étudiants étrangers est en baisse dans les universités du Québec, là, avant même que ce projet de loi là soit adopté...


 
 

15 h 30 (version non révisée)

M. Morin : ...c'est déjà fait, c'est déjà fait. Et permettez-moi, permettez-moi de référer à un article qui a été publié et qui parlait particulièrement de l'Université du Québec à Rimouski. C'était aussi l'objet du reportage d'hier. On entendait des gens, on entendait des étudiants, eh bien ce projet de loi, des mesures gouvernementales, suscite de l'angoisse chez eux. Parce que, là, ils ne savent plus vraiment quoi faire et ça a un impact important sur les programmes universitaires. Donc, il faut être capable, il faut être capable d'équilibrer tout ça dans le cadre d'un projet de loi puis il faut être capable aussi de s'assurer que le Québec va demeurer un joueur clé dans le monde et au Canada, en ce qui a trait évidemment aux études supérieures, aux études universitaires et à la recherche.

Ce que le recteur de l'Université du Québec à Rimouski disait hier M. Deschênes, et je le cite : «Ça crée de l'incertitude chez les personnes qui souhaitent venir étudier ici, et, pour ces personnes-là, ça peut influencer la décision.» On dit dans l'article que ce constat est partagé par d'autres institutions qui observent déjà une chute du nombre de nouvelles inscriptions. Université Laval, une baisse de 21 % notamment. Et il y en a d'autres.

Donc, autant d'éléments qui, pour ma part, sont inquiétants. Et je comprends la volonté de M. le ministre de le dire... parce que ça aussi, on a vu un article cette semaine dans les journaux, où il y a une maison d'enseignement qui a accepté beaucoup trop d'étudiants. Évidemment, il faut respecter la loi, c'est clair, il faut respecter la réglementation, mais est-ce que... est-ce que les mesures que veulent se donner le gouvernement ne sont pas trop larges? Est-ce qu'on a véritablement bien cerné les enjeux auxquels on fait face pour être capable de les corriger avec un projet de loi? Bien, j'écoute, M. le ministre, il nous parle d'ouverture. Alors, effectivement, il va falloir en discuter, il va falloir en débattre, parce que, moi, quand je lis le projet de loi, j'ai l'impression, comme on dit parfois, qu'on ne veut pas faire du sur mesure, mais on veut faire du mur à mur. Et je suis loin d'être convaincu que c'est ce dont le Québec a besoin maintenant, compte tenu de l'impact qu'on voit déjà au sein de nos universités et compte tenu également de ce que les recteurs venaient nous dire, qui sont, et je me fie à eux, évidemment des experts dans la gestion de leurs universités. Moi, ce n'est pas mon cas, je les écoute avec, évidemment, attention.

Donc, il me reste quelques secondes. Je termine, je termine là dessus, Mme la Présidente, mais il me semble, il me semble, que ce projet de loi que le gouvernement veut mettre en place, des mesures qui ne sont pas nécessairement bien adaptées à la situation que M. le ministre veut régler, ça, je l'entends, et donc nous l'étudierons avec intérêt. Merci.

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Merci beaucoup, M. le député. Je me tourne maintenant du côté du député de Saint-Henri—Sainte-Anne pour vos préliminaires, 20 minutes.

Mme Setlakwe : ...

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Oh oui! c'est vrai.

Mme Setlakwe : C'est après?

Des voix : ...

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : C'est après, oui, c'est ça. D'accord. On finit et on revient à vous.

Mme Setlakwe : Très bien.

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Donc, j'avais raison. M. le député de Saint-Henri—Sainte-Anne, vos 20 minutes commencent.

M. Cliche-Rivard : Merci, Mme la Présidente. Merci, collègues. D'abord, très heureux de vous retrouver aussi à la CRC, ça faisait un petit moment. Alors, content de vous retrouver. Merci aux collègues des oppositions, merci aux collègues du Gouvernement. M. le ministre et ses équipes, bonjour, puis nos équipes à nous aussi à la recherche de ce côté-ci.

Bon, plusieurs mémoires et plusieurs jours de consultations, plusieurs jours d'étude dans le cadre du projet de loi n° 74 qu'on étudie, qu'on commence à étudier. Évidemment, le collègue de l'Acadie en faisait mention, mais c'est c'est vrai qu'on a siégé même ensemble sur plusieurs projets de loi, mais d'une unanimité comme ça et d'un ensemble de groupes comme ça et d'acteurs importants, là, disons, quasi-unanimité pour faire plaisir au ministre, on a rarement vu ça, quand même...

M. Cliche-Rivard : ...et, de surcroît, dans un niveau, ou dans un élan, ou dans une gravité de concept de cette mesure-là. Puis là je parle notamment de l'autonomie institutionnelle, l'autonomie académique des universités et des cégeps, qui... qui est en jeu, qui a été invoquée être en jeu par plusieurs institutions, et, évidemment, par le... le... disons, la... la posture ou le rôle important de ceux et celles qui sont venus nous en parler, notamment des coalitions de recteurs, rectrices, de fédérations. On a eu droit à... à l'ensemble des têtes dirigeantes des institutions académiques du Québec pour venir dire au gouvernement de ne pas aller de l'avant avec ce projet de loi là. C'est quand même frappant, c'est quand même marquant. Et, vous l'avez dit, Mme la Présidente, d'entrée de jeu, vous avez déposé des mémoires additionnels, parce qu'il y a beaucoup de gens qui n'ont pas été entendus, qui avaient des choses à dire.

Donc, je... je salue l'ouverture du ministre, d'entrée de jeu, qui nous a peut-être annoncé des amendements à venir, là, je ne sais trop, mais ça a été dans... dans son... dans ces mots. Là, je... je regarde Greffier, et je n'en vois point, donc j'imagine qu'ils... ils sauront venir, le cas échéant, mais je pense que ça va être essentiel. J'entendais le ministre aussi nous parler d'espoir d'unanimité ou, en tout cas, d'espoir de consensus. C'est vrai qu'une très grande majorité de projets de loi, ici, on entend ou... on est capables de s'entendre. Encore faut-il... puis je note son ouverture et sa transparence... encore faut-il qu'on fasse un bout de chemin dans cette direction-là. Je pense que c'est tout à fait encore possible. C'est mon souhait. Mais, là encore, faudra-t-il voir les marges de manœuvre puis les ouvertures, du côté gouvernemental, pour voir si c'est possible pour nous d'embarquer dans... dans cette... dans cette danse, hein, disons le comme ça.

Par contre, tout ça vient dans un contexte d'un climat de suspicion ou d'un climat qu'on ne peut pas prendre hors de son contexte. Il y a différentes mesures du gouvernement actuel, en matière d'immigration, depuis 2018, qui nous permettent d'arriver aujourd'hui à l'inquiétude qui a été véhiculée, qui, souvent, dépasse le projet de loi. Une... une lecture autonome puis indépendante du projet de loi peut nous amener à une conclusion X, mais une lecture dans son contexte, dans l'évolution des annonces récentes, peut nous permettre d'en avoir une autre.

Et je ne peux pas m'empêcher de souligner la décision initiale, en 2018-2019, d'effacer 18 000 dossiers, 40 000 familles qui ont été laissées pour compte, à l'époque. Dans le contexte, je ne peux pas ignorer cet... cet élément du narratif. J'en ai parlé aussi dans les consultations, on ne peut pas ignorer les différentes réformes du Programme de l'expérience québécoise, qui, à plusieurs reprises, dans des réformes avortées, dans des réformes pressées, ont, finalement, été annulées, mais pour, finalement, revenir à un PEQ révisé, l'année dernière, pour qu'on nous apprenne quelques jours avant le début de l'étude de ce projet de loi là, que, finalement, le Programme de l'expérience québécoise était suspendu, laissant des étudiants et étudiantes, quand même, dans un haut niveau de... de stress et d'incertitude, sans trop savoir ce qui allait se passer post-juin prochain.

Sans parler de la suspension du PRTQ, de... de voir ce qui se passera avec le fameux PSTQ, qu'on attend aussi depuis un certain moment. On a étudié les dispositions réglementaires l'année dernière. Sans parler de... de la réunification familiale, on n'en parle pas assez, mais des familles déchirées et séparées qui demandent au gouvernement, depuis un certain moment, de faire un geste en leur faveur pour éviter la séparation de familles, pour éviter que ces séparations-là continuent. Et, vraisemblablement, suivant des consultations particulières où plusieurs groupes ont... ont fait des ajustements, des demandes de correctifs ou de modifications, puis qui n'ont pas été satisfaits ou... pour l'ensemble de... du plan, finalement, déposé l'année dernière.

Donc, c'est dans ce contexte-là que les universités, les cégeps, les groupes sont venus sonner l'alarme, sur la base d'un... d'un narratif qui se construit et dans lequel il y a un... il y a un bris de confiance, là, apparent envers où est-ce qu'on va s'en aller avec ledit projet de loi. Et le ministre sera appelé à préciser ses intentions, puis on va le faire dans le cadre de l'étude détaillée, parce qu'il y a des inquiétudes énormes qui ont été formulées par ces groupes-là. Inquiétudes, notamment, sur la liberté académique, on va avoir beaucoup de temps pour en parler. Mais l'ensemble des mémoires institutionnels, d'universités ou de...

M. Cliche-Rivard : ...nous ont parlé de leur indépendance puis de leur liberté académique, notamment, de développer des programmes, notamment, de prévoir le développement de leurs facultés, leurs unités ou leur chaire de recherche, le développement d'établissements ou de programmes, peut-être, satellites quand c'est applicable, l'ouverture d'un autre établissement, l'ouverture d'un autre groupe. Et là on se retrouve devant une incertitude qui n'existait pas a priori.

• (15 h 40) •

Et les universités, les cégeps, dans leur décision de développer des nouveaux programmes, d'ouvrir à la recherche, d'ouvrir à l'innovation - l'ETS nous en parlait notamment, mais pas que - vont se retrouver dans une difficulté. Ils nous expliquaient que ça peut prendre jusqu'à 10 ans de développer une nouvelle chaire de recherche, un nouveau programme, et que si, en amont, ces travaux-là n'avaient pas été faits, bien, aujourd'hui, on ne serait pas en mesure de jouer notre rôle, par exemple, sur l'intelligence artificielle ou dans plein d'autres domaines, et que le gouvernement, évidemment, ne devrait pas avoir un contrôle ou ce pouvoir-là, ou ce rôle-là à jouer, qui dépouillerait  les universités, puis les cégeps, les instances académiques de leur pleine liberté académique. Et on va avoir la chance d'en reparler dans les prochains jours, c'est certain.

Sur la question des chiffres, Mme la Présidente, là il y a un débat clair et il y a des réflexions claires à avoir, puis ça fera l'objet, M. le ministre, d'une demande que j'aurai un petit peu plus tard pour qu'on parte avec un cadre défini, là, ensemble sur les mêmes chiffres. Ça pourrait être intéressant, autant sur l'émission des certificats d'acceptation du Québec, par programme, par établissement, par niveau d'enseignement, que le corollaire envers les permis d'études finalement délivrés, et puis de bien comprendre... qu'on s'entende tous sur où est-ce qu'ils sont, les fameux 123 000 étudiants étrangers actuellement. Les universités nous ont parlé de 15 000, les cégeps nous ont parlé... Non, c'est l'inverse, les universités nous ont parlé de 41 000, les cégeps nous ont parlé de 15 000. On est loin de 123 000, encore faudrait-il qu'on s'entende, là, sur où sont ces étudiants-là.

Moi, j'ai, avec moi, les chiffres de l'IRCC, immigration, réfugiés, citoyenneté Canada au 24 juillet qui arrivent à un total de permis émis à 61 000 pour 2023. Bon, certainement qu'une partie de ceux de 2022 sont encore là, mais lesquels? Dans quelle proportion? Et il va falloir qu'on s'assure qu'on dépose ou qu'on développe des politiques publiques ici, au Québec, sur la base de données factuelles sur laquelle on va s'entendre. Donc, moi, j'y reviendrai tout à l'heure, Mme la Présidente, mais ça va faire partie des choses que j'aimerais qu'on établisse, d'entrée de jeu, pour qu'on ait des discussions efficaces.

Effectivement, au briefing technique de ce matin, Mme la Présidente, on est revenu sur un cas du début... en fait, de la fin 2019, du 31 décembre 2019. Je m'en souviens, certains s'en rappelleront. Moi, j'étais avocat en immigration à cette époque-là. Et il est évident que le MIFI avait émis un arrêté ministériel avec une certaine liste d'institutions qui ne pouvaient plus se voir émettre des certificats d'acceptation du Québec. Le collègue de l'Acadie en parlait. Il y a une procédure sur demande d'injonction provisoire, ordonnance de sauvegarde et injonction interlocutoire... mesure interlocutoire qui a été déposé sur la base que la mesure aurait été pris de manière ultra vires, donc, sans fondement légal, sur la base de l'article 5052 qu'on étudie précisément aujourd'hui en 2020, Mme la Présidente... en fait, 2019. Là, le ministre nous dit : Il fallait agir.

En novembre 2024, quand même, connaissant l'agilité et l'efficacité gouvernementale, s'il avait vraiment fallu agir, on aurait agi en 2020, pas quatre ans plus tard. Et là, aujourd'hui, on nous sort comme explication : Voilà. Ce projet de loi là... Puis on nous le sort aujourd'hui à l'étude détaillée, mais ce n'était pas ça, le narratif du tout. Aux consultations particulières, c'était plutôt le ministre Miller, fédéral qui, du haut de son statut, le ministre fédéral, menaçait de ne pas permettre au Québec de choisir ses étudiants étrangers. Là, aujourd'hui, bon, comme on a vu que les mesures du fédéral ne touchaient pas du tout le Québec, on change le narratif, puis là c'est plutôt pour répondre à une injonction de 2020. J'imagine qu'il va avoir d'autres explications un petit peu plus tard, mais je salue l'imagination...

M. Cliche-Rivard : ...du ministre de trouver des explications pour tenter de changer le narratif qui est très différent parce que le narratif principal, c'est celui d'institutions académiques qui sont venues nous dire de ne pas aller là.

Et je ne peux qu'aller dans le même sens que mon collègue de l'Acadie. Il y avait là une injonction, là. Aucun jugement sur le fond, Mme la Présidente, parce que le gouvernement a décidé de ne pas contester, et il a décidé d'acquiescer sur engagement aux revendications de groupes. Est-ce qu'elles sont fondées ou est-ce qu'elles ne le sont pas? Moi, je ne me prendrai pas à la place de la Cour supérieure, Mme la Présidente n'eut été que, bon, le juge... les juges ont déterminé qu'il y avait motif sérieux, certes, mais de décision sur le fond, il n'y en a pas eu. Et je l'inviterais, parce qu'on parlait d'abus tout à l'heure, je l'inviterais à parler d'abus allégués, tant et aussi longtemps que ça n'a pas été avéré.

J'en parlais tout à l'heure aussi, Mme la Présidente, il y a une grande distinction entre les CAQ qu'on peut émettre, puis le nombre d'étudiants qui vont finalement obtenir un permis d'études, qui vont se qualifier puis qui vont arriver au Québec. Puis, un des exemples de ça, puis c'était bien dénoncé avec raison dans les médias parce que, moi, je pense qu'effectivement il y a des choses à corriger, il y a des abus puis il y a des problèmes, mais dans un des exemples du Journal de Montréal, il y a un... il y a un... il y a un collège privé qui s'est vu émettre 12 000 CAQ. C'est vrai, ça. Ça n'a pas de bon sens. Mais là, quand on a fait le contrôle et quand on a fait la vérification du nombre d'étudiants finalement inscrits, on était à 3 300.

Ce que j'essaie de formuler par là, c'est qu'il y a une grande distinction puis une grande différence entre le nombre de CAQ émis et le nombre de permis d'études délivrés, puis finalement le nombre d'inscriptions dans un collège ou dans une université. Et cette trajectoire-là, elle n'est pas simple à déterminer, Mme la Présidente. L'ÉTS nous a expliqué, et avec raison, et d'autres groupes nous expliquaient que, si on vient à limiter en amont, dans l'entrant, le nombre de CAQ délivrés, il n'y a aucune assurance, démonstration, ou preuve, ou corrélation directe avec le nombre de permis d'études puis, finalement, le nombre de gens qui viendront vraiment étudier dans l'établissement.

Et ça, ça m'inquiète parce qu'on pourrait voir une institution, un cégep, une université, émettre un certain nombre de CAQ, limiter du côté ministériel avec le projet de loi, mais ne pas se matérialiser les inscriptions. Et ça, je le soumets au ministre pour considération. Puis j'aimerais ça savoir, puis on en parlera à l'étude détaillée. Je me doute bien qu'il aura une solution ou une réponse à cette proposition-là, mais il me fait un signe d'ouverture, ce que j'interprète, il me corrigera si ce n'est pas ça, mais je pense qu'il faudra prévoir des façons.

Et un des exemples, c'est qu'il y a une demande d'accès à l'information du 3 octobre 2024 du ministère sur le nombre de CAQ émis par cégep, par niveau, par université aussi. Et on voit, là, dans la corrélation entre le nombre de CAQ émis d'un côté, puis le nombre de permis d'études délivrés de l'autre, puis les chiffres des universités et des cégeps dans l'autre, qu'on n'a pas un continuum super précis et clair. Et je vais nous inviter à faire très attention à ne pas... Puis l'exemple, je reviens à ça, là, l'exemple probant, 12 000 CAQ, ça n'a effectivement pas de sens pour un cégep ou une institution de cette taille-là, pour finalement avoir 3 000 inscriptions où, là, je veux dire, ce n'est pas à moi de tracer la ligne à c'est quoi, le maximum, mais on est quand même dans le quatre fois moins. Je vous invite à réfléchir à ça dans l'élaboration puis la mise en œuvre de ce qu'on va travailler.

On y reviendra, mais à mon avis, là, pour l'instant, il n'y a pas la démonstration qu'on cible... en fait, qu'on vise la bonne cible. Je pense qu'il y a effectivement des abus. Le ministre l'a clairement démontré dans deux exemples types, mais peut-être faudrait-il davantage passer par la voie de la régulation du contrôle, de la Loi sur l'enseignement privé, des sanctions possibles quand des règles ne sont pas respectées, plutôt que d'aller tous azimuts venir faire des mesures qui sont larges pour venir à viser des gens qui, finalement, ne sont pas le problème. Le ministre en a parlé, j'en suis certain qu'il ne considère pas l'Université de Sherbrooke et nos universités comme étant des problèmes. Je suis certain qu'il ne considère pas la très grande majorité des institutions collégiales publiques privées comme étant des problèmes. Il y a effectivement des joueurs récalcitrants...

M. Cliche-Rivard : ...Maintenant, y a-t-il lieu de plutôt venir encadrer les permis, venir solidifier les processus d'enquête plutôt que de venir réguler l'ensemble de l'émission des CAQ pour les étudiants temporaires? Je pense que, là, la réponse se place davantage là. Et je sens qu'il y aura une ouverture ou j'espère qu'il y aura une ouverture du côté ministériel.

• (15 h 50) •

Alors, on a beaucoup de travail à faire, Mme la Présidente. Je vais m'arrêter là-dessus. Je reviendrai de toute façon parce qu'on aura, je le sais, quelques motions préliminaires. Mais il est certain que les revues de presse actuelles nous démontrent qu'avant même l'adoption du projet de loi on voit, et je titre Radio-Canada, le nombre d'inscriptions d'étudiants étrangers en baisse dans les universités du Québec, avant même l'adoption du projet de loi. Alors, il faut croire que des mécanismes existent, il faut croire qu'il y a d'autres façons d'y arriver qui ne mettraient pas à mal ou ne mettraient pas en jeu l'autonomie institutionnelle et académique et la liberté académique des universités, de nos universités.

Puis, en terminant, Mme la Présidente, un des éléments les plus forts, puis un des éléments les plus éloquents des prestations puis des présentations, ça a été le volet sur les établissements en région, ça a été le volet régional. Et, bon, j'en suis. Moi, je suis un élu de Montréal, évidemment, mais il n'empêche qu'au niveau national, dans nos institutions régionales, on a absolument besoin, pour la vitalité économique des régions, pour la survie de programmes puis pour la survie d'institutions financières, académiques, absolument besoin de préserver une part importante dans certains secteurs de l'immigration temporaire, des étudiants étrangers temporaires qui permettent à des classes d'ouvrir. Et il y a là, pour moi, un combat qu'on fera de tout instant pour être certains et certaines... Et on a eu tellement d'exemples éloquents, d'accueils ouverts, chaleureux, positifs et de réussites qu'on devra s'assurer de ne pas mettre à mal leurs excellents programmes d'intégration, puis de leur permettre de continuer de faire leur travail avec brio, puis de leur permettre de continuer d'ouvrir des classes en région, de répondre aux pénuries de main-d'œuvre en région puis d'attirer des gens, des néo-Québécois, des néo-Québécois qui veulent s'installer en région. Donc, assurons-nous, à l'intérieur de ce processus-là, de préserver l'équilibre régional et de préserver nos Rimouski, nos Rouyn, nos Gaspé qui sont venus en commission nous dire qu'ils avaient des inquiétudes par rapport à la présentation du projet de loi. Merci, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Merci beaucoup, M. le député. Alors, je me tourne du côté du député de Jean-Talon pour une période de 20 minutes. Le micro est à vous.

M. Paradis : Merci beaucoup. Où le gouvernement voulait-il aller avec ce projet de loi? Ça demeure une question fondamentale qui a été posée, sans trop de réponses, par à peu près tout le monde qu'on a entendu en consultations particulières.

Et je dois remercier le ministre, vers la fin des consultations particulières, d'avoir finalement ouvert son jeu un petit peu là-dessus, en disant : Bien, écoutez, c'est parce qu'on a essayé de faire ça avant, une planification régionale, par exemple, des demandes d'admission au Québec puis des permis, puis ça n'a pas fonctionné. Et, aujourd'hui, pour que les gens qui nous écoutent sachent de quoi on parle, c'est qu'aujourd'hui on a eu aussi une réunion très intéressante avec les gens du ministère qui nous ont expliqué aussi un peu le fond de l'affaire. Mais là on a reçu, comme tout le monde, là, une liasse de documents aujourd'hui qui sont vraiment très importants pour comprendre le fond de l'affaire. Encore une fois, je remercie. Finalement, on l'a su. Mais c'est une question de transparence. Il y a du mérite à annoncer vraiment ses intentions, à le dire à l'avance, ce qu'on veut faire et pourquoi on le fait. Et là on vient d'en avoir des bouts.

Alors, moi, j'ai... je dois l'avouer, je n'ai pas eu le temps de lire tout ça, j'ai reçu ça aujourd'hui, mais donc ce sont des décisions des tribunaux dans des cas qui font suite à un arrêté ministériel où, si on le comprend bien, le gouvernement a tenté de faire ça, a tenté de planifier puis d'avoir une répartition des demandes pour les étudiants internationaux puis ça n'a pas fonctionné puis il y a eu des poursuites. Puis là mes collègues en ont parlé. C'est quoi, les résultats de ça? Il y a eu une entente. Qu'est-ce que c'est? Qu'est-ce que les tribunaux ont mis ou pas? Mais, si on l'avait su à l'avance, si on en avait parlé plus franchement, on aurait peut-être eu des discussions déjà plus fructueuses jusqu'à maintenant. Et il y a plein d'autres questions qui ont été...

M. Paradis : ...légitimes qui ont été posées en consultations particulières aussi. Des... plusieurs intervenants nous ont pointé cette dichotomie entre le nombre de demandes d'admission puis les inscriptions, disant : Bien là, on a des chiffres de 125 000 personnes sur le territoire, mais le nombre d'inscriptions dans les institutions d'enseignement supérieur ne correspondent pas. Alors, où sont ces personnes-là? Que s'est-il passé? Quel est le lien ensuite entre les personnes qui sont de l'immigration temporaire, donc, des étudiants internationaux, mais qui ensuite passent au statut d'immigration permanente? Donc, ils viennent s'installer au Québec. Quels sont ceux qui repartent? Si on avait eu des chiffres plus clairs, si on avait eu des données du gouvernement, si on avait eu des explications de ce qu'est la situation, de ce que sont les constats que fait le gouvernement sur la situation actuelle et ce qu'il veut faire avec ces constats-là, on aurait peut-être un débat bien différent. Peut-être même qu'on aurait eu un vote différent à la proposition sur le vote de principe aujourd'hui au Salon rouge, mais on n'a pas eu ça, encore une fois. Et ça, c'est quelque chose de récurrent avec ce gouvernement, un manque de transparence, un manque d'explications puis un manque de clarté sur ce que sont ses objectifs, ce qu'il veut faire et pourquoi il veut le faire. Est-ce qu'il répond aux impératifs des sondages du moment ou est-ce que c'est une volonté d'avoir une planification à court, long et surtout... court, moyen et surtout long terme?

Parce que, oui, tout le monde nous l'a rappelé, nous sommes dans une thématique qui demande de la planification à long terme. Il s'agit d'abord de gens qui font le choix du Québec, qui veulent venir enrichir notre société en ayant un plan... une idée, un rêve d'études au Québec. Et ça, ça ne se planifie pas du jour au lendemain. Ça prend du temps, ça demande de la stabilité, ça demande de la prévisibilité. Or, donc, où le gouvernement veut-il aller avec le projet de loi n° 74? Où veut-il aller avec les seuils en matière d'immigration des étudiants étrangers ou étudiants internationaux?

Quand on lit le mémoire du ministre, on insiste beaucoup sur la question de la fraude. Puis il y a beaucoup de gens qui sont venus dire : Il y a un réel problème avec des fausses institutions d'enseignement, donc qui donnent des passerelles, finalement, à un statut, à un autre statut d'immigration. Puis là on semble dire : C'est ça que ça veut régler, ce projet-là. Si c'est le cas, plusieurs personnes sont venues nous dire : Bien nous, on n'a rien à voir avec ça. Nous, on est des institutions d'enseignement crédibles, avec des siècles d'histoire, puis on n'a rien à voir avec ça. Les cégeps sont venus nous dire : Attendez, là, nous, notre croissance, elle est raisonnable dans les dernières années. Comment ça se fait qu'on est dans le même panier? Alors, si c'est ça, bien, le projet de loi n'est pas vraiment utile.

Si, par ailleurs, c'est de chercher à diminuer le nombre d'étudiants internationaux qui sont sur le territoire, bien, de quelle façon, en quelle proportion, dans quel nombre? On ne l'a pas su non plus. Le ministre l'a évoqué à un moment donné dans ses échanges avec un groupe qui est venu témoigner. Il a dit : Oui, mais là on peut prévoir que, puis il l'a annoncé sur la place publique. Mais peut-être qu'on aurait eu un débat beaucoup plus serein si on avait annoncé cette planification-là à l'avance. Le manque de planification, il génère de l'incertitude, il génère des inquiétudes chez des personnes qui sont déjà chez nous puis qui se demandent qu'est-ce qui va se passer demain? Qu'est-ce qui va se passer dans six mois? Qu'est-ce qui va se passer dans un an? C'est la même chose pour les institutions d'enseignement. On nous a dit... on nous a parlé de prévisibilité.

Alors, l'année dernière, l'année dernière, on annonce que le Programme de l'expérience québécoise ne comptera plus pour les seuils. Et, cette année, un an plus tard exactement, on a dit : Ah! bien là, attendez un peu, on va faire un moratoire sur le PEQ, sur le Programme de l'expérience québécoise. C'est ça, le problème. C'est l'absence de planification, l'absence de prévisibilité. Où est le plan du gouvernement? Où est le plan de la CAQ? On a eu cet échange-là, le ministre et moi, pendant les consultations particulières. À un moment donné, il s'est mis à parler amplement de la planification du Parti québécois. Moi, j'ai trouvé ça extraordinaire. Je l'ai remercié. J'ai dit : Merci de parler de notre programme, mais je comprends pourquoi vous parlez de notre programme, vous n'en avez pas. Vous n'avez pas de planification. Les gens sont venus ici dire : Où est-ce que vous voulez aller avec ça? Puis il n'y avait pas de réponse. C'est ça que les gens veulent savoir. C'est important de savoir quelles sont les cibles que le gouvernement vise. Et actuellement on ne le sait pas.

• (16 heures) •

Et, en plus, avec ça, il y a une autre question de planification qui est extrêmement importante et qui est complètement ignorée par ce projet de loi n° 74, c'est celui du financement. Plusieurs personnes, plusieurs intervenants sont venus nous dire, en consultations particulières, qu'il y a... qu'il y a un moment où les choses ont changé. Je pense que, là-dessus, le gouvernement et notre formation politique aussi, on s'entend, c'est qu'en 2017-2018...


 
 

16 h (version non révisée)

M. Paradis : ...18, il y avait comme une... avant ça, il y avait une croissance, hein, une croissance assez raisonnée dans les années 2010, mais là, en 2017-2018, soudainement, il y a une hausse fulgurante des admissions, notamment dans tous les domaines, dans tous les secteurs de l'immigration et également pour les étudiants internationaux. Qu'est-ce qui s'est passé? Il y a eu une déréglementation du mode de financement, ce qui fait que, là, il y a un financement qui pouvait être obtenu, directement par les institutions d'enseignement, par étudiant international, ce qui a généré, là, je reprends les mots qui ont été utilisés par certains, ça a généré une course aux étudiants internationaux parce que c'est un mode de financement. Et qu'à l'inverse, aujourd'hui, si tant est que le gouvernement a l'intention de réduire les seuils sans vraiment l'annoncer encore ou sans avoir la clarté qu'on aurait dû avoir avant ce projet de loi là, mais là, ça pourrait avoir un impact de définancement. Et ça, ça ne peut pas être le cas, ça ne peut pas être une manière indirecte ou non annoncée de réduire le financement, parce que, woups, on est en austérité, on a de la misère, on a eu un gros déficit. Demain, on ne sait pas ce qu'on va annoncer dans la mise à jour budgétaire. Mais ça ne peut pas être ça. C'est pour ça que nous, on dit : Il faut parler du mode de financement en même temps qu'on parle des questions qui sont abordées par le projet de loi n° 74, de dire : Si jamais on vise une réduction du nombre pour revenir à des seuils normaux, pas pour fermer le robinet, revenir à des seuils plus raisonnables, mais qu'on l'annonce, mais surtout qu'on parle de financement pour ne pas que ça veuille dire moins d'argent pour les universités, moins d'argent pour les cégeps. Donc, ça, aussi, il faut en parler. Et moi, je suis curieux d'entendre le ministre, et ses collègues d'ailleurs de l'Enseignement supérieur, son collègue de l'Enseignement supérieur et des autres ministères concernés, nous parler...

Une voix : ...

M. Paradis : Sa collègue, pardon, nous parler de... nous parler de ce plan-là.

Tout ça se passe dans un dans un contexte plus large. On a souligné, puis ça a été... c'était beau de voir les étudiants, le corps enseignant, le personnel, les institutions, unanimement venir nous parler de quelque chose, je pense, qu'on porte tous et toutes ici, c'est-à-dire cette... que nous parlons de la richesse qu'apportent au Québec les étudiants internationaux. Et aussi, quand ils... ils choisissent de retourner chez eux, quand c'est ça, leur plan, aussi, ils deviennent des ambassadeurs du Québec. Ils deviennent des porte-parole. Ils sont les créateurs de partenariats de demain. Ils sont ceux qui vont dire : Oui, je connais le Québec. Donc, c'est quelque chose qui est extrêmement important pour la posture internationale du Québec et pour aussi l'enrichissement de nos programmes d'études, de nos programmes de recherche, l'enrichissement de nos sociétés. On l'a parlé notamment en région, dans certains endroits au Québec, dans certaines institutions où ils sont, où leur aventure québécoise à titre d'étudiantes et d'étudiants est importante, est essentielle pour l'avenir du Québec.

On nous a parlé des besoins, des objectifs de chaque institution, notamment celles des régions qui ont bâti des programmes qui font appel à ces étudiantes et ces étudiants. Et c'est important. On nous a parlé de la liberté académique. C'est important de ne pas... de circonscrire les interventions de telle sorte de respecter les choix académiques des institutions d'enseignement supérieur. Tout ça, c'est très important.

D'autres sont venus nous parler, par exemple, c'était significatif, que ce soit le Commissaire à la langue française qui vienne nous parler en premier, le même qui a produit aujourd'hui un rapport dans lequel il nous réitère, une nouvelle fois, à quel point la langue d'enseignement supérieur peut avoir un impact sur le choix linguistique des personnes, notamment des personnes migrantes, qu'il s'inquiète actuellement d'un certain nombre de tendances. Il le dit dans son rapport que j'ai consulté tout à l'heure, il dit : On va continuer à développer nos études, mais il annonce clairement l'intention qu'il nous a aussi signalée quand il est venu ici... il suggère, lui, que, parmi les mesures qu'il propose pour assurer la prospérité, l'avenir de la langue française, qu'il y ait une meilleure répartition des étudiants internationaux et des effectifs dans les domaines d'études contingentés ainsi que dans les programmes formant les professionnels qui serviront une clientèle principalement québécoise, par exemple les soins de santé, l'assistance sociale, etc. Ça se discute, mais c'est actuellement ce qu'il propose. Je cite la page 68 de son rapport publié aujourd'hui.

D'autres rapports d'autres institutions qui sont notamment citées dans la planification en matière d'immigration du Parti québécois viennent nous parler de questions qui sont importantes dans le projet de loi qu'on étudie aussi, parce qu'on parle d'une catégorie d'immigration qui a des liens avec toutes les autres catégories d'immigration. On vient nous parler donc des services publics, de la question du logement, de la question des services de francisation. Bon, il y a plusieurs points...

M. Paradis : ...à discuter là-dedans. Donc, ça se passe dans un contexte vraiment plus large, et la façon dont on va avoir le débat aujourd'hui est un test d'un certain nombre des thématiques qu'on a abordées au salon rouge hier. J'étais... j'ai reçu, il y a quelques quelques semaines, à l'Assemblée nationale, un groupe de 27 étudiants internationaux, 27 étudiants internationaux, puis la conversation a commencé parce qu'ils me disaient : Oui, mais là on entend beaucoup de choses, qu'on n'est peut-être pas bienvenus, puis que, là, il va y avoir des coupures ou qu'on ne veut plus d'étudiants internationaux au Québec. Puis je leur expliquais qu'il n'y a personne qui prétend ça au Québec. Il n'y a personne qui dit ça. J'ai sorti quelques données, quelques chiffres. J'ai parlé notamment de la plateforme de notre formation politique, de ce qui se passait actuellement au Québec. Les gens sont sortis rassurés, mais c'est l'importance d'avoir de la clarté sur ce qu'on veut faire, mais des mots qu'on utilise, mais ils me disaient : J'ai entendu ça, j'ai entendu ça.

La semaine dernière, j'étais à Montréal, toujours avec des étudiants internationaux puis qui me disaient : Vous savez, on a tellement entendu des mots, là, comme le racisme, la xénophobie, la fermeture que, là, il y a des dangers pour les étudiants internationaux, puis ils disaient : On l'a beaucoup entendu dans certains milieux. Faisons attention aux mots qu'on utilise dans les débats qu'on a, parce que lui, il dit... bien là, moi, j'en ai un entre autres qui me parlait, il dit : Oui, mais moi, après ça, je suis sorti puis je suis allé un peu partout au Québec, je n'ai vu que de la bienveillance, que de la générosité, de l'accueil. Je vous parle d'un étudiant international, là. Mais il dit : Ce que j'avais entendu, c'étaient des gens qui n'arrêtaient pas de sonner l'alarme avec les mots les plus durs et les plus inquiétants possibles. On leur a dit, là, racisme, xénophobie, fermeture, etc.

Alors, est-ce qu'il est possible d'avoir un débat sur nos politiques publiques en matière d'immigration, sans utiliser ce type d'accusation? Est-ce qu'il est possible d'avoir un débat, qu'on va avoir ici et qu'on doit avoir, sur les seuils pour les étudiants internationaux, sans qu'on se fasse des procès d'intention, sans qu'on dise... Parce qu'on l'a entendu, là, puis on l'a lu dans certains mémoires, on stigmatise des étudiants internationaux, on stigmatise les immigrants, on les pointe. Non, on parle de politique publique et on est capable d'avoir ce débat-là de manière sereine, avec des mots justes, avec des mots bienveillants et c'est ce à quoi je nous appelle, parce qu'il s'est passé des événements significatifs dans les derniers jours, dans cette institution. Puis je pense qu'il y a des Québécoises et des Québécois qui nous disent qu'ils sont fatigués des procès d'intention, qui en ont soupé, des accusations et des mots difficiles quand on parle de questions aussi délicates. Et ça, ça vaut pour tous les côtés.

Donc, je nous fais confiance. Je sais qu'on est capable de le faire. On le fait très régulièrement. On va le faire encore une fois aujourd'hui. Cela étant dit, j'ai hâte d'en savoir plus sur la planification du gouvernement, justement pour qu'on ne sème pas l'inquiétude, mais qu'on explique où est-ce qu'on veut aller avec ce projet de loi, tant sur le mécanisme, là, ce qu'on nous dit, qu'on a besoin de ces outils-là pour mieux faire de la planification, mais surtout sur les objectifs, parce qu'on l'a entendu. Et nous, en tout cas, de ma formation politique du Parti québécois, je pense que vous avez eu un échange où j'expliquais quels sont nos objectifs, un groupe de professeurs des cégeps des régions qui nous disaient : C'est de la musique à nos oreilles, dire qu'on va protéger les programmes en région, qu'on va insister sur les régions, qu'on va faire en sorte qu'on planifie mieux, qu'on évite les excès qu'on a pu connaître dans les dernières années, mais qu'on va faire mieux là où ça compte le plus. C'est le genre de chose, je pense, qu'on veut entendre de la part du gouvernement, de la clarté, de la planification, de la transparence, des explications sur les mécanismes qu'on veut utiliser avec ce projet de loi n° 74 qui est devant nous. Nous, en tout cas, on est prêts à en discuter. Merci.

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Merci beaucoup, M. le député. Alors, je pense que la députée de Mont-Royal—Outremont veut prendre la parole. Vous avez 20 minutes.

Mme Setlakwe : Merci, Mme la Présidente. Bien, bonjour à vous tous. À mon tour de prendre la parole, puis je pense que c'est important de le faire, pas dans l'optique d'étirer le temps, pas du tout, mais parce que le dossier, il est extrêmement important. La pièce législative qui a été déposée par le gouvernement a suscité beaucoup de discussions, une revue de presse importante, des réactions fortes de la part du milieu de l'enseignement supérieur notamment, et donc énormément d'inquiétudes ont été exprimées. Alors, je pense...

Mme Setlakwe : ...que c'est tout à fait opportun qu'on prenne le temps d'exprimer, réitérer ces inquiétudes, ces préoccupations, et qu'on prenne le temps aussi, avant, d'étudier le projet de loi, de comprendre surtout la problématique, quelle est la problématique qu'on souhaite corriger, qu'on souhaite... pour laquelle on le souhaite, que le gouvernement souhaite se donner les outils. Et je dois dire que je ne la saisis toujours pas et que ce semble être... La problématique semble être une cible mouvante, encore cet après-midi. Et je m'explique.

• (16 h 10) •

J'ai entendu le ministre parler de... Et d'ailleurs, c'est en lien avec la documentation qui a été déposée, là, les procédures judiciaires. Le ministre a dit, donc, essentiellement qu'il y a des... qu'il y a des problématiques dans certains établissements, que le gouvernement a des... que les pouvoirs du gouvernement sont inadéquats, que le statu quo n'est pas tenable, etc., et qu'il est donc important de pouvoir agir de manière chirurgicale. Donc, on laisse... Ça laisse sous-entendre qu'il y a une problématique bien ciblée.

Or, il dit également, il l'a dit également cet après-midi, qu'en 10 ans, l'augmentation, elle est beaucoup trop importante. 140 % c'est énorme. Et ça, ce n'est pas la première fois qu'on entend ça de la part du gouvernement. Le premier ministre, d'ailleurs, quand le projet de loi avait été déposé, il avait été interpelé par les journalistes, et sa réaction fut de dire : 120 000! 120 000 sur notre territoire! Mais c'est énorme! Comme si c'était un fléau, comme si c'était un problème et comme si c'était inattendu ou, tu sais, que ça suscitait une surprise. Il faut se rappeler que l'arrivée des étudiants ou l'augmentation de l'arrivée des étudiants internationaux, c'est quelque chose qui est visé par les objectifs du gouvernement depuis, donc, pas seulement en enseignement supérieur par le biais de la... de la stratégie, mais aussi au niveau des autres ministères.

Au niveau même du ministère de la Langue française, là, on dit, dans le mémo qui a été adressé au Conseil des ministres, que c'est une volonté affirmée d'augmenter le nombre d'étudiants étrangers francophones. Ça avait été prévu par le Plan pour la langue française. Et donc il y a une augmentation du nombre d'étudiants internationaux sur notre territoire, et ça ne devrait pas être une surprise. Et c'est d'ailleurs quelque chose qui... En tout cas, soyons clairs, de ce côté-ci de la table, du côté de l'opposition officielle, notre vision ou la façon dont nous voyons les étudiants internationaux, elle est très positive. Les étudiants internationaux ne représentent pas un problème en ce qui nous concerne. Ça, c'est le principe. Et ça, c'est le principe général, et j'aimerais vraiment que ce soit très clair, pour des raisons que, nous, nous croyons extrêmement importantes pour la capacité du Québec à innover sa capacité de recherche. Il y a des impacts sur l'économie, je vais y venir. Alors ça, il faut que ce soit clair.

Alors, le principe général, les étudiants internationaux ne sont pas un problème pour nous. S'il y a une problématique bien ciblée dans certains établissements, bien, qu'on la nomme, et travaillons sur cette problématique, et assurons-nous, comme législateurs, que le... que les... que le projet de loi, que les pouvoirs qui seront octroyés, les pouvoirs de procéder par décret, par règlement, etc., qu'ils soient adéquats, qu'ils soient mesurés, qu'ils soient... qu'ils ne soient pas excessifs.

En ce moment, la pièce législative qu'on a sous les yeux, elle est... elle est floue. Et c'est une pièce législative pour laquelle, Mme la Présidente, nous sommes incapables de dégager une vision claire. Et dans son libellé actuel, les pouvoirs qui sont octroyés au gouvernement peuvent avoir des conséquences négatives tellement grandes pour le réseau de l'enseignement supérieur qu'on a dû voter contre le principe.

Maintenant, le gouvernement doit nous démontrer quelle est la problématique, encore une fois, et quels sont les pouvoirs qui sont nécessaires pour répondre à cette problématique-là sans affecter négativement notre réseau d'enseignement supérieur? Il semble, honnêtement, en ce moment, Mme la Présidente, sincèrement, là, que le projet de loi, il est construit sur des bases qui ne se tiennent pas. Ça, je l'ai entendu d'ailleurs dans plusieurs des rencontres que j'ai eues avec les recteurs, avec des dirigeants des cégeps. Ce qui s'est dégagé jusqu'à maintenant, ce n'est que des inquiétudes, que des préoccupations. J'aimerais les...

Mme Setlakwe : ...j'aimerais les réitérer, c'est extrêmement important, il y a des conséquences, donc, potentiellement négatives, directement sur nos institutions d'enseignement et il y a aussi des conséquences beaucoup plus larges sur la société québécoise, des risques beaucoup plus généraux si les nouveaux pouvoirs sont mal utilisés. Il faut se le rappeler, et ça a été dit par des collègues, les pouvoirs qui vont être octroyés par le biais du projet de loi n° 74 vont lier le gouvernement actuel mais également les gouvernements futurs.

Pour ce qui est des impacts directs sur nos institutions d'enseignement, on parle ici d'une ingérence dans la gouvernance des universités. Non, mais c'est sérieux, là, les universités parlent d'une seule voix et demandent d'être exclues de l'application du projet de loi. C'est très clair. Tous les mémoires disent la même chose. Et le BCI, le Bureau de coopération interuniversitaire a signé une lettre datée du 12 novembre. Ils ont senti le besoin. En plus de tous les mémoires, toutes les consultations, toutes les présentations qui ont eu lieu, ils ont signé une lettre, ils l'ont adressée à la ministre de l'Enseignement supérieur et au ministre de l'Immigration, signée par le recteur de l'Université du Québec à Trois-Rivières. Mais toutes les universités cosignent cette lettre et réitèrent leur demande, elle est très claire, là, d'être exclues. «Notre demande, c'est d'exclure les établissements universitaires québécois du projet de loi n° 74. D'autres avenues peuvent être envisagées conjointement, dans le respect de l'autonomie universitaire, pour assurer une stabilisation de l'immigration étudiante au Québec.» Donc, c'est assez clair, Mme la Présidente, que le projet de loi, dans son état actuel, il suscite des inquiétudes vives si les universités souhaitent en être exclues et la Fédération des cégeps aussi. Ils sont venus nous dire : S'il y a des problématiques, elles ne viennent pas de la part de... elles ne viennent pas de chez nous. Donc, l'autonomie des institutions sera brimée par ce projet de loi là.

Et d'ailleurs le recteur de l'Université du Québec à Trois-Rivières, Christian Blanchet, a signé une lettre ouverte la semaine dernière, qui a paru dans Le Devoir, Une brèche dans l'autonomie universitaire : «Il est crucial de souligner — je le cite — l'incidence de ce texte législatif sur l'autonomie universitaire, un pilier fondamental de notre système d'enseignement supérieur.»

Le projet de loi va donner le pouvoir au gouvernement d'aller s'immiscer dans ces dossiers-là, dans ces processus de recrutement qui relèvent de nos universités. Il faut faire également très attention au manque de prévisibilité pour les institutions. Ils sont venus nous dire que le processus de recrutement, ce n'est pas un processus qui se fait en quelques jours. On ne peut pas simplement ouvrir le robinet et fermer le robinet. C'est un processus qui se fait en continu sur des années. En se donnant le pouvoir réglementaire, le gouvernement va pouvoir à tout moment ouvrir... fermer ou ouvrir des programmes de recrutement à l'international. Il sera ainsi impossible pour les établissements de faire une stratégie fiable de promotion et de mise en marché de ces programmes.

Dans un contexte de compétitivité mondiale et de mondialisation des talents, il peut y avoir des effets extrêmement néfastes, Mme la Présidente. Il y a non seulement, donc, un impact sur les étudiants eux-mêmes, il y a un impact sur le recrutement des enseignants. Également, dans la lettre de M. Blanchette, il est venu dire qu'un encadrement politique trop restrictif rendra le recrutement des professeurs talentueux, qu'ils soient québécois ou internationaux, plus difficile puisque le développement de leur recherche pourrait arbitrairement être contraint par des décisions politiques découlant de cette loi.

Il faut également parler de l'impact financier sur les institutions. Il faut se rappeler que la politique de financement, la nouvelle politique de ce gouvernement qui a été déposé en juin dernier, compte sur la hausse des droits de scolarité pour redistribuer l'argent dans le reste du réseau. Mais, si les inscriptions sont à la baisse puis si on vient plafonner le nombre d'étudiants internationaux, bien, il y aura clairement un impact financier négatif dans tout le réseau. La baisse d'effectif va toucher tout le monde, donc tout le monde va se partager une plus petite tarte. Et moi, je vois ici une incohérence, là. Il faut tout regarder ça de façon interreliée. La nouvelle politique de financement, ce projet de loi là, on se demande si les différents ministères se parlent, si...

Mme Setlakwe : ...gauche parler à la main droite. Mais tout ça a été mis de l'avant durant les consultations. C'est simple, donc, une perte d'étudiants internationaux va entraîner une perte de subventions.

• (16 h 20) •

Encore une fois, le recteur de l'Université du Québec à Trois-Rivières, qui dirige le BCI, il est venu donner... il a donné des entrevues, comme... comme bien d'autres l'ont fait, et il a parlé de... il a donné... il a donné un exemple. D'ailleurs, je pense que ça... c'était suite à des discussions qu'il avait eues avec la ministre de l'Enseignement supérieur. Il disait : Si on réduit de 30 %... parce qu'on ne connaît toujours pas la cible du gouvernement... si on réduisait de 30 % les étudiants internationaux, cette réduction entraînerait des coupes budgétaires de l'ordre de 120 à 170 millions de dollars, donc, disons, 150 millions. Mais il ne faut pas penser que c'est les institutions financières, directement, là, qui sont si riches, là, qui vont être impactées. Non, non, ces... ces montants d'argent sont importants pour les étudiants. Ça va être des coupures qui vont affecter directement l'ensemble du réseau, les services offerts aux étudiants dans tout le réseau. C'est avant... avant tout, c'est eux qu'il faut considérer. C'est des programmes qui vont être fermés, des programmes dans des régions, des programmes qui sont importants pour les étudiants en région, notamment dans des domaines de pointe, dans des domaines de sciences, technologie, mathématiques, etc. Il faut penser à ça, et c'est normal qu'on... qu'on agisse avec prudence puis qu'on... on s'assure d'avoir une réflexion approfondie avant de donner notre aval, comme le souhaite le ministre. Et souhaitons qu'à la fin du processus on puisse, de façon unanime, adopter ce projet de loi là, mais on est vraiment loin d'en arriver là.

Je continue, là, au niveau de l'impact financier. Au niveau de la recherche, s'il n'y a pas de chercheurs, bien, il n'y a pas d'argent pour financer la recherche. Puis là, ici, je ne pense pas juste à McGill, puis... puis le fait que McGill soit renommé non seulement au niveau de la recherche, mais au niveau de l'enseignement. À ces deux titres là, McGill, il est extrêmement haut dans les... dans les palmarès, et il faut en être très fiers. On peut penser... en région, on peut penser à l'UQO, l'Université du Québec en Outaouais. Ils sont très performants également, pour les citer en exemple, au niveau de la cybersécurité. Ailleurs, comme à l'Université de Sherbrooke, ils sont très performants aussi dans des domaines nichés. L'institut... Ils ont un institut quantique. Évidemment, il faut ajouter à tout ça la recherche qui se fait en médecine au Québec, en collaboration avec nos centres hospitaliers universitaires.

Donc, il faut réfléchir, là. Quand on parle d'étudiants internationaux, on parle de cerveaux, on parle de cerveaux, de talents dont on a besoin, ici, dans nos laboratoires de recherche, notamment, et tout ça favorise l'économie, tout ça est très bénéfique pour le Québec. Et toutes les universités parlent d'une même voix, le réseau anglophone, le réseau francophone. Le président de l'UQ, Alexandre Cloutier, il est venu parler de... du fait qu'il y a une augmentation du nombre d'étudiants internationaux dans son réseau. Il en est très fier, il en est très satisfait, il voudrait que ça continue. C'est une... une population étudiante francophone. Il est très inquiet pour la vitalité des programmes de... il est inquiet pour la recherche, il est inquiet pour le développement régional, sur l'emploi, sur les ententes, aussi, avec les partenaires à l'international. Honnêtement, on a besoin d'être rassurés sur tous ces éléments-là, Mme la Présidente.

Je reviens à la question des incohérences, non seulement en lien avec la politique de financement, mais le plan stratégique du ministère de l'Enseignement supérieur dit, noir sur blanc... un plan stratégique qui date de 2023... que l'internationalisation de l'enseignement supérieur, c'est souhaité, c'est ce qu'on veut. On veut que le Québec soit présent, soit compétitif dans cette course mondiale aux talents. Et donc comment se fait-il que le gouvernement se surprenne qu'on ait comblé l'écart qu'on avait avec d'autres provinces, que... que les chiffres soient à la hausse? Encore une fois, quelle est la problématique? Qu'est-ce qu'on est en train de vouloir faire ici? Qu'on cesse de se surprendre que le nombre d'étudiants internationaux, généralement, est à la hausse. Il est à la hausse, surtout, dans les universités et dans le réseau francophone. Au niveau des universités anglophones, c'est plutôt stable. Donc, encore une fois, il va falloir qu'on clarifie qu'est-ce qu'on est en train de faire, parce qu'on ne pourra pas avoir une discussion intelligente, là, puis, avec une cible mouvante, ça ne fonctionnera certainement pas. D'ailleurs, le premier ministre, en 2022, avait reconnu le... le statut distinct des étudiants internationaux, alors c'est une... c'est très difficile à suivre ici.

Et on se demande : Pourquoi est-il nécessaire d'adopter un projet de loi avec des... des pouvoirs aussi larges, une vision qui est si... qui est si floue, des cibles qui ne sont pas définies...

Mme Setlakwe : ... Avec tous ces... toutes ces inquiétudes qui planent, Mme la Présidente, c'est... c'est franchement... c'est franchement étonnant.

Il faut mentionner également la baisse démographique. On dit qu'on a trop d'étudiants - mais c'est ce que le gouvernement dit - trop d'étudiants internationaux, mais il est clairement documenté qu'il y a une baisse démographique et que les étudiants internationaux, puis ce n'est pas juste moi qui le dis, là, c'est encore une fois dans la lettre du BCI, viennent compenser la baisse démographique des étudiants québécois.

Ils ont... Ils sont venus dire donc encore, les universités, bien, d'un, de... Excluez-nous complètement du projet de loi. Mais soyez très vigilants, soyez très précis, dans les chiffres que vous utilisez vous devez parler du nombre de personnes inscrites aux différents cycles d'études, c'est des informations qui sont partagées avec le ministère de l'Enseignement supérieur, et au niveau des universités c'est 57 440 étudiants internationaux universitaires inscrits à l'automne 2024. Puis, quand ils viennent... Donc, ça, c'est un des points importants qu'il faut retenir de leur lettre, il faut vraiment s'en tenir aux données officielles sur les inscriptions.

Et, pour ce qui est de la croissance de 140 000 qui s'est... qu'on a vécue donc sur une période de 10 ans, bien, la part des universités, c'est 57 000, encore une fois, puis que c'est la croissance effective des inscriptions qui est le seul vecteur à retenir dans cet exercice d'analyse, qui a donc été de 55,71 % en 10 ans. Ça fait que, quand... Il faut faire attention quand on parle de 140 %, puis de grandes surprises, puis de grandes affirmations générales, là. Il va falloir qu'on décortique tout ça, puis là, ici, je pense à ce que mon collègue de Saint-Henri-Sainte-Anne a dit, qu'on parte des mêmes chiffres, qu'on parle des mêmes chiffres, qu'on parle de la même prémisse de base puis qu'on soit très, très clair sur la problématique. Mais, en ce qui me concerne puis en ce qui concerne les universités, tous les mémoires pointent dans la même direction, et le BCI est venu ajouter... en ajouter une couche avec cette lettre co-signée par tout le réseau : Écartez-nous complètement de ce projet de loi là.

Et puis donc je revenais à mon idée. Je voulais les citer encore une fois, on peut les citer sur tellement de volets. Mais, sur la question de la baisse démographique, donc, la croissance du nombre total des inscriptions, en fait, a été de 3,3 % dans leurs établissements, les effectifs étudiants totaux, locaux et internationaux, étant passés de 308 000 à 318 000. Écoutez, les chiffres sont là.

Je reviens à... Je reviens au début de mon intervention. J'aurai d'autres occasions, donc, de parler des conséquences plus larges, là, sur la société québécoise si on n'agit pas avec prudence dans ce dossier-là. Mais je... Encore une fois, la question demeure entière : Qu'est-ce qu'on essaie de faire?

On a entendu... Même dans les deux jours de consultation, le discours du ministre, avec tout respect, il semble avoir évolué durant les deux jours. Le premier jour, il semblait y avoir une problématique, problématique au niveau du logement, problématique au niveau du... peut-être du français, de la francisation, etc. Jour deux, c'était : Non, non, c'était... Effectivement, les étudiants internationaux sont une grande richesse, c'est un atout crucial. Mais il y a des situations abusives de dérapage, et là, le fédéral vient aussi... vient aussi... donc entre en jeu, évidemment, parce que c'est une compétence partagée, mais, avec les annonces récentes du fédéral, c'est ce qui nous pousse à agir, alors là qu'aujourd'hui, on apprend que c'est plutôt suite à des... avoir été débouté en cour que... que... qu'on... On s'assoit plutôt là-dessus, là, pour justifier le projet de loi.

Donc, en résumé, Mme la Présidente, nous, à l'Opposition officielle, on aimerait vraiment comprendre quel est le problème, pour qu'on puisse avoir une discussion intelligente puis s'assurer de mettre de l'avant une solution qui soit adéquate, et puis, pour citer les recteurs d'université, qu'on ne soit pas en train de prescrire un médicament avec des effets secondaires indésirables.

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Merci beaucoup, Mme la députée. Est-ce que d'autres membres désireraient faire des remarques préliminaires?

Alors, s'il n'y a pas d'autre membre, on en est maintenant rendu à l'étape des motions préliminaires. J'ai compris qu'il y a une motion préliminaire qui va être déposée par l'opposition officielle. Alors, est-ce que vous avez envoyé la motion, pour qu'elle soit sur Greffier?

• (16 h 30) •

M. Morin : Oui. Oui, Mme la Présidente, la motion préliminaire a été envoyée, pour qu'elle soit sur Greffier.

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : On va l'ouvrir.

M. Morin : Oui, c'est ça. Elle est peut-être encore dans l'univers, mais elle devrait arriver chez vous à un moment donné...


 
 

16 h 30 (version non révisée)

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : ...si on ne l'a pas, on va suspendre quelques instants, mais on va regarder par le moyen de. Si nous l'avons... Motion préliminaire, bon, on va l'ouvrir, puis je vais vous demander, M. le député, d'en faire la lecture. Allez-y.

M. Morin : Merci. Alors, motion préliminaire, Mme la Présidente : «Conformément à l'article 244 du règlement de l'Assemblée nationale, je fais motion afin que la Commission des relations avec les citoyens, dans le cadre de l'étude détaillée du projet de loi n° 74, Loi visant principalement à améliorer l'encadrement relatif aux étudiants étrangers, tienne des consultations particulières et qu'à cette fin, elle entende la ministre de l'Enseignement supérieur.»

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Alors, je vais vous demander... Vous avez une période de temps pour expliquer votre motion préliminaire, par la suite, on y va en alternance.

M. Morin : Oui, tout à fait. Merci. Je crois avoir une période de 30 minutes, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Exactement, oui.

M. Morin : Voilà. Donc... Alors, je propose... je dépose... J'ai fait lecture de cette motion préliminaire, parce qu' à la lecture du projet de loi, bien sûr, qui traite d'immigration, d'encadrement relatif aux étudiants étrangers, mais quand on regarde le document, quand on regarde le texte, au fond, on se rend compte qu'il y a une grande absente, et c'est la ministre de l'Enseignement supérieur, parce qu'à mon avis ce projet de loi va venir directement impacter son travail, son mandat en ce qui a trait à l'enseignement supérieur au Québec.

D'ailleurs, quand on regarde le projet de loi, on dit, entre autres, que «le ministre - n'est-ce pas - pourrait prendre des décisions - et là je suis à l'article deux du projet de loi - en tenant compte notamment des orientations, des objectifs fixés au plan annuel d'immigration, mais des besoins économiques, de main-d'oeuvre, plus besoin de favoriser une diversité de provenance des demandes de sélection, de considérations humanitaires, de toute situation susceptible de compromettre la santé, la sécurité, le bien-être des personnes immigrantes, de la capacité d'accueil et d'intégration du Québec ou de l'intérêt public».

Donc, d'une part, c'est excessivement large. D'autre part, d'autre part, ça dit bien que ces décisions-là doivent être prises, notamment, avec consultation auprès de la ministre de l'Enseignement supérieur. Donc, quand on regarde ceci, bien sûr, il y a un objectif recherché par le gouvernement, qui est évidemment d'avoir un impact sur l'immigration, sur les étudiants internationaux, étrangers. Mais, quand on est... on a écouté attentivement, en consultations particulières, l'ensemble des groupes, au fond, on s'est rendu compte que la très grande majorité était des groupes, des associations, des experts, des hauts gestionnaires, des cadres en lien avec le domaine de l'éducation et de domaine de l'éducation supérieure au Québec.

L'impact, l'impact de ce projet de loi va se faire sentir chez la ministre de l'Enseignement supérieur, d'où l'importance, évidemment, de l'entendre en commission parlementaire pour qu'on soit capable, Mme la Présidente, de véritablement bien comprendre l'impact qu'aura le projet de loi sur son mandat et sur, notamment, les universités et les cégeps. Pourquoi je vous dis ça? Bien, i y a quelques raisons, la première, je le soulignais dans le cadre de mes remarques préliminaires, le projet de loi est flou, et on ne comprend... En tout cas, moi, je ne comprends toujours pas ce que le ministre essaie de régler. Donc, au moins, je voudrais qu'on soit capables, la commission parlementaire, donc, un organe du Parlement, d'avoir tous les renseignements, toute l'information pour être capable de faire notre travail, évidemment, d'une façon efficace, comme parlementaires.

Je vous dis ça, parce que, et ma collègue la députée de ville Mont-Royal-Outremont y faisait référence, il n'y a pas longtemps, en fait, très peu de temps, en novembre 2024, après les consultations particulières, les recteurs, chefs d'établissements universitaires québécois ont fait parvenir une lettre, d'abord et avant tout, à la ministre de l'Enseignement supérieur et au ministre de l'Immigration pour leur rappeler à nouveau, à nouveau, l'impact de ce projet de loi. Et les mots qu'ils utilisent sont quand même parlants, mais aussi très forts. On écrit, dans le premier paragraphe, et je me permets de les citer...

M. Morin : ...nous croyons que cette éventuelle loi aura des effets très négatifs pour nos établissements et pour le Québec.» Ce n'est pas banal, là. Alors, je tiens à le répéter, «des effets très négatifs pour nos établissements et pour le Québec». Et là, qui écrit ça, Mme la Présidente? L'ensemble des chefs d'établissements universitaires québécois, pas n'importe qui. Kathy Baig, directrice générale de l'École de technologie supérieure, Maude Cohen, directrice générale, Polytechnique Montréal, un centre reconnu à travers le monde. Sophie D'Amours, rectrice, Université Laval, Daniel Jutras, recteur, Université de Montréal. Sébastien Lebel-Grenier, principal et vice-chancelier, Université Bishop's, Vincent Rousson, recteur, Université du Québec en Abitibi-Témiscamingue, Graham Carr, recteur et vice-chancelier de l'Université Concordia, Pierre Cossette, recteur, Université de Sherbrooke, François Deschênes, recteur, Université du Québec à Rimouski, Murielle Laberge, rectrice, Université du Québec en Outaouais, Stéphane Pallage, recteur, Université du Québec à Montréal, Deep Saini, recteur, vice-chancelier, Université McGill, Alexandre Cloutier, président de l'Université du Québec, donc, ce qui chapeaute le réseau. Hugo Cyr, directeur général. L'École nationale d'administration publique, notre école nationale, qui vise, entre autres, à former des gestionnaires de haut calibre, qui, entre autres, vont œuvrer au sein de notre fonction publique québécoise. Et ça, on peut en être très fiers. C'est une école de haut niveau. Et on a au Québec une qualité au sein de nos gestionnaires, une très grande qualité de gens qui se dévouent pour la société québécoise. Luc Alain Geraldo, directeur général, Institut national de la recherche scientifique, ce n'est pas banal. Lucie Laflamme, directrice générale de l'université TELUQ, Federico Pasin, directeur HEC Montréal, et Ghislain Samson, recteur, Université du Québec à Chicoutimi.

Toutes ces personnes-là ont signé cette lettre et, je le répète, ils croient, tous ces gens-là, que «cette loi aura des effets très négatifs pour nos établissements et pour le Québec». Donc, il me semble qu'entendre la ministre de l'Enseignement supérieur, à qui toutes ces personnes-là ont écrit, il est essentiel... ça m'apparaît essentiel qu'on fasse un arrêt ici puis qu'on l'entende. M. le ministre nous parlait d'ouverture. Je ne sais pas s'il aura cette ouverture, je l'invite, mais il me semble que c'est excessivement parlant. Ça commence comme ça.

Et, par la suite, par la suite, tous ces gens-là nous parlent de l'impact du projet de loi. On nous parle de chiffres, mais on nous parle aussi, bien sûr, de la cohérence des politiques publiques du Québec. On souligne qu'ils sont profondément convaincus, et je cite, «qu'au-delà de la question litigieuse des chiffres...», parce que permettez-moi de faire un aparté, on en parlait des chiffres, tout à l'heure. Les chiffres, là, ça se promène de tout bord, tout côté, 120 000, 130 000, 110 000. Écoutez, on y perd... on y perd... j'allais dire : On y perd notre latin, c'est une langue morte, on y perd notre français quasiment. Ça n'a pas de bon sens. Au niveau universitaire, c'est 57 450, selon le Bureau de coopération universitaire. Puis, si on ajoute les 20 000 quelques des cégeps, moi, j'arrive à 77 600. On est loin des 123 000. Ils sont où, les autres? Je n'en ai aucune idée. Mais peut-être qu'à un moment donné le ministre va être capable de nous aider. Je l'invite à le faire, mais...

Mais alors, ils nous disent : Écoutez, au-delà des chiffres, là, il y a quand même des enjeux de taille. On nous dit même : «Au niveau, notamment, des projets de recherche soutenus par la Stratégie québécoise de recherche et d'investissement en innovation, SQRI, dans lequel l'État québécois investit en finançant divers programmes, donc, avec notre argent et des bourses, ils seraient très difficiles, voire impossibles à réaliser dans certains cas sans l'apport des étudiants internationaux recrutés par nos équipes de recherche.» Écoutez, le langage est quand même fort. Moi, je tiens... je tiens à prendre du temps, là, pour que le public qui nous écoute...

M. Morin : ...comprennent, comprennent ce qu'on est en train de faire ici, puis comprennent aussi pourquoi nous, de l'opposition officielle, bien, quand je lis les dispositions du projet de loi, quand je lis ces témoignages, bien, il faut en parler, il faut les rendre publics, il faut l'expliquer. Ça m'apparaît essentiel.

• (16 h 40) •

Donc, très difficile, voire impossible, de réaliser des programmes de recherche, des programmes de financement. Puis la recherche, la recherche au niveau universitaire, c'est fondamental, c'est en lien avec l'innovation, c'est en lien avec, évidemment, le rayonnement du Québec. Plusieurs, plusieurs sont venus nous dire, parmi les recteurs et rectrices d'université : Ce n'est pas juste des étudiants, Mme la Présidente. Il y a des étudiants aux études supérieures qui oeuvrent dans des centres de recherche, qui reçoivent des subventions importantes, que ce soit du gouvernement du Québec ou du gouvernement fédéral. Ces programmes-là fonctionnent grâce à des sommes donnés pour faire de la recherche. Évidemment, s'il n'y a plus d'étudiants, bien, ils n'en auront plus d'argent, forcément, ils ne feront pas de recherche. Ces gens-là vont aller ailleurs, puis le Québec va perdre. Alors, ça, c'est un élément que je tiens absolument à souligner. Puis ça, là, ça va avoir un impact directement chez la ministre de l'Enseignement supérieur.

Maintenant, permettez-moi de vous parler de l'autonomie universitaire. J'en ai parlé tout à l'heure dans mes remarques préliminaires, mais je veux insister à nouveau sur l'importance de la liberté académique universitaire. Donc l'autonomie universitaire, ça fait partie... c'est une composante de cette liberté académique. Et, croyez-moi, j'ai été le premier à être surpris de lire l'article 3 du projet de loi. Une décision pourrait être prise pour cibler ou pour faire en sorte qu'on mettrait de l'avant, dans le plan annuel d'immigration, des objectifs pour des besoins économiques ou autres, de main-d'œuvre, etc. Alors, qu'est-ce qui va arriver si le ministre, dans sa planification, décide à un moment donné — je ne sais pas, c'est une hypothèse — de financer ou d'accepter un nombre d'étudiants dans un programme plutôt qu'un autre puis que ça a un impact direct, direct sur des programmes universitaires dans nos universités? Bien là, on va mettre à mal des efforts qui ont été faits, des investissements, de la planification, et ça, c'est important puis ça va avoir un impact directement dans le ministère de l'Enseignement supérieur, ça m'apparaît évident, évident.

Mais il n'y a pas juste ça, il n'y a pas juste ça. Les recteurs d'université sont venus nous dire, Mme la Présidente, qu'un programme universitaire, un programme de recherche, ça se développe, ça prend des années, ça prend des années pour être réalisé. Donc là, dans sa planification, si le gouvernement change à gauche et à droite de priorité, ça va devenir tout à fait ingérable. D'ailleurs, d'ailleurs, on le voit, le projet de loi n'est pas adopté, mais déjà il y a suffisamment d'informations qui ont été partagées à l'étranger, dans le monde puis au Québec, qu'il y a moins d'étudiants qui viennent des universités québécoises, ce qui crée un enjeu puis une pression sur les programmes dans les universités. Encore là, je me répète, dans les universités. Donc, ce n'est pas uniquement de l'immigration. Alors, ça va avoir un impact directement chez la ministre de l'Enseignement supérieur. Alors, c'est important, c'est important de le souligner.

Et ce qu'il faut savoir également, c'est qu'en plus, en plus, tout dépendant de ce qui va être décidé ici, bien, ça pourrait avoir un impact sur des ententes de collaboration avec des universités d'autres pays. Imaginez, vous avez un jumelage entre une université québécoise et une université en Europe qui facilite le passage, l'attrait d'étudiants étrangers vers le Québec. C'est un exemple. Prenons un domaine en histoire, sciences sociales, sociologie. Et le ministre de l'Immigration décide... bon, je comprends qu'il va devoir consulter ses collègues, mais il décide que, dans le plan annuel d'immigration : ah! ce n'est pas en lien avec des besoins trop, trop économiques, ce n'est pas ça qu'il faut, ce n'est pas nécessairement une priorité. Il n'y a pas de considérations humanitaires, donc, oups., on coupe les rames. Ces universités-là, elles vont faire quoi? Si vous avez des programmes de recherche importants dans ces domaines-là, ils vont être quoi? Ils n'auront plus d'étudiants, donc ils n'auront plus de revenus, donc ils vont mettre à mal les programmes. Alors, c'est un appauvrissement...

M. Morin : ...c'est une diminution importante et il faut, il faut le souligner parce que ces ententes-là, bien, sont présentement en vigueur. D'ailleurs, dans la lettre, bien, la ministre des Relations internationales était... Évidemment, c'est... Ici, ça peut avoir un impact. Donc, demain matin, là, woups! ça, ça pourrait disparaître ou avoir un impact négatif.

Donc, permettez-moi de vous souligner que ce n'est pas ce qu'on recherche, nous, dans l'opposition officielle, très clairement, très clairement. Mais également, également, tous ces chefs d'universités nous disent qu'il y a lieu de veiller, et je les cite, «à ce que ces établissements d'enseignement puissent accomplir leur mission sans contrainte doctrinale, idéologique ou morale. Dans cette perspective, s'y attaquer par le biais en particulier de l'article 5 du projet de loi no 74 met en cause les fondements mêmes de l'institution qu'est l'université et, par conséquent, c'est ce que je vous disais, Mme la Présidente, sa capacité à planifier son offre de formation et de développement de la recherche à court, moyen et long terme». C'est l'impact que ce projet de loi pourra avoir s'il est adopté tel qu'il est.

Alors, quand M. le ministre, tout à l'heure, nous disait : Écoutez, je suis prêt à faire preuve d'ouverture, moi, j'appelle ça d'une façon très favorable comme porte-parole de l'opposition officielle en matière d'immigration, ma collègue en matière d'enseignement supérieur, parce que, quand je lis ce que tous ces gens-là ont écrit et que je m'attarde à l'impact qu'ils nous décrivent, bien, je me dis : Il me semble qu'il faudrait... il ne faudrait pas aller trop vite. Il faudrait penser véritablement à ce qui va arriver si ce projet de loi là est adopté. Donc, impact sur l'autonomie universitaire, impact sur leur mission de recherche, notamment fondamentale, impact sur des initiatives où il y a des ententes avec d'autres universités à travers le monde. Donc, les impacts sont nombreux et ils sont importants.

On l'a dit, je le répète, les étudiants universitaires internationaux sont une richesse pour le Québec. C'est d'ailleurs ce qu'on nous dit ici. C'est une carte gagnante pour le Québec. Moi, au niveau du développement économique, je trouve qu'une carte gagnante, ça en dit long puis c'est vraiment important. Je pense qu'il faut tout faire pour être capable de miser là-dessus, de l'encourager. Ce sont, selon ce que les chefs d'université nous disent, les immigrants, les étudiants internationaux, ils les appellent des immigrants modèles. Nos établissements les sélectionnent avec soin. On investit pour leur accueil, pour leur accompagnement, pour des activités d'intégration de qualité. Elles sont au plan des stratégies institutionnelles des prochaines années. Alors, quand je vous disais, Mme la Présidente, qu'un programme universitaire, un programme de recherche universitaire, ça se planifie sur des années, bien là, on en a la preuve. Ce n'est pas moi qui le dis, c'est l'ensemble des recteurs, rectrices des universités au Québec.

Donc, on ne peut pas venir changer ça en quelques mois. Ça ne peut pas fonctionner comme ça. Ou bien on comprend mal comment fonctionne un centre de haut savoir qui est une université, puis qu'on veut tout changer en l'espace de quelques mois, ou on respecte ceux qui le font. Puis à ce moment-là, bien, il va falloir d'une façon très, très claire, réévaluer le projet de loi, parce que c'est antinomique, ça ne fonctionne pas, ça ne fonctionne pas.

Donc, les étudiants internationaux sont au cœur des plans stratégiques institutionnels, et en diminuer le nombre met en cause nos stratégies d'action visant à l'excellence, mais ça a aussi un impact sur la pertinence sociale et scientifique des contributions, puis notamment au développement du Québec. Ça a aussi un impact sur la prévisibilité. Je vous en parlais, Mme la Présidente, dans le cadre de mes remarques préliminaires. Pour moi, un projet de loi doit être un document législatif qui va d'abord et avant tout permettre quelque chose qui est prévisible, qui va permettre aux citoyens et aux citoyennes de s'y conformer, de comprendre ce qui se passe. C'est pour ça...

M. Morin : ...qu'un gouvernement, qu'une assemblée législative légifère. Là, on est en train de faire exactement le contraire. Ce qu'on va créer, c'est une absence de prévisibilité, ce qui n'est pas une bonne chose non plus. Tous ces gens-là nous disent qu'ils sont très préoccupés par les effets sur la scène internationale des multiples changements des dernières années sur les conditions d'immigration. Là, on déborde, le projet de loi numéro 74, mais c'est aussi vrai.

• (16 h 50) •

Et mes collègues députés en parlaient tout à l'heure dans leurs remarques préliminaires, il y a des changements à tout bout de champ, là, puis pas toujours bien expliqués. On a l'impression que, woups, il y a un petit coup de vent par ici, on s'en va par là, on s'en va par là. Nous, ce n'est pas pour rien, que, dans l'opposition officielle, on a demandé un bureau intégré de la planification en matière d'immigration. Ce n'est pas pour rien. C'est pour que le gouvernement soit capable d'expliquer ce qu'il veut faire puis qu'on soit capables de comprendre. Ce n'est pas pour rien, qu'on a demandé au gouvernement d'adopter une loi dans sa planification pour tenir compte des travailleurs temporaires étrangers. Heureusement, le gouvernement nous a entendus. Une réalisation de l'opposition officielle. Mais ça, ça permet une prévisibilité, madame la Présidente, et c'est ça qu'on veut. C'est ça qu'on veut pour le Québec.

On nous dit également : La réputation du Québec est déjà lourdement entachée en matière d'immigration étudiante, et là on dit : Il suffit de consulter les médias sociaux traditionnels internationaux pour en mesurer l'ampleur. Et donc, là, je fais appel au ministre, je fais appel à son ouverture. L'effet de refroidissement est évident. Alors, ce qu'ils nous demandent, et c'est logique, c'est cohérent, évidemment, c'est de les exclure, exclure les établissements universitaires du projet de loi pour qu'ils soient capables de remplir leur mission.

Puis, quand on regarde au niveau universitaire, madame la Présidente, le nombre d'étudiants internationaux par établissement, et j'ai comme source le Bureau de coopération interuniversitaire, c'est le chiffre que je vous donnais tout à l'heure, 57 450. Ce n'est quand même pas un chiffre qui est énorme. Puis, quand on le répartit par université, bien, tout dépendant où on est, on parle de 58 personnes, 435... bon. Évidemment, si vous regardez UdeM, HEC, Poly Montréal, ça fait plus, bien sûr, c'est 12 000, si vous regardez McGill, c'est 10 000, mais ce sont de très grosses universités, ça va de soi. Mais, quand vous regardez toutes les universités des régions du Québec, l'Université du Québec à Chicoutimi, l'Université du Québec à Rimouski, l'Université du Québec à Trois-Rivières, l'Université du Québec en Abitibi-Témiscamingue, l'Université du Québec en Outaouais, on parle de 1 000, 400, 1 000, 2 000 personnes. Ce sont des moteurs de développement de haut savoir pour nos régions, pour nos régions.

Puis les régions, au Québec, c'est fondamental. C'est fondamental, que les Québécois puis que les Québécoises aient accès à des établissements d'enseignement supérieur dans des régions. Puis je pourrai évidemment vous parler de Sherbrooke. C'est une excellente université et, évidemment, encore là, en région. Donc, tout ça, tout ça milite en faveur, à mon avis, et je vous le soumets, de revoir ce projet de loi à la lumière des informations qui nous sont transmises par l'ensemble des recteurs et rectrices des universités. Ça m'apparaît fondamental.

Et, quand on parle des centres de recherche, tout à l'heure, ma collègue, la députée de Mont-Royal Outremont, parlait de physique quantique à Sherbrooke, mais on peut donner d'autres exemples de centres de recherche. Une université que je connais un peu plus, l'Université de Montréal. Pensons au centre de cyberjustice, un centre exceptionnel, Centre de recherche en droit public, qui a une réputation internationale à travers le monde. Bien, ça, ce sont des cas concrets d'universités qui ont été capables d'attirer des chercheurs de haut niveau à travers le monde pour aider le Québec et le positionner. Donc, ça m'apparaît tout à fait important, surtout de ne pas poser geste qui va avoir un impact et qui va avoir un impact, bien sûr, dans le mandat et dans le ministère de la ministre de l'Enseignement supérieur. Ça m'apparaît tout à fait fondamental.

Et, en plus, en plus, c'est le collègue, je crois, de Jean-Talon qui l'évoquait tout à l'heure, si le ministre se met à décider à gauche et à droite...

M. Morin : ...Ça va être quoi ses orientations? Quels vont être évidemment les objectifs qu'il va fixer? La réduction possible, etc. Mais quel va être l'impact économique et financier pour l'université puis pour la région où elle est située? Et ça, là, c'est ce que je vous disais, Mme la Présidente, dans le cadre de mes remarques préliminaires, ça, là, l'impact négatif, d'ailleurs, les recteurs entendent, mais c'est déjà commencé, c'est déjà commencé. Et quand vous regardez l'article qui a été publié, notamment par Radio-Canada par Sébastien Desrosiers, on voit qu'il y a déjà une diminution qui a commencé dans les universités au Québec et que ça a un impact. Et d'ailleurs, d'ailleurs, et ça, je dois le souligner, là, le narratif du ministre a changé. C'est une bonne chose. Mais on nous disait, entre autres, et on l'écrit dans l'article : On vous demande de cesser d'associer des étudiants internationaux à un problème. Et c'est ce qu'avait dit le recteur de l'Université de Sherbrooke, Pierre Cossette. Je tiens à le souligner. Donc, ça, ça m'apparaît important. Puis là, ce qu'on nous dit, c'est que oui, il y a de l'angoisse, et puis là on a des étudiants, puis, permettez l'expression, je cite, «la plupart des étudiants sont déboussolés» parce qu'ils ne savent plus quoi faire.

Alors, si on parle de l'Université du Québec à Rimouski, bien oui, c'est ce qu'on apprenait hier, il y a une forme d'inquiétude qui est déjà installée, parce qu'en plus, comme je le soulignais, il n'y a pas juste le projet de loi, là, il y a un moratoire sur le PEQ, il y a un moratoire sur d'autres programmes, donc ça crée autant de mauvaises expériences auprès de ces étudiants-là qui vont faire en sorte que... probablement que certains vont décider d'aller ailleurs, puis ça va être un appauvrissement pour le savoir au Québec. Moi, je ne veux pas ça, je ne veux pas ça.

Et on nous signale, on nous signale, évidemment, le cas d'un étudiant béninois, il dit : Bien là, mon projet est à l'eau, je suis dans l'attente. Les étrangers qui étudient à l'UQAR, à l'Université du Québec à Rimouski, plusieurs sont originaires de l'Afrique de l'Ouest et sont francophones à près de 95 %. Donc, au niveau de l'intégration, ce n'est pas en français que ça va poser des problèmes, ils parlent déjà français. Et évidemment ils font vivre la région, forcément, forcément. Et donc tout ce qu'il faut, bien, c'est éviter justement qu'il y ait de l'instabilité.

Le recteur de l'UQAR nous dit que la survie de certains programmes pourrait être menacée advenant une diminution importante des effectifs internationaux. Alors, imaginez, d'où la pertinence de faire entendre la ministre de l'Enseignement supérieur. Imaginez, imaginez que le gouvernement décide de diminuer des seuils, diminuer le nombre de certificats qu'ils vont émettre, diminuer le nombre d'étudiants étrangers qui vont venir étudier ici, puis que là on se ramasse avec des universités qui ferment des programmes, des universités qui perdent, évidemment, des subventions de recherche parce qu'ils ne pourront pas rien faire avec. Imaginez. Des gens qui voudraient tout miser sur le Québec, mais qui risquent d'aller ailleurs, est-ce que c'est vraiment... est-ce que c'est vraiment ça qu'on veut? Mais moi, j'ai une réponse pour M. le ministre, Mme la Présidente, la réponse, c'est non. C'est non, je ne veux pas ça comme parlementaire.

Et si, le problème, c'est de régler certaines admissions dans certains collèges, bien, à ce moment-là, qu'on s'attaque aux vrais problèmes. Qu'on nous l'explique, puis si c'est ça, là, bien oui, on va collaborer avec le gouvernement, mais on va régler les vraies affaires, on ne va pas faire du mur-à-mur sur l'ensemble des universités québécoises qui nuisent à la réputation et des universités du Québec à l'international pour régler des problèmes.

• (17 heures) •

Quand on lisait l'article du bureau d'enquête, mais c'est sûr qu'on ne veut pas, ça, c'est évident, c'est évident. Voyons! Quand même étonnant qu'il n'y ait personne au ministère qui ait réagi, là. Ça, c'est une autre chose. Mais bon. Mais bon, laissons-leur le bénéfice du doute. Mais il n'en demeure pas moins que si on veut véritablement comprendre l'impact de ce projet de loi, là, les recteurs nous en ont déjà parlé, bien, il faut absolument entendre la ministre de l'Enseignement supérieur et il faut qu'elle soit capable de venir témoigner devant cette commission, et puis qu'on soit capables de dialoguer avec elle. Vous savez, nous, dans l'opposition...


 
 

17 h (version non révisée)

M. Morin : ...opposition, contrairement au gouvernement, comme parlementaires, on a quelques options, et une des options qu'on a quand on est en commission parlementaire, et je l'apprécie pleinement, Mme la Présidente, c'est de pouvoir, justement, avoir des gens qui vont venir nous informer, nous renseigner, avec lesquels on peut dialoguer, pour que tout le monde, les gens qui nous écoutent comprennent bien l'impact de ce projet de loi. Et donc c'est la raison pour laquelle je vous demande de faire entendre la ministre de l'Enseignement supérieur. C'est la raison, également, pour laquelle j'ai présenté cette motion.

Et je vous soumets humblement qu'avec les éléments que je vous ai soumis, que j'ai partagés avec l'ensemble des collègues, avec le constat que font l'ensemble des chefs des établissements universitaires québécois... et je le répète, on nous écrit que cette éventuelle loi aura des effets très négatifs pour nos établissements et pour le Québec... je vous demande de faire entendre la ministre. Merci, madame...

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Merci beaucoup, M. le député. Est-ce que j'ai d'autres interventions? M. le député de Saint-Henri—Sainte-Anne, est-ce que vous voulez...

M. Cliche-Rivard : Merci, Mme la Présidente. J'ai 20 minutes, hein, c'est ça?

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : 30 minutes.

M. Cliche-Rivard : 30 minutes, bon. Je n'irai pas dans les 30 minutes, j'en assure le ministre déjà, mais, quand même, j'ai plusieurs points à soulever. D'abord, oui, je... je pense que cette motion-là est importante, parce que beaucoup des considérations qui ont été soulevées dans le cadre de l'étude détaillée touchaient notamment l'enseignement supérieur, certaines discussions, aussi, sur le volet enseignement tout court, là... éducation, en fait. On pourrait y revenir peut-être plus tard, peut-être... peut-être pas. Mais, bref, pour les institutions d'enseignement, là, cégeps, universités, il y avait quand même beaucoup de discussions qui ont été établies.

Le point, moi... ou le point, ou le nœud de l'affaire, ou l'élément qui m'a le plus interpellé, c'est la question de l'autonomie institutionnelle, de la liberté académique, de la... tout ce qui concerne, là, l'innovation, le développement, la façon, pour l'université, pour le... de... de voir et de peaufiner sa trajectoire de développement de programmes, de développement de technologies, et, bon, toute l'expertise qu'ils et elles ont, recteurs, rectrices, doyens, pour, sur, souvent, une décennie, là, tracer des trajectoires, développer des programmes puis développer des orientations qui leur permettent, qui nous permettent, aux Québécois et aux Québécoises, de... d'assurer une innovation qui est... qui est fonctionnelle puis qui est à la... à la hauteur de la richesse de la société québécoise. Et ça, ça m'inquiète, dans la lecture du projet de loi, puis je ne suis pas tout seul.

On a relevé quelques mémoires, mais, dans les faits, une très, très, très grande majorité des mémoires, les institutions d'enseignement supérieur nous parlent de la liberté académique, de leur autonomie. Je vais... je vais en citer quelques-uns. L'Université Laval, McGill, Sherbrooke nous disent : «L'autonomie des universités leur permet d'être le lieu d'émergence de disciplines et de découvertes dont les retombées sont mesurables sur la longue durée. La voie qu'emprunte le gouvernement avec la présentation du projet de loi, dont les règlements pourraient limiter ou contraindre les universités, menace cette autonomie, qui s'est avérée très bénéfique pour le Québec par le passé.»

Et, dans ce contexte-là, j'aimerais bien, moi, entendre la ministre de l'Enseignement supérieur quant à sa vision de l'autonomie universitaire, notamment, eu égard à la Loi sur la liberté académique, dans le contexte du projet de loi n° 74. J'aimerais bien voir comment elle répond à son réseau, comment elle répond aux recteurs, rectrices, aux professeurs, ainsi qu'aux doyens, doyennes, qui sont inquiets — et là ce sont des gros mots, là, quand même — de la liberté, et de se voir limiter ou contraindre, voire menacer l'autonomie, qui s'est avérée bénéfique pour le Québec. C'est quand même particulier d'entendre ça, et c'est quand même inquiétant.

Et ça continue : «En souhaitant se doter du pouvoir d'interdire la venue d'étudiants internationaux sur la base du choix de programmes d'études, le gouvernement du Québec agit là où les universités ont déjà la compétence pour sélectionner les étudiants.» C'est quand même intéressant. «Rappelons que, dans le processus complexe de recrutement, les étudiants internationaux détiennent une offre d'admission universitaire, lorsque vient le temps d'obtenir les autorisations gouvernementales requises, pour ensuite débuter leurs études. En plus d'empiéter sur l'autonomie de gouvernance académique des universités, le gouvernement, avec le p.l. n° 74, interdit... intervient — pardon — dans une chaîne sophistiquée. Celle-ci concerne les universités, la recherche, mais également les industries et les acteurs de l'innovation situés sur tout le territoire du Québec. Chercher à régir où étudieront les candidats internationaux afin de répondre à des besoins...

M. Cliche-Rivard : ...main-d'oeuvre à court terme ou des priorités gouvernementales changeantes affectera négativement cette chaîne et la capacité de développement stratégique de nos institutions». Quand même. Ça, ça vient des recteurs, rectrices de l'Université Laval, de McGill, de Sherbrooke.

Les cégeps. Un peu le même son de cloche, Mme la Présidente. La Fédération des cégeps exprime sa grande inquiétude concernant une possible centralisation du pouvoir décisionnel, reflété dans les deux notes explicatives suivantes du projet de loi n° 74, et là il le cite, et un des points soulevés, c'est l'ingérence dans l'autonomie des cégeps, dans l'adoption des priorités en matière de gestion et de son offre éducative et d'attraction étudiante des étudiants internationaux. Quand même. C'est le fondement même, le socle même du développement de leur expertise, à savoir combien d'étudiants internationaux ils peuvent accueillir dans les cycles supérieurs de surcroît, dans les chaires de recherche, dans les programmes d'innovation, dans les deuxièmes, troisièmes cycles aussi, parce qu'ils en parlent, c'est excessivement important. L'apport d'étudiants internationaux qu'ils devront recevoir par rapport aux étudiants locaux, dans quel programme, dans quel objectif, dans quelle pénurie de main-d'œuvre, dans quelle innovation? Ça fait partie de la compétence, puis de la structure, puis de l'autonomie fondamentale des universités et des cégeps.

Et ça, j'aimerais entendre la ministre de l'Enseignement supérieur sur ces considérations-là, sur ces inquiétudes-là, parce qu'avec le plus grand respect que j'ai pour le ministre de l'Immigration, ce sont des considérations qui dépassent largement ce qui touche la Loi sur l'immigration du Québec. Évidemment, on est dans le cadre de la liberté académique, on est dans le cadre de la Loi sur l'instruction, on est dans le cadre de la création des différentes universités puis des cégeps et dans leur vision d'autonomie puis d'innovation. Et donc on est dans la pure réflexion de la place de l'université, du cégep dans cette société, puis de leur rôle, puis leur autonomie, et non pas dans une seule bien qu'importante question d'immigration.

La Fédération québécoise des professeurs et professeures d'université nous parle aussi : «Autonomie en sursis, un enjeu de gouvernance et de concentration. Le projet de loi n° 74 soulève de sérieuses inquiétudes quant à l'autonomie des universités québécoises».  Quand même, ce n'est pas rien, là. «Centralisant le pouvoir décisionnel pour l'accueil des étudiants internationaux entre les mains du gouvernement et plus spécifiquement du ministère de l'Immigration et de la Francisation et de l'Intégration. Il écarte au passage les consultations avec les parties prenantes clés de l'enseignement supérieur. À ce titre, il risque d'entraver la capacité des institutions à gérer efficacement leurs programmes et à déployer une vision d'ensemble pour leur développement. En effet, le p.l. 74 donne au gouvernement le pouvoir de bloquer l'accueil d'étudiants étrangers souhaitant s'inscrire dans certains domaines de formation et certains établissements, ce qui risque de menacer la viabilité de programmes en cause ou contraignent les universités à réduire l'offre de cours dans ceux-ci». C'est leur analyse de leurs institutions. «Or, le principe d'autonomie des universités suppose qu'on leur laisse le pouvoir de déterminer leurs priorités et, en fonction de celles-ci et des ressources dont elles disposent, de choisir les programmes qu'elles offrent et la taille des cohortes qu'elles souhaitent admettre. L'autonomie des universités est cruciale pour garantir une gouvernance indépendante, équilibrée et en adéquation avec les réalités locales». Et là, c'est là que ça devient important. «Or, le projet de loi confère au gouvernement le pouvoir de restreindre l'admission d'étudiants, étudiantes dans certains programmes en refusant leur permis d'études, ce qui équivaut à influencer indirectement l'offre de formation. Une telle ingérence empiète sur une prérogative qui devrait strictement relever des institutions d'enseignement supérieur». Telles sont les mots. Et je termine avec leur dernier paragraphe ici : «L'absence de consultation avec le milieu pour la détermination de cibles qui découleront du projet de loi constitue à ce titre une lacune importante. En procédant ainsi, le gouvernement prive la communauté universitaire d'une occasion précieuse de faire valoir ses besoins et d'apporter son expertise dans l'élaboration de politiques qui influencent directement le fonctionnement des universités. La FQPPU défend fermement l'autonomie des établissements d'enseignement supérieur à partir d'une vision basée sur la concertation et la coopération. Le p.l. 74, s'il limite la participation du milieu universitaire au processus décisionnel va directement à l'encontre de nos principes fondateurs». Et là où je pense que c'est d'autant plus intéressant et important d'entendre la ministre de l'Enseignement supérieur, c'est justement qu'on a vu tous ses acteurs et tous ses... tout son écosystème, c'est-à-dire les universités, les cégeps, bien au-delà de l'écosystème...

M. Cliche-Rivard : ...pas mal de groupes de consultation qui touchent l'immigration habituellement, en fait des groupes qui touchent directement habituellement l'immigration, l'association du Barreau canadien, le Barreau. On ne les a pas entendus parce que c'était spécifiquement un projet de loi qui touchait les étudiants internationaux, les institutions d'enseignement supérieur, et ce sont eux et elles qui se sont manifestées parce que directement touchées par le projet de loi en majorité. D'où l'importance, je pense, d'avoir avec nous, à cette table pour commenter, pour rassurer, pour collaborer, pour définir ensemble une voie de passage, la ministre de l'Enseignement supérieur, notamment aussi eu égard aux impératifs financiers, à l'impact budgétaire que pourrait avoir une telle décision sur l'autonomie financière, le développement financier desdits établissements d'enseignement. Donc, toute la question du financement des cégeps, des universités liées de près ou de loin, malheureusement ou heureusement, aux étudiants internationaux, se posera.

• (17 h 10) •

Donc, pour cette raison, Mme la Présidente, moi, je... ma formation politique va appuyer une telle motion et je pense qu'on pourrait beaucoup profiter de l'éclairage, de la vision et des réponses de la ministre de l'Enseignement supérieur. Je sais que le ministre de l'Immigration est capable de nous en donner des réponses, eu égard à l'immigration. J'aimerais entendre la ministre dans son carré de sable, dans son champ d'expertise pour ce qui touche l'enseignement supérieur. Merci.

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Merci, M. le député. Est-ce que j'ai d'autres interventions? M. le ministre.

M. Roberge : Merci, Mme la Présidente. Donc, brièvement, pour répondre aux arguments attendus dans les remarques préliminaires et dans le cadre de cette motion, j'ai entendu des collègues s'inquiéter du fait que j'avais énoncé plusieurs arguments pour déposer ce projet de loi là, plusieurs arguments qui viennent justifier le projet de loi, et qu'au fil des interventions, lors des auditions particulières, j'ai donné des arguments différents et j'en ai donné d'autres aujourd'hui.

Donc, est-ce que c'est pour corriger les erreurs du passé et s'assurer qu'on ne soit pas obligé d'aller devant un juge pour corriger des abus? Est-ce que c'est parce que le fédéral s'ingère dans notre champ de compétence, vient imposer des plafonds d'étudiants étrangers, vient sélectionner des secteurs à partir d'Ottawa sur ce qui devrait être des secteurs stratégiques au Québec? Est-ce que c'est pour corriger ou empêcher des abus ou même des fraudes, même l'arrivée d'étudiants... de faux étudiants qui arriveraient sous de faux prétextes alors qu'en réalité ce sont des gens qui veulent demander l'asile? Est-ce que c'est parce qu'on a des problématiques de logement ou des problématiques d'étudiants qui arrivent ici, qui sont incapables de payer leurs frais de scolarité, même qui fréquentent les banques alimentaires? Est-ce que c'est parce que, dans la loi actuelle, on n'a pas notre capacité d'agir? Et mes collègues se disent : Mais, mon Dieu, comment se fait-il qu'ils changent d'argument comme ça? C'est juste que toutes ces réponses sont bonnes.

Donc, à chaque argument soulevé, on donne une réponse appropriée. Et si vous... s'il y a d'autres enjeux qui sont soulevés, qui viennent justifier le projet de loi, bien, on aura d'autres arguments qui s'additionneront. Donc, la réponse à votre question, c'est toutes ces réponses. Et je m'inquiète, en fait je m'étonne de mon collègue de Québec solidaire, qui nous dit, dans le fond, que ça ne devrait pas être l'État qui gère sa politique migratoire, ça devrait être les institutions qui décident, eux, chaque institution décide combien d'étudiants elle devrait admettre. Sauf que ce sont des étudiants étrangers internationaux qui arrivent sur le territoire québécois, ce n'est pas normal que ça ne soit pas l'État. C'est quasiment une approche libertarienne où on veut restreindre le rôle de l'État, alors qu'il me semble qu'un État national devrait contrôler les leviers de sa politique migratoire.

Pour ce qui est de la question de la motion préliminaire, bien, écoutez, je ne pense pas que ça soit nécessaire étant donné que le projet de loi a été étudié, travaillé en collégialité avec ma collègue de l'Enseignement supérieur, travaillé ministre avec ministre, cabinet avec cabinet, équipe avec équipe. Ça a été discuté en Conseil des ministres. Et, en plus, il est prévu dans les articles de ce projet de loi que, dans plusieurs cas, les recommandations au gouvernement doivent être faites de manière conjointe, Immigration et Enseignement supérieur. Donc, nous sommes très bien attachés, et je pourrai répondre à vos questions au fil des articles, le cas échéant. Donc, je vais voter contre cette motion.

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Merci. Est-ce que j'ai d'autres interventions? Mme la députée?

Mme Setlakwe : Oui. Moi, Mme la Présidente...

Mme Setlakwe : ...Mme la Présidente, et j'aimerais faire mon intervention au nom du chef de l'opposition officielle, je crois que j'ai une période de temps de 30 minutes.

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : ...parce que le représentant officiel a été le député de l'Acadie, qui a déjà utilisé son 30 minutes. Donc, il représente le... Ça, c'est dans la décision... dans l'article 209, décision 209 deux. C'est dans le livre des décisions. Alors, vous bénéficiez d'une période de 10 minutes.

Mme Setlakwe : Merci, Mme la Présidente.

Une voix : ...

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : On va suspendre quelques instants.

(Suspension de la séance à 17 h 16)


 
 

17 h 30 (version non révisée)

(Reprise à 17 h 36)

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : À l'ordre, s'il vous plaît. La commission reprend ses travaux. Après avoir vérifié, relu comme il faut l'article 209 du rapport des... du livre des décisions des commissions, mais en vertu également de l'article 209.3 du recueil des décisions de l'Assemblée nationale, vous avez droit, à titre de porte-parole, de 30 minutes. Alors, le 30 minutes commence maintenant.

Mme Setlakwe : Merci, Mme la Présidente. Donc, je réitère que je prends la parole, dans le cadre de cette motion, au nom du chef de l'opposition officielle. Cette motion préliminaire, qui a été déposée par mon collègue le député de l'Acadie, je l'appuie entièrement. Je pense qu'il est tout à fait à propos de demander d'entendre la ministre de l'Enseignement supérieur dans le cadre de l'étude de ce projet de loi no 74. Mme la Présidente, je dirais que... Je n'ose pas avancer un pourcentage, là, mais disons que la très grande majorité des mémoires qu'on a reçus, des personnes qu'on a entendues, des représentants d'institutions collégiales et universitaires sont rattachés au réseau de l'enseignement supérieur.

Et donc il est essentiel d'avoir la perspective, d'entendre et de pouvoir questionner la ministre de l'Enseignement supérieur au sujet de ce... de ce projet de loi là. Qu'est-ce qu'elle en pense? Et où... Ou comment... Comment répond-elle à toutes les inquiétudes qui ont été mises de l'avant par les recteurs, par les directeurs des cégeps, par la représentante... la présidente de la Fédération des cégeps, par les représentants de l'Association des collèges privés subventionnés, et j'en passe? Elle doit les prendre, ces inquiétudes, ou les rassurer une à une, donc les prendre une à une et rassurer son réseau, les personnes qu'elle représente, les personnes qu'elle est censée défendre. Elle est là pour défendre le réseau de l'enseignement supérieur. Le réseau est ébranlé. Il y a des inquiétudes qui ont été exprimées, des préoccupations légitimes. Alors, nous, ce qu'on demande... Dans le fond, on porte la voix de ces réseaux pour demander à la ministre de venir s'asseoir en commission avec nous afin qu'on puisse porter la voix, donc, de ces groupes, de ces institutions, et qu'on puisse, pour le bénéfice, pour leur bénéfice, pour le bénéfice de la population, entendre la façon... la réflexion, les réflexions de la ministre et la façon dont elle entend défendre le réseau de l'enseignement supérieur.

• (17 h 40) •

Je ne veux pas reprendre, là, l'ensemble des mémoires qui ont été... qui ont été déposés, il y en a plusieurs, mais il est important qu'on revienne sur la lettre du Bureau de coopération interuniversitaire, le BCI. On se rappelle, là, que c'est une lettre... C'est une lettre de... Tout le monde autour de la table devrait la lire, là. C'est une lettre de quatre, cinq pages, qui vient résumer l'ensemble des arguments, des inquiétudes qui ont été soulevées dans les différents mémoires. Et c'est impressionnant de voir, donc, l'ensemble des réseaux parler d'une seule voix. Cette lettre, elle est signée par le président du BCI. Aujourd'hui, c'est le recteur de l'Université du Québec à Trois-Rivières. Mon collègue l'a fait, l'exercice, elle est cosignée par les chefs des établissements universitaires...

Mme Setlakwe : ...Québécois, et c'est... c'est unanime, là, c'est le réseau de l'Université du Québec. Ce sont toutes les grandes universités qui ont des facultés de médecine. Je ne veux pas les renommer, mais ce qu'il faut retenir, c'est qu'elles parlent toutes d'une même voix. Elles sont toutes du même avis. Elles veulent toutes être exclues, elles sont toutes préoccupées. Et donc le recteur de l'UQTR met de l'avant, donc... résume l'ensemble de l'argumentaire. Il énonce que, s'il y a des problématiques qui existent, elles ne... elles ne sont pas... il ne faut pas viser le réseau universitaire, il faut agir de façon ciblée pour corriger les situations problématiques si elles existent, avec les bons outils. Et, il est venu ajouter un élément, et je l'ai rencontré en personne. Le hasard a fait que j'avais une rencontre prévue avec lui la semaine dernière. Je me suis rendue à Trois-Rivières. Et il m'a dit : Il y a un élément dans notre lettre qui n'a pas été présenté en commission. Alors, je pense que c'est important qu'on le... qu'on réitère cet élément-là. Et il est venu parler globalement des métriques et des objectifs d'immigration. Puis ça touche aussi à l'autonomie, là, des institutions. Quand il dit : Il faut laisser toute l'autonomie aux institutions pour déterminer toute la gamme de cours et de programmes qui doivent être offerts dans le réseau universitaire, c'est à ce niveau-là que ça doit se décider, et non pas au niveau du gouvernement. Il a... sa crainte, je vais l'exprimer dans mes mots, puis, après ça, je vais lire sa lettre.

C'est que, si le gouvernement et... ou les gouvernements, les différents paliers, même ensemble, établissent ou font une liste de secteurs prioritaires, ça peut être en lien avec des enjeux économiques, des enjeux de besoin de main-d'œuvre, et si on dresse cette liste et qu'ensuite on autorise ou on permet, donc, l'arrivée d'étudiants internationaux en lien avec ces domaines-là, mais on va laisser de côté des domaines qui aujourd'hui ne sont pas des domaines qu'on peut dire des domaines chauds ou des domaines pour lesquels il faut... il y a un urgent besoin aujourd'hui de former... de former les jeunes pour pouvoir répondre à des enjeux de société d'aujourd'hui. Mais il faut... puis c'est à l'université que ça se fait, il faut prévoir, anticiper les besoins de demain.

Il donnait... il me citait un exemple. Yoshua Bengio, tout le monde le connaît, on est donc content de l'avoir chez nous, au Québec. Il a... d'ailleurs, la médaille de l'Assemblée nationale lui a été remise... de la présidente de l'Assemblée nationale, lui a été remise cette année. En intelligence artificielle, si on recule de cinq, 10, 15 ans, est-ce que le gouvernement aurait mis l'intelligence artificielle sur une liste de domaines prioritaires, domaines pour lesquels... Tu sais, si on fait une liste, on dresse une liste des domaines où il y a des besoins de main-d'oeuvre, pas sûr que l'intelligence artificielle apparaissait sur cette liste-là. La quantique, là, quand on parle aussi de quantique qui n'existait pas... ce n'était pas un domaine auquel on pensait, mais cinq, 10, 15 ans, aujourd'hui, l'Université de Sherbrooke est un chef de file. On a attiré des étudiants internationaux, surtout, donc, dans les cycles supérieurs. On a un institut quantique. Les exemples sont... la cybersécurité.

Tout ça pour dire, puis là je vais... je vais m'en remettre à ses paroles, parce que c'est important. Toutes les universités nous disent de respecter leur autonomie. Et ce qu'ils disent, c'est que «le système québécois de gestion actuel de l'immigration est basé notamment sur l'établissement d'une liste de professions en pénurie. Les personnes immigrantes qui ont des formations dans ces domaines sont privilégiées. Les portes s'ouvrent moins pour les autres. Ce sont les besoins d'hier et certains des besoins d'aujourd'hui qui sont privilégiés. C'est le court terme qui prime.» Et c'est là qu'il a soulevé l'exemple de Yoshua Bengio. En tout cas, moi, je le veux, le prochain, Yoshua Bengio ici, chez nous. Je pense que mon collègue de l'Acadie est d'accord avec moi. Il le disait tout à l'heure, différemment, il disait : Ces talents-là, s'ils ne viennent pas chez nous, ils vont aller ailleurs. Il y a une compétition féroce, là, qui est... qui est en cours pour attirer les meilleurs talents. Et le gouvernement l'a reconnu dans la... dans la stratégie du ministère de l'Enseignement supérieur.

Je poursuis : «On répète souvent que les professions d'importance dans sept ou 10 ans sont aujourd'hui inconnues. Le monde universitaire est le lieu où les professions essentielles à l'évolution de nos économies et de nos sociétés émergent, au-delà de sa réponse collective à la pénurie de main-d'œuvre. Ces dernières apparaissent rarement dans la liste des professions utilisées par les ministères du Québec et du Canada pour prioriser l'immigration. Or, il importe de protéger l'autonomie des universités dans leur diversité pour faire émerger des nouveaux programmes à tous les cycles pour soutenir...

Mme Setlakwe : ...de nouvelles niches de recherche qui enrichissent ces programmes et nos connaissances, mais aussi pour enrichir notre population étudiante venant de partout à travers le monde, dans tous les domaines. Ces étudiants internationaux amènent de nouvelles perspectives qui permettent l'innovation par le choc des idées. Ainsi, l'université québécoise peut jouer pleinement son rôle comme moteur du développement du Québec.»

Donc, voilà. Comme je le disais avant de citer nos recteurs universitaires, dans le fond, ce n'est pas juste le recteur de l'UQTR qui amène cet élément additionnel, ce sont tous les recteurs, rectrices d'université. C'est un élément qui n'avait pas été présenté en commission et d'où l'importance, oui, de respecter l'autonomie universitaire, mais l'importance d'avoir la réaction de la ministre del'Enseignement supérieur à cet élément et ainsi que tous les autres éléments qui ont été amenés en commission, Mme la Présidente.

J'ai parlé des... Mais juste avant, avant d'arriver aux cégeps, j'aimerais revenir sur un point, moi, qui m'a été mentionné en personne lors de mes rencontres, quand je suis allée visiter différents recteurs, et c'est quelque chose qui a aussi été mentionné, qui était palpable durant les consultations il y a deux semaines. C'était toute... L'inquiétude était palpable chez les recteurs, mais ils ont mentionné que l'ensemble des mesures qui ont été mises de l'avant... Parce que ce n'est pas juste le projet de loi n° 74, cette mesure s'ajoute à d'autres mesures qui ont été adoptées, là. Ils ont parlé d'une vingtaine en tout. C'est vrai que les 20 ne viennent pas du gouvernement du Québec. Mais, quand on considère, donc, l'ensemble des mesures, mais il y en a beaucoup qui viennent du Québec, du gouvernement du Québec, le gouvernement qui est actuellement en place. On peut penser à la hausse des droits de scolarité, à la nouvelle mouture de la politique de financement. On a parlé d'affaiblir les institutions. Ce n'est pas moi qui le dis, là. On dit que ces mesures viennent affaiblir nos institutions. C'est sérieux, Mme la Présidente. On a un projet de loi qui suscite ce genre d'inquiétude, ce genre de préoccupation.

Moi, je ne veux certainement pas escamoter la réflexion ou je veux vraiment aller au fond des choses pour s'assurer qu'on n'affaiblisse pas nos institutions universitaires qui font notre fierté. J'en ai dans ma circonscription, j'ai Polytechnique, HEC, l'Université de Montréal, mais je suis fière, moi, de toutes nos institutions universitaires. Et elles forment ensemble un écosystème, un îlot d'excellence. Au fur et à mesure de mes rencontres, je réalise aussi à quel point elles ne travaillent pas en silo, elles collaborent ensemble et que, quand il y a un bon coup, disons à McGill, bien, il y a un impact positif à Sherbrooke et vice versa. Ils se parlent. On le sentait durant les consultations. Ils sont venus ensemble. Concordia et Bishop sont venus ensemble. Les quatre universités qui ont une faculté de médecine sont venues ensemble. On a senti, donc, la force de cet écosystème. C'est quelque chose qu'on ne peut pas prendre à la légère. C'est quelque chose qu'on ne peut pas brimer. Et la personne la mieux placée pour venir rassurer la commission qui se penche sur cette pièce législative, c'est la ministre de l'Enseignement supérieur. Ça, c'est les universités.

Dans le réseau de l'enseignement supérieur, il y a aussi les cégeps. On est fiers de nos cégeps au Québec. Il y a un réseau de 48 cégeps qui... On l'a entendu... On les a entendus également en commission. Qu'est-ce qu'ils sont venus dire également? On veut être exclus de l'application du projet de loi. Chez nous, dans nos cégeps, le recrutement, il est réfléchi, il est ciblé. On a besoin des étudiants internationaux. On a essayé aussi de voir est-ce que c'est plus en région, c'est plus à Montréal qu'ils sont importants, dans les grands centres. La réponse, Mme la Présidente, c'était : Dans l'ensemble du réseau, on a besoin des étudiants internationaux pour toutes sortes de raisons.

• (17 h 50) •

Je vais me référer à mes notes, là, du passage de la Fédération des cégeps. Les cégeps sont non seulement des institutions d'enseignement, mais sont aussi des moteurs de développement, développement régional, développement économique. On peut penser aussi que c'est du développement social communautaire. Des communautés entières dépendent des cégeps, de leurs installations. Et nos cégeps ne peuvent pas fonctionner à plein régime, nos cohortes, dans nos cégeps, ne peuvent pas être complètes si on n'a pas les étudiants internationaux. Les étudiants internationaux, il ne faut pas juste penser que leur... que leur présence, bien, est bénéfique pour eux. Leur présence est bénéfique avant tout pour les étudiants québécois. Si on n'est pas capable de former une cohorte complète, bien, on ne pourra pas offrir des programmes à nos jeunes Québécois qui veulent rester en région. Moi, j'ai...

Mme Setlakwe : ...Moi, j'ai grandi en région, j'ai grandi dans la région de... dans la ville de Thetford Mines. J'ai fait mon cégep là-bas, j'ai fait une formation générale, ensuite je suis allée à l'université. Mais je sais très bien quelle est la réalité des régions : les jeunes quittent beaucoup. Et ce qu'il faut faire, c'est les retenir. Puis il faut garder nos cégeps en bonne santé. C'est le cas à Thetford Mines, je m'en réjouis aujourd'hui. Mais ce qu'on a entendu, c'est que la présence des étudiants internationaux nous permet de compléter les cohortes et ça bénéficie avant tout aux jeunes Québécois qui veulent rester dans leur région et suivre... avoir une vaste gamme de programmes offerts localement. Et la Fédération des cégeps est venue dire essentiellement qu'il ne faut pas couper en région puis il ne faut pas couper dans les grands centres non plus. Attention, là, de venir imposer, disons, un moratoire à Montréal. Il y a des domaines nichés, des domaines de pointe, des domaines pour lesquels il faut absolument former la relève, absolument former les travailleurs de demain étant donné le vieillissement de la population, étant donné les pénuries dans nos services publics, au sein de nos entreprises, etc.

Donc, honnêtement, moi, je n'ai pas été capable de dégager un domaine où... pas un seul où c'est superflu. Il semblerait que tout est bien réfléchi puis qu'on a besoin de tous ces programmes dans toutes nos régions et que... Donc, le message qu'il faut retenir, c'est : Ne coupez pas dans les étudiants internationaux. Dans notre réseau des cégeps publics, tout va bien. Ils ont des chiffres à l'appui aussi. Ce n'était pas... tu sais, le pourcentage des étudiants internationaux, c'était complètement sous contrôle. Ne touchez pas à ça, excluez-nous. Nous, on ne fait pas partie du problème, on est... tout va bien. C'est une question d'accessibilité aux études supérieures dans toutes les régions. Si on vient couper, on va affecter la mission fondamentale des cégeps, on va toucher à l'avenir des régions.

La ministre de l'Enseignement supérieur, elle en pense quoi? Est-ce qu'elle peut venir rassurer le réseau et dire : Non, non, je n'imposerai pas un quota dans les régions puis je n'imposerai pas non plus un quota dans les grands centres. Est-ce qu'elle peut venir les rassurer? Il dit... Ils nous disent : Laissez les cégeps s'autoréguler. Laissons ou préservons l'agilité des établissements. C'est toutes des choses que j'ai notées suite à leur passage. C'est une belle immigration. Ils sont formés chez nous. Et ensuite qu'est-ce qu'ils font? Bien, ils s'assurent...

On va se tirer dans le pied si on baisse les... on baisse les seuils ou on impose des plafonds. C'est le futur des services publics, c'est les soins. Ces personnes-là vont assurer les soins qui vont être offerts à la population partout au Québec. Il ne faut pas se mettre la tête dans le sable, là, il y a une baisse démographique. Notre population vieillit. On a besoin de ces cerveaux, on a besoin de ces jeunes chez nous.

Je ne peux pas m'empêcher d'ajouter que ce projet de loi est vu dans le réseau. On me l'a dit, j'étais au cégep de Trois-Rivières la semaine dernière. Et d'ailleurs ça fait l'objet de revue de presse. Cette mesure s'ajoute à d'autres mesures qui portent le réseau des cégeps à dire qu'ils sont en plein tsunami. Et c'est un ouragan qui les frappe, que jamais le réseau a été autant mis à mal par un gouvernement. Pensons aux plafonds dans les budgets d'investissement qui ont été imposés le 31 juillet dernier. Encore une fois, ça a été vu comme une atteinte à leur autonomie, une atteinte à la gouvernance locale. Ce sont les conseils d'administration localement qui connaissent la réalité locale et qui... c'est des gens bénévoles, là. D'ailleurs, ils ont signé une lettre ouverte pas plus tard qu'hier, là, où ils se plaignent du fait que, écoutez, nous, on se réunit, on connaît les besoins, on établit les montants, on fixe un budget d'investissement pour l'année à venir, puis qu'est-ce qu'on nous fait un mois plus tard, on envoie une lettre disant : Hum, vous pensiez dépenser, disons, 30 millions, mais vous êtes limités à 15. Ça, c'est un exemple, Mme la Présidente. Et, dans bien des cas, vous le savez, là, vous avez tous des cégeps, là, dans vos... je regarde mes collègues autour de la table, dans vos régions, qui... Les 48 cégeps ont reçu la même lettre, moi, c'est ce qu'on m'a dit, et il y a des plafonds qui ont été imposés dans tous les cégeps. Et, dans certains cas, ils ont dû mettre un terme à des projets... à des projets de rénovation, à des projets d'agrandissement. Mais ça va plus loin que ça, ça empêche les cégeps de faire des achats, de réagir à des urgences. Ça, c'est une chose. On impose... on a changé les...

Mme Setlakwe : ...au niveau des heures rémunérées. Tout récemment, par le biais d'une décision, là, de concert avec le Conseil du trésor, il y a un gel d'embauche aussi qui était imposé. Donc, on est vraiment en train de vivre... les cégeps, ce n'est pas moi qui le dis, ça m'a été dit et c'est documenté, ils sont en train de vivre une période difficile, et là on vient ajouter le projet de loi n° 74. Donc, eux, ce qu'ils disent, c'est : Laissez-nous notre autonomie, les choses vont bien. Et d'ailleurs, la population étudiante grandit. On a besoin d'avoir toute l'autonomie. On a besoin d'avoir les coudées franches. Alors, essentiellement, ils nous disent : Excluez-nous. Moi, j'aimerais bien que la ministre de l'Enseignement supérieur vienne réagir à ce mémoire, à tout ce que je viens de mentionner, qui vient de... qui nous provient de notre réseau des cégeps. Ça, c'est les cégeps publics.

Il y a aussi les cégeps privés subventionnés. Puis là on pourra venir... on pourra en venir éventuellement à une discussion sur les collèges privés. On a eu en consultation l'Association des collèges privés du Québec, extrêmement inquiets eux aussi. Je saute à la conclusion de leur mémoire. Eux spécifiquement, ce qu'ils disent, c'est qu'il faut agir avec prudence dans ce dossier. Donc, nous, on porte leur voix et on demande au gouvernement d'être extrêmement prudent : «Nous désirons nous assurer que le projet de loi ne viendra pas fragiliser le réseau collégial privé et subventionné».

Est-ce que la ministre de l'Enseignement supérieur pourrait venir répondre à cette préoccupation? Ils ont demandé : Quelle est l'intention du gouvernement? Ce n'est pas clair. Le projet de loi, selon eux, n'est pas nécessaire et représente un grand danger. Est-ce que... Où le gouvernement a-t-il l'intention de couper? Il y a un potentiel de dommages. Et là ils arrivent aussi à un point bien spécifique, et c'est la disposition du projet de loi qui change la Loi sur l'enseignement privé pour les collèges privés et subventionnés. Je vais le dire dans mes mots. Ils disent : Attention de faire du mur à mur puis attention de donner des pouvoirs larges au gouvernement, parce qu'il se pourrait que, du jour au lendemain, un collège privé et subventionné... je vais donner l'exemple du collège Brébeuf qui est dans ma circonscription, puis je pense que c'est un exemple qui avait été mentionné durant les consultations. Puis c'est un collège qui est bien connu puis c'est un collège où il n'y a pas de problématique, là, au niveau des étudiants internationaux. Je pense qu'il y en a très peu d'ailleurs. Mais, du jour au lendemain, on pourrait venir imposer un seuil, un plafond. Brébeuf a... j'ai noté 1 700 étudiants au collégial, et, en vertu du libellé actuel, on pourrait venir leur dire que, subitement, ce plafond serait réduit à 1 000. Imaginez l'impact. Imaginez l'impact sur un collège comme Brébeuf et sur tous les autres collèges privés, c'est ça, les collèges privés subventionnés.

Encore une fois, dans le même esprit, Mme la Présidente, quelle est la réaction de la ministre de l'Enseignement supérieur? Est-ce qu'on peut l'entendre? L'ensemble des mémoires, presque la totalité des mémoires, sont des mémoires déposés par les réseaux, par les institutions, par les recteurs, les directeurs qu'elle représente, qu'elle a la mission de défendre.

• (18 heures) •

Aussi, je me permets de réitérer puis ça a été dit, ça a été documenté aussi, ce n'est pas juste moi qui le dis, les incohérences qui semblent émaner, là, de ces différentes différentes positions, d'un côté, on dit que l'internationalisation de l'enseignement supérieur est une priorité. C'est dans le plan stratégique. Puis là ensuite, le projet de loi ou, en tout cas, des membres du Conseil des ministres et le projet de loi envoient le message qu'il faut couper puis qu'il y en a trop. Bon, alors, c'est très important de faire... d'internationaliser, ou bien il y en a trop puis c'est un problème, il va falloir qu'on clarifie tout ça? Puis je pense que la perspective de la ministre de l'Enseignement supérieur serait plus que pertinente. Également, la nouvelle mouture de la politique de financement qu'elle a pilotée, qui a été déposée en juin, où il n'y a pas de nouvel argent qui est investi dans le réseau universitaire, a comme...


 
 

18 h (version non révisée)

Mme Setlakwe : ...élément essentiel, la hausse des droits de scolarité, et on compte sur le financement qui provient de la clientèle internationale pour venir redistribuer de l'argent dans l'ensemble du réseau. Mais, du même souffle, on dit, au gouvernement, qu'on veut réduire le nombre d'étudiants internationaux, qu'il y en a trop, que c'est donc problématique, parce que c'est sûr qu'il y a une problématique, là, si on dépose un projet de loi avec des projets aussi larges.

Donc, encore une fois, qu'est-ce qu'on tente de faire? Est-ce qu'il y a un problème? Est-ce qu'il est ciblé? Et est-ce qu'on a les bonnes mesures en place pour répondre spécifiquement à ces problèmes-là? J'aimerais entendre la ministre sur ces différents éléments qui sont interreliés et qui semblent contradictoires.

Permettez-moi de faire en rafale, là, le... un sommaire, là, des conséquences plus larges, donc, sur la société et des risques plus généraux, là, si les nouveaux pouvoirs, tel que stipulé dans le projet de loi dans sa forme actuelle, sont mal utilisés.

Fort potentiel de nuire aux régions, je l'ai mentionné, alors qu'on semble dire... le ministre a dit qu'il veut protéger les régions, mais il va falloir que ça, ça se traduise dans le projet de loi, il va falloir que le... les pouvoirs du ministre et des ministres, et là j'aimerais entendre la ministre de l'Enseignement supérieur là-dessus, soient balisés. Le Québec se donne notamment la possibilité de procéder par décrets. C'est très large et ce sont des pouvoirs très larges et où le gouvernement va avoir une très large discrétion.

Fort potentiel de nuire à notre économie. Il ne faut pas sous-estimer la contribution de ces étudiants-là. Le gouvernement de la CAQ se dit le gouvernement de l'économie. Moi, je commence à en douter sérieusement, Mme la Présidente. Ces étudiants, pendant qu'ils sont ici, ils dépensent, ils font rouler l'économie. Ce doit être chiffré. Plusieurs travaillent pendant la durée de leurs études, dans le secteur du commerce de détail par exemple, donc ils comblent la pénurie de main-d'œuvre. Ils contribuent à la capacité de recherche et d'innovation du Québec. Ça, ça a été dit et redit. Le projet de loi pourrait avoir un effet négatif sur les laboratoires de recherche qui recrutent des étudiants aux deuxième et troisième cycles. Donc, il n'y a pas toujours un lien avec les besoins de main-d'oeuvre, mais ils sont essentiels à l'innovation. Elle en pense quoi, la ministre de l'Enseignement supérieur? Les universités sont venues dire : Excluez-nous totalement, mais, de grâce, excluez les cycles supérieurs, deuxième et troisième cycles. Il ne faut absolument pas couper au niveau de ces cycles-là.

Juste pour parler de Polytechnique. À la maîtrise... Une autre belle institution dans ma circonscription. À la maîtrise, 60 % des cohortes sont composées d'étudiants internationaux, 60 %, et au doctorat, 70 %. Qu'est-ce qu'elle répond, la ministre de l'Enseignement supérieur, à Maud Cohen, la directrice de l'École polytechnique, qui a d'ailleurs... Le jour des consultations, elle n'est pas venue, Mme Cohen, mais elle a signé une lettre ouverte. Ça vaut la peine d'être lu. Moi, j'aimerais que la ministre de l'Enseignement supérieur nous dise qu'est-ce qu'elle en pense, qu'est-ce qu'elle répond à Mme Cohen, qu'est-ce qu'elle répond aux HEC, qu'est-ce qu'elle répond à l'UQO. Il faut absolument l'entendre dans le cadre de ce projet de loi là. Encore une fois, c'est à la maîtrise et au doctorat où se déploient la recherche et l'innovation. Mme Cohen a dit dans sa lettre : «Ce sont principalement des étudiants venus de l'étranger qui contribuent de façon significative aux programmes de recherche et d'enseignement dans nos universités et industries.» J'ai déjà mentionné les pourcentages.

Quand je suis allée visiter Polytechnique, il y a quelques semaines, on m'a mise en contact justement avec des étudiants, des brillants... des étudiants brillants. Ils étaient autour de la table. J'ai eu le privilège d'échanger avec eux. Ils m'expliquaient leurs parcours, m'expliquaient surtout à quel point ils étaient tombés en amour avec le Québec, à quel point... déjà, là, ils ont... ils ont déniché des emplois, ils ont... ils performent, ils parlent le français, un français impeccable. Et là j'avais cette jeune étudiante à mes côtés qui m'a remis une lettre. Là, c'était la décision aussi par rapport au PEQ. Le découragement, l'inquiétude dans ses yeux, dans sa voix, c'était... c'était franchement ébranlant. Elle, elle dit : J'ai... Elle s'est même... Elle s'est mariée. Elle a... Elle est en couple avec un Québécois. C'est... Tu sais, c'est tout un projet de vie. On se dit : Quelle incertitude on est en train de leur faire vivre, alors qu'elle contribue à l'innovation, son expertise est très pertinente, là, dans la...

Mme Setlakwe : ...la transition énergétique, là. Cette jeune personne, mais des exemples comme cette jeune dame à la Polytechnique qui veut travailler ici, qui veut s'établir, elle est mariée, d'ailleurs, qui parle un français impeccable, elle se dit : Mais on m'a convoité, on m'a... on m'a déroulé le tapis rouge, j'ai choisi le Québec, et je ne regrette pas, j'adore le Québec, j'adore Montréal. Mais là qu'est-ce qu'on est en train de faire? On est en train de changer les règles du jeu en cours de route. Elle est très inquiète et elle me dit : Là, ce projet de loi là, je ne le... je ne comprends pas. Est-ce qu'on veut... est-ce qu'on veut... est-ce qu'on veut continuer à accueillir des personnes comme moi?

Alors, je pense que la réponse... En tout cas, à la Polytechnique, leur position est claire : la ministre de l'Enseignement supérieur est la personne toute désignée pour venir rassurer, pour venir expliquer sa vision, pour venir... Je comprends, là, qu'elle va avoir un rôle à jouer. Le ministre de l'Immigration l'a mentionné, il y a des décisions qui vont devoir être prises conjointement. Mais il n'en demeure pas moins qu'ici on essaie de dégager l'intention, la vision, là, l'intention du législateur. Avec ce projet de loi là, il serait plus que pertinent d'avoir le son de cloche de la ministre de l'Enseignement supérieur.

Et, bien, en terminant, écoutez, elle doit, elle aussi, penser à... que c'est important de demeurer attractif et compétitif. Elle a dû faire la même tournée que moi des universités. D'ailleurs, elle est, c'est évident, là, encore plus en contact que moi, simple députée de l'opposition officielle. Il faut absolument entendre sa voix dans le cadre de ce projet de loi.

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) :     Merci beaucoup, Mme la députée. Est-ce qu'il y a d'autres interventions sur la motion préliminaire? Alors, s'il n'y a pas d'autre intervention, nous allons procéder à sa mise aux voix.

M. Morin : Je vais vous demander, Mme la Présidente, un vote par appel nominal, s'il vous plaît.

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Un vote par appel nominal. Mme la secrétaire.

La Secrétaire : Pour, contre, abstention. M. Morin (Acadie)?

M. Morin : Pour.

La Secrétaire : Mme Setlakwe (Mont-Royal—Outremont)?

Mme Setlakwe : Pour.

La Secrétaire : M. Roberge (Chambly)?

M. Roberge : Contre.

La Secrétaire : Mme Tardif (Laviolette—Saint-Maurice)?

Mme Tardif : Contre.

Le Secrétaire : Mme Lecours (Lotbinière-Frontenac)?

Mme Lecours (Lotbinière-Frontenac) : Contre.

La Secrétaire : Mme Schmaltz (Vimont)?

Mme Schmaltz : Contre.

La Secrétaire : Mme Poulet (Laporte)?

Mme Poulet : Contre.

La Secrétaire : Mme Picard (Soulanges).

Mme Picard : Contre.

La Secrétaire : M. Cliche-Rivard (Saint-Henri—Sainte-Anne)?

M. Cliche-Rivard : Pour.

La Secrétaire : Mme Lecours (Les Plaines)?

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Abstention. Alors, la motion est rejetée.

Je crois savoir qu'il y a une deuxième motion préliminaire qui a été déposée, elle est déjà dans le Greffier. M. le député de Saint-Henri Sainte-Anne, dès que nous allons l'avoir, je vais vous demander d'en faire la lecture.

M. Cliche-Rivard : Je vais attendre que...

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Elle s'en vient. Voilà.

M. Cliche-Rivard : Merci, Mme la Présidente. J'en fais la lecture.

Qu'en vertu de l'article 244 du règlement de l'Assemblée nationale, je fais motion afin que la Commission des relations avec les citoyens, dans le cadre de l'étude détaillée du projet de loi n° 74, Loi visant principalement à améliorer l'encadrement relatif aux étudiants étrangers, demande au ministre de transmettre les documents suivants à la commission, dans le but de dresser un portrait de la situation adéquat et complet avant d'entreprendre son mandat.

Les informations suivantes sont demandées :

le nombre de lettres d'admission émises pour des étudiants internationaux par établissement d'enseignement, par niveau d'enseignement, par programme et par année, pour les années 2018 à 2024;

le nombre de CAQ émis pour chaque établissement d'enseignement par niveau d'enseignement, par programme et par année, pour 2018-2024;

le nombre de permis d'études et le nombre... émis et en vigueur pour chaque établissement d'enseignement du Québec, par programme, par niveau d'enseignement et par année, pour 2018 2024; et

le nombre d'inscriptions pour les étudiants internationaux par établissement d'enseignement, par niveau d'enseignement, par programme et par année, pour les années 2018 à 2024.

Donc, je m'exprime, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Bon, juste une seconde, on va vérifier le temps, on va partir le temps. Maintenant, elle est dans le Greffier. Si vous voulez la lire à nouveau pendant que je vous cède la parole pour votre 30 minutes.

• (18 h 10) •

M. Cliche-Rivard : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Donc, M. le ministre, ma demande, c'est pour qu'on parte sur les mêmes bases, là, tous ensemble. Je pense que votre gouvernement ou le ministère a plusieurs de ces informations-là, sinon toutes, en fait, je... probablement qu'ils les ont toutes ou, du côté du gouvernement, vous les avez. J'aimerais ça qu'on commence la discussion avec les mêmes bases, les mêmes chiffres. Parce que, dans le dossier d'immigration, et vous le savez, on a déjà discuté là-dessus, là, il y a... bon, il y a Statistiques Canada, il y a IRCC, il y a le MIFI, il y a plusieurs joueurs évidemment, et là on est... puis le Commissaire à la langue française nous en fait cette revendication-là aussi dans son rapport. C'est un petit peu difficile d'y voir clair sur l'ensemble des chiffres. Bon...

M. Cliche-Rivard : ...La donnée qu'on a ou qu'on semble avoir, c'est 123 000 étudiants étrangers temporaires sur le territoire du Québec ou, du moins, 123 000 permis valides, mais ce n'est pas toujours clair, à savoir les inscriptions, ce n'est pas toujours clair, à savoir combien sont-ils vraiment. Et ma question vient notamment pour qu'on soit capables d'avoir des politiques publiques qui soient basées sur les faits sur lesquels on peut s'entendre, là. Donc, moi, vraiment, dans une logique de collaboration, puis dans une logique qu'on puisse avoir un portrait commun et conjoint de l'état de la situation, puis qu'on puisse avancer ensemble, j'aimerais ça que le gouvernement puisse nous fournir ces données-là pour qu'on puisse, tu sais, vraiment... Le ministre nous parle souvent de là où il y a des problèmes. Puis moi, je suis d'accord avec lui qu'il y a certaines institutions qui dépassent la ligne, là, qui dépassent les bornes, mais ce n'est pas toujours clair de quoi on parle puis qu'est-ce qu'on cherche à encadrer.

Et donc, là, nos 123 000 en question, là, et c'est là où je posais la question tout à l'heure de ce que j'appellerais les quatre étapes. L'étape où l'étudiant international fait une demande d'admission dans une université, par exemple, et qu'il est admit. Étape un. Le nombre de lettres d'admission émises par étudiant, par programme, par établissement, par niveau, par année. Combien de demandes? Là, on va savoir, je ne sais pas, moi, je ne... je n'ai pas le chiffre, mais peut-être qu'il y en a 500 000. Je ne le sais pas. C'est l'information que j'aimerais avoir. Ensuite, ces gens là, sur la base de ladite lettre d'admission et d'autres documents, feront une demande de certificat d'acceptation du Québec au MIFI. C'est ça qui est en jeu, essentiellement, dans le cadre du projet de loi aujourd'hui. Maintenant, combien, là, de... combien de ces demandes-là initialement, là, si je pars avec l'idée du 500 000 font finalement l'objet d'une demande de CAQ pour qu'on puisse savoir, finalement, la corrélation : Est ce que 100 % des gens qui reçoivent une lettre d'admission appliquent pour un CAQ? J'en doute. À une époque lointaine, mais peut-être pas si lointaine que ça, vous vous souviendrez peut-être... des gens parmi... dans la salle qui ont fait des demandes d'admission dans certaines universités, vous en avez probablement faites plusieurs, peut-être à l'Université de Montréal, peut-être à l'Université de Sherbrooke, peut-être à l'Université d'Ottawa, peut-être à l'Université McGill, et vous avez reçu des réponses, vous n'avez probablement certainement pas accepté toutes ces demandes-là, vous avez choisi l'université, puis les autres sont restées lettre morte. Bien, vous l'avez refusée, la demande d'admission. Et donc même chose pour des étudiants internationaux qui peuvent appliquer dans, ne serait-ce, plusieurs pays, plusieurs villes, plusieurs régions, plusieurs programmes, plusieurs universités. Alors, combien de ces demandes-là font l'objet d'un CAQ? Dans quelle proportion, dans quelle institution, dans quel établissement, dans quelle région? Ça, ça nous permettrait de voir directement... peut-être qu'on passe, là, je donne les chiffres, mais c'est les chiffres que je veux obtenir. Peut-être que, tout d'un coup, on passe à 400 000 de notre 500 000 initial parce que, finalement, il y en a 100 000 qui décident de ne pas le faire. Bon. Et une fois que ça, c'est fait, là, avec notre CAQ en main, les étudiants internationaux déposent une demande de permis d'étude auprès du gouvernement fédéral et RCC avec d'autres documents additionnels. Et là le fédéral émet ou n'émet pas un permis de travail... un permis d'étude. Combien de permis d'étude émet-il? Combien même de détenteurs de CAQ déposent des demandes de permis d'étude puis combien n'en déposent pas finalement? Et combien de permis d'étude sont finalement émis? Ça nous permettrait très bien d'avoir un portrait global de combien de gens véritablement obtiennent le permis d'étude. Et peut-être que, là, on serait rendu à 300 000 dans la délivrance, peut-être même 250 000, parce que le taux d'approbation de permis d'étude, on sait que c'est très variable selon les pays d'origine. Et une fois que ça, c'est dit, reste l'étape de finaliser notre inscription, de se présenter finalement dans ladite université, de choisir ses cours et d'aller s'asseoir dans la classe pour matérialiser l'inscription. Quatrième étape. Combien de ces gens là ont finalement commencé leur cours au Québec par institution? Et est-ce qu'à ce moment-là on est effectivement rendu à 123 000? Peut-être. Et c'est ce chemin-là, par programme, par université, par niveau, qui nous permettrait d'établir ou de dresser le portrait des endroits problématiques, des endroits qui fonctionnent, et qui nous permettrait d'avoir des politiques publiques basées sur des données chiffrées importantes. Parce que moi, je regarde la décision, par exemple, du MIFI du...

M. Cliche-Rivard : ...octobre 2024. Et on voit que le ministère émet des milliers et des milliers de demandes de CAQ par année, beaucoup plus que de nombre de permis d'études qui sont finalement octroyés à la fin du processus. C'est normal. Mais combien? Et combien à quelles institutions? Et là on les a, là, par commissions scolaires, par cégeps, par universités, par niveaux d'études. Donc, on a une partie de la réponse, mais, quand on regarde les chiffres d'IRCC, sur le nombre de permis d'études délivrés, là, j'ai de la misère à dire qu'on puisse travailler sur les mêmes bases puis et sur les mêmes chiffres, puis ça, ça m'inquiète, Mme la Présidente.

Parce que, là, quand on fait le cumul des permis d'études émis au Québec en 2023, c'est 61 191 permis d'études émis. Bon, le Commissaire à la langue française nous en parle aussi, mais, si on fait les maths, là, on nous dit «15 000» dans les cégeps, on nous dit «41 000» dans les universités puis quelques milliers en secondaire, là, les jeunes qui sont avec des parents accompagnants, là. On n'arrive pas. C'est ça, une des questions que j'ai pour vous, M. le ministre, pour bien comprendre la base de nos politiques publiques, puis je pense que vous avez une partie de réponse, puis tant mieux, pour qu'on sache vraiment, là, nos 123 000, où sont-ils.

Puis un des éléments, c'est... vous l'avez vu puis entendu avec moi, M. le ministre, le Commissaire à la langue française, j'en parlais, nous dit : Selon Statistique Canada, en 2019, le quart, 24 % des titulaires d'un permis d'études postsecondaires au Canada n'étaient pas inscrits dans un établissement d'enseignement postsecondaire reconnu, le quart. Dans la moitié des cas, nous ignorons même si les gens étaient présents ou non sur le territoire et à quel titre. Parce qu'il y a un taux important de détenteurs de permis d'études qui, pour des circonstances hors de leur contrôle, ne se présentent pas au Canada. Ça se peut ça aussi. D'où l'importance du nombre d'inscriptions, finalement, matérialisées dans les institutions.

Selon IRCC, au 31 décembre, il y avait 94 795 permis d'études de niveau postsecondaire en vigueur au Québec. Or, durant cette année scolaire, on comptait 71 347 étudiants étrangers dans les collèges, un écart de 25 %. Donc, il y a à peu près 20 000 personnes, 23 000 personnes qu'on ne sait pas sont où, mais, si on base nos politiques publiques, Mme la Présidente, sur des chiffres, comme nous dit le Commissaire à la langue française, qu'on ne sait pas ils sont où, comment est-ce qu'on peut fonder des bonnes politiques publiques? Et c'est vrai que c'est choquant le titre qu'il y a 12 000 CAQ ont été émis pour un seul... une seule institution ou un seul... un seul cégep. Cela dit, dans les faits, c'est 3 000 étudiants inscrits. Est-ce que 3 000, c'est trop? Probablement, probablement pour cette institution précise là, je pense qu'avec ce qui a été allégué autour de ça, probablement, mais, sur la seule base du permis du CAQ, des admissions, on n'est pas capable de faire la démonstration puis le chiffre précis.

Et, moi, ce que je demande à l'équipe gouvernementale, c'est de nous répondre sur ces quatre volets-là : par établissement, par niveau d'enseignement, par institution, pour que moi, là, je sache. Et l'autre élément que j'ai mentionné, c'est qu'il y a l'existence puis la délivrance des permis, puis il y a les permis en vigueur. Évidemment, quand vous appliquez sur un baccalauréat à McGill, vous obtenez un permis de trois ans, le temps de faire votre permis... le temps de faire vos études. Vous ferez peut-être une prolongation. Ça vous appartiendra, mais votre permis sera valide la durée de vos études.

• (18 h 20) •

Donc, c'est sûr qu'aujourd'hui, en 2024, on a des gens qui ont reçu un permis de 2021, qui sont là, qui vont graduer en août ou en hiver 2025, c'est correct, mais ce cumul-là, d'où sont-ils, les universités, là, c'est-tu 60 000 comme nous le dit... ou 40 000 comme nous le dit RCC... IRCC, ou c'est-tu 45 000? De quelle année? C'est la discussion que j'aimerais qu'on ait pour qu'on parte sur des bases solides puis qu'on soit capable de se dire : Aujourd'hui, c'est ça, le portrait de notre immigration temporaire. Sur la base de ces portraits-là, il y aura certainement des correctifs à apporter, j'en suis, puis on les appuiera, ces correctifs-là, mais partons sur les mêmes bases. Puis entendons-nous, au deuxième cycle, à Montréal, à Sherbrooke, il y a x 1 000 étudiants. Entendons-nous...

M. Cliche-Rivard : ...combien de ces étudiants-là émanent finalement du nombre de lettres d'admission? Il y avait combien de lettres d'admission émises pour combien d'étudiants inscrits? Je pense que ça va nous permettre de répondre à beaucoup d'inquiétudes puis à beaucoup d'éléments de la part d'institutions qui se pensent visées puis que je pense, moi, que le ministre n'a pas l'intention de les viser. Il nous le dira. Je pense qu'il a à cœur nos établissements d'enseignement supérieur. Je pense que ce n'est pas ces gens-là qu'il veut attaquer. Mais si on pouvait, d'une façon, mieux encadrer le qui on tend à viser, et qui dépasse les bornes, et qui ne respecte pas le fin fond du mandat d'institution qui est l'enseignement supérieur... Vous l'avez dit, M. le ministre, ce n'est pas une business, ça doit œuvrer à l'éducation supérieure, au développement scientifique, et c'est ça, la mission profonde d'une université, d'un cégep. S'il y en a qui ne font pas ce mandat-là, moi, je vais vous suivre pour les remettre à l'ordre, mais encore faut-il qu'on ait les bonnes données, les bons chiffres, et je pense, à voir vos équipes s'activer, qu'il y a une partie des réponses qu'on va avoir, là, ou une partie des chiffres, mais c'est comme ça qu'on va voir là où il y a des abus dans les dernières années. Merci, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Merci, M. le député. Est-ce que j'ai d'autres interventions? M. le ministre?

M. Roberge : Merci, Mme la Présidente. Je rejoins les préoccupations du collègue. Je pense que c'est une demande qui est légitime d'avoir davantage d'information, de démêler les chiffres entre les CAQ, les admissions, les permis d'études, etc. J'ai des documents ici que je pensais vous partager lors des études pour qu'on avance. Je n'ai pas toutes les réponses que vous demandez, malheureusement, et c'est pour ça qu'il faut adopter le projet de loi, parce que l'article 10, 11 et 12 permettent au gouvernement, au ministre de l'Immigration, mais même au ministre d'Éducation puis au ministre de l'Enseignement supérieur de recueillir ces informations-là. L'article 10, là, on parle de recueillir les renseignements nécessaires pour l'éducation, loisir et sport. L'article 11, on parle justement de recueillir, communiquer aux fins de l'exercice les règlements. Puis 12, bien, on est en enseignement supérieur pour recueillir des renseignements, puis être capable de prendre les meilleures décisions. Des fois, je pense que c'est nécessaire.

Ceci dit, je ne pourrai pas voter en faveur exactement de la motion parce que... je pense, vous demandez quatre éléments. Le premier et le dernier, on ne les a pas avec le détail que vous demandez. Ceci dit, j'ai d'autres informations que vous ne demandez pas, mais qui sont très pertinentes, que je suis prêt à partager avec vous, que ce soit le nombre de CAQ qui ont été donnés au fil des années précisément. Ensuite, il y a le flux et il y a le stock, hein, combien on en fait, combien on en délivre à chaque année puis combien il y en a sur le territoire québécois. Le flux, c'est combien à chaque année, le stock, c'est combien on en a en ce moment. Donc, il y a ces deux informations-là. Il y a le nombre d'étudiants, on l'a à partir de 2018, la plupart du temps, jusqu'à 2023, comme données fiables. Parfois, on a des estimations pour 2024. Puis je pense que ça va aider, pas seulement à vous, mais à tout le monde, de bien comprendre de quoi on parle. Et vous allez retrouver le nombre de 122 000 dans les prévisions de 2024 puis le chiffre pour 2023.

Donc là, il nous reste un petit peu de temps. Je ne sais pas si vous voulez poursuivre là dessus ou suspendre, parce que je ne pourrai pas voter en faveur de ça, je n'ai pas toutes les informations. Il faut adopter le projet de loi, paradoxe, pour répondre exactement à vos demandes. Ceci dit, je m'engage... demain, on se retrouve, puis vous aurez les informations, vous et puis tous les gens qui les veulent, pour qu'on puisse poursuivre nos travaux puis bien comprendre à quoi on réfère.

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Merci, M. le ministre. J'ai d'autres interventions? M. le député de l'Acadie.

M. Morin : Oui. Je comprends qu'il nous reste quelques minutes.

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Six minutes, un peu moins.

M. Morin : Six minutes environ. Très bien. Je vous remercie, Mme la Présidente. Bien, écoutez, merci. Merci, M. le ministre, de votre ouverture. Je vais appuyer la motion du collègue le député de Saint-Henri—Sainte-Anne, parce qu'il me semble pertinent et important qu'on ait au moins la même base pour qu'on puisse se comprendre quand on va étudier, article par article, votre projet de loi. Je vais être très transparent avec vous, je suis un peu étonné que vous n'ayez pas déjà...

M. Morin : ...ces chiffres-là parce qu'il me semble, à moins que je comprenne très mal, mais il me semble que quand on regarde les règlements, notamment en matière d'immigration, sur le programme des étudiants étrangers, et quand on dit «le ministre consent au séjour d'un ressortissant étranger dans le cadre du programme des étudiants étrangers lorsqu'il satisfait aux conditions suivantes», et je suis à l'article 11 du règlement, bien, si vous consentez, et donc que vous allez émettre un certificat, normalement, il devrait y avoir quelqu'un dans votre organisation qui les compte. Tu sais, je ne peux pas croire que vous les émettez et qu'il n'y a pas de dossiers, il n'y a pas de statistiques que vous conservez à cet effet-là. Donc...

Et puis ce que j'aimerais aussi savoir de vous, M. le ministre, parce que vous dites : Il y a des... Il y a des.... Il y a des chiffres que nous avons, mais il y en a que nous n'avons pas. D'où l'importance de la loi et d'adopter le projet de loi. Alors, qu'est-ce que vous avez là-dedans et qu'est-ce que vous n'avez pas? Parce que quand... quand je lis votre projet de loi et que je regarde les articles 10 et 11, ce n'est pas clair, à 10, que ça va vous donner plus de renseignements quant au nombre. À 11 peut-être, parce que vous pourrez éventuellement, par règlement, déterminer les renseignements que les organismes doivent recueillir, mais pas nécessairement vous. Alors, ça m'apparaît vraiment, vraiment nébuleux, tout ça. Et évidemment j'apprécierais que vous puissiez partager avec nous les chiffres que vous avez, les renseignements, le nombre de certificats, parce que ça nous permettrait évidemment de mieux saisir, de mieux comprendre où vous voulez aller avec votre projet, avec votre projet de loi.

Ça serait important aussi de savoir parce que, moi, si je me fie aux chiffres du Bureau de la coopération interuniversitaire, quand on regarde le nombre d'étudiants internationaux par établissement, eux, ils arrivent à 57 450. Donc, vous devriez avoir dans vos chiffres en quelque part, si eux ont ces statistiques-là, le même chiffre. Et ce serait important, je vous dirais, d'avoir aussi des chiffres en ce qui a trait, bien sûr, aux universités que ce soit au premier cycle, au deuxième cycle et au troisième cycle, les cégeps et, évidemment, les collèges d'enseignement privés. Parce que j'imagine que ce que vous voulez faire, éventuellement, M. le ministre, c'est de savoir et de déterminer en bout de piste combien il va y avoir de personnes sur le territoire québécois en termes d'étudiants internationaux.

Je reprends ce que disait le collègue, le député de Saint-Henri Sainte-Anne. C'est sûr que les étudiants internationaux, normalement, à moins qu'ils aient identifié un programme très, très, très ciblé et très spécifique, vont probablement faire des demandes dans plusieurs universités. Évidemment, en bout de piste, ils n'iront qu'à un seul endroit. Est-ce que ça veut dire qu'à chaque fois qu'il y a une demande qui correspond à une maison d'enseignement, vous émettez un certificat d'acceptation au Québec? J'aimerais effectivement le savoir parce que, dans ce cas-là, c'est sûr que vous allez vous retrouver avec un nombre de certificats beaucoup plus élevé que le nombre de personnes qu'il y a sur le territoire. Puis au fond, ce que vous voulez comprendre, voire évaluer, c'est le nombre de personnes que vous allez avoir sur le territoire, pas le nombre de documents que vous émettez. Donc, ça m'apparaît tout à fait important, d'autant plus qu'à chaque fois qu'on parle de chiffres, que ce soit au niveau du fédéral ou au niveau du Québec, on n'arrive jamais aux mêmes chiffres. C'est quand même fascinant pour un même programme, pour une situation qui touche les étudiants étrangers...

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : M. le député de l'Acadie...

M. Morin : ...internationaux. Voilà.

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : ...compte tenu de l'heure, la commission ajourne ses travaux sine die.

(Fin de la séance à 18 h 30)


 
 

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