(Neuf heures quarante et une minutes)
Le Président (M. Auclair): Bien, bonjour à tous. On s'excuse un petit peu du retard. Semble-t-il qu'on a des petits problèmes de stationnement, et semble-t-il que ça va être comme ça pour le reste de l'été. Donc, juste pour préparer mes collègues, là, partir 15 minutes plus tôt afin qu'on soit capables de respecter l'horaire.
Bienvenue à tout le monde. Je vous demanderais avant tout de fermer vos cellulaires et tous autres systèmes pour qu'on puisse travailler l'esprit tranquille. Ayant constaté le quorum, s'il vous plaît, on va continuer maintenant le mandat de la commission qui est de poursuivre la consultation générale et les auditions publiques sur le document intitulé La planification de l'immigration au Québec pour la période 2012-2015.
Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements?
La Secrétaire: Oui, M. le Président. Alors, M. Kotto (Bourget), le porte-parole de l'opposition officielle en matière de communautés culturelles, remplace Mme Poirier (Hochelaga-Maisonneuve); M. Cloutier (Lac-Saint-Jean) remplace M. Cousineau (Bertrand); et Mme Rotiroti (Jeanne-Mance--Viger), l'adjointe parlementaire de la ministre, remplace M. Chevarie (Îles-de-la-Madeleine).
Le Président (M. Auclair): Merci beaucoup, Mme la secrétaire. Donc, pour l'ordre du jour, ce matin, nous débutons avec la Chambre de commerce du Montréal métropolitain. Merci beaucoup de vous être déplacés. J'inviterais maintenant M. Leblanc, président et chef de la direction, à présenter les personnes qui l'accompagnent et de débuter son allocution. Vous allez avoir 15 minutes pour votre présentation. Ensuite, les parlementaires vont se partager les 45 prochaines minutes qui vont être partagées environ 50-50, et on va laisser un deux petites minutes à notre collègue député indépendant. Donc, s'il vous plaît, si vous pouvez, M. Leblanc, débuter. Bien vous identifier, s'il vous plaît, pour la personne qui prend nos interventions.
Auditions (suite)
Chambre de commerce du Montréal métropolitain (CCMM)
M. Leblanc (Michel): Alors, bonjour et merci de l'invitation à venir vous présenter notre mémoire. J'ai avec moi ce matin, à ma droite, donc à votre gauche, Maha Berechid qui est économiste, Stratégie et politiques à la Chambre de commerce du Montréal métropolitain; et j'ai à ma gauche, donc à votre droite, Marie-Pier Veilleux qui est directrice, Développement, diversité métropolitaine, donc qui est directrice d'une unité de la chambre qui travaille directement auprès de travailleurs immigrants, auprès d'entreprises qui accueillent des travailleurs immigrants en stage. J'y reviendrai plus tard.
Je vous remercie, Mme la ministre, membres de la commission, de nous recevoir. Je voudrais d'entrée de jeu simplement signaler par ma présence ce matin ici, alors qu'à Montréal au même moment le premier ministre Jean Charest, le ministre des Finances responsable de la région de Montréal, M. Raymond Bachand, et le ministre des Transports tiennent une réunion d'un comité, sur lequel je siège, sur l'État des infrastructures routières à Montréal... Il y a eu des demandes à ce que je fasse un choix, et j'ai choisi d'être ici parce que, du point de vue de la Chambre de commerce et de la communauté d'affaires, il est très important -- je ne dirai pas que les infrastructures routières ne sont pas très importantes -- il est très important qu'on réussisse ce dossier de l'immigration. Et donc je vous signale, et je pense qu'il faut en tenir compte, à quel point, pour nous, ce dossier est important.
Je voudrais d'entrée de jeu aussi préciser ce qu'est la chambre, simplement pour mémoire. Je présume, et nous présumons toujours que tout le monde nous connaît, mais la Chambre de commerce du Montréal métropolitain aura l'année prochaine 190 ans. C'est la première organisation au Québec représentante de la communauté des affaires. Nous avons 7 000 membres, 3 000 entreprises sont membres. Ça va de toutes petites entreprises, d'entrepreneurs individuels jusqu'à des très, très grandes sociétés. En fait, les fleurons de l'économie du Québec sont membres chez nous. Nous travaillons sur divers plans. Nous travaillons, entre autres, sur toute la question de la main-d'oeuvre, et je vais en parler. Ça touche deux grands volets: évidemment l'adéquation de la main-d'oeuvre avec les besoins des entreprises, mais aussi la disponibilité, et, par disponibilité, il y a évidemment tout le lien avec l'immigration.
Je commencerai par un bref rappel du contexte dans lequel nous abordons cette question. Pour les entreprises, lorsque nous les sondons, lorsque nous leur demandons: Quel est le principal facteur qui déterminera votre croissance et votre succès au cours des prochaines années?, la disponibilité de mains-d'oeuvre qualifiées et de talents vient en tête de liste. C'est le premier enjeu pour les entreprises que nous sondons et que nous représentons.
Deuxièmement, les entreprises, comme tout le monde, sont bien conscientes que nous faisons face à un resserrement démographique au Québec, et donc s'inquiètent de la disponibilité de ce talent.
Troisièmement, les entreprises, et vous l'avez sûrement remarqué, se sont fortement mobilisées autour de la question de la persévérance scolaire. Les entreprises sont bien conscientes qu'une bonne partie de la réponse à nos besoins en main-d'oeuvre viendront de ce que nous pourrons nous-mêmes, comme société, fournir les compétences, les talents dont nous avons besoin. Cela dit, les entreprises, comme vous, comme nous, sont bonnes en mathématiques et sont capables de déterminer que, même en réussissant sur l'enjeu de la persévérance scolaire, nous ne comblerons pas les besoins de main-d'oeuvre auxquels nous sommes confrontés.
Et donc les entreprises nous signalent clairement que l'enjeu de l'immigration est fondamental, qu'il s'agit d'un enjeu sur la quantité, il faut accueillir suffisamment d'immigrants. C'est un enjeu d'adéquation, il faut accueillir des immigrants qui correspondent à nos besoins; c'est un enjeu d'intégration, il faut réussir à ce que ces immigrants puissent participer à la société, trouver l'emploi, se faire valoir, faire valoir leurs compétences; et dernier point, il faut être capable de les retenir, il faut être capable, une fois qu'on a réussi à les intégrer, de faire en sorte qu'ils s'épanouissent et qu'ils n'aient pas le désir d'aller ailleurs au Canada ou ailleurs dans le monde.
La réalité, au Québec, de l'immigration est une réalité métropolitaine montréalaise. Ce n'est peut-être pas ce qu'on voudrait à long terme. Peut-être que, pour le bien-être du Québec, il faudrait que les immigrants se déploient davantage en région. Néanmoins, les chiffres que nous avons, c'est que 87 % de la population immigrante au Québec, dans l'immigration récente, se trouve dans la région de Montréal et à Montréal. Donc, bien que ce soit un enjeu québécois, je vous prierais de reconnaître que, présentement, c'est un enjeu métropolitain et montréalais.
Et puis, dernier point, par rapport au reste du Canada, le vieillissement de notre population étant plus rapide, la part d'immigration que nous avons reçue au cours des dernières années ayant été inférieure à ce qu'il y avait dans le reste du Canada, on voit un effritement progressif de la proportion de la population québécoise dans le reste du Canada. Si, moi, j'étais président d'une chambre de commerce dans une ville importante du reste du Canada et que je devais lutter pour attirer des usines, des investissements étrangers, je ferais valoir qu'il serait plus facile de trouver la main-d'oeuvre qu'on recherche dans ma ville, à l'extérieur du Canada, qu'à Montréal dans les prochaines années. Donc, il y a un enjeu de compétitivité internationale et compétitivité nationale sur l'attraction des investissements dans la région de Montréal liés à la main-d'oeuvre.
Nous avons, dans notre mémoire, et je vais les présenter rapidement, quelques propositions qui émanent directement de nos discussions avec la communauté d'affaires. Comment améliorer le processus de sélection des immigrants afin d'identifier les candidats qui s'intégreront le mieux au marché de l'emploi québécois? C'est la première question qui revient souvent. Les gens sont critiques de la sélection des immigrants. Ils ont l'impression que nous ne réussissons pas clairement à identifier correctement des immigrants qui vont répondre aux besoins le plus rapidement possible. Ce n'est pas la seule lacune que nous pouvons corriger, mais cette lacune est néanmoins mentionnée très fréquemment.
Les entreprises nous demandent d'accentuer l'immigration de jeunes, et on va mettre «jeunes» entre parenthèses, parce que «jeunes», il y a 20 ans, ne voulait peut-être pas dire ce que ça veut dire aujourd'hui. Par «jeunes», on entend des immigrants qui ont autour de la trentaine ou juste en bas de la trentaine; des immigrants qualifiés; des immigrants qui vont, par le fait qu'ils ont entre 20 et 29 ans, s'intégrer plus rapidement. Les chiffres dont nous disposons sont à l'effet qu'au Québec comme ailleurs -- nous ne sommes pas différents -- accueillir un jeune immigrant qualifié de moins de 30 ans augmente fortement ses chances de s'intégrer rapidement, plus rapidement que s'il a au-delà de 30 ans.
**(9 h 50)** Deuxièmement, les gens nous demandent d'augmenter significativement la part de l'immigration pour les professions en forte demande. Évidemment, ça va sous le sens. On devrait s'attarder, à savoir, à partir des analyses qui ont été faites par le ministère de l'Emploi et de la Solidarité sociale, où seront les besoins et, à partir de là, voir dans quelle mesure nous pouvons attirer des talents qui correspondent à ces besoins.
Dans les chiffres que nous avons, il y a évidemment les soins de santé et de services sociaux, il y a les services professionnels, scientifiques et techniques, mais les choses comme le commerce de détail, la finance, les assurances, l'immobilier à l'occasion, c'est dans les industries de services.
Du point de vue de ces immigrants qualifiés, les entreprises questionnent les raisons pour lesquelles il semble y avoir toujours des difficultés à accueillir plus rapidement des immigrants professionnels dont les acquis sont directement reconnaissables parce qu'ils ont soit étudié ici, soit qu'ils sont des travailleurs temporaires qualifiés. Donc, les entreprises nous disent, et ça nous surprend, qu'il y a des travailleurs temporaires qualifiés pour qui ça semble problématique, encore une fois, de leur donner le statut d'immigrant rapidement. Or, on sait, s'ils travaillent ici, qu'ils sont compétents et on sait bien, s'ils travaillent ici, qu'ils sont en partie intégrés.
Je vous dirais, à ma plus grande surprise encore, j'entends -- et je vais vous donner un secteur en particulier, dans le secteur des jeux vidéo -- j'entends des entreprises se plaindre que la relocalisation de travailleurs à l'intérieur de leur entreprise, donc des travailleurs déjà à l'embauche ailleurs dans le monde de la même entreprise qu'ils voudraient voir relocalisée ici, que ça ne se fait pas facilement. C'est une absurdité. Quand j'entends ça de la part d'entreprises, je ne peux pas m'imaginer qu'à l'heure où on se parle une entreprise qui a déjà reconnu les compétences d'un de ses employés qui travaille ailleurs et que, pour des raisons de croissance au Québec, voudrait accueillir cet employé ici trouve ça difficile, doit faire la démonstration que, sur l'espace du Québec, il ne trouverait pas une compétence à l'égal de la compétence qu'il tend à attirer. C'est un paradigme mental qui présume qu'on n'a pas besoin de ce talent qui est à l'étranger, parce qu'il faudrait trouver une job à un Québécois qui a le même talent, qui est dans la communauté ici. Or, le premier problème qu'on a, c'est l'attraction des talents. On n'a plus un problème de chômage des talents au Québec, il y a encore un taux de chômage, il y a encore des gens qui ont besoin de se requalifier, qui ont besoin de trouver les qualifications pour le bon emploi, mais la réalité, c'est qu'il y a des talents qu'on tente d'attirer ici, pour lesquels on aurait un emploi immédiatement et qui seraient intégrables immédiatement.
Finalement, dans ce premier lot de solutions, augmenter l'apport des immigrants économiques de la catégorie gens d'affaires. C'est un défi, c'est un défi. On peut tenter de l'expliquer de plusieurs façons. La réalité, c'est: On a un déficit d'entrepreneurship au Québec. On a une détérioration de l'entrepreneurship, et, si je devais dire si on a un déficit de travailleurs qualifiés dans un secteur, essayons d'attirer des gens de ce secteur, bien on a un déficit d'entrepreneurs qui sont d'attirer des entrepreneurs. Ce n'est pas facile d'attirer des entrepreneurs, mais ce qu'on observe, c'est deux choses. La première, c'est, dans d'autres régions du Canada, le taux d'entrepreneurship chez les immigrants est plus élevé qu'au Québec. Est-ce que c'est parce qu'on est avec un taux d'entrepreneurship plus faible chez les Québécois de souche ou est-ce que c'est parce qu'un immigrant qui arrive au Québec fait face à des défis peut-être plus grands ou en tout cas des enjeux plus difficiles pour partir son entreprise? D'après nous, il y a un chantier à faire directement sur l'immigrant entrepreneur. Et, avec la stratégie d'entrepreneuriat que le ministre Gignac va déposer, on pense qu'il y a là une opportunité de travailler ensemble pour s'attaquer spécifiquement à ce problème.
Deuxième volet, renforcer les mesures nécessaires afin d'améliorer l'intégration des immigrants une fois installés au Québec. Nous pensons que le gouvernement doit poursuivre et nous, du point de vue d'une organisation comme la chambre, nous poursuivrons les initiatives qui visent à favoriser un contact privilégié entre les entreprises, les organisations locales, mais surtout avec les travailleurs immigrants qualifiés ou non qualifiés, mais nous travaillons avec les qualifiés sans emploi. Notre programme Interconnexion, qui est dirigé par ma collègue ici, Marie-Pier Veilleux, vise à trouver pour des immigrants qualifiés des stages en emploi qui varient de quelques jours à quelques semaines. Nous sommes en quelque sorte des marieurs professionnels. Nous trouvons des entreprises qui ont des besoins en travailleurs qualifiés, nous travaillons avec des banques de données, avec des ressources du ministère de l'Emploi, des ressources du ministère de l'Immigration et avec des partenaires sur le terrain pour identifier des immigrants qui pourraient répondre à ces besoins. Nous pensons que ce type d'initiative est très stratégique, et dans un monde idéal, dans quelques années, idéalement, on n'en aurait plus besoin. Idéalement, le milieu des affaires serait capable de détecter rapidement les immigrants qualifiés et les immigrants qualifiés seraient capables de détecter rapidement l'emploi pour eux. La réalité, c'est que ce n'est pas encore fluide.
J'aimerais attirer l'attention sur le fait que notre programme Interconnexion, qui trouve des stages pour des travailleurs qualifiés, ne trouve pas de stages en santé et services sociaux pour les travailleurs qualifiés par ailleurs en santé et services sociaux, où on estime que les besoins seront les plus élevés.
Ce que ça nous indique, c'est qu'à l'intérieur même de l'espace public et gouvernemental il y a un enjeu sur l'accueil et sur l'intégration des travailleurs qualifiés immigrants, et ça nous surprend. On a plus de facilité à trouver des stages pour les travailleurs qualifiés dans l'entreprise privée que dans certains secteurs gouvernementaux qui, pourtant, auront des besoins de remplacement de main-d'oeuvre très élevés. Alors, j'attire l'attention encore une fois sur... Dans l'enjeu de l'intégration, du point de vue du gouvernement lui-même, vis-à-vis des immigrants qualifiés, il y a des choses qu'on pourrait améliorer.
Sujet délicat: les gens de la communauté d'affaires, et on en a entendu des échos dans la communauté plus large, indiquent que, lorsque nous avons des immigrants qualifiés qui n'ont aucune compétence en anglais, cela peut poser problème. Et ça peut poser problème, parce que la nouvelle réalité du marché du travail, c'est que, parfois, des logiciels contiennent de l'anglais; parfois, des manuels contiennent de l'anglais. Et, dans bien des situations, nous voulons que nos entreprises, dans un monde globalisé, mondialisé, puissent faire affaire avec leurs plateformes internationales.
Donc, il y a un enjeu ici. Si nous accueillons des immigrants qui ne sont absolument pas fonctionnels en anglais, il est possible qu'ils aient, eux, un obstacle d'intégration en emploi dans des emplois de haut niveau, répondant à des besoins réels, mais où l'anglais ou une maîtrise minimale de l'anglais est une exigence.
Finalement, les entreprises que nous voyons s'inquiètent de tout ce qui semble être de la résistance à la reconnaissance des compétences et des acquis de la part des immigrants. Je ne vous cacherai pas que j'ai reçu des messages très positifs, à un moment, liés à l'accélération, semble-t-il, de la reconnaissance des diplômes pour recevoir par la suite des messages extrêmement cyniques à l'égard des stages qui sont exigés mais qui n'existeraient pas pour ces mêmes immigrants à qui nous aurions reconnu les compétences.
Il y a un cynisme dans la communauté d'affaires vis-à-vis de cette reconnaissance des diplômes qui est mauvaise. On doit traverser cet obstacle et arrêter de donner l'impression qu'un immigrant qui voudrait faire reconnaître son diplôme finit, s'il le fait reconnaître, par avoir une exigence de stage qu'il n'obtiendra pas. Et puis finalement ça retarde toujours son intégration en emploi.
Troisième sujet: augmenter le nombre d'immigrants afin de répondre aux besoins de main-d'oeuvre. La lecture que nous faisons, c'est que nous n'accueillons pas suffisamment d'immigrants. La lecture que nous faisons, c'est que nous accueillons des immigrants en moins grand nombre que le reste du Canada depuis plusieurs années. L'Accord Canada-Québec de 1991, si nous le lisons correctement, nous autorise à aller accueillir 5 % de points de pourcentage de plus que notre représentation en termes de population dans le Canada. Si la population du Québec est 23,2 % du Canada, si nous accueillons, selon nos chiffres, depuis quelques années, 19,2 % des immigrants, il y a déjà un déficit. Et il y a un déficit si on se compare à notre poids relatif dans le Canada. Il y a un déficit si on se compare à ce que l'accord de 1991, l'Accord Canada-Québec nous autorisait, c'est-à-dire aller chercher jusqu'à 28,2 %.
Un calcul simple et facile à faire nous dit que, si nous accueillions un nombre d'immigrants proportionnel à notre poids démographique, nous aurions une cible de 65 067 immigrants par année. C'est le chiffre qui nous sert de base, pour nous, c'est-à-dire que, lorsque nous regardons: Est-ce que nous accueillons suffisamment d'immigrants?, la question est: Est-ce que nous pourrions, à l'exemple du reste du Canada, être aussi efficaces dans l'intégration de nos immigrants et accueillir ne serait-ce que la même proportion que dans le reste du Canada? Ce qui voudrait dire non pas 50 000 mais 65 000 immigrants par année.
Ce n'est pas faire du rattrapage avec les cinq points de pourcentage qui voudrait dire qu'on remplace la revanche des berceaux par la revanche des immigrants au Québec, mais on pourrait envisager même éventuellement de dépasser notre poids dans la population canadienne. En fait, ce que nous disons, c'est que la cible du volume d'immigration doit être planifiée selon nos besoins de main-d'oeuvre à long terme, et c'est ça qui doit nous guider. Et, si nous avons des problèmes d'intégration, réglons nos problèmes d'intégration, mais ne modifions pas l'objectif qui est de répondre à nos besoins de main-d'oeuvre.
En conclusion, du point de vue des entreprises, la diversité culturelle de leur personnel est extrêmement importante. Nos entreprises, du point de vue de la région métropolitaine, dans la mesure où ce sont des multinationales, veulent avoir à bord, dans leurs équipes autant dirigeantes que dans leurs équipes professionnelles, des gens issus d'une diversité culturelle qui reflète leurs clientèles cibles à l'international. Nos entreprises, lorsqu'elles sont plus petites, ce qu'elles nous disent, c'est qu'elles veulent avoir des talents facilement identifiables, facilement intégrables et, lorsqu'elles ont de la difficulté à les détecter, elles veulent des mécanismes pour les aider à les détecter.
**(10 heures)**Le Président (M. Bernier): Je vous invite donc à conclure, s'il vous plaît, M. Leblanc.
M. Leblanc (Michel): Je suis dans ma conclusion, donc, donnez-moi encore quelques secondes.
À la fin, je dirais que nos entreprises nous incitent aussi, et ça peut paraître paradoxal pour une Chambre de commerce du Montréal métropolitain, à établir des passerelles avec nos partenaires en région de façon à ce qu'on puisse faciliter le déplacement et la fluidité des déplacements des immigrants sur la région métropolitaine avec les régions du Québec. L'objectif que nous avons, c'est d'être le berceau et le lieu d'accueil et ensuite, le plus facilement possible et rapidement possible, le lieu où transiteront les immigrants vers les emplois dans les régions et éventuellement, si on développe le Nord-du-Québec, vers le Nord. Merci.
Le Président (M. Bernier): Merci, M. Leblanc, merci. Vous allez pouvoir poursuivre vos commentaires et discussions, nous allons passer maintenant aux échanges avec les parlementaires. Donc, nous allons débuter avec la ministre. Mme la ministre, la parole est à vous.
Mme Weil: Merci, M. le Président. D'entrée de jeu... bon, bonjour M. Leblanc et bonjour à vos collègues, je veux vous remercier évidemment pour votre présence ici aujourd'hui. Ce n'est pas facile d'être président de la Chambre de commerce du Montréal métropolitain, il y a des choix à faire. Mais je veux vous remercier pour votre intérêt et votre passion pour l'immigration. Vous êtes un allié incontournable du ministère de l'Immigration et du gouvernement. Et vous avez évoqué beaucoup de choses, vous avez une connaissance fine, vous avez une expérience, vous avez travaillé dans ce dossier-là, et c'est évident que j'aurai besoin de poursuivre... Vous avez mentionné des pistes vraiment intéressantes. On ne pourra pas tout faire avec le temps qui m'est attribué, j'aurai beaucoup de questions à vous poser, et je pense qu'il va falloir qu'on ait une équipe et des équipes et qu'on continue à travailler ça avec Emploi-Québec évidemment. C'est toujours un allié dans ces questions d'intégration, mais il y a des questions qui touchent la sélection. Vous avez mentionné des choses importantes. D'entrée de jeu, je voulais vous remercier.
Alors, allons... parce que vous avez évoqué beaucoup de choses... Évidemment, les volumes, même si le volume que, nous, on cible, c'est un volume qui, selon l'ISQ -- hein, on va toujours avec des prévisions de l'ISQ -- nous permet de répondre aux besoins du marché du travail, on fonctionne toujours avec ce chiffre de 740 000 emplois. C'est un message que je répète et je répète, Emploi-Québec aussi, et la ministre de l'Emploi et de la Solidarité sociale, Julie Boulet. C'est quand même intéressant pour moi de vous entendre dire ce que vous dites, parce que vous y croyez tellement, vous le savez, et ça lance le message que, même si, nous, on vise une stabilisation, parce qu'on a beaucoup de gens qui sont là, disponibles pour remplir des emplois, puis on voudrait s'assurer de bien réussir l'intégration, que ceux qu'on a déjà sélectionnés, qui sont jeunes, scolarisés, avec une capacité de mobilité transversale, nous, on est... On travaille avec une nouvelle grille de sélection, on travaille avec Emploi-Québec, et là on propose d'aller encore plus loin pour que 50 % de ces travailleurs puissent répondre justement aux professions et métiers qui sont en demande.
Mais, comme vous le savez, l'immigration, c'est toujours une combinaison de facteurs qu'on recherche. Et le marché de la main-d'oeuvre peut changer rapidement, donc il ne faut pas mettre tous ses oeufs dans ce panier, il faut aussi regarder à moyen, long terme et avoir une qualité générale. Donc, c'est pour ça qu'on veut... Mais on ne veut pas lancer le message qu'on veut réduire, j'ai bien dit «stabiliser», parce que c'est quand même des volumes importants. Et le Canada, M. Kenney, Jason Kenney, propose à peu près la même chose que nous, il vise à réduire, si vous voulez, et c'est presque une stabilisation, de 265 à 250. Parce que le taux de chômage est élevé ailleurs aussi. On a tendance toujours à se culpabiliser ici, au Québec, mais c'est une immigration plus récente, les réseaux sociaux ne sont pas là. Il y a beaucoup de chercheurs qui expliquent le phénomène, je pense que l'important, c'est de dire que le problème existe ailleurs dans d'autres sociétés. L'important, c'est de s'attaquer à cette intégration.
Ce qui m'amène peut-être à vous parler de ce que vous avez évoqué par rapport aux travailleurs temporaires, ceux qui sont déjà au sein d'une entreprise -- moi, je vous entends -- et de parler du programme PEQ qui est un programme très prometteur, pour les gens qui nous écoutent, c'est le Programme de l'expérience québécoise, pour des gens qui ont déjà une expérience de travail ou des étudiants qui vont recevoir un diplôme québécois, on les met sur une voie rapide. Pour l'instant, ça va bien. Il faut continuer à travailler ce dossier, et, surtout quand on parle des jeunes, ça semble remplir vraiment le profil que vous recherchez.
J'aimerais vous entendre sur le PEQ étudiant, ce que vous en pensez, s'il y a d'autres façons d'aller encore plus loin, de stimuler l'intérêt pour ce programme-là, je suis à la recherche d'idées, de stratégies, et, d'autre part, que vous expliquiez peut-être un peu mieux le problème que vous avez entendu par rapport au PEQ. Ou est-ce que vous parliez du PEQ, justement ces travailleurs temporaires qu'on met sur la voie rapide? Parce qu'on commence à avoir des résultats par rapport à ce programme. Qu'est-ce qu'on peut faire pour stimuler l'intérêt aussi pour ce programme-là?
Le Président (M. Bernier): M. Leblanc.
M. Leblanc (Michel): En fait, je pense que les messages ont été bien compris par le gouvernement. Et, le programme PEQ, en ce qui s'adresse aux étudiants autant qu'aux travailleurs qualifiés déjà en emploi et travailleurs temporaires, c'est une première réponse. Je pense qu'il y a un enjeu de communication, il y a un enjeu de connaissance. Les entreprises sont absolument ignorantes en grande majorité de ça. Et donc, d'après moi, ce qu'on entend, c'est beaucoup de gens qui sont ignorants, mais, en partie, ce sont des travailleurs aussi qui sont ignorants. Le travailleur temporaire, s'il était averti, peut-être qu'il en discuterait avec son employeur.
La réalité, c'est que, présentement, nos entreprises se plaignent de ce qu'ils ont l'impression que les travailleurs temporaires -- on parle d'accélération, là -- que ce n'est peut-être pas encore... que ça devrait être immédiat. Dans leur esprit, c'est que ça devrait être immédiat. Alors, est-ce que c'est assez rapide, l'accélération? C'est vraiment de dire: Il ne faut jamais qu'on risque de perdre quelqu'un qui est ici. Et il faut bien comprendre que les travailleurs qui sont délocalisés sont probablement des travailleurs, dans bien des cas, qui ont des fortes compétences, qui sont en demande ailleurs et qui voient des besoins ailleurs. Donc, la possibilité qu'ils quittent, elle est réelle. Donc, c'est une question d'accélération et... donc, je disais de le faire connaître.
La connaissance du français obligatoire est un enjeu. Et j'ai des entreprises dans la région de Montréal qui disent que, notre priorité, ça devrait être d'intégrer des gens une fois qu'on les a acceptés et d'accepter les gens basé sur leurs compétences et leurs talents. Et la connaissance du français, s'ils ont déjà choisi d'étudier à McGill ou à Concordia, s'ils ont déjà choisi un emploi temporaire au Québec, laissons-les s'intégrer et acceptons-les rapidement. Donc, il y a juste un enjeu, ici, de signal: Est-ce que la priorité, c'est de les accueillir rapidement? Et, le défi, ça, c'est de les intégrer, oui, mais, lorsqu'ils sont déjà ici, lorsqu'ils ont déjà commencé à travailler ici, ça devrait être immédiat.
Là, où j'entends encore plus de plaintes et je l'ai mentionné tantôt, c'est lorsqu'à l'intérieur de ces mêmes entreprises il y a des transferts d'employés envisagés et que ça prend du temps. Et ça, c'est vraiment, du point de vue de l'entreprise, une frustration énorme. Ils ont l'impression, à ce moment-là, que les besoins de l'entreprise ne sont pas pris correctement en considération, ils ne comprennent juste pas. Ils disent: Moi, j'ai déjà validé que c'est quelqu'un qui a une compétence, je vais le payer, il ne sera pas à la charge de la communauté, comment ça se fait que c'est compliqué de le transférer au Québec puis d'obtenir les papiers? Alors, ça, c'est une indication.
Je reviendrais sur votre premier commentaire sur le nombre d'immigrants. Des gens de la communauté d'affaires m'ont dit: Si j'étais une entreprise comme le Québec et que je savais que j'ai un besoin de main-d'oeuvre qualifiée, compétente, présentement, je me dirais: C'est le moment d'aller en Grèce, c'est le moment d'aller au Portugal, c'est le moment d'aller en Irlande. C'est le moment de saisir une conjoncture rare où il y a énormément de jeunes en Europe, compétents et formés, qui se cherchent du travail. Et j'augmenterais volontairement et peut-être temporairement mon nombre d'immigrants autorisé juste pour saisir une opportunité de marché qui ne va peut-être pas durer dans le temps. Alors, ça pourrait militer en fonction qu'on ne voie pas l'immigration comme étant linéairement... elle est toujours au même niveau, mais comme étant conjoncturellement gonflée par le fait qu'on a l'opportunité d'aller séduire des talents formés en Europe qui se cherchent un emploi.
**(10 h 10)**Mme Weil: Sur la question des permis de travail temporaires, on travaille ce dossier-là. On aura peut-être l'occasion d'échanger encore plus, mais le ministère travaille cette question parce qu'on nous a sensibilisés à ce problème-là.
Il y a la question de la langue. Je pense qu'il faut qu'on s'en parle très ouvertement ici puis, ensuite j'aimerais aller sur la question de s'assurer qu'on va un peu partout chercher les talents, parce que je vous entends là-dessus. Sur la question de la langue, c'est sûr que, moi, personnellement, j'entends ça. D'ailleurs, je faisais une entrevue ce matin avec Paul Arcand. Il a soulevé cette question de la langue. Les gens, quand ils arrivent ici... plutôt dans le sens de l'intégration. En même temps, et vous faites partie de ce grand chantier de travail, l'urgence, si on veut, ou la priorité pour le Québec, c'est de s'assurer que le message qui est lancé, c'est qu'on préserve une société francophone ici. Et c'est un enjeu de taille, hein? Ça prend la mobilisation de tout le monde, l'intention, et pas de message mixte.
Donc, ça, pour le gouvernement, c'est vraiment prioritaire. Moi aussi, comme ministre de l'Immigration et des Communautés culturelles, j'en parle beaucoup. Ça émerge comme, je dirais, dans ces consultations, un facteur important. Les gens veulent qu'on continue à mettre l'accent là-dessus. C'est presque unanime. Mais les gens qui sont dans les milieux de travail comme vous, qui sont très branchés, surtout à Montréal, cet élément de la langue est soulevé. Dans la grille de sélection -- j'y vais un peu pointu, là -- mais comment vous verriez ce facteur-là de la langue jouer un rôle, c'est-à-dire la connaissance d'une deuxième langue ou d'une troisième langue, soi-disant l'anglais? Est-ce que c'est des points à attribuer, dans le sens de remonter le profil de la personne?
Le Président (M. Bernier): M. Leblanc.
M. Leblanc (Michel): Pour le milieu des affaires, la connaissance de l'anglais est vu comme étant un critère de compétence professionnelle à jauger en fonction de l'emploi spécifique. Donc, dans des emplois qui ne requièrent pas d'anglais, bien, pour un employeur, l'anglais n'est pas une exigence, point à la ligne. Lorsque ça requiert un minimum de connaissance pour être capable de lire un manuel, ou pour être capable d'aller consulter des sites Web ou être capable de répondre au téléphone à des interlocuteurs qui ne sont pas du Québec, bien, ça devient un critère de compétence comme celui de posséder certaines compétences techniques. Du point de vue du gouvernement du Québec et de ses critères de sélection, ça devrait être vu de la même façon. Ça fait partie de compétences qu'un individu peut mettre de l'avant. Si nous n'accueillons -- et je prends un exemple extrême -- que des immigrants ne possédant pas du tout l'anglais, ce que nous faisons, c'est que nous accueillons des gens qui ne peuvent pas répondre immédiatement à un besoin réel de nos entreprises. Et ce que ça veut dire, c'est qu'on aura un fardeau, ou bien ces individus auront un fardeau d'apprendre l'anglais rapidement, minimalement. On n'est pas en train de dire qu'on devrait exiger du bilinguisme, on est en train de dire que ça devrait être pris en compte. C'est une réalité et ça fait partie de ce qu'on veut être comme société, c'est-à-dire une société à la fois ouverte sur le monde, mais une société d'entreprises qui sont compétitives à l'échelle mondiale. Et pour être compétitifs à l'échelle mondiale, ça veut dire qu'une partie de notre personnel...
Et, du point de vue de Montréal, on a la prétention d'être une ville de sièges sociaux, et ne serait-ce que de sièges sociaux au sens canadien. Et je vais prendre une société comme L'Oréal Canada qui est basée à Montréal, qui a des travailleurs dans le reste du Canada et qui a besoin, donc, d'un point de vue de siège social, de passer ses directives, de faire ses évaluations, de faire toutes ses activités de siège social, parfois en utilisant l'anglais.
Alors, d'un point de vue de l'accueil des immigrants, ce pointage-là, de connaissance de l'anglais, pour nous, a une valeur, et il faut penser que c'est un critère d'intégration favorable pour certains emplois.
Mme Weil: J'ai deux questions, puis je voulais voir avec M. le Président si j'ai le temps pour deux questions.
Le Président (M. Bernier): Vous avez environ sept minutes, Mme la ministre.
Mme Weil: Alors, on va... parce que j'ai deux questions importantes. La situation inverse, donc la personne qui aurait un permis de travail, mais qui ne maîtrise pas assez bien le français ou peut-être pas du tout, et lorsqu'il voudra appliquer dans le PEQ, ça devient un obstacle. Qu'est-ce que les entreprises font pour s'assurer que la personne puisse acquérir... Nous, on offre des cours de francisation, on voit que le programme d'apprendre le français en milieu d'entreprise va bon train, mais je pense qu'on peut aller beaucoup plus loin. Parce qu'ils ont une période de temps où ils peuvent apprendre le français puis ils ont beaucoup, souvent, là, des connaissances de base. Mais, nous, on a des bonnes réussites avec ce qu'on offre. Est-ce que vous... comment dire, vous faites la promotion aussi de ça, justement qu'on fasse le lien avec le PEQ? Moi, je rencontre des étudiants qui vont à Concordia puis à McGill puis je leur dis: Vous connaissez le programme PEQ? Je fais mon travail sur le terrain. Vous parlez français? Et, bon, il y en a qui ont des connaissances mais ils disent: Bien, on aurait aimé bien savoir ça qu'il faut parler français ici, même avant d'arriver, etc.
Je pense qu'on a beaucoup de travail à faire pour que les gens comprennent, et donc, lorsque vous allez arriver au Québec, bon, soit que vous allez à l'Université de Montréal, l'Université du Québec, Sherbrooke, Laval, et tout va bien... Mais, si vous choisissez une université anglophone, choisissez des cours en français, commencez votre cheminement. Bon. Donc, il y a cette question. J'aimerais savoir ce que vous en pensez pour ces gens qui cibleraient le PEQ, qu'on commence déjà le travail de francisation.
M. Leblanc (Michel): Pour nous, il y a deux réalités importantes. La première, du point de vue de la chambre: nous travaillons à des... nous avons un programme spécifique, toujours dirigé par Mme Veilleux ici, qui vise la francisation en entreprise. Et l'objectif, c'est d'amener les petites et moyennes entreprises à connaître les programmes qui sont offerts, à savoir qu'il peut y avoir de la francisation sur les lieux de travail et à savoir qu'il y a des programmes de crédits d'impôt qui s'appliquent, et finalement tout notre objectif est de faire en sorte que la PME québécoise qui a peu de temps, qui essaie de travailler pour gagner sa vie puisse aussi offrir à ses employés un environnement qui favorise la francisation. Ça, c'est une réalité. On y travaille et on pense qu'on a des progrès. On y travaille sur des artères commerciales du centre-ville et dans des parties de l'île de Montréal, plus vers l'ouest, où il y a plus de rues anglophones. Donc ça, on est là-dessus.
Le deuxième point... puis je pense que collectivement il faut réaliser ce qu'on tente de faire: McGill et Concordia sont des bassins extrêmement riches en talents qu'on gagnerait à conserver au Québec. À l'image de ce qui se passe à Boston, quand quelqu'un du reste du Canada, ou des États-Unis, ou du reste du monde vient étudier à McGill, il ne pense pas qu'il va vivre sa vie à Montréal. Les gens qui vont étudier à Harvard, ils ne pensent pas qu'ils vont travailler à Boston. La réalité, c'est que ce sont des anglophones, bien souvent, qui viennent ici étudier dans une université anglophone et qui, parce qu'ils ne connaissent pas le français, sont dans des univers anglophones.
On a volontairement pris la décision de leur permettre de travailler hors campus pour maximiser les chances qu'ils s'intègrent dans notre société, qu'ils désirent y rester parce qu'ils ont travaillé, ils ont une blonde, un chum, n'importe quoi. On voudrait qu'ils choisissent le Québec. Le pari qu'on fait, c'est qu'au moment où on leur permet de travailler souvent ils ne connaissent pas leur français, mais que, ce faisant, ils vont se développer. Alors, tout notre défi collectif, c'est de travailler avec ces immigrants qui sont potentiellement des immigrants intéressants, mais qui ne possèdent pas le français. Et ce qu'on pense, c'est qu'on ne devrait pas se priver de ces immigrants potentiels à Montréal.
Mme Weil: Maintenant, là, je vais... M. le Président...
Le Président (M. Bernier): Oui, allez-y.
Mme Weil: Il y a une dernière question. C'est une question bien importante, c'est ce que j'appelle la diversité. Bon. Des groupes sont revenus sur une de nos orientations -- vous ne vous êtes pas prononcé là-dessus -- c'est les bassins de provenance. J'essaie de voir si on pourrait reformuler ou trouver une autre façon d'exprimer exactement ce que vous disiez tantôt, qu'il faut que, nous, en tant que gouvernement, on soit à la recherche de talents un peu partout dans le monde. Les entreprises, elles veulent la diversité, des têtes de pont, des gens qui attaquent un problème... Vous avez un beau passage dans votre mémoire sur l'importance de la diversité. J'aimerais vous entendre là-dessus. Est-ce que ce serait intéressant qu'on ait une orientation là-dessus, sur la diversité en soi?
**(10 h 20)**Le Président (M. Bernier): Allez-y.
M. Leblanc (Michel): Pour nous, il y a deux stratégies. Il y a la stratégie de la diversité. Les entreprises nous disent qu'en entreprise les équipes qui proviennent de diverses régions dans le monde, qui ont des connaissances culturelles et linguistiques variées, c'est un atout. Et, des entreprises qui cherchent à multiplier les origines de leurs employés, du point de vue de Montréal, qu'on ait cette offre-là... et je pense que, du point de vue du Québec, si on l'avait, c'est une force, ce serait une force pour le reste du Québec. Ça, c'est un.
Deux, je l'ai dit tantôt, les entreprises nous disent: Soyons opportunistes. Je parlais de l'Europe parce que, présentement, conjoncturellement, c'est potentiellement le moment d'aller recruter. Beaucoup de gens nous disent: Recrutons en Asie, recrutons en Chine, il y en a des endroits où c'est ouvert. Et là je dois vous avouer que, lorsque j'ai été à Hong Kong et j'ai eu le plaisir de rencontrer les gens du bureau de Hong Kong, j'ai été sidéré par le peu de ressources. Si ma compréhension est bonne, les personnes à Hong Kong couvrent, je pense, du Japon jusqu'à l'Afghanistan... ou au Pakistan, mais je pense qu'ils se rendent même à l'Afghanistan. Si on regarde, sur une carte géographique, ce que ce bureau-là couvre, c'est incroyable. Moi, je pense que, si on est sérieux sur la diversité, l'accueil, il faut se donner des moyens, dans certaines régions, d'aller recruter plus efficacement, plus rapidement, de faire des sélections plus rapides, et je questionne sur l'Asie, si on y met les ressources dont on a besoin. C'est clair, je le répète, et je finirai là-dessus, que, du point de vue des entreprises, avoir un bassin où il y a une diversité d'origine des talents, c'est une force, et c'est une force dont on se sert à Montréal.
Le Président (M. Bernier): Merci. En passant, pour être un ancien du ministère des Relations internationales comme chef de cabinet, il y a deux bureaux en Chine que le ministère des Relations internationales du Québec possède.
M. le député de Bourget, pour un bloc d'environ...
M. Kotto: Merci, M. le Président. Monsieur, mesdames, bonjour, merci d'être là. M. Leblanc, à la fin de votre laïus, vous suggériez que Montréal devienne en somme le réceptacle de l'immigration au Québec pour, par la suite, dispatcher, disons -- je résume votre pensée sans la déformer -- qu'on dispatche par la suite en région les immigrants. Est-ce qu'il n'y a pas là un risque qu'une fois que l'urbain... en fait, l'immigrant a goûté à Montréal, qu'il n'ait absolument pas le goût d'aller ailleurs que Montréal, puisque, Montréal, c'est une vitrine, comme toutes les grandes capitales au monde ou toutes les grandes villes au monde. Beaucoup, notamment dans le Sud, rêvent de vivre dans ces grandes villes là. Mais, une fois qu'ils viennent s'établir, est-ce qu'il n'y a pas un risque qu'ils n'envisagent absolument pas l'idée d'aller vivre en région?
Le Président (M. Bernier): M. Leblanc.
M. Leblanc (Michel): Je suis extrêmement fier de Montréal et un amoureux de Montréal, et, en même temps, la lecture que j'ai, c'est que beaucoup de gens qui migrent vers Montréal vont y rester non pas parce qu'ils tombent nécessairement en amour avec Montréal, mais parce que c'est là que se trouve souvent une communauté dans laquelle ils s'intègrent initialement. Alors, le risque, pour moi, ce n'est pas tellement que Montréal soit plus attractif que venir vivre à Québec ou à Rimouski, mais la réalité, effectivement, c'est qu'à Montréal il y a une communauté dans laquelle ils s'intègrent initialement, très souvent, et ils vont y rester parce qu'ils vont tisser des liens.
À terme et idéalement, les immigrants n'auraient pas à passer par Montréal. Ce que j'essaie, c'est de refléter simplement que, pour l'instant, c'est la réalité. Et là où on réussit peu, c'est à les informer rapidement des emplois qui existent en région. Il y a des gens qui pourraient bénéficier d'un emploi dans la vallée de l'aluminium qui ne savent pas que, dans la vallée de l'aluminium, il y a un emploi pour eux. J'ai rencontré récemment des ingénieurs en génie maritime qui ont finalement découvert que c'est dans la région de Rimouski que se trouve probablement l'emploi dont ils rêvent.
Alors là, il y a un problème de communication. Je dirais qu'il y a un problème possiblement de capacité d'accueil, en région, d'immigrants. Et je ne suis pas un spécialiste des régions, mais ce qu'on me dit, c'est qu'un immigrant qui tombe en région a l'impression qu'il y a un dispositif pour l'appuyer qui est moins riche qu'à Montréal, et possiblement qu'à Montréal sa communauté a contribué à mettre en place des dispositifs d'appui. Donc, là, il y a une réflexion à faire dans les régions. Pour l'instant, je n'ai pas d'opinion, je n'ai pas fait cette réflexion. Mais, moi, je ne pense pas que Montréal, en étant le lieu par lequel ils passent au début, serait nécessairement le lieu où ils restent si on réussit en région à mettre en valeur les emplois qui s'y trouvent, les besoins, et éventuellement des structures d'appui et d'accueil pour faciliter ce transfert.
Le Président (M. Bernier): M. le député.
M. Kotto: Et donc, quand vous dites qu'il y a un problème de communication, on devrait insister sur ce point-là. Si la communication ne passe pas, c'est parce qu'il n'y a probablement pas les moyens pour établir cette communication. Est-ce que...
M. Leblanc (Michel): Est-ce une question de moyens? Vous regardez cette semaine... Moi, je trouvais très...
M. Kotto: Quand je parle de moyens, c'est des ressources humaines...
M. Leblanc (Michel): O.K., oui.
M. Kotto: ...c'est des ressources financières aussi pour établir. Ça revient à la grande question des... comment dire, de la remise en question fondamentale de notre politique d'immigration et d'intégration. Je parle très souvent de notre capacité financière... Quand je parle de capacité financière, je parle des finances publiques et aussi des moyens au plan des ressources humaines limitées pour accompagner adéquatement l'immigrant qui arrive dans une démarche d'intégration parfaite réussie.
M. Leblanc (Michel): Cette semaine, j'ai trouvé très intéressant le reportage sur les emplois sur la Côte-Nord à combler, le boom immobilier qu'on y retrouve. Et ce que j'ai trouvé, c'est que cette information-là, quiconque regarde la télévision l'a eue cette semaine.
Je me suis posé la question: L'immigrant récent qui ne possède pas nécessairement bien le français encore, qui n'a peut-être pas le réflexe de regarder les nouvelles le soir, est-il au courant, alors que son taux de chômage est très élevé dans la région de Montréal, que, s'il va voir là-bas, il est possible qu'il se trouve un emploi dans les quelques jours suivants et qu'éventuellement il puisse partir sa carrière? Bon, ça pose la question: Est-ce qu'il trouverait logement, est-ce qu'il aurait les capacités d'accueil et d'appui? Mais la réalité que je pose dès le départ, c'est: Est-ce qu'il est au courant seulement des emplois qui sont là-bas?
Donc, à la question: Est-ce que c'est un manque de ressources? C'est un manque de communication vis-à-vis des communautés immigrantes sur les emplois qui se trouvent partout où ils se trouvent au Québec. Et c'est là où j'ai l'impression qu'on pourrait améliorer les processus.
Du point de vue de Montréal, on essaie de le faire. Et le programme qu'on a, c'est d'identifier dans des entreprises sur Montréal là ou il y a des besoins, et on détecte des immigrants qui ne savent pas que les besoins existent dans l'entreprise, à l'intérieur même de Montréal. Et donc de penser qu'ils savent que ça existe à l'autre bout du Québec, dans des entreprises qui pourraient avoir besoin d'eux, ce n'est pas encore le cas.
C'est là ou je dis: Pour nous, ce n'est pas un enjeu du nombre d'immigrants qu'on accueille. C'est un enjeu de la qualité de l'appui et de la communication qu'on leur donne sur où sont les emplois pour eux et de les amener à aller vers ces emplois-là.
Le Président (M. Bernier): M. le député.
M. Kotto: O.K. Vous vous êtes exprimé de la perspective du prisme économique. Et donc je présume que vous avez conscience de la difficulté d'intégration économique des immigrants. Je présume également que vous avez conscience des difficultés de mettre sur pied des politiques sociales permettant à assurer leur pleine intégration au marché du travail. Mais, cependant, vous suggérez le rehaussement des seuils à 65 000. Partant de notre réalité factuelle, est-ce raisonnable?
Le Président (M. Bernier): M. Leblanc.
M. Leblanc (Michel): J'ai une très grande foi dans l'ingéniosité humaine. Et la lecture que nous faisons, c'est qu'il y a d'autres endroits en Amérique du Nord où on accueille en proportion de la population... Le reste du Canada accueille plus d'immigrants, pour sa part de population, que le Québec. Il réussit mieux, semble-t-il, à les intégrer et il a un taux d'entrepreneuriat, chez les immigrants, plus élevé que chez nous.
Alors, ça pose plusieurs questions. Premièrement, nos immigrants, encore une fois, d'après moi, la question qui se pose: Est-ce que nos immigrants entrepreneurs ont autour d'eux un environnement stimulant pour entreprendre? On parlait tout à l'heure des besoins tels que l'Institut de la statistique les voit. L'analyse que nous faisons, nous, c'est qu'en accueillant plus d'immigrants on crée plus de développement économique. Les immigrants que nous accueillons, qui vont réussir, vont créer des emplois. Sergey Brin, de Google, a créé beaucoup d'emplois et, comme immigrant, ça a été un bon immigrant, d'un point de vue de développement économique.
La perception que nous avons, c'est que nos immigrants présentement sont mal informés d'où se trouvent les emplois. On n'a peut-être pas sélectionné ceux qui correspondaient le mieux à nos besoins. Et puis finalement, dans l'intégration des immigrants entrepreneurs, on a des faiblesses qui expliquent un taux d'entrepreneuriat chez nos immigrants moins élevé qu'ailleurs.
Le Président (M. Bernier): Merci. M. le député.
**(10 h 30)**M. Kotto: Vous dites: On n'a peut-être pas sélectionné ceux qui sont en phase avec la demande en matière d'emploi, ce qui nous indique l'impératif d'instaurer des indicateurs pour un suivi plus étroit, plus rigoureux afin, pour les années à venir, de planifier intelligemment sur ce plan. Je sous-entends que, sans jeter l'opprobre, que le gouvernement... je ne pointe pas seulement le ministère de l'Immigration, parce que c'est un effort d'ensemble. Hier, je parlais de l'impératif de mettre sur pied un comité interministériel pour ne pas abandonner ce pauvre ministère à son sort. Donc, ils ont des devoirs à faire à ce niveau-là.
Je ne reviendrai pas sur le débat sur l'impératif de maîtriser le français, surtout pour la population nord-africaine qui, très souvent, est handicapée relativement à ce facteur, parce que vous avez nuancé votre propos. Je vous poserai une dernière question. L'enjeu de l'immigration et de l'intégration, vous en conviendrez, est important, pas seulement au Québec, c'est dans tout l'Occident, en Europe, en Amérique du Nord. Mais ce qui est frappant, c'est l'absence, dans ce débat, d'économistes, de démographes, de spécialistes des méthodes quantitatives pour arriver à une évaluation objective des politiques. Et c'est encore plus pertinent pour ce qui nous concerne parce que, jusqu'à présent, nous ne disposons pas de mesure rationnelle, de mesure de référence pour réfléchir rigoureusement. Est-ce que je suis dans le champ quand je fais cette remarque?
Le Président (M. Bernier): M. Leblanc.
M. Leblanc (Michel): Ma formation professionnelle, c'est celle d'être un économiste, donc il m'arrive d'aller dans des colloques d'économistes. Je trouve là beaucoup d'intelligences analytiques sur les immigrants que nous accueillons, les facteurs qui expliquent une meilleure ou une moins bonne intégration. Donc, je vous dirais, je pense qu'il y a un corpus d'information qui permet de bien comprendre les facteurs qui sont susceptibles d'expliquer une meilleure ou une moins bonne intégration.
Vous l'avez dit, puis je l'ai mentionné, la perception que nous avons, c'est qu'une méconnaissance absolue de l'anglais chez un immigrant limite l'accès à certains types d'emploi et le force dans le fond à faire un investissement après son arrivée pour posséder des rudiments d'anglais dans certains types d'emploi, puis des fois c'est plus que des rudiments. Donc là, il y a un enjeu. Puis je pense que ce n'est pas propre à Montréal, c'est probablement partout dans le monde, que quelqu'un qui ne parlerait que finlandais puis qui arriverait à quelque part se ferait bloquer des emplois jusqu'à ce qu'il possède un minimum d'anglais et évidemment un maximum de la langue locale où il irait.
Mais là je reviens à quelque chose, je pense, qui est stimulant dans ce que vous avez dit -- puis je ne l'ai pas vu si le gouvernement l'a fait -- j'ai l'impression qu'il y aurait lieu de faire une analyse ex post sur les critères qui ont mené à la sélection des immigrants, le type d'immigrants qu'on a accueilli et, en fonction des variances dans la réponse à ces critères-là, de voir quels sont les critères qui génèrent des résultats plus ou moins satisfaisants. Il y a probablement, dans notre grille de critères, des choses qu'on a qui font en sorte qu'on se prive de certains types d'immigrants ou qu'on a plus de certains types d'immigrants et qui explique peut-être partiellement une performance inférieure à ce qu'on observe ailleurs.
Je disais tantôt... Nous, on nous dit, par exemple: On devrait accueillir plus de jeunes. Est-ce que le pointage chez les jeunes est assez élevé? Est-ce qu'on devrait accueillir peut-être des jeunes qui ne possèdent pas du tout le français, sachant qu'ils sont plus susceptibles de l'apprendre que des personnes qui ont 55 ans, qui ont peut-être plus de difficulté à apprendre une nouvelle langue à 55 ans? Ce sont des questions comme celles-là. Et là, bien, je laisse au ministère, là, de répondre.
M. Kotto: Je vais vous poser une ultime question. Je note -- vous me corrigerez si je me trompe -- que deux facteurs fondamentaux à vos yeux sont un obstacle pour l'intégration dans le milieu de l'emploi. Est-ce que ce serait, donc, la non-maîtrise des rudiments de l'anglais, d'une part, et, d'autre part, la carence en matière de communication pour aiguiller, pour orienter les immigrants... Est-ce que c'est ce qui justifie le haut taux de chômage, notamment chez les Maghrébins?
Le Président (M. Bernier): M. Leblanc.
M. Leblanc (Michel): Je pense que ce serait réducteur que de ramener ça à deux facteurs comme celui-là. Je pense qu'il... Ce qu'on a comme impression, nous, c'est qu'un facteur comme la reconnaissance des diplômes... À Montréal, quiconque prend un taxi et parle à son chauffeur de taxi s'aperçoit que son chauffeur de taxi a une formation et une expérience dans son pays bien au-delà de celles que requiert d'être un chauffeur de taxi. C'est assez standard. Ce que ça révèle à ce moment-là, c'est que ces personnes qui ont peut-être été sans emploi pendant un bout de temps ont fini par se raccrocher à un emploi qu'elles ont accepté pour gagner leur vie, pour envoyer leurs enfants à l'école ou simplement par fierté et par volonté de contribuer à la collectivité. C'est ça qu'on observe.
Donc, moi, je pense que, collectivement, dans le passé, on a péché en ne reconnaissant pas nécessairement la compétence des gens qu'on accueillait, qu'on avait souvent sélectionnés sur la base de ces compétences-là, et puis ça a entraîné chez ces gens une période de déstabilisation où ils n'acceptaient pas de prendre un emploi bien en deçà de ce qu'ils avaient rêvé de faire, et ils se retrouvaient dans une communauté où ça a pris un certain temps avant qu'ils se raccrochent. Et, pendant ce temps-là, bien, ils ont été chômeurs, et ça rentre dans nos statistiques. Donc, moi, j'ai vraiment l'impression que là, collectivement, on paie encore pour certaines erreurs du passé, une rigidité de notre marché du travail du passé.
Moi, je pense que les accords qu'on fait, comme celui qu'on a fait avec la France, sont très prometteurs. Dans la mesure où on pense qu'à l'autre bout ils sont compétents pour former leurs gens et qu'ils offrent des diplômes à des gens compétents, on devrait -- la moindre des choses -- se fier à cette compétence-là dans l'octroi des diplômes là-bas pour le reconnaître ici et vice-versa. Donc, je pense que c'est réducteur, mais c'est des facteurs qui sont importants. Et je pense que la communication est quelque chose qu'on peut grandement améliorer.
Le Président (M. Bernier): Merci. Oui?
M. Kotto: Et le facteur culturel, où est-ce que vous le situez? Parce que, parfois, il fait problème.
M. Leblanc (Michel): C'est délicat. Je parlais tantôt d'économistes. Moi, j'ai lu une étude d'économistes qui disait qu'on a tendance à accueillir des immigrants, ici, provenant de zones où le taux de chômage est plus élevé et le taux d'entrepreneuriat est plus faible, et ce qui voudrait dire qu'on accueille des gens qui viennent de bassins culturels qui sont moins susceptibles d'être intégrés en emploi que d'autres endroits sur la planète et qu'on se compare à des lieux... Et là c'est délicat parce que tout de suite on tombe dans des conditions raciales, tout de suite on peut se faire taxer d'avoir une vision raciste de l'immigrant. La réalité, semble-t-il, c'est que culturellement l'attitude par rapport au marché du travail est un facteur important au départ.
Ensuite, les différences culturelles au sens de la diversité, pour moi, ce que j'en perçois, c'est que c'est considéré comme étant un plus de la part des entreprises. Les entreprises, du point de vue de la région métropolitaine et du point de vue de l'île de Montréal, se sont confrontées, depuis maintenant des décennies ou au moins une bonne dizaine d'années, à des talents provenant de partout sur la planète et, dans bien des cas, voient ça comme étant un avantage, un avantage linguistique, un avantage de compréhension culturelle, souvent de compréhension des marchés où des employés dans d'autres lieux de travail, donc c'est vu comme étant une force, la diversité culturelle. Mais l'autre facteur, c'est dans la provenance des immigrants, leur bagage culturel par rapport à l'attitude sur le marché du travail, l'intégration au marché du travail. Il y a sûrement là des choses à analyser.
Le Président (M. Bernier): Merci. M. le député de Deux-Montagnes.
M. Charette: Merci, M. le Président. Mesdames monsieur, merci pour votre présence ce matin. Je viens tout juste de lire le communiqué de presse que la chambre a diffusé, là, suite à son passage devant nous. Ça reprend essentiellement les grandes lignes de votre allocution. À la fin d'un paragraphe, on peut lire ce que vous avez dit également: «augmenter à long terme le volume d'immigrants». La question des volumes, lorsqu'il est question d'intégration, c'est une question qui est fondamentale. Lorsque vous dites «à long terme», est-ce que vous avez pu identifier un scénario de hausse? Est-ce que -- je vous pose la question également -- compte tenu des différentes difficultés que vous avez évoquées vous-même, peut-être un manque de ressources, vous parliez du bureau en Asie, peut-être certaines difficultés au niveau de la sélection elle-même, pour ce qui est du profil des immigrants, des difficultés reliées également à la reconnaissance des diplômes, donc compte tenu de ces difficultés-là, est-ce qu'on pourrait envisager une hausse après seulement avoir corrigé ces différentes lacunes là? Est-ce qu'on pourrait envisager, même, dans un premier temps, de faire un pas en arrière, c'est-à-dire, peut-être pour une année ou deux, diminuer les volumes, histoire de bien régulariser la situation, et ensuite y aller avec un scénario de hausse?
Le Président (M. Bernier): M. Leblanc.
M. Leblanc (Michel): Notre réponse à ça, c'est qu'on doit faire les deux. Nous ne préconisons pas de faire ce recul ou même cette pause. On pense qu'on a la compétence, si on s'y attelle, pour améliorer nos processus d'intégration, évaluer ce qu'on a fait correctement ou pas correctement soit dans la sélection soit dans l'intégration, et corriger ces choses en ne réduisant pas le nombre d'immigrants que nous recevons.
Le signal, en réduisant, est un signal de frilosité, est un signal de frilosité par rapport au marché de l'immigrant international. Ce qu'on veut lancer comme signal, du point de vue de Montréal: Le Québec a besoin des talents, venez, et on n'est pas en train de réduire, on n'est pas en train de requestionner, on est en train d'améliorer comment on va vous intégrer puis comment on va reconnaître vos compétences. C'est le signal qu'on pense qu'on doit lancer présentement pour maintenir le dynamisme, et tenir compte qu'en avant de nous, là, notre premier problème du point de vue de nos entreprises, c'est l'accessibilité, la disponibilité du talent pour la croissance de nos entreprises.
Le Président (M. Bernier): Merci, M. Leblanc, Mme Berechid, Mme Veilleux, merci de votre participation à cette commission.
Nous allons suspendre nos travaux pour quelques instants afin de permettre à la Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec de prendre place. Merci.
(Suspension de la séance à 10 h 40)
(Reprise à 10 h 44)
Le Président (M. Bernier): Nous allons reprendre nos travaux. Donc, nous avons le plaisir, ce matin, d'accueillir la Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec représentée par son président, M. Michel Arsenault. Bienvenue, M. Arsenault...
M. Arsenault (Michel): Merci, M. le Président.
Le Président (M. Bernier): ...Mme Monique Côté et M. David Maden, qui vous accompagnent. Donc, vous avez une période de 15 minutes pour nous faire votre exposé et, par la suite, des échanges de 20 minutes avec les groupes parlementaires. La parole est à vous, M. Arsenault.
Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec (FTQ)
M. Arsenault (Michel): Merci, M. le Président. Mme la ministre, MM., Mmes les députés, bonjour. Écoutez, à la FTQ, on est, bien sûr, heureux puis fiers de participer à cette commission, amener humblement notre point de vue sur la planification de l'immigration au Québec pour la période 2012-1015.
Je suis accompagné, comme vous l'avez dit, M. le Président, de Monique Côté, Monique Côté est vice-présidente de la FTQ, mais elle est également présidente des employés de bureau de la ville de Montréal, une section locale de plus de 10 000 membres; et David Maden, qui est un conseiller syndical à la FTQ qui s'occupe spécifiquement de l'immigration et de notre comité d'aide aux personnes immigrantes.
La FTQ, c'est 600 000 membres au Québec, c'est la plus grosse centrale syndicale. C'est 41 différents syndicats affiliés. On est présents partout au Québec. 40 % de notre membership travaille dans le secteur public, 60 % dans le secteur privé. Depuis quelques années, 35 % de notre membership a moins de 35 ans d'âge, comme un renouveau bénéfique. Et le tiers de nos membres sont des femmes.
Depuis 2004, on a également un comité permanent sur l'intégration des personnes immigrantes en milieu de travail, et Monique Côté en est la responsable politique pour le bureau de la FTQ. On fait, annuellement, une journée de réflexion sur la situation des immigrants et des immigrantes au travail à la FTQ, et on fait également des réflexions régionales. Comme je vous l'ai dit, on est présents dans toutes les régions du Québec. Et je peux vous dire qu'on regrette la disparition du Conseil des relations interculturelles, qui a disparu au mois de février dernier. C'était, pour nous et pour plusieurs autres, un lieu de réflexion pour conseiller le gouvernement du Québec en matière d'immigration.
On va traiter, aujourd'hui, avec vous: de l'immigration temporaire; de la lutte contre la discrimination, l'information, la formation de la population sur l'apport de l'immigration; de l'État en tant qu'employeur exemplaire en matière d'embauche des personnes immigrantes; la reconnaissance des acquis et des compétences; la reconnaissance du français chez les candidats de la catégorie des travailleurs qualifiés.
Je voudrais, en début, avant de passer la parole à Monique et à David, vous parler un peu de la reconnaissance des acquis. Vous avez sûrement vu, dans notre mémoire, qu'on salue l'entente entre la France et le Québec, une entente qui fait en sorte qu'on reconnaît les acquis des immigrants français. Malheureusement, de l'autre côté, l'immigration française, c'est 7,1 % de l'ensemble de l'immigration du Québec. Vous avez probablement vu à la page 7 de notre document, on souhaite mettre de l'avant... on souhaiterait qu'on mette de l'avant un cadre législatif en matière des reconnaissances des acquis, comme ça a été fait dans divers pays de la Communauté européenne. On pense que ça doit viser une harmonisation des formations, des processus des reconnaissances des acquis, incluant le niveau universitaire, ce qu'on ne trouve pas. Développer un guichet unique. Vous savez, c'est tellement... Même les Québécois de souche des fois en perdent leur latin à aller d'un ministère à l'autre. Quand tu es immigrant, c'est encore plus difficile, j'imagine, parce que tu arrives dans une nouvelle structure gouvernementale. Donc, s'il y avait un guichet unique, ça faciliterait le processus de la reconnaissance des acquis. Et on pense aussi qu'on devrait accorder un financement permettant de répondre adéquatement aux défis dans ce domaine.
Je vous dirais que le président de la chambre de commerce a un peu volé mon punch tout à l'heure en disant qu'il trouvait ça fort triste de voir des chauffeurs de taxi à Montréal. Je ne voudrais surtout pas mépriser le travail de conduire un taxi, mais, quand tu es ingénieur électricien... Il y a quelques semaines, j'ai pris un taxi, et le chauffeur de taxi me confiait que, dans son pays, en Égypte, il était ingénieur électricien. Je trouve ça triste un peu que cette personne-là ne puisse pas travailler comme ingénieur électricien ou dans le domaine électrique.
Je peux vous dire qu'à la FTQ, au local 800, l'Union des employés de service à la FTQ, c'est eux qui négocient le décret dans l'entretien ménager, et vous seriez surpris et surprises de voir le nombre de personnes qui travaillent dans l'entretien ménager, au Québec, qui ont des diplômes universitaires. Et ça, il me semble, humblement, là, qu'on devrait trouver une façon de reconnaître les qualifications de ces gens-là et de faire en sorte qu'ils puissent travailler dans les domaines pour lesquels ils ont étudié puis ils sont qualifiés.
Je vais passer la parole à Monique et, ensuite, à David pour parler, entre autres, de la proportion que représente chacun des grands bassins géographiques.
**(10 h 50)**Mme Côté (Monique): Oui. Alors, bonjour à tous. Merci de nous accueillir. Je devais vous parler, premièrement, justement, de chacun des bassins géographiques, mais on est heureux de constater, Mme la ministre, qu'en fait vous avez accédé à notre première revendication. Alors, on espère que vous allez en faire autant pour ce qu'il y a dans le reste du document. Alors, je vais vous parler plutôt de l'immigration temporaire, donc les visas un, deux ou trois ans.
Dans la planification proposée, le ministère a envisagé un scénario qui prévoit une diminution du volume d'immigration et selon les besoins du marché du travail, comme par exemple en augmentant le niveau de connaissance du français chez les travailleurs. Bon, on a constaté qu'en 2010 il y a environ 34 000 personnes qui séjournaient avec un permis de travail temporaire au Québec, et ça, c'est une augmentation de 61,7 % par rapport aux 21 000 personnes en 2006. On sait que, même, il y a certains de ces travailleurs temporaires là qui deviennent des résidents permanents après qu'ils aient fait les démarches, mais on pense que la proportion demeure quand même faible.
Et la tendance, malheureusement, est à la hausse du nombre de permis temporaires qui sont accordés par le ministère, et ça, ça nous inquiète, parce que le ministère vise une diminution globale du nombre d'immigrants permanents à recruter au cours des trois prochaines années. Le récent assouplissement du Règlement sur la sélection des ressortissants étrangers, ça facilite la démarche pour les employeurs qui souhaitent recruter des travailleurs temporaires. De plus, la non-réglementation des agences de placement, dont le nombre augmente, accélère aussi cette tendance-là.
Alors, l'augmentation du nombre de permis de travail temporaires a également donné lieu à une augmentation des cas d'abus et des violations des droits auxquels les travailleurs étrangers temporaires sont exposés. Dans bien des cas, ces travailleurs n'ont accès à aucun mécanisme de protection ou de représentation. Alors, on insiste sur ce point-là, on veut réitérer notre revendication pour qu'il y ait un encadrement beaucoup plus strict des agences de placement, et tout particulièrement des agences de placement des travailleurs étrangers temporaires, qui soit mis en place.
L'immigration temporaire, on sait que ça répond aux pénuries temporaires de main-d'oeuvre seulement. Cependant, cette catégorie d'immigration ne répond pas aux objectifs que vous visez à long terme, notamment le dynamisme démographique, la vitalité du français est une autre des choses aussi.
Le processus d'attribution des permis de travail temporaires doit faire l'objet d'un vaste processus de consultation et ça doit vraiment intégrer la politique d'immigration, qui vise plus une immigration permanente, et avec des critères plus particuliers pour les immigrants permanents.
Un autre des volets qu'on trouve important aussi, c'est l'État en tant qu'employeur exemplaire en matière d'embauche des personnes immigrantes. Il y a ici la Loi d'accès à l'égalité en emploi dans les organismes publics. Nous, ce qu'on dit, c'est que ça vise des nobles objectifs, mais elle n'apporte pas les résultats que l'on s'attend. Avec le faible taux de remplacement lors des départs dans la fonction publique, le gouvernement ne devient pas l'exemple à suivre, pour l'ensemble des employeurs, pour atteindre cet objectif-là.
Je pourrais aussi vous parler de Montréal, parce que j'y suis, à Montréal, depuis plusieurs années. Malgré que le service central ait des bonnes intentions au niveau de la Loi d'accès à l'égalité, ils ont mis en place une politique... Vous connaissez la structure de la ville présentement, on se retrouve dans... et on appelle ça, maintenant, des unités d'affaires, les arrondissements. Donc, compte tenu qu'ils ont une autonomie complète par rapport à ce qui leur est suggéré par le service central, on ne voit pas les résultats de la loi d'accès à l'information, pour cette raison-là mais aussi parce que cette loi-là, à notre avis, elle n'a pas assez de dents, je le dirais comme ça. Il faudrait soit qu'il y ait des incitatifs intéressants pour que les unités d'affaires ou les organisations embarquent dedans et il faudrait aussi soit qu'il y ait des incitatifs ou encore qu'il y ait des obligations de résultat, ce qu'on ne voit pas dans la loi présentement.
Dernière chose sur laquelle j'aimerais peut-être insister, c'est l'augmentation du niveau de connaissance du français chez les candidats de la catégorie des travailleurs qualifiés. Nous, on croit qu'il y a un manque d'affirmation politique envers l'importance de la langue française au Québec, et ça, ça augmente l'incertitude des immigrants en ce qui concerne l'adoption de notre langue. La connaissance du français, c'est une porte d'entrée qui est privilégiée dans la société québécoise, et il faut la valoriser plus qu'elle ne l'est là.
Sans vous lire ce qu'on a écrit -- de toute façon, je suis sûre que vous l'avez lu -- j'aimerais quand même terminer là-dessus en vous disant que, moi, de mon expérience... J'ai travaillé pendant 20 ans à Emploi-Québec et, jusqu'en 2000, la première chose qu'on faisait quand on recevait les personnes, les nouveaux arrivants, c'était de les inscrire à des cours de français via les COFI, et c'était une obligation pour aller chercher de l'aide à l'aide sociale. Mais c'était aussi... On les amenait à comprendre que c'était primordial d'apprendre le français quand on rentre au Québec.
Malheureusement, je crois que c'est en 2000 ou en 2001, les COFI ont été abolis, et ce qu'on me dit, à l'heure actuelle, à Emploi-Québec, parce qu'on a quand même encore 500 travailleurs, travailleuses qui sont là, c'est que maintenant Emploi-Québec ne subventionne plus les cours de français. C'est un volet qui a été remis aux organismes communautaires. Bien, il n'y a plus de concertation entre les gens qui sont à l'immigration, les gens qui sont à l'aide sociale pour l'entrée des nouveaux arrivants, les organismes communautaires. Et ça, on trouve ça vraiment très déplorable, parce qu'à notre avis c'était une mesure qui était fort importante et sur laquelle on devrait mettre beaucoup plus l'accent à l'heure actuelle.
Le Président (M. Bernier): Merci, Mme Côté.
M. Maden (David): Merci, avant tout, de votre présence et de nous permettre d'être ici. Au-delà de la question de reconnaissance des acquis et compétences, la planification de l'immigration, comme on a entendu, l'accès à l'égalité à l'emploi, francisation ou autre, il y a un élément, mais pas moindre, c'est la lutte contre la désinformation, les préjugés et la discrimination.
Tout au long de ce processus, on parle de l'intégration. L'intégration, à l'opposé de l'assimilation, sous-entend une réciprocité, réciprocité entre les personnes nouvellement arrivées et le milieu d'accueil. Au cours des dernières années, un travail a été fait de la part du gouvernement pour donner la formation aux personnes immigrantes aux termes des valeurs communes à nos sociétés mais aussi valoriser la diversité. Pour commencer, on peut le constater, ce plan-là mise davantage sur l'engagement, de la part des personnes immigrantes, sur le respect des engagements de la valeur commune de notre société. Mais, au-delà de ça, lorsque les personnes immigrantes, ils ont rempli leurs obligations, qu'est-ce qu'ils sont en droit de s'attendre en contrepartie? Quand on parle de réciprocité, on parle de permettre à ces personnes à participer et contribuer de façon active au développement de notre société et notre économie. Comme on peut voir au niveau des chiffres, les personnes immigrantes ne sont pas forcément les personnes qui sont les plus actives sur le marché, surtout les personnes nouvellement arrivées, le taux de chômage, il est là pour en donner la preuve.
Mais, au-delà de ça, on constate que, suite à l'enquête qu'Angus Reid nous a faite en 2010, plus d'un tiers de la population québécoise considère l'immigration de manière négative. Cette perception ne pourra être modifiée que si la population en général a la connaissance, est capable de mesurer l'apport, évaluer l'apport de l'immigration pour l'ensemble de notre société. Il y a d'autres pays, pour ne pas les nommer, les États-Unis ou l'Australie, ils ont été capables de faire des recherches pour justement évaluer quel est l'apport de cette immigration pour la société, en termes économiques principalement, parce que c'est une des raisons premières pour lesquelles on accueille, on recrute ces personne immigrantes. Québec, après de nombreuses années d'accueil de personnes immigrantes, devrait être en mesure de le faire, évaluer qu'est-ce que ça a apporté au fil des années pour la société, pour l'économie, l'arrivée de l'immigration.
Pour contrer cette désinformation, c'est certaines parties qui reviennent au gouvernement de faire, de un, les preuves, de deux, de le démontrer et le diffuser. C'est ce qui permet de contrer la désinformation que subit la population en général, qui, bien souvent, est attisée par la médiatisation des cas isolés ou anecdotiques dans les médias. Écoutez, il ne faut pas oublier qu'on accueille au-delà de 50 000 immigrants par année. On entend, dans les médias, quelques cas d'exception, mais la population en général, ce qu'elle retient, c'est davantage ces quelques cas d'exception que l'ensemble de l'apport de l'immigration.
Dans la mesure que le gouvernement soit capable de démontrer sa capacité à assurer les ressources nécessaires en intégration des personnes immigrantes, la FTQ appuie la planification 2012-2015. Ce que ça sous-entend aussi: qu'il devrait y avoir un plan d'attribution des ressources à l'intégration des personnes immigrantes tenant compte aussi des travailleurs et travailleuses temporaires, de la réglementation des agences de placement, comme on avait dit tout à l'heure, et qui devrait être mis de l'avant avant même le dépôt, la mise en avant de la planification comme telle.
De plus, la FTQ, aussi, recommande que les mesures soient mises en place pour assurer le respect des droits des travailleurs et travailleuses temporaires. Nombreux cas ont été démontrés qu'ils sont victimes d'abus parce qu'ils ne sont pas représentés, parce qu'ils ne connaissent pas le français, parce qu'ils n'ont pas connaissance forcément des lois et leurs droits.
**(11 heures)**Le Président (M. Bernier): Excusez, M. Maden, je vous inviterais à conclure, s'il vous plaît, pour qu'on puisse débuter les échanges avec les parlementaires. Je vous donne environ une minute pour conclure.
M. Maden (David): Donc, aussi, on considère, comme on avait dit tantôt, que le gouvernement devrait appliquer la Loi sur l'accès à l'égalité en emploi dans toutes ses instances, qu'elle ne devienne pas juste une loi d'apparence mais qu'elle soit vraiment appliquée à tous les niveaux. De plus, le gouvernement, il devrait aussi exiger, à toute entreprise ou organisation qui bénéficie de subventions ou avec qui il transige, l'application de cette loi, ça veut dire la Loi de l'accès à l'égalité en emploi, en tant que condition à respecter lors des offres d'appel, des demandes de subvention ou toute autre forme de financement, direct ou indirect. Ce serait une mesure qui rendrait cette loi beaucoup plus efficace. Vous savez, lorsqu'on finance, lorsqu'on paie, on peut mettre des conditions. Le gouvernement a le pouvoir de le faire. Merci.
Le Président (M. Bernier): Merci. Nous allons débuter nos échanges. Donc, Mme la ministre, la parole est à vous.
Mme Weil: Oui. Alors, merci, merci beaucoup de votre présence. Je vais vous poser certaines questions, évidemment plus précisément sur les orientations, et je vous poserai ensuite les... ou des commentaires et des questions sur quelques points précis que vous avez soulevés.
Bon, vous êtes préoccupés par la question de la connaissance du français, et, nous, on propose deux orientations qui vont dans le sens de préserver, si vous voulez, le fait français ici, au Québec. Est-ce que vous êtes d'accord, donc, de maintenir majoritaire la proportion de personnes connaissant le français? Vous savez que, depuis 20 ans, on est passés d'à peu près... un peu en dessous de 40 % qui connaissaient le français, on est rendus à entre 60 % et 65 % qui connaissent le français. Donc, il y a eu vraiment des progrès dans ce sens-là. Alors, on voulait savoir si vous êtes d'accord. Je présume que vous êtes d'accord avec cette orientation... pour l'enregistrement.
M. Arsenault (Michel): On ne peut pas être contre la vertu, Mme la ministre, on ne peut pas être contre la vertu. Effectivement, je veux dire, vous...
Mme Weil: Parce que, nous, éventuellement, évidemment, pour le ministère de l'Immigration, on a vraiment besoin de savoir quels sont les points où on a l'adhésion des groupes, et, vous, évidemment, vous êtes dans un secteur extrêmement important. Est-ce que l'idée, aussi, de porter à 50 %... Ensuite, il y a de rehausser la connaissance de la compétence en français. Ça, c'est une nouvelle orientation. Donc, on veut s'assurer que les gens, quand ils disent qu'ils connaissent le français, ils connaissent le français vraiment, d'évaluer la maîtrise de la langue.
Le Président (M. Bernier): M. Arsenault.
M. Arsenault (Michel): Bien, ça va de soi. Vous connaissez les positions de la FTQ sur le français comme langue de travail. Mais en même temps on est conscients que, le Québec, on est 8 millions en Amérique du Nord, là, on n'est pas une île dans le milieu du Pacifique ou de l'Atlantique -- malheureusement, on n'est pas dans le Pacifique, avec nos hivers. Puis on est entourés d'une mer d'anglophones, puis avec la mondialisation des marchés, etc., je veux dire, ce n'est pas une tache de maîtriser la langue anglaise, là, au contraire.
Et ce qu'on déplore, puis c'est ce que Monique a tenté d'expliquer tout à l'heure... Il fut un temps, avant l'an 2000, par exemple, un immigrant qui arrivait au Québec... Premièrement, moi, je pense... on pense qu'un immigrant qui s'en vient au Québec il faut que ça lui soit expliqué avant qu'il mette le pied ici, là, que ça se passe en français puis que la langue de travail, c'est le français, surtout à ceux qui ne maîtrisent pas, qui ne parlent pas le français. Mais ce qu'on faisait à une époque, à l'époque des COFI, c'est que ces gens-là, ils ont une aide gouvernementale. Puis, Monique l'a expliqué, puis David aussi après, lorsqu'on paie, on peut avoir des exigences. Il fut une époque au Québec, un nouvel arrivant qui ne maîtrisait pas le français, on l'orientait vers l'étude du français pour apprendre un français, là, acceptable, un français de base, et, s'il n'y allait pas, bien, il n'avait pas l'aide gouvernementale.
Mme Weil: ...revenir sur cette question, M. le Président, parce que, je pense, il y a beaucoup de corrections à amener dans votre perception de la réalité. Il y a eu un renforcement extraordinaire au niveau du ministère de l'Immigration, des Communautés culturelles sur l'offre en francisation, beaucoup plus variée, beaucoup plus efficace. Et là c'est vraiment l'approche avant, pendant, après. Les COFI, c'était perçu comme très cloisonné. Là, on a éclaté ça pour que les gens qui arrivent, qui sont scolarisés -- parce que là on a des gens qui arrivent très scolarisés, il y a eu une évolution dans le profil des immigrants qu'on va chercher -- ils soient dans des milieux aptes, appropriés pour leur niveau. Donc, on a des partenariats avec les cégeps, les écoles, les collèges et, donc, les universités. Donc, c'est beaucoup plus dynamique actuellement.
Et nous répondons actuellement à la demande de service en francisation. Il n'y a pas de délai d'attente. C'est une question de journée avant que la personne... C'est 38 jours avant que la personne puisse avoir une réponse à sa demande. On offre des cours de francisation en ligne. On a des partenariats avec des alliances françaises partout dans le monde. Et là ce qui arrive, c'est que les gens reçoivent leurs certificats de sélection, ils commencent déjà leur parcours pour peaufiner, dépendant de leur niveau, parce qu'il y a plusieurs niveaux... Lorsqu'ils arrivent, donc, ils ont réussi à avoir un niveau de compétence plus élevé, et ensuite ils continuent leur parcours en francisation.
Le cours de francisation en ligne a gagné des prix, des prix pour la qualité de ce cours-là par l'offre. Et je vous dirais que c'est une innovation qui en fait, des jaloux, et il y a d'autres juridictions qui regardent... Parce que la question de la langue et de la maîtrise de la langue, ce n'est pas juste le Québec qui vit ça, les juridictions anglophones vivent la même chose. Et, eux aussi, ils ont des problèmes, bon, des fois les gens ne maîtrisent pas. Et, je vous dis, il y a d'autres provinces qui regardent... le fédéral qui regarde ce qu'on a développé parce qu'il trouve ça très intéressant comme outil, la francisation en ligne.
Par ailleurs, par ailleurs, vous avez entendu le commentaire, peut-être, de la chambre de commerce avant. Ce qui arrive, c'est que le message est tellement fort que c'est français ici que les gens ne se rendent pas compte qu'il y a certaines entreprises... Et c'est Michel Leblanc qui l'a dit. Ils sont francophones, il y en a beaucoup qui sont francophones qui viennent -- le bassin du Maghreb, c'est des gens avec une compétence extraordinaire en français, qui maîtrisent le français -- mais là ils apprennent que peut-être l'anglais, c'est utile aussi. Donc, moi, je vous dirais que la perception, les gens que je rencontre, c'est plus l'inverse. C'est qu'ils ont très bien compris que c'est le français ici, puis là, ah! il y a plus d'anglais, peut-être, et que certaines entreprises... En tout cas, on a eu cette discussion, cet échange, c'est la chambre de commerce qui dit ça.
Alors, je tenais quand même à corriger le portrait parce que... On a même créé une direction générale de la francisation au ministère de l'Immigration -- parce que c'était très éparpillé -- en 2004 pour vraiment démontrer cette volonté d'être très stratégique, efficace, efficient, en francisation, pour adapter l'offre. Il y a maintenant aussi la francisation au sein des entreprises. On a des partenariats avec les chambres de commerce, parce qu'on sait... On travaille très fort pour s'assurer que la langue commune soit le français. Comme vous le savez, on travaille aussi... Moi, je siège à cette table où tous les partenaires socioéconomiques y sont pour s'assurer que, le message dans nos actions, nos politiques, très concrètement, la langue du travail soit le français.
Et les entreprises offrent des cours de francisation qui sont... bien, c'est le MICC, mais au sein des entreprises, et on a une bonne réponse à ça -- mais, moi, je pense qu'il faut aller plus loin encore -- parce que là ça permet à la personne de vraiment apprendre le lexique qui correspond à ses besoins au sein de cette entreprise. Alors, moi, je pense que c'est important de rectifier le tir.
Mais j'aimerais vous poser une autre question, sur...
M. Arsenault (Michel): ...réagir sur ce que vous me... si c'est permis, là.
Le Président (M. Bernier): Oui, allez-y, M. Arsenault.
Mme Weil: Non, bien, j'ai bien entendu vos commentaires. On en a parlé deux fois...
Le Président (M. Bernier): Allez.
Mme Weil: ...mais j'ai d'autres questions importantes aussi.
Le Président (M. Bernier): Oui, oui. Si vous voulez réagir. Par la suite, on va...
Mme Weil: Mais j'ai bien compris vos arguments. Vous avez bien étayé ça dans votre document.
**(11 h 10)**Mme Côté (Monique): Peut-être juste un petit commentaire, si vous me permettez, Mme la ministre. C'est qu'on est convaincus... Et vous l'avez dit à quelques reprises, là, au niveau de la qualité des cours de français, là. Tant mieux, et on est très contents de ça, là, s'il y a vraiment eu une bonification à ce niveau-là, par rapport à l'exemple qu'on vous donnait des COFI. Nous, ce qu'on a constaté et ce qu'on nous dit ici, c'est qu'il y a quand même eu beaucoup de coupures de cours de français. Emploi-Québec ne les offre plus.
Et là où on a un problème, c'est au niveau de l'obligation d'apprendre le français. Parce que, quand on arrive à Montréal... Je vais vous donner l'exemple que je connais des nouveaux arrivants. Quand ils arrivent à Montréal, oui, ils savent que c'est... la langue, c'est le français, la langue de travail. Mais beaucoup savent aussi que, dans la région métropolitaine, même s'ils ne parlent pas le français, ils vont très bien pouvoir travailler et ils vont être capables de s'adapter à Montréal sans avoir besoin de parler cette langue-là. Et c'est de là, nous, qu'on voit l'importance et l'intérêt qu'avait Emploi-Québec, à l'époque, d'inscrire ces nouveaux arrivants là qui ne parlent pas français tout de suite à l'entrée au Québec. Parce que, si on ne les inscrit pas lors de leur entrée au Québec, ils commencent à travailler, ils n'ont plus de disponibilité, ils n'ont plus le temps de suivre des cours de français, et, pire que ça, ils réalisent qu'ils n'en ont pas besoin, du français, à moins d'aller en région. Et c'est sur cet aspect-là que, nous, on voulait insister.
Et ça ne veut pas dire que les cours ne se sont pas améliorés, tant mieux si c'est ça. Il y a sûrement des améliorations qu'il y avait à faire au niveau des COFI, mais il reste qu'à partir du moment où tu n'intègres pas la langue de la province...
Une voix: ...
Mme Côté (Monique): ...la langue directrice -- merci, Michel -- à l'entrée, il y a un gros risque que tu ne l'intégreras pas, particulièrement si tu restes à Montréal.
Le Président (M. Bernier): Merci, Mme Côté. Mme la ministre.
Mme Weil: Donc, vous êtes d'accord avec les deux orientations qui touchent à la langue, c'est ça qui est important pour nous. Et évidemment, toutes les façons qu'on peut faire pour continuer à livrer ce message, nous... Comme je vous dis, on le lance avant, pendant, après. Mais c'est un travail continuel, hein, cette histoire. Et je pense que l'important, c'est d'avoir l'adhésion, donc, à ces deux orientations qui... On reçoit, pour l'instant, je vous dirais, une adhésion très forte à ces deux orientations parce que... Ça dénote à quel point c'est important pour tout le monde, pour tous les acteurs que cette question de la pérennité du fait français.
Sur la question des volumes, alors là, nous, on propose une stabilisation des volumes pour arriver, en 2014, à 50 000. Je réitère souvent que c'est quand même des volumes importants. On avait la Chambre de commerce de Montréal métropolitain, avant vous, qui disait: Non, on devrait viser 65 000, il faut continuer avec les volumes. Généralement, généralement, les gens semblent être d'accord. Mais j'aimerais vous entendre sur cette question de volume. Évidemment, l'idée, ici, c'est de bien travailler l'intégration, de s'assurer que les mesures qu'on a mises en branle depuis juste les dernières années portent fruit, réellement portent fruit. Le taux de chômage est encore plus élevé chez les immigrants que chez les natifs. Ça nous donne une certaine pause, mais on maintient nos investissements dans ces efforts. Ça ne veut pas dire que c'est pour toujours, mais juste stabiliser, au lieu d'aller en croissance. Est-ce que vous êtes d'accord avec cette orientation?
Le Président (M. Bernier): Merci. M. Arsenault.
M. Arsenault (Michel): Oui. Les volumes, c'est toujours proportionnel à la demande. Puis, nous autres, ce qui est important, c'est les ressources qu'on met pour favoriser l'intégration. Ça, c'est fort important. Et j'écoutais les intervenants, tout à l'heure, qui parlaient, entre autres, du Plan Nord, et je pense que c'est vous autres, aussi, qui en avez parlé. Vous savez, moi, j'ai vécu plusieurs années à Sept-Îles et sur la Côte-Nord, et, à la fin des années cinquante, on a eu une vaste immigration italienne, qui sont encore là, qui ont pris racine et qui se sont intégrés de façon exemplaire à la société québécoise. Et, dans les années soixante-dix, on a eu une vaste immigration portugaise, aussi, sur la Côte-Nord, Gagnon, Fermont. Même, à Gagnon, lorsqu'on a fermé la ville de Gagnon, le maire de Gagnon, c'était René Couacou, qui était un Haïtien. Je veux dire, ça veut dire que tu avais une intégration quand même importante. C'était le seul Haïtien, le seul noir à Gagnon, puis il a été élu maire avec l'opposition, ça fait que... Il y avait une acceptation là puis une intégration extraordinaire.
Et on va devoir, je crois, avec le Plan Nord, si ce qu'on nous promet, ce qu'on projette... les milliards de dollars, ça va créer énormément d'emplois. Et c'est clair dans notre esprit FTQ qu'il va falloir avoir recours à l'immigration pour combler ces postes-là, une immigration qualifiée. Mais en même temps il va falloir avoir les ressources nécessaires pour favoriser l'intégration de ces gens-là. Parce qu'un immigré... un immigrant, excusez-moi, qui arrive à Montréal, il a déjà une communauté, tout ça. Un immigrant à qui on offre d'aller en région, s'il n'a pas de point de repère puis il n'a pas de ressource pour favoriser l'intégration, souvent il va refuser, même si c'est un emploi plus rémunéré ou plus avantageux à Sept-Îles, ou à Noranda, ou à la Baie James, etc. Ça fait qu'il va falloir...
Pour répondre à votre question, vos 500 000, nous autres, ce qui importe, c'est les ressources pour favoriser l'intégration. Et, si le besoin est là... Je pense que d'en faire venir, des immigrants, ici, lorsqu'il n'y a pas d'ouvrage, bien... Mais là, avec la pénurie de travailleurs, travailleuses qui s'en vient, avec le fait que les gens de ma génération vont prendre leur retraite -- ce n'est pas mon cas, mais c'est le cas de plusieurs de mon âge, les baby-boomers -- il va falloir avoir une politique puis une favorisation à l'intégration, puis, comme on le dit depuis le début, là, favoriser... pas favoriser, faire comprendre à ces gens-là que la langue de travail, c'est le français.
Le Président (M. Bernier): M. le député de Vimont, vous avez une question?
M. Auclair: Oui, rapidement. Bonjour à vous trois. Écoutez, merci d'être là. C'est important de voir que la Fédération des travailleurs du Québec est présente.
Bon, vous avez un intérêt à ce que les gens... les nouveaux arrivants s'intègrent. Moi, j'aimerais voir... Parce qu'hier on a reçu des groupes, on a reçu, entre autres, le CAMO, qui est un groupe qui fait justement de l'intégration, qui travaille fort, puis le CAMO relatait certaines procédures, nouvelles politiques ou des gestes qui sont posés par le gouvernement du Québec. Le CAMO a relevé surtout un élément très important: pour que les nouveaux arrivants puissent s'intégrer, il faut qu'ils aient des emplois, il faut que les jeunes voient aussi le futur et voient l'avenir d'un bon oeil.
Qu'est-ce que la FTQ, comme joueur social, pose comme gestes pour justement s'assurer que, dans les corps de métier et autres endroits, la francisation, le fait... pas juste le fait français -- je vais regarder dans l'ensemble de l'oeuvre -- tous les nouveaux arrivants puissent faire partie... et justement s'assurer, comme vous avez dit, que, les baby-boomers, quand ils vont prendre leur retraite, on va avoir les moyens de payer ces retraites-là? Donc, il faut des gens qui travaillent, il faut payer vos fonds de pension. Donc, c'est important de s'assurer que ces nouveaux arrivants là travaillent et soient intégrés. Est-ce que la FTQ... Dans les petites, moyennes entreprises, c'est quoi, les gestes que vous posez, vous, comme acteur social, pour aider le gouvernement à arriver à atteindre ses objectifs?
Le Président (M. Bernier): M. Arsenault.
M. Arsenault (Michel): Bon, écoutez, on a des moyens limités. Et, comme je le disais d'entrée de jeu, on a un service à la FTQ pour aider les personnes immigrantes qui sont membres de la FTQ. Dans la grande entreprise, c'est un peu plus facile. Et on fait des belles choses. Je regarde juste au niveau de la francisation, des syndicats français sont venus au Québec, dans l'aéronautique, pour apprendre de nous la terminologie française dans les pièces, etc., chez Pratt & Whitney, chez Bombardier. Je veux dire, on est très fiers de ça, de voir qu'on enseigne même le bon français à des syndicalistes français, au niveau de la technologie, parce qu'eux ont tendance à... vous savez, le «parking», le «training center», tu sais, nous, on dit un centre de conditionnement physique, etc., mais c'est la même chose au niveau de la technologie. On a des moyens limités...
Puis je vais laisser à David... David Maden, en passant, c'est un bel exemple d'intégration à la société québécoise, tu sais: un père cubain, une mère russe, né en Pologne, qui est polyglotte, et qui est arrivé à Québec... Il est arrivé à la FTQ par la shop. Il est allé travailler dans une entreprise de la région de Québec, il s'est fait élire président de sa section locale, et finalement, nous, on l'a vu. Puis c'était le type excellent pour venir travailler à notre service d'aide aux personnes immigrantes.
Ça fait qu'il va vous expliquer qu'est-ce qu'on fait puis qu'est-ce qu'on pourrait faire de plus si on avait plus de moyens. On est limités par nos revenus, vous savez. On ne peut pas... Les syndicats puis la FTQ, on a la responsabilité de s'administrer, on ne peut pas dépenser plus qu'on gagne ou qu'on reçoit en cotisations syndicales. Ça fait que je vais laisser à David le bon soin d'expliquer qu'est-ce qu'on fait dans ce service-là et qu'est-ce qu'on pourrait faire de plus si on avait d'autres moyens.
Le Président (M. Bernier): M. Maden.
**(11 h 20)**M. Maden (David): D'entrée de jeu, effectivement, il y a beaucoup de choses qui sont faites à l'heure actuelle mais qui ont commencé déjà pour longtemps, ne serait-ce que la question de la francisation en milieu de travail ou la formation pour les comités de francisation, surtout dans les entreprises de 99 travailleurs salariés et plus. Donc, l'idée, c'est comment renforcer les comités de francisation pour être capables de faire vraiment... d'appliquer la loi en termes d'utilisation du français en milieu de travail. Ça, c'est un des éléments.
Mais, au-delà de ça, on tient annuellement, depuis quatre ans -- on souhaiterait renouveler cette année puis on souhaiterait aussi avoir la présence d'un autre ministre à cet égard-là -- la journée de réflexion pour l'intégration des personnes immigrantes en milieu de travail. Ceci dit, c'est une journée dans laquelle personnes immigrantes ou non immigrantes, activistes syndicales ou non, on se rencontre justement pour voir où est-ce qu'on est, qu'est-ce qui a été fait, qu'est-ce qui peut être amélioré, et ensemble être capables de trouver des pistes de solution pour justement être capables d'accompagner les personnes immigrantes en milieu de travail, pour faciliter l'intégration.
Au-delà de ça, on fait aussi des visites d'entreprises. Ça veut dire, on travaille avec des organismes communautaires en insertion en emploi, par le biais desquels on rentre en contact avec les personnes immigrantes en recherche d'emploi. On les accueille chez nous, on leur fait visiter une entreprise syndiquée, qui leur permet de, un, rentrer en contact avec le milieu de travail, donc aller donner un visage à ce milieu de travail qu'ils souhaitent atteindre, ça leur permet de connaître le milieu. Ça permet aussi au milieu de connaître l'immigration, que ce soit par le biais des travailleurs, aussi du côté des employeurs. Parce que ces gens-là, ils vont arriver dans le milieu de travail, ils vont poser des questions, ils vont interchanger avec les employeurs. Et c'est aussi une façon par laquelle les employeurs, ils découvrent cette main-d'oeuvre qui est disponible, qui est qualifiée, qui parle bien français, à la limite, et qui maîtrise bien souvent deux langues, mais qui, bien souvent... dans certains cas, on ne les connaît pas. Donc, ça nous permet aussi de sensibiliser autant les milieux de travail qu'au niveau des employeurs en termes de la diversité qu'apporte l'immigration.
Au-delà de ça, on donne la formation. On a développé une formation qui dure deux jours, une formation au fait... la gestion de la diversité dans les milieux syndiqués. C'est une formation dans laquelle on balaie un peu tout le processus de, un, recrutement, prospection... recrutement et sélection des immigrants, et par la suite tout le processus d'intégration -- quels sont les besoins que peut vivre une personne nouvellement arrivée dans un nouveau milieu, et comment est-ce qu'on peut accompagner ces gens-là une fois arrivés dans le milieu de travail -- de un, pour que le milieu de travail soit sensibilisé, qu'il connaisse un peu cette réalité et éventuellement puisse contribuer aussi à cette intégration, pour qu'il soit capable aussi de regarder un peu qu'est-ce qui peut être fait, ne serait-ce que, par exemple, en francisation, pour éventuellement les accompagner ou les diriger aux employeurs, de mettre de l'avant ce genre d'activité. On essaie aussi...
Le Président (M. Bernier): Merci. Merci, M. Maden. Vous êtes fort intéressant, mais on doit poursuivre maintenant avec le groupe représentant l'opposition. Donc, monsieur...
M. Arsenault (Michel): Si on avait plus de moyens, on en ferait plus. Vous avez compris le message...
Le Président (M. Bernier): Bien, oui, c'est... Mais on a compris le message, c'est qu'au moment où on augmente les moyens on va en faire plus. Exactement, c'est ce qu'on a compris.
Une voix: ...
Le Président (M. Bernier): Oui, si vous permettez. M. le député de Bourget, la parole est à vous.
M. Kotto: Merci, M. le Président. M. Arsenault, Mme Côté, M. Maden, merci d'être là... Je suis ici. Je vous en prie. Je suis à l'ombre.
M. Arsenault (Michel): J'ai travaillé dans les mines, j'ai un problème avec mes oreilles.
M. Kotto: O.K. Vous avez exprimé l'idée que votre appui, disons -- je résume -- au seuil proposé dans le fascicule en question, ici, aujourd'hui, est conditionnel à la capacité... pardon, dans la mesure où le gouvernement fera la démonstration de sa capacité d'accueillir et d'intégrer. Est-ce que vous pouvez élaborer là-dessus? Est-ce que vous avez un doute sur ces capacités-là au moment où on se parle aujourd'hui?
Le Président (M. Bernier): M. Arsenault? M. Maden.
M. Maden (David): Au fait, ce n'est pas la question tant qu'on en doute mais surtout que vraiment les ressources soient appliquées à la bonne place. Quand on regarde, par exemple, les organismes communautaires qui se débattent pour être capables de rester en vie, ne serait-ce que pour accompagner ces personnes nouvellement arrivées, on voit qu'il y a une pénurie de ressources disponibles pour ces personnes immigrantes.
Je disais tantôt qu'on fait des visites en entreprise avec des personnes immigrantes qui sont en recherche d'emploi et qui sont en processus d'insertion à l'emploi. Pour avoir échangé avec ces personnes-là, bien de ces personnes sont au courant, par exemple, qu'il y a des emplois en région, mais ils ne prennent pas le risque d'aller en région parce qu'ils disent: Écoutez, moi, je suis arrivé ici, à Montréal, j'ai réussi à me trouver un logement, j'ai réussi à placer mes enfants à l'école et j'ai réussi à connaître un peu le quartier, puis, s'il faut que j'aille en région avec toute ma famille sans avoir la certitude ou la capacité d'avoir un minimum d'appui arrivé en région pour être capable de, un, trouver un emploi, de, deux, faire toutes les démarches que je viens de faire, c'est comme si on émigrait deux fois, là.
Donc, si on n'est pas capable d'accompagner ces gens-là dans ce processus-là de régionalisation et autres, bien, c'est sûr que ces... Ces ressources ne sont pas là. Donc, pour dire à la question: Est-ce qu'on a la capacité des moyens?, ce qu'on dit, c'est qu'on devrait être alignés à la bonne place et avec une vision d'ensemble et globale.
On sait aussi, par exemple, qu'il y a beaucoup de travailleurs temporaires, pas forcément seulement que des travailleurs agricoles mais dans plusieurs secteurs d'activité, ça veut dire que ces travailleurs temporaires qui sont ici, bénéficient d'un permis de résidence temporaire dans la mesure qu'il y a un emploi. Si ces gens-là sont ici parce qu'ils ont un emploi, comment est-ce possible qu'il y ait autant de travailleurs temporaires qui sont au Québec et qu'on n'est pas capables d'accorder des emplois à des gens en immigration permanente qu'on a déjà recrutés puis qui sont ici?
Donc, il y a une lacune, en quelque part, entre l'offre puis la demande, hein? Ça veut dire, il y a quand même des emplois disponibles. Il y a une pénurie, quand même, des emplois. À preuve, on les comble avec les travailleurs temporaires. Mais on ne met pas les ressources nécessaires de la bonne manière pour que l'immigration permanente qui est déjà ici puisse bénéficier ou profiter justement de ces emplois qui sont disponibles, qu'ils soient à Montréal, ou en région, ou en d'autres milieux.
Le Président (M. Bernier): Merci. M. le député.
M. Kotto: Pour ce qui est de la reconnaissance des diplômes et des compétences, surtout, relativement aux emplois syndiqués, est-ce que la FTQ a son mot à dire?
Le Président (M. Bernier): M. Arsenault.
M. Arsenault (Michel): Directement, non. Mais on favorise une reconnaissance des acquis, comme je l'ai dit d'entrée de jeu. Et, je le répète, tu sais, moi, quand je vois des gens avec des diplômes universitaires travailler en entretien ménager, là, je trouve ça... c'est un gaspil de talent et c'est un gaspil pour la société québécoise aussi. Je ne veux pas dénigrer les gens qui font de l'entretien ménager, là, mais, quand tu as un diplôme universitaire, il me semble que tu pourrais faire d'autre chose.
En ce qui regarde les qualifications comme telles, on a, bien sûr... Vous savez comment est-ce que le système syndical fonctionne au Québec, c'est accréditation par accréditation, il y en a à chaque convention collective. Mais il y a des critères de promotion, il y a des critères d'entrée dans certains métiers, mais c'est unité par unité, non sur l'ensemble du territoire.
Le Président (M. Bernier): Merci. M. le député.
M. Kotto: Merci. Je reviendrais sur le profilage racial. Quelles actions votre organisme entreprend ou a entreprises par le passé pour mener une lutte contre ce phénomène?
Le Président (M. Bernier): Merci. M. Maden.
M. Maden (David): En fait, comme je disais tantôt, on a, entre autres, la... On parlait tantôt d'une formation qui dure deux jours. C'est le but premier, justement, de sensibiliser le milieu de travail, autant par le biais des délégués syndicaux locaux mais aussi en disséminant l'information sur la question de la diversité, mais dans un ensemble positif, pour être capables de tirer davantage de ce qui est positif plutôt que laisser un peu la mauvaise information ou la désinformation continuer à circuler. Comme on disait tantôt, une des choses qu'on parle dans le cadre de cette formation, c'est donner le portrait de l'immigration, mécanismes de recrutement, le portrait de l'immigration et la valeur qu'elle apporte normalement. Dès le moment que les participants, ils prennent l'information, je peux vous dire que, la vision de l'immigration qu'ils ont, ces gens-là, ils changent. Ils changent parce qu'ils sont plus en mesure d'évaluer par eux-mêmes qu'est-ce que ça apporte, cette immigration. Parce qu'au-delà de ça ce qu'ils retiennent, c'est les problèmes qui sont soulevés principalement par les médias. Alors, c'est une façon qu'on utilise, nous, pour justement contrer cette question de discrimination, principalement raciale, entre autres, mais aussi culturelle, et, bon, dans l'ensemble de la diversité qui vient avec.
Le Président (M. Bernier): Merci. M. le député.
M. Kotto: Il me reste combien de temps, M. le Président?
Le Président (M. Bernier): Il vous reste environ 14 minutes.
M. Kotto: 14. Ah bon! Je n'aurai pas besoin de tout ça. Maintenant, juste pour faire le point de ce que nous entendons ici depuis le début de ces audiences, l'intégration... pardon, l'immigration et l'intégration sont des enjeux majeurs, parce qu'elles résonnent sur plusieurs champs: au plan de l'emploi, au plan de l'identité, identité comprenant, bien entendu, la langue, sur laquelle vous avez insisté dans le sens que nous défendons, évidemment, et les moyens, les ressources financières et humaines ne sont pas toujours là ou ne sont pas toujours au bon endroit pour mener à bien ce dossier au plan local et au plan national.
Est-ce qu'il n'est pas, de votre perspective des choses, pertinent d'envisager, disons, un sommet pour réfléchir rigoureusement, au lieu de ne se voir que tous les trois ans dans le cadre des rencontres en vue de la planification, pour réfléchir aux avenues sur le long terme, pas toujours sur le court terme, sur ces questions-là?
Le Président (M. Bernier): M. Arsenault.
**(11 h 30)**M. Arsenault (Michel): Certainement, s'il y a un sommet, on va sûrement y participer comme centrale syndicale. Et, peut-être pour revenir à votre ancienne question aussi, on prêche également par l'exemple au niveau du profilage racial. Si vous venez chez nous, par exemple, la nouvelle réceptionniste est d'origine asiatique. On a des gens de différentes origines ethniques qui travaillent à l'intérieur de la FTQ et on fait tout ça par l'éducation. Mais on a des moyens modestes, vous savez. Il y a 40 % des gens au Québec qui sont dans des endroits syndiqués. Il y en a donc 60 % qui ne travaillent pas dans des endroits syndiqués. Et je peux vous dire que c'est difficile au niveau de la PME aussi. Ce sont des entreprises qui ont des moyens limités de payer, et c'est beaucoup plus difficile, faire de la formation au niveau de l'immigration, dans une PME, par exemple, que de la faire dans une grande multinationale qui a les moyens pour libérer les gens soit pour suivre une formation, apprendre le français, etc.
Mais, pour répondre à votre question, s'il y avait un sommet sur l'immigration ou sur l'intégration des immigrants à Québec, bien sûr qu'on y participerait, comme centrale syndicale.
Le Président (M. Bernier): Merci. M. le député.
M. Kotto: S'il y avait un sommet. Mais est-ce que, de votre perspective des choses, c'est à envisager, compte tenu des difficultés, de la complexité de ce dossier?
M. Arsenault (Michel): J'avais interprété votre question en disant: Est-ce que le gouvernement doit faire un sommet ou... Vous voulez que, nous, le monde syndical, on fasse un sommet sur l'intégration des personnes immigrantes ou que ce soit le gouvernement qui le fasse?
M. Kotto: Ah bien, ça peut être l'initiative...
M. Arsenault (Michel): Normalement, ce genre de sommet là est fait par les gouvernements. On a eu ça dans le passé, des sommets. On a toujours été présents, là. Il y en a eu sur l'économie, il y en a eu sur l'avenir constitutionnel du Québec, des choses semblables, oui, et on y a participé.
M. Kotto: Non, je posais la question relativement à une initiative que pourrait prendre le gouvernement. Mais c'est une initiative qui peut également venir d'un secteur comme le vôtre. Certains, en l'occurrence M. Bouchard, avaient initié récemment le symposium sur la diversité culturelle, sur l'interculturalisme, plus précisément, récemment, et ça a eu un écho plutôt intéressant, parce qu'il y a eu un débat de fond, loin des passions et de l'irrationnel, avec des données, avec des arguments qui nous éclairaient par rapport aux différentes perspectives en matière d'intégration, surtout.
L'immigration, à cause de la globalisation, à cause de la mondialisation, aujourd'hui est devenue un enjeu, en Occident, qui engendre énormément de problèmes pour les sociétés d'accueil -- le Québec n'est pas isolé -- et aussi pour les immigrants. Et certains sont passés nous dire leur lecture de cette réalité. Il nous manque cependant des spécialistes objectifs qui viendraient nous faire une lecture plus éclairante encore. Vous, de votre part, c'est selon l'expérience vécue au plan syndical que vous vous exprimez. D'autres sont venus, comme ceux qui vous ont précédés ce matin, relativement au milieu des affaires. Mais il manque cette perspective, disons, holistique qui permette de voir clair pour... et surtout aussi des données relatives à ce qui s'est passé antérieurement, vous l'avez évoqué vous-même. Cette absence de données rationnelles rigoureuses n'est-elle pas, de votre point de vue, un obstacle pour avancer intuitivement des seuils? Aujourd'hui, c'est 50 000, hier, c'était 54 000, certains ont proposé 65 000. Qu'est-ce que vous en pensez?
Le Président (M. Bernier): M. Arsenault.
M. Arsenault (Michel): Dans un premier temps, si vous regardez notre mémoire, nous les... Pas des sommets, je ne veux pas avoir cette prétention-là. Je veux dire, on n'est pas le gouvernement, la FTQ, que Dieu nous en préserve. On fait des journées de réflexion. Puis au niveau régional on a des conseils régionaux, la FTQ, partout au Québec, là, de Sept-Îles aller jusqu'à Gatineau, en passant par le Nord-Ouest québécois, Sherbrooke, etc., et là aussi il y a des journées de réflexion qu'on fait, avec l'ensemble de nos affiliés, sur l'immigration, l'intégration, etc.
Si vous regardez la dernière page, à la page 10 du mémoire qu'on vous a présenté ce matin, une des recommandations qu'on fait: «Que des campagnes d'information et de sensibilisation soient mises de l'avant afin de sensibiliser la population et, tout particulièrement, les employeurs aux réalités et à l'apport des immigrants et immigrantes.» Mais on dit en plus: «Que le gouvernement favorise une meilleure concertation et [des meilleures collaborations] entre les différents acteurs sociaux que sont les organismes gouvernementaux, les organismes communautaires et les syndicats.» Si le gouvernement décidait de faire un sommet, ça répondrait en partie à ce qu'on vous demande là. Et, si on est invités, on va y aller. Puis, si on n'est pas invités, bien on sera à la porte.
M. Kotto: Le gouvernement, à sa décharge, a déjà entrepris une campagne de sensibilisation, mais est-ce que cela suffit? Je ne sais pas si vous êtes au courant de la campagne initiée par le gouvernement, récemment, relativement à la diversité dans l'emploi. Elle est bien conçue, certes, mais est-ce que cela suffit, concrètement, sur le terrain, auprès des employeurs, d'une part, et aussi auprès de la population, qui, pour une partie substantielle, ne trouve pas très sexy, entre guillemets, l'enjeu de l'immigration?
Le Président (M. Bernier): M. Maden.
M. Maden (David): Un peu comme on disait tantôt, ça fait partie de ce qu'on considère comme un mandat d'un gouvernement. C'est vraiment de lutter contre la désinformation, les préjugés et la discrimination.
Ceci dit, l'immigration présentement, au moins pour un tiers de la population, elle ne jouit pas d'une vision favorable. Ça veut dire qu'il y a une partie de la population qui regarde de façon négative l'immigration, l'arrivée de l'immigration. Certes, le gouvernement, il a entrepris une campagne, mais encore là est-elle suffisante? En fait, c'est la question qu'on se pose.
Mais on peut voir un peu qu'est-ce qui est arrivé avec d'autres situations semblables, ça veut dire de... le moment dans lequel on approche la question de la population. On l'a vu, par exemple, avec la conduite avec facultés affaiblies ou le fait de ne pas conduire après avoir consommé de l'alcool. C'était une campagne qui n'a pas duré deux mois, elle n'a pas duré deux semaines, elle était assez large. Donc, ce n'était pas juste une question d'une loi. C'était une information à tous les niveaux, autant pour les enfants que pour les médias. C'est assez large. On peut aller plus loin aussi, si on reste dans la question de code routier, le port de la ceinture aussi. C'était une forme aussi de sensibilisation, d'information et de conscientisation de la population.
Donc, ce sont des éléments que, nous, on considère qui devraient être mis avec la même ampleur qui a été faite avec des autres éléments, comme l'alcool au volant, la ceinture de sécurité, même la question du port du casque de vélo, qui n'est pas encore réglementé, mais au moins la population est assez sensibilisée pour exiger à ses enfants de le porter, pour eux-mêmes, comment dire, pour donner l'exemple de porter le casque.
Donc, c'est une question de sensibilisation, de communication. Mais ça ne se fait pas en deux semaines, ça ne se fait pas en deux jours, il faut un plan, un échéancier plus long terme et vraiment que ce soit quelque chose qui est exigé de façon récurrente. Oui, on considère qu'effectivement il y a du travail à faire dans ce sens-là.
Le Président (M. Bernier): Merci.
M. Kotto: Merci.
Le Président (M. Bernier): M. le député de Deux-Montagnes.
M. Charette: Merci, M. le Président. Madame messieurs, un plaisir de vous entendre, avec des propos, ma foi, éclairants à bien des égards. Vous avez parlé du Programme d'égalité en emploi. Ce sont des programmes qui existent depuis de nombreuses années. Au niveau de la fonction publique, si je ne m'abuse, ce sont des programmes qui remontent au niveau des années quatre-vingt, même, donc plusieurs années. Et systématiquement, année après année, au niveau de la fonction publique, on n'arrive pas à atteindre les objectifs que l'on se fixe, comme gouvernement ou comme société, au niveau de sa propre fonction publique. Comment expliquer qu'on peine à combler ou atteindre les propres objectifs que l'on se fixe? Et aussi comment peut-être envisager les choses différemment pour arriver à des meilleurs résultats?
Le Président (M. Bernier): Merci. Mme Côté.
**(11 h 40)**Mme Côté (Monique): Oui. Merci. Bien, un des éléments qu'on explique, nous, et on le dit dans le document, c'est au niveau du fait que le gouvernement a un faible taux de remplacement dans sa fonction publique. Alors, c'est difficile de faire vivre la Loi sur l'accès à l'égalité puisqu'il y a peu d'embauche.
Je vais parler plus de l'exemple de la ville de Montréal. J'en ai parlé un peu tout à l'heure, mais, vous allez voir, c'est assez éloquent. Au début des années quatre-vingt-dix, cette loi-là était assez nouvelle, et il y avait une réelle... il y avait une volonté de la dirigeante qui était là à l'époque... Je me souviens, c'était Mme Léa Cousineau qui était là. Et, comme dirigeante, elle avait décidé que c'était un des enjeux principaux, à la ville de Montréal, de faire en sorte d'augmenter le nombre... À ce moment-là, je pense que c'était plus pour les femmes, parce que la loi a changé beaucoup depuis ces années-là. Mais on avait vu un changement très, très marqué au cours des années subséquentes à 1990.
Par la suite, il y a eu des modifications à la loi. Je ne suis pas vraiment en mesure de vous en parler, là, je ne m'embarquerai pas là-dedans. Mais la volonté n'était plus au rendez-vous. Et aujourd'hui un des éléments, David en a mentionné beaucoup, mais qu'on fait, les syndicats, c'est qu'on tente, dans la mesure du possible, dans nos conventions collectives, d'intégrer des comités paritaires pour faire en sorte que la loi d'accès à l'égalité, elle soit prise au sérieux, que ça soit une volonté réelle puis qu'on l'applique dans nos milieux de travail. À la ville de Montréal, c'est ce qu'on a fait.
Le Président (M. Bernier): Et je dois vous interrompre, malheureusement, notre temps est maintenant terminé. Donc, M. Arsenault, Mme Côté et M. Maden, merci de votre participation à cette commission parlementaire fort importante.
Donc, je vais suspendre quelques instants pour permettre au groupe représentant l'Action Travail femmes et Fédération des femmes du Québec de prendre place.
(Suspension de la séance à 11 h 41)
(Reprise à 11 h 46)
Le Président (M. Bernier): Donc, à l'ordre, s'il vous plaît! Nous allons donc reprendre nos travaux. Nous accueillons l'Action Travail femmes et Fédération des femmes du Québec. Bienvenue. Bienvenue, mesdames. Mme Lorena Favier, bienvenue, Mme Marina Sylla et Mme Alexandra Pierre. Donc, vous avez une période de 15 minutes pour votre présentation. La parole est à vous.
Action Travail des femmes (ATF) et
Fédération des femmes du Québec (FFQ)
Mme Favier (Lorena): Oui. Bonjour à tous. Merci de nous accueillir ici. Donc, juste à titre d'information, je serai accompagnée de Marina, notre stagiaire, qui sera là surtout en tant qu'observatrice.
Donc, M. le Président, Mme la ministre, MM. et Mmes les députés, Action Travail des femmes est aujourd'hui un organisme oeuvrant à soutenir les femmes socioéconomiquement défavorisées de tous âges et origines dans leurs démarches pour accéder à des emplois décents, notamment dans les domaines non traditionnels.
Possédant une longue expérience des problématiques de discrimination sur le marché de l'emploi et de l'accès à l'égalité des femmes immigrantes, Action Travail des femmes, dont les usagères sont à 80 % des femmes immigrantes, a mené différentes luttes et pris des engagements en ce qui concerne la situation de ces dernières. Pour ne citer que quelques exemples, Action Travail des femmes est membre du Comité de réflexion sur la situation des femmes immigrées et racisées de la Table de concertation des organismes au service des personnes réfugiées et immigrantes. Elle fait partie du groupe initiateur de la Coalition des organismes pour une meilleure prise en compte des besoins des femmes immigrantes. Elle a mis en place le projet Femmes immigrantes diplômées à l'étranger: accompagnement pour un parcours réussi vers l'emploi, et a finalement mené à bien le projet pilote intitulé La reconnaissance des diplômes et compétences: difficultés et impacts chez les femmes immigrantes.
Alors que le Québec fait figure, sur le plan national et international, de terre d'accueil, qu'il est qualifié d'exemplaire en ce qui concerne l'égalité entre les hommes et les femmes et qu'il constitue une référence dans son engagement pour l'élimination de toutes les formes de discrimination envers toutes les femmes, nous sommes aujourd'hui face à une situation qui contredit cette réputation.
Malgré les engagements pris par le Canada, et par le Québec particulièrement, vis-à-vis de l'ONU, à travers la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination envers les femmes, lors de la quatrième Conférence mondiale des Nations unies sur les femmes à Beijing, pour garantir l'application des approches de genre dans les processus d'élaboration de lois, politiques et programmes, par rapport à la politique gouvernementale Pour que l'égalité de droit devienne une égalité de fait, Action Travail des femmes et la Fédération des femmes du Québec sommes accablées par la situation déplorable des femmes immigrantes, en particulier, et que nous rencontrons dans nos lieux de travail et d'intervention.
Les femmes immigrantes font face à des problématiques toutes particulières en lien avec leur sexe, leur statut d'immigration, leur origine et souvent leur couleur. De leur statut d'immigration jusque dans leur recherche d'emploi, leur parcours se caractérise par une multitude d'obstacles qui, bout à bout, constituent un véritable processus de discrimination systémique. S'appuyant sur des données statistiques ainsi que sur plusieurs recherches, notamment celle de Mme Amel Belhassen, ainsi que sur les constats de nos respectifs lieux de travail, nous pouvons dresser un portrait de la situation de précarité sociale et économique, mais aussi du désarroi et du sentiment de délaissement de leur situation.
Rappelons, d'entrée de jeu, qu'entre 2004 et 2008 les femmes représentaient 51,6 % de l'immigration récente. Nous assistons donc, dans les dernières décennies, à une féminisation importante de l'immigration. À la ville de Montréal, les immigrantes représentent à elles seules 45 % de la population féminine totale de la ville. Il s'agit de données primordiales pour penser adéquatement nos politiques d'immigration et d'intégration.
**(11 h 50)** Il est aussi important de noter que les femmes ont des statuts d'immigration les plus précaires et encore plus que leurs homologues masculins. De 2002 à 2006, 55 % des femmes immigrantes sont entrées dans la catégorie de l'immigration économique, 27 % dans le cadre du regroupement familial et 15 % ont été acceptées sous le statut de réfugié. Une grande part d'entre elles restent donc des personnes à charge, dépendantes de leurs parrains. Ce désavantage vis-à-vis de leurs conjoints ne saurait les positionner dans un rapport égalitaire face à un processus d'intégration.
Notons que les taux de chômage des femmes immigrantes sont plus élevés, et les salaires, plus bas que les femmes natives mais aussi que les hommes immigrants. La précarité et la pauvreté, la plus préoccupante, sont le lot caractéristique des femmes immigrantes, et en particulier celles des minorités visibles. Pourtant, les femmes immigrantes arrivant au Québec sont en majorité diplômées dans leurs pays d'origine et ont un niveau d'études plus élevé que celui des femmes nées au Québec. Alors que celles-ci ont non seulement les diplômes, mais souvent l'expérience nécessaire pour accéder à des emplois à la hauteur de leurs attentes et de leurs compétences, la plupart font face à une situation de chômage et de déqualification.
La non-reconnaissance des diplômes et des compétences, ainsi que le long processus de faire valoir leur bagage académique et professionnel plongent rapidement ces femmes dans un parcours du combattant. Reprise d'études pour les unes, cours de remise à niveau pour les autres, accumulation de bénévolat pour acquérir la première expérience canadienne souvent exigée prouvent l'incapacité du système d'immigration à intégrer ces femmes. Ce long et pénible processus n'amène pourtant pas ces femmes fortement diplômées à un emploi dans leurs champs de compétence.
Notons que celles qui sont actives sur le marché de l'emploi le sont souvent dans les secteurs les plus précaires, où les revenus annuels sont donc les plus faibles: les secteurs des services, de l'hébergement, de la restauration, du commerce au détail, du secteur manufacturier, qui emploient à eux seuls près du quart des femmes immigrantes. La dévaluation de leurs diplômes et compétences, l'urgence d'assurer une survie sur le plan économique participent à reproduire des situations de précarité.
Mme Pierre (Alexandra): Donc, Alexandra Pierre. Je suis de la fédération...
Le Président (M. Bernier): Mme Pierre, oui.
Mme Pierre (Alexandra): ...oui, de la Fédération des femmes du Québec. On vient donc de vous présenter un portrait assez rapide de la situation des femmes immigrantes que nous et nos groupes membres rencontrons quotidiennement. Ces femmes composent aussi au jour le jour avec des politiques d'immigration et d'intégration, des programmes d'accès à l'emploi, des mesures de reconnaissance des acquis et des compétences qui sont bien mal adaptés à leurs situations spécifiques.
Compte tenu de la féminisation croissante de l'immigration qu'a mentionnée Lorena, des situations de précarité et de pauvreté vécues par les femmes immigrantes, des obligations familiales qui incombent encore aux femmes aujourd'hui, de la déqualification à laquelle ces femmes sont confrontées, il nous paraît urgent de se pencher sur la situation spécifique des femmes immigrantes et d'appliquer une analyse différenciée selon les sexes à la planification, aux programmes d'immigration et à la budgétisation du MICC.
On se rend compte qu'il y a des lacunes et des méconnaissances, de la part du ministère et du gouvernement, sur le parcours et les obstacles particuliers qui sont rencontrés par les femmes immigrantes. Cela, évidemment, conduit à une espèce d'invisibilité des problématiques particulières rencontrées par ces femmes et à une certaine, aussi, inertie vis-à-vis des mesures que nous considérons urgentes.
Ces femmes immigrantes oeuvrent activement à leur intégration, que ça soit par le réseautage, le bénévolat, les stages, tout le parcours de francisation, les formations qu'elles prennent, les reconversions professionnelles qu'elles entreprennent, mais il semblerait que ça soit la société d'accueil qui ne s'outille pas correctement pour accueillir ces femmes.
Les obstacles qu'elles doivent surmonter ont souvent des conséquences sociales, économiques, professionnelles, psychologiques qui sont dramatiques, entre autres toute la question de l'isolement de ces femmes. Il est impératif, pour nous, que le ministère y prête une attention immédiate et soutenue. Pour nous, il ne suffit pas de déterminer des niveaux d'immigration, même si c'est important, mais ce n'est pas suffisant pour assurer des politiques d'immigration et d'intégration cohérentes. Pour nous, il faut... bien, il faut plutôt mettre en parallèle aussi des ressources, et pour cela il est primordial de savoir comment les femmes immigrantes sont positionnées dans le système d'immigration et d'intégration, et quelles actions devraient être prises pour leur permettre de participer pleinement à la société québécoise.
Dans cette perspective, et à l'instar de la Coalition des organismes pour une meilleure prise en compte des besoins des femmes immigrantes, on a fait un certain nombre de recommandations dans notre mémoire.
D'abord, on croit qu'un remaniement de l'approche du ministère face aux problématiques des femmes immigrantes est primordial. Il faut requestionner et changer de position aussi vis-à-vis des organismes de femmes qui travaillent sur cette question et qui détiennent une expertise en condition féminine. Ces problématiques-là devraient apparaître comme prioritaires dans l'agenda du MICC.
Une autre de nos recommandations, c'est évidemment l'application impérative de l'analyse différenciée selon les sexes dans les politiques, programmes et la budgétisation du ministère. L'analyse différenciée selon les sexes correspond d'ailleurs à l'approche transversale qui est prônée dans la politique d'égalité entre les hommes et les femmes. Toute la question aussi de la reconnaissance des discriminations systémiques dont sont victimes les femmes immigrantes doit être aussi considérée.
Quand on parle d'analyse différenciée selon les sexes, on entend un processus qui vise, de façon préventive, au cours de la conception, de l'élaboration d'une politique, d'un programme ou de toute autre mesure, qui vise à déterminer les effets distincts que pourrait avoir son adoption sur les femmes et les hommes touchés, compte tenu des différences socioéconomiques qui caractérisent les hommes et les femmes. Pour nous, cette application de l'ADS est essentielle. Évidemment, que le MICC s'en empare aussi. On sait que le ministère a, entre autres dans le programme PAD, donc programme Action diversité, comment dire, a encouragé ses partenaires à appliquer l'ADS, mais, pour nous, c'est aussi essentiel que le ministère donne l'exemple et applique l'ADS aussi, l'analyse différenciée selon les sexes, aussi dans son propre fonctionnement, évidemment.
Une autre de nos recommandations, c'est un programme de redressement spécifique aux femmes immigrantes, tel encore que stipulé dans la politique gouvernementale Pour que l'égalité de droit devienne une égalité de fait. Ce programme de redressement spécifique correspondrait à l'approche spécifique qui vise à mettre en oeuvre des actions concrètes afin de corriger des inégalités entre les hommes et les femmes. Et ce programme devrait donner une priorité à l'intervention et à l'expertise communautaire en immigration et en condition féminine sur les problèmes de discrimination.
Et enfin notre dernière recommandation serait la création d'espaces de concertation entre les groupes de femmes et le ministère de l'Immigration, donc des espaces de concertation permanents entre les groupes de femmes et le MICC, afin qu'on puisse bénéficier l'un et l'autre de l'expertise qu'on a pu développer sur la question des femmes immigrantes. Merci beaucoup.
Le Président (M. Bernier): Merci, mesdames, de votre présentation. Nous allons donc débuter les échanges avec la partie ministérielle. Mme la ministre.
**(12 heures)**Mme Weil: Oui. Merci beaucoup de vous présenter ainsi, de parler de cet enjeu important. Pour moi, personnellement, peut-être pour tout le monde, mais pour moi, personnellement, lorsque je suis rentrée en poste, c'est une question tout de suite qui me préoccupait parce que j'ai beaucoup travaillé dans le milieu communautaire. Je pense que tout ceux qui travaillent dans ce milieu-là, on a une image, on a le reflet de cette situation. Et donc je voulais voir, je suis allée à la rencontre de plusieurs organismes qui travaillent auprès des femmes pour mieux comprendre les défis, les enjeux, etc.
Et donc mes questions vont aller beaucoup dans ce sens-là, parce qu'il s'agit vraiment d'essayer de creuser la question. On a même une étude qu'on a faite tout récemment, au MICC, pour essayer de mieux comprendre. Parce que c'est vrai qu'ici, aujourd'hui, on est sur des orientations sur la sélection. Donc, je vais vous amener sur ces questions-là, parce qu'il y a certainement des liens qu'on peut faire sur les problèmes d'intégration qu'on observe, d'une part, et des améliorations qu'on peut amener sur la sélection, qui vont répondre en partie au problème. Et donc je vais vous demander de réfléchir à ces questions-là.
Pour ce qui est des défis d'intégration, il faut qu'on continue à échanger, et j'accepte votre invitation de continuer à travailler ensemble. Le ministère de l'Immigration et des Communautés culturelles a quand même mis en branle une série d'initiatives, via le programme Défi Montréal et d'autres programmes, pour cibler des projets. Je ne vais pas faire tout l'inventaire ici parce que je voudrais aller sur ces questions de sélection et nos orientations.
Pour ce qui est de l'orientation qui vise à porter à 50 % la proportion des requérants principaux de la catégorie des travailleurs qualifiés qui détiennent une formation dans les champs de compétence qui correspondent aux besoins qui sont exprimés sur le marché du travail, pensez-vous que cette orientation peut aller dans le bon sens, dans le sens que vous dites? C'est-à-dire que, bon, ces femmes-là, comme vous dites, elles sont très scolarisées, elles ont le profil... Les femmes qui sont sélectionnées, elles ont tout à fait le profil de personnes qu'on recherche, mais, comme pour d'autres personnes, il y a des obstacles à l'intégration. Donc, nous, on travaille fort pour trouver toutes les mesures qu'on peut mettre en branle avant d'arriver, par la sélection, et pendant et après, lorsqu'elles sont ici. Est-ce que vous pensez que cette mesure peut aller dans le sens voulu?
Mme Pierre (Alexandra): Bien...
Le Président (M. Bernier): Mme Pierre.
Mme Pierre (Alexandra): Oui. Pardon. Cette mesure, comme la mesure concernant les volumes d'immigration, pour nous, ce n'est pas ça qui pose problème. Donc, oui, on est prêtes à accepter ces deux mesures-là. Mais, pour nous, ce qui importe, c'est évidemment les ressources qui viennent avec ça. Dans la mesure où est-ce qu'il y a une volonté politique et des ressources qui sont mises à la disposition pour que les femmes puissent s'intégrer de manière adéquate partout au Québec, pas seulement à Montréal parce que... Bien, c'est sûr qu'il y a une concentration. Mais, pour nous, ces deux mesures-là ne sont pas particulièrement remises en question. On est plutôt d'accord, là. Nous, ce sur quoi on veut insister, c'est sur la question des ressources et aussi de l'urgence de la situation de ces femmes immigrantes.
Le Président (M. Bernier): Merci. Mme Favier, vous voulez ajouter?
Mme Favier (Lorena): Dans la continuité, en fait, de ce qu'Alexandra présente, c'est vrai qu'on ne remet pas en question la question du volume, mais vraiment de la prise en charge, autant avant le départ... Parce que beaucoup de femmes qu'on reçoit à Action Travail des femmes sont des femmes qui parlent beaucoup de désinformation sur les difficultés qu'elles vont rencontrer dans la société d'accueil. Donc, il est nécessaire d'avoir une véritable analyse, ce qu'on demande d'ailleurs, une analyse différenciée selon les sexes, pour avoir une expertise en ce qui concerne la spécificité des parcours des femmes.
Et de ce point de vue là, évidemment, promouvoir le Québec et, pour être en cohérence avec l'idéal de l'égalité qui, on pense, s'exerce au Québec, qui a une grande tradition de pionnier par rapport à la question de l'égalité entre les sexes, il est nécessaire aussi que, dans la planification de l'immigration, il y ait une véritable analyse de la situation spécifique des femmes, pour que les femmes soient aussi, avant le départ, informées des difficultés éventuelles, et souvent réelles, qu'elles rencontreront ici. Et c'est vrai qu'une fois qu'elles arrivent sur le terrain toute cette image de l'égalité entre les sexes, de la parité, elle est beaucoup moins réelle, notamment en ce qui concerne l'accès à l'emploi. Et je pourrais énumérer beaucoup d'autres situations.
Donc, il est vraiment important que l'information soit faite, mais aussi, en amont, une analyse et une application de cette analyse spécifique des femmes pour pouvoir ensuite les prendre en charge correctement et dans la mesure de leurs attentes aussi.
Le Président (M. Bernier): Merci. Mme la ministre.
Mme Weil: Oui. Toute cette question d'en amont, l'information qui devrait être transmise, c'est un peu un couteau à double tranchant aussi parce qu'évidemment on travaille fort pour éliminer ces obstacles. Et là c'est sûr que sur l'intégration... C'est comme la question de la langue. Ce matin, on nous demande de bien expliquer peut-être aux gens que l'anglais est un facteur, mais en même temps on travaille fort pour lancer un autre message. Je vous le dis, là, le risque, c'est une contradiction, puis il faut continuer à travailler à régler ces problèmes d'intégration. Mais je vous entends, là.
Bon, alors, on va aller sur l'intégration, parce que, la question de la langue, j'imagine que vous êtes peut-être d'accord avec les orientations qui mettent l'accent sur la connaissance de la langue, tous les efforts qu'on fait en francisation. Évidemment, c'est la langue qui permet d'intégrer le marché du travail, mais, vous, vous voulez vraiment mettre l'accent sur l'intégration, le travail que vous pouvez faire avec mon ministère. Vous avez un commentaire?
Le Président (M. Bernier): Mme Pierre.
Mme Pierre (Alexandra): Bien, en fait, tout est lié toujours sur les orientations qui concernent la francisation. Évidemment, on ne peut pas être contre la vertu, mais, dans la mesure où est-ce que cette francisation, il y a des obstacles très concrets que les femmes immigrantes rencontrent. Entre autres, le fait que les programmes de francisation, les programmes d'accompagnement, les programmes de stage ne viennent pas avec, par exemple, des services de garde, bien, ça, c'est un problème, c'est un réel obstacle. Donc, oui, la francisation, c'est un élément clé, mais, une fois qu'on a dit ça, comment spécifiquement les femmes y ont accès, c'est une autre problématique sur laquelle il faut se pencher plus avant. Tu sais, il ne suffit pas de dire: On veut que les cours de français soient adaptés et soient le plus nombreux possible, mais il faut aussi qu'ils soient accessibles, entre autres à ces femmes immigrantes.
Le Président (M. Bernier): Merci. Mme la ministre.
Mme Weil: Oui, tout à fait. J'ai eu ce commentaire beaucoup. J'ai rencontré des femmes dans cette situation, qui veulent justement avoir accès, puis il y a le problème de garde, et donc je suis sensible à ça, et aussi le problème des femmes qui veulent aider leurs enfants avec leurs devoirs, mais qui ont besoin d'une certaine compétence en français pour pouvoir aider leurs enfants.
Je vais aller, donc, peut-être sur la question très précise: Les femmes, scolarisées, professionnelles, ont le métier qu'on recherche, parlent français, bon, le profil parfait, hein, il y en a beaucoup. Moi, je les rencontre. C'est vraiment un profil parfait. Qu'est-ce que vous voyez comme obstacle, parfois? Parce qu'on a développé des programmes intéressants, la CRE, le programme de mentorat -- je ne sais pas, vous le connaissez? -- qui semble très prometteur. Et je suis allée au lancement de ce programme. C'était un lancement, mais le programme était déjà en marche. Et plusieurs des gens qui ont témoigné, c'étaient justement ces femmes extrêmement scolarisées, très compétentes, très professionnelles, et le programme de mentorat a finalement réussi à dénicher exactement l'emploi dont elles avaient besoin.
Donc, c'est un travail très soutenu qu'il faut faire, puis il y a des bonnes idées qui émergent actuellement. On dirait que la conjoncture est peut-être favorable, dans le sens que les employeurs voient qu'il y a un besoin, il faut combler des emplois, ils s'ouvrent.
Alors, comment faire pour ouvrir les entreprises? Parce que, nous, on a des programmes pour inciter, on a des politiques, des orientations, et tout ça, mais c'est les employeurs qui engagent, hein? Donc, il faut avoir l'adhésion de la société civile, les entrepreneurs, et tout, et c'est vraiment un effort collectif. Donc, j'aimerais vous entendre là-dessus, des types de programmes ou d'initiatives intéressantes qui vont vraiment faire en sorte d'avoir la rencontre entre la personne que, nous, on a sélectionnée, qui par ailleurs a un très beau profil, et l'employeur qui pourrait être à la recherche de ses talents.
Le Président (M. Bernier): Mme Favier.
**(12 h 10)**Mme Favier (Lorena): Sur cette question, avant d'en venir à la rencontre concrète entre l'employeur et la femme immigrante qui a été sélectionnée, il faut rendre compte, avant ça, qu'elles sont confrontées à ce qu'on définit, dans le mémoire et dans notre présentation du début, comme une discrimination systémique. C'est vrai qu'il est important, à ce point-là, de parler de discrimination, parce que les femmes immigrantes, elles arrivent sur le marché de l'emploi. On l'a dit, on a les chiffres qui appuient tout ça, ce sont des femmes qui sont très diplômées, qui ont des compétences et qui ont aussi une expérience qui est, sur le C.V., indiscutable.
Par contre, et là où on interpelle le ministère, c'est sur la question de reconnaître la discrimination systémique. C'est-à-dire que les femmes sont confrontées à une double discrimination, parfois une triple discrimination, mais dans ce cas-là par rapport à leur statut d'immigrant, comme immigrantes, et aussi par rapport à leur sexe. Et ça, je peux vous dire, sur le terrain, on rencontre quotidiennement des femmes qui arrivent avec une maîtrise, avec un doctorat, avec un postdoctorat, et qui n'arrivent pas à trouver de l'emploi. Donc, avant de parler de la rencontre concrète entre l'employeur et une femme immigrante diplômée, il faut parler de la problématique de la discrimination et des problématiques spécifiques que vivent les femmes immigrantes.
Ensuite, nos organismes mettent en place tout ce qui est faisable en termes de budget pour qu'aient lieu effectivement ces rencontres, mais malheureusement il y a une vraie difficulté simplement financière de la part de nos organismes, parce qu'on aimerait ça qu'on ait l'appui de fonds, par exemple, qui viennent du ministère de l'Immigration, parce que ça les concerne. D'autant plus qu'on est dans un contexte de féminisation de l'immigration. On est à 51,6 % de femmes immigrantes. Ça dépasse le bassin d'hommes immigrants. Donc, c'est quelque chose... c'est une situation dans laquelle le ministère doit s'investir en même temps que les organismes. Donc, à partir du moment où on dépasse les 50 %, on peut parler de féminisation de l'immigration. Donc, c'est primordial de travailler ensemble sur cette situation. Et, nous, concrètement, on a un volet employabilité où on essaie de travailler avec ça, avec la mesure qu'on peut, en termes de budget, clairement.
Le Président (M. Bernier): Merci. Mme Pierre, vous voulez ajouter?
Mme Pierre (Alexandra): ...là-dessus, donc, vous l'avez mentionné, il y a des très belles initiatives, des très beaux programmes de mentorat, d'accompagnement. ATF en est un exemple, mais aussi plusieurs groupes qui travaillent sur la question de l'immigration ont développé une expertise. Ce que je peux dire, c'est que ces accompagnements, ce mentorat, c'est la fin du parcours. Déjà d'arriver à rentrer dans ces programmes-là, c'est déjà un début de succès pour les femmes immigrantes.
Et, comme disait Lorena, avant même d'arriver à cette rencontre employeur-femme immigrante, il y a plein de facteurs spécifiques aux femmes qui viennent bien avant ça, dont toute la question de la discrimination liée au sexe, à l'origine, donc du racisme. Ça, c'est sûr qu'il y a toute une question d'éducation, d'éducation à la non-discrimination, qu'il faut faire, mais il y a aussi toute la question des statuts des femmes. Donc, le fait d'avoir des statuts précaires ou d'avoir des statuts un peu différents que les hommes font en sorte que le parcours ne sera pas le même.
Je peux vous donner un exemple extrêmement concret. Lorsqu'une famille immigre, que le conjoint est le demandeur principal et que la femme est ce qu'on appelait avant personne à charge, bien la priorité de carrière est donnée au conjoint, ce qui veut dire que le conjoint prend quatre, cinq ans pour s'intégrer. Au bout des quatre, cinq ans, c'est le temps de la femme de commencer son parcours d'intégration. Bien, les programmes qui sont en place, généralement, c'est les nouveaux arrivés, moins de cinq ans. Donc, elle est prise dans cette situation-là.
Toute la question aussi de l'accès à l'aide financière. Quand on veut fait un stage, quand on veut poursuivre des études, quand on veut se réorienter professionnellement, bien, à un moment donné, il faut aussi faire vivre sa famille, surtout si son conjoint est aussi dans un processus d'intégration. Et ces barrières-là, ces barrières financières, sont des barrières concrètes.
On a parlé aussi tout à l'heure de l'accès aux services de garde. Bien, encore aujourd'hui, au Québec comme ailleurs, les femmes ont des obligations familiales. C'est essentiellement elles qui prennent en charge ces obligations-là. Et, si elles n'ont pas de garderie, si elles n'ont pas de service de garde, bien elles ne peuvent pas faire leurs activités et poursuivre leur processus d'intégration. Donc, bien avant cette question du mentorat ou de l'accompagnement, bien il y a toutes ces questions-là qui se posent.
Et un dernier point que je voulais amener, c'est aussi toute la question des programmes d'accès à l'égalité, qui touche les femmes immigrantes mais aussi les femmes racisées des communautés culturelles. Mais, pour ce qui est des femmes immigrantes, bien on se rend compte que les programmes d'accès à l'égalité, par exemple, ont des objectifs, en termes de personnes immigrantes, personnes des communautés culturelles, mais ces objectifs-là ne sont pas croisés. Donc, quand on parle de catégorie des personnes immigrantes ou des personnes des communautés culturelles, la question de est-ce que c'est des gars... est-ce que c'est des hommes ou c'est des femmes ne rentre pas en ligne de compte. Donc, si l'objectif, dans une entreprise -- je vous donne un exemple quelconque -- c'est 10 personnes immigrantes, bien, si c'est 10 hommes, bien ça rentre dans les objectifs du programme d'accès à l'égalité, alors qu'on devrait avoir des programmes d'accès à l'égalité qui prennent systématiquement compte de la différence hommes-femmes.
Le Président (M. Bernier): Merci beaucoup. Nous allons donc passer du côté de l'opposition officielle. M. le député de Bourget.
M. Kotto: Merci, M. le Président. Bonjour. Merci d'être là. Je commencerai par la sémantique. Vous parlez de discrimination systémique. Cela présuppose une approche réfléchie et accomplie. Qu'est-ce qui vous amène à un tel énoncé au plan factuel?
Mme Favier (Lorena): Bien, je pense... Pardon.
Le Président (M. Bernier): Allez-y, Mme Favier.
Mme Favier (Lorena): Je pense qu'Alexandra l'a illustré juste là, c'est-à-dire que l'entrecroisement de plusieurs facteurs, ce serait la question du sexe principalement, puisqu'on parle de femmes, puis aussi de statut d'immigrant, puis éventuellement d'une couleur de peau ou d'un accent, et comme ça jusque... on peut le développer sur plusieurs niveaux, montre que les femmes rentrent dans un processus qui pourrait être illustré comme un cercle vicieux, qui fait qu'elles rentrent dans un véritable système dans lequel une discrimination ou un obstacle mène à l'autre et qu'elles tournent en rond, comme ça, pour être très schématique, en accumulant et multipliant des obstacles.
Donc, Alexandra le disait tout à l'heure, si on n'a pas accès à des systèmes de garde qui soient adaptés au parcours spécifique des femmes immigrantes, alors on ne va peut-être pas pouvoir se rendre à Emploi-Québec. Enfin, ça fonctionne comme ça. Et c'est une sorte de circuit fermé. Et c'est surtout aussi parce qu'il n'y a pas eu en amont une analyse différenciée selon les sexes. Donc, ça fonctionne comme ça. Les femmes, elles enchaînent une série d'obstacles qui empêchent l'accès à l'emploi mais l'intégration aussi. Et il y a la question de l'isolement dans lequel elles se retrouvent.
Donc, il y a une véritable réflexion que les centres de femmes et que les groupes spécialisés sur la question des femmes immigrantes ont développée. Et c'est pour ça qu'on tire un peu la sonnette d'alarme aujourd'hui, c'est parce que tout le parcours d'immigration est beaucoup plus difficile pour les femmes, et ça se voit dans les chiffres, ça se voit dans les statistiques, ça se voit sur le terrain, avec toutes les femmes qu'on rencontre.
Quand elles sont confrontées à toute la procédure d'une reconnaissance des acquis, il faut... et je vous invite à voir la recherche-action qu'Action Travail des femmes a menée là-dessus, c'est un véritable parcours du combattant, et ce n'est pas une problématique qui est séparée des autres, c'est-à-dire que d'une difficulté découlent toute une série d'autres difficultés. On l'a un peu montré en fait dans le portrait des femmes aujourd'hui. Donc, c'est ça qu'on considère qui est une discrimination systémique.
Donc, on vous en fait part et on vous invite aussi à réfléchir sur la question de l'analyse différenciée selon les sexes, qui doit être un outil de gestion gouvernemental essentiel, en termes d'égalité entre les hommes et les femmes mais aussi en termes de démocratie, tout simplement.
Le Président (M. Bernier): Merci. Mme Pierre, vous voulez ajouter?
Mme Pierre (Alexandra): Oui. En fait, rapidement, on parle de discrimination systémique lorsque... Ou plutôt on peut voir une discrimination systémique lorsqu'il y a un certain nombre de données qui montrent un traitement différencié, finalement, avec un autre groupe de la population. Et, dans le cas des femmes immigrantes, on voit que le taux d'emploi, le taux de chômage, le taux d'activité, les secteurs d'emploi qui emploient ces femmes, les revenus aussi, les écarts de revenus entre les femmes natives mais aussi entre les hommes immigrants, toutes ces données nous montrent ou nous font conclure qu'il y a discrimination systémique. C'est essentiellement basé sur un regard statistique aussi.
Le Président (M. Bernier): Merci. M. le député.
M. Kotto: Est-ce que vous pouvez nous éclairer sur les domaines d'activité qui présentent le plus d'obstacles pour les femmes immigrantes, en matière d'intégration en emploi?
Le Président (M. Bernier): Madame...
**(12 h 20)**Mme Pierre (Alexandra): Bien, en fait, moi, j'irais par l'inverse, en fait, parce qu'il y a... les femmes immigrantes ont des domaines de compétence, des diplômes qui sont extrêmement larges. Avec la sélection... C'est sûr que la sélection faite par le Québec et le Canada... c'est sûr que l'idée, c'est d'avoir des gens qui ont des compétences et des diplômes pour venir combler un certain nombre de secteurs en manque d'emploi. Donc, c'est difficile de dire quel secteur présente le plus de difficultés.
Ce qu'on sait par contre, c'est que, malgré ce haut taux de diplomation, malgré cette sélection qui a été faite en disant: Vous pouvez venir travailler au Canada, on a de la place pour vous dans nos secteurs, on se rend compte qu'un quart des femmes immigrantes sont employées dans des secteurs extrêmement précaires, qui sont le secteur manufacturier, le secteur de l'hébergement-restauration, et -- voyons, j'ai un blanc, on l'a dit tout à l'heure -- et les services. Donc, 24 % des femmes immigrantes sont employées dans ces secteurs-là. Donc, ça, c'est un réel problème parce que ces métiers-là ne correspondent absolument pas ni à leurs compétences ni à leurs ambitions ou à leurs intérêts.
Le Président (M. Bernier): Merci. M. le député.
M. Kotto: Disposez-vous de données qui pourraient nous éclairer sur le profil de diplomation de ces femmes qui se trouvent en marge?
Mme Pierre (Alexandra): Tout à fait. Bien, en fait, il y a eu des recherches, entre autres Amel Belhassen, Marie-Thérèse Chicha, qui est une universitaire à l'Université de Montréal, qui ont assez bien documenté ça avec des recherches-actions, donc avec des femmes qui suivaient ce parcours d'immigration là, mais aussi des données un petit peu plus larges à partir des données de Statistique Canada. Donc ça, c'est quand même assez bien documenté, là, cette question des femmes immigrantes et de leurs parcours d'intégration, là.
Le Président (M. Bernier): Merci. M. le député.
Mme Favier (Lorena): Je voulais rajouter que...
Le Président (M. Bernier): Oui, Mme Favier, allez-y.
Mme Favier (Lorena): ...Amel Belhassen a fait, dans le cadre de la recherche-action qu'elle a menée, elle a fait un travail de terrain qui était très, très intéressant, parce qu'elle n'est pas partie, même si c'est essentiel, et les statistiques macrosociales nous montrent que cette réalité se confirme, mais le travail qu'Amel Belhassen a fait, c'était extrêmement intéressant, parce qu'elle a fait un travail de terrain, avec un échantillon restreint de femmes mais qui permettait d'aller très loin dans le profil et dans le parcours de ces femmes, donc d'essayer de comprendre vraiment sur le terrain ce qui se passait avec ces femmes. Et il y avait des femmes qui étaient vraiment très, très, très diplômées, qui avaient au moins une maîtrise, qui parfois étaient trilingues et qui étaient sur le territoire... Elle a pris une fourchette de personnes qui étaient nouvellement arrivées et qui étaient là depuis 15 ans, et elle a remarqué qu'il y a des femmes immigrantes, admettons que ça fait 10 ans qu'elles sont sur le territoire, elles continuent à vivre toutes les problématiques des nouvelles arrivantes.
Donc, ça montre bien que ce parcours d'immigration dure dans le temps. Et les obstacles durent aussi. Et elles les rencontrent après 10 ans de s'être établies ici. Alors, on imagine sur un C.V. la déqualification que ça représente, quand on n'a pas réussi à le renouveler et qu'on est arrivé pourtant avec des expériences, avec un diplôme, avec un parcours parfait pour le genre d'immigration qu'on invite à venir au Canada. Et pourtant elles ont un C.V. qui aura un trou noir parce qu'elles ont eu une difficulté dramatique pour pouvoir accéder à l'emploi. Donc, en termes de conséquences dans la vie de ces femmes... Et on ne parle pas d'un petit échantillon, hein? Je n'ai pas les chiffres, malheureusement, mais je peux vous inviter à lire cette recherche. C'est vraiment des parcours dramatiques, marqués par la dévalorisation et en plus marqués par l'acceptation de cette dévalorisation. C'est-à-dire qu'à côté elles ont quand même des responsabilités économiques vis-à-vis de leurs familles, qui font qu'elles ne peuvent faire que ce qu'on leur propose, c'est-à-dire travailler dans les secteurs les plus précaires, et ça, c'est quand même très préoccupant.
Le Président (M. Bernier): Merci. M. le député.
M. Kotto: Comment expliquez-vous l'écart entre ces femmes immigrantes en marge versus les hommes immigrants qui se trouvent dans la même situation?
Le Président (M. Bernier): Mme Pierre? Mme Favier.
Mme Favier (Lorena): Je pense que, lorsqu'on regarde les chiffres et puis... Bon, on va partir... on va essayer de faire ça ordonné. De l'entrée au Canada, déjà, du statut d'immigrant -- on revient là-dessus -- il y a déjà un obstacle d'entrée. On a un statut d'immigration qui fait qu'on doit attendre un certain nombre d'années pour pouvoir commencer le processus d'intégration. Ce n'est pas forcément le cas des hommes. Les chiffres nous le disent, ce n'est pas forcément le cas des hommes. Il y a une intégration plus facile des hommes, et là-dessus je pense que c'est parce que malheureusement il y a encore cette idée selon laquelle le pourvoyeur principal d'une famille, c'est l'homme. C'est vraiment quelque chose qui est encore ancré. Ne serait-ce que ça, ça fait que déjà il y a des conséquences à long terme pour les femmes. Donc, l'intégration des hommes... Et le taux de chômage des femmes est beaucoup plus élevé que celui des hommes.
Le Président (M. Bernier): Merci. Mme Pierre, vous voulez ajouter?
Mme Pierre (Alexandra): Je rajouterais aussi... Ce n'est pas juste une question de perception, c'est-à-dire que, quand la majorité des femmes viennent comme personne ou conjoint à charge, ça a des conséquences sur leurs parcours d'intégration, comme disait Lorena. Il y a aussi toute la question, je l'ai mentionnée tout à l'heure, des obligations familiales. Et très rapidement...
C'est assez ironique, parce qu'il y a beaucoup de... Et on le voit très bien dans la recherche d'Amel Belhassen mais aussi dans les recherches de Marie-Thérèse Chicha. Elles ont des échantillons... Il y a beaucoup de femmes, dans leurs échantillons, il y a beaucoup de femmes qui viennent de la région du Maghreb, et on se rend compte que ces femmes-là, dans leurs pays d'origine, avaient une carrière, avaient réussi à constituer un réseau pour prendre soin de leurs enfants, si elles en avaient, des enfants en bas âge, soit parce qu'elles avaient des aides familiales, soit leurs familles, etc., et que donc dans leurs foyers, au départ, la répartition des tâches entre les hommes et les femmes était... j'allais dire, exemplaire, peut-être pas, mais était intéressante. Donc, elles avaient leur autonomie, elles pouvaient avoir leurs carrières. Elles arrivent ici -- alors qu'on a l'image exactement du contraire -- elles arrivent ici, et c'est là qu'en tant que femmes elles redeviennent attachées à leurs enfants et à leurs obligations familiales parce qu'on n'est pas en mesure de leur fournir des services collectifs, des services de garde. Donc, elles reprennent la charge de ces obligations familiales là. Et donc, s'il y a la présence d'enfants en bas âge, bien elles ont de la difficulté à concilier leurs activités et leurs familles.
On voit qu'il y a une division sexuelle du travail qui est accrue parce que la priorité est donnée au conjoint, qui doit s'intégrer et rapidement. Donc, toute cette inégalité, elles la vivent ici beaucoup plus que dans leurs pays d'origine. Donc, ça, c'est un des éléments.
Donc, il y aurait le statut, les obligations familiales, aussi la précarité financière, puisque, pour pouvoir faire un parcours d'intégration intéressant, bien il y a toute la question du financement, comment on fait pour financer ces formations, ces stages, etc.
Le Président (M. Bernier): Allez-y, pour une courte question.
M. Kotto: ...dernière question. Vous avez énoncé plusieurs facteurs qui se présentent comme des obstacles pour les femmes immigrantes. Quelle est la place du facteur religieux?
Le Président (M. Bernier): Mme Pierre.
Mme Pierre (Alexandra): Le facteur religieux, avec les femmes qu'on rencontre, les recherches qu'on a soit faites soit consultées, le facteur religieux est extrêmement minime, est extrêmement, extrêmement minime, parce que, comme je vous dis, entre autres dans la recherche de Marie-Thérèse Chicha, on voit que ces femmes étaient des femmes autonomes, de carrière, etc., et qui arrivent ici, et leurs conditions changent. C'est extrêmement... C'est minime, oui.
Mme Favier (Lorena): Je pense que sur cette question, juste pour appuyer là-dessus, je ne pense pas qu'il y ait quelque chose qui nous fasse cibler là-dessus. Je pense que les femmes, toutes les femmes, d'où qu'elles viennent, elles ont envie de s'intégrer et elles doivent s'intégrer, parce qu'elles sont préparées pour, elles sont préparées pour, elles viennent pour ça. Donc, la question du religieux n'a aucune place en fait et n'est pas un facteur qui doit être analysé de quelconque façon. Je pense que ces femmes, d'où elles viennent, elles ont envie de s'adapter et elles le font avec beaucoup de difficultés d'ailleurs.
Le Président (M. Bernier): Merci beaucoup. Donc, merci, Mme Favier, Mme Sylla, Mme Pierre, de votre participation à cette commission parlementaire fort importante.
Donc, je suspends les travaux jusqu'à 14 heures. Merci.
(Suspension de la séance à 12 h 30)
(Reprise à 14 h 10)
Le Président (M. Bernier): À l'ordre, s'il vous plaît! Ça va. Mme la ministre, ça va. On prend place.
À l'ordre, s'il vous plaît! Nous reprenons nos travaux. Alors, bon après-midi à tous et bienvenue à la Commission des relations avec les citoyens.
Nos travaux portent sur une consultation générale et des auditions publiques sur le document intitulé La planification de l'immigration au Québec pour la période 2012-2015.
Et, sans plus tarder, nous souhaitons la bienvenue au Service d'aide aux néo-Canadiens représenté par M. Denis Marceau et Mme Mercedes Orellana. Merci d'être là. Vous avez une période de 15 minutes pour nous faire votre exposé, par la suite des échanges suivront avec les parlementaires. La parole est à vous.
Le Service d'aide aux néo-Canadiens (Sherbrooke) inc. (SANC)
Mme Orellana (Mercedes): Merci.
M. Marceau (Denis): Merci. Mme la ministre de l'Immigration et des Communautés culturelles, MM. et Mmes les députés, merci de nous recevoir comme Service d'aide aux néo-Canadiens de Sherbrooke.
D'abord, Sherbrooke puis l'Estrie, c'est une très belle terre d'accueil des personnes immigrantes. En 2009-2010, le Service d'aide aux néo-Canadiens a accueilli 926 nouvelles personnes immigrantes, dont 322 référées par le ministère de l'Immigration et des Communautés culturelles, et 144 réfugiés autres, et, en plus, 287 indépendants. En 2010-2011, le Service d'aide aux néo-Canadiens a accueilli, dans les mêmes proportions, 850 nouvelles personnes immigrantes.
Sherbrooke, comme ville, compte autour de 10 % de sa population en personnes immigrantes, et, tel qu'entendu aux nouvelles hier à RDI et à CBC, on dit que, dans les années qui viennent, d'ici 2030, la proportion devrait être non pas de 8 % ou 10 % mais jusqu'à 25 %, 30 % et 40 % du total de la population. Donc, Sherbrooke, on est bien partis, on est une belle terre d'accueil, mais il faut continuer, on n'est pas dans la moyenne canadienne.
Nous avons, de plus, de belles activités annuelles favorisant le rapprochement interculturel: le Festival des traditions du monde qui, en cinq jours au début août, a attiré plus de 100 000 personnes, et mentionnons aussi que nous faisons à chaque année le Buffet des nations, au printemps, qui attire plus de 800 personnes en une seule soirée.
L'apport de l'immigration est essentiel pour le développement de Sherbrooke et de l'Estrie. Cela a été vrai dans le passé. L'Université de Sherbrooke, comme le CHUS, c'est-à-dire le Centre hospitalier universitaire de Sherbrooke, n'existeraient pas sans cet apport. Le côté manufacturier, minier et agricole n'aurait pas connu ses heures de gloire en Estrie sans cet apport. Mais que sera le futur? Sherbrooke veut continuer à être une terre d'accueil, il en est de même pour l'Estrie, en autant que les personnes soient bien formées pour répondre aux besoins de la main-d'oeuvre et qu'elles soient capables de s'adapter rapidement. Ceci est le fruit d'une étude menée par la conférence régionale des élus en 2010 où on a interviewé tous les maires de l'Estrie, et ils nous ont manifesté leur ouverture, en autant que les personnes soient bien formées et capables de s'adapter rapidement.
Le Service d'aide aux néo-Canadiens veut continuer aussi à assurer son mandat, c'est-à-dire d'accueillir des personnes immigrantes qui nous sont référées par le ministère de l'Immigration et des Communautés culturelles et celles qui viennent frapper à nos portes et les aider aussi dans leur hébergement et leur intégration socioéconomique. Mais nous devons réussir cet accueil et cette intégration des personnes immigrantes. La société, dont l'Estrie, ne tolère pas et tolérera de moins en moins d'échecs. Elle est informée et elle est de plus en plus exigeante. Il en est ainsi pour les personnes immigrantes qui veulent être un apport pour le développement de la société, pour le développement de l'Estrie tout entier et de Sherbrooke.
Nous vous faisons quelques constats. Sherbrooke est bien sûr une belle terre d'accueil qui ne s'est pas encore enlisée dans la ghettoïsation comme les grandes villes, et c'est bien. Et Sherbrooke présente aussi un bon potentiel économique avec un taux de chômage inférieur à la moyenne nationale et québécoise. Cependant, la situation est fragile. L'accueil va bien, mais l'intégration socioéconomique demeure un défi. Le contingent de nouvelles personnes immigrantes réfugiées, nous en recevons autour de 400, s'alourdit en nombre et en complexité psychosociale à chaque année. Des difficultés dans la langue parlée et écrite, bien sûr, mais de plus en plus des problèmes de santé mentale et l'accès au travail, bien sûr, et avec ces exigences, c'est de plus en plus un défi.
Le ministère de l'Immigration et des Communautés culturelles aide financièrement, mais, selon nous, pas à la hauteur des responsabilités données et des attentes de la société. Heureusement, SANC, Le Service d'aide aux néo-Canadiens, a un grand réseau de bénévoles pour l'aide au déménagement, à l'hébergement, à l'habillement, au soutien psychosocial et linguistique. Mais le réseau de bénévoles vieillit et n'est pas facile à renouveler. Que ferait Le Service d'aide aux néo-Canadiens sans ce réseau? Le Service d'aide aux néo-Canadiens ne pourrait exister, et l'accueil des personnes immigrantes à Sherbrooke et en Estrie serait compromis.
Aujourd'hui, l'aide du ministère de l'Immigration et des Communautés culturelles et celle des bénévoles -- qui dépassent la centaine, on a plus d'une centaine de personnes bénévoles qui aident dans toutes sortes de tâches -- nous amènent donc à faire aujourd'hui ce qu'on appelle le minimum du minimum dans toute cette question de l'accueil et de l'intégration socioéconomique. C'est dangereux de maintenir ça toujours au niveau minimum du minimum. Nous ne souhaitons pas déraper. La société ne nous le pardonnerait pas.
Aussi, nous voulons attirer votre attention sur la nécessité de développer un processus unifié pour éviter justement que le service de préparation à l'emploi se fasse à un endroit, préparation linguistique à un autre endroit, les aspects psychosociaux à un autre endroit. Ce morcellement-là risque beaucoup de miner le processus d'intégration, le processus d'accueil et d'intégration.
Les nouvelles personnes immigrantes, particulièrement celles réfugiées, sont fragiles et présentent un niveau de difficulté croissant. On ne peut envoyer ces personnes d'un lieu à un autre, surtout qu'elles ont des problèmes linguistiques et de santé mentale. Et, comme en éducation, il faudrait peut-être investir dans les premiers temps de l'accueil et de l'intégration. Si le départ est bon, le succès est beaucoup plus assuré. C'est vrai pour les réfugiés, comme pour les indépendants qui, selon le Conseil des relations interculturelles du Québec, sont laissés souvent à eux-mêmes.
Au Québec, nous avons du chemin à faire. L'étude faite par CIRANO en 2010 montre que les personnes immigrantes du Québec s'intègrent moins bien au marché du travail que celles de l'Ontario et de la Colombie-Britannique, alors que l'intégration des natifs, c'est-à-dire des gens qui sont ici même, au marché du travail est comparable avec les autres provinces. Bien sûr, au Québec, les exigences de la langue française écrite et parlée constituent un obstacle de plus, raison de plus pour investir davantage afin de lever cet obstacle. Notons que la maîtrise de la langue pourrait se faire en même temps que la préparation à l'emploi, d'où un processus unifié et dynamique. Je laisse la parole à Mme Orellana qui va nous parler de notre réaction par rapport à chacune des orientations du ministère.
Le Président (M. Bernier): Mme Orellana, allez-y.
**(14 h 20)**Mme Orellana (Mercedes): Merci. En fait, je vais vous amener directement à la page 10 de notre document, de notre mémoire, si vous voulez. Je veux juste mettre en évidence certains éléments qu'on vous a déjà mentionnés par rapport aux orientations qui sont en consultation.
En lien avec la première orientation, qui est de porter progressivement à 50 % la proportion de requérants principaux de la catégorie des travailleurs qualifiés détenant une formation dans des champs de compétences correspondants à des besoins exprimés sur le marché du travail, on réitère, selon nous, que la principale difficulté à laquelle il faut s'attaquer, c'est de rendre l'arrimage entre les besoins du marché du travail et les compétences des travailleurs qualifiés qui sont des candidats à l'immigration le plus possible en temps réel. Parce qu'il y aura toujours un décalage, on en est conscients, à cause des procédures de sélection. Mais, si on peut travailler, avoir une marge de manoeuvre plus grande pour réduire ces délais, exemple, dans la durée ou la validité du certificat de sélection du Québec, le rendre plus court pour que la personne soit forcée de venir plus vite puis être capable de rencontrer encore des possibilités sur le marché du travail à son arrivée, ça serait déjà ça de gagné. Donc, c'est notre premier constat, parce qu'on est conscient que les besoins évolutifs du marché du travail, ça évolue trop rapidement par rapport au processus de sélection des travailleurs qualifiés.
Dans la deuxième orientation, qui est de maintenir majoritairement la proportion de personnes connaissant le français dans l'ensemble des admissions, c'est sûr que l'objectif est louable, en soi. Les personnes qui sont déjà francisées à l'étranger, c'est sûr que ça représente une économie pour le Québec. Cependant, je pense qu'il faut regarder, revoir encore et encore, parce qu'il y a toujours de la place à l'amélioration, nos outils de francisation, surtout la francisation qui peut se faire de façon parallèle à l'occupation d'un emploi. Plus vite on est capable d'intégrer une personne immigrante au marché du travail tout en lui donnant des outils de francisation, mieux elle va représenter une économie pour le Québec, quitte à enlever les barrières, parlant des quotas, par exemple, par rapport à la francisation en groupe ou en entreprise. C'est payant à la fin, à mon avis, pour tous.
La troisième orientation, d'augmenter le niveau de connaissance de français chez les candidats de la catégorie des travailleurs qualifiés, encore aussi la même recommandation s'applique à l'effet que, les travailleurs qualifiés, il y a un certain nombre qui nous arrivent dont la langue maternelle, ce n'est pas le français. Pensons à des gens qui viennent des pays d'Amérique latine, par exemple. Et leur niveau de francisation, quand ils arrivent, n'est pas suffisant pour occuper un emploi tout de suite. Donc, la même mesure pourrait s'appliquer que la personne pourrait occuper un emploi tout en continuant sa francisation, et non de la mettre tout de suite sur les bancs de l'école puis faire ça en parallèle, une chose à la fois.
La quatrième orientation, qui est de maintenir annuellement entre 65 % et 75 % la part des personnes de moins de 35 ans dans l'ensemble des admissions, on dit oui, c'est correct. Le Québec, il a besoin de personnes qui sont jeunes, c'est sûr, surtout dans un contexte de vieillissement de la population, mais il ne faudrait pas se pénaliser d'avoir des personnes qui peuvent répondre aussi au profil des personnes immigrantes parce qu'il est à la limite de l'âge, juste parce qu'il est rendu à 36 ans, déjà trop vieux parce qu'il a passé la barrière de 35. La personne, elle peut apporter quand même, à 36 ans, beaucoup sur le plan social, sur le plan économique et culturel au Québec, et démographique, et linguistique aussi.
La cinquième orientation, ça va aussi dans le même sens. Quand on parle de rééquilibrer progressivement la proportion que représente chacun des grands bassins géographiques, je suis sûre que vous allez avoir d'autres réactions, surtout par rapport à la progression des personnes qui viennent de l'Afrique ou des pays du Maghreb. Nous, on pense qu'il ne faudrait pas non plus utiliser des critères qui vont faire apparence de discrimination, même au regard de l'origine ethnique de certaines personnes. Il faudrait plutôt regarder ce que la personne peut apporter sur tous les plans que j'ai mentionnés tantôt, social, linguistique, économique, démographique, plutôt que des origines ethniques.
La sixième orientation, qui est aussi... Bon, on veut augmenter à un minimum de 65 % de l'immigration économique. Je pense que, malheureusement, au moment où on se parle on n'a pas de mesures pour démontrer quel est l'impact, par exemple, de l'immigration économique sur l'intégration en emploi. Est-ce que c'est vrai que les personnes qui arrivent avec un statut de travailleur qualifié sont toutes en emploi à l'intérieur de trois mois après leur arrivée? Ou sinon quel est le pourcentage des personnes qui se retrouvent à frapper à la porte du dernier recours faute d'avoir trouvé un travail ou faute de maîtriser le français encore suffisamment? Je pense que l'objectif est louable, mais, en même temps, il faudrait s'attarder aussi au problème une fois que les personnes arrivent en place, comment on peut désamorcer d'autres obstacles aussi à leur intégration économique, toujours en travaillant de concert avec les ordres professionnels aussi.
La septième orientation, mais la dernière, c'est viser à une restabilisation relative au volume d'admission pendant la période de 2012 à 2015. Nous, ce qu'on entrevoit, c'est le danger de vouloir restabiliser les volumes d'admission versus le poids du Québec dans l'ensemble du pays du Canada. Si on diminue le pourcentage, si on diminue le poids du Québec, ça peut se diminuer aussi par une contribution financière du gouvernement fédéral, et évidemment il y a des impacts aussi au niveau politique, au niveau démographique aussi qu'il faut considérer à ce niveau-là.
Je laisserai encore une fois la parole à M. Marceau pour qu'il termine notre présentation.
Le Président (M. Bernier): Vous avez environ une minute, M. Marceau.
M. Marceau (Denis): Très bien. Alors, pour tirer tout simplement trois éléments de conclusion. Le premier, le Service d'aide aux néo-Canadiens fait le minimum du minimum, puis on est fiers de le faire, et grâce à un réseau d'une centaine de personnes, hein? Parce que, si on n'avait pas ce réseau de bénévoles, on serait vraiment en difficulté pour réaliser notre mission d'accueil et d'intégration.
Le deuxième élément de conclusion, c'est que, l'accueil, je pense qu'on réussit à bien le faire, mais l'intégration socioéconomique, c'est là qu'il faut travailler beaucoup, et nous ne pouvons pas le faire dans les conditions actuelles. Il va falloir que le gouvernement nous aide à donner des conditions un peu plus grandes pour qu'on puisse mieux réussir cette intégration socioéconomique, que ce soit avec les réfugiés ou même avec les indépendants. Parce que, contrairement à ce qu'on peut croire, ce n'est pas facile pour les indépendants non plus de s'intégrer sur le plan socioéconomique. Ils ont besoin d'aide, et Le Service d'aide aux néo-Canadiens pourrait apporter cette aide.
La troisième conclusion, c'est que, Le Service d'aide aux néo-Canadiens, on est rodés depuis 54 ans, donc on est en mesure d'en recevoir plus, mais, bien sûr, il faut avoir les conditions nécessaires pour bien faire notre job selon les attentes non pas du Service d'aide aux néo-Canadiens, selon les attentes de la société qui sont, comme je le disais, de plus en plus exigeantes. La société est sensible, la société veut qu'on réussisse cette intégration socioéconomique. Merci beaucoup.
Le Président (M. Bernier): Merci infiniment, merci de votre présentation. Nous allons donc débuter nos échanges avec les groupes parlementaires. Mme la ministre.
Mme Weil: Oui. Alors, bienvenue, merci de vous présenter ici. Et, d'entrée de jeu, je veux vous féliciter pour le travail extraordinaire que vous faites. Évidemment, vous êtes un grand partenaire de mon ministère et vous êtes reconnus et vraiment valorisés pour le travail extraordinaire que vous faites depuis plus de 50 ans, hein, depuis 1954. Vous existiez bien avant le MICC, même, bien avant le MICC. Et d'ailleurs j'étais au Festival des traditions du monde à deux occasions la fin de semaine dernière, et c'est vrai que Sherbrooke, c'est un centre extraordinaire d'immigration. Et ce qui m'a beaucoup impressionnée avec l'événement, la soirée d'ouverture, c'est qu'on voit des gens qui sont de partout, une mixité avec la communauté locale. À Montréal, souvent on peut voir le festival d'une communauté ou d'une autre, et c'est vraiment cette communauté qui est là. Et la beauté de cet événement... Et j'imagine que le Buffet des nations aussi c'est la même chose. Et c'est beaucoup grâce au travail, évidemment, il y a beaucoup de partenaires et des leaders qui jouent un rôle, mais des organismes comme le vôtre qui travaillez à l'intégration.
Moi, je pense que vais aller beaucoup... Votre expertise, c'est l'intégration. Je vois généralement vos commentaires sur les orientations, et on n'a pas nécessairement l'adhésion précise à nos orientations, parce que vous dites: L'accent, il faut le mettre ailleurs. Alors, je pense qu'on va profiter de votre présence ici pour aller sur vos connaissances en intégration, puis évidemment ça va nous aider sur tous nos programmes d'intégration de pouvoir vous poser ces questions.
Vous parlez d'un modèle d'intégration optimal et vous parlez d'un processus d'intégration unifié et dynamique. J'aimerais vous entendre là-dessus, ce que vous entrevoyez quand vous parlez de «unifié et dynamique».
Le Président (M. Bernier): M. Marceau, Mme Orellana? M. Marceau.
Mme Orellana (Mercedes): Je vais laisser M. Marceau commencer, si vous permettez.
Le Président (M. Bernier): C'est beau, c'est beau, c'est beau.
M. Marceau (Denis): Le processus unifié, c'est tout simplement dans le sens de faire un ensemble d'interventions, mais qui ont un point de rassemblement pour que ça soit un tout et que ça ne soit pas non seulement des parties qui s'additionnent les unes aux autres. Donc, c'est le sens ici du mot «unifié». Et «dynamique», ça veut dire ça qu'il faudrait que tous les éléments bougent en même temps. Exemple: nous recevons, je ne sais pas, par autobus, des gens, des réfugiés qui arrivent à Sherbrooke, on doit les accueillir bien sûr, mais déjà ils sont dans un processus socioéconomique, puis même d'apprentissage de la langue, et non pas morceler les choses, puis dire: Bon, là, vous allez en francisation, on ne s'occupe plus de vous, c'est ceux qui s'occupent de la francisation qui vont s'occuper de vous. Ce n'est pas de même que la dynamique de la personne, et surtout des personnes que nous recevons, qui sont extrêmement fragiles et qui sont de plus en plus avec toutes sortes de difficultés que des gens vivent, d'autant plus qu'ils viennent d'ailleurs... C'est qu'il faut, donc, qu'il y ait quelque chose d'unifié et que ça soit dynamique, dans le sens que tous les éléments bougent en même temps. Nous souhaiterions idéalement que la francisation se fasse à travers le processus d'intégration sur le marché du travail. Je sais bien qu'il y a des limites à concevoir les choses semblables, parce que ce n'est pas de même qu'on les a imaginées, mais peut-on faire évoluer les choses dans le sens de quelque chose de beaucoup plus dynamique que, je dirais, séquentiel? Alors, c'est le sens du mot «unifié et dynamique». Je ne sais pas si ça vous...
Le Président (M. Bernier): Mme Orellana, vous voulez...
**(14 h 30)**Mme Orellana (Mercedes): Oui. Je voulais aussi compléter la dimension d'«unifié et dynamique» aussi en disant que, dans notre travail terrain au Service d'aide aux néo-Canadiens, on a l'avantage d'avoir un organisme qui offre plusieurs services sous le même toit. Donc, on voit les familles puis on les accompagne du moment qu'ils sont arrivés et pendant les prochaines années suivantes aussi, mais, en même temps, on est gestionnaire d'une banque d'interprètes. On sait que, pour les personnes qui arrivent, les personnes allophones, elles ont besoin d'utiliser des services gouvernementaux, par exemple, au niveau de la santé ou dans le milieu scolaire. Donc, on voit déjà tout de suite les besoins de pouvoir faire appel à une ressource intermédiaire au niveau linguistique pour justement contrer la barrière linguistique.
Le fait qu'on est à proximité des services puis qu'on se rend compte de la difficulté dès l'arrivée, on est capables, à l'interne, d'éliminer des délais, d'éliminer des obstacles aussi, et ça rend l'intervention plus efficace. La même chose aussi par rapport au travail. Lorsque la personne a fini en parallèle sa francisation, que ce soit au cégep ou dans une autre institution, mais on est à même de voir que la personne est déjà rendue à une autre étape de son intégration, donc il faut déjà l'accompagner dans sa recherche d'emploi. Quand il commence à se questionner ou si c'est une personne indépendante, un travailleur qualifié, on voit ses besoins tout de suite en arrivant parce que, justement, on est conscients de la pression qu'il vit au niveau économique pour être pourvoyeur aussi avec un travail, pourvoyeur de sa famille.
Donc, c'est ça aussi l'essence d'unifier puis de dynamique aussi, de ne pas morceler l'intervention, surtout en ce qui concerne justement les premières années. Le premier pas, comme M. Marceau l'avant dit, est très important dans l'intégration pour bien la réussir.
Le Président (M. Bernier): Merci. Mme la ministre.
Mme Weil: Oui, vous parlez aussi de l'importance de faire la promotion de l'apport de l'immigration, et je vous rejoins beaucoup là-dessus. Évidemment, c'est depuis toujours, hein, qu'il faut expliquer l'immigration, le rôle de l'immigration, ouvrir les esprits, les mentalités à l'immigration. Et vous proposez de mettre en place des initiatives d'éducation populaire sur l'apport positif de l'immigration. D'abord, les écoles jouent déjà un rôle important. Nous, on le sait, c'est peut-être les écoles qui jouent le rôle le plus important pour la deuxième génération, et les parents aussi réussissent bien aussi. Je pense que les écoles, notre système scolaire réussit bien. J'aimerais vous entendre là-dessus.
Mais aussi, si vous connaissez des initiatives dans ce sens-là, de ce genre d'éducation at large, là, pour sensibiliser, ouvrir les esprits à l'immigration. Je pense qu'il faut le faire presque en temps continu... Parce qu'on va chercher du talent extraordinaire, des gens scolarisés. Vous, vous imaginez... J'imagine que vous avez tous les profils, hein, réfugiés, regroupement familial, mais aussi les travailleurs qualifiés. Mais, que ce soit une catégorie ou l'autre, c'est des gens qui arrivent avec une volonté de s'intégrer, et donc il faut valoriser cette contribution. Alors, j'aimerais savoir si vous connaissez des initiatives qui peuvent nous inspirer.
Le Président (M. Bernier): M. Marceau.
M. Marceau (Denis): Il y en a une qui existe en Estrie depuis quelques mois qu'on appelle La Tribune de la diversité. Il y a, à chaque mois, dans La Tribune, c'est le journal de Sherbrooke et de l'Estrie principalement, donc, à chaque mois, il y a une page qu'on appelle La Tribune de la diversité où on met en évidence des personnes venues d'ailleurs et qui sont des exemples de bonne intégration. Et nous pensons que c'est une façon très démocratique de faire la promotion finalement des personnes venues d'ailleurs et ayant un apport très important pour la communauté estrienne et de Sherbrooke.
Puis, moi, j'en profite toujours, à chaque fois que j'ai l'occasion de le dire, je l'ai dit, je le redis: l'Université de Sherbrooke n'existerait pas s'il n'y avait pas eu de l'immigration. Et c'est fort, ça. Puis là je passe en revue toute l'Estrie finalement, tous ces secteurs de développement ont été faits grâce à l'apport des personnes venues d'ailleurs. On oublie cela, si bien que, les gens qui sont maintenant installés, il faut refaire un peu cette éducation, leur dire: Oui, voyez-vous d'où on est venus, qui on est et où est-ce qu'on s'en va? C'est de ne jamais oublier nos racines finalement.
Mais La Tribune de la diversité, c'est un très bel exemple d'éducation populaire. Bien sûr que le Festival des traditions du monde, c'est un événement de plus en plus important, qui rassemble de plus en plus, là, des gens venus d'ailleurs puis même des gens en dehors de l'Estrie. On a été même surpris, il y a des gens de Québec, de Montréal qui viennent de plus en plus à ce Festival des traditions du monde. Mercedes?
Le Président (M. Bernier): Mme Orellana.
Mme Orellana (Mercedes): Oui, je veux juste ajouter, parce que vous demandez des exemples, si on connaît des initiatives justement d'éducation ou de promotion de l'immigration. Il y en a une qui a déjà existé, et, nous, on la propose sur un nouveau format, sur un nouveau modèle, si on veut: un programme de réseautage. Parce qu'il n'y a rien de mieux dans la publicité que le fait du bouche à oreille. Quand on aime quelque chose, peu importe qu'on s'en aille dans un restaurant, dans un cinéma, une pièce de théâtre, si on a aimé le produit qu'on a dégusté, on a le goût d'en parler puis on fait la promotion de façon positive et naturelle.
Et ça a déjà existé, un plan de jumelage interculturel au niveau de l'immigration, et le ministère de l'Immigration soutenait financièrement cette initiative. Pour x raisons, ça se fait moins maintenant. Mais je pense que, si on remettait sur pied un programme de réseautage entre des familles québécoises et des familles nouvellement arrivées, il n'y a rien de mieux pour laisser tomber des barrières, laisser tomber des préjugés, laisser tomber des peurs, des craintes, ouvrir les esprits, comme on dit, que la connaissance puis le côtoiement.
Quand on est rendus à ouvrir les portes de notre maison, à inviter à souper quelqu'un puis à dire: Comment vous le préparez, quelle épice que vous mettez dedans? Comment qu'on fête la fête des parents, ou la fête des mères, ou tel événement dans votre pays?, on ouvre déjà le dialogue, on ouvre déjà la connaissance.
Puis c'est sûr que c'est un programme plus... une initiative plus qualitative que quantitative. Mais tous les impacts positifs au niveau de l'intégration sociale des personnes, c'est incommensurable, à mon avis, parce que ce sont des ambassadeurs de l'intégration qu'on met en contact, et il y a un échange interculturel qui se fait de plus direct dans une ambiance aussi ludique, d'humour, d'esprit.
Et je pense que ça mériterait énormément... Et ça se fait à très peu... à mon avis, ça pourrait être possible de se faire avec très peu de frais, et c'est une formule qui pourrait s'appliquer dans toutes les villes de destination où est-ce que le gouvernement souhaite qu'il y ait des nouvelles communautés qui s'installent aussi, parce que la formule est facile. Le Québécois d'origine est ouvert de nature aussi puis il est très accueillant, peu importe qu'il soit du Saguenay--Lac-Saint-Jean, de Chicoutimi, l'Estrie, je pense que la plupart des Québécois sont très ouverts. Donc, ça ne demande pas un grand effort pour solliciter de la collaboration des bénévoles à ce niveau-là, puis ça serait une belle initiative à mon avis.
Le Président (M. Bernier): Merci. Mme la ministre.
Mme Weil: Oui, je suis d'accord avec vous, puis il y a juste un groupe qui a parlé de cette question du rôle, et puis, bien, on va aller sur le rôle de la société civile. Dans d'autres sociétés, d'autres États en Amérique du Nord, il y a vraiment... on dirait, ça fait longtemps que la société civile joue ce rôle-là. C'est moins développé ici pour toutes sortes de raisons, et ça a été beaucoup le gouvernement qui a mis sur place des programmes, qui a financé, etc.
Là, c'est de voir comment on peut trouver cet équilibre où, vraiment, la société civile se sent interpellée pour réussir l'immigration. Parce que ce n'est pas le gouvernement qui peut tout seul. On peut avoir des programmes et supporter les organismes communautaires, mais, justement, d'aller chercher ces bénévoles... Alors là, à Sherbrooke, évidemment, cet événement, il y en a d'autres aussi partout au Québec où on voit les entreprises, les employeurs, les banques, tout le monde qui embarque, hein? C'est des commanditaires, parce que, là... C'est une bonne idée de... Et des bénévoles, des centaines de bénévoles.
Donc, comment vous voyez justement le gouvernement jouer un rôle pour stimuler, si on veut, de dire: Bon, c'est à la communauté maintenant, c'est à la communauté de s'ouvrir à cette diversité?
**(14 h 40)**M. Marceau (Denis): J'oserais peut-être un élément. À ma façon à moi, je suis un bénévole depuis le début de ma retraite, depuis deux ans, et je le fais généreusement au Service d'aide aux néo-Canadiens, j'y investis au moins deux jours et demi par semaine. Puis là je côtoie des bénévoles, on en a une banque au moins d'une centaine, nous, qui nous aident. Puis, comme j'ai dit dans ma présentation, s'ils n'existaient pas, Le Service d'aide aux néo-Canadiens ne pourrait pas exister pour remplir sa fonction.
Mais, moi, pour moi, c'est qu'il va falloir penser aussi à soutenir, à encourager les bénévoles. Par exemple, bon, les bénévoles le font généreusement. Moi, j'utilise mon auto, je fais tout ça généreusement, comme ça. Mais je me dis: Est-ce que je suis valorisé là-dedans? Je sais que Mercedes me valorise beaucoup, ça c'est bien, mais est-ce que la société peut valoriser mieux ses bénévoles dans ces secteurs-là?
Et, moi, je ne le sais pas, il n'y a peut-être pas à investir bien des sous pour soutenir, encourager les bénévoles, si ce n'est que leur payer un petit goûter une fois de temps en temps, je ne sais pas, leur faire une petite fête une fois de temps en temps. Donc, il y a peut-être des moyens qui ne sont pas très dispendieux, mais pour soutenir, et encourager, et développer notre banque de bénévoles. Parce que, ce que je constate au Service d'aide aux néo-Canadiens, et là c'est différent un peu du Festival des traditions du monde, mais disons au Service d'aide aux néo-Canadiens, c'est que les bénévoles vieillissent et, de plus en plus, ils sont plus âgés. Et ça, je trouve ça dangereux, on n'a quasiment pas de jeunes. Il va falloir aller chercher des bénévoles jeunes pour qu'ils puissent s'intégrer et devenir des bénévoles. Comme on en a qui sont bénévoles à SANC depuis 35, 40 ans, c'est extraordinaire, mais on n'a plus ce phénomène-là, là. Comment attirer les jeunes dans cette voie-là? Alors, peut-être qu'il y aurait quelque chose à travailler pour mieux soutenir les bénévoles. Justement, c'est curieux à dire, les bénévoles sont là pour soutenir, mais, en même temps, il ne faudrait pas oublier de soutenir les bénévoles aussi.
Mme Orellana (Mercedes): C'est ça. Puis, pour compléter un élément de réponse aussi, je pense, c'est par le biais d'un coordonnateur de la banque de bénévoles, de l'action bénévole dans chacun des organismes. Nous, on en a une. On a la chance d'en avoir une, personne, qui, justement, joue le rôle de faire le lien avec tout le bénévolat chez nous. Et cette personne-là a la responsabilité de sélectionner, de choisir les bénévoles, de l'informer aussi, de lui donner tout l'éventail des possibilités de faire du bénévolat chez nous. On lui explique, à la personne, aussi tout le défi que ça représente, le travail d'accompagnement qu'on fait au quotidien auprès des familles. Et on a aussi des activités de reconnaissance, dont quelques occasions par année. On a même une fête pour les bénévoles, annuelle, dont on n'en parle pas beaucoup, mais c'est l'occasion où toute l'équipe de travail rémunérée se met à travailler pour dire: Merci, bravo à nos bénévoles, chapeau pour tout l'apport et votre contribution que vous nous donnez au quotidien.
Je pense que, comme M. Marceau dit, quand on regarde, le coût en vaut beaucoup plus que la chandelle aussi, de tout ce qu'on récolte comme contribution puis comme apport des bénévoles. C'est sûr que ça implique aussi un effet de promotion pour que justement l'effet de bouche à oreille... Nous, on n'a pas de problème énormes à faire du recrutement de bénévoles, parce que les personnes qui sont satisfaites, bien, elles en parlent dans leur réseau, puis elles disent: Bon, bien, le mardi après-midi, moi, j'y vais parce que j'ai telle activité au centre ou je m'en vais visiter une famille qui vient d'arriver, puis etc., puis qui a besoin de telle chose.
Donc, la publicité se fait par elle-même aussi. Je pense que, dans d'autres milieux, dans d'autres régions au Québec, que ce soit Saint-Jérôme, Victoriaville, etc., il y a aussi des bénévoles, des personnes qui sont à la recherche de nouveaux défis pour s'impliquer socialement, pour jouer leur rôle de citoyens. Donc, c'est simplement par un soutien minimal qu'on peut développer cet apport, à mon avis.
Le Président (M. Bernier): Vous voulez ajouter?
M. Marceau (Denis): Peut-être que j'aimerais ajouter que, dans les bénévoles, il faut aller chercher de plus en plus les gens du côté économique, là, les employeurs. Il faudrait investir plus. Les employeurs... J'ai eu un bon coup, il n'y a pas longtemps, là, je suis allé chercher une pharmacienne propriétaire de Sherbrooke, mais elle est au travail. Donc, elle va s'investir comme bénévole, et là je vais aimer la suivre là-dedans et avoir son regard critique. C'est comment on va aller chercher les employeurs qui, eux autres, n'ont pas beaucoup de temps, ne sont pas patients comme nous, etc. Alors, comment aller les chercher pour être dans ce rôle de soutien de bénévolat.
Le Président (M. Bernier): Merci. Nous allons donc passer du côté de l'opposition. M. le député de Bourget.
M. Kotto: Merci, M. le Président. Madame, monsieur, merci d'être là. Si on pouvait vous donner un qualificatif, enfin, pour ma part, je parlerais davantage de missionnaires sans soutane. Vous êtes en quelque sorte la première ligne d'aide aux immigrants avec comme principal objectif l'intégration économique. C'est bien ce que j'ai saisi.
Quel est en moyenne le volume d'immigrants que vous accompagnez chaque année?
Mme Orellana (Mercedes): Par rapport au travail seulement ou de façon générale?
M. Kotto: De façon générale.
M. Marceau (Denis): Entre 800 et 900.
Le Président (M. Bernier): M. Marceau.
M. Marceau (Denis): On a dit, en 2009-2010, nous avons reçu 926 nouvelles personnes; l'an passé, 850. Donc, c'est autour de... entre 800 et 1 000 par année, nouvelles personnes.
M. Kotto: O.K. Et, avec ça, il y a combien de bénévoles qui travaillent avec vous?
Mme Orellana (Mercedes): On parle d'un noyau d'une centaine de bénévoles, mais, dans l'action au quotidien, il y a probablement plus une soixantaine de personnes qu'on appelle plus souvent aussi pour nous accompagner, que ce soit aller chercher les familles au terminus, faire la visite d'appartements, ouvrir un compte en banque, faire différentes démarches aussi, les habiller dans les magasins, etc.
M. Kotto: O.K. Et est-ce que ce nombre de bénévoles varie d'une année à l'autre? Est-ce qu'il arrive parfois que vous en manquiez?
M. Marceau (Denis): Oui.
Mme Orellana (Mercedes): Oui. Prenons par exemple à la période estivale, à l'été. C'est certain que les bénévoles, pour ceux qui sont à la retraite ou qui ont des projets de vacances, ils sont moins disponibles aussi à certains moments. Et, pour nous, l'été, ça ne veut pas dire vacances au niveau de l'accueil. On accueille des familles à n'importe quel moment de l'année, donc l'été, c'est aussi occupé que l'hiver ou l'automne. Et, à ce moment-là, en ayant moins de disponibilités, on doit parfois faire plus d'appels pour être capable d'aller chercher des bénévoles qui viennent nous accompagner.
M. Kotto: Mais, quand vous vous retrouvez dans une telle situation, comment est-ce que vous vous organisez pour répondre à la demande d'accompagnement des immigrants?
Le Président (M. Bernier): ...
Mme Orellana (Mercedes): On fait plus d'appels, on tord des bras parfois un petit peu, on raconte comme des petites blagues au téléphone pour plaire puis on offre, disons, en tout cas... pas le ciel et la terre, mais on réussit quand même, bon an mal an, à trouver des gens qui nous aident.
Le Président (M. Bernier): Merci. M. le député.
M. Kotto: Donc, en fait, je sous-entends, du moins à partir de ce que vous dites, que la continuité du service n'est pas totalement assurée, en quelque sorte.
M. Marceau (Denis): Ce que je déclare et maintiens, c'est qu'on est fragiles...
M. Kotto: O.K.
M. Marceau (Denis): ...du fait que notre banque de bénévoles vieillit et qu'il faut renouveler. Puis là ça nous prend de l'aide pour la développer, cette banque-là, la maintenir à jour, aller chercher la zone plus économique, par exemple, pour nous aider dans cette partie-là. Donc, notre banque est fragile, puis, sans notre banque de bénévoles, là... Je sais qu'on a eu à un moment donné un message de la responsable de la banque des bénévoles en nous disant: Venez nous aider, parce que telle journée, telle journée, on a tels besoins. Puis là ce n'est pas n'importe quels besoins, c'est parfois des gens qui ont une automobile, qui savent parler espagnol ou une autre langue, arabe, et ainsi de suite. Donc, c'est des exigences. Et là, notre banque de bénévoles, parfois elle peut être en difficulté.
Mme Orellana (Mercedes): Exact, oui. Tout à fait.
M. Marceau (Denis): Alors, dans ce sens-là, on est fragiles, C'est pour ça que, moi, je déclare: On réussit à maintenir le minimum du minimum, mais il faut viser beaucoup plus, là, pour être plus... d'une façon satisfaisante et surtout si on veut vraiment faire un pas de plus dans le socioéconomique.
M. Kotto: O.K.
Le Président (M. Bernier): Merci. M. le député.
M. Kotto: Jusqu'à date, quelles sont les différentes sources disons de soutien financier à votre endroit?
Mme Orellana (Mercedes): ...qui est de l'accueil et l'intégration des personnes, c'est évidemment le ministère de l'Immigration et des Communautés culturelles. Et aussi, pour l'intégration économique, on a une partie qui est partagée avec le ministère de l'Immigration et Emploi-Québec. On a une entente aussi avec Emploi-Québec.
Ensuite, il y a aussi un petit peu de l'agence de santé et services sociaux, parce qu'on est gestionnaires d'une banque d'interprètes aussi. Donc, on fait le lien aussi, par le biais du MICC, on fait le lien avec le réseau de la santé et des services sociaux. Nous, on est chanceux parce qu'on a ça depuis deux ans. On ne l'avait pas, puis je sais que, dans d'autres régions, on ne l'a pas. Mais pourtant on est les meilleurs ambassadeurs pour dire les effets positifs d'avoir justement ces liens à faire, autant avec le réseau de la santé qu'avec le réseau de l'éducation, c'est important aussi dans les premières années.
Donc, principalement, c'est nos bases de financement. Il y a aussi la ville de Sherbrooke un petit peu pour la vie associative aussi, parce qu'on est un organisme reconnu par la ville de Sherbrooke.
Le Président (M. Bernier): M. Marceau.
M. Marceau (Denis): J'ajouterais une activité-bénéfice que nous maintenons, entre autres, là, chaque année, le Buffet des nations, puis on a un support très extraordinaire de Mme la ministre. On a eu un bon soutien cette année. Alors, c'est une activité de rapprochement interculturel, mais en même temps bénéfice qui nous aide à dégager quelques milliers de dollars -- mais pas beaucoup de milliers, là, quelques milliers -- qui nous aident à combler un certain nombre de vides, là.
Le Président (M. Bernier): Merci. M. le député.
M. Kotto: Et est-ce que vous considérez à l'heure actuelle que le soutien... ou les différentes sources de soutien financier sont adéquates relativement aux services que vous devez rendre?
**(14 h 50)**M. Marceau (Denis): C'est-à-dire, moi, je maintiens la position suivante, c'est que, si on veut mieux réussir l'intégration socioéconomique des personnes que nous recevons à la hauteur des attentes de la société, c'est-à-dire en faire un succès, nous n'avons pas les ressources nécessaires. Parce que nous avons les ressources pour maintenir ce que j'appelle un minimum acceptable, puis ça dépend à qui qu'on parle pour définir le mot «acceptable».
M. Kotto: O.K., oui, oui.
M. Marceau (Denis): Puis là, je vais prendre juste l'exemple du socioéconomique. On fait beaucoup d'efforts avec... le socioéconomique comprenant bien sûr la partie psychosociale et économique, partie intégration sur le marché du travail. On a un certain succès, mais on devrait avoir au moins 80 % de succès là-dedans; on n'a pas ça. Puis d'ailleurs, bon, vous entendez comme moi les chiffres qui circulent, c'est que juste par rapport au taux de chômage des gens qui proviennent d'ailleurs, il est le double et un peu plus que le taux des natifs au Québec.
M. Kotto: Merci.
Le Président (M. Bernier): M. le député.
M. Kotto: C'est une question complémentaire à celle que je viens de poser. Suivant les variations des volumes d'immigrants que vous accompagnez, est-ce que les ressources financières suivent toujours?
Mme Orellana (Mercedes): Bien, il faut dire qu'on a une façon de négocier avec le ministère aussi par le biais duquel on fixe des cibles, à chaque année, selon ce qu'on pense qu'on est capable d'atteindre. On fixe des cibles pour certaines catégories d'immigrants. Tandis pour d'autres, c'est sûr que c'est... Si on fixe une cible par rapport aux personnes réfugiées prises en charge par l'État, on peut déterminer une cible, mettons, de 200 personnes. Mais admettons que, dans l'ensemble du Québec, le gouvernement, il en a reçu 200 de moins puis il en a envoyé 20 de moins à Sherbrooke, mais, nous autres, on n'atteindra pas notre cible parce qu'il y en a eu 20 de moins de référence. Je ne sais pas si j'ai répondu bien à votre question?
M. Kotto: Non. En fait...
Mme Orellana (Mercedes): Mais vous vouliez savoir si le niveau de financement est variable...
M. Kotto: ...si le niveau de financement est adéquat relativement au volume de gens que vous accompagnez, oui.
Mme Orellana (Mercedes): C'est parce que, dans l'entente qu'on a avec le ministère de l'Immigration, des Communautés culturelles, on a une clause qui dit que, s'il y a dépassement des cibles, on a une mécanique qui nous permet d'avoir un certain remboursement après les cinq premiers dépassements, mais les cinq premières familles sont quand même à la charge de l'organisme aussi selon les paramètres de financement qui étaient fixés pour l'accueil des personnes réfugiées prises en charge par l'État. En fait, ce que je voulais dire, c'est que la façon, la mécanique pour déterminer le financement n'est pas facile, parce qu'elle est reliée pas juste au service qui est donné à la personne, mettons un accueil, un accompagnement, elle est reliée aussi au statut de la personne. Comment ça se fait, par exemple, que, si c'est une personne qui est réfugiée est prise en charge par l'État, il y a tel montant qu'on donne pour tel service, tandis que, pour ce même service là, si la personne est travailleur qualifié, ce n'est pas le même montant? Donc, c'est difficile que je puisse vous répondre de façon complète.
M. Kotto: Comment on peut fixer ce problème, selon vous, de votre perspective, oui?
Mme Orellana (Mercedes): Moi, je pense qu'il y a un exemple, on a un exemple ministériel au gouvernement du Québec avec Emploi-Québec. Emploi-Québec, il a déterminé une offre de service, et les organismes qui sont subventionnés par Emploi-Québec, ils sont subventionnés selon un palier de services. Ce sont les services qui sont déterminés avec une fourchette, d'un minimum et un maximum, et il n'y a pas de lien avec le statut de la personne. Qu'il soit célibataire, qu'il soit immigrant, qu'il soit Québécois, peu importe, c'est un service qui est donné, qui comporte un certain nombre de caractéristiques. Le gouvernement, il s'est assis avec le regroupement d'organismes communautaires pour fixer les modalités de financement à coût forfaitaire, et ils sont arrivés à une formule qui convienne à tout le monde. Donc là, il n'est pas question que ce soit un statut quelconque.
Et comme M. Marceau l'a mentionné précédemment, pour les travailleurs qualifiés, ce n'est pas... Nous, ce qu'on voit sur le terrain, c'est que ce n'est pas si facile, si automatique, si de soi que la personne va s'intégrer parce qu'elle parle déjà français à son arrivée. Il y a quand même toute la connaissance de la culture qu'elle ne possède pas. Il y a tous les repères aussi, certains repères qui sont importants pour être capable de se débrouiller. Et la personne a quand même besoin d'un minimum d'information et d'orientation aussi. Ce n'est pas juste de lui dire: Bon, bien, voici le journal puis débrouillez-vous. Elles ont quand même beaucoup de questionnements aussi, les personnes, même si elles sont capables, oui, de faire plus de démarches par elles-mêmes. Et, à ce moment-là, c'est de se questionner, à mon avis, sur le mode de financement. On en a déjà fait des représentations au ministère par rapport aux paramètres de financement, plusieurs fois.
Le Président (M. Bernier): Merci. M. le député.
M. Kotto: Le gouvernement envisage de maintenir un haut flux d'immigrants au Québec. Donc, inévitablement il y aura un impact un peu partout, notamment dans votre région. Est-ce qu'il est, disons, raisonnable d'envisager, disons, un haut taux d'immigrants à accompagner sans que les moyens suivent derrière?
Le Président (M. Bernier): M. Marceau.
M. Marceau (Denis): C'est-à-dire que, plus on augmente et qu'on ne fait pas suivre le reste dans les mêmes proportions, on se fragilise. Et on se fragilise davantage par rapport aux attentes de la société, dont toute la question de l'intégration socioéconomique à succès, et là je le dis tant pour les indépendants que pour les réfugiés. Nos réfugiés, il ne faut pas les oublier, on espère et on souhaite les amener sur le marché du travail le plus vite possible. Et eux autres, les réfugiés, voudraient aussi comme ça mais... puis, pour les indépendants, ça, c'est évident, mais ce n'est pas évident, là, que, si on augmente le nombre en disant: Bien là, on n'a pas à faire suivre, toutes proportions gardées, tout ce qui suit comme financement, je pense qu'on se fragilise énormément au Québec par rapport aux attentes de la société.
Et vous savez que les attentes de la société, à un moment donné, croulent, c'est-à-dire se manifestent puis on dit: Ça n'a pas d'allure de constater qu'on reçoit 50 000 personnes par année puis qu'elles demeurent, la moitié, à la charge de l'État pour la vie et très peu intégrées sur le marché du travail, ce n'est pas faisable. Alors, moi, je dis: Ça, il faut briser ça. Puis, pour le briser, je pense qu'il va falloir... Moi, d'après moi, il faut maintenir nos niveaux actuels. Puis, nous, on est ouverts à les augmenter, si vous le jugez à propos, en autant qu'on nous donne les ressources qui suivent, toutes proportions gardées, parce que nous avons développé une expertise pour le faire. Mais ça prend des conditions minimales pour pouvoir bien faire opérer ces deux éléments-là, c'est-à-dire bien répondre aux attentes de la société. Si le nombre augmente, bien, bien sûr que les conditions doivent suivre en autant.
Le Président (M. Bernier): Merci. M. le député.
M. Kotto: Je crois que madame voulait...
Le Président (M. Bernier): Ah, vous voulez ajouter. Allez-y, madame...
Mme Orellana (Mercedes): Je veux juste ajouter un élément. Moi, je pense que le ministère de l'Immigration, il fait ce qu'il peut avec le budget aussi qu'il reçoit. Mais s'il y avait quelqu'un qui devrait entendre ce message-là, c'est le Conseil du trésor. C'est les gens qui travaillent avec les finances publiques. C'est les gens qui choisissent aussi où va l'argent au moment de faire le budget, au moment de dire c'est quoi les priorités pour notre province, au Québec. Et, moi, je pense que c'est ces personnes-là qui ont la décision de dire: Mais, oui, O.K., c'est la santé, la priorité, c'est l'éducation, mais c'est aussi l'immigration, c'est aussi tel élément. Parce que le ministère, une fois qu'il a reçu ses crédits, il a beau jouer de droite à gauche, de haut en bas, on fait juste déplacer le mal de place, mais on ne corrige pas les problèmes. À mon avis, c'est quelqu'un de plus haut qu'il faut qu'il prenne conscience, qu'il faut qu'il écoute, qu'il faut qu'il regarde de plus près les chiffres aussi puis qu'il regarde les problèmes que ça occasionne pour la collectivité dans son ensemble pour être capable de changer la vapeur de côté.
Le Président (M. Bernier): Merci. M. Marceau, vous voulez ajouter...
M. Marceau (Denis): Je voudrais juste revenir un petit peu sur ce que j'ai entendu à RDI et à CBC hier, hier au soir aux nouvelles, où on dit que, bien sûr, l'avenir du Québec, là, si on parle de RDI, se fera par l'immigration et le maintien des retraités le plus longtemps possible au travail. Mais, en même temps, c'est que les personnes immigrantes vont nous aider en autant qu'elles soient bien préparées pour répondre aux besoins. Parce que, si elles sont mal préparées, elles ne s'intégreront pas, puis finalement on n'aura rien réglé avec notre raisonnement.
Le Président (M. Bernier): Merci. M. le député.
M. Kotto: Là, je vais poser juste une question qui vous permettra éventuellement de briller pour la postérité. Les succès dans l'accompagnement, vous en avez plus que les échecs ou inversement?
Mme Orellana (Mercedes): Chez nous, il y a beaucoup plus de succès, c'est clair, c'est.. aucun doute là-dessus.
M. Kotto: O.K.
Mme Orellana (Mercedes): Puis on pense continuer à travailler aussi pour être capables de bien réussir ce qu'on fait, même si c'est le minimum du minimum.
M. Marceau (Denis): Je...
Le Président (M. Bernier): Merci. Oui.
M. Marceau (Denis): Ça m'amène aussi à dire, dans la réponse de Mercedes, c'est que je pense que Le Service d'aide aux néo-Canadiens fait bien les choses au niveau de l'accueil. Que ça soit les personnes immigrantes, que ça soit les réfugiés, on déploie beaucoup d'énergie, puis il y a beaucoup d'expertise qui s'est développée à travers les années. Là où le bât blesse, c'est dans l'intégration socioéconomique, donc toute cette question de répondre et de se préparer à bien répondre aux attentes de la société québécoise et particulièrement bien sûr de l'Estrie et de Sherbrooke.
Le Président (M. Bernier): Merci. Donc, je désire vous remercier, M. Marceau, Mme Orellana, de votre participation à cette importante commission. Je demanderais aux gens de la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante de se préparer à prendre place. Je suspends les travaux pour quelques instants. Merci.
(Suspension de la séance à 15 heures)
(Reprise à 15 h 2)
Le Président (M. Bernier): À l'ordre, s'il vous plaît! Nous reprenons nos travaux.
Donc, nous avons le plaisir de recevoir la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante, représentée par Mme Martine Hébert et M. François Vincent. Je vous souhaite la bienvenue. On est heureux de vous recevoir ici cet après-midi, à cette commission. Je vous donne donc la parole pour une période d'environ une quinzaine de minutes pour faire votre présentation. Par la suite suivront les échanges avec les parlementaires.
Fédération canadienne de l'entreprise indépendante (FCEI)
Mme Hébert (Martine): Merci beaucoup, M. le Président. Mme la ministre, distingués membres de la commission, d'abord je tiens à vous remercier de nous donner l'opportunité aujourd'hui de vous présenter le point de vue des PME à l'égard de la planification de l'immigration au Québec.
Comme vous le savez, à la FCEI, on regroupe 24 000 PME au Québec, et nos membres sont présents dans tous les secteurs économiques et dans toutes les régions aussi. Et, les PME, je vous dirais qu'elles sont fortement préoccupées par la pénurie de main-d'oeuvre, qui est un problème important, et je pense que l'immigration offre une réponse à ces problèmes-là.
Bien sûr, la diversité des personnes qui forment une société et qui mettent à profit leurs talents est enrichissante, tant au niveau social que culturel et économique. Alors, c'est pourquoi, M. le Président, la FCEI salue l'initiative du gouvernement dans le cadre de la présente consultation, et on accueille favorablement, je vous dirais, la finalité, là, en majorité, des principes énoncés dans le document de consultation.
C'est sûr qu'en matière de politique liée à l'immigration, l'intégration sociale et économique des personnes qui sont visées sont indissociables et elles sont fort importantes. En ce sens-là, je pense qu'on est satisfaits de constater que le gouvernement se préoccupe justement du profil des personnes recherchées. Plusieurs PME au Québec ont recours à des personnes issues de l'immigration pour combler leurs besoins en main-d'oeuvre. À peu près 20 % de nos membres, un petit peu moins que 20 %, ou plus, selon la région, mais dans l'ensemble à peu près 20 % y ont recours.
Vous savez qu'Emploi-Québec -- on le répète tellement -- prévoit que d'ici 2014 il va y avoir 700 000 emplois à pourvoir au Québec. Et de ce nombre les deux tiers résulteront des départs à la retraite, et le tiers, de la croissance économique. Face à cette situation-là, c'est évident que l'immigration joue un rôle clé. Et, bon, selon les projections de l'Institut de la statistique du Québec, et je cite, «l'immigration deviendra le seul facteur de croissance de la population en âge de travailler. [...]Cette relève sur le plan de la main-d'oeuvre contribuera ainsi à la poursuite de l'activité économique et au maintien de la croissance du PIB du Québec.» Fin de la citation.
Ainsi, les besoins du marché du travail doivent absolument jouer un rôle central, selon nous, dans la sélection des candidats à l'immigration économique. Dans cette perspective, on est satisfaits, je vous dirais, des orientations présentées dans le document de consultation, qui vise à «maintenir annuellement à un minimum de 65 % la part de l'immigration économique dans l'ensemble des admissions». Cependant, la pénurie de main-d'oeuvre est bel et bien à nos portes, et on se demande si on ne pourrait pas mettre la barre un peu plus haute à l'égard de la cible de 50 % établie pour les travailleurs qualifiés.
Maintenant, regardons où sont les besoins les plus pressants, M. le Président. Nos données nous montrent que les entreprises du secteur de l'agriculture sont les plus touchées par la pénurie de main-d'oeuvre, tandis que la pénurie de compétences touche davantage le secteur de la finance, de l'assurance et des biens immobiliers. Les secteurs du transport, de l'accueil et de l'hébergement, et dans l'ensemble au moins trois entreprises sur 10 soulignent être aux prises avec les deux types de pénurie: pénurie de main-d'oeuvre et pénurie de compétences.
Par ailleurs, 42 % des PME québécoises ressentent la pénurie de main-d'oeuvre dans les postes exigeant des compétences techniques et spécialisées -- niveau B, qu'on appelle. Elles sont 37 % à être confrontées à des difficultés de recrutement pour le personnel qui a des compétences intermédiaires et de travail de bureau, et seulement 13 % à affirmer rechercher des employés qui ont des compétences élémentaires ou des manoeuvres.
Or, M. le Président, quand on met en relation ces besoins-là, exprimés par les PME, avec les compétences des personnes qui proviennent de l'immigration économique, on remarque -- c'est un peu troublant -- que la réponse ou en tout cas l'adéquation entre les deux ne semble pas toujours au rendez-vous. Les candidats qui ont des compétences en gestion et les professionnels, en tout cas à la lumière des données qu'on a, ont semblé être privilégiés au détriment des personnes qui présentent un niveau de compétences techniques, paraprofessionnelles et intermédiaires.
D'ailleurs, le Vérificateur général, et rappelons-le, dans son rapport en 2010, a lui aussi souligné ce décalage, rappelant, et je cite, que «selon le Règlement sur la sélection des ressortissants étrangers, les travailleurs qualifiés sont des personnes qui viennent s'établir au Québec pour occuper un emploi qu'ils sont vraisemblablement en mesure d'exercer». Il a constaté que, pour la période de 2006 à 2008, «seulement 9 % des candidats sélectionnés présentaient un profil répondant aux exigences dans les domaines de formation privilégiés au Québec [et que] 65 % des travailleurs qualifiés sélectionnés n'ont eu aucun point pour le domaine de formation. La note de passage a été obtenue surtout grâce à d'autres caractéristiques -- niveau de scolarité, âge et connaissance du français.» Fin de la citation.
Le Vérificateur général a suggéré au ministère d'améliorer sa méthode de sélection notamment en examinant les meilleures pratiques à l'international et en considérant aussi d'autres moyens pour attirer des candidats qui répondent vraiment aux besoins du marché du travail. Il a constaté, et je cite encore, que «la grille de sélection du Québec repose davantage sur une évaluation du potentiel socioprofessionnel du candidat que sur des possibilités concrètes d'emploi. Un candidat peut atteindre le seuil d'employabilité de la grille de sélection sans avoir une formation dans un domaine privilégié s'il obtient les points requis pour les autres facteurs et critères de la grille.» Alors, c'est pourquoi on a recommandé, dans le fond, M. le Président, que les critères de sélection de l'immigration économique prennent davantage en compte les besoins des petites et moyennes entreprises et qu'à cet égard le gouvernement, lors de sa sélection, favorise l'admission de candidats qui ont des compétences de niveau technique, intermédiaire et compétences élémentaires et manoeuvres.
De plus, considérant l'importance des départs à la retraite et de la pression sur le marché du travail, on pense que la cible du gouvernement devrait être augmentée. Et c'est pourquoi on recommanderait que le ministère de l'Immigration et des Communautés culturelles, là, fixe à 60 % la proportion des requérants principaux de la catégorie des travailleurs qualifiés détenant une formation dans des champs de compétence correspondant à des besoins exprimés sur le marché du travail.
Maintenant, M. le Président, abordons les obstacles que rencontrent les PME en matière d'embauche de travailleurs, parce que c'est important, c'est la contrepartie de ce dont on parle. Je vous dirais qu'en tête de liste on retrouve la complexité du système et la paperasserie, suivis par la difficulté de garder les nouveaux immigrants qui ont un statut temporaire.
Je sais qu'il y a beaucoup d'efforts, et on doit le souligner, M. le Président, qui ont été faits au cours des dernières années par le ministère de l'Immigration et des Communautés culturelles, et on a vu des changements tangibles à plusieurs égards. Par contre, je pense qu'il y a encore des améliorations qui peuvent être réalisées dans ce domaine. Et c'est pourquoi on a recommandé que le ministère, en collaboration avec ses partenaires, évalue les possibilités de simplifier encore davantage et de réduire encore davantage les formalités administratives et réglementaires liées à l'immigration, malgré les progrès qui ont été réalisés ou dans la foulée des progrès qui ont été réalisés, plutôt.
On voudrait aussi que le ministère, de concert avec les PME du Québec, mette sur pied des passerelles, ou continue d'en mettre, pour faciliter, en amont du processus d'immigration, le recrutement direct à l'étranger par les employeurs et qu'on intensifie les efforts encore plus dans ce sens-là aussi.
Maintenant, quelques mots sur la question du français. M. le Président, le document de consultation qui nous a été soumis comporte deux orientations sur l'importance de la connaissance du français. C'est sûr que de connaître le français, c'est un élément central à l'intégration des immigrants dans une société majoritairement francophone comme le Québec et c'est également important pour une intégration en emploi réussie. En ce sens-là, la FCEI est favorable aux orientations gouvernementales en la matière parce qu'elles répondent aux préoccupations des PME et qu'elles améliorent l'employabilité des nouveaux arrivants.
**(15 h 10)** Il faut savoir que, quand on demande aux PME c'est quoi, les principaux problèmes liés à l'intégration des nouveaux arrivants dans l'entreprise, la barrière de la langue arrive en première position, avec 67 % des mentions, devançant presque du double les relations avec d'autres employés en raison des différences culturelles ou religieuses, qui représentent 39 % des mentions. Ces données sont assez éloquentes sur l'importance de la connaissance de la langue pour accéder plus facilement au marché du travail.
Ces résultats-là militent aussi, donc, en faveur des efforts qui ont été faits par le ministère de l'Immigration et des Communautés culturelles ces dernières années pour répondre davantage aux besoins des entreprises quant à la francisation de leurs employés. Soulignons notamment les outils offerts en ligne, les travaux pour harmoniser les services et l'offre de cours de francisation en entreprise. C'est pourquoi on recommande, dans le fond, que le gouvernement maintienne les orientations quant à l'importance de la connaissance linguistique, mais qu'il poursuive aussi ses efforts dans la mise en place de programmes de francisation flexibles et disponibles en entreprise.
Venons-en maintenant à la fameuse question des bassins géographiques de provenance de l'immigration. Le document de consultation proposait de «rééquilibrer progressivement la proportion que représente chacun des grands bassins géographiques [...] pour qu'en 2015 cette proportion[-là] soit limitée à un maximum de 30 % pour chacun des bassins».
Je pense que, M. le Président, l'objectif de diversification des bassins de provenance est noble et est quelque chose de souhaitable. On ne veut pas créer des ghettos, dans notre société, ou quoi que ce soit. Ce n'est pas quelque chose qui favorise une meilleure intégration. Mais je pense que le défi en la matière va être de trouver le juste équilibre entre la diversification des bassins géographiques, les connaissances linguistiques et les qualifications requises sur le marché du travail pour répondre aux besoins des PME en matière de main-d'oeuvre. C'est pourquoi, dans tous les critères qu'on utilise pour sélectionner les personnes qui vont intégrer la société québécoise, je pense qu'il faut rappeler que l'objectif principal doit demeurer de trouver les meilleurs candidats répondant aux besoins du marché du travail et qui ont des compétences de base, qui leur permet une intégration réussie, peu importe la provenance. Autrement dit, il ne faudrait pas que la diversification des bassins amène des distorsions ou nous écarte de l'objectif principal qui est, dans le fond, de pourvoir la pénurie de main-d'oeuvre qu'on a, que connaissent les PME au Québec.
Un petit mot, M. le Président, sur les travailleurs temporaires, qui sont une main-d'oeuvre très précieuse pour les PME dans beaucoup de secteurs d'activité. Vous savez que le gouvernement fédéral a modifié la réglementation concernant les travailleurs étrangers temporaires. Certains aspects de cette modification-là, puis d'autres sont venus vous en parler, là, affectent directement les PME, et particulièrement la limitation à quatre ans du droit aux travailleurs étrangers temporaires de travailler au Canada et qu'ils doivent attendre, après ça, six ans pour pouvoir revenir. Vous savez, les entreprises ont souvent les mêmes travailleurs, et elles ont déployé des efforts et des ressources pour les former, ces travailleurs-là. On est donc opposés à cette barrière à l'entrée qui a été imposée, là, par le gouvernement fédéral.
Le gouvernement a affirmé vouloir que ces personnes demandent le statut de résident permanent si elles désirent travailler au Canada de façon permanente. Toutefois, ce qu'on sait, c'est que souvent l'accès à la résidence permanente ou à l'immigration est presque impossible pour les travailleurs non spécialisés et/ou sans formation, et ça, comme on l'a vu, même s'il y a des besoins importants sur le marché du travail pour ce type de main-d'oeuvre. Alors, cette restriction-là, pour nous, est non seulement néfaste pour le marché du travail, mais on pense qu'elle prive aussi le Québec de bons candidats, avec lesquels ils entretiennent une relation d'emploi en fonction de leurs besoins.
Bien évidemment, ces nouveaux critères là complexifient aussi le programme de façon importante, là, pour les entreprises, et nous estimons que des améliorations pourraient y être apportées. C'est pourquoi on a recommandé dans notre mémoire, d'ailleurs, que des pourparlers soient entrepris avec le gouvernement fédéral pour simplifier le programme des travailleurs temporaires et que l'on facilite l'acquisition de la résidence permanente pour les travailleurs temporaires travaillant au Québec depuis plus de trois ans et désirant s'y établir.
En conclusion, M. le Président, je pense qu'il faut réitérer qu'effectivement l'immigration ça vient beaucoup enrichir la société québécoise et que c'est aussi une composante importante de notre développement économique, social et culturel. Comme on l'a démontré, nos PME -- et je le répète, puis on ne le répétera jamais assez -- sont vraiment aux prises avec une pénurie de main-d'oeuvre, et je pense qu'une bonne planification de l'immigration peut vraiment apporter une solution à ce problème-là, qui risque de s'accentuer suite aux importants départs à la retraite et au vieillissement de la population du Québec.
C'est pourquoi on souhaite que le gouvernement considère l'ensemble de nos recommandations afin que le Québec puisse atteindre ses objectifs, notamment en matière de besoins de main-d'oeuvre dans les PME, et ce qui va en bout de ligne, de toute façon, contribuer à enrichir le dynamisme économique, culturel et social du Québec. Je vous remercie.
Le Président (M. Bernier): Merci, Mme Hébert. Merci de votre présentation. Nous allons donc passer aux échanges avec les parlementaires. Mme la ministre.
Mme Weil: Alors, merci beaucoup de votre présence. Merci beaucoup du travail extraordinaire que vous faites et de cette présentation. C'est vraiment de la musique à mes oreilles, c'est sûr, en tant que ministre de l'Immigration et des Communautés culturelles, parce que c'est tout ça, hein, l'immigration? C'est un capital humain compétent, scolarisé, etc., qu'on va chercher, qui parle français, pour enrichir et répondre aux besoins de qui? De ces entreprises qui sont là pour créer la richesse, qui sont là pour participer au développement de la société. Évidemment, ces gens contribuent aussi à la société à tout point de vue, culturel, social et tout, mais il faut toujours rappeler aux gens cette dynamique. C'est sûr que les groupes qui viennent ici échanger avec nous adhèrent beaucoup à cette vision, mais votre connaissance des besoins des PME, c'est précieux pour nous, et je pense qu'on aura à poursuivre sur certains enjeux.
Vous avez parlé des travailleurs non qualifiés temporaires. Il y a quelque chose là. On va peut-être former un groupe pour regarder un peu plus profondément. Il y a des expériences ailleurs, en Alberta. Il faut regarder ça, parce qu'on a une crainte que, si on ne porte pas attention, on va manquer le bateau peut-être. Alors, comment fait-on pour répondre à ça tout en préservant cette qualité de profil d'immigration qu'on va aller chercher?
Je voulais juste vous dire quelques éléments. La grille de sélection, suite au rapport du Vérificateur, a été modifiée en 2009, pour répondre à vos préoccupations. Il y a là-dedans des formations techniques, justement. Alors, ça, ça a été fait. Ça ne veut pas dire... Et ça, c'est en temps constant, hein, avec Emploi-Québec. Oui, et puis en plus ils sont priorisés. Alors, 48,3 % des dossiers acceptés obtiennent des points au critère Domaine de formation, contrairement à 33,1 % avant les modifications. Et ensuite, une fois qu'on les repère, les traitements de ces dossiers sont priorisés. Alors, ça, c'est des améliorations.
Il y a aussi... Donc, vous, vous parlez d'augmenter les travailleurs qualifiés dont le profil répond aux besoins du marché de 50 %, ce que nous, on propose, à 60 %. Et là, évidemment, c'est que le Québec est en compétition, vous l'avez dit, d'autres l'ont dit, surtout du secteur économique, avec d'autres provinces et avec d'autres États, d'autres sociétés. Et l'immigration se présente comme un marché. Et on n'est pas passifs. Et les gens veulent absolument venir nécessairement ici, au Québec. Il faut travailler fort pour aller les chercher. Et on est en compétition, puis il faut être proactif. Donc, 50 %, nous, on considère que c'est réaliste. On est à 48 % actuellement. L'autre élément... Donc, ça, c'est une... Je ne pense pas qu'on serait capable d'aller jusqu'à 60 %. Peut-être qu'éventuellement on peut imaginer d'être plus ambitieux, mais on y va petit à petit.
L'autre chose, évidemment, il y a toujours cette question d'équilibre dans le profil qu'on va chercher. D'une part, ceux qui sont capables de répondre aux besoins ponctuels, plus ou moins court terme, du marché du travail, et d'autres qui sont scolarisés et ils ont une capacité d'une mobilité latérale. Donc, c'est toujours ce grand portrait de l'immigration qu'on essaie de...
Je mentionne certaines choses, juste pour... PELI, le programme de recrutement en ligne international, je pense qu'il répond aussi à votre intérêt qu'on aille recruter directement à l'international. Ça, ça a été mis sur pied tout récemment avec Emploi-Québec, qui semble être... les gens réagissent très, très bien, les entreprises, à ça, et il y a les missions, évidemment, qui se font en France.
Maintenant, pour parler des travailleurs temporaires, le PEQ... vous connaissez le Programme de l'expérience québécoise, c'est-à-dire des travailleurs temporaires qualifiés et les étudiants qui étudient? On a mis sur pied en 2010... Parce que tout le monde disait: Ils ont besoin de l'expérience québécoise pour avoir un emploi ici. On a mis sur pied ce programme PEQ, Programme de l'expérience québécoise, qui met ces personnes-là sur la voie rapide. Alors, je voulais savoir si vous étiez au courant de ça et s'il y a... Sinon, ça veut dire qu'il y a peut-être du travail de promotion à faire. Et comment vous voyez ce programme-là, s'il faut faire d'autre chose pour stimuler... Pour l'instant, les chiffres sont quand même assez intéressants. On est allé chercher près de 4 000... un peu plus de 3 000 personnes, qui ont reçu un CSQ. Et c'est dans un échéancier très court, entre un an, deux ans. Donc, au lieu d'attendre de renouveler... ou le quatre ans, ils sont sur une voie rapide. Je voulais savoir si vous étiez au courant de ce programme.
**(15 h 20)**Mme Hébert (Martine): Oui. Je pense même qu'on en parle un petit peu.
Le Président (M. Bernier): Oui, Mme Hébert.
Mme Hébert (Martine): Oui. Pardon, M. le Président. Oui, je pense qu'on en parle quelque part dans notre mémoire ou en tout cas... Et on siège aussi, Mme la ministre, à votre comité, là, des intervenants économiques du MICC, donc on est... M. Vincent ici est familier avec les programmes.
Je pense que ce qu'il est important de retenir, dans le fond, c'est que plus on va lever les obstacles, mieux ça va être. Quand on parle de «fast track», en bon français, c'est toujours souhaitable. Et, vous savez, les entreprises... Ce qu'il faut dire, c'est que nos PME, au Québec, croulent déjà suffisamment sous un fardeau de paperasserie et de bureaucratie énorme. Et, si on veut favoriser, dans le fond, l'intégration des personnes issues de l'immigration, il faut accélérer les processus, minimiser la paperasserie, et minimiser les coûts, et aussi essayer de rentrer dans des délais les plus courts et les plus rapides possible, parce que la pénurie de main-d'oeuvre, elle n'arrivera pas dans 10 ans, là, elle est déjà à nos portes, elle est déjà bien établie au Québec.
Alors, je pense que ce genre de programmes là sont des programmes intéressants, c'est des beaux exemples à poursuivre, Mme la ministre, et, comme j'ai dit dans mon allocution, d'ailleurs, on souligne, là, beaucoup d'efforts, les coffres à outils qui ont été développés par le ministère. Ce qu'on pense, c'est que, là où... Je suis contente de vous entendre dire que la grille de sélection a été modifiée, parce que, quand on regardait les données, les dernières données, là, qui étaient tirées de Caractéristiques de l'immigration 2011 versus ce que, nous, notre sondage disait, là, où étaient les besoins, il y a un gros décalage. Quand on dit: les professions en demande dans les PME, 42 % techniciens et paraprofessionnels, versus 22 % des personnes qui ont été admises, là, on avait un gros décalage. Alors, je ne sais pas depuis quand votre grille a été modifiée et, votre 48 %, là, vous l'avez obtenu, mais c'est une bonne nouvelle. Mais je pense que, le focus, c'est là-dessus qu'il faut le garder, et plus on aura de programmes qui facilitent l'entrée rapide ou encore des aménagements pour permettre de garder les travailleurs qui ont les compétences pour travailler dans nos PME au Québec, mieux ce sera.
Le Président (M. Bernier): Merci. Mme la ministre.
Mme Weil: Oui. Juste une précision: c'est en fait 20 jours ouvrables d'une demande, en vertu du PEQ, que la personne reçoit le... C'est 20 jours ouvrables, je me corrige, que la personne reçoit un certificat de sélection du Québec. Alors, ça, c'est vraiment très, très rapide.
On a beaucoup parlé aussi, ces derniers jours... Et c'est un commentaire qui est beaucoup fait, et c'est surtout les PME: Comment fait-on pour ouvrir les PME à la diversité? Beaucoup de gens parlent de ça. Et, nous, on a des programmes, mais évidemment c'est les employeurs qui engagent. Et, nous, on peut avoir toutes sortes de programmes et faciliter, évidemment, le parcours de quelqu'un qui veut immigrer, mais, une fois que la personne est rendue, puis acceptée, puis a été sélectionnée, on nous dit qu'il y a des barrières. Nous, on le sait. On essaie d'avoir différents programmes pour ouvrir les entreprises, et c'est surtout chez les PME.
Maintenant, là, on sent peut-être une conjoncture intéressante parce que la pression maintenant, à cause des départs à la retraite, va faire en sorte... Et, moi, je suis allée en région, puis j'avais remarqué beaucoup d'ouverture, parce qu'on a des ententes de régionalisation. Vous parlez de ça comme important. Pour le MICC aussi, le gouvernement, la régionalisation de l'immigration est très importante. Il y a des besoins qui se font sentir.
Comment vous voyez tout ça, la conjoncture, d'une part, qui peut peut-être forcer l'ouverture, et des programmes, peut-être que vous avez, sur la gestion de la diversité? Parce que ça, ça revient un peu beaucoup, comme thème, c'est-à-dire comment gérer cette diversité. Et les grandes entreprises ont plus d'expérience avec ça. Est-ce qu'il y a peut-être un transfert d'expertise à faire des grandes entreprises aux PME? Juste vous entendre là-dessus.
Le Président (M. Bernier): Mme Hébert.
Mme Hébert (Martine): Merci, M. le Président. Je vous dirais d'abord, Mme la ministre, qu'il ne faut pas confondre ce qui... Il faut donner à César ce qui appartient à César et l'accuser aussi de ce dont il doit être accusé, dans le sens où il y a... Vous dites: Il y a une barrière dans les PME, etc. Il ne faut pas confondre, je pense, ça avec les problèmes ou les défis qu'on a au Québec par rapport à la régionalisation de l'immigration. Et, bon, vous savez que les PME... 95 % de nos entreprises au Québec sont de petite taille, effectivement. Donc, il y a une concentration des populations issues de l'immigration dans les grands centres urbains, on le sait, et il ne faut pas... dans le fond, il ne faut pas mélanger les deux problématiques.
Cela étant, effectivement, je vous dirais que, quand on... En tout cas, nos données, ce qu'elles montrent, là, pour répondre à votre question, la première préoccupation qui a trait au problème d'intégration des personnes issues de l'immigration dans l'entreprise ou dans la collectivité, ce que les PME nous disent, c'est la barrière de la langue à 67 %. 39 % nous disent les relations avec d'autres employés en raison des différences culturelles ou religieuses, et c'est là où on entame votre sujet de la gestion de la diversité. Bon, évaluation des diplômes étrangers, après, 18 %, etc. Donc, principalement, donc, premièrement, la langue, d'où, pour nous, ce qui est important, d'abord et avant tout, ce sont les programmes de francisation en entreprise. Je pense qu'on l'a dit, puis je me permets de vous le réitérer.
Et les programmes de gestion de la diversité, comme vous dites, je pense que ça passe probablement aussi par quelque chose de beaucoup plus large. Je ne sais pas, la responsabilité ne revient pas nécessairement uniquement aux PME. Puis il faut se dire que, dans une PME, bien, malheureusement tu n'as pas un département de ressources humaines, hein, pour t'accompagner dans ce genre de choses là. Tu sais, il faut se dire que 75 % de nos entreprises au Québec ont moins de 10 employés. Ça fait qu'on se doute bien qu'ils n'ont pas de département de gestion des ressources humaines. Alors, il faut voir comment tout ça s'harmonise mais dans une perspective beaucoup plus systémique que de dire «pour les PME en particulier».
Le Président (M. Bernier): Mme la ministre.
Mme Weil: Oui. Merci, M. le Président. À Montréal, on a lancé un projet qu'on a supporté -- je pense que, si je me souviens bien, c'est la CRE -- justement parce que les PME, il y en a beaucoup, c'est trop petit, elles ne peuvent pas avoir un agent gestion de la diversité. Alors, il y a un partage. L'idée, c'est qu'il y a plusieurs PME qui vont se partager une ressource. C'est un projet pilote qu'on essaie de voir. Je vous lance ça comme peut-être une idée à développer. Et par région, évidemment, si on va dans ce sens-là. C'est peut-être dans... Nous, on va voir les résultats de ce projet-là pour voir si ça peut bien marcher. Mais ce que je ressens, c'est qu'il va falloir qu'on travaille très fort là-dessus, parce qu'on a ce bassin de talents intéressant, on a un taux de chômage plus élevé chez les immigrants.
La question de la francisation, oui, je vous entends. On travaille fort là-dessus. On a diversifié l'offre. On continue à travailler là-dessus. Il y a des cours de francisation au sein des entreprises.
Alors, je pense qu'on a besoin de tous travailler ensemble, et peut-être de partager des bonnes idées, partager des expériences, des projets pilotes, et voir à stimuler finalement les meilleures pratiques en la matière.
Le Président (M. Bernier): Merci. Mme Hébert. Ah...
Mme Hébert (Martine): Oui. M. Vincent...
Le Président (M. Bernier): Allez-y, monsieur...
M. Vincent (François): Oui. Donc, vous référez à un programme qui semble intéressant. Ce qui est important, pour nous, c'est que le programme soit adaptable aux PME. Parce que vous avez référé, dans l'exemple précédent, que des programmes sont bien implantés dans les grandes entreprises, mais la réalité «PMEiste» est complètement différente.
Mme Weil: ...premier volet.
M. Vincent (François): Avec 10 employés, la proximité avec les employés puis le patron est beaucoup plus petite. Ils vont manger dans la cafétéria en même temps, donc il y a aussi des contacts humains plus proches, qui vont permettre de soi une meilleure adaptabilité des différentes communautés culturelles au sein de l'entreprise. Donc, des programmes les plus adaptables possible.
Je fais référence ici aussi à des programmes que vous avez mis en place, qui sont super. Le programme sur la francisation, qui permet d'aller faire la francisation en entreprise, ça, c'est un exemple de programme qui fonctionne bien. Parce que l'employeur qui a cinq employés, il ne peut pas libérer une personne pour aller prendre des cours de français, il vient de perdre une grande proportion de sa main-d'oeuvre. En permettant d'aller en entreprise, ça, c'est un exemple d'adaptabilité au niveau de la PME. PRIIME-emploi aussi, où il y a des subventions salariales qui incitent l'employeur à aller vers l'embauche d'une personne immigrante, puis ensuite de ça voit que c'est bien, donc qui va continuer. Je pense que le taux de rétention est de 80 % pour les personnes qui vont sur PRIIME-emploi. Donc, ça, c'est un programme qui est très intéressant.
Puis vous avez fait référence aussi à la régionalisation. On en parle dans notre mémoire. On pense que ça pourrait être intéressant aussi, justement pour inciter la main-d'oeuvre à aller... des nouveaux arrivants à aller en région, parce qu'il y a un exode des jeunes aussi en région.
Puis, bon, bien, pour conclure, il y a déjà 20 % des entreprises qui ont une main-d'oeuvre immigrante, puis ça va aller en augmentant. Donc, je crois que, dans les entreprises, étant donné qu'elles sont petites, l'adaptation va venir aussi, puis il va y avoir un changement de culture qui va aller en s'agrandissant aussi au sein des entreprises.
Le Président (M. Bernier): Mme Hébert, vous voulez ajouter?
**(15 h 30)**Mme Hébert (Martine): Peut-être juste pour compléter... Merci, M. Vincent. Peut-être juste pour compléter, Mme la ministre, dans le fond, c'est quoi, les caractéristiques des programmes que M. Vincent vient de vous énumérer? Flexibilité, facilité d'accessibilité, pas 300 millions de formulaires en 15 exemplaires à remplir, avec 12 000 questions par page. Donc, je pense que c'est ça, la leçon qu'il faut retenir, et avec des mesures incitatives qui sont flexibles, faciles à administrer et qui ne commandent pas, là, d'avoir un doctorat en paperasserie gouvernementale pour obtenir la subvention.
Le Président (M. Bernier): Merci. D'autres questions?
Mme Weil: Est-ce qu'il reste du temps?
Le Président (M. Bernier): Oui, il reste encore du temps.
Mme Weil: Vous avez parlé... Vous aviez des données provenant de votre baromètre des affaires sur les préoccupations de vos membres. J'aimerais en savoir un peu plus sur cet outil, hein, outil de travail que vous avez développé...
Le Président (M. Bernier): Mme Hébert.
Mme Hébert (Martine): Vous savez, la...
Mme Weil: ...le type d'information que vous allez chercher puis...
Mme Hébert (Martine): Vous savez, la fédération, on est pancanadien, un organisme pancanadien. On a 108 000 membres au Canada. On est le plus important regroupement de PME à l'échelle canadienne en proportion, là, du nombre d'entreprises. Donc, c'est un outil qui est développé par notre département d'économie. On a une section économie, un peu comme les institutions financières. On est un OSBL, mais on a un département d'économie, avec notre économiste en chef, M. Ted Mallett, qui a développé cet outil-là, qui est outil où on mesure mensuellement l'optimisme des entreprises, donc, et aussi leurs préoccupations à différents égards. Et à partir de ça on construit un indice mensuel, qu'on publie, et cet indice-là, dans le fond, donne, calculé à partir de beaucoup d'indicateurs, l'état ou le moral, l'état du moral des PME à l'échelle canadienne et au Québec aussi, parce qu'on a les résultats par province.
Le Président (M. Bernier): Mme la ministre.
Mme Weil: Un baromètre qui pourrait être très utile pour les décideurs politiques, d'après ce que je comprends. C'est sur votre site Web? De tester un peu les...
Vous avez parlé d'une orientation qui est formulée en termes de rééquilibrage de bassins et vous dites: Ce serait... Vous comprenez l'idée derrière ça, la diversité. D'ailleurs, ces deux derniers jours, j'ai fait plusieurs entrevues à ce sujet. Je pense que vous avez peut-être vu ça. Donc, vous, vous êtes d'accord si on... L'idée, ce serait de changer la formulation, qui crée un malaise. Honnêtement, ça crée un malaise, et vous l'identifiez bien dans votre mémoire. La majorité des gens sentent un malaise. Donc, il ne faudrait pas aller avec des orientations qui créent un malaise parce qu'on cherche l'adhésion de tous à nos politiques et nos orientations en immigration.
Mais cette idée de diversité, elle est intéressante, je le crois fermement. Je pense qu'on va beaucoup plus vers ça dans les années à venir: diversité à tous les niveaux, à tous les points de vue. Et ce qu'on entend beaucoup surtout du milieu des affaires et des entreprises, c'est cette plus-value. Et c'est quelque chose d'assez concret aussi pour eux, la diversité. Et c'est beaucoup le discours que j'entends au Canada anglais, qui ont fait des études, le Conference Board et là le Conseil du patronat, qui répète ces discours. Aux États-Unis, depuis plusieurs années, ils font des études là-dessus. Ça crée des équipes plus compétitives, plus créatives. Ça crée des têtes de pont.
Est-ce que vous voyez les PME aussi qui commencent à s'intéresser? Évidemment, ils sont plus petits et ils ne sont peut-être pas rendus là. Mais que cette notion de diversité... Vous, vous l'endossez. Donc, vous représentez les PME. Est-ce qu'il y a quelque chose à faire de ce côté-là pour faire avancer cette notion de diversité? Est-ce qu'ils adhèrent?
Le Président (M. Bernier): Mme Hébert.
Mme Hébert (Martine): Je vous dirais que, dans une PME, la diversité, là, elle est assez facile à calculer, hein? Quand tu as moins de cinq employés puis que tu embauches une personne issue de l'immigration, tu as 20 % déjà de ton personnel. Donc, on est déjà pas mal diversifié, à ce moment-là.
Il faut regarder en proportion de ce que c'est. Vous mentionniez le Conference Board, etc. Il faut vraiment différencier entre la grande entreprise et la petite entreprise. Je ne suis pas qualifiée pour vous parler de la grande entreprise. Je pense que mes homologues viennent d'autres organisations, qu'ils les représentent. Je vais leur laisser ça à eux.
Je peux vous parler de la petite entreprise, par exemple. Et dans ce sens-là je vous dirais que la question des bassins géographiques, moi... Dans n'importe quoi, la diversité effectivement est toujours souhaitable. Maintenant, nous, ce qu'on vous dit, Mme la ministre, c'est que, si vous décidez d'aller de l'avant, il ne faudrait pas que, pour atteindre des quotas, dans le fond, on se prive de main-d'oeuvre dont nos PME ont besoin. Nous, ce qui compte en premier pour nous, ce n'est pas... Et c'est là où il faut préserver l'équilibre, dans le fond, dans cet équilibre peut-être fragile ou en tout cas tridimensionnel, je vous dirais, entre... Mais il ne faut pas non plus que la langue devienne le principal facteur. Il ne faut pas non plus que la provenance devienne le principal facteur. Pour nous, ce qui doit primer, c'est vraiment: Est-ce que les travailleurs, est-ce que les personnes qu'on accueille dans la section de l'immigration économique, est-ce qu'elles vont répondre aux besoins de nos PME? Et, pour nous, ça, c'est le premier facteur.
À partir de là, après ça, le reste est secondaire et découle... Parce que, si on est pour se priver de travailleurs qualifiés pour faire rentrer un paquet de travailleurs avec des doctorats ou des maîtrises, parce qu'on a émis des quotas ou parce qu'on a émis des barèmes pour les PME du Québec... Et je n'ai rien contre les diplômés universitaires, j'en suis une moi-même, comme beaucoup d'entre vous, donc je n'ai rien contre ça, mais on se prive d'une main-d'oeuvre. Et, pour nous, ce qui doit primer... Et c'est pour ça qu'on dit: C'est l'équilibre fragile, là, entre tout ça, et je pense que c'est là, la notion. Ce qui doit primer, c'est les compétences. Est-ce que ces travailleurs-là ont des compétences de niveau technique, et professionnel, et spécialisé dont nos PME ont besoin pour fonctionner?
Le Président (M. Bernier): Merci, Mme Hébert. Nous allons donc passer du côté de l'opposition officielle. M. le député de Bourget.
M. Kotto: Merci, M. le Président. Mme Hébert et M. Vincent, merci d'être là. Je vous ai écoutés attentivement et, la connaissant, je suis persuadé que la ministre a bien saisi vos doléances, donc je ne reviendrai pas sur l'ensemble des sujets que vous avez abordés.
J'irai cependant sur deux points, celui notamment de la pénurie de la main-d'oeuvre, qui vient, disons, en paradoxe avec le taux de chômage chez les immigrants, le taux de chômage élevé chez les immigrants. Est-ce que les PME ont, disons, conscience qu'elles ont une part de responsabilité ou un souci de partage des responsabilités à assurer relativement à l'intégration de cette main-d'oeuvre-là? Autrement dit -- je prendrai la chose autrement -- est-ce que l'employé d'origine étrangère est attendu dans les PME, comme on le dirait dans le domaine de la construction, clé en main? Est-ce que les PME attendent que l'État leur livre ces employés étrangers déjà formés, déjà qualifiés pour entrer dans leur réseau?
Le Président (M. Bernier): Mme Hébert? M. Vincent...
Mme Hébert (Martine): Bien, écoutez, la première chose, sur votre premier commentaire, M. le député, je vous dirais... Vous parliez du taux de chômage, donc d'où l'importance de notre recommandation d'assurer une meilleure adéquation entre les besoins et la qualification des personnes qui sont admises au chapitre de l'immigration économique. Quand on regarde les données, techniciens et paraprofessionnels, 42 % des PME disent qu'ils en ont besoin, alors qu'on a admis seulement 22 % des personnes dans cette catégorie-là, contre 43 % qui avaient des compétences en gestion et des diplômes professionnels, alors qu'il y a seulement 7 % des PME qui en demandent. C'est très certainement un facteur qui peut expliquer... en tout cas un, je ne dis pas que c'est le seul, mais c'est probablement un des facteurs qui peut fortement expliquer le phénomène que vous décriviez tantôt.
Deuxièmement, quand on regarde... quand on décortique un petit peu ils sont où, les membres, elles sont où, les PME du Québec qui embauchent des personnes issues de l'immigration, ce qu'on constate... on vous a dit à peu près une sur cinq au Québec dans l'ensemble, mais on constate qu'elles sont surtout concentrées dans la région de Montréal, 30 %, de la Capitale-Nationale, 22 %, de l'Estrie -- on avait des représentants, tantôt, de l'Estrie ici -- 16 %, et des Laurentides et de Lanaudière, 12 % et 11 %.
Alors, ça nous ramène aussi à la question, d'une part, de la régionalisation de l'immigration au Québec, d'une part, et, d'autre part, toute la question de l'intégration sociale, je vous dirais, et culturelle des personnes issues de l'immigration. C'est une responsabilité gouvernementale, oui, pour laquelle je pense qu'il y a d'autres intervenants qui sont beaucoup mieux qualifiés que moi pour venir en parler avec vous, mais c'est aussi une responsabilité de l'État, effectivement. Même si beaucoup de nos membres disent qu'ils font des efforts en matière de francisation, ceux qui ont embauché, là... Si vous voyez dans notre mémoire, d'ailleurs, 39 % disent qu'ils ont pris des mesures pour favoriser l'intégration des personnes immigrantes dans l'entreprise, 39 % donnent la formation linguistique, et la même proportion a fourni de l'aide à l'établissement des personnes.
**(15 h 40)**Le Président (M. Bernier): M. le député.
M. Kotto: En fait, pour être clair, ce que je veux comprendre, c'est... Enfin, ce qui est clair pour moi, la PME ou les PME ne forment pas pour combler le déficit de la main-d'oeuvre. C'est une sorte de désengagement, de ce côté-là, pour que les choses soient claires. Est-ce que je le comprends, ça, clairement? J'interprète comme un désengagement, de la part des PME, que de ne pas s'engager dans la formation d'une main-d'oeuvre disponible. Parce que, quand on se réfère au taux de chômage élevé chez les immigrants, notamment ceux du Maghreb, il y a a priori une disponibilité. C'est un bassin dans lequel les PME peuvent aller puiser pour former et combler le déficit de main-d'oeuvre. Mais ce n'est pas une opération qui rentre dans la culture des PME. Est-ce que je comprends bien?
Le Président (M. Bernier): Mme Hébert.
Mme Hébert (Martine): Pas du tout, parce que nos rapports sur la formation démontrent, là, que nos PME font de la formation, de la formation à la fois formelle et informelle au sein des PME du Québec. Et on pourra vous envoyer nos études à cet égard-là, M. le député, si vous désirez les avoir.
Cela étant, votre préoccupation, je me pose la question. Quand je regarde, 43 % des personnes admises avaient des compétences en gestion et de niveau professionnel, alors qu'elles répondent aux besoins de seulement 7 % des PME. Vous parlez de formation. Je veux dire, je veux bien, mais, comme je vous dis, il faut regarder ce que les statistiques nous disent et ce que les données nous disent. Moi, je vous dis: Les PME font de la formation. D'ailleurs, comme je viens de vous dire, 40 % font de la formation linguistique, 40 % font de l'aide à l'établissement aussi, à peu près 30 % font du mentorat et des activités sociales. Donc, oui, les PME font de la formation, et sont ouvertes à ça, et elles le font.
Donc, le problème, là où le bat blesse, c'est justement l'adéquation à ce que les gens... Est-ce qu'ils ont les compétences de niveau technique et professionnel ou est-ce qu'ils ont une maîtrise ou un doctorat qui, dans la PME, pour un poste de machiniste, par exemple, n'est pas adéquat? Et là ce n'est pas une question de formation, là, ou de volonté de former quelqu'un ou pas.
Le Président (M. Bernier): Monsieur...
M. Kotto: Mais, comment dire, dans ce bassin de chômeurs, appelez-les ainsi, qui sont entre 23 % et 28 % dans la communauté arabo-musulmane, entre 18 % et 19 % dans la communauté noire, est-ce qu'il n'y a pas là, disons, un bassin d'individus dans lequel on peut aller puiser justement pour combler, au lieu, disons, d'attendre autant des seuils encore trop élevés relativement à la capacité du Québec d'accueillir et d'intégrer adéquatement? Est-ce qu'il n'y a pas sur place, au Québec, aujourd'hui, des individus, même s'ils ont des doctorats et qu'ils conduisent des taxis, ou s'ils ont des maîtrises et qu'ils font de la plonge dans les restaurants, est-ce qu'ils n'y a pas là un bassin de gens qui seraient susceptibles -- c'est une question, je ne ferai pas l'avocat du diable -- qui seraient susceptibles de s'adapter dans le profil d'emplois qui font carence dans les PME?
Le Président (M. Bernier): Mme Hébert.
Mme Hébert (Martine): Écoutez, je suis certaine que, parmi le bassin des personnes qui sont à la recherche d'un emploi, il y en a qui cadrent probablement dans les compétences, ou les connaissances, là, ou l'expertise qui est recherchée par les PME. Quand on regarde... Mais la question que vous posez, M. le député, en toute humilité, vraiment c'est aussi une question de dire... Je pense que la question que vous posez, c'est de dire: Bien, on a 23 %, par exemple, de chômage dans telle communauté. Qu'est-ce qu'on fait avec eux? Moi, je pense qu'il y a d'autres groupes qui sont mieux placés, là, pour vous dire...
Moi, ce que je vous dis, en tant que représentante des PME... Je ne suis pas une spécialiste en intégration des personnes issues de l'immigration à la société québécoise, mais, en tant que spécialiste des PME, ce que je vous dis, c'est: Assurons-nous que les personnes qu'on fait rentrer au Québec, qu'on amène ici, ont les compétences ou des niveaux de compétence qui sont recherchés dans les PME. Et, pour celles qui sont déjà ici, bien je pense que, là, à ce moment-là, c'est aux autorités compétentes de mettre en place des programmes et des mesures qui vont favoriser, si vous voulez, l'intégration de ces personnes-là et de dire: Bien, si la formation n'est pas adéquate, qu'est-ce qu'on peut faire pour la combler, etc.? Mais ça, ce n'est pas la responsabilité des entreprises. Elles sont là pour dynamiser le Québec. Puis, vous le savez, vous en avez tous dans vos régions, dans vos comtés, les PME sont souvent une grande, grande source de dynamisme dans nos régions. Alors, c'est ça, leur mission première.
Le Président (M. Bernier): M. le député.
M. Kotto: Non, je voulais juste comprendre. Mais c'est clair dans mon esprit.
Il y a un autre point qui me frappait. C'est à la page 10 de votre document, la figure 8: Problèmes d'intégration des nouveaux immigrants dans l'entreprise ou dans la collectivité. Vous en avez parlé dans votre allocution. Le second point -- il est quand même important -- qui pose problème, c'est les «relations avec d'autres employés en raison des différences culturelles et religieuses». 39 %, c'est quand même hyperélevé. Est-ce que vous avez, disons, le profil des individus qui sont comptabilisés dans cette case, là? Est-ce que c'est plus d'hommes ou plus de femmes? Est-ce que c'est plus d'Africains, Nord, Sud, ou de Latinos? Et est-ce que vous pouvez élaborer là-dessus?
Le Président (M. Bernier): Mme Hébert.
Mme Hébert (Martine): Bien...
M. Kotto: Ou d'Asiatiques.
Mme Hébert (Martine): Écoutez, non, on n'a pas ces données-là. Mais ça nous ramène à la question de tantôt, de dire... la question de la gestion de la diversité, qui déborde largement le cadre de la PME, là, je veux dire, qui est une question beaucoup plus vaste que ça et qui est une approche... qui est une problématique beaucoup plus systémique, à laquelle on doit s'attarder dans le cadre, justement, de politiques et de programmes qu'on met en place pour favoriser l'accueil et l'intégration des personnes issues de l'immigration dans notre société. Mais malheureusement, non, on n'a pas ces données par type...
M. Vincent (François): Pour préciser la figure 8, les propriétaires de PME avaient cette question et ensuite décidaient quel était l'élément le plus problématique. Mais il n'y avait pas ensuite une case qui disait: Définissez pourquoi, quel problème, quelle nationalité, ou etc. C'était vraiment, là... ils cochaient parmi ces listes-là.
Le Président (M. Bernier): Merci, M. Vincent. M. le député.
M. Kotto: En tout cas, j'espère que le ministère, malgré ses moyens limités, va pousser sa recherche là-dedans parce que c'est une analyse fine qui éclaire davantage. C'est une question que je posais en lien avec ce que nous avons déjà entendu ici relativement aux facteurs d'exclusion, aux facteurs de marginalisation de certains immigrants relativement aux différences culturelles, aux différences religieuses ou aux pratiques religieuses.
La langue, la barrière de la langue dans les PME, est-ce que c'est en amont, c'est-à-dire est-ce que c'est au niveau de l'embauche que ça pose problème ou au niveau de l'interaction avec les autres employés qui finit par capoter?
Mme Hébert (Martine): Je vous dirais qu'un petit peu...
Le Président (M. Bernier): Mme Hébert.
**(15 h 50)**Mme Hébert (Martine): Merci, M. le Président. Un petit peu comme je disais tantôt, la question de la langue, c'est sûr qu'elle est importante aussi dans une PME, hein? Le bassin de travailleurs est beaucoup plus petit, mais la proximité favorise aussi l'apprentissage au sein de l'entreprise. C'est vraiment comme être immergé... un exercice d'immersion linguistique dans une famille, qui est la petite famille qu'est la PME. Donc, en ce sens-là...
Mais ce qu'on dit, nous, c'est que, oui, la question de la langue est importante, mais ça ne doit pas être le principal ou le seul critère qu'on prend en compte pour l'évaluation. Et c'est pour ça que, comme M. Vincent mentionnait tantôt, les programmes qui ont été mis en place, de francisation en entreprise, ça prend des programmes flexibles et dans l'entreprise. Parce qu'il faut se dire que, comme M. Vincent le mentionnait tantôt, quand tu as une entreprise de cinq employés puis que tu envoies quelqu'un, tu ne l'envoies pas sur les bancs d'école pendant trois mois de temps, parce que tu viens de perdre 20 % de ta main-d'oeuvre. Donc, ça prend des mesures accessibles, flexibles, en entreprise, pour favoriser la francisation des personnes dans leurs milieux de travail.
M. Vincent (François): Si je peux...
Le Président (M. Bernier): Oui, allez-y, M. Vincent.
M. Vincent (François): Si je peux me permettre, vous avez référé aussi à l'embauche ou à l'emploi, c'était où, les principaux critères. Moi, je pourrais dire: À l'embauche, si l'entrepreneur reçoit un C.V. qui a plein de fautes d'orthographe, ça ne va pas nécessairement l'aider à aider la candidature de la personne. Puis aussi, au niveau de l'emploi, c'est important que les personnes puissent comprendre les directives puis communiquer entre elles.
Le Président (M. Bernier): Merci. M. le député.
M. Kotto: Je veux profiter de votre présence pour vous poser une question. Dans le profil des PME ayant, disons, un bassin de cinq à 10 employés, est-ce que ce serait judicieux ou raisonnable d'appliquer la loi 101?
Le Président (M. Bernier): Mme Hébert.
Mme Hébert (Martine): Bien, écoutez, c'est sûr que je vous dirais que les PME du Québec tentent de se conformer le plus possible aux lois et aux règlements qui sont en vigueur. Je veux dire, c'est clair. Sur la question de la francisation en entreprise des personnes issues de l'immigration, parce que je pense que c'est ça qui nous préoccupe aujourd'hui, comme je vous ai dit tantôt, les mécanismes qui doivent être mis en place doivent favoriser la francisation, lorsque la personne ne parle pas correctement ou suffisamment le français. On doit déployer encore plus de mesures flexibles qui permettent la francisation en entreprise et la formation des personnes dans les entreprises.
Et, vous savez, en tout cas, sûrement -- je sais que probablement vous avez fait l'apprentissage de plusieurs langues -- d'être en immersion dans un milieu où on a à parler, on entend parler français autour de nous, favorise grandement l'apprentissage de cette langue-là. Nous, ce qu'on vous dit, c'est: Ce qui est important, c'est la francisation en entreprise, puis mettons des programmes de l'avant pour ça parce que les PME nous disent que c'est important.
Le Président (M. Bernier): Merci. M. le député.
M. Kotto: Avez-vous des suggestions, vous qui maîtrisez le terrain, pour y arriver avec célérité, efficacité? On évoquait tout à l'heure... Je pense que c'est M. Vincent qui en premier et vous en deuxième évoquiez le fait que, de se délester d'un de ses employés, on vient de perdre 20 %. Est-ce qu'il y a, de votre perspective des choses, un moyen idéal pour arriver à atteindre cet objectif de francisation de façon efficiente?
Le Président (M. Bernier): M. Vincent? Mme Hébert?
Mme Hébert (Martine): Bien, écoutez, je pense qu'à la FCEI, ce qu'on a toujours prôné, ce qu'on sait, c'est que les mesures incitatives, c'est toujours des mesures intéressantes par rapport à des mesures coercitives, premièrement. Mais, comme je vous dis depuis tantôt, ce que nos membres nous disent, ce que les PME nous disent, c'est qu'en ce qui a trait au programme de francisation, la formation en entreprise, oui, elle est beaucoup plus adaptée à leurs besoins que la formation à l'extérieur de l'entreprise. À moins que je ne comprenne pas bien le sens de votre question, là, mais...
M. Kotto: Non, non, vous l'avez compris. Quel serait le paradigme, concrètement parlant, en milieu d'entreprise?
Mme Hébert (Martine): Écoutez, je ne suis pas une spécialiste de la formation en langues, mais ce que je peux vous dire, par exemple, c'est qu'il faut que ce soit flexible, il faut que ça respecte, dans le fond, aussi l'entité de la PME, il faut que ce soient des mécanismes qui soient flexibles, et qui ne soient pas trop rigides, et qui soient facilement accessibles aussi pour la PME. Comme j'ai dit tantôt, si ça prend un doctorat en paperasserie gouvernementale pour être capable d'aller chercher la ressource nécessaire pour aider à accompagner la personne issue de l'immigration à la francisation en entreprise, bien là, on va rater notre cible.
Alors, il faut que ces programmes-là qui sont offerts, il faut que ces ressources-là qui sont offertes tiennent compte à la fois des spécificités des PME, donc de la petitesse de la taille, du fait que souvent, si on est un commerce de détail, on a à servir une clientèle. Donc, comment est-ce qu'on peut faire ça? Comment est-ce qu'on fait la francisation dans ce cadre-là? Ou comment se fait justement l'apprentissage au sein de l'entreprise? Bien, ça, il faut tenir de l'ensemble de ces facteurs-là, et, nous, c'est ce qu'on vous dit.
Mais le paradigme, là, ce n'est pas compliqué avec les PME, hein: flexibilité, pas trop de paperasse, puis en entreprise c'est encore plus facile, tout en respectant les spécificités liées aux différents secteurs d'activité dans lesquels elles oeuvrent.
Le Président (M. Bernier): Merci.
M. Kotto: Merci.
Le Président (M. Bernier): Merci, Mme Hébert, M. Vincent. Merci de votre participation à cette commission parlementaire. Vos propos sont fort intéressants.
Je vais donc suspendre pour quelques instants la commission, pour faire une pause santé et permettre aux représentants de l'Institut national de recherche scientifique de prendre place.
(Suspension de la séance à 15 h 56)
(Reprise à 16 heures)
Le Président (M. Bernier): À l'ordre, s'il vous plaît! Nous allons reprendre nos travaux. Nous recevons M. Alain Bélanger, de l'Institut national de recherche scientifique. M. Bélanger, je vous souhaite la bienvenue cet après-midi, on est heureux de vous accueillir à la Commission des relations avec les citoyens. Je vous laisse la parole pour une période d'environ une quinzaine de minutes, par la suite vous aurez l'occasion d'échanger avec les parlementaires. Donc, la parole est à vous, M. Bélanger.
Institut national de la recherche scientifique, Centre Urbanisation,
Culture et Société (INRS-Urbanisation, Culture et Société)
M. Bélanger (Alain): Merci. Bon, bien, je vais commencer par me présenter. Je suis professeur au programme de démographie. En fait, je suis aussi le directeur du programme de démographie à l'Institut national de la recherche scientifique. Je suis professeur depuis 2007, mais, auparavant, j'ai travaillé pendant 17 ans à Statistique Canada, où j'ai été chef de l'analyse et de la recherche à la Division de la démographie pendant plusieurs années. J'ai été responsable des projections démographiques et, à la fin de ma carrière à Statistique Canada, j'étais directeur adjoint au recensement. Et ces fonctions-là m'ont amené à retourner à la recherche en devenant professeur à l'INRS.
Malheureusement, mon collègue Patrick Sabourin ne pourra pas être avec nous aujourd'hui, le coauteur du mémoire que nous avons présenté. Patrick Sabourin est, en fait, un étudiant au doctorat, avec moi, qui est extrêmement brillant: il est boursier Vanier, président fondateur de l'IRFA, l'Institut de recherche sur le français en Amérique.
Bon, maintenant que j'ai présenté d'où je viens et qui nous sommes, je vais vous parler du document que nous avons présenté comme mémoire à la consultation publique.
Pour résumer rapidement, les recommandations que nous faisons dans notre mémoire, en quelques mots, la première, je crois, nous croyons que la politique d'immigration ne devrait pas fixer arbitrairement un nombre élevé d'immigrants à admettre, mais elle ne doit pas non plus fixer un quota arbitraire sur le recrutement de certains bassins géographiques -- mais ça, on n'en parlera plus, je pense, pour le restant de l'après-midi, ça a déjà été réglé avant ma présence ici -- mais plutôt devrait assurer une meilleure sélection des immigrants, notamment en ce qui concerne les connaissances linguistiques et la qualité des compétences acquises à l'étranger, et favoriser une pleine intégration économique des immigrants qui sont admis.
Donc, si on regarde rapidement le contexte démographique et économique au Québec, on sait que la fécondité est sous le seuil de remplacement depuis déjà 40 ans et que cette faible fécondité fait en sorte qu'on a des interrogations sur l'avenir de la main-d'oeuvre. En fait, est-ce qu'on pourrait avoir une pénurie de main-d'oeuvre au Québec ou au Canada à cause du vieillissement démographique? Les premiers baby-boomers, qui ont cette année 65 ans, ont commencé à se retirer du marché du travail. Et on peut évidemment s'attendre que, pour les 15, 20 prochaines années, des cohortes nombreuses de baby-boomers se retirent du marché du travail et ne seront pas nécessairement remplacées par des cohortes moins nombreuses de jeunes qui entrent sur le marché du travail, d'où l'importance de l'immigration, selon plusieurs.
On a souvent dit aussi que l'immigration était nécessaire parce qu'on était dans un contexte de vieillissement démographique, mais les démographes, depuis à peu près 100 ans, ont bien démontré que l'immigration par elle-même ne peut pas infléchir le vieillissement démographique qui résulte d'une baisse de la fécondité ou une variation de la fécondité dans le passé. Et finalement le vieillissement démographique que le Québec et le Canada va connaître ou connaît déjà présentement est déjà inscrit dans sa structure par âge.
Par contre, on a commencé, depuis 1990, au Canada, à augmenter les niveaux d'immigration à des seuils relativement élevés, en fait très élevés. Au niveau international, le Canada est parmi les pays avec les taux d'immigration, au moins soutenus sur une longue période comme ça, les plus élevés au monde. C'est deux fois plus élevé que les taux d'immigration américains, par exemple. Et en même temps l'immigration est de plus en plus diversifiée. Alors que, dans le passé, les immigrants étaient principalement originaires d'Europe, ils sont de plus en plus originaires d'Asie, les deux tiers des immigrants canadiens sont originaires d'Asie. Elle est encore plus diversifiée au Québec qu'ailleurs au Canada, en fait.
Et on observe aussi, en même temps, que l'intégration économique des immigrants est de plus en plus difficile. Ils font face à des taux d'activité plus faibles, un taux de chômage plus élevé, des revenus plus faibles et aussi une plus grande surqualification. Bon, j'ai des chiffres, je pense que ce n'est pas nécessaire de vous inonder de chiffres, je pense que c'est des faits acquis, tout le monde est au courant de ça. Ces différences-là demeurent élevées même si on tient compte du niveau d'éducation. Par exemple, le taux de chômage des immigrants âgés de 25-54 ans, à Montréal, qui détiennent un diplôme universitaire de l'étranger est de 15 % en 2006, contre à peu près 5 % pour les universitaires natifs. Par contre, on observe que les différences entre les immigrants et les natifs vont s'amenuiser lorsqu'on va tenir compte des compétences linguistiques ou de la qualité de l'éducation.
Donc, au niveau de la démographie, l'immigration va augmenter la population totale, ça, c'est clair, elle va augmenter le taux de croissance démographique, mais elle n'a que peu d'effets sur la structure par âge de la population. L'immigration ne peut pas infléchir le vieillissement démographique qui est déjà inscrit dans la structure de la population.
Au niveau de l'économie, de la même manière, l'immigration augmente la taille de l'économie mais ne va pas nécessairement enrichir la population. Ce qui compte, en définitive, c'est le revenu par habitant. Ce n'est pas que le PIB augmente, c'est que le PIB par habitant augmente. Et, à ce niveau-là, il y a peu d'études qui sont concluantes. En fait, les études chez les économistes, certaines montrent qu'il y a un effet légèrement positif, la plupart, en fait, tournent autour de zéro, certaines vont aussi trouver des effets légèrement négatifs. Ce qui compte évidemment, c'est l'intégration pleine et complète, au marché du travail, des immigrants de façon à ce qu'ils puissent contribuer aux finances publiques et à l'économie en général.
Donc, le message principal que je voudrais passer, c'est que la population active devrait continuer à croître, peu importent les scénarios démographiques qu'on peut envisager, mais à un rythme beaucoup plus lent que ce qu'on a observé dans le passé. La population active de demain sera plus âgée mais aussi plus diversifiée, peu importe que l'immigration augmente ou diminue, ça ne changera rien au taux global d'activité. Mais, par contre, une meilleure intégration économique peut permettre de ralentir la baisse du taux global d'activité. Bref, ce n'est pas tant le nombre d'actifs qui compte mais évidemment la proportion d'actifs dans la population totale.
Et peut-être que je voudrais vous amener à regarder le tableau que j'ai préparé dans le mémoire, à la page 4, où on présente en fait les effets, sur la population d'actifs et d'inactifs, d'une hausse de l'immigration ou d'une intégration pleine et entière des immigrants. Par exemple, ce qu'on retrouve sous Effet de la croissance démographique, on voit que ça correspond aux différences en termes de nombre d'actifs et d'inactifs que le Québec connaîtrait en 2031 si on avait une immigration plus forte que celle qu'on a en moyenne depuis le passé récent. Donc, c'est la différence entre le scénario forte immigration versus un scénario de référence.
Effectivement, avec une plus forte immigration, on aurait plus d'actifs, environ 180 000 actifs de plus -- puis ça, c'est une augmentation d'à peu près 15 % de l'immigration... 0,15 %... 0,15 % de l'immigration en termes de taux, mais bon -- mais on aurait aussi une augmentation d'à peu près 126 000 inactifs, pour un gain net d'à peu près 53 000 et un effet nul sur le taux d'activité. Peu importe le scénario démographique qu'on envisage, le taux d'activité, en 2031, ne varie pas. Par contre, si, au lieu d'avoir des taux d'activité spécifiques aux immigrants, ceux-ci avaient les mêmes taux d'activité que les Blancs natifs, on aurait, donc, pour un niveau équivalent d'immigration, une augmentation du nombre d'actifs de 72 000 et, par le fait même, une réduction d'inactifs du même nombre, puisque c'est la même population qui est projetée, et ça se traduirait par un gain net de 144 000, en termes de gains, et un effet, sur le taux d'activité, de 1 %, donc une augmentation du taux d'activité d'à peu près 1 %. On voit donc que, plus que les variations du nombre de l'immigration, l'intégration économique des immigrants a beaucoup plus d'importance.
Alors, je crois que le temps passe beaucoup plus vite que j'avais prévu.
**(16 h 10)**Le Président (M. Bernier): ...cinq minutes, M. Bélanger.
M. Bélanger (Alain): Oui. Le taux global d'activité, peu importent les projections qu'on peut envisager, va décliner au Québec, comme au Canada, comme dans la plupart des pays occidentaux. Néanmoins, il est présentement à des seuils historiquement élevés. Et même, en 2031, selon le scénario de référence, le taux d'activité du Québec, ou du Canada, serait supérieur à plusieurs pays de l'OCDE, tel que connaissent plusieurs pays de l'OCDE aujourd'hui même, en 2010.
Je vais passer tout de suite sur l'impact sur la dynamique démolinguistique. Je pense que c'est aussi un facteur extrêmement important à considérer pour le Québec dans le cadre d'une politique d'immigration. Le Québec est, on le sait, une province francophone dans un océan anglophone en Amérique du Nord, et le pouvoir d'attraction de l'anglais est beaucoup plus grand que le poids de la communauté anglophone de langue maternelle, particulièrement dans la région de Montréal. Je pense qu'il ne suffit pas qu'une faible majorité des immigrants et/ou de leurs enfants connaissent le français pour assurer une pleine intégration linguistique à la majorité, mais il faut qu'une proportion égale à celle de la proportion francophone parmi la population de langue maternelle officielle connaisse le français et l'utilise au travail et dans le domaine public, ce qui correspond à une proportion de près de 90 %. Pour ça, il faut que la première génération d'immigrants transfère à ses enfants le français comme langue d'usage de façon encore plus importante que ce qu'on observe présentement.
Un autre facteur important, je pense, au niveau de l'immigration, c'est: peu importe l'origine ou la couleur des immigrants, leur compétence linguistique, lorsqu'ils sont allophones, lorsque leur langue maternelle est autre que le français ou l'anglais, est généralement plus faible que celle des natifs, même si leur niveau d'éducation est plus élevé. En fait, les enquêtes de Statistique Canada sur la littératie ont permis de montrer que les immigrants présentaient des résultats inférieurs aux Canadiens de naissance au niveau des échelles de littératie même si leur scolarité était plus élevée. Par exemple, les immigrants allophones sont environ deux fois plus nombreux dans le niveau 1, le niveau le plus faible de littératie, que les Canadiens de naissance. Une augmentation de l'immigration, évidemment, ferait en sorte d'augmenter la proportion d'allophones de langue maternelle dans la population.
J'ai l'impression d'avoir passé tout mon temps. Peut-être que je peux...
Le Président (M. Bernier): Il vous reste deux minutes. Si vous voulez débuter les échanges avec les parlementaires, comme vous voulez.
M. Bélanger (Alain): Donc, bon, peut-être pour conclure, je pense qu'on est face à un arbitrage délicat entre l'économie et aussi la question linguistique au Québec. Chiswick et Miller, des économistes américains qui s'intéressent beaucoup à l'effet de la langue sur l'intégration économique des immigrants, ont fait des études avec les données canadiennes -- on a des données intéressantes, mais on a aussi un milieu intéressant, puisqu'il y a deux langues officielles -- et, dans une de leurs études, ils résumaient assez bien le dilemme dans lequel on peut peut-être se retrouver: en augmentant les critères de sélection basés sur la connaissance du français, on réduit nécessairement le bassin dans lequel on peut aller recruter des immigrants potentiels pour le Québec et, en réduisant le bassin, on réduit évidemment la qualité moyenne de cette population-là qui pourrait être recrutée. Donc, il y a des choix à faire à ce niveau-là.
Le Président (M. Bernier): Merci, M. Bélanger. Nous allons donc débuter nos échanges avec les parlementaires sans plus tarder. Mme la ministre.
Mme Weil: Oui. Merci beaucoup, M. Bélanger. Et, évidemment, on est dans le plus technique. Évidemment, il y a quelques économistes qui se sont prononcés. Mais, avant d'arriver... pour bien comprendre les positions que vous prenez ou les recommandations que vous faites par rapport à chaque orientation, l'exercice de consultation, vous, vous pensez que ce n'est pas tellement utile, est-ce que j'ai bien compris, c'est-à-dire... Non, l'exercice de consultation, est-ce que vous voyez ça comme un exercice utile, c'est-à-dire...
M. Bélanger (Alain): Extrêmement, oui. Pourquoi vous dites ça?
Mme Weil: Ah! O.K. Je ne sais pas pourquoi...
M. Bélanger (Alain): Je suis étonné de...
Mme Weil: O.K. Je ne sais pas où j'ai pris ça, là. Et de déterminer des volumes... Peut-être sur ces questions précises...
M. Bélanger (Alain): Alors, ce que je trouve...
Le Président (M. Bernier): M. Bélanger, oui, allez-y.
M. Bélanger (Alain): Pardon.
Le Président (M. Bernier): Allez-y, M. Bélanger.
M. Bélanger (Alain): Ah non, je trouve que c'est absolument très utile de consulter. Au contraire, je ne voudrais pas d'un gouvernement qui ne consulterait pas, là.
Pour ce qui est des volumes, mon point de vue, c'est que c'est...
Mme Weil: Ils sont là, c'est ça que vous vouliez dire.
M. Bélanger (Alain): Le problème, c'est qu'on ne peut pas nécessairement fixer des niveaux élevés d'immigration si l'intégration n'est pas complète. Si on peut intégrer ou... Parce qu'intégrer, ça coûte aussi des sous. On entendait précédemment, là, d'autres intervenants, dire qu'il faut... la formation, la formation linguistique, la mise à niveau des compétences, etc. Si, pour les montants dont le Québec dispose pour l'intégration, on peut avoir 30 000 immigrants puis les intégrer comme il faut, c'est préférable que d'en avoir 50 000 puis ne pas les intégrer comme il faut. C'est un peu comme ça qu'on pourrait résumer notre point de vue.
Le Président (M. Bernier): D'accord. Mme la ministre.
Mme Weil: Maintenant, sur la question... je veux bien comprendre sur la question linguistique parce que c'est tellement important. Ce qui semble émerger actuellement, c'est un consensus sur nos deux orientations. Évidemment, il y a certains qui pensent qu'il ne faut pas aller aussi fort là-dessus, mais généralement je vous dirais qu'il y a consensus sur l'importance du français, globalement, et donc, premièrement, qu'il faut préserver cette orientation d'une majorité entre 60 %, 65 %, parce qu'il y a 20 ans c'était un peu en dessous de 40 % qui connaissaient le français, mais qu'il faut aller un peu plus loin et vraiment tester le niveau. Et c'est le même enjeu qu'on voit dans des pays anglophones, sur la question de la maîtrise de la langue, c'est exactement le même débat qu'ils ont, qu'il faut vraiment tester.
Donc, vous, par rapport à cette première orientation sur la langue, de maintenir une majorité, votre réaction par rapport à cette orientation, juste pour que ça soit très clair pour moi.
Le Président (M. Bernier): M. Bélanger.
**(16 h 20)**M. Bélanger (Alain): Bien, notre point de vue par rapport à cet aspect-là, c'est qu'il faut s'assurer que les compétences linguistiques soient de niveau. Le rapport du Vérificateur général, par exemple, va montrer que, lorsqu'on a demandé d'augmenter le nombre d'immigrants, les évaluations ont peut-être été faites un peu plus rapidement.
Par ailleurs, au niveau des statistiques, quand je regarde l'enquête longitudinale sur l'immigration au Canada puis que je compare les réponses des répondants... Donc, c'est une cohorte d'immigrants qui, en 2001, ont été suivis pendant quatre ans au cours d'une enquête longitudinale, puis on leur a demandé, à six mois, deux ans et quatre ans après leur arrivée, des questions, là, toutes sortes de questions, dont des questions sur les connaissances linguistiques. C'était toujours de l'autodéclaration, mais on doit s'attendre que les connaissances en anglais ou en français d'un immigrant allophone qui s'établit au Canada, après deux ans, seraient meilleures qu'avant l'arrivée et après quatre ans encore meilleures. Mais ce n'est pas ce qu'on observe nécessairement pour tous les immigrants dans leurs réponses. Il y a un bon nombre, 8 %... Bien, selon la question, c'est la connaissance du français ou de l'anglais écrit ou parlé, il y a même jusqu'à... parfois jusqu'à 23 % qui, pour certaines questions, montrent... ou répondent moins bien connaître la langue anglaise ou française, deux ans ou quatre ans après, qu'au début. Alors, on peut se demander quelle est la valeur qu'on peut accorder à l'autodéclaration de la connaissance du français ou de l'anglais telle que mesurée au recensement, par exemple. Donc, en fait, notre point de vue, c'est qu'il faut mesurer de façon normative les compétences linguistiques.
Si Statistique Canada réussit à faire une enquête sur la littératie au Canada, et une enquête internationale sur la littératie -- bien, l'enquête sur la littératie, en moyenne, prend 58 minutes pour mesurer les compétences linguistiques d'un individu -- bien, il devrait être possible de faire un test similaire, de 58 minutes, à tous nos immigrants de la catégorie économique sans que ça soit trop coûteux, et, certainement, qui pourrait nous offrir une bien meilleure idée des compétences linguistiques à l'arrivée.
Le Président (M. Bernier): Merci. Mme la ministre.
Mme Weil: Donc, qu'est-ce que vous recommanderiez sur ces questions de bien évaluer, par un test standardisé, c'est ça, comme on le fait dans d'autres juridictions? C'est ça qui est important pour nous, de connaître exactement votre recommandation, parce que je pense qu'on va dans le même sens que vous. Et c'est pour ça qu'on a mis cette orientation pour discussion. Évidemment, ça prend des gens qui comprennent bien cet enjeu, qui n'est pas un... Je le répète souvent, ce n'est pas juste un enjeu pour le Québec. Et, vous, vous l'avez vu, c'est un enjeu pour le Canada aussi, cette question de bien maîtriser une ou l'autre langue, évidemment, pour le Canada. La question de rééquilibrer, bon, vous avez... Oui?
Le Président (M. Bernier): Oui, allez-y, M. Bélanger.
M. Bélanger (Alain): Peut-être... Je suis d'accord que ce n'est pas un enjeu seulement pour le Québec, c'en est un, un enjeu, en Australie, qui est aussi un pays d'immigration important, c'en est un pour le reste du Canada puis c'en est un aux États-Unis aussi. Mais, au Québec, l'enjeu a une dimension supplémentaire à cause des deux langues qui sont utilisées au travail ou... Bon, le français est la langue officielle, mais on sait bien que, surtout pour des emplois de niveau professionnel... Puis on sélectionne des immigrants, là, en fonction de leurs compétences puis de leur niveau d'éducation, tout ça, pour des emplois qui sont destinés à être des professionnels, pas nécessairement des médecins chauffeurs de taxi, là, comme on entend parfois parler. Donc, au Québec, les deux langues sont importantes, elles sont importantes pour travailler puis elles sont importantes aussi pour la cohésion sociale.
Le Président (M. Bernier): Merci. Mme la ministre.
Mme Weil: Oui. Bon, sur la question de rééquilibrage, j'aimerais quand même vous entendre, sur cette notion -- vous l'avez bien comprise, je pense -- de diversité, je ne sais pas si vous avez pu suivre un peu les débats ou les discussions qu'on a eus sur cette question, ce que vous pensez d'une orientation qui irait... donc, de ne pas évoquer des quotas, comme vous dites, ou des plafonds. Parce qu'il y a une préoccupation, là, moi, je l'ai ressentie, vous, vous l'évoquez aussi. Mais il émane un consensus, beaucoup des acteurs économiques, les entreprises, les employeurs, que ça serait intéressant d'avoir quand même une orientation sur la diversité. Et ça, c'est beaucoup par rapport à leurs propres intérêts, besoins, d'avoir des équipes multis, plus créatives et aussi, qui parlent peut-être plusieurs langues aussi, des approches différentes, des cultures différentes, des têtes de pont, tout ça, beaucoup basé sur des études.
Que pensez-vous... Je ne sais pas si... Il y a beaucoup d'études qu'on voit sur ces questions-là, de la diversité étant une valeur ajoutée. Est-ce que vous pensez que ça pourrait être intéressant d'avoir une formulation qui irait dans ce sens-là, sur la diversité?
Le Président (M. Bernier): M. Bélanger.
M. Bélanger (Alain): Oui. Bien, dans un premier temps, je dois dire que la composition de l'immigration québécoise, elle est beaucoup plus diversifiée que celle du reste du Canada. On a, qu'on regarde par pays d'origine ou par appartenance à un groupe de minorité visible, une bien plus grande diversité qu'à Toronto, où on va retrouver une très grande proportion, presque la moitié, de Sud-Asiatiques, ou à Vancouver, où c'est près de la moitié de Chinois. Ici, au Québec, à Montréal, on a une répartition plus égale, si on veut, là, entre les différents groupes de minorités visibles puis entre les différents lieux d'origine. Et je pense que c'est une bonne chose.
Pour ce qui est de l'avantage de la diversité ou du désavantage, je ne suis pas vraiment un spécialiste de la chose, je suis un démographe, mais, en tant que néophyte, si on veut, je vois bien le point que vous avancez, qu'il peut y avoir, par la présence de personnes avec différentes histoires, différentes connaissances, différentes compétences, des apports d'idées nouvelles qui feraient comme progresser, arriver à une solution plus facilement. Mais il y a peut-être aussi... Trop de différences peut peut-être aussi créer des difficultés à créer un esprit d'équipe. Mais, bon, il faudrait peut-être en parler plus avec un psychologue du travail qu'avec moi, mais...
Le Président (M. Bernier): Merci. Mme la ministre.
Mme Weil: L'apport économique de l'immigration... Et la grille, la grille de sélection. Suite au rapport du Vérificateur général, saviez-vous qu'on a modifié la grille de sélection pour répondre justement aux préoccupations du Vérificateur général, que ça a été fait en 2009, pour vraiment aller chercher les professions, les métiers? Et c'est une liste qui est préparée par Emploi-Québec. C'est un travail très sérieux qui est fait avec Emploi-Québec et le ministère de l'Immigration. Et donc, évidemment, on est très, très, très confiants que ça va donner des meilleurs résultats.
Évidemment, l'immigration, ce n'est pas juste ça, ce n'est pas juste de répondre aux besoins du marché du travail, parce que le marché du travail évolue aussi, donc il faut toujours avoir aussi cette qualité. Mais je pense que votre vision, elle est différente parce que vous allez moins sur les volumes. Nous, évidemment, on fait une planification qui va beaucoup sur les volumes. On se base sur l'Institut de statistique du Québec qui nous dit: Bon, il y aura 740 000 emplois qu'on aura besoin de combler d'ici 2014, dont 15 % seront comblés par l'immigration. Alors, cette planification se fait beaucoup avec Emploi-Québec, l'ISQ, des prévisions tant au niveau des départs à la retraite que des besoins à plus long terme. C'est sûr qu'on sait que, pour contrer le vieillissement, c'est vraiment à la marge, mais c'est la population active qui est plus importante.
Mais, ceci étant dit, la grille de sélection d'une part a été modifiée pour répondre à court terme -- et à court terme, d'ici 2014 -- aux besoins du marché du travail, et des gens qui sont scolarisés, plus scolarisés que la moyenne des Québécois, en fait, qui parlent français -- je vous dresse le portrait général -- jeunes, donc avec une capacité -- c'est ça qu'on recherche -- de mouvement transversal, c'est-à-dire des gens qui, grâce à leur scolarisation, seraient aptes à occuper d'autres fonctions.
Comment vous voyez -- même si, vous, vous êtes plus sur quels sont les vrais besoins ponctuels, si je comprends bien -- de miser sur les deux plans en même temps, le plus court terme et le plus moyen terme?
Le Président (M. Bernier): M. Bélanger.
**(16 h 30)**M. Bélanger (Alain): Bon, le modèle de projection que j'ai développé alors que j'étais à Statistique Canada, puis qui est encore utilisé -- hier, il y a eu une diffusion de projection de la main-d'oeuvre, par exemple, je suis coauteur de cet article-là -- a aussi été utilisé pour projeter la population active selon le niveau d'éducation. Ce n'est pas encore publié, mais ce qu'on observe, c'est que, si on continue à avoir des immigrants fortement éduqués, comme on a présentement, et qu'en même temps on a des jeunes cohortes ou des cohortes de Québécois, ou de Canadiens, ou de natifs qui rentrent sur le marché du travail plus éduquées que celles qui sortent, les pénuries de main-d'oeuvre de demain ne seront pas nécessairement là où on pense qu'elles vont être. Si on projette, par niveau de compétence, la population active de demain, on observe... on a des taux de croissance annuelle moyens de 5 % par année pour les actifs avec un diplôme universitaire, mais on a des taux de croissance négatifs pour ceux qui ont un diplôme secondaire ou moins.
Si les emplois de compétence élevée ne progressent pas aussi rapidement que l'offre de main-d'oeuvre avec compétence élevée, on va se retrouver avec une plus grande surqualification de la main-d'oeuvre. Déjà, on observe à peu près 32 % de surqualification, c'est-à-dire des gens qui ont des diplômes supérieurs au niveau nécessaire pour obtenir l'emploi qu'ils ont présentement. Puis cette surqualification-là est encore plus élevée chez les immigrants, hein? L'idée, là, de médecins ou d'ingénieurs qui conduisent des taxis à Montréal parce qu'ils n'arrivent pas à se trouver des emplois à leur niveau de compétence est statistiquement aussi vraie.
Bien, Ressources humaines Canada fait aussi des projections, sur une dizaine d'années, des emplois selon le niveau de compétence, et puis déjà on observe une croissance un peu moins rapide, au niveau du Canada, de la demande de main-d'oeuvre avec des diplômes universitaires que l'offre. Puis, si cette situation-là continue à augmenter, bien, on va avoir de plus en plus de gens qui vont être... Parce que je ne crois pas que la majorité de ceux qui sont surqualifiés le font parce qu'ils le choisissent, je pense qu'il y en a peut-être, là, mais la majorité acceptent des emplois sous-qualifiés ou demandant des qualifications inférieures à leur compétence parce qu'ils n'arrivent pas à trouver les emplois au niveau de compétence qui correspond à leur niveau d'éducation.
Puis on entendait, juste avant... Je n'ai pas vraiment eu la chance d'écouter toutes les personnes qui sont venues devant vous hier ou aujourd'hui -- aujourd'hui, aucunement -- sauf, là, celles qui représentaient les PME. Je pense que c'est un peu ce qu'elles disaient, c'est que les PME, elles ne veulent pas avoir des gens avec des maîtrises puis des doctorats, mais, nous, on donne des points pour les maîtrises puis les doctorats lorsqu'on sélectionne les immigrants, des travailleurs qualifiés, et par contre ils ont peut-être besoin plus des techniciens, qui ont moins de chances d'immigrer.
Puis aussi, quand on regarde les statistiques sur le chômage ou l'intégration à l'emploi, on voit que les... Par exemple, le lieu d'études est un facteur très important pour expliquer l'intégration à l'emploi. Les immigrants qui ont un diplôme canadien ou encore d'une université occidentale réussissent beaucoup mieux, à tous les points de vue, à s'intégrer, à trouver un premier emploi, à trouver un emploi qualifié, à avoir des meilleurs revenus, ont des taux de chômage plus faibles, etc., que ceux qui ont des diplômes d'une université étrangère, probablement peu connue par les employeurs, qui cherchent à diminuer leurs risques en embauchant des gens dont ils connaissent les compétences plus facilement. Mais, lorsqu'on regarde pour les niveaux d'éducation plus faibles, les taux de chômage ne varient pas, à Montréal, là, entre ceux qui ont un diplôme étranger puis un diplôme canadien. Donc, probablement que les compétences de niveau inférieur au niveau universitaire sont peut-être plus facilement transférables aussi d'un pays à l'autre.
Le Président (M. Bernier): Merci.
Mme Weil: Juste sur la question de niveau de scolarisation, les études que, nous, on a montrent que néanmoins le taux de chômage est plus élevé chez les immigrants et les natifs qui sont moins scolarisés, actuellement. Vous, vous faites une projection, mais en tout cas c'est les données qu'on a au MICC, le taux de chômage est plus élevé s'ils sont moins scolarisés.
M. Bélanger (Alain): Bien, le taux de chômage est plus élevé... Le taux de chômage diminue, tant chez les immigrants que chez les natifs, avec le niveau d'éducation. Plus on est éduqué, plus on a de chances d'avoir un emploi. Ça, ça va...
Mme Weil: ...
M. Bélanger (Alain): Pardon?
Mme Weil: Ce qui va dans le sens de choisir des gens qui sont scolarisés.
M. Bélanger (Alain): Oui. Oui, oui. Si vous voulez... Non, ce que je disais tantôt, c'est que l'écart entre les natifs puis les immigrants, et selon le lieu d'études, a moins d'importance... c'est-à-dire que le lieu d'études n'affecte pas... Bon, chez les universitaires, ceux qui ont un diplôme étranger qui n'est pas un diplôme occidental ont des taux de chômage extrêmement élevés par rapport aux Canadiens de naissance ou par rapport aux immigrants qui ont des diplômes occidentaux. Par contre, chez ceux qui ont un diplôme inférieur au bac, le fait d'avoir obtenu ce diplôme-là d'une université africaine ou non occidentale n'augmente pas le taux de chômage de ces personnes-là.
Le Président (M. Bernier): Merci, M. Bélanger. Nous allons donc passer du côté de l'opposition officielle. M. le député de Bourget.
M. Kotto: Merci, M. le Président. M. Bélanger, bonjour. J'aimerais revenir sur un point -- deux points, d'ailleurs -- que vous avez évoqué au début de votre allocution, c'est l'impact de l'immigration sur le vieillissement de la population. Vous avez évoqué un certain nombre de littératures sur la question. Est-ce que vous pouvez nous indiquer les références de ces littératures? Parce que...
Le Président (M. Bernier): M. Bélanger.
M. Kotto: Pas en détail, là. Mais je vais alléger ma demande: Est-ce que ce sont des études qui ont été faites en Amérique du Nord?
M. Bélanger (Alain): Ah oui. Bien là, partout.
Le Président (M. Bernier): M. Bélanger.
M. Bélanger (Alain): Oui. J'en ai fait moi-même, des études sur l'impact de l'immigration ou de la variation de la fécondité sur le vieillissement démographique. Ça a été fait à Statistique Canada, ça a été fait à l'ISQ, ça a été fait dans nos départements de démographie de l'Université de Montréal, à l'INRS, ça a été fait... les premières études qui ont montré que l'immigration n'avait pas d'effet... ni la mortalité, ou pratiquement pas, là, maintenant, avec la mortalité un peu, parce que maintenant les taux de mortalité, c'est surtout chez les personnes âgées qu'ils diminuent, ce n'est plus chez les enfants, alors que, dans le passé, c'était chez les enfants. Les premières études qui ont montré que le vieillissement démographique résultait de la fécondité ou de la variation de la fécondité, c'est entre les deux guerres, Alfred Sauvy, à l'INED, le fondateur de l'INED, puis Henry. Puis il y en a des centaines, là, d'études qui montrent ça. Ça, c'est connu depuis au moins 75 ans, chez les démographes. À moins que l'immigration soit composée à 100 % de bébés adoptés, il n'y aura pas d'effet sur le vieillissement ou sur la structure par âge de la population.
Le Président (M. Bernier): Merci. M. le député.
M. Kotto: O.K. En fait, à moins que ce soient des bébés adoptés. Donc, dans le cadre de la sélection, on ne peut pas aller là, on ne peut pas sélectionner les bébés, au maximum. Mais pensez-vous... Parce que, quand vous évoquez ce point dans votre allocution, indirectement, vous attribuez au gouvernement la prétention de penser qu'on veut, par l'immigration, par le biais de l'immigration, ralentir le phénomène du vieillissement de la population. Est-ce que c'est ce que...
M. Bélanger (Alain): J'avoue que, dans les documents qui ont été présentés pour cette consultation-là, c'est beaucoup plus prudent que par le passé à ce niveau-là, il n'y a pas cette... Mais on entend encore des ministres, des journalistes, des intervenants à la radio qui disent: On a besoin d'immigrants pour le vieillissement démographique. Ça, c'est faux. Puis cette idée fausse là a été propagée puis elle est... Ça semble être vrai, là. Tu sais, on a plus d'immigrants, on va avoir moins de vieillissement. Mais savez-vous qu'il y a plus de personnes âgées de 65 ans et plus qui sont nées à l'étranger qu'au Canada? Savez-vous qu'en Ontario, par exemple, il y a 40 % des 40 à 64 ans, là, des baby-boomers, ceux qui vont créer le vieillissement, le problème du vieillissement, qui sont nés à l'étranger?
Le Président (M. Bernier): M. le député.
**(16 h 40)**M. Kotto: O.K. L'autre volet, c'est l'impact marginal que vous évoquez sur la croissance économique aussi. Mais, dans votre document, vous spécifiez que l'âge à l'arrivée des immigrants, et le résultat économique, incluant, donc, la probabilité d'emploi et de revenus, est fondamental. Vous dites: Si les immigrants arrivent assez tôt dans leur vie active, leur impact sur la fiscalité est meilleur. Assez tôt, pour vous, c'est quelle tranche d'âge?
M. Bélanger (Alain): Ah bon! Je n'ai pas véritablement chiffré ça. Ce qu'on observe, c'est que plus ils arrivent tôt, plus ils s'intègrent facilement. S'ils arrivent avant 15 ans, c'est encore mieux, parce qu'ils vont avoir eu une formation au Canada, ils vont être intégrés au niveau des compétences linguistiques, au niveau des compétences de l'éducation aussi. S'ils arrivent plus tôt, dans la vingtaine, leur intégration aussi... Les données de l'enquête longitudinale sur l'immigration au Canada -- bon, ça commence à être un peu plus vieux -- montrent ça aussi. Mais, même avec le recensement, on peut voir que l'âge à l'immigration est un facteur important pour l'intégration de la population. Évidemment, l'âge à l'immigration est en conflit avec les diplômes. Plus on demande de diplômes élevés, moins qu'ils ont de chances d'avoir des gens avec un âge plus jeune. Il faut, pour avoir un bac, avoir 22, 23 ans. Mais la grille de sélection, présentement, accorde trop de points à ceux de 30 ans et plus, peut-être.
Le Président (M. Bernier): M. le député.
M. Kotto: Donc, si je vous lis bien, il y a un enjeu d'intégration important. Quand, disons, on met sur la table la proposition d'un, comment dire... l'idée d'accepter... La tranche d'âge qui est ici indiquée, c'est au maximum 35 ans, 18-35 ans. Si je comprends ce que vous dites, c'est une fourchette d'âge qui a très peu de chances de s'intégrer et de contribuer positivement au plan économique, si je vous lis bien, si je rentre dans votre...
M. Bélanger (Alain): Elle est trop large. Il devrait y avoir plus de points accordés aux plus jeunes de cette tranche d'âge puis moins de points à ceux plus... au-delà de 30 ans, dans cette tranche d'âge là. Si l'âge... bien, puisque l'âge est, dans la grille de sélection, un critère pour mesurer l'intégration potentielle des immigrants.
M. Kotto: Donc, si je vais dans les plus jeunes au plan de la sélection -- hypothèse d'école -- je devrais revoir ma politique d'immigration et d'intégration, aller, à ce moment-là, cibler les plus jeunes, et assurer leur éducation une fois arrivés sur le territoire québécois, et les accompagner par la suite, c'est un continuum, compte tenu du fait que vous désespérez pour ceux qui ont au-delà de 18 ans, relativement...
M. Bélanger (Alain): Ah! non, non, non. Je ne désespère pas, là, non. Ce n'est pas vraiment ça, là. Non, non. Mais ce qu'on observe lorsqu'on analyse l'intégration économique des immigrants, c'est que plus ils arrivent à un âge élevé, moins leur intégration se fait facilement. Mais je ne dis pas qu'il faut qu'ils soient... C'est impossible qu'ils aient tous en bas de 18 ans, là. Il faudrait au moins qu'il y ait leurs pères puis leurs mères qui viennent aussi, là. Il y a un certain nombre qui arrivent jeunes, eux, ils s'intègrent très bien. Dans la littérature, on distingue souvent la première génération de la génération un et demi. La génération un et demi, c'est ceux qui sont arrivés avant 15 ans. Ils sont nés à l'étranger, sont de première génération, mais, comme ils ont eu une partie de leur éducation, au moins une partie de leur éducation, dans le pays d'accueil, ils s'intègrent beaucoup mieux à la population du pays d'accueil.
Mais ce qu'on observe, c'est que la grille de sélection, pour l'âge, les points maximums sont accordés pour une catégorie trop large. Le point maximum accordé pour l'âge devrait être accordé pour une catégorie plus étroite, plus jeune.
M. Kotto: Je n'avais pas d'autre question. Mon collègue va...
Le Président (M. Bernier): M. le député de Lac-Saint-Jean.
M. Cloutier: Je vous remercie, M. le Président. Dans votre document, vous remettez en question l'affirmation à l'effet qu'une augmentation de l'immigration pourrait avoir des répercussions positives en ce qui a trait au fédéralisme fiscal... en fait, pas vous, mais le document du gouvernement. Vous, vous remettez en question l'affirmation voulant que ça pourrait avoir un effet positif sur la péréquation. Alors, essentiellement, ce que vous dites, c'est qu'il n'y a pas de corrélation directe entre le nombre d'immigrants et le retour... ou les sommes octroyées par le gouvernement fédéral, tout dépend des performances économiques des immigrants. Est-ce que je comprends bien ce qui est écrit dans votre document?
Le Président (M. Bernier): M. Bélanger.
M. Bélanger (Alain): Oui. Bien, si les immigrants s'intègrent bien, la fiscalité du Québec va être meilleure, ils vont payer plus d'impôt, et puis ça devrait baisser la péréquation. S'ils s'intègrent mal, bien là ça pourrait augmenter la péréquation, parce qu'on aurait des revenus fiscaux moindres. Mais c'est assez pathétique de se servir de la péréquation comme étant un argument pour favoriser une augmentation de la population. C'est un peu...
M. Cloutier: Bien, non seulement...
Le Président (M. Bernier): M. le député.
M. Cloutier: Vous dites: L'argument est pathétique, mais non seulement il est pathétique, mais il est même irrationnel. Il n'y a pas de corrélation à faire, là. Comme il n'y a pas de corrélation, il n'y a pas d'argument.
M. Bélanger (Alain): Il est irrationnel dans le sens que, si les immigrants s'intègrent bien, l'impact sur la péréquation va être négatif. Mais c'est peut-être mieux comme ça. Mais, s'ils s'intègrent mal, bien, ils vont accroître la population. Puis il y a une partie de la péréquation qui... Il y a un facteur important de la péréquation qui est sur le nombre de têtes de pipe ou d'habitants. Donc, une croissance plus forte ferait qu'on aurait une proportion plus élevée ou des transferts fédéraux plus importants. Mais ce n'est pas... C'est un peu comme quand on dit: Il n'y a pas vraiment de problème de l'immigration qui s'intègre plus ou moins bien au fait français, s'ils s'intègrent à la communauté anglophone, ils vont quitter le Québec. Ça ne sera pas un problème s'ils quittent le Québec. Si les anglicisés quittent le Québec, ce n'est pas un problème pour le fait français au Québec. Ça aussi, c'est très, très pathétique, hein, il me semble, comme façon de voir les choses.
Le Président (M. Bernier): Merci. M. le député.
M. Cloutier: Ça va, M. le Président, je vous remercie.
Le Président (M. Bernier): Merci.
M. Kotto: Mais j'aurais...
Le Président (M. Bernier): Oui, allez-y, allez-y. Allez-y, M. le député de Bourget.
M. Kotto: Si jamais il reste un peu de temps, j'aurais une petite question relativement... On revient toujours sur les impacts. Selon votre lecture, est-ce qu'il y a lieu de penser qu'il est bénéfique pour le Québec de choisir des immigrants européens plutôt qu'africains, plutôt que maghrébins, plutôt que latinos ou plutôt qu'asiatiques, par exemple, compte tenu de la distance, de la proximité culturelle, compte tenu de la proximité des valeurs fondamentales? Là, je table sur la thématique culturelle, donc identitaire.
Le Président (M. Bernier): M. Bélanger.
**(16 h 50)**M. Bélanger (Alain): S'il serait préférable... Ils sont plus facilement intégrables. Plus que la distance culturelle est grande, plus que les difficultés d'intégration sont grandes, puis que ça soit au niveau de la langue... C'est sûr qu'un Français de France ou un Belge, c'est plus facile à intégrer au Québec qu'un Chinois ou un Sud-Asiatique. Mais est-ce que c'est préférable? En fait, je pense qu'il faut les sélectionner le mieux possible, à compétences égales, mais véritablement mesurer les compétences de façon objective, pas subjective, tant au niveau linguistique qu'au niveau de la qualité de l'éducation aussi.
Parce que les diplômes ne sont pas tous équivalents d'un pays à l'autre, il existe des... On le sait, ici, McGill, ou l'Université de Montréal, ou l'Université de Toronto, ce n'est pas la même chose qu'une plus petite université, par exemple. Ou, aux États-Unis, il y a d'extrêmement bonnes universités, les meilleures au monde, mais il y a aussi des universités moins bonnes: Southern Mississipi State, ce n'est pas Yale, ce n'est pas Harvard. Mais il existe des bonnes universités en Chine, il existe des bonnes universités en Inde. Il n'y a aucune université africaine parmi les 500 meilleures universités, selon le Times Higher Education, qui fait comme un palmarès, là, un peu comme on fait avec les écoles secondaires au Québec, des universités au niveau international.
Il y a peut-être moyen de... Je ne sais pas, c'est peut-être plus difficile encore que de mesurer les compétences linguistiques de façon formelle, là, comme je le proposais, de mesurer les compétences du niveau de l'éducation, là, parce que... Mais c'est peut-être possible de faire mieux que ce qu'on fait déjà présentement à ce niveau-là, aussi.
M. Kotto: Donc, si...
Le Président (M. Bernier): Merci. M. le député.
M. Kotto: Merci, M. le Président. Si j'insiste sur votre idée à l'effet que la proximité culturelle, la proximité, je dirais, identitaire, même, entre la France, la Belgique, le Québec, est une équation plus favorable parce que des immigrants qui viennent de ces pays-là sont facilement intégrables, cela signifie qu'ils seraient plus productifs que ceux qui ont une distance plus grande, au plan culturel, avec le Québec. Est-ce que je vous suis?
Le Président (M. Bernier): M. Bélanger.
M. Bélanger (Alain): Bien... Pas...
M. Kotto: Donc -- je termine juste la question -- la fourchette d'âge de 18 à 35 pourrait tenir pour cette catégorie d'immigrants versus la limite que vous fixez, vous tablez à 18 ans pour les autres.
M. Bélanger (Alain): Ah bon? Ah non. Je ne pense pas que ça soit une bonne idée que de faire des critères différents selon le lieu d'origine.
M. Kotto: ...c'est en raison de ce que vous disiez tout à l'heure, pour qu'il y ait un impact positif au plan des finances publiques, il faut qu'il y ait une facilité d'intégration d'une part, l'intégration dans l'emploi, ce qui serait beaucoup plus facile pour les Européens, les Belges et les Français, pour prendre cet exemple-là, versus les autres communautés. J'essaie de vous comprendre.
Le Président (M. Bernier): M. Bélanger.
M. Bélanger (Alain): Ce que les études statistiques montrent, c'est que les diplômes universitaires occidentaux, les diplômés d'une université canadienne ou occidentale performent mieux sur le marché du travail, peu importe leur lieu d'origine. Ils peuvent être africains, avoir étudié en France ou au Canada et s'intégrer au Québec aussi bien ou -- il existe aussi de la discrimination -- presque aussi bien qu'un Français blanc.
Mais, par contre, si le diplôme universitaire est sénégalais ou marocain, l'intégration va être plus difficile, peut-être parce que la qualité de l'enseignement est différente, est moindre, et peut-être parce que ce qu'on enseigne aussi ne convient pas nécessairement aux employeurs du Québec, et aussi parce que les employeurs veulent diminuer leurs risques quand ils embauchent, puis ils pourraient choisir plutôt quelqu'un qui a un diplôme d'une université qui est connue.
M. Kotto: Ce que je veux vous faire dire, en somme, c'est que -- ça ne se fera pas, évidemment, parce que nous sommes des humanistes -- dans la meilleure des hypothèses, la sélection, si elle est axée sur l'Europe, notamment la France, la Belgique, pour répondre au problème de vieillissement, pour éventuellement amener des immigrants venant de ces pays-là à contribuer au niveau de sa croissance économique, elle serait plus compréhensible si on applique la proposition qu'on a sur la table, en ciblant les 18-35, ce qui ne serait pas valable... valide parce que non contre-productif versus les entités venant du Sud, notamment l'Afrique, l'Asie. Si je mets bout à bout vos assertions, c'est ce que ça donne.
M. Bélanger (Alain): Je suis étonné de...
Le Président (M. Bernier): M. Bélanger, une courte réponse, s'il vous plaît.
M. Bélanger (Alain): Une courte réponse. Je suis étonné de voir que c'est ce que j'ai transmis comme message. Je n'ai pas l'impression d'avoir transmis ce message-là. Je ne comprends pas vraiment comment vous arrivez à cette conclusion-là. Mais, d'une façon ou d'une autre, l'immigration est diversifiée aussi parce que les pays sources d'origine, ce n'est plus des pays d'immigration. L'Italie, ce n'est plus un pays d'immigration, la France, ce n'est pas un pays d'immigration. Donc, c'est très hypothétique, là, ce que vous cherchez à avancer, là.
M. Kotto: ...que c'était une hypothèse.
M. Bélanger (Alain): Pardon?
M. Kotto: J'ai bien précisé que c'était une hypothèse d'école, oui.
M. Bélanger (Alain): Oui, oui, oui.
Le Président (M. Bernier): Merci, M. Bélanger...
M. Kotto: Merci.
Le Président (M. Bernier): ...donc, représentant de l'Institut national de recherche scientifique, merci de votre participation fort intéressante.
Et, sans plus tarder, je vais suspendre les travaux pour permettre aux gens de l'Université du Québec à Rimouski de prendre place.
(Suspension de la séance à 16 h 57)
(Reprise à 17 h 1)
Le Président (M. Bernier): À l'ordre, s'il vous plaît! Nous allons donc reprendre nos travaux. Alors bienvenue. Souhaitons la bienvenue aux gens de l'Université du Québec à Rimouski. On est heureux de vous recevoir cet après-midi. M. Michel Ringuet, recteur, M. Ringuet, Mme Marie-Thérèse Brunelle, bienvenue, et M. Simon Corriveau. Donc, vous avez une période d'environ 15 minutes pour votre présentation. Par la suite suivront les échanges avec les parlementaires. La parole est à vous.
Université du Québec à Rimouski (UQAR)
M. Ringuet (Michel): Merci, M. le Président, et merci à la commission d'avoir bien voulu nous recevoir pour vous présenter ce que je n'ai pas la prétention d'appeler un mémoire. C'est plutôt un avis véritablement très loin de la connaissance technique et scientifique qui a pu vous être présentée par mon prédécesseur. Appelons ça un cri du coeur empirique basé sur ce que nous vivons en région, ce que nous vivons dans les universités sises en région.
Votre tâche, elle est importante et complexe. Planifier l'immigration au Québec, vous devez nécessairement tenir compte d'une foule d'aspects, d'un très grand nombre d'aspects, on l'a dit tout à l'heure, qui, combien, de quelle provenance, quelles sont les compétences recherchées.
Nous traiterons devant vous plutôt de certains aspects du pourquoi l'immigration et du comment l'immigration. En deux mots, et mon prédécesseur l'a beaucoup mieux fait que moi, mais si on décrit rapidement l'évolution démographique du Québec, on constate, selon les statistiques publiées, qu'il y a quelques régions au Québec qui sont en croissance démographique, disons la zone adjacente à Montréal, la Capitale-Nationale, peut-être l'Outaouais, mais il y a de nombreuses régions en décroissance démographique. Et ce qui est le plus critique, c'est que la plupart de ces régions-là -- M. le député de Saguenay le confirmera -- vivent leur décroissance parce qu'il y a un exode important de la tranche d'âge des 15-24 ans, donc véritablement un flux migratoire négatif de ces gens-là. Et la question qu'on se pose donc, c'est: Vers où s'en va le Québec démographiquement parlant, le Québec, comme province, comme territoire occupé? Pouvons-nous accepter simplement, un peu par défaitisme, que c'est un état de fait, les jeunes quittent les régions périphériques? On nous répondra d'ailleurs que, s'ils le font, c'est par manque d'emplois, le problème d'employabilité. Et on dira tout de suite oui et non. Une étude faite spécifiquement dans le Bas-Saint-Laurent démontre que, d'ici 2014, nous devrons pourvoir à 20 000 emplois et nous ne pourrons pas nous en sortir si au moins 1 200 d'entre eux ne sont pas occupés par des immigrants.
Alors, nous soumettons devant la commission que l'immigration en région devrait être formellement considérée comme prioritaire dans la planification gouvernementale afin de contribuer à endiguer la dévitalisation de ces milieux et, à la fin, de permettre entre autres aux entreprises qui y sont localisées de tout simplement survivre ou, encore mieux, d'elles aussi avoir l'opportunité de travailler et d'exporter à l'étranger.
Un levier possible pour faciliter cette immigration-là, pour assurer l'intégration des immigrants, c'est bien sûr la mobilité étudiante. En effet, les étudiants étrangers sont jeunes et prêts à s'établir dans la vie, connaissent le Québec parce qu'ils y vivent à l'université et l'ont apprivoisé à l'université, ils parlent français, ils détiendront un diplôme reconnu par le marché du travail, bien souvent ils auront acquis leur première expérience de travail au Québec à travers les stages en formation ou durant le travail d'été, ils ont des mentors, des gens qu'ils connaissent déjà en leurs professeurs, des amis, des parrains, des collègues étudiants québécois, une foule de caractéristiques souvent plus difficiles à acquérir pour les immigrants qui nous rejoignent pour occuper directement un emploi.
S'ils ont étudié dans une université en région, ils auront une plus grande ouverture à s'y installer, dans ces régions, ayant apprécié la qualité et le style de vie qui s'y pratiquent. Nous soumettons donc que la mobilité étudiante devrait être, elle aussi, formellement considérée comme prioritaire dans la planification gouvernementale afin de contribuer à assurer une immigration réussie, une intégration réussie.
La mobilité étudiante internationale, d'ailleurs, présente un énorme potentiel eu égard à l'immigration. De 2003 à 2008, cette mobilité a augmenté de 25 % mondialement parlant, atteignant 3 millions d'étudiants. Il y a 3 millions d'étudiants dans le monde qui circulent d'un pays à l'autre. Et, selon l'UNESCO, cette mobilité atteindra 7 millions d'étudiants en 2020. Les principaux critères privilégiés par les étudiants en mobilité sont la notoriété du pays, la langue d'enseignement, le coût des études, la réputation de l'institution, la possibilité d'immigration versus la complexité d'obtention de visas et la sécurité.
Réalisons qu'au Québec nous avons la plupart, sinon tous ces atouts. Notre pays a une excellente notoriété, le Canada, la province en a une aussi. La langue d'enseignement, le français, on peut en faire un atout plutôt qu'un problème; le coût des études est abordable; la réputation des institutions, nous avons d'excellentes universités, y compris en région; la sécurité du pays est reconnue; le problème que nous vivons dans toute la liste des critères identifiés chez les étudiants, c'est la possibilité d'immigration. Rappelons-nous qu'on demande encore à l'étudiant qui demande son admission à une université québécoise qu'il s'engage formellement à retourner dans son pays ou, au mieux, peut-être qu'il ne s'y engage... la double intention, c'est-à-dire que, s'il ne s'y engage pas... s'il n'immigre pas, bien, qu'il s'engage à retourner. Donc, le problème demeure. En tout cas, c'est encore l'idée qui persiste.
Les pays qui percent bien dans le recrutement international, comme l'Australie et la Nouvelle-Zélande, ont un certain nombre de caractéristiques: ils valorisent le marketing international; ils forment des intervenants en recrutement; et ils développent, comme pays, la notoriété internationale en tant que milieu d'accueil pour les étudiants; ils soutiennent les interventions Internet et de nouveaux médias; ils considèrent le recrutement international comme une activité véritablement commerciale. La Nouvelle-Zélande, c'est très clair.
Nous, il nous faut malheureusement constater que le Québec consacre des moyens très limités à nos actions collectives de recrutement international. La CREPUQ vous en parlera très certainement lorsqu'ils vous rencontreront, elle se voyait attribuer par le MELS un montant à cet effet, un programme particulier, il n'est plus versé, il n'existe plus cette année. La fédération vous dira la même chose. Il y a quelques années, il y avait un programme intitulé ÉduQuébec-régions. Suite à une évaluation plus ou moins mitigée de ce programme, on ne l'a tout simplement pas reconduit, on n'a pas considéré le modifier, on l'a tout simplement abandonné.
**(17 h 10)** Alors, ce qui fait que les universités québécoises sont relativement autonomes dans leurs activités de recrutement international, et les universités sises en région, de par leur plus petite taille, ont forcément moins de visibilité à l'international. Et pourtant il nous faut nous aussi, universités en région, favoriser tous les moyens généralement employés en plus de présenter notre région à l'étudiant, une région le plus souvent inconnue. Et cette chaîne d'actions là, donc notre participation à la venue d'internationaux, elle est complexe et impressionnante. Nous devons identifier nos marchés privilégiés, donner suite aux propositions de professeurs qui développent des relations à travers des colloques ou des sabbatiques, avoir nous-mêmes un Web efficace avec un suivi immédiat aux requêtes d'information, accueillir certains visiteurs, participer aux salons internationaux -- une université en région comme la nôtre, salon international, les meilleures années, on va participer à quatre, cinq salons, alors que les universités mieux nanties, je dirais, y vont plus souvent -- et faire aussi, ce qui fonctionne relativement bien, la promotion directe de nos professeurs, de nos créneaux étoiles. Quand un Joël Bêty, professeur à l'UQAR, est reconnu par Radio-Canada scientifique de l'année, ça nous donne une possibilité de faire parler de nous et d'attirer l'attention à l'international. Si les gens avaient à parler de nous aujourd'hui, parmi vous, vous parleriez des sciences de la mer, de l'ISMER, alors ces créneaux forts là nous permettent de percer.
Et, on l'a déjà dit, nos étudiants forment de bons immigrants... immigrants privilégiés, entre autres parce que les universités dégagent de grands moyens pour assurer et la réussite éducative des étudiants et leur intégration dès le départ. On les aide à la recherche d'un logement, dans l'ouverture du compte bancaire, tour de ville, guide d'accueil, atelier de fonctionnement des études, centre d'aide à la réussite, l'aide à l'obtention de permis de travail, quand c'est possible, parrainage, activités culturelles, sportives et sociales, tout ça sont vraiment des leviers d'une grande importance dans la première intégration de l'immigrant.
L'automne dernier, l'UQAR accueillait plus de 400 étudiants étrangers, 400 sur... Bon, nous avons 6 200 étudiants, mais dont à peu près la moitié est à temps partiel. Donc, sur nos étudiants à temps plein, c'est plutôt 400 sur 3 200. C'est un pourcentage intéressant. Et, sans ces témoins de la diversité culturelle, nos campus seraient extrêmement pour ne pas dire trop homogènes. Parce qu'il faut bien dire que la présence de ces immigrants-là, de ces étudiants-là, étrangers... sont extrêmement enrichissants pour nos Québécois pure laine. Sans leur apport, notre université -- et ça, c'est très important -- pourrait se voir dans l'impossibilité d'offrir certains programmes pourtant des plus pertinents pour le développement de nos régions et du Québec. Réalisons que quelques étudiants de plus -- étrangers -- dans nos programmes de chimie et de génie nous permet, à nous, de les dispenser de façon plus rentable. S'ils n'étaient pas là, on pourrait éventuellement suspendre les admissions pour les Québécois. Et là on parle clairement des régions, petites universités. Les étudiants étrangers permettent donc en région la saine expression d'une diversité culturelle en même temps que le maintien de l'offre de disciplines spécifiques.
Le MICC, ministère de l'Immigration et des Communautés culturelles, a déjà établi une liste de formations et souhaite favoriser la venue d'étudiants étrangers. Nous sommes prêts à les favoriser à y mettre plus d'énergie parce que ce sont bien souvent aussi les formations dont nous avons le plus besoin en région. Et, pour ce faire, afin de favoriser cette immigration-là, afin de préserver la venue d'étudiants étrangers dans les disciplines identifiées par le MICC, nous souhaiterions qu'un partenariat financier particulier soit développé entre les universités en région, le ministère de l'Éducation et le MICC par, par exemple, l'octroi, par la gestion des certificats d'acceptation du Québec, d'un certain quota aux universités en région et par un programme particulier de recrutement où, après peut-être une mise de fonds ou ÉduQuébec--régions revampé, on pourrait se voir compenser certaines parts de nos activités de recrutement, mais à l'arrivée de l'étudiant ou, encore mieux, lorsque l'étudiant demanderait de devenir immigrant.
Comprenons donc en terminant que d'autres partenaires régionaux travaillent avec l'UQAR pour favoriser toute cette participation de l'université à la régionalisation de l'immigration. On travaille intensément avec les conférences régionales des élus, les tables interordres où siègent les cégeps et les commissions scolaires, les CLD, Emploi-Québec. Alors, c'est véritablement, et c'est plus facile de le faire dans les régions comme les nôtres, une action commune de tentative de revitalisation. Il y a quelques années, par exemple, avec la CRE, on a fait un mouvement vers l'île de La Réunion -- on pourra vous en parler plus tard -- et c'est un avantage certain au niveau des régions.
Alors, le message que je voudrais qui soit retenu de nos propos, c'est véritablement le caractère essentiel d'inclure dans cette planification le volet région. Pensez aux régions, pensez aux entreprises régions et pensez au volet mobilité étudiante. Pour moi, la mobilité étudiante est une forme d'immigration peut-être à plus long terme, après trois, quatre ans, mais c'est véritablement un levier extrêmement productif, et, pourquoi pas, la conjonction région et mobilité étudiante. Merci.
Le Président (M. Bernier): Merci, M. Ringuet, de votre présentation. Nous allons donc procéder aux échanges. Mme la ministre, la parole est à vous.
Mme Weil: Merci, M. le Président. Alors, bonjour et bienvenue. Bonjour, M. Ringuet. Je me rappelle, j'étais là au mois de janvier pour la signature d'une entente de régionalisation du Bas-Saint-Laurent. Et je suis bien contente d'avoir visité votre campus, l'université. Et je voyais vraiment la flamme que vous avez comme équipe et université d'aller attirer ces étudiants étrangers, la rétention aussi, et l'organisme communautaire que j'ai rencontré, qui était dans le sous-sol. Et, si je me souviens bien, il y a quelqu'un qui se promène dans les couloirs pour prendre soin des étudiants en détresse. Et j'ai trouvé ça extraordinaire, parce que vous voulez vraiment bien réussir. Parce que, c'est vrai, les étudiants, ils peuvent évidemment vivre des moments difficiles, hein? Ils sont loin de chez eux. Ils n'ont pas nécessairement... Ils ne connaissent pas le milieu, la communauté. Alors, j'ai trouvé ça extraordinaire, et que l'organisme communautaire soit vraiment là, au sein de votre université.
Et je pense qu'à l'époque on a même échangé sur cette question d'attraction des étudiants. C'est un dossier extrêmement important. Évidemment, vos commentaires, votre mémoire, je vais le transmettre à deux de mes collègues: la ministre de l'Éducation et la ministre des Relations internationales, parce que c'est vraiment dans leur champ de compétence, d'attirer ces étudiants. Mais ce n'est pas à dire que le MICC n'a pas son rôle de soutien pour faciliter l'arrivée, mais c'est plus un rôle de soutien pour faciliter l'arrivée.
Mais il y a quand même -- j'entends des grondements, là, à l'extérieur -- il y a quand même le PEQ, le Programme de l'expérience québécoise, qui cible les étudiants, et je suis en réflexion beaucoup avec les universitaires que je rencontre, les recteurs et tout, pour voir comment on pourrait peut-être aussi imaginer un lien. Parce qu'un élément d'attraction qu'on a c'est cette notion d'embarquer dans le Programme de l'expérience québécoise qui permet aux étudiants étrangers, une fois qu'ils ont un diplôme, d'aller sur la voie rapide pour avoir leurs certificats de sélection du Québec. C'est très attirant. Et je pense qu'il faut vraiment trouver des façons innovatrices de faire la promotion de ce programme, mais en partenariat notamment avec les universités.
Donc, je pense qu'on a besoin de réfléchir encore plus. On pourrait avoir un lien de votre site à notre site. Je pense qu'on va en parler avec la CREPUQ aussi, de voir soudainement donc, le candidat, la candidate voit: Hein, c'est intéressant au Québec, on pourrait rapidement avoir un CSQ. Et on me dit que c'est toujours délicat, ces choses-là, parce qu'il faut quand même que la famille, les parents... On dit que c'est délicat par rapport à vouloir aller chercher ces étudiants. Mais les parents vont le savoir, c'est sur l'Internet, c'est en toute connaissance de cause, s'ils sont intéressés.
Je pense que, pour les universités francophones, c'est intéressant, parce qu'il y a cet élément de maîtriser la langue française, et donc c'est un élément d'attraction additionnel et qui leur permet de planifier leur parcours universitaire, même avant d'arriver. Parce qu'ils vont savoir, en allant sur notre site: Voici ce qui va vous permettre d'être admis, il faut connaître le français. Alors, déjà... Puis les étudiants vont le faire. Moi, je rencontre des étudiants qui ne connaissent pas le PEQ, ils sont déjà là et ils me disent: Bien, si on avait su, il y a des choses qu'on aurait pu faire. Dans d'autres pays, on aurait pu choisir la langue française comme deuxième langue ou troisième langue, au lieu d'une autre langue. Donc, je pense qu'on a beaucoup de travail à faire à ce niveau-là, et c'est beaucoup par les universités, je pense, qu'on pourrait le faire, et lorsqu'ils arrivent. Donc là, s'ils choisissent une université francophone, c'est vraiment... ils sont rendus. Ils n'auraient aucun problème par la suite. Donc, ça, c'est une idée.
Donc, le PEQ, je voulais voir si vous... le Programme de l'expérience québécoise, la voie étudiante, si vous étiez au courant de ce programme-là.
**(17 h 20)**Le Président (M. Bernier): M. Ringuet.
M. Ringuet (Michel): Je crois que... Ce n'est pas un programme qui est connu, ça, c'est... Je ne pense pas avoir...
Mme Weil: ...
M. Ringuet (Michel): Oui, oui.
Mme Weil: Oui. Très bien. C'est nouveau, quand même, c'est très nouveau, c'est depuis 2010, et on a vraiment l'intention d'en faire la promotion, mais je pense que ça pourrait être intéressant. Et, moi, il me semble qu'on avait... j'avais rencontré des étudiants, peut-être français, qui avaient choisi justement votre université à cause des programmes que vous offrez -- donc il y a des gens qui cherchent vos programmes -- et qui étaient intéressés à rester, ils étaient carrément intéressés à rester. Donc, il y a lieu de vraiment faire connaître ce programme. Donc, ça, c'est un rôle que le MICC peut jouer.
Je ne sais pas si vous avez des opinions sur le reste, c'est-à-dire... Sinon, ça va. Je comprends que vous êtes venus ici pour parler de ce dossier-là: l'attraction des étudiants, comment mieux faire pour les capter...
M. Ringuet (Michel): Bien, en fait...
Mme Weil: ...et dynamiser les régions.
Le Président (M. Bernier): M. Ringuet.
M. Ringuet (Michel): Oui. En fait, vous avez raison, on n'est pas tellement branchés sur la question même de la consultation en fonction du mémoire, les quotas ou... bon. Mais, lorsqu'on planifie le Québec de demain, dans la planification du Québec de demain, il y a nécessairement donc pour nous une priorité à donner à l'occupation du territoire, on se sentait mandatés d'une certaine forme pour venir dire: Dans cette planification, si... Parce que la question des immigrants n'est pas la même partout au Québec, il est clair, et donc il peut y avoir des gens... Effectivement, on l'entend dire: Il y a trop d'immigrants. On l'entend même chez nous. Vous avez peut-être vu passer des commentaires sur Internet où il y a des gens qui croyaient que, parce qu'il y a une rue à Rimouski qui s'appelle Mohammed-El-Sabh, qui était un grand scientifique de l'UQAR, qu'on est en train, bon, de trop tourner vers la multiethnicité. Mais, donc, c'est peut-être ça, c'est de dire: Est-ce qu'on peut, même si on est un peu en périphérie, vous dire: Pensez aux régions dans cette écriture-là, et vous inviter -- puis, je pense, la CREPUQ va le faire aussi -- à considérer la venue des étudiants internationaux comme un moyen réel d'immigration? Ce n'est pas clair pour tout le monde. Ça se fait en deux temps. Venez, venez comme étudiants, et après ça on pourra vous considérer comme immigrants.
Nous, le sentiment qu'on a quand on discute avec nos étudiants, c'est que peut-être que les parents pourraient trouver ça interpellant que de savoir que le jeune considère déjà d'aller travailler à l'étranger. Mais le jeune lui-même, dans sa tête, là, il est rendu là. Donc, l'importance de lui dire dès le départ: Oui, il a la possibilité d'immigrer.
Mme Weil: Tout à fait, et je...
Le Président (M. Bernier): Mme la ministre.
Mme Weil: Oui. Merci, M. le Président. J'ai compris que... Je pense que c'est London School of Economics: première journée que les étudiants arrivent, tout de suite on leur explique ça. Bon. Et surtout s'il y a un lien sur l'Internet, bon, tout le monde le voit, puis c'est à eux de choisir s'ils veulent, les jeunes et les parents.
Moi, j'ai senti, dans votre région comme d'autres régions aussi, vraiment un intérêt, beaucoup. Parce que j'étais sur votre campus, et vous avez cette volonté, cette vision, pour moi, je l'ai senti comme très fortement. Vous êtes tout à fait, je vous dirais, où, moi, je suis rendue aussi, nous, on est rendus, et c'est pour ça que le Programme de l'expérience québécoise est surtout d'aller chercher la jeunesse, des gens qui sont francophones, scolarisés ici, c'est exactement ce qu'on veut, et dynamiser les régions aussi. Alors, la régionalisation de l'immigration est importante. Donc, je suis tout à fait d'accord avec vous.
Avec votre permission, M. le Président.
Le Président (M. Bernier): Oui. M. le député de Charlesbourg, la parole est à vous.
M. Pigeon: Merci, M. le Président, et...
Une voix: Dénonce ton conflit d'intérêts, là.
M. Pigeon: Je veux souhaiter la bienvenue à mes ex-collègues de l'Université du Québec à Rimouski. Moi, j'aimerais dire d'entrée de jeu que l'université, on s'en parlait tout à l'heure, est une formidable machine à intégrer, je pense que c'est très clair, c'est très net. Et ça, c'est un élément à mettre sur la table, là. Les jeunes qui viennent, ils viennent assez jeunes d'ailleurs, ils se forment, comme vous le dites dans votre mémoire, un réseau social, ils tissent des liens, ils comprennent dans quelle communauté ils s'inscrivent. Donc, ça, je pense qu'en partant c'est une grande réalité.
La deuxième réalité, c'est que nous voulons au Québec que les régions soient vivantes et dynamiques. Et je pense que la contribution de l'université est absolument énorme. Je me permettrais aussi de dire que la contribution des cégeps est très grande à la vitalité des régions, hein? C'est des centres économiques, sociaux, culturels. C'est vraiment fondamental.
Ce que j'aurais envie... quelques questions un peu plus précises, mais, là où je veux en venir, vous allez le comprendre tout de suite, c'est le lien avec l'emploi. Je comprends tout à fait le point de vue que, si on intègre les gens à l'université puis qu'ils restent, c'est une richesse, bon. Mais la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante, qui a passé cet après-midi, nous disait, là, que, souvent, bon, les PME recherchent des gens qui ont plutôt un profil métier, technique, etc. Et vous nous dites: Bon, nous, on forme des universitaires, et ces gens-là seraient intéressés à rester, on veut les intégrer.
Donc, un ensemble de petites questions, là. D'abord, les étudiants qui sont chez vous, est-ce qu'ils sont surtout au bac, à la maîtrise ou au doctorat? J'aimerais avoir une idée, là, du tableau un petit peu, là. Puis dans quels secteurs ils étudient?
M. Ringuet (Michel): Les étudiants à l'UQAR spécifiquement, les étudiants étrangers?
M. Pigeon: Oui. Alors, je voulais savoir, là, justement, à Rimouski, là, est-ce qu'ils sont plutôt bac, maîtrise, doctorat, j'aimerais avoir une idée, et dans quels secteurs ils étudient, puis comment vous avez fait... Vous l'avez fait, parce que je sais que c'est le rôle d'un recteur, puis on se préoccupe de la manière dont les étudiants vont pouvoir s'intégrer dans la société par la suite. Quels sont vos contacts avec les entreprises sur place ou du bassin du Bas-Saint-Laurent? Puis est-ce qu'il y a vraiment une possibilité intéressante pour un grand nombre de vos diplômés étrangers d'aller travailler dans des entreprises?
Est-ce qu'il y a comme des comités de formés, là, puis qu'il y a des liens? Puis quelles sortes d'entreprises? Donc, au-delà donc de ce que disait la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante, comment on peut faire le lien avec des entreprises qui ont besoin de diplômés universitaires?
Le Président (M. Bernier): M. Ringuet.
M. Ringuet (Michel): Faire le lien avec l'entreprise qui a besoin de gens de métier actuellement... puis c'est clair qu'on a besoin de gens de métier. Mais, en même temps, on se raconte tous qu'on s'en va vers une économie du savoir. Je pense que, quand on parle d'une économie du savoir, on devrait normalement penser à une économie qui devrait glisser vers des compétences... je dirais une sphère de compétences universitaires accrues par rapport aux gens de métier. On aura toujours besoin de gens de métier, là, mais... Et certaines économies le sentent, ça.
Et alors donc oui, actuellement, les gens... D'ailleurs, il y a de plus en plus, et c'est le cas chez nous, de cégeps et même de commissions scolaires qui s'engagent dans un mouvement de recrutement international aussi, parce que le technicien en génie mécanique, s'il est formé dans un de nos cégeps, lui aussi il va avoir plus de facilité à se trouver un travail comme technicien que le technicien formé à l'extérieur.
Nous, on a les chiffres, nous. Mais, grosso modo, je vous dirais que -- et on est un petit peu différents d'autres universités à cet égard-là -- chez nous, la proportion d'étudiants de deuxième, troisième cycle est plus importante qu'ailleurs. Elle est...
Mme Brunelle (Marie-Thérèse): Elle est presque deux tiers aux cycles supérieurs et le tiers au premier cycle, alors que la plupart des universités ont plus d'étudiants au premier cycle.
**(17 h 30)**M. Ringuet (Michel): Et pourquoi cela? C'est qu'historiquement c'est vraiment par nos créneaux forts qu'on est allés chercher les étudiants internationaux: en océanographie principalement, en biologie nordique, en gestion de projet. Alors, c'est vraiment là où... La notoriété de l'université joue sur l'attractivité, et donc par notre notoriété dans ces secteurs-là.
Bon, vous allez me dire: On n'embauche pas tous les océanographes qu'on forme à l'Institut des sciences de la mer dans notre région. Bien sûr. Sauf que je vous raconterai par ailleurs qu'actuellement des entreprises rimouskoises sont en train d'implanter un observatoire marin en Argentine, dans la baie de Comodoro-Rivadavia, à partir de technologies développées à Rimouski, des bouées construites à Rimouski, et ça, c'est un océanographe étranger qui est venu faire son doctorat chez nous qui a permis à cette industrie de se développer. Alors, il y a des contrecoups de ce type-là, là, qui vont au-delà de l'employabilité immédiate.
L'employabilité immédiate, elle existe aussi. Vous demandez par quelle plateforme. On est en relation extrêmement étroite avec Emploi-Québec Bas-Saint-Laurent, avec tous les CLD du Bas-Saint-Laurent, les SADC, je siège à la conférence régionale des élus, et c'est par tous... et quand les gens, ils parlent d'emploi, bien, on a décidé ensemble, la conférence, la table interordres du Bas-Saint-Laurent, de se payer une étude prospective de l'évolution de l'emploi au Bas-Saint-Laurent jusqu'en 2020 en se disant que nos établissements de formation, bien sûr, ne forment pas des gens qui vont être disponibles demain matin, mais ils vont être disponibles dans cinq ans, dans huit ans quand ils sont encore au secondaire. Et donc vers quoi devons-nous tirer notre formation? Alors, oui, on est en conjonction immédiate.
On a aussi dans nos murs une corporation indépendante, un autre organisme sans but lucratif qui s'appelle la Corporation de soutien au développement technologique des petites et moyennes entreprises du Bas-Saint-Laurent. Ces gens-là sont chez nous, interviennent avec toutes les entreprises et voient très bien les besoins en emploi de ces entreprises-là. Et comme ils sont chez nous et qu'ils sont en lien direct avec le Département de génie, le Département de chimie-biologie, etc., les ponts se font très adéquatement. De plus en plus, dans nos programmes, on a des stages en cours d'étude, alors l'étudiant étranger a accès à ces stages-là tout comme les étudiants québécois, et l'apprivoisement se fait à ce moment-là.
Le Président (M. Bernier): Merci.
M. Pigeon: Oui, merci, M. le Président.
Le Président (M. Bernier): Dernière question, monsieur...
M. Pigeon: Oui, juste un bref commentaire. Pour revenir à justement ce que disait la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante, c'est que eux disent: Il y a pénurie d'emploi, puis c'est maintenant, puis on veut des gens maintenant, tout de suite, puis on choisit les gens qui ont déjà les compétences. Votre vision à vous, c'est une vision sur cinq ans, 10 ans, on prépare l'avenir. L'université n'est pas sur le même terrain, hein? Et c'est sûr qu'on parle de quelqu'un qui se forme au bac à trois ans, quatre ans, à la maîtrise, au doctorat, mais là on parle d'un horizon temporel beaucoup plus long. Et donc la conception qu'on peut avoir de l'importance de l'immigration, ce n'est pas la même chose évidemment que le très court terme des employeurs qui ont un besoin maintenant. Mais bon, moi, je trouve intéressant vos remarques et je termine simplement en vous disant, là, que vous je souhaite bonne chance dans toutes vos démarches. Bon succès.
Le Président (M. Bernier): Merci. Mme Brunelle, oui, un court commentaire.
Mme Brunelle (Marie-Thérèse): Si vous me permettez un commentaire...
Le Président (M. Bernier): Oui, oui.
Mme Brunelle (Marie-Thérèse): ...je trouve intéressant... Vous savez, dans le fond, oui, parfois on est capables d'être très réactifs et presque immédiats. Par exemple... puis je regarde les enjeux des fois de l'immigration, et vous avez défini une liste de priorités. Et souvent nos priorités se croisent. Par exemple, chez nous, on va avoir besoin de chimistes. Bien, ils sont dans votre liste de personnes que vous cherchez, nous autres on va les chercher. On vient de mettre sur pied un programme en chimie environnementale qu'on peut faire en deux ans et demi et même l'été. Ils sont intégrés dans les entreprises dans les deux années, et, tout de suite, on les rentre dans le marché du travail. On est capables d'avoir des programmes pas mal ancrés, et je sais qu'il y a plusieurs domaines, par exemple en informatique, où les gens veulent avoir des gens compétents. Et très rapidement, quand ils arrivent, ils doivent travailler en même temps pour gagner leurs études, ils se prennent des petits contrats, et c'est un besoin que vous avez, et nous autres on attire aussi des gens.
Au premier cycle, c'est souvent génie informatique parce qu'on va tenir compte des besoins des gens qui sont en quête de lieux pour arriver. Alors, bien sûr, là, il reste à leur faire valoir qu'en région c'est très intéressant, mais il faut leur dire aussi que... il faut savoir où ils veulent vivre, hein? On a une belle région au bord de la mer, des grands espaces, c'est très attirant. Et, ma foi, quand ils ont connu cette réalité-là... Mais, quand ils arrivent par la voie de l'immigration traditionnelle, ils vont souvent arriver dans les grands centres et là ils vont se trouver une communauté, et l'intégration va être plus difficile à faire que quand ils arrivent à Rimouski où ils doivent nécessairement se faire des amis Québécois. Alors, il n'y a pas que Boucar Diouf, mais c'est quand même une image, tout le monde lui dit: Tu viens de Rimouski ou de la Gaspésie.
Le Président (M. Bernier): Nous allons poursuivre nos échanges avec les membres de l'opposition officielle. M. le député de Bourget, la parole est à vous.
M. Kotto: Merci, M. le Président. M. Ringuet, Mme Brunelle, M. Corriveau, merci d'être là.
J'aurais fait une blague si j'étais en forme, mais j'irai directement à la question. La perspective de rétention des étudiants étrangers, en fait, des cerveaux étrangers -- je fais l'avocat du diable, je ne vous fais pas un procès -- n'est-elle pas, disons, un danger à l'effet qu'elle vide les pays d'origine de ces étudiants-là de talents potentiels?
Le Président (M. Bernier): M. Ringuet, oui.
M. Ringuet (Michel): Le Québec vit la même chose. Nous avons des étudiants québécois qui vont étudier ailleurs, alors la circulation, ce n'est pas à sens unique. Par ailleurs, c'est évident que notre programme ne doit pas aller dans le sens d'un exode des cerveaux des pays qui en ont le plus besoin vers des pays qui en disposent plus. Cette année, vous avez peut-être entendu parler de notre programme spécial pour les étudiants haïtiens. Nous avons réussi, immédiatement après le séisme, à engager des négociations avec l'université d'État d'Haïti qui ont fait en sorte que 10 étudiants haïtiens ont pu venir étudier, poursuivre leurs études universitaires chez nous gratuitement, avec la contribution d'un certain nombre de partenaires. Eh bien, ces étudiants-là, pour avoir accès à ce programme-là, devaient s'engager à retourner à Haïti. Ça, c'était très clair.
Par ailleurs, j'irai dans le contre-exemple où on a eu un partenariat avec l'île de La Réunion, département français où le chômage des jeunes est endémique. Donc, l'île de La Réunion a décidé de favoriser l'émigration de ses jeunes parce qu'ils savent très bien que, d'ici à un avenir prévisible, ils ne pourront pas donner d'emploi à ces jeunes-là. Alors, pour moi, il faut chercher l'équilibre dans tout ça.
Le Président (M. Bernier): M. le député.
M. Kotto: Pour revenir... C'est une question en lien avec un échange que nous avons eu avec M. Bélanger tout à l'heure. J'aimerais savoir, de votre perspective des choses: Les étudiants qui arrivent à Rimouski, à l'université, qu'ils viennent d'Afrique ou d'Amérique du Sud, est-ce que vous pouvez nous donner une idée de leur niveau de performance, leur niveau de formation? Est-ce qu'ils sont à niveau équivalent avec les souchiens de Rimouski quand ils arrivent chez vous?
Le Président (M. Bernier): M. Corriveau.
M. Corriveau (Simon): Dans la majorité des cas, oui. C'est clair qu'il peut arriver qu'un étudiant se soit faufilé, là, mais, grosso modo... Bon, ceci dit, si vous posez la question à la CREPUQ, dans les statistiques globales du Québec, le taux de réussite des étudiants étrangers est inférieur au taux de réussite des étudiants québécois. Ça, on l'admettra tout le monde. Cependant il faut considérer, donc, la phase d'acclimatation qui est une phase critique, c'est vrai pour les étudiants québécois aussi. Passer du cégep à l'université, la première session, c'est extrêmement difficile. Nos étudiants haïtiens ont eu des problèmes, de graves problèmes académiques à la première session. L'avantage que nous avons, dans une université comme la nôtre, et Mme la ministre en parlait tout à l'heure, on a un encadrement, on peut se permettre un encadrement plus personnalisé, parce que la taille nous le permet. Nous avons ce que l'on appelle un travailleur de corridor qui identifie les étudiants qui commencent à s'isoler, parce que souvent l'isolement est dû à des problèmes académiques aussi bien qu'à des problèmes d'éloignement du pays. Et donc, à la fin de tout ça, parce que le niveau d'entrées -- on a des mesures de ces niveaux d'entrées là, il y a des évaluations des dossiers, là -- parce que le niveau d'entrées est acceptable et parce que nous fournissons un encadrement adéquat, chez nous, le taux de succès, il est quasi comparable à celui des étudiants québécois.
**(17 h 40)**Le Président (M. Bernier): M. le député.
M. Kotto: Quelle est la moyenne d'âge quand ces étudiants étrangers arrivent chez vous?
M. Ringuet (Michel): Je ne saurais dire. Légèrement supérieure à celle des étudiants québécois, certainement, là, légèrement supérieure, mais pas de façon spectaculaire. L'étudiant qui arrive maîtrise, doctorat doit arriver autour de 25, 26 ans.
M. Kotto: Ça reste toujours un peu trop tard pour M. Bélanger.
Des voix: Ha, ha, ha!
Mme Brunelle (Marie-Thérèse): C'est assez bien normé...
Le Président (M. Bernier): Mme Brunelle.
Mme Brunelle (Marie-Thérèse): Excusez-moi. C'est assez bien normé. Alors, c'est sûr que, pour entrer chez nous, à l'université, on va demander 13 ans de scolarité. Alors, quand on va dans un autre système universitaire, on va aussi demander aussi ce 13 ans, exception de la France, là, où il y a une parité après le bac, après 12 ans, ils peuvent venir chez nous. Mais, si on va dans tout autre pays, on va demander l'équivalent du bac français plus une année déjà. Donc, généralement, les gens ont suivi le même cursus et arrivent à un âge assez comparable. Il y a des pays où ça peut être un peu plus long, là, pour faire la scolarité, mais on va demander le même nombre d'années généralement.
Le Président (M. Bernier): Merci. M. le député.
M. Kotto: Là, je vais à un enjeu qui est important aux yeux de la ministre, la diversité. Au niveau du corps professoral, les chargés de cours, est-ce qu'on trouve parmi eux des gens venus d'ailleurs également?
M. Ringuet (Michel): Chez...
M. Kotto: Chargés de cours dans un premier temps et les profs titulaires aussi.
M. Ringuet (Michel): Chez les profs titulaires...
M. Kotto: C'est quoi la proportion?
M. Ringuet (Michel): Oui, chez les profs titulaires, certainement. Chez les...
M. Kotto: Oui.
M. Ringuet (Michel): Et même dans une université comme la nôtre, il y a un nombre assez important de professeurs qui proviennent d'ailleurs, plus dans certains domaines que dans d'autres. En génie, par exemple, en sciences de la mer, on va chercher les meilleurs experts et, si ces meilleurs experts là viennent d'ailleurs... Quand il n'y a pas l'équivalent canadien, on embauche. Alors, il y a certainement... je ne pourrais pas vous dire... je dirais comme ça 15 % des professeurs de l'UQAR proviennent de l'étranger. On n'en a pas en sciences comptables, les sciences comptables sont purement québécoises, sciences de l'éducation aussi, et, comme ce sont des programmes importants chez nous, la majorité des professeurs titulaires étrangers se retrouvent donc dans disciplines plus sciences naturelles et génie.
Chez les chargés de cours, c'est moins fréquent. Les chargés de cours, c'est des gens qui sont généralement en emploi en entreprises ou en organisations qui viennent donner un cours ou deux chez nous, et ça, la proportion d'immigrants dans ces secteurs-là est probablement plus faible.
Le Président (M. Bernier): Merci. M. le député.
M. Kotto: Merci.
Le Président (M. Bernier): M. le député de Lac-Saint-Jean.
M. Cloutier: Oui. Merci, M. le Président. Alors, je ne peux passer sous silence le cri du coeur, d'une certaine manière, que vous nous faites en ce qui a trait à l'immigration en région de façon générale. Un des moyens que vous nous proposez, c'est par un nouveau partenariat financier avec les universités en région. Et, ce que je comprends, c'est qu'il y a une disparité entre vos moyens et les universités un peu mieux nanties. Peut-être vous pouvez nous en dire davantage pour qu'on comprenne mieux votre problème.
Le Président (M. Bernier): M. Ringuet.
M. Ringuet (Michel): Les moyens que nous avons sont en proportion du nombre d'étudiants que nous avons. Les frais de scolarité et les subventions sont en... Bon. Et il est certain que... Et, si donc notre population étudiante représente 10 % de la population étudiante d'une autre université, ça veut dire que nous avons l'équivalent de 10 % ce que l'autre université peut faire dans ses activités internationales. C'est aussi simple que ça.
Alors, bien sûr, à travers les activités de la CREPUQ, avec la subvention générale que nous avions par le passé, nous pouvions nous engager dans certaines activités collectives, mais on ne pouvait vraiment pas participer à toutes les activités collectives. On n'a pas ces moyens-là, surtout que... Alors, il y a ce volet du moyen dû à la taille.
L'autre volet, c'est qu'en plus de ça nous devons tenter de convaincre l'étudiant que Rimouski existe bel et bien. L'étudiant a entendu parler de Montréal, a entendu parler de Québec, le plus souvent, mais Rimouski, c'est où? Une fois qu'ils l'ont compris et qu'ils voient l'expertise, comme a dit Mme Brunelle, une fois qu'ils ont vécu chez nous, ils sont le plus souvent extrêmement satisfaits de leur expérience. Mais il y a cette vente additionnelle là à faire.
Le Président (M. Bernier): Merci. M. le député.
M. Cloutier: Oui. De façon peut-être plus générale, outre le partenariat avec votre université, avez-vous réfléchi à d'autres alternatives pour attirer les nouveaux arrivants pour vote région? Parce que je pense que la décroissance démographique est particulièrement importante chez vous. Est-ce que ça se répercute aussi au niveau des étudiants à l'université, au niveau des inscriptions?
Le Président (M. Bernier): M. Ringuet.
M. Ringuet (Michel): Au niveau des inscriptions, grâce aux étudiants internationaux, on maintient les inscriptions. Ça, c'est vrai pour le campus de Rimouski. Le campus de Lévis, c'est une autre situation. Il y a des organismes qui... et je sais qu'il y en a un chez vous qui fonctionne bien, je ne sais pas comment ça s'appelle... Place aux jeunes, où on cherche à attirer des étudiants d'autres régions québécoises vers le Saguenay en favorisant... En fait, on joue à la grande séduction. Alors, c'est sûr que l'université participe à ce genre de moyens là. Mais peut-être que Marie-Thérèse...
Le Président (M. Bernier): Mme Brunelle.
Mme Brunelle (Marie-Thérèse): Oui, j'aimerais peut-être ajouter... parce qu'il y a quelques années, avec d'ailleurs l'Université du Québec à Chicoutimi et avec le partenariat du ministère de l'Immigration, on avait un programme qui s'appelait ÉduQuébec-régions, et vraiment c'était de partir à travers le monde puis d'amener des gens vers les régions, dans nos systèmes d'éducation, et c'est un partenariat qu'on avait.
Et une des choses où on avait de la difficulté, c'est que les... C'est un programme qui était intéressant, il a eu de bons résultats, et d'ailleurs on a beaucoup appris, en travaillant avec le ministère, sur comment faire du recrutement international. Cependant, on dilue, parce que, quand c'était le ministère qui partait avec ses moyens pour le faire, alors qu'il y a une expertise qui est développée dans les universités...
Nous, ce qu'on dit souvent... on a demandé au ministère de l'Immigration, c'est: Faites-nous confiance, laissez-nous l'ordre des moyens, et entendons-nous sur les résultats. Si, dans vos grilles, vous nous dites: Nous, ce qu'on veut dans le Bas-Saint-Laurent, on voudrait avoir tel profil de jeunes, en telle quantité, nous, on pense, à l'université, que, si on a... Tantôt, je vous parlais de chimie, je pourrais vous parler d'informatique ou d'autres programmes. Nous, si on vous dit: On commence à connaître ça, mais, si vous nous laissez le choix des moyens et que vous nous rétribuez aux résultats, je pense que, là, on pourrait avoir un partenariat qui se tienne.
Que, nous, on vous dise, là: Bien, si vous nous dites: On a besoin de chimistes, puis il faut que ça aille dans les entreprises, O.K., on va déployer des moyens. Donnez-nous une petite base de démarrage. Après ça, si je vais chercher le profil sur lequel on s'entend, est-ce que je pourrais avoir une rémunération qui me permettrait après ça de réinvestir dans mon recrutement extérieur? Et, la minute où ils vont demander leur permis de résident permanent, donnez-moi un petit boni pour ça.
Moi, je me dis que, quand on met les bons... ça, là, ça va susciter l'action, parce que, quand il y a un petit boni... Ça peut être un 1 000 $, ça peut être un 2 000 $ pour celui qui arrive. Mais, si on fait ça, puis que, moi, je vais vous en chercher une centaine ou... en tout cas, ça va nous motiver pour aller en chercher davantage et qu'on déploie toutes les connaissances, toute l'énergie, tous les réseaux que vous nous avez permis de créer.
Quand ÉduQuébec--régions est tombé, ça nous a fait mal parce qu'on a été ralentis dans cet élan-là. Et là on s'est repartis beaucoup avec la CREPUQ et le PIEQ, et là, encore là, ça tombe. Alors, est-ce qu'on pourrait être supportés financièrement, mais qu'on nous laisse l'ordre des moyens, et qu'on s'entende sur le résultat à atteindre, et qu'on le mette très quantifiable? Moi, je pense, c'est un programme sur lequel on pourrait s'entendre.
Le Président (M. Bernier): Merci. M. le député.
M. Cloutier: Je ne suis pas familier avec les programmes que vous avez mentionnés. Je comprends que c'est des programmes qui n'ont probablement pas été renouvelés, c'est ça?
Mme Brunelle (Marie-Thérèse): C'est ça.
**(17 h 50)**M. Ringuet (Michel): Ça, c'était 2004... programmes qui existaient en 2004-2007. C'est un partenariat entre le ministère et les universités en région, mais qui... En fait, ce qui a été fait surtout, c'est que le ministère s'est occupé lui-même d'aller dans les salons, d'aller à l'extérieur et de présenter les universités québécoises...
Mme Brunelle (Marie-Thérèse): Et des cégeps.
M. Ringuet (Michel): ...et les cégeps.
Comme le dit Mme Brunelle, le véritable contact de recrutement, là, nous, on a des experts qui font ça, on a des gens qui sont capables de faire la vente, et on connaît les meilleurs moyens. On a maintenant des collègues, là, un peu partout qui nous connaissent bien puis avec lesquels on peut travailler.
Alors, si on s'entendait sur un programme plus souple qui rémunère le succès plutôt que juste mettre une enveloppe de départ, je pense que ça serait extrêmement incitatif et ça pourrait fonctionner. Et, nous, je dirais, là, ça nous enlèverait un certain fardeau, parce qu'actuellement -- on va être un certain nombre à parler de frais de scolarité, là, dans quelques mois, là -- si on dit aux étudiants québécois: Il y a une portion de vos frais de scolarité qui va servir à aller faire du recrutement international, là, on va tous se faire mal.
Alors, pour moi, le recrutement international, il faudrait essayer de le sortir de ces enveloppes régulières là des universités et le faire dans une autre optique, une optique qui est celle dont on parle aujourd'hui, ouvertement.
Le Président (M. Bernier): Merci. M. le député.
M. Cloutier: Oui, non, mais c'était plus un commentaire, alors... C'est un beau partenariat. Dans le fond, c'est un message que vous lancez au gouvernement. Je comprends que la ministre tout à l'heure disait qu'elle allait transmettre votre mémoire à sa collègue ou à ses collègues.
Votre région, la nôtre, la Gaspésie vivent des décroissances importantes. Avez-vous réfléchi à d'autres alternatives, là? Peut-être par votre présence à la CRE, vous dites, vous étiez probablement un représentant de la société civile à votre CRE régionale, mais quelle autre solution voyez-vous pour que vous deveniez une terre d'accueil plus accueillante encore, plus attirante pour les nouveaux arrivants? Parce qu'on a le même défi chez nous, puis, de toute évidence, on y arrive difficilement.
Le Président (M. Bernier): Oui, M. Ringuet, un dernier commentaire.
M. Ringuet (Michel): Oui. Ce qui est surprenant, là... bien, «surprenant» n'est pas... En fait, ce qui fait mal, c'est le nombre de jeunes, 15-24 ans, qui quittent la région, surtout quand ces gens-là pourraient choisir d'étudier la discipline chez nous. Une fois qu'on a dit ça, là, moi, je comprends tout à fait l'étudiant qui veut aller voir le monde, hein? Dans le fond, c'est de ces mêmes étudiants-là qu'on parle, alors... Mais, je ne pense pas qu'il y ait beaucoup d'autres moyens que ce dont on vous parle aujourd'hui: on travaille déjà avec les CRE, on travaille déjà avec les entreprises, on connaît bien notre milieu.
C'est l'ordre du moyen pour se donner la notoriété et l'attractivité, là, qui doit jouer. C'est de choisir ça ensemble. Et ça, je pense qu'on peut le faire de façon non compétitive. Peut-être travailler avec les cégeps, travailler avec... Tu sais, vraiment c'est mousser... Quand on regarde le succès que la Nouvelle-Zélande a, il est extrême... Allez voir les chiffres des étudiants internationaux en Nouvelle-Zélande, pour un si petit pays. Mais c'est qu'ils investissent, ils investissent beaucoup, ils voient ça comme une activité commerciale.
Une voix: Puis une école de francisation...
M. Ringuet (Michel): Oui.
Le Président (M. Bernier): Merci. Merci, M. Ringuet, Mme Brunelle, M. Corriveau. Merci de votre participation, représentants de l'Université du Québec à Rimouski. Je remercie également tous les parlementaires qui ont participé à ces deux jours de travail. Je remercie le personnel de l'Assemblée nationale qui nous ont secondés.
Donc, compte tenu que nous avons terminé les auditions qui étaient prévues pour aujourd'hui, la commission ajourne ses travaux au mercredi 24 août 2011, à 9 h 30, dans la salle Louis-Hippolyte-La Fontaine. Bonne soirée.
(Fin de la séance à 17 h 55)