(Neuf heures trente-huit minutes)
Le Président (M. Picard) : À
l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission des relations avec les citoyens
ouverte. Je vous souhaite la bienvenue et je demande à toutes les
personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs appareils
électroniques.
La commission
est réunie afin de poursuivre la consultation générale et les auditions
publiques sur le cahier de consultation intitulé La planification de
l'immigration au Québec pour la période 2017‑2019.
Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements?
La
Secrétaire : Oui, M. le Président. Mme Lavallée (Repentigny)
est remplacée par Mme Roy (Montarville).
Auditions (suite)
Le
Président (M. Picard) :
Ce matin, nous entendrons les groupes et organismes suivants : le Réseau
des forums jeunesse régionaux du Québec, le
Mouvement Québec français, l'Association canadienne
des conseillers professionnels en immigration et la ville de Montréal.
Sans plus
tarder, je souhaite la bienvenue aux représentants du Réseau des forums
jeunesse régionaux du Québec. Vous
disposez d'une période de 10 minutes pour faire votre exposé. Vont s'ensuivre
des échanges avec les parlementaires. Je vous demanderais, dans un
premier temps, de vous présenter et de faire votre exposé. Allez-y.
Réseau des forums jeunesse régionaux du Québec
Mme Côté
(Florence) : Merci. Bonjour, je m'appelle Florence Côté. Je suis
présidente du Réseau des
forums jeunesse régionaux du Québec et du projet Citoyenneté jeunesse et
présidente du forum jeunesse régional Capitale-Nationale. En parallèle, je
complète mon externat en médecine à l'Université Laval puis je suis membre du
conseil d'administration puis du comité exécutif de l'Université Laval.
M. Risso
(Santiago) : M. le
Président, Mme la ministre, chers députés, bonjour. Mon nom est Santiago
Risso, président du Forum jeunesse de l'île de Montréal et vice-président du réseau des forums jeunesse régionaux et du projet Citoyenneté
jeunesse. Et aussi je suis administrateur de Concertation Montréal.
Et, tout
d'abord, nous sommes très, très heureux d'être ici parmi vous aujourd'hui. On est très contents de savoir que le gouvernement, il consulte encore la jeunesse. Et d'abord,
suite à la commission sur le projet
de loi n° 77, nous
saluons le fait de retrouver nos recommandations en ce qui concerne notamment la reconnaissance des compétences, l'intégration par
l'implication ainsi que la régionalisation de l'immigration. Nous apprécions le
fait que nos propositions aient été majoritairement
entendues et reprises dans le cadre
de la planification. Cela démontre
que l'expertise développée il y a plus
de 15 ans par les forums jeunesse est toujours utile, et cette instance est toujours
pertinente pour le gouvernement.
Dans le même mémoire... Dans le mémoire, en
fait, qu'on va vous présenter aujourd'hui, nous allons nous attarder notamment
sur les orientations 3, 6 et 7 de la planification, en reprenant et en
précisant plusieurs éléments à propos des étudiants étrangers, de la
reconnaissance des acquis et des compétences ainsi que de la concertation des acteurs
socioéconomiques et municipaux.
• (9 h 40) •
Mme Côté
(Florence) : Nous comprenons et partageons l'objectif et la stratégie
derrière la volonté d'augmenter la
proportion de travailleurs temporaires et d'étudiants étrangers étant ensuite
sélectionnés par l'immigration permanente. Mais, pour s'assurer que cette initiative-là soit couronnée de succès,
on pense que, d'abord, il faut faciliter et perfectionner l'accès aux
conseils en immigration pour les futurs étudiants étrangers.
Dans le
journal Le Soleil du 1er août 2016, on nous présentait l'agence Alfabé,
qui est une agence spécialisée en demandes d'admission et de bourses
pour les étudiants étrangers et surtout une agence spécialisée en fraude, alors
qu'elle demande 421 $ pour une demande
d'admission qui en coûte 79 $ à l'Université Laval. C'est un exemple
parmi tant d'autres, d'agences et de
conseillers qui affirment pouvoir faire les démarches à la place de l'étudiant
et lui faciliter le travail tout en lui obtenant une place à
l'Université du Québec de son choix.
Le noeud du
problème derrière cette situation-là, c'est que ces étudiants étrangers ont
l'impression que c'est trop difficile
de se retrouver dans tous les processus de demandes de bourses, de visas,
d'acceptations nécessaires pour venir étudier
au Québec. Ils pensent donc qu'ils doivent absolument avoir accès à ces agences
et ces conseillers disponibles par Internet
dans leur pays. La nouvelle loi en immigration du Québec, qui calque, à ce
sujet, la loi canadienne en immigration et en protection des réfugiés, limite l'accès à des conseils de qualité
et favorise du même coup l'utilisation de ces fraudeurs.
Comme
on l'explique dans notre mémoire, jusqu'en 2013, les employés des universités
et des cégeps n'étaient pas considérés comme des conseillers
potentiellement fraudeurs et n'étaient donc pas soumis au resserrement de leur formation et de leur
reconnaissance parce que, d'une part, ils n'étaient pas rémunérés directement
par les étudiants et les demandeurs
pour leurs services et parce que ces services ne représentaient pas l'ensemble
de leurs fonctions. Mais, en 2013,
l'interprétation de la loi a changé et ces raisons aussi. On pense qu'on
devrait revenir à cette ancienne interprétation de la loi pour les mêmes raisons, d'autant plus que les conseils dans
les universités et les cégeps sont toujours donnés via l'établissement
d'enseignement; que les administrations universitaires et collégiales encadrent
et surveillent les conseils donnés... et
qu'avec les années d'expérience vient l'expertise en matière d'étudiants
étrangers; et, finalement, que les
coûts associés à la formation et au maintien de la reconnaissance ainsi que la
charge financière que représentent les potentielles amendes... sont une
charge financière trop importante pour plusieurs universités et cégeps, qui ont
déjà commencé, cette année, à réduire
l'accès aux conseillers en immigration pour les étudiants étrangers. Comme il
s'agit d'une compétence provinciale, on pense que le gouvernement devrait
demander au gouvernement canadien d'enlever la notion d'enseignement supérieur de
leur loi et s'entendre ensuite directement avec les universités et les cégeps
pour assurer au Québec des conseils accessibles et de qualité pour les
étudiants étrangers.
De
la même manière, beaucoup de candidats au travail et aux études arrivent
avec un bagage de compétences, d'expérience
et de diplômes. Nous comprenons et approuvons le désir de démêler, faciliter et
standardiser la reconnaissance des
acquis, mais, dès maintenant, il faut s'assurer de mieux communiquer les lignes
directrices actuelles et futures pour éviter les mauvaises surprises et
limiter l'impression de s'être fait flouer que peuvent vivre certains
immigrants à leur arrivée au Québec. Il faut que ce soit fait évidemment par les
conseillers en immigration, mais aussi, surtout avec la diminution des
conseillers à prévoir, par des campagnes, des infos visuelles et des fiches
pratiques qui pourraient être consultées directement par les candidats avant
même leur demande d'immigration.
M. Risso (Santiago) : O.K. En lien avec l'orientation n° 6 de la planification, on mentionne, dans le document de
consultation de la planification de l'immigration au Québec, que le
gouvernement veut maintenir, pour la période 2017‑2019,
le taux d'acceptation de jeunes arrivants à 65 %. Évidemment, ce taux
élevé est nécessaire afin de ralentir la tendance du vieillissement de
la population et ainsi avoir un impact positif au niveau économique et social
de notre province. En considérant un taux
aussi élevé de nouveaux jeunes immigrants, il est primordial de bien prendre au
sérieux l'intégration des jeunes et de nous
doter des outils nécessaires pour réussir une intégration réellement ouverte.
En 2015, le Secrétariat à la jeunesse
indiquait, dans son document de consultation pour la politique québécoise de la
jeunesse que, je cite, «en plus de la
participation politique, la participation sociale des jeunes aux activités de
leurs communautés contribue également de façon importante à leur
intégration». Donc, le Réseau des forums jeunesse recommande que le MIDI travaille en étroite collaboration avec les forums
jeunesse. Nous proposons pour le gouvernement d'utiliser les instances
démocratiques régionales qui sont les forums jeunesse. Notre expertise développée
dans les 15 dernières années en matière de
participation citoyenne en concertation pourrait être un atout pour le gouvernement afin de mieux intégrer les nouveaux arrivants, notamment dans
nos activités de mobilisation, nos activités locales et régionales et aussi
notre représentation au niveau de la jeunesse, et surtout, et surtout, par
notre philosophie de par et pour les jeunes.
Mme
Côté (Florence) : D'ailleurs, les forums jeunesse régionaux et leurs
parrains, les CRE, font déjà partie de l'ADN des planifications
pluriannuelles en immigration. Celle de 2005-2008 déjà nous identifiait comme
partenaire incontournable, et, cette année
encore, on parle encore davantage de régionalisation de l'immigration, et on
veut, pour ce faire, concerter les acteurs socioéconomiques et les
municipalités de chacune des régions du Québec. Mais, après l'abolition, dans
les deux dernières années, des CRE, des CLD, des bureaux régionaux du MIDI, des
forums jeunesse régionaux, après la
diminution des enveloppes budgétaires des municipalités et des MRC, il faut se
demander : Il reste quoi pour la régionalisation en immigration?
Les
organismes en régionalisation de l'immigration basés à Montréal doivent se
donner les moyens de rejoindre réellement et efficacement les acteurs
régionaux. C'est vrai que la concertation est la clé, mais qui vont être les
chefs d'orchestre? Ce qu'on vous propose,
c'est des ententes spécifiques avec les forums jeunesse régionaux, Place aux
jeunes en région, et la FQM notamment ainsi
qu'un travail parallèle pour structurer une solution à long terme pour la
régionalisation de l'immigration selon des objectifs concertés régionalement.
M. Risso (Santiago) : Donc, pour conclure, on voulait simplement vous remercier encore une
fois de consulter la jeunesse et d'affirmer encore la collaboration des
forums jeunesse avec le ministère de l'Immigration. Donc, on est vraiment prêts
à travailler avec le MIDI.
Le Président (M. Picard) : Merci. Merci. Je vais céder la
parole à Mme la ministre pour une période de 16 minutes.
Mme
Weil : Oui. Alors, rebonjour, donc, Florence Côté, Santiago
Risso. Merci beaucoup de vous intéresser... il faut que je parle dans le
micro parce que vous entendez un léger bruit derrière nous, on s'en excuse.
Mais on est contents que vous soyez là, mais
très, très contents aussi que vous vous intéressiez à l'avenir du Québec par
l'immigration et que vous souhaitiez y jouer
un rôle, parce que vous êtes devenus des gens, des interpelants... j'oublie le
mot, là... qui regardez les choses de
très près. Je regarde tout ce que vous dites sur le mouvement des étudiants,
mouvement dans le sens de ceux qui veulent venir ici, rester ici, puis
vous portez attention à ça.
Pour
ce qui est des conseillers, j'essaie de comprendre la préoccupation. Vous savez
que la loi est déjà adoptée par le
gouvernement fédéral et que les conseillers universitaires se sont déjà pliés à
la loi et se sont ajustés. Mais on vous rassure que nous, on travaille
en étroite collaboration avec ces personnes-là, et on les connaît depuis
longtemps, ils sont très connaissants, très, très connaissants. C'est
l'expérience que j'ai en échangeant avec ces conseillers, ils sont vraiment capables
d'orienter les étudiants sur différents aspects.
Mais
vous touchez aussi — et, je
crois, c'est ça que je vois dans votre mémoire — à la mobilité internationale. Ça, c'est l'autre partie de la réforme du PTET, on
s'est déjà exprimés là-dessus auprès du gouvernement fédéral, qui porte une attention particulière à cette problématique.
Comme vous dites, il faut que ces gens, ces étudiants puissent venir
ici, c'est des stages importants pour eux et pour nous. Alors, ça, c'est un
dossier mobilité internationale qui a été pris, si vous voulez, dans l'engrenage de la réforme du PTET. Alors, on fait nos
représentations. Merci d'en parler et d'évoquer cette problématique.
Vous avez vu
notre orientation sur... 40 % de nos travailleurs qualifiés seraient issus
de la filière, si vous voulez, étudiants
étrangers et travailleurs temporaires. Est-ce que vous aviez une inquiétude que
ça pourrait nuire à l'atteinte de cet objectif ou... Quelle était votre
crainte par rapport aux conseillers?
Le Président (M. Picard) :
Mme Côté.
• (9 h 50) •
Mme Côté
(Florence) : En fait, c'est que, dans le cadre de cette
orientation-là, on souhaitait s'exprimer sur la facilité pour les étudiants étrangers ou, en fait, la difficulté pour
les étudiants étrangers de venir d'abord ici avant même d'être
sélectionnés parmi 40 %. On comprend qu'en effet les conseillers en
immigration, dans les universités puis les cégeps, sont très compétents, puis
ça, on ne le nie vraiment pas.
L'enjeu qu'on
a vu soulever, au moment de l'adoption de la loi en 2013, c'est que les
universités et les cégeps ont eu des
craintes par rapport aux amendes possibles si des employés, qui n'étaient pas
considérés comme des conseillers parce
qu'ils n'avaient pas reçu la formation ou parce qu'ils n'avaient pas le statut
préalable nécessaire... Si les employés voulaient donner des vrais
conseils, ils ne pouvaient pas le faire, il fallait absolument que ce soient
des informations neutres, puis ça a donné
lieu a un certain... un petit chaos dans certaines des universités puis des
cégeps de la province puis même du Canada au complet. Puis, pendant un
certain temps, même, certaines universités ont refusé de parler aux immigrants pendant quelques mois, le temps de bien
comprendre, avec leurs propres avocats, l'indication de la nouvelle loi.
Donc, c'est simplement ça. On ne dit pas que
les conseillers en immigration reconnus ne sont pas compétents, loin de
là, on dit simplement que les autres employés, qui ne sont pas reconnus comme
tels, comme des conseillers, ont tout de même une expertise et une expérience
antérieure en matière de conseiller les étudiants étrangers.
Mme Weil : Et il y a le ministère
de l'Immigration aussi, hein?
Mme Côté (Florence) : Oui.
Mme Weil : Alors donc, je vous dirais qu'on a beaucoup,
beaucoup de contacts, et on les aide rapidement.
Quand vous dites : Des lenteurs ou de
la bureaucratie, parce qu'il y a deux paliers de gouvernement qui traitent de ça... Donc, le ministère s'assure de traiter
leurs cas de façon rapide. On a ce souci-là, parce que les universités et les
cégeps sont assez... on le comprend, ils ont
besoin de savoir exactement combien d'étudiants vont étudier dans leurs institutions au mois de septembre ou à la fin du mois d'août. Alors, on a
cette préoccupation-ci, on s'assure que le système roule bien.
On va parler peut-être
de la reconnaissance des compétences,
donc votre préoccupation à cet égard aussi. Est-ce que vous pourriez
peut-être élaborer sur cette question, vos constats, votre expérience par
rapport à ces problématiques de reconnaissance des compétences?
Mme Côté (Florence) : Oui. Bien, en
fait, c'est encore une fois une recommandation qu'on porte un peu en parallèle avec l'orientation qui est énoncée,
parce qu'on reconnaît puis on est très d'accord avec le fait de gérer, là,
avec les ordres professionnels puis avec les
employeurs, avec les universités, toute la reconnaissance des acquis et des
compétences, puis on ne veut pas
nécessairement s'exprimer sur quelles compétences et quels acquis devraient
être reconnus ou pas.
Par contre,
on entend toujours des histoires, puis on en voit nous-mêmes dans
notre entourage, mais de gens qui arrivent avec une idée préconçue de
quelle reconnaissance de leurs acquis et compétences va leur être accordée,
puis finalement ça ne s'avère pas exactement le cas. Ça occasionne quand même
des déceptions, ça occasionne aussi des problèmes
au niveau de la prévision. Quand on dit, par exemple, à un médecin
étranger qu'il va pouvoir venir ici parce qu'on a des besoins de
médecins, mais que finalement il y a un délai, il faut qu'il passe par d'autres
endroits où il n'avait pas prévu passer, ça nuit à tout le monde, finalement,
là, dans leurs prévisions des effectifs.
Mme Weil : Alors, juste vous rassurer que c'est une grande préoccupation, je vous le dirais, c'est même central dans la nouvelle politique et stratégie d'action. Donc, il y a
un comité interministériel qui va déposer un rapport très, très bientôt des suites à donner à ça. Et l'objectif ultime, c'est la reconnaissance totale ou presque totale avant l'arrivée, au moins une voie
tracée sur : Bon, voici ce que vous avez à faire.
Maintenant,
les ordres professionnels, nous, on finance un programme pour les aider
dans la reconnaissance des
acquis, des compétences. Il faut savoir que c'est à peu près 10 % de notre
immigration qui se destine à un ordre professionnel,
près de 10 % aux métiers réglementés, mais tout le reste, c'est des
travailleurs qui ont des compétences, une expérience qui... et les
employeurs ont un peu de difficultés ou beaucoup de difficultés à reconnaître
le diplôme et l'expérience. On travaille,
donc, ces trois voies-là avec des recommandations. Il y a une intention ferme d'aller plus loin. Il y a
la ministre de la Justice qui a déposé un projet de loi aussi concernant
les pouvoirs du commissaire aux plaintes, qui, lui, examine ces
dossiers-là.
Il y a beaucoup,
quand même... Je tiens à le dire publiquement, il y a quand même
beaucoup de progrès qui a été fait ces dernières
années, depuis le rapport Bouchard-Taylor, mais même avant, c'est... Mais
l'important, c'est que tout le monde travaille ensemble, parce qu'il y a beaucoup de ministères qui sont dans ce dossier. Mais merci aussi de
vous préoccuper de cette question.
Bon. Vous
êtes vraiment les personnes toutes désignées pour parler du
programme de l'expérience québécoise. Vous
avez évoqué les problématiques. J'aimerais peut-être vous entendre sur
l'aspect positif de cet objectif, là, 40 %
qui seraient des jeunes, et le rôle aussi
du... vous souhaitez jouer un rôle, aussi, à l'avenir, par rapport à cette
orientation, parce qu'évidemment il y
a un nombre important d'étudiants étrangers qui sont partout au Québec... et
peut-être faire le lien avec les régions aussi. Je ne sais pas si vous
avez un commentaire à faire à cet égard.
Mme Côté
(Florence) : Bien, en fait, oui. On parle du 40 % ou du
65 %, mais, dans les deux cas, on parle, si on parle d'étudiants étrangers ou des jeunes de moins
de 35 ans qui vont être reconnus comme immigrants permanents, on parle
de jeunes. Puis on pense, comme on l'avait dit, en fait, en février, que, pour
bien intégrer des jeunes, comme n'importe
qui, mais des jeunes, entre autres, dans la communauté, il faut qu'ils aient
l'impression de pouvoir avoir un impact sur leur communauté. Puis, de la
même manière, les jeunes, qu'ils soient nés au Québec ou pas, doivent avoir l'impression, pour avoir un sentiment
d'appartenance à leur région puis vouloir y revenir... il faut qu'ils aient
l'impression de justement avoir un impact dans leur région.
Puis c'est,
entre autres, ce que les forums jeunesse régionaux s'efforcent de faire d'année
en année, mais c'est vraiment de réunir autour d'une même table des
jeunes qui proviennent de tous les secteurs économiques, de tous les secteurs
d'activité, de tous les secteurs territoriaux et de tous les horizons,
finalement, puis de les faire travailler ensemble
à leur région, à donner des conseils à leurs municipalités, à travailler ensemble, finalement, à parler aussi
au gouvernement provincial, puis à organiser des activités en concertation avec
les autres organisations jeunesse, en concertation
avec les universités et les associations étudiantes, puis d'organiser des
activités politiques, mais pas seulement des consultations, aussi, simplement, de la mobilisation, parler
d'enjeux, se poser des questions. Puis tout ça ensemble fait en sorte qu'immigrants ou pas tout le monde peut
avoir l'impression d'avoir un réel impact sur son milieu puis vouloir
rester dans sa région, vouloir la voir foisonner puis vouloir y mettre des
efforts.
M. Risso
(Santiago) : Pour nous, en
fait, c'est vraiment important de créer des liens. Intégrer les jeunes en
silo en faisant des activités juste pour les
nouveaux arrivants, pour nous, ce n'est pas suffisant. Il faut qu'on soit
capables de créer des liens avec les nouveaux arrivants, avec les jeunes
Québécois qui sont déjà impliqués dans leur communauté.
Donc, pour
nous, on pense que la participation citoyenne, c'est un bon moyen pour intégrer
les jeunes. Justement, c'est pour ça qu'on a cité le Secrétariat à la
jeunesse. Je pense que le gouvernement, par cette... il croit aussi que la participation citoyenne, la participation
politique, la participation à une communauté, c'est un incontournable au
niveau de l'intégration. Et, au-delà des
connaissances de comment ça fonctionne, la société, tout ça... mais ça peut
être aussi banal qu'aussi ça peut
être une façon pour les nouveaux arrivants d'être en contact avec des
francophones aussi. Ça va aider à la francisation aussi des nouveaux
arrivants.
Si je peux me permettre, Mme la ministre, un
petit commentaire par rapport au dernier point, notamment par rapport à la reconnaissance des acquis, on sait
très bien que... quand la politique est sortie, je pense que c'était un
grand point qui était ressorti et très
intéressant, d'ailleurs : c'est de travailler en collaboration, justement,
avec les ordres professionnels. Nous,
notre crainte, c'est jusqu'à quel point les ordres, ils sont prêts à
travailler, justement. C'est ça, notre crainte, en fait.
Moi,
malheureusement... c'est très personnel, mais je l'ai vécu quand même, ma mère
étant professeur de français en
langue seconde, ayant un diplôme français... moi, je suis Uruguayen d'origine...
mais elle avait quand même fini ses études
en Uruguay... on a été acceptés il y a 14 ans au Québec. Une des raisons
pourquoi on a été acceptés, c'est parce que, bon, ma mère avait un métier qui était en demande au Québec. Quand elle
est arrivée pour faire revalider son diplôme, ce n'était pas possible. Il a fallu qu'elle refasse des études.
Aujourd'hui, elle est chargée de cours à McGill, là, mais elle a fait des études, elle a fait une maîtrise pour y
arriver, quand même. Avec une famille, c'est pire. Là, ça peut parler
très personnel puis être un cas isolé, mais ça arrive très souvent. Donc, c'est
primordial pour nous.
• (10 heures) •
Mme Weil :
En effet, l'expérience que votre mère a vécue, c'est une expérience que
j'entends beaucoup. Mais il y a quand
même eu, depuis ce temps-là, beaucoup, beaucoup de progrès à cet égard. Mais
c'est important parce qu'il reste, évidemment, encore des cas
particuliers, que j'entends, de gens qui sont arrivés tout récemment. Mais des
programmes qui ont été mis en place de reconnaissance des diplômes, là, il y a
vraiment beaucoup de progrès.
Mais, en bout
de ligne, il y a aussi cette question de... le 80 %. Ce n'est pas des
ordres professionnels, c'est vraiment des
gens qui ont un diplôme et une expérience de travail. Et il y a une réticence.
On ne peut pas savoir est-ce que c'est de la méfiance, est-ce que c'est de la discrimination. Il y a une étude de la
Commission des droits de la personne... Est-ce que c'est tout simplement que la personne n'est pas
capable de reconnaître ses compétences et qu'il a besoin
d'accompagnement? Quoi qu'il en soit, on
nous recommande un accompagnement plus serré. Là aussi, il y a beaucoup de
travail qui a été fait, mais c'est évident qu'il nous reste encore du
travail à faire.
Ce qui
m'amène à vous poser la grande question, on en parlait beaucoup :
l'attitude envers la diversité, les attitudes envers la diversité. Notre jeunesse est toujours... c'est notre avenir.
Et notre jeunesse, je pense que tout le monde partage ce grand espoir.
On le voit chez nos jeunes, leurs attitudes face à la diversité, qu'ils ne
voient pas la différence. Ils ont été élevés dans des milieux de diversité,
parce que les écoles sont remplies de... c'est des mini-Nations unies, avec une
langue commune, le français.
J'aimerais
vous entendre. Vous êtes des jeunes. Parlez-nous de ça, autant dans des
milieux urbains que dans les régions, vos constats. Vous voyez une
demande de jeunes personnes qui demandent une commission d'enquête sur la discrimination et ce qu'on appelle le racisme
systémique. Il y a eu beaucoup de jalons au fil des années pour
améliorer les attitudes
envers la diversité, les immigrants, pour contrer le racisme. Bon, j'ai énuméré
ces actions au fil des années, mais j'aimerais
vous entendre parce que vous êtes deux jeunes. On n'a pas beaucoup de gens qui
viennent ici représenter les jeunes. Si vous pourriez me dire comment
vous voyez les attitudes envers la diversité... parce que c'est la clé, hein,
du succès.
Mme
Côté (Florence) : Oui. Bien, en fait, on peut revenir un peu à ce
qu'on disait, mais on pense que c'est la mixité, comme vous dites, c'est la mixité sociale qui va faire
l'acceptation, par l'expérience, par le fait que les gens vont se rendre
compte... puis comme les jeunes s'en rendent compte en étudiant ensemble, comme
vous le dites, mais que les jeunes, que tout
le monde de la société va se rendre compte justement des compétences que les
uns et les autres peuvent apporter autour d'une table.
Dans
les régions, ce qui est plus difficile depuis, bon, quelques dizaines d'années,
c'était évidemment qu'il y avait moins
d'immigrants qui se retrouvaient en région, que les régions sont
majoritairement blanches et catholiques. Par contre, avec l'objectif de
régionalisation de l'immigration, qui veut diriger directement des immigrants
dans les régions en fonction des besoins, donc avoir un immigrant qui aura
directement un emploi ou qui se destinera justement à un travail dans sa communauté, on pense que c'est
bénéfique. Si c'est bien fait, c'est bénéfique parce que ça va justement
mettre en contact plus d'immigrants avec
plus de gens des régions. On mentionnait, en février, les statistiques quand
même impressionnantes d'immigrants qui se
ramassent, à peu près à 75 %, dans la grande région de Montréal, et, après
ça, un petit peu parsemés un petit
peu partout. C'est le même principe, là, qui fait en sorte que les régions ont
moins de contacts avec les immigrants.
Puis on a beau discuter dans l'espace public, on a beau discuter, à la
télévision, des immigrants, l'acceptation, il n'y a rien qui vaut
l'expérience.
Mme Weil :
Merci. Je vais céder la parole à mon collègue de...
Le Président (M.
Picard) : Il reste seulement une minute.
Mme Weil :
Ah? on nous avait dit quatre minutes.
M. Birnbaum :
Merci, M. le Président. Et merci à Mme Côté et M. Risso. Une autre prestation
très lucide et intéressante comme l'autre fois que vous... dont vous étiez ici.
J'ai
envie, dans le peu de temps qui reste, prendre l'autre côté de la question de
Mme la ministre et de vous inviter, de
votre expérience, de parler brièvement des étudiants de l'étranger et qu'est-ce
qui est dans leur âme, dans leur esprit. Qu'est-ce qu'on peut faire ensemble pour augmenter le monde, le
pourcentage de jeunes d'extérieur qui décident de rester chez nous et, dans votre cas, de rester en région?
C'est quoi, les plus gros obstacles et comment on peut vous aider à les
aider à faire le choix du Québec?
M. Risso
(Santiago) : Je peux commencer. En fait, une des questions, c'est
juste au niveau des statuts de cette
personne-là, de cet étudiant-là quand il arrive au Québec. Des fois, quand il a
juste un visa d'étudiant, le temps est très
limité, s'il ne peut pas travailler non plus, c'est des choses qui... c'est
difficile pour lui aussi de se «voyer» comme un résident à long terme ou à moyen terme aussi. Donc, il faut
effectivement donner plus des outils à ces jeunes-là pour qu'ils soient capables de mieux s'intégrer, de vivre
comme un résident permanent au Québec, donner ces outils-là justement
pour qu'ils puissent travailler puis puissent apporter à la société pendant son
séjour étudiant. On pense qu'en fait les étudiants
étrangers, c'est une bonne façon d'aller chercher un type d'immigration
qualifiée aussi. Puis je pense que c'est avantageux pour la société à
long terme.
Mme Côté
(Florence) : Je dirais, dans le document même de consultation, on le
mentionne quand même assez bien, là, il y a
toute une partie qui dit à quel point les étudiants étrangers sont des bons
candidats à l'immigration permanente
parce que, de base, bien, ils ont déjà vécu une certaine partie de l'expérience
québécoise. Mais, comme le dit mon
collègue Santiago, il faut essayer de bonifier le plus possible cette
expérience québécoise là pour leur donner le goût de rester parmi nous.
C'est sûr qu'on pourrait aborder, là, les côtés, bien, de droits de scolarité,
ce que les associations étudiantes apportent
en particulier, là, sur les impôts postétudes puis tout ça, mais ce n'est pas
vraiment pour ça qu'on est ici, on
n'est pas en train de parler au ministère de l'Éducation, on n'est pas les
associations étudiantes. Donc, nous, on se concentre vraiment dans le
discours sur le fait que bonifier l'expérience pendant qu'ils sont ici, ça va
leur donner le goût de la continuer plus longtemps.
Le Président (M.
Picard) : Merci. Je cède maintenant la parole à M. le député de
Bourget pour une période de 9 min 30 s.
M.
Kotto : Merci, M. le Président. Alors, Mme Côté, M. Risso,
soyez les bienvenus et merci pour la contribution, l'ensemble de
l'oeuvre, en somme.
Je
voudrais revenir sur... à la page 8 de votre mémoire... 6, dis-je, de votre
mémoire, la première, la toute première recommandation, pour rebondir sur le premier échange que vous avez eu
avec la ministre. Donc, la recommandation 1 est à l'effet «que le gouvernement québécois demande au gouvernement
canadien de retirer les établissements postsecondaires de l'ajustement sur l'encadrement des conseils en
immigration; que le MIDI collabore avec les administrations collégiales et universitaires pour encadrer les conseils en
immigration donnés au sein des établissements d'enseignement supérieur».
Est-ce que vous pouvez élaborer davantage pour la bonne compréhension des
personnes qui nous écoutent?
Mme Côté (Florence) : Oui.
Dans les fait, comme on l'expliquait, jusqu'en 2013, alors que la loi
canadienne a été adoptée et en fonction, les
employés des universités puis des cégeps étaient exclus, là, de l'application
de la loi, donc étaient exclus du
fait de devoir se former à 4 000 $ d'abord, puis 2 000 $ par
année pour avoir une formation spécifique, étaient exclus des amendes potentielles s'ils contrevenaient à ladite
loi parce qu'on considérait qu'au sein des établissements d'enseignement
ces conseillers-là étaient tellement ciblés puis tellement hors du champ global
de conseillers en immigration qu'ils
n'étaient pas potentiellement fraudeurs, que, si c'était un employé de
l'université dans le cadre de ses fonctions
qui répondait à un étudiant sur comment bien s'y retrouver dans sa demande
visa, ça ne faisait pas partie, là, des potentiels fraudeurs qu'on
voulait contrer avec la loi canadienne et avec la loi québécoise par la suite.
Donc, ce qu'on croit, c'est qu'en effet il faut se
pencher sur les conseillers en immigration au sein des établissements d'enseignement supérieur, sauf que, de les
contraindre à exactement les mêmes choses que les conseillers en dehors
des établissements d'enseignement supérieur
qui répondent à toutes sortes de questions pour toutes sortes d'immigrations
différentes, ce n'est pas exactement la
manière la plus efficace de fonctionner pour les étudiants étrangers. Donc, ce
qu'on proposait, c'était justement de
pouvoir faire un ajustement spécifique dans les établissements d'enseignement
supérieur dans le cas des étudiants
étrangers, dans le cas des conseils donnés dans les établissements
d'enseignement supérieur. Mais, au final,
ça a l'air très pointu, mais, ce que ça permet, c'est tout de même de répondre
à des centaines d'étudiants étrangers dans toute la province du Québec
de manière plus efficace et plus personnalisable et personnalisée.
M. Kotto :
Étudiants étrangers déjà intégrés maîtrisant...
Mme Côté
(Florence) : ...
M. Kotto :
Voilà. Avez-vous fait des représentations au niveau fédéral avant que le
cadenas ne se ferme?
Mme
Côté (Florence) : Malheureusement, non. Par contre, des associations
étudiantes l'ont fait. Mais, nous, à l'époque,
là... les forums jeunesse régionaux sont relativement très provinciaux dans
leur action. À l'époque, évidemment, on ne siégeait pas dans les forums,
donc je ne sais pas personnellement exactement ce qu'il s'est dit à ce
moment-là.
M.
Kotto : Et les associations qui ont, disons, exprimé ce besoin,
considérant la portée structurante de sa finalité, est-ce que ces
associations ont été, selon ce que vous en savez, entendues, écoutées ou
ignorées tout simplement?
Mme Côté
(Florence) : Il faudrait demander entre autres à la FAECUM. Je sais
que la FAECUM était sortie à ce sujet dans les dernières années, mais
manifestement la loi est fonction. Je sais que des universités ont fait des représentations aussi. Il y a des universités, à
l'époque, là, surtout du milieu canadien-anglais, là, mais qui avaient
exprimé leur malaise, qui avaient dit :
On va devoir réduire, au moins pendant quelques mois, notre offre de services
pour les conseils en immigration aux
étudiants étrangers. Donc, je sais qu'à l'époque ça avait fait un certain
bruit. Ça l'a fait ensuite, dans les années suivantes aussi, quand on a
vu l'impact, puis ça a continué d'en faire un petit peu. Mais c'est sûr que,
comme disait Mme la ministre, les
universités se sont adaptées. Il y a des conseillers en immigration qui sont
présentement actifs et qui répondent
à la loi. Par contre, ils sont en nombre moins nombreux, puis les employés qui
ne sont pas des conseillers en immigration sont limités plus qu'avant
dans leurs fonctions.
M.
Kotto : O.K. Tout ceci, parce que c'est la raison pour laquelle
que je voulais que vous élaboriez davantage pour les personnes qui nous écoutent, parce que, très souvent, nous proposons
que le gouvernement, l'État québécois, ait la pleine mesure de ses politiques
en immigration, qu'il soit maître d'oeuvre à ce chapitre-là de a à z, ce qui
éviterait ce genre de malentendu. C'est une belle illustration.
Mon
autre point, ce que... avant vous, d'autres, dans l'absolu, considèrent que
l'orientation 3 est une bonne chose. L'orientation 3, qui est à l'effet
d'augmenter à au moins 40 %, en 2019, la proportion de personnes
immigrantes de 18 ans et plus de la
sous-catégorie des travailleurs qualifiés sélectionnés ayant un statut de
travailleur temporaire au Québec au moment de leur sélection ou
d'étudiant étranger.
Mais
je vais m'arrêter sur le profil travailleur temporaire, qui est de juridiction
fédérale, comme vous le savez. Et ce qui
me titille un peu, c'est le fait que les temporaires n'ont pas l'obligation d'envoyer
leurs enfants à l'école française. Ils peuvent les envoyer à l'école
anglaise sans problème. Et je ne vois rien dans le document traitant de cette
équation difficile à résoudre, parce que je
ne sais pas si on a la réponse à cela. Il n'y a rien qui oblige les
travailleurs temporaires à envoyer leurs enfants à l'école française.
Donc, il y a là une faille. Je ne sais pas ce que vous en pensez.
• (10 h 10) •
M. Risso (Santiago) : Mais effectivement, il y a une faille puis, comme vous dites, étant donné que ça
devient au gouvernement... ça fait partie du gouvernement, un des pouvoirs du gouvernement
fédéral, comme vous dites, par rapport aux travailleurs temporaires. C'est sûr que oui, exactement, on ne s'est pas attendu spécifiquement à ces réponses-là, mais, dans tous nos documents,
on parle quand même de l'importance de la francisation puis comment y arriver
aussi, là.
Mme
Côté (Florence) : On n'a pas
la solution plus que vous. C'est un bon problème que vous nous apportez,
mais c'est sûr que les forums jeunesse
régionaux sont persuadés que travailler en français, ça aide aussi à
l'intégration en français.
M.
Kotto : O.K., là, je
vais aller au coeur du sujet qui nous occupe : c'est les seuils d'immigration. Vous avez entendu depuis
quelques mois déjà les oscillations relativement aux cibles notamment
exprimées par le premier ministre, qui avait envisagé d'augmenter les
seuils, passant de 50 000 à 60 000.
Le
Président (M. Picard) : Il vous reste deux minutes.
M. Kotto :
...et ce, en porte-à-faux avec la ministre, qui, elle, attendait la tenue de
cette commission pour statuer sur la question. À 50 000 déjà en moyenne,
il est avéré que nous n'avons pas la totalité des moyens ou des ressources pour un accompagnement réussi en
intégration en emploi et en francisation. Est-ce que vous avez pris,
disons, comme conscience de ces deux enjeux-là?
Mme
Côté (Florence) : Oui, on le mentionnait, en fait, en février aussi.
On mentionnait le fait qu'entre autres que le CPMT, là, qui finançait,
en lieu de travail, les activités de francisation n'avait plus de fonds dans sa
cagnotte qu'ils utilisaient jusqu'à présent pour ce faire et qu'il demandait à
ce moment-là au MIDI de palier et qu'il s'attendait à ce que le MIDI pallie finalement aux coûts inhérents
à ces formations de francisation en lieu de travail. Donc, c'est à
l'époque quelque chose qu'on avait soulevé, les manques de fonds. De la même
manière, l'absence de bureaux régionaux du MIDI
par coupures financières est problématique. Donc, on ne veut pas s'attarder
nécessairement au nombre d'immigrants, parce
que, comme on l'a dit tout à l'heure, avoir des immigrants, surtout jeunes, ça
aide à renouveler le bassin jeune de la population, à continuer d'avoir une bonne population dynamique. Par
contre, au point de vue des moyens financiers, pour bien les accueillir,
c'est certain que c'est quelque chose auquel il faut s'attarder.
M. Risso
(Santiago) : Effectivement, ce n'est pas une question des seuils. Il faut
juste que, si on décide d'augmenter, je
pense que le Québec a besoin de ça, mais il faut que les ressources, elles
viennent avec, effectivement. Puis on
le sait d'ailleurs que ce n'est pas la première fois que les ressources, elles
manquent, là, et notamment en 2012, quand le gouvernement, il avait décidé de couper, si je ne me trompe pas,
d'environ 50 % dans les cours de francisation. Donc, si on décide
d'augmenter les seuils, bien, effectivement, il faut qu'il y ait des ressources
qui viennent avec.
Le Président (M.
Picard) : Merci. Je cède maintenant la parole à Mme la députée
de Montarville pour une période de 6 min 30 s.
Mme Roy
(Montarville)
: Et demie.
Le Président (M.
Picard) : Et demie.
Mme
Roy
(Montarville)
: Merci beaucoup, M. le
Président. Madame, monsieur. Merci
d'être là. Je me souviens de vous, on s'est
vus il y a quelques mois déjà. Vous m'aviez d'ailleurs impressionnée par
votre présentation. Dans celle-ci, ce que je comprends bien, puis je vais aller à la page 10, pour les gens qui nous
écoutent, là. Tu sais, je vulgarise rapidement, là, tout le mémoire, très, très
rapidement. Vous voulez être un acteur beaucoup plus présent dans tout le
dossier de l'immigration en région,
on le sent, là, on sent vraiment que c'est le message que vous nous communiquez
aujourd'hui. Et vous aussi, vous dénoncez les coupes importantes qui ont
eu lieu... Ça, c'était en 2015. Et on parle entre autres des CLD, des bureaux
régionaux du MIDI, de Force Jeunesse. Sachez que...
Une voix :
Forum.
Mme Roy (Montarville): Forum, pardon. Excusez-moi, c'est un lapsus... de forum jeunesse et...
pour que vous sachiez... à l'époque, nous avons aussi dénoncé, parce qu'on
considère que c'est des instances qui sont importantes, qui sont de première ligne, qui sont la porte d'entrée souvent
dans les régions. Alors, que vous le sachiez que là-dessus, on est sur
la même longueur d'onde.
Vous
nous dites : Il faudrait «s'assurer que le MIDI restructure des liens
régionaux et municipaux. Cela pourrait se faire notamment via des
ententes avec les forums jeunesse régionaux...» Alors, pour le bénéfice des
gens qui vous écoutent, pourriez-vous nous
dire quel est le rôle actuellement des forums jeunesse relativement à toute l'immigration, quel est le rôle que vous souhaiteriez
avoir.
M. Risso
(Santiago) : Mais, présentement, au niveau du rôle de l'immigration,
effectivement, ce n'est pas nécessairement
notre expertise. Notre expertise, c'est la participation citoyenne. Par contre,
lorsque les forums jeunesse, ils géraient
le Fonds régional d'investissement jeunesse, donc les fonds publics dédiés à la
jeunesse, financièrement, on était capables de mettre en place des
initiatives pour les jeunes immigrants, notamment, si je prends un exemple, en
employabilité. Par exemple, au Forum jeunesse de l'île de Montréal, ont
financé, en collaboration avec le MIDI à l'époque, étant donné qu'on n'a plus
le financement maintenant... on a fait un projet ensemble en concertation avec
Intégration jeunesse du Québec. Donc, c'est un projet qui consistait à insister
les entrepreneurs, soit des organismes communautaires ou même des entrepreneurs
privés, inciter à donner un cachet pour qu'ils embauchent des jeunes
immigrants. Ça, c'est un exemple de comment on peut... on aidait à l'époque.
Aujourd'hui,
notre place, c'est plus au niveau... Il y aurait plusieurs possibilités. Une
des possibilités, ça serait au sein... comment impliquer davantage
justement les gens, les nouveaux jeunes immigrants à des instances comme les
forums jeunesse pour qu'ils vivent et participent à la vie active, à la vie
citoyenne de notre communauté.
Tu veux ajouter
quelque chose?
Mme Côté
(Florence) : On avait aussi pensé à quelque chose qu'on fait déjà,
mais c'est des ateliers dans les écoles secondaires
et dans les cégeps, donc des ateliers qui traitent en particulier, la plupart
du temps, de la démocratie, le vote, les élections, comment ça fonctionne, les
différents paliers de gouvernement au Québec. On va dans des classes de francisation pour le faire, entre autres, mais on
va aussi dans des classes normales parce qu'au secondaire tout le monde
a besoin d'apprendre ces choses-là. Mais on
voudrait continuer de le faire puis perfectionner aussi ce créneau-là, parce
que plus les jeunes, en francisation ou ailleurs, ont accès tôt à ces
informations-là, plus ils peuvent se prendre en main justement dans leur
participation citoyenne jeunesse et future.
Mme Roy (Montarville) : Et devenir des citoyens avertis. Il faut être
informé, vous avez tout à fait raison. Donc, ça, ce dont on vient de parler, c'est votre recommandation 3, cette plus
grande participation, ce lien avec le MIDI et forums jeunesse. Mais
vous nous dites... lorsque vous nous parlez de la consultation des acteurs
socioéconomiques et des municipalités, comment concerter efficacement, à la page 9, vous nous dites, après les
compressions qu'on a connues, là : «...force est de constater qu'avec l'abolition de toutes les
instances régionales de concertation et d'organisation dans la dernière année,
le défi sera de taille et
possiblement insurmontable.» Insurmontable, c'est un gros mot. Pourquoi vous
dites-vous que c'est insurmontable?
Mme Côté
(Florence) : C'est que, dans l'état actuel des choses... En fait, on
parlait comment impliquer directement les
jeunes un peu de manière individuelle, là, mais, au niveau des régions, on est
des acteurs de concertation, surtout
d'organisations jeunesse, c'est pour ça qu'on parle aussi d'autres organismes,
là, jeunesse ou autres, qui pourront aider
à la concertation. Mais on recrée, pour notre part, ce que les CRE faisaient au
niveau adulte. Donc, on concerte les jeunes
et les instances jeunesse de chacune des régions. Donc, quand le MIDI parle,
par exemple, de justement demander à chacune des régions ses objectifs
en matière d'immigration et ses besoins, on pense qu'il faut qu'ils aient un
interlocuteur par région pour pouvoir justement mieux les encadrer sur les
besoins et que ces besoins-là ne soient pas uniquement gérés de Montréal avec
les besoins économiques visualisés de là-bas.
Donc,
c'est un petit peu là qu'on voit le problème, c'est que, dans l'état actuel des
choses, on ne sait pas qui gérera ces
objectifs régionaux là, à part les bureaux en régionalisation de l'immigration
à Montréal, puis c'est un petit peu ce qui est notre crainte finalement, c'est qu'il y a encore certaines
organisations régionales qui existent, on parlait de Place aux jeunes en
région, on parle aussi des municipalités quand on parle de la FQM, mais les
forums jeunesse existent encore sans financement, mais il faut essayer de
revoir ça puis de le restructurer de manière un petit peu plus pérenne si on
veut répondre à l'objectif de régionalisation dans les règles de l'art, selon
nous.
Le Président (M.
Picard) : Merci. Il reste une minute.
Mme
Roy (Montarville): Une minute? Parfait. Vous n'en
parlez pas dans votre mémoire, mais j'aimerais savoir ce que vous pensez
des seuils qui sont proposés par le gouvernement, le nombre d'immigrants que le
gouvernement souhaiterait accueillir au fil
des années. Vous n'embarquez pas sur cette recommandation, en fait, cette
suggestion du gouvernement. Avez-vous une idée à cet égard?
M. Risso (Santiago) : Bien, c'est ça, pas nécessairement. Comme on disait, peu importent les
seuils, c'est une chose qu'on veut
s'assurer qu'il y a les ressources pour l'intégration. Pour nous, c'est
primordial. Dans qu'est-ce qu'on peut
dire qu'on est peut-être d'accord, c'est qu'on trouve intéressant que la
plupart de ces immigrants-là, ça va être des jeunes de moins de 35 ans.
Je pense que c'est un atout à long terme et c'est une vision à long terme que
notre société va se doter.
Mme Roy
(Montarville)
: Vous avez raison. Je vous remercie infiniment.
Le Président (M.
Picard) : Merci. Je vous remercie pour votre contribution aux
travaux de la commission et je suspends quelques instants afin de permettre
d'éteindre les sonneries de téléphones. Donc, merci beaucoup pour votre
contribution.
(Suspension de la séance à 10
h 20)
(Reprise à 10 h 22)
Le Président (M. Picard) : Nous reprenons nos travaux en recevant le Mouvement Québec français.
Vous disposez d'une période de 10
minutes. Je vous demanderais, dans un
premier temps, de vous présenter. Et
va s'ensuivre, après votre présentation,
un échange avec les parlementaires. Vous êtes déjà habitué, monsieur...
Bouchard — Bouchard? — exact,
allez-y.
Mouvement
Québec français (MQF)
M. Rivard
(Christian B.)
: Est-ce que c'est fonctionnel, oui? Le micro,
O.K., vous m'entendez bien?
Le
Président (M. Picard) :
Oui, oui, c'est fonctionnel. Malheureusement, il y a du bruit, là, mais c'est fonctionnel. Il faut
parler fort, puis on n'est pas fâchés, personne.
M.
Rivard (Christian B.)
:
Je suis Christian Rivard, le président du Mouvement Québec français.
Mon collègue ici, Éric Bouchard, est le directeur général du Mouvement Québec
français. Et nous, nous sommes une organisation civile qui a comme mission et objectif
de promouvoir et de défendre la langue française et de rappeler aux élus que la langue française
n'est pas encore la langue commune du Québec, et qu'ensemble il faudra régler
la situation et il faudra renforcer la loi 101.
Pour
y arriver, le MQF multiplie les actions militantes, les démarches dans la rue.
On explique les conséquences de
l'anglicisation aux citoyens. On fait des conférences partout à travers le
Québec. On dénonce le bilinguisme institutionnel. Et on porte la parole
de nos milliers de membres et de sympathisants dans les médias du Québec. Et enfin, le MQF coordonne la table de concertation
Partenaires pour un Québec français, qui regroupe les plus importantes
centrales syndicales du Québec et les mouvements citoyens dévoués à la défense
de la langue française. Voilà. Je vais laisser la parole à mon collègue Éric
Bouchard.
M. Bouchard
(Éric) : M. le Président, Mme la ministre, messieurs dames les
députés, vous savez, on est chanceux, on vit dans un État où il y a des
recensements. Et les recensements, vous savez, ça fait quoi, un recensement? Ça fait deux choses. Ça donne le
portrait aux cinq ans de la population puis ça donne des indicateurs,
des tendances démographiques. Et ça, là, ça
nous dit quoi? Ça nous en dit beaucoup sur l'âge de notre population. Va-t-elle
vieillir? Va-t-elle se rajeunir? Puis quand
on sait ça, bien, on peut prévoir, dans le fond, l'argent qu'il faut mettre
dans les fonds de pension. Si on sait que la
population vieillit, il faudrait en mettre un peu plus dans les fonds de
pension. Ça nous permet de prévoir les investissements en santé. Ça nous
permet, dans le fond, de voir c'est quoi, les besoins dans les politiques familiales. Ça nous donne aussi des
données sociodémographiques pour voir où sont les poches de pauvreté
dans la société pour intervenir de façon
ciblée. À la place d'avoir des mesures puis des politiques publiques mur à mur,
on peut y aller de façon ciblée. Puis ça donne des indicateurs aussi de
la mobilité de la population. Donc, on peut savoir si certaines villes ou
villages sont en croissance ou en décroissance. Donc, c'est un outil extraordinaire.
Cet
outil-là, bien, il sert à qui? Il sert d'abord au gouvernement, il sert aux élus de l'Assemblée nationale, il sert aux groupes de pression comme nous puis il sert aussi aux citoyens. Les deux
fonctions, là, donc, pourquoi ça nous sert tant? Bien, ces deux fonctions, c'est d'établir des politiques
publiques intelligentes et de planifier de façon intelligente, dans
le fond, ce qu'on veut faire, ce qu'on veut donner aux Québécois
comme politiciens et comme citoyens pour faire en sorte qu'on ait une société cohérente et la plus
efficace possible. Et c'est un outil aussi qui sert à faire des prévisions
démographiques sur l'évolution linguistique des sociétés. Et donc là — vous
l'avez vu dans la lettre qui a été publiée dans
Le Devoir de ce matin — les
documents du MIDI sont d'une rare qualité. Rarement, là, j'ai consulté des
documents publics où est-ce qu'on peut en savoir autant sur l'immigration.
Donc, franchement, là-dessus, chapeau au MIDI, chapeau, Mme la ministre!
Mais,
comme je l'explique dans la lettre, il manque deux choses essentielles,
c'est-à-dire que, quand on fait des... on est ici, ici, là, on discute avec les élus sur les prévisions
pluriannuelles des volumes d'immigration; dans le fond, il faut savoir sur quoi on se base. Qu'est-ce que ça va
donner? Pourquoi 51 000, pourquoi 60 000, pourquoi 80 000?
Qu'est-ce que ça va donner dans 50 ans? Et, malheureusement, les documents ne
contiennent pas de prévisions démographiques, mettons, sur 50 ans, mettons,
jusqu'en 2066. Et ça, c'est majeur, parce que les décisions qu'on prend aujourd'hui
ici — bien, les décisions ne sont pas prises
aujourd'hui, mais, vous comprenez, dans le cadre du processus — vont faire en sorte qu'il va y avoir des répercussions dans cinq, 10, 15, 20, 30 ans,
50 ans. Bref, il faut savoir sur quoi se baser pour dire si un chiffre
est préférable à un autre.
Je vous amène à la
page 5 de notre mémoire, dans le résumé. On voit, ici, il y a un graphique.
Bien, ce graphique-là, il fait quoi? Il fait
un paquet de petites lignes puis il
fait l'évolution, dans
le fond, du poids du français
comme langue d'usage en fonction de divers scénarios d'immigration, c'est-à-dire
60 000 immigrants, 50 000 immigrants ou 35 000 immigrants, puis
en fonction de la composition de l'immigration. Parce que c'est beau, parler du
nombre, 50 000, 51 000,
60 000, mais la composition de l'immigration a une incidence majeure sur
la langue qui va être parlée dans 50 ans.
Habituellement,
les gens, quand on est au Mouvement Québec français, la première affaire que
les gens se disent dans la
société — parce
que, c'est normal, un peu tout le monde s'étiquette dans la société — ils
disent : Ah! le Mouvement Québec français, vous autres, vous devez être contre l'immigration. Pas tout à fait. S'il y
avait 80 000 immigrants par année, puis la moitié d'entre eux étaient de langue
maternelle française et l'autre moitié étaient des francotropes, donc tous
ceux qui viennent de pays de langues latines ou de pays qui ont été colonisés par les Français
à une certaine époque, eh bien, ça changerait
énormément la composition linguistique de Montréal,
et Montréal se franciserait en dedans de 10, 15 ans.
Donc, le nombre, c'est une chose, mais de quoi est composée votre immigration,
c'est une autre affaire.
En 1987, il y avait seulement
27 000 immigrants qui arrivaient par année, mais la plupart d'entre eux ne
connaissaient pas le français. Donc, qu'est-ce qui est mieux : 27 000
personnes qui ne connaissent pas le français ou 80 000 personnes où est-ce
qu'il y a beaucoup, beaucoup plus de monde? Et donc là c'est pour ça que je dis
que les documents du MIDI, c'est... un des
points faibles des documents, c'est de dire sur quoi on se base. Pourquoi Mme
Weil et le MIDI proposent 51 000 en
2017-2018 puis 52 000 en 2019? Pourquoi M. Couillard a proposé déjà
60 000? Pourquoi Jean-François
Lisée a déjà dit qu'il faut réduire les volumes d'immigration? Ça nous prend
quelque chose pour se baser. Et donc
c'est une faille majeure dans les prévisions. Puis c'est dans l'exercice qu'on
fait, parce que c'est ça qu'on fait, on prévoit comment va être la
population dans cinq, 10, 15, 20 ans.
Si
on regarde à la page 13 du mémoire, on peut voir qu'il y a une évolution
démographique selon les prévisions de Marc
Termote, que ce soit de la région de Montréal ou dans l'ensemble du
Québec : avec 60 000 immigrants par année dans la composition, à peu près, actuelle de ce qu'est
l'immigration, bien, on voit que le français va reculer de façon
drastique d'ici 2056, soit de 10 % dans
l'ensemble du Québec ou de 12 % dans la région de Montréal. Ce n'est pas
banal. Alors donc, c'est pour ça que
c'est important de savoir... oui, peut-être 51 000, mais c'est quoi, les
objectifs du gouvernement dans la composition de l'immigration?
Autre chose, quand on parle
d'immigration puis qu'on parle d'établir des seuils, oui, le chiffre, c'est
important, des seuils, oui, la composition,
c'est important, mais, après ça, on parle de francisation, parce qu'on sait
très bien que ce ne seront pas tous
les immigrants à 100 % qui seront francophones. Donc, l'immigration
est-elle obligatoire ou pas? Parce que ça,
ça change. Si la francisation est obligatoire, bien, il est clair qu'on peut se
permettre d'avoir une immigration moins francophone puisqu'à l'arrivée la francisation va être obligatoire.
Mais, si la francisation n'est pas obligatoire, oh! il va falloir, en
amont, que la composition, elle soit plus francophone.
• (10 h 30) •
Et donc, là, l'autre
question par rapport à la francisation, disons obligatoire ou pas... Mais,
après ça, combien d'argent est disponible et combien ça coûte, franciser un
immigrant? Un immigrant. Puis, dans la lettre ouverte de ce matin qui a été publiée dans Le Devoir, c'est
notre grande préoccupation parce que, au Mouvement Québec français, on cherche, puis on a financé une étude à l'IREC puis
qui n'est pas encore sortie, mais on cherche à savoir le coût unitaire.
On le sait, qu'il y a des gens qui sont...
ça prend plus de temps à franciser parce qu'ils viennent du Sud-Est asiatique,
alors que les gens qui viennent d'Amérique latine sont plus faciles à
franciser; on sait qu'il y a des cours qui sont à temps partiel, il y a des cours à temps complet. On sait tout ça. Mais, dans
l'ensemble, comment coûte franciser un immigrant? Et donc, s'il y a 20 000 immigrants par année qui foulent le territoire québécois,
bien, 20 000 personnes... puis, si notre objectif, c'est d'être optimal pour le français... parce que
les documents du MIDI sont clairs, on veut fort, fort, fort, au
gouvernement, pour le français, et c'est
clair, net et précis dans le vocable utilisé dans les textes, mais, après ça,
ça prend des moyens. Donc, si on ne sait pas combien coûte un immigrant
en moyenne à franciser puis qu'il y en a 20 000 sur le territoire...
mettons, je vais mettre un chiffre aléatoire, ça coûte 20 000 $
franciser un immigrant, puis, s'il y en a 20 000 qui franchissent le territoire du Québec par année,
20 000 fois 20 000, bien là, on parle de quelque chose comme
400 millions que ça prend par année juste pour la francisation.
Alors,
c'est un peu ça qu'on est venu dire pour débuter. Il y a deux choses
importantes : les prévisions démographiques
en fonction de divers scénarios, ça va être quoi, l'impact; deuxième des
choses, francisation obligatoire ou pas; puis, troisième chose, c'est quoi,
le coût unitaire. Et ça fait 25 ans que, depuis l'accord de 1991, on tient ces consultations pluriannuelles et on n'a jamais su
c'était quoi, le coût unitaire. Donc, j'aimerais ça le savoir. Peut-être
pas aujourd'hui, mais j'aimerais ça que ça
devienne, dans l'espace public, quelque chose sur lequel on travaille fort.
Merci, M. le Président.
Le Président (M.
Picard) : Merci, M. Bouchard. Vous êtes un habitué. Donc, tout
à l'heure, on parle de Mme la ministre, de
M. le premier ministre et de M. le député de Rosemont, pour... Vous avez nommé
les gens par leur nom de famille, ce qui est interdit par le règlement,
ici.
Une voix :
...
Le Président (M.
Picard) : Non, mais vous avez parlé de monsieur... le député de
Rosemont, je ne peux pas le nommer.
Une voix :
Excusez, je me suis trompé.
Le Président (M.
Picard) : Mme la ministre, la parole est à vous pour une
période de 16 minutes.
Mme Weil :
Bonjour, M. Rivard, M. Bouchard. Merci de revenir une deuxième fois. Vous êtes
venus pour le projet de loi n° 77, et
là on est rendus à l'étape, le troisième pilier de la réforme en immigration
avec, bon, les gens qui participent,
et c'est important d'avoir tous les points de vue, tout le monde participe, et
des orientations sur lesquelles on vous demande de vous prononcer.
Donc,
je voulais juste voir s'il y a quelques chiffres. Vous savez que, bon, on va
commencer avec la composition de l'immigration. Vous savez qu'il y a des
réfugiés et que le Québec adhère à la Convention de Genève; il n'y a pas d'obligation linguistique. Donc, c'est toujours
une cohorte qui arrive et qui sont inscrits en francisation. Et d'ailleurs,
dans la foulée des dernières arrivées, puis
il y en a d'autres qui vont venir, on maintient cet engagement humanitaire, on
s'est assuré d'ouvrir des classes de
francisation le plus rapidement possible. Évidemment, il faut leur donner le
temps de s'installer et, bon, pour le regroupement familial, il y a
cette catégorie-là et les travailleurs qualifiés.
On
est maintenant rendus que 95 % des requérants principaux parlent le
français à l'arrivée. C'est une tendance très forte. Le niveau de français requis a été remonté au niveau sept, la
francisation avant d'arriver aussi, qui donne d'excellents résultats.
Moi, je rencontre des gens qui ont suivi nos cours de francisation avec les
alliances françaises. Ils savent déjà, hein?
Le message est lancé à l'international que, si vous voulez immigrer au Canada,
ça va, c'est plus anglais et, si c'est le Québec, il faut parler
français. Donc, ce message est véhiculé, ils le savent. Donc, ils prennent le
cours.
Je voulais juste
savoir si vous comprenez tout ce qu'on fait en amont, qui fait que ça donne ces
résultats-là et que, depuis les 20 dernières
années, le nombre de personnes qui parlent français a doublé. Donc, c'est des
chiffres macro et des tendances. Moi, personnellement, j'avais fait des
recherches, je l'ai fait confirmer par le MIDI. Parce que le regroupement familial, évidemment, c'est, là
aussi, des conventions internationales, auxquelles, bien, le Québec
adhère, hein? C'est l'importance de réunir la famille. Donc, c'est strictement,
comment dire, de compétence fédérale, mais le Québec, évidemment, va toujours
donner sa capacité, la capacité d'accueil, et tout, etc. Mais il faut
s'attarder, donc, à cette cohorte-là.
Mais on voit,
avec le temps, que les enfants sont le reflet de ceux qu'on a admis, donc plus
francophones depuis les 20 dernières
années, beaucoup de Maghrébins, d'Africains de l'Ouest, qui parlent un français
impeccable, beaucoup de Français. La France était notre premier bassin d'immigration en 2015,
donc, de plus en plus, évidemment. En tout cas, plus que le message, la réalité... vous, vous parlez d'une certaine
réalité, mais la réalité que j'entends, c'est que partout, au Québec, si on ne parle pas français, ils quittent.
Ce n'est pas tout le monde qui quitte, mais le taux de rétention est
difficile. Pour nous, le taux de rétention est important. On investit dans ces
personnes-là.
Donc, je
voulais savoir comment vous voyez l'orientation parce que, jusqu'à date, on a
vraiment 100 % d'adhésion à
l'orientation 4, fixer un minimum de 85 % de la proportion des adultes de
la sous-catégorie des travailleurs qualifiés qui déclarent connaître le français à l'admission comme orientation.
Évidemment, cette orientation, elle est basée sur, un peu, le portrait que je vous ai donné. Évidemment, les
vases communicants, c'est l'immigration humanitaire et les travailleurs
qualifiés. Plus on a de travailleurs qualifiés, plus on peut agir sur cette
question de la langue. Mais on comprend que, ces prochaines années, il y a un
engagement humanitaire qui fait en sorte qu'on a un travail à faire de
francisation.
Juste vous entendre sur cet équilibre... parce
qu'on est là-dedans, nous, en immigration, on est un pays d'immigration, on l'a toujours été et on va
continuer à l'être, mais on veut s'assurer que ces personnes puissent
participer à la société dans la langue commune, qui est le français.
M.
Bouchard (Éric) : Bien,
première des choses... C'est drôle, hein? Quand les gens ont des débats,
souvent, les gens, ils ont de l'air de ne pas être d'accord. Bien, ce que vous
venez de dire, je suis d'accord avec ce que vous dites. 95 %... mais ça, c'est le requérant principal. Moi, je ne peux pas
dire : Bien non, Mme la ministre, vous n'avez pas raison. Vous avez raison. Sauf que le requérant principal,
c'est : la personne est... il a soit sa femme ou son enfant et le reste
de sa famille. Et donc ça, c'est sûr et
certain que le requérant principal, c'est parfait, puis on est d'accord avec
ça, 85 %, c'est sûr, sûr, sûr.
Mais, par la suite, c'est tous ceux qui ne sont pas les requérants principaux,
qui eux... Est-ce que la francisation est obligatoire ou pas? Puis est-ce que les moyens sont là pour les
franciser? C'est sûr et certain que... Et c'est là qu'après ça on va
être en mesure dire : Ah! bien, écoutez...
M. le premier ministre, il propose 60 000
immigrants, mettons, en... On ne sait pas qui est-ce qui va être premier ministre dans trois ans, hein, parce qu'il
va y avoir des élections, mais admettons que c'est M. Couillard encore
une fois. Et donc peut-être qu'il va
dire : Bon, bien, c'est 60 000 immigrants par année. Bon, parfait,
60 000 immigrants, mais, si on
est sûrs qu'à la fois le requérant principal et le reste de la famille se
francisent et utilisent le français dans l'espace public, c'est clair que, là, on va pouvoir dire : Ah!
le seuil de 60 000 est un bon seuil. Nous, on revient là-dessus. Le
nombre, là, nous, ça nous importe peu.
Mme Weil : ...
M. Bouchard (Éric) : Allez-y, allez-y.
Mme Weil :
L'objectif comprend le conjoint, le 85 %. 95 % des requérants
principaux parlent français, mais notre objectif, le 85 %, ça, ça
comprend le conjoint. Et d'autres chiffres qui sont intéressants, c'est que,
dans...
M.
Bouchard (Éric) : Donc, qui
connaissent le français. Excusez-moi. Qui connaissent le français à
l'arrivée.
• (10 h 40) •
Mme Weil :
Oui, qui connaissent le français à l'arrivée, c'est ça. Donc, honnêtement, je
vous le dis, j'ai lu les mémoires et les interventions : tout le
monde est d'accord avec cet objectif. Ils voient qu'on va toujours plus loin.
L'autre chiffre qui est vraiment important... Et
puis ça revient à la loi 101 et l'objectif de la loi 101, qui est peut-être la disposition la plus stratégique de la
loi 101 : c'est qu'un quart des immigrants, c'est des enfants, qui
seront scolarisés en français. Et, dans le
cas des réfugiés... on regarde les chiffres, nous, on le voit, dans le cas des
réfugiés syriens, un tiers, c'est des
enfants. C'est des grandes familles. Ils sont jeunes, hein? Moi, je les
rencontre, des fois, c'est deux mois après l'arrivée, trois mois après
l'arrivée. Vous seriez impressionnés par le niveau de français.
Vous connaissez les jeunes. Bon, on parle
d'éponges. C'est des éponges, oui, mais il ne faut pas sous-estimer... Quand même, d'apprendre une langue, il
y a une difficulté là-dedans. Mais les jeunes parlent le français. Et
c'est pour ça que je vous disais qu'on a
remarqué que, sur 20 ans, le nombre
de... même issus du regroupement familial... parce que cet enfant-là
deviendra grand, et donc les personnes de sa famille qu'il va faire venir, soit
que ça provient d'un bassin francophone ou, bon, ils ont déjà le message que ça
se passe en français, mais aussi parce que nos bassins sont beaucoup
francophones. C'est peut-être la deuxième langue. Je regarde mon collègue de
Bourget évidemment, hein?
Donc, ça, c'est le portrait global, et il y a
des indices positifs dans tout ça qui conditionnent, donc, cette planification. Et j'aimerais rappeler qu'on
stabilise des volumes, hein? On fait un exercice, là, on propose un
exercice sur trois ans. Et la raison pour
laquelle on veut stabiliser les volumes, la vision derrière ça, c'est parce
qu'il y a une grande réforme en
immigration actuellement qui touche beaucoup vos préoccupations. Bon. La grande
réforme, en partie, c'est l'intégration rapide en milieu de travail,
mais amener les gens en région. Et les gens parlent beaucoup aussi d'aide de francisation en milieu de travail, et ça,
donc, on l'entend de tout le monde, d'avoir plus une offre diversifiée parce que des gens on peut-être un certain
niveau, mais ils souhaitent atteindre un niveau plus élevé au plan professionnel.
Donc, ça, j'aimerais vous entendre là-dessus, sur le français en milieu de
travail.
Et, je ne sais pas si vous le saviez, mais, dans nos crédits 2016‑2017,
on a rajouté 4 millions en francisation, c'est un sommet historique.
Et on a lancé une campagne de promotion de la francisation pour rejoindre des
clientèles qu'on a plus de difficultés à
rejoindre, qui est le regroupement familial. Ce n'est peut-être pas des gens
destinés toujours au marché du
travail, ça peut être la mère, et ses enfants sont à l'école, son mari
travaille, mais, elle aussi, on voudrait qu'elle participe à la société
en français.
Donc,
je vous donne ces morceaux-là parce que c'est quand même des morceaux, moi, je
trouve, stratégiques, avec plus
d'argent pour atteindre notre but pour que, oui, en effet, l'immigration
contribue au fait français au Québec, et qu'on continue toujours dans
cette marche, et de ne pas perdre les gens aussi parce qu'ils n'ont pas un
niveau de compétences assez élevé, qu'ils vont partir en Ontario ou ailleurs au
Canada.
M.
Bouchard (Éric) : Plusieurs
choses. Une chose qu'il faut différencier pour ceux qui nous écoutent, il y a
une différence entre connaître une langue et
l'utiliser dans l'espace public. Donc, qu'il y ait 85 % des gens, des
requérants principaux, qui connaissent le
français, c'est super. Et je vous donne l'exemple : si moi, j'immigrais en
Espagne, on pourrait dire :
Éric Bouchard connaît l'espagnol. Puis je connais aussi le catalan. Mais
quelle langue que je parlerais à Barcelone d'après vous? Je parlerais catalan. Donc, dans les chiffres du
gouvernement espagnol, je serais considéré comme quelqu'un qui connaît l'espagnol puis qui vient contribuer
au fait espagnol en Espagne. Mais, dans les faits, je parlerais
uniquement catalan parce que la langue que
je parlerais avec mes amis, avec les gens avec qui je travaille... Donc, l'importance
de la langue utilisée dans l'espace public et la langue utilisée à la
maison, donc la connaissance, c'est une chose, mais l'utilisation...
Et pour que
l'utilisation soit bonifiée dans l'espace public, et ça, on en parle dans le
mémoire, il faut qu'il y ait un arrêt
du bilinguisme institutionnel de l'État. Donc, encore une fois, au niveau du
bilinguisme individuel, on en est, c'est
certain. Je serais bien mal placé de dire que je suis contre le fait de parler
plusieurs langues, j'en parle quatre. Mais, après ça, c'est dans l'espace public, le comportement de l'État fait en
sorte que, oui, il y a des gens qui vont connaître le français, mais, si l'État leur répond en anglais
de façon systématique, ça va faire en sorte qu'eux vont dire : Bon,
bien, j'ai le choix entre le français et l'anglais. Et c'est après l'arrivée
qui fait en sorte que l'espace montréalais, parce que c'est principalement... c'est là que ça se passe, on est
dans une période d'anglicisation, et on le voit, et on le sent à tous les
jours.
Moi, je suis
natif de Montréal, et on voit l'évolution, là. À chaque année, là, on va
toujours une rue plus à l'est, puis on
va toujours un peu plus loin à Longueuil, moi, je demeure à Longueuil, puis, à
Laval, ça s'anglicise toujours un peu plus.
Donc, il y a des preuves des faits, il y a des
statistiques, puis il y a le fait que je reviens à ça : s'il y a
50 000 immigrants par année, mais la composition est beaucoup plus
francophone de langue maternelle, pas seulement la connaissance, mais de langue
maternelle, ça vient aider la francisation à Montréal, le fait français dans
l'espace public. Ah! c'est votre tour de parler, Mme la ministre.
Mme Weil : Non, non, c'est
toujours votre tour, mais...
M. Bouchard (Éric) : Oui, mais c'est
votre tour d'intervention.
Mme Weil : ...mais je voulais
compléter, mais ça dépend combien de temps il me reste.
Le Président (M. Picard) : Il
vous reste quatre minutes.
Mme Weil : Mais je pense que
je vais vous donner des chiffres parce que ça va être important d'avoir votre réaction. Je viens d'avoir ces chiffres du MIDI,
une étude qui a été faite. 89,1 %, donc 90 % des Québécois
communiquent surtout en français avec
l'administration publique. 88,1% des Québécois communiquent en français avec la
banque. 88 % des Québécois communiquent... bien, c'est toujours
surtout en français, c'est-à-dire que peut-être qu'il y a un mot en anglais, mais surtout en français dans les centres
d'achats. 92,4 % des Québécois communiquent surtout en français au CLSC.
Vous parliez de l'interaction avec l'administration publique et le... appuyez
sur neuf... Je pense bien que j'ai appuyé sur...
M. Bouchard (Éric) : «Press nine».
Le «press nine».
Mme Weil : Cinq. Ce n'est pas
neuf, oui. Donc, je ne sais pas si vous aviez ces chiffres-là.
M. Bouchard (Éric) : Bien, ça, c'est
l'étude qui est sortie en décembre 2014, je crois, de l'OQLF...
Mme Weil : ...conscience
linguistique et usage du français, en 2013, mais...
M.
Bouchard (Éric) : En tout cas, c'est les Québécois avec les interactions dans l'espace public. Ce
qu'on voit dans une de ces études-là...
Mme Weil : ...
M.
Bouchard (Éric) : Donc, c'est ça, les Québécois... Bien, les Québécois, ça comprend tous ceux qui sont sur le territoire, donc ceux qui
sont immigrants aussi. Et l'étude nous montre que...
Mme Weil : Dans ça, là, je pourrais vous le donner, mais il
y a aussi les chiffres sur les immigrants. Donc, on voit que la majorité
communique en français.
M. Bouchard
(Éric) : Bien, les chiffres sur les immigrants, ce que ça nous dit,
c'est que les gens qui sont desfrancotropes,
donc ceux qui sont de pays de langue latine ou de pays qui ont été colonisés
dans le passé par la France,
donc, exemple, les pays du Maghreb, ces gens-là utilisent dans l'espace public énormément
de français. Ceux qui sont non francotropes
utilisent très, très peu le français dans l'espace public. Et c'est
pour ça que je parle beaucoup
de la composition, qui est importante.
Mme Weil :
Mais aussi l'évolution. Et c'est ça que les chiffres montrent. Donc, ceux qui
sont ici depuis plus de 10 ans, c'était 72,4 %
des personnes immigrantes qui avaient ce contact, donc, avec l'administration en français. Ensuite, il y a eu une progression, parce que ceux
qui sont ici depuis cinq, 10 ans, c'est 76,5 %. Et ceux qui sont ici
depuis cinq ans et moins, c'est 83,3 %.
Ça, ce n'est pas un hasard. C'est les politiques de sélection qui donnent ce résultat-là. Donc, on est allés chercher dans les bassins francophones ou francotropes. Il
y a eu beaucoup de francophones ces 10, 15 dernières
années avec vraiment des stratégies de promotion, de prospection importantes.
Aussi, le message qui a été véhiculé... Là,
nous, on le voit même dans la l'admission. Là, avec le niveau 7, c'est donc
encore plus important. Donc, c'est des stratégies... C'est de vous
entendre sur cette progression... quand
même, il y a une progression... et
qu'on peut agir sur cette progression
par les orientations qu'on vous propose aujourd'hui, autant par la réforme qu'une stabilisation pour permettre justement
que nos programmes donnent les résultats qu'on souhaite et qu'ils vont dans le
sens de ces chiffres.
M. Bouchard
(Éric) : M. le Président, il nous reste combien...
Le Président (M.
Picard) : ...
M. Bouchard
(Éric) : Donc, le syndicat de la fonction publique, écoutez, ce n'est quand
même pas banal, il y a un 42 000
membres. Il y a un exécutif, puis il y a eu un congrès, puis les gens
disent : il y a un problème dans la région de Montréal particulièrement. Nous, les commis de l'État,
lorsqu'on fait affaire avec les gens devant nous, la langue dans
laquelle plusieurs personnes vont s'adresser à nous, puis les gens qui sont
souvent issus de l'immigration, très, très, très souvent, c'est l'anglais. Et, nous, comme
travailleurs, on n'a pas de directives claires que ça doit être en français,
donc, qu'on doit parler. Donc, le commis de
l'État doit faire l'arbitrage constamment
entre : Je dois-tu parler en français, pas en français, les cotes
de langue. On en a déjà entendu parler, des cotes de langue. Donc, je comprends
qu'il y a une progression, je comprends que
ça va mieux, Mme la ministre. Je ne peux pas contester l'étude tu sais, puis
les chiffres que vous venez de dire.
Mais, en même temps, peut-être qu'en pourcentage ça va mieux, mais, comme il y
a beaucoup plus de gens qui arrivent,
il y a beaucoup plus de gens aussi, en nombre, qui ont une interaction avec
l'État, et ça ne se passe pas nécessairement
en français. Et ça, parce que les pourcentages, c'est une chose à regarder,
mais 1 % de 100 personnes, c'est une
personne. 1 % de 50 000 personnes... il faudrait que je le calcule.
Je ne l'ai pas tout de suite, mais c'est beaucoup plus de gens, donc
c'est sûr et certain...
Le Président (M.
Picard) : Merci.
M. Bouchard (Éric) : Ah! pardon.
Le Président (M.
Picard) : Merci. M. le député de Bourget. C'est 9 min 30 s.
M. Kotto :
Merci, M. le Président. «Donc, c'est sûr et certain», je vous laisse continuer.
• (10 h 50) •
M. Bouchard (Éric) : Donc, si on revient sur l'exemplarité de l'État, l'étude que vous
citez, Mme la ministre, il est clair
qu'on voit une progression, mais, s'il y a 50 000 personnes par année qui
franchissent le territoire du Québec puis qu'il y a x pourcentage de la population, que ce soit 15 % ou 8 %,
c'est quand même un bon nombre, tu sais. 10 % de 50 000, c'est
quand même 5 000 personnes par année qui se concentrent toutes autour de
Montréal. C'est 5 000 personnes qui
interagissent avec l'État en anglais. Et, si l'État le permet, le message
envoyé, c'est de dire : Tu peux choisir. Et donc, après ça, ça se répercute. C'est que tu n'as pas
besoin d'apprendre le français. Si tu n'as pas besoin d'apprendre le
français, bien là, tu te trouves un emploi, et là, dans un de tes emplois, bien, la
langue qui va être parlée avec tes collègues, si tu ne sais pas le français, bien, ça va être souvent
peut-être pas l'anglais, mais une espèce de «globish». Et donc, là,
finalement, quand tu arrives, toi, comme
citoyen immigrant par la suite et tu t'en vas aux Galeries d'Anjou, bien, il
est clair que tu t'adresses au commis qui te vend ton téléphone
cellulaire... tu vas t'adresser en anglais, ce qui fait en sorte que les
employeurs exigent l'anglais parce qu'ils se disent : Je ne veux pas perdre
une vente parce que, si, chez Vidéotron, la personne,
elle ne peut pas parler en anglais à ce client-là, ce client-là va aller chez
Telus... et donc une bilinguisation du monde du travail à cause de ça.
Et
donc, là, on n'arrête pas de dire que, pour franciser, au Québec, il faut que
tu puisses travailler en français, mais, pour travailler en français, il faut que les conditions d'embauche... ne
soit pas exigé le bilinguisme, mais, pour ne pas exiger le bilinguisme, il faut que la population sache,
qu'il y ait un message clair, que ça se passe en français. Les natifs le
savent bien, ils sont nés, ils ne se forcent pas, ils se lèvent puis la
majorité, ils vont parler en français. Mais ceux qui arrivent d'ailleurs, même si la proportion, comme vous
dites, tend à s'amenuiser, de ceux qui s'expriment en anglais, il y a
quand même... si c'est seulement 10 %
de 50 000 par année, c'est quand même 5 000 personnes à chaque année
qui s'ajoutent dans la région de
Montréal, mais 5 000 sur 10 ans, ça fait 50 000 sur le territoire
montréalais qui s'adressent en anglais à l'État, puis ils s'adressent en anglais non seulement à l'État, mais à
tous les commis de tous les magasins, et c'est là qu'on bilinguise les
milieux de travail.
Ça fait que, même si l'État met énormément
d'efforts, met des programmes, que vous proposez des... Je n'ai pas contesté du tout ce que vous proposiez, Mme la
ministre, hein, on n'a pas dit : Ça n'a pas de bon sens. Nous
autres, on dit :
Il faut aller plus loin. Donc, aller plus loin, si on veut optimiser tout ça,
il est clair qu'il faut connaître c'est quoi, le prix unitaire, tu sais, le coût unitaire de franciser un immigrant. Ça,
ça n'a pas de bon sens qu'on ne sache pas ça. On envoie des gens sur la lune, on bâtit des avions au
Québec, mais on nous demande des redditions de comptes pour, disons,
faire une demande de prêt comme organisme sans but lucratif, on nous demande
toutes sortes de documents. Il faut prévoir sur cinq ans à la cent près ce qu'on va dépenser, et, lorsque ça vient le
temps de dire : Il y a des budgets pour la francisation de l'immigration, on ne sait pas c'est quoi, le coût
unitaire. Donc, si 20 000 personnes sur 50 000 ne parlent pas
français à l'arrivée, il faut savoir
combien on peut investir. Et là ça va permettre aux partis d'opposition de
dire : Vous faites un bon travail
ou pas, parce que, là, s'ils regardent les chiffres, ils disent : Mme la
ministre a promis tel budget pour franciser, il y a 20 000 immigrants qui arrivent qui ne parlent
pas français, ça coûte 20 000 $, Mme la ministre met le
400 millions, des groupes comme nous, on va vous féliciter, et les
partis d'opposition ne pourront pas dire que vous faites un mauvais travail puis vous non plus, même, vous allez
pouvoir dire : J'en ai un peu plus si vous mettez 500 millions par
année. Mais, si vous mettez
250 millions, là, les partis d'opposition vont pouvoir dire : Ça n'a
pas de bon sens, parce que c'est beau, elle a peut-être augmenté, Mme la
ministre, de 5 ou 6 millions, mais, pour être optimal, il faudrait qu'il y
ait tant d'argent.
Donc, le coût unitaire, on ne fera pas ça
aujourd'hui, hein, on s'entend-u, mais ce qui se pourrait, dans les prochaines
années : ce soit établi. Nous, on est venus pour demander ça.
Alors, M. le député de Bourget, je pense, j'ai
répondu à votre... quand vous m'avez relancé la balle.
M. Kotto :
Tout à fait. M. Bouchard, M. Rivard, merci d'être là ce matin, et on vous
écoute religieusement, sachant pertinemment
que l'enjeu sur la table, ici, en commission, en est un que vous maîtrisez tous
les deux sur le bout des doigts.
Je voudrais
cependant continuer avec vous sur la question de l'obligation de la
francisation. Considérant l'entente Canada-Québec, considérant les deux
chartes des droits, considérant la place du Québec à l'intérieur de la
fédération, la pseudo fédération
aujourd'hui, comment est-il possible d'obliger un immigrant à se franciser, un
immigrant adulte? Parce que la loi 101 couvre les enfants, les moins de
18 ans, mais les adultes, en référence à l'entente Canada-Québec, en référence aux deux chartes, comment cela serait-il
possible? Ne serait-il pas plus logique que l'État, lui, soit obligé de
faire ce travail, que l'État soit obligé de
rendre des comptes relativement à la francisation plutôt que de mettre l'obligation
sur les immigrants, compte tenu des blocages potentiels au plan du droit, tout
simplement?
M. Bouchard (Éric) : Vous savez, il
y a plusieurs choses dans ce que vous avez dit. Je ne sais pas combien il me reste de temps. Mais, première chose, on est
dans une... tu sais, il y a un partage des pouvoirs, et tous les élus
de l'Assemblée nationale, peu importe le parti confondu, peu importe l'orientation, que ce soit pour faire la souveraineté du Québec ou de dire qu'on reste dans le Canada — tu sais, il y a des orientations de parti
claires depuis longtemps — on peut demander, comme État, et les parlementaires
peuvent s'unir ensemble... Et c'est ce qu'a fait Robert Bourassa
lorsqu'il est allé chercher des pouvoirs en
matière d'immigration. Et donc, là, il pourrait y avoir quelque chose qui
dirait : Écoutez, on négocie avec le Canada, et le Canada, on veut
avoir quoi? Nous, on veut que, pour ceux qui font une demande...
M. Kotto : Juste une
parenthèse, M. le Président.
Le Président (M. Picard) :
Allez-y, M. le député.
M. Kotto : Aller renégocier, c'est aller renégocier
l'entente, ce qui met le Québec à risque, parce que le Québec, face aux autres provinces, est envié, c'est une
cible. Les autres provinces considèrent qu'il y a une inéquité d'avoir
demandé, d'une part, autant d'argent, au Québec, et autant de marge de
manoeuvre relativement aux pouvoirs en matière de politique d'immigration. Vous
êtes bien sensible à ça?
M.
Bouchard (Éric) : Je suis
sensible. Mais, vous savez, je suis
amateur de sport, puis, si vous êtes amateur de sport, moi, je préfère toujours les équipes un peu plus offensives,
hein, puis il y a du monde qui prépare les choses un peu plus
défensives. Moi, pour ma part, je trouve qu'il y a peut-être
un risque, mais je ne dis pas que c'est la solution optimale, mais de dire : On va renégocier avec Ottawa,
et Ottawa peut dire ce qu'il veut par
la suite. Si Ottawa dit : On
n'est pas contents, on vous refuse
tout ça, ça sera aux Québécois de décider, par la suite, des conséquences
du refus du Canada. Mais on a le
droit de demander que, pour tout demandeur, tout requérant principal qui
demande au Québec d'immigrer, hein, quelqu'un qui obtient un
certificat de sélection, bien, à la fin, lorsque vient le temps de dire :
On t'octroie ta citoyenneté ou pas, bien, ceux qui ont fait la demande
au Québec, souvent bien des années avant, bien... Parce que le Canada, il y a
une discrimination à l'entrée au Canada, c'est de dire : Il faut que tu
connaisses une des deux langues, soit le français ou l'anglais. Donc, il y a déjà une discrimination sur une des deux langues.
Donc, se pourrait-il qu'on demande à Ottawa de dire : Non, mais, nous, ceux qui font une demande au Québec,
qui ont un certificat de sélection du Québec, bien, que ce soit seulement la connaissance
du français? Donc, ça, c'est un incitatif majeur pour la personne qui veut
devenir un citoyen canadien de dire : Il faut que j'apprenne le français.
Donc, ça, c'est la partie incitative.
Mais
il pourrait aussi avoir une autre partie qui est plus, disons... c'est
difficile de s'exprimer là-dessus, mais, disons, plus punitive, de dire : Tant que tu n'as pas atteint le niveau 7,
le niveau 7 de connaissance du français, puis le niveau qui permet de
travailler en entreprise et de s'envoyer des courriels pour les gens, tu sais,
qui ne comprennent pas nécessairement tout le jargon de la connaissance des langues, bien, tant que tu n'as pas atteint le niveau 7, eh bien,
tu n'es pas en mesure d'avoir tel ou
tel permis ou droit à l'intérieur du Québec, exemple, un permis de conduire. Mais ce
n'est pas la solution optimale, là, que je
dis là, c'est le travail des députés d'en discuter. Nous, on est là pour amener
des choses sur la place publique, on
ne détient pas la vérité, je peux vous le dire, et donc là on amène... on
essaie d'amener de l'eau au moulin pour la discussion, et donc, là, lorsque...
Et puis là, ça, c'est la partie, disons, qui a de l'air un peu plus punitive, mais, après ça, il
faut aider l'immigrant. Donc, et de dire, si on dit : Il a un délai de 24 mois pour apprendre le
français, bien, il faut donner des
moyens pour que les gens puissent être sur les bancs d'école et l'apprendre, le
français, que ce soit dans tous les
programmes que Mme la ministre proposait, c'est-à-dire soit le français sur les
lieux de travail, soit autour des écoles, soit un peu partout dans
l'ensemble de l'offre qui est donnée en cours de francisation.
Le Président (M.
Picard) : Merci. Merci, M. Bouchard. Mme la députée de
Montarville, pour une période de 6 min 30 s.
Mme
Roy (Montarville) : M. Bouchard, M. Rivard, merci d'être là,
merci du mémoire. Ce matin, dans mon lit, je lisais l'article du Devoir, que je trouvais fort intéressant
d'ailleurs, votre lettre ouverte. La question est bonne : Quel est le coût
unitaire? Mais je vous dirais que c'est
difficile, hein? On a un montant global, et puis il n'y a pas un individu dont
l'investissement pour la francisation sera
le même montant. Certaines personnes, le cours pourra prendre plus de temps,
d'autres moins. Donc, c'est difficile
à évaluer. Et on sait qu'il y a une enveloppe. On sait que l'enveloppe... Il y
a beaucoup de cours de francisation,
cependant, qui ont été coupés au cours de la dernière année, ce qui est un peu
beaucoup dommage, puisqu'il est très important de franciser nos nouveaux
arrivants.
J'aimerais vous
amener sur les recommandations que vous formulez et en poser une de façon plus
globale : Quelles modifications souhaiteriez-vous que le MIDI fasse à la
grille de sélection relativement à la connaissance du français? Parce que vous
en parlez un peu partout. Pourriez-vous être plus précis relativement à cette
grille-là?
• (11 heures) •
M. Bouchard (Éric) : Bien, O.K. Il y a plusieurs volets, parce
qu'on s'entend, là, l'immigration, hein, tous les programmes, bon, les différentes catégories, c'est
assez vaste. Exemple numéro un, par rapport à la connaissance du
français niveau 7, c'est déjà exprimé dans
le programme PEQ, par exemple. Si tu veux pouvoir, dans le fond, déposer, dans
le fond, une demande, bien, que tu
sois dans une université de langue française ou anglaise, si tu as le niveau 7,
tu peux faire une demande et là, donc, étudier au Québec puis, finalement,
tu as comme une... c'est quelque chose de facilitant pour t'amener... Dans le fond, c'est un peu l'autoroute
express de l'immigration. C'est un peu l'idée, dans le fond, de la
réforme, si je ne m'abuse, Mme la ministre.
Donc, ça, c'est une chose. Donc, le niveau 7, ça sert à ça. Donc, quand on
établit un barème, ça, ça veut dire
que c'est le niveau qu'on veut atteindre comme société pour que les gens
puissent travailler. Et donc, ça, c'est le niveau, donc, le programme
PEQ.
Moi,
il est clair que ce qui arrive souvent là-dedans, c'est que nous, on
préférerait que ce soit dans une université de langue française, dans des programmes en français. Pourquoi? Bien, parce
qu'il est clair que les gens peuvent connaître le français, mais, si tu as étudié l'ensemble, comme
immigrant, de tout ton parcours universitaire, ou que ce soit collégial,
en anglais, bien, il est clair que tous les
termes puis tout ton apprentissage pour ta langue de travail va se faire en
anglais. Ça fait que, oui, tu vas connaître
le français, mais, comme immigrant, lorsque tu vas arriver sur le milieu du
travail, tu vas pouvoir discuter avec
tes collègues en français, mais la langue dans laquelle tu vas travailler, ça
risque d'être l'anglais. Donc, programme PEQ, ça, c'est un exemple.
Et
donc, sur la grille de sélection, pour revenir là-dessus, il est clair qu'on
pourrait favoriser de dire : Ah... Il ne faut pas pénaliser ceux qui connaissent l'anglais.
C'est ça, l'affaire. Et donc, là, de dire : Les points accordés à
l'anglais devraient être donnés
seulement à ceux qui ont le niveau 7... Parce que ce qui arrive, c'est que tu
peux être admis au Québec en étant marié avec trois enfants, puis que tu
as en bas de 35 ans, puis tu as un diplôme, là, hein — je
brosse ça de façon très arrondie — tu peux arriver au Québec sans connaître
le français puis tu peux connaître l'anglais. Donc, mettons, quelqu'un qui
vient de l'Inde ou du Pakistan, donc, lui, il va parler l'anglais, ça va être,
tu sais, sa deuxième langue, il va arriver au Québec, il va pouvoir immigrer,
et finalement, dans la grille de sélection, ses points sur le français ou l'anglais ne seront pas... même, il va peut-être
pouvoir passer parce qu'il a des points en anglais. Donc, donner les
points à l'anglais seulement à ceux qui ont
le niveau 7, ça, ça permettrait de faire en sorte que ceux qui sont juste sur
le bord, tu sais, de passer ou de ne
pas passer, bien, on s'assurerait... le niveau 7, là, c'est quand même un bon
niveau... ça ferait en sorte qu'on
aurait... oui, la personne connaît l'anglais, mais elle connaît aussi très bien
le français. Donc, on serait sûrs d'avoir un travailleur qui serait plus, disons, pas juste un bilingue fonctionnel,
quelqu'un qui connaît très, très bien le français pour travailler et
quelqu'un qui, oui, connaît l'anglais, mais qui obtient seulement ses points
pour la grille de sélection s'il connaît le niveau 7. Ça va?
Le Président (M.
Picard) : Mme la députée de Montarville, deux minutes.
Mme
Roy (Montarville): Oui, j'ai très peu de temps. Donc,
le niveau 7, on s'entend, vous êtes d'accord avec le niveau 7 qui est
proposé.
M. Bouchard
(Éric) : ...
Mme
Roy (Montarville): Bon. À l'égard des ressources,
naturellement, toute la question du calcul, à savoir est-ce qu'on a la possibilité de bien franciser nos immigrants,
c'est la question que vous posez, justement, à Mme la ministre, au
MIDI... Moi, je vous poserais une autre
question. Au niveau de cette grille de sélection, est-ce que vous avez des
recommandations, des suggestions au niveau de la provenance des nouveaux
arrivants?
M. Bouchard (Éric) : Franchement,
non, parce que, pour la provenance, il est clair que... Regardez, on privilégie, on dit : C'est sûr que quelqu'un
qui vient d'un pays francophone, qui est francophone ou qui vient d'un
pays francotrope,
c'est sûr que ça, il faut que ce
soit privilégié. Mais on ne peut pas
dire : Ah! On ne veut pas du monde, mettons, de l'Asie, on ne veut pas du monde du Pakistan,
mais on veut du monde d'Amérique latine. Tu sais, tu ne peux pas le
faire à travers une grille de sélection. Et
c'est pour ça que les points sur la langue, c'est là qu'ils sont importants.
C'est là que tu peux dire à des gens, sans discrimination, tu sais, d'où
est-ce que tu viens, tu peux dire : Ah! tu n'auras tes points de
l'anglais, de connaissance de l'anglais que si tu as le niveau 7. Et c'est ça
qui va influencer la provenance. Donc, la composition
de la grille va influencer la provenance, mais tu ne peux pas dire, de prime
abord : Vous, on vous prend ou vous, on vous prend moins ou un peu
plus en fonction du territoire d'où les gens viennent.
Mme Roy
(Montarville) : Je vous remercie, parce que j'avais cru
comprendre l'inverse. Alors, je suis contente que vous précisiez à cet
égard-là. Merci beaucoup pour votre mémoire.
Le Président (M. Picard) :
Merci, MM. Rivard et Bouchard, pour votre contribution aux travaux de la
commission.
Je vais suspendre quelques instants pour
permettre au prochain groupe de prendre place. Merci.
(Suspension de la séance à 11 h 5)
(Reprise à 11 h 8)
Le
Président (M. Picard) :
Nous reprenons nos travaux en recevant l'Association canadienne des
conseillers professionnels en immigration,
qui sont représentés par Mme Isabelle
Vachon et M. Louis-René Gagnon. C'est bien ça? Donc, vous disposez d'une période de 10 minutes pour faire votre exposé,
vont s'ensuivre des échanges avec les parlementaires. Donc, la parole
est à vous.
Association canadienne
des conseillers
professionnels en immigration (ACCPI)
Mme Vachon (Isabelle) : Merci.
Bonjour, M. le Président, Mme la ministre, MM., Mmes les députés. Je me nomme
isabelle Vachon, je suis la présidente de la section du Québec de l'Association
canadienne des conseillers professionnels en
immigration. Je veux remercier la commission de nous avoir invités à présenter un mémoire
devant elle. M'accompagne ce matin M. Louis-René Gagnon, professeur de
droit de l'immigration au collège Saint-Laurent, qui agit comme conseiller
technique pour la préparation de notre mémoire.
L'ACCPI est
l'association professionnelle pancanadienne des consultants en immigration qui
les représente et leur fournit des
services d'information et de perfectionnement. Elle agit distinctement,
mais de concert avec le CRCIC qui est l'organisme
de réglementation et de discipline. Notre section du Québec compte 141 membres,
soit la grande majorité des consultants inscrits au registre des
consultants en immigration.
Nos points de
vue sur les orientations. Orientation 1 : Les niveaux d'administration.
L'ACCPI est persuadée que l'immigration
influence la croissance démographique, ce qui contribue à la croissance
économique et ainsi soutient la prospérité du Québec. Comme le
démontrent les plus récentes perspectives démographiques de l'ISQ pour la
période de 2011 à 2061, il faudra admettre
60 000 immigrants chaque année pour éviter au Québec un recul de sa
population en âge de travailler en
dessous de son niveau de 2011. Rappelons que le Canada, pour 2016, vise à accueillir
300 000 immigrants, alors que ce
nombre était de 279 000 pour l'année 2015. Si le Québec exerçait
pleinement le droit que lui confère l'Accord Canada-Québec d'accueillir
son poids démographique du mouvement d'immigration canadien, sa cible
d'admission pour 2016 serait déjà de 60 000 personnes.
• (11 h 10) •
Nous sommes conscients que certains affirment
que ce nombre dépasse la capacité d'accueil du Québec. Les consultants en
immigration connaissent très bien les difficultés d'intégration sur le marché
du travail de leur clientèle. Toutefois,
nous pensons qu'à l'intérieur de paramètres raisonnables la capacité d'accueil
est avant tout une question de leadership politique. Quand on veut, on
peut. Les décisions très différentes que les gouvernements ont prises en
réaction à la crise des réfugiés syriens, tant en Amérique du Nord qu'en
Europe, sont éloquentes à cet égard.
Orientation 2 : La part de l'immigration
économique. Nous sommes d'accord avec cette orientation, mais il n'y a rien de sacré dans la répartition 65 %
économique et 35 % humanitaire et familial. Ce n'est pas parce qu'une
crise humanitaire produit davantage de réfugiés que nous devrions réduire le
nombre de travailleurs qualifiés. En somme, ce 65 % devrait être compris
comme un plancher et non un plafond qui justifierait de limiter le nombre
d'immigrants économiques. Par ailleurs, il
faudrait augmenter le nombre pour les gens d'affaires. Si des gens intéressés
répondent aux exigences des programmes, selon quelle logique devons-nous
limiter le nombre des entrepreneurs ou des travailleurs autonomes à 150 et 50, comme on l'a fait en 2016? Avons-nous trop de
gens d'affaires au Québec? Pour les investisseurs, nous proposons de
progressivement hausser les quotas et d'améliorer la rétention en relevant le
seuil de passage pour favoriser les candidats qui obtiennent davantage de
points pour les facteurs de sélection autres que la convention d'investissement et l'expérience de gestion qui, à
eux seuls, permettent de récolter 35 %, alors que le seuil de
passage n'est que de 40 %. Puisque ce sont les gens d'affaires qui font le
plus appel aux représentants pour les épauler dans leur DCS, nous croyons que
l'ACCPI devrait être étroitement associée aux réflexions sur les réformes
envisagées par cette catégorie.
Orientation 3 : Augmenter à
40 % en 2019 la part du PEQ. Nous sommes d'accord avec cette cible de
40 %, mais nous suggérons, pour
l'atteindre plus facilement, des modifications au PEQ, dont vous trouverez les
détails dans le texte de notre mémoire.
Orientation
4 : Fixer à 85 % la proportion de connaissance du français. L'ACCPI
appuie la volonté d'atteindre cette cible, mais il faut éviter d'exclure
les candidats de valeur, notamment en faisant du critère linguistique un
facteur éliminatoire dans la sélection.
Orientation
5 : Sélectionner au moins 70 % des travailleurs qualifiés détenant
une formation en demande. L'ACCPI appuie
cette orientation à condition que la LDF soit assez large et souple pour éviter
que cela ne devienne une barrière à l'obtention
d'un CSQ À cet égard, dans un nouveau système de déclaration d'intérêt où c'est
le ministère qui invite une personne
à déposer une demande, le MIDI devrait surseoir à la règle de l'application
immédiate lors de modifications de la LDF
pour ceux qui ont déjà déposé une demande. Puisqu'on nous promet des délais de
traitement rapides, il serait équitable de ne pas changer les règles en
cours de traitement.
Orientation
6 : Maintenir à 65 % la part des moins de 35 ans. Nous appuyons cette
orientation. Cependant, nous suggérons,
afin de quand même permettre à des familles dont les parents sont plus âgés que
35 ans d'être plus facilement sélectionnées,
de débloquer la grille de sélection du plafond du critère de présence d'enfants
qui est maintenant limitée à huit
points. Cela augmenterait la présence des jeunes enfants dans le flux
migratoire, tout en incluant des familles dont les parents sont un peu plus âgés que 35 ans. À ce
propos, il faut noter que, particulièrement chez les femmes qui occupent
un emploi professionnel, l'âge lors de la
venue d'un premier enfant a tendance à augmenter un peu partout dans le
monde.
Orientation
7 : Contribuer à la régionalisation. L'ACCPI est favorable à un
accroissement des efforts en matière de
régionalisation. Cependant, comme nous sommes impliqués principalement dans la
phase de sélection, nous suggérons que
les critères de sélection comportent un avantage réel pour les clients qui se
destinent hors de Montréal. Actuellement, le seul avantage tangible de se destiner en région est un différentiel de
deux points si on obtient une offre d'emploi validée par le MIDI hors de
Montréal.
Orientation
8 : Favoriser la diversité du mouvement migratoire. L'ACCPI considère
cette diversité comme une bonne
chose, mais elle met en garde le gouvernement contre la tentation d'utiliser
des quotas fondés sur l'origine nationale pour y parvenir. Nous voulons être certains que le nouveau système
québécois de déclaration d'intérêt évaluera uniquement des individus et non pas des pays. L'origine
nationale ne doit pas être un motif pour refuser de traiter la demande
d'une personne que l'on a invitée à
présenter une demande d'immigration. Si le Québec veut prendre les meilleurs
candidats, seule leur capacité individuelle doit être prise en compte. Leur
pays d'origine ne doit pas entrer en considération.
Orientation 9 :
L'engagement humanitaire du Québec. L'ACCPI appuie sans réserve le Québec dans
son engagement humanitaire. Nous voulons
simplement souligner notre souci de ne pas prendre prétexte de cet
engagement pour réduire le nombre de
personnes admises dans les autres catégories. À propos des réfugiés, nous suggérons que le Québec, à
l'instar des autres provinces, crée un registre centralisé de tous les services
disponibles pour les réfugiés.
En
terminant, nous voulons également vous faire part de nos préoccupations dans le
contexte de transition de la nouvelle
loi et d'un nouveau système de déclaration d'intérêt qui seront mis en oeuvre pendant la période 2017‑2019 :
Premièrement, être
consultés lors de l'élaboration de la nouvelle réglementation du système de
déclaration d'intérêt;
Deuxièmement, nous
appuyer pour assurer la formation continue de nos membres;
Troisièmement, une
mise en oeuvre équitable du système de déclaration d'intérêt en n'appliquant
pas aux demandes déjà déposées les changements aux règles;
Quatrièmement, et
dernier point, réserver aux opérations d'immigration l'utilisation des fonds
générés par la tarification des demandes
d'immigration. Peu de gens savent que les opérations de sélection des
immigrants ne coûtent rien aux
contribuables québécois. L'étude du cahier explicatif des crédits 2015‑2016 du
MIDI a permis d'apprendre que, lors de la
dernière année budgétaire, le Québec a récolté plus de 41 millions en
frais de tarification des demandes d'immigration. Cela dépasse largement
les frais d'opération de sélection encourus par le MIDI, et cela même si on y
ajoute certains coûts encourus par le MRI à l'étranger.
Vous
trouverez, dans le texte de notre mémoire, plus de précisions concernant ces
quatre préoccupations. Je vous remercie de votre attention.
Le Président (M.
Picard) : Merci, Mme Vachon. Je cède maintenant la parole
à Mme la ministre pour une période de 15 min 30 s.
Mme
Weil : Merci,
Mme Vachon et M. Gagnon. Merci pour votre participation. On va en profiter parce que
vous, vous avez une expérience qui est vraiment...
peu de gens qui viennent en commission
parlementaire qui
connaissent... Vous connaissez des cas particuliers. Vous avez vu toutes sortes
de parcours. Vous avez vu les embûches. Vous avez vu, au fil des années, les
transformations, les changements. Mais, globalement... bon, on va peut-être y
aller un par un.
Le
volume, bon, le volume, le nombre de personnes qu'on souhaite admettre, vous
souhaiteriez qu'on l'augmente pour avoir plus de travailleurs qualifiés.
Maintenant, vous comprenez les vases communicants entre l'immigration surtout
humanitaire... J'aimerais vous entendre sur cet objectif, bon, c'est-à-dire
qu'on maintient cet engagement, mais c'est difficile de...
Et,
d'ailleurs, excusez-moi parce que j'ai tendance à ne pas parler dans... là, ça
va mieux, hein, sûrement? Oui. On s'excuse de ça.
Donc,
c'est des vases communicants, et il y a une grande réforme aussi qu'on met en
branle. Alors, ça, c'est le troisième
pilier de cette grande réforme pour nous permettre d'aller de l'avant. Vous
voulez consulter la population sur tous
ces éléments. Et les orientations reflètent justement les changements au projet
de loi n° 77, la déclaration d'intérêt.
Donc,
en regardant les volumes qu'on propose, l'intention, ici, c'est de... la
dernière des choses à faire, dans toute initiative de transformation profonde, quel que soit le domaine, c'est
de ne pas mettre une pression additionnelle alors qu'on est en train de
changer un système. Alors, c'était la prudence.
Oui, on
connaît les prévisions démographiques. On voit que les personnes en âge de
travailler sont en décroissance. C'est
pourquoi, la troisième année, on augmente. Mais, vous, vous dites : Vous
devriez augmenter de façon plus importante. Mais vous voyez que, là, on
augmente pour avoir plus de travailleurs qualifiés. Le pourcentage est
peut-être moins important que pour vous,
qu'il y ait plus de travailleurs qualifiés en chiffres bruts, si je comprends
bien. Plus de travailleurs qualifiés.
Parce que, le pourcentage, on maintient l'engagement des réfugiés. Donc, c'est
pour ça que vous, vous proposez une augmentation. Est-ce que j'ai bien
compris?
Mme Vachon (Isabelle) : Tout à fait.
Mme Weil :
Parce que vous avez une inquiétude qu'en bout de ligne, la troisième année, on
n'ait pas assez de travailleurs qualifiés.
Mme Vachon (Isabelle) : Oui. C'est
dans l'aspect que, oui, nous sommes pour la catégorie des réfugiés humanitaires
et familiaux, mais que, dans l'influence au niveau économique, que ça
n'influence pas négativement.
Mme Weil :
Qu'est-ce que vous remarquez, vous, dans votre expérience par rapport aux
besoins économiques, le besoin des
entreprises, les problématiques auxquelles elles font face? Vos clients, là...
bien, vos clients... vous le voyez de part et d'autre, surtout le
demandeur.
Mme Vachon (Isabelle) : Oui. On le
voit de part et d'autre, autant le nouvel arrivant qui se présente dans ses qualifications sur le marché du travail, et
l'employeur, ce qu'il recherche au niveau des qualifications comme
employé.
• (11 h 20) •
Mme Weil :
Et donc les problématiques de reconnaissance. Est-ce que vous avez remarqué des
améliorations? Parce que nous, bon, on a
financé, depuis de nombreuses années, comment dire, des programmes pour aider
les ordres professionnels à reconnaître les compétences. On a vu
beaucoup de progrès ces dernières années.
Il y a les
employeurs qui ont besoin d'être accompagnés. On a des organismes comme
Qualification Montréal, qui fait un
excellent travail, qui déborde le territoire de Montréal. Beaucoup, beaucoup
d'initiatives ces dernières années. Est-ce que vous, au fil de votre pratique et carrière, vous avez vu que ça
commence à donner des résultats ou qu'il y a eu des progrès? Nous, on le
constate, mais dans votre accompagnement de ces nouveaux arrivants?
Mme Vachon
(Isabelle) : Je dois vous dire que oui, parce que, un emploi...
Pendant des années, j'ai été conseillère en emploi auprès d'Emploi-Québec, donc j'avais déjà un intérêt et je
cherchais ces éléments-là. Donc, ce qui m'a amené à l'immigration, c'est l'aspect que je n'avais pas
de réponse, et donc, quand on est à l'affût de cela, on recherche plus
ces informations. On les ressent petit à petit, mais il est clair qu'il y aura
toujours des efforts...
Mme Weil : Oui, qu'il faut
aller plus loin, en effet.
Mme Vachon (Isabelle) : Oui, tout à
fait.
Mme Weil : Maintenant,
l'arrimage entre la sélection... Vous avez comme une petite réserve. Peut-être
vous entendre là-dessus, cet arrimage entre
les besoins du marché du travail... Vous savez qu'il y aura des portraits
régionalisés des besoins pour amener les
gens plus en région. Pourquoi en région? Bien, ils vont être en région parce
que c'est là que l'entreprise les sollicite. C'est ça, ce contact. Mais
vous avez des commentaires. Est-ce que je pourrais vous entendre un peu plus
là-dessus?
Mme Vachon
(Isabelle) : Le bon point par rapport à la région... Oui, l'entreprise
a besoin, mais, après, c'est tout le mode
de vie, vous comprenez? Alors, à partir de là, quelles sont les activités? Et
donc c'est pour ça, comment je pourrais dire, que le nouvel arrivant se redirige un peu vers la métropole, où il
y a une certaine concentration. Mais, si l'entreprise prend, oui, en
charge l'emploi, c'est déjà bien d'avoir un emploi. Et, par la suite, sur le
terrain, auprès, je ne sais pas, du municipal, les engagements, au niveau des
différentes associations qui sont positionnées là... ce serait, pour les
entreprises, de se jumeler aussi à d'autres activités.
Mme Weil : On est très
d'accord avec vous, là, sur cette question, et c'est pour ça que, dans la
politique et la stratégie d'action, il y a
des mesures, justement, qui visent la société autour de cet immigrant, le
vivre-ensemble, la rétention. Ça prend plus qu'un emploi pour assurer la
rétention : ça prend tout le milieu de vie. Donc, il y a des stratégies
d'action qui viennent accompagner, justement, le nouveau système d'immigration.
J'aimerais
vous entendre sur... c'est le point 3, là, l'orientation 3. Je trouve ça
vraiment intéressant puis j'aimerais vous
entendre un peu plus sur le fait de cibler 40 % de l'immigration
permanente qui serait issue de la voie temporaire. Et vous dites qu'on
devrait considérer le niveau 7, et ça vient...
Une voix : ...
Mme Weil : C,
excusez-moi... et ça vient rejoindre un peu la fédération des entreprises
indépendantes par rapport... Qu'est-ce
que vous constatez? Là aussi, vos constats par rapport... les types d'emplois,
que vous voyez certainement un besoin, des gens qui sont déjà en emploi,
peut-être développer un peu cette idée-là.
M.
Gagnon (Louis-René) : Oui. Pour les travailleurs temporaires dans le
PEQ, pour améliorer... Effectivement, actuellement, le PEQ est réservé
au niveau 0, A et B de la CNP. Mais on pense qu'il y a...
Mme Weil :
Est-ce que ça vous dérangerait... Je ne sais pas si on a le temps. Pour les
gens qui nous écoutent, c'est tellement
important, ce que vous dites là. Peut-être expliquer quelques... parce que ce
n'est pas facile pour les gens.
M. Gagnon
(Louis-René) : Oui, juste expliquer rapidement : 0, c'est cadres,
A, c'est professionnels, B, c'est techniciens.
Mme Weil :
C'est ça.
M. Gagnon
(Louis-René) : Parce que les emplois au Canada sont... Le CNP, c'est
quelque chose qui sert beaucoup en immigration, mais qui n'est pas uniquement
par l'immigration. C'est produit par Statistique Canada. Il y a les niveaux,
aussi, C et D. C, ça demande généralement le secondaire, D, c'est le reste.
On
donne des points à C, dans la grille de sélection, pour l'expérience de
travail; évidemment, 0, A ou B. Mais on pense qu'il y a certains grands groupes de C qui pourraient être
admissibles. Pour donner un exemple, on pourrait prendre ceux qui sont déjà dans la liste de la démarche
simplifiée pour les temporaires. Il y a un certain nombre de C. Ce
serait logique de permettre ça. Et il y a
quelques provinces au Canada, notamment l'Alberta et la Saskatchewan, qui, dans
leurs propres processus PNP, élargissent à
certains groupes de niveau C la possibilité, là, d'avoir une désignation
provinciale.
Alors,
là-dessus, sans vous dire exactement... Parce que ça varie, hein, le marché du
travail. On est d'accord qu'il faut
adapter. Je pense qu'il faudrait peut-être avoir une certaine ouverture pour,
de temps à autre, moduler ça et avoir une ouverture d'ouvrir — si
vous me permettez cette tautologie-là — à certains groupes de C, qui
peuvent une certaine pénurie, ne pas être aussi rigide.
Et
aussi on trouverait ça intéressant, vous n'avez pas posé la question,
mais de créer un troisième volet, un volet entrepreneur. On se demande quelle est la logique. On offre un parcours
rapide aux gens qui ont un diplôme, aux gens qui ont travaillé 12 mois au Canada, au Québec, mais pourquoi quelqu'un qui a opéré une entreprise
pendant 12 mois ou 24, si vous voulez, ne se verrait pas offrir, lui
aussi, un CSQ selon la même logique?
Mme Weil :
On va regarder cette recommandation. Vous savez qu'on est en train de revoir le
Programme immigrants entrepreneurs de fond en comble.
M. Gagnon
(Louis-René) : Je pense que l'ACCPI aimerait bien être associée de
près au...
Mme
Weil : Bien, est-ce que
je peux vous entendre là-dessus? Parce
que vous avez des suggestions
là aussi. Est-ce qu'on pourrait vous entendre? On va en profiter. Nous,
on est en train de le réviser, là, justement pour associer, donc, ces personnes à des
incubateurs, des accélérateurs, etc. Mais vous, vous dites que vous aimeriez
être associés ou mieux comprendre parce que
vous avez un point de vue, une expérience. Est-ce que vous pourriez
partager, donc, votre expérience dans ce domaine?
M.
Gagnon (Louis-René) : On a
l'avantage, l'ACCPI, c'est que c'est une association pancanadienne,
surtout Isabelle travaille avec les présidents de sections des autres
provinces, des autres régions, qui ont de l'expérience, par exemple, du
programme fédéral. Il y a un programme fédéral de visa pour... Start-up, et
donc nous, on peut puiser l'expérience des gens des autres sections qui ont
vécu là-dessus pour vous donner des suggestions, même chose que pour Entrée express, qui s'applique dans le reste
du Canada depuis le 1er janvier 2015. Les collègues des
autres provinces ont de l'expérience qu'ils peuvent nous transférer pour
vous aider dans la mise sur pied de la réglementation et des directives
concernant le nouveau système de déclaration d'intérêt.
Mme Weil :
Allez-y, ce serait intéressant de vous entendre.
Mme
Vachon (Isabelle) : À ce niveau-là? Par rapport au Québec, ce qui est revenu en premier, on s'est
arrêtés beaucoup sur l'aspect linguistique, on l'a mentionné
ici, c'était... ce que vous avez mentionné, on se sent une limite à ce niveau-là, on espère qu'il y aura plus de
flexibilité. C'est la réalité du Québec, on maintient le français à ce niveau-là, mais c'est une réalité que, pour entrer au Québec,
les candidats rencontrent plus de difficultés. On a beau leur rappeler, leur
dire : Oui vous avez besoin du français... Oui, vous en avez de besoin.
On avait parlé, tantôt,
au niveau des évaluations des compétences, ça a été mentionné, on travaille beaucoup
là-dessus. L'accessibilité aussi aux organismes que vous avez mis sur pied
est plus facile, c'est vraiment un avantage. Si je pense à mes collègues des
autres chapitres, la facilité se va de l'avant et ils attendent pour nous, pour
voir comment nous donner un coup de main quand on va se positionner pour
le nouveau projet de loi qui s'en vient.
Mme Weil : Qu'est-ce que vous
voyez par rapport à Start-up Visa? Nous aussi, on a consulté beaucoup le milieu des incubateurs, accélérateurs et des
entrepreneurs, on a beaucoup consulté pour concevoir ce nouveau
programme. On a regardé ce qui se passe au niveau
fédéral. Est-ce que vous avez des commentaires, des leçons apprises, des recommandations
sur les meilleures pratiques, des choses intéressantes que vous avez vues ailleurs
qui pourraient être importées?
Mme Vachon
(Isabelle) : Comme commentaire, c'est bien d'avoir un suivi, un suivi au niveau de la
participation avant, pendant et après, ce
qui va donner une meilleure qualification. Pour avoir fait un projet au SAGE
aussi, là, c'est vraiment une réalité. Et surtout au niveau de la comptabilité au Québec, hein, les gens se posent la question :
Est-ce qu'on se doit d'avoir
un rapport ici, au Québec? Est-ce qu'on se doit de l'avoir au fédéral? Donc, il
y a toute une notion d'informations auxquelles peu de gens sont informés. Mais
c'est vraiment d'avoir un suivi, ce serait l'avantage.
Mme Weil : Oui. La
régionalisation, cette question d'amener les immigrants en région... Je pense
qu'on l'a peut-être déjà couvert, hein, les commentaires que vous avez déjà
faits.
Mme Vachon (Isabelle) : Oui. On parlait
au niveau des entreprises. Oui, les entreprises par l'offre d'emploi, c'est tout
à fait génial, mais vraiment les alentours, donc on parle de la ville, de la
région, d'avoir des associations, il y en a, des associations, sur pied, mais vraiment une collaboration
directe avec les entreprises et même le municipal pour faire découvrir aux gens la région de près et de
loin.
• (11 h 30) •
Mme Weil : Là, j'ai une question importante.
J'essaie de comprendre quand vous dites qu'on a besoin de plus d'assouplissements dans la liste des domaines de formation
pour éviter une barrière pour avoir un CSQ, alors que l'objectif évidemment
des travailleurs qualifiés, c'est que les gens intègrent le
marché du travail rapidement, donc, c'est toujours basé sur une liste qui sera maintenant
régionalisée, là, une fois que le projet
de loi n° 70 est adopté,
pour amener les gens là où il y a ces emplois. Quelle est votre crainte par
rapport à cette liste?
M. Gagnon
(Louis-René) : Bien, écoutez,
c'est parce que, quand on voit des points domaines de formation,
au fond, le vrai régulateur de ça, c'est la
liste des domaines de formation. Si la liste est très étroite, très congrue, ça va être très difficile d'aller chercher ça. Donc, c'est simplement
attirer l'attention que le véritable enjeu tactique là-dedans,
c'est d'avoir quand même une liste des domaines de formation qui n'est
pas trop rigide. Récemment, elle a été augmentée. Je dois vous dire qu'il
y a plus de... c'est plus facile,
puis, même si elle est régionalisée... Mais juste d'attirer l'attention que
c'est ça qui est crucial : quand un
consultant examine le dossier de ses clients pour voir s'il va aller chercher
deux, six, 12 ou même 16 points supplémentaires, si la liste est trop
étroite, ça ne passera pas.
Il y a
aussi le fait que les changements à la liste des domaines de formation, comme
quand c'est arrivé le 26 janvier 2015,
ils s'appliquaient immédiatement. Dans le régime actuel, on peut comprendre, mais,
dans un régime de déclaration d'intérêts où les gens sont dans un pool
puis après ça qu'on fasse une invitation à déposer une demande, appliquer aux
demandes qui ont déjà été déposées les modifications à la liste, on ne trouve
pas ça équitable, surtout si c'est le ministère qui a invité, puis le délai de traitement est
court. Autrefois, si le délai de traitement était encore deux, trois
ans, c'était peut-être plus raisonnable de
dire : Bien non, il faut l'appliquer immédiatement. Parce que
ça met les consultants dans une
position terrible par rapport à leurs clients. Ils font une évaluation,
ils leur disent : Oui, aujourd'hui, on dépose votre demande, vous faites les points, ça marche, et là le gouvernement change des règles du jeu en cours de route. La plupart des
clients, ils ne comprennent pas, là, et ils mettent la faute sur le consultant
ou leur avocat quand ils ont un constat de dire :
Vous m'avez dit que c'était correct. Puis là ils ont de la difficulté
à croire que le gouvernement change des règles en cours de route.
Le Président (M. Picard) :
Merci.
Mme Weil : Je n'ai plus de temps. Je vous remercie, mais on vous reviendra avec quelques questions précises que j'ai pour nous aider dans
l'implantation de cette réforme. Merci beaucoup.
Le Président (M. Picard) : M.
le député de Bourget pour 9 min 20 s.
M. Kotto : Merci, M. le
Président. Madame, monsieur, soyez les bienvenus. Merci d'être là.
Je voudrais
profiter de l'occasion de l'expérience de madame qui a travaillé à Emploi-Québec, qui, de mémoire, considère
que ça prend un niveau 8 en termes de maîtrise du français pour travailler en français
au Québec. Parce
qu'à ce moment-ci nous nous trouvons au
niveau 7, et certains de vos prédécesseurs ici, en commission, ont demandé
d'assouplir davantage encore. Est-ce
qu'assouplir cette condition serait, disons, profitable pour une intégration
réussie en français au Québec pour un immigrant ou une immigrante?
Mme Vachon
(Isabelle) : Diminuer les critères n'est pas toujours évident, à
savoir comment limiter. Le français est
important, ça, on ne questionne pas cela, et, pour le pratiquer, il y a
certains emplois qui demandent de rédiger des documents, de communiquer par l'écrit. La conversation avec des
collègues sur le terrain, verbale, c'est une chose, mais par écrit, quand qu'on demande des tests
linguistiques, on peut l'identifier. Parce qu'il faut une préparation. On
s'entend, oui, je vis au Québec, je vis dans le français, mais, je peux
vous dire, quand vient le temps d'aller compléter des tests, je me remets à certains... et il y a certaines
exceptions que je n'ai pas maintenues avec moi tout au long de mes études.
Donc, à savoir si on doit diminuer, j'en
reviens aux candidats, c'est sûr que ça va franchement aider à déposer leurs
demandes, leurs candidatures,
ça, oui. Ça, c'est, à ce niveau-là, oui. Et, sur le marché du travail, autant
pour nous, pour les consultants, c'est important pour nous d'avoir des
gens qui sont capables de maîtriser le français tout à fait.
Mais donc on
relance cet aspect-là, comme on dit,
au leadership politique, parce que, oui, diminuer, mais pas à un
point où est-ce qu'on va questionner à savoir si les gens sont capables de le
maîtriser ou non. J'espère que ça répond à votre question.
M. Kotto : Je reviens à cette notion de leadership politique
relativement à ce que vous proposiez comme niveau de seuils, vous êtes pour aller jusqu'à 60 000.
Serait-ce une proposition à considérer sans, disons, mettre sur la balance
les moyens financiers, et les ressources, et
les structures d'accueil pour accompagner en intégration, en emploi et en
francisation?
Mme Vachon
(Isabelle) : Oui, à tous les
niveaux, à tous les niveaux, parce que, si on dit : On accueille un
groupe et on cible vers l'augmentation, il faut que toutes les structures
aillent de l'avant.
M. Kotto : O.K. Donc, il faut
qu'il y ait une synchronicité...
Mme Vachon (Isabelle) : Oui.
M. Kotto : ...à ce niveau-là.
En gros, voilà les deux questions qui me turlupinaient.
Mme Vachon (Isabelle) : Merci.
M. Kotto : Merci. Merci, M.
le Président.
Le Président (M. Picard) :
Merci. Mme la députée de Montarville, pour une période de 6 min 10 s.
Mme Roy (Montarville): Merci beaucoup, M. le Président. Mme Vachon, M. Gagnon, merci, merci du mémoire,
merci d'être là. Vous avez le nom d'une de mes amies.
J'ai lu votre
mémoire. Je vous amène tout de suite à la page 4. Il y a des choses intéressantes que
vous dites, avec lesquelles je suis tout à fait
d'accord. Page, page, page... je disais 4, voilà. Lorsqu'on parle, effectivement, d'un accroissement de
l'immigration en région, on pense tout comme vous que c'est primordial, que
c'est important aussi de faire en sorte que nos nouveaux
arrivants n'aillent pas tous à Montréal, mais aillent justement en région. Puis,
pour nous, c'est aussi pour des
raisons d'intégration. Je pense que
c'est important d'immigrer partout à travers le Québec, pas uniquement à
Montréal. Vous nous dites : «Cependant,
comme nous sommes impliqués principalement dans la phase de sélection
des nouveaux arrivants, nous suggérons que les critères de sélection ou
d'invitation comportent un avantage réel pour nos clients qui désirent se
destiner en dehors de la région métropolitaine de Montréal.»
Alors,
qu'est-ce que vous voulez dire par «un avantage réel»? Comme quoi, ça
ressemblerait à quoi? Voulez-vous élaborer, je vous prie?
M. Gagnon
(Louis-René) : Tout simplement donner des points aux gens qui veulent
aller en région... c'est un débat éternel au ministère... mais, à part
ça, il n'y a pas de points supplémentaires. Ce qui arrive souvent, c'est que les clients qui viennent voir les consultants, on
va leur dire : Il faut écrire dans la demande la région de destination.
Les gens vont dire : Quel avantage que
j'ai si je dis «Québec», si je dis «Gatineau» ou «Rouyn-Noranda»? Actuellement,
on est obligés de leur dire : Ça
ne vous donne rien, à moins que vous ayez une offre d'emploi validée, ce qui
est assez rare, ce qui touche à peine
quelques pourcents des demandes. Donc, on n'a pas d'instrument dans la phase
dans laquelle on s'occupe, là, celle de la sélection, du choix de la
région de destination, on n'a pas de levier pour persuader les gens d'aller en
région. Évidemment, on va dire souvent : Bon, bien, si on donne des points
aux gens qui disent qu'ils vont, je ne le sais
pas, à Québec, ils vont arriver puis ils vont repartir après vers Montréal.
Mais, écoutez, c'est vrai pour le Québec, hein? On permet à des gens de venir au Québec puis on en perd quelques-uns
pour le reste du Canada, parce qu'ils disent qu'ils viennent à Montréal, puis, après ça, ils viennent
à Toronto. Mais le système fonctionne quand même. Il y a quand même beaucoup de gens qui respectent la question de
destination. Alors, tout simplement, tout simplement, aménager la grille
pour permettre de donner des points aux gens qui déclarent... Bon, on pourrait
aussi trouver des moyens après ça de les récompenser.
Il y a des qui ont déjà suggéré de rembourser une partie des frais
d'immigration aux gens qui sont trois ans après dans la région de destination qu'ils ont promise hors Montréal. Ça
serait un incitatif financier. Il peut y avoir d'autres choses. Et, juste en passant, récemment, au
Canada, il y a un eu grand succès de régionalisation. Savez-vous où est-ce
que c'est?
Mme Roy (Montarville):
Allez donc.
• (11 h 40) •
M.
Gagnon (Louis-René) : C'est
dans les autres provinces du Canada. Autrefois, l'immigration Canada hors Québec se concentrait énormément
à Toronto et à Vancouver. Depuis que le gouvernement fédéral a
décentralisé et a permis à certaines provinces d'accorder des points via
leur système de PNP, la répartition régionale dans le reste du Canada, dans les
provinces qui n'étaient pas des provinces d'accueil a beaucoup augmenté. La Saskatchewan,
le Manitoba, l'Alberta, dans le temps où
c'était intéressant économiquement, il y avait cet aspect-là, mais le Manitoba,
notamment, la Saskatchewan ont augmenté de façon remarquable
leur pourcentage de l'immigration du ROC, du reste du Canada, pourquoi? Parce qu'ils se sont vu attribuer des
pouvoirs de sélection plus intéressants. Donc, l'idée que la
décentralisation, donner des points aux
régions, la possibilité d'accorder des points aux régions, c'est un levier que
le Québec possède en matière de sélection qu'il devrait utiliser
davantage.
Mme
Roy (Montarville): Dans la quotidienneté de votre travail, puisque vous êtes avec justement
les demandeurs, dans la réalité des
choses, est-ce que les gens vous demandent d'aller en région? Si oui, quelles
régions? Qu'est-ce que les gens veulent puis... parce que vous
êtes vraiment en contact avec eux.
Mme Vachon
(Isabelle) : Et là, si on s'est déplacés en tant que nous-mêmes
consultants dans la région, on a un peu plus
d'éléments d'apportés, donc on va faire une recherche voir au niveau... si les
gens préfèrent le plein air, s'ils préfèrent,
je ne sais pas, au niveau de l'emploi, un aspect minier. C'est nous-mêmes qui
se doit d'amener des éléments pour les
convaincre de découvrir une autre région, sinon c'est pour ça que les points,
ce serait un bon incitatif à ce niveau-là.
Mme Roy (Montarville): Donc, vous êtes en train de me dire que ce n'est pas tant les
immigrants qui le demandent, mais
c'est vous qui devez leur vendre une région.
Mme Vachon
(Isabelle) : Oui. C'est les deux, O.K., c'est les deux.
Mme Roy (Montarville): O.K. C'était ça, ma question, oui. Au niveau de la demande, ça
ressemble à quoi?
Mme
Vachon (Isabelle) : C'est parce que
la demande vient de plus en plus par
rapport en région, parce qu'ils disent : Oui, on entend souvent qu'on nous dit que tout le monde est là-bas, tout le monde est là-bas, et on nous dit d'aller voir un peu plus grand ailleurs. Mais ailleurs, c'est quoi? D'où vient un peu qu'on leur
parle... J'ai eu la chance, moi, de grandir en région, donc j'ai connu
autant les Appalaches, l'Estrie, je suis allée en Ontario. Vous voyez, donc,
j'ai ces éléments de leur partager, alors
c'est sur ça qu'on se base. Mais une personne, si on prend un consultant qui
est arrivé à Montréal, il va positionner Montréal.
Mme Roy
(Montarville) : En terminant, vous parlez sur les seuils. Vous
dites que vous êtes favorables à une augmentation substantielle de 60 000
assez rapidement du seuil d'immigration. Vous nous dites : Qui veut peut,
on a les moyens. Mais concrètement, actuellement, est-ce que la
démonstration est faite qu'on a les moyens de réussir l'intégration et la
francisation de nos immigrants avec ce qu'on a sur la table?
Mme Vachon
(Isabelle) : O.K. C'est sûr qu'au niveau de la francisation ce que
j'ai pu voir sur le terrain, il y a eu des activités qui ont été positionnées.
Et ce que j'avais été chercher sur le terrain était que, pour apprendre le français, c'est préférable d'être dans un milieu
où est-ce que les gens aiment parler le français et parler de la culture
aussi. Ce n'est pas juste cet aspect de la
langue, donc c'est un élément de partager la culture du Québec. C'est ça qu'il
faut mettre aussi par rapport au français.
J'ai vu beaucoup de
changements. Il y a une nouveauté qui s'est présentée. Ce n'est pas évident.
Parce que j'observe, et je cherche la
participation, et je vais à la recherche de ces informations-là. Mais peut-être
que d'autres diraient : Non,
moi, je ne vois pas de changement. Mais j'encourage le français, ce n'est pas
compliqué. Alors, à partir de là... Mais, pour ce qui est de qu'est-ce
qui est installé, instauré, il y a toujours... faire place à l'amélioration.
Merci.
Le Président (M.
Picard) : Merci, Mme Vachon, M. Gagnon, pour votre contribution
aux travaux de la commission.
Je suspends quelques
instants afin de permettre au prochain groupe de prendre place. Merci.
(Suspension de la séance à
11 h 44)
(Reprise à 11 h 47)
Le
Président (M. Picard) :
Nous reprenons nos travaux en recevant les représentants de la ville de Montréal. Donc, vous disposez
d'une période de 10 minutes. Vont s'ensuivre des échanges avec les parlementaires.
Dans un premier
temps, je vous demanderais de vous présenter, et je vous avise tout de suite
que, vers midi, il va y avoir un dynamitage. Donc, il ne faut pas faire le
saut, tout simplement. Donc, la parole est à vous.
Ville de Montréal
M.
Perez (Lionel J.) : Merci
bien. Merci, M. le Président. Mme la ministre, chers membres de la commission, je me présente, mon nom est Lionel Perez. Je suis
membre du comité exécutif de la ville
de Montréal responsable, entre
autres, des infrastructures, de la gouvernance et des relations gouvernementales.
J'ai avec moi M. Francisco Silva, qui est du Bureau des relations gouvernementales
et municipales.
Donc, au nom
de la ville de Montréal, je tiens d'abord à saluer l'initiative
du gouvernement du Québec
d'entendre les préoccupations des différents acteurs concernés par la planification de l'immigration au Québec. Cette consultation survient dans un contexte où la ville de Montréal est dans l'attente de la loi sur la Métropole. En effet, depuis
plusieurs années, la ville de Montréal revendique auprès du gouvernement
du Québec une reconnaissance
explicite de son rôle en matière d'intégration, d'accueil, ainsi que
l'allocation des ressources conséquentes à la reconnaissance de ce statut. J'aimerais également souligner que
l'accueil d'immigrants provenant de tous les coins de la planète doit se faire
sous la perspective du
vivre-ensemble. Cette planification doit tenir compte de cet aspect afin de permettre
la pleine et entière participation
des nouveaux arrivants à toutes les sphères d'activité. Dans cette
logique, Montréal s'est engagée à bâtir des milieux de vie
où il fait bon vivre. C'est au niveau local que se vit tous les jours
l'inclusion, condition essentielle du vivre-ensemble.
Alors, le présent mémoire de même que les recommandations formulées
doivent être interprétés en regard de ce contexte global.
Montréal
est favorable aux orientations proposées dans le document de consultation. Nous souhaitons toutefois apporter
des précisions et des nuances qui nous semblent essentielles au succès de la
présente planification. D'entrée
de jeu, nous constatons que plusieurs objectifs sont similaires à ceux formulés
dans les documents de planification
pluriannuelle antérieurs, soit de de 2008 à 2010 ainsi que 2012 à 2015. Cela
ouvre la porte à plusieurs interrogations concernant
le bilan de ces plans. Il serait fort pertinent de pouvoir prendre connaissance et d'évaluer les résultats obtenus. Ces informations nous permettront de mieux déterminer quels
seront les outils et les ressources nécessaires à mettre
en place pour atteindre les objectifs
suggérés par les orientations 2 à 6 de la présente planification. Il est maintenant impératif de prendre en compte le rôle également de la métropole et de travailler de concert afin
d'atteindre les objectifs qui seront fixés.
C'est dans
cette logique que nous réitérons au gouvernement
du Québec l'importance de développer ce qu'on appelle
le réflexe Montréal permettant à la Métropole de participer en amont
à la planification de l'immigration pour les années à venir. La première de nos recommandations vise donc à reconnaître le rôle de
la métropole en matière d'accueil et d'intégration des nouveaux
arrivants et de personnes issues de l'immigration, sa spécificité et ses
besoins. Nous soulignons la volonté du
gouvernement du Québec, dans sa stratégie d'action 2016‑2021, de mettre en
place une approche partenariale,
notamment avec les municipalités. Donc, évidemment, Montréal, où on a accueilli
70 % de l'immigration sur une base annuelle, aura un rôle de
premier plan.
• (11 h 50) •
Concernant les orientations, la première suggère
de stabiliser les niveaux d'immigration pour les deux premières années puis les
augmenter légèrement au cours de la troisième année. La ville de Montréal est
d'avis qu'il est possible de stabiliser les
niveaux d'immigration pour les deux premières années de la planification puis
ensuite de les augmenter
progressivement dans la mesure où le nombre total de personnes immigrantes et
les modalités de répartition prévus ne compromettent pas l'apport
migratoire nécessaire à la métropole.
Concernant la deuxième orientation, soit
d'accroître progressivement la part d'immigration économique pour atteindre 63 % en fin de période, nous
croyons que la croissance de la part de l'immigration économique est
souhaitable pour faire face à la tendance
démographique actuelle et répondre aux besoins de main-d'oeuvre observés.
Toutefois, il ne suffit pas seulement
d'accroître la part d'immigration économique pour considérer que les enjeux en
matière d'accueil et d'intégration
s'amenuisent. Les nouveaux arrivants ont besoin d'un accompagnement adéquat
pour que leurs démarches de recherche
d'emploi soient positives, que les barrières soient levées et que leur
intégration se déroule le plus facilement et harmonieusement possible.
Cet accompagnement se fait en ce moment avec des ressources financières
limitées et malmenées par certaines règles
du gouvernement du Québec qui ne permettent pas la simultanéité des programmes.
Je pourrai vous donner un exemple, si vous voulez, lors des périodes de
questions.
Ces constats nous amènent à formuler une
deuxième recommandation, soit d'assurer une planification des niveaux d'immigration au Québec qui permet à
Montréal de faire face aux défis démographiques et économiques actuels. Les orientations 3 à 6 touchent de manière plus
particulière aux caractéristiques des nouveaux arrivants et aux
qualifications requises. À cet égard, il
importe de prévoir des ressources et des services pour permettre l'intégration
sociale et économique des immigrants.
En concordance avec la troisième orientation, Montréal est d'avis que
l'amélioration de la rétention des étudiants
étrangers et des travailleurs temporaires présents sur le territoire est un
enjeu clé, pour ne pas dire une priorité. Il importe de mettre en place
des mécanismes visant à faciliter l'obtention de leur résidence permanente, mais
avant tout de mettre à leur disposition un ensemble de services visant à
favoriser une adaptation rapide et un enracinement dans le milieu de vie.
En ce qui
concerne la quatrième orientation visant à fixer à un minimum de 85 % la
proportion des adultes de la sous-catégorie des travailleurs qualifiés
qui déclarent connaître le français d'admission, on sait tous que l'article 1
de la Charte de la ville de Montréal énonce
que Montréal est une ville diverse, inclusive et de langue française. Cela
contribue à son caractère unique.
Évidemment, l'accueil de nouveaux arrivants parlant le français est un atout,
sinon la clé afin de favoriser leur
intégration, notamment en emploi. Il peut toutefois sembler ambitieux et
complexe d'atteindre cet objectif de 85 % de personnes connaissant
le français tout en répondant à l'orientation n° 8, qui stipule vouloir
assurer une diversification des bassins
d'immigration. En ce sens, la ville de Montréal invite le ministère à fournir
de plus amples informations sur les mesures et ressources qui seront
mises à la disposition des partenaires et des nouveaux arrivants pour parvenir
à atteindre ces cibles.
L'orientation
5 propose, quant à elle, de s'assurer que la proportion des candidates et
candidats sélectionnés dans la
sous-catégorie des travailleurs qualifiés détenant une formation en demande
soit d'au moins 70 %. Une fois arrivés au pays, les nouveaux arrivants qui ont été sélectionnés doivent bénéficier
d'un accompagnement étroit pour que se concrétise le maillage avec les entreprises qui cherchent à
combler leurs besoins. Ces mesures font partie du continuum de services
qui doivent être offerts aux nouveaux arrivants pour favoriser leur
intégration.
Toutefois,
pour atteindre ces objectifs, plusieurs mesures en amont qu'en aval doivent
être déployées. Par exemple, la réalisation annuelle de portraits
régionaux en collaboration avec les partenaires locaux, dont la ville de
Montréal, permettra de prendre en compte les besoins
réels des entreprises et d'ajuster à brève échéance l'apport migratoire
nécessaire. Également, la reconnaissance des diplômes constitue également un
défi important pour un bon nombre de nouveaux
arrivants. À cet égard, nous sommes encouragés du fait que le comité
interministériel qui étudie la question soumettra un rapport avec
recommandations afin de résoudre cette importante problématique.
Enfin, la
métropole souhaite que le gouvernement poursuive ses efforts afin de réduire la
lourdeur administrative inhérente au processus d'embauche d'un
ressortissant étranger pour les entreprises et qu'il soutienne des mesures
d'accompagnement plus ciblées.
Quant à la
part des personnes de moins de 35 ans dans l'ensemble des admissions, soit
l'orientation 6, qui fixe un minimum
de 65 % annuellement, les tendances démographiques démontrent un
vieillissement de la population accéléré au Québec en comparaison avec les autres provinces canadiennes. Donc, la
ville de Montréal considère que la sélection d'une proportion minimale
de 65 % de nouveaux arrivants âgés de moins de 35 ans contribuera à
pallier cette tendance.
On regarde
les orientations 3 à 6 quant aux caractéristiques des nouveaux arrivants et aux
qualifications requises. Nous recommandons une série de mesures visant à
assurer un continuum de services adaptés aux nouveaux profils des candidats
sélectionnés. Vous trouvez la liste de l'ensemble de toutes les mesures
proposées sous la troisième recommandation de notre mémoire.
En ce qui
concerne la septième orientation, Montréal a développé une expertise
particulière en matière de gestion de
la diversité de même que des projets porteurs. Plusieurs de ces projets
pourraient être déployés à une plus grande échelle dans d'autres régions du Québec. Il est important
de déployer tous les efforts requis pour éviter qu'un fossé se creuse
entre Montréal et les régions du Québec en ce qui a trait à la vision de
l'accueil et de l'intégration des nouveaux arrivants. Le rôle de Montréal et
des régions est complémentaire dans cet objectif d'ouverture et d'inclusion.
Par
conséquent, notre quatrième recommandation consiste à encourager les échanges
entre les régions du Québec et la métropole afin de consolider les ponts
et de favoriser le rapprochement entre les Québécois et les Québécoises de
toutes origines.
La huitième orientation vise à favoriser la diversité
du mouvement migratoire en provenance des différentes régions du monde.
En tant que métropole cosmopolite, Montréal considère que le Québec doit être
ouvert à attirer les talents nonobstant leur
pays d'origine et s'assurer d'offrir des services nécessaires afin que ces
personnes apprennent le français.
La neuvième
orientation concernant l'engagement humanitaire du Québec par l'accueil des
personnes réfugiées et d'autres personnes ayant besoin d'une protection
internationale... l'ouverture du Québec à l'endroit des populations réfugiées doit en effet être réaffirmée. Il est
également nécessaire d'apprendre des expériences passées afin
d'améliorer et de consolider les mécanismes d'accueil et d'intégration prévus
dans de telles situations. La métropole...
Le Président (M. Picard) :
S'il vous plaît! En terminant, s'il vous plaît.
M. Perez
(Lionel J.) : La métropole
pourrait cependant répondre plus adéquatement aux besoins des
personnes réfugiées dans la mesure où elle dispose des ressources, des
compétences accrues.
Pour
conclure, l'accueil et l'intégration sociale, économique des immigrants est un défi local, elle doit être une priorité d'intervention partagée entre les
différents paliers de gouvernement. La métropole souhaite ainsi jouer un
plus grand rôle en matière d'intégration des
nouveaux arrivants et, pour y arriver, il est nécessaire d'un partenariat
renouvelé avec le gouvernement du Québec. Je vous remercie.
Le
Président (M. Picard) : Merci. Je cède maintenant la parole à
Mme la ministre pour une période de 16 minutes.
Mme Weil : Oui. Bonjour.
D'ailleurs, je cherche, votre collègue... le nom.
Une voix : ...
Mme Weil : Oui. Donc, c'est
ça, M. Perez, évidemment, bonjour, et M. Silva, bienvenue, merci de
votre participation. Un document riche de
recommandations par rapport à la relation, la relation de la ville de Montréal
avec l'immigration, justement, donc une
présence historique de l'immigration dans la ville de Montréal, et aussi le
rôle que la ville de Montréal souhaiterait jouer pour améliorer,
finalement, l'intégration, et notamment l'intégration en emploi...
Alors, je
vais vous poser des questions qui vont aller sur chacune de vos
recommandations. Dans la première, peut-être commencer par le point 1.2 de vos recommandations, le bilan. On a
plusieurs documents de bilans, mais peut-être que vous parlez d'autres choses. Alors, dans le plan
annuel, on fait un bilan de l'accueil, l'admission puis la répartition
des immigrants. Il y a la publication d'un
bulletin statistique sur l'immigration permanente trimestriel et pour
l'ensemble de l'année. Il y a une
reddition de comptes dans le rapport annuel de gestion avec beaucoup, beaucoup
d'information. Ce serait peut-être
éventuellement de regarder et de voir qu'est-ce qu'il manque dans ces
dossiers-là. La particularité de Montréal n'est peut-être pas prise en compte, et ces des chiffres globaux.
Évidemment, c'est complexe. On a évidemment une équipe au ministère qui
s'occupe de ça. Donc, ça, c'est quelque chose qu'on pourrait travailler
ensemble pour mieux vous aider dans votre planification.
Pour
ce qui est du premier, de permettre à la métropole de participer en amont à la définition
des objectifs sur le niveau et la
composition de l'immigration... Évidemment, cette recommandation va beaucoup
dans le sens de cette réforme, que,
si on veut améliorer l'intégration des personnes et qu'ils puissent trouver un
emploi rapidement, il faut changer nos façons de faire. Et, je le répète
souvent, changer nos façons de faire, c'est de bien consulter les premiers
intervenants, essentiellement, donc les
entreprises qui ont besoin de ces travailleurs qualifiés, les villes et tous
les partenaires régionaux. Des fois, c'est des villes, des fois c'est des MRC, des fois c'est cette
même entité, tous les acteurs qui ont besoin de bien planifier l'arrivée
de ces personnes pour nous assurer d'une bonne intégration comme Montréal et
votre... le maire de Montréal répète souvent, c'est le vivre-ensemble et la
bonne intégration.
Alors,
j'aimerais vous entendre sur votre vision. Moi, j'explique beaucoup comment, et
vous touchez à ça aussi, même dans la
planification des besoins, qu'on consulte pour voir. Et on aura la Commission
des partenaires du marché du travail,
d'ailleurs, qui, dans le projet de loi n° 70, c'est prévu, aura des
portraits régionalisés des besoins du marché du travail. Et on souhaite aussi consulter les milieux. Alors,
j'aimerais vous entendre parce que je pense que ça va tout à fait dans
la vision de cette réforme.
• (12 heures) •
M.
Perez (Lionel J.) : Tout à fait. Merci, Mme la ministre. Effectivement, nous accueillons très favorablement la
volonté d'avoir ce nouveau partenariat, c'est une des orientations de plan
d'action évidemment au niveau de la ville de
Montréal, qui reçoit, bon an, mal an, 70 % de l'immigration du
Québec. Évidemment, on est un joueur de premier plan, avec le
gouvernement du Québec, pour pouvoir faciliter l'accueil et l'intégration. Dans
ce contexte-là, évidemment, il y a des besoins très précis, il y a des besoins
très locaux. À cet égard, on a mis en place différentes opportunités,
différents programmes pour pouvoir faciliter cette intégration-là. Mais,
nonobstant ces efforts-là, nous croyons que Montréal
peut et doit jouer un rôle encore plus important, plus prononcé sur ces
enjeux-là. Nous avons la capacité et la volonté de le faire. Évidemment,
c'est une question financière, mais aussi une question de principe de
subsidiarité.
Nous
pensons que, dans plusieurs cas, vraiment, les municipalités, et Montréal en
particulier, sont le mieux placées pour
pouvoir traiter de certains enjeux. On est vraiment le palier gouvernement le
plus proche de la population sur les enjeux,
par exemple, de l'affectation des programmes, avec des agents de liaison dans
notre bibliothèque, c'est quelque chose
qui est ultralocal, ce n'est pas quelque chose qui va se gérer évidemment de
Québec, on le comprend. Bien, avec cela, on veut avoir une certaine
efficience pour pouvoir répondre aux besoins et éliminer peut-être certains
obstacles.
Alors,
dans ce contexte-là, on voit l'ouverture, on compte évidemment sur la volonté
du gouvernement et de vous-même. On
voit également... nos discussions continuent avec le gouvernement du Québec
concernant la loi sur la métropole et voir comment on peut s'agencer
encore. Et c'est vraiment dans une volonté commune de pouvoir rendre cela plus efficient, plus efficace, pour avoir une meilleure
intégration de la part de la population immigrante et évidemment pour
qu'elle puisse participer plus pleinement à l'épanouissement du Québec, qui est
évidemment l'objectif ultime.
Concernant
votre premier point sur le bilan, évidemment, avec le cahier de consultation,
mais toute la statistique... il y a
énormément de statistiques qui sont données. Mais ce que ça donne, c'est le
quoi : ça nous donne des constatations, des effets, des données très spécifiques. Notre recommandation, elle est
plutôt dans le pourquoi : Quels ont été les résultats, par exemple, des mesures qui ont été mises en place
lors des dernières planifications? Ayons cette information, échangeons,
regardons qu'est-ce qui a été plus efficace, qu'est-ce qui a été peut-être
moins efficace pour qu'on puisse s'ajuster ensemble afin d'améliorer les
résultats.
Mme Weil :
Pour revenir sur la planification, il faut comprendre, la planification, c'est
un exercice global qui implique tout le gouvernement, hein? Il y a une
consultation qui se fait, parce que ce n'est pas le ministère de l'Immigration... comme vous le savez, nous, on
s'occupe de l'admission, mais l'intégration, c'est le ministère de
l'Emploi, le ministère de l'Éducation, c'est
beaucoup d'acteurs. Et plus les années progressent, plus le gouvernement du
Québec... et, je pense, que la société en
général travaille de façon horizontale pour qu'on ait les points de vue de tout
le monde, pour être capable de bien
faire les choses, parce qu'on ne peut pas travailler en silo. Si je comprends
bien ce que vous dites, c'est : Il ne faut que, vous non plus, vous
soyez dans une situation où vous travaillez en silo, sans être connectés à ce grand réseau. Il y a aussi, donc, la capacité
financière qui est en jeu quand on estime les volumes. Donc, nous, on
estime tout ça avec l'Institut de la
statistique du Québec, qui nous donne des prévisions démographiques, puis on
regarde, oui, les besoins du marché du travail, et tout.
L'effort,
ensuite, c'est la sélection pour répondre aux besoins particuliers des régions,
des villes, des régions. C'est ça, la
nouveauté, donc, en temps réel. Parce que, dans l'ancien système, c'est premier
arrivé, premier servi. Et c'est là, cette consultation avec la ville,
qui veut jouer un rôle par rapport à quels sont nos besoins, quand vous dites
les créneaux d'excellence, notamment, hein,
dans tout ce qui touche la technologie de l'information. Nous, on le sait parce
que toutes ces grandes compagnies
nous sollicitent souvent parce qu'ils ont besoin... bon, que ce soient des
travailleurs temporaires, des travailleurs
permanents... Donc, vous, vous voyez
la ville aussi jouer donc ce rôle-là sur les besoins en consultation avec le milieu, le milieu économique. Où est-ce que
vous sentez la pression pour que Montréal puisse jouer son rôle de métropole et être compétitive, évidemment, avec les autres
grandes métropoles? J'essaie de voir ce qui vous intéresse là-dedans.
La planification, oui, mais est-ce que c'est plus dans
cette optique de dire au Québec et tous les acteurs qui sont impliqués là-dedans : Nous, voici nos besoins, et que, dans cette planification gouvernementale qui est large et vaste, qui souhaite avoir une meilleure répartition, aussi, des travailleurs qualifiés, qui tient compte de la capacité d'accueil, que vous
avez votre voix, une voix au chapitre dans cette grande planification?
M. Perez (Lionel
J.) : Tout à fait. Évidemment, en tant que la métropole du Québec, en
tant que ville qui reçoit 70 %, je l'ai dit tantôt, on doit jouer, on
joue un rôle sur l'accueil au plan local, on joue un rôle évidemment sur
le terrain. Ce qu'on veut également, c'est
pouvoir avoir un plus grand rôle en discussion, en partenariat avec le
gouvernement du Québec. On ne veut
aucunement s'immiscer dans les compétences du gouvernement du Québec, mais, à
cause de la réalité terrain, à cause
de notre expertise, de notre connaissance, nous pensons qu'on a un plus grand
rôle à jouer, justement, pour en discuter, pour pouvoir participer et
actualiser pleinement ce partenariat.
Un exemple
très concret... Vous faites allusion aux nouveaux créneaux en technologie.
Bien, évidemment, Montréal est une ville universitaire. Alors, il y a le
rapport de l'OCDE qui parle très spécifiquement comment Montréal peut jouer un rôle pour être
un facilitateur avec les universités, avec les employeurs, avec les organismes
locaux pour pouvoir justement être ce
lien, faire ce maillage ensemble. C'est quelque chose que... on ne veut pas
avoir une lourdeur administrative
pour revenir. Alors, c'est de ce contexte-là, on peut dire : Bien, il y a
un créneau pour les deux prochaines années,
allons-y, il y a un besoin terrain, on est convoqués. Et, nonobstant évidemment
toutes les revendications qui vous sont
faites également, nous pensons qu'on peut, dans un contexte de subsidiarité,
créer cette efficience qui... Ultimement, on veut avoir une meilleure intégration.
Si on peut obtenir cet objectif-là, si on peut réduire, par exemple, les taux
de chômage des nouveaux arrivants, c'est quelque chose où tout le Québec va en
bénéficier.
Mme Weil : Est-ce que je peux
vous amener sur un sujet bien important? Puis je pense que ça vous concerne beaucoup. C'est l'orientation sur le... qu'on vise
40 % de l'immigration permanente qui serait issue de la voie
temporaire. Vous le savez, il y a beaucoup
de travailleurs temporaires dans des créneaux d'excellence à Montréal,
beaucoup, et, parfois, pas facile de
les rejoindre, de diffuser l'information, de les attirer, de les accompagner.
Les étudiants étrangers, là, on a vu quand même des progrès ces
dernières années. Plus on diffuse cette information, le programme gagne en
popularité. Comme vous savez, Montréal,
c'est la deuxième ville étudiante en Amérique du Nord. Comment vous voyez ça,
le rôle que Montréal pourrait jouer à cet égard pour retenir ces
personnes-là par rapport à l'accompagnement? Surtout, je pense aux travailleurs
temporaires qui travaillent dans nos grandes entreprises. J'en rencontre
souvent. Je leur pose toujours des questions pour savoir s'ils sont intéressés
à rester. Est-ce que vous avez réfléchi à cette question-là?
• (12 h 10) •
M. Perez
(Lionel J.) : Tout à fait. Évidemment, nous, on voit notre rôle, comme
je l'ai dit, comme facilitateurs sur le terrain. La ville de Montréal,
elle est là pour l'accueil, évidemment, et avec des programmes, entre autres,
avec le MIDI, avec le MTESS. Donc, on est là
en partenariat, mais, très souvent, c'est la ville de Montréal qui exécute
beaucoup des programmes, qui les réalise. Donc, on a cette expérience terrain.
Et nous, par exemple, on voit quelque chose qui est très efficace, c'est, dans un contexte...
je vais le prendre dans un contexte, par exemple, plus socioéconomique, qui est des agents de liaison, des agents de
liaison qui puissent encadrer, discuter avec des nouveaux arrivants,
avec des immigrants pour... que ça soit pour connaître un peu plus la culture, pour connaître comment interagir au niveau local,
au niveau de leur ville, de leurs besoins. Ce qu'on pense, c'est que
cette approche-là, si on peut l'apporter juste dans un contexte de préemployabilité
pour faciliter les gens pour trouver des emplois...
Il y a des programmes qui existent, évidemment. Il y a le programme professionnel, de parrainage
professionnel. Il y a le
programme NEXUS, qui est un programme qui est là pour sensibiliser les
employeurs. Donc, avec ces
outils-là, avec ces programmes-là, avec
cette expérience terrain, on peut jouer un rôle pour, justement, faciliter,
pour faire cette adéquation entre les étudiants, entre les travailleurs
temporaires et spécialisés et avec les employeurs.
Évidemment, il va falloir que les ressources
financières soient au rendez-vous. Présentement, on reçoit du gouvernement du Québec 1,6 million de dollars
du MIDI et environ 10 millions de dollars du MTESS, à travers
différents programmes, pour une enveloppe de
10 à 11 millions de dollars par année. Dans un contexte où le gouvernement
du Québec reçoit chaque année... en
2014, c'est 320 millions de dollars en vertu de l'entente Gagnon-Tremblay—McDougall... on voit que, vraiment, il y a une opportunité pour, justement, aller
chercher plus pour faire plus. Et on est prêts évidemment à donner des comptes et des bilans pour pouvoir
justifier le tout et démontrer la plus-value d'avoir et d'utiliser la ville
de Montréal pour faire ces rapports et ces programmes.
Le Président (M. Picard) :
Merci. Il reste deux minutes, Mme la ministre.
Mme Weil :
Il reste deux minutes? Je voulais vous amener sur le BINAM, comment vous voyez,
donc, le rôle du BINAM associé, bon,
au statut de métropole, quel est le territoire que vous regardez et comment on
pourrait travailler, comment vous le
voyez intégré au grand réseau gouvernemental d'intégration et d'accueil, qui
comprend, comme vous le savez,
beaucoup le ministère de l'Emploi, oui, le ministère de l'Immigration, le
ministère de l'Éducation. Il y a beaucoup de ministères qui sont
là-dedans. Mais vous jouez un rôle important au niveau de l'intégration, donc.
M. Perez
(Lionel J.) : Absolument. Donc, évidemment, le BINAM, le Bureau
d'intégration des nouveaux arrivants à
Montréal, a été annoncé par M. Coderre en début d'année. Il est déjà en
opération, évidemment, avec la venue des réfugiés syriens, notamment. Mais vraiment, ce bureau-là,
il va être beaucoup plus large. Ça ne va pas seulement être pour des
nouveaux arrivants, des immigrants sur la base humanitaire. L'objectif, c'est,
encore une fois, de renchérir ce rôle qui est là.
Donc, on parle de la collaboration étroite avec
les organismes locaux impliqués, la mise en service d'une ligne — dans le temps, c'était Info-aide — concernant les réfugiés, mais encore, ça
peut être élargi; soutien à la recherche de logement ainsi que de la qualité abordable; la création d'outils de
communication à l'intention des nouveaux arrivants; discussions avec le milieu corporatif pour
coordonner leur contribution; préparatifs visant à l'implantation d'un
centre de transition si requis. Ce sont tous des éléments très concrets et très
réels sur lesquels on commence.
Évidemment,
le rôle du BINAM, de ce bureau, ne va qu'aller en grandissant, notamment avec
les attentes qu'on a avec la loi sur
la métropole, avec le plus grand rôle qu'on aura, et évidemment, avec la
planification, les partenariats de votre ministère ainsi que d'autres. Nous pensons que c'est un modèle qui peut
être utilisé pour Montréal, pour la grande région de Montréal, et c'est
quelque chose à suivre. Peut-être, il y a d'autres villes, d'autres
municipalités, d'autres régions qui pourraient s'inspirer... pour justement
voir quelles sont les meilleures pratiques et les instaurer ailleurs au Québec.
Le Président (M. Picard) :
Merci. M. le député de Bourget, pour une période de 9 min 30 s.
M.
Kotto : Merci, M. le Président. M. Perez, M. Silva, soyez les
bienvenus. Merci pour la contribution et la clarté de votre exposé. Montréal, métropole culturelle,
deuxième capitale économique francophone au monde... Les enjeux de la langue, à Montréal, on en parle, on revient chaque
année sur ça. Je poserai une question... enfin, je pose une question aux
pédagogues que vous êtes, pour la bonne
compréhension des personnes qui nous écoutent. Comment, selon vous...
ou, plutôt, de quelle manière l'immigration peut-elle contribuer à la
francisation de Montréal, à la sauvegarde du visage français de Montréal?
M. Perez
(Lionel J.) : Comme vous le dites, Montréal, évidemment, c'est une
ville de langue française, mais c'est aussi
une terre d'accueil, une terre d'enracinement. Donc, c'est toujours, si vous
voulez... à un certain point, ça peut être perçu comme un défi, comme
une divergence sur un spectrum. Nous, on voit ça comme, vraiment, une
opportunité.
La clé à une
intégration au Québec et à Montréal, c'est vraiment la connaissance du
français. Donc, c'est pour ça qu'évidemment,
au cours des dernières décennies, la connaissance du français était un élément
clé dans la détermination de pouvoir
accepter ou non un immigrant. C'est toujours le cas. Mais je vous soumettrai
que ce n'est pas suffisant. On
ne peut pas nécessairement s'attendre à ce
que l'immigration ou les immigrants avec une connaissance de la langue française soit la seule
façon qu'on puisse augmenter notre niveau d'immigration, et ça, ça passe
évidemment par un système de francisation qui est
adéquat, qui est efficace pour que des personnes, même si elles ne connaissent
pas le français d'emblée, elles puissent l'apprendre, elles puissent pouvoir
contribuer et participer pour éventuellement s'intégrer.
Vous savez, la diversité, c'est évidemment une
richesse. Des fois, il y a des capacités, des habiletés qui s'apprennent, qui
s'enseignent, et, s'il y a une volonté, s'il y a une volonté de la part de ces
immigrants de le faire, s'il y a une opportunité et également, une facilité de
le faire, ils le feront, et je pense que c'est ce qu'on voit. On voit, à Montréal,
cette capacité.
Maintenant,
il y a des défis, c'est vrai, il y a des défis concernant la francisation. Évidemment,
c'est quelque chose qui est de compétence du gouvernement provincial. C'est quelque chose sur
lequel on n'a aucune volonté ou intérêt de pouvoir s'immiscer. C'est sûr qu'il y a une relation. Lorsqu'on parle
d'intégration et francisation, il y a un lien direct. Donc, c'est une
façon de comment collaborer ensemble pour s'assurer qu'il y a cette
subsidiarité entre le gouvernement du Québec et la ville de Montréal.
Je vous donne
un exemple, par exemple, peut-être, où on peut améliorer la francisation. Très
souvent, on parle de francisation, on parle d'un système où on veut
enseigner pour que quelqu'un puisse, oui, trouver un emploi, puisse gouverner... pas gouverner, plutôt mais pouvoir
vivre, savoir comment communiquer, mais il y a aussi des besoins très
ponctuels. Par exemple, dans le contexte de préemployabilité, bien, il faudrait
peut-être avoir des programmes où un langage plus spécifique, très technique
pour le créneau qui est voulu... pour qu'on puisse donner plus d'outils.
Il y a aussi
cet élément de culture corporative ou culture d'employeurs au Québec. C'est
bien beau de connaître le français, mais il y a des personnes qui
viennent de France, qui viennent d'autres pays et puis il y a quand même un ajustement, il y a quand même une intégration. Ce
n'est pas le fait qu'on sait le français qu'il y a une garantie
d'intégration et ce n'est pas le fait qu'on
ne connaît pas le français qu'on ne peut pas s'intégrer. Alors, c'est ça,
l'équilibre de pouvoir trouver... Et
je pense qu'il faut vraiment combiner ces éléments de préemployabilité avec des
éléments... pour pouvoir faciliter
cette connaissance, cet apprentissage. Ultimement, une personne qui connaît le
français, que ce soit dès son arrivée ou bien au cours des premières
années de son arrivée, si on veut avoir un succès, c'est parce qu'il peut
apprendre et connaître le français et trouver un emploi en français.
M. Kotto : Sur un autre ordre
d'idées, hier, je posais la question au maire de Laval, qui était passé faire
sa présentation ici, sur la question de la discrimination en emploi. On en
entend beaucoup parler. À titre d'élu, j'ai des commettantes et des commettants
qui régulièrement viennent frapper à la porte de mon bureau pour me faire part
de leurs désillusions relativement aux
arguments qui les ont amenés à venir s'installer au Québec, et plus
spécifiquement à Montréal, puisque c'est à
peu près 74 %, 73 % ou 74 % des nouveaux arrivants qui sont en
rétention à Montréal. Mais, face à ce
qu'ils considèrent comme un mur de discrimination, il y a le découragement et
parfois des déménagements du côté de Toronto,
où les bras sont ouverts. C'est 24 % de taux de chômage à Montréal, et
comparativement à 14 % à Toronto, selon les derniers chiffres que
nous avons eus, alors que ces personnes parlent français, et ces mêmes
personnes qui parlent français à Toronto ont
plus de chances de trouver un emploi versus Montréal. Est-ce que la question de
la discrimination en emploi, à l'embauche plus spécifiquement, est une
vue de l'esprit ou une réalité, selon vous?
• (12 h 20) •
M. Perez
(Lionel J.) : On pense que
les faits parlent pour eux-mêmes. Le taux de chômage des nouveaux
arrivants est de 14,4 %, pour les non-immigrants, c'est de
6,6 %. Ces données-là, si on les examine au fil des dernières années,
elles sont plus ou moins stables. Donc,
évidemment, il y a un enjeu, il y a un enjeu pour pouvoir s'assurer que la
population immigrante puisse trouver des
emplois, et il y a des défis. Il y a
des défis notamment sur la discrimination. La Commission des droits de la personne en a
fait état dans leur rapport. Donc, encore une fois, c'est une réalité. Ce sont des échos que nous entendons, évidemment. De façon plus
globale, au niveau de notre société, la ville de Montréal, on a des
efforts à faire également pour justement à voir s'assurer qu'on ait plus
d'immigrants, mais également plus de personnes des minorités visibles. C'est un
enjeu sur lequel la ville de Montréal travaille. Il y a une augmentation, mais,
encore une fois, on doit, on peut et on doit bonifier.
Ce
que j'apporterais également, c'est le fait, qui est quand même
intéressant, c'est que, pour les immigrants qui ont une certaine scolarité au Québec,
ce taux de chômage continue à Montréal, mais il diminue à
Toronto et à Vancouver, d'après le
rapport de CIRANO qui a été fait en 2014. Donc, il y a clairement
une problématique. Ça, ça peut s'expliquer notamment avec la reconnaissance des diplômes, avec la reconnaissance des compétences. Nous pensons que ça,
c'est vraiment un élément clé pour pouvoir éliminer cette
problématique. On connaît tous la problématique de la surqualification. On connaît tous des personnes qui font des travaux
de préposés bien qu'ils ont des reconnaissances universitaires. Donc, oui, c'est quand
même sur multiples niveaux, mais c'est une problématique, il faut continuer à
s'attaquer de façon sociétale au... du gouvernement du Québec.
Au niveau de Montréal, il y a différents programmes, par exemple, le programme NEXUS, qui est un programme qui est administré par la ville de Montréal mais qui est subventionné par le gouvernement du Québec, pour
qu'on puisse effectivement sensibiliser l'employeur quant à l'attrait et
les apports des nouveaux arrivants, de leurs connaissances, de leurs compétences. Ça fonctionne. Il y a
le programme de parrainage professionnel, qui a eu vraiment
un grand succès depuis 2010. On parle de plus de 360, sinon 400
stagiaires, où le taux d'embauche après stage est de 60 %. On parle d'un
taux de satisfaction de 95 %.
Donc, je pense qu'il
y a des opportunités, il y a des programmes, c'est une question de vraiment
agrandir le potentiel et avoir une plus grande échelle pour avoir des résultats
voulus à différents niveaux.
Le Président (M.
Picard) : Il reste 20 secondes.
M. Kotto :
20 secondes? Merci.
Le Président (M.
Picard) : Merci. Mme la députée de Montarville,
6 min 30 s.
Mme
Roy (Montarville) : Merci, M. le Président. Bonjour, messieurs.
Merci. Merci pour votre mémoire, que je lis avec intérêt.
Il
y a quelque chose qui est très frappant pour les gens qui nous écoutent.
Montréal, c'est gros, c'est vraiment le coeur économique du Québec, hein, c'est la réalité, mais vous nous dites
une chose frappante. Vous avez beaucoup de chiffres et vous nous
dites : «...on estime que ces nouveaux arrivants représentent en moyenne
100 arrivées par jour» à Montréal, 100
personnes. Alors, c'est énorme, et on voit toute la responsabilité qui incombe,
oui, au MIDI, mais aussi à la ville
de Montréal. Et Montréal, c'est gros, Montréal, c'est grand, il y a des
problématiques particulières. Merci pour les données, parce qu'il y a
beaucoup de données sur le taux et le pourcentage. Maintenant, on nous dit
qu'il y a déjà... en 2011, sur le territoire
de Montréal, 612 000 personnes avaient le statut d'immigrant, soit
33 % de la population totale. C'est le tiers, c'est une personne
sur trois.
Donc,
allons tout de suite à la page... bien, en fait, page 7, justement, parce que
la première question, on est ici pour les
seuils d'immigration pour les années à venir. Je crois comprendre que vous êtes
d'accord avec les représentations qui sont
faites par la partie gouvernementale. Vous êtes d'accord avec les seuils, mais
vous nous dites : «Il importe toutefois qu'annuellement le nombre
de personnes immigrantes et les modalités de répartition prévues sur le
territoire ne compromettent pas l'apport migratoire nécessaire pour la métropole.»
Alors, ma question : Est-ce que vous craignez que l'immigration en région se fasse au détriment de Montréal, ou que
Montréal en souffre, ou il faut prémunir Montréal d'une certaine façon?
Voulez-vous élaborer là-dessus?
M. Perez (Lionel
J.) : Bien, je pense tout simplement qu'il faut s'assurer, dans la
planification, dans les nombres, qu'effectivement les montants nécessaires pour
la croissance démographique de Montréal et pour tous les avantages, pour la main-d'oeuvre, le
vieillissement, etc., soient maintenus. On pense qu'avec l'historique... On
reçoit plus de 70 % de niveaux
d'immigration, on ne pense pas que vraiment il y a un risque à cela. On ne
pense pas qu'au jour de lendemain il
y aura un changement à cet égard, mais nous pensons qu'il est tout à fait
pertinent de pouvoir le souligner et de le rappeler.
Concernant
la régionalisation, nous comprenons tout à fait le besoin de main-d'oeuvre en
région. Nous comprenons également une
volonté d'avoir également une intégration en région. C'est pour le bienfait de
la société québécoise. On pense qu'il
y a des programmes, il y a des opportunités pour avoir des échanges avec les
régions et la ville de Montréal. On
parle également d'une maison des régions qu'on est en train de mettre en place pour
avoir ces programmes d'échange économiques, mais également culturels.
Alors, c'est dans ce contexte-là. Nous, on veut s'assurer que les chiffres, les
montants pour la ville de Montréal viennent dans notre direction, pas plus que
ça.
Mme
Roy (Montarville) :
Vous disiez quelque chose tout à
l'heure et je hochais de la tête.
J'étais tellement en accord avec ce que vous disiez à l'égard aussi de la compréhension de
la culture. Ce n'est pas nécessairement parce qu'on a de très bonnes cotes en français qu'on va bien nécessairement s'intégrer si on ne comprend pas la culture et, à l'inverse, on peut
parler n'importe quelle autre langue, mais, si on a compris la culture, peut-être
que ce sera plus facile, l'intégration. Je trouvais que c'était intéressant de vous entendre dire ça parce que
je pense qu'effectivement nous croyons qu'il faut mettre l'accent sur la
connaissance de la culture, là, je veux dire nos valeurs, nos valeurs dans la charte
québécoise, naturellement.
Je pense que c'est important que les gens les connaissent lorsqu'ils arrivent
ici et y adhèrent. Et naturellement vous disiez également l'importance de la
langue française, la pérennité de la langue française.
Maintenant,
il y a naturellement à l'égard de... certaines problématiques, vous
les mentionnez, à l'égard d'une certaine
discrimination à l'emploi... Peut-on parler de discrimination dans la mesure
où, à la page 9, je vous amène en haut de
page, vous nous dites : «En février 2015, parmi les prestataires de l'aide sociale au Québec, on comptait 53 829 adultes nés hors Canada, dont une grande partie habitait l'île de Montréal.» C'est beaucoup de monde qui ne travaille pas, et on sait
que le taux de chômage est de 18 % pour les immigrants qui sont ici depuis
cinq ans et moins. Alors, c'est un défi particulier
pour Montréal puisque vous avez le plus grand bassin. Que préconiseriez-vous
que le MIDI fasse pour aider justement à diminuer ce taux de chômage
chez des immigrants, et des immigrants qui sont francophones aussi, ce qui est
assez aberrant?
M. Perez (Lionel J.) : Il
n'y a pas de solution magique, hein? Il faut vraiment voir ça dans un contexte
structurant où il y a évidemment eu la
consultation sur la nouvelle politique québécoise d'immigration, et maintenant,
évidemment, le projet de loi n° 70 qui
a été adopté avec la nouvelle méthodologie, la nouvelle méthode de sélection.
On part maintenant avec la
planification. Donc, nous, on voit ça dans un tout. Et, nous, ce qu'on dit,
c'est que, si on veut avoir des résultats à la longue, il faut voir
quelles sont les meilleures façons d'intégrer le monde. Alors, il y a
différentes façons de le voir.
Si
on voit ça dans un continuum de services, un continuum de services où
évidemment c'est, avant qu'ils viennent au Québec, au Canada, il y a
certains éléments, ensuite il y a une sélection qui est faite, mais ensuite,
une fois qu'ils arrivent là, il y a toute
une panoplie d'agissements, d'actes, de tâches qui doivent être faites, et
principalement c'est par les municipalités,
par la ville de Montréal, évidemment avec des programmes d'aide du gouvernement
du Québec. Mais nous, nous pensons qu'évidemment il faut absolument
continuer avec ces programmes au niveau local. La subsidiarité, je l'ai dit, je
le répète, c'est important pour créer des efficiences, pour avoir une meilleure
intégration.
Mais,
à part cela, je pense qu'il faut également, et on le souligne à notre
recommandation 3.2, c'est une campagne de sensibilisation auprès de tout
le monde, auprès de la société, auprès des employeurs pour pouvoir que c'est
une diversité, c'est un apport, c'est
vraiment un avantage sociétal. Nous pensons qu'à travers ces différentes
mesures, on peut.
Donc, il n'y a pas
d'élément clé, c'est à travers des efforts constants, structurants et nous
pensons que, par exemple, le BINAM, du
bureau d'intégration, c'est un point d'accueil. Nous pensons que les programmes
NEXUS, le programme de parrainage professionnel, tous, ce sont des
éléments qui puissent améliorer l'accueil, l'intégration pour avoir une
meilleure employabilité.
Vous
savez, vous dites que le français, ce n'est pas une garantie. Moi, je dirais
que c'est évidemment nécessaire à certains niveaux. Mais là il y a tous
les autres éléments. Il faut également une volonté de la part des immigrants de
pouvoir s'ajuster, ça fait partie... et ce
n'est pas unique au Québec. Donc, nous, on pense qu'à travers tous ces
éléments, avec tous ces éléments de
pouvoir faire plus de pédagogie auprès des employeurs, de pouvoir mieux
outiller des immigrants à travers une meilleure sensibilisation, on
parle de la population, on peut, et on doit, et on va y arriver.
Le Président (M.
Picard) : Merci. Merci, messieurs, pour votre contribution aux
travaux de la commission.
Et la commission
suspend ses travaux jusqu'à 14 heures, où nous poursuivrons les auditions à la
salle du Conseil législatif.
(Suspension de la séance à
12 h 30)
(Reprise à 14 h 2)
Le
Président (M. Picard) :
À l'ordre, s'il vous plaît! La Commission
des relations avec les citoyens
reprend ses travaux. Je demande à
toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de
leurs appareils électroniques.
Nous
poursuivons la consultation générale et les auditions publiques sur le cahier
de consultation intitulé Laplanification
de l'immigration au Québec pour la période 2017‑2019.
Cet après-midi, nous
débutons nos travaux en recevant le Regroupement québécois des organismes pour
le développement de l'employabilité. Vous
disposez de 10 minutes pour faire votre exposé. Dans un premier temps, je
vais vous demander de vous identifier. Par
la suite, il va y avoir des échanges avec les parlementaires. Donc, la parole
est à vous.
Regroupement québécois des organismes pour le
développement de l'employabilité (RQUODE)
Mme
Roy (Valérie) : Merci beaucoup. M. le Président, Mme la ministre et
distingués membres de la commission, mon
nom est Valérie Roy, je suis directrice générale du Regroupement québécois
des organismes pour le développement de l'employabilité, le RQUODE. Je suis accompagnée, à ma gauche,
aujourd'hui, de M. Jean-Luc Gélinas, directeur général du
Service d'orientation et d'intégration des immigrants au travail, le SOIIT, qui
est un de nos organismes membres situés à
Québec; et, à ma droite, de Mme Mélanie Hébert, conseillère en emploi
à l'Orienthèque, également un de nos organismes membres situés en
Montérégie.
Je
tiens d'abord à vous remercier de nous permettre de présenter le point de vue
des membres du RQUODE sur la planification de l'immigration. Notre
regroupement rassemble 87 organismes répartis à travers le Québec qui sont spécialisés en développement de la main-d'oeuvre.
Nos membres offrent des services d'emploi à plus de
80 000 personnes chaque année.
Leur impact sur les communautés est donc substantiel et les programmes qu'ils
mettent en oeuvre ont des retombées significatives sur plusieurs types
de clientèles. Je tiens à souligner qu'une trentaine de nos organismes membres
oeuvrent auprès de la clientèle immigrante.
C'est
donc avec beaucoup d'intérêt, M. le Président, que nous avons pris connaissance
du cahier de consultation publié sur
les orientations de la planification pluriannuelle de l'immigration. Face aux
nombreux défis liés à l'attraction, mais
aussi à la sélection, à l'accueil et à l'intégration des personnes immigrantes
en sol québécois, le RQUODE a choisi de se concentrer, pour le présent exercice de consultation, sur un enjeu
primordial en lien avec l'orientation 7, l'immigration en région. Les
constats et recommandations présentés dans notre mémoire s'appuient sur
l'expérience et l'expertise des membres du regroupement.
Je cède maintenant la
parole à mon collègue, M. Gélinas.
M. Gélinas (Jean-Luc) :
Bonjour. En référence à la page 5 du
mémoire, le gouvernement du Québec
souhaite favoriser l'installation des
personnes immigrantes dans les régions de Québec ayant des manques de main-d'oeuvre et qui sont mobilisées pour
les accueillir, notamment en encourageant la mobilité interrégionale des
personnes immigrantes engagées dans une recherche
d'emploi. Il vise ainsi à accroître la proportion de personnes immigrantes qui
s'installent hors de la région métropolitaine de Montréal. Les actions
décousues en matière de régionalisation sèment des doutes quant à la volonté réelle des autorités politiques.
Le gouvernement doit faire preuve de leadership
et se doter d'un véritable plan
d'action en matière de régionalisation. Il doit également assurer la concertation et la coordination entre
les différents ministères impliqués.
L'orientation 7 de la présente consultation démontre clairement la volonté du gouvernement d'impliquer
davantage les acteurs sociaux et locaux,
mais rend difficilement applicable une stratégie concertée et harmonisée. Si le RQUODE salue cet effort de mobilisation, il craint néanmoins que la multiplication des acteurs puisse
nuire au déploiement d'une offre de
service cohérente et adaptée. Il est également essentiel de donner aux
organismes et aux acteurs locaux impliqués les moyens de mettre en oeuvre la volonté du gouvernement en matière de
régionalisation de l'immigration. Combiné à la coordination floue, ce financement incertain, souvent confirmé à la
dernière minute, engendre une pression énorme sur les organismes
communautaires et leurs ressources humaines, d'où la recommandation 1 de mettre
en oeuvre un plan d'action national concerté en matière de régionalisation de
l'immigration.
Quant aux régions,
même s'il est démontré que le choix du lieu d'établissement peut avoir une
incidence significative sur l'intégration
professionnelle des nouveaux immigrants, seul un nombre restreint de candidats
immigrants choisis initialement s'établissent en région. Plusieurs raisons
connues expliquent ce choix. De nombreuses régions tentent alors de recruter davantage d'immigrants installés à Montréal.
La pierre angulaire du plan d'action en matière de régionalisation doit donc prioriser les régions
afin d'éviter, dans la mesure du possible, un double processus
migratoire que représentent l'immigration et
l'émigration. Il importe donc de faire davantage connaître et valoir le
potentiel des régions dès le début de
la démarche d'immigration en identifiant préalablement les secteurs d'emploi en
demande dans les régions harmonisés aux compétences pour favoriser
l'installation de personnes immigrantes hors de la région métropolitaine. Il
est essentiel de s'assurer que les nouveaux arrivants soient de nouveau
informés rapidement à leur arrivée, d'où la recommandation 2 d'intensifier les
actions en amont de l'arrivée des candidats immigrants.
Mme
Roy (Valérie) : Je vais maintenant
vous parler de l'emploi comme vecteur d'intégration. Il est certain que l'attraction des travailleuses et travailleurs
immigrants en région constitue un vecteur de développement et
d'enrichissement des collectivités.
Cependant,
la réussite de l'immigration en région nécessite plusieurs conditions. Deux
d'entre elles sont plus que nécessaires pour réussir
l'immigration : la maîtrise du français et l'intégration en emploi.
L'immigration en région ne peut donc être
séparée de l'emploi, car la majorité des immigrants se déplaceront en région
uniquement s'ils ont accès à un
emploi de qualité. Emploi-Québec estime que 17 % des 1,4 million d'emplois à pourvoir d'ici 2021 seront
comblés par des personnes immigrantes. Il
est alors primordial de s'assurer de l'adéquation formation-compétence-emploi.
À ce titre, les projets de stages
rémunérés offerts par la Commission des partenaires du marché du travail, la
CPMT, dont certains sont pilotés par
notre regroupement en partenariat avec nos organismes membres, permettent entre
autres à des personnes immigrantes d'intégrer un emploi tout en recevant
une formation qualifiante qui favorise le développement des compétences en milieu de travail. Ainsi, nous
recommandons de consolider et bonifier la mise en oeuvre des programmes
de stages rémunérés en entreprise de la Commission des partenaires du marché du
travail pour soutenir les personnes immigrantes
et les minorités ethnoculturelles dans leurs démarches vers une insertion
réussie sur le marché du travail en portant une attention particulière
aux régions.
J'aimerais
maintenant vous parler de la nécessité de sensibiliser les milieux d'accueil
pour favoriser l'inclusion. Vous
serez d'accord avec moi que la réussite de l'établissement et de la rétention
des personnes immigrantes en région dépend
aussi de l'ouverture et de la capacité d'adaptation des différents acteurs de
la communauté d'accueil. S'il y a un manque
de sensibilisation, d'ouverture et d'inclusion, les nouveaux arrivants n'hésiteront
pas à quitter leur nouvelle région pour
s'établir dans la métropole québécoise ou même ailleurs au Canada. Nous croyons
que les efforts de sensibilisation doivent être poursuivis à trois
niveaux, soit la société en général, les villes et les MRC, ainsi que les
employeurs et les milieux de travail. Voilà
pourquoi nous recommandons d'abord d'organiser une campagne nationale
d'information, de promotion et de sensibilisation au grand public sur l'apport
de l'immigration au développement du Québec.
Je vais laisser mon
collègue, M. Gélinas, poursuivre pour vous parler de l'importance d'impliquer
les villes et MRC.
• (14 h 10) •
M.
Gélinas (Jean-Luc) : Concernant les villes et les MRC, de nombreux
organismes sur le terrain constatent une méconnaissance des élus face aux enjeux, à la présence et à l'apport des
immigrants. Il est donc important de sensibiliser les élus municipaux sur les stratégies à mettre en
place pour une harmonisation des relations interculturelles en les
invitant à intégrer les besoins liés à l'immigration et à la diversité
ethnoculturelle dans leurs politiques.
L'immigration
représente une véritable contribution au développement économique des régions
en fournissant notamment un bassin de
compétences agrandi et renouvelé des travailleurs hautement qualifiés et
motivés. L'immigration en région
génère également une société plus diversifiée favorisant les échanges
interculturels, un apport au dynamisme de l'occupation du territoire.
Les autorités
provinciales doivent encourager les autres villes à adopter et mettre en oeuvre
une politique d'immigration. Elles doivent
par ailleurs s'assurer que ces politiques fassent l'objet d'une véritable
appropriation locale, d'une
application concrète et d'un suivi, d'où la recommandation d'inciter et
soutenir les villes et les MRC, et qu'elles conçoivent et développent
une politique d'accueil.
Mme
Hébert (Mélanie) : La stratégie d'accès en matière d'immigration
insiste sur la nécessité de bâtir un marché de l'emploi local libre de toute discrimination. Donc, la stratégie
propose d'outiller les dirigeants pour l'accueil, le maintien et la progression en emploi d'une main-d'oeuvre
diversifiée, notamment par des guides et des activités de
sensibilisation et de formation.
Par rapport
aux nombreux préjugés qui subsistent de la part de certains employeurs, le
RQUODE est favorable aux propositions d'augmenter les efforts de
sensibilisation et d'information sur les avantages d'une main-d'oeuvre
diversifiée auprès des acteurs du milieu économique. Il est d'avis que les
entreprises ont besoin également d'un accompagnement
plus personnalisé et plus soutenu. L'expérience du projet IntégraTIon Québec a
mis en lumière la pensée de nombreux employeurs selon laquelle la
gestion de la diversité culturelle ne les concerne pas. Ils ne perçoivent pas toujours l'utilité d'une formation ou d'un
accompagnement en gestion de la diversité culturelle pour favoriser
l'intégration en emploi de leurs nouvelles
ressources immigrantes. Que ce soit une expérience positive ou négative, il en
résulte que les gens, les employeurs
peuvent hésiter à recruter de nouveau au sein de certaines communautés ou au
sein même du bassin de talents issus
de l'immigration. Il s'avère donc essentiel de fournir un accompagnement
soutenu et personnalisé aux employeurs
des régions moins familières avec la diversité. Il n'est malheureusement pas
suffisant d'outiller les gestionnaires si aucun transfert n'est réalisé
vers les équipes. Ainsi, l'information, la sensibilisation et l'accompagnement
des entreprises doivent aussi viser les
autres employés, surtout en région. Donc, nous avons la recommandation 6 :
recourir aux services des organismes en
employabilité spécialisés auprès de la clientèle immigrante pour outiller les
employeurs et les travailleurs, contrer les préjugés existants et faire
connaître les bénéfices de l'immigration.
Au niveau des travailleurs temporaires, donc, au
cours des dernières années, le Programme de l'expérience québécoise a obtenu de bons résultats et a permis
d'accroître le potentiel de transition vers un statut permanent de
milliers d'immigrants temporaires. Les
immigrants temporaires, plus nombreux dans les différentes régions du Québec,
répondent à des besoins de main-d'oeuvre
spécifique ou poursuivent leur formation dans l'un des établissements scolaires
québécois. Selon l'orientation 3, le
gouvernement provincial entend doubler la proportion des personnes immigrantes
de la sous-catégorie des travailleurs
qualifiés sélectionnés qui sont déjà au Québec et qui ont un statut de
travailleur étranger temporaire ou
d'étudiant étranger. Le MIDI souhaite offrir le service d'intégration en ligne
et la francisation en ligne pour faciliter le passage du statut de résident temporaire au statut de résident
permanent. Par contre, ces seuls services ne suffisent guère pour ceux qui ont besoin de services
d'accompagnement sur le terrain, que ce soient des étudiants étrangers, qui
peuvent être isolés, qui ont de la
difficulté à trouver un emploi, ou des travailleurs étrangers, qui sont bien
intégrés en emploi mais dont les
conjoints ne réussissent pas toujours à trouver du travail. Ces gens font
souvent appel à l'expertise des organismes sur le terrain afin
d'obtenir, de demander leur résidence permanente. Malheureusement, les organismes...
Le Président (M. Picard) : En
conclusion, Mme Hébert, s'il vous plaît.
Mme Hébert (Mélanie) : Oui, merci.
Le Président (M. Picard) :
Vous allez pouvoir poursuivre lors des échanges aussi.
Mme Hébert
(Mélanie) : Pas de problème. Donc, en fait, c'est ça, ce qu'on veut,
c'est permettre aux organismes en
employabilité d'offrir des services aux travailleurs étrangers temporaires et à
leurs conjoints ainsi qu'aux étudiants étrangers pour faciliter leur
établissement durable.
Le Président
(M. Picard) : Merci. Nous allons débuter notre période
d'échange. Mme la ministre, la parole est à vous pour 16 minutes.
Mme Weil : Merci, M. le
Président. Alors, bienvenue, Mmes Roy, Hébert, et M. Gélinas. Merci beaucoup de
participer à cette commission parlementaire.
Et vous amenez une expertise... chacun amène une expertise différente et
intéressante, et, à quelque part, il faut
que tout le monde travaille ensemble pour bien réussir une bonne sélection,
une bonne intégration, le vivre-ensemble, et j'aimerais toucher à tous ces
enjeux-là.
Peut-être,
dans un premier temps, pour que mes collègues et les gens qui nous écoutent
comprennent bien votre mission, votre expérience, votre expertise...
Mme Roy
(Valérie) : Bien sûr, donc, je vais débuter la réponse. Alors, oui, le
regroupement québécois, comme
je disais en introduction, représente 87
organismes, et leur expertise, c'est d'accompagner en emploi, pas juste trouver
un emploi et intégrer une personne en
emploi, mais j'insiste sur le mot «accompagnement», le maintien en emploi. Et, dans les
dernières années... Parce que nous, on existe depuis 30 ans, le regroupement,
mais il y a certains de nos organismes membres qui existent depuis 35, 40 ans.
Donc, vous comprendrez que c'est des organismes très bien ancrés dans leur communauté,
avec un fort tissu social, qui travaillent en concertation avec les autres
acteurs, qu'ils soient sociaux ou des acteurs
du milieu de la santé. Donc, c'est le maintien, leur spécialité, c'est d'aider
les gens à se trouver un emploi — ici,
on parle des personnes immigrantes, la
clientèle immigrante — mais
pas seulement d'accompagner l'individu, la personne qui se cherche un emploi, mais l'employeur, les entreprises.
Donc, c'est la clé du succès, c'est l'expertise, c'est le trait d'union
entre les chercheurs d'emploi et les besoins de main-d'oeuvre des employeurs.
Donc, je dirais que
c'est ça qu'on peut apporter autour de la table aujourd'hui, et, aujourd'hui,
on parle spécifiquement de régionalisation. Donc, c'est clair qu'ils ont
une expertise, dans la région, très poussée avec les autres acteurs parce
que, vous allez le voir tout à l'heure dans les échanges, les exemples qu'on va donner, la concertation, et on le nomme dans notre mémoire,
elle est primordiale. Donc, il faut vraiment nous voir comme un acteur socioéconomique
clé, mais qui est spécialisé dans cette intégration, ce maintien-là, à la fois
pour l'employé et l'employeur.
Mme
Weil : Donc, je
voudrais, dans le temps que j'ai, aborder justement cet accompagnement en amont puis... bon, votre appréciation de la réforme et de la
transformation qui va bénéficier de beaucoup plus de rapidité et
efficacité et avec un travail en amont. Puis
vous évoquez ça, ce travail collégial et de réseautage avant, pour bien
déterminer les besoins des régions
pour que la personne reste, mais vous touchez aussi le vivre-ensemble. Je veux
me donner du temps à la fin pour poser ces questions, ces clés. C'est
exactement notre vision des choses.
J'aimerais vous
entendre sur la question des stages rémunérés, votre expérience. Comment
suggérez-vous de bonifier ces programmes de
stages en entreprise? On en a beaucoup parlé, je pense que tout le monde trouve
que c'est très stratégique. Quelle est votre expérience avec ces stages?
Qui vous ciblez pour ces stages en entreprise?
Mme
Roy (Valérie) : Bien, premièrement, les personnes qu'on cible, c'est
des chercheurs d'emploi, parce que les stages
en entreprise, il faut qu'il y ait plus de stages accessibles pour les gens qui
ont a priori des obstacles à leur intégration en emploi. Premièrement, il faut qu'il y en ait plus, il faut avoir plus
de souplesse, plus de flexibilité, il faut voir ça comme un
accompagnement.
Donc,
le stage, c'est une chose, mais il faut que, durant l'intégration, il faut bien
cibler, premièrement, l'endroit où le stage va se faire. Donc, les
organismes en employabilité, premièrement, identifient selon les besoins
d'activité. Parce que les stages en
entreprise qu'on parle, c'est que, comme je disais tout à l'heure, c'est un
virage qu'on prend un peu... La
personne qu'on dessert, ce n'est pas juste le chercheur d'emploi, c'est
l'entreprise aussi. Donc, c'est selon les secteurs d'activités en
demande. On identifie les possibilités d'emploi, on identifie... après ça, les
personnes qu'on rencontre dans les
organismes qui ont des intérêts, des compétences ou des compétences à
développer pour intégrer ces emplois-là dans les secteurs d'activité en
demande et c'est l'accompagnement. Pour le bonifier, il faut permettre une
souplesse, c'est très important, et un certain temps dans l'entreprise.
L'accompagnement,
même une fois que la personne est intégrée en stage, il faut permettre aux
intervenants pivots, les conseillers
en emploi, de continuer à intervenir pendant toute la durée du stage. Puis ici,
quand on parle de personnes immigrantes,
là, l'expérience en sol québécois, il y a tout un code culturel à apprendre.
Cette fameuse première expérience là sur le marché du travail québécois,
ça prend du temps.
Donc,
pour le bonifier, c'est vraiment ce parcours-là. Il faut respecter
l'accompagnement, la flexibilité puis la pluralité des ressources qui...
Des fois, la personne en stage a besoin d'autres ressources.
Mme
Weil : Je voudrais comprendre, parce que, pour que ça devienne
une stratégie nationale, évidemment, ça prend plusieurs ministères
impliqués, beaucoup de différents acteurs sur le terrain.
Vos constats, au fil
des années, est-ce qu'il y a plus d'ouverture? Plus de possibilités? Est-ce
qu'il y a des programmes ou est-ce qu'il y a une multitude de programmes et
beaucoup de confusion? C'est quoi, votre lecture de l'environnement? Parce que c'est sûr que... je pense que tout le monde
pense les stages en entreprise, c'est essentiel, un peu le modèle peut-être allemand. Mais est-ce
qu'il y a des obstacles à ça actuellement? Est-ce que ça évolue bien?
Quels seraient les obstacles à éliminer?
Mme Roy
(Valérie) : Bien, je pense que je peux commencer, puis, Jean-Luc, tu
pourras continuer à appuyer. C'est sûr qu'il
faut une stratégie concertée, là. Il y a plusieurs ministères d'impliqués. Ça,
c'est clair qu'il faut un... peu importe qui va prendre le leadership,
il faut... Ça, c'est un obstacle, souvent. On travaille en silo, donc, ça, il
faut une stratégie intégrée.
J'aime
bien quand vous dites «stratégie nationale». Il faut un leadership politique
gouvernemental pour que ça fonctionne.
Oui, le modèle allemand, je sais, on est allés voir, c'est intéressant aussi.
Mais, au-delà de ça, je pense qu'il faut que plusieurs ministères
aillent dans le même sens. Ça, c'est un obstacle complètement administratif,
là, que je vous parle.
• (14 h 20) •
Mme Weil :
Je vais vous amener sur la reconnaissance des compétences et des acquis. Les
chiffres qu'on me donne, c'est les
experts... qu'à peu près 10 % de nos immigrants s'orientent vers une
carrière professionnelle, donc un ordre
professionnel. Donc, on travaille sur ce dossier-là, évidemment, mais c'est
10 %, hein, ce n'est pas 90 %, comme les gens pensent. Ensuite, il y a 10 % à peu
près, métiers réglementés. Mais, le reste, c'est les employeurs qui ne peuvent
pas reconnaître ni le diplôme ni la
compétence. Il y a beaucoup de travail qui a été fait pour reconnaître le
diplôme, mais là le bout qui manque,
selon tout le monde, c'est la formation, c'est les stages et un accompagnement
pour l'employeur pour reconnaître
justement l'expérience acquise dans un autre pays. J'ai l'impression que vous,
vous en savez quelque chose.
M.
Gélinas (Jean-Luc) : Moi, ce que je vous dirais, c'est qu'il faut
travailler sur ce que j'appelle l'effet porte de verre. Vous savez, on connaissait le plancher de verre, qui a été
nettement documenté chez les immigrants, ce qu'ils font face, c'est à une porte de verre. La majorité ont
de la difficulté à trouver un emploi dans leurs compétences parce qu'on dit : Vous n'avez pas d'expérience
québécoise, vous manquez de connaissances sur le marché du travail. Il y a
beaucoup d'arguments qui, je vous dirais, viennent travailler pour la fermeture
de la porte de verre, et, quand on parle d'une intégration réussie, de faire un stage va permettre d'éliminer les peurs
et donner la chance réellement à l'immigrant de démontrer ses
compétences et diminuer ces peurs-là et ces craintes-là qu'il va y avoir.
Mme Weil :
La question d'accompagnement des travailleurs temporaires et des étudiants
étrangers, vous évoquez ça. Évidemment,
c'est à l'extérieur du cadre qu'on a en vertu de l'entente Canada-Québec. Ce
n'est pas encore des résidents
permanents. Donc, tous les services, que ce soit ici ou ailleurs sont vraiment
axés sur la personne qui a des droits
en vertu de son statut, hein, un résident permanent. Là, c'est des personnes
qui n'ont pas ce statut. Nous, on veut les encourager à devenir des résidents permanents, évidemment, et passer par
un CSQ, et on souhaite, et on est en train de planifier ça, leur donner accès à la francisation en ligne, bon, déjà,
ça, parce que c'est quand même assez accessible. Après ça, je vous dirais qu'il n'y a pas de services
publics qui sont désignés pour ça. Disons, on ne serait pas la seule
société à ne pas avoir d'accompagnement.
Vous comprendrez pourquoi, parce que ce n'est pas des résidents permanents.
Donc, c'est comment faire en sorte de
combler ce vide qui amènerait les gens. On a beaucoup de succès quand même avec
le PEQ. On veut les encourager. L'employeur aussi joue un rôle à quelque part,
parce que l'employeur veut les garder.
Mme Hébert
(Mélanie) : Bien, c'est sûr que c'est un enjeu qui est important parce
que ce qu'on se rend compte, c'est au
niveau du maintien dans les régions. Donc, les gens, souvent, ils vont avoir un
emploi puis ils risquent de quitter après
parce que, si le conjoint, la conjointe n'arrivent pas à trouver de l'emploi...
parce qu'il n'a pas ce soutien-là, lui, il a été recruté, par exemple, à l'international, mais, si le conjoint, donc,
n'a pas le soutien qu'il veut, ce qu'il risque de faire, c'est qu'il risque de repartir. Donc, c'est là
qu'on pense que c'est un enjeu qui est important pour arriver à garder nos
gens dans les régions, et souvent c'est
qu'avec Emploi-Québec on a des difficultés justement à reconnaître ces
services-là, donc, d'où l'importance pour prévenir ça.
Mme Weil :
J'ai un collègue qui voudrait poser des questions. Donc, avant que je vous
quitte, parce que c'est important
pour moi que vous le sachiez, vous connaissez notre document Stratégie
d'action, vous allez retrouver beaucoup de vos recommandations là-dedans. Cette campagne sociétale, on est
tellement d'accord avec vous, comment créer des milieux accueillants, ça
prend des partenaires. Donc, il y a un budget qui est attaché à ces stratégies
d'action. Je vous demanderais de le regarder
attentivement et, peut-être, à une autre occasion, peut-être nous faire part de
vos commentaires sur cette stratégie
d'action, parce que c'est sur cinq ans, hein? C'est quand même intéressant, on
est très, très d'accord avec vous
qu'on ne peut pas juste agir en amont puis choisir la personne qui a le profil
idéal pour un emploi, puis, même si la personne intègre l'emploi, cette
personne est libre de quitter la région. Donc, la rétention passe beaucoup par
une mobilisation de la communauté. Alors, je vous remercie. Merci.
Le Président (M. Picard) : M.
le député de D'Arcy-McGee.
M.
Birnbaum : Merci, M. le Président. Bonjour, Mmes Roy et Hébert, M.
Gélinas, et merci pour votre témoignage.
Il me semble que ce n'est pas la première fois qu'on ait pu bénéficier de votre
expertise et votre expérience devant cette commission-là. C'est
impressionnant et important de constater que vous parlez au nom de 87 organismes membres qui sont sur le
terrain. Et je crois que Mme
la ministre vient de le dire, nos
orientations ont l'air d'être
complémentaires en grande partie à vos préoccupations. Mais, en
même temps, vous êtes sur le
terrain, et il y a des choses importantes à faire améliorer.
Vous avez
noté, et à juste titre, évidemment ce n'est pas la présidence qu'on l'entend,
que, l'immigration en région, ça passe par l'emploi. Y
a-t-il un constat plus incontournable
que ça? En même temps, comme vous pouvez voir dans nos neuf orientations, la francisation
est une grande préoccupation qu'on partage tous. En même temps, elle est... et
donc on parle, à titre d'exemple, de
notre recommandation que 85 % des travailleurs qualifiés soient... aient
une connaissance du français déjà.
Mais, si on constate que l'immigration passe par l'emploi, on parle de cet
autre 15 % et d'autres qui ont à perfectionner leur français qui
sont intéressants et très importants.
De votre expérience, je serais très curieux, si
vous étiez pour parler de vos orientations là-dedans, et de faire dans votre tête un sondage de vos membres, vos
87 membres, et les employeurs avec qui vous avez affaire, si vous
étiez pour poser la question... nous pouvons
mettre les mains sur les gens qualifiés qui ont les expertises pertinentes pour
le travail que vous avez à offrir, deux
questions : Est-ce que vous êtes bien ouverts à les accueillir malgré le
fait qu'ils sont en mode d'apprentissage et de perfectionnement du
français? Est-ce que vous êtes à l'aise et ouverts à ça? Deuxième
question : Est-ce que vous avez la capacité de les accompagner pendant ce
temps qu'ils perfectionnent leur français?
M. Gélinas
(Jean-Luc) : Je suis content de votre question, ça fait longtemps que
nos organismes... quand on parlait de
tenter de chevaucher les différents programmes et non pas les séparer. Et j'ai
beaucoup de gens qui suivent la francisation, qu'ils ont hâte de
commencer un processus de recherche d'emploi et qui doivent attendre la fin de
la francisation. Vous savez, des gens qui
ont de la difficulté à donner un sens à leurs compétences, et on leur
dit : Attendez la fin de la francisation,
et là on va commencer les démarches. Ils doivent commencer les démarches le
plus rapidement possible.
L'autre
phénomène que vous avez qui est crucial, tous les immigrants qui arrivent ici
arrivent ici en disant : Vous devez avoir pour trois mois de
subsistance. Je vous dirais que le trois mois est quelque chose de terrible à
vivre parce qu'eux, dans leurs têtes, ils
vont commencer à travailler dans les trois premiers mois, et ils s'aperçoivent
que la réalité n'est pas là, ce qui
amène une pression énorme familiale sur la façon de vivre, et également pour
leurs très profondes enracinées de
travail. Ils sont venus ici pour travailler pour un monde meilleur. Donc, cette
francisation-là, elle doit se faire en même temps que d'autres programmes pour les amener à réfléchir et non pas
travailler que dans l'urgence du moment, et qu'ils puissent avoir un
accomplissement relié sur leur développement et non pas sur la peur de manquer
d'argent et la peur d'avoir une suite. Et on
a la capacité de les avoir, on est capables de les prendre, et la simple
différence qu'on aura, on les prendra
plus tôt que plus tard. Donc, il y
aura, dans l'extension des services, quelque chose qui va revenir à la même
chose.
Mme Hébert (Mélanie) : Oui. Puis, juste pour compléter, nous, je regarde
au sein de notre organisme puis je sais que c'est la même chose dans d'autres organismes où on dessert des
clients qui sont en processus de francisation, donc où il y a des rencontres pour certains qui se font même
en anglais, d'autres, c'est des rencontres qui se font français et
anglais pour les accompagner parce que,
comme mon collègue dit, le besoin est là. Donc, oui, ils font de la
francisation, mais ils ne peuvent pas se permettre d'attendre trop longtemps
avant de travailler parce qu'il y a la famille qui est là et qu'ils ont besoin
d'eux.
Le Président (M.
Picard) : Il reste une minute.
M.
Birnbaum : M. le Président. Et, en ce qui a trait à la capacité, il
faut faire des généralisations évidemment, la capacité des entreprises d'accompagner ces gens qui ont besoin de
perfectionner le français. On a plus de programmes qui sont en aide à
ces employeurs-là. Est-ce que les gens sont au rendez-vous et ils comprennent
que c'est un chemin à parcourir en accompagnant les immigrants qu'ils
accueillent?
Mme Roy
(Valérie) : Vous parlez des employeurs?
M. Birnbaum :
Oui.
• (14 h 30) •
Mme Hébert (Mélanie) : Mais, en fait, nous, on a des entreprises où on
voit qu'ils ont le souci, ils veulent l'offrir, donc il y a... mais
c'est le bassin aussi, mais où ils vont offrir soit des cours, par exemple, le
soir ou au sein de leurs employés. Donc,
oui, il y a cette ouverture-là. Mais ils ne sont pas toujours outillés, à savoir de quelle façon le faire.
Là, ils ont besoin de l'expertise qui est offerte dans les organismes, parce
que nous, on est là pour les référer vers les bonnes ressources et faciliter
l'intégration en emploi de ces employés-là qui parlent français, mais qui
auraient besoin effectivement, là, de l'améliorer, là.
Mme
Roy (Valérie) : D'où l'importance que nos organismes puissent aussi desservir l'employeur, et non
pas juste la personne immigrante, parce que
le Québec est constitué avant tout de PME. Ils n'ont pas le
temps d'accompagner à l'intérieur, de
faire de la gestion sur la diversité culturelle, par exemple. Donc, c'est important
d'avoir un organisme comme ça qui puisse accompagner à la fois, comme on
le disait d'entrée de jeu, l'employé et l'employeur.
Le Président (M.
Picard) : Merci. Je cède maintenant la parole à M. le député de
Bourget, 9 min 30 s.
M.
Kotto : Merci, M. le Président. Alors, Mme Roy, M. Gélinas, Mme Hébert, soyez
les bienvenus et merci de contribuer
à cet exercice de réflexion que j'espère nourricier pour le ministère
de l'Immigration et pour le gouvernement surtout, parce que le ministère a beau avoir à sa tête une ministre
compétente, mais, quand les choix budgétaires à chaque année se font, il y a des ministères
qui font les frais de politiques que je ne qualifierai pas, mais on s'entend sur
ce dont je parle, et ce n'est pas
exclusif au gouvernement actuel, c'est de tout temps. Le ministère
de l'Immigration, le ministère de la Culture, pour ne nommer que ces
deux-là, sont souvent des enfants pauvres dans les priorités budgétaires de l'État.
Je voudrais déjà vous
féliciter pour les lumières que vous nous apportez relativement à ce qui se
passe sur le terrain. Et j'ai bien aimé le
concept du syndrome de la porte de verre — c'est la première fois que je l'entends, celle-là — et je voudrais creuser un peu plus là-dessus. Les
personnes qui vivent cette expérience, elles doivent être nombreuses.
Quand elles sont face à cette réalité, qu'est-ce qui se passe dans leur tête au
plan du sentiment d'appartenance, au plan du sentiment d'acceptation par
rapport à la société d'accueil?
M.
Gélinas (Jean-Luc) : Je vous dirais que j'ai rencontré beaucoup
d'associations ethniques et d'immigrants depuis les dernières années. Ce
sentiment-là, je vous dirais, quand je vais sur le terrain, il y a un
sentiment, chez eux, mitigé. Vous savez,
c'est des êtres humains qui, certains, pour eux, ont défrayé des coûts pour
venir ici. Ils avaient une carrière dans leur pays, ils souhaitaient
améliorer le sort de leurs enfants et leur sort quand ils se sont en venus ici.
Ce qu'ils voient dans la difficulté de
reconnaissance des compétences... Vous savez, je regarde, avec ma clientèle,
j'ai fait un sondage auprès de mes clients depuis mes cinq dernières
années, et il y en a à peu près la moitié qui travaille dans les compétences qu'ils ont. Le reste vont travailler
dans d'autres travails par urgence et nécessité, ce qui crée des
déceptions. L'arrimage est difficile. Quand je vous parlais de l'effet porte de
verre, ça, c'est quand on parle d'employabilité.
Tantôt, quand on vous
a parlé d'intégration sociale, moi, j'appelle ça l'effet aquarium, c'est-à-dire
que les immigrants, dans une région, sont
vus comme dans un aquarium et où il est difficile de communiquer parce qu'il y
a une vitre qui sépare les natifs des
nouveaux arrivants. D'ailleurs, j'ai des immigrants qui m'ont dit : À quel
moment on va arrêter de me dire que
je suis un immigrant? On pourrait le définir de façon légale très facilement,
c'est de façon sociale que ça devient plus difficile.
Ce
qu'on regarde dans cette dualité-là de porte de verre, elle est souvent reliée
au mode de gestion d'une entreprise qui
a sa propre culture et pour laquelle l'immigrant veut bien adhérer à cette
culture-là, mais, quand il est sur le terrain, il est confronté à la sous-culture, qui est parfois très
différente de la culture de la direction. Il a de la difficulté à pouvoir
gérer ces enjeux-là. Ça fait que l'effet de porte de verre, je vous dirais,
c'est que c'est un poids d'un rêve inaccessible. J'ai beaucoup d'immigrants qui me disent : Vous savez, je suis fatigué
de passer mes journées à aller dans des offres d'emploi qu'on me dit qui
seraient ouverts pour moi et que je reviens avec un échec. Ça fait 17 fois que
je fais ce processus. Je travaille à petit salaire, et,
chaque fois que je prends une journée de congé pour me présenter, c'est une
déception. Qu'est-ce que je dis à ma famille quand je reviens?
Et
c'est là la difficulté que je vous disais. L'effet de porte de verre, ce n'est
pas mesurable, mais on en ressent les effets,
hein? Pour ça que je conçois, quand on parlait d'intégration sociale, de cette
force qu'on doit avoir pour au moins donner
une solidité familiale et permettre à la personne qui vit ces moments
difficiles là d'avoir cet appui local, pour être capable d'aller vers ce qu'il avait comme rêve. Et non pas dire, comme
j'entends souvent : Moi, ma vie, je la mets de côté, mais c'est mes
enfants qui en bénéficieront.
Quand
on parle de terre d'accueil, c'est là que la dualité de l'immigration... qui
est pour une raison économique, mais il y avait l'immigration qui est
pour un enrichissement collectif et social. Et, ce côté-là, on ne l'a jamais
fait en symbiose, les deux pensés ensemble, et c'est ce qui est la difficulté
d'être transposé au niveau du travail.
M. Kotto :
Bien, merci. Merci, M. le Président.
Le Président (M.
Picard) : Merci. Mme la députée de Montarville, 6 min 30 s.
Mme
Roy (Montarville) : Merci beaucoup, M. le Président. Mesdames
monsieur, merci. Merci pour votre mémoire, pour votre témoignage. Et je tiens à m'excuser pour les
quelques minutes de retard. Je tiens vraiment à m'excuser, je dois faire
tout en même temps.
Votre mémoire porte
principalement sur l'immigration en région, on le comprend. J'aime vous
entendre témoigner parce que, ce que vous
venez de dire, entre autres, là, sur l'immigrant qui va faire des entrevues et
qui revient jusqu'à 17 fois, vous apportez un visage, un témoignage
humain et concret, alors, de ce qu'est la réalité de certains immigrants.
Revenons sur
l'immigration en région. J'en suis. Je pense que c'est extrêmement important,
justement, pour valoriser l'intégration, l'intégration
à la communauté d'accueil. Et l'intégration se fait par le travail, comme vous
dites. Donc, vous écrivez à la page 6... Et
là pour le bénéfice des gens qui nous écoutent, je vais lire un tout petit peu.
Vous nous dites ici : «Si
le financement du programme de régionalisation — anciennement le Programme régional
d'intégration — n'a
pas changé pour certaines régions, en dépit des modifications apportées à
l'administration du programme, quelques organismes
membres du RQUODE déplorent de fortes coupures budgétaires, de l'ordre de
30 % à 84 %, et ce, malgré un excellent taux de rétention en
région.»
Alors,
j'aimerais savoir concrètement quels ont été les impacts pour vous, pour le
travail que vous faites et pour les
gens que vous représentez, sur le terrain, quels ont été les impacts de ces
compressions, qui varient entre 30 % et 84 % du budget pour
certains organismes?
M.
Gélinas (Jean-Luc) : Bien, je vous dirais, ici, à la région de la
Capitale-Nationale, le SOIT avait auparavant 250 000 $ pour procéder à la régionalisation, et ça a fondu à
27 000 $, puis pour terminer avec plus rien. Je vous dirais que la régionalisation, quand on dit qu'on a un
besoin... Mais c'est pour ça également, dans le mémoire, qu'on parlait
de travailler en amont. Parce que de prendre
quelqu'un de Montréal pour le ramener ici... C'est que, pendant qu'il vit
son immigration à Montréal, après ça, je
dois le prendre pour l'amener en région, je l'amène dans une étape
d'émigration, alors qu'il n'a même pas
complété son processus d'immigration. C'est beaucoup de déchirements et un
autre sentiment de perte pour revenir en région. C'est pour ça que c'est
fragile, et l'accompagnement demeure absolument crucial durant l'emploi.
Parce qu'une personne
qui arrive dans une région et qui n'a pas ses repères, s'il n'a pas d'appui, il
va sentir son environnement de travail
menaçant par l'inconfort de sa vie de tous les jours en région. Ça fait que
c'est là qu'il est important de travailler avec lui avant d'arriver dans
l'entreprise, pour bien le préparer à comprendre son milieu de travail
qu'il va vivre et, par la suite, à le suivre et à l'aider dans son
accomplissement. Quand je vous disais tantôt :
Au travail, l'écart qu'il y a entre la sous-culture et la culture, qu'il a de
la difficulté à vivre... On peut l'aider et
le faciliter là-dedans.
Ça
fait que, dans le fond, ce qu'on vous dit, c'est que, oui, effectivement, il y
a eu des coupures, oui, il y a eu des problématiques.
Est-ce qu'on a lieu de travailler différemment pour améliorer... et une
meilleure efficacité de répartition en
région? J'ai des gens qui m'ont dit : Ça fait trois ans que je suis à
Montréal, je n'ai rien et je ne savais pas que j'avais une possibilité,
à Québec, de venir travailler.
Ça
fait que, voyez-vous, c'est là, quand on parlait de cet enjeu majeur en amont
pour bien répartir les ressources selon les besoins. Ils ne les
connaissent pas, ils ne le savent pas. Et ça demande un accompagnement pour
pouvoir le réaliser, et le plus rapidement possible.
• (14 h 40) •
Mme
Hébert (Mélanie) : Je peux peut-être
compléter aussi. Au niveau des entreprises, pour aider les travailleurs immigrants à venir en région, l'employeur, de
savoir qu'il y a une ressource qui va l'aider à intégrer la
personne... parce que ça peut faire
peur, à dire : Bon, la personne, exemple, habite Montréal, est-ce qu'elle est vraiment
prête à venir en région ou elle
applique sur un poste parmi tant d'autres? Donc, de savoir qu'il y a
des organismes qui vont les aider à trouver rapidement le logement dès
qu'ils ont la nouvelle qu'ils ont l'emploi, qui vont aider à installer conjoint
ou conjointe, qui vont trouver des écoles pour les enfants, des
garderies pour les enfants, c'est beaucoup plus convaincant aussi pour l'employeur de savoir qu'il a
tout ce soutien-là et de choisir cette personne-là à venir travailler dans son
équipe, d'où le financement qui est important.
Le
Président (M. Picard) : Il reste deux minutes, Mme la députée.
Mme Roy
(Montarville) : D'où aussi le réconfort que ça va apporter à la
personne qui vient, de savoir qu'elle est épaulée.
Vous avez été très diplomate parce que je vous
demandais si concrètement il y avait des répercussions. Votre mémoire, donc, porte sur l'immigration en région, vous ne vous prononcez pas sur le taux d'immigration qui est suggéré par le gouvernement.
Est-ce qu'actuellement, avec le taux d'immigration que nous avons, là, cette année, on a suffisamment de moyens et de ressources pour bien intégrer tout ce monde-là,
bien les accueillir et bien faire en sorte qu'ils s'intègrent à la société?
Mme Roy
(Valérie) : Je pense qu'il y a beaucoup
de ressources qui font un travail formidable au Québec — pas juste
dans le secteur des services publics d'emploi, là, nos organismes sont en
ententes de service avec Emploi-Québec
dans d'autres secteurs, de la santé et tout — mais il y a encore beaucoup... quand on
regarde les statistiques, là, le taux de chômage des personnes immigrantes est beaucoup plus élevé
comparativement à celui des Québécois. Donc, oui, il y a beaucoup de
ressources. Est-ce qu'elles travaillent de façon concertée, optimale? J'en
doute.
Non, on ne
s'est pas prononcés sur le taux d'immigration. Il va falloir qu'il augmente,
particulièrement en région, on n'aura
pas le choix, pour répondre aux besoins de main-d'oeuvre. Mais je pense qu'il
faut faire, comme on disait tout à l'heure,
d'entrée de jeu, un leadership concerté. Parce que les ressources sont là, mais
l'arrimage n'y est pas. Il faut une volonté gouvernementale, il faut un
cadre de référence... tout le monde y adhère.
M. Gélinas
(Jean-Luc) : Je pourrais vous dire : Est-ce qu'on doit augmenter?
La réponse, ce n'est pas non ou oui,
ça va être quand. La différence et la difficulté que nous allons vivre, que je
vous dirais, c'est d'augmenter le nombre quand je sais que j'en ai un très fort pourcentage qui ne sont pas
capables de travailler, qui ont des difficultés de travailler dans les
compétences qu'ils ont. Est-ce que je vais intensifier la problématique?
Commençons déjà par stabiliser et d'augmenter,
au niveau des compétences, l'entrée au travail des gens en reconnaissant les
compétences et, à partir de ce geste-là, on pourra dire : De s'adapter.
Mais actuellement il y a un risque, que je vous dirais, de créer encore plus de
déception. Mais j'en ai aussi qui ont des succès.
Le Président (M. Picard) :
Merci. Merci, Mme Hébert, Mme Roy, M. Gélinas, pour votre contribution aux
travaux de la commission.
Je suspends quelques instants afin de permettre
au prochain groupe de prendre place.
(Suspension de la séance à 14 h 43)
(Reprise à 14 h 45)
Le
Président (M. Picard) :
Nous reprenons nos travaux. Donc, nous recevons deux personnes. Je vais vous
laisser vous présenter, pour éviter des
impairs, parce que j'ai de la difficulté à prononcer vos
noms de famille, et, je vais vous expliquer,
vous allez avoir 10 minutes pour faire votre présentation, vont s'ensuivre des
échanges avec les parlementaires. Donc, présentez-vous, et vous avez 10
minutes pour faire votre présentation.
MM. Abdelaadim El
Hanchi, Abdelghani Dades
et Badreddine Filali Baba
M. Dades
(Abdelghani) : Abdelghani
Dades, je suis journaliste de profession, j'anime un organe de communication communautaire qui cible particulièrement la communauté maghrébine et je m'intéresse aux questions
migratoires depuis une vingtaine d'années, notamment en matière de
recherche sur les grands flux migratoires, en particulier en ce qui concerne
mon pays, le Québec, et mon pays d'origine, le Maroc. Donc, je
voudrais tout d'abord vous remercier, M. le Président, Mme la
ministre, Mmes et MM. les députés, mesdames et messieurs, d'avoir bien voulu nous
écouter, la voix de citoyens issus de l'immigration et qui ont le souhait
d'exprimer leur citoyenneté en contribuant à améliorer
l'efficience des politiques publiques québécoises en la matière.
Donc, je vais
lire, comme ça je ne commettrai pas d'impairs non plus, pour la première partie
du mémoire. La seconde partie sera présentée par mon collègue, M. El
Hanchi.
Donc,
répondant à l'invitation lancée le 14 juin 2016 par Mme Kathleen Weil, ministre de l'Immigration,
de la Diversité et de l'Inclusion, invitation adressée à la population
québécoise en vue de participer à la consultation générale sur la planification de l'immigration au Québec
pour la période 2017-2019, nous avons l'honneur de soumettre le présent mémoire à l'attention de votre honorable commission.
À travers cette démarche, nous souhaitons, en qualité de citoyens issus de l'immigration, contribuer à «un exercice démocratique unique au monde», dixit le communiqué du ministère, ainsi que
l'a souligné Mme Weil, et, par ce biais, apporter une contribution à une
«réflexion importante sur l'avenir du Québec» — je cite toujours — avec pour principal souci d'explorer des
voies nouvelles et innovantes menant vers une optimisation «des apports
de l'immigration au dynamisme de notre société et à sa prospérité».
Alors, je
voudrais tout d'abord que nous reconnaissions les efforts constants des
autorités québécoises compétentes en matière de mise en adéquation,
notamment par l'adaptation et l'actualisation continue des critères de sélection
des candidats à
l'installation au Québec, donc de la mise en adéquation des compétences et des
savoir-faire des nouveaux arrivants et des besoins effectifs de
l'économie de la province. Ce mémoire soumet aux honorables membres de la commission un projet de nature à améliorer les
dispositions de la réforme actuellement menée en matière d'immigration,
de participation et d'inclusion dans le but de mieux sélectionner, mieux
intégrer et mieux vivre ensemble.
Ce mémoire
est également le fruit d'une concertation entamée en début mars puis accélérée
en juin 2016 avec plusieurs personnes issues elles-mêmes de
l'immigration et qui avaient pour caractéristique commune d'agir au sein d'associations qui interviennent à divers titres
dans le soutien à l'inclusion des immigrants originaires du Maroc. Nous
avons également consulté des journalistes et des médias communautaires à
référentiel marocain.
En
conclusion, nous avons élaboré ce mémoire en conformité avec l'esprit et la
lettre de la nouvelle politique en matière d'immigration, de
participation et d'inclusion, Ensemble, nous sommes le Québec, qui a été
dévoilée le 7 mars 2016. Elle se
conforme également à la Loi sur l'immigration au Québec, sanctionnée par
l'Assemblée nationale le 6 avril 2016.
Le document se conforme à sept des neuf orientations formulées dans le cahier
de consultation déposé par Mme
Kathleen Weil, ministre de l'Immigration, de la Diversité et de l'Inclusion, à
l'Assemblée nationale, le 2 juin 2016.
• (14 h 50) •
Alors, pourquoi ce mémoire? Il y a un contexte
qui l'a dicté. Dans le courant de l'année 2004, la publication de chiffres afférents à la prévalence du chômage
et du sous-emploi dans les communautés issues de l'immigration a eu
l'effet d'un électrochoc. Les taux de qualification dans les groupes
démographiques non natifs du pays, largement supérieurs
à la moyenne nationale, n'empêcheraient en effet pas le taux de chômage de
rester tout aussi supérieur et aux moyennes
nationales, et ceci même sans tenir compte de l'emploi en surqualification, qui
est une forme de chômage non quantifiée et encore assez méconnue.
C'est dans
les segments de la population issus de l'immigration... si le taux de
qualification — des personnes
en âge actifs, le bac+3 à bac+15 et expérience professionnelle significative — s'établit
autour de 50 % pour le taux de qualification,
mais le taux de chômage atteignait 24,6 % en moyenne, avec des pointes
proches de 29 % pour certains groupes particuliers.
Ces moyennes
cachent en outre de grandes disparités selon les bassins géographiques de
départ de l'immigration. Une analyse,
même sommaire, des données statistiques disponibles laissait ainsi apparaître
des situations beaucoup plus critiques que les chiffres que je viens de citer.
Ainsi, pour ce qui concerne le segment des originaires du Maghreb, le
taux de chômage avoisinait les 29 %,
28,6 %, c'est les chiffres de 2004, contre 7 % en moyenne au Québec à ce moment-là, alors que le taux de qualification s'établissait aux alentours de
65 % dans une population qui, au surcroît, était francophone à 85 %. Donc, ces écarts résultaient
incontestablement de l'application de critères de sélection qui, au motif de choisir
les meilleurs pour le Québec,
permettaient l'arrivée de détenteurs de compétences et habiletés supérieurs aux
besoins réels en compétences de l'économie.
Les autorités
ont, en conséquence, entamé un travail de réajustement des critères de
sélection qui, semble-t-il, ont commencé à donner des premiers
résultats. On apprenait ainsi, fin 2013, que le taux de chômage dans le segment
de population issue de l'immigration était tombé de 26,4 % en 2004 aux
alentours de 16,8 %.
Nous n'avons cependant pas été en mesure
d'obtenir de chiffres ventilés selon les régions de départ des communautés
culturelles considérées, ce qui peut laisser croire, mais sous toute réserve,
que la communauté des originaires du Maghreb est encore
défavorisée et continue à se heurter à de gros obstacles en matière d'accès à
l'emploi, étape incontournable à l'inclusion
et à l'optimisation des apports à la société de vie. On en voudra pour preuve que la
présence en grand nombre d'origines du Maroc ou d'Algérie dans des activités de
services subalternes, travaux d'utilité générale — préposé
aux bénéficiaires, chauffeur de taxi, responsable
de service de garde en milieu familial — qui sont certes des métiers générateurs de revenus, mais également des métiers
d'instabilité professionnelle et sociale, générateurs, en conséquence,
de coûts sociaux pour les concernés et de coûts financiers, via entre autres
les prestations de dernier recours, pour la
collectivité. Les difficultés actuelles du secteur de taxi et de la garde
d'enfants en milieu familial laissent même
placer le spectre d'une aggravation de cette situation, ce qui ne manquera pas
de réduire, peut-être grandement, la portée et les effets des mesures et
initiatives gouvernementales visant à l'inclusion des originaires de
l'immigration comme des nouveaux arrivants. Parce qu'on parle souvent des
nouveaux arrivants, on oublie que le délai de latence pour l'accès à l'emploi peut atteindre, par moment, huit à 10 ans chez
des gens qui sont déjà citoyens et qui continuent de souffrir des mêmes
problèmes que ceux que vont rencontrer de nouveaux arrivants.
Donc, au vu de cette situation, nos réflexions
se sont portées vers les voies et moyens pouvant permettre à la communauté de se porter au soutien des démarches
publiques, telles que définies dans le cadre de la réforme actuellement
menée en matière d'immigration, de participation et d'inclusion, dans le but de
mieux sélectionner, mieux intégrer et mieux vivre ensemble.
Cette réflexion aboutit sur l'ébauche d'un
projet que M. El Hanchi va vous présenter.
Le
Président (M. Picard) : Mais il vous reste une minute. Non,
mais vous pourrez poursuivre lors des
discussions.
M. El Hanchi (Abdelaadim) : Alors,
je me présente, El Hanchi Abdelaadim. Je suis membre de l'ordre des ressources humaines. Je dirige deux entités en
ressources humaines, une ici et l'autre au Maroc. Je suis aussi
président du Forum des Compétences
Canado-Marocaines, mais, ici, aujourd'hui, je parle en mon nom propre, pas au
nom du forum.
Alors, par
rapport au projet, je veux l'expliquer rapidement, c'est un projet qui a été
fait... Donc, nous allons aller chercher ailleurs qu'est-ce qui se
passait. Nous avons trouvé, entre l'Italie et le Maroc, un projet qui a répondu
à des exigences. L'Italie avait besoin de
personnes dans le domaine de l'agriculture, et ils ont entamé une réflexion, et
ils ont décidé de prendre, entre le
Maroc et la Moldavie aussi, des personnes qui ont suivi des formations par
rapport à l'agriculture en Italie. Puis ces personnes, elles étaient recrutées, elles
travaillent maintenant en Italie. Puis aussi ce projet a été élargi au niveau d'autres pays comme la Tunisie et
l'Égypte. Pourquoi nous avons pensé à ça? Parce que nous constatons
qu'ici, au Québec, il y a un manque de main-d'oeuvre, de ressources humaines
par rapport à cette thématique, par rapport à l'agriculture,
puis aussi, au Maroc, nous avons des compétences préparées qui ont suivi des
études, qui font de l'agriculture, et
qu'on peut les adapter au régime, tout ce que nous avons ici pour
l'agriculture. Donc, c'est un projet qui a donné ses fruits au niveau de l'Italie. On aimerait bien, si
ça entre dans les projets pilotes... qu'on peut mettre pour voir sa
pertinence et puis le rendre viable par rapport au Québec.
Alors, je vais directement vers les attentes.
L'élaboration de ce projet et son opérationnalisation nécessitent cependant sa validation par les autorités, les
institutions et les associations professionnelles québécoises concernées
ou intéressées. De même, un accord sur le principe d'un partenariat
public-privé pourrait-il s'avérer nécessaire. Enfin, l'aménagement d'un cadre légal ou normatif pour ce type d'initiative,
qui pourrait, au vu des résultats du projet pilote, être étendu à d'autres qualifications, compétences et
habiletés professionnelles, sachant qu'il peut entrer aussi bien dans le
cadre du plan de l'immigration au Québec
pour la période 2017‑2019, le programme régulier des travailleurs qualifiés ou
le Programme de l'expérience québécoise...
La deuxième
des choses, des recommandations que nous voyons, ce n'est pas dans le mémoire,
mais traiter ce problème d'équivalence
de diplômes et de reconnaissance des acquis. La troisième des choses, c'est
l'accompagnement, mais, à travers
l'accompagnement, nous parlons de l'accompagnement à distance. Ça veut dire,
après que les gens aient leur
certificat de sélection, par exemple, au Maroc ou n'importe où, ils ont un
délai d'un an, d'un an et demi pour avoir les papiers pour venir. Si on
peut accompagner ces gens-là à distance, peut-être qu'ils vont arriver avec des
outils bien nécessaires pour intégrer le monde du travail.
Donc, c'est à
cette fin que nous déposons ce mémoire. Nous vous remercions de l'intérêt que
vous voudrez bien porter à ce mémoire, à son contenu, et nous... à votre
disposition pour répondre à d'autres demandes d'informations complémentaires.
Merci.
Le
Président (M. Picard) : Merci beaucoup. Avant de céder la
parole à Mme la ministre, d'ici deux minutes, il devrait y avoir une
détonation parce qu'il y a des travaux de dynamitage. Donc, allez-y, Mme la
ministre.
Mme Weil : Oui. Bonjour. Bienvenue,
M. El Hanchi, M. Dades. Merci beaucoup de votre participation. J'ai beaucoup aimé votre mot d'introduction,
l'importance de participer à cet exercice démocratique, mais aussi d'avoir
la voix de ceux qui ont vécu l'expérience de
l'intégration, mais aussi parce que tellement de membres de votre
communauté... Mais, vous, je vous connais
bien, sur le terrain, vous... Il y a de la mixité, hein, en immigration au
Québec, et on est très contents de
ça. Vous connaissez autant la voix des Haïtiens, des Africains, des Français,
et tout, parce que c'est la réalité sur le terrain. Ça, c'est la bonne chose. Je pense que les gens parlent
d'une seule voix. Il y a peut-être des problématiques particulières par
rapport à la reconnaissance des diplômes d'un pays ou de l'autre, mais ça,
c'est plus des questions techniques qu'autre chose.
Peut-être,
avant d'arriver sur le projet pilote, vous avez évoqué... Bien, premièrement,
vous avez des chiffres...
(Interruption)
Mme Weil :
...sur le chômage — je
pense, c'est un avertissement — sur le taux de chômage. On était
curieux, à savoir d'où venaient vos chiffres
de 2004. Nous, on a des chiffres de 2006. Quoi qu'il en soit, vos chiffres
montrent des progrès importants. Ça,
c'est quand même intéressant. Mais est-ce que vous êtes capables de me dire
d'où viennent vos chiffres? Je cherche, là, dans votre mémoire. Vous
dites : «On apprenait, fin 2013, que le taux de chômage dans les segments
de population issus de l'immigration était tombé des 24,6 % de l'année
2004 à 16,8 %.»
M. Dades (Abdelghani) : Le
16 %, je crois que c'est de votre...
(Interruption)
Mme Weil : Ça, ça va pour
2013, mais de 2004?
• (15 heures) •
M. Dades (Abdelghani) : 2004, très
franchement, je crois que c'était...
Mme Weil : D'accord. Mais ça
reflète quand même la tendance qu'on a vue aussi.
(Interruption)
Mme Weil : J'ai peur, là!
M. Dades (Abdelghani) : Non, c'est
fini.
Mme Weil : J'ai peur d'avoir peur.
On pense qu'on va sursauter.
Donc,
j'aimerais qu'on revienne là-dessus, parce que c'est quand même une tendance importante,
intéressante, et vous, vous êtes très
connaissant en la matière, vous le vivez, je le sais, parce qu'a souvent
l'occasion d'échanger, de se voir, de parler. Vous avez vu tous les programmes, les
efforts qui ont été mis en place au fil des dernières années, que ce
soit le programme PRIIME, vous le soulevez ou, en tout cas, d'autres l'ont
soulevé, les programmes Interconnexion, les programmes
de stages, qui semblent donner des résultats. Et là on est à l'étape de vouloir aller encore
plus loin, parce qu'il reste
encore... On sait que, sur une plus longue période de temps, les gens, parce
qu'ils sont assidus, réussissent à intégrer le marché, mais d'autres
intègrent plus rapidement, soit par la voie du PEQ, le Programme de
l'expérience québécoise ou, tout simplement, ils avaient une offre d'emploi. Bon, ce n'est pas vrai que tout le monde est exactement dans la même situation,
il y en a qui bougent plus vite que d'autres. Est-ce que vous constatez, en vos
mots, une évolution depuis que vous êtes ici? Vous êtes ici depuis...
Est-ce que je peux vous demander? Très longtemps?
M. Dades
(Abdelghani) : 20 ans.
Mme Weil :
20 ans. Est-ce que vous avez des constats par rapport à cette évolution?
M. Dades
(Abdelghani) : C'est certain. Je ne l'ai peut-être pas suffisamment
souligné, mais il y a un intérêt constant pour améliorer l'arrimage entre les
profils sélectionnés et les besoins réels de l'économie, ce qui est la clé pour
résoudre le problème du chômage. Il y a effectivement un progrès, sauf que, je
vous l'ai dit, les statistiques, des fois,
il y a un chiffre qui passe, qui est crédible, qui n'est pas démenti et donc
que nous retenons comme outil d'analyse d'une situation. Alors, je n'ai pas tous les outils statistiques, je
l'ai dit, pour faire cette analyse, mais je regarde sur le terrain, vous savez, je suis un peu partout à la fois. Je
profite de ma retraite pour faire les choses que j'ai envie de faire,
notamment réfléchir, aider à trouver des solutions à ces problèmes qui
pénalisent le Québec, qui ne pénalisent pas seulement des groupes
communautaires, quels qu'ils soient, quelle qu'en soit l'origine.
Et
donc il y a une amélioration, c'est certain. Dans quelle mesure, dans quelle
mesure aussi le chômage caché, le travail
en surqualification, n'est-il pas en train d'améliorer artificiellement les
statistiques? Le souci, c'est d'améliorer, que l'immigration donne son plein apport à la société dans laquelle elle
a choisi de vivre et qui a choisi de les accueillir. Ce n'est pas une
vision critique. C'est vraiment constructif.
Mme
Weil : Là où je vous amène, c'est les solutions qui sont
proposées, parce qu'évidemment nous, on vise, le gouvernement vise à
stabiliser les volumes, pour que, justement, ces nouvelles stratégies, les
stratégies qu'on a déjà d'améliorer les
choses, reconnaissance des acquis et des compétences... Il y a beaucoup de
travaux en marche, il y a la stratégie
d'action, la stratégie d'action, qui s'étale sur cinq ans, avec un budget
important, où on travaille les milieux autant en amont qu'en aval.
Et
donc c'est une panoplie de mesures, mais je vous dirais trois piliers à cette
réforme, donc : la politique, avec sa stratégie d'action; le projet de loi qui propose, donc, ce nouveau
système d'immigration avec des stratégies qui accompagnent cette nouvelle façon de faire qui fera en sorte
d'arrimer plus directement les besoins du marché du travail avec le
candidat... Ça ne prendrait pas 4, 5 ans
avant que la personne arrive. Cette lenteur, inefficacité du système ralentit
le système, qui devrait améliorer...
C'est l'expérience d'autres pays qui ont mis en place ce système, mais nous, on
l'accompagne d'autres éléments et on l'accompagne d'une cible pour les
travailleurs temporaires et les étudiants à l'étranger, qui sont déjà intégrés ici, 40 % qui s'intégreraient... et
aussi d'autres mesures, mais, très, très important, c'est les milieux
accueillants. Donc, certains intervenants
qui ont beaucoup d'expérience surtout en immigration en région... C'est que, si
on ne s'attarde pas aussi aux attitudes... nous encourage à faire une
campagne de sensibilisation, ouvrir les esprits, faire comprendre, sensibiliser les acteurs et la société civile à
l'apport de l'immigration... Je voulais voir si cette approche, qui va sur différents fronts...
comment vous percevez... avant qu'on arrive sur votre projet pilote...
M.
Dades (Abdelghani) : Je
crois que c'est parce qu'il y a eu cette approche qu'on a senti la volonté
politique d'aller de l'avant dans cette voie, que nous avons été encouragés à
élaborer le mémoire, à le proposer. Ça a nécessité quelques mois de recherche. Et puis nous avons pris comme projet pilote quelque chose qui est relatif à l'agriculture parce que c'est là qu'il
y a un problème criant en
qualifications. Je ne parle pas de travailleurs saisonniers qui viennent, qui sortent avant
la fin de saison, je parle de gens qui vont répondre au problème de l'absence
de relève et de l'absence de main-d'oeuvre qualifiée capable de continuer à
faire fonctionner l'agriculture, éventuellement de l'améliorer. Et donc la question de l'accompagnement, c'est un des
éléments essentiels du projet, parce
que, quelle que soit la partie
intervenante dans la réalisation du projet pilote ou éventuellement de son rehaussement au niveau d'une politique
permanente ou pérenne,
l'accompagnement aussi des deux côtés, des membres de la communauté plus
anciennement installés comme des structures
associatives ou institutionnelles qui travaillent sur le sujet,
l'accompagnement est incontournable. Là, aucun projet ne peut réussir s'il
n'y a pas cet accompagnement.
Donc,
le sens pris par la politique est le bon. Maintenant, qui va animer
cette politique? Est-ce
qu'on va l'élargir ou est-ce qu'on va la laisser entre les mains de structures particulières? Est-ce que
la société civile, elle doit faire sa
part dans ce processus? En fait, c'est ce que nous proposons.
Mme
Weil : L'exercice que vous avez mené pour concevoir ce
projet... Comment est-ce que vous avez travaillé pour déterminer le secteur, les besoins? Avec qui vous avez travaillé?
Et quelles sont, plus particulièrement, les professions ciblées ou les métiers
ciblés où vous constatez des pénuries à venir? Et, quand vous parlez de relève,
est-ce que c'est vraiment des propriétaires de fermes, est-ce que
de ça que vous parlez? Parce
que — vous connaissez bien le milieu — c'est
des travailleurs agricoles qui viennent... saisonniers, puis
c'est très bien comme ça, puis ils font un excellent travail,
mais ils veulent retourner chez eux. Mais
vous, vous parlez d'autre chose. C'est peut-être d'expliquer peut-être plus
profondément le projet et qu'est-ce que vous ciblez exactement.
M. El Hanchi (Abdelaadim) : Bon. Moi, je retourne sur l'action d'avant maintenant
pour dire : Les avancées, on les
constate par rapport à la politique, par
rapport aux stratégies comme on les
voit. Mais ce qu'on ne voit pas, c'est sur le terrain. C'est lorsqu'on
arrive chez les entreprises qu'il n'y a pas assez de réceptivité, donc qu'il
n'y a pas assez de sélections des gens qui
émanent, même avec des compétences à égalité avec les compétences locales.
C'est des gens, là, qui sont, moi, je dirais, discriminés systématiquement,
mais on ne peut pas le prouver.
Ce que je demande par
rapport à ça, par rapport à l'avancée des stratégies, et tout, c'est
d'accompagner ces entreprises à comprendre l'enjeu de la diversité et des gens
qui viennent d'ailleurs et de prendre en considération leur apport
par rapport à leur entreprise. Moi, je dirais qu'il faut... le travail doit
être mené par rapport aux entreprises pour qu'il puisse... parce que le travail
a été fait, je pense, au niveau étatique, au niveau des municipalités, il y avait
du recrutement des gens de la diversité.
Mais, au niveau des entreprises, on peut trouver une entreprise
de 2 000 personnes, il n'y a
personne de la diversité, alors... ou on
peut trouver autres où il y a quelques personnes.
Donc, moi, je dirais qu'il y a aussi un effort à faire au niveau des entreprises pour les sensibiliser par rapport à la... parce qu'il n'y a pas de loi contraignante par rapport à la diversité, comme c'est le cas pour les municipalités et pour l'État,
pour la province, donc il faut que les entreprises soient sensibles
par rapport à ça. Si elles ne le sont pas, peut-être
qu'il faut prévoir des choses... un contrat ou quelque chose comme ça.
Moi, je parle du côté ressources humaines, je suis là-dedans. On en parle. Le congrès des ressources humaines de l'année... pas de cette année, de l'année d'avant,
toute la thématique, ça a été sur la diversité. Mais, sur le terrain,
c'est surtout la gestion de la diversité, comment ils vont gérer des gens. Mais
le recrutement, à un moment, ça se bloque, parce
qu'ils ont eu une mauvaise expérience
où il y a eu 10 personnes qui ont créé un problème, alors
que les autres vont être bannis. Donc, ça, c'est par rapport à l'avancée
par rapport à la première. Donc, la deuxième question.
• (15 h 10) •
M. Dades
(Abdelghani) : Pour répondre plus précisément à la question de Mme
Weil, pourquoi le secteur de l'agriculture, en fait, c'est parce qu'au moment
où on était en train de travailler on a identifié un certain nombre de métiers où il y a déficit de main-d'oeuvre, y
compris, paradoxalement, des métiers émergents, des métiers émergents
qui sont déjà menacés par un déficit de
main-d'oeuvre. Mais, au moment où on
était en train de réfléchir au projet, j'ai vu plusieurs articles dans les médias qui faisaient état de situations
dramatiques en matière de relève et de main-d'oeuvre
agricole. Et donc, naturellement, ça s'est... Mais il y en a d'autres, il y a
d'autres métiers sur lesquels on pourrait réfléchir et pour lesquels les projets... si on arrive à réussir un
projet en matière d'agriculture, je crois qu'on a déjà placé les standards
et qu'on pourra réfléchir à l'extension à d'autres secteurs d'activités, à
d'autres profils.
Et,
pour l'agriculture, nous avons examiné 10 projets
interméditerrannéens, c'est-à-dire rive sud de la Méditerranée, rive
européenne, rive nord et rive sud, réservoir de main-d'oeuvre qualifiée, manque
de main-d'oeuvre. Et on s'est intéressés sur cette dizaine de projets, particulièrement
aux projets agricoles. La main-d'oeuvre saisonnière, moi, par principe, je n'embarquerai jamais dans un projet
de cette nature, vu les résultats désastreux au plan humain et économique
auxquels ça a donné lieu en Espagne et en France. C'est dramatique.
En
revanche, ce qui est vraiment productif pour le Québec, ce ne sont pas des
gens qui viennent trois mois par an, quatre
mois par an pour cueillir des fraises et qui s'en vont, ce sont des gens qui
viennent gérer une entreprise
agricole parce que, sinon, elle va être laissée à l'abandon. Et on
sent déjà le poids de cette désertification de nos campagnes à travers
la baisse de la part de l'agriculture dans le PIB, de l'agro-industrie également.
Donc,
on est en train de tuer un secteur qui relevait, il y a quelque
temps, de la sécurité, qui n'est plus classé sécurité parce qu'il y a eu la mondialisation, mais je
pense qu'au Québec on ne devrait pas aller dans ce sens-là, qu'on
devrait, au contraire, aller plus dans cette
réflexion. Plus, ça répond au problème démographique, et au problème de
désertification, et à la question de la
régionalisation. L'agriculture urbaine, c'est quelques terrasses à Montréal. La
véritable agriculture, elle est en
région. Et donc, là, on touche plusieurs objectifs à la fois et on maintient un
des piliers de l'économie de la province, qui est l'agriculture et
l'agro-industrie.
Le Président (M.
Picard) : Merci.
M. Dades
(Abdelghani) : Donc, c'était la raison du choix.
Le
Président (M. Picard) : Je cède maintenant la parole à M. le
député de Bourget pour une période de 9 min 30 s.
M.
Kotto : Merci, M. le Président. Messieurs, soyez les bienvenus
et merci pour la contribution à cette réflexion. Je rebondis sur le
projet. Tout à l'heure, vous avez manqué d'un peu de temps pour élaborer sur la
seconde partie, mais il y avait quelque
chose, disons, d'original dans ce que vous disiez, la conclusion de votre
présentation contractée. Vous parliez
de cette phase, où la personne sélectionnée recevrait son CSQ, mais
attendrait... serait préparée pendant un laps de temps avant de faire le
voyage, un peu à l'image de ce que font les astronautes avant de... Est-ce que
vous pouvez élaborer là-dessus?
M. El Hanchi
(Abdelaadim) : Moi, je vais parler d'un vécu personnel, d'accord?
Personnellement, lorsque j'avais reçu le
CSQ — moi, je
suis dans les ressources humaines — alors, en arrivant ici, qu'est-ce que je
dois faire? Je dois travailler dans
les ressources humaines. Comment travailler dans les ressources humaines, O.K.?
Il y a un ordre. Même ce n'est pas
contraignant qu'on soit dans l'ordre, mais il faut se préparer. Donc, j'ai
contacté l'ordre, j'ai déposé mes papiers, puis ça a été reçu dans les
15, 20 jours. Donc, on m'a reçu. Puis, après, j'ai préparé mon examen.
Avant
d'atterrir à Québec, j'avais mon titre de CRHA. Donc, ça a été un apport pour
moi, pour que... si j'arrive, donc,
en principe, je dois trouver du travail facilement. Ce n'était pas le cas,
mais, en principe, j'ai pu changer la donne. Mais, si on donnait cette possibilité à ces
gens-là avant qu'ils arrivent... Je prendrai le cas d'un médecin avant qu'il
arrive. La plupart des gens ne se donnent
pas cette possibilité d'aller chercher, parce qu'ils sont dans la vie
quotidienne et puis ils s'attendent
qu'ils arrivent ici. Si on va dire au médecin : O.K., avant d'arriver,
avant que tu sois reconnu par l'ordre, il faut que tu passes des
examens. Donc, de chez lui, il peut préparer des examens, il peut venir ici,
passer son examen et retourner, d'accord?
Parce que ce qui arrive, nous avons un cas actuellement, une femme médecin, ça
fait cinq ans qu'elle est là, elle va
retourner au Maroc, parce qu'elle a eu son équivalence, mais on lui a demandé
une expérience d'au moins de deux
ans, qu'elle n'a pas parce que ça fait cinq ans qu'elle n'exerçait pas. Donc,
maintenant, avec son diplôme, avec son acquis
qu'elle a... battu puis son mari qui a travaillé pour financer toutes les
formations et les examens, puis elle n'a pas...
Donc, si on donne à ces gens-là la possibilité
de préparer tout ça à l'avance, les coacher, les accompagner à distance, leur dire exactement avec des grilles...
je sais que ça existe, mais il faut que ça soit concentré et puis peut-être
la société civile peut jouer un rôle. Ça veut dire, il y a des organismes qui
peuvent ce rôle-là, puis ça serait plus facile à expliquer aux gens. Je
prendrais le pharmacien, je prendrais le technicien, toute personne qui peut...
Maintenant, il y
a aussi des cégeps qui se sont installés au Maroc. Donc, on peut aussi suivre
la formation aussi à distance pour préparer le D.E.A. ou le D.E.P., quelque
chose comme ça à distance, avant d'arriver.
Donc, il y a des solutions. Il faut les mettre
sur la table et communiquer sur ça. Il faut que les gens sachent sur ça. Parce
que qu'est-ce qu'on reçoit lorsqu'on part à l'ambassade? On reçoit, je pense, Comprendre
le Québec ou Comment vivre au Québec...
Une voix : ...
M. El
Hanchi (Abdelaadim) : Non, Québec, Québec.
Donc, lorsqu'on a la CSQ, on a un document qui nous parle de la culture, et tout, mais, tout ça, ce que j'ai
dit, ça n'existe pas. Donc, il faut qu'on explique aux gens, puis ils
doivent savoir à quoi ils s'attendent. S'il
doit attendre deux ans, il doit le savoir; s'il doit attendre trois ans, il
doit le savoir, et c'est à lui de
choisir. Parce que le pire des cas, comme vous l'avez dit tout à l'heure, les personnes qui étaient avant nous, les gens dépensent de l'argent. Ils arrivent ici puis ils
dépensent de l'argent pendant deux ans, trois ans, cinq ans, pour ne pas
arriver à ce qu'ils veulent. Donc, moi, je
dirais, un accompagnement à distance, ça fera la chose, et nous sommes prêts à
participer dans cette dynamique-là.
Le Président (M. Picard) : M.
le député.
M. Kotto : O.K. Donc, c'est ça, l'accompagnement en amont. Je
pense que l'idée est originale. Hier, je pense que c'était hier, je ne sais plus à qui je le disais, je parlais de la
nécessité de changer de paradigme, de s'adapter pour un cheminement réussi entre le nouvel arrivant et la
société d'accueil et vice versa. C'est une histoire de rencontre. Et des
déceptions, si on peut les éviter avec des
solutions comme celle-ci, pourquoi ne pas plonger? On a une nouvelle
approche en termes de politique
qui met à la disposition des moyens puisqu'avec la nouvelle loi la ministre
a la possibilité de mettre en branle un projet pilote de cette envergure.
Mais, bon, je ne veux pas parler à sa place, mais il y a un écho positif à mes
oreilles.
Vous avez
parlé de l'impératif de faire comprendre les enjeux de la diversité aux entreprises.
En quoi cela est-il important à vos yeux aujourd'hui?
M. El Hanchi
(Abdelaadim) : Moi, je pense
qu'il y a des exemples qui ont été faits, mais peut-être au niveau institutionnel. Je prendrai la mairie de Montréal.
Ils ont préparé une formation pour les élus, pour les gens qui
travaillent à la mairie, pour les
sensibiliser par rapport à ça. Et je pense que ça a donné des résultats, parce que,
lorsqu'on rentre à la mairie de Montréal, on voit Montréal parce que
c'est divers. Donc, on voit des Maghrébins, on voit des Haïtiens, on voit des Africains, on voit des... tous genres, donc,
là-dedans, donc... Et puis c'est ce genre de formation que les entreprises
doivent avoir. Les entreprises,
ils sont tranquilles dans leurs coins, ils ne veulent pas faire l'effort. Tout à l'heure, ils parlaient, les gens, de l'expérience canadienne ou québécoise.
Comment on peut donner une expérience québécoise ou canadienne à quelqu'un qui n'a jamais travaillé ici? Donc, comment il va la faire? Il y a quelqu'un
qui va le faire. Donc, ce quelqu'un, il doit être sensibilisé sur les enjeux. Puis, des fois, lorsque des gens
s'intéressent à des gens de la diversité, à la fin, ils ne veulent pas les lâcher. Ils seront heureux parce qu'ils trouvent les qualifications et ils trouvent le rendement, ils
trouvent les possibilités. C'est des gens qui veulent donner.
Donc, moi, je
dirais, par rapport à ça, c'est une
sensibilisation, c'est des formations qui peuvent se faire entre le ministère et les ordres professionnels par rapport
à ça, avec les entités, les associations professionnelles aussi, pour
lancer des formations de sensibilisation par
rapport au recrutement de la diversité. Parce qu'il n'y a pas... rien qui va le
contraindre, mais il faut...
Et aussi, la
deuxième des choses, parce que, lorsqu'on voit ça, il y a certaines entreprises
qui y adhèrent, mais qui adhèrent à
un niveau bas. Ça veut dire : on va trouver les chauffeurs, les
mécaniciens, et tout, mais, au niveau décisionnel, on ne va pas les
trouver. On ne va pas trouver un directeur de ressources humaines, ou un chef
de division de ressources humaines, ou
quelqu'un au financier, on va trouver toujours un niveau un peu plus bas. Donc,
il faut les sensibiliser par rapport
à ces deux choses-là. Parce que les gens qui arrivent, la plupart, moi, je
parlerai de ma communauté, la plupart, ils ont des diplômes qui sont des baccalauréats plus, maîtrises plus, même
des doctorats. Donc, c'est des gens qui ont des outils, qui ont des choses
à apporter à l'entreprise et puis à la société d'accueil.
M. Dades (Abdelghani) : Ceci dit, il
y a eu des...
Le
Président (M. Picard) : M. Dades.
M.
Dades (Abdelghani) : Pardon. Ceci dit, il y a eu des expériences en
matière de sensibilisation des entreprises à la diversité qui ont été
pilotées d'ailleurs par le ministère, qui ne s'appelait pas encore le MIDI à
l'époque, sauf que c'étaient des expériences qui sont restées à une échelle
relativement réduite, qui ont ciblé de très grosses entreprises, alors que l'essentiel de l'emploi se trouve au
niveau des PME. Les PME n'ont jamais été touchées. Et le programme, à ma
connaissance, n'a jamais été reconduit, de sensibilisation à la diversité en
milieu professionnel. Donc, peut-être qu'il faudrait
retrouver ces informations, en tirer les leçons, et tenter de reconduire le
modèle et de l'améliorer ou de l'étendre
• (15 h 20) •
Le Président (M.
Picard) : Merci. M. le député, il reste
1 min 30 s.
M.
Kotto : Une minute,
oui. Hier, je pense que c'est le Conseil du patronat avec qui
on a eu cet échange-là et qui déplorait
le fait que plein de programmes allant dans le sens de la, comment dire... de
solutions structurantes relativement à l'intégration de la diversité au
sein des entreprises et tout ça ne soient pas connus du public, qu'ils ne
soient pas publicisés, parlant même
d'une information qui, même apportée, n'était accessible parce qu'il n'y avait pas un véritable intérêt... Est-ce que vous pensez que
la diversité québécoise devrait prendre en charge elle-même cet impératif
travail d'information auprès de ces
entreprises en leur faisant, disons,
découvrir ce qu'ils ne veulent pas découvrir éventuellement?
M. Dades (Abdelghani) :
Comme beaucoup de vos idées, l'idée me plaît, mais je crains que confier ça
exclusivement aux groupes ethniques, ça ne soit pas très efficace.
M. Kotto :
O.K. Les amener à contribuer.
M.
Dades (Abdelghani) : Dans
des équipes multiethniques, dans des équipes multiethniques capables de
donner le spectre le plus large possible sur la réalité de la diversité à des
décideurs...
Il y a aussi d'autres
éléments. Je ne voulais pas évoquer le pire, mais il y a aussi un certain
cynisme chez les employeurs qui, plutôt
que de prendre le risque de recruter un immigrant qui pourrait provoquer un problème, peu importe de quelle nature, ils préfèrent s'abstenir plutôt
que de courir un risque, si minime
soit-il. Par exemple, j'ai entendu des employeurs dire :
Oui, ce monsieur est très compétent, moi, je n'ai rien contre les musulmans,
mais, s'il lui prenait la fantaisie de
demander un temps mort pour aller faire ses prières alors que j'ai une chaîne à
conduire... donc, je préfère ne pas le
recruter, comme ça, je ne prends pas ce risque, sans même savoir si ce monsieur
va effectivement demander un temps de prière en temps ouvrable.
Le
Président (M. Picard) :
Merci. Je cède maintenant la parole à
Mme la députée de Montarville, 6 min 30 s.
Mme
Roy (Montarville) : Merci beaucoup, M. le Président. Messieurs, merci. J'ai pris soin de lire votre mémoire.
D'entrée de jeu, je
vous dirais que je considère que c'est d'une grande tristesse, même
d'un manque de respect, j'irais jusque-là
dans mes paroles, que de laisser miroiter
des possibilités d'emploi dans des domaines très précis,
hautement qualifiés à des gens, à des personnes qui arrivent ici et qui
n'y ont pas accès ou qui n'y auront pas accès. Je trouve ça extrêmement triste. Le gouvernement est conscient qu'il y a effectivement du travail à faire en ce qui
a trait à l'équivalence des diplômes, à la reconnaissance
des acquis, et ça, c'est une problématique, et on n'a qu'à penser à certains
reportages. Vous parliez de médecins
tout à l'heure. On sait qu'il y a ces ingénieurs, entre autres, qui sont
surqualifiés. Vous nous reparlez de cette problématique, de cette forme
de chômage méconnue et non quantifiée qui est ce chômage par surqualification. C'est d'une grande tristesse. On a besoin de tout
le monde puis on a besoin de tous les
cerveaux, et il faut remédier à ça.
Alors,
vous nous arrivez ici avec une proposition d'un projet
pilote qui est calquée sur ce qui
s'est fait en Italie, un projet
pilote dans le domaine de l'agriculture. Et j'ai quelques questions à
l'égard de ce projet pilote là. Vous avez fait des recherches, vous avez contacté des groupes, vous
avez parlé aux gens qui sont intéressés. Et ce projet pilote là
pourrait-il justement intéresser et aider à
faire en sorte de remplir des emplois en fonction des compétences des
immigrants, de cette surqualification
justement du fait qu'il y a peut-être des agronomes, qu'il y a peut-être des
gens qui aimeraient contribuer à la société, y participer parmi le taux
de chômage très élevé de la communauté?
M.
Dades (Abdelghani) : Oui.
Alors, je crois, je l'ai dit, mais j'aurais dû être plus précis.
J'ai dit qu'on parlait un peu trop souvent des problèmes rencontrés par les
nouveaux arrivants. Alors, il y a arrivants plus anciens pour lesquels
les délais de ce qu'on a appelé un temps le
délai de latence, c'est-à-dire le délai entre l'arrivée, une requalification
éventuelle et l'accès à un emploi
garantissant un revenu honorable, pouvait atteindre huit à 10 ans. La moyenne est aux alentours de cinq ans. Et donc on ne les oublie pas, s'il y a
des agronomes, si ce projet venait à voir le jour. En plus, ce sera peut-être moins coûteux économiquement de
prendre des gens ici qui connaissent les conditions climatiques. Parce que la
qualification donnée à ceux qui pourraient être recrutés parmi les nouveaux
arrivants consiste à adapter leur savoir de climat semi-aride, voire
semi-désertique, à un climat froid. Ceux qui sont ici ont gagné au moins deux,
trois hivers d'expérience du froid, et donc
pourraient être moins difficiles à former, c'est-à-dire que l'adaptation de
leurs compétences et savoir à des
conditions géoclimatiques différentes serait peut-être plus facile. Mais ça,
l'aspect contenu est encore à l'étude. Nous
sommes assurés de l'opportunité, de la faisabilité, de l'identification des
partenaires potentiels à un tel projet, une estimation financière, mais
le contenu, nous attendons d'avoir un feu vert avant d'aller vers un travail
aussi précis.
Le Président (M. Picard) :
Mme la députée.
Mme Roy (Montarville) :
Alors, c'était la question suivante. Je crois donc comprendre que tout a été
fait, on est prêts, on attend. Mais
est-ce qu'il y aurait des gens qui seraient prêts justement à le piloter, ce
projet pilote, advenant qu'il pourrait y avoir... justement, remplir les
conditions puis avoir l'aval nécessaire? Parce que, dans le nouveau projet de
loi n° 77, comme vous le savez, on
ouvre la porte à plusieurs projets pilotes, en région, entre autres. Donc,
est-ce qu'il y a des gens qui seraient prêts à le prendre en charge pour
qu'il démarre?
M. Dades
(Abdelghani) : Oui.
Mme Roy
(Montarville) : Oui?
M. Dades
(Abdelghani) : Oui.
M. El Hanchi (Abdelaadim) : D'abord, par rapport à un autre projet... il
s'inscrit dans la planification future, ça veut dire pour minimiser l'échec des nouveaux arrivants. Maintenant,
nous avons le même projet ou d'autres projets qu'on peut adapter par rapport à la situation actuelle
des gens, d'accord? Donc, par rapport à la qualification, par rapport...
On fait des choses par rapport à ça. Donc,
il y a des choses qu'on fait pour l'employabilité des gens. Dans l'organisation
que je préside, en principe, on
travaille sur l'employabilité des gens à travers d'autres mécanismes, d'autres
méthodes, c'est à travers des 5 à 7,
des rencontres avec les chefs d'entreprises, des moyens pour leur montrer le
cheminement, comment faire pour
arriver à... Donc, c'est des choses qu'on fait, mais qu'on peut aussi les
mettre... donc, la méthode avec laquelle on fait, on prépare les choses puis, une fois que ça réussit, on va les
présenter au ministère pour avoir le soutien pour y aller. Nous avons un événement qui s'appelle le poste du
mois, qui fait ramener des chefs d'entreprises, des personnalités dans leur domaine, qui expliquent aux immigrants ici,
nouveaux arrivants ou des gens qui cherchent un autre emploi, pour voir,
dans le domaine des TI, dans le domaine des
finances, dans le domaine des ressources humaines, et tout... Et là la
plupart des gens, ils sortent avec des
réseaux, ils sortent avec des emplois, et donc des choses comme ça. Donc, c'est
des modèles comme ça qu'on peut faire pour les gens d'ici, mais,
celui-là, il est pour les gens qui vont venir après.
Une voix :
La réponse est oui.
Une voix :
C'est bon.
Une voix :
Mais oui.
Mme
Roy (Montarville) : Donc, c'est ça, on crée des solutions puis
on avance. Maintenant, je sais que votre mémoire porte sur ce projet
principalement...
Le Président (M.
Picard) : Il reste une minute, Mme la députée.
Mme
Roy (Montarville) : Parfait. Qu'est-ce que vous pensez... votre
mémoire n'en traite pas, mais j'aimerais savoir qu'est-ce que vous pensez du seuil d'immigration qui est
proposé par la partie gouvernementale pour les années à venir, les
chiffres de l'immigration. Vous en pensez quoi?
M. Dades
(Abdelghani) : Nous l'avons soigneusement évitée, cette question,
parce que c'est la première des orientations de la réflexion. En fait, on est
dans le micro, les microsolutions.
Si on arrive à
réaliser le projet en matière agricole et agro-industrielle, qu'on peut
développer vers d'autres secteurs, etc., là,
on pourra commencer à penser plus haut. Mais, pour l'instant, cette réflexion,
je vous avoue — je
ne suis pas en train de faire de la
diplomatie — je reste
dans la petite échelle, et peut-être que, avec la maturation du projet
ou son extension peut-être qu'on sera amenés à réfléchir plus globalement.
Je vous en prie,
madame.
Le Président (M.
Picard) : Je vous remercie pour votre apport aux travaux de la
commission.
Et je suspends
quelques instants afin que le prochain témoin puisse prendre place. Merci
beaucoup.
(Suspension de la séance à
15 h 29)
(Reprise à 15 h 32)
Le Président (M.
Picard) : Nous reprenons nos travaux en recevant M. Stéphane
Tajick. Donc, M. Tajick, vous avez une période de 10 minutes pour faire votre
exposé, vont s'ensuivre des échanges avec les parlementaires. La parole est à
vous.
Stéphane Tajick Consulting
M. Tajick (Stéphane) : Merci.
Bonjour, Mme la ministre, M. et Mmes les députés. Mon expertise est dans
l'immigration d'affaires. Ce que je fais, c'est que je fais beaucoup de
recherche sur à peu près tous les programmes à travers le monde, et plusieurs rapports à chaque
année, et, en plus, j'indexe beaucoup de villes à travers le monde par
rapport à leur fiscalité, marché immobilier, le pouvoir économique, etc. Je
suis ici pour parler de la rétention des immigrants investisseurs qui... je
sais que le ministère cherche à un peu élucider dans sa planification de 2017 à
2019.
Quand le Québec pose la question sur la
rétention des immigrants investisseurs, il s'adresse au rapport annuellement publié, Présence des immigrants au
Québec. Dans ce document, une personne, là, qui est considérée
présente est présente si elle possède une
carte d'assurance maladie non expirée. Alors, quand vous posez la question, la
réponse en général qu'on a, c'est : 20,7 % des immigrants
investisseurs admis de 2004 à 2013; en 2015, ils possèdent une carte
d'assurance maladie valide.
Que veut dire
«présent» dans ce contexte? Ça veut dire que, pour être considéré présent au
Québec, il faut avoir une carte
d'assurance maladie valide, donc on est resté au moins six mois durant l'année
au Québec et techniquement on deviendrait
aussi résident fiscal au Québec. C'est quelque part inconsistant avec ce qui
est exigé de l'immigrant investisseur. L'immigrant investisseur s'engage
à rester deux ans sur cinq ans au Canada pour continuer de permettre d'avoir la
résidence permanente et pour la renouveler,
ce qui veut dire qu'il peut passer quatre à cinq mois par année au
Québec, au Canada, et remplir les conditions
de son entente. Alors, quelqu'un peut très bien travailler à l'étranger, rester
quatre mois à cinq mois ici, remplir les attentes qu'on avait placées
sur lui, mais être considéré absent dans le rapport de présence.
Ce genre de jumelage peut avoir un pourcentage
d'erreur assez bas quand on considère les autres catégories d'immigrants qui viennent soit pour travailler ici
ou pour entreprendre, mais, pour ce qui est des investisseurs qui n'ont
pas réellement quelque chose à faire après leur arrivée, le pourcentage
d'erreur est assez élevé, en fait.
D'ailleurs,
si on regarde les tableaux 1 et 2 de l'annexe du mémoire, vous allez voir le taux de rétention, qui,
à partir de 2010, chute. Le rapport de présence des immigrants au Québec
souligne certains points. Pour une cohorte annuelle
donnée, le pourcentage de personnes immigrantes présentes au Québec
ira généralement en diminuant avec le temps. Ça veut dire : la baisse qu'on voit à
partir de 2010 n'est pas naturelle. La tendance devrait être inverse.
Rappelons que la période de validité de la
carte d'assurance maladie est généralement d'un maximum d'un an pour une carte
délivrée de... et de quatre ans dans les cas
de renouvellement. Les raisons d'un non-repérage peuvent être
multiples : changement de nom,
inscription d'un dépendant à partir du formulaire du requérant principal de
l'unité familiale, erreur dans la saisie du numéro du formulaire ou
encore départ du Québec avant même de s'être inscrit à la Régie de l'assurance
maladie. C'est ce dernier cas qui se produit
le plus fréquemment lors du non-repérage des immigrants récents. Les autres
situations demeurent exceptionnelles.
Alors, le
non-repérage a vu aussi son nombre croître significativement depuis 2010.
Malheureusement, le rapport ne peut
pas nous dire s'il s'agit des immigrants investisseurs parce qu'ils ne montrent
pas les statistiques par catégorie, mais on soupçonne que c'est possiblement le cas. Alors, que se passe... depuis
2010 avec le programme Immigrants investisseurs? Eh bien, le programme fédéral a mis fin à son programme en 2014, avait
fait un moratoire en 2012, et déjà, à partir de 2010, commencé à réduire
la compétitivité du programme et le nombre de places. Si vous portez votre
attention aux tableaux 3, 4 et 5 du mémoire,
vous verrez que déjà les délais pour procéder, de traitement de demandes
étaient trois fois plus élevés au
fédéral qu'au Québec, et que les places diminuaient énormément, et, qu'à partir
de même 2015, même 2012, il n'y avait
quasiment plus de places au fédéral, signifiant que, pour les gens, les
investisseurs, les gens qui se catégorisent investisseurs ou tout
simplement les gens fortunés qui veulent venir immigrer au Canada, la seule
porte d'entrée qui se présentait était celle du Québec.
Quand on regarde les intentions de résidence,
qui est le tableau 6 de l'annexe, jusqu'en 2010, les données d'intention de résidence étaient plus ou moins
stables. On parlait de 50 % pour la Colombie-Britannique, un peu
moins de 30 % pour l'Ontario, un peu
moins de 20 % pour le Québec. Vous ne verrez pas les autres provinces
parce que, pour les immigrants
investisseurs, le reste pour les autres provinces est dérisoire. On parle
surtout de trois provinces, et principalement
de trois villes, en fait. En 2011, soit un an après, les intentions pour la
résidence au Québec ont bondi, ont plus
que doublé, et le Québec est devenu la première province d'intention de
résidence pour les immigrants investisseurs. En 2015, elle a quasiment atteint 100 %. Bien que, sur papier, on
peut croire que tout le monde a vraiment voulu venir résider au Québec,
il faut rester assez sceptique face aux données.
En
conclusion, ce que moi, j'arrive à conclure de tout ça, c'est qu'on n'a pas de
moyen efficace de bien définir, un, ce
qui est la présence au Québec, on a une erreur dans la définition de présence
au Québec, du moins pour les immigrants investisseurs, et que, depuis la
fermeture du programme fédéral, les données qu'on a sur la rétention des
immigrants investisseurs au Québec est quelque peu corrompue par les données
et... du moins, pas objectives.
Est-ce qu'on
peut les comparer? Maintenant, est-ce que ces chiffres qu'on a, de toute façon,
est-ce qu'on peut les comparer aux autres provinces ou même à d'autres
pays? En 2010‑2011, le gouvernement fédéral publiait un rapport qui s'intitulait Le mouvement interprovincial
des immigrants au Canada. Les données étaient assez anciennes pour
ce qui est des immigrants investisseurs. Ce
qu'on avait de plus récent, c'était... en 2010, ils avaient trouvé des
immigrants qui étaient venus... en
fait, de 2006 à 2011, juste pour le Québec, les immigrants investisseurs,
78 % étaient encore présents au Québec,
ce qui signifie à peu près le double de ce que nous, au Québec, on estime, avec
des pertes, le reste des pertes, on parle de 22 % qui sont partis
vers l'Ontario et la Colombie-Britannique.
• (15 h 40) •
La raison
pourquoi il y a une si grosse différence est dans la technique, dans la
méthodologie de calcul. Nous, on utilise
la RAMQ pour jumeler nos informations, eux, ils utilisent le rapport d'impôt.
Par contre, ce qu'il est important de savoir,
c'est que, si quelqu'un n'a pas fait un rapport d'impôt au préalable, il ne
sera pas dans la liste. Alors, si quelqu'un n'a jamais fait de rapport d'impôt, il n'est tout simplement pas dans la
liste, il n'est pas calculé dans les calculs. Apparemment, un nouveau
rapport devrait arriver d'ici la fin du mois. Peut-être, ça intéresserait le
ministère d'avoir l'information. Il pourrait voir avec le gouvernement fédéral
là-dessus.
Pour
ce qui est des autres pays, chaque année, je fais l'abattage annuel, environ,
des statistiques sur le sujet d'une centaine
de pays, et je n'ai jamais trouvé la moindre information sur ce sujet. Une
grande raison, c'est que la plupart des
programmes offrent des programmes conditionnels ou la résidence temporaire
avant de donner la résidence permanente, ce qui fait que, même si on veut faire un jumelage ou un croisement des
calculs, combien de personnes ont appliqué après pour la résidence
permanente, le pourcentage d'erreur est trop élevé pour qu'on puisse vraiment
faire ce genre de calculs. Et même, pour mon
expérience, si on prend le programme américain de EB-5, EB-5 américain, je vous
dirais, pour mon humble opinion, que je pense même que moins de 25 % des
gens qui appliquent pour le programme finissent avec la «green card».
Mais, de toute façon,
est-ce que ce n'est pas normal d'avoir un taux de rétention bas pour cette
catégorie d'immigrants? Parce que, quand on
se plaint de la rétention des immigrants investisseurs, c'est surtout quand on
compare les chiffres avec les autres catégories d'immigrants.
Il y a certaines
informations qui sont nécessaires pour bien comprendre ce qu'est un immigrant
investisseur. Le demandeur doit être ou
avoir été actionnaire important d'une entreprise. Le demandeur doit avoir de
l'expérience dans la gestion d'une
entreprise. Le demandeur doit démontrer un actif net de 1,6 million de
dollars. Le demandeur doit effectuer un investissement passif, sans
risque, auprès du gouvernement, de 800 000 $ pour cinq ans, et sans
intérêt.
Donc,
si on veut dessiner le profil moyen de l'immigrant investisseur, ce serait une
personne multimillionnaire. Selon nos
statistiques, il aurait une femme, un enfant. Il posséderait une entreprise en
Chine, parce que la grande majorité sont
Chinois. Alors, qu'est-ce qu'il fait? Il fait sa demande, il place son argent
auprès du gouvernement et reçoit la résidence permanente. Maintenant,
qu'est-ce qu'il fait après ça? Il n'y a rien de défini pour lui.
Le Président (M.
Picard) : En terminant, s'il vous plaît.
M. Tajick
(Stéphane) : Pardon?
Le Président (M.
Picard) : En terminant, s'il vous plaît.
M.
Tajick (Stéphane) : En terminant? D'accord. Dans la nature même du
programme, c'est tout à fait normal, pour
ce type de programme, qui... d'investisseurs où il n'y a pas d'activité active,
disons, d'investissement actif après leur arrivée, que les gens ne soient pas nécessairement présents
plus de six mois par année, surtout si, fiscalement, ça ne leur est pas
avantageux. La nature du programme fait en sorte que, si on est ici deux ans
sur cinq ans... c'est ça, ce que les gens s'engagent généralement de respecter,
et que...
Le Président (M.
Picard) : Merci. Vous allez pouvoir poursuivre dans les
échanges avec les parlementaires.
M. Tajick
(Stéphane) : D'accord.
Le Président (M.
Picard) : Mme la ministre, pour une période maximale de 16
minutes.
Mme
Weil : Bonjour, bienvenue, M. Tajick. Donc, je pense que vous
êtes le seul intervenant à évoquer, parler de ce programme, Immigrants investisseurs. Vous avez beaucoup d'expérience.
Ce n'est pas un programme que les gens connaissent bien. Et je profite
du fait que vous faites des rapports, vous faites des recherches, vous
regardez, comme vous avez dit, tous les
programmes qui existent ailleurs pour vous amener sur cette question de
rétention. Est-ce que vous avez vu peut-être des meilleures pratiques ou
des programmes dans d'autres pays? Parce que j'imagine que cette problématique
de rétention existe ailleurs aussi. Est-ce qu'il y a des données qui vous
permettent de comparer ces programmes de rétention?
Nous,
on a signé une entente avec Investissement Québec, justement, il y a quelques
années, pour améliorer le taux de
rétention. Comme vous le dites, c'est un débat, un débat à l'échelle du Canada,
et, de temps en temps, des articles qui sont écrits là-dessus... Maintenant, est-ce que vous avez des
connaissances par rapport à des programmes dans d'autres pays, justement, pour accompagner ces immigrants
investisseurs pour qu'ils puissent vraiment contribuer à l'économie
locale?
M.
Tajick (Stéphane) : Réellement, une partie des choses que je disais,
c'est qu'il n'y a pas de comparatif avec d'autres pays. Personne ne se
pose réellement la question, beaucoup de pays sont satisfaits de ce qu'ils reçoivent au
début, l'investissement de départ, et
après, bon, on a fait nos coûts, on a fait un profit, le reste n'est pas nécessairement
ce qu'ils recherchent, à moins qu'on
parle de programme actif où les gens doivent activement — comme l'entrepreneur — où les gens doivent activement intégrer l'économie. Mais, pour ce qui est des
investisseurs où ils ont juste une résidence, personne n'a les
statistiques, personne ne se pose la question réellement, et, en réalité, dans
notre cas aussi, il n'y aurait pas raison,
vu la nature du programme, à même se poser la question. Ça ne veut pas dire
qu'il n'y a pas de problème, que les gens ne quittent pas nécessairement
pour d'autres provinces; les gens qui veulent rester activement après, qui
veulent intégrer activement l'économie, ne vont pas ailleurs, ne décident pas
de quitter... Ça, on n'a pas les statistiques pour affirmer ou dire l'inverse
sur ce genre d'information. Voilà.
Mme
Weil : Et vous dites que la langue joue un rôle important au
chapitre de la rétention. Donc, vous, vous avez une expérience
personnelle avec des immigrants investisseurs, donc vous avez remarqué ça.
Donc, si ces personnes parlent français, ils
ont plus tendance à rester ici. Et est-ce que vous prônez justement
l'accompagnement parce que vous prônez la rétention parce que vous
prônez l'investissement en continu dans la société d'accueil? C'est bien ça?
Peut-être nous parler un
peu de cette expérience que vous avez. J'imagine que vous avez des clients,
sans nominaliser, mais peut-être plus parler
de cette question de langue et de port d'attache, qui fait en sorte qu'on... et
quel est le potentiel aussi parmi les
immigrants investisseurs francophones où la question de rétention serait moins
problématique.
M. Tajick (Stéphane) : Oui. Comme on
a vu, le profil moyen de l'immigrant investisseur, c'est en général quelqu'un qui ne parle pas français et qui peut parler
un petit peu d'anglais. Maintenant, on sait tous, si, demain, on part en
Autriche, on ne parle pas allemand, les
difficultés qu'on va rencontrer à s'intégrer, à s'installer, à faire nos
papiers, etc., commencer à trouver un
logement, repartir sa vie... On sait que ça prend du temps, ça prend de
l'effort. Maintenant, ce qu'on a pu
remarquer, c'est qu'à cause de la facilité de la langue, qui est plus proche,
par exemple, l'Ontario, Vancouver, ces gens-là mettent moins d'efforts
et de temps à s'installer qu'ils ne le font au Québec, à Montréal, ce qui fait
qu'il y a un débalancement et que Montréal
est, à ce niveau-là, moins compétitive. Je dis : Montréal, Toronto,
Vancouver, parce que tout le monde va quasiment uniquement dans les
villes, quand on parle d'immigrants investisseurs, on parle de ces trois villes
au Canada. Le reste, c'est quasiment des miettes.
Alors, oui,
il y a des choses qu'on peut faire. Il faut réaliser que, pour le Québec,
toujours, il a fallu, pour le Québec, compenser
un petit peu à cause du français, au niveau économique, toujours. C'est une
réalité. On peut faire en sorte que l'équilibre soit réajusté et même
devenir plus compétitifs par rapport aux autres villes si on venait à réduire
le temps et l'effort que les gens mettent à
l'installation. Et ça, ça passerait, selon moi, par un programme
d'accompagnement qui serait beaucoup
plus... disons, un vrai programme d'accompagnement où, les gens, on irait vers
l'immigrant, qui serait quasiment
obligatoire, jusqu'à un certain point, et qui serait financé par l'immigrant
investisseur lui-même durant son application.
Et, si l'on souhaite, à ce niveau-là, après, mettre certains incitatifs pour le
voir intégrer activement l'économie, faire
des investissements... Parce que le potentiel est énorme, on le sait, des gens
comme Li Ka-shing, qui est l'homme le plus
riche d'Asie... est passé par le programme canadien il y a très longtemps. Il y
a beaucoup... c'est des grosses fortunes, des gens qui peuvent faire
énormément de choses pour l'économie québécoise s'ils venaient à travailler
l'économie québécoise. On peut venir, au
niveau de l'exportation, favoriser les entrées de marchés dans leurs pays
d'origine. Il y a beaucoup de choses qu'ils sont capables de faire.
Voilà.
Mme Weil :
...les incitatifs pour garder cette personne, retenir cette personne et
l'encourager justement dans cet accompagnement... ça va prendre des
incitatifs pour l'intéresser à rester ici et investir, c'est l'objectif. Quels
seraient les incitatifs à mettre en place?
• (15 h 50) •
M. Tajick (Stéphane) : La première
chose, c'est un bon accueil, quand on parle... c'est vraiment faciliter les choses. On
a aisément la capacité de faire en
sorte que leurs premières semaines ou
premiers mois soient comme un rêve, qu'on vienne les chercher, qu'on les
porte, qu'on arrange tout pour eux, etc., ça, c'est très facile. C'est très
facile. Après, dès que l'expérience est bonne dès le début, il y a une plus
grosse marge. Après, c'est voir qu'est-ce qui peut être fait — et ça,
il faut les partenariats avec le secteur privé — qu'est-ce qui peut être fait à leur avantage
économiquement. Il ne faut pas aller
chercher nécessairement d'abord qu'est-ce qui avantage le Québec, c'est voir
qu'est-ce qui avantage l'immigrant
investisseur : Est-ce que c'est commencer à acheter une petite entreprise
ici? Des fois, c'est, très simplement, acheter
des parts dans une entreprise qui fait à peu près la même chose qu'eux, disons,
par exemple, en Chine, une usine, manufacture
de sacs en plastique, ils prennent des parts dans une manufacture de sacs en
plastique ici, ils voient comment ils travaillent au Québec, des fois ça
peut être intéressant pour eux, ils vont exporter la technologie, amener une
certaine expertise qu'on a au Québec et l'appliquer
là-bas, et ça, ça leur fait grossir leurs intérêts là-bas. Ça, ça peut être un
exemple intéressant pour eux, ça va donner
de la valeur au Québec, pour eux, à Montréal, pour eux, et, à partir de ça, tu
peux grossir. À long terme, le but
ultime d'un programme d'accompagnement, ce serait vraiment ça, ce serait, par
exemple, l'immigrant investisseur
chinois, on puisse le mettre en contact avec un investisseur brésilien, ouvrir
les marchés pour eux, et cette plaque tournante qui permettrait tout ça
serait Montréal et le Québec.
Mme Weil :
Donc, votre prémisse, c'est que finalement ces personnes, ils pourraient être
très motivés si on est capables de les accompagner dans ce qui est leur
force essentiellement... c'est de savoir comment bien investir, mais à moyen et
long terme.
M. Tajick
(Stéphane) : Présentement, le programme Immigrants Investisseurs, il a
trois profils de relocalisation pour
les immigrants d'affaires : tu as ceux qui vont se relocaliser
complètement, qui vont vivre la plupart de leurs jours au Québec et qui vont chercher à avoir une source de
revenus au Québec qui va devenir leur source de revenus principale. Eux,
ça, c'est une relocation complète, on a ce qu'on appelle les résidents
touristes, qui ne vont jamais rester ici très longtemps,
ils vont être pratiquement des touristes qui vont venir annuellement ici et qui
vont juste essayer de respecter les conditions
de la résidence permanente. Et, entre les deux, vous avez la relocalisation
partielle ou transition où quelqu'un peut transiger entre... d'abord, on
était juste en résidents touristes et on veut, au fur et à mesure du temps,
devenir quelqu'un qui va être à part entière au Québec.
En général,
ces gens-là, souvent, ils vont avoir peut-être de la famille, ils vont avoir
des enfants ou les enfants vont étudier
ici et eux vont garder leurs activités d'affaires à l'étranger. Mais ce que
j'ai remarqué dans beaucoup des cas, c'est que, bien qu'ils ont des activités à l'étranger, et qui est très
profitable, et venir au Québec, et vendre ce qu'ils ont là-bas pour
venir se casser la tête au Québec pour rebâtir une vie en revenus, etc., qui
n'est pas nécessairement intéressant à première vue, l'idée d'être proches de
leurs familles, de leurs enfants fait en sorte qu'ils sont ouverts, ils sont
ouverts à la possibilité de transiger.
Alors, ce que moi, je
conseille en général, c'est de faire en sorte qu'ils aient au moins un
investissement, commencer un petit
investissement et leur permettre de le grossir avec le temps, qu'ils commencent
à mieux connaître l'économie du Québec, s'intégrer. On cherche juste
l'intégration économique, on ne cherche pas à faire que des millionnaires deviennent des milliardaires, on
cherche qu'on fasse en sorte qu'ils aient quelque chose ici qui les
tienne un petit peu, et qui les attire, et
qu'au fur et à mesure pourraient venir faire la balance pour faire en sorte
qu'ils soient plus intéressés à rester ici à long terme ou du moins
qu'ils soient gagnants et que le Québec soit gagnant.
Mme Weil : Très bien. Merci
beaucoup, M. Tajick.
Le Président (M. Picard) :
Merci. Je cède maintenant la parole à M. le député de Bourget pour une période
de 9 min 30 s.
M. Kotto :
Merci, M. le Président. M. Tajick, soyez le bienvenu et, au nom de tous, je
m'excuse pour le bruit ambiant qui
n'est pas très... peut-être que les gens, à la maison, ne l'entendent pas, mais
nous, on est en plein dedans. C'est intéressant,
les lumières que vous nous apportez relativement à ce profil d'immigrant. Le
cas de la France, est-ce que vous l'avez également étudié?
M. Tajick
(Stéphane) : Le cas de la France au niveau des... quand on parle des
immigrants investisseurs on ne parle
pas vraiment du cas de la France, on pourrait en parler... peut-être des
entrepreneurs ou travailleurs autonomes, mais... Si vous voulez
continuer votre question...
M. Kotto :
Oui. Bien, je veux dire, est-ce que le profil d'immigrant et investisseur ne
s'applique pas, là, au cas de la France, par exemple?
M. Tajick
(Stéphane) : Non. Non, non. On parle surtout des pays en voie de
développement, on parle des pays qui, en
général, ne vont pas parler français et qui n'ont pas nécessairement d'autres
moyens de venir au Canada ou au Québec autres que les programmes,
Immigrants investisseurs, par exemple.
M. Kotto :
O.K. A priori, comme ça — en fait, a priori, je dis «a priori», mais vous êtes bien
documenté pour nous répondre — quand ils choisissent de
venir au Québec, le premier instinct, il est bâti sur quoi, il est basé sur quoi?
Qu'est-ce qui les attire ici?
M. Tajick
(Stéphane) : Quand ils choisissent le programme investisseur du
Québec, je vous dirais que ce qui saute aux yeux en général... bien,
premièrement, c'est le seul choix qu'ils ont, et il n'y a plus vraiment de programme
fédéral. Il y a le nouveau programme pilote fédéral qui, à ce que je sache, n'a
peut-être pas encore donné sa première résidence
permanente. Peut-être que je me trompe, peut-être qu'ils en ont fait un ou deux
jusqu'à maintenant. Mais surtout c'est
un peu ce qu'il s'est passé vers la fin du mandat conservateur dans... c'est la
façon qu'ils ont agi envers le programme Immigrants investisseurs. En fait, le programme déjà québécois
était beaucoup plus compétitif que celui du fédéral, et maintenant
il est fermé. Alors, les gens étaient toujours plus intéressés
à passer par le programme du Québec. Maintenant, est-ce qu'ils voulaient
tous vraiment rester au Québec? Ça reste spéculatif de dire l'inverse.
M. Kotto : Donc, si j'entends
bien, ce sont les programmes qui les... attirent, dis-je.
M. Tajick (Stéphane) : Oui.
M. Kotto :
En l'occurrence, celui du Québec, qui est généreux. Mais, derrière cela, venir
immobiliser une partie de sa fortune au Québec, ça leur rapporte quoi en
échange? Au-delà de la famille ou des enfants qui étudient, au-delà du système
de santé éventuellement, qu'est-ce que ça leur apporte?
M. Tajick (Stéphane) : Vous savez,
dans le milieu de l'immigration et la citoyenneté, ce qu'on appelle le «residence citizenship» qui touche vraiment
principalement les gens fortunés, je vous dirais, si j'évalue un peu la
valeur des résidents permanents et la citoyenneté de chaque pays... Parce qu'il
y a un marché, en fait, là-dessus. Il y en a qui le vendent directement. Il y en a qui, par le biais d'investissements...
nous offrons la résidence, etc. Ça vaut, quand même, la résidence
permanente du Canada... sa valeur marchande est entre 400 000 $ et
500 000 $ cash. Alors, pourquoi? Parce
qu'il y a beaucoup de bienfaits à être ici : ça peut être la sécurité, ça
peut être la qualité du passeport, au bout du compte, la qualité de
l'éducation.
Écoutez, moi,
je fais un rapport annuel sur les attraits des villes à travers le monde pour
ce genre de personnes, et Montréal
finit deuxième de toutes les villes, derrière Londres. Pour ce qui est des
familles qui veulent se relocaliser avec un budget de 1 million de dollars, Montréal est la meilleure solution
au monde pour eux. Alors, il y a quand même beaucoup d'attraits. La
région de Montréal serait plus intéressante que Toronto et Vancouver à ce
niveau-là, à cause du pouvoir d'achat, en fait.
M. Kotto :
O.K. Mais il s'avère néanmoins que notre capacité de rétention de ces profils
soit, disons, faible à la lumière de ce que vous nous exposez.
M.
Tajick (Stéphane) : Non. Ce que j'ai exposé, en fait, c'est qu'on a
des chiffres, mais on ne peut pas se baser sur ces chiffres parce qu'on définit mal «présence» pour les immigrants
investisseurs. Parce que quelqu'un techniquement un immigrant investisseur ici qui est quatre à cinq mois par an est
présent au Québec, mais nos chiffres nous disent qu'ils ne le sont pas.
Vous comprenez?
Pour ce qui
est de est-ce qu'ils vont dans les autres provinces, on ne le sait pas, ça
reste spéculatif. Alors, tout le débat
sur la rétention est presque fictif parce qu'il ne se base sur aucune donnée
concrète, on a juste des dires, on a juste des soupçons. Ça ne veut pas dire que ce n'est pas le cas, mais ça veut tout
simplement dire que, d'après moi, ce que j'ai vu, on ne peut pas affirmer qu'on a un problème de
rétention des immigrants investisseurs au Québec. Dépendamment de ce qu'on considère présent ou pas présent, c'est ça
qui va définir, en fait, si on a un problème ou on n'a pas un problème.
M. Kotto :
O.K. Alors, prétendre que le Québec sert de tremplin pour ces profils
d'immigrants investisseurs pour, par la suite, se retrouver en Ontario,
ou en Colombie-Britannique, ou aux États-Unis, c'est une vue de l'esprit.
• (16 heures) •
M. Tajick
(Stéphane) : Vous savez, il faut soit voir la façon qu'ils ont promis
de venir ici et après ils vont ailleurs, ou tu prends le bassin : dans ce bassin, il y aura des gens qui
seraient mieux à Vancouver, et il y a des gens qui seraient mieux à
Toronto, et il y a des gens qui seraient mieux à Montréal, il y en a qui vont
repartir, il y en a qui vont aller aux États-Unis, etc.
Nous, on a fini avec tout le bassin. Alors, sûrement,
il y a des gens qui viennent ici, qui vont, après quelque temps, réaliser : Bien, peut-être,
moi, je serais mieux à Vancouver, ou ils vont à Vancouver, ils voyagent un peu
partout au Canada et trouvent :
Ah! bien moi, je pense que Vancouver, ça irait mieux pour moi. Ah! moi, je
pense que Toronto serait mieux pour moi. Si on a tout le bassin de population, c'est assez normal
que ça arrive. Après, si c'est les gens qui auraient voulu aller au Québec que, dès le début, vraiment, de tout le bassin,
on avait une proportion, et, si, de cette proportion, les gens quittent, c'est un différent... et plus que les
autres provinces, là, oui, on aura un problème de rétention. Mais on ne le
sait pas, ça, malheureusement.
M. Kotto : O.K. Combien de
temps?
Le Président (M. Picard) :
Deux minutes.
M. Kotto : Deux minutes. En fait, ce que je retiens de
fondamental dans votre exposé cet après-midi, c'est que les données, des
données qui nous permettent de suivre leurs mouvements, leurs déplacements sont
intangibles, oui.
M. Tajick (Stéphane) : C'est exact. On est la seule province qui essaie d'avoir ce
genre d'information. On est les seuls que moi, j'ai conclu, pour les immigrants investisseurs du moins,
qu'on a ces intentions d'essayer de voir qu'est-ce qu'il se passe avec
eux. Malheureusement, c'est très difficile à trouver. Comme je vous ai dit,
pour le fédéral, ils ont essayé de faire la
même chose. Leur méthodologie est encore plus erronée, selon moi. On a vu les
chiffres, on parle du double de ce que... 78 % de rétention pour le
Québec, alors que nous, on a des chiffres qui donnent 30 %. On n'a pas
vraiment des bases vraiment sur quoi se baser.
M. Kotto :
O.K. Merci.
Le Président (M. Picard) :
Merci. Je cède maintenant la parole à Mme la députée de Montarville.
Mme Roy (Montarville) : Merci,
M. le Président. Bonjour, M. Tajick, merci pour le mémoire. C'est très compliqué, je ne suis pas bonne en chiffres, mais j'ai des questions à vous
poser, parce qu'on s'était posé la
question sur les immigrants
investisseurs, parce que c'est une source de revenus qui est quand même
importante pour le gouvernement du
Québec. C'est un contrat échange-échange : ils y trouvent quelque chose,
on y trouve quelque chose, c'est particulier.
Vous nous dites que l'immigrant investisseur
moyen ne parle pas le français et très peu l'anglais, mais que le problème de rétention n'est pas dû au français,
mais plutôt au temps et à l'effort nécessaires pour un nouvel arrivant
afin de s'installer, de s'adapter puis de s'intégrer dans un nouvel
environnement — c'est
des gens d'affaires, tout le temps entre
deux voyages — et que,
tout le temps que ça prend pour s'adapter, il faudrait faciliter cette
adaptation-là, si je vous comprends bien. Les traiter aux petits
oignons, ça faciliterait probablement leur rétention.
Maintenant,
je vais vous faire la proposition suivant : puisque l'argent, c'est le
nerf de la guerre et c'est la raison pour
laquelle ils viennent ici — ce sont des investisseurs — nous avions proposé à la ministre, durant
l'étude du projet de loi n° 77,
quelques mesures. Et j'aimerais vous entendre là-dessus, parce que peut-être
que ce n'est pas bon, mais peut-être que c'est bon aussi. Alors, je
voudrais avoir votre avis d'expert.
Alors, on
avait proposé trois mesures pour améliorer la rétention de ces immigrants
investisseurs. Un, obliger les immigrants
investisseurs qui souhaitent financer une partie ou la totalité du placement à
obtenir leur financement auprès du gouvernement
du Québec, pas nécessairement des banques; deux, rembourser la moitié du placement
dans cinq ans, sous condition de posséder des immobilisations
corporelles — le
terme n'est peut-être pas exact, mais des immeubles ici, là, au Québec — ou
des actifs financiers sur le territoire québécois équivalant à plus de
10 % de leurs avoirs nets, et rembourser
l'autre moitié — donc, on
donne plus de temps pour le remboursement — du placement dans cinq ans, les cinq
années suivantes, en fonction des engagements financiers de l'immigrant
investisseur sur le territoire québécois durant cette période.
On veut les garder plus longtemps en
faisant en sorte qu'ils remboursent sur une plus longue période, mais,
en contrepartie, qu'ils aient des
immobilisations, des investissements ici, au Québec, et également qu'ils se
financent auprès du gouvernement. Qu'est-ce que vous pensez de ces
pistes de solution?
M.
Tajick (Stéphane) : La première poserait un gros problème au niveau
des partenariats qu'on a dans le secteur privé, qui fait le marketing du programme. Il faut comprendre que, pour
chaque personne dans le marché, en fait, mondial, pour chaque personne
qu'on ramène comme client, ça a un coût, ça a une valeur marchande, en fait.
La
raison qui fait aussi que les gens vont au Québec et pas ailleurs, c'est en
raison du coût. Si demain, le Québec n'offrait
rien pour ses références, ce serait comme un programme entrepreneurs où on
parlerait peut-être de 50 demandes à la
place de 5 000 demandes. Alors, il faut faire attention comment on joue
avec ces variables, parce que c'est ça qui rend un peu le programme
compétitif.
Pour
le deuxième, pour ce qui est... peut-être
un peu les forcer à rester sous obligation de contrainte, etc., moi, je vous dirais, vous savez, chaque personne, chaque
individu coûte environ 20 000 $ par an. Ça, ça part du budget fédéral, provincial et municipal, c'est
à peu près 20 000 $ par an ou 20 000 $, 25 000 $
par an. Quand il fait une contribution, sa contribution de l'immigrant investisseur, le coût va à peu près pendant
cinq, six ans, lui et sa famille. S'il n'est plus au Québec, il n'y a plus de coûts au Québec. S'il
n'est plus au Canada, il n'y a plus de coûts au Canada. Alors, sa
contribution est positive. Il a donné de
l'argent, il n'a pas pris. Il n'a pas pris le produit. Il a payé, mais il n'a
pas pris le produit. Dans ce cas-là,
ça irait un peu à l'inverse... est-ce qu'on peut... ce qui ferait du sens au
niveau de son rapport, de ce qu'il donne et combien il coûte.
Après, moi,
personnellement, je n'ai jamais été pour... ma philosophie, ce n'est pas de
mettre des contraintes, d'obliger des gens.
Parce qu'en fin de compte, après ça, tu réduis un peu les bénéfices de ton
programme. Je suis beaucoup plus pour
l'incitation, trouver des incitatifs, trouver des moyens intelligents de les
faire investir. Parce que, des fois, ce n'est peut-être pas bon pour
eux, peut-être ils ne sont pas dans une situation où ils devraient, etc.
Peut-être qu'ils ont eu des problèmes financiers. Il y a beaucoup de raisons
qui font que...
Je
pense qu'au Québec, surtout, on est assez riches, on a assez de ressources pour
être plus généreux dans notre approche,
et trouver des moyens de les aider, et trouver un moyen d'aligner un peu nos
objectifs. Si l'immigrant investisseur prospère, nous allons prospérer.
Il y a beaucoup de moyens.
Écoutez, si on
optimise le programme Immigrants investisseurs, on peut retrouver avec un fonds
qui fait 30, 48 milliards à plein
régime. C'est un peu moins que la moitié du budget provincial. L'immigration
d'affaires, en général... Écoutez,
moi, je ne serais pas surpris si on fait les changements qu'on peut faire. Dans
cinq ans, tu peux retrouver le Québec avec
le meilleur taux de croissance au Canada. Il y a beaucoup de choses qui sont
possibles de faire. Il faut juste avoir la vision de ce qui est possible
et de ce qui n'est pas possible avec ces programmes.
Mme
Roy (Montarville) : Si je vous comprends, c'est plus
d'incitatifs... être davantage facilitateurs sur les irritants qu'ils
ont et, entre autres, c'est la perte de temps, c'est le temps qu'il faut
investir justement pour...
M. Tajick
(Stéphane) : Exactement. L'information.
Mme Roy
(Montarville) : ...pour s'intégrer, si je peux parler ainsi,
là.
M.
Tajick (Stéphane) : Si on prend, par exemple, un homme d'affaires, par
exemple, qui vient de Chine, quand il arrive
ici, bon, bien sûr, il ne connaît pas la langue nécessairement, mais il ne
connaît les pratiques d'affaires, il ne connaît pas les produits, les compagnies. Il n'a pas de réseau d'affaires, etc.
S'il avait tout ça, il serait capable sûrement d'avoir une productivité
élevée au Québec. Ce qu'il faut être capable de faire, c'est de l'intégrer le
plus rapidement, lui compresser cette
information sans le léser non plus pour qu'il puisse lui-même changer de
costume et avoir un costume d'homme d'affaires québécois après quelques
années.
Mme Roy
(Montarville) : Je vous remercie beaucoup pour votre expertise.
M. Tajick
(Stéphane) : Je vous en prie. Merci.
Le Président (M.
Picard) : Merci pour votre contribution aux travaux de la
commission.
Et je suspends
quelques instants afin de permettre au prochain groupe de prendre place.
(Suspension de la séance à
16 h 9)
(Reprise à 16 h 11)
Le
Président (M. Picard) :
Nous reprenons nos travaux en recevant les représentants de la Confédération des syndicats nationaux. Je
reconnais M. Lortie. Donc, vous êtes un habitué. Je vous demanderais de
présenter les gens qui vous accompagnent. Vous disposez de 10 minutes,
après ça vont s'ensuivre des échanges avec les parlementaires. La parole est à
vous, M. Lortie.
Confédération
des syndicats nationaux (CSN)
M. Lortie
(Jean) : Alors, M. le Président, Mme la ministre, MM. et Mme les députés, alors, je suis
accompagné, à ma gauche, d'Anne Pineau, Me
Anne Pineau, adjointe au comité exécutif de la CSN, et, à ma droite, de Me
Marjorie Houle, conseillère syndicale au Service de recherche de la CSN.
Alors, M. le Président, la CSN est très contente d'être reçue cet après-midi
à la Commission des relations
avec les citoyens sur la planification des niveaux d'immigration. Je vous dirais
que ce qui préoccupe beaucoup la CSN à travers son mémoire, qu'elle a présenté... Évidemment, on est
dans la foulée des différentes consultations
publiques qui ont été menées
depuis quelques années sur les questions d'immigration.
Pensons au projet de loi n° 77 ou, avant,
les différentes consultations publiques qui ont été faites. Dans cette présente
consultation sur la stabilisation des niveaux d'immigration, le premier élément
pour nous, évidemment, qui traverse d'ailleurs
l'ensemble de nos six préoccupations sur cette consultation, c'est évidemment
la question de l'intégration et des mesures concrètes pour bien
s'assurer que cette intégration des immigrantes et immigrants non seulement à
la première génération, mais également aux générations subséquentes, soit
faite.
Alors, la Confédération des syndicats nationaux est préoccupée davantage sur cette question
d'intégration que sur les niveaux d'immigration qui sont proposés par le
gouvernement, qui, effectivement, doivent répondre à des besoins démographiques au Québec dans un contexte de
vieillissement de la population. Mais cette question de l'intégration doit
traverser cet ensemble de cette planification-là pour permettre évidemment
d'accueillir, d'intégrer et de retenir des personnes immigrantes dans la société
québécoise.
On se réjouit de la volonté du gouvernement du
Québec de faire en sorte que les travailleurs qualifiés et les étudiants qui ont un statut temporaire puissent
demeurer au Québec. Mais on se pose encore une fois la question
sur les travailleurs étrangers temporaires, notamment
dans la foulée du projet de loi n° 8, qui a été adopté il y a
déjà deux ans de ça, qui leur retire
le droit de syndicalisation et qui... Maintenant, ces travailleurs-là sont vulnérables. On les retrouve sur
les terres agricoles québécoises,
mais également dans les usines de l'agroalimentaire dans beaucoup
de cas. Et pourquoi on n'applique pas à ces travailleurs-là migrants temporaires la capacité ou la possibilité de demeurer au Québec et qui sont déjà depuis plusieurs années travailleurs
payant des impôts? Et on lèverait l'hypothèque de l'immense vulnérabilité dans
laquelle ils sont, documentée d'ailleurs par beaucoup, dont la Commission des
droits de la personne.
Pour nous, la
question de la connaissance du
français à l'admission, on salue qu'au moins 85 % des travailleurs qualifiés maîtrisent le français. Mais qu'en
est-il des investisseurs? On pourrait, si le temps nous le permet, vous
raconter une anecdote sur la Côte-Nord, où
on a vécu des situations de non-capacité de communication entre le propriétaire
d'une entreprise et ses employés. Ça a donné lieu à un dur conflit de travail.
La question
des régions. Effectivement, la CSN martèle depuis des années qu'un des
succès d'attirer et de retenir les
personnes immigrantes dans les régions du Québec, c'est évidemment
des mesures de parrainage, de jumelage qui font qu'on va les ancrer dans les régions. Ils vont être bien accueillis et
vont faire en sorte qu'ils vont demeurer dans les régions et enrichir celles-ci. La question, évidemment,
des structures régionales, qui ont été un peu malmenées dans les
dernières années, va se poser sur la capacité réelle des régions québécoises
d'accueillir les migrants.
Sur la question de l'emploi, on est très
préoccupés sur la notion d'une adéquation immigration et travailleurs, d'autant plus que, sur les centaines de milliers
d'emplois disponibles au Québec qu'on est incapables de combler... Et je vous dirais que je suis membre de la Commission
des partenaires du marché du travail. On a eu des données au printemps. Ce qui est troublant, c'est les emplois les moins
bien qualifiés, cuisiniers, coiffeuses, commis d'épicerie, dans la restauration, serveuses et serveurs, ces
métiers-là, c'est là où on a des pénuries de main-d'oeuvre au Québec.
Alors, on parle beaucoup
du soudeur québécois qui n'existe pas, mais le véritable problème...
Et c'est des emplois peu qualifiés. Et je
vous dirais qu'on doit mettre l'emphase sur la protection des travailleurs. Et il n'y aura jamais d'adéquation
parfaite entre les besoins des entreprises,
et on ne doit pas bâtir notre planification seulement sur une adéquation
purement, compte tenu que la plupart
des emplois à combler au Québec
ne sont pas des emplois qualifiés, ils sont plutôt des emplois dits au
salaire minimum, avec des conditions de
travail qui font qu'on a beaucoup de difficultés à les retenir. Alors, c'est assez
troublant, comme données que la commission
a déposées ce printemps, et je pense que ça mérite qu'on y travaille, sur la
question de la croissance du marché du travail et de combler les besoins dans un contexte de vieillissement et de
pénurie dans certains secteurs, mais les principales pénuries se
retrouvent dans les emplois les moins bien qualifiés au Québec.
Et je dirais
que la question de la réaffirmation de l'engagement humanitaire au Québec est un impératif important. Le Québec doit
demeurer une terre d'accueil des réfugiés, on le voit depuis quelques mois,
l'accueil des personnes réfugiées de Syrie, et faire en sorte que le Québec
demeure une terre d'accueil, et la planification doit le prévoir.
Mais, à
travers toute la proposition que le gouvernement a mise sur la table, la consultation, notre préoccupation première
évidemment, c'est la question de l'intégration, des
mesures en amont pour s'assurer qu'on mette en place de bonnes mesures pour que ces gens s'intègrent bien
à la société québécoise et ne la quittent pas, qu'ils apprennent la
langue française, c'est un impératif important,
apprendre le français, et on salue l'initiative du gouvernement au cours des dernières semaines
sur la promotion du français auprès des personnes immigrantes, mais on doit
faire un effort colossal, comme société,
si on veut véritablement régler la question démographique par accueil d'une population
immigrante qui va venir travailler et vivre en société québécoise en
français.
Alors, je
dirais que ça représente les grands éléments du mémoire que la CSN dépose cet après-midi,
et, bien sûr, au cours des
échanges, nous pourrons compléter sur certaines pistes de solution que nous
avons mises de l'avant.
Le Président (M. Picard) :
Merci. Nous allons débuter notre période d'échange. Mme la ministre, pour une
période de 17 min 30 s.
Mme Weil : Bienvenue, M. Lortie, Mme Pineau et Mme Houle.
Merci de participer à chaque étape de cette grande réforme. Vraiment, on apprécie. On apprécie votre point de vue parce que c'est un exercice démocratique, on hésite
à dire «unique au monde», mais le ministère, on a regardé un peu partout et il
semblerait qu'on est peut-être la seule société qui fait cet exercice. C'est important
d'entendre les points de vue. Ça nous permet aussi d'enrichir.
Peut-être
commencer un peu avec la vision d'ensemble de cette réforme. Évidemment, l'immigration, c'est des vases
communicants, hein? Donc, quand on parle de volume, on a cet engagement
humanitaire et on a été interpelé de façon
importante en 2015. Nous, on le voyait venir, par rapport aux réfugiés syriens, depuis plusieurs
années. On a fermé notre bureau à
Damas et on a commencé à avoir des inquiétudes déjà en 2013. On savait qu'il
fallait qu'on se prépare. L'équipe humanitaire, on a fait beaucoup de
travail pour préparer le terrain, et ensuite, comme vous le savez, on a annoncé
notre plan, et ensuite le gouvernement fédéral aussi, le nouveau gouvernement
fédéral. Les nombres, les admissions ont
beaucoup augmenté, comparé aux années précédentes. Donc, tout le monde est
sollicité dans ce projet humanitaire important.
Je
pense que ce qui est très encourageant, c'est de voir à quel point nous, on a
constaté l'adhésion à ce projet, la mobilisation
de tous les acteurs de la société civile, les organismes autour de nous. Donc,
ça, ça prend plus, comment dire... Dans
notre 50 000, vous avez vu, dans les proportions, que le nombre de
travailleurs qualifiés chute un peu, travailleurs économiques. Donc, il faut trouver, donc, dans
tout ça, un équilibre pour répondre à nos besoins, remplir nos
obligations humanitaires, sachant que chacune de ces personnes a une
contribution aussi.
On
le répète souvent, hein? On regarde l'expérience des «boat people», hein, on
regarde aussi les gens qui sont venus,
bon, du Vietnam, du Cambodge et d'autres pays au fil des années, c'est des gens
qui... J'aime bien votre message sur l'être
humain et sa contribution, parce que c'est vrai. Et donc, dans la vraie vie, on
ne fait pas la distinction, bon, est-ce que vous êtes un travailleur qualifié, est-ce que vous êtes de la catégorie
regroupement familial, est-ce que vous êtes un réfugié. C'est un être humain, c'est un immigrant, puis on
souhaite l'accompagner, puis il faut accompagner toutes ces personnes.
• (16 h 20) •
Et
merci pour vos félicitations sur le programme, la campagne de promotion de la
francisation, parce que les gens qu'on
vise, là, parce que les réfugiés sont en francisation, les travailleurs
qualifiés, la majorité, la grande majorité parlent français à l'arrivée, puis les enfants sont
scolarisés en français. On cherche justement d'atteindre ces personnes-là, et,
la dernière fois qu'on avait fait une
campagne, on avait eu un taux de réussite important. On a augmenté notre budget en francisation de 4 millions. Donc ça, ça va être une initiative bien importante, parce que
qu'est-ce que ça cible, qu'est-ce que ça vise? La participation à la société
québécoise. Je pense qu'on vous rejoint tout à fait sur cet enjeu.
Pour
les travailleurs qualifiés, l'arrimage, oui, vous avez raison,
l'arrimage parfait... Mais les constats qu'on a, les études que le ministère a faites par rapport à d'autres sociétés, comme l'Australie, la Nouvelle-Zélande, évidemment le Canada, qui ont adopté ce système de déclaration
d'intérêt... accompagné d'autres mesures, là, ce n'est pas juste ça. Ça,
c'est juste un mécanisme. Mais le fait que
les gens arrivent beaucoup plus rapidement, ont des offres d'emploi et qu'on
mette en contact l'entreprise, l'employeur — et c'est tout ça qu'on est en
train de regarder — ça
améliore de façon importante son intégration en emploi. Donc, c'est beaucoup
plus efficace, c'est plus rapide. Et évidemment, au fil des dernières années, on choisissait des gens avec des profils
intéressants, mais plus de difficulté à faire cet arrimage... et désolant
de voir les obstacles auxquels faisaient ces
personnes. Donc, c'était dans cette optique-là, on est d'accord, l'arrimage
parfait, mais parfois c'est juste une formation d'appoint, et il y a
beaucoup de travail qui peut être fait en amont avec les ordres professionnels. Déjà, moi, j'ai rencontré des
ordres professionnels, les comptables agréés. Ils sont capables — c'est 100 %, d'ailleurs, des candidats, maintenant — ils sont capables de leur dire : Bon,
vous, vous avez besoin de ça et ça, puis ils leur donnent exactement, comment dire, la voie, et pas
de problème ensuite à reconnaître... parce que, pour les comptables,
apparemment, les normes sont internationales.
Donc,
je voulais peut-être vous entendre là-dessus, si vous comprenez un peu les
nuances dans cet arrimage. C'est beaucoup
ce qu'on va faire avec la Commission des partenaires du marché du travail, des
portraits régionalisés des besoins, et
ensuite on viendra sur les autres... je pense que vous parlez des autres
travailleurs, peut-être moins qualifiés. J'aimerais qu'on en parle dans
une deuxième question.
M.
Lortie (Jean) : Je vous dirais que, sur la question des travailleurs
qualifiés, bon, évidemment, il faut faire un arrimage serré. Il faut d'abord dépoussiérer les mythes et les légendes
sur les pénuries au Québec parce qu'évidemment, dès qu'on est dans un secteur d'activité économique
peu attrayant, évidemment, on vit des pénuries. Et souvent on ne va pas
en amont mesurer quelles sont les difficultés
de recrutement des travailleuses et travailleurs dans ce secteur-là. Et ça,
c'est un des risques, et d'ailleurs c'est
pour ça qu'on vous le souligne cet après-midi, c'est une mise en garde de faire
attention sur ces données-là. Parce que ce
qu'on a découvert, puis ça fait plusieurs années, c'est qu'on entend parler de
beaucoup de pénuries de main-d'oeuvre, qu'il faut faire une adéquation
formation-emploi, et souvent on constate que la masse des emplois qu'on qualifiait, qu'ils étaient en
pénurie parce que les postes n'étaient pas comblés, parce que c'est des
emplois de fort taux de roulement. Donc,
c'est des emplois de fort taux de roulement — que ce soit à Montréal, à Québec ou
dans les centres, dans les régions — et, si on souhaite attirer une clientèle immigrante
peu qualifiée, il faut le savoir que c'est ce qu'on vise, pour faire
cette adéquation-là avec ces emplois-là. Mais on sait très bien que ces gens-là
ne pourront pas demeurer dans ces
emplois-là, compte tenu des conditions de vie et de travail, travail de soir,
de nuit, vous avez des jeunes enfants, donc il y a des difficultés de
conciliation famille-travail.
Donc,
il faut faire bien attention quand on veut attirer des travailleurs immigrants
qualifiés, savoir qu'est-ce qu'on vise
comme objectif, pour éviter qu'on les retrouve chauffeurs de taxi à Montréal.
Et ça ne sera pas du tout — puis tout le monde le
souligne — cette
inadéquation-là entre la reconnaissance des diplômes, la reconnaissance des
expériences et, concrètement, bien,
qu'est-ce qu'on peut trouver comme emploi. Et ça, c'est le rêve brisé de venir
au Québec sous des fausses prémisses et de ne pas réussir finalement à
travailler. Ça, vraiment, on a une très grande préoccupation de ça.
Et
l'autre élément aussi, c'est les travailleurs peu qualifiés. Bien, évidemment,
quand on parle des travailleurs immigrants temporaires qui sont sur des
programmes, moi, je pense qu'il y a un bassin incroyable, là, de gens qui voudraient demeurer au Québec, qui ont du
potentiel de demeurer au Québec. Et, dans votre énoncé de politique, on
voit davantage les étudiants et les
travailleurs qualifiés... on favoriserait leur statut au Québec. Par contre,
pas pour ce groupe-là, et c'est le
groupe le plus vulnérable, et c'est des gens qui sont capables d'occuper des
emplois peu qualifiés actuellement, puisqu'ils sont déjà dans les
usines, ils comblent déjà des pénuries importantes d'emplois qui sont dans des
grandes pénibilités. Donc, ayons en tête
que, si on veut véritablement accueillir encore plus de gens au Québec, il y a
des bassins, là, de population, qu'on
peut recruter et maintenir au Québec. Alors, je vous dirais que c'est une des
préoccupations qu'on a.
Évidemment, la question de l'intégration de la
langue française, ce que je vous disais un peu plus tôt, c'est un facteur important d'intégration à la communauté, à
l'emploi. Obtenir des notions de sécurité et de santé au travail,
d'avoir accès à un logement, etc. Donc, ça, c'est un facteur important. Vous
avez dit un peu plus tôt que vous aviez investi davantage d'argent, on salue évidemment, mais il y a encore des efforts
importants à faire pour récupérer... des dernières années. Et nous, on y travaille quotidiennement,
dans plusieurs de nos milieux de travail, à des cours de français pour
les travailleuses et travailleurs
immigrants, et c'est un succès total, on refuse des gens tellement que c'est
populaire. Dans mon propre syndicat
d'origine, encore une fois, cette année, il y avait des groupes, les gens en
veulent. Donc, je pense qu'on a un bon
filon, si on veut, et les gens sortent de là enthousiastes : apprendre le
français, ils s'intègrent, on les voit après dans des activités... et une très grande fierté. Et ça,
je dirais qu'on score beaucoup quand on fait cet effort d'intégration de
ces gens-là en amont.
Par rapport
aux niveaux, nous, notre préoccupation, c'est moins les niveaux que ce qu'on
accueillera au Québec. C'est 50 000, 60 000, 80 000 ou
100 000 personnes, nous les accueillons bien et nous les intégrons bien à
la société québécoise... et qu'ils ne s'en
aillent pas du Québec, ils restent au Québec, ils peuplent les régions,
comblent les emplois qualifiés ou peu qualifiés et qui deviennent des
citoyens de demain.
Mme Weil :
...que ça rejoint notre vision. C'est pour ça qu'on stabilise, parce qu'on est
très confiants, avec l'argent qu'on
investit, surtout que l'argent, évidemment, c'est calculé selon notamment le
nombre de personnes qui ne parlent pas français...
donc, pour tenir compte de l'argent qu'il faut investir en francisation. Mais
l'expérience nous le dit, puis, quand on fait ces calculs-là, c'est que justement on est capables de les
accueillir, bien les accueillir, avec le réseau d'organismes
communautaires qui travaillent avec nous, qui font un travail extraordinaire,
les accompagner.
Mais le bout qui manquait, c'est vraiment les
accompagner en emploi, parce que c'est des gens qui sont très qualifiés, très
scolarisés, et donc qui cherchent et qui viennent ici justement pour combler un
emploi, ils veulent immigrer au Québec.
Mais on veut
donner ces deux années de transition pour implanter cette réforme qui comprend
cette dimension régionale importante avec les acteurs régionaux, donc
déterminer les besoins et aussi la stratégie d'action qui vient accompagner cette réforme. Vous êtes venus pour la
politique, je crois bien, la consultation aussi sur la politique. Donc,
la stratégie d'action qui s'échelonne sur
cinq ans, avec un budget intéressant, vous allez retrouver beaucoup de vos
idées dans cette stratégie d'action qui met l'accent sur des milieux
accueillants, l'accompagnement, maintenir tous les programmes qui ont quand
même donné beaucoup de succès, les stages en milieu de travail, le réseautage,
bon, etc.
J'aimerais
vous amener sur la francisation en milieu de travail. La Commission des
partenaires du marché du travail a un
mot à dire sur cette question. Peut-être m'expliquer un peu comment ça se passe
autour de cette table, la Commission des
partenaires du marché du travail, par rapport à la francisation. Ça, je vous
dirais, c'est un consensus, c'est qu'il faut avoir la francisation en
milieu de travail, plus de francisation en milieu de travail, parce que
beaucoup de gens sont prêts à travailler,
ils veulent travailler, on veut aller vers l'accompagnement par des stages et
autres, mais ils auraient besoin de cette
capacité. Moi, j'ai visité des entreprises qui offrent la francisation en
milieu de travail, mais vous, vous avez plus d'expertise terrain là-dessus. Pouvez-vous me dire comment ça se passe
au niveau de la commission des partenaires et les recommandations que la
commission peut faire à cet égard?
M. Lortie
(Jean) : Bien, évidemment, sur la commission des partenaires,
évidemment, le président va s'adresser à
la commission parlementaire la semaine prochaine. Je fais attention, mais je
vous dirais que la question de la francisation, elle fait l'objet de
beaucoup de débats, mais c'est une question évidemment de moyens, de fournir
aux entreprises qui font des demandes dans le cadre de la loi du 1 % des
programmes de formation...
On a dû
réduire, compte tenu que, depuis plusieurs années, la masse des entreprises
couvertes par cette loi du 1 % là a beaucoup diminué. Ça a affecté
les sommes que la commission disposait. Alors, ça, il y a un enjeu, malgré que
le gouvernement a compensé de plusieurs millions de dollars dans le budget
2015, si ma mémoire est bonne — oui, au printemps 2015 — et là
les mesures devraient entrer en vigueur. Il y a plusieurs millions de dollars
qui sont annoncés pour plusieurs années. Ça ne compensera pas, évidemment. Et
ça, c'est un chantier important à la commission, la question de la
francisation, ça fait partie d'une des façons d'accueillir et d'intégrer les
travailleuses et travailleurs. Mon expérience terrain...
Et
d'ailleurs, quand les programmes, les premiers programmes de francisation en
milieu de travail ont été mis sur pied,
c'est sous M. Claude Ryan, en 1990, dans les grands hôtels de Montréal, et ça a
été un succès boeuf dès le départ parce qu'évidemment...
Mais les
conditions d'exécution de ces programmes-là demandent énormément d'énergie de
la part des entreprises, et, comme
vous le savez, au Québec, c'est beaucoup de PME qui sont peu pourvues en
ressources humaines, en responsables ou en gestionnaires de ressources
humaines, et ça, c'est un défi de taille parce qu'ils n'ont pas les ressources
pour accueillir, intégrer, mener ces
formations-là. Alors, ça demande énormément d'énergie bénévole pour réussir à
le faire.
Et
ça, prenez-le en compte dans les programmes. Compte tenu que c'est 90 % de
PME au Québec, ils ont peu de moyens
de pouvoir... même s'ils avaient la volonté de le faire, peu de salles pour le
faire, peu de gens disponibles pour donner la francisation ou libérer
des postes de travail pour permettre d'aller suivre des cours, difficultés
d'organiser compte tenu la fin des horaires de travail, tout ça.
Ça allait
bien dans les grands hôtels, on a des salles de réunion partout. Il y a des
quarts de travail sur 24 heures. On
était capables d'organiser, entre 14 heures et 17 heures, des cours
et on leur donnait un billet d'autobus, on leur donnait une collation, et souvent on payait les frais de
garde. Donc, ça permettait aux travailleuses, notamment les préposées aux
chambres, de retourner chez elles avec un
frais de garde payé, donc elles pouvaient arriver un peu plus tard à la
maison sans trop de difficultés. Mais, ça,
c'est un milieu idéal, l'hôtellerie, compte tenu que vous avez un environnement
qui le permet. Mais, dans une usine
d'abattage, de découpe de viande, où trouver une salle appropriée pour donner
des cours? Alors, ça, il faut avoir en tête les difficultés.
Et, à la
commission, on reconnaît actuellement qu'une des difficultés importantes
d'investissement en formation de la main-d'oeuvre, c'est la capacité
d'accueillir notamment des stagiaires en milieu de travail. C'est la capacité
de l'entreprise de les accueillir et de bien
le faire comme entreprise. Elles n'ont pas ces ressources de gestion pour le
faire, elles sont trop petites. Alors, comment peut-on penser à trouver les
meilleures façons de le faire? Bien, on est ouverts à des idées là-dessus
absolument, absolument, et à la commission et dans mon organisation.
• (16 h 30) •
Mme Weil : Nous, on avait fait, au MIDI, quand... on avait
un programme qui s'appelait Défi Montréal, pour tester des innovations. On avait fait un projet. Justement, on parle de la gestion de la diversité.
Ce n'est peut-être pas la meilleure expression,
ça fait un peu froid. Mais, bon, l'idée, c'est d'accompagner autant l'employeur
que l'entreprise et les employés dans
l'entreprise que la personne immigrante. Mais, parce que les PME nous disaient
justement : Mais, moi, je n'ai pas les ressources pour avoir et
donc pas capable d'intégrer... Et ça leur faisait un peu peur. Alors, au lieu
d'engager quelqu'un, non... Alors, on a créé
un programme pour partager une ressource entre trois ou quatre petites
entreprises qui a donné des très bons résultats.
Peut-être des idées de ce genre parce qu'on
constate que... Vous le voyez dans les chiffres. Je ne sais pas si vous avez suivi les débats ici, mais, à chaque
fois qu'on fait des consultations, il y a certains blocages par rapport à
des personnes qui ne réussissent pas à cause de leur nom, hein? La Commission
des droits de la personne qui a fait cette étude,
Mieux vaut s'appeler Bélanger que Traoré... Donc, est-ce que c'est la
méconnaissance, l'inquiétude? Est-ce que c'est la discrimination? Quoi qu'il en soit, les entreprises nous
disent : Non, c'est juste que je ne sais pas comment gérer ça, puis
j'aurais besoin d'aide.
Mais est-ce que des initiatives de ce genre,
vous les connaissez, comment vous voyez ça pour intégrer ces personnes? Et peut-être, en francisation, ça
pourrait être ça aussi, des partages de ressources dans les plus petites
entreprises, se mettre ensemble pour des programmes comme ça.
M. Lortie
(Jean) : Ça serait une excellente initiative si on est capables de
fédérer les entreprises qui n'ont pas les ressources pour le faire elles-mêmes et mesurer, là, les difficultés qui
pourraient arriver, mais certainement la combinaison de ces ressources-là permet d'avoir un plus grand
bassin de personnes à former, soit en intégration au milieu de travail,
donc connaître les questions de normes de
santé et sécurité au travail, la question de l'apprentissage du français au
milieu de travail, l'apprentissage de
devenir citoyen québécois, donc la gestion, comme vous dites, de la diversité,
effectivement.
Fédérer à
travers des secteurs, hein, je vous dirais qu'il y a différentes initiatives
qui sont faites par les associations sectorielles,
dans les comités sectoriels de main-d'oeuvre, dans les conseils régionaux des
partenaires du marché du travail, et
l'obstacle, la difficulté qui est à peu près insurmontable, c'est la capacité
réelle des entreprises de s'investir. Et souvent il y a des difficultés d'intérêt, disons-le de même, mais en général
c'est l'incapacité de pouvoir le faire parce qu'ils n'ont pas, comme je vous le disais un peu plus tôt, les
ressources. Et, d'expérience, moi, je l'ai vécu quand j'étais dans ma
fédération professionnelle à la CSN,
l'employeur nous disait : J'aimerais bien, mais comment faire ça? Et c'est
là qu'il faut trouver des arrimages nécessaires avec d'autres types
d'entreprises et des associations qui accompagnent ces travailleuses et travailleurs-là, associations de différentes
communautés ethniques qui peuvent faire en sorte... En fédérant ça, moi, je
pense qu'on est capables de trouver un filon
pour mieux offrir des programmes et qui ne soient pas trop coûteux dans le
sens qu'on ne disperse pas nos énergies inutilement.
Mme Weil :
J'ai une question, je vais la poser, mais... Peut-être que vous allez trouver
une façon de répondre. Est-ce que votre position par rapport aux
travailleurs, on va dire, peu qualifiés, parce que c'est très important cette recommandation que vous faites, est-ce que ça
rejoint la position de la Fédération canadienne des entreprises indépendantes?
M. Lortie
(Jean) : Disons qu'on prêche dans deux chapelles différentes à cet
égard-là, nos intérêts ne sont pas les mêmes.
La question de la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante, c'est
d'avoir un bassin de main-d'oeuvre bon marché,
hein, parce que c'est souvent ces emplois à bon marché au salaire minimum,
parce qu'en arrière de ce débat-là c'est
l'enjeu du salaire minimum, hein? Le débat annoncé sur l'augmentation du
salaire minimum au Québec, alors, ça colore idéologiquement la position
de la fédération.
Je vous dirais qu'on ne s'y retrouve pas sur les
mêmes raisons, pourquoi il faut accompagner. Parce que, ce qu'on constate depuis plusieurs années,
c'est : on nous martèle le message qu'il y a énormément de pénurie de
main-d'oeuvre au Québec, mais, quand
on regarde les données qu'Emploi-Québec publie, alors là on découvre avec
effarement que c'est des emplois peu
qualifiés de vente dans les magasins, dans les épiceries, dans les entrepôts,
cuisines, coiffeurs. C'est des emplois
qui ont toujours été difficiles à recruter et c'est des emplois qui, à cause du
peu de rémunérations, de peu de qualité à ces
emplois-là, on va vivre un roulement de main-d'oeuvre. Alors, pour nous,
l'enjeu n'est pas le même que la Fédération canadienne des entreprises
indépendantes, non.
Le Président (M. Picard) : Je
vais donner maintenant la parole à M. le député de Bourget pour une période de
10 min 30 s.
M. Kotto :
Merci, M. le Président. Alors, M. Lortie, Me Pineau, Mme Houle, soyez les
bienvenus une nouvelle fois. Je
reprends sur la question de la ministre parce que je faisais ce même
rapprochement relativement au désir exprimé d'avoir, disons, des profils
moins qualifiés, qui ne sont pas toujours, disons, ciblés, considérant, même,
ce matin, le titre du Devoir qui
disait Les PME dénoncent l'élitisme en immigration. Il y a un volume relatif à une main-d'oeuvre moins qualifiée qui est
demandée par elles, mais vous demandez la même chose, et, comme eux, le fait
d'avoir — j'exagère
peut-être un peu, là — demain
matin, 60 000 immigrants qui rentrent, ça ne pose pas de problème a
priori.
M. Lortie (Jean) : Bien, comme je le
disais en début de présentation, pour nous, la question, c'est moins les
niveaux d'immigration parce que le Québec doit accueillir un volume important
d'immigrants et d'immigrantes par année. Un
volume important, 50 000, 60 000, 75 000, c'est peu là notre
souci que l'intégration de ces gens-là, parce que c'est un échec. On pourrait accueillir 10 000
seulement, et, si on les accueille extraordinairement bien, c'est un
succès. Si on accueille 60 000 et mal,
bien, on va mettre 10 fois plus d'efforts dans les prochaines années pour
recommencer le travail, surtout la deuxième et troisième génération si
on a mal besogné dès le départ.
Alors, moi, je vous dirais, notre
préoccupation... La Fédération canadienne de l'entreprise indépendante veut disposer d'un bassin de main-d'oeuvre peu
qualifiée à des conditions de travail qui sont évidemment peu
intéressantes; pour nous, c'est préoccupant.
Nous, ce qu'on souhaite, c'est qu'il y a déjà des travailleurs qui sont au
Québec qui sont des travailleurs immigrants temporaires, qui sont sur le
programme fédéral et qui sont déjà dans les usines, qui sont déjà dans les hôtels, qui sont déjà sur les terres agricoles,
qui souhaiteraient rester au Québec. Donc, ils sont déjà là. Ils ont
rempli des papiers, on les connaît, on sait,
ils viennent du Honduras, du Salvador, du Guatemala. Ils sont ici depuis des
années. Ils souhaiteraient devenir
Québécoises et Québécois, mais les règles actuelles ne le permettent pas, et
c'est un facteur de leur vulnérabilité que la Commission des droits de
la personne a souligné en 2012, leur grande vulnérabilité face à leur
employeur. Alors, si on pouvait lever cette hypothèque-là sur eux, et leur
permettre de rester au Québec, et d'obtenir éventuellement
de ces emplois-là, et en étant citoyens, moi, je pense qu'on aurait un bassin
important et ça permettrait de rejoindre nos préoccupations.
M. Kotto :
O.K. Je reviens sur le volume pour aller un peu plus loin. Des 50 000,
60 000 en termes de volume qu'on
recevrait chaque année, combien d'entre eux, des nouveaux arrivants, peut-on
raisonnablement espérer intégrer avec succès au Québec chaque année?
M. Lortie (Jean) : Tous, il le faut,
tous. Il faut réussir à...
M. Kotto : ...
M. Lortie (Jean) : Mais on n'est pas
là actuellement, mais c'est ça, le défi qu'on a à faire. Si on accueille 50 000 nouvelles personnes par année, il faut
collectivement, en amont, prendre les moyens que ces gens-là soient bien
intégrés, et ça, ça inclut des fonds
publics, ça inclut des organisations, les travailleuses et travailleurs dans
leur milieu de travail, les
entreprises. C'est un effort collectif. On le fait actuellement pour les réfugiés
syriens au Québec et au Canada. On est
fiers de ce qu'on a fait depuis l'hiver dernier. Il y a des défauts, il y a des
ratés, etc., mais on l'a fait comme effort. On est capable, comme
société québécoise, dans un contexte de vieillissement, de faire beaucoup plus,
et ça, il faut le faire, à ce niveau-là.
Puis, Anne, tu veux rajouter?
• (16 h 40) •
Mme Pineau
(Anne) : Et, pour rajouter,
il y a toute la question de la reconnaissance des diplômes, il y a toute
la question de la francisation, il y a toute
la question des ressources aux organismes de soutien, il y a aussi toute la
question de la discrimination, qui est une
chose à laquelle il faut s'attaquer. Je pense que la Commission des droits a
bien documenté les nombreuses
problématiques qui entourent la question, pas seulement d'ailleurs des
immigrants, mais des communautés culturelles,
les minorités visibles, les taux de chômage plus élevés chez les populations
immigrantes. Même après 10
ans, on ne rattrape même pas les taux des
natifs. On a une surqualification, c'est des gens dont on n'utilise pas les
compétences, c'est un gaspillage navrant de
compétences auquel on assiste. On a eu le testing de la Commission
des droits, et d'ailleurs il n'y a pas qu'ici, hein? D'ailleurs, il y a
eu des testings comme ça à Toronto, à Vancouver. Il y a un phénomène de
discrimination auquel il faut s'attaquer, et de façon sérieuse, le profilage,
l'accès à un logement. Donc, il y a une
M. Kotto : Mais reconnaissons ensemble que c'est un vaste
chantier, considérant que, en haussant les volumes, ce n'est pas
inconditionnel, c'est conditionnel à des préalables, notamment des moyens
financiers, des ressources, des structures, la lutte ou des stratégies de lutte
contre la discrimination, et autres.
Mais
les enjeux liés à la discrimination à l'embauche, à l'emploi, on en parle
souvent. En tant que député, je
reçois des commettantes et des commettants
qui souvent sont découragés, qui pleurent dans mon bureau, parce que,
nonobstant le fait
qu'ils et elles aient obtenu leurs diplômes ici, il y a des portes qui se
ferment. Des personnes qui vous ont précédés tantôt utilisaient l'expression «des portes de verre», et c'est des gens
qui ont des enfants, qui ont des épouses et des époux et qui se retrouvent dans, je dirais, des
dislocations familiales parce que l'échec est là en permanence, c'est des gens
qui ont quitté des situations parce qu'on
leur a vendu le Québec, mais, face à une réalité qu'ils n'ont pas anticipée,
sont totalement désemparés, pas de réseau, rien.
Donc,
le chantier, cette fois je parle d'un chantier vaste, énorme auquel il faut
s'atteler. On ne peut pas se limiter à exprimer
des idées ou des intentions, il faut des actions tangibles et mesurées et des
rapports qui seraient, disons, exposés publiquement, en toute
transparence, parce que ce ne sont pas des biens meubles, ce sont des êtres
humains, et c'est des drames potentiels si on ne s'en occupe pas
rigoureusement.
M. Lortie
(Jean) : Donc, tout à fait. Je partage absolument vos préoccupations,
M. le député, et parce qu'effectivement l'erreur qu'on va faire sur une
population qu'on accueille maintenant, on va le payer sur 10, 15, 20, 25 ans par une ghettoïsation de ces gens-là, ils
vont devenir marginaux dans l'emploi, le travail au noir, on en voit
dans beaucoup de secteurs dans la région
métropolitaine de Montréal, des secteurs complets où les gens sont parallèles à
la société : pas de carte d'assurance maladie, pas de carte d'assurance
sociale, ils travaillent au noir, vulnérables à tous égards, et ça, c'est un échec, pour nous, parce qu'on va payer le prix à
moyen terme. Et non seulement on va payer le prix à moyen terme, c'est qu'en plus ça va créer des
facteurs de tension entre les populations locales et ces gens-là
puisqu'ils seront marginalisés dans la société. Alors, ça, évidemment il faut
éviter...
C'est
ça, l'investissement qu'on s'appelle collectivement à faire sur la
planification et sur la portée moyenne des cinq prochaines années. Le Québec est en choc démographique d'ici cinq
ans, on va le voir. Là, on commence à peine à voir... ou on revoit plutôt les bannières «nous embauchons». Depuis la
récession de 2008, on les voyait moins, mais on les revoit réapparaître partout, et là les tensions
sur le marché du travail sont importantes, on en a partout dans les
secteurs, incapables de recruter quelque main-d'oeuvre que ce soit, il n'y en a
pas et il va y en avoir de moins en moins. Alors, c'est là qu'on a à investir maintenant et envoyer un signal fort à ces
gens-là que le Québec va accueillir ces gens-là et va mettre les moyens
pour le faire.
M. Kotto :
Merci.
Le Président (M.
Picard) : Mme la députée de Montarville, pour une période de
sept minutes.
Mme
Roy (Montarville) : Merci, M. le Président. Mesdames monsieur,
merci. Merci pour votre mémoire. J'ai pris
des notes pendant que vous parliez, il y a beaucoup de choses sur lesquelles on
est tout à fait d'accord : d'entrée de jeu, la stabilisation des
niveaux d'immigration. Vous nous dites : «Le gouvernement, en amont de la
planification de l'immigration, doit évaluer les indicateurs reliés à
l'intégration des personnes déjà admises ainsi que la capacité de la société d'accueil à accueillir et à intégrer
d'autres personnes issues de l'immigration.» Alors, c'est l'exercice que
nous faisons actuellement, c'est pour ça
qu'on est là, pour déterminer quel est justement ce seuil. Je suis d'accord
avec vous dans la mesure où quelle
est cette capacité... Je sais que le Québec est grand, le Québec, on peut si on
veut. Mais quelle est-elle vraiment? A-t-on actuellement tous les
services, tous les moyens pour réussir l'intégration, la francisation? Je vais y
revenir tout à l'heure. Mais ça, je suis d'accord avec vous, là, il faut
déterminer les besoins puis les moyens. Puis
est-ce qu'on les a? C'est ça, la
grande question, avant de mettre un chiffre, pour ne pas mettre un
chiffre de façon arbitraire non plus.
Maintenant,
vous nous dites : «La recherche d'un arrimage "parfait" entre la
sélection des personnes immigrantes et les
besoins du marché du travail est utopique et n'est pas la solution à
l'intégration réussie.» Quand vous nous dites, c'est utopique tenter de faire cet arrimage-là,
pourriez-vous élaborer? Utopique, c'est un gros mot, là, c'est un très gros
mot, parce que tout le monde s'entend pour dire qu'il faut effectivement mieux
arrimer les besoins du milieu, des milieux et puis la demande d'immigration.
M.
Lortie (Jean) : Alors, rapidement,
puis mes collègues pourront rajouter, mais rapidement je pourrais
vous dire que la question de l'arrimage
parfait ne peut pas exister, parce que souvent l'attrait ou non d'un emploi dans
une industrie donnée, c'est souvent lié aux conditions d'exercice du travail,
qui fait qu'on peut avoir des pénuries dans un secteur parce que l'emploi est tellement pénible, hein, la
dureté d'exercice : d'abord, ça peut être l'isolement, vous travaillez
dans une mine; ça peut être dans une usine de sidérurgie, ce qui
fait que, pour des gens, ce n'est pas très attrayant; les horaires, la fin de semaine, le soir, la nuit; de voyagement, etc. Des conditions d'exercice font
en sorte que souvent il y a un secteur, il va connaître une pénurie tant que
l'industrie ne se donnera pas les moyens de soit d'améliorer les conditions
d'exercice ou les conditions de
travail. Et les gens vont dire : Bien, nous, on veut une immigration liée à nos pénuries de main-d'oeuvre.
Et, quand on pose la question : Oui,
mais pourquoi y
a-t-il pénurie?, souvent, on n'a pas
la réponse. Et je donne l'exemple : coiffeuses, serveuses, cuisiniers dans
les restaurants, la réponse est
claire, c'est les horaires atypiques,
c'est le soir, la fin de semaine, pendant
que la moyenne des gens s'amusent, bien, les gens doivent travailler. C'est les
conditions de travail : pas d'assurance, pas de régime de retraite, pas de vacances ou à peu près
et des salaires, salaires minimums souvent. Donc, ces gens-là, ils ne veulent pas travailler ou ils le font, mais ça roule tout le temps, tout le temps. Donc, on recommence, on recommence, on recommence à recruter de la main-d'oeuvre. On n'est qu'à faire ça à plein temps. Des endroits, c'est
100 % par année.
Donc
nous, on dit : C'est utopique, parce qu'il y aura toujours
des entreprises ou des secteurs où les conditions d'exercice, la fonction vont être tellement
difficiles qu'on n'attirera pas la main-d'oeuvre. Et on aura beau donner tous les programmes, c'est trop
pénible. Il faut trouver des façons de corriger à la source le
problème de ces emplois-là. Et ça, c'est
un des enjeux pour nous. Alors, il
faut faire attention quand on parle
d'avoir une immigration uniquement pour baser sur les besoins des
entreprises.
Je
donne l'exemple des soudeurs. La Commission des partenaires se fait taper les oreilles depuis des années
sur la pénurie de soudeurs au Québec. Bien,
quand on a fait une enquête pour la question des soudeurs, il n'y a pas de
pénurie. Il peut y avoir des difficultés, des tensions, mais de quoi parle-t-on
quand on parle des soudeurs? Bien, on veut une entreprise qui veut avoir le meilleur soudeur qui est le plus
performant, qui a pu faire n'importe quel chantier. On veut l'avoir
immédiatement. Ça n'existe pas, ça. Il est déjà dans un emploi puis il a
souvent un bon emploi, des bonnes conditions.
Donc, c'est souvent à l'entrée, la difficulté de l'apprentissage, hein, dans
l'usine pour devenir des meilleurs soudeurs,
avoir des qualifications, tout ça. Et là on a découvert que c'est un problème
d'organisation du travail, souvent, qui fait qu'on va toujours avoir une pénurie là, parce que les gens veulent
améliorer leur sort et les emplois les plus pénibles, parce que c'est quand même assez dur comme
travail, soudeur, on... découvert qu'il n'y avait pas de pénurie au
Québec de soudeurs, mais, au contraire,
c'est juste une mauvaise allocation peut-être, une tension régionale peut-être
puis l'exercice des conditions de travail, ce qui fait que ça donne de
mauvais indicateurs du marché du travail.
Alors,
c'est ça qu'on vous met en garde, de faire attention quand on vous envoie ces
indicateurs-là du marché du travail.
Des fois, ce n'est pas la réalité, ou la réalité, c'est que les emplois sont
tellement pénibles qu'on n'ose pas le dire, parce qu'on ne veut pas améliorer les conditions de travail, pour toutes
sortes de raisons, capacité ou pas, ou idéologiques. Et il fait en sorte qu'on va souvent appeler une
population à travailler. Le plus bel exemple, c'est les travailleurs
agricoles. Il y a 40 ans, moi, je récoltais
des fraises à Chambly, à Carignan, sur la Rive-Sud de Montréal, parce
qu'au contraire c'était très
glorieux. On passait l'été à avoir du fun dans le champ à ramasser des fraises.
De nos jours, vous ne verrez pratiquement plus de Québécoises ou de Québécois d'origine qui ramassent des fraises
dans les champs. C'est parce que... la pénibilité du travail. Mais c'étaient les seuls emplois d'été
qu'on avait il y a 30, 40 ans, quand j'avais 14, 15 ans. Maintenant, il y en
a tellement, d'emplois d'été que les gens ne
veulent plus. Donc, on a mis sur pied le Programme des travailleurs
étrangers temporaires et les distorsions que
ça apporte maintenant. Alors, ça, c'est un exemple que je voulais vous donner
sur les signaux que le marché du travail vous envoie : être prudent
là-dessus.
• (16 h 50) •
Mme Roy
(Montarville) : Parfait. Et c'est dommage, ce que vous dites,
parce que je considère que le travail agricole est extrêmement important, devrait être valorisé et que c'est un milieu
justement dans lequel il faudrait peut-être retourner, mais, chose
certaine, valoriser. Je comprends que ça puisse être difficile cependant.
Maintenant,
la francisation, connaissance du français. «La langue est le premier vecteur
d'intégration tant social que professionnel.»
Je suis tout à fait d'accord avec vous. Je vous amène tout de suite à la page
13 : «Nous croyons que,
pour assurer la vitalité du français, le budget
alloué aux programmes d'accueil et de francisation doit être établi
obligatoirement en fonction du volume prévu
d'immigrants à franciser et du coût unitaire moyen de francisation. Il est
inacceptable que les budgets soient établis arbitrairement ou qu'ils
puissent faire l'objet [des] coupes en cours de route.»
Vous
avez le même discours à cet égard que le Mouvement Québec
français, qui nous disait ça ce matin, pour ce qui est d'établir le coût
de la francisation.
Pouvez-vous
élaborer sur l'impact des coupes qui ont été faites au cours des derniers mois,
des dernières années? On a peu de temps, hein?
Mme Pineau (Anne) : Bien, en fait, côté français, on estime que, dans la mesure où on peut
accueillir des gens qui ne possèdent
pas la connaissance — parce qu'il y a un certain volume de
personnes qui n'ont pas la connaissance — il faut que ces
personnes-là apprennent le français. C'est un incontournable pour s'intégrer,
pas seulement en emploi, mais pour
s'intégrer socialement. Donc, on ne peut pas tabler sur : Ah bien! on
verra si on a l'argent. Il faut qu'à chaque personne qu'on accueille ici il y ait un montant prévu, et ça, il faut
fixer quel est ce montant-là pour franciser quelqu'un en fonction de son
niveau et il faut assurer, taguer ces montants-là pour être sûr qu'en cours de
route il n'y aura pas de fluctuation et qu'on laissera tomber finalement cet
élément-là, essentiel à l'intégration. Et, pour nous, on ne peut pas parler
d'immigration sans parler d'intégration, donc sans parler de francisation.
Donc, on ne peut pas, tout à coup, en cours d'année, pour les fins du déficit
zéro, dire : Bien là, désolé, il n'y a plus d'argent, et on va attendre. On ne peut pas attendre que ces gens-là... pour
nous, c'est majeur que ça se fasse de façon le plus rapide possible dans
le processus d'intégration.
Le
Président (M. Picard) : Merci. Donc, je vous remercie pour
votre contribution aux travaux de la commission.
Et je suspends les
travaux quelques instants.
(Suspension de la séance à
16 h 52)
(Reprise à 16 h 55)
Le Président (M.
Picard) : Nous reprenons nos travaux en recevant la Table de
concertation des organismes au service des personnes réfugiées et immigrantes.
Bienvenue. Dans un premier temps, vous allez faire un exposé de 10 minutes. Je vous demanderais de vous présenter,
et par la suite il va y avoir des échanges avec les parlementaires. Donc, la parole est à vous pour les 10 prochaines minutes.
Table de concertation des
organismes au service des
personnes réfugiées et immigrantes (TCRI)
M.
Reichhold (Stephan) :
Bonjour, M. le Président, Mme la
ministre, MM., Mmes les députés. Merci beaucoup de nous entendre. Je présente mon collègue Yann Hairaud, qui est
membre du conseil d'administration de la TCRI et aussi directeur de
CITIM, un organisme d'employabilité. On va, comme on n'a pas beaucoup de temps,
décider de faire comme deux préoccupations qu'on va vous exposer, puis après on
peut élargir, si vous voulez, un, sur la question des réfugiés, bien sûr, qui nous touche particulièrement, et aussi,
bon, sur l'emploi, parce qu'on sait que c'est le défi. On ne sait jamais si c'est bon d'être les derniers à comparaître parce que
les gens sont plus détendus puis ils savent que ça va bientôt finir ou
bien sont plutôt... souhaitent que ça finisse vite et puis il faut... Enfin, on
verra bien.
Alors, tout d'abord, je voudrais profiter, là, pour féliciter publiquement la ministre
pour son initiative du forum qu'on a
tenu lundi, mardi sur le bilan des Syriens, qui, à mon avis, aussi, au nom de
mes collègues, a été très utile, cet exercice, justement pour faire le point un peu, mettre un terme à des
mois et des mois... enfin, quelques mois d'intenses travaux sur l'accueil des
Syriens, sur l'opération syrienne, et qui a déjà donné des résultats, je trouve.
D'ailleurs, Mme la ministre, je trouve que votre discours a changé depuis
mardi. Je vous ai écoutée hier et aujourd'hui, c'est beaucoup plus nuancé. Vous
nous avez écoutés. Vous ramenez des choses maintenant que vous avez
entendues lundi, mardi, j'ai
remarqué. Je ne sais pas si c'est conscient ou si c'est inconscient, mais, en
tous les cas, ça a servi à quelque
chose.
Alors, très rapidement,
là, en deux, trois minutes, je voulais quand
même revenir sur la question
des niveaux, parce qu'on reste un peu sur notre faim quand on voit les
chiffres et les cibles. C'est sûr qu'on est plutôt contents que le Québec
prévoie maintenir un niveau élevé d'accueil des réfugiés, qui, bon, on le sait,
ces dernières années, avait beaucoup décliné.
Donc, le Québec revient un peu à son accueil de réfugiés d'il y a quelques
années, et ça, on est très, très contents.
Bon, la
position habituelle de la table, c'est : oui, nous, on est plutôt pour une
hausse raisonnable, mais toujours conditionnelle,
bien sûr. Il faut que les ressources pour l'accueil,
l'intégration, la francisation suivent s'il
y a des hausses. Donc, si je regarde pour 2016, en fait, les
chiffres qu'on nous présente pour cette année, c'est, bon, 6 600 réfugiés toutes catégories confondues,
et on sait qu'il y en a déjà 5 500 qui sont arrivés, et on en attend quand
même encore 2 000, 3 000. Enfin, ça dépend, moi, j'inclus aussi les
réfugiés reconnus sur place là-dedans, donc globalement. Donc, c'est quasiment sûr qu'on va dépasser les cibles des
réfugiés en 2016. Tant mieux. Mais moi, je pense que c'est important
qu'on s'en parle aussi.
Par contre, le contexte a beaucoup changé du
fait que le Canada a augmenté, va augmenter, annonce qu'il va augmenter de manière drastique ses cibles. On
parle, 2016, 300 000 personnes au Canada, incluant les cibles du
Québec. Pour les années suivantes, on ne sait pas parce qu'il y a les
consultations, mais on sait qu'on vise 300 000, dont 55 000 réfugiés par année au Canada pour
2017, 2018, 2019. Si on regarde les chiffres du Québec, je veux dire, on
est loin de ça. On maintient à 50 000
et on retourne dans la proportion des années 80. Je veux dire, le Québec va
être un peu... et moi, j'ai peur
qu'on se retrouve un peu comme l'Île-du-Prince-Édouard, je veux dire, en termes
de taux, de proportion d'immigrants
qui viennent s'installer au Québec. Donc, je pense que c'est... je ne dis pas
ça, que c'est... je me questionne, je pense
que c'est un débat qu'il faut faire. Il faut regarder qu'est-ce qu'il se passe
dans le reste du Canada, sinon ça va être des... on dirait qu'on
fonctionne un peu en vase clos, là. Il faut s'ajuster.
Et aussi
l'autre enjeu — après,
je termine — c'est
que, bon, une des rares obligations du Québec dans l'accord Canada-Québec, c'est de prendre l'immigration
humanitaire proportionnelle à la population québécoise. Avec ces
chiffres-là, on n'y arrive plus, là, je veux
dire, c'est clair, et là on va avoir un sacré problème parce que ça va un peu
être une raison de réouvrir l'accord,
et je pense que, dans cette salle, personne n'est intéressé à réouvrir l'accord
si on ne le respecte pas.
Alors là, je lance le débat et je passe la
parole à Yann.
• (17 heures) •
M. Hairaud (Yann) : D'accord. Donc,
bonjour. Donc, on va aborder maintenant la question de la situation socioéconomique des nouveaux arrivants et, plus
particulièrement, l'intégration au marché du travail, parce que, on le sait, c'est vraiment au coeur, hein, des
discussions, et, malheureusement, ça ne date pas d'aujourd'hui. Et
malheureusement les indicateurs sont
toujours à des niveaux critiques, hein? Donc, écoutez, on ne reviendra pas sur
les causes et les origines. Je pense
que tout ça a été longuement documenté, décortiqué, analysé. Je pense qu'il
faut maintenant envisager, surtout, les solutions, et les solutions qui
vont donner des résultats. Donc, il faut passer, en quelque sorte, à la vitesse
supérieure.
Nous, la
façon dont on le conçoit, à partir de notre expérience terrain... Et là je
parle au nom du ROSINI, qui est le réseau
des organismes spécialisés en intégration d'emploi des nouveaux arrivants, qui
relève, donc, de la TCRI. Écoutez, nous,
on découpe ça en quatre phases... cinq, plus exactement : le bilan de
compétences; la RAC, la reconnaissance des acquis et des compétences, c'est un incontournable; la formation
manquante; les stages, je pense que ça a été beaucoup évoqué, hein, lors
de cette commission; et puis, bien évidemment, in fine, l'objectif, c'est
l'emploi.
Le bilan de
compétences est essentiel, car c'est une occasion, dès l'arrivée, d'établir un
portrait juste et exhaustif des compétences transférables. Or,
actuellement, aucune démarche systématique et structurée n'existe
véritablement, de telle sorte que tout ça a
pour conséquence parfois de laisser bon nombre de personnes immigrantes dans
une situation de flou, et, parfois, de les maintenir dans de fausses
réalités, et d'entretenir en vain de faux espoirs quant à leur avenir
professionnel au Québec. Donc, par rapport à ça — et on cible
particulièrement Emploi-Québec puisque c'est son mandat — Emploi-Québec
devrait pouvoir proposer des bilans de compétences le plus tôt possible dès
l'arrivée à toutes les personnes
réfugiées immigrantes qui le nécessitent, afin de les aider à transférer leurs
compétences sur le marché du travail.
La
reconnaissance des acquis et des compétences. Ça aussi, c'est un
incontournable. C'est un outil intéressant, et on constate que, de plus en plus, c'est un outil auquel recourent les
personnes immigrantes puisqu'au fil des années, hein, l'offre de service s'est enrichie. Par contre, la
lacune, au niveau de la RAC, c'est qu'elle est offerte principalement au
niveau postsecondaire, alors que beaucoup de personnes
immigrantes sont des diplômés universitaires. Donc, il y a lieu d'encourager et de soutenir le milieu
universitaire pour développer et proposer une offre, en RAC, adaptée à la
réalité des personnes immigrantes afin de
pouvoir identifier la formation manquante et de pouvoir proposer un parcours de
formation adapté aux nouveaux arrivants qui possèdent déjà une formation
universitaire.
La formation
manquante. Là encore, il y a des choses qui se font, mais malheureusement on
est encore trop souvent dans des schémas où les personnes immigrantes doivent
reprendre des études à temps plein pour suivre un programme en entier. Les parcours proposés reposent surtout sur une
logique de diplomation et pas suffisamment sur une logique d'acquisition et d'actualisation de
compétences axées sur les besoins du marché du travail. En matière de
formation, la priorité devrait être donnée à des parcours courts qui visent
l'insertion professionnelle.
Aussi,
dans un autre niveau, considérant que, pour Emploi-Québec, l'anglais — puisque c'est aussi un obstacle, notamment pour les immigrants francophones — représente le dernier obstacle à
l'intégration en emploi, bon nombre de professionnels
immigrants francophones rencontrent beaucoup de difficultés à intégrer un
emploi à la hauteur de leurs compétences,
car ils n'ont pas une maîtrise suffisante de l'anglais. Donc, il faudrait que
la mise à niveau en anglais soit facilitée par Emploi-Québec, selon les
besoins des différentes industries.
J'en
profite également pour... Par rapport à toute la question de la formation
manquante, hein, on sait qu'il y a aussi le projet de loi n° 98 qui
s'en vient, qui va élargir le mandat du commissaire aux plaintes pour tout ce
qui concerne justement la cohérence et
l'adéquation entre les formations et les exigences notamment des ordres
professionnels. Et je pense que ça,
effectivement, c'est quelque chose de bon augure parce que ça va permettre
probablement d'aller plus en avant et de responsabiliser les différents
acteurs. Parce que, là encore, on constate qu'il y a beaucoup, parfois,
malheureusement, d'incohérence, du fait, principalement, des fonctionnements en
silo.
Les
stages. Je pense que bon nombre de personnes avant nous en ont fait part :
c'est fondamental. Donc, instaurer des
stages rémunérés pour aider les personnes immigrantes à intégrer leur milieu
professionnel à l'issue de la formation est une formule souvent gagnante
qui, en plus de mettre en pratique les compétences acquises, leur permet
d'acquérir la fameuse expérience professionnelle québécoise si souvent exigée
par les employeurs.
Le Président (M.
Picard) : En conclusion, s'il vous plaît.
M.
Hairaud (Yann) : Alors,
bien, écoutez, en conclusion, c'est l'emploi, bien évidemment,
hein, c'est l'objectif final. Et donc
ça, ce n'est pas évident en soi, hein, il
y a un travail d'arrimage à faire
entre les personnes immigrantes, et donc l'intervention auprès des
employeurs est une composante essentielle de l'intégration en emploi des
personnes immigrantes. Et je pense que Québec aurait intérêt à s'appuyer aussi
sur une expertise qui, au fil des années, a été développée par les organismes
spécialisés en emploi, qui peuvent tenir compte à la fois des besoins des
personnes immigrantes, mais également faire le lien et l'arrimage avec le
besoin des entreprises.
Un dernier mot, M. le
Président. Je pense qu'également — et il en est beaucoup question lors de
cette consultation — qu'il
y a tout un enjeu par rapport à toute la question des travailleurs temporaires.
J'aurai peut-être l'occasion d'y revenir à travers la période d'échange.
Le Président (M. Picard) : Merci. Je cède maintenant la parole
à Mme la ministre pour une période de 17 min 30 s.
Mme Weil :
Merci, M. le Président. M. Reichhold, M. Hairaud, bienvenue. Alors,
très contents... et bon, malheureusement, hier,
le bruit avait cessé, il me semble, vers 16 heures. Malheureusement, il va
falloir passer à travers.
J'aimerais
revenir... bon, il y a plusieurs questions que j'ai, alors je vais faire
attention. J'aimerais qu'on discute justement
de la proportionnalité. C'est une question importante que vous avez évoquée, M.
Reichhold, je pense que c'est important
qu'on y revienne. M. Hairaud, vous avez vraiment une connaissance fine de tout
le problème de la reconnaissance des acquis des compétences. J'aimerais
revenir là-dessus — et
vous parlez des différentes catégories, finalement, de professionnels, métiers réglementés et tous les autres — j'aimerais revenir aussi sur les
travailleurs temporaires et vous permettre de vous prononcer là-dessus.
Oui,
cette question, évidemment, pour le Canada, ce n'est pas encore confirmé, vous
parlez de ça généralement, je pense,
ils ont évoqué... je ne sais pas qu'est-ce qui est public ou pas public, on
entend des volumes importants, hein, pour le reste du Canada, et cette
préoccupation toujours, en vertu de l'accord Canada-Québec, du poids relatif.
Vous
comprendrez que, pour le Québec... on a suivi le débat ici, au Québec, c'est
cette capacité d'accueil. Et de bien intégrer les personnes est le grand
souci pour l'instant, et on a tous eu ce souci par rapport aux réfugiés
syriens, on voulait... C'est une expérience
quand même sans précédent. On savait qu'on pouvait bien le réussir, mais on
veut le réussir pour les prochaines
années aussi, c'est pour ça qu'on a fait ce colloque, pour faire un bilan, pour
voir comment on peut ajuster le tir. Donc, évidemment, ce plan, il y a
une part qui est la réforme.
Il
y a prudence, il y a prudence dans le plan parce que la dernière chose à faire,
quand on est dans une période de réforme,
c'est de rajouter de la pression, sinon on risque de rater la réforme. Ça,
c'est ce qui touche vraiment les travailleurs qualifiés. En même temps, il y a cet engagement humanitaire, et ça
aussi, c'est une expérience sans précédent. Et on a un réseau fort, on a remarqué lundi, mardi, avec cet
exercice, c'est impressionnant quand on regarde le réseau. Je pense à
vous, là, qui êtes nos premiers partenaires pour réussir l'immigration, on peut
compter sur votre réseau et ensuite on a un réseau
public qui est très fort, mais on ne veut pas déséquilibrer, on ne veut pas
affaiblir, alors il y a prudence, je pense, dans ce plan.
Le souci, pour
l'instant, je comprends puis j'aimerais vous entendre sur votre préoccupation
par rapport au poids relatif face... parce
qu'il n'y a personne qui en a parlé et qui l'ont vu nécessairement. Ici, la
préoccupation, c'est toujours les volumes. Peut-être... je vous laisse
exprimer votre point de vue sur cette question.
M. Reichhold
(Stephan) : Donc, oui, je vais essayer, en quelques minutes. C'est
beaucoup, c'est toujours compliqué avec des chiffres, et tout ça, là. Bon,
premièrement, et vous avez tout à fait raison, je pense que ce qui a été
démontré, là, cet hiver, ce printemps, avec l'opération syrienne, c'est
que — comme
d'ailleurs dans le reste du Canada — le dispositif existant au Québec pour
accueillir et rétablir des réfugiés est très performant. Je veux dire, on
a, en quelques jours, quasiment, mis en place... et on sait que ça s'est
relativement bien passé, on a reçu presque 6 000 plus les 2 000 autres réfugiés, dont on ne parle pas beaucoup, là,
des Centrafricains, les Burundais, les Népalais, tout ça, qui venaient en même temps. On ne les voyait pas
beaucoup dans les médias, mais nous, on les voyait chez nous, dans nos
organismes. Donc, ça s'est relativement bien passé.
• (17 h 10) •
Une des raisons pour lesquelles ça s'est bien
passé, c'est que le gouvernement a débloqué des ressources très rapidement
et a donné de l'oxygène aux organismes justement pour déployer des choses qu'habituellement ils ne
peuvent pas déployer, parce qu'ils n'ont pas ces ressources-là. Notre grande
inquiétude : si on maintient — et c'est ce qui est
annoncé — le
même niveau de réfugiés, c'est-à-dire 6 000, 7 000, 8 000, avec les
réfugiés acceptés sur place, il faut absolument
maintenir ces ressources temporaires
qui ont été débloquées. Aussi en
éducation, en santé, pour les organismes, en francisation, il y a eu plusieurs millions de dollars, hein, qui ont
été mis à la disposition. Il faut dire, ce n'était pas de l'argent
neuf — bon,
ça, c'est un autre débat — mais
au moins l'argent était là. Et donc la grosse question pour nous, c'est : À partir du 1er avril l'année
prochaine, est-ce que ces ressources seront encore là pour continuer... Ça, je
peux vous donner quelques exemples, là, des choses qu'on a pu faire
qu'on ne pouvait pas faire avant, si vous le souhaitez.
Notre préoccupation, c'est, je pense, surtout au
niveau du parrainage privé. Bon. On sait qu'il y a eu un engouement sans précédent des citoyens québécois,
de la population québécoise au niveau du parrainage, de parrainage de familles de réfugiés plus privés. Et cet
engouement, en fait — et ça, je pense, on peut en être fiers — continue, c'est-à-dire, les personnes
continuent à déposer des engagements, des demandes de parrainage, notamment
pour faire venir des membres de leur
famille, syrienne ou autre, et on a en inventaire, au Québec, actuellement,
7 000... en fait, ce n'est pas des demandes, de personnes qui
attendent de pouvoir venir. Donc, c'est des dossiers qui ont déjà été traités,
qui sont déjà dans la machine, 7 000. Selon les cibles qui sont
présentées.
Je veux dire,
si vous déposez une demande de parrainage aujourd'hui, la personne arrivera en
2020. Est-ce que c'est ça qu'on veut ou est-ce qu'il faut trouver une
solution pour prioriser les demandes de... Surtout quand c'est des groupes de deux à cinq, des citoyens qui ont mis
de l'argent en banque, 20 000 $, 30 000 $,
40 000 $ pour parrainer une famille,
est-ce qu'on peut les faire attendre trois ans avant que leur famille va
arriver? Alors, c'est ça, la question du jour. Moi, je n'ai pas la réponse. Si on dit oui, bon, ça va,
c'est sûr, décourager beaucoup de monde; si on dit non, ça va faire bondir nos niveaux d'immigration.
Où est-ce qu'on met la balance, là? C'est ça.
Nous, ce
qu'on proposerait — bon,
mais je ne sais pas si c'est techniquement, juridiquement possible — c'est,
le parrainage privé, et surtout les groupes
de deux à cinq, de les sortir des cibles de l'immigration et de les
traiter... comment, je ne sais pas
comment, là, mais à l'extérieur des cibles, parce que c'est une intervention
humanitaire d'urgence, et il y a des familles
ici, et le monsieur — je ne
sais plus son nom — du
Yémen, hier, je pense, a bien illustré dans quelle situation se trouvent
ces personnes. Quand il y a des soeurs, des frères, tout ça qui... le seul
moyen de les faire venir, c'est de les parrainer
et de mettre de l'argent sur la table... Et le Québec est fort là-dedans. On
l'a démontré, on est capables, on réussit. S'il y a les ressources, on
peut aller de l'avant. J'arrête là, parce que, sinon, je vais continuer.
Mme Weil :
Et vous avez évoqué donc aussi... En vertu de l'accord Canada-Québec, normalement, on prendrait le 23 %, hein, c'est ça, qui
ferait qu'on doublerait aussi, normalement, le... parce que, là, ça
représenterait à peu près le double de
ce qui est inscrit pour le nombre de réfugiés. Ça, c'est un chiffre,
évidemment, qui est là, un engagement qu'on a pris parce qu'on voulait
maintenir le poids. Et ça, ça s'applique généralement. La règle générale, c'est
d'avoir notre poids relatif. Mais, bon, c'est des décisions à prendre.
Vous avez
parlé des travailleurs... Bien, peut-être sur la reconnaissance des acquis,
donc, vous avez une grande expérience,
vous savez donc qu'il y a un premier rapport qui est attendu. Par rapport au
professionnel, ceux qui sont destinés au professionnel, ceux qui sont
destinés à des métiers réglementés, et le reste, qui est la grande majorité,
c'est des gens qui ont des compétences qu'on
ne reconnaît pas, un diplôme qu'on ne reconnaît pas, mais, depuis les dernières
années, il y a eu des avancées, parce que...
Bien, c'est ce qu'on me dit. Aux ordres professionnels, il y a eu des avancées
dans certains ordres professionnels, on me
dit beaucoup, en fait : les comptables, les ingénieurs. Est-ce que vous,
vous avez une vision d'ensemble des progrès, des choses qui fonctionnent
à ce niveau-là, tant pour les métiers réglementés, que les professionnels, que
les autres travailleurs ou...
M. Hairaud
(Yann) : Écoutez,
en ce qui concerne les professionnels et les professions et métiers
réglementés, oui, effectivement, les organismes de réglementation, et je pense particulièrement
aux ordres professionnels, en tout cas, certains
d'entre eux, ont fait des avancées en
matière de règlements
liés à la reconnaissance des acquis... des diplômes, pardon, étrangers. Il y a encore probablement place à amélioration, mais je
dirais que l'enjeu, à mon avis,
se situe plus au niveau de... à
partir de l'évaluation qui est faite, et, en général, le résultat est une
reconnaissance partielle, jamais totale du premier coup, souvent, ça implique de reprendre une partie de la
formation, d'effectuer des stages pour pouvoir valider certaines
compétences, etc., et c'est là où le lien n'est pas encore bien, bien, bien
établi.
Mme Weil :
...ont pu développer des formations par Internet, des comptables, et, ce qu'ils
m'ont dit, ils ont réussi à faire en
sorte qu'avant l'admission tout était réglé dans beaucoup de cas. Mais ça, je
pense que c'est unique. Ce n'est pas tous les ordres professionnels.
Nous, c'est sûr que, dans le nouveau
système, l'intention, c'est d'avoir, comme certains pays, une
reconnaissance totale ou presque totale, et, à tout le moins, pour la partie
qui manque, une tracée bien claire par rapport à ce que la personne devra
faire, au lieu d'avoir des gens qui arrivent déçus, incapables d'exercer dans
le domaine qu'ils veulent exercer, puis ils pourraient aller ailleurs au lieu
de s'investir et venir ici. Est-ce que vous voyez ça comme possible?
C'est
sûr qu'il reste encore du travail à faire. Alors, il y a ce premier rapport et
ensuite, à partir de là, il va falloir décider,
bon, ce qu'il reste à faire. Les gens nous disent : La formation, c'est le
nerf de la guerre beaucoup, et, comme vous le dites, peut-être de ne pas exiger de refaire le tout. Vous soulignez
ça. Vous êtes le premier à vraiment mettre le poing là-dessus, qu'on est
beaucoup trop exigeants.
M. Hairaud
(Yann) : Oui, comme je le mentionnais, on est souvent dans une logique
de diplomation, hein? Pourquoi? Parce que la
RAC est opérée par des gens du milieu de l'éducation. Donc, instinctivement ou
par déformation, ils ont tendance à
vouloir effectivement se baser sur des contenus et sur des diplômes, alors que
là on est plus dans un objectif d'intégration
professionnelle. Donc, c'est vraiment d'aller chercher ce qui manque pour
pouvoir faciliter l'intégration professionnelle.
Vous avez raison, Mme la ministre, il y a probablement des ordres qui sont
rendus assez loin. Moi, je pourrais vous citer d'autres exemples où,
malheureusement, il y a des... Alors, je pense qu'on est loin encore d'avoir
quelque chose d'assez uniforme. Donc, il faut effectivement inciter fortement
les ordres professionnels à continuer.
Et,
si vous me permettez, pour terminer, je pense aussi, pour l'avoir vécu en tant
qu'expérience au sein de notre organisme,
que l'étape bilan de compétences est importante aussi, nonobstant le fait qu'il
y ait des validations par des ordres de
réglementation, des organismes de réglementation. Je pense, c'est important
aussi pour une personne dans un parcours migratoire qui change d'environnement de pouvoir prendre le temps aussi
de prendre du recul et de mettre ça dans une perspective de transfert de compétences, qu'est-ce qui est transférable
et qu'est-ce qui n'est pas transférable, parce que beaucoup arrivent
avec idée en tête de pouvoir exercer leur profession telle quelle parce que, de
manière légitime, ils sont diplômés pour ça
dans leur pays et ils ont travaillé pour ça... leur pays, mais parfois il peut
y avoir des décalages. Et c'est là
où, je pense, qu'une analyse un peu plus fine au départ permettra à la personne
d'avoir l'heure juste, en quelque sorte,
et de pouvoir mesurer les écarts. Parce que souvent il faut gérer une
intégration à deux rythmes, enfin, en deux temps, hein? Il y a l'urgence
d'intégrer le marché du travail pour pouvoir subvenir à ses besoins et puis il
peut y avoir un objectif à moyen terme, qui
est effectivement d'essayer de réintégrer un emploi de qualité correspondant
aux compétences. Donc, vous voyez, il y a comme plusieurs dimensions sur
lesquelles intervenir en même temps.
Mme
Weil : Ou de réorienter sa carrière. Ça, ça arrive assez
souvent. On valide souvent la volonté de la personne de se réorienter, mais vous comprendrez à quel
point c'est important, cet enjeu-là, dans le contexte d'un nouveau
système de déclaration d'intérêts où on veut intégrer la personne rapidement.
Donc, tout ce travail devra se faire en amont, hein, c'est ce système qu'on
veut mettre en place.
Vous vouliez aussi
nous parler des... je pense, notre objectif de 40 % des travailleurs
temporaires, qualifiés temporaires et les
étudiants étrangers qu'on veut mettre sur la voie de l'immigration permanente,
peut-être vous entendre sur votre point de vue là-dessus, comment bien
réussir cet objectif.
• (17 h 20) •
M. Hairaud
(Yann) : Oui. Alors, c'est ça, hein? Quand on regarde les chiffres
depuis 2011, l'immigration temporaire — et là on parle principalement des
travailleurs temporaires — est un incontournable puisque, dans l'absolu, en volume, le Québec accueille plus d'immigrants
temporaires que d'immigrants permanents. Donc, je veux dire, ça devient
un incontournable de la politique
d'immigration du Québec. Et, nous, le constat qu'on fait par rapport à ça, et
effectivement Québec a une volonté de
permettre aux résidents temporaires de passer au statut de résident permanent,
et c'est une bonne chose. Bon, en
l'occurrence, il y a l'exemple du Programme de l'expérience québécoise, hein,
qui donne des beaux résultats, mais cette
nouvelle réalité vient modifier en quelque sorte la logique d'accompagnement de
ces personnes parce que, je vous
écoutais un peu plus tôt, étant donné que ce sont des résidents temporaires,
ils ne peuvent pas accéder aux services d'intégration qui sont offerts
aux résidents permanents. Je comprends la contrainte légale, mais sauf que,
d'un point de vue des besoins de la
personne, les services, lorsqu'il devient résident permanent, bien, c'est trop
tard, les services, il en avait besoin avant. Donc, je pense qu'il faut
vraiment travailler cette dimension-là parce que, sans ça, je pense que ça
risque de demeurer un objectif vain.
Et
je pense que le PEQ, qui cible les étudiants étrangers et les travailleurs
qualifiés, donc catégories 0, A, B de la CNP, c'est une bonne chose, mais je pense qu'il ne faudrait pas oublier
probablement aussi les travailleurs temporaires moins qualifiés qui malheureusement, compte tenu du fait que leur emploi
n'est pas admissible, ne peuvent pas se qualifier au niveau de la résidence permanente. Donc, je
pense qu'il faudrait élargir le PEQ. Nous, ce qu'on recommande, c'est
d'élargir le PEQ à d'autres catégories.
Et
je mentionnerais, ça, c'est une expérience qu'on a également, qu'on vit dans
notre organisme particulièrement, il y
a toute la question des permis vacances-travail, les PVT, c'est à peu près
6 000 par année. Et là aussi je pense que, si l'objectif est de doubler le recrutement via le
PEQ, il va falloir probablement se pencher sur cette question-là parce
que, je veux dire, ils n'ont accès à aucun
service, et souvent ils n'arrivent pas à trouver, dans le temps imparti de leur
séjour, un emploi qui leur permette
de se qualifier pour le PEQ, et donc, malheureusement, Québec perd probablement
une partie importante d'un potentiel de résidents permanents.
J'en profite, j'ouvre
une parenthèse, je la referme aussitôt : en tant qu'on organisme, je vais
faire parvenir à la commission un document — malheureusement, on était
hors délai, donc on n'a pas pu le déposer en tant que mémoire — qui
illustre un petit peu cette réalité.
Mme
Weil : Pour les gens qui nous écoutent, le PVT, pourriez-vous
l'expliquer? Moi, je sais bien qui on cible. C'est très stratégique,
mais c'est important que les gens qui nous écoutent... C'est une entente avec
la France?
M. Hairaud
(Yann) : Oui. Bien, avec la France et d'autres pays, hein, puisqu'en
fait c'est un programme fédéral qui
est... c'est le programme d'emploi réciproque, donc dans Expérience
internationale Canada, qui permet en fait... donc, c'est des ententes bilatérales qui permettent des
échanges de jeunes de 18 à 35 ans en leur permettant de venir effectuer des séjours de découvertes et d'expériences
professionnelles au Canada. Alors donc, c'est des gens qui viennent avec
des permis de travail ouverts pour des
durées qui peuvent aller jusqu'à deux ans, et effectivement un certain nombre
d'entre eux... et nous, on les voit passer
chez nous en particulier, mais ils vont aussi dans d'autres organismes,
malheureusement ils ne sont pas admissibles
aux services, c'est que ces gens-là viennent souvent aussi dans une optique
d'immigration. Donc, on est dans une immigration en deux temps.
Mme Weil : Il me reste 30
secondes?
M. Hairaud (Yann) : On me souffle
que c'est un tiers des travailleurs...
Une voix : Des travailleurs
temporaires au Québec, c'est majeur.
Le Président (M. Picard) :
Merci. Je cède la parole à M. le député de Bourget, 10 min 30 s.
M. Kotto :
Merci, M. le Président. M. Reichhold, M. Hairaud, soyez les bienvenus et merci
de tout ce que vous apportez à ce débat par l'action et par la pensée,
la réflexion.
Je veux
revenir très rapidement sur le programme syrien, par exemple, au niveau du
Canada, qui, selon un rapport sénatorial,
n'est pas si fluide que ça. Ce qui ressortait de ce rapport, c'est qu'il y
avait des carences au plan notamment de la francisation ou de l'anglicisation, au plan du logement, etc.,
probablement parce qu'on est montés trop haut trop vite, mais, considérant le fait que le grand voisin américain
ou même les voisins immédiats, notamment l'Arabie saoudite, n'ont pas bougé le petit doigt pour en prendre davantage, le
Canada fût obligé de marquer le coup.
Le Québec doit assurer derrière avec son poids
démographique. On suit.
On a été, la dernière fois, mis devant le fait
accompli parce que le chiffre initié dans le débat de la dernière campagne par le premier ministre Trudeau
dépassait... enfin, doublait celui que proposaient l'ex-premier ministre
Harper, M. Mulcair et M. Duceppe.
Donc, je me mets à la place des fonctionnaires, hein, parce qu'ils sont tous à
l'écoute de ces moments-là pour
anticiper, et je pense que tout le monde a été pris de court. Et, nous, ici, à
Québec, inévitablement, on en prend un coup également.
L'idée, c'est
d'être à la hauteur de nos ambitions
d'accueil. Quand les moyens ne sont pas là, quand les structures ne sont pas là, quand on n'est pas, disons, prêts,
et, je dirais — trois points de suspension — car
nous sommes dans un système politique laïc. Vous étiez là. Vos organismes étaient là.
L'arrimage s'est bien fait avec le ministère. Le ministère de la Sécurité publique a également
fait ce que doit pour que tout cela se goupille de façon positive. Et j'ai bon
espoir que nos récents réfugiés syriens ici
vivront une expérience, disons, plus lumineuse que dans le reste du Canada
si on se fie au rapport sénatorial.
Je voulais,
par ce biais, vous amener sur un volet dont on parle peu, c'est tous ceux qui
sont nés, disons... je ne vais pas
utiliser un terme fort, mais qui passe sous silence ceux qui se trouvent dans
l'est du Congo au moment où on se parle. Ce sont également des gens
mal pris, et je me demande pourquoi on n'en parle pas davantage, je me demande pourquoi
on ne s'y intéresse pas, pour quelle
raison on n'y met pas autant d'énergie que pour d'autres réfugiés. Est-ce
que vous en savez quelque chose?
• (17 h 30) •
M.
Reichhold (Stephan) : Oui,
effectivement. Je pense qu'on nous a approchés, que ce soit d'abord le
fédéral puis le Québec, pour nous consulter,
nous annoncer l'opération syrienne, que ce soit nous au Québec ou partout au
Canada, la première chose que tout le monde
a dit : Oui, pas de problème, mais à une condition : vous ne touchez
pas aux niveaux des autres réfugiés.
Ce n'est pas l'un vient à la place de l'autre, vous maintenez les niveaux des
autres pays, notamment, bon, les Bhoutanais, les Congolais, les
Centrafricains, les Burundais, en fait ceux qui arrivent, les Colombiens,
aussi, qui continuent à arriver, et ça, ça a
été, autant par le Canada que par le Québec, a été maintenu. Donc, ils ne sont
pas encore tous arrivés, ceux de 2016, mais le plan initial, même avant
la Syrie, est toujours là, et c'est vrai que ça a donné l'impression, à cause des médias qui viraient fous autour des Syriens...
c'est complètement passé à côté. Mais, ne vous inquiétez pas, les organismes et nous... et même on a un petit peu
triché aussi, là, on peut le dire maintenant publiquement qu'il y a certaines ressources dédiées aux
Syriens... on les a prises, on les a données aux autres aussi, donc. Mais,
bon, c'est un peu normal. Mais il n'en reste
pas moins que toute l'opération syrienne a permis à de nombreux, nombreux
Québécois de s'impliquer au niveau des
réfugiés. Ils ont découvert que le Québec rétablissait des réfugiés depuis 30
ans, que peu de gens savaient qu'il y a un programme de rétablissement
qui est d'ailleurs souvent souligné par le Haut Commissariat des Nations unies
comme un modèle. Et, comme je disais tout à l'heure, on a quand même démontré
que le dispositif en place a fonctionné.
Il y a eu
effectivement ce que vous mentionniez tout à l'heure, quelques petites
difficultés au niveau du parrainage privé parce que, là aussi, on est
passés de 400 par année à 5 000 par année du jour au lendemain. C'est sûr
que le programme, la structure du programme
n'était pas adaptée, là, il n'y a pas eu le temps vraiment... bon, le comité sénatorial, effectivement,
quelques personnes sont venues un peu dire que, oui, il y avait telle et telle difficulté,
mais, là encore, on
s'est assis ensemble, on a regardé, il
y a des ressources qui ont été
déployées, et là les choses commencent à s'arranger, on a des réponses, il
y a une ligne téléphonique qui s'est mise en place, il y a toutes sortes de
ressources.
Et, pour finir sur la question de la
francisation, oui, on a des histoires de Syriens, qui, finalement, au lieu
d'apprendre le français, vont travailler en anglais, tout ça, mais moi,
j'aimerais bien — si
c'est possible, je ne sais pas — sortir
des données sur le nombre de Syriens qui sont arrivés et qui ont suivi la
francisation. On ne les connaît pas encore,
mais je suis convaincu que la très grande majorité, du moins dans nos
organismes, ils sont tous en francisation. Et on les voit, on les entend à la radio, on les voit à la télé, il y en a
qui se débrouillent plutôt bien. Tous les enfants, qui est presque la moitié des réfugiés syriens qui sont
arrivés, c'est des jeunes, c'est des enfants. Ils sont tous à l'école
française. Je ne veux pas avancer de
pourcentage, mais la grande majorité des Syriens est en train de se franciser. C'est sûr, pas tout le monde, là, mais, je pense,
il y a une masse critique, là, qui va faire en sorte, au niveau de la communauté... maintenir, comment dire, un tronc
francophone, j'en suis convaincu. Mais je n'ai pas la preuve scientifique,
c'est pour ça que j'aimerais ça que le ministère
nous sorte des chiffres, voir un peu... Bon, après, dans deux ans, il faudrait
qu'on se reparle puis voir un peu qu'est-ce que ça a donné comme résultat,
mais je dirais que c'est plutôt...
Et aussi,
contrairement au reste du Canada, ce qu'on oublie aussi, c'est que les réfugiés
parrainés dans le reste du Canada n'ont pas droit d'allocations, hein,
quand ils suivent des cours de français, alors qu'ici ils ont droit à des
allocations, même les réfugiés parrainés, ce qui est quand même un incitatif intéressant
pour certains, pas pour tout le monde. Donc, ça, c'est l'avantage du programme québécois,
là, de parrainage, c'est un des gros avantages. Et, pour ça, beaucoup de
réfugiés parrainés préfèrent venir au Québec que dans le reste du Canada.
Alors, je finis là.
M. Kotto : Toujours sur la question de la langue, M. Hairaud disait... évoquait
tantôt le fait que, dans l'embauche, l'anglais
devenait un obstacle. Et je ne sais pas si c'est moi qui interprète mal, mais
j'avais perçu un encouragement au bilinguisme en emploi ou en milieu de
travail. Non, ce n'est pas ça. Est-ce que vous pouvez élaborer là-dessus?
M. Hairaud (Yann) : Bien, écoutez,
en fait, l'observation terrain au niveau de l'intégration en emploi des immigrants... qui, pour la plupart, sont quand même
extrêmement qualifiés et donc se destinent à des emplois où
l'anglais devient un facteur d'employabilité
important... Donc, c'est là où des immigrants
francophones... Et je pense en particulier, par exemple, aux immigrants
francophones ou d'expression de langue française qui viennent d'Afrique du
Nord, ou de pays subsahariens de
langue française, ou de la francophonie. Bien, c'est sûr que, s'ils n'ont pas
une maîtrise suffisante de l'anglais,
professionnellement, ça peut malheureusement... et peut-être encore plus dans certaines régions que
d'autres au Québec — je
pense, en particulier, à Montréal — ça peut devenir,
effectivement, un obstacle.
M. Kotto :
Mais ça, ce n'est pas dans tous les domaines. Dans l'hôtellerie, la
restauration, on peut comprendre.
Le Président (M. Picard) : Il
reste 30 secondes.
M. Kotto :
30 secondes? En 30 secondes... On poursuivra le débat. Mais c'est une
préoccupation, vous le savez, pour
nous. L'idée d'appliquer la loi 101 dans les entreprises de 29 employés en
montant, est-ce une approche qui pourrait éventuellement sauvegarder le
visage français de Montréal?
M. Hairaud
(Yann) : Bien, en fait, peut-être aussi, au-delà du niveau de
qualification, c'est, effectivement, dans certains secteurs d'activité
et plus particulièrement dans des domaines d'industrie. Je pense à
l'aéronautique, à l'informatique, ou des choses comme ça, où l'anglais, je veux
dire, est quelque chose d'incontournable.
Donc, je ne
sais pas. Je ne peux pas vous répondre. Peut-être que ça pourrait régler, mais
ça, c'est plus, à mon avis, du moyen,
long terme, et, nous, c'est sûr qu'on travaille dans du très court terme.
C'est-à-dire qu'on a des gens qui sont des
francophones, je veux dire, de langue
maternelle. Et je pense que le fait, pour eux, d'améliorer l'anglais ne
devrait pas comporter un risque d'un point de vue de la langue d'usage. A
priori, c'est plus vraiment un aspect relié à l'activité professionnelle, selon
moi.
Le Président (M. Picard) :
Merci. Mme la députée de Montarville, pour les sept prochaines minutes.
Mme Roy
(Montarville) : Merci, M. le Président. Messieurs, merci. Merci d'être là. Merci pour
votre mémoire, et effectivement je
vais poursuivre dans la même veine que mon collègue le député de
Bourget, parce que ma lecture a sursauté et là je veux que
vous m'expliquiez des choses. Lorsqu'on parle de l'orientation 4, on parle
naturellement de fixer «un minimum de 85 % la proportion des adultes de la
sous-catégorie des travailleurs qualifiés qui déclarent connaître le français à
l'admission». Alors, on parle aussi du fameux niveau de français qui est
réclamé.
Pour le
bénéfice des gens qui nous écoutent, je vais lire quelques extraits, et vous
nous citez des auteurs, hein, ce n'est
pas nécessairement votre plume, vous citez des auteurs. Alors, je vais prendre
quelques extraits. À la page 17, vous nous
dites : «Or, plusieurs données tendent à démontrer que le français n'est
pas la clé pour la réussite de la participation économique et sociale
des nouveaux arrivants. [...]"même si le français joue un rôle
prépondérant, l'anglais est aussi utilisé,
et les immigrants doivent composer avec cette situation".» Page 18, dans
le milieu, vous nous dites : «...le niveau de maîtrise du français ou de l'anglais exigé est
parfois excessif par rapport au type d'emploi et les différences entre le
français international et le français
utilisé au Québec peuvent être source de difficultés dans certains domaines
professionnels ou milieux de
travail.» Puis là ça me fait sourire : «...les exigences linguistiques servent...»
Non, ce n'est pas ça qui me fait sourire.
«Les exigences linguistiques servent parfois de prétexte pour refuser des
candidatures.» Ça, ce n'est pas drôle. Et vous nous dites, recommandation 4, tout de suite
après : «...le français ne constitue pas la clé pour l'intégration,
espérée.» Et, page 19, nous y venons, dans le deuxième paragraphe : «Il
faut donc relativiser l'effet de la maîtrise de la langue française sur la réussite professionnelle des
immigrants au Québec et offrir par exemple, via Emploi-Québec, des cours
d'anglais aux immigrants francophones leur permettant de répondre aux exigences
linguistiques de base du métier qu'ils veulent exercer ou du secteur dans
lequel ils veulent travailler.»
J'aimerais
que vous élaboriez sur cette recommandation que vous faites. Et ma question,
c'est : Pour ce qui est du seuil,
du niveau que l'on demande actuellement, est-ce que ça, il vous convient pour
l'immigration? Et là, là, je comprends qu'il y a l'emploi et...
M. Hairaud
(Yann) : Écoutez, sur le seuil, je ne sais pas si ça convient ou
si ça ne convient pas, en tout cas c'est une... mais je vais y revenir parce que, sur l'emploi, je pense que ce
qui est important... parce que souvent on considère à juste titre qu'au
Québec le français et l'apprentissage du français est essentiel à
l'intégration. Ça, je pense que tout le monde
s'entend là-dessus, il n'y a pas... Mais, nous, la nuance qu'on apporte, c'est
que — et on le
constate là encore, hein, ce sont des
observations terrain — auprès des immigrants francophones, donc pour lesquels la
connaissance de la langue d'usage est réglée, ils rencontrent des
difficultés au niveau de l'intégration au marché du travail, et on constate que
certains butent parce qu'ils ont un niveau
d'anglais professionnel insuffisant. Donc, c'est ça, la nuance qu'on veut
apporter.
Donc, franciser les immigrants qui ne
connaissent pas le français, oui c'est indispensable, mais pour les
francophones et peut-être même pour les autres s'ils ne parlent pas l'anglais,
à un moment donné... et dans certains domaines, bien évidemment, hein, on... la
proposition n'est pas de donner des cours d'anglais à tous les immigrants francophones, c'est en fonction des besoins du
marché du travail. C'est pour ça que c'est Emploi-Québec qui doit gérer
ces volets-là, c'est en fonction des besoins des industries, en fonction de ce
qu'on constate en termes des exigences reliées
à l'industrie. Il faut, à ce moment-là, effectivement proposer ce type de
formation, ça fait partie du développement de l'employabilité. Ça, on en
est convaincus.
Mme Roy (Montarville) :
Parfait. Maintenant, passons... Oui, vous voulez ajouter... Oui?
• (17 h 40) •
M.
Reichhold (Stephan) : Bon. Sur les seuils, je peux
vous dire... En fait, ce que j'ai dit tout à l'heure, je veux bien le
répéter, c'est que, oui, 50 000, mais le contexte actuel de doubler le
niveau des réfugiés, où on n'a pas vraiment le choix à cause du contexte, les Syriens, la réunification familiale, les
demandes de parrainage des citoyens québécois... Et aussi, dans le contexte où le Canada va
monter son seuil d'immigration à 300 000
personnes à partir de cette année, il faut, à mon avis, faire une
réflexion qui va plus loin que ce qui est proposé là, parce que ça change la
donne, ça change carrément la donne.
Donc, à mon
avis, les niveaux qui sont proposés ici, il faudrait les revoir, éventuellement
augmenter la catégorie de l'immigration économique pour rebalancer avec
l'humanitaire, sinon l'humanitaire va être plus important que l'économique. Ce
n'est pas non plus la solution, hein?
Le Président (M. Picard) :
Deux minutes.
Mme Roy
(Montarville) : Deux minutes? Je comprends ce que vous dites au
niveau de balancer avec l'économique, parce qu'il est très important. Mais, quand vous parlez du
niveau d'immigration totale à la grandeur du Canada, il y a une donne
que nous croyons qu'il ne faut pas
oublier : c'est cependant le fait que, sur les 10 provinces du Canada,
c'est le Québec qui est la province la plus pauvre, alors il faut avoir
aussi le moyen de nos ambitions. Parce que c'est très important de bien recevoir les gens, et force est de constater qu'à
certains égards on a de la difficulté à bien intégrer ou à bien offrir tous les
services. Alors, il faut s'assurer d'avoir l'arrimage entre les ressources que
le gouvernement du Québec peut
allouer et cette obligation que nous avons de bien accueillir, je pense.
M.
Reichhold (Stephan) : Là,
moi, je rajouterais que, contrairement aux autres provinces, le Canada est le
seul à avoir une entente, un accord, et
345 millions de dollars qui lui tombent du ciel chaque année pour intégrer
et franciser les immigrants, qui va... à mon avis, mes évaluations, là,
dans le contexte, un peu, qu'on connaît, qui va probablement monter à 400 millions, là, d'ici un an ou
deux, parce qu'il y a une formule d'indexation, là, assez géniale qui fait que
ça augmente à coups de 10 millions par année, donc... et qui est dédié à
l'intégration et la francisation des immigrants.
Et le Québec est la province qui dépense le plus
d'argent, quasiment quatre fois plus d'argent, au niveau de l'intégration, et de la francisation, et les cours
de langues, que dans le reste du Canada. Donc, on n'a pas besoin d'avoir
peur qu'on n'aura pas assez d'argent. Et, en
plus, l'immigration génère des revenus autonomes de 50 millions,
60 millions par année, qui viennent se rajouter aussi. Donc, ça ne
coûte rien au trésor public, là, l'accueil des immigrants.
Le
Président (M. Picard) : Merci. Donc, je vous remercie pour
votre contribution aux travaux de la commission.
Et la
commission ajourne ses travaux au mardi 23 août 2016, à 9 h 30, où
elle poursuivra son mandat. Bonne soirée.
(Fin de la séance à 17 h 43)