(Neuf heures trente-sept minutes)
Le Président (M. Bernier): À l'ordre, s'il vous plaît! Nous allons débuter nos travaux. Donc, ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission des relations avec les citoyens ouverte. Et je demande à toutes les personnes, comme d'habitude, dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs téléphones cellulaires.
La commission est réunie afin de tenir une consultation générale et des auditions publiques sur le document intitulé La planification de l'immigration au Québec pour la période 2012-2015. Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements?
La Secrétaire: Oui, M. le Président. Alors, M. Kotto (Bourget) remplace Mme Poirier (Hochelaga-Maisonneuve); M. Blanchet (Drummond) remplacera M. Cousineau (Bertrand); et Mme Rotiroti (Jeanne-Mance--Viger) remplace M. Lehouillier (Lévis).
Le Président (M. Bernier): Merci. Je vous souhaite donc une bonne avant-midi de travail.
Auditions (suite)
Nous allons donc débuter, ce matin, avec la présentation de M. Michel Pagé. Bienvenue, M. Pagé. Ça me fait plaisir de vous recevoir à la commission. Vous avez une période d'environ 15 minutes pour faire votre présentation. Par la suite, il y aura un échange avec les parlementaires sur votre présentation et sur le sujet. Donc, la parole est à vous. Allez-y, M. Pagé.
M. Michel Pagé
M. Pagé (Michel): Je vous remercie. Donc, M. le Président, Mme la ministre, Mmes et MM. les députés, je vous remercie de me recevoir ce matin.
Mon intervention est particulière en ce sens que je la fais graviter autour du thème de l'intégration positive. Alors, il m'est apparu utile d'orienter cette contribution-là autour de ce thème de l'intégration positive, parce qu'une fois que déjà les choses sont clarifiées autour de ce thème il devient plus facile de parler de niveaux, de composition et aussi d'actions positives que pourrait faire le MICC.
De l'intégration, je dirai peu de chose, hormis que l'intégration est une source de cohésion et de coopération sociale, qu'elle constitue une condition préalable à l'existence d'une société stable et viable. Voilà ce qui fait déjà de l'intégration un objectif de société et de bonne gouvernance. Maintenant, on comprend, dans ces quelques mots, que l'action politique, sous ses différentes formes, peut porter sur l'intégration ou la désintégration des forces cohésives d'une société.
**(9 h 40)** Là, je vais faire porter la présentation sur deux volets, soit l'intégration linguistique et l'argumentaire économique, qui justifieraient les niveaux d'immigration.
Donc, je porte à votre attention que les justifications d'une planification de niveaux d'immigration élevés s'appuient sur un argumentaire fragile, lorsqu'on fait référence aux vertus, sans sens critique ni nuance, d'une immigration à haut volume. Contrairement aux idées reçues, l'immigration au niveau actuel, dans une conjoncture économique incertaine, n'est pas requise, ce, pour deux raisons fondamentales. Il y a déjà un problème d'intégration linguistique et économique dans la grande région de Montréal, et Montréal s'anglicise de façon effarante depuis 2003-2004 et particulièrement depuis 2007. En deuxième lieu, en situation économique difficile, l'immigration à des niveaux trop élevés et dont la composition correspondrait trop peu aux objectifs d'intégration sociale et économique et aux besoins régionaux réels en main-d'oeuvre ferait en sorte que le seuil des bénéfices économiques marginaux serait négatif et générerait une charge budgétaire excédentaire qui pourrait être insoutenable s'il fallait que la récession perdure ou que la récession en W, que certains annoncent, la déflation, se produise aux États-Unis et dans la zone euro.
Par ailleurs, des études démontrent bien que l'immigration ne contribue pas à rajeunir la population d'une manière significative et qu'elle ne contribue pas à contrer un déficit démographique, puisqu'il n'y a pas de déficit démographique aux termes mêmes des dernières simulations de Statistique Québec et de Statistique Canada. L'immigration, certes, augmente la population mais n'a aucunement les vertus qu'on lui prête aux termes du vieillissement et aux termes du déficit démographique.
Sur la question de l'intégration linguistique et culturelle, je serai bref. Au Québec, les institutions et la société civile valorisent des principes démocratiques: l'égalité des hommes et des femmes, la langue commune, le français. Nos traditions et notre histoire témoignent de la contribution de la religion chrétienne. On ne doit pas confondre religion, ici, avec culture. Ce sont deux notions très différentes. Et, que cela plaise ou non, ce sont des données essentielles de notre aire identitaire dont il faut informer les nouveaux arrivants.
La hausse, sans soutien démocratique profond, de l'immigration à des niveaux de plus en plus élevés depuis 2004 relève d'une erreur fondamentale, car les hausses importantes du niveau de l'immigration auront engendré une diminution de la proportion des immigrants francophones véritables, c'est-à-dire ayant une connaissance unique du français. Ainsi, pour les périodes de hausse marquée des volumes d'immigration, soit entre 1990 et 1994, puis, plus récemment, 2003 à 2009-2010, ces périodes coïncident à des baisses de la proportion des immigrants ayant une connaissance unique de la langue française, et ça, on ne le dit pas suffisamment. La hausse des niveaux de l'immigration se fait aux dépens de la proportion des immigrants ayant une connaissance unique du français, laquelle diminue alors entre 21 % et 23 %, selon les données de différents ministères, dont Statistique Québec et du MICC. Observons que la situation démolinguistique du français s'est dégradée suite à chacune de ces vagues d'immigration et vraisemblablement depuis 2007.
Quel serait le juste niveau d'immigration? Je vous rappelle que les États-Unis, qui présentent pourtant des signes de troubles sociaux liés à l'intégration, se contentent d'un rapport d'immigration de moins de un sur 300, c'est-à-dire un immigrant par 300 habitants, ce qui, ramené au niveau canadien, signifierait un seuil maximal de 110 000 immigrants par année pour tout le Canada et que 28 000 immigrants pour tout le Québec.
Ainsi, les intentions du gouvernement fédéral, et par le fait même du gouvernement québécois, de hausser à des niveaux records l'immigration, depuis quelques années, ne répondraient en rien à des besoins rationaux et objectifs, mais contribueraient rapidement à marginaliser les populations francophones hors Québec et à miner la vitalité du français dans le Grand Montréal. Globalement, l'immigration devrait être ramenée à des niveaux plus bas, sa composition devrait être francophone ou, à défaut, francotrope et francophile, tout en répondant aux autres critères de qualité économique et de qualité des dossiers. Une responsabilité de recrutement -- ce qui ne se fait pas ou pas suffisamment -- de sélection et d'intégration de tous les immigrants n'aurait pas été pleinement assumée. Malheureusement, cette action politique a joué en défaveur des intérêts linguistiques et trop peu en faveur des intérêts économiques du Québec.
Donc, je vais porter le reste de mon intervention sur l'argumentaire économique. Certains éléments seront iconoclastes, vont à l'encontre de ce qu'on entend habituellement de certains éditorialistes, mais enfin. Donc, je pourrai répondre aux questions après.
Des analyses antérieures mettaient déjà en doute la justesse de la stratégie migratoire sur le plan de la main-d'oeuvre et du marché de l'emploi. La reprise économique depuis 2009-2010 tarde à se concrétiser nettement, et la reprise du marché de l'emploi est décalée d'autant, tout particulièrement aux États-Unis. Il n'y aurait pas de pénurie de main-d'oeuvre, au dire même de la Fédération des chambres de commerce du Québec dans une déclaration, dans une étude qu'ils ont rendue publique en novembre 2010. À vrai dire, le plan d'immigration aurait dû être adapté dès 2009, et un gouvernement responsable aurait alors abaissé les volumes d'immigration générale pour 2009, 2010 et 2011. Il faut comprendre, et c'est vrai depuis un bon bout de temps, que les pénuries de main-d'oeuvre sont sectorielles et régionales, et non pas globales, et évoluent au fur et à mesure de la conjoncture économique.
Trois points généraux relatifs à l'économie et à l'argumentaire économique. L'immigration ne constitue pas la solution de choix à la pénurie de main-d'oeuvre en général, mais une parmi d'autres. Certes, des demandes spécifiques de compétences spécialisées requièrent un recrutement à l'étranger, mais en général des moyens plus efficaces et plus respectueux de la population québécoise et autochtone consisteraient à contrer le taux de décrochage chez les jeunes, tant au niveau secondaire qu'au niveau professionnel, à recycler une partie des assistés sociaux encore jeunes vers des emplois techniques ou des métiers en demande, à inciter des jeunes retraités à reprendre le chemin du travail, et d'autres solutions qui ont été élaborées par différents organismes. En relation aux besoins régionaux, la formation professionnelle dans les cégeps régionaux pourrait, semble-t-il, correspondre encore plus adéquatement aux besoins des milieux de travail spécifiques.
Deuxième point, l'efficacité de l'immigration pour contrer certaines pénuries de main-d'oeuvre et un vieillissement de la population dépend plus de la composition de cette immigration que d'une augmentation des volumes. À cet effet, je souligne que l'âge médian des dernières cohortes d'immigration est sensiblement le même que l'âge médian de la population en général. Donc, c'est impossible, au niveau statistique, qu'il y ait rajeunissement de la population par l'immigration s'il n'y a pas une sélection, ce que tout le monde conviendra que... la sélection n'est pas une notion, dans ce sens-là, qui sera retenue. Le rapport du Vérificateur général du Québec, en juin 2010, précise bien que la sélection des immigrants est lacunaire, que les dossiers seraient mal évalués et souvent peu en correspondance avec les besoins de formation et de main-d'oeuvre qualifiée, et donc inepte en général à répondre à des impératifs d'intégration sociale et économique.
Troisième point général sur l'argumentaire économique lié à l'immigration, l'immigration certes contribue à augmenter la demande de services et de biens de base, nourriture, logement, etc., mais plus marginalement que la population en général. Cette demande accrue de biens et de services de base et de consommation courante ajoute un peu d'activité économique marginale, donc au PIB, indicateur de richesse par agrégation, mais n'accroît absolument pas le PIB par habitant, indicateur de richesse et de niveau de vie. De surcroît, et c'est le dernier point, un questionnement sur l'éthique de la redistribution à des néo-citoyens qui n'ont pas encore contribué à l'essor d'un patrimoine économique collectif émerge de la façon dont l'intégration est faite actuellement.
**(9 h 50)** Il est utile de souligner que, lors de l'importante récession de 1981-1982, le gouvernement canadien avait ramené le niveau d'immigration, pendant quatre ans, en dessous des 100 000 immigrants par année. C'était une récession dont certains éléments -- pas tous -- certains éléments ressemblent à la récession actuelle. Donc, le gouvernement canadien avait rabaissé très largement en dessous de 100 000 immigrants par année l'immigration, le gouvernement québécois, à moins 20 000, soit aussi longtemps que le marché de l'emploi n'eût pas rattrapé le recul des années de récession. La même sagesse devrait maintenant prévaloir.
Malgré la bonne performance relative du Canada pendant et après la récession de 2008-2009, les effets sur l'emploi auront été profonds. Des effets perdurent, et le niveau d'emploi est encore inférieur à ce qu'il était avant la crise. Après une période de reprise, des données économiques de juin et de mai 2011 traduisent un ralentissement d'autant plus significatif que le consommateur est beaucoup plus endetté qu'avant la récession et que les économies européennes et des États-Unis sont aux prises avec des niveaux d'endettement insoutenables. L'inflation pointe ou, à défaut, la déflation, deux paramètres qui pourront freiner la demande en main-d'oeuvre. Bref, la prudence indique encore que les niveaux d'immigration canadiens auraient dû être réduits depuis 2008-2009 et être ramenés à des niveaux beaucoup plus bas, comme nous l'enseigne la prudence du gouvernement fédéral durant la récession 1981-1982.
Par ailleurs, l'étude -- mais il y a différents rapports à ce sujet-là -- l'étude des niveaux d'assistance sociale de 2006 à 2011, tant aux niveaux canadien que québécois ou ontarien, révèle que des hausses du nombre d'assistés sociaux et de chômeurs immigrants ont accompagné les hausses du nombre d'immigrants depuis 2007, ce qui contredit les objectifs théoriques des politiques d'immigration à porte ouverte.
En définitive, l'impact de l'immigration sur l'économie serait mitigé et varierait largement en fonction des caractéristiques des immigrants, de leur composition, de leurs qualifications et des besoins conjoncturels de l'économie. L'impact de l'immigration sur les finances publiques semble plus nettement négatif, surtout en période de récession. La conjoncture économique incertaine fournit l'opportunité de revoir les objectifs et l'organisation du MICC, de manière à ne plus à la fois risquer de grever les finances publiques et en même temps de fragiliser la situation de la vitalité de la langue française à Montréal et dans le Grand Montréal.
Tout indique alors que les seuls quotas ou que la notion de quota, c'est-à-dire un volume élevé à atteindre en dépit d'indications contraires...
Le Président (M. Bernier): ...à conclure, M. Pagé, s'il vous plaît. Il reste environ 30 secondes.
M. Pagé (Michel): En tout état de cause, une planification triennale ne doit pas être rigide. Elle devrait permettre d'abaisser le nombre d'immigrants reçus en fonction d'une conjoncture économique ou sociale défavorable et ne jamais compromettre la qualité des candidatures retenues.
Dans tous les cas, le gouvernement au coeur de la nation canadienne-française doit faire preuve d'une bonne gouvernance en matière d'immigration. La cohérence de la planification de l'immigration -- sa composition, son niveau et sa qualité -- serait évaluée de pair avec des impératifs d'intégration positive. Voilà, essentiellement, M. le Président. Je vous remercie.
Le Président (M. Bernier): Merci, M. Pagé. Nous allons donc procéder aux échanges avec les parlementaires. Nous allons débuter avec le groupe formant le gouvernement. Donc, Mme la ministre, la parole est à vous.
Mme Weil: Merci beaucoup, M. Pagé. Merci de vous présenter ici avec un mémoire très réfléchi, très intéressant. Évidemment, il y a des orientations qu'on a, je vais vous poser des questions. Je comprends, là, où il y a, comment dire, un écart de pensée entre... en tout cas ce qu'on propose, mais il y a quand même aussi des points communs, des points de convergence. Alors, je vais peut-être commencer avec les points de convergence, sur la question de la langue. Je vous dirais que, lors de ces audiences, ces consultations, la langue émerge comme un thème prépondérant, l'importance de préserver une société francophone.
Alors, nous, donc, dans les orientations, il y a l'orientation 3... il y a 2 et 3 qui touchent la langue: «Maintenir majoritaire la proportion de personnes connaissant le français dans l'ensemble des admissions.» J'aimerais souligner que depuis 20 ans il y a une nette progression à ce niveau-là. Il y a 20 ans, c'était à peu près 38 % qui disaient connaître le français, et là on est au-dessus, on est à peu près entre 65 % et... à peu près, oui, 65 %. Donc, on a vraiment fait du progrès à ce niveau-là. Évidemment, il y a des bassins francophones qui nourrissent notre immigration, qui nous permet... Il y a le Maroc, l'Algérie et la France qui sont vraiment dans les quatre pays sources d'immigration pour le Québec. Donc, j'imagine... je voulais juste savoir si vous êtes d'accord avec cette orientation de maintenir majoritairement...
Maintenant, ça ne peut pas être 100 %. Je pense qu'il faut toujours souligner aux gens que le Québec est en compétition pour l'immigration. Ce n'est pas comme si les gens choisissent naturellement le Québec pour venir ici. Il faut vraiment qu'on se vende et qu'on attire, qu'on fasse de la promotion, de la prospection. Je le dis souvent ici, on est en compétition avec d'autres provinces du Canada, on est en compétition avec l'Australie. Je comprends que, vous, vous avez une vision de baisser les niveaux d'immigration -- mais on reviendra à cette question plus tard -- mais est-ce que vous êtes d'accord généralement sur cette question de garder majoritaire le nombre de personnes qui sont francophones ou qui parlent français? Et je pense qu'il faut regarder les deux orientations ensemble. C'est une nouvelle orientation. On veut vraiment aussi s'assurer d'un niveau de français qui permette à ces personnes d'intégrer le marché de l'emploi et de réellement être capables d'échanger en français, de communiquer en français.
Le Président (M. Bernier): M. Pagé.
M. Pagé (Michel): Mme la ministre, avec des commentaires et des orientations si gentiment adressés, je ne peux qu'être en accord mais à la fois être en désaccord avec les détails. Or, c'est dans les détails que se trouve le diable. Dans un premier temps, il y a une notion qui me blesse beaucoup et en blesse plusieurs, c'est cette notion de connaissance de la langue. Il y a un an et demi, je vérifiais sur le site -- je n'ai pas refait l'exercice depuis -- sur le site de votre ministère ce qu'on entendait par connaissance de la langue. Les questions et les réponses étaient données. À ce rythme-là, moi, je parle toutes les langues du monde.
Mme Weil: Mais c'est pour ça que, là, il y a cette nouvelle orientation par une évaluation objective.
M. Pagé (Michel): L'orientation objective, je l'ai lu dans les journaux, c'est un pas en avant. Maintenant, ce que je dois souligner, ce n'est pas nécessairement la notion qu'il faut retenir.
Mme Weil: Pardon?
M. Pagé (Michel): La notion qu'il faut retenir, c'est non pas celle de connaissance générale, parce que quelqu'un... Je me mets dans la peau d'un immigrant et je ferai la même chose. J'ai énormément... Vous savez, malgré ma prise de position pour une décroissance, j'ai un profond respect pour les immigrants. J'ai voyagé à l'étranger et disons que j'ai une position plutôt humaniste. Je n'aimerais pas qu'il y ait confusion sur mes intentions et sur mes propres perceptions humaines. Toutefois, au niveau de la langue, plus qu'une connaissance, il faut une connaissance unique. Et c'est pour ça tantôt, quand je donnais quelques chiffres, à chaque fois qu'il y a eu une hausse des niveaux d'immigration, il y a eu une baisse des immigrants ayant une connaissance unique, donc profonde, du français. Donc, ce qu'il faut rechercher, ce qu'il faut retenir, c'est la notion de connaissance unique, surtout dans un contexte nord-américain. Le transfert linguistique est tellement facile et se fait. À partir du moment où quelqu'un a une connaissance du français, mais aussi une connaissance de l'anglais, et aussi une connaissance d'une autre langue vernaculaire... Moi, si j'allais à l'étranger et puis je tombais dans la situation qu'on a actuellement, j'opterais pour l'anglais, car...
Mme Weil: Juste pour clarification, en 2003...
Le Président (M. Bernier): Mme la ministre.
**(10 heures)**Mme Weil: -- Oui. Merci, M. le Président -- c'est 21,8 % qui avaient connaissance seulement du français, et en 2010 c'est 26,6 %. Il y a une légère progression à ce niveau-là. Mais je pense que ce que je retiens, évidemment, et vous n'êtes pas le seul à le dire, et il y a des employeurs qui le disent, c'est aussi d'avoir une connaissance adaptée à l'emploi, la profession ou le métier qu'ils vont occuper. Et souvent ça nécessite, donc, une connaissance d'un lexique parfois technique mais approprié pour la formation que ces personnes ont.
Le Président (M. Bernier): M. Pagé.
M. Pagé (Michel): Bien, Mme la ministre, effectivement, j'abonde dans votre sens. Maintenant, j'ajouterai que déjà c'est une amélioration que les tests linguistiques administrés dans les pays d'origine et à la suite desquels les immigrants qui n'auraient pas une connaissance pourraient être invités à suivre des cours, dans leurs pays d'origine, de français. Donc, c'est une notion un peu différente de celle que j'ai lue.
Par contre, le bassin de recrutement, là, j'ai fait une suggestion il y a plus d'un an et demi, deux ans à votre prédécesseure. C'est qu'il y a une notion fortement différente, là, c'est que l'espace francophone, dans un sens large, comprend aussi des pays comme l'Italie et l'Espagne. Vous savez, le plus grand lycée français hors France se trouve à Madrid. Il y a 5 000 étudiants. En Espagne, par exemple, il y a plus que 2 millions de francophiles ou de locuteurs francophones. Or, il n'y a aucun recrutement fait auprès des... Et actuellement, dans la conjoncture actuelle difficile en Europe, il y a une foule de jeunes Espagnols francophiles, francophones ou qui seraient heureux d'apprendre -- parce que c'est une langue cousine du français -- d'apprendre le français. Donc, la suggestion que je vous fais, c'est que, dans les pays de langue romane, l'Italie, le Portugal, l'Espagne -- je pense surtout à l'Espagne parce que les chiffres sont éloquents à ce niveau-là -- il y a lieu d'établir une délégation pour faire un recrutement actif des francophiles, locuteurs francophones dans ces pays-là, ce qui ne se fait pas. Et la structure avec le ministère des Relations internationales ne semble pas se rejoindre.
Le Président (M. Bernier): Merci. Mme la ministre.
Mme Weil: Oui, M. le Président. Il y a le Bureau du Québec à Barcelone, justement, et c'est en effet, d'ailleurs, un bassin qui est très intéressant pour le Québec. Et d'ailleurs, à cause de la situation en Europe...
Bien, je vais vous amener sur une question, la question d'une orientation qui parle de bassins de provenance et d'un plafond de 30 % par grand bassin. Moi, je consulte les personnes parce qu'il n'y a pas d'adhésion à cette orientation, je vous dirais, globalement. Les gens nous disent d'aller plus sur les compétences, la grille de sélection et toutes les compétences qu'on recherche, métier, profession, scolarité, langue, etc. Et je pose la question aux intervenants qui viennent ici sur une orientation qui irait plus sur la diversité, c'est-à-dire de s'assurer qu'on fait de la prospection partout dans le monde, justement parce qu'il y a des gens, un peu partout dans le monde, qui étudient le français. J'ai découvert qu'au Japon il y a beaucoup, beaucoup de jeunes Japonais qui font des études en langue française. Et c'est un peu peut-être contre-intuitif, mais il y a, un peu partout dans le monde, des gens qui sont intéressés. En Irlande, j'ai appris qu'il y a des universités qui se spécialisent en culture française, des gens qui s'intéressent à ça. Bon, tout ça pour dire que l'orientation irait plus dans le sens de s'assurer que le ministère de l'Immigration continue ou, dans la répartition de nos effectifs et de nos efforts, on s'assure d'aller chercher ces personnes francophones un peu partout dans le monde, qui seraient attirées par le Québec. Que pensez-vous d'une orientation qui mettrait plus l'accent sur la diversité?
Le Président (M. Bernier): Je vous remercie. M. Pagé.
M. Pagé (Michel): ...on se rejoint, évidemment une ligne générale. Et d'ailleurs, ce type de suggestion là, je l'avais écrit dans le chapitre 3 de mon petit bouquin que j'avais publié l'année passée. Je suggérerais effectivement de faire un recrutement sélectif actif auprès de pays où on retrouve de larges bassins de locuteurs francophones compatibles avec les valeurs canadiennes et québécoises. Je pense à l'Espagne, 1 million, 2 millions de locuteurs... pas de locuteurs, de francophiles, l'Italie, même chose, Roumanie, Bulgarie, quoique là c'est en... encore une fois 1 million. Aux États-Unis, il y a 2 millions de francophones, et presque toutes les universités américaines donnent des cours, ont un département de français ou un département de littérature française. Donc, c'est ce qui n'a pas été fait dans le passé et puis où le bât blesse parce qu'il y a... L'espace francophone est vaste. Plusieurs pays, dont ceux que j'ai nommés, constituent des bassins de recrutement, surtout maintenant que des pays comme le Portugal, l'Espagne, la Roumanie, l'Italie ont des difficultés. Or, la population est en général bien instruite, à toutes choses égales. Donc, dans les prochaines années, c'est là qu'il faut chercher nos francophiles et francophones de façon directe, bien orchestrée, en relation avec le ministère des Relations internationales. Et nous nous rejoignons.
Sauf que je ferai valoir que c'est tellement déplorable, ce qui s'est passé depuis une dizaine d'années ou plus, que, là, bien, le temps presse, et puis il faut faire des choses concrètes. Je sais que vous êtes anglophone et je vois le coeur que vous mettez à la culture et à la langue française. D'ailleurs, la plupart des meilleurs défenseurs de la langue française au Canada sont anglophones, hein? Donc, je salue vos initiatives.
Le Président (M. Bernier): Merci. Mme la ministre.
Mme Weil: Dans mon cas, c'est parce que toute ma scolarité a été justement dans une institution française. J'ai même fait le bac, le baccalauréat français. Donc, j'ai une sensibilité particulière à l'importance de la langue, autant au niveau... beaucoup à cause de l'intégration. C'est la seule façon de bien intégrer une société et c'est vraiment par justice aussi et équité envers la personne qu'on va rechercher. Il faut que la personne soit équipée pour pouvoir jouer son rôle pleinement. Et c'est le fait que je suis capable de parler français que je suis ici, élue, etc.
Bien, juste sur cette question, j'ai des chiffres intéressants sur les locuteurs francophones, donc, à l'échelle planétaire: environ 200 millions de locuteurs du français, dont 70 millions de langue maternelle française. Donc, c'est vrai, il y a un bassin, mais je vous dirais que le MICC a quand même, le ministère de l'Immigration, depuis ces dernières années, toujours fait des efforts. Il y a des bureaux en Europe aussi. Mais, depuis l'Union européenne, ce qu'on a constaté, ça a été beaucoup plus difficile de séduire ces personnes pour qu'elles viennent ici, contrairement aux années cinquante. Maintenant, il y a une conjoncture économique, et on est bien conscient de ça. C'est pour ça que je trouve ça intéressant de vous entendre parler de ça. Il y en a quelques-uns qui l'ont souligné. Il y a une conjoncture qui ferait en sorte -- je crois aussi, je partage votre opinion -- qu'on redouble nos efforts pour aller chercher... et beaucoup les jeunes.
Je voulais savoir si vous étiez au courant de notre programme qui s'appelle le Programme de l'expérience québécoise? C'est des étudiants ou des travailleurs qualifiés qui viennent travailler ici, donc qui sont déjà en voie d'intégration, des étudiants qui sont dans des universités francophones ou anglophones, et on peut les mettre sur une voie rapide pour avoir le certificat de sélection du Québec. Et c'est un programme qui a été mis sur pied en 2010. Parce que, vous savez, il y a un nombre record d'étudiants qui viennent étudier en Amérique du Nord. Maintenant, le Canada est en compétition avec les États-Unis, le Québec est en compétition avec les autres provinces, donc il faut vraiment mettre beaucoup d'efforts pour attirer ces jeunes. Alors, personnellement, je crois que c'est une voie d'avenir intéressante parce qu'ils sont jeunes, on cherche des gens qui sont jeunes. Évidemment, ils doivent passer le test de français. Mais beaucoup sont déjà... Avec la Chambre de commerce de Montréal, ils ont des opportunités, des occasions de travail, d'ailleurs, avoir des emplois, qui leur permet déjà d'avancer leurs connaissances. Je voulais savoir si vous étiez au courant de ce programme?
Le Président (M. Bernier): M. Pagé.
M. Pagé (Michel): Oui, M. le Président. Mme la ministre, non, franchement, je ne connaissais pas les détails. J'avais lu l'entrefilet sans plus. Je reçois avec grand plaisir cette information-là. Elle rejoint une suggestion que j'avais faite il y a deux ans aussi à votre prédécesseure, parce que beaucoup peut être fait avec les ententes institutionnelles, dont universitaires, par ce canal-là. Voilà. Donc...
Mme Weil: Les gens aussi, d'ailleurs... Il y avait le...
Le Président (M. Bernier): ...M. Pagé avait un petit peu une difficulté pour entendre. Donc, si vous pouvez hausser la voix un petit peu, Mme la ministre, ça aiderait.
Mme Weil: Oui. L'Université du Québec à Rimouski était ici la semaine dernière, ils ont parlé de recrutement actif qu'ils font, parce qu'évidemment l'occupation du territoire, la régionalisation de l'immigration est importante. Ils réussissent bien à intégrer les immigrants parce que, c'est évident, tout le monde parle français, donc l'intégration se fait rapidement. Donc, les universités sont en recrutement actif.
Maintenant, on va aller sur... Est-ce qu'il me reste un peu de temps?
Le Président (M. Bernier): Oui, il vous reste encore environ quatre minutes.
**(10 h 10)**Mme Weil: On va aller sur les volumes et ce que les employeurs nous disent. Et, moi, je suis beaucoup sur le terrain, beaucoup en région aussi, et je vous dirais que cette question de pénurie de main-d'oeuvre, le chiffre de 740 000 emplois qui seront... donc des départs à la retraite et la croissance économique, qui fait qu'on prévoit 740 000 emplois à combler d'ici 2014, dont 15 % sera comblé... devrait être comblé par l'immigration, moi, les employeurs me disent qu'ils le sentent vraiment, que c'est imminent. Ils mettent beaucoup de pression sur nous. Ils nous disent: Il faut aller chercher ces travailleurs. Et souvent c'est des métiers très spécialisés. Et le ministère de l'Immigration a modifié sa grille de sélection, suite à beaucoup d'échanges, évidemment, avec Emploi-Québec et le milieu des employeurs, des entreprises, pour avoir... donc en 2009 et suite au rapport du Vérificateur général, qui nous a recommandé de modifier notre grille.
Donc, je vous dirais que la pression du milieu du développement économique, des entreprises, elle est réelle. Et j'ai des témoignages, des gens qui m'en parlent. Alors, les prévisions qu'on fait sont basées sur, oui, la démographie, mais c'est très à long terme, le vieillissement. Je vous dirais que c'est beaucoup les besoins de main-d'oeuvre. Et la sélection qu'on fait, c'est toujours, d'une part, des gens qui sont scolarisés, qui seraient aptes à avoir une mobilité transversale, et, dans d'autres cas, c'est vraiment des gens qui seraient capables de combler des besoins immédiats, alors avec une longue liste de métiers, de professions.
Alors, je vous fais ce constat-là. Je ne sais pas si vous avez un commentaire par rapport... Je sais que, vous, vous parlez d'avoir des volumes moindres, mais, moi, je vous dis que c'est basé sur des données que, nous, nous avons.
Le Président (M. Bernier): M. Pagé.
M. Pagé (Michel): Oui. Mme la ministre, voici, il y a deux notions très différentes. Il y a les demandes sectorielles et régionales, que je ne nie pas en aucune manière. Témiscamingue-Abitibi va témoigner après-midi. Je ne serais pas du tout étonné qu'ils demandent plus, hein? Mais le problème, c'est que la plupart des immigrants, au fond, sont à Montréal et le Grand Montréal, et n'ont pas les qualifications dont vous parlez, qui sont pointues, que pourraient requérir l'Abitibi-Témiscamingue, le secteur minier entre autres, ou la Côte-Nord, avec le Plan Nord éventuel, etc. Ceux qu'on devrait aller chercher dans les régions, et j'en ai discuté avec les gens du Témiscamingue, il y a une foule de jeunes qui sont des décrocheurs, et c'est un scandale. On est la province la pire après ou au même niveau que le Manitoba. Il faut raccrocher ces gens-là et mettre sur pied des plans d'intégration pour réintégrer ces jeunes-là, qui ont 17, 18, 19, 20, 23 ans, qu'on retrouve quelques années après sur l'assistance social, alors qu'ils sont forts et costauds. Je pense qu'il y a un effort, là, qu'il faut répéter. En Abitibi-Témiscamingue, j'ai fait une remarque supplémentaire. J'ai dit: Oui, mais les autochtones? Vous avez vu le film de Desjardins? C'est une honte. Ils peuvent travailler. C'est une question d'intégration.
Donc, voilà. Respectons les gens d'ici, dans un premier temps, les décrocheurs, les jeunes, qu'on peut orienter sur des métiers, quelque chose de concret. Quelqu'un qui décroche veut quelque chose de solide. Un métier, c'est solide. Plombier, des choses comme ça, c'est solide.
Le Président (M. Bernier): Merci. Merci, Mme la ministre. Nous allons donc poursuivre du côté de l'opposition officielle. M. le député de Bourget, la parole est à vous, pour un bloc d'environ 20 minutes.
M. Kotto: Merci, M. le Président. Je profite de l'occasion pour vous adresser un chaleureux bonjour ainsi qu'à mes collègues du gouvernement. Et bonjour, M. Pagé. Merci d'être là.
J'ai écouté attentivement votre présentation, pertinente à plusieurs égards. J'aimerais cependant revenir sur les solutions que vous étiez en train d'élaborer. Avec la projection des 740 000 emplois à combler d'ici 2015, voire même les 1,4 million d'ici 2019, ça serait quoi, de votre perspective, de votre point de vue, la solution, en dehors de l'immigration, point sur lequel on va revenir?
Le Président (M. Bernier): M. Pagé.
M. Pagé (Michel): Oui. Merci. Dans un premier temps, je souligne la contribution extraordinaire de l'immigration. J'ai été moi-même immigrant, en ce sens que j'aurais pu très bien vivre sur la Côte d'Ivoire, n'eût été des événements. Ceci dit, les 740 000 emplois qu'il manquerait pour les prochaines années sont des projections optimistes qui s'appuient sur une reprise économique. Or, je vous parie que, si la récession en W a lieu, la déflation aux États-Unis, l'incapacité du Portugal, de l'Espagne ou de l'Italie de payer leurs dettes, on n'aura plus une croissance, on aura une deuxième récession importante. Il faut moduler ça, et c'est ce que je lis. Je ne suis pas économiste, j'ai une formation générale, mais c'est ce que je lis dans les données. Il faut une certaine prudence, il faut regarder ça avec un certain grain de sel. Donc, Côte-Nord, Témiscamingue, Abitibi, si la reprise ne se fait pas ou tombe à plat, en déflation aux États-Unis, leurs demandes d'emploi ne vont pas se réaliser.
Donc, ce serait un peu sous fausse représentation que de faire venir tant de gens de l'immigration générale pour remplir des postes qui devraient avoir lieu et qui de toute façon nécessiteront une formation pointue, alors qu'on a des décrocheurs ici, dont, parmi les jeunes, les immigrants des 10 dernières années. C'est un scandale, ça aussi, de voir tant de gangs de rue à Montréal. Je ne vais plus dans certains quartiers de Montréal. Il faut réaliser ça, il faut le dire. Je n'aime pas avoir la langue de bois.
Donc, voilà pour les projections de 740 000. Il faut y aller avec une certaine prudence parce que ce sont des données optimistes. Or, la situation actuelle, en juin, maintenant, les dernières données, vous voyez ce qui s'est passé à la bourse, ce qui se passe peut-être aujourd'hui à la bourse, les dettes, il faut regarder ça avec un certain grain de sel. Et puis toujours les solutions, c'est raccrocher les décrocheurs, les assistés sociaux forts qui peuvent retrouver du travail, puis toujours sélectionner en fonction des compétences ou du potentiel d'apprentissage. Ça fera des immigrants, des Néo-Canadiens plus faciles à intégrer, qui seront plus heureux et qui ne tomberont pas dans certaines difficultés que nous relatent les journaux.
Le Président (M. Bernier): M. le député de Bourget.
M. Kotto: Il y a un point que vous avez soulevé tout à l'heure. Vous privilégiez une immigration qui aurait une distance culturelle étroite, disons, parce que facilement plus intégrable, et à cela vous ajoutiez une immigration qui partagerait les mêmes valeurs que le Québec et le Canada. C'est sur ce point-là que je veux vous questionner. Sur quelle base, disons, mettez-vous en lien les valeurs canadiennes et les valeurs québécoises, quand on parle, au Canada, de multiculturalisme et, au Québec, d'interculturalisme? Parce que, voyez-vous, une immigration hétéroclite, sans aucune forme de considération de proximité culturelle, de proximité au plan des valeurs non plus, cadre parfaitement avec le multiculturalisme, mais on voit l'expérience britannique, néerlandaise, allemande, constat d'échec au bout d'un certain nombre d'années. Au Canada anglais, il y a certaines voix qui commencent à interpeller les politiques relativement aux dérives potentielles, et c'est ce qui m'a amené à... en vous entendant parler, de comparer ces valeurs-là.
Le Président (M. Bernier): M. Pagé.
**(10 h 20)**M. Pagé (Michel): M. le député, c'est une question sensible, on en conviendra, et il s'agit d'un mot pour qu'il y ait dérapage, souvent, soit dans les journaux, en commission, en consultations. Je ne toucherai pas aux questions de multiculturalisme et de pluriculturalisme pour l'instant. C'est le deuxième thème dans le cahier, si on vous distribue ma contribution, et je l'ai fait d'une façon un peu directe, sans mâcher mes mots, en me référant à certaines analyses critiques du rapport Taylor-Bouchard, donc faites par M. Taylor, du pluriculturalisme, qui dit que ce n'est rien d'autre que du multi déguisé. Le multiculturalisme a été introduit au Canada par M. Trudeau pour mater les Canadiens français à travers le Canada. Le résultat, un des résultats... C'est formidable, en tant que... mais c'est une idéologie, c'est du futurisme. Lénine a fait la même chose. On a voulu faire la même chose en recréant un homme nouveau à partir de l'effondrement de l'homme ancien. C'est un peu ça qu'il y a dans le multi ou dans le pluriculturalisme de M. Bouchard. Et je n'en dirai pas plus parce que c'est un thème sensible. Mais le thème 2 porte sur ça, et je suis assez critique.
Donc, le multiculturalisme a eu un effet... Moi qui suis si sensible à la dualité pancanadienne, français-anglais, l'effet direct, c'est que ça a tué littéralement des communautés ou marginalisé des communautés canadiennes-françaises à travers tout le Canada, de l'Atlantique... hormis au Québec, bien sûr. Écoutez, en Ontario, en 1950, la population était de 7,9 %, 8 % de francophones. Par assimilation et puis par accroissement de la population par l'immigration, les francophones de l'Ontario ne sont plus que 4,1 %, 4 % en 2006. Et c'est la même chose partout, l'assimilation.
Donc, je lisais récemment, là... je voulais consulter le rapport économique en Colombie-Britannique, et puis -- j'en ai fait mention à l'ancien ministre Campbell, qui a eu la gentillesse de m'écrire pour s'excuser -- leurs rapports sont écrits en hindi et ne sont pas disponibles en français, en Colombie-Britannique. Voilà un effet sur la vitalité du français au Canada, ce qui fait que l'immigration ne peut pas se discuter en vase clos. Elle doit être discutée avec le fédéral, en leur faisant valoir que l'immigration doit être abaissée, parce que ce qu'ils font, c'est l'assimilation des Canadiens français à travers le restant du Canada. C'est ça que les chiffres nous donnent. C'est une dégringolade.
Donc, j'ai dépassé et à la fois esquivé votre réponse, mais je peux la préciser, si vous voulez. Mais c'est le cadre général que je vois.
Le Président (M. Bernier): M. le député de Bourget.
M. Kotto: J'ai bien saisi le fond de votre pensée. Merci beaucoup. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Bernier): Bien. Merci. Donc, merci, M. Pagé, de votre participation fort intéressante.
Nous allons donc suspendre nos travaux pour quelques instants, pour permettre au groupe suivant de prendre place. Merci.
(Suspension de la séance à 10 h 23)
(Reprise à 10 h 29)
Le Président (M. Bernier): Donc, à l'ordre, s'il vous plaît! Nous allons reprendre nos travaux. Nous souhaitons la bienvenue aux représentants de la Conférence régionale des élus de Montréal. Donc, Mme Manon Barbe, Mme Marie-Claire Dumas, M. Ahmed Benbouzid, bienvenue à la Commission des relations avec les citoyens. La façon de procéder, vous avez 15 minutes pour faire votre présentation. Par la suite suivront des échanges avec les parlementaires. J'aurai l'occasion de vous interpeller pour vous identifier, lorsque vous prenez la parole, de façon à faciliter l'enregistrement. Donc, merci. La parole est à vous.
Conférence régionale des élus de Montréal (CRE de Montréal)
Mme Barbe (Manon): Merci beaucoup, M. le Président. Un bonjour particulier à Mme la ministre. Alors, je suis accompagnée, comme M. le Président le disait, de Mme Marie-Claire Dumas, qui est directrice générale de la CRE de Montréal, et de M. Ahmed Benbouzid, directeur, Innovation sociale et Diversité à la CRE.
**(10 h 30)** C'est avec un grand plaisir que nous nous présentons devant vous ce matin pour vous faire part des positions de la CRE de Montréal concernant la planification du niveau d'immigration pour la période 2012-2015. Ces positions ont été adoptées par notre comité exécutif lors de sa séance du 27 mai dernier.
Au préalable, j'aimerais mentionner que la Conférence régionale des élus de Montréal réunit non seulement des élus, mais également des leaders socioéconomiques. Notre conseil d'administration de 146 membres -- vous avez bien compris, 146 membres -- et notre comité exécutif de 18 personnes sont composés aux deux tiers d'élus municipaux et au tiers de représentants de la société civile.
Assurément, la planification de l'immigration est un enjeu de taille pour le développement du Québec et de sa métropole, Montréal. Au demeurant, la CRE de Montréal estime que l'immigration, l'intégration et le métissage des cultures constituent des fondements majeurs du développement de notre région. Nous leur devons notre caractère cosmopolite et distinctif. Montréal étant le principal pôle d'attraction de l'immigration, notre Plan quinquennal de développement 2010-2015 intègre celle-ci comme axe fondateur de notre action et de notre stratégie de développement. L'immigration représente le moyen par excellence de nourrir notre diversité, qui est, et cela a été démontré par plusieurs études, notamment par le Conference Board du Canada, un facteur favorisant la créativité et l'innovation de nos entreprises et de nos institutions de recherche.
Avant d'aborder plus en détail les orientations soumises à la consultation, permettez-moi de vous souligner ce que nous considérons être les éléments les plus fondamentaux à retenir sur cette question des niveaux d'immigration. Tout d'abord, l'essor des grandes métropoles s'appuie sur une croissance démographique forte dans laquelle l'immigration joue un rôle de premier plan. Ensuite, il faut reconnaître que la diversité est une richesse. En plus de susciter une effervescence créatrice, elle est source d'ouverture au monde, elle facilite l'attraction et la rétention des meilleurs talents, de même que la diversification de nos marchés. Comme la Chambre de commerce du Montréal métropolitain, nous considérons qu'il est essentiel, pour l'essor de la métropole mais également du Québec, d'augmenter les taux d'immigration plutôt que de les réduire. Les entreprises font déjà face à des difficultés de recrutement. Un sondage récent de l'Ordre des conseillers en ressources humaines révèle que près de 60 % des conseillers en ressources humaines anticipent une intensification des efforts de recrutement. Nous considérons également, compte tenu de la forte concurrence internationale, qu'il est important de faire des efforts particuliers pour maintenir, sinon augmenter, la part de l'immigration économique.
Tout en étant favorable à des taux d'immigration plus élevés, la CRE doit aussi se faire l'écho des nombreuses voix, notamment celles de la ville de Montréal et de la Table de concertation des organismes au service des personnes réfugiées et immigrantes, qui sonnent plusieurs alarmes quant à l'adéquation des ressources consenties à l'intégration des personnes immigrantes. L'immigration est un choix économique et démographique. Pour maximiser les retombées d'un tel choix, il faut se donner les moyens d'une intégration socioéconomique rapide et durable des personnes immigrantes. En somme, pour la CRE de Montréal, l'immigration constitue un moteur de développement essentiel pour la région.
Bien entendu, nous croyons que cette immigration doit correspondre aux besoins du marché du travail. C'est pourquoi nous déployons beaucoup d'efforts pour faire de la diversité une réelle valeur ajoutée au développement de notre région. Ces efforts se traduisent notamment par la mise en oeuvre de notre Plan d'action régional en matière d'immigration et de relations interculturelles de Montréal, le PARMI, qui se décline en une trentaine de projets régionaux impliquant une cinquantaine de partenaires. Le PARMI est soutenu par une entente spécifique de régionalisation triennale que nous avons conclue avec le ministère de l'Immigration et des Communautés culturelles ainsi que 10 autres partenaires institutionnels. Il représente des investissements de 6 millions de dollars sur trois ans et permet la mise en oeuvre de plus d'une trentaine de projets dans notre région. Cet effort régional d'envergure mérite d'être poursuivi et renforcé pour les prochaines années.
Nous aimerions maintenant attirer votre attention sur notre analyse et nos recommandations concernant les orientations soumises à la consultation par Mme la ministre. Pour vous les présenter, je cède donc la parole maintenant à Mme Marie-Claire Dumas. Merci.
Le Président (M. Bernier): Mme Dumas, la parole est à vous.
Mme Dumas (Marie-Claire): Merci beaucoup. Merci, Mme Barbe. Merci, M. le Président. On a soumis bien sûr un mémoire, que vous avez et dans lequel on vous a soumis 14 recommandations qui portent sur les différentes orientations soumises. On ne vous présente pas, dans le mémoire ni dans la présentation que je vais faire... dans l'ordre des orientations du document de consultation, mais dans l'ordre logique dans lequel nous concevons l'intervention que nous voulons faire aujourd'hui, en commençant par la question des volumes d'immigration.
Le document de consultation nous propose de fixer une moyenne annuelle des admissions qui s'établisse à 50 000 personnes. Or, nous considérons que cela n'est pas suffisant et qu'il ne faut pas diminuer les efforts pour continuer à maintenir un niveau d'immigration que nous avons fixé minimalement à 55 000 personnes par année. Nous avons suivi les travaux de cette commission et avons entendu les interventions, notamment de la Chambre de commerce de Montréal métropolitain, qui a suggéré, devant cette commission, même 65 000 personnes par année. On est de cette école où on pense qu'il faut à la fois poursuivre les efforts d'une intégration réussie et à la fois maintenir un effort très fort du côté de l'attraction. La croissance démographique, la croissance économique, à Montréal tout au moins, sont liées intimement à la croissance de l'immigration et à la qualité de la sélection qui est faite, et donc nous encourageons le gouvernement à maintenir des objectifs élevés en termes d'attraction de l'immigration. Et nous souhaitons que cette immigration soit bien sûr, comme l'a indiqué Mme Barbe, une immigration très conforme et qui répond aux besoins du marché du travail.
Nous avons identifié, dans notre mémoire, des pistes pour le marché du travail montréalais, notamment autour des industries du savoir et des industries du tertiaire, donc d'avoir une immigration de travailleurs qualifiés qui corresponde à ces créneaux d'intervention de la métropole. Et on doit rappeler bien sûr la qualité des centres de recherche, des centres universitaires du domaine des technologies de l'information, qui sont tous des domaines où on veut compter sur l'immigration pour augmenter notre capacité de jouer notre rôle de métropole face à d'autres métropoles du monde, dans un marché international en compétition pour ces créneaux du savoir. Alors, on ne peut qu'encourager bien sûr le ministère dans sa défense de ses crédits auprès du Conseil du trésor, pour avoir des ressources adéquates pour maintenir des efforts d'attraction, de rétention et d'intégration durable en emploi des personnes qui immigrent chez nous.
La deuxième orientation que nous avons regardée, l'orientation 6, qui est de maintenir annuellement un minimum de 65 % de la part de l'immigration économique dans l'ensemble d'immigration. Nous souhaitons demeurer au niveau de 2009 et 2010, qui était à 70 %, et de ne pas se fixer des objectifs inférieurs à ceux qui ont déjà été atteints. Nous pensons notamment que l'immigration économique peut être très aidée par toute la question de la rétention des travailleurs temporaires, j'y reviendrai un petit peu plus tard, mais le bassin des étudiants internationaux et des travailleurs temporaires peut très facilement être des chemins qui nous facilitent la croissance de la part de l'immigration économique dans le volume des admissions.
**(10 h 40)** On a tenté dans le mémoire, on pourra y revenir aussi tantôt, en période de questions, si vous voulez, mais de faire un appel aussi sur la sélection des gens d'affaires. Nous avons, à la CRE de Montréal, le Projet entrepreneuriat Montréal, qui regroupe tous les intervenants en développement de l'entrepreneurship sur l'île de Montréal. Et nous avons collaboré et participé à la consultation du ministre Gignac sur la stratégie québécoise en entrepreneuriat, où il était évident, dans les diagnostics, que nous aurons bientôt une pénurie de relève entrepreneuriale, si ce n'est déjà fait. Et on calcule même un manque à gagner de 25 000 entrepreneurs d'ici 10 ans, ce qui n'est pas rien. D'ici 10 ans, on calcule que pas loin de 80 000 entrepreneurs prendront leur retraite. Or, les immigrants qui viennent au Québec pour racheter des entreprises, prendre la relève d'un certain nombre de PME, par exemple, sont assez minimes sur le volume, et nous croyons qu'il y a lieu de développer un réel chantier pour développer vraiment toute l'immigration d'entrepreneurs qui nous aideront à développer, sur le Québec, et à Montréal pour nous, la question de la relève entrepreneuriale. Donc, c'est un focus sur lequel on voulait attirer l'attention de cette commission.
Parlant d'intégration réussie, il faut, d'après nous, garder une lecture élargie de l'immigration et avoir des services adaptés non seulement aux requérants principaux qui arrivent sur le Québec, mais aussi à l'ensemble de la famille, des enfants, des conjoints qui sont là, et l'intégration réussie doit être celle de l'ensemble des membres de la famille qui se joignent à nous pour développer le Québec. Donc, on suggère de regarder à partir... de ne pas seulement regarder la seule adaptation des services d'accueil et d'intégration aux besoins des requérants principaux, mais aussi de regarder l'ensemble des besoins, et à cet effet-là il semble évident, pour nous, que l'ensemble du gouvernement du Québec est interpellé par la question de l'immigration. Ce n'est pas qu'un sujet ou qu'une préoccupation qui doit être celle du ministère de l'Immigration, mais elle concerne aussi la Condition féminine, l'Éducation et évidemment le Développement économique. Donc, l'ensemble des ministères sont interpellés par la question d'une intégration réussie du côté des immigrants et de leurs familles.
Nous avons ensuite abordé l'orientation 1, qui vise à porter progressivement à 50 % la proportion des requérants principaux de la catégorie des travailleurs qualifiés détenant une formation dans des champs de compétence correspondant à des besoins exprimés sur le marché du travail, une orientation avec laquelle, bien sûr, nous sommes en accord. Et nous savons, puisque nous travaillons étroitement avec le ministère, que ces chiffres sont en bonne voie d'être atteints et que les travaux vont bon chemin de ce côté-là.
Nous souhaitons qu'il y ait l'amélioration d'un processus de sélection de la catégorie des travailleurs qualifiés quant à la rigueur et la rapidité du traitement des dossiers. Nous insistons pour mettre en place un délai plus court de traitement des dossiers à tous les niveaux, pour assurer une bonne adéquation des besoins du marché du travail et des employeurs à la réalité des immigrants et à leurs compétences. On a estimé entre 18 mois et cinq ans les délais pour une arrivée sur le Québec, ce qui peut faire qu'avec la rapidité des changements économiques les besoins de main-d'oeuvre peuvent avoir considérablement bougé entre le moment de la demande d'immigration et l'arrivée sur le Québec. Et la durée du délai de traitement nous semble vraiment une question à considérer.
Une autre question qui préoccupe beaucoup les administrateurs de la conférence chez nous est celle de la reconnaissance des acquis et des compétences, qui semble maintenant avoir dépassé le stade de l'urgence mais bien vraiment une problématique très, très importante à regarder pour assurer une très bonne adéquation entre la grille de sélection et la réalité des emplois ici, au Québec.
Je passe les recommandations. On pourra revenir sur les autres orientations...
Le Président (M. Bernier): ...il vous reste environ une minute, madame.
Mme Dumas (Marie-Claire): Voilà. Donc, je voulais aller à une autre préoccupation que nous avons. C'est celle de l'immigration temporaire. Nous avons dépassé en 2009 les 60 000 personnes, et le document de consultation en fait bien état, qui arrivent sur le... qui sont au Québec avec des statuts temporaires. Il nous semble que c'est un bassin très riche, que c'est une réalité importante de la mobilité internationale. On calcule des millions de personnes qui sont en mobilité sur la planète, et, pour nous, il s'agit de mettre beaucoup d'efforts, autour de l'immigration temporaire, sur l'attraction et ensuite sur la rétention.
Nous menons des travaux, à la CRE de Montréal, avec le gouvernement du Québec, sur la question de l'attraction et de la rétention des étudiants internationaux. Nous faisons ça avec les universités. Nous pensons qu'on doit maintenant aussi regarder du côté des travailleurs temporaires, soutenir les PME dans leurs efforts de recrutement, poursuivre les efforts de rétention. Et, du côté des étudiants internationaux, on doit maintenir les efforts du côté des universités mais certainement ouvrir un champ très important du côté du collégial puisque nos besoins de main-d'oeuvre iront aussi du côté des métiers et des professions techniques.
Donc, je termine avec ces recommandations, donc, sur l'immigration temporaire, qui chez nous occupe une bonne partie, notamment avec Montréal International et le ministère. Et nous comptons poursuivre dans cette ligne, continuer les travaux qu'on fait du côté de Montréal International sur la rétention, la promotion de la résidence permanente auprès des travailleurs spécialisés temporaires. Et nous invitons donc le gouvernement à mettre aussi l'épaule à la roue avec nous sur ces chantiers à Montréal. Je vous remercie.
Le Président (M. Bernier): Merci, Mme Dumas. Merci de votre présentation. Nous allons donc débuter les échanges avec les parlementaires. Donc, nous allons commencer par la partie ministérielle. Mme la ministre.
Mme Weil: Oui. Bonjour. Alors, bienvenue. Je suis très contente de vous recevoir aujourd'hui, parce que, bon, j'ai eu l'occasion de rencontrer la CRE, j'ai fait beaucoup d'annonces avec la CRE, je pense qu'il y a une vision partagée importante avec l'acteur important qu'est la CRE.
Et je pense que ce serait intéressant, dans un premier... J'ai des questions spécifiques, mais on a signé une entente, une première entente, avec la CRE, de 6 millions, une entente triennale, en 2010, et il y a beaucoup d'initiatives que vous avez prises qui sont très intéressantes, comme Mentorat Montréal, Leadership Montréal. Et, moi, j'évoque ces programmes-là comme possiblement des projets intéressants pour d'autres régions parce que je pense qu'on partage le point de vue qu'il faut ouvrir tout le monde à la diversité. Il y a ce capital humain intéressant, mais il faut faire l'arrimage. On ira dans la sélection et le reste après, mais pourriez-vous rapidement expliquer peut-être certains de ces programmes que vous avez lancés tout récemment et peut-être les résultats que vous avez? Moi, j'ai entendu des témoignages dans le contexte de Mentorat Montréal, qui est intéressant, mais je pense que c'est important pour les gens de comprendre. Il y a beaucoup d'initiatives intéressantes actuellement en branle à Montréal.
Le Président (M. Bernier): Mme Barbe.
Mme Barbe (Manon): Oui, merci. Je vais demander à M. Benbouzid peut-être de nous donner un tableau rapide des programmes.
Le Président (M. Bernier): M. Benbouzid.
Mme Weil: Peut-être, oui, juste peut-être deux ou trois, les plus importants, parce qu'il y en a beaucoup.
M. Benbouzid (Ahmed): Alors, l'ensemble de nos projets s'inscrivent dans ce qu'on appelle le PARMI, le Plan d'action régional en matière d'immigration, qui est articulé... Et ça, ça a fait le consensus auprès d'une centaine de partenaires, suite à une consultation qu'on a eue à la demande du ministère en 2006. Et on travaille principalement sur trois axes: d'abord l'intégration durable en emploi mais également en entrepreneuriat. On travaille aussi sur la promotion de la diversité. Et on travaille évidemment pour pouvoir avoir des niveaux d'immigration qui répondent aux besoins de la communauté montréalaise.
Pour donner deux exemples de projets sur lesquels on travaille, qu'on a annoncés récemment, il y a le projet ALLIÉS Montréal, qui est un partenariat extrêmement intéressant avec les gens d'affaires. Il y a une vingtaine d'entreprises, des grandes entreprises mais également des PME dans les différents secteurs, qui sont partenaires dans ce projet-là. Nous travaillons ensemble avec ces entreprises. On a des tables de pratique, on a des échanges avec eux, on les a embarqués dans des projets, notamment dans le projet Mentorat Montréal. Donc, c'est un besoin qui a été identifié par les entreprises comme une action concrète dans laquelle ils aimeraient s'investir, et, nous, on les accompagne dans cette démarche-là.
Nous avons lancé ce projet il y a quelques semaines. C'est un projet où il y a déjà une dizaine d'entreprises qui sont partenaires. Il y a une dizaine d'organismes à Montréal également qui sont partenaires. Alors, nous, on joue, dans ce projet-là, le rôle d'un facilitateur entre les entreprises et entre les organismes qui font l'accueil et l'intégration des personnes immigrantes. Et c'est une stratégie régionale. Avant, il y avait des stratégies de mentorat mais qui sont isolées à Montréal. Nous, on arrive avec un projet d'envergure où on dote la région d'une stratégie qui met à contribution les entreprises, et ça, c'est extrêmement important pour nous. On travaille beaucoup, depuis plusieurs années, sur l'apport des entreprises dans l'intégration. Donc, on va vraiment travailler au niveau de l'ouverture des entreprises, au niveau de l'accompagnement, du développement des services et on travaille également dans les rencontres entre les décideurs publics et les entreprises pour l'adaptation des services. Donc, c'est un ensemble de travail qu'on fait, mais c'est quelque chose qui a été développé en concert avec les entreprises.
**(10 h 50)**Le Président (M. Bernier): Mme la ministre.
Mme Weil: Très bien. Là, je vais aller sur plusieurs questions, la sélection, je vais aller aussi sur la sensibilisation des entreprises à ces diversités et une question sur le PEQ, aussi, étudiant. Comment, selon vous, là... Parce que, nous, on a modifié la grille de sélection pour répondre beaucoup aux commentaires du Vérificateur général et aux employeurs, et, bon, pour être capables de vraiment cibler des métiers et des professions qui sont en demande. C'est un travail qui a été fait avec Emploi-Québec. Comment pourrions-nous mieux concilier les besoins des PME et nos activités de sélection? Parce qu'on a beaucoup... on a quelques mémoires qui vont très pointu là-dessus, des organismes qui ont beaucoup d'expertise là-dessus, qui nous demandent d'aller encore plus finement sur les besoins des PME et l'exercice de sélection.
Le Président (M. Bernier): M. Benbouzid.
M. Benbouzid (Ahmed): Le constat qu'on fait, quand on travaille avec des entreprises, les grandes entreprises, ils ont les moyens, ils sont bien outillés pour le recrutement, pour l'intégration, pour le développement des carrières des personnes issues de l'immigration. Les PME, où il y a un besoin réel, parce que la majorité des emplois sont créés par des PME, ils sont peut-être moins bien outillés pour ça. Une grande entreprise, elle a les moyens de faire une mission de recrutement à l'étranger, par exemple, mais une PME n'a pas ces moyens-là. Nous, on pense qu'il faut trouver des stratégies, des synergies entre les PME pour pouvoir se partager des ressources. Par exemple, on a développé un projet sur la rétention des travailleurs immigrants et on est passé par une mutuelle de PME. Donc, la mutuelle, ça permet de rejoindre plusieurs entreprises. Les PME, c'est difficile de les rejoindre une à une, mais je pense qu'il faut trouver des stratégies qui permettent d'avoir des synergies ensemble, et travailler avec eux leurs besoins, et se donner des moyens qu'ils peuvent se partager. Donc, les mutuelles, par exemple, c'est une issue qui peut être explorée.
Le Président (M. Bernier): Mme la ministre.
Mme Weil: L'autre question: Est-ce que vous sentez... Parce qu'on a développé aussi un outil de gestion de la diversité. Il y a ce projet aussi, dans le contexte de Montréal, de partage de ressources, d'ailleurs, une personne parmi quatre... C'est un projet pilote, quatre PME pour partager une ressource, pour la gestion de la diversité. Sentez-vous qu'avec la conjoncture économique actuelle et vraiment les entreprises qui disent... Ils sentent la pression, au niveau des besoins de main-d'oeuvre, et qu'il y a une pénurie qui est à leurs portes. Sentez-vous que la conjoncture, elle est favorable à plus d'ouverture? Parce que les gens nous disent que l'ouverture n'est pas nécessairement là. Est-ce que cette ouverture, ou manque d'ouverture, c'est parce qu'il n'y a justement pas eu d'arrimage, il n'y a pas eu assez de sensibilisation. Qu'en pensez-vous?
Le Président (M. Bernier): Mme Barbe? Mme Dumas?
Mme Barbe (Manon): Mme Dumas.
Le Président (M. Bernier): Mme Dumas, allez-y.
Mme Dumas (Marie-Claire): Oui. Écoutez, nous, on a le sentiment qu'on est dans un changement de paradigme. Il y a 10 ou 20 ans, on pouvait parler de ce problème d'ouverture. Nous, on travaille avec des entreprises qui voient l'immigration comme une solution d'affaires. C'est un besoin des entreprises. Ce n'est pas une question d'ouverture ou une question de charité, on n'est pas là-dedans. On est dans un besoin d'affaires. C'est une solution d'affaires, l'immigration, et ça correspond à un besoin des entreprises. Je pense que c'est ce qui est à la base du succès d'ALLIÉS, par ailleurs, puisque les entreprises ont soif de ressources pour les aider.
Une fois qu'on a exprimé ce besoin et qu'on a exprimé cette question d'ouverture, comme on pourrait l'appeler, il y a la réalité quotidienne, effectivement, de l'intégration, et là on a besoin, bien, du recrutement mais aussi de l'intégration, et là, de fait, les entreprises, Ahmed pourra compléter au besoin, mais ont besoin effectivement de se doter de services et de partage d'expertise pour bien faire les choses.
Je vais utiliser l'exemple de la CRE. Nous avons embauché un réceptionniste africain. Dans les premiers temps où... Et nous avons une politique très, très forte d'embauche dans la diversité, donc c'est cohérent avec nos valeurs. Et, dans les premiers temps où notre réceptionniste était à notre emploi, il ne regardait pas les gens qui rentraient, puisque culturellement c'était quelque chose qu'il... Donc, il ne nous saluait pas. On avait un réceptionniste qui ne saluait pas les gens. Et il a fallu mettre en place un système où notre collègue Mehdi a pris en charge l'acculturation, je dirais, de Roger.
Donc, il y a toutes sortes de choses qu'il faut mettre en place comme ça. Et dans une entreprise plus fermée, bien sûr, on aurait dit: Bien, il ne fait pas l'affaire, on le renvoie, bon, tout ça. Mais il faut le savoir qu'il y a des accompagnements, et des adaptions, et des ajustements chez le personnel aussi, et il faut être prêt à faire ça. Donc, des organisations comme ALLIÉS permettent d'exprimer ces choses-là, de trouver des trucs, de partager des expériences. Les mutuelles de formation donnent ces services-là. Mais je ne pense pas qu'on ait un problème d'ouverture. Au contraire, on est dans une volonté de le faire.
Le Président (M. Bernier): Mme la ministre.
Mme Weil: Très bien. Il me reste combien de minutes? Parce que j'ai plusieurs questions.
Le Président (M. Bernier): Oh! environ une dizaine de minutes.
Mme Weil: Ah! O.K. Parfait. Sur le Programme de l'expérience québécoise... Et je sais que vous partagez mon point de vue, notre point de vue, que c'est très prometteur. C'est des gens qui... Parce qu'on demande l'expérience québécoise. Ça, c'est la plainte numéro un que je reçois de gens qui ont été sélectionnés: Mais on nous demande toujours une expérience québécoise! Donc, ce Programme de l'expérience québécoise est très prometteur. C'est des gens qui ont déjà commencé leur intégration, ils ont un emploi, etc., les étudiants aussi, ils sont jeunes. Donc, au-delà du programme PEQ, est-ce que vous avez d'autres idées pour attirer? Est-ce qu'il y a d'autres programmes ou d'autres initiatives auxquelles on pourrait réfléchir pour capter... Le programme PEQ est tout récent, hein, c'est 2010. On a des chiffres quand même encourageants. Mais d'autres initiatives pour aller chercher cette clientèle, ce bassin.
Le Président (M. Bernier): M. Benbouzid.
M. Benbouzid (Ahmed): Oui. Tout d'abord, nous trouvons évidemment, à la CRE, que le programme PEQ, c'est une superbonne idée, qu'on aimerait qu'il prenne plus d'ampleur. C'est important. Il faut rejoindre la majorité des étudiants internationaux, il faut rejoindre la majorité des travailleurs temporaires par cette mesure-là. Je pense qu'il y a des bons résultats, mais il y a lieu d'augmenter le volume. C'est important. On parle de 60 000 personnes mobiles qui gravitent un petit peu au Québec. Est-ce qu'on peut capter un maximum de ces personnes-là? C'est très important.
On peut aussi... Nous, à la CRE, on a commencé à travailler au niveau d'étudiants internationaux. Notamment, on fait des visites d'entreprise, donc à la fin des formations, pour leur ouvrir le champ, pour leur donner les possibilités que le Québec leur offre. On fait la fête des étudiants internationaux au début de l'année. Donc, c'est important de développer un sentiment d'appartenance de ces étudiants-là par rapport à la société québécoise, qui va faire qu'à la fin de leurs formations ils vont choisir de s'établir au Québec.
On peut également, par exemple, élargir le mentorat aux étudiants. Donc, c'est important que les entreprises s'ouvrent. Et le mentor, c'est un ambassadeur dans l'entreprise. Donc, ça peut être une issue également qui peut être explorée dans ce sens-là et qui viendrait s'arrimer avec ce que fait déjà, par exemple, Mentorat Montréal.
Le Président (M. Bernier): Merci. Mme la ministre.
Mme Weil: Il y a aussi le programme avec la chambre de commerce, des stages pour les étudiants, des stages d'été, donc des emplois d'été qui leur permettent aussi déjà de s'acculturer. Peut-être aussi, si la langue... Il y en a qui connaissent le français. Question de peaufiner leurs connaissances, peut-être avoir un grand partenariat avec des entreprises qui seraient prêtes à accepter des étudiants. En tout cas, c'est des voies d'avenir. Je ne sais pas si vous aviez...
Le Président (M. Bernier): M. Benbouzid.
M. Benbouzid (Ahmed): Dans notre mémoire, on parle... Marie-Claire... et je pense qu'elle n'a pas mentionné dans... Mais, par exemple, on a identifié les étudiants anglophones. Il y a deux étudiants sur cinq qui arrivent au Québec et qui sont dans des établissements anglophones. Donc, nous, on préconise que c'est important de leur offrir un service de francisation. C'est un moyen de rétention et d'ouverture sur la société québécoise. Donc, ça peut être aussi... Donc, on a vraiment une recommandation là-dessus dans notre mémoire.
Le Président (M. Bernier): Merci. Mme la ministre.
Mme Weil: J'ai deux autres questions. J'ai le temps pour deux questions?
Le Président (M. Bernier): Oui, oui.
Mme Weil: Oui? Sur la question de l'entrepreneurship, comment stimuler... Vous avez parlé de l'importance de l'entrepreneurship. Il y a évidemment mon collègue M. Gignac qui a fait une consultation partout au Québec, qui va bientôt sortir avec un programme. Comment pensez-vous qu'on pourrait stimuler cette veine entrepreneuriat chez les nouveaux arrivants?
**(11 heures)**Le Président (M. Bernier): Mme Dumas? Mme Dumas, oui.
Mme Dumas (Marie-Claire): Oui, merci. Nous pensons qu'il faut sélectionner des entrepreneurs plus que le... On a moins visé de stimuler la fibre... Stimuler la fibre entrepreneuriale, c'est vrai de tous les citoyens et toutes les citoyennes du Québec. Nous pensons qu'il y a un effort sur la sélection, à l'étranger, de profils entrepreneuriaux.
Le Président (M. Bernier): Merci. Mme le ministre.
Mme Weil: Oui. D'ailleurs, au ministère de l'Immigration on est en train de revoir tout ce programme, justement.
Bon, je vais vous poser une question. Il y a une orientation -- vous avez fait un commentaire là-dessus -- telle que l'orientation est écrite dans le document de consultation, on parle de bassins et on parle de 30 %, de plafonner... Ça a créé beaucoup de commentaires, je dirais, critiques envers cette formulation. Évidemment, l'idée de cette formulation, c'est d'assurer d'une diversité, mais, moi, j'ai déjà publiquement dit que je cherche une autre formulation. Et j'aimerais vous entendre sur cette question de diversité. C'est-à-dire qu'on s'assure au gouvernement, au MICC, qu'on est toujours à la recherche, évidemment avec tous les autres critères importants, c'est-à-dire la formation, la langue, et tout, l'âge, scolarisation, mais qu'on aille un peu partout continuer à recruter dans tous les bassins du monde.
Comment vous verriez... Parce que l'idée que j'ai en tête, c'est que la diversité... Depuis quelques années, plusieurs recherches qui émanent beaucoup des États-Unis et du Canada anglais sur l'importance de la diversité comme un atout pour les entreprises -- et plus récemment, au Québec, on en parle aussi -- les entreprises qui disent que les équipes avec beaucoup de diversité -- donc on parle de plusieurs langues, plusieurs têtes de pont, plusieurs cultures -- sont plus créatives, mais aussi, dans un monde globalisé, ça peut servir de tête de pont, alors que Montréal est vraiment une ville avec beaucoup, d'ailleurs, d'entreprises avec des sièges sociaux... d'entreprises à l'international, sièges sociaux à Montréal. Comment vous voyez une orientation qui viendrait encourager cette diversité, mais évidemment au niveau de la sélection, mais comme une valeur aussi, une valeur ajoutée pour la société?
Le Président (M. Bernier): Mme Barbe? Mme Dumas? Mme Dumas.
Mme Dumas (Marie-Claire): Écoutez, on a indiqué, dans le mémoire, qu'on reconnaissait effectivement sous la formulation -- puis on a lu les tollés, on a lu effectivement votre mise au point récente -- on lisait de façon sous-jacente que la recherche était une recherche de diversité, effectivement. Et ce que vous dites par rapport aux entreprises, les recherches qu'on voit sur les entreprises, est aussi vrai des quartiers. Et je réfère notamment à de nombreuses recherches faites par Annick Germain sur les quartiers multiethniques de Montréal, ça remonte à quelques années, mais qui était assez parlantes, du point de vue des quartiers avec une très grande diversité, des quartiers très pacifiques, des quartiers très riches aussi, très effervescents. Donc, il y a un avantage certain à la diversité, aussi du point de vue de la cohabitation.
Donc, nous sommes d'accord, bien sûr, avec la diversité. Et je pense, Mme la ministre, que ce que vous avez dit sur les têtes de pont parle de soi. C'est-à-dire que, si on va dans plusieurs continents, on ouvre les possibilités d'aller chercher les meilleurs talents et on ouvre les possibilités de collaboration avec différents pays, différents endroits du monde et différentes cultures, donc on est gagnant, hein, c'est une richesse. Comment reformuler l'orientation? On n'est pas allés si loin.
Le Président (M. Bernier): Merci. Mme la ministre.
Mme Weil: Bon, on va aller sur une question évidemment très importante, c'est la question de la langue. Et ça se joue beaucoup à Montréal. Donc, nous, on propose de garder majoritaire le nombre de parlants français et on... une nouvelle orientation qui voudrait s'assurer, évidemment, aller dans le sens de s'assurer que les gens aient une meilleure maîtrise de la langue. Vous êtes en accord, je pense, avec ces deux orientations. Il y a des commentaires, des gens qui nous disent... des employeurs aussi, la Chambre de commerce, qui est venue nous parler aussi de cette question de l'anglais qui est toujours là aussi. Donc, il y a un constat, pas la présence de l'anglais à Montréal, mais que souvent on demande -- c'est des immigrants qui disent ça -- on demande une connaissance aussi de l'anglais. Mais évidemment le message que, nous, on lance, comme gouvernement, c'est que c'est le français qui est la langue commune. Donc, on ne sait pas trop... pour l'instant, on garde nos orientations dans ce sens-là. Donc, sur la question de la maîtrise de la langue, et maîtrise de la langue aussi dans le sens que, pour le métier ou la profession, que la langue et la connaissance de la terminologie et de l'éthique, etc., soient bien adaptées, avez-vous des commentaires sur cette question-là?
Le Président (M. Bernier): Mme Dumas? M. Benbouzid, oui.
M. Benbouzid (Ahmed): C'est sûr que, pour nous, les compétences linguistiques, elles font partie de la clé du succès de l'intégration. Il y a les compétences linguistiques et les compétences professionnelles. Ça fait partie, grosso modo, des conditions sine qua non à une intégration réussie.
C'est sûr qu'à travers les échanges qu'on avec les partenaires ALLIÉS Montréal... On a fait des «focus groups» au début du projet, et c'est vrai que les entreprises parfois expriment le besoin de dire qu'il y a certaines professions qui demandent que la personne ait un anglais fonctionnel aussi. Donc, l'anglais, ça peut être parfois... ça peut faire partie des compétences professionnelles de la personne au même titre, par exemple, que les outils informatiques, ou la technologie, ou tel ou tel outil de travail. Donc, c'est probablement... l'anglais peut être considéré comme une compétence professionnelle qui peut être demandée par certaines professions, et là ça fait partie vraiment des outils que la personne puisse avoir pour occuper des postes.
Le Président (M. Bernier): Merci, Mme la ministre. Nous allons donc passer du côté de l'opposition officielle. M. le député de Bourget.
M. Kotto: Merci, M. le Président. Bonjour, mesdames messieurs.
Une question plus générale: Est-ce que, de votre perspective des choses, ceux qui ont en charge la gestion de l'État ne sont pas... ne feraient pas preuve de prudence, dans les circonstances actuelles, de prendre en compte ce que pense, ce que vit la population relativement à l'immigration?
Le Président (M. Bernier): Qui répond? Mme Dumas? Mme Barbe?
Une voix: Je ne suis pas sûre d'avoir bien saisi la question.
Le Président (M. Bernier): Bien, M. le député, vous pouvez peut-être reformuler.
M. Kotto: Je répète ma question. Je disais: De votre perspective des choses, dans le cadre d'une étude comme celle-ci, est-ce qu'il n'est pas avisé que celles et ceux qui ont en charge les affaires de l'État prennent davantage en compte la lecture que la population fait de l'immigration? Parce que jusqu'à présent on a différentes personnes, organismes, organisations qui sont venues témoigner, mais on n'a pas... on est loin de prendre le pouls de la population relativement à ce dossier.
Le Président (M. Bernier): Mme Barbe.
Mme Barbe (Manon): Est-ce qu'on doit comprendre, par votre question, que le dossier de l'immigration... On parle évidemment de l'intégration de l'immigration dans les milieux de travail, dans l'économie de la province de Québec, de la ville de Montréal, etc. Est-ce qu'on doit comprendre que la... C'est parce que j'ai de la difficulté à comprendre la... Pour vous, la définition de l'immigration pour la population en général, est-ce que c'est la définition d'un immigrant ou son rôle dans la société québécoise? Est-ce que c'est son rôle que vous voulez qu'on prenne en compte, la position du citoyen régulier, ordinaire sur le rôle d'un immigrant, ou c'est qui, un immigrant?
Le Président (M. Bernier): M. le député.
M. Kotto: Non, je suis dans la perception de l'immigration...
Mme Barbe (Manon): La perception de l'immigration en général.
M. Kotto: ...qui est un enjeu dans les sociétés occidentales en général, pas seulement au Québec. Vu ce que ça engage comme débat dans la société, au plan de l'intégration, au plan du français, au plan des valeurs, est-ce qu'il n'est pas sage, de la part du gouvernement, de se pencher davantage sur ce qui émane, comme posture, de la population, pour aller de l'avant relativement à une étude comme celle-ci?
Le Président (M. Bernier): Mme Dumas.
**(11 h 10)**Mme Dumas (Marie-Claire): Je pense que, par exemple, un exercice de consultation publique serait peut-être un peu trop... ce serait un peu lourd, comme processus, à toutes les fois où on a à refaire un exercice de planification de l'immigration. Pour ma part, j'ai le sentiment qu'on a beaucoup entendu la population, au fil des dernières années, notamment autour, bien sûr, de la commission Bouchard-Taylor, et tout ça, et je sentais ici une certaine prudence, effectivement, qui me semblait peut-être liée à cette conjoncture-là. Nous croyons qu'une large partie de la population est très positive face à l'immigration, et c'est pourquoi nous portons la voix, nous osons porter la voix d'une augmentation, parce que nous pensons que, dans la population de notre région, il y a un large profil de personnes très positives. Et, comme je le disais tantôt, du côté des entreprises, si je prends ce segment-là des gens d'affaires, on est sur un besoin, non seulement un souhait. Donc, ce serait, pour la CRE de Montréal, la position que nous avons adoptée.
Le Président (M. Bernier): Merci. M. le député de Bourget.
M. Kotto: Enfin, je vous pose la question parce que vous n'êtes probablement pas... Et je fais l'avocat du diable, je suis immigrant moi-même. Mais ce n'est pas pour autant que je passerais sous silence un certain nombre de questions pertinentes relativement à la gestion de ce dossier. Depuis des années déjà, la perception de l'immigration en Occident aujourd'hui... Et je ne sais pas si vous êtes au courant de ce sondage qui a été réalisé par Global Advisor pour le compte d'IPSOS, qui est une société de sondage française. À l'international, l'immigration est très mal perçue, probablement à cause des problèmes économiques, fondamentalement, à cause des problèmes de valeurs aussi.
C'est une chose, l'immigration, mais le plus important, c'est l'intégration. Et c'est à ce niveau-là qu'on a, disons, énormément de défis à relever, à partir du moment où cette immigration est mal planifiée, quand elle n'est pas synchrone avec les moyens, avec la capacité d'accueillir. L'immigration en soi peut s'articuler de façon ponctuelle, mais l'intégration, c'est un continuum. On est, dans la réalité québécoise, montréalaise aussi, dans un contexte où on remarque un nombre important de nos concitoyennes et concitoyens issus du Maghreb qui se retrouvent, pour un nombre substantiel d'entre eux, au chômage, et, plus bas, nos concitoyennes et concitoyens issus de l'Afrique subsaharienne qui suivent derrière. C'est des pourcentages très importants.
Et j'en ai rencontré beaucoup. J'ai siégé au Parlement canadien, à l'époque, ça défilait à mon bureau très souvent. Et, quand on échange avec ces personnes-là, qui pour la plupart ont des compétences, ont des diplômes, sont bardés de diplômes et qui sont contraints d'accepter des emplois qui sont en deçà de leurs aptitudes, de leurs capacités, de leurs compétences, et qu'on voit, derrière, la détresse, qu'on voit, derrière, des drames familiaux, des ruptures, il y a lieu de se poser la question en amont: Posons-nous des gestes cohérents quand nous planifions? Posons-nous des gestes cohérents quand nous sélectionnons? Parce que, si oui, pourquoi tout ce nombre se retrouve-t-il en marge de l'emploi? Ce sont des individus qui comme vous, comme moi ont des rêves, et, quand ces rêves sont déçus, c'est une catastrophe pour eux.
Je vous envoie cette question, parce que jusqu'à présent on débat, on échange ici, on n'a pas un bilan chiffré, on n'a pas un suivi longitudinal de l'immigration, dans le cadre de l'intégration dans l'emploi, pour nous permettre d'initier ou de projeter des pourcentages ou des nombres par anticipation relativement à une planification. On n'a pas un recul rationnel, factuel qui nous permette de dire: On est partis de là, on peut aller là, on est partis de là, ça a donné tel résultat. On n'a rien là-dessus. Pour arriver à de telles conclusions, ne faut-il pas avoir des données rationnelles, des données palpables, ce qui nous manque dans les échanges, dans les débats, dans le débat actuel?
Ça a une conséquence, quelque part, parce que, pour revenir à la population de laquelle nous sommes déconnectés, en tant qu'élus, parce qu'on ne l'écoute pas, le simple fait de ressentir, de voir qu'il y a, disons, un peu de laisser-aller -- je ne fais pas de procès d'intention -- à ce niveau-là grandit encore davantage son rejet de l'immigration. La perception, c'est qu'il n'y a pas d'encadrement, en somme, on y va au pif. On parle d'Emploi-Québec qui identifie les métiers en demande, mais est-ce qu'il y a une définition plus fine de ces métiers? Est-ce que ces entreprises, entre guillemets, qui sentent la pression d'une carence à venir de la main-d'oeuvre sont identifiables? Est-ce qu'on peut les afficher quelque part pour mailler les possibilités d'emploi avec les demandes en immigration? Tout ça n'est pas clair. Alors, c'est ce sentiment -- c'est un exemple -- qui vient quelque part motiver des avis, des commentaires comme ceux qu'on a entendus ce matin, à l'effet que c'est de la fiction, ces 740 000 emplois à combler d'ici 2015 ou ce 1,4 million à combler en 2019, c'est virtuel, ce n'est pas concret, voyez-vous? Et je ne sais pas si vous avez pris connaissance de cet essai de Dubreuil et Marois sur l'immigration et ses impacts pseudopositifs. Ça aussi, c'est un élément qui vient alimenter ce dossier de manière négative.
Alors, c'est ça, ma question: D'une part, le gouvernement ne devrait-il pas soit apporter des éléments tangibles de référence pour clarifier ses orientations, ses perspectives afin d'évacuer des malentendus... Parce que c'est de ces malentendus que naissent les tensions, c'est de ces malentendus que naissent la stigmatisation, c'est de ces malentendus que naissent la marginalisation. C'est une question commentaire, mais j'aimerais vous entendre là-dessus.
Le Président (M. Bernier): M. Benbouzid? Mme Dumas? Mme Dumas.
**(11 h 20)**Mme Dumas (Marie-Claire): Effectivement, une question à plusieurs volets. Je dirais, pour la partie de la perception: C'est une des raisons pour lesquelles, à la CRE de Montréal, nous avons pris, dans les... un des trois objectifs du PARMI, celui de valoriser la diversité, parce qu'il y a beaucoup d'histoires à succès, il y a beaucoup de contributions de personnes immigrantes à la société québécoise qui ne datent pas d'hier, et il y en a de très nombreuses actuelles qu'on connaît peu. Et, de toujours être en discours dominant, il y a des problèmes. Il y a des problèmes réels. Vous avez nommé la question des personnes qui viennent du Maghreb, puis après Ahmed peut parler un peu des travaux qu'on fait autour de la population maghrébine. Mais, cette question de la perception, il faut aussi faire contre-discours à ce discours du problème. C'est l'option que nous avons prise, à la CRE, de dire: Il y a beaucoup d'apports positifs de l'immigration. Et, dans le cadre d'ALLIÉS Montréal, nous avons fait une collaboration avec Radio-Canada International et le journal Montréal Métro pour faire des portraits de personnes qui ont des apports très, très positifs et qui ont des histoires de succès dans leurs parcours migratoires. Il y en aurait des milliers, d'histoires à raconter comme ça.
Un autre programme dont on n'a pas parlé encore, mais j'aimerais en dire un petit mot rapide, c'est Leadership Montréal. C'est-à-dire qu'à travers Leadership Montréal nous favorisons l'arrivée, sur des conseils d'administration et des lieux décisionnels, de profils plus variés, et là on étend: les femmes, les jeunes, les personnes immigrantes de différentes communautés, donc de diversifier le profil des conseils d'administration. Et, quand c'était facile... Avec les femmes, par exemple, il y avait des bassins de candidates qui existaient, il y avait des listes de femmes qui avaient été diplômées de différentes écoles. Quand on est arrivés du côté des profils de l'immigration, et on y allait vraiment dans nos pages jaunes, ce n'était pas recensé, et ça a été un travail titanesque, dans la dernière année, qui a été fait, dans l'équipe de Leadership, chez nous, de repérer les gens, de repérer les organisations à travers lesquelles on peut repérer vraiment des leaders très compétents dans la communauté et donc de faire aussi place, dans les lieux décisionnels, à une diversité. Je me souviens de la première soirée réseautage, où, moi qui fréquente le domaine de la diversité depuis bientôt 12 ans, j'étais tombée en bas de ma chaise. Je veux dire, la qualité des profils et des C.V. qu'il y avait dans cette salle-là était phénoménale. Mais on ne le dit pas, on ne le connaît pas, les gens ne sont pas dans les réseaux.
Donc, c'est une contribution qu'il faut faire, parce que ça enrichit nos lieux de décision, parce que ça enrichit notre société, mais aussi parce que ça modifie la perception qu'on a, et vous le dites tout à fait éloquemment, cette perception qu'on a que c'est un problème et que ce n'est qu'un problème. Mais ce n'est pas qu'un... Il y a des problèmes, mais il y a beaucoup de succès, il y a beaucoup de richesse à cette diversité. Donc, nous essayons humblement de faire le contre-discours à ça.
Vous posez la question aussi des services qui sont offerts. Nous constatons qu'il y en a beaucoup, en fait, tant dans les organismes communautaires que dans différents... Vous avez mentionné Emploi-Québec, le ministère. Il y a beaucoup de services. Nous avons, nous, eu l'impression qu'on avait beaucoup de données de façon spécifique, c'est-à-dire... Moi, je partage votre point de vue sur la... Il y a quelque chose qui se passe entre la sélection et le fait que les gens... Et la population maghrébine en est un bon exemple: fort diplômée, pas d'emploi. Il y a vraiment un problème. Et je pense que ça fait partie des travaux qu'on a en chantier, en tout cas à travers le PARMI, avec le ministère aussi, pour essayer d'être très spécifiques sur nommer le problème. Qui a des problèmes? Pourquoi? Et qu'est-ce que... Et là-dessus on a quand même beaucoup de données sur lesquelles s'appuyer.
Maintenant, comment on y répond? Je demanderais à Ahmed, par rapport à ce qui se fait sur l'adaptation des compétences dans un des projets du PARMI, juste pour compléter un peu. On essaie d'y aller de façon spécifique et non pas de façon globale, de regarder très, très spécifiquement des cohortes. Notamment avec les femmes immigrantes en entrepreneuriat, on fait beaucoup de choses aussi. Donc, essayer d'aller pointu sur des populations très, très précises. On sait que les femmes immigrantes isolées viennent comme conjointes. On fait du travail d'intégration des requérants principaux, les femmes restent derrière, ne peuvent plus avoir accès aux programmes de francisation. Donc, nous, on a ciblé cette population-là comme étant un morceau, là, qu'il faut travailler. Et peut-être qu'ici M. Benbouzid peut compléter.
Le Président (M. Bernier): M. Benbouzid.
M. Benbouzid (Ahmed): Oui. Comme vous savez, les obstacles à l'intégration sont multifactoriels, donc il y a différentes causes, différentes origines. Ça peut être au niveau de la langue, ça peut être au niveau de la non-reconnaissance des acquis et compétences, ça peut être uniquement un manque de réseaux professionnels. Donc, nous, par rapport à la communauté maghrébine, évidemment on partage le constat qu'il y a un taux de chômage élevé, évidemment.
À la CRE -- et ça, ça fait partie aussi du partenariat qu'on a avec le ministère -- on s'intéresse à la question de l'adaptation des compétences, parce qu'une personne qui peut avoir une formation dans un domaine x, dans un pays Y, bien, quand il arrive au Québec, il a des compétences génériques mais qui sont moins bien adaptées, par exemple, aux normes au Québec. Moi, je donne toujours l'exemple de la secrétaire qui est formée en Tunisie, qui a toutes les compétences et toutes les habiletés d'une secrétaire, mais, quand elle arrive ici, quand on lui demande de rédiger une lettre, la disposition n'est pas la même. Les salutations ne sont pas les mêmes, la signature, elle va la mettre en bas à droite, etc. Mais elle a toutes les habiletés d'une bonne secrétaire.
Donc, c'est important, je pense, de développer des passerelles efficaces, très ciblées, qui visent l'adaptation des compétences, et amener ces gens-là à faire un parcours rapide, efficace, ciblé, en lien avec les entreprises. On part des besoins des entreprises et on regarde dans quels domaines il y a un manque de besoins, où on va chercher des groupes de personnes et leur faire un parcours rapide, mieux adapté. Et c'est ce que nous sommes en train de faire à travers un projet pilote avec le cégep Maisonneuve et avec une grappe d'entreprises. Nous croyons que cette approche-là va répondre à ce besoin spécifique et, dans la mesure où il y aura des résultats positifs, évidemment, nous souhaitons élargir ce projet-là à l'échelle de la région.
Donc, les personnes maghrébines, elles étaient sélectionnées... Il y en a qui étaient là depuis plusieurs années. Il y en a qui sont arrivés dans un contexte de récession, qui ont pris des jobs qui ne correspondent pas à leurs compétences à l'époque, parce qu'ils étaient en récession, qui ont continué à faire ça. Donc, il y en a, par exemple, qui sont formés en informatique, mais l'informatique évolue aussi, donc c'est important de réactualiser leurs compétences. Mais il y a moyen, au lieu de dire à la personne: Tu vas retourner à l'université à partir de zéro, de dire: Il y a des acquis qui sont importants, mais il y a une part d'adaptation et de formation manquante. Et je pense que... En tout cas, à la CRE, c'est ça, notre stratégie par rapport à apporter une solution par rapport aux compétences maghrébines, qui sont un peu... qui ne sont pas mises à contribution pour le développement de Montréal.
Le Président (M. Bernier): Merci. Merci de votre contribution. Donc, Mme Barbe, Mme Dumas, M. Benbouzid, merci de votre présentation, merci de vos réponses.
Nous allons donc suspendre quelques instants nos travaux pour permettre à Accès Accueil Action Basses-Laurentides de prendre place. Merci.
(Suspension de la séance à 11 h 28)
(Reprise à 11 h 31)
Le Président (M. Bernier): À l'ordre, s'il vous plaît. Nous allons donc reprendre nos travaux dans quelques instants. Je vais attendre la caméra. Merci. Donc, nous reprenons nos travaux. Nous avons le plaisir de recevoir Accès Accueil Action Basses-Laurentides, connu sous l'abréviation ABL. Donc, M. Alain Margineau et M. Claude Girard, je vous souhaite la bienvenue. Vous avez une période de 15 minutes pour faire votre présentation. Donc, c'est M. Margineau qui fait la présentation? La parole est à vous, M. Margineau. Allez-y.
ABL Accès Accueil Action Basses-Laurentides
M. Marginean (Alain): J'irais juste dans un premier mot pour dire: C'est Marginean...
Le Président (M. Bernier): Marginean? Excusez-moi.
M. Marginean (Alain): ...n-e-a-n, comme Jean, e-a-n. Mais c'est un peu marginal, comme nom de famille, donc souvent on fait l'erreur.
Le Président (M. Bernier): Merci.
M. Marginean (Alain): L'origine, elle est roumaine, donc latine.
M. le Président, MM., Mmes les députés, merci de nous accueillir. On se demandait, jusqu'à la toute dernière minute, si on allait venir, parce qu'on a eu à traverser quatre ou cinq chantiers pour nous rendre à notre chantier, et puis même notre troisième personne est restée avec la voiture. Donc, on est très contents, très contents d'être arrivés à quelques minutes d'avis. Vous allez nous excuser si on a un peu cette nervosité, là, de la conduite des derniers milles en faisant attention aux policiers.
Le Président (M. Bernier): Allez-y, M. Marginean. Il n'y a pas de problème, on vous écoute.
M. Marginean (Alain): ...donc je vais directement au sujet. Je suis président d'ABL Basses-Laurentides, comme bénévole. Je suis nouveau, jeune retraité. J'étais directeur de la formation continue au cégep Lionel-Groulx, à Sainte-Thérèse, et nous avons créé un organisme concernant l'accueil et la promotion, finalement, de la diversité. Et c'est un peu dans ce cadre-là qu'on vient vous présenter, à une troisième reprise, notre mémoire.
Je suis accompagné de M. CLaude Girard, qui agit comme directeur de notre organisme. M. Girard est commissaire à la commission scolaire Seigneurie-des-Mille-Îles. Je dois vous dire aussi, et je pense que c'est important de le souligner: Depuis un mois, donc après le dépôt de notre mémoire, personnellement j'ai accepté un mandat à durée limitée pour le député de Groulx, M. René Gauvreau, pour lequel j'agis comme attaché politique. Mais l'ensemble du mémoire qu'on vous présente aujourd'hui, finalement, n'est pas associé d'aucune façon... donc c'est au niveau des organismes du milieu. Je tenais à faire cette précision.
Je vais être assez bref. Trois éléments à vous présenter: un peu ce qu'est ABL, d'une part, notre région et les objets du mémoire qu'on vous a présenté.
Une voix: ...
M. Marginean (Alain): Ça va?
Le Président (M. Bernier): Allez-y, monsieur.
M. Marginean (Alain): Ça va? Vous m'entendez?
Donc, ABL est tout simplement une table de concertation, une table de concertation qui a été mise en place par le cégep, la commission scolaire, les deux CSSS, Thérèse-De Blainville et Saint-Eustache, et les trois CLD, Saint-Eustache, Mirabel et Deux-Montagnes. Donc, c'est une table de concertation des partenaires qui existe déjà depuis une douzaine d'années et qui visait à stimuler à la fois la connaissance de la région et l'accueil et l'intégration éventuelle de nouveaux arrivants.
Le moteur, et le déclenchement, a été, pour certains d'entre nous à l'époque, il y a plus de 10 ans finalement, une... On avait assisté à une présentation du ministère de l'Immigration qui présentait chacune des régions, dont la région des Laurentides, et on présentait la région des Laurentides comme une région bucolique où il faisait bon vivre, où on voyait des gens pêcher, les montagnes, et tout ça. Et ça nous avait un peu offusqués en disant que les Laurentides, c'étaient aussi les Basses-Laurentides, c'était la ceinture nord de Montréal, c'était la moitié de la population, 250 000 de population environ, c'était une région qui était une sous-région inexistante mais qui était reliée à Montréal par deux métros de surface, pour ne pas dire deux trains de banlieue, le train de Saint-Eustache et le train de Sainte-Thérèse, c'était une région qui était aussi en lien avec deux autoroutes, la 13 et la 15, et qui faisait partie aussi de la CMM, et donc, finalement, que nous avions à la fois un pied dans le Montréal métropolitain et un pied dans la région des Laurentides et que, quant à nous, la constellation des 18 municipalités -- vous me corrigerez -- 17 ou 18 municipalités qui se situent entre Laval et Saint-Jérôme avait une existence propre et une dynamique particulière, une première dynamique étant finalement une homogénéité particulière au Québec, qu'on ne retrouve pas non plus ailleurs, où le taux de Québécois d'origine est à son maximum.
Vous vous rappelez que le cégep Lionel-Groulx était le collège, au Québec, qui avait une homogénéité la plus grande au niveau de sa clientèle adulte, l'ensemble de sa clientèle, plus qu'on retrouve dans le Bas-du-Fleuve ou en Gaspésie, et autres. La mobilité des personnes, la mobilité de la main-d'oeuvre, faisait finalement que la région des Basses-Laurentides n'était pas au diapason d'un Québec contemporain, et on le voyait par nos étudiants, qui aimaient... qui se sentaient quasiment dans un autre pays, en regard, finalement, à ce qui se passait à Laval ou même à Montréal. C'est assez cocasse, pour les gens qui habitent les Basses-Laurentides, d'aller juste au centre d'achats, au Carrefour Laval, pour s'apercevoir, finalement, qu'on est comme dans un autre monde.
Donc, l'objectif des partenaires dont je vous ai parlé tantôt était à la fois d'amener les décideurs locaux, les collèges, les villes, les institutions, à s'ouvrir, à faire de la promotion pour accueillir des nouveaux arrivants, non pas en termes de besoins, parce que les besoins de main-d'oeuvre et... Tous les indicateurs sont positifs, hein, dans la région des Basses-Laurentides, c'est le plus haut taux de croissance, de scolarité, et tout ce qu'on veut. Donc, c'était pour amener une certaine diversité et amener finalement, au niveau des jeunes de notre région, finalement de vivre ce nouveau Québec contemporain.
Donc, à la fois au niveau, finalement, de stimuler l'accueil... Et de stimuler l'accueil, aussi, c'est au niveau de l'intégration des personnels qui sont de minorités visibles et ethniques, donc leur faire une place, parce que la facilité finalement fait que les gens ne sont pas nécessairement portés, d'une part... et faire connaître, dans un deuxième volet, la sous-région des Basses-Laurentides, qui n'est pas la région des Laurentides, et donc tenter d'y trouver une place importante, le troisième volet étant de donner un support concret aux nouveaux arrivants. Comme la région est assez autosuffisante, ou la sous-région est assez autosuffisante, le geste n'est pas automatique à aller porter ou aller chercher de nouvelles clientèles.
Les efforts qui ont été faits l'ont été en 1999, déjà, où le collège Lionel-Groulx était initiateur, avec deux ou trois autres établissements, d'un projet qui était à l'accueil de nouveaux arrivants dans des programmes de francisation, alors que les COFI existaient encore, hein? Avant les modifications, là, on avait été... Parce qu'on se disait: À Lionel-Groulx, avec 5 000 étudiants francophones, on est capable... on garantit qu'en l'espace de 15 semaines toute personne qui vient chez nous va parler français, va savoir qui est Lionel Groulx, et finalement on risque peut-être de l'attirer à rester dans les Basses-Laurentides. Donc, on a été de ces premières initiatives au niveau, finalement, de l'intégration au niveau de la francisation, mais rapidement ces expériences n'ont pas eu de suite, compte tenu de la problématique structurelle qu'on peut vivre, au niveau de la périphérie nord et sans doute sud de Montréal, au niveau du découpage des régions.
**(11 h 40)** On est à 3 km de Laval, la rivière des Mille Îles est un quasi-mur de Berlin, c'est ce qu'on disait, et, la même chose du côté ouest, aussitôt qu'on arrive à Bois-des-Filion, on tombe dans Lanaudière, et finalement Lanaudière devient une autre région, où finalement les difficultés sont énormes, hein? C'est plus facile d'avoir des ententes avec Mont-Laurier, qui est à 300 km à peu près, 250 km de Sainte-Thérèse, que d'avoir une entente à Sainte-Rose, qui est à 2 km, là, de Sainte-Rose. Donc, au niveau de la population, les problématiques sont celles-là.
Ce qui a amené finalement ABL à continuer le travail de concertation entre les différents organismes et, finalement, de s'incorporer, ce qui a été une suggestion, finalement, des intervenants, s'incorporer pas pour devenir une structure à son tour lourde, mais pour permettre éventuellement d'avoir la possibilité d'avoir une existence légale, pour pouvoir s'exprimer comme on le fait présentement et donc de pouvoir finalement cheminer dans un cadre légal, ce qui a été fait. Et ça a été fait au moment où Mme Courchesne lançait le processus de consultation, là, au niveau des plans régionaux -- qui a été suivie par Mme James... non, Mme Thériault, Mme James par la suite -- sur lesquels on a été encouragés et sinon manifestement heureux de voir le travail qui s'est fait au niveau de la direction régionale du ministère de l'Immigration, qui a développé une stratégie pour les Laurentides qui est en fonction de trois pôles: le pôle sud, le pôle centre et le pôle nord.
C'est évident que la problématique de la ceinture nord, dans les Laurentides, n'est pas la même que celle de Saint-Jérôme ou du centre et n'est pas la même que Mont-Laurier. Et donc on a salué des gens en commission parlementaire et on a salué finalement le travail qui avait été fait et, bien sûr, cautionné par Mme la ministre à ce moment-là et qui a conduit à des valeurs à partager, des intérêts, le fameux document d'orientation régionale, qui, pour nous et probablement tous les organismes de la région, est devenu une quasi-bible, parce que finalement le travail avait été fait dans le plus grand respect des entités propres, en évitant finalement les tensions qu'on pouvait avoir, là, entre le sud, le centre et le nord des Laurentides. Donc, on avait salué ce travail-là.
Au niveau de la francisation, ce qui était de responsabilité de direction régionale a été ramené à la direction centrale, et finalement, peu à peu, les programmes de francisation se sont déplacés à Saint-Jérôme, Saint-Jérôme étant une capitale des Laurentides, mais en sachant fort bien... Et c'est le même constat dans tous les dossiers. En éducation, en santé, en environnement, les Basses-Laurentides puis les Laurentides, c'est un élément problématique. La même chose que Lanaudière, vous allez me permettre ce petit écart là. Les gens de Terrebonne ne vont pas nécessairement se faire soigner à Joliette. Les gens de Sainte-Thérèse, bien c'est... La relation est est-ouest et non pas, ou peu, nord-sud.
Donc, au niveau de la francisation, les programmes se sont déplacés, j'imagine, par facilité du ministère, du côté de Saint-Jérôme puis du côté de Laval. Il faut comprendre que c'est des lieux qui sont assez près, hein, on parle de 15 km un de l'autre. Sauf que 15 km l'un de l'autre, dans nos problèmes de circulation, bien ça prend... c'est une 1 h 30 min un de l'autre. Je ferme la parenthèse de ce côté-là. Mais, étant donné que, du côté de Saint-Jérôme, on a favorisé une problématique davantage de réfugiés, bien, finalement, on s'est retrouvé avec l'ensemble des populations des Basses-Laurentides qui souhaitent des processus de francisation, ne trouvent pas de place à Sainte-Thérèse ni à Saint-Eustache, ne trouvent plus de place à Saint-Jérôme, ils doivent se déplacer sur Laval -- et même à Laval, maintenant, il n'y a plus de place -- sur Montréal.
On sait très bien, finalement, que les programmes de francisation ont un volet complémentaire qui est à l'intégration sociale, l'intégration communautaire des nouveaux arrivants. C'est évident que, quand un nouvel arrivant qui habite à Sainte-Marthe-sur-le-Lac ou à Oka et qui a à rencontrer les services communautaires de la police de Laval ou le CLSC de Laval... ces gens-là, finalement, on ne travaille pas dans une intégration souhaitable au niveau de ces populations. La même chose du côté de Saint-Jérôme. Les déplacements sont complexes dans ces axes routiers là, compte tenu, finalement, des éléments de problématique.
Et j'ajouterais que les Basses-Laurentides ne sont pas une banlieue, à proprement parler, de Montréal. C'est des régions qui existent depuis longtemps, qui ont leur histoire, qui ont leur enracinement. Si avec le temps les régions se sont rejointes pour former le Grand Montréal, il n'en demeure pas moins qu'il y a des entités propres du côté de Saint-Eustache et du côté de Sainte-Thérèse.
Donc, c'est fiers du plan de la ministre qu'on s'est associés aux propos, mais pour qu'elle se rende compte, les quatre dernières années, malheureusement, du peu d'actions, du peu d'activités qu'il s'est réalisé en regard aux objectifs qui étaient mentionnés. Donc, on se retrouve en 2011 avec des éléments qui sont les mêmes. D'ailleurs, on vous a reproduit en mémoire nos conclusions, qui étaient strictement les mêmes conclusions qu'on avait déposées en 2007. On ne se voulait pas d'être insultants, mais on se disait que ça demeure encore, au niveau des gens du ministère de l'Immigration, au niveau de la direction régionale, au niveau des partenaires régionaux, ça demeurait encore valide, ça demeurait encore important, mais qu'il fallait recommencer, ou reproduire, ou accélérer, finalement, le travail. Voici pour l'essentiel de nos propos.
Donc, vous avez en page 7 la conclusion. Je ne vous lirai pas le document. Vous avez aussi nos documents d'appoint. En page 7, on reprend strictement les mêmes points qui y sont. Je voudrais peut-être attirer juste votre attention au point d, où on disait: «...nous souhaitons que les programmes de francisation et d'intégration au milieu soient paramétrés en fonction des besoins des différentes régions...» C'était finalement... On comprend que c'est peut-être plus facile de concentrer les lieux de francisation à des endroits, mais ils n'atteignent pas nécessairement les cibles, toutes les cibles qui sont souhaitées, et on pense encore que le pôle, le pôle institutionnel universitaire qui est en lien avec l'Université de Sherbrooke et l'Université Laval devrait ou pourrait recevoir des étudiants dans le cadre des programmes de francisation.
Le Président (M. Bernier): Merci, M. Marginean. Merci de votre participation. Nous allons procéder maintenant aux échanges avec les députés. Nous allons débuter du côté ministériel avec la ministre. Mme la ministre.
Mme Weil: Merci, messieurs. Je vous remercie beaucoup pour votre participation. Donc, vous parlez d'un enjeu extrêmement important pour l'avenir du Québec. Et, moi, je fais une tournée régionale, j'annonce le renouvellement de certaines ententes. Et évidemment la couronne nord, c'est une région, et, c'est vrai, il y a une dynamique. Moi, j'ai beaucoup été impliquée avec plusieurs organismes qui touchent le Grand Montréal, la grande région, et on connaît le mouvement, et je vois les défis, évidemment, d'attraction et de rétention.
Alors, j'ai juste quelques questions plus concrètes avant de vous poser des questions sur les grandes orientations. Qu'est-ce que vous faites, comme mission? Juste nous décrire très concrètement, quand vous voulez faire... attirer... Si je comprends bien, vous faites des missions à Montréal. Et est-ce que vous connaissez la Passerelle pour l'emploi? Comment vous faites pour essayer d'attirer et ensuite, évidemment, la rétention des immigrants? Et peut-être... Parce que dans le mémoire vous parlez de cette question d'établissement, qu'on ne devrait peut-être pas, au MICC, aller mettre tant d'emphase sur l'établissement, parce qu'il y a des gens qui, s'ils avaient une expérience de travail, un certain vécu, peut-être, éventuellement, ils pourraient déménager. Peut-être vous entendre sur cette question.
Le Président (M. Bernier): M. Marginean? M. Girard? Lequel des deux?
M. Marginean (Alain): Je vais répondre, puis je vais laisser la parole après à M. Girard.
Le Président (M. Bernier): Allez-y, M. Marginean.
**(11 h 50)**M. Marginean (Alain): Brièvement, il y a 10 ans, quand nous avons créé ABL, c'était pour éviter ce qui se passe à Montréal, c'était notre perception, là, pour éviter ou en tout cas pour être plus attentifs à ce qui commençait à Laval. On devrait s'organiser, faire une table de concertation pour travailler en aval de ces populations-là. Je dois vous dire que le retard ou la lenteur a fait que là, malgré nous, présentement, que ce soit à Sainte-Marthe-sur-le-Lac, à Bois-des-Filion, à Boisbriand, il y a une vague, parce que les maisons sont déjà trop chères à Montréal, sont déjà trop chères à Laval, et on le vit présentement, là, on le vit, la commission scolaire, l'arrivée de nouvelles familles à Sainte-Marthe, à Boisbriand, à Blainville. Et donc, le grand voeu qu'on avait d'être en stratégie d'accueil, on y arrive plus ou moins, là, pour être très honnêtes.
Ce qu'on avait comme mission et ce qu'on a toujours, c'est assez simple. C'est un organisme qui est souple. C'est plus une table de concertation. On n'a pas de bureau, pas physique... On a un site Internet, et autres. Premièrement, rencontrer, diffuser, bon, le travail au niveau des trois CLD, les maires, les mairesses, les conseils de ville, donc favoriser, parler, discuter, favoriser des conférences, quand le maire de Bois-des-Filion fait une conférence sur l'accueil, dans sa propre ville, de travailleurs étrangers, tout ça, donc favoriser au niveau de la population une ouverture puis un accueil. La population est très homogène. La même chose dans les établissements, hein, comme au cégep. Accueillir des professeurs qui sont de d'autres nationalités, c'est aussi, finalement, l'accueillir auprès des collègues de travail mais aussi face aux étudiants, des étudiants qui sont homogènes, pour éviter finalement tout glissement, et autres.
La même chose au niveau du centre hospitalier. Le centre hospitalier, les gens qui se font soigner, c'est des gens québécois de souche, d'origine, et autres. Donc, la situation qu'il y a au niveau du personnel, ce n'est pas la même situation qu'il y a à Laval ou à Montréal. Donc, c'est important, oui, de faire du recrutement. Il faut respecter les règles de la Commission des droits de la personne au niveau des minorités visibles et ethniques. Mais au-delà du recrutement c'est l'intégration de ce personnel-là et la relation avec les clientèles. La relation avec les clientèles, il faut voir comment ça se passe dans une salle d'urgence quand on met des éléments...
Donc, du travail, le travail qui a été fait, de sensibilisation, de profiter de toutes les plateformes qui sont données auprès des députés, auprès des trois CLD, auprès de chambres de commerce, auprès des maires... Donc, sensibiliser la population. Ça, c'est le premier volet.
Le deuxième concerne la promotion de la région à l'extérieur de la région, principalement à partir de Montréal. On a fait des ententes avec des organismes de Montréal, dans le cadre de la régionalisation, où M. Girard accueille et on accueille des groupes finalement qui viennent... qui partent de Montréal, de différents organismes, pour visiter les Basses-Laurentides, dans le cadre des salons de l'emploi. On tente finalement de diffuser à Montréal l'information comme quoi qu'il y a des salons d'emplois, de passer dans les journaux ethniques de Montréal, de diffuser finalement des informations dans les langues d'origine, finalement, pour faire connaître la région.
Mais ce n'est pas une région qui est en pénurie. Il faut voir finalement que, contrairement à d'autres régions qui font des campagnes systématiques pour attirer des gens, bon, que ce soit combler finalement le nombre d'étudiants... Le cégep, là, la croissance est 15 % à 20 % par année, là, vous me corrigerez les chiffres, donc ce n'est pas un collège qui est en baisse de clientèle, ce n'est pas un collège qui gratte les fonds de tiroirs. Donc, c'est une région que les indicateurs sont très positifs. Donc, c'est un plus, là, il faut aller au niveau culturel.
Donc, c'est le deuxième volet: accueillir des groupes, faire la diffusion de la promotion, le site Web, et donc faire connaître la région dans le cadre, je dirais, de certaines batailles régionales. Parce que les Basses-Laurentides, c'est aussi Montréal métropolitain. Est-ce que quelqu'un qui habite à Montréal tourne à Saint-Jérôme pour venir à Saint-Eustache? Non, nécessairement. Est-ce que Saint-Eustache fait partie des programmes de régionalisation? Non. On a une grande discussion avec la direction régionale, au niveau finalement d'indicateurs de réussite, parce qu'on reçoit une petite subvention, et on nous dit finalement: Le placement de 15 familles... On dit: Est-ce que des familles qui habitent à Sainte-Rose mais qui travaillent de l'autre côté du pont -- le pont fait 300 mètres -- est-ce que les gens qui habitent... Ah! ils ne sont pas considérés dans les statistiques de Laurentides, c'est des statistiques de Laval, donc on ne peut pas les compter.
Ou la personne qui vient travailler. On va partir du principe de dire: Si on amène les gens travailler, bien peut-être qu'avec le temps... Ils peuvent prendre le train, le métro, tout ca, mais peut-être qu'avec le temps ils vont se déplacer avec leurs familles. Donc, le ministère parle de l'établissement. Nous autres, on dit: On ne parle pas d'établissement. Une personne peut facilement travailler à Laval, travailler à Montréal, prendre le train, et ça prend 20 minutes, hein? Ça prend moins de temps de partir du centre-ville de Montréal pour venir à Sainte-Thérèse que de partir de ville d'Anjou pour aller au centre-ville. Et on est coincé dans un problème structural où, au niveau des chiffres... Bon, un organisme de Montréal qui fait un placement à Saint-Eustache est dans la CMM, il ne fait pas un placement en région, hein? Je comprends que dans certaines régions, finalement, on habite où on travaille, mais dans les Basses-Laurentides on n'habite pas nécessairement où on travaille, et tous les éléments sont faussés, à ce niveau-là. Donc, le travail d'argumenter auprès des organismes locaux, régionaux, finalement, sur ces questions-là.
Le Président (M. Bernier): Mme la ministre.
M. Marginean (Alain): Est-ce que je réponds à votre question, Mme la ministre?
Mme Weil: Oui, merci.
M. Marginean (Alain): Je m'excuse, je m'emporte.
Mme Weil: Donc, si je comprends bien, l'attraction... il y a du mouvement, il y a du renouveau, il y a des gens qui s'installent dans la région, c'est dynamique, les entreprises ont besoin de combler des emplois. Est-ce que vous travaillez avec des employeurs et des entreprises pour cibler les besoins?
Puis je vais peut-être vous amener sur une orientation. On a une orientation qui vise à augmenter à 50 % les pourcentages de personnes avec le métier ou la profession en demande. On l'augmente. On l'a augmenté. En 2009, c'était 48 %. Là, ce serait 50 %. Est-ce que ça, c'est une mesure qui pourrait aussi aider votre région? Parce que ça permet éventuellement de faire un meilleur arrimage entre la sélection... Vous, vous êtes beaucoup sur l'intégration, la francisation, mais il y a la sélection, d'entrée de jeu, et il y a des régions aussi où on pourrait peut-être... Il y a Placement en ligne international -- je ne sais pas si vous connaissez, mais ça peut répondre vraiment aux besoins des régions -- la Passerelle pour l'emploi, où on cible les besoins, les emplois dans les régions.
Le Président (M. Bernier): M. Marginean, M. Girard? M. Marginean.
M. Marginean (Alain): Oui, bien, l'entente régionale qui s'est faite dans le cadre de la CRE avec Emploi-Québec considérait des points semblables. Je dois vous dire qu'on revit le même problème de structure au niveau régional. L'entente qui a été faite par Emploi-Québec il y a plusieurs années et qui perdure a été faite avec des organismes de Saint-Jérôme, des organismes de Saint-Jérôme qui ont une pertinence limitée, on va dire comme ça, dans les Basses-Laurentides. Donc, les éléments que vous énumérez là sont, je pense, des mesures convergentes intéressantes dans lesquelles on peut s'appuyer, mais la problématique dans laquelle on se situe, pour une question de structure, de structuration régionale, fait qu'on est extrêmement limité. L'entente en région avec la CRE a mis quatre ou cinq ans avant d'être conclue. Et, à notre avis, malheureusement, les autres ministères n'ont pas adopté la stratégie de votre ministère concernant finalement une stratégie par pôles d'intervention, hein? Et ça, ça complique la vie, et je pense que vous comprenez ce que je veux dire.
Le Président (M. Bernier): Merci. Oui, M. Girard.
M. Girard (Claude): Bien, pour compléter un petit peu, vous savez, il y a beaucoup de choses qui peuvent se faire. Nous sommes en train de développer une possibilité d'utiliser notre site électronique, qu'on appelle le site Web, où des immigrants pourraient offrir leurs services, peut-être en 140 caractères ou un peu plus, et que les employeurs pourront aller sur le site puis dire: Bien, on voudrait les engager. Pour l'instant, je suis en contact avec quelques chercheurs de têtes, et toutes les personnes qui me présentent leurs... Parce que je n'ai pas le droit, moi, de travailler dans le domaine de l'emploi comme tel. C'est la job d'Emploi-Québec. Et c'est sûr que... Et, vous le savez, c'est une intégration qui est d'abord économique, ensuite sociale et ensuite culturelle, dans l'ordre, mais nous touchons en fait un petit peu, forcément...
Comme, pour compléter une autre partie de la question, j'aide actuellement quelqu'un à se trouver une maison. Il demeure à Laval, là, dans le coin de Chomedey, puis ça fonctionne très bien. Il veut s'installer. Bon, je lui donne un coup de main. Moi, cette personne-là, ça fait deux ans qu'elle travaille dans les Basses-Laurentides. Elle demeure à Laval. Bon, quelque part, on pourra le mettre, nous aussi, dans nos statistiques, hein, qu'on vient de trouver quelqu'un. Mais ce n'est pas comme ça que ça se passe du tout.
Et les personnes viennent. Actuellement, ils traversent la rivière. Il y en a. Nos services d'accueil ne sont pas très développés parce que... Vous avez vu les chiffres qu'on vous a donnés, ils sont vrais, là. Avec ces argents-là qu'on a reçus, j'ai piloté, moi, 600 personnes, leur faire connaître les Basses-Laurentides dans une journée d'exploration, de les emmener, leur montrer que c'est possible de travailler en évitant autant que possible la 15, la 13 puis la 640, en passant sur des routes, sur des petites routes, dans des quartiers résidentiels. On avait un problème pour manger, alors je les amenais dans des écoles, des écoles secondaires. Dans des écoles secondaires, ça coûte 4,30 $ pour manger. Il y en a la moitié qui apportent leurs lunchs, l'autre moitié... Mais j'exigeais qu'il y ait des activités avec les élèves. Et actuellement on me demande: Est-ce que tu peux revenir? C'est positif pour les élèves. Ils s'ouvrent, ils s'ouvrent aux communautés. Et j'en aurais pour deux heures à vous parler des choses extraordinaires que j'ai vues à l'intérieur de ça. Mais je ne vous parlerai pas pendant deux heures.
Le Président (M. Bernier): Merci. M. le député de Vimont, vous voulez poser une question, je vous donne la parole.
**(12 heures)**M. Auclair: Merci beaucoup, M. le Président. Messieurs, bonjour. Moi, je suis très interpellé par ce que vous parlez, en partant, quand vous parlez de Sainte-Rose, le pont. Moi, je suis le député de Sainte-Rose, je suis un petit gars de Sainte-Rose. Mais je suis également un résident de Mirabel, donc ça vous donne un peu le portrait. Je connais assez bien la région que vous avez décrite, le cégep, mon fils va au cégep Lionel-Groulx. Donc, je connais très bien le secteur.
Vous avez dépeint le secteur d'une façon intéressante. Moi, j'ai une autre vision aussi du secteur. Je regarde juste chez nous, à Mirabel, et je vais parler aussi de Deux-Montagnes, toute la région, il commence à y avoir des communautés culturelles qui traversent et qui s'établissent. Et je pense que vous avez raison quand vous dites que vous avez essayé d'être proactifs, et je suis sûr qu'on est tous de bonne foi, parce qu'on l'a vécu aussi, nous autres aussi, à Laval, la réalité n'est pas... On a beau être proactif, la réalité, elle est tout autre, parce que, quand les communautés viennent s'établir, elles vont le faire de façon initialement... un geste, deux gestes, deux, trois familles, puis après ça, dès qu'il va y avoir une belle reconnaissance et qu'il va y avoir un bel accueil au niveau scolaire, une facilité d'adaptation, il va y avoir une mouvance qui va se faire. Les communautés, là-dessus, sont très... se parlent beaucoup entre elles, et ça fonctionne bien. Moi, je regarde, je peux vous dire que j'ai des secteurs complets de Saint-Rose qui, il n'y a pas 10 ans... on avait une ou deux familles maghrébines, et maintenant le quartier est complètement peuplé par une communauté très bien établie, très bien intégrée. D'ailleurs, pour nos écoles, pour notre communauté, ça fonctionne très, très bien.
Les gestes que vous posez... Moi, je regarde chez nous, Rosemère... pas Rosemère, Mirabel, et on va souvent à Saint-Eustache pour les épiceries, et autres, et de plus en plus il y a des communautés maghrébines qui sont là. Et vous avez raison qu'au niveau de l'accueil ils ne se reconnaissent pas parce qu'il n'y a pas d'employé encore des communautés. Très rares, les membres... les employés des communautés. Pourtant, il y a une communauté à Deux-Montagnes qui est très vivable, qui est très vivante, très dynamique. Et j'aimerais voir avec vous les gestes que vous posez à cet égard-là. Parce que je peux comprendre... Est-ce que vous êtes allés chercher des membres des communautés pour siéger avec vous? Est-ce que les gens de la commission scolaire Sir-Wilfrid-Laurier... partie de vos comités? Parce qu'on sait très bien qu'au niveau de la commission scolaire anglophone il y a une culture peut-être plus ouverte, plus habituée, je vais dire plutôt, face à l'intégration, face à l'arrivée des nouveaux arrivants.
Est-ce qu'il y a des gestes, comme ça, qui est fait au niveau de la communauté? Parce que, pour moi, les Basses-Laurentides, ça inclut Deux-Montagnes, Oka, qui est extrêmement anglophone, Rosemère, qui est une des seules municipalités bilingues au Québec, reconnues bilingues. Donc, à ce niveau-là... Puis je ne parle pas de Blainville, avec Fontainebleau, qui a une communauté... J'ai beaucoup de ma communauté italienne qui est établie là, beaucoup de monde. Donc, le portrait... c'est pour ça que, moi, j'ai un drôle de... j'ai un portrait un peu différent de ce que vous nous dites, puis j'aimerais voir avec vous qu'est-ce que vous posez comme gestes?
Le Président (M. Bernier): M. Marginean? M. Girard? M. Girard, allez-y.
M. Girard (Claude): Bien, je vais parler au niveau des écoles tout d'abord, c'est un domaine que je connais pas mal plus. Vous savez, il y a différentes façons de poser des gestes, et, les gestes, je les ai posés au niveau de la commission scolaire, bien qu'ils soient des partenaires dans ABL-immigration. Par exemple, il y a un programme avec des conseillers pédagogiques pour accueillir les immigrants, les nouvelles personnes qui travaillent à la commission scolaire. Alors, il y a un programme de ce côté-là. Également, bien, la commission scolaire, elle a accepté de mettre, d'offrir des cours de francisation à même ses enveloppes, et ça, c'est des efforts que nous avons faits de ce côté-là. Et là ils ont un nouveau programme, en fait, d'accueil pour les gens, des efforts que nous avons faits de ce côté-là. Et évidemment les passages que j'ai faits dans les écoles précédemment. Et prochainement on fera d'autre chose vis-à-vis des écoles. Moi, je vous parle des écoles, là.
Et effectivement ces gens-là viennent, traversent la rivière, pour ainsi dire. Ils s'organisent, oui, c'est vrai, mais ils arrivent dans les villes, et les villes leur disent: Bien, nous, on n'est pas équipés, allez voir ABL. Puis, nous, on dit: Bien, nous, on va se déplacer puis on va le faire. Sauf qu'il faut comprendre que c'est du bénévolat puis c'est du bénévolat qui est pas mal à plein temps, là. Il faut comprendre ça. Moi, je veux dire, je rêve d'avoir un peu plus de structures pour mieux répondre à un paquet de questions qu'on nous pose, là. En tout cas, si ça vous va, ça, comme réponse...
Le Président (M. Bernier): Merci, monsieur. M. Marginean, vous voulez ajouter?
M. Marginean (Alain): Pour préciser, oui, il y a des relations avec la commission scolaire Sir-Wilfrid-Laurier. Et l'an passé on a aidé des parents à accompagner leurs enfants à l'intégration à l'école anglophone. Et je suis un résident depuis 35 ans de Rosemère aussi et fier de ma ville. Et je pense que la convergence...
M. Auclair: Juste, si vous me permettez...
Le Président (M. Bernier): M. le député de Vimont, oui.
M. Marginean (Alain): Excusez-moi.
M. Auclair: Oui, mais une chose que je trouve intéressante, peut-être quelque chose que vous vivez moins que d'autres secteurs, comme Montréal immédiat, c'est que les personnes qui migrent dans les Basses-Laurentides ne sont généralement pas des immigrants, des nouveaux arrivants. Ce sont des néo-Québécois qui ont, vous dites, bon, qui ont vécu à Montréal, Laval, et maintenant les deuxièmes générations s'établissent. Donc, ils sont aussi Québécois et très intégrés. Donc, eux autres, ce n'est pas un défi. Généralement, ils sont très intégrés.
Moi, je regarde... Bien, peut-être que j'ai une comparaison facile, mais chez nous, dans Vimont, j'ai énormément de deuxièmes générations de Montréal, communauté italophone entre autres, qui sont venus s'établir chez nous, et croyez-moi que ça ne demande pas aucun investissement, là, pour les soutenir, et tout ça. Ils sont trilingues, très confortables dans la langue française, et très bien impliqués, et très bien intégrés, et on ne parle pas de leurs enfants, là, c'est sûr, et la même chose sur ma communauté haïtienne, qui sont souvent des deuxièmes générations. Est-ce que vous... On parle bien sûr de nouveaux arrivants, mais il y a également une question d'arrivants... de néo-Québécois aussi qui sont là, qui, eux autres, tracent le chemin aussi, là.
M. Marginean (Alain): Effectivement, il y a les deux...
Le Président (M. Bernier): M. Marginean, oui, je vous donne la parole.
M. Marginean (Alain): Pardon. Excusez-moi. Effectivement, il y a les deux, encore que la réalité de Laval, hein, est une réalité d'une ville, d'une structure, d'un collège, et au niveau des Basses-Laurentides on parle de 18 villes, trois CLD, deux CSSS, et, avec tout le respect, c'est des problématiques qui se vivent d'une façon fort différente. Effectivement, la ville de Rosemère, pour parler d'elle, a son autonomie de Deux-Montagnes. Les concertations qu'il peut exister ne sont pas du tout de même nature qu'on peut vivre du côté de Laval.
Mirabel, c'est une particularité. La municipalité est celle qui a été créée par cette loi, qui est une dynamique qui se situe, pour certains, pour certaines personnes, plus à Saint-Eustache, pour d'autres plus à Sainte-Thérèse, pour d'autres plus à Saint-Jérôme. Il faut voir l'histoire, là, au niveau des agriculteurs. Ce qu'on sait aujourd'hui, c'est que les nouveaux arrivants s'identifient vers Montréal, vers Sainte-Thérèse. Ça, un nouvel arrivant qui arrive à Mirabel est moins attaché à Saint-Jérôme, à Saint-Eustache. Je veux dire, c'est des mouvements sociaux qui existent, on le voit par rapport à l'accueil au niveau du cégep, et autres.
Mais il n'en demeure pas moins qu'un fait... sur les 6 000 étudiants -- vous me corrigerez, là -- sur les 6 000 étudiants qu'il y a au cégep Lionel-Groulx, hein, les Québécois de souche représentent finalement le plus haut taux à travers tout le Québec. Ça, c'est une réalité. Ça, c'est une réalité que les jeunes qui évoluent... Un jeune qui évolue au cégep Lionel-Groulx est dans un autre monde, sinon une autre planète, que le jeune qui évolue au cégep Montmorency, à Laval. C'est deux mondes. Et, si on veut préparer les jeunes à un Québec contemporain ouvert sur la multiethnicité, il faut avoir des mécanismes qui permettent finalement d'ouvrir à des communautés d'une façon plus systématique, autant au niveau de l'emploi, autant au niveau de l'éducation.
Le Président (M. Bernier): Merci, M. Marginean. Nous allons donc passer du côté de l'opposition officielle. M. le député de Bourget.
M. Kotto: Merci, M. le Président. M. Marginean, M. Girard, bonjour. Merci d'être là.
J'aurai deux questions fondamentales à vous poser, puis, s'il y en a d'autres qui découlent de celles-là, on ira de l'avant. J'aimerais d'abord savoir si, disons, de votre perspective et avec votre connaissance de l'historique migratoire contemporain, vous seriez pour une immigration massive ou pas, au Québec, aujourd'hui?
Le Président (M. Bernier): M. Marginean.
M. Marginean (Alain): Comme on l'a indiqué dans notre rapport, nous sommes d'accord pour une ouverture, une intégration. On considère que le Québec émane de ça. Donc, oui, mais dans la mesure où nous avons la capacité d'intégrer et d'offrir convenablement des services à ces personnes. Sinon, c'est non. Je veux bien accueillir dans la maison, dans la mesure où je vais accueillir convenablement et selon finalement le cadre des valeurs qu'on s'est doté, comme société.
Le Président (M. Bernier): M. le député.
M. Marginean (Alain): Si vous me permettez, M. le Président...
Le Président (M. Bernier): Oui, allez-y.
**(12 h 10)**M. Marginean (Alain): ...nous avions un point d'ailleurs où nous disions, au point e, que le français... «Nous souhaitons également que certains critères de sélection, dont ceux sur la maîtrise de la langue française -- je pense qu'on était assez pointus -- soient pondérés de façon à reconnaître la potentialité de l'apprentissage du français eu égard aux valeurs culturelles de certaines catégories d'immigrants.» Donc, ce qu'on disait il y a quatre ans, c'est que, écoutez, le français, c'est bien sûr un élément important, mais pas nécessairement fondamental. Si les personnes ont la capacité de l'apprentissage du français et si nous avons la capacité de les amener au français, bien on pensait finalement qu'on devait aller dans ce sens-là. On pensait, entre autres, aux Amériques, on pensait finalement, entre autres, à l'Amérique centrale, l'Amérique du Sud, et on était dans une perspective d'un certain pourcentage. On a entendu les médias cette semaine, mais on était, nous, en faveur d'un certain pourcentage en région pour permettre finalement à chacune des cultures de pouvoir avoir assez d'espace pour pouvoir influencer les autres. Donc, quant à nous, le critère du français devait être un critère que l'on pouvait pondérer et non pas un absolu.
Le Président (M. Bernier): Merci. M. le député.
M. Kotto: À deux reprises, vous avez prononcé le mot «capacité», capacité d'accueil, capacité de franciser. Au plan de l'accueil, comment définiriez-vous... ou quel avis donneriez-vous au gouvernement relativement au seuil, qu'il veut plafonner à 50 000 immigrants par année au Québec, ce qui correspond à une circonscription montréalaise, en moyenne? Quelle est la nature des moyens qui devraient être mis en branle pour, disons, accoter cette projection-là, selon vous, selon l'expérience que vous avez du terrain?
Le Président (M. Bernier): M. Marginean.
M. Marginean (Alain): On doit avoir l'humilité de nos réponses. Nous ne sommes pas spécialistes. Ce que nous avions... Nous, nous ne voyions pas, à l'expérience des gens qui gravitent autour de notre table... Là, je vous ai nommé, tantôt, les organismes. Personne ne voyait une problématique de contrainte en nombre. Les gens voyaient la contrainte à deux niveaux, hein, au niveau de nos structures puis de la lourdeur des structures qu'on pouvait vivre dans les Basses-Laurentides, là, et probablement sud-ouest, Lanaudière. Dans notre incapacité d'être efficients au niveau de l'emploi, au niveau de la francisation, au niveau de l'accueil, proprement dit, de cette participation citoyenne, on les vit, les limites, là. Et donc, on va dire, si le ministère peut paramétrer d'une façon spécifique les stratégies en regard au Montréal métropolitain, qui est une dynamique particulière, à ce moment-là, les limites, je ne pourrais pas vous les dire, M. le député, mais les limites sont nécessairement plus grandes, dans la mesure où on a cette capacité et que nous mettions les moyens nécessaires. Les programmes de francisation nous apparaissent importants. Les programmes de formation, d'accompagnement nous paraissent importants. On pensait que la question des COFI, c'était une bonne chose d'amener ça dans les établissements d'enseignement postsecondaire, mais il y a sûrement une évaluation à faire de tout ça pour chercher une plus grande efficience et non pas permettre à des établissements d'équilibrer leurs budgets.
Le Président (M. Bernier): M. le député.
M. Kotto: Donc, vous parlez d'une évaluation indispensable à faire préalablement, en amont, ce qui sous-entend que cette évaluation n'est pas faite au moment où on se parle.
M. Marginean (Alain): Ça sous-entend que, pour nous, l'évaluation qui est faite ne... non, n'a pas été faite dans une fonction d'efficience. Écoutez, de façon bien simple, là, appliquer... C'est un plan d'action concret, hein, point par point. Les partenaires sont identifiés. Le ministère a fait, à notre avis, un travail fantastique, on va le qualifier comme ça. On y a collaboré. Appliquons ou donnons-nous les moyens d'appliquer... et là on pourra évaluer finalement la pertinence de ce qui avait été prévu. Mais présentement, non, il n'y a rien ou très peu d'actions. M. Descoteaux, l'ancien député, qui était d'allégeance libérale, avait donné son appui au colloque qui était prévu à l'intérieur de ça pour permettre aux intervenants de pouvoir discuter. C'est encore là dans la notion, et on n'a rien fait.
Le Président (M. Bernier): M. le député.
M. Kotto: Merci, M. le Président. Le document que vous avez entre les mains, c'est quoi, ça?
M. Marginean (Alain): C'est le plan de travail du ministère ou de Mme la Ministre.
M. Kotto: D'accord. Maintenant, je...
M. Marginean (Alain): Pour les Laurentides, pardon.
M. Kotto: O.K. J'aimerais savoir ce que vous pensez des bassins géographiques d'immigration dont on parlait, avec le seuil. Mais, à la lumière des dispositions nouvelles de la ministre, je pense que les seuils vont... les plafonds vont sauter. Parce qu'on les ramenait à 30 % partout, mais ça n'empêche pas qu'on privilégie, à un moment donné, au plan de la sélection, au plan d'une stratégie non écrite, éventuellement, telle ou telle immigration. Quel est, selon vous, le profil -- hypothèse d'école -- le profil qui devrait être privilégié dans le cas de la sélection au Québec?
Le Président (M. Bernier): M. Marginean.
M. Marginean (Alain): Je veux bien comprendre, là. Vous parlez au niveau des pourcentages qu'on pourrait établir par région, par provenance?
M. Kotto: ...pas dans les pourcentages, mais le profil, en tenant compte des critères linguistiques, des critères, disons, de valeurs. On parle très souvent de diversité. La ministre évoque souvent l'idée, disons, de faire du Québec, modestement, bien entendu, un eldorado de la diversité. Maintenant, considérant la situation démographique, culturelle, linguistique du Québec, quel serait, selon vous, le profil idéal à privilégier dans le cas des sélections?
Le Président (M. Bernier): M. Marginean? M. Girard?
M. Marginean (Alain): Je suis embêté de répondre à votre question, mais je... On s'est dotés d'une charte des droits et des libertés, nous avons des valeurs de diversité et d'ouverture, mais... Je vais y aller de façon très personnelle. Mes grands-parents n'étaient pas des universitaires et, je pense, ont contribué d'une façon significative à la société à laquelle j'appartiens.
Nous sommes plusieurs membres aussi d'ABL qui dans leurs fonctions... mais ont aussi ce point d'intérêt qui fait que... Bon, c'est bien sûr qu'on a un point d'intérêt, dans notre bénévolat, à agir, qu'on est assez fiers des valeurs que nous avons, des institutions que nous nous sommes données. C'est évident que nous souhaitons renforcer, développer, finalement, ce que nous avons mis en place comme société, comme valeurs et s'ouvrir davantage à améliorer, à augmenter cette qualité mais dans ce cadre. Et, pour ce faire, bien je pense qu'on doit avoir...
Il y a une différence entre du laisser-aller puis du laisser-faire, et je pense que, si on veut permettre finalement un développement de société qui soit conforme ou souhaitable envers ce qu'on désire, ce n'est surtout pas dans le laisser-aller, mais dans l'investissement, dans la responsabilité, dans les programmes d'accueil, dans les programmes d'intégration, dans les programmes de francisation et dans les programmes de participation civique dans lesquels il faut investir. Je ne sais pas si je réponds à votre question, M. le député.
M. Kotto: Merci. Merci beaucoup. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Bernier): Merci, M. le député de Bourget. Donc, M. Marginean, M. Girard, merci de votre contribution à cette commission parlementaire. Vos propos ont été fort intéressants.
Nous allons donc suspendre nos travaux jusqu'à 14 heures. À ce moment-là, nous accueillerons la Corporation de développement économique communautaire LaSalle-Lachine. Merci.
(Suspension de la séance à 12 h 19)
(Reprise à 14 h 6)
Le Président (M. Bernier): À l'ordre, s'il vous plaît! La commission va reprendre ses travaux.
La commission est réunie, je tiens à vous le rappeler, afin de poursuivre la consultation générale et les auditions publiques sur le document intitulé La planification de l'immigration au Québec pour la période 2012-2015.
Donc, bon après-midi à tous. Bienvenue aux travaux de la Commission des relations avec les citoyens. Cet après-midi, nous avons le plaisir de recevoir la Corporation de développement économique communautaire LaSalle-Lachine -- c'est bien ça? -- représentée par M. Henri Chevalier, Marie Stabler, Adina Samoila, Monique Jeanmart, Audé Mary. Ça va?
Une voix: ...
Le Président (M. Bernier): Audet Mary.
Des voix: ...
Le Président (M. Bernier): Aude Mary. Ah! excusez-moi. Excusez-moi, je vais ajuster mes lunettes. Aude Mary. Donc, bienvenue. Vous avez une période de 15 minutes pour faire votre présentation. Je ne sais pas qui est le porte-parole. Bon, Mme Stabler, je vous donne la parole. Allez-y.
Corporation de développement économique
communautaire LaSalle-Lachine (CDEC LaSalle-Lachine)
Mme Stabler (Marie): Merci. Bonjour à tous. Marie Sabler. Je suis agente de développement chargée du partenariat et du développement à la Corporation de développement économique communautaire LaSalle-Lachine. Je vous remercie, au nom de tous, de nous recevoir aujourd'hui, d'avoir bien voulu consulter notre mémoire. Notre but aujourd'hui est essentiellement de vous rapporter les constats qui découlent de notre expérience terrain, précisément sur les deux dernières années, dans le contexte d'un projet pilote qui a été autorisé il y a donc deux ans par le MICC et par Emploi-Québec.
Avant de réfléchir en termes de nombre d'immigrants admis au Québec, la CDEC croit crucial de se pencher davantage sur le processus de sélection, avant de parler de tout ce qui concerne le volet d'intégration, puisqu'avant même d'intégrer une personne immigrante il faut penser à pourquoi elle a été autorisée et admise au Québec.
Je vais vous présenter peut-être brièvement ce que sont que les CDEC. Les corporations de développement économique communautaire ont la préoccupation d'un développement social et d'une lutte à l'exclusion. Notre CDEC, LaSalle-Lachine, travaille spécifiquement au développement économique et social, développement de l'emploi et de la main-d'oeuvre. On travaille essentiellement en concertation avec notre milieu, tant au niveau des citoyens que des collectivités, que du privé et de l'institutionnel. En gros, c'est ce qu'on fait sur notre territoire.
En ce qui a trait à la question de l'immigration, je tiens à préciser que la CDEC LaSalle-Lachine, depuis près de 15 ans, travaille avec des partenariats qui sont reconnus en la matière de l'immigration, en l'occurrence le MICC, bien sûr, et Emploi-Québec, avec lesquels on a collaboré sur divers travaux, projets. En l'occurrence, en 2003, la CDEC LaSalle-Lachine a participé à l'élaboration d'un guide qui s'appelle précisément Obstacles et pistes de solution à l'intégration des personnes immigrantes sur le marché du travail. On a travaillé beaucoup avec le Conseil des relations interculturelles, qui sont maintenant remodelées, restructurées d'une autre façon. On travaille avec le CAMO-PI, CAMO-PI qui veut dire Comité adapté de main-d'oeuvre pour personnes immigrantes. On travaille avec la TCRI également. On est très impliqués sur notre territoire, LaSalle-Lachine, sur différentes tables de réflexion et d'action en ce qui a trait à la question immigrante multiculturelle, d'intégration multiculturelle sur nos territoires.
**(14 h 10)** Donc, c'est pour ça qu'on a une expertise au-delà de ce projet pilote qui date de deux ans. Il est clair que l'équipe de travail, et la direction de la CDEC, depuis plus de 15 ans, a vraiment travaillé, réfléchi et posé des actions concrètes sur le territoire en termes d'immigration.
On parle de projet pilote. Je vais peut-être vous expliquer brièvement ce que c'est que ce projet, puisqu'encore une fois je répète que ce mémoire a été réfléchi et élaboré par rapport à ce projet pilote, même si évidemment on voit défiler des personnes immigrantes dans notre pratique depuis au-delà de deux années, c'est clair. Mais là ce projet pilote là, en quelques mots, c'est un accompagnement sur 12 mois, qui est donc exceptionnel. Vous le savez, en principe, ça se fait sur une période ponctuelle ou au maximum sur six mois. Nous, on a proposé un accompagnement étroit sur 12 mois, qui a été, donc, accordé et qui part du principe d'un soutien préemploi et postemploi. Et, peut-être, c'est là aussi la plus-value et la richesse de cet accompagnement. Et le postemploi concerne et le soutien de l'individu même mais aussi le soutien de l'entreprise. Donc, nos intervenants travaillent en soutien, en support à l'entreprise dans tout ce qui concerne la gestion de la diversité culturelle, c'est ça, chez eux, en entreprise. Donc, on parle du maintien en emploi, chose qui ne se fait pas nécessairement, puisqu'une fois l'intégration faite ce n'est pas assuré, ce n'est pas garanti, tant pour l'individu que pour l'entreprise, que cet individu va performer et demeurer en place.
Et puis peut-être, troisième point important, point fort de ce programme-là, c'est toute la sélection des participants. C'est important. Chose que beaucoup de services d'aide à l'emploi ne font pas, on s'attarde beaucoup à la sélection d'individu et précisément une sélection, en principe, qui se fait le plus en adéquation avec la demande du marché du travail, qui n'est pas locale, mais qui est vraiment à échelle provinciale, O.K., puisqu'on travaille aussi en régionalisation, bien entendu, là. Donc, ce n'est pas un besoin et ce n'est pas une réponse à une demande locale lasalloise ou lachinoise.
La clientèle qui est ciblée dans ce projet-là aussi est particulière. On vise des nouveaux arrivants très nouvellement arrivés. Très nouvellement arrivés, pour nous, c'est... En principe, dans la pratique des deux années, on essaie vraiment de focaliser sur six mois et moins, mais le financement a été autorisé pour du deux ans maximum, O.K.? Donc, au mieux, ce qu'on peut avoir, c'est des gens qui ont été francisés pendant 10 mois à peu près et/ou qui ont déjà participé à une formation professionnelle quelconque et qui intègrent ce service à l'emploi après ceci, là. Mais en principe on essaie de travailler avec des gens qui débarquent de l'avion ou à peu près, là.
Fait important aussi, le bassin d'immigrants qui nous est référé, tant par les agents du ministère de l'Immigration que par les agents d'Emploi-Québec, ne répond pas, hélas, parfaitement ou totalement à nos critères qui ont été élaborés lors de cette élaboration de projet pilote. Donc, on est obligés de travailler, quelque part, avec les gens qui nous sont référés, bien entendu. Donc, il y a une sélection d'immigration au Québec, puis il y a une sélection, après, des agents des deux ministères avec lesquels on travaille. Malgré cela, on réfute jusqu'à 40 % d'individus, ce qui nous force, quelque part, à faire une espèce de lien direct avec évidemment les grilles de sélection, alors à tort ou à raison, parce qu'il est clair que c'est tout un processus qui est complexe. Les grilles de sélection n'ont pas seulement comme objectif la force économique ou la plus-value économique, on le sait. Les grilles de sélection aussi se basent sur la langue, se basent sur l'âge, se basent sur... Il y a toutes sortes d'évaluations, on le sait.
Mais, n'empêche, ce qu'il est important de comprendre, c'est que, 40 %, quand même, des gens qui arrivent chez nous, on ne peut pas les prendre. Et pourquoi? Pas par caprice. Parce qu'avec notre pratique terrain, avec ce qu'on connaît de l'immigration et aussi et, je dirais, surtout des demandes des employeurs, pas des demandes du marché du travail, parce qu'on fait une nuance entre le pouls du marché du travail versus les prérequis et les impératifs que les chefs d'entreprises, des petites et moyennes entreprises, demandent, et donc, avec cette connaissance-là, on sait que ces 40 % qu'on réfute ne seront pas habilités à intégrer le marché du travail dans un laps de temps qui, selon nous, est... pas pertinent, mais acceptable. Maintenant, on peut débattre de ce qui est acceptable et pas acceptable, là, au niveau du temps d'intégration. Donc, ça, c'est pour un petit peu la mise en contexte.
Je peux arriver tout de suite aux recommandations ou en tout cas aux idées qu'on a lancées. Je tiens aussi à préciser que la CDEC évidemment a un oeil micro. Évidemment, on ne parle pas à hauteur nationale ou provinciale, il est clair. On parle en plus, qui plus est, dans ce mémoire spécifique, d'un échantillon de 100 individus qui n'a rien à voir avec le 250 000 qui arrive, c'est clair. Donc, on a aussi une vision qui est très qualitative plutôt que quantitative, c'est-à-dire qu'on ne s'attaque pas non plus, dans le mémoire, à savoir combien il en faut, combien il n'en faut pas, est-ce qu'il faut plus, est-ce qu'il faut moins. Tout ce que, nous, on rapporte, c'est ce qu'on voit dans nos murs, ce qu'on voit en pratique et quelles sont un peu les limites qu'on observe. C'est peut-être important de le préciser, là.
J'entre au coeur des recommandations, donc. Un des éléments sur lequel on s'attarde, c'est la révision de la grille de sélection. On sait que le pointage est accordé -- un des pointages en tout cas -- est accordé à la compétence qui est directement transférable, en accord avec les besoins, donc, du marché du travail, bien sûr. Or, on s'aperçoit que cette notion de compétence transférable, elle nécessite une évaluation qui est, selon nous et, encore une fois, selon ce qu'on observe, qui ne peut pas être une équation simple, parce qu'elle n'est pas simple, entre diplomation égale potentiel de transférabilité. On a besoin de plus qu'un potentiel. On a besoin de réelles compétences qui se transfèrent immédiatement sur le marché du travail, auprès de nos chefs d'entreprise. Or, avec cette grille actuelle, la diplomation n'égale donc pas l'intégration.
On fait mention, dans le mémoire, de quelques exemples. Encore une fois, ce n'est pas des généralités. Par contre, ce sont de vrais exemples. C'est des vraies personnes, des vrais cas et des vrais profils. On ne généralise pas, et ce n'est pas caricatural, pas du tout. Un des exemples... Bien, je pense que dans le mémoire on parle d'un professeur d'histoire-géographie qui est d'origine camerounaise et donc qui possède effectivement un baccalauréat en histoire-géographie, qui a un niveau de français écrit qui n'est absolument pas acceptable ici, au Québec, qui échoue ses examens au ministère de l'Éducation, examens de français, j'entends, comme de nombreux immigrants qu'on voit passer chez nous, qui sont en général des professeurs, donc, et qui ne passent pas... et ce ne sont pas des gens qui ont été francisés, ce sont des gens qui sont francophones. Donc, première limitation au niveau de la langue.
Et, deuxième limitation, un professeur d'histoire-géographie camerounais ne peut vraisemblablement pas enseigner l'histoire-géographie québécoise. Donc, cet individu-là rentre ici avec tous les espoirs qu'on sait qu'un immigrant peut avoir en arrivant. Il n'empêche que les faits, c'est que, un, il est coincé d'ores et déjà par l'examen de français et, deuxième étape, il sera coincé de toute façon auprès des différentes institutions, collèges, écoles secondaires, parce qu'il n'a pas tout simplement la connaissance de l'histoire-géographie du pays. Alors, c'est pour ça que, quand on dit: Révision de la grille par rapport à la diplomation versus le potentiel de transférabilité, ce n'est pas une équation mathématique, hélas. Ça ne l'est pas. Parfois, ça marche, bien entendu, heureusement, ça marche. Il y a des belles réussites. Mais évidemment on parle de ce qui ne marche pas ici, on ne parle pas... On devrait parler de ce qui marche, parfois, aussi. Donc, un exemple de ce Camerounais-là.
Un exemple qui n'est pas mentionné mais dont on parlait tout à l'heure ensemble avec l'équipe, un Arménien aussi qui est docteur en théologie et en histoire de l'art. Il cherche un poste de chargé de projet à l'université... chargé de cours, pardon, chargé de cours à l'université. On sait tous ici, natifs ou néo-Québécois, que l'accès à la charge de cours à l'université, ce n'est pas pour demain matin, même si on est étudiant doctoral. Alors, encore une fois, c'est un leurre de croire qu'un docteur en théologie, il a un haut pointage parce qu'effectivement c'est un universitaire. Mais où est la force vive de cet individu-là sur le plancher des vaches?
Alors, bon, premier point, la grille de sélection. Deuxième point, qui en découle, c'est l'amélioration, donc, de cette évaluation de grille de sélection. Et on ne parle même pas de revoir la grille de sélection, parce que je pense que les catégories dans la grille sont tout à fait pertinentes, bien entendu, mais c'est l'évaluation de cette grille où peut-être il y a quelque chose qu'il faudrait modifier.
Au niveau de l'application des grilles, la CDEC...
**(14 h 20)**Le Président (M. Bernier): Mme Stabler, je vous donne 30 secondes pour faire une conclusion. Par la suite, on devra passer aux échanges.
Mme Stabler (Marie): Pour clore, au niveau de l'évaluation de la grille, la CDEC a réfléchi sur la connaissance des besoins des employeurs ici. Et encore une fois on fait une différence entre la connaissance du marché du travail et de ses besoins versus les besoins des employeurs, leurs préoccupations, leurs exigences en termes de main-d'oeuvre qualifiée. Il faudrait un... On pensait à un questionnaire beaucoup plus exhaustif sur les objectifs visés par l'individu versus, encore une fois, les besoins et les prérequis des chefs d'entreprise d'ici.
Le Président (M. Bernier): Merci, Mme Stabler. On va immédiatement passer aux échanges avec les parlementaires. Vous savez, il y a plusieurs groupes qui viennent présenter leurs mémoires cet après-midi, donc c'est pour ça que je suis obligé d'être assez rigoureux dans la gestion du temps.
Mme Stabler (Marie): Mais oui, je comprends. C'est moi qui parle trop.
Le Président (M. Bernier): Donc, sans plus tarder, nous allons débuter avec la partie ministérielle. Mme la ministre, la parole est à vous.
Mme Weil: Merci. Vous me permettrez, dans un premier temps, M. le Président, de saluer la présence du député de Drummond, et je veux, comment dire, l'accueillir dans ce merveilleux monde de l'immigration, parce qu'honnêtement c'est un domaine très intéressant, très fascinant, avec des experts, comme on entend ici aujourd'hui, qui sont sur le terrain, qui connaissent les problèmes d'intégration en emploi et les autres...
Le Président (M. Bernier): Et ce monde vous va très bien, Mme la ministre.
Mme Weil: Pardon?
Le Président (M. Bernier): Et ce monde vous va très bien.
Mme Weil: ...je suis très heureuse dans ce monde de l'immigration. Alors, j'espère que le député sera aussi très heureux dans ce monde de l'immigration.
Alors, je veux vous remercier pour votre présentation. Ce que je trouve intéressant, dans votre mémoire, c'est que vous avez une expérience terrain qui est très précieuse pour nous, et je peux vous dire qu'on va bien analyser, on va bien faire des suivis, c'est toute cette question de la sélection et l'arrimage avec le marché du travail. Vous savez sûrement que la grille de sélection a été modifiée en 2009. Et ensuite la question, c'est: Une fois qu'on a comment évaluer ces compétences et les attentes que les gens peuvent avoir, vous le soulignez bien, puis donc, lorsque les personnes ont des attentes, c'est la déception, même la dépression, etc., qui s'ensuit s'ils ne trouvent pas... Donc, j'aimerais vous entendre un peu sur... j'ai beaucoup de questions un peu techniques, mais cette question de comment bien préparer -- parce que vous en parlez -- comment bien préparer...
Évidemment, on cherche des gens scolarisés. On propose d'aller à 50 % et on les met sur une voie rapide, ceux qui ont précisément les compétences qu'on recherche. Mais ce n'est pas 100 %, évidemment, ce serait impossible. Alors, on cherche des gens scolarisés, jeunes, francophones, etc. Mais c'est cette question des attentes et comment vous voyez cette préparation avant que la personne arrive dans le processus de sélection...
Le Président (M. Bernier): Madame...
Mme Weil: ...avec des nouveaux arrivants.
Le Président (M. Bernier): Mme Stabler.
Mme Stabler (Marie): Merci. On sait qu'il y a eu effectivement, au fil des années, beaucoup plus de préparation à la promotion à l'étranger... du Québec à l'étranger, certains accords avec certains pays, comme par exemple la France, pour ne nommer que celui-ci. Donc, il y a différents accords et programmes de partenariat pour pousser certains immigrants à mieux se préparer. Le Québec pousse les demandeurs à consulter, bien sûr, les ordres professionnels, les associations professionnelles, oui, pas dans tous les pays. Et puis en plus, bémol, tous les demandeurs ne font pas cet exercice-là, hein? Même s'ils ont un certain niveau d'information, ils ne le font pas systématiquement.
Je pense qu'un certain nombre de prérequis devraient être instaurés avant même la sélection. Je m'explique. Je parlais tout à l'heure de l'examen de français au ministère de l'Éducation. On a discuté souvent, parce qu'on a des cas vraiment très souvent de professeurs étrangers et on croit définitivement que certains arrimages et partenariats avec le ministère de l'Éducation devraient se faire présélection. Ça sous-entend que l'examen de français devrait être réussi avant même d'arriver ici.
Je vous parle d'exemples. Je ne sais pas si c'est trop lourd de donner des exemples ou si c'est plus simple à comprendre. Un individu qui a travaillé avec la CDEC LaSalle-Lachine il y a deux ans était professeur de mathématiques. Algérien, hélas, il a eu son baccalauréat en Algérie avant 1985, qui fait que, pour x et y raisons, ce n'est plus d'actualité. Donc, lorsqu'il arrive ici, un, il doit repasser son examen de français, qui prend un délai, qu'il ne réussit pas, et, deuxième chose, on lui apprend qu'il n'a pas le baccalauréat en mathématiques. Il ne l'a pas, parce que de toute façon ça s'annule, puisque ça a été fait avant 1985.
S'il y avait plus qu'une information mais des prérequis qui doivent être en bonne et due forme, une fois qu'on a l'acceptation du MELS, une fois qu'on a une adéquation de diplôme avec effectivement la demande, on peut effectivement sélectionner l'individu. Et à ce moment-là il n'y aura pas de surprise d'examen de français échoué et il n'y aura pas de surprise aussi de non-adéquation du diplôme avec le marché. Avec les ordres professionnels, je sais que ce n'est pas toujours facile, mais il va falloir, à un moment donné, que les ordres professionnels se plient à certaines choses que les politiques vont demander et vont proposer. Actuellement, on le sait tous, qui travaillons au niveau de l'immigration, il y a un blocage par rapport à certains ordres professionnels, et ça aussi, c'est très compliqué.
Donc, la préparation mais les prérequis réussis, peut-être qu'à un moment donné il va falloir en arriver là. J'ignore si je réponds correctement à la question.
Le Président (M. Bernier): Mme la ministre.
Mme Weil: En effet, c'est le système australien qui fonctionne dans ce sens-là. Alors, j'imagine que vous serez d'accord avec la deuxième orientation, qui propose d'augmenter le niveau de connaissance du français. Donc, c'était justement pour s'adresser à cette question-là parce que c'est le commentaire qui est souvent fait. C'est que le niveau de français n'est pas à la hauteur des besoins du marché de l'emploi et par rapport à la profession, au métier que la personne exerce. Mais vous allez plus loin, et c'est là la ressemblance avec le système australien, c'est qu'il y ait déjà l'ordre professionnel qui est identifié, que la personne serait admise à l'ordre... cette évaluation avant. Donc, ça, ça pourrait aider beaucoup au niveau de la sélection, selon vous.
Maintenant, pour l'intégration en emploi... Parce qu'il y a néanmoins beaucoup de personnes, et vous en avez repéré même dans la centaine, de personnes que vous avez vues, il y en qui... Vous avez travaillé étroitement avec ces personnes-là, et ils ont trouvé un emploi, donc des gens qualifiés, qui parlaient français, etc. Pouvez-vous nous décrire comment vous travaillez avec les employeurs, les entreprises et les PME en particulier qui... Toute cette question de gestion de la diversité, comment les aider, là-dedans?
**(14 h 30)**Le Président (M. Bernier): Mme Stabler.
Mme Stabler (Marie): Essentiellement, effectivement, ce projet-là, à la CDEC LaSalle-Lachine, travaille avec des PME parce que, comme vous le dites, c'est vraiment ces petites et moyennes entreprises qui sont les moins préparées, qui ont le moins de temps aussi à accorder à la gestion de la diversité, qui ne sont absolument pas sensibles et informées par rapport à la problématique de l'immigration et aux enjeux, aussi, politiques de l'immigration. Donc, ce programme-là, effectivement, c'est une des spécificités aussi, c'est de travailler en étroite, étroite... C'est plus qu'une collaboration, c'est vraiment une interface avec l'employeur. Donc, la CDEC se présente comme étant un coach de la personne immigrante, et on présente la personne immigrante.
J'ai omis de dire que bien sûr, comme tout service d'aide à l'emploi, les intervenants qui sont spécialisés en gestion de la diversité culturelle préparent les individus, bien entendu, par rapport au C.V., par rapport au comportement. J'ai omis de le dire, mais c'est une évidence, bien sûr.
Une fois qu'on a fait ça, il faut faire très exactement la même chose avec l'entreprise, alors expliquer quel est son cursus, comment ça se passe en Algérie, quelles sont les types d'industries en Algérie, au Maroc, en France, en Tunisie, au Cameroun, au Sénégal, pour éviter que l'entreprise, par réflexe, ne considère que déjà le fossé de différence est insurmontable. Alors, c'est notre travail d'expliquer en quoi ça ne l'est pas, insurmontable, et quelles sont les adéquations à faire. Et l'entreprise ne le fait pas seule. Et, d'autre part, je ne l'ai pas dit à la présentation, mais dans le mémoire on a parlé des guides, des sites Internet que les ministères, MICC et Emploi-Québec, ont mis en place, et bien entendu que c'est quelque chose qui est important, bien entendu que c'est des guides et des outils qui sont importants et qui vont être consultés mais, hélas, hélas, trop peu consultés et spécifiquement par les petites et moyennes entreprises qui n'ont pas de département de RH, qui n'ont absolument pas le temps et, encore une fois, pas de réelle préoccupation à se soucier de l'intégration immigrante, hélas.
Alors, il faut vraiment qu'il y ait une interface privilégiée et extrêmement étroite avec l'entreprise et, qui plus est, un support postemploi. Donc, quand on a un: O.K., je prends Mme Moldave, mais, Mme Moldave, l'entreprise et la CDEC LaSalle-Lachine vont continuer à travailler postintégration pour voir que Mme Moldave s'insère bien, répond aux exigences du marché du travail. Si on peut aussi proposer certains programmes incitatifs financiers à l'entreprise, tels que PRIIME, bien entendu, assurément, on l'explique, on le propose, on sensibilise l'entreprise, on travaille avec. On essaie aussi d'être l'interface entre Emploi-Québec et nous pour que ça simplifie la vie du gestionnaire. Alors, tout ça, c'est une plus-value qui est très, très importante et qui rassure énormément l'employeur.
Je pense que, quand on parle des enjeux de l'immigration, l'enjeu de l'immigration et la volonté politique de faire une immigration économique réussie, si elle n'est pas partagée par l'industrie, si elle n'est pas comprise par l'industrie, il n'y aura pas d'adéquation. Si c'est seulement une volonté politique, ce n'est pas suffisant. Il faut absolument rallier l'industrie avec les politiques, avec les ordres professionnels, avec le ministère de l'Éducation, les chambres de commerce, bien sûr. Elles le font de plus en plus.
Le Président (M. Bernier): Merci. Mme la ministre.
Mme Weil: Oui, M. le Président. Ce matin, la CRE de Montréal, je leur ai posé la question si, à la lumière des 740 000 emplois qui devront être comblés d'ici 2014, il y a une réelle pression. Moi, lorsque je rencontre beaucoup d'employeurs, beaucoup en région, tous disent que, là, ils sentent réellement cette pression, et ils sont à la recherche, souvent, de métiers ou quelqu'un avec une qualification très, très spécifique. Il y a le PELI, maintenant, le Placement en ligne international, Passerelle pour l'emploi aussi. Et, eux, ils sentent qu'il y a peut-être une conjoncture, actuellement, qui va favoriser, avec toutes les actions qui ont été... des programmes, il y en aura peut-être sûrement d'autres, mais des projets pilotes et des initiatives très intéressantes à Montréal, avec la CRE, le mentorat, Diversité Montréal, Leadership Montréal, il y en a plusieurs, que finalement on devrait voir, ces prochaines années, un déblocage, pas dire que les questions précises que vous soulevez ne demeurent pas une préoccupation. Est-ce que, vous, vous sentez sur le terrain... Parce que les employeurs et les entreprises sont vraiment à la recherche. Est-ce que vous le sentez sur le terrain qu'ils sont à la recherche, qu'ils ont une inquiétude par rapport à la main-d'oeuvre et le...
Mme Stabler (Marie): Non.
Mme Weil: Non? Pas encore?
Mme Stabler (Marie): Pas les PME. Pas les PME. Très peu. Même si...
Mme Weil: À Montréal ou en région?
Mme Stabler (Marie): Les deux. Oui, même à Montréal, je pense qu'ils sont...
Mme Weil: C'est le jour au jour.
Mme Stabler (Marie): Et je dirais que les... De petites et moyennes entreprises, on s'entend, là. Les gestionnaires de petites et moyennes entreprises souvent ont besoin d'être au pied du mur, hein, pour prendre des décisions ou avoir une espèce d'orientation. Alors, pour l'instant, évidemment, les économistes prévoient, la Chambre de commerce évidemment le prévoit aussi, hélas, les petits gestionnaires n'en sont pas là. Et donc, par conséquent, l'option de l'immigration pour répondre à cette déqualification ou à cette pénurie de main-d'oeuvre, ce n'est pas encore une option pour eux, d'où l'importance encore plus de les sensibiliser et puis de leur apporter comme solution la main-d'oeuvre immigrante qualifiée.
Le Président (M. Bernier): Mme la ministre.
Mme Weil: Oui. Vous travaillez aussi avec les régions, les employeurs dans les régions. Pourriez-vous nous expliquer comment vous travaillez avec les régions pour faire cet arrimage? Le bassin, c'est surtout, j'imagine, le bassin d'immigrants qui se trouve à Montréal, les personnes qui sont à Montréal.
Mme Stabler (Marie): Oui, oui. Bien sûr, oui.
Mme Weil: Comment vous faites ce lien-là? Est-ce que vous utilisez la Passerelle pour l'emploi?
Le Président (M. Bernier): Mme Stabler.
Mme Stabler (Marie): Oui. On travaille, oui, de plus en plus avec les organismes qui ont été... qui se spécialisent en régionalisation dans différents centres, qui sont importants, qui sont pour nous une interface privilégiée, bien entendu. La relation avec l'entreprise en région est différente dans le sens où... évidemment beaucoup moins habituée à travailler avec évidemment la population immigrante, à la voir, à la considérer aussi, mais notre approche, tel que je l'ai expliqué tout à l'heure, elle est identique, hein? Rassurer l'entreprise, proposer une plus-value, c'est la même démarche. Mais, oui, travailler avec des organismes communautaires qui sont en place pour ça, oui, on va se rencontrer en région avec le candidat, l'entreprise et ces organismes communautaires qui travaillent, eux, beaucoup plus près de l'entreprise en région, hein? Ces organismes-là travaillent très, très près des régions, comparativement aux organismes communautaires montréalais, là.
Le Président (M. Bernier): Oui, Mme Mary, Aude de son prénom.
Mme Mary (Aude): Aude, oui. Bonjour, mesdames messieurs. Je voulais juste ajouter peut-être: Ce que Marie ne dit pas, c'est que, comme vous le savez très certainement, 80 % des immigrants que nous recevons au Québec décident de s'installer à Montréal et que par conséquent, dans notre programme, nous avons reçu beaucoup, beaucoup de travailleurs qui ne devraient même pas arriver dans nos bureaux, des agronomes en foresterie, toutes sortes de métiers qui ne devraient même pas passer par Montréal. Donc, par le fait même, de travailler avec ce type de personnes, évidemment, ça nous amène à travailler évidemment avec les régions, puisque jusqu'à présent on n'a pas vu d'agronome travailler au coeur même de Ville-Marie. Donc, c'est sûr qu'on a vraiment des besoins de ce côté-là, parce que la clientèle aussi qu'on reçoit évidemment n'est pas forcément en adéquation avec le marché du travail local uniquement à Montréal. Donc, on a besoin de travailler avec les employeurs de la région.
Le Président (M. Bernier): Merci. Mme la ministre.
Mme Weil: ...reste encore un peu de temps?
Le Président (M. Bernier): Il vous reste environ trois minutes.
**(14 h 40)**Mme Weil: Trois minutes. Je comprends que votre préoccupation, votre expertise, c'est vraiment la sélection pour l'intégration, donc comment bien faire cette sélection. Est-ce que vous avez une opinion sur les volumes? Nous, on propose, on parle de stabiliser, parce qu'on était vraiment en croissance depuis plusieurs années. L'idée, ce serait de stabiliser à 50 000 d'ici 2014. Parce qu'il faut que les gens comprennent, ce n'est pas demain matin qu'on peut réduire à 50 000, donc ce sera peut-être... C'est 52 000 l'année prochaine, bon, et puis graduellement on arrive à 50 000, l'idée étant justement que, ces dernières années, il y a beaucoup de projets, beaucoup de programmes qui ont été mis sur pied pour réussir l'intégration. On veut donner le temps à ces programmes, ces projets, ces initiatives de porter fruit pour que l'immigration soit une réussite. Et, pour que ce soit une réussite, il faut réussir l'intégration. Avez-vous une opinion sur cette orientation de vouloir stabiliser et réduire légèrement?
Le Président (M. Bernier): M. Chevalier.
M. Chevalier (Henri): Oui. Merci. Bonjour, Mme la ministre. Bonjour, messieurs. Bonjour, madame. Idéalement, il faudrait pouvoir resserrer les conditions de sélection des candidats de manière à ce qu'il soit plus simple de les intégrer sans changer le volume ou même peut-être en l'augmentant légèrement. Vous avez parlé tout à l'heure de 740 000 postes, disons, à pourvoir dans le prochaines années. Nous, notre souci, donc, comme disait tout à l'heure Marie, c'est plus le qualitatif. On est vraiment sur les clients directement. On se rend compte qu'il y a un décalage important. En termes de quantité, idéalement, si on pouvait ajuster la sélection de manière à conserver la même quantité... Parce que quelque part on a besoin des immigrants. Il faut qu'ils arrivent sur le marché du travail et qu'ils soient présents et disponibles.
Le Président (M. Bernier): Mme la ministre, vous avez...
Mme Weil: Juste pour spécifier, l'immigration va combler 15 % des ces 740 000 emplois, et l'autre élément, c'est qu'on a quand même les travailleurs temporaires, 25 000 par année, qui comblent aussi des besoins. Et, avec le programme PEQ, le Programme de l'expérience québécoise, donc, les étudiants qui viennent étudier dans nos universités, les travailleurs qui viennent travailler, on les met sur une voie rapide depuis 2010. C'est un programme très prometteur. Donc, on travaille sur différents fronts pour s'assurer de cet arrimage puis d'avoir les bonnes personnes pour le marché de l'emploi. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Bernier): Merci beaucoup. Merci. Nous allons donc passer du côté de l'opposition officielle. Bienvenue, M. le député de Drummond. La parole est à vous pour les échanges avec...
M. Blanchet: Merci bien, M. le Président. D'emblée, mes salutations, messieurs dames. Mes salutations aussi à Mme la ministre. C'est un plaisir d'être ici et d'avoir hérité de ce dossier, parce qu'outre les aléas des choix politiques qui se font c'est un sujet d'intérêt personnel marqué, pour plusieurs raisons. Avant, j'étais à la culture. Maintenant, j'ai hérité et de la langue et de l'immigration, que je considère comme deux doigts d'une même main. C'est ce qui fait que nous sommes une société d'accueil harmonieuse. Ce sont les outils sur la base desquels il faut travailler. Donc, c'est un sujet d'intérêt.
C'est une continuité parce que même à la culture je concevais la culture sous son acception la plus large, qui est l'ensemble des valeurs, des comportements, des idées qui conditionnent nos comportements en collectivité. Et évidemment, lorsqu'on arrive sur les questions d'immigration, avec tous les sujets et les sous-sujets que ça soulève, c'est absolument fascinant. Et ça fait appel à une passion qui ne m'a pas quitté depuis la fin de mes études, puisque j'ai une formation en ethnologie. Alors, je suis fort heureux d'être ici. Je suis aussi très heureux de collaborer avec mon ami Maka, avec qui je n'ai pas pu collaborer en commission parlementaire depuis longtemps. Et donc je suis convaincu qu'on aura des échanges fort intéressants.
Ma première question traite de l'allocation des ressources. Je pense que c'est évidemment le mot clé. Il y a une recherche normale d'adéquation entre les ressources qu'on va affecter à l'intégration harmonieuse des immigrants et bien sûr le nombre, le volume. On ne peut pas, suppose-t-on, réduire l'immigration à un exercice mathématique de nos besoins économiques si cet exercice se fait au détriment de notre capacité, comme nation, d'en assurer harmonieusement l'intégration. Et par «intégration» évidemment on parle de leur capacité d'adaptation économique mais aussi de leur capacité de développer une appartenance à la société d'accueil.
Lorsque donc vous parlez d'allouer les ressources, j'aimerais que vous puissiez détailler un peu, quand même dans les grandes lignes, là, je ne parle pas de quantification précise. Mais des ressources affectées à quoi? À quel type d'adaptation croyez-vous le plus important que nous nous attardions? Est-ce qu'il s'agit de ressources qui devront assurer d'emblée une compréhension, un choix d'une langue commune, qui est considéré comme un exercice essentiel pour l'adaptation au Québec? Est-ce que c'est une meilleure connaissance de l'ensemble des institutions? Est-ce que c'est un perfectionnement technique dans la perspective d'une intégration en milieu d'emploi? Où est-ce qu'il faut prioriser? Comment trouve-t-on cette espèce d'équilibre là pour ne pas simplement ouvrir l'accès à une main-d'oeuvre qui, outre son milieu de travail, sera destinée à ne pas fonctionner harmonieusement à l'intérieur de la société d'accueil?
Le Président (M. Bernier): Qui répond? Madame, en vous identifiant, s'il vous plaît.
M. Jeanmart (Monique): Monique Jeanmart. Je peux peut-être essayer de répondre parce que justement ce que je...
Le Président (M. Bernier): Mme Jeanmart.
M. Jeanmart (Monique): C'est justement ce que je fais à la CDEC avec les nouveaux immigrants. Notre expérience nous a montré que plus l'immigrant connaîtra, comprendra le Québec, comprendra le pourquoi des choses, pourquoi on parle français ici, pourquoi on tient au français et pourquoi... bon, qu'est-ce que c'est, la loi 101, pourquoi... il comprendra la dualité, qu'est-ce que c'est, la dualité, là, français-anglais, plus il connaîtra certains éléments de notre histoire, plus il comprend ce qui se passe actuellement, plus il comprend toutes les questions qui sont autour, plus facilement on peut l'intégrer au travail. Plus c'est quelqu'un qui semble comprendre déjà la société, moins il fera peur à l'employeur.
Et c'est pour ça que, dans la... C'est aussi ce qu'on dit. Quelque chose de particulier à notre programme, ils ont un huit jours à temps complet de formation dans lequel j'interviens pour une demi-journée, mais ensuite ils se retrouvent une fois par semaine en groupe, et c'est ça que j'assume avec eux. Et ce n'est pas, je veux dire, un package qui est tout fait en fonction de leurs besoins, en fonction des questions qu'ils posent. Je fais des ateliers avec eux dans lesquels justement je leur fais mieux comprendre ce qu'est le Québec, pas d'un point de vue juste... pas d'un point de vue économique. C'est justement la question culturelle, la question politique.
Toujours, toujours, toujours, la question vient. Justement, sur les questions politiques, ça les met un petit peu mal à l'aise, les situations des différents partis. Alors, il faut qu'ils comprennent quelques éléments de base d'histoire pour comprendre la situation actuelle. Et les groupes -- parce que je les prends en groupes -- ont en général quatre, cinq, six ateliers, un par semaine, pendant qu'ils font la recherche d'emploi, déjà, pour répondre justement à leurs questions, par exemple un atelier sur la santé, un atelier sur l'éducation, comment on fonctionne ici, notre système d'éducation. Beaucoup ont des enfants. Et justement je pense que c'est une des choses qui est importante chez nous aussi. Tous ceux qui sont passés chez nous nous disent, après, comment ils ont apprécié justement de mieux comprendre la société autour d'eux, qu'est-ce qu'un Québécois, qu'est-ce que c'est, le Québec, qu'est-ce qu'on attend d'eux ici.
Le Président (M. Bernier): Merci. M. le député.
M. Blanchet: Est-ce... Allez-y, monsieur.
Le Président (M. Bernier): Alors, Mme Samoila.
Mme Samoila (Adina): Oui. Je voudrais juste ajouter... Monique a parlé des ressources qui sont allouées plutôt pour la préparation des immigrants, mais ça serait aussi bien de considérer une meilleure préparation des entreprises, c'est-à-dire des agents qui expliquent à ces entreprises qu'il y a des programmes, des incitatifs financiers qui pourraient les aider si elles décident d'embaucher des immigrants, comme c'est le cas du PRIIME, parce qu'on s'est aperçu, dans la pratique, qu'il y a des entreprises à Montréal qui ne connaissent pas l'existence de ce programme et donc les bénéfices que ce programme peut apporter pour leur entreprise et bien sûr pour l'immigrant. Et bien sûr il y a des entreprises à l'extérieur de Montréal qui ne connaissent pas ce programme et plusieurs autres informations que les entreprises ne connaissent pas.
Comme Marie a dit, l'information existe, elle est disponible sur des sites Internet, mais, encore une fois, les entreprises ne font pas le geste d'aller chercher l'information ni peut-être assez souvent, en cas de besoin. Et donc cette préparation des entreprises effectuée par des agents d'Emploi-Québec, du ministère de l'Immigration, qui se ferait sur le terrain, augmenterait les chances pour la population immigrante pour qu'elle soit considérée comme une alternative viable de main-d'oeuvre, viable, disponible et intéressée, bien sûr, et compétente.
Donc, une partie des ressources financières et matérielles qu'un gouvernement pourrait allouer devrait absolument être dirigée vers la petite et moyenne entreprise québécoise à Montréal, et peut-être encore plus en région, pour que ces entreprises soient sensibilisées à l'existence de la main-d'oeuvre disponible. Si on peut présenter aux immigrants des entreprises qui sont prêtes à les accueillir en région, c'est sûr que les immigrants, au moins une partie d'entre eux, pourront vaincre leur peur des régions et pourraient accepter un peu plus facilement de se déplacer.
**(14 h 50)**Le Président (M. Bernier): Merci. M. le député.
M. Blanchet: Je pense que monsieur voulait compléter.
M. Chevalier (Henri): Je voulais... Pardon. Henri Chevalier. Je voulais simplement ajouter... Disons, Adina et Monique ont toutes les deux dit chaque côté du programme pilote qu'on a à la CDEC. On prend les immigrants, on parle aux entreprises et on accompagne les deux. On les tient chacun par la main jusqu'à ce qu'ils se tiennent la main entre eux sans nous et on les accompagne. On leur explique le programme PRIIME, on prépare les immigrants. C'est un tout, en fait. Je pense que l'accompagnement de l'immigrant qui arrive... Je suis moi-même immigrant. Vous avez reconnu mon accent. Ça fait sept ans que je suis au Québec, qu'on est au Québec, parce que je suis venu en famille. J'ai eu un moment où j'étais un peu... ça a flotté. Je ne savais pas trop où aller, vers quoi me diriger. Simplement en accompagnant, en investissant dans l'accompagnement de l'immigrant pour rejoindre le marché du travail, on va économiser beaucoup d'argent et on va avoir beaucoup d'efficacité. Je pense qu'il y a beaucoup d'immigrants qui sont disponibles sur le marché. Simplement, ils ne savent pas trop comment faire. Ils sont très adaptables très rapidement. Et dans notre programme on a quand même un taux de placement qui est autour de 70 %. Pour des gens qui sont nouvellement arrivés, avec en moyenne six mois de présence au Québec, c'est un très bon taux de placement. Donc, on peut avoir des bons résultats avec un investissement ciblé dans l'accompagnement des immigrants.
Le Président (M. Bernier): Merci. M. le député.
M. Blanchet: Chacune de vos réponses soulève des questions toutes plus fascinantes les unes que les autres. Vous avez soulevé la question du rôle des entreprises dans l'intégration, dans l'accueil et l'intégration, et bien sûr faisant appel à une bien meilleure compréhension de la réalité des communautés immigrantes, qui sont d'origines, d'ailleurs, multiples, et de la capacité de les intégrer autrement que comme -- passez-moi l'expression -- que comme outils à l'intérieur d'une entreprise. Ça me semble un enjeu fondamental. Ça appelle une formation des entreprises, donc un autre type de ressources et un autre type d'expertise, qui va se transmettre à deux étages, si je peux m'exprimer comme ça. Et ça, donc, je comprends de votre commentaire que ce n'est pas adéquat et je présume, et vous me le préciserez, que, si on sort de la grande région de Montréal, c'est encore moins le cas, même dans des secteurs fortement industriels, comme par exemple ma circonscription, Drummond. C'est fortement industriel, une passablement importante présence immigrante à Drummond.
Madame soulevait le point que les immigrants ont une réticence à sortir de Montréal. Est-ce qu'il y a des efforts adéquats de faits, de votre point de vue, pour que les communautés immigrantes, les gens qui arrivent au Québec se voient présenter les charmes -- et Dieu sait que ma circonscription est charmante -- les charmes de l'ensemble du Québec comme milieu d'accueil, comme milieu de vie, comme milieu d'intégration, peut-être momentanément un peu plus difficile parce que tu es plus isolé du reste de la communauté, mais à moyen terme plus, comment dire, efficace et fluide?
Le Président (M. Bernier): Bon, Mme Mary? Mme Samoila? Je ne sais pas qui... Mme Mary, oui.
Mme Mary (Aude): J'ai entendu tout à l'heure que vous aviez une formation en ethnologie. C'est mon cas également. Je voudrais dire justement, à ce propos, que, si les immigrants ont peur d'aller en région, comme disait Marie tout à l'heure, c'est avant tout parce qu'ils vont sortir d'un entre-soi qui est évidemment très rassurant. Et évidemment il faut bien, à un moment donné, qu'il y en ait qui sautent en effet le premier pas. Et, lorsque peut-être, on l'espère, d'ici quelques années, en effet, de nombreux immigrants, j'espère, auront fait le choix de la région, puisqu'il y a beaucoup de potentiel à la fois en termes de travail et de qualité de vie et que oui, malheureusement, ici le marché commence à être saturé par le fait même du nombre... donc on espère que certains d'entre eux vont sauter le pas. Et ils sont quand même nombreux à le faire. On a eu quand même de belles réussites en région. Et c'est souvent, en plus, c'est vrai, de belles réussites. Et ils sont souvent très bien accueillis par la communauté à la fois dans leur travail ou simplement la communauté sociale là où ils se trouvent.
Donc, en fait, c'est ça, c'est vraiment leur faire comprendre que, oui, évidemment, il y a beaucoup d'opportunités en région. Mais, je veux dire, bon, vous avez entendu, on est tous immigrants à cette table. Moi, ça fait un peu plus de quatre ans que je suis là, ici. Et c'est vrai que l'angoisse de l'immigration, quand on part de chez soi, quand on quitte sa famille, ses amis, son travail, qu'on arrive... Bon, ils sont quand même nombreux à connaître, à avoir déjà de la famille installée ou des amis, et le fait même de savoir que... même si c'est une personne qui est un ami d'un ami, rien que ça, c'est rassurant de se dire qu'on n'est pas tout seul, même si on ne va peut-être pas contacter cette personne.
Donc, c'est vrai que c'est difficile. Et je suis sûre que nombre d'entre eux sont conscients qu'il y aurait des possibilités en région, mais c'est vrai que peut-être ils se disent qu'ils seront encore plus seuls qu'ils ne le sont déjà dans le cas de l'immigration. Et c'est pour ça que peut-être des initiatives parfois toutes simples de jumelage entre des immigrants déjà installés ou des Québécois de souche en région avec les personnes nouvellement arrivées...
On a eu le cas d'une jeune Marocaine, Fatima, qui est partie travailler dans la région de Trois-Rivières. Et on a applaudi grandement l'initiative de son entreprise, où un jeune homme qui travaillait dans cette entreprise, lui-même Québécois mais marié avec une Marocaine, a pris tout seul l'initiative de donner de son temps pour justement accueillir à la fois les nouveaux travailleurs dans l'entreprise mais plus spécifiquement les travailleurs immigrants. Et il a accueilli Fatima. Avec sa femme, il l'a accompagnée, il l'a aidée à trouver un appartement, et elle s'est sentie accueillie. Et cette jeune fille là qui a... Je pense, elle avait 32 ans. Lorsqu'elle est partie du Maroc, elle vivait encore chez ses parents, elle n'était pas mariée, je veux dire, elle était comme sortie de l'oeuf. Et on a vraiment tellement été fiers d'elle d'avoir sauté le pas. Mais je suis sûre que vraiment cet effet d'accueil, de se dire que, oui, quelqu'un l'attendait, ça l'a beaucoup rassurée.
Alors, peut-être il faudrait systématiser, en région, des programmes d'accueil mais tout simples. Là, on ne parle pas de formation, on ne parle pas forcément d'intégration en emploi, on ne parle pas forcément d'organisme communautaire, simplement des personnes qui donneraient de leur temps simplement pour dire: Bienvenue, et je t'accueille dans ma communauté et dans ton nouveau milieu de vie. Et je pense que ça, ce serait très rassurant.
Le Président (M. Bernier): Mme Stabler. Vous voulez rajouter quelque chose, Mme Stabler? Ça fait plusieurs fois que vous me faites...
Mme Stabler (Marie): Oui, parce que je ne veux pas perdre mon idée, bien que, non, elle n'est pas très loin. J'entends évidemment ce que mes collègues disent et je l'appuie, bien entendu. Or, il ne faut pas oublier qu'outre ces dimensions qui sont très sociales, psychologiques et culturelles il y a définitivement une dimension qui est purement économique. Et, si on veut effectivement qu'une immigration soit harmonieuse, il faut nécessairement et obligatoirement que l'industrie daigne cette harmonie. Si on a juste un accueil d'une Marocaine à Trois-Rivières pour s'installer et pour trouver IGA et Jean Coutu, c'est le fun, c'est important, bien entendu, c'est rassurant, bien entendu, mais, si, Mme Marocaine, en bout de ligne, il n'y a pas d'entreprises qui l'utilisent, il n'y a pas d'entreprises qui lui font confiance, il n'y aura pas d'harmonie. L'harmonie, elle est là parce qu'il y a une intégration économique, il y a un pouvoir d'achat, il y a un réel sentiment d'intégration. Et l'intégration, ce n'est pas juste pour savoir où est IGA et Jean Coutu, il est clair.
Alors, la sensibilisation, elle doit être faite auprès de l'industrie à Drummondville, à Trois-Rivières, à Sherbrooke et aussi à Montréal. Il doit y avoir des plans de formation de tous les intervenants institutionnels et communautaires en gestion de la diversité culturelle, chose qui n'est pas faite systématiquement. Et ça, c'est important, c'est ce qui va rassurer l'industrie. On parle du monsieur marocain qui tient la main de Fatima. Il faut que l'entreprise aussi soit tenue par la main pour intégrer Fatima.
Le Président (M. Bernier): Je vais permettre au député de reposer une question, madame, si vous permettez.
**(15 heures)**M. Blanchet: Je vais essayer de faire ça très rapidement. Vous avez référé à l'entre-soi et vous aviez référé plus tôt au multiculturalisme. Évidemment, vous connaissez tout le débat. Maintenant, un certain nombre de personnes évitent le terme «multiculturalisme» parce qu'il s'est vu infliger la définition qui lui convient: c'est une doctrine qui a une vocation bien précise. Et là on parle d'interculturalisme, qui n'a pas de définition consensuelle encore.
À un moment donné, dans l'exercice, il faut nuancer l'entre-soi. Autrement dit, je pense -- et je veux avoir votre commentaire là-dessus -- qu'il faut que les gens qui sont davantage intéressés à venir au Québec, et peut-être, en partant, eux, au Canada, comprennent qu'ils doivent renoncer à l'absolue sécurité d'une communauté qui est similaire à leurs propres valeurs et à leur propre culture originale. Pourquoi? Parce que, là, on est en multiculturalisme, on organise, on structure ce qui sera ultimement... bon, «ghetto», le mot est fort, mais des communautés relativement étanches, imperméables, d'une part.
Et, d'autre part, l'autre question très rapide, l'immigration économique a d'emblée une vocation économique, et donc l'intégration se fait d'emblée sous l'angle de la participation au marché du travail. Il y a une grosse partie de l'immigration qui n'est pas de l'immigration économique, qui est de l'immigration, je dirais... mettrais sous le chapeau large de l'humanitaire. L'immigration humanitaire arrive avec un rêve mais qui n'est pas d'emblée structuré autour de l'idée d'un emploi précis. L'étape à franchir, le pas à franchir est supplémentaire et d'autant plus lourd, en termes de ressources pour ces gens-là, parce qu'évidemment le milieu économique va vouloir absorber les employés employables, peut-être au détriment de ceux qui le sont moins. Est-ce que les ressources sont adéquates pour adapter tout ce tiers de l'immigration qui arrive beaucoup plus démuni encore?
Le Président (M. Bernier): Vous avez une minute pour donner une réponse. Quelle personne est la plus concise? Mme Samoila, allez-y.
Mme Samoila (Adina): Je voudrais peut-être commenter pour vous dire: Oui, les ressources sont peut-être adéquates, quand il s'agit de la préparation des immigrants, si on parle, par exemple, aux cours de francisation pour les immigrants catégorie humanitaire qui arrivent ici sans parler le français. Il y a aussi des organismes, à Montréal et en région, qui s'assurent de... qui veulent les préparer, qui les préparent pour intégrer le marché de l'emploi, côté C.V., côté présentation de soi-même, de ses réalisations.
Par contre, et je reviens encore une fois à l'idée des entreprises, pour les entreprises aussi, on devrait allouer des ressources qui préparent les entreprises en région à recevoir ce type de main-d'oeuvre. Parce que je pourrais peut-être citer quelques cas, dans la région de Saint-Hyacinthe, où des activités ont été organisées pour les immigrants et pour les entreprises locales, et les entreprises ne se sont pas montrées très intéressées pour rencontrer les immigrants, se sont présentées en petit nombre à des déjeuners d'affaires, se sont présentées en petit nombre pour faire le tour de la zone industrielle, et donc il y a des immigrants qui ont raté des chances à plusieurs occasions. Et c'est sûr que, si ça arrive une fois et l'immigrant retourne à Montréal, c'est un mouvement qu'on connaît très bien, il ne reviendra, je peux vous assurer, plus jamais en région.
Le Président (M. Bernier): Merci aux représentants de la Corporation de développement économique communautaire LaSalle-Lachine, M. Chevalier, Mme Stabler, Mme Samoila, Mme Jeanmart, Mme Aude Mary. Merci de votre participation à cette commission parlementaire. Ce fut fort intéressant.
Je vais suspendre quelques instants pour permettre aux représentants de Vision Montréal de prendre place. Merci.
(Suspension de la séance à 15 h 3)
(Reprise à 15 h 6)
Le Président (M. Bernier): Donc, à l'ordre, s'il vous plaît! Nous allons reprendre nos travaux. Alors, je souhaite une bon après-midi et bienvenue à l'équipe de Vision Montréal, représentée par -- et bienvenue chez vous, Mme Harel, hein, bienvenue chez vous -- Mme Harel, Louise Harel, Mme Anie Samson, Mme Marisa Celli, Mme Viviana Espinoza. Il y a une personne dont je n'ai pas le nom, qui...
Une voix: Mme Bekhechi.
Le Président (M. Bernier): Bekhechi... pouvoir l'identifier. Donc, vous avez 15 minutes pour faire votre présentation. Par la suite, nous allons échanger avec les parlementaires. La parole est à vous.
Vision Montréal (VM)
Mme Harel (Louise): Alors, bonjour. C'est un plaisir d'être parmi vous. D'abord, il fait très beau à Québec, et c'est une très, très belle ville. Cependant, en cherchant un stationnement, on avait l'impression d'être encore à Montréal. Il y a tellement de travaux autour du Parlement.
Alors, vous savez, la réalité... Nous sommes cinq femmes. En fait, on me faisait remarquer qu'il y aura Mme Barbe aussi, qui est conseillère municipale au comité exécutif de la ville de Montréal, qui viendra présenter, je pense, un mémoire -- ou elle est déjà venue, c'est ça -- au nom de la conférence régionale des élus. Il y aura aussi, je pense, demain Mme Deros qui viendra au nom de ville. Et je ne veux pas que vous ayez l'impression que la politique municipale est juste féminine, n'est-ce pas? Mais le fait est que je suis accompagnée, en fait, d'Anie Samson, qui est mairesse de l'arrondissement Villeray--Saint-Michel--Parc-Extension. Et l'arrondissement, là, c'est 113 communautés qui cohabitent dans cet arrondissement. C'est un des deux arrondissements que le Conseil interculturel de Montréal, qui a rendu public un avis absolument formidable, j'espère que vous avez pu en prendre connaissance ou que vous aurez l'occasion d'en prendre connaissance... c'est un des deux arrondissements qui ont été étudiés aux fins de l'application de la loi sur l'égalité en emploi, et on vous en dira un mot tantôt. Mais voyez les personnes qui m'accompagnent: Viviana Espinoza-Iturriaga, elle est d'origine chilienne, Nawal est d'origine algérienne, et Marisa est d'origine italienne. Alors, nous sommes en minorité, et nous sommes les deux, finalement, de souche, et c'est la réalité, en fait, montréalaise.
Bon, il est bien évident, quand on vient -- je l'ai fait pendant quelques années, comme vous le savez -- quand on vient vous présenter des mémoires, ce qu'on souhaite au départ, c'est de vous tracer le portrait de ce qui nous apparaît être une problématique à résoudre, hein, parce que peu de gens, s'ils sont très, très contents, vont venir vous visiter pour vous dire: Continuez. Ça, de tout temps, c'est comme ça que ça s'est passé.
Alors, la problématique à résoudre au premier chef -- on pourra vous parler dans l'échange, si vous le voulez, de d'autres aspects -- ça reste celle de l'emploi. D'abord, parce que l'île comme telle, là, l'île de Montréal, dernières statistiques de l'Institut de la statistique du Québec, c'est un taux de chômage qui nous met à l'avant-dernier rang de toutes les régions du Québec, l'île de Montréal, la ville de Montréal, en n'oubliant jamais que Montréal, métropole du Québec et finalement locomotive économique... Mais, en termes d'emplois, c'est 9,5 %, derniers... disons, dernières informations du semestre du printemps. 9,5 %, île. Mais autour, Laval, 6,5 %, Laurentides, autour de 7,2 %, Lanaudière, autour de 7,8 %, en fait, vous voyez, donc un écart, un écart qui est assez considérable parce que l'ensemble de toutes les autres régions du Québec finalement, sur le plan de l'emploi, performe mieux.
**(15 h 10)** Donc, il y a un défi particulier, puis ce défi, on le dit bien simplement, c'est celui de l'intégration en emploi des nouveaux arrivants. Alors, ce défi est extrêmement important dans cet avis du Conseil interculturel de Montréal. On y lit ceci. Je les cite, eux. On avait des chiffres aussi dans notre mémoire, mais c'est plus récent. Mais c'est aussi parce que c'est indubitable et qu'on a adopté cet avis au conseil de ville hier. Alors, ça fait quand même l'unanimité dans les rangs de toutes les formations politiques.
Alors, vous voyez, le taux de chômage des immigrants était beaucoup plus élevé, 12,6 % chez les... du total de ce qu'on appelle les immigrants. Les immigrants, en fait, ce sont les minorités ethniques, hein, qu'on distingue des minorités visibles, hein? Vous connaissez ces catégories, évidemment. Les minorités visibles, c'est 14,5 %, 14,5 %. Et, chez en fait les Montréalais de naissance, c'est 6,8 %. Vous voyez l'écart, hein: 6,8 %, 14,5 %, un peu plus de 12,5 %. Donc, c'est un écart qu'on reconnaît tous qu'il faut combler, particulièrement dans les sous-groupes, tel, par exemple, le groupe d'immigrants arabes. Alors là, les immigrants d'origine arabe, ce sont ceux provenant du Moyen-Orient qui affichent le taux de chômage le plus élevé, 20 %, suivi des Asiatiques du Sud-Est, 16,2 %, et des Noirs -- je lis toujours le rapport du Conseil interculturel -- 15 %. Hein, il y a là un défi encore plus particulier. Bon.
Ce qu'on souhaite, ce qu'on aimerait en fait obtenir, on y a réfléchi. Et je remercie Viviana, en fait, qui nous a beaucoup aiguillonnés sur ces questions, Marisa également. Mais on a vraiment réfléchi à plusieurs occasions. Qu'est-ce qu'on peut faire de mieux? Qu'est-ce qu'on peut faire de plus?
D'abord, c'est bien sûr que la diversité à Montréal, là, c'est son ADN, hein? La diversité, ça se célèbre à Montréal. Il n'y a pas d'expression, là, de rejet, d'aucune façon, de la diversité. On est extrêmement chanceux, parce que, vous voyez, Anie Samson me faisait part, là, d'un sondage Ipsos, sondage que peut-être la ministre connaît ou peut-être son ministère, hein, qui a été fait dans plusieurs pays cet été, un sondage qui révèle qu'on est un cas d'exception, pas au Québec, mais au Canada, puisque les immigrants ne servent pas de bouc émissaire à la situation économique. Il faut dire qu'heureusement la situation économique ne s'est pas détériorée comme ce fut le cas également en Europe. Mais il demeure donc que, si on ne règle pas par ailleurs les problèmes qui se présentent...
Vous savez, je n'ai pas à vous dire à quel point l'amertume, qui s'intensifie chez ceux qui ont le sentiment d'être venus habiter ici et d'avoir été en fait mal informés ou d'être venus sous fausse impression, hein... Parce que cette amertume, bien ce ressentiment, le danger, bien sûr, c'est qu'il se propage dans toute la famille. Très souvent, vous savez, la première génération, elle est prête à prendre tous les blâmes d'avoir pris la décision d'immigrer. Elle est prête à faire tous les sacrifices qu'il faut, parce que c'est elle qui l'a décidé, puis elle est prête à l'assumer. Mais, moi, ce qui me préoccupe beaucoup, c'est toujours: Que deviendra la deuxième génération, celle qui est née ici, celle qui n'a pas de patrie là où ses parents sont nés, celle pour qui la patrie, c'est ici?
Alors, cette deuxième génération, si elle ne trouve pas sa place, là, il y a un immense danger. Bon, on l'a vu en France, on l'a vu aux États-Unis, cette deuxième génération, à un moment donné, se met, disons, à faire des choses qui, disons, ne sont pas acceptables mais qui en même temps révèlent un problème de société. Un problème de société, bien je réfère, comme vous pouvez l'imaginer, à tous ces nombreux incidents qui ont pu avoir lieu dans les banlieues, en fait, à Paris ou aux États-Unis.
Vous voyez, à Montréal, disons qu'un bon virage est nécessaire. Un virage est nécessaire, entre autres, dans la fonction publique montréalaise. Là, on a les chiffres les plus récents, ceux qui ont été revérifiés par la Commission des droits de la personne, et ces chiffres révèlent qu'au cours des cinq dernières années le Programme d'accès à l'égalité en emploi, de 2006 à 2010 -- c'est récent, là -- 2006 à 2010, oups, rien n'a changé, vous voyez? Par exemple, minorités ethniques, le Programme d'accès à l'égalité en emploi, pour Montréal employeur -- parce que Montréal est un des plus importants employeurs, n'est-ce pas, sur le territoire, plus de 21 000 employés -- alors, minorités ethniques, 2006, 4,9 %, puis, 2010, 4,8 %. Alors, vous voyez, en cinq ans, ça n'a pas bougé, comme s'il était nécessaire de le démontrer. Mais, minorités visibles, ça a bougé un peu: 6,1 %, c'est passé à 8,5 %. 6,1 % il y a cinq ans, et puis 8,5 % en 2010. Alors, c'est très, très lent. À ce rythme-là, ça va prendre un siècle, hein?
Donc, il y a un coup de barre, hein, il y a un bon coup de barre à donner, et c'est la raison pour laquelle on souhaite que Québec accepte d'élargir la responsabilité sociale de la ville de Montréal à titre d'employeur, afin que les responsabilités découlant de la Loi sur l'accès à l'égalité en emploi dans des organismes publics soient également appliquées aux contractants et entreprises faisant affaire avec la ville de Montréal. Ce que ça signifie, c'est que les gouvernements, les administrations publiques embauchent de moins en moins, pour toutes sortes de raisons que l'on connaît tous, et c'est certain que le faire-faire, que les gouvernements adoptent et les administrations publiques aussi, ce faire-faire auprès de fournisseurs de services ou auprès d'entreprises, bien ça va supposer qu'on révise la Loi sur l'accès à l'égalité en emploi dans les organismes publics pour accepter que cette loi soit élargie à ceux qui contractent avec l'État ou qui contractent avec la ville, si vous voulez. Alors, voilà.
En fait, il y a d'autres aspects. Je vous disais tantôt que Mme Samson, dans son arrondissement, il y a 113, disons, communautés d'origines diverses, et elle m'a appris à peu près tous les mots de salutation dans à peu près je ne sais combien de langues, mais il y a une cohabitation qui est heureuse. Vous savez, par rapport à ce qu'on propose, nous, on pense que c'est, disons, que c'est raisonnable de vouloir un peu de temps d'arrêt, là, pour pouvoir regarder comment on peut faire pour faire mieux, en termes d'intégration. C'est raisonnable, ce qui est proposé en termes de ratio d'immigration pour les prochaines années, puis qu'on puisse faciliter l'intégration. Il me semble que c'est là un des défis qu'on a tous à relever.
Alors, en même temps, on se le dit beaucoup entre nous, des travailleurs qualifiés, il est bien sûr qu'il faille de plus en plus, dans la sélection, se rapprocher des besoins de main-d'oeuvre, parce que c'est pour ça qu'ils viennent ici, c'est pour gagner... réussir leur vie en la gagnant. C'est bien sûr que, pour ce qui est des réfugiés, on est conscientes, parce qu'on a des exemples à vous donner, ce sont souvent des personnes... Il y a une absence, là, d'accompagnement dans les services. Souvent, les gens ne parlent ni français ni anglais, ils ne connaissent même pas les services auxquels ils pourraient avoir accès. Et là je pense qu'il y a un effort particulier à faire, Anie pourra vous en parler aussi. Alors, je ne sais pas si...
Le Président (M. Bernier): Mme Samson.
Mme Samson (Anie): Bien, peut-être revenir sur les recommandations. Tout d'abord, merci de nous recevoir ici. Je vais juste prendre quelques minutes. C'est parce que je pense que Mme Harel a déjà pris notre 15 minutes qui nous était alloué.
Le Président (M. Bernier): Non, allez-y, Mme Samson. Il vous reste environ sept minutes.
Mme Samson (Anie): Ah, mon Dieu!
Le Président (M. Bernier): Vous voyez, Mme Harel a été économe.
Une voix: C'est bon, ça.
Mme Harel (Louise): C'est rare.
**(15 h 20)**Mme Samson (Anie): Vous avez reçu notre mémoire, avec les différentes recommandations. Lesquelles sur ce... j'aimerais bien, peut-être, vous entretenir, c'est les recommandations 8, 9 et 10. Lorsqu'on parlait d'intégration, Mme Harel vous a parlé beaucoup d'emploi. Moi, je vais vous parler beaucoup de vie concrète sur le terrain, avec les immigrants qui choisissent de venir ou de choisir pays chez nous. On aimerait bien, et c'est ce qu'on voit, nous, sur le terrain, que le gouvernement puisse peut-être améliorer les services de francisation dans lesquels les immigrants ont droit, soit les rendre obligatoires, entre autres pour des mises à niveau. Donc, il y a beaucoup de Maghrébins qui parlent français qui arrivent ici, mais sur la langue de travail ils n'ont pas les mêmes termes. Donc, je pense qu'un rôle important que le gouvernement pourrait faire, c'est d'offrir à tous nos nouveaux arrivants des cours de francisation ou des cours de mise à niveau pour que les gens arrivent ici déjà préparés. Parce que, comme Mme Harel le disait, lorsque les immigrants arrivent à l'aéroport, souvent ils sont laissés pour compte et doivent faire eux-mêmes ces démarches-là. Donc, on suggère d'avoir des mesures d'accompagnement qui pourraient davantage les aider à se qualifier pour des emplois.
Également, aussi, pour en avoir parlé avec la ministre, ce qui pourrait être intéressant, c'est aussi d'intégrer des cours de droits et devoirs civiques des citoyens. Beaucoup, dans mon arrondissement, que je reçois régulièrement, soit des immigrants réfugiés, soit des immigrants économiques qui viennent ici pour travailler, qui ont de la difficulté à trouver des emplois malgré les diplômes qu'ils ont, parce qu'ils n'ont pas, peut-être, la même langue de travail, donc des termes qui ne sont peut-être pas les mêmes, aussi leurs droits et leurs obligations...
Un des rôles que nous avons dans l'arrondissement, que je me suis donné comme responsabilité à titre de maire, c'est, dans les cours de francisation où mes immigrants vont, c'est de faire une entente avec l'école, entre autres, et de permettre, dans leurs cours de trois mois, d'avoir une obligation de venir visiter la mairie. Et à la mairie je prends deux heures avec eux pour leur expliquer leurs rôles et leurs devoirs à titre de citoyens. Et souvent les gens ne le savent pas. Ils arrivent dans un pays, ils y vivent, mais ils ne comprennent pas les règles, les règlements, qu'ils ont des droits, qu'ils peuvent participer aux assemblées publiques, qu'ils ont le droit de donner leurs opinions, puis sans qu'il y ait de mesure, s'ils sont contre ou pour nous, qu'il n'y ait pas de mesure contre eux. Donc, ils ont le droit de s'exprimer. Et depuis sept ans je peux vous dire que... C'est petit groupe par petit groupe, mais ce serait bien qu'on puisse le faire à grands groupes mais de tous âges aussi, de toutes générations. Mais ces gens-là viennent petit à petit au conseil d'arrondissement, au conseil municipal. On les voit de plus en plus s'impliquer dans le milieu communautaire, qui est un réseau extrêmement important, et on les voit dans les organismes, pas nécessairement des organismes de leur culture mais des organismes qui touchent toutes sortes de services. Et ça, pour moi, c'est une forme d'intégration.
Mais on doit aller les chercher, souvent, et les accompagner. Beaucoup viennent nous voir parce qu'ils sont à bout de ressources, n'ont pas les réseaux, ont peur de communiquer, ont peur de sortir. Ils ne savent pas. Mais c'est pour ça que ce qui pourrait être intéressant, c'est qu'avec le gouvernement vous puissiez avoir un système d'accueil qui va pouvoir les suivre, que ce soit le gouvernement ou des organismes mandatés, une façon de pouvoir faciliter leur intégration. Il ne faut pas que ça dure trop longtemps non plus parce qu'à partir du moment où on les prend toujours en charge l'intégration va se faire beaucoup moins vite. Mais d'une façon rapide, dans les premières semaines, qu'on puisse au moins les encadrer, les diriger et après ça les laisser, après ça, s'intégrer. Mais il faut vraiment qu'on puisse...
En tout cas, c'est les lacunes que, nous, on voit au quotidien, là, dans notre vie, là. De la façon dont les gens viennent nous voir, c'est beaucoup parce qu'ils ont besoin d'avoir un petit peu plus d'encadrement sur les services qui sont offerts. Et effectivement, oui, au niveau de l'emploi, je pense que tout passe par là, hein? L'intégration d'une communauté ou des citoyens passe par là.
Un des bons points, peut-être -- je terminerais en parlant du français -- une des bonnes décisions qui a été prise, c'est d'obliger les enfants à aller à l'école en français. Et on s'en rend compte, parce que souvent les parents, première génération, qui ont sacrifié leur vie pour avoir une meilleure vie pour leurs enfants, lorsqu'on va dans les activités, les enfants qui parlent français, ils l'ont appris à l'école, pas à la maison. Et la seule façon d'apprendre le français, c'est d'aller dans les cours. Et ces enfants-là servent d'interprètes aux parents, lorsque les parents vont voir les professeurs. Et pour eux, les enfants, ça leur donne une force encore plus importante dans la famille. Mais les parents, cette première génération, ont beaucoup de difficultés à suivre l'évolution des enfants. Donc, tous les cours d'intégration, les cours de suivi d'école après les classes, ça se fait par des organismes.
Le Président (M. Bernier): Merci, Mme Samson.
Mme Samson (Anie): C'était la... On voulait mettre la table.
Le Président (M. Bernier): Mme Harel, merci. Merci de votre présentation. Nous allons donc procéder aux échanges. Mme la ministre, la parole est à vous.
Mme Weil: Oui. Alors, bienvenue. Je vous vois beaucoup sur le terrain évidemment, beaucoup d'événements. Mme Harel et moi, on se croise beaucoup, beaucoup. Évidemment, comme ex-ministre de l'Immigration, on a souvent des échanges très, très, très intéressants, puis je vois que la passion est toujours là, la passion pour l'immigration. Et c'est vrai que Montréal, c'est la réalité quotidienne. Donc, je veux en profiter, parce que vous connaissez la réalité, et Mme Samson la connaît très bien.
On parle beaucoup de régionalisation de l'immigration. Je pense que vous appuyez cette notion, puis il y en a beaucoup qui disent qu'on devrait aller plus loin. L'intégration en emploi, évidemment, c'est le nerf de la guerre, hein, on le sait, donc l'accompagnement. Mais vous avez touché... puis je voudrais juste, d'entrée de jeu, toucher cette question de cours civique. Ça revient de temps en temps. Je pense qu'en France c'est obligatoire. Il me semble qu'en France c'est obligatoire. J'aimerais ça juste qu'on creuse un peu plus cette question-là. Parce qu'évidemment il y a différents profils d'immigrants, hein? Il y a l'immigrant très, très qualifié et très scolarisé, qui s'intègre très rapidement, hein? On pense à beaucoup en Europe. Ils s'intègrent rapidement. On a un service d'accueil, évidemment, dans un premier temps, et ensuite les personnes sont référées à des organismes communautaires et, dépendant des besoins...
Je pense que, Mme Samson, vous, vous voyez beaucoup, dans votre ville, peut-être aussi un autre profil d'immigration où ces cours seraient très bénéfiques, beaucoup pour les femmes. Et je pense qu'il y a peut-être lieu de parler de cette question des femmes, parce qu'il y a une préoccupation. Je le vis dans un autre dossier, où on a entendu beaucoup d'organismes nous parler de cette question de l'égalité entre les hommes et les femmes, comment la femme immigrante peut trouver sa place. Elle est sous-employée. Souvent, elle a des qualifications élevées, mais elle ne trouve pas le niveau d'emploi, D'ailleurs, il y a un groupe qui est venu nous parler de cette question. Donc, je pense, c'est un grand enjeu, et on le voit beaucoup sur le terrain, à Montréal.
On voit aussi beaucoup de belles choses, hein? Je pense qu'il faut faire la part des choses. L'immigration, 70 % économique, il y a des belles histoires d'intégration. Mais il y a une autre portion, et la CRE est venue ce matin parler de beaucoup d'initiatives qu'ils ont lancées. Parce qu'on a une entente avec la CRE, une entente avec la ville de Montréal, deux ententes pour travailler la question de l'intégration. Je veux peut-être vous entendre juste un peu plus sur comment on pourrait... et si vous voyez ça... Donc, ce serait obligatoire, mais on pourrait peut-être voir le profil d'immigrant aussi.
Mme Harel (Louise): En fait, ce qui est...
Le Président (M. Bernier): Mme Harel.
Mme Harel (Louise): Oui. Bon, d'abord, ça nous fait plaisir d'être ici de façon plus formelle, parce qu'il y a eu, je pense, une douzaine de fois, depuis quelques mois, où nous avons pu en parler, de ces questions qui vous préoccupent aussi beaucoup. Et, vous savez, j'ai un regret, moi. C'est que les COFI jouaient ce rôle-là aussi. Bien évidemment, on a voulu les transformer pour que les cours de français puissent se donner à d'autre niveaux, à l'intérieur de l'enseignement régulier, secondaire, collégial ou universitaire. Mais les COFI servaient à plus que simplement à franciser. Ils servaient aussi à donner le code d'entrée dans la société, à expliquer comment utiliser une carte de guichet automatique, servaient aussi à plein de choses et à expliquer les règles de vie en société.
Mme Samson nous racontait, pendant le dîner, que lors d'un 8 mars, dernièrement, dans une mosquée, elle a fait un discours éloquent sur l'égalité des hommes et des femmes, et il n'y a eu mais absolument aucun applaudissement des 300 personnes présentes. Il faut le faire, ça. Vous savez, il y a des gens courageux qui expliquent les choses d'une manière ouverte et accueillante mais qui les expliquent. Mais deux femmes assez discrètes sont allées la voir à la fin pour dire: Écoutez, personne ne nous avait jamais parlé de ça.
Alors, je pense qu'il y a quelque chose d'important. Comment le faire? Ça, je crois qu'il faudra le faire aussi peut-être avec... bon, à Montréal, avec les arrondissements, possiblement, peut-être avec... ou des organismes communautaires, mais il y a une façon de le faire. Mais il faut que ce soit fait, parce qu'à défaut il y a toutes sortes de malentendus, disons, qui augmentent le fossé, là, qui élargissent les... Alors, je pense qu'il faut... bon, il faut aller dans ce sens-là.
Vous savez, il y a une autre chose que... Je vous en ai assez parlé que, là... Mais j'ai l'occasion de le faire, je le dis. En termes d'emploi dans les régions, là, il faut qu'Emploi-Québec vienne à Montréal organiser des missions de recrutement. J'entends parfois ou je lis que Québec International veut aller à Boston faire du recrutement. Bon, moi, je leur dis: Passez d'abord par Montréal. Et je ne pourrais plus comprendre qu'Emploi-Québec finance des missions, comme ce fut le cas, là, il y a quelques années récentes, là, soit au Brésil, ou en Belgique, ou ailleurs, alors qu'il y a à Montréal vraiment une main-d'oeuvre qualifiée.
Il est possible qu'il y ait un problème de langue, mais n'est-il pas mieux que... de les accompagner dans la francisation en région, si tant est, évidemment, qu'à compétence égale ils aient toutes les compétences, que d'aller à l'extérieur continuer à recruter alors qu'il y a un bassin de main-d'oeuvre qui est disponible à Montréal? Moi, je rêve que le ministère du Développement économique et de l'Exportation, que le ministère de l'Emploi s'associent à vous pour organiser des grandes foires de l'emploi mais avec les régions.
**(15 h 30)**Le Président (M. Bernier): Mme la ministre.
Mme Weil: Oui. CGI d'ailleurs a fait exactement ça. Ils ont fait une mission à Montréal et ils ont trouvé exactement les gens en technologie. Ils ont fait ça. Donc, on a la Passerelle pour l'emploi. Il y a aussi ces séances d'information à la Bibliothèque nationale. Mais, si je comprends bien, ce que vous voyez, c'est quelque chose d'encore plus dynamique, peut-être...
Mme Harel (Louise): Visible. Visible.
Mme Weil: ...visible, avec des entreprises, quelques ministères, puis...
Mme Harel (Louise): Oui, Palais des congrès... Très visible.
Mme Weil: C'est ça. Puis d'ailleurs il y a une grande... il y a une foire comme ça pour les ingénieurs. Mais je comprends. Je trouve l'idée très intéressante. Ça pourrait être très dynamique, parce qu'il y a évidemment beaucoup de mains-d'oeuvre très qualifiées, là, qu'on a sélectionnées, qui sont à Montréal, qui souhaiteraient et qui sont prêtes à aller en région. On les rencontre et puis ils sont prêts à aller en région.
Je vais vous amener peut-être sur les orientations très précisément, là. Parce qu'évidemment on parle beaucoup des problématiques, des enjeux, hein, des défis, on parlera de défis à Montréal. Pour le volume, la question de volume, nous, on propose de stabiliser. Donc, oui, c'est une légère baisse, parce qu'on était en ascendance, 54 000 et quelque l'année dernière, presque 55 000, et là on propose... C'est une légère pause, mais, je réitère, c'est quand même des volumes importants, parce que les milieux économiques... la Chambre de commerce de Montréal est venue nous dire «65 000» parce qu'ils veulent garder le cap puis continuer sur cette question.
Moi, ce que je vois, c'est que depuis 2008, 2009, 2010... beaucoup d'initiatives intéressantes pour travailler l'intégration en emploi. D'ailleurs, on vient d'avoir un témoignage de la CDEC de Lachine-LaSalle vraiment intéressant, puis ils ont des constats très précis, projets pilotes, etc. La CRE, il y a beaucoup d'initiatives. Il y a cette entente avec la ville de Montréal. Bon, et donner le temps à ces initiatives de porter fruit. Ensuite, il y a une conjoncture économique, à Montréal, intéressante, dans le sens... bien, à Montréal et au Québec, besoin de combler des emplois. De plus en plus de porteurs... de porte-parole, si on veut, du milieu économique qui disent que la diversité en soi est une richesse, c'est-à-dire d'avoir des équipes diversifiées, c'est bon pour les affaires. Alors, c'était la vision, je vous dirais, derrière cette stabilisation. Qu'est-ce que... Comment vous voyez ça?
Le Président (M. Bernier): Mme Harel.
Mme Harel (Louise): Bon, je pense que c'est très sage. Je pense que c'est très sage et puis ça donne un temps pour pouvoir évaluer, n'est-ce pas, et favoriser l'intégration. Moi, je pense que c'est très sage. On a pu obtenir d'Emploi-Québec les besoins de main-d'oeuvre jusqu'en 2014, donc 2010-2014, pour Montréal, sur Montréal, là, sur l'île en fait, et on se rend compte, vous voyez, qu'il y aurait 95 000 départs à la retraite. Ça, c'est en 2010-2014. Vous avez peut-être tous ces chiffres-là, déjà, peut-être.
Mme Weil: Bien non, mais, pour Montréal, c'est...
Mme Harel (Louise): 95 000 départs à la retraite et 42 000 entrées sur le marché de l'emploi, selon Emploi-Québec. C'est donc dire qu'il y aura 53 000 emplois à pourvoir sur le territoire de la seule ville de Montréal.
Bon, alors, ça, c'est pour jusqu'en 2014, là. C'est demain, ça. Donc, il ne faut pas non plus réduire mais stabiliser, comme vous dites, là. Alors, je pense que c'est très intéressant.
Il y a un défi, qui est bien important, qui est très, disons, présent, là, puis qu'on n'arrive pas à relever, savez-vous, c'est celui des stages, des stages d'étudiants. Il y a beaucoup, beaucoup d'étudiants adultes qui font des mises à niveau au niveau collégial ou universitaire. Et maintenant, de plus en plus, c'est tout à fait justifié, mais on leur demande de faire un stage pour avoir leurs diplômes. Que ce soit au HEC, que ce soit à Polytechnique et à l'ETS, en fait même techniciens, là, les techniciens collégiaux, etc., les jeunes n'arrivent pas à avoir des stages quand ils sont, souvent, si vous voulez, nouvellement arrivés, et ça, c'est un vrai problème. Ils n'arrivent pas à avoir leurs diplômes parce qu'ils n'ont pas de stages, puis ils n'ont pas de stages parce qu'ils n'ont pas de réseaux. Alors, on voulait vous alerter là-dessus parce que ça crée beaucoup de...
Mme Iturriaga-Espinoza (Viviana): De frustrations, puis...
Mme Harel (Louise): ...oui, de frustrations...
Mme Iturriaga-Espinoza (Viviana): ...de déqualifications.
Mme Harel (Louise): ...oui, puis, comme dit Viviana, de déqualifications, parce que, croyez-le ou pas, il y a des jeunes qui n'arrivent pas à avoir leurs diplômes à cause de ça. Alors, si c'était possible, je pense qu'il y a vraiment un travail particulier qu'il faut faire à l'égard, donc, de cette politique de stages -- ça peut être des stages non rémunérés ou rémunérés -- pour acquérir un diplôme.
Le Président (M. Bernier): Merci. Mme la ministre.
Mme Weil: ...vous poser une question sur un enjeu. On a déjà eu l'occasion d'échanger, mais, je pense, ce serait intéressant de vous entendre parler là-dessus. C'est une orientation dont la formulation je voudrais modifier, qui irait sur... La manière que c'est formulé, c'est des bassins, là, donc de bassins de provenance, avec un plafond de 30 % par grand bassin. Et je l'ai déclaré publiquement que je voulais reformuler cette orientation parce qu'il y avait un inconfort, je vous dirais, généralement avec cette notion de bassins et de plafonds. Mais je trouve que... Moi, je pense qu'il y a quelque chose... avoir une orientation sur la diversité qui fait en sorte que le gouvernement se doit, se doit de continuer à regarder un peu partout pour chercher, dénicher des francophones qui sont un peu partout dans le monde. Les gens ne sont peut-être pas très conscients. On pense toujours aux bassins traditionnels, mais il y a quand même des gens qui parlent français qui sont ailleurs dans le monde. Je vous dirais... donc le milieu économique, qui trouve que c'est une idée intéressante, parce que de plus en plus il y a des études qui disent que la diversité en soi, c'est une richesse.
Je pense que ce serait important d'avoir votre vision, en tant que Vision Montréal, comment vous voyez cette notion de diversité, comme une orientation, une orientation qui est beaucoup... Parce que c'est des orientations pour le gouvernement, pour le ministère de l'Immigration, dans la sélection, donc avec évidemment des obligations de moyens, au moins. Comment vous voyez ça?
Le Président (M. Bernier): Mme Harel.
Mme Harel (Louise): Vous avez raison parce que vous en êtes... j'ai eu l'occasion de vous féliciter publiquement, là, je le refais, je l'ai fait à Montréal, de réfléchir, parce que cette question, pour moi, là, c'est, je vous l'ai dit... Le ministère, en fait, c'est un peu comme un mal de dent. Il s'essaie, à chaque nouveau ministre ou nouvelle ministre, d'introduire cette notion de quota dans les bassins géographiques. Peut-être que j'ai tort, mais c'est vraiment l'impression que j'ai parce que ça fait presque une décennie que ce débat-là a lieu.
Alors, moi, je pense qu'il faut le voir sur une assez longue période. Vous savez, il y a eu une époque où on recevait beaucoup de Québécois d'origine italienne. On ne se posait pas la question. C'était après la Deuxième Guerre. Il y avait des poussées... L'immigration, c'est une poussée de fièvre aussi, hein, souvent, du pays d'origine. La communauté grecque nous est arrivée après la Première Guerre, lorsque la dictature s'est installée en Grèce. Et puis, le Chili, on en discutait, moi, quand je fus ministre de l'Immigration, c'étaient des avions complets, 222 sièges, 222 demandes de réfugiés. Il n'y en a plus, ça s'est tari. Parce que, l'immigration, il faut plus la voir beaucoup liée à l'actualité internationale. Ce qui se passe dans le monde arabe, le printemps arabe, peut changer beaucoup, beaucoup de choses. Alors, il faut faire vraiment attention de regarder ça juste sur un court laps de temps. Il faut regarder ça plus, disons, de manière, disons... dans la durée, en fait, plus longue.
En fait, quand vous dites: C'est des obligations de moyens, vous avez raison, parce que, vous savez, en fait, le ministère peut très bien s'ajuster, par rapport aux services qu'il rend, pour qu'il y ait plus de dossiers étudiés, disons, dans un secteur que dans un autre. Mais je ne pense pas qu'il faille fixer des quotas, non.
Le Président (M. Bernier): Mme la ministre.
Mme Weil: Ça va pour moi.
Le Président (M. Bernier): C'est beau?
Mme Weil: Oui, c'est beau.
Le Président (M. Bernier): Merci. M. le député de Drummond, la parole est à vous.
**(15 h 40)**M. Blanchet: Merci, M. le Président. Écoutez, peut-être avant-goût de discussions qui seront toujours fort cordiales mais qui seront, j'espère, franches, j'entends qu'on pourrait appuyer une réflexion sur la notion de diversité, et je lis d'autres commentaires, un bureau de la diversité et différentes propositions de ce type-là, et j'ai l'impression que c'est une façon, au bas mot, extrêmement bienveillante d'aborder la situation.
Montréal n'a pas de problème de diversité. Montréal a une diversité phénoménale. Montréal est incapable de gérer sa diversité parce qu'elle est énorme, parce qu'elle est d'une richesse telle qu'elle ne peut pas être l'objet, de façon efficace, présentement, avec les ressources disponibles, ou la vision, ou la structure de la vision disponible, d'une démarche qui ait démontré son potentiel de succès. Et, lorsque je disais qu'une certaine vision multiculturaliste avait encore cours, je pense que c'en est un exemple.
Cela dit, aussi, j'entendais un constat qui est un constat que beaucoup d'immigrants ne pouvaient pas recevoir de service, ne parlant ni français ni anglais, et donc qu'il fallait aborder le problème du service qui doit être rendu et compris. Ça suggère qu'on est déjà rendu passablement loin. Et je précise d'emblée que je suis un tenant d'une immigration nombreuse, abondante et riche. Je pense que c'est extraordinaire comme enrichissement culturel et même économique pour une société, à la condition de ne pas s'y perdre. Et c'est toujours le rapport entre la ressource et le nombre, et ça, on n'en sortira pas. Mais c'était presque normalisé que... Bien oui, il va falloir gérer ça, il y a des gens qui ne comprennent pas ni en français ni en anglais. Et d'ailleurs c'était «ni en français ni en anglais», comme si l'un valait l'autre, comme si on arrive à Montréal puis on dit: Écoute, s'il te plaît, parle anglais ou français, sous-entendant que parler français ou anglais, à Montréal, c'est pareil. C'est un problème singulier. Moi, je vous soumets d'emblée que quelqu'un n'est pas au début d'un processus réussi d'immigration s'il n'est pas capable de fonctionner minimalement en français.
Je vais vous donner un exemple qui va vous apparaître étonnant. Pour la première fois, mes semi-jeunes enfants sont lâchés lousses à Québec, après-midi. Donc, j'ai laissé mon téléphone allumé, M. le Président, au cas où.
Le Président (M. Bernier): C'est plus prudent pour vous.
M. Blanchet: Ils ont l'âge pour partir tous les trois dans les rues de Québec, puis c'est une belle aventure pour eux autres. Ils sont capables de parler français, ils vont se débrouiller.
Il y a peut-être des gens qui débarquent du Sierra Leone, qu'on lâche dans les rues de Montréal, qui ne parlent ni français ni anglais, qui doivent être dans un état de panique solide. On fait le constat. Et je trouve ça fascinant qu'on normalise le constat. Une cinquantaine de mille par année au Québec, c'est environ une part sur 160 de la population actuelle, à Montréal une part sur 40, 50. C'est énorme. Est-ce qu'on est -- la question va avoir l'air un peu crue -- est-ce qu'on est sur le bord d'avoir le début des ressources nécessaires pour être à la hauteur de nos ambitions, en termes de chiffres d'immigration, ou... Et encore, je réitère, je suis, pour ma part, et notre programme l'est aussi, un tenant de l'immigration pour tout ce que ça apporte à une société, à la condition de ne pas s'y perdre. Là, on se questionne. Voici le chiffre de l'immigration, puis là on se questionne sur les ressources. Est-ce qu'on n'est pas un peu à l'envers? Est-ce qu'on ne devrait pas se dire: Voici les ressources qu'on a, ça nous permet une immigration de combien?
Le Président (M. Bernier): Mme Harel.
Mme Harel (Louise): Bon, la première des choses, c'est que le mérite de ce que l'on fait, là, c'est de le faire en public. Il n'y a pas beaucoup de sociétés, n'est-ce pas, on est tous d'accord, je pense que ça... il n'y a vraiment pas beaucoup de sociétés, aussi évoluées soient-elles, dans le monde, qui tiennent un débat public sur le niveau d'immigration. Ça, c'est fondamental et c'est extrêmement important. Bon.
Il y a un paradoxe. Vous savez, le sous-groupe qui a le taux de chômage le plus élevé, c'est ceux qui parlent le plus français, c'est-à-dire les Maghrébins. C'est le grand paradoxe. Parce que le taux de chômage chez les Maghrébins... chez les Arabes -- excusez-moi, je dis «les Maghrébins», mais j'ai tort -- Arabes du Moyen-Orient, c'est 20 %, alors que les Montréalais de naissance, c'est 6,8 %. Donc, il y a un problème. Oui, il y a un problème, je veux dire, appelons-le comme ça, là, parce qu'il est réel. Donc, il y a un défi, parce qu'ils sont francophones, souvent francophiles et la plupart du temps scolarisés. Est-ce que... C'est plus de la moitié qui d'ailleurs a un niveau de scolarité universitaire, je pense, hein?
Une voix: Ah! plus que ça. Les deux tiers.
Mme Harel (Louise): Bon. Alors donc, premier défi, il y a telle chose que la société elle-même, tu sais. Vous avez connu Kamal El-Batal, n'est-ce pas, Kamal El-Batal, qui était membre du comité exécutif du Parti québécois? Kamal El-Batal est celui qui a été refusé quand il a fait une demande d'emploi dans une entreprise, que je ne nommerai pas -- c'est la Coopérative fédérée, en fait -- mais par la suite il a envoyé le même C.V. avec le nom de Tremblay et puis il a eu une demande d'entrevue. Et il est allé devant la Commission des droits de la personne, qui lui ont donné raison. Finalement, je pense qu'il a eu une indemnité de 15 000 $. Bon.
Alors, ceci étant, je... Bien, maintenant, la Coopérative fédérée, à Montréal, nous ont contactés pour être capables d'avoir des listes de communautés immigrantes. Ils ont fait un cocktail bien important avec tous les leaders des communautés, et vraiment, à leur grande, grande satisfaction, ils se sont dit: Mais c'est une richesse incroyable! Ils ont découvert que 80 % des gens présents avaient un diplôme universitaire.
Il y a telle chose aussi dans une société... Il y a des choses qui ne sont pas résolues dans la nôtre, tu sais, parce qu'au Québec il y a une langue officielle, mais au Québec, Canada, il y a deux langues officielles. Alors, vous voyez, les messages qui leur sont envoyés ne sont quand même pas clairs, hein, ça fait que c'est difficile pour eux de faire la part des choses parce qu'il y a des messages, disons, confondants.
Mais, si vous étiez, dimanche, pas celui-ci, le précédent, chez les Pakistanais -- Marisa, vous y étiez -- alors, c'était une iftar, à la fin du ramadan, et les enfants venaient rendre... disons, faire un peu l'éloge du Pakistan, parce que c'était la journée du 64e anniversaire, et il y avait des petites filles, là, qui le faisaient dans un français châtié. Peut-être que personne dans la salle ne pouvait comprendre parce que c'étaient les parents, qui, eux, ne parlaient pas français. Mais elles le faisaient en français. C'est quand même assez...
Bon, vous allez me dire: C'est un début. Et Anie avait tout à fait raison, parce que c'est par l'intégration dans l'école publique que ça se passe, ça, c'est certain. Alors, je ne sais pas, est-ce que je réponds à votre question...
Le Président (M. Bernier): Merci, Mme Harel. M. le député.
Mme Harel (Louise): ...ou j'ouvre trop de portes, là?
Le Président (M. Bernier): M. le député.
M. Blanchet: En fait, j'avoue d'emblée que ma question en est une à laquelle il n'est pas possible de donner une réponse parce que je... Mais il y avait une question de logique. Devant l'ampleur, devant l'ampleur d'une situation qu'on observe, qu'on réobserve, et qu'on commente, et qu'on recommente... C'est sûr que c'est un peu embêtant de demander à des gens de commenter ça, mais établissons ce qu'on a comme ressources, voyons ce qu'on peut faire comme accueil. Est-ce que ce n'est pas plus logique que de faire un accueil qui ne sera pas réussi? Si on remarque qu'une petite fille parle bien français dans une assemblée pakistanaise, c'est parce que c'est exceptionnel. Sinon, on ne le remarquerait pas. Alors, la normalité serait cette espèce d'intégration réussie.
Mme Harel (Louise): Je vais laisser Anie vous répondre très concrètement, mais, sachant que vous venez du milieu culturel, je veux juste vous rappeler que, bon, récemment, peut-être il y a une dizaine de jours, Alain Simard, du Festival de jazz, là, de Montréal, fondateur du Festival de jazz, était interviewé dans La Presse -- enfin, vous pouvez retrouver ça dans La Presse -- sur le fait qu'il était très sollicité pour créer des festivals de jazz un peu partout, puis il racontait que depuis 20 ans il avait été beaucoup dans des grandes villes, et ça avait été très étudié: Boston, puis il en nommait plusieurs, là. Dernièrement, c'est New York. Il disait: Ce n'est pas possible parce qu'il arrive un moment donné où les services de sécurité, d'incendie et les services policiers, devant le modèle montréalais, disent: Nous, on ne peut pas. Nous, on ne peut pas faire ça. On ne peut pas mettre 150 000 personnes dans les rues. On ne peut pas mettre 150 000 personnes qui vont prendre du vin ou de la bière et qui vont fêter ensemble parce que ça va être une émeute. Parce qu'il y a des ghettos dans ces villes-là. On est une ville où il n'y a pas de ghetto. C'est quand même extraordinaire, ça.
Ça n'a l'air de rien, là, mais la poussée qu'il faut faire devant le défi, là, c'est une poussée qui est de la nature de la culture de l'entreprise. Il faut travailler au niveau de la culture des entreprises. Les entreprises ont encore un problème d'accueil.
Le Président (M. Bernier): Mme Samson.
**(15 h 50)**Mme Samson (Anie): Vous parlez du manque de ressources. Je pense que c'est plus de la coordination. Quand les gens viennent ici puis sont hyperdiplômés, il y a aussi toute la reconnaissance des diplômes qui ne se fait pas facilement, et je pense que ça, ce n'est pas un manque de ressources. C'est peut-être une façon d'organiser les choses différemment. Mais il faut être conséquent. Si on fait venir des immigrants, il faut qu'on soit capable de les recevoir et, pour faire une intégration économique, il faut qu'on reconnaisse un peu leurs diplômes.
Moi, je le vis dans Saint-Michel, dans Parc-Extension. C'est le quartier, l'arrondissement le deuxième plus pauvre à Montréal, celui où il y a le plus d'immigration, mais deux quartiers fondamentalement les plus pauvres au Canada. Et ça, quand je prends le taxi, combien de chauffeurs de taxi sont Maghrébins ou Haïtiens? Et, quand vous leur parlez, ils nous disent: Nous, on a des diplômes, nous, on a tout ça, mais ici on n'est pas intégrés. Et, quand on parle de phénomène... Tu sais, ça a un impact sur l'ensemble de la société. Quand on parle de jeunes, phénomène gangs de rue... Pourquoi il y a des gangs de rue? Quand on parle à ces jeunes-là, ils disent: Écoutez, mon père, là, il est hyperdiplômé, il est chauffeur de taxi, et, moi, je suis capable de faire quatre fois son salaire qu'il fait en une semaine dans un week-end. Donc, pour eux, là, l'intégration, la deuxième intégration, le deuxième niveau d'immigrant, a toute une autre définition, parce que ces jeunes-là sont nés ici et essaient d'avoir leurs racines ici, mais ils ont la culture de leurs parents, qui, elle, est beaucoup plus dans leurs pays.
Et on le vit, ça, pas juste la communauté haïtienne ou maghrébine. Je le vis dans les Sud-Asiatiques, où les jeunes qui sont ici, à l'école en français, et ça, c'est la plus belle chose qu'on peut avoir, c'est parce que ces jeunes-là comprennent et c'est le début de leur intégration... Leurs parents malheureusement seront peut-être la génération sacrifiée, mais eux le comprennent. Mais à l'adolescence ils sont confrontés à leurs valeurs culturelles que leurs parents leur donnent et à celles qu'ils ont de leur pays d'accueil. Et ça, cette deuxième génération là va nécessiter aussi des moyens différents pour vraiment faciliter leur intégration ici.
On l'a un peu partout, toute cette intégration-là, et je vous dirais, entre autres... On parlait tantôt de comment on est capable d'avoir beaucoup de monde à la même place sans avoir de problème et de ghetto. Bien, on est ici, au Québec, la seule place, mais en Amérique du Nord, où on a un quartier qui s'appelle Le Petit Maghreb. Le Petit Maghreb a été parti par des commerçants, dans le quartier Saint-Michel, qui ont créé eux autres mêmes leurs propres cafés, même s'ils sont hyperdiplômés, sociologues, ils ont de tous les diplômes. Ils ont parti leurs cafés parce qu'ils n'avaient pas d'autre emploi. Et les cafés sont pleins, le jour, parce que c'est des chômeurs qui sont là à venir se parler entre eux en disant: Bien, on n'est pas capables de trouver d'emploi. Ils rentrent dans le réseau. Ils ont beaucoup de difficultés à s'intégrer.
Et, pour leur donner un peu de fierté, on a décidé -- bien, moi, ça été une de mes réalisations -- de créer ce quartier-là pour leur donner cette fierté de dire: Écoutez, montrez au peuple qui vous êtes pour que les gens... Ce n'est pas pour créer un ghetto entre eux, mais pour dire à la population entière: Si vous voulez prendre un café, bien venez voir dans Le Petit Maghreb. Il y a du thé à la menthe, il y a de la culture, il y a plein d'activités. Et ça a permis à cette communauté-là de s'enraciner, de prendre la place puis de nous regarder dans les yeux, plutôt que de regarder par terre. Et beaucoup remettaient en cause leur place chez nous parce qu'ils avaient choisi de quitter pays, emploi, qualité de vie. Ils se sont sacrifiés pour dire: Moi, je veux que mes enfants aient un bel avenir. Et beaucoup de ces parents-là se sont questionnés, se questionnent encore sur: Est-ce que j'ai fait le bon choix?
Et c'est là que le gouvernement... Et on doit, tout le monde ensemble, tenter de trouver des façons de les intégrer dans l'emploi. Quand Mme Harel disait tantôt: C'est important, entre autres à la ville de Montréal, qu'on puisse augmenter le taux, le pourcentage d'immigrants qui travaillent chez nous, évidemment à compétence égale... Et ceux qui sont là actuellement... Nous, on le fait dans l'arrondissement, et les gens se sentent encore beaucoup plus partie prenante de la société parce qu'ils sont pleinement intégrés. Et je pense que là-dessus c'est là qu'on doit miser sur: Est-ce qu'il faut plus de ressources, moins de ressources, d'autres programmes? C'est là qu'il faut travailler, parce qu'on fait venir des gens, et, oui, encore une fois, les messages qu'on passe dans les bureaux de la délégation du Québec ou l'ambassade, c'est: Venez-vous-en au Canada, c'est l'eldorado. Les gens arrivent ici pas souvent très préparés.
Et je pense que, là, on pourrait peut-être soit commencer à les préparer, lorsqu'ils font leurs demandes pour venir ici, en faisant des démarches d'emploi avec eux, en leur donnant des sites, en les responsabilisant davantage, parce que les gens arrivent ici puis ils pensent que tout est là. Ils se rendent compte que finalement ils ont aussi des démarches à faire mais qu'ils auraient peut-être pu, en attendant d'avoir leurs papiers d'immigration chez eux, pendant les années qu'ils ont attendu, ils auraient peut-être pu faire des travaux déjà avant, ou des devoirs, ou de l'implication différemment pour, quand ils arrivent ici, ils ont déjà des ressources, ils ont déjà un réseau, ils ont déjà développé...
Donc, je pense, c'est beaucoup plus là-dessus qu'on doit travailler parce qu'effectivement la diversité culturelle, c'est ce qui rend, en tout cas chez nous, notre ville bien différente des autres, mais surtout c'est une richesse qu'on a et qu'on peut partager avec les autres.
Le Président (M. Bernier): M. le député.
Mme Samson (Anie): Ça n'a peut-être pas répondu à votre question, mais...
M. Blanchet: J'ai un rôle extraordinairement ingrat, parce que, lorsque je n'exprime pas l'accord, on pourrait dire que je ne suis pas favorable. C'est ma passion, la diversité culturelle. Mais la diversité culturelle ne se communique que par le truchement d'une langue commune, la reconnaissance d'institutions communes, la connaissance minimale d'une histoire commune et la reconnaissance et l'adoption d'un certain nombre de valeurs communes, dont la laïcité des institutions publiques, l'égalité des sexes. Il n'y a pas de communication entre deux communautés de cultures différentes si elles n'ont pas en commun certains éléments d'une culture commune. Au Québec, à Montréal, cette culture commune est celle de la communauté d'accueil. C'est ce que nous souhaitons. On ne sert pas les gens que l'on invite à immigrer au Québec, si nous ne nous assurons pas hors de tout doute que notamment -- et ce n'est pas une question d'argent -- que nous développons une façon adéquate de reconnaître leurs compétences. C'est une vérité absolue.
J'imagine l'ampleur du problème à Montréal, lorsque, moi, dans ma circonscription, j'ai 1 000 Colombiens qui sont venus au Québec sous la représentation d'une reconnaissance de leurs compétences et qui travaillent dans un abattoir à Saint-Cyrille. Des gens qui, lorsqu'on les rencontre, disent: S'il vous plaît, donnez-nous des ressources de francisation, on est à Drummondville. Ils demandent des ressources de francisation, première rencontre avec la communauté colombienne que j'ai faite en décembre 2008, avant décembre 2008. Imaginons la réalité montréalaise.
J'ai une communauté irakienne. Ils doivent être huit. Je ne sais pas combien ils sont, ils sont très, très peu. Leur groupe, leur milieu, c'est quasiment de fermer les fenêtres chez eux parce qu'ils ont peu ou pas d'affinités avec l'environnement. Lorsqu'on arrive à Montréal, il y en a peut-être 278 ou 1 278 qui vont tendre à s'en aller dans un même secteur pour échanger avec des gens dont, d'emblée, les valeurs, la langue, les éléments fondamentaux sont en commun.
Je trouve effectivement que le mot «ghetto» est extrêmement dur. Le mot «ghetto» réfère à des réalités dans d'autres pays du monde qui vivent dans une violence psychologique, économique et physique extraordinaire. Bon, je pense qu'en général on évite ça. Mais il y a des zones, il y a des zones où la concentration de communautés qui sont les bienvenues mais qui ne sont pas en processus harmonieux d'intégration ralentit cette intégration-là. Et j'ai la crainte que, malgré la volonté que j'ai que nous ayons cette immigration puis que nous ayons ces 50 000 là, qui viennent au Québec et qui y sont les bienvenus, je le dis, je le répéterai à toutes les phrases, que nous ne fassions pas ce qui est nécessaire pour que le processus par lequel Montréal est en train d'être échappée par le Québec, au niveau de sa langue de convergence par exemple, ne soit pas en train de se corriger du tout.
Le Président (M. Bernier): Mme Harel, il reste environ deux minutes. Je vous laisse la parole.
Mme Harel (Louise): Écoutez, c'est sûr qu'il faudra faire plus, là, puis vous allez retrouver, dans notre mémoire, des recommandations bien précises. Une sur laquelle j'insiste beaucoup, c'est celle d'élargir la loi sur l'égalité en emploi dans les organismes publics pour aller chercher... Vous voyez, par exemple, sur 4,5 milliards, c'est au moins 1,5 milliard en contrats, et de moins en moins les administrations publiques embauchent, donc le recrutement va se faire de plus en plus auprès des fournisseurs, des firmes. Bon, ça, il faut faire plus. Il faut faire plus au niveau des stages, il faut faire plus au niveau de l'accueil. Il faut faire plus, bien évidemment.
Mais, voyez, par exemple, prenons la France, là. Anie est allée donner un peu l'expérience de Saint-Michel à Paris, puis elles sont allées, Nawal et Anie, dans le quartier Saint-Denis. Le quartier Saint-Denis, là, elles sont revenues bouleversées, hein, la zone, là, bouleversées. Puis la langue est commune en France, tu sais, puis ça n'a pas pourtant eu comme effet d'être intégrateur. Puis je ne sais pas si vous êtes...
M. Blanchet: ...supplémentaire qui est propre à ici.
Mme Harel (Louise): ...si vous êtes déjà allé.
M. Blanchet: Oui, je suis allé dans Saint-Denis.
Mme Harel (Louise): Oui? Bon. Mais c'est vrai que c'est important. Et je pense qu'il faut aussi rejoindre les femmes à la maison, parce qu'il demeurera toujours... Et, je ne suis pas la première à le dire, je pense que toutes les études internationales le démontrent, c'est par le biais des mères en fait qu'on peut le mieux intégrer. Le père va toujours avoir un développement dans son réseau à lui, mais, au niveau des mères, il faut pouvoir les -- comment dire? -- les relancer, et il y a vraiment des beaux projets qui se font avec les commissions scolaires pour rejoindre essentiellement le parent, mais, dans la majorité des cas, c'est la mère.
Le Président (M. Bernier): Merci, Mme Harel.
Mme Harel (Louise): Ah! c'est déjà terminé? Ah! bon, bien, on continuera cette intéressante conversation.
Le Président (M. Bernier): C'est déjà terminé. Merci, Mme Harel, Mme Samson, Mme Celli, Mme Espinoza, Mme Bekhechi, de Vision Montréal. Merci de votre participation. Merci de vous être déplacées, d'être venues à cette commission parlementaire.
Je vais donc permettre à l'Organisme de communication pour l'ouverture et le rapprochement interculturel de prendre place.
Je suspends quelques instants.
(Suspension de la séance à 16 heures)
(Reprise à 16 h 5)
Le Président (M. Bernier): À l'ordre, s'il vous plaît! Nous allons donc reprendre nos travaux.
Nous recevons les représentants de l'Organisme de communication pour l'ouverture et le rapprochement interculturel, représenté par Mme Laouni, Mme Chouinard et Mme Provencher.
Bienvenue, mesdames. Vous avez une période de 15 minutes pour présenter votre exposé.
Organisme de communication pour l'ouverture
et le rapprochement culturel (COR)
Mme Laouni (Samira): Merci. M. le Président, Mme la ministre, Mmes et MM. les députés, bonjour. Merci infiniment de nous recevoir encore une fois de plus dans une des commissions de notre Assemblée. Et donc mon nom est Samira Laouni. Je suis la présidente du COR, communication, ouverture et rapprochement interculturel. C'est un organisme qui travaille sur le terrain pour justement un petit peu démystifier et faire tomber certains préjugés, certains stéréotypes, par l'intermédiaire de conférences, de tables rondes thématiques, etc. Nous avons déjà eu la chance de passer ici, dans cette même... dans cette enceinte, pour la commission sur le projet de loi n° 94, et donc on a largement expliqué ce que nous faisions, etc., et ce que nous faisons encore.
Et donc là, aujourd'hui, pour participer à cette discussion, je voudrais d'abord laisser peut-être la chance à mes deux collègues de se présenter et puis, moi, je passerai à la présentation. Donc, Carmen...
Le Président (M. Bernier): Alors, je vous en prie, en vous nommant.
Mme Chouinard (Carmen): Oui. Moi, je suis Carmen Chouinard. Je suis doctorante en sciences des religions à l'Université de Montréal. Je suis auxiliaire de recherche pour la Chaire de recherche du Canada Islam, pluralisme et globalisation. Et je suis le porte-parole pour le Centre islamique libanais.
Le Président (M. Bernier): Merci.
Mme Laouni (Samira): Mme Provencher.
Le Président (M. Bernier): Mme Provencher.
Mme Provencher (Marie-Andrée): Je travaille en francisation d'adultes depuis 1976. Et, les six dernières années, je les ai consacrées à aider des nouveaux arrivants à préparer les examens professionnels de français.
Le Président (M. Bernier): Merci beaucoup.
**(16 h 10)**Mme Laouni (Samira): Voilà. Donc là, pour donner aussi notre point de vue et puis pour peut-être plus vous éclairer ou vous donner des pistes, peut-être, de réflexion plus approfondies, puisque nous sommes sur le terrain à tous les jours, concernant la planification de l'immigration du Québec pour la période 2012-2015, nous allons voir comment atteindre une intégration optimale à l'emploi. Et, pour ce faire, nous examinerons les liens entre l'adaptation sociale et la francisation, l'effet pervers et inattendu du fait d'être francophone, et puis nous allons aborder à la fin quelques pistes de solution, comme par exemple des stages d'immersion mais surtout quelques réflexions qui pourraient aider à surmonter certains obstacles à l'intégration professionnelle.
Donc, pour commenter utilement ce projet de planification de l'immigration, nous pensons qu'aussi bien que... notre société que pour les nouveaux arrivants ce qui importe, c'est le nombre d'immigrants au travail. C'est pas seulement le nombre d'immigrants, c'est surtout le nombre d'immigrants au travail. Et, pour discuter de tout cela, on va voir comment on peut atteindre cette intégration optimale à l'emploi.
On peut prendre pour acquis que le ministère de l'Immigration et la grande majorité des immigrants visent un même but: c'est l'insertion professionnelle. Pourtant, malgré l'augmentation des mesures prises par le MICC pour y arriver, on a constaté un recul. D'abord, il faut voir le français non seulement comme un outil de travail, mais comme un moyen essentiel d'accéder au marché de l'emploi.
Dans un premier temps, examinons les liens entre l'adaptation sociale et la francisation. Donc, le document de consultation établit qu'en 2010 65,1 % des personnes immigrantes connaissaient le français. Chez les travailleurs qualifiés, cette proportion atteignait 77,3 %. D'abord, connaître, entre guillemets, le français recouvre des réalités très variées. Alors que certains immigrants sont véritablement francophones à l'oral et à l'écrit, d'autres sont entraînés, guidés par un coach à l'entrevue de sélection du Québec. Il est probable qu'étant considérés francisés, encore une fois entre guillemets, ceux-ci ne bénéficieront pas de cours de français appropriés. Il faut évaluer après leur arrivée ici leur véritable niveau de maîtrise du français. Ensuite, les besoins en français doivent être précisés, je dirais «diagnostiqués», d'après nos exigences pour accéder à un emploi dans leurs domaines de compétence.
Pour bien faire comprendre ce que nous entendons par là, examinons deux groupes de professionnels. Je vais vous donner deux exemples. D'abord, par exemple, les enseignants au primaire et au secondaire qui sont diplômés à l'étranger. Une fois les équivalences de diplôme faites, ils doivent réussir deux séries d'examens de français: d'abord, l'une au ministère de l'Éducation, qui porte sur la compréhension de l'écrit, l'expression écrite et l'expression orale, et l'autre, exigée de tous les enseignants du Québec, qui concerne seulement l'écrit, l'expression et le code linguistique. Or, aucun cours de francisation, que ce soit au MICC ou au ministère de l'Éducation, ne nous permet d'atteindre ce degré de maîtrise du français.
Un deuxième groupe, un deuxième exemple est constitué de ceux qui doivent faire partie de leurs ordres professionnels pour pouvoir pratiquer leurs métiers ici, par exemple les ingénieurs, les médecins, les architectes et même les infirmiers, et j'en passe. Ils doivent réussir un examen portant sur les quatre habilités langagières, administré par l'Office québécois de la langue française. Pour le candidat qui parlait peu ou pas le français à son arrivée, la francisation intensive d'environ sept mois donnée par le MICC est rarement suffisante pour réussir cet examen, du moins à l'écrit.
Mais examinons maintenant l'aspect de l'obtention d'un emploi. La francisation est une première mesure pour augmenter l'employabilité du nouvel arrivant. Le lien entre l'acceptabilité sociale et la capacité de communiquer dans la langue de l'interlocuteur est évident. Ce lien doit être aussi évident quant à la maîtrise des codes culturels des Québécois. Or, le français appris dans un autre contexte culturel, par exemple par l'Alliance française ou les cours en ligne dans le pays d'origine, s'il permet la transmission d'informations, n'assure pas du tout les relations interpersonnelles harmonieuses. Et voilà l'effet pervers maintenant, qui est inattendu, du fait d'être francophone.
Voyons comment cet effet se manifeste. Le taux de chômage semble être particulièrement élevé chez les immigrants parlant le français mais présentant un grand écart culturel, par exemple les Maghrébins. Et on a vu en 2009 l'étude de l'IRPP, le chiffre qui avoisinait le 30 % de taux de chômage chez cette communauté-là de nouveaux arrivants. Le fait d'être francophone cache les obstacles dus à ces disparités culturelles -- c'est ce qu'on a remarqué sur le terrain -- et ce, de façon bilatérale, de part et d'autre. Tout, dans les relations interpersonnelles, est interprété en fonction de sa propre culture, perçu par chacun comme une norme plus ou moins universelle. Chacun, pour lui, c'est sa normalité.
Faisons une comparaison maintenant avec l'immigrant non francophone. À son arrivée dans un centre de francisation, où il côtoie des nouveaux arrivants de tous les continents, il éprouve un certain choc culturel extrêmement bénéfique pour lui, parce qu'il découvre que presque tous les usages sont culturels, et non naturels, puisqu'ils diffèrent tellement. Grâce à cette prise de conscience, juste à cette prise de conscience, voulant évidemment s'intégrer au Québec pour atteindre ses objectifs pour lesquels il s'est déplacé et il a tout laissé derrière lui, il se met à observer ses enseignants et ses autres nouveaux concitoyens, pour découvrir comment adapter ses façons pour être accepté socialement par eux, par les autres.
Alors que le non-francophone bénéficie de cette période de francisation et d'adaptation culturelle avec une allocation de survie, le déjà francisé, entre guillemets, est plus ou moins laissé à lui-même, sans aide équivalente, ce qui constitue une injustice flagrante en soi-même. C'est un cercle qui peut se révéler vicieux. À cause d'un manque d'adaptation sociale... Et j'étais très contente d'entendre déjà le parti Vision Montréal d'en parler. Donc, c'est un petit peu dans ce sens-là, dans la même veine. Donc, à cause d'un manque d'adaptation sociale, il ne parvient pas à décrocher un premier emploi, et, parce qu'il ne parvient pas à travailler, là il est probable qu'il fréquentera surtout les compatriotes, surtout ceux qui comme lui n'ont pas d'emploi. Donc là, ça vient faire, d'une façon, que les difficultés communes risquent de les mener à l'amertume, à une certaine amertume ensemble, et on peut sombrer dans les ghettos, comme vous avez eu l'occasion d'en parler tout à l'heure.
Nous proposons donc quelques pistes de solution, par exemple un stage d'immersion dont le premier objectif est l'adaptation sociale. Pour s'assurer que les candidats concernés s'y inscrivent, il faut que ce stage soit axé sur la recherche d'emploi mais dans un sens très large: fonctionnement de la société, règlements dits sociaux, système de valeurs, lois, etc. Évidemment, ce stage doit être offert dès l'arrivée et accompagné de la même allocation de survie donnée aux non-francophones. Ce serait souhaitable que ces stages soient organisés dans les centres de francisation, entre autres parce que, si des lacunes en français étaient décelées, les cours appropriés seraient disponibles sur place. L'autre avantage de le donner dans les centres de francisation est le contact avec les immigrants de pays très variés et la possibilité que les enseignants de francisation, qui sont aussi des interprètes culturels, y contribuent. Quant à la longueur de ce stage, ce serait le choix des contenus qui permettrait de la déterminer. Mais, comme il faut amener les modifications de comportements relationnels, une explication sur les mécanismes et les règles du marché du travail au Québec est évidemment insuffisante.
Passons maintenant à quelques pistes de solution pour surmonter certains obstacles. D'abord, la reconnaissance des diplômes et de l'expérience professionnelle acquise, qui doit être effectuée dans le pays d'origine, d'après notre... c'est-à-dire, c'est ce que nous proposons, lors du processus de sélection, car elle peut influencer la décision d'immigrer. On a eu des discussions, des pourparlers, à ce sujet-là, et on a eu quelques réponses en nous expliquant des obstacles. Mais, nous, maintenant, on argumente ces obstacles-là, on amène des solutions pour ces obstacles-là.
Donc, d'abord, premier obstacle, c'est: procéder ainsi coûterait cher au gouvernement. C'est la réponse qu'on a reçue. Notre réponse à nous, c'est de dire que les candidats paieraient eux-mêmes, comme c'est le cas maintenant, de toute manière. Ils paient pour la reconnaissance de leurs diplômes. Donc, qu'ils paient en étant au Québec ou qu'ils paient dans leurs pays d'origine, avant de venir au Québec, de toute manière ils paient pour le dossier de sélection. Donc, ça va de soi.
Deuxième obstacle, c'est que cela encombrerait les bureaux des fonctionnaires, donc entraînerait des délais plus longs. Pour nous, la réponse, c'est que, le processus de sélection durant de un à cinq ans, cela laisserait généralement assez de temps pour procéder justement aux équivalences. De plus, la vérification de l'expérience acquise serait peut-être plus fiable en y procédant dans le pays d'origine et pas ici, parce que nous sommes sur le terrain, nous allons être sur le terrain, pour reconnaître le diplôme sur le terrain, dans son pays d'origine. Cependant, il y aurait avantage, dans plusieurs cas, à procéder à des comparaisons de programmes d'université plutôt qu'à l'analyse de diplômes individuels.
Troisième obstacle qu'on nous a donné ou dont on nous a parlé, c'est que le candidat désire seulement immigrer, peu importe le travail qu'il obtiendra au Québec. D'abord, quand il s'agit des professionnels qualifiés, cette attitude est sûrement rare. De toute façon, il est essentiel que le candidat sache d'avance s'il pourra pratiquer la profession pour laquelle il s'est préparé tout le long de sa vie. Nous connaissons maintenant la détresse psychologique que peut entraîner la dévalorisation professionnelle, donc sociale. Les coûts humains, sociaux, financiers, etc., sont énormes, et on le sait, les chiffres le démontrent de toute manière. Le MICC, ces récentes années, a instauré de nombreux programmes. Si nous prenons l'exemple du PRIIME, juste le programme PRIIME, qui facilite l'accessibilité à un emploi ou à un stage, ces derniers doivent être appropriés à la compétence et à l'expérience du travailleur. De plus, il faudrait que des stages soient aussi offerts par des employeurs publics, en particulier pour donner l'exemple, parce que ce n'est pas ce qu'on voit actuellement, c'est très rare. Aussi, il faudrait revoir les conditions d'admissibilité à ces programmes. Il faut viser à inclure plutôt... à exclure.
Et là je vais donner un exemple très stéréotypé que je donne toujours. Si on prend l'exemple d'une femme qui a plus de 35 ans, qui est francophone, diplômée, qui est au Québec ça fait plus de cinq ans, qui n'est pas une femme violentée, donc elle n'a pas accès aux services des centres de femmes, etc., elle n'a pas d'aide, elle ne peut pas bénéficier de ce programme-là parce qu'elle a dépassé cinq ans d'existence au Québec. Un exemple.
Donc, on constate que le taux de rotation est énorme aussi par ce programme-là, PRIIME, on constate qu'il y a un taux de rotation qui est énorme. Le CRI, le Conseil des relations interculturelles, par Mme Patricia Rimok, qui n'existe plus, avait fait déjà cette étude-là en ce sens-là, pour parler de ce taux de rotation de ces stagiaires et de ces employés.
**(16 h 20)**Le Président (M. Bernier): Mme Laouni, je vous invite à conclure. 30 secondes.
Mme Laouni (Samira): D'accord, ça va être très, très vite. Donc, alors qu'un but de cette politique est l'embauche des candidats qui se révèlent compétents, il faut donc trouver des correctifs aux tactiques de certains employeurs. Donc, ça, c'est une chose.
D'une autre part, pour l'ensemble du public, de nombreuses émissions concernant l'intégration de nouveaux arrivants, comme la télévision, la radio, l'Internet, etc., souvent très bien faites, ont déjà été présentées. Le hic, c'est qu'elles ne peuvent pas atteindre celui qui entretient déjà des préjugés à l'encontre des immigrants. Il choisit une autre émission. Cependant, en les présentant sur des chaînes préférées aux heures de grande écoute, les auditeurs à l'esprit ouvert seraient rejoints en plus grand nombre.
Donc, je pourrais... Par la suite, il y a eu d'autres solutions aussi. Par exemple, le moyen le plus efficace serait une sensibilisation aux réalités des nouveaux arrivants.
Le Président (M. Bernier): Vous aurez l'occasion de faire valoir ces éléments-là avec les parlementaires.
Mme Laouni (Samira): Voilà, de parler de ça avec vous plus largement, voilà. Je vous remercie.
Le Président (M. Bernier): Bon, maintenant, nous allons passer aux échanges avec les parlementaires. Mme la ministre, la parole est à vous.
Mme Weil: Oui. Merci de vous présenter ici. Alors, c'est la deuxième fois qu'on a l'occasion d'échanger sur des questions, évidemment, de société importantes. On parlait du PRIIME. Alors donc, ce que vous dites, par rapport à offrir ce programme aux institutions publiques, vous pensez aux hôpitaux, aux agences, les institutions scolaires, c'est ça?
Mme Laouni (Samira): Tout à fait. Tout à fait.
Mme Weil: D'accord. Parce que pour l'instant c'est vraiment dans le secteur privé seulement.
Mme Laouni (Samira): Privé.
Mme Weil: Maintenant, le programme par ailleurs a un taux de succès intéressant: taux de rétention de 83 %. Pensez-vous que c'est une mesure qu'on devrait bonifier, qui est porteuse?
Mme Laouni (Samira): Tout à fait. Non seulement que c'est une mesure qu'il faudrait bonifier, mais en même temps, comme je vous ai dit, de l'élargir, de la rendre plus inclusive, de ne pas la mettre dans des limites, dans des paramètres ou des limites, des critères d'accessibilité assez difficiles, des fois. Parce qu'on sait que généralement les nouveaux arrivants, quand ils arrivent ici, au Québec, surtout les femmes... Elles sont en âge de procréation, donc, ne trouvant pas d'emploi, elles vont choisir d'enfanter. Le temps d'enfanter et d'élever les enfants, et pas de place en garderie, donc c'est tout un cercle vicieux, elles ne vont pas travailler. Au moment où elles peuvent retourner sur le marché de l'emploi, elles ont dépassé ou l'âge ou le temps qui est instauré par les critères de sélection de ce programme.
Le Président (M. Bernier): Mme la ministre.
Mme Weil: Oui. Les intervenants -- c'était Vision Montréal -- avant vous, je ne sais pas si vous les avez entendus, mais il y a quelques intervenants qui ont fait cette recommandation. Au-delà de la francisation ou dans... Et c'est vrai, ce que vous soulignez, parce que dans le cours de francisation il y a aussi un cours sur la société québécoise. Donc, ce n'est pas juste un cours de langue, c'est un cours sur les valeurs, les normes, l'histoire, etc. Mais ils vont plus loin. La recommandation de Vision Montréal, c'était qu'il y ait un genre de cours de citoyenneté ou un cours sur les droits, les valeurs, etc., obligatoire, qui pourrait peut-être répondre un peu à cette préoccupation de s'assurer que tout le monde est sous le même toit en même temps, qu'ils peuvent échanger et voir la diversité de la société québécoise, mais qui rend l'intégration finalement plus facile. Je pense que vous décrivez bien la situation. Que pensez-vous de cette idée?
Le Président (M. Bernier): Mme Laouni.
Mme Laouni (Samira): Je pense que je vais laisser à Mme Provencher le soin de répondre.
Le Président (M. Bernier): Mme Provencher? Allez-y.
Mme Provencher (Marie-Andrée): Oui. Il faut aller beaucoup plus loin que ça. Vous savez, dans les relations interpersonnelles, ce n'est pas juste les connaissances. Il faut donner ces connaissances, il faut donc faire ça, O.K., mais il faut amener les gens à entrer en relation de façon à être acceptables socialement par les gens de... nous, O.K.? Bon, simplement la distance à laquelle on se place pour parler à une personne, l'insistance à faire une demande devant un refus, dans quelle situation il est approprié d'inviter, de, comment dirais-je, ne pas trop vanter ses propres mérites. Bon, alors, il faut, à ce moment-là, que les gens soient en contact avec des gens qui viennent non seulement de la société d'accueil, mais d'ailleurs aussi. Vous ne pouvez pas savoir à quel point, dans un centre de francisation, les premiers jours, les gens ont un choc effroyable parce qu'ils pensaient que c'était seulement dans leur pays d'origine qu'il y avait des problèmes. Ils sont tellement... Leurs problèmes étant très graves dans leur pays d'origine, ils n'ont jamais réfléchi qu'il y avait des gens de tout autre pays qui eux aussi avaient des problèmes et immigraient au Québec.
Alors, il faut vraiment... Bon, moi, je travaille avec des nouveaux arrivants de je ne sais combien de pays mais tous des professionnels, puisque ce sont les examens professionnels que j'aide à passer, et, ceux qui sont passés par les centres de francisation, c'est drôlement plus facile, mes relations avec eux. Des gens qui viennent tout juste d'arriver, qui étaient... qui sont parfaitement francophones, bon, refusent de croire que je travaille bénévolement. Ils sont sûrs que le gouvernement me paie. Ils ne peuvent pas accepter que, bien oui, ici, il y a des gens qui font du travail bénévole. Bon. Quand je refuse... quand je décide que... bon, pas je décide, je décide toujours que c'est moi qui mène, c'est moi, la professionnelle, c'est moi, l'experte, ah, ils voudraient m'imposer comment ça se faisait dans les écoles dans leurs pays, O.K., bon, alors que... Bon.
Écoutez, il faut absolument aider les immigrants francophones à cesser de penser que toutes les différences qu'ils rencontrent avec leurs normes sociales, leurs règles de politesse, leurs façons de parler sont des infériorités, parce que, comme ils interprètent tout ce qui est différent comme étant un écart à la norme, puisque la norme, c'est ce qu'ils font, bien ils ne s'adaptent pas. On n'est pas pour s'adapter à des écarts.
Le Président (M. Bernier): Merci. Mme la ministre.
Mme Weil: Oui. Je vais peut-être vous amener sur les orientations. Je vais vous dire qu'on va... Vous faites beaucoup de suggestions très... On voit que vous avez fait beaucoup de recherches, c'est très pointu, et il y a beaucoup de valeur dans ce que vous dites, et ça va être important pour le ministère de bien analyser vos suggestions.
Sur la question de la langue et de la compétence linguistique, on a une nouvelle orientation qui, je pense, répond en partie à ce que vous dites. C'est de vraiment s'assurer que le niveau de français est le bon niveau pour la profession ou le métier. Et donc j'imagine que vous êtes en accord avec cette orientation.
Mme Provencher (Marie-Andrée): Tout à fait.
**(16 h 30)**Mme Weil: Oui. Et ce ne serait pas une mesure objective. Alors, ça, ça semble vraiment, je vous dirais... consensus. Et donc on pourrait s'assurer qu'un professionnel, une fois qu'il a passé ce test-là, il n'aurait pas de problème au niveau de l'ordre professionnel, il devrait pouvoir intégrer facilement...
Sur les volumes, toute la question des volumes et l'orientation qui vise à stabiliser, j'ai eu l'occasion de le répéter souvent, c'est qu'on a beaucoup de mesures qu'on vient de mettre sur pied depuis les quelques dernières années. Il y a eu vraiment une prise de conscience. Les statistiques, je pense, c'est vraiment les statistiques de 2006 qui ont fait beaucoup la manchette. Il y a beaucoup d'analyses, beaucoup plus fines, surtout sur la communauté maghrébine. Donc, il y a des mesures maintenant qui ciblent la communauté maghrébine, dont PRIIME et ensuite la CRE, la ville de Montréal, beaucoup de mesures intéressantes de... ce n'est pas de parrainage, mais le mentorat, bon, d'autres, Leadership Montréal, l'intégration... pour qu'ils fassent... qu'ils siègent aussi aux conseils d'administration, justement, aller chercher les gens qui proviennent de ces différentes communauté pour siéger à des conseils d'administration, parce que les conseils d'administration ne reflètent pas la diversité de Montréal. Donc, c'est à tous ces niveaux.
Et on a... Je ne sais pas si vous avez vu les chiffres de 2010, où il y a une remontée, des progrès intéressants en emploi -- vous avez vu ça -- qui bénéficient légèrement plus les immigrants. On n'a pas un «breakdown» pour la communauté maghrébine. Mais on est prudents. On ne sait pas si c'est une tendance. On espère que oui. Alors, l'idée, c'est de stabiliser à 50 000, surtout avec l'idée de permettre à toutes ces mesures et nous permettre d'aller encore plus loin pour vraiment faire un arrimage, autant dans la sélection, s'assurer que la sélection, elle est vraiment bien faite. Puis d'ailleurs on a beaucoup de commentaires très pointus sur ces questions, qui sont utiles. On a modifié la grille de sélection. Mais ensuite... Donc, ça, c'est en aval. Mais, lorsque la personne arrive, comment fait-on? Donc, avec Emploi-Québec, il y a quand même des séances d'adaptabilité au marché. Mais je comprends ce que vous dites. Vous parlez de quelque chose de plus soutenu, pas juste une séance et puis, bon, sur les valeurs, et tout. Donc, est-ce que vous êtes... votre opinion, par rapport à cette notion de stabiliser à 50 000, avec l'idée... Parce qu'avec 50 000, nous, selon les prévisions de l'ISQ, on répond à nos besoins, tant démographiques long terme que les besoins du marché du travail à court, moyen terme, les 740 000 emplois, bon, 15 % qui seront fournis par l'immigration. Alors, on va sur ça, on va sur nos besoins, mais il y a aussi cet élément de vouloir réussir l'immigration. Il faut que l'immigration soit une réussite pour engendrer d'autres réussites. Les gens sont très positifs, généralement, ceux qui oeuvrent en immigration, parce qu'ils le voient, mais... vous entendre là-dessus.
Le Président (M. Bernier): Mme Laouni.
Mme Laouni (Samira): Alors, c'est certain que, stabiliser l'immigration, là, je n'ai pas un avis personnel dessus, parce que je présume, je suppose que c'est des études faites par des personnes spécialistes dans ce domaine-là, qui ont décidé qu'il faudrait... Tout ce que je peux dire, c'est que l'immigration est une richesse pour le Québec. Ça, on ne peut pas s'en passer. De quel taux elle doit être? Ça, c'est aux spécialistes de décider de quel taux elle doit être. Ce qui est certain, pour moi, c'est que, lorsque l'immigrant arrive ici, c'est qu'il ne se sente pas ni brimé ni désillusionné. C'est surtout ça. C'est surtout ça, le plus important. C'est qu'il puisse réaliser le rêve pour lequel il est parti, il a tout laissé. Parce que c'est sur cette, je dirais, c'est sur cette barrière-là qu'il faudrait se mettre, voir tout ce que la personne laisse pour venir et qu'est-ce qu'elle a, en contrepartie, quand elle vient. Donc, il faut toujours se mettre là-dessus, sur cette ligne, pour voir un petit peu les sentiments.
Et nous savons à quel point la détresse... La clinique de psychiatrie de Sainte-Justine le démontre bien. Il suffit de voir le nombre d'immigrants qui passent par cette clinique-là, qui sont en détresse psychologique parce qu'ou leurs diplômes ont été dévalorisés, ou ils ont été déclassés, en termes de niveau social, ou ils ont perdu complètement toute notion de travail, d'être le pourvoyeur pour la famille. Et de tout ça s'ensuit la violence familiale, les divorces, la violence faite aux femmes, aux enfants, et ainsi de suite. Et donc on est dans un cercle vicieux. Et là ça va demander d'autres ressources. Et donc on ne pourra plus faire face aux ressources parce que nous avons des immigrants. Et donc tout se rejette sur le dos de l'immigrant.
Ce n'est pas comme ça qu'il faut le voir. Il faut voir que l'immigrant, c'est une richesse. D'abord, il arrive ici, il n'a pas fait ses études ici, il a étudié à l'étranger, donc ça a coûté zéro cent au Québec. C'est ça, le plus important. Et, quand il est arrivé ici, il a un bagage. Il faut profiter de ce bagage-là. Pour profiter de ce bagage-là, il faut le mettre à l'emploi. Qu'est-ce qu'il faut à l'arrivée, c'est un accompagnement beaucoup plus, je dirais, constant, rigoureux, et un petit plus long dans le temps, et surtout avec une... Je parlais tout à l'heure de cette petite allocation. Parce que, quand la personne arrive ici et en plus, elle doit chercher l'emploi, elle doit payer ses équivalences, elle doit faire garder ses enfants pour aller chercher l'emploi, vous comprenez bien que ça lui coûte terriblement cher. Donc, du coup, des fois, elle est tellement déprimée qu'elle se retrouve dans d'autres, je dirais, dans d'autres cercles vicieux ou dans des économies souterraines, ou ainsi de suite. Et c'est ce qu'on ne veut pas. Ce qu'on veut, c'est que vraiment l'immigrant, quand il arrive ici, qu'il réalise son rêve pour lequel il est venu, et c'est celui d'améliorer sa vie et celle de ses enfants. En travaillant, bien sûr, en donnant à la société québécoise tout son acquis, tout son bagage avec lequel il est venu, mais en même temps en s'enracinant pour faire profiter... et donner d'autres produits encore plus savoureux, je dirais.
Le Président (M. Bernier): Merci. Mme la ministre.
Mme Weil: Oui. On n'en parle pas beaucoup, beaucoup parce que ce n'est pas dans les orientations, mais c'est quand même un programme intéressant. Je voulais savoir si vous aviez une opinion. Vous savez qu'il y a beaucoup, il y a 25 000 qui rentrent par la voie de l'immigration temporaire. C'est une tendance forte au Canada et le Québec aussi. Et ensuite il y a le Programme de l'expérience québécoise, qui ressemble beaucoup à un programme en Australie, puis, nous, on l'a mis sur pied en 2010. L'avantage de cette voie d'immigration, c'est que c'est des gens qui vont avoir un diplôme au Québec, donc ils ont déjà cette expérience. Ou bien ils ont une expérience de travail et en 45 jours ils ont un CSQ. Ils passent le test de français... Mais il y en a beaucoup qui sont déjà soit dans une université francophone ou, bon, ils ont des stages, la Chambre de commerce de Montréal, qui travaille avec les entreprises pour leur donner des stages. Et ça nous permet...
Parce que l'immigration, c'est beaucoup l'équilibre, hein? On a des réfugiés, il y a le regroupement familial. Donc, le profil qu'on voit et que les gens voient, c'est un mélange de tout ça et 70 % qui sont des travailleurs qualifiés, et, oui, il y a cette question d'arrimage avec, bon, leurs compétences, et tout ça. Mais donc nous aussi, pour s'assurer qu'on a aussi une autre façon d'enrichir notre capital humain mais avec un taux de succès élevé... Parce que c'est des gens qui ont déjà une expérience de travail. Et c'est des gens qui viennent de partout. Ils sont du Maghreb, mais, bon, alors, ils sont de l'Europe, ils sont de la France, ils peuvent être de l'Amérique latine. Avez-vous déjà regardé ce programme-là? Qu'en pensez-vous comme voie d'avenir?
Mme Laouni (Samira): Non. Non, franchement, je ne me suis pas penchée sur ce programme-là. Je ne l'ai pas encore regardé.
Mme Weil: Parce que c'est une façon, je vous dirais... Parce que vous dépeignez un portrait que je connais, j'ai lu des livres à ce sujet, puis c'est vrai, la détresse, c'est sérieux. Il faut dire que, moi, lorsque je pose la question à des gens... Parce qu'on me dit que les gens ont des attentes. Au ministère de l'Immigration, on me confirme qu'on leur explique très bien la situation, qu'ils peuvent avoir des barrières au niveau de l'intégration, que c'est beaucoup la personne qui devra faire ses preuves. Lorsque j'ai parlé à des personnes... même un médecin, tout récemment, qui m'a dit: Non, on m'a bien décrit la situation. C'était en toute connaissance de cause que je suis venu, et je savais que j'aurais peut-être à faire une autre formation. Et maintenant elle travaille dans un autre domaine, toujours dans le domaine de la santé. Et il y a beaucoup d'intervenants qui ont dit, comme vous: Il faut que la personne soit bien sensibilisée avant. Mais il faut que la personne entende ce qu'on leur dit, aussi. Et c'est souvent ça, peut-être, le problème. Ils ont tellement le désir de venir, tellement d'espoir. Est-ce qu'ils entendent vraiment les consignes qu'on leur donne?
Le Président (M. Bernier): Me Laouni.
**(16 h 40)**Mme Laouni (Samira): Je comprends tout à fait, Mme la ministre, et je suis complètement d'accord avec vous, aussi. Il y en a, des personnes aussi comme ça. Si je prends mon cas, mon exemple personnel, j'arrive de la France. Je n'arrive même pas du Maroc. Je vivais en France, je travaillais en France, j'étudiais en France. J'étais très bien là-bas. Ce qui m'a fait partir de la France, c'est la montée de la droite conservatrice. C'est ça qui m'a fait partir. Et j'ai cherché où aller. Dans un pays francophone, de surcroît le Québec, un pays, une nation où on reçoit les gens à bras ouverts. Donc, je suis venue. Mais, lorsque j'ai passé mes tests de sélection, on m'a remis un papier en me disant que mon diplôme était prenant, qu'il y avait de l'emploi pour mon diplôme ainsi que celui de mon conjoint. Donc, on n'est pas venus parce qu'on savait qu'on n'allait pas travailler. Sinon, je serais restée en France, je ne serais pas venue ici pour ne pas travailler. Bon, il se trouve que je ne me laisse pas faire et puis que je continue à me battre puis à travailler, même sans salaire, ce n'est pas grave. Mais je travaille toujours pareil, je suis toujours active.
Mais il y a beaucoup d'autres comme moi qui aussi ont... Il y en a même qui ont sombré dans la dépression parce qu'ils n'ont pas trouvé d'emploi jusqu'à maintenant, 13 ans après et 10 ans après qu'ils se sont établis au Québec. Et il y en a aussi qui ne veulent pas écouter. Bien, pour ceux-là, on ne pourra pas leur trouver de solution parce que c'est eux qui ont fait ce choix-là délibérément, sachant... Le médecin qui sait... Parce que, le médecin, c'est écrit sur papier que dans la médecine on ne peut pas exercer la médecine de son pays d'origine au Canada et au Québec. C'est délibéré. Ou on refait une formation, et là c'est toute une autre discussion aussi... Parce que je connais aussi l'association des médecins diplômés à l'extérieur du Québec et du Canada. Donc, c'est une autre problématique aussi. Mais, je veux dire, quand la personne choisit délibérément, c'est O.K., mais, quand on nous dit que c'est possible, que le marché d'emploi est ouvert et qu'on peut y accéder, quels sont les obstacles? Et, les obstacles, j'en sais, qu'il y a des obstacles visibles et il y a des obstacles invisibles, qu'on pourra revoir par la suite, à une autre occasion.
Mme Weil: Et donc, justement, pour les professionnels, on a le programme IPOP. C'est justement l'intégration. C'est un programme comme PRIIME mais qui cible les ordres professionnels. Donc, depuis quelques années, je vous dirais que l'Ordre des ingénieurs, qui a beaucoup évolué aussi dans ce sens... Je n'ai pas les chiffres devant moi, mais il y a beaucoup d'ordres professionnels maintenant qui ont travaillé très fort ce dossier-là. Et, nous, on continue à travailler avec eux et on finance d'ailleurs des outils d'évaluation pour leur permettre de mieux évaluer les compétences. Et il y a donc, depuis deux ans, trois ans, beaucoup de choses qui ont été faites.
Êtes-vous, donc, d'accord avec l'orientation qui dit d'augmenter à 50 %... Je vais la lire exactement: «Porter progressivement à 50 % la proportion des requérants principaux de la catégorie des travailleurs qualifiés détenant une formation dans des champs de compétence correspondant à des besoins exprimés sur le marché du travail.» Il y a une liste de métiers, puis on met ces gens-là sur la voie rapide pour un CSQ. C'est toutes ces améliorations qui ont été amenées depuis quelques années. J'imagine que vous êtes d'accord avec cette orientation?
Mme Laouni (Samira): Tout à fait. La seule chose pour ça, c'est qu'il faudrait... Entre le temps de prendre la décision et le temps de la concrétiser, des fois il y a un long temps qui s'écoule entre les deux, et il se fait que, lorsque le nouveau arrivant arrive, le programme, ou il est obsolète ou il n'est plus pratiqué. Donc, il faudrait peut-être que les délais soient plus raccourcis.
Le Président (M. Bernier): Merci, Mme Laouni. Nous allons donc passer du côté de l'opposition officielle avec M. le député de Drummond.
M. Blanchet: Bien le bonjour, mesdames. Vous avez quitté, dans votre cas précis, vous avez quitté la France pour le Québec dans la perspective d'améliorer votre sort, de façon très générale pour l'instant. Je crois comprendre que la perception que vous en aviez lorsque vous êtes partie était différente de ce que vous avez observé en arrivant, puisqu'encore aujourd'hui vous n'avez pas un emploi rémunéré. Je présume que vous n'êtes pas la seule personne dans cette situation fâcheuse. Est-ce qu'on peut croire qu'il y a un écart, pas systémique, dans le sens que ce n'est pas voulu, mais qu'il y a un écart systématique entre ce qui est présenté aux candidats à l'immigration et ce à quoi ils sont confrontés quand ils arrivent au Québec?
Le Président (M. Bernier): Mme Laouni.
Mme Laouni (Samira): Alors, ce n'est pas tellement l'écart. C'est surtout, comme je l'ai bien expliqué, c'est surtout, quand il arrive ici... Par exemple, je vais vous donner un exemple très concret, le fait que dans les entreprises ici tout le monde demande le bilinguisme. C'est un fait. Ce n'est pas expliqué. C'est un exemple concret. Un deuxième exemple, l'expérience canadienne québécoise. Pour ça, je sais que le MICC a fait beaucoup de programmes pour faciliter justement cette accessibilité à l'emploi, et un premier emploi au Québec, et puis le premier stage au Québec, mais il n'en demeure pas moins que ça a été une très grande problématique. Elle demeure encore, elle n'est pas complètement absorbée, elle n'est pas complètement résolue. Quand on arrive, on ne peut pas avoir d'expérience canadienne québécoise, en arrivant ici, sauf si on prend Air Canada et puis qu'on travaille sur l'avion, à bord, pour obtenir cette expérience-là. Sinon, on ne peut pas l'avoir. Donc, c'est toutes des choses comme ça. C'est des petites choses, des fois, auxquelles on n'a pas... Ce n'est pas fait sciemment, comme vous avez dit, ce n'est pas systémique, mais c'est fait, et puis on n'y a pas fait attention, et puis on continue, puis ça fait, ça crée des obstacles encore et encore. Voilà.
Le Président (M. Bernier): M. le député.
M. Blanchet: Les gens qui ont rencontré les candidats à l'immigration à Paris et qui leur ont dit que... qui ne leur ont pas dit que le bilinguisme semblait -- Dieu sait que c'est problématique -- la norme pour avoir un emploi dans la région de Montréal, ces gens-là le savaient, pourtant. Il doit y avoir quelqu'un au Québec qui leur a dit: Écoutez, vous ne pouvez pas leur dire que juste être francophone, ça va suffire, parce qu'il va falloir qu'ils puissent... Encore là, Dieu sait que c'est un problème, mais juste parler français, ça ne suffirait pas. Ça fait que ce n'est pas sciemment, mais une bonne foi institutionnelle ferait sûrement en sorte qu'on vous aurait averti de ça.
Mme Laouni (Samira): Je pense que la personne... Je ne vais pas m'acharner sur cette personne-là, le délégué du Québec à Paris, par exemple, la personne qui nous a parlé, parce que je pense que le fait que cette personne soit fonctionnaire d'État, qu'elle ne fonctionne qu'en français, donc, pour elle, c'est normal que de recevoir du monde qui parle français et qui veuille travailler en français. Et on n'a pas du tout abordé, je n'ai pas du tout souvenir que moi-même, de mon bord aussi, que j'aie abordé cette problématique-là de parler de bilinguisme, d'anglais, ou autres. Pour moi, j'ai choisi le Québec parce qu'on parle français au Québec et parce que je voulais continuer à fonctionner en français.
M. Blanchet: On va essayer que vous ne soyez pas trop déçue.
Mme Laouni (Samira): Je ne le suis pas.
M. Blanchet: Mon impression est que quelqu'un au Québec qui fait affaire avec la haute science, les transports internationaux, le commerce international ou à peu près n'importe quoi qui se situe au niveau international va devoir maîtriser la lingua franca internationale, qui est l'anglais, nous en convenons tous. Mon impression est aussi qu'en théorie, et tout le monde le dit quand c'est public, quelqu'un peut bien vivre sa vie professionnelle, sa vie en général, au Québec, en français. S'il n'a pas de lien avec l'international, il n'aurait, en théorie, pas besoin de l'anglais puisque le français est la seule langue officielle au Québec. J'imagine...
Mme Chouinard (Carmen): Savez-vous, monsieur, qu'au Québec présentement il y a des femmes qui veulent juste travailler chez McDonald's et qui ne sont pas employées parce qu'elles ne parlent pas anglais?
M. Blanchet: Je m'en inquiète, justement.
Mme Chouinard (Carmen): Voilà. Ça, c'est la réalité à Montréal, dans tous les quartiers à Montréal.
M. Blanchet: Parce que ce que j'entends...
Mme Chouinard (Carmen): C'est notre réalité à Montréal.
Le Président (M. Bernier): Merci, Mme Chouinard.
M. Blanchet: Ce que j'entends de ce que vous nous dites, c'est: Nous sommes pénalisées parce que nous sommes en principe la plus commode -- passez-moi l'expression «commode», et je ne la veux pas irrespectueuse, bien au contraire -- ...nous avons déjà une maîtrise de la langue de la société d'accueil, et, plutôt que d'être un avantage lorsqu'on arrive, à certains égards, c'est un inconvénient. Pour moi, ce constat-là, il est extrêmement grave. Pour moi, ce constat-là suggère que le Québec n'est pas du tout ce qu'on veut bien prétendre qu'il est. Ça, pour ma part, ça m'inquiète.
Vous disiez que les gens laissent beaucoup -- et je n'en disconviens pas du tout -- laissent beaucoup derrière eux pour venir vivre au Québec. Ils viennent puis ils poursuivent un rêve, et c'est le propre de l'Amérique depuis qu'elle a été découverte. Ce n'est pas facile, comme question, mais j'aimerais mieux comprendre, peut-être en sectionnant: Au niveau professionnel, qu'est-ce que c'était et à quoi est-ce qu'on aspire? Au niveau socioéconomique, qu'est-ce que c'était, à quoi on aspire? On veut améliorer son sort, et c'est absolument légitime. Donc, on laisse effectivement quelque chose pour autre chose qu'on pense qui va être mieux. Par rapport à ce que vous connaissez de la société d'accueil, des gens qui sont le plus près de vous culturellement, qu'est-ce qu'on laisse puis qu'est-ce qu'on espère trouver, au-delà de ce qui est parfois très réductionniste, là, au-delà de strictement les questions professionnelles? Parce que ce n'est pas pour le climat, j'assume.
Le Président (M. Bernier): Mme Laouni.
Mme Laouni (Samira): Alors, je peux vous dire, les chiffres le démontrent, à plus de 70 % de... l'immigration reçue est très instruite, est fortement instruite. Donc, quand on est très instruit, dans les pays notamment du Maghreb, eh bien, on est des cadres, on est des hauts fonctionnaires. Quand on arrive ici et qu'on se retrouve à faire chauffeur... comme une anecdote aussi qui dit que c'est mieux d'aller, je dirais, dans un taxi que d'aller dans un hôpital, parce que dans un taxi on est sûrs d'avoir un médecin, avec nos chauffeurs, qui peut nous traiter si on a une crise cardiaque dans le taxi. Donc, c'est une réalité, c'est une dure réalité. Mais aussi, comme j'ai dit tantôt, les médecins, eux, ils savent qu'ils ne peuvent pas exercer. Mais d'autres professions ne le savent pas. Au contraire, sur le papier qu'on leur remet, il y a de l'emploi, le marché est encore en expansion, etc., est ouvert, et on a besoin de cette main-d'oeuvre. Donc, c'est à ça qu'on aspire.
Et il n'y a pas que ça, il n'y a pas que seulement le niveau social ou le niveau, je dirais, professionnel. On aspire aussi à une certaine équité, égalité, les valeurs, les valeurs universelles, qui malheureusement manquent dans certains pays desquels les nouveaux arrivants arrivent. Si je parle du Maghreb, eh bien, il suffit de voir qu'est-ce qui se passe avec le printemps arabe actuel, puis on se rend compte de qu'est-ce que les gens vont chercher aussi. C'est cette quiétude, c'est cette sécurité, c'est ces valeurs-là, qui sont réellement instaurées, c'est ça qu'on vient chercher.
Le Président (M. Bernier): M. le député.
**(16 h 50)**M. Blanchet: Vous me suggérez une question. Il y a un écart entre... D'abord, on part d'une situation qui, comme vous le dites, est parfois difficile. On dit: Ah! je vais aller au Québec, et voici ce que je pense que ce sera. Il y a un écart considérable. Est-ce que l'écart est au point que, si les gens savaient, avant de partir, ce que ce sera, il y en aurait moins qui effectivement seraient intéressés à venir?
Le Président (M. Bernier): Mme Laouni.
Mme Laouni (Samira): Certainement qu'il y en aurait moins. Certainement qu'il y en aurait moins. Et, moi, je vais encore plus loin dans ma réflexion. Je dis que ce choc-là culturel, et je l'ai dit au début de ma présentation, il n'est pas d'un seul bord, il est bilatéral, il est des deux côtés. Si on s'affaire ici, au Québec, maintenant, aujourd'hui, on prend la décision de mettre des programmes sur pied pour faire la formation, par exemple chez les fonctionnaires d'Emploi-Québec, de la SAQ, des policiers, des services de santé... Parce qu'il ne faut pas oublier que durant... depuis, je dirais, 2006 il y a une montée de... Je vais le dire: Il y a une montée pas de racisme, mais vraiment de rejet de l'autre, ce qui fait... et de crainte, et une augmentation de peur aussi. Et tout ça mélangé ensemble, ça fait quelque chose d'explosif. Parce que l'employeur ne veut pas employer, parce qu'il a peur que l'autre lui demande des accommodements religieux et des accommodements raisonnables, l'autre ne peut pas aller travailler parce qu'il n'a pas la langue, ou il ne veut pas parce qu'ils vont mal le regarder, et ainsi de suite. Si on s'affairait à faire peut-être... à mettre en place des programmes à la télévision pour démystifier, pour décloisonner, pour faire tomber certains préjugés et certains stéréotypes, je suis certaine qu'on y parviendra. Peut-être pas à une grande vitesse, grand V, mais à petite haleine, on va y arriver, on y parviendra.
Et surtout ce qu'il faudrait faire, c'est de la sensibilisation, je pense. Et, comme j'ai dit tantôt, pour, par exemple, donner des exemples, si on voit, par exemple... Il n'y a pas de M. Delorme d'une communauté culturelle. Il y a Mme Céline Galipeau, mais elle ne ressemble pas beaucoup, beaucoup, beaucoup aux communautés culturelles actuelles. Si on mettait quelqu'un qui représenterait les communautés culturelles, je pense que ça réglerait beaucoup de... Parce que, quand on se voit représenté, on comprend qu'on a de la place, et c'est tout dans ça.
Et la gestion de diversité, dont vous parliez tout à l'heure avec le parti Vision Montréal, je pense, c'est ça, la gestion de la diversité. Ce n'est pas seulement gérer qu'est-ce qu'ils vont faire, ou est-ce qu'ils vont observer aux règles de l'égalité, ou est-ce qu'ils vont observer aux lois. Tout ça, c'est très important, c'est très important, mais il faut aussi travailler sur la sensibilisation. Et la sensibilisation et l'éducation populaire, je pense, c'est ce qui manque le plus aujourd'hui.
Mme Chouinard (Carmen): Est-ce que je pourrais rajouter...
Le Président (M. Bernier): Oui, allez-y, Mme Chouinard.
Mme Chouinard (Carmen): Oui. Est-ce que je pourrais rajouter? Juste pour vous dire: J'ai devant moi M. Maka Kotto. Quand j'étais jeune, j'écoutais les séries québécoises, et, la première fois où j'ai vu un Noir -- excusez, là, M. Maka Kotto, je ne suis pas raciste...
M. Kotto: Oui, je suis Noir.
Des voix: Ha, ha, ha!
Mme Chouinard (Carmen): ... -- la première fois où j'ai vu un Noir dans une série québécoise, ça a été M. Maka Kotto. Est-ce qu'il serait pas... Écoutez les séries qu'il y a toujours... Honnêtement, je n'ai pas le temps de les écouter, mais je vous demande juste de regarder ce qui se fait présentement au Québec. Et est-ce que nos communautés ethniques sont représentées, ne serait-ce que dans nos séries québécoises? Il y a vraiment beaucoup de travail à faire.
Le Président (M. Bernier): Merci. M. le député de Bourget, oui. Vous voulez ajouter, M. le député de Bourget, expliquer votre rôle, peut-être?
M. Kotto: Non, mais c'est un vaste programme, M. le Président. C'est effectivement une voie. Le ministère de l'Immigration a lancé une campagne de sensibilisation récemment. C'est un bon premier pas. Et je suggérerais justement un effort conjugué, convergé de différents ministères, relativement à cette sensibilisation-là, et notamment le ministère de la Culture et des Communications, qui a son rôle à jouer relativement à cet enjeu-là.
Quand on a des modèles d'identification, des modèles de référence affichés à l'image, affichés dans la fonction publique, affichés à travers les médias, il y a lieu de penser que la société, sans lui faire porter des fruits comme un arbre, elle évolue dans le sens de faire grandir ses fruits et de les faire mûrir. Il est possible aussi que les changements de mentalité ne soient pas un phénomène spontané, immédiat, mais que d'une génération à l'autre on voie des progrès. Mais, pour ce faire, il faut commencer ce travail. Malheureusement, il n'est pas fait, il n'est pas fait.
Et ce qui est encore plus grave... Et c'est bien d'évoquer la perception qu'on a de l'autre aujourd'hui en Occident. Si vous avez la chance de le faire, jetez un oeil sur cette étude qui avait été commandée par Ipsos. C'est un institut de statistique... c'est l'institut de statistique français de référence. C'est Global Advisor qui a réalisé cette étude, là. La perception de l'immigration aujourd'hui, à travers l'Occident et même en Afrique, est un problème grave. Les communautés se referment entre elles. Et ça va de pair avec les flux, qui sont de plus en plus importants, parce que les sociétés n'ont pas été préparées à cela. Il est possible qu'il faille investir deux fois plus d'efforts pour préparer ces sociétés à vivre avec la diversité. Ce n'est pas facile. Et c'est pourquoi ça ne doit pas devenir un enjeu politique non plus. Parce que, si ça devient un enjeu politique comme en France, ça bloque. Ça demande la convergence de toutes les énergies pour une approche constructive pour le futur, pour un mieux-être de la diversité au sein de la société, pour une meilleure compréhension des uns et des autres aussi.
Pour prendre l'exemple que vous avez donné à la télévision, on est venu me chercher à Paris. Parce que je vivais à Paris, moi aussi, à l'époque. Et c'est Dany Laferrière qui m'a convaincu de venir au Québec, parce que justement il y avait une carence au plan de la représentation de la diversité à la télévision et au cinéma. En France, tout allait très bien pour moi. Quand j'ai choisi de venir, on m'a pris pour un débile mental parce que j'étais bien installé, bien assis. Pourquoi aller reprendre à zéro là-bas alors que tu as eu du mal à faire ta place en France? Je suis parti comme en mission. C'est un peu un réflexe conditionné parce que j'ai failli être missionnaire, en passant. Et ça a fonctionné. Et beaucoup de gens, et même de jeunes générations, de la génération de mes enfants, me parlent de certaines séries, de certains films que j'ai pu faire. Et ça rapproche. C'est très pertinent. Je prends votre remarque comme une proposition et je passe le témoin à la ministre pour qu'elle en discute avec ses collègues.
Mme Chouinard (Carmen): ...ajouter?
Le Président (M. Bernier): Oui, allez-y, Mme Chouinard... Ou bien, M. le député, je pense que... Je dois donner la parole au député. C'est lui...
M. Blanchet: Ça va être très rapide. Vous avez soulevé deux exemples qui me semblent extrêmement différents. Un société d'État qui engage un lecteur de nouvelles, c'est une chose. Je me rappelle, j'ai subi un peu les foudres d'une certaine communauté nationaliste parce que, lorsque Jacob Tierney avait dit qu'il n'y avait pas assez de visibilité pour les anglophones et les gens issus des communautés immigrantes dans les arts québécois, j'avais simplement exprimé que son opinion était aussi légitime que celle de n'importe qui et que, même si je pense essentiel que certains éléments de convergence ne soient pas négociables, la langue commune, la laïcité des institutions, connaissance de l'histoire minimale, bref un certain nombre de paramètres de ce type-là, nous perdrions la richesse de la diversité culturelle si nous commencions à imposer des contraintes aux artistes et aux créateurs, qui, par nature, doivent être capables de se déployer dans la plus absolue des libertés. Il y a des limites, là, mais n'empêche. Et donc j'avais un peu pris la défense de M. Tierney et j'avais subi un peu les foudres... Je ne crois pas, je ne crois pas, pour être issu du milieu des arts, je ne crois pas que ça se fasse sous la contrainte. Je pense que ça se fait par le rapprochement.
Et je reprendrais ce que disait Mme Harel tout à l'heure: Peu de sociétés au monde font comme nous le faisons ici, d'une façon aussi paisible, cette discussion sur les meilleures manières de se développer harmonieusement ensemble. Et ce qui se vit à l'échelle internationale et les frictions avec une certaine extrême droite sont l'expression, Dieu merci marginale, des tensions normales du fait qu'il n'y a pas que l'économie qui se mondialise, il y a les mouvements humains aussi.
**(17 heures)**Le Président (M. Bernier):. Merci. Vous avez environ une minute, madame, pour répondre. Par la suite, notre temps sera terminé. Oui, allez-y, Mme Provencher.
Mme Provencher (Marie-Andrée): Je vais revenir en arrière, un petit peu. On a parlé d'employeurs réticents à engager des nouveaux arrivants. On sait qu'il y a plus de réticences vis-à-vis des Maghrébins musulmans, d'accord? Bon, moi, je pense qu'un certain nombre d'emplois sont affichés comme exigeant le bilinguisme pour préparer un prétexte, prétexte légal, à refuser l'embauche à un candidat dont on n'aime pas l'apparence. Et je pense qu'on devrait faire comme un certain effort pour un peu étudier les annonces d'emploi pour vérifier: oui, c'est effectivement souhaitable que la personne soit bilingue pour effectuer ces tâches, et: non, c'est carrément de la frime.
Le Président (M. Bernier): Merci beaucoup. Donc, merci aux représentants du Conseil des relations... excusez, à l'Organisme de communication pour l'ouverture et le rapprochement interculturel. Mme Laouni, Mme Chouinard, Mme Provencher, merci de votre participation. Ça a été fort intéressant.
Je vais suspendre quelques instants pour permettre au Conseil des relations interculturelles de prendre place.
(Suspension de la séance à 17 h 2)
(Reprise à 17 h 6)
Le Président (M. Bernier): Donc, à l'ordre, s'il vous plaît! Nous allons reprendre nos travaux. Nous recevons maintenant le Conseil des relations interculturelles, représenté par Mme Patricia Rimok. Bienvenue, madame.
Mme Rimok (Patricia): Merci.
Le Président (M. Bernier): Bienvenue à la Commission des relations avec les citoyens. Donc, il nous fait plaisir de vous accueillir cet après-midi. Vous avez une période de 15 minutes pour faire votre présentation. Par la suite, nous échangerons... vous pourrez échanger avec les parlementaires. Le parole est à vous.
Conseil des relations interculturelles (CRI)
Mme Rimok (Patricia): Merci beaucoup. Mme la ministre, Mmes et MM. les députés, c'est toujours un honneur de venir nous présenter et présenter nos propos. Alors, en fait, d'entrée de jeu, je vous dirais que c'est la dernière fois aujourd'hui que je prends la parole à titre de présidente posthume du Conseil des relations interculturelles du Québec. Ce fut un privilège d'avoir servi le CRI pendant les sept dernières années, un organisme qui oeuvrait depuis 25 ans à bâtir un Québec inclusif et en plus qui était le seul bras-conseil indépendant au service de la ministre de l'Immigration et des Communautés culturelles.
Nous comprenons très bien que le gouvernement, en période d'assainissement des finances publiques, a eu à faire des choix, mais ceux-ci demeurent un peu surprenants à une époque où l'immigration constitue un enjeu de premier plan pour la société québécoise, un enjeu extrêmement sensible et critique pour notre démographie, pour notre économie et évidemment pour la pénurie d'emplois appréhendée, de surcroît tout cela dans un contexte de rareté de nouveaux capitaux, et la population québécoise désirant le maintien du panier de services publics actuel.
Je profiterai donc aussi de cette occasion pour vous faire part de mes intentions de poursuivre cette volonté au sein de la société, avec ceux qui nous avaient déjà appuyés, ceux qui nous appuient maintenant et qui nous accompagnent, et de ceux qui voudront bien nous suivre.
Alors, ma présentation portera tout d'abord sur les éléments essentiels du mémoire que nous avons soumis à la commission, en revenant sur certaines recommandations principales et, en conclusion, sur comment nous entendons poursuivre notre volonté et nos travaux au sein de la société.
En ce qui concerne le cas des travailleurs qualifiés, depuis les dernières années, le ministère de l'Immigration et des Communautés culturelles obtient de bons résultats quantitatifs du côté de l'immigration économique, et ce sont les travailleurs qualifiés qui constituent la sous-catégorie la plus importante.
Selon le Vérificateur général du Québec, entre 2006 et 2008, seulement 9 % des travailleurs qualifiés sélectionnés par le ministère présentaient un profil répondant aux exigences dans les domaines de formation privilégiés du Québec, alors que 65 % des candidats n'avaient obtenu aucun point pour la formation. De plus, considérant que les délais entourant le processus d'immigration, de l'obtention du certificat de sélection jusqu'au visa du gouvernement fédéral, sont plus longs que dans le reste du Canada, est-ce réaliste de viser 50 % des travailleurs qualifiés avec la formation correspondant aux besoins du marché du travail? À ceci se rajoute qu'une partie importante des travailleurs qualifiés est aussi constituée de personnes qui les accompagnent mais dont le profil ne répond pas nécessairement aux qualifications privilégiées par le gouvernement du Québec au regard de sa grille de sélection, sinon d'y répondre trop tard.
**(17 h 10)** Cependant, nous avons des pistes de solution qu'on aimerait prioritairement voir le gouvernement faire. Premièrement, évaluer les compétences des travailleurs qualifiés afin de les arrimer aux besoins du marché du travail québécois. Mais, pour ce faire, il faut bien des outils: alors, développer une grille de compétences qui compléterait la grille de sélection, puis, si nécessaire, un bilan de compétences pourrait être administré aux nouveaux arrivants; en amont, collaborer avec l'ensemble des sectoriels de la main-d'oeuvre afin de déterminer leurs besoins en main-d'oeuvre sur le court, moyen et long terme, et signer des ententes-cadres en les impliquant dans le processus de sélection; évidemment, assurer que cet arrimage se fasse aussi avec la participation des territoires, villes et régions; réduire bien sûr les délais de traitement en appliquant la première recommandation; revoir la répartition des dépenses allouées au ministère et autres ministères au regard de la première recommandation; mettre en place un dispositif d'évaluation de la satisfaction de ces derniers au regard des services reçus; faire une évaluation à jour des programmes d'immigration, de l'intégration en emploi des travailleurs qualifiés; utiliser des indicateurs socioéconomiques pour mieux mesurer la capacité de l'État québécois à accueillir et à intégrer en emploi les immigrants; et finalement poursuivre les campagnes de sensibilisation auprès des entreprises pour en assurer une plus grande ouverture.
On aurait une question à la ministre: Est-ce que la ministre a signé des ententes avec les sectoriels de la main-d'oeuvre? Et, si oui, lesquels? Et sinon pourquoi? Nous le savons, une mauvaise intégration pourrait avoir un impact sur l'attraction des travailleurs qualifiés et des répercussions sur le maintien de la cible de 65 % de l'immigration.
En ce qui concerne le cas des étudiants étrangers, nous considérons que c'est une source de croissance économique. En 2008, une étude identifiait le Canada comme l'un des pays de l'OCDE comptant le plus d'immigrants avec une scolarité universitaire et ainsi la plus forte probabilité que des entrepreneurs immigrants créent des entreprises à succès. Le Québec fait bonne figure quant à l'attraction des étudiants étrangers, une source importante de futurs entrepreneurs si nous les incitons à s'établir avec leurs études. Environ 9 % des étudiants universitaires sont des étudiants étrangers. Un tiers des étudiants étrangers qui viennent au Canada choisissent une université québécoise.
Donc, question à la ministre: Est-ce que la ministre pourrait interpeller son collègue le ministre du MDEIE afin qu'il puisse inclure la recommandation du CRI dans sa politique sur l'entrepreneurship en ce qui concerne le cas des étudiants étrangers pour les retenir?
En ce qui concerne les travailleurs temporaires, depuis les années 2000, le gouvernement fédéral privilégie le traitement des demandes d'admission de travailleurs étrangers au Canada sous un permis de travail temporaire. Au Québec, ces admissions ont atteint un sommet en 2009 avec plus de 30 000 travailleurs. Ainsi, l'augmentation du nombre de travailleurs temporaires a donné lieu à un accès, pour les employeurs, à une main-d'oeuvre plus flexible. En 2008, une consultation organisée par le ministère avec les entreprises à ce sujet s'était soldée par plusieurs recommandations pour améliorer la situation. Qu'en est-il de ces recommandations en 2011?
Nous avons aussi des pistes de solution à proposer à cet égard. Le conseil considère que le MICC devrait diffuser les moyens qu'il se donne pour s'assurer de retenir de manière permanente les travailleurs temporaires spécialisés, avec le concours des entreprises qui les ont embauchés, et que le MESS, les partenaires du marché du travail et le MICC se penchent spécifiquement sur le processus entourant la reconnaissance des compétences de la main-d'oeuvre pour, entre autres, mesurer les compétences des immigrants temporaires non spécialisés au profit des entreprises qui souhaiteraient les embaucher d'une manière permanente.
En ce qui concerne le cas des immigrants d'affaires, ça, c'est un gros... pour moi, c'est saisir cette opportunité, je le répète. Dans un mémoire qu'on a réalisé en janvier 2011, le conseil s'est penché sur le cas des immigrants investisseurs, entrepreneurs et travailleurs autonomes. Je serai donc brève sur ce sujet, l'ayant discuté en commission parlementaire. Mais je ne saurais trop insister sur l'importance de mieux attirer et retenir plus particulièrement les immigrants investisseurs afin de les inciter à créer des entreprises au Québec. Le taux de rétention au Québec étant largement plus faible que celui de la Colombie-Britannique et l'Ontario, il serait essentiel de développer un dispositif d'accompagnement et de suivi permettant de suivre leur établissement en affaires au Québec de manière permanente en leur offrant un accompagnement personnalisé. D'ailleurs, à cet effet -- j'y reviendrai dans la deuxième partie de ma présentation -- tout comme les étudiants étrangers, le Québec ne doit pas les laisser partir lorsque leur choix est de s'établir ailleurs que dans leurs pays d'origine.
En ce qui concerne le cas des réfugiés, le conseil attire aussi l'attention sur les compétences que les personnes réfugiées peuvent détenir. L'Association éducative transculturelle à Sherbrooke, qui parraine des réfugiés, en est un exemple. Cette ville abrite la deuxième communauté afghane au Québec. À cette fin, il serait pertinent de créer un guichet unique pour les personnes réfugiées, notamment afin de les référer au bon endroit, afin qu'elles obtiennent un service adapté à leurs besoins, qu'il s'agisse de soins de santé, de services sociaux mais aussi d'employabilité, par exemple.
Je dirais un certain... je reviendrais sur les propositions, les orientations du ministère sur la connaissance du français. La proportion des personnes connaissant uniquement le français et celles disant le connaître en plus de l'anglais a augmenté d'un peu plus de sept points entre 2006 et 2010, comparativement à la période 2002-2006. Ce sont de bons résultats quantitatifs. On peut, bien sûr, se demander ce que les personnes entendent par «connaître le français». À cet égard, dans le document de consultation sur la planification de l'immigration, le ministère indique que 21 % des travailleurs qualifiés admis entre 2005 et 2009 et qui avaient déclaré connaître le français s'étaient inscrits à des cours de francisation en constante augmentation depuis les années quatre-vingt-dix.
Or, ce qu'il est important de se rappeler, c'est que la capacité de maîtriser le français ne peut pas se faire au détriment de l'intégration en emploi. Puisque nous savons qu'ultimement le nombre d'inscriptions a augmenté et qu'ultimement nous avons aussi un taux de chômage élevé, jusqu'à quel point est-ce qu'il y a un arrimage entre cette connaissance du français et la capacité d'intégrer ces personnes sur le marché du travail? La question qu'il faudrait se poser, c'est: Jusqu'à quel point est-ce qu'on ne pourrait pas mieux arrimer les cours de francisation avec le secteur d'affaires et, comme on l'a souvent cité, avec la FTQ?
L'autre point aussi, c'est qu'étant donné que le nombre d'inscriptions a augmenté vous avez aussi la part, la répartition des finances associées à ça qui est énorme pour le gouvernement du Québec, énorme pour le ministère de l'Immigration. Donc, ultimement et optimalement, même si quantitativement on a de bons résultats sur le nombre d'inscriptions, on n'est pas sûrs qu'au-delà du nombre d'inscriptions, l'offre de francisation n'étant pas suffisamment adaptée aux secteurs d'activité... jusqu'à quel point est-ce qu'on peut continuer et poursuivre à augmenter les fonds associés à la francisation si en même temps on n'est pas capable d'associer cette augmentation-là à une intégration réussie sur le marché du travail.
En ce qui concerne les bassins géographiques, nous sommes heureux d'apprendre que la ministre a reculé sur cette position. Je n'ai pas trop de choses à dire là-dessus.
Et, pour terminer cette première partie de ma présentation, le conseil ne peut donc qu'accueillir favorablement l'orientation de la ministre de ramener le nombre d'immigrants à 50 000 par année, le temps que l'ensemble des problématiques soient mieux cernées et corrigées, mais cependant d'agir rapidement afin de ne pas voir le poids démographique du Québec réduire encore plus par rapport au reste du Canada.
On arrive à ma partie 2.
Le Président (M. Bernier): Il vous reste trois minutes.
**(17 h 20)**Mme Rimok (Patricia): Je vais aller vite. Alors, le Québec est une terre d'accueil extraordinaire, mais, à force de ne pouvoir assurer aux immigrants que nous avons sélectionnés des conditions d'emploi et des revenus qui sont minimalement et globalement équivalents à ceux de la moyenne nationale, et ce, depuis les années quatre-vingt, il ne faudra pas ensuite s'étonner de constater que nous aurons aussi, par ricochet, hypothéqué la deuxième génération. Cette façon de voir et de faire doit changer si le Québec moderne veut s'accomplir dans tout ce qu'il est et dans tous les objectifs qu'il se donne. Il en va de sa pérennité.
Vous connaissez notre position sur les immigrants d'affaires en général. Comme il ne me reste pas grand temps pour expliciter en fait tout l'argumentaire là-dessus, j'aimerais simplement ramener l'exemple de l'Australie, qui est intéressant à retenir, puisque l'Australie, il y a déjà plus de 10 ans, a modifié son système de sélection pour évaluer les travailleurs qualifiés en fonction de leur employabilité sur le marché du travail australien. Ainsi, plutôt que de chercher, comme au Québec, à apprécier strictement le potentiel d'intégration des candidats d'après des compétences générales, elle évaluerait les compétences des candidats selon les besoins du pays en matière d'emploi. 10 ans après la réforme, ces résultats ont été très concluants. Pourquoi ne pas regarder ce genre de modèle?
Nous devons aussi revoir nos façons d'appréhender les fluctuations des demandes du marché et répondre plus rapidement aux besoins des employeurs, des territoires mais aussi des immigrants. Ceci aiderait à rendre plus efficace et fluide le processus migratoire à la fois pour les immigrants à la recherche d'un emploi, pour ceux qui créent des entreprises, condition même du statut d'entrée, ainsi que pour les immigrants qui investissent leurs capitaux et leur savoir-faire. Donc, je ne veux pas revenir encore sur la dernière catégorie des immigrants investisseurs, dont on connaît déjà le résultat au niveau de la rétention: 90 % quittent le Québec au bout de 10 ans. Évidemment, on pourrait regarder et retrancher différentes années pour voir si ça monte ou ça descend, mais, bref, si on le voit sur le long terme, ça fait 20 ans qu'on ne les retient pas.
Donc, nous comprenons que le gouvernement n'a pas la mission de retenir les immigrants investisseurs, mais qu'il est plutôt là pour faciliter l'accès aux programmes. Donc, étant donné que c'est le cas et puisqu'il ne se préoccupe pas réellement de cette problématique, nous avons décidé nous-mêmes de le faire en créant une agence au service des immigrants d'affaires et, dans un premier temps, nous allons concentrer nos efforts sur favoriser la rétention des immigrants investisseurs en collaboration avec les banques intermédiaires financières, les sectoriels de main-d'oeuvre, les associations d'affaires de toutes origines, les villes et régions, et autres acteurs économiques et réseaux sociaux qui pourront contribuer à faciliter l'accès aux opportunités d'affaires, et ce, dans le but de faire prospérer le Québec, favoriser à ce que les immigrants investisseurs deviennent un vecteur d'innovation et qu'ils contribuent à la relève entrepreneuriale, et les inciter bien sûr à créer des entreprises qui favorisent la création d'emplois, et bien sûr, encore, leur dédier un service d'accompagnement sur mesure, à l'écoute de leurs besoins. D'ailleurs, à cet effet, nous annonçons le lancement de notre site Web, www.ib2ib.net, réseau d'affaires immigrantes, qui se veut, dans la première phase, un forum de partage et d'échange pour les immigrants d'affaires...
Le Président (M. Bernier): Merci, madame, sur ce lancement de réseau. Nous allons maintenant procéder aux échanges avec les parlementaires. Vous aurez l'occasion de poursuivre vos éléments. Mme la ministre, la parole est à vous.
Mme Weil: Oui. Juste sur ce dernier point, on suggérait sur les orientations... Bonjour, d'abord.
Mme Rimok (Patricia): Bonjour.
Mme Weil: Et merci beaucoup de prendre le temps de venir ici pour faire la présentation. Vous avez une longue expérience en immigration, et donc on apprécie beaucoup que vous soyez venue ici pour partager cette expérience et votre point de vue.
Connaissez-vous le projet pilote qu'on a avec Investissement Québec, justement, sur la rétention des immigrants investisseurs?
Mme Rimok (Patricia): Est-ce que c'est le projet où...
Mme Weil: Pas le tout récent.
Mme Rimok (Patricia): ...il y a trois heures, c'est-à-dire il y a trois heures d'accueil auprès de personnes immigrantes?
Mme Weil: Non, c'est un accompagnement, un vrai accompagnement, pour assurer... Donc, il y a plusieurs initiatives avec Investissement Québec, là, qui devient vraiment un partenaire important. Donc, c'est un projet pilote, et on va voir si ça donne des résultats. Mais évidemment toutes les initiatives qui vont aller dans le sens de la rétention, toutes les initiatives sont intéressantes, surtout des acteurs du milieu économique et de la société civile en général, hein? Parce que finalement l'immigration, c'est l'affaire de beaucoup, beaucoup, beaucoup d'acteurs. Il ne faut pas juste le gouvernement. Le gouvernement a des programmes, etc., des incitatifs, etc.
Pour le volume -- donc, ça, c'est peut-être la première des questions -- vous êtes d'accord avec cette orientation de stabiliser à 50 000 pour donner le temps à toutes ces mesures qui ont été mises en branle, que vous connaissez très bien, ces dernières années, qui portent fruit... Et aussi je pense qu'on est beaucoup dans une conjoncture où on parle beaucoup de diversité mais on parle aussi de besoins de main-d'oeuvre et que les entreprises doivent s'ouvrir. Et les employeurs, généralement, du secteur public, parapublic et privé ont cette diversité. Donc, vous partagez cette vision.
Donc, oui, j'ai annoncé publiquement, la semaine dernière, que je voulais une nouvelle orientation et je pose la question aux intervenants qui viennent. Ce serait une orientation qui irait beaucoup plus sur une orientation de diversité mais qui n'aurait pas de chiffre. Il n'y a pas de plafond. C'est plus obligation de moyens, que le ministère de l'Immigration continue... Parce que le Québec est reconnu quand même pour avoir beaucoup de diversité dans son immigration. Mais on veut maintenir cette diversité. Et ce que les gens... Je pense que les gens ne se rendent pas compte toujours -- vous vous en rendez compte, là -- mais, l'immigration, on parle d'un marché et on est en compétition. Et on n'a pas nécessairement le luxe... Parfois, il faut vraiment travailler très fort.
Vous parliez de l'Australie. C'est 18 millions de population, donc c'est beaucoup moins que le Canada qu'ils vont chercher. Alors, eux, c'est un certain nombre de plombiers dont ils ont besoin? Ils prennent un certain nombre de plombiers, hein? C'est vraiment comme ça qu'ils fonctionnent. Ils font même... ils s'assurent que l'ordre professionnel va même intégrer la personne, avant de donner la citoyenneté, bon, ou d'accorder la sélection, alors que, nous, comme vous le savez, l'immigration répond à beaucoup de besoins: démographiques long terme, contrer le vieillissement, le marché du travail. Donc, on cherche des gens qui sont scolarisés, avec une capacité de mobilité transversale.
Donc, je vais commencer sur la question de la... une orientation qui irait dans le sens de la diversité. Je n'ai pas la formulation encore, mais l'idée, ce serait de s'assurer qu'on continue à... pour tirer le maximum de bénéfices de l'immigration, que le Québec puisse continuer à bénéficier... qu'on aille chercher la diversité dans nos bassins d'immigration. Est-ce que vous êtes en accord avec une orientation de ce genre?
Le Président (M. Bernier): Mme Rimok.
Mme Rimok (Patricia): Je m'excuse, je ne sais pas à quelle réponse vous avez fait allusion quand vous parliez de diversité.
Mme Weil: Non, moi, je vous dis que vous avez évoqué que vous étiez en accord sur le fait que je reformule ou que je retire... Vous aviez dit ça, là, dans votre présentation sur les bassins de provenance, le 30 %.
Mme Rimok (Patricia): Ah! C'est-à-dire, le seul point que j'avais là-dessus, c'est que...
Mme Weil: Oui, et, moi, je le remplace. Mais je propose... et je vais consulter les groupes...
Mme Rimok (Patricia): Ah! D'accord. O.K.
Mme Weil: ...et les intervenants pour le remplacer par une notion de diversité, parce que c'est vraiment ça qu'on cherche. Et, j'ai eu l'occasion de le répéter, c'est beaucoup les employeurs, le milieu des affaires aussi qui dit que la diversité en soi est une valeur ajoutée. Ils prennent conscience de ça, surtout des études qui émanent des États-Unis et du Canada anglais, mais le Conseil du patronat aussi, la Fédération des chambres de commerce, la Chambre de commerce de Montréal, qui l'a dit: bon, des équipes de personnes qui viennent d'un peu partout, des têtes de pont -- la CRE, ce matin, l'a dit aussi -- plusieurs langues, plusieurs façons d'aborder un problème. Donc, généralement, les gens sont pour ça. C'est un débat qui est un peu plus moderne, cette notion de diversité, mais qui est perçue comme un moteur de développement économique et social. Aussi, un groupe qui a évoqué une étude importante, aussi, d'intégration sociale... La diversité... C'est connu dans les écoles, plus on a de diversité, puis pas, comment dire, d'homogénéité dans cette diversité, si je peux le dire ainsi, plus il y a de diversité, mieux l'intégration se fait dans la culture et la communauté qui accueille, c'est-à-dire le Québec.
Le Président (M. Bernier): Mme Rimok.
Mme Rimok (Patricia): Oui. Bien, vous savez que le conseil a beaucoup travaillé sur des questions de diversité, ayant sorti un avis en 2007 justement sur cette question-là, sur la gestion de la diversité et qui allait un peu dans ce sens-là. Mais il y a une différence entre juste une diversité et être capable aussi de répondre aux besoins du marché. Donc, on peut aller se donner une démographie très large et attirer tous les bassins de la planète -- et je mets ça sous réserve, parce que, bon... -- oui, on peut aller chercher toute cette représentativité-là, mais en même temps il faut être capable de déceler, à l'intérieur de tous ces bassins, des personnes qui soient capables de répondre aux besoins du marché, parce qu'en bout de ligne il faut que ces personnes s'intègrent et il faut qu'ils arrivent à vivre ici. Donc, l'attraction, c'est bien, d'aller chercher partout sur la planète toutes sortes de personnes, mais en même temps il faut s'assurer qu'en bout de ligne ces personnes soient capables d'intégrer le marché du travail. Donc, j'aurais simplement ça à dire.
Le Président (M. Bernier): Merci. Mme la ministre.
Mme Weil: C'est ça. Bien, comme vous le savez, c'est la même grille qui va s'appliquer un peu partout dans le monde. Donc, sur la question de la grille, vous, vous parlez du 9 % du Vérificateur, mais la grille a été modifiée en 2009 pour répondre à ces préoccupations. Et actuellement c'est 48 % -- ça, c'est actuellement -- 48 % des travailleurs qui ont une formation qui corresponde aux besoins immédiats du marché. Donc, nous, on propose juste de le monter à 50 %. C'est juste 2 %. Je voulais juste clarifier cette question. Donc, j'imagine que vous seriez d'accord avec cette orientation, parce que ça va tout à fait dans le sens que vous dites, c'est de s'assurer de faire un meilleur arrimage entre les besoins du marché du travail.
Mme Rimok (Patricia): Mais... Excusez-moi.
Le Président (M. Bernier): Oui, Mme Rimok.
Mme Rimok (Patricia): Mais comment vous allez le faire?
**(17 h 30)**Mme Weil: Bien, il y a une liste. Donc, premièrement, ils sont traités de façon prioritaire, ceux qui ont la profession, le métier qui correspond à la liste qui est préparée par Emploi-Québec. Donc, le travail est fait avec Emploi-Québec. Maintenant, il y a quand même eu des suggestions de groupes -- surtout c'était la CEDEQ de Lachine et LaSalle -- qui disent d'aller encore plus pointu sur cette question d'arrimage. Alors, il y a des choses... comment dire, une amélioration continue qu'il faut faire dans ce dossier-là. Mais c'est 50 %, et donc ça, ça répond à des besoins plus court, moyen terme. Et ensuite, la scolarisation, on ne veut pas abandonner cette notion-là parce qu'elle est importante. Donc, il y a le... comment dire, la voie de l'immigration temporaire qui répond aussi aux besoins court terme, mais la scolarisation est une valeur importante aussi, et c'est des gens qui enrichissent beaucoup le capital. Et c'est sûr que c'est des tendances démographiques à plus long terme, mais on trouve que c'est important que le Québec garde le cap sur cette scolarisation, parce qu'il y a une pression énorme aussi qui vient des employeurs pour aller chercher, bon, les métiers et les professions dont ils ont besoin tout de suite. Mais le marché évolue rapidement, vous savez tout ça.
La question de la langue -- on va aller sur cette question -- je pense que vous êtes d'accord avec les mesures, donc, de maintenir majoritaires les gens qui connaissent le français. Mais évidemment la clé de tout ça, c'est: C'est quoi, exactement, leur connaissance de la langue? Donc, est-ce que vous êtes d'accord sur cette nouvelle orientation qui irait déterminer finalement la connaissance linguistique par une mesure objective?
Le Président (M. Bernier): Mme Rimok.
Mme Rimok (Patricia): C'est-à-dire, faire un examen? Est-ce que c'est ça que vous voulez dire?
Mme Weil: Oui, c'est ça.
Mme Rimok (Patricia): Oui, absolument. Ça se fait ailleurs et avec des résultats quand même assez probants. Mais il faudrait quand même que les cours de francisation soient plus arrimés aux besoins exprimés du marché, parce que souvent on peut avoir des connaissances générales ou génériques sur le français pour maîtriser la langue en tant que telle. Donc, la force de l'évaluation est faite sur la compréhension... peut avoir de la langue, mais pas nécessairement les termes techniques, par exemple, qui peuvent être associés aux secteurs d'activité où on retrouverait ces personnes. Donc, quand même bien qu'ils auraient une compréhension générale et que c'est important de l'avoir quand même, elles se font quand même refouler à la porte de ces entreprises parce que la maîtrise du français technique, là, si je peux dire, associé aux secteurs d'activité n'est pas là.
Donc, il faut absolument travailler avec les entreprises. J'ai remarqué qu'elles étaient quand même assez frileuses sur l'offre de francisation dans le lieu de travail. Ça n'a pas été... Je sais que Mme James avait annoncé ça il y a quelques années, mais je pense que les résultats n'avaient pas été très, très, très fantastiques, là, là-dedans. Donc, quelque part, c'est bien de comprendre le français en général, mais, quand on ne l'associe pas aux termes et aux expressions associées, donc, au secteur d'activité, ça devient... Et en même temps on augmente continuellement l'investissement qu'on fait. D'ailleurs, on peut se targuer de dire qu'on a bien fait puisque la quantité absolue de personnes augmente au niveau des inscriptions. Mais en même temps est-ce que l'ensemble de ces personnes-là se sont retrouvées à trouver du travail grâce à cette francisation si à quelque part elles se font refouler à la porte parce qu'elles ne maîtrisent pas la partie technique de ce qu'ils ont besoin pour pouvoir faire ce travail?
Le Président (M. Bernier): Merci. Mme la ministre.
Mme Weil: ...précision. Il y a actuellement des cours de francisation pour le génie, secteurs du génie, de la santé, de l'administration. Et, la francisation au sein des entreprises, la chambre de commerce est venue en parler. Ça va très, très, très bien. Et ce que j'entends sur le terrain, c'est que c'est un programme qui a beaucoup de mérite, qui semble avoir beaucoup de succès.
J'aimerais vous parler de... C'est le groupe qui est venu juste avant, qui parlait d'un enjeu. Puis je suis sûre que vous avez une perspective là-dessus. Il y a beaucoup de personnes qui maîtrisent la langue française, de l'Afrique par exemple, donc qui ne vont pas dans des cours de francisation. Et les cours de francisation sont plus que des cours de langue, c'est aussi des cours de culture et d'apprivoiser la culture. Alors, leur commentaire, c'est que ce groupe-là manque cette occasion d'être acculturé, si on veut, à la société québécoise. Comment vous voyez... Est-ce que, vous, vous avez observé cette problématique? Il y a quand même des sessions d'adaptation au milieu du travail. Le MICC fait une session générale aussi. Il y a Emploi-Québec qui a des formations. Mais je pense que c'est au-delà de ça. Ils sont dans un groupe. Le commentaire qui a été fait, c'est que, les cours de francisation, ce qui est intéressant, c'est qu'il y a des gens de partout, donc ils se rendent compte qu'ils sont avec d'autres personnes aux prises avec les mêmes défis, disons.
Le Président (M. Bernier): Mme Rimok.
Mme Rimok (Patricia): Oui, c'est un point intéressant. Je suppose que mon souci à moi, dans le sens de l'assainissement des finances publiques, c'est: Est-ce que c'est une surcharge, est-ce que c'est une charge supplémentaire financière de rajouter ces services-là à l'intérieur de l'offre de francisation, déjà? Je me poserais la question, alors que l'objectif de départ, c'est d'assurer que 52 % de l'immigration parle déjà français. Mais je peux comprendre que l'accueil, en tant que tel, suscite évidemment une certaine sécurité. De voir qu'au début du processus tout le monde est un peu dans le même bain et tout le monde peut se rencontrer peut-être au départ, ça sécurise peut-être les gens. Mais à la fin c'est un coût public qu'il faudrait estimer. Je ne sais pas qu'est-ce que ça peut coûter. Et, deuxièmement, à la fin, est-ce que d'apprivoiser les valeurs du Québec -- et là je ne suis plus au conseil -- est-ce que le fait d'apprivoiser les valeurs du Québec au début fait en sorte que ces personnes trouvent du travail et s'intègrent, pour ensuite pratiquer les valeurs du Québec?
Le Président (M. Bernier): Mme la ministre, vous voulez...
Mme Weil: Sur la question de l'intégration, ce n'est pas toujours des programmes publics, gouvernementaux. Il y a la société civile qui joue un rôle important en intégration. Et c'est une prise de conscience, souvent, d'une situation qui va susciter souvent, dans le milieu des organismes communautaires, le milieu de la philanthropie aussi, lorsque les gens prennent conscience d'un enjeu... Et tout ce débat ou le dialogue interculturel, ce n'est pas... Le gouvernement peut initier des choses, mais vraiment, l'intégration, c'est toute la société qui s'en charge. Et je pense que l'important, c'est surtout de prendre conscience de certains éléments, pas nécessairement de dire que c'est le gouvernement qui prend tout sur ses épaules. De toute façon, ça ne peut pas fonctionner. Une société n'évolue pas lorsque c'est juste le gouvernement qui prend... Je pense que c'est une prise de conscience qui est importante, à ce chapitre-là.
Mme Rimok (Patricia): Alors, c'est une excellente idée.
Le Président (M. Bernier): Mme Rimok, oui.
Mme Weil: Moi, ça va pour moi, M. le Président. Merci.
Le Président (M. Bernier): Ça va? Merci. Nous allons donc passer du côté de l'opposition officielle. M. le député de Drummond.
M. Blanchet: Bien le bonjour, madame. On pourrait en discuter trop longtemps pour le temps dont nous disposons, d'une définition opérationnelle valable et consensuelle de l'interculturalisme, mais on y colle souvent la notion de diversité. Dans les échanges, elle était là. J'aimerais qu'on précise ça parce que, pour moi, c'est pour l'instant trop commode pour être absolument valable. Qu'est-ce qu'on entend par «la valorisation de la diversité»? J'imagine qu'on ne fait pas de compromis sur un certain nombre de paramètres qui doivent être établis comme étant communs à tout le monde qui vit au Québec et qui est Québécois. Donc, évidemment, on ne met pas en question la maîtrise de la langue française, la connaissance des institutions, la laïcité de l'État.
Qu'est-ce qu'on veut valoriser? Sous quelle forme on veut le valoriser? Est-ce qu'on veut le valoriser d'une façon qui favorise le décloisonnement et l'émergence d'une culture qui soit davantage que la somme de ses parties coexistantes? Ou est-ce qu'effectivement on dit: Non, non, gardez votre différence, ce qui à certains égards peut être valable? Et est-ce que c'est une intégration sur une base artistique, une intégration sur une base institutionnelle? Bref, j'ai l'impression qu'on fait à peu près n'importe quoi, qu'on glisse le mot «diversité» parce que ça donne un peu bonne apparence aux propos. Donc, j'aimerais connaître mieux qu'est-ce qu'on est supposé faire avec la notion de diversité, dont je suis un fervent, pour ma part, à condition qu'on ne lui fasse pas dire n'importe quoi.
Le Président (M. Bernier): Mme Rimok.
**(17 h 40)**Mme Rimok (Patricia): Là, on déborde un peu de... complètement, là, je dirais, enfin, du mémoire et de la planification des niveaux. Parce que, là, on rentre dans un débat plutôt philosophique sur qu'est-ce que ça veut dire, «diversité», il y a un consensus sur l'interculturalisme, etc. Je vous avoue franchement, au-delà de considérer les manières plutôt opérationnelles d'intégrer les personnes qui arrivent -- et on parle de beaucoup de personnes, 50 000 personnes qui arrivent chaque année -- je préfère m'occuper... et imaginer quel pourrait être un modèle qui pourrait intégrer le plus rapidement possible ces personnes pour qu'elles puissent, donc, contribuer à tous les paramètres que le Québec se donne sur ces questions-là et faire confiance au peuple dans son ensemble pour finalement poursuivre dans des valeurs qu'on a déjà. Mais pourquoi les mettre en opposition? Pourquoi les associer nécessairement à un processus migratoire?
Donc, moi, je resterais strictement sur les opérations, au départ. Regardons strictement les opérations. Aujourd'hui, nous avons un certain nombre de personnes, et des groupes en particulier, qui pour des raisons x, y, z -- je ne rentrerai pas dans tous les détails, le pourquoi -- n'intègrent pas le marché du travail. Ça, pour moi, c'est important. Pourquoi? Parce que ça fait depuis les années quatre-vingt que ce chiffre-là ne change pas. Vous avez un écart de plus en plus important depuis 1981, si on veut aller chercher un «benchmark», là, de personnes qui n'arrivent pas... Toutes les cohortes d'immigrants qui sont arrivées depuis 1981 ne rejoignent pas la moyenne nationale des revenus québécois. Alors, je veux dire, pour moi, ça, c'est essentiel à corriger.
Maintenant, le modèle, tu sais, le modèle philosophique, sincèrement, je n'en ai pas.
Le Président (M. Bernier): M. le député, vous voulez ajouter?
M. Blanchet: On vit dans une société qui veut, et qui vit, et qui accueille énormément d'immigrants. On a des difficultés évidentes à y parvenir. Ça soulève des débats d'autant plus particuliers qu'on a une fragilité linguistique. On n'est pas capable de trouver des solutions, des approches et des explications. Et, lorsqu'on veut reculer dans la compréhension, on dit que ce serait philosophique. Ce n'est pas philosophique, c'est ethnolinguistique, c'est sociologique, c'est, à la limite, démographique et mathématique. Et donc on n'a pas l'infrastructure en termes de connaissances. On dit: On ne la veut même pas. On veut tout de suite aller dans l'opérationnel. Mais l'opérationnel a besoin d'une connaissance à caractère souvent scientifique avant d'y aller, sinon on a des situations comme maintenant, où ça va dans différentes directions, et on n'est pas même capable d'en donner l'explication.
Mon autre question, ce sera ma dernière, et je l'ai posée tout à l'heure, parce que je pense que c'est un raisonnement qu'on doit, qu'on a le devoir de faire, on est là pour ça. Là, on dit: Voici le chiffre, puis après ça on parle de ressources. Et, moi, je suggérais: Est-ce qu'on n'aurait pas dû dire: Voici les ressources, et elles nous permettent d'accueillir combien d'immigrants au Québec? Est-ce qu'on ne fait pas le processus à l'envers? On dit: Voici la conclusion: 50 000. On ne recule pas, savoir si on a les ressources nécessaires, et, pour revenir au point précédent, on ne recule même pas au niveau de la connaissance scientifique, démographique, et autre, pour comprendre et maîtriser le phénomène auquel on s'attaque. Est-ce qu'on ne ferait pas le processus à l'envers?
Le Président (M. Bernier): Mme Rimok.
Mme Rimok (Patricia): Je vous avoue franchement, je ne sais pas trop quoi vous répondre, parce que le calcul, au fond, c'est qu'il y a une politique en matière... Moi, je me base sur ce qui existe. Il y a une politique en matière d'immigration qui existe. On a fait le choix de considérer l'immigration comme à la fois un vecteur pour l'intégration, pour la démographie, pour les pénuries en main-d'oeuvre, bon, etc. Donc, on a fait ce choix. Moi, je me base sur ces choix-là et j'essaie de composer avec ces paramètres. Alors, ces paramètres-là, qu'est-ce qu'ils nous disent? Ils nous disent qu'on a augmenté les volumes, depuis quelques années, pour pouvoir répondre en plus à des pénuries ou de rareté ou de disponibilité de main-d'oeuvre. Bon. Donc, c'est un peu ce qui arrive, bon, et il y a une concurrence plus importante sur le territoire de la planète pour pouvoir aller chercher, donc, ces gens-là.
Donc, moi, je regarde ça et je dis: Bon, comment est-ce qu'on peut faire pour intégrer toutes ces personnes-là, disons, avec optimalement les meilleures ressources et avec un niveau de financement suffisant? Ce que je vois, c'est qu'il y a plus de 90 millions de dollars qui est investi dans la francisation, sur un budget de, je pense, 180 millions, quelque chose comme ça. C'est beaucoup si en même temps on n'est pas capable de savoir... Et, attention, je ne veux pas qu'on comprenne mal ce que je dis. C'est important, la francisation. Mais ce que je veux dire, c'est que quelque part, en dépensant autant d'argent, est-ce qu'à la fin on se retrouve avec, donc, des personnes -- parce que c'est un modèle d'intégration, hein? -- à la fin, est-ce que ces personnes se retrouvent à avoir un travail? Parce qu'avec le travail vous vous socialisez. Avec un travail, vous apprenez à travailler avec votre voisin, Et la sociologie, comme vous en parlez, enfin la façon dont vous voyez vos modèles, s'inscrit déjà dans les paramètres que vous avez. Donc, moi, ce que je ne comprends pas, c'est pourquoi est-ce que vous avez autant de difficultés à accepter les paramètres que vous avez? Pourquoi tout le temps les remettre en question? Ils fonctionnent.
M. Blanchet: Non.
Mme Rimok (Patricia): Ils fonctionnent. Moi, je pense qu'ils fonctionnent. Bien, je m'excuse, ils fonctionnent. C'est simplement, et c'est là où j'irais plus loin, c'est que les services ne sont pas nécessairement suffisamment opérationalisants pour accélérer le processus d'intégration des personnes. Il faut savoir... Bon, je m'arrêterai là.
Le Président (M. Bernier): M. le député de Drummond.
M. Blanchet: Le constat que beaucoup de gens font, c'est que justement ils ne fonctionnent pas. Le niveau de chômage chez les communautés immigrantes est plus élevé, chez les femmes des communautés immigrantes, grave, chez les jeunes des communautés immigrantes, dramatique. L'intégration ne se réussit pas. La francisation est souvent déficiente. Ceux qui sont francisés sont davantage marginalisés que ceux qui ne le sont pas. Moi, mon constat, aujourd'hui, c'est que ça ne marche pas et qu'avant de dire: Fonçons par en avant, je dis donnons-nous minimalement... Je souhaite qu'on atteigne le 50 000. Je souhaite que ce soit le maximum qu'on peut faire en vertu des ressources et de notre succès, comme société d'accueil, dans l'harmonie. Mais je dis: Donnons-nous au moins le recul de ne pas manquer notre coup et de ne pas reculer sur ce que nous sommes, comme société d'accueil, parce qu'on l'aura mal fait, parce qu'on l'aura fait de façon dogmatique ou parce qu'on n'aura eu que la lorgnette réductrice d'une certaine vision de l'économie, alors que ces gens-là ne voient même pas leurs diplômes et leurs connaissances reconnus quand ils arrivent au Québec.
Le Président (M. Bernier): Mme Rimok, commentaire?
Mme Rimok (Patricia): Juste en complément, vous avez raison, c'est-à-dire les résultats montrent qu'il y a encore des problèmes au niveau du taux de chômage, qu'il y a encore des problèmes au niveau de la reconnaissance des acquis, de la qualification, bon, etc. Mais en même temps quels étaient, il y a huit ans, neuf ans, quels étaient les outils opérationnels qui permettaient d'ajuster rapidement toute cette intégration en augmentant les volumes d'une manière aussi importante? Donc, au lieu d'aller avoir un débat sur comment, tu sais, comment on va voir la société du Québec considérer tout ça, bien on est mieux de s'attaquer directement avec des outils qui permettent rapidement de gérer et d'administrer ces personnes-là pour qu'elles puissent intégrer le marché du travail le plus rapidement possible.
Le Président (M. Bernier): Merci. Autre question? Ça va? Donc, Mme Patricia Rimok, représentant le Conseil des relations interculturelles, merci de votre participation, merci de votre présentation.
Je vais donc suspendre quelques instants pour permettre à la Conférence régionale des élus de l'Abitibi-Témiscamingue, la CRE, de prendre place.
(Suspension de la séance à 17 h 48)
(Reprise à 17 h 53)
Le Président (M. Bernier): À l'ordre, s'il vous plaît! Nous allons reprendre nos travaux. Nous avons le plaisir de recevoir les représentants de la Conférence régionale des élus de l'Abitibi-Témiscamingue, communément appelée la CRE. Donc, M. Arnaud Warolin, M. Philippe Maschinot et Mme Mélanie Corriveau, bienvenue à vous trois. C'est un grand plaisir de vous recevoir. La personne qui prend la parole, c'est M. Maschinot?
Une voix: ...
Le Président (M. Bernier): Pardon? M. Warolin? Bon, mon Dieu, M. Warolin, allez-y. Vous avez 15 minutes pour faire votre présentation, en vous identifiant, s'il vous plaît, pour fins d'enregistrement.
Conférence régionale des élus de
l'Abitibi-Témiscamingue (CREAT)
M. Warolin (Arnaud): Alors, M. le Président, Mme la ministre, Mmes et MM. les membres de la commission, merci d'avoir accepté de nous recevoir à une heure si tardive. Alors, je me présente: Arnaud Warolin. Je suis préfet élu de la MRC de Témiscamingue et le trésorier de la Conférence régionale des élus de l'Abitibi-Témiscamingue. Je vous présente... je suis accompagné de Philippe Maschinot, président de la Table régionale de concertation en immigration, bénévole impliqué dans notre milieu, entrepreneur reconnu et, comme moi, minorité visible de France. Visible... audible, j'allais dire. Je vous présente aussi Mélanie Corriveau, notre agente de développement à la CRE, qui est là en support pour des questions techniques.
Alors, tout de suite, si vous me le permettez, vous connaissez, je pense, tous le rôle de la CRE, qui est un interlocuteur privilégié du gouvernement du Québec en matière de développement régional. Nous avons le mandat d'établir un plan quinquennal de développement et de donner des avis au gouvernement sur la situation dans notre région. Alors, nous concluons aussi des ententes spécifiques. D'ailleurs, nous avons une entente en immigration qui prend fin au 31 mars 2012.
Au niveau de notre présentation, la présentation, le mémoire qu'on vous dépose est le fruit d'un travail de concertation de l'ensemble des acteurs de notre milieu. Alors, on a toute une liste de représentants qui ont travaillé là-dessus, que ça soit des territoires de MRC au niveau de nos organismes d'accueil, au niveau des employeurs, au niveau des représentants des agences de santé et de services sociaux, du monde de l'éducation, cégep de l'Abitibi-Témiscamingue, des représentants des immigrants, qu'on appelle chez nous... un organisme qui s'appelle La Mosaïque, représentants du Conseil du statut de la femme, Valorisation Abitibi-Témiscamingue, qui fait la promotion de notre région, et l'ensemble des partenaires gouvernementaux. Je peux vous dire que le mémoire qu'on présente a fait une très grande unanimité d'échanges et fait consensus. Je dois vous dire qu'avant 2008 cette question d'immigration nous touchait assez peu, on était assez peu impliqués. Depuis que le gouvernement nous a donné un cadre, une entente spécifique, c'est quelque chose qui nous a fortement... on s'est fortement impliqués à réfléchir sur comment est-ce qu'on allait résoudre nos problématiques en termes d'immigration.
Alors, notre présentation se veut rapide et concise, et portera principalement sur le portrait de l'immigration en Abitibi-Témiscamingue par rapport à ce que vous voyez à l'échelle du Québec. Nous parlerons des enjeux et défis de l'immigration en région en correspondance avec les enjeux et défis soumis à la consultation. Nous vous parlerons des réactions de la région aux orientations soumises et enfin nous vous parlerions des défis à relever dans les orientations pour 2012-2015. Alors, notre présentation, nous allons espérer, va rentrer dans le temps.
Alors, je passerai tout de suite la parole à mon confrère M. Maschinot, qui va vous faire la présentation de l'immigration en Abitibi-Témiscamingue.
Le Président (M. Bernier): M. Maschinot, la parole est à vous.
M. Maschinot (Philippe): Merci. Bien, l'immigration en Abitibi-Témiscamingue, si nous brossons un état de la situation assez rapide, nous pouvons dire qu'en neuf années la région a accueilli 462 personnes immigrantes sur les 440 860 arrivées au Québec, soit 0,1 %, alors qu'en nombre d'habitants le poids relatif de notre région par rapport au Québec est de 1,90 %. Il nous est difficile de comprendre un tel résultat quand nous voyons augmenter le nombre d'emplois disponibles et nos entreprises avoir de plus en plus de mal à recruter. Les immigrants arrivés au Québec ayant l'intention de choisir l'Abitibi-Témiscamingue comme destination se chiffrent à 54 en 2009 et à 64 en 2010. Ces données représentent 0,1 % du nombre total d'immigrants arrivés au Québec lors des deux dernières années. La question qui se pose et que nous nous posons est: Pourquoi? Le difficile parcours des travailleurs temporaires dans la paperasserie fédérale et provinciale a de quoi décourager les travailleurs et les entreprises. Par contre, nous notons que les étudiants étrangers sont attirés par nos institutions d'enseignement, puisqu'en quatre ans, entre 2007 et 2011, ce sont 915 étudiants étrangers qui sont actuellement et qui sont venus en région.
Donc, du point de vue de l'Abitibi-Témiscamingue, voici les enjeux et les défis de l'immigration. La prospérité économique de la région, associée au défi démographique, rend l'immigration de plus en plus intéressante et nécessaire pour combler les besoins de main-d'oeuvre. Sur les 2 415 établissements sondés dans la région par Emploi-Québec, au moins trois entreprises sur quatre, 79 %, ont l'intention d'embaucher de nouveaux travailleurs au cours des 12 prochains mois et elles se montraient ouvertes à l'idée d'embaucher de la main-d'oeuvre immigrante. Notre défi est donc de soutenir les entreprises et de faciliter l'embauche des personnes immigrantes.
Ces entreprises sont prêtes, mais à qui s'adressent-elles? L'ouverture aux autres et notre diversité se lient assez facilement en Abitibi. Prenons un exemple au niveau politique: Arnaud Warolin, préfet de la MRC, Ulrick Chérubin, maire d'Amos, président de la conférence régionale des élus, Jean-Paul Schott, directeur technique régional, qui a mis en place toute une région... qui a mis le soccer de la région sur le plan provincial. Donc, notre implication et notre intégration, en termes d'immigration, elle existe, elle est là, et une région comme la nôtre facilite cette implication et cette intégration.
La régionalisation de l'immigration est tout un défi. Il faut donner des outils aux régions pour travailler à cette régionalisation. Sans argent et/ou sans entente spécifique, rien ne peut se faire. Une meilleure promotion des régions au Québec et à l'étranger et des programmes qui fonctionnent, car nous pouvons constater la difficulté, voire l'échec du programme Passerelle pour l'emploi en raison d'un manque de promotion. Améliorer l'efficacité des présentations de la Grande Bibliothèque à Montréal sous la responsabilité du MICC, en faisant probablement plus de promotion, et avec une meilleure préparation, et probablement dans un cadre moins rigide.
Pour les orientations soumises à la consultation, tout d'abord, pour planifier l'immigration, on ne peut pas se donner uniquement une cible provinciale. Il doit y avoir une planification incluant des planifications régionales. Nous profitons également de cette présentation pour souligner que c'est difficile, en Abitibi-Témiscamingue, de garantir aux immigrants l'accès aux services du MICC parce que le bureau est fermé depuis 2009. Et cette absence de ressources régionales du MICC nuit aussi au déploiement d'une stratégie régionale concertée.
Sur la question qui est de porter progressivement à 50 % la proportion des requérants principaux de la catégorie des travailleurs qualifiés détenant une formation dans des champs de compétence correspondant à des besoins exprimés sur le marché du travail, nous y sommes favorables dans la mesure où ces travailleurs correspondent aussi à des besoins exprimés par le marché du travail régional. La Table régionale de concertation en immigration propose que des cibles soient identifiées pour les différentes régions du Québec et que le MICC s'engage à tout mettre en oeuvre pour les atteindre. Le MICC doit convenir avec les régions de stratégies de recrutement, d'accueil et d'intégration, et la planification de l'immigration du gouvernement du Québec ne peut plus être la planification de Montréal ou de Québec, elle doit aussi être celle des régions.
**(18 heures)**M. Warolin (Arnaud): Alors, je vais continuer sur les défis à relever en Abitibi-Témiscamingue. Alors, en lien avec ce que vient de vous dire M. Maschinot, les véritables défis à relever en Abitibi-Témiscamingue, sur la question de l'immigration 2012-2015, sont pour nous, premièrement, de renouveler l'Entente spécifique en immigration et la bonifier afin de permettre le déploiement d'une véritable stratégie régionalisée et concertée pour favoriser l'attraction, l'accueil et la rétention des personnes immigrantes en Abitibi-Témiscamingue. Trop souvent, dans nos ententes spécifiques, on se rend à la dernière minute, avant de les renouveler, et ça nous fait des trous. Si on a des trous, on perd tout ce qu'on a mis en place, on perd nos ressources, et ça, c'est extrêmement dommageable. Donc, on espère qu'on va pouvoir rapidement signer cette entente.
Deuxièmement, il nous faut des moyens d'accompagner et de soutenir les entreprises qui s'ouvrent pour la première fois à l'embauche des personnes immigrantes. Actuellement, nos entreprises manquent d'outils, manquent de références, ne savent pas où se diriger pour pouvoir accueillir. Le processus est tout de même assez complexe, et donc, nous, on rate un petit peu la cible à ce point-là.
Troisièmement, il faut faciliter la venue des étudiants étrangers, qui devraient avoir les mêmes chances de recevoir des bourses en venant étudier dans des universités de régions comme l'Abitibi-Témiscamingue, plutôt que d'aller étudier à McGill ou à Concordia, à Montréal. Il est possible de constater que ces institutions sont privilégiées par rapport aux institutions régionales.
En bref, le plus grand défi de la région est de maintenir la mobilisation et la concertation des acteurs sur la question de l'immigration, et ce, afin de poursuivre les travaux en la matière et de donner une nouvelle stratégie d'action régionale pour le recrutement, l'accueil et l'intégration des personnes immigrantes en Abitibi-Témiscamingue. Pour réaliser cela, deux choses sont indispensables: une cible régionalisée en immigration et le renouvellement d'une entente spécifique qui donne les moyens à la table régionale de concertation de collaborer avec le MICC dans l'atteinte de ses objectifs.
M. Maschinot (Philippe): Donc, les orientations de la région pour 2012-2015. Ce qu'il faut comprendre, c'est que la table de concertation n'est plus dans une table... On n'est plus dans une table de concertation. On est dans une véritable table qui a mis en place des actions et on est vraiment, vraiment aujourd'hui dans l'action, dans la région. Donc, nous disposons déjà de services d'accueil. Alors, nous comptons très simplement, au point 1, renouveler l'Entente spécifique en immigration avant le 31 mars 2012, de manière à ce qu'elle soit opérationnelle à cette date et pas attendue plus que nécessaire, axer nos travaux de sensibilisation aux employeurs et tout faire pour leur faciliter la vie quand ils ont l'intention d'embaucher une personne immigrante, ce qui veut dire, excusez-moi sur le terme, mais d'exiger le retour d'un bureau du MICC en région, travailler en étroite collaboration avec les organismes de régionalisation pour qu'ils vendent bien la région au Québec. Nous présenterons d'ailleurs un colloque sur l'immigration en Abitibi-Témiscamingue au printemps 2012. Et nous souhaitons recruter à l'étranger directement selon nos besoins de main-d'oeuvre et nos similarités culturelles et environnementales. Ce sont les recommandations de la table.
Le Président (M. Bernier): M. Warolin.
M. Warolin (Arnaud): Alors, je vais conclure, M. le Président. Alors, je tiens à vous rappeler que la région a déployé de nombreuses énergies au cours des dernières années, depuis le début de l'Entente spécifique, afin de favoriser l'accueil, l'intégration et la rétention. J'en suis un exemple et je suis très content de ce qui a été fait. Je dois vous dire que la région est particulièrement accueillante et qu'avec le peu d'immigrants, et quand on a fait les efforts nécessaires, il est extrêmement facile de gravir les échelons.
Alors, avec la prospérité économique que nous vivons en Abitibi-Témiscamingue, avec le Plan Nord, avec le boom minier, avec tout l'intérêt qu'on a pour les ressources naturelles, si on veut pouvoir continuer sur cette croissance et pouvoir faire profiter de cette croissance l'ensemble du Québec, on doit traiter ce dossier de l'immigration et on doit aller chercher notre dû de ce montant-là, parce que sinon on va devoir limiter notre développement. Plusieurs entreprises chez nous limitent leur croissance faute de personnel qualifié.
La Table régionale de concertation en immigration de la conférence régionale des élus est un bel exemple de mobilisation du milieu, qui désire contrer la pénurie et favoriser la venue d'immigrants. Le contexte économique, la mise en place de services d'accueil, la place de choix que l'on offre aux immigrants qui veulent contribuer à la diversité culturelle ainsi que l'innovation et l'expertise des institutions d'éducation ne font que confirmer que la région est prête à accueillir et à garder ces nouveaux immigrants.
Au-delà des orientations et des réflexions, la région a su mettre en place des actions concrètes pour favoriser la venue d'immigrants. Elle a pu démontrer et développer, au cours des dernières années, sa propre vision. La table est donc à même d'attendre que le gouvernement du Québec, dans sa planification 2012-2015, se donne et donne à la région les moyens de réaliser ses ambitions, notamment et surtout en se donnant des cibles régionalisées en immigration.
Alors, M. le Président, Mme la ministre, MM. et Mmes les parlementaires, je vous remercie de nous avoir écoutés. Et nous sommes prêts à répondre à vos questions.
Le Président (M. Bernier): Merci de votre présentation, messieurs. Nous allons donc passer aux échanges avec les parlementaires. Du côté ministériel, Mme la ministre, allez-y.
Mme Weil: Oui. Merci, M. le Président. Merci beaucoup de votre présentation. Merci beaucoup de vous intéresser aussi vivement à la régionalisation de l'immigration. Évidemment, c'est un enjeu très, très important pour l'avenir du Québec, pour les régions. On parle beaucoup d'occupation du territoire, et puis le ministère de l'Immigration et des Communautés culturelles, avec Emploi-Québec, avec le ministère des Affaires municipales... beaucoup de partenariats dans ces ententes avec les CRE. Évidemment, je sais que les gens des régions s'activent beaucoup, s'intéressent beaucoup. C'est ce que je constate. Les gens s'intéressent dans les régions. Je découvre des champions de la régionalisation de l'immigration, et c'est important pour moi, en tant que ministre, de pouvoir compter sur ces forces vives qui sont dans les régions, qui veulent vraiment réussir l'immigration puis attirer des gens.
Alors, j'ai des questions précises par rapport à des stratégies qui pourraient être adoptées. Vous parlez d'essayer de cibler par région. Donc, on le fait dans les ententes. Dans beaucoup d'ententes, on cible le nombre réaliste de personnes qu'on pourrait aller chercher selon les besoins aussi du marché. Mais comment voyez-vous le gouvernement le faire, ou le MICC, sachant qu'évidemment les personnes sont libres, hein? En vertu de l'immigration puis les règles de la charte, et tout, les gens ont la mobilité, les gens sont libres de s'installer où ils veulent. Donc, on peut bien cibler des nombres par région, mais c'est surtout... ce n'est pas en amont qu'on peut le faire, c'est vraiment un montant global, selon les besoins du marché de l'emploi, selon les prévisions d'Emploi-Québec, etc., mais une fois arrivés. C'est pour ça que ces ententes de régionalisation sont importantes. Donc, ça, c'est une question.
Et on a entendu parler de peut-être, avec les employeurs, à la suggestion de Vision Montréal... C'était Mme Harel, je pense, qui a parlé de faire des missions à Montréal, parce qu'il y a beaucoup de personnes à Montréal qui cherchent de l'emploi. Et CGI avait fait une mission. Donc, il y a des entreprises qui pourraient peut-être faire des missions. Ça, c'est l'autre question. Mais, parce que ces questions se touchent, il y a aussi une question... Quand vous parlez de ces sessions qui manquent de... je ne sais pas, des sessions à la bibliothèque...
M. Maschinot (Philippe): À la Grande Bibliothèque.
Mme Weil: ...trop rigides ou... je ne me rappelle plus votre commentaire...
**(18 h 10)**M. Maschinot (Philippe): Oui, un petit peu trop rigides.
Mme Weil: ...qu'est-ce que... en quoi elles sont très rigides? Comment on pourrait améliorer? Et, si vous connaissez le programme PELI, programme Placement en ligne international... Vous connaissez le... O.K. Bon, on parlera de ça... Ça, c'est aussi une nouvelle initiative qui peut être intéressante. Donc, vraiment savoir tout cette question d'attraction dans les régions en amont, difficile, mais en aval... c'est pour ça qu'on a les ententes.
Le Président (M. Bernier): Alors, M. Warolin, M. Maschinot... Mme Corriveau. Bienvenue, Mme Corriveau. La parole est à vous.
Mme Corriveau (Mélanie): Pour ce qui est d'avoir une cible et d'atteindre cette cible-là tout en respectant, je pense, la liberté des gens, je crois que les régions vont être en... enfin, notre région, on serait en mesure de l'atteindre si on faisait nous-mêmes notre recrutement. Donc, si l'Abitibi-Témiscamingue va faire son propre recrutement à l'étranger, dans certaines régions du monde où on sait qu'il y aurait une main-d'oeuvre qui pourrait combler nos besoins, là, les gens feraient un choix libre de s'en venir en Abitibi-Témiscamingue, et non pas de s'en venir au Québec. Ils s'en viendraient directement en région. Donc, ça, je pense que c'est une première... ça répond à votre première question.
Pour ce qui est d'autres actions concrètes pour la régionalisation de l'immigration, il y a les organismes de régionalisation qui sont à Montréal, là où il y a un gros bassin d'immigrants, qui travaillent à ce que les immigrants viennent s'établir dans les régions. Et, nous, on essaie d'avoir une ressource de l'Abitibi-Témiscamingue dans ces organisations-là. On est en train de le faire, mais on a des moyens très limités qui nous permettent d'avoir cette personne-là à une journée aux deux semaines pour rencontrer les immigrants montréalais et les inciter à venir en Abitibi-Témiscamingue. Donc, nos moyens sont très limités pour le faire, mais on a déjà la créativité puis on sait déjà comment on pourrait le faire.
Pour ce qui est de la Grande Bibliothèque et un petit peu du cadre rigide, là, qu'on soulignait, c'est en fait que les présentations sont faites par le ministère. Et donc le ministère a sa formule, je dirais, qui est formatée et qui se répète à chaque présentation, alors que, nous, l'Abitibi-Témiscamingue, on a développé nos propres stratégies pour valoriser notre région et pour attirer des gens chez nous. Et ça, ça freine un peu qu'on puisse utiliser nos propres outils, notre propre stratégie. On a une organisation qui ne fait que ça, vendre la région à l'extérieur, donc on voudrait pouvoir profiter de cette session-là avec ce qu'on a déjà développé.
Et finalement, pour les programmes PPLI, bien c'est vraiment difficile pour nous de savoir les programmes du ministère de l'Immigration, parce que des ressources du ministère de l'Immigration ne sont plus chez nous. Et, quand on en a eu, des gens de l'Outaouais qui venaient, on a eu un gros roulement de main-d'oeuvre, les gens ne sont pas toujours là. Donc, c'est difficile d'avoir une bonne discussion avec le ministère sur qu'est-ce que vous pouvez faire pour nous dans notre stratégie, dans les objectifs, où qu'on s'en va, parce que les gens ne sont pas là. Et on sait bien que, quand les gens ne sont pas autour de la table, le travail ne se fait pas aussi bien, là.
Le Président (M. Bernier): Mme la ministre.
Mme Weil: Est-ce que vous vouliez ajouter?
Le Président (M. Bernier): Oui? Vous voulez ajouter? Oui, allez-y, M. Warolin.
M. Warolin (Arnaud): Je dirais qu'aujourd'hui on a aussi un problème, c'est que, vu la pénurie de main-d'oeuvre, les régions, on dépense de l'argent, les uns et les autres, pour essayer d'attirer un immigrant qui est déjà arrivé au Québec. On se bat pour cet immigrant. Et ça, ça fait un non-sens. Donc, ça, il faut absolument trouver une solution pour arrêter de dépenser de l'argent pour essayer de se battre pour cet immigrant-là. Donc là, je pense que c'est l'utilisation des fonds publics, on a quelque chose à faire.
Au niveau de la promotion des régions, et je suis bien placé puisque je l'ai vécu personnellement, il faut absolument que les agents d'immigration, que les gens dans les aéroports et les premiers intervenants acceptent de dire: Les régions, ce n'est pas Mars, ce n'est pas l'enfer. Moi, je l'ai vécu à Montréal. Avec ma femme, nous avions décidé de venir en région. On nous a dit textuellement: En dehors de Montréal, point de salut pour un immigrant. Donc, ça, je pense que ce discours-là, il doit changer. Et ce n'est pas une catastrophe, car, quand on est un immigrant, comme, moi, je suis venu, dire qu'on va faire 1 000 kilomètres de plus pour aller en Abitibi-Témiscamingue, ou sur la Côte-Nord, ou à Montréal, c'est la même chose. Le but, c'est le voyage, c'est le Québec, c'est cette population qui nous accueille. Donc, ça, c'est extrêmement important pour nous. Et ça, ça nous aiderait à choisir, à intervenir pour aller chercher ces immigrants. Parce que, se battre pour un bassin, si on travaillait plutôt ensemble, puisque nous avons des besoins différents d'une région à une autre, ça nous permettrait d'être beaucoup plus efficaces.
Le Président (M. Bernier): Merci. Mme la ministre.
Mme Weil: J'entends ce que vous dites. J'en prends bonne note, parce qu'évidemment on pourra parler de nouvelles stratégies, comment dynamiser. J'entends ce que vous dites, surtout sur comment, vous, vous pourriez vraiment être les vendeurs de votre région parce que vous êtes vraiment les mieux placés. Surtout, de source immigrante, c'est parfait, là, il n'y a pas meilleur vendeur.
Sur la question de l'implication des entreprises, est-ce que vous avez eu à travailler avec des entreprises? Et comment vous voyez leur rôle dans votre cas particulier, dans votre région? Comment les entreprises pourraient vous aider pour attirer des immigrants soit de Montréal ou avec ce service, Placement en ligne international, là? Ça vaut la peine d'aller sur notre site pour regarder ça. Il y a aussi les missions qu'on fait en France, etc. Mais donc le rôle des entreprises.
Le Président (M. Bernier): M. Maschinot.
M. Maschinot (Philippe): Merci. J'ai fait partie de l'une des premières tables en région, à la Chambre de commerce de Rouyn-Noranda, et on avait déjà cette problématique-là dans les années 2004, 2005, 2006. C'était d'essayer de faire comprendre aux entrepreneurs par où il fallait qu'ils passent pour aller chercher une population immigrante.
Je suis chef d'entreprise. J'ai fait venir des Français immigrants temporaires. J'en ai plusieurs qui sont restés. J'en ai deux qui sont encore en région, qui ont acheté des maisons, qui se sont mariés, qui se sont installés.
Il y a une démarche. Mais cette démarche-là, une fois qu'on a poussé un petit peu la porte du site Internet d'Immigration Québec, qu'on a compris un petit peu comment ça marchait, le 1 800, etc., c'est un petit peu plus simple. Mais beaucoup d'entreprises abandonnent à ce stade-là. Et depuis 2009 je rappelle que nous n'avons plus d'interlocuteur d'Immigration Québec en région, et c'est extrêmement compliqué. Les services téléphoniques, c'est compliqué.
J'ai des cas. Je peux vous en donner quelques-uns là, mais ce n'est peut-être pas le but, vous dire qu'actuellement les entreprises sont prêtes, mais, face à la paperasserie gouvernementale, face à un exemple très simple, l'avis relatif au marché du travail à déposer à Service Canada, alors qu'Emploi-Québec Abitibi-Témiscamingue a identifié les besoins... Pourquoi faut-il encore passer par Service Canada, d'accord, pour faire un avis relatif au marché du travail?
La facilité qu'on aurait, au niveau d'Immigration Québec, d'aller... de répondre aux besoins de la région par rapport au dossier, par rapport à la façon dont on va remplir le dossier... Il faut qu'on ait une ressource sur place et il faut que cette ressource soit probablement un peu plus autonome que les ressources qu'on a eues jusqu'à maintenant, pour y répondre.
Le Président (M. Bernier): Merci. Mme la ministre.
Mme Weil: Juste pour vous dire, parce qu'on a eu beaucoup ce commentaire: On travaille actuellement avec CIC pour simplifier la procédure parce que la conjoncture fait en sorte que les entreprises ont vraiment besoin de main-d'oeuvre. Ça, c'est une pression partout au Canada. C'est partout au Canada que ce commentaire est fait, et les entreprises insistent, et on est là pour aider le développement économique. Alors, juste vous dire qu'on travaille là-dessus. Alors, on vous entend et on vous comprend aussi.
M. Maschinot (Philippe): Mais c'est compliqué au jour le jour.
Mme Weil: Oui. Oui. Oui. Non, je comprends.
M. Maschinot (Philippe): J'ai une boulangerie-pâtisserie à Rouyn-Noranda, coin de la rue. J'ai, pratiquement une ou deux fois par semaine, des immigrants qui viennent me voir en me disant: Voilà, j'ai ce cas-là. Je fais quoi? Je vais vous donner un cas parce qu'on n'a pas de réponse: un couple d'immigrants, trois enfants, la petite fille, cinq ans au mois de décembre, le petit garçon, quatre ans, une autre petite fille de deux ans. Ils viennent tous de gagner une année. La petite fille a six ans. Elle rentre à l'école, là. Elle est illégale parce qu'à partir de six ans il faut un permis d'étude. On le demande où? On fait quoi? Les commissions scolaires ne sont pas au courant. Mais la gamine, elle est illégale. Il faut-u que les parents sortent et puis reviennent? C'est des cas, mais, ces cas-là, on les vit tous les jours, et on n'a pas de ressource, et on n'a pas de réponse au téléphone.
Le Président (M. Bernier): Merci. Mme la ministre.
Mme Weil: Je prends bonne note, hein, je prends bonne note. C'est surtout ça.
M. Maschinot (Philippe): On peut se voir après la réunion, je vous en raconterai d'autres.
**(18 h 20)**Mme Weil: Oui, je pense qu'on a besoin d'une réunion de travail, hein, parce que... Non, je vous entends. Et je dois vous dire que, nous, on reçoit aussi beaucoup de cas particuliers puis on essaie d'aider. Mais c'est surtout... mon rôle, c'est de voir comment simplifier les procédures. Premièrement, qu'on soit capable de répondre à vos besoins. Répondre aux besoins des entreprises, ça veut dire répondre aux besoins des régions. Et ensuite il y a quand même une table technique, si vous voulez, MICC-CIC, qui se voit régulièrement. Il y a une autre table conjointe ou comité conjoint sur les grandes orientations politiques.
Mais c'est des cas comme ça qui alimentent la réflexion, qui nous permettent de voir les problèmes. Et actuellement avec, je dirais... il y a comme une pression forte actuellement au niveau économique, ce qui est une bonne chose au Canada. Ça se fait sentir dans plusieurs régions au Canada. On est quand même chanceux d'avoir cette pression. On espère que ça va rester, ce qui fait en sorte que, oui, les systèmes administratifs, les règles, tout ça, il faut les revoir pour les simplifier. Alors, c'est l'intention, puis on travaille, mais c'est ces cas particuliers qui m'aident souvent à essayer de repérer peut-être des solutions avec les fonctionnaires, et ensuite ils amènent ça à la table, la table conjointe, et on travaille dans ce sens-là.
Alors, sur les grandes orientations qu'on propose, j'imagine que, bon, pour les volumes, ce n'est pas nécessairement votre enjeu, dans la région, mais, sur la question du français, bon, l'idée, c'est de prioriser, de garder majoritaire la proportion de personnes qui parlent français, ensuite d'évaluer les compétences linguistiques. Mais dans votre région c'est beaucoup de français, si je comprends bien?
M. Maschinot (Philippe): Absolument. Un peu plus. Mais, vous savez, par rapport à votre réflexion...
Le Président (M. Bernier): Allez-y, monsieur...
M. Maschinot (Philippe): ...tout à l'heure, sur les entreprises, pour revenir un petit peu à ça, je crois que ce qui est important, c'est que la table de concertation, qui est véritablement dans cette action, on a, tous les partenaires, Emploi-Québec, et autres, on a identifié... on sait qu'actuellement, en Abitibi-Témiscamingue, il y a à peu près 10 000 emplois. Si on vient chercher le ratio de population, on vient chercher 1 000 immigrants par année. On a le potentiel. On a le potentiel à la fois pour les intégrer, donc pour les accueillir, leur trouver un emploi et les intégrer. On est une communauté... On est 145 000 habitants en Abitibi-Témiscamingue. Tout le monde se connaît. Il y a des cursus professionnels ou d'implication.
Jamais, moi, il y a 10 ans, le 4 décembre 1999, quand on m'a tamponné mon IM 1000 en me disant: À Rouyn-Noranda, il n'y a rien à y faire -- parce qu'on me l'a dit -- jamais j'aurais pensé que 12 ans plus tard je serais en commission parlementaire au Québec.
Donc, c'est possible. On n'est pas là pour enfoncer le clou avec une masse de, combien, de six livres ou de 10 livres. On est là pour vous dire: On est là pour avancer. Et la table de concertation est une table d'action. Donc, on a identifié tout cela. On a les moyens d'avancer. On se donne les moyens d'avancer. Il faut... L'Entente spécifique, elle est importante, financièrement, mais on a des moyens pour avancer. Parce que les partenaires sont autour de la table, se concertent. Mme Proulx, qui est directrice régionale d'Immigration-Québec, nouvelle directrice régionale, fait son bout aussi de son côté. Mais il faut qu'on avance et il faut qu'on avance dans l'identification de toute la problématique, qui n'est pas si importante que ça en région, du fait qu'on se connaît tous. Donc, si on fait venir un travailleur temporaire ou un résident permanent, on a possibilité de trouver des emplois aussi à leurs épouses ou leurs conjoints.
Le Président (M. Bernier): Merci, M. Maschinot. Mme la ministre.
Mme Weil: Est-ce que vous connaissez le Programme de l'expérience québécoise, où les travailleurs temporaires sont mis sur la voie rapide et en 45 jours ils obtiennent le certificat de sélection du Québec s'ils sont qualifiés? Vous connaissez le programme?
Le Président (M. Bernier): M. Maschinot.
M. Maschinot (Philippe): On le connaît, mais encore une fois ce programme devrait nous être expliqué par quelqu'un sur place. Excusez-moi, j'enfonce le clou un peu plus, mais on a besoin de quelqu'un.
Mme Weil: Très bien. Merci beaucoup.
Le Président (M. Bernier): Merci. M. le député de Drummond, la parole est à vous.
M. Blanchet: Bonjour, messieurs dame. Dans la mesure où je suppose que ça peut être contributif à notre réflexion et dans la mesure aussi où on reproche souvent aux gens qui font la politique de ne pas suffisamment faire avancer les idées, je vous inviterais à consulter le produit de notre réflexion à nous, qui soutient, qui parle de soutenir les initiatives locales qui proviennent d'organismes ou d'entreprises pour avoir un contrôle direct sur l'immigration en région, de même qu'une autre, que je connais bien parce que c'est moi qui l'avais initiée, qui vise à reconnaître et à faire en sorte que les étudiants francophones qui viennent étudier au Québec soient traités... qu'ils paient les mêmes frais des scolarité que les Québécois qui sont déjà citoyens québécois et que ceux qui demeureront par la suite, quelles que soient leurs origines, récupèrent, par voie de mesures fiscales, la différence entre ce qu'ils auraient payé s'ils avaient été citoyens québécois et la différence qu'ils ont payée en surplus parce qu'ils ne l'étaient pas au moment de leurs études, donc des mesures qui, en particulier dans les régions, ont un impact significatif. Quelle belle immigration, jeune, disposée à la scolarisation, formée localement, volonté d'intégration remarquable. Et d'ailleurs les régions sont une avenue formidable, d'autant plus que la question de l'intégration ne se pose pas beaucoup pour un immigrant qui arrive en Abitibi. Son adaptation quotidienne demande une maîtrise rapide et une volonté immédiate. Et donc, à cet égard-là, en effet, la régionalisation de l'immigration doit être considérée.
J'avais une question assez technique. Vous n'avez pas énormément d'immigration. Vous avez une volonté parce qu'il y a un besoin à caractère surtout économique d'immigration dans votre région. Est-ce qu'on parle d'immigration hautement qualifiée, moyennement qualifiée ou de main-d'oeuvre peu qualifiée mais en volume? Parce que ça varie selon les régions, là. Ce n'est pas du tout la même chose dans des secteurs très industriels, comme le Centre-du-Québec, versus des secteurs qui peuvent être plus diversifiés, comme chez vous.
Le Président (M. Bernier): Mme Corriveau.
Mme Corriveau (Mélanie): Oui. Bien, actuellement, ce qui se passe chez nous, là, avec la prospérité économique, c'est vraiment des emplois de tous ordres, là. On est rendus avec une pénurie autant pour des emplois... Je pense qu'Emploi-Québec les appelle des emplois, là, de classe c, que finalement on n'a pas le droit de les intégrer, ils ne sont pas admissibles à l'immigration, là. Mais, nous, on a besoin quand même de gens qui travaillent en restauration. Là, il y a des restaurants qui ferment parce qu'on n'a plus de chefs. On a besoin de soudeurs, on a besoin de débosseleurs autant qu'on va avoir besoin d'ingénieurs miniers, de professeurs, de gens dans l'administration publique, et tout. Donc, c'est vraiment toutes les classes d'emploi, là, qui sont nécessaires chez nous.
Le Président (M. Bernier): M. le député.
M. Blanchet: Vous avez été extrêmement précise. Ça, ce n'est vraiment pas par manque d'intérêt, parce que vous avez été d'une limpidité assez exemplaire par rapport à la spécificité de votre situation.
J'ai une question. Parce qu'il y a... la notion de contrainte ou d'établissement de critères crée souvent des malaises, et donc je ne prétends pas que ce soit une position, là, de qui que ce soit dans la pièce ici, mais la réflexion... Est-ce que la volonté ou l'acceptation de l'idée d'aller en région pourrait être prise en compte dès le début du processus? Autrement dit, ne pourrait-on pas dire aux candidats à l'immigration: Est-ce que vous êtes disposés à ne pas être dans un grand centre urbain? Est-ce que vous... C'est sûr que, pour eux autres, la notion est tout à fait abstraite, là, parce que, pour eux autres, Montréal est une notion abstraite, donc on peut supposer qu'Amos, ça l'est sérieusement. J'ai déjà vu du monde revirer de bord à l'aéroport puis rentrer dans l'aéroport quand ils ont vu la température au mois de janvier. Ils ont dit: Non, non, non, je ne ressors plus d'ici. Donc, effectivement, il y a... tout ça est très, très abstrait. Mais est-ce qu'on pourrait imaginer une façon que ça devienne un paramètre, même volontaire, mais un paramètre de sélection pour favoriser, en termes de pourcentage, de ratio, le nombre qui serait disposé à migrer dans les régions.
Le Président (M. Bernier): M. Warolin, oui.
M. Warolin (Arnaud): Oui, tout à fait. On pense que ça devrait être pris dans les critères, même dans les grilles d'analyse au niveau du pointage. Je pense que c'est quelque chose qui serait très profitable en tout cas pour les régions et pour l'intégration. Alors, nous, on est favorables à une mesure, oui, peut-être même encore plus en amont que ce que vous pensez. On se dit que, si, nous, on allait les chercher, ces immigrants-là, eh bien, on pourrait absolument savoir et prioriser... Si on va les chercher, c'est sûr qu'ils vont venir chez nous.
Mais on pourrait mettre des mécanismes pour dire à un immigrant... Si cet immigrant-là veut aller en région, il pourrait y avoir une accélération un peu du processus ou une bonification pour qu'il puisse s'installer chez nous. Je pense que ça serait profitable et ça réglerait peut-être quelques problèmes qu'on a en termes d'immigration au Québec. Parce que, nous, on peut. Par contre, il faut faire attention à notre capacité de pouvoir les intégrer dans le marché du travail, un peu comme on disait préalablement à la personne qui était à ma place tout à l'heure, de dire: En fonction de notre capacité, combien est-ce qu'on peut en intégrer par rapport à l'habitude et aux outils qu'on a? Mais, si on pouvait nous-mêmes mettre des critères et nous-mêmes aller les chercher avec le gouvernement du Québec, je pense que ça serait la meilleure des solutions.
M. Blanchet: Je conclurai par un commentaire.
Le Président (M. Bernier): Merci. M. le député.
M. Blanchet: Woup! Pardon, M. le Président. Je conclurai par un commentaire et je vous mettrai en contact si vous le voulez. La SDED, la Société de développement économique de Drummondville fait de l'immigration économique ciblée. Ils identifient à l'étranger les expertises précises demandées par le milieu, parfois même par une entreprise spécifique, l'identifient à partir d'un réseau à l'étranger, et favorisent, suscitent cette immigration-là de façon très, très pointue, très directe et avec... Ça va jusqu'à les aider à trouver une maison, et tout, et tout, là. Mais c'est un processus qui a un certain succès dans la communauté. Mais je pourrai vous mettre en contact si vous le souhaitez. Merci beaucoup.
Le Président (M. Bernier): M. Warolin.
**(18 h 30)**M. Warolin (Arnaud): Bien, je trouve que c'est une belle initiative, mais je vous ramènerais tout à l'heure, quand on disait qu'il ne fallait pas non plus se battre pour ces immigrants-là. Il faut trouver des mécanismes pour éviter que... Je me souviens que le Saguenay--Lac-Saint-Jean, l'Abitibi, on essayait de chacun tirer sur le bras d'un immigrant pour le faire chez nous. Je trouve que le mécanisme n'est pas très intéressant. Pour l'immigrant, c'est sûrement quelque chose de très agréable, mais en fin de compte c'est quand même peu efficace. Donc, il faut essayer de réfléchir, puis je pense qu'avec le gouvernement, si on se faisait une table de travail, on pourrait trouver des outils pour améliorer ça.
Le Président (M. Bernier): Alors, merci, messieurs de la Conférence régionale des élus de l'Abitibi-Témiscamingue. M. Warolin, M. Maschinot, Mme Corriveau, merci de votre participation à cette commission parlementaire. Vos échanges ont été très appréciés.
Donc, je remercie également les collègues qui ont participé, les gens de la recherche, les gens du ministère, les gens de l'Assemblée nationale qui nous accompagnent.
Donc, compte tenu que nous avons terminé les auditions qui étaient prévues pour aujourd'hui, la commission ajourne ses travaux au jeudi 25 août 2011, à 9 h 30, dans cette même salle. Merci. Bonne soirée.
(Fin de la séance à 18 h 31)