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Version finale

42e législature, 1re session
(27 novembre 2018 au 13 octobre 2021)

Le mercredi 14 août 2019 - Vol. 45 N° 32

Consultation générale et auditions publiques sur le cahier de consultation intitulé « La planification de l'immigration au Québec pour la période 2020-2022 »


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Table des matières

Auditions (suite)

Corporation des concessionnaires d'automobiles du Québec inc. (CCAQ)

Olymel SEC

Centre multiethnique de Québec inc. (CMQ)

Fédération des chambres de commerce du Québec (FCCQ)

Accueil liaison pour arrivants (ALPA)

M. Thomas Tsukalas

M. André Sirois

Chambre de commerce du Montréal métropolitain (CCMM)

Ordre des conseillers en ressources humaines agréés (Ordre des CRHA)

Québec International

Autres intervenants

Mme MarieChantal Chassé, présidente

M. Luc Provençal, président suppléant

M. Simon Jolin-Barrette

M. François Jacques

M. Simon Allaire

M. Monsef Derraji

M. Andrés Fontecilla

Mme Méganne Perry Mélançon

Mme Stéphanie Lachance

Mme Paule Robitaille

Mme Lucie Lecours

Mme Marilyne Picard

*          M. Robert Poëti, CCAQ

*          Mme Lucie Allard, idem

*          M. Paul Beauchamp, Olymel SEC

*          M. Louis Banville, idem

*          Mme Isabelle Leblond, idem

*          Mme Corinne Béguerie, CMQ

*          Mme Dominique Lachance, idem

*          Mme Natacha Battisti, idem

*          Mme Kathy Megyery, FCCQ

*          M. Alexandre Gagnon, idem

*          M. Michel Cournoyer, idem

*          M. René Fréchette, ALPA

*          M. Éric Mallette, idem

*          M. Michel Leblanc, CCMM

*          M. Philippe de Villers, Ordre des CRHA

*          Mme Chantal Teasdale, idem

*          M. Jean-Philippe Brunet, idem

*          M. Carl Viel, Québec International

*          Mme Sara Tapia, idem

*          M. Geoffroy Tremblay, idem

*          Témoins interrogés par les membres de la commission

Journal des débats

(Neuf heures trente-deux minutes)

La Présidente (Mme Chassé) : Et je constate le quorum. Je déclare la séance de la Commission des relations avec les citoyens ouverte et je vous souhaite la bienvenue. Je demande à tous de fermer la sonnerie et la vibration de leurs appareils électroniques.

La commission est réunie aujourd'hui afin de poursuivre la consultation générale et les auditions publiques sur le cahier de consultation intitulé La planification de l'immigration au Québec pour la période 2020‑2022.

M. le secrétaire, y a-t-il des remplacements?

Le Secrétaire : Oui, Mme la Présidente. M. Lévesque (Chauveau) est remplacé par Mme Picard (Soulanges); M. Poulin (Beauce-Sud) est remplacé par M. Allaire (Maskinongé); M. Skeete (Sainte-Rose) est remplacé par M. Provençal (Beauce-Nord); M. Birnbaum (D'Arcy-McGee) est remplacé par M. Derraji (Nelligan); Mme Dorion (Taschereau) est remplacée par M. Fontecilla (Laurier-Dorion); et M. LeBel (Rimouski) est remplacé par Mme Perry Mélançon (Gaspé).

Auditions (suite)

La Présidente (Mme Chassé) : Je vous remercie. Ce matin, nous entendrons les organismes suivants : la Corporation des concessionnaires d'automobiles du Québec, Olymel SEC, le Centre multiethnique de Québec et la Fédération des chambres de commerce du Québec.

Je souhaite donc la bienvenue aux représentants de la Corporation des concessionnaires d'automobiles du Québec. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé. À une minute de la fin, je vais vous faire un signe soit de la main... si vous ne le voyez pas, je vais vous le dire vocalement, et ensuite nous procéderons à la période d'échange avec les membres de la commission. Je vous invite à tout d'abord vous présenter puis à poursuivre votre exposé.

Corporation des concessionnaires d'automobiles du Québec inc. (CCAQ)

M. Poëti (Robert) : Merci, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Chassé) : Merci à vous.

M. Poëti (Robert) : M. le ministre, Mmes et MM. les députés, mon nom est Robert Poëti, je représente la Corporation des concessionnaires automobiles du Québec, je suis président-directeur général. Je suis accompagné de Lucie Allard, qui travaille avec nous comme conseillère en ressources humaines et responsable des dossiers en recrutement international à la corporation avec moi.

Je sais par expérience — et pour moi, c'est un moment particulier d'être ici ce matin, cette fois-ci de l'autre côté de la table — que l'objectif de ces commissions est d'entendre d'autres points de vue, ceux du terrain souvent, et d'avoir une ouverture et des suggestions ou des commentaires constructifs, évidemment, qui contribueraient à bonifier l'intention gouvernementale dans le domaine... en matière d'immigration.

Mais, avant tout, qui sommes-nous, la Corporation des concessionnaires automobiles du Québec? Nous sommes 884 concessionnaires au Québec avec un taux d'adhésion volontaire de membres à 99 %. Les membres de la corporation représentent la deuxième force économique du Québec, la plus importante après le secteur de la construction, en employant collectivement près de 40 000 salariés dans toutes les régions du Québec. De Percé à Rouyn-Noranda, de Sept-Îles à Tremblant, de Trois-Rivières à Thetford Mines, de l'Estrie à l'Outaouais, de Drummondville à Charlevoix, de la Mauricie à Chicoutimi, bref, dans chacune... villes du Québec, vous avez des concessionnaires automobiles.

Nous générons une activité économique de plus de 20 milliards de dollars annuellement. Par ailleurs, les concessions représentent des investissements majeurs en terrains et bâtisses, soit plus de 3 milliards de dollars en évaluation foncière, générant ainsi près de 200 millions de dollars annuellement en entrées de taxes municipales dans la grande majorité des villes et municipalités. Au Québec, vous croiserez des concessionnaires automobiles sur tout le territoire, au service des consommateurs dans leurs besoins de déplacement pour le plaisir, pour le travail pour la livraison de biens essentiels, pour la famille, pour la liberté, pour les vacances et, en terminant, toujours en contribuant directement à l'essor économique québécois. En bref, l'industrie automobile est indéniablement une industrie structurante pour le Québec et ses régions.

La corporation est active et impliquée dans de très nombreux projets reliés au développement de la main-d'oeuvre ainsi que l'attraction des jeunes dans notre industrie. Notre relève de gestion des concessionnaires est formée de jeunes femmes, de jeunes hommes d'affaires scolarisés et fortement axée sur l'évolution de l'industrie et des besoins des citoyens en matière de transport. En matière de recrutement international et d'immigration, la corporation est partenaire avec ImmigrEmploi, une firme privée reconnue, professionnelle et experte dans le domaine du recrutement international. Nous le savons tous, le Québec vit une pénurie de main-d'oeuvre importante. Nous connaissons le taux de chômage maintenant historique depuis quelques mois, et rien n'annonce un changement de tendance à court terme, en fait, peut-être tout au contraire. En tant que deuxième force économique du Québec, le secteur de l'automobile, du camion lourd et de la carrosserie est également atteint par cette pénurie de main-d'oeuvre.

Au début de 2018, la corporation a été interpelée par ses membres, qui vivaient des enjeux importants de main-d'oeuvre et d'une situation difficile face à la réglementation en matière de recrutement international. Dans un contexte de pénurie de main-d'oeuvre, la corporation souhaite donc aider ses membres de façon proactive en positionnant l'ensemble de l'industrie automobile de manière avantageuse, et ce, sur la scène internationale. À ce jour, la corporation a déjà mené à bien cinq missions de recrutement international en Tunisie et au Maroc. Une sixième mission, à laquelle je participerai avec Mme Allard à mes côtés, est prévue au Maroc dans quelques semaines. Le projet exploratoire a permis de recruter 115 travailleurs qualifiés au cours de la dernière année. À titre d'exemple : quatre en Outaouais, huit en Abitibi, trois à Thetford Mines, 10 en Beauce, cinq à Lévis, quatre à Sept-Îles, un à Chibougamau, pour ne nommer que ceux-ci.

Au terme de ce projet exploratoire, la corporation a déterminé que la meilleure option pour ses membres était de développer un processus complet et sur mesure de recrutement international, d'immigration, d'accueil et surtout d'intégration. Nous avons donc fait le constat constructivement que le processus pourrait être complété par de meilleures structures d'accueil et d'intégration. Nous nous réjouissons... en fait, on est contents des récentes annonces ministérielles dans le domaine de l'accompagnement et de cibler plus précisément les régions où un manque de ressources ou une méconnaissance peut-être réelle des ressources est ressentie. Qui fait quoi? Qui est responsable de quoi? Qui assure le suivi global d'un dossier pour un immigrant?

Notre première recommandation : favoriser des processus et des structures d'accueil à l'échelle de la province. La Corporation des concessionnaires automobiles croit que le succès d'une intégration réussie débute avant tout dès la sélection d'un travailleur étranger. Nous avons également une préoccupation à ce que les services dispensés soient de qualité, encadrés et effectués selon des normes élevées. Sur le terrain, il existe une multitude de ressources disponibles, concentrées souvent à Québec et Montréal, parfois au détriment des régions, d'une certaine façon. Il est difficile pour une entreprise ou un immigrant d'identifier les ressources disponibles et surtout d'en évaluer la qualité et la crédibilité. Une confusion et parfois une perte d'efficacité peuvent en découler.

Les ressources et organismes subventionnés ou recommandés par le MIDI devraient être répertoriés afin de pouvoir répondre adéquatement aux besoins des travailleurs et des entreprises. Nous proposons que le MIDI développe un guichet unique. Le métier de débosseleur-peintre devrait être aussi placé sur la liste de pénurie de main-d'oeuvre, liste de traitement simplifiée pour l'immigration. Les travailleurs étrangers temporaires qui arrivent dans le secteur de l'automobile ont, pour la très large majorité, le même objectif : l'objectif de présenter une demande de résidence permanente. Il serait pertinent d'ouvrir les portes à l'immigration, la faciliter pour des métiers moins qualifiés, mais pour lesquels les entreprises offrent de la formation à l'interne, à titre d'exemple : préposé à l'esthétique. En mission de recrutement à ce jour, nous avons concentré nos efforts sur le métier de débosselage.

• (9 h 40) •

Notre deuxième recommandation : rendre les programmes gouvernementaux accessibles aux travailleurs temporaires. Bien que la corporation s'assure que ses processus de recrutement internationaux lui permettent de sélectionner des candidats extrêmement compétents et qualifiés, il n'en demeure pas moins que ceux-ci ont des besoins dès leur arrivée au Québec. Un travailleur étranger qualifié performant dans son pays d'origine aura besoin d'une formation pour lui permettre une adéquation sur le marché nord-américain. Les travailleurs doivent suivre plusieurs formations afin de leur permettre de répondre aux requis de l'industrie. L'employeur investit un montant considérable en formation pour assurer l'adéquation au marché du travail nord-américain. Nous proposons que des programmes de subvention soient mis sur pied pour aider les entreprises, notamment en incluant les travailleurs temporaires dans le programme PRIIME.

D'autre part, dans l'ensemble de l'industrie, les travailleurs sont les propriétaires de leur coffre d'outils, à titre d'exemple, ce qui nécessite un investissement de plusieurs milliers de dollars, une somme considérable pour un nouvel arrivant. Nous souhaitons que des mesures soient implantées pour permettre l'intégration professionnelle sur tous les aspects incluant les programmes de subvention ou un allègement des avantages imposables.

En conclusion, notre première recommandation est de favoriser des processus de structures d'accueil à l'échelle de la province. Notre deuxième recommandation : rendre les programmes gouvernementaux accessibles aux travailleurs temporaires.

Nous proposons donc que le MIDI développe un guichet unique comprenant l'ensemble des organismes et ressources subventionnés ou simplement recommandés par le MIDI. Le programme PRIIME n'est pas admissible aux travailleurs et aux entreprises qui ont utilisé le Programme des travailleurs étrangers temporaires, comme c'est le cas pour l'ensemble des membres de la Corporation des concessionnaires. Nous recommandons donc que le programme PRIIME soit élargi et que des ressources pour appuyer les employeurs et les nouveaux arrivants dans le cadre du Programme des travailleurs étrangers temporaires soient mises en place.

Nous tenons d'ailleurs à souligner que l'équipe du MIDI fait un excellent travail et nous aide énormément, globalement, dans nos démarches, qui, à ce jour, se sont avérées vraiment positives. Nous les en remercions. Nos actions se veulent structurantes et innovatrices en matière de recrutement international, d'accueil et d'intégration. Nous travaillons et nous travaillerons dans le respect des lois et des individus pour le bien collectif de nos membres concessionnaires et de l'industrie de l'automobile et pour le développement économique du Québec en collaboration avec toutes les instances de gouvernement qui encadrent l'exercice d'immigration. Merci de votre attention.

La Présidente (Mme Chassé) : Merci à vous, M. Poëti, pour votre exposé. Et nous allons débuter la période d'échange. M. le ministre, la parole est à vous pour un bloc d'échange avec le parti formant le gouvernement de 16 min 30 s.

M. Jolin-Barrette : Merci, Mme la Présidente. M. Poëti et Mme Allard, bonjour, merci d'être présents. C'est un plaisir de vous retrouver, M. Poëti, en commission parlementaire. Auparavant, on disait «M. le député de Marguerite-Bourgeoys», alors enfin je peux vous appeler par votre vrai nom, comme on dit. Mais c'est un plaisir de vous retrouver ici, à l'Assemblée, d'autant plus que vous avez donné plusieurs années de votre vie au service public, entre 2012 et 2018, notamment comme ministre des Transports, comme ministre délégué à l'Intégrité des marchés publics aussi. Alors, je tiens à vous remercier au nom des Québécois pour lesquels vous avez fait du service public au cours des années.

Écoutez, d'entrée de jeu, lorsque vous parlez du programme PRIIME, ce que vous nous dites, c'est que vous souhaiteriez que les travailleurs temporaires puissent en bénéficier... bien, en fait, que les employeurs puissent bénéficier de ce programme-là pour faire en sorte que, pendant que les gens sont en situation temporaire ici, les employeurs en bénéficient.

M. Poëti (Robert) : Exactement. Dans certains cas, et j'ai donné quelques exemples, ne serait-ce que sur le coffre d'outils, qui est un investissement souvent de 5 000 $, 8 000 $ ou 10 000 $. Il y a des programmes qui existent dans PRIIME qui permettent et avantagent, évidemment, les immigrants, mais parce que nous sommes dans l'autre programme, ça ne peut s'appliquer à nous. Et, d'une certaine façon, ces immigrants-là, ces personnes-là, dans le programme, sont lésés, et ce n'est pas toujours facile. Donc, on se demandait s'il y avait une possibilité de communication, de travailler ensemble pour permettre, justement, de standardiser... et je ne veux pas appeler ça des avantages, mais des moyens facilitants pour l'intégration de ces gens-là qui arrivent ici.

M. Jolin-Barrette : O.K. Juste si on revient, là, sur la Corporation des concessionnaires, là, vous avez, dans le fond, les concessionnaires qui vendent des véhicules neufs, mais vous avez aussi des concessionnaires qui vendent des véhicules usagés chez vous. Je voyais aussi le réseau CarrXpert, qui fait partie de la corporation aussi.

M. Poëti (Robert) : Oui, complètement. En fait, au Québec, pour l'information globale, il se vend 600 000 véhicules automobiles par année : 400 000 véhicules neufs, toutes marques confondues — vous comprenez que je les aime toutes parce que je les représente au complet — et 200 000 véhicules usagés également. La corporation a quatre boîtes sous elle. Donc, la corporation est un organisme à but non lucratif, et il y a quand même des entreprises sous la corporation, dont CarrXpert, qui regroupe près de 200 ateliers de débosselage au Québec, souvent qui appartiennent à des concessionnaires, évidemment, ou en lien directement avec les concessionnaires. Donc, pour nous, le besoin de main-d'oeuvre dans les débosseleurs était criant et important, donc on a commencé à cibler ce milieu-là.

M. Jolin-Barrette : O.K. Et vous disiez, bon : On a fait cinq missions à l'étranger déjà, on va y aller pour une sixième mission. Les gens que vous avez réussi à recruter, je pense, au nombre de 115 travailleurs qualifiés, vous les avez recrutés à titre de travailleurs temporaires ou à titre d'immigrants permanents?

M. Poëti (Robert) : Travailleurs temporaires. L'ensemble de nos démarches sont pour les travailleurs temporaires. D'ailleurs, je veux souligner ici, parce que parfois les gens ne le savent pas, mais dans notre cas, évidemment, j'ai eu le privilège de travailler avec vous ici, il y a des représentants des maisons du Québec partout à travers le monde. Et, lorsque je suis arrivé, Lucie était déjà au dossier, et on a communiqué avec ces gens-là. Donc, on a un appui d'employés du gouvernement, en fait, qui représentent le Québec au Maroc et à d'autres endroits qui nous ont aidés dans ce domaine-là. Donc, évidemment, l'utilisation des ressources gouvernementales, des programmes qui sont en place... mais effectivement le fait que nous travaillons sur une base temporaire, sachant que la majorité de ces personnes-là vont faire une demande de résident permanent dans l'année qui suit.

M. Jolin-Barrette : Parce que je comprends que l'objectif pour la corporation, c'est que, quand vous faites des missions à l'étranger, vous dites : Bien, écoutez, nous, on va utiliser le recours aux travailleurs temporaires parce qu'ils peuvent venir beaucoup plus rapidement. Là, j'imagine, ils ont été admis dans le cadre du Programme des travailleurs étrangers temporaires.

M. Poëti (Robert) : Oui.

M. Jolin-Barrette : O.K. Donc, on souhaite qu'ils viennent rapidement pour combler les besoins du marché du travail, mais par la suite les employeurs que vous représentez vont tout faire pour les accompagner dans le processus de permanentisation pour qu'ils puissent demeurer au Québec. Vous, l'objectif que vous avez quand vous allez en mission à l'étranger, vous offrez des emplois, mais vous dites... vous voulez qu'ils demeurent au Québec aussi, même s'ils passent par les travailleurs temporaires dans un premier temps.

M. Poëti (Robert) : Complètement. Et où on se rejoint facilement dans les politiques gouvernementales avec la corporation, c'est que le Québec est grand, et, je le disais tantôt, et mon laïus n'était pas un laïus de publicité, mais pour bien réaliser à quel point l'ensemble des concessionnaires se retrouvent partout au Québec, si vous allez à Sept-Îles, vous passez la rue principale, vous allez en avoir cinq qui sont en ligne. Si vous allez à Baie-Comeau, c'est la même chose, vous allez en Gaspésie... On est allés récemment à Percé, à Matane... Donc, ces gens-là s'installent localement, et l'accompagnement est important pour nous. Et ces gens-là font partie intégrante de la communauté très rapidement, et c'est pour ça que la barrière de la langue... lorsque nous, on travaille directement avec le Maroc ou la Tunisie, ces gens-là parlent français déjà, il n'y a pas de barrière de langue, donc évidemment ça facilite, d'une certaine façon, leur intégration.

Et on fait aussi de la formation, mais on fait aussi de la vérification des compétences. Donc, on se déplace là-bas, à titre d'exemple où on va aller bientôt, dans un endroit où il y a une école pour le débosselage où on fait travailler les gens devant des experts qu'on amène avec nous, évidemment avec la firme privée d'ImmigrEmploi, qui fait un excellent travail, pour s'assurer de la compétence de ces gens-là. Et, lorsque, évidemment, ils sont sélectionnés, ils arrivent ici, il n'y a pas de surprise pour personne, la barrière de la langue est déjà réglée, et la compétence, la formation... Bien, comme on disait tantôt, je donnais l'exemple du coffre d'outils, bien, si un employeur va lui fournir, bien, il va avoir un bénéfice imposable sur le plan de l'impôt, où il y a des choses qui ne sont pas permises dans ce cas-là. Et ces gens-là arrivent ici souvent avec pas beaucoup d'argent en poche et recommencent ou continuent leur vie d'une autre façon au Québec. Mais, oui, notre objectif, c'est qu'ils restent ici et qu'ils restent en région où ils ont été accueillis.

M. Jolin-Barrette : O.K. Et justement, pour ça, vous recommandez, dans votre mémoire, d'avoir des structures d'accueil partout en région. Là, la semaine dernière, j'ai annoncé le Parcours d'accompagnement personnalisé, qui est ouvert à la fois aux travailleurs temporaires ou aux travailleurs permanents justement pour faire en sorte que, dès le départ... bien, en fait, dès l'étranger, la personne qui est sélectionnée puisse bénéficier d'un accompagnement personnalisé. On a annoncé aussi qu'on allait déployer des agents d'aide à l'intégration sur l'ensemble du territoire québécois.

Pour vos employeurs, là, c'est quoi, les besoins, supposons, en structures d'accueil qui sont nécessaires dans les différentes régions du Québec? Tu sais, parce que tout le monde fait sa part, tout le monde doit faire sa part lorsqu'on accueille les nouveaux arrivants, supposons, en région, parce que la personne n'a pas de réseau, parfois elle vient avec sa famille, parfois elle vient seule. Comment est-ce qu'on fait pour s'assurer qu'elle se sente bien intégrée, qu'elle se sente accompagnée? C'est quoi, les besoins de vos membres?

• (9 h 50) •

M. Poëti (Robert) : Écoutez, dans un premier temps, c'est vraiment de clarifier les ressources, parce que, dans ce domaine-là, et je dois le dire, il y a eu quelques expériences malheureuses de concessionnaires où une entreprise ou une personne s'est dite spécialiste en recrutement international, et évidemment a utilisé le même procédé que nous utilisons avec des gens qui sont arrivés ici qui n'avaient pas les compétences pour effectuer le travail, dans un deuxième temps n'ont pas réussi à apprendre la langue pour pouvoir échanger sur le plan du travail, sur le plan, évidemment, de la résidence aussi, également.

Donc, si on pouvait clarifier les ressources et les identifier, si le MIDI, à certains égards, pouvait nous dire que l'ensemble d'organismes privés qui disent, et que certains le font très bien... d'un accompagnement et d'une intégration, mais ce n'est pas le cas vraiment partout en région, et il y a des gens qui tout d'un coup deviennent des spécialistes en immigration ou en intégration, c'est faux. Et les villes veulent s'impliquer, mais ne savent pas toujours avec qui pouvoir travailler et comment regrouper ces compétences-là. Alors, je pense que ce volet-là d'identifier les ressources que j'appellerai autorisées, peut-être que le terme est mauvais, mais reconnues minimalement par le MIDI aiderait les concessionnaires et tout le monde à ne pas faire d'erreur et de perdre du temps.

Parce qu'on sait que le processus est quand même assez long, et c'est normal, mais, lorsqu'on arrive au bout d'un processus et qu'on n'a pas suivi les règles en place, on a fait affaire avec une entreprise qui, malheureusement, ne connaissait pas les lois ou les règlements, bien, on repart à zéro. Et ça, certains concessionnaires l'ont vécu avant, évidemment, que Mme Allard prenne en charge le dossier et que la corporation travaille avec une firme privée spécialisée, et là, à partir de là, on évite ces problèmes-là. Mais, si on arrive à Baie-Comeau, à Sept-Îles ou à Gaspé, si on regarde les organismes qui reçoivent des subventions gouvernementales pour aider l'intégration à l'immigration, parfois on a des déceptions et on ne sait pas si cet organisme-là travaille directement avec vous.

M. Jolin-Barrette : O.K. Et puis, pour les concessionnaires, là, qui ont fait partie des missions de recrutement puis qui ont vu la venue des 115 travailleurs, là, en moyenne, combien de temps ça a pris? Savez-vous combien de temps ça a pris entre le moment où ils sont allés en mission entamer leurs premières démarches et la venue du travailleur dans leur entreprise en moyenne? Avez-vous une idée?

M. Poëti (Robert) : Si vous me permettez, je vais laisser Mme Allard pouvoir y répondre parce que ça fait plus longtemps que moi qu'elle est au dossier et elle travaille énormément dans ce dossier-là. Je vais la laisser répondre.

Mme Allard (Lucie) : On parle en moyenne huit à neuf mois pour les démarches d'immigration au complet.

M. Jolin-Barrette : Lorsque ça se solde par un succès, donc, pour la venue du travailleur durant huit mois d'attente.

Mme Allard (Lucie) : Oui.

M. Jolin-Barrette : Puis dans l'industrie, dans votre industrie, il y a des besoins... bien, en fait, combien d'employés vous avez de besoin au cours des prochaines années?

Mme Allard (Lucie) : C'est difficile pour nous de chiffrer exactement la demande, mais c'est vraiment en fonction de la population, des départs à la retraite, etc.

M. Poëti (Robert) : Le nombre est important parce que, quand on a reçu cet appel de nos concessionnaires, nous leur offrons des services pour faciliter, évidemment, leur travail et l'industrie, et ce manque criant là se faisait surtout en région. Parfois, c'est peut-être un peu plus facile dans les grands centres, donc Montréal et Québec souvent, mais pas en région. Et, à partir de là, je suis obligé de vous dire qu'effectivement les gens qui quittent à la retraite sont évidemment ces gens-là qu'il faut remplacer, et là le manque de main-d'oeuvre nous permet difficilement de pouvoir combler ces postes-là.

Donc, vous savez, c'est 40 000 emplois au Québec, l'industrie. Donc, évidemment, on a ciblé, actuellement, pour faire un test, un genre de projet pilote qui fonctionne très bien, puis je dois l'avouer, avec beaucoup de travail, beaucoup d'énergie, on l'a ciblé à l'industrie du débosselage, parce qu'on a 200 bannières... en fait, on a une seule bannière, mais plus ou moins 200 groupes qui sont là, et eux, ils ont levé la main rapidement.

Donc, donner un chiffre, c'est un peu difficile. Mais actuellement, des 115 qu'on a recrutés, il n'y a personne qui est en attente de trouver un poste, là. Lorsqu'on rencontre ces gens-là, qu'on les qualifie, qu'on s'assure, évidemment, de leur capacité au travail, qu'ils répondent aux normes gouvernementales, lois et règlements, bien, à ce moment-là, c'est assez facile de pouvoir les placer. Et notre liste est très courte. En fait, on n'a pas de liste d'attente des gens qu'on a réussi à amener ici, au Québec, pour travailler.

M. Jolin-Barrette : Je vous remercie grandement pour la présentation du mémoire. Je sais que j'ai des collègues qui veulent poser des questions. Merci.

La Présidente (Mme Chassé) : Oui, alors j'invite le député de Mégantic à prendre la parole. Allez-y, il vous reste quatre minutes au bloc d'échange.

M. Jacques : Merci, Mme la Présidente. Bien, merci, M. Poëti, Mme Allard. Je voudrais revenir, là, sur la pénurie de main-d'oeuvre. Je sais que notre collègue le ministre du Travail et de la Solidarité sociale a fait une annonce, là, pour aider le secteur automobile dans le recrutement de main-d'oeuvre. Présentement, combien il y a de manque d'employés, là, dans votre secteur, à court terme, là?

M. Poëti (Robert) : Je vais vous donner le chiffre exact. Vas-y, Lucie.

Mme Allard (Lucie) : On parle d'environ 80 % de nos membres qui vivent des enjeux majeurs de recrutement.

M. Jacques : O.K. Donc, 80 %, ce qui peut représenter 1 000 emplois, 500 emplois?

M. Poëti (Robert) : Bien, écoutez, tu sais, tantôt on parlait de 40 000 emplois, global, donc, évidemment, des emplois directs. Mais je vous ai dit d'emblée que nous avons commencé doucement nos démarches, donc on a ciblé un secteur particulier qui était, évidemment, le débosselage. Et forts de l'expertise qu'on développe avec les gens sur le terrain, ça va nous permettre d'aller un peu plus loin. Évidemment, on vise la mécanique, on vise, évidemment, tous les secteurs puis on demande aussi également que... Vous savez, pour des métiers moins... je vous dirai, qui nécessitent une formation un peu différente, lorsqu'on parle d'esthétique, bien, ces gens-là, il y a de la formation à l'interne qui se fait, donc ces gens-là pourraient très bien travailler ici. Donc, c'est sûr qu'on veut se retrouver sur cette liste-là, au niveau du débosselage. Mais c'est difficile de donner un chiffre parce que les années qui viennent vont nous démontrer qu'on a eu raison, l'année dernière, de commencer tout de suite à faire nos devoirs, si vous me permettez l'expression, à comprendre le rouage, de parler avec nos représentants du Québec à l'étranger.

Et l'autre chose aussi, c'est — et ça, c'est dans un autre domaine, mais je veux le souligner quand même — valoriser les emplois dans l'industrie de l'automobile, qui est importante, dans nos écoles. Et au Québec, nos écoles de formation dans ce domaine-là, je pourrais dire, ne sont peut-être pas tout à fait à jour. Lorsqu'on pense au milieu électrique, le domaine électrique, évidemment, qui est en croissance, ce sont les constructeurs qui offrent les formations dans les concessionnaires et non les écoles du Québec, qui ont encore, quelques-unes, un programme ou deux, mais, honnêtement et en tout respect, ne correspond absolument pas aux besoins actuels de l'évolution du marché sur le plan de l'électricité.

Donc, c'est dur de vous donner un chiffre, mais il est important. En fait, ce que je pourrais vous dire, c'est : Chaque personne qui vient au Québec dans un programme d'immigration a un emploi.

M. Jacques : Parfait. Vous avez mentionné, dans votre mémoire, que vous avez mis sur pied des comités pour l'étude sectorielle sur les besoins du marché du travail dans votre domaine. Quels étaient les objectifs de mettre ce projet-là sur pied, les comités? Puis de quelle façon vous l'avez fait... en fait, de quelle façon vous avez formé ces comités-là?

Mme Allard (Lucie) : C'est une initiative qui vient des comités sectoriels de main-d'oeuvre, auxquels nous participons activement. Et le comité sectoriel de main-d'oeuvre, en ouvrant notre réseau, on leur a donné accès à tout l'ensemble des secteurs, notamment au niveau de la pose de pneus, puis tous les métiers qui ont des secteurs influencés par la saisonnalité des métiers, et les travaux sont en cours en ce moment.

M. Jacques : Parfait. Donc, vous n'avez pas de conclusions, présentement...

Mme Allard (Lucie) : Non.

M. Jacques : ...vu que vous êtes en travail.

Mme Allard (Lucie) : Oui.

La Présidente (Mme Chassé) : Il vous reste une minute au bloc d'échange. Oui? Le député de...

M. Allaire : Maskinongé.

La Présidente (Mme Chassé) : Maskinongé, allez-y.

M. Allaire : Merci, Mme la Présidente. Alors, bien, bravo pour votre exposé! Rapidement, vous en avez parlé dans votre mémoire, mais aussi vous l'avez effleuré tantôt, il y a une confusion avec les acteurs, là, de première ligne en accompagnement sur le terrain. C'est quoi, le profil parfait, là, qui serait en mesure de mieux accompagner, là, les entrepreneurs ou les concessionnaires, là?

M. Poëti (Robert) : Bien, écoutez, peut-être juste en préambule, parce qu'évidemment j'ai des amis qui sont proches de moi, c'est 3 200 postes à pourvoir à l'échelle canadienne aujourd'hui dans l'industrie de l'automobile. Alors, pour revenir à votre question, le profil parfait, vous me parlez de celui gouvernemental, en fait?

M. Allaire : Oui.

M. Poëti (Robert) : Le profil parfait, c'est l'arrimage à travers les différents programmes, comme on vous l'a dit.

La Présidente (Mme Chassé) : En terminant.

M. Poëti (Robert) : Donc, c'est-à-dire que les programmes puissent être communicants. Ce qui est utile pour un travailleur temporaire...

La Présidente (Mme Chassé) : Ça conclut l'échange. Vous aurez l'occasion de poursuivre peut-être avec le porte-parole de l'opposition officielle. Je vous cède la parole, M. le député de Nelligan, pour un bloc d'échange de 11 minutes.

M. Derraji : Merci, Mme la Présidente. Très content de vous revoir, cette fois-ci en commission parlementaire, M. Poëti, et, Mme Allard, bienvenue. Merci pour votre excellent rapport et votre point de vue par rapport à une industrie, probablement, que... ça mérite d'être plus connu, surtout par rapport à ces enjeux. Et merci de venir, parce que nous avons entendu pas mal de groupes, et aujourd'hui un autre secteur d'activité très important pour l'économie régionale du Québec vient aussi sonner une... nous informer de ses préoccupations.

Ma première question : Le fait de penser à aller à ImmigrEmploi — c'est ça, la compagnie? — ...

M. Poëti (Robert) : Oui.

• (10 heures) •

M. Derraji : ...c'est parce que vous avez tout essayé au Québec? Aucune formation n'est disponible? Aucun besoin ne répond, au niveau des régions? C'est quoi, l'élément déclencheur de cet appel à cette compagnie?

Mme Allard (Lucie) : On ne veut pas nous prétendre spécialistes de la solution, mais on croit vraiment que c'est un ensemble de solutions et on est activement impliqués dans plusieurs autres initiatives visant à faire rayonner les métiers, de faire venir les jeunes dans notre industrie. Donc, on ne prétend pas que l'immigration est la seule et unique solution.

M. Derraji : Non, je comprends, mais ma question, c'est plus : Avez-vous eu des discussions avec, par exemple, le ministère de l'Emploi, le ministère de l'Éducation? Parce que, là, si ça continue comme ça... Je pense au rythme des missions. C'est très bien. D'ailleurs, je vous souhaite une excellente mission au Maroc, que j'aime beaucoup, hein? Je vous invite à aller à Marrakech, qui est ma ville natale. Mais au rythme... Vous allez partir régulièrement en mission d'exploration, mais quand même, c'est des solutions très... c'est très court terme, là, si on... C'est quoi, votre point de vue par rapport à ça?

M. Poëti (Robert) : Oui, bien, vous avez raison. On a répondu rapidement à un besoin criant de l'industrie. La façon la plus rapide était celle qu'on a décidé de faire, c'est-à-dire travailler en collaboration avec les spécialistes en immigration. Mme Allard l'a bien spécifié, on ne se prétend pas être des spécialistes d'immigration. Nous sommes là pour offrir des services aux concessionnaires et le faire de façon, je vous dirai, légale, dans les règles de l'art, à un niveau de qualité, à un niveau aussi de service impeccable.

On a connu, je dirai, malheureusement ou heureusement, on a vu, dans la province, certaines entreprises et certains concessionnaires utiliser parfois des gens se disant des experts dans le domaine et qui ont commis des erreurs assez importantes qu'il y a eu des conséquences négatives sur l'exercice du recrutement. Donc, nous avons sélectionné, pour nous, celle qui répondait le mieux à nos besoins, cette firme-là, d'ImmigrEmploi, qui sont des spécialistes de ça. Ça, c'est une réponse immédiate, bien que les délais sont relativement longs, si on parle de huit à neuf mois, mais relativement courts lorsque vous n'avez personne à attendre, vous n'avez pas de C.V. qui arrivent.

Vous avez tout à fait raison de dire que notre première réponse en est une d'urgence, mais la deuxième en sera une, évidemment, d'éducation, de formation, et aussi de demander, évidemment, au ministère de l'Éducation. Et je disais tantôt, je donnais l'exemple... Et tout le monde est d'accord au développement de l'électricité, donc des véhicules de plus en plus électriques, mais en même temps si vous voulez avoir une formation au Québec, actuellement, à la hauteur d'où nous sommes rendus, il n'y en a pas.

M. Derraji : Oui, bien, justement, le processus, et vous le comprenez, je ne vous apprends rien, M. Poëti, c'est que le ministre, il est en consultation, il est en mode écoute. Au fait, je pense que le moment est opportun de dire : Écoutez, oui, il y a l'immigration, notre corporation, pour pallier au besoin de main-d'oeuvre court terme, on fait nos missions, mais à votre place, je vais inviter le ministère et le ministre à inclure l'Éducation, à inclure le ministère de l'Emploi parce que sinon ça va être un problème récurrent, et vous serez obligés d'aller toujours faire des missions. Au fait, c'est ça, le but de ma question, c'est que... voir la solution beaucoup plus globale. Oui, l'immigration, mais aussi l'éducation et la formation continue.

L'autre question que j'ai, vous avez mentionné 115 travailleurs, huit à neuf mois pour venir, et votre choix a été guidé par le temps. Ça veut dire que, quand vous regardez les programmes que vous avez devant vous, le seul programme qui vous permet d'avoir un travailleur qualifié qui répond aux besoins du marché rapidement, c'est le programme temporaire. Est-ce que j'ai bien compris? J'ai compris...

M. Poëti (Robert) : Bien, en fait, dans un premier temps, pour répondre juste à la fin de votre question précédente, on avait un problème de démographie aussi. Vous savez, c'est beaucoup plus difficile de trouver des jeunes ou des gens en Gaspésie. J'en arrive, de la Gaspésie, visiter des concessionnaires. C'est des gens exceptionnels qui travaillent fort, mais la rétention du personnel... Lorsqu'il y a un des propriétaires, là-bas, d'un débosseleur, il a décidé de prendre sa retraite, il prend sa retraite, il n'a pas de remplaçant à l'intérieur qui veut le faire. Donc, la démographie est un problème pour nous. Donc, c'est pour ça qu'on est contents d'entendre que cette préoccupation-là globale touche les régions. Ça, on veut ça.

La deuxième, quel type de programme ou de quelle façon pouvons-nous travailler le plus rapidement possible en situation de crise, parce qu'on l'appelle comme ça, situation difficile où il faut du recrutement? Bien, c'est le choix que nous avons fait nous permettant d'aller chercher des gens là-bas.

Maintenant, je suis tout à fait d'accord avec vous, de dire : L'amalgame de la discussion avec les différents ministères pour mieux faire connaître, nous tentons de le faire. D'ailleurs, on est contents d'être ici pour exprimer... peut-être certaines personnes ont appris des choses sur l'industrie de l'automobile. Les gens disent que c'est une industrie qui est en décroissance. C'est faux, il se vend plus d'automobiles qu'il ne s'en est jamais vendu. Maintenant, les automobiles sont beaucoup plus écologiques, sont beaucoup mieux construites.

Donc, ce que je veux vous dire, c'est que l'industrie est là pour rester. Elle évolue, elle change. Et nous, on regarde ce qui est possible, rapidement, de faire, mais, encore une fois, puis je vais dans votre sens, il faudra valoriser et permettre des cohortes dans les différentes écoles du Québec pour intéresser de jeunes professionnels et aussi des gens de métier à venir travailler avec nous.

M. Derraji : Bien, vous le faites très bien, M. Poëti, et c'est tant mieux, parce que c'est ce qu'on n'arrête pas de dire, c'est que ça prend une solution beaucoup plus globale par rapport à la pénurie de main-d'oeuvre. Nous avons déjà entendu la corvée, mais, si j'ai bien compris, la corvée n'a pas répondu à votre besoin. C'est plus des missions à l'extérieur qui répondent parfaitement à votre besoin.

Je reviens à la question que vous avez soulevée, de huit à neuf mois. Comme vous le savez, il y avait le projet de loi n° 9, l'arrimage, le début d'Arrima. Le but de mettre Arrima, c'est vraiment pour arrimer entre les besoins du marché du travail et les gens qui appliquent à l'intérieur d'Arrima. On nous dit que le délai va être beaucoup plus rapide, donc, on parle d'un délai raisonnable, j'ai cru comprendre, dans les mêmes délais que vous avez mentionnés.

Pour vous, aujourd'hui, là, pour les gens d'affaires et les femmes d'affaires que vous représentez, si je vous dis qu'Arrima va répondre à votre besoin dans un temps qui est raisonnable ou bien continuer à faire les missions et avoir des travailleurs temporaires, pour votre industrie, ça serait quoi, la meilleure solution?

M. Poëti (Robert) : Bien, pour notre industrie, la meilleure solution sera celle qui nous permettra de pouvoir travailler directement avec les différents pays qui répondent à nos besoins, avec les différents immigrants qui ont un intérêt à venir à Québec, et nous aussi, de les intéresser à Québec.

Vous savez, les processus gouvernementaux, et j'en ai connu quelques-uns, sont là, en fait, pour améliorer les choses. Et moi, à l'intérieur des différents programmes, je ne vais pas faire un choix direct, mais nous allons utiliser le véhicule le plus facilitant pour nous et le plus efficace pour nous pour donner aux concessionnaires, à nos membres un service en immigration qui leur permettra d'avoir quelqu'un, demain matin, assis dans leur atelier, dans leur garage, dans leur mécanique pour pouvoir faire le travail.

M. Derraji : Mais, si Arrima répond à votre besoin, avec tout ce qui a été dit au projet de loi n° 9 et la mise en place d'Arrima dans un temps... et avoir des immigrants permanents, parce que vous avez soulevé la démographie — je reviens à ça par la suite — l'enjeu de la démographie, ça ne prend pas du temporaire, ça prend du permanent. Donc, entre la permanence et qui répond à votre besoin, via la plateforme Arrima ou par le temporaire, ça serait quoi, votre choix?

M. Poëti (Robert) : Écoutez, moi, mon choix... puis ce n'est pas que je ne veux pas vous donner un choix, pour moi, c'est l'agilité qui est importante, de quelle façon on peut être assez agiles pour être capables de répondre. Donc, s'il y a un programme, que ce soit Arrima... ou des modifications au projet de loi nous permettraient d'être plus rapides ou, en tout cas, de bien répondre à notre besoin, bien, nous, on est partants. On investit beaucoup de temps et d'argent pour ça, on fait notre part. Je vous le dis sérieusement, nos concessionnaires font leur part, investissent dans ça.

Mais ce que je vous dis, c'est qu'on s'est réjouis d'entendre des changements sur le plan régional. Pour nous, c'était une problématique, je dois vous le dire. Le Québec est grand, et nous sommes partout. Maintenant, si Arrima ou un autre type de programme amélioré répond, comme ils le font actuellement, mieux ou plus rapidement, c'est sûr qu'on sera de la partie.

M. Derraji : Bien, justement, et vous comprenez mieux aussi le langage du monde des affaires, l'incertitude, c'est l'ennemi numéro un. La permanence, avoir quelqu'un qui va rester, je vais investir dans sa formation, je vais investir dans sa francisation, ça ne m'intéresse pas qu'il quitte le Québec ou qu'il quitte ma région. En fait, c'est ça, mon point que je veux ramener.

Vous avez évoqué la démographie qui touche les régions, c'est un fait. Vous venez d'arriver de la Gaspésie. J'en suis sûr et certain que plusieurs collègues qui ont voyagé au Québec le voient. Que pensez-vous des seuils proposés par le gouvernement caquiste?

M. Poëti (Robert) : Bien, écoutez, moi, ce que j'ai compris du message gouvernemental, et nous avons fait cette réflexion-là dès mon arrivée avec Lucie...

La Présidente (Mme Chassé) : Simplement vous mentionner qu'il reste une minute au bloc. Allez-y.

• (10 h 10) •

M. Poëti (Robert) : ...et nous avons fait cette analyse-là, et ce que nous, on a compris du message gouvernemental, c'est qu'on veut des immigrants qui viennent travailler ici et qui soient prêts à travailler lorsqu'ils arrivent. C'est ce que nous offrons, parce que nous nous déplaçons pour vérifier les compétences. Nous avons déjà été dans des régions où la langue n'est pas un enjeu, parce qu'il s'agit maintenant... Et on n'est pas contre que les gens apprennent le français. Éventuellement, on va y arriver. Mais, à court terme, pour nous, c'était la solution la plus rapide, c'est celle qu'on a décidé de prendre.

Et ce que je comprends du message gouvernemental, on veut que, lorsque des immigrants viennent au Québec, ils soient, évidemment, suivis, ils soient... l'intégration, que je veux m'exprimer, qu'ils soient bien intégrés et qu'ils aient un emploi dès leur arrivée, et même permettre à la famille, donc souvent sa conjointe et des enfants, de pouvoir s'intégrer rapidement. En région, c'est facile, c'est plus facile, et c'est ce que nous, on offre.

La Présidente (Mme Chassé) : C'est très bien. Ça conclut le bloc d'échange. Je cède maintenant la parole au député de Laurier-Dorion, qui est le porte-parole du deuxième groupe d'opposition, 2 min 45 s. Allez-y.

M. Fontecilla : Mesdames messieurs, bonjour. En ce moment, le Québec n'a pas les compétences, le pouvoir décisionnel en matière des travailleurs temporaires, il faut passer par Ottawa. Et, dans ce sens-là, pour vous, là, quels sont les avantages et les contraintes de l'utilisation accrue d'une main-d'oeuvre qui, à un moment donné, devra partir du pays?

M. Poëti (Robert) : Bien, écoutez, on est au Canada. Je suis un fier Canadien et un fier résident du Québec, un fier Québécois. Mon père est issu de l'immigration, est né en Italie. Alors, ce que je vous dis, c'est que, nous, ce qu'on doit faire et ce qu'on veut faire, c'est travailler avec les deux paliers de gouvernement de façon à répondre exactement aux attentes, aux besoins, aux préoccupations gouvernementales en matière d'immigration, tout ça pour la bonne raison de pouvoir permettre à des gens de venir s'installer au Québec et de ne pas être inquiets sur le plan légal.

Donc, évidemment, un résident temporaire veut devenir un résident permanent. Dans la majorité de nos cas à nous, c'est un automatisme. Ça lui permet d'arriver rapidement, cependant, plus rapidement. Ça lui permet, évidemment, d'évaluer. Et c'est notre responsabilité, comme Québécois, comme industrie, d'être attrayants et de leur fournir ce qu'il leur faut pour s'intégrer au Québec et d'être heureux à Gaspé, à Percé, à Rouyn-Noranda ou en Mauricie. Donc, pour nous, on veut s'assurer que les règles gouvernementales fédérales et provinciales soient bien suivies et que ça ne soit pas une embûche, un mur à l'intégration, où qu'un citoyen nous dirait : Bon, bien, c'est compliqué au Québec, je vais aller en Ontario. On est toujours au Canada, là, à ce que je sache. Ça fait que ce que nous, on se dit, c'est que... soyons attractifs, et c'est ce qu'on veut faire pour les garder ici.

Travailler avec les deux paliers de gouvernement, pour nous, n'est pas un problème. Parfois, c'est plus long, c'est normal. Je comprends, par exemple. C'est cette façon de travailler pour s'assurer qu'on respecte l'ensemble des lois au Québec et au Canada.

La Présidente (Mme Chassé) : ...secondes.

M. Fontecilla : Vous avez parlé d'être attractifs. Qu'est-ce qu'on pourrait faire pour améliorer l'attractivité auprès de la main-d'oeuvre locale de l'industrie de l'automobile?

M. Poëti (Robert) : Bien, localement, aider les municipalités, à travers certains programmes qu'ils ont déjà, à pouvoir investir dans l'intégration, dans le suivi, dans l'amélioration de leur arrivée. Il y a plusieurs municipalités qui, spontanément, le maire ou un organisme local, décident d'aider la famille, les enfants, les écoles.

La Présidente (Mme Chassé) : En conclusion.

M. Poëti (Robert) : Donc, je pense que... un lien entre les différents programmes et les organismes qui aident, de se retrouver ensemble sur une liste claire, et qu'on sait que ces gens-là nous aident.

La Présidente (Mme Chassé) : Très bien, merci. Ça conclut le bloc d'échange. J'invite maintenant la députée de Gaspé à prendre la parole, qui est la porte-parole, justement, du troisième groupe d'opposition. Allez-y.

Mme Perry Mélançon : Merci, Mme la Présidente. Bonjour à vous. Je crois savoir de qui vous parlez quand vous faites mention d'un certain concessionnaire, que je connais bien aussi, et on a eu ces discussions-là. Je connais bien l'industrie automobile, les besoins de main-d'oeuvre. C'est très, très criant chez nous particulièrement.

Alors, je me demandais : Vous avez fait beaucoup de missions économiques via une firme, est-ce que vous croyez que le MIDI devrait plus concentrer ses activités sur le recrutement à l'international ou est-ce qu'on devrait, justement, plus faire confiance à ceux qui y oeuvrent déjà mais qui devraient avoir une certaine certification pour pouvoir oeuvrer dans le... Juste pour que je sois certaine.

M. Poëti (Robert) : Comprenez bien le... Oui, je comprends votre question. Le MIDI, pour nous, est essentiel, a été d'une aide, mais aussi un guide très clair de collaboration, et pas de mise en garde, mais d'explication des règles. Alors, si on suit les règles, hein — vous le savez, j'ai une déformation — si on suit les règles, c'est plus facile, et à partir de là, le MIDI nous donne la direction.

L'organisme indépendant ImmigrEmploi, qui a une compétence, une expertise de plusieurs années dans le domaine, nous guide sur la façon de le faire, nous facilite, évidemment, les déplacements, mais on est toujours là. Ce n'est pas eux qui le font pour nous, on est en partenariat avec eux. On a signé récemment une entente de partenariat après avoir travaillé presque un an avec eux en collaboration. Aujourd'hui, ce sont des partenaires. On a pris une firme privée, pas pour faire le travail gouvernemental du MIDI, mais pour nous aider au bout qui nous revient à nous, comme organisme, et je pense qu'on doit le faire comme corporation. Donc, l'amalgame des deux est essentiel. On ne se prétend pas des spécialistes en immigration. On commence à mieux connaître ça, je vous dirai, mais les deux doivent travailler ensemble.

Mme Perry Mélançon : Rapidement, concernant la liste de traitement simplifié, vous avez dit qu'on devrait élargir ou revoir les métiers qui sont inclus à l'intérieur de ça. Donc, pour vous, ce serait de revoir entièrement la liste pour pouvoir offrir les formations, parce que vous avez ce qu'il faut, là, pour le faire à l'interne.

M. Poëti (Robert) : Oui — merci de votre question — spécialement la carrosserie. D'ailleurs, le concessionnaire dont on parle veut... doit en ouvrir une parce que quelqu'un part à la retraite. Mais une va servir trois ou quatre concessionnaires, donc, dans notre bannière CarrXpert, donc ça va être génial. Et ça, c'est des nouveaux emplois, c'est des emplois qui vont se continuer.

Alors donc, moi, je pense que c'est essentiel pour nous si on pouvait ajouter l'industrie de la carrosserie, parce que toutes nos voitures vont bien, mais, lorsqu'il arrive un accident, il faut les réparer, et ça, c'est aussi important.

Mme Perry Mélançon : Puis ça prend une certaine qualification.

La Présidente (Mme Chassé) : Ça termine le bloc d'échange... Tiens, il vous reste 10 secondes. Allez-y. Veux-tu...

Mme Perry Mélançon : Non, mais c'est vrai que ça prend une certaine qualification. Je veux dire, ça fait partie des métiers qui pourraient être...

M. Poëti (Robert) : On n'est pas sur la liste, actuellement. La carrosserie n'est pas là.

Mme Perry Mélançon : Non, c'est ça.

M. Poëti (Robert) : On aimerait vraiment la retrouver là. Merci.

La Présidente (Mme Chassé) : Très bien. Je vous remercie, M. Poëti et Mme Allard, pour votre contribution à la commission.

Je suspends momentanément les travaux afin de permettre au prochain groupe de prendre place.

(Suspension de la séance à 10 h 16)

(Reprise à 10 h 18)

La Présidente (Mme Chassé) : Je vous invite à prendre place, allez-y. Je souhaite maintenant la bienvenue aux représentants d'Olymel. Je vous rappelle, vous disposez de 10 minutes pour faire votre exposé. À une minute de la fin, je vais vous faire un signe soit de la main... si vous ne le voyez pas, je vais vous le mentionner verbalement. Et je vous invite tout d'abord à vous présenter puis à débuter votre exposé. Bienvenue.

Olymel SEC

M. Beauchamp (Paul) : Merci, Mme la Présidente. M. le ministre de l'Immigration, membres de la commission, bonjour. Je suis Paul Beauchamp. Je suis le premier vice-président d'Olymel. Je suis accompagné ce matin de M. Louis Banville, qui est vice-président, Ressources humaines, ainsi que de Mme Isabelle Leblond, qui est directrice corporative, Ressources humaines, Support aux établissements et surtout la personne en charge du dossier de l'immigration chez nous.

Olymel vous remercie, ni plus ni moins, pour la tenue de cette commission et nous permettre de venir présenter notre point de vue, de venir vous présenter nos préoccupations. C'est sûr que je vais parler pour l'entreprise, mais vous pouvez considérer, derrière notre propos, un peu celui de l'industrie, parce que je pense que nous sommes un peu un miroir de l'industrie agroalimentaire au Québec.

• (10 h 20) •

Olymel est le chef de file canadien dans le secteur de la production, de la transformation et de la distribution de viande de porc et de volaille. Nous sommes, en fait, le premier producteur de porc au Canada et le premier transformateur de viande au Canada. Fière de nos racines québécoises, Olymel emploie 14 000 personnes au Canada, dont plus de 9 500 au Québec, dans 25 établissements et de nombreuses fermes répartis à travers le Québec. Nous sommes un véritable moteur de développement économique régional, ayant des activités en Montérégie, dans Lanaudière, au Centre-du-Québec, en Mauricie, dans la Capitale-Nationale, au Bas-Saint-Laurent, en Chaudière-Appalaches, en Abitibi-Témiscamingue, au Saguenay—Lac-Saint-Jean, en Estrie, à Montréal et à Laval. Nous soutenons grandement le développement économique des régions du Québec et sommes un joueur clé pour leur vitalité, leur prospérité et le maintien du tissu socioéconomique.

Malgré notre développement dans le reste du Canada, nous demeurons en pleine croissance ici, au Québec, avec une création nette de 1 800 emplois depuis juillet 2017. Nous sommes le plus grand employeur dans le secteur québécois de la transformation des viandes et l'un des plus importants, tous secteurs confondus, au Québec. Malgré cet impressionnant résultat, l'impact de la pénurie de main-d'oeuvre se fait ressentir sur l'ensemble de nos opérations à travers le Québec et atteint un niveau critique sans précédent. Cela constitue un enjeu majeur pour l'entreprise et le secteur agroalimentaire lui-même. Présentement, nous cherchons à pourvoir près de 830 postes vacants. Ces postes s'ajoutent à ceux qu'on a déjà comblés, vous comprenez. Il va sans dire que ce déficit de main-d'oeuvre ralentit considérablement notre croissance économique et celle des régions du Québec. Certains de nos projets de développement et d'expansion au Québec sont même compromis.

Olymel est un créateur d'emplois locaux. Environ 70 % de nos emplois sont des gens qui viennent dans un rayon d'environ 50 kilomètres. On s'efforce d'utiliser les différentes filières de main-d'oeuvre, telles que les nouveaux arrivants, les jeunes, les travailleurs d'expérience, la main-d'oeuvre autochtone, et de mettre des mesures facilitant le maintien au travail de nos travailleurs d'expérience. Malgré tous nos efforts, nous n'avons aucun autre choix que de recourir à l'immigration économique afin de compléter nos objectifs et soutenir notre croissance.

Nous sommes d'avis que l'immigration économique permanente et temporaire fait partie des solutions essentielles pour répondre à nos besoins de main-d'oeuvre, surtout pour nos besoins de main-d'oeuvre que je vais qualifier de non qualifiée en région. Ce terme est utilisé, évidemment, au sens de la législation et de la réglementation québécoises. Chez Olymel, ça correspond davantage à des travailleurs semi-spécialisés. C'est pourquoi nous avons mis en place un programme unique en matière de recrutement, d'intégration et de rétention de nos employés nouveaux arrivants. Nous sommes proactifs et adoptons des pratiques éthiques et exemplaires. Nous réalisons exclusivement nos nombreuses missions de recrutement dans des pays francophones, facilitant ainsi l'intégration au milieu du travail — on parle de sept ici à ce jour. Nous aidons nos travailleurs et leurs familles dès le recrutement, lors de leur arrivée, notamment par la recherche de logement, en leur fournissant des vêtements, l'Internet pour qu'ils restent en contact avec leur famille. Nous leur offrons aussi un service de transport par autobus navette à la quasi-totalité d'entre eux et nous les soutenons, évidemment, dans leurs démarches d'obtention de leur résidence permanente. Toute la première semaine est consacrée à leur intégration en travaillant, entre autres, avec les municipalités, le curé, l'épicier du village, l'institution financière la plus proche, avec plusieurs organismes communautaires d'intégration en région afin de soutenir nos employés nouveaux arrivants dans leur démarche d'intégration, qu'on souhaite permanente.

Olymel salue les récentes mesures annoncées par le gouvernement en matière de francisation et d'intégration afin de soutenir la prospérité socioéconomique du Québec et de répondre aux besoins du marché du travail. Cependant, il reste beaucoup à faire. Nous avons un besoin pressant de main-d'oeuvre, et la main-d'oeuvre disponible sur le terrain ne répond pas à nos besoins. De plus, les avancées en technologie et en robotisation ne sont pas encore adaptées à notre secteur et ne correspondent pas à une solution adéquate aux problèmes que nous vivons au moment où on se parle. Il faut en conclure que l'immigration économique adaptée aux besoins des régions est une solution incontournable afin de poursuivre non seulement le développement d'Olymel, mais celui des régions.

Juste avant d'entreprendre la lecture de nos recommandations, mais pour bien les comprendre, je vous demande de considérer Olymel ni plus ni moins comme une chaîne de valeur où tous les maillons sont essentiels, de la ferme jusqu'à votre table, des régions jusqu'à la métropole, parce qu'une usine d'abattage sans employés aura un impact à la fois en amont, à la ferme, et en aval, dans nos unités de surtransformation. Une chaîne de valeur brisée, c'est même une chaîne qui affaiblit son industrie.

Olymel met de l'avant les propositions suivantes : la sélection permanente de l'immigration économique doit être arrimée aux besoins importants de main-d'oeuvre en région. Olymel demande au gouvernement de soutenir davantage la régionalisation de l'immigration en considérant les besoins de main-d'oeuvre régionaux dans la sélection permanente.

Les seuils d'immigration économique pour 2020 et 2021 et les programmes d'immigration économique doivent impérativement prendre en compte les besoins spécifiques de main-d'oeuvre non qualifiée en région, le contexte démographique, les taux de chômage, le nombre de postes vacants. Le gouvernement doit reconnaître l'apport essentiel de ce qu'il appelle les travailleurs non qualifiés, qui correspondent davantage, chez Olymel, à des travailleurs semi-spécialisés. Il est donc important qu'il révise la liste des métiers qui entrent dans la catégorie de main-d'oeuvre qualifiée ou qu'il augmente les seuils de main-d'oeuvre non qualifiée.

La sélection permanente de travailleurs étrangers temporaires doit être favorisée. Elle doit prendre en compte les besoins de main-d'oeuvre non qualifiée sur une base permanente. Le processus doit être simplifié afin de réduire les délais et les coûts. Le gouvernement du Québec doit établir un programme équivalent au programme pilote sur l'immigration agroalimentaire fédéral d'ici le début de l'année 2020. Ce programme va conférer, dès le début de l'année, un avantage économique significatif à nos compétiteurs canadiens.

Une quatrième recommandation, qui vise une révision majeure du Programme des travailleurs étrangers temporaires. Olymel requiert une intervention soutenue et prioritaire du gouvernement du Québec afin qu'il joigne sa voix à celles des entreprises québécoises pour obtenir du gouvernement fédéral un PTET réellement adapté aux particularités régionales et sectorielles du Québec, notamment en recherchant des solutions concrètes aux enjeux suivants : complexité des exigences administratives, longueur des délais, processus imprévisibles et frais élevés, limites insuffisantes d'embauche des travailleurs étrangers temporaires par lieu d'emploi, la fameuse règle du 10 %, l'évaluation des impacts sur le marché du travail trop courte, de trop courte validité et d'une complexité au niveau du processus.

La gestion du Programme des travailleurs étrangers temporaires par le Québec doit être simplifiée — je le mentionne depuis tantôt — flexible et adaptée. Olymel estime que la gestion par le Québec du PTET doit être revue et améliorée. Il est essentiel à nos yeux que les exigences soient assouplies afin d'accélérer la venue de travailleurs étrangers temporaires, notamment en solutionnant les enjeux suivants : l'impossibilité d'admissibilité à la RAMQ pour les travailleurs en statut implicite, recrutement nécessaire avant le dépôt du certificat d'acceptation du Québec et de l'évaluation des impacts sur le marché du travail, le manque d'arrimage entre la durée de validité de l'EIMT-CAQ et les formalités administratives du Programme de l'expérience québécoise en vue de l'obtention du certificat de sélection du Québec.

Et finalement les listes régionales des professions aux fins du traitement simplifié n'incluent pas les professions semi-spécialisées qui sont en forte demande...

La Présidente (Mme Chassé) : Il vous reste moins d'une minute à votre exposé.

M. Beauchamp (Paul) : Oh! je vais sauter ma dernière recommandation.

La Présidente (Mme Chassé) : Oui, hein?

M. Beauchamp (Paul) : Je tiens à le réitérer, l'impact de la pénurie de main-d'oeuvre se fait ressentir sur nos opérations à travers le Québec, atteint un niveau critique sans précédent et constitue un enjeu majeur pour notre entreprise. Malgré nos efforts considérables en matière de recrutement au sein de la population active du Québec, nous n'avons d'autre choix que de recourir à l'immigration économique afin de compléter nos effectifs, soutenir nos activités, notre croissance régionale et l'industrie agroalimentaire au Québec.

Olymel demande donc au gouvernement de mettre en oeuvre le plus rapidement possible ses recommandations dans le cadre de la planification de l'immigration au Québec pour la période 2020‑2022. C'est ainsi qu'Olymel pourra poursuivre sa croissance économique, soutenir le développement régional, poursuivre notre mission qui est de nourrir le monde. Merci beaucoup.

La Présidente (Mme Chassé) : Merci à vous, M. Beauchamp. Nous allons maintenant débuter la période d'échange, et nous allons débuter avec le parti formant le gouvernement pour une durée de 16 minutes. M. le ministre, la parole est à vous.

M. Jolin-Barrette : Merci, Mme la Présidente. Bonjour à vous tous, M. Beauchamp, M. Banville, Mme Leblond. Merci de la présentation de votre mémoire en commission parlementaire.

J'étais heureux de vous entendre dire que ça prenait des assouplissements au Programme des travailleurs étrangers temporaires, et j'en suis, et c'est ce qu'on porte au gouvernement fédéral depuis plusieurs mois déjà, pour répondre aux besoins des employeurs, parce que la réalité à laquelle vous êtes confrontés... J'en suis extrêmement conscient, de cette difficulté de recruter des travailleurs, et dans les différentes industries comme la vôtre...

Notamment, vous disiez, là, des travailleurs semi-spécialisés ou non qualifiés, il y a des difficultés à en recruter, et ça prend un assouplissement au niveau du Programme des travailleurs étrangers temporaires, notamment en ce qui concerne le nombre de travailleurs par industrie, la durée de temps pour laquelle le permis de travail est donné, mais aussi la rapidité avec laquelle... lorsque vous allez à l'étranger, que vous offrez une offre d'emploi, que le fédéral puisse donner un permis de travail temporaire. Alors, j'accueille vraiment favorablement vos propos en ce sens-là. Et il faut que le gouvernement fédéral comprenne cette réalité québécoise là au niveau du marché du travail.

L'autre point sur lequel je souhaite insister : pour le gouvernement du Québec, les travailleurs temporaires peuvent constituer une voie intéressante pour répondre à cette pénurie de main-d'oeuvre là, mais on a le souci, par contre, de s'assurer que, lorsqu'on va à l'étranger recourir à des travailleurs temporaires, ils puissent demeurer par la suite au Québec. Donc, l'ensemble des mesures qu'on a déployées à ce jour, c'est d'offrir à la fois la francisation, à la fois le parcours d'accompagnement personnalisé aux travailleurs étrangers temporaires, justement... que, s'ils occupent un emploi, ils sont au Québec, ils sont dans vos industries, on puisse leur offrir de continuer puis de s'établir durablement au Québec.

Je reviens à votre mémoire puis à vos propos. Tantôt, vous dites : La régionalisation, c'est important. Qu'est-ce que vous pensez que le gouvernement du Québec devrait faire, en collaboration avec les entrepreneurs, les employeurs, pour assurer une plus grande régionalisation?

• (10 h 30) •

M. Beauchamp (Paul) : Avant de laisser la parole à mon collègue, j'aimerais vous dire que nous sommes partenaires de votre approche au niveau de la francisation. Je l'ai mentionné, nous réalisons nos missions de recrutement exclusivement dans des pays qui peuvent nous fournir une main-d'oeuvre temporaire francophone. Évidemment, on le fait un peu pour l'entreprise parce que ça facilite leur intégration dans les opérations, mais ça facilite énormément leur intégration dans le milieu de travail.

Je l'ai mentionné, on commence à travailler déjà auprès des travailleurs immigrants temporaires sur place, en rencontrant leur famille, leur expliquant... parce que, nous, notre objectif, c'est que ces employés temporaires là demeurent avec l'entreprise, au Québec, évidemment, mais avec l'entreprise, ce qui fait qu'on commence déjà le processus avant même que ces gens-là soient acceptés et viennent ici. On le fait lors du recrutement, dans leur pays.

Et, si vous voulez nous donner des obligations additionnelles en matière de francisation pour s'assurer que nos travailleurs soient... ou maîtrisent la langue au départ, bien, soit, c'est à votre guise, on va vivre avec ça parce que nous sommes prêts à le faire. On n'opère essentiellement que dans les milieux francophones au Québec. Ça fait que, pour nous, là, d'avoir des exigences de recrutement, on n'a aucun problème. De maintenir la qualité du français de ces gens-là pour les accompagner au cours des premières années, avec nous la première année, puis après ça on espère qu'ils continuent, on n'a aucun problème, donc, avec ça, M. le ministre. Ça fait que vous pouvez nous compter, comme entreprise, comme des partenaires à cet égard-là.

Je vais demander à M. Banville de répondre au niveau de la régionalisation, s'il vous plaît.

M. Banville (Louis) : Oui, tout à fait. Au niveau de la régionalisation, comme l'a dit Paul, évidemment, le fait qu'on recrute exclusivement en français est déjà un élément d'appropriation de l'entreprise majeur, important.

En deuxième temps, je pense que les organismes d'aide à la régionalisation dans les régions, les organismes communautaires doivent recevoir un support plus élevé que ce qui existe actuellement parce que ce sont des partenaires incontournables au moment de l'arrivée et pendant les phases d'intégration qui vont suivre. Comme nous travaillons dans une optique que les travailleurs étrangers temporaires soient sur une base permanente, on les supporte pour l'obtention de la résidence permanente. Pour nous, un travailleur étranger temporaire n'est temporaire que dans l'appellation. Notre objectif, c'est qu'il demeure, et on le fait déjà.

Pour répondre clairement à votre question : l'aide au logement, l'aide au transport. On fait déjà beaucoup, on a pas loin de 680 personnes qui sont transportées matin et soir par des mécanismes de transport qu'on a mis en place, et on aide les... Avant leur arrivée, aux travailleurs étrangers temporaires, ils ont déjà... on a déjà organisé leur logement. Mais il y a aussi les nouveaux arrivants du Canada qu'on amène aussi en région, et des fois l'aide au logement passe par un logement transitoire. Les gens viennent essayer s'ils aiment ça, s'ils adaptent.

Donc, pour répondre à votre question : aide au logement, support aux organismes d'intégration régionale et l'aide au transport. Et idéalement un guichet relativement unique, ça faciliterait, c'est criant. Le reste, on va s'en occuper, on va faire nos devoirs.

M. Jolin-Barrette : O.K. Sur les types de professions qui sont admissibles au traitement simplifié, là, dans le cadre du Programme des travailleurs étrangers temporaires, C et D ne sont pas là, le fédéral ne souhaite pas qu'elles soient présentes dans la liste de traitement simplifié. Moi, ce que je comprends de votre mémoire, c'est que vous souhaiteriez que le fédéral soit ouvert à ce que, sur le traitement simplifié, les emplois non qualifiés ou semi-spécialisés s'y retrouvent sur la liste, justement, pour vous accompagner au niveau de la rapidité de la démarche pour réussir à combler les emplois dans vos différents lieux d'établissement.

M. Beauchamp (Paul) : C'est bien ça.

M. Jolin-Barrette : O.K., j'en suis. Moi, je pense qu'il faut faire en sorte vraiment de s'assurer de répondre aux besoins, mais surtout des différentes entreprises. Quand on dit, là, «non qualifiés» ou «semi-spécialisés», les emplois chez vous, qu'est-ce que ça représente comme corps d'emploi, comme types d'emploi? Puis c'est quoi, environ, les salaires moyens? Qu'est-ce que vous offrez, là, comme conditions de travail aux employés?

M. Beauchamp (Paul) : Bon, je pense que, comme conditions — puis Louis, au besoin, pourra compléter — il faut que vous sachiez que la presque totalité de nos établissements sont des établissements syndiqués, donc le travailleur qui entre chez nous bénéficie déjà d'une couverture, là, qui est légale, ni plus ni moins, quant à ses conditions d'emploi. Le salaire moyen doit être environ autour de 20 $ de l'heure, plus ou moins des avantages, parce que, dépendamment des établissements, tout le monde ne gagne pas le même salaire à travers l'entreprise. Mais c'est à peu près le niveau d'emploi.

Et ce qui se produit aussi, puis on commence à le vivre parce que ça fait déjà plus de 10 ans que nous travaillons avec les programmes d'immigration temporaire — le premier établissement, c'est à Saint-Esprit en 2009 — mais on a des gens issus de ces premières vagues-là qui commencent à avoir des promotions, qui ne sont pas strictement des employés manoeuvres, mais qui sont devenus des contremaîtres, qui sont devenus des superviseurs. Ça fait que, ces gens-là, on a cette possibilité-là de leur offrir de progresser au sein de l'entreprise, d'une part.

Mais aussi, l'élément non négligeable, s'ils obtiennent leur permanence, leur statut permanent et que la famille vient, on est en mesure d'offrir aussi un second emploi à la famille parce qu'on a... ce ne sont pas des travailleurs spécialisés. Ça fait que le conjoint ou la conjointe qui vient retrouver celui qui est déjà ici au pays, on lui offre un emploi le lendemain matin si elle veut travailler, cette personne-là. Ça fait qu'il y a aussi un avantage qu'on est en mesure d'offrir à ces gens-là qui crée un intérêt certain pour demeurer avec l'entreprise.

M. Jolin-Barrette : O.K. Vous disiez : Nous, quand on accueille les travailleurs temporaires en région, la première semaine, c'est consacré à l'intégration. Et qu'est-ce qui vous a amené à dire : Nous, là, comme entreprise, là, on s'assure de l'installation des gens qu'on accueille?

M. Beauchamp (Paul) : Dans le fond, l'expérience, 10 années d'expérience nous amènent à développer des meilleures pratiques. Nous, le recrutement, au début, on a travaillé avec des agences pour nous aider à faire ce qu'on ne savait pas faire à l'époque. On a développé de l'expertise, on a Mme Leblond, qui maintenant se... on va la qualifier de spécialiste en la matière, et on est en mesure de développer des meilleures pratiques.

Quand on a parlé et quand Louis fait mention de l'aide aux organismes communautaires régionaux, c'est que nous, on accueille puis on prend le temps et les moyens nécessaires pour que la communauté, pas seulement l'entreprise... parce qu'on a des défis dans certaines usines aussi à faire accueillir de l'immigration, que la région veuille bien le faire et participe. Puis Vallée-Jonction ici, dans la région, est un exemple incroyable de réussite. Mais tous ces éléments-là font partie de notre clé.

Le support aux organismes régionaux vient s'ajouter parce qu'il y a une deuxième puis une troisième phase dans leur implantation, hein? Ils veulent s'acheter un char, ils ne savent pas comment. C'est de valeur, on aurait pu les présenter à M. Poëti. Mais ces gens-là, ils veulent s'établir pour demeurer, ça fait qu'ils veulent avoir un véhicule, ils s'achètent un véhicule en groupe, ils veulent se trouver un autre appartement que celui qu'on leur a fourni, ils veulent s'implanter. Mais là, à ce moment-là, ils vont s'adresser aux organismes communautaires, puis ça devient leur travail à eux. Ils sont énormément sollicités pour le faire de première ligne avec nous, mais ils n'ont pas les ressources suffisantes pour le faire lorsque vient la deuxième vague de demande pour l'intégration.

M. Jolin-Barrette : O.K. Je vous remercie pour la présentation de votre mémoire. J'ai des collègues qui souhaitent intervenir. Merci.

La Présidente (Mme Chassé) : La députée de Bellechasse désire prendre la parole.

Mme Lachance (Bellechasse) : Merci, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Chassé) : Merci à vous. Il vous reste cinq minutes, pour votre information.

Mme Lachance (Bellechasse) : Cinq minutes? Merci.

La Présidente (Mme Chassé) : Oui, absolument.

Mme Lachance (Bellechasse) : Merci, madame, merci, messieurs, d'être là. J'ai bien lu votre mémoire et même la révision. Je dois vous avouer qu'il était très éloquent et complet, toutes les informations dont nous avions besoin pour porter notre réflexion s'y trouvaient. Il y avait beaucoup de revendications, et parmi ces revendications, plusieurs sont à faire auprès du gouvernement fédéral. Mais, au-delà de ces revendications-là, comment nous, au Québec, on peut vous aider à résoudre cette problématique-là?

• (10 h 40) •

M. Beauchamp (Paul) : ...donner rapidement, et on le retrouve dans nos recommandations, c'est d'essayer de développer au Québec le pendant de ce que le programme fédéral... qui vient d'être lancé au niveau des programmes des travailleurs temporaires dans le secteur agroalimentaire. Il y a eu une reconnaissance par le gouvernement fédéral des besoins spécifiques à notre secteur, qui est l'un des plus importants au Canada comme au Québec, pour aborder cette question-là, faciliter les délais, réduire les coûts, etc. Ce qu'on souhaiterait, c'est que le gouvernement du Québec puisse offrir, à tout le moins, ce pendant-là dans les meilleurs délais de façon à ce qu'on ne brise pas notre compétitivité par rapport à nos concurrents canadiens. Ça, je pense qu'il y a là une première étape, un geste rapide à poser qui, de notre avis, est relativement simple. Louis, est-ce que tu veux rajouter?

M. Banville (Louis) : Bien, oui, je pense que Paul a tout à fait raison, dans le fond, on comprend qu'il y a des répartitions de juridictions, mais un programme miroir à celui que le fédéral a implanté s'avère, pour nous, essentiel et parce que ça va développer un niveau de compétitivité débalancé, mais surtout ça freine l'arrivée et ça retarde un programme miroir qui comprendrait un EIMT d'une durée de 24 mois au lieu de 12 mois.

Au Québec, on est la seule province... et je ne veux pas rentrer dans la technique, mais c'est important, Isabelle pourra me recompléter, il faut aller recruter les gens à l'étranger avant même de savoir s'ils seront acceptés. Donc, on s'en va au Rwanda, on s'en va à l'Île Maurice, à Madagascar, Isabelle part, et on recrute des gens, on ne sait pas si, à la fin, l'EIMT sera accordé, et ça, c'est une particularité au Québec.

Le seuil de 10 % ne tient pas compte de la démographie, du socioéconomique de la région impliquée, est-ce que je suis en zone urbaine, industrielle, de services. Le taux de chômage : 2,6 % dans Chaudière-Appalaches. Ce matin, dans cette région-là, Olymel est à la recherche de 160 personnes, ce matin, à 2,6 %.

Alors, des délais plus courts, des EIMT plus longs, des coûts moins onéreux et des seuils adaptés, on ne dit pas nécessairement 25 % partout, mais qui tiennent compte du taux de chômage de la région, du profil socioéconomique de la région et de la démographie. Le reste, si on a ces objets facilitants là, qu'ils viennent du fédéral, par revendication du Québec ou par un programme miroir, pour nous, le reste, on va s'en occuper, on va s'en occuper.

M. Beauchamp (Paul) : Peut-être juste en complément sur l'information de Louis, quand on parle du 10 %, le 10 % est attaché à l'établissement. On ne souhaite pas qu'il devienne à l'entreprise parce que ça pourrait créer des peurs qu'on prenne notre 10 % sur 9 500 puis qu'on ouvre une usine strictement avec des travailleurs... L'objectif n'est pas là. Mais, lorsqu'on a plus d'un établissement dans la même région administrative, peut-être qu'on puisse régionaliser le 10 %, parce que, s'il manque 50 travailleurs à Saint-Henri, puis je suis limité à 10, ça fitte pas pire. Il m'en manque peut-être un peu plus dans un autre établissement, qui est celui de Vallée-Jonction, puis j'aurais peut-être pu prendre une portion de moins 10 % de Saint-Henri puis de combler... Dans la même région administrative, on ne veut pas déplacer, là, commencer à jouer des jeux inimaginables, là.

Mme Lachance (Bellechasse) : Merci. Vous avez mentionné que vous aviez actuellement 830 postes à combler, dont 160 dans la région de Chaudière-Appalaches. C'est des postes de quelle nature?

M. Beauchamp (Paul) : Bien, c'est des postes de manoeuvre. C'est des gens qui vont se retrouver sur la ligne pour désosser. Je veux dire, ils entrent en fonction de la convention collective, comme des travailleurs québécois qu'on embauche quotidiennement, parce que des fois on a des résultats négatifs à la fin de la semaine, on en a embauché moins qu'il en a quitté. Mais ils rentrent en vertu de la convention collective au même titre que les autres travailleurs.

Mme Lachance (Bellechasse) : D'où l'importance que les postes non qualifiés soient considérés.

M. Beauchamp (Paul) : Oui.

Mme Leblond (Isabelle) : Effectivement.

Mme Lachance (Bellechasse) : Mme la Présidente, il me reste combien de temps?

La Présidente (Mme Chassé) : 45 secondes.

Mme Lachance (Bellechasse) : M. Provençal?

Une voix : ...

Mme Lachance (Bellechasse) : Oui? O.K. Merci. J'aimerais savoir... Bon, vous avez pris plusieurs moyens pour essayer de bien avoir l'ensemble de vos ressources humaines, les mesures pour retenir les travailleurs d'expérience, vous avez, pendant trois ans, travaillé avec des nouveaux arrivants et aussi avec des travailleurs temporaires. Est-ce que les taux de rétention, parmi les deux types de travailleurs étrangers, sont les mêmes ou sont différents, puis pourquoi?

La Présidente (Mme Chassé) : En 15 secondes.

M. Banville (Louis) : Oui, très précisément, 80 % à 90 % des travailleurs étrangers temporaires qui ont obtenu leur résidence permanente, donc qui sont en permis ouvert, qui pourraient nous quitter, sont restés avec nous. L'exemple de Saint-Esprit...

La Présidente (Mme Chassé) : En conclusion.

M. Banville (Louis) : ...Saint-Esprit en 2009 : 90 % des travailleurs étrangers temporaires, après les résidences permanentes, sont restés avec nous.

La Présidente (Mme Chassé) : Merci. Ça conclut le bloc d'échange avec le parti formant le gouvernement. Maintenant, nous passons au parti formant l'opposition officielle. M. le député de Nelligan, la parole est à vous.

M. Derraji : Merci, Mme la Présidente. Messieurs, bonjour. Madame, bonjour. Bienvenue à la commission. Je tiens à vous remercier. J'ai une petite première question : Est-ce que c'est votre première participation à une commission parlementaire, en termes de planification de l'immigration?

M. Beauchamp (Paul) : De l'immigration? Ma réponse sera oui.

M. Derraji : Oui? Je tiens à vous remercier, parce que le rapport est excellent. Mais moi, je tire une conclusion, c'est que, vraiment, la situation est urgente. L'urgence, elle est là. Et j'ai lu entre les lignes que... Vous soulevez plusieurs points, y compris par rapport à la nouvelle planification, donc mes questions vont se diriger vraiment dans ce sens, parce que vous êtes une compagnie québécoise très ancrée dans nos milieux économiques, surtout au niveau régional, mais aussi un leader au niveau canadien.

Ma première question, c'est par rapport à vos besoins. Vous avez dit, votre besoin, actuellement, c'est 830 emplois, et, si je comprends bien, ça ne dure pas... ça ne date pas d'hier, ça date depuis quand même plusieurs années que vous faites des recrutements à l'international. Est-ce que je peux conclure que votre besoin est permanent, en termes de main-d'oeuvre?

M. Beauchamp (Paul) : Je vous dirai qu'il est permanent dans la situation qu'on connaît à l'heure actuelle. J'ai tendance à vous dire oui. Mais l'élément le plus important, c'est que, même une fois comblés ces 830 emplois quand même pas négligeables, si on veut penser croissance et développement, on va chercher les autres où?

M. Derraji : Oui, mais vous avez très bien répondu à ma question. Parce que moi, je suis en train de cheminer avec vous, du moment que nous sommes dans une planification, c'est très important de vous écouter. Parce que, pour moi, aujourd'hui... oui, j'entends, le fédéral, mais, pour moi, un vrai nationalisme, c'est le Québec qui doit prendre le leadership pour répondre à une entreprise qui a de la valeur et qui crée la valeur au Québec. Et aujourd'hui, moi, ce que je m'attends, je m'attends à ce que le gouvernement québécois, le gouvernement caquiste réponde à vos besoins.

Donc, du moment que le besoin est permanent, je ne pense pas que les travailleurs temporaires étrangers, ils vont régler le problème qui est récurrent. Le problème, et corrigez-moi si je me trompe, c'est que, vu la complexité du système d'immigration, vous avez choisi ou opté pour le Programme de travailleurs étrangers temporaires parce que le délai est très court et vous pouvez jongler avec le système pour pouvoir répondre d'une manière très rapide à vos besoins. Est-ce que j'ai bien compris la problématique?

M. Beauchamp (Paul) : Bien, je corrigerais le «très rapide» par «plus rapide».

M. Derraji : Oui, oui, désolé, parce que c'est quand même neuf mois.

M. Beauchamp (Paul) : Parce que, pour nous, ce n'est pas... pour nous, là, on ne parlera pas de rapidité, là.

M. Derraji : Excellent. Oui, surtout en termes d'affaires, neuf mois, on peut échanger une... à plusieurs reprises. Donc, le besoin, il est permanent, on utilise un moyen relativement rapide, le programme de travailleurs temporaires. Mais, dans une situation idéale, ce qu'Olymel aimerait, c'est que la grille de sélection, qui est le pouvoir du Québec... Parce que, moi, entendre aujourd'hui : Aller à Ottawa, parler avec Ottawa pour que ça change et attendre, encore une fois, des mois... Le Québec a tous les pouvoirs de changer la grille de sélection. Et vous proposez pas mal de choses, et c'est là où j'aimerais vous entendre. Pour vous, la grille de sélection ne répond pas à vos besoins. Donc, quand vous dites, pour vous, c'est des travailleurs semi-qualifiés, dans la définition du gouvernement, c'est du non qualifié, est-ce que ça, ça vous pose un problème?

M. Beauchamp (Paul) : Oui, ça nous pose un problème parce que ça ne permet pas aussi facilement d'avoir, soit en nombre, les travailleurs que nous avons besoin pour combler les postes qui sont vacants.

M. Derraji : Excellent. Donc, selon vous, le by-pass de ce qu'on fait, par exemple, pour recruter via le temporaire doit être changé par du permanent qui répond à vos besoins en changeant la grille de sélection.

M. Beauchamp (Paul) : Bien, je pense que vous avez là une portion de la solution globale.

M. Derraji : Bien, j'espère. Écoutez, le ministre s'apprête à annoncer la politique au mois de novembre, et moi, je peux vous garantir que je vais veiller sur ça, parce que, pour moi, Olymel, comme entreprise québécoise... je veux, en tant que Québécois, qu'Olymel demeure... et surtout l'industrie agroalimentaire demeure au Québec, mais continue à assurer la prospérité économique de nos régions.

L'autre question que j'ai, vous avez soulevé un point très important au niveau du regroupement familial et que ça joue un élément important dans votre quotidien parce que ça aide à ce que la rétention soit beaucoup plus meilleure. Est-ce que vous savez que la nouvelle politique proposée par le gouvernement caquiste va diminuer le nombre de personnes qu'on va accueillir au niveau de la catégorie regroupement familial? Est-ce que vous pensez que c'est quelque chose qui peut affecter vos employés qui sont en région à qui vous voulez garantir une rétention régionale?

• (10 h 50) •

M. Banville (Louis) : Pour nous, il est évident que... Comme on le mentionnait tantôt, on a toujours travaillé sur une base de faire en sorte que les... peu importe par lequel des chemins le travailleur étranger arrivera chez nous, soit par l'immigration régulière ou par le Programme des travailleurs étrangers temporaires, on a toujours travaillé sur du long terme. Et il est certain que l'arrivée des familles dans le cadre du Programme des travailleurs étrangers temporaires... Pour donner un exemple, les membres de la famille, une fois que notre employé a reçu sa résidence permanente, c'est un moment très important pour cette personne-là de voir sa famille arriver après un an d'absence et ça consolide la régionalisation, ça stabilise ces gens-là et, comme le dit Paul, bien, ça donne une opportunité des fois d'embaucher le membre de la famille, mais, à tout le moins, de faire établir une famille dans une région de façon durable.

Donc, tout ce qui va favoriser la venue de travailleurs et de personnes arrivant de l'étranger en région, et le plus rapidement possible, avec leur famille est un pas dans la bonne direction pour travailler sur une base permanente, parce que le problème de pénurie de main-d'oeuvre, compte tenu de la démographie, n'est pas un phénomène temporaire.

M. Derraji : Je comprends votre préoccupation et je tiens quand même à vous le dire, parce que vous devez être conscients de ça parce que j'en suis sûr et certain qu'au sein de vos entreprises il est des employés qui aimeraient ramener leur famille. Et, dans les trois catégories qu'on a, à part la catégorie économique, le regroupement familial et les réfugiés humanitaires, bien, seront touchés. Les deux autres catégories seront touchées au niveau de la nouvelle politique. Donc, il faut être conscients ça, que c'est un autre handicap qu'on vous rajoute. Donc, à part aller chercher les 830 personnes qui vous manquent, l'autre point que vous allez avoir sur votre table pour les prochaines années, surtout pour les deux, c'est qu'il va y avoir un ralentissement par rapport à l'arrivée des personnes pour compléter les familles au Québec.

L'autre question que j'ai : C'était quoi, votre réaction, quand vous avez vu que le gouvernement fédéral a mis un programme pour encourager le secteur agroalimentaire et, du côté gouvernemental, il n'y avait rien? Je n'ai pas vu d'annonce par rapport à ce secteur. Est-ce que vous pensez que vraiment...

M. Beauchamp (Paul) : Bien, j'aurais envie de vous répondre que ça a créé des attentes.

M. Derraji : Des?

M. Beauchamp (Paul) : Des attentes.

M. Derraji : Par rapport à votre campagne, oui.

M. Beauchamp (Paul) : Par rapport à notre situation au Québec. Et c'est pour ça qu'on l'aborde dans notre mémoire et qu'on s'adresse au gouvernement en lui disant : Nous sommes en attente d'avoir un programme miroir, à tout le moins, pour ne pas perdre nos avantages compétitifs avec le reste du Canada. Ça fait que ça a créé des attentes. On aurait aimé de l'avoir. Puis ça, l'État est ce qu'il est, et on se repose maintenant sur le gouvernement du Québec pour avoir un miroir.

M. Derraji : Je vois que vous êtes un homme beaucoup plus poli. Moi, je pense que je peux utiliser d'autres mots. Vous êtes en train de me dire qu'il y avait une annonce fédérale pour toute l'industrie agroalimentaire, pour tout le Canada, toutes les entreprises de votre secteur. Ça veut dire, vos concurrents vont avoir de l'appui et silence radio de la part du gouvernement du Québec?

M. Beauchamp (Paul) : Bien, c'est pour ça qu'on espère que notre présence contribuera à sensibiliser le gouvernement au besoin de le faire, ce programme miroir. C'est un des objectifs de notre présence aujourd'hui comme entreprise, parce que je pense qu'on est la seule entreprise qui a été entendue en commission parlementaire ou qui le sera. Le reste, c'est des consultants, ce sont des associations. Et nous, on voulait venir porter ce point-là parce qu'au-delà de la problématique, que vous avez bien décrite, il se passe quelque chose dans le reste du Canada, puis on se demande si le gouvernement du Québec ne pourrait pas nous produire un programme miroir qui nous conférerait les mêmes avantages que nos compétiteurs.

Parce que, je ne veux pas démoniser la situation, mais, quand on a un travailleur immigrant temporaire qui travaille près du Nouveau-Brunswick et qui est sollicité par une entreprise du Nouveau-Brunswick puis, s'il bougeait, il pourrait aller chercher sa permanence plus rapidement de l'autre côté, à côté, là, on parle de quelques kilomètres... Il y a la mobilité, hein, il y a une réalité qui exige qu'il y ait une réaction, je pense, à très court terme, sans ça... On l'entend, là, déjà, sur le terrain.

La Présidente (Mme Chassé) : Il reste une minute au bloc d'échange.

M. Derraji : Bien, ce qui est dommage, et je vous entends, ce qui est dommage, c'est qu'on parle beaucoup de nationalisme, mais, pour moi, le nationalisme économique, c'est être à la défense et défendre les intérêts de nos entreprises québécoises. Aujourd'hui, ce que j'ai devant moi, c'est qu'une entreprise leader dans son domaine... que le Québec ne fera pas un programme miroir comme ce qu'on fait au niveau canadien. C'est ce que je dois comprendre entre les lignes, M. Beauchamp?

M. Beauchamp (Paul) : À ce jour, il n'y a pas de programme miroir. Le programme fédéral entre en vigueur le 1er janvier. Je me répète et je réitère que nous espérons sensibiliser le gouvernement à cet effet.

M. Derraji : Oui. Dernière question.

La Présidente (Mme Chassé) : 10 secondes.

M. Derraji : 10 secondes.

La Présidente (Mme Chassé) : Je ne pense pas, une question...

M. Derraji : Que pensez-vous des seuils de 40 000?

La Présidente (Mme Chassé) : Cinq secondes.

M. Beauchamp (Paul) : Bien, il y a là pour nous une limite, évidemment, au potentiel.

La Présidente (Mme Chassé) : Merci. Je passe maintenant la parole au député de Laurier-Dorion, 2 min 40 s.

M. Fontecilla : Merci. Madame, messieurs, bonjour. Écoutez, une des critiques qu'on porte au programme des travailleurs temporaires, c'est la question du lien obligatoire entre la personne concernée et l'employeur, là, ce qui rend les travailleurs dans une situation vulnérable. Vous, vous êtes syndiqués, je le comprends. L'année passée, il y a plusieurs articles de presse, là, concernant l'industrie des attrapeurs de volaille, donc, avec des conditions de travail horribles, des accidents de travail à répétition, etc., utilisant presque uniquement des travailleurs étrangers temporaires. Quel est votre lien avec cette industrie-là?

M. Beauchamp (Paul) : Bien, c'est un des maillons de la chaîne de valeur. Nous ne sommes pas impliqués dans le volet de l'attrapage des oiseaux. Par contre, c'est un des éléments essentiels : pas d'oiseaux dans les usines d'abattage, la chaîne, elle ne débute même pas le début de sa valeur. Mais, dans le fond, ce qu'on essaie, nous, de faire, c'est de travailler avec des entreprises qui respectent des conditions minimales d'emploi, de sécurité au travail. Ça fait partie de notre obligation, à la fois comme gestionnaires d'entreprise, comme administrateurs d'entreprise, pour s'assurer que tous les travailleurs occupent un emploi et que des règles minimales de santé et sécurité au travail soient respectées.

M. Fontecilla : À la suite des articles de l'année passée concernant cette situation-là, est-ce que vous avez pris des mesures?

M. Beauchamp (Paul) : Nous sommes intervenus parce que, quand... Il faut voir qu'il y a les autorités gouvernementales qui nous mettent de la pression puis il y a le rôle de contrôle. Mais tous nos clients de grande taille, pensez aux plus grandes marques de restauration, etc., aussitôt qu'ils entendent un message comme celui-là où il peut y avoir maltraitance à la fois ou des animaux ou des travailleurs, ils sont les premiers à téléphoner pour savoir quels sont nos plans d'action pour s'assurer que les oiseaux qui sont livrés chez Olymel, qui servent à produire ce qu'ils mettent en marché... soient faits selon les règles les plus strictes. Ça fait que, oui, on a pris des mesures.

M. Fontecilla : Parfait. Je change de sujet...

La Présidente (Mme Chassé) : 30 secondes.

M. Fontecilla : Vous avez parlé, à la page 10, que vous avez 232 TET en ce moment, là, et dont 76 sont éligibles au CSQ, donc 32 %. Plus tard dans votre mémoire, vous parlez de 75 % à 80 % des TET qui peuvent être éligibles au... Il semble y avoir une contradiction entre ces deux chiffres. Et pourquoi la plupart ne peuvent pas postuler au CSQ?

Mme Leblond (Isabelle) : Le nombre, c'est que, depuis l'année dernière, on peut... tous les manoeuvres en transformation alimentaire, maintenant, ont accès au PEQ, ce qu'il n'y avait pas avant. Donc, ceux que ça fait déjà un an qu'ils sont ici...

La Présidente (Mme Chassé) : En conclusion.

Mme Leblond (Isabelle) : ...c'est pour ça, le nombre de 76 qui ont accès. Les autres vont avoir également accès. C'est juste une question de temps d'arrivée du Québec.

M. Fontecilla : Merci.

La Présidente (Mme Chassé) : Merci. Très bien. Je passe maintenant la parole à la députée de Gaspé, la porte-parole du troisième groupe d'opposition.

Mme Perry Mélançon : Merci, Mme la Présidente. Bonjour. Merci de venir nous faire part de toutes les réalités que vous connaissez dans votre secteur d'activité. Pour moi, il y a des données intéressantes... bien, nouvelles et intéressantes. À défaut de vous faire répéter, parce que les questions ont beaucoup été posées, là, avant moi, j'aimerais savoir : Quand vous dites que le gouvernement fédéral... bien, en fait, d'adapter, mieux adapter le PTET aux particularités régionales et sectorielles, quelle serait une révision du PTET idéale pour vous, outre le traitement simplifié?

Mme Leblond (Isabelle) : Bien, le projet pilote miroir, entre autres, qu'on parle, donc, qui a été annoncé, où est-ce que les seuils vont être augmentés, où est-ce qu'il va y avoir... traitement simplifié des EIMT, des EIMT de deux ans. Déjà là, le premier pas, si on développe provincialement ou qu'on adapte un projet miroir au projet fédéral, va déjà être une belle amélioration au niveau du PTET.

Mme Perry Mélançon : Et je pense que, dans les contrats de travail aussi, il y a le fait qu'un travailleur qui arrive a vraiment une tâche particulière et ne peut pas faire beaucoup d'autres tâches, là, qui seraient à combler, là, au sein de l'entreprise. Ça, je sais que je... on s'en est fait beaucoup parler. Donc, ce serait de pouvoir élargir un peu les tâches que cette... travailleurs...

• (11 heures) •

M. Banville (Louis) : ...le terme «manoeuvre à la transformation», là, décloisonner parce que ça ne correspond pas à une réalité des opérations. Et j'ajoute à ce qu'Isabelle mentionnait, je reviens sur le seuil, le plafond de 10 %, dans le cadre d'un programme miroir adapté, je le répète, à la démographie, au taux de chômage, aux postes vacants, 10 % ne permet pas... bien que ce soit le dernier recours de notre recrutement, hein? Je pense que c'est important de le mentionner, on recrute d'abord localement. C'est le dernier recours, mais cette portion qui nous manque fait la différence entre compromettre des opérations et de la croissance et pouvoir aller de l'avant.

Donc, les seuils aussi, j'ajoute à la mention d'Isabelle, un horizon plus réaliste et un arrimage plus réaliste entre les besoins, en région, de l'industrie...

La Présidente (Mme Chassé) : En conclusion.

M. Banville (Louis) : ...quant aux seuils.

La Présidente (Mme Chassé) : Merci, M. Beauchamp, Mme Leblond, M. Banville, pour votre contribution à la commission.

Je suspends momentanément les travaux pour permettre au prochain groupe de prendre place.

(Suspension de la séance à 11 h 1)

(Reprise à 11 h 3)

La Présidente (Mme Chassé) : Je vous invite à prendre place. Je souhaite maintenant la bienvenue aux représentants du Centre multiethnique du Québec. Vous avez 10 minutes pour votre exposé. Je vous invite à débuter en vous présentant. La parole est à vous.

Centre multiethnique de Québec inc. (CMQ)

Mme Béguerie (Corinne) : Merci, Mme la Présidente. M. le ministre, Mme la Présidente, Mmes et MM. les députés membres de la commission parlementaire, M. le secrétaire, bonjour. Mon nom est Corinne Béguerie, je suis présidente du conseil d'administration du Centre multiethnique de Québec, que je nommerai par la suite le CMQ. Je suis accompagnée de Mme Natacha Battisti, à ma droite, qui est la directrice générale du Centre multiethnique et des Habitations du Centre multiethnique, et de Mme Dominique Lachance, à ma gauche, qui est la directrice du CMQ. Nous sommes accompagnées, comme participante silencieuse, de Sandrine Viel, qui est la directrice des Habitations du Centre multiethnique.

Pour le bénéfice de tous, je me permets quelques mots pour présenter notre organisme. Depuis 60 ans, le CMQ intervient auprès des personnes réfugiées et immigrantes qui s'établissent dans la région de la Capitale-Nationale et a reçu du MIDI le mandat d'accueillir dans la ville de Québec les réfugiés pris en charge par l'État. La mission du CMQ est d'accueillir les immigrantes et immigrants de toutes catégories afin de faciliter leur établissement, de soutenir leur adaptation et leur intégration à la société québécoise et de favoriser leur accès à de meilleures conditions socioéconomiques. Cette mission s'accomplit par le biais d'interventions individuelles et en groupe et par la participation active à différents comités. Le dynamisme du CMQ se reflète par les nombreux services qui ont vu le jour au fil des années, entre autres la session Premières démarches d'installation pour l'immigration économique permanente, et récemment, pour les immigrants temporaires, le Réseau des agents en milieu interculturel, que l'on appelle le RAMI, et l'intervention de proximité, un volet hébergement, Les Habitations du CMQ, la Clinique de santé des réfugiés, le jumelage interculturel, etc.

Le CMQ est maintenant un organisme incontournable au regard de l'accueil, de l'installation et de l'intégration des nouveaux arrivants dans la ville de Québec. Son action, reconnue par le milieu, s'est adaptée aux nouveaux mandats qu'on lui a confiés, notamment grâce à la consolidation et au développement de partenariats multiples et à l'effort d'actualisation des services, aux besoins de plus en plus diversifiés de la clientèle. De plus, depuis plusieurs années, le CMQ bénéficie de l'engagement de près de 300 bénévoles provenant de toutes les catégories de la population et travaillant au sein de toutes les sphères d'activité, confirmant ainsi l'organisme comme une ressource enracinée dans sa communauté.

Par ailleurs, les services professionnels, à l'image des valeurs transmises par l'organisme, sont dispensés par une équipe multiculturelle composée de 35 employés provenant de disciplines multiples, dédiée à la mission et aux services offerts aux personnes immigrantes. En 2018‑2019, l'organisme a accueilli 1 000 nouvelles personnes, les employés ont effectué 22 640 interventions auprès d'immigrants d'une soixantaine de nationalités.

Le CMQ a étudié avec intérêt les documents de consultation sur la planification de l'immigration 2020‑2022, et nous vous remercions de l'opportunité qui nous est offerte de vous communiquer nos commentaires et recommandations. Nos propos s'inscrivent aujourd'hui dans une perspective dictée par notre mission.

La planification actuelle de l'immigration est axée sur la recherche de main-d'oeuvre pour répondre aux besoins des employeurs, maintenir le poids des francophones au Québec et prévenir la décroissance du Québec au sein du Canada. Nous sommes en accord avec cela. En revanche, le CMQ a toujours soutenu une augmentation des niveaux d'immigration et tient à mentionner que toute personne immigrante, quelle que soit sa catégorie, que l'on parle de travailleurs qualifiés, que l'on parle de réfugiés ou de travailleurs temporaires, désire travailler dans sa société d'accueil.

Le CMQ reconnaît l'importance de l'amélioration apportée aux mesures de francisation et salue la bonification des allocations et l'augmentation de son universalité. Cependant, il se questionne sur certaines orientations dans la planification 2020‑2022, qui semblent paradoxales.

D'abord le gouvernement déclare vouloir poursuivre son engagement humanitaire par l'accueil de personnes réfugiées et d'autres personnes ayant besoin d'une protection internationale, mais les cibles sont en baisse depuis 2017. Pourquoi ne pas augmenter ce nombre et, dans une vision long terme, tabler sur le potentiel économique de ces personnes?

Ensuite, les orientations proposées n'encouragent qu'une immigration jeune, une immigration de travailleurs qui connaissent les valeurs québécoises et qui peuvent intégrer la marché du travail rapidement pour répondre aux besoins des employeurs. Pourquoi alors suspendre le volet du Programme de l'expérience québécoise concernant le volet des étudiants internationaux? Ils sont formés au Québec en français, sont intégrés, connaissent les valeurs québécoises, et on se prive de cette main-d'oeuvre potentielle disponible.

Le CMQ se questionne également sur le recrutement des travailleurs temporaires. C'est effectivement une des solutions pour répondre aux besoins de main-d'oeuvre des entreprises de la province, mais qu'en est-il de l'intégration sociale et professionnelle des conjointes et conjoints? Ils commencent tout juste à avoir accès à certains services, mais leur accompagnement repose souvent entre les mains des employeurs. Nous l'avons vu encore avec Olymel, qui nous a expliqué que c'étaient eux qui s'occupaient des conjoints des travailleurs temporaires en leur offrant notamment des emplois et en travaillant parfois avec les organismes.

Aussi, concernant le système Arrima, il ne semble pas y avoir, pour le moment, de règles claires et de critères de recrutement objectifs et non discriminatoires dans la base de données qui sera mise à la disposition des employeurs. Le gouvernement a-t-il prévu des mécanismes pour s'assurer que les employeurs choisiront les personnes selon leurs compétences et non pas selon leur pays d'origine?

• (11 h 10) •

La planification de l'immigration au Québec 2020‑2022 propose neuf orientations concernant l'immigration économique pour répondre aux besoins de main-d'oeuvre des employeurs de la province, mais seulement une orientation sur l'immigration humanitaire, somme toute assez vague, et le regroupement familial est totalement absent des recommandations et des orientations. Selon nous, l'immigration au Québec devrait respecter un certain équilibre entre les catégories humanitaire, familiale et économique. Nous proposons, dans notre mémoire, cinq recommandations qu'il nous fera plaisir de discuter avec vous lors de cette session.

D'abord, en 1 : «Poursuivre l'engagement humanitaire du Québec par l'accueil de personnes réfugiées et d'autres personnes ayant besoin d'une protection internationale en augmentant progressivement, à l'instar des autres catégories d'immigration, les cibles pour les prochaines années.»

Deuxièmement : «Reconnaître et valoriser la contribution économique des réfugiés et leur offrir des programmes de formation et de francisation en milieu de travail» qui soient adaptés. Ce sont des personnes qui, contrairement à la sous-catégorie des travailleurs qualifiés, ne choisissent pas leur lieu d'établissement. Ils sont envoyés en région, dans 14 villes de la province, où ils peuvent s'enraciner et contribuer économiquement. Ils ont d'ailleurs un taux de présence nettement plus important que les immigrants économiques.

Troisièmement : «Qu'une campagne nationale de sensibilisation et d'information positives soit portée par les instances gouvernementales afin d'atténuer les préjugés qui entretiennent des craintes au sein de la population. Le gouvernement doit mettre en application des mesures visant à appuyer des rapports harmonieux au sein de la société d'accueil en encourageant les stratégies gagnantes qui ont déjà fait leurs preuves.» Par exemple, nous avons entendu plusieurs fois au cours de cette consultation que certains préjugés sur les réfugiés sont présents. On en a parlé comme d'un fardeau, parfois. Les organismes terrain à travers la province ont développé des initiatives de sensibilisation intéressantes, pourquoi ne pas s'en servir de leviers de sensibilisation au niveau de la province?

Quatrièmement : «Que le gouvernement s'assure de soutenir et d'outiller les milieux d'accueil et de se donner les moyens pour une régionalisation efficace.» Plusieurs intervenants l'ont mentionné ces deux derniers jours, les milieux d'accueil — on parle de la santé, de l'éducation, du communautaire — doivent être triés, et les infrastructures, le logement, les transports, les écoles, les garderies sont nécessaires à l'établissement de nouveaux arrivants et doivent être présents dans les régions pour favoriser l'accueil, l'installation et la rétention de ces derniers ou plutôt leur enracinement dans les régions.

Finalement, notre dernière recommandation est : «Que la réunification familiale qui est reconnue comme un droit fondamental pour tout immigrant ou réfugié s'installant au Canada, indépendamment de la capacité financière du garant, soit possible et effective. Que la notion de famille soit révisée et que le gouvernement du Québec fasse des recommandations à ses homologues fédéraux à cet égard.» Je vous remercie.

La Présidente (Mme Chassé) : Merci à vous, Mme Béguerie. Nous allons maintenant débuter la période d'échange avec le groupe formant le gouvernement pour une période de 15 min 30 s. M. le ministre, la parole est à vous.

M. Jolin-Barrette : Merci, Mme la Présidente. Mme Battisti, Mme Béguerie et Mme Lachance, bonjour. Merci pour la présentation de votre mémoire.

Dans un premier temps, revenons, là, sur la question d'Arrima, là. Ce n'est pas la première fois que j'entends ça et je pense qu'il y a un besoin de clarification ou de dissiper les craintes ou les enjeux. Arrima est là pour faire en sorte de sélectionner les personnes, au niveau de la catégorie économique, en lien avec les besoins du marché du travail. Il n'est aucunement question de donner la possibilité de sélectionner les gens qui vont immigrer au Québec en fonction de la provenance du bassin géographique ou du pays duquel ils viennent, ça, c'est très clair, parce que le gouvernement du Québec veut donner l'opportunité à tout le monde, peu importe sa provenance dans le monde, de venir participer à la société québécoise, pour autant qu'il réponde aux besoins du marché du travail, parce que c'est ça, le plus grand enjeu auquel le Québec a fait face au cours des années.

Lorsqu'on parle, en matière d'immigration économique, d'immigration sélectionnée, c'est le fait de dire qu'on s'est retrouvés avec plein de gens qui avaient des compétences, avaient des études, avaient de l'expérience dans un domaine et qui n'occupaient pas l'emploi qu'ils souhaitaient occuper au Québec, parce que les gens étaient sélectionnés en fonction de la grille de sélection. Les pointages faisaient en sorte que, si vous aviez un doctorat, bien, vous aviez davantage de points, mais il n'y avait pas nécessairement d'emploi disponible pour cette catégorie de... ces compétences-là, ce profil-là. Alors, avec Arrima, ce qu'on fait, c'est qu'on va arrimer les profils ensemble, mais il n'y a pas de discrimination fondée sur la provenance de la personne. Puis nous, on est beaucoup dans une optique de dire : Il y a des besoins partout au Québec en matière économique, il faut répondre à ces besoins-là, et surtout assurons le jumelage entre les employeurs et la personne immigrante parce que c'est beaucoup plus facile dès le départ, si vous immigrez dans un pays... vous savez où vous en aller, vous avez déjà un emploi, votre expérience, votre expertise, vos diplômes, et, si vous êtes membre d'un ordre professionnel ou que vous souhaitez exercer un métier au Québec qui requiert l'inscription à un ordre professionnel, que déjà, toutes ces démarches-là soient entamées dès l'étranger, que vous soyez reconnu ou que, si vous avez des équivalences à faire sur le territoire québécois, bien, vous sachiez quelles sont ces équivalences-là. Parce que c'est arrivé trop souvent dans le passé que des gens se faisaient vendre la lune, disant : Venez au Québec, vous allez pouvoir travailler dans votre domaine, puis finalement, bien, ils se retrouvaient à être barrés au niveau des ordres professionnels ou à ce que les équivalences étaient tellement longues à faire que ça décourageait les gens. Puis moi, je ne veux pas qu'on en soit là. Je veux que les personnes, là, dès le jour 1, puissent avoir tous les services qui sont à leur disponibilité, qu'ils puissent réussir à occuper un emploi rapidement, se franciser s'ils ne connaissent pas le français.

Alors, toute la démarche du parcours personnalisé qu'on a présentée la semaine dernière, c'est dans cette optique-là, vraiment, dès l'étranger, en soutien, justement, avec les organismes communautaires. Alors, je voulais juste dissiper ces craintes-là relativement à la sélection des personnes immigrantes.

Parlons des niveaux d'immigration. Dans votre mémoire, vous dites : Écoutez, on devrait donner une plus grande place au regroupement familial, aux réfugiés également. Vous n'êtes pas d'accord avec les niveaux où le gouvernement du Québec s'en va avec sa proposition.

Mme Béguerie (Corinne) : Non. On pense qu'il faudrait... Ce que vous proposez, c'est d'augmenter l'immigration économique au détriment du nombre d'immigrants issus de la catégorie des réfugiés et des travailleurs... et du regroupement familial. Nous, on pense qu'il faut continuer à recevoir des personnes réfugiées et continuer à travailler sur le regroupement familial. Je vais d'ailleurs laisser la parole à Mme Lachance sur ce sujet-là.

Mme Lachance (Dominique) : Oui, en fait, je voulais juste dire quelque chose sur Arrima. Excusez-moi, je reviens un peu en arrière. On comprend bien l'intention, ce que vous nous exprimez, M. le ministre, et on espère que ça fonctionne, mais notre rôle dans la commission, c'est de nommer nos inquiétudes, parce qu'il n'y a rien qui apparaît dans le document à l'effet qu'on va se prévaloir... on va mettre un système en place pour s'assurer qu'il va y avoir une sélection, comme vous l'expliquez, qui va être équilibrée et qu'il n'y aura pas, justement, de choix par rapport à l'origine.

Donc, nous, notre rôle, c'est qu'à partir du document que vous nous avez proposé, bien, on ne voit rien qui nous dit qu'il va y avoir quelque chose de ce genre-là, donc à cet égard-là, on lève un drapeau rouge en disant : Attention. Tant mieux, là, si vous avez des mesures, puis s'il y a des choses... mais on s'attend à ce que ça nous soit expliqué et qu'on soit en mesure de comprendre bien de quelle façon vous allez vous protéger... vous allez protéger, en fait, cette sélection, à travers Arrima, d'une sélection, en fait, davantage dirigée vers une origine ethnique, à compétences égales. Donc, on espère, effectivement, qu'il va pouvoir y avoir des mesures concrètes qui vont nous être expliquées et non pas que ce soit une improvisation qui s'ajuste en cours d'année.

Par rapport aux réfugiés pris en charge par l'État et parrainés, bon, j'ai déjà fait mon laïus un peu lundi passé avec la TCRI, et je répète la même chose, parce que, présentement, je représente le Centre multiethnique, mais c'est aussi le discours de beaucoup d'organismes, il y a une préoccupation majeure de considérer les réfugiés, on l'a dit déjà, comme un fardeau, alors que ce sont des gens qui contribuent et qui s'enracinent. Donc, à cet égard-là, dans le nombre actuel de réfugiés pris en charge par l'État, entre autres, puisque c'est d'eux qu'on va parler, il y a une baisse de 23 %. On calculait ça sur le nombre déjà très, très limité qu'on reçoit annuellement, c'est 400 personnes par année. Alors, on se questionne : Qu'est-ce que 400 personnes? C'est une goutte dans l'océan. Alors, pourquoi s'acharner à diminuer ce nombre-là, alors que ça donne un message tellement défavorable envers cette catégorie-là par rapport à la population québécoise, qui, doit-on le dire encore et encore, doit être sensibilisée et préparée? Les milieux d'accueil doivent être préparés.

Donc, en diminuant, et alors que vous dites que vous allez, par la suite, réaugmenter les autres catégories, mais vous laissez en plan la catégorie des réfugiés. Quel message que ça laisse, alors que ce n'est que 400 personnes, 400 personnes, incluant des enfants, majoritairement femmes et enfants? Donc, on se demande pour quelle raison il y a un acharnement à vouloir maintenir ces niveaux-là si bas. Nous, on croit au contraire qu'il faut investir dans cette population-là qui reste, qui s'enracine, qui s'établit en région, on l'a déjà dit, et qui veut travailler, et pour lesquels il y a aussi un besoin. Ils peuvent répondre à un besoin. Ils peuvent répondre à un besoin, pour des entreprises, de travail non spécialisé ou spécialisé, parce qu'il y a aussi des gens qui sont qualifiés, on l'a déjà dit. Donc, moi, c'est cette espèce d'incompréhension là, d'acharnement à dire : On maintient... C'est 400 personnes, ce n'est rien, alors que ça donne un message tellement négatif sur cette catégorie-là. On se demande si ce n'est pas en réponse à des préoccupations électoralistes qu'il y a eu, là. Bon, on ne comprend pas vraiment, là.

• (11 h 20) •

M. Jolin-Barrette : Je vous dirais, je ne partage pas du tout votre propos puis j'inviterais peut-être un peu à de la modération, le choix du terme «acharnement», de faire le lien avec la campagne électorale. Écoutez, je pense que c'est très clair que la volonté du gouvernement, c'est de donner les ressources puis de mieux intégrer les personnes immigrantes. Jamais... Le ministère de l'Immigration a une augmentation de budget de 42 %, comme c'est le cas cette année... et qu'il y a des ressources qui vont être mises pour accompagner, travailler avec les organismes communautaires dans toutes les catégories d'immigration.

Mais le Québec a un défi aussi, a un défi de répondre, notamment, à son économie. Puis, oui, les personnes réfugiées peuvent participer à l'économie du Québec aussi, puis le Québec a toujours fait sa part, va continuer de faire sa part, en matière d'accueil des réfugiés. D'ailleurs, au niveau des demandeurs d'asile, depuis les deux dernières années, deux, trois dernières années, le Québec fait plus que sa part relativement aux ressources qui sont consacrées annuellement aux demandeurs d'asile... et qu'il y en a beaucoup parmi ceux-ci qui vont se retrouver comme réfugiés. Alors, je pense que le Québec, pour la grandeur de sa population, fait énormément, respecte ses obligations internationales, puis je pense qu'on peut en être fiers, de cela.

Alors, nous, on est vraiment dans une logique de faire en sorte, vraiment, que les gens, lorsqu'ils vont venir au Québec, ils vont avoir les moyens d'être pleinement intégrés, d'apprendre le français, puis qu'on les soutienne aussi. Le temps... L'époque qui faisait en sorte qu'on donnait un CSQ ou on accueillait les gens, les réfugiés, puis qu'on ne s'en occupait pas, c'est terminé. C'est la responsabilité de l'État, c'est la responsabilité des milieux d'accueil de faire la part... On est vraiment dans cette logique-là.

Alors, j'entends votre message, mais je ne le partage pas nécessairement, parce que, vous savez, lorsqu'on a diminué les seuils à 40 000 pour l'année 2019, il y a eu une diminution dans toutes les catégories d'une façon paramétrique. Oui, le gouvernement du Québec choisit d'augmenter vers une proportion, jusqu'en 2022... jusqu'à 65 %, la catégorie immigrants économiques. Nécessairement, si on augmente cette catégorie-là, il y a une diminution dans les autres catégories. C'est un choix que nous faisons notamment pour s'assurer de répondre adéquatement aux besoins du marché du travail.

Vous avez probablement suivi les travaux de la commission depuis le début. Il y a une nécessité, dans toutes les régions du Québec... puis, si on veut assurer, justement, que les régions... il y ait de la vitalité dans les régions, il y ait... on puisse... les entreprises demeurent en région, puis que ça constitue des milieux d'accueil aussi, bien, il faut s'assurer qu'on puisse répondre à ces besoins-là aussi.

Alors, pour ce qui est des travailleurs économiques aussi, on accueille leurs familles aussi. Souvent, on a le requérant principal, mais il y a la famille aussi qui vient avec. Alors, ça serait un peu le message que je vous lancerais. Je suis sensible à ce que vous me dites, mais il y a aussi l'analyse globale aussi qui doit être prise en compte.

Mme Béguerie (Corinne) : Vous me permettez de préciser ce qu'on... Ce que nous, on soutient, c'est... Que vous augmentiez l'immigration économique, on le comprend tout à fait, là, mais pas forcément au détriment du nombre de réfugiés et de personnes du regroupement familial. C'est pour ça que nous, on est pour une augmentation des seuils d'immigration. On est dans une vision plus long terme. Ces personnes réfugiées, qui ne sont pas toutes, d'ailleurs, des personnes qui ont besoin de francisation, certains parlent déjà français, peuvent intégrer le marché du travail rapidement.

Le Centre multiethnique a eu la possibilité, l'année dernière, de faire le profil socioéconomique des réfugiés qui sont arrivés, 2015‑2017, et il se trouve que ces gens-là ne sont pas forcément des gens très qualifiés. Ce ne sont pas des gens qui ont beaucoup d'années d'études et ce sont des personnes qui sont une main-d'oeuvre potentielle rapidement pour des employeurs. Quand on parle, dans notre recommandation 2, de valoriser la contribution économique des réfugiés et de leur offrir des programmes de formation et de francisation en milieu de travail, c'est l'idée aussi de pouvoir les intégrer rapidement sur le marché du travail. Comme toute personne qui arrive ici pour une nouvelle vie, ils ont envie de travailler, ils ont envie de contribuer. Ils n'ont pas du tout l'intention d'être sur les prestations universelles toute leur vie. Ils veulent être pourvoyeurs, comme ils l'étaient dans leur pays d'origine, auprès de leurs familles.

C'est pour ça que d'essayer de trouver des programmes adaptés, une francisation adaptée, ça se fait. Il y a des entreprises qui travaillent sur des projets comme ça, notamment à Québec, d'essayer de faire de la francisation avec le cégep ici, à Sainte-Foy, mais aussi dans l'entreprise, milieux syndiqués. On met tout le monde autour de la table et on essaie de trouver des solutions pour faire en sorte que ces personnes-là qui répondent aux besoins des entreprises aujourd'hui soient accompagnées dans leur intégration, tant au niveau du français que de leur formation professionnelle. Donc, c'est l'idée aussi de proposer des projets pilotes, peut-être, pour intégrer ces gens-là rapidement dans les entreprises en leur donnant une formation et de la francisation. Il y a des organismes communautaires sur tout le territoire, qui accueillent et qui installent des réfugiés depuis plusieurs années. On connaît bien ces personnes-là, on les accompagne depuis très longtemps. Donc, on peut aussi travailler avec le ministère de l'Immigration, et même le ministère du Travail, de l'Emploi et de la Solidarité sociale, pour mettre en place ces projets-là.

Quand il a été question d'accueillir les réfugiés syriens en 2015, toute une concertation s'est faite à Québec. C'est sûr que nous, on parle de la ville de Québec parce que c'est ici que nous sommes, mais toute une concertation des acteurs du milieu a été mise en place, et on avait fait plusieurs scénarios. On savait qu'on était capables d'accueillir, d'installer 800 personnes qui pouvaient arriver ici, à Québec, on a en a reçu 300. Donc, on a une capacité, dans les villes, d'accueil de réfugiés à travers la province, d'accueillir des personnes réfugiées pour les installer et pour aussi accompagner les entreprises ou même le ministère dans des programmes qui pourraient favoriser leur intégration économique rapidement, parce que c'est difficile, pour ces gens-là, d'arriver, et on leur dit : Pour ceux qui ne parlent pas français, il faut aller en francisation. C'est normal, ici, on vit en français, on travaille en français, on s'intègre en français, mais c'est reculer leur intégration professionnelle. Je ne sais pas, mais, quand on a 40, 45, 50 ans, qu'on arrive ici, au Québec, qu'on n'a pas choisi le Québec, parce que les réfugiés n'ont pas choisi, bien, c'est difficile d'aller sur les bancs de l'école toute une journée pour apprendre une langue difficile. Si on va en entreprise et qu'on apprend le français dans l'entreprise, on est dans une immersion, la dynamique est différente.

M. Jolin-Barrette : Sur la question...

La Présidente (Mme Chassé) : En conclusion, M. le ministre.

M. Jolin-Barrette : Oui, juste rapidement, sur la question des réfugiés, est-ce que vous considérez que la proportion de réfugiés pris en charge par l'État versus les réfugiés parrainés, supposons, par des groupes d'individus... la proportion est adéquate? Est-ce que vous pensez qu'il devrait y avoir davantage de réfugiés pris en charge par l'État? C'est quoi, votre opinion là-dessus?

Mme Béguerie (Corinne) : C'est deux situations...

La Présidente (Mme Chassé) : ...

Mme Béguerie (Corinne) : ... — j'ai cinq secondes? O.K. — deux situations différentes...

La Présidente (Mme Chassé) : Alors, ça conclut.

M. Jolin-Barrette : On s'en reparlera.

La Présidente (Mme Chassé) : Des discussions intéressantes. Maintenant, je passe la parole à la députée de Bourassa-Sauvé ou au député de Nelligan pour un bloc de 10 min 40 s.

M. Derraji : Merci.

La Présidente (Mme Chassé) : 10 min 20 s.

M. Derraji : Ce n'est pas 11 minutes?

La Présidente (Mme Chassé) : Regarde, tu sais, les gens ont pris du temps pour se placer. Alors, si on est capables d'être plus vigilants dans les passages... Mais tout le monde se fait couper de façon proportionnelle, soyez rassuré.

M. Derraji : Bien, juste la prochaine fois, si vous voulez couper, Mme la Présidente, nous aviser, parce que, moi, il me semble qu'on a 11 minutes.

La Présidente (Mme Chassé) : Vraiment, c'est proportionnel, la mise à niveau au niveau des temps.

M. Derraji : O.K., c'est bon.

La Présidente (Mme Chassé) : Soyez rassuré, mais on pourra en parler à la fin si vous le désirez.

M. Derraji : Pas de problème, on va commencer. Merci, Mme la Présidente. Merci pour votre présence, mesdames. Toujours, vous avez des bons points. On vous remercie pour votre rapport. J'ai deux petites questions, après c'est ma collègue. Je vais faire ça très vite.

J'entends, entre les lignes, des inquiétudes sérieuses par rapport à la plateforme Arrima. Est-ce que j'ai bien compris ça?

Mme Béguerie (Corinne) : Bien, des inquiétudes sérieuses... On n'a pas trouvé, comme disait Mme Lachance, dans le document de consultation, le détail de la façon dont va fonctionner la base de données qui va être mise à la disposition des employeurs, donc on se pose des questions, mais M. le ministre a quand même répondu.

M. Derraji : Oui. Vous êtes des partenaires du MIDI?

Mme Béguerie (Corinne) : Pardon?

M. Derraji : Vous êtes partenaire du ministère?

Mme Béguerie (Corinne) : Oui.

M. Derraji : Est-ce que vous avez déjà reçu une information qui vous explique comment la base de données Arrima va fonctionner?

Mme Béguerie (Corinne) : Non, on n'a pas reçu cette information. Ceci dit, on est un organisme d'accueil et d'installation des personnes immigrantes, pas un organisme en employabilité. Donc, les immigrants qui sont clients, qui viennent au Centre multiethnique, ne sont pas accompagnés dans leurs recherches d'emploi, et on n'a pas de relation avec les employeurs à cet effet-là.

M. Derraji : Non, non, je comprends votre mission, je la comprends très bien, mais vous avez évoqué quand même, dès le début, des inquiétudes par rapport à Arrima. Ma question est par rapport à vos questions. Je comprends votre mission, mais votre première question, elle était... vous avez des inquiétudes par rapport au mode de fonctionnement, du moment que le ministère est là pour éclairer l'ensemble des partenaires. Donc, ma question, elle était relativement à Arrima et comment le ministère compte utiliser Arrima. C'est ça, ma question.

Mme Béguerie (Corinne) : Alors, on a eu une réponse de M. le ministre, on espère qu'il y aura peut-être des documents explicatifs plus détaillés dans les prochains mois pour expliquer comment ça fonctionne et quels sont les critères qui sont utilisés.

• (11 h 30) •

M. Derraji : Vous avez évoqué aussi les travailleurs temporaires et leur intégration. Est-ce que... au sein de votre organisme, avez-vous eu déjà des travailleurs temporaires? Avez-vous déjà offert des services à ces travailleurs?

Mme Lachance (Dominique) : Depuis le premier... avec le programme PRIIME, un programme qui scelle le partenariat que le Centre multiethnique a entre autres avec le ministère, on a, depuis le 1er juillet, une... ils rentrent dans les populations qu'on doit desservir. Mais, depuis quelques mois déjà, on voit quand même une recrudescence et on a déjà commencé à les desservir. Donc, effectivement, ce n'est peut-être pas une masse énorme, mais on a de plus en plus de travailleurs temporaires qui viennent rechercher des services, de l'information. On a d'ailleurs initié ce qu'on appelle le PDI pour les temporaires. Normalement, le PDI s'adresse aux travailleurs qualifiés. C'est un programme qu'on a avec... des sessions qu'on offre avec le ministère de l'Immigration. Mais depuis quelque temps, avec Québec International, on offre des sessions PDI pour les travailleurs temporaires parce qu'on se dit qu'ils ont aussi besoin d'avoir l'information de base pour l'installation. Donc, on est à bonifier, à peaufiner tout ça. On va avoir, d'ailleurs, des sessions encore la semaine prochaine. Donc, c'est des initiatives qu'on a prises... en fait, on a avancé un peu la demande du ministère à cet égard parce qu'on l'a conçu un peu...

M. Derraji : Plusieurs groupes évoquent la possibilité d'avoir des travailleurs étrangers temporaires. Vous, vous pensez quoi par rapport à l'avenir de l'immigration au Québec, travailleurs étrangers temporaires ou bien des travailleurs permanents?

Mme Béguerie (Corinne) : Bien, c'est sûr que les deux programmes sont différents et ne répondent pas aux besoins qui sont les mêmes. Travailleurs temporaires, ce sont des entreprises qui ont des besoins qui vont faire du recrutement de travailleurs temporaires pour combler des besoins immédiats. En tout cas, d'après ce qu'on a entendu, les délais ne sont quand même pas si immédiats que ça. Et puis le programme de la sous-catégorie des travailleurs qualifiés fait en sorte que ces personnes-là font une demande pour venir ici via le CSQ, etc., donc c'est une démarche qui vient plus de la personne. Après, les besoins des entreprises... On peut comprendre que les entreprises ont des besoins. Moi, j'écoutais, depuis deux, trois jours, la consultation. Quand on entend les chiffres du Conseil du patronat, c'est important de répondre à ces besoins de main-d'oeuvre immédiats, et on n'est pas du tout contre cette démarche-là. Nous, ce dont on parle, c'est plus d'avoir une vision plus long terme par rapport à des personnes réfugiées ou des personnes issues du regroupement familial qu'on veut enraciner et qu'on veut garder à long terme. Il faut les deux.

M. Derraji : Le ministère a évoqué le parcours personnalisé — ça va être ma dernière question, après c'est ma collègue qui va poursuivre — est-ce que vous étiez consultés pour la mise en place du parcours personnalisé?

Mme Lachance (Dominique) : Bien, en fait, on a été informés cette année, là, des démarches. Ce qu'il faut dire, c'est que le parcours personnalisé, pour nous, la formule parcours personnalisé, nous sommes contents que ce soit institutionnalisé, mais les organismes communautaires font un parcours personnalisé avec les nouveaux arrivants, avec des plans d'action, et tout ça, depuis... c'est notre fonctionnement. On n'a pas le choix parce qu'il faut... on prend les gens avec leurs besoins au départ, on fait une évaluation puis on les oriente. Donc, que ce soit maintenant avec le ministère de l'Immigration, bien, je pense que ça va être positif s'il y a une belle collaboration puis que chacun travaille à diffuser puis à réorienter les personnes, parce qu'on travaille ultimement tous pour les nouveaux arrivants. Donc, si ça fonctionne avec une communication établie entre les différents organismes, qu'on respecte les expertises et les reconnaissances du milieu, bien, ça ne devrait qu'être positif. Mais, comme je vous dis, pour nous, ce n'est pas quelque chose de nouveau.

Si je peux me faire... Je retourne un peu en arrière, par rapport aux travailleurs étrangers, travailleurs temporaires. Pour nous, on travaille en accueil et installation. On comprend les besoins du marché du travail, mais dans tous les cas, ce qui nous importe, c'est que la personne, à l'arrivée, soit accompagnée, ait des services, peu importe sous quelle forme elle arrive, qu'elle soit accompagnée, que le milieu soit sensibilisé, que les conjoints puissent venir, autrement dit que la personne puisse avoir une vie normale, autonome et se développer dans la société d'accueil. C'est ce qui nous importe. Donc, peu importe la façon dont les travailleurs viendront, on comprend qu'il y a un besoin de marché du travail, mais ce qui est important, c'est que ces gens-là, une fois rendus au pays, au Québec, on s'en occupe puis on s'assure qu'ils demeurent, qu'ils sont heureux et qu'ils puissent profiter pleinement de la société d'accueil et surtout contribuer de façon saine et qu'on les accompagne là-dedans. C'est notre rôle, nous autres, comme organisme.

Mme Battisti (Natacha) : Je voudrais juste rajouter...

La Présidente (Mme Chassé) : Je... oui.

Mme Battisti (Natacha) : ...30 secondes, juste rajouter à qu'est-ce que Dominique mentionnait, justement, dans le parcours d'intégration personnalisé. Tout à l'heure, Olymel parlait justement de leur approche auprès des gens qu'ils vont chercher à l'extérieur et, après, la continuité. On est un partenaire, et ça fait partie pour nous, comme organisme communautaire terrain, justement, d'une approche avec des partenaires pour pouvoir travailler dans les besoins individuels des gens. Alors, on est déjà, nous, au niveau des organismes, avec des partenaires associés dans ce parcours-là individualisé d'intégration.

La Présidente (Mme Chassé) : Je reconnais la députée de Bourassa-Sauvé, qui désire prendre la parole.

Mme Robitaille : Combien de temps il reste?

La Présidente (Mme Chassé) : Trois minutes.

Mme Robitaille : Mesdames, bonjour. Écoutez, hier, on a entendu le Conseil du patronat, les restaurateurs qui donnaient un cri d'alarme, là, pour ce qui est de la pénurie de main-d'oeuvre, Olymel, ce matin, la Corporation des concessionnaires d'automobiles du Québec. Donc, il y a une pénurie de main-d'oeuvre criante, très, très sérieuse. Ce matin, le ministre nous dit que son souci, le souci du Québec, c'est de répondre à son économie.

Alors, moi, je me demandais : Est-ce que vous ne trouvez pas ça un peu contradictoire que de diminuer les seuils d'immigration dans un contexte comme celui-là, considérant ce qu'il a dit?

Mme Béguerie (Corinne) : C'est ce qu'on dit dans notre mémoire, c'est que nous, on est pour l'augmentation des seuils d'immigration proportionnellement pour chaque catégorie. Parce que, oui, on a besoin d'immigration économique, c'est un fait, et puis, de toute façon, le Québec, et le Canada s'est toujours construit sur une immigration pas mal économique aussi, mais au Québec, on a une histoire d'immigration humanitaire, je pense qu'on le fait bien, on a des bons services, on est reconnus internationalement pour ça, et c'est une catégorie d'immigration qui est importante tant au niveau... pour répondre aux besoins humanitaires et aussi pour répondre aux besoins économiques, encore une fois, dans une vision peut-être plus long terme. Parce que les personnes qui sont issues des sous-catégories, enfin, des catégories réfugiés et regroupement familial, ne répondent pas forcément tout de suite à un besoin, parce que certains ont besoin de francisation, certains ont besoin aussi d'atterrir, pardonnez-moi l'expression, mais certains réfugiés ont vécu des situations difficiles, donc, avant d'intégrer le marché du travail, il faut qu'ils se reconstruisent un peu. Mais c'est aussi le rôle des organismes comme le nôtre, et je pense que ça permet aussi à ces gens-là de s'enraciner, et d'intégrer le marché du travail, et d'être très, très loyaux aussi auprès de leurs employeurs.

Mme Robitaille : Alors, si j'entends bien, vous dites : On diminue...

La Présidente (Mme Chassé) : ...minute.

Mme Robitaille : ...on diminue les seuils au détriment de l'immigration humanitaire. Ça, c'est contraire, selon vous, à la tradition du Québec.

Mme Béguerie (Corinne) : Oui. Nous, on pense qu'il faut conserver un nombre de personnes réfugiées et de personnes issues du regroupement familial plus important que ce qu'on voit ces derniers temps.

Mme Battisti (Natacha) : Et de valoriser aussi leur apport, à ces gens-là aussi. Même s'ils arrivent, c'est des réfugiés, ils ont une contribution à offrir aussi, et souvent c'est des gens qui s'impliquent rapidement dans la société d'accueil parce que, justement, ils sont redevables.

La Présidente (Mme Chassé) : Ça conclut? 20 secondes.

Mme Robitaille : Oui, merci.

La Présidente (Mme Chassé) : Ça conclut. Je cède maintenant la parole au porte-parole du deuxième groupe d'opposition, le député de Laurier-Dorion. Allez-y, 2 min 35 s.

M. Fontecilla : Merci, Mme la Présidente. Bonjour, mesdames. Dans votre mémoire, vous parlez... «l'absence d'orientation portant sur la lutte contre l'intolérance, la discrimination et le racisme», qui, semble-t-il... vous dites, un grand défi à l'heure actuelle. Croyez-vous... Et comment cette absence-là de... ou l'absence d'orientation sur cette notion-là peut avoir une influence sur le recrutement de main-d'oeuvre et induise une... ce qui a déjà été mentionné par d'autres intervenants, la TCRI en particulier, là, une homogénéisation de l'immigration au Québec?

• (11 h 40) •

Mme Béguerie (Corinne) : C'est sûr que nous, quand on dit qu'on aimerait qu'il y ait une campagne de sensibilisation pour travailler sur les préjugés, les stéréotypes, on voit des entreprises qui sont passées ici ou des regroupements d'entreprises qui viennent ici pour dire : On a besoin de main-d'oeuvre, on est prêts à embaucher des personnes immigrantes, mais ce n'est pas le cas de toutes les entreprises. Et puis, on ne se le cachera pas, quand on regarde les réseaux sociaux, quand on regarde les commentaires qu'il peut y avoir suite à certains articles dans la presse, ils ne sont pas toujours tendres envers une certaine catégorie de personnes immigrantes.

Les études aussi, dernièrement, sur la discrimination en emploi, notamment les «testings» qui ont été faits à Montréal en 2012 ou 2014 et le dernier «testing» à Québec l'année dernière, ont montré quand même que, pour certains employeurs, bien, il était plus facile d'embaucher des personnes qui sont plus proches culturellement que des personnes plus éloignées. Les derniers «testings» ont démontré qu'en fonction du nom de la personne il pouvait y avoir une certaine discrimination.

Donc, nous, ce qu'on aimerait, c'est qu'il puisse y avoir une campagne de sensibilisation, je ne sais pas, moi, de montrer des modèles d'intégration des personnes immigrantes, comment elles contribuent à la société dans n'importe quel secteur d'activité. Que ce soit au niveau culturel, que ce soit au niveau économique, il y a beaucoup d'immigrants entrepreneurs qui ont eu des succès à travers la province, bien, de montrer que ces gens-là aussi, qui sont issus de l'immigration...

La Présidente (Mme Chassé) : En conclusion.

Mme Béguerie (Corinne) : ...ont contribué au développement économique de la province. Merci.

La Présidente (Mme Chassé) : Très bien. Je vous remercie. Je cède maintenant la parole à la porte-parole du troisième groupe d'opposition, la députée de Gaspé.

Mme Perry Mélançon : Merci, Mme la Présidente. Donc, j'aimerais revenir... Tout à l'heure, vous avez parlé que c'était plus facile pour des gens d'un certain âge d'apprendre le français à l'intérieur d'un milieu de travail, que c'était plus dynamique que dans une salle de classe. Mais qu'attendez-vous des employeurs, à ce moment-là? Est-ce qu'on doit établir des règles, des balises? Parce que c'est important quand même de s'assurer qu'il y ait vraiment un suivi de l'apprentissage du français, donc ça ne peut pas être fait de manière, là, vraiment improvisée. Qu'attendez-vous? C'est quoi, votre vision par rapport au rôle de l'employeur?

Mme Béguerie (Corinne) : Complètement, c'est pour ça que, tout à l'heure, je parlais plus de projets pilotes pour voir qu'est-ce qui peut fonctionner dans les entreprises. Est-ce qu'il y a déjà des projets qui sont en route et qui ont montré des succès? Qu'est-ce qui a bien marché? Qu'est-ce qui a moins bien marché? Qu'est-ce qu'on peut apprendre de ces projets-là? Est-ce qu'on peut travailler plus sur d'autres façons d'intégrer les personnes immigrantes dans les entreprises avec de la francisation? La francisation du MIDI, on peut l'avoir aussi en entreprise, qui est donnée par des professeurs du MIDI avec le programme du MIDI. Donc, il y a déjà des choses qui existent. C'est de voir qu'est-ce qu'on peut faire mieux, comment on peut aller de l'avant avec ce type de projets là pour intégrer ces travailleurs-là. Les entreprises ont besoin de travailleurs, donc comment on peut les accompagner, ces entreprises-là, à intégrer ces gens qui ont des compétences, mais qui ont besoin d'être accompagnés au niveau de la francisation?

Mme Perry Mélançon : Merci. Puis, en terminant, par rapport à votre campagne de sensibilisation que vous aimeriez voir qui soit mise en place, qu'est-ce qu'on pourrait faire également pour lutter contre la discrimination à l'embauche? Parce que ça, c'est un problème majeur, là, dans l'employabilité et le recrutement de nouveaux arrivants. Alors, qu'est-ce qui pourrait être fait du gouvernement pour contrer ça?

La Présidente (Mme Chassé) : En 30 secondes.

Mme Battisti (Natacha) : Ouf! O.K. Dans le fond, nous, dans la sensibilisation, c'est vraiment travailler avec... peut-être en groupes de travail, justement, avec les gens, en discussion. On sait que la sensibilisation, c'est vraiment de faire valoir l'apport pas juste économique, mais social, l'intégration. Mais en même temps, si on part seulement du milieu de travail, il y a toute une insertion qu'on doit travailler avec les partenaires et dans le milieu d'accueil, et là on vient travailler vraiment...

La Présidente (Mme Chassé) : En conclusion.

Mme Battisti (Natacha) : ...en conclusion, on vient vraiment travailler la valorisation des gens qui arrivent, les nouveaux arrivants. Et, tout à l'heure, je fais juste le point avec monsieur d'Olymel, on...

La Présidente (Mme Chassé) : Je vous remercie. Mesdames, je vous remercie pour votre contribution à la commission.

Je suspends momentanément les travaux pour permettre au prochain groupe de prendre place et je vous invite à le faire prestement, si c'était possible. Merci.

(Suspension de la séance à 11 h 45)

(Reprise à 11 h 46)

La Présidente (Mme Chassé) : Oui, bravo! Merci pour la preste agilité à tous pour prendre place. Je souhaite maintenant la bienvenue aux représentants de la Fédération des chambres de commerce du Québec. Vous avez 10 minutes pour votre exposé. À une minute de la fin, je vous fais signe, vous connaissez la façon de faire. Et je vous invite à tout d'abord vous présenter. Allez-y.

Fédération des chambres de commerce du Québec (FCCQ)

Mme Megyery (Kathy) : Bonjour. Merci pour l'accueil aujourd'hui. Je suis Kathy Megyery, vice-présidente, Stratégie et affaires économiques à la FCCQ. Je suis accompagnée aujourd'hui, à ma droite, d'Alexandre Gagnon, directeur, Main-d'oeuvre et Santé et sécurité au travail, et, à ma gauche, de Michel Cournoyer, économiste-conseil. Merci.

La FCCQ est à la fois une fédération des chambres de commerce et une chambre de commerce provinciale. La FCCQ regroupe plus de 130 chambres de commerce et plus de 1 100 membres corporatifs. Ainsi, la FCCQ représente plus de 50 000 entreprises exerçant leurs activités dans tous les secteurs de l'économie et sur l'ensemble du territoire québécois. La FCCQ et ses membres sont depuis longtemps très actifs sur les questions relatives à l'immigration et à la gestion de la diversité dans les milieux de travail. La FCCQ se prononce d'ailleurs systématiquement lors des consultations publiques. La FCCQ participe également activement aux travaux de la Commission des partenaires du marché du travail et de ses instances.

Par ailleurs, partout à travers la province, les chambres de commerce fournissent de nombreuses occasions à des entreprises de réseauter avec des représentants d'organismes voués à l'intégration des personnes immigrantes et organisent des conférences pour leurs membres avec des experts sur le sujet. En outre, des activités d'appariement entre les employeurs des régions et les personnes immigrantes sont organisées dans le cadre de l'initiative de la FCCQ Un emploi en sol québécois.

La contribution de la population immigrante à la dynamique du marché du travail au Québec est indispensable. À titre d'exemple, si le bassin de main-d'oeuvre de 25 à 54 ans a crû au Québec entre 2006 et 2018, c'est grâce à la hausse de la population active chez les personnes immigrantes, qui s'est chiffrée à 237 000 alors que celle-ci baissait de près de 200 000 chez les personnes nées au Canada. L'apport de l'immigration est méconnu. Celle-ci a évidemment un impact sur le court et moyen terme, mais également à long terme, alors que les immigrants de deuxième génération et des générations subséquentes ont une grande influence sur notre démographie et notre réalité économique.

Parallèlement aux difficultés croissantes de recrutement auxquelles sont confrontées les entreprises québécoises, un nombre sans précédent de personnes à travers le monde souhaitent acquérir des expériences de travail à l'étranger. Ce désir est manifeste dans la plateforme Arrima, où l'on compterait plus d'un quart de million d'inscriptions depuis sa mise en ondes. Il y a une opportunité évidente à saisir alors que les besoins du Québec explosent.

• (11 h 50) •

La FCCQ voit d'un bon oeil l'exercice de revoir périodiquement notre planification de l'immigration. Toutefois, afin d'asseoir la révision pluriannuelle sur des faits, de favoriser une lecture commune de la situation et d'éclairer la décision, la FCCQ recommande de baser la décision quant aux seuils d'immigration sur des données économiques et sociales objectives qui démontreront, nous le croyons, l'importance et notre capacité d'augmenter substantiellement l'immigration. Un tel tableau de bord de l'immigration pourrait être développé par la Commission des partenaires du marché du travail, qui regroupe les parties prenantes à une intégration et une francisation réussies.

La FCCQ croit que les orientations générales de la planification vont dans le bon sens, mais que certains aspects doivent être revus, notamment le rythme du redressement du nombre de travailleurs qualifiés admis. La diminution du seuil d'immigration à 40 000 en 2019 amène la nécessité de rattraper l'afflux de travailleurs qualifiés de façon plus importante.

Compte tenu du caractère d'urgence que vivent plusieurs entreprises par rapport aux pénuries de main-d'oeuvre, notamment en région, la FCCQ considère qu'il est plus que temps d'agir, alors que la planification propose d'y aller avec précaution et une hausse graduelle des niveaux. En somme, la proposition nous appelle à se hâter lentement, alors qu'à nos yeux il faut accélérer le rythme.

Le nombre de travailleurs qualifiés admis est en baisse depuis 2012. Le Québec n'en a jamais reçu aussi peu depuis 2006. Force est de constater que la politique d'immigration n'a pas suivi l'évolution du besoin économique est s'est plutôt inscrite dans le sens contraire, exacerbant les difficultés de recrutement des entreprises. Aux yeux de la FCCQ, on doit faire mieux et plus rapidement.

La FCCQ déplore les délais dans le déploiement d'Arrima, et nous souhaitons grandement que le nouvel échéancier de janvier 2020 pour sa mise en oeuvre, et donc du recrutement direct, soit respecté. Mais pour que ces outils donnent leur plein rendement, les démarches à suivre devront être connues des entreprises, simples à utiliser, souples afin de s'ajuster aux réalités locales des marchés du travail et peu coûteuses. À cet effet, une campagne de promotion et une aide technique à la disposition des employeurs apparaissent indispensables.

La FCCQ propose de rétablir dès 2020 le niveau moyen des admissions de travailleurs qualifiés des 10 dernières années précédant 2019, soit à près de 29 000 admissions, et de le faire évoluer selon la planification par la suite. Le nombre total maximum d'admissions atteindrait, à la fin de la période de planification en 2022, près de 60 000, soit le seuil global que préconise la FCCQ.

Comme nous l'avons mentionné à plusieurs reprises par le passé, la FCCQ considère que les exigences à l'égard de la connaissance initiale du français sont trop élevées et éliminent des candidatures qui répondent aux besoins des entreprises. Nous recommandons donc une révision à la baisse de celles-ci, tout en accordant les investissements requis pour accompagner la francisation des travailleurs en emploi.

La grille de sélection est l'outil central du dispositif d'immigration actuel en ce qui a trait aux travailleurs qualifiés, et il demeure urgent de revoir les critères qui président à la sélection des personnes immigrantes, car le système de déclaration d'intérêt ne dispense pas de tels critères. Mais on en sait peu sur les résultats qu'elle produit et sur sa capacité réelle à identifier les candidats répondant aux besoins du marché du travail. Bref, la grille apparaît comme une boîte noire. Ainsi, la FCCQ invite le ministre à revoir rapidement la grille de sélection et à mettre ensuite en place un panel d'experts indépendants afin d'analyser l'efficacité de la grille et faire des recommandations.

Une chose est certaine, le poids accordé au fait de détenir une offre d'emploi validée devra être prépondérant dans la nouvelle grille de manière à assurer qu'un employeur puisse effectivement recruter à partir du bassin des candidats inscrits à Arrima. À cet effet, la FCCQ recommande que les candidats recrutés dans une profession en déficit régional de main-d'oeuvre soient sélectionnés sans autre formalité et que ce diagnostic soit établi sur la base des prévisions sur un horizon de 10 ans produites par Emploi-Québec.

La FCCQ croit que l'orientation d'appuyer les employeurs de toutes les régions du Québec est insuffisante, puisqu'il s'agit là d'un besoin criant laissé en plan par la priorisation d'une immigration fortement scolarisée et urbanisée. Pour la FCCQ, il serait souhaitable d'ajouter une orientation à la planification de manière à s'assurer que les besoins des régions soient davantage considérés dans la sélection.

La FCCQ considère que les programmes d'immigration permanents et temporaires sont complémentaires, les premiers visant des besoins structurels tels ceux associés à l'évolution démographique, tandis que les deuxièmes permettent de répondre à des besoins ponctuels comme ceux associés aux emplois saisonniers.

En ce qui a trait au Programme des travailleurs étrangers temporaires, la FCCQ est d'avis que les démarches relatives aux études d'impact sur le marché du travail devraient être rationalisées en réduisant les exigences pour les demandeurs, en abaissant les frais par demande, en utilisant les outils modernes de télécommunication et en mettant fin à l'enchevêtrement de responsabilités entre les deux gouvernements.

La Présidente (Mme Chassé) : Il vous reste moins d'une minute.

Mme Megyery (Kathy) : Le processus devrait être simplifié et accéléré et son résultat rendu plus prévisible pour les professions en demande.

En conclusion, la FCCQ croit que les orientations générales de la planification vont dans le bon sens, mais que certains aspects doivent être revus, notamment le rythme de redressement du nombre de travailleurs qualifiés admis. La FCCQ considère qu'il est plus que temps d'agir, alors que la planification propose d'y aller avec précaution et une hausse graduelle des niveaux. Or, les niveaux mis de l'avant dans la planification sont si faibles...

La Présidente (Mme Chassé) : En conclusion.

Mme Megyery (Kathy) : ...qu'ils contribueraient à accroître significativement le nombre de pénuries régionales. En somme, il faut accélérer le rythme et se doter d'objectifs ambitieux à la hauteur de nos besoins. Merci.

La Présidente (Mme Chassé) : Mme Megyery, merci beaucoup. Je passe maintenant la parole au ministre pour un bloc d'échange, puisqu'on l'a fait précédemment, de 16 minutes.

M. Jolin-Barrette : Merci, Mme la Présidente. Mme Megyery, M. Gagnon, M. Cournoyer, bonjour. Merci d'être présents ici, en commission parlementaire, pour nous présenter votre mémoire.

Alors, vous trouvez que les seuils proposés dans le cahier d'orientation sont trop bas. C'est ce que je décode du message général. Je crois vous avoir... Vous avez dit : On devrait avoir une cible vers 60 000 immigrants environ, c'est bien ça?

Mme Megyery (Kathy) : Oui, c'est bien ça.

M. Jolin-Barrette : O.K. Il y a une réalité aussi. Vous n'êtes pas sans savoir qu'on a diminué les seuils à 40 000 pour l'année 2019, justement pour prendre un pas de recul et aussi pour faire en sorte de s'assurer que chaque personne immigrante soit bien intégrée, qu'on lui donne les ressources nécessaires afin d'assurer sa francisation, son intégration. Est-ce que vous trouviez que, dans le passé, le processus d'intégration, de francisation était adéquat?

M. Gagnon (Alexandre) : Bien, vous posez la question, on sait très bien que le Vérificateur général, nécessairement, avait émis certaines préoccupations à cet effet. Il y a eu notamment des resserrements quant à... notamment dans le projet de loi n° 9 pour s'attaquer à ça, notamment quant à la coordination des différents efforts qui sont faits au niveau de la francisation. Récemment, vous avez fait le système déclaration d'intérêt, qui a été mis en place, il y a le processus d'intégration personnalisé qui a été mis en place, des investissements importants qui ont été faits au niveau de la francisation. Par la force des choses, on se dit : Bien, le pas de recul, là... C'est difficile de voir autre chose qu'on pourrait actuellement mettre en place, là, que les outils ou tout au moins la base n'a pas été mise récemment.

Donc, à partir de là, aujourd'hui, où est-ce qu'on s'en va? Qu'est-ce qu'on a besoin? Évidemment, nous, on propose, oui, 60 000 immigrants, vous l'avez mentionné, des seuils à 60 000, mais principalement... et là c'est un petit peu plus dur de l'expliquer lorsqu'on fait une allocution, mais ce qu'on vise, ce qui est important, c'est le nombre de travailleurs qualifiés, c'est surtout là... et le nombre de travailleurs économiques, là, d'immigrants économiques, c'est là qu'on a un besoin de rehaussement.

Ce qu'on passe comme message, c'est : Il faut arrêter d'avoir une dichotomie entre les immigrants humanitaires, disons, et les immigrants économiques. Les besoins du marché du travail, c'est par les travailleurs qualifiés. Nous, notre message est sur l'augmentation des travailleurs qualifiés, et là on vise entre 35 000 et 36 000, là, afin de répondre aux besoins.

M. Jolin-Barrette : O.K. Mais vous disiez, M. Gagnon... avec ce qui a été annoncé par le gouvernement outre la francisation, le Parcours d'accompagnement personnalisé, les ressources supplémentaires, vous dites : On ne voit pas d'autres choses qui pourraient être rajoutées de la part du gouvernement du Québec. Dans le fond, vous dites : Le gouvernement du Québec a fait son travail pour mettre en place les mesures d'accompagnement, d'intégration et de francisation. Là, vous dites : Puisque vous avez déployé les ressources, là vous pourriez augmenter les seuils. C'est ce que vous dites?

Mme Megyery (Kathy) : En respectant, bien sûr, les échéanciers proposés pour la mise en place de ces nouvelles mesures.

M. Jolin-Barrette : O.K. Mais ce que vous dites, c'est que les services que nous allons offrir aux personnes immigrantes sont suffisants pour assurer l'intégration.

M. Gagnon (Alexandre) : Bien, suffisants, on va le voir, évidemment, à l'usage, hein? Il va falloir le voir, comment ça va se matérialiser sur le terrain. Tout au moins, est-ce que les assises légales, techniques ont été mises en place? On croit que oui. Maintenant, il faut mettre les efforts puis le mettre, l'amener sur le terrain, évidemment. Mais même auparavant les indicateurs économiques nous montraient qu'il y avait une certaine amélioration quant à l'amélioration des immigrants, là, notamment au niveau du taux de chômage, là, au niveau du taux d'activité. Il y avait quand même des améliorations qui venaient, là, qu'on voyait entrevoir, là, déjà auparavant également.

• (12 heures) •

M. Jolin-Barrette : O.K. Tout à l'heure, je vous entendais, relativement à Arrima, sur le Portail employeurs. Vous disiez : On souhaite que l'accès en libre-service soit livré, comme prévu, à l'hiver 2020, et c'est toujours l'objectif du gouvernement du Québec. Je souhaitais simplement vous informer qu'actuellement déjà les employeurs du Québec peuvent faire appel au ministère de l'Immigration. Ce n'est pas en accès libre-service, sauf qu'il y a des agents du ministère de l'Immigration qui sont disponibles pour accompagner les employeurs qui auraient des besoins, et donc de pouvoir utiliser Arrima, d'utiliser les offres d'emploi validées aussi.

Je voulais qu'on discute du PEQ, du Programme de l'expérience québécoise. Vous suggérez son élargissement. Qu'est-ce que vous entendez par l'élargissement du Programme de l'expérience québécoise?

M. Cournoyer (Michel) : L'élargissement, en particulier pour les diplômés de la formation professionnelle. Lorsqu'on regarde les postes vacants, le portrait des postes vacants, les difficultés de recrutement des entreprises, on s'aperçoit qu'une bonne partie des postes vacants sont pour des titulaires d'un diplôme de secondaire ou moins. Le diplôme d'études professionnelles est un diplôme d'études secondaires. Il y a un énorme besoin de candidats de la formation... de diplômés de la formation professionnelle en région, et le programme, lui, va plutôt favoriser les études supérieures. Et, dans ce sens-là, on pense qu'il y aurait là une bonne occasion pour pérenniser la présence des étudiants en formation professionnelle, des étudiants étrangers, de leur offrir aussi les possibilités qu'on offre aux diplômés de l'éducation supérieure.

M. Jolin-Barrette : Donc, prenons un cas concret, là. Vous dites : Quelqu'un qui ferait un D.E.P., il devrait pouvoir accéder au PEQ, ce qui n'est pas le cas actuellement. Supposons, vous faites un D.E.P. en boucherie, actuellement vous ne pouvez pas accéder par le Programme de l'expérience québécoise. Bien, vous dites : Il y a des besoins, supposons, dans le domaine de la boucherie, on est en pénurie, et donc, si jamais un étudiant étranger venait faire son cours en boucherie, bien, on voudrait lui donner l'opportunité de passer par ce programme-là.

M. Cournoyer (Michel) : Exactement.

M. Jolin-Barrette : O.K. Donc, est-ce que vous mettriez une limite? Parce qu'actuellement il y a une limite par rapport au nombre d'heures de la formation associée. Pour vous, est-ce que ce sont tous les diplômes d'études professionnelles qui devraient se qualifier au PEQ, même chose pour les attestations d'études collégiales? Est-ce que c'est dès qu'on a un diplôme québécois ou il y a certains paramètres à mettre dans le...

M. Cournoyer (Michel) : Oui. Un paramètre facile, c'est celui que fournit Emploi-Québec dans son diagnostic des perspectives professionnelles sur un horizon de 10 ans. On compte, dans ces perspectives, le dernier numéro qui est paru cet hiver, si je ne m'abuse, quelque 500 pénuries... 500 professions en pénurie régionale au Québec. C'est énorme. Donc, ce sont des domaines d'études où, effectivement, il y a une capacité d'intégration permanente.

Et donc on pense que, si, par exemple, on prenait cette liste-là qui est disponible, et dont, d'ailleurs, on fait amplement usage pour l'orientation professionnelle des jeunes, on souhaite que les jeunes s'inscrivent dans les études qui conduisent dans des secteurs où il y a des pénuries de main-d'oeuvre, bien, on pourrait appliquer le même raisonnement, dans le cadre du PEQ, aux diplômés de la formation professionnelle.

M. Jolin-Barrette : Est-ce que vous trouvez que le PEQ devrait être uniquement pour les diplômes qui sont avec des formations en demande? Parce qu'actuellement, là, le PEQ, supposons, il est ouvert, là, à tous les diplômes... Je vous donne un exemple : Moi, je suis avocat de formation. Supposons que je venais faire mon cours de droit de l'étranger, je suis diplômé en droit, à ce moment-là je peux passer au PEQ, alors qu'on sait tous qu'on ne manque pas d'avocats au Québec, actuellement. Alors, est-ce que vous pensez que ça devrait juste être des professions en demande qui sont admissibles au PEQ, vos diplômés?

M. Cournoyer (Michel) : C'est une suggestion en ce qui concerne la formation professionnelle pour... mais il faudrait faire des études d'impact plus précises, là, pour vraiment voir comment est-ce que ces décisions-là peuvent affecter le nombre de personnes à être admissibles. Mais certainement, une chose est certaine, c'est que le PEQ... actuellement, il y a des pénuries pour les diplômés de formation professionnelle, et on pense que le PEQ pourrait avantageusement être ouvert dans une perspective de réduire ces pénuries.

M. Jolin-Barrette : O.K. Je vous remercie. Je sais que j'ai des collègues qui souhaitent poser des questions, alors je vais laisser la parole. Merci.

La Présidente (Mme Chassé) : Alors, la députée de Les Plaines désire prendre la parole.

Mme Lecours (Les Plaines) : Merci, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Chassé) : Ça me fait plaisir. Allez-y.

Mme Lecours (Les Plaines) : Merci, M. le ministre...

La Présidente (Mme Chassé) : Il vous reste 6 min 55 s.

Mme Lecours (Les Plaines) : Six minutes? Parfait. Merci de votre présence aujourd'hui, votre éclairage et vos recommandations.

Dans votre mémoire, il y a deux points qui ont suscité un petit peu plus mon intérêt. Évidemment, vous dites que la connaissance du français est trop élevée, les critères sont trop élevés pour les besoins actuels. Bon, on a récemment fait quelques annonces qui semblent vous plaire, c'est ce que je comprends. On va en voir les effets, bien sûr, dans les prochains mois, les prochaines années. Et tout ça nous ramène aussi à la grille de sélection, que vous qualifiez de boîte noire. En fait, j'aimerais vous entendre un petit peu plus là-dessus, et quelles seraient les modifications que nous devrions apporter à cette grille, justement, parce que vous recommandez également qu'elle soit analysée par un comité consultatif, c'est ce que j'ai bien compris.

M. Cournoyer (Michel) : Oui. D'abord, pour donner un exemple, on peut prendre l'exemple dont on vient de discuter, celle de la formation professionnelle. On a sciemment augmenté les poids, dans la grille, pour les personnes dans des domaines de formation où il y a des pénuries, avec peu de conséquences. On ne sait pas très bien quel est le résultat. On augmente des poids, mais, dans la sélection, l'effet de jouer avec les poids est difficile à cerner.

La dernière analyse publique, à tout le moins... Je ne doute pas qu'au ministère les gens qui font des recommandations quant aux différentes pondérations ont une capacité de prévoir les impacts, mais de l'extérieur, ça apparaît comme une boîte noire, d'autant plus que la dernière évaluation qui a été faite est publique — c'est celle de la Vérificatrice générale en 2010‑2011, ça date un peu — et qui arrivait à la conclusion que moins de 10 % des travailleurs qualifiés admis au Québec l'étaient sur la base d'une formation en demande. Donc, on ne peut pas dire que les besoins du marché du travail dominent l'effet de la sélection, de la grille. On peut certainement penser qu'il y a moins de 1 % des travailleurs qualifiés admis qui le sont sur la base d'une offre d'emploi qu'ils détiennent, d'une offre d'emploi en main. On ne peut pas croire que la grille favorise largement le besoin du marché du travail quand il y a moins de 1 % des gens qui ont un emploi lorsqu'ils sont admis.

Mme Lecours (Les Plaines) : Je fais du chemin par rapport à ce que vous me dites là, au niveau de la qualification. Dans le cadre, justement, du programme... pas le programme, mais le projet que vous avez mis en place, Mon premier emploi en sol québécois, justement, il y a beaucoup d'immigrants qui étaient surqualifiés par rapport... Moi, je l'ai vécu, je jasais avec certains d'entre eux, là, qui étaient surqualifiés. Ils arrivaient en région, ils auraient voulu aller en région, mais il n'y avait pas les emplois qui étaient à la mesure de leurs compétences. Donc, ce serait dans la grille des...

• (12 h 10) •

M. Cournoyer (Michel) : La grille est l'outil par excellence pour favoriser l'adéquation, encore faut-il que les poids le permettent. Et, dans l'élément clé qu'on croit qu'il doit être changé dans la grille, et on en fait une priorité à court terme, c'est le poids qu'on accorde, justement, à avoir en main une offre d'emploi validée. Si on ouvre le bassin des personnes qui sont inscrites à Arrima, on ouvre ce bassin-là au recrutement direct par les employeurs, mais par ailleurs qu'on n'accorde pas un poids suffisant, si ces personnes-là se font recruter, on aura tout fait ça pour rien. On aura créé une capacité d'aller recruter dans une banque sans pouvoir admettre la personne.

Donc, il y a des changements majeurs, mais, comme c'est très complexe et on en connaît peu, lorsqu'on change un élément, on dit : À court terme, allons directement pour s'assurer qu'au niveau du recrutement direct on ait l'effet qu'on souhaite et, à moyen terme, qu'on examine ça de manière transparente avec des experts externes pour qu'on ait une meilleure connaissance des résultats que donnent les modifications aux différentes pondérations de la grille.

Mme Lecours (Les Plaines) : J'ai encore du temps? Oui, deux minutes. Donc, rapidement, bon, lorsque tout ça va faire son chemin, il faut évidemment en faire la promotion aussi à l'étranger. Comment vous analysez nos moyens, actuellement, de promotion? Et est-ce qu'il y aurait des ajustements aussi à y faire?

M. Cournoyer (Michel) : L'ajustement, c'est certainement en fonction des modifications qu'on va apporter. Comme par exemple, un des éléments à très court terme, le recrutement direct, va favoriser une réponse aux besoins des régions. Il faudrait faire connaître davantage les besoins de ces régions-là pour que les candidats à l'immigration à l'étranger sachent qu'ils ont des meilleures chances d'être recrutés au Québec. Tu sais, il faut faire connaître les opportunités qu'on veut offrir.

Mme Lecours (Les Plaines) : Mais outre le recrutement direct, est-ce qu'il y a autre chose aussi qu'on peut mettre de l'avant?

M. Gagnon (Alexandre) : Déjà, il va falloir s'assurer que ceux qui sont dans le système de déclaration d'intérêt, qui répondent à une déclaration d'intérêt vont correspondre aux nouvelles réalités d'une grille modifiée. Donc, si on modifie la grille, si on permet, notamment, à des personnes avec un diplôme d'études professionnelles d'avoir davantage d'accès à une sélection du Québec, bien, par la force des choses, il va falloir aller approcher ces nouvelles clientèles là qui auparavant avaient comme message : N'essayez même pas, vous ne serez pas accepté. Donc, s'assurer, dans les nombreuses personnes qui vont se déclarer intéressées, bien, qu'elles soient informées des nouvelles réalités, de nos nouveaux besoins déclarés, de notre marché du travail puis de notre capacité d'intégration.

Mme Lecours (Les Plaines) : Merci beaucoup.

La Présidente (Mme Chassé) : Merci. Ça conclut le bloc d'échange avec le parti formant le gouvernement. Maintenant, nous passons au parti formant l'opposition officielle pour un bloc d'échange de 10 min 40 s. On a rattrapé du temps.

M. Derraji : Merci, Mme la Présidente. Je sais que...

La Présidente (Mme Chassé) : M. le député de Nelligan.

M. Derraji : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Madame messieurs, bienvenue à la Fédération des chambres de commerce du Québec. Ici, en commission, on aime ça savoir avec qui on parle. Bien, je tiens juste à rappeler que vous représentez 130 chambres de commerce, 1 100 membres corporatifs, 50 000 entreprises. C'est quand même énorme et très important. Donc, merci pour votre présence. Merci aussi pour la qualité de votre rapport.

J'ai trois points. Le premier point concerne la grille de sélection, que vous considérez une boîte noire. Aujourd'hui, avec le processus que le ministre met en place au niveau de la prochaine planification, au mois de novembre, on va mettre une nouvelle planification pour les deux prochaines années. Selon vous... La recommandation que vous avez, la recommandation 6 : «La FCCQ invite le ministre à revoir rapidement la grille de sélection et à mettre ensuite en place un comité consultatif indépendant afin d'analyser l'efficacité de la grille et faire des recommandations.»

Est-ce que je peux comprendre que, même avec Arrima, avec l'arrimage que le ministère compte faire, on s'en va vers le mur parce que la grille ne répond pas aux besoins du marché du travail?

M. Gagnon (Alexandre) : Bien, je ne crois pas qu'on s'en aille vers le mur, parce qu'on a dénoté l'intérêt que le ministre a dit de modifier cette grille-là. Donc, par la force des choses, si la grille va être modifiée selon les nouvelles réalités, on a bon espoir que ça réponde à notre besoin du marché du travail pour les prochaines années. Mais effectivement, si on reste avec la grille... Auparavant, elle n'a pas démontré nécessairement sa grande efficacité, une efficacité optimale, disons, à sélectionner les bons immigrants.

M. Derraji : Avez-vous déjà participé à des discussions sur la modification de la grille?

M. Gagnon (Alexandre) : Est-ce qu'il y a eu... Bien, par la force des choses, à chaque fois qu'on vient en commission parlementaire venir vous voir, on mentionne les discussions sur la grille. La Commission des partenaires du marché du travail, à laquelle on siège, a fait des recommandations à cet effet-là, notamment. Donc, c'est une discussion continuelle, là, au courant des années.

M. Derraji : Mais c'est quoi, les garanties que vous avez que la grille de sélection va être changée? C'est ça, moi, ma question. S'il n'y avait pas des discussions avec les partenaires du marché du travail, exemple, la FCCQ... Avez-vous mis sur la table une feuille de route par rapport à la nouvelle grille de sélection?

M. Gagnon (Alexandre) : Est-ce qu'on a mis une feuille de route sur la grille de sélection? Je ne crois pas nécessairement qu'on a demandé un délai. Évidemment, nous, c'est quelque chose qu'on parle depuis plusieurs années, tous partis confondus, auxquels on demande de faire des modifications à cette grille-là. Évidemment, on a confiance, maintenant, là, avec les discussions qu'on a aujourd'hui et qu'on a depuis plusieurs années, que le temps est arrivé.

M. Derraji : Donc, si je peux conclure, que, la grille de sélection, dans la nouvelle politique d'immigration qui sera annoncée au mois de novembre, son changement, il est très important pour la FCCQ.

M. Gagnon (Alexandre) : Il est plus que nécessaire.

M. Derraji : Excellent. Mon deuxième point, c'est par rapport au programme d'immigration temporaire. Je ne vous cache pas la vérité que, depuis deux, trois jours, on en entend beaucoup parler et on entend même que l'idée, c'est vraiment aller dire au fédéral, je dirais, de diminuer un peu certains... le fardeau, de répondre plus rapidement, etc.

Mais vous, vous ramenez un autre point très, très important. Vous dites, dans votre rapport : «Le programme d'immigration temporaire ne permet pas de répondre aux besoins du marché du travail [au Québec].» C'est quand même une affirmation. Pouvez-vous nous éclairer par rapport à ça?

M. Gagnon (Alexandre) : C'est que le Programme des travailleurs étrangers temporaires, depuis plusieurs années, a connu un resserrement. Notamment, il y a... puis ça, ça dépend, évidemment, du gouvernement fédéral, mais... et ce qui a fait qu'alors que nos besoins de main-d'oeuvre étaient en grandissant, le nombre de travailleurs étrangers temporaires qui étaient acceptés est allé en diminuant. Là, on est allés... je pense qu'on est rendus à près de 7 000 immigrants temporaires, là, en dehors de l'agriculture. Donc, par la force des choses, le programme n'est pas optimal. Quelqu'un qui vient avec ce programme-là, par la force des choses, au niveau de l'intégration, ce n'est pas optimal non plus, considérant qu'en étant temporaire est-ce qu'il a accès au logis aussi facilement? De s'acheter une maison, d'avoir des prêts hypothécaires, c'est impossible. Donc, ce n'est pas la voie à venir, là, pour notre immigration permanente.

M. Derraji : Oui. Donc, pour vos... Oui, allez-y, allez-y.

M. Cournoyer (Michel) : ...je ne vais vous citer que quelques chiffres. Le Programme des travailleurs étrangers temporaires, si on considère les travailleurs hors agriculture et hors aides familiales, le nombre, pour l'ensemble du Canada, a diminué, de 2013 à 2018, de 65 %. Or, on avait... Donc, on a une diminution du nombre de travailleurs hors agriculture, aides familiales, d'au-delà, disons, des deux tiers, 65 %, en quelques années, alors qu'on a assisté à une explosion des besoins de main-d'oeuvre.

M. Derraji : C'est un point extrêmement important, et je vous remercie de le remettre sur la table, parce qu'on a tendance à penser toujours que le programme des travailleurs temporaires est la solution pour la pénurie de main-d'oeuvre qu'on a au Québec. Et c'est là où... Et je vous remercie, encore une fois, pour l'éclairage, parce que je ne veux pas qu'on fait fausse route et penser que la solution, c'est régler le programme de travailleurs temporaires étrangers avec Ottawa et laisser à côté quelque chose qu'on a le leadership au Québec, à savoir le programme de résidence permanente, et notamment avec la grille de sélection.

Je vous repose une autre question. Là, vous avez... on est dans un dilemme. Il y a des gens qui disent : Bon, écoutez, le programme temporaire, c'est comme un PayPass, on va aller chercher rapidement nos travailleurs. Et, de l'autre côté, il y a une école de pensée qui pense que c'est au gouvernement de trouver les solutions par rapport à la grille de sélection et aller accélérer le processus par rapport à la permanence, ça veut dire les programmes permanents. Si je vous pose cette question, ça serait quoi, votre alignement?

M. Gagnon (Alexandre) : Bien, vous l'avez bien mentionné, évidemment, actuellement, le Programme des travailleurs étrangers temporaires est très valorisé pour une question de délais, hein, parce que nos délais au niveau du programme régulier, autant provincial que fédéral, sont très, très, très longs. Donc, de sélectionner un immigrant sur la base d'une offre d'emploi validée aujourd'hui, se dire qu'il va arriver dans deux ans et demi, trois ans, évidemment, là, c'est inconcevable. Ça ne répondra pas aux besoins du marché du travail immédiats. Mais est-ce qu'il y a une solution facile afin de réduire ces délais-là? Bon, je pense, poser la question, c'est y répondre. Mais est-ce qu'on vous encourage, au gouvernement puis au niveau des oppositions, de continuer à marteler le message, de voir qu'est-ce qui se répète entre les deux instances gouvernementales et qu'est-ce qui pourrait être rationalisé afin de réduire les délais? Évidemment, à ce moment-là, si on a un délai respectable, le programme régulier sera, évidemment, tout à fait à être privilégié.

• (12 h 20) •

M. Derraji : Du moment que vous m'interpelez en tant qu'opposition officielle, je vais vous dire que je vais mener la bataille pour l'économie du Québec, pour les entrepreneurs du Québec et je vais exiger que le gouvernement, s'il y a une bataille à mener, il améliore les processus de la résidence permanente. Oui, au niveau des immigrants temporaires, programme des travailleurs temporaires, mais je ne veux pas que ça soit ça uniquement, notre cheval de bataille pour les prochains mois.

Ma dernière... ma troisième question concerne le PEQ. Vous avez ramené une autre bonne proposition, donc l'élargissement, mais je tiens juste à vous rappeler qu'en plein mois... en plein été le gouvernement a mis un moratoire, et donc ce programme n'existe plus, le programme du PEQ, et on sait c'est quoi, la plus-value de ce programme. Avez-vous des choses à nous partager par rapport à ce programme? Pourquoi vous tenez vraiment à ce que ce programme reste, mais aussi le bonifier?

M. Gagnon (Alexandre) : Bien, je vais vous reprendre avec modestie, le programme a été pour les étudiants étrangers.

M. Derraji : Oui, étrangers, oui, je parle des étudiants étrangers.

M. Gagnon (Alexandre) : Oui, oui. Pour les étudiants étrangers, il y a eu un moratoire jusqu'à la fin de l'année. On a bon espoir que... Évidemment, ce n'est pas une situation souhaitable à première vue, mais on a bon espoir qu'avec la nouvelle planification... que les chiffres soient suffisamment élevés, que ces personnes-là, au mois de novembre, lorsque ce moratoire-là va être levé, puissent redemander puis de passer au niveau de la... d'avoir leur certificat de sélection.

M. Derraji : Oui, mais surtout, quand on parle de rajeunir, démographie, le programme d'étudiants étrangers aide plusieurs universités, mais aussi l'économie québécoise. Donc, selon vous, est-ce qu'il n'y a pas un moyen de voir aussi l'utilité économique en termes de main-d'oeuvre?

M. Gagnon (Alexandre) : Bien, on a bon espoir que ce programme-là va être rétabli intégralement, là, à partir de la fin de ce moratoire-là. Clairement, les étudiants étrangers ont démontré leur utilité, autant pour nos institutions d'éducation que pour notre développement économique. Là, à partir de ce moment-là, je crois que cette pause-là... Est-ce qu'elle était nécessaire? Je vais vous laisser de l'analyser. Mais pour la suite, évidemment, on aurait grand besoin que ce programme-là revienne intégralement.

M. Derraji : Oui. Une toute dernière question avant de laisser la parole à ma collègue...

La Présidente (Mme Chassé) : Il va rester une minute au bloc.

M. Derraji : O.K. Je laisse la parole à ma collègue, c'est bon.

Mme Robitaille : Bien, en fait, c'est justement par rapport au PEQ. Bonjour.

M. Gagnon (Alexandre) : Bonjour.

Mme Robitaille : Par rapport au PEQ, est-ce que... C'est parce que ce que je comprends, c'est que, bon, ultimement, tous les employeurs, tous les gens qu'on a entendus aujourd'hui veulent ultimement avoir des... que leurs employés aient des résidences permanentes. Est-ce qu'on ne pourrait pas rajuster le PEQ pour que ça soit plus rapide d'obtenir une résidence permanente, un CSQ?

M. Gagnon (Alexandre) : Bien, actuellement, quand même, là, c'est un an, là, de travail, là, avant d'avoir son CSQ, je vous dirais, si on passe dans un programme. L'enjeu, c'est que les gens, ils viennent sur un statut temporaire, donc ils viennent dans l'idée qu'ils vont repartir, et que, là, on dit : Bon, ils ont apprécié le Québec, ils ont vécu notre hiver québécois, notamment, ils veulent rester.

La Présidente (Mme Chassé) : En conclusion.

M. Gagnon (Alexandre) : Oui, mais on vous invite à explorer ce qui se fait, notamment, avec les provinces de l'Atlantique, avec le programme pilote Canada atlantique où qu'ils viennent...

La Présidente (Mme Chassé) : Ça termine le bloc d'échange.

M. Gagnon (Alexandre) : ...dans un contexte permanent, dans une phase test.

Mme Robitaille : Ce serait un bon exemple. O.K.

La Présidente (Mme Chassé) : Merci. Je passe maintenant la parole au député de Laurier-Dorion, qui est le porte-parole du deuxième groupe d'opposition.

M. Fontecilla : Merci, mesdames messieurs. Concernant le PEQ étudiant, là, j'aimerais être plus précis, là. Vous êtes des représentants des employeurs, quand même, hein? Est-ce que vous considérez que le gouvernement a fait fausse route en annulant ce programme-là?

M. Gagnon (Alexandre) : Bon, encore une fois, on n'a pas perçu que c'était annulé, là, il y a eu un moratoire. Est-ce que c'est une bonne chose? Bien, on pense, à première vue, que c'est une répercussion malheureuse de la descente, là, de la diminution des immigrants, là, des seuils d'immigration pour 2019. À ce moment-ci, bien, il n'est pas trop tard. Notre message, c'est de dire : Il y a le temps de se rajuster, de réaugmenter les seuils à des niveaux plus élevés, et à ce moment-là, bien, par la force des choses, le programme va revenir en fonction, là, nous l'espérons.

M. Fontecilla : Le gouvernement prétend aussi, en quelque sorte, geler le niveau d'immigration humanitaire et de réunification familiale. Est-ce que vous pensez que c'est une bonne chose pour l'économie du Québec?

M. Gagnon (Alexandre) : Évidemment, c'est un petit peu plus difficile de mentionner... de parler sur ce sujet-là. Nous, ce qu'on passe comme message, c'est de dire : Il faut... notamment, on n'était pas tout à fait d'accord avec la cible du 65 %, là, des travailleurs économiques, là, des immigrants économiques, considérant qu'il faut...

Les usages, les utilités de ces deux types d'immigration là ne sont pas les mêmes. On se dit : Plus qu'il y a d'immigrants économiques, davantage d'immigration humanitaire qu'on va être capables d'accueillir convenablement, et on dit que, lorsqu'on considère, on analyse l'immigration humanitaire, bien, de prendre en compte également l'apport, qui n'est peut-être pas immédiat souvent, mais l'apport qu'ont les deuxièmes générations et les troisièmes générations, qui ont un apport indispensable, là, historiquement, pour le Québec, là.

La Présidente (Mme Chassé) : En 30 secondes.

M. Fontecilla : Je vous laisse, en 30 secondes, vous exprimer sur le sujet qui vous convient.

M. Gagnon (Alexandre) : Tu as-tu un sujet en particulier?

La Présidente (Mme Chassé) : Improvisation mixte. Allez-y.

M. Cournoyer (Michel) : Nous avons dressé un tableau de bord très sommaire pour arriver à des conclusions, trois points simples : le nombre de travailleurs qualifiés admis dans le tableau de bord, c'est une flèche par en bas, rouge, hein, parce que, depuis trois... sur un horizon de cinq ans...

La Présidente (Mme Chassé) : En 10 secondes.

M. Cournoyer (Michel) : ...le nombre de travailleurs qualifiés admis est à la baisse. Le besoin des entreprises relativement à la disponibilité de main-d'oeuvre, c'est une grosse flèche verte par en haut, hein? Les besoins sont croissants.

La Présidente (Mme Chassé) : En terminant.

M. Cournoyer (Michel) : La capacité d'insertion des personnes immigrantes...

La Présidente (Mme Chassé) : C'est terminé.

M. Cournoyer (Michel) : ...grosse flèche par en haut. Donc, conclusion : il faut augmenter.

La Présidente (Mme Chassé) : Très compris. La députée de Gaspé, la porte-parole du troisième groupe d'opposition, prend la parole.

Mme Perry Mélançon : Merci. Ça aurait été une conclusion tout à fait positive, et je m'excuse d'avance de vous couper ça sec, parce que j'ai... Bien, il y a plusieurs points intéressants, là, dans votre exposé, mais, quand même, il y a quelque chose qui me fait beaucoup sourciller, quand vous parlez de réviser à la baisse les critères de français, quand on connaît que le tiers des immigrants qui ne parlent pas français ne s'inscrivent pas dans des cours, et tout ça. Donc, pour nous, c'est important qu'à l'entrée il y ait des critères très, très pointus là-dessus. Il y a l'urgence d'agir, oui, en matière d'immigration, mais il y a aussi l'urgence d'agir pour la protection de notre langue partout en Amérique du Nord. Donc, qu'est-ce que vous proposez pour améliorer la francisation, si ce n'est de bien sélectionner les candidats? Parce qu'on a un grand bassin de candidats potentiels qui connaissent le français. Donc, c'est quoi, votre proposition?

M. Gagnon (Alexandre) : Bien, à la base, où est-ce qu'il y avait un gros problème au niveau de la francisation puis de participation aux efforts, c'est qu'on n'avait aucune idée quand les immigrants arrivaient au Québec, donc on ne les relayait pas nécessairement aux bonnes ressources, aux bons endroits. Donc, à ce moment-là, évidemment, il y en avait qui passaient au travers des mailles du filet, là, d'accompagnement, d'intégration. Je vais vous ramener... On a bon espoir que les nouvelles mesures du parcours d'intégration personnalisé vont combler un certain besoin.

Là, à savoir pourquoi est-ce qu'on demande de réduire le seuil minimal... On ne dit pas de ne pas donner plus de points à ceux qui maîtrisent davantage le français auparavant, c'est simplement... on a davantage de ressources au niveau de la francisation, davantage de ressources au niveau de l'intégration. On a besoin de profils d'immigrants différents de ce qu'on a accepté auparavant. Il faut voir d'autres manières, d'autres façons de sélectionner, et parfois c'est des personnes qui maîtrisent peut-être un petit moins le français mais qui sont ouvertes à l'apprendre. Là, à ce moment-là, nous, on vous dit de garder les yeux ouverts puis de voir le potentiel de ces travailleurs-là, de ces immigrants qui vont bien s'intégrer à nos communautés.

Mme Perry Mélançon : J'ajouterais quand même que, dans les intentions du gouvernement, ce n'est pas une obligation de suivre des cours, mais plutôt une offre qui va être élargie à plus de gens, mais, quand même, je pense qu'avec le bassin de candidats potentiels de partout, pas seulement un type de profil, comme vous dites — peut-être, vous pensez à certaines personnes qui sont francophones — on demande au moins une base, une connaissance du français. Donc, je ne sais pas si vous avez quelque chose à rajouter.

La Présidente (Mme Chassé) : En 15 secondes.

M. Gagnon (Alexandre) : On ne demande pas que le seuil soit à zéro, évidemment, là.

Mme Megyery (Kathy) : On n'est pas en désaccord avec ce que vous dites.

M. Gagnon (Alexandre) : On ne demande pas que le seuil soit à zéro, on demande qu'il revienne au stade pré-2013. C'est à ce niveau-là qu'on a une exigence et...

La Présidente (Mme Chassé) : En terminant.

M. Gagnon (Alexandre) : Mais, à partir de ce moment-là, évidemment, avec le recrutement direct, on s'attend à ce qu'il y ait davantage... les immigrants aillent davantage en région, vivent davantage en français également.

La Présidente (Mme Chassé) : Ça conclut. Merci, Mme Megyery, M. Gagnon, M. Cournoyer, pour votre contribution à la commission.

J'ajourne les travaux, et la commission suspend jusqu'à 14 heures. Bon lunch à tout le monde.

(Suspension de la séance à 12 h 29)

(Reprise à 14 h 2)

La Présidente (Mme Chassé) : Très bien. Bon retour. Je souhaite la bienvenue aux représentants d'Accueil liaison pour des arrivants, c'est bien ça? Excellent. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé et qu'ensuite nous procéderons à une période d'échange. Je pense que vous ai déjà rencontrés. Donc, vous connaissez le format, je vais vous faire des petits signes de la main une fois de temps en temps, sinon je vais vous exprimer quand vous arrivez à la fin de vos périodes d'intervention. Je vous invite à vous présenter puis à débuter votre exposé. Allez-y.

Accueil liaison pour arrivants (ALPA)

M. Fréchette (René) : Mme la Présidente, M. le ministre, Mmes et MM. les membres de la commission, au nom des membres du conseil d'administration de l'organisme, je veux d'abord vous remercier de l'invitation. Mon nom est René Fréchette, je suis directeur général d'ALPA. Nous sommes situés à Montréal près du Stade olympique. Je suis en compagnie d'Éric Mallette, directeur, Développement et services aux employeurs chez ALPA.

En l'absence de représentants du conseil d'administration compte tenu des vacances estivales, j'aimerais vous présenter ALPA. Depuis 35 ans, ALPA travaille tous les jours avec les personnes immigrantes sur le terrain. L'an dernier, notre équipe de 23 spécialistes, qui parlent d'ailleurs 10 langues, a accueilli, accompagné 4 000 personnes immigrantes, 90 bénévoles les soutiennent. Notre offre intégrée de services couvre l'accueil et l'intégration, la francisation, l'emploi, la régionalisation et le tout nouveau service aux employeurs. Le conseil d'administration d'ALPA est diversifié quant aux compétences, au genre, à l'origine de ses membres. Le conseil applique les meilleures pratiques de gouvernance.

Par ailleurs, nous amorçons fièrement la deuxième année du cycle triennal de notre planification stratégique, qui vise des objectifs spécifiques, mesurables, ancrés dans un échéancier. Notre organisation est agile. Nous gardons l'oeil ouvert pour améliorer en continu les services offerts aux personnes immigrantes. Par exemple, nous utilisons un dossier électronique pour mieux suivre le parcours de chaque participant. Les services sont dispensés le soir, le samedi et bientôt le dimanche, incluant la francisation. Et nous nous impliquons dans de nombreux comités du milieu des affaires et du milieu communautaire.

ALPA souhaite agir comme vecteur d'innovation des politiques publiques. L'organisme participe au projet pilote mené par le MIDI sur l'implantation du Parcours d'accompagnement personnalisé. Nous participons aussi à un projet pilote du MIDI sur la francisation. Avec deux autres organismes, nous avons concrétisé le projet emploisenregion.ca au cours de la dernière année, et nous sommes ouverts à nous impliquer dans d'autres projets.

Notre mémoire aborde trois thèmes : d'abord, le rôle des organismes communautaires comme partenaires du parcours d'intégration, puis le rôle des employeurs dans une perspective d'engagements partagés, et enfin l'immigration comme apport pour les employeurs situés hors du Grand Montréal. Nous nous sommes abstenus de nous prononcer sur les admissions projetées de même que sur la répartition entre les différentes catégories. Selon vos décisions sur ces deux points, comme c'est le cas depuis 35 ans, ALPA offrira des services de qualité à toute personne immigrante accueillie au Québec.

Parlons d'abord du rôle clé des organismes communautaires. Chaque personne immigrante arrivant chez ALPA rencontre un membre de l'équipe qui évalue ses besoins en s'assurant à la fois de couvrir les dimensions économique, linguistique, culturelle, citoyenne et communautaire. Dans notre mémoire, nous référons d'ailleurs à une étude de Statistique Canada qui démontre l'impact positif du capital social et de l'accompagnement des organismes, incluant un écart positif et significatif au niveau salarial. ALPA peut, à l'instar des autres organismes communautaires spécialisés en immigration, jouer un rôle crucial dans le succès de cette démarche.

M. Mallette (Éric) : Pour ma part, je vais maintenant vous parler de l'accompagnement des employeurs afin qu'ils puissent miser avec succès sur l'apport stratégique de l'immigration et édifier des milieux d'accueil inclusifs.

Je me suis joint à l'équipe de direction d'ALPA en juin dernier, c'est donc tout récent, et avec enthousiasme j'ai décidé de mettre à profit 25 ans d'expérience en gestion des ressources humaines, dont 15 ans dans des postes de direction dans le milieu corporatif et 10 ans dans un cabinet de recrutement.

Au printemps 2019, à même ses ressources, ALPA a ajouté un nouveau service aux employeurs à son offre. Selon nous, les données sur le chômage des personnes immigrantes ainsi que le résultat d'un diagnostic posé auprès d'employeurs, depuis mon arrivée, illustrent la nécessité de bien les accompagner. En créant le service aux employeurs, ALPA veut contribuer à l'élimination de biais discriminatoires à l'endroit des minorités ethnoculturelles et des femmes. Le but est aussi d'améliorer en continu les services d'employabilité d'ALPA pour que la main-d'oeuvre immigrante, présente et à venir, puisse contribuer pleinement à la prospérité du Québec.

Notre offre aux employeurs repose donc sur 35 ans d'expérience en intervention directe auprès des personnes immigrantes. Chaque intervention de notre équipe d'employabilité permet de capter de l'information sur les obstacles et les freins à l'intégration au marché du travail. Cette information, comme celle que nous recueillerons auprès des employeurs, générera une synergie et conférera une valeur ajoutée aux nouveaux services d'ALPA. Nous voulons, d'une part, faire la promotion d'excellentes pratiques existantes, mais aussi créer un véritable laboratoire de développement de nouvelles pratiques en matière d'inclusion.

En créant ce service, ALPA souhaite faciliter l'intégration des personnes immigrantes qui arriveront selon un processus accéléré décrit à l'orientation 6 de la planification 2020‑2022. Quand tout va vite, le risque d'erreur augmente. ALPA peut intervenir auprès de ces clientèles depuis l'étranger pour permettre une intégration réussie à leur arrivée en poste au Québec.

Je partage quatre constats qui résultent à la fois de mes 25 ans d'expérience et d'entrevues réalisées plus récemment avec des employeurs sur leurs besoins en gestion de la diversité. Le premier constat : les besoins importants d'accompagnement des employeurs existent. Tout comme pour les personnes immigrantes, ces besoins sont spécifiques et, pour y répondre, des actions concrètes et efficaces s'imposent. Deuxième constat : les barrières à l'emploi des personnes immigrantes existent bel et bien, particulièrement en ce qui a trait, à notre avis, à l'évaluation des compétences transférables et comportementales. Aussi, il n'existe pas nécessairement de corrélation entre la taille ou le secteur d'activité d'une entreprise et sa capacité à gérer les enjeux de la diversité. Enfin, lorsqu'il les connaît, l'employeur s'y perd dans les informations et les outils offerts en gestion de la diversité. Le vocabulaire est souvent perçu comme abstrait, les outils perçus comme théoriques et parfois même à trop haut niveau.

Ces constats ont amené ALPA à développer une offre à trois volets : le premier volet est un programme d'accompagnement au recrutement responsable et inclusif, le second, des services consultatifs en gestion de la diversité, où ALPA agira comme un carrefour d'experts aptes à répondre à des problématiques spécifiques, enfin, des ateliers-conférences sur la valorisation de la diversité pour sensibiliser les employeurs et leurs équipes.

Comme directeur du service aux employeurs d'ALPA, je favorise une approche pratique et bien alignée sur la réalité des employeurs et idéalement... ainsi qu'un langage qui leur parle. Je serai heureux de répondre à vos questions, car, bien que notre service soit tout nouveau, on sait que sa nécessité et son potentiel sont grands. Nous visons des résultats.

• (14 h 10) •

M. Fréchette (René) : Enfin, parlons de l'immigration comme apport pour les employeurs situés en dehors du Grand Montréal. ALPA intervient en régionalisation depuis 2010. Selon les prévisions, plus de la moitié des emplois à combler au Québec seront en dehors du Grand Montréal d'ici 2021.

J'en profite donc pour vous parler du projet pilote du MIDI mené conjointement par trois organismes de Montréal : PROMIS, Le Collectif et ALPA. Il vise à créer un continuum d'intervention pour que la personne immigrante maintienne le contact avec des ressources compétentes tout au long du processus de régionalisation. Le partage d'expertise des trois organismes a permis, l'année dernière, 650 établissements dans 11 régions administratives du Québec. On parle de plus de 1 000 personnes. Le potentiel d'un tel projet mérite d'être soutenu dans un contexte où la concertation des efforts ne peut être que bénéfique.

Nous réitérons l'importance d'une concertation accrue des partenaires dans les régions. Je me permets d'ajouter : la pertinence d'informer et de sensibiliser les milieux d'accueil pour susciter une plus grande ouverture de la diversité ethnoculturelle. Lorsqu'une famille quitte la région qui l'avait adoptée, c'est aussi souvent tout le milieu qui se démobilise, incluant un employeur déçu des efforts investis en vain, tout est à recommencer.

Trois recommandations figurent dans notre mémoire en page 21 : la première porte sur le rôle clé des organismes communautaires dans la réussite du parcours d'intégration, la deuxième, sur les mesures à mettre en place avec les employeurs pour favoriser une meilleure intégration dans les milieux de travail, la troisième confirme le besoin d'investir efforts et ressources conséquentes dans toutes les régions du Québec pour contribuer à des établissements durables.

La Présidente (Mme Chassé) : Il vous reste une minute.

M. Fréchette (René) : Chez ALPA, nous sommes convaincus que c'est une responsabilité collective et un projet rassembleur que d'offrir les meilleures conditions aux personnes immigrantes que le Québec choisit d'accueillir. ALPA en appelle à la création de milieux inclusifs tant sur le marché du travail et dans les milieux de vie. Chacun doit s'engager pleinement. L'heure est définitivement à l'action, et ALPA peut et veut vous aider à faire mieux pour les services offerts aux personnes immigrantes. Merci de votre écoute.

La Présidente (Mme Chassé) : Merci à vous, M. Fréchette. Bienvenue, M. Mallette. Nous allons maintenant débuter la période d'échange. M. le ministre, pour un bloc, pour le parti formant le gouvernement, de 16 min 30 s.

M. Jolin-Barrette : Merci, Mme la Présidente. M. Fréchette, M. Mallette, bonjour. Merci d'être présents en commission parlementaire. Je crois qu'on s'était vus sur le projet de loi n° 9, vous étiez venus en commission parlementaire. Écoutez, je veux vous remercier pour votre mémoire puis aussi pour le travail que vous faites au sein de l'organisme dans l'accueil des personnes. 4 000 personnes, quand même, hein, c'est beaucoup.

Il y a un volet qui m'intéresse. Sur le volet entreprise, vous dites... Je pense à votre deuxième recommandation. Comment est-ce qu'on fait pour mieux outiller les entreprises dans l'accueil des nouveaux arrivants? Comment vous voyez ça? Pouvez-vous développer là-dessus?

M. Mallette (Éric) : Oui, certainement. J'y vais? Merci. Donc, bien, ce que je vais dire s'appuie certainement sur mes deux mois et demi chez ALPA, mais aussi sur 25 ans de carrière de l'autre côté, donc du côté des employeurs et aussi dans un cabinet de recrutement. Alors, à mon avis, l'approche doit certainement viser d'abord dès le processus d'embauche comme tel. À mon avis, il y a encore des biais discriminatoires dans le processus d'embauche, particulièrement dans l'évaluation de ce que j'appelle les compétences comportementales — on parle souvent de «soft skills» — et ça, ce n'est pas facile et ce n'est pas tous les employeurs qui sont équipés pour bien évaluer ça. Et c'est là, à mon avis, que les préjugés et les stéréotypes peuvent être nombreux.

Ensuite, évidemment, pour tout ce qui est l'accueil et l'inclusion, alors, différentes formules d'accueil peuvent exister, que ce soit, bien, tout ce qui est jumelage, parrainage, coaching. Mais aussi, comme tel, les meilleurs employeurs que j'ai vus traitent des familles autour des personnes aussi également, donc pas seulement des employés, mais également des familles, parce qu'on ne veut pas que ces gens-là soient nécessairement isolés.

Ensuite, évidemment, toujours dans l'accueil, l'interprétation des codes culturels. Alors, ça, c'est quand même... ça peut paraître très simple pour des gens natifs, mais pas nécessairement pour des personnes immigrantes, de bien comprendre, par exemple, comment fonctionne la hiérarchie dans une organisation, c'est quoi, innover, est-ce que j'ai le droit d'émettre mes idées ou je n'ai pas le droit, etc. Donc, il y a des codes culturels bien précis comme ça qu'il faut accompagner, tout ce qui est en processus d'équité également. Mais de manière plus importante, moi, où je vois que le bât blesse souvent, c'est tout ce qui est maximiser le potentiel des personnes immigrantes lorsqu'elles sont en emploi, ainsi que de les maintenir en emploi, bien sûr.

Alors, je pense que ça, c'est des façons. C'est pourquoi on a décidé de développer trois services : le premier, celui en accompagnement au recrutement responsable et inclusif, où on veut rester présents pour s'assurer que les personnes immigrantes soient bien évaluées ou mesurées et qu'elles contribuent à l'efficacité des organisations; le deuxième, des ateliers-conférences pour continuer la sensibilisation — on n'a pas fini de faire ça; et le dernier, parce qu'on n'a pas nécessairement la prétention d'avoir toutes les expertises pour répondre à la variété des exigences des employeurs, c'est de se bâtir un carrefour d'experts, et il y en a, qu'on va connaître et qu'on pourra déployer selon les problématiques présentées.

M. Jolin-Barrette : O.K., ça, c'est dans la perspective, supposons, qu'une personne immigrante arrive sur le territoire québécois, ne connaît pas déjà son employeur, est en démarche d'emploi. Avec le système Arrima, ce qu'on souhaite faire éventuellement, c'est déjà d'avoir des offres d'emploi validées et déjà que, dès l'étranger, il y ait justement un maillage entre les deux. Vous disiez dans votre mémoire : Ça prendrait des services de formation en ligne de l'étranger. Je suis d'accord avec vous. C'est pour ça qu'on veut mettre l'accent sur la francisation en ligne de l'étranger. Même chose aussi, tantôt vous avez dit : Pour les personnes immigrantes, parfois elles sont en poste, mais elles ne développent pas leur plein potentiel. Là, est-ce que vous parlez de l'enjeu de la surqualification?

M. Mallette (Éric) : ...oui, bien, ils ne sont pas nécessairement surqualifiés, mais certainement...

M. Jolin-Barrette : Non, mais, dans le fond... Oui, allez-y, allez-y.

M. Mallette (Éric) : Bien non, mais je peux vous laisser parler.

M. Jolin-Barrette : Non, non, allez-y.

M. Mallette (Éric) : Alors, tout ce que je voulais dire, c'est : Est-ce qu'ils sont utilisés à leur plein potentiel et est-ce que l'employeur reconnaît ce plein potentiel là, souvent, par les expériences passées ou les qualifications du pays d'origine? Alors, souvent, c'est un peu méconnu. Et ce qu'on prône, chez ALPA, ce n'est pas seulement de trouver un emploi, mais le bon emploi et celui dans lequel on se sent mobilisé pour offrir le mieux qu'on puisse à l'employeur.

M. Jolin-Barrette : Mais, de votre propos, là, ce que vous dites, là, c'est que, parfois, les personnes immigrantes se retrouvent dans des postes pour lesquels elles ont davantage d'expérience ou davantage de compétences que le poste qu'elles occupent?

M. Mallette (Éric) : Tout à fait.

M. Jolin-Barrette : O.K. Ça fait qu'on revient à la question de la surqualification. Elles sont plus qualifiées que le poste qu'elles occupent.

M. Mallette (Éric) : Peuvent être, oui, tout à fait.

M. Jolin-Barrette : Peuvent être. O.K.

M. Mallette (Éric) : Absolument.

M. Jolin-Barrette : O.K. Mais c'est ça, mais nous... oui.

M. Mallette (Éric) : En ce sens, Arrima, à mon avis, peut faire un bout du chemin par rapport aux compétences techniques, à la transférabilité, idéalement, de ces compétences-là. Mais là où ça devient très, très, très difficile, c'est les compétences comportementales, et on en trouve dans toutes les descriptions de poste : la capacité de collaborer, la capacité d'être innovant, la capacité de bien analyser, la capacité de bien vulgariser, de travailler en équipe.

Alors, moi, mon expérience, particulièrement en cabinet de recrutement, c'est que, si on présentait trois candidats finalistes à un employeur... et je dis souvent qu'en cabinet de recrutement on ne recrute personne, au fait, on est un intermédiaire entre des candidats préqualifiés, mais on préqualifiait quand même les compétences comportementales. Or, quand on recevait le feedback ou la rétroaction sur les personnes immigrantes, souvent, ce qu'on nous disait, c'est : Ah! je ne vois pas comment cette personne-là va bien collaborer avec mon équipe, je ne vois pas comment cette personne-là va bien innover, je ne vois pas comment cette personne-là va savoir bien vulgariser. Alors, pour moi, on avait beau challenger ça un peu ou le défier, mais automatiquement je me disais : Comment est-ce que l'employeur a vraiment mesuré ou fait pour évaluer ces compétences comportementales là? Alors, en ce sens, de ce que l'on sait pour Arrima, je ne suis pas certain que ça, ça pourra être mesuré.

M. Fréchette (René) : Ça confirme, dans le fond, le besoin de former, et les employeurs... puis je me permets de faire du pouce sur ce qu'Éric disait tout à l'heure, quand vous disiez «former à partir de l'étranger». En francisation, c'est un volet, oui, mais les codes du marché du travail au Québec, c'est intéressant de les connaître avant d'arriver en poste, comme ça on peut éviter un paquet de problématiques qui font en sorte que ça prend plus de temps à la personne. Parce qu'on parle d'une entrée accélérée, dans certains cas, dans les orientations. Ça prend plus de temps à la personne, si elle n'a pas été accompagnée par des ressources compétentes, à prendre sa place dans son emploi, peu importe l'emploi. Donc, si on est capables, à l'avance, d'intervenir là-dedans, en plus des démarches de francisation, je pense que ça va être gagnant.

M. Jolin-Barrette : O.K. Et comment est-ce qu'on fait pour intervenir? On offre le soutien aux employeurs... Est-ce que vous pensez que... Parce que nous, avec le Parcours d'accompagnement personnalisé, on va accompagner la personne tout au long du processus. Si jamais il y a des difficultés, notamment en matière d'emploi, l'agent d'aide à l'intégration va être là pour accompagner, pour résoudre des solutions. Est-ce que vous pensez que c'est suffisant, ça, ou vous verriez une mission étatique supplémentaire?

• (14 h 20) •

M. Fréchette (René) : Bien, de ce que je comprenais du Parcours d'accompagnement personnalisé, c'est que l'agent d'intégration, il agit comme évaluateur des besoins puis il sert ensuite à pister vers les bonnes ressources. Donc, les organismes comme ALPA, les organismes communautaires comme ALPA, on va recevoir, donc, les gens avec le parcours établi par l'agent d'intégration et nous, on l'applique et on le module au fur et à mesure que les besoins évoluent. Donc, dans cette perspective-là, je pense que c'est un bon point pour les gens lorsqu'ils sont arrivés ici.

Mais, si on parle des gens qui sont encore à l'étranger et qu'on veut faire en sorte que leur intégration au marché du travail puis au milieu de vie, de façon générale, se passe bien, je pense qu'il faut intervenir sur ces points-là alors qu'ils sont à distance, plus qu'uniquement la francisation, même si la francisation est primordiale. On s'entend qu'apprendre le français ça prend quand même pas mal de temps.

M. Mallette (Éric) : Puis, si je pouvais faire du pouce sur ça, parce que je pense que c'est lié aussi au sujet, c'est... oui à l'agent d'intégration et au parcours personnalisé, mais j'aimerais peut-être juste vous donner un cas concret d'une intervention qu'on a eu à faire qui m'apparaît très simple, mais qui est quand même importante, et je me demande jusqu'à quel point un agent d'intégration pourrait aller jusque-là, étant donné le volume potentiel de travail qu'ils auront à faire. Un employeur recherchait quelqu'un, spécifiquement, pour un poste à la fois administratif et à la fois en ressources humaines, et on demandait de l'expérience en CNESST ainsi que de l'expérience à transiger avec Revenu Québec, Revenu Canada. Bon, la personne est arrivée ici depuis un an, n'a pas eu d'expérience dans son champ d'expertise. Alors, évidemment, quand l'employeur nous demande ça, moi... c'est sûr que notre premier réflexe a été de bien évaluer la personne puis de voir s'il n'y a pas des talents transférables ou des compétences transférables. Or, en Côte d'Ivoire... quand on gratte et qu'on prend le temps de rencontrer le participant, on s'aperçoit qu'en Côte d'Ivoire, bien, la CNESST, son équivalent, c'est la caisse nationale de présence sociale et puis que Revenu Québec ou Revenu Canada, c'est la Direction générale des impôts. À partir du moment où on a compris ça, ça a été bien plus facile de relayer à l'employeur qu'il y avait là une compétence transférable, mais il fallait aller quand même dans le détail.

Alors, oui au parcours personnalisé, oui à un accompagnement, mais je pense qu'il y a un accompagnement très, très proche du terrain qui sera nécessaire, et c'est ce qu'ALPA offre depuis maintenant 35 ans.

M. Jolin-Barrette : Je suis d'accord avec vous. C'est bien.

M. Mallette (Éric) : Vous comprenez? Ça fait que, pour l'employeur, ça devenait important de lui faire ce que je vais appeler cette traduction-là.

M. Jolin-Barrette : De vraiment clarifier les choses pour expliquer et que chaque partie se comprenne bien.

M. Mallette (Éric) : Parce que, si on cherche «CNESST» sur le C.V., on ne trouvera jamais ça.

M. Jolin-Barrette : Je suis d'accord avec vous. Je suis d'accord avec vous.

M. Mallette (Éric) : Voilà.

M. Jolin-Barrette : Écoutez, je vous remercie. Je sais que j'ai des collègues qui veulent poser des questions.

M. Mallette (Éric) : Merci à vous.

La Présidente (Mme Chassé) : Oui, la députée de Vaudreuil-Soulanges...

Une voix : ...

La Présidente (Mme Chassé) : ... — juste Soulanges — désire prendre la parole. Allez-y.

Mme Picard : Oui. Merci, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Chassé) : Pour votre première intervention dans notre commission, si je ne me trompe pas.

Mme Picard : Bien oui, oui, exactement.

La Présidente (Mme Chassé) : Bienvenue à vous.

Mme Picard : Merci.

La Présidente (Mme Chassé) : Vous avez 6 min 30 s. Allez-y.

Mme Picard : Merci beaucoup. Bonjour, M. Fréchette. Bonjour, M. Mallette. Merci beaucoup pour votre présence ici, très, très apprécié d'être venus parmi nous.

Moi, j'aimerais en savoir plus sur les besoins. Vous avez parlé que vous évaluez les besoins à l'arrivée d'une personne immigrante dans votre organisme : économiques, linguistiques, culturels, citoyens et communautaires. J'aimerais en savoir plus sur quel type de besoin qui est le plus demandé des personnes immigrantes et puis les programmes qui sont offerts en ce moment par le gouvernement, comment on peut améliorer les choses, si vous avez des cas concrets à nous expliquer.

M. Fréchette (René) : Récemment, depuis le 1er juillet, il y a eu des changements dans l'admissibilité aux programmes, donc, il y a eu un élargissement d'admissibilité au programme d'accueil. C'est un programme... au plan technique, ça s'appelle le programme PRint, et ça permet, donc, d'accueillir les travailleurs temporaires qui n'étaient pas admissibles à ces programmes-là avant, et ça permet aussi d'accueillir les étudiants étrangers, donc c'est une très bonne chose. Donc, je commence par la fin, vous disiez : Est-ce qu'on peut améliorer les programmes?, bien, ça, c'est une amélioration qui vient tout juste d'arriver qui est fort intéressante.

Il n'y a pas un besoin que je pourrais nommer d'entrée de jeu comme étant le besoin commun à tout le monde. Le principe, c'est que chaque personne immigrante est unique, donc elle arrive avec son bagage, et il faut adapter le plan personnalisé. C'est ce qu'on faisait dans le passé. Maintenant, on va recevoir le plan préparé par l'agent d'intégration, puis notre rôle, ça va être de le mettre en application et, comme je disais tout à l'heure, de le moduler selon les besoins.

Les premières rencontres qui sont faites par les intervenants chez nous servent vraiment à cerner le parcours, puis là je parle du parcours migratoire, donc comment la personne est arrivée au Québec puis de quoi elle a besoin, dans le sens qu'est-ce que... Bon, on parle de besoins primaires, on y va dans la hiérarchie : trouver un logement; s'il y a des enfants, est-ce qu'ils sont en âge scolaire, expliquer le principe de l'école, comment ça marche. Parce que, pour les gens qui ne parlent pas français, la première journée d'entrée à l'école pour leurs enfants, ça peut être assez traumatisant. Quand on commence à expliquer le principe des collations, puis ils n'ont pas le droit de rentrer avec des arachides, pour plusieurs personnes, c'est comme un petit peu un concept abstrait, là. Puis je choisis cet exemple-là puis j'aurais pu en prendre plein d'autres.

Donc, l'évaluation des besoins, elle se fait vraiment sur mesure, et à ce moment-là on va y aller avec un mode d'intervention... chez nous, on fonctionne avec un mode d'intervention individuelle. On fait beaucoup de travail en groupe, des séances d'information, des séances de formation en groupe, ça permet aussi de commencer à se créer un réseau. Quand on change de pays, on perd notre réseau et on réalise, quand on vit au quotidien, l'importance de ce réseau-là pour tout. Quand on chercher un plombier, on fait qui si on n'a pas eu de problème de plomberie? Bien, on appelle un ami, on appelle quelqu'un. Maintenant, on appelle Facebook puis on écrit : Réseau, aidez-moi à trouver un plombier. Mais, quand mon réseau, il est en Côte d'Ivoire, si j'écris «Je veux un plombier», ça ne nous aide pas beaucoup à Montréal, ça. Donc, le travail en groupe nous permet de structurer un réseau ou de le consolider et de... On travaille beaucoup avec des partenaires externes, on est enracinés dans notre milieu, donc on travaille avec d'autres organismes qui complètent l'offre de services.

Et je reviens, donc, à la fin de votre question : Est-ce qu'il y a moyen d'améliorer les choses? Moi, je suis un partisan de l'approche étapiste, donc je suis heureux des derniers pas qui viennent d'être franchis : l'ajout des allocations pour les étudiants, les élèves en francisation. Nous, on fait du temps partiel. Il n'y avait pas d'allocation financière, maintenant il y en a une, c'est très positif. Et je pense que je suis prêt à faire un bout avec les moyens qu'on a en ce moment puis de lever le drapeau au moment où il y aura d'autres besoins qui apparaîtront.

Mme Picard : Aussi, dans votre mémoire, vous avez mentionné, un passage à la page 10... pour les demandeurs d'asile qui ont un intérêt pour la régionalisation. Ça m'a intriguée. Vous citez l'exemple de l'entreprise KDC dans la MRC de Brome-Missisquoi. J'aimerais que vous m'en parliez davantage, de cet exemple-là en particulier.

M. Fréchette (René) : Bien, ALPA, parce qu'on est situés près du Stade olympique, ça avait frappé l'imaginaire collectif quand le stade avait été converti en centre d'hébergement. Donc, on est à quelques coins de rue, donc le boulevard Pie-IX était devenu une allée très empruntée pour venir recourir à des services. Et, dans le milieu communautaire, il y a peu d'organismes qui offrent une panoplie de services assez large aux demandeurs d'asile.

En fait, les gens ont droit à la francisation, ce qui est loin d'être négligeable, et ils ont droit à l'aide au logement, qui sont des services qui sont financés par le MIDI. Quand vient le temps de chercher de l'emploi, ils sont laissés à eux-mêmes. Donc, nous, à même nos moyens, on est allés voir une fondation privée et on est allés chercher des moyens financiers pour générer un poste qui fait de l'accompagnement en employabilité pour les demandeurs d'asile.

J'ai souvent entendu, dans la commission depuis lundi... puis je regarde Mme Robitaille, qui a dit : On dit que les réfugiés sont des poids pour la société. La première chose que nous disent les demandeurs d'asile quand ils s'assoient chez nous, c'est : Je veux travailler, trouvez-moi un emploi, vite, j'ai une famille... si je suis seul, j'ai moi à soutenir, mais, si j'ai une famille, j'ai une famille à soutenir. Ce n'est pas... des gens qui n'ont jamais vécu de l'aide sociale, jamais, des gens qui ont vécu en ayant des carrières, en ayant des métiers, donc, quand ils viennent chez nous, ils ont besoin d'aide, ils sont prêts à travailler. On le sait, en ce moment, vous l'entendez depuis lundi, là, les employeurs crient...

La Présidente (Mme Chassé) : Il vous reste moins d'une minute.

M. Fréchette (René) : ...les employeurs crient à l'aide pour avoir de la main-d'oeuvre. Donc, nous, ce qu'on fait avec les demandeurs d'asile, lorsqu'ils sont prêts à le faire, c'est qu'on va les encourager à aller travailler en région. Et, aux employeurs qui disent : Oui, mais est-ce qu'ils vont rester longtemps, est-ce qu'on va les perdre vite?, bien, à la vitesse que tournent les emplois de nos jours, un employé qui reste là pendant un an et demi, deux ans, c'est magnifique...

La Présidente (Mme Chassé) : Non, j'essayais de signifier... Il vous reste encore 20 secondes. J'essayais de lui signifier d'arrêter mon micro, sans succès. Il reste 10 secondes maintenant.

Mme Picard : ...particulier au Québec?

M. Fréchette (René) : ...de Montréal, c'est des régions où c'est plus facile d'encourager les gens à aller s'installer.

La Présidente (Mme Chassé) : Ça termine le bloc d'échange. Je prête maintenant la parole au député de Nelligan, qui est le porte-parole de l'opposition officielle.

M. Derraji : Merci, Mme la Présidente. Merci pour votre participation, votre présence, votre rapport, mais aussi pour votre contribution à l'intégration des nouveaux arrivants. C'est très, très apprécié.

J'ai deux questions. Vous semblez dire, et corrigez-moi si je me trompe... Le parcours personnalisé, vous le faites depuis très longtemps, vous avez développé de l'expertise. Pouvez-vous me parler de cette expertise?

M. Fréchette (René) : Bien, dans les faits, depuis nombre d'années, chez ALPA comme dans beaucoup d'organismes communautaires, ce qui fait la qualité de l'intervention, c'est notre capacité à personnaliser notre approche. Donc, le parcours personnalisé, il était existant dans le réseau. Je pense que c'est assez simple, c'est vraiment cette capacité d'adapter nos services aux besoins. Maintenant...

• (14 h 30) •

M. Derraji : Est-ce que ça a été développé à l'interne?

M. Fréchette (René) : Oui, exactement, oui, au fil d'années d'expérience. Et, à chaque année, là... je vous dis... 4 000 personnes l'année dernière, mais à chaque année, c'est ces milliers de personnes qui viennent chez nous pour chercher de l'accompagnement, donc on a développé cette approche-là.

Une chose qui est bien du nouveau système qui va apparaître, c'est que le BINAM, le bureau d'immigration de la ville de Montréal, disait qu'il y a presque 50 % des personnes immigrantes qui ignorent tout des services auxquels ils pourraient avoir droit. Donc, je pense qu'en instaurant une rencontre systématique avec les gens qui vont arriver à l'aéroport, bon, ça ne permettra pas nécessairement aux gens qui arrivent en bus ou par d'autres moyens, s'ils ont atterri à Toronto... mais je pense que ça va permettre à plus de gens de profiter des services du milieu communautaire. Puis, comme je disais tout à l'heure, ces services-là, c'est gagnant parce qu'ils permettent aux gens de mieux se placer plus vite dans leur vie.

M. Derraji : Est-ce que vous avez participé à l'élaboration du projet que le MIDI vient d'annoncer au niveau du parcours personnalisé?

M. Fréchette (René) : Oui, tout à fait.

M. Derraji : Donc, vous avec contribué à l'élaboration...

M. Fréchette (René) : Oui, puis on fait maintenant partie du projet pilote pour tester le parcours personnalisé.

M. Derraji : Pour tester... Excellent.

M. Fréchette (René) : Donc, oui, on a été proches de tout ça.

M. Mallette (Éric) : Je bâtirais peut-être un peu sur ce qu'on vient de dire par rapport au parcours personnalisé. En fait, si on pouvait l'articuler simplement, c'est qu'il est basé sur le projet d'immigration de l'individu et sur son parcours migratoire, alors, en gros, on l'a articulé autour de tout ça.

M. Derraji : C'est excellent, ce que vous avez développé. Ma dernière question avant de passer la parole à ma collègue, c'est sur la capacité d'accueil. Il y a quelques écoles de pensée au Québec, maintenant, qui disent : Bien, écoutez, on ne peut pas aller au-delà de 40 000. Vous avez tous suivi ce qui a été dit la dernière année : en prendre moins pour en prendre soin. Là, on frappe le mur avec la pénurie de main-d'oeuvre. Il faut qu'on trouve des solutions et qu'on innove.

Ma question, parce que je l'ai posée à plusieurs autres groupes... En Montérégie, on m'a dit : Écoute, nous, on peut prendre davantage... Mais l'adage qui circule, c'est qu'on ne peut pas prendre davantage de gens. Vous, vous êtes à la première ligne. Concrètement, aujourd'hui, est-ce que vous êtes capables de chiffrer... Est-ce que vous pouvez doubler, tripler ou quadrupler ou bien rester... limiter à ce que vous offrez déjà?

M. Fréchette (René) : Bien, je vous dirais que, dans le passé, on n'a jamais fermé les portes à accueillir des gens. On a toujours été en mesure de répondre aux demandes, c'est pour ça qu'on a développé une offre à plusieurs niveaux. Ce qu'on ne peut pas faire individuellement, on va le faire en groupe. Donc, je pourrais répondre : Est-ce qu'on peut accueillir plus de gens pour offrir des services à plus de gens?, on serait probablement, oui, en mesure de le faire.

M. Derraji : Bien, en fait, je vois juste ce que vous avez développé, vous avez développé de l'expertise, un parcours personnalisé. Et on parle en votre nom, au nom de la capacité d'accueil, et on dit aux gens : On n'est pas capables d'accueillir plus, alors que vous êtes les intervenants de la première ligne. Moi, ce que j'essaie, avec vous, de comprendre, comme ce que j'ai fait avec les gens de la Montérégie et de l'Estrie... Les gens qui travaillent sur le terrain, qui comprennent le terrain, ils sont capables d'avoir plus. Donc, le fait de dire aujourd'hui que notre besoin, c'est 40 000, et on oublie la pénurie de main-d'oeuvre, pour vous, c'est un mythe, ce n'est pas un fait, parce que les organismes d'accueil peuvent... et ils ont développé de l'expertise pour accueillir plus et offrir plus de services.

M. Fréchette (René) : Ce que je vous dirais, c'est qu'au fil des 35 dernières années on a répondu à la demande et on va continuer à le faire.

M. Derraji : Excellent. Et je comprends, vous ne pouvez pas répondre d'une manière plus claire à la question. Je comprends. Je vais juste la reformuler autrement, c'est que, si j'ai une demande, aujourd'hui, supplémentaire de personnes qui viennent de l'extérieur, votre organisme, ALPA, est capable, avec ses partenaires, à la livrer du moment que vous avez déjà l'expertise.

M. Fréchette (René) : Oui, on est en mesure d'accueillir les gens et de leur offrir des bons services et les ressources, oui.

M. Derraji : Merci à vous deux. Continuez votre beau travail. Je cède la parole, madame...

La Présidente (Mme Chassé) : Absolument, Mme la députée de Bourassa-Sauvé, la parole est à vous.

Mme Robitaille : Et, dites-moi, Mme la Présidente, combien...

La Présidente (Mme Chassé) : 5 min 45 s.

Mme Robitaille : Wow! Messieurs, bonjour. Contente de vous revoir. Oui, justement, on parlait de l'immigration humanitaire, des réfugiés tout à l'heure. Vous nous dites que, finalement, ces gens-là veulent travailler. Donc, je ne me trompe pas en me disant que ces gens-là contribuent à l'économie du Québec?

M. Fréchette (René) : Tout à fait, tout à fait. Un des avantages pour les demandeurs d'asile, c'est qu'ils obtiennent un permis de travail assez rapidement, donc ils sont prêts, ils sont fin prêts, ils sont sur les blocs de départ pour intégrer le marché du travail.

Mme Robitaille : Donc, diminuer les seuils de l'immigration humanitaire quand on est en pénurie de main-d'oeuvre, qu'est-ce que vous en pensez de ça, vous?

M. Fréchette (René) : Comme je disais, on ne va pas se prononcer sur les nombres, on va se concentrer sur notre mission. Notre mission, c'est d'offrir les services. Chez ALPA, particulièrement, on a fait le choix d'offrir plus de services aux demandeurs d'asile, et je pense que ça s'est fait avec beaucoup de succès, des milliers qui viennent, depuis 2017, chez nous. Et on va continuer à augmenter parce que la demande est là. Et, comme il y a peu d'organismes qui sont prêts à les desservir, on va continuer à le faire avec beaucoup d'énergie.

Mme Robitaille : Donc, ce que vous voyez sur le terrain, c'est qu'il y a de la place pour ces gens-là, il y a de la place.

M. Fréchette (René) : Bien, il y a des employeurs qui sont prêts à les embaucher.

M. Mallette (Éric) : C'est là que j'allais, moi aussi.

Mme Robitaille : Oui, on avait Olymel ce matin...

M. Mallette (Éric) : Si vous me permettez juste...

Mme Robitaille : Oui, allez-y.

M. Mallette (Éric) : ...parce que j'y suis depuis 10 semaines, mais, en 10 semaines, j'ai eu à peu près 40 employeurs qui nous ont appelés pour des besoins de main-d'oeuvre, pour nous présenter à peu près 45 postes, pour demander de l'aide, alors qu'on ne s'affiche pas officiellement comme une aide au recrutement ou au placement.

J'ai quand même une inquiétude à cet égard, c'est que, dans certaines des requêtes reçues, il y a un phénomène d'instrumentalisation des personnes immigrantes alors que j'entends parfois : Bien, pour ce poste-là, moi, j'ai besoin de deux bras, deux jambes, et quelqu'un de débrouillard, avec un permis de conduire. Ça, personnellement, à titre de service aux employeurs, moi, je trouve ça inquiétant, ce bout-là.

Et alors, quand on dit que les employeurs ont besoin d'accompagnement, ne serait-ce que dans cette phrase-là, de qu'est-ce que vous cherchez, de quoi avez-vous besoin, et qu'on me répond «deux bras, deux jambes, un permis de conduire et quelqu'un de débrouillard», moi, déjà, par là, je sais que l'employeur a un besoin, certainement, de main-d'oeuvre, mais probablement d'accompagnement également, si jamais on devait essayer d'accueillir ou d'intégrer cette ressource-là.

Mme Robitaille : Oui. Et donc, c'est ça, je comprends, donc aider l'employeur, aider aussi l'employé ou le futur employé à bien répondre aux demandes de cet employeur-là, puis des fois ça paraît évident, mais ce n'est pas si facile que ça.

M. Mallette (Éric) : Et j'ajouterais notre responsabilité, comme organisme, de valider que c'est un employeur responsable et qu'il sait comment bien faire les choses, parce que la piste de l'immigration en est une, mais ce n'est pas la seule façon de contribuer à de l'innovation et à changer les pratiques non plus.

M. Fréchette (René) : Et, quand on parle d'intégration, je me permettrais d'ajouter... il y a un employeur qui disait : Est-ce que c'est moi qui va être obligé d'aller à la caisse populaire avec lui? Et ma réponse fut : Ce n'est peut-être pas vous personnellement qui allez devoir y aller, il va falloir que quelqu'un y aille, parce que, quand on n'est jamais allé dans une institution financière en Amérique du Nord, ça dépend d'où on vient, là, mais ça peut être plus compliqué de comprendre comment ça marche. Donc, oui, il faut que quelqu'un l'explique.

Mme Robitaille : Il faut de l'accompagnement, ça, c'est sûr, et puis vous faites un excellent travail dans ce sens-là. Moi, mon comté, c'est Bourassa-Sauvé, Montréal-Nord, pas loin de chez vous. Le directeur de la table de quartier me disait qu'il y a environ 30 organismes qui touchent de près ou de loin à l'intégration des immigrants dans le comté, le CJE, que vous connaissez, qui fait sa part aussi. Et donc il y a beaucoup d'intervenants, il y a des gens qui font ce parcours personnalisé déjà. Alors là, on va avoir le gouvernement qui va arriver avec son agent d'intégration. Est-ce qu'il n'y a pas une crainte de dédoublement ou... Comment on fait pour bien s'arrimer?

M. Fréchette (René) : Je vous répondrais que, bien, il va falloir se concerter, j'allais faire... j'allais dire «avoir un arrimage», là, mais je ne veux pas faire de jeu de mots avec Arrima, mais ça va prendre un bon arrimage entre les agents d'intégration et les organismes qui sont sur le terrain. De ce qu'on vivait avant... Et ce n'est pas tous les immigrants qui vont arriver qui vont rencontrer des agents d'intégration, il y a encore des immigrants qui vont arriver sur le terrain puis qui vont aller directement dans l'organisme communautaire. Ce n'est pas dans les... Peu importe le nombre, là, qui va arriver au Québec, ils ne vont pas tous systématiquement avoir leur plan fait par un agent d'intégration.

Donc, comme organisme, on va continuer à faire ça. Pour les gens qui vont arriver avec le plan fait par l'agent d'intégration, bien, je pense que notre rôle, notre expertise va se jouer dans la mesure où on va être capables de le suivre, ce plan-là, et de l'adapter, le moduler selon l'évolution des besoins.

Mme Robitaille : ...va avoir sa spécificité. L'agent d'intégration dans Montréal-Nord n'aura pas les mêmes outils que, nécessairement, quelqu'un à Sherbrooke.

M. Fréchette (René) : À Rimouski.

Mme Robitaille : Oui, c'est ça.

M. Fréchette (René) : Oui, oui. Bien, en fait, il ne s'appuie pas non plus sur le même réseau d'organismes communautaires. L'offre varie selon les régions. Donc, à Montréal, il y a une concentration d'immigration, mais il y a une concentration d'expertises puis d'organismes aussi.

Mme Robitaille : C'est ça.

La Présidente (Mme Chassé) : En conclusion.

• (14 h 40) •

M. Mallette (Éric) : Je trouve que la question est très bonne, et c'est pourquoi nous, on est très fiers de participer au projet pilote du parcours personnalisé, justement, pour définir où commence le rôle de l'un et l'autre...

Mme Robitaille : Mais là pour ne pas qu'il y ait de dédoublement, oui.

M. Mallette (Éric) : ...mais, idéalement, faire de la complémentarité plutôt que du dédoublement.

La Présidente (Mme Chassé) : Ça conclut. C'est très bien, merci. Je cède maintenant la parole au député de Laurier-Dorion, le porte-parole de la deuxième opposition.

M. Fontecilla : Merci. Bonjour, messieurs. Concernant... On discute beaucoup de la question de la surqualification, du taux de chômage, et l'idée qui est souvent transmise, que le taux de chômage plus élevé des personnes issues de l'immigration, c'est parce qu'elles sont surqualifiées. Alors, j'entends votre propos sur les parcours migratoires, etc., un propos plein de belles analyses très nuancées, etc., et qui met beaucoup de l'avant la question des biais discriminatoires, là, qui sont souvent... c'est inconscient ou ce n'est pas par faute de volonté. Et la question : Est-ce qu'un taux de chômage, selon vous, là, plus élevé pourrait correspondre davantage à une situation de surqualification ou à une situation de non-reconnaissance des compétences, non-reconnaissance dans le sens de voir les...

M. Mallette (Éric) : ...ce sont deux des causes principales. Je ne suis pas capable de les qualifier, à ce stade-ci, en termes de nombre précis, mais c'est deux enjeux.

M. Fréchette (René) : Qui sont bien réels.

M. Mallette (Éric) : Qui sont très réels, oui.

M. Fontecilla : O.K. Est-ce que vous rencontrez beaucoup d'immigrants qui sont surqualifiés, dans votre travail, et qui ont de la difficulté à se placer en emploi?

M. Mallette (Éric) : Mais nous, on les accueille pour l'employabilité, alors, à ce stade-là, ils ne sont pas nécessairement surqualifiés. Ils sont qualifiés, point, et le but est de trouver le bon poste pour la bonne personne. On cherche le bon emploi.

M. Fontecilla : Est-ce que vous y arrivez?

M. Fréchette (René) : Bien, dans plusieurs cas, oui, on y arrive, on y arrive, parce qu'on a un bon taux de succès au niveau du placement, parce qu'on a développé, au fil des années, un bon réseau d'employeurs puis un bon programme préparatoire aux gens avant... Quand ils viennent chez nous, ils trouvent, en général, relativement rapidement... là, je pèse mes mots, là, parce qu'il y en a, dans certains cas, c'est un peu plus long, mais ils vont trouver relativement vite un bon emploi.

M. Fontecilla : Donc, d'après votre expérience, si on met les efforts, l'accompagnement personnalisé, et bien connaître les besoins de la personne, sa connaissance du marché du travail, une personne qui est dite surqualifiée, entre guillemets, va trouver un emploi.

M. Fréchette (René) : Bien, j'ai tendance à dire oui.

M. Mallette (Éric) : Oui, moi aussi, mais une personne qualifiée plutôt que surqualifiée. Mais une personne qualifiée et bien accompagnée d'un employeur respectueux des compétences et qui a lu les compétences transférables, à mon avis, va reconnaître le talent, et surtout, en situation où il y a des besoins, va savoir... Mais les deux côtés doivent être bien accompagnés pour que cet arrimage-là arrive.

La Présidente (Mme Chassé) : Ça conclut.

M. Fréchette (René) : D'accord.

La Présidente (Mme Chassé) : Merci. Je cède maintenant la parole à la députée de Gaspé, qui représente le troisième groupe d'opposition.

Mme Perry Mélançon : Merci, Mme la Présidente. Bon après-midi, messieurs. Mes excuses d'avoir manqué les premières minutes de votre présentation.

Je voulais savoir... Vous dites que vous avez... Dans votre parcours d'accompagnement, vous offrez des services de francisation. Est-ce que ce serait possible de m'en dire un peu plus puis me dire quels sont les enjeux liés à ce service-là? Et est-ce que l'annonce du gouvernement, récemment, vraiment, vient régler tous les enjeux, les défis, là, que vous rencontrez?

M. Fréchette (René) : Dans la dernière année, chez nous, ça a été 2 000 élèves à temps partiel en francisation. Le taux d'abandon était un peu inquiétant, je vous dirais, et je suis persuadé que la mise en place des allocations... d'une allocation financière — et là c'est tout nouveau, c'est commencé depuis le 1er juillet — aura un impact à la fois sur le taux de persévérance des élèves... Mais on le sent déjà, pour l'automne... c'est pour ça que, là, on va ajouter des cours le dimanche, on va ajouter des cours le jeudi soir, le vendredi soir...

Mme Perry Mélançon : À temps partiel, j'imagine, aussi.

M. Fréchette (René) : ...à temps partiel, oui, pour que les gens puissent profiter du programme de francisation. Donc, chez nous, les nouvelles mesures qui ont été annoncées, on les voit de façon très positive parce qu'on les réclamait depuis nombre d'années, et on est heureux de voir que, là, ça s'est concrétisé. Donc, l'impact de ça va être positif à court, moyen et long terme, définitivement.

M. Mallette (Éric) : Il y a déjà un impact sur les inscriptions.

M. Fréchette (René) : Oui.

Mme Perry Mélançon : Oui. Puis est-ce qu'il y a des préoccupations, vraiment, que vous voulez nous faire part, là, pour ne pas que ce soit oublié dans la façon de traiter le dossier de francisation?

M. Fréchette (René) : Je vous dirais que c'était... Là, nous, on a partagé... En février dernier, quand on est venus sur la loi n° 9, on a partagé l'élément que... des calendriers, et je sais que c'est en train de se traiter en ce moment, le fait que tous les organismes commençaient leur session à la même date. Donc, un immigrant qui manquait le début de la session devait attendre 12 semaines avant de commencer sa francisation, et c'est dans ces 12 semaines là qu'il y en a beaucoup qui décident de faire autre chose. Donc, chez nous, on est contents de voir que, là, c'est à l'étude, c'est en train de se mettre en place et qu'il va y avoir des calendriers qui vont donc se chevaucher, qui vont raccourcir...

La Présidente (Mme Chassé) : En conclusion.

M. Fréchette (René) : ...la période au cours de laquelle les gens ne peuvent pas commencer le processus de francisation.

Mme Perry Mélançon : Merci.

La Présidente (Mme Chassé) : C'est très bien. M. Fréchette, M. Mallette, je vous remercie pour votre contribution à la commission.

Je suspends les travaux quelques instants pour permettre au prochain groupe de prendre place. Merci à vous.

(Suspension de la séance à 14 h 46)

(Reprise à 14 h 48)

La Présidente (Mme Chassé) : Oui, nous sommes de retour, et je souhaite la bienvenue à M. Thomas Tsukalas.

Une voix : ...

La Présidente (Mme Chassé) : Là, c'est moi qui ai le micro pour le moment, puis après ça va être votre tour. Vous serez accompagné d'une interprétation simultanée de manière à faciliter les échanges. Vous devriez avoir ça avec vous ici. Des écouteurs sont à votre disposition afin d'entendre l'interprète qui est responsable — à tous ici, autour de la table, là — pour la traduction simultanée, parce que M. Tsukalas va s'exprimer en anglais.

M. Tsukalas — est-ce que je peux m'exprimer à M. Tsukalas en français? Oui, ça va? Très bien — je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé. À une minute de la fin, je vais vous faire un signe que... pour commencer à amorcer votre conclusion, et par la suite il va y avoir une période d'échange avec les membres de la commission. Je vous invite à, tout d'abord, vous présenter puis à débuter votre exposé.

M. Thomas Tsukalas

M. Tsukalas (Thomas) : My name is Thomas Tsukalas, and I'm a Ph.D. in Political Science from McGill University.

I'm writing to present my views at the public hearings concerning the new immigration Bill 9 tabled in Québec. It is my opinion that the Québec Government must be able to firmly insist on deciding which countries various potential immigrants should come from into Québec so that they are properly equipped to deal with the Québec labor market and for Québec's need to fill in job vacancies. This is especially critical in the outlying regions, which are suffering from both an acute labor shortage and serious demographic depopulation. This policy would also make sure that the prospective immigrants would be able to fit in and are able to easily integrate into their host society with its modern and progressive social values.

• (14 h 50) •

Therefore, countries such as Poland, the Ukraine, Romania, Moldova and Bulgaria as well as Brazil and other Latin American countries should be targeted for special consideration. They are Francophile in outlook and these countries, especially Poland, the Ukraine, Romania, Moldova and Bulgaria, have developed a large educated, skilled and experienced labor force through an extensive network of universities and vocational and trade colleges.

Since joining the European Union, over 700,000 Polish citizens have immigrated to the United Kingdom and are presently integrated into the British labor market. They have filled vacancies as bus drivers. In fact, today, a large percentage of public transport workers and drivers in Britain are Polish immigrants. Polish women have provided a huge contingent of nurses and other health care workers for Britain's National Health Program. Skilled technicians, such as airplane and truck mechanics, carpenters, plumbers, engineers in all fields, computer programmers, a large array of scientific and technological researchers, academics, are now working in Britain. The same applies to immigrants coming from Brazil, the Ukraine, Moldova, Romania, Bulgaria and other Eastern European countries as well as from Latin America and Asia.

To the point, President George Bush Jr., while he was in office, had made a special presidential and congressional dispensation which was supported and lobbied for by the health care industry to especially bring over to the United States 20,000 Polish nurses within just two years. They, along with their spouses and the usual three young children, amounted to over 90,000 and 100,000 special case Polish immigrants who, in just two years, immigrated to the United States, and all this was separate from the regular immigration quotas. In Denmark and Sweden, it was said that Poland had lost much of its medical staff and nurses to these countries as well as to the United Kingdom.

Why then is Québec not actively and aggressively recruiting Polish nurses and other skilled and technical workers who are eager to come and work in Québec? By the way, Canada has over 150,000 immigrants of Polish descent. While just Ontario is home to over 100,000 Polish immigrants living and working, while even Alberta tops Québec with its 15,000 Polish immigrants, while Québec has only 12,000 immigrants of Polish descent living and working here, recent ones. Here, we are talking of immigrants born in Poland. Otherwise, Canada has over 1 million citizens of Polish descent. There are over 700,000 Romanian immigrants as well as over 300,000 Bulgarians working in Spain, and they are highly integrated into the local Spanish workforce and very much liked by the local Spanish population.

It is therefore high time that Québec eagerly and aggressively seek to recruit immigrants that are compatible with its economy and to its social values. Remember that the late Premier Jacques Parizeau's wife was Polish... is Polish. Polish people as well as Ukrainians are very similar in outlook and social values to Québec people, that is they are very much like the Irish immigrants who had come to Québec before them, Catholic, in the case of Poles, and many from rural areas, and small towns, and cities, as well as being very much accustomed to Québec's climate, which is very similar to that found in Poland and in the Ukraine.

In France, Britain, Ireland and Greece, Polish immigrants are widely and publicly considered and known as peaceful and hardworking immigrants, in France as well, so are the Portuguese, which are about 800,000, as well as the Italians and Spaniards. In Poland today, there are approximately 1 million Ukrainian immigrants working in the economy. These immigrants are largely unregulated and are working there semilegally, fleeing the chaos resulting from the economic collapse and hardships existing in the Ukraine. The vast majority are from the western parts of the Ukraine and mostly belong to the Ukrainian Uniate Church, that is, they are Eastern Rite Catholics united to the Roman Catholic Church and thus, West European oriented, since the region was ruled by the Austro-Hungarian Empire for centuries. Here, again, are potential immigrants for Québec's labor market, skilled immigrants and easily adaptable and integrated into the Québec population.

Therefore, Québec must target and encourage Francophile immigrants, even though they may not speak French, but are favorably disposed to learning French. Otherwise, what is occurring right now is that France is quietly pursuing a policy of encouraging the emigration of its own local, embittered Maghrebi or North African population with which it has had great difficulties in properly integrating in France due to many complex factors, including its strict job market, with its lack of flexisecurity, that is, the ability of workers laid off who can transfer their previous work benefits to other new jobs. Turkey, with a very large secular urban population, is also a great candidate for recruitment for skilled labor, with many urban Turks having learned French as a second language.

At present, however, with Brexit looming, over 1 million EU citizens working in Britain, including the 700,000 Polish immigrants, are facing a difficult dilemma, since most do not have British citizenship, they will be compelled to return to their home countries, be it Poland or elsewhere. Otherwise, they will be forced to seek employment in the other parts of the European Union. This, therefore, offers a great opportunity for both Québec and Canada to actively and aggressively recruit these highly skilled and socially compatible Polish and Eastern European immigrants to fill in Québec's labor shortages as well as those acute job vacancies in the outlying regions which are presently facing a very serious depopulation problem. Thus, this immigration would cover Québec's need in filling this provincewide and regional labor shortages, which not only is already becoming quite severe, but with the future prospect of this labor shortage getting even worse. This labor shortage will have the added effect of hindering or slowing the growth and upward trajectory of the Québec economy.

Most Polish workers would feel quite at home in Québec's regions, which often remind them of Poland, along with their outlook and congenial sympathy for the Québec population. The same would apply to both Ukrainian and Romanian immigrants. Remember that the Canadian Government, at the beginning of the 20th century, recruited massive numbers of Ukrainian immigrants from the Western Ukraine, the region known as Galicia, to settle and farm the underpopulated Prairies, that is in the provinces of Manitoba, Saskatchewan and Alberta. Today, there are over 1 million Canadians of Ukrainian descent.

The same must be said for Romanian, Ukrainian, Moldovan, Bulgarian and other Eastern European peoples. This equally applies to future immigrants from Brazil and other Latin American countries, which generally are Catholic by background and favorable to the modern Québec social values, and are indeed very easily integrated, with minimal social friction. Another area to look for future immigrant labor is from the various Christian populations in the Middle East, who are under severe stress and strain and therefore are very eager to leave from the Middle East because of the repression and discrimination against them by the ruling governments and the dangers posed by local Muslims and radicalized Islamic militants who seek to drive them out from their homes through the use of bombings of churches, businesses, homes and as well as rapes, kidnappings and ransoms.

The Québec Government should also look into recruiting immigrants from francophone Africa, including countries like Senegal, Cameroun, Ivory Coast, Rwanda, Burundi, Congo, etc., which have many applicants with various university diplomas willing to contribute to the Québec economy. Haiti has traditionally provided many workers in semiskilled and manual jobs, and special efforts should be made to continue recruiting from there. Potential immigrants should be recruited from the Middle East, Iran, India, Southeast Asia and from China, who also have skilled workers. A special case should be made towards the Philippines, especially since Filipino females already provide almost 90% of international domestic workers and who, at the present, fill in the special category of home care workers throughout the world, even in countries and regions such as Israel, the Arab Gulf, the U.S. and Europe. Québec has a great need for home care workers for its aging population, and Filipino female workers have filled this function in great numbers in Ontario, Manitoba, Alberta and British Columbia. Why not in Québec, especially in the outlying regions? They eagerly learn the local language and would easily learn French if only the Québec Government would provide the proper educational means and the qualified teaching staff.

By the way, in Canada, there are today over 1 million Canadians of Filipino descent, with Ontario having over 400,000, about 3% of its population, and Manitoba topping off with 7% of its population being of Filipino descent, that is 85,000. Even Alberta has over 200,000 Filipinos working and living there, making 5% of the Albertan population, while Québec has only 34,000 Filipinos.

La Présidente (Mme Chassé) : Il vous reste 30 secondes pour conclure.

M. Tsukalas (Thomas) : OK. The more important parts are here. OK, we come to the issue of francization. The Québec Government must upgrade and improve to a high professional standard its own preparatory courses that teach French to non-French speaking immigrants. In the Netherlands, highly qualified teachers and staff are hired, and effective and efficient courses have been crafted that teach the Dutch language to local immigrants. In fact, the Dutch Government has adopted and implemented legislation for the teaching of Dutch to newly arrived...

La Présidente (Mme Chassé) : En conclusion.

M. Tsukalas (Thomas) : O.K., ça va...

La Présidente (Mme Chassé) : 10 secondes. Ça termine.

M. Tsukalas (Thomas) : O.K., c'est terminé, voilà.

La Présidente (Mme Chassé) : Je vous remercie pour votre exposé. Nous allons maintenant débuter la période d'échange avec le parti formant le gouvernement. M. le ministre, la parole est à vous.

• (15 heures) •

M. Jolin-Barrette : Oui, merci, Mme la Présidente. M. Tsukalas, bonjour et bienvenue à l'Assemblée nationale. Merci pour la présentation de votre mémoire et votre intervention.

Écoutez, je dois vous dire, la position du gouvernement du Québec, actuellement, relativement à l'immigration, elle est sur le fait d'offrir l'opportunité à tout le monde, peu importe la région du monde où il provient, peu importe son origine ethnique les mêmes opportunités, parce que ce qu'on souhaite, notamment, au Québec, c'est de faire en sorte que les personnes que l'on sélectionne pour venir immigrer au Québec puissent répondre aux besoins du marché du travail.

La compétence du Québec en matière d'immigration, qui est une compétence partagée en vertu de la Constitution canadienne, et suite à l'Accord Canada-Québec de 1991, vise à faire en sorte que le Québec sélectionne son immigration économique, les réfugiés également, mais qu'on est les principaux responsables en matière d'accueil et d'intégration des personnes immigrantes. Et, lorsqu'on y va avec la sélection de l'immigration économique, on veut vraiment que cette immigration-là réponde aux besoins du marché du travail. C'est pour ça qu'on a mis de l'avant le système Arrima, pour vraiment faire un maillage entre les emplois qui sont disponibles et le profil des candidats à l'immigration.

Donc, nous, ce qu'on dit, c'est que, si vous répondez aux besoins du marché du travail, eh bien, vous êtes les bienvenus au Québec. On souhaite vraiment s'assurer que les personnes soient en emploi et que les personnes apprennent le français, peu importe d'où elles viennent, ces personnes-là, et quel est leur parcours.

Par contre, par contre, en contrepartie à cela, il y a des exigences au niveau de l'immigration, parce que nous, on le voit comme un engagement partagé : la personne immigrante décide d'immigrer au Québec, la société québécoise a des responsabilités, mais la personne immigrante aussi. Un de ceux-là, c'est d'adhérer aux valeurs québécoises de la société, hein, ce qui forme le cadre du vivre-ensemble québécois, le fait de faire en sorte d'adhérer à ces valeurs. Au Parti libéral, on les appelle les valeurs communes, nous, on les appelle les valeurs québécoises exprimées dans la Charte des droits et libertés de la personne. Alors, on est vraiment dans cette logique-là. Et cette demande d'intégration là, d'adhésion doit être partagée à la fois par la société d'accueil et par la personne immigrante pour faire en sorte qu'on puisse construire ensemble. Alors, je suis un peu en désaccord avec le contenu de votre mémoire relativement à lorsque vous dites que nous devrions utiliser des sous-bassins géographiques, supposons. Je ne sais pas comment vous recevez mes commentaires.

M. Tsukalas (Thomas) : Écoutez, aux États-Unis, par exemple, et même en Angleterre, quand Mme Thatcher... bon, c'est une longue histoire, mais en Angleterre, ils ont déjà invité les 700 000 Polonais pour travailler dans le marché.

Le problème, ce n'est pas seulement géographique. On dit que toutes les régions sont bien accueillies, mais le problème, c'est qu'il y a des personnes qui sont plus adaptables, ils sont des personnes qui ont plus de compétences. Ils sont des personnes qui ont les compétences universitaires qui sont au même niveau qu'au Québec, par exemple, de l'université, des universités en Pologne, en Europe de l'Est, comme à Budapest ou les autres. Ils ont l'égalité, égalité si... médecins. Mais, s'il y a une personne qui vient de l'Inde, par exemple, là, ça dépend, parce qu'il y a beaucoup de fraudes dans les diplômes. Et c'est la même chose qui s'est passée en Europe. En Europe, il y a des personnes qui ont pu acheter des diplômes. On peut... C'est facile. Donc, la compétence était difficile de caractériser, particulièrement des petites universités qui existent en Inde ou dans les petites... dans beaucoup de... monde.

Mais les autres universités, comme s'ils étudiaient... Si tu viens avec un diplôme de Stockholm ou de Londres, de Paris ou d'Allemagne, immédiatement tu es le même niveau qu'au Québec, donc il n'y a pas de problème. Le problème des compétences, c'est que les Polonais, les Européens de l'Est, ils ont les... les compétences sont du même niveau qu'au Québec. Donc, il y a une... pour embaucher, par exemple, les infirmières, comme avaient fait les États-Unis et les pays scandinaves.

L'autre problème pour le Québec, c'est Trudeau. Justin Trudeau, il va augmenter la population d'immigration de 350 000 par année. Donc, le contrepoids du Québec, ça veut dire, il faut... pour être dans le même 22 % de la population du Canada, il faut encourager l'immigration de 70 000 immigrants au Québec, de retenir le même poids de pourcentage de la population au Québec... au Canada. Parce que 350 000, il faudrait avoir 70 000 immigrants au Québec pour maintenir le pourcentage. Donc, le Québec a besoin beaucoup d'immigrants. C'est les questions pour l'intégration, c'est les questions pour développer les méthodes de francisation de qualité. C'est ce qu'on manque d'avoir un petit cours qui donne des petites... quelque chose qui sont pour les petits enfants... Il faut être...

Parce que, par exemple, allemand, c'est une langue difficile, hollandais, c'est une langue difficile. Les Hollandais, ils paient, ils paient les immigrants pour prendre des cours de langue le même temps qu'ils travaillent. La même chose, le Québec peut le faire. Ça veut dire payer des immigrants quand ils travaillent, payer aussi des cours, payer pour attendre à des cours, aussi des cours, bon, de politique, ça veut dire du civique, des choses comme ça. C'est la même chose qui se passe, par exemple, aux gens... des choses ici.

M. Jolin-Barrette : Simplement pour vous dire que, la semaine dernière, j'ai procédé au lancement du Parcours d'accompagnement personnalisé, qui vise justement à accompagner les personnes immigrantes tout au long de leur processus d'intégration pour faire en sorte qu'ils aient un agent d'aide à l'intégration qui va être disponible pour eux. Donc, pour nous, c'est important de faire en sorte que quelqu'un qui souhaite venir au Québec, bien, il déploie des efforts pour apprendre la langue française, également au niveau de son intégration.

Cela étant dit, comme je vous le disais, on ne souhaite pas fermer la porte à personne et on veut que quelqu'un qui a des talents puisse l'exprimer au Québec. Mais je vous remercie grandement pour la présentation de votre mémoire. Je pense que j'ai peut-être des collègues qui veulent vous poser des questions. Merci.

La Présidente (Mme Chassé) : J'octroie la parole au député de Maskinongé.

M. Allaire : Merci, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Chassé) : Ça me fait plaisir.

M. Allaire : Il me reste combien de temps?

La Présidente (Mme Chassé) : Sept minutes.

M. Allaire : Sept minutes? Parfait, merci.

It's a pleasure to meet you — du contenu à Infoman cette semaine, mon accent pourrait être difficile à comprendre. Probablement que vous n'avez pas eu le temps, en fait, de l'aborder tantôt, là, verbalement, mais, dans votre mémoire, vous en faites question, l'aspect de la régionalisation. Pour moi, c'est un élément très important. Dans ma circonscription, à Maskinongé, j'ai des gros employeurs qui vivent des grandes problématiques de main-d'oeuvre, entre autres dans le secteur du meuble. Puis ce matin, l'entreprise Olymel, qui est venue nous exposer leur mémoire, en est une, entreprise qui est sur mon territoire.

M. Tsukalas (Thomas) : Il faut le lire tout, le mémoire, parce qu'il y a beaucoup des autres points. Parce que j'ai terminé en page 3, donc il y a sept pages...

M. Allaire : Oui, oui, oui, c'est parfait, je comprends. Puis c'est parfait, ça va vous permettre d'en parler. En fait, chaque matin chez nous, il y a un autobus qui part de Maskinongé, plus particulièrement de Yamachiche, qui va jusqu'à Montréal chercher des travailleurs, des immigrants, et les amène à l'usine pour faire leur cycle de travail. Idéalement, si on se projette à moyen terme, on espère ne plus voir cette pratique, c'est-à-dire qu'on veut que les immigrants viennent s'installer chez nous.

Vous en abordez certains aspects, là, dans votre mémoire. Entre autres, ce que vous proposez, bon, c'est un accès, finalement, à l'acquisition d'une première maison en favorisant, par exemple, une diminution du taux hypothécaire, qui pourrait être une solution, entre autres. Moi, je vois une certaine problématique, c'est-à-dire, oui, ça peut effectivement être un incitatif, mais par contre, souvent, ils peuvent manquer d'équité. Vous voyez ça comment? Est-ce que vous pensez que l'entrepreneur... pas l'entrepreneur, mais l'entreprise peut jouer un rôle à ce niveau-là?

M. Tsukalas (Thomas) : Oui, absolument, parce qu'aux États-Unis, par exemple, quand ils ont invité les infirmières, non seulement ils donnent une maison gratuite, ils aussi donnent une auto, une voiture gratuite, mais ils signent un contrat de 20 ans de travailler dans un hôpital... dans les hôpitaux, particulièrement dans les régions en Alabama, dans des régions dont il y a tellement beaucoup besoin des infirmières. La maison était donnée, gratuite, même une voiture, parce qu'aux États-Unis il n'y a pas beaucoup de services collectifs, et c'est ça, la question, mais pour 20 ans, elle signe 20 ans, elle va travailler dans un hôpital en Alabama, Birmingham ou d'autres endroits.

M. Allaire : Puis est-ce que l'intervention de l'État dans un contexte comme celui-là, est-ce que vous avez vu ça dans d'autres pays?

• (15 h 10) •

M. Tsukalas (Thomas) : Oui, mais on peut demander parce qu'il y a beaucoup, beaucoup d'argent pour... dans l'industrie de «health care», comme on dit en anglais. Mais, pour les infirmières, c'est très important parce que, pour rester dans un endroit, particulièrement dans les régions, pas juste dans Montréal, dans les grandes villes parce que c'est facile, mais, dans les régions, il faut avoir un incitatif. Un incitatif, ça veut dire donner quelque chose pour qu'ils peuvent rester là-bas. Parce que, dans une petite ville ou dans une petite région qui est bien isolée, peut-être la personne veut dire que je peux... bien, parce que je suis infirmière, je peux travailler aux États-Unis, donc, comme il y a beaucoup des infirmières d'ici, du Québec, qui émigrent au Suisse ou aux États-Unis parce qu'ils donnent des maisons gratuites, et elles espèrent des... il y a beaucoup, beaucoup de bonus comme ça.

M. Allaire : C'est donc un incitatif qui fonctionne, de ce que je comprends. Vous proposez aussi, par exemple, qu'on signe un contrat avec un immigrant qui veut s'installer en région. Qui signe le contrat? C'est l'entreprise avec l'immigrant ou c'est l'État qui signe ce contrat-là? Vous voyez ça comment?

M. Tsukalas (Thomas) : Ça, c'est... Auparavant, le Québec l'avait déjà fait, ça, durant les années 50. Ma tante, quand elle est venue ici, elle a signé un contrat pour travailler à Saint-Jérôme dans l'industrie du textile pour deux ans. Après deux ans, elle était... C'est peut-être le gouvernement ou avec... le gouvernement avec la compagnie, parce que, bien évidemment, c'est la compagnie qui va payer. Mais le gouvernement, c'est la cosignature.

M. Allaire : O.K. On a parlé beaucoup cette semaine du programme Immigrants investisseurs. Dans votre mémoire, vous en faites allusion, je crois que vous êtes en défaveur de ce programme-là. Pouvez-vous aller un petit peu plus loin?

M. Tsukalas (Thomas) : Non. Il faut avoir beaucoup, beaucoup de... Il y a beaucoup de fraudes. Par exemple, il y a un grand spécialiste en France, Gabriel Zucman, qui avait parlé sur le blanchiment d'argent. Et le blanchiment d'argent, ça vient particulièrement de la Chine, qui était... et pour des autres régions, il donne dans un projet, après ça il prend l'argent, il est blanchi. Donc, il réinvestit dans un autre endroit, aux États-Unis particulièrement, parce que c'est ça qui est le plus rentable qu'ici, et on peut faire un autre Chinois qui va investir dans le même endroit.

Il y a beaucoup des articles dans le journal Economist en anglais, une grande fraude avec ça, avec les Chinois en Grèce. Donc, ils ont acheté beaucoup, beaucoup d'argent... beaucoup, beaucoup des édifices, et les édifices, ils ont augmenté deux, trois, quatre, cinq fois de plus. Mais il était illégal parce que l'argent était venu par une banque qui était investie en Grèce. La même chose qui se passe à Vancouver. À Vancouver, par exemple, donc, selon la Gendarmerie du Canada, il y a environ 60 Chinois, 60 Chinois qui étaient recherchés par le gouvernement de Chine populaire parce qu'ils ont volé de l'argent des banques ou des usines, des choses comme ça, ils ont investi à Vancouver, comme Mme Meng, qui a une grande maison là-bas. Donc, il y a beaucoup des autres.

Un autre qui était un procès à Vancouver, c'était une madame qui était dans la prostitution, et c'était dans le trafic des prostituées, et elle était 3 millions de dollars là-bas. Et la Chine demande qu'elle est retournée à la Chine, mais le Canada dit que la loi de la Chine, elle n'est pas juste comme... Canada, mais elle était ici. Mais c'est...

La Présidente (Mme Chassé) : Il reste une quarantaine de secondes au bloc d'échange. Il reste une quarantaine de secondes au bloc d'échange.

M. Allaire : Bien, en fait, on parle beaucoup de compétitivité. Pour garder ce positionnement-là superintéressant qu'on peut avoir aussi au Québec, c'est quoi, les mesures qu'on doit continuer à faire ou qu'on doit changer, là, pour garder notre avantage concurrentiel, si on veut?

M. Tsukalas (Thomas) : Ah! c'est pour construire, à mon avis, comme en Allemagne, un réseau des écoles de... «vocational».

La Présidente (Mme Chassé) : ...secondes.

M. Tsukalas (Thomas) : Hein? Oui?

La Présidente (Mme Chassé) : En 10 secondes.

M. Tsukalas (Thomas) : Ah! de «vocational», c'est de métiers, des métiers, donc, comme en Allemagne. Les écoles qui sont...

La Présidente (Mme Chassé) : Merci. Ça conclut le bloc d'échange avec la partie formant le gouvernement. Maintenant, on passe au parti formant l'opposition officielle. M. le député de Nelligan, je vous invite à prendre la parole.

M. Derraji : Merci, Mme la Présidente. Merci, M. Tsukalas, pour votre présence et votre mémoire. Première question : C'est quoi, l'importance du français pour vous?

M. Tsukalas (Thomas) : Le?

M. Derraji : Le français. Le fait qu'on parle français.

M. Tsukalas (Thomas) : Le français?

M. Derraji : Oui.

M. Tsukalas (Thomas) : Ici?

M. Derraji : Oui, au Québec.

M. Tsukalas (Thomas) : Oui, c'est très important parce que... Écoutez, tous les pays, même en Europe, comme en Hollande... En Hollande, c'est un pays très petit, donc, pour enseigner le hollandais pour... qui était dans une population de 20 000, ou norvégien, qui était un pays de 5 millions de personnes, mais de haut niveau de vie, c'est difficile parce que... Mais, au Québec, c'est une grande, grande lutte parce que, généralement, l'anglais était «pervasive», c'était...

M. Derraji : Donc, c'est très important pour vous de garder cette spécificité québécoise. Et de facto...

M. Tsukalas (Thomas) : Oh! bien sûr, bien sûr, parce qu'autrement... Et non seulement ça, il faut imposer. Il faut imposer la langue, parce que, pour les situations de minorité, il faut imposer. Pour une grande nation comme les États-Unis, où l'anglais... il n'y a pas besoin de mettre des lois pour qu'ils parlent anglais. Tout le monde parle anglais parce que c'est plus difficile de survivre aux États-Unis sans parler. Ils ont intégré naturellement.

M. Derraji : Donc, vous comprenez que...

M. Tsukalas (Thomas) : Mais pour Québec, pour Québec, le français, il faut lutter, imposer des lois pour le «coercive». Il faut être... pour qu'ils apprennent le français.

M. Derraji : Le français. Mais je comprends et je partage votre point de vue. Le français, c'est très important pour notre nation, pour le fait de continuer à exister. Et vous le savez, l'immigration fait partie des solutions que le Québec a choisies depuis plusieurs années, ça ne date pas d'aujourd'hui. Et, dans votre mémoire, ce que vous proposez, la plupart des pays, ce n'est pas des pays francophones. Ça veut dire que, pour vous, ce n'est pas important, la langue française. Vous acceptez qu'on ramène des gens qui ne parlent pas forcément français, mais à condition qu'on les francise ici, au Québec.

Ma question en tant que contribuable... Le choix de ramener des gens francophones, c'est qu'on ne veut pas que le Québec dépense toute son énergie et son argent dans les cours de francisation. Ce qu'on veut, c'est des gens qui arrivent, premier jour, ils parlent français, peuvent aller acheter ce qu'ils veulent du dépanneur, aller chez le médecin, parler la langue commune qu'on a au Québec.

Donc, ce que vous proposez dans votre mémoire — et vous êtes quelqu'un qui a fait des études supérieures, pas de n'importe quelle université, l'Université de McGill — avez-vous chiffré ça? Ça va coûter combien aux contribuables si on suit votre proposition?

M. Tsukalas (Thomas) : Pour le français?

M. Derraji : Non, le fait qu'on ne ramène pas des gens 100 % francophones et il faut qu'on leur enseigne le français au Québec. Ça, ça a des coûts, hein?

M. Tsukalas (Thomas) : Premièrement, c'est la question d'embaucher, embaucher les personnes particulièrement dans des emplois du gouvernement, par exemple Hydro-Québec, dans les municipalités, donc ils sont bien payés, pas seulement...

M. Derraji : Non, non, ce n'est pas ça, ma question, monsieur. Je vais la répéter. Dans votre mémoire, vous avez dit que vous n'avez aucun problème à ce que le Québec cherche des gens de la Pologne, l'Ukraine, la Roumanie, la Moldavie, la Bulgarie, le Brésil, l'Amérique latine. Vous insistez même que le «target for special consideration, they are francophile».

M. Tsukalas (Thomas) : «Francophile».

M. Derraji : «Francophile».

M. Tsukalas (Thomas) : Francophile, bien sûr, parce que, généralement, dans les écoles, dans sa culture, le français était enseigné. Généralement, en Brésil, par exemple, c'était le français qui était enseigné. Après beaucoup des années, il a changé pour anglais. Mais la même chose en Mexique. Au Mexique, c'était pour les élites, je parle des élites. Généralement, c'était la langue française qui était... En Bulgarie, la même chose, en Roumanie, la même chose, en Pologne, c'est la même chose, le français était la langue seconde qu'ils apprennent après leur langue maternelle. Maintenant, avec l'anglais, les États-Unis qu'ils ont changé une grande partie, même dans les pays du Maghreb. Maghreb, par exemple, en Algérie, par exemple, c'était le français qui était enseigné, mais les États-Unis ont mis un grand programme pour angliciser les universités en Algérie parce que c'est pour... influence...

M. Derraji : Mais vous semblez, dans votre mémoire... parce que vous évoquez l'Algérie ou les pays du Maghreb, qu'il y a un problème d'intégration, et vous ne le suggérez pas...

M. Tsukalas (Thomas) : En France, en France, en France, oui, c'est ça. Ça va sans dire, ça. C'est bien clair, ça.

M. Derraji : Mais on parle du Québec, on ne parle pas de la France. Et l'immigration au Québec, elle est choisie. On ne parle pas de l'immigration en France. Mais, pour vous, l'immigration francophone, elle est très importante pour le Québec.

M. Tsukalas (Thomas) : Francophone ou francophile?

M. Derraji : Francophile.

• (15 h 20) •

M. Tsukalas (Thomas) : Francophile, parce que je parle de francophile, parce que des pays qui parlent français, ils sont très, très, très petits. Regarde, en 1948, le gouvernement du Canada a changé la loi d'immigration pour encourager l'immigration des Français, des Français de la France. Il y a 5 000 demandes chaque mois pour entrer au Québec, ça veut dire environ 60 000 demandes de la France pour immigrer ici. Le gouvernement, avec d'autres personnes, ils ont dit : Non, on ne veut pas les... ils ont rejeté. Seulement dans cinq années, on se sauve d'avoir 400 000 Français, immigrants français à Québec, ils avaient 5 000. Pourquoi? Ils ont dit : Ils sont communistes, ils sont des syndicalistes, ils sont des anticléricaux, ils sont des radicaux, ils sont des intellectuels. L'Église catholique ici, au Québec, dit : Non, non, non, on ne veut pas des...

M. Derraji : M. Tsukalas, ma collègue a des questions pour vous aussi. Donc, si vous le permettez...

La Présidente (Mme Chassé) : Oui, effectivement, la députée de Bourassa-Sauvé s'est signifiée pour prendre la parole. Allez-y.

Mme Robitaille : Merci. Combien de temps, Mme la Présidente?

La Présidente (Mme Chassé) : Trois minutes.

Mme Robitaille : O.K., bon, ce n'est pas grave. Écoutez, oui, écoutez, je lis votre rapport et, bon, je comprends, vous dites : Les Coptes, par exemple, en Égypte, ou les gens qui sont persécutés dans...

M. Tsukalas (Thomas) : Les maronites au Liban ou...

Mme Robitaille : ...les maronites, ou les ismaéliens, ou les bahá'ís en Iran, ou, par exemple, l'intelligentsia au Burundi qui fuit le régime de Nkurunziza, et tout ça, on pourrait... ils sont francophones...

M. Tsukalas (Thomas) : ...francophones, oui.

Mme Robitaille : ...ou francophiles, on pourrait les faire venir. Je ne sais pas si vous le savez, mais ce qui est dommage, et ça réfère, pour moi, tout de suite à la question des réfugiés, et on pouvait... on peut encore parrainer des réfugiés. Le gouvernement canadien... le gouvernement québécois a fait venir, par exemple, des Syriens, des Bosniaques au fil des années. Là, maintenant, on diminue le nombre de réfugiés, donc c'est dommage. Je suis d'accord avec vous, ce serait bien d'aller chercher, déterminés par le HCR, des réfugiés dans des camps, des réfugiés burundais, par exemple. Mais le nombre est très, très restreint, même va être beaucoup plus restreint qu'avant maintenant parce qu'on veut diminuer ce nombre de... cette catégorie d'immigrants, des immigrants humanitaires. Qu'est-ce que vous en pensez, vous, de ça?

M. Tsukalas (Thomas) : C'est ça, la raison que monsieur... le représentant au commissariat des réfugiés, il a dit qu'il faut accepter aussi des immigrants économiques comme des réfugiés. À mon avis, c'est une violation du concept de réfugié. Un réfugié, c'est un réfugié qui est une personne qui fuit un danger, ça veut dire de guerre ou de... comme ça.

Mme Robitaille : Oui, mais c'est ce que je dis, hein, parce que les Burundais de l'intelligentsia qui parlent français et qui sont dans des camps de réfugiés au Rwanda, hein, ils pourraient être des bonnes personnes ici. On pourrait aller les chercher, c'est des réfugiés. On peut les amener comme on a fait avec les Bosniaques, comme on a fait avec les Bhoutanais.

M. Tsukalas (Thomas) : Oui, je suis absolument d'accord, parce que...

Mme Robitaille : Et là on va être limités.

M. Tsukalas (Thomas) : Oui. Le Canada peut... le Québec peut faire une contribution pour accueillir un groupe de réfugiés. Évidemment, il faut les sélectionner, des choses comme...

Mme Robitaille : But you understand what I mean. I'm saying that they want to lower the number of refugees in Québec.

M. Tsukalas (Thomas) : Yes, yes, je suis contre ça. Non, je suis contre ça. Il faut avoir le même niveau que le Canada, le même niveau que M. Justin Trudeau, qu'il... S'il augmente le pourcentage, il faut être la même chose ici.

La Présidente (Mme Chassé) : Il reste 30 secondes au bloc d'échange.

M. Tsukalas (Thomas) : Au travail, c'est le même... pour peser, ça veut dire, le poids démographique. Si pour le Canada, c'est 10 %, ils sont réfugiés, le Québec, il faut accueillir 10 % avec son... de pourcentage.

Mme Robitaille : Merci.

La Présidente (Mme Chassé) : C'est très bien, ça conclut le bloc d'échange. Je passe maintenant la parole au député de Laurier-Dorion, qui représente le deuxième groupe d'opposition.

M. Fontecilla : Bonjour, M. Tsukalas. Dans votre mémoire, vous faites mention de la question de la francisation, comme quoi on pourrait améliorer, et vous citez des exemples internationaux. Vous êtes le premier à nous apporter cet éclairage-là. D'après vous, d'après les exemples que vous amenez, qu'est-ce qui pourrait être fait au Québec, là, pour améliorer la francisation?

M. Tsukalas (Thomas) : Premièrement, augmenter la qualité des enseignants, et, deuxièmement, faire, je pense, une amélioration de la méthode d'enseignement, et, troisièmement, il faut continuer, avoir une continuité d'enseignants. Parce que seulement pour six mois... trois mois, six mois, ça, ce n'est pas beaucoup. Il faut avoir peut-être une continuation de deux, trois années après le travail, vous savez, comme «part-time», ça veut dire temps partiel. Continuons, parce que, quand une personne arrête d'étudier le français, il arrête d'améliorer le français, parce que le français, il faut l'apprendre. C'est plus facile d'apprendre l'anglais parce que l'anglais, ils l'apprennent par la télévision, les films, des voyages aux États-Unis, n'importe où. Pour le français, il faut continuer, il faut insister, une scolarisation même après le travail. Et comme en Hollande, parce que le hollandais, c'est très difficile, ils les paient, ils les paient pour assister aux écoles pour apprendre la langue. C'est gratuit. Il paie, le gouvernement paie.

M. Fontecilla : Ici, au Québec, on les paie aussi, mais est-ce que vous pensez que c'est suffisant pour retenir les élèves sur les bancs d'école?

M. Tsukalas (Thomas) : Non seulement les élèves, je parle aussi des adultes.

La Présidente (Mme Chassé) : En 30 secondes.

M. Fontecilla : Oui, oui.

M. Tsukalas (Thomas) : Je n'ai pas dit des adultes, j'ai dit des élèves dans les écoles.

M. Fontecilla : Des adultes, oui, oui. Des adultes, oui.

M. Tsukalas (Thomas) : Oui, c'est... bien sûr. Mais il faut à la fois aussi une évaluation après trois mois, cinq mois pour voir s'il était amélioré ou non. Et pas avoir des étudiants de la littérature, parce que c'est ce qui se passe maintenant...

La Présidente (Mme Chassé) : En conclusion.

M. Tsukalas (Thomas) : ...il y a des personnes qui ont étudié de la littérature française à l'université, ils enseignent le français, mais comme métier.

La Présidente (Mme Chassé) : Merci. Ça termine le bloc d'échange.

M. Tsukalas (Thomas) : ...

La Présidente (Mme Chassé) : C'est très bien. Merci. Maintenant, la parole est à la députée de Gaspé, qui représente le troisième groupe d'opposition. Allez, la parole est à vous.

Mme Perry Mélançon : Merci, Mme la Présidente. Donc, j'aimerais, en conclusion, peut-être revenir sur vos recommandations de manière plus résumée, là, parce que je sais que vous n'avez pas eu la chance de terminer votre présentation. Alors, si vous voulez terminer en nous disant vraiment quelles seraient vos recommandations, là, dans le cadre de cet exercice qui est la planification des seuils d'immigration.

M. Tsukalas (Thomas) : O.K. L'autre, c'est que le Québec peut ouvrir un bureau, par exemple, à Warsaw... à Varsovie, à Varsovie, en Pologne. Auparavant, ils avaient un bureau à Vienne pour toute l'Europe de l'Est. Mais pourquoi Vienne? Parce qu'il y a quelques fonctionnaires qui veulent faire du ski à Innsbruck? Non. Il faut avoir un bureau au centre de recrutement des immigrants à Varsovie et un autre, peut-être, temporairement, à Berlin, à Londres, parce qu'il y a 1 million d'Européens de l'Est qui vont perdre leur permis de travailler en Angleterre, et ils ont beaucoup, beaucoup de compétences, ils sont des personnes qui sont... ils sont des mécaniciens, ils sont des charpentiers, ils travaillaient dans l'industrie de construction, ils étaient aussi des chimistes, il y a des chimistes, il y a des... mais parce qu'avec Brexit ils n'auront pas le droit de rester là-bas. Donc, c'est une recommandation de recruter, pas tout le monde, mais un grand nombre, un grand nombre, des infirmières, il y a beaucoup d'infirmières. On a besoin des infirmières au Québec.

Mme Perry Mélançon : Merci.

La Présidente (Mme Chassé) : Oui, ça termine le bloc d'échange. M. Tsukalas, je vous remercie pour votre contribution aux travaux de la commission.

Et je suspends momentanément les travaux de la commission pour permettre au prochain groupe de prendre place. Merci.

(Suspension de la séance à 15 h 29)

(Reprise à 15 h 32)

La Présidente (Mme Chassé) : Très bien, nous sommes de retour, et je souhaite maintenant la bienvenue à Me André Sirois. Vous avez 10 minutes pour votre exposé, et par la suite nous aurons un bloc d'échange avec les membres de la commission. Je vous invite à tout d'abord vous présenter. Bienvenue.

M. André Sirois

M. Sirois (André) : Bonjour, Mme la Présidente, mesdames messieurs. Je m'appelle André Sirois, je suis avocat. J'ai fait la plus grande partie de ma carrière à l'Organisation des Nations unies dans différents bureaux, et dans différents tribunaux de l'ONU, puis au secrétariat à New York. J'ai aussi travaillé dans d'autres organisations internationales et j'ai été notamment conseiller juridique de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié du Canada.

Je m'intéresse au sort des immigrants depuis fort longtemps, en fait depuis 1956, c'est-à-dire que ça fait presque 63 ans maintenant, alors qu'en 1956 j'ai participé à l'accueil du premier gros groupe de réfugiés qu'on a reçu dans l'histoire du Canada, à part les immigrants irlandais. Je suis allé à l'anse au Foulon aider à accueillir les réfugiés hongrois de 1956. Donc, si on a le temps, je pourrai y revenir après, j'ai une petite anecdote.

Je me réjouis beaucoup de la tenue des audiences, tout en regrettant qu'on n'ait jamais fait de véritables consultations de fond sur l'immigration au Québec, pas à ma connaissance, en tout cas. Un tel débat est plus que nécessaire, et les lobbys de l'immigration tentent de l'empêcher en criant au racisme et à la xénophobie, ce qui est très regrettable. Il faut faire cette consultation-là, et c'est ça ma première recommandation.

Entre-temps, le Québec doit décider de proclamer un moratoire et suspendre toute immigration au Québec le temps nécessaire à une réflexion pour décider des politiques de fond. C'est ma deuxième recommandation. Je vais revenir à ça après. Par conséquent, en toute logique, je ne ferai pas ici de commentaires sur le cahier de consultation directement, vu que je parle de suspendre l'immigration le temps de faire des consultations. Ce serait comme de parler de décoration intérieure alors qu'il y a un incendie. Vous allez voir pourquoi je parle d'incendie.

En ce qui concerne l'immigration, le Québec fait face à quatre difficultés ou à quatre problèmes majeurs. Deux problèmes qui sont anciens, qui remontent à la Constitution ou à l'acte d'Amérique britannique du Nord, c'est que le Québec n'a pas de contrôle sur l'immigration ni sur ses immigrants, ensuite il est pris avec les politiques de multiculturalisme, et je vais parler de ça après. Et plus récemment, deux problèmes plus récents, le pacte global sur l'immigration et le pacte global sur les réfugiés de l'ONU, ce qui est un problème énorme, c'est une menace énorme, et l'explosion démographique fulgurante en Afrique subsaharienne. Je vais proposer quelques observations à ce sujet puis je vais ensuite dénoncer quelques... ce qui me semble des erreurs qui sont colportées au sujet de l'immigration et que j'avais envie d'essayer de corriger.

Le Québec n'a pas de pouvoir sur l'immigration ni sur les immigrants, j'imagine que je ne vous apprends rien. Mais, dans la pratique, les problèmes sont considérables. Et un problème très simple ou une chose très simple qui n'est jamais mentionnée, c'est qu'on ne sait pas combien d'immigrants il y a, par exemple, à Montréal ou au Québec, tout simplement parce que les immigrants, une fois qu'ils sont rentrés au Canada, peuvent aller et venir comme ils l'entendent, c'est la Charte canadienne qui prévoit ça. Et, d'autre part, les immigrants, même les immigrants que le Québec envoie en région, peuvent décider de quitter la région et de s'en venir à Montréal, par exemple. Et, d'après les renseignements que j'ai, je ne prétends pas tout savoir, mais, d'après des coups de téléphone très informels, c'est ce qui se passe en région. En tout cas, les gens que je connais en région se plaignent de ça. Donc, c'est les... Je voulais mentionner ça parce que ça reste des problèmes de fond, des problèmes très sérieux, puis il y a, quant à moi, toute une politique à faire autour de ça ou une stratégie à adopter.

Ensuite, le Québec est pris avec les objectifs du multiculturalisme canadien, qui est, quant à moi... et je le disais à cette époque-là et j'ai connu des gens qui ont été parmi ceux qui ont établi le multiculturalisme pour le gouvernement canadien, je considère que c'est une fumisterie, et maintenant de plus en plus de pays s'en rendent compte, les quelques pays qui ont essayé ça laissent tomber et ne poursuivent plus dans cette voie-là. Malheureusement, au Canada, on est pris avec le fait que le multiculturalisme est maintenant inscrit dans la charte.

Le pacte global sur les migrations et le pacte global sur les réfugiés, ça va peut-être vous étonner ou vous allez peut-être vous demander ce que c'est. Croyez-moi, c'est une menace très sérieuse. Je ne peux pas vous donner tous les renseignements que je voudrais sur ce sujet-là pour une raison très simple, je ne les ai pas. Je travaille aux Nations unies depuis 30 ans, j'ai de très bons contacts, à la fois à l'intérieur et à l'extérieur, chez des intervenants importants, et malgré tout personne n'est capable de déterminer exactement ce qui se passe. Chacun a sa version ou chacun a ses bouts de version.

Mais, en gros, ce que ça va donner, et c'est pour ça que ça vous concerne, c'est que les Nations unies ou certaines personnes des Nations unies veulent prendre le contrôle de tout ce qui est migration à travers le monde. Quant à moi, puis je connais plusieurs gens qui le croient aussi, c'est une première étape vers un gouvernement mondial par des non-élus. En tout cas, ça ressemble à ça. Le problème, c'est que... Je sais très bien que les gens ici, en général, ont une très, très belle image des Nations unies. Malheureusement, la réalité est entièrement différente.

Et en ce moment les Nations unies sont contrôlées par un groupe de pays qui sont, de façon générale... qui ont des administrations que j'appellerais autoritaires, despotiques. C'est le mot qu'on utilise généralement quand on veut parler un peu plus large que «dictatoriaux». Alors, on dit «despotiques» pour couvrir «dictatoriaux» et ceux qui ne sont peut-être pas vraiment des dictateurs. Mais ça, c'est le groupe qui contrôle les Nations unies en ce moment. Remarquez, c'est très facile ou c'est relativement facile de voir ça et même d'utiliser ça à des fins politiques, mais je ne me lancerai pas là-dedans.

• (15 h 40) •

Alors, ce qui se passe dans les faits, c'est que vous avez un groupe de pays qui ne veut pas d'immigrants, qui n'en reçoit pas du tout dans certains cas, du tout, jamais, ou d'autres pays qui en reçoivent... comme le Japon, qui en reçoit 20... pas 20... 18 sur 20 000 demandes. Ça, c'est compté comme un pays qui reçoit des immigrants. Je n'ai pas besoin de vous dire qu'on est bien loin de la générosité canadienne et québécoise. Donc, ces pays qui ne reçoivent pas d'immigrants du tout, qui n'en veulent pas, vont maintenant décider d'ordonner aux pays qui... les quelques pays qui reçoivent vraiment des immigrants, en particulier le Canada, vont dire à ces pays-là comment faire et surtout qu'il faut en recevoir plus et mettre encore plus d'argent pour recevoir des immigrants. Vous comprenez que je trouve ça un peu fort, et je pense que n'importe qui de bon sens va trouver que c'est un peu fort. Mais, dans la réalité, c'est ça qui se passe. Ça, au moins, les gens que je connais, là, qui sont renseignés, qui se sont beaucoup renseignés à ce sujet-là, en arrivent à cette conclusion-là.

Malheureusement, Trudeau s'est jeté là-dedans la tête la première alors qu'il aurait... pour une fois, il aurait bien dû regarder ce que faisaient les États-Unis et ce que faisait Trump. Les États-Unis ont refusé de signer ces deux pactes-là, qui ne sont pas des pactes, soit dit en passant, ce n'est pas vraiment des pactes, mais là je ne me lancerai pas dans cette technique-là. Mais le gouvernement américain ne s'est pas embarqué là-dedans parce que ces pactes-là portent atteinte à la souveraineté nationale, et ça, je suis convaincu que le gouvernement américain avait raison. Puis il y a quand même... malgré ce qu'on peut penser de Trump, il y a quand même des gens intelligents, là, quelque part dans le gouvernement américain, et c'est le cas. Le gouvernement canadien n'aurait pas dû signer ce pacte-là. On n'a pas été consultés, et c'est tout. D'autre part...

La Présidente (Mme Chassé) : Il reste une minute à votre...

M. Sirois (André) : Pardon?

La Présidente (Mme Chassé) : Il vous reste une minute à votre exposé.

M. Sirois (André) : Bon, alors on passera au reste plus tard.

L'explosion démographique en Afrique. Je n'aime pas beaucoup assommer les gens avec des chiffres, mais ce que je vous dirais, c'est qu'il y a un taux de croissance de 4 %, la population double tous les 20 ans environ. D'ici à 2030, l'Afrique va voir sa population passer de 1,2 milliard à 1,7 milliard, 50 millions de naissances par année. L'Afrique du sud du Sahara explose, et ça, c'est vraiment le terme qu'utilisent les spécialistes, c'est une bombe démographique. Et là, on ne pourra pas recueillir tout ce monde-là et on ne pourra pas aider tout ce monde-là. Il va falloir discuter de ça et il va falloir faire des choix. C'est un problème de canots de sauvetage. Vous pouvez... Si vous êtes...

La Présidente (Mme Chassé) : On conclut.

M. Sirois (André) : Vous ne pouvez pas prendre tout le monde du Titanic dans le même canot de sauvetage, et c'est connu.

La Présidente (Mme Chassé) : Ça conclut.

M. Sirois (André) : ...je reviendrai...

La Présidente (Mme Chassé) : Bien, vous allez avoir l'occasion de le faire lors des débats d'échange avec les membres de la commission, qui débutent avec le parti formant le gouvernement. M. le ministre, la parole est à vous.

M. Jolin-Barrette : Merci, Mme la Présidente. Me Sirois, bonjour, bienvenue à l'Assemblée nationale. Merci pour la présentation de votre mémoire. Vous avez commencé, en introduction : On ne sait pas... on n'a jamais fait de véritable consultation en matière d'immigration au Québec. Qu'est-ce que vous voulez dire par là? Parce que, là, présentement, on est en consultation.

M. Sirois (André) : C'en est une, mais, quant à moi... et vous me corrigerez si je fais erreur, mais moi, je n'ai jamais vu... puis j'ai suivi le ministère de l'Immigration pendant longtemps, le temps que j'étais au Québec en tout cas, depuis Jacques Couture, et je n'ai jamais vu une consultation générale à l'intérieur du Québec sur ce qu'on voulait comme immigrants, sur les politiques qu'on voulait avoir pour les immigrants; d'abord, si on en voulait, première des choses et, deuxièmement, comment est-ce qu'on allait procéder avec ça. Jacques Couture est arrivé à gagner quelque chose, un semblant de pouvoirs, mais moi, je n'ai pas vu de vraie consultation, là, faire le tour du Québec pour tenter de savoir ce que les Québécois veulent et ce qu'ils souhaitent faire de ça.

Je fais peut-être erreur. Vous en connaissez peut-être; moi, je n'en connais pas. Il y a des... ce qu'on... Et ce qu'on me confirme à l'intérieur de votre ministère... et là je ne veux pas vous donner l'impression que j'ai des contacts secrets, mais tout simplement, comme ça, des gens que je connais puis qui sont bien renseignés me disent qu'effectivement, depuis longtemps, bien avant vous, là, on a procédé au pièce à pièce, et que, pendant longtemps... Mes amis, qui sont vraiment des gens très cotés là-dedans, me disent : On ne pouvait jamais savoir, par exemple, quelle quantité d'immigrants on voulait ou on allait vouloir et on ne pouvait pas arriver à avoir les éléments essentiels pour établir une politique. C'est ce qu'on me dit. Ça a peut-être changé depuis. Moi, il y a un bout de temps que je ne suis plus vraiment au Québec autant qu'avant, et, si vous me dites que c'est autre chose, je veux bien. Moi, il me semble que, s'il y avait eu quelque chose d'importance, j'en aurais entendu parler.

M. Jolin-Barrette : Bien, en fait, moi, je pourrais vous dire, actuellement, on est présentement en train de... puis la démonstration, c'est que vous êtes présent, la consultation, c'est une consultation générale, tout le monde au Québec pouvait déposer un mémoire à la présente consultation, donner ses commentaires sur la planification. Il y en a qui font ça beaucoup plus large que le cahier de consultation, dans les mémoires qu'on reçoit. Donc, je comprends que vous m'invitez peut-être à faire une tournée du Québec en commission itinérante.

M. Sirois (André) : Pourquoi pas? Moi, j'avais l'impression, en préparant mon mémoire, là, que... vous verrez en le lisant, j'avais l'impression que je me mettais délibérément à côté de la plaque, que normalement, si vous faites une consultation, avec un cahier de consultation, en plus, que les gens ont pris la peine de rédiger, qui est bien fait, d'ailleurs... Je n'ai pas voulu faire de commentaires sur le cahier, mais je vais vous dire que je le trouve bien fait. Et j'aurais peut-être une critique après, si jamais quelqu'un pose une question, mais je trouve que c'est bien fait, je trouve ça intéressant, mais c'est déjà encadré au départ. Moi, ce que j'aurais souhaité comme cadre, c'est que ce soit justement une tournée de consultation d'ensemble pour dire aux gens : Où est-ce que vous voulez qu'on aille avec l'immigration? Je ne suis pas contre l'immigration, je ne suis pas en train de proposer des solutions, je suis juste en train de dire qu'il me paraît que ça a pris une telle importance dans la société québécoise qu'on devrait faire ça et que, par ailleurs, en toute logique, on devrait faire un moratoire et se dire : On se retrousse les manches, on regarde ça et puis on va prendre des décisions de fond pour savoir où on s'en va. Bien entendu, comme toutes les décisions de fond, à un moment donné, il va falloir donner un coup de volant, on verra.

M. Jolin-Barrette : O.K. Je ne veux pas renchérir le débat, mais je sais que ma collègue de Notre-Dame-de-Grâce, à l'époque où elle était ministre de l'Immigration, il y a quelques années, avait également fait une consultation sur le nouvel énoncé de politique du ministère de l'Immigration. Alors, je veux juste porter ça à votre attention. Je comprends qu'il n'y a pas eu de consultation dans les différentes régions, mais tout le monde peut venir à l'Assemblée nationale et tout le monde peut déposer des mémoires et faire connaître leur opinion sur les différents sujets qui ont cours.

Par rapport à l'ONU, vous dites : Écoutez, il faut faire attention par rapport aux commentaires qu'on reçoit de l'ONU sur la capacité d'accueil des États et, dans le fond, sur la souveraineté des États. On doit être en... Dans le fond, ce que vous nous dites, c'est que parfois certains représentants de l'ONU vont dire à certains États comment se comporter.

• (15 h 50) •

M. Sirois (André) : Ah! bien là, on saute à ce que j'ai rajouté en note de fin de page, si vous voulez. C'est que moi, j'ai été stupéfait d'apprendre que vous avez quelqu'un de l'ONU qui se présente ici, en commission. C'est absolument, absolument interdit. Il y a deux choses interdites pour les gens de l'ONU : la première, c'est de prendre des ordres du pays d'où on vient ou d'un autre pays, finalement, et la deuxième, c'est d'intervenir dans les politiques internes d'un pays, quel qu'il soit. Et ça, c'est respecté de façon absolue, absolue.

Je représente des employés de l'ONU depuis maintenant pratiquement 30 ans contre l'administration. J'ai fait ça bénévolement tant que j'étais employé, et puis ensuite j'ai continué, bon, quand j'ai pris ma retraite. J'ai représenté un grand nombre d'employés, j'ai gagné un tas de causes de toutes sortes. Je vous dirai que, pour ça, si un employé m'arrivait avec ça en disant : J'ai été sanctionné parce que je suis allé témoigner en commission parlementaire à Québec, je lui dirais : Mais il n'y a rien que je peux faire pour faire lever la sanction ou pour te faire réembaucher. Vraiment, je ne vois pas sur quelle base je pourrais faire ça, ça fait plus de 70 ans que c'est comme ça et que c'est appliqué strictement à tout le monde.

Je ne sais pas où ce gars-là... quel règlement il a eu. Il y a peut-être une entente très particulière avec le gouvernement du Québec. Normalement, dans ces cas-là, il y a ce qu'on appelle, bon, dans le jargon des Nations unies, un MOU, un mémorandum d'entente ou peu importe, un texte de mandat quel qu'il soit, mais il y a un document entre quelqu'un de l'ONU qui est dans un pays, qui est posté dans un pays comme ça, il y a un texte quelque part, sûrement. Moi, j'ai soumis, dans mes notes : Si j'étais à votre place, je demanderais à voir ça pour savoir si vraiment il a l'autorité pour faire ça. Je l'ai mentionné dans mes notes, j'ai téléphoné à la fois à d'anciens ambassadeurs qui sont des amis en qui j'ai toute confiance, des ambassadeurs du Canada, et des gens au cabinet du secrétaire général, et des gens aux affaires juridiques des Nations unies, des amis, des gens en qui j'ai confiance et qui ne veulent surtout pas que je donne leur nom, mais dans tous cas ça a été unanime, les gens étaient stupéfaits, ils disaient : Mais qu'est-ce qu'il va faire là? Tu n'es pas sérieux? Et, je ne sais pas, peut-être qu'il va vous montrer un document établissant que c'est justifié. Ce serait un précédent, c'est des choses qui arrivent. Moi, je n'ai pas communiqué avec lui puis je ne lui ai pas demandé qu'il me rende des comptes à moi, je n'ai pas à faire ça, je vous fais part simplement de mon étonnement et de ma suggestion de lui demander qu'est-ce que c'est, son mandat quand il vient vous parler ici. C'est tout ce que j'ai dit... j'ai à dire.

M. Jolin-Barrette : Vous suggérez une loi sur la résidence québécoise. Pouvez-vous nous expliquer ce concept-là?

M. Sirois (André) : Oui, bien, je vais vous dire, j'ai fait ça parce qu'en préparant mon mémoire j'ai parlé avec des gens de votre ministère, et puis ces gens-là... ou des gens qui sont... non pas dans votre ministère, dans ce cas-là, c'est quelqu'un qui est à l'extérieur, mais qui, pour toutes sortes de raisons professionnelles, ne peut pas être identifié, mais j'ai beaucoup confiance en lui comme quelqu'un de très savant, et il me dit : Écoute, rends-toi compte qu'il n'y a pas une loi définissant la résidence québécoise, et ça cause énormément de problèmes parce qu'il y a plusieurs définitions de résidence en ce qui concerne les immigrants, et ça ouvre la porte aussi à des fraudes. Bon, je me suis dit... je lui ai dit : Très bien, moi, je vais le prendre à mon compte, ça me semble parfaitement logique. Moi, il y a un bout de temps où j'ai rédigé des lois et des règlements, même révisé des lois et des règlements. C'est un peu ce que je connais. Très bien, moi, je suis bien pour ça qu'on rédige une loi et qu'on fasse une loi claire et non pas une loi... ou ne pas avoir une situation où on a différentes lois avec différentes définitions... je ne vous dirai pas qu'elles sont contradictoires, mais qui ne sont pas cohérentes. N'importe quel étudiant de droit va vous dire qu'on aime mieux avoir un texte cohérent et clair.

M. Jolin-Barrette : Faites-vous référence à la résidence permanente? Parce qu'à partir du moment où une personne immigrante entre sur le territoire québécois, il y a une libre circulation.

M. Sirois (André) : C'est bien sûr, mais pour obtenir certains services... ce que j'ai compris, c'était : pour obtenir certains services, il faut une résidence, et puis les exigences de résidence varient selon le type de service. Là, je ne peux pas m'avancer beaucoup plus que ça. Sérieusement, si jamais vous êtes intéressé à en savoir davantage, je peux communiquer avec ma source et me faire donner des exemples plus précis. Il m'en a donné au téléphone, sauf que je n'ai pas tout pris ça en note en même temps. Mais, si jamais vous êtes intéressé, je peux communiquer avec ma source, je ferai l'intermédiaire et je vous transmettrai l'information.

M. Jolin-Barrette : Écoutez, je vous remercie, et je pense que j'ai des collègues qui veulent vous poser des questions. Merci pour votre présentation.

La Présidente (Mme Chassé) : Oui. Alors, je donne la parole à la députée de Bellechasse.

Mme Lachance (Bellechasse) : Merci, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Chassé) : Ça me fait plaisir. Et vous voulez savoir combien de temps?

Mme Lachance (Bellechasse) : Vous m'accordez combien de temps, Mme la Présidente?

La Présidente (Mme Chassé) : Je vous accorde 4 min 30 s avec plaisir.

Mme Lachance (Bellechasse) : Merci. Merci beaucoup. Merci d'être là. D'abord, j'ai pris connaissance de votre mémoire, et j'aimerais revenir sur un petit passage dans lequel vous mentionnez que des études en France nous disent qu'il faut trois générations pour passer de l'état d'immigrant, dans un pays, à celui de citoyen à part entière. Est-ce que vous seriez en mesure de me dire de quelles études il s'agit?

M. Sirois (André) : Non, mais je peux les chercher parce que je sais très exactement d'où vient cette information-là, ça vient d'un livre, que je vous recommande beaucoup, que je recommande à tout le monde, d'ailleurs, qui est vieux maintenant. Mais j'ai vu ça en 1992, et je regrette encore de ne pas avoir fait ce que je voulais faire à ce moment-là, d'en faire une version canadienne, québécoise. Je pourrai vous donner la référence par écrit, si vous voulez, si vous me donnez votre carte, c'est un livre de quelqu'un qui s'appelle Jean-Claude Barreau, et ça s'appelle... c'est un titre très, très, très long, c'est comme De l'immigration et de la citoyenneté française en général, ou quelque chose comme ça. C'est toute une série de livres qui portent le même titre un peu long dont je ne peux pas me souvenir maintenant. Mais j'ai beaucoup d'admiration pour Barreau, qui est quelqu'un d'absolument exceptionnel et un excellent vulgarisateur, et il a été, entre autres, responsable de l'immigration en France. Je ne vous raconterai pas sa vie, mais allez voir sur Wikipédia, il a une vie passionnante. Et, encore une fois, c'est un très, très bon vulgarisateur, et je m'en rappelle très bien que j'ai vu ça dans son livre, c'est là que j'ai vu... j'ai appris beaucoup, beaucoup de choses sur l'immigration. Bon, je m'intéressais à l'immigration, j'avais été à la Commission de l'immigration et j'ai appris beaucoup de choses dans son livre. Il a fait un livre aussi, soit dit en passant, sur l'islam, et, là aussi, on apprend beaucoup, beaucoup. Comme je vous dis, c'est un excellent vulgarisateur, et je pense que... Alors, je pourrai regarder pour avoir... de mémoire, je suis assez convaincu qu'il ne donne pas une référence précise, mais, s'il faut, je vais le contacter pour lui demander la référence, je suis prêt à le faire.

Mme Lachance (Bellechasse) : Ça va aller, merci. Dans un autre ordre d'idées, vous savez, actuellement, nos entreprises, pour plusieurs, ont de la difficulté à trouver de la main-d'oeuvre. On sait que près des trois quarts des travailleurs qualifiés s'établissent dans la région de Montréal. Auriez-vous des solutions ou... Qu'est-ce que nous pourrions faire, selon vous, pour mieux accompagner les immigrants vers le travail en région?

M. Sirois (André) : L'idée d'accompagnement, c'est très bon. Moi, je pense que les Québécois sont très, très hospitaliers et je pense aussi qu'ils ne sont pas racistes. Là, vous avez vu sans doute ce que je dis dans le texte à ce sujet-là. Il n'y a pas d'injure plus fausse pour les Québécois. Je vis à l'étranger et je vois fonctionner des étrangers les uns par rapport aux autres à l'intérieur des Nations unies, par exemple. Les Québécois ne sont pas xénophobes, ils ne sont pas racistes, c'est vraiment totalement faux.

Ce que je dirais, c'est que, d'abord, pour ce qui est de combler les besoins de main-d'oeuvre, ça fait 2 000 ans que ces problèmes-là sont réglés. Déjà, les Romains de la Rome antique avaient réglé ces problèmes-là, et avaient des travailleurs étrangers, et géraient leurs travailleurs étrangers. Les Grecs de la Grèce ancienne aussi. Ce n'est pas si compliqué que ça.

Les pays des Émirats arabes, par exemple, qui ne veulent pas du tout d'immigrants, qui viennent encore d'en jeter à la porte, là, un nombre considérable, qui ne veulent pas du tout d'immigrants, prennent quand même de la main-d'oeuvre étrangère qu'ils contrôlent. Je ne prétends pas que c'est une situation idéale là-bas. Je vous dirai que j'ai eu une sorte de guerre avec le Qatar, que j'ai gagnée, entre autres parce que j'ai fait valoir ce que je savais fort bien, c'est qu'au Qatar et dans les Émirats arabes — ça fera peut-être plaisir à certaines personnes qui vont venir ici — on fait venir des étrangers, de la main-d'oeuvre étrangère, on leur donne des contrats en bonne et due forme un an, deux ans, trois ans, et, quand le contrat est terminé, pour rentrer chez lui...

La Présidente (Mme Chassé) : En conclusion.

M. Sirois (André) : ...l'employé doit se faire donner l'autorisation de son employeur pour rentrer chez lui, surprise, l'employeur lui dit : Rembourse-moi tout l'argent que je t'ai payé, autrement je ne signe pas. Et, s'il ne signe pas, c'est la prison. Je vous assure que ça se fait encore maintenant.

La Présidente (Mme Chassé) : Très bien, ça conclut le bloc d'échange avec le parti formant le gouvernement. Nous passons maintenant au parti formant l'opposition officielle. M. le député de Nelligan, la parole est à vous, allez-y.

M. Derraji : Merci, Mme la Présidente. Bonjour, M. Sirois. Vous avez signé votre mémoire avec «avocat auprès de l'ONU». Est-ce que vous exercez toujours à l'ONU?

M. Sirois (André) : Je ne suis pas avocat de l'ONU. Ça fait déjà longtemps que je ne suis plus avocat de l'ONU. Je suis auprès de l'ONU parce que je représente les fournisseurs de l'ONU et les employés de l'ONU contre l'administration de l'ONU.

M. Derraji : Oui. Ma question est très simple : Est-ce que vous exercez toujours auprès de l'ONU?

M. Sirois (André) : Oui, oui, je représente des employés et des fonctionnaires de l'ONU dans le cas des services de l'ONU. Dans le cas des services, ça se fait généralement sous forme d'arbitrage. Dans le cas des employés, c'était le tribunal administratif. Maintenant, on a un nouveau tribunal, grâce à moi, soit dit en passant.

M. Derraji : Non, c'est juste, probablement... et corrigez-moi, peut-être je me trompe, moi, quand je vois une signature «avocat auprès de l'ONU», j'ai cru comprendre que c'est l'ONU qui est devant moi. Donc, c'est juste une question pour savoir... Vous êtes là en votre titre personnel, pas comme le groupe qu'on va recevoir demain, donc.

M. Sirois (André) : Ah! non, non, non. Je ne suis pas là au nom de l'ONU. Je croyais que c'était clair, mais, si ça ne l'est pas, je peux...

M. Derraji : Non, c'est juste... je voulais juste clarifier.

M. Sirois (André) : ...mais, si ça ne l'est pas, je peux le préciser.

M. Derraji : Non, pas de problème.

M. Sirois (André) : Non, je ne parle sûrement pas au nom de l'ONU et je ne prétends pas ça.

M. Derraji : Merci beaucoup. Ma première question. Vous avez déclaré, dans votre document : Nous nous sommes établis ici après y avoir été invités par les Indiens. «Contrairement à ce que prétend la version fédéraliste et multiculturaliste, [nous ne sommes] pas des immigrants.» Nous nous sommes établis ici après y avoir été invités par les Indiens, donc suite à une invitation. Pouvez-vous juste me clarifier votre pensée par rapport à ça?

M. Sirois (André) : Ah! ce n'est pas ma pensée, c'est des faits très simples qui sont dans les documents historiques. Quand les Français sont arrivés ici... Lisez, par exemple, la vie de Champlain ou lisez des documents de Champlain qui sont là, on les publie, là, tout récemment, quand les Français sont arrivés, ils ont été invités par les Indiens, qui avaient besoin des armes des Français. Ils ont été invités par les Indiens à s'allier à eux pour combattre d'autres Indiens, les fameux Mohawks.

M. Derraji : Ils étaient invités comment?

M. Sirois (André) : Ah! bien là, je n'étais pas là, mais c'est ce que disent les documents.

M. Derraji : Non, mais vous relatez des faits que les Indiens, ils ont invité les Français pour pouvoir les aider, donc il y avait une invitation pour venir en aide dans un contexte particulier.

M. Sirois (André) : Oui, oui, mais ça, remarquez, je n'étais pas là...

M. Derraji : Moi non plus. Moi non plus.

• (16 heures) •

M. Sirois (André) : ...je vous parle de livres d'histoire et je peux vous donner des références à des livres d'histoire où ça, c'est reconnu. Je suis étonné, même, de votre question, parce que c'est vraiment reconnu que les Français ont été invités par les Indiens et ont fait des alliances avec les Indiens. Et c'est ça qui a été la force de l'administration française, c'est tout ce réseau d'alliances avec les Indiens.

M. Derraji : Tisser des liens d'alliance, je comprends le fond de votre pensée, parce que, probablement, nous avons juste évolué dans le temps. Et je veux juste vous ramener à une autre réflexion, c'est que, probablement, le Québec continue de fonctionner de la même façon que les Indiens. Mais je veux vous expliquer la démarche qu'on fait, présentement. C'est que le ministère, avec la déclaration d'intérêt, le candidat à l'immigration déclare son intérêt, mais c'est le Québec qui lui demande de déposer pour avoir son certificat de sélection. Donc, les temps changent. Dans le passé, les Indiens, ils avaient un besoin, donc ils ont demandé aux Français de venir. Et c'est comme ça, dans votre texte, vous dites que les Français, c'est un peuple fondateur, ce n'est pas des immigrants. Donc, est-ce qu'on peut appliquer la même logique du moment que c'est le Québec qui demande à ces gens d'appliquer et de venir au Québec?

M. Sirois (André) : Je n'ai pas dit que les Français, c'était un peuple fondateur. Je suis certain que je n'ai pas utilisé cette expression-là. Mais je veux bien vous parler de ça quand même, je veux bien vous répondre.

C'est que ce qui est arrivé, c'est simple : techniquement, d'un point de vue de droit — et vous verrez, j'ai pris la peine de mettre, dans mon document, une définition d'«immigrant» qui vient du meilleur dictionnaire de droit français — ce qui est arrivé, c'est que les Français, en s'établissant, ont créé une colonie. Et, à ce moment-là, les colons qui venaient dans la colonie ne quittaient pas la France, ils partaient du royaume de France, ils étaient sujets du roi de France, et ils s'en venaient au Québec, en Nouvelle-France, où ils étaient encore des sujets du roi de France, et ils n'avaient pas changé d'allégeance, ils n'avaient pas changé de pays, ils n'avaient pas changé de gouvernement. Donc, de ce point de vue là et du point de vue de droit de l'immigration, ce n'est pas des immigrants, ça n'a jamais été des immigrants. On ne descend pas d'immigrants, soit dit en passant, contrairement à ce que dit le fédéral. Et là je voudrais bien — j'aurais dû le mettre dans mes recommandations — que le Québec fasse son histoire du Québec qu'il remettrait aux immigrants et qu'il ne s'en remette pas au fédéral pour raconter aux immigrants l'histoire du Québec. Ce qu'on voit à Ottawa à ce sujet-là dépasse l'imagination. Je ne vous ferai pas perdre de temps avec ça maintenant, mais, croyez-moi, il y en a long à dire à ce sujet-là.

M. Derraji : Mais juste vous rappeler que je n'ai pas le même temps que la partie gouvernementale, et j'adore échanger avec vous, parce que vous l'avez évoqué, nous sommes... bien, en fait, vous affirmez qu'il y a des affirmations fausses. La première, on l'a vu, est que nous sommes tous des immigrants. C'est faux, les colons français n'étaient pas des immigrants. De plus, ils ont fait ce pays, ce qui n'est pas le cas des immigrants ni des réfugiés que nous accueillons maintenant. Ça veut dire, pour vous, il y a deux... il y a les non-immigrants et il y a les immigrants, corrigez-moi, parce que je veux juste comprendre votre pensée par rapport à ça. Comment on va aller expliquer ça aux gens qu'on accueille ou qu'on cherche? On doit leur dire quoi pour venir au Québec?

M. Sirois (André) : Mais c'est relativement simple : dans tous les pays du monde, il y a des nationaux puis il y a des gens qui ne sont pas des nationaux, qui peuvent être des travailleurs étrangers temporaires ou qui peuvent être des immigrants. Mais la notion d'immigrant s'oppose...

M. Derraji : Pouvez-vous me donner des exemples, c'est quoi, des nationaux et des immigrants? Genre, moi, je suis un immigrant. Moi, je suis un immigrant. Selon vous, selon votre définition, je suis un immigrant.

M. Sirois (André) : Bien, ce n'est pas ma définition à moi, c'est la définition de droit...

M. Derraji : Non, non, mais je suis juste votre document.

M. Sirois (André) : Il y a d'énormes documents, il y a des définitions de droit international sur les immigrants et sur les nationaux, et il y a une différence entre les nationaux et les immigrants. Je n'invente rien, les documents sont là. Et, si on veut se comprendre... c'est pour ça que j'ai mis, d'ailleurs, la définition d'«immigrant». Et immigrant, ce n'est pas un citoyen national, c'est quelqu'un qui quitte son pays pour aller dans un autre pays. Alors, moi, je n'ai jamais quitté mon pays pour aller dans un autre pays. Voilà.

M. Derraji : O.K. Donc, vous êtes... On n'a pas le même statut, moi et vous. Moi, je suis immigrant, vous voulez...

M. Sirois (André) : Ce n'est pas ce que je dis, je dis simplement que c'est juste un fait. On n'a pas la même définition. Je ne dis pas ça en... Je n'essaie pas de faire une échelle de valeurs ou quoi que ce soit avec ça, je parle simplement d'un fait. Un immigrant n'est pas un citoyen national, puis un citoyen national n'est pas un immigrant, ce n'est pas la même chose, et ça, tous les dictionnaires du monde vont vous confirmer ça. Je peux vous parler de dictionnaires d'autres langues que je connais où la même distinction existe, et on peut regarder dans les documents des Nations unies, et vous allez voir qu'on va trouver des tonnes de documents qui font cette distinction-là.

M. Derraji : Oui, vous faites beaucoup référence aux Nations unies, mais pourtant vous critiquez beaucoup les Nations unies.

M. Sirois (André) : Ah! absolument, oui, parce que je pense...

M. Derraji : Donc, on peut faire référence aux Nations unies même si on critique les documents des Nations unies.

M. Sirois (André) : Ah! je pense qu'il faut critiquer les Nations unies. Ça fait des années que je critique les Nations unies. J'ai même obtenu qu'on refasse tout le système de justice interne avec les critiques que j'ai faites des Nations unies. Je suis bien d'accord pour critiquer les Nations unies, mais c'est là maintenant, puis on doit vivre avec ça.

M. Derraji : Merci, M. Sirois. Ma collègue va continuer.

Le Président (M. Provençal)  : Alors, Mme la députée de Bourassa-Sauvé.

Mme Robitaille : Bonjour, monsieur. Vous avez travaillé à la CISR, comme moi. En quelle année?

M. Sirois (André) : Oh mon Dieu! Il faudrait que je vérifie. 1989-1990, quelque chose comme ça.

Mme Robitaille : Ah bon. Écoutez, j'avais plusieurs questions...

M. Sirois (André) : C'était tout de suite après l'adoption de la nouvelle loi.

Mme Robitaille : Ah oui, ça commençait, à cette époque-là, ça commençait sous Mulroney.

M. Sirois (André) : Oui, oui, c'est ça. J'ai été embauché, là, justement à cause de l'arrivée de la nouvelle loi.

Mme Robitaille : Puis il y en avait, là, des demandeurs d'asile à cette époque-là, je pense, oui, il y en avait beaucoup.

M. Sirois (André) : On pourrait parler de ça longuement après, si vous voulez.

Mme Robitaille : Ah! oui, mais on va revenir à nos moutons. Écoutez, depuis le début des consultations, on parle de pénurie de main-d'oeuvre. On a plusieurs groupes qui sont venus nous parler de crise, même, de main-d'oeuvre. Alors, bon, vous proposez un moratoire. Qu'est-ce qu'on fait? Il y a une pénurie de main-d'oeuvre, là. Moi, ma tante est dans un CHSLD, il y a un problème préposés aux bénéficiaires sérieux. Qu'est-ce qu'on fait, s'il y a une pénurie de main-d'oeuvre, puis on gèle l'immigration?

M. Sirois (André) : On fait venir des travailleurs étrangers auxquels on donne des contrats d'un an, deux ans, trois ans. Ça peut prendre diverses formes, là, mais c'est fréquent partout à travers le monde. Pensez-vous qu'au Japon, qui ne prend pas d'immigrants et qui a une population très, très vieille... on a exactement le même genre de problème et on le résout en faisant venir des travailleurs étrangers auxquels on ne donne pas la citoyenneté, jamais.

Mme Robitaille : Un peu comme dans les États arabes unis, c'est ça, où on donne des contrats, on donne des...

M. Sirois (André) : Oui, mais je ne prétendrai pas que la même situation se produit au Japon, c'est-à-dire qu'on refuse de payer ou qu'on se fait rembourser, je ne pense pas que ce soit le cas, mais il reste que c'est une des façons de régler ces problèmes-là, c'est par l'embauche de travailleurs étrangers. On fait venir des travailleurs étrangers, c'est fréquent, ça se fait depuis toujours, ça. Il y a toujours des creux, et les gens font ça.

D'un autre côté, je vous dirais, si je peux ajouter à ça, que moi, je ne suis pas toujours très impressionné par la Chambre de commerce, par exemple...

Le Président (M. Provençal)  : Je vous remercie, monsieur, alors, pour cette réponse. Nous en sommes rendus à un échange avec le deuxième groupe d'opposition. Je cède la parole au député de Laurier-Dorion.

M. Fontecilla : Merci. Bonjour, M. Sirois. Écoutez, vous avez dit tantôt que vous n'étiez pas contre l'immigration, alors que, dans l'ensemble de vos propos, de votre mémoire, on sent que l'immigration, ce n'est pas quelque chose de bon pour le Québec, de positif. D'ailleurs, vous le dites vous-même, votre principale recommandation, c'est un moratoire sur l'arrivée de l'immigration, et ça laisse supposer que tous les immigrants qui vont arriver ne sont pas un apport positif pour le Québec et tous ceux et celles qui sont arrivés avant non plus. D'ailleurs, vous dites, en parlant du multiculturalisme, que les immigrants forment des ghettos qui font des luttes entre eux et au détriment des Québécois, là.

Moi, j'aimerais ça que vous nous expliquiez est-ce que l'immigration, pour vous, c'est un apport positif pour le Québec ou c'est quelque chose qu'on devrait faire comme le Japon, qui est un pays, oui, qui refuse l'immigration — un des rares pays à travers le monde, d'ailleurs — d'arrêter carrément l'immigration au Québec.

M. Sirois (André) : Bien, vous m'avez fait dire plusieurs choses que je n'ai pas dites et je ne peux pas...

M. Fontecilla : Je cite votre...

M. Sirois (André) : Non, non, non, ce n'est pas ça que j'ai dit, non, non, non.

M. Fontecilla : Je peux vous citer encore, si vous voulez.

M. Sirois (André) : Non, non, je n'ai pas dit que je suis contre l'immigration.

M. Fontecilla : Vous l'avez dit...

M. Sirois (André) : Non, non, je n'ai pas dit que je suis contre l'immigration.

M. Fontecilla : Tantôt, vous avez dit que vous étiez...

M. Sirois (André) : J'ai dit qu'il y a des problèmes avec l'immigration, c'est une chose entièrement différente, et c'est pour ça que je dis qu'il faut étudier la situation. Ce n'est pas parce que je suis contre l'immigration que je constate qu'il y a des problèmes avec l'immigration. Oui, il y a des problèmes, mais ça ne veut pas dire que je suis contre l'immigration. On pourrait très bien arriver à la conclusion qu'il faut des immigrants pour telle et telle raison, à telle et telle condition. Je ne me suis pas aventuré jusque-là, absolument pas, je veux que ce soit clair.

M. Fontecilla : Je vous pose la question : Êtes-vous pour ou contre l'immigration?

• (16 h 10) •

M. Sirois (André) : Je ne suis ni pour ni contre l'immigration, parce que ça dépend des circonstances et ça dépend des situations données ou ça dépend des politiques d'un pays. Normalement, si c'était notre pays, on adopterait déjà nos décisions et nos politiques d'immigration et on n'aurait pas les problèmes qu'on a maintenant. Je n'ai pas à vous dire si je suis pour ou contre l'immigration parce que ce n'est...

La Présidente (Mme Chassé) : En conclusion.

M. Sirois (André) : ...je ne pense pas qu'il y ait une réponse honnête à ça.

La Présidente (Mme Chassé) : Je vous invite à conclure.

M. Sirois (André) : Il faut absolument examiner les situations. Je ne peux pas répondre à ça comme ça. Je comprends... C'est un des problèmes qu'on a, d'ailleurs, que les gens se jettent...

La Présidente (Mme Chassé) : Je vous invite à conclure.

M. Sirois (André) : Alors, je ne peux pas répondre à ça.

La Présidente (Mme Chassé) : Et voilà. Merci. Ça termine ce bloc d'échange. Nous passons maintenant à la troisième opposition. Je donne la parole à la députée de Gaspé. Allez-y.

Mme Perry Mélançon : Merci, Mme la Présidente. Donc, j'avais pas mal les mêmes questions que mes collègues puis j'ai eu de la difficulté à interpréter peut-être les réponses, mais je vais m'arrêter ici. Peut-être juste vous demander : Qu'est-ce qu'on fait pour contrer la pénurie de main-d'oeuvre outre que l'immigration, selon vous, puisqu'on ne sait pas si c'est bon ou mauvais, là, au bout du compte?

M. Sirois (André) : On fait venir de la main-d'oeuvre temporaire. C'est ce qui se fait depuis toujours.

Mme Perry Mélançon : Bien, c'est de l'immigration.

M. Sirois (André) : Pardon?

Mme Perry Mélançon : Bien, c'est une forme d'immigration.

M. Sirois (André) : Non, non, non, ce n'est pas de l'immigration. Ça, c'est deux choses...

Mme Perry Mélançon : O.K. On repart dans... C'est ça ou on peut...

M. Sirois (André) : Ça, non, non, non. Ça, non, ce n'est pas ça que je veux dire non plus. C'est deux choses totalement différentes. Justement, les pays... la plupart des pays du monde font venir des travailleurs étrangers pour régler leur problème de main-d'oeuvre, et ne font pas d'immigration, et n'en font pas des immigrants. Ça, c'est la très grande majorité des pays des Nations unies, 193 pays.

Mme Perry Mélançon : Mais, comme le gouvernement a la volonté d'en faire éventuellement des gens qui vont s'établir de façon permanente, vous dites que vous êtes en désaccord avec ça.

M. Sirois (André) : Moi, je pense qu'avant de dire que je suis d'accord avec ça on devrait faire un examen de la situation parce que... étant donné la situation particulière des Québécois, je crois qu'on doit faire un examen très sérieux de la situation, examiner les risques, et les avantages, et les inconvénients.

Bon, ce que j'allais dire aussi au sujet de la Chambre de commerce qui veut... ou des gens qui veulent avoir plus de main-d'oeuvre, je vous rappelle que les hommes d'affaires de Montréal, lors de la guerre de Sécession, ont appuyé les sudistes et ont appuyé l'esclavage parce que ça pouvait faire leur affaire. Alors, vous savez, je ne suis pas toujours très impressionné par les décisions des hommes d'affaires de Montréal.

Mme Perry Mélançon : Et des femmes d'affaires, j'espère.

La Présidente (Mme Chassé) : Merci.

M. Sirois (André) : Bien, aussi les femmes d'affaires...

La Présidente (Mme Chassé) : Non, mais là les femmes d'affaires, ça allait.

M. Sirois (André) : ...un homme généreux, un homme généreux, ce qu'on appelle en latin vir viri...

Des voix : ...

La Présidente (Mme Chassé) : Là, on peut exclure les femmes, cette fois-là.

M. Sirois (André) : Mais à l'époque il y avait seulement des hommes. Je ne pourrais pas blâmer les femmes d'affaires, il y avait seulement des hommes d'affaires, à l'époque, quand ils se sont...

Des voix : ...

La Présidente (Mme Chassé) : Qu'est-ce qu'on fait? On met fin au bloc? Il vous reste 15 secondes, vous pouvez conclure comme vous le désirez.

Mme Perry Mélançon : Ah! O.K., O.K. Ah! bien, pour moi, c'est tout pour les questions.

M. Sirois (André) : Est-ce que je peux rajouter une petite chose, s'il vous plaît, très rapidement?

La Présidente (Mme Chassé) : Allez-y donc, mais brièvement.

M. Sirois (André) : Une autre chose qui devrait vous intéresser, puis ça me fait toujours plaisir de mentionner ça parce que ça montre jusqu'où certaines autorités peuvent aller dans ce genre de débat...

La Présidente (Mme Chassé) : Ça termine le bloc. Cinq secondes.

M. Sirois (André) : ...à un moment donné, quand je travaillais en santé et sécurité au travail...

La Présidente (Mme Chassé) : Pas possible.

M. Sirois (André) : ...j'ai trouvé que, lorsqu'on a voulu abolir le travail des enfants aux États-Unis, les hommes d'affaires et les...

La Présidente (Mme Chassé) : Oui, alors, savez-vous quoi, vous avez déjà dépassé votre temps de 15 secondes, et c'est terminé, je vous arrête là-dessus. M. Sirois, je vous remercie pour votre contribution à la commission.

Je suspends momentanément les travaux afin de permettre au prochain groupe de prendre la place.

(Suspension de la séance à 16 h 14)

(Reprise à 16 h 16)

La Présidente (Mme Chassé) : Oui, alors, je souhaite maintenant la bienvenue aux représentants de la Chambre de commerce du Montréal métropolitain. Bon retour. On s'est déjà rencontrés ici à la dernière session. Et je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes, vous connaissez la recette, je vais vous indiquer à la fin de votre exposé lorsqu'on s'approchera de la conclusion, et par la suite nous aurons une période d'échange avec les membres de la commission. Je vous invite à prendre parole et à tout d'abord vous présenter. Allez-y.

Chambre de commerce du Montréal métropolitain (CCMM)

M. Leblanc (Michel) : Alors, merci. Je suis Michel Leblanc, je suis président et chef de la direction de la Chambre de commerce du Montréal métropolitain et, comme vous l'entendez, je sors d'une sinusite, excusez la voix.

Quelques mots rapidement sur la Chambre de commerce. C'est une organisation qui a près de 200 ans, 7 500 membres. C'est le plus important organisme privé qui appuie le développement économique au Québec. Nous avons été actifs depuis maintenant de nombreuses années, plus de 10 ans, sur le dossier de l'immigration, et nous avons participé à toutes les consultations, et nous vous remercions, encore une fois, d'avoir accepté de nous entendre. Notre présentation aujourd'hui lance un message important, selon nous, qui est de se baser sur les signaux du marché pour élaborer la planification de l'immigration.

Je vais commencer peut-être différemment des prédécesseurs qui sont passés ici en disant que, selon l'estimation que nous avons présentement, on est possiblement à l'aube d'un âge d'or économique du Québec. Il faut vraiment regarder les chiffres, regarder ce qui se passe. Le PIB du Québec et de sa métropole est à la hausse et nettement supérieur à ce qu'on retrouve dans le reste du Canada depuis deux ans. Notre taux de chômage est nettement inférieur. Celui de Montréal est le plus bas en 40 ans, inférieur à celui de Toronto. Depuis février, la croissance des salaires moyens au Québec est de cinq points de pourcentage, 5 %, ce qui est plus élevé que dans le reste du Canada. Les entreprises investissent : dans la région de Montréal, il y a 154 chantiers de plus de 20 millions de dollars, ce qui représente 40 milliards de dollars, au moment où on se parle, en investissements dans la grande région de Montréal. Montréal International a connu une année record : 2,5 milliards d'investissements pour 60 projets. Le port de Montréal est en croissance : ils annonçaient une expansion majeure du côté de Contrecoeur, et, avec les accords de libre-échange, tout laisse croire que ça va se poursuivre. Les touristes affluent, on a des nombres records pas obtenus depuis 1967, l'année de l'Expo, et Aéroports de Montréal a des années records.

C'est une situation extrêmement positive, mais le premier message que je viens lancer, là, c'est que ça pourrait s'accélérer et ça pourrait être encore meilleur. Les indicateurs dans le privé sont extrêmement positifs, les indices de confiance sont élevés, les intentions d'investir sont robustes. Le gouvernement lui-même est très ambitieux. Je rappelle que le premier ministre est déterminé à atteindre une croissance économique telle que nous puissions un jour ne plus recevoir de péréquation. Quand vous faites les mathématiques, ça exige un taux de croissance de notre économie extrêmement élevé dans les prochaines années.

Le ministre Fitzgibbon est très actif, il incite les entreprises à investir, à accroître leur productivité. Il veut accroître les exportations. Il a amorcé une restructuration importante du dispositif de développement économique et donné un mandat ambitieux au nouveau président d'Investissement Québec. Et il soutient quelque chose qui est assez exceptionnel, qui est le déploiement sur Montréal d'une expertise incroyable en intelligence artificielle, qui risque de nous donner dans l'avenir des entreprises extrêmement performantes parmi les meilleures innovatrices au monde.

Le ministre Roberge met des efforts énormes pour améliorer notre système d'éducation. Il veut aider les jeunes à bien choisir leur domaine de formation et à s'assurer qu'ils vont jusqu'au bout pour obtenir leur diplôme. Il favorise un meilleur arrimage entre les cursus de formation et les besoins du marché du travail et il veut renforcer le dispositif de formation continue.

Les finances publiques sont en ordre, il y a des marges de manoeuvre importantes, et le ministre des Finances, M. Girard, a clairement dit qu'il voulait s'en servir pour accélérer la croissance économique du Québec.

• (16 h 20) •

Vous-même, M. le ministre, vous avez pris deux décisions extrêmement importantes pour notre réussite économique : l'adoption de la plateforme Arrima, qui nous assurera un des meilleurs arrimages au monde entre les bassins d'immigrants puis les besoins du marché du travail, et la mise en place annoncée il y a quelques jours d'un processus d'accompagnement personnalisé des immigrants pour s'assurer qu'on les accompagne durant tout leur parcours.

Il reste une troisième décision importante, M. le ministre, à prendre, et c'est combien d'immigrants nous allons accueillir au cours des prochaines années. Cette décision est très importante. Vous avez entendu plusieurs organismes venir, il y a des besoins majeurs en main-d'oeuvre, que ce soit du point de vue des entreprises et les représentants de ces entreprises ou dans les régions et les représentants des régions. Il y a 120 000 postes à combler... en fait, plus de 120 000, c'était le chiffre au début de l'année 2019, c'est 9 000 postes de plus qu'un trimestre précédent.

L'étude de la BDC sur les comportements et les intentions des entrepreneurs nous révélait que 53 % des entrepreneurs ont affirmé que le manque d'employés qualifiés limiterait leurs investissements. Je peux vous confirmer — vous avez eu des représentants régionaux — que, sur la région de Montréal, c'est la même chose qui se produit. Dans le secteur des TI, 44 000 postes sont à pourvoir d'ici 2021.

Dans les autres secteurs, que ce soit en restauration, en aéronautique, en hôtellerie, les chiffres sont également très élevés. C'est à combler maintenant et au fur et à mesure que les départs à la retraite seront anticipés. 82 % des entreprises manufacturières de la région signalent qu'ils ont des problèmes de recrutement au moment où on se parle.

On le sait, la région métropolitaine déjà est normalement bien dotée en immigrants. 85 % des immigrants au Québec résident dans la région de Montréal, et on comprend que le gouvernement a dit... et on l'a même appuyé dans sa volonté de s'assurer qu'il y a des immigrants qui vont en région. Le signal, c'est que ça ne doit pas se faire au détriment de la nécessité, à Montréal, de continuer d'accueillir des immigrants. Et donc ça nous amène à dire que, si on veut plus d'immigrants en région, ça veut dire qu'on en veut plus au total et non pas en enlever dans la région de Montréal.

Le mémoire qu'on vous a soumis soumet plusieurs... en fait, le mémoire soumet plusieurs recommandations, dont un qui est une première série de recommandations qui visent à s'assurer que, dans l'évaluation de la grille de sélection, on s'assure d'être très, très rapprochés, très en phase avec les besoins du marché du travail et qu'on consulte les entreprises, qu'on consulte les organismes qui travaillent auprès de ces entreprises-là et qu'on le fasse deux fois par année, ce qui nous permettrait de voir l'évolution, et qu'une fois par année on révise les critères pour s'assurer que ça correspond bien à l'évolution du marché du travail. Des avancées technologiques vont amener des modifications dans les besoins, il faut les voir venir au fur et à mesure.

Nous pensons aussi qu'il y a lieu d'insister pour que les ordres professionnels adoptent tous des meilleures pratiques. Certains ordres ont réussi à s'engager à reconnaître les diplômes avec... bien, les diplômes ou les compétences à l'intérieur de 12 mois, et on pense que ça devrait être généralisé à l'ensemble des ordres professionnels.

On pense aussi que, dans le Parcours d'accompagnement personnalisé, il faut tenir compte des initiatives existantes qui fonctionnent très bien. Là-dessus, je vais en illustrer deux qui sont mises en oeuvre par la chambre, évidemment : Interconnexion, dont on a déjà parlé, et J'apprends le français, qui vise à travailler auprès des immigrants déjà à Montréal et qui maîtrisent mal le français. Ce qu'on pense, c'est que, dans le parcours personnalisé, il existe des bonnes façons de faire qui ont été développées sur le terrain, et on devrait les intégrer.

Arrivons dans le vif du sujet, les seuils d'immigration. Suite à la diminution à 40 000, le gouvernement a proposé de remonter ce nombre à entre 49 500 et 52 500 d'ici 2022. Ces chiffres-là ne sont pas très différents de ce qu'on a observé au cours des trois dernières années, 2016, 2017, 2018, qui correspond grosso modo à entre 51 000 et 53 000. Durant cette période-là ont commencé à poindre les postes vacants, les postes non comblés, qui, comme je le rappelle, dépassent 120 000 postes vacants. Et on pense qu'avec ces chiffres que le gouvernement met de l'avant on ne va pas réussir à combler tous les postes, que le nombre de postes vacants va aller en croissance. Les effets du vieillissement et des départs à la retraite vont s'accentuer, et, je le disais d'entrée de jeu, il y a une croissance économique extrêmement vigoureuse, et on veut qu'elle le demeure.

Ce qui nous amène à redire ce qu'on a dit depuis maintenant près de six ans qu'on pense que le Québec devrait accueillir et devrait cibler... devrait, dans le fond, se fixer comme objectif d'accueillir 60 000 immigrants par année dans un premier temps. C'est, selon les chiffres qu'on a vus, une façon d'empêcher que le nombre de postes vacants augmente, donc d'accompagner les entreprises dans leurs besoins. On pense que ce chiffre-là, ultimement, de 60 000 va être inférieur à ce qu'on devrait viser, qui est de maintenir dans le Canada notre poids démographique, qui correspond, à ce moment-là, à s'assurer qu'on reste à 23 %. Selon nos calculs, ça veut dire qu'éventuellement on devrait être en mesure d'accueillir 78 000 immigrants par année. C'est une charge importante. C'est une charge d'intégration. C'est une charge qui devrait exiger de nous qu'on est capables de s'assurer qu'ils ne restent pas tous à Montréal, et c'est dans cette optique-là qu'on le fait. L'objectif, c'est qu'ils aillent sur l'ensemble du territoire du Québec, qu'on en ait plus et qu'on les intègre bien.

On pense également qu'il faut augmenter la proportion des immigrants économiques dans le bassin d'immigrants qu'on accueille. Au Canada, présentement, ce chiffre-là correspond à 55 %. On pense qu'on devrait passer à 65 %. Et on pense que vous avez bien fait, M. le ministre, d'entamer des discussions sérieuses avec le gouvernement fédéral pour accroître le nombre de travailleurs temporaires, de travailleurs qui ont le statut temporaire.

On pense également que vous avez bien fait de dire que vous alliez rétablir le plus rapidement possible le Programme de l'expérience québécoise, qui a été suspendu pour permettre d'examiner les dossiers qui étaient déjà en traitement. Ce qu'on vous dit, c'est qu'on va vous appuyer si vous avez besoin de ressources additionnelles. Ça n'a pas de sens d'avoir l'impression que le ministère a des limites sur le nombre de dossiers qu'il peut traiter alors que les besoins des entreprises sont extrêmement criants. On pense qu'il y a des façons de le faire qui vont nécessiter plus de ressources, et on vous appuiera, le secteur privé est très clair là-dessus.

Je conclus en disant ce que j'ai dit tout à l'heure : Nous avons devant nous une possibilité unique, le Québec pourrait connaître un âge d'or économique exceptionnel. Nous devons saisir cette opportunité, mais pour y arriver nous aurons besoin de davantage de bras et de cerveaux.

La Présidente (Mme Chassé) : En conclusion.

M. Leblanc (Michel) : Et en conclusion, ma dernière ligne, nous sommes d'avis que hausser significativement les seuils d'immigration est présentement un acte de nationalisme économique. Merci.

La Présidente (Mme Chassé) : Merci, M. Leblanc, pour votre exposé. Nous allons maintenant débuter la période d'échange avec vous, M. le ministre, pour le parti formant le gouvernement. La parole est à vous.

M. Jolin-Barrette : Merci. Merci, Mme la Présidente. M. Leblanc, bonjour. Merci de venir en commission parlementaire nous présenter votre mémoire.

Parlons des ordres professionnels. Vous dites, dans le mémoire : Écoutez, à l'intérieur d'un an, il devrait y avoir un processus permettant aux gens d'acquérir leur mise à niveau, ou les études supplémentaires, ou le stage. Je suis d'accord avec vous sur l'importance de faire en sorte que les formations soient disponibles. Parce que souvent ça, c'est une des réalités qu'on constate, là, la personne, supposons, elle a une équivalence à faire, un cours à suivre, mais le cours n'est pas disponible ou il faut faire le cours sur trois ans, supposons, alors que la personne a le trois quarts de son parcours qui est conforme aux exigences. Un an pour... dans toutes les situations ou...

M. Leblanc (Michel) : Alors, je vais... je pense que c'est une question importante. Moi, je veux rendre hommage à deux organisations qui, d'après nous, ont fait un excellent travail : l'Ordre des ingénieurs et l'Ordre des comptables agréés. Dans le cas des ingénieurs, ils se sont fixé comme objectif que 75 % des applicants aient leur reconnaissance à l'intérieur de neuf mois. Alors, c'est inférieur à l'année, et le 75 %, ça dit exactement ce que vous venez de dire, ce n'est pas 100 %.

L'objectif pourrait être de dire qu'ils ont des permis de travail avec des limites, mais qu'ils puissent gagner leur vie dans leur domaine rapidement. Et donc ce n'est pas nécessairement de dire qu'après neuf mois ou après un an vous pouvez faire tout ce qu'un permis normal ou une accréditation normale permettrait de faire, mais ça permettrait de les asseoir dans leur domaine de compétence, de leur permettre de travailler, de développer leur réseau et, au besoin, d'aller chercher quelques cours ou quelques connaissances qui prendraient un peu plus de temps.

L'idée, c'est de ne pas les perdre dans d'autres secteurs, parce qu'ils doivent gagner leur vie, mais de leur permettre rapidement d'être rattachés à leur secteur. Et on pense que les ordres professionnels, certains innovent, certains trouvent des solutions, mais d'autres se traînent un peu les pieds.

M. Jolin-Barrette : Bien, ça, je suis d'accord avec vous, puis c'est un des objectifs aussi qu'on a que, dès l'étranger, la personne puisse déjà entamer son processus de reconnaissance puis qu'elle sache ce à quoi est... bien, en fait, où elle devra s'inscrire, pendant combien de temps, tout ça.

Lorsque vous dites... Supposons, pour des professions avec des actes réservés ou un champ de pratique, vous dites : Bien, écoutez, on devrait... on pourrait limiter le champ de pratique quand la personne n'a pas fait ses équivalences, sauf que... Avez-vous des exemples de champs de pratique qui pourraient être limités? Parce qu'il n'y a pas toujours le syndic qui est en arrière pour vérifier si la personne ne fait pas des actes qui sont réservés pleinement, là.

• (16 h 30) •

M. Leblanc (Michel) : Ça pourrait être qu'il y ait une nécessité de travailler avec quelqu'un qui a l'accréditation complète et qui peut contresigner ou qui peut compléter, ça pourrait être certaines fonctions ou certaines tâches qui sont limitées. Les domaines sont nombreux, là, on peut être en pharmacie, on peut être en génie, on peut être dans bien des secteurs, alors ça serait à eux de déterminer comment ils peuvent séparer certains actes d'autres actes.

Mais ce que je dis, ce que je comprends, c'est que ça peut se faire, et ce que je comprends, c'est que c'est le meilleur moyen de les garder dans leur secteur, plutôt que de dire : Attendez deux ans ou attendez, même, un an. S'ils peuvent rapidement travailler dans ces domaines-là... Et à travers Interconnexion, c'est ce qu'on observe, notre programme vise à rattacher des immigrants qualifiés à leur domaine de compétence alors qu'ils n'ont jamais eu d'emploi dans ce domaine-là. Et, dans bien des cas, ils comprennent qu'il y a un petit élément de formation qu'ils ont à aller chercher, mais on ne leur avait jamais vraiment dit, et donc ils avaient décroché de leur secteur. Donc, ça serait à demander aux ordres : Comment pourriez-vous permettre à des immigrants qualifiés de travailler dans leur domaine de qualification durant ou après un an?, et là de regarder quelle réponse ils vous fournissent.

M. Jolin-Barrette : O.K. Sur la question de la régionalisation, dans votre mémoire, vous dites : Il y a des besoins à Montréal aussi, hein, il ne faut pas que ça soit au détriment de Montréal, la régionalisation. Par rapport au nombre de personnes immigrantes que l'on accueille, il y a des choix à faire quand même. Peut-être que vous me direz : Bien, si on est à 60 000, on aura moins de choix à faire que si, supposons, on est à 52 000 en fin de période. Dans l'optique où on est avec la proposition gouvernementale, comment vous voyez ça, la régionalisation?

M. Leblanc (Michel) : Bien, je pense qu'il y a deux variables sur lesquelles on peut jouer. Il y a le nombre, vous venez de le dire, puis, si on en accueillait énormément, bien, à ce moment-là, ça ne se ferait jamais au détriment de Montréal. Je pense qu'on pourrait aussi, dans la grille de critères, mettre des critères qui reconnaissent l'intention, le désir de la part d'immigrants d'aller en région. On pourrait surpondérer des immigrants qui viennent de régions ou qui viennent de villes qui ne sont pas des capitales ou des métropoles, donc qui sont déjà habitués de vivre dans des espaces, des villes plus petites. Il y a des façons d'identifier la probabilité que des immigrants soient tentés d'aller en région et d'avoir des mécanismes pour le faire, mais c'est juste... on revient, c'est que, si on veut des immigrants qui vont en région et qu'on ne veut pas pénaliser l'économie de Montréal, bien, il faut aussi augmenter les seuils, et c'est ce qu'on préconise.

M. Jolin-Barrette : Mais êtes-vous d'accord avec le fait de prioriser les offres d'emploi en région?

M. Leblanc (Michel) : Non. Non, parce qu'une entreprise est une entreprise, mais une création de valeur est une création de valeur, et je comprendrais mal qu'on dise à une entreprise de Montréal : Dans ta croissance, toi, tu ne peux pas aller plus loin parce que tu n'es pas en région et tu ne peux pas embaucher ou accueillir. Je ne comprends pas comment on pourrait dire ça à un entrepreneur de Montréal.

M. Jolin-Barrette : Mais à ce moment-là comment on va faire pour la régionalisation? Parce que, dans le fond, vous savez, en fait, on a un défi. Puis de tout temps, là, Montréal a toujours accueilli, a toujours été plus attractif que, supposons, les régions. On fait face à une situation où, dans certaines régions, c'est la mise en péril des entreprises. Vous allez me dire : Bien, c'est la même chose en région de Montréal, sauf qu'il y a toute la vitalité du territoire aussi qui rentre en ligne de compte. Comment est-ce qu'on peut réconcilier tout ça, là? Puis je suis d'accord avec vous, là, il y a des besoins autant dans la région métropolitaine de Montréal qu'en région, mais...

M. Leblanc (Michel) : Bien, on augmente le nombre. Non, mais c'est la conclusion logique. Les besoins sont là, ils sont partout sur le territoire. Les entrepreneurs, présentement, là... Puis il faut réaliser que c'est beaucoup de la PME, qui a peu de redondance à l'interne et qui, là, présentement, rate des contrats, rate des clients puis qui appelle... qui est là en disant : C'est le rêve de ma vie qui commence à s'effondrer, j'ai toujours voulu avoir ce client-là puis là je ne peux pas le prendre.

Moi, je vous dis, le grand défi qu'on a... puis je suis convaincu qu'on va y arriver. Moi, je vous le dis, là, on peut avoir des discussions entre nous, mais, dans trois ans, dans quatre ans, dans cinq ans, les cas vont sortir. Il y a des gens qui veulent venir chez nous, il y a des gens qui vont vouloir appliquer par Arrima puis il y a des besoins réels d'entreprises ici qui sont des beaux fleurons. Puis le ministre Fitzgibbon le premier va dire au premier ministre : Si vous voulez que je vous livre la croissance économique qu'on s'est engagés à livrer aux Québécois, on a besoin de cette main-d'oeuvre qui veut venir chez nous.

M. Jolin-Barrette : Et est-ce que vous pensez qu'il y a d'autres solutions que l'immigration pour combler la pénurie de main-d'oeuvre?

M. Leblanc (Michel) : Oh oui, oui, ça, c'est clair, mais, je pense, ce ne sera jamais suffisant. On l'a dit, et je l'ai entendu, le ministre Boulet, parler des travailleurs expérimentés. C'est clair que, si on peut rattraper l'Ontario sur la rétention, ça va être un facteur important. J'ai parlé des jeunes, l'arrimage, la diplomation, c'est clair que c'est important. On va avoir de la formation continue à faire avec des gens qui vont voir leur travail, leur expertise devenir obsolètes. Si on peut les garder puis les rentrer dans l'économie dans d'autres domaines, ça va être très positif.

Si on n'avait que le choc démographique, on aurait ce défi-là. Mais le défi qu'on a, c'est qu'on est dans un momentum de croissance exceptionnel, là. Pas beaucoup de cheveux gris ici, là, je vous dis, on n'a pas connu ça dans notre vie. Puis on n'a pas connu ça, à mon avis, longtemps avant même que certains d'entre nous naissent ici. C'est vraiment exceptionnel, ce qu'on traverse, et, si on rate cette opportunité-là, on va avoir un prix à payer, puis ça va être une économie qui va retrouver une erre de croissance beaucoup plus molle.

M. Jolin-Barrette : Et puis vous ciblez à 60 000 personnes immigrantes en fin de période. On a eu beaucoup de groupes communautaires qui sont venus avant vous et qui disent : Bien, en fait, le plan du gouvernement de hausser à 65 % le nombre de personnes immigrantes qu'on accueille dans la catégorie économique, vous préjudiciez les autres catégories, et on accuse le gouvernement d'avoir une approche utilitariste. Quel est votre commentaire par rapport à ça? Parce ce dont vous nous invitez, c'est d'augmenter encore plus la catégorie économique. C'est quoi, votre position là-dessus?

M. Leblanc (Michel) : Il y a la position du président de la Chambre de commerce, qui dit que l'économie en a besoin, que nos entreprises en ont besoin. La position de Michel Leblanc, c'est qu'on a un devoir moral, à ce moment-ci, dans le contexte planétaire, d'accueillir le plus de monde qu'on peut, comme dans les années 30. On a ce devoir moral là. J'ai l'impression, mais ça, c'est mon opinion personnelle, qui est qu'effectivement en haussant les seuils et en haussant la proportion des immigrants économiques on maintient un niveau assez élevé d'immigrants non économiques parce qu'on hausse les seuils. Mais c'est clair que moi, je partage la vision des gens qui dit qu'on est une terre d'accueil, une terre sur la planète, présentement, qui a des disponibilités en termes d'espace, en termes de momentum économique et qu'on a un rôle à jouer là-dedans. Mais c'est mon opinion personnelle et non pas celle du président de la Chambre de commerce.

M. Jolin-Barrette : O.K. Je vous remercie. Je pense que j'ai des collègues qui veulent poser des questions.

La Présidente (Mme Chassé) : Oui. Alors, le député de Mégantic désire prendre la parole pour échanger avec vous, M. Leblanc.

M. Jacques : Merci, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Chassé) : Allez-y. Cinq minutes.

M. Jacques : Bonjour, M. Leblanc. On parlait, là... vous voulez monter les seuils à 60 000 arrivées... nouveaux immigrants. Pensez-vous qu'on a la capacité d'intégrer ces 60 000 immigrants là, là, de façon constructive?

M. Leblanc (Michel) : Moi, je pense que oui, je pense que... Il y a plusieurs éléments de réponse là-dedans. D'abord, je pense que le marché du travail est complètement différent de celui qu'il était dans le passé, et donc il va être capable d'absorber. Ensuite, avec la plateforme Arrima, on va mieux les sélectionner qu'on l'a fait dans le passé en fonction des besoins. Donc, de ce point de vue là de l'intégration économique, je pense que la réponse est évidente.

Ensuite, un des objectifs qu'est la régionalisation va amener ces immigrants-là dans des bassins où l'intégration va se faire très naturellement. Et donc le défi, c'est de le réussir, mais c'est clair qu'en la réussissant cette intégration-là va venir beaucoup plus facilement. J'imagine que les gens qui vont aller travailler aux Îles vont rapidement s'intégrer dans la société des Îles.

Le dernier élément, c'est... il y a, sur Montréal, des efforts majeurs qui sont faits. Je parlais de francisation, je parlais d'intégration professionnelle, il y a une réalité, présentement, qui est que les immigrants à Montréal sont dans un environnement beaucoup plus réceptif. Les entreprises qui auparavant avaient toutes des C.V. de Québécois francophones qui ont étudié dans des endroits qu'on connaît, qui ont travaillé dans des entreprises qu'on connaît, ça fait des C.V. plus faciles à décoder puis à embaucher. Et présentement, bien, ces C.V. là, ils arrivent moins, alors donc il y a une beaucoup plus grande ouverture à dire : O.K., tu as travaillé dans ton pays, tu as fait ça, je suis très heureux d'essayer avec toi, on travaille ensemble. Donc, cette intégration-là, elle est beaucoup plus facile, plus volontaire, donc je suis convaincu qu'on pourra les intégrer.

Maintenant, et là je vais vous le dire, si, dans quatre ans ou dans cinq ans on s'apercevait que c'est plus difficile, bien, on retardera un peu. Mais le signal qu'on vous lance, présentement, c'est que la volonté des entreprises, c'est d'embaucher, c'est d'intégrer, c'est de former puis c'est de croître.

M. Jacques : Parce qu'on avait un problème d'intégration dans les dernières années, là, donc on pense être capable de remonter ça rapidement et d'être capable d'intégrer tout ce monde-là facilement?

M. Leblanc (Michel) : Bien, facilement... ça va prendre du travail, comme toute société. Ce que ça veut dire, c'est de s'assurer que les cours sont disponibles, c'est de s'assurer que l'accompagnement est disponible. Et, encore là, j'ai célébré la décision du ministre de faire un accompagnement personnalisé. Le gouvernement lui-même change ses façons de faire et les améliore, la société est prête à les accueillir, les entreprises en ont besoin. C'est la recette pour réussir.

M. Jacques : O.K. Vous recommandez d'entreprendre un vaste effort de communication pour souligner l'importance de l'ouverture à l'immigration. Quelles sont les voies de communication utilisées par la Chambre de commerce du Montréal métropolitain pour diffuser ça?

• (16 h 40) •

M. Leblanc (Michel) : Alors, nous, dans cette campagne de communication là, il y a deux axes. Il y en a un qui est ici, appelons-le entre nous au Québec. Et nous célébrons l'apport de l'immigration et on pense, comme chambre de commerce, que ça doit se faire, on pense que tous les acteurs doivent le faire, montrer à quel point nos immigrants qu'on accueille, qui sont compétents, font partie de la solution. Et on pense qu'à l'étranger il faut aussi avoir une campagne, d'abord parce qu'il y a peut-être eu certains échos négatifs liés au projet de loi sur les signes religieux qui ont pu donner l'impression qu'on est une société moins ouverte, mais deuxièmement parce que la plateforme Arrima vient changer les choses.

Et on pense qu'à l'étranger des immigrants qui veulent que ça se passe bien vont être intéressés d'apprendre qu'au Québec, avec la plateforme Arrima, un immigrant va s'intégrer professionnellement presque immédiatement, et ça devient donc un argument à l'étranger pour attirer les talents. Et on pense qu'à ce moment-ci une grande campagne internationale pour montrer à quel point le Québec est ouvert aux immigrants puis à quel point le Québec travaille à bien les intégrer avec une plateforme qui est performante, ce serait positif pour attirer ces immigrants-là.

M. Jacques : Vous mentionnez aussi que l'automatisation de certaines tâches pourrait augmenter la productivité de nos entreprises et de la main-d'oeuvre pour l'avenir de notre travail. Mais vous indiquez aussi que l'automatisation ne remplace pas les besoins de main-d'oeuvre parce qu'on va avoir de besoin de plus en plus de main-d'oeuvre, d'ailleurs. Pourriez-vous nous expliquer plus en détail cette affirmation? Et quels types d'emplois ne pourront pas être remplacés aussi par cette automatisation?

M. Leblanc (Michel) : Ah! bien là, je ne suis pas un devin pour vous dire lesquels emplois ne seront pas remplacés. Les spécialistes qu'on lit ou qu'on suit nous disent que ce qui est du domaine de l'ordre créatif, ce qui est du domaine du soin personnel, ce qui est du domaine de l'accompagnement des humains risque d'être fait par des humains. Ce qu'on a observé dans le passé, c'est qu'avec des transformations technologiques importantes il se crée des nouveaux besoins, des nouveaux emplois, et les spécialistes nous disent qu'une bonne partie des emplois du futur on ne les connaît pas, présentement, alors c'est difficile de dire qu'est-ce qui va arriver. Et c'est pour ça qu'on disait dans nos recommandations qu'on doit s'assurer qu'on suit en temps réel l'évolution du marché du travail pour ajuster les critères, parce que cette évolution-là va amener des transformations importantes, donc à suivre.

La Présidente (Mme Chassé) : Il reste 30 secondes au bloc d'échange.

M. Jacques : Vous dites aussi que ça va prendre plus de techniciens, plus tard, pour s'occuper de la... bien, pour répondre aux besoins du marché du travail.

M. Leblanc (Michel) : Ce qu'on pense, c'est qu'à travers les consultations dont je parlais, les entreprises vont le révéler, il y a des besoins d'expertise technique, des besoins d'expertise manuelle qui vont ressortir, et c'est pour ça que, si on fait bien les choses, Arrima va nous permettre de sélectionner ces immigrants-là en fonction de ces besoins, et ça va être très efficace.

La Présidente (Mme Chassé) : Ça conclut le bloc d'échange. Merci. Maintenant, c'est le groupe formant l'opposition officielle qui prend la parole. M. le député de Nelligan, la parole est à vous.

M. Derraji : Merci, Mme la Présidente. M. Leblanc, c'est toujours un plaisir de vous entendre. Merci beaucoup pour la qualité de votre rapport très bien documenté, avec des chiffres à l'appui et des études fiables. Je partage à 100 % vos inquiétudes. Je reconnais en vous l'homme qui a à coeur le développement économique du Québec, le développement économique de la province du Québec. Et, si on prend le temps de vous entendre aujourd'hui, c'est un cri d'alarme qui se rajoute à d'autres associations patronales, et ça, personne ne peut vous l'enlever, et je vous remercie au nom de ma formation politique.

Vous avez soulevé un point très important que nous avons dit à plusieurs reprises depuis le début des travaux que, pour livrer un taux de croissance élevé, pour accroître la productivité et l'exportation internationale, ça nous prend de la main-d'oeuvre. Le capital humain est très important dans cette équation. Malheureusement, ce qu'on voit, c'est que... toujours les mêmes seuils, je dirais, même pas d'ouverture. C'est quoi, le signal qu'on envoie à la communauté d'affaires, selon vous?

M. Leblanc (Michel) : Bien, je pense qu'il y a eu un flottement, ce qui a amené, j'ai l'impression, à une certaine insécurité dans la population et que le gouvernement actuel a essayé de corriger ces perceptions. Je pense qu'on est pris avec notre historique, et notre historique, ça a été un historique de taux de chômage structurel élevé, ça a été un historique d'intégration des immigrants difficile, peut-être de sélection qui n'était pas optimale. Et ce que j'essaie d'amener, c'est une compréhension qu'on est dans un nouveau monde. Le mot à la mode, c'est «un nouveau paradigme».

Et vous dites que c'est un signal d'alarme. Moi, ce que j'ai essayé de faire aujourd'hui, c'est de signaler non pas l'alarme, mais de signaler l'opportunité. Devant nous, il y a quelque chose d'exceptionnel qui peut se produire qu'on n'a pas connu, et c'est : le Québec, une machine économique, une machine qui crée de la valeur, une machine qui est capable de faire en sorte que les citoyens vivent bien. Et, dans cette équation-là, vous l'avez dit, la main-d'oeuvre ou le talent est important, et c'est là où on dit : Si on ajuste cet ingrédient-là... J'ai listé toutes les autres décisions qu'on est en train de prendre, qui sont des bonnes décisions. Il y a celle-là qui est nécessaire aussi.

M. Derraji : Oui, très d'accord avec vous. Vous répondez quoi à quelqu'un qui vous dit que, pour contribuer à régler le problème du manque du personnel, il faut rendre les postes vacants plus attrayants pour les Québécois?

M. Leblanc (Michel) : C'est clair que la hausse des salaires est importante, et on l'observe. Je l'ai dit, depuis février dernier, cinq points de pourcentage, c'est élevé. Ça correspond à des signaux d'inflation si c'est débridé, mais pour l'instant ça ne l'est pas. Le défi, c'est que, si ça se produit trop rapidement, autrement dit si le resserrement du marché de l'emploi fait en sorte que la pression sur les salaires est trop rapide, il y a beaucoup de PME qui n'auront pas le temps de s'ajuster, d'ajuster leur niveau de productivité et de rentabilité pour pouvoir verser ces salaires-là, puis on va avoir énormément de déstructuration chez des petites PME. Et donc l'idée, c'est de s'assurer qu'au fur et à mesure que les salaires vont augmenter, que ce soit par migration vers des meilleurs emplois ou une amélioration de la productivité et des emplois, ça se fasse avec une certaine trajectoire douce sur quelques années.

Donc, je pense que, de facto, la théorie économique l'a prédit, les emplois non comblés vont chercher à se combler en devenant soit des meilleurs emplois, soit en remplaçant les humains par des machines, soit en cessant d'exister. Mais il ne faut pas que ça se passe de façon trop brutale parce que les PME vont avoir de la difficulté à absorber le choc.

M. Derraji : Malheureusement, ça a été ça, la déclaration du premier ministre aujourd'hui, et c'est ça qui m'inquiète. Ce qui m'inquiète, c'est qu'on cible plusieurs régions, et je sais l'impact, et vous le savez mieux que moi, vous êtes en contact avec plusieurs PME. Et, pour moi, déclarer une chose pareille, probablement, il y a un manque de sensibilité par rapport aux enjeux des PME, surtout, surtout par rapport au capital humain.

M. Leblanc (Michel) : Bien, c'est clair que je partage avec le premier ministre l'objectif que les emplois deviennent de plus en plus rémunérateurs et de meilleurs emplois. Ce que moi, je dis, c'est qu'il faut le faire avec un certain rythme, et, si le choc est trop brutal, ça va affecter la survie d'entreprises qui présentement n'ont pas les moyens d'améliorer rapidement ces emplois-là.

M. Derraji : Vous avez évoqué, à la fin de votre excellente présentation... pour vous, le nationalisme économique, c'est aussi hausser les seuils. Je peux dire que c'est toute une déclaration venant du P.D.G. de la Chambre de commerce de Montréal métropolitain. Vous dites quoi...

M. Leblanc (Michel) : C'est pour ça que je l'ai gardée pour la fin.

M. Derraji : Hein?

M. Leblanc (Michel) : C'est pour ça que je l'ai gardée pour la fin, je vous voulais qu'on s'en rappelle.

M. Derraji : Et je l'aime et je la partage avec vous. Vous dites quoi aux détracteurs du nationalisme économique?

M. Leblanc (Michel) : Moi, ce que je pense, c'est que toutes les sociétés ont le droit de rêver de réussir leur croissance, de réussir leur économie, puis que le Québec, la société québécoise a le droit, et que, depuis des décennies, on a été pris dans des situations économiques difficiles, et qu'on a devant nous l'occasion, collectivement, d'avoir une croissance économique extrêmement forte, et on a le droit de le vouloir, et on a le droit de s'organiser pour l'avoir, et que le geste à poser présentement, qui est un geste de l'ordre du nationalisme économique, c'est d'accueillir plus de talents, plus de cerveaux, plus de bras pour contribuer à cette croissance économique, et l'immigration fait partie de la solution.

M. Derraji : Le ministère et le ministre préparent une déclaration au mois de novembre. Cette déclaration, ça va être pour la prochaine planification des deux prochaines années. Si je vous dis qu'on maintient le seuil à 40 000... pour être juste, 43 000, est-ce que, pour vous, on met fin à notre nationalisme?

M. Leblanc (Michel) : Moi, je pense que ce serait maladroit. Je pense que, dans le contexte actuel des besoins de l'économie, ce serait s'attacher les mains, ce serait s'empêcher de profiter du momentum économique qui s'en vient. Je pense que ça ferait souffrir beaucoup d'entreprises, ça ferait souffrir beaucoup d'entreprises en région et à Montréal. Je pense que ça ferait souffrir des employés actuels qui vont voir leur entreprise moins investir parce que les ressources, les talents ne seront pas là au rendez-vous. Et puis finalement, ce que je pense, je vais vous dire bien humblement, c'est que je ne pense pas que ça sera soutenable. Je pense que, si on le fait, on va s'apercevoir que les Québécois vont réclamer fort qu'on augmente les seuils et qu'on va devoir corriger le tir.

M. Derraji : ...écoles de pensée disent le contraire. Les Québécois, ils ont élu un gouvernement le 4 octobre en se basant qu'il va baisser les seuils et que ça tient la route, et le gouvernement doit tenir sa promesse mur à mur de garder les seuils à 40 000. Vous leur dites quoi aujourd'hui?

M. Leblanc (Michel) : Écoutez, je ne sais pas, moi. Quand on élit un gouvernement, si on l'élit sur un seul élément de son programme, alors je ne sais pas pourquoi les Québécois... J'imagine qu'ils avaient des bonnes raisons, collectivement, pour décider de ce gouvernement.

Ce que je pense, c'est qu'en même temps la réalité change, l'information s'accumule et qu'éventuellement une bonne décision devient une mauvaise décision, et on a le droit de corriger le tir. Et moi, j'ai toujours dit qu'un nouveau gouvernement doit examiner la situation et peut, à l'occasion, admettre ou reconnaître que ce n'est plus approprié de procéder comme on l'avait promis. Dans ce cas-ci, c'est clair dans mon esprit que le gouvernement devrait reconnaître que le Québec a besoin de davantage de bras, de davantage d'immigrants.

M. Derraji : Donc, on a entendu le premier ministre dire que, parmi ses priorités, c'est l'économie pour la prochaine session, du moment qu'on a réglé d'autres dossiers à l'avant-dernière. Et l'économie, elle est sur sa table. Pensez-vous qu'on se donne vraiment les outils pour dire que la priorité est l'économie, si on oublie le capital humain?

M. Leblanc (Michel) : Bien, je vais renverser votre question en disant que sur tous les autres chantiers j'observe un gouvernement qui met de l'avant les enjeux économiques. Alors, les décisions sont là. J'ai parlé de ce que fait le ministre Fitzgibbon, de ce que veut faire le ministre Girard des surplus, de ce que fait le ministre Roberge, de ce que fait le ministre de l'Immigration. C'est clair dans mon esprit qu'il manque seulement un élément à cette recette, un élément à cette décision, et c'est de revoir à la hausse les seuils d'immigration. Mais donc si vous me demandez : Est-ce que le gouvernement travaille à renforcer l'économie du Québec?, moi, je vous dis oui. Il manque un élément, et c'est pour ça qu'on est consultés.

M. Derraji : Oui, merci de clarifier que c'est un élément aussi important, le capital humain. Parce qu'on peut espérer la croissance économique qu'on veut, quelqu'un avant vous l'a dit, si on manque de bras, bien, on manque de bras. Oui, pour la robotisation, mais ça prend aussi des bras, un capital humain qui va innover, surtout si on veut être leaders au niveau de l'intelligence artificielle.

Ma dernière question, ça va concerner le programme où le ministère a mis en plein été les étudiants internationaux. Brièvement, que pensez-vous de ce moratoire?

M. Leblanc (Michel) : Bien, je l'ai dit clairement, je pense que le gouvernement a exprimé son intention de relancer le programme le plus tôt possible. On a entendu parler du 1er novembre. On invite le gouvernement à le faire le plus tôt possible. On avait demandé explicitement au gouvernement de s'assurer que personne en entreprise, présentement, ne soit forcé de quitter le Québec, et donc d'y accorder la priorité absolue. Ce qu'on comprend, c'est que le gouvernement, avec ses moyens limités, a choisi de focaliser sur cette priorité-là et de suspendre temporairement. Je l'ai dit tout à l'heure et je le répète, si le ministre veut bien demander des sommes supplémentaires pour s'assurer qu'il puisse traiter tous les dossiers à l'avenir, on va le supporter et on demandera au ministre des Finances d'accéder à sa demande.

M. Derraji : Merci, M. Leblanc.

La Présidente (Mme Chassé) : Merci. Ça conclut le bloc d'échange avec le bloc formant l'opposition. Nous passons maintenant à la deuxième opposition. M. le député de Laurier-Dorion, la parole est à vous.

M. Fontecilla : Merci. Bonjour, M. Leblanc. Dans votre mémoire, vous avez montré un tableau indiquant le taux de chômage, là, des communautés issues de l'immigration, très intéressant. Moins de cinq ans et plus de cinq ans, c'est une donnée très intéressante. On voit que ça baisse, là, à travers... donc, plus longtemps qu'on reste ici, le taux de chômage des gens issus de l'immigration baisse, mais il reste quand même toujours un petit peu plus élevé. Évidemment, il baisse en période de croissance économique, là.

On a reçu des organismes communautaires qui nous ont indiqué l'existence d'un certain... de biais dans l'embauche, qu'ils appellent des biais discriminatoires, qui font en sorte que les candidats de l'immigration sont laissés de côté. Ça diminue en période de pénurie de main-d'oeuvre parce que... vous l'avez indiqué tantôt, là. Donc, ils mettaient de l'avant la nécessité de sensibilisation, des programmes d'accompagnement des employeurs, surtout des petits employeurs, des PME, qui n'ont pas de gros départements de ressources humaines, etc. Est-ce que vous reconnaissez cette situation-là et est-ce que vous seriez favorables à un programme d'accompagnement des employeurs pour reconnaître le talent?

M. Leblanc (Michel) : Alors, c'est un phénomène qu'on a observé. Je vous rappelle que, depuis maintenant près de 10 ans, on a un programme qui s'appelle maintenant Interconnexion — c'était Cap sur le monde, un petit projet pilote, il y a 10 ans — et qui vise justement à intégrer des immigrants qualifiés dans leur domaine de compétences, alors qu'ils n'ont jamais eu d'emploi dans ce domaine-là. Et donc on est aux premières loges de ce contact avec des entreprises, potentiellement des employeurs.

On a observé des résistances, on a observé des employeurs qui n'étaient pas habitués à avoir des immigrants, qui avaient des préjugés. On a observé aussi des employeurs qui, pour la première fois, acceptaient d'en évaluer, de recevoir les C.V., de recevoir ces gens-là. Et ce qu'on observe, présentement, c'est que la pression sur l'embauche fait en sorte qu'il y a de moins en moins de ces comportements-là.

Ce qu'on pense qui est structurel puis qui change, c'est que, présentement, il y a énormément d'entreprises qui embauchent leurs premiers immigrants, qui n'en ont jamais eu avant et qui sont en train de démystifier c'est quoi, un immigrant, que c'est quelqu'un qui travaille fort, que c'est quelqu'un qui veut réussir sa vie comme n'importe quel autre employé, que c'est quelqu'un qui s'intègre bien si on l'accompagne. Et ce qu'on pense, c'est que, structurellement, structurellement, les entreprises, les petites entreprises, les départements de ressources humaines vont être de plus en plus à lire des C.V. d'immigrants, d'embaucher des immigrants, et on pense que la situation qu'on a connue dans le passé va être soit éliminée soit beaucoup moindre dans l'avenir.

La Présidente (Mme Chassé) : Ça conclut le bloc d'échange. Très bien, merci. Maintenant, la parole est au troisième groupe d'opposition. Mme la députée de Gaspé, la parole est à vous.

Mme Perry Mélançon : Merci, Mme la Présidente. Bonjour, M. Leblanc. J'aimerais revenir sur un échange que vous avez eu avec le ministre concernant la régionalisation. Vous avez dit que vous étiez en faveur, mais que ça ne devrait pas être fait au détriment de Montréal et surtout qu'on ne devrait pas prioriser les régions pour certains emplois ou pour l'arrivée d'immigrants. Jusque-là, je pense que je reprends vos propos, là, je les...

• (16 h 50) •

M. Leblanc (Michel) : Mais je serais d'accord pour accorder la priorité, c'est-à-dire, je serais d'accord pour qu'on reconnaisse, dans l'évaluation et dans les critères... qu'on accorde une certaine pondération plus favorable à des immigrants qui vont répondre à des besoins en région, mais ça ne doit pas se faire dans une optique où on maintient le chiffre limité, et donc ça veut dire que ça ferme la porte à un besoin d'une entreprise de Montréal. Donc, accorder la priorité, c'est reconnaître qu'on va focaliser sur ces besoins en région en premier, mais que, s'il y a des entreprises de Montréal qui ont des besoins, on va les traiter également.

Mme Perry Mélançon : Puis j'aimerais qu'on revienne sur le sujet pour savoir... juste parce que je trouve ça intéressant d'avoir quelqu'un qui vient de la région métropolitaine. Moi, je suis une députée de région, je suis une jeune qui a fait le retour en région, mais on perd énormément de jeunes qui s'installent, là, dans les grands centres. Donc, c'est l'exode des cerveaux, des bras, de tout, donc c'est sûr que, pour nous, pour pallier à ça, l'immigration est une solution. Est-ce que vous seriez, par exemple, en faveur qu'il y ait de la promotion qui se fasse dans les grands centres pour dire quels sont les besoins en main-d'oeuvre et tout, qu'il puisse y avoir quand même une collaboration entre Montréal et les régions?

M. Leblanc (Michel) : Tout à fait. En commission parlementaire précédente, je l'ai offert à plusieurs reprises. On a présentement un système, à Montréal, où des entreprises terrain détectent des immigrants qualifiés qui n'ont pas trouvé d'emploi dans leurs domaines de qualification. On a des entreprises qu'on sollicite qui ont des besoins non comblés et on est un marieur. Et je l'ai dit à plusieurs reprises, on serait très heureux, très heureux de travailler avec des organismes en région qui travailleraient avec des employeurs et qui nous transmettraient les besoins, et nous, à travers le bassin à Montréal, on pourrait proposer à des gens d'aller voir dans les régions, d'aller voir ces emplois-là et de se déplacer. C'est clair qu'aller en Gaspésie, pour des immigrants, ça coûte des sous, donc ça prendrait un programme qui non seulement nous soutient, avec les organismes terrain dans les régions, pour faire ce mariage, si on veut, mais aussi pour accompagner ces immigrants. Il y a d'autres organisations qui ont commencé à le faire.

La Présidente (Mme Chassé) : En conclusion.

M. Leblanc (Michel) : La Fédération des chambres de commerce a commencé à le faire. On pense qu'on pourrait faire partie de la solution puis accroître les volumes.

La Présidente (Mme Chassé) : M. Leblanc, merci beaucoup pour votre contribution à la commission, ça a été très apprécié.

Je suspends momentanément les travaux pour permettre au prochain groupe de prendre place.

(Suspension de la séance à 16 h 57)

(Reprise à 16 h 59)

La Présidente (Mme Chassé) : On peut bientôt dire bonsoir. Et je souhaite maintenant la bienvenue aux représentants de l'Ordre des conseillers en ressources humaines agréés. Vous avez 10 minutes pour votre exposé. À une minute de la fin, je vais vous faire une indication pour que vous puissiez conclure, et par la suite nous aurons un débat d'échange avec les membres de la commission. Je vous invite à tout d'abord débuter en vous présentant. Bienvenue.

Ordre des conseillers en ressources humaines
agréés (Ordre des CRHA)

M. de Villers (Philippe) : Très bien, merci beaucoup. Mme la Présidente de la Commission des relations avec les citoyens, M. ministre de l'Immigration, de la Diversité et de l'Inclusion, Mmes et MM. les membres de la commission, merci de nous accueillir, dans un premier temps, dans le cadre de ces consultations sur la planification de l'immigration au Québec pour la période 2020‑2022.

Je m'appelle Philippe de Villers, je suis président de l'Ordre des conseillers en ressources humaines agréés. À mes côtés, Mme Chantal Teasdale, CRHA, présidente du comité de formation, et Me Jean-Philippe Brunet, CRHA, spécialiste en immigration. Au besoin, je ferai appel à mes accompagnateurs pour répondre à certaines de vos questions lors de l'échange.

 (17 heures)

Je vais peut-être vous présenter une perspective un petit peu différente de ce que vous avez discuté ces derniers jours. Au fil des années, le Québec a accueilli et intégré avec succès des dizaines de milliers de nouveaux arrivants tout en préservant la spécificité de la société québécoise. L'immigration au Québec a toujours été un défi, mais je pense qu'on peut reconnaître, comme société, que c'est un succès, globalement.

Par contre, en l'espace de quatre ou cinq ans, on a vécu un changement brutal. On est passés d'une situation de chômage plus élevé que la moyenne canadienne à un contexte de rareté de travailleurs la plus aiguë au Canada, puis c'est le résultat combiné d'une économie dynamique créatrice d'emplois — ce qui est une excellente nouvelle, évidemment — une faible natalité puis un vieillissement accéléré de la population qui accroît le nombre de travailleurs d'expérience qui prennent leur retraite à chaque année.

Évidemment, il y a plusieurs façons dont on peut faire face à cette rareté de main-d'oeuvre. Certaines mesures ont déjà été annoncées par votre gouvernement, notamment en matière de rétention des travailleurs expérimentés, mais également intégration, maintien en emploi des personnes handicapées, d'autochtones, réorganisation, automatisation, donc transformation des organisations. Bien sûr, l'immigration en fait partie.

Notre Ordre des conseillers en ressources humaines, CRHA, compte près de 11 000 professionnels membres qui sont présents dans l'ensemble des organisations du Québec, donc de tous les types d'organisations, toutes les régions. Nos membres professionnels sont vraiment au coeur des organisations et donc occupent une place stratégique dans ces milieux de travail là. C'est eux qui sont vraiment la première ligne dans les organisations quand il est question de main-d'oeuvre, de recrutement, de développement, mais de rétention aussi. Donc, dans ce contexte-là, vous comprendrez qu'ils jouent un rôle crucial et un rôle clé dans l'intégration et dans l'accueil des nouveaux arrivants.

Comme ordre professionnel, bon, vous n'êtes pas sans savoir que notre mission, c'est vraiment la protection du public. Donc, on encadre la profession, on assure le maintien des compétences de nos professionnels membres, autant conseillers en ressources humaines agréés que conseillers en relations industrielles agréés, et on prépare la relève dans les organisations. Un de nos facteurs clés, un de nos thèmes-phares, c'est vraiment placer l'humain au centre des organisations, ce qui nous permet de participer au maintien de l'équilibre entre la réussite des organisations, d'une part, et, d'autre part, vraiment le bien-être de ses employés. Donc, pour nous, la diversité et l'inclusion, c'est vraiment un enjeu prioritaire pour notre ordre.

Donc, le point de vue qu'on a sur l'immigration, on pense que c'est un point de vue pratique dans un contexte de vision globale et très unique de la situation. Puis un des éléments clés qui nous préoccupe beaucoup, c'est vraiment le déracinement de l'immigrant et les enjeux d'accueil et d'intégration qu'ils vivent dans les organisations. Donc, les commentaires qu'on a émis dans le cadre de notre mémoire, on les a élaborés dans le cadre d'une consultation réalisée avec des membres ciblés, CRHA, CRIA, qui avaient une expérience particulière soit en immigration ou une connaissance approfondie en matière de diversité et d'inclusion.

J'aimerais dire de façon très claire que nous accueillons, de façon générale, très favorablement les objectifs qui ont été présentés par le gouvernement, mais on pense que certaines orientations gouvernementales peuvent manquer leur cible en simplifiant certaines problématiques à la dimension quantitative, puis on néglige quelquefois l'élément qualitatif le plus important, c'est-à-dire l'immigrant en tant que tel. Donc, je vais faire avec vous un survol rapide des 11 recommandations que nous avons formulées afin d'enrichir la réflexion dans le cadre de ces consultations.

On a tendance à voir l'immigration comme un débat interne, ce qui est le cas, bien sûr. Par contre, il faut le voir comme un enjeu de concurrence internationale. On doit maintenir le Québec comme une destination de choix pour s'assurer que les meilleurs talents mondiaux viennent s'établir chez nous. Donc, recommandation n° 1 : On pense que le gouvernement du Québec doit voir à repositionner nos processus d'accueil dans une perspective de l'immigrant pour maintenir notre image de marque de terre d'accueil.

Également, la sélection des travailleurs dans certaines caractéristiques socioprofessionnelles, telles qu'exprimées par le gouvernement dans sa planification de l'immigration, répond en partie aux besoins présents, mais un des enjeux qu'on voit, c'est qu'on n'assure pas nécessairement une adéquation durable avec les besoins futurs au niveau de la société. Donc, recommandation n° 2 : On aimerait que le gouvernement du Québec inscrive la planification de l'immigration dans une vision à long terme de la société québécoise. Évidemment, nos phénomènes démographiques qu'on vit, ils agissent sur des décennies. Donc, un horizon de trois ans, c'est court dans un contexte stratégique de société. Donc, nos organisations dans lesquelles nos membres professionnels évoluent ont besoin de davantage de prévisibilité pour bien évoluer.

Un des enjeux indissociables de l'immigration, c'est la reconnaissance des compétences et des diplômes, bien entendu. Les délais sont parfois longs. Parfois, on a trop d'immigrants surqualifiés qui sont prêts à faire plus, beaucoup d'espoirs déçus en découlent. Donc, recommandation n° 3 : On aimerait que le gouvernement s'assure que la reconnaissance des compétences et des diplômes se fasse en amont de l'arrivée des travailleurs immigrants. Évidemment, je tiens à préciser, on est conscients que les délais ne sont pas la seule responsabilité du gouvernement du Québec, mais ça reste un enjeu que nos entreprises vivent au quotidien et qu'il faut adresser. Donc, pour que la réforme du système d'immigration porte fruit, certaines solutions concrètes doivent être mises en place afin de pallier à la complexité de certains de ces processus.

On a également trois recommandations qui vont toucher directement l'attraction et la rétention des immigrants. Le système Arrima qui est mis en place par le gouvernement pour vraiment apparier l'offre des travailleurs étrangers et la demande en compétences des entreprises est définitivement un pas dans la bonne direction, mais l'ordre a certaines préoccupations néanmoins.

Le futur Portail employeurs prévu pour l'hiver prochain ne doit pas être rigide et il doit être aligné avec les demandes des entreprises. Pour l'ordre, c'est vraiment essentiel d'apparier l'offre que représentent les travailleurs étrangers à la demande telle qu'exprimée en termes de besoins des entreprises québécoises. Le futur Portail employeurs doit vraiment être en mesure de s'adapter aux besoins évolutifs du marché du travail. Je parlais de transformation des organisations, présentement c'est un terme qu'on entend beaucoup. Ça n'a pas fini, j'ai l'impression, ça fait juste commencer. Donc, il doit s'adapter mais en même temps demeurer simple pour ne pas alourdir le recrutement pour les entreprises. Donc, recommandation n° 4 : Que le gouvernement veille à ce que le futur Portail employeurs soit simple et évolutif pour les entreprises.

D'un autre côté, le portail immigrants que les candidats vont se servir, on voit là une opportunité réelle pour faire rayonner l'expertise du Québec en intelligence artificielle. En misant sur certaines de ces technologies pour vraiment améliorer le recrutement et cibler les bons profils de candidats recherchés, probablement qu'on pourrait faciliter le recrutement de travailleurs immigrants. Puis en même temps, pour tirer pleinement profit des compétences de cette main-d'oeuvre et favoriser l'alignement avec la demande des entreprises, on pense que la grille de sélection des travailleurs qualifiés peut créer une certaine distorsion entre l'offre des candidats et les besoins réels des entreprises. Donc, recommandation n° 5 : On aimerait que le gouvernement modifie la grille de sélection des travailleurs qualifiés afin de rééquilibrer l'offre des travailleurs immigrants par rapport aux emplois disponibles. L'ordre, évidemment, bon, nos membres, ce sont des experts en gestion et en développement de compétences. Donc, on croit avoir la crédibilité, dans ce contexte-là, pour vous assister dans la modification de certains critères afin d'apparier l'offre à la demande.

Également, on pense que l'unilinguisme français d'Arrima pourrait potentiellement priver le Québec de talents précieux qui peuvent parler la langue, mais sans nécessairement être en mesure d'en saisir toutes les subtilités. Donc, notre recommandation n° 6 : On aimerait s'assurer que l'unilinguisme d'Arrima ne cause pas un préjudice au Québec en termes d'attraction de talents.

Par ailleurs, on veut exprimer notre préoccupation par rapport aux exigences de qualifications professionnelles de certains candidats à l'immigration. On doit prendre en compte la réalité du terrain. Notre économie repose aussi sur des emplois moins qualifiés. Des exemples : préposés aux bénéficiaires, employés de restaurant, des manoeuvres, des journaliers, il en manque des milliers au Québec en ce moment. Donc, recommandation n° 7 : On aimerait faciliter l'immigration des travailleurs non qualifiés afin de répondre aux besoins réels.

Sur le plan de l'accueil, on pense pouvoir faire certains progrès. Notamment, au niveau des régions, dont on a parlé précédemment, ça reste un défi. Pourtant, la qualité de vie en région est très, très grande, et les besoins y sont réels. Donc, on pense que les régions devraient consolider les structures d'accueil avec les entreprises en recherche de main-d'oeuvre. Donc, nos recommandations 8 et 9 sont dans ce sens-là : Que le gouvernement favorise la création d'un guichet unique pour les entreprises désireuses de collaborer avec des organismes en immigration...

La Présidente (Mme Chassé) : Il vous reste une minute à votre exposé.

M. de Villers (Philippe) : ...oui, merci — et que le gouvernement s'assure que la réalité dépeinte lors des exercices de recrutement d'immigrants à l'étranger se reflète bien à la situation réelle du marché du travail québécois.

Un autre élément qu'on voit parfois malheureusement, ce sont des biais lors de l'embauche, parfois conscients, parfois inconscients. Donc, notre recommandation 10 va dans ce sens-là : On aimerait que le gouvernement aide les entreprises à surmonter ces biais dans leurs processus de recrutement par le développement d'outils adéquats.

Enfin, la recommandation 11 porte sur les travailleurs temporaires et étrangers. On en fait venir des milliers chaque année.

La Présidente (Mme Chassé) : En conclusion.

M. de Villers (Philippe) : Donc, on aimerait vraiment, en conclusion...

La Présidente (Mme Chassé) : Ça termine.

M. de Villers (Philippe) : ...faire venir davantage de travailleurs étrangers temporaires. Merci, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Chassé) : C'est très bien. Merci à vous. Vous allez avoir l'occasion d'approfondir avec les membres de la commission avec qui on va débuter la période d'échange. M. le ministre, la parole est à vous.

• (17 h 10) •

M. Jolin-Barrette : Merci, Mme la Présidente. Madame messieurs, bonjour. Merci d'être présents à l'Assemblée nationale pour présenter votre mémoire.

J'avais une question d'entrée de jeu. Dans votre recommandation 1, là, vous dites : «Que le gouvernement du Québec voit à repositionner nos processus d'accueil selon la perspective de l'immigrant afin de s'assurer de maintenir l'image de marque de la province comme terre d'accueil.» Bien, qu'est-ce que vous voulez dire par cette recommandation-là?

M. de Villers (Philippe) : Bien, en fait, c'est vraiment ce qu'on prône de remettre l'être humain au centre des organisations. Donc, on croit que, pour l'immigrant, c'est la même chose. Donc, vraiment, en plaçant cet être humain là, nouvel arrivant, au centre de toutes les réflexions, on pense être en mesure de mieux l'accompagner et de mieux l'intégrer à la société dans son cheminement, finalement, vers une citoyenneté à part entière. Dans ce contexte-là, les démarches que vous avez entreprises au niveau du parcours d'accompagnement personnalisé s'intègrent définitivement bien avec cette recommandation-là.

Donc, il s'agira vraiment de toujours garder ça en tête, qu'est-ce que ce nouvel arrivant là va vivre dans la société, également, pas juste le nouvel arrivant travailleur, mais sa famille qui va l'accompagner, pour s'assurer qu'il vive une expérience positive qui va contribuer à faire rayonner le Québec au niveau de son image de marque internationale pour vraiment maintenir une forte attractabilité.

M. Jolin-Barrette : O.K. Donc, vous vous souciez de... dans le fond, le processus, le Parcours d'accompagnement personnalisé, l'intégration des personnes immigrantes... Dans le fond, est-ce que vous êtes satisfaits de ce qu'on a proposé la semaine dernière relativement à la prise en charge, aux agents d'aide à l'intégration? Est-ce que vous trouvez que le Québec est sur la bonne voie?

M. de Villers (Philippe) : C'est définitivement un pas dans la bonne direction. On était, en effet, très satisfaits de voir ça. Évidemment, c'est un projet qui est dans ses balbutiements. Donc, ce qu'on veut vraiment réitérer, c'est l'importance de toujours garder la perspective du nouvel arrivant dans tous les programmes qu'on va déployer pour ces personnes-là.

M. Jolin-Barrette : Puis, quand vous parlez de l'image de marque du Québec, là, comme terre d'accueil, selon l'expérience de l'ordre professionnel, le Québec a une bonne image de marque à l'international?

M. de Villers (Philippe) : C'est quelque chose qu'on voit, en effet. Je crois que les chiffres le démontrent bien. Il y a beaucoup de gens qui veulent venir nous rejoindre comme société. Il faut s'assurer que ça le demeure, parce que c'est quelque chose qui est très fragile, puis on le voit, nous, travaillant dans les organisations.

C'est un peu le même enjeu pour une organisation qui est en compétition avec d'autres organisations pour le même bassin de main-d'oeuvre, bien, il faut s'assurer que l'image de marque d'un employeur demeure toujours à un niveau des plus élevés pour s'assurer que les travailleurs soient naturellement attirés vers cette organisation-là, parce que, quand la réputation de l'organisation faiblit, évidemment, tous les efforts de recrutement deviennent beaucoup plus complexes et plus lourds. Donc, c'est vraiment notre préoccupation, de s'assurer qu'on garde une très, très bonne image de marque afin d'attirer les meilleurs talents chez nous.

M. Jolin-Barrette : Bien, est-ce qu'il y a des choses... ou est-ce que vous avez des inquiétudes par rapport à l'image de marque du Québec, par rapport à la renommée du Québec? Est-ce qu'il y a des choses qui... Pour avoir ce commentaire-là, est-ce que... D'où vient ce commentaire? Est-ce que vous avez des craintes?

M. de Villers (Philippe) : Bien, c'est-à-dire, sans avoir des craintes, une image de marque, c'est quelque chose de fragile qu'on doit chérir et s'assurer, dans un contexte de transformation de nos processus d'accueil et d'intégration des immigrants, de toujours garder ça en tête. Donc, sans dire qu'on a des craintes, c'est plutôt un élément qu'on soulève, de dire : En revoyant nos processus, assurons-nous de toujours garder en perspective ce que vit le nouvel arrivant pour être sûrs de ne pas occulter cette dimension-là dans la refonte de nos processus qu'on va effectuer au courant des prochaines années. Donc, c'est plutôt un point de vigilance qu'on vous amène aujourd'hui.

M. Jolin-Barrette : O.K. Bien, je ne suis quand même pas sûr de vous suivre, parce que, quand, là, les députés, là, puis le gouvernement décident de moderniser, supposons, le système d'immigration ou de faire le Parcours d'accompagnement personnalisé, bien entendu les politiques publiques sont développées au bénéfice de la population québécoise et, notamment, toutes les décisions du gouvernement sont dans l'intérêt général de la population du Québec, l'immigration aussi. Et ce qu'on vise à faire, notamment, par la réforme du système d'immigration ou par les nouveaux outils dont on se dote, notamment le Parcours d'accompagnement personnalisé, c'est de s'assurer que les personnes immigrantes puissent intégrer le marché du travail, puissent connaître les valeurs québécoises, puissent s'intégrer adéquatement avec la société québécoise. Donc, vous êtes d'accord avec ces changements-là, que le gouvernement du Québec va de l'avant.

M. de Villers (Philippe) : Ah oui, entièrement, et c'est pour ça que je tenais à souligner que le Parcours d'accompagnement personnalisé, qui est quand même assez récent au niveau de l'annonce, on voit beaucoup de valeur à ça parce qu'effectivement ça a le potentiel de bien répondre à cette préoccupation-là, donc, oui, tout à fait.

M. Jolin-Barrette : O.K. Au niveau de l'unilinguisme d'Arrima, vous dites : Il ne faut pas que ça constitue un frein. Vous voudriez qu'il soit bilingue?

M. de Villers (Philippe) : Bien, c'est-à-dire, est-ce qu'on voudrait qu'il soit bilingue? Peut-être que oui, peut-être que non. La préoccupation que nous avons réellement est de dire : Dans certains cas, soit un nouvel arrivant ne maîtrise pas le français, donc il ne comprendra peut-être pas toutes les subtilités de la société québécoise qu'on souhaite illustrer à travers Arrima, ou, dans certains cas, effectivement, peut-être qu'il ne parlera pas français du tout. Donc, à ce moment-là, s'il se fait aider par une tierce personne, tout ça, bien, ça revient à son expérience de candidat à l'immigration qu'il va vivre.

Est-ce qu'on se prive, dans ce contexte-là, de main-d'oeuvre qui pourrait avoir une valeur inestimable pour le Québec? Je pense, entre autres, on parlait... intelligence artificielle, précédemment. Donc, s'il choisit de ne pas venir au Québec parce qu'il n'est pas capable d'appliquer à travers la plateforme Arrima et qu'il va dans un autre pays, bien, à ce moment-là, on s'est potentiellement privé de cette ressource-là, d'autant plus que, dans un contexte où on annonce des sommes additionnelles en matière de francisation des nouveaux arrivants, bien, on voit là une opportunité de dire : Bien, est-ce que... peut-être qu'on n'est pas en mesure, dans certains cas, d'accueillir des nouveaux arrivants qui, potentiellement, ne parlent pas très bien français ou peut-être même, dans certains cas, pas du tout, mais qu'on prend le pari, comme société québécoise, de bien les franciser dans un laps de temps relativement rapide, toujours en gardant en tête qu'évidemment le nouvel arrivant doit démontrer la volonté de se franciser. Donc, ça, on pense que c'est un élément clé également.

M. Jolin-Barrette : Sauf que vous êtes conscients aussi que les communications gouvernementales doivent se faire en français, pour les ordres professionnels aussi, puis c'est prévu dans le corpus législatif.

M. de Villers (Philippe) : Tout à fait, oui. Et votre point est très bon. Même dans le cadre de notre ordre professionnel, pour devenir membre de l'ordre, bien, le candidat doit démontrer sa maîtrise de la langue française. Mais, encore une fois, dans un contexte de francisation du nouvel arrivant, on est en mesure de parvenir à cet objectif-là et de réconcilier l'ensemble de ces parties prenantes.

M. Jolin-Barrette : O.K. Vous dites... vous êtes prêts à accompagner le gouvernement dans la recherche de solutions permettant de diagnostiquer les biais à l'embauche. Bien, en fait, qu'est-ce que vous constatez, comme professionnels des ressources humaines, par rapport aux entreprises relativement à cet enjeu-là que vous soulevez, au niveau des biais à l'embauche?

M. de Villers (Philippe) : Évidemment, nos professionnels sont formés pour identifier des biais lors de processus d'entrevue, que ce soient, comme je mentionnais, des biais conscients ou des biais parfois inconscients. Donc, évidemment, dans les entreprises où il y a des membres CRHA, CRIA, ils sont en mesure d'adresser sur le terrain ces biais-là avec les gestionnaires pour un peu permettre de faire évoluer certaines mentalités.

Cela étant dit, le problème, c'est qu'au niveau de la société on a un angle mort dans plusieurs entreprises qui sont soit trop petites pour avoir des professionnels en ressources humaines ou qui font le choix de tout simplement ne pas en avoir. Donc, ces biais-là sont présents.

Alors, on pense qu'il y a une opportunité pour développer certains outils diagnostiques qui seraient offerts aux entreprises, qu'elles seraient en mesure d'utiliser pour voir est-ce qu'on a des biais en place dans certains de nos processus liés à l'embauche et l'intégration des nouvelles personnes arrivantes. Chantal, je ne sais pas si tu veux en...

Mme Teasdale (Chantal) : Bien, en fait, Arrima, quand on parle de recrutement, de combler des besoins en entreprise, là... En fait, moi, ça fait une trentaine d'années que je travaille dans le domaine des ressources humaines dans différents secteurs d'activité, donc j'ai eu à combler différents postes. L'immigration ou les travailleurs étrangers temporaires spécialisés ou non, c'est quelque chose qui est connu, là, dans mon domaine.

Mais, quand on vient pour combler des postes, on doit avoir des outils technologiques. Arrima en est un, mais il y a d'autres formes d'applications technologiques qui nous permettent de bien arrimer, si on veut, un candidat à la source avec un besoin d'entreprise. Donc, Arrima étant un modèle, mais il y a d'autres formules. Donc, si on a à... Évidemment, il y a des organisations qui ne sont pas outillées au niveau technologique, des applications comme des CVManager ou des Taleo et autres applications qui permettent de jumeler le candidat avec le poste.

Donc, Arrima étant un outil à des organisations pour avoir un bassin de candidats qui va bien répondre aux organisations, mais encore faut-il que cet outil-là soit, comme tous les autres outils technologiques, convivial, simple, qu'il donne le goût à un candidat d'accéder à cette application-là, que ça ne le décourage pas en partant puis qu'il voie qu'il y a une option d'emploi à quelque part, là, que ça soit un incitatif, si on veut.

M. Jolin-Barrette : O.K. Je vous remercie. Je pense, j'ai des collègues qui veulent poser des questions. Merci.

La Présidente (Mme Chassé) : La députée de Les Plaines désire prendre la parole.

• (17 h 20) •

Mme Lecours (Les Plaines) : Oui. Merci beaucoup, Mme la Présidente. Merci, M. le ministre.

La Présidente (Mme Chassé) : Vous avez cinq minutes.

Mme Lecours (Les Plaines) : Cinq minutes? Parfait. Alors, bien, permettez-moi, dans un premier temps, de vous souhaiter la bienvenue. Merci de votre contribution, justement, à la commission.

Je vais m'arrêter sur trois recommandations que vous faites en lien avec l'orientation 6, l'orientation 6 qui est celle d'«appuyer les employeurs de toutes les régions du Québec dans leurs démarches de recrutement de travailleurs étrangers temporaires, afin d'en augmenter le nombre, de diminuer les délais [dans] leur arrivée et de faciliter les démarches pour répondre [à leurs] besoins — à court et à moyen terme — de main-d'oeuvre».

Les recommandations que vous faites, la première, vous en avez parlé abondamment, c'est-à-dire le Portail employeurs, qu'il demeure simple et évolutif. Vous avez également parlé de créer un guichet unique pour les entreprises désireuses de collaborer avec des organismes communautaires en immigration. Et la recommandation 10, qui est d'aider les entreprises à surmonter, par le développement d'outils adéquats, les biais inconscients qui sont présents dans leurs processus de recrutement, vous en avez parlé brièvement, et tout ça, mais ce que je voudrais savoir... Là, vous êtes des experts en ressources humaines. Il y a des entreprises qui n'ont pas de département de ressources humaines. Il y en a qui sont venus ici, notamment les restaurateurs qui sont venus ici, qui nous ont dit : C'est déjà compliqué, le processus d'immigration, c'est compliqué aussi, l'intégration. Qu'est-ce que vous avez à recommander au gouvernement, qu'on puisse davantage les aider?

M. de Villers (Philippe) : Je crois, Mme la députée, que vous avez très bien ciblé la problématique, en ce sens où les entreprises qui ont de nos membres présents, elles sont capables de faire un travail de fond sur le terrain. Cela étant dit, elles souffrent de cette pénurie-là au jour le jour parce que... Et, des témoignages, on en a par dizaines, de conseillers en ressources humaines qui ont des postes affichés, qui travaillent, qui travaillent, puis qu'il n'y a rien qui se passe. Cela étant dit, Chantal, est-ce que tu veux répondre à la question?

Mme Teasdale (Chantal) : Oui, j'aimerais compléter. En fait, il y a, au Québec seulement, environ 400 organismes qu'on appelle d'employabilité. À l'intérieur de ça, il y a des organismes qui, à travers le Québec, ont des missions d'accompagnement d'un immigrant vers un employeur, donc qui les aident à se trouver des emplois, et d'autres qui aident à l'intégration dans les régions. Le problème avec ça, c'est qu'il y en a tellement que, comme entreprise, qu'on soit en ressources humaines ou pas, on ne sait pas vers quel organisme se tourner. Il y en a beaucoup, mais ils sont méconnus, on ne sait plus qui fait quoi. Il y en a qui ont plusieurs chapeaux, qui vont être un accès à des immigrants puis qui vont aider la famille à se loger, à s'intégrer dans différentes municipalités, il y en a d'autres qui ne font pas ça, etc. Donc, c'est un peu difficile de s'y retrouver.

S'ils étaient mieux connus à travers les régions, si les missions étaient plus... alors ça aiderait certainement plusieurs organisations à recourir à ces organismes-là à défaut d'avoir des ressources humaines. Même à ça, même quand on a un département Ressources humaines complet avec plusieurs ressources, on n'est pas outillé pour faciliter l'intégration des immigrants non plus. Dans le travail, oui, mais dans une région, l'aider à se loger, etc., ça, on n'est pas outillé pour ça. Mais il y a des organismes, mais c'est juste qu'ils ne sont pas assez bien connus, si on veut.

Mme Lecours (Les Plaines) : Donc, c'est la recommandation, en fait, d'un guichet unique, c'est ce que je comprends par «guichet unique», où il y aurait, justement, toutes sortes d'organisations, avec leurs missions précises, qui viendraient en soutien aux entreprises.

Mme Teasdale (Chantal) : Ça aiderait.

Mme Lecours (Les Plaines) : Globalement, est-ce qu'il y aurait d'autres recommandations, justement, pour aider les employeurs qui ne sont pas munis de ressources humaines? Parce qu'il y en a beaucoup. Des PME, il y en a énormément, énormément, et...

Mme Teasdale (Chantal) : Il y a des comités sectoriels, il y a des associations aussi qui existent, qui donnent des outils à différentes organisations, là, pour leur prêter main-forte, là, mais c'est sûr qu'on... dans un contexte pénurique, là, il reste que l'intégration d'une personne à l'emploi, ça fait partie de la responsabilité de l'employeur. Si j'ai un restaurant puis j'accueille un cuisinier, c'est la moindre des choses que je l'intègre, que je l'accueille, que je le forme. Ce n'est pas une fonction à Ressources humaines qui fait ça, ça fait partie de l'entrepreneur aussi.

La Présidente (Mme Chassé) : Il reste 30 secondes au bloc.

M. Brunet (Jean-Philippe) : Avant de penser même à la question d'intégration, il faut regarder le mécanisme d'immigration, à l'heure actuelle, au niveau temporaire. À l'heure actuelle, les mécanismes sont lourds, les mécanismes sont difficiles, les mécanismes sont longs. Donc, c'est certain qu'entre autres une plateforme...

La Présidente (Mme Chassé) : En conclusion.

M. Brunet (Jean-Philippe) : ...au niveau technologique, qui permettrait, au niveau temporaire... — on parle d'Arrima depuis tantôt, qui est principalement adressé aux permanents — visant à faciliter, entre autres, la procédure, visant à accélérer la procédure qui, dans certains cas au Québec, à l'heure actuelle, peut prendre jusqu'à un an... Si on a un besoin qui est immédiat, on ne peut pas attendre un an pour l'arrivée d'un travailleur temporaire. Donc, on ne peut même pas penser à cette question d'intégration. Merci.

La Présidente (Mme Chassé) : Merci à vous. Nous passons maintenant au parti formant l'opposition officielle. M. le député de Nelligan, vous prenez la parole. Merci.

M. Derraji : Merci, Mme la Présidente. Madame messieurs, bienvenue. Merci pour votre présence. Je vous remercie pour la qualité du rapport et la qualité des recommandations.

Vous étiez sur un excellent élan. Je vais vous relancer par une autre question. Quand vous dites que les mécanismes d'intégration temporaire, c'est très long, là... Arrima vient de commencer. Il y a un parcours qui a été annoncé la semaine dernière par le ministre, le MIDI. Est-ce que vous êtes satisfaits? Vous pensez qu'il y a une...

M. Brunet (Jean-Philippe) : ...Arrima, si ultimement la plateforme permet une meilleure intégration des travailleurs qui sont à l'étranger pour venir combler des besoins, parfait. Toutefois, ce que l'on parle, ce de quoi nous parlons moins, c'est la présence ou l'arrivée de travailleurs temporaires pour venir combler des besoins immédiats. Un présentateur précédent mentionnait les besoins immédiats au niveau du Montréal métropolitain et un peu partout au Québec. Arrima et le système... l'accompagnement verra à accompagner les gens qui sont... qui viendront s'établir de façon permanente. Toutefois, il faut prendre en considération que les employeurs québécois ont des besoins qui sont immédiats. On peut utiliser le processus des travailleurs temporaires pour les faire venir et, à l'heure actuelle, le processus est lourd. À titre d'exemple, on a déposé, dans certains cas, des formulaires originaux. Donc, on doit utiliser des services de messagerie ou la poste pour envoyer des documents qui sont par la suite physiquement ouverts au ministère, qui sont probablement enregistrés...

M. Derraji : ...c'est toujours le ministère de l'Immigration du Québec, oui.

M. Brunet (Jean-Philippe) : Absolument, tout à fait, tout à fait, et par la suite on commence un traitement. On invite le gouvernement à poursuivre dans sa lancée et introduire des procédures au niveau temporaire, visant peut-être... intégrer cette portion informatique, cette portion technologique pour permettre, un, un processus simplifié, deux, des communications accrues et, trois, de façon plus importante, diminuer les délais de traitement.

M. Derraji : C'est un bon point. Je souhaite, moi aussi, la même chose et je pense que le ministère et le ministre sont en mode écoute, et c'est un bon point qui va améliorer considérablement nos processus.

J'ai plusieurs questions. Je veux juste vous demander... que je n'ai pas beaucoup de temps, donc si vous pouvez juste être plus court, parce que je trouve tellement intéressant le mémoire que j'ai vraiment beaucoup de questions.

Première question, la reconnaissance des compétences des diplômes. Vous êtes un ordre qui joue un rôle très important. D'une manière honnête et très claire, sommes-nous sur la bonne voie ou il y a des choses? S'il y a des choses, qu'est-ce que vous proposez sur la table pour les améliorer? Le ministère, il est là pour écouter.

M. de Villers (Philippe) : ...façon très, très rapide, oui, nous sommes sur la bonne voie. Arrima a beaucoup de potentiel. Je pense que la clé sera l'exhaustivité et l'agilité du processus, donc qu'on soit capables de rapidement identifier, quand il y a des nouveaux diplômes, à l'étranger, qui sont émis, à quels diplômes canadiens ou québécois ils peuvent être associés pour que, pour les entreprises, ce soit très, très facile de reconnaître. Donc, si la personne est diplômée de l'Université de Toulouse dans telle discipline, ça correspond à un bac à l'UQAM dans telle discipline, et l'équivalence est faite.

M. Derraji : ...vous proposez, c'est que, même dans la plateforme Arrima, il y a une inclusion des équivalences. Est-ce qu'on vous a informés? Est-ce que ça existe déjà, ça, dans la plateforme Arrima ou vous n'avez aucune idée de si ça existe ou pas?

M. de Villers (Philippe) : De ce que l'on a compris, c'était dans les objectifs de le faire. Cela étant dit, ce qu'on comprend également de la plateforme Arrima, c'est que c'est en déploiement. Ce sera probablement un produit en constante évolution, mais nous, on voit... En fait, ça...

M. Derraji : Je vais me permettre de vous arrêter.

M. de Villers (Philippe) : Oui, oui, allez-y, allez-y.

M. Derraji : Ce qu'on a compris... C'est qui, la personne qui vous a dit ça? Est-ce que c'est juste des ouï-dire ou une communication du ministère?

M. Brunet (Jean-Philippe) : Donc, au niveau, tout simplement, de l'utilisation du système, à l'heure actuelle... Et puis notre souhait est, tout simplement, voir une facilitation pour que les employeurs québécois qui voient un diplôme étranger puissent être en mesure de vérifier rapidement. Donc, on ne parle même pas du système Arrima, on parle des employeurs, qu'ils soient en mesure de voir de façon immédiate.

M. Derraji : Oui, mais, si j'ai bien compris, ça veut dire que, moi, en tant qu'employeur au Québec, la personne a appliqué dans la plateforme Arrima... que vous suggérez un mécanisme, que l'équivalence... Je sais que je recrute un bac au Québec versus une maîtrise, un doctorat en France ou ailleurs, en Russie, là.

M. Brunet (Jean-Philippe) : ...une visibilité.

M. Derraji : Excellent. Pensez-vous que c'est quelque chose qui existe ou c'est quelque chose que vous aimeriez qui existe? C'est un souhait que vous formulez au ministère par rapport à Arrima?

• (17 h 30) •

M. Brunet (Jean-Philippe) : Je pense que c'est quelque chose qui est en partie en place et que nous désirons voir amélioré et en amélioration constante.

M. Derraji : Est-ce que vous avez déjà eu des présentations de la part du MIDI par rapport à la plateforme Arrima?

M. Brunet (Jean-Philippe) : Oui.

M. Derraji : C'est quoi, votre point de vue?

M. Brunet (Jean-Philippe) : Bien, de façon initiale, c'est un système informatique comme plusieurs systèmes informatiques sont présentés dans le domaine de l'immigration. Et puis ce qu'on désire voir, entre autres, encore une fois, c'est la simplification de ce processus afin qu'on continue à être compétitifs, comme Philippe l'a souligné tantôt.

M. Derraji : Oui. Corrigez-moi si je me trompe, vous avez insisté à plusieurs reprises sur la simplification, et je l'ai lu aussi dans la recommandation 4. Du moment que vous avez assisté à cette présentation, est-ce que vous avez quitté la rencontre avec un sentiment que ce n'est pas simple et c'est très complexe?

M. Brunet (Jean-Philippe) : Je pense qu'il y a une écoute au niveau de tous les partis autour de la table aujourd'hui. Je pense qu'il y a clairement un désir de faire avancer les choses. Et l'ordre désire communiquer son message à l'effet que, pour tous les membres, tous les employeurs, tous les conseillers, conseillères en ressources humaines, pour nous, ce qui est important, c'est qu'on ait un processus qui est transparent, et donc rapide et simplifié.

M. Derraji : Je vous rappelle que je ne fais pas partie de cette table, donc je vais répéter ma question d'une autre façon. Je suis là pour vous aider et je suis là pour comprendre la démarche qui est derrière. J'ai cru comprendre qu'il y a une problématique. Vous pouvez me corriger, vous pouvez me dire : Écoutez, M. le député, il n'y a pas de problématique. Vous avez assisté à une présentation d'Arrima. Vous avez probablement un pressentiment que c'est très complexe en quittant la réunion. Vous avez formulé des recommandations. Vous avez un souhait, vous avez même inclus ça dans votre rapport, et c'est ça que je veux comprendre. Et, si c'est le cas, donnez-nous vos arguments, on va essayer de faire le suivi pour améliorer... Ce qu'on veut, au bout de la ligne, que ce soit l'opposition ou le gouvernement, c'est la réussite d'Arrima. Donc, on est là pour vous écouter.

M. Brunet (Jean-Philippe) : Humblement, je ne suis pas informaticien, je suis avocat. Ce que je peux vous dire, c'est que plus une plateforme est simple, plus les immigrants et les employeurs vont pouvoir l'utiliser de façon adéquate. Ce qu'on désire voir, c'est une continuité de l'amélioration de celle-ci. La plateforme, telle qu'elle est à l'heure actuelle, est quand même complexe d'un point de vue informatique. Et donc de voir une amélioration... ne verra que rejoindre les objectifs du gouvernement québécois actuel et rejoindre les besoins des employeurs, point.

M. Derraji : Merci. Vous êtes un excellent communicateur, je viens de le comprendre, vous êtes un avocat. Bravo! Je comprends la réponse. On va faire le suivi, on va faire le suivi pour que ça soit beaucoup plus simple.

L'autre point très important, vous avez évoqué la discrimination, dans votre rapport, et vous avez mentionné que le gouvernement du Québec modifie la grille de sélection des travailleurs qualifiés afin de rééquilibrer l'offre des travailleurs... Ah! désolé, la recommandation 6, c'est ça qui concerne la discrimination. Quand vous avez évoqué la discrimination, sur quoi vous vous êtes basés pour dire qu'il y a un «flag» de discrimination?

M. de Villers (Philippe) : Bien, en fait, au niveau de la discrimination, si vous le permettez, c'est plutôt la recommandation 10, en fait, c'est vraiment d'éviter les biais. Nos membres nous le disent, des fois ils auront besoin d'intervenir auprès des gestionnaires qui, malheureusement, encore, vont avoir des réflexes de discriminer, soit, encore une fois, consciemment ou inconsciemment, des nouveaux arrivants. Donc, nos conseillers sur le travail... sur le terrain, pardon, doivent faire ce travail-là. Donc, on peut tout simplement imaginer que, dans les entreprises où il n'y a pas de CRHA, la même situation se vit également.

M. Derraji : Ma dernière question, elle est aussi importante, je vais vous dire pourquoi. Venant de l'ordre... Je veux prendre une attention particulière... Il y avait des groupes qui sont venus ici pour nous dire qu'il y aurait un biais à l'embauche. Mais, venant de l'ordre, je pense que je dois être beaucoup plus attentif. Est-ce que vous pouvez m'éclairer? Selon vous, vos arguments, vous êtes quand même des spécialistes du recrutement, pourquoi vous avez mis ça dans votre rapport?

M. de Villers (Philippe) : Parce que, pour nous, encore une fois, ça revient dans la perspective du nouvel arrivant. Donc, ce qu'on veut favoriser, évidemment, encore une fois, dans une perspective organisationnelle qui s'applique à la dimension québécoise, c'est l'attraction, le développement et la rétention de ces nouveaux arrivants là. Donc, un nouvel arrivant qui vit une perspective de discrimination dans le cadre d'entretiens d'embauche ou de non-sélection à répétition, évidemment, ça donne une drôle d'image de marque au niveau de la société québécoise. Et, encore une fois, j'insiste sur le fait que ce ne sont pas toujours des biais conscients, des fois c'est des biais inconscients. Donc, c'est pour ça que je crois que nos entreprises ont besoin d'aide, parce que le cri du coeur, je pense qu'on l'a tous entendu cette semaine.

Le Président (M. Provençal)  : 30 secondes pour conclure votre réponse.

M. de Villers (Philippe) : Merci. Et on l'entend fréquemment dans les médias, à toutes les semaines, il y a des histoires d'entreprises qui doivent restreindre soit des contrats soit des heures d'ouverture. Donc, je crois que ces entreprises-là ont besoin d'aide et qu'on est en mesure de leur fournir des outils pratico-pratiques qui leur permettent d'identifier où sont ces biais-là, qu'ils en soient conscients et qu'ils puissent par la suite les adresser pour améliorer la rétention de nouveaux arrivants... et donc une meilleure expérience pour ces personnes-là.

Le Président (M. Provençal)  : Merci beaucoup. Alors, ça complète bien votre réponse. Et nous en sommes rendus avec le questionnement du député de Laurier-Dorion. Alors, à vous la parole.

M. Fontecilla : Merci. Merci, mesdames messieurs, d'être avec nous cet après-midi. Écoutez, d'emblée, pour votre recommandation 1, maintenir l'image de marque, il y a quelque chose qui a suscité un questionnement. Est-ce que vous croyez que, pour maintenir l'image de marque du Québec, la décision d'annuler 18 000 dossiers d'immigration est de nature à maintenir l'image de marque du Québec?

M. de Villers (Philippe) : Merci de la question, M. le député, c'est une excellente question. Je vais me permettre de vous faire une analogie d'entreprise. Si je reçois 15 000 C.V., dans ma banque de candidatures, que je n'ai pas traités encore et que je communique avec ces 15 000 candidats là pour leur dire : Bien, écoutez, désormais, votre C.V., je ne considère plus, vous pouvez réappliquer si vous vous voulez, mais vous devez recommencer à zéro, la clé, si je veux avoir du succès dans ce genre d'opération là, je dois avoir un plan de gestion du changement qui va être très, très robuste, donc comment je vais communiquer cette décision-là à ces gens-là, comment je vais mettre en place des mesures d'atténuation d'impact et comment je vais les soutenir là-dedans, parce qu'il y a toujours une bonne raison pour laquelle, comme organisation, tu fais ça. Donc, si l'approche est mal faite, donc si la gestion du changement a été mal faite auprès de ces gens-là, bien, c'est évident que ce n'est pas les 15 000 qui vont réappliquer sur mon site, donc je vais perdre potentiellement des candidats de grande qualité, et c'est le genre de contexte qui pourrait nuire à l'image de marque de mon entreprise, effectivement.

Donc, pour revenir à votre question, pas nécessairement, ça va dépendre de comment on va mettre en place un solide plan de gestion du changement par rapport à ces personnes-là pour les épauler là-dedans, qu'ils comprennent bien ce qu'il en est, puis, ultimement, qu'ils comprennent que, potentiellement, ils pourraient être gagnants dans cette décision-là.

M. Fontecilla : Vous croyez que ce processus de gestion des conséquences a été mis en place?

M. de Villers (Philippe) : Honnêtement, je ne suis pas assez près de ce dossier-là pour porter un jugement là-dessus.

M. Fontecilla : Très bien. Écoutez, à votre recommandation 6, s'assurer que l'unilinguisme de la plateforme Arrima ne cause pas un préjudice au Québec, qu'est-ce que vous voulez dire, qu'il faudrait que la plateforme soit en anglais aussi?

M. de Villers (Philippe) : Pas nécessairement, comme je mentionnais, mais on doit s'assurer que des gens qui ne parlent pas ou peu français soient en mesure quand même d'utiliser la plateforme Arrima et de faire... et de transférer, à leur meilleur... toutes leurs compétences et leur potentiel pour qu'on soit sûrs de ne pas renoncer sur des nouveaux arrivants qui pourraient contribuer significativement à la société québécoise. Donc, le comment ça doit se faire, ça peut prendre plein de formes. Des fois, on voit des pictogrammes, ça peut être, encore une fois, de l'intelligence artificielle qui joue dans ça, ça peut être certaines traductions simultanées. Mais, bon, bref, on doit garder encore une fois le principe d'attraction du Québec et l'image de marque de notre société comme terre d'accueil.

Le Président (M. Provençal)  : Merci beaucoup pour cette réponse. Alors, je cède la parole maintenant, pour terminer cet échange, à la députée de Gaspé.

Mme Perry Mélançon : Merci, M. le Président. Merci de votre présence et de tout le sérieux que vous accordez, là, à la démarche. Vous êtes très intéressants.

Quand vous dites, pour la grille de sélection qui ne vise pas nécessairement les bons besoins de la main-d'oeuvre... vous avez dit aussi que les mécanismes étaient trop lourds et longs. J'aimerais vous entendre sur... J'imagine que vous êtes familiers avec la liste d'emplois à traitement simplifié. Qu'est-ce qu'on doit faire pour la mettre à jour, qu'elle corresponde aux besoins de main-d'oeuvre? Et est-ce que vous avez des exemples de secteurs qui sont beaucoup plus touchés et qui devraient se retrouver dans cette liste?

• (17 h 40) •

M. Brunet (Jean-Philippe) : Au niveau de la démarche simplifiée, d'abord et avant tout, on applaudit les changements de cette année, de la part du ministère, au niveau de la régionalisation des postes, une très belle initiative. Toutefois, je pense que c'est un pas dans la bonne direction, mais il faut continuer. Chaque région du Québec a des besoins différents. Et à l'heure actuelle, en fait, on trouve que plusieurs régions ont perdu certains postes qui sont clairement en demande, et donc un remaniement plus rapide de celle-ci, et à inclure plusieurs postes...

Je pense qu'à l'heure actuelle les listes régionales, entre autres, ont été peut-être simplifiées un peu trop, si vous me permettez l'expression. Et donc d'y voir, beaucoup plus écouter les employeurs... On a des employeurs, en région, qui ont des besoins, comme vous le savez, marqués, entre autres en Gaspésie, et, si on regarde la liste pour la grande région de la Gaspésie, je ne pense pas, avec respect, qu'elle vient répondre aux besoins de tous les employeurs. Est-ce qu'on peut avoir une liste qui est parfaite? La réponse est probablement pas. Mais je pense qu'on se doit, à titre de Parlement, de tenter de viser cette perfection-là en continuant à travailler sur ces listes-là par rapport aux besoins spécifiques de chaque région, et donc peut-être via, justement, notre ordre professionnel, de consulter les spécialistes en ressources humaines pour déterminer quels sont les besoins des régions, spécifiques pour essayer de l'adapter, et donc avoir une maniabilité plus grande.

Le Président (M. Provençal)  : En conclusion.

Mme Perry Mélançon : Merci. Bien, rapidement, vous avez dénoncé, dans votre mémoire, la suspension du volet diplômés dans le PEQ. J'aimerais juste vous entendre là-dessus rapidement.

M. Brunet (Jean-Philippe) : Ramenez-le, c'est aussi simple que ça. C'est un programme qui faisait la jalousie du reste du Canada, plusieurs pays. On a des gens qui, par l'intermédiaire avancé, ont des diplômes, donc aucun problème de reconnaissance de diplôme. Ce sont des gens qui sont, par définition, arrimés, point, donc ramenez-le le plus rapidement possible.

Mme Perry Mélançon : Merci.

Le Président (M. Provençal)  : Merci. Alors, je remercie l'Ordre des conseillers en ressources humaines agréés pour leur contribution.

Et je suspends les travaux quelques instants afin de permettre au prochain groupe de prendre place. Merci beaucoup.

(Suspension de la séance à 17 h 41)

(Reprise à 17 h 43)

Le Président (M. Provençal)  : Je souhaite maintenant la bienvenue aux représentants de Québec International. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé, après quoi nous procéderons à la période d'échange avec les membres de la commission. Je vous invite à vous présenter et à commencer votre exposé. À vous la parole.

Québec International

M. Viel (Carl) : Merci. Bonjour, mon nom est Carl Viel, président-directeur général de Québec International. Bonjour à vous tous et merci de nous permettre d'échanger avec vous aujourd'hui. Je vous présente mes collègues qui m'accompagnent : à ma droite, et à votre gauche, Mme Sara Tapia, directrice, Mobilité internationale, et M. Geoffroy Tremblay, conseiller d'attraction, Étudiants internationaux.

Québec International est l'agence de développement économique pour la grande région de Québec. Depuis 10 ans, notre impact économique lié à nos initiatives en attraction de talents a connu une croissance constante. En 2018, l'obtention d'une aide financière supplémentaire du ministère de l'Immigration, de la Diversité et de l'Inclusion a permis à Québec International de doubler ses actions et à plus que doubler ses impacts au niveau du recrutement international.

L'organisation est passée de 492 recrutements annuels en 2017 à 11 007 recrutements en 2018, ayant pour résultante l'accueil de 2 700 nouveaux arrivants, d'accompagner 427 entreprises distinctes, de recevoir plus de 2,2 millions de visites sur notre site, Québec en tête, de mettre en place des missions de corecrutement entre entreprises et institutions scolaires et de retenir 144 candidatures d'étudiants pour des programmes débutant en janvier 2020, de déployer plus de 68 activités pour la rétention des étudiants et de rejoindre plus de 2 000 étudiants internationaux.

Depuis plus de 10 ans, l'enjeu relié à la disponibilité de main-d'oeuvre est le défi le plus important rencontré par les entreprises. Le besoin de main-d'oeuvre est demeuré bien ancré dans la réalité des entreprises de la région, alors que le taux de chômage s'est fixé à 3,8 % en 2018, et qu'il a atteint 2,3 % en juillet dernier, et que la région a connu une croissance constante dans la création d'emplois. À titre d'exemple, en 2017, c'est près de 10 000 nouveaux emplois qui ont été créés dans la région.

Nous saluons la démarche actuelle de consultation du ministère de l'Immigration, de la Diversité et de l'Inclusion. Nous rejoignons la volonté gouvernementale afin que les immigrants sélectionnés correspondent davantage aux besoins de main-d'oeuvre. L'ensemble des actions de Québec International est actuellement basé sur le même principe.

Notre région, de par sa taille, n'attire pas spontanément comme les grandes métropoles. Nos concurrents ont des moyens beaucoup plus élevés que les nôtres. Les métropoles, incluant Montréal, sont connues et sont attractives. Comment une région comme la nôtre peut-elle attirer et tirer son épingle du jeu? Nous croyons fortement que l'emploi est le meilleur angle d'attraction, de rétention, mais également l'élément principal d'une intégration durable. Nous avons identifié 10 recommandations que nous allons partager avec vous. Pour votre information, elles ne seront pas nécessairement présentées dans le même ordre que dans notre mémoire.

Premièrement, nous recommandons de maximiser les seuils en fonction d'assurer la meilleure adéquation avec le marché du travail tout en tenant compte des éléments suivants : augmenter la proportion d'immigrants économiques dans le seuil établi; assurer une place pour les démarches du PEQ-Travailleur et tenir compte de l'intensification des actions de recrutement international; assurer une place pour les demandes générées par le portail Arrima; assurer une place pour les demandes émanant d'un potentiel projet du style Canada atlantique — si on se fie à ce projet en Atlantique, c'est environ 3 000 demandes par année; voir à la mise en place d'outils de mesure du marché du travail afin de faire évoluer les seuils en fonction des besoins; s'assurer de maintenir l'équilibre délicat entre le seuil établi et l'adéquation avec les besoins des employeurs du Québec.

Nous avons su démontrer l'an dernier que, si nous avons l'appui financier pour réaliser davantage d'actions, les impacts se concrétisent très rapidement. Nous demandons donc au ministère d'augmenter l'appui accordé à Québec International pour soutenir l'intensification et accélérer les actions de recrutement international de travailleurs qualifiés et d'étudiants internationaux.

Un projet de collaboration avec le MIDI pourrait être déposé conjointement avec différents organismes déjà impliqués dans le recrutement international. Les actions concertées des organismes serviront de base solide pour le déploiement des efforts de recrutement à plus grand impact. L'ensemble des actions se feront en collaboration avec le MIDI et impliqueront les conseillers aux entreprises régionaux du MIDI et du MTESS.

Nous considérons également que les efforts de mutualisation en recrutement international au niveau local doivent être appuyés et valorisés par le gouvernement du Québec. Par conséquent, cela implique que des initiatives régionales puissent avoir lieu en parallèle aux initiatives globales et accessibles à toutes les régions du Québec. Les équipes régionales du MIDI seraient alors dédiées en complémentarité à l'offre de services régionale déjà accessible pour accompagner l'entreprise locale dans ses démarches d'immigration reliées au recrutement international.

• (17 h 50) •

Mme Tapia (Sara) : Nous considérons que l'ensemble des actions qui sont déployées par le MIDI ou par les organismes de développement économique doivent être accessibles pour toutes les entreprises, peu importe leur provenance. Le ministère de l'Immigration, de la Diversité et de l'Inclusion devrait mettre en place un calendrier des actions de recrutement offertes par les organismes de développement économique pour permettre une meilleure communication de l'information et une accessibilité à l'ensemble du Québec.

Comme organisation, nous désirons appuyer et soutenir les actions et le déploiement d'initiatives exploratoires et de recrutement international sur des territoires inexplorés par l'équipe en recrutement international du MIDI appuyées par les représentants du ministère déployés à l'étranger. La prospection du ministère permettra ainsi d'établir sur ces territoires des ententes de collaboration avec les services publics et les gouvernements locaux, de tester par des missions pilotes le potentiel de ces nouveaux territoires et de valider les réseaux de diffusion. Le ministère créera ainsi les corridors d'action à valeur ajoutée permettant de diversifier les bassins et favorisant ainsi une meilleure adéquation avec le marché du travail.

Nous considérons également que le MIDI doit développer la proximité terrain dans les régions du Québec non actuellement desservies et favoriser la mise en place d'une offre d'accompagnement en recrutement international pour ces entreprises avant, pendant et après une mission de recrutement. Une entreprise devrait pouvoir recevoir le standard d'intervention, peu importe où elle est située sur la province du Québec. 85 % des postes à pourvoir dans les prochaines années seront des postes hors de l'île de Montréal. Nous croyons que le MIDI devrait soutenir spécifiquement les initiatives en fonction des besoins du marché du travail avec une prérogative pour soutenir l'attraction hors métropole et la rétention en région.

Nous considérons que le système Arrima devrait donner priorité aux offres d'emploi hors la région métropolitaine de Montréal. Le principal enjeu demeure actuellement les délais de traitement des dossiers. La mise en place d'un projet pilote similaire au programme d'immigration Canada atlantique permettrait, pour un nombre de dossiers — environ 3 000 — de bénéficier d'un délai de traitement garanti de six mois et soutiendrait efficacement les régions hors métropole en leur donnant un avantage.

M. Tremblay (Geoffroy) : Nous trouvons pertinent le Programme de l'expérience québécoise pour les étudiants internationaux, puisque celui-ci est un atout considérable pour obtenir ici les candidats internationaux. Toutefois, comme nos efforts visent à attirer des étudiants dans des formations en déficit de travailleurs québécois, nous estimons que l'étudiant qui fera un choix en correspondance avec les besoins du marché du travail réussira à se trouver un emploi avec son permis de travail postdiplôme pour ensuite, après un an sur le marché du travail, bifurquer vers la résidence permanente en utilisant le Programme de l'expérience québécoise pour travailleurs.

Nous mettons d'ores et déjà des actions d'attraction et de rétention d'étudiants internationaux, en collaboration avec des entreprises de la région, afin de faciliter leur intégration sur le marché du travail avant, pendant et après leurs études. Notre objectif est d'éviter de créer un bassin de nouveaux diplômés sans emploi ou qui occupent des postes ne correspondant pas à leur profil académique.

Considérant le moratoire sur le Programme de l'expérience québécoise pour les étudiants, nous suggérons au MIDI de mettre en place une campagne de promotion valorisant l'ensemble de l'offre éducative au niveau professionnel, collégial et universitaire permettant l'accès au permis de travail postdiplôme et au PEQ-Tavailleur afin de valoriser ce parcours comme une réussite d'intégration sur le marché du travail. Nous valorisons ainsi le fait que le Québec, par le recrutement des travailleurs ou par le recrutement d'étudiants, vise en priorité l'adéquation avec les besoins du marché du travail.

M. Viel (Carl) : En conclusion, nous désirons également interpeler le gouvernement du Québec non pas comme partenaire et collaborateur dans le défi de la main-d'oeuvre, mais comme employeur. Notre région est le siège social du gouvernement. Comme capitale nationale, nous sommes aussi préoccupés par le fait que le gouvernement vivra également, à court et à moyen terme, des difficultés de recrutement.

La fonction publique québécoise est le plus gros employeur au Québec. Nous désirons collaborer avec le gouvernement afin de trouver conjointement des solutions et le soutenir dans le déploiement d'initiatives lui permettant de répondre efficacement aux défis auxquels il fera face de façon plus ou moins long terme. Notre objectif est d'assurer le maintien des emplois à valeur ajoutée de la fonction publique dans notre région.

Nous suggérons la mise en place d'une table de réflexion sur les emplois de la fonction publique dans la capitale nationale afin de trouver des pistes de solution de la rareté de main-d'oeuvre qui servira également le gouvernement du Québec, permettant ainsi de maintenir une présence forte des ministères dans notre région.

Et, en terminant, j'aimerais nous lancer un défi à nous tous, c'est-à-dire : travaillons tous ensemble afin de réussir la région de Québec, réussir Québec. Merci.

Le Président (M. Provençal)  : Je vous remercie pour votre exposé. Nous allons maintenant débuter la période de ce dernier bloc d'échange. M. le ministre, je vous cède la parole.

M. Jolin-Barrette : Merci, M. le Président. M. Viel, Mme Tapia, M. Tremblay, bonjour. Merci d'être présents en commission parlementaire.

Il y a quelque chose que je trouve intéressant dans votre mémoire relativement au calendrier des actions. Pouvez-vous nous expliquer ce que vous entendez par le calendrier de recrutement, puis comment vous voyez ça, puis surtout pourquoi?

M. Viel (Carl) : Bien, je pense qu'il y a... on le reconnaît tous, c'est une des choses qui a été mentionnée que vous voulez mettre de l'avant, c'est une meilleure collaboration et un meilleur travail tous ensemble afin, en bout de ligne, de mieux recruter. Si on est capables de mieux partager les actions qui sont faites ensemble de part et d'autre, qu'elles soient s'organiser chez nous, au gouvernement ou par d'autres... des organismes, on peut faire une meilleure planification du calendrier, des efforts. On peut aussi mieux travailler sur différents territoires. On s'assure aussi que la coordination va assurer, justement, un meilleur déploiement des actions, qu'elles soient...

On peut prendre un exemple. Sur Paris, bien, je pense que c'est tout à fait logique et compréhensible que, globalement, l'ensemble du Québec, on devrait aller à Paris la semaine prochaine et non Québec... je parle de, mettons, la ville de Québec cette semaine, Montréal dans deux semaines, et ainsi de suite. Donc, en s'assurant, justement, de partager les calendriers et de mettre tout ça ensemble, on va s'assurer qu'on travaille ensemble, on va s'assurer qu'on a une force de frappe plus grande. On le voit lorsqu'on se déplace, par exemple, lors des journées Québec, c'est l'ensemble du Québec qui est présent. On démontre globalement l'ensemble des opportunités qui sont disponibles sur le territoire québécois et, en même temps, on partage entre nous et aussi avec les acteurs de l'État les meilleures pratiques, et ensemble on met en... des choses qui sont plus durables, et, en bon québécois, on maximise notre investissement.

M. Jolin-Barrette : Là, actuellement, vu qu'il n'y a pas de calendrier, est-ce que vous diriez qu'on se nuit en fonctionnant de cette façon-là, globalement, là?

M. Viel (Carl) : Je vous dirais que, comme dans n'importe quoi, il y a toujours place à l'amélioration. Je le dis souvent, ça fait plus de 10 ans, chez Québec International, que nous faisons des missions de recrutement. Depuis 10 ans, tout ce qu'on essaie de se faire, c'est de s'améliorer d'une fois à l'autre. Et on a mis en place différents outils et différentes choses qu'on ne faisait pas il y a 10 ans parce qu'on a reçu des commentaires des entreprises, on a reçu des commentaires des participants. Donc, on a amélioré, depuis 10 ans, la façon de faire, et aussi avec les différents partenaires. Et on doit quand même constater que, sur certains territoires, ça arrive qu'il y a des organisations qui vont se présenter à des échéances un peu courtes entre une et l'autre, et je ne suis pas certain que, dans certains pays ou certaines villes, il y a une capacité de recevoir, à toutes... je vais exagérer, mais, à toutes les deux semaines, différentes villes. Donc, de le faire de façon concertée tout le monde ensemble, c'est certain qu'on va avoir des résultats plus grands aussi.

M. Jolin-Barrette : Parce que vous, vous êtes des experts, notamment dans le recrutement international. Ce qu'on constate de plus en plus, c'est qu'il y a beaucoup d'entreprises qui vont faire les missions à l'international par eux-mêmes, parfois avec des consultants. Il y en a qui ne sont pas nécessairement préparées à aller à l'international. Vous, vous êtes là pour accompagner les entreprises, vous les fédérez, vous vous assurez... vous avez l'expertise pour organiser tout ça. Là, vous, vous couvrez, actuellement, à Québec, la grande région de Québec aussi...

M. Viel (Carl) : Capitale-Nationale, Chaudière-Appalaches en priorité.

M. Jolin-Barrette : C'est ça, puis vous êtes ouverts à donner un coup de main aux autres régions aussi?

M. Viel (Carl) : Bien, je pense... comme je le mentionnais, on a été les premiers à débuter en 2008. En 2010, de mémoire, Montréal International s'était joint à nous lors d'une mission, par la suite les gens de Sherbrooke, Drummondville. On a partagé — ici, je vais utiliser une expression — notre livre de recettes avec les autres régions. On est déjà en discussion avec d'autres régions qui vont venir avec nous en décembre, et la première chose qu'on leur dit, c'est : Avant de venir avec des entreprises, venez voir comment une mission se déroule, venez comprendre comment le tout se déroule sur la période dans laquelle on est là-bas. Je pense que c'est important de bien comprendre. On doit, par la suite, bien préparer nos entreprises avant d'y aller, on doit les aider pendant qu'elles sont là puis on doit les aider aussi à leur retour pour les aider, justement, à faire les suivis.

Et, comme on l'a dit souvent, on a créé, à travers les années, aussi ce qu'on appelle des groupes de copartage d'entreprises où les gens vont partager leur expérience. Je vais donner deux exemples bien simples. On pourrait avoir deux entreprises qui ont le même type de profil qu'ils recherchent, une entreprise recrute cinq personnes, l'autre n'en recrute pas — c'est important après de savoir pourquoi moi, j'ai été capable de recruter et l'autre pas — ou, dans un autre cas, les deux entreprises ont toutes les deux recruté cinq personnes, et, un an après, une entreprise, les cinq sont encore là, et dans l'autre entreprise, deux ou trois ont quitté. Donc, pourquoi? Qu'est-ce qu'on peut faire pour améliorer ces choses-là? Donc, le partage d'information, le partage des meilleures pratiques d'affaires, c'est quelque chose qui est important. Et, lorsqu'on est sur le terrain, la réalité, elle est différente que, des fois, ce qu'on peut penser lorsqu'on regarde les choses à travers nos oeillères. Donc, je pense que c'est important. Et notre objectif à nous, c'est de continuer à partager notre expertise, et que, globalement, au Québec, on continue à recruter plus, et qu'on récupère... que des entreprises recrutent plus de travailleurs pour répondre à leurs besoins.

M. Jolin-Barrette : Puis vous êtes en contact constant avec différents employeurs. Dans le fond, l'objectif, c'est ça, des missions de recrutement. Vous proposez, dans le fond, dans le mémoire, qu'on maximise dans la fourchette supérieure les seuils en matière d'immigration. Est-ce que, quand vous allez à l'étranger, c'est plus difficile, supposons, de vendre Québec, de vendre Chaudière-Appalaches, supposons, que Montréal? Est-ce que ça requiert des efforts supplémentaires, pratico-pratique, là, sur le terrain?

• (18 heures) •

M. Viel (Carl) : Je vais répondre à votre question sur différents volets. Il y a un élément... Puis là je ne veux pas tomber dans un autre débat qui est hors sujet de qu'est-ce qu'on parle ici, mais je vais prendre un exemple très facile à comprendre. Si, demain matin, je dois partir de Gaspé ou de Québec pour aller à Paris, disons que le tarif pour s'y rendre n'est pas nécessairement le même que si je quitte de Montréal, c'est assez simple à comprendre. Mais, quand on fait une offre globale, on offre le même... le tarif pour participer est le même à travers le Québec. Donc, déjà là, il y a un impact sur le coût, mais on fait un tarif, donc il y a un impact sur le coût de la mission.

Deuxièmement, c'est certain que des villes, que ce soit Montréal, que ce soit Toronto ou d'autres grandes métropoles, ont une plus grande connaissance ou sont plus connues au niveau international que, malheureusement, notre capitale nationale, donc, oui, on doit doubler d'efforts, on doit faire connaître. L'avantage par rapport à Québec, c'est que nous, on est à plus de 70 % des gens qu'on va recruter... bien, pas nous, mais que les entreprises vont recruter. C'est des familles, donc c'est aussi un autre élément de rétention, c'est-à-dire d'avoir des gens qui vont arriver avec leur famille, donc les enfants qui vont débuter l'école, le ou la conjointe qui va aussi débuter à travailler par la suite.

Donc, nos taux de rétention sont très bons, et je pense qu'il est relié à plusieurs facteurs dont, un, l'emploi, deux, l'intégration d'une famille, donc ça joue beaucoup. Et, oui, on doit trouver ou innover pour essayer de se distinguer d'autres régions ou d'une autre région au Québec.

M. Jolin-Barrette : O.K. Je vous remercie pour la présentation de votre mémoire.

M. Viel (Carl) : Merci.

M. Jolin-Barrette : Je sais que j'ai des collègues qui veulent poser des questions.

Le Président (M. Provençal)  : Alors, je cède la parole au député de Maskinongé.

M. Allaire : Merci, M. le Président. Combien de temps il me reste, s'il vous plaît?

Le Président (M. Provençal)  : Huit minutes.

M. Allaire : Parfait. Merci, M. le Président. D'abord, salutations à Mme Tapia, M. Tremblay. M. Viel, je prends le temps de vous féliciter. Je vous ai longuement suivi dans le début de ma carrière, je vous ai même côtoyé dans des formations pour l'investissement d'attraction en investissements étrangers. Vous être un intrapreneur, vous avez toujours su innover à même votre organisation puis vous êtes encore là aujourd'hui. Je salue votre travail.

M. Viel (Carl) : Merci.

M. Allaire : Et je le vois dans votre mémoire, encore vous arrivez avec des idées qui nous challengent, j'adore ça. Entre autres, le calendrier, mon collègue ministre vous a posé des questions, j'avais hâte d'entendre les réponses, et ça me réjouit énormément.

Vous voulez idéalement — en tout cas, ce serait votre souhait — que le gouvernement puisse aller plus loin avec l'embauche de ressources, là, pour accompagner les entreprises, entre autres au niveau du processus avec l'immigration, mais, ce que je comprends, aussi au niveau de la francisation. Ça fait que ce que je comprends, c'est que vous voulez rebâtir ce que mes collègues libéraux ont si gentiment voulu démolir en 2013, là, avec l'abolition, entre autres, des CLD. Vous voulez un peu restructurer cette structure-là, en fait, qui était en place pour accompagner nos entrepreneurs.

M. Viel (Carl) : Je répondrais... Bien, premièrement, merci beaucoup pour vos bons commentaires. Puis, comme je le dis à l'interne, si, dans le travail qu'on fait, on n'innove pas, on recule, puis il faut mettre de l'avant des idées qui vont nous permettre, justement, de continuer d'avancer. Puis je le dis aussi, il faut apprendre. Donc, nous, depuis 10 ans, on apprend. Et, on l'a dit, l'année dernière, c'est près de 450 entreprises différentes avec lesquelles on a travaillé. Donc, l'offre qu'on veut, je ne sais pas si... qu'on veut faire, c'est que, oui, il faut augmenter le nombre de ressources puis, on l'a dit, il faut trouver des façons d'aider, parce que les besoins globaux, on le sait, dans les données qui émanent du gouvernement, sont à l'extérieur de la région de Montréal. Donc, on essaie de trouver des façons de répondre à ces besoins-là en faisant des choses qui vont aider. Puis le défi que je me dis, bien, Québec, c'est une région, il faut réussir Québec. Si on est capables de réussir Québec, on sera capables aussi de réussir les autres régions au Québec aussi.

Donc, en ce moment, on sait que la vaste majorité des gens arrivent dans la région de Montréal, alors qu'est-ce qu'on fait pour, justement, être capables... Dans les grandes régions métropolitaines, si on regarde... Puis, au Québec, la région de Québec, on est 10 %, à peu près, de la population, mais on n'est pas à 10 % dans l'immigration. Donc, on a un travail à faire, nous, comme organisation, et l'ensemble du Québec pour, justement, être capables d'aller chercher au moins notre poids relatif en termes d'immigrants sur notre territoire. Donc, on veut atteindre le 10 % et on voudrait y arriver avec vous en trouvant des solutions qui vont nous permettre, justement, d'atteindre ce 10 % là.

M. Allaire : Et, concrètement, sur le terrain, là, si on pense à des nouvelles ressources, là, qui pourraient nous aider à ce niveau-là, est-ce que c'est des ressources qui seraient employées chez Emploi-Québec ou dans les organismes modulés de développement économique, c'est-à-dire les MRC ou les plus grandes villes?

M. Viel (Carl) : Il y a trois éléments. Le premier élément qui a été mentionné, c'est que, nous, ce qu'on constate, c'est qu'on doit aider les entreprises à devenir, je dirais, capables de voler par elles-mêmes. Donc, notre objectif à nous, c'est d'aider les entreprises d'être capables d'opérer et de faire du recrutement par elles-mêmes. Vous le savez autant que nous que la vaste majorité de nos entreprises au Québec, 80 % et plus des entreprises, c'est des PME, des petites entreprises qui n'ont pas nécessairement des gens aux Ressources humaines ou des processus standard pour aider le recrutement et de faire, par exemple, des missions où on amène les gens dans un processus qui est, je vais dire ça comme ça, un entonnoir entre l'idée «on veut recruter» et «on arrive le 15 décembre prochain à Paris».

On amène les entreprises dans un processus et on voit que, quand on les amène dans un processus d'accompagnement, c'est beaucoup plus facile d'aider les entreprises que, des fois, de faire du recrutement de façon continue. Parce qu'une petite entreprise, la réalité la rattrape à tous les jours. C'est : J'ai une machine qui est arrêtée, j'ai des gens qui ne se présentent pas, j'ai x, j'ai y, z. Donc, on est toujours pris dans notre train-train quotidien. Donc, d'amener les gens dans un processus, par des missions, on les aide. Donc, un, avoir des ressources qui aident les entreprises à devenir les plus indépendantes, d'être capables d'agir par elles-mêmes, c'est important.

Deuxièmement, le partage de l'expertise, que ça soit entre entreprises, entre régions, pour que, globalement, encore une fois, on soit capables d'accueillir le plus de gens possible qui vont répondre aux besoins des entreprises, c'est important.

Le déploiement en région d'effectifs pour aider les entreprises, c'est important. On doit avoir des gens sur le territoire qui vont, justement, aider nos entreprises à être capables de répondre à ces besoins-là.

Et je vais donner un dernier exemple. Il faut toujours penser que quelqu'un qui prend une décision — puis il y a quelqu'un ici, qui est à ma droite, qui l'a fait — de quitter son pays et de venir s'installer ici, c'est une décision de vie — puis il y a d'autres personnes dans la salle aussi qui l'ont fait — c'est une décision de quitter. Moi, partir de Québec puis m'en aller travailler à Montréal, je l'ai fait trois fois dans ma vie. Je pouvais partir la semaine, puis vous le faites, vous autres aussi, certains d'entre vous. On vous revoit, la famille, la fin de semaine.

De partir de Paris puis de s'en venir à Québec, on ne peut pas dire à la famille : On va se revoir à toutes les fins de semaine. On doit amener notre famille à se déplacer. C'est une décision importante que les gens font. Donc, il faut s'assurer qu'en bout de ligne on va les intégrer, on va les accueillir. C'est une décision de vie, et c'est des décisions qui sont réfléchies par les gens. Et moi, ce que je constate, mon n égale un, depuis quelques années, c'est le nombre constant en croissance de gens de l'extérieur qui sont venus ici, qui sont venus visiter, en bien des cas, qui sont venus rester pendant des périodes, souvent la saison estivale, et puis ils font le choix par la suite de venir s'installer ici.

Donc, il faut être capable d'aider ces gens-là à être bien outillés avec, entre autres, des annonces que vous avez faites la semaine dernière, d'un côté, pour les arrivants, et, de l'autre côté, de bien outiller nos entreprises pour être capables de bien accueillir ces gens-là.

C'est des décisions qu'ils ont prises, et je vous donne un dernier exemple que nous, on... j'ai toujours à dit à mes gens : Si, demain matin, on part avec des entreprises à Paris pour recruter des soudeurs, la première chose que je ne veux pas qui arrive, c'est que, lundi prochain, l'entreprise m'appelle et elle me dit : J'ai engagé Carl Viel, mais il ne sait pas souder. La personne est rendue ici, elle a tout vendu. Il faut s'assurer... Donc, nous, on fait passer des tests techniques avec les entreprises pour s'assurer que les besoins que les entreprises ont sont bien répondus. On ne veut pas arriver avec des candidats, des gens qui arrivent ici qui ne répondront pas aux besoins de nos entreprises.

La Présidente (Mme Chassé) : ...bloc d'échange avec le parti formant le gouvernement.

M. Allaire : Merci pour les précisions.

M. Viel (Carl) : Merci.

M. Allaire : Une dernière question. Vous faites des missions à l'étranger, on l'a bien compris. Ultimement, ces missions-là, ce que je comprends, sont prévues pour attirer des nouveaux investissements ici, au Québec, et vous en profitez pour, justement, faire du recrutement en même temps. Est-ce qu'il vous manque des moyens pour être encore plus efficaces?

M. Viel (Carl) : Bien, une des choses qu'on a mises en place il y a déjà quelques années, on a été, jusqu'à tout récemment, les seuls à le faire, il y aura... Montréal va débuter cette année, c'est ce qu'on appelle des missions virtuelles. Donc, au lieu de se déplacer sur le territoire, les gens viennent dans nos locaux pour rencontrer des candidats. On fait la prochaine à la fin septembre, mi-septembre et on a reçu, jusqu'à maintenant, 40 000 C.V. pour combien de postes, Sara?

Mme Tapia (Sara) : Pour plus de 450.

M. Viel (Carl) : 450 postes. Donc, c'est une façon de faire du recrutement sans nécessairement se déplacer. Donc, vous voyez la portée qu'on peut avoir en faisant d'autres types de façons de faire de façon innovante aussi. Et on en parle beaucoup, je disais... dernière chose, je termine là-dessus, mais, juste sur notre site, 2,2 millions de visites sur le site de Québec en tête, ça démontre la force du réseau qu'on a été capables de faire, mais nos gens...

La Présidente (Mme Chassé) : Ça dépasse le temps.

M. Viel (Carl) : Parfait.

La Présidente (Mme Chassé) : Et vous m'expliquerez ce que «n égale un» signifie un peu plus tard.

M. Viel (Carl) : Oui, c'est moi.

Une voix : ...

La Présidente (Mme Chassé) : Oui, oui, je le sais, mais là ça ne me revient pas. Je le... Ah! vraiment désolée.

M. Derraji : ...n égale un, c'est bon, hein?

La Présidente (Mme Chassé) : Bon. Alors, on est en train de gruger sur le temps du parti formant l'opposition officielle.

M. Derraji : Ah! non, non, non. Oh! non, non. Je ne vais pas accepter ça, là, oh non, non.

La Présidente (Mme Chassé) : Ce n'est pas sérieux.

M. Derraji : Jamais, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Chassé) : Jamais.

• (18 h 10) •

M. Derraji : Je vous taquine.

La Présidente (Mme Chassé) : Mais moi aussi.

M. Derraji : Pas pour prendre mon temps, là.

La Présidente (Mme Chassé) : Mais non, pas du tout.

Une voix : ...

Des voix : Ha, ha, ha!

La Présidente (Mme Chassé) : J'aime ça, «n égale un, le député de Nelligan». Wow! Ça, c'est un vite, on aime ça. C'est à vous de prendre la parole. Allez-y.

M. Derraji : Merci, Mme la Présidente. Madame messieurs, bienvenue. Merci pour votre présence. Toujours un plaisir écouter Québec International. Surtout, on vous suit depuis très longtemps. Merci pour votre rayonnement à l'international, faire rayonner la capitale nationale, la grande région de la Capitale-Nationale à l'international. J'ai suivi un peu vos missions. Vous faites du très bon travail, notamment par rapport à la mission virtuelle, où vous avez réussi à avoir... Moi, je l'ai suivie, je recevais vos messages sur LinkedIn, et c'est un bon projet que ça mérite d'être vulgarisé, parce que, si on réussit à avoir 40 000 C.V. pour 400 postes...

Mme Tapia (Sara) : Plus de 450 postes.

M. Derraji : 450? Bien, bravo! Je vous lève... Je vous félicite.

Écoutez, j'aimerais bien vous ramener sur un point que je considère très important, parce que j'ai eu des échanges avec M. le ministre par rapport aux missions et j'ai la même inquiétude que vous. On suit ce qui se passe au Québec, on voit plusieurs régions parfois, juste sur les réseaux sociaux, telle à Paris, l'autre en Tunisie, l'autre au Maroc, l'autre... et, sérieux, moi, je salue votre proposition que ça nous prend un vrai calendrier de missions. Parce que ce qui se rajoute sur la table maintenant, c'est les missions du MIDI, et là le ministère aussi, et ça a été même dit dans le budget, ils veulent aussi commencer à faire des missions. Moi, ma crainte et ma préoccupation, c'est, au bout de la ligne, vous le savez — et là je vais revenir à ça par la suite — on se bat pour des seuils que vous connaissez très bien, 40 000, est-ce que ça mérite tant de missions à l'international?

M. Viel (Carl) : Bien, nous, c'est une question qu'on s'est posée lorsqu'on a préparé notre mémoire. On a regardé... Il y a deux façons dont on peut regarder la chose. On peut, on pourrait dire, garder le même nombre de missions, mais comment on augmente le nombre d'entreprises si on veut arriver à des chiffres... que ça soit le seuil actuel ou un seuil plus élevé?

L'autre élément est facilement mathématique, c'est d'augmenter le nombre de missions avec le nombre d'entreprises. En général, ce qu'on voit, c'est qu'une entreprise va recruter à peu près cinq travailleurs lors de missions. Donc, si on regarde ça... Comme je le dis, on peut le regarder sur deux façons : au lieu d'avoir x entreprises, on en a y, et à ce moment-là on va arriver avec un chiffre, ou, de l'autre côté, on augmente le nombre de missions. Du côté du nombre de missions, bien, il faut aussi prendre en considération qu'il y a un travail important logistique qui doit être fait, comme je l'ai dit tout à l'heure, tant en amont, pendant et postmission, c'est-à-dire il faut aider les entreprises après et il faut les préparer correctement.

Et puis j'entendais les gens tout à l'heure, mais on a eu une discussion cet après-midi... On a fait, il y a déjà à peu près 10 ans, une mission de recrutement dans la ville de Namur et on avait mis qu'on recherchait de la main-d'oeuvre, et c'est un terme qui voulait dire autre chose que qu'est-ce qu'on utilise ici, donc ce n'était pas nécessairement le terme à utiliser. Donc, il y a des choses importantes à bien concevoir.

M. Derraji : Je comprends parfaitement, et c'est pour cela que vous excellez dans ce que vous faites.

Moi, ce n'est pas ça, mon sujet, vraiment. Mon sujet, c'est qu'on voit qu'il y a de plus en plus de partenaires qui aimeraient tous aller à l'international, et on comprend le pourquoi. Et, probablement, l'enjeu, il est... tout est louable parce qu'on veut juste aller chercher la main-d'oeuvre qualifiée. La problématique que j'ai... Vous, vous aimez beaucoup les chiffres et les paramètres. Vous avez un paramètre qui n'est pas du tout contrôlable, le MIDI qui veut commencer à faire des missions aussi d'une manière imposante à l'échelle internationale, et vous avez l'autre paramètre, et c'est les seuils. Vous ne pensez pas que les seuils d'un côté, le MIDI de l'autre côté... et continuer à espérer répondre aux besoins des PME de la grande région de Québec?

M. Viel (Carl) : Premièrement, il faut travailler sur une collaboration pour s'assurer que, encore une fois, on ne va pas se piler les pieds. Ça, c'est le premier élément. Le deuxième, je regarde, jusqu'à maintenant, le ministère a fait une seule mission qui a été organisée par le ministère du MIDI à laquelle Montréal, Drummondville et nous avons participé, où, je dirais, à peu près l'ensemble des entreprises qui ont fait partie de cette délégation-là venaient d'un des trois partenaires que je viens de vous mentionner. Donc, c'est certain que d'une... je devrais dire, en ce moment, la réalité d'être près des entreprises, les organismes que je vous mentionne sont souvent ceux qui sont le plus près pour, justement, aider au recrutement des entreprises.

M. Derraji : Oui, excellent. Dans la page 12 de votre mémoire, entre 2008 et 2018, vous êtes passés de 200 travailleurs recrutés à 1 200 en 2018. C'est quand même intéressant comme courbe de croissance. Ce qui est beaucoup plus intéressant, c'est... entre 2017 et 2018, là on voit vraiment un... presque fois trois...

M. Viel (Carl) : Une croissance, oui.

M. Derraji : ...une croissance énorme de 400 presque à 1 200. C'est quoi, les raisons?

M. Viel (Carl) : Les raisons sont assez simples. Un, on a obtenu des montants pour être capables d'accroître le nombre d'activités qu'on a faites. On a doublé le nombre d'interventions qu'on a faites, soit les missions de recrutement, les missions de sensibilisation, de promotion sur différents territoires. On a aussi commencé à investiguer des nouveaux territoires sur lesquels on pourrait faire des missions, et l'«output», c'est justement la préparation, la présence d'entreprises avec nous et puis, justement, le fait qu'on ait été capables, à partir des dollars qu'on a reçus, d'augmenter le nombre de personnes qu'on a. Et deux éléments qu'on a mis en place aussi maintenant, c'est qu'on a des gens qui sont attitrés à temps plein sur la rétention des conjoints, conjointes, qui est aussi un élément important pour s'assurer, justement, que les gens vont demeurer.

M. Derraji : Donc, vous avez mis en place tout un écosystème très complet et vision 360. Mais, je dirais, l'élément, et corrigez-moi si je me trompe, c'est vraiment le contexte économique. C'est que, s'il n'y a pas de demandes de PME, s'il n'y a pas une demande de la grande région de la Capitale-Nationale, Chaudière-Appalaches, je ne pense pas que vous allez avoir, je dirais, cette opportunité d'aller chercher ces travailleurs.

M. Viel (Carl) : Bien, je veux dire, s'il n'y a pas d'entreprise qui veut recruter, c'est certain qu'on n'aura pas de résultat. Mais, globalement, vous le savez, avec le taux de chômage, là, qui est rendu à 2,3 % sur le territoire de la Capitale-Nationale, les besoins sont criants dans tous les secteurs. Donc, le nombre d'entreprises qui veulent participer... Vous le savez aussi, la ville de Québec a fait son rendez-vous annuel avec la communauté des affaires...

M. Derraji : Oui, j'étais là.

M. Viel (Carl) : ...il y avait plus de 300 personnes, le besoin, il est là. La ville a exprimé... on l'a mis en annexe, les recommandations de la ville aussi. Donc, pour nous, c'est un problème qu'on voit depuis plus de 10 ans et c'est un problème que les gens nous disent qu'on voyait qui allait venir, qui allait apparaître dans les années à venir. On a un faible taux de natalité, on a une population vieillissante, etc., donc on savait, on aurait dû déjà prévoir qu'on allait faire face à cette problématique-là.

M. Derraji : Oui, ce qui me ramène à ma prochaine question. Vous avez sûrement suivi un peu les débats dans notre commission?

M. Viel (Carl) : Oui.

M. Derraji : L'ensemble des représentants des entreprises, que ce soient les chambres de commerce, que ce soit le patronat, vraiment, la plupart des groupes qui parlent au nom des entreprises, Olymel, rien qu'Olymel ce matin, l'Association des restaurateurs, les concessionnaires ce matin, tous, unanimement, disaient à votre place que 40 000, ça ne tient pas la route et ils proposaient 60 000, alors que vous, dans la page 20, et corrigez-moi si je me trompe, vous êtes presque en accord avec la proposition du gouvernement, corrigez-moi, quelque chose, parce que je n'arrive pas à comprendre. Vous représentez des entreprises pour aller les aider à ramener de la main-d'oeuvre. Vous, vous travaillez avec des entreprises, vous travaillez avec des PME. Vous avez entendu tous... tous les groupes patronaux disaient une chose, mais, quand je vois votre accord avec la proposition du ministre, il y a quelque chose que je n'ai pas compris. Mais pouvez-vous juste m'éclairer?

M. Viel (Carl) : Oui, bien, premièrement, je n'ai pas d'expertise, tant à l'interne que moi, d'arriver et de trouver quel serait le chiffre qui serait approprié pour répondre aux besoins du Québec. L'élément sur lequel on est conscients et sur lequel, nous, on dit qu'on veut travailler en ce moment, c'est que la région de Québec, on n'atteint pas notre seuil d'à peu près 10 % de la population en immigration. Donc, on veut travailler afin d'arriver à un chiffre qui représente notre poids relatif en termes d'immigrants, ça, c'est un élément. Et le deuxième qu'on constate aussi, c'est qu'on doit trouver des solutions afin de répondre aux besoins des régions. Pour répondre aux besoins qui sont importants, on a, si on regarde Capitale-Nationale et Chaudière-Appalaches, à peu près 20 000 postes vacants, donc sur une période... dans le futur, donc il faut trouver des solutions. Et on dit qu'on doit... on propose de faire des choses qui vont répondre, justement, aux besoins des régions.

• (18 h 20) •

M. Derraji : Moi, j'achète ce discours. C'est juste, quand je lis ça, «nous sommes en accord avec les orientations proposées pour que les seuils d'immigration soient augmentés progressivement afin d'atteindre les seuils antérieurs d'immigration», pour moi, le message que je reçois... parce que ça ne répond pas vraiment à la réalité, le plein-emploi du Québec. 20 000 postes, demain, moi, j'en suis sûr et certain que le téléphone n'arrête pas de sonner, avec le succès que vous avez. Mais malheureusement, si on continue dans cette direction, vous ne pouvez pas remplir le mandat parce que les seuils sont déjà limités. 43 000, là...

M. Viel (Carl) : Bien, la façon dont on répond en ce moment, c'est sur les permis, sur le temporaire. C'est la façon dont on répond aux besoins des entreprises en ce moment.

M. Derraji : Mais par rapport... Donc, vous êtes en train de dire que le temporaire devient un by-pass au système?

M. Viel (Carl) : Je ne dis pas que c'est la façon, c'est une des façons qu'on peut aller, justement, pour recruter, comme les programmes d'expérience Canada qui nous permettent, avec différentes catégories, de recruter des gens en dedans de 10 jours aussi.

La Présidente (Mme Chassé) : On approche de la conclusion du bloc.

M. Derraji : Donc, vous, vous êtes très à l'aise, malgré le contexte de la pénurie, que le gouvernement poursuit avec 40 000, 43 000, malgré que toutes les associations patronales disent le contraire?

M. Viel (Carl) : La seule chose que je dois répondre, c'est que je ne suis pas habileté à fixer est-ce que c'est que 40 000, c'est 50 000.

M. Derraji : Mais vous vous êtes basé sur quoi pour confirmer que le ministère a raison?

M. Viel (Carl) : Bien, en ce moment, il faut être capables d'intégrer les gens puis d'être capables d'arriver à ça. Et, comme je le dis, par le volet des travailleurs temporaires, on réussit à attirer des gens qui viennent répondre aux besoins. Ces gens-là, par la suite, vont bifurquer vers le temps plein, oui.

M. Derraji : O.K., merci.

La Présidente (Mme Chassé) : Ça complète.

M. Viel (Carl) : Le permanent, plutôt.

La Présidente (Mme Chassé) : Très bien, merci. Nous passons maintenant au porte-parole du deuxième groupe d'opposition, le député de Laurier-Dorion. Allez-y.

M. Fontecilla : Merci, madame messieurs, beaucoup de choses à voir avec vous, mais... Écoutez, vous faites une proposition assez, comment dire, révolutionnaire où, potentiellement, ça peut susciter beaucoup de débats, là, c'est donner aux régions la priorité dans Arrima. Comment ça peut fonctionner, ça?

M. Viel (Carl) : Bien, si vous regardez, en ce moment, l'expérience qu'on a vue, qui a été mise en place par le gouvernement canadien, au niveau de la région de l'Atlantique, le gouvernement canadien a mis de l'avant un projet pilote pour une région qui est quatre provinces sur 10, à laquelle on leur a donné une priorité. Donc, on leur a permis, justement, d'avoir un processus, si je peux me permettre, accéléré du traitement des demandes. Donc, la région de... bien, les régions de l'Atlantique, où les quatre provinces font face, elles aussi, à des problèmes importants, ont réussi à obtenir un projet pilote. Donc, ce qu'on vous présente, c'est de voir est-ce qu'on ne pourrait pas aussi prendre un risque au Québec et dire qu'est-ce qu'on fait. On est conscients que 80 % des besoins qui viennent du gouvernement sont à l'extérieur de la grande région de Montréal, donc est-ce qu'on ne pourrait pas mettre de l'avant un projet pour, justement, permettre aux régions à l'extérieur de Montréal de pouvoir recruter plus rapidement et de les aider, justement, à combler leurs besoins?

M. Fontecilla : Donc, ça peut être que, dans le nombre total des personnes admises au Québec, il y a un pourcentage correspondant aux emplois vacants qui s'en va à différentes régions, etc.

M. Viel (Carl) : Exact. Ça peut être différent de... Nous, ce qu'on met de l'avant, c'est une proposition qui est à discussion. On aimerait pouvoir en discuter et échanger avec le ministère par la suite. Oui, on est conscients... puis j'ai eu des conversations avec mes collègues d'une autre région la semaine dernière, parce qu'on a partagé nos choses, mais on fait face à des défis puis on veut attirer des gens dans nos régions. Donc, c'est une des solutions qu'on propose pour faire face aux besoins des autres régions à l'extérieur de la grande région de Montréal, quand on sait que la vaste majorité des gens, en ce moment, arrivent à Montréal et que, des fois, on a plus de difficultés pour être capables, par la suite, de les amener vers d'autres régions du Québec.

M. Fontecilla : Il y a l'idée, à terme, d'ici quelque temps, d'intégrer le PEQ, Programme de l'expérience québécoise, à Arrima. Est-ce que vous seriez d'accord avec cette idée-là?

M. Tremblay (Geoffroy) : Au niveau du PEQ-Étudiant, vous parlez?

M. Fontecilla : En général et y compris le PEQ-Étudiant.

M. Tremblay (Geoffroy) : Bien, au niveau du PEQ-Étudiant, notre position en tant qu'agent de développement économique, c'est de créer une adéquation, le plus possible, entre les études et le marché du travail.

Actuellement, ce qu'on voit, c'est qu'au niveau des options qui s'offrent à l'ensemble du réseau, on intègre tout ce qui est niveau postsecondaire au niveau formation professionnelle, collégiale, universitaire. C'est l'avenue par le postdiplôme, c'est-à-dire que c'est la voie uniforme, qui uniformise l'accès au marché du travail. Parce qu'actuellement le programme tel qu'il est présenté, qui est une belle carte aussi de rétention pour nos étudiants qui choisissent le Québec, par contre, n'inclut pas tous les types de programmes. Et actuellement ce qu'on voit, c'est que, sur le marché du travail, surtout, on va dire...

La Présidente (Mme Chassé) : En conclusion.

M. Tremblay (Geoffroy) : ...au niveau de certaines formations, il y a des enjeux... il y a des programmes qui sont vides, qui n'ont pas d'étudiants internationaux ni d'étudiants québécois et qui correspondent à des enjeux de main-d'oeuvre sur le marché du travail. Donc, nous, notre...

La Présidente (Mme Chassé) : Ça termine l'échange. Merci. Maintenant, nous passons au parti formant la troisième opposition. Mme la députée de Gaspé, la parole est à vous.

Mme Perry Mélançon : Merci. Bien, bonsoir. Ça me fait plaisir de me retrouver avec vous parce que mes premières connaissances dans le domaine de l'immigration, je les ai puisées chez vous, donc c'est un plaisir de vous voir. Je connais, bon, votre expertise sur le marché international et j'ai eu aussi affaire à certaines délégations, bon, du Québec, les bureaux qui sont à l'étranger et qui font un peu aussi du démarchage, du recrutement. Puis moi, j'ai été en mesure de constater qu'il y avait des failles. Et je ne veux pas vous mettre en mauvaise position, parce que c'est sûr que vous faites affaire avec eux, mais comment est-ce qu'on pourrait améliorer leurs services à l'étranger? Parce que le gouvernement a l'intention de leur donner beaucoup de pouvoirs puis de ramener, en fait, les pouvoirs et la coordination à l'intérieur de son ministère. Donc, comment vous voyez ça? Qu'est-ce qu'on peut faire pour...

M. Viel (Carl) : Bien, il y a différents aspects. Je pense que le premier, c'est un élément de communication. Le deuxième élément, c'est un élément de formation, c'est-à-dire, encore une fois, que ça soit d'un point de vue des entreprises et des gens qui sont là, c'est-à-dire de s'assurer que les gens comprennent comment ça fonctionne. Il y a beaucoup de choses à faire. Puis c'est un processus qui... comme dans bien d'autres affaires, il y a beaucoup d'éléments qui sont à prendre en considération, et il faut aussi comprendre notre réalité.

Puis je vais donner un autre exemple très simpliste, là, mais, lorsqu'on arrive dans certains endroits puis qu'on leur parle qu'on a des quatre et demie, pour certaines personnes, ça ne veut pas nécessairement dire bien, bien des choses quand on vient de différents pays. Donc, là-dessus, il faut s'assurer, justement, qu'il y a une meilleure coordination, un meilleur travail avec les partenaires.

Nous, on fait... que ce soit par le travail de Sara, entre autres, en Amérique du Sud et avec d'autres personnes en Europe, justement, s'assurer qu'on va faire des déplacements, qu'on va bien travailler avec nos partenaires puis qu'ils comprennent notre réalité. Je parle de celle de Québec, mais ça peut être... c'est la même chose pour chez vous, à Gaspé, c'est-à-dire que les gens soient capables de bien comprendre votre réalité et la nôtre et, justement, par la suite, de pouvoir exprimer cette réalité-là auprès des candidats, et non seulement, des fois, d'avoir une réalité qui peut être reflétée peut-être à un endroit sur l'ensemble du territoire.

Donc, c'est un travail aussi, de part et d'autre, d'éducation pour s'assurer que les gens comprennent nos réalités, qu'elles soient celles de Québec, qu'elles soient celles de Gaspé, de Sherbrooke, et etc. Donc, c'est un travail qui est en continu, justement, d'amélioration pour que les gens comprennent les différentes réalités des différentes régions du Québec.

Mme Perry Mélançon : Merci. Pas de temps, j'imagine, hein, je commence à...

La Présidente (Mme Chassé) : Cinq secondes.

Mme Perry Mélançon : Ah! bon, bien, merci.

M. Viel (Carl) : En espagnol.

Des voix : Ha, ha, ha!

18217 17865 La Présidente (Mme Chassé) : Sauf que je vois qu'il y a du temps qui a été gagné, ça fait que je peux autoriser un échange. Là, je donne une certaine liberté. Il y a un échange qui est intéressant. Si vous désirez apporter une conclusion ou...

Mme Perry Mélançon : Bien, on va vous laisser la parole parce que moi, j'arrivais avec une question qui mettait le gouvernement... tu sais, ça fait que je veux dire, je suis...

Une voix : On peut peut-être, de mon côté, pour conclure...

La Présidente (Mme Chassé) : Bien, regardez, là, expliquez-moi rapidement, là. Oui, c'est ça, là.

Une voix : Allez-y, allez-y.

La Présidente (Mme Chassé) : On est curieux. Vas-y, go!

Mme Perry Mélançon : Non, mais je voulais connaître votre opinion par rapport Arrima. Est-ce que vous pensez que ça va vraiment tout régler, dans le fond? Parce qu'on mise beaucoup...

M. Viel (Carl) : (S'exprime en espagnol).

Des voix : Ha, ha, ha!

M. Viel (Carl) : Bien, sérieusement, concernant Arrima, je pense que, nous, en ce moment, le processus, je veux dire, est débuté. Nous, ce qu'on voit en ce moment avec les entreprises, on voit que c'est un travail qui débute, donc c'est certain qu'il va y avoir des ajustements. Puis, comme je l'ai dit plus tôt, on met en place un processus, on met en place des nouveaux outils, la perfection n'est pas de ce monde, donc il faut s'attendre à ce qu'il y aura des choses qui devront être arrimées. Mais il faut que ça soit fait d'une façon constructive pour qu'en bout de ligne on aide le plus de gens possible à arriver chez nous, et que les gens soient bien intégrés, puis qu'on soit capables de les retenir, que ça soit à Québec, à Gaspé ou à Montréal.

La Présidente (Mme Chassé) : C'est très bien. Merci, M. Viel, merci, Mme Tapia, M. Tremblay, pour votre contribution à la commission.

Elle ajourne ses travaux jusqu'à demain, jeudi, 9 h 30, où nous poursuivrons notre mandat. Une excellente soirée à tout le monde.

(Fin de la séance à 18 h 30)

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