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Version finale

42e législature, 1re session
(27 novembre 2018 au 13 octobre 2021)

Le mardi 9 avril 2019 - Vol. 45 N° 8

Étude détaillée du projet de loi n° 9, Loi visant à accroître la prospérité socio-économique du Québec et à répondre adéquatement aux besoins du marché du travail par une intégration réussie des personnes immigrantes


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Table des matières

Journal des débats

(Seize heures vingt-deux minutes)

La Présidente (Mme Chassé) : Bonjour, tout le monde. Bon retour après cette petite pause. Je constate le quorum et je déclare la séance de la Commission des relations avec les citoyens ouverte. Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs appareils électroniques.

La commission est réunie afin de procéder à l'étude détaillée du projet de loi n° 9, la Loi visant à accroître la prospérité socio-économique du Québec et à répondre adéquatement aux besoins du marché du travail par une intégration réussie des personnes immigrantes.

Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements?

La Secrétaire : Oui, Mme la Présidente. M. Birnbaum (D'Arcy-McGee) est remplacé par M. Derraji (Nelligan); Mme Maccarone (Westmount—Saint-Louis) est remplacée par Mme Anglade (Saint-Henri—Sainte-Anne); Mme Dorion (Taschereau) est remplacée par M. Fontecilla (Laurier-Dorion); M. LeBel (Rimouski) est remplacé par Mme Perry Mélançon (Gaspé).

Mémoire déposé

La Présidente (Mme Chassé) : Merci, bien reçu. Avant de débuter les remarques préliminaires, je dépose le mémoire de la Fédération des Québécois de souche, reçu depuis la fin des auditions et que nous avons reçu par courriel.

Remarques préliminaires

Nous débutons avec les remarques préliminaires. M. le ministre de l'Immigration, de la Diversité et de l'Inclusion, vous disposez de 20 minutes.

M. Simon Jolin-Barrette

M. Jolin-Barrette : Merci, Mme la Présidente. Chers collègues, M. le député de Sainte-Rose, Mme la députée de Bellechasse, Mme la députée des Plaines, M. le député de Mégantic, M. le député de Beauce-Sud et M. le député de Chauveau. Salutations également à la collègue et porte-parole de l'opposition officielle, la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne, Mme la députée de Fabre, Mme la députée de Bourassa-Sauvé, M. le député de Nelligan ainsi que mes collègues du deuxième groupe et du troisième groupe d'opposition.

Alors, Mme la Présidente, nous voici arrivés à une nouvelle étape du projet de loi n° 9, Loi visant à accroître la prospérité socio-économique du Québec et à répondre adéquatement aux besoins du marché du travail par une intégration réussie des personnes immigrantes. Je tiens à vous remercier tous, membres de la commission, pour votre contribution au sein de la consultation particulière que nous avons tenue il y a de cela quelques semaines.

Un consensus principal s'est clairement dégagé au sujet de la nécessité d'améliorer le système d'immigration du Québec pour permettre l'intégration réussie des personnes qui choisissent de s'établir au Québec et d'y réaliser leurs rêves. C'est, il faut le rappeler, l'objectif même du projet de loi n° 9 que j'ai déposé. Je souhaite que l'étude détaillée que nous commençons maintenant se poursuive dans le même esprit de collaboration et que nous puissions nous donner les moyens d'atteindre cet important objectif, soit de réformer le système d'immigration.

Cette nouvelle étape nous permettra de discuter plus en profondeur afin de trouver des solutions concrètes et durables pour que les personnes immigrantes puissent réaliser leurs projets de vie au Québec tout en contribuant pleinement à la société québécoise. Je crois sincèrement que ce sont là des attentes partagées par la population québécoise et les personnes immigrantes ayant choisi le Québec comme terre d'accueil.

D'autres consensus sont ressortis des consultations particulières sur le projet de loi n° 9.

Tout d'abord, nous convenons tous de la nécessité de renforcer la francisation et l'intégration des personnes immigrantes. Il s'agit là d'un déterminant essentiel au succès de l'immigration. La connaissance du français est un incontournable pour prendre pleinement sa place dans la société québécoise. Cela se concrétisera notamment par une bonification de l'offre de services en matière d'intégration et de francisation. Plusieurs nouvelles mesures seront bientôt mises en place.

Nous comptons par ailleurs définir et mettre sur pied sous peu un parcours personnalisé afin d'assurer un meilleur suivi des personnes qui utilisent les services d'intégration et de francisation. Ce suivi nous permettra de mieux connaître leurs besoins et d'adapter notre offre de services en fonction de ceux-ci. Tous ont un rôle important à jouer pour favoriser une immigration plus efficace et en réponse aux besoins du marché du travail.

Cela dit, la nécessité, pour le ministère de l'Immigration, de la Diversité et de l'Inclusion, d'assurer une meilleure coordination des services offerts par ses différents partenaires est partagée par les différents intervenants en faveur d'une immigration plus efficace, une intégration au marché du travail réussie et d'une meilleure réponse aux besoins actuels de main-d'oeuvre.

Je tiens aussi de ces échanges avec les différents représentants qu'il y a une urgence d'agir afin de répondre aux besoins pressants de main-d'oeuvre au Québec. Nous devons mieux arrimer le profil des personnes sélectionnées aux besoins du marché du travail tout en accélérant leur arrivée au Québec. C'est le coeur du projet de loi n° 9, le fait de sélectionner les gens en fonction du profil de compétence qu'ils ont pour qu'ils puissent remplir un emploi à la hauteur de leurs compétences.

Nous avons entendu les éléments soulevés par des représentants du marché du travail et des employeurs, et, je vous le confirme encore aujourd'hui, notre objectif est de faciliter les tâches administratives des entreprises et les processus d'embauche. Nous travaillons à ce que les personnes qui répondent aux besoins du Québec puissent arriver et s'intégrer plus rapidement à la société québécoise. C'est la raison pour laquelle nous souhaitons passer dès que possible à une gestion des demandes d'immigration basée sur le système de déclaration d'intérêt.

Nous sommes par ailleurs conscients que, derrière ces demandes en inventaire, il y a des familles avec des projets et des rêves. Les délais d'attente de l'ancien système et les déceptions trop nombreuses suite à leur arrivée au Québec sont tristes et inacceptables, ce qui nous motive justement à mieux sélectionner les personnes immigrantes et à leur offrir la possibilité d'être véritablement partie prenante du Québec d'aujourd'hui.

Nous avons entendu vos demandes visant à accorder la priorité aux personnes qui séjournent temporairement au Québec et qui y sont déjà en emploi. À cet effet, nous avons d'ailleurs fait savoir que les demandes de ces personnes seront invitées en priorité, et ce, dès l'adoption du projet de loi n° 9 tel que je l'ai présenté en motion à l'Assemblée nationale.

Le projet de loi n° 9 est la première pierre législative de la réforme du système d'immigration. À terme, nous nous assurerons de répondre aux besoins du marché du travail ainsi que d'une meilleure francisation et intégration des personnes immigrantes.

En terminant, j'aimerais réitérer mes remerciements aux membres de cette commission ainsi qu'aux personnes avec qui nous avons eu l'opportunité d'échanger. Vos réflexions et vos suggestions alimentent le sain débat concernant notre système d'immigration.

Et j'invite tous les membres de cette commission à prendre acte du fait que le projet de loi n° 9 est nécessaire afin de moderniser le système d'immigration afin notamment de s'assurer de pouvoir mettre en place les différentes réformes pour donner davantage de pouvoir au ministère de l'Immigration pour mieux accompagner les personnes immigrantes, à la fois si elles sont en statut temporaire, mais à la fois si elles sont en statut permanent. Notamment, aussi, sur le fait que le budget du Québec consacre 146 millions de dollars d'argent neuf à l'immigration, par année, sur une période de cinq ans, pour 730 millions de dollars. C'est une augmentation de 42 % d'augmentation. Et donc, pour ce faire, pour réussir à pouvoir utiliser l'argent, nous devons nécessairement réformer le système d'immigration pour donner davantage de services aux personnes qui ont choisi le Québec.

Alors, Mme la Présidente, je vous remercie, et nous sommes prêts à démarrer les travaux en étude détaillée.

• (16 h 30) •

La Présidente (Mme Chassé) : Merci, M. le ministre. J'invite maintenant la porte-parole de l'opposition officielle et députée de Saint-Henri—Sainte-Anne à faire ses remarques préliminaires pour une durée maximale de 20 minutes.

Mme Dominique Anglade

Mme Anglade : Je vous remercie. Je vous remercie, Mme la Présidente.

Alors, d'abord, je vais saluer mes collègues, l'ensemble des collègues, l'ensemble des parlementaires. Je nous souhaite des échanges fort constructifs, lors de l'étude de ce projet de loi détaillée, qui est, à mon sens, un projet de loi qui est fort important. Il est fort important parce que l'immigration, c'est une pierre angulaire, évidemment, d'un point de vue économique, mais d'un point de vue social également au Québec. Et, dans les dernières semaines, il y a eu beaucoup d'échanges, beaucoup des... questions qui ont été posées. Et je vous dirais que ce que je souhaite d'abord et avant tout... d'abord et avant tout, excusez-moi, c'est de...

Une voix : ...

Mme Anglade : Non, non, je t'en prie. Non, non, il n'y a pas de problème du tout, là. Ça m'a fait sourire parce que je ne m'attendais pas à ça. Je comprends très bien la situation. Ce qui est important, c'est qu'on puisse avoir un débat qui soit serein et qui nous amène dans la bonne direction.

Et je vais revenir sur des éléments qui m'apparaissent essentiels. Lorsque l'on veut un débat serein, il faut qu'on soit capable d'avoir les réponses à nos questions, il faut qu'on soit capable de dire : Voici les faits. Il faut savoir reconnaître qu'il y a des moments, peut-être qu'on erre, hein, e-r-r-e, et peut-être qu'on a aussi un certain mea culpa à faire pour qu'on puisse avancer également. Et là je souhaite qu'il y ait cette dynamique-là, cette transparence-là. Et je peux assurer à l'ensemble des collègues de ma volonté de le faire de manière constructive.

Dans les dernières semaines, la présentation du projet de loi, il y a eu beaucoup de répercussions, à la présentation du projet de loi, beaucoup de réactions qui ont été faites. D'abord, si on prend un peu de perspective par rapport aux seuils d'immigration, j'attache beaucoup d'importance au fait que les données pour prendre des décisions sont importantes. On n'a toujours pas compris jusqu'à présent pourquoi on est passé de 50 000 à 40 000 et qu'est-ce qui justifiait ça. Je sais que le ministre s'est exprimé à un certain nombre de reprises en disant : Il y avait des taux de chômage deux fois plus élevés, on ne veut plus ça, etc. Mais, au-delà de ça, simplement de passer de 50 000 à 40 000 ne répond pas aujourd'hui aux besoins du Québec. Et d'ailleurs on le voit, puisque déjà on sent qu'il y a une volonté de la part du ministre de rehausser les seuils à court terme.

Donc, finalement, on se dit : Initialement, on voulait descendre les seuils. Quand on a vu qu'il y avait vraiment une pénurie de main-d'oeuvre, que c'était vraiment mal avisé, on s'est dit : On va la réduire pour une période temporaire. Là, on se rend compte que c'est pour une période qui est peut-être simplement d'un an. Je pense que, là-dessus, il faut qu'on se pose les bonnes questions puis qu'on prenne des décisions qui soient avisées pour le Québec parce que des décisions de court terme peuvent avoir un impact très moyennement sur le long terme.

Et l'image que l'on projette, elle est importante, elle est importante d'un point de vue économique. Je vois mon collègue de l'Économie, qui est à l'étranger, qui va en Allemagne, qui se déplace, qui doit promouvoir le Québec. Il est évident que, dans les positions puis ce que fait le Québec à l'international, la manière dont on rayonne ou dont on ne rayonne pas a des conséquences directes sur notre capacité d'attirer les investisseurs étrangers, a des conséquences réelles sur notre capacité de mobiliser des acteurs à l'international par rapport au Québec. Alors, il ne faut pas sous-estimer les décisions que l'on prend. Il ne faut surtout pas sous-estimer les répercussions qu'elles ont.

Dans ce qui nous occupe particulièrement — on va revenir sur les 18 000 dossiers — c'est que je pense qu'on a réellement sous-estimé l'impact que ça avait. Et le meilleur témoin de cette sous-estimation, c'est le fait qu'on ne connaissait même pas les chiffres du nombre de personnes qui étaient, ici, touchées par les 18 000 dossiers. Alors, dès le dépôt du projet de loi, on a voulu tout de suite dire : On a un enjeu, là; pourquoi est-ce qu'on ne traite pas l'ensemble des dossiers? Dès le départ, on a été très clairs sur cet enjeu qui nous apparaissait extrêmement litigieux, en plus de ne pas être économique, vraiment pas humain. On a reçu énormément de messages de la part de nos citoyens. Puis là je parle de «on». Ce n'est pas ma formation politique qui a reçu ces messages-là. L'ensemble des formations politiques ont reçu énormément de messages de la part de personnes qui résident au Québec ou qui résident à l'extérieur du Québec, par rapport à ça. Et la réaction, ça n'a pas été une réaction d'écoute, ça a été une réaction : Ce n'est pas grave, on maintient le cap, on veut passer rapidement à la prochaine étape.

Et c'est là, je pense, qu'on a besoin de prendre du recul puis de se dire : Comment est-ce qu'on va aborder ce dossier-là? Le dossier de ces 18 000 cas, il est important. C'est l'image du Québec. C'est aussi notre manière de faire les choses au Québec, la manière dont on veut se gouverner qui va être importante. Et le fait qu'on ait été obligé, collectivement, d'aller devant les tribunaux, ce n'est pas souhaitable. Ce n'est souhaitable pour personne. Puis, très sincèrement, et je le dis au ministre, moi, je ne souhaite pas qu'on ait à revivre ce genre de situation là. Puis je pense qu'il n'a pas envie de la revivre non plus, ce genre de situation là. Donc, pour éviter ça, est-ce qu'on est capables d'avoir les conversations nécessaires puis se dire : C'est la bonne chose à faire pour le Québec? Traitons ces dossiers-là.

D'autant plus que, lorsqu'on regarde ce qu'on a été capable et en mesure de faire dans les dernières années, on sait très bien que... je le sais, le ministre l'a mentionné à plusieurs reprises, c'est un legs libéral que ce nombre de dossiers là. Mais la réalité, c'est que, et le député de Sainte-Rose va être d'accord avec moi également là-dessus, le 95 000... il y avait 95 000 dossiers, en 2011, et chaque année il y a eu une réduction des inventaires, entre guillemets — parce qu'on parle d'humains, ici, on ne parle pas juste d'inventaire puis de dossiers, c'est des humains qui sont en arrière de ça — il y a eu une réduction systématique de ce nombre de dossiers là. L'année dernière seulement, on parle de 20 000 dossiers qu'on a été capables de traiter. Si on a été capables d'en traiter 20 000 en un an, en plus dans une année électorale, ce qui signifie donc qu'il y a un changement de gouvernement dans ce cas-ci, dans ce cas qui nous occupe, il me semble qu'on serait absolument capables de traiter l'ensemble des 18 000 dossiers, outre que... À moins qu'on décide de ne pas le faire pour des raisons idéologiques. Aujourd'hui, ce qui se produit, c'est qu'on décide de ne pas avancer, du côté des 18 000 dossiers, ou de le faire simplement parce qu'on a une injonction, donc on découvre qu'on a 500 dossiers et plus.

Et, en passant, j'aimerais que le ministre puisse répondre à certaines des questions. Parce que, lorsqu'il nous dit qu'il n'est pas capable de répondre au nombre de dossiers qui sont traités... En fait, il n'y a aucune raison pour laquelle on n'est pas capables de partager cette information-là. En plus, elle se retrouve dans les médias. Il sait très bien qu'il n'y a personne qui va le poursuivre parce qu'il a émis... donné ces informations-là. Chat échaudé craint l'eau froide, mais là, c'est l'eau froide, c'est vraiment l'eau froide, ce n'est pas l'eau chaude, là, qui va arriver au chat, là. Donc, il faut quand même prendre un peu de perspective puis se dire : Cette information-là, elle est pertinente pour les parlementaires. Et si, au bout du compte, les journalistes... cette information-là, elle devient publique, pourquoi ne pas pouvoir en discuter entre parlementaires puis se dire : Bien, voilà ce que nous prévoyons, dans les prochaines semaines, dans les prochains mois, pour y arriver? D'autant plus que le ministre s'est engagé à traiter certains dossiers de manière prioritaire. Quels sont-ils? Où sont-ils rendus?

Moi, à la place du ministre, ce que j'aurais fait, c'est... j'aurais présenté les 18 000 dossiers, dire : Écoutez, voilà, il y en a tant, telle année, tant, telle année, voici ceux que nous allons traiter, voici ceux qui nous restent, après, voici ce qu'on propose de manière proactive. Au contraire, on a l'impression que l'information n'est pas partagée, ce n'est pas nécessaire. On veut le plus possible faire avancer ces dossiers-là de manière constructive.

Lorsque l'on parle des inventaires, j'aimerais également revenir sur un certain nombre de choses. C'est qu'il n'y a personne ici, personne ici qui peut dire : On ne savait pas qu'il y avait ces 18 000 dossiers là. Ces 18 000 dossiers là, cette information-là était publique, elle est publique, rendue publique chaque année. D'ailleurs, ce n'est pas une nouveauté, ce n'est une nouveauté pour personne. Ils étaient 40 000, il y a deux ans, 18 000 cette année, 65 000 il y a plusieurs années, donc, cette information, elle est publique.

Ce projet de loi, qui vise à faire en sorte qu'idéalement, dans une forme que je souhaiterais autre, il y ait une meilleure intégration, un meilleur arrimage, une meilleure adéquation entre les besoins de la main-d'oeuvre et les immigrants, c'est une bonne chose, puisque le changement de loi... Même sous le gouvernement libéral, en 2016, c'est ce que nous avons proposé. Le nouveau système Arrima a été mis en place sous le gouvernement libéral. Donc, évidemment que nous sommes en faveur. Il n'y a personne... vous n'allez trouver personne autour de cette table et, je pense... enfin, je dis «personne», je regarde mon collègue de Laurier-Dorion, je ne suis pas certaine, quand je dis ça, mais personne de notre formation politique, en tout cas, qui va dire qu'on n'est pas d'accord avec un meilleur arrimage. Mais ce meilleur arrimage là, il faut qu'il se fasse de la bonne façon puis de la bonne manière, alors, en faveur de faire avancer un projet qui va nous amener plus loin, qui va faire en sorte que nous allons avoir plus de régionalisation, plus de francisation et plus d'intégration, évidemment.

Mais j'aimerais aussi que, lorsque l'on parle de ça, puisqu'on va parler beaucoup d'amélioration, on reconnaisse le chemin qui a été parcouru. Lorsqu'on regarde la rétention au Québec... Moi, il y a une chose que je déteste, Mme la Présidente, là, c'est d'avoir des chiffres qui ne tiennent pas la route. Ça, moi, j'ai horreur de ça. Ce n'est pas vrai que 25 % des gens au Québec, à l'intérieur de 0-5 ans, décident de quitter le Québec. Ce n'est pas vrai. Ces chiffres sont faux. Ce qui est vrai, c'est qu'on a un taux de rétention autour de 84 % au Québec. Ce taux de rétention là, il se compare allègrement à ce que nous voyons dans le reste du Canada. On est mieux que certains, on est un peu moins bons que d'autres, mais en moyenne on se situe dans la moyenne canadienne. Et vous n'allez trouver nulle part au monde où il n'y a pas de taux de rétention à 100 %. Ça n'existe pas. Donc, on peut se comparer aux meilleurs puis en disant : Le 84 % devrait peut-être être à 90 %. Mais il ne faut surtout pas dire : C'est une catastrophe, c'est un désastre, 25 %. C'est alerter les gens. Quand on regarde les chiffres, les chiffres tiennent la route. Est-ce qu'on peut les améliorer? J'en suis, j'en suis. Mais encore faut-il les regarder.

• (16 h 40) •

Quand on regarde, par exemple, le regroupement familial, on a un des meilleurs taux de rétention au Canada. On est deuxième sur 10 provinces, sur le regroupement familial. Ce qui signifie donc que, ceux-là, on devrait les encourager à... nous assurer qu'il y ait une intégration encore plus rapide de ces gens-là parce que ça fonctionne. Les chiffres démontrent que ça fonctionne. Alors, quand on décline les statistiques, on se rend compte qu'on serait capables de prendre des décisions, dire : Bien, le regroupement familial, ça, ça marche; par contre, tel élément, peut-être qu'on devrait travailler davantage là-dessus. Et je pense que c'est de cette manière-là qu'on va être capables de progresser.

Même chose pour les taux de chômage. C'est correct de prendre des taux de chômage qui remontent à... on ne va pas dire Mathusalem, mais qui remontent à longtemps. Mais est-ce qu'on est capables de prendre les taux récents puis de comprendre un peu ce qui se passe dans le système aujourd'hui, de comprendre un peu les chutes de taux de chômage drastiques que l'on observe aujourd'hui? Et le fait qu'il y a une intégration qui se fait de plus en plus rapidement, le fait que le taux d'emploi des immigrants... Le taux d'emploi des immigrants a dépassé le taux d'emploi de la population active. Je n'ai jamais entendu le ministre le dire. Jamais qu'il n'a dit ça. Pourtant, ce sont des faits. Alors, lorsque l'on regarde ça, il y a matière à amélioration, mais il faut absolument comprendre tout ce qui vient en arrière, tout ce qui vient en arrière, comme données, pour nous permettre de prendre les bonnes décisions. Et ça, je pense que c'est un élément qui est essentiel.

Ensuite, il y a évidemment toute la question de la résidence permanente. On a besoin de comprendre, à l'intérieur de ce projet de loi, l'intention du législateur, comme en tout projet de loi, vous me direz. Mais la résidence permanente, une chose à laquelle c'est sûr que je vais m'opposer, c'est que le Québec soit un endroit où on est obligé d'avoir une épée de Damoclès, par rapport à d'autres régions. Je pense que le Québec peut rayonner, le Québec peut pleinement se déployer, peut pleinement s'affirmer. Mais je n'ai pas envie que les gens se disent : Aïe! Si je vais en Ontario, là, ça me prend un an, et, si je vais au Québec, ça me prend trois ans, puis j'ai une épée de Damoclès parce qu'ils essaient d'établir des conditions à une résidence permanente. Non seulement ce n'est pas souhaitable, mais ça va même à l'encontre des intérêts des Québécois. Ça va même à l'encontre de ce que l'on devrait faire d'un point de vue social, d'un point de vue économique, d'un point de vue... Même d'un point de vue administratif, ça n'a pas de sens. Et, si on regarde les propos qui ont été tenus par les différents intervenants qui sont venus nous voir, le message est on ne peut plus clair par rapport à leur positionnement.

Si on regarde, par exemple, les gens de l'AQOCI... de l'AQAADI, pardon, pas l'AQOCI, l'AQAADI. Ils sont venus nous voir. Cette question-là est vraiment problématique. Et on sait que c'est eux qui ont décidé de poursuivre le gouvernement et qu'il y a une demande d'injonction, etc. On ne veut pas se retrouver dans une situation où il y aura davantage de poursuites. Or, force est de constater que, dans les propos qui ont été tenus par les différentes personnes qui sont venues, il y a un risque associé à davantage de poursuites. Donc, comment est-ce qu'on élimine aussi... Non, à la limite, on ne dit pas qu'on légifère pour éviter des poursuites. Ce n'est pas ce que je dis. Mais on est capables d'évaluer les risques. Et un de ces risques, par exemple, c'est de ne pas traiter les 18 000 dossiers. Parce que ça nous coûterait environ 4 millions de dollars, passer à travers les 18 000 dossiers? Ça va nous en coûter plus de 20 millions pour les éliminer. Quel est le choix logique par rapport à ça? Encore une fois, ça ne tient pas la route.

Et donc, lorsqu'on regarde les commentaires qui ont été émis, je pense qu'il faut les prendre avec hauteur. La Protectrice du citoyen est venue nous dire, encore une fois, qu'il y avait d'autres risques si on ne compensait pas suffisamment les personnes. Je sais que le ministre a moins aimé la visite de la Protectrice du citoyen, mais au-delà de... On pourra dire moins aimé, je pense, c'est une belle manière de qualifier l'appréciation. Non?

Une voix : ...

Mme Anglade : Mais elle est venue, elle a donné son opinion et elle nous a dit qu'il y avait des risques, en termes de poursuites. Et ça, c'est un enjeu qui va revenir. Et il faut que, lorsqu'on étudie le projet de loi, qu'on soit en mesure de dire : Bien, voici une modification qui va faire en sorte que, d'un point de vue de la législation, on prend les bonnes décisions.

Puisqu'on parle d'économie, parlons-en. Plusieurs intervenants sont venus parler de pénurie de main-d'oeuvre, de la nécessité d'avoir un meilleur arrimage. Puis là on va tous être d'accord avec ça, hein? Il n'y a personne qui va être en désaccord avec ça. Mais un élément très important qui a été mentionné, c'est que l'immigration temporaire n'est pas une solution à la pénurie de main-d'oeuvre.

À plusieurs reprises, on a entendu certains protagonistes dire : On va faire venir plus de personnes de manière temporaire. En aucun cas l'immigration temporaire n'est un substitut réel à une immigration permanente. Et ça, les représentants des milieux économiques ont été très clairs là-dessus. Conséquemment, il faut qu'on soit en mesure de dire : Ce n'est pas une solution de long terme, c'est une solution de rechange. On peut l'améliorer, on peut accélérer certaines choses, mais ça ne peut pas être la source première qui va faire en sorte qu'on va bâtir... Le Québec ne s'est pas bâti sur une immigration temporaire. Ça n'a jamais été la philosophie au Québec. Donc, je pense qu'il faut vraiment réfléchir sur le long terme.

Et une entreprise, d'abord et avant tout, souhaite avoir de la prévisibilité, souhaite avoir un degré de certitude. Tout ce qui crée de l'incertitude, de manière générale, nuit au développement économique. Ce n'est pas compliqué, c'est assez simple en fait. Alors, cette incertitude-là, il faut que, lorsqu'on étudie le projet de loi article par article, on soit en mesure de dire : On va éliminer certains éléments d'incertitude. Ça, c'est de l'incertitude, parlons-en, éliminons ça et éliminons ça. On va améliorer le projet de loi avec ce principe-là si on continue d'éliminer ces éléments...

La Présidente (Mme Chassé) : ...vous reste trois minutes.

Mme Anglade : C'est parfait. C'est parfait. Je pense que je vais les prendre. Vous m'arrêterez après. Je regarde ça.

La Présidente (Mme Chassé) : ... près d'une minute.

Mme Anglade : Il n'y a pas de problème. Faites-moi signe, mais je vais... j'y reviendrai de toute façon. Donc, évitons les poursuites, assurons-nous d'éliminer des incertitudes, basons-nous sur des faits. C'est un peu les principes qui devraient nous guider dans l'étude du projet de loi qui nous a été présenté.

J'aimerais rappeler aussi que, dans certains intervenants qui ont pris la parole, toute la question de... le Québec à l'international, ce que ça signifie. Moi, ça ne me fait pas plaisir de voir des articles sur le Québec à l'international, ça ne me fait pas plaisir d'un point de vue image, ça ne me fait pas plaisir d'un point de vue économique. Moi, ce n'est pas ce genre d'articles là que j'ai envie de lire. Je pense aussi qu'on a une responsabilité de prendre cette hauteur-là puis de se dire que les décisions de court terme qu'on est peut-être amenés à prendre ont des impacts à long terme. On sous-estime aujourd'hui des décisions qui sont prises, et leur impact qu'elles vont avoir sur l'image, puis notre capacité à attirer des personnes.

J'ai entendu le ministre dire, à un moment donné : Ah! il y a 102 000 personnes dans Arrima, ça veut dire qu'on a de l'attrait. Je vais vous dire une chose, les gens qu'on souhaite attirer, là, ils ont la possibilité d'aller partout sur la planète. Ils ne vont pas attendre que le ministre décide d'inviter les personnes qu'il veut inviter à Arrima, puis... Ce n'est pas ça qui se passe. C'est qu'on est en compétition avec le reste du monde. Alors, je pense qu'on a un degré d'agilité à introduire dans notre manière de fonctionner, dans notre manière de faire les choses.

Finalement, peut-être d'un point de vue plus personnel, rappelons-nous que le processus d'immigration est un processus de long terme. Nous sommes en 2019. Il y a exactement 50 ans, mes parents immigraient au Québec. C'est un processus qui est long, c'est un processus qui ne se fait pas sur le coin d'une table, c'est un processus qui est complexe, et j'espère qu'autour de la table nous allons avoir le respect nécessaire par rapport à des gens qui décident de faire le choix du Québec, et de comprendre que ce ne sont pas des enjeux simples que l'on peut traiter à gauche puis à droite, puis qu'il nous faut, encore une fois, prendre du recul et de la hauteur pour bien amener ce projet de loi de l'avant.

Alors, Mme la Présidente, je vous remercie. Il me fera plaisir de poursuivre les échanges avec mes collègues. Merci, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Chassé) : Merci, Mme la députée. J'invite maintenant le porte-parole du deuxième groupe d'opposition et député de Laurier-Dorion à faire ses remarques préliminaires pour une durée maximale encore de 20 minutes.

M. Andrés Fontecilla

M. Fontecilla : Merci, Mme la Présidente. Comme Mme Anglade, je salue tous les membres de la commission. C'est un réel plaisir d'être ici avec vous et commencer l'étude détaillée d'un projet quand même... un projet de loi très important. Je salue le ministre également.

Et évidemment, l'immigration, c'est peut-être le sujet du XXe siècle, hein? Ce n'est pas pour rien. Le Québec ne fait pas partie d'un bocal de quelque chose de séparé d'à travers le monde. On fait partie d'un monde où l'immigration est un sujet brûlant. Ça suscite d'ailleurs des positionnements politiques et surgissements de forces politiques qui nous préoccupent. Et ce ne serait pas de... on ne peut pas supposer que la présentation du projet de loi n° 9 échappe à la considération politique plus large que le simple arrimage économique d'un emploi d'un immigrant à un emploi à Chibougamau.

• (16 h 50) •

Donc, d'emblée, je dirais que c'est... je dirais rare, là, mais c'est à vous de me dire que ce n'est pas le cas, qu'un projet de loi commence par une commotion humaine, un drame humain. En fait, c'est la deuxième fois qu'on voit très rapidement cette situation-là dans la présente législature. C'est le projet de loi sur les taxis, aussi, qui a suscité un drame humain... qui suscite, en ce moment, un drame humain très important. Et celui-là, c'est concernant l'immigration. C'est un petit peu antérieur.

Donc, on parle de l'annulation de l'étude de 18 000 dossiers, ce qui représente... bon, les chiffres ne sont pas fixes, peut-être que le ministre pourrait nous renseigner, entre 45 000 et 60 000 personnes, dont une proportion importante, substantielle concerne des gens qui restent au Québec et qui, malgré les assurances du ministre, ne pourront pas... enfin, n'ont pas les critères nécessaires... ne remplissent pas les critères nécessaires pour rentrer dans la petite case du Programme de l'expérience québécoise ou le programme Arrima. Donc, voilà, premier constat : un drame humain et des milliers de personnes qui dépendent de nous, d'on ne sait pas trop quoi, d'un processus politique, etc., et qui voient leur avenir hypothéqué.

Et, ensuite, le projet de loi, tel qu'il nous est présenté, met de l'avant une vision réductrice de ce qui est l'immigration et qui assigne un rôle à celle-ci cantonné strictement au domaine économique. L'immigration n'est considérée que comme de la main-d'oeuvre qui... et non pas comme des citoyens, citoyennes qui un jour vont s'intégrer complètement à la société québécoise, vont fonder une famille, vont envoyer leurs enfants, qui vont voter, qui vont participer pleinement, donc qui vont contribuer, oui, économiquement, mais aussi socialement, culturellement à la société québécoise.

Donc, le projet de loi n° 9 tend à considérer la personne issue de l'immigration comme un facteur de réduction, hein? Puisqu'on parle en termes économiques, un facteur de production, c'est une marchandise, c'est une machine qu'on déplace, qu'on achète, qu'on vend, qu'on répare, qu'on évacue, qu'on jette aux vidanges. Et ça se passe au détriment de tous les autres facteurs qui concernent l'intégration d'une personne issue de l'immigration. D'ailleurs, si vous avez bien entendu les groupes qui se sont présentés en commission parlementaire, tous les groupes dans le domaine de l'accueil et l'intégration des personnes issues de l'immigration nous diront que l'intégration est un phénomène complexe qui comporte des avancées, des reculs, et de la stagnation, souvent, et des périodes de chômage, des périodes d'emplois dans des secteurs tout à fait insatisfaisants pour la personne, etc. Et, même, c'est une période qui peut s'étendre à travers des années, souvent tout au long de la vie d'une personne et même jusqu'à une deuxième génération.

D'ailleurs, on sait, et pas seulement ici, au Québec, mais ailleurs dans le monde, la pauvreté qui affecte les immigrants de première génération affecte aussi les immigrants de deuxième génération, hein, la pauvreté se perpétue. Et là on pourrait discuter et faire des analyses de savants à savoir si la pauvreté, c'est de la faute des pauvres ou c'est de la faute du système qui les maintient dans la pauvreté. Mais ça, c'est un autre projet de loi, disons. C'est comme si, à travers ce projet de loi...

Et cette question-là de la réduction... la vision réductrice de l'immigration à l'aspect économique, là, ce n'est pas d'une nouveauté qui vient du gouvernement de la Coalition Québec, hein? En fait, Arrima a été créé effectivement par le gouvernement libéral. C'est une vision qui correspond aussi... qui a été lancée, implantée par le gouvernement libéral, et, oui, je reconnais, Mme Anglade, que nous avons des critiques concernant cette vision économiste de l'immigration qui est aussi portée par le Parti libéral. Donc, heureusement, la Coalition avenir Québec n'a pas le monopole de cette vision-là. Donc, c'est une vision qui, certains diraient, considère, au mieux, le ministère de l'Immigration, le MIDI, comme une agence d'emploi international dont la mission, c'est la mission d'une agence d'emploi, mettre en contact un chercheur d'emploi, une chercheuse, avec un employeur. Et, au pire, et on l'a entendu, cette mission-là même d'agence d'emploi internationale devrait être accomplie par le privé parce qu'eux ils connaissent vraiment, et on peut le comprendre, les réalités des dynamiques économiques sur le terrain, là. Donc, voilà, d'emblée, on peut cantonner ce projet de loi dans cette vision-là.

Aussi, ça comporte un certain nombre de problèmes parce que le projet de loi, tel qu'il nous est présenté, fait omission de la notion, qui était présente dans d'autres politiques ou d'autres lois, la notion de responsabilités partagées. Donc, selon cette notion-là, c'est autant l'immigrant que la société d'accueil qui ont des droits et responsabilités qui doivent être partagés et sont un peu le reflet de l'un dans l'autre. L'immigrant, évidemment, oui, il a le devoir de s'intégrer, mais la société a le devoir de lui paver la voie, d'enlever des obstacles, de lui donner de la francisation, lui donner des bons conseils d'emploi, un parcours individualisé, que le projet de loi prévoit d'ailleurs, là. Mais, dans le projet de loi tel que présenté, il n'y a pas de trace explicite des responsabilités de la société d'accueil, et tout le poids repose sur les épaules de la personne immigrante, ce qui est un rapport un peu déséquilibré.

Et, oui, le ministre prévoit, dans son projet de loi, davantage de ressources en accompagnement personnalisé, le parcours personnalisé, ce qui est bien, que nous saluons. Mais ce qui se dégage de l'esprit du projet de loi n° 9 est bien celui de la capacité de l'État d'imposer des obligations, c'est ça qui se dégage principalement, des obligations à l'immigrant. Et on lui met sur le dos la responsabilité de travailler un peu partout à travers le territoire. Encore une fois, c'est réducteur. Et moi, je constate... et ma formation politique, on constate un appauvrissement de la riche vision développée par les institutions québécoises depuis les 30, 40 dernières années à travers... concernant l'immigration. Donc, voilà. Et je trouve cela désolant qu'on appauvrisse notre compréhension, et notre vision, et les outils qu'on se donne concernant l'intégration de l'immigration.

On voit souvent, dans le projet de loi n° 9, la question des valeurs québécoises. Oui, ça existe, depuis quelque temps, cette notion-là. Et ici on l'utilise encore une fois à profusion, mais ça porte à confusion, hein? Évidemment, on les cantonne selon les valeurs qui se dégagent de la charte québécoise des droits et libertés. D'ailleurs, il y a deux sortes de valeurs, semble-t-il, au Québec : il y a les valeurs démocratiques, selon le p.l. n° 9, et les valeurs québécoises. Je pense qu'il y a amplement matière à discussion sur ces deux grands champs de valeurs. J'aimerais bien comprendre qu'est-ce que recouvre l'un, qu'est-ce que recouvre l'autre, qu'est-ce que c'est, ces valeurs, et comment les mesurer.

Et insidieusement le p.l. n° 9 introduit la possibilité d'un test de valeurs. Parce que, si on parle des valeurs, il faut pouvoir les mesurer à un moment donné. Comment on mesure les choses? On passe des épreuves, des tests. Et c'était cela, d'après ce qu'on comprend. Mais, encore une fois, ce n'est pas si clair, là. C'est considéré comme une condition à l'obtention de la résidence permanente. Mais, sur la mécanique de tout cela, on n'en sait pas grand-chose. Le tout sera envoyé à des éventuels règlements. Il est très particulier et inquiétant qu'une loi ouvre cette possibilité sans la baliser davantage. Comment mesurer l'adhésion à des valeurs? Et surtout, et surtout, comment peut-on pénaliser une personne de ne pas avoir suffisamment adhéré à des valeurs, là, qu'on a préalablement mesurées? J'espère que nous allons nous y pencher très sérieusement pendant l'étude détaillée.

• (17 heures) •

Et, en effet, l'idée des tests des valeurs fait peut-être gagner des élections, mais malheureusement, Mme la Présidente, selon nous, ils ne font pas gagner le Québec. Ces propositions sont porteuses de controverses aiguës dans les décennies à venir, et elles diviseront passablement la société québécoise, là. Et d'ailleurs est-ce qu'il y a un état d'urgence sociale qui justifie le fait d'inscrire dans les lois des notions aussi controversées? C'est bien de respecter ses promesses électorales, là. Mais, une fois au pouvoir, le gouvernement doit éviter de jouer aux apprentis sorciers.

En prendre moins, mais en prendre soin, on la connaît, et c'est ce que nous martèle le premier ministre depuis la campagne électorale, et nous savons que c'est un très bon sophisme, effectivement, mais c'est un faux dilemme. Rien n'indique que le fait de réduire le seuil et d'accepter moins d'immigrants va améliorer le sort des personnes immigrantes. D'ailleurs, la question de seuil, là, qui est intimement liée, quand même, à ce projet de loi là, répond à un engagement électoral, parce qu'on sait déjà... le ministre a déjà annoncé que, dès 2019‑2020, il va y avoir augmentation. D'ailleurs, on l'avait appris lors des consultations particulières. Donc, cependant, une année seulement pour répondre à une promesse électorale, et en disant... en voulant envoyer le message que le gouvernement de la Coalition avenir Québec allait diminuer l'immigration, comme si celle-ci était quelque chose, comment dire, de problématique, là, il y en avait trop, là. Et donc on sait qu'encore une fois la réduction de seuil d'immigration n'améliore pas le sort des personnes issues de l'immigration, et l'institut de recherche socioéconomique l'a montré, l'IRIS, et il a montré dans un rapport, il n'y a pas longtemps, que les pays qui accueillent le plus d'immigrants sont ceux où la situation est la meilleure par rapport à la population native, là.

La question de l'intégration. Il y a peu de choses dans le projet de loi pour une meilleure intégration des personnes issues de l'immigration. Pourtant, il est là, le problème, là, actuellement il n'y a pas assez de ressources en intégration. Oui, il va y avoir plus d'argent, j'en conviens et j'applaudis, hein? Mais il faut savoir l'utiliser, l'argent, là, hein? Parce que jeter de l'argent par la fenêtre, ça se fait aussi, vous le savez. Mais je n'oserais jamais penser quelque chose, hein? Lancez-vous la balle. Et donc il n'y a pas, en ce moment, assez de ressources en intégration. Ce qu'on trouve abondamment dans le projet de loi, là, par contre, c'est les bâtons, c'est l'obligation. Ça, là, on ne s'en sort pas. Mais il n'y a pas l'idée d'une bonne politique d'intégration, là. Est-ce qu'il va y avoir supposément, bon, surtout de l'intégration, et plus de francisation?

Oui, nous appuyons l'idée d'un accompagnement personnalisé des personnes immigrantes, mais on peut et on doit aller plus loin, là, pas seulement concevoir cet accompagnement-là comme un agent d'aide pour trouver un emploi. C'est qu'on n'est pas... Le MIDI, ce n'est pas un carrefour en emploi-jeunesse, ce n'est pas emploi-jeunesse non plus, et l'accompagnement peut aller beaucoup plus loin, là. Par exemple, est-ce que le gouvernement investira davantage en francisation? On aimerait le savoir. Est-ce qu'il va formuler des... va explorer des formules novatrices? Par exemple, est-ce que le gouvernement va soutenir les entreprises pour la francisation en milieu de travail? Est-ce que c'est appuyé par certains acteurs économiques aussi? Et surtout soutiendra-t-il les personnes suivant des cours de français avec un revenu qui les motive à demeurer sur les bancs d'école? Parce qu'on le sait, les personnes qui vont surtout souvent aux cours de... à temps plein, mais particulièrement à temps partiel, ne reçoivent pas assez d'argent, et il n'y a pas assez d'incitatifs pour rester sur les bancs d'école à apprendre le français. D'ailleurs, ça a été souligné par... bien, le taux d'abandon a été souligné par la Vérificatrice générale, là. Nous avons besoin de plus de classes pour bien franciser les personnes immigrantes. Oui, il y a une augmentation du budget, mais on aimerait bien savoir comment cet argent-là va être... concrètement, quelles vont être les politiques, là, qui découlent du projet de loi n° 9.

D'autres angles morts du p.l. n° 9, là. Aucune disposition concernant la discrimination à l'embauche. On dirait que ça n'existe pas, alors que plusieurs intervenants en commission parlementaire sont venus nous nommer cette réalité-là. Effectivement, c'est une réalité difficile à reconnaître, mais un gouvernement responsable, justement, reconnaît ces situations difficiles et prend le taureau par les cornes et fait quelque chose. Est-ce que le gouvernement va proposer quelque chose dans ce sens-là pour contrer la discrimination à l'emploi, alors qu'il n'y a rien dans le projet de loi n° 9?

Et la question de la reconnaissance des diplômes et des compétences, pas grand-chose non plus dans le p.l. n° 9; un autre angle mort. Donc, ça commence à se multiplier, et ça confirme, encore une fois, la vision réductrice de ce projet de loi là, que, j'espère, on pourra bonifier en cours de route. Et...

La Présidente (Mme Chassé) : Il vous reste trois minutes.

M. Fontecilla : Trois minutes, madame?

La Présidente (Mme Chassé) : Oui.

M. Fontecilla : Merci. Quelques articles qui posent particulièrement problème, l'article 10, les conditions que doit déterminer un employeur, là. On ajoute des conditions pour qu'un employeur puisse embaucher un résident permanent, ce qui est en soi assez problématique, parce que... Enfin, ce que je... vous allez peut-être me corriger, un immigrant... un résident permanent a absolument le même droit qu'un citoyen, une citoyenne canadienne, sauf le droit de vote. Donc, je ne vois pas pourquoi un résident... on devrait mettre des conditions à ce qu'un employeur embauche un immigrant résident, là. Et souvent des immigrants ont du mal à se trouver du travail, et voilà que le projet de loi impose des conditions aux éventuels employeurs, des contraintes pour les embaucher, là. Et le gouvernement, c'est prévu, va se donner le droit de retirer, on croit, là, la résidence permanente, parce qu'elle est conditionnelle. Nous croyons fermement que la sélection doit se faire en amont. Une fois l'immigrant sélectionné, il ne doit pas vivre plusieurs années au Québec, y trouver un travail, y fonder une famille, et se faire dire : Bien là, finalement, tu ne fais plus l'affaire, tu t'en vas. Et on a utilisé tantôt l'expression l'épée de Damoclès. C'est ce que promet ce projet de loi, et ça va faire certainement diminuer le taux de rétention parce qu'il n'y a aucun immigrant qui va vouloir amener sa famille au Québec alors que, dans quelques années, il pourra se faire dire : Bien toi, toi et ta famille, là, vous devez vous en aller. Où ça? Ailleurs, là, dans le reste du Canada, on suppose, là. Et donc... et d'ailleurs, c'est une des craintes que... ça a été soulevé par plusieurs personnes. Ce projet de loi est peut-être une façon de... l'effet pervers, c'est de créer des sans-papiers, à terme. Et donc, bien, je vais m'arrêter là, madame.

La Présidente (Mme Chassé) : C'est très bien.

M. Fontecilla : Merci.

La Présidente (Mme Chassé) : Je vous rappelle qu'on s'adresse aux membres de la commission par le nom de leur circonscription. Et j'ai apprécié que vous vous soyez adressé tout du long à la présidence. Alors, merci beaucoup, M. le député.

J'invite maintenant la porte-parole du troisième groupe d'opposition et députée de Gaspé à faire ses remarques préliminaires, pour une durée maximale de 20 minutes.

Mme Méganne Perry Mélançon

Mme Perry Mélançon : Merci, Mme la Présidente. Je ne vais pas prendre ce tour pour faire des remarques préliminaires. Je vais simplement rappeler que, bien, en fait, je suis en faveur du principe du projet de loi, outre certains éléments, à quelques éléments près. Je l'ai déjà dit en intervention au salon bleu que, moi, quand je lis le nom du projet de loi, ça me paraît fondamental qu'on travaille là-dessus puis qu'on le fasse de manière conviviale, tous ensemble. Mais certainement il y a des éléments, comme la destruction de 18 000 dossiers non traités, qui ne va pas dans le sens de ce qu'on veut projeter comme réputation des Québécois comme terre d'accueil pour nos nouveaux arrivants. Et puis il y a également des éléments qui sont manquants, que je souhaite qu'on rajoute, effectivement, dans le projet de loi. Donc, quand on ira article par article, je me prononcerai davantage. Mais, effectivement, tout le pan de la discrimination à l'embauche et puis de reconnaissance des diplômes... qu'en ce moment on doit vraiment travailler plus en profondeur. Alors, je pense que j'y reviendrai au moment opportun. Merci.

• (17 h 10) •

La Présidente (Mme Chassé) : Merci à vous, Mme la députée. Est-ce qu'il y a d'autres membres qui souhaitent faire des remarques préliminaires du côté du parti formant le gouvernement? Non? Est-ce qu'il y a... Ah! j'invite le député de D'Arcy... attends, je vais devenir bonne, Nelligan...

M. Monsef Derraji

M. Derraji : De Nelligan.

La Présidente (Mme Chassé) : ...le député de Nelligan à prendre la parole pour un maximum de 20 minutes.

M. Derraji : Merci, Mme la Présidente. Nous voilà arrivés à une étape très importante, celle qui introduira une longue série de questions afin de nous permettre de lever le voile sur plusieurs aspects de ce projet de loi. Le moins que l'on puisse dire... que ce projet de loi soulève bien des interrogations, des questionnements, mais aussi des points positifs. Il est bien évident que, parfois, à entendre parler et à entendre certaines propositions, on arrive à se demander si ce gouvernement a une maîtrise pleine et entière des enjeux qui touchent l'immigration. J'avais l'impression d'assister à la même scène que nous avons eue pendant la dernière campagne électorale, et je vais me permettre aujourd'hui, dans mes remarques préliminaires, de soulever trois blocs, trois points importants du point de vue humanitaire, du point de vue migratoire et du point de vue économique. L'impact économique mais aussi juridique — on parle aussi d'inconstitutionnalité — revient toujours lors de nos échanges avec les intervenants que nous avons eu, tous, la chance, les membres de cette commission, d'entendre pendant les débats entourant ce projet de loi.

Au niveau humanité, alors, lorsqu'on parle d'humanité, on ne peut occulter la question des 18 000 dossiers. Et je pense qu'en toute humilité il faut avouer que la décision de jeter les 18 000 dossiers a fait très mal au Québec, et à notre sérieux. Vous savez, Mme la Présidente, nous avons eu une très bonne réputation, à l'échelle internationale, par rapport à notre système d'immigration. Il y a beaucoup de pays qui s'est inspiré du modèle québécois au niveau de l'accueil, mais aussi la sélection. Et, je me rappelle, je l'ai déjà entendu dans plusieurs pays, que les gens venaient au ministère de l'Immigration s'inspirer de nos façons de faire. Donc, le fait de jeter à la poubelle les 18 000 dossiers et se faire rappeler à l'ordre par la cour a été quand même quelque chose qui nous faisait mal en tant que société québécoise.

Les employeurs québécois aussi, pendant toute cette période, nous ont démontré que, sur le territoire québécois, il y avait des personnes qui travaillaient en situation régulière, qui contribuaient à l'économie québécoise comme nous tous, qui payaient leurs taxes. Et ce qu'on a fait avec cette décision, c'est qu'on a rajouté de l'incertitude. Nous avons vu la mobilisation de plusieurs personnes qui se disaient : Ça n'a pas de bon sens. Moi, ma vie, elle est au Québec, ma vie n'est pas ailleurs. Comment ça se fait que, d'un seul coup, le gouvernement va faire abstraction à tout ce que j'ai pu construire avec ma famille et jeter à la poubelle mon dossier? Donc, ça a été quand même un climat très difficile, hein? Il faut le dire. Ça a été un climat où, personnellement, je ne l'ai jamais vécu au Québec. Donc, ça, d'une part.

D'autre part, nous pouvons répondre à l'invitation du ministre de l'Immigration qui nous rappelle de collaborer dans ce dossier. Je l'ai bien entendu, et je peux vous assurer que pas uniquement moi-même, mais l'ensemble des membres de notre formation, ça nous tient à coeur, ce projet, parce qu'on veut bien faire les choses. Et il faut bien faire les choses parce que ce que nous sommes en train d'étudier aujourd'hui va impacter l'avenir économique de notre Québec, va impacter l'avenir de plusieurs régions, parce que, oui, on doit arrimer entre les besoins du marché du travail, les besoins des régions... mais il faut bien le faire, il faut bien le faire.

Et donc ce projet de loi — et c'est là le lapsus, hein — ce projet de loi n° 9 repose sur une promesse politique électorale parce que, jusqu'à tout récemment, d'après ce que j'ai compris, c'est 40 000, mais, du coup, on pense augmenter ça à partir de l'année prochaine — nous sommes déjà presque au mois de mai — et ça, ça va avoir un impact négatif sur notre économie, vu la non-disponibilité de la main-d'oeuvre. Et on ne sait pas à quel point le processus de migration ne se fait pas en un seul jour.

Et je vais me permettre de rajouter une petite note personnelle, et, je pense, au tour de la table, je suis probablement l'immigrant qui a probablement immigré récemment — hein, récemment, ça remonte quand même à 2004 — et je vais me mettre dans la peau de ces 18 000 dossiers. Le processus d'immigration, ça ne se fait pas facilement, c'est très difficile. Il faut être dans la peau de cette personne pour le vivre. Moi, personnellement, j'ai eu à faire beaucoup de voyages pour voir le lieu de ma résidence : Est-ce que je vais habiter à Sherbrooke, ou à Québec, ou à Montréal? Où je vais faire mon MBA, parce que j'avais le choix, et j'ai trouvé ce que je voulais au Québec. Donc, quand je dis une part d'humanité, c'est très important pour nous. Et s'il y a quelque chose à corriger après ce projet de loi, c'est redorer l'image qu'on est toujours une terre d'accueil et qu'on prend soin des personnes qui déposent... et qu'on a le droit... et ils ont le droit de recevoir une réponse de notre part, peu importe cette réponse.

Donc, comme j'ai dit, c'est un processus qui est laborieux et se fait sur des années pour certains. Il ne faut pas perdre de vue que le choix que font les gens d'immigrer au Québec plutôt que vers les autres provinces du Canada repose aussi sur la volonté de vivre en français. Les gens en sont bien conscients. Donc, le Québec est connu pour être une province qui porte les valeurs de démocratie, d'égalité entre les femmes et les hommes, de séparation entre le pouvoir politique et le religieux, et de primauté du droit. Chacun prétendant à l'immigration signe une déclaration sur les valeurs communes de la société québécoise avant d'obtenir le CSQ. Alors, je m'irrigue en faux lorsque l'on nous le fait croire... qu'on veut nous croire que les personnes ne sont pas au courant.

Donc, Mme la Présidente, contrairement à ce que le ministre de l'Immigration pense probablement, la procédure d'immigration est davantage qu'un simple dossier qu'on envoie au MIDI pour analyse. Il constitue, à mon sens, un contrat moral qui lie le Québec à celles et ceux qui, de bonne foi, déposent leur dossier lorsqu'ils savent qu'ils remplissent objectivement les critères d'admissibilité de différents programmes d'immigration. Certains vous diront que ce n'est pas contraignant. Mais, lorsqu'on est conscient des dégâts sur la réputation du Québec, on mesure tout l'impact d'ordre migratoire et économique que cela peut engendrer par ailleurs. Ce n'est pas anodin et cela doit être pris très au sérieux, alors éliminer des dossiers sans penser aux répercussions humaines en arrière est tout simplement inacceptable.

Au niveau migratoire, en parlant de ce qui est inacceptable, comme on le sait, le gouvernement du Québec aurait pu décider de procéder à un traitement accéléré de toutes les demandes de CSQ, si on prend le contexte actuel de pénurie de main-d'oeuvre, en finalisant les demandes en cours. Pourtant, si on est attentifs au discours des organismes qui ont été consultés, le besoin est criant. Il existerait même un large consensus sur le fait qu'il faudrait davantage penser à augmenter le taux d'immigration. Et je pense, même le ministre s'est rendu compte très, très tôt et il a annoncé la semaine dernière au CORIM qu'il prévoyait une augmentation du taux en 2020. Pas tellement ça? Une augmentation, et non à le diminuer comme le souhaitait le gouvernement. C'est l'avis en tout cas de la Chambre de commerce du Montréal métropolitain, du Conseil du patronat du Québec, de la ville de Montréal, de l'Institut de recherche et d'informations socioéconomiques. En clair, les acteurs que j'entends en Chambre, de la bouche même du gouvernement, sont tous d'accord qu'il faut augmenter le nombre d'immigrants qu'on reçoit. Mais, fidèle à l'habitude de suivre les promesses électorales de diminuer, le gouvernement continue à avoir en tête cette diminution et compte l'appliquer pour cette année.

Comment passer à côté de l'article 21.1, qui semble entaché d'inconstitutionnalité puisque le ministre s'arroge dorénavant le droit d'imposer des conditions pouvant affecter la résidence permanente? Selon l'Accord Canada-Québec relatif à l'immigration et à l'admission temporaire des aubains, 1991, c'est le gouvernement fédéral qui est responsable de l'admission des personnes immigrantes au Québec. Le Québec ne peut que sélectionner, mais en aucun cas restreindre ou imposer des conditions pouvant affecter la résidence permanente. Là encore, c'est inquiétant, c'est très inquiétant, et je me demande comment on va mettre ça en application, sachant qu'on aimerait mettre... arrimer entre les besoins du marché du travail et les futurs immigrants. Je dis inquiétant parce que c'est trop mal connaître le système d'immigration pour en arriver à proposer un tel article. Quel genre de relation souhaitons-nous établir avec celles et ceux qui voient dans le Québec le tremplin vers une vie décente fondée sur la dignité humaine et les droits et libertés individuels? Au lieu d'imposer, il faudra veiller à ce que, collectivement, nous soyons en mesure d'identifier les facteurs qui manquent à l'installation et à la rétention des immigrants dans les régions. Il ne s'agit certainement pas de contraindre ou de bousculer les normes et règlements en matière d'immigration.

• (17 h 20) •

En ce qui concerne la dimension économique, enfin, Mme la Présidente, laissez-moi vous parler d'un domaine que je connais encore mieux que les autres, celui de l'impact négatif du projet de loi n° 9 sur notre économie. Parlons de chiffres, Mme la Présidente, soyons pragmatiques. Selon les estimations d'Emploi-Québec, près de 1,5 million de postes seront à pourvoir d'ici 10 ans, dont 118 000 dans l'immédiat. De ce nombre, près du quart, 22 %, seront occupés par des personnes immigrantes. Le défi que nous avons, c'est de bien sélectionner, accueillir et intégrer nos futurs immigrants, et donc indissociables de notre prospérité économique future, a déclaré le Conseil du patronat du Québec. Si vous questionnez les représentants des employeurs, ils vous le diront sans détour, ce qui constitue une urgence pour le développement socioéconomique de la province est la disponibilité de la main-d'oeuvre qualifiée. Le CPQ voit même dans la pénurie de main-d'oeuvre une véritable épée de Damoclès suspendue sur la tête des entreprises. Les Québécois doivent comprendre une chose fondamentale, Mme la Présidente, cela a été documenté, analysé et confirmé dans le cadre de plusieurs tables de concertation, de forums et de rencontres : s'il faut prendre soin de notre immigration, en prendre moins, c'est se condamner à faire face à une crise sans précédent au Québec en matière d'emploi et de croissance économique. Et, sérieusement, pour moi, encore, la décision de réduire les seuils d'immigration est une décision antiéconomique. En outre, les chiffres sont positifs quant à la capacité des immigrants à s'insérer dans le marché du travail, puisque la Chambre de commerce du Montréal métropolitain...

La Présidente (Mme Chassé) : ...pour le vote. On doit suspendre pour un vote, et, compte tenu de l'heure... N'empêche que... hein?

Une voix : ...

La Présidente (Mme Chassé) : On va revenir ici? On revient...

Des voix : ...

La Présidente (Mme Chassé) : Je vous invite, dès que le vote est pris, à revenir ici pour reprendre la séance.

On se retrouve tantôt. Merci.

(Suspension de la séance à 17 h 22)

(Reprise à 18 h 27)

La Présidente (Mme Chassé) : À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! On a repris les travaux, merci, pour rapidement les suspendre immédiatement jusqu'à 19 h 30. Et on se retrouve à ce moment-là à la salle La Fontaine.

Merci à tous.

(Suspension de la séance à 18 h 28)

(Reprise à 19 h 31)

La Présidente (Mme Chassé) : À l'ordre, s'il vous plaît! La Commission des relations avec les citoyens reprend ses travaux. Merci d'être là. Je demande à toutes les personnes de fermer à nouveau son appareil électronique ou ses appareils électroniques et de demeurer attentifs, malgré qu'on vient tous de prendre un bon souper.

Je vous rappelle que la commission est réunie afin de poursuivre l'étude détaillée du projet de loi n° 9, la Loi visant à accroître la prospérité socio-économique du Québec et à répondre adéquatement aux besoins du marché du travail par une intégration réussie des personnes immigrantes.

Lors de la suspension de nos travaux en fin d'après-midi tantôt, nous étions alors à l'étape des remarques préliminaires, et M. le député de Nelligan n'avait pas encore terminé ses remarques. M. le député, je vous cède la parole pour une durée de 8 min 35 s.

M. Derraji : Merci, Mme la Présidente. Au fait, j'étais sur une lancée. Donc, je vais essayer de reprendre ma lancée pour continuer mes arguments préliminaires et mes remarques préliminaires.

J'avais la dimension économique et, comme je disais, je citais les estimations d'Emploi-Québec, qui nous parlait de 1,5 million de postes qui seront à pourvoir d'ici 10 ans, dont 118 000 dans l'immédiat. De ce nombre, près du quart seront occupés par des personnes immigrantes. Le défi de bien sélectionner, accueillir et intégrer nos futurs arrivants est donc indissociable de notre prospérité économique future. Et ça, c'était la déclaration du Conseil du patronat du Québec. Si vous questionnez les représentants des employeurs, ils vous le diront sans détour, ce qui constitue aujourd'hui une urgence pour le développement socioéconomique de la province est la disponibilité de la main-d'oeuvre qualifiée. Le Conseil du patronat, je me rappelle, même, dans cette salle, voit même, dans la pénurie de la main-d'oeuvre, une véritable épée de Damoclès suspendue sur la tête des entreprises.

Donc, les Québécois doivent comprendre une chose fondamentale, Mme la Présidente. Cela a été documenté, analysé et confirmé dans le cadre de plusieurs tables de concertation, de forums et de rencontres. S'il faut prendre soin de notre immigration, en prendre moins, c'est se condamner à faire face à une crise sans précédent au Québec en matière d'emploi et de croissance économique. Et les dernières nouvelles économiques nous le confirment, que plusieurs secteurs sont touchés par la pénurie de main-d'oeuvre.

En outre, les chiffres sont positifs quant à la capacité des immigrants à s'insérer dans le marché du travail puisque — l'exemple parfait — la chambre de commerce métropolitaine de Montréal rappelle des données d'études qu'elle a menées dans la grande région métropolitaine. Entre 2008 et 2017, l'écart du taux de chômage entre les natifs et les immigrants a fondu de plus de moitié. Durant cette période, le taux d'emploi des immigrants est passé de 53 % à 61 %, se rapprochant ainsi à moins de trois points de pourcentage de celui des personnes nées au Canada.

Certes, nous souhaitons que soient trouvées des solutions qui permettraient d'alimenter les régions en main-d'oeuvre. Et, sur ce point, en termes d'arrimage entre les besoins de main-d'oeuvre et les besoins des régions, nous sommes d'accord, mais pas n'importe comment. Et c'est en collaboration avec les autres ministères que cette approche doit être adoptée.

Enfin, j'aborderais, pour terminer, le rayonnement du Québec à l'international. Nous jouissons d'une réputation exceptionnelle qui ne s'est pas construite en un seul jour. C'est un travail de longue haleine qui permet au Québec de prétendre aujourd'hui jouer un rôle clé, notamment au sein de la zone francophone. Et malheureusement ce qui a été mentionné sur plusieurs tribunes, c'est vraiment la cacophonie avec laquelle les dossiers ont été gérés. Et, je le répète encore une fois, ici, il y a une urgence à rétablir cette réputation à l'international. Et le traitement qui est porté aux prétendants et prétendantes à l'immigration fera reculer plus d'un et porterait sérieusement atteinte à nos besoins en main-d'oeuvre, qui sont criants. Les changements de cap brutaux, la suppression de dossiers, la remise en cause de leur statut à titre de résidents temporaires ou permanents, enfin la seconde zone à laquelle on relègue nos immigrants, décourageraient beaucoup de personnes à venir s'installer au Québec.

La notion de confiance est fondamentale. Le défi migratoire, le défi de la main-d'oeuvre, ce n'est pas uniquement le Québec qui le vit. Au niveau mondial, nous avons plusieurs exemples. La France, l'Italie, l'Allemagne, le Japon, même, et d'autres pays vivent cette problématique. Donc, la notion de confiance est fondamentale lorsque l'on dispose des personnes, des biens et des services. Est-ce que l'on considère l'impact sur l'attrait de l'investissement? Feriez-vous confiance à un gouvernement qui déciderait, d'un coup de crayon, de mettre fin à des années de procédures? Investiriez-vous dans un tel pays?

Le Québec s'est taillé, au cours des dernières années, une place importante en tant que chef de file et de leader dans plusieurs secteurs d'activité. Aujourd'hui même, un rapport sur l'intelligence artificielle disait que la guerre de demain sera une guerre de talents. Et, quand on dit une guerre de talents, c'est bien les accueillir, c'est bien les intégrer, mais aussi leur donner un moyen et un environnement sains pour leur épanouissement. Notre rôle est de veiller à ce que le cadre juridique dans lequel baigne le Québec soit favorable à l'attrait de chercheurs, d'investisseurs, de sièges sociaux.

C'est pour cela ce que je disais au début, que ce que nous sommes en train de discuter aujourd'hui risque de laisser une tache pour les années à venir, pas uniquement une tache antiéconomique par rapport à la réduction des seuils d'immigration, mais par rapport à la place que le Québec veut se donner à l'échelle internationale. C'est tout un circuit qui s'est mis en place à travers les années et qui culmine aujourd'hui en autant de modèles d'excellence et de leadership non seulement au Canada, mais à travers le monde.

La Présidente (Mme Chassé) : ...trois minutes.

M. Derraji : Oui, j'ai mon compteur. Merci beaucoup.

La Présidente (Mme Chassé) : Ah! bien, parfait. Bravo, l'autonomie!

M. Derraji : 2 min 59 s. Le Québec est encore riche de nouvelles opportunités et de potentiel pour prendre la première place dans bien des secteurs et des domaines de pointe. Cela a l'air bénin, mais un climat de confiance rompu peut être préjudiciable à la bonne marche de notre croissance économique.

Et, dans une démarche de construction, j'inviterais le ministre à être un bon joueur d'équipe, et un bon joueur d'équipe, quand on joue en équipe, on accepte de se faire questionner, mais on accepte de donner des réponses qui comptent. Le déroulement des discussions article par article de ce projet de loi, ce n'est pas pour un seul parti politique, mais plus pour notre nation. Notre Québec a besoin de nous. Notre Québec a besoin d'une immigration. Notre Québec a besoin d'une main-d'oeuvre qualifiée et aussi présente pour l'ensemble des régions. Et c'est évident que le projet de loi n° 9 présente, à mon avis, beaucoup de zones d'ombre qui méritent éclaircissement, des amendements à apporter, des intérêts à préserver. Et, entre nous, la clé est chez le ministre. Donc, nous, nous sommes prêts à étudier les articles un à la fois, mais ça demande aussi une très bonne collaboration de la part du ministre.

Donc, pour conclure, Mme la Présidente, le projet de loi n° 9, sur plusieurs... Il y a pas mal de points positifs, comme je l'ai dit, mais il reste quand même des points à clarifier par rapport à comment le ministre et le ministère comptent mettre en place ces stratégies d'arrimage, comment le ministère compte faire l'implantation au niveau de l'ensemble des régions et comment le ministère compte répondre aux partenaires économiques qui ont qualifié la situation du manque de main-d'oeuvre d'une crise. Et ça, je répète les mots du Conseil du patronat, qui ont qualifié le manque de main-d'oeuvre par une crise. Et, quand on dit une crise, ça veut dire que ça va affecter tôt ou tard notre économie, mais aussi nos régions.

Donc, je vais arrêter là, Mme la Présidente. Je vous remercie.

• (19 h 40) •

La Présidente (Mme Chassé) : Merci, M. le député de Nelligan. Merci. Y a-t-il d'autres membres qui souhaitent faire des remarques préliminaires? Mme la députée de Fabre, je vous invite à... vos remarques. Vous avez 20 minutes.

Mme Monique Sauvé

Mme Sauvé : Merci, Mme la Présidente. Alors, à mon tour de saluer l'ensemble des collègues parlementaires... et le privilège de pouvoir participer à l'étude détaillée de ce projet de loi qui est si important pour l'avenir du Québec.

Je vous dis tout de suite, Mme la Présidente, et au ministre que, comme mes collègues l'ont mentionné, nous serons en mode collaboration. Très important. Nous souhaitons vraiment contribuer, mais nous aurons des questions. Nous aurons des amendements, mais nous serons vraiment dans un mode de contribution continue tout au long de ces travaux.

D'ailleurs, j'invite tout de suite, d'entrée de jeu, Mme la Présidente, le ministre, dans cet esprit de collaboration, s'il a des amendements à son projet de loi, de pouvoir déposer les amendements pour qu'on puisse en prendre connaissance, donc, d'avance. Alors, j'inviterai le ministre, dans cet esprit de collaboration, à déposer ses amendements.

Je voulais, bien sûr, dire que je suis très attentive à la notion de pénurie de main-d'oeuvre, à la problématique de pénurie de main-d'oeuvre. Et, quand je regarde les derniers chiffres du bulletin sur le marché du travail du mois de mars, le taux de chômage a encore baissé par rapport au mois dernier, de 0,1 %. Donc, on est à... Bien, en fait, pour le dernier trimestre, au Québec, on est à 5,3 % de taux de chômage par rapport à 5,5 % l'an passé. Donc, nous sommes vraiment dans une situation de plein emploi et de pénurie de main-d'oeuvre plus criante dans plusieurs secteurs d'activité.

Alors, oui, bien sûr, je suis très préoccupée quand je regarde les dernières données sur l'emploi, et, oui, il faut une réponse aux besoins du marché du travail. J'en suis. Je suis très préoccupée par cette notion importante d'arrimage et d'adéquation entre les besoins du marché du travail. J'ai été près de 20 ans de ma vie dans le domaine de l'employabilité. Alors, c'est une préoccupation que j'ai, bien sûr, et, oui, une réponse à la pénurie de main-d'oeuvre, j'en suis aussi. Il nous faudra un débat serein. Il faudra, de tous, une volonté de bonifier le projet de loi et contribuer à la réflexion.

Mais, et je tiens à ce «mais», il y a plusieurs éléments incontournables pour assurer la zénitude de nos débats. Pour pouvoir contribuer à la réflexion, il faut bien comprendre la lecture du ministre sur le portrait global de l'intégration réussie des personnes immigrantes. Je suis déjà intervenue précédemment sur le dossier, bien sûr, qui a fait couler beaucoup d'encre, les 18 000 dossiers, et j'avais parlé à ce moment-là d'anamorphose, qui est une image déformée lorsqu'on se penche un peu. Alors, sous un certain angle, l'image prend toute sa réalité. Alors, je souhaite vraiment que l'image et l'intention du ministre autour de cette grande question de prospérité socioéconomique et d'adéquation avec les besoins du marché du travail, ce soit une véritable réalité et non pas une image déformée parce que ce qui me préoccupe, c'est que j'entends beaucoup qu'il faut tout refaire, mais, comme l'a souligné ma collègue précédemment, il y a des bonnes pratiques en place. Il y a eu une amélioration continue. Et il y a des choses à prendre en compte dans cette élaboration d'un portrait qui est juste pour la suite des choses.

Alors, il ne faut pas juste un projet de loi panacée universelle, mais une véritable étude détaillée qui nous permet de bonifier, d'améliorer entre tous les parlementaires, pas juste, donc, une intention qui reconstruit tout sans reconnaître les éléments qui ont été porteurs dans le passé.

Vous savez, j'ai une préoccupation aussi par rapport à la dimension d'intégration réussie. Pour avoir été dans l'employabilité, mais dans le communautaire, pendant près de 20 ans, pour moi, la dynamique d'un territoire, c'est fort prometteur et c'est une condition gagnante à chaque fois. Alors, j'aurai le grand souci d'entendre le ministre nous partager sa vision des ententes, entre autres, avec les organismes des différents territoires.

Je vais me permettre un élan de chauvinisme lavallois quelques secondes pour vous dire que, par exemple, dans la plus belle région du Québec, je pense que mon collègue va être d'accord avec ça entièrement, alors, déjà, on s'entend, donc, évidemment, il y a une dynamique au niveau des partenariats locaux et régionaux entre les partenaires qui travaillent à l'intégration des personnes immigrantes. On est dans une dynamique. Il y a un historique très différent de celui de Montréal, par exemple. Alors donc, il faut tenir compte de cette couleur, de cette dynamique très particulière d'une région à l'autre, avec la richesse de l'ensemble des organismes qui composent cette dynamique.

Alors, je serai très, très attentive et très sensible à cet élément-là qui va contribuer non seulement à un arrimage... Parce qu'on n'est pas juste dans une situation où on regarde les profils des personnes et on regarde les marchés du travail. Pour une véritable intégration réussie, il faut faire en sorte que tous les partenaires qui sont déjà actifs et qui ont des pratiques gagnantes soient dans le coup et soient interpelés dans ce projet de loi. Quand je disais qu'il faut comprendre, je pense qu'il est très important pour nous de s'entendre parce qu'on a entendu beaucoup de distinctions entre certains chiffres. Alors, pour moi, de bien comprendre, c'est de s'entendre dès le point de départ sur la rigueur des faits et la rigueur des chiffres. Il faut aussi comprendre, de la part du ministre, Mme la Présidente, les définitions qui, à mon avis, sont absentes pour plusieurs propos et plusieurs articles du projet de loi.

Et je veux aussi vous parler d'une condition, là. Je parlais de zénitude tantôt. Je reviens là-dessus. J'y tiens beaucoup. Alors, une condition qui est essentielle et tellement importante, je souhaite qu'on n'ait pas trop, dans nos dialogues et nos débats, les mots «inventaire», «liste» et «dossier». J'espère y trouver plus des mots comme «citoyen» et «personne» parce que ce projet de loi a une carence d'humanité, très honnêtement. Et je ne veux pas revenir, mais je vais revenir sur la situation des 18 000 dossiers. J'ai eu des centaines de citoyens qui m'ont adressé leur situation, leur drame humain, des jeunes qui étaient découragés, des personnes qui travaillaient déjà, des étudiants. Et c'est une situation qu'on a nommée beaucoup, beaucoup, mais on avait pour réponses évidemment les réponses que l'on connaît.

Alors, je souhaite contribuer. Je souhaite, avec mes collègues, être là au rendez-vous pour bonifier. Mais, pour moi, cette humanité, elle devrait être au coeur de nos débats. Est-ce que la situation s'est améliorée depuis des années? Oui. Est-ce qu'on peut faire mieux? Oui. C'est l'humilité aussi qu'on a à travailler avec tout le monde.

Vous savez, dans mon comté, j'ai plusieurs quartiers, plusieurs réalités. J'ai des Québécois natifs. J'ai des gens de trois générations des communautés culturelles, plus d'une dizaine de communautés culturelles qui contribuent à l'économie de mes beaux quartiers et de la région de Laval. Alors, mes citoyens me parlent, mes citoyens me rencontrent. Et cet aspect-là, il est excessivement important parce que les réponses que nous aurons face aux préoccupations que nous aurons, les réponses, c'est celles que je donnerai à mes citoyens de mon comté.

Alors, voilà la préoccupation. Donc, oui, on va être en mode collaboration, mais je souhaite des réponses, des réponses aux questions qui me viennent de mes citoyens de Fabre. Merci, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Chassé) : Merci, Mme la députée de Fabre. Et ceci met fin... Non? Il y a quelqu'un d'autre encore, là?

Une voix : ...

La Présidente (Mme Chassé) : Alors, je n'ai pas couvert... «Eh boy! Oh my God!» Bien là, c'est parce que c'était comme un miroir, c'est le même veston. Alors, il y a une autre membre qui désire faire ses remarques préliminaires. Je suis vraiment désolée. Mme la députée de Bourassa-Sauvé, je vous invite à faire vos remarques préliminaires et j'invite...

Une voix : ...

La Présidente (Mme Chassé) : Du potassium? J'invite tous à continuer à être attentif. J'ai commandé du café, du thé pour tous. Je vous invite à prendre...

Mme Paule Robitaille

Mme Robitaille : C'est parfait. C'est un supertiming.

La Présidente (Mme Chassé) : Oui, on va rester attentifs pour vos 20 minutes de remarques préliminaires. Merci.

• (19 h 50) •

Mme Robitaille : Merci. Alors, écoutez, ce projet de loi est très important. Et c'est fondamental, l'immigration, pour construire la société québécoise de demain. Ça, c'est clair et net. Et le projet du ministre est emballant. Il y a des aspects du projet de loi qui sont vraiment emballants. On s'entend tous qu'il faut mettre les ressources pour mieux accompagner un nouvel immigrant, qu'il faut plus de régionalisation parce que nos régions se vident, là, on est d'accord, que les magasins ferment, puis il y a une pénurie de main-d'oeuvre qui frappe dans nos régions, mais aussi dans nos villes.

Et on se réjouit d'entendre le ministre qui souhaite mettre sur place un parcours personnalisé pour chacun des nouveaux arrivants, un accompagnement, d'une certaine façon, de luxe. Et je me réjouis aussi de voir que le ministre a le budget pour mettre en place quelque chose de particulièrement intéressant pour aider les régions, pour aider nos entreprises, pour aider nos nouveaux arrivants.

Alors, avec les différents groupes en commission parlementaire, on a réfléchi à la façon dont les municipalités devaient accueillir, à l'aide que le Québec devait fournir, à son rôle dans l'intégration, à la part que l'entreprise devait jouer, au rôle des organismes communautaires dans tout le processus. C'est très bien. C'est très, très bien. Mais il y a un aspect humain du projet de loi qu'il ne faut pas escamoter, qu'il faut prendre en considération. On est en train de gérer des humains, et ça, je trouve que le projet de loi pourrait certainement bénéficier de certaines améliorations, et c'est pour ça qu'on va avoir cette commission parlementaire, et c'est pour ça qu'on va parler puis essayer d'amender certains articles du projet de loi.

Bon, il y a toute la question des 18 000 dossiers, hein, ces 50 000 personnes. Et on pense qu'il est possible, qu'il est possible et qu'il est nécessaire, d'aller de l'avant et de traiter à la fois les 18 000 dossiers et à la fois les déclarations d'intérêt sous le système Arrima. On peut faire les deux en même temps. Mes collègues vous ont parlé amplement, là, de toute cette question des 18 000 dossiers, de l'importance de les traiter. Moi, j'aimerais parler un peu des conditions à la résidence permanente.

Moi, je viens du comté de Bourassa-Sauvé. C'est Montréal-Nord, Mme la Présidente. Il y a beaucoup d'immigrants là-bas. Il y a beaucoup de Québécois qui sont issus de l'immigration dans Bourassa-Sauvé. On attend justement la visite du député de Beauce-Sud, qui a gentiment... qui appuie certains organismes dans Montréal-Nord et qui... et c'est très, très apprécié, parce que ces jeunes-là sont issus de l'immigration, et ils veulent réussir, et ils veulent trouver leur place dans la société québécoise.

Donc, un petit... Très, très rapidement, là, je veux que personne ne dorme, mais je vais, en quelques mots, vous dire un peu c'est quoi, la résidence permanente. Alors, c'est une étape avancée du processus qui conduit à la citoyenneté canadienne, hein? Alors, la résidence permanente, c'est géré par le gouvernement fédéral, bien, parce qu'on fait encore partie du Canada. Alors, tant qu'on fera toujours partie du Canada, la résidence permanente, bien, devra être gérée par le gouvernement fédéral.

Une voix : ...

Mme Robitaille : Oui, c'est ça, mais je fais juste vous le rappeler. Alors donc, juste une petite explication là-dessus pour comprendre. Le Québec a le pouvoir de, hein, choisir ses immigrants. On leur donne un certificat de sélection du Québec. Puis ensuite le gouvernement canadien leur accorde une résidence permanente. De là, le Québec met en place les mesures pour les accueillir et les intégrer, pour les aider à apprendre le français puis, bon, ainsi de suite. Et ce projet de loi là est important justement parce qu'on veut absolument que les gens puissent s'intégrer et on veut absolument aider les entreprises, les MRC à les accompagner là-dedans.

Là, la CAQ va imposer des conditions à cette résidence permanente là, liées probablement à ce qui touche à l'apprentissage du français, des valeurs québécoises et puis du lieu de résidence. Bon, les valeurs québécoises, j'ai très, très hâte d'en parler avec M. le ministre. J'aimerais savoir exactement quelle est sa définition de valeurs québécoises, et tout ça. Ça va être très intéressant. On a des heures de plaisir devant nous. Mais, bon, c'est clair... Mais, moi, ce que j'aimerais aussi voir, et ce qu'on ne pourra peut-être pas voir, mais peut-être que M. le ministre pourra nous donner un brouillon de ça ou, en tout cas, une idée, c'est les règlements qui vont accompagner ces articles-là, qui vont déterminer qu'est-ce que l'article 9 du projet de loi veut dire exactement. Mais on n'a pas ces règlements-là. C'est dommage. Ça nous aiderait à mieux comprendre s'il y a peut-être un manque de transparence là. En tout cas, en campagne électorale, le premier ministre a parlé de test possible relatif à l'apprentissage du français, à un test de valeurs.

Une voix : ...

Mme Robitaille : Oui? Non, non, mais ce n'est pas pour vous blesser.

La Présidente (Mme Chassé) : On reste attentifs. Est-ce qu'il y a consentement pour que M. le ministre se prononce pendant...

M. Jolin-Barrette : Bien, c'est une question de règlement.

La Présidente (Mme Chassé) : Parfait.

M. Jolin-Barrette : C'est une question de règlement. Mme la Présidente, on semble me prêter des intentions sur un manque de transparence. Je ne pense pas que la députée de Bourassa-Sauvé peut faire cela. Je vous soumets la question.

Mme Robitaille : Mais en tout cas je suis convaincue que le ministre, durant nos délibérations, va nous expliquer ce qu'il veut comme règlements, qu'il va nous parler un petit peu plus des règlements à venir après l'adoption du projet de loi. Alors, je compte sur M. le ministre là-dessus.

Mais en tout cas, en campagne électorale, le premier ministre a parlé de test possible relatif à l'apprentissage du français, des tests de valeurs québécoises après trois ans de l'obtention de la résidence permanente, d'obliger à... On a parlé aussi de la possibilité d'obliger les gens à rester en région ou d'occuper un travail pendant une certaine période de temps pour conserver cette résidence permanente là. Ça, c'est justement... Et c'est des questions qu'on va poser au ministre durant les prochaines semaines.

Pour tous les juristes qu'on a entendus, tous les autres groupes qui ont posé des questions durant cette période de consultations là, cette condition à la résidence permanente, ce n'est pas une bonne idée. D'abord, c'est une affaire de principe. C'est une question de principe parce que mettre une condition à la résidence permanente, c'est une mesure coercitive. On devrait plutôt accompagner au lieu d'imposer des conditions. C'est ce qu'on nous a dit, et je trouve que c'est tout à fait juste. Tous les groupes communautaires, même des regroupements d'affaires qui reçoivent des immigrants, nous expliquent que ça n'a rien de bon parce que ça crée des incertitudes et des inquiétudes, de savoir s'ils pourront ou non garder leur résidence permanente.

Donc, c'est une rupture avec la tradition d'accueil du Québec. Il y a cette idée d'éliminer bêtement... Bon, c'est... Pardon, j'ai... Mais donc c'est une rupture avec cette tradition d'accueil du Québec, une tradition... De tradition, pour les gens qui arrivent, une résidence permanente, c'est une sécurité pour démarrer sa vie au Canada. On n'a surtout pas besoin d'insécurité ou d'incertitude. Avec le projet de loi n° 9, on lui met un stress de plus à cause de cette condition. Il passe un test de langue, un test de valeurs, c'est une obligation de rester en région. C'est la crainte de perdre tout, de perdre son droit de rester au Canada, au Québec s'il perd son emploi. C'est contre-productif, Mme la Présidente, et je pense que le ministre devrait peut-être reconsidérer... En tout cas, on va s'en parler durant les prochaines semaines.

Moi, dans mon comté, j'ai des Italiens qui sont arrivés au Québec dans les années 50, 60. Ils ne parlaient pas un mot de français quand ils sont arrivés. Ça a pris souvent plus que trois ans parce que ces gens-là, bien, ils devaient travailler. Ils devaient travailler fort pour faire vivre leur famille. Mais aujourd'hui, je vais vous dire, ils parlent tous français. Je les rencontre régulièrement. Leurs enfants, leurs petits-enfants parlent aussi français. Et puis ces trois générations-là sont des Québécois à part entière qui paient leurs impôts, qui construisent le Québec. C'est ça, l'immigration, Mme la Présidente. Les immigrants, ce ne sont pas des produits jetables, hein, et l'immigration, ce n'est pas qu'un algorithme. Ce sont des gens qui ont pris d'énormes risques et qui ont choisi le Québec. Il faut s'en souvenir. Oui, il faut en prendre soin et non pas leur balancer des conditions qui mettent tout en péril quand on leur accorde une résidence permanente.

En droit, cette mesure est inopérante sous plusieurs aspects. Lorsqu'un individu devient résident permanent, il devient résident du Canada au complet. Ça, on l'a entendu dans les consultations. Il devient résident du Canada au complet, pas d'une ville ou d'une province, mais du pays au complet. Et ça, l'obliger de rester à un endroit précis, c'est une violation de l'article 6.2 de la Charte canadienne des droits, et donc c'est un problème. On ne peut pas dire à quelqu'un qu'il va perdre son statut s'il veut déménager. Je considère que c'est inhumain. C'est injuste de faire ça et ça va contre la charte des droits et libertés du Canada, mais aussi du Québec.

Et c'est la même chose au niveau du travail. On ne peut pas perdre son statut de résident permanent si on perd son travail. Ça va contre l'idée de permanence de cette résidence-là. Le gouvernement fédéral ne veut pas s'embarquer dans cette idée d'accoler une condition provinciale à la résidence permanente. C'est lui qui devrait mettre ceci en application et il refuse. Donc, l'article est inopérant. Il refuse, donc c'est difficile d'aller de l'avant avec ça. Même si le gouvernement fédéral n'y voyait pas d'objection, accoler une condition à la résidence permanente est, avec tout le respect, là, une idée malhabile, mal ficelée en droit, qui risque de se retrouver rapidement devant les tribunaux.

• (20 heures) •

Je vais vous expliquer pourquoi on l'a essayé, mais ça n'a pas marché. Me Cliche-Rivard, de l'AQAADI, a expliqué qu'en 2012, sous le gouvernement conservateur de Stephen Harper, le gouvernement fédéral a imposé une condition à la résidence permanente, entre autres aux époux et aux épouses pour qu'ils restent dans leur relation, mais on a tout enlevé ça en 2016 parce que ça mettait les gens dans une situation de dépendance et de précarité. Imaginez-vous, Mme la Présidente, la femme qui doit rester en couple avec son mari abusif pour ne pas perdre sa résidence permanente. Ça ne fonctionnait pas, et on a tout enlevé en 2016.

On peut faire le parallèle avec le type qui est obligé de rester dans son emploi, bien qu'il soit peut-être harcelé par son employeur, parce qu'il ne veut pas perdre sa résidence permanente. Enfin, on a décidé au fédéral qu'on devient résident permanent, point à la ligne, parce que ça ne fonctionnait pas. Est-ce qu'on veut vraiment recommencer la même erreur, Mme la Présidente? De toute façon, le fédéral ne veut pas s'embarquer là-dedans, et, si le fédéral ne s'embarque pas là-dedans, ça ne marche pas, de toute façon.

La résidence permanente, c'est la première étape vers la citoyenneté. On la retire pour quelque chose de très, très grave, hein? Si on lit la loi de l'immigration et du statut de réfugié, on voit dans la loi qu'on retire la résidence permanente quand quelque chose est très, très grave, pour des raisons de criminalité ou si quelqu'un a falsifié ses documents d'immigration.

Et, quand on retire cela, il y a toute une procédure qui s'enclenche. On peut en appeler devant la section d'appel d'immigration fédérale. C'est un processus complexe, ultimement géré par la Commission de l'immigration et du statut de réfugié. Je connais ça parce que j'ai travaillé là. Laissez-moi vous dire, quand on retire une résidence permanente, c'est extrêmement complexe. Le ministre doit le savoir.

On ne retire pas la résidence permanente parce que quelqu'un ne passe pas un test de français ou un test de valeurs québécoises après trois ans, parce que ça veut dire que la personne qui s'est installée ici, qui a un job et qui envoie ses enfants à l'école, des enfants qui parlent déjà parfaitement français probablement, devrait être déportée. Et ça ne tient pas la route. Qui va déporter cette personne-là? Ça serait imposé en plus par des fonctionnaires fédéraux, hein? Alors, quand on regarde tout ça, qui va expulser ces gens-là, qui va appliquer la loi, c'est le fédéral, ce n'est pas sérieux. Et je comprends tout à fait Ottawa de ne pas vouloir s'embarquer là-dedans avec le Québec, parce que c'est simplement inapplicable, et j'ai hâte que le ministre nous en parle.

Bref, c'est une idée inhumaine, à mon avis, antiéconomique, et ça ne tient pas la route juridiquement. Je pense qu'il faut choisir ses batailles, et celle-là n'est pas la bonne. Si le ministre continue de s'entêter sur cette voie, il risque de subir le même sort qu'il a subi lorsqu'il a voulu mettre les 18 000 dossiers à la poubelle avant que son projet de loi soit adopté. Veut-il vraiment encore être dans une situation comme celle-là? Je me demande pourquoi on s'acharnerait là-dessus. Le Québec a déjà un pouvoir de sélection. On choisit nos immigrants, on leur attribue un certificat de sélection du Québec. Avant qu'ils obtiennent la résidence permanente et après qu'ils l'aient obtenu, il y a toutes sortes de façons de travailler sur une bonne intégration et une bonne francisation des immigrants.

Cette condition qu'on veut accoler est, selon nous, inutile et n'apportera absolument rien, au contraire. Nous croyons fermement que le gouvernement doit miser plutôt sur de bonnes mesures d'intégration, mettre le paquet dans l'intégration, une bonne coordination entre les gouvernements, les municipalités, les entreprises, les organismes communautaires, opter pour une approche humaine plus que sur des clauses qui sont, de toute façon, inopérantes. Pourquoi pas la carotte, M. le ministre... ou, Mme la Présidente, pourquoi pas la carotte au lieu du bâton? Et c'est un problème, parce que, si on va de l'avant avec ça, on va avoir un problème de rétention. Déjà, le ministre en a parlé, il aimerait avoir plus de gens qui vont rester au Québec. Or, avec des mesures comme ça, on amplifie le problème. Les gens ne vont pas nécessairement rester ici. Ils vont partir ailleurs.

On construirait alors deux systèmes. On aurait deux systèmes : celui du Québec, où là il y aurait une condition à la résidence permanente, ça serait plus long pour s'établir dans le pays, ça serait plus long pour avoir la permanence, d'une certaine façon, de rester ici; puis on aurait un autre système dans le reste du Canada, où là ça serait beaucoup plus rapide. Alors, qu'est-ce que vous pensez que les gens vont faire? Entre une solution plus facile en Ontario... bien, malheureusement, même s'ils parlent français, moi, j'ai bien peur qu'ils choisissent l'Ontario. Il reste combien de temps?

La Présidente (Mme Chassé) : Il vous reste 4 min 50 s.

Mme Robitaille : O.K., bon. Ah! je vais continuer.

La Présidente (Mme Chassé) : On continue.

Mme Robitaille : Alors, et donc tout ça, évidemment, on l'a vu, hein, durant les derniers mois, ça a un impact sur l'image du Québec à l'étranger. Et, comme disaient mes collègues, il y a en ce moment... il y a une espèce de guerre des talents sur la planète. On veut aller chercher les meilleurs, et c'est important de donner l'image d'une société qui est capable d'accueillir, qui est ouverte à l'accueil, qui est ouverte aux nouveaux immigrants. Et avec un projet de loi comme celui-là, je me pose de sérieuses questions. On l'a vu, hein, dans les journaux, dans la presse internationale, on a vu les titres. Le Monde qui écrivait : Cafouillage au Québec sur l'accueil des étrangers; L'Orient-Le Jour : Dossiers immigration annulés : la réputation du Québec mise à mal; le journal Les Échos, en Belgique, Le rêve brisé d'une cabane au Canada. Ça, ça ne nous aide pas si on veut aller chercher les meilleurs.

Et là l'impact, on ne le voit pas encore, mais, une fois la loi adoptée, évidemment, les gens... parce que c'est sérieux, là. Quand on décide de déménager, qu'on décide de choisir un nouveau pays, on y pense deux fois. On se prépare et on essaie de choisir la meilleure variante, le mieux pour toute la famille. Et on pense sérieusement qu'un projet de loi comme celui-là va juste bousiller ce qui a été fait dans le passé. Pour ce qui est, justement, de cette idée de condition à la résidence permanente, l'idée de mettre ces 18 000 dossiers à la poubelle, c'est très mauvais pour l'image du Québec. Mais on peut tabler sur des choses positives qui sont dans le projet de loi.

Alors donc, on s'en va où avec ce projet de loi là? On a posé la question à Me Stéphane Handfield, et il nous a dit : Dans le mur, direct dans le mur. On va investir combien dans les poursuites judiciaires?, il nous disait. Parce que, s'il n'y a pas de modifications à ce projet de loi là qui, à la base, peut être excellent, mais s'il n'y a pas de modifications sur ces articles-là qui vont vraiment dans le mur, comme il dit, on ne pourra pas aller bien loin, et tous les efforts qu'on va mettre dans l'intégration vont être contrecarrés par des articles comme ça qui sont inapplicables. Tous les juristes qui sont venus nous voir en ont conclu la même chose. Donc, il faut se souvenir de ça.

Je souhaite profondément que le ministre mette toute son énergie à trouver les meilleures façons d'accueillir ceux qui nous aideront à bâtir le Québec. Je souhaite qu'il arrête de s'obstiner à défendre des articles de loi qui ne tiennent juste pas la route. Je suis convaincue qu'on peut faire mieux et j'espère que le ministre de l'Immigration et son équipe entendront raison. Alors, Mme la Présidente, merci beaucoup.

La Présidente (Mme Chassé) : Merci pour vos remarques, Mme la députée. Ceci, si je ne me trompe pas, met fin à la section des remarques préliminaires. Et, avant d'entamer la prochaine section, je voulais vous dire que je trouve qu'actuellement les propos sont assez constructifs et je voulais vous le signifier, j'apprécie. On rentre dans une étape bientôt qui va être importante, qui va être exigeante, et je nous invite à maintenir un haut niveau d'écoute et d'attention. L'objectif de l'étude détaillée, vous le savez, c'est d'améliorer le projet de loi qui est sur la table. Et ce que j'entends, suite aux remarques préliminaires, c'est que c'est... il y a cette intention de mener à bien ce projet-là, d'améliorer le projet de loi. Alors, je tenais à vous mentionner que je vous félicite pour la première étape atteinte.

Nous sommes donc rendus à l'étape des motions préliminaires. Et, s'il n'y a pas de motion préliminaire... Ah! il y a quelqu'un qui lève la main. Oh! M. le député de Laurier-Dorion.

M. Fontecilla : Merci, Mme la Présidente...

La Présidente (Mme Chassé) : C'est toujours un défi de dire le nom de votre comté, hein?

M. Fontecilla : Laurier-Dorion.

La Présidente (Mme Chassé) : Laurier-Dorion, c'est bon.

Motion proposant d'entendre l'Association canadienne
des conseillers professionnels en immigration

M. Fontecilla : Voilà. Donc, je voudrais déposer une motion préliminaire pour :

«Qu'en vertu de l'article 244 de nos règles de procédure, la Commission des relations avec les citoyens tienne, avant d'entreprendre l'étude détaillée du projet de loi n° 9, Loi visant à accroître la prospérité socio-économique du Québec et à répondre adéquatement aux besoins du marché du travail par une intégration réussie des personnes immigrantes — ce n'est pas moi qui ai choisi le titre, hein? — des consultations particulières et qu'à cette fin, elle entende l'Association canadienne des conseillers professionnels en immigration.»

Est-ce que je peux prendre deux minutes pour expliquer? Donc, effectivement, l'Association canadienne des conseillers professionnels en immigration...

La Présidente (Mme Chassé) : ...M. le député de Laurier-Dorion. Je vais suspendre les travaux. Je vais vous demander une copie écrite de la motion que vous avez en main pour qu'on puisse la distribuer aux membres.

Alors, je suspends les travaux.

(Suspension de la séance à 20 h 10)

(Reprise à 20 h 16)

La Présidente (Mme Chassé) : Alors, on reprend les discussions, les travaux.

La motion est recevable, et je vais permettre le débat. Avant de vous inviter à la relire, puisque tout le monde l'a en main, je veux vous rappeler un peu les règles du débat. C'est 30 minutes pour l'auteur. À ce moment-là, vous relirez votre motion que vous avez déposée. Et les représentants des chefs des groupes parlementaires aussi, un par groupe aura 30 minutes, ainsi que 10 minutes pour tout autre intervenant. Ça va? C'est une seule intervention pour chacun et aucun droit de réplique. C'est clair? Alors, le député de Laurier-Dorion, ça va? À l'ordre, s'il vous plaît! Le député de Laurier-Dorion, je vous invite à débuter vos remarques.

M. Andrés Fontecilla

M. Fontecilla : Oui, merci, Mme la Présidente. Je voudrais rassurer les membres de la commission, je ne prendrai sûrement pas les 30 minutes et surtout rassurer le ministre que ça va prendre moins longtemps. Donc, je relis, vous l'avez devant vous :

«Qu'en vertu de l'article 244 de nos règles de procédure, la Commission des relations avec les citoyens tienne, avant d'entreprendre l'étude détaillée du projet de loi n° 9, Loi visant à accroître la prospérité socio-économique du Québec et à répondre adéquatement aux besoins du marché du travail par une intégration réussie des personnes immigrantes, des consultations particulières, et qu'à cette fin, elle entende l'Association canadienne des conseillers professionnels en immigration.»

Donc, cette motion est motivée par le fait que ce mémoire a été présenté, il se trouve dans le site Greffier, les membres de la commission peuvent y avoir accès. Il n'a pas été retenu dans les négociations pour faire partie du groupe qui a fait une présentation. Et on sait que peut-être ce n'est pas tous les membres de la commission qui ont eu la chance de parcourir l'ensemble des mémoires qui ont été déposés, sauf que celle-ci... et, à la lecture de celle-ci, je me suis rendu compte qu'elle avait un intérêt tout à fait particulier, en particulier pour M. le ministre, parce que c'est un mémoire qui rentre un peu plus dans le détail du système Arrima et de la... comment dire, de la mécanique de sélection des personnes immigrantes, et pourrait donner, d'un côté... mieux montrer comment fonctionne le système dans le détail, et d'autre part, trouver des possibilités d'amendement ou des pistes de sortie pour, entre autres, régler ne serait-ce que quelques dossiers dans le grand dossier des 18 000 dossiers. Et donc ils proposent, ils avancent des suggestions qui pourraient être d'une grande utilité et qui serviraient au ministre, au gouvernement, à éviter des drames humains qui font les manchettes régulièrement dans les journaux.

Donc, pour l'aspect pratique et constructif de ce mémoire-là, qui, soit dit en passant, appuie le système Arrima, malgré que je manifeste quelques préoccupations et quelques désaccords, mais il se prononce pour le système Arrima, ça pourrait être d'un grand intérêt pour les membres de la commission d'entendre ces personnes-là. Voilà.

• (20 h 20) •

La Présidente (Mme Chassé) : Merci, M. le député de Laurier-Dorion. J'invite le ministre à faire des remarques sur la motion qui a été déposée. Alors, j'invite la leader de l'opposition... Est-ce que quelqu'un désire faire des remarques sur la motion qui est déposée? M. le député de Nelligan.

M. Monsef Derraji

M. Derraji : Oui, merci, Mme la Présidente. Merci, Mme la Présidente. J'ai juste quelques points d'ajout par rapport à la motion préliminaire du collègue de Laurier-Dorion, pour ne pas nommer son nom. Je pense que la motion préliminaire va dans le sens même de ce qu'on disait depuis le début de nos travaux, et c'est en parfaite adéquation par rapport à ce qui a été dit, notamment par rapport aux partenaires du marché du travail. Et, si je reprends la phrase «et à répondre adéquatement aux besoins du marché du travail», je pense qu'on s'entend que le ministre doit aimer cette phrase, parce que, si on est là aujourd'hui en discussion par rapport à ce projet de loi n° 9, c'est exactement pour répondre adéquatement aux besoins du marché du travail.

Et l'autre point qui est très important, c'est l'intégration réussie des personnes immigrantes. Donc, on le voit, les statistiques le démontrent, depuis les 10 dernières années, le Québec a quand même constaté une très bonne évolution dans l'intégration des personnes immigrantes. Et, par rapport à ce point, l'Association canadienne des conseillers professionnels en immigration va amplement, je dirais, nous donner d'autres arguments et des pistes par rapport à la réussite de l'intégration, mais aussi à l'adéquation aux besoins du marché du travail.

L'autre point que je note, l'Association canadienne des conseillers professionnels en immigration, de par leur mission de jouer un rôle très important dans l'immigration, c'est que, dans cet espace international de recherche de talent, ces conseillers professionnels en immigration ont, en quelque sorte, l'heure juste par rapport au flux migratoire. Et on sait que nos besoins... le premier besoin, à part l'aspect technique et à part l'aspect professionnel de cette personne qu'on aimerait ramener au Québec, c'est aussi le fait français. Et, dans un bassin francophone, l'importance d'avoir le pouls de ce qui se passe... encore une fois, on n'est pas les seuls à être sur le marché de l'immigration. Et donc, dans ce sens, moi, j'appuie la motion préliminaire du collègue de Laurier-Dorion, surtout dans le contexte où nous aimerions, au-delà d'assurer les consultations particulières, mais aussi avoir l'heure juste par rapport à l'intégration réussie.

Donc, le projet de loi n° 9, de par sa mission et son titre, vise à assurer cette intégration, vise à assurer cette adéquation entre le marché de l'emploi, les régions ainsi que les bassins d'immigration. Je pense que l'Association canadienne des conseillers professionnels d'immigration est la meilleure pour jouer ce rôle et nous éclairer dans la poursuite des travaux du projet de loi n° 9. Merci, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Chassé) : Ça me fait plaisir. Je vous remercie, M. le député de Nelligan, pour vos remarques sur la motion préliminaire qui a été déposée par le député de Laurier-Dorion. Y a-t-il d'autres personnes qui désirent... M. le ministre, vous désirez vous prononcer sur la motion préliminaire?

M. Simon Jolin-Barrette

M. Jolin-Barrette : Oui. Bien, écoutez, Mme la Présidente...

La Présidente (Mme Chassé) : Vous avez 30 minutes.

M. Jolin-Barrette : ...je trouve ça tout de même particulier que le député de Dorion dépose une motion préliminaire, c'est son droit. Cela étant dit, on a tenu des auditions particulières qui avaient été négociées entre les différents groupes parlementaires, et généralement, lorsque les groupes parlementaires donnent leur accord à l'Assemblée nationale pour qu'on tienne des consultations particulières, on s'entend sur les groupes, on s'entend sur la durée. Alors, je comprends que ce qui avait été convenu entre les groupes parlementaires, ça ne satisfait plus le député de Laurier-Dorion. Donc, je comprends que, pour la suite des choses et pour la conduite de nos travaux, lorsqu'on négocie avec le leader du deuxième groupe d'opposition officielle, il ne faut pas prendre son engagement pour avéré dans le cadre des ententes que nous avons avec le leader du deuxième groupe d'opposition.

Juste pour des fins, là, de compréhension, les gens qui ont été entendus dans le cadre de la présente commission, il y a eu Accueil liaison pour arrivants, Association québécoise des avocats et avocates en droit d'immigration, Barreau du Québec, Chambre de commerce du Montréal métropolitain, Chambre de commerce et d'industrie de Québec, Commission des droits de la personne et droits de la jeunesse, Commission des partenaires du marché du travail, Conseil du patronat du Québec, Fédération canadienne de l'entreprise indépendante, Fédération des chambres de commerce du Québec, Fédération québécoise des municipalités, Pierre Fortin, Stéphane Handfield, La Maisonnée, Manufacturiers exportateurs du Québec, Montréal International, Protecteur du citoyen, Québec International, Table de concertation des organismes au service des personnes réfugiées et immigrantes, ville de Montréal. Ça, c'est juste les personnes qu'on a entendues.

En plus, dans le cadre des négociations, on a décidé de faire des auditions particulières d'une heure pour accommoder Québec solidaire, pour qu'elle ait davantage de temps de parole, la formation politique. Et, comme le député de Laurier-Dorion l'a dit, on a entendu également... en fait, l'Association canadienne des conseillers professionnels en immigration a déposé un mémoire au bénéfice de la commission parlementaire, comme l'Association du Barreau canadien, le Conseil interprofessionnel, la Fédération des cégeps, HEC Montréal, Yves Laberge, Syndicat de la fonction publique et parapublique du Québec, Syndicat des professeurs de l'État du Québec, Union des municipalités du Québec.

Alors, je comprends que le député de Laurier-Dorion veut entendre encore des gens, mais je pense qu'on avait eu une entente, on s'était engagés. Donc, la prochaine fois, on comprend le message de Québec solidaire, lorsqu'il y a une entente, ça ne tient pas.

La Présidente (Mme Chassé) : Merci, M. le ministre. Y a-t-il d'autres intervenants sur la motion préliminaire qui a été déposée par le député de Laurier-Dorion? Est-ce que la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne...

Des voix : ...

Mise aux voix

La Présidente (Mme Chassé) : Parfait. Et voilà, c'est... Parfait. Merci. Alors, de ce que je comprends, il n'y a pas d'autres interventions. Il est l'heure de passer aux voix. Est-ce que la motion est adoptée?

Une voix : Non.

La Présidente (Mme Chassé) : La motion est rejetée. Je prends en considération... Nous passons donc maintenant à l'étude...

Des voix : ...

La Présidente (Mme Chassé) : Est-ce que vous désirez une pause? Ça va? On passe donc à la prochaine étape.

Mme Anglade : Mais le vote...

La Présidente (Mme Chassé) : Le vote vient de se passer. J'ai demandé si la motion était approuvée, elle a été rejetée.

Mme Anglade : Alors, on peut passer à une autre motion?

La Présidente (Mme Chassé) : Nous pouvons passer à une autre motion. Est-ce qu'une autre motion a à être déposée? Alors, j'invite la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne à déposer sa motion.

Motion proposant d'entendre l'Association du
Barreau canadien, division Québec

Mme Anglade : Alors, j'ai une motion, également, préliminaire.

Alors : «...conformément à l'article 244 [du règlement de l'Assemblée nationale], je fais motion afin que la Commission des relations avec les citoyens tienne, avant d'entreprendre l'étude détaillée du projet de loi n° 9, Loi visant à accroître la prospérité socio-économique du Québec et à répondre adéquatement aux besoins du marché du travail par une intégration réussie des personnes immigrantes, des consultations particulières et qu'à cette fin, [on] entende l'Association du Barreau canadien, division du Québec.»

Alors, je ne sais pas si vous voulez que je fasse les photocopies nécessaires.

La Présidente (Mme Chassé) : Oui, c'est ça.

Je vais suspendre les travaux, le temps d'analyser la motion qui vient d'être déposée.

(Suspension de la séance à 20 h 28)

(Reprise à 20 h 30)

La Présidente (Mme Chassé) : On est prêts à reprendre les travaux. La motion préliminaire qui a été déposée par la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne est recevable. Alors, je ne répéterai pas les règles pour le débat, je vais permettre le débat. Je vous invite, Mme la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne, à nous relire la motion préliminaire et à faire vos remarques.

Mme Dominique Anglade

Mme Anglade : Très bien. Merci, Mme la Présidente. Alors, je relis la motion préliminaire :

«...conformément à l'article 244 [du règlement de l'Assemblée nationale], je fais motion afin que la Commission des relations avec les citoyens tienne, avant d'entreprendre l'étude détaillée du projet de loi n° 9, Loi visant à accroître la prospérité socio-économique du Québec et à répondre adéquatement aux besoins du marché du travail par une intégration réussie des personnes immigrantes, des consultations particulières et qu'à cette fin, [...]entende l'Association du Barreau canadien, division du Québec.» C'est bon.

La Présidente (Mme Chassé) : Est-ce que vous poursuivez avec vos remarques?

Mme Anglade : Je poursuis avec mes remarques.

La Présidente (Mme Chassé) : Très bien.

Mme Anglade : Alors, nous avons reçu un certain nombre de personnes. D'ailleurs, les groupes qui ont été reçus ont été énumérés par le ministre tout à l'heure. Cependant, tous les groupes n'ont pas pu être entendus. Et, dès le départ, nous avons mentionné que nous souhaitions qu'il y ait davantage de groupes qui soient entendus, notamment ceux qui ont particulièrement exprimé le besoin d'être présents et de faire valoir leurs perspectives. Nous pensons dans ce cas-ci qu'étant donné que le 18 février dernier l'Association du Barreau canadien avait demandé à être entendue en commission, c'est pertinent.

La raison pour laquelle nous pensons que c'est pertinent, c'est, lorsque vous prenez connaissance des éléments qui sont présentés, on constate qu'il y a des éléments qui n'ont pas réellement été discutés lors des échanges que nous avons eus ici — d'ailleurs, c'était dans cette salle. Notamment, tout l'aspect sur les étudiants internationaux a été très peu couvert. Ils ont une perspective intéressante à savoir de quelle manière s'ils vont être touchés particulièrement.

Deuxièmement, il y a une distinction importante qu'ils amènent dans leur rapport, qui a été... dont on a peu fait état et, je pense, qui témoigne jusqu'à un certain point du manque de profondeur qu'on a eu dans l'analyse des dossiers, notamment des 18 000 dossiers. Mais deux éléments : le statut d'immigration valide sur le territoire et les demandeurs extérieurs. Ce sont deux éléments qui sont spécifiques, et je pense que l'ensemble des gens qui participent à la commission gagneraient à mieux comprendre ces éléments-là.

Ensuite, ils ont des propositions concrètes pour l'accélération du processus des demandes. Ils ont des mesures qu'ils proposent, qu'ils veulent mettre de l'avant, qu'on n'a pas entendues avec d'autres intervenants.

Finalement, je vous dirais qu'il y a un autre élément qu'ils amènent et qui fait en sorte qu'on devrait les considérer, c'est que l'absence de prévisibilité pour les travailleurs temporaires est importante. Et ils viennent expliquer et détailler dans quelle mesure ce manque de prévisibilité là a un réel impact sur les individus mais également sur l'ensemble du processus.

Alors, pour toutes ces raisons-là, j'estime que nous devrions recevoir ces personnes en commission.

Je me permets d'ajouter, Mme la Présidente, que, dans les règlements, il est clairement stipulé, donc, article 244, qu'avant d'entreprendre l'étude détaillée la commission peut décider de tenir des consultations particulières dans le cadre de son mandat. Donc, il relève de la commission de décider si, oui ou non, on décide d'aller de l'avant. Mon collègue de Laurier-Dorion a fait une proposition en ce sens. Le ministre de l'Immigration a balayé la demande du revers de la main. Mais cette mesure-là, elle existe. Elle existe parce qu'il y a des besoins et que, par rapport à notre système, en démocratie, on a le droit d'utiliser ce type de règlement là justement pour avoir une discussion éclairée.

On ne demande pas, ici... je n'ai pas 25 motions préliminaires. On pense que celui-là... cette demande-là est plus spécifique et répond vraiment à un besoin particulier qui éclairerait l'ensemble des membres de la commission de manière pertinente et qui nous aiderait dans les échanges que nous allons avoir par la suite. C'est la raison pour laquelle nous formions cette demande.

Merci, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Chassé) : Merci, Mme la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne. Y a-t-il d'autres interventions sur la motion préliminaire? Oui. M. le député de Nelligan.

M. Monsef Derraji

M. Derraji : Merci, Mme la Présidente. Au fait, je vais ajouter d'autres éléments. Et je pense comme ma collègue la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne — c'est ça? Hein?

Une voix : ...

M. Derraji : Oui. Et sérieusement, quand je lis l'article 9 : Cette loi est modifiée par l'insertion, après l'article 21, du suivant :

«21.1. Lorsque le ministre sélectionne un ressortissant étranger, il peut lui imposer des conditions qui affectent la résidence permanente conférée en vertu de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés (Lois du Canada, 2001, chapitre 27) afin d'assurer, notamment, la protection de la santé publique, la satisfaction des besoins régionaux ou sectoriels de main-d'oeuvre, la création régionale ou sectorielle d'entreprises ou le financement de celles-ci, ou l'intégration linguistique, sociale ou économique du ressortissant étranger.

«Le gouvernement détermine, par règlement, les conditions que peut imposer le ministre ainsi que les cas où celui-ci peut les imposer, les modifier, les lever ou les annuler.»

Sérieusement, quand je lis cet article, je pense que nous avons tous besoin d'éclaircissements de la part de l'Association du Barreau canadien, division du Québec.

Et la demande, elle est légitime, elle est louable, surtout dans un esprit de collaboration. Encore une fois, c'est une demande de bonne volonté. Nous demandons à entendre l'Association du Barreau canadien pour nous éclairer. Il y a une volonté de conditionner la résidence permanente de la part du ministre. Il y a des règlements ou un ajout de conditionner ça, l'arrimage en région, au niveau de l'installation des immigrants reçus. Donc, je pense que la moindre des choses, c'est entendre l'Association du Barreau canadien, qui, sûrement, ils vont nous donner des arguments, un, sur la faisabilité. Et je peux assurer le ministre que ça va nous économiser probablement énormément de temps.

Et, s'il veut aller de l'avant avec le projet, et je sais que c'est son souhait, et mon souhait, et le souhait de nos collègues, je pense que c'est plus sage et c'est plus bénéfique pour l'ensemble des membres de notre commission d'entendre l'Association du Barreau canadien nous éclairer par rapport à certains points. Parce que nous avons encore des questions par rapport à l'applicabilité de cet article.

Et j'espère que... j'en suis sûr, que le ministre a ses réponses, mais j'aimerais bien, dans un esprit de neutralité aussi, écouter et entendre un autre groupe qui, probablement, va nous donner des pistes et va nous faire gagner, nous, à nous tous et aussi aux membres de la commission, énormément de temps. Donc, j'espère que la demande sera considérée afin d'écouter et d'inviter l'Association du Barreau canadien. Merci, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Chassé) : Merci, M. le député de Nelligan. Y a-t-il d'autres membres qui désirent... Oui, M. le député de Laurier-Dorion, je vous invite à faire vos remarques.

M. Andrés Fontecilla

M. Fontecilla : Merci, Mme la Présidente. Donc, autant pour le Barreau canadien que pour l'Association canadienne des conseillers professionnels en immigration, il s'agit de personnes, des acteurs qui travaillent quotidiennement avec la Loi sur l'immigration, la loi de l'immigration, autant canadienne que québécoise. Ils sont très au fait de la mécanique de ces opérations-là. Ils pourraient nous éclairer grandement, là, ça a été dit à plusieurs reprises. Ceci dit, il peut arriver qu'en cours de commission... il est très envisageable qu'on désire, en tant que commission, en tant que membres de la commission, étudier de nouvelles avenues, entendre des personnes qui pourraient éclairer nos travaux.

Donc, je vous rappelle que les négociations qui mènent à la définition des groupes qui vont présenter verbalement leurs mémoires en commission parlementaire, c'est fait en amont du travail de la commission, au tout début. Il y a beaucoup d'eau qui peut couler sous le pont, là, en cours de commission. En attendant, des choses peuvent changer. Donc, la commission est... ça a été soulevé, les membres de la commission ont parfaitement le droit de vouloir, de proposer... et puis, évidemment, il y a un jeu de majorité-minorité qui s'opère, mais de vouloir ramener des points de vue nouveaux.

Nous ne sommes pas... Je pense que la négociation entre les bureaux des leaders parlementaires, ce n'est pas un traité international qui est immuable. Vous n'avez pas négocié le traité sur le contrôle des armes nucléaires de l'Iran, là, vous avez juste négocié, hein, une liste de groupes à entendre. Donc, il me semble qu'après avoir entendu tout plein d'opinions il est parfaitement légitime que les membres de la commission puissent vouloir entendre de nouveaux points de vue qui vont éclairer grandement notre travail et, surtout, faire une meilleure législation pour le Québec dans l'avenir.

La Présidente (Mme Chassé) : Merci, M. le député de Laurier-Dorion. Y a-t-il d'autres membres qui désirent faire des remarques? La députée de Fabre... Ah! M. le ministre.

Une voix : ...allez-y.

La Présidente (Mme Chassé) : La députée de Fabre s'invite à faire des remarques sur la motion préliminaire.

Mme Monique Sauvé

Mme Sauvé : Oui. Merci, Mme la Présidente. Vous savez, je n'en suis pas à ma première étude détaillée, et à chaque fois je vous dirais qu'il y a un élément qui est gagnant pour la suite des choses et pour une véritable collaboration, et c'est l'éclairage qu'on reçoit lors des consultations, et c'est l'éclairage représentatif de l'ensemble des points de vue. Et, à chaque fois, à chaque fois, ça fait avancer le débat parce qu'on a tous les angles, on a les contreparties, on a les points qui s'opposent.

Et moi, pour moi, j'ai beaucoup de difficulté à imaginer qu'on puisse mettre de côté, exclure une telle motion qui nous permet d'avoir un angle fondamental qui est celui du point de vue du Barreau canadien. Alors, honnêtement, en termes de représentativité, là — parce que, pour moi, c'est un élément majeur — quand on n'a pas un acteur tel que celui-là au coeur d'un débat aussi sensible, il me semble qu'on perd beaucoup dans la suite des choses et pour la véritable collaboration qu'on doit avoir. Moi, il me semble que cet angle-là, comme législateur, on a besoin de les entendre. Alors, voilà.

• (20 h 40) •

La Présidente (Mme Chassé) : Merci à vous, Mme la députée de Fabre. M. le ministre, est-ce que vous décidez d'ajouter des remarques?

M. Simon Jolin-Barrette

M. Jolin-Barrette : Bien oui, Mme la Présidente. Écoutez, l'Association du Barreau canadien, division Québec, a déposé un mémoire que tous les membres de la commission peuvent lire. Et d'ailleurs, en termes d'opinion juridique, si on peut dire, là, on a eu en audition particulière l'Association québécoise des avocats et avocates en droit de l'immigration. Je pense, c'est pas mal les plus spécialisés, hein, selon les propos que les collègues avaient. On a eu le Barreau du Québec qui est venu en commission parlementaire aussi, vous avez pu les questionner aussi en audition particulière aussi. Alors, la députée de Fabre va pouvoir aussi retrouver leur mémoire sur le site Web. Qui on a eu d'autre? Ah oui! la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse aussi, qui ont déposé un mémoire fort volumineux, je me souviens, une trentaine de pages aussi. Alors, ça fait trois organisations qui ont des membres du Barreau. Aussi... ah oui! Me Stéphane Handfield, qui est venu à titre personnel, aussi, témoigner, qui est connu et qu'on voit souvent commenter les questions dans les médias.

Alors, ça fait déjà quatre personnes qui sont issues du domaine juridique pour éclairer la commission. Je pense qu'on a fait le tour. Et, comme le dit la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne, effectivement, c'est prévu dans le règlement, à l'article 244, et c'est utile d'avoir un règlement qu'on peut se servir. Alors, on voit que le député de Laurier-Dorion se sert du règlement aussi pour déposer une motion préliminaire. Puis ils sont contents, à Québec solidaire, de pouvoir avoir un règlement sur lequel s'établir. Ça devrait être la même chose pour le quorum. C'est prévu par règlement. Alors, voyez-vous, le règlement est utile quand on veut, hein?

Une voix : ...

La Présidente (Mme Chassé) : Oui, monsieur...

Une voix : ...

La Présidente (Mme Chassé) : Non, je crois... Juste un moment...

Une voix : ...

La Présidente (Mme Chassé) : Exactement. Merci. Alors, ça met fin à vos remarques, M. le ministre. Je vous remercie de garder vos propos sur le sujet, et c'est une seule intervention par membre. Y a-t-il d'autres membres qui décident de nous faire part de leurs remarques sur la motion préliminaire? Oui, la députée de Bourassa-Sauvé, je vous écoute.

Mme Paule Robitaille

Mme Robitaille : J'ai lu le mémoire du Barreau canadien. J'aurais eu plusieurs questions à leur poser. Je trouve qu'ils avancent des pistes de solution. Ça aurait été très, très, très utile de les recevoir, et je pense que ça vaudrait la peine. C'est un débat important. C'est des questions cruciales. On va peut-être faire une collision frontale avec Ottawa là-dessus. Il y a des choses qui se sont dites. On aurait pu leur poser des questions et avoir des réponses. Et je pense que c'est nécessaire. On peut le faire. Et, considérant l'importance de ce projet de loi, on aurait tout avantage à les entendre, à les avoir ici avec nous. Merci.

La Présidente (Mme Chassé) : Merci, Mme la députée de Bourassa-Sauvé. Y a-t-il d'autres membres qui décident de nous faire part de leurs remarques?

Mise aux voix

Alors, la motion préliminaire déposée par la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne est mise aux voix. Il y a une demande de vote. Donc un vote par appel nominal. Excellent. Alors, j'ai besoin de votre aide, Mme la secrétaire, le vote par appel nominal, parce que je ne pense pas que moi, je vais me mettre dans le milieu en train de nommer les noms de chacun, là, tu sais?

La Secrétaire : Mme Anglade (Saint-Henri—Sainte-Anne)?

Mme Anglade : Pour.

La Secrétaire : M. Derraji (Nelligan)?

M. Derraji : Pour.

La Secrétaire : Mme Robitaille (Bourassa-Sauvé)?

Mme Robitaille : Pour.

La Secrétaire : Mme Sauvé (Fabre)?

Mme Sauvé : Pour.

La Secrétaire : M. Jolin-Barrette (Borduas)?

M. Jolin-Barrette : Contre.

La Secrétaire : M. Skeete (Sainte-Rose)?

M. Skeete : Contre.

La Secrétaire : Mme Lachance (Bellechasse)?

Mme Lachance : Contre.

La Secrétaire : M. Jacques (Mégantic)?

M. Jacques : Contre.

La Secrétaire : Mme Lecours (Les Plaines)?

Mme Lecours (Les Plaines) : Contre.

La Secrétaire : M. Poulin (Beauce-Sud)?

M. Poulin : Contre.

La Secrétaire : M. Lévesque (Chauveau)?

M. Lévesque (Chauveau) : Contre.

La Secrétaire : M. Fontecilla (Laurier-Dorion)?

M. Fontecilla : Pour.

La Secrétaire : Mme Perry Mélançon (Gaspé)?

Mme Perry Mélançon : Pour.

La Secrétaire : Mme Chassé (Châteauguay)?

La Présidente (Mme Chassé) : Je m'abstiens. Alors, Mme la secrétaire, est-ce que vous pouvez me donner le constat du vote?

La Secrétaire : La motion est rejetée.

La Présidente (Mme Chassé) : La motion est rejetée. Alors, s'il n'y a pas d'autre motion préliminaire, nous allons immédiatement débuter l'étude article par article.

Une voix : ...

La Présidente (Mme Chassé) : Ah!

Mme Anglade : J'ai juste un commentaire à faire. Alors, à moins... Je veux juste... Ça va être rapide, Mme la Présidente...

La Présidente (Mme Chassé) : Je vous écoute, Mme la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne.

Mme Anglade : ...je vous rassure. Alors, avant le début de l'étude détaillée, j'aimerais simplement dire qu'à moins d'indication contraire et conformément à l'article 245 on demande à ce que le projet de loi soit étudié article par article, alinéa par alinéa et paragraphe par paragraphe, tout simplement.

La Présidente (Mme Chassé) : C'est noté. Donc, je suspends... C'est une motion... Non, ce n'est pas une motion préliminaire.

Une voix : ...

La Présidente (Mme Chassé) : O.K. Parfait. Donc, on continue. Ça clôt donc la section des motions préliminaires. Très bien. Merci.

Étude détaillée

Nous entrons maintenant dans l'étude détaillée. Et je prends en considération l'article 1 du projet de loi. M. le ministre, la parole est à vous. Je vous laisse donc d'abord lire puis expliquer l'article 1.

M. Jolin-Barrette : Merci, Mme la Présidente. Article 1. L'article 2 de la Loi sur le ministère de l'Immigration, de la Diversité et de l'Inclusion (chapitre M-16.1) est modifié par l'insertion, dans le premier alinéa et après «valeurs démocratiques», de «et des valeurs québécoises exprimées par la Charte des droits et libertés de la personne (chapitre C-12)».

Les notes explicatives. Cet article modifie l'article 2 de la Loi sur le ministère de l'Immigration, de la Diversité et de l'Inclusion afin de prévoir que la pleine participation des personnes immigrantes est aussi faite dans le respect des valeurs québécoises exprimées par la Charte des droits et libertés de la personne.

Une voix : ...

M. Jolin-Barrette : On peut voter.

La Présidente (Mme Chassé) : O.K. M. le ministre, juste un moment, là. Donnez-moi le temps de prendre le rythme de cette nouvelle fonction pour moi. Je vais y arriver, soyez rassurés, je vais y arriver.

(Consultation)

La Présidente (Mme Chassé) : O.K. Je suspends un instant. Merci.

(Suspension de la séance à 20 h 48)

(Reprise à 20 h 49)

La Présidente (Mme Chassé) : Merci. On reprend les travaux. Merci à tous pour votre patience.

Donc, je comprends que vous venez de lire et de fournir vos explications sur l'article 1, M. le ministre. Nous sommes maintenant rendus à l'étape où des intervenants peuvent commenter cet article-là. Je rappelle les règles pour tout le monde, puis après ce sera fait : 20 minutes par intervenant pour chaque article ou, si un membre en fait la demande, 20 minutes par paragraphe ou alinéa en une ou plusieurs interventions.

Est-ce qu'il y a des intervenants qui désirent faire des commentaires sur l'article 1? La députée de Saint-Henri—Sainte-Anne. Je vous invite à faire vos remarques.

• (20 h 50) •

Mme Anglade : Parfait. Alors, je vais débuter. Dans le texte qui est proposé par le ministre, on introduit la notion de... au-delà des valeurs démocratiques, des valeurs québécoises exprimées par la Charte des droits et libertés de la personne. Alors, lorsque je lis «des valeurs québécoises exprimées par la Charte des droits et libertés de la personne», j'aimerais juste comprendre l'intention du ministre lorsqu'il parle des valeurs québécoises. De quoi s'agit-il exactement?

La Présidente (Mme Chassé) : Alors, M. le ministre, je vous invite à répondre.

M. Jolin-Barrette : Bien, vous savez, il y a plusieurs valeurs dans la Charte des droits et libertés de la personne. Pour les fins de la discussion, je pense qu'on pourrait l'appeler la charte québécoise parce que, souvent, il y a une distinction entre... enfin, les gens font une distinction entre ce qu'on appelle la charte des droits et libertés, qui est la charte canadienne, versus la Charte des droits et libertés de la personne, qui est la charte québécoise. Donc, la charte en question, dont on parle présentement, c'est la charte québécoise, qui est quasi constitutionnelle, versus la Charte canadienne, qui est dans la Constitution canadienne.

Alors, au fil des années, la charte québécoise a évolué. Donc, elle a été déposée en 1975 par l'ancien ministre de la Justice Jérôme Choquette et elle a été bonifiée au cours des années, notamment, de droits, d'articles qui font en sorte de représenter ce que sont les valeurs québécoises, notamment, de droits et libertés, entre autres. Alors, dans la charte, c'est composé notamment de droits, de libertés, mais aussi de valeurs québécoises. Et je donne un exemple. Sous un précédent gouvernement, on a inséré, dans les considérants, au début, dans le préambule de la charte québécoise, l'égalité entre les hommes et les femmes. Et donc ça, je pense que, dans notre société, ça constitue une valeur québécoise.

Alors, lorsqu'on réfère aux valeurs québécoises, on réfère notamment à l'égalité entre les femmes et les hommes, qui est un des principes, je crois, avérés dans notre société comme valeur fondamentale de la société québécoise, comme valeur québécoise inscrite dans la charte.

La Présidente (Mme Chassé) : Merci, M. le ministre. Mme la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne.

Mme Anglade : Alors, évidemment qu'à mon sens l'égalité hommes-femmes fait partie des valeurs qui nous régissent au Québec. Cela dit, le ministre dit : Il y a beaucoup de valeurs qui émanent de la charte. J'aimerais savoir : Dans la charte, exactement, à quelles valeurs fait-il référence? Parce que moi, j'ai la Charte des droits et libertés de la personne en avant de moi. Où parlons-nous des valeurs spécifiques à l'intérieur de la charte? À quel moment dans la charte est-ce qu'il lui fait référence?

La Présidente (Mme Chassé) : M. le ministre, oui.

M. Jolin-Barrette : Bien, notamment, à l'article 9.1, on parle de valeurs démocratiques et donc on traite notamment de la question des valeurs, questions de principe là. Mais l'ensemble de la charte est composé de droits et de libertés, et ces droits et libertés là, notamment, ça constitue des valeurs québécoises. Donc, on fait référence à la somme de toutes les questions qui sont dans la charte québécoise lorsqu'on parle de valeurs québécoises. Parce que ce n'est pas vrai que c'est uniquement des valeurs démocratiques.

Parce que prenez l'égalité entre les femmes et les hommes. Est-ce que c'est nécessairement une valeur démocratique? Pas nécessairement parce que vous pouvez avoir la démocratie sans nécessairement avoir ce principe-là, cette valeur-là de la société québécoise. Alors, pour le législateur, pour nous, c'est très clair que les valeurs québécoises inscrites dans la charte québécoise comprennent notamment l'égalité entre les femmes et les hommes.

Mme Anglade : Mais en aucun cas, dans la charte... Excusez-moi.

La Présidente (Mme Chassé) : Mme la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne, allez-y.

Mme Anglade : Mais en aucun cas, dans la charte, est-ce qu'il est fait mention des valeurs québécoises. Vous le définissez, vous, comme... tu sais, vous avez dit...

M. Jolin-Barrette : ...comme législateur.

Mme Anglade : ...comme législateur. Puis là je vais m'adresser à Mme la Présidente. Le ministre les définit : valeurs québécoises, mais elles ne sont pas définies. Il fait référence à la charte, mais elles ne sont définies nulle part à l'intérieur de la charte. C'est pour ça que je pense qu'il est très pertinent de définir de quoi il s'agit exactement. La seule valeur dont j'ai vraiment entendu parler jusqu'à présent, c'est celle de l'égalité hommes-femmes. Il y a tout un tas de choses qu'on pourrait sortir qui pourraient être des valeurs et qui pourraient ne pas être des valeurs. Alors, je pense qu'on a besoin de comprendre l'optique du législateur là-dedans, l'optique du ministre de l'Immigration par rapport à ça.

Parce qu'à part l'égalité entre les hommes et les femmes j'aimerais ça savoir de quoi il s'agit exactement. Parce qu'avant d'inscrire «valeurs québécoises» à l'intérieur d'une notion... Puis ce n'est pas seulement qu'on l'inscrit au premier article. On l'inscrit à plusieurs niveaux dans les documents. Et j'ai bien entendu le ministre quand il dit : Les valeurs démocratiques font notamment partie de ce qu'il considère, dans sa tête, être les valeurs québécoises, ce à quoi, tu sais, je peux consentir jusqu'à un certain point. Mais quelles sont les autres valeurs auxquelles il fait référence? Et, si le mot «valeurs» est dit, notamment, à l'article 9.1, c'est le seul endroit où on fait référence aux valeurs. Dans toute la charte, le seul endroit où on va trouver le mot «valeurs», c'est à l'article 9.1. Alors, à quelles valeurs spécifiquement fait-il référence?

La Présidente (Mme Chassé) : Merci. M. le ministre.

M. Jolin-Barrette : Bien, en fait, il y en a plusieurs dans l'ensemble du texte, là. Ça fait référence au texte aussi de la charte québécoise des droits et libertés. Mais ce qui est intéressant, Mme la Présidente, c'est que, lorsqu'elle me dit : Ah! les valeurs québécoises... lorsque la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne, pardon, dit : Ce n'est pas défini, les valeurs québécoises, bien, ma prédécesseure, la députée de Notre-Dame-de-Grâce, a inscrit les valeurs démocratiques, hein, dans la Loi sur l'immigration. Est-ce qu'elle définit les valeurs démocratiques? Est-ce que ces valeurs démocratiques là, sont définies? Non. Parce qu'on sait tous ce que sont des valeurs démocratiques : le droit de vote... Ce sont des valeurs qui existent, les valeurs d'une démocratie.

Mais, si vous voulez aller dans une énumération au niveau des valeurs québécoises, oui, ça comprend la démocratie, ça comprendra, je l'espère, prochainement, tout dépendant de votre volonté, l'apport du Parti libéral, la laïcité aussi. Parce que vous n'êtes pas sans savoir que, dans le cadre du projet de loi n° 21, on vient modifier le préambule de la charte québécoise et qu'on vient indiquer que la laïcité, c'est une valeur fondamentale de la société québécoise.

Une voix : ...

M. Jolin-Barrette : Bien, en fait, de notre côté, du côté du gouvernement, on pense que c'est une valeur importante, c'est une valeur québécoise, la laïcité. Elle apparaîtra prochainement, je le souhaite, si le Parlement en décide ainsi, dans le cadre du texte. Alors, ça, c'est un exemple concret. Et est-ce que la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne serait d'accord avec moi pour dire que la laïcité devrait être une valeur québécoise inscrite dans la charte?

La Présidente (Mme Chassé) : Merci, M. le ministre. Mme la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne.

Mme Anglade : Oui, nous sommes dans un État laïque, hein, et ça, on en est bien conscients. Puis vous allez faire le débat... Nous sommes dans un État laïque, je veux dire... À moins qu'on me dise qu'on ne fonctionne pas... ça ne fonctionne pas de manière laïque au Québec. Je pense qu'on est dans un État laïque.

M. Jolin-Barrette : Pas juridiquement. Pas juridiquement.

Mme Anglade : Maintenant... Est-ce que je vais poursuivre?

La Présidente (Mme Chassé) : On va continuer à s'adresser à moi. Merci.

Mme Anglade : Merci, Mme la Présidente. Cela dit, je vais revenir à la question des valeurs québécoises. Parce que le ministre a dit : Bien, les valeurs québécoises, il y a les valeurs démocratiques; les valeurs démocratiques sont incluses dans les valeurs québécoises. Il y a la laïcité qu'il aimerait inclure parce qu'il le juge nécessaire, enfin, avec le projet de loi n° 21, mais on va laisser faire le débat du projet de loi n° 21 à la commission qui va s'en charger. Donc, on en aura assez avec nos propres débats ici.

Mais, sur la question des valeurs québécoises qui incluent les valeurs démocratiques, quels sont les autres éléments qu'il aimerait ajouter? Parce que ce n'est pas juste de dire : Des valeurs québécoises. C'est exactement quels sont les éléments qui reflètent ces valeurs québécoises qu'on a besoin de comprendre. Au-delà d'égalité hommes-femmes, qu'on pourrait dire, O.K., égalité hommes-femmes, démocratie, très bien, ça fait partie des valeurs démocratiques de toute façon, quels sont les autres éléments qu'il aimerait ajouter, puis qu'est-ce qu'il veut dire exactement?

La Présidente (Mme Chassé) : Merci, Mme la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne. M. le ministre, vous voulez rajouter une remarque?

M. Jolin-Barrette : Certainement, Mme la Présidente. Écoutez, mais je n'ai pas entendu la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne nous dire si elle considérait la laïcité comme une valeur québécoise. Ça, je pense que c'est fondamental pour la poursuite du débat. Est-ce qu'elle, Mme la Présidente, considère que la laïcité devrait faire partie des valeurs québécoises? Pour elle, est-ce que c'est une valeur de la société québécoise, la laïcité?

La Présidente (Mme Chassé) : Merci, M. le ministre. Mme la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne, c'est à vous.

Mme Anglade : Écoutez. On ne va pas faire le débat sur la laïcité au moment où on fait le débat sur l'immigration. Je pose des questions à celui qui a l'intention de faire... C'est lui qui présente, le ministre présente son projet de loi. Il a un autre projet de loi en parallèle qui veut modifier la charte, c'est très bien. Mais, Mme la Présidente, vous pouvez intervenir puis dire que, par rapport au débat qui est là, ce n'est pas le sujet et l'objet, est-ce que la laïcité est là ou pas. On a de la difficulté à nous dire quelles sont les valeurs québécoises et on en ajoute une autre dans un autre projet de loi qu'on va approuver plus tard.

Moi, ce que je veux savoir, c'est... Il a écrit, dans son projet de loi, les valeurs québécoises exprimées par la Charte des droits et libertés. Très bien. Quelles sont les valeurs québécoises qui sont exprimées par la charte? On ne parle pas de laïcité. À moins qu'il veuille me faire référence à la laïcité ici, je suis très à l'aise, s'il trouve l'endroit où on veut faire référence à ça, mais quelles sont les valeurs? Parce qu'il est impératif, pour nous, dans un projet de loi aussi important, aussi essentiel, et sachant d'autant plus que, vraisemblablement, on va parler éventuellement, dans des règlements, de test de valeurs, de quelles valeurs s'agit-il exactement.

Alors, jusqu'à présent, j'ai eu une réponse qui était l'égalité hommes-femmes, très bien, la démocratie, très bien, qui fait partie des valeurs démocratiques. Quels sont les autres éléments qu'on aimerait mettre de l'avant quand on parle de valeurs québécoises?

La Présidente (Mme Chassé) : Merci, Mme la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne. M. le ministre, vous désirez ajouter des remarques?

• (21 heures) •

M. Jolin-Barrette : Oui. Alors, je dénote bien, de la part de la réponse de la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne, que, pour elle, ça convient que la laïcité constitue une valeur de la société québécoise, une valeur qui devrait être inscrite dans la Charte des droits et libertés de la personne. C'est ce que je retiens de son propos.

Pour ce qui est de la nomenclature des valeurs, écoutez, je peux donner une série d'exemples. Ce que j'ai dit à la députée de Saint-Henri—Sainte-Anne, c'est que l'ensemble de la charte québécoise fait partie des valeurs québécoises. Le texte même, ça constitue les valeurs québécoises : la primauté du droit, la laïcité éventuellement, la justice, la paix.

Vous savez, la Cour suprême a défini récemment dans un arrêt que le Québec avait des spécificités et des valeurs sociales distinctes. C'est quoi, le texte de base de la société québécoise? C'est la Charte des droits et libertés de la personne, qui fait partie de la constitution informelle du Québec, et toutes les lois québécoises doivent être conformes à la Charte des droits et libertés de la personne. Alors, l'ensemble des valeurs se retrouvent à l'intérieur. Même chose au niveau du droit à l'égalité, de la liberté d'association, de la liberté d'opinion, de la liberté de religion, du droit au secours, du droit à la vie. Ça, c'est des valeurs québécoises.

Prenez... dans la charte, il y a un article qui dit que les gens doivent prêter secours aux gens si ça ne met pas en péril leur sécurité et leur vie. Il y a une obligation au Québec, on appelle ça l'obligation du bon samaritain. Ça, là, dans les autres textes dans d'autres États, ce n'est pas nécessairement présent, mais nous, on a fait le choix au Québec de dire : Tu dois porter assistance. Tu dois, comme citoyen québécois, porter assistance à ton prochain. Moi, je considère que c'est une valeur québécoise. Je considère que, dans notre société, c'est le ciment de notre société. Alors, ça, c'est un autre exemple, c'en fait partie. Le bien-être général des citoyens du Québec, c'est inscrit dans la charte. C'en fait partie, des valeurs québécoises, aussi.

Voyez-vous, il y a une série de droits, de libertés, de principes, de concepts, qui constituent des valeurs québécoises. Et on l'a toujours dit, on a toujours été clairs, pour nous, l'adhésion aux valeurs québécoises, c'est l'adhésion aux principes qui sont dans la Charte des droits et libertés de la personne, dans la charte québécoise. Et je ne pense pas qu'il y a personne qui peut être contre le fait que la société québécoise, son vivre-ensemble, son adhésion... l'adhésion, en fait, que la société québécoise souhaite, ce soit l'adhésion à la Charte des droits et libertés de la personne, parce que ça constitue, en fait, une sorte de contrat social que nous avons. Ça fait quoi? 1975... 44? 44 ans que le texte est là.

Alors, nous, ce qu'on vient spécifier, c'est que, dans le cadre de l'immigration, lorsqu'on dit «le respect des valeurs démocratiques», oui, mais pas juste les questions de la démocratie, également les valeurs québécoises, qui sont comprises dans le texte complet. Vous voulez un autre exemple peut-être? En 2006, un précédent gouvernement, libéral de surcroît, avait inscrit le droit de vivre dans un environnement sain, 46.1 de la charte. Ça, je pense que... On parle beaucoup de développement durable, on parle d'environnement, on se pose des questions sur comment est-ce qu'on va développer notre économie. Bien, ça, c'est une valeur québécoise aussi de dire : Pour nos citoyens québécois d'aujourd'hui et de demain, on souhaite qu'ils vivent dans un environnement sain. C'est une valeur québécoise. Ce n'est pas toutes les sociétés qui ont fait ça. Est-ce que ça, c'est une valeur démocratique? Je ne le crois pas, mais très certainement c'est une valeur québécoise, d'où le sens d'inscrire, dans la loi sur l'immigration... bien, en fait, dans la Loi sur le ministère de l'Immigration, de la Diversité et de l'Inclusion, la référence à «valeurs québécoises».

La Présidente (Mme Chassé) : Merci, M. le ministre. J'ai noté deux... trois interventions. Il y a la députée de Fabre, il y a le député de Nelligan et il y a la députée de Bourassa-Sauvé. Je vais y aller dans l'ordre qu'on me l'a signifié, à moins que vous vouliez ajouter à l'instant...

Mme Anglade : Je vais passer et je vais revenir à ce moment-là, alors allez-y. Je vais revenir là-dessus.

La Présidente (Mme Chassé) : Parfait. Alors, ça vous va, dans l'ordre? Je vais d'abord continuer avec la députée de Fabre. Je vous invite à faire vos remarques sur l'article 1.

Mme Sauvé : Merci, Mme la Présidente. Alors, toujours dans un souci de bien comprendre et de bien entendre ce que le ministre dit, lorsqu'il a parlé tantôt des valeurs et tout ça, je l'ai entendu dire que bien sûr qu'il y a des valeurs de liberté, de choix, de religion, que ça fait partie des valeurs québécoises. J'ai besoin d'une distinction très claire entre valeurs québécoises, valeurs démocratiques, parce que, quand je vais sur le site d'Immigration-Québec et que je google «valeurs démocratiques», il y a cette valeur-là qui est très présente et qui est l'exercice des droits et libertés de la personne, qui se fait dans le respect de ceux d'autrui et du bien-être général. Et, dans le libellé, c'est clairement dit : «Ces valeurs et les lois de la société québécoise font consensus et assurent à chaque personne le droit, entre autres, de s'exprimer et de choisir librement son style de vie, ses opinions et sa religion.»

Est-ce que c'est ce que le ministre voulait dire tantôt? J'ai besoin d'une clarification.

La Présidente (Mme Chassé) : Merci, Mme la députée de Fabre. M. le ministre, vos remarques.

M. Jolin-Barrette : Oui, mais très certainement, les valeurs québécoises peuvent comprendre les valeurs démocratiques aussi.

La Présidente (Mme Chassé) : Merci, M. le ministre. Mme la députée de Fabre, vous désirez...

M. Jolin-Barrette : Notamment. Bien, notamment, hein, notamment.

Mme Sauvé : Notamment, O.K. Mais quand vous avez exprimé tantôt la liberté de style de vie, et tout ça, vous faisiez appel vraiment à ce libellé, à cette valeur commune?

La Présidente (Mme Chassé) : ...intervenir auprès de moi.

Mme Sauvé : Mme la Présidente, oui.

La Présidente (Mme Chassé) : Merci.

Mme Sauvé : C'est bien ce que vous vouliez...

M. Jolin-Barrette : Bien, vous savez, ce qui est intéressant, Mme la Présidente, c'est que la députée de Fabre vient de dire «valeur commune», là. Donc là, ce n'est plus une valeur démocratique, c'est des valeurs communes. Et très certainement, la façon dont ça a été libellé, ça a été libellé par la députée de Notre-Dame-de-Grâce dans le cadre de ses consultations. Et, au départ, lorsqu'elle a commencé son processus, elle était avec valeurs communes, et là il y a des gens qui sont venus en commission parlementaire, puis elle a dit : Ah! on va appeler ça valeurs démocratiques pour ces concepts-là.

Mais, par contre, est-ce que l'égalité entre les hommes et les femmes, c'est une valeur démocratique, pour vous, ou c'est une valeur québécoise? Au-delà de tout ça, là, on peut s'entendre pour se dire que l'ensemble de la charte québécoise représente les valeurs québécoises. Moi, je ne veux pas être limitatif. Je ne veux pas faire en sorte de dire : Ah! ça, ça rentre-tu dans valeurs démocratiques uniquement, tout ça? Pour moi, l'ensemble des droits et libertés qui sont présents à la charte québécoise, ça constitue des valeurs québécoises.

Le fait de respecter la charte, le fait qu'il y ait le droit à l'égalité, qu'il n'y ait pas de discrimination pour les personnes qui souffrent d'un handicap, sur la grossesse, sur l'orientation sexuelle, sur l'identité de genre, ça, je pense que c'est des valeurs québécoises. Le fait d'être ouvert, parce que c'est ça, le droit à l'égalité prévu à l'article 10, c'est une valeur québécoise, puis c'est pour ça qu'on vient l'inscrire. Il faut que ce soit très clair dans notre loi que, dans la Loi sur l'immigration, on vient couvrir les valeurs québécoises. C'est les valeurs de notre société, c'est les valeurs du Québec. Il y a des spécificités à la société québécoise. C'est notre texte fondamental, là, la charte, là, au Québec, là. Il n'y a pas d'autre texte, là, qui est plus fort juridiquement que cela, là. Donc, c'est normal que ça représente les valeurs québécoises.

La Présidente (Mme Chassé) : Merci, M. le ministre. Merci. Merci à la députée de Fabre. Vous voulez rajouter des remarques aux propos ou on passe à...

Mme Sauvé : Non, ça va aller.

La Présidente (Mme Chassé) : Merci. M. le député de Nelligan.

M. Derraji : Merci, Mme la Présidente. Écoutez, je vais être beaucoup plus pratico-pratique et je vais poser la question au ministre. Nous sommes en train, avec ce projet de loi, de planifier l'immigration pour un arrimage entre les besoins du marché du travail, en quelque sorte, les besoins de nos régions par rapport à des bassins d'immigration, des bassins au niveau international.

Une voix : ...

M. Derraji : Ah! vous pouvez dire bassin ou... là où les immigrants se retrouvent, si vous ne voulez pas le mot «bassin». Et à la lecture de ce texte proposé, le respect des valeurs démocratiques, je pense que ça sonne très universel, et des valeurs québécoises exprimées par la Charte des droits et libertés de la personne. Il ne faut pas oublier qu'on s'adresse à des gens qui ne sont pas encore sur le territoire québécois et qu'on espère ramener, dans un futur proche, avec la plateforme Arrima. Je me mets à la place de cet immigrant qui va déposer son dossier dans Arrima, et on veut qu'il respecte les valeurs québécoises.

Ma question est très simple : Comment le ministre va s'assurer, avant l'arrivée de ces immigrants, qu'il y a le respect de ces valeurs québécoises et valeurs démocratiques?

La Présidente (Mme Chassé) : Merci au député de Nelligan. M. le ministre, vos remarques.

M. Jolin-Barrette : Bien, en fait, honnêtement, il n'y a rien dans le projet de loi qui dit qu'on va s'assurer du respect des valeurs québécoises. Je comprends, là, que le Parti libéral est bien, bien excité par le test des valeurs, là, mais il n'y a pas...

Une voix : ...

M. Jolin-Barrette : Non, mais c'est ce que vous allez dire...

Des voix : ...

M. Jolin-Barrette : Mme la Présidente, ça s'en vient. Ça s'en vient. Ça brûle les lèvres du député de Nelligan à ce niveau-là, ça brûle les lèvres.

Des voix : ...

M. Jolin-Barrette : C'est moi qui ai le droit de parole, je pense.

• (21 h 10) •

La Présidente (Mme Chassé) : Juste un moment! Je vous invite à vous adresser à moi. Merci. On poursuit.

M. Jolin-Barrette : Je pense c'est moi qui ai le droit de parole.

La Présidente (Mme Chassé) : On poursuit. On poursuit dans ce sens-là.

M. Jolin-Barrette : Alors, première erreur, au niveau du député de Nelligan, il dit : Écoutez, les gens ne sont pas encore sur le territoire québécois au niveau des personnes immigrantes. Alors, ça, c'est faux, parce que nous, là, il y a beaucoup de gens qui sont des travailleurs temporaires ici. Donc, l'immigration, là, ce n'est pas juste de l'étranger de façon permanente. Il y a aussi des travailleurs temporaires qui sont présents ici, puis nous, on souhaiterait que les gens qui décident de venir de façon temporaire au Québec, bien, ils puissent demeurer à long terme puis migrer vers l'immigration permanente. Et, lorsqu'on me dit : Écoutez, une personne de l'étranger, elle verrait les valeurs québécoises...

Écoutez, le texte fondamental de la société québécoise, c'est la Charte des droits et libertés de la personne, avec la Loi sur l'Assemblée nationale, avec la Charte de la langue française. Ça, j'espère que vous ne le niez pas. Ce qu'il y a dans la charte, ça représente le consensus de la société québécoise, le fait de ne pas discriminer les gens, le fait qu'il y ait l'égalité entre les hommes et les femmes, éventuellement la laïcité. Je sais que votre parti ne veut pas inscrire la laïcité dans la charte, ça, ça vous appartient, mais le principe de la primauté du droit... Écoutez, pour nous, c'est très clair qu'on définit, dans la Loi sur l'immigration, quelles sont les balises de la société québécoise, notamment, le cadre de vie, c'est ce qu'il y a présent dans la Charte des droits et libertés de la personne. C'est clair.

La Présidente (Mme Chassé) : Merci, M. le ministre. M. le député de Nelligan, vous désirez poursuivre ?

M. Derraji : Oui, absolument.

La Présidente (Mme Chassé) : Allez-y.

M. Derraji : Je pense que pour le bénéfice de l'avancement de nos travaux, il faut éviter qu'on fait des procès d'intention. Je n'ai pas dit le mot «test», mais, si le ministre veut qu'on parle des tests, on va en parler des tests, s'il le souhaite, mais ce n'est pas mon intention.

Mon intention, elle est très simple. C'est que le ministre vient de nous parler d'immigrants temporaires. Dans la fourchette des personnes qu'on veut recevoir, les temporaires, c'est quand même très limité. Donc, il y a une catégorie économique qui ne sont pas encore dans le territoire, qui sont à l'extérieur du pays.

La Présidente (Mme Chassé) : C'est une question au ministre?

M. Derraji : Oui, oui. Je veux juste... Oui, absolument.

La Présidente (Mme Chassé) : Parfait. Merci. Allez-y.

M. Derraji : Je veux juste qu'on clarifie puisqu'on parle et ce qu'on a... on réfléchit au niveau de la même catégorie. Au niveau de l'immigration, comme vous le connaissez, Mme la Présidente, oui, il y a les temporaires, il y a l'immigration économique, il y a le regroupement familial, il y a la catégorie des réfugiés, il y a plusieurs catégories. Je n'ai pas parlé des temporaires qui sont sur le territoire, et moi, c'est dans la perspective d'adhérer tous à ces valeurs universelles, à ces valeurs démocratiques. Je ne vais pas aller dans le jeu de mots, hein, je vais dire les valeurs universelles, les valeurs démocratiques et les valeurs de la société québécoise. Mais je veux juste bien qu'on soit d'accord déjà sur la ligne de départ. Est-ce qu'on se comprend, M. le ministre?

La Présidente (Mme Chassé) : Parfait. Merci, M. le député de Nelligan. M. le ministre, vous désirez rajouter?

M. Jolin-Barrette : Bien, voyez-vous, Mme la Présidente, le député de Nelligan dit les valeurs universelles, les valeurs démocratiques puis il dit les valeurs de la société québécoise. Je pense qu'on n'est pas loin, Mme la Présidente, parce que, pour le député de Nelligan, les valeurs de la société québécoise, ce sont les valeurs qui sont dans la Charte des droits et libertés de la personne. Là-dessus, je suis d'accord avec lui, Mme la Présidente.

M. Derraji : Mme la Présidente, je vais revenir à ma question.

La Présidente (Mme Chassé) : Je vous écoute, M. le député de Nelligan.

M. Derraji : Je ne vais pas faire de ce débat un débat de définitions où on va aller chercher le Larousse pour faire des définitions de valeurs universelles, démocratiques ou de société québécoise.

Ma question, elle est très simple. Le projet de loi, depuis les débuts, le ministre a démontré une volonté réelle d'accélérer le processus pour utiliser Arrima, qui vise à arrimer, qui vise dans un... si je veux utiliser une expression utilisée par M. le ministre, Tinder de l'immigration, donc mettre en contact des gens qui viennent de l'extérieur avec le besoin du marché et les besoins des régions.

Ma question, elle est très simple. Comment on va s'assurer que les gens, avant qu'ils viennent ici, ils respectent les valeurs québécoises telles que mentionnées et ajoutées par le ministre, à savoir le libellé suivant : le respect des valeurs démocratiques et des valeurs québécoises exprimées par la Charte des droits et libertés de la personne, chapitre C-12. Ma question, elle est très claire.

La Présidente (Mme Chassé) : Merci. Vos remarques, M. le ministre ?

M. Jolin-Barrette : Oui. Mme la Présidente, quand on reprend le texte proposé, là, avec l'amendement, là, je vais le relire, là, pour le bénéfice du collègue, là :

«Le ministre élabore et propose au gouvernement des orientations ou des politiques sur l'immigration et la pleine participation, en français, des personnes immigrantes et des minorités ethnoculturelles à la société québécoise en toute égalité et dans le respect des valeurs démocratiques et des valeurs québécoises exprimées par la Charte des droits et libertés de la personne.»

Donc, sur l'article, là, qu'est-ce que fait l'article? Il dit au ministre, en l'occurrence pour l'instant c'est moi, que je propose au gouvernement, au reste des ministres et au premier ministre des orientations ou des politiques sur l'immigration pour la pleine participation des gens qui vont immigrer, là, en français, et des minorités ethnoculturelles à la société québécoise dans le respect des valeurs québécoises. Ça, c'est que l'article dit.

Alors, nous, ce qu'on rajoute, c'est qu'on ne vise pas juste les valeurs démocratiques, on vise l'ensemble de la charte québécoise, parce que les valeurs qui sont dans la charte québécoise, c'est plus large qu'uniquement les valeurs démocratiques, puis je vous en ai fait la démonstration tout à l'heure, notamment l'égalité entre les femmes et les hommes, éventuellement la laïcité. Vous comprenez le sens du propos. L'idée, c'est d'élargir les propositions que le ministre fait pour viser l'ensemble de la charte, parce que ça, c'est le ciment de notre État, et les perspectives, les programmes qui doivent être développés visent notamment à s'assurer de couvrir l'ensemble des valeurs québécoises qui sont dans la charte.

La Présidente (Mme Chassé) : Merci, M. le ministre. Ça vous convient, M. le député de Nelligan?

M. Derraji : Non, je vais continuer.

La Présidente (Mme Chassé) : Vous désirez rajouter des remarques?

M. Derraji : Oui, oui, je vais continuer. Oui.

La Présidente (Mme Chassé) : Je vous écoute.

M. Derraji : Merci, Mme la Présidente. Je commence... que je commence à comprendre le raisonnement du ministre, et pour le comprendre très bien, l'ajout de la phrase des valeurs québécoises exprimée par la Charte des droits et libertés de la personne, et depuis tout à l'heure je l'entends, c'est l'égalité entre les hommes et les femmes. Est-ce que c'est ce que j'ai bien compris, M. le ministre?

La Présidente (Mme Chassé) : Merci. M. le ministre.

M. Jolin-Barrette : Entre autres.

M. Derraji : Entre autres?

M. Jolin-Barrette : Entre autres.

M. Derraji : Ça veut dire, Mme la Présidente, qu'il y a d'autres valeurs qu'il vise par rapport à ça. Juste pour qu'on soit beaucoup plus explicites, surtout que ce projet de loi va s'appliquer à des personnes qui ne vivent pas actuellement sur le territoire et qu'on veut qu'elles adhèrent à ce processus... C'est là mon souhait et mon inquiétude aussi.

Ce texte de loi que nous sommes en train de proposer, ces amendements, ces ajouts ou le texte proposé par le ministre, il vise des gens qui ne vivent pas ici, au Québec, qu'on veut les faire adhérer à nos valeurs, aux valeurs de la société québécoise et aux valeurs démocratiques. Et c'est là où moi je veux qu'on soit beaucoup plus explicites et qu'on les nomme pour que ce soit compréhensible par tous ces gens qui aimeraient venir et immigrer au Québec. C'est là où, tout à l'heure, l'essence même des questions de ma collègue... et c'est pour cela que je pense qu'il faut élaborer davantage et ne pas juste parler de l'égalité entre les hommes et les femmes.

La Présidente (Mme Chassé) : Merci. M. le ministre, désirez-vous rajouter des remarques?

M. Jolin-Barrette : Bien, je pense que j'ai fait la nomenclature, notamment, non exhaustive des valeurs tout à l'heure, lorsque la députée de Sainte-Anne m'a parlé ainsi que la députée de Fabre. Alors, je vous réfère à ce que j'ai dit tout à l'heure.

La Présidente (Mme Chassé) : Merci, M. le ministre. Vous désirez rajouter, M. le député de Nelligan?

M. Derraji : Absolument. Je comprends très bien que M. le ministre ne veut pas vraiment aller au-delà de ce qu'il a dit tout à l'heure, mais je vais le ramener à un autre cas beaucoup plus pratique.

La personne arrive sur le territoire, elle est... donc une région x, chez un employeur Y, et ne respecte pas une des valeurs. Où on veut qu'elle les respecte? Comment on va s'assurer qu'elle va respecter les valeurs? Et dans le cas du non-respect d'une valeur, prenons le cas que vous citez... que le ministre cite depuis tout à l'heure, le cas de l'égalité, hein? C'est des cas qui, probablement, existent. Comment on va s'assurer qu'il va les respecter ou comment on va s'assurer qu'on va lui dire : Écoute...

M. Skeete : Je m'excuse, Mme la Présidente, il y a un cas de règlement. Je...

La Présidente (Mme Chassé) : Oui. Je vous écoute, M. le député de Sainte-Rose.

M. Skeete : ...de Sainte-Rose. Toujours de Sainte-Rose. Oui, en fait, je ne suis pas sûr qu'on est sur le sujet parce qu'ici on est dans un texte qui propose une orientation générale du projet de loi, puis M. le collègue de Nelligan, mais lui, il est rendu à comment on va l'appliquer plus tard. Je l'invite à peut-être poser ses questions quand on va être rendus à des sections qui voudraient dire ça. Là, ici, on est dans la mise en page du débat, on veut établir un principe. Je ne pense pas que c'est le moment de faire le débat sur le principe.

La Présidente (Mme Chassé) : Merci. Je suspends les travaux temporairement.

(Suspension de la séance à 21 h 20)

(Reprise à 21 h 21)

La Présidente (Mme Chassé) : Merci. Oui, on reprend les travaux. Donc, je vous invite à rester centrés sur les discussions autour de l'article 1. Merci au député de Sainte-Rose. Le député de Nelligan désire poursuivre?

M. Derraji : Oui, oui. Absolument.

La Présidente (Mme Chassé) : Allez-y.

M. Derraji : Merci, Mme la Présidente. Et je pense que, depuis le début, je suis dans l'essence même du texte proposé. Et, comme le ministre, moi aussi j'ai mon interprétation au texte, et, si je pose des questions, c'est pour le bénéfice de tout le monde. Et surtout, surtout, moi, ce texte de ce projet de loi, encore une fois, s'adresse aussi aux gens qu'on veut accueillir au Québec. Et donc le plus qu'on soit clairs, que ce soit au niveau de nos règlements ou nos textes, on va s'assurer qu'il y a un bon arrimage. Et je sais que c'est la volonté du ministre d'assurer le bon arrimage.

Je vais continuer par rapport au libellé. Il élabore notamment une politique québécoise en ces matières. Est-ce que le ministre peut nous parler de sa politique québécoise en la matière de ces deux valeurs mentionnées dans le même texte?

La Présidente (Mme Chassé) : Merci. M. le ministre.

M. Jolin-Barrette : Mme la Présidente, deux choses. Premièrement, le projet de loi qu'on modifie, on ne touche pas à la question de la politique. C'était déjà présent dans le texte que votre collègue de Notre-Dame-de-Grâce a mis en vigueur. Alors, moi, je ne touche pas à ça, là. Donc, on ne réinvente pas la roue.

L'autre élément qui est intéressant, le député de Nelligan me dit : Comment vous allez évaluer l'adhésion aux valeurs? Moi, j'aurais envie de lui demander : Au niveau des valeurs démocratiques, là, que son parti avait faites, là, comment c'était fait, ça? Comment c'était appliqué?

La Présidente (Mme Chassé) : Oui, M. le député de Nelligan.

M. Derraji : Mme la Présidente, je pense que le ministre, c'est à lui de répondre à nos questions et non pas l'inverse. Je ne suis pas ministre, et c'est M. le ministre qui doit répondre à nos questions par rapport au projet de loi en question, à savoir le projet de loi n° 9.

M. Poulin : Question de règlement, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Chassé) : Oui, M. le député de Beauce-Sud, je vous écoute.

M. Poulin : ...tout le respect que j'ai pour notre collègue de Nelligan, il doit prendre la réponse du ministre, quand même. Il doit prendre la parole du ministre.

La Présidente (Mme Chassé) : Malheureusement, je n'ai pas compris votre point de règlement. Pouvez-vous...

M. Poulin : Bien, le point de règlement, ce qu'il dit, c'est qu'on doit prendre la réponse du ministre qui est mentionnée en commission parlementaire, et c'est ce que le ministre fait. Alors, on ne peut pas refuser la réponse du ministre.

La Présidente (Mme Chassé) : Merci. J'invite M. le député de Nelligan à poursuivre.

M. Derraji : Je pense que nous sommes tous en train d'apprendre. Écoute, je peux aussi élaborer l'article 35.6°, qu'on me prête des intentions, hein?

Une voix : ...

M. Derraji : Bien, depuis le début, on me prête des intentions. Je peux aussi, moi aussi, élaborer des articles, mais on ne va pas s'en sortir. Je pense que j'ai le droit de poser des questions et j'exige des réponses dans le respect de tout le monde. Tu sais, je pense que c'est très clair.

La Présidente (Mme Chassé) : Merci. Je vous invite...

Une voix : ...

La Présidente (Mme Chassé) : Un moment! Un moment! Merci. Je vous invite à revenir à la discussion. Nous sommes à discuter de l'article 1 et à faire des échanges et des remarques. Merci. M. le député de Nelligan, poursuivez.

M. Derraji : Merci, Mme la Présidente. Je vais répéter l'essence même de ma réflexion. L'essence même de ma réflexion, c'est qu'on veut, et je veux personnellement, comme le ministre, assurer un bon arrimage entre les nouveaux arrivants et les régions. Et je comprends la volonté d'avoir l'adhésion aux valeurs démocratiques et l'ajout des valeurs québécoises exprimées par la Charte des droits et libertés de la personne.

Ma question, elle est très simple : Au-delà de s'assurer, techniquement, en termes pratico-pratiques, comment on va mettre ça en place, comment le ministre, Mme la Présidente, comment le ministre compte mettre ça en application? Du moment qu'il a la volonté d'ajouter le respect des valeurs québécoises... et, depuis le début, on parle de l'égalité entre les hommes et les femmes, je pense que c'est quelque chose qui est très important, mais comment nous-mêmes, nous, les élus, on va s'assurer qu'il y a le respect de cette valeur québécoise par rapport à ces personnes qu'on va ramener?

La Présidente (Mme Chassé) : Merci. M. le ministre, est-ce que vous désirez rajouter des remarques...

M. Jolin-Barrette : Oui, je désire...

La Présidente (Mme Chassé) : ...répondre au député de Nelligan?

M. Jolin-Barrette : Oui. Merci, Mme la Présidente. Écoutez, l'article, ce qu'il dit, là, il dit : «Le ministre élabore et propose au gouvernement des orientations ou des politiques sur l'immigration et la pleine participation, en français, des personnes immigrantes et des minorités ethnoculturelles à la société québécoise en toute égalité et dans le respect des valeurs démocratiques et des valeurs québécoises exprimées par la Charte des droits et libertés...»

L'obligation dans l'article, c'est de proposer au gouvernement des politiques, du ministre vers le gouvernement, pour faire participer les personnes immigrantes à la société en respect des valeurs démocratiques puis des valeurs québécoises. Les valeurs québécoises, je les ai définies, c'est les valeurs qu'il y a dans la charte, les droits et libertés de la charte, notamment l'égalité entre les hommes et les femmes, la laïcité éventuellement, le bien-être général, le droit à un environnement sain. Donc, les politiques visent notamment l'intégration, l'adhésion en français à la société québécoise.

On dit, là, au ministre de l'Immigration, dans le cadre de l'article, là... Je ne parle pas de moi à la troisième personne, là. Je parle du ministre qui est dans la loi, là, O.K., pour les fins de la discussion, là. O.K.? Ça fait qu'on dit : Le ministre de l'Immigration, sa job, lui, c'est ça. Avant, c'étaient juste les valeurs démocratiques; nous, ce qu'on dit avec le texte législatif, c'est qu'on dit, avec la proposition législative, c'est qu'on dit... on rajoute les valeurs québécoises inscrites dans la charte, c'est plus large.

Là, le député de Nelligan, il me dit : Comment vous allez faire appliquer ça? Bien, ce n'est pas une question de faire appliquer ça sur les personnes immigrantes, c'est de proposer des programmes puis des orientations au gouvernement pour dire, là, supposons, au niveau de l'intégration : Comment est-ce qu'on fait, là, pour s'assurer, là, que les personnes immigrantes participent pleinement à la société québécoise? Bien, il faut prendre en compte nécessairement les valeurs québécoises, pas juste les valeurs démocratiques. Puis là le député de Nelligan me disait : Bien, comment ça va se faire? Mais j'aurais envie de lui dire : Comment ça se faisait avec les valeurs démocratiques? Qu'est-ce qui se passait? C'est la même chose. Le ministre de l'Immigration proposait des orientations en lien avec ça.

Nous, on couvre plus large sur l'ensemble de la charte. Est-ce que vous êtes en désaccord avec le fait qu'on couvre l'ensemble de la charte québécoise au niveau des propositions et des orientations qu'on fait au gouvernement? Trouvez-vous ça normal, là, que, dans les orientations, là, on mette que l'égalité entre les femmes et les hommes, ça soit un des principes importants? Êtes-vous en désaccord avec ça, qu'on fasse ça?

La Présidente (Mme Chassé) : Ça clôt vos remarques, M. le ministre?

M. Jolin-Barrette : Oui.

La Présidente (Mme Chassé) : Il nous reste peu de temps. Vous désirez clore, M. le député de Nelligan? Je vous invite...

M. Derraji : Oui. Pour une fois, je vais répondre directement à la question, même si je ne suis pas là pour répondre à des questions. Je suis là pour poser des questions pour approfondir la connaissance et notre connaissance, parce que c'est le ministre en question qui a déposé ce projet de loi, et, à ma compréhension, il aimerait approfondir les échanges avec les membres de l'opposition pour éventuellement, dans un esprit de collaboration, comme il le souhaite, le bonifier et pour qu'on le comprend très bien.

Oui, M. le ministre, je suis pour l'égalité entre les hommes et les femmes. Et ma question, ce n'est pas par rapport à ça. Ma question est très claire : Comment, du moment où vous m'avez posé la question, comment moi et vous, on va s'assurer du respect sur le terrain de ces valeurs? Vous avez nommé, pour vous, les valeurs démocratiques, ça n'inclut pas les valeurs québécoises exprimées par la Charte des droits et libertés, pas de problème.

La Présidente (Mme Chassé) : Il vous reste quelques instants.

M. Derraji : Vous avez ajouté les valeurs... Vous avez ajouté, dans le texte, «et — e-t — des valeurs québécoises exprimées par la Charte des droits et libertés de la personne», pas de problème.

Ma question est très simple depuis le début, juste le comment, juste le comment, Mme la Présidente. C'est juste le comment. C'est très simple. Le ministre, probablement, peut nous économiser beaucoup de temps et avancer très rapidement dans l'étude de ce projet de loi, c'est juste s'il répond à ma question. C'est très simple, ma question, Mme la Présidente, au lieu de me poser des questions si je suis pour l'égalité entre les hommes et les femmes, et je lui dis oui.

La Présidente (Mme Chassé) : Le ministre peut aussi poser des questions, mais ça nous donne l'occasion de clore les débats pour aujourd'hui. Je vous remercie...

M. Poulin : ...

La Présidente (Mme Chassé) : Je vous écoute, M. le député de Beauce-Sud.

• (21 h 30) •

M. Poulin : ...passer au vote sur l'article 1? Déjà plus d'une demi-heure sur un esprit au niveau la charte, alors est-ce qu'on peut passer au vote?

La Présidente (Mme Chassé) : On suspend les travaux. Le temps est écoulé.

Des voix : ...

La Présidente (Mme Chassé) : O.K. Donc, le vote est demandé. Bon, est-ce qu'il y a consentement pour la mise aux voix?

Des voix : ...

La Présidente (Mme Chassé) : Je suspends les travaux. O.K. Je garde votre attention juste un tout petit moment, là, pour bien clore les travaux. Merci de votre attention et merci pour votre collaboration.

Et compte tenu de l'heure — c'est ça, Mme la secrétaire? — la commission ajourne ses travaux sine die. Merci.

(Fin de la séance à 21 h 31)

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