Journal des débats de la Commission des relations avec les citoyens
Version préliminaire
43e législature, 1re session
(début : 29 novembre 2022)
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Le
mardi 26 septembre 2023
-
Vol. 47 N° 29
Consultation générale et auditions publiques sur le cahier de consultation intitulé : La planification de l'immigration au Québec pour la période 2024-2027
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9 h 30 (version non révisée)
(Neuf heures cinquante-neuf minutes)
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : À l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je
déclare la séance de la Commission des relations avec les citoyens ouverte.
Alors, la commission est réunie afin de
poursuivre les auditions publiques dans le cadre de la consultation générale
sur le cahier de consultation intitulé : La planification de l'immigration
au Québec pour la période...
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : ...2024-2027.
Mme la secrétaire, y a-t-il des
remplacements?
La Secrétaire : Oui, Mme la
Présidente. Mme Garceau (Robert-Baldwin) est remplacée par M. Derraji
(Nelligan); Mme Prass (D'Arcy-McGee) est remplacée par Mme Lakhoyan
Olivier (Chomedey); Mme Massé (Sainte-Marie—Saint-Jacques), par M. Cliche-Rivard
(Saint-Henri—Sainte-Anne).
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup. Alors, mesdames les élues, bienvenue! Ce
matin, nous allons entendre les groupes suivants : le Québec c'est nous
aussi, que je constate... dont je constate la présence devant moi, École Québec
et le Centre multiethnique de Québec. Je souhaite donc rappeler au public qu'il
est toujours possible de commenter ce mandat et de... et que la consultation en
ligne sur le cahier de consultation se terminera le 28 septembre, qui est dans
deux jours. Si ce n'est déjà fait, je vous invite à vous rendre sur notre site
Web afin de remplir le questionnaire à l'adresse assnat.qc.ca/immigration.
Je souhaite donc la bienvenue à nos gens
ce matin et qui proviennent de Québec c'est à nous. Madame, messieurs, je vais
vous demander, dans un premier temps, de vous présenter. Vous allez bénéficier
d'une période de 10 minutes pour votre exposé, vos commentaires, vos
recommandations. Ensuite, nous allons échanger avec des parlementaires. Alors,
le temps est à vous.
Mme Launay (Claire) : Merci,
Mme la Présidente. Merci à tous les membres de la commission de nous recevoir
aujourd'hui. Mon nom est Claire Launay. Je suis la présidente de l'organisme le
Québec c'est nous aussi. Donc, je suis Française d'origine. Je suis arrivée au
Québec en 2011. J'ai fait mes études au Québec. Je suis passée par le PEQ
diplômé pour obtenir la résidence permanente en 2018. Et aujourd'hui je suis
citoyenne canadienne. Je suis accompagnée de...
M. Fotso (Hippolyte Mbogne) : Bonjour
et merci. Je suis Hippolyte Mbogne Fotso. Je suis d'origine camerounaise. Je
suis membre du pôle Recherche du Québec c'est nous aussi, rescapé du PEQ 2019,
avant la réforme. Et aujourd'hui je suis résident permanent au Québec et je
suis enseignant.
Mme Launay (Claire) : Donc,
un petit mot sur notre organisation avant de commencer. Le Québec c'est nous
aussi, c'est un organisme à but non lucratif, qui a été fondé en 2020, pour la
défense des droits et des conditions de vie des personnes immigrantes au
Québec. Ça a vraiment été créé dans la foulée de la réforme du PEQ de mars
2020. L'idée était vraiment de porter la voix des personnes immigrantes dans la
place publique, parce qu'on s'est souvent rendu compte qu'on parlait de nous,
mais sans nous. Donc, nous, on voulait vraiment prendre cet espace-là pour
s'assurer que nous étions... entendus dans la prise de décision sur des mesures
qui nous concernent directement. Au fil du temps, nous avons élargi l'étendue
de nos luttes pour représenter vraiment l'ensemble des personnes immigrantes au
Québec. Donc, ça comprend à la fois les travailleurs qualifiés du Québec, les
personnes réfugiées, les personnes qui vivent la réunification familiale ou
encore les personnes sans statut.
Donc, on est très heureux d'être là
aujourd'hui. Ça fait depuis trois ans qu'on demande une discussion profonde sur
le système d'immigration au Québec, au-delà des grands titres des journaux,
toujours sur les seuils. Donc, aujourd'hui, on va vous parler de quelques
recommandations. Notre mémoire en contenait 21, donc on pourra répondre à
toutes les questions que vous aurez sur celles-ci. Pour la présentation, je
vais me focaliser sur quatre ou cinq d'entre elles.
Dans un premier temps, dans le contexte de
la planification de l'immigration au Québec, on parle toujours, uniquement, de
l'immigration permanente dans les seuils... vraiment, les admissions de
résidence permanente. Pourtant, depuis quelques années, on a remarqué un basculement
dans les populations immigrantes au Québec et dans le reste du Canada aussi,
d'ailleurs, avec une augmentation très importante de l'immigration temporaire.
Donc, pour nous, pour vraiment planifier une immigration dans son ensemble et
qui représente un portrait fidèle de la situation, ça prend une planification
de l'immigration temporaire aussi, le but étant de pouvoir prévoir quel genre
de service ces personnes-là... de quel genre de service ces personnes-là vont
avoir besoin en termes de logement, de francisation, de santé, d'éducation,
mais aussi d'éviter l'établissement d'une société un peu parallèle, en fait,
d'immigration temporaire. On a vu qu'en 2023 il y avait plus de 350 000
immigrants temporaires qui vivaient au Québec.
Là, il y a quelques semaines, les Nations
unies ont sorti un rapport qui montrait qu'il y avait des formes d'esclavagisme
moderne dans le programme des travailleurs étrangers temporaires, pas seulement
au Québec, mais ça comprenait le Québec aussi. Donc, nous, on, on sonne l'alarme
sur, vraiment, le besoin de planifier correctement cette immigration. Notre
but, ce n'est pas forcément de la réduire, mais c'est juste de la prévoir
correctement pour que ces personnes-là aient des conditions de vie dignes.
Ensuite, on voudrait vous parler de
solidarité internationale. C'est un pan du cahier consultation qu'on a trouvé
qui était peu abordé...
10 h (version non révisée)
Mme Launay (Claire) : ...Mme
la ministre, vous parlez d'immigration comme un y avec deux branches, l'une
étant la main-d'oeuvre et l'économie et l'autre la langue française et la
francisation, deux branches avec lesquelles, somme toute, nous sommes assez d'accord,
mais nous pensons qu'il manque une branche vraiment importante sur la
solidarité internationale.
On sait qu'il y a une volonté du peuple
québécois de faire sa part. On l'a vu au moment de la guerre en Ukraine que de
nombreuses personnes se sont mobilisées. Le Québec a été capable d'accueillir
un grand nombre d'immigrants ukrainiens dans l'urgence. Donc, on sait que le
Québec peut continuer à faire sa part. Et de ce point de vue là, une de nos
recommandations, en fait, vient comme un peu retourner une des orientations du
gouvernement puisque dans le cas de consultation, il était question d'augmenter
la part de la sélection, la part des personnes sélectionnées par le Québec dans
les seuils du Québec. Mais en fait, ce que ça revient à faire, ça veut dire
diminuer la part des personnes non sélectionnées, c'est-à-dire les réfugiés
reconnus sur place et les personnes de la réunification familiale.
Nous, on recommande vraiment de ne pas
baisser la part de ces... de ces catégories d'immigration, particulièrement
dans un contexte où les inventaires sont extrêmement élevés pour ces catégories
d'immigration. Donc, les délais d'attente sont déjà de 2 à 3 ans pour la
réunification familiale et de plusieurs années, de plus de 10 ans, par
exemple, pour les réfugiés. On pense que c'est des situations qui... qui n'ont
pas lieu d'être au Québec, particulièrement dans la mesure où il n'y a pas
vraiment de critères de sélection du Québec. Donc, la seule raison pour
laquelle ces personnes-là n'obtiennent pas la résidence permanente, c'est parce
qu'il y a des seuils, justement, des limites d'admission par an pour ces
catégories. Donc, on met en alerte, disons, le gouvernement sur la possibilité
de réduire davantage la part de cette immigration-là dans l'immigration au total.
Par ailleurs, on voudrait attirer votre
attention sur un autre élément duquel consultation on n'a pas... on n'a pas vu
malheureusement, c'est toute la question de la régularisation des personnes
sans statut. Donc, on sait qu'un programme de régularisation est en élaboration
au gouvernement fédéral en ce moment et depuis plusieurs mois maintenant. Nous,
déjà, on voudrait s'assurer que le Québec... que les personnes qui sont dans
cette situation-là et qui habitent au Québec vont pouvoir être éligibles à ce
programme et, de ce fait, que ce soit prévu dans la planification de l'immigration.
Pour l'instant, il n'y a aucune ligne qui est prévue pour ce programme-là.
Donc, si le gouvernement fédéral va de l'avant avec cette proposition, on a
peur que ce soit compliqué pour le Québec d'embarquer parce que ça n'a pas été
prévu.
Donc, de façon générale, on encourage
vraiment à penser l'immigration de façon... de façon large, de penser à toutes
les catégories pour ne rien oublier et prévoir de façon plus exacte l'immigration
des trois prochaines années.
Un bon point, entre guillemets, vraiment
un point positif qu'on a vu du Québec ces derniers mois et qui était dans le
cahier de consultation, c'était la volonté du Québec, du gouvernement, de
défendre les personnes qu'il sélectionne, notamment dans le cas des étudiants
africains. On a vu qu'il y a des taux de refus de visas qui sont très
importants au niveau d'Ottawa. Sachez que notre organisation a témoigné à la
Chambre des communes à ce sujet-là.
Donc, c'est un sujet qui nous tient
beaucoup à cœur aussi. On salue le gouvernement pour les gestes qu'il pose à
cet égard. On pense qu'on peut aller encore, peut-être, un petit peu plus loin
et que le gouvernement du Québec pourrait demander à Ottawa de retirer le
critère de la double intention comme motif de refus dans l'octroi des visas. On
pense que le Québec a vraiment un leadership à jouer à cet endroit-là et de
façon générale de montrer aux immigrants qu'il sélectionne, qu'il a à cœur qu'ils
arrivent au Québec et qu'ils s'établissent de façon digne et dans des
conditions correctes.
De la même manière, nous, on propose la
création d'un guichet unique. Là, c'est une idée un peu ambitieuse, mais on
pense que vraiment le système d'immigration, nous, on en parle, on l'a vécu, c'est
un labyrinthe à naviguer, les deux paliers de gouvernement avec les différents
enjeux, les lois qui changent, les critères qui changent, des crises arrivent,
qui font bouger les inventaires d'un côté ou d'un autre à Ottawa. Si le Québec
a réellement à cœur de faire venir ce monde-là et de les laisser s'établir dans
le cas des demandes de résidence permanente, je pense qu'il y aura vraiment un
intérêt à ce que le gouvernement mette en place, en collaboration avec le
gouvernement fédéral, un système unique de demande de résidence temporaire et
permanente pour faciliter vraiment la tâche des immigrants et que même les
immigrants se sentent appuyés par le gouvernement du Québec dans tout ce
processus-là.
• (10 h 10) •
Enfin, une de nos recommandations, mais
vraiment quand il est question des seuils, c'est vraiment de se baser sur le
solde migratoire qu'on prévoit dans les prochaines années. On a vu que, vous l'avez
peut-être vu dans notre mémoire, le solde migratoire ces dernières années a
vraiment augmenté de façon importante, bien au-delà des admissions de résidence
permanente. D'après nous, la métrique des admissions n'est plus une métrique...
Mme Launay (Claire) : ...en
fait, ce n'est plus... la plus pertinente pour, vraiment, faire une
planification de l'immigration. D'après nous, les admissions, donc les seuils,
devraient être proportionnelles, d'une certaine manière, avec le solde
migratoire pour qu'on se retrouve avec une immigration qui est, principalement,
permanente et ensuite temporaire, et non l'inverse.
Pour terminer, on salue vraiment
l'ouverture du gouvernement qu'on a vue dans les deux dernières semaines au
cours des consultations. On a déjà collaboré avec le ministère par le passé.
C'est vraiment, en tant que collaborateurs, qu'on vient aujourd'hui. On vient
avec notre vécu, mais aussi avec notre expertise de personnes immigrantes qui
ont vécu le système. Donc, on répondra avec... à vos questions avec plaisir.
Merci.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup pour cette présentation. Alors, nous allons
débuter l'échange avec les parlementaires. Je vais commencer avec l'aile
gouvernementale pour une période de 16 minutes 30 secondes. Le micro est à
vous.
Mme Fréchette : Merci
beaucoup, Mme la Présidente. Alors, bon début de dernière semaine de commission
à tous. Merci, merci d'être là. C'est très apprécié. Merci de partager à la
fois votre expérience, votre vision, votre expertise, parce que, manifestement,
vous êtes engagés à plein dans cette volonté de porter des demandes en lien
avec l'immigration. Donc, merci d'avoir pris part à cet exercice.
Alors, j'aurais quelques commentaires
avant de lancer quelques questions, d'une part, pour rebondir sur une des
choses que vous avez abordées, c'est le critère de la double intention qui pose
un enjeu. Effectivement, c'est notre lecture également que ce critère de la
double intention génère, en fait, un haut taux de refus, particulièrement pour
les étudiants africains francophones, ce qui a un impact considérable sur nos
établissements d'enseignement, particulièrement en région, parce que plusieurs
reposent sur l'arrivée de ces étudiants étrangers pour le maintien d'un certain
nombre de programmes.
Alors, au cours de mes réunions de
travail, au cours des derniers mois, avec mon homologue au fédéral, bien, on a,
effectivement, demandé le retrait de ce critère de la double intention. Ça nous
apparaît être une mesure qui n'est pas aidante parce que ça met les personnes
immigrantes dans une situation un peu de dilemme. Alors, voilà, on va voir de
quelle manière le fédéral réagit. Mais cette demande-là, donc, elle a été
portée à l'attention du gouvernement canadien.
Par rapport à votre recommandation 10,
c'est à la page 11 de votre mémoire, bon, vous suggérez d'exempter de tests de
français les personnes diplômées des programmes francophones ou ayant validé
des études secondaires ou postsecondaires en français. Alors, bien, simplement,
pour souligner qu'en réalité, là, les étudiants diplômés des programmes
francophones au Québec ou en mesure de nous montrer qu'ils ont suivi trois
années d'études en français à l'étranger n'auront pas à passer à travers un
test de français. Sauf si un doute est semé au sein du ministère par rapport à
un dossier, une personne en particulier, là, on se réserve la possibilité de
faire faire un examen de français. Mais ce ne sera pas d'office une étape à
traverser, parce que, pour nous, bien, vous comprendrez que, c'est ça, là, le
fait d'avoir eu un diplôme en français est suffisant. Mais ça se pourrait que
certains dossiers génèrent quand même une volonté d'aller creuser un peu plus
davantage le dossier.
Autre commentaire. À la page six, vous
indiquez que le gouvernement du Québec devrait davantage porter son attention sur
la connaissance du français dans l'immigration temporaire puisqu'elle est
faible et que cette immigration est en hausse. Bon, à ce sujet-là, j'aimerais
de ne pas rappeler qu'il y a presque 60 % des immigrants temporaires qui
connaissent le français. Donc, c'est juste pour dire qu'on n'est pas à la case
départ, on n'est pas à un niveau près du zéro, au contraire, il y a une
majorité des immigrants temporaires qui parlent français. Donc, bonne nouvelle.
Et par ailleurs on a été le gouvernement qui a rendu accessibles les mesures de
francisation aux immigrants temporaires. Ça, c'est un pas important.
Alors j'en entends qui se préoccupent, là,
de la situation pour les travailleurs temporaires. Eh bien, nous, on a pris
action en rendant, donc, accessibles ces cours de francisation. Avec
Francisation Québec, c'est également confirmé. Et pratiquement la moitié de nos
apprenants sont des immigrants temporaires, donc les gens répondent à l'appel,
même s'il y a une majorité de gens qui, déjà, parlent français, donc une
excellente nouvelle. Et non seulement on a rendu les cours accessibles, mais en
plus on a offert des allocations à une bonne part d'entre eux, des allocations
financières pour faire en sorte que les cours de français ne soient pas en
compétition avec l'emploi, avec le revenu de travail. Donc, il y a des
allocations financières qui sont disponibles pour ces personnes. Alors, on est
très contents de la réponse...
Mme Fréchette : ...les
personnes immigrantes temporaires ont eu face à notre appel parce que c'est
pratiquement un appel qu'on a lancé avec nos réformes en mai dernier pour
l'immigration économique. Donc, les gens sont au rendez-vous. On va s'assurer
donc de mettre les bouchées doubles pour répondre à cette demande en termes de
francisation, mais je vous dirais qu'on est le gouvernement qui a pris action
en lien avec cette nécessité de faire en sorte de transmettre la connaissance
du français chez les immigrants temporaires.
Ensuite, à la page 12, là, je vais y
aller avec une question. Donc, bien vous... En fait, à la page 12, vous
soulevez un enjeu, là, de passage du statut de temporaire au permanent pour
certaines catégories de travailleurs étrangers temporaires. Et vous proposez en
fait l'ajout de professions, de compétences intermédiaires de niveau faire 4 au
Programme d'expérience québécoise. Mais comme vous savez, on a annoncé en mai
dernier, là, une réforme du programme PRTQ. On va le transformer en Programme
de sélection des travailleurs qualifiés. Et dans cette réforme, il y a le
développement, la création d'une passerelle pour des travailleurs étrangers
temporaires, ce qui est difficile d'accès, là, pour l'instant dans le système
actuel d'accéder à la résidence permanente quand on est travailleur étranger
temporaire avec des compétences manuelles ou intermédiaires. Donc, on a
développé ce volet 2 spécifiquement pour ce type de travailleur.
Donc, j'aimerais savoir si, pour vous, la
création de ce volet 2 au sein du Programme de sélection des travailleurs
qualifiés, si ça répond à une partie des demandes que vous portez pour rendre
plus accessible le statut permanent des travailleurs temporaires. Et puis
est-ce qu'il y a des éléments dans le fond qui seraient à considérer pour
bonifier ce programme pour les travailleurs temporaires?
Mme Launay (Claire) : Je
veux juste revenir sur quelques-uns de vos points, notamment sur la
connaissance du français pour les immigrants temporaires, juste pour clarifier
que, nous, notre demande, ce n'est pas que l'immigration temporaire devrait
systématiquement parler français en arrivant au Québec. On soulignait plutôt le
fait que l'immigration permanente est de plus en plus francophone. On va déjà
dans le bon sens. L'Immigration temporaire, elle, a augmenté, notamment parce
que le gouvernement a mis en place des mesures pour l'augmenter. Donc, c'était
plus de rétablir une espèce d'équilibre et de rappeler qu'on ne peut pas à la
fois augmenter l'immigration temporaire de façon importante et ensuite la
blâmer pour peut-être un supposé déclin du français. Donc on voulait juste
remettre un petit peu de nuance à cet endroit-là.
On souligne d'ailleurs les efforts qui ont
été faits par rapport à Francisation Québec. C'est quelque chose qu'on... un
projet qu'on accueille de façon tout à fait positive. Justement, comme vous
disiez, la demande a été importante, ce qui prouve qu'il y a une grande volonté
des immigrants, autant temporaires que permanents, d'apprendre le français.
Nous, on n'est pas très surpris, on le savait, mais on pense qu'on va dans la
bonne direction avec ça.
Pour ce qui est du PEQ, donc, nous, c'est
ça, on recommandait l'inclusion des catégories faire 4 dans le PEQ travailleur.
En fait, pour nous, le programme du PSTQ et le PEQ, c'est des programmes qui
ont des visées différentes et qui sont complémentaires. Donc, disons, le
problème que, nous, on voit avec l'exclusion des faire 4 dans le PEC,
c'est que le PEC permet une espèce de garantie, en fait. On sait que, si on
remplit les critères du PEQ, on aura accès à la résidence permanente. Puis ça,
pour une personne immigrante qui a déjà... comme s'est complètement déraciné et
qui est arrivé au Québec, de savoir qu'il y a un programme qui... qui lui
garantit une stabilité et une sortie des permis de travail fermés notamment,
c'est quelque chose qui est très rassurant et qui motive à mon avis les
personnes immigrantes à vouloir s'intégrer au Québec et à vouloir y rester.
Dans le cas du PSTQ, oui, ces gens-là sont
inclus, mais ces personnes là se retrouvent comme dans un bassin. Donc, deux
sélections. Peut-être qu'ils vont être sélectionnés, peut-être pas. Donc, et
après donc... Ou alors, le temps qu'elles soient sélectionnées, ces
personnes-là doivent rester sur des permis de travail fermés. Pour nous, ce
n'est pas des situations qui sont idéales, particulièrement dans un contexte où
on a une pénurie de main-d'oeuvre, il y a des besoins en région, il y a
beaucoup de personnes qui ont... de profession faire 4 qui se trouvent en
région. On trouve qu'il y a une opportunité manquée à cet endroit-là. De ne pas
les inclure dans le PEQ pour un... En fait, pour nous, on le voit comme un
incitatif de régionalisation aussi. On le voit, que les personnes vont avoir
envie de s'établir en région dans ces emplois-là s'il y a une garantie de
stabilité en termes d'accès à la résidence permanente, ce que le PSTQ ne permet
pas complètement.
Mme Fréchette : Je vois.
Bien, merci. Merci pour ces précisions. Je vous amène sur un autre sujet. Mme
la Présidente, il me reste combien de temps?
• (10 h 20) •
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : 7 min 44 s.
Mme Fréchette : Oh! Là,
là. Je vais... O.K. Vous recommandez de travailler avec les ordres
professionnels pour s'assurer que le Québec reste compétitif. Bon, le
ministère...
Mme Fréchette : ...en fait,
on a déjà priorisé, là, un certain nombre de professions de l'opération
main-d'œuvre, par exemple en génie, en technologies de l'information, en santé
pour améliorer la reconnaissance des qualifications professionnelles. On a
d'ailleurs un plan aussi qui a été adopté, un plan sur deux ans qui inclut des
aides financières spéciales pour les moments de formation prescrite par des
organismes de régulation. On a bonifié aussi Accompagnement Québec. Alors, je
voulais savoir en fait, de votre côté, qu'est-ce que vous verriez. Est-ce que
vous verriez d'autres professions ou secteurs qui devraient être visés le plus
tôt possible par le ministère lorsque la reconnaissance des compétences est
prescrite et incontournable?
Mme Launay (Claire) : En
fait, nous, ce qu'on ce qu'on voit, donc on a 54, c'est ça, professions
réglementées. Ce qu'on voudrait, ce serait vraiment un cadre un peu qui est
valable pour tous. On sait, bien sûr, chaque profession va avoir ses
spécificités. Mais l'idée étant d'avoir un cadre auquel les ordres doivent se
plier, en tout cas pour les personnes immigrantes, pour faciliter la
compréhension de tout le système. Pour les personnes immigrantes, pour les
ordres, on voit qu'il y a des incompréhensions, toujours du côté des employeurs
de différents... de différents côtés. Donc, c'est vraiment... c'est une
simplification qu'on propose. Tant mieux si on a déjà des programmes qui vont
dans cette direction-là. On pense qu'on peut toujours en faire plus, je pense
notamment au milieu de la santé, ça reste toujours un enjeu de faire
reconnaître les acquis des médecins, des psychiatres formés à l'étranger.
Est-ce que tu as d'autres choses à ajouter, Hippolyte?
M. Fotso (Hippolyte Mbogne) : Oui.
Je voudrais... Merci, Claire, merci de me passer la parole. Je voudrais
compléter qu'il s'agit là du volet intégration du ministère de l'Immigration,
du volet intégration parce que lorsqu'on arrive ici... lorsque des immigrants
arrivent ici avec un certain bagage, avec certaines compétences parfois... et
comme Claire l'a dit, nous avons 54 professions réglementées au Québec,
46 ordres professionnels, donc nous pensons qu'il est important qu'il y
ait un cadre universel de reconnaissance des acquis. Nous nous rendons compte
qu'actuellement le gouvernement fait beaucoup dans des domaines qui n'ont pas
eu de réforme depuis un certain temps : la santé, l'éducation, la
construction. Et nous pensons que lorsque l'on... lorsque l'on pense, lorsque
l'on conçoit ces réformes-là, il faut intégrer également un élément de
reconnaissance des acquis pour les travailleurs immigrants qui arrivent, de
sorte que le parcours ne soit plus très complexe comme ça l'est aujourd'hui.
Nous sommes là dans le volet intégration. C'est important qu'il y ait un cadre
qui corresponde à toutes les professions réglementées et à tout le reste. Donc,
c'est ce que je voudrais ajouter?
Mme Fréchette : D'accord,
merci. Mme la Présidente de céder la parole à des collègues.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup, Mme la ministre. Alors, je me tourne du
côté de la députée de Vimont. Il vous reste 4 min 32 s
Mme Schmaltz : Parfait.
Merci, Mme la Présidente. Merci à vous trois de vous être déplacés. Toujours
agréable d'accueillir les gens en présentiel. J'aimerais vous ramener à la
page 7 de votre mémoire où vous appuyez notamment la mise en place de
Francisation Québec, tout en faisant valoir les difficultés rencontrées donc
par les personnes immigrantes qui souhaitent participer donc aux cours... aux
cours de français.
Au-delà de l'aspect financier, qu'est-ce
que vous pourriez nous suggérer pour justement améliorer notre offre de
services?
M. Fotso (Hippolyte Mbogne) : Merci.
Le Québec, c'est nous aussi appuie déjà, premièrement, l'initiative de
Francisation de Québec. Cela a été dit par notre présidente Claire. Mais nous
pensons que oui, vous ne souhaitez pas que l'on revienne sur l'aspect
financier, mais nous recommandons une augmentation, tout simplement parce que
les familles immigrantes ont des besoins qui correspondent également... qui
sont également frappés par l'inflation, qui sont frappées par les prix des
services de garde, etc. donc, nous pensons que revaloriser l'aide financière va
placer la francisation en tête de liste des priorités de ces familles-là, par
rapport, par exemple, à la recherche d'heures supplémentaires, etc. Nous
pensons également que le site Internet de Francisation Québec, je ne sais pas.
Nous avons pour le site Internet, le français et l'anglais, mais peut être que pour
ces personnes qui arrivent, qui souhaitent apprendre le français mais qui n'ont
pas encore la connaissance de la langue immédiatement peut-être pour ces
personnes-là, il est préférable de voir d'autres langues. C'est possible sur le
site de Francisation Québec. Je pense aussi que beaucoup de personnes...
beaucoup de personnes immigrantes qui arrivent n'ont pas les compétences
technologiques nécessaires pour procéder à une inscription sur Francisation au
Québec, surtout qu'actuellement, dans les centres de services, il n'y a plus...
M. Fotso (Hippolyte Mbogne) : ...d'inscription
en présentiel, d'inscription physique.
Mme Schmaltz : ...site
Internet, Mme la ministre, elle pourra me corriger, mais on a quand même des
petites capsules qui sont faites en d'autres langues...
Une voix : ...
Mme Schmaltz : ...c'est ça,
l'espagnol, justement, pour aider les gens à se diriger, là, plus facilement.
Donc, ce n'est pas uniquement français, on a quand même, justement, réfléchi
pour accompagner les gens, là, qui ne parlaient pas le français. Donc, je ne
sais pas si vous le saviez, là, mais... C'est ça, c'est juste une petite
parenthèse là-dessus.
M. Fotso (Hippolyte Mbogne) : ...mais
je voudrais ajouter que, comme je le disais, beaucoup n'ont pas les compétences
technologiques pour procéder à une inscription sur Internet. Nous avons affaire
à des personnes qui, parfois, ont de la peine à rédiger un simple courriel,
donc.
Mme Schmaltz : ...comme
solution, justement, pour ces gens?
M. Fotso (Hippolyte Mbogne) : Je
pense que, pour un temps, il aurait été peut-être plus efficace de conserver la
possibilité des inscriptions dans les centres de services scolaires, dans les
centres de cours, dans les centres communautaires, de sorte que... Parce que,
lorsque la personne arrive dans un centre communautaire ou dans un centre de
services, elle a la possibilité d'exprimer ses difficultés à quelqu'un d'autre,
elle a la possibilité de réagir à chaque fois, de rebondir, et je pense que,
une inscription, on aurait pu laisser encore pendant une période, une période
transitoire avec des inscriptions dans les centres de services.
Mme Schmaltz : D'accord.
Si...
Mme Launay (Claire) : ...me
permettre d'ajouter un point aussi.
Mme Schmaltz : Oui, oui,
allez-y.
Mme Launay (Claire) : Pour
nous, la francisation, ça s'inscrit dans un projet d'intégration qui est
beaucoup plus large, on pense notamment aux personnes en région. Il y a des
personnes dont les permis de conduire ne sont pas reconnus, par exemple, au
Québec, donc, juste pour se rendre au cours de francisation, il y a des enjeux.
Pour nous, en fait, pour faciliter l'intégration, et donc la francisation des
personnes immigrantes, ça prend des mesures structurantes en termes de
garderies, d'éducation, de santé, de transports en commun, de logement. Parce
qu'une personne qui va devoir payer le loyer, qui veut faire de la francisation
à temps plein, qui a des enfants à nourrir ou à garder, ça marche... pour
l'instant, le système n'est pas vraiment fait pour que ça fonctionne. Puis
c'est bien au-delà de ce que le ministère de l'Immigration peut faire, là, je
l'entends, c'est une collaboration interministérielle qui est nécessaire. Mais
on encourage le gouvernement, justement, à aller dans cette direction, regarder
l'enjeu de façon plus holistique.
Mme Schmaltz : Avec le
ministère de la Famille, notamment, là, il y a des projets pilotes, justement,
pour intégrer les haltes-garderies pour les personnes, là, qui désirent se franciser.
Donc, il y a quand même des pas en avant qui se font pour répondre, justement,
à ce que vous mentionnez.
M. Fotso (Hippolyte Mbogne) : Et
puis, tout en encourageant la francisation en entreprise... Ah! c'est terminé?
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : ...le temps est terminé pour cette portion de discussion.
Merci beaucoup, mesdames. Je me tourne du côté de l'opposition officielle pour
une période de 12 minutes 23 secondes. Le député de Nelligan va
prendre la parole.
M. Derraji : Merci, Mme la
Présidente. Bon début de semaine à tous les collègues, une troisième semaine de
consultations. Je vais prendre quelques secondes pour vous remercier. Ce n'est
pas la première fois qu'on voit l'organisme. Je vous salue, vous faites un
excellent travail de terrain. Je me rappelle, à l'époque, du PEQ et la
naissance d'un mouvement, et je suis très content de recevoir, au Parlement du
Québec, un rescapé du PEQ qui contribue, avec son expertise, avec des collègues
à lui, à enrichir le débat sur l'immigration. Vous êtes l'exemple parfait d'une
intégration réussie. Venir en commission parlementaire, participer au débat,
c'est noble. Bravo! Merci.
Je vais aller... il y a tellement de
choses dans votre mémoire, je vais commencer par la réunification familiale. On
sait comment ça marche à Ottawa, une fois on arrive au seuil que le Québec
veut, on arrête. Pour les gens qui nous suivent, parfois, on oublie que,
derrière, il y a des familles déchirées, il y a des conjoints et des conjointes
séparés et, parfois, des histoires d'horreur. Si vous voulez résumer un peu le
côté humain. Derrière les chiffres... on les connaît, on sait que... on sait le
nombre, mais je ne veux pas parler de nombre, je veux parler de cas de vies
humaines aujourd'hui. Pouvez-vous nous éclairer?
Mme Launay (Claire) : Merci
pour votre question. Mais, pour les histoires humaines, il n'y en a pas
beaucoup qui sont heureuses en termes de réunification familiale ces derniers
temps. Nous, en fait, notre mouvement se fait contacter régulièrement par des
personnes, justement, qui souhaitent se mobiliser, qui souhaitent que leurs
enjeux soient entendus. Donc, on s'est fait contacter, dans les derniers mois,
justement, par plusieurs personnes qui étaient dans des situations de réunification
familiale et qui vivaient des situations vraiment difficiles, notamment, donc,
à essayer de parrainer leur conjoint ou leur conjointe. On a entendu, la
semaine dernière, il me semble, à l'Assemblée nationale, là, une de ces
personnes-là qui a été forcée d'avorter parce qu'elle ne savait pas quand
est-ce que son mari pourrait effectivement se rendre au Québec. Et donc elle
était terrifiée à l'idée de donner naissance seule au Québec et de possiblement
commencer à élever son enfant seul. On a des histoires aussi... Tous ces
groupes-là se sont beaucoup mobilisés, c'est beaucoup de femmes...
Mme Launay (Claire) : ...Je
tiens à le préciser, et elle note vraiment l'impact sur la santé mentale que
cette attente a sur elle. Donc, vraiment des gens qui perdent leurs cheveux,
qui perdent le sommeil, parce qu'elles ne savent pas quand est-ce qu'elles vont
pouvoir retrouver leur famille.
• (10 h 30) •
Je sais que vous voulez des histoires
humaines, mais j'en profite pour quand même vous préciser notre recommandation
à cet égard. Les seuils du Québec en réunification familiale sont autour de
10 000, alors qu'on a plus de 30 000 dossiers encore dans l'inventaire. Il y a
des...
M. Derraji : Prenez le temps.
Moi, j'ai... si c'est aujourd'hui, on règle juste cette histoire, je vais être
très heureux. Moi, j'ai tout mon temps pour vous, là.
Mme Launay (Claire) : Bien,
nous aussi, on serait heureux.
M. Derraji : Prenez le temps.
Prenez le temps parce que vous êtes en train de dire des choses extrêmement
importantes.
L'inventaire est de combien, s'il vous
plaît?
Mme Launay (Claire) : Alors,
donnez-moi une seconde, je les ai notés. L'inventaire en réunification
familiale, nous, le dernier chiffre qu'on a, c'était 36 800, alors qu'on a
un seuil de 10 600.
M. Derraji : Excellent. Une
étape à la fois. On a deux scénarios. On a deux scénarios aujourd'hui sur la
table, je ne vais pas parler des immigrants temporaires, on va s'éparpiller,
50 000 ou 60 000. Rien que pour la réunification familiale, c'est le
double, c'est le double, si on veut respecter les seuils de cette année.
Techniquement, aujourd'hui, quelqu'un qui fait une demande de parrainage, femme
ou homme, conjoint ou conjointe, si on suit la logique, doit attendre jusqu'à
trois ans. Ça veut dire que tout est prêt, la personne ne verra pas son
conjoint, ni dans la prochaine année, ni la deuxième année, ni la troisième
année. Est-ce que j'ai bien compris?
Mme Launay (Claire) : Oui,
c'est ça. Donc, c'est de 2 à 3 ans, comparé au reste du Canada, où
vraiment l'attente est d'un an. En fait, la seule raison pour lesquelles...
pour laquelle l'attente est plus longue au Québec, c'est vraiment les seuils
que se fixe le Québec. Je reviens un petit peu sur mon point que j'ai mentionné
dans mon propos préliminaire, mais c'est une sélection sur laquelle le Québec
n'a pas vraiment de critères. Donc, ce n'est pas comme si c'était le... ces
personnes-là ne rencontrent pas des critères, donc c'est pour ça qu'elles ne
veulent pas rentrer au Québec, c'est juste qu'elles ne rentrent pas dans le
chiffre de cette année-là.
Donc là, on parle vraiment, d'après nous,
d'une vision de l'immigration qui sort complètement l'humain du système. Nous,
on veut rappeler que ce sont... c'est ça, c'est des familles, c'est des
enfants, des conjoints, des parents, parfois. En plus, quand il s'agit de
personnes qui ont besoin de visas pour venir au Canada, on a d'autres enjeux
qui viennent s'ajouter à cela à Ottawa, ce qui rend extrêmement difficile, pour
ces personnes-là, de juste se voir et encore plus de construire une famille ou
un projet de vie. On a entendu qu'il y avait des personnes québécoises qui
envisageaient de quitter le Québec pour avoir une chance d'être avec leur
conjoint. Là, on marche sur la tête dans ce sens-là.
M. Derraji : Et quand on
parle de régionalisation et on parle d'ancrage dans les régions, la plus belle
chose, c'est permettre à la personne d'avoir un membre de sa famille, peu
importe, conjoint ou conjointe, avec elle ou lui dans une région.
Et c'est de là votre recommandation. Ce
que vous proposez aujourd'hui au gouvernement, «que le gouvernement du Québec
demande à Ottawa de traiter de manière exceptionnelle», moi, je dirais que
l'inventaire doit être à zéro. C'est inacceptable, laisser des personnes
séparées. C'est inacceptable qu'à l'extérieur du Québec les gens peuvent se
réunir très rapidement et, au Québec, ça prend tant de temps. Première
remarque.
Deuxième. Vous demandez aux gens
aujourd'hui de manière très claire que la réunification familiale, on l'enlève
des seuils. Ça veut dire 50 000, 60 000, faites ce que vous voulez
avec, mais ne mettez pas dedans la réunification familiale. Est-ce que j'ai
bien compris?
Mme Launay (Claire) : Oui,
c'est exactement ça. En fait, à court terme, on demande à ce que vraiment
l'inventaire au complet soit traité, parce que, 2 à 3 ans d'attente, on
juge que ce n'est pas acceptable en ce moment pour les familles québécoises.
Et, à moyen terme, en fait, comme on l'a
vu, le gouvernement propose des façons de faire différentes, là, puis on est
ouverts à ça. Notamment, dans l'établissement des seuils, on voit que le PEQ
diplômé, les personnes qui passent par ce volet-là ne seraient pas incluses
dans les seuils. On pense que c'est la bonne voie à suivre pour les personnes
de la réunification familiale, que ce soient des admissions en continu en
dehors des seuils.
M. Derraji : Oui. Je vous
remercie pour ce volet, parce que mon bureau de comté est... reçoit beaucoup de
messages, des cas que c'est inacceptable, je vous le dis. Si, autour de la
table, il y a une réelle volonté pour la régionalisation et pour garder nos
personnes dans les régions, ça commence par une réunification familiale. Je ne
veux pas que les gens quittent le Québec pour aller dans une autre province
canadienne pour rencontrer leur âme sœur. Le Québec, et, je pense, même le
gouvernement n'a rien à faire dans les relations entre les personnes. La
personne a fait son choix d'avoir son conjoint à l'extérieur, on doit tout
faire pour faciliter...
10 h 30 (version non révisée)
M. Derraji : ...donc, moi, je
vous appuie dans cette recommandation et j'espère que le gouvernement va tout
faire... Parce qu'encore une fois, je ne veux pas comparer. On parle des
chiffres. C'est des êtres humains, c'est des histoires d'amour que le Québec
est en train de briser, malheureusement, parce qu'attendre trois ans,
avorter... Entendre, en commission parlementaire... Je sais que la personne
était là. Dire que le choix qu'elle avait, c'est avorter, parce qu'ils ne
voient plus la lumière au bout du tunnel, ça rajoute un peu à ce qu'on a
entendu sur les immigrants temporaires, malheureusement, le rapport du
rapporteur des Nations unies. Je n'ai jamais pensé qu'un jour on sera là.
Page 12, un autre excellent point que
je vous permets, si vous le permettez, d'élaborer un peu plus. C'est par
rapport au PEQ-Travailleurs étrangers temporaires. Là, vous dites que vous
voulez inclure, dans les professions éligibles, les professions de FÉER. Vous
pouvez expliquer, pour les gens qui nous écoutent. Moi, je sais c'est quoi, 4.
Et vous demandez : «Exiger une expérience de travail d'un an, à temps
plein, aux 2 580 heures.» Mais ce que vous suggérez aussi, c'est que
ce soit du temps plein ou temps partiel. C'est qu'au bout de la ligne on ne
pénalise pas ceux et celles qui choisissent de travailler à temps partiel, et
que, si, avec un cumul, on arrive au nombre demandé, qu'on leur permette d'utiliser
le PEQ-Travailleurs. Vous voulez élaborer?
Mme Launay (Claire) : Oui,
tout à fait. Pour ce qui est de l'inclusion des catégories d'emploi FEER
quatre, en fait, c'est revenir vraiment à une version du PEQ préréforme de mars
2020, donc, qui incluait toutes les catégories d'emploi. Donc, tant qu'une
personne accumulait le temps d'expérience professionnelle requis, cette
personne avait accès... avait une voie d'accès vers la résidence permanente à
travers le programme de l'expérience québécoise. Donc, nous, on veut s'assurer
que, quelle que soit la catégorie d'emploi, ces personnes-là y ont accès.
Ça part aussi, en fait, juste de deux
constats. Déjà, on garde en tête que pour nous, on a besoin de tout le monde.
Il n'y a pas de catégories d'emploi dont on besoin moins que d'autres,
particulièrement en ce moment, donc on trouve ça un petit peu particulier d'exclure
une catégorie d'emploi de cette voie rapide vers la résidence permanente. Et,
comme je le disais tout à l'heure à Mme la ministre, on sait qu'il y a un grand
nombre des personnes dans ces catégories d'emploi là qui se dirigent vers les
régions, donc ça vient compléter notre... nos Recommandations de
régionalisation pour inciter des personnes à choisir les régions,
particulièrement dans ces emplois-là, s'il y a des voies d'accès vers la
résidence permanente.
Pour ce qui est de l'accumulation d'expérience
de travail à temps plein et à temps partiel, pour nous, c'est une question de
bon sens. Le marché du travail est en constante évolution. Ce n'est plus
pareil, ce n'est plus pareil qu'avant. Il y a des personnes qui accumulent des
expériences, plusieurs expériences à temps partiel ou une expérience à temps
partiel sur plus longtemps, pendant qu'elles se consacrent à d'autres projets.
On ne pense pas que ces personnes-là devraient être pénalisées, ou encore des
personnes qui doivent composer avec de la garde d'enfant, par exemple. On veut
être sûrs que, tant qu'une personne a accumulé l'expérience professionnelle
requise, qu'elle ait accès au PEQ.
M. Derraji : L'autre point,
on l'a beaucoup dit dans le passé, c'est que, le problème, c'est les voisins. À
Gatineau, traverser à Ottawa, c'est fini, ces histoires du PEQ et de... et avoir
la résidence permanente en quelques mois. Pensez-vous que c'est une menace pour
les futurs travailleurs au Québec qui voient une complexité au niveau des procédures
et ils décident de quitter le Québec pour avoir la RP très rapidement à l'extérieur
du Québec?
Mme Launay (Claire) : Oui, c'est
vrai. C'est un enjeu de compétitivité, effectivement, parce que... particulièrement
parce qu'en ce moment, depuis plusieurs années maintenant, le gouvernement
fédéral propose des programmes d'immigration très, très attractifs qui
facilitent l'accès à la résidence permanente. Donc, pour que le Québec continue
d'être attractif et compétitif vis-à-vis du reste du Canada, on pense que c'est
la bonne marche à suivre.
M. Derraji : Dans votre
mémoire, vous avez dit que le portrait est incomplet, de cette consultation,
parce qu'on n'inclut pas les immigrants temporaires. Je tiens à vous le dire,
je l'appuie. J'ai moi-même déposé un projet de loi au mois de mai pour avoir le
portrait global. Malheureusement, les deux scénarios n'incluent pas les
temporaires. Pourquoi, selon vous, le portrait que nous sommes en train de
faire est incomplet?
Mme Launay (Claire) : Je ne peux
pas répondre à la place du gouvernement, mais c'est sûr que pour nous, l'inclusion
des temporaires, en fait, dans le portrait actuel de l'immigration, c'est faire
une planification qui est incomplète et qui va mener à des erreurs de
planification, si on n'inclut pas l'immigration temporaire.
Quand on pense à, par exemple... Je
reviens à la régionalisation, mais amener une cinquantaine de travailleurs, par
exemple en Gaspésie, ça marche que si c'est planifié avec les villes, avec les
centres communautaires, pour être... Pour s'assurer qu'il y ait une offre de
logement, de santé, d'éducation. Toujours la même chose, mais s'assurer que ces
personnes-là ne vont pas juste boucher un trou en termes de travail, mais
vraiment vont pouvoir s'intégrer quelque part. Si on ne planifie pas cette
immigration temporaire et qu'on continue de la regarder augmenter...
Mme Launay (Claire) : ...on
va se retrouver dans des situations où on fait venir du monde et on n'a nulle
part où les loger.
• (10 h 40) •
M. Derraji : Merci à vous
trois.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup. Alors, cette autre période étant terminée,
je me tourne du côté du député de Saint-Henri-Sainte-Anne de la deuxième
opposition. Quatre minutes, huit secondes. Le micro est à vous.
M. Cliche-Rivard : Merci
beaucoup. C'est toujours un immense plaisir de vous revoir. Merci pour votre
travail. Merci pour ce que le Québec c'est nous aussi fait. Vraiment, continuez
cette belle bataille, continuez ce beau périple, vraiment. Une question rapide.
On parle de sélectionner, hein, la part du Québec qu'il sélectionne, la part
qu'Ottawa sélectionne. Qu'est-ce que ça veut dire, vraiment,
"sélectionner" dans le cadre familial? Est-ce qu'Ottawa, vraiment,
sélectionne votre conjoint, votre enfant?
Mme Launay (Claire) : Mais,
nous, pour nous, c'est vraiment une question de droit humanitaire. Donc, non,
il n'y a pas vraiment d'enjeu de sélection. C'est des personnes qui ont le
droit d'être au Canada, en vertu de la famille qu'ils ont déjà dans le pays,
donc, en l'occurrence au Canada ou au Québec.
M. Cliche-Rivard : Donc,
quand on met en dualité ce que le Québec sélectionne puis ce que le fédéral
sélectionne, est-ce qu'on parle vraiment d'une sélection fédérale dans la
catégorie familiale?
Mme Launay (Claire) : On
parle plus de cible, en fait, plutôt que de sélection, vraiment, parce que les
critères ne sont pas du tout les mêmes que, par exemple, pour une immigration
économique où là il y a une réelle sélection. On choisit, dans un bassin de
personnes, un certain nombre de personnes qu'on souhaite faire venir ou rester
de façon permanente.
M. Cliche-Rivard : Parce que
le fédéral n'a pas vraiment son mot à dire sur qui vous fréquentez ou sur vos
enfants, on s'entend?
Mme Launay (Claire) : Normalement,
non.
M. Cliche-Rivard : Normalement,
non. Donc, quand même, à considérer, parce qu'on les met beaucoup en dualité,
augmenter la part du Québec dans sa sélection. Mais, de l'autre côté, ce n'est
pas une sélection qui est fédérale, vraiment, donc je pense qu'il faut revenir
à ça.
Vous dites "traiter les inventaires
au complet dans le familial" vous le dites. Votre mémoire date du début
août, si je ne me trompe pas, fin août, Le devoir a sorti des chiffres, dans
deux autres catégories, en refuge et en humanitaire. Donc, je me permets de
vous poser la question : Devant l'arriéré dans les autres catégories,
est-ce que vous maintenez cette position-là, ou est-ce que vous avez cette
position-là pour le refuge et l'humanitaire seulement, qu'il faut vider les
inventaires exceptionnellement, ou si ça devrait simplement se faire en
familial?
Mme Launay (Claire) : Je...
mes collègues rapidement. Mais oui, je pense qu'effectivement, nous, on demande
à ce que les inventaires soient vidés dans toutes les catégories. Donc, deux
personnes qui ne sont pas sélectionnées par le Québec, donc ça comprend,
effectivement, les réfugiés, les catégories autres d'immigration, notamment
humanitaires. En fait, pour nous, ces seuils-là, c'est vraiment... c'est juste
des chiffres. Ces personnes habitent déjà au Québec, en fait, ils travaillent
déjà. Donc, elles vont probablement participer si elles ne sont pas encore
francophones, à Francisation Québec. Donc, on ne voit pas pourquoi les empêcher
d'accéder à un statut permanent serait bénéfique, ni pour eux ni pour le
Québec, en fait.
M. Cliche-Rivard : Parce que
là on l'a vu, on peut monter dans des délais dans l'humanitaire jusqu'à 25 ans,
avec l'arriéré actuel, arriéré qui continue, là, de facto, parce qu'on en
traite seulement 450, ou on va en donner à peu près 450 annuellement. C'est
arriéré-là va monter à beaucoup plus, et donc on va, quoi, se retrouver avec un
délai de traitement de 50 ans dans une catégorie, ça n'a pas de sens, on est
d'accord.
Vous dites rétablir un certain équilibre
migratoire, on a à peu près combien de temporaires en ce moment, grosso modo?
Mme Launay (Claire) : Bien,
les derniers chiffres qu'on avait, c'était 350 000 qui habitent actuellement au
Québec.
M. Cliche-Rivard : Et dans la
planification, dans le scénario, il y a combien de places dans l'économique?
Mme Launay (Claire) : Dans
l'économique, ça doit être 40 000, c'est ça?
M. Cliche-Rivard : Entre 30
et 40, autour de ça, disons. Donc, ça fait, quoi, maximum, une personne sur 10
de temporaires qui auront la chance... maximum, hein, parce qu'il y a le bassin
qui est ouvert à l'ensemble de la planète. Donc, il y a beaucoup plus de gens
que les simples temporaires qui vont appliquer dans le bassin du PSTQ, et donc
à l'immense maximum, seulement, qu'un temporaire sur 10 environ va avoir
l'accès ou la chance de pouvoir pérenniser son statut au Canada.
Mme Launay (Claire) : C'est à
peu près ça, sachant que, même dans le cahier de consultation, c'est précisé
qu'en fait, maintenant, la vaste majorité des personnes qui obtiennent la
résidence permanente avaient déjà un statut temporaire avant. Donc, je pense
qu'on ne peut plus vraiment parler... on ne peut plus vraiment dire que, ah,
les immigrants temporaires sont voués à partir, c'est de moins en moins vrai.
Puis d'ailleurs on le voit avec l'augmentation du solde migratoire, ce n'est
pas juste le nombre de personnes... d'immigrants temporaires qui sont au
Québec, c'est qu'il y en a beaucoup moins qui partent aussi. Puis nous, on
trouve que c'est vraiment positif, on ne veut pas qu'il y ait moins
d'immigrants nécessairement, on veut juste le planifier correctement.
M. Cliche-Rivard : C'est le
temps que j'avais. Un énorme merci pour votre travail puis merci de votre
présence aujourd'hui.
Mme Launay (Claire) : Merci.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup. Alors, à mon tour, je vous remercie pour l'apport
à nos travaux. Je vous souhaite une excellente journée. Et je suspends les
travaux, le temps de recevoir le prochain groupe. Merci.
(Suspension de la séance à 10 h 44)
(Reprise à 10h
48
)
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci. À l'ordre, s'il vous plaît. La Commission des
relations avec les citoyens reprend ses travaux. Nous recevons donc
École Québec avec ses quatre représentants. Mesdames... Mme et messieurs,
bienvenue à la Commission des relations avec les citoyens. Vous allez
bénéficier d'une période de 10 minutes pour votre exposé, mais je vais
d'abord vous demander de vous présenter et ensuite nous allons procéder à la
période d'échange. Le temps est à vous.
M. Boire (Serge) : Merci, Mme
la Présidente. Mme la ministre, membres de la commission, merci de nous
recevoir et de nous donner l'opportunité de présenter notre point de vue et nos
recommandations à la Commission dans le cadre de ce processus démocratique.
Je m'appelle Serge Boire, je suis
directeur général d'École Québec depuis 2018 et auparavant, depuis 2010,
j'ai eu le bonheur d'enseigner le français québécois, notre culture, notre
histoire, nos expressions, nos valeurs communes à plus d'un millier de
Brésiliennes et Brésiliens d'École Québec de Rio de Janeiro. Je remercie
aussi les personnes qui sont à mes côtés aujourd'hui qui ont tenu à s'adresser
à vous pour partager le lien qui les unit avec École Québec et je les
laisse se présenter.
M. Bertrand (Michel) : Alors,
bonjour, mon nom est Michel Bertrand. J'ai le privilège d'être le
vice-président ressources humaines chez Biscuits Leclerc, ici à Saint-Augustin.
Biscuits Leclerc fait affaire avec École Québec pour la francisation et la
certification en français de nos employés et futurs employés depuis déjà
plusieurs années, mais surtout depuis le début de 2022. Ce que nous apprécions
des services de l'École Québec, c'est la flexibilité du service qu'on a.
On travaille avec un entrepreneur, on a des affinités. On a un service rapide
qui est agile, et nos employés sont en mesure d'apprendre le français...
M. Bertrand (Michel) : ...français
vraiment rapidement, ce qui est vraiment un gros plus quand vient le temps de
l'intégration sur nos planchers de production, dans nos ateliers de maintenance
ou dans nos différents bureaux. Le fait qu'ils puissent apprendre le français
en même temps qu'ils apprennent notre culture, c'est fantastique. Quand on a un
employé qui arrive puis qui dit : Elle est où, la meilleure poutine à
Saint-Augustin?, c'est le fun à entendre. Un employé qui aurait suivi sa
francisation à l'Alliance française, probablement, demanderait où est le
meilleur jambon beurre à Saint-Augustin, puis personne ne comprendrait. Donc,
pour nous, c'est vraiment important ce déclic-là, la connexion, c'est...
l'intégration est toujours plus rapide.
• (10 h 50) •
Également, avec École Québec, on a accès à
un suivi très, très dynamique sur l'avancement et la motivation des employés,
des futurs employés. Donc, pour nous, là, c'est rassurant de pouvoir compter
sur un partenaire comme École Québec pour une... qui est une institution, qui
vraiment, qui vraiment présente bien l'image du Québec, qui fait en sorte que
le choc culturel est toujours moindre. Nos employés peuvent être francisés par
des gens qui connaissent bien le Québec. Puis ce n'est pas des étrangers, c'est
des gens connaissent bien le Québec, ils sont en mesure de vraiment faciliter
la transition. Donc, connaître le Québec, la culture, la réalité du marché du
travail, les préparer en conséquence, donc, l'expérience migratoire devient
automatiquement beaucoup plus humaine. Et chez nous, c'est une valeur
importante. Donc, on valorise autant l'apport du travailleur à notre société
qu'à Biscuits Leclerc. Et, à ce niveau-là, c'est vraiment un privilège d'avoir
eu à travailler avec École Québec pour amener nos futurs Québécois, parce
qu'ils sont en démarches pour avoir leur résidence permanente. Donc, merci de
m'accorder un peu de temps pour pouvoir partager notre expérience.
M. Ayub de Oliveira (Victor) : Bonjour,
mon nom, c'est Victor. Je vous parle en tant que directeur technique chez
NovAxis Solutions et en tant qu'ex-élève d'École Québec. Je suis ici pour
partager l'importance d'École Québec... a eu dans mon parcours de migration et
l'importance qu'elle a toujours pour NovAxis Solutions et ses partenaires.
Il y a plus de 10 ans, j'étais dans
les souliers des candidats que nous, on recrute aujourd'hui au Brésil. À
l'époque, j'étudiais le français à l'École Québec, à São Paulo, ma ville
natale, et j'ai rêvé d'être recruté pour immigrer au Québec. Ma présence ici
vous démontre que j'ai réussi mon projet d'immigration, mais surtout mon
intégration au marché du travail et à la société québécoise. C'est en entrant
dans les processus d'embauche et, ensuite, en arrivant au Québec en 2013 que
j'ai constaté... le coffre à outils que m'avait donné École Québec était
complet. Ça a été facilitant. J'avais les repères et je n'ai presque pas subi
de choc culturel. J'ai ensuite rencontré l'amour ici avec une Québécoise pure
laine, comme on dit. Vanessa et moi, on est ensemble depuis sept ans et, dans
les prochains jours, on va voir notre premier bébé. C'est un mélange de samba
au sirop d'érable, je dirais. C'est pour toutes ces raisons et mon histoire de
succès que l'entreprise pour laquelle je travaille confie à École Québec tous
les candidats que nous recrutons en technologies de l'information. Merci pour
votre attention.
Mme Santos Lanza Moura
(Lucianna) : Bonjour. Je m'appelle Lucianna. J'ai parcouru le même
parcours que mon collègue à mes côtés, mais je suis infirmière clinicienne
depuis 15 ans au Brésil. Et j'étudiais à l'École Québec quand même et j'ai
appris beaucoup de choses sur Québec. Je suis recrutée pour le CHU de Québec en
2021. Je suis à Québec, ça fait un an. En 2022, je suis arrivée ici. Je
travaille actuellement à l'Hôtel-Dieu de Québec. J'attends de mon résultat de
l'examen de l'ordre, que j'ai fait le 18 dernier, et cela me permettra de
pouvoir occuper mes fonctions d'infirmière de façon autonome dans cette belle
ville où je souhaite contribuer à son essor comme nouvelle Québécoise. C'est ça
que je voudrais. Merci beaucoup.
M. Bertrand (Michel) : Merci,
Lucianna. Je voudrais juste porter à votre attention qu'elle a terminé à
8 h ce matin. On a changé son chiffre, alors elle était de soir, et là...
Alors, elle était déjà inquiète de son niveau de français et de son niveau de
stress, mais je pense qu'on peut lui pardonner. Alors, voilà.
Mme Santos Lanza Moura
(Lucianna) : Oui, c'est ça.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : On est en famille ici, là, il n'y a pas de problème.
M. Bertrand (Michel) : Voilà.
Mme Santos Lanza Moura
(Lucianna) : Merci beaucoup.
M. Bertrand (Michel) : Mme la
Présidente, Mme la ministre, depuis le début de vos travaux, vous avez entendu
plusieurs groupes qui vous ont parlé des enjeux de fond soulevés par la
planification de l'immigration au Québec. Notre présence ici aujourd'hui vise à
partager notre expérience du terrain, vous l'avez vu un peu avec les
témoignages ici. Nous sommes au début de la chaîne de l'immigration et de la
francisation, ce qui nous donne une autre perspective pour vous proposer des
pistes pour bonifier les processus.
École Québec est l'une des rares
institutions de francisation 100 %...
M. Boire (Serge) : ...Québécoise
à l'étranger. Depuis 2006, pas moins de 4 000 Brésiliens et
Brésiliens ont été québécisés chez nous, dans nos écoles de Sao Paulo et de Rio
de Janeiro. Maintenant, on est en ligne, donc on est accessibles partout dans
le monde.
Notre institution a développé sa propre
méthode de francisation, créée pour outiller des travailleurs et des étudiants
étrangers à être fonctionnels pour occuper un poste en demande au Québec, et
ce, en 10 mois seulement.
École Québec ne se prononcera pas sur le
nombre d'immigrants qui devaient être accueillis par le Québec. Ce n'est pas
notre rôle, sinon que de vous féliciter pour la création de Francisation
Québec, qui est une chose qu'on réclame depuis environ 10 ans et qu'on
trouve qui est une excellente idée. Il était temps que le Québec se dote de son
propre service de francisation.
Nous croyons cependant que peu importe le
chiffre qui sera déterminé au terme de ces consultations, notre institution est
un outil qui devrait être offert dans le bouquet des écoles partenaires en
francisation à l'étranger afin d'atteindre les cibles qui font l'objet du débat
actuel.
Les solutions proposées par les acteurs du
milieu depuis le début des travaux pointent presque toujours vers le
recrutement dans des pays francophones parce qu'on constate dans le format
actuel que la francisation prend trop de temps. Or, il y a quelques jours, les
médias signalaient que l'Organisation mondiale de la santé a lancé un cri
d'alarme et met en garde les pays industrialisés contre les dommages qu'ils
font subir à de nombreux pays d'Afrique en venant leur retirer des
professionnels de la santé dans des secteurs en pénurie... Qui sont déjà en
pénurie dans leur propre pays.
École Québec a démontré son efficacité en
francisation d'infirmières, entre autres, mais de toutes les professions dont
on a besoin, et nous croyons qu'il est possible d'être encore plus efficaces
pour amener plus rapidement au Québec des professionnels de la santé qui
maîtrisent le français. Je vous explique comment.
La formation des infirmières brésiliennes
est très semblable à celle des infirmières québécoises. D'ailleurs, le Brésil
est le deuxième bassin de prédilection pour le Québec dans ce secteur, après la
France. Mais leur possibilité d'être embauchées au Québec est limitée par les
critères du ministère de l'Immigration et de Recrutement Santé Québec. Pour
espérer être convoquée en entrevue, une infirmière brésilienne actuellement
doit avoir atteint le niveau huit, donc le niveau deux de... du cadre européen.
Pour atteindre ce niveau, une infirmière doit prendre le tiers ou le quart de
son chèque de paie actuel et se lancer à l'aveuglette dans sa francisation à
coup de deux ou trois soirs par semaine en espérant qu'au terme de cela
Recrutement Santé Québec la convoque en entrevue.
C'est une profession de foi que peu
d'infirmières brésiliennes font, sachant qu'il y a de nombreux autres pays qui
rencontrent les candidats en entrevue à l'aide d'un interprète :
l'Australie, l'Allemagne, les Pays-Bas, pour ne nommer que ceux-là. Nous avons
actuellement dans nos listes environ 200 infirmières qui sont intéressées
par le Québec, mais qui n'ont pas le niveau de français requis ni même l'argent
pour étudier. En maintenant le critère du niveau huit pour l'entrevue,
plusieurs vont faire ce que plusieurs autres ont fait au cours des dernières
années et accepter les offres alléchantes des pays concurrents.
Je ne vais pas continuer parce que je vois
que le temps passe, là, mais je vais...
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : La ministre accepte de prendre un peu de son temps, si vous
voulez continuer.
M. Boire (Serge) : Oui, je
peux.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Allez-y.
M. Boire (Serge) : À l'École
Québec, nous répétons depuis 10 ans qu'on ne devrait pas exiger un niveau
si élevé pour convoquer des candidats en entrevue. Nous disons même que l'on ne
devrait pas fixer d'exigences de maîtrise du français pour l'entrevue afin de
permettre à tous ceux et celles qui sont intéressés par le Québec de... qu'ils
puissent poser leur candidature et permettre aux employeurs, à Recrutement
Santé Québec de découvrir la personne qui est devant eux.
Et, avec notre méthode, si on fait une
espèce de contrat conditionnel à l'atteinte d'un niveau de français, bien, on
se retrouve à rencontrer des gens qui vont être des perles rares, qu'on va
identifier et qu'on va dire : Écoutez, si vous étudiez, vous arrivez au
niveau B2, nous, en 10 mois, on est capables de les franciser, on
peut rouler les deux processus en même temps, c'est-à-dire que la francisation
peut se faire en même temps que le début de la paperasse.
Alors, c'est un peu l'approche qu'on a
avec Biscuits Leclerc et avec la majorité de nos partenaires. C'est une
approche qu'on appelle l'approche proactive, c'est-à-dire de ne pas limiter le
niveau de français pour l'entrevue d'embauche. On voit ça par la suite.
• (11 heures) •
Donc, nous voulons également porter à
votre attention le fait que les élèves d'École Québec ne peuvent pas bénéficier
d'un remboursement de leurs frais parce que l'école n'est pas une institution
reconnue par le ministère de l'Immigration. Les seules institutions que
reconnaît le ministère depuis 25 ans au moins sont des institutions qui
doivent être des organismes à but non lucratif. Un simple coup d'œil à la liste
des partenaires sur le site Internet du gouvernement du Québec permet de
constater que la très vaste majorité des institutions reconnues sont des écoles
de francisation comme les...
M. Boire (Serge) : ...comme
les alliances françaises, qui enseignent le français européen à nos futurs
immigrants, aucune école québécoise. À notre avis, cette situation prive un
très grand nombre de candidats potentiels de la possibilité d'atteindre les
niveaux de français requis par le gouvernement dans un court laps de temps,
sans parler du fait qu'ils vont apprendre un français européen, alors que,
nous, on est vraiment spécifiques au Québec. Comme vous avez pu le voir dans
notre mémoire, à École Québec, un élève peut atteindre le niveau 8 de
l'échelle québécoise en 10 mois, alors qu'il faudra deux ans et demi pour
atteindre le même niveau à un élève inscrit à l'Alliance française de Sao
Paulo, par exemple. Nous recommandons donc que le critère qui exige qu'une
institution d'enseignement reconnue soit un OBNL soit retiré pour permettre à
des institutions comme la nôtre de joindre le bouquet d'offres disponibles en
francisation à l'étranger.
En terminant, nous voulons porter à votre
attention... porter votre attention sur un dernier point souligné dans notre
mémoire, la traduction du site Web du ministère de l'Immigration en portugais
et en espagnol. C'est un aspect qui vous semblera peut-être très terre-à-terre,
mais notre expérience démontre que c'est un frein pour percer un marché de
dizaines de millions de travailleurs potentiels qui pourraient avoir envie de
poursuivre leur carrière au Québec en français.
Chaque jour, nos employés au service à la
clientèle reçoivent des appels de travailleurs qui ont vu nos campagnes
publicitaires payantes de promotion. On fait la promotion du Québec à tous les
mois de façon payante sur les réseaux sociaux, on s'est rendu compte que ça ne
nous donnait rien de faire la promotion d'un cours de français, quand la
majorité des gens à l'extérieur des frontières du Québec ne savent pas que le
Québec existe. Alors, il faut d'abord commencer par faire la promotion du
Québec, des opportunités, de comment on est fantastiques, et, une fois qu'on
attire ces gens-là, ils viennent à nous, sauf qu'ils ne trouvent pas
l'information en portugais ou en espagnol. Alors, nous, le service à la
clientèle de notre école se retrouve à avoir en moyenne 400... entre 300
et 400 demandes par mois de gens qui veulent savoir comment ça fonctionne.
Alors, on se retrouve à prendre les informations sur le site et à les traduire.
Alors, en gros, ça conclut notre
présentation pour le moment. Je vous remercie de votre attention.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup pour cette présentation. Alors, je me tourne
rapidement du côté de la banquette ministérielle pour une période d'un petit
peu moins de... ah! 13, minutes, 9 secondes. La parole est à vous.
Mme Fréchette : Excellent.
Merci beaucoup, Mme la Présidente. (S'exprime dans une langue étrangère). Il y
a longtemps que j'ai eu des notions de portugais, mais je n'ai pas tout perdu.
M. Boire (Serge) : Mais vous
les avez bien, oui.
Mme Fréchette : Bien, je vous
remercie d'être ici avec des témoins en plus, des gens qui ont traversé votre
parcours, le parcours que vous offrez ou encore des utilisateurs comme vous,
M. Bertrand. Donc, un grand merci d'avoir rassemblé ces gens puis un grand
merci pour vous être déplacés aussi au Québec parce que vous auriez été un des
premiers candidats pour la visioconférence, je dirais. Mais non, vous êtes
ici, donc c'est grandement apprécié.
M. Boire (Serge) : Bien, ça
vous démontre à quel point... On veut vous remercier pour l'invitation, mais ça
vous démontre à quel point la question nous tient à cœur. Votre invitation nous
a tenu à cœur au point où on voulait être ici présents pour en discuter.
Mme Fréchette : Bien, merci,
c'est grandement apprécié. Je sais également que les équipes du ministère, du MIFI,
en fait, sont en contact avec vous pour discuter, là, d'un partenariat avec
vous. Alors, je vois d'une manière positive, là, les possibilités de
collaboration avec École Québec, donc à suivre. J'ai hâte d'en entendre parler.
Le premier... Ma première question, en
fait, porterait sur, bien, vos méthodes d'apprentissage, parce que vous nous
indiquez, là, dans le mémoire que... Quand vous comparez les niveaux atteints
après 10 mois de cours par vos élèves versus ceux des élèves de l'Alliance
française au Brésil, que c'est très différent. Donc, j'aimerais que vous nous
parliez de votre méthode. En quoi est-ce qu'elle se distingue et qu'est-ce qui
vous permet d'être plus rapide?
M. Boire (Serge) : Mme la
ministre, en 2018, au moment où... Je me souviens très bien, M. Legault
était en campagne électorale. J'étais ici au Québec, et on était en rencontre
avec des gens de la francisation du ministère de l'Immigration et on nous
avait... on se rendait compte qu'il n'y avait pas de méthode d'enseignement du
français québécois, ça n'existait pas, hein, avant, Par ici, là, alors...
Maintenant, il y a Par ici, et il y a notre méthode, et on s'est rendu compte
qu'on a tous les deux créé ça en même temps sans se parler. Mais nous, ce qu'on
a fait... Mon partenaire d'affaires est un Brésilien, qui est une sommité en
enseignement du français langue seconde, alors on a pris l'expérience de nos
élèves depuis 2006, qui ont immigré au Québec, et on a fait la liste des choses
qui a été difficile pour eux au niveau de l'intégration. Qu'est-ce que vous
aviez besoin d'avoir? J'ai pris mon parcours à moi de Québécois qui est arrivé
au Brésil en 2010, ça fait 13 ans. Qu'est-ce que j'ai eu comme choc
culturel? Et on a...
11 h (version non révisée)
M. Boire (Serge) : ...Monter
une méthode dont l'objectif était clair. On n'arrivera jamais... On a pris la
grille de l'échelle québécoise, ce qui doit être inclus dans chacun des
niveaux, mais il a fallu faire des choix. Parce que, devant l'urgence de la
crise de la main-d'oeuvre, on s'est dit il faut outiller des gens qui vont être
en mesure d'aller occuper un poste ou étudier. Mais il va falloir faire des
choix. Et c'est pour ça que chez nous, la méthode qu'on a mise, elle est
spécifique à quelqu'un qui a besoin d'aller travailler ou étudier. Ils... Il y
a des choses qu'ils n'apprendront pas, mais qu'on s'est dit, une fois qu'ils
sont dans un... Dans une situation d'immersion, ça se règle assez rapidement.
Et c'est pour ça qu'on a une différence entre les niveaux. C'est qu'à un moment
donné il faut faire des choix : ça, on le laisse de côté parce qu'on a une
urgence de franciser quelqu'un parce qu'il faut qu'il soit au Québec hier. C'est
un peu ça.
Mme Fréchette : Bon, côté
francisation, là, nous, on essaie d'adapter notre offre. Francisation Québec,
ça va être notre bateau amiral pour, donc, toutes les mesures d'apprentissage
du français avec... En lien avec le gouvernement et nos partenaires. Comme vous
savez, là, on a des missions de recrutement international et pour nous, tous
les pays, à la fois francophones et francotropes, donc dont l'Amérique latine,
sont d'une grande importance pour la suite des choses pour faire en sorte de
bien faire connaître le français aussi au sein du bassin des personnes
immigrantes.
Là, vous, dans l'orientation un, vous
suggérez, en fait, qu'il y ait des bourses qui soient offertes, octroyées, des
bourses de 25 %, 50 % ou 75 %, pour que les personnes aient
davantage de la capacité financière. J'aimerais que vous me parliez un peu de
la mécanique, là, que vous verriez à établir autour de ces bourses-là, comment
est-ce que ça s'appliquerait, à quel moment est-ce qu'elles seraient octroyées.
Comment fonctionnerait, là, la mécanique de remboursement, parce que... est-ce
que ce serait au début ou à la fin? Et de quelle manière on pourrait s'assurer
que ça remplisse l'objectif souhaité?
M. Boire (Serge) : Je vous
remercie de la question. On a... Bon. On avait déjà commencé ça depuis
plusieurs années avec des entreprises privées, mais depuis 2021, on a eu droit
à des bourses discrétionnaires du ministère des Relations internationales et de
la Francophonie. Donc, on est actuellement avec ce ministère-là dans des
bourses qui francisent exclusivement des infirmières.
Et ce qu'on s'est rendu compte au cours
des 15 dernières années, c'est qu'il ne faut absolument pas donner une
bourse de 100 %. Il faut que chaque candidat sente un peu le poids, dans
sa poche, de son... De sa... c'est une contribution financière. Mais il faut
les aider, parce que les salaires, en Amérique latine, et j'inclus le Brésil et
tous les pays qui sont là, sont 3 à 4 fois moins chers... Moins élevés qu'ici
alors que le coût de la vie est similaire à ce qu'on vit ici. Alors,
imaginez-vous que, quand je disais un peu plus tôt, pour une infirmière qui
décide de payer sa propre francisation, c'est le tiers ou le quart de son
salaire qu'elle passe là-dedans, en ne sachant même pas si, au final, elle va
être appelée par Recrutement Santé Québec.
Alors, ce que nous, on propose, c'est :
abaissons les exigences de l'entrevue d'embauche, allons, ouvrons la porte à
tous les talents qui sont disponibles avec un interprète qu'on fournit chaque
fois, allons identifier qui nous intéresse. Et, quand cette personne-là est
intéressante, c'est là qu'on lui fait une offre de bourse en fonction de ses
capacités. C'est pour ça qu'on dit 25 %, 50 %, 75 %, 85 %,
mais aidons-la au moment où... et qu'est-ce qu'on fait en faisant ça? On lui
tatoue la fleur de lys sur la joue, là, un peu, parce qu'elle va voir que c'est
vrai, c'est vrai que le Québec a un intérêt pour moi, et il a un intérêt au
point où il va participer financièrement dans ma participation. Et nous, à l'école,
on voit l'intérêt de cette personne-là. Le sérieux qu'elle met...
(Interruption) ...pardon, dans sa
francisation change complètement. C'est un peu ça, l'idée.
Mme Fréchette : Merci.
Dernier sujet, pour ma part, là, que je voudrais aborder, c'est la
régionalisation. Vous savez qu'on a la volonté, là, d'accroître l'immigration
primaire en région, faire en sorte que les gens d'entrée de jeu aillent s'établir
en région. Dans quelle mesure est-ce que vous contribuez à ça ou vous êtes en
mesure de le faire, de contribuer à mieux faire connaître les opportunités qui
s'offrent en région, la diversité aussi et la qualité de vie qu'on y retrouve?
M. Boire (Serge) : On le fait
déjà. J'aurais dû apporter des... quelques copies du livre pour que vous voyiez
comment on a québécisé tout ça. Je veux dire, toutes les régions sont
présentes. On leur apprend comment... C'est quoi, un trois et demi, comment
louer un trois et demi. Nos salles de classe, dans chacune de nos écoles, s'appellent
le Saguenay, Montréal, Québec, Trois-Rivières. Chacune de nos salles de classe
a la photo de la région en question. Alors, entrer à l'École Québec de Sao
Paulo, de Rio de Janeiro, c'est entrer au Québec. Alors, ils savent déjà que
les régions existent. Quand c'est le moment des missions de recrutement avec
Québec International, qui est un de nos plus vieux partenaires, depuis 2008...
M. Boire (Serge) : ...ils
savent déjà que... et ce n'est pas juste Montréal, Québec, au contraire. Et je
vous dirais que ceux qui veulent aller étudier ont déjà bien compris qu'il
fallait sortir des grands centres. On leur explique qu'il faut sortir des
grands centres, qu'il faut aller en région. On a un élève, actuellement, qui
est à Saguenay, qui a réussi toutes les bourses. Il a réussi à obtenir toutes
les bourses de mérite, et tout ça. Il étudie en soudure pour... et c'est un
technicien naval. Alors, on a plusieurs élèves qui sont déjà un peu partout étendus
au Québec, et ça fait partie, de toute façon, de notre méthodologie
d'enseignement, ils sont très conscients des régions du Québec.
• (11 h 10) •
Mme Fréchette : Et vous
gardez ce réseau actif.
M. Boire (Serge) : Tout à
fait, tout à fait.
Mme Fréchette : Excellent.
Bien, obrigada.
M. Boire (Serge) : ...
Mme Fréchette : Mme la
Présidente, je vais laisser la parole à mes collègues.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup. Je vous ferai rajouter quelques villes dans
la circonscription des Plaines, vous allez voir...
M. Boire (Serge) : ...
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Je me tourne maintenant du côté de la députée de Vimont, il
reste quatre minutes. 35.
Mme Schmaltz : Parfait.
Merci, Mme la Présidente. Merci beaucoup de votre... notamment vos témoignages,
et vous, vous semblez être un formidable ambassadeur du Québec au Brésil, c'est
vraiment...
M. Boire (Serge) : Oui, bien...
Mme Schmaltz : ...en tout
cas, on le sent à travers vos propos. Je voudrais revenir sur la question de la
flexibilité des cours de francisation. Vous savez que nous travaillions à
franciser dans le milieu du travail, notamment avec la francisation sur les
lieux du travail. On développe aussi un axe famille, c'est-à-dire de franciser
les tout-petits et, par extension, les parents. Donc, c'est une façon aussi
d'amener les gens à se franciser par le biais, parfois, des enfants, puis on
sait que les enfants, bien, c'est des formidables éponges aussi à
l'apprentissage.
En fait, je voulais voir un petit peu avec
vous, pensez-vous que cette façon de faire, est-ce que c'est prometteur dans
l'intégration, cette façon de franciser, ces nouvelles façons? Parce qu'outre
l'axe familial on a aussi des ententes, avec le ministère de la Famille, pour
pouvoir ouvrir à proximité des garderies, des haltes-garderies, justement, pour
aider nos personnes immigrantes à se franciser plus facilement, surtout quand
ils sont... quand ils ont des jeunes enfants. J'aimerais un petit peu vous
entendre là-dessus.
M. Boire (Serge) : Bien,
écoutez, nous, ce qu'on s'est rendu compte, mais je vais laisser mes Brésiliens
vous répondre, parce que je pense que c'est plus pertinent de la part de leur
bouche que de la mienne, mais, en 15 ans, nous, ce qu'on s'est rendu compte,
clairement, c'est que, dans un projet d'immigration, on ne peut pas que
franciser la personne qui va poser sa candidature, il faut inclure le conjoint.
Et ça, c'est fondamental, parce que tous les cas de gens qu'on a vus, qui sont
arrivés au Québec, qui ont occupé un poste et qui sont revenus au Brésil, ce
sont ceux où le conjoint n'était pas francisé. Ça, c'est clair, c'est limpide,
on peut le mettre du crayon jaune là-dessus.
Alors, nous, quand ils arrivent chez nous,
on leur fait bien comprendre ça, au point où l'école même va leur donner un
rabais, on est... parce qu'on sait que ça ne fonctionnera pas si le conjoint
n'est pas francisé. Maintenant...
Mme Schmaltz : ...franciser
le couple?
M. Boire (Serge) : On
francise le couple.
Mme Schmaltz : O.K. D'accord.
M. Boire (Serge) : Oui. On a
monté, depuis 10 ans, des forfaits avec des gros spéciaux. Je ne suis pas un
capitalisme, moi, Mme, on ne fait pas beaucoup de profits chez nous. On le fait
parce qu'on y croit. Je veux dire, vous me disiez que j'étais un ambassadeur,
mais j'y crois vraiment. Je suis un ancien journaliste qui a découvert
l'enseignement du français en 2018... en 2010, et j'en ai fait une deuxième
profession, parce que j'y crois fondamentalement et aussi parce que je crois
exactement ce que le premier ministre disait au mois de mai. À partir du
Brésil, on voyait bien que le problème que... auquel fait face le Québec, ce
n'est plus le Canada anglais, c'est nous-mêmes qui fait plus d'enfants, alors
que la solution passe par l'immigration. Et ça, moi, je m'en suis rendu compte,
il y a longtemps, en voyant ça de loin. Alors, ça explique la motivation.
Mais, en même temps, pour revenir à votre
question, pour ce qui est des enfants, je pense que c'est un... c'est sûrement
un plus, mais je ne sais pas si...
M. Ayub de Oliveira (Victor) : Bon,
je vais parler pour mon expérience. Je pense que les couples, venir francisés,
ça aide énormément avec mes expériences. Le monde qui, comme Serge a bien dit,
qui n'a pas fonctionné, le projet d'immigration, c'est à cause que leurs conjoints
ou les conjoints n'ont pas été francisés. Par contre, les enfants, c'est comme
connu que les enfants, comme vous avez bien dit, sont des éponges. Donc
arrivés, au Québec, sans aucun mot en français, ils absorbent tellement et,
effectivement, ils aident les parents à : Vous devez parler comme ça, pas
comme ça, parce qu'ils ont vraiment, là... ils arrivent à un point d'expérience
du français extrêmement vite, beaucoup plus vite que les parents. Par contre,
l'arrivée d'une personne...
M. Ayub de Oliveira (Victor) : ...couple
avec ou pas d'enfants, que les deux n'aient pas au moins la connaissance du
français, ça fait, permets-moi de dire, sans aucun chiffre pour m'épauler, et
permets-moi de dire que ça fait beaucoup de monde qu'ils vont dire qu'ils
préfèrent aller à Montréal parce qu'ils se débrouillent en anglais. Je suis
vraiment désolé, mais je pense qu'aller en région, il faut se dire que le
couple doit savoir c'est quoi, au contraire, l'intégration est difficile. J'ai
vécu moi-même une immigration où moi j'étais plus francisé que ma conjointe.
Son parcours d'immigration n'était pas le même. On vient du même foyer. Et je
me demande à ce moment-là comment on peut aller en région. C'est dans cette
optique que je dis que j'ai eu la chance dans mon expérience de passer par
École Québec. Quand je suis arrivé à Québec, j'avais beaucoup plus des nuances
québécoises pour que mon intégration soit beaucoup plus simple. Ma conjointe...
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Je dois vous arrêter. Malheureusement, je vous arrête. Je
vous ai laissé comme un petit peu continuer, mais on va poursuivre la
discussion. Je me tourne du côté de l'opposition officielle. 12 min 23 s. La
parole est à vous, M. le député.
M. Derraji : Merci, Mme la Présidente.
Merci pour votre présence. Merci à vous quatre. Surtout pour vous... faire le
voyage. J'ai lu votre lettre, et rassurez-moi que... en fait, votre demande,
c'est que vous voulez devenir partenaire du MIFI.
M. Boire (Serge) : Bien, en
fait, on demande au gouvernement de revoir ce critère-là. Bien sûr qu'on veut
devenir partenaire parce que oui, ça...
M. Derraji : Bien, vous êtes
une institution privée.
M. Boire (Serge) : Tout à
fait.
M. Derraji : Privée. Donc,
une compagnie incorporée?
M. Boire (Serge) : Limitée.
M. Derraji : Limitée?
M. Boire (Serge) : Oui.
M. Derraji : O.K. Limitée,
avec des actionnaires ou partenaires, vous avez des associés?
M. Boire (Serge) : Oui, deux
actionnaires, moi et un Brésilien.
M. Derraji : Deux associés?
M. Boire (Serge) : Oui.
M. Derraji : Les sièges, vos
sièges sont deux au Brésil, vous avez...
M. Boire (Serge) : Oui.
M. Derraji : Au Québec, il
n'y a pas...
M. Boire (Serge) : Au Québec,
on a, avec NovAxis, une entente où on partage des locaux, mais l'entreprise
n'est pas encore créée, justement parce qu'on se dit : Est-ce qu'il faudra
devenir un organisme à but non lucratif? Et ça, on avait évalué ça avec le
ministère, mais il semblerait que même si on faisait ça, on nous disait que ce
n'est pas possible. Alors, on verra. Voilà.
M. Derraji : O.K. Parce que
je veux juste comprendre un peu la formule que vous faites. Donc, une
entreprise incorporée au Brésil. Et au Québec, il n'y a pas de structure pour
le moment.
M. Boire (Serge) : Pour le
moment, non, mais c'est une question de deux jours, là, pour régler ça.
M. Derraji : Et aussi au
Québec, vous êtes sur la voie d'incorporer une entreprise limitée, c'est ce que
j'ai bien compris? Une entreprise.
M. Boire (Serge) : En fait,
la loi fonctionne de la sorte, je me suis informé au Registraire des
entreprises, on peut prendre École Québec au Brésil et prendre l'institution,
l'enregistrer au registraire et en faire une entité québécoise.
M. Derraji : Une entité
québécoise privée aussi?
M. Boire (Serge) : Oui.
Voilà.
M. Derraji : O.K. Bon. Là,
j'ai compris. Merci beaucoup. Ça facilite la tâche pour la suite. Ce que vous
voulez, c'est qu'au Brésil, le MIFI puisse reconnaître votre école comme
partenaire, ça veut dire offrir des cours de francisation et, bien entendu,
permettre à ces élèves qui choisissent le français, s'ils veulent venir au
Québec... avoir accès, bien entendu, à toute la panoplie de services qu'on
offre ici, est-ce c'est ça, votre souhait, aussi?
M. Boire (Serge) : Les élèves
de l'École Québec, une fois qu'ils arrivent au Québec, ils ont droit à la
francisation comme tout le monde. Là où on trouve que ce n'est pas juste, c'est
que comme on n'est pas un partenaire officiel du ministère de l'Immigration,
seuls les partenaires du ministère de l'Immigration... les élèves qui ont
étudié, par exemple, dans des Alliances françaises comme ils sont partenaires,
ceux-là, en arrivant au Québec, peuvent demander un remboursement de
1 800 $ de leur francisation, alors que mes élèves qui étudient à
l'École Québec, qui vont investir de l'argent de la même manière, arrivent au
Québec et n'ont pas le droit parce que l'École Québec n'est pas reconnue. Et je
vous dirais que ce que ça... Nous, je vais vous dire, M., la reconnaissance,
là, en quelque part, on se reconnaît nous-mêmes, on sait ce qu'on fait. La
seule chose qu'on demande, c'est est-ce qu'on peut avoir l'équité là-dedans?
Parce qu'on est en compétition finalement avec des institutions françaises qui
n'enseignent absolument rien du Québec, et nos élèves arrivent au Québec et n'ont
pas droit au même bénéfice que ceux qui ont étudié dans des institutions
françaises. C'est un peu ça.
M. Derraji : Et je le vois.
Non, mais c'est très clair, c'est pour cela que... Parce que je pense que
l'essence même de votre présence aujourd'hui en commission : Allô, on
existe, on est privé, on n'est pas OBNL, le ministère ne veut pas travailler
avec nous, mais on existe, on veut qu'il travaille avec nous.
• (11 h 20) •
Le comble, c'est que, dans la
page 11, vous présentez un tableau comparatif qui explique très bien
l'exagération des coûts, si je peux dire, exagération de coûts, mais vous avez
le droit de parler de votre concurrent Alliance française au Brésil...
M. Derraji : ...total
6 511 $... 3 454 $. Et j'étais en train de réfléchir à
l'histoire de l'infirmière qui voulait venir au Québec, et que c'est le un
tiers de son salaire, et elle veut tout payer de ses poches. Mais venir au
Québec, il ne sait pas s'il va passer l'entrevue. Il va passer un test qui est
fait en France, pas au Québec, et, par la suite, il va perdre tout son argent.
Est-ce que j'ai bien résumé la situation?
M. Boire (Serge) : C'est un
peu ça, mais en même temps, nous, ce qu'on dit, c'est que ce n'est pas une
question, présentement, de parti politique. Je voudrais rappeler à tout le
monde autour de la table que ça fait au moins 25 ans que c'est comme ça,
peu importe les partis qui se sont succédés, alors ce n'est pas... Nous, on a
commencé en 2008 à des discussions avec le ministère de l'Immigration, et on
s'est fait toujours répéter la même chose : Écoutez, on est des
fonctionnaires, il y a un critère, puis nous, on doit le respecter. Alors,
nous, notre présence ici aujourd'hui, c'est vous mettre au fait de ce qui se
passe, et à vous maintenant de voir si tout ça fait du sens. À notre avis, ça
ne fait pas de sens.
M. Derraji : Oui. Bien, je
tiens juste à préciser que les questions, ce n'est pas pour... parti ou pas
parti politique. La question, c'est pour comprendre votre modèle d'affaires.
M. Boire (Serge) : Non, bien
sûr, bien sûr, bien sûr, mais je pense que ça...
M. Derraji : C'est vous...
Bien, c'est vous qui mentionnez le parti. Moi, je mentionne un fait. Le fait,
il est le suivant : c'est qu'il y a Francisation Québec. Tout le monde a
misé sur Francisation Québec. C'est une plateforme que vous-même vous saluez?
M. Boire (Serge) : Oui, tout
à fait. Oui, tout à fait.
M. Derraji : Elle est ouverte
à tout le monde.
M. Boire (Serge) : Oui.
M. Derraji : Oui. Je vais...
J'aimerais bien vous entendre sur les pays francotropes. Vous avez vu, suivi le
débat. Pour un ancien journaliste, je pense que c'est quelque chose que vous
suivez de près. Qu'en dites-vous quand on dit qu'on va juste cibler les pays
francophones, la portion qu'on doit prendre par rapport aux pays francotropes
ou francophiles? Comment vous vous situez dans ce débat?
M. Boire (Serge) : Bien,
merci pour la question, parce que c'est... ça fait l'objet de ce que je disais
un peu plus tôt. C'est que... Comme peut-être on ne savait pas qu'on existait,
je vais oser dire ça, puis qu'on a développé cette méthode-là, où on appelle ça
du recrutement proactif, hein, ce que j'ai expliqué un peu tout à l'heure. Si
on abaisse nos critères au niveau des exigences du français pour l'entrevue
d'embauche, je ne crois pas qu'il faut s'en aller uniquement dans les pays
francophones. Parce que si on met 10 mois à franciser quelqu'un, c'est le
même temps que ça prend environ pour la paperasse et tout le processus. Alors,
ce n'est plus un problème. On n'a... Particulièrement dans les pays
latino-américains qui ont une facilité d'apprendre le français parce que, bon,
le latin... c'est une langue latine, on n'a plus d'obstacles, et ça nous permet
d'avoir accès à tous les candidats qui sont excellents. Présentement, depuis
des années, la façon dont on fonctionne, c'est qu'on va accepter en entrevue
seulement ceux qui ont appris le français. Ce n'est pas tous les talents du
monde, ça. On se prive du 95 % des meilleurs talents à cause des exigences
au niveau de l'entrevue d'embauche. Et là les entreprises se retrouvent dans
des missions de recrutement où ils sont en guerre un contre l'autre pour un
candidat fantastique qui a le niveau de français au moment de l'embauche. Mais
ils oublient qu'au moment de l'embauche, là, il ne sera pas arrivé au Québec
tout de suite. Il va arriver dans 10 mois, dans un an. C'est le temps que
j'ai besoin, moi, pour le franciser. Alors, je pense qu'il faut juste revoir
notre approche, être un peu plus créatif, et là, je pense qu'on aura accès au
monde entier.
M. Derraji : Oui, mais quand
vous dites «créativité», ça veut dire que... baisser les exigences en français
au t1, genre, l'année 1, et que... permettre à ces candidats de suivre des
cours de francisation.
M. Boire (Serge) : Tout à
fait. C'est-à-dire... Parce que là, je veux que ça soit clair, je suis tout à
fait d'accord avec les niveaux de français qu'on exige pour venir au Québec,
hein? Je dis même que les infirmières ici, on l'a... nous, on l'a élevé nous
même. On avait mis ça au niveau huit, et ils sont rendus au niveau 10,
parce qu'on les accompagne jusqu'au Québec et on va revoir leur feed-back. On
s'est rendu compte que ce n'était pas suffisant. Ça prenait le niveau 10.
Ils parlent... ils sont avec des patients, alors...
M. Derraji : Oui. J'aimerais
vous entendre aussi sur le test en français.
M. Boire (Serge) : Oui.
M. Derraji : Je ne sais pas
si vous avez suivi...
M. Boire (Serge) : Bien sûr.
M. Derraji : ...un peu ce qui
s'est passé aussi. Pensez-vous qu'on doit continuer à orchestrer un test fait
en France?
M. Boire (Serge) : Bien non,
bien sûr. Bien sûr. Bien sûr que non. Nous, d'ailleurs, on est partenaire
avec... on a quelques contrats avec le ministère de l'Immigration, mais au
niveau de l'interprétation et du test des niveaux des candidats. Par exemple,
là, il y a une mission Journées Québec Brésil au mois de novembre. Il y en a
une au Mexique. C'est nous qui a reçu le contrat encore cette année de fournir
des interprètes entre les employeurs et les candidats. Donc, ce sont nos
enseignants qui s'occupent de ce lien-là pour être certains que la
communication est fluide. Et on va aussi tester les niveaux des candidats que
les entreprises sont intéressées...
M. Boire (Serge) : ...avoir en
entrevue pour dire à l'entreprise : Écoutez, c'est ça, son niveau réel,
hein? Parce qu'entre ce qu'ils disent et la réalité il y a souvent un pont.
Alors, pour répondre à votre question,
c'est évident que nous, on ne trouve pas non plus que c'est acceptable que tout
ce qui a rapport au français québécois soit encore fait à Paris.
M. Derraji : Oui. Dernière
question. Vous dites : «Créer un site national où les employeurs eux-mêmes
pourraient afficher des postes disponibles.» Pourquoi? Vous pensez que ça
manque à la structure actuelle?
M. Boire (Serge) : Bien,
nous, on est toujours en mode recrutement, parce que, je l'expliquais un peu
plus tôt, le gouvernement du Québec, Québec International, Montréal
International n'ont pas de budget payant pour faire la promotion du Québec.
C'est nous qui le font, en tout cas, en Amérique latine, depuis des années, on
prend de notre propre argent et on fait découvrir le Québec. Et c'est comme ça
qu'on réussit à attirer des candidats qui vont comprendre que, s'ils veulent
aller au Québec, il faut qu'ils apprennent le français.
Maintenant, un des outils qui nous
permettrait davantage d'attirer des candidats intéressants, c'est si on avait
une banque, un site qui permettrait à ces gens-là de voir qu'on ne fait pas
juste dire qu'il y a des emplois pour le dire, il y en a, des emplois, ils sont
disponibles, ils sont là, et ce serait... si c'était possible de créer une
banque comme ça, qui est actualisée, ça permettrait à tous les candidats, même
si on n'est pas en mission de recrutement, de savoir quels sont les postes
disponibles et qu'ils puissent poser leur candidature eux-mêmes aussi,
directement.
M. Derraji : Merci à vous.
M. Boire (Serge) : Merci à
vous.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Alors, je passe la parole, maintenant, à la députée de
Chomedey, pour 2min 7s.
Mme Lakhoyan Olivier : C'est
tellement intéressant, vous écouter, c'est vraiment différent sur tous les
autres groupes qu'on a écoutés à date. Et puis, vraiment, j'apprécie le fait
que vous avez pensé à aller ailleurs et franciser, mais en québécois. C'est
beau, entendre ça.
Moi aussi, je suis immigrante, de longue
date, je suis venue avec mes parents, et puis mes parents ne parlaient le
français, mais mon père avait un contrat... pas un contrat, mais il avait un
emploi qui l'attendait. Quel est votre... Je sais que, pour vous, c'est
important, la francisation avant d'arriver, mais quelle est votre opinion pour
ceux qui n'ont pas le choix mais qui aimeraient arriver ici sans être francisés
d'abord?
M. Boire (Serge) : Est-ce
qu'il y a quelqu'un qui aimerait... Parce que je pense que venant de...
Mme Santos Lanza Moura
(Lucianna) : ...c'est difficile. Nous qui sommes déjà francisés, c'est
un parcours difficile, j'imagine qui arrive sans français, c'est... C'est non.
Si je peux dira ça, c'est non, parce que c'est comme mon collègue a dit, moi,
j'ai fait la francisation avant d'arriver ici, mais mon conjoint, il ne fait
pas. Et notre processus, c'est difficile, au début, parce qu'on doit comprendre
l'accent québécois en plus et on a toute la responsabilité de parler pour notre
conjoint, de faire des choses, de l'intégrer, je parle pour mon conjoint, et
c'est une responsabilité énorme.
M. Boire (Serge) : Ça crée
des tensions aussi.
Mme Santos Lanza Moura
(Lucianna) : Oui. Moi, ils m'intégraient aussi au milieu de travail.
C'est difficile quand même.
Une voix : Juste pour... si
je peux prendre la parole. Si vous me permettez...
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : ...imparti à l'opposition et terminé, mais il reste quand
même une dernière portion d'échange avec le député de Saint-Henri-Sainte-Anne,
4min 8s. Le temps est à vous.
M. Cliche-Rivard : Merci. Je
voulais juste être certain de bien comprendre. Vos élèves arrivent ici avec la
résidence ou avec un permis de travail fermé?
M. Boire (Serge) : Avec un
permis de travail. Ça dépend. Ça peut être des temporaires, ça peut être. Bien,
je vais laisser Michel...
M. Bertrand (Michel) : Ça va
être des permis de travail ouverts ou fermés.
M. Cliche-Rivard : O.K., donc
il n'y a personne qui est présélectionné, là, qui arrive directement avec la
résidence permanente. Vous n'avez pas ça dans votre bassin, non?
M. Bertrand (Michel) : Non.
M. Cliche-Rivard : Parfait.
Vous parlez donc que vous vous destinez à un niveau de français, là, dans...
aux examens, mais avec l'examen français, vous n'avez pas le choix, donc votre
cursus doit nécessairement être influencé en vertu du test. Vous n'avez comme
pas le choix de les préparer à cet examen-là.
M. Boire (Serge) : Oui. On le
fait au moment... On ne prend pas ça en compte dans notre matériel, mais on a
des sessions préparatoires aux tests, où, là, on les remplit d'audio de la
France.
M. Cliche-Rivard : O.K. C'est
quoi la spécificité? C'est quoi la différence, vraiment?
• (11 h 30) •
M. Boire (Serge) : Bien, il y
a plusieurs expressions, il y a plusieurs, bon... Et je pense que c'est un fait
connu que ce n'est pas facile, même pour un Québécois, de passer ce test-là.
Alors, on essaie de faire tout ce qu'on peut pour les franciser, les
européaniser au moment du test, mais c'est... bon, on s'entend, c'est quand
même...
11 h 30 (version non révisée)
M. Boire (Serge) : ...une
incongruité qui devrait être réglée.
M. Cliche-Rivard : Parce qu'on
l'a dit, bon, ça fait longtemps que c'est ça. Moi, je pense que ça se
travaille, mais c'est difficile quand même à comprendre à quel point cette langue-là
ou, en tout cas, vous l'avez dit, là, on... vous québécisez, là, à quel point c'est
différent puis à quel point, finalement, on pousse des gens vers une
francisation qui n'est pas du tout adaptée à notre réalité québécoise. Je veux
dire, vous qui l'enseigner sur le terrain, puis on n'a pas beaucoup de temps,
tu sais, mais j'aimerais ça vraiment que vous nous le fassiez sentir ou
comprendre, cette différence-là, à quel point, c'est vraiment le jour et la
nuit.
M. Boire (Serge) : Bien, ce l'est,
et je veux dire, on en parlait en déjeunant ce matin, et elle me dit :
Écoute, Serge, je suis arrivée à Montréal, je comprenais tout parce que j'ai
étudié à l'École Québec puis là je suis arrivé à Québec, je ne comprenais plus
rien. Alors, juste un accent différent d'une ville, et je vous dirais que si
nous, on avait à se spécialiser, il faudrait aller chercher l'accent bleuet, il
faudrait prendre tous les accents régionaux et les intégrer dans notre
méthodologie parce que même ça, on n'est pas... Alors, imaginez quand ils
sortent d'une Alliance française où on parle le français européen, même si on
met dans une Alliance française une méthodologie québécoise, le professeur qui
est là, il est européen et il parle de croissant comme ça. Alors, ça ne donne
rien quand on arrive au Québec comme ça, hein, mais c'est un peu ça.
Mme Santos Lanza Moura (Lucianna) :
J'ai découvert le Québec à travers l'École Québec. C'est ça. Ma vie...
M. Cliche-Rivard : Pas avant
ça.
Mme Santos Lanza Moura (Lucianna) :
Non, non, jamais. Et si je peux dire une chose, c'est que j'ai fait
français à une autre école, mais je suis arrivé au niveau B2 quand j'ai
étudié à l'École Québec. Et j'ai fait les tests de connaissances de français
québécois et j'ai réussi le niveau B2.
M. Cliche-Rivard : Est-ce que
vous, vous remarquez ou vous frappez... Il y a des échecs qui ne devraient pas
arriver, est-ce que vous le voyez ça, dans le sens où ils sont vraiment
meilleurs que ce que le papier va dire?
M. Boire (Serge) : Bien sûr,
bien sûr, mais je vous dirais que, sans être revanchard, notre taux d'échec est
très, très, très bas.
M. Cliche-Rivard : Je
comprends, mais vous pouvez, donc, avec cette expertise-là, constater qu'on
perd des talents francophones qui sont...
M. Boire (Serge) :Tout à
fait. Tout à fait. Tout à fait. Oui. Et c'est un débat qui dure depuis trop
longtemps, qui dure depuis trop longtemps.
M. Cliche-Rivard : Il faut le
régler. En terminant, volonté d'expansion, vous me parlez beaucoup du Brésil.
Tant mieux. Vous avez dit, vous êtes en ligne, mais une École Québec ailleurs,
c'est dans les plans?
M. Boire (Serge) : Bien,
écoutez, moi, je vous disais tout à l'heure que je ne suis absolument pas un
capitaliste et un... Quand j'ai entendu le projet Francisation Québec, je me
disais qu'à un moment donné, il faudrait peut-être qu'on se parle, parce que le
Québec a besoin, pour assurer son avenir linguistique, son avenir culturel, de
se doter de son propre service de francisation. Et nous, je pense qu'on a fait
un très bon bout de chemin dans ça.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup. Le temps est malheureusement épuisé. Il me
reste à vous souhaiter un bon dîner, peut-être une petite poutine ici dans la
ville de Québec.
Une voix : ...
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Oui. Et vous... Oui, des crottes de formage. Et vous
remercier pour l'apport à nos travaux. Merci beaucoup. Alors, nous allons
suspendre quelques instants le temps de recevoir le prochain groupe.
(Suspension de la séance à 11 h 33)
12 h (version non révisée)
Mme Battisti (Natacha) : ...personnes
réfugiées qu'on doit soutenir davantage. Alors, c'est là que les enjeux, nous,
c'est dans les enjeux directs. Et, quand je le mets en ouverture qu'on
surcharge nos intervenants, parce que c'est toujours ce petit lien là de plus
qu'on doit donner à la personne qui arrive sur ces enjeux-là juste d'administration
ou juste d'inscription. Nous, ça nous amène un enjeu sur la tâche à donner
après à nos, à nos intervenants et... Puis là c'est un exemple trop évident par
rapport à Francisation Québec, mais nos partenaires aussi nous demandent de les
aider parce qu'ils n'ont pas de ressources. Alors là, on vit la difficulté de
cet enjeu-là, par exemple.
• (12 heures) •
Par rapport à l'intégration, on le
nomme... on l'a nommé à l'intégration des personnes qui ont des difficultés,
puis ça a été assez clair, tout à l'heure, avec l'exposé, que, quand les gens
ne parlent pas français dès leur arrivée, vivent un enjeu d'intégration. Dans
les dernières années, on a apprécié, surtout pour les réfugiés, mais on le voit
aussi, le désir de le développer, de laisser... Avant, on avait un mandat de
sept jours pour accueillir les réfugiés, pour pouvoir les installer dans un
appartement, au niveau du mandat du MIFI, à cause de la pandémie, on est rendu
à 14 jours, et là une ouverture à 21 jours. Donc, nous, on apprécie
parce qu'on voit les réfugiés se déposer, prendre le temps... Parce que toute l'action
administrative, pour nous, ça nous a amené beaucoup plus de délais. Puis, vous
le voyez, que ce soit la demande de RAMQ, que ce soit l'ouverture de compte
bancaire, on a des délais supplémentaires, Services Québec, Service Canada. Et,
à ce niveau, on n'est pas capable de rendre l'administratif plus rapidement.
Donc, c'est plus difficile pour nous, de
les installer, par exemple, dans des appartements. Et on vit l'enjeu pour des
travailleurs temporaires. On est interpellés à différents niveaux à ce
niveau-là, mais l'enjeu administratif, aussi, a fait que la capacité d'intégration
rapide des personnes est plus longue. Alors, il faut nous laisser vraiment sur
le terrain plus de temps pour pouvoir faire les meilleures actions. Dans les
dernières années aussi, le centre multiethnique et les Habitations, on a mis
une intensité directe aux réfugiés et l'intensité a eu un effet. Ça veut dire
qu'on a pris les stratégies du CIUSSS de la Capitale-Nationale, je proviens de
la santé, et, quand on met une intensité à la bonne place, les gens développent
leur autonomie plus rapidement. On a joué cette stratégie-là et on a vu,
justement, des façons dans les familles à améliorer... à s'améliorer, à s'intégrer
et avoir une autonomie dans leurs actions.
Une voix : Merci.
Mme Battisti (Natacha) : Aline
ou Richard.
M. Gorman (Richard J.) : Pour
compléter, en ce qui concerne la différence entre, par exemple, la région de la
Capitale-Nationale et les autres régions du Québec, c'est clair que la
Capitale-Nationale n'est pas une région rurale comme d'autres régions, mais la
régionalisation n'est pas que l'immigration rurale. Ça fait au moins 30...
depuis 30 ans qu'on parle de régionalisation de l'immigration, depuis le plan 91-94,
si je ne me trompe pas, puis on a toujours le même taux de concentration des
immigrants dans la région métropolitaine. Les pistes de solution incluent,
entre autres, la sensibilisation que Mme Battisti a mentionné et aussi le
continuum de services d'avoir... d'accroître l'accessibilité de services en
région, et ça inclut la région de la Capitale-Nationale.
Mme Fréchette : Mme la Présidente,
je vais céder la parole à des collègues.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci, Mme la ministre. Je me tourne du côté de la députée
de Vimont. Il vous reste trois minutes, 46 secondes.
Mme Schmaltz : Parfait.
Merci, Mme la Présidente. Merci à vous trois d'être présents. Peut-être... Je
veux juste renchérir au niveau de vos inquiétudes concernant la lutte contre le
racisme, la discrimination. Peut-être juste vous rappeler que nous avons quand
même un ministre qui est responsable de la lutte au racisme. Alors, c'est quand
même une création que le gouvernement a fait pour justement se pencher sur ces
questions. D'ailleurs, au mois d'août, cette année, on s'est engagés à la
création d'un bureau permanent, justement, pour la lutte contre le racisme,
mais à la grandeur du Québec.
Alors, c'était juste une petite... un
petit aparté. Alors, je vais retourner dans votre mémoire, où vous recommandez,
justement, la mise en place d'un lieu interculturel, justement, pour échanger
avec tous les citoyens, ce qui me permettrait évidemment d'avoir peut-être une
meilleure compréhension. Est-ce que vous avez des exemples à nous donner?
Mme Battisti (Natacha) : Actuellement,
on est sur le projet d'Espace bleu. Depuis trois ans, on travaille avec le musée
de la Civilisation, entre autres, sur des expositions, où on... Je pense,
autant des Québécois, ils nous ont demandé d'intégrer avec eux la vision de l'immigration
à l'intérieur de leur exposition. Donc, c'est vraiment le partage du culturel,
je pense, qu'il faut immiscer Donc, quand je vous parle de faire des...
Mme Battisti (Natacha) : ...avec
différents milieux ministériels, c'est ça aussi, mais sur le terrain, ils nous
connaissent donc ils nous... ils nous cognent à la... ils viennent nous voir.
Mais il y a les espaces bleus qu'on travaille avec eux, avec le Musée de la
civilisation. On travaille aussi avec la ville, en lien avec la Maison de la
diversité, là, il y a eu encore... mais il y a des choses qui se passent là. Et
on est conscient aussi, la vision de la ville par rapport aux bibliothèques. La
bibliothèque Gabrielle-Roy, qui est en rénovation, va être aussi un lieu
d'accueil, mais on comprend qu'il y a de plus en plus l'ouverture. Mais, si on
se... quand je nomme ça, c'est que l'idée, c'est autant par rapport à la lutte
par rapport à ces lieux-là d'accueil, qu'on... C'est sûr que vous devenez... le
ministère doit avoir une vision transversale de tous ces canaux-là pour nous
assurer que, nous, sur le terrain... Ce n'est pas moi qui vais monter, vous
comprenez, à la porte du bureau de coordination ou... il y a comme des actions
transversales qui doivent se faire ensemble, donc. Mais il faut que vous soyez
sensibilisés quand même que la lutte... je comprends, de tutes les actions, je
les vois, on les vit, on est interpellé sur toutes les actions de la lutte,
mais on est vraiment, là... la pandémie à créer un... quelque chose
d'exponentiel par rapport à la discrimination. Et c'est à différents niveaux.
Ça fait que je pense qu'on l'a fait aussi à la dernière... aux dernières
recommandations. Ce n'est pas seulement de passer des publicités de la
diversité à travers les villes, à travers les pubs à la télé, mais je pense
qu'il y a une sensibilisation de travailler directement sur des actions, puis
que... oui, je le comprends, que ça passe par le pacte, je comprends que ça
passe... mais, si vous nommez que c'est important pour vous parce qu'on veut
travailler l'intégration, on veut travailler, il faut diminuer ces préjugés-là.
Ça devient un mot pour tous, vous comprenez? C'est un peu là que je veux...
vous comprenez l'engagement à travers ça.
Mme Schmaltz : Nous avons
déjà...
Mme Battisti (Natacha) : Oui.
Mme Schmaltz : ...des
ententes avec les autres ministères, notamment le ministère de la Famille,
justement pour les haltes communautaires dans l'apprentissage, là, de la
francisation. Donc, effectivement, ce que vous nous ramenez, on le fait déjà.
Tantôt, quand j'ai mentionné le ministre responsable de la lutte au racisme,
c'est une question aussi qui est importante à vos yeux, qui est importante
aussi pour le MIFI. Donc, oui, il y a du travail qui se fait entre les
ministères.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci, Mme la députée, cette portion d'échange vient de se
terminer. Je me tourne du côté de l'opposition avec la députée de... non avec
le député d'Émile Nelligan,12 min 23 s., le micro est à vous.
M. Derraji : Merci, Mme la
Présidente. Merci à vous trois pour votre présence. J'ai lu le mémoire, et, à
la lumière de vos réponses, j'ai le goût de vous poser une question sur la
force des mots. On a une universitaire autour de la table, on a des experts sur
le terrain. Et, vous savez, le débat de l'immigration, surtout les dernières années,
a été marqué par des mots. Donc, on peut bien parler des structures contre le
racisme et de politique publique, mais les mots ont une force. Et du moment que
vous êtes sur le terrain, pouvez-vous nous dire c'est quoi, l'impact des mots
prononcés par des politiciens qui stigmatisent l'immigration, parfois qui
parlent de la régionalisation, parfois qui parlent de la francisation, parfois
qui ramènent des mots qui sont très durs à absorber pour M. et Mme
Tout-le-monde?
Mme Battisti (Natacha) : Bien,
pour nous, actuellement, là, l'enjeu... puis là c'est... le fait, je veux le
dire comme ça, là, le fait d'être un organisme de proximité, les gens se
tournent beaucoup vers nous actuellement sur... puis là, je parle des gens, ce
n'est pas seulement les personnes immigrantes, c'est des partenaires aussi. Et
parce qu'il y a des enjeux, parce que la difficulté, puis là je vous le nomme,
là, mais c'est notre expérience. Actuellement, on est avec l'OMHQ dans un
bâtiment au 200, rue Dorchester. On a nos... notre lieu et on est dans un
bâtiment où est-ce qu'il y a du vivre ensemble. Mais ça n'enlève rien que...
juste dans notre bâtiment, le vivre ensemble n'est pas facile, parce qu'on a
différentes clientèles. On a notre clientèle et l'OMHQ, mais il faut souvent se
parler entre nous et l'OMHQ juste pour travailler le vivre-ensemble. Puis on...
je vous parle d'un bâtiment, puis on est sensibilisé à cette action-là.
• (12 h 10) •
Alors, pour nous... les mots, je le
comprends, là, quand vous me dites : Il y a une force. Qu'est-ce que les
gens comprennent aussi par rapport aux actions? Et on voit de la
discrimination, même juste dans notre building. On fait du déménagement, des
fois, des gens qui arrivent, on les monte au deuxième ou troisième étage sur
nos étages, et souvent juste dans notre building, on a deux ascenseurs un pour
le CMQ, un pour le HMQ Ça veut dire que... un pour l'OMHQ, un pour nos
habitations...
Mme Battisti (Natacha) : ...la
clientèle ne prennent même pas le même ascenseur. Ça a été construit comme ça à
l'époque. Donc, quand je nomme ça, c'est des petits gestes, puis là c'est à
nous à faire des choses, mais c'est des petits gestes et des petits mots, mais,
sur le concret, nous, les gens, quand ils se tournent vers nous puis qu'ils
vivent des situations, puis là que ce soit à travers des employés, que ce soit
à travers des partenaires, des voisins, on voit de plus en plus ces
difficultés-là d'intégration de nos personnes autour de nous parce que nous,
ils viennent nous cogner à la porte, ils disent : Qu'est-ce que je fais
avec ça? C'est quoi, la possibilité que le propriétaire ne peut pas faire ça,
mais... C'est que ça rajoute, nous, à notre mandat des cas à suivre plus
complexes, et on doit s'arrimer, tu sais... j'allais dire à travers des liens
avec nos partenaires.
M. Derraji : Est-ce que vous
êtes outillés? Est-ce que vous...
Mme Battisti (Natacha) : Bien,
c'est certain qu'il nous manque certains éléments sur le terrain. Quand on dit
outillé, c'est de la formation, puis je pense qu'on est allé un peu là. Quand
on parle de la concertation, il y a des formations, il y a des choses. Dans
l'interculturel, on est outillés, tout à fait, hein, on est là-dedans. Dans
l'arrimage avec la santé, on est outillés, mais il y a des choses qu'on l'est
moins.
M. Derraji : Par exemple,
discrimination, problèmes de racisme, pensez-vous que vous êtes outillés?
Mme Battisti (Natacha) : Bien,
on travaille beaucoup avec nos partenaires sur la situation. Je pense qu'il
faut y aller à différents paliers, hein? Comme vous le nommez, il y a les gens
sur le terrain puis, après ça, il y a les organisations, l'engagement de
chacune des organisations. Ce n'est pas seulement... Je vais le nommer comme
ça, mais quand j'embauche une nouvelle personne dans mon organisation, je vais
leur demander : Signez que vous ne ferez pas de harcèlement, on a une
petite politique de : Je ne fais pas de harcèlement, je vais parler
correctement à mes collègues, je vais parler correctement, mais c'est au-delà
de juste faire signer, une politique, vous comprenez? Comment je vais faire
vivre de l'intérieur ces éléments-là? C'est un peu, dans cette vision-là, je
vous dirais, là, que le centre multiethnique désire se positionner aussi. Mais
on n'est pas seulement expert, vous comprenez, il y a d'autres experts dans...
Et on fait partie, justement, du comité de polarisation de la ville de Québec,
on est vraiment sur les différents paliers pour arriver à assurer des choses,
mais nous, on le voit parce que les familles nous parlent des situations que
leurs enfants vivent à l'intérieur des écoles. On va le nommer à travers nos
intervenants, on va le nommer à la direction, mais, après ça, les parents
peuvent nous ramener certains éléments, qui fait qu'ils ne se sentent pas bien
accueillis.
M. Derraji : Oui. Dans votre
rapport, vous parlez beaucoup de préparer les milieux d'accueil à recevoir les
immigrants en amont afin de faciliter leur intégration dans la communauté. Vous
êtes des experts sur le terrain de la capitale nationale, si j'ai bien compris.
Mme Battisti (Natacha) : Oui.
M. Derraji : Uniquement la
capitale nationale, pas Chaudière-Appalaches?
Mme Battisti (Natacha) : Juste
capitale nationale.
M. Derraji : Oui. Quel est
votre constat? Parce qu'on parle beaucoup de la régionalisation. Quel est votre
constat de l'état des lieux? Est-ce qu'on arrive vraiment à ce que, peu importe
le jeune qui vient à l'université pour étudier ou le jeune travailleur
professionnel qui vient à la ville de Québec pour s'installer... Vous avez vu
que, ce matin, on a parlé du regroupement familial. Ça prend trois ans,
maintenant, et tout le monde souhaite, autour de la table... tout le monde
parle de la régionalisation, tout le monde veut de la régionalisation, tout le
Québec, pas uniquement les parlementaires.
Quand vous voyez des problèmes liés au
regroupement familial, des délais, des longs délais au niveau de la résidence
permanente, des procédures longues, pensez-vous que vraiment les ingrédients
sont là pour favoriser la régionalisation, mais, au-delà de la régionalisation,
garder les gens qui choisissent la capitale nationale au niveau de la capitale
nationale, et non pas partir ailleurs, exemple, revenir à Montréal?
Mme Battisti (Natacha) : Aline,
veux-tu... as-tu une opinion?
Mme Lechaume (Aline) : Est-ce
que tous les ingrédients sont là? Certainement pas. Est-ce qu'on peut faire
mieux? C'est tout à fait évident. Je pense qu'aussi il y a effectivement encore
beaucoup de besoins d'information et de formation de la part de tous les
intervenants sur le terrain, et, dans ce sens-là, dans toutes les institutions.
Ce n'est pas seulement pour les personnes qui sont des intervenants ou
intervenantes dans des services directs aux personnes immigrantes, donc de
soutien et d'accompagnement des personnes immigrantes, mais, également, je
pense à la santé, aux services de garde, en éducation, etc. Donc, ça, on
aura... Il est nécessaire qu'il y ait davantage, là, de formation à tous les
niveaux et dans toutes les sphères de la vie des personnes. Au-delà des mots,
je...
Mme Lechaume (Aline) : ...Associe
concrètement toutes les formes de discrimination qui vont être plus
structurelles du fait qu'on demande... Par exemple, on parlait tout à l'heure,
simple exemple, là, de l'accès à des bibliothèques. Demander à quelqu'un son
bail pour pouvoir avoir une carte de bibliothèque, bien, ça, ça renvoie nombre
de personnes, notamment à statut précaire ou, par exemple, de femmes qui sont,
par exemple, en situation d'hébergement aussi temporaire, à leur précarité.
Et donc, je pense qu'il y a aussi beaucoup
d'éléments qui pourraient être améliorés au sein des structures. On a pensé,
notamment, là, dans un des projets de recherche, à avoir tout simplement une
carte de résident de la ville qui ne serait pas juste pour les personnes
immigrantes, mais pour toutes les personnes. C'est un petit geste qui serait
très concret, assez facile à obtenir, mais qui permettrait justement à tout le
monde de prouver juste d'être résident de la ville et d'avoir ainsi accès à un
certain nombre de services, là, municipaux sans avoir toujours à répéter son
histoire, à expliquer qu'on est nouvellement arrivé avec un statut particulier,
et cetera. Donc, il y a plein de choses qu'on peut faire, je pense, autant dans
la formation que dans des éléments plus structurels, là, et concrets.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci. Je reconnais maintenant la députée de Chomedey.
Trois minutes 20 secondes.
Mme Lakhoyan Olivier : Bonjour.
J'ai vraiment aimé vous écouter, mais surtout vous lire. J'adore le côté que...
Vous mettez l'emphase sur l'humanitaire. Donc, c'est une approche humaine, et
ça date de longue date. Vous êtes une grande équipe, 65 personnes,
65 ans l'année prochaine et 65 personnes. Et je vous écoutais tantôt
pour les chiffres, il me semble, 397, 500, 1 700, j'ai calculé, c'est du
beau monde. Comment ces gens-là vous trouvent pour recevoir le service?
Mme Battisti (Natacha) : Bien,
on... Les réfugiés sont... Vous savez, en ayant le mandat, ils viennent nous
voir directement. Mais on est vraiment... je vous nommerais, exemple, je vous
donne l'exemple, là, les demandeurs d'asile maintenant, bien, les postes
frontaliers nous nomment, nous nomment, donc... Et pourquoi? Parce qu'on a
l'avantage d'avoir des habitations.
Mme Lakhoyan Olivier : Ça,
c'est magnifique, oui.
Mme Battisti (Natacha) : Ça,
c'est la... Mais ça nous amène des enjeux. On revient à ça. Je n'en ai pas
assez pour répondre aux besoins. Puis ce n'est pas de répondre aux besoins à
tous. L'idée, c'est qu'on fait... on... Puis là, je n'ai pas le choix, je
prends les situations de cas les plus... Les situations de cas plus
particuliers. Mais il faut s'assurer justement d'un hébergement. Et je ne veux
pas alerter, mais on est là aujourd'hui, actuellement. On devra discuter avec
la Ville, mais il faut plus d'hébergement.
Parce que ma crainte... Actuellement, le
8-1-1 réfère chez nous des gens qui ont des enfants et qui n'ont pas d'argent
pour pouvoir aller à l'hôtel, puis, si on ne les prend pas en charge, ils vont
glisser vers... puis là, je dis le grand mot, «itinérance». Mais vous comprenez
que maintenant... Je le voyais, les dernières années, vers des situations de
cas où c'est des cas complexes de santé, difficulté d'adaptation, mais
maintenant, c'est des nouveaux arrivants. On ne le voyait pas, les dernières
années, autant. Et un peu... En ce moment, là, j'ai... dernièrement, dans les
deux dernières semaines, j'ai eu quatre situations qui m'ont été proposées par
le CIUSSS, de les prendre. Alors, vous comprenez, c'est là la complexité par
rapport à l'accueil, par rapport à nous assurer où on est rendus aujourd'hui.
Je n'irai pas plus loin.
Mme Lakhoyan Olivier : Mais
déjà qu'on a une crise de logement, un manque de logement dans la province,
dans les quatre coins, donc, en plus, le besoin de pouvoir donner les services
que vous aimeriez donner, humanitaires, et essayer de trouver de la place pour
tout le monde, je comprends, c'est tout un défi. On vous entend, ça, c'est sûr.
Vous avez mentionné sur... À la page sept,
que «son engagement du Québec humanitaire et son exemple de soutien dans le
processus de réinstallation lui valent une réputation internationale quant à
son modèle d'accueil de ces populations vulnérables». Pouvez-vous élaborer
là-dessus?
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Rapidement.
Des voix : ...
M. Gorman (Richard J.) : Plus
de temps?
Mme Battisti (Natacha) : Rapidement,
rapidement.
• (12 h 20) •
M. Gorman (Richard J.) : Oh!
Bien, j'allais juste dire que l'accueil humanitaire...
M. Gorman (Richard J.) : ...c'est
la population la mieux répartie sur le territoire, donc ça participe à la
régionalisation de l'immigration, mais il nous est parfois difficile de
desservir cette population parce que ce n'est pas tous les immigrants qui
rentrent dans des cases faciles, donc ils rentrent dans une catégorie donnée.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : C'est terminé. Merci beaucoup. Alors, on va terminer
maintenant cette période d'échange pour 4 min 8 s avec le député de Saint-Henri
Sainte-Anne.
M. Cliche-Rivard : Merci
beaucoup. Merci énormément pour votre travail. Je veux revenir à la
recommandation 1 sur l'augmentation progressive dans l'engagement
humanitaire. Est-ce que vous, vous faites aussi du parrainage privé de
réfugiés? Non, vous n'en faites pas.
Mme Battisti (Natacha) : Pas
du tout.
M. Cliche-Rivard : Et est-ce
que vous êtes... est-ce que vous avez une position là-dessus, sur la hausse? Je
sais qu'on accueille, quoi, autour de... entre 1 500 et 2 000
annuellement avec nos quotas. Est-ce que vous avez une position sur
l'augmentation de ce volet-là ou pas vraiment?
Mme Battisti (Natacha) : Pour
le parrainage?
M. Cliche-Rivard : Privé,
oui, de réfugiés?
Mme Battisti (Natacha) : On a
des enjeux, mais...
M. Gorman (Richard J.) : Il
nous est difficile de desservir justement les réfugiés parrainés parce qu'ils
ne sont pas pris en charge par l'État.
M. Cliche-Rivard : Je
comprends.
M. Gorman (Richard J.) : Alors,
même quand il y a des lacunes dans les services ou dans leur accueil, quand ils
viennent, par exemple, au centre multiethnique, il nous est difficile, voire
parfois impossible de les servir.
Mme Battisti (Natacha) : Bien,
nous, on reçoit... puis là je vous le nomme comme ça, on ne fait pas de privé,
parrainage privé, mais c'est sûr que quand ça se complexifie, le parrainage
privé, on va aider à solutionner.
M. Gorman (Richard J.) : On
ne ferme la porte à personne.
M. Cliche-Rivard : Je
comprends. Recommandation 4, vous parlez de situation de statut précaire,
est-ce que vous avez avancé une proposition sur une régularisation de statut?
Ça se discute beaucoup au fédéral. Est-ce que vous avez une position là-dessus?
Mme Battisti (Natacha) : Bien,
on... Je vais laisser Aline... parce qu'Aline...
Mme Lechaume (Aline) : Bien,
c'est certain que la régularisation, là, des statuts permettrait justement aux
personnes de sécuriser leur parcours. On se retrouve dans des situations
extrêmement complexes et, parfois, à partir d'éléments très simples, je pense à
la complexité de compléter un formulaire, tout simplement, ou ne pas l'avoir
fait à temps va faire tomber, donc, un statut et une personne, notamment dans
les situations temporaires, se retrouver dans un statut extrêmement précaire,
alors qu'au bout du chemin la personne pourra peut-être obtenir la
régularisation de son statut. Mais tous ces délais entre perdre son statut et
la régularisation de son statut vont entraîner un parcours extrêmement
anxiogène pour les personnes, vont être aussi demandant pour les services
d'accompagnement. Et tout le monde est perdant, finalement, dans cette
situation-là et on entrave vraiment les trajectoires des personnes, comme je le
disais tout à l'heure, là, à court terme comme à long terme, en fait.
Mme Battisti (Natacha) : Je
veux juste ajouter... J'allais dire : Les statuts précaires pour nous,
hein, c'est les travailleurs temporaires qui ont des permis fermés, on
s'entend, des étudiants où est-ce qu'il vit une dépression puis il va glisser
vers une incapacité à continuer ses études. On voit tout ça, là, nous, à chaque
année, à chaque situation. Alors, pour nous, c'est d'essayer de régulariser davantage,
de leur donner... tu sais, de comprendre. Puis là, je peux...
M. Cliche-Rivard : Donc, vous
voulez dire pérenniser leur statut permanent.
Mme Battisti (Natacha) : Tout
à fait. Le plus important, c'est d'aller chercher le plus rapidement possible
un statut qui va leur permettre favorablement la résidence permanente qui est
une solution pour nous le plus rapidement possible et éviter les permis fermés.
Je comprends l'implication des employeurs financièrement, je comprends tout ça,
mais on pourrait... Parce que quand on fait un permis fermé... L'autre chose
qui est intéressante, c'est de voir avoir des pratiques d'intégration de ces
employeurs-là pour ne pas mettre à l'écart leurs employés au système. On voyait
justement dans les recherches dernièrement, que ce soit dans le domaine
maraîcher, il y a quelques personnes qui allaient voir la santé, mais
l'employeur est avec lui, avec le médecin parce qu'il parlait... Ça fait que,
là, c'est des petites choses. Mais il faut juste se dire : C'est quoi,
les meilleures pratiques pour un employeur? Et l'employeur, s'il a les
meilleures pratiques, que ce soit un permis ouvert, il n'y aura pas peur de le
perdre, son nouvel employé, même s'il vient de l'international. Ça fait que
c'est juste de travailler ces liens-là parce que je crois qu'on est capable de
développer des meilleures pratiques et de continuer les augmentations.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Sur ce, je dois terminer cette audition. Merci. Mmes, MM.,
merci beaucoup pour votre apport à nos travaux, et je suspends la commission
jusqu'après les avis touchant les affaires courantes. Merci.
(Suspension de la séance à 12 h 25)
15 h (version non révisée)
(Reprise à 15 h 16)
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : À l'ordre, s'il vous plaît! La Commission des relations
avec les citoyens reprend ses travaux. Alors, cet après-midi, nous poursuivons
les auditions publiques dans le cadre de la consultation générale sur le cahier
de consultation intitulée La planification de l'immigration au Québec pour la
période 2024-2027.
Pour cet après-midi, donc, nous allons
entendre les personnes et les organisations suivantes : la Table de
concertation des organismes au service des personnes réfugiées et immigrantes,
que j'ai devant moi. Ensuite, nous allons entendre le Regroupement des
organismes du Montréal ethnique pour le logement, le Réseau des organismes et
groupes de parrainage des réfugiés au Québec, ainsi qu'Éducation
internationale.
Alors, bienvenue à la Commission des
relations avec les citoyens. Donc, pour ce groupe, qui est, je le répète, la
Table de concertation des organismes au service des personnes réfugiées et
immigrantes, bienvenue. Vous allez bénéficier d'une période de 10 minutes
pour présenter vos recommandations, mais je vais aussi vous demander de vous
présenter pour le bénéfice de tous les parlementaires. Ensuite, nous allons
engager une période de discussion. Alors, le temps commence maintenant pour
vous.
M. Reichhold
(Stephan) :Alors, merci, beaucoup, Mme la
Présidente, Mme la ministre...
M. Reichhold
(Stephan) :...messieurs, mesdames les
députés, donc, je me présente, je suis Stephan Reichhold, directeur de la Table
de concertation des organismes au service des personnes réfugiées et
immigrantes, communément appelée TCRI aussi, ça va être plus facile, et mes
deux collègues... je suis accompagné de mes deux collègues, que je vais laisser
se présenter. Vas-y, Lida.
Mme Aghasi (Lida) : Oui.
Bonjour. Mon nom, c'est Lida Aghasi, je suis coprésidente de la table de
concertation, la TCRI, et la directrice générale de Centre social d'aide aux
immigrants, organisme situé à Montréal, avec 76 ans d'expérience auprès des
personnes immigrantes et réfugiées prises en charge par l'État surtout.
Mme Toulouse (Sarah) :
Bonjour.
Moi, je me nomme Sarah Toulouse. Moi, je suis administratrice de la TCRI. Je
suis directrice générale d'Accueil Intégration Bas-Saint-Laurent, qui est à
Rimouski, on couvre Rimouski-Neigette et La Mitis, donc. Merci.
M. Reichhold
(Stephan) :Alors, merci beaucoup de nous
accueillir, de nous donner l'occasion de nous exprimer sur le plan, sur la
planification. Donc, la TCRI, comme vous avez pu le voir, ceux qui sont moins
familiers, on regroupe 152 organismes communautaires à travers le Québec, qui
oeuvrent auprès des personnes réfugiées immigrantes et sans statut. Vous avez
certainement pris connaissance de notre mémoire et de nos recommandations, nos
35 recommandations.
Ce que nous souhaiterions en fait, c'est
de passer immédiatement aux questions et au dialogue pour avoir plus de temps
au niveau des échanges avec les élus et pour faire durer le plaisir. Alors, je
ne sais pas si c'est possible de tout de suite engager les questions et les
échanges, puisque vous avez pris connaissance, j'imagine, avec soin, de nos
recommandations.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Alors, la demande est... En fait, je dois me tourner du
côté de mes collègues membres de la commission. Est-ce que vous autorisez qu'on
repartage le temps? Autorisation? Parfait. Alors, on va d'ores et déjà
commencer. On va partager le temps, je vais vous le donner en cours de route.
Alors, je me tourne du côté de la banquette du gouvernement. Alors, Mme la
ministre.
Mme Fréchette : Je cherche la
banquette.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : La banquette, elle est très confortable, quand même.
Mme Fréchette : Oui, oui,
très confortable, pour une banquette.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : On passe plusieurs heures ici. Alors, la parole est à vous.
Je vous donnerai le temps, comme je vous disais, dans les prochaines secondes.
Mme Fréchette : Merci Mme la
Présidente. Alors, merci, M. Reichhold, merci à vous trois de prendre part à
l'exercice et de donner du temps aux échanges. C'est souvent ce que l'on
souhaite. Alors, on va en profiter. On avait plusieurs questions déjà
d'identifiées pour vous alors.
Alors, bien, d'une part, j'aimerais, en
fait, saluer le travail qui est réalisé par l'ensemble de vos membres et par
vous-même. C'est un travail exemplaire, un travail d'une grande importance,
d'accompagnement, d'accueil de nos personnes immigrantes. Et, vraiment, je vous
lève mon chapeau, parce que ça a été beaucoup de travail qui a été réalisé par
vous, par vos membres au cours des dernières années. Et je pense qu'on peut
être très fier de ce qui a été réalisé sur le terrain, et l'accueil dont
bénéficient nos personnes immigrantes réfugiées est exemplaire. Donc, un grand
merci pour ça, là, je vous en suis pleinement reconnaissante.
M. Reichhold
(Stephan) :Merci à vous.
Mme Fréchette : J'ai visité,
là, 17 régions au cours des derniers mois. À chaque fois, j'ai tenu à
rencontrer les groupes, les organisations sur le terrain, soit en matière
d'accompagnement, d'intégration, de francisation, l'ensemble des acteurs qui
étaient engagés dans le processus d'accueil, d'accompagnement de nos personnes
immigrantes. Puis, à chaque fois, j'ai vu le rôle clé que jouaient ces
organisations sur le terrain, vos membres, et je m'en faisais parler,
également, notamment par les acteurs économiques, de l'importance qui était
assumée par... du rôle qui était assumé par ces organisations-là. Alors, vous
pouvez être fiers de les représenter, bref, en cette instance et dans le cadre
de vos actions quotidiennes.
Moi, j'aimerais ça... bien, en fait, on a
beaucoup de relations avec les organisations sur le terrain, dans l'ensemble
des régions, là, vous savez qu'on s'est déployé quand même de manière très
vaste et large au sein des régions et on soutient une grande part des
organisations. J'aimerais ça que vous me parliez de votre lecture de
l'écosystème au Québec. Comment est-ce que ça a évolué ces dernières années, au
Québec, là, l'écosystème, pour lequel vous veillez à les représenter. Il y a eu
plusieurs développements, au cours des dernières années, alors, si on se
compare à d'autres provinces canadiennes, comment est-ce que vous qualifieriez
ce qui se passe au Québec, l'écosystème québécois puis le type d'accueil qu'on
offre au Québec?
• (15 h 20) •
M. Reichhold (Stephan) :
Bien... Merci...
M. Reichhold
(Stephan) :...pour les bons mots pour la
TCRI. Effectivement, on travaille très étroitement ensemble, le ministère et
nous, depuis plus de 30 ans maintenant, et toujours sur les bases très
partenariales. Et on ne s'entend pas toujours sur tout, là, heureusement,
mais... Bien, moi, je dirais, c'est sûr, avec la pandémie, c'est venu un peu
brouiller les cartes, là, en 2021. On a tous été comme... on n'avait pas prévu
le coup, là. Mais je dirais que le... disons que les Développements récents,
là, je pense que c'est principalement l'explosion de la clientèle dans les organismes.
C'est... Vous avez les chiffres, là, depuis, disons, depuis 2019, on avait à
peu près 60 000 clients uniques qui fréquentaient le réseau, et là, en 2022,
là, on frise les 120 000.
Heureusement, les ressources ont suivi en
2021-2022. Malheureusement, elles ne suivent pas en 2023-2024. Parce que, bon,
je sais qu'on a eu des rencontres là-dessus, hein?, je ne vous apprends rien de
nouveau, vous avez eu des difficultés à avoir les budgets en 2023, pour
2023-2024. Et nous, on anticipe une augmentation, surtout à travers les
travailleurs temporaires, de 30 % à 40 % cette année. D'ailleurs,
Sarah pourra vous parler un peu d'où est-ce qu'ils en sont à Rimouski. Ils ont
déjà atteint leur cible de l'année. Tu sais, comment gérer ça, la croissance? Heureusement,
je veux dire, oui, le... votre gouvernement a mis beaucoup de nouvelles
ressources, là, a augmenté les ressources, ça, c'est clair, et on en est très
reconnaissants. Mais là, pour cette année, on a vraiment, vraiment un gros
problème, là, de... tu sais, on anticipe des bris de service, là, c'est clair,
là, oui.
Mme Fréchette : Ma question
portait sur comment est-ce que ça se compare, ce qui s'offre ici en termes
d'accompagnement, en comparaison des autres provinces au Canada? Est-ce que
c'est similaire, ce qui s'offre ailleurs ou on se distingue?
M. Reichhold
(Stephan) :ce qui est la grande
différence, et ça, on le reconnaît, hein?, c'est que le... Dans le reste du
Canada, il y a des réseaux semblables à celui de la TCRI, aux organismes d'accueil.
Jusqu'à aujourd'hui les travailleurs temporaires et les étudiants étrangers ne
sont pas admissibles ni aux services linguistiques, aux cours d'anglais et de
français, ne sont pas admissibles aux services d'établissement. Il y a d'autres
services au niveau des provinces, mais au niveau fédéral, ça reste les... ils
regardent beaucoup sur le Québec d'ailleurs, là, ils nous envient beaucoup, là,
que nous, on puisse avoir la possibilité de donner des services, là, aux
travailleurs temporaires et aux étudiants étrangers. Ça, c'est clair, là, oui.
Mme Aghasi (Lida) : Et, si
vous voulez, je pourrais compléter ça.
Mme Fréchette : Oui, allez-y.
Mme Aghasi (Lida) : Parce
qu'on participe dans les rencontres au niveau national avec les autres organismes.
Par exemple, bientôt, on va être à Ottawa pour une rencontre. Et à chaque fois,
le Québec, c'est cité comme un exemple. Surtout les organismes communautaires,
les projets qu'ils développent en partenariat avec le ministère, c'est déjà
comme un exemple à suivre pour les autres provinces canadiennes. C'est la
qualité des services, c'est les initiatives qu'on met sur place pour les
accueillir comme il faut, c'est toujours exemplaire. Ça, je peux vous rassurer.
Mme Fréchette : O.K. Donc,
c'est davantage, bien, en matière d'intégration, d'accompagnement, de panier de
services qui est offert, que le Québec se distingue?
Mme Aghasi (Lida) : Oui.
Surtout sur les initiatives qu'on crée au niveau communautaire, les organismes,
les différents projets que nous avons mis sur place en partenariat avec le
ministère, c'est déjà comme un exemple pour les autres provinces. Et ils nous
demandent toujours d'expliquer. Surtout les ICSI, les intervenants
communautaires interculturels, lorsqu'ils ont été mis sur place avec l'aide de
la TCRI, et le ministère, finalement, a financé beaucoup de projets des ICSI.
Au niveau fédéral, ils ne connaissaient pas ça. On leur a expliqué c'est quoi,
un ICSI, ça sert à quoi. Et aujourd'hui, on est fiers pour dire : nous
avons des intervenants pour les femmes, pour les jeunes, pour les protections
de la famille, plusieurs niveaux. Et ça, c'est... ça montre notre, vraiment,
compétence de... d'être vraiment au courant des besoins de notre clientèle et
tout de suite mettre sur place des projets adaptés à leurs besoins.
M. Reichhold
(Stephan) :Par contre, je dirais un petit
bémol quand même...
M. Reichhold
(Stephan) :...C'est qu'en matière
d'employabilité, mais je sais que ça ne relève pas de vous, moi, je dirais qu'ils
sont beaucoup plus en avance que nous au Québec, là, au niveau des services
d'employabilité, pour les nouveaux arrivants, oui.
Mme Fréchette : Qu'est-ce qui
fait la différence en termes d'accompagnement ou d'employabilité?
M. Reichhold (Stephan) :Bien, il y a plus de programmes, il y a plus de capacité,
il y a beaucoup plus de... Il faut dire, il y a aussi des grandes fondations,
là, qui investissent énormément d'argent, là, au niveau de l'accès à l'emploi,
des ressources qu'on a moins ici au Québec. Donc, c'est toujours... Et c'est
sûr que quand on leur dit les chiffres, les niveaux d'immigrants au Québec, ils
tombent tous de leur chaise, là, parce que c'est sûr que ce n'est pas
comparable avec les nouveaux arrivants dans le reste du Canada, là, oui.
Mme Fréchette : Avant
d'intégrer le... est-ce que vous voyez d'un bon oeil, dans le fond, les mesures
qu'on met de l'avant à travers Francisation Québec pour la francisation en
milieu de travail? Est-ce que vous pensez que c'est une orientation qui est
intéressante, qui est constructive?
M. Reichhold (Stephan) :
Oui. Moi, je pense que oui, là. Je ne sais pas, Lida, toi,
qui es sur le terrain, là, tu... Je pense qu'il y a effectivement du
développement à faire, là, parce que ce n'est pas très développé, on le sait,
bon. Mais je pense qu'il y a aussi, bon, le fait que les travailleurs
temporaires ont accès maintenant à la formation linguistique. C'est sûr que...
de nouveau, ils l'ont mis en avance par rapport au reste du Canada, là.
Mme Aghasi (Lida) : ...
Mme Fréchette : Merci.
Concernant le... l'aide et le soutien, là, aux personnes immigrantes, bon, je
sais que vous avez des besoins criants. On en a parlé lors de nos rencontres de
travail, alors je sais que vous souhaitez un appui financier rehaussé pour les
membres. Donc, parlez-moi de ce sur quoi il nous faudrait construire, ce sur
quoi il nous faudrait bâtir davantage. Vous avez quand même pu mettre en place,
là, des choses intéressantes, là, depuis cinq ans grâce au financement
rehaussé, là, qu'on a mis en place, là, par rapport à l'austérité budgétaire,
là, qui prévalait dans les années antérieures sous la gouverne de nos
prédécesseurs. Nous, on a quand même augmenté le financement, là, de 200 %
depuis l'année 2019, ce qui est considérable. Mais quel est, ce sur quoi
il nous faut bâtir pour les prochaines années?
M. Reichhold (Stephan) :
...Sarah, tu...
Mme
Toulouse (Sarah) : Bien, oui. Bien, je...
M. Reichhold
(Stephan) :...perspective rimouskienne.
Mme Toulouse (Sarah) : Oui,
bien, j'avais même envie tantôt de revenir sur l'écosystème qui a évolué. Mais
clairement, dans les dernières années, nous, on est la dernière ville
d'accueil, la 14ᵉ ville d'accueil, le RPCE à s'être joint au réseau. Puis on a
vraiment vu une explosion en termes de tout type d'arrivée, mais aussi de notre
capacité, nous, à bien accueillir les gens. Le fait d'avoir, comme le
mentionnait Lida, des... d'être en mesure d'accompagner sur différentes
facettes du parcours d'immigration puis du parcours d'installation, c'est
vraiment précieux, mais on a besoin de plus de ces ressources-là, de plus de
temps consacré aux personnes qui arrivent, parce que, bien, souvent, elles vont
arriver... Si on prend, par exemple, l'exemple des travailleurs étrangers
temporaires, on en reçoit vraiment de plus en plus. Je pense que c'est une
réalité qui n'était peut-être pas si dans le radar il y a plusieurs années,
parce que, bien, la pénurie de main-d'oeuvre, elle s'est exacerbée avec le
temps. On en reçoit de plus en plus, puis les accompagnements, les gens qu'on
doit mettre autour de ces travailleurs, travailleuses-là, pour assurer un filet
de sécurité puis de s'assurer qu'ils aient tout en main pour se débrouiller,
bien, c'est de plus en plus exigeant.
Donc, ne serait-ce qu'en termes de
ressources concrètes, on a besoin de ça, mais il y a aussi de prendre en
considération la réalité, les gens qui arrivent réellement chez nous, de
prendre en considération nos cibles réelles, le volume de personnes qui
arrivent, puis là, c'est toutes régions confondues, que ce soit dans la
métropole ou hors centre, il y a de plus en plus de monde qui arrivent partout.
Donc, de prendre en compte nos cibles réelles puis de considérer quel sera pour
nous le financement qui nous permettra de les accueillir convenablement. Parce
qu'on a beau dire, si on prend, par exemple, ici, la situation des étudiants
internationaux, il y a des enjeux, puis on a, comme, fait des mises en garde
de... Bien, si vous n'avez pas trouvé de logement par exemple, bien, essayez de
ne pas venir. Les gens vont venir quand même parce que, bien, le Québec a quand
même bonne réputation en termes de capacité d'accueil. Les gens savent que...
puis ça, c'est un peu de notre faute dans le sens où les gens savent que, bien,
on va bien les accueillir. Qu'on soit financé ou pas, on va les accueillir
parce qu'on fait un travail qui est humain puis qu'on ne pourra pas arrêter de
faire si on ne répond pas à des cibles.
• (15 h 30) •
Donc, nous, ça doit être pris en compte
pour qu'on puisse continuer à faire le travail qu'on fait déjà sur le
terrain...
15 h 30 (version non révisée)
Mme Fréchette : ...par
rapport à l'aide aux collectivités, là, juste pour mentionner, on a signé plus
de 180 ententes, qui couvrent pratiquement 80 % des MRC au Québec,
là, ces dernières années, ça fait qu'il y a un grand travail, je dirais, d'ancrage
dans les régions avec des groupes qui sont sur le terrain qui a été fait, et ça
a généré, en fait, un rehaussement important, là, de plus de 50 % des
dépenses. Donc, le PAC, Programme d'accompagnement aux collectivités, là, est
passé de plus de 16 millions de dollars à plus de 26 millions de
dollars. Donc, ça, ça a quand même donné, je dirais, des ailes à vos
organisations. Vous pouvez peut-être me parler de ce que ça a permis,
justement, comme déploiement ces dernières années.
Mme Toulouse (Sarah) : Bien,
c'est certain que le PAC permet vraiment... Je peux peut-être parler de la
réalité régionale, parce que nous, en 2017, il y avait une seule personne à l'embauche
d'Accueil Intégration Bas-Saint-Laurent, qui faisait ce qu'elle pouvait avec
une panoplie de bénévoles. Depuis, le portrait a beaucoup évolué en région
parce qu'il y a une augmentation de l'immigration. C'est certain que...
Mme Fréchette : Maintenant...
il y a combien de ressources, maintenant, qui... Vous disiez qu'en 2017 il y avait
une personne.
Mme Toulouse (Sarah) : On est
27, présentement.
Mme Fréchette : 27. Passé d'une
personne à 27 personnes? Wow!
Mme Toulouse (Sarah) : Tout à
fait, oui.
Mme Fréchette : O.K.
Mme Toulouse (Sarah) : Et on
pourrait être plus.
Mme Fréchette : Je pense que
l'impact ne pourrait être plus clair du rehaussement et du soutien qu'on vous a
offerts, oui.
Mme Toulouse (Sarah) : Tout à
fait, mais le nombre de personnes qu'on accompagne, lui aussi, va en
augmentant, puis à une vitesse encore plus fulgurante. Donc, c'est un peu ça.
Puis le PAC, c'est certain qu'il est essentiel, d'autant plus en région, quand
on part parfois d'un peu plus loin en termes de sensibilisation à faire, mais c'est
clair que ça change, ça nous permet de changer un peu le portrait puis de
vraiment aller travailler l'interculturel puis le désir de contribuer
collectivement à l'intégration.
Mme Aghasi (Lida) : Et j'ajouterais,
si vous me permettez, effectivement, les services ont été élargis, et on apprécie
beaucoup, le niveau de financement a peut-être triplé, même, mais le nombre d'immigrants
qu'on reçoit, comme Sarah vient de dire, aussi a triplé, ce n'est pas nous même
nombre. On a créé un programme qui est magnifique, mais, si on n'est pas capable
de donner, respecter les normes de programmes, donner les mêmes services à
toutes les personnes immigrantes et réfugiées qui viennent demander de l'aide,
ça, ce serait vraiment une grande perte d'énergie, d'efforts de la part de
ministères et des organismes qui ont mis beaucoup d'accent pour créer ce
programme précis.
M. Reichhold (Stephan) :Bien, peut-être je voudrais ajouter aussi, là, une des
raisons pourquoi il y a une augmentation de fréquentation des organismes. Je
parlais là... on parle de 120 000, là, en 2022. C'est que les problèmes
ont augmenté aussi. C'est que les gens vont dans les organismes quand ils ont
un problème. Ceux où ça va bien, qui tout va bien, tu sais, ils ne se
présentent pas dans les organismes. Et ça, c'est surtout à cause des
travailleurs temporaires, du calvaire des permis fermés. Ça, c'est le genre de
choses avec lesquelles les organismes doivent dealer maintenant, excusez-moi de
l'anglicisme, et qu'on ne connaissait pas avant. Et aussi, sachant que les
travailleurs temporaires rentrent à coup de dizaines de milliers, là, chaque
mois, là, maintenant, on est très préoccupés, là, tu sais. La capacité d'intégration
dont on parle souvent, c'est beaucoup la capacité des organismes aussi d'absorption
des organismes et des ressources disponibles. Et ça, avec 350 000, je ne
parle même pas des demandeurs d'asile, là... c'est lourd à porter, là, pour le
réseau, là, en ce moment, là, oui.
Mme Fréchette : Et c'est pour
ça aussi qu'on veut favoriser la régionalisation, puis je pense qu'on a des
vues qui convergent en ce sens-là, parce que vous voyez ça d'un bon oeil et
vous mentionnez dans votre mémoire que vous souhaitez que la régionalisation s'inscrive
dans la durée. Alors, c'est aussi notre souhait, bien entendu, non seulement d'attirer
les gens en région, mais de les y retenir également. Et je suis quand même
encouragé, là, par les chiffres que l'on a pour ces dernières années, là. On
voit qu'il y a eu un rehaussement, là, de la part des personnes immigrantes qui
vont s'établir en dehors de la région métropolitaine de Montréal, là. On est
passé, en sept, huit, là, de 20 % à plus de 31 % des gens qui vont s'établir
hors de la région métropolitaine de Montréal.
Alors, puisque vous avez des membres,
vous, dans toutes les régions du Québec, bien, j'aimerais ça vous entendre, là,
sur les défis de la régionalisation et particulièrement les défis de la
régionalisation primaire, là, c'est-à-dire dès l'arrivée au Québec, là, de voir
les personnes s'installer en région. Qu'est-ce que vous avez comme lecture, là,
par rapport à ce...
Mme Fréchette : ...défila puis
comment on pourrait avancer encore davantage sur cet objectif.
M. Reichhold
(Stephan) :Bien, c'est sûr qu'on répète,
puis tout le monde s'entend là-dessus, c'est la préparation du milieu, là, qui
est essentielle, hein, si on veut avoir une rétention. Mais je vais laisser
Sarah... c'est elle vraiment qui reçoit quotidiennement ces personnes-là. Elle
va pouvoir vous dire comment ça marche, si ça marche ou si ça ne marche pas.
Mme Toulouse (Sarah) : Bien,
je pense qu'il y a deux volets à la question. Il y a le fait aussi qu'avec le
gel ou la reconduction des ententes... beaucoup d'organismes ont été obligés de
faire des choix puis de laisser de côté un peu le volet régionalisation pour se
concentrer sur l'installation puis l'intégration. Donc, à ce niveau là, déjà,
on est un peu perdant dans notre élan de faire de la régionalisation puis de
vraiment travailler activement à ce niveau-là. On doit se concentrer sur ceux
qui nous arrivent par voie naturelle ou qui finissent par arriver chez nous, de
quelle façon on contribue à créer, justement, un milieu qui soit accueillant.
Puis c'est certain que d'arriver en
région, souvent, on n'aura probablement pas toute une diaspora pour faciliter
l'intégration, donc le poids sur les organismes d'accueil va être un peu plus
élevé que peut être dans des milieux où, bien, il y a une plus grande variété
d'organismes qui peut aller toucher les différentes thématiques selon le vécu de
la personne qui arrive ici. Je dirais qu'en région, bien, on accompagne
l'ensemble du parcours migratoire de la personne. Donc ça demande des
ressources qui sont à la fois super spécialisées, mais aussi capables de
faire... capables d'être généraliste aussi pour bien prendre la personne avec
son bagage puis s'assurer de faciliter le lien vers les organismes du milieu
qui sont encore à sensibiliser aussi, parce que, bien, tu sais, des nouvelles
clientèles, c'est des nouvelles réalités puis c'est de comprendre aussi... en
fait d'être dans la différenciation puis de ne pas prendre pour acquis que tout
le monde arrive avec la même réalité. Quand ils arrivent à Rimouski, par
exemple, chacun a son parcours qui lui est propre, donc ça demande un temps
pour tout le monde, comme collectivité puis comme partenaire, aussi, d'accueil.
Mme Fréchette : Est-ce que...
Il nous reste à peine une minute. Est-ce que vous avez quelques cas d'exemple
des bonnes pratiques, justement, d'accompagnement des milieux? Il nous reste
une minute.
• (15 h 40) •
Mme Aghasi (Lida) : Moi, si
vous me permettez, je voulais juste parler de notre langue. Vous savez, on
collabore avec les organismes dans les régions, on respecte la politique de
régionalisation du gouvernement, mais une grande majorité de ces immigrants
sont à Montréal et les organismes de Montréal reçoivent cette grande majorité
et il leur manque des ressources aussi. Il ne faut pas oublier l'objectif,
c'est la régionalisation, mais, en même temps, il faut penser à la qualité
d'intégration de ces personnes immigrantes ou réfugiées qui sont à Montréal. Et
ça prend du temps préparer le milieu dans les régions, collaborer avec les
organismes, en même temps, penser à leur intégration ici, à Montréal et les
préparer pour leur départ dans les régions. Il ne faut pas oublier Montréal...
on oublie Montréal.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup. Cette première partie de discussions avec
les parlementaires vient de se terminer. Je vais me tourner du côté de
l'opposition officielle avec une période recalculée de
15 min 22 s, et je reconnais la députée de Chomedey. Alors, la
parole est à vous.
Mme Lakhoyan Olivier : Bonjour,
bienvenue. Vous avez fait une présentation très étoffée. Je comprends avec 152
organismes, associations, organismes, c'est pas mal gros. Vous représentez tout
ce beau monde-là, Table de concertation des organismes au service des personnes
réfugiées et immigrantes, TCRI.
Vous avez apporté d'autres points de vue?
L'un d'eux, c'est concernant... attendez une seconde, la loi n° 96,
la réforme de la Charte de la langue française, loi n° 96.
Malgré de nombreux articles pertinents pour renforcer le français au Québec...
a mis en place des dispositions qui limitent l'accès aux services gouvernementaux
pour les personnes immigrantes ne maîtrisant pas encore le français six mois
suivant leur arrivée sur le territoire. Entre autres, seulement les services
gouvernementaux pour l'accueil des personnes immigrantes pourraient être
offerts dans les langues autres que le français dans les six premiers mois
après l'arrivée. Vous dites que cette mesure nuit au processus d'intégration
des personnes immigrantes, augmente les situations de vulnérabilité. Vous
avez...
Mme Lakhoyan Olivier : ...pas
mal élaboré là-dessus. Est-ce que vous auriez des exemples?
M. Reichhold
(Stephan) :Bien, moi... bien, c'est sûr
que notre préoccupation... on est très en faveur de la loi 101 et de la
priorisation du français, et l'obligation à aller à l'école française, ce n'est
pas ça, l'enjeu. L'enjeu pour nous, là, c'est... et, au niveau des services
pour les nouveaux arrivants, c'est le six mois. On sait très bien qu'au bout de
six mois c'est très rare qu'une personne puisse maîtriser. Un exemple très
concret, j'ai... Ma fille a commencé le secondaire la semaine dernière. Donc,
j'étais à la rencontre avec les professeurs, et il y avait un parent dans la
classe qui ne parlait pas un mot de français. Je n'ai aucune idée depuis
combien de temps elle était là, et le prof a refusé de lui parler en anglais,
alors qu'il maîtrisait l'anglais. Alors, c'est ça, l'impact concret. Là, on
sait que ce n'est pas encore très clair c'est quoi, les critères, à quel moment
un fonctionnaire a le droit de parler en anglais ou pas, à partir de... on ne
sait pas non plus à... le chronomètre du six mois, là, il commence à partir de
quand, on ne le sait pas non plus, à partir... c'est quels statuts, là, sont
touchés par les six mois. Est-ce que les demandeurs d'asile, les personnes sans
statut aussi, il faut qu'ils apprennent le français en six mois? Bien, il y a
plein de questions non répondues encore, mais c'est une grosse préoccupation de
notre réseau, là, l'histoire du six mois, là.
Mme Aghasi (Lida) : Et, si
vous me permettez, je peux compléter, parce j'ai été intervenante aussi et je
gère un organisme. Je vois déjà, six mois passent très rapidement, les gens
arrivent, ils sont en deuil de l'immigration... d'intégration. Ils ont des
problèmes financiers, ils n'ont pas d'emploi, ils n'ont pas de logement, ils
ont des problèmes interpersonnels dans la famille, avec les enfants, avec...
dans le couple, ça prend du temps pour juste retrouver dans son nouveau... Et
puis en même temps, ce n'est pas comme... il arrive, tout de suite, les cours
de français sont disponibles, ce n'est pas ça.
En même temps, ils veulent trouver un
emploi pour pouvoir payer leur logement parce qu'avec les allocations qu'ils
reçoivent, ils ne sont pas capables... vraiment répondre aux besoins de leur
famille. Six mois, ça passe très vite. Il y a énormément de stress et de
pression sur les familles. Si l'objectif est de vraiment les encourager d'aller
apprendre le français, qui est vraiment notre droit, six mois ne va pas régler
le problème. Ça ajoute un problème à nos organismes qui doivent envoyer les
interprètes, accompagner ces personnes-là lors de sa rencontre, effectivement,
à l'école, dans d'autres rendez-vous qu'ils ont avec les différentes
institutions. Et ce n'est pas vraiment... le problème n'est pas réglé. Il
faudrait voir c'est quoi, l'impact de cette loi-là, combien de personnes ont
appris le français plus rapidement par rapport aux années précédentes. Parce
que ce n'est pas vraiment une bonne chose. Ça ajoute beaucoup de pression sur
les familles, sur les organismes et je ne pense pas que les gens vont être plus
motivés d'apprendre le français plus rapidement.
Mme Lakhoyan Olivier : Veux,
veux pas... Oui, allez-y.
Mme Toulouse (Sarah) : Non,
j'allais simplement ajouter que je pense qu'on précarise même les femmes dans
ce genre d'approche là, dans la mesure où, très souvent, l'homme va avoir accès
à la francisation plus rapidement que la femme, ce qui fait qu'en bout de
ligne, bien, il va avoir la responsabilité, si c'est uniquement en français que
les communications doivent se faire, c'est lui qui va avoir la responsabilité
de communiquer avec les différentes instances, avec les différents
intervenants. Ce qui fait que la femme, bien, elle se trouve un peu à la merci
de ce que l'homme fera comme communications. Donc je pense que c'est une
préoccupation qu'on a à avoir en termes d'égalité dans le parcours
d'intégration, aussi, de s'assurer que les femmes comme les hommes aient accès
à des ressources qui vont les comprendre puis qui vont les accompagner au mieux
de leurs compétences.
Mme Lakhoyan Olivier : Merci
beaucoup pour...
M. Reichhold
(Stephan) :...des problèmes d'ailleurs du
cahier de planification, c'est qu'il n'y a aucune, il n'y a zéro analyse
différenciée, là... hommes-femmes, alors que normalement c'est une obligation,
là, du gouvernement de faire ça. Donc, ça, ça nous a vraiment surpris, là,
qu'on est en 2023, toujours rendu là, là, que l'immigration, c'est... ça
appartient aux hommes.
Mme Lakhoyan Olivier : Veux,
veux pas... de temps... je parle de mon cas. Moi, je suis immigrante, je suis
venue avec mes parents. Et puis mes parents ne parlaient pas le français. Ma
mère est allée en cours. Je m'excuse, je me répète, mais mon père, lui, il a
commencé à travailler tout de suite. C'était un rembourreur. Donc, lui, ça a
pris du temps. Il a appris sa cinquième langue, quatrième, cinquième. Il a
appris le français, l'anglais avec des années, mais je ne sais pas quand. Si
c'était six mois, là, on ne serait pas ici. Je ne serais pas ici aujourd'hui.
Donc je comprends que vous êtes en...
Mme Lakhoyan Olivier : ...de
dire, mais là, c'est... Vous dites, ça nuit aux droits de la femme à cause d'un
manque de compréhension, et tout ça, et vous essayez de venir en aide, et qui
alourdit votre travail. Je comprends bien.
Vous parlez de... qu'il faut implémenter
une approche intersectorielle, pouvez-vous développer là-dessus?
M. Reichhold (Stephan) :Intersectorielle par rapport à quoi?
Mme Lakhoyan Olivier : Dans
l'immigration, afin de prendre en compte les enjeux particuliers des femmes et
des travailleurs à statut précaire. On continue un peu dans le même sens.
M. Reichhold (Stephan) :Oui, c'est dont on vient de parler, là. C'est que
l'immigration, telle qu'elle est perçue, les programmes, les mesures, l'accès à
la francisation, n'est souvent pas adaptée au niveau des besoins des femmes.
Ça, on le constate, et ça fait longtemps, on l'admet même aussi au niveau du
ministère. On essaie, il y a des... certaines mesures, mais quand on lit le
cahier de consultation, là, on dirait qu'on a des... tout... On a tout oublié,
en fait, ces besoins-là, qui soient intersectionnels et au niveau... Parce que
près de la moitié de l'immigration, c'est quand même constitué par des femmes
immigrantes et des jeunes filles et... mais, dans les politiques, ça ne ressort
absolument pas, là, dans les politiques et les mesures, oui.
Mme Lakhoyan Olivier : Est-ce
que vous trouvez qu'avec cette politique, le ministère a transféré une lourdeur
sur les... ces... vous, les Organismes, un alourdissement?
Mme Toulouse (Sarah) : Bien,
dans tous les cas, nous, on n'a pas le choix d'envisager l'accompagnement qu'on
fait des personnes qui viennent nous voir dans une optique intersectionnelle,
dans la mesure où, bien, par exemple, si c'est une femme monoparentale qui ne
parle pas français, qui n'a pas de travail, bien, clairement, nous, notre
accompagnement doit se moduler selon ces différents défis là. Puis ça ajoute un
défi...
Mme Lakhoyan Olivier : ...
Mme Toulouse (Sarah) : Oui,
allez-y.
• (15 h 50) •
Mme Lakhoyan Olivier : Ah
bien, finissez. Mais c'était concernant la loi 96, que je demandais si ce
nouveau règlement, ça a fait qu'il y a un alourdissement des tâches envers les
organismes?
Mme Aghasi (Lida) : Bien,
c'est que les organismes doivent jouer le rôle d'interprète. Dans la plupart du
temps, ce n'est pas vraiment de notre rôle, mais c'est ça, les gens viennent
demander notre aide, qu'on les accompagne lors de leurs rendez-vous à l'école,
disons. Quand ils vont dans les rendez-vous médicaux, et tout, ils ont besoin
de quelqu'un pour expliquer leurs problèmes et... Ou bien, même quand il y a un
problème juridique, ils veulent que quelqu'un soit là. Surtout pour les choses
qui sont très délicates, ça prend beaucoup de nos ressources. En plus, nous
n'avons pas cette expertise. On n'est pas des interprètes professionnels, mais
c'est... Pour eux, c'est mieux que rien.
Alors, c'est ça, ça alourdit le travail
des organismes communautaires. Mais il y a une pression, un stress aussi qui
revient vers les familles et les personnes immigrantes, surtout sur les femmes,
comme Sarah vient d'expliquer. Parce que, souvent, elles commencent leur
francisation plus tard, elles peuvent être enceintes quand elles arrivent au
Québec. Et pour avoir des jeunes enfants quand elles arrivent à Québec, il n'y
a pas beaucoup de garderies, et surtout, elles attendent pour que les enfants
soient un peu plus grands, l'époux trouve un emploi pour qu'ils puissent se
permettre, trouver une garderie aussi. Alors, le six mois passe très vite.
Mme Lakhoyan Olivier : Comment
le gouvernement peut vous aider? Qu'est-ce qu'on peut faire afin d'alléger ce
stress-là?
Mme Aghasi (Lida) : Bien,
c'est ça, je pense qu'il faut adapter les politiques à la réalité. Même dans
chaque catégorie, cette réalité, ça peut être différent. Mon organisme et
l'organisme de Sarah, nous avons le mandat d'installation et l'accueil des
réfugiés pris en charge par l'État dans nos régions respectives. Les réfugiés
pris en charge par l'État, souvent, sont des gens qui peuvent être analphabètes
dans leur pays d'origine. Trouver un cours d'alphabétisation, déjà, ça peut
prendre plus que six mois...
Mme Aghasi (Lida) : ...Des
fois, ils attendent plus que 6 mois, même s'ils sont prêts à commencer
leur cours, ils doivent attendre pour leurs cours. Alors, c'est ça, la réalité
dépend à la catégorie de la personne qui vient. Oui, si c'est quelqu'un qui
vient avec des diplômes universitaires et qui connaît un peu le français, il va
améliorer son français, il peut facilement améliorer son français. Même les
francophones qui viennent de différents pays, de... des fois, parlent français,
mais ils ne peuvent pas bien écrire ou le niveau de grammaire du français, ce
n'est pas très bien. Alors, ils peuvent peut-être fonctionner, mais dans les
travaux, au niveau professionnel, ils doivent améliorer leur niveau de
français, et, dans la plupart du temps, même apprendre l'anglais. Tout ça, ça
prend du temps. C'est pour ça que je dis : Il faut être un peu plus
flexible et comprendre que ces politiques doivent être adaptées à chaque
catégorie de personnes, immigrantes et réfugiées qu'on reçoit.
Mme Lakhoyan Olivier : J'entends...
Mme Toulouse (Sarah) : L'inverse
est vrai...
Mme Lakhoyan Olivier : Oui,
allez-y.
Mme Toulouse (Sarah) : J'allais
mentionner que l'inverse est vrai aussi. Parfois des gens arrivent, ils sont
surqualifiés pour les emplois dans lesquels ils se retrouvent, parce que, si on
prend l'exemple des réfugiés pris en charge par l'État, ils n'ont pas les
relevés de notes ou ils n'ont pas les diplômes nous permettant de faire l'équivalence
des compétences puis de leur permettre de travailler dans un domaine pour
lequel ils ont l'expérience, les compétences, les qualifications. Donc, je
pense que l'appel, c'est vraiment de dire : Bien, ça prend une
flexibilité, comme le mentionnait Lida, puis une adaptabilité aux différents
parcours, parce que, bien, on se prive de talents et on pénalise aussi les gens
qui arrivent avec l'espoir de pouvoir exercer, par exemple, une profession
qu'ils aiment puis pour laquelle ils sont qualifiés pour des technicalités
administratives sur lesquelles on devrait être capable, nous au Québec, de...
bien, d'avoir une certaine souplesse pour faciliter l'intégration.
Mme Lakhoyan Olivier : Est-ce
que... D'après vous, d'après tous ces organismes que vous représentez, les
immigrants qui viennent ici, n'importe quel statut, est-ce qu'ils veulent
apprendre le français? La majorité, est-ce qu'ils veulent et ils sont contents
d'apprendre le français?
Mme Aghasi (Lida) : Bien,
écoutez, je pense, parmi mes collègues, ici, je pense que Stephan et moi nous
sommes issus de l'immigration...
M. Reichhold
(Stephan) :...statistiquement parlant, je
suis un allophone, hein, juste rappeler... ma langue maternelle, c'est
l'allemand, oui.
Mme Aghasi (Lida) : Oui, mais
pour vous dire que, oui, nous avons beaucoup d'intérêt d'apprendre le français,
nous avons choisi le Québec. Et pourquoi? À cause du français. Parce que sinon,
beaucoup de gens ont quitté vraiment le Québec. Les immigrants qui restent au
Québec, c'est un choix qu'ils font. Ils choisissent le Québec. Ils veulent
apprendre le français. Ils veulent que leurs enfants deviennent bilingues. Ils
sont fiers. Quand ils parlent avec leurs amis qui sont en Ontario, ils vendent
le Québec. Ils essaient de parler des différents programmes. On est fiers
d'être au Québec. On est fiers que nos enfants sont bilingues, que nous sommes
bilingues. Mais le problème, c'est que, des fois, on a une vision très
robotique des choses. On pense que l'immigrant, c'est un robot. On va
programmer, il faut qu'il fasse ça. Après, il va arriver à ce point-ci. Après,
ça va être ça. Ce n'est pas vrai parce qu'il faut être dans cette situation
pour comprendre comment ça fonctionne. Je me souviens lorsque, moi, je suis
arrivée, j'étais enceinte. Pendant des mois, je ne pouvais même pas sortir de
la maison, stress post-traumatique, le deuil de quitter la famille, recommencer
ici. Aujourd'hui, j'ai obtenu mon doctorat, même ici, et puis là je suis très
fière. Je gère un organisme, c'est ma fierté. Mais la réalité, c'est que ce
n'était pas facile au début. Si, à l'époque, il y avait cette loi-là...
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Je vous remercie.
Mme Toulouse (Sarah) : ...je
ne pourrais pas être là.
Mme Lakhoyan Olivier : Merci.
Vous avez été très généreux.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci. Mais ce n'est pas terminé, on poursuit encore une
dernière période d'échanges, cette fois avec le député de
Saint-Henri-Sainte-Anne, pour une période de cinq minutes, sept secondes. ...M.
le député.
M. Cliche-Rivard : Merci
beaucoup. Merci pour vos recommandations, votre excellent mémoire et pour tout
ce que vous faites au quotidien. D'ailleurs vous êtes sur la première ligne,
donc je viens aux nouvelles sur certains dossiers. La loi 83 qui
élargissait la couverture de la RAMQ pour les enfants sans égard à leur statut,
j'entends que la situation est très complexe sur le terrain. Est-ce que vous
pouvez nous en dire davantage?
M. Reichhold (Stephan) :Bien, je peux peut-être commencer, moi, je suis moins sur
le terrain, mais, justement, on a un groupe de travail pour faire le suivi avec
la RAMQ parce qu'il y a des sérieux problèmes d'accessibilité.
Tout d'abord, je vais quand même souligner
et féliciter le gouvernement pour avoir pris cette décision, qui est quelque
chose qu'on demandait depuis des années, de donner accès aux services de santé
à tous les enfants mineurs résidant au Québec...
M. Reichhold
(Stephan) :...sauf les demandeurs d'asile
malheureusement qui sont juste la couverture... Et donc, oui, ce qu'on
constate, on a fait un sondage, là, récemment avec Médecins du Monde, en fait
c'est surtout Médecins du Monde qui pilote la brevet, et ce qu'on constate dans
les hôpitaux, dans les CIUSSS, tout ça, il y a une méconnaissance de cette
décision, de cette loi, là, que les enfants, donc, quand les personnes... parce
que c'est des parents, donc, souvent, qui n'ont pas de statut ou qui n'ont pas
de couverture RAMQ, donc quand ils se renseignent, on ne leur donne pas la
bonne information. Il y a beaucoup de difficultés à créer les modalités
d'inscriptionm là, elles sont très complexes. L'attitude des agents
administratifs à la RAMQ aussi. Et ils ne sont pas très... comment dire, pose
les problèms, et surtout le non-respect de la présomption d'admissibilité dans
les hôpitaux quand il y a des naissances, par exemple. Donc, il y a des...
depuis un an et demi, là, qu'elle est en vigueur, la loi, il y a des problèmes
d'accès, là, qu'on essaie de régler. Le ministère de la Santé et des Services
sociaux nous appuie beaucoup. Là où ça bloque, c'est la RAMQ. C'est où il y a
vraiment un manque de collaboration.
M. Cliche-Rivard : Donc, il y
a des enfants au Québec qui, malgré la loi, là... c'est la loi, je veux dire,
la loi a été votée, là, qui doivent se battre pour obtenir des soins gratuits
alors que la loi le prévoit? Comment ça se fait qu'on n'est pas capable
d'appliquer la loi au niveau de la RAMQ?
M. Reichhold
(Stephan) :Ou pire que ça, qui sont
refoulés aux urgences ou dans les cabinets de médecins parce qu'ils n'ont pas
de couverture RAMQ, oui.
M. Cliche-Rivard : Alors, la
loi du Québec n'est pas appliquée par la RAMQ?
M. Reichhold
(Stephan) :Oui, effectivement.
M. Cliche-Rivard : Mais c'est
absolument terrible. J'entends et je vois madame la ministre qui réagit.
J'imagine, là, je veux dire, c'est grave.
M. Reichhold
(Stephan) :Sarah a des exemples aussi.
Même à Rimouski, là, il y a des problèmes.
Mme Toulouse (Sarah) : Bien,
on a des défis en termes de...
M. Cliche-Rivard : On parle
d'enfants, là, on parle de bébés, on parle de gens qui sont malades. Allez-y.
Mme Toulouse (Sarah) : Inscrire
un enfant, par exemple, au guichet d'accès pour un médecin de famille, ça prend
le numéro d'assurance maladie du parent. Mécaniquement, là, administrativement,
donc un enfant dont le parent n'a pas ce numéro là, bien, on ne peut pas
administrativement l'inscrire. La réponse qu'on reçoit de la RAMQ, c'est: Ah!
Bien, vous avez juste à mettre votre numéro à vous. Ça fait que, là, déjà, les
intervenants et les intervenantes vont tellement loin dans ce qu'ils font de
plus, tu sais. Mais là de mettre un numéro personnel dans une fiche d'un enfant
qu'on accompagne ici, ça dépasse la limite de ce qui est acceptable.
• (16 heures) •
M. Cliche-Rivard : Puis là,
que ça change toujours grand chose, mais beaucoup de ces enfants là sont
citoyens canadiens, là, ils sont...
M. Reichhold
(Stephan) :En plus, oui.
M. Cliche-Rivard : En plus.
M. Reichhold (Stephan) :
Oui.
M. Cliche-Rivard : C'est
particulièrement déroutant, surtout qu'on sait que ça ne fait pas trois
semaines, là. Ça va faire, vous l'avez dit, un an et demi ou plus que ça, deux
ans que...
M. Reichhold
(Stephan) :Un an et demi, à peu près...
M. Cliche-Rivard : Un an et
demi.
M. Reichhold
(Stephan) :...je pense, qu'elle est en
vigueur, oui, la loi.
M. Cliche-Rivard : Bien,
merci de nous informer là dessus. Je voulais savoir, vous avez des
informations, vous, de votre côté sur... dans le cadre de l'entente des pays
tiers-sûrs. On parlait d'une quinzaine de milles de réfugiés ou de personnes
réinstallées qui allaient venir au Canada. Est ce que vous avez des
informations là dessus?
M. Reichhold
(Stephan) :Oui, il y avait un article
dans La Presse, là, je pense, il y a quelques jours et j'ai aussi eu des
informations d'autres sources. Effectivement, il y a des discussions
actuellement entre le IRCC, Immigration Canada, le HCR et les États-Unis. Donc,
c'était l'engagement du Canada, hein, avec l'amendement de l'entente des tiers
pays sûrs, c'est de prendre 15 000 réfugiés ou personnes en situations
semblables référées par les États-Unis. C'était un peu le bonbon de l'entente
du deal, et le Canada a accepté. Et là ça commence à se concrétiser, là. En
fait, il y a 2 000, à peu près, qui viendraient dans le programme... comment ça
s'appelle, pour les réfugiés qui viennent dans un emploi...
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : C'est tout le temps que nous avions.
M. Reichhold (Stephan) :
Ah!
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : C'est tout le temps que nous avions. Ça passe vite, hein? Écoutez,
je termine en vous disant merci beaucoup de votre participation à nos travaux,
c'est très apprécié. Et, pour le moment, je vais suspendre le temps d'installer
le prochain groupe. Merci beaucoup.
(Suspension de la séance à 16 h02)
16 h (version non révisée)
(Reprise à 16 h 05)
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : À l'ordre, s'il vous plaît! La Commission des relations
avec les citoyens reprend ses travaux. Nous recevons donc pour l'heure, le
Regroupement des organismes du Montréal ethnique pour le logement. Messieurs,
bienvenue à la commission. Alors, vous allez bénéficier d'une période de 10 minutes
pour vous présenter, ainsi que présenter les grandes lignes de votre mémoire,
donc vos recommandations. Nous allons par la suite procéder à un échange avec
les parlementaires. Alors, je me tourne tout de suite du côté de la banquette
gouvernementale...
Une voix : ...
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Vous avez 10 minutes? Oui, pour eux, oui, c'est ce que
j'ai dit. Vous aviez bien compris? Dix minutes pour eux pour vous présenter. Je
me tourne maintenant du côté de la banquette. Vous avez 16 minutes, 30 secondes.
Une voix : ...
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Ah! bien oui, c'est vrai, je voulais aller trop vite. Vous
m'avez tout mélangé. Voilà, le temps est à vous. Allez-y.
M. Houdeib (Mazen) : O.K.
Alors, bonjour, Mme la Présidente, Messieurs les députés, je me présente, mon
nom c'est Mazen Houdeib. Je suis le directeur général du ROMEL. Je vais faire une
intervention en deux temps. Rapidement, une présentation du ROMEL, et deux, la
deuxième, c'est un peu les recommandations qu'on a proposées.
Le Regroupement des organismes de Montréal
ethnique pour le logement, c'est un organisme communautaire qui a été créé en
1984, puis moi j'ai le... un peu le plaisir de dire que je fais partie de cet
organisme depuis 1990. Alors, quand même, il y a un historique derrière ça. Ce
qui est important à retenir par rapport à ça, c'est que le ROMEL a été créé par
des organismes communautaires, incluant des institutions comme le CLSC. Et l'idée,
c'était de créer une entité qui est capable de proposer des solutions
concernant les problèmes d'habitation auxquels faisaient face surtout les
nouveaux arrivants et les personnes vulnérables. Donc, le ROMEL n'est pas venu
comme un organisme. C'est très important de retenir ça, parce que ça se reflète
dans nos recommandations après, c'est un organisme qui n'a pas une liste d'épicerie.
Au départ, il avait simplement un mandat de regarder qu'est-ce qui se passe sur
le terrain, d'envisager des solutions, de proposer des solutions et les mettre
en application. D'ailleurs, dans l'annexe qui a accompagné notre mémoire, on a
mis un peu un résumé de l'évolution des interventions du ROMEL...
M. Houdeib (Mazen) : ...depuis
le début jusqu'à tout récemment, qui démontre vraiment la vraie nature de
l'organisme.
L'organisme ROMEL, présentement, il a une
équipe de 10 employés qui sont spécialisés dans tout ce qui touche la
question de l'habitation, du développement, de la mobilisation de groupes
jusqu'à la... même la gestion immobilière, la recherche de logement et tout ce
qui touche la question de logement.
Dans nos recommandations, on s'est basés
un peu sur, bien, l'essence du cahier présenté, qui s'appelle La planification
de l'immigration au Québec pour la période 2024-2027, qui offre, en fait,
un portrait des besoins en immigration au Québec au cours des prochaines
années. On a retenu un thème qui est très important dans tout ça, c'est le
thème de la régionalisation. Parce qu'on considère que, lorsqu'on parle
régionalisation, on parle forcément de... D'accommodation, on parle forcément
de logement, parce qu'on ne peut pas travailler sur l'intégration et sur des
nouveaux arrivants sans avoir la capacité de les loger.
D'ailleurs, notre... on va dire, le logo,
il porte un terme qu'on a, nous, déjà introduit dans cette industrie
d'habitation, «le logement est la clé de l'intégration». Parce qu'on croit
fortement que, ça, c'est la clé vraiment de l'intégration.
En plus de l'intégration des personnes
immigrantes, on dit que ça nécessite une structure d'installation et
d'intégration adéquate. C'est ce que, ça, ressort un peu des constats. Et
l'accès au logement est devenu une préoccupation très importante depuis des
années. Je peux vous dire que ça fait 23 ans que je suis dans ce domaine,
à peu près, et puis j'ai vécu les situations. Puis je vois qu'aujourd'hui
lorsqu'on parle de crise de logement, ça nous confirme la nécessité de mettre de
l'avant des politiques comme des recommandations que nous, on va proposer, et
qui aident à... peut-être à se mettre sur un chemin porteur à long terme.
• (16 h 10) •
J'arrête ici pour la présentation du ROMEL
et je vais vers les recommandations. Nous, on a fait trois recommandations. La
première, c'était la recommandation de développer une stratégie ambitieuse pour
le développement immobilier communautaire au Québec. Qu'est-ce que ça veut
dire? Je vais résumer en deux mots puis j'aurai vraiment le plaisir et
l'honneur de recevoir vos questions pour donner peut-être un peu plus de
précisions.
Nous, on est pour le développement d'un
programme autoporteur de développement de logements communautaires et
abordables. On n'est pas en train, ici, de réinventer la roue parce qu'un
programme pareil existait depuis des années. Il a fait ses preuves, il a
produit des dizaines de milliers de logements à prix abordable et
communautaire, et qu'il a simplement eu besoin de se mettre à jour par rapport
au contexte immobilier, au contexte financier actuel, parce que la situation
évolue, les coûts de construction, ainsi de suite, et cetera. Il fallait
simplement trouver le moyen de bonifier un programme ou... Au lieu de
réinventer un nouveau programme autoporteur comme ça.
Alors, ça, pour nous, la stratégie de
pouvoir produire du logement à prix abordable passe par un programme
autoporteur dans lequel l'État a vraiment une implication directe. Parce que
c'est très... C'est essentiel. Et, ça, ça permet de créer des logements qui
sont abordables à très long terme et en même temps permet à assurer une
intégration des personnes puisque les organismes communautaires sont impliqués
dans tout ce développement-là. Alors, il y a le côté social, plus le côté
bâtiment, et cetera.
Je termine sur ce point pour dire que
l'investissement dans un programme autoporteur comme ça, c'est vraiment un
investissement. Ce n'est pas vraiment de l'aide sociale ou de la charité
puisque, même avec les études qui étaient faites par la Société d'habitation du
Québec et d'autres instances, il y a eu une preuve que chaque dollar investi
dans le logement communautaire et social génère dans l'économie québécoise
2,70 $ en retombées directes par rapport à la... Par rapport au cycle
économique puis par...
M. Houdeib (Mazen) : ...à la
dynamique économique d'un projet de construction et des retombées indirectes au
niveau de la santé, au niveau de la santé mentale, la santé physique des
ménages, parce que ça aide à éliminer en partie l'insalubrité, le surpeuplement
et toutes sortes de problèmes de logement auxquels font face aujourd'hui les
ménages avec un revenu limité ou modeste. Alors, ça, c'est la première... je
peux élaborer plus tard suite aux questions.
La deuxième, la deuxième recommandation,
c'était en... faciliter la coordination entre les instances publiques et les
différents organismes dédiés à l'habitation communautaire et à l'intégration
des personnes immigrantes. Ce que nous, on a vécu, dans les années passées,
c'est qu'il y a des organismes comme le ROMEL qui ont développé une expertise
extrêmement importante. À titre d'exemple, entre parenthèses, on a beaucoup de
nos collègues, par exemple, au ROMEL, qui ont pris leur retraite, au ROMEL.
Vous pouvez vous imaginer le cumul d'expertise qu'on a pu accumuler au fil des
ans et que ça serait dommage que cette possibilité ne soit pas vraiment
exploitée, entre guillemets, ou utilisée par le gouvernement pour favoriser ce
type de coordination entre les instances publiques et les différents
organismes. D'ailleurs, cette deuxième recommandation met plutôt en lumière
l'importance de consolider les services qui encouragent l'accès des nouveaux
arrivants et des nouvelles arrivantes aux ressources et aux services
disponibles dans la province.
On a vécu une situation. Je peux donner un
petit détail, que toujours les personnes qui sollicitent des services, ils font
le tour de plusieurs places, de plusieurs organismes pour obtenir le même
service. Alors, se spécialiser et concentrer les services, ça serait une bonne
affaire. D'ailleurs, cette recommandation correspond à la 10e orientation
proposée dans le cahier public, soit la coordination gouvernementale des
services d'intégration des personnes immigrantes, qui implique, notamment, de
favoriser l'accueil, l'intégration et la rétention des personnes immigrantes
dans toutes les régions en misant sur les services d'accueil, de soutien aux
personnes immigrantes. Alors, on est... on a besoin... il y aura des... plus
tard aussi des exemples par rapport à ce type d'orientation.
La troisième recommandation, c'est
d'encourager la mise sur pied de projets pilotes et de partages de meilleures
pratiques au sein du réseau de l'habitation communautaire et l'inclusion
sociale au Québec. Ce point, il est lié directement à ce que j'ai présenté au
départ, de la nature, par exemple, d'un organisme comme le ROMEL. C'est que
nous sommes, le ROMEL et d'autres organismes, il ne faut pas oublier qu'on
regroupe à peu près 45 organismes communautaires dans la région de
Montréal, la grande région de Montréal, ces organismes sont sur le terrain
constamment. Et on est capables, par la nature même de notre travail, de
recenser les besoins et essayer de réfléchir ensemble à trouver des solutions
et trouver des façons. Toujours la solution n'est pas nécessairement par un
programme mur à mur, qui peut prendre des mois et des mois à discuter, à
réfléchir, et cetera. Ça peut être des initiatives qui font preuve
d'efficacité, qui donnent des résultats. Et, à ce moment-là, on juge que ça
vaut la peine de les élargir, de les étendre, par exemple, à d'autres, exemple,
quartiers ou villes ou régions, parce que ça donne une réponse à un problème
qui est déjà bien identifié.
Alors, dans ce cas-là, le ROMEL, bien sûr,
dans les recommandations, on n'est pas vraiment dans la théorie. On est plus...
On est vraiment dans la pratique parce qu'on a expérimenté, ça fait partie de
notre réalité et de notre mandat, c'est de créer des solutions.
Et je peux vous donner, pour terminer...
Je ne sais pas si j'ai épuisé les 10 minutes, là?
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Mme la ministre a accepté de prendre un peu de temps sur le
sien, alors, si vous voulez conclure?
M. Houdeib (Mazen) : Je
conclus que les projets... Par exemple, je prends le projet Harmonie, de ROMEL,
a permis de visiter 4 813 logements, dont 3 778 qui étaient
qualifiés comme étant salubres. Et c'est comme ça qu'on fait les références à
des logements salubres, par exemple. Et ça, ça nous a permis de faire des
interventions auprès de 2 991 locataires. C'est simplement pour dire
que c'est une... Comment on dit, expérience de terrain que j'essaie de...
D'exposer ici aussi...
M. Houdeib (Mazen) : ...merci.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup pour cette présentation. Alors, cette
fois-ci, je me retourne du côté de la banquette gouvernementale pour une
période d'un petit peu moins, là, de 15 minutes. Le temps est à vous.
Mme Fréchette : Merci, Mme la
Présidente. Bien, alors, un grand merci à vous trois pour prendre part à cet
échange, à cet exercice démocratique. Je me sens... je suis très reconnaissante
de nous partager votre expertise acquise au fil des 30 dernières années.
Donc, vraiment, il y a un capital d'expérience vraiment intéressant, là, pour
nous de vous entendre aujourd'hui.
Alors, bien, vous le savez, là, du côté de
l'immobilier, on est dans un contexte très particulier, hein, avec la hausse
des prix, également la pénurie de personnel. Donc, tout ça, ça complique la
donne. Et je dirais que cette donne-là, elle est encore plus complexe quand il
s'agit de régions éloignées, parce que ces phénomènes-là sont amplifiés par la
distance et puis l'absence, parfois même, d'entrepreneurs dans le domaine
immobilier, dans la région concernée. Alors, j'aimerais ça, donc, vous entendre
sur les bonnes pratiques à mettre en place pour s'assurer de développer
davantage le logement abordable. Est-ce que vous auriez, comme, des stratégies
efficaces que vous avez déjà ciblées puis qui mériteraient d'être déployées à
plus large échelle, soit en partenariat ou non, là?
M. Houdeib (Mazen) : C'est
sûr que tout ce qu'on peut proposer doit se faire en partenariat, parce que les
instances gouvernementales avec les instances... lorsque je dis
gouvernementales, ça veut dire provinciales, municipales et instances des
organismes communautaires sur le terrain se complètent, leurs actions se
complètent. Le problème qu'on vit souvent et qui retarde la production, c'est
lorsqu'il y a des dédoublements de procédures. Au lieu de compléter, ça devient
des dédoublements. Ça veut dire, un document qui peut prendre, je dirais, une
semaine pour produire, ça prend deux mois, trois mois. Et ça, dans un contexte
immobilier, dans un contexte de marché — on est dans un contexte de
marché — ça peut faire une grosse différence dans le coût et la
possibilité de mener le projet à terme. Alors, ça occasionne beaucoup de
pertes.
• (16 h 20) •
Lorsque moi, j'ai proposé la question de
programme autoporteur, je vais un peu clarifier ce point rapidement, c'est que
les besoins en habitation sont diversifiés et les solutions sont diversifiées.
Alors, il y a des gens, des ménages qui sont capables de construire une maison,
d'acheter un condo, de louer un condo d'une certaine grandeur, d'une certaine
qualité. Et il y a d'autres à revenus moyens, revenus... je dirais bas revenus
qui ne sont pas capables de le faire. Ils sont obligés de louer, mais il faut
aussi qu'ils louent des logements qui sont décents, comme on dit, et salubres.
Alors, ce qui fait que tous les joueurs au niveau de l'habitation, des
promoteurs privés jusqu'aux promoteurs communautaires, le gouvernement, etc.,
se complètent dans cet exercice.
Alors, c'est faux, selon nous, de
considérer qu'une partie de la société est capable de mener à bon un programme
puis de le livrer. Il faut compter sur tout. Et un programme autoporteur fait
une grosse différence parce que c'est un programme qui permet à produire très
rapidement du logement communautaire, à condition que ce programme soit
toujours ajusté à la réalité du marché, soit toujours accompagné. Parce que le
marché ni le gouvernement peut le contrôler, ni les organismes, ni les
promoteurs. Le coût du matériel, le coût de la main-d'œuvre, on ne peut pas les
contrôler, mais il faut s'ajuster pour pouvoir produire rapidement du logement.
Mme Fréchette : Merci. En
conclusion de votre intervention, vous avez fait référence au projet Harmonie.
J'aimerais ça que vous nous en parliez davantage, là, de son mécanisme, comment
ça procédait. Et puis quels sont les outils que l'on devrait développer
davantage ou qu'on devrait utiliser davantage pour sensibiliser les
propriétaires, donc, à l'importance... en fait, aux réalités des personnes
immigrantes et à l'importance de leur offrir un accès au logement?
M. Houdeib (Mazen) : Bon,
moi, le principe que je retiens, et je m'excuse si le terme n'est pas très,
peut être, «politically correct», je ne sais pas, c'est qu'il faut absolument,
pour avancer, éviter de réinventer la roue à chaque fois. Ça veut dire, le
projet Harmonie, c'était un projet qui était une évolution naturelle du
programme de banque de logements qu'on a mis sur pied avec l'aide
gouvernementale. Au fil des ans, on a conclu sur le terrain que la simple
référence pour un logement ne permet pas de responsabiliser un propriétaire, de
responsabiliser même un locataire et d'arriver à...
M. Houdeib (Mazen) : ...a des
résultats à long terme de... d'accès à des logements salubres. Alors, nous, on
a décidé, au ROMEL, qu'il faut absolument impliquer les propriétaires privés
dans le processus, parce qu'ils font partie de la solution, pas nécessairement
du problème. Et c'est pour cette raison qu'on a fait, à l'époque, une entente
avec l'Association des propriétaires du Québec pour créer le projet Harmonie,
qui consistait à ce que les propriétaires nous livrent leurs logements à louer,
nous permettent de qualifier leurs logements, qui sont salubres ou pas, de
respecter nos conseils pour des réparations. Et, sur cette base, on peut référer
des locataires qui sont bien avertis de leurs droits, bien avertis de leurs
obligations par rapport à un bail, et cetera.
Au début du programme, il y avait eu
beaucoup de résistance parce que toujours, le mythe, c'est que le propriétaire
est méchant, le locataire est victime ou vice versa. Il n'y a pas vraiment une
nuance qui dit que, non, il faut créer un espace de dialogue, un espace
d'échange. C'était un peu ça, notre idée. Et, au fil des ans, on a réussi à
attirer plus de 300 propriétaires qui référaient constamment leurs
logements à louer à nous et nous permettaient de visiter les logements et
après, référer des personnes qui cherchaient un logement. Ce qui nous a permis
aussi de faire évoluer notre banque de données en la rendant une banque de données
relationnelle qui permet de faire un peu le jumelage, on va dire, ou le lien
entre un besoin d'un ménage et un logement qui existe. Et ça, ce n'est pas des
logements qui sont sur Kijiji, ce n'est pas des logements qui sont sur... dans
les journaux. C'est des logements qui sont qualifiés parce qu'on les a visités.
Et le logement qui ne se qualifie pas, on disait au propriétaire : ça ne
se qualifie pas, à moins que tu fasses telle, telle, telle interventions et
réparations, sinon, on ne peut pas te référer des locataires.
Alors, ce projet-là a fonctionné pendant
des années avec l'appui financier de la Ville de Montréal. C'est le département
Diversité qui est en lien avec le ministère de l'Immigration parce que l'argent
vient du ministère de l'Immigration, en principe. Alors, ça a fonctionné
pendant des années, jusqu'à tant qu'il y a eu une décision qu'on va changer
d'orientation. Et c'est là où moi, je dis un programme comme ça, il a fallu lui
permettre d'évoluer et de s'étendre au lieu qu'on soit confinés un peu,
seulement, à... Dans quelques quartiers de Montréal, on va dire, O.K., qu'on
soit un peu sur tout le territoire, que ça soit répété comme expérience, qui
crée un espace d'échange entre les propriétaires et les locataires.
Et même le projet Harmonie a évolué, mais,
faute de financement, on n'a pas réussi à mettre sur pied le comité de...
comment on appelle, de... Je m'excuse, le terme m'échappe, là. Pour régler les
problèmes entre propriétaires et locataires, ça veut dire médiation, voilà le terme
que je cherche, médiation communautaire gratuite pour les propriétaires et
locataires lorsqu'ils ont des problèmes. Ça, ça fait... ça faisait partie du
programme.
Une autre partie du programme, c'était
avec la Société d'habitation du Québec, en faisant un projet qu'on a appelé...
C'est ça, Alfredo, si je ne me trompe pas?, qui consistait aussi à démystifier
les coutumes, les... des nouveaux arrivants avec des propriétaires pour que les
gens se comprennent mieux, puis créer un espace d'échange plutôt qu'être sur...
toujours dans l'incompréhension de part et d'autre sur les enjeux. Merci.
Mme Fréchette : Merci. Merci
beaucoup d'avoir partagé votre connaissance et... sur ce programme fort
intéressant. À partir d'ici, je vais partager le doit parole avec des
collègues.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Bien entendu. Merci beaucoup, Mme la ministre. Donc, je
cède la parole à la députée de...
Une voix : ...
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : ...Laviolette-Saint-Maurice. C'est trop long. La parole est
à vous pour une période de cinq minutes 47 secondes.
Mme Tardif : Merci. Bonjour.
Merci d'avoir pris le temps de nous déposer un mémoire, d'avoir pris le temps
de prendre le temps maintenant de nous rencontrer et du travail que vous faites
aussi auprès des personnes plus vulnérables.
Un de nos objectifs, vous le savez, on
vient de l'aborder aussi abondamment, c'est vraiment la régionalisation des
personnes immigrantes. Le MIFI, nous nous sommes dotés d'un plan d'action et
nous voulons travailler en particulier davantage sur ce qu'on appelle la...
Mme Tardif : ...régionalisation
primaire, c'est-à-dire qu'on va inciter les gens à s'installer en région avant
même qu'ils soient arrivés au Québec. Donc, on se dit que ça va éviter un
double déracinement, un dédoublement, éviter aussi le dédoublement de toutes
les démarches, là, d'installation. Qu'est-ce que vous pensez de cette
approche-là? Parce que je n'ai pas vu dans votre mémoire, là, que vous avez
abordé ce sujet-là.
M. Houdeib (Mazen) : Parce
que le terme de la régionalisation, vraiment, veut dire ce que vous venez de
m'expliquer, comment, comment attirer, dans les régions, des nouveaux
arrivants. Il y a eu un point qui était mentionné, je pense, dans le cahier,
parce que, là, il faut faire la séparation, qui parle des travailleurs
temporaires. Les travailleurs temporaires, pour nous, pour le moment, ce n'est
pas l'immigration, c'est des travailleurs temporaires qui demeurent temporaires
tant et aussi longtemps que le gouvernement ne leur donne pas un statut, par
exemple, d'immigrants ou de résidents permanents. Lorsque je parle de la
régionalisation, le point crucial qu'on a vécu, parce qu'on a fait des démarches
un peu dans les régions, c'est le manque de logements, principalement. C'est le
manque de logements.
Mme Tardif : Outre le manque
de logements, parce qu'on a quand même abordé ce sujet-là abondamment, là, et
on y travaille... et vous avez raison, là, il y a un manque de logements, mais,
là où je voudrais vous entendre, c'est par rapport à notre approche. Parce que,
là, il y a beaucoup de gens qui viennent, et on essaie de les attirer dans les
régions après coup. Ce qui est nouveau ou ce qui s'en vient, ça va être déjà de
les inciter déjà, avant même qu'ils arrivent au Québec, de venir s'installer
directement dans nos régions plutôt que d'arriver à Montréal ou d'arriver à
Québec et d'après, de les attirer en région. Est-ce que vous pensez que c'est une
bonne idée? Est-ce que vous pensez que ça faciliterait la rétention en région?
Parce que c'est ce qu'on veut.
• (16 h 30) •
M. Houdeib (Mazen) : C'est
une bonne idée, mais je ne peux pas... pour réussir la rétention, ça prend
aussi autres mesures. L'idée, l'idée en soi, elle est excellente parce que ça
permet de répondre à cette importante idée de régionalisation. Mais retenir les
gens dans les régions... Quelqu'un qui arrive dans les régions puis qui
n'arrive pas à trouver un emploi, on va dire, exemple, et trouve un emploi à
Montréal, encore une fois, ou à Québec, ou dans un centre urbain, O.K.? Bien,
il va être obligé d'y aller s'il n'est pas relativement proche, par exemple,
parce que parfois on peut voyager, là.
Mme Tardif : Notre approche
est vraiment basée sur le fait qu'on les fait venir en région pour combler le
manque d'emplois, c'est par rapport à nos entreprises, là. On ne les invite pas
juste comme touristes et on essaie de les attacher. Ce n'est pas tout à fait
ça, là, on a vraiment des entreprises de la région qui ont des besoins
spécifiques de technique ou d'ingénierie, peu importe, ou en médecine, ce sont
d'autres exemples, là, ou en électronique, en équipement, en électrochimie,
etc.
Vous avez aussi mentionné le besoin d'avoir
une meilleure coordination des services d'accueil, des personnes qui arrivent
sur le terrain. Puis là je vous ramène en région, parce que moi, je suis en
région. Est-ce que vous pouvez élaborer davantage sur la meilleure coordination
ou ce que vous voyez comme étant un manque de coordination? Est-ce que c'est
entre les organismes sur le terrain, les organismes et les ministères? Comment
vous voyez ça?
M. Houdeib (Mazen) : En fait,
c'est à deux niveaux, c'est entre le ministère et les organismes et entre les
organismes et eux-mêmes. Le problème que les organismes communautaires vivent
depuis longtemps, et là, c'est mon ancienneté qui parle un peu, là, c'est que,
malgré toutes les bonnes intentions de tous les gouvernements, ministères, les
organismes communautaires, même malgré toutes les bonnes intentions, il y a la
question de la confiance qu'il faut développer. Ça veut dire une confiance dans
les partenaires, les partenariats, ça veut dire essayer de ne pas mettre des
organismes communautaires en compétition et plutôt les mettre en
complémentarité, plutôt les aider à ne pas dédoubler les services. Moi, je peux
vous assurer, sur le terrain, qu'on reçoit des gens qui ont fait déjà le tour
de tous les organismes pour leurs besoins et ils finissent à arriver au ROMEL
pour la même question, le même besoin. Alors, ça, c'est comme... Et la raison
pour...
16 h 30 (version non révisée)
M. Houdeib (Mazen) : ...d'ailleurs,
le dernier programme du ministère de l'Immigration l'a bien illustré, le
programme...
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Je dois vous arrêter, la période impartie au gouvernement
est terminée, mais on va continuer nos discussions, cette fois avec l'opposition
officielle. La députée de Chomedey, une période de 12 min 23 s.
Mme Lakhoyan Olivier : Bonjour.
M. Houdeib (Mazen) : Bonjour.
Mme Lakhoyan Olivier : Donc,
vous avez... D'abord, merci d'être là. Merci de nous avoir remis vos mémoires.
Vous êtes... Est-ce que j'ai bien compris? Vous êtes 10 personnes qui
travaillent, qui font tout ça?
M. Houdeib (Mazen) : Oui, l'équipe,
c'est 10 personnes. On était... avant la COVID, on était 18, par exemple,
puis... En tout cas, pour le moment, on est 10 personnes, mais on a
maintenu les services.
Mme Lakhoyan Olivier : Vous
êtes 10 personnes et cet organisme existe depuis une trentaine... plus qu'une
trentaine d'années. Et vous faites un gros travail. Lorsque vous avez mentionné
tantôt que vous avez visité des logements. Sur les 4 813 logements,
vous avez trouvé 3 800, à peu près, salubres. C'est un gros travail, ça,
faire les recherches, pour 10 personnes.
M. Houdeib (Mazen) : Oui. En
fait, ce n'est pas les 10 personnes qui font les recherches, c'est
Alfredo, qui est avec nous, avec une deuxième personne qu'on a réussi... Mais
ça... c'est sûr, les chiffres, c'est au fil des ans, c'est pas une seule année,
c'est au fil des ans du programme Harmonie, là. C'est comme à peu près sept
ans, je pense, si je ne me trompe pas. Alfredo, c'est sept ans... notre
programme Harmonie a fonctionné, et c'était géré pratiquement par deux
personnes.
Mme Lakhoyan Olivier : Wow.
En ce moment, est-ce que vous trouvez qu'il y a des immigrants de n'importe
quel statut, là, qui cherchent des logements et que vous n'en avez pas trouvé?
Est-ce qu'il y en a beaucoup? Avez-vous une liste d'attente? Commence ça se
passe?
M. Houdeib (Mazen) : Je
laisse la parole à mon collègue, Alfredo, qui gère ce service et qui accueille
tous ces gens-là. Il peut vous... Alfredo, s'il vous plaît, si vous permettez.
M. Lombisi (Alfredo) : Merci
beaucoup pour la parole. En fait, en ce moment, la situation actuelle, en
commençant par le prix des logements qui sont trop chers présentement... et
quand on parle de nouveaux arrivants, comme des demandeurs d'asile qui
reçoivent un montant vraiment limité qui est de 800 $, aujourd'hui, on
parle d'un un et demi à 850 $ et facilement à 900 $, donc ça devient
vraiment difficile de trouver des solutions pour cette clientèle-là qui, à
force, ils vont se mettre à deux ou trois pour trouver un logement. Donc, c'est
vraiment difficile de trouver un logement présentement en ville. Il y en a
maintenant qui... Avant, c'était difficile pour quelqu'un qui venait d'arriver
de lui proposer d'aller à Longueuil, par exemple. Mais aujourd'hui, les
nouveaux arrivants, en parlant avec d'autres nouveaux arrivants aussi dans les
centres, ils acceptent d'aller à Laval ou bien à Longueuil parce que ça devient
difficile de trouver un logement ici, à Montréal. Oui, c'est très difficile de
trouver un logement pour les nouveaux arrivants.
Mme Lakhoyan Olivier : Donc,
à Montréal, il y a un manque de logements, déjà on sait ça, mais même vous n'êtes
pas capable d'offrir des logements sur l'île de Montréal. Vous avez apporté
plusieurs suggestions. Dans la planification, vous trouvez aussi le besoin de d'abord
avoir un logement de prêt pour ces gens qui vont arriver ici pour s'installer.
Donc... Et vous avez mentionné tantôt des suggestions pour le développement des
logements. Est-ce qu'on a de la place à Montréal? Est-ce qu'on doit aller dans
les régions? Qu'est-ce que vous pensez là-dessus?
M. Houdeib (Mazen) : Il y
a... si vous me permettez, il y a deux niveaux de problème de logement. Il y a
un qui était un peu occulté à cause de... bien, à cause de... en tout cas, des nouvelles.
Il y a le manque de logements, puis il y a les logements qui sont inadéquats,
insalubres et surpeuplés. Alors, à Montréal et un peu... c'est-à-dire, le
problème, il est un peu partout à Montréal parce qu'on reste à Montréal...
M. Houdeib (Mazen) : ...Montréal.
Il y a des possibilités avec les grands sites qui appartiennent à la Ville de
Montréal, comme le site Blue Bonnets ou le site...
M. Guay (Emanuel) Louvain Est.
M. Houdeib (Mazen) : ...Louvain
Est et d'autres grands sites à Montréal qui permettent d'offrir quand même un
certain nombre de logements.
Il ne faut pas oublier aussi qu'il y a à
Montréal des milliers, je dirais... Je n'ai pas le chiffre exact, là,
aujourd'hui, mais des milliers de logements qui sont gelés parce qu'il y a eu
un changement dans les programmes. Puis le programme AccèsLogis n'était plus
comme... bien comme... est presque arrêté, et tout, ce qui fait que, quand
même, il y a des projets sur des terrains parfois qui appartiennent à la ville
même de Montréal dans le cadre de l'inclusion, qui attendent un financement
pour pouvoir se développer.
Et c'est des projets qui sont pas mal
avancés, je veux dire, au niveau de la procédure, des plans, des choses comme
ça. Ce qui fait que, repartir un programme autoporteur comme le programme
AccèsLogis, là, mais avec des ajustements adéquats par rapport à la réalité du
marché, va permettre très rapidement de sortir peut-être 3 000 unités
de logement à 4 000, c'est-à-dire en chantier au bout de quelques mois
parce que c'est des projets qui sont prêts. Mais, pour le moment, ces
projets-là, certains peut-être vont pouvoir se réaliser avec le nouveau
programme PHAQ, peut-être, d'autres, peut-être, avec d'autres programmes, mais
il y a beaucoup qui ne réussissent pas à boucler leur financement.
Alors, c'est un peu ça, la... si on veut
faire une mesure comme un peu rapide, immédiate, là, ça peut permettre de
débloquer des projets à Montréal, à part les grands sites dont je parle, qui
peuvent accueillir des milliers de logements aussi, comme le site Louvain ou le
site Blue Bonnets.
Mme Lakhoyan Olivier : Vous
savez, les citoyens qui nous écoutent en ce moment, à entendre tous ces
termes-là, ils disent : on veut avoir des logements, on veut que tout le
monde ait une qualité de vie. Est-ce que... Vous dites : il y a des
terrains à la Ville de Montréal, plusieurs terrains, gros terrains. Est-ce que
vous trouvez qu'il y a un manque de vouloir de la part du gouvernement
provincial, la Ville, est-ce qu'il y a un manque à un certain niveau pourquoi
ces projets n'ont pas eu lieu encore?
• (16 h 40) •
M. Houdeib (Mazen) : Bon.
Le... Au Niveau de l'intention, moi, je peux vous dire par expérience que la
bonne intention, que ce soit du gouvernement ou de la Ville de Montréal, est
là. Ils veulent. Le problème, c'est que le développement d'un projet de
logements ne dépend pas seulement de la ville et du gouvernement, il dépend du
marché. Et le marché, comme vous venez de dire et qu'on vient de parler, c'est
qu'il y a des difficultés sur le marché. Il y a des coûts qui sont énormes, il
y a le taux d'intérêt qui est... Ce qui nécessite des mesures exceptionnelles
de la part des gouvernements. Alors, c'est là où...
Alors, l'intention, elle est là, on est
convaincus, 100 %, mais ça prend seulement... Ça prend une décision dans
un sens ou dans l'autre pour pouvoir débloquer ces projets-là. Alors, c'est
vraiment une question plus peut-être mécanique, je ne peux pas vous dire
vraiment la raison, mais je suis sûr que les instances gouvernementales, elles
veulent... c'est évident, là, elles veulent que les projets démarrent. Mais il
faut peut-être prendre des mesures qui favorisent le démarrage de ces
projets-là. Et toujours, on ne se cache pas derrière notre doigt, c'est la
question du financement à cause des taux d'intérêt, à cause des coûts de
construction.
Alors, ça serait utopique de penser qu'on
peut produire des logements abordables sans investissement. Même le secteur
privé ne peut pas les produire sans investissement parce que c'est une question
mathématique, là, c'est une question mathématique et financière, ce n'est pas
compliqué, alors...
Mme Lakhoyan Olivier : ...
M. Houdeib (Mazen) : ...le
financement.
Mme Lakhoyan Olivier : Je ne
voulais pas vous couper la parole, mais l'être humain, ce n'est pas
mathématique. L'être humain a besoin d'un toit. Et le fait qu'on n'a pas de
logements pour ces gens-là, ça ne ressemble pas à Québec. On est au Canada,
dans la province du Québec, on... Je n'en reviens...
Mme Lakhoyan Olivier : ...on
parle de manque de logements... Ça fait un an, on parle de ça, puis maintenant,
avec cette commission, je vous entends. Ça me frustre en tant que député, au
Québec, quand on n'a pas de logement. Combien de gens vous trouvez qu'ils n'ont
pas de logement? Oui, ils habitent vraiment dans des logements pas salubres,
disons. Est-ce que c'est un grand nombre? De combien de nombres on parle? C'est
quoi, le besoin?
M. Houdeib (Mazen) : Bien,
moi, vous allez m'excuser de ne pas mentionner peut-être des chiffres précis,
mais on sait que dans les quartiers, le pourcentage, surtout les quartiers
centraux, le pourcentage des gens qui payent plus que 30 ou 35 % de leurs
revenus pour se loger et inadéquatement, on va dire, parce que le
surpeuplement, même c'est un logement inadéquat, l'insalubre... le logement
insalubre, il est inadéquat aussi également. Et puis le prix, il peut être très
lourd pour une famille normalement. Ça, ça compte par des dizaines de milliers,
là, dizaines de milliers. On a besoin de dizaines de milliers de logements
vraiment à prix abordable. Bien, lorsque je dis «prix abordable», un vrai prix
abordable en partant, parce que ça doit être abordable pour les gens qui ont
des revenus moyens et modestes et en même temps ça n'exclut pas le logement
communautaire et social. Parce qu'exclure le logement communautaire et social,
on vient exclure une bonne... une partie de la population d'avoir accès à des
logements décents, et ces personnes-là ne seront jamais capables d'accéder à un
logement abordable dans les formules actuelles. C'est un peu difficile parce
que le prix, il est élevé par la nature même. Ce n'est pas la faute à personne,
on va dire, là, c'est le marché, et il est comme ça. Alors, si on n'injecte pas
de l'argent pour développer des logements communautaires, vraiment à prix
abordable et pérenne dans le temps, qui vont rester pour toujours des logements
abordables, ça serait peut-être difficile de trouver des solutions.
Mme Lakhoyan Olivier : Qu'est-ce
qu'on va faire d'abord? On a nos aînés, ils vont augmenter de plus en plus. On
a nos citoyens aussi en situation vulnérable. On a les immigrants. Je pense que
c'est très urgent d'avoir des logements. Donc, vous apportez les suggestions,
mais en même temps, vous dites : Il n'y a pas de solution.
M. Houdeib (Mazen) : Non...
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup. Je dois malheureusement vous arrêter ici,
le temps imparti à l'opposition étant écoulé. On va terminer par contre avec le
député de la deuxième opposition. Quatre minutes, huit secondes, M. le député,
le temps est à vous.
M. Cliche-Rivard : Merci
beaucoup pour votre présentation puis pour votre travail. Vous avez expliqué
très, très en détail vos trois recommandations. Merci. C'est très clair. Le
mémoire est très clair aussi. Mais je me demandais si vous aviez des positions
aussi sur les autres sujets du cahier de consultation, par exemple si vous
aviez des recommandations sur les deux scénarios qui sont soumis, celui à
50 000, celui à 60 000. Est-ce que vous avez des positions sur les
enjeux de hausse de délais ou sur la hausse des étudiants étrangers
temporaires, sur la hausse des travailleurs temporaires? Bref, je me demandais
si vous aviez des positions aussi sur le reste du cahier.
M. Houdeib (Mazen) : Si vous
me permettez, je demanderais peut-être à mon collègue Emanuel s'il aimerait
peut-être commenter ça. C'est correct?
M. Cliche-Rivard : Oui.
M. Guay (Emanuel) Oui... très
rapidement, je pense qu'on a préféré se concentrer sur les enjeux de logement
dans le cadre du mémoire, essentiellement parce qu'on trouvait que le cahier
public se concentrait beaucoup sur la régionalisation, qu'on a abordée un peu,
la francisation, qu'on a moins discuté peut-être dans le cadre de cette
audition puis tout en prenant bien en compte, là, la question effectivement des
seuils, tu sais, dans la période 2024-2027 relative à l'immigration. On a
vraiment préféré se concentrer sur le logement comme une partie intégrante,
voire centrale finalement, de la structure d'accueil puis d'intégration au
Québec, parce qu'on trouvait que c'était peut être un... La crise du logement
était évoquée dans le cahier public, il était question, tu sais, d'habitation,
mais surtout pour dire qu'il en manquait au Québec. Nous, ce qu'on voulait
mettre de l'avant, c'est le fait que finalement, indépendamment des scénarios
qui vont être adoptés en 2024-2027, il va falloir un soutien plus conséquent
finalement pour le secteur de l'habitation communautaire, tu sais, qui est un
des outils pour permettre, je veux dire, aux nouveaux puis aux nouvelles
arrivantes de se loger, là, tu sais, comme à d'autres catégories de population.
Mais nous, ce qu'on voyait, c'était des ralentissements possibles dans la
sortie de terre de plusieurs projets...
M. Guay (Emanuel) ...à cause des
réalités qu'a évoquées, là, mon directeur, Mazen, entre autres. Puis aussi ont
appelait à une meilleure reconnaissance des services déjà offerts sur le
terrain, comme, par exemple, Alfredo ou d'autres collègues, au... ou dans
d'autres organismes. Donc, on ne s'était pas vraiment prononcé spécifiquement sur
ces aspects-là du mémoire parce qu'on voulait vraiment se concentrer sur ce qui
nous apparaissait comme un angle un peu sous-développé dans le cahier public
puis qui répondait directement à nos expertises.
M. Cliche-Rivard : Donc, je
devine que, bon... Vous l'avez dit un peu, on aura à définir notre capacité
d'accueil et on aura à définir qu'est-ce que ça veut dire, là quand on aura des
facteurs ou des éléments clés. J'imagine que, pour vous, le nombre de logements
disponibles par région, par ville, ça fera partie des indicateurs.
M. Houdeib (Mazen) : Effectivement,
oui.
M. Cliche-Rivard : Est-ce que
vous avez idée d'autre chose? Vous parlez de services. Est-ce que ce que vous
auriez ou vous êtes capables de définir quels seraient, selon vous, les
facteurs prioritaires dans la définition de cette capacité d'accueil là?
M. Houdeib (Mazen) : Si vous
me permettez, le facteur... pour nous, le facteur premier, c'est le logement,
l'habitation. Parce que, même, la question est là, je parle d'expérience, moi,
je ne suis pas nouvellement arrivé, là, mais, quand même, je suis venu
d'ailleurs, O.K., puis j'ai vécu mon expérience. Puis des gens que je connais
ont vécu l'expérience. Lorsqu'on n'est pas bien logé, avec surtout une famille
ou des enfants, même les cours de francisation, même les cours de recherche
d'emploi, même les autres, ça devient un lourd fardeau pour une famille qui
souffre dans son logement.
Alors, pour nous, lorsqu'on va parler de
la capacité d'accueil du Québec, des nouveaux arrivants, il faut prendre en
compte la capacité de développement dans les régions, un peu partout, là, du
logement et de l'habitation. Alors, ça va ensemble. Nous, on pense que ça va
ensemble. Si le gouvernement décide que le seuil est 50 000, ou 40 000, ou
60 000, il faut qu'il y ait des programmes à côté qui permettent cet
accueil-là. Alors...
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup. C'est ce qui termine cette audition.
Messieurs, à nouveau, félicitations pour l'apport à nos travaux. Je vous
souhaite une bonne fin de journée.
Et je suspends les travaux quelques
secondes, le temps de recevoir le prochain groupe.
(Suspension de la séance à 16 h 50)
(Reprise à 16 h 56)
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Alors, mesdames et messieurs, à l'ordre, s'il vous plaît!
La Commission des relations avec les citoyens reprend ses travaux. À l'ordre,
s'il vous plaît! On avait besoin d'un petit repos.
Alors, nous allons recevoir... bienvenue à
la commission, le Réseau des organismes et groupes de parrainage des réfugiés
au Québec. Alors, mesdames, messieurs, vous allez bénéficier d'une période de
10 minutes pour vous présenter et exposer vos recommandations. Ensuite,
nous allons procéder à une période d'échanges avec les parlementaires. Alors,
la parole est à vous.
M. Van Haren (Ian) : Merci
beaucoup. Donc, bonjour, merci pour l'invitation. Nous sommes très contents de
présenter notre mémoire aujourd'hui. Je me présente Ian Van Haren, je suis le
directeur général d'Action Réfugiés Montréal et je fais partie du comité de
coordination de ROGPRAQ, le regroupement des organismes et groupes de
parrainage des réfugiés au Québec.
Aujourd'hui, je suis avec Alessandra
Santopadre, directrice du programme de parrainage par le diocèse de Montréal,
Sylvain Thibault, membre d'un groupe de parrainage dans le cadre du programme
de groupes de deux à cinq personnes, et, Myriam Keyloun, ma collègue qui
accompagne les personnes réfugiées qui sont parrainées. Comme elle va nous
expliquer, Myriam est venue au Québec en tant que personne réfugiée par ce
programme.
Le programme de parrainage collectif offre
une protection au Québec aux personnes qui se trouvent dans les situations de
refuge d'ailleurs dans le monde. Des groupes au Québec se mobilisent pour aider
et soutenir des personnes réfugiées à se réinstaller au Québec et à s'adapter à
leur nouvelle vie ici.
Le parrainage des personnes réfugiées
change la vie des personnes réfugiées et cela enrichit notre société aussi. On
connaît bien l'arrivée des personnes réfugiées du Viêtnam, du Cambodge et du
Laos par ce programme vers la fin des années 70. Plus récemment...
M. Van Haren (Ian) : ...plusieurs
personnes réfugiées syriennes sont venues au Québec par le parrainage.
Aujourd'hui, les groupes au Québec répondent à plusieurs situations de
migration forcée, parrainant les personnes afghanes, irakiennes, congolaises,
et des personnes d'autres origines qui ont besoin de protection au Québec.
Voici quelques exemples : des
Syriennes qui fuient leur pays car elles ne veulent pas participer à une
guerre, des jeunes femmes qui ont dû quitter l'Afghanistan car elles sont
persécutées lorsqu'elles cherchent à obtenir une éducation ou à vivre de
manière indépendante, des personnes LGBTQ+ dont les droits ne sont pas
respectés dans leurs pays d'origine. Le programme de parrainage collectif est
pour ces personnes. Dans certaines situations, c'est assez récent... où la
personne réfugiée a dû quitter son pays d'origine, mais dans d'autres situations,
ça se prolonge. Des enfants sont nés dans les camps de réfugiés, dans une
famille, en attente d'une solution à long terme. Par exemple, certains réfugiés
érythréens et congolais se trouvent dans ces situations.
Partout au Québec, des groupes ou des organismes
de parrainage s'impliquent à aider les personnes réfugiées par le parrainage
collectif. Dans un contexte global où la migration forcée est un enjeu
important, le programme de parrainage collectif est perçu comme un exemple à
suivre dans plusieurs autres pays, et nous croyons que les valeurs québécoises
nous poussent à accueillir ces personnes réfugiées.
Notre mémoire encourage votre gouvernement
de faire en plus pour renforcer ce programme et d'améliorer l'accueil qui est
offert aux personnes réfugiées qui arrivent par le parrainage collectif. Je
soulève nos recommandations. D'abord, nous encourageons une augmentation
significative des personnes qui obtiennent le statut de résident permanent au
Québec par des visas octroyés aux personnes réfugiées. Pour le parrainage
collectif, nous vous encourageons de fixer une cible d'au moins 4320 personnes
réfugiées par année, chaque année. Ensuite, nous constatons que, dans les
années récentes, le gouvernement du Québec n'a pas atteint ses cibles pour le
programme de parrainage collectif. En effet, il y avait un écart de 5400
personnes entre 2020 et 2022. Nous reconnaissons la pandémie, mais il faut
rattraper ce retard. Ces actes, de fixer les cibles claires pour le parrainage
collectif et de rattraper les demandes de parrainage qui n'ont pas été
traitées... ces actes vont aider à réduire les temps de traitement des
dossiers.
• (17 heures) •
Ensuite, il faut mettre en place des
normes de service précises et claires pour chacune des étapes que le Québec
contrôle afin de traiter toutes les demandes de parrainage dans 12 mois. Il
faut aussi abolir le système de loterie. L'accès au parrainage ne doit pas être
laissé au hasard.
Nous avons des recommandations concernant
comment améliorer les services offerts aux personnes réfugiées parrainées et
les services offerts aux garants qui accompagnent les personnes réfugiées. Cela
comprend des actions pour soutenir les personnes réfugiées à accéder à la
francisation et à participer à l'économie québécoise. Il faut être clair :
les Québécoises et Québécois qui se mobilisent et font des parrainages le font
car ils répondent avec humanité aux situations très difficiles. Nous voulons
accueillir les personnes réfugiées au Québec. Les personnes réfugiées qui sont
parrainées dans ce programme sont prêtes à contribuer à la société québécoise
et à vivre dans un contexte où leurs droits sont respectés. Donc, à la base,
c'est un programme humanitaire pour une population qui veut travailler,
contribuer et se sentir en sécurité.
Il pourrait y avoir des enjeux liés au
marché du travail, mais c'est des enjeux bien connus. Et un accès rapide à la
francisation pour celles qui en ont besoin, et la flexibilité de la part des
employeurs pour la documentation, qui est souvent difficile, pour les personnes
réfugiées, à obtenir, ça va améliorer la situation.
Nous voulons aussi aborder une solution
potentielle pour répondre au grand nombre des personnes réfugiées dans le
monde. Récemment, plusieurs pays ont mis en place des initiatives qu'on appelle
des voies complémentaires, où les employeurs peuvent recruter des personnes
réfugiées qui habitent dans les camps des réfugiés pour combler certains
postes. Le Québec devrait voir si un tel programme pourrait être mis en place
ici.
Nous, les membres du ROGPRAQ, nous voulons
travailler avec vous pour renforcer et améliorer le programme de parrainage
collectif. Nous sommes prêts à collaborer en créant une société inclusive qui
offre un accueil chaleureux et digne aux personnes réfugiées. Je passe la parole
à ma collègue Myriam.
Mme Keyloun (Myriam) : Bonjour.
Je m'appelle Myriam Keyloun. J'ai quitté la Syrie en 2012 et je suis arrivée au
Québec en 2016 en passant...
17 h (version non révisée)
Mme Keyloun (Myriam) : ...par
la Turquie et le Liban. Je suis une personne réfugiée parrainée grâce à ce
programme de parrainage collectif. Je suis heureuse de pouvoir vous adresser
aujourd'hui.
Le parcours commence le moment où on
quitte notre pays. On est à la merci des pays de transit où on se trouve. On
travaille s'ils nous permettent de travailler. On habite où ils nous donnent le
droit d'habiter, incluant des camps de réfugiés. On apprend vite à se faire le
plus petit possible. On se voit transformé en un produit dont la valeur humaine
est à être examinée, évaluée, validée ou rejetée. On perd le sens de notre
humanité et on passe de la vie à la survie. On vit dans le présent et parfois
dans le passé, mais le futur ne nous appartient pas.
Le programme de parrainage collectif nous
donne de l'espoir, mais, avec le tirage au sort, l'espoir devient conditionnel
et le processus moins humain. L'accès au programme, les délais de traitement et
d'attente augmentent notre détresse. On comprend que ça prend des années, mais
combien? Deux, trois, cinq, plus? On ne le sait pas et personne ne nous répond.
On est un numéro de dossier sur le bureau de quelqu'un à l'autre bout du monde.
Et on reçoit enfin le coup de fil
tellement attendu. On arrive au Québec, on nous dit qu'on est chez nous et on
le croit. Malgré tout ce qu'on a vécu, on a hâte... le moment de notre arrivée
de passer à l'action, de réclamer notre humanité et de retrouver nos rêves et
nos aspirations personnelles et professionnelles qu'on a dû laisser de côté
pendant des années.
Moi, j'avais hâte de me retrouver en
classe d'école et de redémarrer ma carrière de 10 ans en enseignement,
mais malheureusement je fais face à tellement d'obstacles que j'ai décidé de
laisser aller. Et pendant mes sept ans au Québec, j'ai travaillé sur différents
projets, programmes et recherches liés à l'accueil et l'accompagnement des
personnes réfugiées dans le domaine de la francisation, l'employabilité et la
santé mentale, entre autres. J'ai reconnu le privilège que j'avais de vouloir
et de pouvoir utiliser ma voix. Et en passant par cette expérience et en
appartenant à la communauté des personnes réfugiées, je me suis rendu compte
que je n'étais pas la seule à être confrontée par des obstacles systémiques qui
sont en dehors de mon contrôle et liés à mon parcours et réalités de refuge. Ce
que nous avons tous en commun, c'est que notre parcours de refuge n'était pas
né d'un choix.
Nous sommes venus au Québec grâce à un
programme d'immigration humanitaire, mais on est là, un groupe diversifié, avec
une richesse de valeurs, d'expériences et d'expertises. La résilience et la
capacité de nous adapter sont devenues une partie intégrale de notre identité.
On redémarre dans notre projet de vie, on regarde droit devant vers un futur
qui enfin nous appartient et on avance en portant nos traumas sur nos épaules
et en vivant le deuil de qui on était et de ce qu'on a dû laisser derrière.
Nous sommes prêts et capables à contribuer à notre société.
Les recommandations nommées dans notre
mémoire est un reflet de notre témoignage des parcours incroyables des
personnes réfugiées que nous accompagnons et des vraies réalités vécues par les
personnes réfugiées avant et après leur arrivée. Et souvenons-nous, un statut
de réfugié est juste un statut, ça n'augmente pas et ça ne diminue pas la
valeur d'un être humain. Merci.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup pour ce témoignage, c'est touchant. Mme la
ministre vous a accordé quelques secondes sur son temps, c'est pour ça je ne
vous ai pas fait signe. Alors, va débuter tout de suite la période d'échanges.
Vous avez un petit peu moins de 16 minutes, 16 minutes tout juste.
Voilà.
Mme Fréchette : O.K. Merci, Mme
la Présidente. Bien, merci à vous tous d'être des nôtres pour participer à cet
exercice démocratique. Un grand merci pour nous avoir partagé votre parcours de
vie. Il y a beaucoup à tirer de ce que vous avez traversé. Félicitations pour
votre résilience. Manifestement, vous en avez fait preuve pendant tout ce
trajet. Donc, un grand merci pour votre mémoire également.
J'aimerais commencer en vous disant,
bien...
Mme Fréchette : ...je suis
très sensible au stress vécu par les familles qui sont en attente d'une
conclusion de l'étude de leur demande. Les délais de traitement, on reconnaît,
là, qu'il y a eu des retards qui ont été accumulés dans le traitement des
dossiers, là, dans le cadre du parrainage collectif. Il y a des efforts qui ont
été investis ces dernières années afin que toutes les demandes, là, complètes
reçues en 2021 et 2022 soient finalisées d'ici la fin décembre 2023. Donc, le
ministère, là, va vraiment poursuivre ses efforts pour les demandes reçues dans
la présente année de manière à combler le retard. Donc, je voulais prendre le
temps de souligner ça puisque vous y avez fait référence dans votre
intervention.
Vous avez fait référence également au
processus de tirage au sort. Bon, comme vous savez, le parrainage collectif, ça
fait l'objet d'une gestion de la demande depuis 2018, en fait. Auparavant,
c'était un autre système. Et donc le ministère fixe une limite au nombre de
nouvelles demandes et il procède par tirage au sort depuis 2021. Et ça, c'est
le cas parce que c'était une recommandation du Protecteur du citoyen. Donc, le
ministère a mis en œuvre la recommandation du Protecteur du citoyen, alors
c'est pour ça qu'on procède par tirage au sort. Donc, de là origine la
mécanique qui est utilisée actuellement.
Alors, vous mentionnez dans votre mémoire
à la page... Je vais vous amener à la page 12. Vous avez une
recommandation, la recommandation 14, qui repose, donc, sur l'instauration
d'un programme pilote qui fournirait une résidence permanente à titre de
travailleur qualifié aux personnes réfugiées qui répondent... qui répondraient
aux besoins, là, du marché du travail du Québec. Alors, j'aimerais ça que vous
me parliez davantage de cette proposition que vous nous faites. Comment est-ce
que vous verriez que puisse fonctionner un tel projet pilote, et, voilà,
comment ça évoluerait?
• (17 h 10) •
M. Van Haren (Ian) : Oui.
Donc, c'est un projet pilote qui est déjà instauré au niveau fédéral au Canada.
C'est récent. Ils ont fait un peu de recherche là-dessus. Donc, c'est
différent du parrainage. Et, d'un autre côté, c'est quelque chose à voir, à
explorer parce qu'on voit dans le monde plus de 100 millions de personnes
qui vivent la migration forcée, plus de 30 millions de personnes dans le
monde qui sont des personnes réfugiées.
Donc, s'il y a des entreprises au Québec
ou si le système de santé au Québec, par exemple, trouve un manque de personnel
dans un lieu en particulier, peut-être de créer un programme, ou des problèmes
qui sont toujours... souvent vécus par des personnes réfugiées, comme manque de
documentation ou des choses comme ça, sont un peu réglés dans un programme
pilote pour embaucher des personnes comme ça. Il y a des exemples au
Nouvelle-Écosse, où c'est déjà arrivé, ou dans les autres pays, mais ça doit
être additionnel à un programme de parrainage et ça peut répondre à vos besoins
d'immigration économique, mais trouver des personnes réfugiées pour faire ça.
Nos autres recommandations sont vraiment plutôt ciblées sur le programme
Parrainage collectif.
Mme Fréchette : Et ça semble
bien fonctionner avec ce qui a été implanté au fédéral?
M. Van Haren (Ian) : Je pense
que c'est une discussion avec le ministre fédéral... C'est vraiment nouveau.
Mais si on est par exemple à Genève, on discute les solutions pour les
personnes réfugiées, où, en passant, je pense, le Québec peut être aussi
présente à Genève pour ce type de consultation. C'est vraiment là où le HCR et
les autres organismes internationaux vont pour trouver d'autres solutions pour
les personnes réfugiées à l'échelle mondiale.
Mme Fréchette : Bien, merci
de la proposition. En page 10, vous recommandez, en fait, d'offrir des
cours de français aux personnes réfugiées parrainées avant leur arrivée au
Québec et vous indiquez, en fait, que la connaissance du français, là, ne
devrait pas être un critère de sélection. Donc, bien, je voudrais juste vous
mentionner, d'une part, que la connaissance du français n'est pas un critère de
sélection, là, pour les personnes réfugiées puis qu'il n'est pas prévu non plus
que ça le devienne. Donc, ça, je veux vraiment clarifier les choses de ce
côté-là.
Donc, le ministère, là, on dispose déjà
d'un certain nombre de partenaires à l'étranger puis on souhaite renforcer
l'offre de cours en amont avant même que les gens n'arrivent au Québec. Mais là
vous, donc, vous proposez que le... En fait, notre façon de procéder en ce
moment, c'est que le CSQ est délivré à la fin du processus, et c'est une fois
le CSQ obtenu qu'il y a l'accès aux cours de français en amont. Vous, vous
proposez que ça puisse se faire avant même la délivrance du certificat, c'est
ça?
Mme Keyloun (Myriam) : Bien,
du moment où...
Mme Keyloun (Myriam) : ...où
il y a un résultat d'acceptation, que la personne est acceptée. Et là, parfois,
ça prend des années avant que la personne, vraiment, arrive au Québec. Donc, vu
que les personnes réfugiées viennent de la diversité... Et puis, même dans les
pays de transit, c'est des réalités différentes. Donc, il y a des personnes qui
ont accès... qui vivent dans des centres urbains, qui ont accès à la technologie.
Ce n'est pas le cas pour tout le monde, mais ça peut déjà servir pour ceux qui
peuvent bénéficier. Ils nous demandent toujours qu'est-ce qu'on peut faire pour
préparer avant notre arrivée. Et il y a même des personnes qui commencent déjà,
même sur YouTube, qui commencent à apprendre le français elles-mêmes, et
parfois ils font des cours que, là, ils doivent payer, et ça coûte cher
dépendant... Donc, c'est quelque chose qui peut déjà aider, que les personnes,
certains critères, peuvent arriver déjà préparées ou avec un cours ou deux mais
déjà une compréhension générale de la langue française.
Mme Fréchette : O.K. Et je
vois de la technologie, hein? Il n'y a pas que des défauts. Ça, ça oui.
Vous proposez aussi de renforcer la
prestation de services aux personnes réfugiées récemment arrivées, là, pour
l'ensemble des régions du Québec. Quels défis particuliers vous associez au
fait que les personnes arrivent en région? Qu'est-ce que ça ajoute comme niveau
de complexité? Puis qu'est-ce que vous verriez qu'on doit ajouter comme types
de services pour être plus complets dans notre accompagnement?
Mme Keyloun (Myriam) : Bien,
vu que le programme de parrainage vient de la volonté des personnes Québécois
et Québécoises, et parfois c'est des membres de la famille, donc ils se
trouvent partout au Québec, donc les personnes... Pour nous, les régions, ce
n'est pas nécessairement dans le contexte de régionaliser... de
régionalisation, ça veut dire, ce n'est pas seulement de quitter Montréal pour
aller en région, mais, parfois, le programme de parrainage se fait en région.
Mais on trouve qu'il y a beaucoup de personnes qui arrivent en région, qui
déménagent à Montréal à cause de manque de services, qui peut être même au
niveau du transport. Donc, en vivant en région, l'accès entre où on habite,
avec le problème des logements, et où on travaille, là, ça coûte... il faut
avoir une voiture. Il y a des défis déjà.
Donc, pour nous, l'important, quand on
pense au programme de parrainage n'importe où au Québec, n'importe qui sont les
parrains et les groupes de parrainage, qu'il y ait les services qui sont dans
la globalité. Donc, on travaille sur la francisation, en même temps sur l'accès
aux garderies, en même temps sur l'accès aux services d'employabilité pour les
personnes qui parlent déjà français, donc l'ensemble des services. Les
personnes réfugiées se trouvent toujours dans des situations de choix. Donc,
est-ce qu'on favorise la famille, donc là, peut être, on reste proche de notre
famille, n'importe, à Montréal ou ailleurs, ou est-ce qu'on favorise avoir un
revenu? Même avant la fin de l'année de parrainage, les personnes, elles ont
été en marche sur place pendant des années, donc, pour eux, commencer, démarrer
une vie... Donc, le plus d'accès à tous les services qu'ils ont, le plus que ça
facilite... que ça avance plus rapidement et qu'ils participeront, bien, à la
vie... oui.
Mme Fréchette : Au
développement de la société.
Mme Keyloun (Myriam) : Oui.
Mme Fréchette : Mais merci
beaucoup. Je vais céder la parole à des collègues.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup. Alors, je me tourne du côté de la députée
de Vimont. Il vous reste sept minutes.
Mme Schmaltz : Parfait.
Merci, Mme la Présidente. Merci à vous, merci de votre présence. Votre
témoignage est extrêmement touchant. Je n'ose même pas imaginer par quoi vous
avez dû passer pour arriver. Par contre, de vous voir ici aujourd'hui, c'est
vraiment un bonheur. Alors, je sens aussi une certaine plénitude. Peut-être le
mot est grand, mais quand même, je sens quand même une belle adaptation dans
votre nouvel environnement. Alors, voilà, c'était une petite remarque.
Je vais vous ramener, par exemple, à votre
recommandation numéro 13 dans votre mémoire où vous parlez de surmonter
les obstacles liés à la reconnaissance des compétences et aux exigences en
matière d'éducation pour certains emplois. Alors, est-ce que vous pourriez
élaborer un peu ces obstacles?
Mme Keyloun (Myriam) : Oui.
Donc, le contexte d'accéder au marché du travail, dans des différentes cultures
et pays, est varié. Donc, ça ne passe pas toujours à travers une formation, un
diplôme. Donc, nous, les personnes qu'on accueille, c'est des personnes qui ont
une richesse d'expertise et d'expérience de... Parfois, on a des personnes...
disons, un soudeur, électro... des mécaniciens qui ont... c'étaient des
entreprises de famille, donc, depuis leur enfance, ils travaillent dans ce
domaine-là, ils arrivent ici. S'ils parlent français, O.K., on passe à la
prochaine étape. Là, il y a des formations qui sont payées pour qu'elles
puissent...
Mme Keyloun (Myriam) : ...Accéder
sa... Parce que, quand on regarde les offres d'emploi, bien, des formations et
des diplômes sont demandés. Donc, si la personne ne parle pas français, bien,
elle fait la francisation, elle arrive à ce moment-là, mais elle n'a pas de
diplôme. Par exemple, ils n'ont pas de diplôme parce qu'ils ne peuvent pas les
amener avec eux ou ils n'ont pas de diplôme parce que depuis... Après l'âge
primaire, ils ont commencé à travailler dans les entreprises familiales. Donc,
c'est vraiment frustrant, parce que c'est des personnes qui ont l'expérience,
qui savent faire ce travail-là. Il y a des choses à apprendre, et c'est
certain, avec le français, c'est important pour pouvoir communiquer, mais c'est
des obstacles qui... c'est pour ça qu'on a dit que c'est lié à une situation,
la réalité de refuge, ce n'est pas lié à la préparation de la personne ou ce
n'est pas le même dans le contexte d'immigration économique, quand la personne
attend pendant des années, mais sa vie continue, elle a tous ses diplômes, et
tout ça. Donc, c'est vraiment frustrant parce qu'on se trouve avec des
personnes qui travaillent à Amazon, Dollarama, dans l'emballage, donc...
Mme Schmaltz : tantôt, M.,
vous avez parlé... Là, vous allez m'excuser, là, parce que je ne suis pas sûre
d'avoir bien saisi ou compris. Vous parliez tantôt de voies complémentaires
pour les employeurs. Est-ce qu'on parle de projets pilotes tantôt, que vous
avez expliqués? C'est de ça qu'on parle, là?
Une voix : Oui, exact.
Mme Schmaltz : En
Nouvelle-Écosse?
Une voix : Oui.
Mme Schmaltz : O.K. j'ai une
question. Considérant la vulnérabilité des réfugiés, est-ce que vous... Est-ce
qu'il y a un danger peut-être de dérive? Est-ce que... Parce que, j'imagine, il
faut un encadrement très solide pour ces gens qui sont... Qui arrivent déjà
dans un état de vulnérabilité, alors je me posais la question : est-ce que
ce projet est bien encadré? Est-ce que vous avez des échos?
M. Van Haren (Ian) : Oui. Et
je dirais, je ne veux pas devenir le porte-parole de ce programme-là parce que
je ne suis pas expert. Mais c'est juste, lorsqu'on est au forum qui parle des
enjeux d'immigration à un niveau national, c'est quelque chose que les autres
organismes soulèvent. Et donc je dirais c'est plutôt une question pour les
personnes qui ont des expériences avec ces programmes-là. C'est quelque chose à
voir, je pense, au Québec pour voir comment ça se passe d'ailleurs au Canada ou
dans les autres pays.
• (17 h 20) •
Mme Keyloun (Myriam) : Bien,
on a, tantôt, parlé aussi des différentes réalités, donc, des personnes parfois
qui quittent, et puis ils se trouvent dans des... Donc, il y a des personnes
réfugiées qui arrivent à quitter avec des documents, donc documents
universitaires, diplômes universitaires. Donc, ils passent à travers le
parcours de parrainage, qui, parfois, met une très grande distance entre le
moment où ils quittent leur pays jusqu'au moment où ils arrivent ici. Donc là
c'est... Les traumas, c'est là que ça s'accumule.
Donc, disons, une personne qui quitte et,
à travers un programme comme ça... Pourrait donner à ces personnes une voie
plus courte et plus rapide, mais en gardant, bien, ce qu'ils ont déjà vécu,
parce que, c'est ça, pour quitter son pays, ils ont vécu. Mais les traumas, ça
s'accumule le plus que la période d'attente est plus longue, et c'est ça que
les personnes amènent. Donc, des personnes qui ont un profil où ils sont de
niveau universitaire, ils ont leur diplôme, ils sont sur Internet, ils
cherchent des travaux, des emplois qui sont... Qui correspondent à leur
expertise, donc un programme comme ça peut, comme ça aussi, donner plus
d'espace dans les cas plus vulnérables.
M. Thibault (Sylvain) : Oui.
En fait, c'est un programme qui est très similaire au programme Entraide
universitaire mondiale du Canada, qui a été fondé en 1920, qui permet justement
à des collèges, des cégeps ou des universités de parrainer un étudiant qui
provient d'un camp de réfugiés et de l'amener ici et de l'encadrer.
L'encadrement, là, vous parliez tout à l'heure, est effectivement très
nécessaire. Donc, le projet pilote des voies d'accès à la mobilité économique
est très axé sur l'encadrement, évidemment. Donc, c'est ça.
Mme Schmaltz : O.K. au niveau
des réfugiés, est-ce que vous accueillez... bien, «accueillez», c'est un grand
mot. Est-ce que c'est... Vous avez plus de femmes, d'enfants ou c'est des
couples, c'est des familles? C'est quel... Oui.
Mme Santopadre (Alessandra) : Bien,
on peut dire qu'elles varient beaucoup. On est des organismes différents et,
quand on se rencontre, on voit qu'il y a des périodes, on peut dire comme ça,
où il y a des familles complètes. On voit, avec... les familles africaines,
afghanes sont très nombreuses, et ils arrivent des fois avec cinq, six enfants,
et la majorité née dans un camp de réfugiés. Et d'autres, irakiennes, je pense
à mes familles syriennes, qui sont plus adultes, familles, mais avec des
enfants adultes, et qui ont eu toute une autre expérience parce qu'ils ont vécu
l'attente...
Mme Santopadre (Alessandra) : ...dans
des villes organisées. Ils ont pu continuer leurs études. Ils arrivent avec une
expertise. Mais on peut dire qu'on ne voit pas seulement une personne, c'est
rare, et c'est vraiment une famille au complet, et, des fois, très nombreuse.
Mme Schmaltz : Est-ce qu'il y
a une période tampon? Dans le sens qu'une fois que ces gens...
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Je dois... Le temps, malheureusement, est terminé pour
cette portion d'échange. On poursuit avec l'opposition officielle pour une
période de 12min 23 s, et c'est le député de Nelligan
M. Derraji : Oui. Bonjour à
vous quatre. Je vais commencer avec vous, Mme Keyloun. Je l'ai bien prononcé?
Je vais me permettre de vous dire que... et, j'en suis sûr et certain, la bonne
majorité autour de la table, c'est l'ensemble des collègues... j'ai été
extrêmement touché par votre témoignage. Vous avez bien fait de le dire, de le
mentionner, de nous partager votre histoire et votre parcours. Et vous avez
bien raison de dire qu'au-delà des chiffres et des numéros, il y a des êtres
humains. Et ce que j'aime, dans cette journée... Parce que vous êtes un autre
groupe qui nous rappelle l'essence même de l'immigration. L'immigration, ce
n'est pas uniquement pour combler des besoins économiques. Oui, nous avons des
problèmes d'enjeux de main-d'œuvre, mais aussi, le Québec, pendant plusieurs
années, et le Canada, l'ont très bien démontré en accueillant plusieurs vagues
d'immigration... Aujourd'hui, nous avons eu l'occasion de parler d'un autre
côté, humain. Ce matin, ça a été le regroupement familial où des personnes
souffrent, un inventaire de 30 000 personnes.
Votre témoignage, et je vous félicite
parce que je vois que vous travaillez à Action Réfugiés Montréal... J'espère
que les patrons sont contents de vous avoir ici. Je ne vais pas commencer à
négocier votre augmentation de salaire, mais, bravo! Bravo! C'est un témoignage
qui est tellement pertinent, surtout tout ce qu'on entend sur les réfugiés.
Vous savez, il y a beaucoup de légendes urbaines qui circulent sur les réfugiés.
Aujourd'hui, avec votre présence au Parlement, à la maison du peuple, devant
des parlementaires de toutes les formations politiques, vous démontrez
beaucoup, beaucoup, beaucoup de choses très positives par rapport à la présence
des réfugiés, à leur implication dans notre société. Donc, je tiens à vous
remercier pour votre excellente présentation.
Maintenant, du moment qu'on va parler
d'une manière plus humaine, là, j'ai la page 6, O.K., et, dans la page 6, vous
avez mis l'écart, 1945, 2590 ou 165, un l'écart de 5400. Donc, c'est l'écart
entre les personnes admises, entre la cible maximale, la cible minimale. Et
juste pour que tout le monde puisse vous suivre, là, on parle du parrainage
collectif. Ce n'est pas la même chose que les autres programmes. Expliquez, en
quelques minutes, c'est quoi le parrainage collectif, et, par la suite,
informez-nous par rapport à cet inventaire qui est quand même énorme.
M. Thibault (Sylvain) : Je
peux peut-être... En fait, moi je suis ici en tant que groupe de deux à cinq,
donc, je fais partie d'un groupe de deux à cinq.
M. Derraji : Expliquez deux à
cinq. Moi, je le sais, c'est quoi. S'il vous plaît. Désolé, hein?
M. Thibault (Sylvain) : J'y
arrive. J'y arrive. Puis je suis un grand privilégié parce qu'en 1979... je
viens d'une famille au cœur ouvert, et mes parents ont été parmi les premiers à
se lancer dans le parrainage collectif de l'époque. Donc, j'ai une affection
très particulière pour ce programme-là. Donc, le groupe deux à cinq, c'est, par
exemple, nous quatre, plus M. qui est là, on se met ensemble et on dépose au
gouvernement du Québec une demande d'engagement pour parrainer ou prendre à
notre charge, pendant la première année, une ou des personnes réfugiées, peu
n'importe où dans le monde, là. Donc, brièvement, c'est ça. C'est un peu plus
complexe que ça, mais, très brièvement, c'est ça. Et il y a aussi les
organismes de parrainage, dont Action Réfugiés Montréal ou le Diocèse de
Montréal, qui sont des organismes expérimentés qui font le parrainage depuis
plus de 10 ans.
M. Derraji : C'est excellent.
Donc là, maintenant, là, c'est ce qu'il existe. Parce que le parrainage
collectif a démontré son efficacité pendant plusieurs années. C'est un
programme que je suivais, que j'ai vu à l'époque, dans la dernière législature,
j'ai eu l'occasion de rencontrer beaucoup de groupes. Ça marchait très bien. Il
y avait le problème des files d'attente, premier arrivé, premier servi. Il y
avait des irrégularités que tout le monde a dénoncées. L'après, est-ce que ça
vous complique la vie...
M. Derraji : ...parce que si
vous avez des demandes et des personnes en attente, vous pensez aux autres
aussi qui attendent, hein, parce qu'il y a des dossiers qui sont en attente.
Pourquoi nous sommes rendus là?
M. Van Haren (Ian) : Donc,
lorsque ça prend plus de temps, ça complique la vie de tout le monde, y compris
le gouvernement, parce que les situations familiales changent pour les
personnes réfugiées qui sont en attente. Il peut y avoir des maladies, des
morts. C'est très difficile. Oui, bien sûr, en 2020, la pandémie globale, ça
cause un ralentissement de l'immigration ou des personnes réfugiées qui sont
venues ici au Québec. Mais ce qu'on voit, donc, on comprend en 2020 que le
nombre des personnes admises dans le cadre de ce programme était plus bas qu'il
était prévu. Mais en 2021 le gouvernement a déposé un plan d'immigration avec
une cible entre 3 100 personnes et 3 300 personnes. Il y a
seulement 635 personnes qui sont arrivées au Québec dans le cadre du
programme Parrainage collectif. Donc, en étant dans une situation où la file
d'attente grandit, il y a des personnes qui sont toujours en attente. Et,
encore 2022, le gouvernement a prévu entre 2 750 ou
3 000 personnes par le programme de parrainage collectif. C'était
seulement 2 000 personnes qui sont arrivées. Même cette année, on
entendre que le gouvernement est un peu lent à émettre les certificats de
sélection du Québec. Donc, encore cette année, on va voir. Est-ce que les
cibles qui sont prévues par le gouvernement vont être respectées ou est-ce que
la file d'attente va accumuler encore en créant des problèmes pour les
familles?
Donc, nous encourageons le gouvernement de
respecter ces cibles et ensuite, pour l'écart pendant la pandémie, d'accueillir
ces 5 400 personnes qui ne sont pas encore arrivées parce que c'est
des groupes, comme Sylvain a expliqué, qui sont en attente pour voir les
personnes qu'il veut parrainer. Donc, il faut vraiment, je dirais, agir pour
accueillir ces personnes-là dans les plus brefs délais.
• (17 h 30) •
M. Derraji : Je peux vous
poser une question? Pourquoi le gouvernement n'atteint pas ces cibles? Parce
que le programme, il est quand même... ça marchait, ça marche. Vous avez dit
depuis plusieurs années, votre famille, vous étiez capable d'accueillir des
gens. C'est des gens qui se mobilisent. C'est la communauté qui se mobilise.
Vous avez toutes les chances du succès, régionalisation, intégration. Je n'ai
pas besoin de dire... Regardez la façon avec laquelle Mme Keyloun parlait
tout à l'heure avec un très bon français. Pourquoi ça ne marche pas?
M. Thibault (Sylvain) : Bien,
vous posez là une excellente question. Ce n'est pas... En fait, je vais
peut-être vous ramener à une de nos recommandations. Nous, ce qu'on
souhaiterait, c'est de travailler avec vous. On a une expertise terrain
exceptionnelle ici, que ce soit Action Réfugiés Montréal, des personnes comme
Myriam. J'en connais plusieurs personnes comme Myriam. Action Réfugiés
Montréal, d'autres... le réseau... notre fameux réseau qu'on a créé en 2016
avec les réfugiés syriens, où là, on a vu une explosion, puis là c'est le mot
«explosion», c'est vraiment ça, de générosité de personnes, des Québécois, des
Québécoises qui levaient la main. Moi, je veux parrainer. Puis... qui est la
table de concertation, a mis sur pied un volet parrainage, et les gens y
venaient aux formations pour apprendre qu'est-ce que c'est le volet parrainage.
Qu'est-ce que c'est... C'est quoi? Ça implique quoi? Et puis il y avait des jumelages
qui se faisaient entre des citoyens, comme vous et moi, et des personnes
réfugiées. On jumelait ça ensemble. On lançait le processus de parrainage et
les personnes arrivaient à un moment donné.
Le programme de parrainage collectif, il
est un peu particulier parce qu'il est en deux temps. D'abord, il y a le temps
MIFI et... qui a la responsabilité de faire l'évaluation des groupes parrains.
Est-ce qu'ils sont... Est-ce qu'ils se qualifient? Est-ce que financièrement,
ils sont solides? Est-ce qu'ils ont des dossiers criminels ou peu importe les
autres raisons? Et il y a la deuxième partie, qui est aussi lente, celle du
IRCC, de IRCC, qui, lui, a la responsabilité d'évaluer la qualité de réfugiés.
Donc, est-ce que c'est une personne, oui ou non, qui a un besoin de protection
et de réinstallation?
Donc, dans notre cas à nous, notre dossier
est au MIFI depuis deux ans. On est toujours en attente. À ce deux ans-là,
parce qu'on parraine des réfugiés qui sont dans un camp de réfugiés en Ouganda,
il va falloir ajouter 33 mois supplémentaires avant que les personnes
puissent arriver ici. Et nous, dès la journée où on a déposé le dossier au
MIFI, nous étions...
17 h 30 (version non révisée)
M. Thibault (Sylvain) : ...prêt
à les recevoir.
M. Derraji : Tout est en
ordre pour recevoir les réfugiés. Donc, on ne parle plus d'intégration, on ne
parle pas d'un logement, on ne parle pas des autres problèmes que les autres
catégories puissent avoir. O.K.
M. Thibault (Sylvain) : Tout
à fait.
M. Derraji : O.K. Donc, ce que
vous demandez aujourd'hui, c'est que le gouvernement du Québec respecte ses cibles
de... le délai, qui est de... vous m'avez dit de deux ans au MIFI.
M. Thibault (Sylvain) : Bien
là, Mme la ministre disait qu'elle mettait en place, là, des mécanismes pour
les dossiers 2021 d'ici 2024, là, début 2024, si j'ai bien compris, là.
M. Derraji : Ah! Mme la
ministre peut répondre, aucun problème, je peux lui donner une seconde.
Mme Fréchette : ...
M. Derraji : C'est ça.
Mme Fréchette : ...sur ce
point, pour dire ça.
M. Derraji : Et récupérer l'inventaire,
l'arriéré, on a 5000, c'est votre souhait aussi?
M. Thibault (Sylvain) : Bien,
je pense que... Vous savez, c'est des dossiers, hein, Myriam l'a bien mentionné
tantôt, c'est plus que des dossiers.
M. Derraji : C'est des êtres
humains, c'est des êtres humains.
M. Thibault (Sylvain) : C'est
ça. C'est plus que des dossiers. Et puis, tu sais, les personnes qu'on
parraine, Mme... je ne sais plus qui l'a dit tantôt, avec WhatsApp, les gens qu'on
parraine, ils ont... on envoie des téléphones, puis ce qu'ils font, dans le
camp de réfugiés, c'est qu'ils vont se mettre le dos à la clôture de la cabane
du HCR pour pogner le réseau et communiquer avec nous, nous envoyer des photos,
puis tout ça, puis... aujourd'hui, on a mangé, hier, on n'a pas mangé, parce
que le Programme alimentaire mondial souffre de sous-financement. Donc, parmi
les réfugiés dans les camps de réfugiés, il y en a plusieurs qui,
malheureusement, mangent une fois sur deux. Donc, ces délais-là, pour les
groupes parrains... c'est torturant, pour nous, parce qu'on touche à une espèce
de sentiment d'impuissance qui est horrible.
M. Derraji : Oui, je pense
que votre collègue voulait parler. Allez-y, madame, allez-y.
Mme Santopadre (Alessandra) : Moi,
je connais Sylvain, ça fait 12 ans qu'on travaille ensemble sur le parrainage
collectif. Quand je suis arrivée ici, au Québec, je suis arrivée comme migrant
et résident permanent et je me suis tout de suite lancée dans le programme de
parrainage pour le Diocèse de Montréal. Et j'ai vu, comme un 2016-2017, quand j'ai
commencé, quand il y avait l'arrivée des Syriens, on a travaillé tellement
étroitement avec les gouvernements. Les gouvernements, ils nous ont... On est
cinq organismes expérimentés, au Québec, on est Action Réfugiés, le Diocèse de
Montréal, les Jésuites, l'Église... et... et on travaillait, on était assis
ensemble pour voir comment bien faire fonctionner et avancer les programmes.
Et, malheureusement, quand j'écoute Sylvain... J'avais des visages devant moi,
des dossiers de 2017 que j'ai encore dans mon bureau, avec des familles qui ne
sont pas encore arrivées. Et, pour nous, c'est frustrant de maintenir l'équilibre
entre notre travail, donner des réponses, dire : Non, ça va, tout est
en... Bien, Il y a des problèmes? Non, ne vous inquiétez pas... maintenir
vivant l'espoir.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Je dois vous arrêter, le temps est un petit peu... on a
dépassé un petit peu le temps, mais on poursuit, on poursuit. Il reste une
dernière intervention, une dernière période, 4 min 8 s, avec le
député de Saint-Henri-Sainte-Anne.
M. Cliche-Rivard : Merci
beaucoup. Merci pour ce que vous faites. Merci pour votre travail à tous les
jours puis la grande compassion que vous démontrez dans tout ça. J'ai participé
moi-même à un dossier de parrainage privé avec une ONG, en fait, les Anges
gardiens d'Edward Snowden, on n'a pas fini et le dossier été déposé en
2016-2017, et il en reste encore. Donc, c'est vraiment des délais absolument,
absolument terribles.
Vous parliez de parrainage privé, Québec,
autour de 2000 personnes, c'est-tu ça, les chiffres qui arrivent annuellement,
finalement, dans les faits, 2000, 3000?
M. Thibault (Sylvain) : Bien,
en fait, une des recommandations, je pense que c'est de ventiler, hein?
Peut-être que tu peux parler de la ventilation, parce que les chiffres ne sont
pas ventilés...
M. Cliche-Rivard : Bien, je
voulais juste faire le parallèle avec le fédéral. Au niveau des autres
provinces, ce qu'on appelle le sponsorship agreement holder, là, c'est, je veux
dire, des chiffres absolument, énormément... je veux dire, moi, ce que j'ai, je
pense que c'est, à peu près, 72 000 personnes qui sont arrivées l'année
dernière, alors que, nous, on en a accueilli 2000. Donc, je ne suis pas très
bon en maths, là, mais comment ça se fait qu'on est à ce point-là à des années-lumière
de ce qui se fait dans le reste du pays?
M. Thibault (Sylvain) : En
fait, je les ai, les chiffres, ici, là. Réfugiés réinstallés par le parrainage
secteur privé, la cible pour 2023, au fédéral, c'est 27 505, alors qu'au Québec
on accueille au total, dans les réfugiés réinstallés, 3650. La cible pour les
réfugiés...
M. Thibault (Sylvain) : ...pris
en charge par l'État, à moins qu'elle ait changé, est de 1 700. On arrive
donc à un chiffre de 1 950 personnes par année sur ce que le fédéral
va faire venir, 27 505, ce qui donne 7 %.
M. Cliche-Rivard : Dans le
privé, hein?
M. Thibault (Sylvain) : Dans
le privé, que pour le privé.
M. Van Haren (Ian) : Et donc,
je dirais, c'est un choix politique concernant le niveau d'immigration. Et nos
recommandations, c'est d'augmenter les cibles pour le programme de parrainage
collectif au Québec.
M. Cliche-Rivard : Parce que
les charges à l'État sont minimes, je veux dire, vous, vous faites l'accueil,
vous payez le logement, vous payez la première année, vous payez tout, là, il
n'y a pas de frais étatiques.
M. Thibault (Sylvain) : C'est
ça.
Mme Santopadre (Alessandra) : Et
aussi il y a une chose que... je reviens à ce que j'étais en train de dire. Ça,
c'est un programme humanitaire. Et quand on parle de l'humanitaire, c'est
l'être humain au centre qui vit des situations de persécution, des détresses,
des crises. Et nous, comme je dis, on a cinq organismes expérimentés. Et les
gouvernements, ils nous connaissent parce que ça fait plus de 40 ans qu'on
existe et qu'on est sur le terrain. Et ce eux qui nous ont donné, grâce à notre
expertise, le fait d'être expérimentés. Alors, nous, on a confiance en vous,
mais on vous demande aussi d'avoir confiance en nous. Et nous, on est un
réseau, on s'aide mutuellement, on se rencontre, on se parle, on essaie de
trouver la bonne solution ensemble pour vraiment accueillir. On est capable.
Moi, comme diocèse de Montréal, pendant la crise syrienne, j'ai fait le tour
des 150 paroisses. 53 paroisses ont décidé de parrainer plus qu'une
famille. Ce sont des citoyens qui se sont mis ensemble pour parrainer. On a
créé des groupes d'accueil pour les accompagner dès l'aéroport jusqu'au
troisième mois. Tout le monde savait quoi faire, où c'était l'école du
quartier, où c'était le centre d'emploi, où était l'embauche de travail. On a
créé des liens avec la communauté érythréenne, la communauté syrienne, la communauté
africaine pour qu'elles nous aident aussi à comprendre en nous c'est quoi leur
culture, c'est quoi leur manière de vivre un choc culturel une fois qu'il
arrive. Nous, on dit : Mais vous allez chez le médecin. Mais le médecin,
ça signifie quoi dans une culture africaine du Congo, du Burundi? Alors, c'est
un réseau qu'on a autour de nous, il nous a aidés, nous aussi, à comprendre
c'est quoi le bon langage pour les accompagner, c'est comment on doit
l'introduire doucement. Il y a des familles qui n'ont jamais vu un métro, et
nous, on leur dit : Prenez les métros. Moi, j'ai peur d'aller en sous-sol
pour prendre un métro parce que je ne l'ai jamais vu. Alors, ce que nous, on
pense, c'est grâce à tous ces réseaux qu'on a développés et cette complicité
aussi avec les gouvernements et nous qu'on a été capables. Alors, c'est
vraiment un lien de confiance qu'on cherche.
• (17 h 40) •
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup. C'était vraiment intéressant. Merci pour
l'apport à nos travaux. Je vous souhaite une bonne fin de journée, un bon
retour. Et, pour la commission, nous allons suspendre quelques instants le
temps de recevoir le prochain groupe.
(Suspension de la séance à 17 h 41)
(Reprise à 17 h 46)
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : À l'ordre, s'il vous plaît! La Commission des relations
avec les citoyens reprend ses travaux.
Nous recevons donc, en ce moment,
Éducation internationale avec quatre de leurs représentantes. Alors, mesdames,
bonjour, bonsoir, presque maintenant. Alors, vous allez bénéficier, comme tous
les autres, d'une période de 10 minutes pour présenter... pour résumer vos
recommandations. Évidemment, pour vous présenter pour le bénéfice des
parlementaires, et après ça on va faire une période d'échange. Alors, le temps
commence maintenant.
Mme van der Knaap (Lysiane) : Bonjour.
Mme la Présidente, Mme la ministre, Mmes et MM. les députés, alors je me
présente, Lysiane van der Knapp, je suis la directrice générale d'Éducation
internationale. Je suis accompagnée aujourd'hui de ma collègue Odile René, qui
est conseillère à la mobilité internationale chez Éducation internationale et
qui possède aussi le titre de conseillère réglementée en immigration pour les
étudiants étrangers. Nous accompagne aussi Mme Véronique Marin, qui est
directrice générale adjointe de la commission scolaire Lester-B.-Pearson, qui
est une institution membre d'Éducation internationale, et elle est désignée
aujourd'hui par la table des D.G. des commissions scolaires anglophones pour
participer à la commission avec Éducation internationale. Et, finalement, Mme
Marjorie Ménard, qui est directrice des affaires éducatives à la Fédération des
centres de services scolaires du Québec, une autre institution membre de la
coopérative Éducation internationale, et Mme Ménard est désignée par la
présidente-directrice générale de la Fédération des centres de services
scolaires pour prendre part à la commission aussi ce soir.
L'Éducation internationale a déposé un
mémoire...
Mme van der Knaap (Lysiane) : ...En
juillet dans le cadre de la consultation publique en cours. Ce soir, nous
venons vous présenter quelques-unes de nos recommandations clés et qui nous
permettent tout particulièrement de faire valoir, à travers notre exposé, la pertinence
de favoriser et valoriser les étudiants étrangers de la formation
professionnelle comme candidats à l'immigration permanente, incluant ceux et
celles inscrits dans des programmes ou combinaisons de programmes de moins de
1 800 heures et que ces programmes soient enseignés en français ou en
anglais.
Un mot rapide sur Éducation internationale
pour nous situer. Alors, Éducation internationale, c'est une coopérative qui a
été créée par le réseau scolaire il y a de cela plus de 20 ans et qui
aujourd'hui est gouvernée et appartient au réseau scolaire, c'est-à-dire les
centres de services scolaires et commissions scolaires du Québec. Nous offrons
différents services spécialisés au réseau scolaire, notamment en matière de
promotion des études au Québec, en formation professionnelle spécifiquement, et
d'appui-conseil en immigration. Nous avons un mandat du ministère de
l'Éducation du Québec, le MEQ, en ce sens à travers une entente de service.
Je commence notre exposé en soulignant que
nous saluons certaines dispositions de la réforme proposées au volet diplômé du
PEQ, le programme de l'expérience québécoise. Jusqu'à aujourd'hui encore, les
étudiants internationaux issus d'un programme de formation professionnelle ou
FP doivent accumuler 18 mois de travail avant de déposer leur demande
d'admission au PEQ, alors que les étudiants issus des paliers de l'enseignement
supérieur, donc au niveau collégial et universitaire, ont pour leur part une
exigence d'avoir accumulé 12 mois de travail.
Une modification au règlement sur
l'immigration est proposée dans le cadre de la présente réforme et vient
établir une exigence identique en termes d'expérience de travail pour tous les
étudiants étrangers. Nous saluons cette proposition car ceci aura pour effet
non seulement de valoriser davantage la formation professionnelle en plus de
faciliter la compréhension des procédures et prérequis à rencontrer pour les
candidats internationaux aux études au Québec puis pour les candidats au PEQ.
Nous souhaiterions cependant voir un autre
critère d'admission au PEQ volet diplômé être modifié. De fait, la liste des
programmes de formation professionnelle admissibles nous apparaît trop
restrictive. Le facteur utilisé pour définir quel programme est admissible au
PEQ ou non est la durée en heures du programme, soit 1 800 au minimum, et
non la pertinence du programme d'étude en lien avec les besoins du marché du
travail. Ainsi, les finissants des programmes de plomberie chauffage,
1 680 heures, Ferblanterie, 1 605 h, ou encore charpentier
menuisier, 1 350 heures, ne se qualifient pas au PEQ, alors que le
Québec connaît une pénurie de main-d'œuvre importante dans le secteur de la
construction et que sévit une grave pénurie de logements dans toutes les
régions du Québec.
• (17 h 50) •
Je pourrais vous nommer encore plusieurs
exemples de programmes de moins de 1 800 heures qui répondent de
façon documentée à des besoins de main-d'œuvre criants, notamment dans les
secteurs jugés prioritaires dans l'opération Main-d'œuvre du gouvernement du
Québec, notamment en santé, tels que le programme Assistance technique en
pharmacie de 1 590 h.
Mentionnons également que près du tiers
des professions qui apparaissent à la liste des professions admissibles au
traitement simplifié qui est établi par le gouvernement du Québec exige un
diplôme de formation professionnelle comme formation préparatoire.
On tient d'ailleurs à saluer les mémoires
de différents acteurs du secteur privé qui avancent le même argument
qu'Éducation internationale. Au chapitre, la Fédération des chambres de
commerce du Québec, qui a inclus une liste de 23 professions en déficit de
main-d'oeuvre et dont le programme de formation préparatoire en est un de
niveau professionnel et qui compte moins de 1 800 heures.
En ce qui concerne notre propre mémoire,
nous avons émis la recommandation à l'effet que non seulement les diplômes
d'études professionnelles, les DEP, mais aussi tout programme ou combinaison de
programme, que ce soient des AEP, des doubles DEP ou des DEP plus ASP de moins
de 1 800 heures soient considérés pour être intégrés au volet diplômé
du PEQ. En formation professionnelle, les programmes existent car ils répondent
aux besoins du marché du travail. Notons, entre autres, que c'est en réponse
aux employeurs que des centres de formation professionnelle du réseau ont
fusionné des DEP pour créer des programmes tels que secrétariat et comptabilité
pour préparer à la profession d'adjoint administratif.
Alors, pourquoi le gouvernement du Québec
trace-t-il une ligne à 1 800 heures? Est-ce le nombre d'heures
suffisant pour calculer qu'une personne est suffisamment intégrée au Québec
pour réussir un projet d'immigration à long terme? Pourquoi pas
1 500 heures, pourquoi pas 1 200 heures? Et pourquoi
exclut-il les combinaisons pertinentes de programmes autres que le DEP
classique ou encore le DEP ASP menant à un métier donné? En contexte de pénurie
de main-d'oeuvre, est-ce qu'on a le loisir de laisser la frontière au programme
classique de 1 800 heures, eut égard aux besoins de main-d'oeuvre? Ça
vaut la peine de se poser la question.
Chez Éducation internationale, nous sommes
convaincus que l'ajout à la liste des programmes admissibles de ces programmes
ou combinaison de programmes de moins de 1 800 heures, mais qui
répondent aux besoins du marché du travail, est une proposition pertinente et
judicieuse. Le gouvernement du Québec fait déjà le travail d'identifier les
secteurs d'emploi et professions prioritaires, ces outils pourraient être
utilisés pour déterminer les balises dans le cadre du PEQ, également.
Pour répondre aux besoins du marché...
Mme van der Knaap (Lysiane) : ...du
travail, notamment en région, nous avons fait des recommandations autres. Le
secteur de la formation professionnelle aimerait voir une mesure équivalente ou
similaire à ce qui a été annoncé en mai 2022 par le ministre du Travail, de
l'Emploi et de la Solidarité sociale. Cette annonce concerne une mesure d'une
valeur de 80 millions de dollars qui prend la forme d'exemptions de
droits de scolarité des étudiants internationaux qui étudient en français dans
un programme ciblé par l'Opération main-d'œuvre dans les établissements
d'enseignement supérieur uniquement, donc les cégeps et les universités situés
à l'extérieur de la Communauté métropolitaine de Montréal. Pourtant, la
formation professionnelle fournit aussi une partie de la réponse aux cibles
entrevues par l'Opération main-d'œuvre et dans toutes les régions du Québec où
se retrouvent les plus de 190 centres de formation professionnelle. Il
faut reconnaître aussi que les formations de différents niveaux conduisent à
l'exercice de métiers différents. Un ingénieur électrique ne fait pas le même
métier qu'un électricien. Les deux sont essentiels et issus de paliers de formation
différents.
Mentionnons que le MEQ souhaite voir
grimper de 30 000 le nombre d'élèves en formation professionnelle chaque
année, et les élèves internationaux font partie de la solution. Disons donc aux
candidats internationaux que la formation professionnelle est valorisée au
Québec et démontrons-le de façon concrète, incluant à travers des mesures
d'attraction et de rétention des candidats à l'immigration. Dans la situation
actuelle inéquitable, on envoie un message clair aux candidats étrangers mais
aussi aux Québécois que la formation professionnelle est un second choix de
carrière, alors que des efforts sont faits actuellement par le MEQ pour
moderniser et valoriser la formation professionnelle.
Tout mon exposé, jusqu'à maintenant, a
porté sur l'économie et la main-d'œuvre, qui est une des deux branches du Y
dont on nous parle, Mme la ministre, dans le cahier de consultation, l'autre
branche concerne la langue française et la francisation. Abordons donc
maintenant les exigences de langue française des candidats au PEQ, volet
Diplômé. Éducation internationale et son réseau, incluant les commissions
scolaires anglophones, croit à l'importance de protéger la langue française au
Québec. Cependant, nous croyons que le gouvernement devrait opter pour une
approche plus inclusive afin de prendre en compte les nombreuses façons dont
les gens acquièrent des compétences linguistiques. Le volet Diplômé du PEQ
devrait rester une option pour tous les étudiants, quelle que soit la langue
d'enseignement, en démontrant la maîtrise de la langue française par le biais
d'un test standardisé. Cette option est offerte aux candidats du programme de
sélection des travailleurs, par exemple. Alors, il serait équitable d'appliquer
la même exigence aux diplômés du Québec. Imposer une règle si sévère,
c'est-à-dire aucune étude dans un programme en anglais, vient aussi miner
davantage l'attractivité du Québec devant les autres provinces en plus de nuire
à la francisation, puisque les étudiants non francophones mais intéressés par
notre langue se verront découragés de poursuivre leurs rêves au Québec.
Nous souhaitons terminer notre exposé en
faisant du pouce sur ce qu'écrit le premier ministre dans son mot d'ouverture
du cahier de consultation publique. Celui-ci dit, en parlant des étudiants
étrangers, qu'«étant donné que ces personnes possèdent un diplôme québécois,
qu'elles sont jeunes et qu'elles vivent déjà ici, en français, depuis plusieurs
années, elles constituent un bassin exceptionnel où recruter des nouveaux
Québécois et Québécoises.»
Nous avons envie d'ajouter que la présence
de ces étudiants internationaux au sein des établissements de formation permet,
premièrement, de combler des cohortes incomplètes, notamment dans des
programmes ou régions en perte d'effectifs étudiants, et ainsi maintenir
l'offre de formation dans les régions. Sans eux, nombre de Québécois ne
pourraient pas bénéficier d'une formation car la cohorte à laquelle ils sont
inscrits pourrait ne pas démarrer. Ceci vaut également pour les formations en anglais
qui risquent d'être affectées avec la réforme du PEQ si elle est maintenue
telle qu'elle est prévue actuellement.
Ensuite, la présence des élèves
internationaux dans les CFP permet aussi de combler des besoins de main-d'œuvre
localement à très court terme, les étudiants internationaux pouvant travailler
à temps partiel, pendant et suite à leurs études, pour une durée moyenne de 1 à
3 ans grâce au permis de travail postdiplôme.
Et, finalement, les étudiants
internationaux permettent de contribuer à la régionalisation de l'immigration,
la formation professionnelle étant offerte dans près de 200 établissements
dans toutes les régions du Québec. En raison de tous les avantages évidents
qu'apportent l'attraction et la rétention des étudiants étrangers, nous
recommandons fermement que les admissions via le PEQ, volet Diplômé ne soient
pas comptabilisées dans les cibles en matière d'immigration permanente au
Québec, peu importe le nombre d'immigrants qui sont visés par le Québec,
scénario 1 ou scénario 2. Merci.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup pour cette présentation. On va donc débuter
la période des échanges avec la banquette ministérielle gouvernementale. Seize
minutes sept secondes pour vous, Mme la ministre.
Mme Fréchette : Merci
beaucoup, Mme la Présidente. Merci à vous toutes, mesdames. C'est intéressant
de voir comme ça une banquette très féminine de ce côté-ci. Donc, merci de nous
partager votre expertise, votre expérience également puis votre vision, votre
vision d'avenir pour la formation professionnelle. C'est de longue date, hein,
qu'on dit qu'il faut valoriser davantage la formation professionnelle. Je me
souviens que j'étais à l'école secondaire, et déjà on tenait ce discours-là. Je
ne vous dirai pas en quelle année c'était, mais ce n'est pas d'hier. Donc, un
vœu renouvelé de longue date. Je vous emmènerais sur une...
Mme Fréchette : ...les thèmes
que vous avez abordés dans le cadre de votre intervention, à savoir les mesures
d'exemption des droits de scolarité supplémentaires pour les étudiants
étrangers, là, de niveaux collégial et universitaire. Donc, vous en souhaitez
une pour la formation professionnelle. Quelle ampleur vous verriez que ça
puisse avoir si c'était appliqué à la formation professionnelle? Combien
d'étudiants verriez-vous qui devraient profiter de cette mesure-là pour que ça
ait un impact significatif et quels secteurs vous verriez qu'on puisse intégrer
dans une mesure de la sorte? Est-ce qu'on devrait s'en remettre à l'Opération
main-d'œuvre ou vous auriez une autre grille d'analyse à proposer? Donc,
j'aimerais vous entendre là-dessus.
Mme van der Knaap (Lysiane) : Bien,
je peux peut-être me lancer, mais, déjà, la mesure qui a été annoncée, c'est
d'une valeur de 80 millions, ce qui n'est pas négligeable, disons, donc.
Puis, en parlant au réseau scolaire, on ne s'attend pas nécessairement à ce que
ça soit exactement équivalent, ça peut être similaire, mais c'est un dialogue
qu'on n'a pas été capable d'avoir encore. Puis on a essayé, quand même, là,
auprès du MIFI, du MEQ. On attend des retours, puis, donc, pour l'instant, là,
je n'ai pas de... on ne l'a pas chiffré. Je ne sais pas si, Marjorie, il y a
quelque chose que tu peux rajouter à ça.
Mme Ménard (Marjorie) : Bien,
en fait, on estime, selon le ministère de l'Éducation, qu'il y a une proportion
environ de 10 000 étudiants étrangers en formation professionnelle, un chiffre
qui n'est pas spécifiquement comptabilisé, là, c'est vraiment un estimé selon
le ministre de l'Éducation. Donc, rien de moins que sa juste part, donc,
comparativement à l'enseignement supérieur.
Mme Fréchette : Donc,
10 000. Est-ce que c'est réparti assez équitablement entre l'ensemble des
régions du Québec, ces 10 000 étudiants? Est-ce que vous avez une
idée de leur répartition géographique?
Mme van der Knaap (Lysiane) : Bien,
ce qu'on peut dire, là, c'est que, contrairement aux paliers d'enseignement
supérieur, le ministère de l'Éducation du Québec, là, n'a pas de données
précises, là, sur les élèves internationaux en formation professionnelle. Ça
fait que c'est plutôt en croisant des données,et tout ça.
On peut vous parler de l'expérience de
Québec Métiers d'avenir. Nous, en ce moment, il me semble, on a à peu près
800 élèves internationaux, là, en formation professionnelle, qui passent
par nos services, parce qu'on recrute et on accompagne des élèves
internationaux en formation professionnelle. Nous, on peut vous dire que c'est
50 % des élèves qu'on recrute, là, qui vont en région, à l'extérieur de
Montréal. Ils sont répartis, ils sont dans toutes les régions du Québec. Je
l'ai mentionné, là, il y a près de 200 centres de formation
professionnelle, puis, dans tous les CSS, dans tous les centres de services
scolaires, on retrouve des étudiants internationaux, ça, c'est certain.
• (18 heures) •
Mme Fréchette : Est-ce que
c'est vous qui êtes mandatés par ces centres de formation professionnelle pour
rayonner à l'international?
Mme van der Knaap (Lysiane) : Exact.
Mme Fréchette : Oui? Vous
avez un mandat de représentation. Bien, parlons, justement, de régionalisation,
là. Vous proposez, en fait, qu'il y ait un traitement plus rapide pour les
personnes étudiantes en région pour favoriser, là, l'attractivité en région. Mais
est-ce que... comment est-ce que le ministère pourrait s'assurer qu'une fois
les études terminées, bien, que les personnes restent en région? S'il y avait
eu un avantage au niveau de la rapidité de l'analyse de leur demande, on
voudrait quand même qu'ils restent en région, qu'ils s'inscrivent dans la
durée, donc, mais comment est-ce qu'on pourrait s'assurer que les personnes,
justement, ne reviennent pas à Montréal aussitôt les études terminées, alors
qu'ils auraient bénéficié d'un avantage qui concernait la régionalisation?
Mme René (Odile) : Je pense
que, souvent, quand les gens ont vécu une expérience d'étude d'une expérience
professionnelle dans une région, ils vont avoir quand même un attachement à
cette région-là. Donc, souvent, les études professionnelles, en moyenne, c'est
un an et demi, après ça, une expérience de travail, peut-être, tu sais, de
quelque temps, ça fait que les gens sont quand même beaucoup plus intégrés dans
ces régions-là pour demeurer là-bas.
Ça peut aussi être du déclaratif. On sait
qu'il y a certains programmes, que c'est sur le déclaratif. On déclare vouloir
demeurer au Québec, donc ça peut être un déclaratif de demeurer en région. Ça
pourrait être une des possibilités aussi.
Mme Fréchette : Bien, merci,
Mme la Présidente. Je vais céder la parole à des collègues.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup. Alors, je reconnais la députée de
Lotbinière-Frontenac pour une période de 11 min 43 s.
Mme Lecours
(Lotbinière-Frontenac) : Merci, Mme la Présidente. Donc, bonsoir,
mesdames. Je vais dire comme la ministre, c'est le fun de voir autant de femmes
ce soir.
Donc, moi, je vais rester sur la question
de la régionalisation. Je voudrais savoir ce que vous pensez de l'approche que
nous mettons de l'avant dans le plan d'action pour la régionalisation du
ministère, à savoir la régionalisation primaire. Puis, j'aimerais aussi savoir
ce que vous... Est-ce que vous pensez que les établissements d'enseignement ont
un rôle à jouer dans la rétention des étudiants étrangers, si oui, lequel?
Mme van der Knaap (Lysiane) : ...nous
rappeler c'est quoi, la régionalisation primaire?
Mme Lecours
(Lotbinière-Frontenac) : Bien, c'est d'amener tout de suite les
étudiants étrangers en région.
Mme René (Odile) : Bien,
c'est un peu ce qu'on fait, nous, de notre côté, au niveau du recrutement des
étudiants étrangers. On amène les étudiants...
18 h (version non révisée)
Mme René (Odile) : ...on amène
les étudiants directement dans les centres de formation professionnelle qui se
trouvent à travers le Québec. Donc, on a au moins la moitié qui est de la
régionalisation primaire, comme vous l'appelez, donc déjà on le fait. Évidemment,
les régions entières ont une responsabilité pour pouvoir faciliter l'intégration,
faciliter la rétention, autant les établissements d'enseignement que le milieu
de vie. Donc, c'est un peu un tout, là, de ce côté-là. Nous aussi, même, on
joue un rôle, là, dans la rétention des étudiants en les préparant, en les
informant. Il faut savoir dans quelle région on s'en va vivre quand on arrive
pour ne pas être trop surpris non plus. Donc. Il y a toute la préparation
aussi, mais il y a aussi l'accueil, l'intégration sur place, qui appartient à
toute la population, finalement.
Mme Lecours (Lotbinière-Frontenac) :
Parfait.
Mme van der Knaap (Lysiane) : Je
peux rajouter un petit mot aussi, là?
Mme Lecours (Lotbinière-Frontenac) :
Oui.
Mme van der Knaap (Lysiane) : Peut-être
que qu'est-ce qui fait la différence aussi, là, c'est de pouvoir accompagner
les gens avant qu'ils arrivent, puis, nous, c'est ce qu'on fait, puis on pense
que c'est un peu un gage de notre succès aussi, là, parce qu'un étudiant
international, évidemment, peut taper... cogner à la porte d'un établissement
puis dire : Moi, je veux aller là, mais sans nécessairement avoir fait un
chemin qui lui permet de valider son choix de programme, son choix de lieu d'étude,
la région où il veut s'établir puis, après ça, c'est quoi... à quoi ressemblent
peut-être les perspectives pour s'insérer dans la communauté aussi. Donc, quand
on lui offre des services d'accompagnement en amont, on voit qu'il a beaucoup
plus de chances, un, de réussir son parcours scolaire, de demeurer en
formation, puis ça... Nous, on échange souvent avec des gens, là, des
fonctionnaires du MIFI puis du MEQ, puis on nous dit que ça fait une différence
quand même, parce qu'éducation internationale, on fait cet accompagnement-là,
puis il y a une différence par rapport à un élève qui va arriver par son propre
chemin ou à travers d'autres types de services, mais qui n'a pas été accompagné
en amont, peut-être, pour valider un peu les choix qu'il fait. Ça fait que, ça,
ça peut être une façon de donner du succès à votre démarche, là.
Mme Lecours (Lotbinière-Frontenac) :
Chez moi, j'ai le centre professionnel... Centre de formation
professionnelle Le Tremplin, à Thetford Mines. On a beaucoup d'étudiants
étrangers. Comment vous les accompagnez, les centres professionnels?
Mme René (Odile) : Bien,
Québec métiers d'avenir, qui est un service d'éducation internationale, offre
différents services, dont un service de recrutement d'étudiants, donc tout ce
qui est promotion, accompagnement, comme ma collègue le mentionnait, accueil,
intégration, préparation pour l'arrivée, accueil pendant la formation aussi. On
offre aussi d'autres services au niveau des centres de formation
professionnelle directement ou des centres de services scolaires, là, au niveau
de l'appui-conseil au niveau de l'immigration. Donc, souvent, ils sont un
peu... s'ils n'ont pas un volume d'étudiants étrangers, ils sont un peu démunis
au niveau des compétences en immigration, les règles, les lois, etc., donc on
offre un appui-conseil là-dedans. Parfois, c'est des situations aussi plus
spécifiques ou plus difficiles, donc on peut offrir cet appui-conseil là. On
est aussi mandatés par le ministère de l'Éducation, tout dernièrement, pour
faire l'appui-conseil au niveau aussi des exemptions de droits de scolarité,
parce qu'il y a là aussi encore une grande liste de règles et d'exemptions
possibles. On offre un appui-conseil pour les évaluations de documents
scolaires aussi étrangers. Donc, on les appuie. On offre des webinaires aussi
aux CSS, des séances d'information, etc., on les appuie dans ce qu'ils veulent.
C'est nos membres, donc on leur offre les services dont... qu'ils nous
demandent ou ceux qu'ils ont besoin.
Mme Lecours (Lotbinière-Frontenac) :
Parfait. À la page 8 de votre mémoire, vous saluez les efforts du
gouvernement du Québec pour offrir des cours de français gratuits pour les
personnes domiciliées au Québec et aussi les personnes à l'étranger détentrices
d'un certificat d'acceptation du Québec. Avec Francisation Québec, nous
poursuivons nos efforts pour diversifier et bonifier notre offre de cours. On
parle de cours à temps partiel, de temps complet, de présentiel ou en ligne, de
cours de jour ou de soir, puis depuis 2019 les personnes qui sont en statut
temporaire au Québec ont accès à la francisation offerte par le MIFI. Vous
mentionnez également que les étudiants ont accès à la francisation à même les
établissements d'enseignement. Nous avons effectivement des partenaires dans le
réseau de l'éducation et de l'enseignement supérieur. Verrez-vous un rôle
particulier ou accru pour les établissements d'enseignement en matière de
francisation?
Mme Ménard (Marjorie) : En
fait, tout à fait, là. On collabore déjà avec le ministère de l'Éducation et le
MIFI, notamment Francisation Québec, là, pour mettre en place tous ces
services-là, là, selon les orientations, là, convenues, là, dans la Loi, là,
pour Francisation Québec, tout à fait.
Mme Lecours (Lotbinière-Frontenac) :
Puis, par exemple, pour un rôle accru, est-ce que vous voyez ça ou...
Mme Ménard (Marjorie) : Pour
les centres de services scolaires, effectivement, ils ont déjà un rôle de
premier plan dans les centres d'éducation des adultes. Mais, au niveau des
centres de formation professionnelle, il y a un service aux entreprises qui est
déjà en place depuis plus de 20 ans dans chacun des centres de services
scolaires, et tout le déploiement de la francisation en milieu de travail pour
les travailleurs, les travaux, là, débutent actuellement...
Mme Ménard (Marjorie) : ...Les
travaux, là, débutent actuellement, là, et à partir du 1er novembre, là,
les... Francisation Québec pour la francisation en milieu de travail, là, va
s'opérer, là, plus... De façon plus pointue. Mais tout à fait, là. En fait,
plus précisément, les services aux entreprises des centres de services
scolaires et des commissions scolaires offrent déjà de la francisation, mais
financée par Services Québec. Mais, à partir du 1er novembre, comme vous
le savez, les crédits seront déplacés à Francisation Québec. Et on est en
train, là, justement, d'opérationnaliser, là, tous ces paliers de services là,
là, pour les entreprises et les travailleurs.
Mme Marin (Véronique) : Je
tiens aussi de vous mentionner que les commissions scolaires anglophones sont
toutes aussi présentes à Francisation Québec. Et donc nous offrons des cours de
francisation dans les centres de formation professionnelle et aussi les centres
de formation aux adultes.
Mme Lecours
(Lotbinière-Frontenac) : Parfait. J'aimerais aussi revenir sur les
activités de votre organisme. Vous avez un partenariat avec le MEQ pour ce qui
est de la promotion et de l'attraction des étudiants étrangers dans la filière
formation professionnelle. Je sais également que vous avez des activités
ponctuelles avec le MIFI. Sentez-vous qu'il y a un attrait grandissant pour la
formation professionnelle au Québec de la part des étudiants étrangers? Puis,
est-ce qu'il y a des secteurs qui sont plus en demande?
Mme René (Odile) : un intérêt
«grandissant», je pense que l'intérêt a toujours été là pour les étudiants
internationaux pour la formation professionnelle. Ça grandit, évidemment, la
sensibilisation aussi. Puis l'information se fait autant au niveau des
Québécois que des étudiants internationaux. Donc, de toujours mettre de l'avant
la formation professionnelle, les débouchés possibles, et tout ça, je pense
que, de toute façon, il faudra continuer. Mais l'intérêt était là. Moi, ça fait
10 ans que je suis là, il était là il y a 10 ans, il est encore là
maintenant, donc... Parce qu'ici c'est quelque chose qui est valorisé, qui est
intéressant pour eux, plus que dans plusieurs pays où la formation
professionnelle ou la réorientation de carrière va être moins valorisée, moins
bien vue. Tandis qu'ici, ils vont pouvoir venir faire une nouvelle formation,
si c'est une réorientation, ou bien juste affiner leurs compétences.
• (18 h 10) •
J'avais sorti un peu les formations qui,
nous, les étudiants internationaux, nous demandent le plus, qui sont le plus en
demande de notre côté, là. C'est sûr que vous allez voir, ce qui ressort, c'est
les formations de 1 800 heures, on ne se le cachera pas. Donc,
infographie, soutien informatique, santé, assistant soins infirmiers,
comptabilité secrétariat pour le double DEP, adjoint administratif, cuisine,
vente-conseil, qui ne sont pas des DEP de 1 800 heures, ressortent
beaucoup.
J'ai ressorti aussi ce qui sortait le plus
au niveau de la construction. On a beaucoup de demandes pour dessin de
bâtiment, électromécanique, mécanique industrielle, charpenterie menuiserie,
plomberie chauffage. C'est les DEP qui ressortent le plus au niveau de la
demande. Mais on a des étudiants qui ont aussi d'autres intérêts, là, d'autres
motivations, donc on a des demandes d'à peu près tous les secteurs des DEP
quand même.
Mme Lecours
(Lotbinière-Frontenac) : Puis, tout à l'heure, vous avez parlé de la
pertinence des programmes en lien avec les besoins du marché versus les
1 800 heures de programmes. Est-ce que, dans le fond, les programmes
qui sont les plus en demande sont en lien avec les besoins du marché?
Mme van der Knaap (Lysiane) : Bien,
je pense. Puis là, peut-être, Odile va répondre mieux que moi parce que ça fait
10 ans qu'elle parle à des étudiants internationaux. Mais on a
l'impression que, si les règles changent puis que justement on baisse le
1 800 heures à 1 500, bien là, il y a des programmes qui vont
devenir populaires. Ça fait que les gens vont choisir le 1 800 heures
parce qu'au final ils souhaitent peut-être avoir l'option de pouvoir immigrer
au Québec de façon permanente. Donc, il faut penser qu'il y a des programmes
qui sont peut-être juste plus populaires parce qu'ils franchissent la base...
la barre du 1 800 heures.
Mme René (Odile) : Je peux
peut-être renchérir juste un petit peu sur ça. Je pense que la majorité des
étudiants internationaux, quand ils se lancent dans cette aventure-là, ils ne
savent pas encore qu'est-ce que ça va donner, tu sais, ils ne savent pas encore
qu'est-ce qu'ils vont vouloir. Ils ont peut-être une idée, un intérêt, mais, tu
sais, la finalité, ils ne la connaissent pas encore. Donc, ils veulent
peut-être assurer un peu leurs arrières en ayant plus de possibilités, donc ils
vont aller vers des formations qui vont mener vers une démarche potentielle de
résidence permanente pour avoir cette option-là. Parce que, si jamais ils
veulent faire ça, ils veulent l'avoir, la possibilité, sinon ils vont être
bloqués à quelque part. Donc, je pense qu'il y a ça aussi, cette espèce de
double intention.
Si les... le Seuil était un peu plus bas
au niveau des formations et qui ça ouvrait à plus de formation, sans doute que
les gens iraient encore plus vers des formations qui touchent leurs propres
intérêts, leurs motivations puis que ça serait un peu plus varié au niveau de
la demande des différents DEP, des différentes formations.
Mme Lecours
(Lotbinière-Frontenac) : Parfait...
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : ...Il reste 40 secondes.
Mme Lecours
(Lotbinière-Frontenac) : Bien, je n'ai pas d'autres questions. Est-ce
que vous voudriez ajouter quelque chose?
Mme Ménard (Marjorie) : ...Si
je peux me permettre. En fait, le... comme vous le savez, le réseau scolaire a
l'expertise en francisation depuis plus de 30 ans, là. Ça fait partie de
son régime pédagogique. Bien entendu, une contribution étroite pour
l'évaluation du français serait fort appréciée puisque l'expertise, elle est
présente actuellement. Donc, comme rôle accru, là, je pense qu'on pourrait tous
contribuer, là, à l'évaluation du français.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup. Alors là, le temps est d'écouler. Je me
tourne maintenant du côté de l'opposition officielle pour une période de
12 minutes 23 secondes. M. le député, le temps est commencé.
M. Derraji : Oui. Merci, Mme
la Présidente. Bonjour à vous quatre. Merci pour votre présence. Mémoire très
détaillé. Vous ciblez vraiment le PEQ, du début jusqu'à la fin.
Avant d'aller dans le vif du sujet avec le
rapport, vous avez vécu la dernière réforme de 2009. J'en suis sûr et certain
que, s'il y a un groupe qu'on doit écouter sur les choses à ne plus faire avec
le PEQ, c'est vous. Pouvez-vous nous dire comment la dernière réforme a affecté
vos services, a affecté vos contacts, a affecté un peu le réseau qui utilise le
PEQ comme moyen pour attirer les étudiants internationaux au Québec?
Mme René (Odile) : je peux peut-être
me lancer. Bien, je pense que la plus grande différence, c'est qu'évidemment
les consultations publiques, la préparation n'a peut-être pas eu lieu lors de
la première réforme. Donc, d'arriver avec des changements rapides, des
changements radicaux aussi, ça chamboule un peu les choses pour tout le monde,
surtout pour les gens qui avaient des projets de vie ou qui avaient basé leur
projet d'étude sur différentes choses qui là ne fonctionnaient plus. Il y a
aussi des travailleurs dans ça. Là, on n'en parle pas aujourd'hui, mais ça a
aussi affecté les travailleurs autant que les étudiants.
Donc, je pense que les choses à ne plus
faire, c'est ne plus changer les choses aussi radicalement sans avertissement.
Ça, je pense que c'est un peu la base, là, des changements de politiques.
Ensuite, peut-être de toujours cibler c'est quoi, notre besoin. Ça va être ça
aussi, l'important. Donc là, à cette période-là, quel était le besoin?, vous
pourrez répondre mieux que moi. Mais aujourd'hui, c'est quoi notre besoin,
c'est un besoin au niveau de la main-d'œuvre, c'est un besoin au niveau d'avoir
aussi des étudiants pour pouvoir continuer à donner les formations dans les
centres de formation professionnelle, donc de cibler le besoin et de mettre les
politiques en lien avec le besoin pour atteindre notre objectif, finalement.
M. Derraji : Est-ce que vous
avez vu des classes, je dirais, où il n'y avait pas assez d'étudiants, surtout
en région, parce qu'il n'y avait pas assez d'étudiants internationaux? Au fait,
en quelque sorte, c'est que, vous comprenez ce que je dis, au niveau du
barème... pour des personnes pour ouvrir une classe. Et moi, à l'époque,
j'étais porte-parole, je faisais presque la même chose, drôle de coïncidence.
Je recevais des appels en région pour me faire dire de faire réaliser au
gouvernement l'ampleur des dégâts causés par la réforme du PEQ et que, si on
ferme le PEQ étudiant, c'est carrément des classes fermées en région pour
certaines formations. Pouvez-vous vous le confirmer?
Mme René (Odile) : ...Pour le
confirmer. Par contre, moi, je peux confirmer qu'en ce moment on a encore des
classes qui ferment. Il y en avait aussi pendant la réforme. Il y en avait
quelques... Un petit peu avant la réforme, mais c'est sûr que ça a quand même
augmenté. Puis, encore aujourd'hui, on a des classes qui ferment, pas seulement
en région, même à Montréal.
M. Derraji : Je pense que
vous voulez intervenir.
Mme Ménard (Marjorie) : Bien,
en fait, je suis tout à fait en accord avec ma collègue, là, ça se voit encore
aujourd'hui. Puis ce n'est pas juste avec les étudiants internationaux, mais
nécessairement, s'il y avait plus d'étudiants internationaux, il y aurait moins
de fermetures de groupes, là. La composition des groupes, c'est un enjeu essentiel,
là, pour démarrer les groupes. Et ça se voit pour bien des programmes d'études.
M. Derraji : Oui. Donc, la
pression sur les programmes d'études, elle est tellement rendue forte que, sans
étudiants internationaux, on risque de compromettre certaines formations en
régions éloignées. Et même à Montréal, vous me dites même à Montréal, hein?
Est-ce que j'ai bien compris?
Une voix : Tout à fait.
M. Derraji : O.K. Parlez-moi
un peu de la concurrence avec l'Ontario. J'ai vu que depuis la réforme du PEQ,
l'exemple Gatineau-Ottawa, il y a pas mal de collèges qui maintenant recrutent
à l'international, mais on parlait aussi du Nouveau-Brunswick. Pensez-vous que
la réforme a poussé certains étudiants internationaux d'aller voir ailleurs et
non pas venir au Québec?
Mme van der Knaap (Lysiane) : Oui.
Bien, tu sais, il faut penser, là, à se mettre dans les souliers d'un étudiant
international qui se magasine une destination, puis là, il voit que le
gouvernement change les règles, rapidement, sans crier gare, un peu comme dit
Odile...
Mme van der Knaap (Lysiane) : ...donc
là, il peut avoir peur. Bien là, si je m'engage, est-ce qu'ils vont encore
changer les règles? Donc, il y a ça qui fait peur. En plus, au Québec, on a des
délais plus longs, le traitement des dossiers, là, après, là, pour accéder à la
résidence permanente, puis, tu sais, ce n'est pas un mois de plus, là. C'est
quand même assez substantiel comme délais supplémentaires. Donc, on perd un peu
en attractivité.
Puis nous, on suit beaucoup le marché, là.
On a... On surveille beaucoup le marché français, ouest africain. On a des
réseaux sociaux très actifs à travers lesquels on rejoint 12 millions de
personnes. Puis ces gens-là commentent beaucoup aussi, puis ils disent, puis on
le voit, là, tu sais, puis pas juste sur nos réseaux sociaux, mais dans
d'autres canaux aussi, que le Québec est... Tu sais, il y en a beaucoup qui
rêvent encore du Québec, c'est certain, là, mais le Nouveau-Brunswick,
l'Ontario, c'est des destinations aussi, là, qui sont vraiment en compétition
avec nous, là, malgré... puis pour des francophones, puis le fédéral a lancé
une offensive pour recruter des étudiants internationaux francophones dans les
autres provinces.
Donc, on est en compétition, puis il faut
demeurer compétitif. Puis nos recommandations... puis dans le mémoire on l'a
écrit, je ne l'ai pas mentionné parce que j'avais seulement 10 minutes, mais
elles vont aussi dans le sens de s'assurer que le Québec demeure compétitif,
là, à l'échelle internationale.
M. Derraji : C'est là où je
voulais vous ramener, parce que cette mise... cette mise en contexte, elle est
très importante pour le bénéfice des membres de la commission. En général,
avant d'entreprendre une nouvelle réforme, il faut apprendre des erreurs du
passé par rapport au PEQ. Le contexte a beaucoup, beaucoup, beaucoup changé. La
réforme, un, elle a dévoilé au grand... à tout le monde et surtout ceux qui
choisissent le Québec, d'autres possibilités d'aller dans d'autres provinces. Moi,
j'ai vu l'offensive de beaucoup de provinces, justement, d'aller dans des
marchés francophones et je vois des collèges de plus en plus partir à
l'extérieur.
Là, j'ai devant moi vos propositions et je
vais aller une à la fois, rapidement. Vous, vous dites qu'il faut permettre aux
étudiants des universités anglophones de passer un test de francisation pour
juger de leur éligibilité au PEQ. Vous savez que, maintenant, par rapport au
PEQ... Pensez-vous qu'avec la mesure qu'on a pour le PEQ qui cible les étudiants
anglophones... pensez-vous que c'est une bonne mesure pour garder ces jeunes au
Québec ou, au contraire, ça ne va pas nous aider à les garder?
• (18 h 20) •
Mme Marin (Véronique) : Je
peux répondre? Non, c'est : au contraire. Des élèves qu'on recrute qui
viennent faire leur formation en anglais chez nous, ils savent très bien que le
Québec, c'est une province où on parle le français. Et, quand ils viennent nous
parler, ils sont très prêts, ils sont d'ailleurs motivés à apprendre le
français, mais souvent l'anglais, c'est leur deuxième langue. Alors, pour
commencer une formation, c'est plus facile pour eux. Mais tous, et vous avez eu
des témoignages ici dans les... la semaine passée, puis on en a des dizaines à
vous donner, c'est des élèves qui sont très prêts, et veulent, et d'ailleurs
commencent à apprendre le français dès leur pays d'origine. Alors, en excluant
ou en mettant une exigence, en fait, au PEQ pour ces élèves-là, en fait, on
enlève une voie de francisation parce qu'ils ne seront pas motivés à se
franciser si, à la fin, ils n'ont pas le même bénéfice que les autres élèves.
Alors, je vous confirme que dans les
écoles... dans les centres de formation professionnelle anglophones, les élèves
commencent tout de suite, presque dès l'arrivée au Québec, à prendre des cours
de francisation, que ça soit dans le centre lui-même ou ailleurs, à travers de
l'offre de services du MIFI. Alors, ce n'est pas un enjeu d'après nous, et nous
sommes dédiés, et on en est là comme partenaire pour franciser ces élèves-là,
pour qu'ils puissent devenir des membres productifs dans la communauté, qu'ils
aient choisi d'étudier en français ou en anglais.
M. Derraji : Donc, votre
demande aujourd'hui : que ça soit un étudiant dans une université
anglophone ou dans un réseau anglophone, qu'il soit traité au même pied
d'égalité que son homologue dans un autre cadre francophone. On s'entend, la
personne doit parler le français.
Mme Marin (Véronique) : Tout
à fait. Et peuvent le démontrer par un test standardisé ou... le test du MIFI
ou le test, en fait, de francisation que nous offrons dans les commissions
scolaires anglophones ou francophones.
M. Derraji : Que vous offrez.
Excellent. Bon, je vais passer à un autre point que vous avez marqué, qui est très
important. Vous dites aujourd'hui que, le PEQ, on doit l'élargir aux programmes
collégiaux de formation professionnelle. Vous avez fait l'énumération de
beaucoup de métiers que... sont en demande énorme, avec une pénurie. Donc,
c'est ça, votre demande par rapport au PEQ?
Mme van der Knaap (Lysiane) : Oui.
M. Derraji : O.K. Vous
mentionnez qu'il faut simplifier les exigences de travail du PEQ, parce que là,
le Programme d'expérience québécoise, il y a le volet étudiant, il y a le volet
travailleur. Qu'est-ce que vous voulez qu'on enlève ou qu'est-ce que vous
voulez que le gouvernement change dans la prochaine version des exigences de
travail pour le Programme d'expérience québécoise...
Mme van der Knaap (Lysiane) : ...en
fait, ce que le gouvernement propose présentement, c'est de rayer la demande,
là, d'avoir une expérience de travail pour tous les étudiants étrangers, qu'ils
soient au niveau professionnel, technique ou universitaire. Puis nous, on
salue, là, cette initiative-là. On pense que, quand même, les gens, quand ils
ont déjà fait un an, deux ans de formation, ils sont déjà quand même bien
intégrés. Puis déjà ils vont être sur leur permis de travail postdiplôme, avant
d'avoir leur résidence permanente, ils ont largement le temps de s'intègre, là,
avant de recevoir la résidence permanente puis de devenir... faire partie du
bassin d'immigration permanente. Donc, ça, c'est quelque chose qu'on a salué
dans notre mémoire.
M. Derraji : Oui, allez-y.
Mme René (Odile) : Il ne faudrait
pas oublier non plus que la formation professionnelle, la majorité des
formations ont des stages obligatoires. Donc, il y a déjà une expérience en
entreprise, des stages obligatoires en entreprise, qui est vraiment très
présente, là, 80 %, c'est de la pratique. Donc, l'expérience est déjà là
en formation professionnelle, et ça, on sent que, peut-être, c'est oublié
parfois justement. Donc, il ne faudrait pas l'oublier.
M. Derraji : Oui. D'après
vous, de votre expérience sur le terrain, le taux de rétention d'étudiants
internationaux en région, avec ou sans PEQ, pensez-vous qu'on va garder ces
gens, il y a une opportunité de travail, on s'entend, une opportunité de
travail en région, est-ce qu'il est plus élevé, moins élevé, pas du tout élevé,
pas du tout intéressant?
Mme René (Odile) : Je n'ai
pas de pourcentage à vous donner. Par contre, je sais que, comme la moyenne
d'âge au niveau de la formation professionnelle est d'environ 30 ans, la
moitié de ces étudiants-là sont des couples ou des jeunes parents, donc avec
des enfants. Souvent, c'est une clientèle qui va préférer aller vers les
régions plutôt que d'aller dans des très grands centres, pour la facilité,
justement, des services, pour la facilité avec les enfants, la sécurité, et
cetera. Donc, souvent, la clientèle va quand même est attirée vers les régions.
On a des témoignages de gens qui disent : Si c'était à refaire, je
retournerais faire ma formation en région, c'est sûr, parce que l'intégration
est plus facile, la communauté est plus accueillante. C'était plus simple de
m'intégrer avec cette clientèle-là d'à peu près... une moyenne de 30 ans à
peu près.
Mme Ménard (Marjorie) : J'ajouterais
que, souvent, le modèle pédagogique privilégié, c'est l'alternance
travail-études. Donc, les heures prévues au programme d'études se font presque
la moitié, sinon plus, en milieu de travail. Donc, le centre de formation
professionnelle est en lien avec des entreprises, fait des ententes avec les
entreprises pour qu'il y ait une embauche puis que les heures de la formation
se donnent en entreprise. Donc, la personne est pleinement intégrée, autant en
emploi qu'à la communauté, là, si elle vient avec sa famille, notamment.
M. Derraji : Je ne sais pas
combien de temps.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : 20 secondes.
M. Derraji : Oui, rapidement.
Permis fermés, les permis fermés versus ouverts, est-ce que vous êtes
interpellées par rapport à cela?
Mme René (Odile) : Bien, on
sait, en 10 secondes, que les permis de travail fermés, ça commence à être un
petit peu plus populaire auprès des employeurs qui sont prêts à faire la
démarche, à payer, à mettre du temps, de l'énergie pour ça. Mais ça reste un
défi, ce n'est pas quelque chose de facile pour un travailleur temporaire de
trouver un employeur pour avoir un permis de travail fermé, surtout dans les
domaines dans lesquels on parle. Parce que les domaines, justement, de
construction, les domaines de la santé, de l'éducation, c'est des domaines
qu'il y a des syndicats, des fois, c'est plus compliqué. Donc, le permis de
travail fermé n'est pas toujours la bonne avenue. C'est un parcours de
combattant.
M. Derraji : Merci...
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup. Alors, on termine l'échange avec le député
de Saint-Henri-Sainte-Anne pour une période de quatre minutes huit secondes.
M. Cliche-Rivard : Merci
beaucoup. Merci pour votre présentation. Vous dites, dans le mémoire, puis
c'est un fait, là, c'est 20 mois pour la résidence permanente en moyenne
au Québec, sept mois à l'extérieur, comment on expliquer ça encore aujourd'hui,
en 2023? Pourquoi c'est trois fois plus long?
Mme René (Odile) : Ce n'est
pas vraiment à nous, je pense, qu'il faut poser la question.
M. Cliche-Rivard : Vous avez
des experts, vous êtes sur le terrain, vous développez des pistes, vous avez
des idées, vous parlez avec IRCC, vous parlez au MIFI. Comment ça se fait que
c'est trois fois plus long au Québec?
Mme René (Odile) : Je pense
qu'il y a une partie au niveau du gouvernement fédéral, là, qu'on ne pourra pas
répondre ici, parce qu'il y a aussi les délais au niveau fédéral, qui sont même
plus élevés pour les demandes qui proviennent du Québec. Donc...
M. Cliche-Rivard : ...capables
de les traiter, toutes les autres, hors Québec, en sept mois, donc ils sont
capables de traiter celles du Québec en sept mois?
Mme René (Odile) : Donc, je
ne sais pas. Je ne pourrais pas vous donner la réponse.
M. Cliche-Rivard : Parfait.
On dit PEQ...
Mme van der Knaap (Lysiane) : On
est de... On a le même sentiment que vous, là. On trouve que c'est injuste,
inéquitable, mais on n'a pas la réponse. On... C'est ça.
M. Cliche-Rivard : On dit PEQ
diplômé «hors seuil». Jusqu'à ce jour-là, on n'avait pas entendu parler de ça,
par contre, le «hors seuil» pour le PEQ étudiant, le PEQ diplômé. Est-ce que
vraiment on veut hors seuil ou si, finalement, on préfère juste avoir le bon
seuil? Tu sais, historiquement, il n'y en a pas eu, d'enjeux, avec le Seuil. Le
PEQ avait 8 000, 9 000, autour, de demandes, annuellement, puis on ne
s'est jamais posé la question avant ce jour. Est-ce que vous pensez que c'est
comme une fausse bonne idée ou, finalement, on reviendrait juste avec un seuil
qui serait celui qu'on veut puis on aurait tout dans l'immigration régulière
dans le seuil? Qu'est-ce que vous en pensez?
Mme René (Odile) : Je pense
que ce serait de ne pas se...
Mme René (Odile) : ...Se
bloquer les...
M. Cliche-Rivard : ...
Mme René (Odile) : On ne
s'est jamais bloqué. Par contre, tu sais, non, on se bloque parfois quand même,
tu sais, pour... En ce moment, la déclaration d'intérêt, on fait la pige avec
un seuil, on se bloque.
M. Cliche-Rivard : ...
Mme René (Odile) : non. Sauf
que là on parle d'une... d'un seuil total d'immigration, donc pas seulement
pour le PEQ, pas seulement pour... donc, c'est comme un seuil total. Donc, pour
le PEQ, il ne faudrait pas non plus se bloquer encore, je pense.
M. Cliche-Rivard : O.K. Mais,
au final, c'est un peu revenir au même, finalement, tu sais. Si on s'était
donné un seuil qui est celui auquel on s'attend... finalement, je ne le sais
pas, ça va être quoi, là, je n'ai pas les estimés, ça va-tu être 12 000,
13 000, 14 000, aucune idée, on reviendrait un peu à la même chose,
là. Finalement, on est en train de comparer deux choses qui sont peut-être les
mêmes.
On me dit beaucoup sur le terrain que
c'est difficile, de plus en plus difficile de changer un CAQ pour études, si on
change de niveau d'études. Est-ce que c'est une réalité que vous vivez sur le
terrain?
Mme René (Odile) : Oui, c'est
une réalité. Je pense que ça s'explique quand même par la vérification qui se
fait au niveau de vérifier si les gens ont respecté leurs conditions de séjour
de CAQ, entre autres. Donc, il y a... On sent qu'il y a plus de vérification
qui est faite. On sent qu'il y a des enjeux qui sont soulevés, puis la
vérification vient avec. Je pense que c'est... Ce n'est pas nécessairement
mauvais non plus parce qu'il manquait peut-être un petit peu de vérification.
Comme tout à l'heure, on me demandait comment on pourrait faire pour vérifier
que les gens vont demeurer en région, si jamais ils déclarent qu'ils vont en région.
La vérification est difficile sur des individus qui sont mobiles, donc c'est...
je pense que ce n'est pas mauvais qu'il y ait quand même une vérification de ce
côté-là.
M. Cliche-Rivard : O.K. Donc,
ça ne va pas... Ou, normalement, ça finit par fonctionner? Moi, ce que
j'entends, c'est que des gens, malheureusement, bon, je ne sais pas, moi, sont
inscrits au baccalauréat, arrivent, c'est beaucoup plus difficile que ce à quoi
ils s'attendaient. Finalement, au... à la fin de la première session, on se
dit : bon, ça ne marchera pas, mon affaire, je vais échouer,
malheureusement. Et décide de s'inscrire dans un programme, dont ceux que vous
avez nommés, DEP ou autre chose. Et là, le changement est systématiquement
bloqué, ça ne passe pas. Et ces gens-là se retrouvent dans une situation de
précarisation. Le CAQ n'est pas octroyé, il y a un échec à l'université, et là,
on se retrouve dans des gens qui tombent sans statut.
• (18 h 30) •
Mme René (Odile) : Personnellement,
moi, ces dossiers-là, celui que vous mentionnez, habituellement, fonctionnent.
Ceux qui sont refusés ou intention de refus, c'est ceux qui ont traîné un peu
trop, souvent, donc ceux que moi, je vois. Il existe plusieurs situations
possibles, là, mais habituellement, les gens arrivent, finalement, ne
commencent pas l'école, puis là, veulent changer. Là, ça se peut qu'il y ait un
refus ou une intention de refus. Mais, dans l'exemple que vous avez donné,
habituellement, c'est accepté.
M. Cliche-Rivard : Merci
beaucoup. Merci pour le travail que vous faites. Merci beaucoup.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci. Alors, sur ces bons mots, c'est le... la commission
va ajourner, mais je tiens, au nom de mes... va suspendre, pas «ajourner», va
suspendre quelques minutes, mais le... je tiens quand même à vous remercier
pour l'appart à nos travaux. Alors, on se revoit à 19 h 15.
(Suspension de la séance à 18 h 31)
19 h (version non révisée)
(Reprise à 19 h 18)
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Alors, à l'ordre, s'il vous plaît! La Commission des
relations avec les citoyens reprend ses travaux.
Nous recevons un représentant du
regroupement... Non, ce n'est pas celui là, je m'excuse. Oui, c'est bien ça, le
Regroupement des organismes en francisation du Québec. M. Camona, bienvenue M.
Camona, à la commission. Alors, vous allez bénéficier...
M. Carmona (Carlos) : Merci, Mme.
La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) :
...d'une période de 10 minutes pour présenter votre... votre mémoire,
vos recommandations, puis va s'ensuivre par la suite — encore un
pléonasme que je viens de faire — une période d'échange avec les
parlementaires. Alors, le temps débute maintenant.
M. Carmona (Carlos) : Parfait.
Merci. Tout d'abord, Mme la Présidente et membres de la commission, je m'appelle
Carlos Carmona, je suis le coordonnateur du Regroupement des organismes en
francisation du Québec, et avant de commencer, je tiens à vous présenter les
excuses de la présidente de notre conseil d'administration, Mme Annette
Alexander, qui aurait dû être présente ce soir. Malheureusement, elle se trouve
à des milliers de kilomètres en Europe et pour elle, en ce moment, il est 4
heures du matin donc c'est un peu difficile de se connecter à cette activité.
Je vais vous faire grâce de la
présentation du ROFQ, elle est à la page 3 du mémoire que nous avons
envoyé. Je pense... je suis convaincu que la plupart de M. et Mmes les
parlementaires, vous l'avez suffisamment lu, et le regroupement est quand même
assez connu au Québec.
• (19 h 20) •
Je tiens à camper cette présentation en
disant, tout d'abord, que la francisation qui se fait dans... en milieu
communautaire est beaucoup plus que seulement de la francisation. La plupart
des organismes communautaires qui travaillent en francisation ont d'autres
services, comme des services d'accueil, des services d'installation, d'intégration
d'interprétabilité. Ainsi donc, c'est une panoplie de services qui a comme
objectif de faire qu'à la fin de leur parcours les personnes immigrantes qui
passent par ces organismes soient prêtes à s'intégrer harmonieusement à la
société québécoise qui les accueille.
Concernant... En commençant, je voudrais
aussi parler du rôle de la langue. On est complètement d'accord. On est... on
est d'accord que le rôle que la langue française doit jouer au Québec, c'est
quelque chose de primordial. C'est un élément qui doit jouer et c'est un
élément qui doit être important pour l'intégration des personnes immigrantes
dans la société québécoise. Nous sommes conscients que nous avons une
responsabilité pour promouvoir l'apprentissage de la langue française, sachant
que cette maîtrise, c'est ce qui va faciliter l'intégration des immigrants dans
la nouvelle société.
On parlait beaucoup... Dernièrement, on a
beaucoup parlé du déclin du français, notamment dans la région de Montréal, et
à plusieurs reprises on a fait le commentaire qu'un des éléments qui jouait sur
le déclin de la langue... de cette langue que j'adore et que je défends au
Québec depuis plus de... depuis presque 50 ans, on dit toujours que les
immigrants qui ne parlent pas français à la maison peuvent contribuer au déclin
de la langue française. C'est à quoi je me prononce en faux absolument. Ce n'est
pas parce que des immigrants parlent le français dans leur maison, ce n'est pas
parce qu'ils veulent garder la langue, la langue de leur pays d'origine, qu'ils
ne s'intègrent pas à la société. On a énormément d'exemples de personnes... de
personnes qui sont dans la... dans cette société, ils sont très bien intégrés
et qui continuent à parler français à la maison. Le fait de parler plusieurs
langues, des langues autres que le français est un atout important et une
richesse pour la société québécoise.
Un des éléments qui apparaît dans la
consultation parlait de promouvoir une... une d'augmenter l'immigration dite
francophone. Nous comprenons ce que le ministère, ce que le gouvernement veut,
mais nous ne partageons pas complètement l'idée de se centrer dans une
immigration presque exclusivement francophone. Nous pensons que le Québec
devrait favoriser une...
M. Carmona (Carlos) : ...une
immigration plus diversifiée... diversité, pardon, une immigration moins homogène
en ce qui concerne l'origine des personnes. Le Québec regorge de personnes
immigrantes issues d'autres... d'autres origines que des... que de la
francophonie, des personnes qui sont complètement intégrées. Moi, ça fait
presque 50 ans que je suis au Québec. Chez moi, je ne... je parle
l'espagnol ou le français et je ne me considère pas pour autant quelqu'un qui
va contribuer au déclin de la langue française. Je suis même quelqu'un qui est
maniaque dans la défense du français sur l'espace public, mais chez moi, je
compte... je garde ma langue maternelle parce que c'est une richesse.
Lors des discussions qu'on a eues il y a
un an et demi, deux ans de... les discussions en commission parlementaire
concernant le projet de loi no 96 qui est revenu de la loi no 14,
nous avons clairement exprimé notre opposition à la disposition exigeant que
l'État s'adresse exclusivement en français aux personnes immigrantes, six mois
après leur arrivée au Québec. Nous persistons à penser que cette disposition va
à l'encontre de leur processus d'intégration et qui rend ces personnes-là
beaucoup plus vulnérables.
En tant que spécialiste de la
francisation, le regroupement existe depuis 1995, moi, je suis professeur de
français depuis... depuis mon arrivée au Québec en 1974, nous saluons
l'avènement de Francisation Québec ainsi que la volonté du gouvernement de
renforcer la maîtrise du français chez les personnes immigrantes. Cette volonté
doit quand même se traduire concrètement par un élargissement de l'offre de
services... de services en francisation aux personnes immigrantes déjà au
Québec, peu importe le statut de ces personnes. Nous sommes conscients que le
ministère de l'Immigration fait de gros efforts pour atteindre... pour
atteindre des personnes, que ce soit des résidents permanents, des travailleurs
temporaires, leurs conjoints... leurs demandeurs d'asile.
Tout ça, c'est fantastique. C'est très
beau, sauf que quelquefois on se heurte à une problématique qui n'est pas
propre au ministère de l'Immigration et qui existe aussi dans les milieux
scolaires, la pénurie d'enseignants. Quelquefois, depuis quelque temps, la
pénurie d'enseignants au MIFI a eu pour conséquence qu'un certain nombre de
groupes, et notamment des groupes de personnes débutantes, ne puissent pas
commencer leur apprentissage de la langue, une situation qui persiste d'une
session à l'autre. Personnellement, j'ai l'espoir qu'avec l'arrivée de
Francisation Québec, cette situation change, mais j'apprécie... mais pour...
une problématique, il y a... il y a eu de session en session quelques groupes
qui n'ont pas été ouverts parce que le ministère n'avait pas le personnel
enseignant suffisant pour donner ses cours.
Qu'est-ce que ça a comme conséquences pour
les personnes qui ne peuvent pas suivre les cours? Bien, il y a un risque
d'abord de s'angliciser, surtout à Montréal. Ces personnes vont avoir des
difficultés pour se trouver un emploi. Ils vont avoir la difficulté encore plus
grande pour accéder à des formations professionnelles spécialisées. Ils vont
peut-être avoir aussi des problèmes pour l'inscription des enfants à l'école.
C'est des personnes qui vont rester non autonomes pendant un certain temps
parce qu'ils ne peuvent pas avoir accès aux cours.
Face à cette situation, nous avons... nous
avons l'idée, nous ne l'avons pas encore proposée d'une façon officielle au
ministère, nous avons l'idée de demander au ministère de mettre sur pied
certaines activités de l'apprentissage, des activités non traditionnelles.
Quand je dis non traditionnel, ça veut dire pas des cours réguliers dans une
salle de classe, mais des activités qui pourraient inclure par exemple des
activités... activités ludiques, des programmes d'immersion et des programmes
en été dans les parcs, certaines activités qui pourraient garder ces personnes
avec... qui pourraient garder ces personnes en contact avec la langue, en
contact avec le français avant d'avoir la possibilité d'intégrer un cours
régulier.
Bon, j'ai fait référence à la
problématique de pénurie d'enseignants au ministère. Nous exhortons le MIFI à
trouver une solution viable et une solution efficace pour augmenter le nombre
d'enseignants afin de répondre à la demande et d'éviter...
M. Carmona (Carlos) : ...d'éviter
qu'il n'y ait pas des cours qui ne puissent pas se donner par manque de
professeurs. Depuis la mise en ligne de Francisation Québec, les demandes
d'admission aux cours de français se font exclusivement en ligne. C'est une
excellente idée, à condition que les conditions soient toutes là. Cependant,
les premières expériences... c'est vrai que ça fait deux, trois mois que cette
application est en fonction, les premières expériences, avec cette nouvelle
méthode, se sont avérées pas mal laborieuses, surtout étant donné qu'au début,
pendant les premiers temps de l'application, la langue de l'application... la
langue de cette application informatique est la même que celle que les
personnes immigrantes souhaitent apprendre, c'est-à-dire le français. Nous
souhaitons qu'il y ait d'autres langues qui puissent être mises à la disposition
des personnes qui ne maîtrisent pas le français de façon à pouvoir faciliter
leur accès à la plateforme, que ce soit des traductions de courtoisie,
d'autres... mais la façon de pouvoir donner à ces personnes un accès le plus
large possible.
Dans le document présenté par le
ministère, la proposition du... le ministère propose d'offrir des cours de
français pour les immigrants avant leur arrivée au Québec. Ça, c'est une
excellente nouvelle, c'est louable, mais il faudrait la prendre avec des pincettes.
C'est une solution qui pourrait avoir certains effets secondaires significatifs
au Québec. Si les enseignants, si les personnes qui enseignent à ces personnes
avant d'arriver au Québec ne sont pas familières avec la culture québécoise,
les nouveaux arrivants pourraient découvrir, en arrivant au Québec que le
français appris ne correspond pas exactement à celui de la Belle Province mais
plutôt au français hexagonal. D'autre part, si on veut contourner cet aspect,
si la formation est dispensée à distance par des enseignants québécois, si on
parle de pénurie d'enseignement, il ne faudrait pas aller enlever des
enseignants pour les personnes qui sont sur place avant de donner des cours à
l'étranger. Donc, il ne faudrait pas réduire le nombre d'enseignants disponibles
localement des personnes... des enseignants pour offrir des cours aux personnes
qui sont déjà sur le territoire, avant de donner l'information à l'extérieur.
• (19 h 30) •
Un aspect très intéressant, c'est aussi la
proposition d'augmenter la francisation en milieu de travail. Il est évident
que l'augmentation de la maîtrise du français chez les travailleurs étrangers
temporaires et la promotion de la francisation en milieu de travail sont des
mesures complémentaires et pourraient être inefficaces si ces personnes-là
n'ont pas la possibilité de mettre en application leurs apprentissages. Si,
quand ils vont aller travailler, le milieu de travail les amène à parler en
anglais, il est évident que tout ce qu'on aura fait pour les franciser risque de
ne pas être valable. Les gens vont aller dans une formation, vont apprendre le
français et, quand ils devront aller en salle de classe... quand ils devront
aller sur le marché du travail, là, on va se trouver avec la problématique que
ces gens-là travaille en anglais. Il y a comme incohérence. Il faudrait que le
gouvernement puisse mettre sur pied... le gouvernement puisse exiger que le
milieu de travail soit... devienne un milieu de travail vraiment francophone.
La régionalisation de l'immigration, c'est
aussi l'installation des travailleurs temporaires en dehors des zones urbaines,
est aussi un impératif pour accélérer. Il faudrait aussi augmenter les
infrastructures d'accueil dans les régions. Les travailleurs temporaires n'ont
pas seulement besoin d'un emploi, mais ils ont aussi besoin de logement pour
eux, pour leurs enfants, pour leur famille. Les enfants, il est important que
les enfants aient accès à des services de garde pour le plus jeune, et aussi
pour... dans un établissement scolaire pour les enfants qui sont plus âgés, que
ce soit des niveaux primaire ou secondaire, et évidemment pour...
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : M. Carmona...
19 h 30 (version non révisée)
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : ...Carmona, je vais juste vous demander de conclure. On a
dépassé un peu le temps. La ministre a pris de son temps, mais, si vous voulez
conclure.
M. Carmona (Carlos) : Oui.
Je vais conclure avec deux petites choses. Il est évident aussi qu'un élément
qui est important, c'est que ces travailleurs puissent avoir accès, un accès
facile et efficace aux services de santé.
Et, en finissant, parmi les deux scénarios
que le ministère présente, nous priorisons le scénario un, c'est-à-dire l'augmentation
des niveaux d'immigration. Merci, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci pour cette présentation. Comme je disais, la ministre
a accepté de prendre un peu sur son temps. Il va donc vous rester à peu près 14 minutes.
Le temps est à vous.
Une voix : ...
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : 12, oui, 12 minutes.
Mme Fréchette : 12 minutes,
d'accord. Bien, merci. Merci, Mme la Présidente. Alors, merci, M. Carmina,
pour cette présentation. Merci de contribuer aux échanges que nous tenons dans
le cadre de cette commission parlementaire. Veuillez transmettre également mes
salutations à Mme Aleksanian, qui ne pouvait pas être...
M. Carmona (Carlos) : Elle
sera de retour mardi prochain.
Mme Fréchette : Bon, parfait,
alors vous pourrez lui souhaiter un bon retour de ma part, et merci d'avoir
participé à distance via l'écrit, donc, à cette commission parlementaire.
Alors, bien, je ferais une première
intervention, en fait, sur l'idée que vous évoquez à l'effet qu'on risque d'avoir
un bassin d'immigrants qui soit insuffisamment diversifié, du fait de nos
exigences en matière de français. Donc, pour nous, en fait, c'est vraiment la
langue française qui est l'axe principal d'action qui a guidé nos réformes au
cours du printemps dernier, qu'on a présentées au printemps dernier. Mais, pour
nous, ça ne signifie pas qu'il y aura... Comment dire, un nombre de pays
géolocalisés, là, qui seront ciblés à l'exclusion des autres. Toute personne
qui a une connaissance du français suffisante pourra aspirer à devenir
immigrant permanent. Donc, pour nous, il n'y a pas de critère qui soit associé
au pays de provenance, au pays d'origine. Et, des personnes qui parlent
français, qui maîtrisent le français, on en trouve partout sur la planète,
donc, en ce sens-là, on est d'avis qu'il y aura quand même une bonne diversité,
une bonne diversification des pays de provenance des personnes qui immigreront
au Québec. Par ailleurs, il y a la voie également de l'immigration temporaire
qui constitue un passage potentiel pour l'immigration permanente. Et, dans nos
immigrants temporaires, il y en a de toutes sortes de langues et de pays de
provenance, donc encore là, il y a un bon bassin diversifié à partir duquel on
pourra faire de la sélection pour des immigrants permanents.
J'aimerais vous amener au thème que vous
abordez à la page quatre. Justement, c'est sur la diversification de l'immigration.
Une des raisons qui nous amène à prioriser la connaissance du français parmi
les immigrants qu'on voudra rendre permanents, bien, il y a cette notion de
rétention. À partir du moment où les gens maîtrisent, connaissent le français,
bien, le taux de rétention est plus intéressant, est plus élevé, plus
important.
Et j'en veux pour preuve, là, les
statistiques qu'on a pour l'année 2020. Si vous regardez, par exemple, le
taux de rétention des personnes qui sont arrivées au Québec cinq ans
auparavant, donc qui sont arrivées au Québec en 2015, ce taux de rétention, il
était de plus de 94 % pour les personnes qui ont déclaré connaître
uniquement le français à leur admission, il tombait à 80 %, disons, près
de 83 % pour les personnes qui ont déclaré connaître à la fois le français
et l'anglais, et il n'était que de 68,5 % pour les personnes qui ont
déclaré connaître uniquement l'anglais. Donc, si vous comparez les personnes
connaissant uniquement soit le français ou l'anglais, bien, il y a un écart
quand même fort important, là, 94 % versus 68 %. Alors, vous, dans
votre mémoire, vous vous dites qu'en fait les non-francophones ont un taux de
rétention potentiellement supérieur à ceux qui maîtrisent le français et qui
sont des francophones. Donc, est-ce que vous pouvez élaborer, dans le fond, sur
vos observations sur cette dimension-là puis nous indiquer, en fait, sur
quelles bases vous vous appuyez pour avancer cette affirmation?
M. Carmona (Carlos) : À
vrai dire, ça fait partie de notre expérience et de notre intuition. On a l'impression
que les personnes qui arrivent au Québec, qui apprennent le français au Québec
et qui suivent un processus d'intégration comme celui qui est prôné par le
ministère et qui vont faire siennes leurs valeurs du Québec vont avoir une
tendance plus facile pour rester au Québec, plutôt que des personnes qui
arrivent déjà en connaissant le français et pour lesquelles, quelquefois, le
fait d'arriver au Québec est un...
M. Carmona (Carlos) : ...tremplin
pour aller ailleurs. Comme on dit dans notre mémoire, on n'a pas des
statistiques comme telles, on se base beaucoup sur notre intuition, sur la
connaissance du terrain, sur l'expérience qu'on a. Et il me semble qu'à un
moment donné on invitait le ministère, peut-être, à faire une étude comparative
à ce moment-là. C'est une suggestion qu'on vous propose.
Mme Fréchette : D'accord. On
regardera s'il nous faut de nouvelles données sur cette dimension-là. Je vous
amènerais, dans ce cas-là, à la page cinq de votre mémoire. En fait, ça porte
sur Francisation Québec. Vous indiquez, là, que la mise en place de
Francisation Québec devrait être associée à un élargissement de l'offre de
services.
Bon, commençons par parler de
l'élargissement de l'offre en diverses langues. Simplement pour dire qu'il y a,
à l'heure actuelle, déjà, en ligne, des capsules linguistiques disponibles en
anglais et en espagnol pour aider les gens à compléter les formulaires pour
s'inscrire dans le processus d'accès aux cours de francisation. Alors, déjà, on
a, là, diversifié les langues utilisées, là, sur le site Internet pour aider
les personnes, justement, qui ne maîtrisent pas le français à pouvoir procéder,
traverser la procédure initiale d'inscription à Francisation Québec.
Et vous nous dites, donc, qu'il faudrait
considérer un élargissement de l'offre de services. Or, bien, depuis le
1er juin, quand même, là, toutes les personnes domiciliées au Québec, là,
ont accès à l'ensemble des services, et puis on a quand même misé sur une gamme
assez variée de services, des cours à temps plein, à temps partiel, de jour, de
soir, en présentiel, en virtuel, en amont, en lieu de travail. Alors, qu'est-ce
que vous nous proposez comme mesures supplémentaires de diversification?
M. Carmona (Carlos) : Bien,
je ne propose absolument rien de supplémentaire, mais tout simplement mettre
l'accent sur le fait que c'est une excellente idée que cet élargissement soit
déjà sur... sur place, je veux dire, excusez-moi, mais à condition, comme on
dit un peu plus tard, qu'on ait le personnel enseignant pour pouvoir donner les
cours.
• (19 h 40) •
Mme Fréchette : D'accord.
Bien, ça, on travaille là-dessus, on met les bouchées doubles pour avoir les
ressources...
M. Carmona (Carlos) : J'ai
entendu dire qu'il y avait à peu près une trentaine de rendez-vous, d'examens
par semaine pour pouvoir trouver des professeurs pour la session du mois
d'octobre, c'est... dont je suis très content.
Mme Fréchette : Voilà. Bien,
nous aussi, on est affairés à ça et on met toute la gomme, comme on dit, pour
faire en sorte d'avoir les ressources requises pour répondre à la grande
demande à laquelle on fait face, puis on en est contents, de cette demande-là,
parce que, manifestement, les gens ont répondu à notre appel, pour ce qui est
de l'apprentissage du français.
Toujours en relation avec l'élargissement
de l'offre de services. Bon, Francisation Québec a également le mandat
d'éveiller les jeunes enfants, les tout-petits à la langue française. Donc, on
travaille en ce sens-là sur différents projets, on en a annoncé déjà quelques-uns
au cours des dernières semaines puis on développe une offre bonifiée en
francisation là où il y a des services de garde qui sont disponibles. Alors,
qu'est-ce que vous pensez de cette approche-là, de travailler avec les
tout-petits? Est-ce que vous avez déjà, dans votre réseau, là, des organismes
qui travaillent sur la francisation des tout-petits? Est-ce que c'est une
dimension que vous avez analysée ou dans laquelle vous vous êtes engagés?
M. Carmona (Carlos) : C'est
une dimension sur laquelle on ne s'est pas encore penchés, à l'exception de
certains organismes qui font... qui offrent des camps d'été, O.K., pendant...
pendant l'été. Mais ce n'est pas pour les tout-petits, O.K.? Parce que, les
tout-petits, à la rigueur, on les prend, si vous voulez, forcément... par la
bande, dans le sens où les parents qui vont suivre des cours de français... Et,
dans beaucoup de nos organismes, il y a des haltes-garderies. Donc, en étant
dans la halte-garderie, ces enfants sont déjà en contact avec le français, et
il y en a quelques-uns qui apprennent le français pendant que leurs parents
suivent les cours qui sont, d'ailleurs, donnés par le personnel du ministère.
L'idée de les offrir dans les services de garde, je trouve que c'est une
excellente idée.
Mme Fréchette : Oui, mais
d'ailleurs on a fait l'annonce, là, il y a quelques semaines, avec, justement,
des interlocuteurs, des partenaires qui sont du milieu des haltes-garderies
pour faire en sorte... des CPE, plutôt, pour faire en sorte qu'il y ait des
pictogrammes, là, qui puissent être utilisés par des tout-petits qui ne
maîtrisent pas le français mais qui voudraient s'exprimer et qui permettront
d'avoir un canal de communication entre les éducatrices et les tout-petits et
les parents, également, de ces enfants. Donc, une formule bien intéressante.
Alors, à partir d'ici, bien, je vais céder la parole à des collègues, Mme la
Présidente.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci, Mme la ministre. Alors, je reconnais la députée de
Vimont. Il vous reste deux minutes...
Mme Schmaltz : ...Parfait.
Merci, Mme la Présidente. Bonsoir. Ça passe vite, hein?, le temps.
M. Carmona (Carlos) : Oui,
Mme la... Députée. Je suis désolé.
Mme Schmaltz : Écoutez, à la
page six, vous... bien, en fait, vous avez... puis pendant votre... tantôt,
votre présentation, vous avez mentionné l'intérêt de la francisation dans le
milieu du travail, mais ça nécessite la collaboration des employeurs.
M. Carmona (Carlos) : Absolument.
Mme Schmaltz : De quelle
façon on pourrait mobiliser justement davantage les employeurs?
M. Carmona (Carlos) : Il y a
eu une époque... Moi, je suis un ancien de la francisation, O.K. Il y a eu une
époque où le ministère offrait des cours de francisation en milieu de travail,
offerts, donnés par le ministère, O.K., avec des professeurs du ministère
pendant les heures de travail. Ça, c'est une façon de faire.
Et le ministère... Évidemment, je ne
connais pas les ententes qu'il y avait entre le ministère et les employeurs,
mais l'idée, à l'époque, c'était sortir des employés pendant... Deux ou trois
fois par semaine, pendant 2 h de leur travail pour qu'ils puissent suivre
des cours de français dans leur milieu de travail et de ne pas attendre
5 h et demie, 6 h, de finir leur journée de cours, rentrer à la
maison rapidement pour prendre une douche, se changer, prendre un sandwich et
aller un cours jusqu'à 9 h, 9 h et demie. L'idée qu'ils puissent le
faire pendant les heures... Est-ce que le ministère, est-ce que le... et je
vais dire est-ce que le gouvernement aura la possibilité d'offrir une certaine
compensation aux employeurs pour qu'ils puissent libérer les employeurs... Les
employés pour qu'ils puissent suivre des cours?, là-dessus, je vous avoue que
je ne sais pas, mais ce serait... Pour moi, c'est une façon de motiver les
employés.
L'autre aspect, c'est est-ce que les...
est-ce que le milieu de travail comme tel... Est-ce que le travail va se faire
en français? Si le travail ne se fait pas en français, on peut avoir les
meilleurs cours de français, et les employés ne parleront pas français.
Mme Schmaltz : j'ai le temps?
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : 30 secondes.
Mme Schmaltz : 30 secondes.
En fait, vous savez, la francisation en milieu de travail se veut justement une
francisation pendant les heures de travail. C'est l'objectif souhaité.
M. Carmona (Carlos) : Excellent.
Mme Schmaltz : Ça, c'est
l'objectif souhaité. On a entendu quand même de belles histoires de
réalisations auprès d'entreprises qui ont réussi justement à conjuguer les
deux, c'est-à-dire de franciser en même temps que les heures de travail. Donc,
ça, c'est une solution. Puis, effectivement, de... Ce n'est pas toujours
évident non plus de suivre des cours de francisation après les heures de
travail, voilà pourquoi c'est une des solutions, là, qui est envisagée.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup. C'est ce qui met fin à cette première
partie d'échange avec les parlementaires. Je vais me tourner du côté de
l'opposition officielle avec la députée de Chomedey pour une période de
12 minutes 23 secondes.
Mme Lakhoyan Olivier : Merci,
Mme la Présidente. Bonjour.
M. Carmona (Carlos) : Bonjour,
Mme.
Mme Lakhoyan Olivier : Vous
représentez plusieurs organismes, dont un, je connais, c'est dans mon coin de
Chomedey, Carrefour interculture. Donc, vous représentez de la
Capitale-Nationale à Îles de la Madeleine, Chaudière-Appalaches, partout.
M. Carmona (Carlos) : on a à
peu près... actuellement, on a à peu près une cinquantaine d'organismes sur
l'ensemble du Québec. La plupart sont concentrés dans la grande région
métropolitaine de Montréal, mais il y en a aussi à l'extérieur. On en a du côté
de Gatineau, la capitale nationale, Drummondville, et ainsi de... On va... et
on va même... on allait même jusqu'à en Gaspésie. Malheureusement, l'organisme
qui était en Gaspésie a décidé à un moment donné de se retirer de la francisation
pour d'autres raisons. Mais, en principe, nous couvrons le territoire.
Mme Lakhoyan Olivier : Est-ce
que je devrais demander pourquoi ils se sont retirés?
M. Carmona (Carlos) : Oui,
parce que leur vocation primaire, c'est la... l'alphabétisation, et ils
préfèrent se concentrer dans l'alphabétisation parce que le ministère, et là je
répète ce qu'ils m'ont dit, le ministère leur a exigé d'avoir une vingtaine de
personnes pour ouvrir un groupe et ils n'arrivent jamais à avoir 20 personnes.
Donc... Et il y a un centre de services scolaire de la commission scolaire du
coin qui offre les services, donc pour éviter la concurrence avec les services,
le centre de services scolaire, il y a eu une sorte d'entente à l'amiable. Il y
en a un qui reste en alphabétisation et l'autre qui se consacre à la
francisation. Ça, c'est en...
Mme Lakhoyan Olivier : ...est-ce
que...
M. Carmona (Carlos) : À
Gaspé.
Mme Lakhoyan Olivier : Est-ce
que malgré qu'il y a beaucoup d'organismes qui sont toujours là et ils n'ont
pas fermé comme Gaspé, mais est-ce qu'on vit cette situation ailleurs s'il n'y
a pas assez de nombres, on ne donne pas des cours? On n'a pas l'autorisation de
donner des cours de francisation.
M. Carmona (Carlos) : Quand
les cours sont donnés par les professeurs du ministère, les règles du jeu sont
plus strictes parce qu'en plus il y a la convention collective qui est... Quand
c'est des organismes qui se trouvent dans des zones plus éloignées, les
organismes ont la possibilité d'engager leurs propres professeurs, et là il
entre en jeu là, la négociation avec l'ancienne direction de la francisation, à
savoir combien de personnes le ministère va accepter que organisme puisse avoir
dans ce cas. Ça peut aller à 10 personnes au lieu de 20. Il y a un jeu qui
peut se faire. Mais ça, ce n'est pas aussi strict que quand on dit : 20
personnes dans une classe ou 13 personnes si les personnes sont des
personnes peu scolarisées. La possibilité existe. C'est les... il y a les...
C'est ce qu'on appelle... Le ministère, il a une formule qui s'appelle un achat
de groupe. Donc, le ministère va acheter les services de l'organisme pour qu'il
donne ces cours. Il doit y avoir à peu près une dizaine sur l'ensemble du
Québec, au travers... Oui, peut-être une dizaine.
Mme Lakhoyan Olivier : Très
intéressant. Vous connaissez tellement... vraiment vous donnez de...
M. Carmona (Carlos) : Mme, je
pense que je suis né... je pense que j'ai pu arriver au Québec en 1974 et déjà,
en 1978, j'étais dans les anciens COFI et j'ai fait toute ma carrière au
ministère de l'Immigration jusqu'à il y a trois ans que j'ai pris ma retraite
et je suis passé de l'autre côté de la muraille.
• (19 h 50) •
Mme Lakhoyan Olivier : On est
honoré de vous avoir.
M. Carmona (Carlos) : L'honneur
est pour moi.
Mme Lakhoyan Olivier : Avec
la francisation dans les régions, d'après vous, quel est l'état de situation
sur la francisation des personnes immigrantes dans les régions? Est-ce qu'on
est capable de réussir?
M. Carmona (Carlos) : On est
capable de réussir si les employeurs collaborent parce que la francisation en
région, elle est actuellement... la plupart des personnes qui assistent à ces
cours, c'est des travailleurs temporaires. Donc, quelquefois, les employeurs
ont certains besoins de garder leurs employés pour du temps supplémentaire ou
autre chose. Donc, ça se fait, mais ça prend plus de temps. Et quelques fois la
personne va pouvoir... va devoir annuler ou s'absenter à un cours quelques fois
parce que son employeur lui demande de rester. Et si par un hasard, la personne
qui doit faire du temps supplémentaire est la personne qui a la voiture pour
emmener ses trois ou quatre autres collègues au cours de français, là, ce n'est
pas un seul qui est absent, mais il y en a trois ou quatre. La réalité n'est
pas la même que dans les grandes villes.
Mme Lakhoyan Olivier : Donc,
comment on peut faire pour pallier à ça?
M. Carmona (Carlos) : Oh! je
reviens à ma marotte de cirque, il faut sensibiliser les employeurs. O.K.?
C'est que je n'ai pas de miracle, je n'ai pas de solution pour sensibiliser les
employeurs. Mais en région, les employeurs devraient pouvoir donner des
facilités à ces travailleurs qui vont s'installer dans leur région. On parle de
pénurie de main-d'œuvre. Pourquoi ne pas donner... la plupart, ne pas donner
mais toutes les facilités nécessaires pour que ces personnes puissent apprendre
le français et de rester dans la région et ne pas se plaindre qu'il nous manque
de personnel.
Mme Lakhoyan Olivier : Le
manque de personnel, c'est un problème. Pour sensibiliser les employeurs, outre
que le manque de personnel, est-ce que... est-ce qu'il y a un service de la
part du MIFI qui explique où il devrait-tu avoir... afin de sensibiliser les
employeurs?
M. Carmona (Carlos) : Ce
n'est pas à moi que vous devez poser la question, il est en face de vous, là.
Mme Lakhoyan Olivier : O.K.
M. Carmona (Carlos) : Et je
sais que... non, mais écoutez, là, je sais que le ministère a du personnel en
région, mais quel est leur mandat et comment ils le mettent... comment ils le
mettent à... comment ils le réalisent, j'imagine...
M. Carmona (Carlos) : ...j'imagine
que ça se fait, mais je ne suis plus dans les secrets des dieux au ministère.
Mme Lakhoyan Olivier : Pas
tous les secrets, quelques secrets.
M. Carmona (Carlos) : Pas
tous les secrets, effectivement. Oui, O.K.
Mme Lakhoyan Olivier : Concernant
les petites et moyennes entreprises pour la francisation, est-ce que vous
pensez que ça fonctionne?
M. Carmona (Carlos) : Je ne
sais pas.
Mme Lakhoyan Olivier : ...
M. Carmona (Carlos) : Je ne
sais pas. Je veux tout de suite vous... Il y a une vingtaine d'années, le
ministère a remis sur pied des cours où on regroupait des personnes des
différentes entreprises dans un endroit. Est-ce que ce ne serait peut-être pas
une formule à reprendre? C'est-à-dire, au lieu de faire des cours en milieu de
travail, pour un ensemble des employeurs de la même région. Ça pourrait se
faire de la même façon qu'il y a eu des cours en hôtellerie, des cours en
restauration auprès des employeurs. Ça, c'est déjà fait et ça pourrait se faire
à nouveau.
Mme Lakhoyan Olivier : Vous
avez mentionné, concernant les délais de six mois, vous avez mentionné le
projet de loi n° 96, qui est devenu la loi 14, exigeant l'État
s'adresse exclusivement français aux personnes immigrantes six mois après leur
arrivée au Québec. Vous dites que vous avez critiqué que... Pouvez-vous
élaborer là-dessus? Parce que ça, c'est un sujet, là... on peut en parler
longtemps.
M. Carmona (Carlos) : Oui, je
vous comprends, mais, pour apprendre le français, et fiez-vous... mon
expérience de prof, O.K.? Pour apprendre le français, on a besoin d'à peu près
1 800, 1 800 heures d'apprentissage. C'est entre 1 500 et
1 800 pour atteindre le niveau sept, qui est le niveau de sortie prôné par
le ministère. Et ça, 1 800 ou 1 500 heures, c'est un an et un an
et demi d'apprentissage. Est-ce que vous pensez qu'en six mois les gens vont
pouvoir... quelqu'un qui arrive au Québec et qui ne parle pas du tout le
français va pouvoir apprendre le français suffisamment pour communiquer, parce
que l'objectif, c'est ça, communiquer avec le personnel de l'État? Il va
peut-être apprendre le français pour se débrouiller dans la vie de tous les
jours, va pouvoir aller à l'épicerie, va pouvoir, alors que, là, même si j'ai
des doutes, aller voir le médecin. Il y a des choses que la personne va pouvoir
faire en six mois d'apprentissage, à condition d'abord... à condition aussi que
cet apprentissage se fasse à temps plein. Mais les gens ne suivent pas tous des
cours à temps plein. Il y en a qui suivent des cours à raison de 6 heures
par semaine, à raison de 9 heures par semaine, à raison de 12 heures
par semaine.
Donc, c'est... je ne sais pas par quel
miracle les gens pourraient apprendre la langue suffisamment pour communiquer
avec l'État en français six mois après leur arrivée. J'essaie de rester calme
quand je parle de ça, mais, dans d'autres circonstances, j'aurais utilisé un
autre mot pour qualifier cette mesure.
Mme Lakhoyan Olivier : Donc,
d'après vous, l'exigence de six mois, qu'est-ce qu'on fait avec ça? Est-ce que
la ministre...
M. Carmona (Carlos) : D'après
moi, s'il y avait la possibilité de l'abolir, je serais... je, moi et plusieurs
personnes seraient très contents. Est-ce que c'est moi qui peux faire ça? Il y
a un gouvernement qui peut faire ça. Vous, vous êtes dans l'opposition, vous ne
pouvez pas le faire, mais, peut-être, à un moment donné, quelqu'un... que ça va
tomber dans une bonne... d'une bonne... Et une loi, ça se modifie. La loi 94,
ça, c'est une loi qui a modifié la Charte de la langue française. Donc,
pourquoi ne pas avoir encore de nouvelles modifications pour enlever cette
obligation, pour la modifier?
Mme Lakhoyan Olivier : ...entre
un immigrant et un autre ici, on comprend c'est quoi, recommencer et puis
apprendre une nouvelle langue. Donc, peut-être, nous, on comprend... aller à un
autre pays puis voir, comme, mes parents apprendre, moi-même apprendre. Donc,
ce n'est pas évident, apprendre d'une nouvelle langue. Et les immigrants qui...
d'habitude, quand ils déménagent dans un pays, ils veulent apprendre la
langue...
Mme Lakhoyan Olivier : ...c'est
sûr, donc... Mais c'est ça, donc, la limite, vous trouvez que c'est un
problème.
M. Carmona (Carlos) : Ce
n'est pas seulement moi, il y a plusieurs autres. Je suis convaincu qu'il y a
d'autres organisations qui trouvent aussi que c'est un problème.
Mme Lakhoyan Olivier : Une
autre question concernant la francisation. Vous parlez de francisation avant
d'arriver au Québec.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : En fait, la période est terminée, Mme la députée.
Mme Lakhoyan Olivier : Merci
beaucoup. J'ai eu plaisir de vous écouter.
M. Carmona (Carlos) : Merci à
vous, Mme...
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : M. Carmona, vous faites bien de faire attention aux mots
parce que je suis gardienne du temps et des mots aussi. On termine, donc, cette
période d'échange avec le député de Saint-Henri—Sainte-Anne pour une période de
quatre minutes huit secondes.
M. Cliche-Rivard : Merci
beaucoup pour cette belle présentation. Je vous amène à la page cinq, sur
l'élargissement des services de francisation. Vous disiez "un
élargissement pour que tous soient inclus, quel que soit leur statut, là vous
dites, résidents permanents, travailleurs étrangers, conjoints, étudiants,
demandeurs d'asile". Qui n'est pas inclus en ce moment? Qui n'a pas accès
à ces services-là? Vous demandez un élargissement.
M. Carmona (Carlos) : En
fait, j'ai peut-être une autre formulation, elle est mal faite. C'est comme
demander... Je pense qu'en fait c'est surtout insister sur le fait que
Francisation Québec avait... Et je ne sais pas quoi, parce qu'il me semble
manquer les personnes qui viennent des peuples... des Premières Nations ont
encore... ont aussi accès maintenant. Donc, c'est peut-être une mauvaise
formulation qu'on a faite là-dessus...
M. Cliche-Rivard : O.K. Il
n'y a pas de problème.
M. Carmona (Carlos) : ...mais
on voulait tout simplement souligner le fait que tout le monde devrait
apprendre le français.
M. Cliche-Rivard : Mais
corrigez-moi si je me trompe, ce n'est pas tout le monde qui reçoit les mêmes
allocations ou les mêmes aides ou subventions.
M. Carmona (Carlos) : Ah! ça,
c'est autre chose, ça, c'est autre chose.
M. Cliche-Rivard : Oui.
Pouvez-vous nous informer là-dessus? Qui reçoit ça? Est-ce que vous le savez?
M. Carmona (Carlos) : Les
demandeurs d'asile, par exemple, ont accès aux cours de français, mais n'ont
pas accès aux allocations de formation. Par contre, ils sont prestataires de
l'aide sociale. O.K. Est-ce que...
• (20 heures) •
M. Cliche-Rivard : Bien, ça,
on ne le sait pas.
M. Carmona (Carlos) : ...c'est
peut-être la raison, je dis peut-être...
M. Cliche-Rivard : Peut-être.
M. Carmona (Carlos) : O.K.
Peut-être. Parce que, dans le formulaire de demande d'admission à la
francisation, on demande si les gens reçoivent des allocations d'autres secteurs...
M. Cliche-Rivard : Je
comprends.
M. Carmona (Carlos) : ...la
CNESST, l'aide sociale, et je ne me souviens pas, il y a deux ou trois sources
de... Et les personnes qui reçoivent de l'argent d'une de ces sources-là ne
reçoivent pas des allocations de la part du MIFI.
M. Cliche-Rivard : Elles ne
sont pas cumulées. Exactement.
M. Carmona (Carlos) : Bien,
c'est ça. O.K.
M. Cliche-Rivard : Est-ce que
vous pensez que c'est un frein à l'accès à la francisation des demandeurs
d'asile, le fait qu'ils n'aient pas accès à cette allocation? Est-ce que vous
pensez que ça devrait être élargi?
M. Carmona (Carlos) : Dans un
monde idéal, peut-être, mais à quel coût?
M. Cliche-Rivard : Ah! ça,
c'est toujours la question, c'est toujours la question. Je vous amène sur un
autre sujet. À la fin, vous choisissez un scénario, vous choisissez le scénario
un. Pouvez-vous nous en dire un peu plus, davantage sur votre décision?
M. Carmona (Carlos) : Bien,
60 000 personnes, je pense que ce n'est pas suffisant. O.K. À la rigueur, on
choisit... Parce que le statu, nous, on n'est pas... le statu quo n'est pas
suffisant pour nous. Le Québec a besoin de main-d'oeuvre. Le Québec a besoin
d'augmenter sa population. Le Québec est... Le taux de natalité au Québec est
toujours très bas, et ça, c'est qu'on pense, avec l'arrivée des immigrants et
avec les enfants, que les nouveaux arrivants... arrivent au Québec.
M. Cliche-Rivard : Est-ce que
vous aviez un chiffre, vous? Vous dites que 60, ce n'est pas suffisant Est-ce
que vous aviez pensé à 70?
M. Carmona (Carlos) : Je ne
suis pas économiste, mais, en réalité, je pense que, même quand on parle de 60
000, ce sera beaucoup plus, parce qu'il y a des travailleurs temporaires qui ne
sont pas comptés dans ce nombre.
M. Cliche-Rivard : Puis il y
a le programme de l'expérience québécoise, volet Diplômé...
M. Carmona (Carlos) : Absolument,
oui.
M. Cliche-Rivard : ...qui va
peut-être donc monter, je ne sais pas, moi, à 72, 74.
M. Carmona (Carlos) : Avec la
diminution des frais de scolarité dans certains cégeps, par exemple, certaines
universités, avec certains programmes, ça risque aussi d'augmenter.
M. Cliche-Rivard : Et...
M. Carmona (Carlos) : Alors,
on aurait été très naïf de garder le statu quo quand on sait que, dans la
pratique, c'est déjà plus.
M. Cliche-Rivard : Oui, parce
que vous dites que, d'un côté, et ça, ce n'est pas tellement abordé, de l'autre
côté, vous nous parlez des temporaires, donc, qui sont, eux, en augmentation
constante. C'est ça que vous vous disiez.
M. Carmona (Carlos) : ...de
plus en plus de temporaires. Il y en a certains qui suivent des cours. Moi, je
donne des cours, un cours sur les valeurs de la société québécoise...
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : M. Carmona...
M. Carmona (Carlos) : ...
M. Cliche-Rivard : Merci.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : ...c'est tout le temps que nous avions...
20 h (version non révisée)
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : ...Alors, au nom des gens de la commission, je vous
remercie pour l'apporrt à nos travaux et je vais suspendre quelques instants le
temps de recevoir le prochain groupe. Merci beaucoup M. Carmona. Bonne soirée.
M. Carmona (Carlos) : Merci.
Merci à vous.
(Suspension de la séance à 20 h 03)
(Reprise à 20 h 04)
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : À l'ordre, s'il vous plaît. La Commission des relations
avec les citoyens reprend ses travaux. Nous recevons pour l'heure le Centre de
réfugiés représenté par trois personnes que j'ai devant moi. Alors, Mme,
messieurs, vous allez bénéficier d'une période de 10 minutes pour faire
votre exposé, et ensuite on va échanger avec les parlementaires. Alors... Et
évidemment vous présenter, hein? Ce serait une bonne chose. Alors, le temps
commence pour vous maintenant.
M. Swaid (Kinan) : Merci
beaucoup. Honorables membres de l'Assemblée nationale, je m'appelle Kinan
Swaid, je suis le directeur des opérations au Centre des réfugiés, mon
collègue, Pierre-Luc Bouchard, et ma collègue, Camille Fournel, coordinatrice
de l'engagement. Donc, aujourd'hui, nous nous présentons devant vous, en tant
que représentants du Centre de réfugiés, une organisation située à...
Montréal, engagée dans le bien-être et l'intégration des personnes réfugiées,
des demandeurs d'asile et des personnes immigrantes. Notre mission ne se limite
pas simplement à répondre aux besoins de base des demandeurs d'asile, mais
également à encourager les législateurs des différents paliers du gouvernement
à voter des politiques qui favorisent l'intégration et limitent toute forme de
marginalisation de cette population vulnérable.
Au cours de l'année 2023, les
différents services de notre organisation ont connu un achalandage record.
Lorsque nous avons comparé nos données internes à celles du gouvernement
fédéral, nous avons constaté que nous avions aidé près d'un demandeur d'asile
sur cinq qui entrait au Québec. Des médias internationaux comme CNN sont même
venus dans nos bureaux pour faire des reportages. Donc, nous sommes d'ailleurs
les seuls, une des seules cliniques juridiques qui offre des services gratuits,
incluant la représentation aux personnes réfugiées à Montréal. Nous avons
également des services d'accompagnement, de santé mentale et physique et dans l'emploi,
de l'aide académique. Bref, nous offrons des services de première ligne à cette
population qui ne cesse de croître.
Tout d'abord, nous reconnaissons le rôle
exemplaire du Québec parmi les autres provinces canadiennes dans la prise en
charge des demandeurs d'asile. De manière distinctive, le Québec est la seule
province dotée d'une entité spécialisée, et là, je parle du... qui a pour
mission de faciliter l'établissement et l'intégration des demandes d'asile au
Québec en offrant de l'hébergement temporaire et un suivi psychosocial. Cette
initiative souligne l'engagement indéniable du Québec envers les individus
cherchant refuge sur son territoire. Cependant, malgré nos avancées
significatives, le contexte mondial nous demande encore plus. Nous assistons à
un niveau de déplacement sans précédent à l'échelle mondiale, une tendance qui
ne montre aucun signe de ralentissement.
Alors que nous sommes à l'avant-garde en
matière d'accueil des personnes réfugiées, il est d'autant plus crucial pour...
des défis et d'éviter les erreurs qui pourraient entraver le processus de
réinsertion. Donc, dans notre recommandation, les retards dans le traitement de
certificats de sélection du Québec, en particulier pour des groupes vulnérables
tels que les mineurs non accompagnés, peuvent avoir des conséquences graves.
Imaginez un enfant seul ayant besoin de soins médicaux attendant deux ans pour
accéder aux soins de santé de base. Ce n'est pas seulement un retard
bureaucratique, c'est une situation qui peut avoir un impact déterminant sur la
vie d'un enfant. D'un point de vue social, l'intégration des personnes
réfugiées...
M. Swaid (Kinan) : ...et des
demandeurs d'asile est bénéfique non seulement pour eux, mais aussi pour
l'ensemble du Québec.
Là, je vais rejoindre... la plateforme
Francisation Québec témoigne des résultats positifs obtenus lorsque nous
privilégions l'intégration linguistique et culturelle. En rendant cette
plateforme accessible en plusieurs langues, nous aidons non seulement les
nouveaux arrivants, mais aussi nous allégeons le fardeau des organisations
communautaires. Au lieu de passer notre temps à faire des traductions pour les
nouveaux arrivants, s'est déjà traduit, c'est déjà fait, c'est déjà sur leurs
traductions.
De plus, la pénurie actuelle de
main-d'oeuvre au Québec nous offre une opportunité unique. Les demandeurs
d'asile, dont beaucoup possèdent des compétences et une expérience précieuse,
sont déjà sur notre territoire, désireux de contribuer. Ils apprennent déjà le
français, ils sont déjà ici, ils comprennent le système, il faut juste élargir
l'accès aux programmes de formation professionnelle. Nous pouvons répondre à
nos besoins en main-d'oeuvre tout en facilitant simultanément l'intégration des
individus. D'accord. Et là on va se déplacer vers un côté un peu plus juridique
avec Me Pierre-Luc Bouchard.
M. Bouchard (Pierre-Luc) : Alors,
oui, toujours dans notre discours d'ouverture, on veut attirer aussi l'attention
sur le fait qu'il est prévu dans la planification de traiter 450 demandes
de CSQ pour les cas d'ordre humanitaire et 3 550 pour les demandeurs
d'asile acceptés. Cependant, les chiffres démontrent qu'il y aurait plus de
18 000 réfugiés acceptés au Québec. En 2022, environ 64 % de
toutes les demandes d'asile au Canada étaient faites sur le territoire du
Québec. Sur les... 45 000, pardon, demandes traitées par la Commission de
l'immigration et du statut des réfugiés, 28 000 ont été acceptées. Cela
signifie qu'environ 18 000 de ces demandes acceptées étaient au Québec.
Pourtant, notre plan actuel ne traite que 3 550 d'entre elles pour un CSQ.
• (20 h 10) •
Pour résumer, les cas d'ordre humanitaire,
un traitement à un taux de 450 par ans peut signifier une attente de plus de
20 ans pour un CSQ. Ce n'est pas seulement une attente, c'est une part
importante de la vie d'un individu, cela impacte ses années les plus
déterminantes dans des cas qu'on parle, pour les mineurs, par exemple, non
accompagnés.
Dans d'autres cas, ces individus ne sont
pas des nouveaux arrivants, ils vivent au Québec, apprennent la langue et
participent à la société. Pourtant, ils sont confrontés à plusieurs obstacles
du fait qu'ils sont dans l'attente de leur CSQ. Ils sont limités dans leurs
perspectives d'emploi, leur opportunité éducative et leur intégration globale
dans la société québécoise. Ce n'est pas seulement un retard, c'est un obstacle
social.
Nous suggérons que les cas d'ordre
humanitaire et les personnes protégées soient catégorisés séparément des
nouveaux immigrants. Ils ne sont pas nouveaux, bien souvent, ils sont déjà
membres et contribuent activement à la société québécoise.
Lorsque le gouvernement planifie
l'immigration, c'est... pour ceux et celles qui ne sont pas encore arrivés,
mais ces individus sont ici intégrés et font partie de notre communauté
actuelle. Ce n'est pas un ajout futur, ils sont présents. Nous demandons une
distinction dans le traitement des demandes de CSQ pour eux.
Pour répondre aux délais d'attente
actuels, nous recommandons de traiter plus de 3 000 demandes par an
pour les cas d'ordre humanitaire et 8 000 pour les personnes protégées. Il
ne s'agit pas d'amener plus de monde, il s'agit de reconnaître et de traiter
correctement ceux qui sont déjà ici séparément des 60 000 nouveaux
arrivants qu'on a projetés. Nous soutenons toute initiative qui vise à aider
ces populations, peu importe le parti politique.
En conclusion, nos recommandations
concernent la vision d'un Québec inclusif, compatissant, tourné vers l'avenir.
Un Québec qui reconnaît le potentiel de chaque individu, quel que soit son lieu
d'origine. Un Québec qui se présente comme un phare d'espoir pour ceux qui
cherchent une terre d'accueil.
Je vais... excuse, veux-tu me passer...
Ah, il est ici. Excusez-moi. On a émis dans notre rapport sept recommandations
qui tombent sous la juridiction spécifique du Québec et, dans le cadre des
échanges qu'on espère avoir avec vous aujourd'hui, on veut traiter justement
les thèmes comme la francisation, qui a été abondamment parlé par la personne
précédant notre audience. Et nous allons aussi également parler des problèmes,
dans nos recommandations, qui touchent vraiment notre expérience de ligne de
front. Ce que je veux dire, c'est nous, le mercredi matin, on ouvre le portail
que ça s'appelle, c'est... en fait, les demandeurs d'asile arrivent et ils
n'ont pas d'ordinateur pour remplir les formulaires fédéraux, alors ils se
mettent en ligne parce qu'on est un des seuls organismes qui offrent ça, ça
fait qu'ils se mettent en ligne en gros à partir de 7 heures le matin et
ils attendent leur tour. On donne les coupons pour ceux qui reviennent plus
tard. Et ces gens-là bien souvent, bien, comme ils ont besoin de plusieurs
services... Et nous, c'est cette expérience-là qu'on aimerait vous partager...
M. Bouchard (Pierre-Luc) : ...On
a, par exemple... Là, on en a parlé un peu, c'est les mineurs non accompagnés.
Les mineurs non accompagnés, souvent, O.K., ça n'arrive pas... il y a une
histoire derrière ça, on va dire ça comme ça, et d'autres services du Québec
sont impliqués, par exemple, la Direction de la protection de la jeunesse. Et,
nous, un des constats qu'on a faits, qu'on veut amener à votre attention, c'est
qu'on n'a pas de... La DPJ est une entité distincte du MIFI, ce qui fait en
sorte qu'ils ont... ils n'ont pas d'accès. Et là, ils ont un enfant qui a
besoin de soins puis son statut ne lui permet pas d'aller tout simplement à
l'hôpital.
Donc, c'est sur ces réalités-là qu'on
aimerait aujourd'hui profiter de la planification pluriannuelle pour vous
souligner ces éléments-là, qu'on voit quand on aide à tous les jours une
population qui est dans une situation précaire au niveau de son statut. Mais
aussi, si vous suivez la pyramide de Maslow, les demandeurs d'asile, on est pas
mal dans la base, donc c'est ça aujourd'hui. Et nos recommandations vont en ce
sens-là.
Et, pour la minute qu'il me reste, je veux
juste enchaîner en disant qu'on veut souligner... Toujours dans l'idée de la
francisation, qui fonctionne très bien jusqu'à présent, de notre point de vue,
étant donné qu'il y a beaucoup de gens de la communauté latino qui viennent et
qu'ils ont des qualifications, notamment en construction, qu'on pense qui
pourraient être très utiles pour le Québec et que, si on mettait l'effort dans
l'intégration par le travail et la formation professionnelle, on aurait un...
Je pense que, tous partis confondus, tout le monde serait vraiment content de
la réussite que cela représenterait pour le Québec.
Je pense que je t'ai...
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup. Merci beaucoup pour cette présentation.
Alors, on va commencer, justement, la période d'échange avec les
parlementaires. Je vais me tourner du côté de la ministre, de la banquette
gouvernementale, pour une période de 16 minutes 30 secondes.
Mme Fréchette : Merci, Mme la
Présidente. Alors, bien, merci à vous trois pour votre présence ici. On est
toujours contents d'accueillir les gens en présentiel. Merci pour votre
engagement également auprès des réfugiés, c'est fort apprécié. C'est un rôle
important dans le processus d'accueil des personnes immigrantes, alors merci de
vous y engager en notre nom, je dirais, donc c'est apprécié.
M. Bouchard (Pierre-Luc) : Ah!
bien, merci.
Mme Fréchette : bon, bien,
vous avez abordé déjà plusieurs thèmes que je voulais discuter avec vous.
Alors, commençons par francisation puisque vous avez terminé sur ce point-là.
Donc, vous mentionnez, là, déjà voir l'impact positif auprès des gens auprès
desquels vous intervenez. Donc, bien, vous avez salué, là, l'accessibilité de
la plateforme, le fait qu'elle soit accessible notamment en trois langues, avec
les capsules vidéo. Est-ce que vous pourriez nous parler un peu plus, dans le
fond, de ce qui est apprécié, de ce que ça permet de faire davantage pour les
personnes qui en bénéficient? C'est important pour nous, là, d'avoir l'écho du
terrain, là, de...
M. Swaid
(Kinan) :
D'accord.
Je vais vous... comment ça marche, d'accord? Parce qu'il faut aussi
penser que ça, c'est un site web, d'accord? Et la majorité de la population
qu'on sert et qui est demandeur d'asile, ils sont limités à un portable,
d'accord? Donc, ça, c'est premier problème, d'accord? Donc, ils viennent vers
des sites comme le nôtre pour qu'on leur donne accès à un ordi et traduire
avant le portail et qu'ils le remplissent. Nous, avant, on le remplissait
nous-mêmes, d'accord? Donc, genre pour chaque personne qui rentre, pour juste
rentrer dans le système de francisation, ça prenait beaucoup de temps,
d'accord? Maintenant, vous, en traduisant ce portail, vous avez... Ça, je vais
juste préciser ce point, vous avez traduit les capsules d'aide, mais ce qui
serait intéressant, c'est de traduire les questionnaires eux-mêmes, d'accord?
C'est quoi votre niveau de langue, moyen, truc, vous écrivez. C'est...
espagnol. Comme ça. Et c'est pour... ça rendra le processus beaucoup plus
facile pour nous et beaucoup plus rapide pour eux. Et s'ils pourront le faire
sur le portable, ça va être plus facile. S'ils pouvaient rendre le site web
beaucoup plus adaptable à plusieurs formats autres qu'ordi, ça, vraiment, c'est
intéressant aussi. Donc, il y a ça. Ça, c'est un côté.
D'un autre côté, maintenant, au système
actuel, nous, ce qu'on fait chaque jour de la semaine, on a des sortes
d'ateliers pour les gens qui viennent, asseyez-vous à l'ordi, et on remplit le
formulaire ensemble juste pour être admis dans le système. Franchement, on est
là, d'accord? Juste avoir l'accès à l'enregistrement, c'est ça qui est dur
aussi, d'accord? Ce n'est pas juste avoir accès aux francisations, c'est même
avoir accès à s'enregistrer, d'accord? Donc, ça, c'est un.
D'un autre côté, après avoir fait... Bien
sûr, la durée d'attente, ça a été discuté. Là, un autre truc qui est important,
c'est aussi pendant les cours. On parle là avec des demandeurs d'asile.
Parfois, ils prennent du temps à recevoir leur permis de travail, donc ils ne
peuvent travailler. Ils sont sur l'assistance sociale, d'accord? Ils n'ont pas
accès aux assistances, aides...
M. Swaid (Kinan) : ...pour les
étudiants en français. D'accord. Donc, ils sont obligés. Donc, le truc, c'est
qu'on les met dans un coin. D'accord? C'est vous êtes restés à prendre l'assistante
sociale et en même temps vous allez apprendre le français. Et franchement, je
vous dis : Ça, c'est une pression sur le système d'assistance sociale
aussi. Donc nous, on ne veut pas avoir ça, et c'est pourquoi je dis s'il y a
une possibilité d'intégrer l'emploi... la francisation dans l'emploi. Donc,
eux, tout ce qu'ils veulent, c'est l'emploi. Ils rêvent de l'emploi. D'accord?
Ils viennent de leur pays pour travailler. D'accord?
Une voix : ...
M. Swaid (Kinan) : Et voilà,
exact. Mais c'est...
Mme Fréchette : De manière
générale, de manière régulière et systématique.
M. Swaid (Kinan) : Exactement.
Mais... et comme le monsieur a dit franchement, ça prend... Si c'est compliqué
de trouver et être employé, embauché par des employeurs si tu ne parles pas le
français. Même en construction, tu dois pouvoir discuter avec tes collègues en
construction pour comprendre comment tout ce qui se passe. D'accord? Donc,
c'est quand même... ce n'est pas normal de croire qu'ils vont pouvoir parler le
français en six mois, même si... même si la population donc qu'on sert, qui
est en ce moment majoritairement qui vient de l'Amérique du Sud, elle parle
espagnol, et je vais être honnête avec vous, ils préfèrent apprendre le
français qu'apprendre l'anglais, c'est beaucoup plus facile pour eux. D'accord?
Mme Fréchette : Pour nous, il
faut s'adresser à eux en français.
M. Swaid (Kinan) : Exactement.
Non mais exactement, et il faut les encourager et les attirer à rester au
Québec parce qu'il y en a parmi eux qui partent, il faut les garder. On a la
chance qu'ils sont venus ici. Regardez, vous restez ici, on va vous encourager
à s'intégrer au système. Donc, ça c'est ce qui est francisation.
Mme Fréchette : Parce que
j'ai d'autres sujets aussi.
M. Swaid (Kinan) : O.K.
Posez... voilà. Parce que, là, je vais me déplacer vers une autre... dites-moi,
dites-moi.
Mme Fréchette : Alors, bon,
écoutez, je vais vous amener justement sur l'emploi parce que je vois que dans
vos sept mesures, il y en a une qui se détaille comme suit : Privilégier
les migrants sur place pour répondre à la rareté de la main-d'œuvre en rendant
les demandeurs d'asile admissibles au programme de formation professionnelle.
Donc, est-ce que vous pourriez nous partager avec votre vision de la chose?
• (20 h 20) •
M. Swaid (Kinan) : Bien sûr,
d'accord. Donc nous, dans notre centre, ce qu'on a ouvert, on a ouvert le
centre... en 2016. D'accord? C'était à peu près après la vague de réfugiés
syriens. D'accord? Malheureusement, malheureusement, il n'y a pas un service
spécialisé d'intégration académique et il n'y a pas d'intégration sociale, et
c'est ça le but. Sans intégration académique... Non... il n'y a pas
d'intégration sociale sans intégration économique et il n'y a pas d'intégration
économique sans intégration académique. D'accord? Parce que si on veut aider
ces gens à grimper l'échelle socioéconomique, c'est ça, c'est où on doit
commencer. Et malheureusement, ces demandeurs d'asile, ils sont considérés
comme individus internationaux sur le territoire canadien. D'accord? Ce qui
veut dire qu'ils sont traités comme des individus internationaux. Ce qui veut
dire, c'est que s'ils veulent rentrer dans le système éducatif du Québec, ils
doivent payer 30 000 $ pour entrer, par exemple, à l'Université de l'UdeM.
D'accord? Ou celle de Laval. C'est impossible pour cette population.
Impossible, d'accord? Donc, il reste à être dans... sur l'assistance sociale,
par exemple. D'accord?
M. Bouchard (Pierre-Luc) : Je
voudrais...
M. Swaid (Kinan) : Allez-y,
allez-y.
M. Bouchard (Pierre-Luc) : Je
voudrais amener un point à Mme la ministre, par rapport à la formation
professionnelle, c'est que beaucoup des demandeurs d'asile qu'on voit,
notamment originaires de l'Amérique latine, ont déjà des qualifications, par
exemple en construction et je dirais dans d'autres domaines, mais nous, ce qui
nous a marqués, c'est surtout la construction. Et ces gens-là, s'il y avait un
programme où, il serait possible d'aller chercher les qualifications du Québec,
là, qui sont propres à nous, et de mélanger avec l'apprentissage du français,
on pourrait optimiser beaucoup l'intégration de ces gens-là parce qu'à la fin
de la journée, le travail, c'est l'intégration. Ces gens-là viennent
travailler. Ils vont passer plus de... au moins... entre 35 et 40 heures
en moyenne au travail et c'est pour les raisons qui sont les mêmes que pour les
Québécois, Canadiens et autres. C'est ça. Et donc nous, ce se disait,
c'est : Mon Dieu, c'est les... je veux dire, on a des soudeurs, là, par
exemple, on représente un soudeur mexicain et il dit... il nous laisse toutes
ces qualifications. En ce moment, si vous... le traitement simplifié offre les
soudeurs, il pourrait aller joint la force de travail dans les soudeurs demain
matin. Mais il ne peut pas, il ne parle pas assez français. Il faudrait
travailler là-dessus.
Par contre, et je dois souligner encore,
on a remarqué que la plupart des gens de l'Amérique latine, peu importe le
niveau d'éducation préalable, généralement, après six mois, ils sont quand même
capables de se débrouiller en français, là. Dans notre réalité à nous, moi,
c'est arrivé qu'ils nous demandent de même changer l'audience à la CSR de
l'anglais au français parce qu'ils nous le disent en arrivant, puis, à un
moment donné, ils finissent par comprendre, puis c'est là que ça débloque...
M. Bouchard (Pierre-Luc) : ...c'est
là que ça débloque. Mais, nous, dans notre proposition, c'est... on dit :
Est-ce qu'il y a moyen? Parce que l'histoire récente a témoigné de l'apport des
demandeurs d'asile au sein de la fonction... bien, au sein, là, des services de
santé. Si on prend ça comme exemple, là, les anges gardiens, ça avait... ils
étaient là. Ça a été une réussite en soi, là, ça, quand même. Et, je vous dirais,
il pourrait y avoir d'autres réussites de cette nature-là s'il y avait des
programmes de formation qui étaient offerts pour aller chercher les
qualifications, mais même en tant que demandeurs d'asile. Et là... Oui.
Mme Fréchette : J'aimerais
que vous complétiez, parce que vous dites : La majorité des demandeurs
d'asile d'Amérique latine ont des compétences. Est-ce que vous associez la
détention de compétences surtout aux Latino-Américains? Et sinon...
M. Bouchard (Pierre-Luc) : Non,
non, c'est juste parce qu'en ce moment, je vous dirais, pour 10... Écoutez,
c'est des chiffres, là. Le Mexique, le Venezuela, la Colombie, Honduras et, je
vous dirais... Là, il m'en manque un, il m'en manque un, maudit! Le Nicaragua,
c'est ça. Excusez-moi, excusez-moi. Le Nicaragua, c'est ça, la majorité par
beaucoup, là, pour nous, là, qu'on voit. Ça fait que c'est pour ça que je vous
dis que dans ce groupe-là, oui, et, dans les... on a par exemple beaucoup de
gens de l'Afrique subsaharienne. Mais, je vous dis, c'est... pour un
subsaharien, on a au moins 10 gens issus de l'Amérique latine, là, c'est dans
ça.
M. Swaid (Kinan) : Mais ça
commence à changer. Ça commence à changer, là : du Sénégal, des autres
pays. Ça commence à changer. D'accord?
Mme Fréchette : Donc, il y a
plus de gens de ces pays-là maintenant comme demandeurs d'asile?
M. Bouchard (Pierre-Luc) : Oui,
ça commence, oui.
M. Swaid (Kinan) : Oui, ça
commence.
Mme Fréchette : O.K., en plus
grand nombre.
M. Bouchard (Pierre-Luc) : La
Turquie aussi, c'est un des groupes qu'on n'avait pas avant qu'on a beaucoup,
là.
Mme Fréchette : Il nous reste
combien de temps, Mme?
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : 6 min 40 s
Mme Fréchette : 6 min 40 s
Bon. Je vais aller vite avec une dernière question. Bien, vous suggérez en fait
d'élargir la consultation sur la planification pluriannuelle aux demandeurs
d'asile. Donc, qu'est-ce que vous entendez par là? Est-ce que ce serait de
planifier les niveaux d'accueil de demandeurs d'asile? J'essayais de voir...
M. Bouchard (Pierre-Luc) : Bien,
voulez-vous, je vais... Bien, écoutez, c'est... souvent, quand on est devant
les commissions, on a des chiffres, on a des rapports. Si vous voyez les
gens... Comme à titre d'exemple, venez au centre le mercredi matin, où est-ce
qu'on a des «lineups» de gens, des files d'attente de gens et tout ça, c'est...
ça va peut-être donner une perspective différente au processus, à la
planification et à ce que c'est fondamentalement. On ne disait pas... On lance,
plutôt, une opportunité ou une réflexion sur : Est-ce que les gens qui
sont concernés, principalement, pour nous, là, demandeurs d'asile, dans le
cadre de ces consultations-là, est-ce qu'il n'y aurait pas une place à leur
faire qui serait plus une place de...qui ne serait peut-être pas une
consultation traditionnelle, une consultation peut-être plus, genre, la... Au
lieu que les gens viennent à la chambre, ici, on emmène la chambre voir l'autre
côté, et peut-être que ça va ouvrir une perspective qui n'était peut-être pas
considérée à la base, là. C'est essentiellement ça qu'on... On l'a mis en
dernier pour ça aussi. Mais c'était surtout pour dire : Des fois, c'est
qu'on voit les choses du prisme... dans nos belles chaises, les belles
boiseries, mais les gens qui...
Mme Fréchette : ...je fais
beaucoup de visites dans les centres d'accompagnement et d'accueil. Vraiment,
j'y tiens, c'est de manière régulière. Donc...
M. Bouchard (Pierre-Luc) : C'est
correct. C'était dans cette optique-là qu'on avait mis ça, ce point numéro 7
là.
Mme Fréchette : D'accord.
Bien, parfait, merci. Pour le moment, je vais céder la parole à mes collègues.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci, Mme la ministre. Alors, c'est la députée de
Châteauguay, pour une période de 4 min 40 s
Mme Gendron : Merci. Bonjour,
Me Swaid, Me Bouchard et Mme Fournel, merci d'être avec nous. Je sais que vous
venez de Montréal, donc un grand merci d'être ici aujourd'hui, même si tard.
J'ai une question... Je souligne vraiment votre grande expérience terrain, je
le constate, ça, vous avez une détermination hors du commun, là, puis une
expérience terrain. Je voudrais savoir, selon vous, c'est quoi, les principaux
facteurs d'intégration. Vous avez parlé de... bon, d'intégration académique,
d'intégration économique. Mais, dites-moi, quels sont les principaux facteurs,
d'après vous?
M. Swaid (Kinan) : Personne
ne se sentira chez lui s'il ne se sentira pas financièrement indépendant,
d'accord, parce qu'il n'a pas l'indépendance financière d'agrandir sa famille,
d'avoir des enfants, d'accord, de se construire une vie, de se sentir chez lui,
d'accord. Donc, pour construire ce... pyramide, d'accord, il faut se... sur la
base, et c'est ce qu'on essaie de faire. Pour avoir cette base, c'est ce... sur
l'aide académique, et c'est pourquoi on a précisé : ouvrir des
opportunités d'études professionnelles à ces communautés qui viennent et qui
veulent accéder, qui veulent faire des études ici, parce qu'honnêtement, ça,
c'est un truc...
M. Swaid (Kinan) : ...c'est un
truc qu'on voit sur... pour les employeurs, par exemple. Parfois, les
employeurs, ils disent : Moi, je ne vais pas prendre quelqu'un qui a fait
ses études à l'extérieur, je préfère que... je prends des études qui... des
gens qui ont fait leurs études ici. D'accord? Donc, on dit : D'accord,
c'est ce que vous voulez, on ne va pas... on va... C'est très dur de changer la
mentalité des employeurs, d'accord? On dit : D'accord, ouvrons des
programmes d'études professionnelles ici pour que le système fonctionne plus
rapidement. Disons, ça, c'est un, études. Après l'avoir, l'étude, avoir accès à
ces emplois, d'accord? Et ça, c'est des emplois... Et il faut saluer aussi le
travail que le gouvernement commence à travailler. Je vais lire à la... un peu.
Il y a un projet pilote de maillages entre les demandes d'asile et les
entreprises touristiques. Donc, ça, c'est en développement. Il y a aussi un
autre programme qui est, nouvel arrivant ou demandeur d'asile, une entente de
possibilités dans le réseau de la santé et des services sociaux. D'accord.
Donc, ça existe, ça commence à se développer. On est bien, d'accord? Mais le
problème, c'est qu'ils n'ont pas les études pour accéder à ces travails. Donc,
on ouvre la porte, c'est bien, mais ils n'ont pas... ils ne peuvent pas y céder
parce qu'ils ont besoin d'études. Donc, ça, c'est un.
Deux, il y a un programme qui a été ouvert
récemment aussi, l'exemption des droits de scolarité supplémentaires selon le
programme d'études et la région. Donc, pour des gens, d'accord... et là, ce
n'est pas trop dans notre mémoire, mais c'est intéressant pour le programme de
régionalisation, vous voulez des gens qui partent en région, d'accord, ouvrons,
si vous ne voulez pas qu'ils... faire leurs études au Québec... je veux dire, à
Montréal, dans les métropoles, ouvrons ce programme pour les demandes d'asile,
qu'ils partent en région, qu'ils fassent leurs études en région et qu'ils
restent en région. Moi, je suis venu ici en 2012, j'ai... j'ai fait ingénieur
mécanique à Concordia, et je suis resté à Montréal, je suis resté où j'ai fait
mes études parce que je me suis... des amis là-bas, je... ma vie là-bas,
d'accord? La porte d'études, c'est une force qu'on a au Québec. On a quatre
universités à Montréal puis... autour de Québec. Ça, c'est la force, c'est le
truc qui attire la jeunesse ou les gens qui veulent faire des études, d'accord?
Donc, si on les attire vers la région, en faisant leurs études, ils vont
rester, ils seront embauchés directement dans la région de centre, et, comme
ça, on pourra construire une infrastructure pour qu'ils puissent rester en
région, d'accord? Parce qu'il n'y a pas d'infrastructure. Ça, c'est un autre
truc, d'accord? Donc... Oui.
• (20 h 30) •
M. Bouchard (Pierre-Luc) : Bon.
Mais je veux juste dire, pour l'indépendance... pour dire... On parlait
d'indépendance financière, c'est comme, c'est... Les emplois, on a une pénurie
de main-d'oeuvre, et nous, c'est là-dessus qu'on se rejoint pour aider ces
gens-là à... Comme premier facteur, c'est l'argent. S'ils ne sont pas capables
de se concentrer sur autre chose que leurs finances, ils ne seront pas capables
de se concentrer dans une salle de classe à apprendre le français. Ça fait que
c'est pour ça qu'on est dans cette espèce de jonglage entre les qualifications
de ces gens-là pour les mettre sur le marché du travail et l'apprentissage de
la langue, mais...
Mme Gendron : Très
rapidement, est-ce que je peux poser une dernière question? Il y a des équipes
déployées à la grandeur du Québec et, entre autres, avec Accompagnement Québec.
Je sais que vous avez des usagers qui l'utilisent. Que dites-vous de cet
outil-là? Rapidement, en 20 secondes.
M. Swaid (Kinan) : Accompagnement
Québec, malheureusement... puis il y a plein de services qui sont dédiés aux
immigrants qui viennent de l'extérieur qui ne sont pas disponibles aux
demandeurs d'asile. C'est un autre... C'est un gros vide dans le système. Donc,
nous, on se retrouve seuls. Honnêtement, je vais être honnête avec vous,
d'accord? Il n'y a pas... Par exemple, il y a le programme de PASI qui ne
couvre de centres comme le nôtre, parce qu'on sert des demandes d'asile, par
exemple. D'accord? Donc, il y a un vide. Si... C'est notre rêve, d'être aidés
d'un point de vue...
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Je dois vous arrêter.
M. Swaid (Kinan) : ...
M. Bouchard (Pierre-Luc) : ...
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci. Mais il va avoir d'autres questions, d'autres
périodes. Alors, je me tourne du côté de l'opposition officielle, une période
de 12 minutes 23 secondes avec la députée de Chomedey.
Mme Lakhoyan Olivier : Bonjour.
Très intéressant. De chaque groupe, on a un autre point de vue et ça nous rend
meilleurs. Si je comprends bien, les demandeurs d'asile, lorsqu'ils arrivent
ici, vous avez dit tantôt qu'on les traite bien, on les reçoit bien, ils sont
logés, ils reçoivent un chèque, et ça s'arrête là, après ça, c'est le vide.
Est-ce que c'est ça?
M. Bouchard (Pierre-Luc) : Bien,
à prime abord, c'est que, quand on dit ça, c'est... Si on voit ce qui se passe
dans le reste du Canada pour l'intégration, ce qu'on veut, c'est... À Toronto,
ils ont... les gens sont dans la rue. Au Québec, généralement... oui, oui, ça a
passé dans les nouvelles, c'est... et... bon, O.K., j'espère, là... si on va
jusqu'au Mexique, vous pouvez voir aussi comment c'est traité, mais, au Québec,
disons que c'est assez nouveau que les demandeurs d'asile ont des services de
plus en plus, parce qu'il fut une autre époque où on arrivait, la personne
arrivait au Québec, au Canada, il y avait sa date d'audience pour la CISR...
20 h 30 (version non révisée)
M. Bouchard (Pierre-Luc) : ...les
60 jours de l'arrivée. On est à peu près en 2015. Mais là, avec la montée,
ils ont... ils n'ont plus eu assez de staff ou de personnel pour répondre à
cette demande-là. Et là on a... Ça a...
Une voix : ...
M. Bouchard (Pierre-Luc) : Le
fédéral fédéral.
Une voix : Le fédéral?
M. Bouchard (Pierre-Luc) : Oui,
c'est ça, le fédéral, mais en même temps aussi le Québec, cette année, depuis
la réouverture des frontières, on a commencé... En novembre 2021, les frontières
ont rouvert après la pandémie. On a connu une augmentation que tout le monde s'attendait,
mais l'augmentation n'a pas baissé. On arrive en 2023. On entend parler de
Roxham Road. Roxham Road devient le centre. On dit : Bon, on va fermer ça.
Et voilà. Finalement, on va entendre beaucoup parler, là, qu'ils ont continué à
venir par l'aéroport. Mais il y a également les gens qui passent par le bois
puis qui restent cachés 14 jours. Ça, c'est ça, la réalité en 2023 des
demandeurs d'asile.
Pour le Québec, moi, là, ce que nous,
on... dans la mesure de ce que le MIFI a, nous, ceux... Ils reçoivent leur
chèque, oui, mais il y a... pour l'aide sociale, ceux qui en font la demande,
il y a... Dépendamment de c'est quoi leur statut, si on parle vraiment de quelqu'un
qui arrive, là, comme ça, là, lui, comme on disait tantôt, en raison des délais
de l'obtention du permis de travail du fédéral, sans compter toute la
logistique qu'eux leur donnent, parce que des fois ils arrivent et ils
reçoivent ce qu'on appelle de l'accusé de réception essentiellement, qui leur
dit : Vous devez revenir nous voir deux ans plus tard. Oui. On est allé au
fédéral pour leur parler de ça déjà, mais ici, donc, le Québec, lui, il se
ramasse à payer l'attente, là, causée, là, par... en payant l'aide sociale. Et
nous, une chance qu'il y a des programmes accessibles, comme la francisation
puis des choses comme ça. Puis là, on parle d'ouvrir pour les cégeps, c'est en
place, on aimerait ça que ça soit plus Mme la ministre, mais... mais ces programmes-là,
c'est ça qui fait qu'on...
Parce que quand on voit une famille d'accueil
débarquer et qu'on lui dit : O.K. il faut que tu attendes deux ans avant
de débuter la démarche pour proprement parler, ça vient avec une dose de
pression sur la famille, comme vous pouvez vous imaginer. Mais là, à force de
pousser au fédéral, on réussit à faire avancer les choses. Mais le Québec,
nous, les services, généralement, c'est la proximité. C'est par exemple, là, on
pourrait aider un moment donné le logement, ils vont les aider avec le
psychosocial qui est très important, notamment quand il y a des mineurs non
accompagnés, mais aussi pour des femmes victimes de violence. Puis tout ce que
vous imaginez que les gens qui viennent ici, dans des circonstances comme celles-là,
peuvent amener avec eux. Mais oui. Bien, nous, c'est parce qu'on trouve que,
comparé aux provinces, le Québec fait beaucoup, puis on aimerait ça qu'il en
fasse plus. Mais écoutez, on n'est pas en train de vous dire on aime ça, mais
il est sur la limite. Oui, vas-y.
Une voix : Allez-y, oui.
M. Swaid (Kinan) : Je veux
juste ajouter quelque chose. Donc, en fait, juste pour être clair, le Québec,
par rapport à d'autres provinces au Canada, franchement, c'est très bien par
rapport à d'autres provinces. Par exemple, l'exception, là, on a de l'aide
juridique qui n'existe pas dans d'autres provinces. D'accord. Et c'est une des
raisons pourquoi il y a plein de réfugiés qui viennent à Toronto, Pearson, l'aéroport
Pearson, ils viennent et puis ils viennent direction... parce qu'au moins là il
y a de l'aide juridique. Là-bas, ils sont tout seuls, ils doivent payer 3 000 $,
4 000 $ pour avoir accès à un avocat. Donc, ça, c'est un.
Deux. On a accès à l'aide sociale, on a
accès à une entité gouvernementale qui s'appelle PRAIDA. Il vient d'ouvrir un
nouveau centre de logement pour les nouveaux arrivants, ça, ça n'existe pas
dans d'autres provinces. D'autres provinces, c'est les organismes
communautaires qui prennent en charge ce sorte de trucs.
Donc, d'un côté, c'est bien, il faut
saluer cet effort et c'est très bien, d'accord, mais d'un autre côté, il faut
comprendre qu'on est en train d'ouvrir le bouchon d'un côté et de le fermer d'un
autre côté, d'accord, et une de nos demandes, c'est d'élargir l'accès et d'augmenter
le nombre pour que ces populations n'aient plus besoin de ces services. Le but,
ça, c'est... je vais dire ça, bouche-trou, c'est des bouche-trous, d'accord, c'est
des solutions bouche-trous, c'est des Band Aids, O.K., ce n'est pas la
solution. Si vous réglez la solution racine des problèmes, ce n'est pas ça, d'accord.
Ça, c'est bien de l'avoir pour régler les problèmes temporaires, mais la base c'est
d'ouvrir le bouchon principal qui est élargir le nombre de CSQ donnés à cette population
pour qu'elle devienne comme les autres. D'accord. Si elle est acceptée, si elle
est dans le système, donc on n'a plus besoin à augmenter, à mettre de la
pression sur ce système qui est déjà sous pression, c'est de leur donner accès
au système du CSQ pour être dans le système. Et c'est une des raisons pourquoi
on demande l'augmentation des chiffres aussi pour les réfugiés reconnus sur
place, par exemple, d'accord, pour pouvoir enlever cette pression sur le
système qui existe, qui... c'est bien pour le moment, mais... et les
chiffres...
M. Swaid (Kinan) : ...vont
n'arrêter d'augmenter... Avec... ils vont toujours être en augmentation,
d'accord? Donc, il faut savoir comment gérer tout ce qui se passe, d'accord?
Voilà.
Mme Lakhoyan Olivier : Est-ce
que... Vous parlez des gens qui arrivent à Toronto, et ils viennent ici, donc
il devrait y avoir un va-et-vient dans les provinces canadiennes vers le Québec
et hors Québec. D'après vos opinions, c'est quoi, le pourcentage entre
Colombie-Britannique jusqu'à Terre-Neuve?
M. Bouchard (Pierre-Luc) : Bien,
ça... Non, mais c'est une bonne question. Bien, Terre-Neuve, je vous avoue que
je ne l'ai pas vu, là, mais Colombie-Britannique... Les provinces, je vous
dirais, Colombie-Britannique, Alberta et... oui, bien, Ontario, là, dans le
fond, et je pense des fois à l'occasion le Nouveau-Brunswick, là, mais je vous
dirais que ça va... il peut aller dans les deux sens, là. Parce que des fois il
y avait des autobus qui les amenaient depuis le Québec vers l'Ontario parce
qu'il y avait trop au Québec. Puis là ensuite on a eu aussi des gens qui sont
au Québec, mais ils font leur demande d'asile, puis là, ils font : Ah!
bien, je veux avoir un emploi qui paye plus puis je n'ai pas le temps
d'apprendre le français, ça fait que je vais aller en Alberta travailler dans
quelque chose là-bas, là. Ça, on le voit des deux bords, ça fait que c'est
difficile de mettre un pourcentage sur la mobilité, là, de la population. Mais
je vous dis que c'est quand même fréquent qu'on a des gens qui sont arrivés
depuis, bien, l'Ontario ou la Colombie-Britannique puis de venir au Québec
faire leur demande d'asile et de rester dépendamment, là, comment que ça va
dans la famille, là. Mais c'est quand même fréquent, mais je ne pourrais pas vous
donner un chiffre aussi précis que ça parce qu'on...
Mme Lakhoyan Olivier : Mais
il y en a beaucoup.
M. Bouchard (Pierre-Luc) : Assez
pour qu'on vous en parle, là.
Mme Lakhoyan Olivier : Il y
en a beaucoup, le mouvement va-et-vient des deux côtés. Ontario, Québec;
Québec, Ontario.
M. Bouchard (Pierre-Luc) : Oui,
Québec, Ontario puis Colombie-Britannique.
Mme Lakhoyan Olivier : Est-ce
qu'on peut dire que ceux qui rentrent dans la province de Québec,
majoritairement, restent ici?
M. Bouchard (Pierre-Luc) : Quand
même...
• (20 h 40) •
M. Swaid (Kinan) : Il y en a
qui disent : J'ai peur du français. Et ils quittent. Je vais toujours être
honnête avec vous, d'accord? Mais je vais être honnête avec vous aussi, ils
reviennent. C'est beaucoup moins cher, d'accord? C'est ça la réalité sur le
terrain, d'accord? Ils partent, ils se rendent compte de ce qui se passe et ils
reviennent direct, d'accord? Mais le problème c'est que quand ils partent, ils
reviennent, ils ne reviennent pas dans les centres dont ils ont quitté
puisqu'ils n'ont plus le droit d'y accéder. Donc, s'il y a un mec... une
personne qui est sortie, qui était avec... par exemple... elle part vers
l'Ontario pour quand elle revient elle n'a plus le droit de rerentrer... Elle
va se débrouiller toute seule, d'accord? Et ici, pour se débrouiller tout seul,
il n'y a pas de financement pour le moment pour supporter les organismes qui
aident les gens à se débrouiller tout seul, d'accord?
Mme Lakhoyan Olivier : ...j'ai
une question là-dessus. Donc, lorsque les demandeurs d'asile rentrent, le
gouvernement fédéral leur donne... commence à donner de l'argent?
M. Swaid (Kinan) : Non. Non,
non, le fédéral, ils ne font rien. En fait, si les gens rentrent... Je vais
retirer ça ici, ce n'est pas qu'ils ne font rien. S'ils rentrent au Québec et
ils demandent l'asile à la frontière, aéroport ou frontière... d'accord? ...il
prend en charge directement... Ils font la demande à la frontière, le...
responsable de cette population. Mais ici, en ce moment, le... est débordé. Il
n'a pas la capacité d'accord? Il y a un mois, le dernier, c'était le plus grand
chiffre de demande d'asile qui est entré au Canada depuis son histoire,
d'accord, le mois dernier.
Mme Lakhoyan Olivier : ...
M. Swaid (Kinan) : Oui, et ça
va toujours augmenter. On vous dit ça direct, ça va toujours augmenter. Si le
système de... est sous pression, c'est l'IRCC, donc, qui va venir, et qui... en
ce moment, qui a des hôtels partout au Québec pour aider... à loger ce
personnel, d'accord? Donc, heureusement que là, il y a un support pour...
Mme Lakhoyan Olivier : Et ils
sont logés, ils ne sont pas dans les rues au Québec.
M. Swaid (Kinan) : Et ils
sont... oui, oui. Ça, c'est...
Mme Lakhoyan Olivier : Ils
sont logés, ils ne sont pas dans les rues au Québec.
M. Swaid (Kinan) : Voilà,
exact. D'accord. Mais heureusement qu'on a une... comme... pour contrôler ce
flux de personnel. Voilà.
M. Bouchard (Pierre-Luc) : Et
le fédéral...
Mme Lakhoyan Olivier : Je
vais laisser mon collègue. Je pense qu'il veut...
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup. Alors, on a une question ici du député de
Nelligan.
M. Derraji : Oui. Merci, Mme
la Présidente de nous rappeler à l'ordre. Vous avez dit que le nombre augmente
de demandeurs d'asile. Vous avez vu que le chemin Roxham est fermé. Tout le
monde a misé sur la fermeture du chemin Roxham pour que le nombre baisse. Mais
ce que vous êtes en train de nous dire aujourd'hui, c'est ça ne sert à rien,
là.
M. Bouchard (Pierre-Luc) : Bien,
on peut vous le dire. On peut... Mais, O.K., Roxham, ça a fermé, comme,
l'endroit où est-ce qu'ils traitaient. Mais là ce que ça a eu comme effet,
c'est qu'ils vont passer par le bois puis ils vont attendre 14 jours...
M. Derraji : ...que vous avez
de l'information? Parce que, c'est des légendes urbaines... Vont passer par le
bois. Mais est-ce que vous avez des preuves?
M. Bouchard (Pierre-Luc) : Bien,
écoutez, on a plein de gens, là. On a une Afghane, on a des gens qui... Ah oui!
C'est terrible, là. Écoutez, c'est pour ça qu'on est venus ici plaider
là-dessus.
M. Derraji : Oui. Donc, vous
êtes en train de nous dire que malgré la fermeture de Roxham, l'arrivée de flux
de demandeurs d'asile et réfugiés continue par le même chemin.
M. Bouchard (Pierre-Luc) : O.K.
il y a un afflux qui vient du bois, O.K.? Là, pour le quantifier, à cette... en
date-ci, je ne pourrais pas le faire. Mais je peux vous dire qu'il est là. Puis
ce qu'il devient, lorsque la personne entre par le bois, on va dire ça comme
ça, elle devient un demandeur d'asile depuis l'intérieur du Canada. Donc,
c'est... Il n'y a pas... On ne va pas plus loin que ça. C'est dans la mesure où
c'est ce qu'on peut vous dire en date d'aujourd'hui.
Les gens qui viennent, sinon, ont des
visas ou viennent de pays qui n'en ont pas besoin. Le Mexique, c'est là. C'est
ça, le portrait. Puis c'est eux qui ont augmenté beaucoup. Mais nous, on
continue d'avoir, dans une proportion quand même importante...
M. Derraji : Donc, vous êtes
en train de me dire que des gens viennent en visa touriste, débarquent au
Canada, au Québec, à Pierre-Elliot-Trudeau, et ils demandent le visa de... Et
ils demandent le statut de demandeur d'asile?
M. Bouchard (Pierre-Luc) : visa
de visiteur, permis.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Je dois vous arrêter. La période impartie à l'opposition
vient de se terminer. On va finaliser le tout avec le député de Saint-Henri...
voyons, Saint-Henri-Sainte-Anne, je vais prononcer comme il faut, pour quatre
minutes huit secondes.
M. Cliche-Rivard : Merci
beaucoup. Merci pour ce que vous faites. J'ai eu la chance de vous visiter, il
n'y a pas si longtemps, alors c'était très intéressant et enrichissant de vous
rendre visite.
Vous avez parlé de chiffres tantôt, mais
vous êtes allés vite. Vous parlez d'augmenter en refuge puis en humanitaire.
Vous avez mis un chiffre de 8 000, si je ne m'abuse, dans le refuge?
M. Bouchard (Pierre-Luc) : C'est...
Oui, dans le refuge et... Attendez-moi un petit instant.
M. Cliche-Rivard : puis dans
l'humanitaire, 3 000, si j'ai noté?
M. Bouchard (Pierre-Luc) : Oui,
c'est ça, c'est exactement ça. Vous avez bien écouté.
M. Cliche-Rivard : O.K. Donc
là, c'est parce que Le Devoir nous révélait... On a un arriéré de 12 000
dans l'humanitaire. Ça fait que, si on fait 3 000, comme vous dites,
on est à quatre ans de délai de traitement à l'étape du CSQ. Là, vous êtes à
dire que ça devrait être en 25, 60 jours. Donc, j'essaie juste d'être sûr
de bien vous comprendre.
M. Bouchard (Pierre-Luc) : Ah!
O.K. Bon, bien, une chose...
M. Cliche-Rivard : Juste pour
bien vous comprendre.
M. Bouchard (Pierre-Luc) : C'est
que nous, on aimerait ça qu'il en entre plus. Mais on n'était pas au courant de
l'article du Devoir et des chiffres qu'ils ont. Nous, on y va avec... On voit
la planification puis on essaie de rester dans une... je vous dirais une
Fourchette qui reste celle des parlementaires, là. Écoutez, on...
M. Cliche-Rivard : Mais on
devrait être à 60 jours.
M. Bouchard (Pierre-Luc) : Oui,
mais ça, c'est sûr que, ça, on aimerait ça que les délais de traitement...
Arrivent. Parce que les mauvaises expériences qu'on a eues, comme je vous dis,
c'est lorsque...
M. Cliche-Rivard : Parce que,
tantôt, vous me parliez jusqu'à 20 ans, là. Ça, des affaires comme ça, ça
ne peut pas se passer, on ne peut pas attendre 20 ans.
M. Bouchard (Pierre-Luc) : Bien
non, c'est ça. Bien non, parce que là, ça fait... C'est difficile pour la
personne, là, c'est bien évident. Bien, c'est parce que le CSQ empêche le
fédéral de donner la carte de résident permanent qui donne accès à, je vous
dirais, une stabilité puis, bien, bien évidemment, avec... Dans le futur, à la
citoyenneté canadienne. Ça bloque ça. Donc, la personne a son acceptation du
fédéral, on va dire, et là, elle demeure, pendant une période indéterminée, en
attente de l'approbation du CSQ, qui est... Qui était... Bien, comme on voyait,
là, le chiffre de 450, là, ça fait qu'on peut comprendre, ça peut durer
longtemps. Là, j'apprends qu'il y a des arriérés.
M. Cliche-Rivard : Mais vous
ne demandez pas juste le CSQ. Vous demandez à ce que la personne devienne résidente
permanente en bonne et due forme.
M. Bouchard (Pierre-Luc) : Bien,
c'est sûr, là, mais....
M. Cliche-Rivard : La CSQ,
c'est une étape. Mais, après ça, quand le ministère parle de cibles
d'admission, ça, c'est pour recevoir la résidence, puis c'est ça qu'on veut
traiter, finalement. On ne veut pas juste un CSQ dans le vide, puis attendre
après 10 ans pour la résidence.
M. Bouchard (Pierre-Luc) : Bien,
la résidence, ça suit tout de suite après, là, dans le... Dans l'ordre des
choses. Bien, je sais que vous avez été avocat, bien, moi, dans mon expérience,
dans ma pratique, lorsque nous recevons le CSQ, généralement, dans les trois
mois qui suivent, on reçoit une demande de confirmation de résidence permanente
qui se fait à travers le site Web maintenant. Et je n'ai jamais eu à gérer des
problèmes, là, longitudinaux entre l'émission du CSQ et la réception de la
résidence permanente.
M. Cliche-Rivard : Tantôt
vous parliez donc de... Du fait que les gens continuent à rentrer par le bois,
là, comme vous l'avez dit, côté citation. Donc, finalement, la meilleure
solution, ça aurait été d'abolir l'entente des pays tiers sûrs pour que les
gens fassent leur demande au point d'entrée?
M. Bouchard (Pierre-Luc) : Ah!
on l'a plaidé au gouvernement fédéral et on est là-dessus. Ça, c'est sûr que
cette entente-là fait plus de mal que de bien, là, pour... quand... pour notre
perspective, là. Je ne sais pas à qui elle profite, là, mais, en gros, pour
notre perspective à nous, non, ça, ça aurait été l'abolition. Mais on a plaidé
ça au... l'année passée au fédéral.
M. Cliche-Rivard : Mais les
faits puis ce qui se passe en ce moment confirment que vous aviez en partie
ou... En tout cas, vous aviez raison.
M. Bouchard (Pierre-Luc) : Bien,
je dirais, si on confirme qu'on avait raison, puis que ça a tout finit, je
n'irais peut-être pas jusque-là. Parce que nous, on n'est pas dans les... On
n'est pas dans la politique, tu sais. On vient voir les parlementaires pour...
M. Bouchard (Pierre-Luc) : ...justement,
conscientiser sur la réalité qu'on vit, mais on n'est pas dans le secret des
dieux, là, là-dessus. Et si ça a été bénéfique, ce qu'on se disait, puis qu'on
aurait raison, je serai bien content, mais, en gros, je ne me donnerais pas ce
crédit-là.
M. Cliche-Rivard : Je n'ai
pas vu de mots sur la régularisation des statuts. Un programme de
régularisation, vous êtes pour ou contre?
M. Bouchard (Pierre-Luc) : Bien,
on est pour, on va même participer à la commission d'étude, mais c'est au
fédéral. Nous, on a concentré les points seulement dans la juridiction du...
M. Cliche-Rivard : ...jouer
son rôle de leadership, devrait le demander.
M. Bouchard (Pierre-Luc) : Bien,
moi, c'est sûr que si on le prend comme ça, jouer le rôle de leadership, moi,
j'amènerais à ce qu'on disait avant sur la formation parce que ces gens-là...
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : C'est ce qui met fin à la rencontre ce soir. Alors, merci
beaucoup pour l'apport à nos travaux, c'est très apprécié. Il me reste à vous
souhaiter une bonne fin de soirée. Et je suspends les travaux quelques
secondes, le temps de recevoir notre dernier intervenant de la soirée.
(Suspension de la séance à 20 h 49)
(Reprise à 20 h 52)
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : À l'ordre, s'il vous plaît! La Commission des relations
avec les citoyens reprend ses travaux avec une dernière audition ce soir, Me
Sirois, Me André Sirois. Bienvenue à la commission. Vous allez disposer d'une
période de 10 minutes pour vous présenter ainsi que les grandes lignes de
votre mémoire. Nous allons par la suite procéder à un échange avec les
parlementaires. Alors, le micro est à vous.
M. Sirois (André) : Merci,
Mme la Présidente. Bonsoir, mesdames et messieurs. Je m'appelle André Sirois,
j'ai fait... je suis avocat, j'ai fait la plus grande partie de ma carrière aux
Nations unies et dans des organisations internationales et j'ai aussi travaillé
comme conseiller juridique à la Commission de l'immigration et du statut de
réfugié du Canada.
Je m'intéresse au sort des immigrants
depuis très longtemps. La première fois, c'était en 1956, lors de l'arrivée du
groupe d'immigrants hongrois, qui était le plus gros groupe d'immigrants qu'on
ait reçu... qu'on avait reçu dans l'histoire à ce moment-là, à part les
immigrants irlandais. Et j'ai été... j'ai participé à l'accueil de ce
groupe-là. Puis, si ça vous intéresse, après j'ai eu une anecdote à ce
sujet-là, mais je ne veux pas perdre de temps...
M. Sirois (André) : ...des
anecdotes. Si vous me permettez, comme vous avez dit, je vais parler des
grandes lignes de mon mémoire, parce que... d'abord, parce que mon texte est
trop long, je vous demande pardon. Et, d'un autre côté, généralement, si
j'étais à votre place, j'aimerais mieux que les gens me parlent directement
plutôt que de lire un texte, mais ça, c'est varie selon les goûts de chacun.
Donc, je vais suivre... j'ai quelques notes sur les principaux points que je
voulais mentionner. Et puis, par la suite, bien entendu, comme il y a une
période de questions, bien, si vous voulez des éclaircissements, je le ferai
volontiers. Et il y a peut-être quelques éléments que je voudrais rajouter à
mon texte, et on verra ça ensuite.
La première question que j'ai, depuis un
grand bout de temps, pour ce qui est de l'immigration au Québec, c'est...
j'admets que ça remonte très, très, très loin, ça remonte à la première entente
entre le fédéral et Québec. Je ne comprends toujours pas le rôle du Québec, le
rôle du Québec en ce qui concerne l'immigration. Ce n'est pas très clair où ça
commence et où ça s'arrête. Et ça revient, finalement, à la présentation que
les gens faisaient juste avant moi, c'est-à-dire qu'entre autres choses, il n'y
a personne qui empêche les immigrants qui sont rentrés au Canada de tous s'en
venir au Québec, si c'est plus rentable pour eux de s'en venir au Québec.
J'ai regardé et je n'ai pas vu quoi que ce
soit qui les empêche de faire ça, sauf le fait qu'ils ne pourraient pas se
prévaloir de la Charte canadienne des droits qui dit qu'il faut être résident,
citoyen ou résident pour se prévaloir de la charte. Mais ça reste une question
fort intéressante parce qu'à ce moment-là il n'y a rien qui empêche les
immigrants ou les demandeurs de citoyenneté de s'en venir tous ensemble au
Québec, si ça leur rapporte davantage de venir au Québec. Vous comprenez que ça
vous... ça ne faciliterait pas les choses au gouvernement du Québec.
Et, pour ces raisons-là, je vais sauter ma
conclusion tout de suite. Moi, j'ai déjà dit ici, dans une autre présentation
sur le même sujet, que je préconise un moratoire sur l'immigration au Québec,
avec l'exception, bien sûr, des dossiers déjà en cours, et afin de permettre
l'établissement, la création d'une commission qui étudierait à fond les
questions et les problèmes qui se posent dans ce domaine-là. Et il y a de
nombreux problèmes qui se posent et dont on ne veut pas parler, ou dès qu'on
commence à parler de ça, les gens nous accusent de racisme, de xénophobie, et
de tout ce qu'on voudra, et surtout nous font taire. Si on veut régler des
problèmes, il faut accepter de les identifier, il faut accepter d'en parler. Et
c'est dans ce sens-là que va mon travail, moi.
Ce que je vous ai présenté, ça ne va pas
contre l'immigration. Ce n'est pas une démarche contre des immigrants, au
contraire, c'est que je voudrais bien que ça fonctionne beaucoup mieux qu'en ce
moment. Et il y a certains moyens très simples qui devraient permettre de faire
fonctionner ça. Mais je ne veux pas présumer du travail de la commission, dont
je demande la création, bien entendu.
Bon, un des premiers problèmes, bien sûr,
c'est le nombre d'immigrants. De façon très générale, quand les gens
viennent... parlent d'immigration, on ne sait pas exactement de quoi on parle,
on parle d'immigration, on parle de réfugiés, on parle de migrants, ce qui est
déjà encore plus confus. Et ça permet de présenter n'importe quel argument, de
soutenir l'argument qu'on veut, d'autant plus qu'on ne dit pas exactement de
quoi on parle. C'est un très gros problème quand on commence à s'intéresser aux
questions d'immigration, parce qu'on a des gens qui font des interventions très
légitimes et très valables dans certains cas, mais inutilisables, parce qu'on
ne peut pas, à moins d'avoir une équipe de travail, on ne peut pas intégrer
tout ça et en tirer des conclusions, en tout cas, c'est mon expérience
personnelle.
Je pense qu'il faut déterminer... Il
faudrait essayer de faire un effort pour déterminer le type d'immigrants et le
nombre d'immigrants. Ce serait la première chose que je demanderais à cette
commission-là. Et je vous mentionne tout de suite qu'on sait déjà qu'il y a des
éléments qui sont incontrôlables, qu'on ne connaît pas. Le premier de ces
éléments-là, c'est qu'on ne sait pas combien il y a des migrants au Canada en
ce moment, ni au Québec non plus, et qu'on le sait, parce qu'entre autres,
quand il y a des immigrants qui passent en cour et qui sont condamnés parfois
pour des crimes très graves, on n'est pas capable de les retourner chez eux,
parce qu'on ne sait pas où ils sont. Alors, on ne peut pas les quantifier non
plus.
J'ai demandé, à un moment donné... J'ai
essayé de savoir le nombre de sans-papiers qu'il pouvait y avoir au Québec...
M. Sirois (André) : ...au Québec,
et la réponse qu'on m'a donnée, c'est de... les gens devaient. Je ne peux pas
croire que c'est ça, que les gens devaient confondre le Québec et tout le
Canada. Mais on m'a dit : Des sans papiers, il y en a entre 50 000 et...
pardon, 20 000 et 500 000. Vous conviendrez que ce n'est pas une réponse très
utile. Ce n'est pas très clair. Mais le problème, c'est que, quand on veut
faire un travail sérieux sur l'immigration au Canada, on a tous ces
problèmes-là l'un après l'autre.
Il y a aussi la question du regroupement
des familles qui n'est jamais mentionnée. Or, le regroupement des familles, la
plupart des pays ont supprimé ça. On ne parle même pas d'ajustement, là, on
parle d'abolir le regroupement des familles. En France, Sarkozy a fait une très
grosse campagne contre ça et il n'a pas gagné sa campagne, mais ça reste
néanmoins qu'il avait des arguments très sérieux.
Et le problème avec le regroupement des
familles, c'est qu'on calcule qu'un gros chaque immigrant reçu fait venir en
moyenne... et ça, je conviens tout de suite que je ne sais pas comment on a
fait le calcul, mais on calcule que chaque immigrant reçu fait venir en moyenne
cinq autres immigrants. Et là, si on imagine que c'est exponentiel, ça finit
par faire un nombre faramineux, et ça, c'est une question qui n'est pas réglée.
• (21 heures) •
Il y a aussi la question de... le problème
qui se pose aussi quand on examine ça, c'est que dans le cas de la déclaration
de M. Trudeau, avec l'objectif qu'il s'est fixé, la façon dont je le vois, et
puis j'imagine que certains vont être d'accord, d'autres pas. Mais moi, la
façon dont je vois ça, c'est que M. Trudeau, un pays a accueilli beaucoup
d'immigrants, beaucoup trop d'immigrants à mon avis pour l'ensemble du Canada,
mis à part le Québec. Ensuite, il se retourne vers le Québec et il dit au
Québec : Écoutez, si vous voulez maintenir votre équilibre dans la...
l'équilibre démographique dans la Confédération, il vous faut accueillir plus
d'immigrants. Alors, le résultat, c'est que les Québécois ont le choix entre
maintenir leur équilibre démographique à l'intérieur du Canada et accueillir un
trop grand nombre d'immigrants, ou bien, d'autre part, essayer de maintenir
leur équilibre géographique à l'intérieur du Québec, et pour ça, accueillir
moins d'immigrants. Ces deux solutions-là sont incompatibles. Et quant à moi,
c'est un piège génocidaire et j'utilise le mot «génocidaire» à bon escient, et
c'est exactement ce que je veux dire. Et pour ça, là, je vous renvoie à la
Convention sur le crime de génocide et je vous assure qu'on peut prendre la
convention et faire un argument juridique très sérieux pour démontrer qu'en ce
moment, il y a une campagne génocidaire qui se fait contre le Québec avec ça,
et...
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Je vais vous demander, monsieur... Me Sirois, de faire
attention à vos propos. Il y a des propos qu'on peut dire, il y en a d'autres
qu'on ne peut pas dire. On est dans l'enceinte du Parlement, donc je vais vous
demander, s'il vous plaît, de faire attention à vos propos.
M. Sirois (André) : Mais j'ai
pris la peine de mentionner la Convention sur le génocide parce que c'est ce
qu'il y a de plus clair et de plus simple, et croyez-moi, je ne lance pas ça en
l'air, ça m'apparaît comme ça. Et comme avocat, je peux vous dire...
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : ...porter des intentions, donc s'il vous plaît.
M. Sirois (André) : Non,
je... Bon, très bien, je vais passer à autre chose. Alors, les coûts, c'est
un...
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : 20 secondes.
M. Sirois (André) : Pardon?
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Il vous reste 20 secondes.
M. Sirois (André) : Oui. Bon,
alors les coûts, mais j'ai vu à la télévision américaine le maire de New York
parler du fait qu'il accueillait 57 000 personnes et qu'au total il y aurait
97 000 immigrants à New York à la fin de l'année, et pour ça, il demande des
milliards de dollars. Au total, il demande 12 milliards pour...
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Votre temps est terminé, mais on va s'engager maintenant
dans une période d'échange avec les parlementaires. Alors, je vais me tourner
du côté de la ministre. Mme la ministre, une période de
16 min 30 s.
Mme Fréchette : Oui, merci,
Mme la Présidente. M. Sirois, vous êtes passé bien rapidement sur votre
parcours. Est-ce que vous pourriez revenir en fait sur les postes que vous avez
assumés, le parcours qui a été le vôtre sur le plan professionnel?
M. Sirois (André) : Oui. Bien
là, ça dépend si vous voulez que je vous raconte tout ça, on va manquer de
temps, c'est certain, parce que je travaille depuis...
21 h (version non révisée)
M. Sirois (André) : ...60 ans,
plus de 60 ans. Alors, j'ai été journaliste longtemps, puis je suis devenu
avocat, j'ai travaillé en droit public pour le gouvernement du Québec et,
ensuite, pour le gouvernement du Canada, puis, par la suite, j'ai commencé à
travailler pour les Nations unies. Ça fait que j'avais fait des contrats pour
les Nations unies avant, mais ça, ça fait très longtemps. Puis ensuite j'ai
commencé à travailler pour les Nations unies, et j'ai été dans des missions des
Nations unies, puis ensuite j'ai mis sur pied des tribunaux internationaux des
Nations unies, j'ai mis sur pied le tribunal pour le Rwanda et, ensuite, celui
du Cambodge, et j'ai travaillé aussi au secrétariat à New York comme avocat et
comme traducteur juridique et diplomatique. Et, en gros, là, ça peut se résumer
à ça, mettons. Je peux vous donner plus de détails si vous voulez, mais, comme
je vous dis... comme, en plus, j'ai travaillé à contrat très régulièrement, j'ai
fait des contrats dans différents endroits, dans différents pays et en faisant
différentes choses, finalement.
Mme Fréchette : D'accord,
merci. Bien, écoutez, je dois dire que j'ai été pour le moins surprise de votre
première recommandation, là, qui est à l'effet de tenir une consultation sur
les enjeux de l'immigration au Québec parce que vous comprendrez qu'on est tous
ici réunis, l'ensemble des formations politiques, enfin presque, pour écouter
les propositions de très nombreux groupes très, très diversifiés. On a eu plus
que le double du nombre de participants qui ont participé, qui participent à
cette commission parlementaire. On parle à la fois d'associations, des
organismes sur le terrain qui accompagnent les immigrants pour leur
intégration, pour l'accueil, pour la francisation. On a des associations
économiques, des associations juridiques, on a des professeurs d'université, on
a des syndicats, on a des citoyens. Donc, vraiment, on a réussi à rallier une
grande gamme, grande variété d'intervenants qui sont interpellés par les enjeux
d'immigration.
On a mis sur la table beaucoup de matière,
hein? Franchement, déjà, on a proposé, à la fin mai dernier, une réforme
complète de nos programmes d'immigration économique. Ça a fait l'objet, d'ailleurs,
du dépôt de nombreux mémoires, plusieurs dizaines de mémoires de la part d'un
ensemble, encore là, d'acteurs interpellés par cette question-là. On met au jeu
pas moins d'une douzaine d'orientations qui viennent caractériser nos
propositions pour la politique d'immigration du Québec. Les gens répondent à l'appel,
vous répondez à l'appel. Vous venez nous présenter un mémoire, nous sommes tous
ici réunis pour entendre l'ensemble des personnes, et vous venez nous dire qu'il
nous faudrait tenir une consultation sur l'immigration. Alors, si ce n'est pas
ce que nous sommes en train de faire en ce moment, je ne vois pas à quoi ça
correspond, ce qu'on est en train de faire, sincèrement.
Alors, je suis pour le moins étonnée. Je
trouve particulièrement singulier d'arriver avec ça comme première proposition
parce qu'il me semble que ce que... votre souhait est complètement incarné par
ce que nous faisons trois semaines durant à temps plein, et plus que plein,
parce qu'on est encore ici, il est 21 h quelques, et on y sera encore
demain soir jusqu'à 22 h quelques. Alors, voilà, vous me voyez étonnée. C'est
un exercice, en plus, qu'on refait de manière régulière. Ça s'est fait il y a
quatre ans, on le refera également dans quatre ans. C'est prescrit par la loi.
Les termes sont très précis. On s'assure de rencontrer et d'écouter l'ensemble
des personnes qui souhaitent être entendues ou lues, parce que certains
déposent des mémoires mais ne souhaitent pas venir en audience.
Alors, voilà, je me demande quelle
définition vous associez à ce que l'on fait en ce moment. Si ce n'est pas une
commission parlementaire, une consultation sur l'immigration, qu'est-ce que c'est
que nous sommes en train de faire? Je cherche à comprendre.
M. Sirois (André) : Oui, je
ne me suis peut-être pas bien exprimé, parce que je ne nie pas du tout la
valeur de la présente commission, mais vous conviendrez que... en tout cas, ce
n'est pas ce que je propose. Ce dont je parle, moi, c'est une commission d'enquête
ou une commission d'étude, peut-être que c'est plutôt comme ça que j'aurais dit
l'appeler, mais qu'on fasse les travaux de recherche nécessaires afin d'avoir
des bases solides pour prendre des décisions. La consultation des citoyens, c'est
très bon, je suis absolument pour ça. Mais, d'un autre côté, il faut bien
reconnaître que, pour avoir les...
M. Sirois (André) : ...fondamentaux,
les renseignements sûrs et nécessaires, il faut passer à une autre étape. J'ai
été membre de deux commissions. Je n'ai pas mentionné ça, mais j'ai été membre
au Québec de ce qui s'est appelé la Commission Gendron, qui était une
commission d'enquête sur la situation du français au Québec. Et j'ai été membre
aussi de la commission Le Dain, la commission d'enquête sur les drogues au
gouvernement fédéral. Alors, je connais un peu le travail de ces
commissions-là. Et ce dont je parle en ce moment... Remarquez qu'à la
commission Gendron, on n'a pratiquement pas eu d'audiences publiques. À la
commission Le Dain, on en a eu beaucoup partout à travers le Canada. Mais par
ailleurs on avait des experts qui faisaient des travaux de recherche, et je le
sais parce que j'ai dirigé une équipe de recherche là-bas, et ces gens-là
faisaient des travaux qu'on leur demandait de faire afin d'avoir des réponses
aux questions qu'on se posait, afin d'avoir des réponses sérieuses.
Pour compléter ça, je vous mentionnerais
que, justement, en immigration, par exemple depuis... pendant très longtemps,
il y a eu deux affirmations qu'on faisait à l'emporte-pièce sans que personne
n'ose contester ça. On disait que l'immigration, c'était rentable. Quand on a
commencé à examiner ça attentivement, on s'est aperçus que ça ne l'était pas ou
que ça ne l'était plus, bon. Et ça, en ce moment, c'est beaucoup moins discuté
qu'avant, là, la situation semble plus claire à ce sujet-là.
• (21 h 10) •
L'autre chose qu'on nous dit et qui est
apparemment fausse, c'est que l'immigration peut servir à contrer la baisse
démographique, à contrer la baisse du vieillissement de la population. Ça, pour
ça, les Nations unies ont fait deux enquêtes très poussées et... avec des
résultats... de volumineux rapports dans les deux cas. Et c'est... Je ne
m'aventurerai pas à essayer de vous résumer ça. J'admets que c'est très
technique et ça me dépasse. Mais ce que je retiens, c'est que la réponse dans
les deux cas, c'est que non, c'est impossible d'utiliser l'immigration pour
contrer la baisse démographique et le vieillissement de la population. Et là je
vais juste vous citer une phrase d'un des rapports : Le maintien... Je
cite : Le maintien des rapports de soutien potentiel à leurs niveaux
actuels - leurs niveaux actuels au pluriel - uniquement en ayant recours à une
immigration de remplacement semble inaccessible en raison du nombre
extraordinairement important de migrants qui s'avéreraient nécessaires. Ça, ça
fait déjà... Fin de la citation. Ça, ça fait déjà quelques années, là, que les
Nations unies ont sorti ce rapport-là, après avoir fait des études de cas et
des projections. Et jusqu'à présent, en fait, à ce que j'en sais, il n'y a
personne qui a contré ces rapports-là ou qui a fait une critique pour dire que
les rapports n'étaient pas bons. Je pense que ça peut être intéressant de lire
ça.
Enfin, tout ça pour répondre à votre
question. Moi, quand je demande une commission, mettons que c'est une
commission d'enquête, si vous voulez, je me suis peut-être mal exprimé, mais je
ne parle pas d'une commission seulement pour entendre des citoyens qui ont
quelque chose à dire. C'est très valable, je ne dénigre pas ça du tout, du
tout, mais je pense que ce serait utile d'avoir une commission d'enquête avec
des experts qui font des travaux de recherche nécessaires.
Mme Fréchette : De notre
côté, on a mis de l'avant, en fait, des fonds qui seront rendus disponibles
pour des universitaires pour mener des études sur les parcours migratoires et
tous les enjeux qui peuvent être associés à l'immigration. On a fait cette
annonce-là au printemps dernier, donc il y a des fonds qui ont été dévolus au
Fonds québécois de recherche société et culture, chapeauté par M. Rémi
Quirion, et qui aura pour mandat, en fait, de financer un certain nombre de
recherches. Et ça, je pense que ça va être très utile au sein du ministère
également. Il y a plusieurs initiatives qui nous permettent d'approfondir notre
connaissance de divers enjeux qui sont d'intérêt pour la conduite du ministère
et la conduite de notre politique en matière d'immigration. Donc, c'est la voie
par laquelle on agira pour la suite des choses.
Mme la Présidente, il nous reste
combien...
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Il reste six minutes, 6 minutes, 40.
Mme Fréchette : Six minutes,
40. D'accord. Alors, écoutez, je vous amènerais sur une de vos propositions
qui, celle-là aussi, m'a surprise, qui est, en fait, celle visant à déclarer un
moratoire sur l'immigration au Québec. C'est quand même... ce n'est pas banal
comme recommandation. Je me demande, en fait, si vous avez évalué, là,
l'ampleur et l'impact de la mesure que vous proposez, parce qu'il faut voir que
l'immigration, c'est quand même un socle, une assise importante sur le plan...
Mme Fréchette : ...du
gouvernement. L'immigration, c'est une richesse. C'est important pour nous de
garder les canaux ouverts en matière d'immigration et de voir vers l'avenir
quand on conduit la politique d'immigration, parce que ça nous apporte
énormément sur un ensemble de plans, que ce soit sur le plan social, sur le
plan économique, sur le plan démographique, que ce soit sur le plan
linguistique également. Donc, il y a toute une série d'enjeux qui sont portés
par l'immigration et dont il faut tenir compte pour garder un équilibre. Alors,
c'est ce qu'on cherche à faire avec la tenue de cette consultation de manière
régulière, de viser en fait le point d'équilibre idéal pour les trois ou quatre
années qui viendront, en tenant compte de l'ensemble des dimensions qui sont soulevées
par l'immigration. Donc, en fait, je m'étonne que vous proposiez un moratoire,
là, parce que, c'est ça, ça aurait un impact assez considérable sur la suite
des choses. Alors, je me demandais si vous aviez évalué justement ces
impacts-là et comment vous les... vous les visualisez?
M. Sirois (André) : Non, je
n'ai pas la compétence pour faire l'évaluation de ça, je le reconnais
volontiers. Cependant, je me fie à ce que me disent, entre autres, les gens de
la Commission du statut de réfugié où j'ai travaillé, et d'autres
fonctionnaires que je connais, des hauts fonctionnaires que je connais dans le
domaine de l'immigration à Ottawa, qui sont absolument débordés et qui ne
voient pas comment sortir de là.
Soit dit en passant, je vais vous faire
une recommandation, je vais faire une suggestion tout de suite. Je suis étonné
de voir qu'on ne fait pas comme aux États-Unis et qu'on ne procède pas des
tirages au sort parce qu'en ce moment, les dossiers ne font que s'empiler alors
qu'aux Nations unies... aux États-Unis, pour certaines parties de cette
démarche-là qui est fastidieuse, tout le monde le reconnaît, une fois qu'on a
examiné les dossiers, qu'on a déterminé que les personnes étaient admissibles,
au lieu de commencer à réexaminer le dossier pour voir qui on veut admettre ou
pas, on procède à des tirages au sort une fois par année. On pourrait le faire
deux fois par année ou quelques fois de plus si on veut. Mais ça me paraîtrait
une avenue qu'il faudrait examiner peut-être.
Je mentionne ça en passant parce que ça
fait des années que je me pose cette question-là. Puis j'ai vu... comme
j'habitais à New York, j'étais en relation avec des gens qui avaient à faire à
l'immigration, et cet aspect-là semblait fonctionner. Je ne vous dis pas que
c'est un modèle absolu, mais cet aspect-là semblait être utile parce que les
gens n'avaient pas attendre des années, des années pour avoir une réponse. Et
s'ils étaient refusés, normalement, ils devaient partir du pays et faire leur
vie ailleurs.
Mme Fréchette : D'accord.
Donc, vous nous proposez une mesure dont vous n'avez pas idée de l'impact parce
que vous n'avez pas cette expertise? Alors, bien, je retiens...
M. Sirois (André) : Non, mais
ce sera examiné par une commission. Justement, c'est un peu ça que je pensais.
Mme Fréchette : Ah! d'accord.
Mais peut-être faudrait-il attendre d'avoir une telle commission avant de
proposer une recommandation dans ce cas-là.
M. Sirois (André) : Bien,
je...
Mme Fréchette : Mais je ne
m'avancerai pas davantage là-dessus, Mme la Présidente. Je vais céder la parole
à des collègues.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup, Mme la ministre. Alors pour une période de
2 min 45 s, je cède la parole à la députée de Châteauguay.
Mme Gendron : Bonjour, M.
Sirois.
M. Sirois (André) : Bonsoir.
Mme Gendron : Bonsoir. C'est
surprenant, vous êtes le premier intervenant à avoir des propos de cette
nature, donc c'est différent ce soir. J'aimerais ça vous amener complètement
ailleurs. De quelle façon vous pourriez penser que l'immigration pourrait être
faite de façon réussie? Qu'est ce que, pour vous, devrait être fait à part le
moratoire, admettons, pour qu'un immigrant soit reçu ici au Québec et que ce
soit une immigration réussie?
M. Sirois (André) : Bien,
mais ma première réaction, c'est j'admets qu'il faudrait peut-être que j'aie le
temps de réfléchir à ça davantage. Mais ma première réaction, c'est de me dire
pour que ce soit réussi, il faudrait que la machine fonctionne bien, et ce
n'est pas le cas en ce moment, toute la machine administrative, et ça, je pense
bien que je ne risque pas d'être contredit là-dessus. Toute la machine
administrative est absolument débordée et ne fonctionne pas bien. Malgré le
fait que, dans certains cas, il y a un biais très fort dans le mécanisme
administratif en faveur des immigrants. Par exemple, la Commission du statut de
réfugié. Je ne me lancerai pas là-dedans parce que je ne commencerai pas
décrire pourquoi il y a un biais et comment ça arrive. Mais il y a un biais
très, très fort en faveur des gens qui demandent le statut de réfugié. Bon, et
malgré tout, il reste qu'il y a des...
M. Sirois (André) : ...des
retards qui sont absolument inadmissibles. Tout le monde conviendra de ça
facilement.
Mme Gendron : Donc, c'est ça
qui motive, en fait, là, votre proposition de moratoire et...
M. Sirois (André) : De
regarder... c'est ça, parce qu'il faudrait regarder le fonctionnement de la
machine administrative et voir pourquoi ça bloque à ce point-là. Et
malheureusement, on sait aussi qu'on ne peut pas régler le problème en ne
faisant qu'embaucher de plus en plus de monde, s'il y a de plus en plus
d'immigrants en même temps, ça va devenir tout simplement exponentiel. Et, à un
moment donné... ou il n'y a rien qui va fonctionner de toute façon. C'est
malheureux, mais c'est comme ça. Ce que... si je peux parler d'une autre chose
que je recommanderais aussi, c'est que je ne comprends pas comment ça se fait
qu'au point de vue international personne ne semble avoir envie de sévir contre
les passeurs, les passeurs volent le monde, provoquent la mort de beaucoup de
monde impunément et...
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Me Sirois, je dois vous arrêter, parce que la période de
temps imparti au gouvernement vient de se terminer. Je me tourne maintenant du
côté de l'opposition officielle qui bénéficie d'une période de 12 minutes
23 secondes, avec le député de Nelligan.
M. Derraji : Merci, Mme la
Présidente. Bonsoir, bienvenue en commission parlementaire. Je vais aller à vos
recommandations. Depuis le début, je vous entends parler et vous nous invitez à
une sorte de commission d'enquête, mais les commissions d'enquête, à part leur
objectif, je ne pense pas qu'une planification pluriannuelle, à mon humble
avis, doit être ou doit s'inspirer d'une commission d'enquête. On est loin des
commissions d'enquête. Mais j'ai lu vos recommandations et vous insistez
beaucoup sur les données, sur les chercheurs, je vous l'accorde, parce qu'il
faut se baser sur des données fiables avant de proposer quelque chose. Je ne
sais pas si vous avez suivi la commission, les travaux.
• (21 h 20) •
M. Sirois (André) : ...malheureusement,
parce que j'ai...
M. Derraji : Pas de problème,
non, pas de problème, vous êtes occupé. Je le sais, pas de problème. Je veux
vous dire et vous partager un peu, les gens qui étaient dans la même chose que
vous, oui, il y avait des citoyens, mais laissez-moi vous dire qu'il y avait
des experts, des chercheurs universitaires, des organismes communautaires, des
groupes représentant le patronat, des groupes représentant le syndicat. Moi,
sérieusement, je n'ai pas perdu mon temps, les deux dernières semaines, j'ai
beaucoup appris et j'ai même appris qu'au-delà des chiffres il y a des êtres
humains. Et je vais me permettre de vous corriger une petite... un petit
pourcentage. Vous avez dit que les immigrants qui arrivent, en moyenne,
ramènent cinq, c'est ça?
M. Sirois (André) : C'est ce
que j'ai lu dans les rapports, oui.
M. Derraji : Oui, c'est des
rapports au Québec, à l'international, quels rapports...
M. Sirois (André) : ...canadiens
M. Derraji : Canadiens, et
appliqués au Québec, cinq.
M. Sirois (André) : Non, je
n'ai pas plus que ça au Québec, en particulier parce que le chiffre concernait
le Canada, des immigrants au Canada.
M. Derraji : Mais au moins,
il y a un qui n'a pas ramené cinq, c'est moi. Je peux vous le partager. J'ai
réussi probablement à convaincre uniquement une seule personne, c'est ma femme.
Je ne sais pas si ça vous rassure. On est juste deux avec deux enfants, donc ça
ne rentre pas un peu dans les statistiques, mais ça, c'est juste... Je sais que
vous aimez les anecdotes, vous voulez même parler d'une, concernant la Hongrie.
Ma mémoire, elle est bonne?
M. Sirois (André) : Oui,
bien, en fait, si vous voulez l'entendre après...
M. Derraji : Après, après,
j'ai juste 12 minutes. Je veux revenir au résultat. Ce qui est quand même
hallucinant, c'est que vous êtes le premier intervenant à nous parler du
moratoire. Vous avez le droit de parler d'un moratoire. Nous avons eu
54 groupes, beaucoup de groupes, ils ont partagé le point de vue de la
ministre, ils ont dit : On est d'accord sur deux, trois points, pas
d'accord sur un autre point. Je suis d'accord sur pas mal de points, mais je ne
suis pas d'accord sur un point et je l'ai mentionné. C'est ça un, processus
démocratique dans une société démocratique où la parole est pour tout le monde.
Mais vous venez nous dire aujourd'hui qu'il faut déclarer ça, c'est deuxième
proposition. D'ailleurs, la première proposition, moi, j'étais un peu choqué,
probablement au même niveau que Mme la ministre, parce qu'il faut entreprendre
une véritable... Moi, je l'ai relu, hein, je l'ai relu plusieurs fois. À
l'échelle du Québec, il faut entreprendre une véritable consultation de fond,
je pense, c'est ce qu'on fait depuis le début, sur les enjeux de l'immigration
au Québec par rapport à ses pouvoirs en ce domaine et à la politique fédérale
de multiculturalisme. Moi, je n'ai jamais vu du multiculturalisme au Québec, on
parle de l'interculturalisme au Québec. Encore une fois, on est maître chez
nous. Le Québec est maître chez nous par rapport... et maître, on est maître
chez nous par rapport à l'immigration. La première recommandation, c'est ce que
vous le dites, je vous cite : "Et donc de faire une...
M. Derraji : ...de
consultation sur l'ensemble des questions d'immigration au Québec. C'est
exactement ce qu'on fait. Donc, probablement, on vient de répondre à votre
première préoccupation parce que nous sommes dans une vraie consultation sur
l'immigration. Maintenant, là où je m'inquiète... bien, «je m'inquiète», je me
pose des questions, on réfléchit à haute voix ensemble, le moratoire. Avec
quels chercheurs vous avez validé l'idée du moratoire? Quelles études vous avez
faites? Avec quels intervenants vous avez parlé, que ce soit acteur régional,
national, association patronale, syndicat, groupe communautaire, groupe qui
ramène des réfugiés, demandeur d'asile, regroupement familial, requérant
principal, demandeur principal, travailleur temporaire étranger? Comment vous
avez validé l'idée du moratoire?
M. Sirois (André) : Je n'ai
pas fait une recherche scientifique, j'en conviens. J'ai parlé avec des hauts
fonctionnaires à Ottawa et des retraités qui se sont occupés de l'immigration,
et, une des idées qui est revenue, c'était que, comme on était débordés à
Ottawa et ici, comme on était débordés, une façon, peut-être... Je ne n'essaie
pas d'imposer cette idée-là, mais je pense que c'est une solution qui
mériterait d'être examinée. Une idée, peut-être, ce serait de faire un
moratoire afin de s'assurer qu'on ne fait pas tout... qu'on n'est pas, là, en
train de simplement constater une augmentation constante contre laquelle on
n'arrive pas... qu'on n'arrive pas à régler, plutôt.
M. Derraji : Oui. Et donc le
moratoire, c'est, je veux juste bien comprendre, un arrêt complet de
l'immigration. Vous avez même dit : Regroupement familial, ça, là, il ne
faut pas le... il ne faut pas toucher ça, il ne faut pas... il faut arrêter ça.
M. Sirois (André) : Si c'est
possible. Je dis simplement que c'est quelque chose qu'on devrait examiner pour
voir si c'est possible. Je ne prétends pas que c'est une solution que je
voudrais imposer.
M. Derraji : Oui, mais
j'échange avec vous, parce que, juste sur le regroupement familial, je me pose
la question, au-delà d'extrapoler sur les gens, probablement que moi-même, je
n'aurais pas eu l'occasion d'avoir ma conjointe avec moi, parce qu'elle n'est
pas née au Québec.
M. Sirois (André) : Bon, on
peut être d'accord ou pas d'accord sur le regroupement familial. Ce que je peux
vous dire, c'est que la très grande majorité des pays du monde... D'abord, il y
a une grande majorité qui n'accepte pas d'immigrant et, d'autre part, il y a
aussi beaucoup, beaucoup de pays qui ne permettent pas du tout le regroupement
familial.
M. Derraji : Oui, mais, Me
Sirois...
M. Sirois (André) : C'était
le cas avant, mais ça a été aboli dans bien des pays.
M. Derraji : Mais, Me Sirois,
j'ai aussi voyagé beaucoup, et en aucun cas je ne compare le Québec à n'importe
quelle autre société, y compris européenne. Le Québec choisit, sont membres
depuis plusieurs années. Y venir aujourd'hui, et vous avez le droit à votre
opinion, que je ne partage pas, que d'autres pays l'ont fait, on doit le faire,
en fait, ce n'est pas un argument scientifique qui tient la route. Ce n'est pas
parce qu'un pays a empêché... D'ailleurs, j'aimerais bien savoir c'est qui, ces
pays qui ont empêché le regroupement familial, j'aimerais bien savoir parce que
moi, je... C'est la première fois que j'entends ça. Maître... Moi, je n'ai
jamais entendu parler qu'un pays a empêché le regroupement familial. Mais ça,
encore une fois, on jase. Tu sais, vous avez des idées, vous les ramenez sur la
table. Mais, sur le moratoire, vous venez de me répondre : Il n'y a pas
d'étude scientifique, c'est juste... vous êtes en train de discuter entre hauts
fonctionnaires au fédéral, des retraités, et l'idée, elle est venue, et vous
l'avez ajouté dans les recommandations.
M. Sirois (André) : Oui, je
ne dis pas qu'il n'y a pas d'étude scientifique, mais je n'ai pas fait la
recherche à ce sujet.
M. Derraji : Pas de problème.
Mais souvenez-vous que, votre première recommandation, vous nous invitez à
faire... à être rigoureux, à faire de la recherche et même aller jusqu'à une
commission d'enquête. Mais là vous, vous venez, sans faire d'étude ni
recherche, recommander un moratoire. À un certain moment, comment on peut juste
vous suivre dans le raisonnement?
M. Sirois (André) : Bien, écoutez,
je n'ai pas d'équipe de chercheurs pour faire ça, j'en conviens, et moi, j'ai
un travail à part ça, alors je ne peux pas non plus me plonger là-dedans à
plein temps. C'est une proposition que je fais, qui peut être discutée, qui
peut être rejetée. Mais, pour ce qui est du regroupement familial, je peux vous
assurer que, ça, il y a déjà beaucoup de travail de fait à ce sujet-là. Et
justement, entre autres, j'ai pris la peine de mentionner Sarkozy parce que
Sarkozy avait fait faire beaucoup de recherches, et il y a des documents en
France à ce sujet-là, j'en ai déjà vu, je pourrais essayer de les récupérer.
M. Derraji : Est-ce qu'on
peut dire que la société québécoise est très différente de la société
française?
M. Sirois (André) : Oh! sûrement.
M. Derraji : Sûrement. C'est
excellent. Je veux revenir à l'idée du moratoire. Parce que vous avez dit
que...
M. Derraji : ...vous voulez
qu'on en discute. On fait quoi avec la pénurie de main-d'oeuvre et les services
publics qui peinent à trouver du monde pour s'occuper de nos personnes âgées,
la pénurie de profs, l'économie qui souffre? Moi, je vous le dis, si vous avez
du temps, je sais que vous êtes un homme occupé... Les deux dernières semaines,
nous avons eu d'excellentes présentations de presque toutes les régions du
Québec, c'est des experts qui sont sur le terrain, qui nous ont dit :
Faites attention. Et nous avons nos enjeux, mais on peut marcher en réglant nos
enjeux, mais on a besoin de monde parce qu'on a une pénurie grave qui sévit
dans les régions. Vous leur dites quoi aujourd'hui?
M. Sirois (André) : Pour ce
qui est de la pénurie de main-d'oeuvre, et on ne parle pas, là, de remplacer...
voyons, la perte démographique, mais pour ce qui est de la pénurie de
main-d'oeuvre, c'est sûr que l'immigration peut aider. D'un autre côté, quand
j'entends les hommes d'affaires nous dire qu'il faut absolument plus d'immigrants,
il y a un moment donné où plusieurs personnes, et je ne suis pas le seul à
penser ça, on se dit, du côté des syndicats par exemple, qu'il y a sûrement des
gens là-dedans qui veulent payer le salaire le moins cher possible. Et il y a
des gens aussi et il faut le rappeler que, lorsqu'il y eut la guerre de
Sécession aux États-Unis contre l'esclavagisme, il y avait des hommes
d'affaires au Québec, des hommes d'affaires anglophones qui se sont rangés avec
le gouvernement britannique du côté des esclavagistes aux États-Unis, c'était
ça la position des élites à Montréal à ce moment-là.
M. Derraji : Je vais juste
revenir à votre idée. Donc, l'immigration, elle est bonne pour combler la
pénurie de main-d'oeuvre, mais pas pour le besoin... la courbe démographique.
Clarifiez, s'il vous plaît, parce que je n'ai pas saisi ce que vous voulez
dire. Vous êtes d'accord avec moi que, pour combler la pénurie de
main-d'oeuvre, l'immigration est une des solutions, mais vous avez ajouté la
courbe démographique. Je n'ai rien compris, pouvez-vous juste...
• (21 h 30) •
M. Sirois (André) : Justement,
pour ce qui est de la perte démographique, ça, je l'admets, j'ai beaucoup de
difficultés, je ne pourrais pas résumer ces rapports-là parce que c'est très,
très complexe.
M. Derraji : Oui. Pas de
problème. Revenons aux choses simples. Évitons les choses complexes, c'est déjà
21 h 30. Revenons à la pénurie de main-d'oeuvre. Vous partagez le
point des deux dernières semaines que des gens sont venus en commission le dire :
Attention, on souffre, on en veut, aidez-nous, Mme la ministre, francisation,
régionalisation. C'est ce qu'ils ont dit.
M. Sirois (André) : En soir,
c'est très complexe, cette question-là. Et pour ça, pour commencer, je vous
suggérerais de bien lire la chronique de Christian Rioux de vendredi dernier,
que vous avez sans doute vu, où il parle justement de... il mentionne justement
que, d'une certaine façon, c'est une nouvelle forme de pillage colonial que
d'aller chercher les gens qui sont déjà formés dans des pays en développement
pour les siphonner au Canada. Bon. Et ça, c'est du colonialisme.
M. Derraji : Le Québec et le
Canada n'obligent personne à venir. C'est par choix aussi. Moi, il n'y a
personne qui m'a obligé de venir au Québec et au Canada. Moi, je ne vois pas un
acte colonialiste dans ce sens. J'ai choisi de venir étudier, faire un MBA à
l'Université Laval. J'ai épousé le Québec, j'ai aimé le Québec, et je suis
devenu Québécois, et je reste au Québec.
M. Sirois (André) : Bien sûr,
mais je vous recommande encore une fois de bien lire le texte de Rioux parce
que, tant qu'à moi...
M. Derraji : Je l'ai lu, mais
je tiens juste à vous dire un autre point de vue qui est probablement différent
de M. Rioux.
M. Sirois (André) : Il décrit
un problème qui a été dénoncé déjà par... c'est une curieuse coïncidence, mais
par deux femmes différentes...
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Le temps est terminé.
M. Derraji : Merci.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Le temps imparti à l'opposition officielle étant terminé,
M. le député, je veux juste vous rappeler qu'on appelle nos collègues... M. le
député, s'il vous plaît. S'il vous plaît, M. le député de Nelligan, je
m'adresse à vous. Je vais juste vous rappeler qu'on appelle les collègues par
leur nom de... le député de... je ne pas le répéter, bien entendu. Alors, M. le
député de Saint-Henri Sainte-Anne, pour une période de
4 min 8 s, le temps est à vous.
M. Cliche-Rivard : Merci beaucoup.
M. Sirois, je m'étais fait la même réflexion que mes collègues, là, je ne
vais pas vous le cacher, il y a quoi, il y a près de 80 mémoires qui ont
été déposés, vous êtes le seul à ce jour à avoir de telles propositions. Ici,
on est quatre partis politiques représentés à l'Assemblée nationale, personne
ne propose de moratoire, des quatre partis, là, avec des idées qui sont très
différentes, personne ne propose ça, personne ne demande ça, et j'inclurais
peut-être même au niveau fédéral. Ça n'appartient à aucune formation politique.
Aucune formation politique au pays, à ma connaissance, n'a ça dans sa
plateforme, alors, avec égard, moi, je me demande... bon, vous avez droit à
votre opinion, ça, je vais toujours respecter la liberté d'expression, mais, à
mon humble avis...
21 h 30 (version non révisée)
M. Cliche-Rivard : ...C'est
une mauvaise décision. C'est une mauvaise proposition à mon humble avis. Et on
n'a pas besoin d'une commission pour examiner si c'est une bonne idée ou une
mauvaise idée, à mon humble avis, c'est une mauvaise idée. Et je vous confirme
qu'à mon humble avis ce n'est pas une bonne idée.
Vous dites que vous comprenez mal ou... Je
vous ai relu, le rôle du Québec en immigration. Moi, je vous recommande d'aller
lire attentivement l'accord Canada-Québec de 1991, qui définit les
responsabilités de chacun. Et il y a une excellente association d'avocats en
droit de l'immigration, que je présidais à une certaine époque, qui fait de la
formation continue extraordinaire sur les rôles de tout un chacun en matière d'immigration.
Je vous le recommande parce qu'on apprend des choses extraordinaires sur l'état
de notre droit constitutionnel ou quasi constitutionnel. Je trouve ça, moi,
très, très, très intéressant.
Vos propositions sur la réunification
familiale, sincèrement, moi, je les trouve choquantes. Abolir le droit à des
familles d'être réunies, bien franchement, dans la société québécoise d'aujourd'hui,
moi, personnellement, je trouve cette proposition-là inacceptable. La famille,
selon moi, est au cœur de la société québécoise, est au cœur des valeurs
québécoises. Et de penser qu'on proposerait des politiques qui viseraient à ne
pas permettre de réunir des époux, des conjoints, des enfants, des parents,
moi, je trouve que c'est un manque d'humanisme ou d'humanité. Moi, je trouve ça
extrêmement grave. Et, très franchement, avec respect, je trouve que ça
discrédite l'ensemble des autres propositions que vous faites, franchement.
Vous avez parlé du début ou d'une
potentielle politique génocidaire. Avec égard, je n'ai vu aucun début de preuve
à cet effet-là. Puis ça m'intéresserait de le voir, parce que, pour l'instant,
je n'ai vu aucun début de preuve.
Dans vos allégations, vous dites que
personne ne peut être renvoyé du Canada. Plusieurs fois par année, il y a des
articles sur beaucoup de gens qui sont déportés du Canada. Moi, j'ai exercé
cette profession d'avocat en immigration et je vous confirme qu'il y a
plusieurs gens, plus de gens qui sont déportés du Canada, annuellement.
Vous dites qu'une grande majorité des pays
n'accepte pas d'immigrants. Ce n'est pas vrai qu'une grande majorité des pays n'accepte
pas d'immigrants, non, je veux dire, vous me ferez la lecture sémantique. Une
grande majorité, plus de la moitié des pays de cette planète, c'est faux.
Il y a plein de raccourcis, il y a plein de
ouï-dire : «j'ai entendu», «on m'a dit». Moi, j'ai lu beaucoup de
préjugés, je n'ai pas vu beaucoup de sources. Honnêtement, j'ai rarement été
autant en désaccord avec quelqu'un, je vais vous le dire très franchement.
Je vous laisse la dernière minute. Vous
avez le droit de répondre. Je vais vous donner un droit de réponse, mais moi,
je trouve ça absolument inacceptable.
M. Sirois (André) : J'ai
présenté deux propositions. J'ai présenté mon texte. Et, dans bien des cas...
Pour ce qui est, par exemple, des pays qui acceptent ou qui n'acceptent pas des
immigrants, il y a 193 États aux Nations unies, et on peut facilement
vérifier. Et vous allez voir que ce que je vous dis là est vrai.
M. Cliche-Rivard : Ça me
surprendrait.
M. Sirois (André) : Bon. Ça,
vous pouvez ne pas être d'accord, mais je suis prêt à ce qu'on fasse un
inventaire de ça. Et ça pourrait être le premier travail de la Commission. Je
vous assure de ça parce que je l'ai fait, je l'ai vérifié dans certains cas. Parce
qu'aux Nations unies en ce moment, une très grande majorité des employés veut s'en
venir au Canada. Et les gens venaient me voir. Et, si j'avais voulu ouvrir une
pratique de droit d'immigration là-bas, je serais encore là à temps plein. Et
je n'ai pas voulu faire ce choix-là.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Maître Sirois, le temps est terminé. Alors, c'est ce qui
met fin à cette audience. Merci beaucoup pour l'appart à nos travaux.
Alors, je suspends la...
Une voix : ...
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : ...J'ajourne, en fait, maintenant j'ajourne les travaux au
mercredi 27 septembre 2023, après les avis touchant les travaux des
commissions. Merci beaucoup. Bonne soirée, Mmes et MM. les députés.
(Fin de la séance à 21 h 37)