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(Quinze heures quarante-deux minutes)
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Alors à l'ordre, s'il vous plaît. Ayant constaté le quorum,
je déclare la séance de la Commission des relations avec les citoyens ouverte.
La commission est réunie afin de procéder
à l'étude du volet Lutte contre le racisme des crédits budgétaires du
portefeuille comité... Conseil exécutif pour l'exercice financier 2023-2024.
Une enveloppe d'une heure a été allouée pour l'étude de ces crédits.
Mme la secrétaire, y a-t-il des
remplacements?
La Secrétaire : Oui, Mme la
Présidente. Mme Caron (La Pinière) est remplacée par Mme Maccarone
(Westmount—Saint-Louis); et Mme Massé (Sainte-Marie—Saint-Jacques), par M. Fontecilla
(Laurier-Dorion).
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup. Nous allons donc procéder à une discussion
d'ordre général, incluant les questions et les réponses. Et pour favoriser...
je favorise une discussion libre, simplement, s'adresser à la présidence pour
le bon fonctionnement, s'il vous plaît. Alors, je suis maintenant prête à
reconnaître à une première intervention de l'opposition officielle avec un
premier bloc d'échange. Mme la députée de Westmount-Saint-Louis, la parole est
à vous pour une période de 18 minutes 7 secondes.
Mme Maccarone : Merci, Mme la
Présidente, collègues, M. le ministre, et bienvenue à votre équipe également.
Je veux commencer à poser des questions par rapport à mettre fin aux cas de
discrimination policière. Action un du plan qui était déposé par le Groupe d'action
contre le racisme, c'est votre première action, de rendre obligatoire l'interdiction
des interpellations policières aléatoires. On... nous le savons tous, on voit
dans notre revue de presse, on a lu le rapport, ceux qui suivent le dossier de
près surtout, que les personnes noires et arabes sont interpellées plus fréquemment
que les personnes blanches. On peut lire tous les documents qui ont été
préparés par la Ligue des droits et libertés. Et on sait que, tout
dernièrement, à la fin de l'année passée, le juge Yergeau a déposé son jugement
en ce qui concerne les interpellations routières et que lui disait que nous
devons mettre fin à l'article 636 du code routier.
Malgré tout ça, malgré que c'est la
première action dans tout les 25 actions qui ont été posées ou proposées
par le Groupe d'action contre le racisme, le gouvernement a quand même pris la
décision d'aller en appel du jugement qui a été déposé. Et, avant d'entendre le
ministre pour sa réponse, je comprends qu'à l'intérieur du projet de loi n° 14,
dont j'ai aussi le privilège de siéger comme membre... membre de la Commission,
je comprends que, dans la réponse du ministre, il va peut-être soulever qu'il y
a des lignes directrices qui vont faire partie du projet de loi n° 14,
mais les lignes directrices font beaucoup... ne font pas le consensus parce qu'il
n'y a personne qui sera consulté en ce qui concerne ces lignes directrices. Ça
fait qu'il y a beaucoup de préoccupations. Ça fait qu'est-ce que la ministre
constate que c'est quand même une promesse brisée du gouvernement, car c'est
leur promesse phare puis ils sont allés en appel?
M. Skeete : Bien, bonjour,
tout le monde. Salutations à tous les collègues. Et merci à mon équipe qui m'accompagne
aujourd'hui. Bien, il y a beaucoup de choses qui sont évoquées dans la question
de la collègue. Premièrement, je pense que, d'emblée, il faudrait faire la
différence entre les interpellations aléatoires et les interceptions
policières. Dans le rapport du Groupe d'action contre le racisme, il y a eu
question d'interdire les interpellations aléatoires. Ici, on parlait, dans la
question de la collègue, des interceptions policières. Donc, ma première
question, c'est : De quoi on parle ici, aujourd'hui, chère collègue?
Mme Maccarone : Que le
gouvernement sont allés à l'appel en ce qui concerne le jugement du juge
Yergeau. Pourquoi avez-vous fait ça quand ça fait partie de votre promesse
phare pour le Groupe d'action contre le racisme?
M. Skeete : Mais est-ce que
vous me posez la question sur des interceptions policières aux interpellations
aléatoires?
Mme Maccarone : Les
interceptions policières.
M. Skeete : O.K....
M. Skeete : ...à ce qui trait
les... les interceptions policières, effectivement, dans le cas de sécurité
routier... routière, il y a la notion des interceptions policières. Le groupe
d'action avait statué sur les interceptions aléatoires. Par contre, il y avait
une grogne dans la communauté et dans plusieurs communautés racisées, par
rapport aux interceptions policières, notamment qu'effectivement il y avait une
plus grande proportion de gens racisés qui se faisaient interpeller de la
manière. Nous, on constate qu'avec les ajustements dans le projet de loi
n° 14 qu'on a une bonne balance. D'un côté, on permet aux policiers de
continuer leur travail qui est très important auprès de les communautés, je
vous rappelle que la disposition 636 permet aux policiers de constater des
infractions, notamment en lien avec la... avec la conduite en état d'ébriété,
et c'est un outil indispensable pour la protection du public. Donc, quand on a
aboli cet outil-là, nous, on est d'opinion, au gouvernement, et le procureur
général qui a pris la décision d'aller en... en appel que ça va lier les mains
de nos policiers en matière de la sécurité publique. Par contre, il y a quand
même le malaise qui existe dans les communautés racisées et autochtones qu'il y
a des interceptions qui sont plus souvent qu'autrement visées vers des gens qui
sont racisés. C'est la raison pour laquelle on a déposé le projet de loi
n° 14 qui va venir baliser les interceptions pour être sûr que d'un côté,
on maintient la loi et l'ordre et la paix sociale, et de l'autre côté, qu'on
vient aussi répondre aux personnes qui pensaient qu'il y avait de la
discrimination dans le volet des dispositions de 636.
Mme Maccarone : Mais vous,
vous constatez que les groupes racisés ne sont pas contents avec cette décision
d'aller en appel du... le jugement.
M. Skeete : J'ai entendu des
groupes dire qu'ils n'étaient pas surpris qu'on allait aller en appel. Il y a
des groupes racisés qui m'ont dit : M. Skeete, je suis avocate — j'ai
une personne en tête — je suis avocate, il est clair que l'État
allait aller en... en appel, c'était clair qu'il allait le faire. Par contre,
il y a le malaise du fait qu'il y a des gens qui sont racisés qui se font
intercepter plus souvent qu'autrement, donc qu'allez-vous faire? Puis c'est à
ce moment-là que j'avais dit à cette dame-là en question : Vous allez
voir, la deuxième mouture du projet de loi de la Sécurité publique va aller
plus loin que la dernière. Puis c'est effectivement ce qu'on a livré avec le
projet de loi n° 14.
Mme Maccarone : Que
pouvez-vous nous dire en ce qui concerne le recensement de données? Que c'est
indiqué dans les crédits que vous avez soumis, que depuis le 30 mai 2022, tous
les corps de police disposent des outils pour leur permettre... de... leur
permettant de déployer le cadre de collecte de données au sein de leur
organisation. C'est quoi ces données? Qu'est-ce que ça nous indique? Parce que
lors de les auditions pour le projet de loi n° 14, nous avons entendu
qu'il y a très peu de données et la Ligue des droits et de libertés nous disent
qu'il n'y a aucune donnée. Alors, on a entendu seulement un corps de police qui
nous ont dit que ça se peut que, oui, c'est recensé. Que dites-vous en ce qui
concerne ceci puis avez-vous des données que vous pourriez déposer?
• (15 h 50) •
M. Skeete : Lorsqu'on a
entamé le groupe de réflexion, le Groupe d'action contre le racisme, ce qui
a... bien, en fait, ce qui m'a choqué, c'était l'absence totale d'inquiétude
par rapport au gouvernement du Québec avant la formation de ce groupe d'action
là. Il y avait plusieurs gouvernements antérieurs qui avaient pris la peine de
faire des rapports, de dénoncer des problèmes, mais ce qu'on a remarqué, c'est
que tous ces rapports-là avaient été tablettés. C'était comme si le
gouvernement voulait un peu savoir, mais pas trop vraiment savoir comment
s'attaquer au débat du racisme. Heureusement, quand le premier ministre a fondé
le Groupe d'action contre le racisme, on est arrivé avec une analyse de
qu'est-ce qui existait avant, on a colligé ça avec des rencontres pour vraiment
mettre le point sur où est-ce qu'on était rendu dans le dossier de la lutte au
racisme et on est arrivé avec 25 actions qui nous permettent de bouger
l'aiguille comme on voulait en matière de la lutte au racisme. Alors, pour
répondre à la question de la collègue, c'était décevant de constater, et
c'est... ça demeure décevant, qu'il n'y avait pas de données, notamment en
matière de profilage racial. Donc, une des dispositions qu'on s'est données
dans le projet de loi n° 14, c'est cette obligation-là d'aller à la
collecte de données.
Mme Maccarone : Ça fait que
ça fait depuis un an que vous... que les... on peut... collecter ces données,
est-ce que vous avez les données à partager avec nous? Parce que vous dites que
vous êtes déçu qu'il n'y a rien qui a été collecté dans le passé, ça fait
qu'avez-vous un rapport à déposer? Parce qu'à date, on n'a rien vu en ce qui
concerne ces données que vous dites sont maintenant possibles depuis un an.
M. Skeete : Oui. Il y avait
des... bien, en fait, ce que les directives dans le projet de loi n° 14
vont nous permettre de faire, ça va être de mandater aux différents corps
policiers d'aller chercher la collecte de cette donnée-là.
Mme Maccarone : Ce n'est pas
le sens de la question. Dans ce que vous avez écrit ici, dans les crédits qui
sont envoyés, je vous réfère, MCE, la page 70.1, ça dit que...
Mme Maccarone : ...maintenant,
depuis le 30 mai 2022, tous les corps de police disposent des outils leur
permettant de déployer le quart des collectes de données au sein de leur
organisation. Ça fait que c'est fait ou non? Puis, si oui, pourquoi nous
n'avons pas les données?
M. Skeete : Bien, un, je vais
valider avec mon équipe, à savoir où est-ce qu'on est rendus, la collecte de
données. Mais, deux, le mois de mai, ça ne fait pas une année, donc j'imagine
qu'on est après faire une synthèse de... les données. Mais je vais valider si
vous me laissez 30 secondes.
Mme Maccarone : Allez-y.
Pendant que vous êtes en train de valider, mes sous-questions, en ce qui
concerne les données, c'est : Est-ce qu'ils sont ventilés? Parce qu'on
sait aussi que ce qui nous manque souvent, c'est dans les données qu'on reçoit,
puis le CDPDJ aussi nous dit : Ce serait bien que les informations sont
quand même catégorisées par le groupe des minorités ethniques, par exemple, que
ce soit une personne arabe, une personne autochtone, une personne noire.
M. Skeete : J'ai la réponse
pour la collègue. En fait, on n'a rien reçu encore des corps policiers. C'est
une information qui est actuellement à se faire collecter. Puis, juste pour vous
remettre en perspective. Le projet de loi 14 va nous permettre d'obliger
de remettre ces données-là. Donc c'est un nouveau pouvoir qu'on va avoir, qu'on
n'avait pas avant. Donc je ne peux pas exclure qu'actuellement il y a une
collecte qui a lieu. Mais ce que le projet de loi 14 va nous permettre de
faire, c'est d'obliger la transmission au gouvernement de ces données-là.
Mme Maccarone : Je souhaite
rester sur la notion des données, hein? J'ai hâte à avoir... de mettre la main
sur les données dont le collègue a dit : Ils seront bientôt disponibles.
Puis je pense qu'il y a plusieurs groupes qui sont... hâte, qui ont hâte à
avoir ces informations aussi. Mais je vous réfère aussi au cahier de crédits,
le 40.1. On a posé la question pour le Bureau de coordination de la lutte
contre le racisme, les crédits dédiés ainsi que les copies, les études, les
analyses, les recherches, les sondages, les scénarios ou projections concernant
le caractère intersectionnel de la discrimination. C'est une demande qu'on
entend depuis plusieurs années de la CDPDJ. Puis la réponse que nous avons eue,
c'est : Il n'y a aucune étude, aucune analyse, aucune recherche, aucun
sondage, aucun scénario ou projection portant sur ce sujet n'ont été menés par
le Bureau de la coordination de la lutte contre le racisme durant la période de
2022-2023. Comment expliquez-vous ça?
M. Skeete : Bien, je
l'explique par le fait que nous, on se concentre actuellement sur le mandat qui
nous a été donné, qui est de répondre aux 25 actions et de bouger
l'aiguille sur ces 25 actions. Ce qui ne nous empêche pas par contre de
regarder d'autres dossiers. Il y a des dossiers qui viennent à l'attention du
bureau qui n'ont rien à voir avec les 25 actions qu'on traite à tous les
jours, justement pour lutter contre le racisme. Puis j'aimerais juste rassurer
la collègue que le racisme, pour nous, c'est tolérance zéro. Donc on s'attaque
à toutes ses formes.
Mme Maccarone : J'entends le
ministre, mais j'avoue, je suis perplexe. Comment évaluer le succès des
initiatives si on ne les mesure pas, s'ils ne sont pas évalués, si vous ne
faites aucune étude, aucune recherche, aucun sondage, aucun scénario, aucune
projection portant sur le sujet? Comment évaluez-vous le succès de... les
critères que vous, vous dites qui sont prioritaires pour vous?
M. Skeete : Vous posez une
question que j'ai posée moi-même au bureau. Pour rappeler dans le temps, on
s'est engagé avec le Bureau de la lutte contre le racisme de répondre aux
25 actions. Mon... je suis le ministre responsable de 13 de ces
actions-là. Et ce qu'on fait, c'est on a ce tableau-là qu'on regarde à tous les
jours pour être sûr qu'on répond aux critères. Le critère numéro un pour rendre
obligatoires les interdictions et les interceptions policières, c'était de
regarder comment on peut avec le projet de loi 14 venir encadrer le
travail des policiers ainsi. On a aussi dans le critère pour les logements, la
discrimination au logement, on est venus financer des initiatives à la CDPDJ
pour justement permettre aux gens qui se sentent lésés par la discrimination de
porter plainte et d'être accompagnés dans le processus judiciaire. Donc, quand
on arrive avec une action, on arrive pour répondre à un des items dans notre
checklist, là, pour... en bon en anglais, on arrive pour enlever celui-là puis
on agit directement en lien avec la question. Ça fait qu'on regarde ce qui a
été demandé. Au fur et à mesure qu'on bouge la balle sur les items qui nous sont
demandés, on vient pour les cocher puis on considère que c'est répondu ou pas.
Mme Maccarone : Je veux être
claire, les mesures sont louables, c'est… je pense qu'on ne peut pas être
contre les mesures qu'on souhaite de mettre en place pour mettre fin au
racisme. Ce n'est pas la question. La question, encore une fois, je reviens
puis malgré que le ministre dit : Oui, on peut cocher pour dire qu'on a
fait telle action, on a fait telle action, mais si on ne recense aucune donnée,
si on ne fait aucune recherche, si on ne fait aucun sondage, comment
pouvons-nous s'assurer que les communautés qui sont marginalisées, les
communautés qui sont affectées aussi, ils font partie de... le processus...
Mme Maccarone : ...qui sont
consultés, qui peuvent dire oui, ça fonctionne, non, ça ne fonctionne pas. Les
montants sont importants, puis on peut avoir un débat pour le... sur le budget,
que ça soit 23 000 $ ou 4 millions que nous allons mettre vers l'avant pour
mettre fin au... pour la lutte contre le racisme, mais, si nous ne sommes pas
en train de l'étudier puis mesurer, comment s'assurer qu'on a un effet? Il faut
recenser du data, il faut savoir que le pourcentage, les plaintes sont à la
baisse, par exemple, puis... Tu sais, je n'aurai pas assez de temps dans ce
bloc peut-être pour avoir un échange là-dessus, mais est-ce que c'est prévu de
faire des études, des scénarios, de la recherche, des analyses au lieu de
toujours juste dire : Mais voici, on va mettre une mesure en place, voici
l'argent que nous sommes en train de... Puis, encore une fois, je réitère,
c'est bien, ce n'est pas une question d'être contre, mais «if you can measure
it, you can manage it». Comment s'assurer qu'on ne fait pas fausse route puis
l'argent que nous sommes en train d'investir va porter fruit?
M. Skeete : Mais il y avait
deux questions que j'ai entendues, mais je vais répondre à la dernière. En
fait, on suit les actions. Puis ce qui est le fun avec la manière qu'on a
décidé de procéder au bureau, c'était : on a identifié les 13 actions
qu'on doit agir, puis c'est des actions concrètes, donc on doit les cocher.
Dans le cas d'une des actions, c'est d'avoir une campagne nationale de
publicité pour la sensibilisation. Je pense que la collègue serait d'accord
qu'une fois qu'on a fait une campagne nationale puis on la répète
annuellement... je pense qu'on peut cocher la case. Donc, on est un peu
là-dedans.
Ça fait que je pense que je comprends son
désir d'avoir des métriques vérifiables et concluantes. Moi, je répondrais pour
dire que, quand on dit qu'on veut encadrer le travail policier puis on
l'encadre avec un projet de loi, je pense que deux personnes intelligentes
peuvent s'asseoir puis dire : O.K., on a réussi à le faire. Donc, je
comprends le sens de la question. Moi, je répondrais pour dire qu'on le fait
actuellement.
Mme Maccarone : On va être en
désaccord, évidemment, parce qu'évidemment, pour moi, ça prend des données pour
savoir que les mesures qu'on va mettre vers l'avant, que ça soit l'adoption
d'une loi ou autres mesures, comme je dis, l'investissement, est-ce que ça
fonctionne ou non, le seul moyen de le faire, c'est de faire de la recherche,
le seul moyen de le faire, c'est de recenser du data pour dire : Mais
voilà, on a vu une baisse dans le nombre de plaintes, on a vu que... suite à
l'adoption du projet de loi n° 14, on a vu qu'on a beaucoup moins de plaintes
en ce qui concerne les personnes qui se disent qu'ils ont fait face au
profilage racial, par exemple.
Ça fait que j'espère que cela sera pris en
considération parce qu'encore une fois, sans avoir des études, sans avoir de la
recherche, c'est bien... c'est bel et bien de dire que nous avons des mesures
que nous souhaitons mettre en place, mais c'est impossible de dire que ça
fonctionne ou non. C'est bien, on coche sur la liste des idées qu'on souhaite
mettre vers l'avant, mais de savoir que ça fonctionne, que les communautés
racisées sont soulagées puis qu'ils disent : Oui, ça fonctionne, ça va
être important de leur entendre.
Alors, est-ce que vous faites au moins des
sondages auprès de ces communautés qui sont marginalisées puis qui sont
affectées pour savoir si eux sont contents avec les mesures et s'ils peuvent
valider que les mesures que vous mettez en place, que vous privilégiez fonctionnent
pour eux?
M. Skeete : Bien, je ne veux
pas insister, mais, tu sais, une des recommandations qu'on a, c'est de
s'assurer que 50 % des conseils d'administration gouvernementaux aient une
personne minoritaire... une minorité visible présente. Et là on est à
61 %. Ça fait que je pense qu'on peut cocher la case. Ça fait que je pense
qu'on dit la même chose. L'objectif, c'est de réussir les 25 actions qu'on a
promises puis c'est notre intention de les livrer.
Pour répondre à la deuxième question...
Pouvez-vous me rappeler c'était quoi vite, vite?
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Une minute 30 pour votre bloc.
Mme Maccarone : Que
faites-vous pour assurer que les communautés marginalisées, racisées font
partie de la communication avec vous pour dire que ça fonctionne, ça ne
fonctionne pas puis ce qu'ils souhaitent voir comme changements, modifications?
Ou ça peut aussi être : Bravo!, tu sais...
M. Skeete : Bien, en fait, je
vous coupe parce qu'il vous reste une minute, puis je veux répondre à votre
question.
• (16 heures) •
Mme Maccarone : Allez-y.
M. Skeete : Depuis la
création du Groupe d'action contre le racisme, il y a eu moult consultations,
que ça soit un à un ou que ça soit différé, on a fait... Je ne peux pas
imaginer le nombre de consultations, de gens qu'on a rencontrés. Justement,
récemment, dans le cadre du projet de loi n° 14, on a rencontré et les groupes
policiers et les groupes communautaires en amont du dépôt du projet de loi pour
leur expliquer un petit peu qu'est-ce qu'on voulait, puis qu'est-ce qu'il
manquerait, puis qu'est-ce qu'on pourrait considérer pour mettre dans le projet
de loi.
Donc, ça se fait en continu. Ce n'est pas
un processus formel. Ça se fait en continu, ça se fait... Je rencontre souvent
mon collègue député de Laurier-Dorion à des événements à Montréal et un peu
partout. Donc, ça se fait en continu et c'est quelque chose qu'on garde dans
notre rétroviseur et en avant parce que ces gens-là doivent se sentir écoutés
et entendus. Alors, on assure une présence sur le terrain. Mais, quand il y a
lieu, on les consulte.
Mme Maccarone : Qui avez-vous
consulté?
M. Skeete : Bien, je peux
vous sortir une liste. Avec votre permission, ça me fait plaisir de sortir la
liste des... une cinquantaine... 25, 30 40...
Mme Maccarone : Avec...
M. Skeete : Il y a plusieurs
groupes qu'on a rencontrés. Ça me ferait plaisir de vous partager ça à un autre
moment.
Mme Maccarone : Bien, si vous
pourriez déposer la liste, je pense...
Mme Maccarone : ...que ce
serait pour le bien-être de tous les membres de la commission, avec la
permission de la présidente.
M. Skeete : Je suis de bonne
foi à vouloir partager ça avec vous. Je mets un bémol, certains groupes qu'on a
consultés ne souhaitent pas être identifiés de manière publique.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup.
M. Skeete : Alors, ce que je
peux vous donner, je vais vous le donner.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Le bloc étant terminé, on poursuivra pour le prochain bloc.
On est maintenant rendu au bloc du deuxième groupe d'opposition. M. le député
de Laurier-Dorion, vous bénéficiez d'une période de 12 minutes cinq secondes.
La parole à vous.
M. Fontecilla : Merci, Mme la
Présidente. Bonjour, M. le ministre. Je salue également les membres de votre
équipe. Ça me fait plaisir d'être ici pour ce sujet si important. J'aimerais
revenir sur la question du profilage racial, le phénomène global, et articuler
plus particulièrement autour des interpellations policières aléatoires. On va
aller là-dessus, là. Écoutez, le Groupe d'action contre le racisme a été
catégorique, là, sous cette question-là. Je lis l'action, action numéro 20 :
"Rendre obligatoire l'interdiction des interpellations policières
aléatoires», "rendre obligatoire". Et, il y a quelques mois, il y a
eu, dans l'affaire Luamba, le jugement, le jugement Luamba par le juge Yergeau,
qui était tout aussi catégorique, là, disant que les interpellations policières
aléatoires fondées sur l'utilisation de l'article 636 du Code de la sécurité
routière amenaient clairement des situations de profilage racial. Et il rendait
un verdict lapidaire.
Le gouvernement du Québec devait carrément
enlever... enlever cet article, l'article 636. Votre gouvernement, là, a fait
une volte-face assez... assez... en disant qu'il allait porter en appel le
jugement Yergeau et, par le fait même, qui confirmait, en quelque sorte...
venait confirmer la recommandation de votre propre gouvernement, signée par six
ministres du gouvernement de la CAQ, là, il faut le rappeler, là, et renvoyant
le tout au projet de loi 14, qui est à l'étude en ce moment, là, qui stipule qu'il
va y avoir des directives du gouvernement. Le ministère de la Sécurité publique
se donnait le pouvoir d'émettre des directives concernant les interpellations
aléatoires sans qu'on connaisse, dans le projet de loi qu'on est en train d'étudier,
là, sans qu'on connaisse le contenu de ces directives-là. Et qu'est-ce qui est...
Quelle est la garantie que vous donnez à la population racisée, là, qu'il y a
une réelle volonté d'éliminer, d'interdire carrément, là, les interpellations
policières aléatoires? On a plutôt l'impression qu'entre la déclaration du
début, "rendre obligatoire l'interdiction des interpellations policières
aléatoires" et le projet de loi 14, vous avez fait volte-face, vous avez
subi la pression des lobbys et vous avez renoncé à prendre et à rendre
obligatoire l'interdiction des interpellations policières aléatoires.
M. Skeete : Bien, humblement,
je suis en désaccord avec le constat de mon collègue pour deux raisons, puis je
ne veux pas être tannant, là, mais il faut vraiment faire la différence entre
les interceptions policières et les interpellations aléatoires.
Malheureusement, on a tendance à mélanger les deux, les deux ne sont pas
pareils. Une interception policière se fait dans le cadre de 636, et sa seule
utilité, c'est pour valider la capacité de conduite en lien avec le Code de sécurité
routière. Tout autre motif discriminatoire, avec le projet de loi 14, entre
autres, va être banni. Donc, on vient répondre à la crainte numéro un des gens
qui se sentent interpellés ou profilés pendant la conduite. Interpellations
aléatoires, c'est un policier qui est dans la rue, avec qui on circule, puis il
dit : Hé! Vous êtes qui, vous? Puis est-ce que je peux voir votre pièce d'identité?
Ça, c'est une interpellation aléatoire. Alors, il faut vraiment distinguer les
deux.
Nous, ce qu'on vient de faire, avec le
projet de loi 14, c'est, on vient dire si, pour des motifs discriminatoires,
vous faites une interception policière, en vertu de 636, ceci n'est plus permis
et la directive va venir clarifier ceci. Alors, moi, je ne suis pas d'accord
que c'est une volte-face. Je considère qu'on livre la marchandise tout en
assurant que les policiers ont les outils nécessaires pour faire le contrôle de
la sobriété sur les routes.
M. Fontecilla : On s'entend
que l'article 636, l'article...conducteurs de véhicules automobiles, là, la
motivation principale, c'était les contrôles de l'alcool au volant, situation
qui a changé grandement depuis l'instauration de cette mesure-là. Mais, dans
les deux cas, que ce soit une interpellation aléatoire ou une interception, on
aboutit au même...
M. Fontecilla : ...même
résultat, c'est-à-dire : les populations racisées, les populations noires,
les populations arabes et... ou autres subissent des interceptions ou des
interpellations plus souvent, là, que le reste de la population. Donc, vous
devriez agir dans les deux fronts, parce que les deux situations aboutissent à
une situation de profilage, de traitement différencié de certaines populations.
Pourquoi ne pas aller directement au but, là, et interdire aux forces
policières d'effectuer ce type d'interventions, qui aboutissent à du profilage
racial?
M. Skeete : Bien, encore une
fois, je ne veux pas être difficile ou tannant, mais on agit sur les deux
fronts. Premièrement, lors d'une interpellation aléatoire, le citoyen n'est pas
obligé de répondre aux policiers. Donc, il n'y a pas de problème. Le seul défi
qu'on a, c'est de rendre cette information-là accessible, puis je le fais quand
je rencontre justement les groupes racisés, je leur rappelle qu'une
interpellation aléatoire, un citoyen n'est pas obligé de s'identifier lorsqu'on
lui demande de s'identifier par le policier. Donc, en partant, il n'y a pas de
problème sur ce bord-là, il faut juste communiquer la nouvelle. De l'autre
côté, on vient interdire dans le projet loi n° 14 les interceptions policières
pour motifs discriminatoires, donc on répond à la question.
M. Fontecilla : M. le
ministre, la discrimination... les interventions sur... avec un... fondées sur
un motif racial sont interdites à la base par les chartes. Mais elles
s'effectuent pareil de façon subreptice, de façon détournée, et c'est ça, le
véritable problème, là. Votre gouvernement a la responsabilité d'interdire
cette possibilité-là, et le jugement Yergeau a été très, très clair, là, les
motivations discriminatoires d'une intervention policière sont pratiquement
impossibles à démontrer. Donc, il faut éliminer l'article qui permet justement
ce traitement différencié, là, sur les populations racisées, là. Et vous avez
décidé... Jusqu'à présent, on n'a pas la preuve que vous allez agir. Vous dites
dans votre projet de loi n° 14, là, qu'il va y avoir des directives, là.. On ne
les connaît pas, ces directives-là, là. Pourquoi ne pas, dans le cadre de votre
projet de loi n° 14, aller à la source et dire... éliminer carrément tous les
articles de loi qui permettent le profilage racial, et, si vous voulez être
redondant, de l'interdire encore une fois, parce que c'est quelque chose qui
est déjà interdit?
M. Skeete : Bien là, je pense
qu'on arrive à quelque chose de vraiment intéressant, parce que, vous avez
raison, la charte protège déjà les citoyens par rapport à la discrimination, et
surtout un traitement du genre. Par contre, l'absence d'une directive policière
nous enlève l'outil de faire une sanction si jamais on ne suit pas les
recommandations. Et c'est ça qui est novateur avec l'approche qu'on prend,
parce qu'effectivement un citoyen avait toujours le droit de contester devant
la cour une interception ou un comportement policier qu'il jugeait
discriminatoire en vertu de la Charte des droits de la personne.
Mais là, ce qu'on vient introduire, c'est
une notion de conduite policière. Maintenant, un policier qui est démontré
d'avoir fait une interception policière discriminatoire, pour des motifs
discriminatoires, non seulement va avoir des sanctions intégrées, mais on va
avoir des leviers pour agir directement en lien avec avec sa fonction. Puis on
insiste beaucoup sur la directive, mais il y a d'autres outils aussi dans le
projet de loi n° 14. Il y a l'obligation d'avoir de la formation continue, qui
est un enjeu important. Il y a certains policiers qui font une carrière puis,
depuis 15, 20 ans, ils n'ont pas reçu de formation. Il y a aussi la nouveauté
qui va donner à la commissaire... Maintenant, si le projet de loi passe, c'est
le tribunal de déontologie qui va donner le droit à la commissaire qui est en
place de faire proactivement des enquêtes.
• (16 h 10) •
Donc, on arrive puis on coche des leviers
qui font en sorte que l'inquiétude du collègue par rapport au fait que, si oui
ou non, on va agir, bien, les autres outils sont assez clairs, là. Je pense
que, premièrement, il faut présumer de la bonne foi du gouvernement. Mais, en
tout et partie, je pense qu'on est... on révolutionne un petit peu la façon de
faire, puis je pense que c'est à quoi les citoyens s'attendaient, mais non
seulement ça, mais je pense qu'on est rendu là. Puis je dis ça tout en disant
aussi que nos policiers, je pense... Ce qui est souvent et trop souvent oublié
dans ce débat-là, c'est la grande contribution de la vaste majorité des policiers
qui font un bon travail. On parle d'une minorité de gens qui, s'ils ne font pas
une bonne job. Mais là, il va y avoir des outils pour assurer une correction.
Mais la vaste majorité des policiers font un bon travail.
M. Fontecilla : M. le ministre,
j'aimerais vous amener ailleurs, là, concernant votre recommandation
d'effectuer des formations destinées sur la question de racisme et
discrimination à l'ensemble des employés de l'État. On a appris dans un article
de Radio-Canada, là, du 5 avril dernier par le journaliste Thomas Gerbet que le
ministre et le ministère de la Santé et Services sociaux avaient censuré une
campagne de formation effectuée par le CIUSSS....
M. Fontecilla : ...l'Ouest de
l'île de Montréal, là, qui mentionnait notamment l'existence du profilage
racial. Ceci étant, là, si censure existe, vous avez été dans le sens contraire
de ce que stipule la loi que vous avez... que votre gouvernement a présenté, la
Loi sur la liberté académique. Est-ce que votre gouvernement a censuré une
formation préparée par des académiciens, là, et qui mentionnait clairement
l'existence du racisme systémique au Québec?
M. Skeete : Je pense qu'on a
déjà répondu à cette question, mais, pour le bénéfice des gens qui nous
écoutent aujourd'hui, ni moi ni mon collègue ministre de la Santé ne sont
intervenus dans cette matière-là. Mais ce qui est important à savoir, c'est...
il y a deux nouveautés que le gouvernement a lancées. On a ici une formation
maintenant destinée pour la formation sur les réalités autochtones puis il y a
une formation qui se dessine à l'intérieur du Bureau de la lutte contre le
racisme qui va toucher l'ensemble de la fonction publique pour le racisme, la
lutte au racisme. Donc, on s'en vient avec une formation qui va être disponible
à tous les employés, qui va nous permettre de sensibiliser la fonction publique
en général des enjeux avec le lien avec la lutte au racisme. Donc, je pense que
les choses vont très bien.
M. Fontecilla : Mais est-ce
que le cabinet du ministre de la Santé et Services sociaux a censuré une
formation destinée aux employés de la santé et services sociaux, là, qui
mentionnait spécifiquement l'existence du racisme systémique?
M. Skeete : On a plutôt...
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : ...
M. Skeete : Pardon?
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Il reste une minute.
M. Skeete : Merci beaucoup,
Mme la Présidente. On a plutôt harmonisé la formation. Moi, je pense que c'est
important que le gouvernement ait une formation qui est destinée à l'ensemble
de la fonction publique au lieu d'y aller à la pièce. On a fait ce choix-là, et
je suis confiant que la formation va vraiment répondre aux besoins de la
fonction publique. C'est important de former la fonction publique sur les
réalités d'un Québec qui change, qui est en transformation. Alors, le bureau,
actuellement, travaille sur une formation qui va être disponible à l'automne,
et on est optimistes que la grande majorité de la fonction publique va pouvoir
en bénéficier rapidement.
M. Fontecilla : Est-ce que
vous croyez, comme l'ensemble du monde académique, là, que la notion de racisme
scientifique... est scientifiquement établie?
M. Skeete : Bien, je dirais
que, malheureusement, il n'y a pas de consensus, quand on parle de racisme
systémique, c'est la raison pour laquelle notre gouvernement a décidé de ne pas
faire le débat de sémantique. Nous, ce qu'on a décidé de faire, c'est de dire,
mettons, la moitié de la population pense qu'il y a du racisme systémique puis
l'autre moitié pense que non. Mais je pense que la vaste majorité, je dirais
95 % des Québécois, sont pour la lutte au racisme. Nous, on a décidé de se
concentrer là-dessus, puis la preuve, c'est qu'il n'y a jamais eu un
gouvernement de l'histoire du Québec qui en a fait autant pour la lutte au
racisme.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup. C'est le temps que nous avions. Je vais
juste vous rappeler de vous adresser à la présidence. Ça permet à notre
technicien aussi de ne pas trop avoir de difficulté à jouer avec l'ouverture
des micros. Je me retourne du côté de l'opposition officielle, vous... pour le
deuxième bloc, 18 minutes, deux secondes. La parole est à vous.
Mme Maccarone : Merci. Je
veux renchérir sur les questions que vous venez d'être posé, M. le ministre, en
ce qui concerne la formation. J'entends les réponses que vous avez données,
mais je veux quand même revenir sur l'article qui était sorti, par Thomas
Gerbet, c'est vraiment un excellent article. Pourquoi que c'est intéressant? Je
pense que la chronologie est importante, puis c'est pourquoi que je suis déçue
de la réponse que vous venez de donner à mon collègue, parce que, si on revient
à la chronologie, on commence en septembre 2020, on a le décès de Joyce
Echaquan, décembre 2020, le Groupe d'action contre le racisme recommande la
formation pour sensibiliser les employés de l'État. Le début de 2021, le
ministère de Santé et Services sociaux mandate l'Institut universitaire...
rattaché au CIUSSS du Centre-Ouest-de-l'Île-de-Montréal pour réaliser la
formation sur le racisme. Ça fait que vous avez octroyé un contrat, pendant un
an, il y a deux chercheuses qui produisent la formation interactive avec
l'appui d'experts pédagogiques et technologiques du CIUSSS de l'Estrie-CHU de
Sherbrooke. Octobre 2020, la version finale du projet est approuvée par un
comité de validation, puis rendu 20 décembre 2020, la formation est annulée par
le ministère. Ça fait qu'on ne peut pas dire qu'il n'y avait pas beaucoup
d'efforts qui a été mis à l'œuvre en ce qui concerne ce rapport. Puis, si on se
fie sur qu'est-ce que les professeurs titulaires comme Mme... a dit, c'est de
la censure et de l'ingérence politique, parce qu'il y avait quand même un
rapport qui a été préparé.
Qu'est-ce qui explique... comment qu'il
explique ça, M. le ministre, à part, bien, on dit qu'on va faire notre propre
affaire à l'interne? Parce que, politiquement, on vient de dire qu'on a dépensé
beaucoup d'argent pour leur demander de préparer quelque chose, puis là, après
deux ans, on jette le bébé et l'eau du bain dans la poubelle. C'est fini, mais
là on a quelque chose qui est prêt, c'est toujours prêt, nous pourrons toujours
le mettre à l'oeuvre. Puis je ne comprends pas la réponse, ça fait que est-ce
qu'il peut clarifier pourquoi? Est-ce que le travail qu'ils ont fait depuis les
deux dernières années sera...
Mme Maccarone : ...plus tard,
est-ce qu'on va... Ou est-ce qu'on va juste le tabletter puis on ne fait rien
avec ce beau travail par ces... cette équipe de recherche vraiment chevronnée?
M. Skeete : Ça me fait
plaisir, Mme la Présidente, de répondre à la collègue. Elle a raison, la
chronologie est importante. En premier lieu, il y a eu le décès de madame
Echaquan, et la réponse a été immédiate. Ça va prendre une formation pour
l'ensemble du réseau de la santé, parce que, manifestement, il y avait un enjeu
à ce niveau-là. Donc, on a voulu répondre à un problème ponctuel qui a mené à
une situation très désagréable, puis on voulait s'assurer qu'on agissait sur le
bobo, directement.
À l'époque, le service de... le centre de
services de la santé avait la même réflexion pour le racisme en général. Donc,
c'est parti d'une bonne intention de dire : Bien, nous aussi, on va
regarder l'ensemble de l'oeuvre pour voir qu'est-ce qu'on peut faire. Par
contre, avec le temps et vu le rapport du Groupe d'action contre le racisme, il
était devenu évident que ça prenait une formation pour l'ensemble de la
fonction publique, pas juste de la Santé, comme c'était le cas, qui répondait à
un besoin important lors du décès de madame Echaquan. Donc, on a pris un pas de
recul pour dire : ça va prendre une formation nationale pour tous les
employés de la fonction publique, puis on va rendre disponible.
Donc, effectivement, la chronologie nous
rappelle que, dans un cas, on répondait à une situation, une crise dans un lieu
particulier, dans un secteur de la fonction publique en particulier, et,
l'autre, c'est de répondre à l'ensemble du défi d'un Québec qui est en
changement.
Mme Maccarone : Dans le même
article, le ministère de Santé et Services sociaux dit qu'il reconnaît que
certaines préoccupations ont été soulevées quant au contenu de la formation,
qui ne répondait pas au mandat. Est-ce que vous savez lesquelles? Ils ont dit
que ce que... la formation qui était préparée ne répond pas au mandat sur plusieurs
points, lesquels?
M. Skeete : Je n'ai pas
compris qu'est-ce que... La citation que vous.
Mme Maccarone : dans
l'article, là, le même article de Thomas Gerbet, le MSSS reconnaît que
certaines préoccupations ont été soulevées quant au contenu de la formation,
qui ne répondait pas au mandat, et, ce, sur plusieurs points, lesquels?
M. Skeete : Bien, je pense
qu'il faudrait demander au MSSS. Je pense que vous n'êtes pas à la bonne
commission. Par contre, comme je peux vous dire, l'intention n'était pas
d'enlever une formation qui était importante. On reconnaît la nécessité d'avoir
une formation pour l'ensemble de la fonction publique. On y travaille parce
qu'écoutez c'est tolérance zéro, le racisme.
Mme Maccarone : Sauf que
dans... c'est soulevé dans le rapport que, comme la collègue a dit, la notion
de racisme systémique apparaît dans le rapport puis, malgré que ça faisait
partie du contrat qui était octroyé, qui... Le groupe en question avait le
droit d'utiliser la terminologie, la population a l'impression que la raison
que le gouvernement a tabletté le rapport, c'est parce qu'on évoque la notion
de racisme systémique. Est-ce que ça veut dire que chaque fois qu'on va
octroyer un contrat pour la formation pour mettre fin au racisme systémique, si
on n'aime pas la terminologie qui est utilisée, nous allons bâillonner nos
chercheurs puis on va dire : non, non, ça, ce n'est pas bon, malgré ce que
vous avez fait, on n'aime pas ce que vous avez dit, ça fait que nous, nous
allons préférer nos propres rapports à l'interne parce qu'on veut contrôler le
message?
• (16 h 20) •
M. Skeete : Bien, comme j'ai
déjà dit, la chronologie est importante. Ici on parlait d'une formation qui
était destinée à une section d'une partie de la fonction publique. Nous, on
visait plus grand, on visait la fonction publique entière. Donc, on a pris un
pas de recul pour avoir un programme de formation qui répondait mieux à cet
objectif-là. Donc, pour rassurer la collègue, cette formation-là va revenir
puis elle va être déployée à plus grande échelle.
Mme Maccarone : Mais, à date,
la formation en ce qui concerne le ministère de Santé et Services sociaux, on
sait qu'il y a seulement 65 % du personnel qui ont suivi la formation
obligatoire. Comment ce qui explique ceci? Surtout que, quand Nadine Girault,
que, malheureusement, n'est plus avec nous, et toutes mes condoléances à sa
famille, mais, elle, quand elle faisait partie de ce groupe, elle a dit que, si
le ministre responsable de la lutte contre le racisme, il ne met pas ça à
l'oeuvre, bien, on va lui taper sur la main. Mais on a... on est seulement rendus
à 65 % de pourcentage du personnel du MESSS qui ont suivi une formation.
Comment qu'il s'explique ça? Puis est-ce qu'il va se mettre à l'oeuvre pour
s'assurer qu'on rejoint un 100 %? Surtout qu'on a vu vraiment... On a
entendu des histoires comme Joyce Echaquan par exemple.
M. Skeete : C'est sûr que
notre souhait, c'est que l'ensemble de... du corps professionnel de... du
centre de... du réseau de la santé participe à la formation. Mais il n'y a pas
une journée, Mme la Présidente, où est-ce que les oppositions ne talonnent pas
le gouvernement sur l'accessibilité des soins de santé, l'accessibilité des
services en santé, la disponibilité des médecins, la disponibilité des...
M. Skeete : ...donc, entre
reporter une chirurgie urgente et suivre une formation aussi urgente, on est
confrontés à ce genre de choix là. Je me réjouis de 65. Je ne me satisfais pas
de 65. On va continuer les efforts.
Mme Maccarone : Je dirais que
la raison que je le qualifie comme un échec, M. le ministre, c'est parce que
c'est vous qui dites que c'est une formation obligatoire. Ça fait partie de vos
recommandations, ça fait partie de vos objectifs. Alors, on n'a pas rejoint les
objectifs. Ça fait que moi, ce que je veux m'assurer, c'est que nous allons
mettre notre main à la pâte pour s'assurer que la formation aura lieu. Tout à
fait d'accord que le réseau fait face à beaucoup de défis, mais ça reste que la
lutte au racisme est quand même un enjeu important. Puis, si on ne se met
pas... tous nos efforts pour s'assurer que tout le monde travaille en ce qui
concerne la lutte, bien, nous n'allons jamais réussir à mettre fin à ce fléau.
M. Skeete : Mais je suis
d'accord avec la collègue que... je voudrais juste corriger ses chiffres. À
partir du 25 février 2023, on est 246 977 employés qui ont été formés, ce
qui représente 84,25 % de gens. Alors, même ça, Mme la Présidente, puis
chers collègues, je ne suis pas du tout satisfait. Moi, je vise plus haut. Mais,
compte tenu des défis qu'on a dans le secteur de la santé, on peut comprendre
le délai.
Mme Maccarone : Je veux
ramener le ministre à... pour parler un peu de la communauté juive. La
communauté juive, comme il sait, il y a une longue et fière histoire au Québec.
Nous avons qu'à penser à Ezekiel Hart, premier juif élu dans le Parlement de
l'Empire britannique, ou la syndicaliste Léa Roback, figure de preuve de la
lutte pour les droits des travailleurs. Nous avons de quoi d'être fiers en ce
qui concerne la contribution de cette communauté vieille de 250 ans au Québec.
Mais malheureusement je pense que la ministre peut constater que nous
assistons, au cours des dernières années, d'une augmentation dramatique des
gestes à caractère antisémite à travers le monde, puis, malheureusement, le
Canada et le Québec ne font pas exception.
Alors, si on regarde les derniers chiffres
de Statistique Canada et du CJA, les Juifs sont la minorité religieuse la plus
visée par les crimes haineux au Canada, malgré le fait qu'ils représentent
seulement 1 % de la population puis seulement... ils sont victimes de
14 % des crimes haineux au Canada. Alors, c'est quand même des chiffres
qui sont épeurants. Puis, seulement la semaine dernière, le SPVM a procédé à
l'arrestation d'un mineur ayant commis un crime haineux à caractère antisémite
à Montréal.
Alors, je pense qu'on peut tous s'entendre
qu'on a une responsabilité d'agir et d'éduquer nos jeunes pour ne pas tomber
dans la haine et le racisme. Alors, ça fait partie du mandat du ministre de...
puis, évidemment, de travailler avec ce collègue. Ça fait que j'aimerais savoir
qu'est-ce qu'il a fait pour avancer les différentes initiatives visant à
combattre le racisme et la haine en ce qui concerne cette communauté dans le réseau
de l'éducation.
M. Skeete : Vous savez, j'ai
eu la chance de grandir à Chomedey, à Laval, puis, à l'époque où j'étais à
Chomedey... ce n'est plus comme ça maintenant, ça l'a beaucoup changé,
Chomedey, mais je dirais que 50 % de la population était de confession
juive puis l'autre, c'était la communauté juive... grecque, pardon. Et j'ai des
souvenirs plus jeunes d'aller chez mes amis, des gens qui ont... qui avaient
des portraits sur le mur, et, quand tu leur demandais : Ah! c'est qui ça?
Ah! Ça, c'est ma grand-mère, puis elle est morte durant l'Holocauste. Puis moi,
j'ai appris très jeune toutes les notions de l'Holocauste, je l'ai appris de la
bouche de survivants. Donc, c'est une cause qui me touche particulièrement.
J'ai eu récemment la chance d'aller à la célébration du 78ᵉ anniversaire du Yom
Hashoah, et c'était touchant de voir les survivants allumer les chandelles.
Il est vrai, il est vrai qu'un grand
nombre de crimes haineux visent la communauté juive pour toutes sortes de
raisons. Il y a encore une montée d'une certaine droite qui considère toutes
les faussetés, là, qu'on a entendues des années 30 et 40, là, qui font la
promotion de ça, toutes les choses blessantes et dégueulasses qu'on peut
penser. Donc, c'est vrai que la communauté, elle est injustement visée pour
toutes sortes de raisons, comme d'autres, comme d'autres, mais la haine, la
haine juive, elle est particulièrement viscérale. Et je suis fier d'avoir
contribué, avec mon collègue, quand j'étais son adjoint parlementaire, au
financement du Musée de l'Holocauste à Montréal. On a contribué un 20
millions de dollars pour la construction de ce nouvel établissement là,
qui, ma foi, pour l'avoir visité récemment, est de toute beauté, il va être
superbeau. J'en ai d'autres à dire, mais je vois que vous voulez...
Mme Maccarone : Bien oui,
c'est...
Mme Maccarone : ...parce que
vous ne répondez pas à ma question. Je veux savoir quelles mesures avez-vous
mises en place dans le réseau de l'éducation pour combattre les crimes haineux
puis éduquer les jeunes. Avez-vous des rencontres avec le ministre de
l'Éducation? Quelles mesures ont été mises en place?
M. Skeete : Bon, celle-là,
elle est plus... elle est plus difficile. Ça fait que le «quick win», c'était
la formation éthique et culture qui est actuellement un projet pilote. Il est
actuellement un projet pilote et il y a des notions de lutte au racisme,
notamment les références à l'histoire juive et l'Holocauste, notamment, qui
vont être touchées dans cette formation. On touche aussi la formation sur les
autochtones, l'histoire et les réalités autochtones. Ça fait qu'on répond à
quelque chose, rapidement, qui va venir en ce sens-là, mais il faut en faire
plus. Il faut en faire plus, puis ce n'est pas facile.
Je vais vous dire pourquoi. Il y a toute
l'autonomie professionnelle des professeurs qui fait en sorte que d'imposer une
formation, ce n'est pas évident. Puis, quand qu'on essaie de l'insérer dans le
curriculum via le ministère, ça requiert énormément de discussions et de
progrès, discussions qu'on a actuellement pour faire bouger l'aiguille, là, je
vous rassure que j'ai ces discussions-là, mais c'est quelque chose qui est plus
difficile à faire atterrir. Donc, la réponse rapide, c'est : dans le
nouveau code d'éthique et de culture, on va avoir ce volet-là où est-ce qu'on
va parler de racisme, et cette situation-là va être évoquée, cette réalité-là
va être évoquée, mais je pense personnellement qu'il faut essayer d'aller plus
loin.
Mme Maccarone : On a aussi
entendu, tous les collègues, tous les 125, nous avons reçu la lettre de B'nai
Brith qui a été envoyée à notre premier ministre le 17 avril de cette
année. Puis eux, ils nous disent, dans leur lettre, qu'ils ont enregistré
2 769 incidents de vandalisme, de harcèlement, de violence et de
haine en ligne ciblant les juifs au Canada. Selon B'nai Brith, les chiffres
représentent le deuxième plus grand nombre d'incidents antisémites observés
depuis 1982. Puis, au Québec, 722 incidents ont été enregistrés, encore
une fois vandalisme, harcèlement, de la haine, de la violence.
Puis ils ont fait une demande, une
recommandation d'adopter la définition de l'antisémitisme de l'Alliance
internationale pour la mémoire de l'Holocauste, une définition qui a été
adoptée par le gouvernement de Canada, qui l'a jointe à sa Stratégie nationale
de lutte contre le racisme et également a été adoptée par Ontario, par Alberta,
Saskatchewan, Nouveau-Brunswick et Manitoba. Est-ce que le ministre va
supporter cette demande? Puis est-ce qu'il va dire oui puis mettre vers l'avant
de la définition, que nous puissions sur l'adopter ici, à l'Assemblée
nationale?
M. Skeete : Et le Québec. On
l'a déjà fait.
Mme Maccarone : Quand est-ce
que nous l'avons fait?
M. Skeete : On va trouver la
date, là, mais c'est... Ça a été fait le 21... 4 juin 2021.
Mme Maccarone : Mais pas
selon B'nai Brith. Pourquoi qu'eux, ils disent qu'ils ne sont pas d'accord?
M. Skeete : Il faudrait
demander à B'nai Brith.
Mme Maccarone : Parce que là,
selon eux, la définition de l'antisémitisme que nous avons adoptée ne rejoint
pas la stratégie nationale qui était mise vers l'avant par Canada, ne reflète
pas qu'est-ce que les autres provinces ont adopté?
M. Skeete : Bien, peut-être,
si la collègue veut, on peut prendre son temps maintenant pour faire le tour
verbatim de chacune des définitions, ou peut-être, hors micro, je pourrais voir
est où exactement la différence entre ce qu'ils veulent puis ce qu'on a fait,
mais, tu sais, je pense que le Québec a été assez avant-gardiste pour
reconnaître les faits importants par rapport à l'antisémitisme. Puis je suis
ouvert à avoir cette discussion-là avec elle, mais je ne sais pas c'est quoi
qui est différent, honnêtement.
Mme Maccarone : Avec plaisir,
nous pourrons continuer le dialogue par la suite, mais c'est sûr, je pense que
ce n'est pas pour moi, mais c'est pour les groupes concernés qui doivent être
rassurés. Parce qu'évidemment il y a un accord dans les positions des groupes,
parce qu'eux, ils ne sont pas d'accord avec ce que vous avez partagé. Eux, ils
disent que nous n'avons pas fait notre devoir puis nous avons un recul puis un
retard en ce qui concerne les autres provinces ainsi que notre pays. Alors, je
pense que nous avons peut-être une correction à faire. Ça fait que, si on peut
s'organiser pour s'assurer que B'nai Brith, eux, ils reçoivent une réponse à la
lettre concernée, peut-être eux, ils seront rassurés. Parce qu'à date on a reçu
plusieurs messages de leur part pour dire qu'on a du retard. Puis, avec la
croissance que nous avons eue dernièrement des crimes haineux, je pense que
nous avons une responsabilité de le prendre au sérieux puis de faire la
démonstration ici que, comme élus, nous sommes préoccupés. Mais, tout à fait,
par la suite...
• (16 h 30) •
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Il vous reste une minute 30 à votre bloc.
M. Skeete : ...ma collègue,
Mme la Présidente, pour dire que je partage son inquiétude. Où est-ce que je
suis en désaccord, c'est pour dire qu'on a un retard. Moi, je pense que le
Québec est assez avant-gardiste en général. La collègue me parlait tantôt
d'éducation, une notion importante d'éducation, c'est la sensibilisation. Le
20 millions qu'on donne au musée de l'Holocauste, je pense, témoigne de
notre sincérité dans ce dossier-là. Donc, je ne suis pas sûr qu'on satisfait
tout le monde, mais je suis pas mal sûr qu'on est exemplaires.
Mme Maccarone : J'ai du temps
pour une dernière question, c'est par... sur la page 31... 39.1, puis
c'est par rapport à la campagne de sensibilisation...
Mme Maccarone : ...contre le
racisme et les préjugés à l'échelle du Québec. En 2021, on a mis un budget de
presque 1,2 million, puis, pour le budget 2022-2023, on n'a rien.
Alors, comment qu'il s'explique que, pour la campagne de sensibilisation, on n'a
presque rien? On a mis à peine un 21 000 $. Qu'est-ce qui s'explique
l'écart?
M. Skeete : Donc, vous parlez
de la campagne de sensibilisation?
Mme Maccarone : Oui,
2021-2022, on a beaucoup, 2022-2023, rien.
M. Skeete : C'est parce que
ça s'en vient. N'oubliez pas, récemment, mon collègue, la ministre responsable
des Affaires autochtones a fait une grande campagne dans les quatre langues où
on vous disait : Bonjour puis on présentait les différentes nations
autochtones. On ne voulait pas faire compétition avec cette initiative-là. Vous
allez remarquer dans le budget de cette année, on a du financement, justement,
pour une campagne de sensibilisation qui va se poursuivre. Donc, c'est une
question de timing pour être sûr qu'on est capable de répondre à tout le monde.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci. Merci, M. le ministre. Merci, Mme la députée. Alors,
pour le dernier bloc d'interventions, je me tourne de ce côté de la banquette
ministérielle, gouvernementale pour un bloc de 9 min 40 s. La
députée de Vimont, la parole est à vous.
Mme Schmaltz : Merci, Mme la
Présidente. Alors, bonjour à tout le monde. Je vais quand même saluer mes
collègues, M. le ministre, toute son équipe. Alors, en fait, nous savons à quel
point c'est important d'avoir une fonction publique qui est plus représentative
de sa population. Alors, ma question, je l'adresse au ministre. Que
faites-vous, justement, pour atteindre l'objectif d'une fonction publique plus
représentative?
M. Skeete : Il y a eu
énormément de progrès qui ont été faits dans les dernières années. Le Conseil
du trésor, de plus en plus, regarde ces métriques-là pour être sûr de faire
avancer les choses. Aux dernières nouvelles, je n'ai pas le chiffre exact...
chose dans la fonction publique, 15.4 % dans la fonction publique. On
devrait être à 18 %, O.K.? Ça fait qu'il y a matière à réjouissance, parce
que c'était quand même beaucoup plus bas avant. Il y a du progrès.
Le dossier avance à un point tel que je
commence à poser d'autres questions. Je commence à poser la question :
Est-ce qu'on a de la représentation à tous les niveaux de la fonction publique?
Tu sais, est-ce que c'est juste des postes d'entrée? Il y a-tu des cadres? Il y
a-tu des professionnels? Ça fait que vu que ça va bien sur un bord, bien, je ne
m'assis pas sur mes lauriers. Je veux voir un peu si c'est vraiment
représentatif, si on est en fait des gains un peu partout. Puis il y a un peu
plus de travail à faire à ce niveau-là. C'est une des raisons pour laquelle on
investit aux deux niveaux. Il y a la fonction publique, vers le bas, mais il y
a aussi les conseils d'administration, vers le haut.
Je parlais de ça avec la collègue tantôt,
c'est que, si on peut aussi influencer les conseils d'administration
gouvernementaux, bien, il va y avoir une pression du haut également. Et je
pense que ça va beaucoup avoir une influence sur ce qui se passe en bas. Donc,
c'est le genre de choses qu'on fait pour travailler à différents niveaux, pour
arriver au résultat qu'on veut. On fait... on aide les conseils d'administration
à être plus diversifiés puis ça va aider les nominations qui découlent du
conseil d'administration. Puis, vers le bas, on fait les campagnes de
recrutement puis on essaye vraiment de restreindre cet écart-là, là.
Mme Schmaltz : En fait, je
voulais... si vous permettez, on va rester peut-être dans la question des
représentativités. Vous avez parlé des C.A., justement, des sociétés d'État.
Est-ce que vous pouvez peut-être un peu plus détailler au niveau des avancées?
M. Skeete : Incroyables
avancées, puis, ça, c'est la preuve que quand on veut, on peut. On est rendu à
61 %. L'objectif, c'était 50 % de tous les conseils d'administration
gouvernementaux qui aient au moins une personne minorité visible. Ça, ça inclut
l'ajout récent, parce qu'il y a eu un projet de loi, récemment, où est-ce qu'on
a ajouté des... des institutions, là, dans le giron gouvernemental. Ça fait qu'on
est rendu à 61 %, mais on ne se contente pas de ça. On a aussi lancé une
bourse d'études qui va rendre accessible une formation pour les personnes
racisées qui souhaitent aller chercher une formation pour siéger sur les
conseils d'administration. Ce qui est le fun avec ça, c'est que c'est une
formation qui est très dispendieuse, qui prend du temps, mais on va aussi
enrichir le bassin potentiel. Puis, ça, c'est ma mesure qui nous permet de dire
que les changements qu'on fait vont être pérennes.
Mme Schmaltz : O.K., je vais
vous amener un petit peu ailleurs. L'année passée, le prix Pour un Québec sans
racisme a été créé. Est-ce que cette année, vous comptez vous... en fait,
est-ce que vous comptez être présent? Et puis j'aimerais savoir aussi pourquoi
c'est si important pour vous et quel est l'objectif qui est recherché.
M. Skeete : C'est une
initiative de mon collègue le député de Deux-Montagnes, qui était à l'époque
ministre de la Lutte contre le racisme. Puis ça, c'est quand, tantôt, j'évoquais
le fait que, dans notre quotidien, on fait...
M. Skeete : ...plein de choses
pour avancer la cause de la lutte au racisme qui ne sont pas nécessairement
attachées au Groupe d'action, en voilà un. Il a créé ce prix qui vient célébrer
les contributions de différentes personnes de la communauté de la société civile
qui font rayonner les communautés, minorités visibles ou qui viennent
contribuer à cette expérience d'apprentissage de l'autre. Et j'ai participé
l'année passée au dévoilement de ces médailles-là. C'était un moment
extraordinaire. Puis j'ai le privilège... Je vais avoir le privilège
professionnellement d'à mon tour redonner ces médailles-là, encore une fois
accompagné virtuellement par monsieur Maka Kotto qui est notre président
d'honneur. Donc, ça va être le fun de voir progresser ça. Je pense qu'on a mis quelque
chose qui va persister dans le temps puis je pense que c'est le début de
quelque chose de bien.
Mme Schmaltz : Est-ce que
j'ai encore le temps?
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Il y a encore cinq minutes.
Mme Schmaltz : J'ai encore
cinq minutes. Écoutez, si je me permets peut-être de revenir, je sais que ça a
été un petit peu discuté avant, mais j'aimerais savoir le bilan que vous faites
des actions du Groupe d'action contre le racisme. Quel est le bilan que vous
tirez de tout ça?
M. Skeete : Vous savez, quand
j'étais membre du Groupe d'action contre le racisme, je me souviens qu'on s'est
dit, premièrement, on a reconnu le rendez-vous historique. Tu sais, c'est...
Parce que moi, je me souviens, jeune, je me faisais traiter de tous les noms
que tu peux imaginer et je me disais : Si tu prends... si tu participes
dans ce groupe d'action là, un jour, il va falloir que tu regardes tes enfants,
mais quand tu te regardes dans le miroir, il va falloir que tu regardes le plus
jeune qui se faisait traiter de tous les noms, là. Puis je ne voulais surtout
pas échouer le mandat. Et je me souviens, Nadine, l'ancienne députée de
Bertrand et l'actuelle députée de Taillon, on avait un sentiment, un devoir...
un sentiment de devoir, là, que toutes ces discriminations-là qu'on a vécues
individuellement et collectivement, comment on allait faire pour bouger
l'aiguille, puis répondre aux attentes. Puis, c'est peut-être ça, le bout le
plus difficile du rôle que j'ai aujourd'hui. Parce que le racisme, ce n'est pas
une fin. Tu sais, la lutte au racisme, ce n'est pas une fin. Il n'y aura pas de
fin à la lutte au racisme, il va toujours avoir de l'éducation à faire, il va
toujours avoir de la sensibilisation à faire. Donc, c'est très noble comme
objectif de vouloir lutter contre le racisme, sachant que ça va peut-être
toujours exister. Alors avec une... avec un mandat si grand et si épeurant,
comment on fait pour arriver à quelque chose de vraiment concluant?
• (16 h 40) •
C'est la raison pourquoi qu'on a décidé de
se concentrer sur des actions concrètes. Et, quand que je pense à... on en a
parlé tantôt, les interpellations policières... les interceptions policières,
pardon, ça me touche parce que moi, j'ai... même,moi-même, j'ai été victime
d'interceptions policières. Et de savoir que maintenant, ça ne sera plus permis
pour des motifs discriminatoires, sachant que j'ai des recours auprès de la
déontologie policière, sachant que les policiers maintenant vont apprendre
c'est quoi, ma réalité étant une personne racisée au volant au Québec. Ça me
remplit de fierté pour savoir que tous mes amis qui eux ont été victimes de ce
fléau-là, mais ils vont avoir finalement satisfaction. Ça fait que je me
concentre sur des actions concrètes comme ça. Quand je le sais que mon collègue
l'ancien ministre de la Lutte au Racisme qui lui a été victime de
discrimination quand il magasinait un appartement avec son épouse qui elle
était une personne... une minorité visible... puis la satisfaction qu'il décrivait
quand il a eu satisfaction, puis il a reçu un chèque parce qu'il a porté
plainte. Mais nous, quand on a parlé de ça, on s'est dit : Comment qu'on
fait pour donner cette satisfaction-là à des gens qui, eux, sont victimes de
discrimination.
Et, quand on a donné le 20 millions à la
CDPDJ pour accompagner les gens, bien, non seulement on donne de la justice à
des gens qui souvent se sentent exclus du système de justice, mais en même
temps, on va bâtir la confiance quand ils vont avoir satisfaction. C'est pour
ça que, quand on regarde les dossiers de la lutte au racisme, il faut toujours
regarder c'est quoi, l'impact voulu. Moi, ce que je veux, c'est que les
personnes racisées du Québec, les nouveaux arrivants comme ceux comme moi, qui
sont nés au Québec, se sentent dans le club des Québécois. Puis comment qu'on
fait pour faire ça, mais de s'assurer qu'ils ont les mêmes expériences, les
mêmes opportunités...
M. Skeete : ...et, à la
limite, même, les mêmes défis, mais pas des défis supplémentaires parce qu'ils
ont l'air différents des autres.
Donc, le bilan, c'est d'essayer de bouger,
d'avancer la balle. Puis, un jour, quelqu'un après moi va avancer la balle à
son tour. Et je pense que le bilan, pour moi, c'est de s'assurer que ceux que
je suis responsable... je suis capable de me regarder dans le miroir comme une
personne racisée, mais aussi avec la grande responsabilité que j'ai avec ce
dossier qui est à la fois terrifiant mais à la fois aussi d'une importance
inouïe.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : En terminant.
M. Skeete : C'est terminé.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Terminé? Merci beaucoup. Alors, l'enveloppe dévolue à cette
étude de crédits étant terminée--je me permets de souligner que c'était vos
premières études de crédits, M. le ministre--Mmes, MM. les députés, merci
beaucoup.
Alors, je dépose donc les réponses aux
demandes de renseignements de l'opposition.
Et, compte tenu de l'heure, la commission
ajoute ses travaux au mardi 2 mai, à 15 h 30, où elle entendra l'étude du volet
Lutte contre l'intimidation des crédits budgétaires du portefeuille Famille.
Merci beaucoup.
(Fin de la séance à 16 h 42)