Journal des débats de la Commission des relations avec les citoyens
Version préliminaire
42e législature, 1re session
(27 novembre 2018 au 13 octobre 2021)
Cette version du Journal des débats est une version préliminaire : elle peut donc contenir des erreurs. La version définitive du Journal, en texte continu avec table des matières, est publiée dans un délai moyen de 2 ans suivant la date de la séance.
Pour en savoir plus sur le Journal des débats et ses différentes versions
Le
mardi 30 mars 2021
-
Vol. 45 N° 73
Consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 79, Loi autorisant la communication de renseignements personnels aux familles d’enfants autochtones disparus ou décédés à la suite d’une admission en établissement
Aller directement au contenu du Journal des débats
Intervenants par tranches d'heure
-
-
D'Amours, Sylvie
-
Lafrenière, Ian
-
Kelley, Gregory
-
Massé, Manon
-
Ouellet, Martin
-
Guillemette, Nancy
-
-
Guillemette, Nancy
-
Lamothe, Denis
-
D'Amours, Sylvie
-
Lafrenière, Ian
-
Kelley, Gregory
-
Massé, Manon
-
Ouellet, Martin
-
-
D'Amours, Sylvie
-
Lafrenière, Ian
-
Lamothe, Denis
-
-
Lamothe, Denis
-
D'Amours, Sylvie
-
Lafrenière, Ian
-
Picard, Marilyne
-
Kelley, Gregory
-
Massé, Manon
-
Ouellet, Martin
-
-
D'Amours, Sylvie
-
Lafrenière, Ian
-
Picard, Marilyne
-
-
D'Amours, Sylvie
-
Lafrenière, Ian
-
Kelley, Gregory
-
Massé, Manon
-
Ouellet, Martin
-
-
D'Amours, Sylvie
-
Lafrenière, Ian
-
Lamothe, Denis
-
Kelley, Gregory
-
-
Kelley, Gregory
-
D'Amours, Sylvie
-
Massé, Manon
-
Ouellet, Martin
9 h 30 (version révisée)
(Neuf heures trente et une minutes)
La Présidente (Mme D'Amours) :
Bonjour. Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission des
relations avec les citoyens ouverte.
La commission est réunie virtuellement
afin de procéder aux consultations particulières et aux auditions publiques sur
le projet de loi n° 79, Loi autorisant la communication de
renseignements personnels aux familles d'enfants autochtones disparus ou
décédés à la suite d'une admission en établissement.
Mme la secrétaire, y a-t-il des
remplacements?
La Secrétaire
: Oui,
Mme la Présidente. M. Poulin (Beauce-Sud) est remplacé par M. Lamothe
(Ungava); Mme Samson (Iberville) est remplacée par Mme Guillemette
(Roberval); Mme St-Pierre (Acadie) est remplacée par M. Kelley
(Jacques-Cartier); Mme Dorion (Taschereau) est remplacée par
Mme Massé (Sainte-Marie—Saint-Jacques); et Mme Perry Mélançon (Gaspé)
est remplacée par M. Ouellet (René-Lévesque).
La Présidente (Mme D'Amours) : Merci.
Ce matin, nous débuterons par les remarques préliminaires, puis nous entendrons
par visioconférence les groupes suivants : Mme Michèle Audette,
commissaire du rapport d'enquête nationale sur les femmes et filles autochtones
disparues ou assassinées, et le Regroupement des familles Awacak.
Remarques préliminaires
J'invite maintenant le ministre
responsable des Affaires autochtones à faire ses remarques préliminaires. M. le
ministre, vous disposez de six minutes.
M. Ian Lafrenière
M. Lafrenière : Merci
beaucoup, Mme la Présidente. Alors, je voudrais tout d'abord saluer mon équipe
qui m'accompagne aujourd'hui. Vous savez, on est de façon virtuelle, mais ici
il y a présence de mes équipes. Heureux de vous retrouver, chers collègues,
collègues des oppositions qui vont être présents avec nous toute la journée
aujourd'hui.
Je suis heureux d'entamer ce processus de
consultation. Il s'agit de mon premier projet de loi, et je tiens d'ailleurs à
saluer le travail de ma prédécesseure, la députée de Mirabel et présidente de
cette commission, puisque c'est sous son leadership que le projet de loi a été
amorcé.
Comme vous le savez tous déjà, il s'agit
d'un projet de loi absolument essentiel et sans précédent, et je suis persuadé
qu'il saura tous nous rallier autour de la nécessité et de l'urgence d'agir
dans l'intérêt des familles endeuillées.
Je vais vous demander de vous imaginer un
instant que vous habitez une communauté éloignée de la Basse-Côte-Nord, pour ne
pas nommer Pakuashipi. Vous êtes dans les années 50, 60. Votre jeune
enfant tombe malade, on vous apprend qu'on doit absolument le transférer vers
un hôpital, donc à distance, mais vous ne pouvez pas l'accompagner. Et plus <tard…
M. Lafrenière : …
un
instant que vous habitez une communauté éloignée de la Basse-Côte-Nord, pour ne
pas nommer Pakuashipi. Vous êtes dans les années 50, 60. Votre jeune
enfant tombe malade, on vous apprend qu'on doit absolument le transférer vers
un hôpital, donc à distance, mais vous ne pouvez pas l'accompagner. Et plus >tard,
quelques semaines plus tard, vous avez un membre de la communauté qui revient
de cet hôpital et qui vous annonce que votre enfant est décédé. Votre enfant
est décédé, vous ne l'avez jamais vu, vous n'avez pas eu de détails sur ce qui
était arrivé, et c'est ce qui serait arrivé à environ 200 enfants. Pas de
détails, les parents n'ont jamais vu le corps, aucune information. Les
dépouilles ont été enterrées, parfois très loin des parents. Dans certains cas,
on apprend même que des enfants auraient été remis à l'adoption sans
consentement parental. Comment des parents peuvent vivre sans savoir, sans
avoir cette information-là? Comme père de deux jeunes filles de 11 ans,
13 ans, je ne peux même pas me l'imaginer un instant, Mme la Présidente.
Concrètement, aujourd'hui, le projet de
loi n° 79 vise à soutenir les familles autochtones dans leurs recherches
de renseignements auprès d'un établissement de santé et de services sociaux,
d'un organisme ou d'une congrégation religieuse sur les circonstances ayant
entouré la disparition ou le décès d'enfants à la suite de leur admission en
établissement de santé et de services sociaux avant 1989.
Le projet de loi constitue une réponse à
deux appels à la justice du rapport complémentaire, spécifique au Québec, de
l'enquête ENFFADA. L'appel n° 20 qui demande au
gouvernement de remettre aux familles toutes les informations dont il dispose
concernant les enfants qui leur ont été enlevés à la suite d'une admission dans
un hôpital ou tout autre centre de santé au Québec. Pour ce faire, il faut
pouvoir autoriser certaines dérogations au régime d'accès en place, qui
constitue un obstacle à la communication de renseignements aux familles, et
c'est ce que nous visons par ce projet.
Nous voulons aussi assister et guider les
familles d'enfants autochtones disparus ou décédés dans leurs démarches. À
l'adoption du projet de loi, ce sera fait grâce à la mise en place d'une
nouvelle direction de soutien aux familles d'enfants autochtones disparus ou
décédés. Cette direction tiendra notamment compte des particularités
linguistiques et culturelles des familles concernées ainsi que leurs besoins
d'accompagnement émotionnel. Le projet de loi prévoit finalement qu'une
personne peut porter plainte au ministre en cas d'insatisfaction quant au
service reçu lors de ses démarches de renseignements.
L'appel à l'action n° 21 demande la
formation d'une commission d'enquête sur les enfants enlevés aux familles autochtones
au Québec. L'une des mesures du projet de loi répond précisément à cet appel en
donnant au ministre responsable des Affaires autochtones le pouvoir de faire
enquête lorsque des éléments laissent croire que des informations susceptibles
de faire connaître les circonstances de la disparition ou du décès d'un enfant
existent. Il s'agit bien d'éclaircir les circonstances des disparitions, pas
les causes. Les pouvoirs d'enquête octroyés dans le cadre du projet de loi sont
ceux prévus par la Loi sur les commissions d'enquête, comme dans celui d'une
commission d'enquête. Les principes de droit applicables restent les mêmes,
incluant le fait de ne pas nuire à une éventuelle enquête policière.
Bien que ce projet de loi, Mme la
Présidente, n'ait pas pour objectif d'identifier les responsables ou de faire
des enquêtes criminelles, nous n'hésiterons jamais à transmettre l'information
au Bureau du coroner ou à la Sûreté du Québec si on a des informations qui nous
laissent croire, justement, qu'il y a une faute qui a été commise. Nous
souhaitons donner des réponses individuelles aux familles parce que nous <croyons
que…
M. Lafrenière : ...
de
loi, Mme la Présidente, n'ait pas pour objectif d'identifier les responsables
ou de faire des enquêtes criminelles, nous n'hésiterons jamais à transmettre
l'information au Bureau du coroner ou à la Sûreté du Québec si on a des
informations qui nous laissent croire, justement, qu'il y a une faute qui a été
commise. Nous souhaitons donner des réponses individuelles aux familles parce
que nous >croyons que c'est la priorité pour elles. La disparition d'un
enfant laisse des blessures profondes, et la seule possibilité de s'engager sur
la voie de la guérison, de pouvoir vivre le deuil, c'est de savoir ce qui est
arrivé à notre enfant, et c'est ce que ce projet de loi va faciliter.
Ce qui nous a guidés, ce sont les
témoignages des familles et de l'ensemble des constats formulés dans le cadre
de l'ENFFADA, des échanges avec des chefs de nation concernés, certaines recommandations
de l'APNQL et du Protecteur du citoyen dans le cadre des travaux du projet de
loi n° 31. Et je nous rappelle collectivement que des articles avaient été
inclus dans le projet de loi n° 31 afin d'aller rapidement, car, vous le savez,
le temps compte. Il y a des familles, il y a des parents qui nous quittent sans
avoir eu réponse à leurs questions. On voulait aller rapidement là-dedans. Nous
avons entendu les demandes des familles, et c'est pour ça qu'aujourd'hui on
vous présente un projet de loi qui est bien unique et seul.
Nous sommes, bien sûr, aussi conscients
que c'est un processus émotionnellement chargé pour les familles. Même si elles
attendent de pouvoir faire ces démarches depuis longtemps, le processus ne sera
pas facile pour autant. Certains voudront s'engager dans le processus plus
rapidement. Les résultats positifs obtenus pour les familles qui se lanceront
tout prochainement dans le processus vont sûrement en encourager d'autres à
s'engager là-dedans. Et c'est pour ça qu'on a prévu une période de cinq ans, Mme
la Présidente, cinq ans pour l'application de la loi. Étant donné que nous
dérogeons, avec le projet de loi, à certaines lois et règlements, on doit
vraiment le circonscrire dans le temps, mais on peut le renouveler pour une
période d'un an et de façon indéfinie.
Alors, Mme la Présidente, en terminant, je
veux nous rappeler pourquoi nous sommes ici aujourd'hui. Nous sommes ici pour
donner les moyens à des familles de faire la lumière sur ce qui a pu arriver, et,
justement, j'en parlais à mes collègues tout à l'heure, des associations de
familles nous ont transmis des petits souvenirs pour se rappeler pour qui et
surtout pourquoi nous faisons toutes ces démarches aujourd'hui, pour donner
réponse à ces familles, qui ont attendu depuis bien trop longtemps. Alors, je
vous remercie. Merci, et très heureux d'être en consultations avec vous aujourd'hui.
La Présidente (Mme D'Amours) :
Merci, M. le ministre. J'invite maintenant le porte-parole de l'opposition
officielle et député de Jacques-Cartier à faire ses remarques préliminaires
pour une durée maximale de quatre minutes.
M. Gregory Kelley
M. Kelley
: Merci
beaucoup, Mme la Présidente. Je veux aussi juste saluer tous mes collègues qui
sont avec nous aujourd'hui. Aujourd'hui, on commence un processus de faire face
à notre histoire, qui est un moment très sombre dans notre histoire commune. C'est
juste une première étape et une étape dans le processus de la réconciliation.
Mais l'histoire que le ministre vient de raconter à nous, d'un enfant enlevé
d'une communauté, si quelque chose comme ça arrivait dans un autre pays, c'est
sûr que le Canada a des mots très durs pour dire envers ce pays-là. Alors, c'est
important pour nous de faire face à notre histoire.
Et, oui, aujourd'hui, on commence un
processus pour donner des moyens à des familles d'avoir plus d'information,
mais j'espère qu'ensemble on va trouver la <façon...
M. Kelley
: …
dans
un autre pays, c'est sûr que le Canada a des mots très durs pour dire envers ce
pays-là. Alors, c'est important pour nous de faire face à notre histoire.
Et, oui, aujourd'hui, on commence un
processus pour donner des moyens à des familles d'avoir plus d'information,
mais j'espère qu'ensemble on va trouver la >façon de mettre un langage,
qu'on donne des moyens à des familles à avoir la vérité sur qu'est-ce qu'il
s'est passé à eux autres.
It's really important
also to just keep in mind that this was a long history that took place. It
happened to communities all across Québec and Canada. And I know everyone here
is here to work in collaboration to try to give all the proper means to the
families that they deserve, to find truth, to find justice. And again, I'm… You
know, after reviewing not just the «projet de loi», but reading some of the
memoirs that have been deposed, it was a good reminder to us all of what
happened in the past and of our duty, as legislators, to work together to try at
least to correct some of those wrongs together.
Alors, je souhaite
vraiment qu'on va être capables de travailler ensemble, pas juste pendant les
consultations, mais aussi dans l'étude détaillée de ce projet de loi. Alors,
merci beaucoup, Mme la Présidente.
• (9 h 40) •
La Présidente (Mme D'Amours) :
Merci. J'invite maintenant la porte-parole du deuxième groupe d'opposition et
députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques à faire ses remarques préliminaires pour
une durée maximale d'une minute.
Mme Manon Massé
Mme Massé : Bonjour, tout le
monde. Écoutez, en une minute, je vais aller au coeur... Je pense que ce que
nous vivons… nous débutons aujourd'hui, comme travail, est un travail essentiel,
que les gouvernements du Québec ont trop tardé à faire, donc je suis très
heureuse d'être parmi vous pour faire ce travail-là. Je m'étais engagée
personnellement, Mme la Présidente, comme bien d'autres autour de cette table,
à faire en sorte que les enfants disparus dans de telles circonstances soient
redonnés à leurs familles et, dans ce sens-là, je vais faire tout mon possible
pour que ce projet de loi là soit le plus fidèle aux besoins identifiés par nos
frères et soeurs autochtones, et soit le plus complet, et s'adopte, bien sûr,
le plus rapidement, parce qu'effectivement le temps compte. Déjà, beaucoup trop
de temps est passé. Alors, heureuse d'être avec vous pour travailler sur ce
projet de loi.
La Présidente (Mme D'Amours) :
Merci. J'invite maintenant le porte-parole du troisième groupe d'opposition et
député de René-Lévesque à faire ses remarques préliminaires pour une durée
maximale d'une minute.
M. Martin Ouellet
M. Ouellet : Merci beaucoup,
Mme la Présidente. Donc, à mon tour de vous saluer, et d'ailleurs de vous
saluer tous, parce qu'on s'est entendus pour changer de commission. On devait
entendre ce projet de loi là dans la Commission des institutions, il y avait
congestion, il y avait plusieurs projets de loi, et on s'est entendus pour
faire ça dans une autre commission, question d'aller vite, d'aller bien, mais
surtout de saisir l'occasion de donner des réponses aux nombreuses questions
que les communautés ont par rapport à la situation.
Évidemment, cette commission sera chargée
d'émotion. Je serai porté par le coeur plus que la raison en étudiant ce projet
de loi là. Mais assurément, Mme la Présidente, on devra faire vite, mais
surtout faire <bien…
M. Ouellet :
...
mais
surtout, de saisir l'occasion de donner des réponses aux nombreuses questions
que les communautés ont par rapport à la situation.
Évidemment, cette commission sera
chargée d'émotion. Je serai porté par le coeur, plus que la raison, en étudiant
ce projet de loi là. Mais assurément, Mme la Présidente, on devra faire vite,
mais surtout, faire >bien. Et le fait qu'on ait un projet de loi
exclusivement dédié à cet enjeu démontre toute l'importance que le gouvernement
du Québec doit apporter aux réponses que ces familles cherchent depuis tant
d'années. Alors, Mme la Présidente, c'est avec beaucoup d'enthousiasme et avec
le coeur que je suis prêt à commencer.
La Présidente (Mme D'Amours) :
Merci pour ces remarques préliminaires.
Auditions
Nous allons maintenant débuter les
auditions. Donc, je souhaite la bienvenue à Mme Michèle Audette, qui est
accompagnée de Mme Geneviève Motard. Je vous rappelle que vous disposez de
10 minutes pour votre exposé, après quoi, nous procéderons à la période
d'échange avec les membres de la commission. Je vous invite donc à vous
présenter puis à commencer votre exposé.
Mmes Michèle Audette, Geneviève
Motard et Véronique Breton
Mme Audette (Michèle) :
(S'exprime dans une langue autochtone) les familles et les survivantes. Je
tiens aussi à saluer toutes les nations qui nous accueillent en ce moment sur
le territoire qu'on appelle Québec. Et, en ce moment, je caresse le territoire
des Wendat, des Attikameks, des Malécites, des Innus et des Abénaquis, et alors
je vais essayer d'honorer du mieux que je peux, aussi, la mémoire de tous ceux
et celles qui ont osé parler de leurs êtres chers, de leur vérité. Et merci à
vous aussi de faire un petit bout, là, dans ce portage rempli d'émotion et très
difficile. Merci aux membres de la commission. Je vous sais et je vous connais
très humains et humaines et très, très, très touchés, là, par ces injustices.
Tout d'abord, merci d'avoir fait passer ou
fait bouger tous ces enjeux-là dans ce projet de loi là, qui va permettre,
évidemment, la mise sur pied, là, d'un régime distinct, quelque chose qu'on n'a
jamais vu avant, là, pour aider les familles qui ont perdu un être cher, pour
aider les familles qui cherchent des réponses suite à une disparition ou à un
décès de leur enfant.
Rappelons-nous aussi que, pour plusieurs
familles, on ne parle pas juste d'un enfant, mais de plusieurs enfants, de
plusieurs êtres chers. Alors, ça, c'est important aussi de voir, une fois qu'on
est admis dans un établissement de santé, de services sociaux ou d'une
congrégation religieuse, on a été touchés par ça, et par des centaines et des
centaines de familles. Alors, on parle d'un passé, mais qui est encore trop
récent. Les familles, aujourd'hui, veulent des réponses, connaître la vérité et,
surtout, entamer un processus de guérison.
Alors, avec les minutes précieuses que
nous avons, nous allons nous partager le temps, avec Geneviève, évidemment,
(s'exprime dans une langue autochtone), et, de façon virtuelle, une collègue, (s'exprime
dans une langue autochtone), Véronique, qui nous écoute.
Ma première recommandation pour vous,
c'est l'importance de connaître pourquoi et comment ça se fait, donc d'avoir un
préambule, afin de faire en sorte que le gouvernement et les institutions qui
vont appliquer et qui vont interpréter ce projet de loi là, on puisse
comprendre pourquoi il y a eu des disparitions et pourquoi il y a eu des décès
de telles sortes. Alors, ça, c'est <important...
Mme Audette (Michèle) :
…
pour vous, c'est l'importance de connaître pourquoi et comment ça se
fait, donc d'avoir un préambule, afin de faire en sorte que le gouvernement et
les institutions qui vont appliquer et qui vont interpréter ce projet de loi
là, on puisse comprendre pourquoi il y a eu des disparitions et pourquoi il y a
eu des décès de telles sortes. Alors, ça, c'est >important de
l'indiquer. Et la reconnaissance de ces faits par le législateur, la personne
qui va légiférer va constituer, en soi, un élément réparateur. Ça va guider
aussi les personnes qui vont, dans leur pratique, jouer un rôle d'interpréter
et d'appliquer la loi. Ça, c'est très, très, très important. D'ailleurs, dans
le préambule, de rappeler aussi les appels à la justice de l'ENFFADA Québec, nos 20 et 21,
puis d'apporter aussi l'objectif en regard de la réconciliation entre la
couronne provinciale, les Premières Nations et les Inuits.
Alors, je vais laisser maintenant ma
collègue Geneviève Motard prendre la parole.
La Présidente (Mme D'Amours) :
C'est à votre tour de prendre la parole. Merci.
Mme Motard (Geneviève) : Merci,
Mme la Présidente. M. le ministre, Mmes et MM. les députés, Michèle Audette et
les familles, «kwe», bonjour. Je suis donc Geneviève Motard, professeure à la
Faculté de droit de l'Université Laval.
Je tiens à vous remercier de nous entendre
aujourd'hui, hein? C'est évidemment un privilège pour moi d'être ici et de
pouvoir discuter avec vous du projet de loi n° 79. D'emblée, je salue la
venue de ce projet de loi. Dans le mémoire, qui a été préparé par Mme Véronique
Breton, qui est doctorante à la Faculté de droit de l'Université Laval, Mme Audette
et moi-même, vous trouverez certaines propositions pour améliorer le projet de
loi. Je me propose de vous en faire une brève synthèse, là, dans les prochaines
minutes.
D'abord, comme cela vient d'être évoqué,
il nous semble nécessaire, là, d'ajouter un préambule au projet de loi, qui
fera référence au contexte particulier qui a mené à la préparation de ce projet
de loi. Donc, le préambule, comme cela vient aussi d'être indiqué, hein, va
être important parce qu'il, donc, va faire en sorte de reconnaître, hein, ce
contexte particulier, mais également parce qu'il va guider ceux qui vont
appliquer et vont interpréter la loi. Nous pensons aussi que l'objectif du
projet de loi devrait être revu de manière à mettre l'accent sur son véritable
objectif, hein, son véritable but, c'est-à-dire de permettre aux familles de
connaître la vérité. Actuellement, le projet de loi met de l'avant un moyen,
hein, c'est-à-dire soutenir les familles, plutôt qu'un objectif, hein, qui est,
finalement, de connaître la vérité sur ces disparitions et ces décès d'enfants.
Également, le projet de loi n° 79
limite la portée de la loi à la recherche d'information, comme vous le savez,
hein, concernant les circonstances des décès et des disparitions d'enfants.
Nous recommandons d'élargir la portée de la loi aux causes et circonstances des
décès et disparitions d'enfants de manière à véritablement connaître la vérité,
là, sur ce qui s'est passé. Les familles veulent comprendre, hein, comment
leurs enfants ont disparu ou sont décédés, mais elles veulent également savoir
pourquoi, elles veulent <connaître…
Mme Motard (Geneviève) : ...
la
loi aux causes et circonstances des décès et disparitions d'enfants de manière
à véritablement connaître la vérité, là, sur ce qui s'est passé. Les familles
veulent comprendre, hein, comment leurs enfants ont disparu ou sont décédés,
mais elles veulent également savoir pourquoi, elles veulent >connaître,
hein, les raisons des décès et des disparitions. Donc, ce sont là, il faut bien
le voir, là, deux aspects du droit de savoir, hein, du droit à la vérité, que
nous retrouvons aussi, là, dans plusieurs instruments du droit international.
Nous recommandons que le projet de loi n° 79 précise aussi les moyens qui seront mis à la
disposition des familles et qui leur donnent plus de garanties. Le projet de
loi n° 79 prévoit, comme vous le savez, là, que son
objectif, hein, est de soutenir les familles, mais les moyens qui sont prévus pour
ce soutien demeurent indéterminés. Je vous donne quelques exemples, là. Est-ce
que le soutien se traduira concrètement par du financement pérein, par du
soutien technique, par du soutien par la voie d'expertises, par exemple, par de
la traduction? Bref, il serait important que ces moyens soient précisés, de
manière à ce que les mécanismes qui seront mis en place soient effectifs,
efficaces, eu égard aux droits des familles de connaître la vérité. Ces moyens
doivent aussi être respectueux des familles, des traumas, hein, ils doivent
respecter, donc, la dignité des familles.
La mise en place d'un processus d'accès à
l'information qui ne serait pas sensible, par exemple, au contexte
sociohistorique des familles ne serait pas, à notre avis, respectueux, là, de
la profondeur de la tragédie vécue par ces familles et des responsabilités
correspondantes du Québec. Mme Audette l'a déjà mentionné, hein, les
familles doivent être au coeur du projet de loi n° 79.
• (9 h 50) •
Nous recommandons aussi que le projet de
loi n° 79 donne davantage de garanties aux familles
pour que celles-ci soient vraiment au coeur des processus et que leur droit à
la vérité ait préséance. Actuellement, encore une fois, plusieurs questions
restent en suspens. Est-ce que l'administration soutiendra les familles lorsque
les archives se trouvent hors des frontières du Québec ou dans les institutions
fédérales, hein? On peut penser à ce qui était, avant, là, le Département des
affaires indiennes. Est-ce que les familles devront multiplier les démarches
auprès des différents établissements? Est-ce que les familles pourront
suspendre leurs démarches et les reprendre ultérieurement? Le projet de loi n° 79, là, est silencieux sur ces questions.
Enfin, nous recommandons que le délai de
cinq ans soit supprimé et qu'aucun délai ne soit indiqué, de manière à
reconnaître le droit imprescriptible des familles de connaître la vérité et
d'avoir accès aux archives. Dans le même esprit, nous pensons que la date du
31 décembre 1989, qui est indiquée au projet de loi, soit retirée. Des
filles autochtones, hein, donc des mineures, qui ont continué à disparaître, là...
ont continué à disparaître à la suite de cette date. Le dernier pensionnat a
fermé ses portes au Québec en 1991, et, jusqu'à tout récemment, on envoyait
encore les enfants autochtones en avion, seuls, pour obtenir des soins dans les
institutions hospitalières, par <exemple...
Mme Motard (Geneviève) : …
Des
filles autochtones, hein, donc des mineures, qui ont continué à disparaître,
là, à la suite de cette date. Le dernier pensionnat a fermé ses portes au
Québec en 1991, et, jusqu'à tout récemment, on envoyait encore les enfants
autochtones en avion, seuls, pour obtenir des soins dans les institutions
hospitalières, par >exemple, des centres urbains.
Je terminerais ici en rappelant que ce projet
de loi, vous le savez, là, est important pour les familles, pour les
communautés, les Premières Nations et Inuits au Québec, hein, qui demandent
vérité et justice. J'ajouterai que ce projet de loi, il est aussi important
pour les Québécois dans leur ensemble, qui ont aussi le droit de savoir ce qui
s'est passé, dans les institutions québécoises, avec tous ces enfants, et qu'un
mécanisme de réparation efficace devrait être mis en oeuvre. Donc, le projet de
loi n° 79, hein, c'est une étape importante, c'est
une première étape, donc une première étape qui est importante, mais, à notre
avis, il doit absolument être bonifié pour que le Québec soit à la hauteur du
drame de ces familles, mais aussi à la hauteur des standards internationaux.
Je conclurais simplement en disant que ces
familles ont le droit à la vérité, et les Premières Nations et Inuits ont aussi
le droit au rapatriement de leurs restes humains. Le Québec a l'obligation, quant
à lui, de prévoir des mesures de réparation efficaces. Merci, «miguech».
La Présidente (Mme D'Amours) :
Merci pour votre exposé. Nous allons maintenant débuter la période d'échange. M.
le ministre, la parole est à vous, vous disposez de 16 min 30 s.
M. Lafrenière : Merci beaucoup,
Mme la Présidente. «Kwe», bonjour à nos invités, très heureux de vous retrouver
aujourd'hui, moment très, très important, et merci de nous partager votre connaissance,
votre savoir pour nous aider aujourd'hui, parce que le but ultime — et
j'ai bien aimé les remarques de mes collègues tout à l'heure — c'est
de trouver ensemble la meilleure loi, le meilleur projet de loi pour répondre
aux attentes des familles, et, en ce sens-là, vous nous aidez beaucoup aujourd'hui.
Avant de passer à ma question, j'ai peut-être
un petit point important à mentionner au niveau de la direction de soutien aux
familles, parce que vous avez amené tellement de points importants, quand on
dit : Comment on va soutenir ces familles-là?, je vais vous dire ce que ce
n'est pas aussi. Ce ne sera pas une boîte de référencement, ce ne sera pas une
boîte qui va vous dire : Monsieur, madame, faites votre demande, revenez
nous voir dans deux semaines, voici un numéro de téléphone. Je pense que c'est
important de dire ce que ce ne sera pas. Ce n'est pas la vision qu'on a, mais pas
du tout, quand on parle de sécurisation culturelle, quand on parle de respect
des familles, de respect du traumatisme qui a été vécu, mais c'est de les
soutenir là-dedans, et ça peut aller jusqu'à remplir la demande avec eux, pour
eux. Alors, ça, c'est très, très clair. Mais vous avez amené des bons points
quant aux détails qui devraient être inclus.
Mme Audette, compte tenu de votre
rôle que vous avez joué à l'ENFFADA, je commencerais avec une première question
pour vous. Est-ce qu'on fait le lien direct entre notre projet de loi et des
appels qui ont été formulés, l'appel 20 et l'appel 21? Et je sais que,
dans votre travail, vous avez dû, justement, vous enquérir d'aller chercher de l'information
dans les admissions… au niveau des établissements de santé, pardon, et j'aimerais
savoir quels ont été vos plus grands défis que vous avez vécus à l'époque. Et
je vous demande ça parce que je veux qu'on se prépare, je veux qu'on soit bien
outillés pour ce qui s'en vient face à nous. Vous avez joué un rôle qui était
hyperimportant, vous avez connu cette <réalité-là, et…
M. Lafrenière : …vous
enquérir d'aller chercher de
l'information dans les admissions… au
niveau des
établissements de santé, pardon, et j'aimerais savoir quels
ont été vos plus grands défis que vous avez vécus à l'époque. Et je vous
demande ça
parce que je veux qu'on se prépare, je veux qu'on soit bien
outillés pour ce qui s'en vient face à nous. Vous avez joué un rôle qui était
hyperimportant, vous avez connu cette >réalité-là, et j'aimerais avoir
votre information là-dessus, c'est-à-dire comment vous l'avez vécu. Quels ont
été les plus grands défis, qu'on puisse s'ajuster à ça?
Mme Audette (Michèle) : Évidemment…
Merci beaucoup, M. le ministre. La commission d'enquête avait des pouvoirs
particuliers, un pouvoir de contraintes et d'exiger, là, des documents et des
archives. Je vous dirais que ça a été difficile d'avoir une collaboration à
100 %, et ce, à tous les niveaux, à travers le Canada, notamment le Québec.
Donc, si on parle ici, au Québec, juste d'avoir accès à des documents, la
complexité, aussi, au niveau des archives, parce que certaines institutions
n'existent plus, alors, ça, de naviguer là-dedans, une chance qu'on avait des
équipes, là, qui ne comptaient pas leur temps, là, pour assurer de trouver les
informations. Ça, ça a été des difficultés, je vous dirais, qui sont à
considérer dans votre travail.
Par la suite, le fait aussi qu'on va
retracer des documents, des archives difficiles de lire parce que c'est des
photocopies, de vieilles photocopies, écrites à la main, donc comment on va
interpréter ça, et que les familles n'ont pas l'expertise de comprendre ce
qu'était un dossier médical, à l'époque, ou juridique, ou de placement, ou de
services sociaux. Lorsqu'on appelait à certaines organisations, qui sont,
aujourd'hui, dûment constituées et organisées, et que ça datait de très, très
longtemps, là aussi, les gens ne savaient pas comment réagir au bout du fil.
Donc, le manque de formation, et d'information, et de préparation sur le
terrain, ça a été pas évident.
La nature, aussi, je vous dirais, de
l'anglais au français, pour des nations qui parlent anglais comme seconde
langue, alors que les documents sont en français. Ou le fait que des familles
vont déposer leur déclaration à la police ou dans une instance qui va prendre
leur vérité en langue atikamekw, en langue innue ou naskapie, mais que personne
ne veut financer la traduction et que, six mois plus tard, on va apprendre, une
fois la commission terminée : Ah! en passant, mon témoignage a été
traduit. Ça a pris six mois, on parle d'une personne. Alors, si on commence à
multiplier sur un grand territoire, ici, au Québec, français, anglais et toutes
les langues des premiers peuples, alors ces équipes-là, c'est important.
La méfiance qu'on a comme institution, à
une certaine époque. L'enquête nationale, je veux dire, on a été varlopés aussi,
où on représentait une institution. Donc, comment établir cette confiance-là
avec des familles? C'est du temps, c'est des gens, ce sont des experts et des
expertes qu'on a dû aller chercher. Et, je vous dirais, si
on avait la capacité que vous avez, M. le ministre et le gouvernement, le
groupe, le regroupement des familles, de le mettre au centre, de les outiller,
en termes de ressources humaines et financières, pour qu'elles puissent marcher
avec vous pendant ce processus-là, je pense que, moi, c'est quelque <chose
que…
Mme Audette (Michèle) :
…
si on avait la capacité que vous avez, M. le ministre et le
gouvernement, le groupe, le regroupement des familles, de le mettre au centre,
de les outiller, en termes de ressources humaines et financières, pour qu'elles
puissent marcher avec vous pendant ce processus-là, je pense que, moi, c'est
quelque >chose que je vous souhaite et je nous souhaite. Et évidemment
les institutions, il y a du racisme, il y a eu des comportements pour ralentir
ou prendre plus de temps lorsqu'on demandait des documents. Ça, c'est un
domaine qui n'était pas mon expertise, mais ça m'a frappée. Donc, ça aussi, des
fois, par des biais inconscients ou très conscients, va nous amener, aussi, des
barrières… et des délais, pardon.
M. Lafrenière : Je vous
remercie. Mme la Présidente, je laisserais l'occasion à un ou une de mes
collègues de la banquette ministérielle de poser une question, parce que je
veux vraiment que ça se fasse dans la collégialité puis que tout le monde ait
la chance d'intervenir avec nos invités. Je vais me permettre une note, à la
fin, pour conclure.
La Présidente (Mme D'Amours) :
Merci. Alors, qui de vos collègues voudrait prendre la parole?
Mme Guillemette : Je peux bien
y aller.
La Présidente (Mme D'Amours) :
Alors, allez-y, Mme la députée.
Mme Guillemette : Merci. Nancy
Guillemette, je suis la députée de Roberval. Très contente d'être ici aujourd'hui
pour ce processus qui va nous mener, on l'espère, vers la connaissance de vos
familles, de ce qui s'est passé à l'époque.
Je prenais tout à l'heure le témoignage de
Mme Motard, et elle disait : Ça va prendre des moyens pour les
familles. Quels moyens on pourrait mettre en place pour les soutenir encore
plus, pour être là pour elles, et que ce processus-là se fasse dans… et malgré
qu'on le sait, qu'il y aura de la douleur et que ce sera émotif, mais pour que
ça se passe le mieux possible?
Mme Audette (Michèle) : Si
vous me permettez, dans le rapport ENFFADA Québec, les familles nous on
proposé, dans les appels à la justice, d'avoir des personnes dans chaque
communauté ou par région pour les nations, en termes de langue aussi, et de
territoire, d'avoir cette relation-là et cette expertise-là qui feraient le
lien avec les familles et les survivantes et la direction ou la… bien, je ne
veux pas dire la boîte, excusez, là, mais l'espace que vous voulez mettre sur
pied, là, comme gouvernement, là, pour accompagner les familles dans la
recherche de vérité et de processus de guérison. Ça, c'est un moyen parmi
d'autres.
Vous allez avoir la chance d'écouter les
familles, et, je vous dirais, si on était en mesure... Oui, Femmes autochtones
du Québec, l'Assemblée des chefs, moi, comme ex-commissaire, on a une
responsabilité morale, éthique et sociale, mais c'est aux familles, en les
finançant, en les soutenant et en collaborant avec elles, que je pense que vous
allez avoir beaucoup, beaucoup de lumière et de guérison en travaillant de la
sorte.
• (10 heures) •
Mme Guillemette : Merci.
Est-ce que j'ai d'autres collègues qui ont des questions? Sinon, j'aurais
peut-être une dernière question. Vous dites que ce serait <important de…
>
10 h (version révisée)
< Mme Audette (Michèle) :
...de lumière et de guérison en travaillant de la sorte.
Mme Guillemette : Merci.
Est-ce
que j'ai d'autres
collègues qui ont des
questions? Sinon,
j'aurais
peut-être une dernière
question. Vous dites que ça
serait >important de donner des garanties aux familles. Qu'est-ce que
vous entendez par «donner des garanties aux familles»?
Mme Audette (Michèle) :
Mme Motard, si vous voulez commencer.
Mme Motard (Geneviève) :
Bonjour. Merci. En fait, c'est que, dans le projet de loi actuel, il y a... je
n'appellerais pas ça des trous, mais il y a cette insuffisance de garantie sur,
par exemple, le contrôle que les familles peuvent avoir sur le processus. Bon, actuellement,
une famille, par exemple, qui souhaiterait entamer des démarches et suspendre
ces démarches, les reprendre ultérieurement, actuellement, il y a une limite de
cinq ans pour faire l'ensemble de ce processus, hein, de recherche, qui peut
être excessivement lourd. Et donc est-ce que les familles auraient le droit,
justement, d'avoir ce contrôle sur ce processus de recherche, finalement? Donc,
ça, c'est ce à quoi on réfère quand on parle de manque de garantie, là, par
exemple.
Bon, il y a d'autres questions, là, qui
restent en suspens. Là, j'ai évoqué l'exemple de la multiplicité des démarches.
Est-ce qu'une famille dont l'enfant a transféré d'un établissement à l'autre
devra faire des demandes dans plusieurs établissements pour être en mesure,
hein, finalement d'avoir une réponse complète, là, sur la situation qui a été
vécue par son enfant? Le projet de loi, encore une fois, il est silencieux sur
cette question-là. Est-ce qu'il serait possible de prévoir un mécanisme, hein,
où une seule demande... Si on conserve le modèle de l'accès à l'information,
est-ce qu'une seule demande ne pourrait pas donner accès, finalement, à
l'ensemble de l'information plutôt que d'imposer, finalement, aux familles, là,
le fardeau de multiplier les demandes à divers établissements à travers le
temps, là?
Ça fait que, donc, ça, ce sont deux
exemples. Peut-être, Michèle, tu veux compléter, là. Mais, de mon point de vue,
là, je ne sais pas, ça illustre peut-être, là, ce qu'on voulait dire. Mais vous
avez d'autres exemples dans le mémoire qu'on a déposé, là.
Mme Audette (Michèle) :
Brièvement, je dirais, toute la stratégie de communication... Pardon, Mme la
députée. La stratégie de communication pour qu'on puisse vulgariser, que les
gens comprennent que, ah! ce qui est proposé, ça me concerne moi, comme
individu ou comme famille. Ça, c'est superimportant. Vulgariser, c'est
superimportant, faire connaître.
Mais aussi la reddition de comptes. On
sait que M. le ministre va devoir de façon annuelle déposer un rapport. Alors,
de trouver une façon que les gens, les familles comprennent c'est quoi, le
rapport, pour faire en sorte qu'on puisse contribuer lors du dépôt du rapport
avec plus d'information, je vous dirais, pour qu'on <comprenne que
c'est...
Mme Audette (Michèle) :
…
de façon annuelle déposer un rapport. Alors, de trouver une façon que
les gens, les familles comprennent c'est quoi, le rapport, pour faire en sorte
qu'on puisse contribuer lors du dépôt du rapport avec plus d'information, je
vous dirais, pour qu'on >comprenne que c'est déjà important ce qui se
passe, pour démontrer aussi qu'à la fin de l'exercice la commission d'enquête
va être nécessaire.
M. Lamothe : Mme la Présidente,
est-ce que j'ai le temps pour une question?
La Présidente (Mme D'Amours) :
Allez-y, M. le député.
M. Lamothe : Mme Motard,
vous mentionnez que les familles aient le contrôle sur le processus de
recherche. C'est assez large, ça, je veux dire, que les familles soient au
courant du processus ou au courant des recherches qui se font, oui, mais le
contrôle du processus, ça, c'est un petit peu fort, non?
La Présidente (Mme D'Amours) :
Mme Audette.
Mme Audette (Michèle) : La
question était à Geneviève, mais, je vous dirais, les familles ont le droit de
savoir, et on a le devoir de leur dire. Le contrôle, je vous dirais, s'il y a
une collaboration étroite avec le regroupement et les organisations en seconde
étape, qui sont ceux et celles qui vont être devant vous... si ce n'est pas
«contrôle», on peut changer pour dire : Au moins, on est transparent, au
moins, on informe. Parce que c'est un processus de guérison, ça, savoir la
vérité ou savoir où on en est dans un processus.
M. Lamothe : On est d'accord.
Que les familles soient au courant, que le processus soit transparent, oui,
mais que les familles contrôlent le processus, comme Mme Motard l'a
apporté, je pense que c'est un petit peu fort.
La Présidente (Mme D'Amours) :
Mme Motard… (panne de son) ...intervenir? Oui. Allez-y, Mme Motard.
Mme Motard (Geneviève) : En
fait, on peut être en désaccord sur les termes, mais actuellement, les
familles, ce qu'on leur propose essentiellement, c'est une ouverture du système
d'accès à l'information. Et donc la capacité qu'elles ont, hein, justement, de
maîtriser…
Prenons simplement le rythme, hein, auquel
ces demandes-là peuvent être faites. Bien, ça, ça doit appartenir aux familles.
Une famille peut être prête à recevoir certaines informations, peut ne pas être
prête aussi à recevoir d'autres types d'informations. Et c'est en ce sens-là
que, par exemple, on peut parler de s'assurer que les familles sont en
contrôle, hein, de ce processus-là. Qu'on pense simplement au rythme.
Bon. Mais, pour le reste, vous allez
entendre les familles. Les familles vont très certainement être en meilleure
position que moi, là, pour vous donner des exemples à ce… sur la portée de ce
contrôle qu'elles souhaitent et le soutien que le gouvernement peut apporter
aux familles, là, dans la recherche de vérité.
M. Lamothe : O.K. Mais, comme
je vous dis, contrôler le processus de recherche, c'est fort. Mais par contre,
si je comprends ce que vous voulez dire, c'est de contrôler jusqu'à un certain
point l'information qu'ils peuvent <recevoir…
Mme Motard (Geneviève) : ...
le soutien que le gouvernement peut apporter aux familles, là, dans la
recherche de vérité.
M. Lamothe : O.K. Mais,
comme je vous dis, contrôler le processus de recherche, c'est fort. Mais par
contre, si je comprends ce que vous voulez dire, c'est de contrôler jusqu'à un
certain point l'information qu'ils peuvent >recevoir.
Mme Motard (Geneviève) : Bien,
entre autres. L'important... Je pense que l'idée, c'est de s'assurer que le projet
de loi mette les familles au coeur du processus et que le projet de loi soit...
réponde aux besoins des familles. Je pense que c'est ça, l'essentiel qu'il faut
retenir ici.
M. Lamothe : On est d'accord.
Mme D'Amours : Merci. M. le
ministre, il vous reste 2 min 20 s.
M. Lafrenière : Bien, merci.
Merci à mes collègues pour les questions. Puis je terminerais en faisant un
petit résumé de ce que vous nous avez présenté aujourd'hui avec des points
importants. Puis ça va nous aider beaucoup dans nos travaux pour le futur.
Vous avez parlé du pouvoir de contrainte,
puis je trouvais ça important, c'est pour ça qu'on l'a mis dans le projet de
loi. Parce que, oui, au tout début, il y la prévention. Vous avez parlé aussi
de la difficulté que vous avez avec certains organismes. On va avoir du travail
à faire. La direction de soutien aux familles, c'est un de ses mandats, c'est
d'aller voir les organismes, de faire de la sensibilisation. Il ne faut pas
être obligés d'aller jusqu'au pouvoir de contrainte. Ça fait que ça, c'est un
point que vous avez mentionné qui est très important.
Traduction, important, puis
interprétation. J'aimerais nous envoyer un message très positif, il y a
plusieurs personnes qui ont levé la main, des médecins, des policiers, des ex
qui nous on dit qu'ils étaient disponibles pour adapter les documents. Parce
qu'on doit comprendre que d'avoir accès à un document, si on ne comprend pas ce
qui est écrit dessus, ça nous amène à la case départ. Alors, il y a plusieurs
personnes qui se sont portées volontaires pour nous aider là-dedans. Très bon
point.
Reddition de comptes, important.
Pour le délai de cinq ans, comme on
contrevient à plusieurs lois et règlements, on devait le cibler dans le temps,
mais vous comprenez très bien aussi qu'on s'est donné le pouvoir de le
prolonger d'une année de façon indéfinie. Alors, tantôt, vous avez amené un cas
d'espèce d'une famille qui n'aurait pas fini ses démarches après quatre ans.
Étant donné que le but est de donner réponse à ces familles-là, on peut le
prolonger de façon indéfinie. C'est vraiment un enjeu légal qu'on va pouvoir
discuter ensemble, là, dans l'article par article, mais on devait le définir
dans le temps, étant donné qu'on contrevient à certaines lois et règlements.
Et là un point super important que vous
avez apporté, de dire : Est-ce que, les familles, c'est à elles de savoir
qu'elles doivent faire des demandes à six organismes? Est-ce que, en bon
français, ça devrait être compliqué pour les familles? Et la réponse, c'est
non. Ça va être la job de la direction de soutien aux familles vraiment de les
recevoir, de les aider, de les guider. Puis je vous le dis, pour moi, des fois
c'est difficile d'expliquer clairement ce que ça va être, mais je vais vous
dire clairement ce que ça ne sera pas : ça ne sera pas une boîte de
référencement. Ça ne sera pas un endroit qu'ils vont vous donner des adresses
courriel, des numéros de téléphone en disant : Faites vos démarches puis
revenez-nous plus tard. Ce n'est pas ce qu'on veut faire. On disait souvent ici
quand on parlait du projet de loi : On veut mettre les familles dans de la
ouate, on veut les enrober, on veut prendre soin d'elles parce que c'est un
processus qui va être lourd, mais tellement important pour apporter des
réponses à ces familles-là.
Alors, merci beaucoup, l'ensemble de vos
recommandations, aujourd'hui, vont nous aider beaucoup, là, dans nos travaux. «Meegwetch.»
Merci beaucoup.
La Présidente (Mme D'Amours) :
Merci, M. le ministre. Maintenant, je cède la parole au député de
Jacques-Cartier. Vous disposez de 11 minutes.
M. Kelley
: Merci, Mme
la Présidente. «Kwei», <Mme Audette....
M. Lafrenière : ...
de vos recommandations, aujourd'hui, vont nous aider beaucoup, là, dans nos
travaux. Meegwetch. Merci beaucoup.
La Présidente (Mme D'Amours) :
Merci, M. le ministre. Maintenant, je cède la parole au député de
Jacques-Cartier. Vous disposez de 11 minutes.
M. Kelley
: Merci,
Mme la Présidente. «Kwei», >Mme Audette, Mme Motard puis Mme Lachance.
Merci d'être ici avec nous aujourd'hui.
J'ai juste une question pour Mme Audette.
En 2019, vous avez demandé que le gouvernement lance sans délai une enquête
publique sur les enfants autochtones disparus. Selon vous, est-ce que ce projet
de loi répond à cette demande de faire une enquête globale sur les enfants
autochtones disparus?
Mme Audette (Michèle) : C'est
sûr que, la question, la façon qu'elle est posée, chers députés et collègues, c'est
non. C'est un début de ramasser ou d'avoir de l'information et des preuves, et
de là l'importance, comme ancienne commissaire, et pourquoi on a proposé ces
deux appels-là tellement importants, d'avoir l'information, de comprendre les
causes et les circonstances, et si le projet de loi ne veut pas parler ou aller
dans le volet des causes... c'est pourquoi j'ai réitéré l'importance d'avoir
cette commission.
• (10 h 10) •
Alors, dans une deuxième étape, je nous le
souhaite, si ce n'est pas une commission... en autant que ça soit un mécanisme
dans lequel on va comprendre comment ça se fait que des enfants de Pakuashipi, et on ne parle pas juste un, mais
plusieurs, vont embarquer dans des avions-ambulances sans la présence des
parents, et, plus tard, on essaie de comprendre ce qui s'est passé, on ne le
sait pas et finalement, 40 ans plus tard, à cause d'une journaliste, on
comprend que, ah! ça a été ça, le décès, mais on n'est pas sûr. Donc... puis qu'on
peut faire un parallèle avec une famille québécoise, pardon, pour leçon, avec
une famille québécoise dans cette région-là, ou plusieurs familles québécoises
dans cette même période là, elles ont été en mesure d'assister aux dernières
secondes de leur enfant et de le ramener dans leur communauté ou dans leur
village pour avoir une cérémonie de deuil, alors que des centaines et des
centaines de familles au Québec n'ont pas eu ce droit-là.
M. Kelley
: Merci
beaucoup. Juste la raison, parce que... pourquoi j'ai posé la question, c'était
suite un petit peu à la discussion que vous avez eue avec mes collègues du gouvernement,
qu'on mette un petit peu le fardeau toujours sur le dos des familles
autochtones, et je reviens un petit peu sur la rafale des années 60, où on
a vu, avec le gouvernement fédéral... et je sais que les deux situations sont
un petit peu différentes, mais les fonctionnaires du gouvernement fédéral n'ont
pas nécessairement aidé les gens qui ont demandé de faire un «claim» avec le
gouvernement fédéral, d'être compensés de la poursuite qui a été lancée contre
le gouvernement fédéral. Mais, bref, il y a eu des blocages des fois, et on a
entendu un petit peu, sur le terrain, que ce n'était pas facile toujours
travailler avec le gouvernement fédéral. Et je sais que le bureau des <avocats
qui a...
M. Kelley
: ...
aidé les gens qui ont demandé de faire un «claim» avec le gouvernement fédéral,
d'être compensés de la poursuite qui a été lancée contre le gouvernement
fédéral. Mais, bref, il y a eu des blocages des fois, et on a entendu un petit
peu sur le terrain que ce n'était pas facile toujours travailler avec le
gouvernement fédéral. Et je sais que le bureau des >avocats qui a
représenté des peuples autochtones a mis ça dans les médias, que ça prend beaucoup
de temps parce que le gouvernement fédéral n'est pas toujours prêt à travailler
nécessairement avec des peuples autochtones.
Encore, on n'est pas pareils, mais je veux
juste savoir l'importance de la formation. Parce qu'on parle un petit peu les
moyens pour les familles, mais aussi la formation des gens qui vont travailler
pour le SAA pour aider des familles. Quels sont les éléments de s'assurer que
ce n'est pas... Eh oui, j'ai confiance en le ministre quand il a dit : Ça
ne va pas juste être un numéro, on reçoit les appels, puis tout est beau. Il y
a un processus après ça. Mais peut-être des suggestions pour nous sur la
formation pour les gens qui travaillent au sein du gouvernement, pour s'assurer
que les peuples autochtones sont bien respectés dans tout ce processus.
Mme Audette (Michèle) : Une question
importante. Je vous dirais, humaniser l'approche, il faut absolument humaniser
l'approche. On le sent dans vos propos, là, M. le ministre, et vous,
M. Kelley, et, je suis convaincue, avec les autres collègues, et pour
avoir entendu Mme D'Amours à plusieurs reprises, là, on parle d'êtres
humains, d'êtres chers, des bébés, des enfants. Donc, il faut absolument
humaniser l'approche.
Le volet juridique, légal et de justice
est important. Mais de se mettre à un niveau... pas parce qu'on est plus bas,
mais un niveau où je vais me sentir en confiance qu'on va redonner ma dignité
et celle de mon être cher qui n'est jamais revenu à la maison.
Et, à travers les formations, il y a des
experts et des expertes qui sont là, et les premières sont les familles. On a
des leaders incroyables dans les familles qui, même moi, vont m'avoir mentorée
tout le long de la commission d'enquête. Tout le long, ils vont nous avoir
obligés et demandé d'avoir un filet de sécurité avant, et pendant, et après le
processus de recherche de vérité ou de partage de vérité, dans une approche qui
va être culturellement aussi propre aux Innus, aux Attikameks, aux Anishnabes,
aux Mohawks, et ainsi de suite, aux nations, donc de ne pas avoir une approche
juste panquébécoise, là, je dirais, je ne sais pas ça serait quoi,
l'expression.
Et, au niveau du SAA, la formation, vous
avez des gens qui sont là depuis longtemps. Vous avez des gens, des relations
autour qui pourraient contribuer à former, informer, former et informer. Comme
en communication, il faut répéter 20 fois un message pour qu'on finisse
par adhérer à ça, bien, la même affaire. Ce n'est pas quelques heures de
formation, mais sur une continuité tout le long du projet, tout le long de la
durée du projet de loi.
M. Kelley
: Et, selon
vous, Mme Audette, comment on peut briser un petit peu ce manque de
confiance? Parce que, quand même, ça va être un service gouvernemental qui
arrive. Et c'est vrai, le gouvernement du Québec et la fonction publique ont
souvent des solutions «try to fit a square into a round peg», ça arrive
souvent. Alors, comment on peut s'assurer que les gens peuvent avoir confiance
dans le processus? <Parce que...
M. Kelley
: … de
confiance?
Parce que,
quand même, ça va être un service
gouvernemental
qui arrive. Et c'est vrai, le
gouvernement du Québec et la
fonction
publique ont souvent des solutions «try to fit a square into a round peg», ça
arrive souvent. Alors, comment on peut s'assurer que les gens peuvent avoir
confiance dans le processus? >Parce qu'une crainte que présentement
j'avais, c'est... les gens vont dire : O.K., on a passé ce projet de loi,
mais pourquoi faire tout ce processus quand je pense que les églises vont quand
même cacher l'information? Comment le gouvernement peut bien communiquer ça au
peuple autochtone pour s'assurer que les gens veulent parler avec les
fonctionnaires publics? Ça, c'est arrivé à moi.
Mme Audette (Michèle) :
Écoutez, la méfiance, pour l'avoir vue avec les familles qui avaient... comme
je l'ai dit dans la présentation un peu plus tôt, pendant l'enquête, les gens
nous ont donné l'étiquette d'une institution fédérale, c'est normal. Mais, une
fois que la confiance est établie et que les gens comprennent le processus,
quand je parlais de vulgarisation, c'est tellement fondamental, qu'on peut
associer aussi des visages rassurants où on sait que, dans cette direction-là...
qui sait, pourquoi il n'y aurait pas un cercle de sages dans lequel nos
organisations ou nos experts et expertes vont contribuer tout le long du
processus comme sages ou comme intervenants pour accompagner tous ces gens qui
vont travailler pour les familles?
Ensuite, dites-vous une chose, une fois
qu'on explique aux familles… moi, je l'ai remarqué à travers le Canada et au
Québec, et au Québec avec la SQ ou des corps policiers en milieu autochtone,
une fois qu'on a expliqué quels est le mandat, la capacité, ce qu'on peut ou on
ne peut pas faire, les gens sont superintelligents, une intelligence
émotionnelle incroyable, autodidactes ou superformés, vont comprendre. Donc, de
là pourquoi je reviens tout le temps sur l'explication et la reddition de
compte, la transparence.
Vous avez la Protectrice du citoyen qui,
elle-même, va pouvoir vous accompagner aussi dans ce processus-là, et d'autres
institutions québécoises. Mais, l'expertise autochtone, moi, je tends ma main,
je suis prête, comme bien d'autres gens, je suis sûre, à vous accompagner
là-dedans.
M. Kelley
: Merci
beaucoup. Peut-être, juste une question pour Mme Motard, c'était sur la
page n° 5, le mémoire. Vous avez parlé du projet de loi n° 79
qui semblait être en décalage avec les normes internationales. Puis, dans les
références, d'une part, puisque le Canada a ratifié plus de conventions
internationales visant la protection des droits de la personne, qui... (panne
de son) ...le Québec, et, dans ça, vous citez deux exemples. Mais je veux juste
bien comprendre ces normes internationales, mais aussi, Mme Motard, ou,
quand même, Mme Audette, des autres juridictions au Canada. Est-ce qu'ils
ont essayé de commencer de traiter cette question des enfants disparus aussi?
Est-ce qu'il y a des bonnes pratiques que peut-être on peut regarder?
La Présidente (Mme D'Amours) :
Mme Motard.
Mme Motard (Geneviève) : Oui.
Bien, écoutez, sur les normes internationales, bon, évidemment, il y a une
panoplie de normes internationales, bon, les conventions de droits de <l'enfant…
La Présidente (Mme D'Amours) :
Mme Motard.
Mme Motard (Geneviève) :
Oui. Bien, écoutez, sur les normes internationales, bon, évidemment, il y a une
panoplie de normes internationales, bon, les conventions de droits de >l'enfant,
conventions contre la discrimination, de toutes les formes de discrimination, à
l'égard des femmes. Bon, toutes ces conventions-là qui protègent les droits
fondamentaux ont été ratifiées par le Canada et sont applicables au Québec, là,
comme vous le savez. Et donc la responsabilité du Québec, essentiellement,
c'est de mettre en oeuvre ces normes internationales.
Maintenant, nous, on a tenté d'aller du
côté du droit à la vérité, là, pour vraiment comprendre comment le projet de
loi s'inscrivait, là, dans le cadre de ce qui se passe à l'échelle
internationale, et là vous avez, bon, plusieurs conventions, qu'on parle du
PIDESC ou encore le… donc les pactes, là, relatifs aux droits civils et
politiques, qui vont… qui appuient ce droit à la vérité, et c'est en ce
sens-là, essentiellement, qu'on est allées rechercher les standards
internationaux.
Du point de vue de l'expertise
comparative, Québec, là, je ne suis pas certaine, là. Évidemment, il y a la
Commission vérité et réconciliation, là, qui portait davantage sur le système
des pensionnats. Maintenant, sur les enfants disparus et décédés, là, dans les
institutions, je ne suis pas certaine, là. Peut-être que, Michèle, tu as
davantage d'informations là-dessus, mais moi, je n'ai pas fait cette
recherche-là pour l'instant, puis ça me fera plaisir, là, de vous communiquer
l'information par la suite, là, si vous en avez besoin. J'espère... je ne sais
pas si ça répond à votre question.
• (10 h 20) •
M. Kelley
: Oui. Non,
ça répond à la question. Puis je ne sais pas combien de temps qu'il reste, Mme
la Présidente, juste… Ah! vous êtes sur «mute». Juste une dernière chose,
rapidement…
La Présidente (Mme D'Amours) :
Il vous reste sept secondes, M. le député.
M. Kelley
: Ah! bien,
c'est terminé. Bref, merci beaucoup, Mme Audette, Mme Motard, puis
madame… pour votre témoignage aujourd'hui. Merci beaucoup.
La Présidente (Mme D'Amours) :
Merci. Je cède maintenant la parole à la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques.
Vous disposez de 2 min 45 s.
Mme Massé : Merci, Mme la
Présidente. Allons droit au but. Donc, bonjour, mesdames. Merci vraiment pour
votre rapport.
Je commencerai peut-être avec vous, Mme Motard.
Vous avez dit, dans votre présentation, que le droit à la vérité est un droit
imprescriptible, ou j'ai mal compris. Alors, j'aimerais que vous me confirmiez
ça. Et vous dites… vous avez dit aussi que, considérant le projet de loi tel
qu'il est libellé présentement, on ne se préoccupe que des circonstances et non
des causes. Alors, j'aimerais vous entendre brièvement, parce que le… j'ai
d'autres questions, j'aimerais vous entendre là-dessus.
Mme Motard (Geneviève) : Oui.
Bien, écoutez, sur causes et <circonstances…
Mme Massé : … qu'il est
libellé
présentement, on ne se préoccupe que des circonstances et non
des causes. Alors, j'aimerais vous entendre
brièvement,
parce que
le… j'ai d'autres questions, j'aimerais vous entendre
là-dessus.
Mme Motard (Geneviève) :
Oui. Bien, écoutez, sur causes et >circonstances, le projet de loi fait,
à mon sens, clairement une distinction, là, en limitant aux circonstances des
décès. On peut simplement comparer, là, avec la Loi sur le coroner, hein, qui
fait cette nuance-là. Et donc la crainte qu'on a avec le projet de loi, c'est
qu'il ne permette pas, justement, d'aller au fond des choses puis de
comprendre, là, l'ensemble non seulement des circonstances, mais aussi des
raisons qui ont causé soit les décès ou encore les disparitions, là.
Donc, il y a plusieurs manières, là, de
pallier cette lacune. Si on peut, par exemple, définir l'expression
«circonstances» dans les définitions, là, d'un projet de loi, de manière à
faire en sorte que ça comprend les causes, de manière large, hein, et que
l'objectif, c'est vraiment d'aller au fond des choses, donc ça serait une
manière de le faire. Ou, encore, ça serait d'ajouter le mot «causes», hein,
«causes et circonstances», par exemple, à l'article 1, là, si je me
souviens bien.
Mme Massé : Et concernant la
dimension imprescriptible?
Mme Motard (Geneviève) : Ah!
Oui, excusez-moi. Donc, effectivement, le droit à la vérité à l'échelle
internationale, c'est un droit qui, donc, est imprescriptible, hein? Ça veut
dire qu'il ne doit pas y avoir, finalement, de délai, hein, ou d'atteinte dans
la durée, là, donc, temporelle qui empêcherait, finalement, les familles de
connaître la vérité. Donc, c'est essentiellement ce que ça veut dire, puis, actuellement
dans le projet de loi, bien il y a deux limites temporelles. Il y a le délai de
cinq ans, là, je comprends les enjeux juridiques mais quand même il faudrait peut-être
que ce droit à la vérité soit présenté comme étant un droit qui, lui, n'est pas
prescriptible, même si, bon, il y a des enjeux juridiques qui doivent être
attachés, là. Donc, ce délai de cinq ans est problématique, puisqu'il peut
avoir pour effet...
La Présidente (Mme D'Amours) : En
terminant.
Mme Motard (Geneviève) : ...pardon,
puisqu'il peut avoir pour effet de porter atteinte à la recherche de la vérité.
La Présidente (Mme D'Amours) :
Merci. Je cède maintenant la parole au député de René-Lévesque. Vous disposez
de 2 min 45 s.
M. Ouellet : Merci beaucoup, Mme
la Présidente. Donc, à mon tour de vous saluer, mesdames. Peut-être continuer
sur les délais imprescriptibles, le ministre nous a dit qu'on doit fonctionner
ainsi parce qu'on déroge à certaines lois, puis il est important de le
circonscrire dans le temps. Cinq ans semble trop court pour vous, et même
inadéquat. Mais est-ce qu'on pourrait l'élargir à 10, peut-être 15 ans,
pour donner plus de temps? Est-ce que ça, ça serait une avenue qui serait
mitoyenne entre le cinq ans et la non-prescriptibilité?
Mme Motard (Geneviève) : Bien,
écoutez, je pense que l'important, c'est que les familles puissent connaître la
vérité, hein? Et ça, c'est l'objectif fondamental du projet de loi. <On
peut parler...
M. Ouellet :
...
le cinq ans et la non-prescriptibilité?
Mme Motard (Geneviève) :
Bien, écoutez, je pense que l'important, c'est que les familles puissent
connaître la vérité, hein? Et ça, c'est l'objectif fondamental du projet de
loi. >On peut parler d'un cinq ans, d'un 10 ans, mais, si les
familles, avec des recherches... il faut comprendre, hein, que le contexte, là,
de recherche qui va être mis en place va être excessivement lourd, là. On parle
d'aller dans des archives médicales, historiques des années 50, avec des
codes. Des fois, les archives se trouvent au fédéral, à l'extérieur du Québec.
Il y a des enfants qui sont sortis du Québec, qui sont peut-être même aux États-Unis
ou ailleurs. Bref, la démarche de recherches, elle est excessivement lourde.
Bon, je vous dirais que, si on impose un
délai de 10 ans pour faire ces recherches-là ou pour faire ces
demandes-là, évidemment que c'est mieux qu'un délai de cinq ans, hein? Mais le
droit de connaître, lui, en soi, il est imprescriptible. Et les délais qu'on va
imposer seront considérés comme étant des atteintes à ce droit à la vérité.
M. Ouellet : L'autre
précision aussi, on écarte les demandes visant les enfants qui auront pu être
admis dans les établissements après le 31 décembre 1989. Donc, ça aussi,
vous voulez voir ça sauter, excusez-moi l'expression, et qu'on puisse regarder
l'ensemble des situations. Est-ce que ça, c'est fondamental aussi comme amendement
qu'on devrait adopter dans le projet de loi?
Mme Motard (Geneviève) : À mon
sens, oui. C'est encore une fois une limite temporelle. Puis, bien honnêtement,
je comprends mal comment cette date de décembre 1989 a été identifiée, là. Bon,
je vous donnais l'exemple des enfants autochtones qui, jusqu'à tout récemment,
allaient dans les hôpitaux en avion sans être accompagnés. Donc, il y a très,
très probablement des situations post-1989 qui sont survenues, et je ne
comprends pas essentiellement pourquoi cette date de 1989 a été identifiée. Et
donc moi, tout simplement, je supprimerais cette... je recommanderais de
supprimer cette date.
M. Ouellet : Parfait.
La Présidente (Mme D'Amours) :
Alors, merci...
M. Ouellet : Combien de
temps, Mme la Présidente?
La Présidente (Mme D'Amours) :
Bien, deux secondes. Alors...
M. Ouellet : Merci.
La Présidente (Mme D'Amours) :
Merci infiniment. Donc, mesdames, Michèle Audette, commissaire du rapport
d'enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues ou
assassinées, Mme Geneviève Motard, professeure titulaire, Faculté de droit,
Université Laval et directrice du Centre interuniversitaire d'études et de
recherches autochtones, merci pour votre contribution aux travaux de la
commission.
Je suspends les travaux quelques instants
afin que l'on puisse accueillir, par visioconférence, le prochain groupe.
(Suspension de la séance à 10 h 27)
10 h 30 (version révisée)
(Reprise à 10 h 38)
La Présidente (Mme D'Amours) :
Je souhaite donc la bienvenue aux représentants du regroupement des familles
Awacak. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé,
après quoi nous procéderons à la période d'échange avec les membres de la
commission. Je vous invite donc à vous présenter, puis à commencer votre
exposé. Nous commençons avec Mme Ruperthouse.
Regroupement des familles Awacak
Mme Ruperthouse (Françoise) :
Oui, allo!
La Présidente (Mme D'Amours) :
Bonjour.
Mme Ruperthouse (Françoise) :
Bonjour. Bonjour, tout le monde. Mon nom est Françoise Ruperthouse. Je
fais partie des familles qui ont perdu des membres, des enfants à l'enfance. Je
viens pour ma mère, mon père, mes parents. Donc, on a perdu une soeur et un
frère. On les a retrouvés mais avec beaucoup, beaucoup de… ce n'est pas clair.
Donc, le projet de loi n° 79, je
débute comme ça, est un bon début, mais les familles autochtones méritent
encore mieux. Donc, on s'attend à avoir un peu plus de qu'est-ce que la
loi n° 79 nous donne.
Le mémoire, moi, je vais faire la lecture
parce que je le lis pour un groupe de familles, je ne lis pas seulement pour
moi, <c'est vraiment pour tout un groupe de familles…
Mme Ruperthouse (Françoise) :
...méritent encore mieux. Donc, on s'attend à avoir un peu plus de
qu'est-ce
que la
loi n° 79 nous donne.
Le mémoire, moi, je vais faire la
lecture parce que je le lis pour un groupe de familles. Je ne lis pas seulement
pour moi, >c'est vraiment pour tout un groupe de familles, le mémoire
Awacak qui veut dire «petits êtres de lumière», à la Commission des relations aujourd'hui.
Le projet de loi fait suite au rapport
québécois de l'Enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones
disparues et assassinées. Ça, ça vient compléter... Nous, quand on s'est
aperçus que ma mère avait perdu deux enfants... dans le fond, c'est une femme,
puis on avait été dénoncer que ma mère, elle avait perdu un enfant... ses deux
enfants pendant plus de 30 ans.
Awacak — Petits Êtres de lumière
a été fondé par des familles de nations atikamekw, anishinabe et innue ayant
des enfants disparus ou décédés lors d'interventions de différentes
institutions. Awacak regroupe plus de 30 familles autochtones qui ont
perdu au total 45 enfants, disparus ou décédés.
• (10 h 40) •
Awacak désire, par ses actions, redonner
de la dignité à nos enfants disparus, mes frères et soeurs, ou décédés ainsi
qu'à leurs familles et faire reconnaître les droits de nos enfants et de nos
familles. Le droit fondamental à l'autodétermination commence par le fait de
nous permettre de prendre nos propres décisions. Je m'excuse, je suis un peu...
je deviens très émotive quand je suis dedans, puis c'est quelque chose qui est
normal, je pense, puis ça fait des années que je vis dans ces émotions-là. Cela
nécessite, entre autres, un accès complet à l'information pour fonder nos
propres conclusions et de prendre en compte notre avis, nos avis, je dirais,
pour une situation, ou des situations, qui est particulière à notre vécu.
Awacak désire souligner certains aspects
positifs de ce projet de loi : l'obligation faite à diverses institutions
publiques et aux congrégations religieuses de remettre aux familles autochtones
toutes les informations concernant un enfant autochtone disparu ou décédé, ça,
c'est bon, c'est vrai que c'est correct; la disposition de l'article 19 du
projet de loi qui permet au ministre ou à son délégué de comprendre et
d'améliorer les pratiques <notamment par la sensibilisation...
Mme Ruperthouse (Françoise) :
…ça, c'est bon. C'est vrai que c'est correct.
La disposition de
l'article 19
du
projet de loi qui permet au
ministre ou à son délégué de
comprendre et d'améliorer les pratiques, >notamment par la
sensibilisation des personnes concernées aux réalités autochtones; le quatrième
paragraphe de l'article 5 qui permet à la famille élargie d'un enfant
disparu ou décédé d'entreprendre des recherches que cette loi... qui permet…
Comme moi, moi, ma mère, elle est à veille de mourir, puis je voudrais
continuer. Ça, c'est bien aussi.
Cependant, Awacak souhaite également
souligner certaines lacunes de ce projet de loi. En effet, le projet de loi
restreint de beaucoup la recherche de la vérité pour les familles, les familles
autochtones, en limitant cette recherche aux circonstances ayant entouré la
disparition et le décès de ces enfants. Voir l'article premier du projet de loi.
Pour nos familles, il est essentiel de
connaître les circonstances. C'est très important pour nous autres de connaître
qu'est-ce qui est arrivé, les circonstances, mais également les causes et les
raisons. Pourquoi les institutions, à travers les différentes époques,
ont-elles traité nos enfants d'une telle façon — je dis nos enfants,
je dis aussi mes frères et nos soeurs — de telle façon que personne
n'a pu savoir pendant des décennies s'ils étaient vivants, disparus ou décédés?
C'est des sentiments… c'est un sentiment qui est très difficile à porter, de ne
pas savoir où ils sont, nos enfants, pendant plusieurs années.
Dans le cas de décès, pourquoi nos enfants
n'ont-ils pas connu… pourquoi nos familles n'ont-elles pas connu le lieu de
leur inhumation? On a été laissés dans l'indifférence. Dans les cas de décès,
pourquoi nos familles n'ont-elles pas connu le lieu? Je le répète encore une
autre fois : À quoi est dû ce manque de transparence, cette absence de
réponses qui perdura pendant des dizaines d'années et des trentaines d'années,
je pourrais dire? Voilà des questions importantes pour nos familles.
Se limiter aux circonstances des décès ou
de discrimination sans essayer de comprendre les causes des <décès et…
Mme Ruperthouse (Françoise) :
...qui perdura pendant des dizaines d'années et des trentaines d'années, je
pourrais dire?
Voilà des
questions
importantes
pour nos familles. Se limiter aux
circonstances des décès ou de
discrimination
sans essayer de comprendre les causes des >décès et des disparitions
ainsi que le traitement qu'ont subi nos familles pendant des dizaines d'années,
pendant plusieurs années de la part des différentes institutions ne peut
permettre aux familles autochtones de connaître le pourquoi, le comment et le
qui de la disparition de ces petits êtres de lumière et ainsi de pouvoir véritablement
guérir. Ce n'est pas sûr qu'on guérit, mais au moins avoir une certaine paix.
Ainsi, le projet de loi propose un mandat
trop restreint, d'autant plus que nous voyons également des problèmes avec le fonctionnement
de l'accès à l'information. En effet, le projet de loi ne propose qu'un processus
d'accès à l'information par l'entremise de plusieurs articles, dont articles 2,
4, 7, 8, 9, 10 et 11. Or, pour les familles, cette orientation... (panne de
son) ...cheminement qu'il propose sont lourds, et bureaucratiques, et
difficiles d'accès, même avec l'appui du ministre responsable des Affaires
autochtones sous forme d'assistance et de guide des familles autochtones.
Nous avons également des demandes
concernant la reconnaissance de cette partie de notre histoire. Pour les
familles autochtones, il est important que cette partie de notre histoire soit
connue et racontée à l'ensemble de la population du Québec. Pourquoi? Parce
qu'on vit de la discrimination, puis on la vit encore et encore, on l'a toujours
vécue. Il est donc nécessaire de mettre sur pied un mécanisme afin de rendre
publics les résultats de ces recherches, il en va de la volonté de la
réconciliation maintes fois annoncée par les différents paliers gouvernementaux,
des gouvernements.
Enfin, les moyens offerts aux familles autochtones,
selon l'article 3, sont imprécis et ne prennent pas en compte la réalité autochtone.
En effet, nos familles endeuillées ont besoin d'une aide basée sur la roue de
la médecine autochtone, qui englobe les besoins physiques, mentaux, émotionnels
et spirituels. En plus, nous avons également des besoins juridiques <spécifiques
reliés à la situation...
Mme Ruperthouse (Françoise) :
...basée sur la roue de la médecine autochtone qui englobe les besoins
physiques, mentaux, émotionnels et spirituels. En plus, nous avons également
des besoins juridiques >spécifiques reliés à la situation particulière
des enfants autochtones disparus ou décédés.
La Présidente (Mme D'Amours) :
Mme Ruperthouse...
Mme Ruperthouse (Françoise) :
Oui.
La Présidente (Mme D'Amours) :
...je suis... J'ai le coeur déchiré, mais je dois intervenir. Votre
10 minutes est terminée. Donc, nous passons... nous passerions à la
période de questions.
Mme Ruperthouse (Françoise) :
C'est bon.
La Présidente (Mme D'Amours) :
Mais je vous remercie de votre exposé. Maintenant, les échanges peuvent commencer.
M. le premier... En premier, ce serait M. le ministre. La parole est à vous.
Vous disposez de 16 min 30 s.
M. Lafrenière : Mme la
Présidente, avec le consentement, on peut faire bien des choses dans la vie.
J'aimerais le consentement de mes collègues pour laisser tout le temps à
Mme Ruperthouse parce que ce qui est le plus important aujourd'hui, ce n'est
pas nous, c'est les victimes. Alors, avec consentement, j'aimerais qu'elle ait
tout le temps, s'il vous plaît.
La Présidente (Mme D'Amours) :
Est-ce que j'ai le consentement de tout le monde pour que Mme Ruperthouse
puisse continuer et terminer son allocution? Merci. Alors, la parole est à
vous, madame.
Mme Ruperthouse (Françoise) :
Je vous remercie, ça me touche beaucoup. Puis, sapristi! il ne reste pas
grand-chose à dire, mais je dois le dire.
On a besoin de guérison, c'est sûr. Le
projet de loi propose un mandat de recherche trop restreint, qui ne prend pas
en compte le contexte dans lequel ces disparitions et décès ont eu lieu et qui
impose une lourde bureaucratie. Nous devons, de plus, profiter de cette
opportunité pour favoriser la réconciliation entre les peuples.
• (10 h 50) •
Awacak désire entamer, par cette
commission parlementaire avec le ministre responsable des Affaires autochtones,
des discussions pour améliorer le projet de loi. Ça, c'est la demande de toutes
les familles.
Ce n'est pas quelque chose qui est facile
quand on lit des choses... c'est difficile de venir lire ça parce que je suis
touchée personnellement. Mais merci de m'avoir laissé finir mon mémoire.
La Présidente (Mme D'Amours) :
Merci, madame. Donc, nous allons débuter les échanges. M. le ministre, il vous
reste 15 minutes. Votre micro, M. le ministre.
M. Lafrenière : Ah! ça commençait
bien. Je suis vraiment désolé. «Meegwetch», Mme Ruperthouse. Merci pour
votre témoignage. Puis je l'ai dit tout à l'heure, avec le consentement, on
peut faire bien des choses. Puis ce qui vient de se passer avec mes collègues
des oppositions, ça démontre que, justement, ce qu'on veut faire, c'est
travailler pour vous, vous êtes les personnes les plus <importantes et...
La Présidente (Mme D'Amours) :
…votre micro,
M. le ministre.
M. Lafrenière : Ah! ça
commençait bien. Je suis
vraiment désolé. «Meegwetch»,
Mme Ruperthouse. Merci pour votre témoignage. Puis je l'ai dit
tout
à l'heure, avec le
consentement, on peut faire bien des choses. Puis, ce
qui vient de se passer avec mes
collègues des
oppositions, ça
démontre que,
justement, ce qu'on veut faire, c'est travailler pour vous,
vous êtes les
personnes les plus >importantes. Et j'ai les petits
mocassins en main depuis tout à l'heure et je les garde dans mes mains en vous
entendant, puis mes collègues vont avoir aussi les petits souvenirs qui vont
nous faire penser à ces petits êtres de lumières pour qui on veut faire la
lumière justement aujourd'hui, pour qui on veut essayer d'avoir le meilleur projet
de loi.
Vous avez évoqué plusieurs points vraiment,
vraiment importants, et vous avez parlé du soutien aux familles, le type de
soutien que les familles auraient besoin, et moi, j'aimerais vous entendre aujourd'hui,
Mme Ruperthouse, à savoir votre vision. Quand on parle de soutien aux
familles, comment ça se matérialiserait? Comment vous voyez ça au quotidien?
C'est quoi, le soutien que les familles auraient besoin? Parce qu'encore une
fois, comme les familles sont au centre de ce qu'on a comme projet de loi
aujourd'hui, j'aimerais vous entendre là-dessus, s'il vous plaît.
Mme Ruperthouse (Françoise) :
Le soutien, c'est sûr qu'on a besoin d'aide pour... un, c'est pour guérir, on a
besoin de guérir de ça puis, pour guérir, on doit faire le… je pense qu'on doit
avoir la vérité, on doit connaître toute la vérité et qu'est-ce qui s'est passé
pour qu'on soit rendu là où on est maintenant.
La guérison, ce n'est pas seulement de
retrouver, c'est toute la souffrance qui nous est… qu'on vit à l'intérieur. Ça
se passe à l'intérieur, ça se passe à l'extérieur. L'extérieur, ça veut dire :
c'est mon frère et ma soeur qui sont disparus et toutes les personnes, les
bébés qui ont disparu à partir des hôpitaux, à partir de plusieurs places. Ça
dit souvent qu'il n'y en a pas, de discrimination. Eh bien, oui, nous autres,
on l'a vécue, cette discrimination-là, nos parents l'ont vécue.
Et, dans le temps, pour être capables de
guérir, on doit nous redonner nos… Comment je vais dire ça? On doit connaître
qu'est-ce qui s'est passé, pourquoi ça s'est passé, surtout pourquoi, pourquoi
mes parents n'ont pas eu la chance de connaître la vérité, pourquoi les enfants
ont disparu à partir des hôpitaux. On a besoin… Il y a beaucoup de travail à
faire pour guérir. Le soutien pour faire des recherches... Me Arsenault va
aussi parler plus. Moi, je suis plus émotive, lui, il est plus… il est capable
de bien formuler les... Le soutien, c'est bien, qu'est-ce qu'on nous donne,
mais il nous manque vraiment… il faut qu'on sache, il faut qu'on sache c'est
quoi qui est arrivé. Pour être capable de passer à d'autres choses, on doit
connaître la vérité, sinon la souffrance va toujours rester là.
Le soutien, qui va nous le donner? Je
pense qu'entre nous, les autochtones, on est <capables... on a…
Mme Ruperthouse (Françoise) :
…il faut qu'on sache c'est quoi qui est arrivé. Pour être capable de passer à
d'autre chose, on doit connaître la vérité, sinon la souffrance va
toujours
rester là.
Le soutien, qui va nous le donner? Je
pense qu'entre nous, les
autochtones, on est capables… on a traversé
beaucoup
d'épreuves puis
je pense qu'on est >capables d'avoir des… Ils
l'ont dit ici, au tout début… pas au tout début mais à un moment donné, ils le
disent qu'on a besoin de guérir avec le physique, le mental, la spiritualité, puis
nous autres, on est très fort dans la spiritualité. C'est une des raisons
pourquoi on est encore debout. C'était vraiment la spiritualité qui nous a
gardés, qui nous tient debout. On croit en quelque chose de très, très fort
puis on a besoin de… mais par contre on a besoin de connaître les raisons des
disparitions de tous ces enfants-là.
Je parle du racisme qui se passe dans nos institutions
gouvernementales, dans les hôpitaux. Vous savez, mes parents, nos parents, nos
familles, ils n'ont même pas eu le droit à de l'aide juridique, parce que, dans
le temps, ils n'avaient pas le droit... ils n'avaient pas le droit d'avoir
d'argent dans leurs poches, ils n'avaient pas le droit d'avoir un avocat pour
aller chercher de l'aide. Ils n'avaient pas le droit d'avoir un compte de
banque, il fallait qu'ils aillent faire leur épicerie avec un bon de commande.
Est-ce que, tout le monde, c'était comme ça? Non, ce n'était pas tout le monde
qui était comme ça. C'est vraiment nos familles qui étaient comme ça. C'est les
autochtones qui ont été traités comme ça, qui n'avaient pas le droit d'avoir
d'argent puis ni d'aide des avocats. Une des raisons pourquoi ça a traîné
tellement longtemps : mes parents n'ont pas été capables d'avoir d'aide. Toutes
les familles autochtones n'avaient pas le droit d'avoir d'aide parce qu'on
n'avait pas le droit à cette aide juridique là.
Donc, aujourd'hui, on n'est plus en 1950,
on est rendu en 2021, et ça se passe encore que les autochtones vivent encore
de la discrimination. On va en vivre combien de temps encore avant que ce soit
réglé? Je ne le sais pas. Mais on essaie de faire des changements avec vous, on
veut être des partenaires avec tout le monde. Moi, je veux aller au magasin, je
veux aller à l'hôpital, je veux aller à des places sans me faire regarder puis
dire : Regarde, elle encore. Ça se passe encore aujourd'hui. On parle des
bébés disparus, mais ça continue, on le ressent encore, la discrimination. Je
voudrais que Me Arsenault continue avec ses réponses.
La Présidente (Mme D'Amours) :
Me Arsenault.
M. Arsenault (Alain) : Oui, merci
beaucoup, Mme Ruperthouse. La question concernant c'est quoi, les moyens que
les familles ont besoin, oui, il y a des besoins de <santé…
Mme Ruperthouse (Françoise) :
…continue avec ses réponses.
La Présidente (Mme D'Amours) :
Me Arsenault.
M. Arsenault (Alain) :
Oui. Merci
beaucoup, Mme Ruperthouse. La
question concernant
de c'est quoi les moyens que les familles ont besoin, oui, il y a des besoins
de >santé, parce qu'une tempête s'en vient, hein, il faut prévenir. Pour
les familles, ça ne sera pas facile, la tempête s'en vient, mais il y a des
moyens.
D'autre part, en termes de moyens, c'est qu'il
faut mettre les familles comme étant des personnes importantes qui doivent
contrôler le processus. C'est les familles qui doivent voir — je vous
donne juste un exemple — à engager peut-être des étudiants
autochtones pour faire la tournée de chacune des communautés pour dire :
Avez-vous perdu un enfant? Avez-vous... Est-ce qu'un enfant a disparu? Est-ce
qu'on peut aller chercher de l'information?
Mais il ne faut pas que ça soit fait par
l'État. L'État a un problème de crédibilité, soyons honnêtes, en ces matières,
et, deuxièmement, c'est l'État qui est remis en cause dans ça, donc ça prend
une certaine distance. Et les familles doivent contrôler tout ce processus
d'enquête là. Quand je dis «contrôler», il faut faire attention, je vais
revenir à une question du député d'Ungava, «contrôler» ça ne veut pas dire tout
décider et faire ce qu'on veut. C'est contrôler le processus en collaboration
avec, et pour nous c'est notre hypothèse, une commission d'enquête, pas une
commission d'enquête comme on en a déjà vu, qui durent des années, mais pas du
tout. Il peut y avoir des choses, des commissions d'enquête relativement
simples, mais qui ont des pouvoirs importants et qui ont l'obligation de rendre
compte publiquement des causes et des circonstances. Voilà ce que les familles
ont besoin. Et je vous dis ça pour avoir eu plusieurs rencontres avec les familles,
avec Mme Ruperthouse, avec beaucoup d'autres membres des familles, avoir
été impliqué dans des dossiers depuis longtemps. C'est juste ça, pour reprendre
le contrôle de leurs propres affaires. Merci.
M. Lafrenière : Merci,
maître. Si vous me permettez, Mme la Présidente, je laisserais la parole à mon
collègue d'Ungava, qui avait une question rapide pour Mme Ruperthouse.
La Présidente (Mme D'Amours) :
M. le député.
M. Lamothe : Merci.
Merci, Mme Ruperhouse... Ruperthouse, je m'en excuse. M. Arsenault,
moi, peut-être curiosité professionnelle, là, à partir du moment, si on remonte
dans le temps, que les disparitions étaient rapportées aux instances, c'était
quoi, le processus de recherche? C'est un bout que j'aimerais savoir. Là, je
veux dire, il y avait sûrement un processus, dans le temps, qui faisait en
sorte... Ce n'est pas juste la discrimination, j'imagine qu'il n'y avait pas de
retour. Il y avait-u une enquête qui était faite? Comment ça marchait?
M. Arsenault (Alain) :
Mais c'est : rien, rien.
M. Lamothe : Pardon?
• (11 heures) •
M. Arsenault (Alain) :
Il y a des gens... il n'y avait rien, il n'y avait pas de <processus
d'enquête. Il y a des...
>
11 h (version révisée)
<17901
M.
Lamothe : ...processus, dans le temps, qui faisait en sorte... Ce
n'est
pas juste la discrimination, j'imagine qu'il n'y avait pas de retour.
Il
y avait-u une
enquête qui était faite? Comment ça marchait?
M. Arsenault (Alain) :
...rien, rien.
M. Lamothe : Pardon?
M. Arsenault (Alain) :
Il y a des gens...
Il n'y avait rien, il n'y avait pas de >processus
d'enquête. Il y a des gens qui ont été voir : Mon enfant n'est pas revenu
de l'hôpital, qu'est-ce qui arrive? Je ne sais pas. Pouvez-vous vous
renseigner? Je ne sais pas. On n'a pas considéré, c'est regrettable à dire, les
autochtones, pères et mères de famille, comme des personnes qui recherchaient
leurs enfants et qui posaient des questions.
Je me souviendrai toujours de
Mme Mary Poker, que j'ai rencontrée, en 2014 à Pakuashipi, qui a perdu
deux enfants. Dans une période de deux ans, une petite communauté d'à peu près
200 personnes, en moins de deux ans, a perdu neuf enfants. Et j'ai demandé,
en 2014, à Mme Poker : Pourquoi ça s'est arrêté? Elle m'a répondu :
Parce qu'ils voulaient emmener un troisième de mes enfants, et j'ai dit :
Il n'embarquera pas dans l'avion si je n'embarque pas. Puis, à partir de ce moment-là,
ça a changé. J'ai dit : Mais, pour vos deux premiers, qu'est-ce que vous
en savez? Et elle a répondu : Tout qu'est-ce que j'en sais, malgré les
demandes de mon mari et mes demandes, c'est ce que j'ai vu à la télévision, à
l'émission Enquête en 2014. Et c'étaient des disparitions au début des
années 70, 1970-1972. Elle a posé des questions, il y a des gens qui ont
eu ses questions, et elle n'a eu aucune réponse. Elle a su que ses enfants
étaient décédés en 2014.
À peu près à la même époque, il avait été
question qu'il y avait quelqu'un qui était d'origine innue, de Pakuashipi, mais
qui vivait à Terre-Neuve, juste en face de Blanc-Sablon. Elle a posé des
questions à ce moment-là, pas plus de réponses, pas de réponse. Il n'y a aucune
ambiguïté, les familles ont fait des démarches, et on n'a pas répondu.
M. Lamothe : Ça fait qu'il n'y
avait rien qui se faisait...
M. Arsenault (Alain) : ...on
n'a pas dit : On va vous... Pardon?
M. Lamothe : Il n'y a rien qui
se faisait? Autant au niveau de l'information, de la recherche, au niveau
hospitalier, clergé, policier, il n'y a rien qui se faisait?
M. Arsenault (Alain) : Il n'y
a rien qui se faisait, absolument rien. Et ça, c'est généralisé, là. Moi, à
chaque fois que j'ai discuté, c'était : Ah! j'ai posé des questions, j'ai
posé des questions au curé, à l'agent, à ci, à la police, j'ai posé des
questions. On va vous répondre... Il n'y avait pas de réponse. À un point tel
que, pour certains... On parle beaucoup d'enfants décédés, mais, pour certains,
on a su que des enfants étaient vivants, qu'ils étaient dans les institutions.
On a également su qu'il y avait des enfants vivants qui étaient rendus aux
États-Unis, qui, dans les faits, avaient été donnés en adoption. Par qui? On ne
le <sait pas...
M. Arsenault (Alain) :
...
décédés, mais, pour certains, on a su que des enfants étaient
vivants, qu'ils étaient dans les institutions. On a également su qu'il y avait
des enfants vivants qui étaient rendus aux États-Unis, qui, dans les faits,
avaient été donnés en adoption. Par qui? On ne le >sait pas. C'est le
noir total, c'est ça qu'il faut comprendre.
M. Lamothe : O.K. Merci, M. Arsenault
et Mme Ruperthouse, merci beaucoup.
La Présidente (Mme D'Amours) :
M. le ministre, votre micro.
M. Lafrenière : Ça fait deux
fois aujourd'hui, je m'excuse. Mme la Présidente, s'il nous reste du temps,
j'ai ma collègue de Soulanges qui avait une question.
La Présidente (Mme D'Amours) :
2 min 30 s.
Mme Picard : Merci. Bonjour à
vous deux. J'aimerais savoir comment vous voyez la reconnaissance qu'on
pourrait faire à vos familles. Vous parlez que vous aimeriez une reconnaissance.
Avez-vous des idées de ce qu'on pourrait faire pour alléger votre coeur?
Mme Ruperthouse (Françoise) :
La question se pose à moi ou à monsieur...
Mme Picard : Oui, à vous.
Bien, à vous, je crois que... oui.
Mme Ruperthouse (Françoise) :
La reconnaissance, c'est sûr... La première chose pour alléger nos coeurs, c'est
vraiment de savoir la vérité, qu'est-ce qui s'est passé, où est-ce qu'ils ont
amené... pourquoi ils ont amené les enfants. Je vais toujours revenir avec ma
mère et mon père, qui ont amené leurs enfants à l'hôpital, puis, quand ils ont
retourné, il n'y n'avait plus d'enfants, ils ne savaient plus où est-ce qu'ils
étaient. Ils ont essayé de trouver, mais, comme j'ai dit tantôt, il n'y avait
pas d'aide, à ce moment-là, à ce temps-là, il n'y avait aucun droit d'avoir...
droit à la justice.
Donc, pour alléger ça, c'est juste la
vérité, on a besoin de connaître la vérité, on a besoin de faire notre deuil en
sachant la vérité, pour être capables de lâcher prise et que tout le monde
parte en paix. Bien, c'est ça qu'on a besoin. Qu'est-ce qui s'est passé, qui a
donné l'autorisation d'enlever les enfants ou... Est-ce que c'est une bonne
chose dire «enlever»? Pour nous, c'est «enlever». Peut-être, pour d'autres
personnes, elles vont dire : Bien non, on les a amenés dans un autre
hôpital ou dans une autre place, mais sans le consentement des parents, sans le
consentement de la famille. Donc, on a besoin de savoir qu'est-ce qui va....
qu'est-ce qui s'est passé, qui a donné l'autorisation.
Ma mère, quand elle m'a demandé d'aller
dénoncer qu'est-ce qui était arrivé, elle a dit : La première personne... dis-moi
c'est qui qui va... qui est le responsable d'avoir enlevé mes deux enfants, qui
sont partis à l'autre bout du monde, qu'on ne sait pas où. Elle a dit : Je
veux que tu lui donnes ça. Ça, ça veut... Elle a 87 ans, ma mère, puis
elle a besoin... elle est malade, elle a besoin d'avoir une vérité. Il y a
d'autres familles qui sont devenues... toute leur vie, ont porté ça. Il y a
quelqu'un, il y a... M. le ministre m'avait dit : On s'excuse d'ouvrir des
plaies comme ça. J'ai dit : Non, hein, les plaies ne sont pas ouvertes, ne
sont pas rouvertes, elles sont ouvertes depuis toujours. Elles n'ont jamais été
fermées.
La Présidente (Mme D'Amours) :
<Merci...
Mme Ruperthouse (Françoise) :
…
toute leur vie, ont porté ça. Il y a quelqu'un, il y a... M. le
ministre m'avait dit : On s'excuse d'ouvrir des plaies comme ça. J'ai dit :
Non, hein, les plaies ne sont pas ouvertes, ne sont pas rouvertes, elles sont
ouvertes depuis toujours. Elles n'ont jamais été fermées.
La Présidente (Mme D'Amours) :
>Merci beaucoup. Je cède maintenant la parole au député de Jacques-Cartier.
Vous disposez de 11 minutes.
M. Kelley
: Merci
beaucoup. Bonjour, Mme Ruperthouse. Je veux juste commencer par présenter
mes excuses. Je suis tellement désolé qu'est-ce vous avez vécu, et votre
famille, dans une institution du Québec. Je pense qu'on est tous ici, comme, les
élus, pour essayer d'au minimum donner des moyens à des familles d'avoir un
petit peu de vérité et justice.
Mais je veux juste continuer un petit peu
sur la question que ma collègue a posée. Quand même si on donne des moyens aux
familles, avez-vous des réserves et des préoccupations concernant des
institutions qui vont faire... ils vont prendre les moyens de, peut-être,
cacher certaines données, ou c'est déjà fait?
Mme Ruperthouse (Françoise) :
Je veux réentendre votre question…
M. Kelley
: Oui. La
question, c'est sur juste comme sur les institutions religieuses, si on prend
ça pour exemple. C'est le moment où vous avez des moyens de faire ou le
ministère a les moyens de faire une enquête. Est-ce que vous avez des
préoccupations que les données ne sont plus là, et comment on peut... après ça,
si c'est déjà supprimé, et j'utilise juste un exemple, c'est quoi, les
prochaines étapes pour donner la vérité aux familles?
Mme Ruperthouse (Françoise) :
Si les choses sont… Si les dossiers — mettons, on va dire, des
dossiers médicaux — sont déjà supprimés... Moi, j'ai retrouvé
beaucoup de… le dossier médical puis je pense qu'il y a plusieurs familles qui
ont… C'est sûr qu'ils ne nous ont pas tout donné. Est-ce que c'est déjà
supprimé? Nous autres, on ne peut pas le savoir parce qu'on ne connaît pas les
dossiers, donc on ne sait pas s'ils sont supprimés, ou s'ils sont cachés, ou…
on ne peut pas le savoir. C'est à eux autres à donner... mettons que c'étaient
les religieuses, c'est à eux autres d'être conscients de dire : Bon, bien,
on est obligées. Écoutez, c'est des… elles travaillent pour le Créateur, ça
fait que, normalement, elles devraient donner ces dossiers-là, ça ne devrait
pas être caché. Et, s'il n'y a rien à cacher, pourquoi le cacher, pourquoi le
détruire, tu sais?
Mais, pour être capables... Le soutien
qu'on aurait besoin c'est aussi qu'on ait besoin des… que les docteurs viennent
nous dire : Bien, regarde, ça, là, Françoise, c'est tout… J'ai les
dossiers médicaux à mon frère et ma soeur, peut-être qu'ils ne sont pas tous
là, je ne le sais pas, mais il en manque, je sais qu'il manque un bout. Un
docteur pourrait… il serait capable de tout décortiquer tout qu'est-ce qui se
dit là-dedans. Il y a des termes, là-dedans, que moi, je ne suis pas capable de
lire, et je pense qu'un docteur, il serait <capable de lire ça…
Mme Ruperthouse (Françoise) :
...je sais qu'il manque un bout. Un docteur pourrait… il serait capable de tout
décortiquer tout
qu'est-ce qui se dit là-dedans. Il y a des termes,
là-dedans, que, moi, je ne suis pas capable de lire, et je pense qu'un docteur
il serait >capable de lire ça. Ce serait... Ça, c'est le soutien, tantôt,
qu'on me pose la question.
Et, en même temps, vous qui dites :
Bien, peut-être qu'il y a des choses de déchiquetées, comment on va faire pour
passer à travers ça?, bien, si on ne le sait pas, on ne pourra probablement
jamais savoir, mais il y a quelque chose, c'est sûr, qu'on va devoir faire pour
notre guérison. On parle aussi de la guérison, de nos guérisons à nous. Puis, s'ils
ne veulent pas nous donner ces dossiers-là, moi, je pense que c'était... la
responsabilité ne m'appartient pas. C'est sûr que je peux faire une crise. Même
si je fais une crise, puis ils ne me le donnent pas, ça donne quoi, tu sais?
Mais peut-être que Me Alain Arsenault peut dire quelque chose aussi
là-dessus. Mais, si c'est déchiqueté...
• (11 h 10) •
M. Kelley
: Et
juste une question de suivi, comme, présentement, quand vos familles demandent
à une institution pour l'information, est-ce que la réponse est toujours :
Ah! à cause des lois qui existent, on ne peut pas donner l'information à du
monde? Il n'y a comme aucune volonté d'aucune institution de travailler avec
les familles pour avoir la vérité? C'est juste de mettre ça un petit peu en
contexte, parce que... C'est sûr que vous avez parlé avec une institution, alors
je veux juste bien comprendre comment, présentement, ça marche.
Mme Ruperthouse (Françoise) :
On a...
M. Arsenault (Alain) : Si...
Mme Ruperthouse (Françoise) :
Oui, vas-y, Alain.
M. Arsenault (Alain) : Si
vous permettez, je peux répondre à partir de cas concrets, et entre autres à
partir du cas de Pakuashipi. Il y a eu, dans le travail de Radio-Canada, un
contact avec l'hôpital de Blanc-Sablon. Ça a été long, ça a été pénible, etc.,
et, à un moment donné, ça s'est terminé. Trouvez-nous des gens qui peuvent
signer une autorisation. Donc, recherches à n'en plus finir. Et, à un certain
moment donné, il y avait un des enfants qui n'avait plus ses parents, ça fait
que... Est-ce que son frère, sa soeur, etc.? Non, non, non. C'était extrêmement
ardu, extrêmement difficile. Et là-dessus, la loi sur l'accès à l'information
ne sera pas vraiment utile. C'est vraiment les pouvoirs d'un commissaire
enquêteur qui peuvent être utiles là-dessus, pour solutionner l'accès aux
documents, qui est la première étape à faire.
M. Kelley
: Merci,
M. Arsenault, parce que... Vous avez soulevé Blanc-Sablon, mais moi, je
pensais aussi, la question, parce que vous avez aussi cité l'exemple des
États-Unis, à comment on peut aussi s'assurer que des familles... c'est
difficile pour eux, mais l'accès aussi à des données à l'extérieur du Québec, parce
qu'on sait, comme pour les Cris, des fois, des écoles résidentielles étaient en
Ontario, et on peut voir les communautés sur la Côte-Nord... peut-être, des
fois, envoyées à Terre-Neuve. Alors, bref, juste vos commentaires. Je sais que
nous sommes limités, dans un certain sens, mais vos pensées sur cet enjeu, que
c'est <possible...
M. Kelley
: ...
l'extérieur
du Québec, parce qu'on sait, comme pour les Cris, des fois, des écoles
résidentielles étaient en Ontario, et on peut voir les communautés sur la
Côte-Nord... peut-être, des fois, envoyées à Terre-Neuve. Alors, bref, juste
vos commentaires. Je sais que nous sommes limités, dans un certain sens, mais
vos pensées sur cet enjeu, que c'est >possible qu'il y a des réponses
aussi à l'extérieur de nos frontières.
M. Arsenault (Alain) : C'est
certain qu'il y a des réponses à l'extérieur. Dans le cas de Blanc-Sablon, ils
transféraient des dossiers à Terre-Neuve, des communautés religieuses ont
transféré leurs archives aux États-Unis, etc., c'est certain. Mais, à partir du
moment où il y a une volonté, par une commission d'enquête, qui est un organisme
parajudiciaire, qui a une certaine prestance, avec l'appui du gouvernement du
Québec... qui demande à un autre gouvernement, une autre institution
paragouvernementale, ça met un certain poids. On ne peut pas avoir la garantie
que ça va être une réponse positive, mais c'est sûr qu'on va prendre ça avec
beaucoup plus de respect, et les possibilités pourront être plus poussées. Le
premier élément, ça va être le gouvernement fédéral, évidemment.
M. Kelley
: Et
juste une question, puis, j'imagine, je n'ai pas beaucoup de temps qui reste, dans
le mémoire, vous avez dit et mentionné qu'il y a des besoins juridiques
spécifiques, je veux savoir c'est quoi, les besoins spécifiques. Est-ce que
vous pouvez juste, peut-être... Donnez-nous des exemples.
Mme Ruperthouse (Françoise) :
...
M. Arsenault (Alain) : C'est
vraiment accompagner...
Mme Ruperthouse (Françoise) :
Vas-y, vas-y.
M. Arsenault (Alain) : ...c'est
de mettre à leur disposition des avocats engagés par eux, qui est leur avocat,
pour expliquer la situation et, évidemment, faire des représentations, aider
les gens à aller chercher des documents, etc., là. C'est vraiment qu'il se
sentent en confiance. Parce que ce n'est pas le gouvernement, qui ne les
respecte pas depuis x temps, qui continue le processus, c'est des avocats. Ils
ont droit à leurs propres avocats pour faire leur propre cheminement.
M. Kelley
: Et je
ne sais pas, Mme Ruperthouse, si vous avez quelque chose à ajouter?
Mme Ruperthouse (Françoise) :
Bien, je pense que Me Arsenault a dit un peu... Nous autres, on parlait d'accompagnement...
tantôt, je l'ai dit, le soutien financier pour les déplacements, pour tout. On
a un avocat qu'on doit... qu'on aimerait qu'il nous accompagne. C'est le
soutien, aussi, spirituel, par des personnes de notre choix, parce que c'est quand
même nous qui souffrons, c'est nous qu'on a... on a besoin de soutien avec les
gens en qui on a le plus confiance. Ce n'est pas chez les soeurs et les Oblats.
Si on retrouverait, mettons, des enfants qui sont disparus, qui <sont...
Mme Ruperthouse (Françoise) :
…c'est nous qu'on a... on a besoin de soutien avec les gens à qui on a le plus
confiance. Ce n'est pas chez les soeurs et les Oblats. Si on retrouverait,
mettons, des enfants qui sont disparus, qui >sont partis depuis
longtemps, il y a aussi des choses à faire, il va y avoir beaucoup de travail à
faire à ce niveau-là.
Donc, on a vraiment besoin de soutien, de
spirituel, que nous, on pense avoir. Chez les autochtones, on a ça, déjà, qu'on
fait par nous-mêmes. Mais on va avoir besoin de beaucoup d'aide financière,
c'est sûr, mais le soutien… C'est ça, c'est vraiment le soutien. Entre nous, on
est capables de le faire, mais Me Arsenault l'a bien dit tantôt que, pour
le reste…
M. Kelley
: D'accord. Merci
beaucoup.
La Présidente (Mme D'Amours) :
Merci. M. le député, il vous restait 1 min 20 s. C'est bon?
Donc, je cède maintenant la parole à la députée de... madame... la députée Sainte-Marie—Saint-Jacques.
Vous disposez de 2 min 45 s.
Mme Massé : Peut-être trois
minutes, considérant que mon collègue de Jacques-Cartier n'a pas tout pris.
Bonjour, Mme Ruperthouse, bonjour, Françoise. Bonjour, Me Arsenault.
Contente de vous voir là. En fait, contente de savoir qu'on passe à une autre
étape, vous l'avez bien nommé.
J'ai trois minutes, donc deux questions. Une
première. Mme Ruperthouse, vous avez dit être... la nécessité que les
familles, dont vous représentez, avec Awacak, le coeur battant d'une
organisation qui va représenter les familles... vous avez dit la nécessité
d'être au coeur de cette démarche-là, et être au coeur d'une démarche lorsqu'on
est tant meurtris, lorsqu'on est blessés, lorsqu'on a une plaie ouverte qui ne
s'est jamais fermée, ça nécessite des moyens.
Ce que je comprends — et là vous
venez de faire une énumération, et c'était le sens de ma question, mais je veux
surtout bien saisir — oui, ça prend de l'argent, il faut que votre
organisation soit soutenue, parce que vous allez être au coeur du processus, si
on veut que ça marche, hein, c'est toujours ça, l'objectif, et moi, j'ai senti
ici, de la part du ministre et de tout le monde, que l'objectif, c'est que ça
fonctionne. Alors, que ce soient des jeunes à embaucher, qui vont faire le tour
des communautés pour parler, dans leur langue, et dire aux gens :
Savez-vous, ça existe, est-ce que vous avez des enfants, est-ce que vous
connaissez des gens? Je vous ai entendue, des besoins à ce niveau-là, des
besoins au niveau des avocats, des médecins, qui vont vous aider à interpréter
les trucs, du soutien psychologique, les déplacements. Est-ce que j'entends que
ça, là, il faut que ce soit au rendez-vous pour être certains de <faire…
Mme Massé : ...Je vous ai
entendue, des besoins à ce niveau-là, des besoins au niveau des avocats, des
médecins, qui vont vous aider à interpréter les trucs, du soutien
psychologique, les déplacements. Est-ce que j'entends que ça, là, il faut que
ce soit au rendez-vous pour être certains de >faire ensemble ce pas-là,
Mme Ruperthouse? Et ensuite j'aurais une question pour M. Arsenault.
Mme Ruperthouse (Françoise) :
C'est garanti qu'on a besoin de ça. Écoutez, ça fait 30 ans, plus de
30 ans que je suis dans ce dossier-là, j'ai commencé vraiment avec ma
famille et mon père, ma mère, dont mon frère et ma soeur qui sont disparus puis
qu'on ne savait pas où ils étaient. J'ai voyagé de tous bords tous côtés, j'ai
cherché, j'ai cherché. C'est à Québec qu'on a fini par le trouver, mais, quand
même, je pense que ça prend beaucoup de déplacements pour être capable de faire
ça.
Puis, en plus, je n'ai pas... je ne suis
pas une professionnelle. Aller faire des recherches, ce n'est pas moi. Les
professionnels sont dans les universités, dont les étudiants qui sont capables
de faire des... d'aller faire des recherches. Moi, j'ai perdu 30 ans... je
n'ai pas perdu 30 ans, mais, je veux dire, j'ai travaillé, j'ai fait des
recherches pendant plusieurs années avant d'être capable d'avoir des réponses
pour la famille. Et, encore, la famille...
La Présidente (Mme D'Amours) :
Merci.
Mme Ruperthouse (Françoise) :
Pardon?
La Présidente (Mme D'Amours) :
Merci beaucoup. Le temps étant écoulé, je cède maintenant la parole au député
de René-Lévesque. Vous disposez de 2 min 45 s.
M. Ouellet : Donc, à mon tour
de vous saluer, Mme Ruperthouse, Me Arsenault. On a eu l'occasion de
se parler en préparation du projet de loi, et je veux dire aux membres de cette
commission qu'il y a quelque chose qui m'a frappé lorsqu'on a échangé ensemble
dans la préparation de cette consultation. Parce que je trouvais un peu
particulier que des parlementaires, aujourd'hui, doivent écrire une loi pour
donner de l'espace, et de l'espoir, et de la réconciliation pour ce qui est
arrivé dans le passé. Moi, je n'étais pas là, et je suis convaincu que tous les
collègues partagent aussi tout le désarroi et toute la tristesse d'avoir vécu
ces situations-là.
• (11 h 20) •
Mais il y a un mot que Pierre-Paul Niquay,
qui vous accompagne et qui... qui m'a touché beaucoup, il m'a dit :
Martin, ne vivez pas de culpabilité, ne vivez pas... n'ayez pas honte de ce qui
s'est passé, réparez ce qui est réparable et pardonnez ce qui est pardonnable. Donc,
ce que vous nous dites : Faites-en le maximum, allez le plus loin
possible. On ne veut pas juste des moyens, on veut aussi comprendre pourquoi,
dans quelles circonstances. Donc, c'est à ça que je vais m'accrocher,
Mme Ruperthouse, sur le travail que votre regroupement fait.
J'aurais une question, parce qu'on en a
parlé ensemble, puis j'aimerais donner ces indications-là au ministre. Vous
dites que, dans l'article 6, il faudrait mieux définir l'autorité
familiale. Pourquoi, pour vous, c'est fondamental que, dans cette pièce
législative, l'autorité familiale soit mieux définie?
Mme Ruperthouse (Françoise) :
Moi, j'aimerais mieux que ce soit Alain qui voie... qui réponde à ça.
M. Ouellet : Il n'y a pas de
problème.
La Présidente (Mme D'Amours) :
...M. Arsenault... Me Arsenault.
M. Arsenault (Alain) : Oui, <oui...
M. Ouellet :
...législative,
l'autorité familiale soit mieux définie?
Mme Ruperthouse (Françoise) :
Moi, j'aimerais mieux que ce soit Alain qui voie... qui réponde à ça.
M. Ouellet :
Il n'y
a pas de problème.
La Présidente (Mme D'Amours) :
...M. Arsenault... Me Arsenault.
M. Arsenault (Alain) :
Oui, >oui. Sur cette question-là, c'est l'élargissement de la définition
de la famille en milieu autochtone à comparer en milieu non autochtone. La
famille, c'est un tout, c'est une communauté. Moi, une première fois que j'ai
été dans une communauté autochtone, il y a 40 quelques années, c'est ça
qui m'a frappé. Tout le monde, je dis bien tout le monde, est préoccupé par l'éducation
de tous les enfants, les grands-parents, le plus souvent, mais aussi le voisin,
et j'ai l'impression que ce projet de loi reconnaît ça, et c'est ça qui est intéressant.
Mais il faut le pousser, il faut aller plus loin. Mais c'est un point positif.
La Présidente (Mme D'Amours) :
Merci infiniment. Je vous remercie pour votre contribution à nos travaux.
Compte tenu de l'heure, la commission
suspend ses travaux jusqu'après les affaires courantes.
(Suspension de la séance à 11 h 22)
15 h 30 (version révisée)
+
(Reprise à 15 h 38)
La Présidente (Mme D'Amours) :
Bienvenue à la Commission des relations avec les citoyens. La commission est
réunie virtuellement afin de poursuivre les consultations particulières et auditions
publiques du projet de loi n° 79, Loi autorisant la
communication de renseignements personnels aux familles d'enfants autochtones
disparus ou décédés à la suite d'une admission en établissement.
Cet après-midi, nous entendrons les
groupes suivants : la Nation naskapie de Kawawachikamach et le Conseil de
la nation atikamekw.
Nous faisons une première aujourd'hui sur
l'expérience d'interprétation simultanée en commission virtuelle qui est
accessible par téléphone pour nos membres et le groupe entendu. Je souhaite
donc la bienvenue aux représentants de la Nation naskapie :
Mme Caroline... Einish, pardon, à la mobilisation communautaire et à la
promotion de la participation citoyenne et des saines habitudes de vie, et l'aînée,
Mme Noat Einish. Je vous rappelle que vous disposez, <mesdames,
de 10 minutes...
La Présidente (Mme D'Amours) :
...Einish, pardon, à la mobilisation communautaire, et à la promotion de la
participation citoyenne, et de saines habitudes de vie, et l'aînée, Mme Noat Einish.
Je vous rappelle que vous disposez, >mesdames, de 10 minutes pour
votre exposé, après quoi nous procéderons à la période d'échange avec les
membres de la commission. Je vous invite donc à vous présenter puis à commencer
votre exposé.
Nation naskapie de
Kawawachikamach
Mme Einish (Caroline) :
Bonjour. Mon nom, c'est Caroline Einish, je suis de la Nation naskapie.
Moi, je voudrais parler des personnes
qu'on... Nous autres, on vient dans le Nord-du-Québec. I
forget to talk in English for my sister.
Une voix :
(S'exprime dans une langue autochtone).
Mme Einish (Caroline) : It's O.K. So, we're from northern communities. Our people stopped
nomadic life in the middle of 1950s, and many did not speak English nor French,
and sometimes they had to go to the cities to find... for medical help. There
was… Sometimes, people passed away and did not have any resources, or what to
do, or how to locate the people that didn't come back. Example, there was a
woman that she died during childbirth, but we… that community never knew where
the child is. And there was a woman here, her name was Kathleen Tooma, and she
had a daughter she never...
• (15 h 40) •
Mme Einish
(Noat) :A son.
Mme Einish (Caroline) : …a son, she never found her… found him. But before she passed away,
she thought that...
Mme Einish
(Noat) :Still alive.
Mme Einish (Caroline) : She said that she thought he was still alive.
Mme Einish (Noat)<
T> : OK. We had a
lot of situations like this, like the families that died in Québec City, the hospitals, they never
brought back the bodies, and the families here, they don't know where the
location is, the graves. They never found the graves, and there's no information at all, and they need closure.
Mme Einish
(Caroline) :Another
thing is we don't know where the graves are, but, also, most of these places where
in the hospitals in Québec City
and most of the people like my parents, they can't say the names of the
hospitals. And there are other stories we don't know about. <We just know
that…
Mme Einish
(Caroline) :
…
Québec
City, and most of the people
like my parents, they can't say the names of the hospitals. And there are other
stories we don't know about. >We just know that
many passed away and they were never… they were… we just thought the persons
passed away, and nobody could find, locate the children that… who also passed
away. So, we don't know the names of these children, we just know… we just
have… we know the names of the parents because we knew the parents, and… (s'exprime dans une langue autochtone). I
don't know the story.
Mme Einish (Noat) : Well, the story is… his story was her sister went to Québec and gave birth. Her sister died there,
and they never… they don't know… they never knew where the child is.
Mme Einish (Caroline) : But there was this person in… from… that said that he met a woman
that was from Rimouski, and she claimed she was Naskapi. So, this is the only
information we find, just hearsay. So, we don't really know how to look for
information even… or why this person passed away, like the mother that gave
childbirth, why she passed away. So, it would be good for the families to have
access to the files.
Mme Einish
(Noat) :(S'exprime
dans une langue autochtone).
Mme Einish
(Caroline) : So, this is very important for us to locate and at least find
out where these people are, like what happened, like where are the graves. But
some believed they seemed to know which hospitals… where the graves should be.
But most of the elders passed away, that had this knowledge and these stories.
So, like we just know about these stories from what the people say from… like
the stories have just passed down.
Mme Einish (Noat) : Nobody never looked or searched for this information, in Naskapi Nation,
for these people. I know other places, other communities, they are doing
research, they are doing search for the people they lost and the people they
are looking for. (S'exprime dans une langue
autochtone).
Mme Einish (Caroline) : There was a family, there was this man that had children with a
Native <woman, and he was…
Mme Einish (Noat) :
...doing research, they're doing search for the people they lost
and the people they're looking for.
(S'exprime
dans une langue autochtone).
Mme Einish
(Caroline) :
There was a family, there
was this man that had children with a Native >woman,
and he was from Russia, and he gathered the children, except one that was a
baby.
Mme Einish
(Noat) :(S'exprime
dans une langue autochtone).
Mme Einish
(Caroline) : And they
hid the baby, but he left, he didn't have time to look for her, but she became
an old woman, and she must have relatives, her sisters, in Russia.
Mme Einish (Noat) :(S'exprime dans une langue autochtone).
Mme Einish (Caroline) :OK. So, this old
woman, she has grandchildren and great-grandchildren, so they were just… don't
know how to go about… So, this is where we're blocked because we can't move
further. Like this man that lost his sister, he's still looking, and I think he
went to commission Viens,
I think he told his story.
Mme Einish
(Noat) :(S'exprime
dans une langue autochtone).
Mme Einish
(Caroline) : OK., only
one person went… I don't know... (S'exprime dans une
langue autochtone).
Mme Einish (Noat) : Only one person went to tell a story about his aunt, I think, aunt,
and still he hadn't received any information yet. I think they're still searching.
Mme Einish (Caroline) : Yes, they just gather stories, and then that's it, we don't know
what goes on with these stories. It seems to be ongoing. It's like we just
tell, but nothing happens. So, it's important that the Native people have
access of the files of the deceased. I think it's logical too, like, why withhold
information? It's not like our
medical files, like we're alive, you know, we want to keep some <things…
Mme Einish
(Caroline) :
...I think it's logical
too, like, why withhold information? It's not like our medical files, like
we're alive, you know, we want to keep some >things
private. But after, when we die, and the family wants to know why, I think it's
important that the Native people have access to these files. We've just named a
few stories, but there are many more, like these are stories we know.
Mme Einish (Noat) : Maybe we need somebody here to come and hear our stories in our
community, because our community is very isolated here. We only have access to
get out here by plane or train.
La Présidente (Mme
D'Amours) : J'aimerais vous remercier pour le
témoignage que vous nous faites aujourd'hui. Le temps est écoulé pour votre 10 minutes. Et nous allons
passer à la période d'échange. M. le ministre, la parole est à vous. Vous disposez de 16 min 30 s.
M. Lafrenière : Merci beaucoup, Mme la Présidente. «Wachiya.»
Mme Caroline Einish, «tshinashkumitin», Mme Noat Einish,
«tshinashkumitin». Thank you so much for sharing with us those horrible stories
that you've been through.
I've got numerous
questions for you, hearing what you said, and this morning we start up talking
about the timeline, when those events happened. And the first question I got
for you... and I'm not looking for a date. I just want to know approximately
what period you're reffering to, because that could be helping us a lot.
Mme Einish (Noat) : 1950.
Mme Einish (Caroline) :OK. in the 1950s…
Mme Einish (Noat) :(S'exprime dans une langue autochtone).
Mme Einish
(Caroline) : OK. I
wasn't part of a nomadic time. She was born during the nomadic times.
Mme Einish (Noat) : My parents, they travelled by canoe to get to Schefferville in 1956,
and that's... In that time, that's when the people got really, really sick.
They started to have tuberculosis, they have new homes, new houses they never
been before, and my grandmother says: «These are going to kill us, people are
sick.» <And, in 1956…
Mme Einish (Noat) :
…new houses they never been before, and my grandmother says that «these
are going to kill us, people are sick». >And, in
1956, people are here in Schefferville, and they started taking people to the
hospitals, transferring to Québec, Montréal, Mont-Joli — I heard the name Mont-Joli — and sometimes with their children, and they would never come back.
Some would never come back. And I think that's the time… then the residential
schools came… just started a new civilization, different, starting to
understand the world, and they took me to residential school, and I was eight
or seven, and some children never came back. There's… a lot of traumas went on
in 1950s.
Mme Einish (Caroline) : Me, I was born in 1960, and they already had settled in the village
of John Lake and the houses were just shacks. There was no plumbing, no… we
just had common light bulbs. And the town of Shefferville had been built, there
were… the houses were… had cement foundations, they had electricity, they had
plumbing and…
Mme Einish (Noat) : …not even electricity when you were born.
Mme Einish (Caroline) : OK. Apparently, I didn't have electricity when I was born. She
remembers when I was born. And so, they were just shacks like… we have pictures
of that. When she's talking about «la famine», the «famine» and the illnesses, the
sicknesses, there was an estimate of about… around 400 Naskapis…
Naskaspis, apparently, were always a small group. So, they were about
150 Naskapis left when the tuberculosis killed the families. My father
lost his first family there around the 1950s, so my mom was his second wife. So,
this is where they lost many, many, many…
Mme Einish (Noat) : People.
Mme Einish (Caroline) : …people, yes. I mean, I just know about the story… so when they
started to do the commission Viens, I just… stories here and there, so that's
how far my knowledge is, but it's still...
M. Lafrenière : That helped a lot. Thank you so much. I know a colleague of mine,
she's got a question for you, but before sharing my time with her, you've been
touching base on this aspect as well how to reach out to different families, <because
you're sharing…
Mme Einish
(Caroline) :
...knowledge is, but it's
still there.
M. Lafrenière :
That helps a lot. Thank you so much. I know a colleague of mine,
she's got a
question
for you. But before sharing my time with her, you've been touching
bases on this aspect as well, how to reach out with different families >because you're sharing your knowledge. But again, I'm sure there are
other families that got touched by those horrible stories. So, I just want to
make sure that I heard you loud and clear. Your recommendation will be to be
present within the community to make sure to reach out with different families.
Is that what you said?
Mme Einish (Caroline) : Yes.
Mme Einish (Noat) : Yes.
Mme Einish (Caroline) : And there was another story. There were two little girls, they
were… Their parents passed away, and the little girls didn't have nobody to
rely on. (S'exprime dans une langue autochtone)… maybe, I think, maybe 11-years-old, 10-years-old, and she had a
little baby sister. (S'exprime dans une langue
autochtone). And this little girl, she saved her little
sister by finding nipple and a bottle.
This was an era, we
already had planes, and trains, and cities. Because we were like... I heard the
word «the last nomadic people of North America».
M. Lafrenière : Thank you. Mme Presidente, I know a colleague of mine got a question.
Une voix :OK.
La Présidente (Mme D'Amours) :
La personne... Parfait. La députée de Vaudreuil aurait une question.
Mme Picard : De Soulanges, Mme
la Présidente.
La Présidente (Mme D'Amours) :
De Soulanges, pardon, pardon, Soulanges.
Mme Picard : I will try my English, sorry for that. But you said that you want
the families could have access to the hospitals' files. Could we do more for
helping families in our search? You mentioned the transportation. Do you have
another idea or something to recognize the families to helping us… you?
Mme Einish (Noat) : I think they should go where the hospitals are to search. Maybe
they still have records of 50 years ago or 60 years ago, what
happened.
Mme Einish
(Caroline) : Les archives.
Mme Einish (Noat) : They probably have...
Mme Einish (Caroline) : By name, by family name.
Mme Einish (Noat) : The records like Mont-Joli, Québec, Montréal.
Mme Picard : And the family, it's all the big family, hein? It's just... What is
the expansion that you want? What do you mean about «family» for… in your
language, in your <community…
Mme Picard :
…and the family, it's all the big family, hein? It's just… What is
the extension that you want? What do you mean about «family» for… in your
language, in your >community?
Mme
Einish (Caroline) : Family? Pourrais-tu le dire en français?
Mme Picard : Je vais essayer,
oui. En fait, le mot «famille» peut être très… on peut le discuter longtemps,
mais, vous, pour vous, vos familles, ce n'est pas les familles immédiates.
Comment on pourrait, à l'intérieur de la loi, en mentionnant le mot «famille»,
inclure toutes les personnes de votre famille, que vous considérez de votre
famille?
Mme Einish (Caroline) : O.K.
Tu veux dire : C'est quoi, notre définition? Notre définition de
«famille», c'est vaste, nous autres.
Mme Picard : ...
Mme Einish (Caroline) : C'est
vaste, nous autres. Exemple, je suis famille d'accueil, j'ai gardé
l'arrière-petit garçon de mon cousin, et puis je le prends comme mon propre
arrière-petit garçon, vu que c'était mon petit frère, comme... C'est mon
cousin, mais nous autres, on dit «frère», O.K.? C'est, comme, il y avait mon
père, son père, mon père puis le père de… son frère, le père de mon frère, mon
père…
Mme Einish
(Noat) : My uncle, my…
Mme
Einish (Caroline) : «Anyway.» Là, il y a eu moi, il y a eu mon cousin
Matthew. J'ai eu des enfants, il a eu des enfants. J'ai des petits-enfants,
puis lui aussi a eu des petits-enfants. Ça fait que ça se trouve être son
arrière-petit garçon. Ça fait que moi, je suis comme sa grand-mère. C'est ça,
l'extension.
Et puis les Naskapis, ils n'ont pas comme
50 noms de famille, on peut faire une liste. Comme là, on a une Jakuush
qui vit encore. C'est notre famille, c'est ma tante. Elle a marié le frère de
mon père, c'est mon oncle puis ma tante. C'est la dernière personne qui
s'appelle Jakuusk qui est vivante, puis ses enfants, c'est Einish, parce que,
nous autres, c'est le père qui appartient à ses enfants.
Et puis on a des… (s'exprime dans une
langue autochtone) Wepeni?
Mme Einish (Noat) : Wepien.
Mme Einish (Caroline) :
Wepien. Ça, c'est un autre, il n'y en a plus. On n'en a plus, de ça, il n'y a
plus de personne qui s'appelle avec ce nom-là. C'était une grand-mère, ça fait
plusieurs années qu'elle est décédée.
Mme Einish (Noat) :
(S'exprime dans une langue autochtone).
Mme Einish (Caroline) : Il
n'y en a plus. Ça fait qu'on n'a pas beaucoup de familles… Comment je peux te
le dire? On a desChescappio, on a des Nattawappio, on a des Sandy, des Guanish…
Mme Einish
(Noat) : Einish.
Mme Einish (Caroline) : Einish, Chemaganish.
Mme Einish (Noat) : Shecanapish.
Mme Einish (Caroline) : Shecanapish.
Mme Einish (Noat) : Mameanskum.
Mme
Einish (Caroline) : Mameanskum.
Mme Einish (Noat) : Pien.
Mme Einish (Caroline) : Pien,
(S'exprime dans une langue autochtone), Nattawappio, je l'ai dit. Bon, tu vois,
j'ai comme… Ça fait que ce ne sera pas dur à trouver… à moins que s'il y a des
noms qui existaient qu'on ne sait pas.
Mme Einish
(Noat) : At the reserves, they say : We
are related to you.
• (16 heures) •
Mme Einish (Caroline) : Et
puis on est… il y a des communautés qui disent qu'elles sont <apparentées…
>
16 h (version révisée)
< Mme Einish (Caroline) :
... Bon, tu vois, j'ai comme...
Ça fait que ce ne sera pas dur à
trouver… à moins qu'il y ait des noms qui existaient qu'on ne sait pas.
Mme Einish
(Noat) :
At the reserves, they say :
We are related to you.
Mme Einish
(Caroline) :
Puis on est...
il y a des
communautés
qui disent qu'elles sont >apparentées avec nous. Exemple, ma mère
s'appelle Guanish, c'est son nom de famille, parce que leur père a été adopté. Dans
le fond, dans la réalité, c'est des Sandy, on est apparentés avec des
Sandy-Whapmagoostui. On a des oncles à Chisasibi. Mon père… Du côté de mon père
aussi, c'est des Kawapit de Whapmagoostui, Grande-Baleine, puis on a un peu de
parenté avec les Tooma. Puis mon père, il dit, sa mère s'appelait Jean-Pierre. Ça
fait qu'on est apparentés avec des Jean-Pierre. Ça fait que ce ne sera pas trop
dur à trouver.
Mme Einish
(Noat) : The thing is my grandmother... In
1940s, they said we didn't have second names, we had clans. And I told her :
What was your maiden name before you were married? And she said : You're
crazy. We never had... My name is Whapmagoostui or
Matimekosh...
Mme Einish (Caroline) : ...
Mme Einish (Noat) : They only had one name, their birth name, and they never had, like,
family names, they had clans. And she said : This is all broken, it's
broken now. This is stupid. Everybody is Einish. Everybody is Mameanskum. Everybody is Pien.
Mme Einish (Caroline) : Like name sharing
Mme Einish (Noat) : She didn't look at it like that, you know.
Une voix
: ...
Mme Einish (Noat) : He said : When they told us… The priests came out of the woods,
and they started baptizing us, they didn't even know if he's Catholic or
Anglican. When my grandfather died, he had been always Anglican, and, when he
was dying, the Catholic priest came and anointed him with oil, and I said :
What are you doing? And he said : He's Catholic. All his life, he never
knew he was Catholic.
Mme Einish (Caroline) : Yes. C'est vrai, oui.
Mme Einish (Noat) : The missionaries were rushing everywhere, looking for people to
baptize and giving second names.
Mme Einish (Caroline) :You know, when there's
a language barrier, it's hard to understand what the person is doing.
Mme Einish (Noat) : He said: One time, two people came, the Government… My aunt was <telling me this. She was…
Mme Einish (Caroline) :
…
language barrier, it's hard to understand what the
person is doing.
Mme Einish (Noat) :
He said: One time, two people came, the
Government…
My aunt was >telling me this. She was young. She said : Two people came out
of the forest and talked to the elders, and they said… they asked them :
What are your names and your ages? And they don't know their ages. And these
people say : Why? So, you can get old security pension, you are going to
get money. And the people : Wow! We won't have to go hunting anymore, we are
going to receive money. And they asked them their ages, and they didn't know
their ages. And they say : O.K., let's throw any kind of year. They never knew their ages.
La Présidente (Mme D'Amours) :
Merci. Merci beaucoup. Merci, Mme la députée. M. le ministre.
M. Lafrenière :Well, thank you so
much for the history, because that's helpful, and, believe me, it's going to
help us a lot in terms of trying to identify families. With what you said about
clans, that just put the focus on how we should adapt ourselves to your reality,
and not the opposite. And this morning, on our discussion, we've been
mentioning that, not trying to force people to adapt theirselves to the system,
and that's the purpose of that bill, it's to give all the support to families
to go through that very tough process.
That having been said, a
question, local question : Who do you see as a local group that will be
credible to accompany, to help us out during the process? With the band council,
will it be another credible group within your region that could play a role in
that, that you rely on? Because, again, what is important is that the families
will trust these people to be helping us out in terms of, you know, referring,
sharing the info, doing the… kind of the promotion of the bill and the intention
of it. But who do you see as credible to help us out in that?
Mme Einish (Caroline) : We have several organizations here. We have the wellness team. We
have a committee, it's called Organizing Committee. Like all the committees
could play a role in this because it touches everybody. And there's also the
CLSC that touches «la santé». The Wellness Team, eux autres, c'est composé de «mental
health worker, Native worker, family, and youth, and elders».
La Présidente (Mme D'Amours) :
Merci. Merci beaucoup.
M. Lafrenière : «Chiniskumitin.»
La Présidente (Mme D'Amours) :
Merci, M. le ministre. <Maintenant…
Mme Einish
(Caroline) :
…mental health worker,
Native worker, family… family and youth, and elders.
La Présidente (Mme
D'Amours) :
Merci.
Merci beaucoup
.
M. Lafrenière :
«Chiniskumitin.»
La Présidente (Mme
D'Amours) :
M
erci, M. le ministre
. >Maintenant, je cède
la parole au député deJacques-Cartier.
Monsieur, vous avez 11 minutes.
M. Kelley
:Merci beaucoup, Mme la Présidente.
Thank
you very much for your presentation, your… sharing your
knowledge with us and your oral history. I would love to, one day, come and
visit. I know you're asking that maybe somebody more official from the Government comes to hear all the
stories, but it would be very nice to visit you one day. Maybe we could make a
trip with the Minister together.
But it would also be nice to hear the oral stories of living the nomadic
lifestyle you did have beforehand, because I think that it is an important history that we need to make sure is documented and well-known,
and, you know, I think that's just... Again, I was very pleased to hear you
just sort of share that story that you've experienced, and also having
ministers and priests walk out of the forest, and the language barrier. So,
thank you again for sharing all that.
I just want to continue on
the question of those groups you were speaking about, that will do some of the
work to help families. Do you need additional financial support to make sure
those groups can accomplish their work? And what are some of the biggest things
that you would say you need right now to really help accompany families to going
towards the system to begin the process of trying to find the information, once
this bill is passed?
Mme Einish (Caroline) :
I'll let you talk first, let your ideas…
Mme Einish (Noat) : We have a wellness team, but I am retired right now, and I've been
working with these groups for a long time. I used to work as a mental health
worker. Now, I'm looking for a place where we can teach and tell stories. We
need a lodge here, I need a lodge here so I can do my workshops. And I am aware
of the elders, of their stories. Even my father and my parents, they gave me a
lot of knowledge to work with our traditions and culture, and it would be
better, because I want them to feel comfortable to talk in a healthy
environment. What I mean is a healthy environment where I can work in my lodge,
access good medicine to drink, you know, like...
Mme Einish (Caroline) : Traditional medicine.
Mme Einish (Noat) : ...like we used to. I still have those kind of traditional <medicines...
Mme Einish (Noat) :
...where I can work in my lodge,
access
good medicine to drink, you know, like...
Mme Einish
(Caroline) :
Traditional medicine.
Mme Einish (Noat) :
...like we used to.
I still have all
those kinds of traditional >medicines, I still
use it to my grandchildren.
So, this is what I want,
a big lodge where I can do my workshops with youth and elders in my community,
and this is my vision. And that's… Whenever they go to the woods or camp, they
feel comfortable, they don't have any worries. And this what I want, a big
lodge near the lake here, in Kawawachikamach, yes.
• (16 h 10) •
Mme Einish (Caroline) : O.K. That would be one funding program that would help people,
where she could gather stories and help people through their healing journeys
and come to closures.
And, from my opinion, on
the economy level, to do this type of work, it's very, very vast, because there
are divisions in this community on the political arena, so… And we know where the division is. So, to be able to
work with this, people would need to be hired to work within the divisions, like
she said, clans. There is, like, two clans, you know: if one clan wants to do something, the other clan is going to
close up, it won't want to participate. Example: as a community mobilization
coordinator, I was taking charge of doing a survey on the recomposition of the
council, because we are almost now 1 500 Naskapis, and many did not
participate… Can you hear me? It's like you froze.
La Présidente (Mme
D'Amours) : On vous entend bien.
M. Kelley
: …
Mme Einish (Caroline) :D'accord. Ça
fait que, pour faire ça, il y en a juste un peu qui ont répondu à mon sondage, mais
l'autre... il y a un groupe qui n'a pas participé. Donc, c'est important. Pour
être capable d'aller chercher tout le monde, il faudrait prendre des personnes
pour... leur donner un salaire pour qu'ils puissent être motivés, puis ça pourrait créer des emplois aussi, puis peut-être aussi créer une
atmosphère d'appartenance, comme quoi ils travaillent tous ensemble. Ce serait
sain, une affaire qui serait... qui créerait un environnement sain pour la <communauté.
...
Mme Einish (Caroline) :
...puis ça pourrait créer des emplois aussi puis
peut-être aussi créer
une atmosphère d'appartenance, comme quoi ils travaillent tous ensemble. Ce
serait sain, une affaire qui serait... qui créerait un environnement sain pour
la >communauté. Ça fait que ça aussi, ça serait une affaire… avoir assez
de fonds pour être capable de faire les sondages, même, si on peut engager plusieurs
personnes pour le faire.
M. Kelley
: And you are doing a very good job as a translator right now. But is
that also one thing… Because you mentioned hospitals, Mont-Joli, Québec City.
So, also in this process too or in the past, has there been some experiences
where that language barrier was an issue to trying to see if more information could be provided? And would you
need some translation assistance in the process of going… Sorry. In going
through the process of trying to get information from some of these institutions, is that something that would maybe be helpful for you?
Mme Einish (Caroline) : Absolutely, yes. We are… Naskapi's education is mostly English for my generation.
Bien sûr, j'ai
appris à parler français. Maintenant, aujourd'hui, peut-être dans 25 ans, on va
avoir les enfants qui vont... les tout petits bouts qui vont parler les quatre
langues, par rapport... Il y en a qui... Les Naskapis et les Montagnais se
marient, et puis les enfants qui sont à Matimekosh, ils partent, ils vont à
l'école ici, ça fait qu'ils apprennent aussi l'anglais puis le Naskapi, puis, à
Matimekosh, c'est Montagnais et français, puis il y en a déjà beaucoup qui
parlent les quatre langues.
Mme Einish
(Noat) : The youth.
Mme
Einish (Caroline) : Les jeunes.
Mme Einish
(Noat) : Like, my grandchildren, they speak
four languages.
Mme Einish (Caroline) : So, we have many that speak four languages. But, at this time, we
don't have a lot of people that understand French.
M. Kelley
: Oh! yes, yes. And I was going to say… It's great to hear there are
now some people in your community that speak four languages, that's quite
impressive. But I was just also going to wonder, in the stories that you have,
is it… at any time, were children taken outside of the province of Québec and never came back? Because we're also trying to ascertain,
too, if all the cases are just here, in Québec, or do we have to think about
ways that maybe we can look to find information that could maybe be in
jurisdictions outside of Québec.
Mme Einish (Caroline) : We cannot know where they were taken.
M. Kelley
:
O.K. I just, also, want to know… I mean, let's just say that, if you end up
going through the process, you arrive at, say… through, you know, a residential
school, for example, and there is noinformation what happened to somebody who…
you know, a child that went missing. How are some other ways that maybe the
Government could provide some more truth to you? If those... that <information
was thrown…
M. Kelley
:
..
let's just say that, if you end
up going through the process, you arrive at, say… through, you know, a
residential school, for example, and there is no
information… w
hat
happened to somebody who… you know, a child that went missing. How are some
other ways that maybe the Government could provide some more truth to you? If
those... that >information was thrown out, the
school burnt down, I mean, who knows, what are some other ways maybe the Government of Québec could provide some, you
know, truth to your community?
Mme Einish (Caroline) : Well, it would probably be to reach out to other communities, if
they know names of the people that are missing.
M. Kelley
:O.K. And, also, I
guess… I just had a few more questions. I know... I think my time is running
out, I don't know how much time I do have left here.
La Présidente (Mme
D'Amours) : 1 min 40 s, M.
Kelley.
M. Kelley
: Pas beaucoup de temps
qu'il reste.
So, finally, I guess my
last question will just be : If you had a chance to look, do you think
that the measures in here for your ability to research and find those names,
everything is in place? And are you feeling confident that you'll be able to go
to the Government of Québec
and, you know, have some positive results?
Mme Einish (Caroline) : Could you... It's, like, many questions in one question.
M. Kelley
: Yes, just one question, I mean, I guess : Are you confident
that, you know, this bill will be able to deliver for your community maybe some
justice? I guess I'll put it that way.
Mme Einish (Caroline) : Yes. I'd prefer to say «closure».
M. Kelley
: «Closure», yes.
Mme Einish (Caroline) : Yes, for the families. You know, like, O.K., let's say somebody wants to know what happened to her sister, and
what if you discover she's alive somewhere, married, happy, you know? We don't
know.
M. Kelley
: Yes. No, absolutely. Well, thank you both very much for taking the time today and speak with us.
Mme Einish (Caroline) : Welcome.
La Présidente (Mme
D'Amours) : Merci. Je cède maintenant la parole à la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques. Vous disposez de 2 min 45 s.
Mme Massé :Merci, Mme la Présidente. «Wachiya.» Bonjour.
Hi! Thank you to be there with us. I only have
two minutes, so I'll jump in the water, in this... I hope, one day, in this
wonderful lake you are talking about.
Let's talk about language,
because, if I understand well, French, it's a little part of the… French
speakers in your community, English, not too bad. But,
I think, if I understand well, it's better if people can speak Naskapi with
you. Am I right or not?
Mme Einish (Caroline) : Yes.
Mme Massé :
Yes. So, that's why you said the importance to bring people up North to sit
down with you, take the time to sit down with you and <listen...
Mme Massé : ... S
o, that's why you said the importance to bring people up North to
sit down with you, take the time to sit down with you and >listen to the story, and help you to fill the paper, because the
paper will ask which date these people were born, which moment, at what time
you lost these children. You know, it's going to be this kind, I'm pretty sure,
of questions. So, if I understand well, the better way that we can help you is
to bring someone… to hire some Naskapi people, and this guy or woman will help
people to fill the form.
Mme Einish (Caroline) : Yes. The situation
here, they go to school, the first four years they learn... three years, they
learn just Naskapi; after, a second language. But, when they leave the school, they
start to speak Naskapi, anywhere they go, it's Naskapi: at the arena, at
church, it's Naskapi. So, they go back to school... So, they don't... there is
not a lot of practicing of the English language. Like, when we don't speak a
language, we don't really reinforce it, and we tend to lose it. Example, when I
took Spanish, I did very well, but nobody to speak to, and I don't know what I
would be hearing if somebody talked to me. So, this is... And meetings in
person are more humanized than Internet. We're like… We're kind of used to it,
but the personal contact is not there. So, it would be better... Like, right
now, because of this... Like, your minutes are calculated, you know, but if you
were here, we wouldn't have that...
La Présidente (Mme D'Amours) :
Merci. Merci beaucoup. Je cède maintenant la parole au député de René-Lévesque.
Vous disposez de 2 min 45 s.
Mme Einish (Caroline) : Deux
minutes pour lui.
• (16 h 20) •
M. Ouellet : Ce n'est pas beaucoup.
Bonjour, mesdames. Je vais vous poser la question en français, donc on aura le
temps de faire la traduction en anglais.
Dans le projet de loi en question, on voit
que les mesures qui seront proposées ne le seront simplement que pour cinq ans,
et on en a parlé avec Mme Audette ce matin, et le Protecteur du citoyen
aussi s'en va dans la même veine. Est-ce qu'on devrait faire sauter ces cinq
années-là et permettre, peu importe le temps, le temps nécessaire pour vos
recherches? Est-ce que c'est quelque chose que vous voudriez voir changer dans
le projet de loi pour vous permettre, à votre communauté ou à toute personne
dans votre communauté, d'avoir le temps de faire les recherches?
Mme Einish (Caroline) : Oui. Mais,
comme c'est là, des fois... On va appeler ça un «pilot <project»...
M. Ouellet :
...l
e
temps nécessaire pour vos recherches? Est-ce que c'est quelque chose que vous
voudriez voir changer dans le projet de loi pour vous permettre, à votre
communauté ou à toute personne dans votre communauté, d'avoir le temps de faire
les recherches?
Mme Einish (Caroline) :
Oui. Mais, comme c'est là, des fois... On va appeler ça un «pilot >project».
Bien, ça peut virer en... Ça peut être extensionné, là, parce qu'on ne sait pas
comment de temps ça va prendre. Parce que, des fois, même nous autres, on va
faire des petits projets de communauté, exemple faire une serre… Là, ça a
arrêté à cause de la COVID ou parce que quelqu'un attend quelqu'un pour une
cotation pour les équipements, mais la personne, à cause de la COVID, il ne
travaille pas au bureau. Ça fait qu'il y a des choses qui prennent du temps. Ça
fait qu'on a tout le temps des obstacles quand on travaille comme ça.
M. Ouellet : De quelle façon
vous voudriez être accompagnés pour vous aider à faire ces recherches-là?
Mme Einish (Caroline) : Les
outils? On a déjà le monde ici. «We have human resources.» C'est
sûr, on va trouver du monde pour travailler. Ça nous prendrait des équipements
comme des outils, d'avoir des bonnes questions, établir des bonnes questions
pour le sondage. C'est quoi qu'on a accès pour faire les recherches? Disons,
quelqu'un peut aller dans les hôpitaux, aller dans les archives, faire des
recherches, tu sais, ça va prendre des... Ou avoir un contact là qui va
chercher pour une personne. Admettons, je fais ça, puis c'est… toi, tu
travailles à l'hôpital, dans les archives, on peut communiquer avec toi, établir
peut-être un système de communication et faire des bons liens, des bonnes
relations avec du monde spécifique.
M. Ouellet : Merci beaucoup,
mesdames. Je pense que mon temps est terminé, Mme la Présidente. Alors, merci
beaucoup à vous. Bien hâte de voir la suite.
La Présidente (Mme D'Amours) :
Je vous remercie pour votre contribution aux travaux de la commission.
Je suspends les travaux quelques instants.
(Suspension de la séance à 16 h 23)
(Reprise à 16 h 29)
La Présidente (Mme D'Amours) :
Avant de commencer, j'aurais besoin du consentement pour qu'on puisse finir un
peu plus tard, étant donné que nous avons pris un peu de temps avec nos
invités, nos derniers invités. Donc, j'ai le consentement de tout le monde?
Merci.
Des voix : Consentement.
• (16 h 30) •
La Présidente (Mme D'Amours) :
Merci. Je souhaite donc la bienvenue aux représentants de la nation attikamek.
Nous avons parmi nous le grand chef, Constant Awashish, et le vice-chef de la
communauté de Manawan, M. Sipi Flamand. Donc, je vous souhaite la
bienvenue. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre
exposé, après quoi nous procéderons à la période d'échange entre les membres de
la commission. Je vous invite donc à vous présenter et puis commencer votre
exposé.
Conseil de la nation
atikamekw (CNA)
M. Awashish (Constant) :
Bien, merci. (S'exprime dans une langue autochtone). Bien, merci à tous les
membres de la commission, là, distingués membres de la commission, Mme la
Présidente… je crois que c'est <Mme D'Amours, là, je ne vois pas,
mais…
>
16 h 30 (version révisée)
< M. Awashish (Constant) :
...bien, merci.
(S'exprime dans une langue autochtone).
Bien, merci à tous les membres de la
commission,
là, distingués membres de la
commission,
Mme la Présidente... je
crois que c'est >Mme D'Amours, là, mais je ne vois pas, mais c'est
ça, la beauté de la technologie et des nouveaux modes de rencontre. Mais merci
de nous recevoir, merci de bien nous entendre, là, en ce qui concerne le projet
de loi n° 79.
Pour nous, c'est un projet de loi qui
vient nous chercher particulièrement, étant donné qu'il y a beaucoup de
familles attikameks qui sont directement liées avec le sujet mentionné dans le projet
de loi. On dénombrait, là, 43 cas, chez les Attikameks actuellement, de
jeunes enfants qui ont été... bien, qui ont disparu, qui ont été enlevés. C'est
40 familles attikameks qui sont touchées par cette problématique-là. Et,
pour nous, bien, c'est important, là, de pouvoir, là, donner notre mot à dire
et au nom des familles également.
C'est un sujet qui est troublant, qui
vient me chercher profondément. Pour ceux qui sont plus sensibles que les
autres, ça peut vraiment un peu bouleverser, là, quand on entend les
témoignages et les madames, les grands-mamans, les grands-papas, les papas, les
mamans qui partagent leur expérience, souvent sans aucune réponse reçue ou des
réponses qui sont floues. Tu sais, encore aujourd'hui, il y a beaucoup de gens
qui en tombent presque malades, hein, de ne pas connaître la réalité, de ne pas
connaître qu'est-ce qui s'est passé réellement, là, avec leurs enfants. Toute
la famille est touchée, toute la famille est bouleversée, et toute la
communauté également, les trois communautés attikameks qui sont... Tu sais, c'est...
de vivre avec cette pensée-là au quotidien, c'est quelque chose qui n'est pas
facile à vivre, puis j'espère que vous aurez la sensibilité de bien vous mettre
dans les souliers de ces familles-là pour comprendre leur cri de désespoir, là,
leur cri de demande d'aide qui vous est adressée.
Puis, en tout cas, encore une fois, là, c'est...
merci beaucoup, là, pour votre disponibilité, votre attention puis tout ce que
vous faites présentement, là, pour donner la parole, justement, aux
organisations, mais également aux organisations qui sont dédiées, là, à
défendre ces... le point de vue de ces familles-là. Je vais laisser maintenant
la parole à Sipi pour qu'il puisse se présenter et par la suite je pourrai
continuer avec la présentation.
M. Flamand (Sipi) : (S'exprime
dans une langue <autochtone)...
M. Awashish (Constant) :
...
Je vais laisser maintenant la parole à Sipi pour qu'il puisse se
présenter et, par la suite, je pourrai continuer avec la présentation.
M. Flamand (Sipi) :
(S'exprime dans une langue >autochtone).
Donc, je vous remercie de cette tribune,
de nous permettre de nous exprimer sur nos préoccupations concernant la
disparition des enfants... (s'exprime dans une langue autochtone) qui ont été
enlevés ou volés. C'est ma famille indirectement touchée à cette situation, et
je pense qu'avec tout ce qu'on vit dans la communauté, c'est une nécessité
qu'on vit, qu'on reçoit la vérité. C'est d'ailleurs dans cette approche-là que
je contribue, avec le Regroupement des familles des enfants disparus Awacak,
pour qu'on puisse avoir des informations sur les causes et sur les
circonstances des enfants qui sont portés disparus dans le système de la santé
publique. Et je pense qu'avec ce projet de loi ça va permettre avoir accès à
ces informations-là, mais aussi permettre aussi une ouverture dans la
réconciliation de nos nations, mais aussi la guérison pour les familles. Donc,
je vous remercie de cette tribune puis je vais laisser la parole au grand chef
Constant Awashish.
M. Awashish (Constant) : «Meegwetch»,
Sipi. Juste d'emblée, d'entrée de jeu, tu sais, on comprend que le projet de
loi n° 79 fait suite au projet de loi, là, n° 31, qui avait été
proposé il y a de cela un certain temps. D'emblée, je vais vous dire qu'il y a
une nette amélioration de la situation, mais que...
((Interruption)
M. Awashish (Constant) : Il y
a une nette amélioration, là, dans le projet de loi que vous proposez, mais il
y a encore certains éléments qui pourraient avoir un regard, là, plus
approfondi, dans lequel nous pourrions améliorer peut-être l'aide que le projet
de loi peut donner à ces familles-là. Il y a encore des éléments qui méritent,
là, vraiment, là, une attention particulière, je crois, de la part de vous,
membres distingués de la commission, pour qu'on puisse améliorer, là, ensemble
ce projet de loi.
Je le sais, que, pour nous, c'est... il y
a une importance particulière, mais je pense, c'est important également pour
tous et chacun, autant pour les familles attikameks que les autres familles des
autres nations autochtones. Mais je pense que c'est important également pour
les Québécoises et les Québécois de bien connaître, là, l'histoire, de bien
connaître la réalité, pour que les gens puissent avoir la réelle information,
là, sur qu'est-ce qui s'est passé réellement avec les Premières Nations ici, au
Québec. Ça n'a pas toujours <été fait...
M. Awashish (Constant) :
...
familles attikameks, que les autres familles des autres nations
autochtones. Mais je pense que c'est important également pour les Québécoises
et les Québécois de bien connaître, là, l'histoire, de bien connaître la réalité,
pour que les gens puissent avoir la réelle information, là, sur qu'est-ce qui
s'est passé réellement avec les Premières Nations ici, au Québec. Ça n'a pas
toujours >été fait de façon, là, mal intentionnée, tu sais, ça n'a pas toujours
été fait, là, tu sais, nécessairement, là, avec une préméditation, mais souvent
c'était une incompréhension, un mal... de la mauvaise information sur les Premières
Nations.
Mais maintenant je pense que tous
ensemble, on a l'opportunité, là, de travailler, là, pour amener, là, notre
destin commun, là, à bon port, puis je vois aujourd'hui une opportunité, là, de
vraiment, là, rajuster le tir, où est-ce qu'on pourra, tous ensemble, grandir
et où on pourra, tous ensemble, travailler, là, pour améliorer notre société,
mais améliorer également la relation qui existe entre nous, Premières Nations,
mais également tous les Québécoises et les Québécois, là, pour qu'on puisse
avoir un meilleur avenir pour nos petits-enfants.
Je pense que c'est... juste pour
commencer, là, juste les... voyons! les améliorations, pardon, qui ont été
notées, là, par rapport au projet de loi n° 31. Et je
vous informe également, là, qu'on va vous déposer un mémoire, là, qui sera
acheminé demain matin, vous pourrez en prendre connaissance, là. Ça va
reprendre un peu ce que je dis aujourd'hui, là, dans mon exposé. La question,
là, d'obligation de divulgation, qui est très... qui est une belle avancée pour
nous, et c'est une belle avancée également pour les familles, parce qu'il faut
remettre... l'obligation faite, là, aux institutions publiques, mais également
les congrégations religieuses qui sont visées également par le projet de loi, je
pense que le gouvernement a bien écouté, là, les familles, à l'époque, là, du
projet de loi n° 31, où est-ce qu'on demandait....
ces familles-là demandaient justement un élargissement, là, de l'application de
la loi. C'est un point positif qui a été fait.
Également, l'article 19, là, qui
permet d'améliorer les pratiques, là, notamment la sensibilisation des
personnes concernées aux réalités autochtones, c'est quelque chose qui est
positif, là, de la part des familles, ce que j'ai entendu. Le fait également
d'accorder, là, aux familles élargies, là, d'entamer le processus, également, c'est
un autre point qui est positif dans ce nouveau projet de loi. C'est des
éléments qui ont été notés, là, positivement par les familles, là.
Quelques lacunes, cependant, là, qui sont
véhiculées, là, auprès des gens consultés, un projet de loi qui est un peu,
là... On veut plus d'implication du gouvernement, tu sais, il y a comme un
sentiment, là, de passivité, là, par rapport à ce projet de loi. On veut
vraiment que le gouvernement y croie. Également, on veut vraiment que le
gouvernement puisse voir l'utilité, là, pour l'avancement de la société, mais
l'avancement également des droits de <tous...
M. Awashish (Constant) :
...
du gouvernement, tu sais, il y a comme un sentiment, là, de
passivité, là, par rapport à ce projet de loi. On veut vraiment que le
gouvernement y croie, également, on veut vraiment que le gouvernement puisse
voir l'utilité, là, pour l'avancement de la société, mais l'avancement
également
des droits de >tous et chacun. On ne peut pas toujours mettre en dessous
de la couverture des situations qui peuvent être désagréables à entendre. On
veut une amélioration, là, au point de vue du support.
Est-ce que ça va seulement être le bureau
du ministre qui va être mis à contribution pour, justement, aider ces
familles-là dans leurs recherches? C'est des questions qui sont posées par les
familles. Tu sais, on veut vraiment que ça soit une implication, excusez mon
anglicisme, là, «at large», là, de la part du gouvernement, là. Je pense, tous
les ministères devraient être impliqués, là, également, là. Je pense, les ministres
devraient être au courant de la démarche pour que tout le monde puisse
travailler dans la même direction puis que la démarche soit efficace au niveau
des familles. Un autre...
• (16 h 40) •
La Présidente (Mme D'Amours) :
Merci, M. le chef Constant Awashish. Le temps étant terminé, nous allons passer
à la période de questions. Vous aurez le loisir de répondre et de terminer
votre échange. Nous allons maintenant débuter la période d'échange avec M. le
ministre. La parole est à vous. Vous disposez de 16 min 30 s.
M. Lafrenière : «Kwei»,
vice-chef. «Kwei», grand chef. Je commencerais en vous laissant terminer ce que
vous avez commencé, grand chef Awashish. Je vous écoute.
M. Awashish (Constant) :
Bien, rapidement, là, il faudrait mentionner dans ce projet de loi, là, quelque
chose, là, qui va aider les familles au niveau psychosocial. On sait que ça
ouvre des plaies, ça ouvre des mauvais souvenirs. Je pense que ces familles-là
auront besoin, là, de support à ce niveau-là. Je pense qu'il faut l'envisager
dans ce projet de loi, là, déjà, un support plus grand, là, en ce qui concerne,
là, tous les effets, là, au niveau psychologique que seule la démarche peut
développer, là, auprès des familles.
Peu de place pour les nations autochtones,
j'avais mentionné ça également, j'avais dénoté ça. Oui, c'est beaucoup le
gouvernement qui... Tu sais, tantôt, j'ai mentionné qu'il faut, le
gouvernement, qu'il soit plus actif par rapport à ça. Mais je pense que le
gouvernement doit travailler en collaboration également avec les différentes
nations autochtones pour justement aider à mieux rendre à l'aise les familles
qui sont touchées par ça, cette problématique-là.
Également, là, c'est d'accorder une plus
grande place, là, dans le projet de loi, là, aux familles. Parce que, de la
façon que je vois le projet de loi puis les gens voient le projet de loi, c'est
vraiment concentré au niveau du bureau du ministre, là. Puis, tu sais, ce n'est
pas parce que je crois que vous ne ferez pas un excellent travail, au
contraire, je pense que vous faites un excellent travail, mais je pense qu'il
faut vraiment faire participer les nations, faire participer également les
familles touchées, là, qu'ils puissent être plus près, plus près de vous, plus
près de l'appareil gouvernemental pour la recherche, là, de l'information.
Autre question également, c'est la date
limite, là, la date limite de cinq ans pour l'application du <projet de
loi, c'est...
M. Awashish (Constant) :
...
je pense que vous faites un excellent travail. Mais je pense qu'il
faut vraiment faire participer les nations, faire participer également les
familles touchées, là, qui puissent être plus près, plus près de vous, plus
près de l'appareil gouvernemental pour la recherche, là, de l'information.
Autre question également, c'est la date
limite, là, la date limite de cinq ans pour l'application du >projet de
loi, c'est quelque chose qui stresse beaucoup les familles, c'est quelque chose
qui... tu sais, qu'est-ce qui arrive, là, si, au début, on a de la difficulté à
démarrer le processus puis on arrive au bout de trois, quatre ans, on voit
l'ampleur, tu sais, des recherches, mais il y a beaucoup de travail encore à
faire? Tu sais, ça va créer un stress supplémentaire, déjà présent chez ces
familles-là, juste le fait... je pense que, tu sais, cette date limite là, ce n'est
pas nécessaire. Je pense qu'il y a moyen également, tu sais, de donner plus de
latitude, au niveau de la recherche, de la part du gouvernement.
Également, la question du
31 décembre 1989 qui, je pense, est une très bonne amélioration
comparativement au projet de loi n° 31. Mais, encore là, pourquoi mettre
une date, alors que peut-être qu'il y aurait des choses qui sont arrivées par
la suite ou des choses qui pourraient arriver dans le futur? On ne le sait pas.
Je pense que, tu sais, en mettant des dates, des délais de cette façon-là, on
se prive tout le monde, non seulement les familles, non seulement les nations
autochtones, mais le gouvernement également, puis les Québécoises et les
Québécois, à avoir les vraies réponses, là, en ce qui concerne toute la
recherche qui devra être faite pour découvrir la vérité pour ces familles-là.
Un élément très important, mais c'est une
possibilité, là, par la création, là, ou l'ajout, dans le projet de loi, là, de
l'implication d'un enquêteur spécial, d'un coroner avec un mandat spécial qui
va accompagner ces familles-là, qui va pouvoir les aider à mieux se diriger,
hein, tu sais, dans les recherches, mais également à mieux comprendre la
documentation, à mieux comprendre également... pour en arriver plus rapidement,
hein, à la vérité qu'ils recherchent tous ensemble. Je pense que c'est
important, là, que le gouvernement puisse reconsidérer cette approche-là, puis
pas tout mettre dans la cour au ministre Lafrenière. Mais c'est de pouvoir
permettre, là, d'avoir des experts autour qui puissent guider tout le monde.
Hein, c'est tout le monde qui va en bénéficier, pas seulement les familles, mais
c'est les nations, mais également les Québécoises et les Québécois qui vont
pouvoir bénéficier de cette expertise-là. Ils vont pouvoir bénéficier également
de l'efficacité, également, dans les recherches, et tout le monde, au bout de
la ligne, on va pouvoir connaître la vérité et on va mieux grandir puis avancer
ensemble. C'est tout le temps dans cette optique-là, je pense, qu'il faut
travailler, puis j'invite aujourd'hui, là, vous, membres honorables de cette
commission-là, à considérer cette question-là de plus en profondeur.
Donc, c'était vraiment ça, les points qui
étaient importants, là, pour moi, là, en ce qui concerne le projet de loi n° 79. Je ne sais pas si Sipi aurait d'autres choses à
rajouter par rapport à ça, étant donné qu'il a travaillé très, très étroitement
avec les familles, là, très directement, puisqu'ils sont... Sipi lui-même avec
sa famille sont touchés. Je vais laisser la parole à Sipi, s'il peut compléter
quelques éléments <également...
M. Awashish (Constant) :
...
importants, là, pour moi, là, en ce qui concerne le projet de loi
n°
79. Je ne sais pas si Sipi aurait d'autres choses
à rajouter par rapport à ça étant donné qu'il a travaillé très, très
étroitement avec les familles, là, très directement puisqu'ils sont... Sipi
lui-même avec sa famille sont touchés. Je vais laisser la parole à Sipi, s'il
peut compléter quelques éléments >également.
M. Flamand (Sipi) : ...dans
ce point-ci qu'il est nécessaire d'entreprendre des recherches sérieuses sur la
disparition des enfants autochtones par des moyens d'enquête des gouvernements
impliqués et par des enquêtes dirigées par les autochtones auprès de toutes ces
institutions. Je pense que c'est dans les mêmes orientations que recommande
grand chef Awashish.
Et je voudrais aussi parler du sujet
concernant certains dossiers que les familles ont reçus à la suite des enquêtes
au niveau du bureau de l'état civil, quant à certains qui ont reçu des
certificats de décès puis sans avoir été informé auparavant de ces... des
décès, et je pense que faudrait qu'on... que les familles aient accès aux
informations sur les circonstances, évidemment, mais aussi sur les causes, c'est
très important pour les familles qui... pour voir l'importance des causes de
ces décès-là.
C'est comme un des cas d'une des familles
ici, à Manawan, qui a reçu un certificat de décès avec des dates qui sont
différentes, Laureanna Echaquan. Puis je pense qu'il faut que le bureau de
l'état civil revoit ces mesures-là, ces... comment donner ces documents-là,
puis c'est très important pour les familles qu'elles aient ces informations-là,
c'est dans cette manière-là, aussi, qu'ils vont pouvoir guérir à leur manière. Puis
je pense aussi que c'est important d'impliquer les aidants naturels attikameks
dans ce processus-là, car ils ont un travail qu'ils ont initié avec l'approche
culturelle attikamek dans ce processus de guérison, mais ça prend aussi des
moyens pour contribuer dans la guérison.
La Présidente (Mme D'Amours) :
Merci. M. le ministre.
M. Lafrenière : Oui, merci.
Merci à vous deux. Puis, écoutez, je vais commencer par un petit point
d'information, je pense que ça va être bénéfique, et grand chef, vice-chef, par
vos questions vous m'aidez à amener un point. Vous savez quand on présente un projet
de loi comme ça, c'est... bon, c'est la base légale, et, entre vous et moi, il
manque beaucoup d'éléments qu'on n'est pas capable de sentir quand on regarde
le projet de loi, puis je veux vous rassurer parce que vous amenez deux bons
points.
La semaine passée, au budget, mon collègue
Eric Girard, le ministre en charge, a annoncé, aussi, qu'il y avait un budget
qui était pour être <attaché à la...
M. Lafrenière : ... un
projet
de loi comme ça c'est... bon, c'est la base légale et entre vous et moi il
manque beaucoup d'éléments qu'on n'est pas capable de sentir quand on regarde
le
projet de loi, puis je veux vous rassurer parce que vous amenez deux
bons points.
La semaine passée, au budget, mon
collègue Eric Girard, le ministre en charge a annoncé, aussi, qu'il y avait un
budget qui était pour être >attaché à la direction aux familles. Alors,
je veux vous rassurer, tous les deux. Oui, c'est vrai que légalement on parle
de responsabilité, puis ça revient au bureau du ministre aux Affaires
autochtones, mais il est déjà prévu d'avoir une direction de soutien aux
familles et d'avoir un groupe d'enquête aussi, donc des gens qui vont avoir le
travail... comme travail principal de faire enquête, d'aller au bout des
choses.
Et je le disais ce matin à un autre
groupe, ce que ce n'est pas. Notre intention, ce n'est pas de référencer, de
dire aux familles : Voici où vous devez appeler, voici le site Web à...
remplir des documents. Ce n'est pas ça, mais vraiment pas. C'est vraiment
d'accompagner les familles avec et pour les familles de A à Z, et ça peut aller
jusqu'à compléter les documents avec eux et, oui, la démarche d'enquête. Et tout
à l'heure on parlait aussi du fait qu'on pourrait recevoir un document, un document
qui date des années 50, signé par un médecin, et, entre vous et moi, je ne
serais même pas capable de le lire ou de le déchiffrer. On a déjà des médecins
retraités qui ont levé la main, qui se sont offerts comme volontaires pour
aider les gens de la communauté, que ce soient des juges, des avocats, des gens
qui ont travaillé dans des écoles, qui sont des retraités, qui veulent aider.
Alors, ce que vous nous partagez aujourd'hui, je l'entends très, très bien,
puis c'est vraiment la volonté en arrière de tout ça.
Puis ça m'amène à une question bien
spécifique pour vous. Comme la direction de soutien aux familles, notre but, c'est
d'avoir une approche qui est en sécurisation culturelle, puis on veut embarquer
aussi les éléments du Principe de Joyce. J'aimerais ça vous entendre, dans
cette approche-là... Puis là j'ai compris l'importance de l'implication des
membres de la communauté, l'importance d'être adapté, justement, avec chacune
des réalités et d'avoir les familles présentes. Mais, devant cette commission aujourd'hui,
quels sont les éléments que vous trouvez vraiment essentiels, là, pour nous,
pour avoir une approche qui serait vraiment adaptée aux Premières Nations, avec
ce que je viens de vous dire, là, au niveau des directions des familles, avec
les enquêteurs attitrés? C'est quoi, les éléments que vous nous suggérez, les
éléments les plus importants pour avoir une approche qui soit bien adaptée?
• (16 h 50) •
M. Awashish (Constant) : Je
vais y aller, Sipi...
M. Flamand (Sipi) : Oui.
M. Awashish (Constant) :
Merci. Bien, simplement, pour répondre à votre question, là, qu'est-ce qui
serait adapté, là, je pense, souvent les familles qui sont touchées par
cette... on va l'appeler... c'est une tragédie, là, historique, là, ici, au
Québec, souvent, ces personnes-là, bien, il y avait une barrière de la langue
également qui était problématique. Je pense qu'il faudrait envisager, là, tu
sais, la contribution, vraiment, tantôt je l'ai mentionné, des différentes
nations, là, des organisations proches de ces familles-là, qu'elles puissent
être impliquées dans le processus, qu'elles puissent travailler en étroite
collaboration avec votre bureau, mais également avec les autres ministères qui
peuvent être impliqués par la démarche. Je pense que c'est important de pouvoir
leur donner le soutien nécessaire, là, à ce niveau-là, un accompagnateur,
autant expert technique, mais autant un accompagnateur qui va pouvoir aider au
niveau de la compréhension, là, et de la barrière de la langue. Je pense que c'est...
déjà, si on comprend cette avenue-là, je pense qu'on a déjà, là, un bon pas
dans la bonne <direction, là...
M. Awashish (Constant) :
...
le soutien nécessaire, là, à ce niveau-là, un accompagnateur, autant
expert technique, mais autant un accompagnateur qui va pouvoir aider au niveau
de la compréhension, là, et de la barrière de la langue. Je pense que c'est...
déjà, si on comprend cette avenue-là, je pense qu'on a déjà, là, un bon pas
dans la bonne >direction, là.
M. Lafrenière : Merci,
grand chef. J'ai une question plus technique pour vous, pour les... Parce que
vous parlez de la collaboration avec les communautés, puis je lisais justement
dans certaines demandes des familles qu'à certains moments ce qui était nécessaire,
c'était d'avoir nom, prénom, date de n'aisance qui étaient enregistrés dans les
registres des conseils de bande. Et je voulais savoir quelle était la
coopération, de quelle façon vous suggérez qu'on travaille ensemble? Parce que,
tantôt, on recevait un autre groupe aussi, puis ça nous a rappelé à quel point
c'était important d'avoir la bonne information signalétique, là, pour bien
commencer ces recherches-là. Et je sais qu'il y a une partie, là, d'archives
qui résident aussi dans les conseils de bande. Alors, quel genre d'approche
vous nous suggérez pour qu'on travaille tous ensemble là-dedans?
M. Awashish (Constant) :
Un élément que j'avais noté également, que j'ai oublié de vous mentionner
tantôt, je pense que le projet de loi devrait mentionner, là, l'obligation, là,
d'une collaboration avec le gouvernement fédéral, le ministère des Affaires autochtones...
anciennement le ministère des Affaires autochtones, qui, eux, détiennent toutes
les archives, l'information, là, en ce qui concerne les individus qui peuvent
être dans les listes de bande. C'est eux qui administrent les listes de bande
des communautés. Oui, dans les communautés, il y a une liste de bande, mais
tout ce qui est... les informations les plus précises, je pense qu'on peut le
retrouver vraiment au niveau du ministère. Puis je ne vois pas de problème,
là... Quand les familles demanderont l'information auprès des communautés, des
conseils de bande, je ne vois pas pourquoi et comment les conseils de bande
refuseraient de collaborer avec ces familles-là.
M. Lafrenière : Bien
reçu. Merci beaucoup pour votre information. Puis vous avez raison qu'il faut
travailler avec le fédéral, mais, dans nos projets de loi, on peut difficilement
les obliger. Mais ça, c'est notre relation nation à nation. Merci. Je crois
qu'il y avait un de mes collègues qui avait une question, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme D'Amours) :
Oui, merci, M. le ministre. Je vais laisser la parole au député d'Ungava.
M. Lamothe : M. Awashish, M. Flamand. Juste
une question, vous avez soulevé tantôt une lacune. L'implication gouvernementale,
vous avez un doute. C'est quoi qui sème le doute, de ce que vous avez vu à
date? Pourquoi votre réflexion face à un doute que vous avez sur l'implication gouvernementale?
M. Awashish (Constant) :
On veut s'assurer qu'il y ait une meilleure participation, comme je
mentionnais, des familles, des nations. On veut vraiment une meilleure collaboration,
pas juste laisser à lui-même, tu sais, le bureau du ministre. On veut s'assurer
que le bureau du ministre reçoit l'aide nécessaire, la collaboration nécessaire
des autres ministères également, mais également que le ministre puisse avoir le
feu vert à collaborer avec les Premières Nations pour avoir la vérité la plus
juste possible. Simple comme ça.
M. Lamothe : Il y a-tu quelque
chose, à date, qui fait en sorte... qui soulève ce doute-là, dans le processus,
à date, que vous avez perçu?
M. Awashish (Constant) : Non,
mais je pense... en faisant la lecture du projet de loi, là, on voit que... tu
sais, beaucoup d'efforts, beaucoup de <pouvoirs...
M. Awashish (Constant)T :
... la vérité la plus juste possible. Simple comme ça.
M. Lamothe :
Y a-tu
quelque
chose qui... à date, qui fait en sorte... qui soulève ce doute-là, dans le
processus
à date, que vous avez perçu?
M. Awashish (Constant) :
Non,
mais je pense... en faisant la lecture du projet de loi, là, on
voit que, tu sais, beaucoup d'efforts, beaucoup de >pouvoirs
discrétionnaires qui sont octroyés au ministre Lafrenière ou peut-être ceux qui
viendront par la suite dans ce projet de loi là. Je pense qu'il faut, tu sais,
un peu, tu sais, donner une plus grande... comment je pourrais dire ça, tu
sais, des acquis plus tangibles pour les familles puis les nations autochtones,
au lieu de tout donner, comme, au ministre, là, la discrétion de décider dans
certains dossiers, là.
M. Lamothe : O.K. Merci
beaucoup. Merci.
La Présidente (Mme D'Amours) :
M. le ministre.
M. Lafrenière : Oui, merci
beaucoup. Merci pour les détails. Puis vous me permettez aussi d'amener un
petit point d'information. Dans mon ancienne carrière, j'ai bien aimé les
enquêtes, mais ça ne sera pas ma nouvelle carrière. Alors, c'est pour ça qu'il
va y avoir vraiment une direction des enquêtes avec des enquêteurs. Quand on
fait une loi comme ça, il y a un pouvoir qui est donné à un ministre, mais qui
va être remis par la suite à des groupes d'enquête. Comme je vous dis, ça fait
partie de mon passé, que j'ai bien aimé, là, mais je ne me suis pas donné une
nouvelle job, une nouvelle carrière, là. Il va y avoir des gens, des
spécialistes en enquête. Mais c'est un très bon point. Puis effectivement,
vous savez, nous, ça fait déjà plusieurs mois qu'on est dans le projet de loi,
qu'on est dedans, mais tellement dedans qu'on ne voit plus la forêt, on est
rendus avec le nez sur l'arbre, et, peut-être, notre compréhension est rendue
tellement pointue qu'on oublie de ramener les grands enjeux comme la direction
de soutien aux familles et la direction des enquêtes. Alors, ça, je vous
remercie, je vous remercie là-dedans.
L'autre enjeu que je voyais, grand chef,
que je voulais vous entendre, et on en a parlé avec d'autres groupes
aujourd'hui, c'est que, ce projet de loi là, notre premier défi, ça va être de
le faire connaître, de faire en sorte que les familles connaissent le projet,
sachent de quelle façon aussi nous rejoindre. Et je veux savoir, comme vous
êtes une personne de terrain, de quelle façon on peut travailler. Encore une
fois, je crois que les nations, les communautés doivent nous aider, mais
j'aimerais ça voir quel rôle vous y voyez, vous, pour la partie communication,
pour être capable de rejoindre les familles. Avec les familles aussi, vous avez
parlé d'Awacak tout à l'heure, c'est des associations de familles qui doivent
travailler avec nous, c'est hyperimportant. Mais comment vous voyez ça? Et là
je vous donne le défi d'y répondre, ça a l'air, en quelques secondes. Je crois
que j'ai brûlé beaucoup de temps.
M. Awashish (Constant) : Je
pense, c'est beaucoup, tu sais, la communication. Nous, on peut travailler avec
vous en collaboration pour, justement, communiquer l'information. Il y a déjà
l'organisation Awacak qui existe, qui va devenir plus officielle éventuellement,
également, qui sont bien organisés. Les familles attikameks sont bien
organisées. Elles sont représentées par Mme Ruperthouse, là, qui est une
Algonquienne qui a été touchée par, justement, cette problématique-là. Il y a
également Sipi avec qui, là, tu sais, les familles travaillent très, très... de
façon très étroite, là, qui pourront, tu sais, à ce moment-là, communiquer
toute l'information. Mais il s'agit juste de se communiquer, là, entre les
organisations. Tu sais, pour nous, le projet de loi touche énormément les
Attikameks, puis je pense que c'est important, là, que les Attikameks soient
approchés. Puis il n'y aura pas de problème, là, tu sais, ils sont très bien
organisés, ils sont très bien... Ils se parlent régulièrement, les familles se
parlent régulièrement, puis je pense qu'il n'y aura pas de problème à ce
moment-là...
La Présidente (Mme D'Amours) :
Merci.
M. Lafrenière : «Meegwetch»,
merci, <«meegwetch...
M. Awashish (Constant) :
...
le
projet de loi
touche énormément les Attikameks,
puis je pense que c'est important, là, que les Attikameks soient approchés,
puis il n'y aura pas de problème, là, tu sais. Ils sont très bien organisés,
ils sont très bien... Ils se parlent régulièrement, les familles se parlent
régulièrement, puis je pense qu'il n'y aura pas de problème
à ce
moment-là
...
La Présidente (Mme D'Amours) :
Merci.
M. Lafrenière :
Meegwetch, merci, >«meegwetch».
La Présidente (Mme D'Amours) :
Merci beaucoup. Maintenant, je cède la parole au député de Jacques-Cartier.
Vous disposez de 11 minutes.
M. Kelley
: Merci
beaucoup. Bonjour, grand chef, et bonjour, vice-chef. Merci pour votre
présentation. C'est un petit peu dans le même sens... puis je pense que tout le
monde ici veut s'assurer que les peuples autochtones du Québec ont vraiment de
la confiance dans le processus qu'on veut mettre en place. Alors, ce n'est pas
comme... vous avez mentionné un enquêteur spécial peut-être, mais peut-être
est-ce que vous avez vraiment des «réservations» présentement que les pouvoirs
qui sont donnés dans le projet de loi ne sont pas suffisants pour faire une
vraie enquête sur les institutions qui pourraient avoir... comment je peux dire
ça sans prêter des intentions, mais, peut-être, veut cacher l'information, ou
ils ont déjà détruit certaines informations qui sont pertinentes pour rendre
vraiment la vérité à plusieurs familles autochtones du Québec?
M. Awashish (Constant) :
Bien, je peux faire un élément de réponse, là. Merci pour votre question. C'est
sûr que, pour nous, là, il faut comprendre un peu le contexte historique des Premières
Nations ici, au Canada, mais au Québec. Ça n'a pas toujours été une histoire
qui... d'amour, hein? Ça n'a pas été toujours une histoire, tu sais, d'une
grande collaboration ou d'un grand respect. Je pense, c'est normal pour nous,
les Premières Nations, d'avoir une certaine méfiance, puis c'est un peu ce que
je ressens, là, de la part des familles, de... tu sais, on veut bien laisser,
tu sais, la chance aux coureurs, mais, je pense, d'un autre côté, tu sais, on
veut bien s'assurer également que nos arrières sont bien protégés. Puis on
demande seulement la collaboration de la commission en place, mais également la
collaboration du ministre Lafrenière et de tout le ministère pour, justement,
faire la lumière là-dessus.
Comme j'ai mentionné tantôt, ce n'est pas
seulement bénéfique pour nous, ça va être bénéfique, je pense, pour la société
en général. Si on veut avancer ensemble, guérir ensemble, je pense qu'il ne
faut pas avoir peur de dire les vraies choses, mais il faut travailler dans ce
sens-là tous ensemble, sinon ça va juste rempirer le sentiment d'injustice puis
ça va juste rempirer le mal, là, que la relation a vécu pendant des années. Puis,
je pense, tout le monde a le même but que moi, c'est de travailler dans un sens
qui... dans le sens du positif, puis je ne pense pas pourquoi, là... je ne vois
pas la raison pourquoi le gouvernement ne serait pas réceptif à ces demandes-là
qui pourraient rassurer, justement, les familles directement sur le terrain. Je
ne sais pas si Sipi aurait d'autres choses à rajouter, là.
M. Flamand (Sipi) : Tu as
bien répondu.
M. Awashish (Constant) : «Meegwetch.»
• (17 heures) •
M. Kelley
: Une autre
question dans le même sens. Ce matin, j'ai posé la question à Mme Audette,
qui a dit que c'était peut-être important de lancer une enquête ou une
commission publique sur les enfants autochtones disparus au <Québec...
>
17 h (version révisée)
<17951
M.
Kelley
: ...une autre
question dans le même sens. Ce
matin, j'ai posé la question à Mme Audette, qui a dit que c'était
peut-être
important de lancer une enquête ou une
commission publique sur les
enfants autochtones disparus au >Québec. Est-ce que, selon vous, ce projet
de loi répond à cette demande ou est-ce que quelque chose comme ça, c'est peut-être
toujours nécessaire pour la province et pour les peuples autochtones du Québec?
M. Awashish (Constant) :
Bien, c'est sûr que, tu sais, une commission d'enquête, ça peut amener beaucoup
d'éléments de réponse, ça peut donner un certain pouvoir d'enquête à la commission
qui pourrait être mise en place, mais, encore là, il faut la mettre en place ou
il faut que les gens y adhèrent, il faut que les gens puissent accepter, là, de
mettre en place cette commission-là. Il faut monter une équipe, il faut... Tu
sais, ça peut prendre un certain temps. Je pense que les familles, eux, tu
sais, ont besoin de réponse immédiatement, puis il y a une possibilité, là, de
le faire, là, tu sais, à travers une collaboration pleine et entière, là, du gouvernement
en place, actuel, et donc on mise beaucoup, là, à accélérer et, également,
donner une efficacité, là, à ce projet de loi là. Et je pense qu'il y a une
porte d'ouverte présentement, puis on est prêts, là, à utiliser cette
approche-là pour les familles. Mais, tu sais, si les éléments ne sont pas tous
rassemblés, tu sais, ça peut être envisagé également, là.
Mais, pour nous, le message que nous
recevons des familles, c'est qu'elles veulent connaître la vérité, seulement la
vérité et rien que la vérité, c'est seulement ça qu'elles veulent. Maintenant,
le projet de loi peut donner les moyens d'aller chercher cette vérité-là. Il
s'agit juste d'avoir une réelle volonté du gouvernement en place, puis je pense...
aujourd'hui, je ressens une certaine sensibilité par rapport à ça, et en
espérant que ça puisse se refléter dans le projet de loi qui sera officiel.
M. Kelley
: Est-ce que...
M. Flamand (Sipi) : En ce
sens, je pense que le projet de loi doit répondre également aux valeurs puis
aux principes autochtones quant à... sur la recherche des enfants disparus, puis
que le gouvernement agisse de façon responsable de ces enjeux-là, parce que les
familles disent qu'elles n'ont jamais eu de communications suite au possible
décès de ces enfants-là, puis aujourd'hui peut-être que ces enfants-là sont
encore vivants, mais il faut aussi que les familles sachent où vivent ces
personnes-là.
On connaît aussi une histoire de... des
rafles des années 60, où beaucoup d'enfants ont été amenés, puis je crois
que ma mère a été... presque été victime de cette réalité-là, parce qu'elle est
allée dans un sanatorium, puis elle a été amenée dans une famille québécoise,
puis sans informer les parents, mes grands-parents, cela dit. Donc, le gouvernement
doit revoir, là-dessus, ses politiques <aussi...
M. Flamand (Sipi) :
...dans un sanatorium, puis elle a été amenée dans une famille
québécoise,
puis sans informer les parents, mes grands-parents, cela dit. Donc, le
gouvernement
doit revoir, là-dessus, ses
politiques >aussi.
M. Kelley
: Merci pour
votre réponse. Une autre question, c'est plus pour le vice-chef, juste parce
que j'ai vu, dans Le Devoir... après que l'ancien projet de loi a
été déposé, bien, c'était mélangé avec un autre projet de loi, vous avez
juste mentionné un petit peu le processus, particulièrement, avec les congrégations
religieuses. Alors, encore, juste de dire : Est-ce que vous avez déjà pris
des démarches avec l'église, dans votre communauté, pour essayer d'avoir plus
d'information? Et est-ce qu'eux autres étaient fermés à ça? Alors, c'est juste de
bien comprendre aussi les démarches que vous avez déjà prises et des barrières
qui étaient vraiment mises en place, et je veux juste bien s'assurer que notre
projet de loi enlève ces barrières-là pour vous.
M. Flamand (Sipi) : Par
rapport à votre question, les congrégations religieuses, c'est très important
qu'ils donnent accès aux informations parce que c'est eux qui avaient la
gestion au niveau des centres hospitaliers à une certaine époque. Puis, oui, il
y a une ouverture, mais au niveau local, je devrais dire, au niveau local, dans
la communauté, l'église est ouverte à donner ces informations-là, mais qu'en
est-il des congrégations religieuses à l'extérieur? Ça, il faut qu'on ait ces
informations-là.
Puis je réitère aussi l'importance de
créer aussi une ouverture avec les archives au niveau national puis au niveau
du ministère des Affaires autochtones, au niveau fédéral, parce que, oui, il y
a beaucoup d'information que Services aux autochtones Canada détient sur les
disparitions. On en a vu avec l'histoire du rapt des années 60.
M. Kelley
: Merci. Et
une autre question, c'est pour le grand chef ou le vice-chef, mais on travaille
sur un projet de loi ici, et le ministre a parlé rapidement de la sécurisation
culturelle, mais je veux juste bien s'assurer que ce n'est pas le moment,
maintenant, de traiter cet enjeu-là, de ne pas ajouter des amendements pour
ajouter les clauses aux différentes lois québécoises pour mettre en place la
sécurisation culturelle au Québec. Est-ce que vous préférez que c'est dans un
projet de loi à part?
M. Awashish (Constant) :
Bien, je pense qu'idéalement là... si on parle de relation, je pense que ça
touche beaucoup la relation des Premières Nations, cette question-là. Je pense,
réellement, si le gouvernement veut renouveler la relation avec les Premières
Nations, ce serait à travers un projet de loi distinct. Et, pour nous, le
projet de loi n° 79, c'est le projet de loi pour les familles touchées par
les enfants enlevés, les enfants qui ont été volés et pour répondre, tu sais, à
leurs besoins, tu sais, immédiats. Je pense que le projet de loi, il faut
vraiment qu'il soit concentré sur les <besoins...
M. Awashish (Constant) :
…
loi distinct. Et, pour nous, le projet de loi n° 79, c'est le
projet de loi pour les familles touchées par les enfants enlevés, les enfants
qui ont été volés et pour répondre, tu sais, à leurs besoins, tu sais,
immédiats. Je pense que le projet de loi, il faut vraiment qu'il soit concentré
sur les >besoins des familles. Et actuellement les familles recherchent
la vérité, recherchent également toute l'information. Il faut les aider à
trouver ces informations-là, il faut les aider à être efficaces dans leurs
recherches également, il faut les aider à avoir une meilleure compréhension,
également, de l'information qui sera retrouvée, mieux les diriger, les
accompagner à travers leur processus, mais également, là, de s'assurer qu'il y
a un filet de sécurité, à travers, là, une aide, là, qui pourrait être de
nature psychosociale, là, pour s'assurer que… Tu sais, ces gens-là vont…
risquent de réouvrir des vieilles plaies qui ont presque guéri mais qui sont
toujours présentes.
Pour moi... Peut-être Sipi a une opinion
qui pourrait être différente, mais, pour moi, je pense, le projet de loi
n° 79 doit vraiment se concentrer sur ce que les familles ont besoin, là,
dans l'immédiat, là, tu sais? Il y a des familles... Les gens, je pense... Puis
chacun d'entre nous, ici, là, chacun des membres de la commission, on prend de
l'âge, mais les familles également, puis les gens veulent connaître la vérité,
hein? C'est ce qui est important pour eux.
La Présidente (Mme D'Amours) :
M. Flamand, vouliez-vous rajouter quelque chose? Il vous reste une minute.
M. Flamand (Sipi) : Oui.
C'est important que... Comme je l'ai dit plus tôt, c'est important d'écouter
les aidants naturels dans les communautés. C'est aussi dans cet aspect-là qu'on
va pouvoir guérir ensemble dans nos communautés, dans les familles, dans les
proches de ces personnes qui… des enfants qui ont été portés disparus. Puis je
pense qu'au niveau de la sécurisation culturelle c'est… il faut vraiment
travailler dans ce sens-là pour les familles également. Mais, on le sait, le
concept «sécurisation culturelle», c'est assez large mais en même temps précis
au niveau de la santé, donc on parle, ici, de pratiques psychosociales pour les
familles. Donc, c'est important qu'ils soient accompagnés avec... les personnes
qui désirent être accompagnées. Je parle, ici, des chefs spirituels, des
psychologues, des intervenants qui connaissent bien les valeurs autochtones,
comment aider les autochtones dans leur processus de guérison.
La Présidente (Mme D'Amours) :
Merci. Je cède maintenant la parole à la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques.
Vous disposez de 2 min 45 s.
Mme Massé : Merci, Mme la
Présidente. Bonjour, grand chef. Bonjour, vice-chef. Heureuse de vous voir là
aujourd'hui. Alors, écoutez, allons directement droit au but. Vous avez fait
état que ce que les gens, les familles veulent, c'est la vérité, toute
l'information, donc qu'il ne soit pas question exclusivement des circonstances,
mais des causes aussi qui ont mené à ça. J'aimerais que vous me précisiez si j'ai
bien compris.
Et l'autre <élément…
Mme Massé : ...
ce
que les gens, les familles veulent, c'est la vérité, toute l'information, donc,
qu'il ne soit pas question exclusivement des circonstances, mais des causes
aussi qui ont mené à ça. J'aimerais que vous me précisiez si j'ai bien compris.
Et l'autre >élément, parce que
le temps va nous filer, c'est... M. Flamand, vous avez fait état de... il
faut revoir comment on donne l'information aux gens, puisque, des fois — ça
peut être l'état civil ou peu importe — ça peut être, bien,
inadéquat. Alors donc, comment, lorsque l'information, et toute l'information,
est trouvée, comment ça doit descendre auprès des personnes endeuillées, puisque
ce qu'on veut, c'est leur permettre de faire leur processus de deuil? Alors, ce
seraient mes deux éléments.
M. Awashish (Constant) :
Bien, juste pour votre première question, là, sur la cause et les
circonstances, je pense que ça va de soi. Tu sais, s'ils veulent connaître la
vérité, comment que tout... qu'est-ce qui entoure l'événement qui aurait pu se
produire avec leur enfant, je pense que c'est important de connaître les causes
puis les circonstances ou la situation qui pourrait affliger une famille en
particulier.
• (17 h 10) •
Pour la deuxième question, comme je vous
mentionnais tantôt, il y a le regroupement Awacak qui existe, qui va exister, également,
officiellement sous peu. Je pense que cette organisation-là va jouer un rôle,
là, tu sais, important, là, pour descendre l'information auprès des familles.
Mais il n'en reste pas moins que le Conseil de la nation atikamekw, tu sais, va
être disponible, là, on va dire qu'on est présents pour ces familles-là, puis
on va pouvoir les aider, les soutenir dans leurs besoins, et, également, on va
soutenir également l'organisation Awacak, là, dans leurs démarches.
La Présidente (Mme D'Amours) :
Merci. Donc, maintenant, je cède la parole au député de René-Lévesque. Vous
disposez de 2 min 45 s.
M. Ouellet : Merci
beaucoup, Mme la Présidente. Donc, à mon tour de vous saluer, M. le chef,
M. le vice-chef. Tout le long de la journée, plusieurs groupes nous
parlent, effectivement, de cette non-nécessité d'avoir un délai de
prescription, donc un cinq ans. Le ministre nous parle qu'on est obligés, quand
même, parce qu'on contourne des lois, de mettre une date. Je vous entendais tout
à l'heure, vous nous dites, peut-être, de faire sauter ça. Mais il existe peut-être
une solution mitoyenne, parce que... même si le projet de loi dit : c'est
cinq ans, puis, après ça, à chaque année, on pourrait le renouveler. Est-ce que
vous ne voyez pas peut-être l'opportunité de mettre un délai déjà plus grand en
commençant, justement, pour permettre aux communautés d'avoir le temps ou de
prendre le temps de s'approprier cette nouvelle pièce législative et de faire
les démarches?
M. Awashish (Constant) : ...Mme
la Présidente, je peux répondre? Merci. Bien, simplement pour répondre à votre question,
c'est sûr que ce serait <apprécié...
M. Ouellet :
...
justement,
pour permettre aux
communautés d'avoir le temps ou de prendre le temps
de s'approprier cette nouvelle pièce
législative et de faire les
démarches?
M. Awashish (Constant) :
...
Mme
la Présidente, je peux répondre? Merci. Bien,
simplement pour répondre à
votre
question, c'est sûr que ce serait >apprécié, là. Je le sais,
qu'il y a peut-être des intrants qu'il faut réfléchir, mais, pour nous, là,
cinq ans, là, on croit que les familles sont... plutôt, croient que c'est très
restreint. Ça donne... Tu sais, ça va se faire à la hâte, ça va se faire... Il
risque d'y avoir des erreurs dans les recherches, il risque d'y avoir des
erreurs dans le processus. Tu sais, au moins, tu sais, de... s'il faut absolument
avoir un délai par la loi, au moins, le doubler ou tripler ce délai-là, qui...
pour, au moins, permettre, là, à ces familles-là d'avoir un sentiment de pouvoir
mieux respirer. Je pense que ce serait déjà une forme de respect envers ces
familles-là.
M. Ouellet : En terminant, bien
rapidement, pour aller au fond des choses, le gouvernement va mettre des moyens,
il y aura des ressources qui vont accompagner les communautés, mais je
comprends bien aussi que vous aimeriez avoir des ressources financières pour
que vos propres ressources, les gens qui font déjà les démarches pour les
membres des communautés puissent, effectivement, avoir les moyens d'y parvenir.
C'est bien ça?
M. Awashish (Constant) :
Bien, c'est sûr que, pour eux, les recherches qui ont été faites, ça a tout le
temps été fait, là, par leurs propres moyens. Si, tu sais, le gouvernement est
impliqué dans le processus, je pense que c'est la moindre des choses, là, de
pouvoir faciliter, là, cette recherche-là, mais également, là, de pouvoir
permettre l'efficacité, là, dans l'avancement de ces recherches-là. Je pense,
certains moyens, là, pourraient, justement, combler un certain fossé, là, qui
peut exister quand vient le temps, là, de vraiment mettre tous les efforts, là,
dans la recherche.
M. Ouellet : Merci.
La Présidente (Mme D'Amours) :
Alors, merci infiniment à M. Constant Awashish, grand chef, et à Sipi
Flamand, vice-chef de la communauté de Manawan. Permettez-moi aussi de
remercier l'équipe technique pour la solution, là, d'interprétation simultanée,
c'était une première. Donc, ils ont travaillé très, très fort, et, bien, je
voulais les remercier.
Donc, la commission ajourne ses travaux
jusqu'à jeudi 1er avril, après les affaires courantes, où elle poursuivra
son mandat. Merci.
(Fin de la séance à 17 h 14)