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(Dix heures dix-sept minutes)
Le Président (M. Boucher): À l'ordre, s'il vous
plaît!
La commission de la protection de l'environnement est réunie pour
étudier les crédits du ministère pour l'année
1983-1984.
Les membres de la commission sont: Mme Bacon (Chomedey), M.
Beauséjour (Iberville), M. Cusano (Viau) remplace M. Bélanger
(Mégantic-Compton); MM. Blouin (Rousseau), Dupré
(Saint-Hyacinthe), Fallu (Groulx), Gravel (Limoilou), Middlemiss (Pontiac),
Ouellette (Beauce-Nord), Rodrigue (Vimont), Vaillancourt (Orford).
Les intervenants sont: MM. Bisaillon (Sainte-Marie), Champagne
(Mille-Îles), Desbiens (Dubuc), Gagnon (Champlain), Mme Juneau (Johnson),
MM. Lincoln (Nelligan), Marx (D'Arcy McGee), O'Gallagher (Robert Baldwin) et
Tremblay (Chambly).
Est-ce qu'il y a un rapporteur? M. Beauséjour (Iberville).
M. Beauséjour: M. le Président, je proposerais
plutôt M. Fallu.
Le Président (M. Boucher): Ah bon! M. Fallu (Groulx).
Adopté.
M. le ministre, pour les remarques préliminaires.
Remarques préliminaires M. Adrien
Ouellette
M. Ouellette: Merci, M. le Président.
Je voudrais tout d'abord vous présenter les gens qui
m'accompagnent: M. Pierre Meunier, sous-ministre, à ma droite; M.
Bernard Harvey, sous-ministre adjoint aux opérations régionales;
M. Michel Lamontagne, sous-ministre adjoint, responsable du programme
d'assainissement; M. Michel Bordeleau, directeur des finances et des
systèmes; M. Louis Bissonnette de la même direction; Me Jean
Piette, directeur des services juridiques et M. André Beauchamps,
président du conseil consultatif de l'environnement. J'ai oublié
M. Jean-Yves Babin, qui est sous-ministre adjoint aux opérations
régionales, je m'excuse. Tout à l'heure, M. Réal
L'Heureux, président du BAPE est censé nous rejoindre. À
ma gauche, M. Pierre Ypperciel, directeur de mon cabinet politique.
En dépit du contexte économique difficile, le gouvernement
n'entend pas se soustraire à ses responsabilités dans le domaine
de l'environnement. Les ressources affectées au ministère ont
été réduites dans plusieurs secteurs, dans la
lancée des mesures de compressions budgétaires. Le gouvernement a
tout de même accordé une priorité à plusieurs autres
volets, dans une perspective d'amélioration de la qualité de vie
des citoyens québécois.
Les crédits du ministère de l'Environnement
s'élèvent à 122 236 400 $ pour l'exercice financier
1983-1984, ce qui représente une augmentation de 10,3% par rapport
à l'an dernier. Les effectifs, pour leur part, ont diminué de 29
personnes-année, soit 2,1%, malgré une augmentation de 15 postes
occasionnels accordés pour l'accélération du programme
d'assainissement. Ces pourcentages n'indiquent cependant pas les efforts
déployés pour réallouer les ressources du
ministère. L'établissement des priorités 1983-1984
résulte de l'examen systématique des programmes du
ministère. Je vous assure que nous avons dû faire des choix
difficiles pour satisfaire les objectifs de compression de 3 325 000 $ qui nous
a été demandée.
Le budget affecté à la gestion des barrages et aux
inventaires a été des plus touchés. À eux seuls,
ces crédits ont absorbé le tiers des compressions, soit 1 045 000
$. Les autres compressions réparties sur l'ensemble des programmes
concernent les traitements et les dépenses de fonctionnement. La
réduction des effectifs a permis de diminuer les budgets de traitements
de 1 000 000 $ et de réduire les activités de certains services.
De plus, la majeure partie des unités administratives se sont vu refuser
l'indexation de leurs dépenses. Je crois sincèrement que tous les
gestionnaires ont fait un effort remarquable pour satisfaire les objectifs de
compression auxquels nous devions faire face.
L'exercice a été un franc succès. Avec un faible
taux de croissance des dépenses gouvernementales, nous avons pu obtenir
une augmentation de 10 300 000 $ au service de la dette du programme
d'assainissement des eaux dont le budget s'élève maintenant
à 61 000 000 $. Dégager 1 700 000 $ pour
l'accélération du programme d'assainissement, trouver 2 700 000 $
pour traiter les eaux contaminées à la ville de Mercier et enfin,
financer la réalisation des travaux de 750 000 $ pour régulariser
les crues de la
rivière Saint-Charles. C'est une performance qui mérite
d'être soulignée.
Bien que les budgets du ministère portent principalement sur
l'amélioration et la restauration du milieu, j'accorde une grande
importance au volet prévention qui nous permettra à terme de
bénéficier d'un environnement de qualité sans consacrer
autant de ressources qu'aujourd'hui.
La protection du milieu implique la réglementation
adéquate des activités de l'ensemble des citoyens. Nous avons
adopté, l'an dernier, deux nouveaux règlements dont un, en vertu
de la Loi sur la qualité de l'environnement, concerne la protection des
eaux souterraines dans la région de la ville de Mercier. Ce
règlement a été rendu nécessaire à cause de
la contamination de la nappe phréatique par des substances toxiques.
J'aurai l'occasion, plus loin, de vous faire part des solutions
apportées à ce problème.
Le deuxième règlement adopté en vertu de la Loi sur
les réserves écologiques a permis de constituer une nouvelle
réserve écologique, soit celle de Couchepaganiche. Nous avons
ainsi préservé de l'intervention humaine un
écosystème représentatif et les générations
présentes et futures ne manqueront pas d'en
bénéficier.
Un des volets importants de la prévention porte sur
l'évaluation et l'examen des impacts sur l'environnement. Au cours de
l'exercice 1982-1983, le ministère a complété la mise en
place de la procédure complète d'évaluation et d'examen;
en tout, 126 directives ont été émises pour décrire
la nature, la portée et l'étendue des études d'impact que
les promoteurs doivent effectuer.
Le service d'analyse des études d'impact traite
présentement 149 projets assujettis à la procédure. Parmi
ces projets, mentionnons l'agrandissement du port de Bécancour, la ligne
de transport d'énergie électrique pour l'interconnexion avec la
Nouvelle-Angleterre, deux projets de dragage et divers projets de marinas,
notamment dans la région de Québec.
Outre ce règlement, le règlement général
relatif à l'administration de la Loi sur la qualité de
l'environnement permet au ministère d'analyser et d'évaluer les
répercussions sur l'environnement de projets importants, demandant une
expertise particulière. Parmi ceux-ci, on note le projet d'aluminerie
Péchiney, le projet de papeterie à Matane, le gazoduc
Montréal-Québec et le programme de forage hauturier de SOQUIP
dans le golfe Saint-Laurent.
Comme vous pouvez le constater, les mécanismes en place sont
suffisamment élaborés pour assurer l'intégration des
projets dans leur milieu. Ce n'est qu'en analysant toutes les
répercussions de nos activités que nous pourrons maintenir
à un niveau raisonnable les coûts qu'il faut absorber pour vivre
dans un environnement sain.
Malgré ces efforts portant sur la prévention, nous devons
encore consacrer des énergies considérables pour redresser la
situation souvent précaire de l'environnement, laquelle découle
des anciennes attitudes de laisser-aller en regard de préoccupations
écologiques qui, aujourd'hui, sont de plus en plus adoptées par
les citoyens.
Nous connaissons maintenant le prix élevé de la
dépollution. L'assainissement des eaux a été entrepris sur
50 bassins de drainage. Présentement, 305 municipalités et trois
communautés urbaines sont inscrites à la programmation. De ce
nombre, 111 municipalités ont signé des conventions avec le
gouvernement du Québec et la valeur des travaux liés à ces
conventions est supérieure à 1 600 000 000 $ et plus de 800 000
000 $ de travaux ont été réalisés. Au cours de
l'exercice 1982-1983, les investissements de 154 000 000 $ ont
été réalisés et 22 nouvelles conventions ont
été signées. La prochaine année promet d'être
encore plus fructueuse.
Permettez-moi de vous rappeler les moyens mis en oeuvre pour
accélérer le programme d'assainissement des eaux. J'ai
reçu l'approbation du Conseil des ministres pour réaliser 328 000
000 $ d'investissements en 1983-1984, soit 128 000 000 $ dans les
communautés et 200 000 000 $ hors communautés. Pour
réaliser ces investissements et créer 5500 nouveaux emplois, le
gouvernement n'a pas hésité à consacrer 1 700 000 $ de
crédits additionnels comme je l'ai déjà mentionné.
J'ai demandé au ministère qui est responsable du programme, et
à la Société québécoise d'assainissement des
eaux qui seconde les municipalités qui font appel à ses services,
de tout mettre en oeuvre pour que les objectifs de la relance soient
atteints.
J'ai par ailleurs réalisé au cours des derniers mois que
la structure administrative du programme d'assainissement des eaux était
beaucoup trop lourde pour assurer un degré d'autonomie suffisant aux
gestionnaires du programme. Aussi j'ai créé le poste de
sous-ministre adjoint à l'assainissement des eaux dont les efforts sont
concentrés exclusivement à la gestion de ce programme
prioritaire.
Pour compléter cette mesure administrative, le cadre de gestion
du programme a fait l'objet d'une refonte et il sera étudié sous
peu par le Conseil des ministres. Les principales modifications concernant
l'inscription à la convention type des objectifs de traitement
poursuivis, l'autorisation de débuter les études EPIC sur les
eaux parasites par infiltration et captage dès que le Conseil du
trésor a approuvé l'inscription des municipalités à
la programmation d'intervention et finalement,
la possibilité pour le ministère de défrayer
à 100% des études de caractérisation.
Les discussions se poursuivent avec le ministère de l'Industrie,
du Commerce et du Tourisme afin que la politique d'achat particulière au
volet municipal du programme d'assainissement des eaux contribue à
maximiser les retombées économiques des investissements
prévus pour le Québec. Pour sa part, le ministère de
l'Éducation participe, en collaboration avec le ministère de
l'Environnement, à la préparation d'un plan d'action pour la
diffusion d'un cours aux opérateurs d'usines d'assainissement des eaux.
Ce plan sera présenté au Conseil des ministres au cours des six
prochains mois.
J'ai enfin demandé au ministère de proposer, d'ici
quelques mois, une politique sur la disposition des boues d'usines municipales
et de publier, dans les plus brefs délais, un répertoire
comprenant les critères de design des ouvrages d'assainissement.
Ces diverses mesures me font croire que nous aurons en main, d'ici peu,
tous les éléments pour relancer et accélérer le
volet municipal du programme d'assainissement des eaux.
En ce qui concerne l'assainissement industriel, l'inventaire des
industries est complété pour chacune des villes inscrites
à la programmation. Au total, 4835 usines ont été
inventoriées et on estime que 1591 sont potentiellement ou effectivement
polluantes. Des interventions ont été entreprises pour 548 de ces
usines et le ministère a déjà conclu une entente avec 145
d'entre elles. La valeur des travaux prévus à ces ententes est de
191 000 000 $.
Les interventions dans le secteur des pâtes et papiers se
poursuivent. Sur 58 usines, 40 ont signé des accords de principe. Les
investissements réalisés à ce jour dépassent 322
000 000 $ et plus de la moitié de ceux-ci ont été
réalisés au cours de l'année 1982-1983. Malgré les
difficultés que connaît le secteur des pâtes et papiers, le
programme d'investissement évalué à 850 000 000 $ se
poursuit normalement. (10 h 30)
Dans le domaine agricole, les inventaires se poursuivent dans les
bassins sous moratoire des rivières Chaudière, Yamaska et
L'Assomption. Pour l'ensemble du Québec, environ 1200 analyses de
projets de plans correctifs individuels ont été faites et plus de
1500 demandes de certificats d'autorisation ont été
traitées. Un projet de modification du règlement relatif à
la prévention de la pollution des eaux par les établissements de
production animale est actuellement en discussion et nous sommes à
compléter notre programme de contrôle sur l'utilisation des
pesticides. Nous prévoyons aussi compléter l'inventaire de 2000
producteurs agricoles dans les municipalités inscrites au programme
d'assainissement.
Parallèlement aux interventions pour assainir les cours d'eau, le
ministère administre un vaste programme de contrôle de la
qualité physico-chimique de l'eau distribuée dans les aqueducs
municipaux. La population couverte par ce programme est de 5 175 000 personnes
et, au cours de l'année qui vient de s'écouler, 196
municipalités comptant une population totale de 340 000 personnes se
sont jointes au programme. Celui-ci sera étendu à d'autres
municipalités au cours de la prochaine année.
Nous prévoyons que le projet de règlement sur les eaux de
consommation sera adopté d'ici quelques mois. Son adoption modifiera
sensiblement la façon dont le contrôle de la qualité de
l'eau est effectué. Nous procéderons à la
décentralisation des services tout en améliorant la
qualité de ces services afin d'intégrer tous les réseaux
d'aqueduc communautaires desservant plus de quinze abonnés au programme
de surveillance.
L'autre avantage que nous retirerons de ces changements sera de
permettre de spécialiser davantage les services offerts par nos
laboratoires pour que ceux-ci correspondent mieux à nos besoins.
Certains types d'analyses nécessitent de l'équipement
coûteux que les laboratoires privés ne peuvent se permettre faute
d'un volume d'analyses suffisant. Nous avons acquis, l'an dernier, un
spectromètre de masse pour détecter la présence de
polluants organiques dans l'eau. L'utilisation grandissante de produits
chimiques nouveaux multiplie les quantités et la diversité des
polluants répandus dans l'environnement. Il est de notre devoir d'en
mesurer les conséquences afin de préserver la santé des
citoyens.
Il en est de même lorsque les biens de la collectivité sont
menacés par la crue des eaux. Beaucoup reste à faire dans le
domaine de la régularisation des eaux; cependant, nous devons agir dans
la mesures de nos moyens. Nous entreprendrons, en 1983-1984, la
réalisation de travaux de protection contre les inondations sur les
rivières Saint-Charles et Duberger dans les limites de la ville de
Québec. Les inondations de février dernier nous ont
démontré l'urgence d'agir.
Pour la réalisation de ces travaux évalués à
833 000 $, le ministère de l'Environnement a obtenu des crédits
de 750 000 $. Le gouvernement fédéral contribuera pour 45% du
coût total. Quant au solde de 10%, il sera assuré par la ville de
Québec. Le rôle de ces ouvrages sera de favoriser la formation
d'un couvert de glace solide, capable d'intercepter tous les glaçons
libérés par une embâcle hâtive dans le tronçon
en amont et ainsi empêcher la formation d'embâcles dans les
secteurs urbanisés situés plus en aval.
Les problèmes rencontrés dans la région de Mercier,
à la suite de la contamination
de la nappe phréatique par des déchets toxiques, nous
rappellent que nous devons être vigilants si nous voulons éviter
que des catastrophes de ce genre ne se reproduisent. Nous avons
réalisé pour plus de 1 400 000 $ de travaux de conduite d'eau
pour garantir l'alimentation en eau potable des citoyens des villes de Mercier,
de Saint-Paul-de-Châteauguay, de Saint-Urbain-Premier, de Sainte-Martine
et de Saint-Isidore. La prochaine étape consiste à
éliminer les produits organiques toxiques par le pompage et le
traitement des eaux souterraines. Pour ce faire, une usine de traitement des
eaux polluées sera construite au coût estimé de 2 700 000 $
et ce, au cours de l'exercice 1983-1984. Considérant les coûts de
fonctionnement de cette usine, cette solution occasionnera des
déboursés additionnels de l'ordre de 500 000 $ annuellement pour
les cinq prochaines années.
La décision du ministère s'appuie sur des études
réalisées par les firmes SNC et Foratek qui ont
démontré la faisabilité de ce projet. D'ici cinq ans, nous
pourrons redonner aux citoyens de la région les usages de la nappe d'eau
restaurée.
Le ministère de l'Environnement travaille depuis plusieurs
années à résoudre le problème des déchets
toxiques. Le règlement relatif à la question des déchets
liquides a d'abord été adopté en 1975 pour forcer les
entreprises à éliminer leurs déchets liquides en les
dirigeant vers une entreprise détenant un permis délivré
en vertu de la Loi sur la qualité de l'environnement. Cependant,
plusieurs entreprises ont du entreposer leurs déchets inorganiques faute
d'un centre de traitement de ces déchets ici même, au
Québec.
Cette lacune sera maintenant comblée par l'ouverture, d'ici
quelques semaines, de l'usine Stablex à Blainville. Le ministère
affectera un employé en permanence à la surveillance de cette
usine afin de s'assurer que les activités de la compagnie soient
conformes aux exigences du ministère, de l'arrivée des
résidus jusqu'à leur enfouissement.
En ce qui concerne les déchets toxiques organiques dangereux,
nous sommes à compléter les négociations avec les
entreprises intéressées à faire le traitement de ces
déchets. Les équipements existants de la compagnie Tricil qui
traite ce type de déchets sont insuffisants et il faut trouver une
solution adéquate à ce problème. Je serai en mesure, dans
les prochaines semaines, d'annoncer qui sera le promoteur du nouveau centre de
traitement qui sera construit.
Le ministère est à élaborer, depuis plusieurs mois,
une politique de récupération et de recyclage des déchets.
Vous comprendrez la difficulté d'établir une telle politique dans
la conjoncture actuelle. Les prix des matières recyclables sont
très bas et fournissent peu d'information sur l'état des
marchés à plus long terme.
Nous avons quand même pu identifier un certain nombre de produits
qui promettent d'être recyclés de façon rentable. Il y a
d'abord le papier et le verre où nous croyons pouvoir faire augmenter la
proportion de matière récupérée de 19% à
60%, dans le cas du papier, et de 24% à 40%, dans le cas du verre, et
ce, d'ici la fin de 1986. Nous sommes présentement à organiser un
sommet qui se tiendra en novembre 1983 où seront discutées les
stratégies pour atteindre les objectifs mentionnés
précédemment.
Nous avons amorcé, au cours de l'exercice 1982-1983, un programme
d'aide à la recherche, à la formation et à
l'amélioration de l'industrie de la récupération
(PARFAIR). Les subventions versées dans le cadre de ce programme ont
totalisé 565 000 $ et la majeure "partie des projets touchaient la
collecte sélective des papiers et cartons issus des secteurs
résidentiel, commercial et institutionnel. Nous maintiendrons ce
programme d'aide encore cette année pour développer davantage les
structures de l'industrie de la récupération.
Le milieu atmosphérique subit, lui aussi, les assauts de la
pollution. Même avec les vastes espaces dont nous disposons, le
ministère doit intervenir de façon énergique pour assurer
un niveau de qualité de l'air acceptable pour la santé et le
bien-être des Québécois. Notre offensive porte
principalement sur 128 entreprises potentiellement les plus polluantes.
Actuellement, 23 entreprises rencontrent les normes d'émission et 18
programmes de dépollution sont en voie de réalisation. Un montant
de 184 000 000 $ sera investi au cours des cinq prochaines années pour
la mise en place d'équipement d'épuration. Nous prévoyons
étudier 51 dossiers d'entreprises non encore évalués, au
cours des mois qui viennent et continuer la consolidation du réseau
d'échantillonnage de l'air.
Un autre aspect de la pollution atmosphérique concerne les
précipitations acides. Environ 70% des sources d'émission
à l'origine des pluies acides sont situées à
l'extérieur du Québec. Nous devons donc non seulement oeuvrer
pour réduire les émissions sur le territoire
québécois, mais aussi convaincre les États voisins de la
nécessité d'apporter des changements. Il faut, pour cela,
consacrer beaucoup d'efforts à la recherche pour connaître les
systèmes de transport des polluants et accumuler les preuves de l'impact
déterminant des précipitations acides sur notre
environnement.
Également dans le domaine de la recherche en environnement, mon
ministère et le Secrétariat à la science et à la
technologie vont s'engager sous peu à la
rédaction d'un rapport de conjoncture sur l'état de la
recherche et du développement technologique dans le domaine de
l'environnement qui devra être rendu public dans un an.
Sur un plan plus large, le Québec participe activement aux
comités fédéral-provincial de coordination de la recherche
et de la surveillance. Il subventionne de plus l'INRS-EAU pour assurer une
participation québécoise aux activités de plusieurs
sociétés nord-américaines.
Nous avons complété deux projets de recherche importants
en 1982-1983; l'un concerne le développement et
l'opéra-tionnalisation d'un modèle numérique de transport
à grande distance de polluants par l'INRS-EAU et l'autre
l'évaluation de la rentabilité économique des
opérations de Mines Noranda ainsi que sa situation compétitive
lorsque soumise à divers scénarios de réduction
d'émissions de SO2.
Nous avons donc la ferme intention d'agir pour réduire les
émissions de SO. sur notre territoire. Je crois qu'en prenant des
mesures concrètes pour combattre les pluies acides et en accumulant des
données sur le sujet nous pourrons convaincre plus facilement nos
voisins du caractère menaçant de ce phénomène.
La protection de l'environnement ne peut être efficace sans la
participation active des citoyens et l'opinion éclairée des
spécialistes de divers domaines.
Le Bureau d'audiences publiques sur l'environnement est le principal
mécanisme institutionnel qui assure à chacun la
possibilité de s'exprimer.
Il s'est tenu, l'an dernier, trois audiences publiques. Elles
concernaient le projet de quai aux fins récréatives et de
déversement de neige de la ville de Montréal, le projet
d'évacuation des crues de la centrale de Rivière-des-Prairies
d'Hydro-Québec, et enfin, le projet de pulvérisation
aérienne contre la tordeuse de bourgeons de l'épinette, du
ministère de l'Énergie et des Ressources. Le Bureau d'audiences
publiques a reçu par ailleurs huit mandats d'informations portant entre
autres sur le dragage de la Baie-des-Ha! Ha!, le dragage du quai de Matane, et
l'interconnexion du réseau d'Hydro-Québec avec le
Nouveau-Brunswick. Tous ces mandats découlent de l'application de la
procédure d'étude d'impact qui prévoit que tous les
dossiers soumis à cette procédure sont obligatoirement
confiés au Bureau d'audiences publiques pour une période
d'informations de 45 jours.
Le Conseil consultatif de l'environnement, pour sa part, est
chargé de fournir des avis, à la demande du ministère ou
de sa propre initiative, sur diverses questions ou politiques concernant
l'environnement. Il a fourni six avis, au cours de l'exercice 1982-1983, sur
des sujets aussi divers que le projet de règlement relatif aux eaux
destinées à la consommation et la proposition préliminaire
d'une politique sur les battures du Québec. Des avis sont attendus sur
le bruit communautaire, la politique sur la gestion des résidus
industriels et divers projets de lois et de règlements afférents
à la Loi sur la qualité de l'environnement.
Certains prétendent que la préservation de la
qualité de l'environnement est trop coûteuse en termes d'emplois
pour qu'on poursuive les programmes de dépollution en cours. Je m'oppose
à cette vision étroite des choses puisque d'autres emplois sont
créés pour assainir notre milieu; notamment, le programme
d'assainissement des eaux a entraîné la création de 2600
emplois au cours de l'année 1982-1983, selon nos estimations, et
entraînera la création de près de 20 000 emplois au cours
des trois prochaines années.
La protection de l'environnement en général et
l'assainissement du milieu en particulier doivent être
considérés comme des objectifs en soi et les effets secondaires
qu'entraîne la poursuite de ces objectifs, comme le développement
de la technologie, de l'industrie et de l'emploi, ne devraient que nous
réjouir.
Le tableau que je viens de vous brosser, bien qu'imposant, ne fait que
traduire une partie seulement de l'immense travail qui se fait au
ministère de l'Environnement et dans les organismes dont nous
étudierons les crédits aujourd'hui. J'aimerais que vous partagiez
mon enthousiasme et celui du personnel du ministère pour
l'amélioration de la qualité de notre milieu. J'espère que
vous êtes convaincus comme nous tous que chaque dollar investi dans la
protection de notre environnement est un investissement des plus rentables.
Le Président (M. Boucher): Merci, M. le ministre.
Mme la députée de Chomedey.
Mme Lise Bacon
Mme Bacon: Avant de faire la lecture de la déclaration que
j'avais préparée pour ce matin, j'aimerais demander au ministre
si l'Opposition a reçu toute la documentation concernant les
crédits. On a reçu, avec un retard, c'est seulement hier,
certains documents. J'aimerais faire remarquer au ministre qu'habituellement,
l'Opposition reçoit deux ou trois jours auparavant l'ensemble de la
documentation qui doit servir à l'étude des crédits. Je
dois déplorer le retard qu'on a mis à fournir la documentation
à l'Opposition. Je ne blâmerai pas le ministre là-dessus,
mais j'aimerais quand même qu'il soit conscient - il n'a peut-être
jamais
étudié de crédits dans l'Opposition - que
l'Opposition a aussi besoin d'une certaine documentation pour étudier
les crédits.
En même temps, j'aimerais peut-être juste lui donner un
exemple de la collaboration de l'Opposition: au moment où j'ai
prononcé mon discours en Chambre en réponse au discours
inaugural, on a demandé une copie de mon discours, ce qui a permis au
ministre de bâtir son discours d'hier autour du discours que je lui avais
soumis immédiatement. Je n'ai pas mis de retard à lui soumettre
la copie. J'aurais aimé qu'il fasse la même chose pour les
crédits.
M. Ouellette: Je m'excuse auprès de Mme la
députée de Chomedey, elle a raison de dire que certains documents
sont parvenus en retard. Il y a deux raisons qui expliquent ce fait: la
première est que nous sommes au début de l'étude des
crédits, donc étant les premiers, nous avons été
les premiers à devoir remettre ces documents; la deuxième cause,
me dit-on, c'est qu'il y a eu une demande de la part de l'Opposition en deux
volets, et le deuxième volet est lui-même arrivé assez
tard, on me parle d'il y a deux jours. C'est la raison qui fait que nous sommes
en retard pour la deuxième partie de la livraison des documents. (10 h
45)
Mme Bacon: Nous a-t-on fourni l'ensemble des dossiers sur
l'explication des crédits?
M. Ouellette: Oui.
Mme Bacon: II n'y a pas d'autres dossiers que ce qu'on nous a
fourni sur l'explication des crédits? D'accord. Je ne reprendrai pas les
remarques... Je pense bien que je vais limiter mes remarques à ma
déclaration de ce matin concernant les explications du ministre sur
l'exposé général qu'il nous a fait ce matin. C'est
évident que le ministère de l'Environnement est un
ministère très technique. Le texte du ministre nous le prouve
davantage. En fait, il y a beaucoup plus de technique que de principes ou de
philosophie. Si on peut joindre la technique à la philosophie, je pense
qu'on peut arriver, comme il le disait tantôt, à coordonner
l'immense travail des gens de son ministère et les organismes qui font
partie de l'ensemble qui s'occupe d'environnement au Québec.
J'aimerais évidemment souligner aussi tous ceux et celles qui
font partie de groupements et de groupes de bénévoles qui, depuis
de nombreuses années, ont travaillé à
l'amélioration de la qualité de la vie des citoyens du
Québec. J'aurai, en cours de route, au moment de l'étude des
différents programmes, certaines remarques à faire concernant la
déclaration qu'a faite le ministre, ce matin.
Comme toutes les sociétés occidentales, le Québec
prend de plus en plus conscience de l'importance d'avoir une meilleure
qualité de son milieu du vie. Ce n'est peut-être pas tant par
choix que par obligation. Combien de fois la population
québécoise entend-elle à la radio, à la
télévision ou lit-elle dans les journaux que telle catastrophe
est survenue, qu'un site ou un cours d'eau est menacé, ou encore, un
geste plus quotidien, qu'elle doit faire bouillir son eau et, encore
dernièrement, qu'elle ne doit pas manger de poisson de certaines de nos
rivières.
Un gouvernement, s'il est responsable, doit donc faire de
l'environnement une de ses priorités. Il ne peut déroger à
ses responsabilités de donner à ses citoyens cette qualité
de vie à laquelle ils ont droit. Pour cela, la gestion de la
qualité de l'environnement doit être faite dans une approche
globale, une politique cohérente de la part du gouvernement en ce qui a
trait à la planification ou au contrôle de ses activités
et, cela, pour une efficacité maximale. Je ne sache pas que ce matin,
encore une fois, les remarques du ministre nous donnent cette vue d'ensemble,
cet objectif global de voir tous les problèmes de l'environnement.
Mais s'il est une critique à formuler par rapport à
l'approche environnementale de ce gouvernement, c'est bien ce manque de
cohérence dans sa politique. Qu'il suffise d'analyser les
différents programmes de ce gouvernement, sa gestion des déchets,
sa politique concernant les espaces verts, son manque de rigueur pour
l'assainissement des eaux et le reste. Chacun de ces programmes est à
l'image même du ministère de l'Environnement, c'est-à-dire
- et je tiens à le souligner de nouveau - ce manque évident d'une
politique entière, globale et cohérente.
Prenons quelques exemples pour bien démontrer mes affirmations.
Premièrement, la gestion des déchets. Il y a des
règlements qui existent mais qui, souvent, sont inadéquats,
difficilement applicables, pas suffisamment sévères. On a
créé un système de surveillance, de contrôle et
partout, on peut compter une centaine de sites d'enfouissement illégaux
qui se multiplent.
Ce gouvernement a créé Stablex dont nous ne constestons
pas le bien-fondé si ce n'est l'emplacement du site. Mais Stablex est
seul pour éliminer les déchets et, de plus, les industries ne
sont pas obligées d'aller traiter leurs déchets chez Stablex;
elles peuvent décider de les traiter elles-mêmes. Or, s'il y a des
industries qui prennent le soin de bien traiter leurs déchets, il y en a
d'autres, par contre, qui, pour un meilleur profit, préfèrent
s'en débarrasser, au risque même d'être illégales.
Cela exige donc un pouvoir de surveillance très large, mais qui est
insuffisant présentement.
De même, on a conscience qu'il existe
du transport, des sites d'entreposage de déchets toxiques sous
forme clandestine. Malheureusement, il est difficile de les reconnaître
et de les pointer du doigt, de pointer du doigt aussi les responsables; cela,
nous en convenons. Mais il ne faut pas nier leur existence pour autant et, dans
ce sens, le gouvernement doit mettre en place des politiques qui garantissent
aux Québécois leur sécurité, leur bien-être
et qui voient donc à éliminer cette forme de
clandestinité.
Nous devons tenir compte également de l'opinion des citoyens. Or,
ce gouvernement a donné des exemples frappants dans ce dossier qu'il
n'avait pas l'intention de respecter les demandes de la population. Stablex a
été imposée aux citoyens de Blainville. La population de
Shawinigan-Sud veut se débarrasser de son entrepôt, de ses BPC. Il
a fallu plusieurs années aux gens de Sainte-Martine, de la ville de
Mercier pour se faire entendre au sujet de la compagnie Tricil.
Il nous faut arriver à une politique qui couvrirait à la
fois la gestion et le contrôle des déchets toxiques, de même
que leur transport, et cela pas seulement dans un secteur du Québec,
mais bien sur l'ensemble du territoire québécois. On ne devrait
pas avoir peur de déterminer la source de pollution. Souvent on dit que
tel cours d'eau est pollué au mercure ou par tout autre polluant. On
identifie les polluants, mais on ne s'attaque pas aux pollueurs.
Le ministre de l'Environnement préfère y aller de
règlements disparates, avoir une attitude de réaction
plutôt que de prévoyance, même si tout à l'heure on
nous parlait de prévention.
Un autre point qui démontre le manque de rigueur de la politique
gouvernementale en matière de l'environnement, c'est son attitude face
à la protection des espaces verts. L'ex-ministre de l'Environnement, le
député de Lafontaine, déclarait, lors de l'étude
des crédits de 1981, qu'il était normal pour des citoyens de se
tourner vers le ministère de l'Environnement lorsqu'il s'agissait de
protéger les espaces verts. Pourtant, il y a tellement d'intervenants
dans ce dossier que les citoyens qui veulent protéger leurs espaces
verts devraient non seulement se tourner vers le ministère de
l'Environnement, mais également vers le ministère des Affaires
culturelles, si c'est un arrondissement naturel, vers le ministère de
l'Agriculture, si c'est un territoire agricole, vers le ministère du
Loisir, de la Chasse et de la Pêche, s'il y a lieu, etc.
Or, chaque intervenant qui a un droit sur les espaces verts a une
perception de la vocation qu'il veut en faire toute différente les unes
des autres. Nous avons assisté l'an dernier au conflit entre le
ministère de l'Agriculture et celui de l'Environnement au sujet des
battures de Kamouraska. On est arrivé à une conclusion mitoyenne,
si je peux dire, qui voulait satisfaire à la fois et donc à
moitié les agriculteurs et les écologistes, mais il faudra une
fois pour toutes déterminer ce qui est bien pour la survie de
l'espèce. Est-ce une décision à moitié prise pour
satisfaire à moitié le plus de gens possible ou ce qui est le
mieux pour l'environnement?
Le ministre de l'Environnement annoncera bientôt un décret
touchant l'épandage aérien des pesticides. Que le ministre fasse
bien attention de ne pas être tenté d'alléger la sentence
pour plaire à son collègue du ministère de
l'Énergie et des Ressources. Cela peut arriver dans d'autres dossiers
aussi. Quelquefois, il vaut mieux attendre afin de prendre une décision
adéquate, et je le dis en voulant aider le ministre de
l'Environnement.
On ne peut passer outre à un autre aspect, soit le programme
d'assainissement des eaux. S'il est un programme qui a démontré
la faiblesse de ce gouvernement en politique environnementale, c'est bien
celui-là. Il a fallu cinq ans, puisque le programme existe depuis 1978,
pour que le gouvernement se décide à émettre des
critères de design. Les objectifs de traitement ne sont pas encore bien
définis. Pourtant, logiquement, pour commencer par le commencement, il
fallait déterminer ces points au tout début du programme. Le
gouvernement a préféré y aller d'éléments
publicitaires pendant toutes ces années. D'ailleurs, sans remettre le
fer dans la plaie, c'est probablement ce qui a coûté son poste
à votre prédécesseur, M. le ministre, c'est-à-dire
annoncer beaucoup mais faire peu. J'espère que vous ne suivrez pas cet
exemple.
M. le Président, ces quelques exemples démontrent à
quel point il est urgent que le ministère de l'Environnement,
après quatre ans d'existence, repense à son fonctionnement,
repense aussi à sa gestion. Il doit développer des
priorités et ne pas y déroger par la suite.
J'ai déjà mentionné à plusieurs reprises ma
perception du fonctionnement du ministère de l'Environnement pour
assurer une meilleure protection et une meilleure gestion des ressources
naturelles. Le ministère de l'Environnement se doit d'avoir une emprise
sur toute décision qui peut toucher l'eau, le sol, l'air. Et, dans ce
sens, j'ai exprimé ma préférence pour un ministère
d'Etat à la fois plus souple et efficace qui amènerait un droit
de regard sur toute action posée susceptible de créer des impacts
sur l'environnement.
La structure existante devrait être consolidée,
regroupée sous forme d'agences ou de sociétés. Si une
certaine forme de régionalisation est bienvenue, il ne faudrait pas pour
autant détruire la bonne volonté de certaines gens ou
associations car si nous avons parlé du rôle de l'État pour
la
protection, il faut également rendre responsables les citoyens.
Si, déjà, certains programmes démontrent cette forme de
responsabilité, il ne faut pas la détruire.
M. le Président, il faut reconnaître à toute
personne le droit à une qualité de vie maximale, à un
environnement sain, à sa protection de même qu'à celle de
toutes espèces vivantes. Pour cela, il faut mettre tous les instruments
en place pour optimiser les chances de succès d'une politique
gouvernementale.
Le Président (M. Boucher): Merci. Est-ce que les membres
de la commission conviennent d'étudier les crédits programme par
programme ou si on en fait l'étude complète et, par la suite, on
adopte les programmes? C'est une procédure qui se fait habituellement au
début de l'étude des crédits. Si on veut procéder
programme par programme, on pourrait appeler immédiatement le programme
1.
Mme Bacon: II y a certaines généralités, M.
le Président. Si on peut commencer par cela, dans l'étude des
crédits, appelez le programme 1, si vous le voulez bien. Est-ce que cela
va?
M. Ouellette: À votre guise.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Groulx.
M. Élie Fallu
M. Fallu: Si vous me le permettez. Mme la députée
de Chomedey vient de faire une intervention et je me dois, comme
député membre de cette commission, de faire part de quelques
réactions, parce qu'il y a, entre autres, le programme de Stablex qui a
été souligné et certains autres pour lesquels je me sens
profondément en désaccord et je voudrais m'exprimer. Est-ce que
cela m'est possible, M. le Président?
Le Président (M. Boucher): Allez-y, M. le
député. Nous sommes à l'étape des remarques
préliminaires.
M. Fallu: D'accord. De Stablex, on a dit que l'emplacement n'est
pas le bon et que, deuxièmement, les Blainvillois veulent se
débarrasser de Stablex. Je voudrais vous faire part de mon
étonnement, ma surprise, d'apprendre une telle chose de quelqu'un qui
est voisin de chez nous. Je vis dans cette circonscription. Je suis
collé sur l'usine Stablex. Je ne vois personne qui conteste
l'emplacement. L'emplacement a été étudié avec un
sérieux absolument extraordinaire. Cela a donné naissance
à un nouveau parc industriel. On vient tout juste de faire l'ouverture
de la sortie 25 sur l'autoroute, telle que suggérée, d'ailleurs,
par le BAPE, à l'époque. On a fait toutes les études
d'impact. On a démultiplié les moyens de protection. Je dirais
même qu'on est allé à des limites presque invraisemblables;
j'en ferais reproche d'ailleurs au ministère. Par exemple, le fait
d'enfouir ce Stablex est anti-économique, un produit déjà
neutralisé, déjà cimenté, de surcroît, qu'on
gaspille en l'enfouissant pour au moins les cinq premières
années, je trouve cela de la folie furieuse.
Bref, on s'est soumis, comme gouvernement, à toutes ces
contraintes, les unes plus inopportunes que les autres. Par mesure de
protection de l'environnement, soi-disant, du moins, on a créé un
laboratoire de recherche pour voir comment utiliser, à l'avenir, le
stablex, et voilà la formule, à mon avis, de l'avenir pour que le
stablex, tout à l'heure, puisse servir à bâtir nos piscines
dans nos cours, à construire nos trottoirs, à construire nos
rues, à construire nos autoroutes, à construire nos ponts. Un
matériau qu'on enfouit bêtement actuellement.
Est-ce que Blainville a l'intention de se débarrasser de Stablex?
Mais pas du tout. Il y a eu quelques énormités, quelques
faussetés, au départ, qui ont été
véhiculées, mais tout cela a été replacé. Je
sais bien que pour des citoyens, il est facile quelquefois de les "emplir",
comme on dit en langage vulgaire, en leur faisant miroiter des bombes atomiques
ou de la chimie qu'on ne sait pas expliquer. Il y a là des
procédés très simples et les gens, chez nous, ont
très bien compris que la chimie, c'est une science et c'est une science
exacte. Il y a, entre autres, trois procédés bien connus dans le
domaine chimique pour que des produits inorganiques puissent être
traités: la précipitation, la cristallisation et la
neutralisation. M. le Président, chaque citoyen, chaque citoyenne,
à Blainville, à Sainte-Thérèse, partout alentour de
chez nous, a compris que si on met, dans une tasse, du caustique et un peu
d'eau de javel dans la proportion suffisante et qu'on le brasse un peu, on peut
le mettre dans la soupe, cela fait du sel de table. Les gens, chez nous, ont
compris cela. On a fait appel à leur intelligence après que
d'autres eurent fait appel à des passions absolument invraisemblables.
Ce problème est réglé. (11 heures)
On parle d'espaces verts. Je change mon chapeau de député
pour prendre celui d'adjoint parlementaire. J'aimerais souligner à
l'Opposition qu'en ce qui a trait à la protection des espaces verts, je
me demande bien pourquoi on veut se retourner maintenant surtout vers le
ministère de l'Environnement. Il faudrait peut-être que, comme
citoyen, au Québec, on se tourne maintenant vers la municipalité,
vers la
MRC, vers la communauté urbaine, au moment où le
schéma d'aménagement va commencer à se dessiner, où
citoyens et citoyennes vont se demander, comme je le disais hier soir à
l'Assemblée nationale, quelle protection ils veulent donner à
leur environnement historique, pour les maisons, pour les écuries, pour
les bâtiments et également quelle destination ils voudront
accorder à leur boisé, au boisé qui est dans le champ,
à côté du village, comme le boisé qui est en pleine
ville. C'est la responsabilité des citoyens des
municipalités.
Évidemment, auparavant, il n'y avait pas d'aménagement au
Québec ou il y en avait très peu. S'enclenche maintenant un
processus d'aménagement par le biais du schéma
d'aménagement, des règlements d'urbanisme, des règlements
de zonage, des règlements de construction. On retourne la question aux
citoyens. On leur dit: Ne faites plus appel à l'État, qui vous
protégerait contre vous-mêmes; voilà les outils qu'on vous
a donnés. En consultation, en partage, en discussion entre vous, par le
biais de la MRC, de la municipalité et de la communauté urbaine,
vous allez vous-mêmes vous donner des avenues, déterminer des
vocations à vos boisés ou à tout autre environnement
à protéger.
Il y a deux accusations qui m'ont fait sursauter à propos des
sites illégaux d'enfouissement et des sites illégaux de
déversement. J'ai souvenance que, dans ma circonscription, il y avait,
avant 1976, exactement onze sites de dépôt de déchets.
Partout dans la circonscription, matin, midi ou soir, et la nuit surtout, on
voyait les flammes ou une immense fumée noire s'élever dans le
ciel. Il n'en reste plus un seul. Nous avons maintenant un site d'enfouissement
sanitaire. On n'a plus de déchets à gauche et à droite. Je
suis assez près des municipalités et des municipalités
régionales de comté pour vous affirmer que cette assertion de la
députée de Chomedey fait montre d'une méconnaissance du
terrain, de toute évidence.
Quant au site de déversement, c'est un problème de
conscience très grave qui se pose là, parce qu'on est en train de
mettre en place Stablex, il y a Tricil qui est en train de se remodeler, le
ministre l'a annoncé, le ministère est en train de
compléter la négociation avec...
M. Ouellette: ...deux nouveaux promoteurs.
M. Fallu: ...deux nouveaux promoteurs. Je souhaite d'ailleurs que
la négociation soit rapide pour qu'on ait en place un bon outil.
Voilà des efforts de cohérence qui ont été faits
par ce gouvernement car il n'y avait rien avant. Si l'un ou l'autre des
parlementaires ou l'un ou l'autre des 6 000 000 de citoyens et de citoyennes du
Québec apprenait, par hasard, qu'il existe un site de déversement
de déchets toxiques, que rapidement il en informe le ministère,
que rapidement il en informe la presse, que rapidement il le fasse
connaître. Je pense que c'est un devoir de citoyen de le faire. Je
supplie donc la députée de Chomedey de nous dévoiler ces
cas, ne serait-ce que par un petit papier passé au ministre ou par une
conversation en dehors de cette table, si elle ne veut pas brûler ses
sources, je la supplie, étant l'un des 6 000 000 de citoyens du
Québec, d'en informer le ministère pour qu'on y mette fin
immédiatement. Ces choses, nous ne pouvons pas, comme
société, les tolérer.
Quant au reste, moi qui ai participé à l'étude des
crédits depuis sept ans maintenant à cette table, moi qui,
à l'époque - je voudrais le rappeler aux partis - avais
été l'un des promoteurs de la rédaction de ce que nous
avons convenu d'appeler dans notre programme la charte de l'environnement, je
vois que l'action du gouvernement s'est alignée justement dans une
cohérence absolument complète. Au départ, la
première des priorités était la protection des eaux.
Depuis 1956, depuis que cette ancienne commission de M. Prévost...
Comment s'appelait-elle à l'époque? La Régie des eaux je
crois, du Québec avait été abolie, ou enfin n'était
plus opérante ou je ne sais trop quoi. Je n'ai pas suivi trop l'histoire
de l'évolution de ce qui fut jadis l'équivalent du
ministère de l'Environnement. On avait cessé au Québec,
à toutes fins utiles, la construction d'usines d'épuration des
eaux. C'était le déversement. On avait cessé de bien
surveiller la construction des réseaux. Il y a là maintenant une
volonté qui s'est exprimée. Il y a là des millions qui ont
été investis, il y a des millions qui sont en train d'être
investis. On n'a jamais vu au Québec un tel remodelage. Comme
société, nous nous sommes dit: II y a des responsabilités.
Ces responsabilités historiquement appartiennent aux citoyens et
à leurs municipalités. On constate, après un certain
nombre d'années, un grand nombre d'années que les
responsabilités n'ont pas été prises.
Là nous faisons une sorte de grande corvée nationale de
l'épuration des eaux. Ce sont toujours les municipalités qui sont
responsables. Sauf que, comme société, n'ayant pas fait
collectivement notre travail, nous faisons une grande corvée. Nous
prêtons de l'argent. Nous donnons des sous. Les fonds qui sont
perçus à Rivière-du-Loup, sont dépensés
à Laval et à Montréal et inversement pour faire en sorte
que nous assumions collectivement des responsabilités municipales qui
n'avaient pas été prises dans le passé. Cette grande
corvée va faire en sorte que nos eaux, d'ici huit ans, dix ans,
sortent de nos égouts propres. Mais il s'agit de
cohérence. Quant aux déchets, il y a trois types de
déchets notamment qui sont en cause. Les déchets organiques, les
déchets inorganiques et certains autres déchets, les PC...
Des voix: Les DPC.
M. Fallu: DPC. On m'a dit que c'était un anglicisme,
à propos. Non?
Des voix: BPC.
M. Fallu: BCP en anglais. Merci. On sait que ces choses
étaient versées à toutes fins utiles dans l'environnement
et on ne savait trop ce qui en arrivait. Il y a eu une cohérence
globale. Stablex, au demeurant, fait partie de cette cohérence. Nous
pouvons même être fiers. Stablex est la première usine de ce
type en Amérique du Nord. Vous ne le croirez peut-être pas! Tout
à l'heure, il y aura de 90 à 110 usines Stablex ou
l'équivalent en Amérique du Nord. C'est cela que cela prend. Il
s'agit de cohérence, M. le Président. Je m'arrête là
parce que j'ai l'impression que je suis en train de me fâcher.
M. Middlemiss: ...des discours.
Le Président (M. Desbiens): M. le ministre.
M. Adrien Ouellette (réplique)
M. Ouellette: Je remercie mon collègue de Groulx qui a
bien voulu se charger du dossier qui le concerne directement, celui de Stablex.
Il nous a entretenu aussi d'un dossier qui est relié directement
à son rôle ici au Parlement puisqu'il est adjoint parlementaire
des Affaires municipales. Sa compétence vient d'être
démontrée hors de tout doute.
J'aimerais revenir quand même sur quelques affirmations qui ont
été faites par Mme la députée de Chomedey dans son
intervention, tout à l'heure, notamment en ce qui a trait à
Stablex. Je n'entrerai pas dans le détail puisque le
député de Groulx l'a fait avec brio. Il y a un
élément qui m'intéresse au plus haut point. Mme la
députée a affirmé qu'on avait imposé Stablex
à la municipalité de Sainte-Thérèse-de-Blainville.
Je lui rappellerai qu'il y a eu deux audiences publiques qui ont
été tenues après analyse de l'étude d'impact
présentée par le promoteur et c'est à la suite de ces
discussions publiques qui ont permis notamment au ministère de
l'Environnement et au promoteur de faire comprendre à la population le
bien-fondé de l'entreprise, le rôle essentiel qu'elle a à
jouer dans l'avenir du Québec en termes de dépollution ou de
protection de l'environnement, et finalement, c'est à la suite d'un
consensus qu'on a choisi la municipalité de
Sainte-Thérèse-de-Blainville.
Dans le même dossier, Mme la députée nous faisait
remarquer qu'il y avait quand même des faiblesses au ministère de
l'Environnement en ce sens que nous ne prévoyons pas ou nous n'obligeons
pas, en tout cas, actuellement les usines à faire traiter leurs produits
chez Stablex. Moi, il m'apparaît qu'il aurait été vraiment
incohérent d'imposer une telle obligation aux producteurs de ces
produits toxiques avant même de pouvoir leur offrir le service. C'est
donc une chose qui sera envisagée au cours des mois qui viennent puisque
maintenant, s'il y a finalement entente avec le gouvernement
fédéral quant à la cession du terrain servant à
l'enfouissement, c'est dans les prochains mois que nous pourrons envisager
cette possibilité d'obliger les compagnies productrices de ces
déchets à les faire traiter de façon convenable dans une
entreprise qui, comme le disait le député de Groulx tout à
l'heure, sera non seulement la meilleure en Amérique du Nord mais la
seule et qui fait appel à ce qu'il y a de plus sophistiqué en
termes de technologie. C'est donc dire que le Québec sera le premier
État nord-américain à disposer d'une entreprise capable
d'éliminer et de neutraliser ce genre de produits qu'on retrouvait
traditionnellement dans le paysage puisque les fabricants, ne sachant trop quoi
en faire, en profitaient pour l'enfouir de façon clandestine dans des
dépotoirs municipaux ou dans des dépotoirs privés ce qui
nous vaut aujourd'hui la découverte presque hebdomadaire de ces sites
pollués pour lesquels on doit dépenser des millions de dollars
annuellement justement en termes de récupération.
Donc, du côté de Stablex, loin d'être critique
à l'endroit de ce projet, je suis enchanté que mon
prédécesseur ait pris toutes les dispositions nécessaires
à sa mise en place.
Mme la députée de Chomedey, très
élégamment, a été un peu cruelle à l'endroit
du programme d'assainissement des eaux et de celui qui l'a mis en place. Je
pense qu'il faut rappeler un certain nombre de choses qui peuvent expliquer en
bonne partie les retards qu'on constate dans sa mise en place et surtout dans
son exploitation. Il est évident qu'au moment où on a
lancé le programme d'assainissement des eaux, on était en droit
de croire, étant donné qu'il n'y avait pas de contrainte
budgétaire perceptible, que sa mise en place se ferait rapidement et
qu'on atteindrait un rythme de croisière optimiste. Mais, on oublie
souvent la complexité du genre de travaux qui découlent de
l'application de ce programme. En d'autres termes, si ce programme avait
prévu la construction de trottoirs municipaux, nul doute qu'on
aurait pu atteindre et même dépasser largement les objectifs qu'on
s'était fixés en 1978. Mais il ne s'agit pas du tout de travaux
aussi simples, au contraire, il s'agit de travaux très complexes qui ont
exigé d'ailleurs la mise en place d'un projet qui reflète cette
complexité. Je vous rappellerai qu'il y a tout près de 70
étapes à franchir à l'intérieur de la mise en place
d'un seul projet. Ces étapes sont rendues nécessaires justement
à cause de la complexité des travaux à être
réalisés. Il est donc normal que le temps de réalisation
de chacun des dossiers soit un peu plus long que prévu.
J'ai eu l'occasion, depuis six mois, de me pencher justement sur ce
dossier puisque j'avais la conviction qu'il fallait accélérer les
travaux, ce qui m'a permis de constater qu'il y avait peut-être certains
changements à réaliser aussi bien à l'intérieur du
ministère qu'à l'intérieur du programme et de son cadre de
gestion.
Dans mon allocution de tout à l'heure, je faisais allusion
à ce genre de changements que j'ai apportés dans le but de
simplifier la procédure et d'accélérer le programme.
Mme la députée de Chomedey nous parlait de critères
de design qui sont apparus trop tard, d'études de caractérisation
et de EPIC, d'objectifs de traitements, etc. J'aimerais lui rappeler justement
que dans le mémoire que j'ai présenté au Conseil des
ministres et qui a été accepté, j'ai fait en sorte,
à la recommandation du comité chargé d'étudier la
problématique, de faire les modifications qui s'imposent. Par exemple,
il m'apparaissait normal qu'on puisse fournir à la firme
d'ingénieurs-conseils, dont les services étaient retenus soit par
la municipalité ou par la Société québécoise
d'assainissement des eaux, les données des études
préparatoires; c'est-à-dire connaître la quantité
des eaux qui devront être traitées. Cela suppose des études
EPIC pour vérifier la qualité du réseau d'égout
existant dans la municipalité, et la qualité des eaux à
être traitées selon la présence ou non de certains types
d'usines dans la municipalité, ce qui s'appelle les études de
caractérisation.
Selon l'ancienne façon de procéder, ces deux
données apparaissaient un peu trop tard, de telle sorte que la firme
d'ingénieurs-conseils n'avait pas vraiment en main toutes les
données pour travailler rapidement.
Un autre élément qui manquait - et elle y a fait allusion
- c'était justement les critères de design qui vont permettre aux
firmes désormais de pouvoir travailler dans un corridor mieux
balisé et atteindre rapidement les objectifs. (11 h 15)
II restait un troisième élément à être
précisé le plus tôt possible dans le processus,
c'étaient les objectifs de traitement. On ne peut espérer que le
gouvernement ou le ministère de l'Environnement, qui est responsable du
programme, qui est le gestionnaire du programme, puisse déterminer une
norme qui s'applique uniformément dans tout le Québec, puisque
les problèmes varient d'une municipalité à l'autre,
dépendant de la population et dépendant, dans bien des cas, du
type d'usine qui déverse ses eaux usées dans le réseau
municipal.
Il faudra donc procéder cas par cas, en tenant compte des
bassins, des rivières réceptrices et de leur capacité de
réception justement pour déterminer ces objectifs de traitement.
Je crois que les firmes d'ingénieurs-conseils disposant de tous ces
renseignements en début de processus seront en mesure de travailler avec
beaucoup plus de précision et donc de rapidité.
Un autre élément qui a fait les manchettes durant quelques
années, dirais-je, était les accords qui pouvaient exister entre
la Société québécoise d'assainissement des eaux et
le ministère comme tel. Il est vrai qu'il y a eu du tiraillement. Cela
n'a peut-être pas été aussi grave que ce qu'en ont dit
certains médias, mais effectivement, j'ai constaté qu'il y avait
du tiraillement. J'ai aussi constaté que ce tiraillement venait beaucoup
plus du fait que la définition des rôles, de chacun des
intervenants dans ce genre de dossier n'était pas suffisamment
précise. C'est donc à l'intérieur du cadre de gestion qui
sera approuvé prochainement par le Conseil des ministres qu'on
procède justement à la définition précise des
rôles de façon que ce désaccord quasi légendaire
fasse place à un accord permanent.
Je dois ajouter que dans les mesures correctives que j'ai
apportées à ce programme et à sa façon de le mettre
en application, j'ai prévu des rencontres heddomadaires qui pourront
s'étaler une fois par quinzaine, rencontres de la direction de la
société et du ministère en ma présence, de
façon qu'on élimine les sujets d'incompréhension et qu'on
étudie les dossiers les plus importants ou les plus litigieux pour faire
en sorte qu'ils s'accélèrent et qu'on réalise cette
année l'objectif de 328 000 000 $ que j'ai mentionné.
Quant à savoir si j'avais l'habitude de lancer des chiffres en
l'air, non, loin de là. J'ai été très prudent dans
les montants que j'ai annoncés. J'ose espérer pouvoir les
réaliser dans l'année 1983-1984. Il y a toutefois peut-être
quelque chose qui pourrait faire varier ces chiffres. Étant donné
la conjoncture économique qu'on connaît, il se trouve que des
projets évalués à X millions, après appel d'offres
se révèlent devoir coûter moins cher. On a à s'en
réjouir. Évidemment, si un projet évalué à
20 000 000 $ n'en coûte que 15 000 000 $, les 5 000 000 $ manquants
pourront être attribués à la lenteur du programme, mais il
n'en sera rien.
II s'agira là, tout simplement, de coûts moindres dus
justement aux conditions économiques qui sont favorables à
l'élaboration et à l'accélération de ce programme.
Je vous remercie, M. le Président.
Le Président (M. Boucher): Merci, M. le ministre.
Mme la députée de Chomedey.
Discussion générale
Mme Bacon: J'aimerais faire quelques remarques. Vous ne pouvez
pas répondre à tout le grand discours du député de
Groulx, qui veut nous faire sentir sa présence ce matin, un bon
vendredi. Peut-être qu'il veut faire un grand discours au début de
cette commission parlementaire, ne serait-ce que pour démontrer aussi au
ministre qu'il n'a pas encore d'adjoint parlementaire et qu'il y a
peut-être des choses à faire du côté de
l'environnement qui l'intéresseraient.
M. Fallu: ...
Mme Bacon: Je sais, vous faites partie des vingt qui peuvent
être soit déjà nommés ou être nommés
suivant la dernière Loi de l'Assemblée nationale que nous avons
votée au mois de décembre dernier. Il y a des adjoints qui
partent, il y a des adjoints qui arrivent et d'autres qui attendent en ce
moment. Je ne suis pas méchante, je me retiens de faire d'autres
commentaires.
M. Ouellette: Ne précisez pas!
Mme Bacon: Je continue mon élégance, M. le
ministre. Je continuerai à persister à dire que dans mes
remarques, je n'ai jamais contesté le bien-fondé de Stablex. Il
faut quand même rétablir les faits. Peut-être que lorsque le
député de Groulx prendra connaissance de mes remarques, il le
verra. Premièrement, il y a d'abord eu contestation. Le ministre ne peut
pas nier qu'il y a eu contestation du site. On vit quand même dans un
monde qui nous entoure et qui se permet - on est encore dans une
démocratie au Québec, j'espère - de contester certains
choix qui sont faits par le gouvernement. C'est heureux qu'il y ait encore des
gens qui aient la possibilité de le faire. Je souhaite qu'on continue
à le faire. Ce que je dis - je pense que le ministre va être aussi
d'accord avec moi - c'est qu'il y a des industries qui prennent soin de bien
traiter leurs déchets, mais il y en a d'autres qui ne le font pas ou qui
le font d'une façon très illégale. Cela exige ce pouvoir
de surveillance qui est très large et qui est insuffisant en ce moment.
Pour ma part, ce sont là des préoccupations auxquelles j'ai voulu
sensibiliser davantage le ministre. J'ai parlé de son
prédécesseur, qui lançait des chiffres, et je sens le
ministre très prudent de ne pas recommencer la même situation que
nous avons vécue et que mon collègue de Nelligan a vécue
comme critique de l'Opposition en face du ministère de l'Environnement,
avec l'ancien ministre de l'Environnement. Il ne peut pas nier que l'ancien
ministre de l'Environnement ait souvent laissé de côté une
saine administration pour faire beaucoup de tape-à-l'oeil avec les
politiques de son ministère. Ce n'est pas moi qui le dis; je tente aussi
de le faire avec beaucoup d'élégance. Le premier ministre a
été beaucoup plus dur que moi quand il a dit, en octobre dernier,
qu'il avait été obligé de se départir des services
de son ministre à cause de la mauvaise administration du
ministère. Il n'a jamais nié - je l'ai même dit en Chambre
- avoir dit de telles paroles et il n'a jamais dit que je mentais à la
Chambre.
Je pense avoir été très précise dans mes
remarques, mais, en même temps, avoir laissé au premier ministre
le jugement à porter sur l'administration du ministère
auparavant. Heureusement, je pense bien que le nouveau ministre a tenté
de prendre les bouchées doubles depuis son arrivée et de
resserrer un peu cette administration de son ministère avec son
équipe. C'est souvent le ministre qui donne le ton à
l'administration de son ministère et je le sens très prudent dans
les annonces qu'il fait. En fait, je réserverai mes félicitations
pour un peu plus tard parce que, ce matin, on continuera l'étude des
crédits sans trop le féliciter, mais en le questionnant sur tous
les faits et gestes du ministre et du ministère.
Quant au député de Groulx, je laisserai à la
population de son comté et des environs le soin de juger ce qu'il a eu
à dire ce matin, mais, encore une fois, je pense qu'il faut aussi
représenter une partie de la population qui n'acceptait pas
d'emblée le site de Stablex.
M. Ouellette: Si on me permettait, j'aimerais apporter une petite
précision....
Le Président (M. Boucher): M. le ministre.
M. Ouellette: ...au sujet des déclarations de mon
prédécesseur en termes de chiffres qui sont apparus, dans
certains cas, mirobolants. Je pense que l'incompréhension est partie du
fait que M. Léger parlait souvent de 6 000 000 000 $ dans le programme
d'assainissement des eaux. Bien des médias se sont appuyés sur ce
montant sans essayer de le ventiler et de déterminer quelle partie
s'appliquait à quel secteur de l'assainissement des eaux. En fait, M.
Léger a toujours dit que l'assainissement des eaux municipales
représentait des investissements probables de
4 500 000 000 $ au cours des dix prochaines années. La
différence entre les 4 500 000 000 $ et les 6 000 000 000 $ était
tantôt la participation des municipalités, puisque que le
programme ne couvre pas à 100% les coûts prévisibles,
tantôt la participation industrielle parce que l'industrie a aussi
à faire des dépenses importantes pour se dépolluer, en
prétraitement dans bien des cas ou en traitement final, dans d'autres.
Il y avait un troisième élément, c'était le volet
agricole, où les agriculteurs sont appelés aussi à faire
des dépenses importantes, que ce soient les producteurs de porc, les
éleveurs de boeuf ou les producteurs de lait. Donc, les 6 000 000 000 $
sur lesquels plusieurs se sont appuyés pour parler de chiffres
mirobolants n'étaient pas nécessairement la partie
gouvernementale qui, elle, se situait autour de 4 500 000 000 $. Aujourd'hui,
ces chiffres nous paraissent encore réalistes. Là où il y
a eu ralentissement - et on ne le cache pas - cela a été dans
l'application du volet municipal et c'est relié à la
complexité des travaux, à la complexité du programme aussi
et au manque de précision de certains rôles dans ce programme.
Mme Bacon: Le ministre me permettra d'ajouter que l'ancien
ministre n'a fait aucun effort de ventilation non plus des 6 000 000 000 $. Il
n'a souvent mentionné que les 6 000 000 000 $ et non fait la
différence entre... Je pense que les propos du ministre sont beaucoup
plus réalistes et plus justes que ceux de l'ancien ministre.
Le Président (M. Boucher): Merci. M. le
député de Nelligan.
Autre intervention M. Clifford Lincoln
M. Lincoln: Je ne devais pas faire de remarques, mais je ne peux
pas... J'aurais voulu faire quelques petites précisions par rapport
à quelques déclarations faites par le député de
Groulx surtout et aussi par le ministre.
Tout d'abord, sur la question de Stablex, je ne vois pas pourquoi le
député de Groulx a pris tellement à coeur les
déclarations faites par ma collègue de Chomedey concernant
Stablex. Je pense que c'était une déclaration tout à fait
normale dans le sens qu'elle a dit que le bien-fondé de Stablex
n'était pas mis en jeu, mais que le site, certainement, avait
été constesté. Si le ministre et le député
de Groulx veulent qu'on fasse un débat du vendredi sur Stablex pour voir
ce qui s'y est passé... Il y a eu pas mal de débats en Chambre.
On a toujours dit qu'on était pour le principe même d'une usine
telle que Stablex pour procéder à la transformation et à
l'enfouissement de ces déchets toxiques, mais nous avons contesté
tout à fait le procédé qui a mené à Stablex.
Si le député veut relire le rapport du BAPE, il verra que toutes
ces constatations sont faites, qu'il y a un grand nombre de citoyens - la
grosse majorité - qui se sont opposés à la question de
l'emplacement et qui trouvaient qu'il n'y avait pas eu de consultation assez
grande, que dans le rapport du BAPE, il est clairement indiqué que
Stablex n'est pas à l'emplacement qu'ils auraient choisi
eux-mêmes. En fait, les experts du ministère, qui avaient fait un
rapport que le ministre de l'Environnement a gardé sur les tablettes ou
en secret pendant très longtemps, démontraient que le
problème, avec Stablex, était justement qu'on allait mettre cela
sur un emplacement de la deuxième nappe phréatique la plus
importante au Québec. C'était cela la constatation et la
discussion.
Quand vous dites qu'on a pris trop de précautions pendant cinq ou
dix ans, je m'étonne que vous puissiez dire qu'on protégera
l'environnement et prendre trop... C'était la première fois que
Stablex s'implantait dans un climat comme le nôtre. Les
précautions additionnelles que nous avons prises sont heureusement
arrivées à cause, justement, de tout l'engagement des citoyens
qui étaient préparés à cette question et
l'engagement de l'Opposition qui a joué sur ce point-là en
disant: On n'est pas satisfait. On a dû faire d'autres études
beaucoup plus avancées qui n'auraient pas été faites
autrement et on s'est rendu compte qu'il fallait des précautions
additionnelles pour l'enfouissement et je m'en réjouis. Je ne peux pas
dire aujourd'hui ce qui se passera demain. C'est cela qu'on disait au ministre.
On disait qu'on n'était pas contre le principe de Stablex, mais contre
le fait qu'il y a beaucoup d'experts en la matière qui se posaient des
questions. Donc, si on peut prendre des précautions additionnelles,
qu'on les prenne.
Le deuxième point qu'on apportait au point de vue des
déchets toxiques, c'est qu'il n'y avait pas de vue d'ensemble de la
question et nous répétons la même chose. Vous parlez des
BPC à Shawinigan-Sud. Si vous voyiez les questions qui ont
été posées en Chambre à propos de la question des
BPC, à Shawinigan-Sud, vous verriez qu'on a porté à
l'attention du ministre ce qui se faisait ailleurs par exemple. Mais, ici, on
ne regarde pas ailleurs parce que c'est à côté et ce n'est
pas bon.
On a dit: On dépose des BPC à Shawinigan-Sud qui ont un
problème toxique qui pourrait causer... Par exemple, les
problèmes d'incendie, on a démontré ce qui se faisait en
Alberta. J'ai même donné des exemples au ministre de ce qui se
faisait et je lui ai dit d'aller essayer de voir ce qui se
passait là-bas, comment on entreposait temporairement ces
choses-là. On a donné un permis à un promoteur qui n'avait
pas le statut financier pour réaliser le projet. Tout cela se fait au
pied levé.
On devrait avoir une politique d'ensemble sur les déchets
toxiques et c'est tout ce qu'on a demandé. On a fait Tricil, cela a
été fait par le gouvernement libéral. On peut
peut-être se blâmer d'un côté ou de l'autre, mais il
n'y a pas une politique globale pour les déchets toxiques. On a fait
Stablex parce qu'on a décidé qu'il y avait le maire à
Blainville; notre ami M. Vallée poussait Blainville. Même
l'étude finale de l'emplacement de Blainville était basée
sur une étude qui avait été faite à
côté, si je me souviens bien, à un ou deux milles de
là.
Si vous voulez faire un débat de fond à propos de Stablex,
on retire tous les dossiers, nous sommes tout à fait d'accord. On
passera trois heures là-dessus vendredi et on discutera de la chose. Si
vous pouvez montrer que les citoyens de Blainville accueillaient cela avec une
grande joie au début, qu'est-ce qu'ils pouvaient faire à la
fin?
Si vous voulez me dire que le rapport du BAPE démontre qu'il y
avait un consensus des citoyens pour Stablex, à ce moment-là, je
n'ai pas lu la même chose que vous.
Sur la question de l'assainissement des eaux, le ministre dit que
l'ex-ministre de l'Environnement était "cautious, careful" sur la
question de la publicité qui a été faite. Cela a
été une grande affaire de publicité. On ne dit pas que le
programme d'assainissement des eaux n'était pas quelque chose de
formidable. Au contraire, on est très content que cela se fasse. (11 h
30) 0e veux vous citer la déclaration de l'ex-ministre de
l'Environnement, le 16 août 1982: "D'abord, les investissements
réalisés. Au strict point de vue des investissements, nous
avions, au 1er juillet 1982, des travaux réalisés totalisant 678
000 000 $ dans 104 municipalités et dans les trois communautés
urbaines. Les conventions signées au 1er juillet 1982 totalisaient des
engagements de 1 570 000 000 $, c'est-à-dire que 43% des montants
prévus aux conventions pour l'assainissement des eaux étaient
déjà investis à cette date.
M. Léger a fait croire que 678 000 000 $ ont été
réalisés. En fait, ce qu'on avait réalisé en dehors
des grandes communautés urbaines, c'était 35 000 000 $.
II n'y avait que cinq projets de complétés à cette
date quand il a fait cette grande déclaration. Cinq projets tout petits,
je peux vous donner la liste: Val-David, Val-Morin, etc. Les estimations
avaient été presque doublées. Dans certains cas,
c'était 86% d'augmentation; 100% d'augmentation dans certains autres
cas.
Ce qui est arrivé, c'est qu'on faisait un "big show" avec cela et
quand on a retiré ce qui avait été fait dans la
Communauté urbaine de l'Outaouais, dans la Communauté urbaine de
Québec et dans la Communauté urbaine de Montréal, il ne
restait rien. Il y avait 35 000 000 $ de chiffres réalisés. Dans
102 autres municipalités, il y avait seulement un nombre infime de
projets qui avaient été commencés. Tout le reste,
c'était sous forme d'études. À Magog, on discute depuis
1980. On fait d'autres études préliminaires. Ce que nous faisions
avec le programme d'assainissement des eaux, c'était des estimations au
pied levé qui avaient l'air d'un "big show". On allait couper le ruban.
Ensuite, on faisait d'autres estimations quand les ingénieurs s'y
impliquaient. Le cas de Granby est un cas typique. Les prix ont doublé
et triplé. Quand je posais des questions au ministre, il me disait: Ah!
On discute en dollars constants et en dollars courants. Mais, en fait, cela a
été un "big show". Si le ministre nous assure maintenant qu'on va
revoir cette question et qu'on va reprendre le retard, eh bien... Ce n'est pas
nous qui l'inventons...
J'ai quelques coupures de presse; ce n'est peut-être pas
grand-chose. "Assainissement des eaux retardé par le Québec". "On
est en train de détruire la rivière pour la sauver".
"Montréal, l'assainissement des eaux accuse un retard
déplorable". "Se baigner dans la rivière des Prairies, c'est
courir au suicide". Il y avait deux ans de retard. "L'assainissement de la
Yamaska - le député doit le savoir - Léger demande que
l'on répare la Yamaska maltraitée par les 36 000 000 $ du
ministre Léger". On dit: "L'annonce des programmes, après cela,
cela devient 55 000 000 $". "La Société d'assainissement des eaux
elle-même détériore...".
On dit qu'il n'y a pas eu de conflit, que les conflits ont
été exagérés entre la SQAE, d'un côté,
et le ministère de l'autre. Ils ne se parlaient même pas.
Là, on ajoute un sous-ministre qui va être responsable de
l'assainissement des eaux, mais on n'a réglé aucun
problème. La SQAE est toujours là. Les sous-traitants
impliqués dans le dossier sont toujours là. On a souligné
cela au ministre. Quand on a formé un comité pour examiner le
programme d'assainissement des eaux, celui qui était responsable,
c'était un sous-traitant qui était lui-même impliqué
dans toute la question de Granby, par exemple. Comment pourrait-il prendre une
décision objective dans un programme dans lequel il était
lui-même impliqué?
Il va nous chanter que, par exemple, tout est merveilleux, tout est pour
le mieux dans le meilleur des mondes. Je suis d'accord avec vous que les
problèmes sont des problèmes complexes. Ce sont des
problèmes
de grande envergure. Mais si cela avait été si bon, on
aurait toujours aujourd'hui le ministre qui était là avant. Ce
n'est pas nous qui avons pris la décision. Quelque chose ne fonctionnait
pas au ministère de l'Environnement. Alors, on espère qu'avec le
nouveau ministre ce sera mieux. Mais qu'on ne dise pas que tout fonctionne
très bien, que les retards, ce n'est pas grand-chose et qu'il n'y a pas
de grands problèmes avec les bagarres qui ont eu lieu entre la SQAE et
le ministère. Stablex, c'était formidable. Tous les citoyens
étaient enchantés. C'est sûr qu'il y a eu beaucoup de
choses positives et on n'a jamais contesté cela. Mais, en même
temps, il ne faut pas croire qu'il n'y a pas de grands problèmes et
qu'il ne faut pas une politique globale beaucoup plus cohérente que
celle dont vous avez parlé.
Le Président (M. Boucher): M. le ministre.
M. Ouellette: M. le Président, j'aimerais apporter des
corrections aux propos que vient de tenir le député de Nelligan
parce que, dans deux cas, ces propos ne me paraissent pas refléter la
vérité concrète.
Par exemple, il nous dit - cela m'a sauté aux yeux tout de suite
- que, dans le cas de Stablex, ce qui l'inquiète, c'est qu'on va faire
de l'entreposage du produit toxique neutralisé au-dessus d'une des
nappes d'eau phréatiques les plus importantes au Québec, ce qui
pourrait laisser croire à ceux qui liraient le journal des Débats
qu'éventuellement, inconsciemment ou quasi inconsciemment, le
ministère de l'Environnement aurait laissé s'entreposer des
quantités abondantes de ces produits sur une nappe d'eau qui pourrait
être éventuellement contaminée. Vous avez parlé
d'entreposage de produits issus de Stablex au-dessus d'une nappe d'eau
importante.
M. Lincoln: C'est sûr, l'usine est là.
M. Ouellette: Nous en sommes conscients. Mais avant d'autoriser
l'entreprosage de cesdits produits, le ministère de l'Environnement a
procédé à une étude poussée au niveau hydro
géologique et s'est assuré qu'il y avait, en dessous de ce
terrain, notamment, une nappe d'argile, de terre glaise qui correspond à
la norme 10-7. Peut-être que cela ne vous dit pas grand chose, mais c'est
l'équivalent...
M. Lincoln: Je connais le dossier peut-être mieux que
vous.
M. Ouellette: Je sais que vous vous intéressez à
l'environnement.
M. Lincoln: Oui.
M. Ouellette: Cette norme est l'équivalent d'une
plate-forme de béton. C'est la norme qu'on impose, par exemple, aux
producteurs de porc pour entreposer le purin; c'est aussi la norme qu'on exige
des producteurs de boeuf pour l'entreposage de leur fumier semi-liquide ou
solide. Cela veut dire que cette nappe, étant naturelle, n'a pas
exigé de dépenses additionnelles. Elle est là et c'est une
protection considérable de la nappe d'eau qui se trouve beaucoup plus
bas.
Deuxièmement, le député de Nelligan a cité
des chiffres qu'il a mis dans la bouche de mon prédécesseur. Il a
dit que ces chiffres étaient du trompe-l'oeil ou un show. Il a
parlé de show. Au fur et à mesure qu'il faisait la lecture des
chiffres cités par mon prédécesseur, je les suivais dans
le mémoire que j'ai présenté au Conseil des ministres et
qui contient l'ensemble des informations sur les montants qui ont
été investis jusqu'à présent. Les chiffres
cités et par le député de Nelligan et par mon
prédécesseur sont tout à fait conformes à la
réalité.
Il est évident que si on extrait les trois communautés
urbaines de ces chiffres, les investissements sont beaucoup moins importants,
mais il faut se rappeler que la moitié de la population du Québec
et même davantage se retrouve dans l'ensemble de ces trois
communautés urbaines. Si on exclut la Communauté régionale
de l'Outaouais, on vient de faire sauter quelque chose comme de 300 000
à 400 000 citoyens. Nous avons fait des investissements - je cite de
mémoire - de l'ordre de 166 000 000 $. Ces travaux sont terminés,
l'usine est en fonction; j'ai même eu l'honneur de l'inaugurer il y a
quelques mois.
Si on ignore les travaux effectués dans la Communauté
urbaine de Montréal, les chiffres perdent toute leur importance; c'est
à Montréal que se retrouve la plus grande concentration de
Québécois. On ne peut donc pas exclure des montants cités
par M. Léger, les montants investis dans la Communauté urbaine de
Montréal. Il en va de même pour la Communauté urbaine de
Québec. Donc, les chiffres qui ont été cités par M.
Léger sont tout à fait conformes à la
réalité. Moi-même, lorsque je parle d'un montant important
pour 1983-1984, j'inclus les dépenses qui restent à être
faites aussi bien dans la Communauté urbaine de Montréal que dans
celle de Québec. C'est là que se trouvent les
Québécois. Donc, il me paraît normal que dans nos chiffres
on fasse paraître les montants dépensés dans ces
communautés urbaines.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Nelligan.
M. Lincoln: Tout d'abord, sur la question de Stablex, je n'ai
jamais dit qu'aujourd'hui on devrait faire croire à la
population que Stablex n'est pas "sécure", qu'elle a des
problèmes. Je n'ai jamais dit cela. Si j'ai dit cela aujourd'hui,
dites-moi quand. Ce que j'ai dit, c'est qu'il y a des études qui ont
été effectuées par votre ministère. Si vous voulez
les voir, je peux vous les montrer. J'ai des dossiers sur Stablex qui sont
épais comme ça, de votre propre ministère. Je pense que
les neuf principaux experts qui ont été invités à
faire une expertise là-dessus parlaient de la nappe phréatique.
Ils disaient: Ce n'est pas un site propice pour ce genre d'usine. C'est cela
qui a mené aux débats. Ensuite, cela a mené à
plusieurs études, à des quantités d'études dont une
étude finale, hydro géologique, qui a démontré que
le site sera "sécure" pour Stablex. On a pris des mesures
additionnelles, dont a parlé le député de Groulx,
justement parce qu'il y avait toujours cette espèce de doute dans
l'esprit même des experts parce que des constatations diverses ont
été faites. Le rapport de BAPE est rempli de ces
constatations.
Ce que je veux vous dire, c'est que toute cette affaire de Stablex est
controversée au possible. Si on veut relire les débats qui ont
été faits, on ne dit pas qu'on aurait dû avoir Stablex. Ce
qu'on dit, c'est qu'il y a toujours un doute dans l'esprit de la population sur
ce qui aurait été le site idéal, quand on pense à
la grandeur du Québec, quand on pense à tous les sites possibles,
quand on pense aux vieilles carrières où on aurait pu installer
cela. Même si le site est "sécure" aujourd'hui, même s'il y
a une nappe phréatique, il y a beaucoup de gens qui se demandent encore
s'il n'y a pas d'autres sites plus adéquats au Québec où,
sans nappe phréatique, on aurait pu installer Stablex. C'est le point
que je voulais souligner.
Quant à la question de l'assainissement des eaux, je n'ai jamais
dit que les chiffres cités par M. Léger étaient inexacts;
naturellement, ils sont exacts. Ce que je veux vous faire dire, c'est qu'il y a
différentes façons de citer des chiffres. Quand vous parlez, par
exemple, des conventions signées au 1er juillet qui totalisent des
engagements de 1 570 000 000 $, cela implique 104 municipalités. Ce que
je voulais vous dire, c'est que, si vous voulez me faire croire que sans M.
Léger, les programmes de l'Outaouais, de la Communauté urbaine de
Québec, de la Communauté urbaine de Montréal
"stopperaient" demain matin, ce n'est pas le cas. Par exemple, la
Communauté urbaine de Montréal, et j'en sais quelque chose, a un
service d'assainissement et d'environnement. Le comité de la CUM est
très actif. Il continuerait les projets, même si votre
ministère cessait demain matin, c'est certain, avec l'argent de tous. Ce
n'est pas l'argent du Parti québécois, c'est l'argent de tous les
citoyens. Tant qu'on a l'argent, c'est 54% qui viennent du gouvernement, on
peut mener les projets tout aussi bien. Là où on a besoin d'un
ministère de l'Environnement pour pousser les projets, ce sont dans les
petites municipalités qui n'ont pas ces services. C'est là la
clé.
Ce que je voulais vous dire, c'est que si vous lisez les rapports de M.
Léger de l'année dernière, la personne, le citoyen qui lit
cela dit: C'est fantastique; on a dépensé 678 000 000 $ pour des
travaux terminés. Quand on regarde les 104 municipalités en
dehors de la communauté urbaine ou les 108 municipalités dans
lesquelles il y avait des projets, c'est zéro. Il n'y avait que pour 35
000 000 $ seulement de travaux qui étaient complétés. Tout
cela était en retard, ce n'était pas commencé ou
c'était dans un fouillis terrible. C'est cela que je voulais dire.
Le Président (M. Boucher): Mme la députée de
Chomedey.
Discussion générale (suite)
Mme Bacon: Je vais laisser la parole au député de
Pontiac.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Pontiac.
M. Middlemiss: Oui. M. le ministre, vous avez dit que le
programme d'assainissement dans l'Outaouais était
complété. Est-ce que vous considérez l'intercepteur comme
faisant partie du programme total d'assainissement?
M. Ouellette: C'est bon que vous souleviez cela. Je crois que
l'intercepteur au niveau de Gatineau n'est pas terminé.
M. Middlemiss: Au niveau d'Aylmer. Le dernier tronçon est
en construction. Donc, le projet total n'est pas complété.
M. Ouellette: Je m'excuse, j'avais cette information, mais elle
m'a échappé. Tout est en voie d'être terminé. Il est
vrai que l'usine est en exploitation. J'aurais le goût de ramener encore
la discussion sur le programme d'assainissement des eaux à la suite des
propos tenus par le député de Nelligan. Il semble reprocher au
gouvernement, par l'entremise de mon prédécesseur, d'avoir fait
beaucoup de déclarations sur ce programme d'assainissement. Je ne veux
pas me porter à la défense de M. Léger, il est très
capable de le faire lui-même. Mais j'aimerais rappeler au
député un volet important du programme d'assainissement des eaux.
Au Québec, nous avons choisi la formule qui
respectait, entre autres choses, l'autonomie municipale, ce qui signifie
que le gouvernement ne se montre pas coercitif dans l'application de son
programme, mais il se doit d'intéresser les citoyens et les
municipalités qui ont une partie des travaux à payer, autour de
17%, et qui ont aussi des coûts d'exploitation à assumer une fois
que le programme est réalisé. C'est donc dire qu'il est du devoir
du ministre de l'Environnement de faire de la publicité, de vanter les
mérites du programme, d'éduquer les gens à
l'assainissement des eaux usées dans le sens de la
récupération des usages ou de certains usages de leurs
rivières.
Si M. Léger s'est montré un parfait vendeur de
l'idée d'épuration des eaux, il ne faudrait surtout pas
aujourd'hui lui en faire reproche puisque, effectivement, par ses
déclarations, par ses tournées, il a incité
énormément de municipalités à profiter de ce
programme et à enclencher le processus qui doit les conduire à
traiter leurs eaux usées malgré les dépenses
inhérentes à l'application de ce programme. Je pense qu'on doit
féliciter M. Léger pour le travail extraordinaire qu'il a fait
dans ce sens.
Quant aux accusations qu'on porte à son endroit, à savoir
qu'il aurait cité des chiffres mirobolants, je pense que quand on les
examine - et vous avez admis tout à l'heure qu'ils étaient vrais
- il suffit de faire la ventilation appropriée ou de regarder de
près ses déclarations pour s'apercevoir que c'était tout
à fait conforme à la vérité et que, par ses propos,
il a justement fait avancer l'application du programme.
Le Président (M. Boucher): Mme la députée de
Chomedey.
Mme Bacon: M. le Président, j'aimerais faire remarquer que
le ministre est bien généreux quand il dit qu'il a vanté
les mérites du programme. Il a vanté les mérites du
gouvernement beaucoup plus que les mérites du programme.
Évidemment, tout cela est dans l'idéologie du Parti
québécois. Il a fait énormément de politique. Ce
que l'Opposition reproche au ministre, c'est de n'avoir fait que de la petite
politique, bien souvent, avec l'annonce de ces programmes. Ce ne sont pas les
mérites du programme de l'assainissement des eaux qu'il a vantés.
Ce sont les mérites de son gouvernement, de son parti. Ce sont les
reproches qu'on fait parce que cela l'a porté à annoncer la
même chose deux, trois et même quatre fois. On a l'impression
qu'à mesure que les annonces se faisaient les paragraphes avaient beau
changer de place, les chiffres étaient toujours là. Je
répète ce que je disais tantôt: La ventilation n'a jamais
été bien faite par le ministre. Il a laissé croire aux
gens que tous ces montants qui étaient donnés étaient
donnés, évidemment, par le gouvernement qui n'a pas toujours
donné toutes les informations nécessaires. (11 h 45)
Je n'en ferai pas une question du vendredi, mais j'aurais juste une
petite question pour revenir à nos propos d'aujourd'hui. Le ministre a
mentionné tantôt son projet de cadre de gestion, par exemple, en
ce qui touche, évidemment, tout le dossier de l'assainissement des eaux.
À mes yeux à moi, c'est un correctif qui est drôlement
nécessaire en ce moment. Est-ce qu'il a dit - je n'ai pas très
bien saisi - s'il avait déjà présenté ce projet au
cabinet ou s'il doit le faire?
M. Ouellette: Le projet est déposé au Conseil
exécutif, mais il n'a pas encore été étudié
par celui-ci, ni approuvé.
Mme Bacon: D'accord.
Le Président (M. Boucher): Merci. M. le
député de Viau.
M. Cusano: Seulement quelques remarques préliminaires sur
les mots prononcés par le ministre. Je lisais attentivement avec lui sa
déclaration et, quand je suis arrivé à la page 7, au bas
de la page, il dit que "le ministère doit intervenir de façon
énergique pour assurer un niveau de qualité de l'air acceptable
pour la santé et le bien-être des Québécois". Ce
paragraphe se trouve au bas de la page et j'attendais une solution sur la
question de la carrière Miron dans le nord-est de Montréal, mais,
malheureusement, en tournant la page, le paragraphe de la page 7 ne me semble
être, encore une fois, que des voeux pieux.
La carrière Miron cause beaucoup de problèmes aux citoyens
de la région de Saint-Michel. Ces citoyens, durant une année,
n'ont pas seulement à faire face à des tempêtes de neige,
comme tous les Québécois, mais ils ont aussi à faire face
à des tempêtes de poussière et à des tempêtes
de papiers. Je suis sûr et certain que vous êtes au courant puisque
le Comité de la sauvegarde de Saint-Michel, même si, depuis
maintenant presque huit mois, il semble avoir beaucoup de difficulté
à obtenir des renseignements de votre ministère, est tout de
même assez actif. Pour démontrer justement ces problèmes de
tempêtes de poussière et de papiers, il n'est pas très
agréable, M. le ministre, pour un résident de devoir aller
ramasser dans sa cour des déchets que le vent a apportés de la
carrière. Je ne parle pas de simples papiers, je parle de déchets
qui s'envolent de la carrière, du site d'enfouissement de Miron. Le
problème, en ce qui concerne la santé telle quelle, c'est que le
parfum de l'air ambiant dans le secteur n'est certainement pas
compétitif pour Chanel.
Une voix: No 5.
M. Cusano: No 5, oui. Les mères de famille m'ont souvent
téléphoné à mon bureau. Elles sont inquiètes
du fait que des jeunes, par exemple, soient réveillés par le
dynamitage durant l'après-midi ou même durant la soirée.
Vous savez fort bien qu'un enfant qui se réveille et qui commence
à pleurer durant l'après-midi, cela cause certains
problèmes de santé, plutôt peut-être au niveau
psychologique qu'à d'autres. Lorsque ce parfum persiste dans les
résidences, on sait fort bien que les gens sont obligés de fermer
les fenêtres tellement c'est désagréable. Nous ne parlons
pas du fait que les gens du comté ne peuvent même pas dans
certaines périodes étendre leur linge sur la corde à
linge, parce qu'au lieu de sécher, il se salira. Dans les écoles
du comté qui sont situées près de la carrière, il
se produit encore le même problème, parce que les écoles
n'ont pas l'air climatisé. Vous savez comment la tâche peut
être très difficile d'enseigner lorsque des enfants sont
enveloppés de ce parfum. Des directeurs d'école du secteur m'ont
dit qu'à plusieurs occasions les enfants refusent même de sortir
lors de la récréation tellement ça sent mauvais.
Quand on arrivera au programme 1, j'aurai des questions un peu plus
spécifiques, mais j'ai été un peu déçu de
votre déclaration, M. le ministre, quand vous parliez de la
santé. Plus loin aussi, vous dites que la protection de l'environnement
ne peut être efficace sans la participation active des citoyens.
Pourtant, dans la quartier de Saint-Michel, il y a une très grande
participation. Les gens veulent en arriver à une solution pour la
carrière Miron, mais le dialogue entre les Michelois et le
ministère de l'Environnement laisse beaucoup à désirer en
ce moment. J'espère qu'à la suite de l'étude des
crédits le ministère aura les bras un peu plus ouverts envers ces
gens. Merci.
Le Président (M. Boucher): Merci, M. le
député de Viau.
M. le ministre.
M. Ouellette: Oui, M. le Président. La déclaration
que vient de faire le député de Viau me paraît être
le fruit d'une réflexion et d'une connaissance du milieu. C'est
évident que, tant et aussi longtemps qu'il existera une carrière
et un site d'enfouissement sanitaire en milieu urbanisé, il y a des
risques que des problèmes ne se répètent ou ne
réapparaissent de façon occasionnelle. J'aimerais lui rappeler
que, lorsqu'on a inauguré cette carrière, si vous me permettez
l'expression, cela a été fait dans un milieu non urbanisé.
Je m'étonne un peu que les responsables de l'urbanisation de l'île
de Montréal aient permis qu'on installe des gens à
proximité d'un site qui risquerait d'incommoder ses résidents.
C'est un premier point qui n'est de la responsabilité ni du
gouvernement, ni du ministère de l'Environnement comme tel.
Deuxième point, il nous dit que les odeurs qui se dégagent
n'ont rien à voir ou n'ont rien de comparable à Chanel no 5, non
plus que Bal à Versailles. Cela me paraît être, justement,
une conséquence de l'exploitation de ce type de choses en milieu urbain.
La responsabilité de cela n'imcombe pas, en premier lieu ou au premier
chef, au ministère de l'Environnement, mais à la
Communauté urbaine de Montréal comme telle qui a mis sur pied un
comité qui se charge des problèmes environnementaux dans la
Communauté urbaine de Montréal. C'est donc à ce
comité que les gens de Saint-Michel, me semble-t-il, devraient
s'adresser en premier lieu.
Le ministère de l'Environnement ne se lave pas les mains du
problème, évidemment. Il a, lui aussi, un rôle à
jouer qui en est un de supervision. À cet égard, selon les
renseignements que j'ai, les trois types de problèmes qui ont
été dénoncés, à savoir le méthane, le
dynamitage et la poussière ont fait l'objet de préoccupations et
d'interventions du ministère de l'Environnement. En ce qui concerne le
dynamitage, nous avons exigé du promoteur qu'il mette un plan de
dynamitage en vigueur de façon à protéger au maximum les
populations environnantes. Toujours selon ces mêmes renseignements, ce
programme serait respecté au maximum par l'exploitant de la
carrière. On a même installé des sonomètres et des
sismographes pour nous assurer qu'effectivement le programme de dynamitage
était respecté. Selon les renseignements que nous fournissent ces
instruments, il le serait.
Le deuxième problème était relié au
méthane. Nous avons exigé du promoteur un plan de
récupération de ces gaz afin qu'ils ne viennent pas
déranger les populations avoisinantes. Ce programme serait
réalisé, selon les renseignements que j'ai, à plus de 50%.
On devrait terminer ces installations au cours de l'année 1983-1984, de
telle sorte que ce problème disparaîtrait à moyen terme et
même à court terme.
Le troisième problème, celui relié à la
poussière, serait dû peut-être au vent dans certains cas,
mais à la circulation de camions. On me dit qu'il entre là
au-delà de 1000 camions d'ordures ménagères par jour. Je
suis conscient que c'est beaucoup de circulation puisque les camions circulent
dans les deux sens. Cela équivaut donc à une route qui supporte
2000 véhicules par jour, c'est beaucoup. On me dit qu'on a exigé
d'eux l'épandage d'une huile antipoussière et que cela serait
aussi respecté par le
promoteur.
Je suis conscient des remarques que vous me faites. Soyez certain que je
vais vérifier auprès de la direction régionale de
Montréal pour m'assurer qu'on protège au maximum les
résidents. Je suis disposé à rencontrer les citoyens de
Saint-Michel pour entendre leurs griefs. Si on peut apporter des correctifs
additionnels, nous le ferons avec plaisir parce que l'existence d'une
carrière et d'un site d'enfouissement sanitaire dans un milieu aussi
urbanisé, j'en suis conscient, risque de créer des
problèmes qu'on doit minimiser.
Le Président (M. Boucher): Merci. M. le
député de Viau.
M. Cusano: Seulement quelques remarques sur ce que vient de dire
le ministre. Je suis d'accord avec lui pour dire qu'on ne peut certainement pas
changer l'histoire de la carrière. Ayant suivi le dossier de très
près, je peux vous assurer, dans un sens, qu'il y aurait des correctifs
à apporter au site d'enfouisssement, non pas des choses nouvelles, mais
des choses qui existent déjà dans les règlements de votre
ministère en exigeant que la compagnie se conforme en totalité
aux règlements du ministère. C'est cela qui est le
problème sérieux chez Miron. C'est le souhait des citoyens: ils
réalisent fort bien qu'on ne peut pas tout d'un coup faire
disparaître cette carrière demain matin. Mais vous avez
déclaré hier en Chambre que le permis de renouvellement est
dû le 20 févier 1984. La population se demande pour quelle raison,
le permis ayant été émis par votre ministère il y a
cinq ans, on a fait des exceptions aux règlements, c'est-à-dire
qu'on n'a pas exigé les mêmes critères qu'à la
carrière Meloche, par exemple, dans Kirkland. Il me semble qu'on
n'enfouit pas les vidanges de la même façon chez Meloche que chez
Miron. Je fais ces précisions à ce moment, mais peut-être
que plus tard vous pourrez nous renseigner ici sur les mesures correctives qui
seront apportées avant que le permis soit émis. La population ne
demande pas l'impossible. La demande de la popoulation est simple: elle a droit
de respirer de l'air qui, s'il n'est pas à 100% pur, au moins ne cause
pas de danger à sa santé physique et mentale.
Le Président (M. Boucher): Merci. M. le ministre.
M. Ouellette: Pour répondre aux inquiétudes du
député de Viau, j'aimerais lui dire qu'avant d'émettre ce
permis le ministère de l'Environnement devra s'assurer que les normes
environnementales sont respectées. Je pense qu'il est honnête de
dire que, dans la mesure où l'exploitant peut nous démontrer,
à la satisfaction du ministère, que ces normes sont
respectées, nous émettrons à nouveau ce permis. Mais je
peux l'assurer qu'on fera cette évaluation. Évidemment, cela peut
paraître simple pour le citoyen de dire: Cela nous dérange; que le
ministère de l'Environnement lui retire donc son permis et le
problème sera réglé. Ce n'est pas aussi simple que cela.
Advenant le cas où on devrait en venir à ne pas
réémettre ce permis, il faudra trouver des moyens de
compensation, d'autres sites pour enfouir cela. Il faudra évaluer aussi
les conséquences d'un tel geste. Mais je répète que la
Communauté urbaine de Montréal a un rôle extraordinaire
à jouer là-dedans, puisque si le ministère de
l'Environnement décidait de ne pas émettre le permis, c'est elle
qui aurait le problème précisément de trouver de nouveaux
sites qui, eux aussi, pourraient, dans certains cas, créer des
problèmes comparables. Mais je peux vous donner ma parole qu'on
vérifiera jusqu'à quel point on respecte les normes du
gouvernement. Je suis conscient également qu'il est facile au
ministère de l'Environnement de dire à tel exploitant: Vous devez
vous conformer à telles normes, mais il faut quand même
prévoir des délais raisonnables d'application; je pense au
méthane et à sa récupération. Il est très
facile d'envoyer une ordonnance et de dire: Vous faites telle chose. Mais ce
genre de travaux peut exiger des investissements très importants et,
aussi, des délais dus à l'aspect technique des solutions. Il ne
s'agit pas, non plus, d'agir de façon sauvage, mais d'évaluer le
pour et le contre, les avantages et les inconvénients des gestes qu'on
devra poser et nous le ferons.
M. Cusano: J'ai seulement un autre petit commentaire.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Viau.
M. Cusano: M. le ministre, d'après ce que vous avez dit,
je suis un peu plus rassuré qu'avant d'émettre le permis vous
regarderez certainement la chose de très près et, je
l'espère, aussi en collaboration avec la Communauté urbaine de
Montréal. Qu'on ne mette pas les citoyens dans une situation où
ils ne savent pas où s'adresser pour avoir des renseignements. (12
heures)
La question fondamentale sur le site de la carrière, c'est que,
quand la carrière a été ouverte, comme vous l'avez bien
dit tout à l'heure, il n'y avait pas de normes établies. Le tas
de merde qui est là présentement cause des problèmes et,
s'il n'y a pas de correctifs apportés au site actuel, la senteur sera
toujours là pour les 100 prochaines années. Je vous demande au
nom de ces gens quels sont les correctifs qu'on
peut apporter au site actuel. Vous avez mentionné tout à
l'heure la question de la récupération du méthane. Je le
comprends et c'est apprécié, mais il y a un autre
problème, celui des eaux usées. D'après ce que j'ai vu de
la carrière, la pluie passe dans ce tas et se ramasse de l'autre
côté de la carrière. À ma connaissance -
corrigez-moi si je me trompe - il n'y a pas de système de
récupération de cette eau comme à la carrière
Meloche, à Kirkland, où cette eau usée est non seulement
récupérée, mais, avant qu'elle soit déposée
dans les égouts de la ville, elle passe dans un chlorificateur. Oui,
cela semble en surprendre quelques-uns, mais c'est ce qui se passe à la
carrière Meloche à Kirkland. Les eaux usées sont
récupérées, elles passent dans un chlorificateur et, par
la suite, entrent dans les égouts de la ville. Il faudra regarder ce
problème très sérieusement.
D'après les informations que j'ai obtenues à Kirkland, le
coût de la récupération de ces eaux usées n'est pas
si énorme que cela. Quand vous regarderez l'ensemble des choses, je
crois que c'est un aspect extrêmement important. Par la suite, chaque
fois qu'on parle de recouvrir des déchets de terre, je sais que la
compagnie semble avoir de la difficulté à ce moment-ci à
avoir du matériel, parce qu'il n'y a pas de construction telle quelle,
mais s'il n'y a pas de construction, cela ne veut pas dire que les
déchets ne doivent pas être couverts d'après les
règlements de votre ministère.
C'est un peu l'ensemble du problème. Je me suis permis de le dire
présentement avant qu'on arrive dans les questions peut-être plus
détaillées tout à l'heure, pour qu'au moins on puisse
assurer d'une façon la population de ce que le ministère entend
faire du côté très pratique. S'il n'y a pas de solution au
problème, M. le ministre, soit à cause du manque de technique ou
du manque de fonds, je crois que la population aimerait se faire dire la
vérité. À la suite de plusieurs rencontres dans le
comté, la plupart des gens s'opposent au chantage qui a
été fait soit par la Communauté urbaine de
Montréal, ou par votre prédécesseur, où on donne
l'espoir que le problème sera réglé. Même
Montréal dernièrement, par un interlocuteur, disait qu'elle
allait acheter la carrière Miron comme elle a fait avec la
carrière Francon, comme si c'était une solution au
problème existant.
Ce que je vous demande, M. le ministre; vous semblez parler avec
franchise, d'après ce que vous avez dit jusqu'à maintenant, et je
crois que la population s'attend à cela. S'il n'y a pas de solution,
vous le dites à la population. Alors la population dira: On est pris
avec des problèmes pour les 100 prochaines années, mais c'est
cela, au lieu de se faire leurrer et de se faire toutes sortes de promesses,
d'une année à l'autre. C'étaient mes remarques
préliminaires.
M. Ouellette: Si vous me le permettez, j'aimerais tout de suite
rassurer le député de Viau sur un quatrième
élément qu'il apporte dans la discussion. On a parlé de
méthane auquel étaient reliées les odeurs
désagréables.
M. Cusano: II y a d'autres éléments que je voudrais
apporter, M. le ministre.
M. Ouellette: Ah oui? Cela promet. Il y avait la
poussière; j'en ai parlé. Il y avait aussi le dynamitage. Il
apporte un quatrième élément, les eaux de lixiviation qui,
nécessairement, se dégagent de ce site d'enfouissement. Je n'ai
pas sous les yeux l'ordonnance qui a été émise à
l'endroit de la compagnie, mais on me dit que cette ordonnance
prévoyait, justement, l'obligation pour la compagnie de
récupérer et de traiter ces eaux. Je ne sais pas où ce
dossier est rendu, mais on me dit que c'est très avancé et
qu'avant longtemps on sera en mesure de régler ce problème
définitivement avant de rejeter les eaux dans les égouts
municipaux.
Le Président (M. Boucher): Mme la députée de
Chomedey.
Mme Bacon: Un bref commentaire. Comme on l'a mentionné,
hier, à la période des questions, ce qui préoccupe la
population, c'est, justement, ce jeu entre les deux paliers de gouvernement: on
se renvoie la balle depuis de nombreuses années. On sait très
bien que, lors d'un renouvellement de contrat ou de permis, les plans et devis
doivent être acceptés par le ministère de l'Environnement.
C'est peut-être cela qu'il faudra faire comprendre davantage à la
population, la préoccupation du ministère de faire en sorte que,
le 20 février 1984, lors du renouvellement du permis, on mette l'accent
là-dessus. D'ailleurs, la Loi sur la qualité de l'environnement -
je pense que c'est l'article 54 ou 55 - donne au sous-ministre cette
possibilité de rejeter, si cela ne rejoint pas les critères
d'acceptation, les plans et devis. S'ils ne sont pas conformes, le
sous-ministre a cette possibilité, par la loi, de les rejeter. Je pense
que c'est un peu cela qui tracasse davantage la population, tous ces
problèmes et ce jeu de balle qu'on se renvoie entre les deux paliers de
gouvernement.
M. Ouellette: J'aimerais, si vous me le permettez, M. le
Président, pour sauvegarder la bonne réputation de Mme la
députée de Chomedey, préciser que, lorsqu'elle parle de
deux paliers de gouvernement, le fédéral n'est pas inclus.
Mme Bacon: Cela empêche le ministre de l'Environnement de
le critiquer.
M. Fallu: La municipalité n'étant pas un palier de
gouvernement.
Le Président (M. Boucher): Si les questions du vendredi
sont terminées, nous allons passer aux crédits. J'appelle le
programme 1, protection du milieu.
Mme Bacon: Avant, il y a quand même certaines
généralités, M. le Président.
Le Président (M. Boucher): Une autre question du
vendredi?
Mme Bacon: Non, on n'a pas fini.
Le Président (M. Boucher): C'est vendredi,
aujourd'hui.
Mme Bacon: Je comprends que vous avez hâte de quitter, mais
on n'a pas terminé.
Le Président (M. Boucher): Non. J'ai tout mon temps.
Mme Bacon: On voit que les crédits sont augmentés
de 11,9% cette année et qu'évidemment la plus forte majoration de
17,5% s'applique à l'amélioration du milieu ambiant, dans le
programme où on retrouve l'assainissement des eaux.
Pour ce qui est de l'effectif, comme l'an dernier, on assiste à
une diminution de 3,2% et on parle d'un nouvel effectif de quinze personnes. Le
ministre l'a mentionné dans ses remarques préliminaires. Est-ce
que ce sont des gens qui sont affectés au programme d'assainissement des
eaux ou à l'ensemble des différents programmes?
M. Ouellette: Non. Les quinze postes additionnels qui ont
été autorisés par le Conseil du trésor sont
affectés exclusivement au programme d'assainissement des eaux, mais dans
ses trois volets: municipal, agricole et industriel.
Mme Bacon: Est-ce que j'ai bien remarqué? Ce sont des
contractuels? Ce ne sont pas des employés permanents?
M. Ouellette: On ne veut pas gonfler l'effectif permanent de la
fonction publique. C'est pourquoi on va engager des contractuels. Cela va
répondre aux questions éventuelles du député de
Nelligan.
Mme Bacon: À moins que cela ne facilite la
sélection.
M. Ouellette: Des occasionnels. Évidemment, cela facilite
la sélection en ce sens qu'on va avoir besoin de gens
spécialisés, mais on ne veut pas en faire des fonctionnaires
permanents.
Mme Bacon: D'accord. Dans la catégorie services, 4, on
remarque que les crédits, en 1983-1984, ont connu une diminution de 35%.
Ils passent de 300 900 $ à 195 500 $. Est-ce que le ministre peut nous
dire ce qui justifie cette diminution?
M. Ouellette: Je m'excuse, mais j'ai manqué une partie de
votre intervention. Vous faites appel à...
Mme Bacon: Supercatégories et catégories,
fonctionnement, autres dépenses, 4, services, 1983-1984. Est-ce qu'on
est au programme 1? Je vous réfère au programme 1.
Le Président (M. Boucher): Nous sommes au programme 1.
Mme Bacon: J'ai encore des généralités, M.
le Président. Est-ce que le ministre peut justifier la diminution des
montants qui sont passés de 300 900 $ à 195 500 $ pour
1983-1984?
M. Ouellette: Cette réduction est reliée à
l'entretien des barrages. Compte tenu des contraintes budgétaires qui
nous étaient imposées, il nous a fallu faire des choix. Comme le
ministère de l'Environnement est un ministère de services,
évidemment, chaque fois qu'on réduit les budgets, on
élimine des emplois. Il ne fallait pas faire subir toutes les pressions,
en termes d'élimination d'emplois ou de réduction d'effectifs.
Alors, nous avons choisi, notamment, de réduire l'entretien des
barrages, compte tenu du fait que, depuis quelques années, on y a
beaucoup investi. Nous avons jugé qu'il était possible de mettre
en veilleuse temporairement - un an, deux ans ou trois ans - l'entretien de
certains barrages pour éviter d'avoir à congédier trop de
personnel.
Une partie de cette réduction est aussi due au fait que nous
avons affecté 63 000 $ au programme des Cris et des Inuits,
conformément aux ententes de la Baie-James, et 150 000 $ ont
été décrétés par le Conseil du
trésor. Ceci s'est principalement réalisé en ne
distribuant pas l'indexation des dépenses.
Les informations préalables que je vous ai livrées
allaient plutôt au programme 2.
Mme Bacon: Est-ce qu'on retarde des projets ou si ce n'est que de
l'entretien régulier?
M. Ouellette: En ce qui regarde la première partie, au
programme 2, on ne fait que retarder certains types d'entretien
affectés aux barrages.
Mme Bacon: On remarque qu'en 1983-1984 il y avait des
crédits de 200 000 $ à la supercatégorie transfert.
J'aimerais connaître les raisons de ce montant qui n'existait pas
l'année précédente.
M. Ouellette: L'ajout des crédits affectés à
la super-catégorie transfert, 200 000 $, a été
effectué afin d'assurer l'entière responsabilité du
programme d'hygiène du milieu au nord du 55e parallèle et la
prise en charge des programmes par les Cris et les Inuits découle des
ententes de la Convention de la Baie-James dont je vous parlais tout à
l'heure. Ces crédits ont été prélevés dans
le programme 1 pour 110 000 $ et 2 pour 90 000 $.
Pluies acides
Mme Bacon: D'accord. Concernant la lutte à la pollution de
l'air, évidemment, on va commencer par les pluies acides. L'ancien
ministre de l'Environnement avait émis une ordonnance à la
Noranda pour que celle-ci avise le ministère de son choix quant à
la méthode utilisée par l'usine dans le but de réduire les
émissions. Il y avait deux méthodes qui pouvaient être
employées: celle des résidus d'amiante et celle d'une usine
à base d'acide sulfurique, une technologie qui est bien connue. La
Noranda devait choisir de mettre en pratique la méthode des
résidus d'amiante. On constate - et je pense que c'est malheureux - que
ce choix devait s'avérer vraiment trop coûteux. Il faut
peut-être se rappeler que la Noranda est la principale source des pluies
acides qui proviennent du Québec. On note qu'une ordonnance a
été signifiée à la Noranda de remettre les plans et
devis au ministère de l'Environnement. Est-ce qu'elle a vraiment
respecté l'ordonnance? On ne spécifiait pas que la Noranda devait
le faire à telle date. Je pense qu'il n'y avait pas de date ou
d'échéancier spécifique pour en venir à diminuer
ces émissions sulfuriques. Pourquoi le ministère de
l'Environnement a-t-il émis une ordonnance qui ne demandait pas la
réduction des émissions sulfuriques? (12 h 15)
M. Ouellette: Dans un premier temps, il nous a paru raisonnable
de demander à la compagnie de nous faire connaître le choix de la
méthode de traitement du SO2. À l'époque, comme
vous l'avez mentionne, il était question du procédé mis
à l'essai par la Société nationale de l'amiante à
partir des résidus d'amiante pour donner un produit chimique
fertilisant. Donc, la compagnie se trouvait devant deux solutions possibles,
soit l'usine de fabrication d'acide ou le procédé mis de l'avant
par la société. Malheureusement, récemment on apprenait
que le procédé à l'essai par la Société
nationale de l'amiante se révélait peu efficace et très
coûteux. Cela veut dire que la compagnie n'a donc plus le choix. Elle
devra donc procéder, semble-t-il, dans la voie tracée par l'usine
d'acide. C'est donc dire que nos hauts fonctionnaires vont entrer en contact
avec la compagnie sous peu pour en venir à une entente
d'étalement dans le temps, compte tenu des coûts extraordinaires
reliés à la dépollution de la Noranda, pour en venir
à établir un échéancier raisonnable, mais qui nous
garantisse, à moyen terme, qu'on puisse trouver une solution globale a
ce problème.
Mme Bacon: II est évident que même si la Noranda
respecte l'ordonnance et que ceci était peut-être trop faible, le
problème des pluies acides demeure quand même entier. Il est
difficile de blâmer Washington ou l'Ontario si on ne règle pas
nous-mêmes certains de ces problèmes. Quelle est la collaboration
du Québec avec Ottawa dans ce dossier?
M. Ouellette: En ce qui me concerne, j'ai eu au moins deux
rencontres avec le ministre fédéral, M. Roberts, à ce
sujet. J'ai aussi participé, à Regina, en octobre dernier,
à une rencontre du CCMRE, un comité canadien où tous les
gouvernements sont représentés sur un pied
d'égalité. Moi, je peux vous assurer que la collaboration entre
le ministère de l'Environnement du Québec et celui d'Ottawa est
parfaite. Il n'y a pas eu de guérilla ni d'un côté ni de
l'autre et, personnellement, j'entends continuer dans cette voie parce que je
suis conscient que, comme vous le disiez, le problème des pluies acides
n'est pas un problème québécois. Ce n'est pas, non plus,
un problème exclusivement ontarien ou même canadien. C'est
vraiment un problème international. Il est d'usage au Canada,
conformément à la constitution canadienne, que les relations
internationales se fassent via Ottawa et j'entends respecter cette
démarche.
Par contre, mon prédécesseur et moi-même avons
demandé, à plusieurs reprises, au gouvernement canadien le droit
d'être partie prenante à ces discussions avec le gouvernement
américain parce que nous prétendons que le Québec souffre
particulièrement des retombées des pluies acides, possède
certaines évaluations qui lui sont propres, certaines technologies
aussi. Nous aimerions avoir voix au chapitre afin d'aider Ottawa et l'ensemble
des provinces canadiennes à obtenir que Washington aille dans le sens
des réductions qui ont été proposées, d'ailleurs,
mais sur lesquelles le gouvernement fédéral américain
semble avoir des réticences.
Mme Bacon: Je lisais un article dans un
journal de la FAPEL, où on reproche au ministre de politiser un
peu ce débat des pluies acides. Vous allez les rencontrer en fin de
semaine et on va peut-être vous le dire à ce moment. On parle de
collaboration avec les autres provinces, on parle même des
États-Unis, mais on oublie le gouvernement d'Ottawa. J'étais
heureuse d'entendre le ministre dire qu'il collabore avec le ministère
fédéral de l'Environnement. Ce dossier des pluies acides est, je
pense, très important, sur le plan international comme sur le plan
strictement québécois parce que si on ne met pas d'ordre
soi-même, c'est difficile de demander aux autres de le faire.
M. Ouellette: Je pense qu'il n'y a pas lieu de créer de
chicane entre Québec et Ottawa à cet égard puisque nous
diposons, au niveau canadien, d'un organisme, le CCMRE, qui, lui, met sur un
pied d'égalité l'ensemble des intervenants provinciaux et
fédéral. À cet égard, il n'y a pas de
problème. En ce qui a trait à la déclaraton de la FAPEL en
relation avec une brochure publiée par le gouvernement sur les pluies
acides qui s'appelle, je crois, La pluie qui chasse les grenouilles, je pense
qu'il y a un peu de grenouillage là-dedans. C'est une information qui
m'a échappé complètement. J'en ai pris connaissance
à la lecture de l'article dont Mme la députée de Chomedey
fait mention. Il n'était pas du tout de mes intentions, non plus que de
celles du ministère, de faire de la discrimination à l'endroit
d'Ottawa. Cela soulève tout un débat à savoir si le
Canada, c'est la somme des provinces? Si oui, on a parlé des provinces,
donc on a parlé du Canada. Ou est-ce que les provinces sont nées
du fédéral? Là, c'est un autre problème. Je ne
pense pas que ce soit la place pour en débattre.
Mme Bacon: J'aimerais revenir à la Noranda, si vous voulez
bien. Quand on a fait le choix dont je parlais tantôt, des deux
méthodes, toutes les informations étaient là au
ministère sur les deux choix possibles. Est-ce qu'on a fait davantage
des pressions sur la Noranda pour le choix qui était le moins
coûteux, par exemple, et qu'on s'aperçoit maintenant
qu'étant trop coûteux il faut revenir à l'autre choix?
M. Ouellette: II nous est paru souhaitable qu'on demande à
la Noranda de faire son choix elle-même.
Mme Bacon: C'est une façon de ne pas être
coercitif.
M. Ouellette: C'est-à-dire qu'étant donné
qu'il y a des montants d'argent considérables d'impliqués dans la
solution de ce problème je pense qu'il est normal de laisser la
compagnie libre de choisir la méthode qui lui convienne pour autant que
les deux soient conformes à nos normes environnementales. La
première solution étant éliminée d'elle-même,
évidemment, on en revient à la deuxième qui est la
production d'acide et, à ce moment, nous ne laisserons plus le choix
puisqu'il n'y a plus de choix possible. Nous serons de plus en plus coercitifs,
mais nous espérons en venir, par voie de négociation rapide,
à un échancier qui nous permettrait d'atteindre nos
objectifs.
Mme Bacon: Quand le ministre nous dit qu'il doit rencontrer la
Noranda sous peu, est-ce qu'il y a des dates de fixées en ce moment?
Est-ce qu'il y a des dates de choisies pour ces rencontres ou si cela fait
partie de planification éventuelle?
M. Ouellette: Le personnel de mon ministère doit
rencontrer la direction de la compagnie, possiblement le conseil
d'administration aussi, aux environs du 15 mai. Le sous-ministre me signale une
information que j'avais déjà eu l'occasion d'entendre, à
savoir que le coût relié au projet SNA versus la production
d'acide était sensiblement le même, sauf que le
procédé de la SNA n'avait pour résultat que
d'éliminer environ 10% du soufre ou des gaz sulfureux.
Mme Bacon: C'est plus coûteux maintenant.
M. Ouellette: C'est cela. Il aurait fallu produire des produits
chimiques en quantité telle qu'on aurait été
embarrassé non plus par le SO2, mais par les produits
chimiques générés par la méthode de la SNA. Tandis
que la production d'acide peut réduire de 40% la production de
SO2; donc, c'est la solution qu'on retiendra.
Mme Bacon: Est-ce que le ministre pourrait me dire la
contribution gouvernementale dans les recherches dans ce domaine des pluies
acides en 1982-1983 et quelle sera celle de 1983-1984 par rapport à
1982-1983? Est-ce qu'il se fait beaucoup de recherches en ce moment?
M. Ouellette: II se fait des recherches dans plusieurs
ministères parce que cela intéresse le ministère de
l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, le ministère du
Loisir, de la Chasse et de la Pêche, l'Environnement, les Terres et
Forêts. Il se fait des recherches dans chacun de ces ministères.
Puisque, lors du dernier remaniement ministériel, le premier ministre a
mis en place un ministère qui s'appelle celui de la Science et de la
Technologie, j'ai demandé à mon collègue de ce
ministère de nous faire une espèce de rapport d'étape
qui
nous dirait exactement l'ensemble des recherches qui se font et je lui
ai demandé à partir de cette espèce de rapport de
conjoncture, lorsqu'on l'aura en main, qu'on puisse établir une
stratégie impliquant tous les ministères intéressés
pour qu'on établisse la mise au point sur le problème des pluies
acides comme telles. Cette année il s'est dépensé 350 000
$ en termes de recherche pour ce secteur. En 1983-1984, nous entendons y
consacrer 300 000 $.
Mme Bacon: Un peu moins. M. Ouellette: Un peu moins.
Mme Bacon: Cela veut dire moins que les autres années,
seulement pour le ministère de l'Environnement.
M. Ouellette: On me signale que la différence vient du
fait que 150 000 $ avaient été affectés au
procédé de la SNA, mais, comme il se termine, évidemment
on n'a pas à répéter ce montant cette année.
Mme Bacon: Est-ce que la grande majorité des recherches
qui sont faites tendent vers ce problème des pluies acides? Est-ce
qu'elles ont pour objet ce problème qui est important tout de
même? Si on en fait un problème international, il ne faut pas le
minimiser. Est-ce que c'est la majorité des recherches qui portent vers
ce problème des pluies acides?
M. Ouellette: La majorité des recherches portent sur le
problème des pluies acides, mais il faut dire qu'un peu partout à
travers l'Amérique du Nord on dispose de relativement peu
d'informations, notamment sur les effets qu'ont ces pluies acides sur les lacs,
sur les cours d'eau, sur la flore, sur la végétation aquatique,
sur la faune aquatique également. Donc, une partie de nos recherches va
dans ce sens, mais elles sont réalisées en particulier par le
ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche puisqu'il est le
premier concerné à cet égard.
Mme Bacon: Le ministre mentionnait tantôt une
stratégie. Est-ce que ce serait le premier geste à poser pour
lui, un plan stratégique? Est-ce que ce serait une stratégie
globale qui toucherait l'ensemble des ministères ou si le
ministère de l'Environnement en prendrait la responsabilité?
Est-ce ainsi qu'il le voit?
M. Ouellette: Oui, c'est ainsi que je le vois. C'est pourquoi
j'ai demandé au ministère de la Science et de la Technologie un
rapport de conjoncture qui nous permettra de coordonner l'ensemble des
activités des différents ministères pour en venir à
mettre le "focus" sur ce problème.
Mme Bacon: Les autres ministères laisseraient la
responsabilité au ministre de l'Environnement de poser des gestes?
M. Ouellette: C'est une chose qui n'est pas
déterminée, mais personnellement j'aimerais que le ministre de
l'Environnement ait un droit de regard important là-dessus. Quant
à savoir quel ministère sera le maître d'oeuvre de tout
cela, ce n'est pas encore discuté. Je suis réceptif à une
formule pour autant qu'elle nous permette d'avoir une droit de regard
très sérieux.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Nelligan.
M. Lincoln: M. le ministre, est-ce que je peux revenir à
la question de la Noranda? Si je comprends bien ce qui s'est passé, je
vois un Telbec du gouvernement du Québec, ministère de
l'Environnement, du 21 mai 1982. On se rappellera que, le 1er février
1982, une ordonnance signée du sous-ministre de l'Environnement
était émise à la mine Noranda, lui commandant de fournir
au ministère de l'Environnement, au plus tard le 1er octobre 1982, ou
bien les plans et devis de construction d'une usine d'acide sulfurique
permettant de réduire de 40% les déchets de soufre, ou bien les
résultats d'une expérience pilote d'une nouvelle usine. Cette
usine produira du sulfate de magnésium à partir de... etc.
Il y avait une ordonnance qui ne leur disait pas grand chose, en fait:
Le 1er octobre, donnez-nous... Ensuite, le ministère de l'Environnement
avait donné une subvention de 250 000 $ à la SNA pour le
programme. On arrive au 1er octobre 1982 avec le résultat qu'une des
deux solutions n'est pas faisable. En même temps, le ministre avait pris
l'engagement qu'on réduise les émissions de soufre de 40% d'ici
1985. On a attendu jusqu'à la fin de 1982 pour savoir quelle solution on
allait choisir. La solution de la SNA tombe à l'eau. Alors, on revient
aux plans et devis de construction d'une usine d'acide sulfurique. Pouvez-vous
nous dire - nous sommes déjà en 1983, ce n'est que pour les plans
et devis de construction - si vous pensez que la construction de l'usine est
réaliste, en deux ans qu'on fasse les plans et devis, qu'on
bâtisse l'usine et qu'on réduise presque immédiatement le
taux de SO2 de 40% en 1985?
M. Ouellette: Pour la première partie de la question,
j'aimerais préciser que l'expérience conduite par la
Société nationale de l'amiante nous paraissait très
prometteuse, en ce sens qu'elle utilisait deux types de déchets ou deux
types de nuisances environnementales, pour donner finalement un produit
chimique intéressant en termes
d'engraissement des sols, notamment. C'est pourquoi dans l'ordonnance
nous demandions à la compagnie de nous produire l'un ou l'autre des
résultats, à savoir des plans et devis pour une usine de
fabrication d'acide, ou bien de nous dire si elle entendait procéder par
le principe mis de l'avant par la Société nationale de
l'amiante.
La compagnie s'est conformée à l'ordonnance avec un peu de
retard, mais aujourd'hui nous sommes devant l'obligation d'envisager une seule
solution possible qui est celle de l'usine d'acide. C'est donc à partir
de négociations qui vont avoir lieu prochainement avec la compagnie
minière qu'on va mettre en branle le processus de plans et devis en vue
de l'établissement de ce procédé de traitement.
Maintenant, vous me demandez si on peut envisager qu'à
l'intérieur des deux prochaines années on puisse commencer
à réduire les émissions de SO2. Je vous avoue
ne pas avoir la compétence technique pour répondre à cela.
Peut-être qu'un sous-ministre...
On m'indique que le délai prévisible est de l'ordre de
quatre ou cinq années entre la mise en chantier ou la préparation
des plans et devis et le fonctionnement de cette usine. Donc, c'est un
délai de quatre ou cinq ans. (12 h 30)
M. Lincoln: On ne veut pas revenir en arrière. J'aurais
aimé que le député de Lafontaine, M. Léger soit
ici, pour qu'on puisse discuter de cette question. Je crois que si vous revenez
aux vieux débats, c'est exactement ce que nous pensions. Si vous
regardez les interventions qui ont été faites par l'organisme
STOP dans ce dossier, on a dit: À quoi cela a-il servi de faire des
ordonnances, depuis octobre 1982, qui n'ont même pas été
respectées? Qu'on fasse une ordonnance et qu'on dise à Noranda:
Écoutez, on sait que vous êtes la plus grande polluante de pluies
acides au Québec. Vous avez une ordonnance pour les réduire dans
un délai que vos experts considèrent raisonnable. Vous avez,
disons, de quatre à cinq ans pour bâtir une usine, et
réduire la pollution de 40% au cours de ces quatre ou cinq
années. Cela a du sens. Mais si vous lisez, par exemple, le Telbec
envoyé par l'ex-ministre de l'Environnement, le 20 novembre 1981, le
ministre a pris l'engagement, vis-à-vis des citoyens de Rouyn-Noranda,
de réduire de 40% d'ici 1985 les émissions de SO2 de
la mine Noranda. Il parle ensuite de la SNA et dit: "...diminuer son volume de
rejet dans l'atmosphère de 40% d'ici 1985," chiffre qui correspond aux
données publiées. Après cela, il dit: "Cependant, avec le
succès de l'expérience bientôt en cours, la diminution
pourrait être beaucoup plus grande et même atteindre 100% des
émissions de cette usine."
Alors, on berne les citoyens. On leur dit qu'en 1985, ils auront 40% de
réduction.
En fait, d'après ce que vous me dites, les plans et devis ne sont
même pas commencés parce qu'on a donné une
échappatoire à Noranda de choisir entre les deux. Alors, ils ont
choisi SNA; ils ont attendu l'expérience miracle. Nous sommes en avril
1983, on n'a pas de plans et devis. Il faudra du temps, peut-être six
mois, pour faire les plans et devis d'une usine. Le début de la
construction se fera au début de 1984 ou 1985, dans un an. On parle
maintenant de quatre, cinq à six ans, j'ai oublié ce que vous
m'avez dit. Au lieu de parler de 1985, on parle de 1989-1990. C'est cela que
STOP disait. Si vous allez voir les débats antérieurs dans
lesquels on redisait au ministre: Ne nous faites pas croire qu'en 1985, on
réduira cela par un procédé miracle.
Peut-être que cela aurait été une solution valable
d'avoir dit à Noranda: L'ordonnance ne dit pas "ou bien", mais examinez
le projet SNA et, en même temps, soumettez-nous des plans et devis. Une
grosse corporation multinationale qui aurait très bien pu...
C'était en mai 1981; ils ont eu l'ordonnance le 1er février 1981.
Si le ministre avait dit, le 1er février: Étudiez le projet SNA
comme une possibilité mais, en même temps, commencez à
préparer des devis pour qu'on arrive à 1985. Depuis le 1er
février, c'est déjà quatorze mois qui sont perdus; les
plans et devis ne sont même pas commencés. Remarquez, M. le
ministre, que je ne vous blâme en aucune façon. Vous êtes un
nouveau ministre, je comprends qu'on parle de problèmes qui sont
accumulés. Ce n'est pas du tout une question personnelle, mais une
question logique, quand on dit que depuis le 1er février 1982, nous
avons perdu quatorze mois. Vous les rencontrerez en mai. Je comprends votre
point de vue, vous ne pouvez pas faire autrement maintenant puisque
l'ordonnance était déjà signée; c'était
fait. Naturellement, Noranda profite de l'ordonnance. Mais, en mai, vous
étudierez les plans et devis. À moins qu'en mai, vous
n'émettiez une ordonnance disant à Noranda: d'ici 1985, 1986,
1987 - on a déjà perdu quatorze mois - vous devrez réduire
vos émissions de 40%. On sera toujours en train de traîner. Si on
prend l'ordonnance du ministre du 1er février 1982 qui demande de
soumettre les devis et s'engage en même temps pour 1985, même si
cela avait été respecté, même si Noranda avait pris
la décision de soumettre des plans et devis, il n'y avait aucune
façon pour qu'elle puisse réduire l'émission de 40% en
1985, de l'avis même de vos experts. Alors, à quoi cela sert-il de
faire tout cela si on est en train de se berner?
Même si Noranda avait dit, en octobre: Je vous soumets des plans
et devis et j'oublie SNA, si on compte quatre à cinq ans, cela nous
mène à 1987. Comment peut-
on dire qu'en 1985 on réduira de 40%.
M. Ouellette: Je comprends l'impatience du député
de Nelligan de voir que ce dossier ne se soit pas réglé hier
matin ou ne se réglera peut-être pas dans les mois qui viennent.
Je suis tout à fait d'accord avec lui et je souhaite qu'on règle
ce problème-là, mais il doit être conscient d'un certain
nombre de facteurs qui sont reliés à ce dossier. Par exemple, la
ville de Noranda vit à peu près exclusivement de la compagnie
minière. C'est donc un élément très important dans
l'économie régionale.
Deuxièmement, les coûts reliés aux exigences
environnementales sont de l'ordre de 80 000 000 $. Il faudra donc en tenir
compte.
Troisièmement, le député de Nelligan nous dit qu'il
est regrettable qu'on ait passé par la voie de l'ordonnance du mois de
février 1982 et qu'on ait ainsi permis à la compagnie de gagner
du temps. Je vous le répète, la proposition faite par la
Société nationale de l'amiante était à ce point
prometteuse qu'il nous serait apparu absolument "farfelu" - j'emploie ce mot
entre guillemets - de ne pas essayer de passer par cette solution, compte tenu
des retombées positives qu'elle promettait d'apporter.
Évidemment, cela s'est révélé un
insuccès et nous le regrettons mais nous n'avons guère le choix
aujourd'hui de procéder dans l'autre voie, la seule et unique qui nous
reste, celle de l'acide. Nous allons donc demander à la compagnie de
nous produire ses plans et devis le plus tôt possible. Je vous rappelle
que je n'ai jamais dit que les plans et devis à ce stade-ci
étaient au point zéro. Ils sont sans doute amorcés. On me
signale également que les fondations de l'usine de production d'acide
sont déjà en place. C'est donc dire qu'on n'est vraiment au point
zéro à aucun de ces chapitres.
Quant à savoir si nous avons l'intention d'émettre une
ordonnance dans ce dossier, je vous répète que je
préfère que mes hauts fonctionnaires rencontrent la compagnie
pour en venir à obtenir d'elle un accord, par exemple par une
déclaration publique stipulant qu'elle s'engage, avec un
échancier précis qui nous soit acceptable, à
réaliser les travaux qui nous permettront de réduire de 40% les
émissions de SO2 conformément à l'entente
nord-américaine qui est intervenue il y a quelques années.
M. Lincoln: Mais, pour revenir là-dessus, et je vous cite,
le ministre a pris l'engagement, face aux citoyens de Rouyn-Noranda, de
réduire ces émissions de 40% d'ici 1985, on sait que c'est
irréalisable et que cela ne se fera pas.
Sachant ce que vos sous-ministres et vos experts savent
déjà, que les plans sont à un certain stade, que les
fondations de l'usine sont en place, est-ce qu'on aurait pu nous dire,
d'après ce que vous savez, quand vous pensez que cette usine pourrait
être commencée, quand vous pensez qu'elle pourra être
terminée, combien de temps cela prendra? À ce moment-là,
il faudra ajouter quatre ou cinq ans et, au moins, les citoyens sauront que ce
n'est pas 1985, mais peut-être 1987 ou 1990, et on aura quelque chose de
réaliste à dire plutôt que de raconter des choses qui ne
tiennent pas debout.
M. Ouellette: Non, je ne voudrais pas raconter de choses qui ne
tiennent pas debout...
M. Lincoln: Non, je ne parle pas de vous, je vous dis ce qu'on a
déjà raconté.
M. Ouellette: Justement, mais ce que vous citez était vrai
dans le contexte où cela a été dit parce qu'à ce
moment-là, le procédé mis de l'avant par la
Société nationale de l'amiante ne nous disait pas que,
finalement, il ne serait efficace qu'à 10%. On espérait qu'il le
soit à 40%. Donc, dans le contexte, ce qui est dit là est vrai.
Advenant que ce procédé se soit révélé
efficace et rentable, nous aurions pu justifier les échéances,
soit 1985.
Aujourd'hui nous constatons que le procédé a
été un échec et, évidemment, les délais
seront plus longs, nous en sommes conscients.
Les réponses à ces questions devraient être
contenues dans l'échéancier qu'on entend faire respecter, mais je
vous répète que, les rencontres entre mes hauts fonctionnaires et
la compagnie n'ayant pas eu lieu, cet échéancier n'est pas
arrêté et c'est autour de la mi-mai ou la fin du mois de mai qu'on
pourra répondre à vos questions avec beaucoup plus de
précision en termes d'années, y inclus l'ensemble de la mise en
place de l'usine d'acide.
M. Lincoln: II y a eu beaucoup de discussions sur la question de
Noranda. Je n'ai pas envie de trop insister, mais le fait est que si vous allez
dans les débats qu'on a eus lors des crédits de l'année
dernière, si vous vous référez à l'ordonnance
première qui avait été faite du temps du ministre
Goldbloom, en 1975, je pense, si vous allez revoir le règlement qui
avait été fait à ce moment-là, on parlait de
réduire de 35%, pour les usines de cuivre, l'émission de
SO2 qui impliquait Noranda.
Quand le règlement a été refait en 1979, les usines
de cuivre n'avaient pas été incluses dedans. Le fait est que,
depuis tout ce temps, on parle de choses qui ne se font pas. On dit: Bien, on
revient au projet SNA, qui était le projet miracle. Comme je vous
le souligne, il y avait beaucoup d'intervenants dans ce dossier, des
intervenants de première ligne. STOP, par exemple, en est un. SVP, je
pense, avait fait la même chose, mais je ne peux pas le certifier. Ils
avaient dit: Tout ce qu'on a jusqu'à présent, c'est l'invention
d'un homme de sciences très éminent; c'est certain. Il y avait
des articles de journaux, mais c'est tout ce qu'on a pour le moment. Toute la
question de marketing, toute la question de "costing", etc., cela doit
être fait. C'est pourquoi le ministre avait demandé des solutions.
Donc, ce n'était pas certain pour la SNA. Mais, en même temps,
comment, ne sachant pas ce qui allait se passer avec SNA... C'est une invention
et, comme beaucoup d'inventions, on pense que cela va apporter des solutions
miracles. Il parlait même de 100%. On disait qu'avec l'expérience
en cours, la diminution pourrait être beaucoup plus grande et pourrait
même atteindre 100%. Maintenant, c'est zéro. Mais c'est reconnu
que, dans toutes les inventions, c'est comme cela. Sachant tout cela, comment
a-t-on pu laisser le temps passer? Aujourd'hui, selon ce que vous dites, on va
attendre avec impatience en mai, mais peut-être qu'au lieu de parler de
1985, on parlera de 1990. C'est peut-être plus réaliste de parler
de 1990 que de 1985.
M. Ouellette: Mme la députée de Chomedey a
souligné, ce matin, à mon endroit, ma prudence dans ce genre de
dossier. Je suis naturellement prudent et, comme vous, j'ai tendance à
croire que les délais sont souvent plus longs que ceux prévus.
C'est pourquoi je ne peux pas, aujourd'hui, vous parler de date de
règlement final. Il faudra que les rencontres dont je parlais tout
à l'heure aient lieu et qu'on s'entende avec la compagnie, autant que
possible, sur ce genre d'échéancier.
Vous parliez du procédé mis de l'avant par SNA qui
était le fruit d'un éminent homme de science de
l'Université de Sherbrooke, si je me souviens bien. Évidemment,
ce procédé était prometteur. Aujourd'hui, nous sommes
obligés d'admettre candidement - hélas! nous le regrettons, c'est
sincère - qu'il ne fonctionne pas en termes de solution du
problème relié à Noranda. Vous disiez qu'on promettait
100% à l'époque et que, maintenant, c'est zéro. Non, ce
n'est pas zéro, c'est dix, mais dix, c'est nettement insuffisant
puisqu'on veut abaisser de 40% -cela est notre objectif - l'émission des
gaz de SO2. Donc, je suis sérieux quand je vous dis que
j'attends beaucoup de la rencontre de mes hauts fonctionnaires avec la
compagnie et je suis également sérieux quand je vous dis qu'on va
tout mettre en oeuvre pour trouver, dans les plus brefs délais possible,
la solution à ce problème. Mais je devrai tenir compte, j'en suis
conscient, de la réalité économique, de la capacité
qu'a la compagnie d'absorber les coûts dans un laps de temps plus ou
moins long. La solution la plus rapide serait d'envoyer, demain matin,
l'huissier fermer la compagnie et il est évident qu'il n'y aurait plus
de retombées de SO . Mais il y aurait des retombées
économiques et sociales très importantes, et je me dois d'en
tenir compte. Donc, ce n'est pas ma première préoccupation.
Évidemment, ma préoccupation est environnementale, mais; en
tenant compte de l'ensemble de l'environnement, du côté humain,
social et économique.
M. Lincoln: M. le ministre, nous sommes tout à fait
d'accord avec vos dernières remarques. Tout ce qu'on vous
suggère, c'est qu'il faut au moins avoir une ordonnance réaliste,
qui mette l'usine de Noranda et la compagnie, une grande multinationale, devant
le fait, comme cela s'est passé avec l'INCO, en Ontario. Si on dit que
1985 n'est pas réaliste, à ce moment-là, qu'on ne prenne
pas des engagements si c'est pour 1987 ou pour 1990. Il y a assez d'experts
pour décider. Qu'on donne une date. Qu'on fasse une ordonnance disant
à Noranda de réduire, d'ici 1990, d'ici 1987, d'un certain
pourcentage établi. C'est quelque chose qui serait réaliste en
tenant compte de toutes les circonstances économiques, sociales, etc.
Autrement, on va aller de délai en délai et rien ne se passera.
C'est ce qu'on vous suggère.
M. Ouellette: Je suis tout à fait d'accord avec le
député de Nelligan à ce sujet. Les gestes que nous allons
poser le seront de façon échelonnée, en tenant compte des
réalités dont je parlais tout à l'heure, et que vous
entérinez d'ailleurs. Je veux m'assurer que l'échéancier
en question, qui jaillira des discussions entre le ministère et la
compagnie, soit réaliste, qu'on ne berne pas la population, qu'on ne lui
dise pas que l'an prochain ce sera fini alors qu'on sait que ce sera dans six
ou sept ans. Je veux que chaque pas que l'on fera se fasse dans la même
direction et que, progressivement, on en vienne à éliminer
complètement le problème, mais dans des délais
évidemment très réalistes.
Le Président (M. Boucher): Merci. Mme la
députée de Chomedey.
(12 h 45)
Mme Bacon: Je voudrais seulement ajouter quelques mots. Le
ministre va comprendre l'impatience de l'Opposition. On est vraiment conscients
de la réalité. Le compte à rebours est quand même
commencé quant à ce problème des pluies acides en ce qui
touche nos lacs et nos forêts, par exemple. Si on veut une survie de nos
lacs et de nos forêts, il faut commencer
immédiatement à poser des gestes importants. On dit
même, je pense que c'est dans sept ou huit ans, que de 70% à 80%
de nos lacs et de notre territoire seront atteints si, immédiatement, on
ne pose pas des gestes, peut-être des gestes dramatiques, mais il faut
les poser, à un moment donné, ces gestes.
Je ne pense pas que nous soyons alarmistes quand on presse davantage le
ministère de l'Environnement et le gouvernement à poser des
gestes. Je pense que c'est plutôt être réaliste dans les
circonstances actuelles; les faits sont là.
M. Ouellette: C'est cela.
Mme Bacon: II y en a d'autres. Je n'ai qu'à mentionner ici
qu'un rapport a été préparé par le National
Research Council de l'Académie des sciences de Washington. Il nous
apprend que le nombre de lacs touchés, tant en Europe qu'en
Amérique du Nord, dont nous faisons partie, par les
précipitations acides, augmenterait de plus de 100% d'ici 1990. Le
rapport dit aussi que les preuves de rejet des centrales thermiques -c'est dans
un autre domaine, mais elles sont reliées aux pluies acides -
présentent un caractère accablant. Dans tous les domaines, on a
quand même une impatience, en ce moment, puisqu'on est tous conscients
que le compte à rebours est commencé.
M. Ouellette: Non seulement j'abonde dans le sens de vos propos,
mais il y a même un élément additionnel que les
Québécois ne connaissent peut-être pas tous: les effets des
pluies acides sur le territoire québécois ou sur le territoire de
quelque pays que ce soit, ne sont pas nécessairement uniformes. On sait
très bien qu'au Québec, en ce qui regarde la partie nord du
fleuve Saint-Laurent, qui est formée du Bouclier canadien, donc de sols
précambriens, les pluies acides ont un effet encore plus fort que dans
les sols végétaux connus sur la rive sud du Saint-Laurent. Donc,
le Québec est très vulnérable et c'est justement dans ce
secteur du Québec qu'on retrouve le plus grand nombre de lacs et c'est
ce qui nous intéresse, bien sûr, ce qui nous pousse à aller
plus vite vers la solution de ce problème.
Le Président (M. Boucher): Mme la députée de
Chomedey.
Mme Bacon: Une autre question peut-être. L'année
dernière, votre prédécesseur avait annoncé
l'ouverture d'un centre d'information sur les problèmes des pluies
acides. Est-ce que cela a été mis sur pied? Est-ce que cela
existe ou si cela n'a été qu'annoncé?
M. Ouellette: C'est une entente qui est intervenue entre le
Québec et l'État de New York en termes d'échanges
d'informations. Cela existe, c'est le Dr Giguère qui représente
le Québec et qui voit à ce que les informations se transmettent
de part et d'autre. Nous sommes conscients qu'il est utile que le Québec
ait des relations avec les États nord-est américains qui sont,
comme nous, victimes des pluies acides en provenance, en particulier, du
centre-ouest américain. On me signale que quatre personnes travaillent
à ce bureau et que le budget est de 15 000 $. Tout à l'heure,
vous me posiez des questions concernant les recherches. Je pourrais
peut-être vous donner des informations additionnelles. En termes
d'étude de l'effet de l'acidification des lacs sur l'omble de fontaine
dans la région de Portneuf, quatorze lacs ont été choisis
dont sept acidifiés et sept autres tamponnés. Le niveau
d'acidité de cette zone est plus élevé que celui du parc
des Laurentides. Le rapport de cette étude sera disponible à
l'automne de 1983 et le budget qui y est consenti est de 240 000 $ en 1982-1983
et de 200 000 $ en 1983-1984, ce qui représente quatre
personnes-année. On travaille aussi à l'établissement des
relations entre le niveau d'acidification des lacs et les effets sur les
organismes biologiques. Il y a l'étude de quatre lacs dont deux seront
acidifiés en vue d'établir le seuil de tolérance pour la
survie de l'omble de fontaine. C'est une subvention à
l'Université Laval en 1982-1983, de 50 000 $ et en 1983-1984, de 50 000
$ également.
Mme Bacon: Quand le ministre parle d'un bureau avec quatre
personnes avec un budget de 15 000 $, il ne parle pas de salaires avec 15 000
$.
M. Ouellette: Non. Les salaires en sus, évidemment.
Mme Bacon: La question des salaires, c'est important.
M. Ouellette: II y a eu des coupures salariales, mais pas
à ce point quand même.
Une voix: Tout de même.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Viau.
La carrière Miron
M. Cusano: Je voudrais revenir dans le secteur de la ville de
Saint-Michel, la carrière Miron. Vous avez parlé tout à
l'heure d'une ordonnance qui a été émise. Est-ce que je
pourrais savoir quel était le contenu de cette ordonnance?
M. Ouellette: Cette ordonnance a dû être émise
autour de 1979 ou 1980, donc, avant mon arrivée au ministère. Le
contenu est essentiellement ce dont nous avons parlé tout à
l'heure, c'est-à-dire la récupération de gaz
méthane en vue de le brûler. Le traitement des eaux de
lixiviation, l'abat-poussière, le papier aussi et le dynamitage en
termes de plan de dynamitage. Maintenant, pour de plus amples informations et
si vous en manifestez l'intérêt, je peux vous faire parvenir une
copie de cette ordonnance. C'est un document public de toute façon.
M. Cusano: D'un autre côté, on disait tout à
l'heure, M. le ministre, que le site actuel d'enfouissement a commencé
avant le ministère; est-ce que vous envisagez une étude pour voir
quels correctifs pourraient être apportés au site actuel?
M. Ouellette: Écoutez, je n'ai aucune objection à
ce qu'on procède à une telle étude. Dans la mesure
où nous sentons que les problèmes que vous dénoncez
aujourd'hui sont vraiment réels et que les solutions
préconisées dans l'ordonnance risquent de ne pas être
totalement satisfaisantes. Il ne s'agit pas non plus de faire des études
pour le plaisir d'en faire, mais si on a la conviction que le contenu de
l'ordonnance étant respecté, le problème sera
réglé, on va éviter l'étude. Là où il
y aura des doutes raisonnables, je n'ai aucune objection à ce qu'on
procède à une telle étude.
M. Cusano: On parlait aussi tout à l'heure de la question
du recouvrement des déchets. Je n'ai pas les règlements avec moi,
mais si ma mémoire est bonne, vos règlements exigent que les
déchets soient recouverts par 20 centimètres de terre. Est-ce que
c'est le cas chez Miron?
M. Ouellette: Selon les informations que j'ai, oui, il y a une
surveillance continue qui se fait et cette norme de 20 centimètres est
respectée. Maintenant, vous savez qu'il s'agit d'une exploitation de
choses complexes qui n'est pas faite par le ministère de l'Environnement
ni par la communauté, mais par un exploitant privé. Il n'est pas
dit qu'à l'occasion il n'y ait pas de failles dans l'application.
M. Cusano: Vous avez des inspecteurs qui se rendent sur le site.
Est-ce que vous pouvez nous dire, dans les dernières années,
combien de fois vos inspecteurs se sont rendus sur le site pour s'assurer que
les devis étaient respectés?
M. Ouellette: C'est une information dont je ne dispose pas
aujourd'hui, évidemment, mais j'essaierai de vous répondre mardi
à la prochaine séance.
M. Cusano: Merci.
Un autre problème de la carrière Miron, il s'agit d'un
problème très complexe. Peut-être pour vous replacer dans
le contexte de la chose, c'est ce qu'on appelle dans les régions le
problème du parc Miron, c'est-à-dire au nord de la
carrière, un espace vert qui appartenait à la ville de
Montréal et qui a été échangé pour un autre
terrain. À ce moment-là, on avait encore fait des promesses
à la population à propos de ce parc, puisque dans la
région, non pas seulement dans mon comté, il y a très peu
d'espaces verts, très peu de parcs pour les jeunes. La population avait
compris que ce parc, qu'on appelle le parc Miron, ne serait jamais
touché par la compagnie pour fins d'exploitation pour le
côté de la cimenterie, cette fois-ci, non pas du côté
de l'enfouissement des vidanges. Pourtant, on a entendu dernièrement,
dans le comté, que la compagnie s'apprête à commencer le
dynamitage dans le parc. Puisqu'on est tous concernés au sujet des
espaces verts, avez-vous l'intention d'empêcher la compagnie de prendre
ce seul espace vert qui reste dans la région?
M. Ouellette: M. le Président, le sujet auquel se rapporte
le député de Viau est un sujet extrêmement complexe sur le
plan juridique. Je ne m'aventurerai pas sur ce terrain qui m'est plus ou moins
bien connu. J'ai par contre ici Me Jean Piette, qui est le directeur du
contentieux, qui est dans ce dossier. Si la commission y consentait, je lui
donnerais le droit de parole en mon nom, s'il le faut, pour répondre
correctement à la question du député de Viau.
Le Président (M. Boucher): Y a-t-il consentement?
Une voix: Ne quittez pas, M. le ministre.
M. Ouellette: La question de ce parc est une question qui est
posée depuis plusieurs années. Il y a eu des discussions
directement entre la compagnie Miron et la ville de Montréal. C'est
essentiellement un problème qui relève de la ville de
Montréal. Des discussions ont eu lieu presque totalement à ce
niveau. Le seul moment où le ministère a été
appelé à intervenir, c'était quant à des
consultations, à savoir dans quelle mesure tel projet d'agrandissement
de la carrière serait conforme au règlement sur les
carrières et sablières du ministère de l'Environnement.
C'est seulement à ce moment que le ministère a été
consulté. Pour savoir s'il y a eu conformité, il faudrait que je
vérifie, parce qu'il y avait des normes et des
limitations qui étaient posées à l'expansion de la
carrière Miron, et cela par le règlement qui remonte à
1977.
Cependant, il y a un critère dans ces normes qui concerne les
titres de propriété du propriétaire de la carrière
lors de l'entrée en vigueur du règlement, c'est-à-dire au
mois d'août 1977. La question se posait, à savoir si la ville de
Montréal était propriétaire à partir du moment
où elle avait déposé son avis d'expropriation. Je pense
que c'était avant 1977. Il y avait un litige là-dessus. Il y a eu
des discussions sur cette question. Je n'ai pas été
informé ces derniers mois de l'évolution du dossier. Cela fait
peut-être un an qu'on n'en a pas entendu parler.
M. Cusano: D'après ce que vous venez de dire, il y a une
question de renseignement qui nous ramène au problème, M. le
ministre, de l'importance de la question de Mme Bacon hier en Chambre sur le
fait que, pour faire toute la lumière sur ce problème, parce que
ce ne sont pas seulement les gens du comté de Viau qui sont
préoccupés par le problème, la question du parc, cela
touche aussi les gens de Crémazie. La poussière, cela touche les
gens de Dorion, cela touche les gens de Rosemont, et ainsi de suite.
Ma dernière question à ce moment est la suivante: Vu la
complexité des choses et vu le problème juridique de la question
du parc, le ministre peut-il nous assurer à ce moment-ci qu'il y aura
dans les plus brefs délais des audiences publiques pour qu'on puisse
éclairer.... N'étant pas avocat, je ne peux pas me permettre de
contester la parole de votre contentieux. M. le député de Groulx,
nous sommes ici pour trouver des solutions et non pour se passer la balle d'un
à l'autre. Je demande au ministre de l'Environnement, s'il peut nous
assurer, vu la complexité du problème de la carrière, s'il
est prêt à demander au Bureau d'audiences publiques d'entendre
tous les participants, tous les gens en cause dans ce problème.
M. Ouellette: Je vous dirai que ce n'est pas une solution que je
rejette du revers de la main, mais à laquelle je devrai
réchéchir. A priori, à la suite de la question
posée en Chambre hier - j'ai eu à réfléchir un peu
à cela hier soir; j'ai quand même réussi à dormir
cette nuit, remarquez - oui, il est bon que l'Opposition fasse
réfléchir le gouvernement, j'en conviens. Nous sommes dans un
dossier qui n'est pas jeune et la compagnie qui exploite la carrière et
le lieu d'enfouissement sanitaire a des droits acquis. Le rôle du
ministère de l'Environnement du Québec, dans ce dossier, est de
s'assurer que l'exploitation se fait à l'intérieur des normes
établies par le ministère de l'Environnement. Dans la mesure
où, au moment de penser à réémettre le permis pour
un nombre d'années à venir, il nous faudra évaluer la
situation à savoir si, effectivement, la compagnie respecte les normes
environnementales ou, à tout le moins, si elle poursuit un cheminement
précis et rapide pour en venir à les respecter. Je ne pense pas
qu'il faille concevoir le ministère de l'Environnement comme un
organisme qui a le droit de vie ou de mort sur chacune des entreprises au
Québec. Mais c'est quand même un organisme qui a le pouvoir de
s'assurer que les normes environnementales sont respectées.
C'est donc au moment de cette évaluation que je pourrai
répondre à votre question avec beaucoup plus de précision,
premièrement, parce que j'aurai réfléchi et,
deuxièmement, parce que j'aurai les données techniques à
ma disposition.
M. Cusano: J'espère alors, M. le ministre, contrairement
à ce qui est écrit à la page 7, que les gens ont droit -
c'est votre responsabilité de l'assurer - à un degré de
qualité sain.
M. Ouellette: C'est vrai.
M. Cusano: C'est votre responsabilité. Vous dites un peu
plus loin que cette protection de l'environnement, contre la pollution de l'air
ou des espaces verts, ne peut pas être efficace sans la participation
active des citoyens.
M. Ouellette: C'est vrai aussi.
M. Cusano: II me semble que si ce sont seulement des voeux pieux
que vous avez décidé d'insérer dans votre
présentation, c'est une chose. Mais si vous voulez vraiment y donner
suite et poser des gestes très concrets... Comme on l'a dit, je le
répète, le problème est tellement complexe qu'il faut
faire toute la lumière sur le sujet. Il me semble que c'est votre
responsabilité en tant que ministre de vous assurer que la
lumière sur le sujet soit faite en totalité. C'est pour cela que
je vous le demande et j'insiste au nom de la population. Je peux vous dire
qu'en ce moment, il y a une pétition qui circule, qui a recueilli
au-delà de 10 000 signatures et qui vous parviendra bientôt. Les
gens demandent à être consultés et à obtenir des
solutions concrètes. Comme je l'ai dit tout à l'heure, si,
techniquement, il n'est pas possible d'apporter des solutions concrètes,
les gens veulent également le savoir et ils vont s'ajuster.
Je vous demande, encore une fois, si vous êtes prêt à
vous engager à nous dire si, oui ou non, il y aura des audiences
publiques.
M. Ouellette: Non. À ce stade-ci, je ne suis pas
prêt à m'engager aussi catégoriquement dans une direction
ou dans l'autre. Je vous répète que, lorsque nous
aurons l'évaluation de la situation et également
l'évaluation de ce qui a été fait par l'entreprise en
termes de respect des conditions qui ont été posées dans
l'ordonnance, je me rendrai sur les lieux pour vérifier, sur place, ce
qui en est, parce que c'est toujours un peu embarrassant de parler de quelque
chose qu'on n'a pas vu et c'est...
Mme Bacon: ...de Chanel no 5.
M. Ouellette: Mme la députée de Chomedey me
suggère une bouteille de Chanel no 5. Je préfère Bal
à Versailles et j'attends ce cadeau de votre part.
Mme Bacon: C'est un peu plus capiteux.
M. Ouellette: C'est plus capiteux, sûrement. Ce ne sera pas
un pot-de-vin, mais un pot de parfum. J'irai sur les lieux et, à la
lumière de toutes ces informations, je pourrai répondre plus
directement à votre question.
Le Président (M. Boucher): Mesdames et messieurs, il est
l'heure de l'ajournement.
M. Cusano: J'ai une brève question.
Le Président (M. Boucher): Oui. Est-ce qu'il y a
consentement?
M. Ouellette: Consentement.
M. Cusano: Ma question ne sera pas longue. Je veux savoir quand
vous allez visiter les lieux et il serait peut-être
préférable de ne pas aviser la compagnie avant d'y aller.
M. Ouellette: Si je vous réponds, il y a des risques que
la compagnie le sache.
Mme Bacon: Bientôt.
M. Ouellette: Disons au mois de mai.
Le Président (M. Boucher): La commission ajourne ses
travaux à mardi, 19 avril prochain, à dix heures. Nous tiendrons
compte de l'heure de vol de Mme la députée de Chomedey.
(Fin de la séance à 13 h 04)