(Dix heures six minutes)
Le Président (M. Picard) : À
l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission des relations avec les citoyens
ouverte. Je vous souhaite la bienvenue et je demande à toutes les personnes
dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs téléphones
cellulaires.
La commission
est réunie afin de poursuivre les consultations particulières et auditions
publiques sur le projet de loi n° 77, Loi sur l'immigration au
Québec.
Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements?
La
Secrétaire : Oui, M. le Président. Mme Montpetit
(Crémazie) est remplacée par Mme Vallières (Richmond) et
Mme Lavallée (Repentigny), par Mme Roy (Montarville).
Auditions (suite)
Le
Président (M. Picard) : Merci. Ce matin, nous recevons la
Centrale des syndicats du Québec et l'Association québécoise des avocats
et avocates en droit de l'immigration.
Comme nous
avons commencé la séance à 10 h 6, j'aurais besoin d'un consentement
pour qu'on puisse poursuivre de quelques minutes. Consentement? Ça va
pour tout le monde? Merci.
Je souhaite maintenant la bienvenue à
Mme Chabot, de la Centrale des syndicats du Québec. Je vous invite à présenter la personne qui vous accompagne. Vous
disposez de 10 minutes, va s'ensuivre des échanges avec les
parlementaires. Vous êtes une habituée. La parole est à vous.
Centrale des syndicats
du Québec (CSQ)
Mme Chabot
(Louise) : Merci, M. le
Président. Bonjour, parlementaires. Je vous présente Gabriel Danis, qui est conseiller à la Centrale des syndicats du
Québec, entre autres, notamment, sur les questions comme l'immigration et la
question de la langue française.
D'ailleurs,
en introduction, vous ne serez pas étonnés de nous entendre à nouveau, on s'est
rencontrés l'année dernière dans le
cadre des consultations pour la politique d'immigration, et c'est bien sûr que
notre propos, dans le cadre du projet
de loi qui est là, va réitérer l'importance qu'on accorde de façon cruciale au
français comme langue d'intégration, d'inclusion et de cohésion sociale.
On vous dit
tout de suite qu'il y a deux objets dans le projet de loi qu'on accueille
positivement, c'est la question des
activités des consultants en immigration qu'on veut resserrer et la compétence
du Tribunal administratif du travail.
Dans les
remarques préliminaires, il nous apparaît important de vous souligner qu'en
tout cas on est du moins étonnés
qu'après, l'année dernière, avoir salué la consultation publique visant à doter
le Québec d'une nouvelle politique d'immigration... on doit admettre qu'on est
un petit peu perplexes devant le choix qui est fait maintenant, on se retrouve devant un projet de loi n° 77 alors que la
politique n'a pas été encore dévoilée. Il nous apparaît logique qu'une
politique claire, de notre avis,
devrait guider l'action gouvernementale en matière d'immigration, qu'elle soit
rendue publique et disponible,
surtout qu'on a pu lire dans la Gazette officielle, au mois de novembre,
que la politique avait été adoptée, et qui s'intitulerait Ensemble,
nous sommes le Québec, approuvée par le Conseil exécutif. On a fait des
demandes au ministère de l'Immigration pour l'obtenir, puis c'est un document
qu'on n'a pas obtenu. Là, on se retrouve avec des modifications législatives alors qu'on ne connaît pas la teneur de la
politique. Ça fait que permettez-nous de dire qu'on doit appréhender ou on doit supposer les
intentions du législateur dans le cadre de ce projet de loi, ne connaissant
pas, malheureusement, la politique.
• (10 h 10) •
La pérennité
du français au coeur de la stratégie d'immigration. Bien, pour nos membres, en
éducation majoritairement mais aussi dans le milieu communautaire qui
s'occupe de francisation, c'est clair que l'État doit maintenir intégralement
le caractère français du Québec, qu'il indique clairement aux candidates et aux
candidats à l'immigration le caractère
français du Québec, qu'il mette des mesures vigoureuses de francisation à la
disposition de celles et ceux qui en
ont besoin et qu'il renforce le français comme langue de travail dans
l'ensemble des secteurs de la vie
économique. C'est pour défendre le
caractère distinct et francophone que le Québec a senti la nécessité,
au cours de son histoire, d'être entièrement maître d'oeuvre de sa politique d'immigration, ce que reconnaît le cahier de consultation de l'année dernière, il avait été conçu dans la perspective de
contribuer à la pérennité du fait français. Dans les cahiers de consultation, sur l'opinion publique, il y avait un des documents
qui posait la question suivante : «L'examen de la Loi sur l'immigration...»
«Elle est silencieuse sur des enjeux
pourtant au coeur des préoccupations exprimées par la population telles [...] la
pérennité du français, l'intégration [puis] le respect des valeurs...»
Ça fait que, pour nous, ça, c'est essentiel, puis c'est essentiel qu'on la retrouve dans le projet de loi comme une affirmation forte dans notre politique d'immigration. Parce
que, pour en témoigner, vous allez
retrouver dans les pages qui suivent des tableaux, des figures qui viennent
illustrer très bien une baisse de la vitalité du français,
tant au plan de la langue maternelle que la langue d'usage, tant à Montréal que
dans les régions du Québec, des prévisions qui sont aussi inquiétantes selon
l'Office québécois de la langue
française, on voit que la chute se poursuit. De moins en moins d'immigrants déclarent aussi connaître le français.
Vous allez retrouver les statistiques dans le tableau II, qui parle de 64,1 de pourcentage à 57 %. Et vous avez
l'étude de l'IREC qui est parue récemment
qui donne... qui en vient à une conclusion qu'avec de tels chiffres,
contrairement à l'objectif des politiques et des stratégies d'immigration de consolider le fait français au
Québec, la politique menée au moins depuis 25 ans puis la défaillance des programmes de francisation
contribuent largement à l'anglicisation de Montréal. Ça fait
qu'on doit... En tout cas, nous, on
pense que le MIDI doit se donner des chiffres exhaustifs et qualitatifs qui
vont permettre d'évaluer la pertinence
de ses politiques. On est d'ailleurs d'accord avec la proposition du chercheur
Guillaume Marois et nous avons une recommandation dans ce sens-là, la
recommandation n° 2.
Les
responsabilités en matière de francisation. À notre lecture, le manque
d'ambition transparaît dans les cibles en matière de francisation. La cible du ministère pour l'année 2015‑2016 se
chiffre à 37 %. Non seulement on pense que ce n'est pas suffisant, mais les données récentes du
ministère nous indiquent qu'on est encore loin du compte. Dans le rapport
annuel de gestion 2014‑2015 du MIDI que Le Devoir
a rendu public, 27,4 % des nouveaux arrivants qui déclarent ne pas
connaître le français s'étaient inscrits au cours de français dans les deux ans
qui ont suivi leur arrivée.
Aussi,
dans le projet de loi n° 77, on s'étonne de voir qu'alors que dans la loi
antérieure, la loi de l'immigration actuelle,
on a six articles qui viennent consacrer les responsabilités en matière de
francisation, maintenant on en retrouve juste deux, les articles 58 et 59.
Et, si on fait des comparaisons, on voit qu'il semble y avoir une diminution au
niveau de la précision et de la
portée des articles concernant les responsabilités et les obligations de
l'État, et ça, ça nous inquiète grandement.
En
plus, l'article 26, on le voit, la grille, elle peut comprendre des
critères de sélection tels formation, expérience et connaissances linguistiques. Pour nous, les connaissances
linguistiques, elles doivent obligatoirement faire partie de la grille. Ce n'est pas un critère parmi d'autres,
ça doit être le critère prépondérant de la grille de sélection de nos
politiques et stratégies d'immigration.
Le
français comme langue d'intégration et de cohésion sociale, il y avait une
question que vous souleviez l'année dernière aussi : Qu'est-ce qui
pourrait être mis en oeuvre pour s'assurer que les personnes immigrantes et des
minorités ethnoculturelles acquièrent les compétences linguistiques nécessaires
en français pour occuper un emploi à la hauteur de leurs aspirations?, et vous allez trouver les
réponses à nos recommandations 4 et 5 : organiser plus de cours de
francisation qualifiante et investir en francisation.
Les
déclarations récentes de la ministre et des organisations patronales, très
honnêtement, nous laissent croire que c'est
exactement la direction opposée que l'on souhaite prendre. On est très
inquiets, madame, on est très, très inquiets de ces déclarations. Et, selon nous, l'importance du français doit
nécessairement continuer de se traduire dans la pondération accordée à la connaissance du français dans le
processus de sélection des personnes immigrantes. Ça ne doit pas être vu comme un obstacle à l'intégration au marché de
l'emploi mais comme une plus-value, au niveau du Québec, puis même une nécessité. C'est pour ça qu'on va recommander
que l'exigence du niveau 7 de l'Échelle québécoise des niveaux de compétence soit maintenue, que ce soit un
plancher. Pour nous, c'est un niveau plancher. C'est très difficile, on l'a dit
tout à l'heure, d'anticiper les intentions,
on le reconnaît, considérant qu'on n'a pas vu la politique globale de
l'immigration, la stratégie.
On
a intitulé l'adéquation formation-emploi une obsession, là. Écoutez, je suis
membre de la CPMT, on vient du secteur
de l'éducation, on a l'impression que ça devient le dogme, qu'on a ça dans
notre soupe. Ce n'est pas qu'on est contre,
ce n'est pas qu'on est contre, mais il ne faudrait pas non plus que nos
politiques d'immigration soient restreintes à une simple question des besoins ponctuels du marché de l'emploi, des
entreprises. Puis là il n'y a rien qui nous rassure quand on a pu lire,
au cours d'une semaine, ce que dit la chambre de commerce, ce que disent les
Manufacturiers et exportateurs. On a
l'impression que le français, là, tant mieux, c'est un «nice-to-have», si vous
me permettez, si on l'a, mais ce n'est pas le critère important; le
critère, c'est d'avoir les compétences puis le profil pour occuper l'emploi immédiatement selon les besoins actuels. Pour
nous, ce serait affaiblir de façon importante la politique d'immigration.
Il
y a un nouveau modèle aussi basé sur la déclaration d'intérêt, où la ministre
invitera, selon certains critères, les
ressortissants étrangers à présenter une demande de sélection. On est inquiets
des pouvoirs pour modifier les critères, les pouvoirs attribués à la ministre en termes de modification de
critères de sélection, et le profil de l'immigration pourrait s'en
trouver touché.
Le Président (M.
Picard) : En conclusion, s'il vous plaît.
Mme Chabot (Louise) : En conclusion, oui, je savais que ça irait vite. Écoutez, sur la
question du français, je pense qu'on a bien démontré l'importance à y
accorder. Maintenant, sur les questions du marché de l'emploi puis les questions d'adéquation et de pénurie de main-d'oeuvre,
on est convaincus que ce n'est pas juste par l'immigration qu'on va pouvoir régler ça, l'éducation joue un rôle
aussi essentiel sur ces questions-là. Et, si on regarde le nombre de chômeurs
au Québec par rapport aux postes vacants, ce n'est pas l'immigration qui va
tout régler, c'est un ensemble de questions.
Et il faut accorder énormément d'importance à l'éducation, puis on a vu les
compressions budgétaires récentes comme celles effectuées au MIDI dans les
groupes communautaires qui s'occupent de francisation, et, pour nous, on
ne saurait baisser la garde, on ne saurait
baisser la garde, au Québec, sur la question de la francisation dans nos
politiques d'accueil, d'intégration, d'inclusion et d'immigration.
Merci.
Le
Président (M. Picard) : Merci, Mme Chabot. Nous allons
débuter nos échanges avec Mme la ministre. Vous disposez d'une période
de 16 minutes.
• (10 h 20) •
Mme Weil :
Oui, bonjour. Bienvenue, Mme Chabot et M. Danis. D'entrée de jeu,
juste vous rassurer, la politique va
être déposée sous peu. C'était le temps des fêtes, c'était une fin d'année très
chargée. Étant donné l'importance de cette politique — on le
voit beaucoup juste sur la question de la langue — les orientations seront connues sous peu.
Mais, je vous dirai aussi, c'est très bien d'avoir cette consultation,
ça confirme ce qu'on a entendu, mais la loi, c'est vraiment beaucoup notre vision par rapport au meilleur
usage de ce qui est un système, une technicalité, la déclaration d'intérêt,
mais qu'est-ce qui entoure tout ça, c'est ça qu'on voit ici, dans le projet de
loi.
Mais,
écoutez, je vais revenir sur une affirmation, une déclaration que vous faites
par écrit et verbalement qui me préoccupe beaucoup, vous dites :
Les déclarations de la ministre... qui vous fait douter de l'engagement que
j'ai, personnellement, et que mon
gouvernement a envers l'importance de la langue française. Autant en amont, au
niveau de la sélection des candidats
à l'immigration qui parlent français, que de la préparation de ces candidats
avant même qu'ils soient sélectionnés,
de tous les programmes qu'on a qui leur permettent, à l'admission, de maîtriser
la langue, et aussi, évidemment, toute l'offre diversifiée de
francisation qu'on offre aux réfugiés, au regroupement familial, tous ceux qui
ne sont pas sélectionnés, hein, en tant que
tels... J'aimerais savoir quelles déclarations. Ici, en commission
parlementaire, chaque fois que cette
question a été soulevée... Je pense que vous faites la confusion entre les
représentants d'employeurs qui sont venus proposer des choses... mais je
n'ai jamais confirmé cette orientation, bien au contraire.
Alors, je
vous dis, c'est une grande préoccupation que j'ai, quand ces faussetés sont
circulées, et je me demande pourquoi. Il y a un article du Devoir ce matin qui est
carrément faux, on l'a corrigé, mais je le dis parce que le journaliste
est ici présent : Je n'ai jamais évoqué
que je partageais l'opinion de ceux qui disent qu'on viendrait réduire les
critères de sélection, d'une part, pour ensuite augmenter le niveau de
francisation en milieu de travail.
La
francisation en milieu de travail est importante en soi, j'ai toujours
expliqué, parce qu'il y a des gens, oui, qui arrivent au Québec qui ne sont pas
sélectionnés, hein, ils viennent de différentes... Ça peut
être le conjoint de la personne sélectionnée ou la conjointe, ça peut
être un réfugié qui a trouvé un emploi, qui a besoin de cet appui, ça peut être
quelqu'un qui veut, et je l'ai répété souvent, gravir les échelons dans son
milieu de travail, qui a besoin d'un lexique plus raffiné. Alors, j'ai déclaré publiquement que, la
promotion, oui, en effet il y a eu des baisses dans les cours de francisation,
je l'ai dit publiquement, ça a été rapporté
dans Le Devoir que moi, je suis en faveur de la promotion de la
langue française, et donc c'est de ça qu'on va parler dans la politique
mais aussi de l'adaptation de nos cours de français aux besoins.
Alors, je
vais vous donner des chiffres qui vont vous rassurer, j'espère bien. Vous
mentionnez dans votre mémoire, en
page 7, que le pourcentage d'immigrants ayant déclaré connaître le
français est en baisse ces dernières années. Vous serez heureuse d'apprendre que le tableau que vous
fournissez s'arrête en 2013 et qu'en 2014 cette statistique connaît une
hausse de 1,2 %, donc pour être, donc, à 58,6 %.
Bon, vous accordez la même importance que moi,
j'accorde à la langue française. Je ne reviendrai pas sur les différentes statistiques que vous avancez, mais ce
que je veux vous dire : En 2012, 85 % de notre immigration était soit
francophone, soit des enfants, qui sont
scolarisés en français, soit des personnes qui fréquentent nos services de
francisation, hein? Le verre est plein,
il n'est pas vide, 85 %. Alors, il faut que les gens regardent la
situation, puis on va vous fournir des
chiffres, on va le faire, lors de la politique, pour que les gens aient un
meilleur portrait. Et, depuis ce temps-là, au niveau des admissions, hein...
Les admissions, il faut savoir, c'est le reflet de la sélection, qui
généralement est de trois ou quatre ans qui
précèdent. Tous les changements qu'on a apportés, le test linguistique, les
alliances françaises, des ententes avec
les alliances françaises, on a 130 ententes dans une trentaine de pays, on
donne accès aux cours de francisation en ligne et on a un critère de sélection, oui, au niveau 7, et donc
tout ça fait en sorte que nos travailleurs qualifiés, les requérants
principaux, c'est maintenant rendu à 90 % qu'ils parlent français.
Donc, toute
cette histoire qu'il y a un déclin au niveau de la sélection des personnes qui
parlent français, ce n'est pas vrai.
Et d'ailleurs, si vous regardez les bassins d'immigration qui alimentent notre
immigration, c'est des bassins surtout francophones.
Oui, il y a la Colombie, il y a des pays francotropes, donc vous avez la
France, Haïti, l'Algérie, le Maroc, Cameroun,
la Tunisie, bon, hein, donc vous voyez bien qu'on puise dans des bassins où les
gens parlent français, mais il y a
d'autres pays où les gens peuvent parler la langue, il y a des gens qui sont
francophiles, et donc on essaie de les repérer partout où ils sont dans le monde. Et il y a le test linguistique que
moi, j'ai introduit en 2011, je crois bien, qui fait une évaluation
objective, c'est la première fois qu'on a eu ça. Donc, on ne donne pas des
points parce qu'on pense que la personne parle bien, puis il déclare qu'il
parle bien, on a un test qui évalue et on le maintient. Le niveau 7,
ensuite, le gouvernement du Parti québécois a augmenté le niveau à 7, je le
garde à 7.
Donc, d'où
vient cette notion qu'on réduit? Je n'ai jamais fait de déclaration dans ce
sens-là. Je pensais important de
faire le point parce que ça circule beaucoup, surtout dans un quotidien du
Québec, qu'il n'y a pas cette volonté, et vous, vous le répétez. Je ne vois pas d'où ça vient. Je pense que vous auriez
beaucoup de misère à trouver une déclaration que j'aurais faite dans ce
sens-là.
Alors, moi,
ce que je vous dirais... Puis vous savez qu'un immigrant sur trois — c'est les statistiques du ministère
de l'Immigration — c'est
un enfant?
Mme Chabot (Louise) : Pardon?
Mme Weil :
C'est un enfant — vous
savez que la loi 101 s'applique — un enfant qui sera scolarisé en français.
Donc, ça a toujours été le cas, mais c'est
un sur trois. Et, je pense, c'est un chiffre qui est important à souligner pour
tous ceux qui s'inquiètent.
Maintenant, vous dites que
l'immigration n'est pas, pour en venir au marché de l'emploi... qu'on en fait,
je ne sais pas, une religion. C'est très important. Alors, les chiffres
qu'on a, d'Emploi-Québec, c'est que, d'ici 2021, c'est 1,3 million d'emplois qui
devront être comblés, mais juste 16 % par l'immigration, on n'a jamais dit
que c'est 100 %. Alors, ça,
c'est un chiffre qui est répété, mais, je tiens à vous rassurer, on n'a jamais
dit que l'immigration est la réponse totale à toutes ces problématiques.
Donc, je tenais à
faire le point avant de vous poser des questions sur vos façons... ce que vous
proposez pour améliorer puis qu'est-ce qu'on
fait en amont parce qu'il faut qu'on parte de la même base, une compréhension
commune de ma position, de votre
position. Je pense que, sur la langue, on est sur la même page, en ce qui
concerne la sélection et en ce qui
concerne l'importance d'une offre de francisation qui serait robuste. Alors,
c'est ça, j'ai déclaré notre intention, ça va se refléter dans la politique. Donc, j'aimerais vous entendre...
Donc, c'est une belle réussite. Et donc moi, je prône la promotion,
l'adaptation, et vous le verrez dans la politique.
Donc,
nous, on parle... Et je pense qu'il faut revenir sur ce nouveau système de
sélection qui va faire en sorte qu'on peut
jouer un rôle en amont. C'est-à-dire, dans le profil qu'on recherche, comment
vous voyez votre rôle pour nous assurer que tous puissent jouer un rôle? Vous êtes à la Commission des
partenaires du marché du travail. Donc, la Commission des partenaires du marché du travail, vous l'avez
vu dans le projet de loi n° 71 qui est sous étude, on aura un portrait
régionalisé. Pourquoi? Parce que, l'immigration en région — c'est
la nouvelle expression, au lieu de parler de régionalisation des personnes j'aime mieux parler d'immigration en
région, c'est un peu plus dynamique, c'est un peu plus humain — on souhaite...
et ce n'est pas qu'on souhaite, mais on a besoin des portraits régionalisés, on
n'a jamais eu ça, et la Commission des
partenaires du marché du travail nous a confirmé qu'ils seraient capables de
nous donner ce portrait régionalisé. Il y a des pénuries dans certains secteurs, dans certaines régions, et la FTQ
est venue confirmer ça puis confirmer leur rôle à titre de membres de la Commission des partenaires
du marché du travail. Donc, sur cette question de sélection, j'aimerais vous entendre sur le rôle que vous pouvez jouer,
que vous souhaitez jouer partout au Québec pour nous assurer qu'on est... et qui s'adresse à vos préoccupations,
c'est-à-dire que, oui, évidemment, les Québécois, toujours, s'il y a des
Québécois qui répondent aux besoins
du marché du travail, on n'ira pas chercher un immigrant, ni temporaire ni
permanent, mais, quand on ne peut pas
trouver, l'immigration est là et l'immigration temporaire est là pour répondre
à ces pénuries, qui est vécu de façon
régionalisée. Alors, j'aimerais vous entendre, si vous pouvez bien, sur cette
question, le rôle que vous, vous pouvez jouer en amont.
Mme Chabot
(Louise) : Parfait. Je vais quand même me permettre, à l'égard de vos
déclarations, là... Ce qui concerne les
médias, puis tout ça, je vais leur laisser, mais, quand vous avez présenté le
projet de loi, vous avez déclaré vous-même
vouloir vous inspirer du modèle canadien. Bien, nous, ça ne nous inspire pas
trop. Ça, c'est une question.
Mme Weil :
Mais, écoutez, sur... Oui, excusez-moi.
Mme Chabot (Louise) : L'année dernière, quand on est venus, sur la question du niveau 7, là,
vous nous avez questionnés là-dessus,
est-ce que ce n'était pas trop fort. Bon, ça s'inscrivait aussi dans une tendance.
Nous, ça nous inquiétait.
Et,
troisième chose, je regrette, là, ça ne va pas bien, là, ça ne va pas bien,
l'immigration, en termes de francisation. Là, vous m'avez donné... Non,
ça ne va pas bien, là, il y a une chute, il y a un déclin incroyable.
Mme Weil :
Mais est-ce que vous êtes capables de contrer les chiffres?
Mme Chabot (Louise) : Je pense qu'il faut être en mesure de le constater, là. On vous a
ressorti des tableaux. Ça fait que, là, ça, ça me permet...
Mme Weil :
Excusez-moi...
Mme Chabot (Louise) : Puis à votre question sur la régionalisation de l'immigration que vous
nous posez, bien, on l'a illustré à la page 19, c'est bien sûr que comme
membres partenaires de la Commission des partenaires du marché du travail on est dans toutes les régions. Je
pense que l'idée est louable, on pense qu'on peut soigneusement être en mesure
d'identifier les besoins. Par contre, vous devez reconnaître avec nous que
parler de régionalisation, ça pose certaines difficultés
aussi avec l'abolition de plusieurs structures au niveau régional qui auraient
pu aider à l'identification puis au soutien d'une régionalisation en
immigration, en plus des coupures qui ont lieu au niveau du MIDI.
Le Président (M.
Picard) : Mme la ministre.
• (10 h 30) •
Mme
Weil : Oui. Pour la question
du système canadien, j'ai bien dit «de la Nouvelle-Zélande et de l'Australie»,
mais savez-vous que les critères de langue sont très élevés au Canada, le
saviez-vous, dans le système canadien? D'ailleurs, on s'est inspirés... il y a
un test linguistique qu'ils doivent passer. Donc, c'était sur la question
de la déclaration d'intérêt. Mais on
parle souvent de la Nouvelle-Zélande, l'Australie, qui, eux aussi, exigent la connaissance de la langue. Je vais vous
dire pourquoi : parce que la langue, c'est la clé de l'intégration en
emploi et c'est très important pour la rétention. Dans ceux qu'on dit,
qui ont été admis en 2012, qu'ils ne parlent pas français et qu'ils ne prennent
pas de cours, savez-vous que le taux de
rétention est de 80 %, à peu
près, bon an, mal an? Pour augmenter le niveau, le taux de rétention, il
incombe qu'on sélectionne des gens qui
parlent français, sinon on les perd. Alors, ce n'est pas notre souhait. Donc,
dans la cohorte qui a été mentionnée
dans Le Devoir, certains d'entre eux, c'est des... il y a plusieurs
personnes qui sont là, dans cette cohorte, notamment ceux qui ont
quitté, parce qu'ils ne maîtrisent pas la langue.
Donc,
j'aimerais... Alors, je reviens là-dessus, vous dites : Ça ne va pas bien.
Alors, 90 %, alors on a doublé, en 20 ans, le nombre de personnes qui parlent français. Alors là, vous
dites que la sélection, quand on est à 90 % des requérants principaux, on ne va pas dans la bonne direction?
Qu'est-ce qu'il faudrait faire, avoir moins de réfugiés? Comment vous
proposez de répondre à cette question-là?
Et là on dit...
Et ça, c'était en 2012. Vous allez voir les chiffres de 2014 quand ils vont
sortir, on les aura bientôt, vous allez voir que c'est encore en augmentation.
Mais je le
dis parce que je pense que tout le monde partage l'importance du français comme
vecteur d'intégration, il n'y a
personne ici qui pourrait dire que c'est facile de vivre au Québec si on ne
parle pas la langue commune, et ça fait partie de la vision de
participation, c'est par la langue.
Bon, on va
aller sur cette question de la langue, parce que nous, on regarde des façons de
bonifier la francisation. La
sélection, évidemment, on maintient le cap, mais, pour tous ceux qui se retrouvent
sur le territoire, les réfugiés, vous le voyez, s'inscrivent rapidement dans des cours à temps plein, il y a une
allocation qui est donnée. Donc, tout ça, c'est des incitatifs pour
faire en sorte que ces gens prennent des cours à temps plein, mais, pour les
réfugiés, c'est toujours ça. Il y a le
regroupement familial, on l'a ouvert en 2008 en faisant de la promotion. Mais
j'aimerais vous entendre, les idées que
vous avez sur comment peut-on, parce que c'est un enjeu bien important,
bonifier l'offre de francisation; peut-être en milieu de travail, parce que vous avez cette expertise. J'aimerais vous
entendre là-dessus, si vous avez des réflexions, des recommandations.
Le Président (M. Picard) : Il
reste une minute, Mme Chabot.
Mme Chabot
(Louise) : Oui, bien, notre
expertise est plutôt en éducation, contrairement à nos collègues de la CSN et de la FTQ, au niveau de la langue du
travail, où on avait déjà des réponses. Mais, écoutez, sur cette question-là,
ce qui nous inquiète beaucoup : il y aura un pouvoir réglementaire
sur les critères. Parce qu'on a changé, là, il y a un changement majeur quand même dans la politique de l'intégration, ça va
être maintenant sur invitation, ça va être maintenant selon des critères de sélection, et par réglementation
on pourra modifier ces critères-là. Ça fait que comment la pondération,
le poids de la langue française va demeurer déterminant?
Puis c'est
une de nos recommandations. Je veux bien croire, là... Tu sais, au Canada, la
langue commune, ce n'est pas le français; au Québec, c'est le français.
Je veux bien vous croire, ce n'est pas une question de confiance ou pas confiance, là, c'est une question de faits. Et, si
on continue à la vitesse de croisière où nous allons, on n'y arrivera pas.
Mme Weil :
Juste pour vous rassurer, Mme Chabot, c'est les mêmes pouvoirs
réglementaires, il n'y a rien qui change. Donc, on maintient le statu
quo, si ça vous rassure.
Mme Chabot
(Louise) : Bien, écoutez,
nous autres, on va le relire, là. Les articles de la loi, actuellement, il y en
a seulement deux sur la
responsabilité, puis au niveau... vous avez maintenant plus de pouvoir comme
ministre en termes de réglementation,
puis il y a même un article dans le projet de loi n° 99 qui vous
donne une dizaine... sur une dizaine de
règlements où vous avez même le pouvoir de les faire sans même qu'ils soient
publiés dans la Gazette officielle, là, il y a une nouvelle... Puis ça, c'est vrai pour votre ministère, c'est
vrai pour le ministère de la Santé, c'est vrai pour d'autres ministères,
là.
Le
Président (M. Picard) : Merci, Mme Chabot. Je cède
maintenant la parole à M. le député de Bourget pour une période de
9 min 30 s.
M. Kotto :
Merci, M. le Président. Mme Chabot, M. Daneau, soyez les bienvenus.
Merci pour votre contribution, j'ai lu le mémoire avec beaucoup
d'attention.
Mais j'aimerais rebondir sur ce que la ministre
disait relativement aux critères de la langue qui sont très élevés au fédéral. Pas plus tard qu'hier, le Hill Times Online nous disait la chose suivante :
«Immigration Minister John McCallum says the Government will be "producing radical changes" to the Citizenship
Act in the next few [days].» Parce qu'on le sait, les libéraux étaient opposés
au projet de loi... au bill 24, qui, disons, resserrait les critères
de prise en... comment dire, les critères
exigés pour la maîtrise de l'une des deux langues afin d'obtenir la
citoyenneté, mais apparemment il y a
des changements, comme le rapporte l'article, des changements radicaux qui vont
être opérés. Donc, je serais prudent
de me référer... relativement à ce qui risque d'arriver avec le gouvernement
Trudeau à Ottawa.
J'ai une
question simple, une première question simple à vous poser : La
francisation, est-ce que, de votre perspective
des choses, c'est une responsabilité collective? Est-ce une responsabilité
dévolue au gouvernement, au nouvel arrivant ou... Bref, la question,
elle est, comment dire, pertinente en ce sens qu'on entend ici et là des
commentaires rejetant la faute sur les
immigrants à l'effet qu'ils ne veulent pas apprendre la langue, mais par
ailleurs on apprend que la plupart
d'entre eux, notamment dans le milieu du travail, veulent bien apprendre la
langue, mais les moyens ne sont pas là pour les accompagner dans ce dessein.
J'aimerais vous entendre là-dessus.
• (10 h 40) •
Mme Chabot
(Louise) : Oui, c'est une
responsabilité, bien, collective, ça, c'est sûr, mais il y a une responsabilité
de l'État, du gouvernement en termes de
francisation. On ne peut pas... Pour nous, il y a une adéquation qui doit être
très claire entre l'immigration puis la francisation. Puis actuellement,
d'ailleurs, la loi est assez... Quand on parlait des deux articles, là, les six articles qui concernent les responsabilités,
si vous allez voir à la page 9 de notre mémoire, actuellement l'article 3.2.4 de l'actuelle loi dit que «le
ministre, en vertu [du] programme, dispense et assume la mise en oeuvre des
services d'intégration
linguistique [qui consistent] en des services d'apprentissage de la langue
française et d'initiation à la vie
québécoise». Ça fait qu'on voit toute l'importance qu'on accorde... «Assume»,
«dispense et assume», c'est des mots forts.
Allez juste voir l'article 58. Pour nous, ça nous semble affaiblir les
responsabilités, «favoriser la pleine participation», on ne retrouve plus la notion, entre autres,
d'initiation à la vie québécoise, et de dispensation, et du fait d'assumer. Ça
fait que, là, on veut vous alerter
clairement, avec le projet de loi qui est là, par rapport à la loi qui est
actuellement... Et, oui, il y a une responsabilité. Il y a des budgets
qui existent dans d'autres secteurs, mais les groupes communautaires, le ministère de l'Immigration, ça fait partie de...
puis il faut être capable d'offrir... On peut comprendre, pour une personne
qui arrive, que, bon, l'emploi est
important, et dans le milieu du travail ce n'est pas toujours simple d'avoir
juste quelques heures pour avoir le
français, donc il faut pouvoir rapidement offrir des cours de français tout en
permettant l'intégration de ces
personnes. Mais, oui, il y a une responsabilité très claire qui nous semble
être affaiblie par l'article 58 et 59, qui sont les seuls articles qu'on retrouve en matière de responsabilité dans
le projet de loi, et l'article 26 aussi au niveau de la grille,
c'est important.
Moi, je veux
bien nous croire qu'on est pour le français au Québec. Écoutez, nous, là, le
drapeau est très élevé là-dessus. Je
comprends qu'on est dans le cadre d'une politique d'immigration, mais on a la
même mesure quand il s'agit de défendre et de promouvoir la langue
française. Ça fait qu'il faut que ça se traduise, il faut...
Probablement que le fait qu'on n'ait pas obtenu...
Puis ça, je le déplore. Je comprends qu'on va l'avoir puis qu'il y a eu bien des affaires à régler au mois de
décembre, mais on a quand même été consultés, on a pris le temps de venir rencontrer les parlementaires, on
s'attendait... On sait que la politique, la stratégie, bien, ça devient une
pièce majeure et que le législatif,
après, arrive. Là, on est obligés d'appréhender, de supposer les intentions du
législateur, et c'est bien fatigant. Si on se trompe, si on nous dit
qu'ici, au sortir de ce projet de loi là, le fait français au Québec sera
préservé minimalement comme on le connaît,
qu'on veut prendre toutes nos responsabilités pour continuer, aider à la francisation — puis ce n'est pas ça que les chiffres nous témoignent — bien on sera des plus heureux à venir saluer
le processus parlementaire qui aura eu cours.
M. Kotto :
O.K. Vous êtes sur le terrain, vous entendez des choses, vous voyez des choses,
il vous est rapporté des choses
relativement, notamment, à la francisation en milieu de travail. Vous savez les
commandes de coupes paramétriques du
gouvernement actuel dans tous les domaines, des coupes qui ont eu des impacts,
nécessairement, en matière de
francisation, il y a eu 5 millions qui ont été coupés cette année
notamment. Qu'est-ce que vous pouvez nous dire relativement à ces
impacts-là?
Mme Chabot
(Louise) : Bien, on a
illustré... Tant pour les groupes communautaires qui s'occupent de francisation
que pour les budgets du ministère de
l'Immigration, là, on va se le dire, les compressions sont importantes, c'est
dans tous les secteurs d'activité. On
a parlé aussi du rôle que l'éducation peut jouer et qu'elle joue très bien en
termes d'accueil, puis on parlait des enfants, on a un très, très grand
rôle à jouer, mais, dans les politiques d'austérité, on le voit sur le plancher, là, que... Même si on n'est pas dans les
milieux de travail comme étant... bien on le voit. Puis je pense que l'article
du Devoir, encore ce matin, venait
illustrer que, dans les grandes industries, il y a une baisse du nombre de
personnes qui peut...
Mais je vais laisser Gabriel continuer, on a une
expérience terrain peut-être plus probante à vous illustrer.
Le Président (M. Picard) : M.
Danis.
M. Danis
(Gabriel) : Oui, merci.
Effectivement, les groupes de francisation qui sont chez nous, à la CSQ, nous
le disent, les compressions font mal, les compressions font en sorte notamment
que plusieurs cours à temps plein qui s'offraient
s'offrent maintenant à temps partiel, les listes d'attente s'allongent. Donc,
ce n'est pas vrai que les investissements augmentent, ce n'est pas vrai
en francisation.
De même,
l'année dernière, en commission parlementaire, on nous avait questionnés sur la
possibilité d'assouplir le
niveau 7 de l'Échelle québécoise des niveaux de compétence en français des
personnes immigrantes adultes comme étant
un obstacle à la sélection de multiples talents. Ce que les gens nous disent
sur le terrain, c'est que le niveau 7 est un niveau plancher pour
fonctionner en emploi. Même si on le qualifie d'intermédiaire avancé, on se
tire dans le pied collectivement à vouloir abaisser ce niveau-là. Donc, voilà.
M. Kotto :
O.K. Je reprends un extrait de l'article de M. Dutrisac ce matin, qui nous
rapporte : «Pour la francisation chez
Peerless, la Commission des partenaires du marché du travail versait au
syndicat une subvention annuelle de 100 000 $, ce qui couvrait
la rétribution des professeurs et le salaire minimum aux employés qui
assistaient aux cours.»
Dans le
dernier budget, le gouvernement a haussé le seuil d'assujettissement des
entreprises à la loi du 1 %, le seuil
est passé de 1 % à 2 %... pardon, de 1 million à
2 millions. Est-ce que vous croyez que ça va avoir un impact sur la
francisation en entreprise?
Le Président (M. Picard) :
30 secondes, Mme Chabot.
Mme Chabot
(Louise) : Oui, c'est clair.
Puis en plus déjà il y a des difficultés avec... Il y a moins d'argent dans
l'enveloppe de la loi du 1 %, puis on
doit aussi faire l'adéquation formation-emploi, ça fait que... Puis ce n'est
pas le MIDI qui va prendre le relais, à moins que le ministère augmente
ces sommes.
Le
Président (M. Picard) : Merci. Je cède maintenant la parole à
Mme la députée de Montarville. 6 min 30 s.
Mme Roy
(Montarville) :
Merci, M. le Président. Madame monsieur, merci. Merci pour votre mémoire. J'ai
le nez dedans depuis tout à l'heure
et j'ai une préoccupation, moi aussi, très grande à l'égard du recul du
français en tant que langue d'usage.
Et, pour le bénéfice des gens qui nous écoutent, à la page 6 de votre
mémoire vous reproduisez des chiffres qui
nous viennent de l'OQLF, des statistiques qui sont très troublantes quand on
regarde les tableaux que vous nous avez mis là. La langue française, langue d'usage, lorsque nous serons rendus...
Actuellement... En 2011, sur l'île de Montréal, la langue française est à 53 %, mais en 2031, selon le tableau de
l'office de la langue ici, là, en 2031, la langue française, en tant que langue d'usage, sera à 48 %. Ça,
ça veut dire minoritaire. Donc, sur l'île de Montréal, en 2031, il y aura
plus d'anglophones et d'allophones que de francophones.
C'est
une constatation qui nous vient de l'Office québécois de la langue française,
ces chiffres-là, c'est ce que vous
nous dites, vous les avez reproduits de façon intégrale. Naturellement, ce sont
des perspectives. Cependant, c'est extrêmement troublant, et c'est la
raison pour laquelle protéger le français en tant que langue d'usage, nous
sommes tout à fait sur cette voie, nous
voulons prôner cette protection, elle est extrêmement importante, naturellement
dans le respect des immigrants, des citoyens qui viennent se joindre à
notre population.
Et
justement, pour se joindre à notre population et... À l'égard du projet de loi
n° 77, il y a une ouverture à l'effet de sélectionner les immigrants en fonction des besoins aussi, des
besoins du marché du travail, ce qui est aussi une bonne chose dans la mesure où nous avons besoin
d'immigrants qui s'impliquent et qui deviennent des citoyens à part entière,
qui travaillent avec nous, on en est. Par ailleurs, les préoccupations sont à
l'égard du déclin de la francisation.
J'aimerais
vous entendre. À la page 7, vous avez la recommandation n° 1... À la
page 8, pardon, à la recommandation n° 1,
vous nous dites qu'il faudrait «moderniser la Loi sur l'immigration au Québec
afin qu'elle prenne spécifiquement en
compte la pérennité du français au Québec — ça, on est d'accord avec vous — et qu'elle fixe des cibles ambitieuses en matière d'accueil d'immigrants
ayant une connaissance du français». Alors, on parle ici des cibles de la
connaissance du français à l'accueil.
Actuellement, on parle de 50 %. Si 50 %, selon vous, cette cible-là,
elle est trop faible, quelle devrait être une cible qui serait
acceptable?
Mme Chabot (Louise) : Bien, on devrait avoir une cible qui reconnaît... Vous l'avez bien
illustré, là, on s'anglicise, là, puis particulièrement sur l'île de
Montréal. Puis ce qui nous inquiète, c'est que même des chambres de commerce comme la chambre de commerce de Montréal viennent
dire que la pondération de l'anglais devrait peut-être avoir plus d'importance que celle du français, ça fait que
c'est assez inquiétant. Ça fait qu'une cible devrait au moins reconnaître
une majorité francophone.
On
a illustré d'autres chiffres aussi où il y a une tendance qui s'est inversée,
je veux dire, qu'il y a un 60 % qui a déjà existé, alors qu'on est, là, dans l'inverse en termes de
francisation. Ça fait qu'on n'a pas chiffré, mais la barre du 50 % nous apparaît... Je vous dirais 100 %, mais
ça, on sait que ce n'est pas réaliste parce qu'il faut accompagner, mais il
faut permettre, toutes les courbes qu'on a démontrées, là, qu'on puisse
les lire à l'envers. Ce serait ma réponse.
Mme
Roy
(Montarville) : Vous conviendrez avec nous qu'outre
la francisation des immigrants il faut aussi bien les intégrer, mais les
intégrer à la société québécoise. Dans cette optique, est-il intéressant
peut-être d'accueillir des citoyens qui ne
parlent peut-être pas français mais qui s'intégreront facilement et à qui on
pourra bien apprendre le français? Parce
que vous dites : Une cible 100 % francophone. Je ne pense pas que
c'est quelque chose qui soit possible et réalisable, mais, compte tenu du fait qu'on doit également
suivre une formation à la citoyenneté québécoise, ne pensez-vous pas que, de
un, ces formations devraient être obligatoires — ce n'est pas le cas actuellement, ni pour le
français ni pour l'introduction à la
citoyenneté — et, de
deux, qu'il serait possible d'avoir une immigration qui n'est pas
nécessairement francophone à 100 % comme vous le souhaitez mais qui
puisse bien s'intégrer?
Mme Chabot
(Louise) : Gabriel.
• (10 h 50) •
M. Danis (Gabriel) : Oui, bien on ne souhaite pas qu'une immigration soit à 100 %
francophone, on souhaite qu'une
grande majorité des immigrants qu'on sélectionne soient à tout le moins
francotropes. Les données, l'étude de l'IREC
publiée la semaine dernière démontre très bien que les francotropes
s'inscrivent dans une démarche de francisation de façon beaucoup plus importante que les anglotropes. Même chose avec
l'utilisation du français en milieu de travail, les francotropes ont
tendance à 70 % à utiliser le français en milieu de travail, c'est
complètement l'inverse avec les immigrants
qui sont anglotropes. Donc, on pense qu'en amont cette pondération-là accordée
soit à la connaissance du français ou à des immigrants qui soient
francotropes demeure importante dans notre grille de sélection.
Et
juste revenir sur le pourcentage d'immigrants ayant déclaré connaître le
français, le tableau II de notre page 7 qui démontre très bien une baisse du pourcentage
d'immigrants ayant déclaré connaître le français de 64 % à 57 % en
2013. Tant mieux si, ce taux-là, la ministre
nous apprend que le taux a remonté à 58 %. Il n'en demeure pas moins que,
dans le plan stratégique du ministère de
l'Immigration, leur cible d'immigrants ayant déclaré connaître le français est
de 50 %. Le gouvernement semble
penser que c'est un verre qui est plein : nous, on pense qu'il est à
moitié vide, à 50 %. C'est une
cible qui est très peu ambitieuse, compte tenu de la baisse de la vitalité du
français tant sur le plan de la langue maternelle
que de la langue d'usage, que de la langue en milieu de travail. Les faits et
les données sont têtus, les données du
Conseil supérieur de la langue française le démontrent très bien. Donc, si on
veut stopper cette tendance-là, il faut avoir des cibles plus
ambitieuses en amont, dans la sélection des immigrants.
Mme Roy
(Montarville) :
Ce qui est intéressant aussi dans...
Le Président (M. Picard) :
20 secondes, Mme la députée.
Mme Roy
(Montarville) :
Combien?
Le Président (M. Picard) :
20 secondes.
Mme Roy
(Montarville) : Oh! misère. Écoutez, si je reviens au
tableau de la page 6 et de la page 5, lorsqu'on dit qu'en 2031 le français sera, comme langue
d'usage, minoritaire, ce qui est frappant, c'est que l'anglais aussi sera très
minoritaire et que ce sera toutes autres
langues confondues qui sera extrêmement important aussi. Si on suit la tendance
qu'on suit actuellement, là, si on regarde en 2011, autres langues sur l'île de
Montréal, 33 %, anglophones, 17 %, et francophones, 48,7 %.
Alors, à cet égard, ne devrions-nous pas rendre les cours de français
obligatoires pour tous?
Le Président (M. Picard) :
Rapidement.
Mme Chabot
(Louise) : On doit
accompagner les personnes, pas les obliger, mais on doit vraiment donner les
moyens, absolument, pour que la francisation soit au rendez-vous. Mais on doit
être plus ambitieux dans l'accueil.
Le Président (M. Picard) :
Merci. Je cède la parole à M. le député de Mercier pour trois minutes.
M. Khadir : Merci, M. le Président. En réaction
au questionnement de la ministre sur ce qui, dans ses propos, fait
porter à croire que son engagement n'était pas... enfin, qu'il manquait de
conviction dans l'insistance sur le fait qu'en
milieu de travail puis en immigration le français doit être au centre de ses
préoccupations, moi, je ne doute pas de la volonté exprimée par la ministre, mais il y a une série, une constellation
d'éléments qui font qu'il y a une perte de confiance et de crédibilité. Un, cette insistance sur le
«skill-based», hein? Vous revenez souvent sur la notion de Nouvelle-Zélande,
vous venez de parler du Canada. Moi, je
connais très bien l'immigration montréalaise qui est acceptée par les instances
canadiennes, et en grande majorité je peux
dire que même en anglais les niveaux de qualification ne sont pas terribles,
ne sont pas vraiment... Bon. Alors, dire que
le Canada peut constituer un modèle parce que l'anglais est important, je pense
que c'est déjà...
Une voix : ...
M.
Khadir : Bon, oui,
mais en réalité, tel que ça se pratique, ce n'est pas très bien. Puis ensuite,
la Nouvelle-Zélande, c'est
«skill-based». Ce n'est pas «language-based», ce n'est pas «education-based»,
c'est «skill-based». Alors, quand vous revenez
sur le modèle néo-zélandais, bien ça envoie le message que, dans le fond, tout
ce que ça vous intéresse, c'est que, les immigrants qu'on accepte, leurs
compétences soient conformes aux besoins du marché du travail. Puis les patrons
ici viennent dire : Le français, ce n'est pas tellement important,
en fait c'est ce qu'on retient de leurs interventions sur...
Le Président (M. Picard) : M.
le député, vous vous adressez à moi, s'il vous plaît.
M. Khadir :
Oui, M. le Président. Ah oui! D'accord. C'est parce que la ministre posait des
questions, mais je veux lui rappeler à la mémoire que nous sommes devant
cette réalité.
Maintenant,
dans votre mémoire, Mme Chabot et M. Danis, à la page 20, vous
parlez du fait que les transferts fédéraux ne sont pas utilisés aux fins
de l'intégration des immigrants, qu'alors qu'on a des coupes dans plusieurs secteurs... Est-ce que vous pouvez nous en parler,
des coupes à même le MIDI? Est-ce que vous pouvez les chiffrer pour que ce soit illustré? Parce que moi, j'ai rappelé
à Mme la ministre que pendant des années le gouvernement libéral a retourné
de l'argent dans le fonds consolidé, de l'argent du MIDI, que le MIDI devait
consacrer aux immigrants.
Mme Chabot
(Louise) : Bien, exact, vous
avez la réponse. Ce n'est pas rien comme coupes, hein : en 2014‑2015,
800 millions dans le programme Réussir l'intégration, un demi-million dans
le programme Mobilisation-Diversité et 2,2 millions
en francisation. Ça fait que, là, quand on nous dit qu'on investit... Et on a
retourné 70 millions dans le fonds consolidé à partir
majoritairement de sommes d'argent qui viennent aussi du fédéral.
M. Khadir : Mme Chabot, vous
faites partie, je crois, des partenaires...
Le Président (M. Picard) :
30 secondes.
M. Khadir :
...de la commission des partenaires du milieu de travail qui finance les
programmes de francisation en milieu
de travail. La baisse de leur financement par le gouvernement, ça relève de quelle
responsabilité? Est-ce que c'est la ministre de l'Immigration? Et est-ce
que la ministre de l'Immigration peut rectifier ça?
Le Président (M. Picard) :
Mme Chabot.
Mme Chabot
(Louise) : Premièrement, la
baisse de fonds au niveau de la CPMT vient du fait qu'on a désassujetti
8 000 entreprises dans l'obligation du 1 %, ça fait qu'on a une
baisse de fonds au niveau de la CPMT. Conséquemment, il y a moins de budget. Ça
fait que, là, je pense qu'il y a un rôle à jouer du ministère de l'Emploi et Solidarité
sociale et du gouvernement.
Le Président (M.
Picard) : Merci. Merci, Mme Chabot, M. Danis, pour
votre contribution aux travaux de la commission.
Je suspends quelques instants afin de permettre
aux représentants du prochain groupe de prendre place.
(Suspension de la séance à 10 h 55)
(Reprise à 10 h 58)
Le
Président (M. Picard) :
Nous reprenons nos travaux. Je souhaite la bienvenue à l'Association québécoise
des avocats et avocates en droit de l'immigration. Je vous invite à vous
présenter ainsi que les personnes qui vous accompagnent.
Vous disposez d'un maximum de 10 minutes, va s'ensuivre des échanges avec
les parlementaires. La parole est à vous.
Association québécoise
des avocats et avocates
en droit de l'immigration (AQAADI)
M.
Boudreault (Jean-Sébastien) :
Merci beaucoup, M. le
Président. Merci, Mme la ministre, Mmes, MM. les parlementaires. Mon nom est Me Jean-Sébastien
Boudreault, je suis président de l'association des avocats en immigration
du Québec. À ma droite, vous avez
Me Andres Miguel Pareja, un administrateur, et, à ma gauche, Me Sara
Goessaert, de l'AQAADI aussi.
On a préparé
un mémoire. Nous, on est allés plus dans vraiment les technicalités du projet
de loi du côté légal. On travaille beaucoup... Les avocats en
immigration, on est la plus grosse association d'avocats qui travaillent en immigration
au Québec, une des plus importantes au Canada, et puis on est allés vraiment
dans les préoccupations sur la sélection et les pouvoirs qui ont été
donnés ou qui seront donnés à la ministre dans le projet de loi n° 77.
La première
chose qui nous a beaucoup frappés, dans le projet de loi, c'est le manque de
définitions. On parle... On va
chercher beaucoup de termes, dont l'intérêt public, mais sans définir quel est
l'intérêt public en immigration. Et aussi on a trouvé un petit peu
difficile la lecture du projet de loi sans avoir de table des matières, qui
sont des petites technicalités mais qui
pourraient beaucoup aider quand on vient... surtout pour des gens qui ne sont
pas avocats, parce que les projets de
loi, les projets de règlement, en immigration, sont souvent regardés par des
gens, des citoyens qui veulent soit
immigrer, ou faire immigrer leur famille, ou aider les gens à immigrer, donc il
faut être le plus clair possible, étant donné que ça s'adresse
majoritairement à des citoyens ou à des citoyens en devenir.
• (11 heures) •
Une des choses qu'on doit féliciter la ministre
pour le projet de loi, c'est l'ouverture à un recours quasi judiciaire
au TAQ. On trouve que c'est une bonne chose.
Jusqu'à maintenant, il y avait seulement la possibilité de
révision administrative qui découle
d'un protocole d'entente entre les associations en immigration du Québec
et le MICC, dans le temps, mais, pour
pouvoir faire une demande judiciaire, il fallait aller en Cour supérieure, et
ce qui rend le processus un peu
difficile. On est très contents de voir qu'on peut maintenant
y aller en cour... au Tribunal
administratif du Québec.
Par contre,
on se questionne : Pourquoi avoir et maintenir une différence entre un
refus et un rejet? Les deux personnes... Les personnes qui voient rejeté leur dossier n'ont plus de recours,
aucun, une fois le dossier rejeté par le ministère, par le MIDI. En 2014, il y a eu près de 10 000 rejets de travailleurs qualifiés.
En 2015, en date du 31 octobre, il y a eu plus de 9 000 dossiers rejetés. Ce qui fait
que ces gens-là, après avoir attendu plusieurs années, voient leur demande
simplement fermée, les frais sont
encaissés, et ils n'ont aucun recours à moins d'aller devant les tribunaux, qui
sont des recours qui sont excessivement longs et coûteux, ce qui ternit
de beaucoup la réputation du Québec à l'international.
On se préoccupe aussi parce qu'étant donné cette
distinction entre le rejet et le refus l'article 55 permet à la ministre de refuser un dossier pour des bases
d'intérêt public, et l'article 56 lui permet aussi de le rejeter pour les
mêmes critères, donc ce qui nous dit
que la ministre pourrait décider que certains dossiers sont refusés et
maintenant pourraient aller devant le
Tribunal administratif... ou ouverture à une révision administrative, mais tous
les dossiers qui sont rejetés présentement n'auraient pas ce loisir-là,
n'auraient pas cette opportunité-là. On trouve qu'il faut faire très attention.
Maintenant,
aussi, on salue beaucoup les remboursements des frais, remboursements des frais
qui pourraient être faits maintenant.
Et c'est quelque chose que l'AQAADI, on a beaucoup demandé et qu'on demande
constamment, les gens qui voient
leurs dossiers rejetés ou même refusés avant une analyse approfondie de leurs
dossiers devraient voir leurs frais administratifs remboursés
proportionnellement aux coûts réels que l'étude de leurs dossiers a engendrés.
Les 10 000 et quelques dossiers en 2014
et les 9 000 dossiers qui ont été rejetés en 2015 ont fait que le
ministère s'est enrichi injustement,
selon nous, en 2014, de plus de 28 millions de dollars, qui ont été
encaissés pour les 10 000 dossiers rejetés sans possibilité
d'appel. Il faut faire très, très attention. Et on voit que la possibilité
maintenant de remboursement est seulement si
un dossier est refusé ou la personne décide de retirer son dossier, parce qu'il
y a une application rétroactive des
règlements. Donc, dans tous les autres cas, on demeure encore avec le même
modus operandi présent, donc les dossiers sont refusés, sont rejetés, les montants sont encaissés, et les
personnes n'ont souvent aucun recours. Il faut faire très, très attention sur la rétroactivité, la possibilité
d'aller de façon rétroactive. On espère, on ose croire qu'avec le nouveau
modèle de déclaration d'intérêt les
délais, et c'est ce que le ministère nous a dit souvent, les délais devraient
être beaucoup plus courts entre le
moment où on dépose une demande d'immigration et le moment où on obtient une
réponse pour obtenir son CSQ. Dans
cette optique-là, si les délais sont si courts, on se demande : Pourquoi
donner un pouvoir de changer les règles
rétroactivement? On peut comprendre, quand les délais étaient de trois, quatre
ou cinq ans, que le marché du travail change, que les demandes en immigration puissent
changer, mais, si les délais sont raccourcis, on ne comprend pas pourquoi
il pourrait y avoir une rétroactivité.
Une autre chose qui
nous préoccupe excessivement et qui a été une des grandes, grandes
préoccupations pour l'AQAADI a été le
pouvoir accordé à la ministre de faire des règlements qui ne sont pas publiés.
L'immigration, c'est une compétence
qui touche des vies, c'est une compétence qui touche le destin des gens, et on
donne un pouvoir rétroactif et on
permet à la ministre de ne pas publier des règlements. Et on s'entend que la
Loi sur l'immigration, c'est le grand cadre,
on a la politique qui est le cadre supérieur, on a la loi après ça, mais toutes
les technicalités de comment immigrer, qui
peut se qualifier, comment on évalue les demandes d'immigration se retrouvent
dans les différents règlements du MIDI. Pourquoi le faire en cachette? Pourquoi le faire en catimini? Nous, on
pense que ça, ça va travailler vraiment négativement sur la réputation du Québec, qui présentement est
en train d'en prendre un coup avec Mon projet Québec, qui a été une chose assez difficile. On a travaillé très fort
pour faire avancer les choses, les choses avancent, mais avancent lentement,
et là on s'en va vers une loi qui est
assez nébuleuse, vers des règlements qui ne seront probablement pas publiés,
dont la société ne pourra pas commenter, ne pourra pas regarder et ne pourra
pas aviser des possibles erreurs. Nous, on est en communication avec des
immigrants à tous les jours et puis on pense que c'est important de pouvoir
donner notre grain de sel comme tous les
autres groupes d'intérêt pour les immigrants. Nous, on croit que l'immigration,
c'est une partie de l'avenir du
Québec, on a besoin des nouveaux immigrants, donc il faut le faire
intelligemment, il faut aller chercher les bonnes personnes.
Maintenant,
la déclaration d'intérêt, on félicite la ministre. On pense que c'est se mettre
au goût du jour de faire quelque
chose de plus électronique, de faire quelque chose qui soit plus rapide,
d'amener à sélectionner des gens... les bonnes personnes pour le Québec.
Par
contre, une chose qui, pour nous, est importante, on a eu une affirmation du
ministère comme de quoi le PEQ, le
Programme d'expérience québécoise, serait laissé à l'extérieur de la
déclaration d'intérêt, et on veut réitérer que c'est quelque chose qui est très important. Le Programme
d'expérience québécoise est le programme qu'on devrait privilégier. C'est des gens qui sont déjà ici, qui ont été soit
éduqués ici, qui ont un travail au Québec, qui parlent français. C'est ces
gens-là qui devraient avoir la priorité et voir leur projet d'immigration
accepté en premier.
L'autre
chose qui nous préoccupe un peu dans la déclaration d'intérêt, c'est la
possibilité, pour la ministre, d'établir des quotas de gens qui pourraient soumettre leur candidature dans le bassin
de la déclaration d'intérêt, et on se pose la question de pourquoi faire ça. Nous, on pense que plus il y a de
candidats dans le bassin, mieux c'est, plus on pourra avoir un meilleur choix, plus on sera en mesure de
sélectionner les bons ressortissants, les bons immigrants pour le Québec.
Et ce qui nous inquiète, c'est que, si on
annonce un quota ou une fermeture de la déclaration d'intérêt pour les bassins,
il va y avoir, comme il y a eu dans le passé, un achalandage incroyable, ce qui
pourrait être très difficile pour les portails informatiques comme on le
voit présentement avec le projet Québec, les gens se sont garrochés pour
soumettre leur déclaration, pour pouvoir
soumettre leur dossier d'immigration, et on a peur qu'on arrive à la même
chose. Et, encore une fois, si on
fait premier arrivé, premier servi, pour une déclaration d'intérêt, on pense
que ça pourrait nuire au Québec et à la réputation du Québec.
Le Président (M.
Picard) : En terminant, s'il vous plaît.
M. Boudreault (Jean-Sébastien) :
En terminant, juste faire attention, on trouve que la dernière partie du règlement qui donne le pouvoir à la ministre de
déléguer ses pouvoirs est très, très générale et on pense que, ça, il faudrait
que ça soit vraiment bien encadré.
Le Président (M.
Picard) : Merci. Nous débutons la période d'échange avec Mme la
ministre.
• (11 h 10) •
Mme Weil :
Bon, alors, Me Sébastien Boudreault, Me Miguel Pareja, (s'exprime en
espagnol), et je n'ai pas compris le nom de famille, mais bonjour, Sara, merci
d'être là. Vous êtes un partenaire très important du ministère, je veux le dire. J'apprécie beaucoup votre
travail, c'est important qu'on travaille en collaboration pour toujours faire
mieux. Je suis sensible à ce que vous
dites par rapport à la réputation du Québec et je sais qu'il y a eu certaines
difficultés, mais je pense qu'on est capables de surmonter ces
difficultés par des échanges ouverts en tout temps, en temps continu.
Alors, vous êtes
présents ici pour amener des améliorations, donc je vais vous poser des
questions. C'est sûr qu'il y a beaucoup de technicalités. Juste la notion
d'intérêt public, on pourrait aller là-dessus, c'est important.
Je
suis contente de voir que vous aimez cette décision qu'on ait recours au TAQ.
Ce n'est pas anodin, je pense que
c'est cette formation juridique qu'on a qui nous dit : C'est la meilleure...
Moi, personnellement, j'y crois beaucoup, hein, je suis très contente
que, le ministère de l'Immigration, on ait décidé d'aller dans ce sens-là.
Avant
d'aller dans les technicalités, juste pour rester quand même sur la grande
vision de la déclaration d'intérêt, qui met fin, finalement, au premier arrivé, premier servi parce que, dès que
ce système est en place, beaucoup des problèmes de rejet, etc., on ne les verra plus, je veux vous dire que je suis très
sensible à ce dossier des rejets. On essaie... Et nous, on pense que la solution, c'est vraiment de corriger
en amont. J'avais déjà demandé une
révision de nos façons de faire dans ce
dossier-là lorsque vous vous êtes exprimés sur la place publique, il y a eu
une révision des façons de faire. Là, il faut continuer à corriger ce
problème-là.
Maintenant,
dans le nouveau système, parce
que, là... et je l'ai même testé avec
les informaticiens du ministère, on est
capables tout de suite de dire : Ah! il manque ce document-là, la
personne peut tout de suite rajouter le document. Donc, peut-être sur cette question très technique, voyez-vous que
ça va, finalement, régler ce problème de rejet? Je sais que le système n'est pas encore en place, il reste du temps, puis
vous souhaitez une solution pour l'intérim, mais voyez-vous, donc, finalement que la déclaration d'intérêt permet justement
un dialogue en temps réel avec le candidat?
M.
Boudreault (Jean-Sébastien) :
Oui, effectivement. S'il y a ce dialogue-là... Puis c'est un
dialogue qu'on avait jusqu'en 2013. Jusqu'en 2013, les candidats
recevaient une lettre, et on était beaucoup moins strict sur le format des documents, sur la virgule qui manque, sur
le sceau qui ne semble pas traduit. Tant qu'il y a un dialogue, je crois que c'est quelque chose qui va gagner... tout
le monde va y gagner, tant le MIDI, parce que le MIDI met énormément de
ressources à rejeter ces candidats-là, à traiter des dossiers, et la réputation
du Québec.
Les intervenants comme nous, les avocats qui y travaillent, comme vous le dites, nous
aussi, on se voit comme un partenaire du MIDI, on est là pour travailler
ensemble. Le Québec reste notre chez nous, on veut avoir les meilleurs candidats qui vont venir au Québec.
Tant qu'il y a un dialogue, ce dialogue-là va être avantageux pour tous. Et, si
vous me dites qu'il y aura la possibilité de dire, bon : Il manque
tel document, et on le soumet, fantastique! On revient aux pratiques qui ont
géré, moi, les premiers 10 ans de ma pratique.
Mme Weil : Donc, je pense que
c'est important pour nous, là. L'intention, c'est, en amont, de corriger ces
problèmes, et je pense que le dialogue doit se poursuivre.
J'aimerais
vous amener sur le PEQ. Vous êtes contents, et c'est une décision qu'on a
prise, de ne pas mettre le Programme
d'expérience québécoise au sein de ce nouveau système. Vous avez peut-être
vu les commentaires de certains par rapport au système Entry Express,
Entrée express, où le programme d'expérience canadienne a été fondu, si on veut,
hein, dans le système, qui ne donne pas des bons résultats. Est-ce que
vous pourriez expliquer... Je suis tellement
d'accord avec vous, c'est pour ça que, pour
moi, c'est une orientation majeure. Dans certains pays, la Nouvelle-Zélande,
la grosse majorité des personnes qui sont des immigrants permanents
viennent justement de ce bassin d'étudiants étrangers qui sont sur place et des travailleurs temporaires
étrangers. Donc, peut-être vous entendre un peu plus sur cette approche et l'importance du PEQ.
M.
Boudreault (Jean-Sébastien) :
Bien, pour nous, c'est la voie d'avenir. C'est des gens qui arrivent ici en
tant que travailleurs temporaires, en
tant qu'étudiants, c'est des gens qui doivent avoir un niveau de français
intermédiaire avancé, donc c'est des
gens qui ont tous les outils pour pouvoir s'intégrer correctement à la société québécoise et s'intégrer en français. Donc, pour nous, c'est vraiment la place où on
devrait aller chercher le plus grand bassin de nos nouveaux immigrants.
C'est
important aussi... Peut-être qu'il faudrait regarder le PEQ et peut-être
discuter aussi avec le fédéral, parce
qu'il y a certains gens qui viennent étudier
au Québec qui, avec les nouvelles règles de permis de travail postétudes, ne
sont plus capables d'avoir ce permis de travail postétudes qui leur permettrait
de rester au Québec. Je pense, entre autres, on a les meilleures écoles d'ostéopathie, au Québec, beaucoup
d'étudiants étrangers viennent étudier en ostéopathie, sont formés
pendant sept ans ici et une fois leur sept ans terminé ne peuvent pas faire une
demande de permis de travail postétudes.
C'est quelque chose qu'on devrait corriger parce qu'après ça ces gens-là
pourraient rester ici. Ils ont déjà une adaptation, ils sont déjà sept
ans dans la province, c'est quelque chose qui est très très important.
Le PEQ doit
devenir un programme qu'on utilise de plus en plus, dont on fait la promotion
quand on va chercher des étudiants
étrangers, des travailleurs étrangers, leur dire qu'ils auront la possibilité...
beaucoup de travailleurs étrangers ne connaissent
pas nécessairement ce programme qui est un programme parallèle au programme des
travailleurs qualifiés, tout le monde
pense qu'il faut passer par les travailleurs qualifiés... ou la majorité des
gens qui arrivent ici; faire la promotion du PEQ, faire la promotion dans les écoles, chez les employeurs pour
leur dire : Bien, vous avez la possibilité de garder vos employés,
surtout qu'avec la nouvelle règle qui dit qu'on peut avoir un permis de travail
maintenant seulement pendant quatre ans
c'est important de le faire le plus rapidement possible pour que ces gens-là
puissent appliquer, obtenir leur CSQ et après ça avoir leur résidence
permanente.
Mme Weil :
Oui, vous avez raison, en effet.
Souvent, je suis allée sur les campus, surtout à l'entrée, c'est-à-dire lorsque la session commence, au mois de septembre, rencontrer des
universitaires, et il y a toujours une grande foule, hein, d'étudiants étrangers qui viennent pour mieux
connaître le programme, et vous avez raison. Alors, on a des
partenariats avec Montréal
International, qui va venir justement cet après-midi nous entretenir de ce programme
et de leur rôle pour faire de la
promotion, mais aussi avec Québec
International, donc des partenaires. Et vous, j'imagine, aussi, vous faites
connaître parmi vos clients que ce programme existe.
Peut-être
vous amener... Vous suggérez que le projet de loi contienne une partie
introductive à la loi consacrée aux définitions,
bon, vous mentionnez l'intérêt public comme exemple de termes clés à définir.
J'irai sur d'autres termes juste pour... parce qu'on a fait quand même
une recherche, au MIDI, dans le corpus législatif et on n'a pas trouvé de définition d'«intérêt public». Ce que les gens de
la législation me disent, c'est que c'est justement une notion évolutive,
qui doit rester évolutive, car la notion
d'intérêt public change au fil du temps. Donc, nous, on n'a pas trouvé d'autre
loi... Les lois qu'on a trouvées,
justement, parlent tout simplement d'intérêt public. Alors, peut-être qu'on
peut aller sur ça, mais est-ce qu'il
y a d'autres définitions que vous souhaiteriez ou que vous recommandez,
d'autres termes qu'on pourrait définir pour amener plus de clarté au projet
de loi?
M.
Boudreault (Jean-Sébastien) :
Bien, une autre chose qui est importante pour nous, c'est la distinction entre «rejet» et «refus». Il n'y a aucun endroit où
c'est expliqué qu'est-ce qu'un rejet
et qu'est-ce qu'un refus, mais la finalité de ces deux termes est complètement différente pour un immigrant.
Quelqu'un qui est rejeté perd tous ses moyens, n'a plus le droit de faire aucune demande, à moins,
comme je disais, d'aller en Cour supérieure, mais là on engendre des frais
excessifs, et seulement pour les refus on veut aller au TAQ. Dans le protocole
d'entente qu'on a entre le ministère, et l'AQAADI,
et l'ABC, on parle de décisions
négatives, et on se demande : Pourquoi ne pas garder ce verbatim-là d'une
décision négative? Parce qu'une
fois qu'on rejette ou qu'on refuse un immigrant, la finalité, c'est que cette
personne-là ne peut pas venir au Québec
ou doit soit faire une demande de révision administrative ou redéposer un
nouveau dossier. Et pourquoi faire
une distinction entre ces deux? Et, si on s'entête à faire une distinction,
bien les définir pour que les gens sachent
qu'est-ce que comprend un refus et qu'est-ce que comprend un rejet, pour savoir vers où on s'en va. Ça, c'est une
des choses, pour nous, qui est très, très importante. Je vous dirais que c'est
pas mal ça.
Et peut-être définir un peu mieux les pouvoirs
que la ministre peut déléguer, les pouvoirs de vérification, de supervision, d'enquête. C'est très, très général
et ça va à l'encontre, selon nous, dans la forme actuelle, de notre règle de
droit qui dit qu'un pouvoir délégué ne peut
pas être sous-délégué, et là on a un
petit peu de craintes à y avoir, là,
jusqu'où pourrait aller cette délégation de pouvoirs là.
Mme Weil : Peut-être, oui, vous entendre sur toute la question,
plus en détail, sur le recours au TAQ, mais aussi révision administrative, hein? Actuellement... Bien, dans le projet de
loi antérieur, il y avait cette
révision administrative; nous, on propose le recours au TAQ. Peut-être
vous entendre sur ces deux voies, soit concurrent ou, c'est-à-dire...
• (11 h 20) •
M.
Boudreault (Jean-Sébastien) :
La révision administrative, en fait, vient de notre protocole d'entente, donc
n'a jamais été intégrée à une loi, c'était dans le protocole d'entente qu'on a
avec le MIDI. Et on pense que la révision administrative
devrait rester pour les dossiers, devrait être un premier recours, c'est un
recours qui est gratuit, surtout pour les travailleurs qualifiés. Ces gens-là, souvent, sont des gens qui n'ont
pas des fortunes, qui ont déjà investi beaucoup dans leur projet d'immigration soit par
les frais de traitement, les frais de traduction, les frais de notarisation,
les tests de français. Donc, on devrait
garder un recours qui est gratuit, qui est revu par des spécialistes du ministère,
parce qu'on croit qu'il
y a quand même des spécialistes au sein du ministère
qui revoient les décisions, il faudrait bien l'encadrer, et que par la suite les gens, s'il y a un problème avec
la révision administrative, puissent aller au TAQ... ou à tout le moins pouvoir avoir le choix entre la révision
administrative, le TAQ, pour garder les deux, mais ouvrir le tout tant aux
rejets qu'aux refus. Il faut... Ou, si on décide de garder les refus seulement,
il faut s'assurer qu'on n'a plus des chiffres faramineux
comme en 2014 et en 2015. Il n'y a presque pas de refus dans ces années-là. Quand on
regarde les statistiques du ministère, les refus sont presque nuls, il y a quelques
milliers de refus, et il y a des dizaines de milliers de rejets dont les
gens perdent tout recours.
Donc, pour
nous, c'est important de garder les deux puis c'est important
d'avoir une gradation un peu des recours. On espère que pas tout le monde ira au TAQ, parce
qu'éventuellement, le TAQ, c'est de l'argent pour tout le monde, c'est beaucoup plus d'argent pour le ministère, c'est
beaucoup plus d'argent pour les immigrants, on veut peut-être éviter un peu ce qui se passe au fédéral où tout le monde va
à la cour fédérale. Il faudrait peut-être avoir... En ayant le TAQ comme
deuxième étape nous permettrait de régler une partie des dossiers, selon nous,
en révision administrative.
Mme Weil :
C'est ça, j'allais dire : Dans le nouveau système — et cette loi, évidemment, prévoit déjà ce
nouveau système parce que c'est assez rapidement qu'on veut le mettre en
place — il
n'y aurait plus cette problématique de refus
et de rejet, hein, parce qu'on inviterait les personnes au profil qui répond le
mieux à nos critères de sélection, donc ces personnes-là seraient invitées à déposer leur candidature... Mais c'est ça. Dans ce cas-là, il n'y aurait
pas de rejet, ce ne serait plus un enjeu; des refus, oui.
Mais là vous,
vous proposez donc qu'il y ait deux voies, la révision administrative et aussi
le recours au TAQ, si je comprends bien. Je mettrais plus l'accent... Il
y en aurait très peu, par exemple, parce qu'on ferait comme une présélection
des gens qui ont le profil le plus intéressant. Donc, en tout cas, on pourra
continuer à en discuter.
J'aimerais peut-être
vous amener, avec le temps qu'il me reste... Vous ne l'avez pas évoqué, je
comprends bien que vous ne voulez pas
évoquer... mais c'est un aspect qui suscite beaucoup d'intérêt parmi les
acteurs, je vous dirais, beaucoup régionaux, dans les régions, c'est les projets pilotes. Alors, vous l'avez vu, ça existe dans d'autres systèmes,
alors, ce projet pilote qui nous permet
de tester des idées à petite échelle, parce
qu'on ne veut pas... — et
vous, comme juristes en immigration,
avocats en immigration, vous allez comprendre — on
ne veut pas substituer le projet
pilote au système d'immigration, qui doit avoir beaucoup d'intégrité puis une cohérence, dans ce système-là.
Est-ce que vous avez eu l'occasion d'échanger là-dessus?
Avez-vous une réflexion ou vous n'avez pas nécessairement réfléchi à ça?
M. Boudreault (Jean-Sébastien) : On
n'a pas vraiment réfléchi à ça. Je vous dirais que, dans les dernières semaines, on a été très, très préoccupés par Mon
projet Québec, donc on n'y a pas réfléchi. Mais on pense que, s'il y a...
À brûle-pourpoint comme ça, je peux vous
dire que, s'il y a des projets
pilotes qui aideraient les gens à
arriver plus vite, à avoir une
meilleure sélection, à aller en région... L'année dernière, quand on est venus
parler, à la politique d'immigration, on
vous en avait parlé, de ça, la possibilité d'aller chercher les acteurs économiques
dans les régions pour amener des immigrants à sortir de l'île de Montréal, à sortir des grands centres et aller au
Saguenay, en Gaspésie, en Abitibi, et accélérer le processus d'immigration de cette façon-là.
Nous, on verrait ça comme un avantage pour tout le monde.
Mme Weil : C'est très bien, ça me permet de voir votre
vision des choses, donc, même si, comment dire... Votre réponse est très
complète. Si vous n'y avez pas réfléchi, ça ne se voit pas.
J'aimerais vous entendre sur... Croyez-vous que
la mise à jour des dispositions pénales permettra de mieux renforcer l'intégrité de nos programmes
d'immigration, comme juristes? Et ce n'est pas une question que je pose aux
autres, mais c'est une préoccupation,
je pense, pour tout le monde en immigration, dans tous les systèmes
d'immigration, c'est l'intégrité du
système. On a un excellent système, on veut le maintenir en tant que tel. Mais
je me demandais si vous aviez un point de vue là-dessus.
M.
Boudreault (Jean-Sébastien) :
Oui, mais, encore une fois, dans la loi c'est très, très général. On parle des
consultants, on parle qu'on aurait dû
savoir. En immigration, souvent, il y a des choses que peut-être qu'on aurait
dû savoir mais qu'après avoir demandé
à répétition, répétition, répétition ça devient difficile. On n'est pas
certains, le devoir de vérification.
On ne parle pas expressément des bureaux d'avocats, mais est-ce qu'on parle
aussi de pouvoir aller vérifier, aller dans les bureaux d'avocats? Vous
savez qu'on a des règles, on est gérés par le Barreau, on a des règles de
secret professionnel, il y a certaines choses qu'il faut faire attention.
On s'en est
peu attardés. On trouve que, oui, c'est une bonne idée de bien encadrer,
surtout de bien encadrer les consultants
en immigration. Je pense que le bât blesse depuis plusieurs années avec les
consultants en immigration parce que
des gens s'improvisent consultants en immigration. On ne s'improvise pas
avocat, on a un permis d'exercice, on a fait les études pour, tandis qu'à peu près n'importe qui peut s'improviser
consultant en immigration. Donc, ça, c'est
un petit peu... Pour nous, c'est
bien, c'est dans une bonne voie, mais il
faut bien l'encadrer, et on a une
grande crainte que tout ça soit encadré dans un règlement qui ne sera
pas publié. Donc, c'est dans la bonne voie, mais il faut le faire de façon intelligente, et je pense qu'il faut
le faire tout le monde ensemble pour que les gens sachent vers où on s'en va,
quelles sont les limites de la façon qu'on peut travailler en
immigration, pour s'assurer que ça devient... Ces mesures pénales devraient être des mesures vraiment
accessoires, des mesures qui sont rarement utilisées, qui ne devraient pas
avoir besoin d'être utilisées...
Le Président (M. Picard) : En
terminant, s'il vous plaît.
M. Boudreault (Jean-Sébastien) : ...mais
qui sont là au cas où.
Mme Weil : Je vous
remercie, Me Boudreault, et je
remercie vos collègues. Merci
beaucoup de votre participation, c'est très apprécié.
Le Président (M. Picard) :
Merci. Je cède maintenant la parole à M. le député de Bourget.
M. Kotto : Merci,
M. le Président. Mme Goessaert — est-ce
que je le prononce bien? — M. Boudreault,
M. Pareja, soyez les bienvenus, et merci pour votre contribution à
ces travaux.
Je voudrais revenir sur vos inquiétudes relativement
aux pouvoirs exceptionnels attribués au ministère, en l'occurrence au ministre, pour
établir des critères notamment en matière de sélection. Vous avez également
exprimé vos craintes relativement au manque de définitions. Relativement à l'intérêt public, il y a quelque
chose de flou là-dessus, on en convient. Pensez-vous que, si la loi-cadre, qui est déjà prête, le Conseil des
ministres en a pris connaissance, comme nous l'a dit la ministre... si la loi-cadre avait été préalablement
déposée, vous auriez une lecture moins inquiétante de ce projet de loi,
notamment dans les articulations que vous avez évoquées?
M.
Boudreault (Jean-Sébastien) :
Pour nous, la politique en
immigration, c'est beaucoup, et on l'a dit l'année passée en commission parlementaire... c'est des
voeux pieux, c'est des grandes orientations. Ce qui, pour nous, est très,
très important, c'est les règlements, c'est ça qui encadre l'immigration au Québec.
La loi donne les orientations... la politique, les grandes orientations, la loi, les grands
pouvoirs, et les règlements vont donner les définitions, vont donner la pondération, vont donner les critères de
sélection, vont donner les critères pour la déclaration d'intérêt. C'est
là qu'il faut aller regarder, mais,
pour pouvoir les regarder, il faut que ces règlements-là soient publiés.
Si, le règlement, on arrive et on met en vigueur un règlement qui n'a pas été vu à l'avance, ça veut dire que
les gens vont être affectés sans avoir idée dans quoi ils se sont embarqués, parce qu'en plus on peut avoir
des applications rétroactives, donc des gens qui ont déjà
soumis leur demande vont pouvoir voir leur demande réévaluée sur
d'autres critères. C'est là qu'il faut aller.
La politique,
pour nous, on a regardé un peu l'année dernière, on a fait des commentaires sur la politique, mais, la
politique, ce n'est pas là que, d'après nous, on trouve les
définitions. Les définitions devraient être directement dans le projet
de loi et vont être dans les règlements,
et c'est là qu'il faut vraiment s'attarder, parce que c'est ça qui va
régir la pratique au jour le jour de l'immigration, vraiment savoir qui
peut immigrer. Est-ce que moi, je peux déposer une demande d'immigration? C'est dans les règlements qu'on le retrouve,
si on se qualifie ou on ne se qualifie pas. Donc, c'est ça qu'il faut vraiment
regarder.
M. Kotto : Je vous entends. Donc, vous persistez et signez à
l'effet que les définitions doivent s'inscrire dans le projet de loi. En
préambule ou en articulation?
M.
Boudreault (Jean-Sébastien) :
Bien, pour nous, ça devrait être à
tout le moins en préambule, comme plusieurs lois,
quand on a des projets de loi, quand on a des lois, on voit, en partant il y a
des définitions, on dit qu'est-ce
qu'on entend par «rejet», qu'est-ce qu'on entend par «refus», qu'est-ce
qu'on entend par «EIMT» — quelqu'un qui ne fait pas nécessairement de l'immigration ne saura pas nécessairement c'est quoi, une
EIMT — faire
des définitions qui peuvent aider les
gens pour mieux comprendre les grandes orientations du gouvernement en immigration. On pense qu'en préambule, tant que le préambule fait partie intégrante de la
loi, comme dans plusieurs lois au Québec c'est le cas... Donc, on ne voit pas pourquoi
on ne ferait pas la même chose en immigration.
M. Kotto : Est-ce
que vous considérez pertinent le
dépôt de projets de règlement, ce qui donnerait une idée, avant l'étude article
par article au terme de cette commission?
M.
Boudreault (Jean-Sébastien) :
Ça pourrait être bien, mais c'est peut-être un peu ambitieux de dire : On va déposer des projets de règlement qui vont
être bien faits avant l'étude article
par article. Mais ces projets de règlement là devraient à tout le moins être faits... Parce que, pour nous, la loi va donner quand même
les grandes orientations. Donc, que
la loi soit déjà adoptée, et après qu'on vienne chercher les règlements,
je pense qu'on peut très bien s'y faire, si c'est fait dans une période assez rapide et courte, mais
il faut que les projets de loi soient publiés pour qu'on puisse les regarder...
les projets de règlement, excusez-moi...
M. Kotto : ...de règlement. O.K.
• (11 h 30) •
M.
Boudreault (Jean-Sébastien) :
...les projets de règlement soient publiés pour qu'on puisse les regarder et
faire l'exercice ensemble.
Souvent, à plusieurs têtes, on peut arriver... Le
ministère a une idée, a une voie. Nous, on arrive sur vraiment les gens, avec les immigrants, vous avez d'autres
groupes d'intérêts qui sont sur le terrain, qui voient quelles répercussions
pourraient avoir tel et tel règlement dans
la pratique de l'immigration, dans la recevabilité des demandes, dans
l'acceptation des immigrants, et
c'est vraiment là qu'il faut qu'on s'assoie tout le monde ensemble pour
regarder vers où on s'en va, pour accueillir les meilleures personnes.
M. Kotto :
Considérant les pouvoirs exceptionnels, discrétionnaires même, je dirais,
attribués, alloués à la ministre ou au ministre... On a un projet de loi
qui compte 125 articles, et il y en a une quarantaine qui parlent de
règlements. Est-ce que la prépublication
devrait nécessiter des échanges comme on en a ici aujourd'hui tant les enjeux
seront importants, compte tenu de la place que ces règlements occupent
dans le projet de loi, ces règlements non publiés?
M. Boudreault (Jean-Sébastien) :
Tout à fait. Nous, c'est primordial, c'est primordial de pouvoir avoir ces
échanges-là sur les règlements. Quand, exemple, on a augmenté le niveau de
français, on a augmenté le niveau de français,
on a été un peu mis devant le fait accompli. On change les compétences, il y a
beaucoup de choses qui changent, qui... Et c'est normal. L'immigration,
c'est un domaine qui bouge beaucoup. On bouge avec la société, on bouge avec les bassins d'immigration, on bouge
avec nos compétiteurs, parce qu'on a de plus en plus de compétiteurs pour
les gens qui veulent immigrer. Le Québec, moi, il y a 15 ans de ça, était
une des terres promises; maintenant, on a
d'autres compétiteurs, on a d'autres gens, d'autres pays qui ont ouvert leurs
portes. Il faut pouvoir aller sélectionner
les bons, les meilleurs, les meilleurs
pour le Québec, pour s'assurer que ces gens-là vont bien réussir, vont pouvoir s'intégrer et vont pouvoir demeurer. On veut
avoir un taux de rétention, c'est ce qui est important, on ne veut pas
que les gens utilisent le Québec comme porte d'entrée et s'en aillent vivre à
Vancouver ou à Toronto par la suite. L'important, c'est de sélectionner nos
immigrants et de les garder chez nous une fois qu'ils sont arrivés.
M. Kotto :
O.K. Je veux revenir sur ce qui a tout l'air d'une arnaque. Vous avez parlé des
sommes encaissées à hauteur de
28 millions de dollars, les dossiers rejetés en 2014, 10 000, vous
l'avez dit; en 2015, 9 000. Ces frais encaissés et qui ne sont pas remboursés, vous avez rappelé
qu'il n'y a aucun recours possible, à part poursuivre devant les tribunaux,
mais c'est un exercice herculéen. Que
suggérez-vous? Parce qu'il en va de la réputation du Québec, évidemment, vous
l'avez bien évoqué. Que suggérez-vous pour réparer?
M.
Boudreault (Jean-Sébastien) :
Je pense qu'il faut à tout le moins regarder vers l'avenir, il faut voir... Là,
on nous assure qu'il n'y aura plus ou
peu de rejets, déjà là c'est un bon pas vers l'avenir, mais il faut établir une
proportionnalité des frais. Quand on
dit qu'un immigrant, travailleur qualifié, la demande coûte 700 $, mais
qu'est-ce qui coûte 700 $? Ce
n'est pas vrai que quand un agent administratif a regardé une liste de
documents et a jugé qu'il manquait un sceau, on a demandé le document, on n'est toujours pas d'accord et on rejette
le dossier sans que le dossier ait été analysé au fond... ce n'est pas vrai que le coût réel de
cette préanalyse-là coûte 700 $. Encore moins pour les investisseurs.
Présentement, le coût de
l'administration, du dépôt d'une demande d'investisseur est de
15 000 $. Les investisseurs qui sont rejetés dans le même processus où on regarde les documents, on
regarde vitement les documents, on fait une petite analyse et on regarde,
bon, il manque une virgule ici, il manque
une traduction là, et on rejette le dossier, c'est impossible que le coût réel
de cette administration-là du dossier soit de 15 000 $. Il devrait y
avoir un remboursement en proportion des coûts réels que le gouvernement
a engendrés pour faire la révision des dossiers.
M. Kotto :
Donc, si je vous entends bien, il faut établir de façon tangible ces coûts et
il faut les mesurer et les rendre publics, par souci de transparence et,
je disais, de probité.
M.
Boudreault (Jean-Sébastien) :
Oui, pour savoir... Bon, écoutez, on regarde l'examen préliminaire, qui est
quand même une étape qui est quand même bien
avancée, combien ça coûte, combien ça coûte pour l'entrevue, combien ça
coûte pour... et avoir une idée. Pour un travailleur qualifié, quand un agent
administratif regarde le dossier et dit : Il manque tel document, telle signature, on ferme le dossier, ça ne peut
pas avoir coûté... Si tout le processus coûte 713 $ ou 763 $, cette petite partie là en coûte
peut-être 50 $, mais le reste de l'argent... Déjà qu'on dit : Vous
êtes refusé, vous n'avez aucun
recours, et en plus on encaisse votre argent, à 20 000 dossiers dans les
deux dernières années, c'est 20 000 familles qui lancent le
mot à travers le monde que le Québec s'enrichit injustement sur le dos des
immigrants.
M. Kotto : Merci.
Le Président (M.
Picard) : Merci. Maintenant, Mme la députée de Montarville.
Mme Roy
(Montarville) : Merci beaucoup, M. le Président. Bonjour à
vous tous, maîtres. Bienvenue. Merci pour votre mémoire.
Vous nous
avez dit, en terminant votre présentation : On n'a pas le temps d'en
parler, mais il faudrait aussi parler de
la délégation des pouvoirs du ministre, de la ministre en l'occurrence. Donc,
j'aimerais vous amener aux articles 80 et 81. Selon ma compréhension, mais corrigez-moi,
probablement que je me trompe, lorsqu'on lit à la page 12 de votre mémoire,
vous craignez qu'on parle d'une délégation,
mais une délégation tout autant des pouvoirs de la ministre auprès d'autres
ministres mais également auprès
d'associations, de personnes, de sociétés. Je voudrais que vous m'éclairiez
parce que, dans la façon dont
l'article 80 est écrit, je semble comprendre que la délégation est
uniquement auprès d'autres ministres ou d'autres organismes
d'administration gouvernementale et qu'à l'article 81 on dit que la
ministre peut conclure des ententes avec des
associations, des sociétés, des personnes et non déléguer des pouvoirs. Mais
corrigez-moi. Vous en parlez à la page 12 et vous dites, pour le
bénéfice des gens qui nous écoutent : «Dans la présente loi, il y a
plusieurs articles préoccupants relativement
à la sous-délégation des pouvoirs ministériels. Selon l'article 81, les
pouvoirs du ministre de déléguer à
une entité de leur choix nous semblent à la fois larges et vagues en ce qui
concerne la possibilité de nommer non
seulement un autre ministre pour administrer la loi et les règlements connexes,
mais "une association", "une société", "une personne", "un organisme"
sans pour autant préciser la nature de ceux-ci, ni leurs qualités.»
Pourriez-vous m'expliquer? Pour ma part, j'y voyais plus une entente
qu'une délégation, à l'article 81.
M.
Boudreault (Jean-Sébastien) :
Bien, nous, ce qu'on en a compris, et, si on est erronés, bien c'est parfait...
Mme
Roy
(Montarville) : Non, ce n'est pas ce que je dis, là,
ce n'est pas ce que je dis. Je veux que vous m'expliquiez.
M.
Boudreault (Jean-Sébastien) :
Non, non, non, mais, si on est dans l'erreur, c'est parfait, puis on est bien
contents de ça. Nous, la façon dont
on l'avait vu, quand on parle d'un organisme de l'administration
gouvernementale... Encore une fois,
le manque de définitions fait qu'on ne sait pas trop à qui on parle, et c'est
un peu ça qui nous a peut-être... Si on avait défini qu'est-ce qu'un organisme de l'administration
gouvernementale... Est-ce qu'on peut créer... On a créé l'organisme qui gère les consultants, on a créé le...
Il y a des organismes qui peuvent être créés à gauche et à droite, du
ministère.
Et, comme je
vous dis, si on l'a mal compris, mea culpa, et puis on est bien contents de
savoir que ça ne peut pas être
délégué à n'importe qui, mais, pour nous, c'était une préoccupation. Et
probablement que le manque de définitions ou l'aspect qui semble très, très large, pour nous, de délégation des
pouvoirs nous posait un problème en droit, avec la règle de droit que les gens connaissent, là, delegatus
non potest delegare. Donc, il faut faire attention comment on délègue les
pouvoirs de l'administration publique.
Mme Roy
(Montarville) : Et à cet égard vous avez tout à fait raison.
Mais heureusement on a discuté de la chose ici, parce que, comme je vous dis, nous lisions ça dans votre mémoire,
et j'avais l'interrogation parce qu'effectivement je n'aurais pas aimé
savoir que des pouvoirs de la ministre aient pu être délégués de façon aussi
large.
Maintenant,
si on revient à la page 7, en parlant des déclarations d'intérêt, ce qui
est la nouveauté avec le projet de
loi n° 77, vous nous dites des choses très intéressantes, Avantages
théoriques : «Ce système offre, en théorie, plusieurs avantages pour toute société d'immigration, comme
le Québec. De prime abord, seulement les candidats qui répondent le plus aux besoins économiques et sociologiques
sont invités. En d'autres termes, seulement les "meilleurs" candidats
peuvent immigrer, ce qui n'est aucunement le cas dans un système de
"premier arrivé, premier servi".»
Cependant,
quand on va à la page suivante, vous nous émettez certaines réserves et vous
avez des craintes à l'effet qu'on se
ramasse effectivement avec un premier arrivé, premier servi même avec les DI.
Si je comprends bien, corrigez-moi si
je me trompe... Entre autres vous nous dites, à la page 8, un, deux,
troisième paragraphe : «Deuxièmement, l'expérience au Canada avec le système fédéral de l'Entrée
express nous apprend que les candidats invités ne sont pas nécessairement
les meilleurs candidats.» Alors, je crois
comprendre que c'est ce que vous craignez ici avec le DI, si on y va avec
premier arrivé, premier servi. Pourriez-vous élaborer... ou je me
trompe? Allez-y, je vous écoute.
• (11 h 40) •
M.
Boudreault (Jean-Sébastien) :
En fait, au fédéral, c'est un système de points. Une personne qui va avoir un
niveau de scolarité élevé, qui va avoir le
niveau d'anglais, qui va aller chercher beaucoup de critères va aller chercher
bon an, mal an, présentement,
450 points. Si elle a... Une
personne qui a une offre d'emploi validée, donc qui peut être une personne qui ne parle pas nécessairement
français mais qui a réussi à valider parce que
dans un certain secteur on avait
besoin de ses compétences, ou, au
niveau fédéral, ne parle pas nécessairement anglais, en partant, en ayant une
offre d'emploi validée, ça lui donne
600 points. Donc, la personne qui a tous les critères qu'on recherche, qui
dans cette optique-là seraient, au
Québec, le français, une scolarité, aurait un certain nombre de points, mais,
en allant valider une offre d'emploi, pourrait
ne pas parler français, ne pas connaître le Québec, avoir un emploi très, très
spécifique dans un milieu très, très spécifique et se voir accorder une
priorité.
C'est ce qui
se passe présentement au fédéral, c'est que ce n'est pas nécessairement les
personnes qu'on recherche vraiment,
avec les critères qui ont été établis par le gouvernement fédéral, qui passent
en premier, et on avait la crainte... Et
ça, c'est là qu'on s'est dit : Il faut faire attention de ne pas recréer
les mêmes erreurs qu'au fédéral et, de ça, aussi sortir le PEQ. Comme Mme la ministre l'a dit tantôt, au
fédéral ils ont intégré le PEC, le programme d'expérience canadienne, à Express Entry, et on avait une crainte que ça soit
ça qui se fasse au Québec. Si ce n'est pas le cas, fantastique, tant mieux!
On aura appris des erreurs du fédéral et on aura un
programme d'immigration qui sera beaucoup plus compétitif et beaucoup plus
efficace.
Mme Roy
(Montarville) :
Donc, s'assurer qu'avec la DI ce ne sera pas premier arrivé, premier servi,
mais les gens les plus compétents et les plus... et répondant, naturellement,
aux standards qui auront été élaborés. Je vous suis.
M.
Boudreault (Jean-Sébastien) :
À tous les critères, pour s'assurer que, si jamais la personne perd son
emploi dans le domaine où elle a obtenu une offre d'emploi validée,
bien, puisse se retrouver un emploi. Si la personne parle français, a déjà une
formation qu'on recherche... C'est ces gens-là qu'on veut aller voir.
L'autre problématique
qu'on a vue, c'est que la ministre a le pouvoir, dans le projet de loi, de
mettre un stop au nombre de demandes
qui pourraient être déposées dans le bassin, qu'on appelle, de la déclaration
d'intérêt, et là ça pourrait recréer...
Si on annonce que le 30 avril le bassin sera fermé pendant x nombre de
temps, les gens vont se garrocher, et là ça va être encore pas
nécessairement les bonnes personnes...
Le Président (M. Picard) : En
terminant, s'il vous plaît.
M.
Boudreault (Jean-Sébastien) :
...qui vont réussir à rentrer dans le bassin d'où on peut piger les futurs immigrants.
Mme Roy
(Montarville) :
Je vous remercie infiniment.
Le Président (M. Picard) :
Merci. Donc, je vous remercie pour votre contribution.
Et je
suspends les travaux jusqu'après les affaires courantes, vers
15 h 30, où la commission poursuivra son mandat.
(Suspension de la séance à 11 h 42)
(Reprise à 15 h 48)
Le
Président (M. Picard) :
À l'ordre, s'il vous plaît! La commission reprend ses travaux. Je demande à toutes
les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs
téléphones cellulaires.
Cet après-midi, nous entendrons Montréal
International, le Comité sectoriel de main-d'oeuvre de l'industrie maritime et
Société de développement économique du Saint-Laurent et, pour terminer, la
ville de Gatineau.
Puisque
nous avons commencé les travaux avec quelques minutes de retard, j'ai besoin
d'un consentement pour poursuivre au-delà de l'heure prévue. C'est
habituel. On s'excuse pour nos témoins, mais on doit attendre l'avis des
travaux qui est donné au salon bleu, c'est pour ça que nous étions prêts ici
mais nous devions attendre.
Un simple
petit rappel pour les parlementaires. Ce matin, il y a eu des propos, là, qui
étaient sur la frontière des propos parlementaires. J'aimerais qu'on continue toujours dans la bonne entente, à discuter correctement. Donc, un petit rappel. Je ne suis pas ici pour faire de la
discipline, mais, s'il faut en faire, on sortira le règlement.
Donc, je
souhaite la bienvenue aux représentants de Montréal International. Je
vous invite à vous présenter ainsi que
les personnes qui vous accompagnent. Vous disposez d'un moment de
10 minutes, va s'ensuivre des échanges avec les parlementaires. La
parole est à vous.
Montréal International
(MI)
M. Bolduc
(Hubert) : Bonjour à tous et
à toutes. Je sais que nous avons 10 minutes, donc je vais aller directement à l'essentiel. Donc, M. le
Président, Mme la ministre, Mmes et MM. les députés. Je m'appelle Hubert Bolduc et je
suis le président-directeur général de Montréal International.
M'accompagnent aujourd'hui M. Martin Goulet, directeur de mobilité internationale, et M. Francis
Langlois, analyste aux études économiques. J'aimerais tout d'abord vous remercier de nous avoir
invités et de nous donner l'opportunité de vous donner quelques commentaires
sur ce projet de loi crucial pour Montréal mais aussi pour le Québec
en général.
Montréal International agit comme un moteur économique
du Grand Montréal pour attirer de la richesse en provenance de l'étranger tout en accélérant la réussite de ses
partenaires et de ses clients. Nous attirons les entreprises étrangères,
les organisations internationales et des talents stratégiques dans la grande
région de Montréal.
• (15 h 50) •
Le Grand Montréal n'est pas la seule région
métropolitaine qui peut compter sur une telle organisation. En effet, la plupart des grandes villes de la planète
disposent de telles agences. 4 000 agences d'attraction d'investissements directs étrangers et de talents
se font compétition sur la planète. Elles sont essentielles pour la
compétitivité, la croissance, la richesse et, bien sûr, pour l'avenir
des métropoles qu'elles représentent.
Il y a
20 ans, il n'y avait que 800 agences qui faisaient notre travail.
Elles se sont donc multipliées par cinq, et ça démontre toute la
compétition qu'il y a à l'étranger dans l'attraction d'investissements
étrangers.
Depuis sa
création, Montréal International a contribué à la venue et à la rétention de
9 000 travailleurs stratégiques internationaux; à l'attraction de projets d'investissement direct
étranger d'une valeur de 10 milliards de dollars dans le Grand Montréal, lesquels ont entraîné la création
ou le maintien de près de 52 000 emplois; à l'établissement de près
de la moitié
des quelque 60 organisations internationales présentes dans la métropole.
Je vous souligne au passage que Montréal est au troisième rang en
Amérique du Nord dans les organisations internationales après les petites
villes que sont Washington et New York et
que Montréal compte plus d'organisations internationales que Vancouver et
Toronto réunies, donc nous sommes très bien positionnés à cet effet.
L'immigration fait inévitablement partie de
l'équation lorsque nous rencontrons les investisseurs étrangers. La question nous est régulièrement posée :
Est-ce que Montréal possède un bassin suffisant de talents disponibles? Sinon,
est-ce possible de recruter à
l'international des travailleurs stratégiques? Est-ce que ceux-ci peuvent entrer
en fonction rapidement? Donc, bref,
le talent stratégique est au coeur des préoccupations des gens d'affaires. Cet
atout est d'autant plus central que
les secteurs qui sont les moteurs de la création d'emplois du Grand Montréal,
ce sont les secteurs de haut savoir.
Le mémoire
que nous vous présentons repose sur un grand principe : notre système
d'immigration doit être flexible, rapide
et accessible. L'immigration ne doit pas être un frein à la venue
d'investissements étrangers, bien au contraire. Nous devons nous démarquer des autres juridictions, qui
sont, elles aussi, à la recherche de talents stratégiques, et nous donner
les moyens de nos ambitions.
Le Grand
Montréal étant bien ancré dans l'économie du savoir, son développement
économique passe nécessairement par
le développement de ses secteurs de haute technologie. Les entreprises évoluant
dans les secteurs de haute
technologie font souvent appel à des travailleurs temporaires spécialisés pour
combler les pénuries de main-d'oeuvre, pensons
au secteur des technologies de l'information notamment, du jeu vidéo, des
effets visuels, de développement de logiciels,
des centres de solutions, des services financiers, etc. Et je vous signale au
passage qu'hier nous avons, avec le premier
ministre du Québec, annoncé la venue à Montréal de Cinesite, qui était déjà
présente au Québec, et qui va ajouter 500 emplois dans le secteur
non pas du jeu vidéo mais bien de l'animation, et donc tous les problèmes que
je vous ai énumérés avant puis qu'on va voir plus tard sont les enjeux auxquels
cette entreprise va faire face.
Montréal
International accompagne plusieurs de ces entreprises dans leurs démarches de
recrutement à l'étranger. La grande
majorité des demandes de certificat d'acceptation du Québec pour lesquelles Montréal
International est impliquée sont faites pas l'entremise du processus simplifié
d'obtention du certificat d'acceptation et de l'étude d'impact sur le marché
du travail, cette procédure allège les
exigences pour une liste de professions en pénurie établie par Emploi-Québec.
Jusqu'à présent, ce programme s'est
montré efficace et a permis de réduire les délais d'embauche des entreprises,
notamment celles dans nos secteurs de
pointe de la métropole. Nous vous encourageons fortement à conserver ce
processus simplifié, car il s'agit
d'un avantage très concurrentiel pour attirer l'investissement étranger dans le
Grand Montréal et ailleurs au Québec.
Le projet de
loi vise notamment à introduire un modèle d'étude des demandes qui s'inspire de
celui mis en place par le gouvernement fédéral dans le reste du Canada
en janvier 2015 et qui est basé sur la déclaration d'intérêt d'un ressortissant étranger. À son article 41, le
projet de loi mentionne que la déclaration d'intérêt sera applicable aux
demandes de résidence temporaire et
permanente. Nous croyons que les demandes de résidence temporaire doivent être
exclues du système de déclaration
d'intérêt. Imposer cette démarche aux demandes de résidence temporaire
viendrait ajouter une étape supplémentaire,
rendrait le processus plus complexe et augmenterait les délais de traitement.
Les employeurs qui recrutent à
l'étranger ont des besoins urgents, nous devons chercher à tout prix à
simplifier et à accélérer les démarches. Cela est d'autant plus important que les secteurs
stratégiques que sont les effets visuels et les jeux vidéo sont des secteurs où
les délais de réalisation des projets
sont extrêmement serrés et peuvent entraîner la perte de contrats s'ils ne sont
pas respectés. Dans le cas de
Cinesite, par exemple, ils doivent produire neuf films en cinq ans, et donc,
les talents stratégiques, ils doivent les avoir le plus rapidement
possible.
Les récentes
modifications apportées par le gouvernement du Canada au Programme des
travailleurs étrangers ont créé beaucoup d'incertitude et de lourdeur pour les
employeurs, ajouter une étape supplémentaire compliquerait encore plus la vie de ceux-ci. Sur le terrain, nous les
sentons échaudés, et ils se disent mal compris par les autorités. Les
entreprises souhaitent que les choses
arrivent rapidement. Dans le reste du Canada, Emploi et Développement social
Canada a mis en place une procédure
accélérée en 10 jours ouvrables pour le traitement des dossiers de
professions en forte demande et pour
les postes les mieux rémunérés. Il est essentiel que le Québec bénéficie d'un
tel privilège. Une décision commune devrait
être rendue en quelques jours par le ministère de l'Immigration, de la
Diversité et de l'Inclusion — le MIDI — et Emploi et Développement social
Canada.
Comme je le
mentionnais plus tôt, ce projet de loi vise notamment à introduire un modèle
qui s'inspire de celui mis en place
par le gouvernement fédéral dans le reste du Canada en janvier 2015 et qui est
basé sur la déclaration d'intérêt d'un
ressortissant étranger. Les signaux reçus sont à l'effet que le nouveau système
canadien ne facilite pas la rétention des
travailleurs temporaires stratégiques et des étudiants étrangers désirant
demeurer de façon permanente au Canada. Or, ceux-ci possèdent incontestablement un potentiel d'intégration et de
réussite très élevé. Nous croyons donc que le nouveau système québécois devrait faciliter leur
rétention. L'immigration doit être un accélérateur de développement économique
et non un obstacle à la croissance des entreprises du Québec.
Bien plus que la moitié des étudiants et
travailleurs étrangers aimeraient, aimeraient rester au Québec, mais seulement un étudiant international sur cinq
dépose une demande de certificat de sélection du Québec. Pour les travailleurs
étrangers, c'est un sur six. Nous n'arrivons
pas à les retenir. Nous avons le Programme de l'expérience québécoise qui
fonctionne bien, mais il est mal connu. En
2015, Montréal International a réalisé une étude sur les facteurs associés à la
rétention des immigrants temporaires dans le
Grand Montréal en partenariat avec le Conseil Emploi Métropole. Lorsque nous sondons les travailleurs étrangers et
étudiants internationaux, ils nous mentionnent que, un, les processus
d'immigration, temporaire ou
permanent, sont méconnus et considérés complexes, il y a une confusion liée aux
réformes récentes, les délais se sont allongés par l'octroi de la
résidence permanente par Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada, et, enfin, le niveau de français exigé
limite l'obtention du certificat de sélection du Québec, et qu'il est difficile
d'atteindre le niveau requis, intermédiaire avancé, dans les délais impartis.
Ajouter
une étape supplémentaire de déclaration d'intérêt ne favoriserait pas leur
rétention, bien au contraire. Nous croyons que nous devons conserver le
Programme de l'expérience québécoise, le PEQ, et le soustraire du système de
déclaration d'intérêt.
Dans les
derniers jours, des acteurs du développement économique ont demandé que soit
révisé le niveau de français requis
dans le cadre d'une demande de résidence permanente. Montréal International
croit qu'il est primordial de distinguer les demandeurs à l'extérieur du Québec et ceux qui y résident de manière
temporaire, soit les étudiants étrangers et les travailleurs étrangers. Les demandeurs vivant à l'extérieur du Québec
constituent notre principal bassin de recrutement. Le niveau de français requis doit être maintenu
notamment afin d'améliorer leur employabilité à leur arrivée au Québec, soit intermédiaire avancé. Le niveau de français
requis pour les demandeurs résidant au Québec sous un statut temporaire devrait revenir au niveau de français exigé en
février 2010 lors de la mise en place du Programme de l'expérience québécoise,
soit intermédiaire débutant.
Les
travailleurs temporaires et les étudiants étrangers sont facilement
employables. Ils ne rencontrent pas les mêmes obstacles que les demandeurs résidant à l'extérieur du Québec dans la
reconnaissance de leurs diplômes et de leurs acquis — et on
sait combien c'est difficile et des fois long, la reconnaissance des diplômes.
Ils sont déjà intégrés à la société québécoise,
ils sont déjà en mode de francisation à l'intérieur des universités ou des
entreprises qui les emploient. Mais...
Le Président (M. Picard) : En
conclusion, s'il vous plaît.
M. Bolduc
(Hubert) : Mais le temps
manque. Un baccalauréat ne dure que trois ans, une maîtrise, deux ans, et
certains permis de travail sont limités à quatre années.
En 2014‑2015,
environ 6 800 certificats de sélection ont été délivrés en vertu du
PEQ, selon le dernier rapport annuel
de gestion du MIDI. De ce nombre total des certificats délivrés, 2 600 ont
été remis à des étudiantes et étudiants étrangers diplômés du Québec et 4 200 à des travailleurs et travailleuses
temporaires spécialisés ainsi qu'au nom de leurs familles. Nous présumons que plus de la moitié étaient francophones et
nous croyons que possiblement 2 000 étudiants, travailleurs
spécialisés pourraient bénéficier du processus accéléré.
Je termine...
pas vraiment, mais je vais terminer avec ce paragraphe : Prenons tous les
moyens pour retenir les talents stratégiques...
Le Président (M. Picard) : ...continuer,
on va prendre ça sur le temps gouvernemental.
• (16 heures) •
M. Bolduc (Hubert) : ...présents sur
notre territoire et surtout faire connaître le Programme de l'expérience québécoise. J'attire d'ailleurs votre attention au
projet de rétention des étudiants étrangers proposé par Montréal International,
des actions simples qui pourraient, nous
l'espérons, faire la différence dans la rétention de ces nouveaux diplômés, et
nous aurons l'occasion d'en reparler.
Pour les demandeurs qui sont à l'extérieur du Québec, il est primordial de les choisir en fonction des besoins du marché du travail. La grille de sélection actuelle favorise
certaines formations. Ce nouveau système de sélection devrait
aussi prendre en compte les professions en situation de pénurie ou en forte
demande afin de répondre aux besoins de main-d'oeuvre de nos secteurs de pointe. Montréal
International crée des écosystèmes porteurs, structurants et
qui sont en forte croissance à l'échelle internationale, c'est pourquoi
nous devons continuer de les appuyer.
On pourrait notamment
envisager d'importer la liste des professions du processus simplifié dans le système
de sélection permanente. Un alignement avec la liste du processus
simplifié pour les demandes temporaires pourrait être envisagé avec le système de sélection permanent. Le demandeur
bénéficierait ainsi d'un traitement accéléré pour la demande de séjour
permanent, ce qui est en soi logique et souhaitable.
Les deux
autres points que je voudrais souligner sont notre accord au recours au Tribunal administratif en cas de refus, nous sommes d'avis que c'est une bonne
idée. Et, en terminant, je veux vous assurer que, les points que nous avons
mentionnés ici, nous allons, dans le cadre
de représentations avec le gouvernement fédéral, militer pour que celui-ci les
intègre. Et j'attire votre attention sur les
quatre points dont nous allons faire des représentations : les délais
rencontrés dans le cadre du Programme
des travailleurs étrangers, le plan de transition exigé, la limite de quatre
années pour certains permis de travail, et j'en passe. Merci.
Le Président (M. Picard) :
Merci. Je cède maintenant la parole à Mme la ministre.
Mme Weil :
Oui. Alors, bienvenue et... Alors, bienvenue. Je souhaite donc la bienvenue à
M. Bolduc, M. Goulet et
M. Langlois. Merci beaucoup de votre participation parce que ça va nous
permettre un peu peut-être de dresser le portrait de Montréal, les régions, la situation de besoins
de main-d'oeuvre qui a un profil différent à Montréal, c'est ce qu'on ressent.
Vous nommez
les secteurs de pointe. Ce matin, c'est la Centrale des syndicats du Québec qui
mettait en doute cette pénurie et
qu'on serait capables de répondre à tous les besoins de main-d'oeuvre, que
l'immigration ne semble pas être une
solution. J'ai bien clarifié que c'est 16 % des besoins d'ici 2021 en
vertu de laquelle l'immigration est une réponse, ce n'est pas tous les besoins. J'aimerais vous entendre parler de
surtout ce que vous voyez à Montréal, le Grand Montréal, hein, vous occupez tout le territoire, là où vous
remarquez déjà des pénuries, autant dans les secteurs de pointe peut-être
que d'autres secteurs aussi.
M. Bolduc
(Hubert) : Peut-être un
commentaire, puis ensuite je céderai la parole à mes collègues. Je vais revenir
avec l'exemple de Cinesite parce qu'il est
très frais. Quand Cinesite a annoncé son implantation au Québec, elle a dit
qu'elle allait embaucher 200 employés en
quatre ans. 18 mois plus tard, elle en avait 250 à son embauche. Pour
procéder à l'embauche de 250 employés,
elle a dû faire 2 500 entrevues. Et, selon eux, malgré le fait qu'ils
ont été capables d'en trouver très
rapidement, ils ne seront pas capables, dans les 500 prochains emplois
qu'ils doivent créer, de recruter localement, à moins qu'on mette en place un programme de formation très, très
flexible avec Emploi-Québec pour être capable de combler les besoins de
l'entreprise.
Mme
Weil : Quel pourcentage de ces emplois a été comblé par des
gens du Québec et quel pourcentage de l'étranger? Ils ont recruté à
l'international pour combler?
M. Bolduc
(Hubert) : À peu près 50 %.
Mme
Weil : 50 %, donc, dans tous les secteurs, là, que vous
avez mentionnés, là, dans ces secteurs de pointe.
M. Bolduc
(Hubert) : Exact.
Mme Weil :
50 %. Bien, on y viendra... Bien, c'est peut-être maintenant qu'on
pourrait... Vous évoquez les modifications
au Programme des travailleurs temporaires et que vous allez faire des
représentations. Je pense que c'est important
de vous entendre parler de ça parce que vous êtes vraiment au coeur de cette
réforme, hein, l'impact de cette réforme
sur le recrutement des entreprises. On le voit à Montréal, mais on le voit
aussi en région. Moi, j'ai eu beaucoup de représentations d'entreprises
qui disent que, cette réforme, il y a des pénuries.
Donc,
vous suivez les travaux du projet de loi n° 71, parce que vous parliez de
la procédure simplifiée, mais on aura des portraits régionalisés, c'est
l'objectif du projet de loi n° 71, donc, à Emploi-Québec, par la
Commission des partenaires du marché du travail. Donc, il faut voir un peu les
deux projets de loi ensemble, en même temps, donc l'adéquation sélection-marché du travail et adéquation formation et
marché du travail. Donc, vous avez évoqué les deux, vous avez dit : Soit par la formation soit
par la sélection. Donc, il faut
voir un peu les deux projets de loi, le mandat du ministère de l'Immigration
et le mandat du ministère de l'Emploi, du MESS, un peu en même temps. L'idée,
c'est de s'attaquer à ce problème de pénurie
ensemble rapidement pour répondre aux besoins régionalisés, et c'est
un peu au coeur de ce problème avec le PTET, les modifications qui ont été
apportées. Donc, nous, notre objectif, comme gouvernement, c'est d'avoir un portrait régionalisé.
Je veux vous rassurer
donc, oui, qu'on va maintenir donc dans notre système de déclaration d'intérêt
pour connaître les besoins du marché du travail. Ce serait régionalisé en vertu de cette nouvelle capacité d'Emploi-Québec de vraiment pouvoir identifier les besoins sur une base
régionale.
Je
veux vous rassurer que le PEQ va rester à l'extérieur. On a l'avantage, hein,
de voir comment ça fonctionne au niveau fédéral. Vous avez peut-être lu le rapport de La Chambre de commerce du Canada, donc, qui explique
très, très, très bien ces problématiques, les deux problématiques ou la
réforme du Programme des travailleurs temporaires et le fait d'avoir effacé, ou enlevé, ou... en tout cas, le
programme d'expérience canadienne qui semble avoir disparu. Donc, on avait
déjà cette notion-là de garder le PEQ distinct. Moi, je l'avais gardé comme
programme distinct.
Mais peut-être vous
entendre, parce que... Le PEQ, comment vous, vous faites la promotion? C'est
tellement important, je suis tellement
d'accord avec vous, on est sur la même page sur cette question. Je le mentionne
souvent, je l'ai mentionné quand vous
êtes venus en commission parlementaire, certains pays, comme Nouvelle-Zélande,
85 % de leur immigration permanente est issue de la voie
temporaire. Donc, peut-être vous entendre sur les stratégies que vous avez, parce qu'on a un partenariat avec vous, pour
faire connaître vos ambitions par rapport à mieux faire connaître ce programme. On sait que le potentiel est énorme, on
a juste à regarder ailleurs, on sait que le potentiel est énorme, votre sondage
le montre. Donc, comment on fait... Nous, on a fait cette même étude
nous-mêmes, 30 % qui se disaient intéressés
par l'immigration permanente au Québec, mais, vous, ce que vous rajoutez, c'est
le passage à l'acte, au fond, la demande,
et là c'est réduit, c'est un sur cinq. Donc, vos stratégies, ce que vous
préconisez pour rejoindre ces gens puis les convaincre de faire la
demande, quelles sont-elles?
M. Bolduc (Hubert) : Bien honnêtement, j'ai deux personnes à côté de
moi qui sont des experts dans le secteur. Alors, je ne sais pas lequel
des deux veut répondre à la question de la ministre, mais... Vas-y, Martin.
• (16 h 10) •
M. Goulet (Martin) : D'abord, j'aimerais souligner, oui, c'est vrai, on
est venus souvent vous rencontrer ici, à l'Assemblée nationale, et
souvent on a répété que l'immigration devait être un outil de levier
économique. Et de voir dans le préambule du projet de loi inscrire que l'immigration
peut contribuer à la prospérité du Québec, franchement, félicitations! L'immigration
doit être un outil qui est un levier de développement économique, c'est clair.
Tout à l'heure, vous avez fait référence au terme «pénurie». Le terme «pénurie» est
parfois galvaudé. Lorsqu'on parle avec
les entreprises, on nous parle de pénurie, on nous parle de
professions en forte demande. Dans les faits, qu'est-ce que c'est? Ce sont des professions
pour lesquelles les candidats sont rares sur le marché du travail et en grande
demande. Ce sont des candidats qui
ont une expérience d'au-delà de cinq ans, c'est ce qu'on voit, nous, c'est les travailleurs étrangers qu'on voit arriver
dans la grande région de Montréal, des programmeurs, des développeurs de logiciel, des animateurs
2D, 3D. C'est le type de travailleur
qui vient s'établir au Québec, c'est la catégorie d'employé qui est
recherchée par les entreprises de
haut savoir. C'est d'ailleurs ces travailleurs spécialisés qui sont visés par le Programme
d'expérience québécoise. C'est ces gens-là qu'on rencontre, c'est ces
gens-là qu'on informe au niveau du programme.
Maintenant, la difficulté, c'est d'aller
rejoindre ces travailleurs-là. Tout à l'heure, on faisait référence au secteur des effets spéciaux au niveau
du cinéma, vous avez un projet, vous avez six mois, huit mois pour livrer un
projet. Alors,
le travailleur arrive au Québec, déjà on
lui dit : Voici les objectifs et voici le livrable. L'immigration demeure, à ce moment-là, très accessoire. S'il est accompagné par un
conjoint ou par une conjointe, on va d'abord voir si on aime Montréal, on va d'abord
voir si on aime le Québec, on va essayer de comprendre la façon de
fonctionner des Québécois, mais l'objectif
reste le même, livrer le film, et par la suite... Donc, notre
défi à nous, c'est d'aller rejoindre ces travailleurs-là, de leur expliquer la procédure, qui est méconnue.
Et là celle du Québec, naturellement, pour le Programme d'expérience québécoise, peut paraître
parfois complexe, mais il y a aussi l'autre portion qui est celle avec le gouvernement canadien, qui est la demande
de résidence permanente. Donc, c'est de concilier cette information-là et de le livrer, je dirais, de la façon la plus simple
possible.
Mme Weil : Pour ce qui est des
diplômés, je sais qu'il y a eu un projet entre... — c'est les grandes,
grandes entreprises — de
fournir des stages à des étudiants étrangers qui sont ici, au Québec,
pour leur trouver, pendant les vacances d'été, par exemple, ou durant le cours de leurs études, des stages
au sein des entreprises pour les garder ici, il y a eu
des projets dans ce sens-là. Est-ce que vous, vous avez déjà pensé à cette stratégie,
de faire la promotion de ce genre de stratégie, faire le lien avec les entreprises?
Est-ce que vous êtes dans une position d'être capables de faire ce maillage-là?
M. Goulet
(Martin) : Montréal
International n'a pas ce type d'activité là. Cependant, dans le cadre de notre
étude effectuée avec le Conseil
Emploi Métropole, lorsqu'on a sondé les étudiants sur, je dirais, les points
positifs pour leur rétention au
Québec, un des éléments importants était l'accès au marché de l'emploi. Et on a
cherché à voir un peu ce que les universités offraient comme services,
et ce qu'on a vu, effectivement, c'est que l'offre de service offerte par
chacune des universités ou des grandes écoles est vraiment disproportionnée.
Donc, on offre parfois, dans le cadre de programmes
coopératifs, ce type de stage là. Pour ce qui est d'autres universités, bien,
l'offre est nulle. Donc, c'est difficile pour les étudiants d'avoir
accès au marché du travail ou d'avoir accès à des stages.
Mme
Weil : Je vais permettre... j'avais des questions concernant...
Filo, puis ensuite je vais revenir à la reconnaissance des compétences, si
vous touchez à ces questions-là.
Mme
Rotiroti : Ah!
pour la reconnaissance des compétences.
Le Président (M. Picard) :
Mme la députée de Jeanne-Mance—Viger.
Mme
Rotiroti : Oui,
merci. Alors, bienvenue. Merci beaucoup d'être là.
J'ai eu le
mandat du premier ministre de travailler sur tout le dossier de la
reconnaissance des compétences et des acquis.
On sait que ça cause un problème. Une fois que l'immigrant arrive ici, bien il
se trouve dans une situation où est-ce que
ses compétences n'ont pas été reconnues ou partiellement reconnues, et l'accès
sur le marché du travail devient très difficile.
Alors, on est en train de regarder avec tous les partenaires concernés, il y a
un comité interministériel qui a été mis
en place, et je vous dirais que tous les ministères sont là, incluant les
ordres professionnels, le Conseil interprofessionnel, et pour regarder comment qu'on pourrait en amont
reconnaître leurs compétences, même avant qu'ils arrivent ici, et aussi donner la possibilité d'être capable de suivre
certaines formations en ligne via l'ordre professionnel concerné ou qu'ils
puissent avoir même une reconnaissance complète même avant qu'ils arrivent ici.
Est-ce que,
pour vous, vous voyez un avantage en faisant ça? Et est-ce que vous avez des
suggestions qu'on pourrait peut-être
aborder dans ce comité-là pour améliorer toute cette notion de reconnaissance
de compétences et des acquis, parce que ce n'est pas pareil? Alors,
j'aimerais ça vous entendre là-dessus, si...
M. Goulet
(Martin) : Écoutez, on n'a
pas abordé cette question-là dans notre mémoire parce que ce n'est pas vraiment, si je peux dire, notre «core business»,
mais ce que je peux vous dire, et c'est un peu les commentaires qu'on a faits déjà en préambule, si nous pouvions retenir
les étudiants étrangers qui sont diplômés du Québec en plus grand nombre,
si nous pouvions retenir les travailleurs étrangers qui ont vu reconnaître
leurs acquis, là, leurs expériences par des travailleurs
québécois, si on pouvait doubler ce nombre-là, passer de 6 000 à
12 000, le travail serait beaucoup moins ardu, de un.
De deux, ce
que l'on dit dans notre mémoire, pour les gens qui à partir de l'extérieur du
Québec veulent venir s'établir au
Québec, on a une grille de sélection actuellement qui favorise certaines
formations. On sait très bien que les métiers
de l'avenir n'ont pas nécessairement une formation, appelons ça, classique, ce
sont plutôt des professions. Les artistes
2D, 3D, ce n'est pas des gens qui ont nécessairement un diplôme en design
graphique, c'est des gens qui ont une expérience, ce sont des artistes,
ils ont un porte-folio. Alors, si on pouvait sélectionner maintenant nos
ressortissants étrangers non pas sur une formation, mais bien sur leurs
compétences, ce qu'ils font dans leur pays d'origine...
Mme
Rotiroti :
Parfait. Merci.
Le Président (M. Picard) : Il
reste une minute.
Mme Weil :
Les projets pilotes, vous l'avez vu, je ne sais pas si vous avez une réaction
par rapport à cette idée d'avoir des projets pilotes. L'idée, c'est des
projets pilotes restreints, 500 personnes maximum, pour tester des idées.
Donc, tant
Montréal que les régions, les profils sont différents. Qu'en pensez-vous? Je ne
sais pas si vous avez analysé cette question.
M.
Goulet (Martin) : Écoutez,
je dois vous dire qu'on en a discuté en groupe, on a vu ces projets pilotes là
qui sont proposés, on n'en a pas fait
mention dans notre mémoire parce que c'était quand même mince comme
information, je dois vous dire, puis
le commentaire qui est revenu, c'est : Pourquoi 500? Pourquoi 400?
Pourquoi ne pas se donner les moyens de nos ambitions, alors, pourquoi
se limiter? Si nous avons quatre entreprises du style Cinesite qui viennent s'établir en même temps à Montréal, pourquoi ne
pas y aller avec un projet pilote de 1 000, 2 000 dossiers de
travailleurs temporaires? Ça a été un commentaire, je dirais, général
alentour de la table, mais c'est tout.
Le Président (M. Picard) :
Merci. Je cède maintenant la parole à M. le député de Bourget.
M. Kotto :
Merci, M. le Président. M. Bolduc, M. Goulet, M. Langlois, merci
d'être là, merci pour votre contribution dans le cadre des travaux de
cette commission.
Question juste pour m'éclairer : Quand vous
parlez de Montréal, vous parlez de Montréal intra-muros ou de Montréal région?
M. Bolduc
(Hubert) : Alors, Montréal
International représente toute la CMM, donc les 82 municipalités. Donc,
c'est à la fois Montréal, Longueuil, Laval, couronne nord, couronne sud.
M. Kotto :
O.K. Et les enjeux relatifs aux entreprises de Montréal intra-muros sont-ils
comparables aux enjeux à
Sainte-Julie, ce que vous retrouvez à Sainte-Julie, par exemple? Est-ce que ce
sont les mêmes enjeux? Est-ce que, d'un endroit à l'autre, dans la CMM,
on a, disons, une configuration comparative d'un endroit à l'autre?
M. Bolduc (Hubert) : Je ne vois pas
pourquoi il y aurait de différence à première vue, mais...
M.
Langlois (Francis) : Écoutez, c'est certain que le tissu industriel
est légèrement différent entre les couronnes et puis la ville centre. Les services sont concentrés dans la ville
centre, mais les problèmes, par exemple, en immigration, lorsque les stades en aérospatiale sont au plein
développement, sont les mêmes que pour une entreprise en effets visuels qui va être concentrée dans la ville, intra-muros,
pour faire venir les employés ici. C'est souvent des projets de courte durée
ou de durée sur cinq ans où la phase de
développement est très importante et puis le temps est un élément déterminant
dans la rentabilité du projet et puis si le projet s'effectue ou non.
M. Kotto : Je vous pose la question également,
vous me répondez si vous avez l'info, sinon ce n'est pas grave : Des 9 000 travailleurs stratégiques dont
vous parlez, quel est le pourcentage en rétention à Montréal intra-muros versus
la couronne, nord et sud?
M. Langlois (Francis) : Je n'ai pas
cette information-là.
M. Kotto : Non? Est-ce que vous avez une idée de la
provenance de ces talents stratégiques? De quels pays ils viennent, en
gros?
Une voix : Bon, la
déclinaison par pays...
M. Goulet
(Martin) : Par pays, les
gens, enfin, les travailleurs que nous, nous aidons sont majoritairement des
gens qui viennent de la France.
M. Kotto : Qui viennent de la
France?
M. Goulet (Martin) : Oui, mais ce sont notre clientèle. Maintenant,
il faudrait voir au niveau des statistiques...
M. Bolduc
(Hubert) : Les gros pays,
disons, les régions que Montréal International cible, tout comme Investissement Québec, d'ailleurs, c'est beaucoup,
énormément la France, les pays francophones, évidemment, on a plus de... en
termes d'attraction, c'est beaucoup plus facile d'attirer des entreprises ou
des travailleurs étrangers de la Belgique et de la France, mais on travaille beaucoup sur l'Allemagne, on
travaille beaucoup sur l'Asie et les États-Unis, très peu l'Amérique du
Sud.
M. Kotto :
Mais, si je vous entends bien, le pourcentage le plus important, c'est la
France, et probablement la Belgique aussi, parce que... Alors, dans...
M. Bolduc (Hubert) : Mais, voyez-vous, dans le cas de... Ça dépend des
secteurs. En aéronautique, oui. Des fois, dans le jeu vidéo, on reçoit beaucoup d'entreprises anglaises, parce que
la plupart des grands studios, que ce soit Framestore ou Cinesite, sont
basés en Angleterre. Donc, ça varie davantage selon le type de secteur que par
pays.
M. Kotto :
O.K. Donc, si vous plaidez à l'effet d'assouplir les exigences en matière de
maîtrise de la langue, c'est davantage
relativement à ceux qui ne viennent pas du bassin français, c'est ceux qui
viennent d'ailleurs, pour les temporaires.
• (16 h 20) •
M.
Bolduc (Hubert) : Bien, c'est certain que quelqu'un qui vient de
France, normalement, ne doit pas avoir rencontré
de problème à l'examen, quoiqu'il y
en a qui disent que l'examen est très
difficile, même s'ils sont Français, mais...
M.
Kotto : Tout à fait,
mais je pose la question parce que... c'est pourquoi je voulais vous amener sur les pourcentages, à savoir d'où ils viennent
spécifiquement, afin d'identifier la provenance de ceux pour qui vous plaidez
à l'effet d'abaisser les exigences en termes
de maîtrise de la langue, de revenir au niveau 6 de 2010, comme vous
l'avez dit.
Et
par ailleurs vous dites que, du côté des étudiants, par exemple, qui sont déjà sur
le territoire, il n'est pas nécessaire de leur appliquer
cette exigence-là. Mais ils sont déjà là. Si au bout de deux, trois ans ils ne maîtrisent pas
le français, c'est qu'il y a un problème, un réel problème.
M.
Langlois (Francis) : La question
n'est pas de savoir si... On a demandé aux entreprises si elles croyaient que,
le français, c'était important
pour les immigrants de le maîtriser. Toutes les entreprises sont d'accord sur
le fait qu'il faut que les immigrants travaillent à apprendre le français.
Ce qu'on s'est rendu
compte est que, la période d'un permis temporaire étant limitée à quatre ans
pour les travailleurs temporaires... ou,
pour les étudiants étrangers, lorsqu'ils font un bac, c'est trois ans, une maîtrise,
c'est deux ans, la longueur du programme, c'est extrêmement difficile
pour certains d'entre eux d'apprendre le français à un niveau intermédiaire avancé dans cette période de temps.
Ces gens-là qui sont déjà à Montréal, qui ont déjà établi un réseau social,
qui sont insérés dans la communauté
montréalaise, québécoise et puis qui ont une plus grande chance d'insertion à
long terme sont déjà en francisation,
sont déjà en train d'apprendre le français, malheureusement on ne peut pas
allonger la période pour permettre à
ces gens-là d'atteindre le niveau intermédiaire avancé avant de faire leur
demande de résidence permanente, donc
l'autre solution étant de revenir à un niveau qui permet aux gens d'avoir une
conversation de niveau intermédiaire
et qui va faire en sorte qu'en restant au Québec... continuent à développer
leur capacité à parler en français, à évoluer en français.
M.
Kotto : O.K. Est-ce que vous avez une idée au plan statistique
du pourcentage de ces personnes qui comptent rester, notamment en considération des ambitions de nos différents
gouvernements, c'est-à-dire les inviter à rester une fois avoir terminé leur formation? Est-ce que vous
avez le pourcentage de ceux qui désirent rester versus ceux qui veulent
repartir? Vous avez une idée?
M.
Langlois (Francis) : On a fait un sondage, chez Montréal
International, avec le Conseil Emploi Métropole pour demander aux étudiants étrangers et puis aux travailleurs
temporaires s'ils désiraient rester à Montréal à la fin de leur séjour temporaire. 50 % d'entre eux ont
répondu : Nous désirons rester, 30 % nous ont dit : Je ne sais
pas, et puis 20 % ont dit : Non, pour différentes raisons je
désire retourner à la maison.
Ce
qu'on s'est rendu compte, c'est que, sur 80 % de gens qui pourraient être
intéressés, un étudiant sur cinq dépose une demande de certificat de sélection du Québec et un travailleur sur
six dépose une demande de certificat de sélection du Québec. Donc, il y a un potentiel d'immigrants
qui connaissent déjà le Québec, qui sont déjà insérés dans la communauté
québécoise qu'on perd pour différentes raisons. Les trois raisons principales
qui ont été identifiées dans l'étude est, premièrement,
toutes les possibilités d'emploi, l'incertitude pour les étudiants étrangers de
savoir est-ce qu'ils vont être capables de se trouver un emploi, le
profil temporaire des travailleurs temporaires étrangers. Le deuxième élément, c'est la méconnaissance du système d'immigration.
C'est une grosse boîte noire, c'est difficile, il faut simplifier, de là
notre projet d'aller parler aux étudiants
étrangers pour simplifier les procédures d'immigration. Et puis le troisième
élément, c'était la possibilité d'apprendre dans un court laps de temps
le français à un niveau intermédiaire avancé.
M.
Kotto : O.K. Quelles sont les chances, selon vous, de voir ce
pourcentage qui souhaiterait rester s'intégrer plus en anglais qu'en
français, au Québec, au regard de leur milieu de formation?
M. Langlois
(Francis) : Je n'ai pas de boule de cristal, c'est...
M. Bolduc (Hubert) : Aucune idée. Mais quelqu'un qui fait des études en français, dans une
université francophone, ses chances d'intégration en français...
M. Kotto :
Sont plus grandes.
M. Bolduc
(Hubert) : ...sont nettement plus importantes.
M. Kotto :
Tout à fait.
M. Bolduc (Hubert) : Maintenant, quel est le pourcentage d'étudiants étrangers qui
fréquentent des universités anglophones
versus le pourcentage d'étudiants étrangers qui fréquentent des universités
francophones? Je ne le connais pas par coeur, là.
M. Kotto :
O.K. J'avais d'autres questions, mais merci.
Le
Président (M. Picard) : Merci, M. le député. Je cède maintenant
la parole à Mme la députée de Montarville.
Mme
Roy
(Montarville) : Merci beaucoup, M. le Président.
Bonjour, messieurs. Merci d'être là, merci pour le mémoire.
Je m'en vais
sur votre site Internet pour connaître davantage Montréal International. Dans
votre mandat, Montréal International
a comme mandat d'attirer dans la région métropolitaine des investissements
étrangers, des organisations internationales et des talents stratégiques
ainsi que de promouvoir l'environnement concurrentiel du Grand Montréal. Gros mandat. Quand vous allez à l'étranger...
Immense mandat. Parce qu'il y a des choses qui me préoccupent là-dedans, là, au niveau de la langue française, mon collègue
de Bourget en a glissé quelques mots, mais aussi au niveau de la connaissance
de l'anglais. Quand vous allez à l'étranger
pour faire ce démarchage-là où vous rencontrez les gens, qu'est-ce qu'on dit
à l'égard du français? Vend-on Montréal comme étant une ville où le français
est la langue d'usage?
M. Bolduc (Hubert) : Moi, j'ai été
démarcheur pendant deux ans, puis à votre question la réponse, c'est oui.
Mme Roy
(Montarville) : Alors, quelle est la réponse, la réaction
des gens que l'on veut attirer ici lorsqu'on leur dit, on leur fait
connaître que Montréal, ça se passe en français, c'est en français?
M. Bolduc
(Hubert) : Règle générale,
la plupart des entreprises n'ont pas vraiment d'écueil par rapport à la langue.
Évidemment, notre territoire de prospection
est, pour plusieurs dossiers, francophone, donc il n'y a pas d'enjeu. S'il y a
des entreprises étrangères situées dans des
pays où la langue est l'anglais, ils viennent ici pour le talent, ils sont
intéressés à Montréal pour le talent. Ils savent qu'on en a puis ils
veulent venir pour en profiter.
Mme Roy
(Montarville) : Je vais poursuivre avec votre mémoire. Si je
comprends bien, ce que vous nous dites, dans ce mémoire-là, c'est : Regardez, nous, on sait qu'il y a un
bassin d'immigrants potentiels qui passe par nos mains. C'est ça que je
comprends, là.
M. Bolduc (Hubert) : Oui,
absolument.
Mme
Roy
(Montarville) : Vous nous dites : Ce sont entre
autres les travailleurs temporaires spécialisés qui viennent ici pour remplir un mandat d'une durée x et
également les étudiants internationaux, alors pigez donc là-dedans pour en
faire des bons immigrants. C'est ça que vous nous dites, là.
M. Bolduc (Hubert) : C'est en plein
ça.
Mme Roy
(Montarville) :
O.K.
M. Bolduc
(Hubert) : Bien,
c'est-à-dire qu'il y a un potentiel là de gens qui parlent, pour la plupart, le
français, qui connaissent le Québec,
qui connaissent les enjeux au Québec, ils sont ici, et puis en plus qui
manifestent un désir de rester.
Mme Roy
(Montarville) : Bon. Alors, c'est vraiment une clientèle
spécifique sur laquelle vous nous aiguillez.
M. Bolduc
(Hubert) : Comme on dit en
anglais, c'est des «low-hanging fruits». Ils sont faciles, ils sont là, ils
sont accessibles.
Mme Roy
(Montarville) : Bon, ce que vous nous dites par contre, par
ailleurs, je comprends que vous nous dites d'abaisser le niveau de maîtrise du français pour différentes raisons,
entre autres, vous nous disiez, pour les étudiants, la durée, hein, tu es ici pour étudier à plein temps,
tu n'as peut-être pas le temps de prendre ton cours pour te franciser. Soit.
Si tu es ici pour faire un mandat x, y, z pour une entreprise, même chose.
Soit.
Par ailleurs, vous nous dites, Autres
obstacles : maîtrise de l'anglais pour les francophones. «Freine
l'accès à l'emploi si la connaissance de
l'anglais est insuffisante.» Là, ça me fait mal un peu, beaucoup dans la mesure
où ces gens-là viennent travailler
ici sachant que vous leur dites que la langue d'usage est le français, mais
que, comme votre anglais n'est pas
assez bon, vous n'avez pas assez de connaissances en anglais, c'est un obstacle
à votre immigration. Là, j'ai un problème avec ça, moi, je suis
préoccupée. Pourriez-vous élaborer?
M. Bolduc (Hubert) : Je n'ai pas
entendu la fin de votre phrase, excusez-moi.
Mme Roy
(Montarville) : J'ai dit : Je suis préoccupée parce
qu'on dit à ces personnes ou ces personnes constatent que, semble-t-il, selon vos chiffres, c'est un
obstacle au fait que les travailleurs temporaires spécialisés pourraient rester
ici, le fait que leur niveau
d'anglais n'est pas assez bon. Alors, moi, je suis préoccupée à cet égard-là
puisqu'ils viennent vivre ici dans un
lieu où la langue d'usage et langue de travail devrait être le français. Alors,
j'aimerais que vous élaboriez à cet égard.
• (16 h
30) •
M.
Langlois (Francis) : Je peux y aller. C'est certain que ces gens-là
viennent ici pour vivre une expérience en français et travailler en
français. Par contre, dans certains secteurs de pointe qui sont des secteurs internationalisés,
lorsqu'on développe un avion où est-ce qu'il va y avoir des interactions avec
l'étranger et puis il faut vendre l'avion à l'étranger, c'est certain que le marché
principal nord-américain est anglophone. Donc, nous, ce qu'on dit, c'est, oui,
parlons au téléphone... à l'intérieur de
l'entreprise, mais parfois, quand un client de l'externe appelle, il faut être
capable de répondre dans la langue anglaise.
C'est
certain que les secteurs qui tirent l'économie du Grand Montréal, l'économie du
Québec vers le haut, ces dernières
années, c'est les secteurs de haute technologie, les secteurs... les
technologies de l'information et des communications, l'aérospatiale, les technologies médicales. C'est
une chance de pouvoir avoir ces entreprises-là au Québec qui évoluent en
français, mais c'est certain que, si on ne
dit pas un mot d'anglais, ça peut être un petit peu plus complexe d'évoluer
dans un secteur où 80 % du marché nord-américain est anglophone.
M. Bolduc (Hubert) : À vrai dire, c'est les mêmes conditions qui
s'appliquent pour quelqu'un qui habite au Québec puis qui se cherche un emploi, que ce soit dans une entreprise locale ou
internationale. Même si l'essentiel du travail se passe en français, la connaissance de l'anglais ou
d'une autre langue est un atout, et les personnes qui ne maîtrisent pas une
autre langue se voient désavantagées dans un processus d'embauche.
Mme Roy
(Montarville) :
Par ailleurs, d'entrée de jeu...
Le Président (M.
Picard) : Une minute.
Mme Roy
(Montarville) :
Je comprends très bien ce que vous voulez dire.
Vous
nous parliez d'entrée de jeu de Cinesite, et là, si je comprends bien, c'est
500 emplois qui seront créés, mais on parle d'emplois pour une
période bien déterminée, j'imagine, le temps de faire ces neuf films. Est-ce
que ce sera des travailleurs temporaires ou c'est vraiment des gens... D'abord,
on va regarder dans le bassin ce qu'on a ici, mais ils semblent dire que c'est très difficile à recruter. Est-ce qu'on peut
s'attendre à ce que les gens qui viennent soient des travailleurs temporaires?
M. Bolduc (Hubert) : Je pense qu'il va y en avoir de tous les acabits. Cela dit, les
entreprises comme Cinesite qui
viennent ici, au Québec, s'établir, ils ne viennent pas ici seulement pour
produire des films puis s'en aller, alors ils ont la forte intention de
demeurer, et par conséquent il y a sûrement des travailleurs temporaires
stratégiques que nous allons contribuer,
ce monsieur en particulier, à attirer et à faciliter l'immigration qui vont se
convertir en travailleurs permanents par la suite. Vas-y.
M. Langlois
(Francis) : Et puis il faut compter aussi sur l'effet multiplicateur
de ces travailleurs-là. On se développe une
expertise, au Québec, en effets visuels, en amenant des entreprises ici, ce qui
fait en sorte qu'après ça, pour nous,
c'est plus facile d'aller attirer une autre entreprise d'effets visuels, parce
qu'on augmente la masse critique de plus en plus de gens travaillant
dans ce secteur-là.
À
la base, pour répondre à votre question, c'est des contrats de deux ans, en
effets visuels, normalement, mais, les contrats
Cinesite, le projet qu'ils ont fait il y a deux ans, les 275 emplois ne
sont pas disparus, parce qu'on a été capable de donner un nom à Montréal comme place où on est bons pour faire des
effets visuels de films AAA. Donc, c'est une roue qui tourne. Le plus qu'on est capable
d'amener de l'eau au moulin, le plus qu'on va pouvoir avoir du développement
économique.
Le Président (M.
Picard) : Merci.
M. Bolduc
(Hubert) : Et si je peux ajouter...
Le Président (M.
Picard) : 30 secondes. Allez-y. 30 secondes.
M. Bolduc (Hubert) : Si je peux ajouter, c'est que c'est tellement vrai, ce que mon collègue
vient de dire, que déjà ce matin il y
a une entreprise étrangère qui nous a contactés et qui veut faire un investissement
supplémentaire dans un secteur autre
mais très connexe, celui de la réalité virtuelle. Et en plus, le dernier point,
en plus ils se débauchent entre eux des emplois, donc quelqu'un qui est
en...
Mme Roy
(Montarville) :
Ils se cannibalisent.
M. Bolduc
(Hubert) : Ils se cannibalisent, alors il faut en attirer encore
davantage.
Le
Président (M. Picard) : Merci, MM. Bolduc, Langlois et
Goulet, pour votre apport aux travaux de la commission.
Je suspends quelques instants
afin de permettre au prochain groupe de prendre place. Merci beaucoup.
(Suspension de la séance à
16 h 34)
(Reprise à 16 h 37)
Le Président (M. Picard) :
Nous reprenons. Je souhaite la bienvenue aux représentants du Comité sectoriel
de main-d'oeuvre de l'industrie maritime et Société de développement économique
du Saint-Laurent. Je vous invite à vous présenter, et
vous disposez de 10 minutes; va s'ensuivre des échanges avec les parlementaires.
La parole est à vous.
Comité sectoriel de main-d'oeuvre
de l'industrie maritime
(CSMOIM) et La Société de développement
économique du Saint-Laurent (SODES)
Mme
Trépanier (Nicole) : Merci.
Alors, dans un premier temps, j'aimerais remercier la commission
de nous accueillir, mon collègue et moi. Mon nom est Nicole Trépanier,
je suis présidente de La Société de développement économique du Saint-Laurent, que j'appellerai dorénavant SODES pour gagner en temps. Et je vais laisser le
soin à mon collègue de se présenter lui-même, étant donné qu'il est un
grand garçon.
M.
Mailloux (Claude) : Bonjour,
M. le Président, Mme la
ministre et tout le monde. Mon nom est Claude Mailloux, je
suis directeur du Comité sectoriel de main-d'oeuvre de l'industrie maritime. Et merci beaucoup de nous
accueillir pour nous donner l'occasion de vous présenter nos idées sur l'immigration
au Québec pour notre secteur.
• (16 h 40) •
Mme
Trépanier (Nicole) :
Permettez-moi d'abord, puisque, bien que nous soyons à la base de notre économie,
notre histoire, très peu de gens connaissent
l'industrie maritime, de vous signifier aujourd'hui ce que c'est que... étant
donné que je travaille pour l'équivalent d'une chambre de commerce maritime, de
vous signifier ce que ça représente à
présent pour nous, pour le Québec. C'est 27 000 emplois, l'industrie
maritime, somme toute. Je tiens à dire que les chiffres que je vous
fournis aujourd'hui viennent d'une étude qui a été réalisée en 2012 en vertu du
modèle intersectoriel de l'Institut de la
statistique du Québec. C'est quelque 300 entreprises, 2,3 milliards
de dollars d'apport au produit intérieur brut, 1 milliard versé en salaires, somme toute, 681 millions
de revenus de taxe pour les gouvernements. Et la question qu'on nous pose souvent pour avoir un aperçu de ce
que ça peut signifier comme mouvement dans l'économie, bon an, mal an, sur le Saint-Laurent, il se transporte
environ 110 millions de tonnes de marchandises, ce qui exclut bien
évidemment les croisiéristes internationaux ou les croisières
intérieures, qu'on appelle excursions. Donc, voilà, pour vous mettre la table sur notre importance. Nous sommes
tellement importants que nous manquons de main-d'oeuvre, comme tous les
autres secteurs d'emploi. Et mon collègue sera plus en mesure de vous fournir
ces détails.
Qu'est-ce que
c'est, la SODES? C'est, somme toute, à peu près 90 membres issus des
transporteurs, qu'on appelle, donc
des armateurs, des propriétaires de navire à la fois basés ici, au Canada, ou
qui utilisent le Saint-Laurent, mais qui peuvent avoir des places
d'affaires ailleurs dans le monde. C'est également le réseau portuaire. Au
Québec, le réseau portuaire, c'est approximativement une vingtaine de ports
partout sur le territoire. Ce sont aussi des expéditeurs, des minières, par exemple, des alumineries, donc c'est
diversifié, de même que les municipalités riveraines qui ont des ports.
J'aimerais
aussi vous dire que, cette activité, les chiffres que je vous fournissais en
introduction s'appliquent au Québec, mais que parfois il est très
difficile de tracer à la ligne les impacts de notre secteur en délimitant
uniquement à la géographie du Québec,
puisque nous sommes de nature internationale. J'écoutais nos collègues tout à
l'heure qui nous ont précédés, de Montréal International, qui
disaient : Nous, on apporte des affaires. Bien, j'ai envie de dire, nous,
on apporte du commerce. Puis tout ce qui est amené de l'étranger, 90 % est
fait par l'entremise du transport maritime.
Alors, je
céderais maintenant la parole à mon collègue. On n'est pas des spécialistes de
l'immigration, je n'ai aucune prétention
en cette matière. Et, lorsque nous avions produit notre mémoire, nous l'avions
fait sur la base du document de
consultation, et ce qui avait évidemment, à l'époque, attiré notre attention,
trois éléments : les pénuries de travailleuses et de travailleurs spécialisés sur lesquels vous
vous penchiez dans le document de consultation, les besoins pressants des
entreprises — et
nous en sommes — de
même que la création d'emplois.
Je tiens à
préciser, comme vous le savez, évidemment, que le gouvernement actuel a une
stratégie maritime. Nous sommes là et
nous voulons qu'elle réussisse, bien évidemment, parce qu'elle dessert
l'ensemble du territoire mais à peu près toute la population.
Alors, je céderais la parole à M. Mailloux.
M.
Mailloux (Claude) : Merci,
Nicole. Alors, pour ceux qui ne connaissent pas les comités sectoriels, un
petit mot. Les comités sectoriels, il
y en a une trentaine au Québec, qui sont une création du gouvernement du Québec
à travers sa loi sur l'emploi, et la politique d'intervention
sectorielle est gérée par la Commission des partenaires du marché du travail, donc, qui est un partenaire
d'Emploi-Québec dans tout ce qui concerne le suivi du marché du travail au
Québec. Le rôle des comités
sectoriels est le développement de la main-d'oeuvre au sens large, mais plus
particulièrement on touche le
développement des compétences, l'identification des besoins de formation et
l'identification des besoins de main-d'oeuvre et des besoins de relève, et pour ce faire on utilise différentes
stratégies. Évidemment, on procède beaucoup au niveau de la promotion
des carrières, parce que les entreprises nous disent qu'il y a des besoins de
main-d'oeuvre extrêmement importants et
qu'il y a même des pénuries de main-d'oeuvre pour certains corps d'emploi, et
la promotion des carrières fonctionne,
celle qu'on peut faire vis-à-vis des écoles secondaires, par exemple, mais il
faut s'adresser aussi à des nouvelles clientèles,
parce que les clientèles traditionnelles elles-mêmes ne suffisent pas à combler
les besoins. Et, parmi les nouvelles clientèles
qui font partie de nos cibles, il y a les femmes, puisqu'on trouve très peu de
femmes dans le domaine maritime, alors
qu'il y aurait de la place pour en avoir beaucoup plus, et il y a évidemment
aussi les candidats issus de l'immigration. Et, quand je parle de l'industrie maritime, je parle de l'industrie
maritime du côté du personnel navigant et du côté du personnel maritime terrestre aussi. En fait, dans
les 27 000 emplois dont Nicole a parlé tout à l'heure, il y a
beaucoup plus de monde dans le
maritime terrestre. Alors là, on parle de gens qui travaillent en milieu
portuaire dans tout le Québec et on parle aussi des gens
qui travaillent dans la gestion et l'administration maritimes et qui sont des
spécialistes de la gestion comme dans les agences maritimes, les
administrateurs portuaires, etc.
Alors,
je vous donne une courte liste des emplois qui nous ont été identifiés par les
employeurs comme étant les plus problématiques
au niveau du recrutement et pour lesquels dans certains cas on peut parler de
pénurie ou de très grande rareté :
les officiers mécaniciens et les officiers de navigation — donc on parle de personnel navigant — et particulièrement les officiers des
échelons supérieurs, par exemple, en navigation, les capitaines, et, en
mécanique de navire, les chefs mécaniciens, mais on parle aussi d'emplois comme
les spécialistes en affrètement de navire, les courtiers en douane spécialisés en maritime, les gestionnaires de
flotte, les surintendants portuaires. Alors, ce sont des exemples d'emplois
pour lesquels le recrutement est extrêmement difficile.
Et
même quand on ne parle pas de très grand nombre, c'est une notion qu'il est
important de mentionner, leur importance stratégique est telle, dans
certains cas, que ça peut être un paralysant extrêmement important. Trouver un gestionnaire de flotte de navires internationaux
pour travailler à Montréal, ça peut être extrêmement difficile, même si
on en a besoin même pas d'une
dizaine, parce qu'il n'y a pas tant d'entreprises qui travaillent dans
ce domaine-là, mais celles qui le
font ont des activités importantes, sont des grands joueurs, en particulier
dans la région de Montréal, dans ce cas-ci, et, si elles ne trouvent
pas ces joueurs-là, bien c'est leurs activités qui en souffrent.
Dans
notre mémoire, on a fait un certain nombre de recommandations pour,
pensons-nous, aider à corriger ou s'attaquer
à ces situations-là, tout d'abord la promotion à l'étranger de nos besoins en matière de main-d'oeuvre. Et nous, comme organisation, avons très peu de moyens ou de ressources pour
faire ça. On a essayé à quelques reprises, par exemple, de
produire des documents d'information, qu'on a transmis dans les délégations du Québec
à l'étranger ou dans les ambassades canadiennes, on l'a fait, mais c'est un peu
au-delà de notre portée en termes de ressources, et on aimerait beaucoup
qu'il puisse y avoir, via les instances dont c'est la spécialité, à travers le ministère
et en étant peut-être même supporté par les lois ou les
politiques... que ça puisse se faire en plus grande abondance.
On
souhaiterait beaucoup, en deuxième lieu, qu'il y ait un traitement
accéléré qui soit accordé à des emplois qui seraient identifiés comme étant stratégiques ou prioritaires, même s'ils
ne sont pas en très grand nombre. Encore
une fois, je reviens sur la notion
dont on parlait tout à l'heure. Pour des grandes entreprises basées à Montréal
qui veulent faire du recrutement
étranger et participer à des salons, par
exemple, en Allemagne, ou en France,
ou au Royaume-Uni, être obligé d'informer
les éventuels candidats que ça va prendre des mois et des mois avant qu'il
puisse y avoir des résultats au
niveau de leur embauche, c'est quelque chose qui peut décourager beaucoup
de candidats. Alors, le principe d'accélérer le traitement des dossiers, dans ce cas-ci, pour des emplois jugés
stratégiques, je pense, serait quelque
chose qui aiderait
considérablement.
Le Président (M.
Picard) : En terminant, s'il vous plaît.
M. Mailloux (Claude) : Oui. Et finalement la reconnaissance des compétences... Et là je fais
appel à la collaboration qu'il devrait nécessairement y avoir, et là
je parle du personnel navigant, parce
que la reconnaissance des
compétences, au Canada, pour les officiers maritimes, est faite par Transports Canada.
Et Transports Canada, pour reconnaître les
compétences, par exemple, d'un chef mécanicien qui arrive de l'étranger ou
d'un officier de navigation, va d'abord
exiger que cette personne-là, avant même de lui ouvrir un dossier d'analyse — et
ouvrir un dossier d'analyse, ça ne veut pas dire qu'il est rendu sur le marché
du travail, parce qu'on va exiger beaucoup de formation — il
faut qu'il soit résident permanent, et,
avant même que ça, ça arrive, ça peut prendre des mois et même des années, dans
certains cas. Alors, évidemment,
c'est un obstacle considérable, on sait qu'on perd beaucoup
de monde pour cette raison-là. Alors, si
c'était possible d'avoir un coup de main... Et cette fois-ci, évidemment,
il y a différents... on ne parle pas de la même juridiction, mais, entre elles, elles peuvent se parler, et c'est ce
qu'on préconise, parce que, pour nous, c'est un problème extrêmement important.
Le Président (M.
Picard) : Merci.
M. Mailloux
(Claude) : Pour la finale, je repasse la parole à ma collègue.
Le Président (M.
Picard) : Non, nous allons entreprendre la période d'échange
avec Mme la ministre. Vous pourrez compléter aussi lors des échanges, tout
simplement. Mme la ministre.
Mme
Weil : Oui, merci, M. le Président. Donc, bienvenue,
Mme Trépanier, M. Mailloux. Savez-vous que j'ai travaillé, moi, dans une firme d'avocats en droit
maritime pendant trois étés lorsque j'étais étudiante? Donc, je connais
un peu, là, mais ça fait très longtemps quand même.
Mais c'est vrai que
c'est un créneau très, très particulier, et je pense qu'il y a aussi... Quand
vous parliez de traitement simplifié, il y a cette exigence d'Emploi-Québec qui
est une masse critique, hein? Et donc, dans le cas des emplois, il n'y a pas la
masse critique, mais il faut trouver une façon de vous appuyer.
Et
vous le mentionnez dans le cadre de cette Stratégie maritime. J'aimerais vous
amener là, par rapport à cette Stratégie maritime, parce qu'en effet,
oui, la main-d'oeuvre, c'est la clé aussi, hein, pour réussir toute stratégie
de développement économique; la
main-d'oeuvre, le capital humain, c'est essentiel. Comment vous, vous voyez,
dans cette Stratégie maritime... Ou,
l'analyse, je ne sais pas si vous avez fait une analyse, justement, des métiers
et professions qui seraient en
demande pour répondre à cette Stratégie maritime et... Quel pourcentage de
cette main-d'oeuvre pourrait être formé localement
ici, au Québec, à peu près, si vous êtes capables de répondre? Quel pourcentage
serait situé ailleurs dans le monde?
• (16 h 50) •
Mme Trépanier (Nicole) : Je vais vous donner un début de réponse par
rapport à la Stratégie maritime elle-même parce que c'est une des bases de la stratégie, de créer de l'emploi, de
créer de la richesse, et évidemment ça nous interpelle beaucoup. Lorsque
le ministre D'Amour, par exemple, nous posait des questions, dans le cadre d'un
forum qui sert à l'implanter, cette stratégie, à l'heure actuelle, le potentiel
de placement de ceux qui sont formés au Québec, l'Institut maritime étant l'instance officiellement reconnue,
ça, c'est le... puis Claude est un spécialiste des portes d'entrée, là, les
différentes avenues empruntées, le taux de
placement, il est parfait, c'est le rêve, O.K.? Il y a quelques années, on
craignait que le fait de devoir aller
étudier à Rimouski... Loin de moi l'idée de dire que Rimouski, ce n'est pas
beau, mais ce n'est pas tout le
monde, par exemple, qui souhaite quitter la région de Montréal pour aller s'y
établir, on a tous étudié puis on sait qu'il y a des coûts liés à ça.
Mais à l'heure actuelle le taux de placement est parfait.
Mais
il y a aussi des entrants, dans l'industrie, notamment pour le personnel à
terre, qui peuvent se recruter par d'autres
avenues, notamment des formations professionnelles. Le comité sectoriel
travaille d'ailleurs là-dessus, sur un diplôme
d'études professionnelles. Il y a une bonne collaboration du ministère de
l'Éducation, qui ne s'appelle plus... excusez, là, je n'ai pas tout mis
à jour mon tableau des noms de ministère. Toutefois, ça va bien.
Maintenant,
le nombre qui vient de l'étranger, je ne suis pas en mesure de vous le donner.
Je sais que le taux de placement ici
est bon. Ça n'empêche pas que nous ayons, en tant que secteur d'activité, à
faire de la promotion, parce que notamment, comme d'autres secteurs
économiques, nous aurons une cohorte importante qui partira à la retraite
incessamment.
Alors,
pour les corps d'emploi supérieurs auxquels Claude référait tout à l'heure,
chefs mécaniciens, qui sont les emplois en haut de la hiérarchie, si on
peut dire, en navigation et en mécanique, ce sont des formations et des années d'expérience qui sont importantes, on ne
s'autoproclame pas chef mécanicien, on ne s'autoproclame pas non plus officier
de navigation à tel rang. Là où nous
souhaitions vous interpeller par notre mémoire, c'était dans l'idée qu'il en
existe ailleurs, des gens qui sont
formés. Nous sommes une nation maritime, mais il en existe d'autres, et ces
autres... d'autres, j'ai dit, d'autres,
et il est possible peut-être d'accélérer, entre guillemets, un bassin entrant
de gens formés, déjà prêts à occuper ces
rangs dans l'industrie dans la mesure où, par exemple, il y a une collaboration
de la part de Transports Canada pour répondre aux besoins ici même, au
Québec, en matière maritime.
Je te laisse
compléter.
M. Mailloux (Claude) : Oui. Effectivement, ça réfère aux corps d'emploi
que l'on mentionnait tout à l'heure au
niveau des expertises qu'on trouve en nombre insuffisant ici. Et, dans ce
cas-là, on parle beaucoup des emplois au niveau administratif qu'on va trouver, par exemple, dans des... de gestionnaire
de flotte ou de courtier en affrètement, qu'on va trouver beaucoup, en grand nombre dans les pays
d'Europe du Nord, par exemple, qui sont des grandes nations maritimes, et qu'on voudrait faire venir ici via des
processus, si possible, accélérés, qui ferait en sorte que ça deviendrait plus
attirant pour eux, parce que tout le volet administratif par lequel il
faut passer serait simplifié, et ça, ça aiderait beaucoup les entreprises qui
sont aux prises avec ce phénomène-là.
Du
côté des officiers, du côté du personnel navigant, contrairement peut-être à
bien d'autres domaines d'activité économique,
le taux de placement des officiers issus de l'immigration qui ont réussi à
passer à travers le processus de reconnaissance
est de 100 % au Québec. Les officiers qui ont reçu, après avoir suivi la
démarche imposée par Transports Canada,
leur brevet d'officier canadien se trouvent un emploi, c'est automatique parce
que c'est des corps d'emploi dont le
taux de placement pour tout le monde est à 100 %, entre 90 % et
100 %, alors... Et à certaines périodes, quand l'activité économique est à son plus fort, comme
ça a été il y a quelques années, le taux de placement, en fait, il pourrait être quasiment à 150 %, parce qu'il
y a véritablement des besoins de recrutement très importants sur le marché
du travail.
Et
là où on rencontre des obstacles, ce n'est pas dans le placement de ces
gens-là, c'est pour les amener jusqu'à la reconnaissance de leurs brevets canadiens. Bon, il
y a les critères de Transports Canada
qui leur imposent de faire une démarche pour canadianiser leurs brevets
qui n'est pas toujours simple, qui peut être assez longue et coûteuse, mais là-dessus
on a fait des gains, en toute honnêteté,
au cours des dernières années, parce qu'on a fait beaucoup de représentations
auprès de Transports Canada, et maintenant,
au moins, ils ne les obligent plus à refaire les mêmes cours qu'ils ont déjà
faits dans leur pays à l'origine, c'est déjà
ça de gagné. Et il faut être honnête aussi, on ne peut pas demander à un
capitaine qui, par exemple, a été
capitaine sur la Méditerranée, du jour au lendemain, de devenir capitaine sur
le Saint-Laurent, ce serait l'envoyer
au suicide professionnel. Donc, c'est sûr qu'il y a nécessairement une
conversion des connaissances à faire.
Là
où on a très gros problème, c'est sur le délai que Transports Canada impose avant même d'accepter d'ouvrir le dossier de la personne, parce qu'on exige
qu'elle soit rendue au stade de résident permanent. Je ne suis pas expert de
ces choses-là, mais ce qu'on me dit, c'est
que, dans certains cas, ça peut aller jusqu'à quelques années, à tout le moins
c'est beaucoup de mois, et c'est suffisant
pour faire en sorte que le candidat se détourne, parce qu'il voit devant lui un
cheminement qui devient trop, beaucoup trop rempli d'obstacles avant d'arriver
au résultat.
Le Président (M.
Picard) : Mme la ministre.
Mme
Weil : Oui. Alors donc, c'est vraiment un domaine très, très
particulier. Parce que j'essaie de voir comment, avec cette réforme... mais je vois que parfois ça passe carrément par le
Canada, par le gouvernement du Canada, vous faites affaire directement
avec eux, le ministère des Transports. Il y a aussi cette question de sécurité
nationale aussi, certains métiers qui exigent la citoyenneté canadienne,
n'est-ce pas?
M.
Mailloux (Claude) : Et ça,
la reconnaissance, c'est beaucoup un problème de Transports, mais l'exigence
d'être résident permanent, c'est un problème d'immigration et qui
malheureusement est imposé par Transports.
Mme Weil :
Et est-ce que donc vous avez des métiers, professions qui passeraient par un
certificat de sélection du Québec dans un premier temps, qui sont des métiers
connexes à l'industrie maritime, mais où ça passerait dans un premier temps comme dans... nous, on est dans la
sélection de travailleurs qualifiés dont on a besoin, mais qui seraient carrément dans notre créneau, dans nos
compétences? Et, si oui... Parce qu'on essaie de voir comment on pourrait vous
aider. Je sais que vous avez déjà contacté
le ministère de l'Immigration dans le passé pour vous accompagner. Ce serait
de nous envoyer, par exemple, la liste des
professions et des métiers en demande directement au MIDI — on me demande de vous demander de faire ça — pour qu'on puisse trouver une façon de
faciliter, justement, la sélection de ces personnes-là, toujours avec le
plan maritime aussi en tête.
Et je vous
amènerais peut-être sur les besoins au niveau régional. Est-ce que vous voyez,
à l'heure actuelle, parce qu'on est
beaucoup aussi là-dessus... Est-ce que vous voyez des besoins qui seraient
régionalisés? Vous avez parlé de Rimouski.
C'est sûr que moi, quand j'entends «plan maritime», moi aussi, je pense
toujours à Rimouski, et j'imagine que ce
serait une ville, une région intéressante pour ce plan-là. Est-ce que vous
voyez, par exemple, en parlant de Rimouski ou de... certaines régions au bord du fleuve qui auraient des besoins
particuliers de main-d'oeuvre? Et on parle d'immigrants.
Mme Trépanier (Nicole) : Il est
possible...
Mme Weil : Mais vous parlez de... vous voyez l'avenir...
Comme dans tous les secteurs, vous voyez les départs à la retraite, hein, on est prévoyants, hein, dans
tout ça. Puis on dit que d'ici 2021 on parle de 1,2 million d'emplois — c'est Emploi-Québec qui dit ça — qui seront à pourvoir, et 16 % de ces
emplois seraient comblés par l'immigration. Donc, ce n'est pas 100 %, évidemment, c'est 16 %.
Mais, vous, c'est peut-être beaucoup moins que ça, là, j'imagine, vous
occupez un espace quand même plus spécialisé, restreint des besoins de
main-d'oeuvre.
• (17 heures) •
Mme
Trépanier (Nicole) : Je
répondrais oui et non à votre remarque parce qu'à l'heure actuelle, si on
regarde au plan économique, ce n'est pas le Klondike pour aucun secteur
d'activité. Toutefois, on sait pertinemment, d'après les prévisions que nous avons, qui sont quand même étayées,
qu'il y aura croissance par rapport à la demande de matières premières
incessamment, c'est une réalité mondiale, mais aussi il y a un accord
économique commercial global avec l'Union
européenne, et cet accord amènera une augmentation de volume parce que le
chemin le plus court pour accéder au marché américain, c'est quand même
le Saint-Laurent.
Dans l'intervalle, pendant que ça va, disons, au
ralenti, ce qui est important, c'est de se préparer à la reprise, notamment au plan des infrastructures mais aussi de la main-d'oeuvre. Si on revient à la Stratégie
maritime, elle prévoit des zones industrielles
ou portuaires qui toucheront... il y en aura une douzaine à travers le Québec,
et, pour ces zones industrielles ou portuaires, il faudra avoir de la main-d'oeuvre spécialisée. L'objectif, c'est d'attirer des investissements au Québec à
proximité des ports, tout comme avec les deux pôles logistiques qui sont prévus
du côté de Montréal. Il faudra du monde. Oui, bien sûr, on n'a
pas besoin nécessairement de penser à l'immigration pour avoir des spécialistes
du chargement de marchandises dans des
entrepôts. Par contre, il faudra avoir des débardeurs à l'intérieur des ports,
il faudra avoir des opérateurs de
grue, il faudra... puisque plusieurs...
la flotte canadienne est en
renouvellement, on rajeunit des navires.
Il y aura une demande pour le Nord, l'Arctique prend une importance stratégique majeure et le Nord du
Québec aussi, donc des navires plus spécialisés.
J'écoutais
tout à l'heure les gens de Montréal International parler. Quand on entend
parler de nouvelles technologies, d'informatique, on a toujours
l'impression que c'est ce qui attire les jeunes. Il y a des gens qui pensent
que le secteur maritime, on est encore avec
des sextants. Alors là, quand on amène des jeunes devant un simulateur de
navigation ou dans la timonerie d'un navire neuf, récent, il fait :
Wow! je ne savais pas qu'il y avait des cartes électroniques, je ne savais pas qu'il y avait une multitude de radars,
qu'on opérait avec les satellites, et là le wow fait : Je veux y
travailler. Et je pense qu'on a toutes les raisons d'être fiers d'avoir
une flotte qui se renouvelle, qui est plus avantageuse au plan environnemental, on a fait les efforts, mais il
faut avoir le personnel pour les opérer, ces navires, et il faut avoir toute la
structure de main-d'oeuvre pour être
capable de bénéficier normalement de l'augmentation du commerce qu'on prévoit,
si on veut que ça serve le Québec.
Mme Weil : O.K. J'ai une
question de ma collègue.
Le Président (M. Picard) :
Mme la députée de Charlevoix—Côte-de-Beaupré.
Deux minutes qu'il reste.
Mme
Simard : Merci beaucoup, je ferai vite. Le sujet m'interpelle
énormément, vous savez, je représente une circonscription au riche
patrimoine maritime, je me sens très interpellée par la Stratégie maritime
également. Et chez moi je vais prendre
l'exemple d'Océan. Tout à l'heure, ma collègue la ministre demandait s'il y
avait des besoins en région. Océan
est en constant besoin, recrutement de main-d'oeuvre, on parle d'une rareté en
ce qui concerne... Par exemple, sur le site Internet, actuellement, on
sait qu'ils recherchent des capitaines, des matelots, soudeurs, monteurs.
J'aimerais
savoir... J'ai deux questions qui me viennent en tête, mais je vais vous poser
celle où vous allez pouvoir répondre
le plus rapidement : Comment pourrions-nous mettre à contribution
davantage l'employeur, dans ce cas-ci qui fait déjà beaucoup en offrant de très bonnes conditions, pour pallier,
finalement, à ce problème de main-d'oeuvre qui est constant?
Le Président (M.
Picard) : M. Mailloux.
M.
Mailloux (Claude) : Bien,
les employeurs, de façon générale, collaborent très bien aux efforts que l'on
fait parce qu'ils constatent assez
rapidement qu'il y va de leur intérêt direct. Vous avez nommé Le Groupe Océan,
qui fait partie des entreprises
sûrement les plus proactives parce qu'elles ont... en plus des entreprises
diversifiées au plan du type d'activité, diversifiées au plan régional
aussi, alors elles rencontrent des besoins de main-d'oeuvre diversifiés, en conséquence. Et donc ils sont très au fait de ces
situations-là puis ils ont même des programmes avec Emploi Québec qu'ils
ont... puis je sais qu'ils sont encore en
train de travailler sur d'autres. Alors, vous avez pris le meilleur exemple
pour signifier que les entreprises sont prêtes à collaborer. Et, si on
fait appel aux autres aussi, évidemment, ça va être le cas.
Et toutes les
entreprises, que je sache, et ça, on l'a démontré par un sondage qu'on a fait
il n'y a pas si longtemps, sont très
disposées à accueillir du personnel issu de l'immigration, et, s'il y a des
initiatives qui sont prises pour essayer de favoriser ça, c'est sûr
qu'on va avoir leur collaboration. Puis c'est un milieu tissé assez serré, là,
le monde maritime, il n'y a pas des millions
d'entreprises, c'est entre 300 et 400 entreprises environ, ce qui fait que
c'est assez facile de mobiliser les gens quand on peut travailler sur
une cause qui les interpelle comme celle-là.
Le Président (M. Picard) :
Merci. Je cède maintenant la parole à M. le député de Bourget.
M. Kotto :
Merci, M. le Président. Mme Mailloux, M. Trépanier, soyez les
bienvenus, merci... Pardon, voyons, Mme Trépanier, M. Mailloux.
J'ai inversé.
Vous parlez de pénurie, de manque d'emploi, de
besoins d'emploi, et vous évoquez la difficulté à recruter. Sur quoi repose cette difficulté-là?
M.
Mailloux (Claude) : Dans le
cas des emplois spécialisés comme ceux qu'on trouve à bord des navires, c'est
carrément la rareté des candidats sur le marché
du travail, parce que
la majorité des emplois exigent des brevets spécialisés,
et il est absolument impossible de
remplacer ces brevets-là par quoi que ce soit d'autre. Et la réglementation est
faite de telle manière que chaque
navire, avant de quitter le port, doit avoir à bord exactement
le nombre de marins pour chacun des
corps de métier qu'on trouve à bord, qui sont spécifiés par le règlement, et,
s'il ne les a pas, si le règlement dit que pour tel navire c'est
20 personnes qu'il doit y avoir à bord, quatre officiers de navigation,
cinq officiers mécaniciens, deux cuisiniers
et neuf matelots, bien, si on ne les a pas, on ne part pas. Et, si on ne les
trouve pas sur le marché du travail
parce que c'est des emplois qui sont en grande rareté, même si les employeurs
sont extrêmement actifs pour éviter que ça arrive, bien il est arrivé des situations où des
contrats n'ont pas pu être réalisés, faute d'avoir à bord le personnel. Alors,
la première réponse à votre question, c'est la rareté des candidats sur le marché
du travail.
M. Kotto : La rareté. Et elle
s'inscrit à l'intérieur de nos frontières ou c'est à l'international?
M. Mailloux (Claude) : Elle est
internationale.
M. Kotto : Internationale.
M.
Mailloux (Claude) : Oui. Évidemment,
ça fluctue beaucoup avec les cycles économiques. Si on parle de la
deuxième moitié de 2015 et de ce qu'on annonce pour 2016, la pression sur
l'embauche à l'international et même au Canada va connaître un certain soulagement, parce que
ça va avec l'activité économique mondiale. Et, le transport maritime étant
un service, bien, si tout le reste ralentit, le maritime ralentit aussi.
Mais, sur le
moyen et sur le long terme, les messages qu'on reçoit de l'international, c'est
qu'il y a des pénuries d'officiers
sévères à l'international, et ça se reflète au niveau canadien aussi, parce qu'il y a des pénuries d'officiers sévères
au niveau canadien.
M. Kotto : Mais, selon vous,
vous me répondrez si vous avez la réponse, pourquoi on n'en forme pas assez,
considérant que c'est un enjeu qui s'étale déjà sur plusieurs années?
M.
Mailloux (Claude) : Bien,
là-dessus, il y a une zone d'optimisme, parce que depuis quelques années on a
réussi à attirer... en tout cas pour ce qui est de la situation du
Québec, là, je peux moins parler pour l'international, mais, pour ce qui est du Québec, on a réussi à attirer à
l'Institut maritime à Rimouski beaucoup plus de candidats grâce à des campagnes
de promotion qui ont donné plus de visibilité à ces métiers-là.
Mais les métiers maritimes, contrairement à
beaucoup d'autres qu'on trouve à terre, n'ont pas de visibilité naturelle. Et je m'explique. Ça veut dire que,
bon, tout le monde côtoie des pharmaciens, des policiers ou des mécaniciens
d'automobile, dans la vie courante, mais,
des capitaines, on peut bien croiser un capitaine au dépanneur, mais on ne
saura pas qu'il est capitaine, et il
n'y a à peu près personne qui va sur les navires voir ces gens-là à l'oeuvre,
de temps en temps on prend un
traversier, mais ça se limite à ça ou à peu près, alors ce qui fait que, si on
ne fait pas des efforts très accentués pour donner de la visibilité à
ces métiers-là, ils n'en reçoivent pas.
Alors, on
s'est efforcés de le faire beaucoup plus au cours des dernières années, ça a
donné des résultats, avec le fait,
d'ailleurs, comme Nicole le soulignait, que Rimouski s'est avérée ne pas être
un obstacle à l'arrivée d'étudiants, dans la mesure où les gens savent... que suffisamment de gens savent qu'à
Rimouski on peut aller faire des cours d'officier maritime. Et là ils
découvrent que c'est des emplois avec des niveaux de salaire très élevés, c'est
des emplois de haut savoir, comme disait Nicole, qui demandent des compétences très spécialisées et
qui sont des emplois d'avenir, des emplois du futur. Mais il y a cette
condition-là.
Alors,
pourquoi pas plus? Bien, pas plus parce qu'il faut vraiment faire beaucoup
d'efforts pour faire connaître ces métiers-là. Et là, avec ce qu'on a
fait, on arrive au niveau où l'école est presque pleine mais au prix d'efforts
qui demandent énormément de ressources, puis
ce n'est pas toujours facile à maintenir. Et on est aussi à la merci des cycles
qu'il y a là-dedans, comme dans n'importe
quel autre domaine. Et, même en ayant rempli l'école, est-ce que ça va suffire
pour combler les besoins du marché du
travail dans l'avenir? Ce n'est pas évident. C'est pour ça que l'apport de
l'immigration est toujours très activement recherché.
M. Kotto :
Votre passage ici peut susciter des vocations.
M. Mailloux
(Claude) : On est bien ouverts à ça.
M.
Kotto : Maintenant, quand vous parlez de la hauteur des
salaires, ça va à combien de chiffres, sans être spécifique?
M. Mailloux (Claude) : Pour un officier supérieur à bord d'un navire,
que l'on parle d'un officier de navigation, un officier mécanicien,
c'est au-dessus de 100 000 $, et parfois largement.
M. Kotto :
O.K. Et les besoins...
M. Mailloux
(Claude) : Par année.
• (17 h 10) •
M. Kotto :
Pardon? Allez-y, allez-y.
M. Mailloux
(Claude) : Par année.
M.
Kotto : Par année,
oui, oui, oui, O.K. Les besoins à
combler, c'est quoi, le volume, sans spécifier les secteurs?
M. Mailloux (Claude) : Oui, c'est une bonne question. C'est difficile à
établir. À travers les études qu'on fait, mais on n'a pas de système continu de vérification, puis évidemment
le marché change, évolue, mais le dernier portrait qu'on a fait des besoins de main-d'oeuvre, qui cherche à quantifier ça, date de 2013, et ça a confirmé des études
antérieures à l'effet qu'on avait, pour l'industrie maritime au Québec, un besoin de renouvellement de la
main-d'oeuvre qui correspond à peu près à 5 % de la force de
travail par année. Comme on a 27 000 emplois, comme on disait tout à
l'heure, dans le domaine, mais ça, ça inclut les emplois indirects et... les
emplois directs dans le domaine maritime sont environ au nombre de 13 000 ou 14 000, et un besoin de 5 % par année, donc c'est environ entre 700 et
1 000 personnes par année dont on a besoin pour combler les
postes qui s'ouvrent et combler les départs à la retraite et le roulement normal.
Donc, 700 à 1 000 personnes par année, c'est quand même beaucoup. Ça
inclut le personnel navigant et le personnel non navigant, mais c'est quand même beaucoup. Et évidemment il ne sort pas
ça de l'Institut maritime à chaque année, là. À l'Institut maritime, si on parle des officiers de navigation, il
sortait 30 ou 40 officiers de navigation par année, qui sont des officiers juniors. Avant qu'ils soient
rendus au stade de capitaine ou de premier maître... On n'est pas rendus là,
là. C'est aussi long former un
capitaine que de former un chirurgien, encore une fois, c'est des
emplois hyperspécialisés. C'est pour ça qu'il y a des grands défis et
c'est pour ça que notre système de formation, qui est excellent... L'Institut maritime du Québec a une réputation internationale de qualité et de former des bons
officiers mais ne suffit pas, en nombre, à combler tous les besoins.
Oh! Excusez. Je
m'étends beaucoup.
M.
Kotto : ...je vais creuser davantage : Ce qui induit, je
l'anticipe, une compétition acerbe à l'international pour le
recrutement.
M. Mailloux (Claude) : Absolument, absolument, les gens qui sont formés
ici sont des candidats intéressants pour
des compagnies partout sur la planète. Et il y en a d'ailleurs un certain
nombre qui font carrière à l'étranger, parfois pour revenir plus tard. Et il est courant qu'on voie dans le profil d'un
officier de carrière qu'il fasse une partie de son temps à
l'international parce que, comme expérience, ça peut être extrêmement
intéressant aussi.
M.
Kotto : O.K. Le pourcentage d'étudiants étrangers versus des
autochtones, en fait les natifs, il est de combien?
M. Mailloux (Claude) : D'étudiants étrangers dans les programmes dont on
parle, à Rimouski, il est très faible.
M. Kotto :
Il est faible.
M. Mailloux
(Claude) : Il est très faible. Par contre, la présence d'immigrants
dans d'autres types d'emplois maritimes,
comme par exemple dans l'administration maritime ou dans la gestion
maritime — et là on
parle surtout de réalité
montréalaise — là, le
pourcentage est plus élevé. Et, là aussi, il y a des besoins, et là
l'immigration peut être d'un apport
très important. Sur les navires, par exemple, de mémoire, c'est entre 5 %
et 10 % du personnel navigant qui est issu de l'immigration, et on
pourrait l'augmenter, parce que les besoins sont là.
Mais
de gens qui vont à l'école maritime pour se former, à la base, il y en a très
peu. Je ne peux pas dire comment il y en a, mais c'est moins que
5 %.
M. Kotto : O.K. Et, quand
vous plaidez pour le traitement accéléré...
Le Président (M. Picard) : Il
reste 30 secondes, M. le député.
M. Kotto : ... — 30 secondes — vous
pensez à qui spécifiquement?
M. Mailloux (Claude) : On parle de
quelques métiers que j'ai nommés tout à l'heure, qui sont courtier en affrètement de navire, gestionnaire de flotte de
navires internationaux, parce que c'est des emplois qui sont... Surintendant
portuaire. C'est des emplois qu'on ne trouve
pas en très grand nombre mais qui sont des spécialités très recherchées par les
compagnies maritimes qui ont à gérer ce genre d'actif.
M. Kotto : Merci.
Le Président (M. Picard) :
Merci. Je cède maintenant la parole à Mme la députée de Montarville.
Mme Roy
(Montarville) : Merci, M. le Président. Bonjour à vous deux,
Mme Trépanier et M. Mailloux — c'est un petit clin d'oeil.
J'ai pris des notes tout le temps que vous
parliez, et mes collègues ont posé exactement les mêmes questions que je m'apprêtais à vous poser.
Cependant, j'aimerais souligner quelque chose. On parle ici de développement de l'industrialisation
maritime. Sachez que, pour nous, le parti que je représente, la deuxième
opposition, la Coalition avenir Québec,
c'est extrêmement important, on y croit tellement qu'avant même la création de
la Stratégie maritime de mes collègues
du gouvernement il y a eu le Projet Saint-Laurent qui a été rédigé, écrit et
autour duquel tout tourne, tout tourne autour
du fleuve, naturellement, mais également du développement de l'industrie
maritime. Alors, on est pour le développement de l'industrie maritime,
croyez-nous.
Les chiffres
que vous nous dites, nous les savions, mais c'est bien que les gens qui nous
écoutent voient jusqu'à quel point c'est une industrie importante. Quand
vous dites que la porte d'accès la plus facile aux États-Unis, c'est le fleuve Saint-Laurent, c'est extrêmement important,
sous-exploité pour le moment, on devrait développer davantage, c'est une
de nos propositions. Alors, on s'entend très bien.
On est ici
pour parler d'immigration. Alors, j'ai pris des notes, et il y a des choses
intéressantes. Vous nous avez dit...
La plupart, vous y avez déjà répondu, mais j'aimerais aller un petit peu plus
loin. Quand vous nous dites qu'il y a 90 membres,
c'est la SODES qui compte 90 membres? Parmi ces membres-là, vous dites
principalement les armateurs, les
armateurs de navire. Est-ce que ce sont des navires de propriété... battant
pavillon canadien ou est-ce que ce sont tous des bateaux étrangers?
Mme
Trépanier (Nicole) : Dans le
cas des armateurs, qui ne sont pas l'essentiel de notre membership parce qu'il
est très éclaté, en tant que chambre de
commerce maritime... En fait, nos membres sont tous liés à l'activité
économique du Saint-Laurent, en
excluant les croisières internationales, comme je l'ai dit tout à l'heure.
C'est essentiellement du cargo, un peu de passagers avec la Société des
traversiers du Québec.
Les armateurs
qui sont membres chez nous sont, pour la plupart, sous pavillon canadien, mais
ça ne les empêche pas, en étant
propriétaires de navires ici, de parfois les mettre sous pavillon étranger
pendant une période où ils ont un contrat ailleurs dans le monde et
d'embaucher de la main-d'oeuvre étrangère aussi. Mais les quelques entreprises
et armateurs dits internationaux qui sont
membres à la SODES, ils le sont parce qu'ils opèrent sur le Saint-Laurent et
qu'ils veulent connaître la réalité propre de l'activité ici.
Mme Roy
(Montarville) : Parfait. On va rester sur le Saint-Laurent.
Une des questions de mon collègue qui était également une de mes
questions, c'était le nombre... Vous nous donnez une idée en quantité de
personnel que vous allez avoir besoin pour
combler des postes dans l'avenir, vous nous dites 5 % du 13 000,
14 000 annuellement que nous avons.
Et ça, c'est uniquement le personnel navigant, les bateaux, le fleuve, ou
est-ce que ça comptait également le réseau portuaire? Parce qu'il ne
faut pas oublier...
M. Mailloux (Claude) : Ça inclut le
réseau portuaire.
Mme Roy
(Montarville) : Ça incluait également le réseau portuaire.
Parfait. Réseau portuaire qui, lui, à moins que je ne m'abuse — probablement que je me trompe, puis corrigez-moi, vous êtes là
pour ça — est de
juridiction fédérale... ou est-ce qu'il y a des juridictions mixtes?
Mme
Trépanier (Nicole) : C'est
variable. Tout à l'heure, je mentionnais qu'on compte une vingtaine de ports au Québec.
Ces ports sont évidemment essentiellement situés sur le Saint-Laurent, on parle
du Saguenay également. On en ajoute quelques-uns qui sont sur la Basse-Côte-Nord,
qu'on appelle, ou dans le Nord carrément, dans le Nunavik, des ports éloignés.
Mais, si je reviens à la vingtaine de ports au
Québec, il y en a cinq qui sont des administrations portuaires canadiennes,
entre guillemets : Montréal, Trois-Rivières, Québec, Sept-Îles, Saguenay.
Et ça, c'est donc de propriété fédérale. Et il y a
d'autres ports qui sont propriété de Transports Canada qui existent, c'est une
bonne proportion. Ça peut être Matane, par
exemple. On a le port de Bécancour qui est propriété du Québec, on a quelques
ports qui sont propriété municipale, comme Valleyfield, puis il y en a
qui sont de propriété privée parce que, par exemple, il peut y avoir... la municipalité a un quai où les gens vont, je ne
sais pas, pêcher, mais à côté il y a une autre installation qui appartient à
une minière, là, qui donne
l'essentiel du volume qui est manutentionné à cet endroit, ça fait qu'il y a
des propriétés, disons, adjacentes mais pas tout à fait la même
vocation. Mais l'essentiel, c'est de propriété de Transports Canada...
Mme Roy
(Montarville) :
Parfait.
Mme Trépanier (Nicole) : ...qui
voudrait bien s'en défaire, par ailleurs.
Mme Roy
(Montarville) : Oui. Cela dit, un autre des items que vous
nous avez soumis, pénurie de travailleurs, on en a parlé, besoins pressants dans l'industrie, ce fameux 5 % annuellement, création d'emplois, et vous nous avez parlé
du volet promotion à l'étranger de nos
besoins en main-d'oeuvre. Vous avez dit : On a essayé de le faire.
C'est excessivement difficile, mon
collègue de Bourget disait à
juste titre, parce que
vous faites face à une compétition
internationale. Parce que ces gens-là sont extrêmement rares, donc, on
se les arrache partout sur la planète.
Alors,
qu'est-ce que vous avez essayé de faire? Puis qu'est-ce que vous aimeriez ou
quelle est l'aide que vous demandez pour faire cette promotion, pour
dire : Attendez, sur le Saint-Laurent, on a besoin de travailleurs, puis
de travailleurs qualifiés? À quoi est-ce que vous vous attendez?
• (17 h 20) •
M.
Mailloux (Claude) : Bien,
essentiellement... On a peu de moyens, mais ce qu'on a produit, on a produit un
document d'information qui explique à des
gens qui ont des qualifications maritimes à l'étranger et qui aimeraient
immigrer au Canada que c'est possible
pour eux de le faire, et voici les démarches qu'ils devraient faire pour rendre
leur démarche, leur expérience la
plus efficace possible, et notamment
en les informant, parce que c'est une chose qui entraîne beaucoup de
délais, ça peut paraître simpliste, mais qu'ils doivent s'arranger, avant
d'arriver au Canada, pour faire traduire tous leurs documents attestant de leurs qualifications maritimes en français
ou en anglais, parce que, s'ils
arrivent ici avec des documents maritimes écrits en ukrainien ou en
marocain, bien ils n'ouvriront même pas l'enveloppe, là.
Mme Roy
(Montarville) : Et cette tentative que vous avez faite pour
recruter à l'étranger, vous l'avez faite via quel canal?
M.
Mailloux (Claude) : En fait,
c'était de l'information qu'on a diffusée via le réseau des délégations du
Québec et des ambassades canadiennes,
en fait tout ce qui est représentation à l'international. On s'est procuré la
liste des bureaux et on a fait un
envoi postal à tous ces gens-là. Et, bon, on n'a pas énormément de ressources.
Ça impliquait la production des documents et les envois, mais on n'a pas
les moyens d'assurer un suivi de ces...
Et, ce genre de chose là, il faut que ce soit
continu. On a constaté qu'on a reçu des demandes d'information à quelques reprises par la suite. Sûrement que
l'effet était là, mais on n'a pas les moyens de faire en sorte que ce soit
vraiment une opération, tu sais, ultraefficace, faute de moyens.
Et là-dessus, si c'était possible d'obtenir
l'appui, via la loi, ou via les politiques, ou via les interventions des ministères, pour s'assurer que c'est bel et bien
pris en charge une fois que ça arrive là-bas — parce que, ça, on n'a pas les moyens
de le vérifier — et
que c'est mis dans les présentoirs...
Le
Président (M. Picard) : En terminant, s'il vous plaît. Merci.
Merci, Mme Trépanier, M. Mailloux, pour votre contribution aux
travaux de la commission.
Je suspends les travaux quelques instants afin
de permettre au prochain groupe de prendre place. Merci.
(Suspension de la séance à 17 h 22)
(Reprise à 17 h 25)
Le Président
(M. Picard) : Nous
reprenons. Je souhaite la bienvenue aux représentants de la ville de
Gatineau. Je vous invite à vous
présenter ainsi que la personne ou les personnes qui vous accompagnent. Vous
disposez d'une période de 10 minutes, va s'ensuivre des échanges
avec les parlementaires. La parole est à vous.
Ville de Gatineau
M.
Pedneaud-Jobin (Maxime) :
Bonjour à tous. M. le Président, Mme la
ministre, MM et Mmes les députés.
Merci d'avoir invité la ville de Gatineau à partager sa perspective sur le
nouveau projet de loi. Je suis Maxime Pedneault-Jobin, je suis le maire de la ville de Gatineau, et je
suis accompagné d'Émilie Cameron-Nunes, qui est responsable de la section de la diversité culturelle à la ville de Gatineau.
Et ce poste-là à la diversité culturelle a été créé dans l'ancienne ville de Hull il y a déjà très, très longtemps, on
a été la première ville au Québec à se donner un responsable des relations
interculturelles, puis on a été imités par
un village, quelque 10 années plus tard, puis ce village-là s'appelait
Montréal. Donc, on est très fiers d'avoir montré la voie au Québec pour
les relations avec les communautés culturelles.
On
salue la volonté du gouvernement de moderniser la loi puis d'y introduire un
nouveau système de sélection visant
un meilleur arrimage entre le profil des nouveaux immigrants et les besoins du
Québec puis de ses régions en matière de
main-d'oeuvre. On croit que le mécanisme de déclaration d'intérêt va avoir un
impact positif sur l'intégration socioéconomique des immigrants.
Bien qu'on
souhaite jouer un rôle au niveau de l'identification des profils désirés en
région via la Commission des partenaires du marché du travail, en tant
que ville, on est particulièrement intéressés par le défi de l'intégration économique et socioculturelle. En effet, nos
nouveaux citoyens issus de l'immigration sont amenés à se tourner vers la
ville comme interlocuteur privilégié, étant
donné notre proximité avec eux. Ainsi, les grandes orientations de la politique
à venir et la façon dont le MIDI encadrera
le rôle élargi des municipalités en matière d'inclusion va être déterminant sur
notre capacité d'avoir des résultats intéressants chez nous.
Permettez-moi
de dresser un bref aperçu du portrait de Gatineau en matière d'immigration,
c'est un contexte qui est
malheureusement mal connu. La région métropolitaine de recensement de Gatineau
est le deuxième pôle d'immigration au
Québec. En 2011, 10 % de notre population était issue de l'immigration,
soit près de 31 000 individus. La ville de Gatineau à elle seule, donc pas la RMR, la ville de Gatineau
à elle seule devance même la ville de Québec à ce chapitre, tant en chiffres
absolus qu'en proportion de la population.
Les prévisions laissent présager aussi que cette diversification de la
population gatinoise va continuer à augmenter au moins jusqu'en 2031.
Depuis 2003,
le gouvernement du Québec signe une entente particulière avec la ville de
Gatineau afin que cette dernière prenne en charge des activités d'accueil et
d'intégration sur son territoire. Dans le cadre de la mise à jour de notre propre politique, en automne dernier, on a
aussi fait une première journée qu'on a appelée une journée découverte avec la ville d'Ottawa, où les deux villes étaient
ensemble pour apprendre, pour que nos organisations apprennent à mieux
se connaître et à mieux travailler ensemble dans un domaine qui nous concerne,
les deux rives, directement.
Il y a
plusieurs raisons qui expliquent la situation particulière de Gatineau en matière
d'immigration. Disons que la première est certainement notre vigueur
économique, un dynamisme qui ne se dément pas depuis quelques décennies.
La présence massive du gouvernement fédéral constitue à elle seule une source
d'attraction importante pour tous les chercheurs
d'emploi. Notre capacité d'intégration économique aussi est impressionnante.
Les immigrants arrivés avant 2001
avaient, en 2011, soit 10 ans plus tard, un taux de chômage un peu plus
bas que la moyenne gatinoise, c'est-à-dire 5,8 % contre 6,5 % pour l'ensemble de la population.
Évidemment, il reste des efforts à faire pour faciliter l'intégration
des immigrants arrivés plus récemment, mais les chiffres nous démontrent
qu'avec le temps on réussit l'intégration économique des immigrants à Gatineau,
ce qui est une grande source de fierté pour nous.
Autre
facteur : pour les personnes immigrantes, la frontière interprovinciale ne
compte pas beaucoup. Après leur arrivée,
les immigrants découvrent rapidement les particularités propres à chacune des
deux rives, et certains font le choix de
traverser la rivière pour s'établir au Québec, notamment afin de profiter de
logements plus abordables ou encore de garderies accessibles.
De plus, ça
fait plusieurs années que Gatineau est reconnue comme une municipalité
proactive dans le domaine de
l'intégration de l'immigration pour ses actions en matière de promotion de la
diversité culturelle, ses services d'accueil, ses événements interculturels et ses partenariats avec le milieu, et ça,
en grande partie grâce au travail remarquable réalisé par les organismes
partenaires qui fournissent des services aux immigrants sur notre territoire.
• (17 h 30) •
Toutefois, on fait face à plusieurs défis
particuliers dans la région. Il est important de maintenir et d'élargir la collaboration entre tous les partenaires pour
mettre en oeuvre des solutions durables. Les résultats de notre consultation
de cet automne démontrent l'importance que
la ville joue un rôle de leadership et mette en place des mécanismes pour
faciliter davantage l'intégration en rapport
avec le marché du travail, la capacité de communiquer et l'accessibilité aux
services. Parmi les défis, on note l'accès à la francisation, qui, à cause de
notre situation frontalière, empêche parfois certains
immigrants d'abord arrivés à l'extérieur du Québec d'obtenir certains services.
Il faut aussi noter que la connaissance préalable
du français par les nouveaux arrivants ne garantit pas la
facilité à communiquer avec la société d'accueil, puisque l'apprentissage des valeurs de base et des codes
culturels québécois reste une étape, pour nous, nécessaire
pour s'adapter à la société québécoise.
Il est important de noter aussi la situation
particulière de la région en matière d'enseignement supérieur. Le gouvernement
du Québec a reconnu que l'Outaouais vit un contexte particulier de compétition
avec des institutions ontariennes, ce qui
provoque un exode important d'étudiants vers Ottawa, dont le quart ne peuvent
pas avoir de reconnaissance de leurs diplômes en sol québécois, donc
parfois ils ne reviennent pas chez nous.
Lors de la
mise en oeuvre de la nouvelle loi et de la nouvelle politique du Québec,
Gatineau va être un important partenaire
du MIDI. On reconnaît que, selon le principe de la subsidiarité et en fonction
vraiment de la réalité sur le terrain, il appartient aux villes et à leurs partenaires locaux de prendre en charge
l'accueil, l'installation, la francisation, l'intégration socioéconomique et les relations interculturelles,
mais les villes et leurs partenaires doivent avoir les moyens légaux et financiers de le faire. Je crois que Montréal et
Québec ont été assez clairs là-dessus, et nous, on porte le même message.
Sur le projet
de loi n° 77 lui-même, comme on l'a déjà mentionné, on accueille
favorablement le projet de loi, qui
va introduire un nouveau mode de sélection des immigrants. C'est une nouvelle
façon de faire qui va nous permettre de
répondre à un des plus grands défis pour les immigrants, soit la pénurie
d'emplois qui leur sont offerts à l'arrivée. En plus de réduire les délais d'attente dans le traitement de dossier, ce
nouveau mode de sélection va permettre de simplifier les procédures et cibler plus rapidement les
candidats les plus prometteurs. De plus, considérant les délais actuels entre
la sélection et l'arrivée des immigrants, on peut imaginer qu'il va être
possible de faire participer davantage les employeurs à la sélection des immigrants si on réduit ces
délais-là, donc en permettant aux employeurs de patienter jusqu'à l'arrivée
de leurs nouveaux employés.
D'après
nous, la mise en oeuvre de cette nouvelle façon de faire doit aller de pair
avec un certain nombre d'autres mesures. Premièrement, bien que
l'intégration économique soit la priorité des personnes immigrantes, il ne faut
pas oublier qu'elle va de pair avec
l'intégration socioculturelle. Pour assurer une rétention en emploi puis une
intégration plus profonde, un sentiment d'appartenance à la société
québécoise, il est essentiel que notre stratégie d'inclusion soit rattachée à
notre stratégie d'intégration économique par des mesures facilitant
l'adaptation à la culture québécoise et facilitant
la communication interculturelle entre la société d'accueil et les nouveaux
arrivants. Il est essentiel que le mode de sélection économique des immigrants s'accompagne d'un investissement
du MIDI dans des initiatives d'intégration et d'inclusion qui ont fait leurs preuves. On a des organismes locaux
chez nous comme le SITO, le service d'intégration au travail de
l'Outaouais, et le carrefour jeunesse-emploi. Avec leur expertise en
employabilité et en compétences interculturelles,
ils peuvent jouer un rôle essentiel d'accompagnement auprès de nouveaux
arrivants et des entreprises pour
assurer l'embauche et l'intégration durable des personnes immigrantes.
Également, les occasions de rapprochement culturel, de formation aux
compétences interculturelles, de jumelage, de stage, de bénévolat organisées
par la ville en collaboration avec ses partenaires doivent continuer d'être
appuyées.
Advenant que
la déclaration d'intérêt cherche à engager davantage les employeurs dans la
sélection des immigrants, on est
convaincus qu'il demeure tout aussi essentiel d'accompagner ces mêmes
employeurs sur le plan de l'accueil, de l'intégration de leurs nouveaux employés et de la communication
interculturelle pour favoriser la rétention en emploi. Le MIDI doit aussi continuer à encadrer et à financer
la mise en place de stratégies et de services qui favorisent la francisation,
la pleine participation des nouveaux
citoyens dans les villes et qui s'assurent qu'un transfert équitable des
ressources soit fait vers les partenaires concernés.
Enfin, pour ce qui est des consultants en
immigration, on salue les nouvelles dispositions qui vont permettre d'éviter des fraudes et de protéger nos citoyens.
En plus d'avoir accès au Registre québécois des consultants en immigration
du MIDI en ligne, les citoyens vont pouvoir être accompagnés dans leurs
démarches par des organismes locaux.
Toutefois,
par manque de connaissance sur l'existence des différents services, il est
arrivé que des Gatinois aient de
mauvaises expériences avec de faux consultants en immigration à Ottawa. Donc,
un lien ou un avertissement pourrait être
fait avec le registre des consultants en immigration en Ontario afin de tenir
compte de la particularité de notre région transfrontalière, où les citoyens naviguent entre les deux rives pour
aller trouver les services dont ils ont besoin. Dans le cadre de nos initiatives
de collaboration entre Gatineau et Ottawa, un lien entre nos sites Web va être
créé et pourrait contenir ces
registres afin que les citoyens et les organismes fournisseurs des services aux
immigrants en soient informés de façon uniforme.
En conclusion,
la ville de Gatineau souhaite arrimer ses pratiques avec celles du gouvernement
du Québec en matière de pairage entre
les immigrants et les employeurs, ça va nous aider à répondre à nos besoins en
matière de main-d'oeuvre. Le projet de loi annonce des améliorations pour notre système d'immigration, constitue une belle occasion de bonifier nos stratégies d'inclusion tout en optimisant la collaboration entre le gouvernement, les villes et les acteurs du milieu.
Gatineau est une vitrine sur le Québec et sur son modèle distinct d'immigration,
elle doit être exemplaire à ce niveau et
doit assurer la rétention des personnes immigrantes qui peuvent contribuer à
notre société. Soyez assurés que Gatineau travaillera de
concert avec le ministère et ses partenaires pour mettre en place les
changements à venir. Merci.
Le Président (M. Picard) :
Merci, M. Pedneaud-Jobin. Je cède maintenant la parole à Mme la ministre.
Mme
Weil : Oui, merci, M. le Président. Donc, bienvenue, M. le maire, M. Pedneaud-Jobin,
et Mme Nunes Cameron. Bienvenue.
Juste deux commentaires. D'entrée de jeu, je voudrais, premièrement, vous féliciter
dans le dossier de l'accueil des réfugiés syriens. Vous jouez un rôle
formidable, un partenaire fiable comme vous l'avez toujours été en matière d'immigration et diversité mais aussi pour
l'immigration humanitaire et la prise en charge. Et vous faites un commentaire
aussi dans votre mémoire que, la ville, il
n'y a pas juste l'organisme communautaire, là, qui joue un rôle mais aussi la
ville, qui veut s'assurer que... l'accueil,
l'intégration puis essentiellement la rétention aussi, parce que vous avez la
frontière qui est là, et je sais que c'est une situation très, très
particulière que vous vivez.
Deuxièmement,
je voulais vous dire que M. Robert Mayrand, du SITO, est venu la semaine
dernière, et, je dois vous dire, ce
sont vraiment de très bons ambassadeurs, hein, pour Gatineau. Ils ont partagé,
justement, le fonctionnement et à quel point ensemble, tout le monde ensemble,
avec Emploi-Québec, SITO, la ville, vous travaillez tous ensemble pour vous assurer de cette intégration en emploi. Donc,
déjà vos chiffres étaient bons, mais là on dirait que tout le monde qui
passe par SITO se retrouve en emploi. J'ai moi-même visité à de nombreuses
reprises pour signer l'entente, l'entente Mobilisation-Diversité,
d'ailleurs une entente qui sera signée sous peu. Alors, je voulais juste vous
dire : Félicitations!
Mais vous
avez une situation très particulière qui, je pense, exige une attention
particulière. Généralement, ça ne semble
pas être un problème, mais il y a beaucoup d'allées et venues, hein, entre
Ottawa et Gatineau. Alors, on pourra y
venir, sur la question de la langue, par exemple, accès à des cours de
francisation, et tout ça, il faudra qu'on en discute.
Peut-être,
dans un premier temps... Oui, on pourrait aller sur la sélection après, mais
vous parlez de l'importance de s'attarder à la question de l'inclusion,
de la participation, et tout ça, et c'est vraiment une force que vous avez. Et je ne l'ai pas expliqué ce matin, parce qu'on
avait des commentaires de la Centrale des syndicats du Québec, mais je n'ai
pas eu le temps d'expliquer, tout ça, c'est
dans le projet de loi, puis je pense que les gens peut-être ne s'y attardent
pas. C'est dans les fonctions du
ministre. Je dis bien «du ministre» parce que c'est un projet de loi pour
l'avenir, donc la ou le ministre. C'est vraiment dans les fonctions que
c'est décrit.
Donc, on
pourrait aller là-dessus tout de suite. On pourra revenir sur le rôle que vous
vous voyez jouer en amont autour de
la sélection puis de la détermination de vos besoins en termes de sélection,
mais peut-être vous entendre sur, par votre
expérience et votre vision des choses, le rôle de la ville. Vous l'avez
beaucoup expliqué quand même mais parce que
c'est tellement central dans votre présentation, et c'est un peu votre marque
de commerce aussi, je pense, la ville
de Gatineau, une ville de diversité mais qui vit bien sa diversité. D'ailleurs,
c'est vraiment un savoir-faire, là, que vous avez, puis concernant le
vivre-ensemble, hein? C'est beaucoup ça, votre expertise.
Donc, je
voudrais voir comment vous, vous voyez le gouvernement, le rôle qu'on peut
jouer avec vous, avec les villes,
donc, les villes, sur toute cette question d'intégration, de participation, de
rétention de l'immigration. Parce que, la rétention, je ne sais pas si vous avez donné le chiffre, mais vous
pourriez peut-être parler de cette question aussi. Ça doit un peu un
défi, j'imagine, les gens qui peuvent quitter la ville.
• (17 h 40) •
M. Pedneaud-Jobin (Maxime) : Oui. Il
y a beaucoup d'éléments.
Bien,
d'abord, je voudrais vous remercier parce que, quand vous êtes passée chez nous
et vous avez utilisé le mot «modèle»
en parlant du SITO, là, des gens qui étaient déjà motivés et qui faisaient déjà
du bon travail étaient encore plus motivés.
Alors, merci d'avoir reconnu ce qu'ils font de bien, parce qu'on en est
vraiment très fiers. Puis c'est un organisme dont une des principales caractéristiques, c'est vraiment son ancrage
avec l'ensemble des partenaires, c'est vraiment tout le monde qui travaille ensemble pour atteindre
l'objectif, bien, principal à court terme, c'est-à-dire de travailler. À partir
du moment où les nouveaux arrivants peuvent
travailler, nourrir leur famille, contribuer, après ça on peut travailler sur
beaucoup d'autres choses, mais ça reste pour
eux, en fait, et pour nous, là, la priorité. Donc, merci d'avoir eu ces bons mots là.
Le rôle de la
ville, pour nous, puis ce n'est pas seulement dans ce domaine-ci, c'est dans beaucoup
de domaines, pour nous, les villes, ce n'est plus des administrations
simples qui gèrent aqueduc, égout, asphalte, c'est vraiment un gouvernement de proximité qui intègre l'action, qui pourrait intégrer — parce qu'on le fait, mais on pourrait le faire encore plus — intégrer
l'ensemble de l'action gouvernementale qui arrive sur le terrain. Puis vous avez
parlé des réfugiés. On l'a vu, ça prend une ville, ça prend une autorité
locale qui assoit les gens ensemble, qui s'assure qu'on collabore; quand il y a
des trous de services, qui peut soit le combler, soit revendiquer pour que quelqu'un
d'autre le comble, qui pourrait être
un autre gouvernement. Et c'est un peu ce qu'on fait avec les partenaires
en immigration, qui fait une partie de notre succès, c'est vraiment cette capacité-là de coordonner l'action, de
s'asseoir, d'asseoir les gens ensemble. Ce qu'on a fait avec la ville d'Ottawa cet automne, c'était
un peu ça, c'est de dire : Bien, l'immigrant ne voit pas tellement
la frontière, il y a des partenaires de chaque côté de la rive qui
offrent des services, ce serait intéressant qu'on se connaisse. Puis malheureusement ça n'avait jamais été fait dans les dernières années. Donc, pour
moi, c'est vraiment d'intégrer l'action gouvernementale.
Puis je
reviens aux réfugiés, là. C'est comme naturel parce qu'il y a à la fois un leadership politique, là, il y a un élu qui est redevable, vers qui les gens peuvent
se tourner, il y a un appareil gouvernemental qui est capable d'asseoir les gens ensemble, puis souvent c'est tous des
organismes qu'on connaît, Accueil-Parrainage Outaouais, le SITO, Option
Femmes Emploi, nommez-les. Tous ceux qui sont... l'éducation, la santé, qui
font affaire de près ou de loin avec un immigrant,
on est là. Ça fait que, pour moi, le rôle de la ville, c'est vraiment ça, c'est
d'intégrer l'action gouvernementale sur le terrain.
Mme Weil :
Dans votre mémoire aussi, bon, vous appuyez donc ce système de déclaration
d'intérêt, mais vous dites par
ailleurs qu'il faut développer d'autres mesures afin de diminuer le taux de
chômage des personnes immigrantes. Donc,
c'est des mesures comme, par exemple, le rôle de la ville, asseoir tout le
monde autour d'une table pour échanger, des organismes comme SITO et les
autres? Est-ce que c'est un peu dans ce sens-là?
M.
Pedneaud-Jobin (Maxime) : Bien, l'autre élément, c'est l'intégration
socioculturelle. On peut cibler l'emploi, mais il y a des codes. Puis je ne veux pas donner... je ne veux pas
cibler des communautés particulières, mais, par exemple, on a des anecdotes de gens qui viennent de France,
donc qui parlent quand même assez bien le français, et qui ont de la
difficulté à s'intégrer dans le modèle nord-américain; dans des cas, des gens
qui viennent d'Afrique francophone, ils parlent
très, très bien le français, mais qui ont des difficultés à s'intégrer dans nos
communautés. Et c'est là, encore une fois,
où la ville peut jouer un rôle. On fait toutes sortes d'activités
interculturelles, on rassemble les gens. Dans les quartiers, il faut
qu'il y ait des activités culturelles, sportives, communautaires où on réussit
à, souvent, extraire les gens de leur appartement, parce qu'ils n'ont pas
beaucoup de réseau, et les faire participer à la vie de la communauté.
J'ajouterais
un élément. On a aussi des services comme, par exemple, nos bibliothèques.
Quand on va dans une bibliothèque la
fin de semaine ou en fait en plein jour la semaine, souvent la proportion
d'immigrants, elle est considérable, parce
qu'il y a des ordinateurs gratuits, c'est un service qui est public, ils sont à
l'aise, ils sont accueillis par quelqu'un. Bien, si la ville a les ressources pour que les gens qui les accueillent
connaissent la situation des immigrants, connaissent les services disponibles et soient capables de les
attirer vers des activités communautaires pour briser leur isolement...
C'est là où la ville est bien placée pour faire ça.
Mais ça, là,
on arrive à la partie plate, c'est que ça prend des ressources. Il faut qu'on
forme notre personnel, il faut qu'ils
sachent... Des fois, ça va prendre, puis je crois que c'est ce que Montréal
veut faire... des fois ça va prendre des gens qui ne font que ça, en particulier dans les bibliothèques. Et ça,
pour moi, c'est vraiment utiliser l'espace public, le rôle de la ville
puis de l'employé municipal d'une façon intelligente, où on ne multiplie pas
nécessairement le nombre d'employés, mais on
a quelqu'un qui est en contact direct avec des gens qui ont un besoin et qui
sont capables d'y répondre; en fait souvent qui ne savent même pas
qu'ils ont un besoin, mais on est capables de les aider.
Mme Weil : Écoutez, je trouve
ça intéressant. On n'a pas eu, jusqu'à date, de villes qui ont parlé de cette problématique de codes culturels. Donc, vous dites
même, vous, vous le remarquez puis vous avez le souci de trouver des stratégies
d'accompagnement pour partager, c'est l'interculturalisme, hein, c'est beaucoup
cette approche de dialogue et de
participation ensemble, mais même avec des Européens, là, des Français qui...
Donc, ce n'est pas une question de langue...
M. Pedneaud-Jobin
(Maxime) : Ce n'est pas toujours une question de langue.
Mme
Weil : ...pas toujours une question de langue ou de religion,
même, c'est vraiment ce que vous dites, c'est des codes culturels. Et
donc vous êtes proactifs depuis un certain temps à cet égard, hein, ça fait plusieurs
années.
M.
Pedneaud-Jobin (Maxime) :
Oui. Peut-être que Mme Nunes pourrait donner des exemples
de ce qu'on fait.
Mme
Cameron-Nunes (Émilie) :
Oui. En fait, on a mis sur pied un projet de centre interculturel en collaboration avec les acteurs du milieu de
la diversité. Ça, c'est une des initiatives, en fait, qui va être vraiment intéressante
parce que les activités offertes au centre
interculturel vont être un prétexte pour favoriser le rapprochement
interculturel. Alors, à travers du jardinage collectif, à travers de la
zumba, à travers n'importe quelle activité, on va offrir un cadre positif
structurant pour favoriser le développement de relations harmonieuses à
Gatineau.
Il
y a toutes sortes de choses qu'on peut penser en tant que ville, offrir un
cadre structuré puis optimiser les activités qu'on a. Par exemple, on va avoir une bibliothèque vivante pour
sensibiliser la population à la situation des réfugiés. Ça, ça va être fait avec l'UQO. Vous connaissez le
concept, c'est que les gens empruntent des livres vivants. Alors, il va y avoir
toutes sortes de questions sur c'est quoi, porter le voile, c'est quoi, être
musulman, etc.
Alors, si on peut
combiner des actions comme ça à d'autres, tel que le jumelage de familles, par
exemple, des possibilités de mentorat
professionnel, si on peut utiliser chaque occasion qu'on fait pour permettre à
la société d'accueil de se rapprocher
avec les nouveaux arrivants, je pense que c'est vraiment l'idéal, utiliser des
événements qu'on fait comme prétexte
pour mettre les gens ensemble puis que les personnes qui viennent d'arriver
dans notre société puissent justement se familiariser avec la façon
qu'on fonctionne au Québec. Il y aurait ça.
Qu'est-ce
qui est ressorti aussi, on a eu une consultation citoyenne à l'automne, et ce
qui est ressorti de ça, c'était, oui,
bien sûr, la priorité, c'est l'intégration économique mais aussi la capacité de
communiquer et l'accessibilité aux services. Ça, c'était une grande problématique. Donc, quand M. le maire vous
parlait, tout à l'heure, justement de l'idée d'offrir une espèce de
guichet unique... pas un guichet unique mais que les employés de la
bibliothèque puissent fournir les informations sur tout ce qui est offert dans
la région, ça pourrait répondre aux besoins, ce serait une façon; au centre
interculturel aussi, ce serait une façon; notre portail Web, etc.
Si
je peux me permettre de répondre à votre question, tout à l'heure, par rapport
à la rétention, la problématique de
la rétention aussi j'aurais une petite anecdote à raconter. On a une personne
qui est passée à travers le SITO qui a fait ses études à l'Université
McGill, à Montréal, après ça elle est arrivée à Gatineau, elle a fait la
formation préparatoire à l'emploi du SITO
qui forme aux codes culturels de la société québécoise, etc., puis elle m'a été
référée par le SITO pour notre initiative de collaboration, justement,
Gatineau-Ottawa. Alors, c'était la personne parfaite. Elle parle
l'anglais très bien, le français un peu moins bien, mais ça va quand même.
Donc, je lui ai donné une super référence, mais
ce n'était pas possible pour elle d'avoir un emploi à Gatineau parce que son
niveau de français écrit n'était pas assez bon. Donc, elle s'est trouvé un emploi comme ça à Ottawa, mais c'est une
perte de productivité pour le Québec comme... C'est ça. Donc, c'est un
peu un exemple au niveau de problématiques au niveau de la rétention qu'on a.
Mme Weil :
J'ai le député de D'Arcy-McGee qui souhaiterait poser une question, M. le
Président.
Le Président (M.
Picard) : M. le député de D'Arcy-McGee. Il reste trois minutes.
M.
Birnbaum : Merci, M. le Président. M. Pedneaud-Jobin,
Mme Nunes-Cameron, merci beaucoup pour votre mémoire. Et je me permets de vous féliciter aussi,
parce que je trouve ça très intéressant de noter, malgré les particularités
de Gatineau — ce n'est pas nécessairement facile, compte
tenu de vos voisins juste à côté — que vous avez l'air d'avoir réussi,
il y a plein de défis, mais à mettre de l'avant les préoccupations à la fois
des immigrants et les compagnies qui risquent
de les recevoir, la société qui risque de les recevoir. Il me semble que
peut-être on peut apprendre beaucoup de votre modèle.
Vous
avez parlé de Toronto et, avant, de la rétention, l'intégration, la
francisation. Je comprends qu'il y ait des défis, mais en même temps
vous avez l'air d'avoir trouvé des stratégies très intéressantes. J'aimerais
vous inviter à élaborer un petit peu,
surtout compte tenu du contexte démographique et géographique de Gatineau, de
votre expérience en tout ce qui a trait à la francisation, les défis ainsi que
les réussites, et comment ce projet de loi risque de faciliter vos efforts.
• (17 h 50) •
M. Pedneaud-Jobin
(Maxime) : C'est clairement un enjeu, la francisation. On est
peut-être la région après Montréal où
l'influence de l'anglais est la plus forte, il y a nos voisins qui sont de
l'autre côté qui envoient des messages puissants de ce côté-là, et, pour
nous, c'est une préoccupation.
Il y a plusieurs
éléments qui font, je crois, qu'on s'en sort assez bien pour l'instant, c'est
qu'on n'a pas une concentration à un endroit
en particulier de nouveaux arrivants, il
y a vraiment, là... dans toute la
partie ouest, l'ancien Aylmer,
l'ancien Hull. Et on essaie, par des tournées de la ville au complet... Quand
on a des nouveaux arrivants, on leur présente
l'ensemble de la ville. On essaie qu'il y ait une installation un peu partout dans la grande ville pour que
l'intégration linguistique se fasse un peu mieux.
On
a vécu un certain nombre de difficultés par rapport aux cours de francisation, notamment
de gens qui s'installent à Ottawa, qui
veulent venir chez nous mais qui n'ont pas accès aux cours parce qu'ils sont entrés par la voie
ontarienne. Et là peut-être que Mme Cameron-Nunes pourrait élaborer.
Mme
Cameron-Nunes (Émilie) : C'est ça. Je crois que les gens qui n'ont pas
un certificat de sélection du Québec n'ont
pas accès à la francisation. Alors, ce qui est ressorti de notre consultation,
c'est qu'en fait la francisation devrait être offerte à tous, en fait, peu importe, puis aussi la francisation
devrait être plus flexible, plus accessible, la façon que c'est offert.
Par
exemple, bien ça, je pense, l'exemple a été cité dans le mémoire, il y a des
citoyens gatinois qui vont dans les
bibliothèques à Ottawa pour avoir accès à des cours de français parce que c'est
style portes ouvertes, les gens peuvent y aller quand ils veulent, c'est
gratuit, alors ça répond bien aux besoins.
Il
y a aussi quelque chose d'intéressant qui avait été proposé, c'était que des
cours de francisation soient plus reliés, en fait, aux professions des gens, donc que ce soit plus relié aux
démarches de recherche d'emploi qu'ils font. S'ils peuvent intégrer un groupe de professionnels ou avoir
accès à du mentorat professionnel pour que leur vocabulaire soit vraiment
axé sur leur emploi, ce serait intéressant.
Donc, c'est vraiment à ce niveau-là, je crois, qu'il faudrait peut-être axer le
futur.
Le Président (M.
Picard) : Merci. Je cède la parole à M. le député de Bourget.
M. Kotto :
Merci, M. le Président. M. le maire, Mme Nunes-Cameron. De parents ou
de culture...
Mme Cameron-Nunes
(Émilie) : Oui, portugaise, Nunes.
M. Kotto :
Portugaise.
Mme Cameron-Nunes
(Émilie) : Cameron, c'est écossais...
M. Kotto :
Écossais.
Mme Cameron-Nunes
(Émilie) : ...québécois, oui.
M. Kotto :
Donc, vous êtes dans un sacerdoce qui vous convient très bien, travailler pour
la diversité.
Mme Cameron-Nunes
(Émilie) : C'est ça. J'ai vécu en Asie, en Afrique, en Amérique latine...
M. Kotto :
Tout à fait. Bien, soyez les bienvenus et merci pour votre contribution à nos
travaux.
M. le
maire, vous parlez... enfin, vous plaidez pour un rôle accru de la ville pour
incarner ou intégrer l'action du gouvernement
sur le terrain relativement aux questions d'accueil, de francisation, de
logement. Sous quel paradigme idéal voyez-vous
ça? Comment fonctionneriez-vous relativement à ce qui se fait actuellement via
les organismes communautaires en particulier?
M. Pedneaud-Jobin (Maxime) :
Bien, je vois le rôle de la ville essentiellement comme un coordonnateur, comme une espèce de leadership territorial. Moi,
je suis dans une position... ou le maire est dans une position pour dire
aux gens : On doit s'asseoir, on doit
faire quelque chose, donc le maire peut être porteur des objectifs généraux du
territoire. Mais on ne fera pas tout
nous-mêmes, surtout qu'il va falloir réviser notre fiscalité le plus rapidement
possible parce que 87 % de nos
revenus, c'est de la taxe foncière, on est supposés offrir des services à la
propriété avec ça. Et on se trouve à
s'investir dans des domaines, avec joie et enthousiasme, comme la culture, les
loisirs, l'accueil des immigrants, mais notre fiscalité n'est pas conçue
pour ça.
Mais
concrètement vraiment moi, essentiellement, je vois ça comme un rôle de
leadership territorial, donc des gens
comme Mme Cameron-Nunes qui connaissent les partenaires, qui les assoient
ensemble, on se donne des objectifs généraux
comme partenaires, et c'est la ville qui, par son leadership, réunit les gens,
voit s'il y a des trous de services, voit
à ce qu'ils soient comblés par nous-mêmes, ou par des partenaires, ou par les
gouvernements, les autres ordres de gouvernement,
mais essentiellement c'est ce que j'appellerais du leadership territorial, qui,
pour moi, est indissociable de l'autonomie des villes, qui est un autre
débat qui s'en vient cette année au Québec, là.
M.
Kotto : Et sur le terrain, notamment en matière de
francisation, à travers quels indicateurs... On est dans des hypothèses, là, parce que la porte n'est pas
encore ouverte à ça, je sais qu'il y a des discussions qui se font, mais, dans
la mesure où justement vous incarnez cette
action gouvernementale sur le terrain, à travers quels indicateurs pourrait-on,
nous, de ce côté-ci, quand la reddition de
comptes s'imposera, nous référer afin
de prendre la mesure du parcours réussi de l'immigrant ou de
l'immigrante?
Mme Cameron-Nunes
(Émilie) : O.K. Vous parlez des indicateurs pour la ville comme telle,
pour notre...
M. Kotto :
Oui, oui.
Mme
Cameron-Nunes (Émilie) : O.K. Donc, en fait, moi, la seule information
que j'ai eue pour les prochains programmes
à venir pour les villes, c'est que le ministère s'enligne vers l'approche des
Collectivités accueillantes, puis la
ville d'Ottawa a déjà cette approche-là depuis quelques années. Alors, je
trouve ça bien intéressant, justement, le fait qu'il y ait des indicateurs comme ça et des mesures de rendement. Par
exemple, O.K., au niveau de l'intégration économique, nous souhaitons avoir 10 stages pour des immigrants par
année et avoir une augmentation de 5 % d'employés immigrants au sein de la ville d'ici 2020, disons,
par exemple. Donc, il y a vraiment des indicateurs comme ça pour chaque
action.
Puis ça, ça
ferait partie, justement, de notre leadership territorial. On pourrait avoir
une forme d'observatoire, un rôle de
vigie plus prononcé, les organismes communautaires nous signalent quels sont
les mécanismes d'exclusion sur le
territoire, quelles sont les problématiques qu'ils ont remarquées, nous, on
prend note de ça. Puis on peut mesurer aussi de façon globale, avec le taux de chômage, avec d'autres indicateurs,
comment va l'intégration à Gatineau. On peut aussi faire des sondages plus au niveau qualitatif, pour
évaluer la qualité des relations interculturelles. C'est comme ça que je vois
ça.
M. Kotto :
O.K. Les organismes communautaires qui ont une relation privilégiée avec le
ministère au moment où on se parle,
comment voient-ils la perspective du rôle que vous seriez amenés à jouer dans
l'hypothèse où le ministère s'ouvrirait à votre proposition?
M.
Pedneaud-Jobin (Maxime) : On est en train de le tester avec la
question des réfugiés, et le leadership municipal est tout à fait bienvenu pour toutes sortes de
raisons, parce que c'est plus difficile de se chicaner entre eux, parce qu'ils
sont des partenaires constants, alors que,
si la ville assoit les gens ensemble puis que collectivement on essaie de
trouver des solutions, c'est... Le rôle de modérateur, jusqu'à
maintenant, est bienvenu.
Mais là je ne
peux pas parler pour l'avenir, mais, jusqu'à maintenant, c'est bienvenu. Et ils
ne sont pas, individuellement, dans la position de jouer ce rôle-là.
Et, si vous me permettez d'aller un petit peu
plus loin sur l'autonomie des villes, c'est un beau cas, le cas de l'immigration. Il y a Québec, il y a Montréal, il
y a Gatineau. Après ça, on arrive dans un autre degré d'importance, on vit des choses complètement différentes.
Montréal ne peut pas être comparée à Gatineau, certainement pas, mais je
dirais qu'on ne peut pas être comparés à
Québec non plus. Donc, dans le modèle où Québec s'appuierait sur les villes,
ça prend une forme d'autonomie ou de très,
très grande flexibilité de la ville, oui, avec des indicateurs en fin de course,
mais, pour s'y rendre, il faut vraiment nous
donner une marge de manoeuvre assez grande, parce que sinon on n'y arrivera
pas... et des ressources. J'insiste pour dire que notre fiscalité n'est pas
conçue pour faire ce que je vous dis qu'on aimerait faire.
M. Kotto :
O.K. Je voulais vous dire dès le départ que j'ai vécu cinq années, presque cinq
ans à Gatineau, parce que je siégeais à la Chambre des communes à ce
moment-là, et ce que j'avais effectivement remarqué, c'est que, comparativement à Montréal, par exemple, où les
communautés vivent en silo, différents endroits, il n'y a pas de ghetto
en tant que tel, mais c'est des silos, je n'avais pas remarqué ça à l'époque. À
Gatineau, ça n'a pas changé, si...
M. Pedneaud-Jobin (Maxime) : Ça va
bien.
M. Kotto : Ça va bien, O.K.
Et la question est en lien avec les deux approches en termes d'intégration. Il
y a l'approche dite canadienne, rejetée par Robert Bourassa vers la fin des
années 70, début des années 80. Lui, il voulait incarner en Amérique du Nord une approche
interculturaliste, donc le vivre-ensemble, si on peut banaliser la chose, comme
tel, vulgariser la chose, comme tel. La proximité avec l'Ontario n'a pas encore
eu, disons, un effet de contamination avec votre ville relativement à
cette approche multiculturaliste au plan de l'intégration?
• (18 heures) •
M.
Pedneaud-Jobin (Maxime) : Je
laisserais, en fait, des chercheurs répondre à ça et je vous répondrais que,
de notre point de vue... Puis, moi, c'est une des préoccupations que j'ai. Il y
avait une conférencière qui était venue à Gatineau,
il y a quelques années, peu après les émeutes de Montréal-Nord,
et elle disait : Une ville peut se
concentrer sur l'asphalte, là, mais, quand on se concentre uniquement sur ce
que certains appellent nos missions de base,
qui, selon moi, sont plus larges, on oublie parfois l'essentiel. Puis
l'essentiel, c'est des activités culturelles, c'est des activités sportives, c'est une communauté,
utilisons l'expression, tricotée serrée, qui se parle, qui communique. Et, dans
la mesure où les nouveaux arrivants s'intègrent dans un quartier comme ça et
ont accès à un carnaval, ont accès à un
festival du film, ont accès à des potagers ou des jardins communautaires où les
gens travaillent ensemble, je ne sais pas ce que ça fait à la fin puis si on parle de multiculturalisme, ou
d'interculturalisme, ou de différents modèles, mais ça fait certainement
une communauté qui se parle, qui se connaît puis qui est heureuse d'être ensemble.
Puis, pour moi, le rôle de la ville, la ville
doit avoir des outils pour faire ça, pour que des gens comme à Montréal-Nord,
bien, aient des activités, soient devant une vie communautaire plus
intéressante que ce qu'on voyait à une
certaine époque, et ça, je pense qu'on réussit, puis je ne veux pas quêter, là,
mais on réussit avec des moyens assez
limités, là. Nous, c'est deux personnes et demie... je dis «et demie», je ne
devrais pas dire ça, mais c'est une
secrétaire, c'est du soutien qui s'occupe de la vie interculturelle à Gatineau,
là, ce n'est pas beaucoup pour la quatrième
grande ville au Québec. Il y a une limite à ce qu'on peut faire avec les
ressources qu'on a pour en arriver à des communautés qui vivent bien ensemble.
M. Kotto : ...dans leur diversité, sans se renier, comme tel, mais s'identifiant
en un foyer de sens avec une langue, avec des codes, vous parliez des
codes.
Le
Président (M. Picard) : En terminant, s'il vous plaît.
M.
Kotto : Et je voulais
juste dire que c'est un incubateur de référence pour l'ensemble
du Québec, quelque part.
M.
Pedneaud-Jobin (Maxime) :
J'ajouterais un élément : Gatineau est une ville de passage même pour les
gens qui ont des racines plus
profondes, disons. Pour nous, là, le patrimoine, mettre en valeur l'histoire
locale, que les noms de rue aient un
sens, qu'on parle d'où on vient, c'est encore plus important,
parce que ce n'est pas seulement les nouveaux arrivants... c'est-à-dire c'est les nouveaux
arrivants mais qui arrivent souvent de Montréal, ou de Québec, ou du Lac-Saint-Jean. Et,
oui, ça prend un tronc commun. Les gens n'arrivent pas dans un nouveau
quartier, ils arrivent dans un endroit qui a une histoire. Et ça aussi, ça exige, selon moi, des investissements plus importants qu'ailleurs, pour construire ce tronc commun là.
M. Kotto :
Merci.
Le Président (M.
Picard) : Merci. Je cède maintenant la parole à Mme la députée
de Montarville.
Mme
Roy
(Montarville) : Merci, M. le Président. Madame, M. le maire, merci. Merci pour le mémoire,
merci d'être là.
J'aimerais
tout de suite aller à la page 7 et parler de francisation.
Vous nous en parlez beaucoup puis vous nous arrivez avec des pistes de solution. En fait, vous aimeriez voir
certaines modifications aux cours de francisation, naturellement dans le but de les optimiser. Alors,
qu'est-ce qu'il faudrait modifier, qu'est-ce qu'il faudrait
améliorer, question d'être
plus efficace et puis d'avoir encore une meilleure francisation?
Mme
Cameron-Nunes (Émilie) : O.K. En
fait, il y a différents aspects à tout cela. L'accessibilité, d'ailleurs
j'en ai déjà parlé, l'accessibilité, moi, je pense
que ça devrait être offert à tout le
monde, même si ça fait plusieurs
années... Parce que des
fois les gens vont commencer tout de
suite à travailler, peut-être,
en anglais, mais peut-être qu'à temps partiel ils pourraient continuer leur francisation en soirée,
les fins de semaine. Donc, multiplier
les formes de cours, si on veut, puis peut-être les endroits aussi où
c'est offert, ça pourrait être une possibilité.
Aussi,
ce qui est ressorti, c'était vraiment d'adapter la francisation ou l'annexer,
en fait, aux besoins principaux des
personnes immigrantes, c'est-à-dire leur intégration en emploi. Donc, ça
pourrait être intéressant peut-être de l'offrir pendant qu'ils font des
programmes, justement, de préemployabilité ou même pendant qu'ils commencent un
stage en entreprise, plus l'annexer
de façon à ce qu'ils voient tout de suite l'application immédiate de ce qu'ils
apprennent. En fait, les langues, c'est vivant, hein, alors plus on est
dans un contexte réel, plus ça s'apprend rapidement.
Mme
Roy
(Montarville) : Et, ce que vous dites, vous n'êtes
pas les premiers qui nous le dites, alors je voulais seulement qu'on le souligne, là, adapter
effectivement les cours aux besoins des gens qui les recevront. Mais ce qui est
important, c'est qu'ils les reçoivent, pour les franciser.
Aussi, vous nous
dites, l'offre de cours de francisation n'étant pas assez prolongée pour ceux
dont la courbe d'apprentissage est plus
grande, par exemple les langues asiatiques versus les langues latines, ça
aussi, c'est une lacune à laquelle il faudrait s'attaquer.
Mme
Cameron-Nunes (Émilie) : Oui,
tout à fait. Moi, pour avoir vécu trois ans en Corée du Sud,
c'est... Je veux dire, apprendre
l'espagnol, l'italien, le portugais, ça se fait comme ça, c'est la même famille
de langues, mais, quand tu parles
d'une langue complètement étrangère, chaque mot, il n'y a
aucun mot qui est commun, la structure est complètement différente, alors
c'est vraiment plus difficile, la prononciation, alors il faut
être plus indulgent et leur donner... C'est sûr que ça dépend aussi de la motivation des gens, du temps qu'ils ont
aussi, mais de base je pense que, oui, c'est beaucoup plus difficile à partir de la langue de laquelle on
part, oui, l'apprentissage.
Mme
Roy
(Montarville) : Donc, on devrait toujours prendre en considération, effectivement, la langue maternelle de
l'immigrant qui nous arrive, parce
que ce n'est pas vrai qu'on apprend
le français dans la même période de temps, pas pour tout
le monde, et s'adapter à ces langues
qui sont beaucoup plus difficiles, à ces gens qui viennent de pays
d'origine où les langues sont plus
difficiles... c'est-à-dire, plus difficiles, ce serait difficile pour moi,
mais que ce serait plus difficile pour
eux de comprendre le français, étant
donné qu'elles sont tellement
loin, là, les origines de la langue sont tellement loin, donc l'adapter
à ça, faire en sorte que ce soit adapté, parce que
ce ne l'est pas pour le moment, il y
a un délai imparti, là.
Par ailleurs,
j'aimerais vous amener... Et vous dites, toujours dans les mêmes pages — et là
je suis tout à fait d'accord avec vous — qu'il
serait pertinent que des moyens éducatifs permettent l'apprentissage des codes
culturels de la société québécoise. Je suis tout
à fait d'accord avec vous. J'irais
même plus loin, j'irais dire que c'est notre responsabilité, c'est de notre responsabilité de recevoir ces
gens et de leur apprendre les codes, et en contrepartie ils auraient le devoir de les apprendre
également.
Je
vous amène maintenant à la page 9, où vous parlez du taux de chômage. Et
il y a une statistique que vous avez mise
de l'avant qui, moi, m'a fait sursauter, puis j'aimerais comprendre comment ça
se fait, comment vous arrivez avec ces
chiffres-là, quelle est la clé du succès. Vous nous parlez des taux de chômage
et vous dites, à la page 9 : «Sur ce point, les personnes immigrantes résidant en Outaouais
ont un taux de chômage plus faible que celui de leurs homologues de
Montréal», alors 8,9 % chez vous contre 13 % pour Montréal. C'est dû
à quoi?
M.
Pedneaud-Jobin (Maxime) : Bien, il y a plusieurs facteurs. Peut-être
que Mme Nunes pourrait élaborer, mais évidemment la présence de l'État...
Souvent, les personnes immigrantes arrivent formées, elles ont des formations
importantes, elles sont allées à l'école, elles sont motivées, et nous, on a la
présence des gouvernements provincial et fédéral — et surtout fédéral — de façon massive. Donc, il y a ça. Il y a
des groupes comme le SITO qui fonctionnent, là, qui sont capables d'aider des gens à se lancer en entreprise, qui
vraiment les orientent, les accompagnent dans toute cette recherche-là, là, d'intégration au travail,
mais on a une économie qui est dynamique depuis 30, 40 ans, à Gatineau,
notamment parce que même quand ça va mal,
nous, la présence de l'État fait que les crises nous affectent un peu moins
qu'ailleurs. Donc, il y a une partie de la réponse qui est certainement là.
Mme
Cameron-Nunes (Émilie) : Si je peux compléter, je ne suis pas
certaine, il faudrait vérifier, mais je me demande si le fédéral n'a pas une politique d'embauche aussi. Je sais
qu'ils ont des stages pour personnes immigrantes, je me demande s'ils
n'ont pas des quotas... Ça fait que ça, ça aide, là, c'est ça.
Mme Roy
(Montarville) :
J'allais poser la question, exactement. C'est un genre de discrimination
positive...
Mme Cameron-Nunes (Émilie) : C'est
ça, oui.
Mme
Roy (Montarville) : ...lorsqu'on a ces gouvernements qui sont
près, tout près, à la portée même sur le territoire.
Le Président (M. Picard) : Il
vous reste une minute.
Mme Roy
(Montarville) : Parfait. Vous parlez également, à la
page 9, des besoins, parce que, là, le nouveau projet de loi veut arrimer davantage les besoins de
l'industrie, de l'entreprise pour combler des postes qui seront vacants, et
vous nous parlez d'un phénomène, à la
fin de la page 9, chez vous, les fameux départs à la retraite, qu'il y
aura énormément d'emplois à combler. Même si actuellement on pourvoit, on
s'attend à ce qu'il y ait une bonne demande. Pouvez-vous un petit peu
élaborer, pour le temps qu'il nous reste, là-dessus?
M.
Pedneaud-Jobin (Maxime) : Bien, on est une région... on est une ville
très jeune, mais on est une ville qui vieillit
plus vite que les autres. Donc, au gouvernement fédéral, à la ville de
Gatineau, il y a toutes sortes de postes où on commence déjà à sentir le début d'une pénurie, donc l'apport... Moi,
c'est une des raisons. Tu sais, la crise des réfugiés, c'est un drame humain auquel on doit répondre pour
des raisons humaines, mais, sans vouloir avoir l'air trop content, bien c'est aussi une occasion pour nous, c'est des
gens qui sont motivés, qui sont formés puis qui vont nous aider à remplacer
notre main-d'oeuvre.
Donc, ce besoin-là va se faire autant dans
l'appareil municipal, dans l'appareil gouvernemental que dans nos entreprises. C'est pour ça que ces mesures-là pour
faciliter l'intégration et la rétention des nouveaux arrivants sont
essentielles pour l'avenir.
Mme Roy
(Montarville) :
Je vous remercie infiniment.
Le
Président (M. Picard) : Merci. Je vous remercie pour votre
contribution aux travaux de notre commission.
Je suspends
les travaux jusqu'à 19 h 30, où la commission poursuivra son mandat.
La salle va être sécurisée, donc vous pouvez laisser vos documents et
ordinateurs. Donc, à tout à l'heure.
(Suspension de la séance à 18 h 10)
(Reprise à 19 h 39)
Le
Président (M. Matte) : La commission
reprend ses travaux. Je demande à toutes les personnes dans la salle de
bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs téléphones cellulaires.
Nous recevons
présentement la Fondation de l'entreprise en recrutement de
la main-d'oeuvre agricole étrangère, Mme Pouliot, M. Hamel et
M. Gibouleau. Alors, actuellement, dans
un premier temps, on vous accorde un
10 minutes pour pouvoir faire
votre intervention, et par la suite c'est un échange de part et d'autre. Alors, je vous
souhaite une bonne soirée et une bonne intervention.
Fondation des
entreprises en recrutement de
main-d'oeuvre agricole étrangère (FERME)
M. Hamel (Denis) : Merci, M. le
Président. Mme la ministre, Mmes, MM. les députés, bonsoir. On remercie d'entrée de jeu la commission pour nous donner cette occasion de nous exprimer
sur une problématique assez particulière
qui est celle des travailleurs étrangers temporaires, essentiellement dans le
milieu agricole et agroalimentaire.
• (19 h 40) •
En quelques
mots, plusieurs d'entre vous connaissez FERME, nous sommes un
organisme de liaison qui assure la
venue de travailleurs étrangers temporaires, essentiellement dans le milieu agricole et agroalimentaire. Après 25 ans d'existence, c'est près de 9 000 travailleurs qui annuellement viennent occuper des
postes essentiellement dans l'agriculture primaire mais aussi dans la
transformation alimentaire et dans quelques entreprises en périphérie du milieu
agricole.
Donc, cette
présentation-là me permet en même temps de vous présenter l'angle à travers
lequel on regarde le projet de loi
n° 77 qui est à l'étude ici, donc celui des employeurs ayant besoin de
travailleurs étrangers mais sur une base temporaire. La première particularité, c'est qu'il y a un arrimage parfait
entre la venue des travailleurs étrangers et les postes qui doivent être
comblés dans les entreprises. Les travailleurs arrivent pour une période bien
déterminée, sont embauchés et, à la fin de
la saison agricole, essentiellement, à la fin du contrat, ils retournent dans
leurs pays. Ce sont des emplois qui
essentiellement, pour ne pas dire pour la plupart, sont boudés par les
travailleurs locaux, d'où la nécessité de
recruter à l'étranger; des emplois en région rurale, qui sont peu ou pas
desservies par des transports collectifs, donc qui sont difficilement
accessibles à des travailleurs établis au Québec.
Ce sont
des programmes fédéraux qui existent, pour le plus vieux d'entre eux, depuis
50 ans, fête son 50e anniversaire cette année, donc ce n'est pas d'aujourd'hui qu'on a besoin de
travailleurs sur les fermes. D'ailleurs, le Québec n'est pas un endroit unique dans le monde, il existe des
programmes équivalents aux États-Unis, en Europe, en Australie où les
employeurs ont besoin de main-d'oeuvre étrangère pour combler leurs besoins en
milieu agricole.
Quelques mots
sur l'impact économique de ces travailleurs. C'est une masse salariale
importante, plus de 100 millions
de dollars, une valeur ajoutée de 236 millions de dollars, ce qui fait de
l'arrivée des travailleurs étrangers un
rouage, je dirais, non seulement important, mais essentiel à l'agriculture du
Québec. D'ailleurs, d'après un sondage fait
par le CISA du cégep de Victoriaville, 80 % des employeurs du milieu
agricole délaisseraient leurs entreprises si ce n'était pas des travailleurs étrangers temporaires. Donc, c'est un
rouage essentiel à notre agriculture. Sans travailleurs étrangers,
presque pas d'agriculture au Québec.
Lorsqu'on a
regardé le projet de loi n° 77, nous nous sommes posé trois questions.
D'abord, est-ce que le projet de loi
n° 77 offre une place suffisante aux travailleurs étrangers temporaires?
Les problèmes qui découlent du Programme des travailleurs étrangers temporaires sont-ils abordés dans le projet
de loi? Et enfin quelles seraient les pistes de solution viables et
efficaces?
Je vous
dirais d'entrée de jeu que les orientations, l'approche générale et le but
recherché par le projet de loi n° 77 satisfait les employeurs que nous représentons. C'est effectivement un
rouage... L'immigration au Québec comme levier de développement
économique, développement des entreprises du Québec, il est fondamental.
Nous nous
inquiétons par contre de certaines absences et de certaines dispositions dans
le projet de loi. Évidemment, une loi
aussi importante que la Loi sur l'immigration n'est pas modifiée très souvent,
je crois que la loi actuelle a presque une
quarantaine d'années, alors, pour nous, il y avait, je dirais, certaines
occasions manquées qu'on aurait souhaité voir dans le projet de loi ou
certains éclaircissements qu'on souhaiterait voir dans le projet de loi.
La première
place, première chose, premier élément, c'est, finalement, l'absence de la
place du travailleur étranger temporaire
dans les définitions. On parle d'étrangers qui viennent soit pour des raisons
de maladie, soit les étudiants qui viennent
au niveau... des étrangers qui viennent dans nos institutions d'enseignement,
mais ensuite on regroupe l'ensemble des
travailleurs étrangers temporaires sous un seul vocable. Pour nous, c'est une
réalité très complexe qui disparaît et qui amène la nécessité de parler explicitement des travailleurs étrangers
temporaires. Un travailleur étranger spécialisé,
par exemple, qui vient au Québec dans un but éventuel d'immigration est dans
une situation bien différente de
celle du travailleur étranger temporaire en milieu rural, travailleur
généralement non qualifié qui va repartir à la fin de son contrat et qui n'a pas nécessairement
l'intention de s'installer au Québec. Donc, c'est deux réalités bien
différentes qu'on aurait bien voulu voir apparaître dans le projet de
loi.
Il ne faut pas oublier aussi que les entreprises
agricoles sont en concurrence, les entreprises agricoles du Québec sont en concurrence dans un marché nord-américain avec plusieurs
producteurs américains, du Nord-Est
américain, de la Californie et notamment de l'Ontario,
alors toutes les dispositions qui compliquent la venue des
travailleurs étrangers ou qui ne s'adressent pas
spécifiquement à l'arrivée des travailleurs agricoles risquent de nuire à la compétitivité du secteur agroalimentaire québécois. Donc, la première recommandation que nous
faisons à la commission, ce serait d'énoncer à l'alinéa 1° de l'article
6... d'identifier clairement les besoins spécifiques en matière d'immigration pour les
travailleurs étrangers temporaires.
Le deuxième point que nous avons soulevé dans le projet de loi, c'est la question de la résidence permanente. La lecture que nous faisons du projet de loi semble ouvrir une porte à la résidence permanente pour l'ensemble
des travailleurs étrangers
temporaires. C'est une solution intéressante, qui mérite qu'on s'y attarde puisque jusqu'à maintenant cette porte était entièrement fermée. Par contre, c'est une
solution partielle à un problème fondamental.
La plupart
des emplois en milieu agricole sont des emplois saisonniers. La plupart des travailleurs étrangers, qui viennent pour
la plupart du Mexique, d'Amérique centrale, ont peu ou pas d'intérêt à
s'installer au Québec. Et une fois installé au Québec, par
exemple, si un travailleur... Par les lois, notamment les lois d'assurance-emploi, ils sont incités à occuper des emplois à temps plein. C'est sûr que
ces gens-là viennent ici, ils veulent faire vivre leur famille et contribuer
au dynamisme de l'économie
québécoise, donc il
y a des fortes chances qu'un travailleur étranger temporaire qui obtient sa résidence au Québec va être plus intéressé à occuper un emploi à
temps plein, un emploi peut-être plus proche des centres urbains, plus proche des services, et délaisserait
l'agriculture, ce qui fait que, finalement, on n'a pas solutionné le problème,
on l'a simplement pelleté par en avant.
Par contre,
il ne faut pas fermer la porte complètement.
On pense notamment
à la question de la relève agricole, pour laquelle il y
a des travailleurs étrangers qui seraient intéressés à reprendre des fermes. On
pense à des emplois annuels, des emplois sur une base annuelle au niveau de la
production en serre, par exemple, la production laitière, dans la transformation
de certains fruits et légumes, pour lesquels la résidence permanente apparaît
une voie de solution assez intéressante. Par contre, comme je vous dis,
on souhaiterait voir une certaine limitation dans le projet de loi...
ou peut-être que ça apparaîtra dans les règlements
qui suivent le projet de loi, mais que cette solution ne doit pas être
vue comme une solution tous azimuts aux problèmes de pénurie de main-d'oeuvre
en milieu agricole.
Enfin,
le dernier point, c'est la question de la simplification administrative réglementaire. On voit dans le
projet de loi plusieurs références à
l'établissement de programmes. La situation que les producteurs agricoles
vivent au Québec, surtout depuis les
trois, quatre dernières années, c'est une complexité extrême et grandissante du
fardeau administratif imposé aux employeurs. Une des particularités des
travailleurs étrangers temporaires, c'est que ce sont les mêmes travailleurs qui reviennent dans les mêmes
établissements année après année. Les producteurs agricoles doivent malgré
tout, année après année, passer à travers un
dédale administratif de formulaires, d'exigences, qui fait en sorte que la
saison des producteurs agricoles
maintenant se résume à six mois de production et six mois de paperasserie pour
faire venir les travailleurs étrangers. C'est extrêmement lourd,
extrêmement difficile pour eux et ça fait planer une incertitude sur
l'agroalimentaire, sur l'agriculture du Québec.
On
aurait donc souhaité, dans le projet de loi, une ouverture, puisqu'il y a quand
même un article, là, qui permet des
programmes pilotes, on aurait souhaité voir dans le projet de loi une ouverture
vers une simplification administrative réglementaire
en ce qui touche les programmes étrangers temporaires. Ceux-ci, il n'y a pas de...
La problématique concernant l'arrimage
avec le travail, concernant la francisation ne s'appliquant pas, le Québec peut
se permettre d'être moins exigeant envers
ces travailleurs qui reviennent année après année, surtout lorsqu'on considère
la contribution au développement économique du Québec.
Donc,
je vous dirais, en conclusion, c'est l'essentiel de notre présentation. Nous
sommes convaincus que plus on aura de
l'immigration au Québec, plus on aura ciblé, notamment, je dirais, l'immigration
ciblée, meilleure sera la santé financière de nos entreprises agricoles.
Et, comme ils contribuent énormément au développement économique et aux emplois chez nous, puisque les travailleurs
temporaires ne représentent que la moitié des emplois sur les fermes, l'autre
moitié, ce sont des résidents, je pense
qu'il faut encourager leur venue et faciliter leur venue pour le bien-être de
tous. Merci, M. le Président.
• (19 h 50) •
Le Président (M. Matte) : Je vous
remercie, M. Hamel. Avant de céder la parole à la ministre,
j'aurais besoin d'un consentement
pour poursuivre les travaux au-delà de l'heure prévue, compte tenu que nous avons débuté à 19 h 39. Est-ce que vous
donnez le consentement? Ça va?
Maintenant,
le temps se répartit de cette façon : le gouvernement, vous avez
16 minutes, l'opposition
officielle,
9 min 30 s, le deuxième groupe de l'opposition a
6 min 30 s, et le député indépendant, vous avez trois minutes.
Alors, je laisse la
parole à Mme la ministre.
Mme
Weil : Oui. Bonjour,
M. Hamel, M. Gibouleau et Mme Pouliot. Merci beaucoup
de venir ici parler d'un domaine qui est complexe, que peu de gens
comprennent mais qui est, comment dire, beaucoup d'actualité.
Il y a
la Commission des droits de la personne qui est venue faire quelques
représentations, je ne sais pas si
vous avez suivi ça, puis je vais vous
parler des questions là-dessus, mais peut-être, dans un premier temps, pour
qu'on sache de quoi on parle, il y a ces ententes entre le gouvernement
du Canada et, bon, le Mexique, Honduras, Guatemala, les Antilles. Donc, c'est des ententes entre deux pays qui font en sorte que
ces travailleurs saisonniers agricoles viennent mais qu'ils doivent retourner dans leur pays, hein,
parce l'entente, c'est pour les aider à les faire vivre, et ils retournent
voir, comment dire... retrouver leur famille et leurs enfants. Donc, ce
n'est pas une voie d'immigration temporaire vers le permanent, c'est conçu pour autre chose, et ça, on le comprend. Moi,
j'ai souvent... je suis allée sur des fermes, j'ai rencontré surtout des travailleurs du Guatemala, on voit
dans quelles conditions ils vivent, etc., et on voit qu'ils reviennent à chaque
année, mais ils veulent retourner aussi,
retourner voir leur famille. Donc, vous, quand vous parlez... Et leur présence
ici est... leur présence dans un
temps limité est gérée par le gouvernement fédéral, et c'est une catégorie qui
n'est pas nommée dans les catégories
d'immigration. Nous, on a tout simplement repris les catégories d'immigration
dans notre projet de loi, des catégories d'immigration qui sont
reconnues par le gouvernement fédéral.
Quand
vous évoquez cette question de transition vers le permanent, vous n'êtes pas en
train d'évoquer ces travailleurs
saisonniers qui sont ciblés dans ces ententes entre le Canada et d'autres pays...
ou est-ce que vous êtes en train de parler de ces travailleurs-là?
M. Hamel (Denis) : Merci de votre question, Mme la ministre, parce qu'effectivement c'est
un programme complexe, qui mérite qu'on s'y attarde.
Comme
on l'explique dans le mémoire, la plupart, la très vaste majorité des
travailleurs saisonniers ne veulent pas
rester au Québec. La famille reste dans le pays d'origine. Ils sont très
heureux, ils rapportent énormément d'argent chez eux, qui contribue à
l'éducation, à la santé.
Par
contre, il y a un certain nombre, oui, de ces travailleurs qui souhaiteraient
rester ici. Je vais donner l'exemple de
l'industrie laitière, par exemple. L'industrie laitière n'est pas une industrie
saisonnière, la traite des vaches se fait tous les jours de l'année, et, pour plusieurs producteurs
agricoles qui sont en manque de relève, le travailleur étranger pourrait
être, par exemple, la voie ou la solution possible à la relève de l'entreprise
agricole.
Pour
autant que l'emploi soit annuel, c'est-à-dire non saisonnier, je pense qu'il
serait intéressant d'ouvrir la porte. Même
chose dans les entreprises qui travaillent à l'année, pensons aux productions
en serre, par exemple, où ces gens-là doivent
venir pour des contrats plus longs, par exemple un an, deux ans, et certains
d'entre eux souhaiteraient s'établir au
Québec. Mais on parle effectivement d'une très petite fraction des travailleurs
qui viennent en vertu de ces programmes.
Mme Weil : Bon, ma
compréhension, puis ce n'est pas mon domaine du tout d'expertise non plus, du
MIDI, c'est qu'ils sont ici pour un maximum de huit mois, puis c'est des
ententes négociées entre le Canada et ces pays. Puis on comprend bien pourquoi, c'est parce qu'ils
amènent... Le Canada, en leur fournissant cette capacité de travailler
ici, c'est pour aider les familles là-bas. C'est un peu comme un genre de
soutien, aide à ces pays-là.
Donc, je ne
pense pas que c'est une immigration qui est... Moi, je comprends bien qu'on
voudrait garder certaines personnes
qui viennent dans le cadre de ces ententes, mais... Je n'ai pas les ententes
devant moi, là, mais j'imagine qu'en vertu de ces ententes, si on dit :
Maximum de huit mois, c'est aussi par mesure de protection des familles qui
sont restées là-bas dans leur pays d'origine. Tout ça, c'est comme des
ententes pour, comment dire... de support mutuel, là, parce qu'on a besoin de
ces travailleurs agricoles, mais eux ont besoin d'emplois.
Alors, en tout
cas, tout ça pour dire que c'est un peu délicat, je pense, de s'aventurer sur...
Et on ne pourrait pas, en vertu... nous, le Québec, on ne pourrait pas
outrepasser ces pouvoirs-là, de leur offrir la résidence permanente, en
vertu... en tout cas, on va regarder tout ça, là, mais en vertu de ces ententes
entre le Canada et ces pays.
Sur la
question de la protection des travailleurs, moi, quand je... en 2011, on avait
amené des mesures additionnelles pour
protéger ces travailleurs saisonniers qui sont ici. Je me rappelle même, FERME,
je pense, c'est en 2011, quand on a fait
la planification pluriannuelle, vous êtes venus pour expliquer les mesures que
vous prenez pour bien les protéger. La Commission
des droits de la personne a évoqué notamment, par exemple, dans le cadre de
cette présente consultation, que certains employeurs décident
unilatéralement de retourner les travailleurs dans leur pays d'origine.
Donc, pouvez-vous nous aider à comprendre cette
situation, préciser les raisons qui peuvent justifier un tel rapatriement des travailleurs étrangers
temporaires, mais peut-être plus largement expliquer les mesures, le souci que
vous devez avoir, que vous pouvez
avoir de protection de leurs conditions de travail? Quels sont les guides?
Nous, on avait développé, en 2011,
certaines mesures, mais là on est en 2016. Si vous pourriez me répondre à cet
égard, sur la protection de ces
travailleurs temporaires. Qui ont un statut précaire, hein? On a nos lois, nos
lois ici, au Québec, s'appliquent à ces personnes-là, mais, selon la Commission des droits de la personne et les
études que la commission a faites, il reste une précarité, et que le gouvernement du Québec doit avoir le souci et
travailler plus fort avec tout le monde, plusieurs ministères,
évidemment, le Travail notamment, pour mieux les protéger.
M. Hamel
(Denis) : Bien sûr, Mme la
ministre, effectivement, vous avez raison, beaucoup de choses ont été faites
dans les cinq dernières années.
Au chapitre
de la protection comme telle, comme vous le mentionnez avec justesse, tous les
travailleurs étrangers sont protégés
par les lois du Québec au même titre que les travailleurs québécois, mais on
est tout à fait conscients qu'il faut
en faire un peu plus. Ces gens-là, pour la plupart, ne parlent ni français ni
anglais, ils sont dans une situation plus difficile du fait qu'ils sont à l'extérieur des grands centres. Ils
comptent sur l'employeur pour avoir accès aux services de santé,
notamment, ou pour avoir accès aux activités qu'ils ont besoin de tous les
jours.
Toutefois,
comme je vous dis, depuis cinq ans, il y a des mesures qui ont été prises, et
c'était une de nos préoccupations,
d'ailleurs, de s'assurer que ces travailleurs-là reviennent puis soient bien
encadrés, et notre taux de retour de 90 % après années montre que...
Je pense qu'il y a un certain succès de ce côté-là.
D'abord, sur
la question du rapatriement, il est vrai qu'à la fin d'un contrat l'employeur
peut mettre fin au contrat d'un
employeur. Par contre, il ne peut pas, comme le prétend la Commission des
droits de la personne, qui, respectueusement, n'a peut-être pas suivi le dossier dans les dernières années... Cette
autorisation-là est donnée par les consulats, donc c'est les consulats qui autorisent le départ des
travailleurs après discussion avec l'employeur, après étude du cas. Donc, on ne
peut pas décider unilatéralement, comme ça, de le mettre dans l'avion.
Nous, on a fait un gros travail de
sensibilisation avec les employeurs en partenariat avec la Commission des normes du travail. Nous, ça fait la quatrième
année qu'on a une entente de collaboration avec la Commission des normes
du travail qui se traduit par de la
documentation donnée en espagnol à tous les travailleurs, d'une part;
deuxièmement, une visite de tous les
employeurs, les nouveaux employeurs, par des agents de la Commission des normes
du travail. Et on était très heureux
d'apprendre d'ailleurs cette année que la Commission des normes du travail
donne au milieu agricole la plus haute cote de conformité à la Loi sur
les normes du travail de la majorité des secteurs économiques québécois.
Donc, il y
avait un problème, et il y a un très gros travail qui a été fait dans les
dernières années. On vise, bien sûr, la
perfection, on espère y arriver, mais effectivement toutes les notions de
rapatriement, d'encadrement des travailleurs ont été resserrées. Et nous, comme organisation, on a pris aussi en
charge de bien informer les employeurs, on a adopté un code d'éthique. Les employeurs qui travaillent
avec nous s'engagent non seulement à bien traiter les travailleurs, ça va
de soi, mais en plus à leur porter assistance et à en faire beaucoup plus
qu'auprès de leurs travailleurs québécois.
Je ne sais pas si...
• (20 heures) •
Mme Weil :
Mais, par curiosité, est-ce que vous avez parlé avec la Commission des droits
de la personne? On dirait qu'il y a
comme une distance importante entre ce qu'eux, ils nous ont dit, leur étude, et
ce que vous dites. Moi, je savais que
j'avais déjà fait du travail en 2011 dans ce dossier-là, je ne savais pas
qu'est-ce qui avait changé depuis, mais est-ce que vous avez eu un
dialogue avec la commission sur les mesures de protection?
M. Hamel
(Denis) : On a déjà eu un
dialogue. Notre interlocuteur privilégié est plutôt la Commission des normes
du travail, puisqu'ils ont un système
d'inspection, ils sont sur le terrain. Il y a beaucoup d'inspecteurs,
d'ailleurs, qui parlent espagnol et
qui peuvent communiquer avec les travailleurs. J'oubliais aussi notamment, là,
de l'information qu'on donne aux
travailleurs à leur arrivée à l'aéroport, où on leur donne un numéro de
téléphone 24 heures par jour, sept jours par semaine où ils peuvent contacter des services.
Mais, avec la commission, on a déjà eu des rapports avec eux, mais pas tant.
Mme Weil : Parce que l'étude
de la commission date de 2011.
M.
Hamel (Denis) : Exactement.
Mme Weil :
Et beaucoup de ces changements ont été depuis ce temps-là? C'est ça?
M. Hamel
(Denis) : Ah! oui, oui. Oui, des changements.
Mme Weil :
Après les réformes qu'on a amenées en 2011.
M. Hamel (Denis) : On en a tenu compte justement pour corriger les faits, et
malheureusement il demeure des perceptions.
Mme
Weil : O.K. Vous parlez d'allègement procédural à la
page 13 de votre mémoire. Tout en restant dans cette discussion de la protection des travailleurs,
selon vous, c'est toujours possible en assurant la protection des travailleurs,
l'intégrité du programme.
Quand
vous parlez d'allègement procédural, peut-être nous en parler un peu. Qu'est-ce
que vous évoquez en parlant d'allègement procédural?
Mme Pouliot (Nathalie) : Bien, écoutez, Mme la ministre, il me fait plaisir
de répondre à votre question. L'allègement procédural ferait en sorte de
créer un système qui tiendrait compte de la protection des droits à la fois, certainement, des travailleurs et des employeurs
mais qui aurait pour effet de créer une autorisation prima facie d'une demande de la part d'un employeur qui année après
année revient dans le système et qui est, si vous me permettez l'expression,
un copier-coller de la demande de l'année dernière.
Donc, il faut savoir
qu'au moment d'émettre une étude d'impact sur le marché du travail les deux
paliers de gouvernement, en l'occurrence
fédéral et provincial, ont par la loi toujours la possibilité, à tout moment,
de réouvrir une enquête, de suspendre
une EIMT qui a déjà été approuvée et éventuellement de révoquer une EIMT s'il
s'avère que les faits qui ont donné
lieu à l'approbation d'abord, en premier lieu, ont changé. Alors, ce qui est
ici, ce qu'on propose par «allègement
procédural», c'est donc une voie privilégiée, une voie accélérée, si vous
voulez, d'une autorisation prima facie qui pourrait durer, par exemple,
sur une période de trois ans, donc, dans la mesure où à chaque fois que les
choses reviennent, à chaque fois que les
choses sont similaires, eh bien, il devrait y avoir en quelque sorte une espèce
de sceau de conformité. Et les droits
des deux parties seraient constamment protégés parce que tout se ferait
toujours à visière levée.
Donc,
évidemment, les travailleurs étrangers, dans les programmes que vous avez
évoqués plus tôt, sont toujours excessivement intéressés à revenir chez
leurs employeurs. D'ailleurs, pour vous donner, en fait, un... pour aller dans l'anecdote, la plupart, sinon la vaste majorité
d'entre eux, lorsqu'ils quittent à la fin de leur contrat, vont laisser des
effets personnels dans leur logement,
dans l'habitation chez leur employeur, parce qu'ils reviennent l'année
prochaine. Et c'est cette
récurrence-là qui alourdit inutilement le système et qui n'est pas prise en
compte par les autorités, parce qu'on refait la même chose à chaque
année.
Mme
Weil : J'ai ma collègue la députée de Richmond... Mais, juste
avant de céder la parole, je comprends très bien ce que vous proposez. On va faire de notre mieux, on va proposer ça
au gouvernement fédéral, j'espère que vous allez proposer ça au gouvernement fédéral, mais je trouve que c'est une
excellente idée. Et on m'a confirmé que les gens veulent revenir, surtout
lorsque les conditions sont favorables. Et le Canada ou le Québec, dans ce cas-ci,
aurait une bonne réputation,
dépendant... ou une ferme en particulier acquiert une bonne réputation dans un
village, hein, c'est ça qu'on nous dit, puis les gens reviennent.
Mme Pouliot
(Nathalie) : Tout à fait, tout à fait.
Mme Weil :
Merci beaucoup.
Le Président (M.
Matte) : Mme la députée de Richmond, vous avez deux minutes.
Mme
Vallières : Merci, M. le Président. Salutations, madame
messieurs. Merci de me laisser ce temps de parole.
Je voulais revenir avec vous sur ce que vous
indiquez comme étant une préoccupation par
rapport aux résidents, les travailleurs temporaires saisonniers. Je pense qu'il faut
plutôt le voir peut-être d'une autre façon puis que c'est un enjeu pour vous, mais que ça peut être quand même un côté positif. On peut démontrer, à
ce moment-là, que l'intégration se fait bien de par l'emploi, on parle
de l'occupation du territoire également.
Ce
qui m'amènerait à vous poser comme question... parce qu'il y a des entreprises
en serriculture dans le comté de Richmond, que je représente, mais
plutôt pour vous entendre sur votre difficulté d'attraction, non pas de rétention de cette main-d'oeuvre-là mais
d'attraction, dans un premier lieu, et les efforts que ça demande aux
entreprises quant à tout ce qui a trait
aux ressources humaines mais, par la suite, à la formation également. Donc, je
pense que c'est important de
comprendre ce détail-là, qui n'en est pas un pour vous, mais pour comprendre
cette demande de récurrence à accueillir des gens qui sont déjà venus et
qui auraient un intérêt à revenir, là.
M. Hamel (Denis) : C'est une
question qui mériterait une réponse très, très longue. Oui, effectivement, la récurrence fait en sorte que... Vous pouvez
difficilement imaginer toutes les embûches administratives qui se dressent
devant les employeurs à chaque fois, à chaque année
qu'ils ont besoin de travailleurs agricoles. Les exigences sont nombreuses, légitimes, la qualité du logement
notamment, être capable de démontrer d'abord et avant tout que les emplois
occupés par les travailleurs étrangers ont
été offerts d'abord à des Canadiens, et c'est tout à fait normal, mais,
lorsqu'il y a reconnaissance explicite de pénurie de main-d'oeuvre dans le
milieu agricole, cette démarche devient un petit peu ridicule. Vous
savez, il faut annoncer en octobre...
Le Président (M. Matte) : Il faut
conclure, M. Hamel, le temps est écoulé.
M.
Hamel (Denis) : D'accord. Il
faut annoncer en octobre des emplois qui vont être occupés à partir du mois
d'avril. Alors, une partie de la
paperasserie est tout à fait inutile et inutilement lourde. Mais, les emplois,
on en a besoin, et les travailleurs étrangers viennent avec
enthousiasme. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Matte) : Merci, M.
Hamel. Je céderais la parole au député de Bourget.
M. Kotto :
Alors, Mme Pouliot, M. Hamel, M. Gibouleau, soyez les bienvenus
et merci pour votre contribution dans le cadre de ces travaux.
J'aimerais
creuser un peu plus pour ma compréhension personnelle et probablement celle de
celles et ceux qui nous
écoutent — j'espère
qu'ils sont nombreux à cette heure-ci. En ce moment, le fardeau administratif
dont vous parlez, est-ce que, dans le
passé — et, si
oui, depuis combien de temps? — vous l'avez évoqué auprès des autorités
québécoises et fédérales?
M. Hamel
(Denis) : Oui. Le fardeau
s'est considérablement alourdi depuis 2013. Il existait, mais, pour autant
que les employeurs avaient une certaine
prévisibilité, on pouvait passer à travers. S'y prendre deux ou trois mois à
l'avance pour faire venir des travailleurs agricoles, c'était faisable.
Dans les
trois dernières années, ça s'est considérablement alourdi, et mettons ça sur la
faute du gouvernement fédéral,
puisque c'est lui qui est le maître d'oeuvre de toutes les mesures
d'immigration. On parle d'émission des visas et aussi des normes
entourant le programme avec le Mexique et avec l'Amérique centrale.
Donc, oui,
nos représentations ont été faites depuis le début à tous les niveaux
administratifs et politiques, tant à Ottawa qu'à Québec.
M. Kotto :
O.K. Et, hypothèse d'école, si le Québec avait pleine maîtrise de sa gestion de
l'immigration, pleine maîtrise
d'oeuvre au Québec, est-ce que vous pensez que ce genre de complications... Et
on a vu les histoires d'horreur qui
se sont avérées avec les blocages d'Ottawa. Si Québec avait pleine maîtrise
d'oeuvre en ces matières, est-ce que vous pensez que ces dossiers se
géreraient avec plus de fluidité?
M. Hamel (Denis) : Écoutez, loin de
moi d'être un expert en politique et de pouvoir présumer quel...
M. Kotto : ...on est dans
l'administratif, pas dans le politique.
• (20 h 10) •
M. Hamel
(Denis) : Au niveau
administratif, il y a une réalité qui est tout à fait incontournable qui est
celle du traitement différent que
vivent les producteurs agricoles du Québec par rapport à ceux des autres
provinces canadiennes, et c'est une source de frustration. On comprend les
fondements, mais on comprend difficilement pourquoi les producteurs du
Québec doivent payer ou écoper de cette situation.
Le gouvernement canadien a mis de l'avant une mesure accélérée
pour le milieu agricole, pour les employeurs qui ont des travailleurs dans le milieu agricole. Ce traitement accéléré
là est disponible pour tous les producteurs
agricoles du Canada, à l'exception de
ceux du Québec. En Ontario, ça prend deux semaines, avoir une autorisation du
gouvernement canadien pour avoir un travailleur étranger. Au Québec,
c'est 12 semaines, et ça pénalise les producteurs.
Pourquoi? Est-ce la double juridiction? C'est ce
qu'on nous dit des fois. Est-ce le fait que les employés du gouvernement
fédéral qui traitent les dossiers au Québec ont une approche différente de
celle des autres provinces? Probablement
aussi. C'est difficile de cerner, de mettre le doigt sur le problème, mais,
chose sûre, la dualité que nous vivons actuellement pénalise.
M. Kotto : O.K. Je reviens également sur un autre sujet
que vous avez abordé avec la ministre, c'est la perception ou les interprétations de la Commission des droits de la personne et des droits
de la jeunesse. Ses récriminations,
selon ce que je viens de comprendre,
reposent sur des faits avérés au tournant des années 2010‑2011,
mais la commission se tient,
là, on est en 2016. Qu'est-ce qui
peut avoir motivé, selon vous, ou alimenté la lecture qu'ils ont faite des
conditions de travail de ces travailleurs saisonniers pour l'exprimer
ici?
M. Hamel (Denis) : Je vous dirais,
la perception est alimentée par le passé et par des situations qui ont cours
notamment aux États-Unis. On voit régulièrement des reportages de comment les
employeurs traitent les travailleurs mexicains aux États-Unis, et on est à des
années-lumière de la situation qui se passe au Québec.
L'amélioration,
elle est venue... D'abord, c'est un autoexamen de la situation. Mettez-vous à
la place, M. le député, d'un
employeur québécois qui a absolument besoin de travailleurs étrangers pour
faire fonctionner son entreprise, puisque la main-d'oeuvre locale n'est
pas au rendez-vous. Le travailleur étranger vient année après année faire
fonctionner l'entreprise,
assurer, donc, des emplois, la croissance de l'entreprise. Quel est l'intérêt
de l'employeur de mal le loger, de mal le traiter, de le faire
travailler des heures impossibles?
La
collaboration entre les employeurs et les travailleurs a largement évolué dans
les dernières années et justement par
des mesures proactives qui ont été prises par les employeurs, notamment ce
rapprochement avec la Commission des normes
du travail, s'assurer que... Il fallait être, dans le fond, beaucoup plus...
Justement à cause de la perception, il fallait aller beaucoup plus loin au niveau de la conformité réglementaire. Cette
prise de conscience là a donné lieu à un changement important sur le
terrain.
C'est
déplorable que la commission n'ait pas suivi cette évolution-là, mais fort
heureusement la Commission des normes du travail, elle, l'a suivie.
M. Kotto : Merci. Je n'ai pas
d'autre question, M. le Président.
Le
Président (M. Matte) : C'est bien, merci. Maintenant, je cède la
parole à la députée de Montarville, Mme Roy.
Mme Roy
(Montarville) : Merci, M. le
Président. D'entrée de jeu, je voudrais faire mes excuses à la ministre,
à la commission, au président et aux
invités, j'avais un petit retard. J'étais en réunion. Ce n'est pas une excuse,
ce sont les faits. Alors, je tenais à vous le dire. Alors, excusez mon
retard.
Le Président (M. Matte) : Vous êtes
pardonnée.
Mme
Roy
(Montarville) : C'est pour que vous le sachiez,
c'est important. Je le regrette, on a fait retarder les travaux.
Maintenant,
madame messieurs, bonsoir, merci d'être là. J'ai lu votre mémoire et je crois
comprendre effectivement qu'on est
ici dans une double juridiction, là, parce que ces travailleurs-là ne sont pas
couverts pour la grande partie du projet de loi n° 77 qui est sous
nos yeux, là, c'est ce que je semble comprendre.
À la lecture
de votre rapport, à la page 10, cependant, en toute fin, il y a quelque
chose qui a attiré mon attention, puis
je suis surprise. Vous nous parlez du prêt de travailleurs, le prêt de
travailleurs d'une entreprise agricole à une autre est formellement
interdit. Est-ce que vous me dites que c'est quelque chose qui se fait
actuellement, dont les entreprises auraient
besoin de le faire ou... On nous parle du prêt de travailleurs, et, sachant
qu'il y a des impacts pour l'employeur, à certains moments il pourrait ne pas y avoir de travail à fournir, alors
que quelqu'un d'autre aurait besoin de main-d'oeuvre... Pouvez-vous
élaborer? Parce que, de un, c'est une notion... c'est la première fois que j'en
entends parler.
M. Hamel
(Denis) : C'est
effectivement une obligation dans le contrat, chaque travailleur est associé à
un lieu de travail et ne peut pas
aller travailler dans une autre entreprise. Dans un secteur aussi sensible aux aléas de la température que le
milieu agricole, c'est une contrainte importante.
Une entreprise
agricole peut avoir des fois des travailleurs en surplus, et, son voisin
immédiat, il va lui manquer des
travailleurs. Il est tout à fait illégal de prêter des travailleurs, même si le gros bon sens nous dit : Voyons! il pourrait aller travailler à côté! Si des inspecteurs du gouvernement fédéral passaient cette journée-là, l'employeur serait privé de son
droit de faire venir des travailleurs étrangers.
Donc, c'est effectivement dans la constitution même du programme fédéral qu'il est interdit de le
faire, et c'est déplorable d'enlever cette flexibilité-là alors que l'entreprise
en aurait vraiment besoin.
Mme Roy
(Montarville) :
Plus loin vous poursuivez en disant : «Rien qu'en 2014, les retards dans
l'émission des visas ont causé aux
producteurs agricoles du Québec des pertes évaluées à plus 50 millions de dollars.» Comment vous arrivez à ce chiffre-là?
Comment pouvez-vous dire ça?
M. Hamel
(Denis) : C'est une
estimation basée sur le nombre de jours perdus multiplié par la valeur moyenne
de la récolte récoltée par un travailleur
étranger à ce moment-ci de la saison, basé par des estimations
d'agroéconomistes, là, qui travaillent
pour l'association des producteurs jardiniers, des producteurs maraîchers du Québec notamment,
donc, parce qu'il y a eu à peu près
350 travailleurs, près de 50 000 jours perdus à cause des délais
administratifs, et des récoltes ont
été perdues dans certains... Dans certaines régions du Québec, c'étaient des
champs entiers qui n'ont pas été récoltés.
Mme Roy
(Montarville) : Quand vous parlez de délais, puisque c'est
un genre... il y a une juridiction un peu mixte, parce que le gouvernement du Québec a un peu à voir dans ce dossier mais
très peu, selon ma compréhension des choses... On lit plus loin dans votre mémoire que vous nous dites : En
Ontario, ça peut prendre quelques semaines, alors qu'ici ça en prend 12. C'est
dû à quoi? Est-ce qu'on peut alléger quand même pour que... Est-ce que le
Québec peut faire quelque chose à cet égard-là?
M. Hamel
(Denis) : Le Québec peut
faire quelque chose, comme ma collègue, Mme Pouliot, le proposait tantôt,
d'avoir un système de reconnaissance
automatique ou... selon une période de temps et bien normé, on ne cherche pas à
se substituer aux normes ou se
défiler des normes, mais d'avoir des autorisations sur des périodes de trois,
quatre ou cinq ans, un peu comme
notre passeport maintenant est rendu valide pour 10 ans, avec une procédure
simplifiée. C'est la même approche
qu'on recommande pour les employeurs. Si on avait ce système-là, ça nous
permettrait très probablement, selon notre connaissance du dossier et
des exigences administratives, de rentrer dans le canal de simplification
offert par le gouvernement fédéral aux producteurs agricoles des autres
provinces.
Mme
Roy
(Montarville) : Vous abordez brièvement la question
de la langue française, de la francisation. Lorsqu'ils sont ici, ces travailleurs-là, qui sont ici vraiment pour une
période très, très précise, déterminée, pour un contrat d'emploi et retourner à la maison, il n'est pas
question de francisation, il n'y a pas de cours. C'est uniquement en
socialisant avec les gens, j'imagine, qu'on peut arriver à se comprendre
et à parler.
M. Hamel
(Denis) : Effectivement,
dans leur métier, ils n'ont pas à apprendre le français. Certains le font de
bonne foi et simplement pour
améliorer les contacts avec la communauté. Dans certaines régions du Québec, ils
sont 2 000, 3 000, et puis, je dirais, même ça contribue à
l'hispanisation de certains villages, et les employeurs apprennent l'espagnol
au même titre que certains
travailleurs parlent français. De façon générale, ils ne le font pas, mais on a
des belles expériences même de travailleurs qui ont marié des
Québécoises.
Mme Roy
(Montarville) :
Je vous remercie infiniment. Merci.
Le Président (M. Matte) : Merci. Je
céderais la parole au député de Mercier.
• (20 h 20) •
M. Khadir : Merci, M. le Président. D'abord,
bienvenue. Vous aussi, c'est un horaire, j'imagine, exigeant pour vous,
là, de venir témoigner ici, à Montréal, en fin de... je dis «à Montréal»...
à Québec en fin de soirée.
Je voudrais
vous demander, parce que... Bien, d'abord, une chose : Québec solidaire
est tout à fait conscient des difficultés
que connaît le secteur agricole en raison d'importantes transformations de nos
sociétés, de nos régions, de la culture,
de l'agriculture, qui fait en sorte que vous faites face à des problèmes,
notamment la pénurie de main-d'oeuvre, et
vous avez besoin de soutien. Alors, c'est sûr que moi, j'aurais souhaité qu'on
ait plus de temps pour qu'on parle du genre
de chose que pourrait faire le gouvernement, par exemple en incitant Hydro-Québec
à offrir de meilleurs tarifs à nos entrepreneurs
agricoles comme on le fait avec des grandes multinationales internationales et
dont les contrats sont même... on n'a
même pas accès pour savoir combien de réduction on leur accorde. Où on peut
voir un gouvernement qui accorde des
hausses de revenus aussi importantes de rémunération à des médecins, de
plusieurs milliards de dollars, comment ça se fait qu'on ne trouve rien pour un meilleur soutien ou un meilleur
accès à certains marchés, que le gouvernement ait des politiques d'achat public pour ses écoles, pour ses hôpitaux,
qu'il soutienne...Donc, il y a toute une série de mesures qui pourraient être faites qui pourraient donner
de la vigueur et un souffle au secteur agricole. Malheureusement, ce n'est
pas au rendez-vous. Vous n'avez pas le même
lobby que les Bombardier ou... bon, on pourrait nommer la liste, ou les banques, qui ont obtenu 800 millions de
cadeau il y a quelques années, bon, il y a toutes sortes de rabais fiscaux qui
leur ont été accordés qui ne vous ont pas été accordés.
Ceci étant
dit, ce qui nous intéresse, d'un point de vue social, nous, Québec solidaire,
c'est aussi la protection des travailleurs.
Alors, je suis sûr que vous êtes tout aussi, disons, soucieux que les pratiques
soient les meilleures possible pour
que ce ne soit pas entaché d'irrégularités ou de choses que les gens ne peuvent
pas accepter. Alors, qu'est-ce que vous
suggéreriez? Est-ce que c'est des campagnes de sensibilisation auprès des
travailleurs quant à leurs droits? Est-ce que c'est une meilleure politique de francisation? Est-ce que c'est
permettre leur syndicalisation ou, comme la Protectrice du citoyen le suggérait, qu'ils ne soient pas obligés
de résider... Quelles seraient les mesures que vous-mêmes, vous proposeriez
pour améliorer la protection des travailleurs étrangers?
Le Président (M. Matte) :
M. Hamel, vous avez 40 secondes pour répondre à la question.
M. Hamel
(Denis) : Bon, je vais donc
faire vite. Oui, écoutez, beaucoup a été fait, il y a certainement d'autres
choses à faire. Je crois que, la
communication avec les travailleurs, avec la fusion maintenant de la Commission
des normes du travail avec la commission de la santé et sécurité au
travail, notre programme va s'élargir, va permettre donc un meilleur accès ou une meilleure connaissance, pour
les travailleurs étrangers, des programmes qui sont mis à leur disposition
par le gouvernement du Québec. Une formation
que l'on fait déjà : à l'accueil à l'aéroport, systématiquement les
travailleurs sont rencontrés, un par un, à l'aéroport, par nos services
de façon à ce qu'ils connaissent très bien leurs droits. Les employeurs
connaissent très bien leurs droits et leurs obligations.
L'information
est la clé. On pourrait, je pense, étendre encore notre gamme de services, mais
déjà avec les progrès qui ont été
faits dans les cinq dernières années je suis très confiant qu'on est sur la
bonne voie. Et cette préoccupation-là demeurera, de toute façon.
Le
Président (M. Matte) : Et,
sur ceci, je vous remercie de votre participation, Mme Pouliot,
M. Hamel et M. Gibouleau.
Je vais suspendre les travaux afin de permettre
au prochain groupe de prendre place.
(Suspension de la séance à 20 h 22)
(Reprise à 20 h 25)
Le
Président (M. Matte) : Eh
bien, je souhaite la bienvenue aux représentants du réseau des forums jeunesse de la région de Québec. Je vous invite à vous
présenter, et vous avez 10 minutes pour faire votre exposé. On vous
demande de vous présenter.
Réseau
des forums jeunesse régionaux du Québec
M. Risso (Santiago) : Ce ne sera pas
long.
Mme
Côté (Florence) : Oui,
bonjour. Florence Côté, présidente du Forum jeunesse de la région de la Capitale-Nationale.
M. Risso (Santiago) : Santiago
Risso, président du Forum jeunesse de l'île de Montréal.
Le
Président (M. Matte) : Eh
bien, vous avez 10 minutes pour nous exposer... et par la suite c'est un
échange de part et d'autre. Merci.
Mme Côté
(Florence) : Merci. Bonsoir.
Puis merci d'avoir invité les forums jeunesse régionaux à donner leur point
de vue sur le projet de loi n° 77 sur l'immigration.
Les forums
jeunesse régionaux, rappelons-le, c'est des organisations qui sont
présentes dans toutes les régions administratives
du Québec depuis le tournant des années 2000. C'est des organisations composées
de jeunes de 12 à 35 ans qui
travaillent sur la représentation jeunesse, le rôle conseil en matière de
jeunesse, la concertation des organismes jeunesse et la promotion de
l'implication sociale dans les régions administratives du Québec.
On est
d'autant plus heureux et légèrement surpris d'avoir l'occasion de nous exprimer
ce soir que notre financement a été
coupé en avril 2015. Malgré tout, on continue nos activités comme on peut. Et
on est regroupés au sein d'un nouveau
projet national, Citoyenneté Jeunesse, qui a les mêmes objectifs globaux et les
mêmes sensibilités pour la participation
citoyenne et qui est présentement en évaluation au Secrétariat à la jeunesse.
En attendant, on est fiers de vous présenter
ce soir le fruit des réflexions des jeunes du Québec, de toute la province et
de toutes les origines, sur l'immigration au Québec. On va s'attarder plus particulièrement sur la reconnaissance
des acquis et des compétences, la francisation, l'intégration et
l'éducation.
Je m'appelle
Florence Côté, comme je l'ai dit, je suis présidente du FJRCN. Je suis aussi,
parallèlement, externe en médecine, en stage de chirurgie pour
l'instant, et membre du conseil d'administration et du comité exécutif de
l'Université Laval.
M. Risso
(Santiago) : Bonsoir, tout le monde. Bonsoir, M. le Président. Bonsoir, Mme la ministre. Bonsoir,
chers membres de la commission.
Comme je disais tantôt, mon nom est Santiago Risso, président du Forum jeunesse
de l'île de Montréal, et je suis aussi membre du conseil d'administration de Concertation Montréal et du comité
organisateur pour les Jeux du Québec
à Montréal 2016. Je suis très honoré d'être ici ce soir,
oui, en tant que président du forum et porter la voix des jeunes Montréalais mais surtout en tant... plus personnel. Vous
avez remarqué, là, avec mon accent. Je ne suis pas une minorité visible,
je suis une minorité audible, comme on dit.
Une voix : ...
M. Risso
(Santiago) : Merci. Donc, moi-même,
en tant qu'immigrant, je suis arrivé au Québec à l'âge de 15 ans.
Donc, je suis vraiment honoré de participer ce soir, apporter au projet de loi.
Donc, pour
commencer, nous aimerions remercier le gouvernement de la reconnaissance, en fait, des projets pilotes comme moyen d'amélioration
continue du programme d'immigration, on trouve que c'est une excellente idée.
Par contre,
on aimerait savoir si le gouvernement, il a l'intention de consulter la population
pour la mise en place et imaginer ces
projets-là. Les forums jeunesse, on est prêt à aider à consulter les jeunes,
les jeunes immigrants surtout, on
vous propose en fait d'inclure les jeunes immigrants dans l'élaboration des projets. Donc, les forums jeunesse, on peut vous aider. On a déjà pas mal d'expertise en consultation. Notamment, le Secrétariat à la jeunesse nous a mandatés de faire la consultation
pour Destination 2030, donc on parle de renouvellement de la politique jeunesse
en 2013.
• (20 h 30) •
Mme Côté
(Florence) : Attardons-nous maintenant
sur le processus que vivent les immigrants avant d'arriver au pays. C'est vraiment important pour les
immigrants de recevoir des réponses qui soient véridiques puis claires à leurs
questionnements, puis c'est pour ça qu'on est contents de voir le désir d'encadrement
des conseillers en immigration. Les conseillers
sont encadrés beaucoup au
niveau du Canada,
par loi canadienne de l'immigration, surtout depuis 2011, mais on est très contents de voir que le gouvernement québécois a aussi la sensibilité de
s'attarder à cet enjeu-là. L'avis qu'on a déposé — un
peu tard, c'est vrai — aborde
le cas des universités puis des autres organismes avec une expertise pour certaines catégories d'immigrant, mais les
universités semblent déjà avoir débuté un bon dialogue à cet effet-là avec le
gouvernement, avec un rapport en
construction, donc on va seulement se limiter, ce soir, à réitérer l'importance
pour nous d'une information de qualité mais aussi obtenue avec une
certaine efficacité.
De la même manière, la vision des immigrants est
souvent erronée, avant leur arrivée, en ce qui a trait à la reconnaissance des acquis puis des compétences. Le
gouvernement semble, encore une fois, avoir une certaine sensibilité à cela avec l'article 108 du projet de loi.
Donc, on va réitérer l'importance de travailler activement avec les
associations d'employeurs, les ordres
professionnels et les établissements d'enseignement postsecondaire pour avoir
des lignes directrices claires puis uniformes pour la reconnaissance des
acquis puis des compétences.
À l'arrivée, maintenant, le lieu de résidence
puis la langue sont des pierres angulaires de l'intégration des immigrants. Pourtant, il semble y avoir d'abord
une certaine métropolisation des arrivants. Entre 2010 puis 2014, c'est
plus de 75 % des immigrants qui se sont établis dans la région élargie de
Montréal, qui comprend aussi Laval puis Longueuil, alors que pourtant la revitalisation
des régions semble être un bon objectif du gouvernement avec le projet de loi. On se demande comment assurer une bonne
répartition avec la banque de candidats qui est annoncée avec le projet de loi. Ce
qu'on propose, c'est un plan pluriannuel avec des discussions qui soient faites
d'avance avec les MRC, les municipalités
et les employeurs de chacune des régions.
Les forums jeunesse ont des bons liens avec les municipalités puis les régions
administratives du Québec, puis on se
propose également de participer à ces discussions-là parce qu'on trouve
important que d'avance il y ait des lignes directrices établies pour
assurer la régionalisation de nos immigrants.
Ensuite, par rapport
à la francisation, on sait que, dans les dernières années, la proportion
d'allophones qui ne participent pas aux
cours de francisation à leur arrivée, dans les deux premières années, est
passée de 40 % à 60 % des allophones,
et plus de 50 % de ces gens-là sont des anglophones. Les critiques
entendues par rapport aux cours de francisation eux-mêmes ne sont, selon
nous, pas à prendre à la légère. On parle de la taille des classes, de
plusieurs niveaux de français regroupés dans
une même classe, d'enseignants contractuels ou de matériel désuet. Quand on
sait que, depuis 2012, c'est 10 % du budget du MIDI puis 2,7 %
des sommes en francisation, en 2014‑2015, qui ont été amputés, on peut comprendre une partie du problème. Le Devoir
d'aujourd'hui titrait d'ailleurs Francisation en entreprise — Québec ampute son aide de moitié. On y parlait du fait que la CPMT, qui par le
fonds de la loi du 1 % finançait jusqu'à dernièrement un OBNL appelé Formation de base pour le
développement de la main-d'oeuvre pour assurer la francisation des employés
en même temps qu'ils soient employés, la CPMT, donc, n'a plus l'argent pour le
faire, étant donné que le surplus de 96 millions
des quatre dernières années du fonds de la loi du 1 % est écoulé. La CPMT
s'attend à ce que le MIDI prenne la
relève. Puis on sait que c'est utile, ce genre de formation là, parce que, pour
beaucoup d'immigrants, le travail puis l'argent, la subsistance passent avant l'apprentissage de la langue à l'arrivée.
D'autant plus que la raison évoquée pour la diminution des budgets était la diminution du nombre
d'immigrants, mais que parallèlement on assure que le projet de loi va
permettre d'augmenter le nombre d'immigrants puis de réfugiés dans les
prochaines années, les forums jeunesse souhaiteraient donc une priorisation
de la francisation accompagnée d'une augmentation des sommes allouées à cet
effet.
En
entrevue, également, la ministre parlait de possibilité de passe-droits pour
commissions scolaires anglophones sur
l'île de Montréal pour les réfugiés syriens ou encore de passe-droits pour des
travailleurs qui seraient en demande. Selon
les forums jeunesse, ce n'est pas la bonne voie à emprunter pour éviter une
ghettoïsation des immigrants à leur arrivée et pour protéger la langue
française au Québec.
M. Risso (Santiago) : Concernant la participation citoyenne, les forums
jeunesse, on croit que la participation citoyenne, en fait, c'est vraiment la clé de l'intégration pour les
jeunes immigrants. Cette intégration-là doit être au coeur des préoccupations pour le développement social,
économique et culturel du Québec. Les jeunes immigrants d'aujourd'hui et de demain auront un poids assez considérable
dans le futur ou dans les années qui s'en viennent, étant donné le contexte
sociodémographique, en fait, de la société.
Il faut prendre en charge l'intégration afin de réduire les impacts négatifs
dans le futur.
Pour
les forums jeunesse, l'intégration va au-delà de l'insertion professionnelle.
Nous devons porter une attention particulière au rapprochement interculturel
et à la connaissance de la culture québécoise, ce qui n'est pas tout à fait acquis en ce moment. On sait que 30 % des
immigrants allophones montréalais étaient en situation de rétention culturelle,
c'est-à-dire qu'ils n'adoptent pas la langue, ni les coutumes, ni la culture,
ni les habitudes de vie de leur société d'accueil,
et ça, à long terme, si on y pense, il y a des répercussions dans les deuxième
et troisième générations d'immigrants aussi, donc leurs enfants.
Alors, les forums
jeunesse, nous croyons que la favorisation de la participation citoyenne chez
les jeunes immigrants et leur intégration
dans les milieux décisionnels sont essentielles à l'intégration. Un, la
participation citoyenne est
l'expertise des forums jeunesse depuis plus de 10 ans, donc nous
connaissons très bien les impacts positifs chez les jeunes. La participation aux actions locales et
régionales crée un sentiment d'appartenance aux communautés. Par exemple,
les lieux d'implication comme les forums
jeunesse et d'autres organisations de jeunes proposent en fait un transfert des
connaissances entre d'autres cultures et entre les Québécois de souche.
Mais
il faut aller plus loin et au-delà des échanges interculturels, il faut que les
immigrants aient l'opportunité et la
chance de s'impliquer concrètement dans leur nouvelle communauté. Un exemple,
le projet Prends ta place dans ta communauté, développé le Forum
jeunesse de l'île de Montréal, valorisait le leadership des jeunes des
communautés culturelles, c'est les jeunes
qui mettaient en place des projets, qui les imaginaient, qui faisaient tout le
processus et les mettaient en place; valorisait leur leadership et
créait un sentiment d'appartenance chez les jeunes.
Concernant
l'implication des immigrants dans les lieux décisionnels, la question ne doit
pas seulement venir des immigrants, il ne faut pas que ce soit seulement
une initiative de l'immigrant d'aller quand il a envie d'aller vers les milieux
décisionnels, mais les institutions doivent, elles aussi et surtout, s'ouvrir à
la diversité. La participation des minorités
visibles qui occupent une place dans les conseils d'administration est de
seulement 7,3 %, le gouvernement doit se doter de procédures claires et précises pour les instances
décisionnelles afin de favoriser la place de la diversité dans les C.A. Par exemple, la majorité des provinces
ont adopté la politique «se conformer ou se justifier» afin de favoriser
la place des femmes au sein des conseils
d'administration. Donc, on croit que c'est une politique qui peut s'appliquer
très bien à la diversité culturelle.
Le Président (M.
Matte) : ...rapidement, le temps est écoulé.
M. Risso (Santiago) : C'est excellent parce que j'allais conclure, justement. Dans le projet de loi, on parle, en fait, qu'on ne parle pas assez, puis dans la société
en général on ne parle pas de l'approche intersectionnelle, en fait. Nous recommandons donc qu'une importance particulière
soit accordée à cette sensibilisation-là puis à la sensibilisation de la
diversité culturelle, par exemple, dans les programmes d'éducation au
secondaire.
Le
Président (M. Matte) : Je
vous remercie. Et je cède la parole à la ministre pour 16 minutes.
Mme la ministre.
Mme Weil :
Oui. Bonjour et bienvenue, Mme Florence Côté et Santiago Risso. Merci beaucoup
d'être présents. La voix des jeunes,
c'est un privilège pour nous, vous représentez l'avenir, et c'est intéressant
d'avoir votre point de vue.
Alors, je
vais vous amener directement sur une recommandation que vous faites, que je
trouve vraiment intéressant, et on
pourrait voir ce qu'on pourrait faire avec ça. Vous parlez d'un plan
pluriannuel régionalisé. Alors, on a beaucoup parlé ici, en commission parlementaire aussi, lorsqu'on a fait notre
consultation en janvier, comment faire en sorte que la sélection reflète vraiment les besoins mais
régionalisés, et donc il y a le projet de loi n° 71, en même temps, qui
procède, et la Commission des
partenaires du marché du travail va être capable d'avoir un portrait
régionalisé. Puis l'intention, la
vision, c'est vraiment d'amener les gens directement en région, basé sur les
besoins puis cette présélection où on invite les gens qui ont le profil,
qui répondent à ces besoins.
Maintenant,
j'aimerais vous entendre un peu plus mais... Votre recommandation, on parle
qu'un effort particulier soit mis
dans la régionalisation de l'immigration — maintenant on parle d'immigration en région,
on a décidé lors de cette consultation
que c'est une expression qui est un peu plus dynamique — en prévoyant des plans pluriannuels
d'intégration basés sur les besoins
de chaque région et des employeurs qui la composent. Peut-être juste nous en
parler un peu, de cette idée qui est nouvelle.
Mme Côté
(Florence) : Oui, bien, en fait, l'idée vient en partie d'un autre
questionnement qu'on avait, qui était à savoir s'il allait y avoir un moyen de rétention une fois que les
immigrants seraient rendus dans la région. Est-ce qu'il est possible, est-ce qu'il est souhaitable de mettre
un certain nombre d'années où les immigrants devront rester? En même temps, si on conçoit qu'ils vont s'en aller dans
une région particulière parce qu'il y a un besoin pour eux puis il y a un
emploi qui peut les attendre puis des intérêts qui peuvent être là, ça peut
déjà être un bon moyen, là, de rétention des immigrants dans les régions.
L'idée de
plans pluriannuels basés sur les besoins de la région vient entre autres aussi
de discussions qu'on a eues avec la
Fédération québécoise des municipalités. On a lu leur mémoire, on a discuté
avec eux, on sait qu'ils sont passés ici puis que c'était quand même une
sensibilité qu'eux avaient, là, de dire qu'ils peuvent être des interlocuteurs privilégiés, là, mais pour aller chercher un
objectif global pour chacune des régions du Québec par rapport à l'immigration.
Ça fait qu'on pense qu'il y a de tous côtés
un intérêt pour la chose. De notre côté, c'est certain qu'on pense que d'avoir
des immigrants qui vont se retrouver dans
les régions directement va permettre, tu sais, d'éviter la passoire
montréalaise, qui semble retenir
beaucoup d'immigrants, puis surtout justement d'aller chercher un intérêt
préalable, là, de savoir que ces gens-là ne vont pas arriver
complètement perdus au milieu du Saguenay à ne pas parler un mot de français.
L'autre
chose, c'est que, si on pense à les amener en région d'emblée, la plupart,
présentement, là, des immigrants qui
s'en vont dans les régions éloignées sont jeunes et ont déjà une certaine
francophilie, si ce n'est francophonie. Donc, en s'attendant à envoyer plus d'immigrants en région, on va s'attendre à
envoyer plus d'allophones en région, puis je pense qu'il faut aussi rappeler, justement, là, notre
désir de prioriser la francisation puis l'accès aux cours, notamment en région.
Mme Weil :
Bien, c'est intéressant parce qu'il y aura une autre consultation qui va venir,
on va être pas mal occupés dans cette
commission, c'est la planification pluriannuelle. Et, lors de cette
planification, qui se fait tous les trois ans, quatre ans, on regarde le volume d'immigration qu'on cherche
et la composition de l'immigration, mais on pourrait — puis là j'ai mes collègues qui sont devant moi, voir leur réaction — on pourrait introduire cette notion, qui est
différente, et de voir ce qu'on pourrait faire avec ça. Alors, on vous
inviterait à revenir lors de la consultation...
Mme Côté (Florence) : Avec plaisir.
• (20 h 40) •
Mme Weil :
...parce que ça peut être vraiment quelque chose de dynamique qui serait
différent de ce qu'on fait d'habitude.
Normalement, c'est vraiment le volume, puis on est dans les 50 000, etc.
Puis, bon, c'est progressif, puis on parle
de la composition, puis on parle des talents qu'on recherche avec une
proportion, etc. Mais, étant donné cette réforme et un mode de sélection qui est très différent, qui met les régions en
amont avec nous, on pourrait essayer d'intégrer cette notion, parce que ce que vous faites ici, ça
rejoint ce que la politique vient faire, et on a eu beaucoup cette discussion avec
des acteurs, les élus, des villes, des
régions, des MRC, c'est qu'on ne peut pas réussir l'immigration en région si on
ne travaille pas en amont et en aval
et on travaille l'intégration, la participation. Donc, peut-être un plan fait
en sorte, régionalisé, où tout le
monde dans une région s'attarde, les MRC, pour assurer d'un milieu accueillant,
hein, on a parlé avec Gatineau de tous ces sujets-là, des milieux
accueillants... Donc, je retiens cette idée.
Oui,
j'aimerais vous... Les projets pilotes, vous dites que c'est important de
consulter les jeunes par rapport aux projets
pilotes. Moi, je suis très réceptive à cette idée, là aussi, quelque chose à
développer. Les projets pilotes, ça, c'est vraiment quelque chose qui intéresse, je dirais, à peu près tous les
intervenants, toutes les régions, parce qu'il y a beaucoup de possibilités de tester des idées sans faire en
sorte que tout le système soit nécessairement axé sur une idée, donc on est
réceptif. Je ne sais pas si vous en
particulier, vous avez des idées là-dessus, mais essentiellement votre message,
c'est que les jeunes puissent être consultés lorsqu'on prépare ces
projets pilotes.
M. Risso (Santiago) :
Essentiellement, oui. L'idée première, c'est qu'on soit consultés, que les
jeunes soient consultés, surtout les jeunes
immigrants. Ça, c'est une étape des projets. C'est sûr que, oui, c'est vrai, on
n'a pas besoin de réinventer la roue
à trois boutons, comme votre collègue disait l'autre fois, mais il y a déjà des
projets qui ont déjà été mis en place.
Entre 2009 et 2014, les forums jeunesse, avec les anciens fonds
d'investissement régional jeunesse, on a mis en place une quarantaine de projets sur
l'immigration, donc on a déjà plus d'une centaine de partenaires avec qui on
travaille, donc nous, on propose...
L'idée, c'est de mettre tous ces acteurs-là sur la même table, assis sur la
même table pour imaginer ces projets-là.
Mme Weil :
Très bien. Je voulais juste vous donner un chiffre qui va vous donner une autre
image de l'immigration maintenant,
là, mais c'est des chiffres de 2012. En 2012, 80 % des immigrants, en
2012, donc, étaient soit francophones soit
des enfants scolarisés, donc, nécessairement en français, comme vous avez vécu
peut-être, scolarisés... — non, pas vous? Ah! bien bravo, hein, vous avez bien réussi
votre francisation! — ...
M. Risso (Santiago) : Merci.
Mme Weil :
...ou ils sont en francisation. Donc là, le verre est beaucoup plus plein que
ce qu'on pouvait imaginer. Et, depuis
ce temps-là... Parce que, quand on parle de cette étude de 2012, ça peut
prendre jusqu'à trois ans avant que la personne
qui a été sélectionnée arrive, hein, trois ans, là. Donc, les critères de
sélection, depuis 2009, ont changé quand même. Le recrutement dans les bassins francophones, on a d'ailleurs
entendu Montréal International qui a bien parlé de ça, on recrute dans
des bassins francophones, la France, les pays du Maghreb, l'Afrique
francophone, c'est des bassins importants,
ou francotropes, beaucoup en Amérique latine, qui fait en sorte que 90 %
des requérants principaux... On parle dans la catégorie des travailleurs
qualifiés.
Ceci étant dit, il faut travailler les
15 %. Ça peut être des gens du regroupement familial, ça peut être des... Essentiellement, on doit mieux comprendre le
phénomène, et donc, je pense, des études en temps continu, en temps réel
toujours pour alimenter nos politiques publiques.
Donc,
j'apprécie vos commentaires sur cette question de francisation, parce que vous
parlez de participation, de rétention,
de tout ça, la langue, c'est peut-être... Je pense que vous le comprenez bien,
la langue, c'est peut-être le premier facteur
d'intégration, hein, pour pouvoir travailler, participer à la société. Donc,
peut-être vous entendre un peu plus sur cette question importante, on en a beaucoup parlé en commission
parlementaire. J'ai une collègue aussi qui a, je pense, des questions et
je ne veux pas prendre trop de temps, là, mais peut-être évoquer rapidement...
Mme Côté
(Florence) : Je peux y aller rapidement. Je pense que vous faites bien
le tour de la question, là. On est contents
d'entendre que 80 % ou plus sont
déjà francophones, là. Ce qu'on
aurait voulu peut-être rajouter, puis je vais juste revenir sur quelque chose que j'ai dit tantôt, pendant la
présentation, mais qui ne se retrouve pas dans le mémoire parce qu'on l'a travaillé surtout aujourd'hui en
lisant l'article du Devoir, mais c'est la francisation en milieu de
travail, parce c'est quand même vrai
que beaucoup de gens vont arriver puis avoir comme priorité de s'installer,
avec un certain montant d'argent pour
faire vivre leur famille, puis tout ça, puis ces travailleurs-là vont avoir de
la difficulté à en même temps avoir des cours de français. Donc, on
trouverait quand même important, maintenant que le CPMT n'a plus le 96 millions de surplus sur quatre ans à
dépenser, entre autres, là-dedans, que le MIDI puisse s'engager, là, à combler
ce manque-là.
M. Risso
(Santiago) : Rapidement, par
rapport à la francisation, ce n'est pas juste une nouvelle façon de communiquer avec l'autre, mais c'est l'ouverture,
justement, à une nouvelle culture. Donc, oui, c'est essentiel à l'intégration.
Mme
Weil : Mais en fait c'est 85 %. J'ai peut-être dit
80 %, mais c'est 85 %. Alors, la députée de Richmond voudrait
poser des questions.
Le Président (M. Matte) : Je cède la
parole à la députée de Richmond.
Mme
Vallières :
Merci, M. le Président, bien aimable à vous. Salutations, Mme Côté, monsieur
également. Tout un plaisir pour moi
de pouvoir vous voir dans le cadre de cette commission parlementaire. On se
reverra certainement dans d'autres dossiers également.
Je voulais
parler... faire un petit peu de pouce sur l'immigration en région. Vous
avez parlé de rétention, moi, je
pense que c'est le coeur de la solution qui est là. Pour vivre moi-même
en région, avoir des amis issus de l'immigration
mais en connaître d'autres également
qui connaissent certaines difficultés, je suis à même de constater qu'on a une
problématique particulière quant à la rétention des gens que l'on finit
par attirer chez nous.
Vous avez
parlé, oui, de francisation, de l'adéquation formation—main-d'oeuvre également, mais j'aimerais ça savoir, à travers le réseau
des gens que vous côtoyez, à travers les consultations que vous avez
faites également pour le projet
Citoyenneté, les jeunes en immigration... ou des jeunes issus de l'immigration, eux, vous disent quoi. Est-ce qu'il
y en a que vous avez rencontrés qui
ont été de ces jeunes qui sont repartis vers Montréal? Et j'ai l'impression
qu'on a beau parler de francisation,
de main-d'oeuvre, mais il
y a quelque chose d'autre qui se
cache derrière ça. Puis est-ce que, dans
vos réseaux, vous avez pu discuter avec de jeunes immigrants qui auraient pu
faire état de leurs expériences personnelles, peut-être?
Mme Côté (Florence) : Veux-tu
commencer?
M. Risso
(Santiago) : Je peux
commencer. En fait, on n'a pas vraiment eu cet écho-là au niveau des jeunes, mais
on pourrait aller... effectivement ce serait intéressant d'aller plus en avant.
Je pense, cette question-là est très... ça ne s'applique pas juste aux jeunes mais à l'immigration en général, là, je pense que c'est le problème, en fait, en
immigration au Québec.
C'est sûr que c'est plus rassurant, pour un nouveau arrivant, d'arriver quelque part où il sait qu'il va côtoyer des
gens qui font déjà partie de sa communauté, donc c'est rassurant,
surtout quand on ne parle pas la langue. Donc, oui, la francisation...
Et je pense qu'il y a
aussi tout le préalable dans la sélection des immigrants, l'importance de bien informer les immigrants aussi où est-ce qu'ils s'en
vont, c'est quoi, les possibilités qu'il y a aussi autour d'eux. Qu'est-ce que
j'ai entendu de façon plus informelle,
c'est qu'il y a des gens en Europe, mettons, qui vont dans des
séances d'information pour immigrer au Québec, puis on lui dit que,
bien, voici, en médecine il y a beaucoup de travail au Québec, et ce n'est tout
à fait pas le cas, là, donc...
Mme Côté
(Florence) : Bien,
également, vous repreniez ce qu'on disait par rapport à la main-d'oeuvre, par rapport au français, mais il ne faut pas aussi oublier
toute la partie sur la participation citoyenne. Je
pense qu'une bonne manière d'intéresser quelqu'un à un milieu
d'accueil, c'est de sentir qu'il a une importance puis qu'il peut participer à faire
grandir ce milieu-là. Puis je vais paraphraser Mme la ministre à l'École
d'été de l'Institut du Nouveau Monde de cet été qui disait que renforcer le
sentiment d'appartenance puis l'implication citoyenne des jeunes immigrants est
un élément clé pour contrer la
radicalisation, mais, j'ajouterais, également pour assurer la rétention de cet immigrant-là
dans son milieu d'accueil.
Mme
Vallières : Vous m'ouvrez la piste sur la participation citoyenne aussi, où j'avais une question. Vous en parlez énormément.
Par rapport aux jeunes, on a, dans
les différents écrits ou propositions que vous avez déjà faites, des idées sur comment amener davantage
de jeunes en participation citoyenne, mais, encore là, spécifiquement, parce qu'on
est ici pour parler d'immigration, est-ce que ces mêmes mesures là tous azimuts, peu importent les
jeunes, vous croyez que c'est suffisant pour inclure sur des instances
décisionnelles des jeunes issus de l'immigration aussi ou vous croyez qu'il faudrait faire
un pas de plus pour cette catégorie de Québécois, de nouveaux Québécois chez
nous?
• (20 h 50) •
Mme Côté (Florence) : Je pense que
l'inclusion des jeunes, des jeunes immigrants, de toutes les catégories sous-représentées dans les milieux décisionnels
peut se faire en deux étapes, puis on les aborde toutes les deux, là, dans
notre avis puis dans nos vies en général, mais la première serait quand même la
formation, parce que, même si juste s'impliquer
dans un milieu décisionnel forme, en soi, c'est sûr que, pour avoir le courage
d'y aller puis pour aussi avoir une
bonne réception de notre implication, c'est utile d'avoir une formation de
base. Ça, ça se fait par l'implication dans des milieux qui sont peut-être plus accueillants et plus formateurs, par exemple... là, on prêche pour notre paroisse,
mais par exemple dans les forums jeunesse, là.
Mais une fois
que ça, c'est fait, une fois que la formation est arrivée puis qu'il y a une
certaine base, là, ensuite, il faut
qu'il y ait quand même un incitatif des deux côtés pour aller chercher une
place dans un milieu décisionnel. Ce qu'on
mentionnait tantôt, entre autres, c'est l'intérêt qu'on trouve dans le
programme, là, «se conformer ou se justifier», qui parle en fait de la place des femmes dans les conseils
d'administration des sociétés cotées en bourse au Canada, puis ça
pourrait être quelque chose à aborder aussi pour d'autres minorités, là, par
exemple pour les jeunes, par exemple pour
les jeunes immigrants, par exemple pour les immigrants. Donc, l'idée, là, c'est
de dire qu'il y a des politiques qui doivent
être mises en place dans chacun des milieux, puis il doit y avoir des objectifs
mis en place, puis à chaque année ou périodiquement il faut que la
compagnie justifie soit l'atteinte ou pas de ces objectifs ou la présence ou
non d'une politique. Donc, ça commence soft,
dirons-nous, au lieu de mettre une discrimination positive d'emblée ou quelque
chose de plus dur, sauf que ça fait une bonne prise de conscience. Comme
première étape, on trouvait ça intéressant.
Puis on a vu,
d'ailleurs, pour les femmes, là, en ce qui a trait à ce projet-là, que, dans la
dernière année, la proportion des femmes sur les sociétés cotées en
bourse, les 500 plus grosses sociétés cotées en bourse au Canada, est passée de
17,1 % à 19, 5 %. Quand même,
2 % en une année, avec un programme qui vient tout juste d'arriver, on
trouvait ça intéressant.
Le
Président (M. Matte) : Je
vous remercie. Maintenant, j'inviterais le député de Bourget à prendre la
parole pour 10 minutes.
M. Kotto :
Merci, M. le Président. Mme Côté, M. Risso, serait-ce indiscret de
vous demander vos âges respectifs?
Mme Côté (Florence) : J'ai
23 ans.
M. Kotto : Wow!
M. Risso (Santiago) : 29 ans.
M. Kotto :
Wow! Je suis impressionné par votre maturité intellectuelle. Vous êtes deux
beaux modèles, vous nous inspirez,
c'est ce que je me disais tout au long des échanges que vous venez d'avoir avec
la ministre. Et je suis bien heureux d'avoir
entendu et reçu tous les commentaires que vous avez pu exprimer ici et j'abonde
dans le sens de la totalité du contenu de ce que vous avez présenté, là,
ce soir.
Mais je vais
insister sur quelques aspects de vos commentaires. En liminaire, vous avez abordé
la question du sécateur de
l'austérité. Vous avez été victimes. Quels vont être les impacts ou quels
seraient les impacts potentiels à ces coupures relativement à vos
activités?
M. Risso
(Santiago) : Vous avez le temps?
Des voix : Ha, ha, ha!
M. Risso (Santiago) : Quels sont les
impacts? C'est sûr qu'au début ça a été très démobilisant. Pourquoi? Parce qu'on a continué à se mobiliser quand même,
suite à réflexion, parce qu'on trouvait la pertinence des forums jeunesse
puis on y croit vraiment.
C'était quoi,
les impacts? Les impacts, c'est, oui... Parce que les forums jeunesse, c'est
deux choses : c'est une école de
gouvernance, premièrement, et, deuxièmement, c'était un moteur économique de
développement aussi pour les jeunes
Québécois. Avec le financement qu'on a perdu, c'est tout le financement qu'on
donnait aux organisations aussi, c'est
les organisations qui venaient cogner à notre porte pour avoir du financement,
avec notre philosophie de par et pour les
jeunes, c'est-à-dire qu'on générait des emplois aussi pour la jeunesse et on
permettait aux jeunes d'imaginer des projets et les mettre en place, puis on était très innovateurs dans notre façon de
faire parce que ça permettait aux jeunes vraiment de... ou à une organisation qui venait de démarrer,
on aimait ça prendre des risques puis dire... on croyait à une organisation
puis on donnait l'argent, dire : Vas-y, allez-y, puis après cette
organisation-là était capable d'aller chercher d'autres bailleurs de fonds. Le meilleur exemple, c'est Clip 514, ça appartient à
Montréal. Aujourd'hui, c'est Clip seulement, c'est partout au Québec, c'est Fusion Jeunesse qui le
porte. Ça, c'est un très bel exemple aussi. C'est la mort aussi d'Électeurs
en herbe, un très beau projet en participation citoyenne.
Comme je
disais aussi, on était un acteur en développements de toutes sortes. Pour chaque dollar que les forums jeunesse investissaient,
c'était 3 $ qui revenait à la
communauté. Donc, tout ça, c'est perdu. On pourrait parler tellement longtemps...
Mme Côté
(Florence) : Bien, ce qui reste, ce qui se maintient sans le
financement qu'on avait pour financer à notre tour, je dirais que c'est la jeunesse mobilisée, là. Dans la
plupart des régions où il y avait des forums jeunesse, les forums jeunesse persistent et continuent leurs
activités. Je vous dirais qu'il y a beaucoup d'espoir de la dernière chance
dans ces efforts-là, on compte encore sur
une reconnaissance du gouvernement renouvelée et possiblement un financement
également qui... celui qu'on demande est
quand même moins élevé que celui qu'on avait, mais, en attendant, on continue
de travailler, on continue de parler entre nous, de faire des actions, de faire
des ateliers, de mobiliser autour de nous.
On a, par
exemple, sans aucun financement, fait l'élection fédérale de l'automne 2015, on
a fait des simulations électorales
dans plein d'écoles secondaires au pays. On a fait des formations en
participation citoyenne. On en fait une samedi prochain à des jeunes
ambassadrices du programme EAU Nord dans la région de Québec.
Donc, les projets continuent mais ils sont plus
difficiles sans argent. Donc, on attend encore la réponse du Secrétariat à la
jeunesse.
M. Kotto :
Merci. Maintenant, je reviens sur les projets pilotes. Vous en avez parlé avec
la ministre, mais vous suggériez une
consultation publique dans la mesure où ces derniers seraient envisagés par la
ministre et le ministère. Quelle en est la pertinence, selon vous? Je
fais l'avocat du diable.
M. Risso (Santiago) : Quelle est la
pertinence? Bien, je pense surtout aux régions, ça peut donner justement l'opportunité que ces projets-là, étant donné
qu'ils vont être... S'ils sont pensés et conçus par des jeunes immigrants qui
ont vécu tout ce processus d'immigration là,
bien peut-être ça va être plus facilitant, et on va avoir des réponses de
justement comment mieux intégrer les jeunes en région, tout simplement.
M. Kotto : Vous avez... Oui?
M. Risso (Santiago) : ...c'est le
simple fait de la démocratie, écouter la population et les jeunes.
M. Kotto : Cela sous-entend
cela. Ceci sous-entend cela.
Vous avez
rappelé une citation de la ministre que j'ai beaucoup appréciée sur la question
du sentiment d'appartenance. À cela,
j'accolerais le sentiment d'acceptation aussi, et tout ça dans le sens de cet
impératif de rapprochement interculturel.
On vit dans un univers hypermédiatisé, vous le
savez. Il y a des faisceaux de communication très puissants, notamment la
télévision, le cinéma, la publicité, le théâtre, du moins tout ce qui est visuel,
qui véhicule des modèles d'identification,
des modèles de référence qu'on peut adopter parce qu'ils nous
ressemblent et ils nous rassemblent.
Or, des pans
importants de la population, et ceci, j'en parle de la perspective de la
diversité, des pans importants de la population ne sont pas représentés,
ne sont pas incarnés à travers ces faisceaux culturels.
Est-ce que,
de votre point de vue, et j'en parle parce que vous êtes la génération de
l'imagerie populaire... Est-ce que,
de votre point de vue, il serait important d'explorer des avenues pour inscrire
dans la psyché collective cette représentation diverse afin de faciliter
effectivement l'objectif qui vous passionne tant, c'est-à-dire le rapprochement
interculturel?
Mme Côté
(Florence) : Oui, je pense que ça va de soi. On l'aborde un petit peu
dans la dernière partie du mémoire, dans la recommandation 8,
considérant qu'il faut que ça commence tôt, que l'exposition à ce genre
d'images là aussi commence tôt. Il nous
semblait que le programme d'éducation secondaire était un bon endroit pour
commencer... bien, en fait, pour aller plus en profondeur dans une
réflexion de ce genre-là.
On aborde
aussi dans cette partie-là le principe d'intersectionnalité, qui est
relativement nouveau dans la psyché collective
mais qui consiste à prendre en compte les mécanismes d'articulation des
différentes logiques de domination qui s'opèrent à partir des construits sociaux tels
que le genre, l'ethnicité, la race, l'orientation sexuelle. Donc, c'est de dire
qu'en plus d'aller chercher une manière
d'intégrer, par exemple, quelqu'un qui vient de la communauté d'Haïti, on va
également chercher à aller accommoder la
personne qui vient aussi de la communauté LGBT en Haïti. Donc, c'est d'aller
concevoir que l'expérience est différente
selon beaucoup d'aspects, y compris l'immigration, y compris le genre et toutes
ces autres choses en même temps.
Puis donc on
parle du programme d'éducation secondaire, mais évidemment ça se décline dans
tous les aspects de la société, sauf
qu'au secondaire, présentement, on a quand même les futurs dirigeants, les
futurs ordres professionnels, les
futurs professionnels, employeurs, donc c'est sûr que de commencer le plus tôt
possible puis de la manière la plus large possible nous semblait une
avenue à privilégier.
M. Kotto : Merci pour votre
contribution. Merci. Merci, M. le Président.
• (21 heures) •
Le Président (M. Matte) : Merci. Je
cède la parole à la députée de Montarville.
Mme Roy
(Montarville) : Merci beaucoup, M. le Président. Madame monsieur, merci. Merci pour votre mémoire, que je lis et que j'annote.
Vous avez des
préoccupations qui rejoignent les nôtres, là, de façon très
directe. Quand vous nous parlez des régions qui sont délaissées, du français qui est délaissé, de la ghettoïsation, des choses
auxquelles il faut s'attaquer, qu'il faut prévenir également, ça nous
touche.
Quand vous
nous donnez des chiffres... Et je
pense que je vais faire une petite
lecture ici pour les gens qui nous écoutent,
parce que force est de constater que la grande, grande,
grande majorité des immigrants s'en vont vivre à Montréal,
et ce serait bien qu'ils aillent vivre un petit peu partout pour qu'on puisse en bénéficier, bénéficier de leur expertise,
les franciser comme il le faut et
puis préserver notre langue française. Alors, pour les gens qui nous écoutent :
«Alors que tous s'entendent pour dire
que les régions du Québec se vident et ont besoin d'être revitalisées, les
nouveaux arrivants de la province se
dirigent en très grande majorité vers la métropole et ses environs. Ainsi, entre
2010 et 2014, des [263 000] immigrants, 70,5 % se sont dirigés
vers l'île de Montréal — c'est énorme, là, c'est sept sur 10 — 8,4 % [vers] la Montérégie, 5,7 % [...] Laval, 4,9 %
se sont installés dans la région de la Capitale-Nationale — Québec — et une poignée seulement dans les autres régions du Québec. Par
exemple, à l'autre extrême, on compte 0,6 % [dans] la Mauricie et
0,5 % [dans] le
Centre-du-Québec.» Alors, on comprend ici votre préoccupation puis on
le voit avec les chiffres que vous nous soumettez, merci de nous les soumettre. Et, tout comme vous, nous
croyons qu'il faut absolument que les immigrants aillent tout partout et
pas uniquement à Montréal.
Par ailleurs,
la francisation, extrêmement important, ça passe par là. J'aimerais vous amener
à la page 9. Vous soulevez
quelque chose d'important, vous nous dites que récemment une étude... Bien, je
commence à la 8, mais je vais aller à
la 9, là, dernière ligne du 8 : «Récemment, une étude du Laboratoire de
recherche sur la santé et l'immigration de l'UQAM révélait pourtant que 30 % des immigrants allophones
montréalais étaient en situation de rétention culturelle, c'est-à-dire
qu'ils n'adoptent pas la langue, les coutumes, la culture ou les habitudes de
vie de la société d'accueil.»
Alors,
pourquoi ça se passe? Qu'est-ce qu'il faut faire? C'est vraiment ça qu'il faut
s'attaquer, là, et je suis tout à fait d'accord avec vous à cet égard.
Donc, pourquoi il y a ce 30 % qui est en rétention culturelle? Que faut-il
faire?
M. Risso
(Santiago) : Pourquoi, je
pense qu'il faudrait faire une étude approfondie là-dessus, mais qu'est-ce
qu'on pourrait faire, c'est qu'est-ce
qu'on propose, c'est de mettre en place des projets surtout en participation citoyenne,
c'est de créer un sentiment
d'appartenance chez les jeunes. Et puis il faut évidemment qu'ils soient en
contact avec d'autres jeunes, des
Québécois de souche, si on veut, pour qu'ils se sentent partie de la chose.
Donc, nous, c'est ça qu'on propose, c'est utiliser la participation
citoyenne comme excuse d'intégration puis de francisation aussi, en même temps.
Mme Roy
(Montarville) : ...à une certaine époque, vous savez que
c'était ça aussi, les immigrants arrivaient puis ils allaient à différents endroits, le gouvernement les plaçait à
différents endroits. J'ai un très, très bon ami à moi italien, parents italiens qui sont arrivés ici après la
Deuxième Guerre, qui sont allés dans un coin francophone, et tout le monde
est français, et cet ami-là parle maintenant
français, italien, espagnol. Donc, c'est vers ça qu'il faut tendre. Et à une
certaine époque ça se faisait, mais il faut aller, naturellement,
délicatement, avec délicatesse, ne brusquer personne.
Mais, les
propositions que vous mettez sur la table, là, j'en suis. Je n'ai pas beaucoup
de critiques à formuler, parce que
c'est vraiment par l'intégration, par la participation citoyenne, par
l'implication de la communauté... Alors, tout ce que vous dites là, ça
coule de source, là.
Alors, je
tiens à vous remercier pour votre participation, merci de vous être déplacés.
Et puis en espérant qu'on puisse continuer la réflexion, comme Mme la
ministre le disait, à l'égard des régions, parce que je pense que c'est excessivement important. Ça va garder la vitalité
de la langue française, et les immigrants deviennent des atouts et des Québécoises, des Québécois à part entière. Puis je
pense qu'il y a plein de monde qui sont... plein de gens qui sont prêts à
les accueillir à bras ouverts, justement,
dans toutes les belles régions du Québec. Ça fait que merci pour votre
participation.
Le Président (M. Matte) : Alors, je
tiens à vous remercier pour votre contribution, ça a été très apprécié.
Et je mets
fin à cette séance, là, de la commission, qui ajourne à 21 h 4, et la
commission ajourne ses travaux à mercredi le 10 février 2016, après
les affaires courantes, vers environ 11 h 15. Merci et bonne soirée.
(Fin de la séance à 21 h 5)