(Quatorze heures trois minutes)
La
Présidente (Mme Chassé) :
Bonjour, tout le monde, bon retour. Je constate le quorum, et je déclare
la séance de la Commission des relations avec les citoyens ouverte, et je vous souhaite la bienvenue. Bon
retour de vacances. Je demande à
toutes les personnes, bien sûr, comme à chaque fois, de bien vouloir... à toutes
les personnes de la salle au complet de bien vouloir éteindre la
sonnerie de leurs appareils électroniques.
La commission
est de retour, réunie ici afin de procéder à la consultation générale et aux
auditions publiques sur le cahier de consultation intitulé La
planification de l'immigration au Québec pour la période 2020‑2022.
M. le secrétaire, y a-t-il des remplacements?
Le
Secrétaire : Oui, Mme la Présidente. M. Poulin (Beauce-Sud) est remplacé par M. Provençal (Beauce-Nord); M. Skeete (Sainte-Rose) est
remplacé par M. Allaire (Maskinongé); M. Birnbaum (D'Arcy-McGee) est
remplacé par M. Derraji (Nelligan);
Mme Dorion (Taschereau) est remplacée par M. Fontecilla
(Laurier-Dorion); et M. LeBel (Rimouski) est remplacé par Mme Perry
Mélançon (Gaspé).
La
Présidente (Mme Chassé) : Puisqu'il y a eu un léger retard pour
le début de nos discussions, est-ce qu'il y a un consentement pour
prolonger de trois minutes l'ajournement des travaux? Donc, ça terminerait à
17 h 48.
Des voix : Consentement.
La Présidente (Mme Chassé) :
Très bien. Merci.
Cet
après-midi, nous débuterons par les remarques préliminaires puis nous
entendrons les groupes suivants : la Table de concertation des
organismes au service des personnes réfugiées et immigrantes, en audition
conjointe, Gestion Stuart et Eterna,
ensuite Echelon Gestion de patrimoine, puis Stephane Tajick Consulting, et
enfin M. Samuel Tessier et M. Henri Tousignant.
Remarques préliminaires
J'invite maintenant
le ministre de l'Immigration, de la
Diversité et de l'Inclusion à faire
des remarques préliminaires. M.
le ministre, vous disposez de 7 min 30 s.
M. Simon Jolin-Barrette
M. Jolin-Barrette : Merci, Mme
la Présidente. Chers membres de la commission, mesdames messieurs, nous débutons aujourd'hui l'étape des auditions de la consultation publique sur la planification de l'immigration
au Québec pour la période 2020‑2022.
Durant cet exercice, la population et les acteurs sociaux concernés auront
l'occasion de se prononcer sur les orientations du gouvernement en
matière d'immigration et plus particulièrement sur le nombre des personnes immigrantes, ainsi que la composition de
l'immigration que le Québec souhaite accueillir au cours des trois prochaines
années. Votre participation est
particulièrement importante pour élaborer une planification pluriannuelle qui
contribue de manière significative au développement de la société
québécoise et qui tient compte de ses besoins et de ses spécificités.
L'immigration
est au coeur du développement d'une société comme la nôtre. Pour tirer parti
des compétences et de tous les
talents qui nous viennent d'ailleurs et pour permettre aux personnes
immigrantes de participer pleinement à notre société, le système d'immigration devait être modernisé. Lors du dépôt
du Plan d'immigration du Québec pour l'année 2019, nous avons posé un premier geste en ce sens. Nous
avons temporairement diminué le nombre des personnes immigrantes admises
afin de nous donner les moyens d'améliorer les services de francisation et
d'intégration.
Avec la Loi
visant à accroître la prospérité socio-économique du Québec et à répondre
adéquatement aux besoins du marché du
travail par une intégration réussie des personnes immigrantes, nous avons posé
les principaux fondements de cette réforme qui transformera durablement
le système d'immigration au Québec.
Ensuite, le
budget 2019‑2020 nous a donné les moyens de nos ambitions. Témoignant
ainsi de l'importance qu'accorde
notre gouvernement à la réussite de l'immigration, les crédits du ministère de
l'Immigration ont été augmentés de 146 millions de dollars
annuellement pour les cinq prochaines années, pour un total de
730 millions de dollars.
Nous avons
lancé les premières invitations dans Arrima, ce qui nous permettra de mieux
répondre aux besoins du Québec en
termes de main-d'oeuvre. Nous avons investi une somme supplémentaire de
70 millions de dollars en francisation afin de bonifier les
allocations de participation et d'élargir l'admissibilité à notre offre de
services à toutes les personnes immigrantes.
Nous avons également mis en place un parcours d'accompagnement personnalisé
afin d'offrir un accompagnement adéquat et adapté à chaque personne
immigrante, et ce, tout au long de son processus d'intégration à la société
québécoise.
Les
10 orientations que nous proposons aujourd'hui pour l'immigration
s'inscrivent dans cette vision modernisée. Elles portent sur la composition de l'immigration, sur le nombre de
personnes immigrantes que le gouvernement du Québec souhaite accueillir dans les prochaines années
ainsi que sur les caractéristiques des personnes sélectionnées et admises.
Elles prennent en considération les
différents enjeux soulevés, notamment la politique d'immigration, les besoins
démocratiques et économiques du Québec ainsi que sa capacité d'accueil et
d'intégration.
Puisque le
Québec dispose maintenant des outils pour mieux sélectionner, mieux franciser
et mieux intégrer les personnes
immigrantes, notamment sur le marché du travail, notre première proposition
consiste à rehausser progressivement le
nombre de personnes immigrantes admises au cours des trois prochaines années
pour atteindre 49 500 à 52 500 personnes en 2022. Ensuite, dans le contexte actuel où la
rareté de main-d'oeuvre est présente dans toutes les régions du Québec,
il est souhaitable de maintenir une
proportion élevée d'admissions dans la catégorie de l'immigration économique.
Les personnes admises dans cette
catégorie sont maintenant sélectionnées en fonction des besoins de
main-d'oeuvre du Québec et sont donc bien placées pour répondre
rapidement aux besoins des entreprises québécoises. C'est pourquoi notre
deuxième proposition est de fixer à
65 % la proportion de personnes admises dans cette catégorie. Toujours en
tenant compte de la réalité des
entreprises de toutes les régions du Québec, le gouvernement souhaite miser
davantage sur les travailleurs étrangers temporaires. Nous voulons
favoriser l'établissement durable de ces travailleurs par une immigration, par
la suite, qui sera permanente.
• (14 h 10) •
Comme je l'ai
dit à maintes reprises au cours des derniers mois, le gouvernement veut aussi
privilégier la sélection des
travailleurs qualifiés possédant une formation en demande au Québec ou une
offre d'emploi validée. L'immigration est
l'une des solutions à la pénurie de main-d'oeuvre, mais pour réellement
répondre aux besoins des entreprises, le gouvernement se doit de sélectionner plus rapidement et plus efficacement. Nous croyons qu'il est nécessaire d'accélérer l'arrivée des personnes
immigrantes dans la catégorie de l'immigration économique. Grâce à
l'utilisation d'Arrima, le ministère sera désormais en mesure de rendre une
décision dans un délai de six mois dans le Programme régulier des travailleurs
qualifiés à compter du moment où la demande est complète.
Afin de
répondre à la rareté de main-d'oeuvre, le gouvernement souhaite offrir
également un service de proximité aux
entrepreneurs du Québec. Nous sommes d'avis qu'une intégration réussie passe
nécessairement par la connaissance des codes
socioculturels et éthiques de la société d'accueil. Ainsi, nous souhaitons
favoriser la sélection des personnes immigrantes qui connaissent les
valeurs québécoises exprimées par la Charte des droits et libertés de la personne.
Un autre
facteur clé pour une intégration réussie à la société, au marché de l'emploi
est bien sûr la connaissance de la langue
française. Le gouvernement souhaite donc, au cours des prochaines années,
favoriser et faciliter l'apprentissage du français auprès des personnes immigrantes. Nous avons d'ailleurs élargi
l'accès aux services de francisation gouvernementaux et à l'aide financière à toutes les personnes
immigrantes, sans égard à la date de leur arrivée au Québec, ainsi qu'aux
étudiants et aux travailleurs étrangers
temporaires. Il s'agit d'une mesure importante de près de 70 millions de
dollars de façon à faciliter l'apprentissage du français et le
gouvernement du Québec prend extrêmement au sérieux cette connaissance.
Dans le but
de répondre aux enjeux démographiques du Québec, le gouvernement entend encourager l'immigration permanente de personnes jeunes. Finalement,
le gouvernement du Québec souhaite poursuivre son engagement humanitaire par l'accueil de
personnes réfugiées et d'autres personnes ayant besoin d'une protection internationale.
Nous amorçons
un nouveau chapitre en matière d'immigration au Québec. Nous souhaitons que le Québec devienne une référence mondiale en matière d'immigration. Les
orientations que nous vous proposons dans le cadre de cet exercice de planification
pluriannuelle visent à poursuivre la mise en place d'un système d'immigration
plus moderne, plus humain et plus efficace.
En terminant, j'aimerais remercier les
organisations et les acteurs de la société québécoise qui ont accepté de s'exprimer devant cette commission. Je souhaite à
tous des échanges fructueux et constructifs autour d'un objectif
commun : répondre aux besoins du Québec
et permettre aux personnes immigrantes de contribuer à la hauteur de leurs
compétences au développement et à la
prospérité de la société québécoise. Il est fondamental de réaliser qu'au cours
de la dernière année le gouvernement
du Québec a fait des pas de géant en matière d'immigration. On a décidé de
mettre en place les ressources nécessaires
pour faire en sorte que chaque personne immigrante puisse être intégrée
adéquatement à la société québécoise, notamment en matière de
francisation et de ressources à sa disponibilité. Je vous remercie, Mme la
Présidente.
La
Présidente (Mme Chassé) : Merci, M. le ministre. J'invite
maintenant le porte-parole de l'opposition officielle et député de
Nelligan à faire ses remarques préliminaires pour une durée maximale de cinq
minutes.
M. Monsef Derraji
M. Derraji :
Merci, Mme la Présidente. Chers collègues, bienvenue. Le projet de loi est
passé dans les conditions que vous
savez. C'est le moment maintenant de se pencher sur la vision du gouvernement
en matière d'immigration, une planification que nous espérions en mesure
de répondre adéquatement aux besoins du marché du travail, compte tenu du
contexte économique actuel et de la pénurie de main-d'oeuvre criante partout au
Québec.
Nous aurons
la chance d'écouter attentivement des intervenants clés du marché du travail,
dotés de l'expertise et de la
connaissance de la réalité du terrain nécessaire. C'est avec attention qu'il
faudra les écouter pour saisir l'ampleur de la situation, une situation, Mme la Présidente, que je qualifie d'urgente,
très urgente. Le Conseil du patronat nous a déclaré, la semaine dernière, qu'on ne va pas frapper le mur,
qu'on frappe déjà le mur. L'ensemble des intervenants communautaires,
mais aussi aux représentants des employeurs, directement touchés par ce que ce
que certains appellent crise... je pense notamment
à des regroupements comme la FCCQ, la FCEI, mais je pense aussi à des
entreprises qui exportent en milliards de dollars à l'international et dans les autres
provinces du Québec, qui rapportent en milliards de dollars en revenus de
taxation et de parafiscalité, qui viendront
également nous dire ce qu'ils pensent des orientations dévoilées lors de cette
planification.
Mme la Présidente, parlant de faits concrets, la
réalité est la suivante : selon un sondage réalisé par le FCEI, il y a 116 000 postes vacants présentement au
Québec. Les besoins en main-d'oeuvre atteignent des niveaux record, les
mesures gouvernementales, y compris la
planification de l'immigrant, doivent tenir compte de la réalité actuelle et
régionale. Les décisions qui sont
prises en matière d'immigration ne concernent pas uniquement l'immigration, ils
ont une portée économique indéniable pour les prochaines années.
En parlant de
concret, Mme la Présidente, que dire de ces entreprises qui ne parviennent plus
à honorer leurs contrats et qui,
faute de main-d'oeuvre, sont tenues de fermer boutique des jours de la semaine?
Ne parlons pas de ces
employeurs qui tombent en dépression parce qu'ils ne sont pas capables de partir en vacances ou, pire encore, qui... des
vacances à leurs employés parce qu'ils ne peuvent pas se permettre de
laisser aller en congé.
Que de
pression économique et sociale sur notre économie, Mme la Présidente, c'est préoccupant, voire même très préoccupant. Où est la cohérence entre la volonté du gouvernement de répondre aux besoins du marché du travail et celui de refuser
d'augmenter les seuils d'immigration? C'est de l'incohérence.
Mme la Présidente, ce sont les régions qui écopent maintenant, et je me
demande : Le gouvernement écoute qui? Est-ce qu'il écoute les
régions? Est-ce qu'il écoute les entrepreneurs? Est-ce qu'il écoute les associations patronales? Donc, j'espère, Mme
la Présidente, qu'à la fin de cet
exercice le gouvernement va revoir sa stratégie de la planification de
l'immigration.
Par ailleurs,
des zones d'ombre persistent et soulèvent des questions essentielles. Quand
j'entends le premier ministre du Québec avouer que l'économie sera une de ses priorités
pour la prochaine session, je me demande : Est-ce que l'économie va sans
capital humain? C'est ça, la situation qu'on a et que les entreprises ont devant eux. Il y a
des entreprises, Mme la Présidente,
qui refusent des contrats maintenant parce qu'il n'y a pas le capital humain pour les
accompagner. Ça me rappelle quelqu'un qui espère faire de la pêche, mais en partant
pour aller faire de la pêche dans le lac de son choix, il a oublié de ramener
avec lui sa canne à pêche. C'est exactement la situation que nous avons devant
nous maintenant.
La situation
que nous avons devant nous maintenant, Mme la Présidente, c'est que la
prospérité économique est là, mais
malheureusement il y a des régions qui souffrent. Et ce qu'on voit maintenant,
c'est un gouvernement qui délaisse les régions,
un gouvernement qui n'écoute pas les régions, parce que la pénurie de
main-d'oeuvre, ce n'est plus un rêve, c'est des faits. Donc, le slogan, Mme la Présidente, «en prendre moins pour en
prendre soin» est dépassé. Maintenant, j'invite le gouvernement à écouter attentivement l'ensemble
des intervenants et de reculer sur sa promesse électorale de ne pas
hausser les seuils d'immigration, parce que
ça va de soi, c'est l'intérêt, c'est la vitalité économique et c'est la
vitalité de nos régions. Merci, Mme la Présidente.
La
Présidente (Mme Chassé) : Merci, M. le député de Nelligan.
J'invite maintenant le porte-parole du deuxième groupe d'opposition et
député de Laurier-Dorion à faire ses remarques préliminaires pour une durée
maximale de 1 min 15 s. M. le député.
M. Andrés Fontecilla
M. Fontecilla :
Je vous remercie, Mme la Présidente. Je remercie mes collègues ici présents, M.
le ministre, après un été où est-ce
qu'on se rappelle dans quelles conditions on s'est laissés, l'imposition par
bâillon du projet de loi n° 9 sur l'immigration,
justement, donc avec une très forte opposition. Et nous sommes ici pour un
exercice extrêmement sérieux pour l'ensemble
de la société québécoise et pour son avenir, là. En fait, nous allons étudier
comment... quels sont les volumes, les seuils
d'immigration qui vont faire en sorte d'accepter des dizaines, des dizaines,
des milliers de nouveaux citoyens qui vont
participer au devenir du Québec. Ce n'est pas rien, ça. Ce n'est pas juste une
question de trouver un emploi à court terme dans une entreprise du Québec, là, on est en train de voir combien de
nouveaux citoyens on va intégrer à la société québécoise, là.
Ceci dit,
nous allons critiquer aussi fortement toute notion économiciste, exclusivement
économique de l'immigration à court
terme et nous allons nous préoccuper très attentivement de la question du seuil
de personnes réfugiées et personnes admises en vertu de la réunification
familiale, qui contribuent aussi économiquement et socialement au Québec.
Merci, Mme la Présidente.
La
Présidente (Mme Chassé) : Merci, M. le député de Laurier-Dorion.
Mme la députée de Gaspé, je vous invite à maintenant prendre la parole, vous êtes la porte-parole du troisième
groupe d'opposition, pour faire vos remarques préliminaires pour une
durée maximale de 1 min 15 s.
Mme Méganne Perry Mélançon
Mme Perry
Mélançon : Merci, Mme la Présidente. Donc, je salue tous les collègues
de l'Assemblée nationale et également
tous ceux qui sont présents ici pour nous faire part de leurs préoccupations,
de nous présenter leur mémoire. C'est très apprécié que vous vous soyez
déplacés pour cette activité-là, qui est très importante.
Notre groupe de parlementaires aurait préféré
que ce soit une consultation qui est faite au préalable avec une méthodologie pour en arriver à un seuil
d'immigration sur lequel on peut reposer puis qui prendrait en considération
toutes les mesures qu'on doit mettre en
place pour une intégration réussie des personnes. Alors, c'est
sûr que nous, on était en faveur de donner
ce contrat-là, ce mandat-là à une institution tierce qui arriverait avec des
données scientifiques qui reposent vraiment sur une méthodologie sérieuse. Alors, on a des questionnements par
rapport à la façon que ça a été fait de fixer les seuils. Et puis je crois que c'est bien qu'on puisse avoir
des experts qui viennent nous faire part vraiment de leur travail, ils
sont vraiment dans ce
domaine-là au quotidien. Alors, vraiment, je crois que ce sera très, très
pertinent pour le ministre de s'appuyer sur ces dires-là pour prendre une décision éclairée, là, sur la
planification des seuils d'immigration. Merci, Mme la Présidente.
• (14 h 20) •
La Présidente (Mme Chassé) :
Merci, Mme la députée de Gaspé. Bon retour de votre été. Et merci pour ces
remarques préliminaires à tous.
Auditions
Nous allons
maintenant débuter les auditions. La durée de chacune des auditions est d'une
durée de 45 minutes. Et je
souhaite donc la bienvenue aux représentants de la Table de concertation des
organismes au service des personnes réfugiées et immigrantes. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes
pour votre exposé. À la fin, je vais faire un signe quand il va vous rester à peu près une minute, O.K., un
petit signe de la main comme ça, et après quoi nous procéderons à la
période d'échange avec les membres de la
commission. Je vous invite donc tout d'abord vous présenter puis ensuite à
débuter votre exposé. Bienvenue. Allez-y.
Table de concertation des organismes au service
des personnes réfugiées et immigrantes (TCRI)
Mme Lopez
(Eva) : Eva Lopez,
directrice de l'organisme Intégration communautaire des immigrants,
spécialisé en régionalisation de l'immigration à Thetford Mines, et membre du
conseil d'administration de la TCRI.
Mme Islas (Veronica) : Oui.
Veronica Islas, directrice générale du Carrefour de ressources en interculturel
à Montréal et membre de la TCRI aussi, membre du conseil d'administration de la
TCRI.
Mme Lachance
(Dominique) : Dominique
Lachance, directrice du Centre multiethnique de Québec et également
membre du conseil d'administration de la TCRI.
La Présidente (Mme Chassé) :
Merci. Allez-y.
Mme Islas
(Veronica) : Donc, merci beaucoup de nous accueillir aujourd'hui pour
vous partager nos pensées. En fait,
qui sommes-nous? En fait, la Table de concertation des organismes au service
des personnes réfugiées et immigrantes regroupe 150 organismes
communautaires qui interviennent auprès des familles réfugiées, immigrantes et
sans statut à travers le Québec. Cette année, on fête 40 ans d'expertise
par rapport à la question d'inclusion, intégration.
On pourrait
vous dire qu'on est un peu préoccupés par rapport à la politique proposée,
parce qu'il y a une tendance à voir
les immigrants comme... de voir l'immigration économique comme étant la seule
chose qui est importante concernant l'immigration.
On oublie qu'on parle aussi de personnes à travers tout cela. On voit qu'il y a
des changements majeurs dans les
orientations, que la vision de l'immigration est un peu simpliste, et ça
pourrait précariser les personnes. Et aussi on se préoccupe par rapport à l'impact que cela pourra
avoir sur les familles et sur les femmes, parce que, dans le cadre de la
politique globale, il n'y a pas une analyse différenciée selon les sexes.
Donc, en
fait, les organismes membres de la TCRI qui travaillent auprès des personnes
réfugiées, immigrantes et sans statut...
s'est dotée d'une vision de l'intégration des nouveaux arrivants qui sert de
cadre de référence à nos pratiques. Et
entre autres nous, on considère l'intégration comme un processus complexe,
puisqu'on parle des humains. Donc, c'est multidimensionnel par rapport à la question linguistique, économique,
sociale, culturelle, politique, religieuse. Il est bidirectionnel parce que cela engage la personne réfugiée et
immigrante et sa famille, mais aussi les membres et les institutions de la
société d'accueil. Ça, c'est tout à fait
pertinent en ce moment avec toute la question de l'interculturalisme dont on
est en train de discuter dans les
médias. C'est un processus qui est graduel, soit étape par étape. Il n'y a pas
une question de pensée magique. Il
est continu, c'est un processus qui n'est jamais terminé. Il est individuel
parce que ça va selon le rythme et l'histoire de chaque personne et
aussi de l'ensemble de sa famille, et il est encadré autant par le sociétal et
le familial.
L'intégration est un processus complexe dont les
indicateurs sont objectifs et aussi subjectifs. Si on parle des indicateurs objectifs, on pourrait parler de
l'accessibilité aux services, avoir accès aux mêmes services, bénéficier des
mêmes droits que l'ensemble des citoyennes,
citoyens, la compétence linguistique, communiquer et travailler en français,
qui est notre langue commune, l'accès
à l'emploi, qui est d'obtenir et effectuer un travail de qualité en lien avec
ses compétences et basé sur les
principes de reconnaissance des acquis, et la participation citoyenne, qui est
de s'impliquer en tant que citoyennes et citoyens à part entière.
Et les
indicateurs subjectifs, qui sont l'autonomie — là, on parle de valeurs de la société
québécoise — donc,
en référence à la notion d'«empowerment», renforcement des capacités
individuelles, la reconnaissance, en référence au sentiment d'être accepté et
reconnu par la société d'accueil, et le sentiment d'appartenance, en référence
au sentiment d'inclusion et d'appartenance à
la société d'accueil, ce qui fait en sorte que les personnes décident de rester
au Québec et pas de partir ailleurs.
Donc,
on va plonger tout de suite dans nos recommandations pour pouvoir répondre à
vos questions, si cela vous va. Donc,
notre première recommandation est : «Le gouvernement devra rester vigilant
quant aux impacts du nouveau système Arrima
qui pourraient être dommageables tant pour les immigrants que pour les
employeurs et la société d'accueil. Dans le contexte de pénurie de main-d'oeuvre, la meilleure façon d'attirer et de
retenir la main-d'oeuvre réside dans le fait d'améliorer les conditions de travail offertes. Tous les
acteurs doivent être impliqués, [soit] acteurs patronaux, syndicaux et gouvernementaux, et
prendre leurs responsabilités. L'immigration peut faire partie de la solution,
mais n'est pas l'unique réponse à cet
enjeu sociétal. L'immigration ne doit pas être instrumentalisée pour tenter de
répondre à des besoins économiques.»
La
deuxième recommandation : «Étant donné le nombre de personnes issues de
l'immigration sans emploi et avec la venue
d'immigrants détenant une formation en demande, il est plus que nécessaire pour
le Québec d'offrir à ces personnes compétentes
formées à l'étranger les conditions d'une intégration sur le marché de l'emploi
dans des emplois à la hauteur de leurs qualifications, ce qui implique
de s'attaquer aux obstacles systémiques à l'oeuvre.»
Mme Lachance (Dominique) : La recommandation n° 3,
c'est que, dans une optique où le gouvernement ouvrira de plus en plus l'entrée aux travailleurs
temporaires et aimerait garder les résidents temporaires afin de combler, on
l'a dit, à la pénurie de main-d'oeuvre, nous
croyons qu'il devient primordial de pouvoir les desservir dans les services
d'aide à l'emploi, et ce, avant même
qu'ils obtiennent la résidence permanente. Cela les informerait davantage sur
les marchés du travail au Québec
ainsi que sur leurs droits et responsabilités, évitant ainsi plusieurs écueils.
Donc, nous croyons important d'associer
d'autres ministères, notamment le ministère de l'Emploi, etc., pour s'assurer
qu'on a une intégration à la même vitesse mais pas à deux vitesses.
Mme Lopez (Eva) : Dans la recommandation n° 4, on recommande... on appuie amplement la
recommandation du CCPI, qui propose une
égalité de services, de services égaux pour tous les immigrants sans tenir
compte de leur statut. Toutes les
personnes qui demeurent au Québec, ils devraient être servis avec les mêmes
bénéfices et les mêmes réponses à leurs besoins.
Dans
la recommandation n° 5, on parle aussi d'impliquer le ministère
d'Occupation du territoire, impliquer tous les ministères, tous les acteurs, parce que, quand on parle de
régionalisation de l'immigration, on ne voit pas nécessairement la présence du ministère des Affaires municipales, de
l'Occupation du territoire, et cela les concerne. On pense aussi qu'il
faut outiller les régions, parce qu'on peut
avoir beaucoup d'ambition par rapport à la régionalisation, mais est-ce que
nous avons les moyens pour pouvoir répondre à une régionalisation
responsable? C'est ça qui est important.
• (14 h 30) •
Mme
Lachance (Dominique) : Recommandation n° 6,
une recommandation qui nous tient à coeur — et on a entendu que certains aussi : «Nous sommes
convaincus que réduire le nombre de réfugiés pris en charge par l'État [...]
est contre-productif — donc n'est pas une bonne solution. Nous
sommes d'avis que le Québec doit maintenir ses cibles d'accueil [de]
réfugiés de toutes origines [et] au niveau de 2016.
«Afin
d'encourager les demandes de parrainage collectif [des] réfugiés, le gouvernement devrait lancer un projet pilote visant à permettre aux milliers de réfugiés
parrainés en attente de visas déjà sélectionnés par le Québec
d'obtenir un visa temporaire de la part du fédéral afin de leur permettre de s'établir rapidement
au Québec en attendant leur résidence permanente.
[Et] en plus de répondre aux besoins de [la] main-d'oeuvre — on a
entendu que c'était une préoccupation — cela désengorgerait le
programme de parrainage et permettrait de réouvrir le dépôt de nouvelles
demandes et [...] stabiliser le programme.
«Globalement,
nous recommandons que le gouvernement du Québec réaffirme son engagement
humanitaire par l'accueil de 22 % de l'immigration humanitaire
canadienne comme [il est] prescrit [dans] l'accord Canada-Québec sur l'immigration.»
Voilà.
La Présidente
(Mme Chassé) : Il vous reste moins d'une minute.
Mme Lachance (Dominique) : Recommandation — dernière recommandation — n° 7 : «Nous
recommandons [également] que le gouvernement
du Québec augmente les cibles [...] des personnes réfugiées reconnues sur place
et des membres de leur famille — qui font aussi partie des personnes qui
doivent être dans les cibles — soit une augmentation qui [serait]
minimalement en concordance avec les niveaux d'immigration planifiés par le
gouvernement fédéral pour les trois prochaines années.» Voilà.
La
Présidente (Mme Chassé) : Très bien. Je vous remercie pour votre
exposé. Nous allons maintenant débuter la période d'échange avec votre
organisation. M. le ministre, la parole est à vous.
M. Jolin-Barrette :
Merci, Mme la Présidente.
La Présidente
(Mme Chassé) : Le bloc pour le parti formant le gouvernement est
de 16 min 30 s, pour votre information.
M. Jolin-Barrette :
Parfait. Je vous remercie, Mme la Présidente. Mme Lopez,
Mme Lachance, Mme Islas, bonjour. Bienvenue à la commission
parlementaire. Merci d'être là pour présenter votre mémoire. J'ai oublié, Mme
la Présidente, tout à l'heure, de souligner... et de féliciter mon collègue de
Nelligan, qui est désormais porte-parole de l'opposition
officielle en matière d'immigration, je sens qu'on va avoir beaucoup de plaisir
à travailler ensemble, et de saluer
mes collègues également, le député de Laurier-Dorion et la députée de
Nelligan... pardon, de Gaspé, ainsi que mes collègues de la partie
gouvernementale qui nous accompagnent cette semaine.
D'entrée
de jeu, vous dites, écoutez, la position du gouvernement serait une position
utilitariste du fait de favoriser l'immigration au niveau de la
sélection économique. J'aimerais vous entendre un peu plus à ce niveau-là, à
savoir pourquoi est-ce que vous considérez
cela comme utilitariste, le fait de sélectionner les personnes immigrantes,
lorsqu'on parle d'immigration économique, en lien avec les besoins du marché du
travail.
Mme Islas
(Veronica) : En fait, ce n'est pas le fait d'analyser l'immigration
économique en lien avec le marché du travail.
Ça, c'est tout à fait normal et ce n'est pas nouveau, c'est quelque chose qui
était déjà en place depuis vraiment, là, des décennies. En fait, c'est la question d'accès juste sur
l'immigration économique. Quand on va décider d'accepter, en tant que société, une personne travailleuse, qu'elle
soit temporaire, qu'elle reçoive un visa temporaire ou bien qu'elle soit
avec une résidence permanente, il faut la
voir dans sa totalité, comme une personne à part entière dans toute sa
complexité, dans tous ses défis, dans
tout son vécu. Et cette personne-là, probablement, aura une famille, elle aura
une femme ou un partenaire, elle aura
des enfants, et il faut voir l'immigration dans sa globalité et dans sa
complexité. De penser qu'on pourrait juste focusser sur la personne qui va arriver comme gagne-pain est complexe et
est problématique par rapport à ça, parce qu'on focussait énormément sur la question économique sans focusser sur
l'ensemble des facteurs qui vont favoriser une intégration pleine de ces
personnes-là.
M. Jolin-Barrette : Bien, là-dessus, je vous rejoins pleinement.
C'est justement pour ça qu'on a consacré des sommes supplémentaires à la francisation, près de
70 millions, et aussi que, la semaine dernière, on a lancé le Parcours
d'accompagnement personnalisé. Donc,
maintenant, c'est à la fois les immigrants en situation temporaire qui ont
accès aux cours de francisation, au
Parcours d'accompagnement personnalisé, depuis plus de cinq ans aussi, parce
que ça, c'est un enjeu aussi. Et, nous, notre objectif, c'est d'offrir les services à toutes les personnes
immigrantes, peu importe la catégorie dont elles proviennent, pour
vraiment les accompagner.
Mais vous
avez raison quand vous dites, supposons, qu'on sélectionne des travailleurs
qualifiés. Bien, ce n'est pas uniquement
un travailleur qualifié qui vient, c'est lui et sa famille. Mais pour nous,
pour le gouvernement du Québec, il faut
que l'ensemble de la cellule familiale puisse s'intégrer efficacement. Puis la
responsabilité du gouvernement du Québec, c'est d'offrir les services. Et c'est ce qu'on est en train de faire,
notamment par rapport à la francisation, par rapport à l'accompagnement personnalisé. Mais je voulais vous demander...
supposons, par rapport au milieu économique, vous dites : Il ne faut
pas avoir une vision utilitariste. Quelle doit être la position des entreprises
dans le système d'immigration?
Mme Islas (Veronica) : Bien, en
fait, je pense que les entreprises jouent un rôle parce qu'elles demandent des personnes et des travailleurs dans un contexte de
pénurie de main-d'oeuvre. Néanmoins, c'est au gouvernement de s'assurer de mettre en place la table et de mettre en place
une politique qui va faire du sens pour éviter de privatiser, mettons,
l'action de l'immigration. C'est un problème
qui pourrait arriver, là. Si on laisse trop la place aux entreprises, elles
pourraient, à un moment donné, faire appel à une immigration très
homogène.
Moi, je pense
qu'en tant qu'employeur, pour moi, il serait vraiment facile d'intégrer des
personnes qui vont me ressembler,
donc peut-être que je vais décider d'apporter des personnes avec un x
profil — c'est
tout à fait normal, c'est un biais,
on a tous des biais — mais
c'est au gouvernement de décider comment on va gérer ça et quelle politique on
va mettre en place pour être, à
quelque part, le «buffer» ou l'acteur qui va mettre en place les politiques
d'État pour que l'immigration ne soit
pas privatisée. Moi, je ne connais pas de pays qui ont privatisé,
nécessairement, la question de l'immigration. C'est un enjeu de société
et en tant que tel, c'est la responsabilité du gouvernement.
Mme Lopez
(Eva) : Et moi, j'ajouterais
à ça : Les organismes du réseau sont habitués à travailler avec les
entreprises, et en effet seul un
employeur... Les acteurs les plus importants en immigration, c'est l'employeur
et la personne immigrante. Il faut qu'ils soient en relation gagnante
pour tout le monde. Le problème se pose aussi, pas nécessairement dans cette
sélection que le gouvernement prévoit, dans le sens de ce sont les employeurs qui
vont choisir leur main-d'oeuvre. Les employeurs
savent très bien de quoi ils ont besoin dans leur entreprise, et on respecte
ça. On appuie même une démarche dans ce
sens, mais avec prudence pour éviter une privatisation, pour éviter des
accidents de parcours très malheureux qui sont vécus réels et sur le terrain, on le constate partout
ailleurs, où c'est seulement l'employeur qui prend en charge son travailleur
temporaire.
Il y a un
autre effet négatif pour les familles, la réunification familiale, quand on
parle de travailleurs temporaires, parce
que ce n'est pas toutes les catégories de travailleurs temporaires qui vont
pouvoir faire venir leurs familles. Et on sait qu'au Québec on a besoin d'ouvriers. Partout, partout, partout dans nos
régions, le cri est : On a besoin de travailleurs qui ne sont pas nécessairement au niveau
universitaire. Alors, ces gens-là, ils vont être beaucoup plus en difficulté de
faire venir les familles. Ça, c'est
une inquiétude pour nous, parce qu'on a vu aussi partir les travailleurs
temporaires avec de la peine de
laisser leur emploi, mais avec priorité envers leur famille. Il fallait rentrer
à leur pays, même si le fait d'être ici, c'était une très belle expérience au niveau professionnel et
même économique. Alors, il faut voir la globalité de ces travailleurs-là
et de quelle manière on va les outiller collectivement pour que cet élan qu'on
se donne soit vraiment prospère et significatif pour tous.
M. Jolin-Barrette : Dans votre mémoire, vous dites aussi : L'utilisation d'Arrima, il faut attention pour ne pas avoir les mêmes obstacles qu'actuellement sur l'intégration du marché
du travail. À qu'est-ce que vous
référez par rapport aux obstacles? Vous disiez : Bon, bien, il ne
faut pas que ça devienne la privatisation de l'immigration. Je vous
rassure, on n'est pas là du tout. Ça appartient à l'État québécois ou au
gouvernement du Québec de sélectionner son immigration. D'ailleurs, le gouvernement du Québec veut étendre ses
pouvoirs en matière de catégories d'immigration par rapport au
gouvernement fédéral. Mais sur l'aspect...
les obstacles rencontrés, lorsque vous faites référence aux obstacles, à quoi
faites-vous référence en lien avec Arrima, là?
Mme Islas
(Veronica) : Mettons, si on pense à juste, encore là, aux personnes
par rapport à leur profil, c'est certain que certains employeurs pourraient juste décider... parce qu'à la base
Arrima vise à arrimer des personnes... des employeurs avec des travailleurs, n'est-ce pas? Donc, c'est
certain que, veux veux pas, on leur donne beaucoup de pouvoirs et ça
pourrait être au
détriment de l'immigration de quelques pays par des biais implicites. Donc,
c'est un questionnement, c'est pour ça qu'on dit qu'il faudra faire
attention à cela.
• (14 h 40) •
M. Jolin-Barrette : ...vous rassurer sur ce point-là, là, le système
Arrima, il est bâti sur la déclaration d'intérêt, mais aussi sur la compétence des individus dans un
domaine particulier. On veut vraiment faire en sorte qu'en fonction des
besoins du marché du travail on sélectionne
la personne immigrante. Donc, la classification des gens, si je peux dire, est
basée sur leurs compétences, sur leur
expérience et non pas sur la région du monde dans laquelle ils proviennent.
Pour nous, c'est important, là,
d'aller chercher la personne qui répond le mieux aux besoins du marché du
travail québécois. Et à partir de ce
moment-là, la responsabilité du gouvernement du Québec, c'est de s'assurer qu'elle ait tous les outils
pour aller vers une intégration
réussie, une francisation. Alors, Arrima est pensé dans cette optique-là, et
toutes les démarches du gouvernement du Québec sont bâties aussi au
niveau de l'accompagnement pour donner une chance équivalente à tout le monde.
Mme Lopez (Eva) : Je crois que c'est important de considérer le
fait que les employés ne sont pas préparés pour l'immigration. Et ça, c'est un des irritants au réseau, c'est une de nos
inquiétudes. Oui, on a bien beau avoir besoin de main-d'oeuvre, mais on ne traite pas les immigrants de
la même manière qu'on traite un Québécois parce que les repères socioculturels
ne sont pas les mêmes. Et on a vu, on a constaté sur le terrain des dérapages
assez importants. Des gens des centres employeurs...
et heureusement ils ne sont pas tous dans ce même élan, mais il y a des
employeurs qui prennent leurs employés en
otage, il fait tout ce qu'il veut. Il a investi pour lui, il fait comme il
veut, et c'est une inquiétude importante pour notre réseau.
Comment
les employeurs vont se préparer non seulement pour aller chercher... Aller
chercher, c'est relativement simple :
on a le cash, on investit et on va les chercher. Comment on va faire pour les
retenir? Parce qu'on sait que la rétention est un peu boiteuse. Alors,
comment on va faire pour que ces personnes-là aient vraiment la réponse à
laquelle elles s'attendaient une fois en sol
québécois? Comment allons-nous, en tant que société... le gouvernement, comment
il va préparer les employeurs à
travailler avec ces personnes? Et on ne parle pas du patron de l'entreprise, on
parle de l'équipe au grand complet.
Comment on va faire? Parce que le patron, peut-être qu'il mange du couscous,
mais son employé au plancher est loin de ça, et c'est dans ce sens-là
qu'on s'inquiète vraiment.
Est-ce
qu'on va tenir compte, oui, du fait que l'employeur... C'est très légitime, on
ne conteste nullement le fait que l'employeur
va aller chercher la main-d'oeuvre qu'il a besoin d'avoir, mais comment et de
quelle manière il va pouvoir faire en
sorte que cette main-d'oeuvre soit respectée dans ses droits, dans ses
obligations, dans tout ça, qu'il y ait l'ensemble de nos citoyens
québécois? Ça, c'est une des préoccupations majeures dans notre réseau.
Mme Lachance (Dominique) : Si je peux me permettre, c'est qu'à travers tout
ça, dans le système Arrima et dans la charge
ou la responsabilité qu'on donne aux employeurs, la réflexion qu'on a, la
préoccupation qu'on a, c'est qu'on ne nomme pas, dans le document, du tout l'importance de travailler sur les
obstacles systémiques à l'emploi, c'est-à-dire les problématiques qui
doivent être travaillées avec le gouvernement en amont, en concertation avec
tous les milieux pour tenter de régler certaines problématiques.
Qu'on
se le dise ou non, il y a des problématiques qu'on pourrait relier à du racisme
systémique. Ce n'est pas de la volonté
des employeurs, mais le système fait en sorte qu'il y a une discrimination qui
se fait du fait que les gens viennent de l'étranger, ne connaissent pas notre système, sont souvent moins
habilités, n'ont pas le réseau de contacts nécessaire pour travailler ou pour se faire valoir, les modalités
d'évaluation de diplômes, bon, etc., je pourrais en parler. Et, dans le
document, on a l'impression que c'est le travailleur qui doit faire ses
preuves, qui doit être justifié.
Et
on ne remet pas en question le fait que la société d'accueil... On parle de
bidirectionnel tantôt, la société d'accueil a aussi une responsabilité par rapport à ces travailleurs-là et doit se
questionner sur ses systèmes de base pour s'assurer que c'est non discriminatoire, et on ne retrouve rien
dans le document qui fait état de ces préoccupations ou, à tout le
moins, une amorce de travail à cet égard-là.
Et, nous, ça nous préoccupe beaucoup parce qu'on remet encore la
responsabilité, d'une part, sur le
travailleur, qui doit se faire valoir et, d'autre part, on dit aux employeurs,
qui ont une très bonne volonté, mais... voilà, sélectionnez les gens... bon, j'y vais de façon grossière, mais
sélectionnez les gens selon vos besoins de main-d'oeuvre. C'est correct, mais ces gens-là ont aussi besoin
d'encadrement, ont besoin d'être supportés et d'avoir une formation.
D'ailleurs, les organismes... il y a le regroupement, le RORIQ, etc., qui fait
un travail extraordinaire en régionalisation pour tenter de s'approprier ou, en
tout cas, d'accompagner certaines entreprises.
Donc,
il y a beaucoup de travail à faire. Donc, la volonté, elle est là, mais il
manque des éléments dans votre document, dans ce qui nous est présenté.
M. Jolin-Barrette : Je comprends. Je sais que, Mme la Présidente,
j'ai des collègues qui veulent poser des questions. En dernier commentaire, je vous dirais : Le
Parcours d'accompagnement personnalisé, il est là justement pour prendre
en compte la réalité de chaque personne immigrante et de l'accompagner face aux
difficultés qui peuvent être vécues, mais surtout dans les démarches
d'installation et d'intégration. Alors, je m'arrête ici, mais je sais que j'ai
des collègues qui veulent poser des questions.
La Présidente
(Mme Chassé) : Y a-t-il un membre du... Oui, Mme la députée
de Les Plaines, la parole est à vous, allez-y.
Mme Lecours
(Les Plaines) : Merci beaucoup.
Merci beaucoup, Mme la
Présidente. Toujours
dans la même veine...
La Présidente (Mme Chassé) :
...au bloc formant le gouvernement.
Mme Lecours
(Les Plaines) : Oui, je fais
ça rapidement. Toujours dans la même veine, parce que, dans le
mémoire, vous parlez aussi que les besoins spécifiques des femmes immigrantes
seraient mis en cause, là... Je ne reprends pas exactement vos mots, mais en
quoi, justement... parce que le ministre l'a bien expliqué
dans le parcours d'intégration du nouvel arrivant, il va y avoir aussi
des liens avec les organismes communautaires, vous en avez parlé, des organismes
d'intégration, donc en quoi ça pourrait être difficile?
Mme Lachance
(Dominique) : Bien, si vous me permettez, je vais laisser,
après ça, ma collègue, qui a plus d'expertise au niveau des femmes, mais de
fait, en diminuant le... Souvent, les femmes immigrantes sont concentrées notamment
dans les catégories de réfugiés. Donc, déjà, en diminuant, on est en train...
on les discrimine, de base. Deuxièmement, dans les travailleurs temporaires,
c'est très technique, c'est davantage des emplois masculins, donc déjà on est en
train, encore une fois, d'occulter, de tasser un peu les femmes dans toute
cette approche-là.
Mme Islas
(Veronica) : Réunification
familiale, c'est la même chose, réunification familiale, normalement ce sont beaucoup plus des femmes qui sont réunifiées avec un
homme qui arriverait en premier. Donc, c'est certain que, si on commence à ajouter catégorie par catégorie,
ça s'en ajoute. Et, oui, c'est certain qu'il y en a en une, analyse
différenciée selon les sexes par rapport à certains programmes, par
exemple le PRIIME, mais il n'y en a
pas, une volonté de vouloir faire une analyse
différenciée selon les sexes pour l'ensemble de la politique.
Donc, c'est encore plus important de voir l'impact que ça pourrait avoir sur les femmes et davantage
aussi même sur les femmes racisées, la politique dans sa globalité, pour ensuite pouvoir
parler de différents programmes et de différentes... de la quantité de personnes
qu'on décide d'accepter par catégorie, quoi.
La
Présidente (Mme Chassé) :
...au bloc. Y a-t-il une autre intervention d'un membre du parti formant le gouvernement?
Mme la députée de Les Plaines, vous désirez poursuivre? Allez-y.
Mme Lecours
(Les Plaines) : Bien, je
vais poursuivre, vu qu'il reste peu de temps. Mais qu'est-ce que vous
pensez du plan d'action, du programme
d'intégration qui a été annoncé la semaine dernière? Parce que, justement,
ça, ça risque de renverser la vapeur.
Mme Lopez
(Eva) : Bien, c'est déjà un programme
existant dans nos organisations. Tous les organismes du Québec qui sont
attitrés à un volet immigration, ils appliquent ça. On a un plan d'action,
c'est les services personnalisés adaptés aux besoins de la personne immigrante et sa famille. C'est génial,
officialiser, le lancer de cette manière, c'est très, très bien, mais ce n'est pas nouveau. Dans nos organismes, si ça
fonctionne, c'est parce qu'il y a un parcours personnalisé. Mais
l'officialiser, c'est très important.
La
Présidente (Mme Chassé) : Merci. C'est terminé pour ce bloc. Vous
allez avoir l'occasion de continuer à parler, parce que maintenant la parole est au parti formant l'opposition
officielle, donc je cède la parole au député de Nelligan. La parole est
à vous.
M. Derraji :
Merci, Mme la Présidente, et je vais partager le temps que j'ai avec ma
collègue députée de Bourassa. Je vous
remercie, mesdames, pour votre excellent rapport. Vous avez ramené pas mal de
points très intéressants, surtout de l'incohérence par rapport à
certains éléments de la politique gouvernementale par rapport à la prochaine
planification de l'immigration.
J'ai deux
points. Le premier point, vous avez évoqué la première incohérence au niveau du
test des valeurs. Et la deuxième
incohérence, c'est... vous pensez que cette politique va fragiliser la position
de certaines femmes et d'entraver le projet
de vie de nombreuses familles. Vous avez même évoqué que le ministère de
l'Immigration... en fait, le moyen d'action qui est la politique gouvernementale pour l'égalité entre les femmes et
les hommes, la politique culturelle du Québec, dans la page 9 de votre rapport... le ministère
responsable, à savoir le Secrétariat à la condition féminine et le ministère de
la Culture et des Communications, et
le collaborateur est le ministère de l'Immigration. Donc, je vous ai entendues,
mais j'aimerais bien que vous
élaboriez davantage par rapport à cet aspect que... probablement les membres de
notre commission aimeraient bien être éclairés par rapport à ces deux
points.
• (14 h 50) •
Mme Lopez
(Eva) : C'est clairement
indiqué dans un des paragraphes, le deuxième paragraphe, on parle de
l'accent qui est mis sur l'immigration
économique au détriment de l'immigration humanitaire et de la réunification
familiale. Je vais me permettre de vous lire ce paragraphe,
même si vous l'avez, mais pour ceux qui nous entendent et qui ne l'ont pas.
C'est très clairement indiqué qu'elles sont
proportionnellement plus nombreuses dans ces catégories de regroupement
familial, les femmes, à 58,24 % contre
41,75 % des hommes. Dans les cas des réfugiés, il y a 50,44 % des
femmes contre 48,56 % des hommes,
et la faible hausse et la stagnation de certains seuils — regroupement familial, notamment, et
réfugiés — risque
en fait d'allonger les délais, ce qui serait préjudiciable aux femmes dont les
conjoints sont déjà au pays.
Alors, le
problème, c'est, dans la réunification familiale, la femme va devoir attendre
longtemps avant de pouvoir rejoindre
son mari. Et je vous parlais tantôt du fait qu'il y a des travailleurs hommes
qui partent dans leur pays parce que la pression, cette absence est très difficile à tenir. Vous connaissez
bien, partout ailleurs, les familles sont très serrées... tricotées serré, et cette absence n'est pas comblée
nécessairement par un salaire. Ça fait que ça, ça précarise beaucoup la
condition des femmes dans le cadre des réfugiés, des réunifications familiales
et, de façon générale, c'est elles qui vont avoir plus un impact négatif.
M. Derraji :
Je vous comprends. Et par rapport au test des valeurs?
Mme Islas
(Veronica) : J'aimerais quand même bonifier un peu. Aussi, on a la
question de services, par exemple, d'accessibilité à d'autres services
qui vont au-delà des services du MIDI. Par exemple, les personnes qui sont
réfugiées, normalement, on vient de le dire,
sont plus des femmes, et elles n'ont pas accès à des services, par exemple,
d'Emploi-Québec, les personnes
demandeuses d'asile n'ont pas accès aux services de garde subventionnés. Donc,
ça fait en sorte qu'il y a une accumulation
sur des personnes qui sont déjà très précaires qui fait en sorte que c'est
d'autant plus important d'avoir une analyse différenciée selon le sexe.
Mme Lopez
(Eva) : Et par rapport au
test des valeurs, c'est très important de considérer... Dominique, veux-tu...
bon, O.K. Par rapport à ça, on sait très
bien que les femmes sont toujours soumises à différents contextes, que ce soit
religieux, culturel, linguistique, même.
C'est difficile pour une femme attendre, si elle ne parle pas la langue...
elles arrivent ici, de comprendre la
société québécoise. Et on sait que, malheureusement, il y a des écarts
culturels qui font en sorte que la femme, elle est très isolée dans plusieurs des cas. Elle est à la maison, elle
garde les enfants, elle n'a pas de service de garde. Pour toutes sortes de situations, elle peut être
confrontée à une ignorance vive de sa condition en tant que femme immigrante
au Québec. Ça fait que le test des valeurs,
les valeurs de la charte, les valeurs québécoises sont très importantes, mais
elles ne sont pas injectées. La personne qui débarque de l'avion, elle ne va
pas les acquérir tout de suite ou elle ne va pas les comprendre immédiatement.
C'est un délai, c'est un temps. Il y a des familles qui sont ici depuis
longtemps, mais
qui, malheureusement, n'ont pas
adhéré parce qu'elles n'ont pas l'accès ni linguistique ni culturel de par le
contexte de leur immigration. Alors,
il ne faut pas voir une formule magique dans le fait qu'il y a un beau texte
noir sur blanc, parce qu'on n'injecte pas ce principe aux gens quand ils
arrivent, c'est un processus lent, graduel, individuel, c'est très subjectif.
La Présidente (Mme Chassé) :
Merci. Mme la députée de Bourassa-Sauvé, vous désirez prendre la parole?
Mme Robitaille : Oui. Bonjour,
Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Chassé) :
Bonjour.
Mme Robitaille : Dites-moi,
combien de temps on a encore?
La Présidente (Mme Chassé) : Il
vous reste 5 min 25 s. Allez-y.
Mme Robitaille : D'accord,
merci. Merci, mesdames. Votre point de vue est très, très important pour nous. Écoutez, je suis de Montréal-Nord, mon comté,
c'est Bourassa-Sauvé, et donc, vous le savez, il y a beaucoup, beaucoup
de réfugiés dans mon comté, des gens qui
travaillent très, très fort et qui contribuent, justement, à l'économie du
Québec puis de Montréal.
Vous dites
dans votre rapport que, contrairement au gouvernement de la CAQ, qui veut
diminuer les seuils, le nombre de
réfugiés, vous, vous croyez qu'on pourrait l'augmenter au Québec. J'aimerais
que vous nous expliquiez comment, justement, ces réfugiés-là ne sont pas un fardeau pour l'économie du Québec, mais
bien contribuent à l'économie du Québec — vous en voyez souvent, vous en rencontrez, des réfugiés — et
quelle place, donc, ils prennent chez nous. Qu'est-ce qu'ils
amènent à la société québécoise?
Mme Lachance
(Dominique) : Bon, le Québec a
une longue tradition, hein, d'accueil de réfugiés pris en charge par l'État,
parrainés, etc. C'est véhiculer des préjugés que dire que les réfugiés, effectivement, comme vous le nommez, sont un
fardeau, et notre lecture de la proposition actuelle, c'est qu'on les considère, sans que ce
soit nommé, comme un fardeau du fait
que c'est la seule catégorie, c'est la catégorie humanitaire... et non seulement n'est pas maintenue, mais on la diminue et on la tient diminuée, alors que nous, on considère que ce sont des
gens... outre leur processus d'arrivée qui est différent, ils ne viennent pas pour les mêmes raisons, on
s'entend là-dessus, et possiblement qu'il y a certaines
vulnérabilités aussi qui sont
établies ou qui ont été générées par leur condition précédente, sont quand même
des gens qui contribuent économiquement, qui sont des travailleurs, vous l'avez nommé, qui sont des gens souvent
diplômés, on a tendance à l'oublier. On les voit comme un fardeau à la société, alors que ce sont des
gens qui travaillent très rapidement, qui ont un taux de rétention beaucoup plus élevé. D'ailleurs, dans les chiffres mêmes du... dans les chiffres
du document du ministère pour la préparation, on faisait un état, quand
même, que les catégories qui augmentaient en fait le taux de rétention au
Québec, c'étaient notamment les réfugiés puis les personnes parrainées. Donc, on ne comprend pas pourquoi ces
gens-là ne font pas partie de la donnée économique, même si on ne veut pas qu'ils ne soient que
considérés là-dessus, parce qu'il y a un regard humanitaire que le Québec
doit continuer à avoir de par ses
engagements internationaux et sa réputation. Il y a toute une expertise,
notamment dans les 14 régions de
destination, qui a été développée autour de l'accueil des réfugiés et qui sert
l'ensemble des nouveaux arrivants, notamment
en région. Donc, on pense qu'il faut regarder les réfugiés non pas juste avec
une loupe humanitaire — elle est là puis elle
est importante — mais
aussi que ce sont des travailleurs qui doivent... qui contribuent, qui restent
en région, pour lesquels les enfants
sont plus... quand on fait en bout de ligne, sont plus scolarisés, se rendent à
l'université et qui restent dans notre région.
Mme Robitaille : Une petite
question, brièvement. Justement, à vous écouter, le Québec a toujours fait
preuve d'humanité, d'accueil, on l'a vu avec les «boat people» vietnamiens,
avec les Haïtiens, avec les Bosniaques, avec les Syriens, avec tous ces gens qu'on a accueillis
avec un grand, grand coeur. Est-ce que vous regardez ça... Est-ce que
des fois ça vous inquiète? Est-ce que vous avez l'impression que ça pourrait
être en train de changer?
Mme Lachance
(Dominique) : Bien, une
diminution des cibles nous inquiète, effectivement, quand on parle que, d'une part, au fédéral, on veut augmenter les
niveaux d'accueil de réfugiés. Parce que ce qui se passe dans le monde,
on s'entend, il y a de plus en plus de... Le
haut commissariat aux réfugiés, je ne vous ferai pas d'histoire là-dessus, mais
a sorti des chiffres, je pense, assez
faramineux sur les personnes déplacées et réfugiées dans le monde. Alors, il
est tout à fait normal que le Québec
continue sa tradition d'accueil, surtout que ces gens-là restent, contribuent,
paient des impôts, achètent des maisons
et font en sorte, au même titre que les autres, que les travailleurs
économiques, à faire avancer et évoluer la société, puis en plus ils amènent une diversité. Ils créent
autour de l'accueil des réfugiés — je parlais de vulnérabilité, puis
c'est vrai — une
concertation d'organisations qui se préoccupent puis qui s'installent, qui se
mettent ensemble pour essayer de trouver des solutions...
La Présidente (Mme Chassé) : Il
vous reste moins d'une minute.
Mme Lachance (Dominique) : ...et qui sont, je le disais tantôt, bénéfiques
pour l'ensemble des personnes immigrantes en région, notamment. Donc, on
comprend mal cette décision-là.
La Présidente (Mme Chassé) : Il
vous reste une trentaine de secondes.
Mme Robitaille :
Oui. Donc, ces réfugiés-là, ces gens issus de la réunification familiale, d'un
point de vue économique, ils sont tout à fait... ils contribuent à part
entière.
Mme Lachance
(Dominique) : Oui, oui.
Mme Robitaille : Ce n'est pas
un fardeau.
Mme Lachance
(Dominique) : C'est peut-être
un peu plus long, mais c'est un investissement à long terme. On ne peut pas se dire que la première année d'arrivée,
les gens sont... Bon, ils ont la francisation, etc., mais c'est de
l'investissement à long terme. Et en ce sens
on trouve que la documentation... le document qui nous est présenté a une
vision plutôt court terme de
l'immigration, bon, il faut répondre à des besoins de main-d'oeuvre, etc.,
maintenant. On n'est pas contre, mais il ne faut que voir ce court terme
là.
La Présidente (Mme Chassé) :
Merci. Merci.
Mme Lachance
(Dominique) : Excusez. Je me suis envolée.
La
Présidente (Mme Chassé) : Quelle belle envolée. Alors, on est
rendus maintenant au bloc d'échange avec le deuxième groupe d'opposition
pour un temps total de 2 min 45 s. M. le député de
Laurier-Dorion, la parole est à vous.
• (15 heures) •
M. Fontecilla :
Merci, Mme la Présidente. J'ai très peu de temps, là, mais croyez-vous que le
gouvernement envoie un mauvais message en diminuant le volume de
réfugiés qui vont être admis au Québec, en augmentant à 65 % — c'est
l'ambition de la politique — les immigrants économiques? Donc, ça fait en
sorte de... entre autres, les réfugiés. Est-ce que vous pensez que ça
envoie un mauvais message à l'ensemble de la société comme quoi les réfugiés ne
sont pas utiles, c'est un fardeau?
Mme Lachance
(Dominique) : C'est Gandhi
qui disait que donner l'exemple, ce n'est pas la meilleure façon de convaincre, c'est la seule. Donc, oui,
effectivement, moi, je pense que c'est un message. On comprend, là, la
préoccupation économique. Et, à la lumière
de ce qu'on vient de dire, on pense que les personnes réfugiées peuvent
contribuer et on est tout à fait inquiets du fait qu'effectivement il y
a un écart, c'est-à-dire qu'on va récupérer... on augmente les travailleurs économiques au détriment de ces catégories-là.
Nous autres, on pense qu'il faudrait les garder, il faudrait les maintenir,
il faudrait continuer à les soutenir parce
qu'ils peuvent contribuer de façon économique. Donc, oui, la réponse est oui.
C'est inquiétant de voir qu'on est dans un
processus de diminution. On est en train de répondre, et j'irai de façon plus
large, à des préoccupations ou des questionnements
qu'une société peut se poser, c'est normal. Mais, nous, ce qu'on considère,
c'est que, s'il y a des questionnements,
s'il y a des craintes, s'il y a des préoccupations au niveau de toute la
question de l'accueil des réfugiés
puis... bon, ce n'est pas en diminuant les cibles, la réponse, c'est au
contraire en expliquant, en allant à la rencontre des gens, en valorisant cet apport-là tout en
l'augmentant plutôt que de diminuer de façon drastique. Oui, c'est
inquiétant, effectivement.
Mme Islas
(Veronica) : Je pourrais ajouter qu'il faudrait vraiment faire
attention puis... parce qu'en fait... Dominique vient de le dire, en fait, il y a une grande contribution économique, et
de ne pas nommer cette contribution économique des personnes, autant des personnes qui arrivent par
le biais de la réunification familiale ou les réfugiés, fait en sorte que
ça crée des préjugés, parce que les
personnes qui n'ont pas plus d'information pensent que : Ah! voilà un
fardeau pour nous, ça nous coûte de l'argent. Donc, ça crée des préjugés
envers des personnes qui veulent juste contribuer économiquement. Donc, on espère qu'on puisse être plus champions, là, des
personnes de toutes origines qui contribuent aussi à l'essor de l'économie.
La
Présidente (Mme Chassé) : Merci. Je cède maintenant la parole à
la députée de Gaspé pour le bloc d'échange avec le troisième groupe
d'opposition. Vous avez 2 min 45 s.
Mme Perry
Mélançon : Merci, Mme la Présidente. Je vais aller rapidement, moi
aussi, avec mes questions. Vous avez
mis le doigt aussi sur la discrimination à l'embauche, qu'il y avait un manque
de documentation par rapport à ça, puis c'est autant, là, au niveau politique dans le nouveau projet de loi qu'à
la planification, comme on le voit. J'aimerais vous entendre sur votre vision. Vous êtes en contact,
vous savez comment c'est difficile pour certaines personnes qui viennent
s'installer de se trouver un emploi, puis ça fait partie de votre mission, de
vos tâches. Donc, comment est-ce qu'on peut arriver à favoriser, là,
l'employabilité de ces personnes-là?
Mme Lopez
(Eva) : Il y a un problème,
la société d'accueil n'est pas préparée. Collectivement, on parle
beaucoup d'immigration, mais l'effort de
l'intégration chez la personne immigrante, les employeurs, on fait beaucoup de
pression dans le sens de
l'intégration, mais on pense rarement à sensibiliser la communauté d'accueil.
Et maintenant la tendance, c'est beaucoup
à la régionalisation. C'est un sujet que je connais très bien, mais c'est un
sujet qui me préoccupe aussi parce que les milieux ne sont pas tous aptes à comprendre, ils ne sont pas informés.
Ils vont pouvoir comprendre si on les prépare, mais la communauté d'accueil n'est pas préparée à
accueillir les immigrants, de là les préjugés par rapport aux réfugiés, par
rapport aux travailleurs temporaires voleurs
de jobs, par rapport à tout ce qui englobe l'immigration. Parce qu'on parle
beaucoup de préparer et on exige beaucoup de
la part de l'immigrant par rapport à son intégration, mais on ne prépare pas
nécessairement les milieux d'éducation, de
santé, les entreprises, les employeurs, et ça prend une préparation et ça prend
une concertation pour que les dossiers d'immigration soient plus
inclusifs.
Et il y a de
la discrimination pour toutes sortes de raisons. La discrimination à l'emploi,
elle est bien documentée. Et la
personne... C'est complètement incohérent de faire beaucoup d'efforts à aller
chercher ailleurs qu'en donnant un bassin très riche à Montréal pour
pouvoir aller développer des techniques, des mécanismes efficaces pour pouvoir
faciliter l'intégration de tous ces
chômeurs, parce qu'ils sont nombreux de par la situation de discrimination et
de méconnaissance par rapport à leur
diplôme, par rapport à leur milieu, à leur pays d'origine, et tout ça. Ça fait
qu'il y a beaucoup à travailler sur le terrain pour améliorer
l'intégration socioéconomique des immigrants.
La Présidente (Mme Chassé) :
Mme la députée de Gaspé.
Mme Perry
Mélançon : ...vous entendre sur... justement, vous parlez des agents
d'intégration, la nouvelle annonce, vous
n'aviez pas terminé votre pensée, puis ça m'intéressait de vous entendre.
Est-ce que vous voyez ça comme un service qui sera complémentaire à tout
ce qui est donné dans les organismes ou que ça peut vous paraître inquiétant de
voir le soutien qui sera peut-être moins là de...
Mme Lopez (Eva) : ...
La Présidente (Mme Chassé) : Je
suis désolée.
Mme Lopez (Eva) : C'est fini?
Bon.
La
Présidente (Mme Chassé) : Je suis désolée. Ta question s'est
rendue... votre question s'est rendue jusqu'au bout du temps. Merci beaucoup pour votre contribution.
Vous étiez les premiers, hein, vous avez brisé la glace, vous nous avez
sortis de nos vacances. Merci d'avoir été là.
Je suspends les travaux quelques instants afin
de permettre au prochain groupe de prendre place. Merci.
(Suspension de la séance à 15 h 6)
(Reprise à 15 h 9)
La
Présidente (Mme Chassé) : Bonjour. Je souhaite maintenant la
bienvenue aux représentants de Gestion Stuart d'Eterna. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre
exposé — à une minute de la fin, je vais vous
faire un signe, si vous ne voyez pas le
signe, je vais vous le dire — et après quoi nous procéderons à une période
d'échange avec chacun des groupes parlementaires qui sont ici. Je vous
invite tout d'abord à vous présenter puis ensuite à commencer votre exposé.
Allez-y.
Gestion des placements Stuart ltée et Eterna Groupe
financier
M. Abikzer (Patrick) : Mme la
Présidente, chers membres de la commission, M. le ministre, mon nom est Patrick
Abikzer, président de Gestion des placements Stuart. Je suis accompagné
aujourd'hui de Pierre Olivier Tardif, vice-président du Trust Eterna, et de
Yanick Labrie, économiste, qui a rédigé le rapport que nous vous avons
présenté.
Nous aimerions vous
remercier de nous recevoir aujourd'hui pour échanger avec vous sur la
planification de l'immigration pour la
période 2020‑2022. Trust Eterna et Gestion des placements Stuart sont deux
institutions reconnues comme intermédiaires financiers pour oeuvrer au
sein du Programme des immigrants investisseurs du Québec. M. Yanick Labrie vous présentera dans un
premier temps les résultats de son étude et parlera des retombées économiques
du programme. Quant à moi, je vous
présenterai certaines pistes de
solution aux enjeux de la rétention et de la francisation des immigrants investisseurs. Et Pierre Olivier
Tardif, finalement, vous présentera... parlera du fonctionnement de la
formule de répartition des contingents entre les intermédiaires financiers.
Yanick, je te cède la parole.
• (15 h 10) •
M. Labrie
(Yanick) : Mme la Présidente, chers membres de la commission, merci
pour l'accueil. Je suis ravi d'être ici présenter les faits saillants de
mon rapport, un rapport que j'ai corédigé avec l'économiste Vincent Geloso.
Alors, d'abord, le programme Immigrants investisseurs est porteur de bienfaits
économiques. En fait, il y a sans conteste des importants bénéfices à ce programme. Vous savez, je suis économiste,
donc je vais vous présenter des données économiques sur l'ampleur des
bienfaits et des retombées.
D'abord,
depuis le début des années 2000, le fonds global de placement constitué
par le programme a surpassé les 14 milliards
de dollars et généré 1,8 milliard de revenus pour le Québec. Cela a permis
notamment à Investissement Québec de
consentir à plus de 6 000 PME de la province une aide financière
totale de plus de 900 millions pour l'expansion de leurs projets d'affaires. Investissement Québec estime
que ces PME ont investi 12,9 milliards et généré ou sauvegardé des
emplois à hauteur de près de 50 000
depuis le début des années 2000, donc ce n'est pas rien. Même en gardant
l'hypothèse prudente que seulement
10 % de l'aide qui est consentie aux entreprises a pu être directement
liée au programme comme tel, c'est 4 800 emplois, c'est un
minimum, O.K.? Si on regarde qu'est-ce que ça représente en termes de masse
salariale, c'est annuellement plus de
210 millions de dollars, à laquelle il faut ajouter, hein, les profits des
entreprises, chose qu'on n'a pas pu quantifier, mais qui sont bien
réels.
Les sommes
investies, évidemment, ont permis — et on ne peut difficilement en douter — d'améliorer la productivité de la
main-d'oeuvre, la productivité de ces entreprises. Elles ont été investies en
technologie, elles ont été investies en
capital physique, donc en machinerie, en équipement, en formation de la
main-d'oeuvre. Et, vous savez, avec les gains de productivité qui ont
été générés, bien, évidemment, c'est à la base, là, de l'enrichissement des
Québécois, l'amélioration du niveau de vie.
Alors, sur le plan économique, sur le plan de l'investissement, c'est un
programme qui remplit ses promesses.
M. Abikzer
(Patrick) : Bien. Les critiques récurrentes qui sont formulées à
l'égard du Programme des immigrants investisseurs
concernent son faible taux de rétention et le faible nombre de francophones qui
appliquent à ce programme. Quelle en est
la raison principale et comment y remédier? Pour répondre à cette question, il
faut d'abord s'intéresser au délai de traitement d'un dossier
investisseur. En date d'aujourd'hui, cela prend entre six et huit ans pour
qu'un immigrant investisseur soit admis au
Québec. Le portrait de l'immigration d'affaires que nous constatons
actuellement est donc une image du
passé. Les immigrants investisseurs qui arrivent aujourd'hui ont pour la
plupart déposé leur demande de certificat de sélection du Québec avant 2013. Le programme des investisseurs est
ainsi le programme d'immigration d'affaires avec le délai d'attente le plus long au monde. Entre le
moment où l'investisseur étranger décide avec sa famille de venir vivre
au Québec et le moment où on l'accueille, il
pourrait s'écouler huit ans. Bien des choses changement en huit ans : les
enfants grandissent et sont maintenant dans
des universités européennes, américaines ou même canadiennes, les affaires du
requérant principal se sont développées et
souvent internationalisées. Il existe tellement de facteurs qui peuvent
influencer un plan de vie sur une si longue période.
Rappelons
également que l'investisseur, dans la plus grande majorité des cas, a vu son
investissement de cinq ans arriver à
maturité avant même de recevoir sa résidence permanente. Il ne perd donc plus
rien en activant son visa de résidence même
si sa décision de vivre au Québec a changé. Cela fausse, bien entendu, le taux
de rétention. Il est difficile de retenir un invité pour le dessert si
on ne l'a jamais reçu à souper.
La solution
que nous proposons est d'offrir au candidat, immédiatement après avoir été
sélectionnés par le Québec, une
résidence temporaire de deux ans. Il a déjà son CSQ entre les mains. Durant
cette période, un des membres de la famille aurait la possibilité de venir au Québec pour y étudier, travailler,
développer ses affaires, lui permettant ainsi d'adhérer aux valeurs québécoises, d'apprendre le français et de
s'acclimater à l'environnement économique. Le taux de rétention se verra
clairement bonifié, et l'investisseur pourra
bénéficier d'une voie prioritaire et rapide pour être admis au Québec, car il
aura clairement démontré sa décision de vivre ici, un peu comme le système
Arrima le fait avec les travailleurs devant être sélectionnés par le Québec.
Précisons que le gouvernement du Québec a tous les pouvoirs législatifs pour
effectuer ces changements et qu'Ottawa n'aurait aucune raison de s'opposer à
cette initiative.
Je laisse mon collègue parler de la formule des
contingents.
La Présidente (Mme Chassé) : Il
vous reste trois minutes.
M. Tardif
(Pierre Olivier) : Parfait. Depuis 2015, il existe un règlement sur
les contingents qui permet d'attribuer à chaque intermédiaire financier un nombre déterminé de dossiers immigrants
investisseurs qu'il peut soumettre au MIDI. Ce contingent est déterminé
par une formule mathématique. Il revient alors à chaque courtier de recruter
les meilleurs candidats possible, et cela, afin d'augmenter les chances d'une
conclusion positive pour chaque demande déposée.
On peut aisément
assumer que plus le taux de succès d'un courtier est élevé et plus ce dernier
devrait être considéré comme un performant.
Dans les faits, c'est le contraire qui se passe. La formule mathématique
établit que le Règlement sur les
contingents comporte un biais très important qui la rend inefficace et
inéquitable et va à l'encontre du bien public. Cette formule ne favorise pas
vraiment la performance des courtiers et protège les plus gros intermédiaires
de la concurrence. Rappelons qu'en date
d'aujourd'hui cinq intermédiaires financiers contrôlent près de 65 % du
marché des contingents alors que les
17 autres intermédiaires financiers inscrits doivent se répartir le reste, donc
le maigre 35 % restant. Le
gouvernement de l'époque a décidé qui allait être gros et qui allait rester
gros et pour des raisons qu'on a du mal à s'expliquer.
La
concurrence engendre la performance. Ces cinq gros intermédiaires financiers
pourraient avoir des taux de succès plus
faibles sans impact significatif sur leur position dominante. Dans les faits,
le système actuel ne récompense pas la performance.
Afin d'améliorer l'efficacité du programme, il serait avisé de remplacer la
formule actuelle de répartition des contingents
par une nouvelle formule qui tient compte de la performance réelle de chacun
des courtiers. Ainsi, les intermédiaires
financiers avec le plus haut taux de réussite seraient alors récompensés pour
leur efficacité en se voyant octroyer un contingent plus élevé de
dossiers, ce qui est dans l'intérêt du Québec.
La Présidente
(Mme Chassé) : ...une minute.
M. Tardif
(Pierre Olivier) : C'est tout. Merci de m'avoir écouté aujourd'hui.
La
Présidente (Mme Chassé) : Bien oui, merci. Alors, j'ai maintenant...
le bloc d'échange avec le parti formant le gouvernement débute pour
15 minutes. M. le ministre.
M. Jolin-Barrette :
Merci, Mme la Présidente. M. Abikzer, M. Labrie, M. Tardif,
merci d'être présents en commission
parlementaire, de nous avoir présenté votre mémoire. Vous êtes le premier
groupe qui nous parle des immigrants investisseurs,
puis j'aimerais ça qu'on mette la table un petit peu sur ce programme-là, qui a
été modifié par le gouvernement libéral de l'époque l'an passé, qui
avait rajouté des contingents en 2015.
Juste
pour bien expliquer, là, aux gens qui nous écoutent et aux membres de la
commission comment ça fonctionne, donc,
généralement, c'est suite à un investissement de 1,2 million de dollars
qui est prêté à Investissement Québec qu'un immigrant investisseur peut se voir accordé la résidence permanente.
Juste avant ça, tout à l'heure vous avez dit : Il n'en revient qu'au gouvernement du Québec de mettre en
place une résidence temporaire de deux ans. Or, l'accès au territoire
canadien, ça relève du gouvernement fédéral, alors le Québec n'a pas cette
juridiction-là.
Je
reviens au programme. Donc, avec 1,2 million, la personne peut obtenir sa
résidence permanente, est sélectionnée par
le Québec et vient sur le territoire québécois par la suite. On est la seule
province canadienne à avoir ce programme-là. Le fédéral, lui, a renoncé ce programme-là. Je vous dirais... Vous
dites : Il y a beaucoup de retombées économiques rattachées à ce programme-là. Comment ça fonctionne, le
montage financier, là? Quel est le rôle des intermédiaires financiers
dans le 1,2 million qui est avancé, là? Est-ce que toutes les personnes
Immigrants investisseurs déboursent 1,2 million puis le donnent à
Investissement Québec?
• (15 h 20) •
M. Abikzer
(Patrick) : Le programme Immigrants investisseurs, il y a une
obligation pour l'investisseur de déposer 1,2 million auprès d'Investissement Québec, d'accord?
L'investisseur a le choix de le faire ou de financer son investissement.
Donc, Investissement Québec reçoit donc un
dépôt de 1,2 million, et c'est un placement sans intérêt. L'ensemble des
intérêts actualisés, c'est l'avantage que
l'investisseur donne au Québec et à Investissement Québec. Cet argent est
utilisé pour donner des subventions à des PME québécoises, et, bien
entendu, à financer des programmes gouvernementaux, et également à rémunérer les intermédiaires financiers qui ont
signé une entente tripartite avec le gouvernement du Québec et
Investissement Québec.
M. Jolin-Barrette : O.K. Et je reviens là-dessus, là, pour Gestion
Stuart et Eterna, là, moi, là, je suis un immigrant investisseur, là, je fais affaire avec vous, là,
comment ça fonctionne? Est-ce que c'est vous qui avancez le 1,2 million
pour moi?
M. Abikzer
(Patrick) : Nous, on finance cet argent, oui, à travers des institutions
financières canadiennes.
M. Jolin-Barrette : O.K. Donc, il n'y a pas de nouvel argent de l'étranger,
c'est des institutions financières canadiennes qui financent le
1,2 million.
M. Abikzer
(Patrick) : Oui, qui financent, absolument, le 1,2 million, tout
à fait.
M. Jolin-Barrette : O.K. Ça fait que ce n'est pas de l'argent de
l'étranger qui arrive au Canada ou au Québec, c'est : vous, vous
faites affaire avec une institution financière qui, elle, prête
1,2 million à Investissement Québec, c'est ça?
M. Abikzer
(Patrick) : Exact. Absolument.
M. Jolin-Barrette : O.K. Et là, dans le fond, moi, si je suis un
immigrant investisseur, qu'est-ce que je fais? Je vous paie, à vous, un
certain montant d'argent pour que vous financiez le 1,2 million?
M. Abikzer
(Patrick) : Exactement, et donc cet argent qui est transféré au Québec
sert, justement, à emprunter et payer
les intérêts aux institutions financières québécoises pour pouvoir financer
cette somme de 1,2 million. Donc, l'intérêt va directement à
l'institution financière québécoise.
M. Jolin-Barrette : O.K. Donc,
l'immigrant investisseur ne sort pas de sa poche 1,2 million.
M. Abikzer
(Patrick) : Non.
M. Jolin-Barrette :
Il va sortir un montant forfaitaire.
M. Abikzer
(Patrick) : C'est ça.
M. Jolin-Barrette :
C'est combien, ce montant-là, à peu près, pour financer 1,2 million?
M. Abikzer
(Patrick) : On parle d'environ 300 000 $,
300 000 $ à 350 000 $, aujourd'hui, dans le programme
1,2 million.
M. Jolin-Barrette : O.K. Ça veut dire, pour pouvoir obtenir ma résidence
permanente, ça me coûte 300 000 $
que je ne reverrai pas.
M. Abikzer
(Patrick) : C'est ça, exactement.
M. Jolin-Barrette : O.K. Et là, lorsqu'on revient avec les
intermédiaires financiers, dans le fond, j'imagine que les
intermédiaires financiers se prennent une cote sur le 300 000 $ pour
les frais associés.
M. Abikzer
(Patrick) : Absolument. Tout à fait.
M. Jolin-Barrette : O.K. Et puis par la suite, sur les intérêts, là,
vous me disiez, il y a une convention tripartite qui a été signée avec Investissement Québec, et là les
intermédiaires financiers ont une quote-part aussi sur les revenus d'intérêts.
M. Abikzer
(Patrick) : Exactement.
M. Jolin-Barrette :
De l'ordre de combien?
M. Abikzer
(Patrick) : 22 %.
M. Jolin-Barrette :
O.K. Et combien on génère d'intérêts annuellement avec ces sommes-là?
M. Abikzer
(Patrick) : Bien, aujourd'hui, pour Investissement Québec?
M. Jolin-Barrette :
Oui.
M. Abikzer
(Patrick) : Environ... Parce que, là, on est en période de transition,
on passe d'un 800 000 $... on va passer à 1,2 million,
mais les dossiers de 1,2 million ne sont pas encore financés, donc c'est
difficile de le dire.
M. Jolin-Barrette :
O.K. Mais sur le 800 000 $, ça donnait combien?
M. Abikzer
(Patrick) : Bien, sur le 800 000 $, ça donnait... bien, sur
le 800 000 $, ça coûtait environ 200 000 $,
d'accord, l'option de financement. Donc, ici, on parle d'environ, aujourd'hui,
120 000 $ environ.
M. Jolin-Barrette :
O.K. Mais au net, les intérêts, ça donnait combien, la masse des intérêts?
M. Abikzer
(Patrick) : Pour Investissement Québec ou pour la banque?
M. Jolin-Barrette :
Bien, vous pouvez nous dire les deux. Pour la banque, c'était combien?
M. Abikzer
(Patrick) : Aujourd'hui, pour la banque, on n'est pas loin de
100 000 $.
M. Jolin-Barrette :
Par dossier de revenus.
M. Abikzer
(Patrick) : Oui, oui.
M. Jolin-Barrette :
O.K. Puis, au total, pour Investissement Québec, est-ce que vous avez...
M. Abikzer
(Patrick) : Légèrement moins parce que, bon, bien, les rendements du
bon du gouvernement du Québec sont plus faibles que le taux d'intérêt
chargé par les banques.
M. Jolin-Barrette : O.K. Mais donc l'intermédiaire financier, lui,
prenait une cote de 22 % sur les revenus d'intérêts.
M. Abikzer (Patrick) : Oui, sur
les revenus d'intérêts d'Investissement Québec, oui. C'est basé sur l'entente
tripartite, ça existe depuis 1986.
M. Jolin-Barrette :
O.K. Et puis je voulais savoir, vous disiez, bon, tout à l'heure... c'est
M. Tardif qui disait : Il y a
uniquement les gros joueurs qui ont été favorisés par le précédent
gouvernement. Qu'est-ce qui arrive avec des plus petits joueurs? Est-ce qu'eux-mêmes financent ou ils font affaire avec
une institution financière? Exemple, comme vous, là, Gestion Stuart et
Eterna, est-ce que vous allez voir une banque pour que ce soit la banque qui
prête l'argent à Investissement Québec?
M. Tardif (Pierre Olivier) :
Oui, une banque ou des compagnies d'assurance.
M. Abikzer
(Patrick) : Banques, compagnies d'assurance québécoises, mais ce n'est
pas... quand on parle de gros joueurs,
on ne parle pas de gens qui financent eux-mêmes leurs investissements. Ce n'est
pas parce qu'on est gros qu'on finance les investissements.
M. Jolin-Barrette : Et donc,
quand vous dites des compagnies d'assurance, des banques, avec qui vous faites
affaire au niveau du financement?
M. Abikzer (Patrick) : Ah! la
Banque de Montréal, compagnie d'assurance Capitale, il y a plusieurs...
M. Tardif (Pierre Olivier) : La
Capitale, la SSQ, entre autres.
M. Abikzer
(Patrick) : Absolument.
Et ce n'est pas parce qu'on a un gros quota ou un petit quota qu'on ne
finance pas nos activités, parce que l'ensemble des courtiers font affaire avec
une banque pour financer leurs activités.
M. Jolin-Barrette : O.K. Et puis,
lorsque vous dites qu'il y a des retombées pour les entreprises québécoises, pouvez-vous expliquer aux membres de la commission
comment ça fonctionne, dans le fond, ce programme d'investissement là?
M. Abikzer
(Patrick) : Absolument. 55 % du revenu d'intérêts sur le
800 000 $ va aux PME. C'est tout simplement une subvention non
remboursable.
M. Jolin-Barrette : Et comment le choix est fait de dire : C'est
telle entreprise ou telle autre entreprise qui bénéficie de la
subvention?
M. Abikzer
(Patrick) : Il y a des
critères qui sont établis par Investissement Québec, et nous, en tant
qu'intermédiaires financiers, on doit identifier l'entreprise, recevoir
la demande de subvention et donner notre recommandation.
M. Jolin-Barrette : Donc, Investissement Québec demande aux
intermédiaires financiers : Telle entreprise, supposons, à Beloeil,
dans mon comté, est-ce que vous donnez votre accord? Quelle est votre opinion
là-dessus pour la financer pour que cette entreprise-là ait une subvention non
remboursable?
M. Abikzer
(Patrick) : Exactement. Ça dépend, bien entendu... C'est une liste de
critères, et on peut donner comme subvention jusqu'à 15 % du
montant investi. Par exemple, une entreprise, une PME québécoise qui aurait un
projet d'investissement peut recevoir jusqu'à 15 % de subvention non
remboursable, pour un maximum de 250 000 $ CAN.
M. Jolin-Barrette : O.K. Je vous remercie. Je sais que j'ai des
collègues qui veulent poser des questions. Peut-être que je reviendrai
par la suite.
M. Abikzer (Patrick) : Bien
sûr.
La Présidente (Mme Chassé) : M.
le député de Mégantic, vous désirez prendre la parole? Allez-y.
M. Jacques :
Oui, merci, Mme la Présidente. Bonjour, messieurs. Vous avez parlé au départ,
là, que ça prenait de six à huit ans de traitement de dossier.
Pouvez-vous m'expliquer un peu pourquoi les délais sont si longs que ça, là?
M. Abikzer
(Patrick) : Bien, oui, je... oui. Écoutez, il y a actuellement presque
19 000 personnes de la catégorie des immigrants investisseurs, donc
qui détiennent un certificat sélection du Québec, qui sont en attente de leur
résidence permanente. Si on évalue à peu
près à 3 500, à 4 000 personnes immigrantes qui peuvent être admises
au Québec d'après le plan 2020‑2022, bien, on divise 19 000 par
trois et demi, quatre, donc ça fait à peu près six ans.
D'ailleurs,
si on va sur le site du gouvernement fédéral et on regarde le temps d'attente
pour un dossier Québec, on est rendu
aujourd'hui à 54 mois. C'est pour cette raison qu'on parle, au niveau fédéral,
d'une attente pas loin de six ans, et, au niveau du Québec, à peu près... bon, on était à un an, maintenant, avec
la réduction du nombre de dossiers qu'on sélectionne chaque année, on
parle d'environ deux ans, donc à peu près deux plus six, ça peut aller jusqu'à
huit ans.
M. Jacques :
Donc, c'est une problématique, au niveau de l'immigration au niveau fédéral qui
fait que les dossiers ne sont pas traités avant six à huit ans.
M. Abikzer (Patrick) : Pas vraiment. Je pense que la problématique,
c'est la problématique des niveaux d'immigration. Je ne suis pas ici pour juger les niveaux
d'immigration. Peut-être, je pourrais vous donner mon avis personnel, bien
entendu, mais c'est le Québec qui décide, finalement,
combien d'immigrants investisseurs vont rentrer chaque année parce que
c'est le fédéral... c'est le Québec qui établit ses niveaux d'immigration.
Le
Québec pourrait dire : Je veux accepter 10 000 investisseurs demain,
ce ne serait pas tellement justifié vu la situation économique du Québec avec les besoins de main-d'oeuvre, mais
il pourrait le faire. Même si je suis dans le domaine, ce ne serait pas
ma recommandation.
M. Jacques :
Et ce serait quoi, votre recommandation?
M. Abikzer
(Patrick) : De permettre à ces 18 000 personnes et à ceux qui
sont dans le processus de pouvoir venir au Québec avec un visa temporaire. Parce que, quand on obtient un CSQ, ça
équivaut à avoir un CAQ, un certificat d'acceptation du Québec, ça peut
être considéré ainsi.
Le gouvernement
fédéral reproche au Québec que ses immigrants investisseurs ne restent pas ici,
qu'ils vont à Vancouver et à Toronto. Ce
n'est pas une obligation pour l'investisseur de venir, mais donnons-lui la
chance. Et, ceux qui viennent, à ce
moment-là, on leur donne une voie rapide. Je ne vois pas comment le fédéral
pourrait refuser un permis de travail
de deux ans pour venir étudier et travailler lorsque le Québec le demande,
parce que le fédéral nous reproche que les investisseurs ne restent pas
ici. Ça, c'est la façon avec laquelle ils vont rester puis ils vont participer
au développement du Québec.
M. Jacques :
Est-ce qu'il y a d'autres provinces qui offrent des programmes d'immigrants
investisseurs?
• (15 h 30) •
M. Abikzer
(Patrick) : Oui, oui, c'est ce qu'on appelle un peu les PNP. Il y en a
un peu partout au Canada. Ce n'est
pas un programme investisseurs fédéral, mais c'est des programmes de... le PNP,
c'est comme un programme au Québec. Donc,
il y a des programmes partout : Provinces atlantiques, il y en a à
Vancouver, il y en a à Toronto, c'est différents programmes.
M. Jacques :
C'est combien d'immigrants qui sont acceptés par ces programmes-là chaque
année?
M. Abikzer
(Patrick) : Il y en a beaucoup. Je ne pourrais pas vous le dire,
actuellement. Vous donner un chiffre exact, je ne pourrais pas vous le
dire, mais je pourrai vous le communiquer avec grand plaisir.
M. Jacques :
Vous avez dit, dans votre mémoire, là, qu'au niveau d'augmenter l'immigration
économique à 65 %, c'était une bonne idée. Vous voyez ça comment?
Pourquoi que c'est une bonne nouvelle?
M. Abikzer
(Patrick) : D'augmenter l'immigration économique?
M. Jacques :
À 65 %.
M. Abikzer
(Patrick) : Écoutez, le Québec est en plein-emploi. On a besoin de
gens, il faut les faire rentrer. Puis ce n'est pas seulement les gens
qui doivent entrer pour le plein-emploi, je pense, c'est important aussi de
faire venir des investisseurs. Pourquoi? Parce que, d'abord, ce sont tous des
ambassadeurs économiques. L'exportation est tellement importante. Ces gens peuvent venir au Québec, s'installer, créer de
l'emploi, oui, des très bons emplois. Ce sont aussi des gens qui peuvent... qui sont innovateurs. Ils ont
des entreprises dans leur pays étranger... dans leur pays d'origine,
pardon, c'est important de les avoir ici.
Pourquoi les laisser attendre huit ans? Ils peuvent contribuer à la prospérité
du Québec et de façon significative.
M. Jacques :
Merci.
M. Labrie
(Yanick) : Est-ce que je peux ajouter?
M. Abikzer
(Patrick) : Bien sûr.
La
Présidente (Mme Chassé) :
Il reste 1 min 30 s au bloc. Est-ce qu'il y a
une autre intervention des membres du bloc formant le gouvernement?
Vous désirez, M. Labrie, prendre la parole? Allez-y.
M. Labrie
(Yanick) : Bien, tout simplement
pour ajouter à ce que mon collègue
disait, il y a
l'autre élément qui est important à
considérer, c'est les liens avec les pays d'origine. Donc, ces investisseurs,
quand ils viennent ici, ils ont des liens, évidemment, d'affaires avec
d'autres pays, les pays d'où ils proviennent, avec lesquels ils font affaire.
C'est important, d'un point de vue économique, de tisser ces liens-là, les liens commerciaux
et, après coup, on a des exportations en plus grand nombre, et c'est
aussi porteur pour le Québec, c'est aussi générateur d'emplois. Alors, ça,
c'est un autre volet aussi qui est à considérer.
La
Présidente (Mme Chassé) :
Excellent. Il reste une minute au bloc. Y a-t-il... Oui, Mme la députée, allez-y.
Mme Lachance
(Bellechasse) : Je vais
faire ça rapidement, merci. Merci d'être là. Dans votre
positionnement, vous nous avez
entretenus du faible taux de rétention, on vient d'en discuter quand même
beaucoup, et vous avec mentionné que le délai de six à huit ans pour l'obtention du CSQ
était une cause principale et que de proposer un visa de travail
temporaire serait une solution. Y a-t-il d'autres solutions pour favoriser la
rétention, selon vous?
La Présidente (Mme Chassé) : 30
secondes.
M. Abikzer (Patrick) : Écoutez...
Faire venir les gens plus rapidement?
Mme Lachance (Bellechasse) : ...
M. Abikzer
(Patrick) : Réduire le
délai, ça veut dire automatiquement augmenter l'admission des investisseurs.
Ce n'est pas le moment idéal, avec les
objectifs du gouvernement. Je pense que c'est une bonne option, reculons un
peu pour mieux sauter. C'est ce que fait, actuellement, le gouvernement en évaluant tous les programmes. Mais en
attendant, pourquoi ne pas faire venir ces gens-là avec un visa temporaire pour
qu'ils puissent s'intégrer?
La
Présidente (Mme Chassé) :
Merci. Ça termine le bloc d'échange avec le parti formant le gouvernement. On est maintenant
rendus au parti formant l'opposition
officielle pour un bloc d'échange de
10 minutes. M. le député de Nelligan, la parole est à vous.
M. Derraji : Merci,
Mme la Présidente. Merci pour votre
mémoire. Et ma première question : Avez-vous des craintes par rapport
à la prospérité de ce programme du point de vue gouvernemental?
M. Abikzer (Patrick) : Des
craintes? Non, c'est un bon programme. Pour moi, c'est un excellent programme, définitivement.
Bien sûr, on oeuvre à l'intérieur...
M. Derraji :
...reformuler ma question : Si demain, je vous dis que le gouvernement va
arrêter ce programme, ça va être quoi, votre réaction?
M. Abikzer
(Patrick) : Bien, écoutez,
le gouvernement a tous les pouvoirs d'arrêter un programme et de
le faire. Je ne suis là que pour
participer au programme. Si le gouvernement décide demain d'arrêter le programme,
je trouve que ce serait une très, très
mauvaise idée, ça serait aller à l'encontre de l'intérêt du Québec.
Je ne pense sincèrement pas que c'est dans l'intérêt du Québec ni
du gouvernement d'arrêter ce programme.
M. Derraji : Pourquoi?
M. Abikzer
(Patrick) : Parce que
c'est un programme très bénéfique pour le Québec et qui pourrait être
amélioré pour être encore mieux. N'oubliez
pas qu'en 1986 ce programme a été créé. Ça a été la première fois dans le monde
qu'un programme Immigrants
investisseurs a été créé. Le monde entier nous a copiés, et on a laissé ce programme
aller à des taux... à huit ans de
l'acceptation, alors qu'il y a d'autres programmes, d'autres pays qui nous ont
copiés qui sont à un an, moins d'un an.
Pour quelle raison? Tout le monde nous a copiés, et aujourd'hui on laisse un programme
aller à l'arrière. Non, je ne crois pas que ce serait une bonne idée.
M. Derraji : Donc, pour vous, malgré le fait qu'il y a
un délai, vous le jugez quand même nécessaire, que c'est un bon programme, mais il y a
une piste à améliorer le programme.
M. Abikzer (Patrick) : Absolument.
M. Derraji : Excellent. Merci,
ça répond à ma question.
Ma deuxième question,
on a parlé beaucoup de problèmes d'image par
rapport aux immigrants
investisseurs. Ma question, c'est par rapport à vous. Vraiment,
qu'est-ce que vous faites pour nous rassurer, rassurer les élus, rassurer la population?
Avez-vous mis en place des pratiques de conformité, gestion d'éthique? Parce que
nous et les membres de la commission, j'en suis sûr et certain, nous avons à coeur le développement économique, et j'ai lu votre mémoire, vous parlez de 48 000 emplois
depuis 2000, vous parlez de 900 millions de dollars. Et je rajoute un
autre point pour le bénéfice de tout le monde, les revenus générés par Investissement Québec financent un
programme du MIDI, qui est le programme PRIIME, qui aide les minorités éthiques et visibles à accéder au marché de
l'emploi qui est, «by the way», un très beau programme. Mais par rapport
à vous, qu'est-ce que vous faites pour améliorer tout ce qui est éthique et
gestion de conformité pour éviter les abus?
M. Abikzer (Patrick) : Bien,
écoutez, d'abord nous sommes réglementés par l'OCRCVM, par l'Autorité des
marchés financiers, on doit respecter toutes les règles de blanchiment
d'argent. Donc, on est... il y a de la conformité, énormément. D'ailleurs,
aujourd'hui, il y a des gens de l'OCRCVM à mon bureau à Montréal. Donc, il est
clair que la conformité est là, on est
obligés de suivre toutes ces règles, et donc on est vraiment un paravent pour
s'assurer d'abord que l'argent qui rentre au Québec... et l'origine des
fonds, s'assurer qu'il n'y a pas d'abus.
En
plus de ça, on est là pour pouvoir recruter les immigrants investisseurs au
niveau international, les rencontrer à travers
nos réseaux d'agents. Donc, il y a tout un travail qui est fait en amont, et en
plus de ça, on est ici quand ils arrivent. On peut également jouer un rôle demain pour ces immigrants qui auront
obtenu un permis de travail temporaire pour venir s'installer ici pendant les deux ans. On pourrait
jouer un rôle avec les investisseurs qui arrivent ici pour les aider,
justement, à intégrer la société québécoise, à chercher des opportunités
d'affaires, toujours dans le cadre de l'entente tripartite que nous avons avec
le ministère de l'Immigration et Investissement Québec.
M. Derraji : ...
M. Tardif
(Pierre Olivier) : Et le programme
québécois... excusez, le programme québécois
est un des programmes les plus
compliqués et les plus difficiles à monter des dossiers pour les immigrants
qui viennent, là. Ça prend très,
très... énormément de temps à monter et faire des «due diligences»
sur l'immigrant, beaucoup plus que la plupart des autres pays qui...
M. Derraji : Merci. Vous comprenez que c'est un point très
important, la conformité, pas par
rapport uniquement aux élus, mais aussi à l'ensemble de la population.
M. Tardif (Pierre Olivier) : Absolument,
absolument.
M. Derraji : Un autre point, et je lance une réflexion avec
vous, le gouvernement se lance dans une démarche avec une politique internationale avec une bonne présence d'Investissement Québec à l'étranger, et j'entends le ministre, tout à l'heure, par rapport à sa question au
niveau des 22 % que les compagnies prennent pour les
300 000 $ et l'argent généré... Si je vous dis : Demain,
le gouvernement va plus donner le mandat à Investissement Québec et de faire ce
que vous faites présentement, ça serait quoi, votre réaction?
M. Abikzer (Patrick) : Écoutez,
je vais vous répondre très franchement, d'accord?
M. Derraji : ...vraiment, c'est
pour ça...
M. Abikzer
(Patrick) : C'est très, très complexe d'aller chercher des
investisseurs étrangers et de les faire venir et c'est excessivement dur. Le programme existe depuis 1986, il est
toujours là, et, croyez-moi, c'est parce qu'on est... parce que les intermédiaires financiers sont ici. On est
un «screen», on va chercher les clients à l'étranger. On s'assure que ce
sont de bons candidats, on s'assure de l'origine de leurs fonds. L'ensemble de
leur actif est évalué, non pas comme aux États-Unis.
Aux États-Unis, le programme EB-5, bon, il était à 500 000 $
encore il n'y a pas longtemps, l'investisseur devait faire la preuve des sources de fonds seulement du
500 000 $ qu'il investissait aux États-Unis. Au Québec, si un
investisseur a 200 millions, il doit faire la preuve de l'origine des
fonds du 200 millions qu'il déclare, puis il est obligé de déclarer l'ensemble de ses actifs. Donc, je peux vous dire
que ce n'est pas facile et je peux vous dire qu'on travaille très, très
fort, parce que chaque dossier, il y a
énormément de travail qui est fait. On est constamment partis aux quatre coins
du monde pour aller, justement, recruter ces investisseurs.
M. Derraji : Je pense, ma
collègue...
La Présidente (Mme Chassé) :
Mme la députée de Bourassa-Sauvé, vous désirez prendre la parole?
Mme Robitaille : Oui.
Dites-moi, il reste combien de temps?
La Présidente (Mme Chassé) :
3 min 30 s.
• (15 h 40) •
Mme Robitaille :
Merci. Merci, monsieur, d'être ici. Écoutez, justement, vous parlez de
rétention, vous dites que ces gens-là ne restent pas toujours ici, c'est un
problème. Vous parlez, dans votre rapport... Vous suggérez... Vous dites :
«La solution la plus porteuse — pour retenir ces gens-là ici — consisterait
à adopter des politiques fiscales et réglementaires se rapprochant de celles en
vigueur dans les autres provinces canadiennes, [comme] l'Alberta, l'Ontario et
la Colombie-Britannique.» À quoi faites-vous référence?
M. Labrie
(Yanick) : Évidemment, il y a plusieurs facteurs, hein, qui expliquent
les raisons pour quoi les immigrants investisseurs
ne vont pas demeurer au Québec. Il y a des facteurs qui sont d'ordre
linguistique, culturel, il y a des facteurs pour lesquels les politiques publiques n'ont pas d'emprise. Pour ce qui est
de la fiscalité, pour ce qui est de la réglementation, ça, c'est un volet, évidemment, pour lequel le
gouvernement a vraiment un impact. Il peut changer les choses, il peut être
plus attrayant pour les investisseurs si,
justement, le climat d'affaires encourage, justement, la création
d'entreprises. Est-ce qu'à l'heure où
on se parle le fardeau réglementaire, le fardeau pour lancer une affaire est
équivalent à celui des autres provinces, les provinces que vous avez mentionnées, l'Ontario, la
Colombie-Britannique? On le sait, c'est effectivement le cas, il y a des
gens qui vont transiter par le Québec qui vont aller dans d'autres provinces.
Si on veut qu'elles restent ici, il faut qu'il y ait des opportunités sur le plan économique aussi pour eux, pour leurs
descendants, donc pour les enfants, la famille, etc., donc il faut qu'il y ait... Si on dit que c'est un
obstacle, la question linguistique francophone, eh bien, il faut compenser
là où on peut le faire, et c'est via des politiques fiscales comme ça qui sont
plus attrayantes d'un point de vue économique.
Mme Robitaille :
Alors, vous dites : Il ne faut pas abolir du tout ce programme-là, au
contraire, il faut encourager ces gens-là, il faut accélérer le
processus.
M. Labrie (Yanick) :
Effectivement, effectivement.
Mme Robitaille : Il faut les
aider à rester, il faut mettre des mesures en place pour que ces gens-là
demeurent chez nous.
M. Tardif (Pierre Olivier) : ...venir
s'établir le plus rapidement possible au Québec.
M. Abikzer
(Patrick) : Oui, exactement.
Pouvez-vous vous imaginer qu'aujourd'hui il y a 18 000
personnes, donc environ 6 000
familles, qui attendent de venir au Québec en tant qu'investisseurs et pour apporter
leur contribution? Donc, ce sont des
gens qui ont des capitaux, accès à des marchés étrangers et puis ils attendent.
Pourquoi? Tout le monde les veut à travers
le monde, tout le monde se bat pour les avoir. Nous, on les a, puis il faudrait
juste accélérer un petit peu pour les faire venir. Tout le monde se bat
pour ça, il y a des programmes partout dans le monde.
Mme Robitaille : Et justement vous dites que, si on accélérait le
processus, au moins ils resteraient plus longtemps.
M. Abikzer (Patrick) : Oui,
c'est ça.
La Présidente (Mme Chassé) : Il
reste une minute pour vos échanges.
M. Abikzer
(Patrick) : Mais le problème, c'est que cette situation ne date pas
des six derniers mois, cette situation date depuis longtemps. On parle
de plusieurs, plusieurs années.
Mme Robitaille :
Vous dites «un programme très, très bénéfique pour le Québec». Résumez-moi
encore une fois pourquoi, pourquoi vous y tenez.
M. Labrie
(Yanick) : Bien, le volet économique, je l'ai résumé. Sur le plan des
retombées, c'est indéniable, hein, c'est
indéniable. Il y a des retombées en termes d'investissements, des
investissements qui sont créateurs de richesse, mais créateurs également
d'emplois. J'ai chiffré... en fait, c'est Investissement Québec, ce sont des
données publiques, qui chiffre à près de
50 000, là, depuis 20 ans... Et il faut regarder également tout le volet
investissements, qu'est-ce qu'il génère en termes de profits...
La Présidente (Mme Chassé) : En
terminant.
M. Labrie
(Yanick) : ...en termes de
profits, en termes de gains de productivité. À la base, hein, le
principal facteur d'amélioration de notre niveau de vie, c'est les gains de
productivité. Sur le plan démographique, avec le vieillissement, ça
risque d'être plus lourd pour les finances publiques, alors on doit compenser
par la productivité.
La
Présidente (Mme Chassé) : Ça termine le bloc d'échange avec
l'opposition officielle. On est maintenant rendus au bloc d'échange avec
le deuxième groupe d'opposition. M. le député de Laurier-Dorion, la parole est
à vous pour un bloc de 2 min 30 s.
M. Fontecilla :
Merci, Mme la Présidente. Je vais enchaîner tout de suite à l'idée de la
députée de Bourassa-Sauvé. Et vous
avez dit tantôt que le gouvernement fédéral avait abandonné ce programme-là.
S'il est si payant, pourquoi l'a-t-il abandonné?
M. Abikzer
(Patrick) : Ce n'est pas le
même programme, d'abord. Il y avait un programme qui était semblable au niveau du gouvernement
fédéral, mais ils ont accumulé des
sommes, ils ne savaient pas le placer. La vérité était là, ils n'ont pas pu le placer correctement. Nous, au Québec,
on le fait, et c'est placé grâce à Investissement
Québec. La collaboration entre Investissement
Québec et les intermédiaires
financiers nous a permis de placer ces sommes. Puis après ça le
programme a été changé au niveau fédéral, et
on est passés à un programme où il fallait investir plusieurs
millions de dollars pendant
une très, très, très longue période sous
forme de capital de risque, et puis ça n'a jamais fonctionné, donc le programme
a été ouvert puis fermé tout de
suite. Donc, on est vraiment, au Québec, les spécialistes du programme
Immigrants investisseurs au Canada. Et d'ailleurs ça existe depuis 1986
encore, sans jamais avoir eu 1 $ qui a été perdu par un investisseur,
jamais.
M. Fontecilla : Quel est le
taux de rétention, déjà, de ce programme-là?
M. Abikzer
(Patrick) : Très difficile à dire. Il y en a qui disent 15 %,
d'autres qui disent 30 %. Ça dépend comment vous calculez le taux
de rétention. Encore une fois, très difficile d'avoir un taux de rétention
lorsqu'on n'offre pas aux gens de venir.
M. Fontecilla : Mais c'est
plutôt bas.
M. Abikzer
(Patrick) : Ah! oui, définitivement.
M. Fontecilla :
Parfait, parfait. Il y en a qui disent que c'est un programme qui vise à
acheter la résidence canadienne, la résidence permanente, et à aller
s'installer ailleurs au Canada, qu'ils ont très peu d'intérêt pour s'installer
au Québec. Qu'est-ce que vous répondez à...
M. Abikzer (Patrick) : Oui,
oui, oui, je comprends ce que vous voulez dire, mais c'est encore la même
chose, d'accord, on revient toujours au même
point, O.K.? La personne qui arrive obtient une résidence permanente
canadienne, il peut aller où il veut, pas
besoin... il n'est pas obligé de venir au Québec. Des fois ils ne viennent pas
au Québec parce que, d'abord, ça a
pris trop de temps, leurs plans ont changé. Donc, il y en a une partie qui ne
viennent même pas au Canada. Ceux qui
viennent au Canada, ils vont peut-être aller dans d'autres provinces, oui, mais
parce qu'on ne leur a jamais donné la chance non plus de venir ici et de
pouvoir... de voir comment fonctionne le Québec...
La Présidente (Mme Chassé) : Il
reste moins de 30 secondes.
M. Abikzer
(Patrick) : ...de leur donner la chance de venir apprécier qu'est-ce
que c'est que de vivre et de faire des affaires
au Québec. Donc, ça pourrait être intéressant, encore une fois, de leur
permettre de venir, après l'émission de leur CSQ, passer quelques années
ici.
La
Présidente (Mme Chassé) : Très bien, merci. On est maintenant
rendus au bloc d'échange avec le troisième groupe d'opposition. Mme la
députée de Gaspé, la parole est à vous pour un bloc de
2 min 30 s.
Mme Perry
Mélançon : Merci, Mme la Présidente. Donc, il y a déjà plusieurs
questions qui ont été posées, je ne m'éterniserai
peut-être pas sur les délais, et tout ça, comme on l'a entendu. On a parlé
beaucoup de chiffres, c'est normal, on est dans les impacts positifs
financiers, qu'est-ce que ça apporte au Québec.
Moi, j'ai une
préoccupation, je vous dirais, très régionaliste. J'ai à coeur le développement
régional et j'aimerais savoir si vous avez des données par rapport à ces
6 000 entreprises et plus que vous avez pu faire bénéficier des
projets d'affaires et tout. Est-ce qu'on sait si ça a un impact sur les régions
puis qu'est-ce qu'on peut faire pour améliorer?
M. Labrie
(Yanick) : Il y a des données qui existent d'Investissement Québec. On
a fait le choix d'avoir un portrait plus global, agrégé à l'ensemble du
Québec, mais c'est indéniable que le programme bénéficie également aux régions.
Il y a un processus aussi de sélection des PME qui est fonction de la
localisation. Évidemment, l'un des critères est de regarder si le projet
d'affaires est viable, est-ce que ça justifie, justement, l'investissement
d'Investissement Québec.
M. Abikzer (Patrick) : Mais la
majorité... excuse-moi.
M. Labrie (Yanick) : Oui.
M. Abikzer (Patrick) : La
majorité des subventions est donnée en région. C'est ça, la beauté du programme
Immigrants investisseurs. Si c'est ça, la
réponse que vous voulez, oui, les régions sont gâtées au niveau de ce
programme, définitivement.
Mme Perry
Mélançon : O.K. Oui, bien, ces subventions, c'est sûr, pour nous,
c'est important, mais aussi les gens, parce
que ça, c'est le gros nerf de la guerre, là. Donc, quand vous parlez de gens
qui sont en train de faire des demandes pour venir s'établir, bien, j'aurais été curieuse de savoir s'il y en a
énormément qui visent d'autres endroits que les grands centres, parce que c'est sûr que, quand on enrichit les
grands centres avec des investissements comme ça, bien, c'est nos régions
qui se dépeuplent. Donc, c'est ma seule crainte, et puis je voulais vous
entendre là-dessus.
M. Abikzer
(Patrick) : Oui, vous avez raison, mais n'oublions pas que ce sont des
immigrants investisseurs. Un immigrant
investisseur est un nomade, il a des affaires un peu partout dans le monde.
Donc, souvent, il peut investir dans une région, mais il ne va pas gérer
l'affaire en région, ça, c'est clair, contrairement aux immigrants
entrepreneurs, qui vont justement faire ça. Et, voyez-vous, la difficulté que
nous avons de les attirer depuis bien longtemps, donc...
La Présidente (Mme Chassé) : Il
reste 30 secondes.
M. Abikzer (Patrick) : Un
immigrant investisseur est vraiment, donc, un immigrant qui gère ses affaires
au niveau global.
Mme Perry
Mélançon : O.K. Bien, ça fait le tour de mes questions, mais, comme on
vous a, vous avez parlé des retombées
que ça a pour la main-d'oeuvre puis aussi les technologies, donc j'aimerais
vous entendre à ce niveau-là, parce que
ça aussi, d'avoir des investissements au niveau technologique en région, on
sait qu'on n'a pas besoin d'être sur place, comme vous dites, c'est des
nomades et tout, donc...
La Présidente (Mme Chassé) : En
terminant.
Mme Perry
Mélançon : Oui, merci, MarieChantal.
La
Présidente (Mme Chassé) : Ça s'en vient, on va l'avoir, deuxième
réchauffement. Ça termine l'échange avec vous. Je vous remercie pour
votre contribution.
Je suspends les travaux momentanément pour
permettre au prochain groupe de prendre place.
(Suspension de la séance à 15 h 49)
(Reprise à 15 h 52)
La
Présidente (Mme Chassé) :
À l'ordre, s'il vous plaît! Je souhaite maintenant la bienvenue aux
représentants d'Echelon Gestion de
patrimoine. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé — à
une minute de la fin, je vous ferai
signe — et
après quoi nous procéderons à la période
d'échange avec les membres de la commission. Je vous invite tout d'abord à vous
présenter puis à débuter. Allez-y.
Partenaires en gestion de patrimoine Echelon
M. Tessier (Samuel) : Bonjour.
Mon nom est Samuel Tessier, je représente Echelon Gestion de patrimoine. Également,
je suis consultant en immigration au niveau fédéral et au Québec.
M. Côté
(Alex) : Moi, c'est Alex
Côté, consultant en gestion de patrimoine international, et je suis aussi
consultant en immigration régi au fédéral et provincial ici, au Québec.
La Présidente (Mme Chassé) :
Allez-y. Merci.
M. Côté (Alex) : Excellent.
Chers députés, respectés membres de la commission parlementaire, confrères et
consoeurs, merci pour votre présence et attention cet après-midi dans le cadre
de cette audition de la planification de l'immigration au Québec pour la
période 2020 à 2022.
Aujourd'hui, nous sommes présents devant vous afin de promouvoir les mérites et
accomplissements du Programme des
immigrants investisseurs du Québec.
L'objectif de notre présentation aujourd'hui est d'encourager l'élimination
du seuil de placement, qui est présentement
fixé à 800 par année, illustrer les retombées économiques du programme pour
le gouvernement du Québec et les PME
québécoises et aussi inciter le gouvernement à poursuivre avec les périodes de
réception de demandes de sélection permanente pour la période 2020 à 2022 pour
le programme investisseurs.
Nous
représentons l'intermédiaire financier Partenaires en gestion de patrimoine
Echelon. Echelon agit à titre de courtier en placement, a des bureaux de
Vancouver jusqu'à Montréal, donc c'est un 10 bureaux total, et nous avons
présentement 5,8 milliards de dollars d'actifs sous gestion. Nous sommes
nouvellement sur la liste des courtiers et des sociétés fiducies autorisées depuis 2016. Et d'ailleurs Echelon s'est
conformé à l'article 39 et l'article 117, selon le Règlement de l'immigration au Québec. Ceci veut donc dire
que nous avons maintenant une société régie aussi par l'OCRCVM en
vigueur sur le sol du Québec, avec des membres du comité exécutif au Québec.
Pour votre
information aussi, moi-même et Samuel, comme qu'on a mentionné, nous sommes
aussi des consultants en immigration
agréés au niveau fédéral et à la province, donc nous avons la chance de nous
entretenir beaucoup avec les candidats
investisseurs. Et la société Echelon a comme objectif d'accueillir les gens
d'affaires de catégorie investisseurs afin
d'accompagner ces gens-là dans le déploiement de leur capital à l'intérieur du
Québec et d'aussi les guider dans leur nouvelle géographie d'adoption,
qui est le Québec.
M. Tessier
(Samuel) : Alors, historiquement, le Québec... le programme
investisseurs a permis au Québec d'être un pionnier et un modèle en
termes d'immigration d'affaires. Ce programme a été extrêmement porteur pour
l'économie québécoise pour différentes raisons que nous allons élaborer, là,
pendant l'exposé. Alors, notamment, en fait, on va commencer avec les bénéfices économiques liés aux PME au Québec. Donc,
en fait, là, il y a plusieurs chefs d'entreprises qui ont été sondés,
qui ont reçu la subvention, qui ont fait des demandes de subvention, et environ
91 % des dirigeants d'entreprise
interrogés affirment que l'immigration par investissement devrait être
favorisée pour injecter davantage de capitaux
étrangers dans l'économie du Québec. De plus, le programme permet au
gouvernement du Québec d'obtenir des fonds substantiels pour financer des programmes sans hausser le fardeau fiscal
sur les contribuables ni réduire l'assiette de services.
Alors, le
programme Immigrants investisseurs est une formule originale et avantageuse qui
permet notamment, là, d'obtenir la subvention
d'aide aux entreprises IMIN. Donc, c'est une contribution financière non
remboursable offerte aux entreprises
d'ici. Les intérêts générés par le placement, donc provenant des immigrants
investisseurs, est géré par Investissement
Québec et sont attribués à des entreprises. Donc, selon les sommaires cumulés,
là, des retombées économiques sur le
programme investisseurs de juin 2000 à avril 2019, les retombées
économiques, là, pour les PME sont les suivantes, donc, en fait, plus de 6 000 dossiers
ont été présentés et autorisés pour une contribution financière non
remboursable, c'est un total de
13 milliards de projets qui ont été présentés à Investissement Québec dans
le cadre de la subvention IMIN, et en fait, là, les retombées sont plus de 900 millions de montants d'aide
autorisés par Investissement Québec sous forme de subventions qui ont été autorisées aux entreprises pour la
croissance ou des projets d'expansion et principalement, donc, en région.
Donc, la plupart des entreprises peuvent
bénéficier de ce produit, qu'elles soient dans n'importe quelle phase de leur
développement.
Le
programme d'aide aux entreprises, donc, a permis de créer ou de conserver plus
de 43 000 emplois, selon les déclarations
des entreprises, et dans toutes les régions du Québec. Puisque nous sommes un
intermédiaire financier accrédité par
Investissement Québec, nous octroyons les recommandations vers les PME du
Québec. Les seuils de placement imposés par le gouvernement nous inquiètent sérieusement, puisque les décisions
du ministère de l'Immigration sortent au compte-gouttes au niveau du
traitement des dossiers d'investisseurs, étant donné les seuils de placement en
place. Nous parlons d'environ 57 % de
baisse par rapport à l'année précédente et une augmentation des temps d'attente,
là, qui est pratiquement le double au
niveau des traitements des certificats de sélection. Nous croyons donc que
l'impact qu'il y aura sur le programme est
un ralentissement des subventions octroyées à des projets porteurs au Québec,
et donc les volumes que nous recevons de demandes pour ces subventions
sont extrêmement élevés par rapport aux subventions disponibles.
Donc, en
premier temps, le ministre des Finances et le gouvernement du Québec a comme
objectif d'emprunter au plus bas coût
possible sa dette à long terme. Donc, le bénéfice pour le gouvernement est
aujourd'hui de pouvoir emprunter des
sommes, environ 1 milliard par année, à un taux de 0 %, qui
représente environ, là, entre 5 % et 6 % de la dette annuelle du Québec. Donc, cette dette, en fait, là, depuis
le début du programme en 2000 sous la forme actuelle, a permis de lever
un peu plus de 14 milliards de dettes à
0 %, et donc qui ont toujours représenté, là, 5 % à 6 % de la
dette à long terme du Québec. Alors, le gouvernement épargne plusieurs
dizaines de millions de dollars en paiement d'intérêts à chaque année par la diversification de la dette via le programme
investisseurs. Également, en fait, il y a des frais exigibles qui sont générés
par le programme. Donc, aujourd'hui, un investisseur
paie 15 496 $, là, pour le traitement de son dossier, et donc,
évidemment, ce montant-là est récupéré 1 900 fois à chaque année.
Également, il
y a un programme d'aide à l'intégration des nouveaux immigrants, qui s'appelle
le programme PRIIME, qui est en forte
partie, là, financé par le programme investisseurs, qui permet l'insertion et
le soutien, là, à l'insertion des nouveaux
arrivants dans d'autres programmes. D'ailleurs, il y a une étude qui a été
faite par l'Institut du Québec, un organisme de réflexion qui réunit HEC Montréal, le Conference Board du Canada, qui
a rendu publique il y a quelques semaines une étude par rapport aux seuils d'immigration nommée Analyse des
incidences démographiques et économiques, l'étude qui avait comme objectif d'établir des seuils d'immigration
optimale pour le Québec. Il va sans dire qu'une augmentation du nombre d'immigrants accroît le PIB de la province. Mais
l'étude établit que le montant optimal, là, en fait, n'est pas clair pour
une nation, alors l'Institut du Québec estime qu'il n'existe pas de seuil
optimal de l'immigration.
Les résultats
de l'analyse, surtout ceux au niveau du PIB par habitant, indiquent que le
nombre actuel de nouveaux immigrants
qui devraient être admis à chaque année devrait être établi en fonction de
notre capacité à les intégrer sur le marché du travail. La recommandation qui en découle, donc, du rapport, est un
accroissement des seuils d'immigration. Toutefois, cette intégration devrait être tenue en compte.
Donc, dans ce contexte, nous recommandons aujourd'hui de ne pas imposer
de seuil d'immigration sur le nombre de
placements effectués par les immigrants investisseurs et ainsi utiliser un
maximum de fonds générés par ce programme
pour assurer notamment l'intégration en emploi des nouveaux arrivants dans la
société et également la francisation des personnes qui arrivent sur le
territoire du Québec.
Tel qu'indiqué dans cette analyse, le nombre
optimal de nouveaux immigrants que devrait accueillir le Québec annuellement devrait être établi selon notre
capacité, notre volonté à les intégrer sur le marché du travail. Et donc les
fonds générés par le programme PRIIME par le
biais du programme investisseurs sont une source importante de financement
aux différents programmes d'intégration qui
devraient donc être arrimés afin d'optimiser notre système d'immigration et
éviter de faire payer la facture de l'intégration aux contribuables québécois.
• (16 heures) •
M. Côté
(Alex) : Donc, comme je l'ai
mentionné tout à l'heure, le but de nos représentations n'était pas
seulement d'illustrer les bénéfices
économiques pour le Québec, mais aussi de sensibiliser le gouvernement et
encourager de poursuivre pour les
périodes de réception de demandes entre 2020 et 2022. Et ce qui nous inquiète
en ce moment, c'est qu'il pourrait potentiellement
y avoir un moratoire en vue étant donné l'inventaire de dossiers qui est chez
le MIDI en ce moment et le seuil de placement qui a été mis en place.
Et en fait
l'impact d'un moratoire, qu'est-ce qu'on voit? Pour les PME du Québec, on parle
de 42 millions de dollars... pertes, environ, de 42 millions
de dollars annuellement d'aide autorisée par IQ, Immigrants investisseurs, donc
les contributions financières non
remboursables qui sont données à des PME, et donc on peut estimer environ 350
PME impactées en 2019 seulement, avec
une majorité des récipiendaires ou des gens qui reçoivent ces subventions-là
qui sont dans les régions du Québec.
Évidemment, on verrait une décroissance dans le fonds réservé PRIIME pour
l'intégration et la perte des frais exigibles
pour les dossiers, qui sont environ de 30 millions de dollars par année,
qui sont générés par le MIDI, le ministère de l'Immigration.
Donc, faute
de temps, chers membres de la commission parlementaire, nous aimerions aussi,
dans un futur proche, adresser nos
propositions afin d'améliorer le programme pour les requérants et les
requérantes investisseurs. Le but de ceci serait de rester compétitif
sur le marché mondial et de continuer à attirer les meilleurs candidats dans
notre province.
Le Président (M. Lévesque,
Chauveau) : Il vous reste une minute, M. Côté.
M. Côté
(Alex) : Oui, merci. Donc,
je saute tout de suite dans les conclusions. Nous sommes d'avis que le
Québec peut continuer à agir à titre de
pionnier dans un modèle en termes d'immigration d'affaires. La prospérité que
le programme apporte économiquement se marie parfaitement avec le
gouvernement, les PME et ses contribuables.
Donc, afin de
poursuivre dans cette lancée, nos recommandations sont les suivantes : ne
pas imposer un seuil de placement pour les immigrants
investisseurs — ça
freine, en fait, la limite d'accès de capital pour les PME au Québec, notamment dans les régions, qui entraîne des
délais pour la réalisation des projets porteurs dans nos régions; il est
possible d'atteindre un seuil de nombre de
personnes sélectionnées par le Québec, plan d'immigration 2019, sans pour
autant impacter les
montants autorisés par IQ. Donc, on propose de revoir, en fait, la répartition
des immigrants permanents dans la catégorie économique au Québec...
Le Président (M. Lévesque,
Chauveau) : En conclusion.
M. Côté (Alex) : Et voilà,
c'est tout. On est prêts pour vos questions.
Le Président (M. Lévesque,
Chauveau) : Merci beaucoup, M. Côté, M. Tessier, pour votre
présentation. Maintenant, nous allons procéder à la période d'échange avec le
gouvernement. La parole est à M. le ministre.
M. Jolin-Barrette : Merci, M. le Président. M. Tessier,
M. Côté, bonjour, bienvenue à la Commission des relations avec les
citoyens. Merci pour la présentation de votre mémoire.
Tout à
l'heure, vous disiez : Avec les immigrants investisseurs, c'est de
l'injection de capitaux étrangers. On a vu tout à l'heure, avec le
groupe qui vous a précédés, que, dans le fond, la majorité du 1,2 million
qui est demandé ou préalablement le 800 000 $ qui était demandé pour
le programme Immigrants investisseurs, bien, en fait, c'est un flux monétaire qui est généré par des institutions
financières canadiennes ou québécoises. Donc, il n'y a pas d'argent qui
vient de l'étranger. Principalement, c'est
principalement un 300 000 $, un 350 000 $ qui est donné aux
intermédiaires financiers, et là on
se finance auprès des institutions financières québécoises, c'est bien ça? O.K.
Quand vous dites, à ce moment-là, qu'il y a des investissements
étrangers, ce n'est pas vraiment le cas.
M. Tessier
(Samuel) : Bien, donc, en fait, je répondrais à votre position de la
façon suivante, là, il y a deux façons de voir la chose, en fait. On attire des familles fortunées, des acteurs
économiques dans leur pays, qui vont, dans un premier temps, faire leur injection soit en déposant le
1,2 million en capitaux propres, donc certains le font, mais la plupart
des gens vont aller vers les facilités bancaires qui sont offertes par
les intermédiaires financiers. Donc, en effet, l'argent nouveau qui y rentre, là, c'est souvent le montant de
350 000 $, mais il ne faut pas oublier que par la suite ces
familles-là, c'est des familles qui
ont été auditées par le gouvernement du Québec, et qui ont établi une valeur
nette importante, et vont s'établir au Québec.
Donc, du coup, l'impact économique va se faire aussi, là, par la suite de leur
établissement au Québec dans le cadre de leur installation familiale,
là, dans la province.
M. Jolin-Barrette : Mais, quand on regarde les statistiques au niveau
de l'établissement, là, au Québec, là, le taux de présence, il est très faible, il est de moins de
20 %, puis surtout il est dans la région métropolitaine de Montréal.
Lorsqu'on prend Montréal, c'est à peu près
93 % des immigrants investisseurs qui sont à Montréal. Si on rajoute Laval
et la Montérégie, on arrive à 97 %. Alors, ça reste concentré à
Montréal, ce n'est pas en région, là.
M. Tessier (Samuel) : En effet.
Les subventions sont déployées à la hauteur de 88 % en région, cependant
les investisseurs eux-mêmes tendent à s'établir dans les capitales, en effet.
M. Jolin-Barrette : Revenons, là, sur les subventions. J'aimerais ça
voir votre vision, parce que, dans le fond, les intermédiaires financiers, eux, principalement, ils vont démarcher à
l'étranger avec les contingents pour que des immigrants investisseurs appliquent sur le programme, font
leurs démarches avec les facilités bancaires, comme vous le dites,
chargent un coût, j'imagine, fixe aux
immigrants investisseurs. Ils font un forfait complet, j'imagine, pour
débourser x milliers de dollars — tantôt, on parlait de
300 000 $ — et par
la suite l'intermédiaire financier, en lien avec l'immigrant
investisseur, sa relation s'arrête là. Au
niveau du programme d'aide, là, pour les entreprises, comment vous expliquez
que ce soient les intermédiaires financiers qui décident où va l'argent
et quels dossiers sont choisis?
M. Tessier
(Samuel) : Moi, bien, en fait, je peux renchérir sur ça, là. En fait,
au niveau de la sélection ou de la décision
qui est d'octroyer ou non la subvention, c'est fait par Investissement Québec.
Donc, à titre d'intermédiaire financier, ce qu'on va faire, c'est une recommandation. Donc, on voit un certain
nombre d'entreprises qui sont soit des clients des différentes firmes de courtage ou des différentes
banques et qui ont des besoins de capitaux, qui ont des financements qui
se font mettre en place, des projets qui
vont être lancés, et donc ces gens-là peuvent être admissibles, et donc
l'intermédiaire financier va recommander,
là, à Investissement Québec l'octroi de la subvention, et ensuite la décision
va venir d'Investissement Québec si le projet est porteur dans les
créneaux des industries ciblées, là, par Investissement Québec.
M. Jolin-Barrette : O.K. Mais comment un intermédiaire financier voit
le dossier? Exemple, là, supposons, moi, j'ai une entreprise, là, à Beloeil, dans mon comté, puis je vais voir
mon prêteur x, y, comment est-ce que je suis mis en relation avec l'intermédiaire financier? Parce
que, exemple, vous, là, chez Echelon, là, vous n'êtes pas une banque, ce
n'est pas vous qui avez 1,2 million par
immigrant investisseur, qui le prête à Investissement Québec, j'imagine, là. Je
ne veux pas présumer, là, mais
j'imagine que vous faites affaire avec une institution financière, une banque à
charte ou des assureurs, tout à l'heure. Donc, comment est-ce que le
dossier d'un investissement vient à l'intermédiaire financier?
M. Tessier
(Samuel) : Bien, il vient de différentes sources, a priori. Il
pourrait venir d'une banque. Donc, souvent, en fait, les gens sont mis à l'affût de cette subvention-là ou de la
disponibilité des subventions par la banque avec laquelle il travaille, dans un premier temps, ou encore par le
biais de la BDC, Investissement Québec ou d'autres bras financiers, là,
qui vont les financer ou les encadrer dans le cadre de leur démarche. Donc,
souvent, ça vient par des apporteurs d'affaires.
M. Côté
(Alex) : Ou sinon c'est des clients existants chez Echelon déjà qui se
font gérer leur argent chez nous.
M. Jolin-Barrette : O.K. Donc, il
y a une sorte de tutelle de la part
de l'investisseur... de l'intermédiaire financier sur l'argent qui est amené... sur les subventions
disponibles en fonction du choix de l'intermédiaire financier de financer
telle demande, tel projet ou tel autre projet. Dans le fond, Investissement
Québec, ultimement, c'est lui qui décide, sauf que l'intermédiaire financier a
son mot à dire dans la démarche de subvention qui est non remboursable.
M. Côté (Alex) : ...comparer les dossiers, mais, voilà, on a beaucoup
plus de dossiers que de subventions en ce moment, donc on n'est pas capables,
en fait, de combler toutes les demandes qu'on a. Voilà.
M. Jolin-Barrette :
Parce que tout le monde veut accéder aux subventions rattachées à ce programme-là.
M. Côté
(Alex) : Les gens qui sont admissibles, bien sûr.
M. Jolin-Barrette : O.K. Mais au niveau de l'expertise dans les
intermédiaires financiers, comment est-ce que les intermédiaires financiers font pour savoir que ce
dossier-là mériterait davantage la subvention qu'une autre entreprise qui demande un prêt?
M. Tessier
(Samuel) : Bien, il y a
certains paramètres, en fait, qui sont mis en place par Investissement Québec et... comme, par
exemple, l'exportation de produits au Québec vers l'international. Et donc,
quand on voit des dossiers, par exemple, qui vont répondre à ces paramètres-là de façon
très crédible, bien, évidemment, c'est des dossiers qu'on va favoriser,
qu'on sait qu'ils ont un haut niveau d'acceptation, là, chez Investissement
Québec.
M. Jolin-Barrette :
O.K. Et, quand vous dites, là, «on a énormément de dossiers par rapport au
nombre de subventions», vous diriez c'est quoi, votre proportion?
M. Côté (Alex) : Mais, comme je vous dis, Echelon, ils sont fraîchement sur la liste
depuis 2016, donc on n'est pas la
Financière Banque Nationale, là, qui a plus de 35 ans d'expérience, là, dans le
programme. Mais qu'est-ce que je peux dire,
c'est qu'en ce moment c'est presque du 10 pour un, on se fait écrire 10
demandes par mois et on est capables de décaisser peut-être
un dossier. Et en fait, quand on le décaisse, c'est parce qu'il faut que ce
soient des plus petits montants parce qu'on a des paramètres, on peut seulement financer entre 40 000 $ et 250 000 $. Donc, en
ce moment, voilà, c'est la réalité qu'on travaille avec.
• (16 h 10) •
M. Tessier
(Samuel) : Vu, en fait, la réalité du temps de traitement des
investisseurs, actuellement, avec le seuil notamment, là, le seuil de placement
qui a été mis en place, recevoir 250 000 $ de subvention
pour un intermédiaire financier, ça
peut être une année d'attente. Alors, du coup, comme Alex le disait, en fait,
on va les décaisser à mesure qu'ils rentrent, donc les plus petits projets vont être priorisés. Pour ne pas attendre,
en fait, une année pour décaisser une subvention
de 250 000 $, on préfère décaisser à chaque trimestre des subventions
de 50 000 $.
M. Côté (Alex) : En fait, le projet doit être
en vigueur, donc c'est important. Si le projet n'est pas en vigueur,
bien, on n'est plus admissibles, en fait.
M. Jolin-Barrette : O.K. Est-ce qu'il y a certains intermédiaires
financiers qui ont plus de dossiers qui sont acceptés que d'autres?
M. Tessier (Samuel) :
C'est une excellente question. Au niveau des investisseurs?
M. Jolin-Barrette :
Oui.
M. Tessier
(Samuel) : Oui, certainement qu'il y a des gens qui sont plus
habilités à présenter des dossiers au MIDI pour avoir des meilleurs taux
d'acceptation.
M. Jolin-Barrette : Non, non, mais je veux dire par rapport aux
subventions avec Investissement Québec, à votre connaissance.
M. Côté
(Alex) : Pas à ma connaissance.
M. Jolin-Barrette : O.K. Je vous remercie. Je sais que j'ai des
collègues qui veulent poser des questions, Mme la Présidente.
La Présidente
(Mme Chassé) : Oui, M. le député de Maskinongé, la parole est à
vous.
M. Allaire :
Merci, Mme la Présidente. Je vais faire du pouce...
La Présidente (Mme Chassé) :
Bienvenue avec nous.
M. Allaire :
... — oui,
merci, c'est gentil — faire du
pouce sur la question de mon collègue ministre. En fait, on sait que, bon, la richesse est redistribuée un
peu, là, sous forme de subventions pour les entreprises du Québec. On a
appris que c'était beaucoup en région aussi.
Croyez-vous que le programme est vraiment équitable? C'est-à-dire qu'une
entreprise, là, qui génère des bénéfices de
100 000 $, 200 000 $, 300 000 $ par année, par
exemple, versus une entreprise où le niveau de risque de l'entreprise, parce qu'elle est en début, début de cycle,
là, si on veut, donc dans un risque financier, là, d'investir dans cette entreprise-là... qui est plus élevé,
est-ce que vous pensez que c'est équitable, c'est-à-dire que l'entreprise
qui génère des bénéfices a autant de chances
de recevoir cette fameuse subvention là qu'une entreprise qui est plus à
risque?
M. Tessier
(Samuel) : Bien, en fait, ce que je peux dire par rapport à ça, c'est
qu'aujourd'hui une subvention peut aller
jusqu'à 15 % d'un projet en démarrage. Donc, en fait, Investissement
Québec a mis ce paramètre-là pour favoriser les entreprises en démarrage pour qu'elles aient de plus grands montants de
subventions, là, pour les aider à lancer leurs projets. Mais, en effet, la profitabilité, là, ce n'est pas
un critère, aujourd'hui, qui est regardé lors de l'octroi de subventions,
donc, voilà.
M. Allaire : Ça ne devient pas
un peu — puis
je vous pose la question en même temps, là — une façon, là, en développement des affaires, d'attirer des très,
très gros dossiers pour les différentes institutions financières, tu sais, de
laisser planer une certaine subvention de 200 000 $, 250 000 $,
peu importe le niveau de l'investissement que l'entreprise veut faire,
là?
M. Tessier
(Samuel) : A priori, ça pourrait être le cas. Est-ce que ces
projets-là sont plus porteurs pour l'économie du Québec que plusieurs
petits projets? Je ne peux pas... en mesure de l'établir, là, aujourd'hui.
M. Allaire :
Pensez-vous qu'il y aurait des solutions pour un peu amener une certaine équité
à travers l'ensemble des entreprises
du Québec? C'est-à-dire qu'une entreprise, une très petite entreprise, une TPE,
ou une moyenne, ou une grande
entreprise auraient, selon, là... toutes proportions gardées, là, autant de
chances une que l'autre d'avoir accès à ces subventions-là?
M. Tessier
(Samuel) : Bien, je pense que les intermédiaires financiers sont guidés
par les paramètres mis en place par
Investissement Québec. Donc, d'une certaine mesure, si les paramètres seraient
mis en place dans ce sens, ça favoriserait, en effet, là, l'octroi de
subventions à des plus petites entreprises en démarrage ou dans des secteurs
plus risqués, là, de l'économie québécoise.
M. Allaire :
Merci. Dans un autre ordre d'idées, on comprend bien votre mission, là, quand
même, on comprend bien aussi que la
baisse du seuil a un impact sur vos revenus, naturellement. Moi, c'est un autre
aspect qui me préoccupe, c'est-à-dire
comment qu'on fait maintenant pour garder les immigrants investisseurs ici, au
Québec? Est-ce que vous avez des solutions à nous proposer à ce
niveau-là?
M. Côté
(Alex) : Oui, bien sûr. On
sait que la rétention... je pense qu'il y a eu un peu de travail qui a été fait
par rapport à la rétention des immigrants
investisseurs. Je pense qu'il y a encore plus de travail qu'on pourrait faire.
On a toutes sortes de recommandations
qu'on serait prêts à partager avec le comité s'ils veulent les lire. Mais,
voilà, d'inciter les gens à faire
d'autres investissements directement dans la région du Québec en faveur de
«fast tracks» ou de traiter plus rapidement leur dossier, d'inciter les gens d'investir dans des biens fonciers ou
l'immobilier ici directement et... finalement, c'est des choses qui vont concrétiser leur rétention si les
gens achètent des maisons ou investissent dans des business via des
placements privés. Il y a toutes sortes de
recommandations qu'on pourrait faire, qui augmenteraient, en fait, le taux de
rétention des immigrants
investisseurs. Et aussi on est en faveur aussi, avec les visas temporaires, là,
qui avaient été proposés, en fait, tout
à l'heure. On le voit en ce moment, les délais de traitement sont excessivement
longs, et donc il faut donner la chance aux gens de venir découvrir c'est quoi, le Québec, et c'est quoi, les
différentes villes au Québec, et leur donner une chance de venir
s'établir directement dans la province.
M. Allaire : Ça va, merci. Je
n'ai pas d'autres questions.
La
Présidente (Mme Chassé) : Y a-t-il un autre membre du parti
formant le gouvernement qui désire intervenir? M. le ministre, allez-y.
M. Jolin-Barrette : Oui. Je reviens, là, sur ce que vous avez dit. Au
moment, là, de la subvention, là, du Programme d'immigrants investisseurs, là, vous avez dit «on décaisse», mais c'est
Investissement Québec qui décaisse, ce n'est pas l'intermédiaire
financier.
M. Côté (Alex) : C'est exact.
Ce n'était pas bien dit de ma part. C'est exact.
M. Jolin-Barrette : O.K., parfait. Mais vous avez quand même
une recommandation à faire par
rapport au dossier. Je vous donne un exemple, là, prenons le cas,
là, de votre situation. Vous n'êtes pas une banque, donc vous êtes en
relation avec Investissement Québec, qui
vient vous voir, qui vous dit : Bon, bien, nous, on a tel, tel nombre de
dossiers, est-ce que, dans le cadre de votre contingentement, vous
voudriez que ces entreprises-là obtiennent la subvention associée au programme?
C'est comme ça que ça fonctionne?
M. Tessier (Samuel) : Ça pourrait, dans certains cas. Ça pourrait venir
d'Investissement Québec, ça pourrait venir d'une recommandation de la BDC, qui est en train d'octroyer un financement dans un certain projet d'un entrepreneur
au Québec. Donc, ça peut venir de différents
endroits. Après ça, on va s'assurer que la documentation correspond bien
aux paramètres d'Investissement Québec pour envoyer l'octroi. Aujourd'hui, les subventions se font tellement rares qu'on peut s'assurer de prendre un dossier et, sur les 10 dossiers, là, ce que
M. Côté faisait référence, bien, prendre lui qui a les meilleures
chances et de présenter celui-là.
M. Jolin-Barrette :
Est-ce que les dossiers sont initiés par vous ou par Investissement Québec?
M. Tessier
(Samuel) : Alors, il y a toujours
un financement dans un dossier, parce que c'est un projet qui
est en train d'être lancé, donc, du
coup, c'est certain qu'il y a une banque, Investissement Québec ou la
BDC qui est derrière le projet pour
financer le reste du projet. Donc, nous, c'est une subvention
de 10 % qui se veut être de
l'équité dans le projet. Alors, il y a de... là, souvent, qui va être mis
en place. Donc, il y a des comptables d'impliqués, voilà.
M. Jolin-Barrette :
...que vous dites qu'il ya de l'équité dans le projet. Qui a de l'équité dans
le projet?
M. Tessier
(Samuel) : Bien, l'entrepreneur lui-même doit mettre de l'équité en
premier temps, mais c'est une certaine façon
de réduire son risque parce que la subvention va venir à l'entrepreneur, et
donc il vient pallier, en fait, l'équité qu'il aurait dû mettre de sa poche a priori ou ne pas réaliser le projet du
tout. Donc, il y avait deux options, et là la subvention vient, en fait,
renchérir, là, son niveau d'équité dans son projet et peut-être améliorer, en
fait, là, ou faciliter le lancement de son projet.
M. Jolin-Barrette : Mais ça veut dire que les institutions
financières qui ont accès, par le biais des intermédiaires financiers, à cette subvention-là dans le cadre
d'un montage financier d'un prêt, ils vont avoir une possibilité
supplémentaire de réussir à concrétiser
l'entente, de venir faire le financement dans x institutions financières parce
qu'ils ont accès à la subvention,
versus une autre institution financière qui, elle, ne participe pas ou qui
n'est pas affiliée avec un intermédiaire financier, qui, elle, ne pourra pas offrir cette bonification-là au
niveau de la subvention non remboursable. C'est un peu ça, là, la
réalité des choses.
M. Tessier
(Samuel) : ...tout à fait exact de dire ça que, si une entreprise
pouvait prendre un prêt plus risqué qu'ils n'auraient pas fait normalement, mais qu'avec la subvention seraient en
mesure d'octroyer ces crédits-là. Ça serait juste de le dire, et c'est
justement un des avantages des intermédiaires financiers...
La Présidente
(Mme Chassé) : En terminant.
M. Tessier
(Samuel) : ...qui ont un siège au Québec de pouvoir bénéficier de ces
subventions-là pour leurs clients et leur donner un avantage
concurrentiel versus d'autres intermédiaires financiers qui ne seraient pas
basés au Québec.
La
Présidente (Mme Chassé) : Merci. Ça termine le bloc d'échange
avec le parti formant le gouvernement. On est maintenant rendus au bloc d'échange avec l'opposition officielle. M. le
député de Nelligan, vous désirez prendre la parole?
M. Derraji :
Oui.
La Présidente
(Mme Chassé) : Allez-y.
M. Derraji :
Merci, Mme la Présidente. Merci pour votre présentation. Première question,
c'est toujours par rapport au montage
financier. C'est quand même intéressant de voir que vous avez beaucoup de demandes,
donc 10 versus une décaissée. Ça veut dire que l'appétit, il est là pour
les subventions. Est-ce que c'est ça qu'on peut comprendre?
M. Tessier
(Samuel) : C'est de l'argent gratuit non remboursable, donc, en effet,
là, l'appétit est important.
M. Derraji : Oui. Est-ce
que vous pouvez nous parler brièvement
de la nature des projets et de quelles régions ils nous viennent, ces
projets?
M. Tessier
(Samuel) : Ah! bien, on en a
de toutes sortes, là. En fait, est-ce
que je pourrais faire une étendue
de tous les projets?
M. Derraji :
Non, juste brièvement.
M. Tessier
(Samuel) : Je peux vous dire
que la majorité viennent de régions. En fait, on a très peu de
projets qui viennent de la région métropolitaine, et la raison est simple, il
y a des secteurs d'activité
comme le manufacturier qui va être
mis de l'avant par Investissement
Québec, et donc les projets
manufacturiers au Québec sont souvent en région, loin de la région métropolitaine,
et donc, voilà, donc les demandes viennent principalement de régions.
M. Derraji : Donc,
est-ce que c'est juste, ce que je dis
que le programme Immigrants investisseurs aide pas mal les régions, aide pas mal le manufacturier dans
les régions et améliore la rétention des employés en région et, par
conséquent, la pérennité de nos entreprises?
M. Tessier (Samuel) : Tout à
fait, c'est exact.
M. Derraji : O.K., merci. Deuxième
point, c'est par rapport... Je vais vous reposer la même question, hein — parce qu'on est là, justement, pour
comprendre aussi vos pratiques — la même question de j'ai posée à vos
collègues ou vos concurrents, vous pouvez l'utiliser comme vous voulez, les
pratiques d'éthique. Vous opérez dans pas mal de pays, et comment vous vous assurez d'avoir des standards de
qualité au sein de votre organisation? Et c'est quoi, ces standards de
qualité, s'il vous plaît?
• (16 h 20) •
M. Côté
(Alex) : Bien sûr. Bien, en
fait, comme mentionné tout à l'heure, on est régi par l'OCRCVM. Donc, en
fait, tout ce qui a trait au blanchiment
d'argent, ou de l'activité terroriste, ou autres, on a des standards assez...
très élevés. Donc, comment qu'on
assure de la qualité? Bien, en premier temps, on est un plus petit joueur sur
la liste, donc on n'a pas un contingent
aussi grand que des grandes institutions financières. Donc, je pourrais dire qu'on prend
le temps de rencontrer chacun des
candidats qu'on va leur donner un contingent. Étant donné aussi qu'on est
consultants en immigration
accrédités au Québec, dans certains cas, on
peut représenter ces clients-là s'ils n'ont pas personne pour les représenter.
Et je pourrais dire qu'on fait la
juricomptabilité complète du candidat investisseur, et on passe par tous les documents
qu'on est capables de collecter, et
ça, c'est pour les contingents. Bien
sûr, on opère aussi dans des marchés
où les candidats parlent le français de
niveau intermédiaire B2, donc on a certains candidats, en fait, du Maghreb ou
de l'Afrique de l'Ouest, et on va se déplacer directement avec des agents
qui vont être sur place, et on s'assure de... tout est en place. Donc, on fait
la juricomptabilité complète des revenus de ces gens-là, leurs avoirs et
autres.
M. Derraji : Oui. Même question encore : Si
demain je vous dis que le gouvernement veut changer la mission de ce programme Immigrants investisseurs en regardant, genre, de
le faire à l'interne... donc, je pense toujours à Investissement Québec, parce qu'il est sur la
table d'Investissement Québec, donc, du coup, Investissement Québec, avec
l'appétit qu'ils ont au niveau
de l'international, voit une opportunité monétaire, il y a
de l'argent à aller chercher, surtout gratuitement, parce qu'on peut faire ce qu'on veut avec les intérêts
générés par ce programme, et je vous dis, demain : Le gouvernement va appuyer cette initiative
de ramener et rapatrier ce programme à l'intérieur d'Investissement Québec, ce
serait quoi, votre réaction?
M. Tessier
(Samuel) : Bien, en fait,
moi, je serais surpris de voir le fonctionnement, parce que ça demande beaucoup de promotion, là. Moi et Alex, on est relativement
jeunes, mais ça fait sept ans qu'on voyage aux quatre coins du monde pour rencontrer des investisseurs, et dans ce contexte-là, en fait, les investisseurs ne
sont pas en mesure de présenter ou mettre
un dossier en place seuls, alors doivent avoir une représentation légale par un
avocat ou un consultant en immigration qui
va les aider à mettre en place leur dossier. Et il y a toute une promotion du
programme qui est derrière ça. Donc, aujourd'hui,
les intermédiaires financiers agissent comme promoteurs, si on peut dire, du
projet ou vont promouvoir le programme
auprès d'intervenants légaux, que ce soient des avocats ou des consultants en
immigration aux quatre coins du monde.
Et cette promotion-là, en fait, je pense, qui est véhiculée coûte cher, demande
des gens compétents, là, pour faire les représentations, les conférences dans des hôtels aux quatre coins du
monde. Et cette portion-là, en fait, là, qui revient aux intermédiaires financiers aujourd'hui, je pense
que ce serait difficile la faire d'une façon aussi vigoureuse, disons, là,
avec des employés d'État.
M. Derraji :
Dernière question, parce que je sais que ma collègue a une autre
question : Est-ce que les entreprises à qui vous octroyez une
subvention sont au courant de la provenance de la subvention?
M. Côté
(Alex) : Bien sûr.
En fait, on le promeut et on leur dit exactement la source des fonds, comment que ça fonctionne, et, voilà, à chaque fois, les gens
trouvent que c'est un excellent programme. Il y a beaucoup de gens qui ne savent pas que ça existe ici, au Québec,
et les gens sont très reconnaissants, et on commence à collecter, en fait, le
plus qu'on peut, des témoignages, en fait, des PME qui en ont bénéficié,
et comment qu'ils sont contents de ce programme-là.
M. Derraji : Donc, nos PME en région savent que l'argent vient
de l'étranger, d'un investisseur
étranger qui a cru dans l'économie
québécoise et qui a placé 1,2 million... bien, ça va être 1,2 million,
qui a placé 800 000 $ dans l'économie québécoise.
M. Côté
(Alex) : Oui, oui. Je prends
le temps de leur dire exactement la provenance et comment que ça fonctionne,
oui.
M. Derraji : Merci.
M. Côté (Alex) : Je vous en
prie.
La Présidente (Mme Chassé) :
Très bien. Mme la députée de Bourassa-Sauvé.
Mme Robitaille : Dites-moi, Mme
la Présidente...
La Présidente
(Mme Chassé) : 4 min 30 s.
Mme Robitaille :
Merci. Messieurs, bonjour. Ceux qui étaient là avant vous nous disaient que la
compétition pour, justement, avoir ces investisseurs-là chez nous était
féroce. Vous nous le confirmez? C'est difficile d'aller recruter des gens à
l'étranger?
M. Côté
(Alex) : Tout à fait. On
parle de gens... si on dit quelqu'un d'aisé, quelqu'un de fortuné qui a des
avoirs en excédent de 1 million de
dollars américains, disons, on peut se dire qu'il y a un mouvement ou un flux
de gens... environ 50 000
familles ont changé de juridiction, ont changé de géographie d'adoption l'année
passée. Et tout le monde, tous les pays ou, dans certains cas, les
provinces, se battent, en fait, pour accueillir ces gens-là chez eux.
Mme Robitaille : Et pourquoi on
décide... pourquoi on choisit le Québec?
M. Côté
(Alex) : Je pourrais vous
donner les motivations, ça me ferait grand plaisir. En premier temps, on
pourrait dire la sécurité, en fait. Dans
certains cas, les candidats vivent dans des géographies d'adoption
un peu instables, donc les gens recherchent à mettre ça dans le passé et
déménager à une place où ce n'est plus une inquiétude au quotidien. En deuxième temps, il y a l'éducation,
hein? L'éducation ici, au Québec, est très attrayante pour différentes raisons, et
donc ils veulent épanouir leurs enfants directement ici, au Québec. Et on
pourrait dire, dans certains cas, c'est des possibilités commerciales ou des motivations qui sont plus
entrepreneuriales. Donc, les gens choisissent le programme investisseurs
comme investissement passif parce qu'ils ne
veulent pas les contraintes d'un programme d'investissement actif comme
le programme entrepreneurs Québec, mais
pourraient décider de faire une venture entrepreneuriale en palliant le programme
investisseurs.
Mme Robitaille : Mais, par
exemple, ils pourraient aller en Ontario, en Colombie-Britannique. Pourquoi ils
choisissent le Québec? Parce que la sécurité, ils l'ont là-bas aussi, les
bonnes écoles, et tout ça. Pourquoi le Québec?
M. Côté (Alex) : Bien, je
pourrais dire que c'est... voilà, je pense que c'est... peut-être, c'est plus
pluraliste, dépendamment d'autres provinces.
Il y a les gens qui sont attirés par le côté plus européen, le «feel»
européen, là, du Québec. Il y a des gens qui aiment la proximité, en fait, de New York
et de d'autres... Chicago, d'autres villes qu'ils pourraient avoir des
opportunités commerciales avec. Donc, des fois, c'est question de géographie,
là.
Mme Robitaille : Je me demandais, je regardais... Vous
dites : «Nous avons assuré le service de plus de 100 familles fortunées [venant d']Algérie, [...]Arabie
saoudite, Bangladesh, [...]Iran, [...]Maroc, Sénégal», entre autres, beaucoup de Chinois, mais beaucoup d'Africains, en tout cas, francophones, des gens d'Arabie saoudite. Ce qui s'est passé
durant les six derniers mois, là, au Québec,
cette loi sur la laïcité, la baisse des seuils, les
18 000 dossiers qu'on a mis à la poubelle, est-ce que ça rend
votre pitch de vente, si je puis dire, un peu plus difficile?
M. Tessier
(Samuel) : Je répondrais en
disant que non, en fait. Souvent, dans ces pays, on parle de familles
aisées, fortunées, hein, donc les gens qui
peuvent être admissibles dans le programme, là, ce n'est pas des propriétaires terriens,
des héritiers, donc c'est des gens, des entrepreneurs, des acteurs économiques,
et je n'ai pas vu de réticence, là, d'aucun investisseur,
Au contraire, en fait, l'instabilité qu'ils voient dans leurs pays est souvent
causée par ce manque de pluralisme dans
leurs sociétés. Donc, les sociétés sont opaques, sont
gérées par... il n'y a pas de séparation entre la politique
et la religion et... qui crée beaucoup
d'instabilité entre différentes factions dans leur pays. Et donc en voyant la laïcité
du Québec, au contraire,
ça peut être un encouragement, même, pour certaines familles des pays que vous
avez mentionnés, qui ont vu la radicalité, là, qu'est-ce que ça peut
donner.
La Présidente (Mme Chassé) : Il
reste une minute au bloc d'échange.
Mme Robitaille : C'est bon à savoir. Et donc, évidemment, le facteur... le fait que ce sot francophone, j'imagine que ça joue une différence aussi... ça
fait une différence.
M. Côté
(Alex) : Bien sûr. Dans
certains cas, les candidats ont eu de l'expérience avec le français à un
certain moment dans leur vie. Et
nous, étant donné les incitatifs, on pourrait dire, positifs des candidats qui
parlent le français, on cible vraiment des gens d'affaires qui ont une
capacité intermédiaire de parler français. C'est qu'est-ce qu'on sollicite.
M. Tessier
(Samuel) : Et d'ailleurs on peut faire un point sur la rétention, là,
qui est famélique dans beaucoup de catégories
ou de beaucoup de provenances, notamment de la Chine, là, qui domine le
programme investisseurs. Cependant, quand on regarde d'autres
catégories, si on sépare par pays, en fait, il y a des pays où, par exemple, si
on prend les francophones, qui est une
mesure qui a été adoptée assez récemment, la rétention est au-dessus de
90 %. Donc, c'est très rare, là,
qu'un Marocain francophone va aller s'établir en Ontario. Au contraire, il a
choisi le Québec pour le français, et donc, du coup, il va y rester, là,
dans la grande majorité des cas.
La
Présidente (Mme Chassé) : Merci. Ça termine le bloc d'échange
avec l'opposition officielle. On est rendus au deuxième groupe
d'opposition. M. le député de Laurier-Dorion, vous avez
2 min 30 s. Allez-y.
M. Fontecilla : Oui,
merci. Bonjour. Écoutez, on apprend que le niveau de fiscalité au travail de
ces immigrants investisseurs est très
faible comparé à l'investissement, bien évidemment. Est-ce que vous avez des
évaluations qui nous disent combien... c'est quoi, l'apport fiscal de
ces investisseurs au Québec?
M. Tessier
(Samuel) : On n'a pas vraiment de données là-dessus, mais il faut
prendre en considération que le programme investisseurs, c'est un programme
d'investissement passif dans lequel on donne le luxe, si on veut,
là, aux gens de faire un investissement passif avec Investissement
Québec et ne pas leur mettre une immigration conditionnelle, en fait, à la
mise en place d'une entreprise au Québec, par exemple, ou avoir un
emploi au Canada ou au Québec. Donc, du coup, évidemment,
c'est des gens qui n'ont pas d'obligation
commerciale avec le Canada, ce qui rend la statistique, là, très faible
au niveau de la fiscalité qui est payée au Canada suivant leur établissement.
M. Fontecilla :
O.K. Dites-moi, là, on sait que près du tiers des revenus de placement du
programme vont dans les institutions,
les intermédiaires, etc., là, ce qui est quand même beaucoup, là, un tiers.
Est-ce que vous pensez que cela fragilise ce programme-là aux yeux des
décideurs politiques, de l'opinion publique, etc.?
• (16 h 30) •
M. Tessier
(Samuel) : Certainement que la position pourra être divisée,
maintenant, de voir le coût de monter des dossiers investisseurs aujourd'hui et de se rendre chez ces
investisseurs, d'aller une fois, des fois deux fois les rencontrer pour s'assurer d'avoir un bon dossier auprès du
ministère. Les chiffres, tantôt, que nos confrères, là, avançaient, en effet,
là, il y a environ 100 000 $ sur
un dossier qui est disponible, mais à ça s'attachent des dépenses, évidemment,
pour faire, justement, le contrôle,
le «due diligence», la mise en place
d'un dossier conforme, adresser les différentes préoccupations du ministère
quand vient le temps de traiter les
investisseurs. Tout ça prend du temps et prend de l'argent en termes de
déplacements, des hôtels, etc. Donc, mettre un dossier en place, ça a un
coût qui peut aller jusqu'à 50 % de cette marge-là, là, et donc...
La Présidente
(Mme Chassé) : En conclusion.
M. Tessier
(Samuel) : Voilà.
M. Côté (Alex) : Et ça, c'est seulement l'opération. Là, on parle... tout qu'est-ce qui
est prospection, promouvoir le programme, se déplacer dans différentes
juridictions, et donc il y a plusieurs frais engendrés dans ces voyages-là, si
on veut.
La
Présidente (Mme Chassé) : Merci beaucoup. Ça termine le bloc
d'échange. Mme la députée de Gaspé, 2 min 30 s, allez-y.
Mme Perry
Mélançon : Top chrono.
Merci. Bonjour, messieurs, merci de votre présence. J'aimerais qu'on
revienne à la base, parce que
vous avez dit que vous étiez consultants en immigration, alors j'aimerais qu'on
en profite pour connaître votre opinion sur ce que devrait être le seuil
d'immigration, dans un monde idéal, dans cette présente planification.
M. Tessier
(Samuel) : Excellent. Bien,
ça va me faire plaisir d'y répondre. En fait, il y a deux grands Pandore
qu'on voit, là, entre l'intégration des travailleurs qualifiés et le programme
PRIIME. Donc, il y a un arrimage, là, selon nous, à y avoir entre les fonds qui sont reçus d'investisseurs au niveau
du programme d'investissement passif, qui est le programme Immigrants investisseurs, qui vont vers le
programme PRIIME, vers une relocalisation, là, en fait, des fonds vers
l'intégration des travailleurs qualifiés.
Alors, les seuils devraient être établis, en fait, là, entre une répartition
entre ces deux programmes, et en
fait... ou le mariage entre les deux, en fait, c'est ce qui rend l'immigration
optimale, en fait. Donc, les fonds d'un, qui sont très rentables, vont aller financer l'intégration des nouveaux
arrivants de l'autre côté ou qui ont besoin de beaucoup plus de fonds pour être intégrés versus quelques
investisseurs, là, que leur intégration est beaucoup plus facile. Alors,
voilà, donc, le mariage entre les deux, là, ça vient d'une répartition entre
ces deux programmes.
Mme Perry
Mélançon : O.K.
Donc, c'est pour ça que vous priorisez, dans vos recommandations, plutôt d'y
aller avec une différente répartition de
l'immigration ou des catégories d'immigrants et donc de ne pas y aller avec une
hausse des seuils, nécessairement,
mais plutôt dans la répartition. Mais, dans ce cas-ci, comment vous voyez la
part de l'immigration économique dans le contexte de pénurie de main-d'oeuvre
au Québec? Quelle est votre opinion par rapport à ça?
M. Tessier
(Samuel) : ...en fait, c'est
clé, c'est probablement la seule solution. Donc, à cette base-là, les
seuils... Ce serait faux de dire qu'on pense
que les seuils devraient être maintenus. Au contraire, les seuils devraient
être augmentés, mais augmentés d'une
façon proportionnelle entre ces deux programmes pour assurer, là, l'intégration
des nouveaux arrivants via le programme PRIIME et également via les
subventions, là, qui sont déployées dans les PME.
M. Côté (Alex) : En fait, dans le passé, il n'y avait pas de seuil de placement pour les
immigrants investisseurs. C'est de
l'argent gratuit que les gens investissent, qu'ils nous donnent gratuitement
pour la dette du Québec, entre autres, et à IQ, et donc on ne
pense pas qu'on doit mettre de seuil sur ces fonds-là, en fait.
La Présidente
(Mme Chassé) : En conclusion.
Mme Perry
Mélançon : Bien, donc, c'est
ça, pour vous, tout ce qui est la demande de résidence, par exemple, ou de pouvoir s'établir,
vous pensez que ça devrait être fait vraiment proportionnellement, malgré qu'on connaît le
contexte actuel, là, de la pénurie de main-d'oeuvre.
La Présidente (Mme Chassé) : Ça
conclut le bloc d'échange. Merci pour votre présence, M. Côté,
M. Tessier, très apprécié.
Je suspends les travaux quelques instants pour
permettre au prochain groupe de prendre place.
(Suspension de la séance à 16 h 33)
(Reprise à 16 h 36)
La
Présidente (Mme Chassé) :
Rebonjour. Je souhaite maintenant la bienvenue au représentant de Stephane
Tajick Consulting. Je vous rappelle que vous
disposez de 10 minutes pour votre exposé. À une minute de la fin, je vais vous
faire signe. Je vous invite à débuter en vous présentant puis à faire votre
exposé. Allez-y, merci.
Stephane Tajick Consulting
M. Tajick
(Stephane) :
Merci. Bonjour à tous. Merci de
m'avoir invité à cette commission. Ça fait ma troisième commission
ces 10 dernières années. Je ne suis pas un avocat en immigration, je ne suis pas un intermédiaire financier, je suis un des spécialistes internationaux au niveau de l'immigration
d'affaires. J'ai fait près de 100 rapports sur l'immigration d'affaires
et je me concentre énormément sur la prise de données. Et chaque année on fait
la vérification de près de 200 programmes
d'immigration d'affaires à travers le monde et on prend beaucoup de facteurs et
d'indices sur à peu près 200 villes
au niveau de la fiscalité, voir leur compétitivité pour les investisseurs.
Alors, on travaille surtout avec les grandes entreprises et, de temps en temps, avec les gouvernements. Je vais vous
parler un peu du programme Immigrants investisseurs. Si vous voulez, après vous pouvez me poser des
questions sur le programme Immigrants entrepreneurs, et je vais vous
aider à le comparer avec les autres programmes qu'il y a à travers le monde.
Là, on va
parler d'abord de ce qui est bien. Le programme Immigrants investisseurs du
Québec, c'est le programme avec le
processus de sélection le plus sécuritaire de tous les programmes à travers le
monde. Alors, premièrement, il y a une vérification sur les antécédents
criminels, qui n'est déjà pas le cas pour beaucoup de programmes, à travers le
monde, d'immigration, mais en plus il fait
une vérification sur les fonds des individus en tant que tels. Ça, seulement
une poignée de programmes à travers
le monde le font pour qualifier leurs appliquants. Ce qui différencie le
Québec, en fait, c'est le fait que
d'utiliser des intermédiaires financiers, c'est comme une première ligne de
défense qui peut rendre des comptes au gouvernement et qui fait qu'il y
a un filtre des applications. Ils utilisent leur expertise pour voir s'il y a
des choses, des applications qui ne
devraient pas être là, et ce qui fait qu'aujourd'hui, c'est le programme le
plus sécuritaire. D'ailleurs, le programme
américain a commencé à s'en inspirer. Et, moi, quand ça m'arrive à parler avec
des pays européens, c'est le premier
modèle que je préconise parce que travailler avec... on ne peut pas prendre des
comptes en invoquant l'immigration dans un pays du tiers-monde, ou en
Europe, ou ailleurs, mais on peut le faire dans son propre pays.
Après, on
peut parler des frais d'application, qui sont d'un peu plus de
15 000 $. C'est les frais les plus élevés au monde pour ce type de programme. Le seul programme
qui pourrait se comparer, c'est le programme australien, et ça, c'est si
l'individu ne parle pas l'anglais et s'il a beaucoup d'enfants qui appliquent
avec lui. Après, on va parler des taux de traitement
de la demande, qui sont aussi à peu près les plus élevés au monde. Maintenant,
il y a le programme américain qui risque
de dépasser le programme québécois, c'est parce qu'il reçoit presque 10 fois
plus de demandes qu'il émet de visas. Par contre, nous, on n'a pas ce problème au Québec, vu qu'on sélectionne le
nombre de dossiers. C'est notre propre décision de sélectionner et
admettre moins de dossiers qu'on reçoit au début.
• (16 h 40) •
On peut
parler de la rétention aussi. Le Québec, c'est le seul endroit où on se pose la
question sur la rétention. Nulle part
ailleurs, il n'y a aucune donnée sur la rétention des immigrants investisseurs.
J'ai moi-même fait plusieurs rapports sur la rétention des immigrants investisseurs au Québec, mon premier, c'était
en 2010. Et déjà qu'on parle de six à huit ans, des fois ça peut être jusqu'à 10 ans, on ne peut pas
vraiment être sérieux dans notre débat de rétention. On sait que ce n'est
pas très sérieux, on ne peut pas vraiment planifier une vie, vous pouvez
l'imaginer vous-mêmes.
Après, au
niveau de la méthodologie du calcul de présence, on peut en parler aussi très
longtemps, vu qu'il nécessite que
chaque personne ait la RAMQ. Pour avoir la RAMQ, il faut être six mois par an
au Québec, pour se qualifier à la RAMQ, alors que ce n'est pas un critère pour maintenir son statut de résident
permanent au Canada. On peut être résident permanent au Canada quatre à cinq mois par an et préserver
son statut de résident permanent. Donc, déjà, on a un petit problème. Si
vous posez la question : Pourquoi c'est
si important?, si vous faites, disons, 2, 3 millions par an, disons, en
Chine, de revenus de votre
entreprise, si vous êtes résident fiscal au Canada, au Québec, vous payez
50 % sur vos quelques millions par an que vous faites de revenus
étrangers, alors que, si vous étiez en Chine, disons que c'est des revenus sur
des dividendes, vous paierez 20 %.
Alors, aucun fiscaliste au monde ne conseillerait d'être résident fiscal au
Québec ou au Canada si votre source de revenus est à l'étranger, de un.
L'autre
point important, c'est que le rapport de présence, le dernier rapport de
présence date de 2018, qui fait état de
l'année 2017, qui elle-même regarde ceux qui sont arrivés au Québec, les
immigrants qui sont arrivés au Québec en 2015. Maintenant, quand vous avez environ sept ans, huit ans que ça
prend à un immigrant investisseur de venir, vous vous retrouvez
à peu près à 2009, 2008, 2010 de ceux qui ont fait leur demande d'application.
Ça veut dire, si demain vous faites... vous
mettez une nouvelle politique pour intégrer les immigrants investisseurs pour
être sûrs qu'ils soient retenus au Québec, disons, à 99 %,
100 %, ça va vous prendre 10 ans avant de le réaliser. Alors, entre-temps,
bon, il peut y avoir deux fois un changement
de gouvernement, on ne peut pas savoir. Ça veut dire, peut-être que ça a marché
les dernières années, peut-être, les
nouvelles batchs d'immigrants investisseurs vont tous rester au Québec.
Aujourd'hui, on pense qu'ils ne vont pas le faire. «So», on a un gros
«lag» entre ce qu'on veut avoir comme information et la collecte.
Après,
on a... Je vais toucher aussi peut-être un peu au niveau de ce qui est, ces
dernières années, passé un peu dans les
nouvelles au niveau des immigrants investisseurs et le marché immobilier. J'ai
fait quelques rapports aussi là-dessus. D'ailleurs, il y a un rapport
fédéral qui est sorti cet été qui s'est concentré sur le sujet, ils ont voulu
voir si les immigrants investisseurs avaient un impact sur le marché immobilier
de Vancouver et Toronto. Et, comme qu'il était prévisible, il n'y a pas un impact important. Il y a beaucoup
d'autres facteurs qui ont fait en sorte que les marchés immobiliers dans
ces villes-là ont augmenté, et l'impact des immigrants investisseurs était
minime.
Alors, je ne sais pas
combien de temps il me reste. J'ai voulu être court.
La Présidente (Mme Chassé) :
Il reste trois minutes.
M. Tajick (Stephane) : Trois minutes? Je vais parler un petit peu alors, si vous voulez,
comment améliorer l'impact du
programme Immigrants investisseurs. Alors, il y a énormément de choses qui
peuvent être faites. La première chose, c'est quelque chose que j'ai souvent parlé, c'est un programme pour améliorer
la rétention, c'est un programme d'accompagnement et pour favoriser
l'intégration économique des immigrants investisseurs. C'est la première façon
où on peut augmenter l'impact du programme.
Juste
pour vous donner une idée, aujourd'hui, un peu, le nerf de l'économie, c'est la
main-d'oeuvre, O.K., on cherche à
attirer de plus en plus de talents. Maintenant, quand vous ramenez une
personne, disons, quelqu'un qui a fini l'université et commence à travailler, s'il est très bon dans
son domaine, il excelle, souvent il va décider de développer sa propre
entreprise, il développe sa propre
entreprise. S'il a du succès, elle grandit, il engage des gens, il devient un
entrepreneur. Au fil du temps, s'il
continue à avoir du succès, son entreprise grandit, il engage des gérants, il
commence à se détacher un peu de la structure quotidienne de
l'entreprise et devient un investisseur. Il commence à investir dans
d'autres... il achète d'autres entreprises dans d'autres secteurs, etc. Alors,
la crème de la crème, un peu, du talent, c'est l'entrepreneur.
L'impact
que ces gens peuvent avoir au Québec au niveau... que ce soit pour favoriser
l'entrée d'un certain marché pour des
entreprises canadiennes, pour des entreprises québécoises, favoriser
l'exportation, l'importation ou... l'investissement peut être énorme. C'est quelque chose que le
gouvernement précédent a toujours été très ouvert. Malheureusement, ils
n'ont jamais réussi à l'appliquer. L'année
dernière, ils ont mis en place une commission pour essayer d'améliorer
l'intégration et la rétention, et ça passait
beaucoup par ce type de programme. Ce n'est pas quelque chose qui,
nécessairement, risque de coûter au gouvernement. Je sais que beaucoup
des intermédiaires risquent d'être ouverts à ce genre d'engagement.
La Présidente
(Mme Chassé) : Il vous reste une minute.
M. Tajick
(Stephane) : D'accord. Bien, je peux terminer maintenant, si vous
voulez.
La
Présidente (Mme Chassé) : Très bien, très bien. Je vous remercie
pour votre exposé. Et on va débuter le bloc d'échange en commençant par
le parti formant le gouvernement. M. le ministre, allez-y.
M. Jolin-Barrette : Merci, Mme la Présidente. M. Tajick, bonjour. Merci de participer aux
travaux de la commission. À la page 2 de votre mémoire,
vous dites : «...j'ai participé déjà à deux consultations
publiques sur l'immigration lors des 10 dernières
années. J'ai participé à des conférences privées avec plusieurs gouvernements
dont celui du Québec sous la gouverne
de l'ex-ministre [de l'Immigration, la députée de Notre-Dame-de-Grâce]. J'ai
conseillé le ministère sur la façon d'améliorer
ses programmes "entrepreneur et investisseur". J'ai écrit plusieurs rapports
sur la façon d'améliorer la rétention des
immigrants investisseurs au Québec et j'ai effectué de nombreuses études sur le
sujet.» Je me demandais de quelle façon, concrètement, avez-vous travaillé avec le précédent gouvernement lorsque
vous dites que vous avez conseillé la députée de Notre-Dame-de-Grâce et
précédente ministre de l'Immigration.
M. Tajick
(Stephane) : J'ai rencontré le ministère à plusieurs reprises. Une
fois, c'était avec Investissement Québec, on a eu une rencontre. On a eu
d'autres rencontres avec le ministère pendant qu'il faisait la refonte du
programme entrepreneurs. Il y a cinq ans,
j'étais un peu de ceux qui avaient conseillé qu'on pouvait augmenter les frais
d'application au seuil qu'ils le sont, mais
ça venait avec la recommandation de baisser les délais de traitement. Alors, on
a augmenté les frais d'application,
mais on n'a pas... on a réussi peu à peu à réduire, parce qu'à un moment donné
ils étaient à huit, neuf ans, et peu à peu ils ont baissé, au fil des
années, pour arriver à six ans. Ça, c'était une des façons.
Au
niveau du programme entrepreneurs, j'ai conseillé... je ne peux pas vous dire
exactement, mais c'était toujours de construire
une structure où on utilise le secteur privé pour faire son «bidding», si vous
voulez, excusez-moi mon anglicisme. Et
premièrement, si ça prend six ans pour un programme entrepreneurs, si quelqu'un
vous remet un plan d'affaires et vous lui dites : Parfait, reviens
dans six ans, après un an et demi, le plan d'affaires est à la poubelle, il ne
vaut plus rien.
M. Jolin-Barrette :
Qu'est-ce que vous voulez dire quand vous dites «par le billing»? Par la
facturation?
M. Tajick (Stephane) : Non,
non, non, «bidding».
M. Jolin-Barrette :
Ah! «bidding», O.K., la soumission. O.K.
M. Tajick
(Stephane) : Et bref, au niveau des entrepreneurs, on n'a pas besoin
de demander le plan d'affaires dans grand
nombre des cas, parce qu'ils n'ont pas nécessairement les informations
nécessaires pour avoir un plan d'affaires solide. Ça peut être... Je ne dis pas que c'est la règle
pour tous, mais en termes généraux, ça serait toujours préférable de les
amener avec un programme temporaire. Ils
passent six mois, ils bâtissent leur plan d'affaires, ils font leur
investissement. On les sélectionne sur
leur profil, ça veut dire : Est-ce qu'ils ont la capacité? Est-ce qu'ils
ont une expertise? Est-ce qu'ils ont la capacité de réussir? Si oui, ils
reçoivent une résidence temporaire, et là on les encadre à pouvoir réaliser
leur projet. C'était un peu ça.
M. Jolin-Barrette : Dans votre mémoire, vous dites, là, que le Québec
vérifie la licéité des fonds et vous dites : Bien, on ne devrait
peut-être pas le faire. Pourquoi on ne devrait pas vérifier la provenance des
fonds?
M. Tajick (Stephane) :
Attention, si vous avez le passage exactement, je pourrais vous dire, mais ce
n'est pas vraiment ma pensée. Ce que je suis
en train de dire, c'est que, dans tout autre type d'immigration, on ne le fait
pas. Alors, qu'est-ce qui nous faire
croire que, disons, quelqu'un qui a des pensées malsaines ou, disons,
criminelles, irait payer une fortune,
attendre six ans et passer par le processus de sélection le plus rigoureux au
monde alors qu'il y a énormément d'autres voies à sa disponibilité? Ce que je dis, c'est : Pas besoin de
mettre plein de gardes à l'entrée si toutes les autres portes et les fenêtres sont ouvertes. Ça se limite plus ou moins
à ça. Je sais qu'il y a un peu tout ce qu'on... L'importance du
processus pour qu'il soit très sécuritaire, ça a plus, je vous dirais, des
allures de... pour garder l'intégrité du programme.
M. Jolin-Barrette : Mais
quelqu'un qui investit 1,2 million chez Investissement Québec, on doit
quand même pouvoir savoir d'où vient l'argent, non?
M. Tajick
(Stephane) : Bien sûr, mais, disons, mes parents ont immigré au Québec
il y a plus de 25 ans, ils sont venus, ils avaient de l'argent, ils
ont acheté une maison, personne n'a vérifié l'origine des fonds.
• (16 h 50) •
M. Jolin-Barrette : Je comprends, mais quand même, dans le type
programme que nous avons, c'est des millions de dollars. On comprend qu'avec les intermédiaires financiers la
majorité, ce sont des sommes qui proviennent d'institutions financières canadiennes et que c'est un flux
monétaire qui est généré à l'interne, mais sur l'ensemble des actifs, dans
le fond, le programme est justement fait
pour ça, pour dire que, s'il y a des sommes qui viennent de l'étranger, on veut
s'assurer qu'elles soient licites.
M. Tajick
(Stephane) : Juste pour
qu'on soit clairs, je n'ai rien contre ce que vous dites. Je n'ai aucun
problème avec ce qui est fait pour vérifier l'origine des fonds.
M. Jolin-Barrette : O.K. Sur la question de l'établissement, là, vous
dites : On est un des seuls États à se soucier du fait que... on regarde le taux de présence ou
le taux de rétention sur le territoire québécois. Puis vous dites, bon :
Pour plusieurs raisons, il y en a qui ne
devraient pas être résident fiscal au Canada. C'est un peu dur à réconcilier,
le point de vue de dire : Bien,
écoutez, on ne devrait pas se soucier de ça, alors que, théoriquement, le
programme Immigrants investisseurs, c'est
fait en sorte pour que les immigrants investisseurs puissent investir au
Québec, puissent y demeurer, puissent immigrer au Québec. Sinon, ça ne va pas à l'encontre de l'objectif du programme
s'ils ne sont pas résidents au Québec, s'ils ne font par leur vie ici?
M. Tajick
(Stephane) : Il faut voir... Si vous regardez les conditions
d'acceptation, vous verrez que le principal critère de sélection, un des principaux critères de sélection, c'est
avoir une entreprise dans les deux dernières années, avoir un certain nombre d'employés puis un certain fonds
de... une certaine somme de revenus, ce qui nous laisse présager le costume d'un homme d'affaires qui a une entreprise
dans son pays d'origine, O.K.? Il n'y a rien qui nous laisse croire que ces gens-là, surtout avec les délais un peu de...
qui ne permettent pas vraiment une vraie planification de la vie, que
ces gens-là quittent leurs attaches,
quittent leur entreprise. Je veux dire, il y a plusieurs types de profils. Je
vous dirais, un des grands problèmes
qu'on a avec le programme investisseurs, c'est qu'il y en a juste un, alors
que, par exemple, si vous regardez comme l'Australie ou d'autres pays,
on sait qu'il y a différents profils d'immigrants investisseurs. Il y en a qui
vont se relocaliser complètement, il y en a
qui vont se faire partiellement, qui vont peut-être se relocaliser complètement
tôt ou tard, et il y en a que c'est
des touristes qui vont rester quelque temps, il y en a qui vont... Alors, on a
un programme qui répond à ces trois profils, alors que, par exemple,
l'Australie a trois programmes pour chaque profil.
M. Jolin-Barrette : O.K. Et au niveau du... Je comprends, là, qu'il y
a plusieurs profils dans d'autres États, mais l'objectif de l'immigration, généralement, c'est de s'établir dans le
pays d'accueil. Et là ce que l'on constate, c'est que les gens ne sont pas présents sur le territoire
québécois. Et ce que vous nous dites, c'est de dire, bien, les fiscalistes
diraient aux gens : Ne vous établissez pas au Canada de façon à ne
pas payer, supposons, l'impôt au Canada.
M. Tajick
(Stephane) : Ça, c'est dans le cas où, comme je vous ai dit, des gens
ont des revenus à l'étranger. Ça peut
être très possible que la personne a appliqué à 55 ans, à 65 ans, il a le droit
de venir au Québec, il est retraité et il reste au Québec. Puis il y a
différents...
M. Jolin-Barrette : Je comprends, mais ce que vous dites, là, c'est
que, lorsqu'on a des revenus de l'étranger, qu'on a une vie active, on
ne devrait pas s'établir au Québec pour ne pas se faire imposer au Québec.
M. Tajick (Stephane) : Je vous
dis «dans certains cas».
M. Jolin-Barrette : Non, mais je sais, mais l'objectif de
l'immigration, c'est de venir enrichir la nouvelle société d'accueil puis pas uniquement de bénéficier des
avantages fiscaux attachés à cela, lorsqu'on parle d'immigration en général, là.
M. Tajick
(Stephane) : Je n'ai pas dit
les avantages fiscaux, ce n'est pas des avantages fiscaux en tant que
tels de... ce que j'ai dit. Mais je
comprends votre question. Pour la répondre, comme je vous dis, la plupart
des États qui ont des programmes d'investisseurs — il y en
a plus d'une cinquantaine — se préoccupent principalement de l'impact économique du programme. On sait que les gens d'affaires,
souvent c'est très dur de les laisser s'attacher à un seul endroit au long
de l'année. Ils risquent de devoir voyager
pour leurs affaires, ils ont leur principale affaire, sûrement, qui est dans
leur pays d'origine, alors ils font un peu l'amalgame des deux.
Après, le
taux de rétention, comme je vous ai dit, j'ai fait beaucoup de rapports sur le
taux de présence... ce qu'on publie
ici, au Québec, et il n'est pas précis. Le fédéral a fait lui-même sa propre
version en 2014, quand il faisait l'évaluation du programme Immigrants investisseurs fédéral, et c'est à peu près le
double, parce qu'il utilisait la déclaration d'impôt pour vérifier leur
présence, et les taux de présence étaient nettement plus élevés.
M. Jolin-Barrette : Tout à l'heure, dans les groupes qui vous ont
précédé, on nous disait : Au niveau des immigrants investisseurs, il y en a qui sont des ambassadeurs
de ce programme-là que c'est vraiment des
cas de succès majeurs. Vous qui êtes
un consultant dans ce domaine-là, est-ce
que vous avez en tête quelqu'un
qui a appliqué dans le programme,
et qui a investi massivement au Québec, et que ça s'en est résulté par des
succès publics qui sont connus?
M. Tajick
(Stephane) : Je peux vous
parler, au niveau du Canada, Li Ka-shing, qui est l'homme le plus riche
d'Asie, qui est passé par le programme fédéral il y a très longtemps.
M. Jolin-Barrette : ...du
Québec.
M. Tajick
(Stephane) : Du Québec... Écoutez,
vous parlez à n'importe quel intermédiaire, ils vont vous dire :
Moi, je rencontre mes clients, et après, vu
que ça prend six ans, ou sept ans, ou huit ans, ou dix ans pour qu'ils
reviennent, je ne sais pas ce qui
leur arrive. Et ça, c'est un des gros problèmes. On ne peut pas... À cause des
délais, on n'est pas capables d'avoir...
tu sais, «track», un peu, des résultats, si vous voulez. Ça, c'est un problème
massif. Et puis, pour moi, qui est un peu... Pour moi, l'immigration, c'est vraiment
relié à l'économie. Quand on fait un investissement chez un immigrant,
il faut être capable de voir les résultats, «track» les résultats, et savoir si
notre investissement a des retombées ou pas.
M. Jolin-Barrette : Je sais que
j'ai des collègues qui veulent poser des questions, Mme la Présidente. Je vous
remercie.
La Présidente (Mme Chassé) : M.
le député de Chauveau, vous prenez la parole? Allez-y.
M. Lévesque
(Chauveau) : Merci beaucoup, Mme la Présidente. M. Tajick, merci beaucoup pour votre présentation, très intéressant.
Je vais faire
un peu de pouce sur ce que le ministre est en train de discuter avec vous. Je constate
les délais qui sont longs, avec les présentations qui ont été faites au préalable avant vous, ce que vous nous parlez aujourd'hui, puis toute la comparaison
que vous avez avec les autres pays. Ça peut prendre six ans, sept ans, huit ans
avant de s'en venir. Vous nous mentionnez
également que les avantages fiscaux, peut-être,
au Québec ou autres endroits au Canada, ce n'est pas toujours avantageux.
J'essaie de comprendre, avec votre expertise qui est internationale, c'est
quoi, l'avantage vraiment pour l'investisseur de venir donner... prêter 1,2 million de dollars au Québec dans ce contexte-là où la personne...
peu d'entre eux viennent vivre au Québec, viennent s'établir, il y a une
rétention difficile, puis en plus la fiscalité est peu avantageuse. Pourquoi
une personne décide de s'inscrire dans ce processus-là?
M. Tajick
(Stephane) : C'est sûr que
la question, peut-être, les intermédiaires financiers peuvent la
répondre plus facilement. Mais moi, comme je vous dis, j'ai évalué environ
200 villes à travers le monde, et au Canada j'ai fait Montréal, Toronto,
Vancouver, et je peux vous dire que le Québec, c'est vraiment
un des endroits les plus formidables à pouvoir vivre. Et ça, moi-même,
je l'ai compris en évaluant un peu... en apprenant à connaître le reste du
monde, que ça se soit sur énormément de facteurs, et on est très chanceux ici, au
Québec : l'équilibre qu'on a entre loisirs et travail est
exceptionnel, la qualité de vie est exceptionnelle, la tolérance qu'on a envers
les étrangers et les autres aussi est exceptionnelle. Alors, il y a énormément
de raisons pourquoi les gens veulent vivre ici.
Maintenant, beaucoup de gens le font pour
différentes raisons. Les raisons pourquoi quelqu'un d'Afrique se relocaliserait et... peuvent être différentes de quelqu'un
de Chine. C'est des choses qu'on évalue. Souvent, c'est la
liberté. Vous savez, quand il y a
l'instabilité et le gouvernement perd un
peu contrôle de la situation,
les premières qui sont prises à...
qui sont mal prises, se sont les gens fortunés. S'il n'y a plus l'État pour
instaurer la sécurité, c'est ceux qui se font piller, c'est ceux qui se
font tuer. Alors, c'est devenu un petit peu... Tout le monde doit avoir une
porte de sortie, O.K.? C'est un peu ça que... comment les
gens le... disons-le, le «promote», c'est qu'il faut avoir une porte de sortie
sécuritaire pour tes enfants, pour ta famille, pour toi-même, etc.
M. Lévesque
(Chauveau) : Donc, autrement
dit, ce que vous êtes en train de me dire, le Canada et le Québec,
c'est une terre d'accueil sécuritaire. Les
immigrants investisseurs se paient une porte de sortie dans... Certains
viennent, hein... attention, je ne
veux pas faire de généralisation, mais certains vont se payer une porte de
sortie au cas où que ça aille mal dans leur pays. On le sait que
l'instabilité politique, la guerre et tout... donc plusieurs vont se payer une
porte de sortie, éventuellement, pour s'en venir, c'est ce que vous me dites.
M. Tajick
(Stephane) : Oui, mais je
voudrais être très clair, peut-être que je me suis mal exprimé. Je ne veux pas
généraliser tous les profils. J'ai peut-être
donné cette impression, mais il
y a énormément de raisons, on peut
en parler pendant des heures, il y a
énormément de raisons pourquoi des gens viennent se relocaliser et choisissent
le Québec, il y a énormément de raisons pourquoi ils risquent de ne
pas rester au Québec. Mais moi, j'ai toujours promu non les forcer à rester, mais leur
donner des raisons de rester.
La Présidente (Mme Chassé) : En
terminant.
M. Tajick (Stephane) : Et il y
a énormément de choses qu'on peut faire sans que ça coûte quoi que ce soit au gouvernement.
• (17 heures) •
La
Présidente (Mme Chassé) :
Merci. Ça termine le bloc d'échange avec le parti formant le gouvernement. On est rendus au bloc d'échange avec l'opposition officielle. M.
le député de Nelligan, la parole est à vous.
M. Derraji : Merci, Mme la
Présidente.
La Présidente (Mme Chassé) :
Oui, allez-y pour 10 minutes, oui.
M. Derraji : Merci,
Mme la Présidente. Merci pour votre intervention et votre rapport. Je vais commencer par la première question que vous jugez intéressante tout à l'heure, lors de votre réponse à M.
le ministre, par rapport au rôle des intermédiaires
financiers. Vous avez dit que c'est une exigence qui est unique et ça rassure.
Ça rassure des deux côtés : ça nous
rassure, nous, en tant que parlementaires, en tant que citoyens, mais en tant
aussi que province, mais aussi ça envoie un message à l'extérieur par
rapport à la pertinence de notre système par rapport aux immigrants
investisseurs.
Si on se
compare par rapport aux autres pays, parce qu'on sait que tout le monde veut
des immigrants investisseurs, je ne
pense pas qu'on a le temps nécessaire pour dire le pourquoi, mais, selon vous,
est-ce qu'on doit renforcer ça, on doit le laisser ou on doit penser à
le changer?
M. Tajick
(Stephane) : Ce n'est pas parce qu'on a le programme le plus rigoureux au
monde qu'il faut arrêter ou il faut
le rendre moins rigoureux. C'est comme... je vous donnerais un exemple très
simple. Le Canada, c'est peut-être le pays
le moins raciste au monde, ça ne veut pas dire qu'on ne doit pas faire des
choses pour le combattre et pour améliorer encore la situation. Alors, c'est à peu près le même cas. Ce n'est pas
parce qu'on est les meilleurs qu'on doit s'asseoir sur ses lauriers et
ne pas continuer à améliorer le processus.
M. Derraji :
Mais quand vous dites «améliorer», pensez-vous que le système qu'on a
maintenant, il faut l'améliorer par rapport au rôle des intermédiaires
financiers?
M. Tajick (Stephane) : Je n'ai
vraiment pas d'opinion là-dessus.
M. Derraji :
O.K. Vous avez dit aussi que le programme, il est le plus complexe, le plus
cher, le plus sécuritaire. Mais, malgré ça, on voit que des gens
attendent neuf ans avant de venir au Québec. Comment vous voyez ça?
M. Tajick
(Stephane) : Disons, je
pense, ça a toujours été... on s'est toujours dit : Peut-être,
c'est les gens, parce qu'ils sont
fortunés, ils sont moins à plaindre. On a favorisé certains... d'autres types
d'immigration parce que, bon, on a peut-être cinq places et six
personnes, alors on va favoriser ceux qui sont peut-être plus à risque. On a eu
la crise des réfugiés qui a fait en sorte
que peut-être qu'on a alloué plus de places à une certaine catégorie et, au fur
du temps, peut-être que... c'est ça. C'est un choix du gouvernement, en
fait.
M. Derraji : Je n'ai vraiment
pas compris. Si vous pouvez réexpliquer votre idée, s'il vous plaît.
M. Tajick (Stephane) : Pourquoi
les délais de procédure ont tellement augmenté?
M. Derraji :
Oui, justement, parce que vous avez dit que le programme, il est le plus complexe...
Bien, en fait, je m'inspire de votre
analyse. Vous avez dit que vous avez analysé plusieurs programmes au niveau
international, et votre constat est
le suivant : c'est un programme qui est complexe, cher, sécuritaire aussi.
Mais quand même, moi, le constat que j'ai devant moi, les gens attendent
pour venir au Québec, donc il y a quelque chose d'intéressant, malgré tout ça.
M. Tajick
(Stephane) : Vous voulez dire pourquoi ils attendent autant?
M. Derraji :
Oui.
M. Tajick
(Stephane) : Bonne question. Vous pourriez le demander aux
intermédiaires financiers ou des consultants en immigration, ceux qui
font la promotion du programme. Moi, je...
M. Derraji :
Vous n'avez pas analysé cette question.
M. Tajick
(Stephane) : Pourquoi ils sont prêts à attendre autant d'années?
M. Derraji :
Oui.
M. Tajick
(Stephane) : C'est la qualité de ce que le Québec offre.
M. Derraji :
O.K. Vous avez évoqué un point intéressant par rapport à la rétention et vous
avez dit — corrigez-moi
si je me trompe — qu'au
niveau mondial ce n'est pas un critère que les autres pays ou États prennent en
considération, oui ou non?
M. Tajick
(Stephane) : Au niveau de l'analyse de la provenance des fonds, vous
voulez dire?
M. Derraji :
Non, non, non, pas l'analyse des fonds. Vous avez dit que le Québec base son
analyse de la... pas la rétention, la
présence au niveau de la RAMQ. Et, quand on se compare avec d'autres États, on
sait que les capitaux voyagent et les
investisseurs voyagent aussi, mais vous pensez que ce n'est pas quelque chose
qu'il faut toujours avoir pour garder les investisseurs au Québec?
M. Tajick
(Stephane) : Écoutez, chacun peut peut-être avoir sa définition de
qu'est-ce que veut dire intégrer ou immigrer.
Les conditions qu'ils ont à répondre, c'est être présents sur le territoire
deux ans sur cinq ans, deux années sur cinq
ans. Ça, c'est l'unique critère qu'ils ont de présence. Tout le reste, ça
devient l'opinion des gens, si vous voulez. Du monde qui sont présents au Canada deux ans sur cinq ans, ça, c'est le
contrat qu'ils doivent remplir. Si on
considère que ça, c'est s'intégrer,
c'est une question complètement différente, ça devient peut-être
subjectif. Alors, c'est ça, quand quelqu'un est présent deux ans sur
cinq ans, il a rempli l'exigence qu'on avait placée en lui.
M. Derraji :
L'exigence de rester résident permanent?
M. Tajick
(Stephane) : Oui. C'est la seule exigence qu'il a de présence.
M. Derraji :
O.K. Mais on s'entend que, s'il veut être citoyen, c'est autre chose.
M. Tajick
(Stephane) : Oui, tout à fait.
M. Derraji :
O.K. Et, quand vous analysez un peu ce qui se passe ailleurs, vous avez dit tout
à l'heure que les États-Unis s'inspirent du même programme,
vous avez proposé, hein... probablement j'ai mal entendu, vous avez proposé ou
vous avez dit que les États-Unis s'inspirent du même programme, donc le programme
québécois, pourquoi?
M. Tajick
(Stephane) : Parce que les États-Unis,
depuis que le programme fédéral a fermé, ils se sont retrouvés avec énormément de demandes. Les demandes qui venaient pour le Canada, c'est retourné vers le programme
américain. Il a connu une croissance énorme,
et ils ont commencé un peu à perdre le contrôle, si vous voulez, c'est devenu
un peu le far west. Ils ne savent pas
combien on doit faire en investissement actif... pas actif, excusez-moi, à
risque dans un projet, et, si ce
projet réussit et donne les résultats escomptés, il se qualifie pour avoir la
résidence permanente. Ce qu'on ne sait pas, c'est combien de ces projets
réussissent et ne réussissent pas. Il y a eu beaucoup de scandales, etc. Nous,
le programme québécois, ça fait plus de 30
ans qu'il existe. Dans le temps, on a eu des scandales, etc., qui a fait que,
peu à peu, on a trouvé une formule
qui fonctionnait mieux. Alors, aujourd'hui, le programme américain essaie de
trouver des façons, en utilisant le modèle québécois, avec le SEC, de
réduire ce genre... avoir plus de supervision sur le programme et ce qui se
fait.
M. Derraji :
Donc, si je peux comprendre que, malgré, je peux dire, entre guillemets, les
irrégularités, parce que ça a été un
peu irrégulier, avec le temps, le délai, etc., qu'on peut toujours améliorer ou
voir comment avoir... mieux intégrer les immigrants investisseurs dans notre écosystème, vous pensez que le
Québec, aujourd'hui, peut dire fièrement, au niveau mondial, qu'on a
l'un des meilleurs programmes qui nous permet de ramener les immigrants
investisseurs.
M. Tajick
(Stephane) : Non. On a un des programmes qui donne... on est très
contents de nos résultats au niveau de
l'impact économique des investissements, de l'utilisation qu'on fait. Ça ne
veut pas dire que l'impact ne peut pas être plus avec l'utilisation des fonds. On a une structure qui est un modèle
pour les autres programmes à travers le monde, mais quand un programme d'immigration qui risque de
prendre huit ans, maintenant, pour que les gens débarquent, on ne peut
pas être fiers de ça.
Après, moi, ce que j'ai toujours
promu, c'est trouver des moyens de faire en sorte que les immigrants
investisseurs investissent plus au Québec au niveau... disons, qu'on s'aligne
un peu avec leurs intérêts. Je vais vous parler un peu d'expériences que j'aie eues avec des immigrants investisseurs, parce
que souvent je conseille, quand ils arrivent, quoi faire. J'en ai eu qui sont venus et qui ont dit :
Ah! j'aimerais bien peut-être acheter un terrain et construire un immeuble.
Moi, ma première approche, c'est :
Avant de faire des investissements au Québec, apprend ton environnement, c'est
un environnement très différent que
d'un pays en voie de développement, ce n'est pas la même vitesse, on ne
travaille pas à la même vitesse, il y
a beaucoup plus de lois. Il faut vraiment un support autour de lui, il doit
avoir plus de connaissances. Et souvent, moi, ce que je lui disais, c'est : À la place de ça, trouve une
entreprise au Canada ou au Québec qui fait quelque chose que tu peux
exporter dans ton pays, vous comprenez?
• (17 h 10) •
M. Derraji : Mais ça, on s'entend. Moi, ma logique... parce
qu'aujourd'hui nous avons devant nous, en tant que députés, un programme. La question qu'on se pose tous : Est-ce que ce
programme, on le ferme, on le continue en l'améliorant ou qu'est-ce qu'on fait? Donc, c'est pour ça que
je vous pose la question. Aujourd'hui, dans les faits, nous avons quand
même un bon programme qui... probablement,
il faut l'améliorer, sachant l'impact économique de ce programme, et tout à
l'heure ça a été mentionné par... l'impact au niveau des régions, l'impact sur
les manufacturiers en région, l'impact sur les entrepreneurs en région qui demandent les subventions qui proviennent de
ce programme. Et je rajoute aussi l'intégration des minorités visibles
via le financement de quelques heures et quelques mois qui leur permettent
d'acquérir une première expérience québécoise. En fait, c'est là où je veux
vous ramener.
M. Tajick
(Stephane) : Parfait. Maintenant...
M. Derraji : Vous avez quand même une bonne
expérience à l'international, c'est juste... comment on peut lire?
M. Tajick
(Stephane) : En tant que gouvernement...
La
Présidente (Mme Chassé) : Ceci conclut le bloc d'échange avec
l'opposition officielle. Et maintenant j'invite le député de Laurier-Dorion à prendre la parole pour
le bloc d'échange avec le troisième groupe d'opposition... deuxième
groupe d'opposition, pardon. Allez-y. Merci.
M. Fontecilla :
Merci. Bonjour, monsieur. Expliquez-moi quelque chose. Vous avez dit
tantôt : L'exigence du programme
exige une résidence effective deux ans sur cinq ans pour la durée du programme.
D'autre part, on sait que, hormis le questionnement s'il faut s'en
occuper ou non, la question du taux de rétention, là, il y a beaucoup de ces
immigrants investisseurs qui partent très
rapidement. Comment concilier ces deux chiffres-là? Est-ce qu'ils partent après
deux ans de résidence effective, ou dès qu'ils peuvent, ou ils partent
avant? Expliquez-moi, là.
M. Tajick
(Stephane) : Ce que je veux être clair, comme j'ai dit, je suis
peut-être la personne qui fait le plus de rapports précisément là-dessus, on ne peut pas discuter de la rétention
des immigrants investisseurs au Québec, on ne peut pas, on n'a pas les
données pour, aussi simple que ça.
M. Fontecilla :
Donc, lorsqu'on dit...
M. Tajick
(Stephane) : La façon qu'on regarde le problème, la problématique
n'est pas adaptée aux immigrants investisseurs, de un. Et, de deux, à
cause des délais de traitement, on ne peut pas avoir une image du présent, de...
les immigrants qu'on a sélectionnés les deux
dernières années, cinq dernières années, sept dernières années, quel va être
leur taux de présence. Aujourd'hui, peut-être le taux de présence des
immigrants investisseurs est peut-être de 99 %, on ne peut pas le savoir.
M. Fontecilla :
O.K. Donc, on ne peut pas savoir si les immigrants investisseurs respectent
l'obligation de deux ans sur cinq ans et on ne peut pas savoir si les chiffres
du ministère sont corrects.
M. Tajick
(Stephane) : Ça, on peut le savoir. Le deux ans sur cinq ans, c'est la
même chose pour tous les immigrants, O.K.?
Tous ceux qui reçoivent la résidence permanente ont les mêmes critères :
deux ans, cinq ans. Alors, on ne va pas mettre les Québécois...
M. Fontecilla :
Au pays?
M. Tajick
(Stephane) : Oui, au pays. Ça fait qu'on ne va pas mettre les...
M. Fontecilla :
Mais on ne sait pas, la province, là.
M. Tajick
(Stephane) : Non, mais ça ne veut pas dire qu'ils se déplacent tous
les deux mois non plus. En général, les
gens sont établis quelque part. Est-ce qu'on peut dire qu'on a un problème de
rétention des immigrants investisseurs? Est-ce qu'on peut dire qu'il y a
15 % des immigrants investisseurs?
La Présidente (Mme Chassé) : En
conclusion.
M. Tajick (Stephane) :
Moi, mon étude, toute ma recherche après toutes ces années, c'est : on ne
peut même pas parler d'un chiffre, on
ne peut pas parler de chiffres. On peut peut-être penser qu'il y a un problème,
mais on n'a pas les chiffres pour
pouvoir le démontrer
précisément ou pouvoir «track»... voir si nos décisions, nos changements, les
politiques qu'on va prendre, qu'on va établir vont avoir un impact dans les
prochaines années.
La Présidente
(Mme Chassé) : Merci. On est maintenant rendus au bloc d'échange
avec le troisième groupe d'opposition. Mme la députée de Gaspé, la parole est à
vous.
Mme Perry
Mélançon : Merci, Mme la Présidente. Je vais continuer rapidement sur
ce que mon collègue a mentionné par rapport
à... Bon, vous nous dites qu'en termes de rétention c'est très difficile de se
fier à des chiffres puis même qu'on
pourrait ne pas en avoir d'ici huit, neuf ans, mais qu'est-ce que vous pensez quand même,
par exemple, des mesures
comme la francisation? Est-ce que vous êtes en faveur? Parce qu'on n'a peut-être
pas le chiffre de rétention, mais on
nous disait tout à l'heure qu'il y a un très faible nombre de francophones
qui appliquent dans ces programmes-là. Et la francisation, pour nous, est une solution puis un besoin, là, pour
l'immigration réussie au Québec. Alors, quand
même, est-ce que vous y
croyez, à la rétention de ces immigrants investisseurs là?
M. Tajick
(Stephane) : Il faut voir
aussi le profil. Quelqu'un qui est francophone a plus de portes d'entrée
que quelqu'un qui n'est pas francophone. Ça
veut dire, si vous êtes francophone, même si vous avez une grosse fortune,
peut-être, vous pouvez choisir d'autres programmes
pour rentrer au Québec que pour un immigrant investisseur. C'est pour ça
que c'est surtout des gens anglophones qui
vont appliquer... ou allophones qui vont appliquer pour le programme Immigrants investisseurs.
Mme Perry
Mélançon : Mais vous nous
dites quand même de prioriser ces... bien, pas de prioriser, mais
quand même d'y porter une attention particulière, à ces investisseurs.
M. Tajick
(Stephane) : Non, ce n'est
pas ça, c'est que, vu que c'est des gens fortunés, ils n'ont pas nécessairement
besoin d'intégrer le marché du travail, ça veut dire qu'ils peuvent très bien être intégrés dans la société,
si vous habitez à Montréal, par exemple, sans parler beaucoup de
français. Maintenant...
Mme Perry
Mélançon : Ça m'amène à une autre question, oui, parce que vous dites,
justement, que ce n'est pas des gens qui ont besoin de s'établir, mais
vous avez, par exemple, bien, dans les objectifs de ce programme-là, il y a...
les immigrants investisseurs peuvent
potentiellement répondre au problème de succession entrepreneuriale. On parle
de gens qui viendraient prendre une entreprise et devenir l'entrepreneur
principal.
M. Tajick
(Stephane) : Ça, c'est un autre sujet. La succession entrepreneuriale,
c'était surtout au niveau des entrepreneurs, et ça devait vraiment être pour
les régions parce que...
Mme Perry
Mélançon : Et est-ce que ça fonctionne?
M. Tajick
(Stephane) : Bien, il n'y a pas de programme à ce niveau-là. C'est quelque
chose qui... En 2012, les premiers rapports
ont établi qu'il y a une énormément grande demande au Canada
pour la succession entrepreneuriale. Et, jusqu'à maintenant, bien qu'il
y a eu beaucoup... Moi, j'en ai parlé beaucoup, Board of Canada en a parlé
souvent aussi...
Mme Perry
Mélançon : ...pas être indiqué comme un avantage au programme, la
relève entrepreneuriale. Les immigrants peuvent potentiellement répondre au
problème de succession.
M. Tajick
(Stephane) : Pas au niveau
du programme Immigrants investisseurs, parce qu'en général les immigrants qui viennent du programme
investisseurs...
La Présidente
(Mme Chassé) : Ça termine le bloc d'échange. Je vous remercie.
Merci, M. Tajick, pour votre contribution à la commission.
Je suspends quelques
instants pour permettre au prochain groupe de prendre la place. Merci.
(Suspension de la séance à
17 h 16)
(Reprise à 17 h 17)
La
Présidente (Mme Chassé) : À l'ordre, s'il vous plaît! Je vais
débuter avec M. Samuel Tessier, et je vous souhaite la bienvenue de nouveau, et vous allez vous
exprimer maintenant à titre individuel. Je vous rappelle maintenant que
vous disposez de cinq minutes pour faire
votre exposé, et puis par la suite nous aurons une brève période d'échange.
Alors, je vous invite à débuter, allez-y.
MM. Samuel Tessier et Henri
Tousignant
M. Tessier
(Samuel) : Super, excellent, merci. Rebonjour. Donc, cette
présentation-là, en fait, est à titre personnel, à titre de consultant en immigration accrédité au Québec, également à
titre d'associé chez Echelon Gestion de patrimoine.
Donc, en
fait, je voulais vous parler un petit peu plus, là, en détail de la pratique au
quotidien d'un consultant en immigration,
puis le type de clients, là, atypiques qu'on voit dans le programme
investisseurs, et l'encadrement, en fait, à titre d'intermédiaire financier qu'on offre à ces clients-là fortunés
qui veulent déployer du capital, là, au Canada ou au Québec en
particulier.
Alors donc,
ça fait sept ans, en fait, là, que je fais cette pratique-là, et donc, en fait,
qu'est-ce qu'on a pu constater, c'est
que ça demande beaucoup de temps monter un dossier, et également il faut se
rendre chez les gens, là, pour offrir des services personnalisés haut de gamme, donc, à ces investisseurs fortunés
aux quatre coins du monde parce que, comme on le disait tout à l'heure, c'est très compétitif, en fait, là, en termes
d'immigration mondiale et, de plus en plus, sur la scène nationale
également.
Donc, dans
cette pratique-là, en fait, on a la chance de voir plein de sortes
d'investisseurs d'un peu partout, des quatre
coins du monde, et on a... En fait, j'ai spécialisé ma pratique sur surtout les
pays en dehors de la Chine. Donc, on va travailler beaucoup sur les pays francophones et également sur les pays
anglophones où les gens ont une bonne propension, là, d'être acceptés
dans le cadre du programme.
Alors, pour
vous donner un exemple, en fait, là, j'avais en tête un client qu'on a
accompagné l'année dernière sur le
programme actuel en vigueur, le 1,2 million, et donc c'est un client qui
nous a été référé de prime abord par un autre client d'Echelon, c'est un
monsieur d'origine du Brésil. Et donc, pour s'établir au Canada, en fait, il a
choisi le programme Immigrants
investisseurs, comme sa fille était déjà établie au Québec. Et donc, ayant déjà
une première fille établie au Québec depuis
plusieurs années, il a choisi le Québec, il a participé au programme
investisseurs, a déposé son dossier auprès du MIDI, et entre-temps, en fait,
comme intermédiaire financier, on l'accompagne dans le déploiement de son
capital au Québec.
Alors, pour ce faire, bien, évidemment, comme
firme... on est en mesure d'accompagner ces gens-là dans le déploiement de leur capital sur les différentes
bourses mondiales, donc d'ouvrir des comptes de courtage au Canada,
transférer une partie de leur patrimoine,
par exemple, dans son cas, des États-Unis vers le Québec, et donc d'encourager,
évidemment, l'industrie du service professionnel et services financiers
québécois, et donc attirer des actifs sous gestion au Québec, évidemment, qui
créent de l'emploi.
• (17 h 20) •
Parallèlement
à ça, bien, ces gens-là ont besoin
d'un accompagnement pendant la procédure d'immigration, mais surtout
après la procédure d'immigration. Donc, au moment qu'ils obtiennent leur avis
de délivrance d'un certificat de sélection,
hein, il y a plusieurs choses qui se mettent en place, notamment
l'acquisition de propriétés. Et donc, étant une firme dans les marchés financiers, bien, on est en mesure d'encadrer les gens ou de les aider à
prendre des bonnes décisions financières,
d'établir une planification financière avec eux pour le déploiement de leur
capital au Canada et de les encadrer dans
les différentes juridictions ou les différentes réglementations provinciales,
là, dans les provinces où ils vont investir.
Alors, cet
encadrement, je crois qu'il est souhaitable pour les gens, en fait, qu'ils ne
soient pas seulement accompagnés auprès
de consultants en immigration ou d'un avocat, mais également auprès d'une
banque ou d'une institution financière, une firme de courtage qui va les
aider à déployer du capital, que ça soit sur les marchés publics ou encore sur
des entreprises privées. Mon précédent
collègue parlait de la transition au niveau des entreprises au Québec et qui va
être un enjeu dans les prochaines
années. Bien, ces gens-là, en fait, sont propices... ont du capital à investir,
maintenant habitent au Québec et donc sont propices à faire
l'acquisition de sociétés.
La personne
que je mentionne depuis le début de mon exposé, là, a pu, par le biais de sa
deuxième fille, en fait, là, faire
l'acquisition d'une société ici, au Québec, dans le cadre de la physiothérapie.
Donc, c'est des gens qui sont en mesure de s'établir, s'épanouir, apprendre le français et qui ont une réelle
volonté, et c'est ce qu'on promeut, en fait. Aujourd'hui, le système de
contingents nous permet de sélectionner de façon rigoureuse des candidats,
parce qu'il n'y a pas beaucoup d'allocations
pour les non-francophones, et donc, du coup, bien, on s'assure de prendre des
gens qui ont une propension et même qui ont déjà fait des démarches, en
fait, pour présenter une intention de s'établir au Québec.
Alors, les
deux préoccupations que j'aimerais soulever d'une famille atypique de ce
profil-là, évidemment, c'est... il a
choisi le Québec déjà, donc sa première préoccupation, c'est les délais de
traitement. Donc, on a parlé... c'est des gens qui ont déjà leur CSQ, qui attendent déjà depuis
plusieurs années. Il reste que le volet fédéral, c'est seulement des... c'est
une portion administrative, là, de contrôle
de sécurité, contrôle médical, les gens ont déjà fait la démonstration de
l'accumulation de leurs avoirs. Cependant,
ils vont quand même attendre cinq ans dans le processus pour des formalités
administratives, finalement, là, de contrôle
médical, contrôle de sécurité qui freinent, en fait, le déploiement de leur
capital. Parce que, pour nous, c'est
une formalité administrative, c'est quelques formulaires, mais pour eux ça fait
toute la différence et ça présente une incertitude...
La Présidente (Mme Chassé) : En
conclusion.
M. Tessier
(Samuel) : ...dans leur immigration, et donc qui vient ralentir, en
fait, le déploiement de leurs capitaux et
l'impact économique que ces gens-là vont avoir au Québec. Alors, c'est la plus
grande préoccupation de ces gens-là. Et la deuxième réalité, c'est que ces personnes, en fait, n'ont pas
nécessairement d'autre alternative aujourd'hui au Québec pour joindre la
société québécoise. Donc, a priori, c'est des gens qui ont un certain âge, qui
ont eu le temps d'accumuler une fortune, et ils ne vont pas appliquer sur des
programmes de travailleurs qualifiés, parce qu'ils n'ont pas l'intention de
travailler au Québec...
La
Présidente (Mme Chassé) : Je vous remercie, vraiment.
M. Tessier
(Samuel) : Merci.
La
Présidente (Mme Chassé) : Merci. On va maintenant débuter la
période d'échange avec le parti formant le gouvernement. M. le ministre,
vous débutez. On a un bloc de cinq minutes.
M. Jolin-Barrette : Merci, Mme la Présidente. Rebonjour,
M. Tessier. Vous dites : Ce qui freine le déploiement du capital, c'est principalement les délais de
traitement. Et là, vous le dites, à Ottawa il y a un délai de traitement de
cinq, six ans. Le précédent gouvernement libéral a laissé s'accumuler des
dossiers, créant un inventaire de 19 000 dossiers immigrants investisseurs qui sont présentement à Ottawa. Ça, ça signifie
que le Parti libéral a donné des certificats de sélection du Québec, a sélectionné des immigrants
investisseurs, mais en ne respectant pas ses seuils d'admission. Dans le fond,
ça veut dire qu'ils ont laissé
s'accumuler... ils ont sélectionné les immigrants investisseurs, ils ont pris
leur argent ou, par le biais
d'intermédiaires financiers, pris l'argent puis, comment on pourrait dire, ils
ont engrangé, dans le fond, durant des années
les demandes, les ont transférées à Ottawa, mais, dans le plan annuel de
l'immigration, bien, ils n'avaient pas de place pour ces gens-là, donc le délai s'accumulait, s'accumulait et
s'accumulait. Maintenant, on est rendus à 19 000 personnes qui ont un CSQ à Ottawa en lien avec le programme
Immigrants investisseurs. Ça fait que ça, c'est le bilan du gouvernement
libéral au cours des dernières années.
Vous
dites : Ça freine le déploiement de capital. Même si les délais étaient
plus courts — tout à
l'heure, on a eu des gens qui nous
ont dit «ça devrait être à l'intérieur d'un an» — est-ce que vous pensez que les immigrants
investisseurs vont véritablement
investir au Québec, vont venir s'établir au Québec ou c'est... comme disait la
précédente personne avant vous, que c'est une police d'assurance, le
fait d'avoir une résidence permanente canadienne?
M. Tessier
(Samuel) : Eh bien, en fait, je dirais que d'ordre général, là, en
fait, les délais de traitement freinent le capital, parce que ça crée une incertitude dans leur procédure
d'immigration. Donc, comme consultants en immigration, on sait, les statistiques d'acceptation au niveau
fédéral sont très élevées. Mais il reste que, pour la personne, l'individu,
ça reste, évidemment, de l'incertitude qui
freine le déploiement de son capital.
Donc, sur cette base-là, en fait, c'est là-dessus que je me baserais,
là, voilà, pour adresser votre point. Est-ce
que ces gens-là vont avoir une
meilleure rétention s'ils sont traités plus
rapidement dans le terme de la procédure fédérale? Tout à fait. Les plans changent. C'est des gens qui sont fortunés, ils ont
une mobilité déjà beaucoup plus importante que la moyenne des citoyens. Et
donc, dans ce cadre-là, les laisser attendre
six ans, bien, évidemment, des opportunités vont se présenter à eux.
L'incertitude que plane devant leur immigration au Canada, malgré qu'ils ont payé, peuvent changer d'idée
et décident de partir au Royaume-Uni parce
que les délais de traitement
sont de 12 mois.
Donc,
en fait, tout à fait, ça va freiner le déploiement du capital. Et d'accélérer
ça, est-ce que ça va faire une rétention plus élevée au Québec? Bien, potentiellement. Le Québec les a choisis, ils ont choisi
le Québec, ils ont confié leurs fonds au
gouvernement du Québec. Et en contrepartie ils s'attendent à avoir une carte de
résidence dans un délai, là, assez proscrit. Eux, ils ont... tu sais, en fait, ils ont fait ce qui était exigé de
leur part, et par la suite c'est seulement une question, là, de délais
administratifs.
M. Jolin-Barrette : Vous dites : On voyage partout à travers le
monde à la recherche des candidats. Comment ça se fait... Comment ça se déroule à l'étranger lorsque vous recrutez des
candidats? Est-ce que vous achetez des dossiers de candidature par le biais de consultants locaux?
Est-ce que vous les démarchez vous-même dans les différents pays?
Comment ça fonctionne, la vie d'un intermédiaire financier à l'étranger?
M. Tessier
(Samuel) : Un peu des deux, en fait, ça se passe un peu des deux. On
travaille avec beaucoup de consultants en immigration réglementés canadiens qui
sont basés dans les pays, donc souvent d'origine locale, et donc établissent leur pratique dans les pays en question.
Et également, en fait, en direct avec des clients, là, qui ont de
l'intérêt pour travailler directement avec
l'intermédiaire. Donc, on est... je ne dirais pas... je ne peux pas parler pour
tous les intermédiaires, mais on est
dans une pratique, en fait, où on a intégré, en fait, les consultants en
immigration aux gestionnaires de
portefeuille pour présenter une pratique holistique, là, au client. Et donc ils
travaillent toujours mains dans la main avec notre équipe, là, de A à Z, de la procédure de son immigration jusqu'à
l'acquisition de sa maison, l'installation de ses enfants dans des
écoles, etc., là, qui va s'ensuivre, là, suivant son immigration.
Donc, au quotidien,
en fait, la présentation des programmes est assez simple. Parce que, si on fait
le survol des programmes au Québec, il y en
a seulement quatre de disponibles, là, sous différents formats. À la fin de la
journée, quelqu'un, par exemple, de 55 ans, fortuné qui veut
immigrer au Canada, bien, il n'y a pas 25 portes. On pourrait lui présenter
le programme entrepreneurs, dans lequel il
va devenir gestionnaire activement d'une société au Québec, ce qui n'est pas
toujours le cas qu'ils veulent faire. Et, de l'autre côté, il y a le programme
d'investissement passif investisseurs. Donc, c'est les deux réelles solutions
qui se présentent à lui s'il ne veut pas passer par un programme de DEP pour
appliquer sur un programme de travailleur qualifié par la suite...
La Présidente
(Mme Chassé) : En conclusion.
M. Tessier
(Samuel) : ...qui n'est pas sa réelle intention.
La Présidente
(Mme Chassé) : Très bien. Je vous remercie. Ça termine le bloc
d'échange avec le parti formant le gouvernement.
On est rendus au bloc d'échange avec le parti formant l'opposition officielle.
M. le député de Nelligan, vous débutez. Merci.
M. Derraji :
Merci, Mme la Présidente. Ma question, c'est par rapport au développement
économique régional. Tout à l'heure,
ça a été mentionné qu'il y a 10 demandes pour une demande de subvention.
Vous avez mentionné dans votre lettre
que votre crainte, c'est voir ce passage de 1 400 placements en 2018
passer à 800 placements en 2019. Pensez-vous que nous sommes en
train d'envoyer un message négatif à l'économie régionale et aux entrepreneurs
qui ont l'habitude d'utiliser ce programme?
M. Tessier
(Samuel) : Tout à fait, parce qu'il y a beaucoup d'entrepreneurs qui
attendent des subventions. Et force est de leur mentionner qu'en fait on
est menotté par les délais de traitement faramineux, donc, tout à fait.
M. Derraji :
Et pensez-vous que le gouvernement envoie, encore une fois, un mauvais signal à
l'économie régionale qu'on ne les supporte pas assez, vu qu'il y a une
demande par rapport à ce programme?
M. Tessier
(Samuel) : Tout à fait. Puis je peux parler aussi du point de vue de
l'immigrant. En fait, l'immigrant va payer
15 000 $ — 15 496 $,
là, exactement — pour le
traitement de son dossier, ensuite va se voir sujet de seuils d'immigration
qui vont évidemment le faire attendre
plusieurs années avant d'obtenir une décision sur sa candidature. Et ensuite on
va encore l'envoyer se faire attendre, là,
plusieurs années au fédéral pendant presque cinq ans. Donc, moi, je considère
que c'est inacceptable. Et pour gérer des clients ou la relation client au
quotidien avec ces personnes-là, c'est très difficile d'expliquer à quelqu'un que ça va lui prendre sept ans à devenir
canadien dans le contexte actuel, surtout qu'il va investir
1,2 million de dollars, là, auprès du gouvernement.
M. Derraji :
Je comprends. Mais, moi, la problématique qui me préoccupe le plus, c'est que
ce programme a un impact économique
sur les régions. C'est le seul programme de subvention qui peut vraiment venir
en aide en utilisant cet argent. Je
sais qu'il y a d'autres programmes, mais ce n'est quand même pas négligeable.
La demande, elle est là. Vous pouvez être beaucoup plus clair et
demander et exiger qu'on revienne au minimum au seuil de placement au lieu de
rester à 800 en 2019.
• (17 h 30) •
M. Tessier
(Samuel) : Tout à fait, bien, c'est notre demande, et notre
présentation précédente, là, en fait, c'était exactement l'objectif. En fait, si on décide de donner
1 900 contingents une année, on devrait s'engager de les traiter
dans les 12 mois qui suivent et, à
chaque année, comme ça, revenir avec des contingents dans la mesure des
capacités opérationnelles du ministère de l'Immigration.
M. Derraji : Bon, je vais être beaucoup plus clair que vous.
C'est que votre affirmation aujourd'hui, vous demandez au gouvernement de ne pas
limiter ça à 800, de rester à 2 900 parce que ça nuit à l'économie
régionale, ça nuit aux entreprises qui demandent des subventions. Est-ce que je
l'ai bien...
M. Tessier
(Samuel) : C'est notre principal point, en effet, là, de retirer les
seuils de traitement mis en place, actuellement.
M. Derraji :
Donc, vous appuyez l'affirmation que je viens de dire.
M. Tessier
(Samuel) : Tout à fait.
M. Derraji :
Merci.
La Présidente
(Mme Chassé) : Il reste 30 secondes au bloc.
Mme Robitaille : Oui, écoutez, la rétention... Selon vous — vous
avez eu plusieurs clients — qu'est-ce
qu'il faudrait faire pour garder ces gens-là chez nous?
M. Tessier
(Samuel) : Eh bien,
je crois que de travailler avec des intermédiaires financiers, ça les encadre.
En fait, ces gens-là ont des besoins
financiers, besoins d'investissement, ils doivent être encadrés. On a mis des
autorités de marché en place qui
régissent ces intermédiaires financiers là, les banques, et donc on devrait les
utiliser, en fait, pour guider ces gens-là
et s'assurer, là, que, dans leur nouvelle géographie d'adoption,
ils sont bien encadrés en termes de
développement de capital et passent par les bonnes pratiques, en fait,
canadiennes, là, qui...
La Présidente
(Mme Chassé) : En conclusion.
M. Tessier
(Samuel) : ...sur lesquelles ils cherchent en venant investir et
s'établir au Canada.
La
Présidente (Mme Chassé) :
Merci. Les deux prochains groupes, vous avez 50 secondes. Je débute par M. le député...
M. Fontecilla :
Je n'ai pas d'autre question, Mme la Présidente.
La Présidente
(Mme Chassé) : Merci, M. le député de Laurier-Dorion. Mme la
députée de Gaspé, un sprint.
Mme Perry
Mélançon : Oui, en fait,
dans tous les argumentaires qu'on a entendus récemment, là, on parle toujours
des exemples d'Australie, Royaume-Uni pour
parler des délais de traitement plus courts, mais est-ce qu'on sait réellement
si le taux de succès de rétention est vraiment nettement supérieur?
M. Tessier (Samuel) : Bien, je ne pense pas qu'ils ont les mêmes enjeux
régionaux ou compétitions interprovinciales, là, qu'on peut voir ici.
Donc, c'est spécifique, je crois...
Mme Perry
Mélançon : Mais, si on compare, par exemple, avec le genre
d'investissements, le genre de projet d'affaires,
est-ce que ces gens-là, vraiment, s'implantent? Et vous parlez d'aller dans les
écoles, leurs enfants et tout, est-ce que, je veux dire, ça, c'est
semblable d'un pays à l'autre?
M.
Tessier (Samuel) : Oui, oui, bien, c'est vraiment une pratique,
disons, là... une planification successorale, hein, que les investisseurs font en choisissant le
Canada, vont le choisir, oui, pour eux, mais a priori, même s'ils sont dans
des pays instables, ils sont très bien installés et ils sont privilégiés dans
leur pays. Quand ils choisissent le Canada, c'est surtout pour leurs enfants.
La
Présidente (Mme Chassé) :
Merci, ça conclut. Je vous remercie pour votre contribution de nouveau aux
travaux de la commission.
Et
je souhaite maintenant la bienvenue à M. Henri Tousignant. Vous
avez cinq minutes, et ensuite nous procéderons à la période d'échange, tel que vous venez de le vivre avec
M. Tessier. Je vous invite à vous présenter de nouveau et à débuter
votre exposé pour cinq minutes. Allez-y.
M. Tousignant
(Henri) : Merci, Mme la Présidente, M. le
ministre, Mmes et MM. les députés.
J'ai été député à Ottawa, alors je sais ce que c'est que d'être assis
alentour d'une table, pas même aller aux toilettes jamais.
Alors,
écoutez, moi, je pense que... puis je suis un bonhomme de 83 ans aujourd'hui, alors c'est à titre personnel que je m'adresse à vous, et moi,
je vais aller dans des considérations beaucoup plus terre à terre. Naturellement,
on entend toutes sortes de présentations,
puis c'est correct, c'est bien, puis il faut que vous les écoutiez, puis c'est
d'intérêt pour tout le monde. Mais moi, je vais tout simplement regarder les
choses qui pourraient peut-être être faites simplement, simplement puis
qui ne coûteraient peut-être pas cher non plus.
Alors,
quand on se retrouve dans une situation de pénurie de travailleurs, de ressources humaines comme on le vit présentement, il me semble que ce serait le temps
de faire le ménage. Vous savez, on a tous été pauvres un jour ou
l'autre, puis on grattait les fonds de
tiroir, puis on essayait de trouver les trente-sous puis la piastre, puis ça ne
nous donnait pas grand-chose, mais ça
nous permettait de faire le ménage. On pourrait peut-être faire le ménage dans
le ministère du Travail puis dans
l'emploi au Québec, premièrement. Il y a du monde, il y a des milliers de
personnes au Québec qui seraient prêtes à travailler, mais voilà, ce n'est pas facile d'aller se chercher une
job. Si vous avez une bonne job, tout le monde court après vous. Si vous n'avez pas de job, puis que vous
vous présentez quelque part, déjà là, là, on a des préjugés contre vous.
Ce n'est pas facile. Il y a des gens qui n'ont même pas d'argent pour mettre du
carburant dans leur auto pour aller se chercher une job.
Donc,
du côté du ministère du Travail, vous ne pouvez pas parler d'immigration sans
inclure le ministère du Travail et
puis d'autres ministères aussi quand on veut parler de main-d'oeuvre, quand on
veut parler de combler les besoins, quand on veut parler de la démographie du Québec, la perte de poids vis-à-vis
le reste du Canada. Alors, on veut combler ça par l'immigration, mais ça, ça ne peut pas se faire
sans concerter tous les ministères, s'il y en a un... si la main gauche ne
sait ce que la main droite fait. Alors, on
devrait... il me semble que le ministère
du Travail devrait, aujourd'hui, avec l'informatique, tout ce qui existe aujourd'hui... il me semble
qu'ils devraient être les premiers intervenants à aller chercher... On devrait être numérotés partout dans... numérotés au gouvernement, et puis qu'on appuie sur un bouton, pareil comme les échanges
qui se font à la bourse de New York,
et puis être en contact avec tout le
monde puis avec tous les employeurs en même temps. Quelqu'un veut travailler, il
appuie sur un bouton, et puis le ministère répond, et puis ça se fait tout mécaniquement,
ça pourrait tout se faire. Là, on est au cheval puis à la charrette encore au ministère
du Travail. Alors, ça, c'est une constatation qui... Je pense que ça pourrait
être amélioré. Ça ne se peut pas qu'en 2020... qu'on soit obligés de travailler
soi-même. Parce qu'il y a des gens qui ne sont pas capables... Puis là, quand
on parle de gens qui sont disponibles pour travailler,
on parle souvent des assistés sociaux. Il y a des assistés sociaux qui
pourraient travailler. Il y a des gens qui ont cessé de regarder pour trouver du travail, ils sont
découragés, ils n'aiment pas ça. Il y
a des autochtones, je ne parle pas
les plus âgés, mais dans les plus
jeunes, il y a des gens de 16, 17, 18, 19, 20 ans, des beaux
garçons, des belles filles, si on les prenait par la main puis on leur disait, bien : On va vous
aider à vous trouver un emploi si vous voulez travailler, je suis certain, moi,
qu'on trouverait 50 000 personnes pour travailler. Bon, ça, ce serait une
chose, ce serait un départ. Ces gens-là, ils n'ont pas besoin d'être naturalisés, c'est des Canadiens français. Alors, peut-être
que de ce côté-là... je ne sais pas s'il
y aurait moyen d'améliorer des
choses.
La Présidente
(Mme Chassé) : Je vous invite à conclure, il vous reste
30 secondes. Allez-y.
M. Tousignant (Henri) : Bien,
voilà, je voulais parler d'immigration, justement.
La
Présidente (Mme Chassé) : Il vous reste 30 secondes.
M. Tousignant
(Henri) : 30 secondes.
Moi, je pense que l'immigration, oui, mais à nos conditions. Je vais être clair avec ça. D'abord, moi, je suis un bonhomme
de 83 ans puis je m'inquiète de la situation du Québec à moyen, long terme. On est entourés
d'anglophones partout. Même les Français, en France, les jeunes à l'école
apprennent l'anglais.
La
Présidente (Mme Chassé) :
M. Tousignant, ça termine votre exposé. Merci, et on débute le bloc d'échange. M. le ministre, le bloc
d'échange avec le gouvernement est de cinq minutes. Allez-y.
M. Jolin-Barrette : Oui, merci, Mme la Présidente. Merci,
M. Tousignant, d'être venu en commission
parlementaire nous partager votre opinion en lien avec la planification
pluriannuelle en matière d'immigration.
Tantôt,
vous avez soulevé un bon point relativement au fait que le gouvernement du Québec devait travailler, tous les ministères devaient travailler ensemble. C'est pour ça que,
dans le projet de loi n° 9, qu'on a adopté au mois de juin dernier,
on a consacré le rôle du ministère de l'Immigration au niveau de la
coordination. Parce que ce que j'ai constaté quand je suis arrivé comme ministre de l'Immigration,
c'est qu'il y a beaucoup... les ministères travaillaient beaucoup en silo
au niveau de l'immigration. Puis ça prend
une approche coordonnée, et maintenant c'est le ministère de l'Immigration
qui va le faire, et ce, dès l'étranger, donc
au niveau international, et, par la suite, aussi à l'intérieur du gouvernement
du Québec. Ça prend un ministère qui
est imputable pour l'accueil des nouveaux arrivants. Puis actuellement il y
avait des choses qui se faisaient au
ministère du Travail, à l'Immigration, à l'Éducation aussi, et maintenant le
point de chute, c'est le ministère de l'Immigration, qui est imputable,
justement pour faire en sorte qu'on ait une approche globale, une vision
globale.
Pour
ce qui est du ministère de Travail, Emploi, Solidarité sociale, mon collègue le
ministre du Travail fait une grande corvée, est en train de recenser
région par région l'ensemble des emplois qui sont disponibles. Mais bien
entendu, actuellement, il y a une pénurie de
main-d'oeuvre et il y a beaucoup de demandes pour des travailleurs.
L'immigration peut constituer une des
solutions, mais, comme vous le dites, justement, les travailleurs expérimentés
peuvent contribuer au marché du
travail, les jeunes dans les programmes de formation, les membres des nations
autochtones aussi, mais c'est la responsabilité
du gouvernement du Québec de les intégrer aussi et de les accompagner
là-dedans, comme on fait avec les personnes immigrantes.
Je ne sais pas
qu'est-ce que vous en pensez, des propositions qu'on fait.
• (17 h 40) •
M. Tousignant
(Henri) : Excellent. Je voulais d'ailleurs vous féliciter pour le
projet de loi sur la laïcité, qui, à mon sens, ne va pas encore assez
loin, mais c'est ça.
Mais ce que je
voudrais ajouter, moi, je pense que vous devriez mettre l'accent sur les
francophiles, en termes d'immigration, les
gens qui sont francophiles, les gens qui aiment la francophonie puis qui sont
prêts à accepter notre façon de
vivre, parce que, nous, comme je l'ai mentionné tout à l'heure, il y a des
risques qu'on disparaisse. Puis on a beau jaser, puis parler de toutes sortes de belles choses, puis parler
d'investissements, puis tout ça, mais, à la fin du compte, qu'est-ce que
c'est qui est l'objectif? Quel est
l'objectif? L'objectif, c'est la survie de notre peuple. Puis je ne suis pas
séparatiste puis je ne veux pas faire
de politique, là, mais la survie de notre peuple, là, c'est très important puis
c'est la première chose, je pense,
que le ministère de l'Immigration devrait prendre en compte, aller chercher des
gens francophones. Les Français, ça,
ils sont... Vous pourriez accepter les Français sans condition parce que les
Français, ils sont chez eux, c'est eux autres qui ont découvert le Canada. Alors, il me semble que,
ça, on pourrait en prendre sans trop d'hésitation, parlant français,
oui, mais pas nécessairement parlant français, les gens qui veulent s'intégrer
ici puis qui sont francophiles.
M. Jolin-Barrette :
En fait, M. Tousignant, ce sur quoi on travaille avec le lancement de la
plateforme Arrima, justement, c'est de
sélectionner des personnes immigrantes, peu importe la région dans le monde,
qui correspondent aux besoins du marché du travail. Puis nous, au
gouvernement du Québec, de la façon dont on voit ça, c'est que c'est une responsabilité partagée au niveau de
l'intégration, au niveau de la francisation. Le rôle du gouvernement du Québec,
c'est d'offrir toutes les ressources, tous
les services disponibles aux personnes immigrantes qui choisissent le Québec.
Puis j'ai annoncé cette semaine un
parcours d'accompagnement personnalisé, la semaine dernière, qui fait en sorte
que, dès l'étranger, on offre des
cours de francisation, la reconnaissance des diplômes, la facilité avec les
ordres professionnels parce que souvent, ça, ça constitue un frein à
l'intégration.
Puis
les deux facteurs les plus importants pour l'intégration, bien souvent, dans
n'importe quelle société, c'est la connaissance de la langue d'usage,
donc le français pour le Québec, mais aussi le fait d'occuper un emploi.
La Présidente
(Mme Chassé) : Il vous reste 30 secondes.
M. Jolin-Barrette : Alors, sur ces deux volets-là, on travaille
ardemment là-dessus vraiment pour accompagner les personnes immigrantes. Puis, nous, notre objectif, c'est que les
personnes immigrantes puissent occuper un emploi à la hauteur de leurs compétences, mais surtout qu'ils
adhèrent à la connaissance de la langue française, aux valeurs
québécoises inscrites dans la Charte des droits et libertés de la personne.
La Présidente
(Mme Chassé) : Merci, M. le ministre. Ça termine le bloc d'échange
avec le parti formant le gouvernement. Nous sommes rendus au parti formant
l'opposition officielle. M. le député de Nelligan, pour
3 min 20 s.
M. Derraji :
Merci, Mme la Présidente. Merci pour votre présentation. Je partage en partie
votre présentation, mais je ne la partage
pas à 100 % parce que... je vais vous partager le pourquoi, hein? Ce qu'on
a devant nous maintenant : 116 000 postes disponibles vacants,
1 million pour les 10 prochaines années. Et vous dites qu'il y a un
risque de survie pour notre peuple.
Vous ne voyez pas qu'au-delà de la survie d'une population ou d'un peuple, il y
a aussi la survie de nos services? C'est
que, demain, on va avoir de la misère à avoir des personnes qui vont s'occuper
de nos personnes âgées en résidence de personnes âgées. Moi, c'est ça,
la crainte que je vois qui frappe à l'horizon.
M. Tousignant
(Henri) : Je suis tout à fait d'accord avec vous. Je suis à 100 %
pour l'immigration, mais ce que je dis :
Essayons donc d'aller chercher des personnes qui sont heureuses ici... qui vont
être heureuses ici. Puis j'en parle à l'aise,
je sais qu'il y a des gens ici qui sont issus de l'immigration, mais vous
acceptez, vous vous intégrez totalement. C'est ça qu'on veut. Quelqu'un qui ne peut pas s'intégrer, c'est de la
violence, c'est inacceptable. C'est de nous faire un doigt d'honneur.
Quelqu'un qui vient chez nous... On ne doit pas s'excuser d'être chez nous, là.
Alors,
il me semble, moi, qu'il faut s'assurer que les gens sont heureux ici et puis
qu'on écrive dans les documents d'acception...
qu'on écrive en gros caractères puis en rouge s'il le faut : Étant donné
la situation du Québec, qui est précaire... C'est un cas, c'est réel, ça, là. Les Français, là, en France, là, tous
les jeunes apprennent l'anglais à l'école. Dans deux générations, c'est 40 ans, ça, vous allez voir ce qui va se
passer, même en France. Donc, nous autres, là, c'est... vous comprenez
ce qui va se passer. Tout le monde apprend l'anglais. Bon, alors, c'est ça, si
on ne veut pas tomber dans le melting-pot,
comme on dit, puis disparaître... C'est bien beau, l'argent, c'est bien beau,
le commerce, c'est bien beau, toutes ces
choses-là, mais l'objectif fondamental : Est-ce qu'on doit continuer de
survivre, nous, comme peuple? Qu'on soit de n'importe quelle
nationalité, que les... Oui, je m'excuse, là.
La Présidente
(Mme Chassé) : Non, non, allez-y.
M. Tousignant
(Henri) : Qu'on soit de n'importe quelle nationalité, si on accepte de
s'intégrer ici, c'est des purs Québécois.
Tout le monde est pur Québécois,
puis on est heureux avec ça, puis on vit avec ça. Il n'y a pas de racisme
au Québec, ça, c'est aussi simple que ça. S'il y a du racisme, c'est juste
des gens qui ne veulent pas se conformer, c'est simple.
M. Derraji :
Donc, selon vous, on doit juste accueillir des Français parce que ça va être
bon pour notre survie.
M.
Tousignant (Henri) : Non,
non, pas juste... tous les gens d'Europe, n'importe qui, mais quelqu'un
qui est content, qui est francophile
puis qui est heureux de vivre au Québec, c'est aussi simple que ça, puis qui veut faire
sa vie ici heureuse.
M. Derraji : Juste pour une petite note anecdotique, parce que
moi, je suis francophone, mais je suis de l'Afrique, pas de l'Europe...
M. Tousignant
(Henri) : Non, non, ça peut être d'Afrique aussi, ça peut être de
n'importe où.
M. Derraji :
...mais je suis très heureux au Québec.
M. Tousignant
(Henri) : Non, n'importe
qui, n'importe quel individu de n'importe où dans le monde, s'il veut
s'intégrer, c'est un Québécois pure laine.
La
Présidente (Mme Chassé) :
Ça termine le bloc. Je vous remercie. 50 secondes, M. le député de Laurier-Dorion.
M. Fontecilla : Très rapidement, vous êtes préoccupé par la
situation du français. Que pensez-vous qu'il faudrait faire pour
améliorer la francisation des immigrants?
M. Tousignant
(Henri) : La francisation des Québécois?
M. Fontecilla :
Non, des immigrants.
M. Tousignant
(Henri) : Bien, il faut s'en
tenir aux règles, la loi 101. Et puis les lois, ce n'est pas fait trop,
trop... Ce n'est pas une bonne chose de
passer des lois parce que tout le
monde conteste les lois, les avocats
contestent les lois devant les
tribunaux tout le temps. C'est d'avoir des principes puis faire
comprendre à ces gens-là que, s'ils veulent être heureux ici, qu'ils s'intègrent. Puis, si les gens s'intègrent,
nous, on est heureux, les Québécois, on est pleinement heureux. Moi, je connais
des immigrants que je préfère à mes frères et soeurs, c'est aussi simple que
ça, mais ils s'intègrent.
La
Présidente (Mme Chassé) :
Merci, M. Tousignant. Mme la
députée de Gaspé,
vous vous essayez pour 50 secondes? Allez-y.
Mme Perry
Mélançon : Oui, merci. Vous
avez dû être un député très coloré, en tout cas. J'aurais bien aimé vous
voir dans vos fonctions au fédéral.
Bien,
simplement dire que je pense qu'il ne faut pas non plus voir la connaissance du
français à l'entrée comme une marque
de discrimination non plus, parce
qu'il n'y a pas seulement les Français, pas seulement les Européens, il y a
les Africains aussi. Moi, j'en ai connu, au Pérou, qui le parlaient très, très
bien aussi. Donc, c'est là qu'on ne se rejoint peut-être pas, mais sachez que notre position,
c'est certain qu'au Parti québécois on veut qu'il y ait une connaissance du
français dès la porte d'entrée. Ça, on s'entend sur cet objectif-là.
M. Tousignant
(Henri) : Tous les gens qui veulent être francophones, parler français
puis nous accepter chez nous, c'est
mes amis, qu'ils viennent de n'importe quel coin de la planète, c'est aussi
simple que ça. C'est des humains, c'est des gens qui sont souvent plus
qualifiés que nous, qui nous apportent beaucoup, mais qu'on se respecte.
La
Présidente (Mme Chassé) : Merci. Merci beaucoup.
M. Tousignant, je vous remercie pour votre contribution aux
travaux, et ça ajourne nos travaux jusqu'à demain, mardi 13 août,
10 h 15, où on va poursuivre notre mandat.
(Fin de la séance à 17 h 48)