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Etude du livre blanc sur la consultation populaire au
Québec
(Dix heures quarante-sept minutes)
Le Président (M. Paquette): A l'ordre, messieurs!
Les membres de cette commission parlementaire sont M. Bertrand (Vanier),
M. BisailIon (Sainte-Marie), M. Brochu (Richmond), M. Burns (Maisonneuve), M.
Gratton (Gatineau), M. Grenier (Mégantic-Compton), M. Johnson (Anjou)
remplacé par M. Gosselin (Sherbrooke), M. Laberge (Jeanne-Mance), M.
Lamontagne (Roberval) remplacé par M. Ciaccia (Mont-Royal), M. Lavoie
(Laval), M. Lévesque (Taillon) remplacé par M. Fallu
(Terrebonne), M. Mackasey (Notre-Dame-de-Grâce), M. Martel (Richelieu),
M. Morin (Louis-Hébert), M. Morin (Sauvé) remplacé par M.
Char-bonneau (Verchères), M. Paquette (Rosemont), M. Roy (Beauce-Sud),
M. Samson (Rouyn-Noranda) et M. Vaugeois (Trois-Rivières).
Ce matin, nous entendrons quatre mémoires concernant
l'étude du livre blanc sur la consultation populaire au Québec.
Pour le premier mémoire, je demanderais à M. Réginald
Lavertu, président de la Société nationale de l'Est du
Québec de se présenter à l'avant avec les gens qui
l'accompagnent.
J'inviterais M. Lavertu, président de la Société
nationale de l'Est du Québec, à se présenter, à
présenter les gens qui l'accompagnent et à présenter le
mémoire de son organisme.
Société nationale de l'Est du
Québec
M. Lavertu (Réginald): Merci, M. le Président. La
Société nationale de l'Est du Québec, autrefois la
Société Saint-Jean-Baptiste de Rimouski, regroupe 30 000 membres
dans un territoire qui couvre la majeure partie de l'Est du Québec,
c'est-à-dire le Bas-Saint-Laurent et une grande partie de la
Gaspésie. C'est un organisme qui, historiquement, a toujours
été préoccupé de la promotion des
intérêts du peuple québécois et qui est très
heureux, ce matin, de venir présenter son mémoire sur la
consultation populaire.
Permettez-moi de vous présenter d'abord, à ma gauche,
Réal Dubé, animateur-organisateur pour la Société
nationale de l'Est du Québec, M. Jean Pineau, de la section Amqui de la
Société nationale de l'Est du Québec, M. Claude Otis, de
Ma-tane, administrateur à la Société nationale de l'Est du
Québec. Si je vais à l'extrême droite maintenant, M.
Jean-Louis Desrosiers, de la section Mont-Joli; Jocelyne Michaud,
secrétaire du conseil d'administration de la Société
nationale de l'Est du Québec et M. Bruno Roy, directeur
général de la société.
La Société nationale de l'Est du Québec, la SNEQ,
se réjouit à l'idée de voir s'ajouter un autre
mécanisme à l'appareil démocratique du Québec, le
référendum. En ce sens, la SNEQ appuie le mi- nistre responsable
de la réforme électorale et parlementaire, l'honorable Robert
Burns, et elle veut lui apporter son concours dans cette démarche
collective qui aura pour effet de nous doter d'une loi-cadre régissant
les consultations populaires.
Comme on peut le remarquer dans l'introduction du livre blanc sur la
consultation populaire, l'addition du référendum à nos
coutumes politiques aura comme avantage d'associer plus étroitement la
population à la prise des grandes décisions politiques. Le
référendum aura aussi comme immense bienfait de mettre un terme
à la tendance des politiciens modernes qui, pour camoufler leurs
lacunes, sont souvent portés à faire des
élections-référendums où tout l'enjeu se
résume à un seul thème et où on oublie tout le
reste.
Il est aussi rassurant de constater, dans ce projet de loi, le souci de
tenir compte des expériences des autres. Même si, finalement, on
privilégie l'expérience britannique, ce n'est pas sans avoir
minutieusement scruté les autres formules et c'est aussi parce que le
contexte politique dans lequel nous évoluons s'apparente beaucoup
à celui de la Grande-Bretagne. Il est certain que le livre blanc ne
répond pas à toutes nos questions, à toutes nos attentes.
C'est pourquoi, à travers ce mémoire, nous apporterons sur
différents points des commentaires et, à l'occasion, des
propositions de modification. Nous essaierons d'éviter
l'équivoque ou la confusion qui peut se dresser entre les
référendums en général et le
référendum auquel tout le monde pense. C'est un danger qui peut
amener beaucoup de difficultés au cours de ce débat.
Les référendums consultatifs. Dans le contexte
constitutionnel actuel, il serait difficile de donner aux
référendums un caractère législatif direct. De
toute façon, il ne nous semble pas important d'insister sur ce point. Il
nous paraît que la volonté populaire, exprimée clairement,
possède en soi une force si contraignante qu'un gouvernement ne serait
pas justifié d'ignorer l'avis de la majorité de la
population.
Concernant le droit d'initiative, à ce chapitre, la position du
ministre Robert Burns nous semble quelque peu ambiguë. En effet, tout en
souhaitant que le droit d'initiative soit aussi laissé au peuple, il
choisit cependant de le confier au gouvernement parce que, dit-il, une telle
tradition n'existe pas au Québec et parce que "l'initiative populaire
s'est toujours avérée plus conciliable avec les régimes
présidentiels qu'avec les régimes parlementaires".
La première objection pourrait, à notre avis, être
nuancée. Il est vrai qu'au Québec il n'y a pas de tradition
concernant les référendums et cela, par la force des choses.
Cependant, on retrouve dans la plupart des groupes ou des mouvements, par
exemple, les municipalités, les syndicats, les coopératives, les
sociétés nationales, etc., les mécanismes de participation
ou de contestation dont peuvent se servir les citoyens ou les membres à
des occasions particulières. Ainsi le droit d'initia-
tive de la base à l'échelle des organismes existe et est
utilisé depuis suffisamment longtemps pour penser que les
électeurs ne seraient pas pris au dépourvu s'ils avaient à
exercer ce droit à l'échelle du Québec.
En second lieu, s'il est vrai que le droit à l'initiative
populaire sied mieux au type de régime présidentiel, nous nous
demandons pourquoi l'actuel gouvernement semble peu pressé à
entreprendre un des points majeurs de son programme qui consistait justement
à doter le Québec d'un régime présidentiel. Selon
nous, cette opération devrait être un préalable à
bien d'autres réformes puisque plusieurs des changements importants
envisagés à notre système se heurtent aux contraintes du
régime actuel.
D'ailleurs, en juin 1977, lors d'une rencontre avec l'honorable Robert
Burns, concernant la réforme parlementaire et électorale, nous
avions insisté sur la nécessité d'une réforme en
profondeur, réforme qui devrait à notre avis commencer par le
changement de régime. Nous avions alors mis le ministre en garde contre
une série de réformettes qui ne finiront jamais par constituer en
soi une véritable réforme.
Quoi qu'il en soit, en dépit des arguments invoqués par le
ministre, nous sommes d'avis qu'il faudrait faire la distinction entre
référendum constitutionnel et référendum
législatif. Le gouvernement pourrait se réserver le droit
d'initiative pour les référendums constitutionnels et partager ce
droit avec le peuple pour les référendums législatifs.
De cette façon, le gouvernement aurait l'initiative pour
déclencher un référendum en vue d'un changement
constitutionnel; mais il serait tenu d'étudier à
l'Assemblée nationale toute demande faite par un certain pourcentage des
électeurs qui voudraient une consultation populaire sur une question
autre que constitutionnelle (par exemple, la peine de mort, la fluoration de
l'eau, l'avortement, etc.).
La formulation de la question. Il nous semble que le gouvernement
voudrait se dérober de ses responsabilités et partager avec toute
l'Assemblée nationale un échec éventuel lors de la tenue
d'un référendum. C'est ce qui ressort de la lecture de la
proposition contenue dans le livre blanc où l'on veut que
l'Assemblée soit appelée à discuter, amender et voter sur
une formulation de la question présentée par le gouvernement. Il
est évident que le gouvernement, étant majoritaire, n'accepterait
jamais de modification substantielle à sa formulation de la question,
pourtant, le parti au pouvoir pourrait toujours, au besoin, jouer sur
l'ambiguïté venant du fait que tout a été
accepté par l'Assemblée nationale.
Selon nous, lorsqu'un gouvernement prendra l'initiative de
déclencher un référendum, il devra poser lui-même la
question, après avoir consulté le plus de spécialistes sur
la matière soumise au référendum par le biais d'une
commission ad hoc. La question formulée serait alors
présentée à l'Assemblée nationale, à
l'instar du message inaugural ou du discours du budget. De la même
façon, il pourrait faire l'objet d'un débat d'une durée
maximale de 25 heures.
L'Assemblée nationale n'aurait pas à accepter ou à
rejeter la formulation proposée par le gouvernement puisque le
référendum est tenu sous son initiative. Il devra en prendre lui
seul les responsabilités tout comme lorsqu'il déclenche une
élection.
Dans le cas d'un référendum dû à l'initiative
populaire, la procédure devrait être différente.
L'Assemblée nationale, qui se serait prononcée sur
l'opportunité de la tenue du référendum, aurait aussi
à participer à la formulation de la question.
Un autre point nous apparaît important à souligner, celui
de la langue de rédaction de la question. Selon la SNEQ le
libellé de tout référendum devra être
rédigé dans la langue nationale ou suivant les dispositions de la
loi 101.
Les préalables au scrutin. Droit de vote. Nous sommes d'accord
pour que la campagne référendaire soit conduite le plus possible
selon les procédures d'une élection. Cependant, pour ce qui est
du droit de vote, nous demandons que la liste électorale permanente
comprenne aussi les Québécois travaillant ou étudiant
à l'extérieur du Québec ainsi que leurs électeurs
à charge, de sorte qu'au moment d'un référendum tous ceux
qui seront inscrits sur la liste électorale permanente aient le droit et
la possibilité de voter.
La campagne référendaire. La date du
référendum. Nous sommes d'avis que la date de la tenue de tout
référendum est un élément qui revêt une
grande importance et qu'il ne faudrait pas laisser à la
discrétion des politiciens. D'abord, il est toujours facile, pour les
stratèges politiques, de trouver une période où les forces
de l'Opposition sont désorganisées, un moment où une
partie de l'électorat qu'on voudrait éliminer est
"déplacée", par exemple le début et la fin de
l'année scolaire pour les étudiants-électeurs, ou la
période estivale. De plus, la question soumise au
référendum n'a pas le caractère d'une urgence nationale.
Ainsi, il n'y a pas nécessité de bousculer l'électorat
n'importe quand pour une consultation populaire. On peut prévoir assez
longtemps à l'avance l'utilisation de cet instrument de la
démocratie.
Pour ces raisons, nous croyons que la future loi devrait établir
une date fixe pour la tenue de tout référendum. Selon nous, le
meilleur moment de consulter le peuple serait en juin, période où
les étudiants peuvent être plus facilement rejoints à une
résidence précise, période aussi qui n'est pas encore
perturbée par les vacances d'été et où les groupes
qui participeraient éventuellement à un tel débat sont
facilement mobilisables. Donc, les référendums au Québec
devraient se tenir en juin, un dimanche, afin de les distinguer de tous les
autres scrutins. De plus, les bureaux de scrutin provisoires devraient
être ouverts la semaine précédente.
Les participants. L'expérience de la Grande-Bretagne qui
consistait à regrouper sous une même organisation les partisans
d'une option nous semble très acceptable parce qu'elle enlève
à cette forme de consultation l'aspect partisanerie
politique et qu'elle élimine les confusions que pourrait
engendrer une multiplicité d'organisations. Cependant, nous insistons
sur la nécessité de déterminer une date fixe dans
l'année pour le déclenchement de telles consultations afin de ne
prendre personne au dépourvu.
La campagne référendaire. Afin d'éviter qu'il y ait
disproportion entre les forces en présence au niveau de la
publicité, il faudra encadrer les media par des règlements, des
codes d'éthique. Il est important que chaque option profite des
mêmes possibilités sur le plan de la publicité et de
l'information; à cette fin, une loi sur les mouvements d'opinions
devrait être mise en place avant de recourir à cette forme de
consultation qu'est le référendum.
Néanmoins, il peut survenir des référendums dont
l'enjeu dépasserait nos frontières... Il faudra alors beaucoup de
vigilance afin d'éviter que nous viennent de l'extérieur des
interventions qui échapperaient à tout contrôle.
Le financement des campagnes. La Société nationale de
l'Est du Québec croit que tous les citoyens ont le droit de bien
connaître chacune des options proposées avant de faire un choix.
C'est pourquoi il nous apparaît essentiel d'assurer une
équité financière à chacune des options offertes au
moment de tout référendum. Pour permettre cette
équité financière, il faudrait interdire toute aide
pécuniaire venant des partis politiques. Le financement serait
assuré par l'Etat seul qui accorderait un montant pouvant atteindre
$0.50 par électeur à chacune des organisations. Evidemment, ces
mêmes organisations pourront toujours compter sur le
bénévolat de leurs membres pour ajouter à la participation
de l'Etat.
Le scrutin. A ce chapitre, il nous semble important que le
dépouillement du scrutin se fasse au niveau des circonscriptions
électorales. En effet, si, selon l'avis des experts, le résultat
du référendum ne met pas en jeu la survie du gouvernement, il
doit en être ainsi au niveau des députés. Il est même
hautement souhaitable que chaque député sache exactement ce que
pensent les électeurs de son comté relativement à une
question précise.
Voilà donc les principales recommandations qu'une étude
malheureusement trop brève, à cause des délais, nous a
permis de formuler à la lecture du livre blanc sur la consultation
populaire.
Consciente de son devoir de protéger les intérêts
politiques de ses quelque 30 000 membres, la SNEQ n'entend pas s'arrêter
là. Elle compte, au contraire, suivre de très près ce
débat et elle interviendra chaque fois qu'elle le jugera
nécessaire. De concert avec tous les éléments actifs du
Québec, la Société nationale de l'Est du Québec
tient à faire sa part pour que la nation québécoise
atteigne le plus rapidement et le plus correctement possible une plus grande
maturité politique.
Le Président (M. Paquette): Je remercie les
représentants de la Société nationale de l'Est du
Québec. Avant de cornmencer les questions, à la demande de l'un
des membres de la commission, on me permettra de relire les règles qui
régissent le fonctionnement de cette commission.
Cette commission élue se réunit à la suite d'un
mandat reçu de l'Assemblée nationale, mandat qui est d'entendre
les mémoires relativement au livre blanc sur la consultation populaire
au Québec. Son ministre responsable est M. Robert Burns, ministre d'Etat
à la réforme électorale et parlementaire.
Pour la bonne marche de nos travaux là, je parle au nom du
président de la commission, M. Claude Vaillancourt, qui est retenu
ailleurs ce matin j'aimerais insister auprès des membres de la
commission et des intervenants sur les points suivants: 1- Le livre blanc sur
la consultation populaire au Québec et les mécanismes qu'il
propose ne sont pas élaborés en fonction d'une consultation
populaire spécifique; 2-Cette commission ne doit en aucun cas être
considérée comme une tribune pour émettre des positions ou
des opinions sur des questions de fond ou sur des sujets pouvant
éventuellement faire l'objet d'une consultation populaire; 3- Les
discussions et les interventions des membres de la commission et des
intervenants devront porter essentiellement sur les mécanismes de
consultation populaire proposés par le livre blanc.
Voilà le mandat de cette commission parlementaire, tel que
confié par l'Assemblée nationale. Egalement, j'aimerais rappeler
aux intervenants et aux participants de la commission qu'aucune limite de temps
n'est imposée aux groupes ou individus pour la présentation de
leur mémoire et, également, que le premier intervenant de chaque
parti s'impose une limite de temps de 30 minutes qu'il peut utiliser en une
seule ou en plusieurs interventions; enfin, les autres représentants des
partis s'imposent collectivement une limite de temps répartie de la
façon suivante: Parti québécois, 30 minutes, Parti
libéral, 20 minutes et Union Nationale, 10 minutes. Voilà
l'entente qui est intervenue entre les partis, datée du 4 novembre 1977.
Je donne la parole au ministre d'Etat à la réforme parlementaire
et électorale.
M. Burns: Le député de Beauce-Sud a dix minutes
également.
Le Président (M. Paquette): Oui, M. le
député de Beauce-Sud.
M. Roy: Quant au partage du temps, je m'aperçois que vous
ne m'avez rien réservé.
M. Burns: Non, vous avez dix minutes également.
Le Président (M. Paquette): Le premier intervenant de
chaque parti on ne dit pas parti reconnu s'impose une limite de
temps de 30 minutes. J'espère que vous en aurez assez, M. le
député de Beauce-Sud.
M. Roy: Non, je m'excuse; j'avais compris seulement le dernier
bout...
M. Burns: Je me demandais si vous vouliez avoir simplement une
limite de dix minutes ou si vous vouliez prendre 30 minutes.
Le Président (M. Paquette): M. le ministre.
M. Burns: M. Lavertu j'adresse mes remarques à tous
vos collègues également que vous nous avez désignés
tout à l'heure je vous remercie très sincèrement,
au nom du parti ministériel, de nous avoir présenté ce
mémoire. C'est tout à fait dans ce ton, comme je l'ai
mentionné à quelques autres intervenants la semaine
dernière, que nous souhaitions recevoir à cette commission un
certain nombre de remarques, c'est-à-dire que vous vous êtes
forcés, vous vous êtes limités à parler, d'une part,
de l'utilité d'une loi-cadre, opinion que vous partagez avec ce qui est
exprimé dans le livre blanc, mais, aussi, vous vous en êtes tenus
à cette loi-cadre plutôt que de vous lancer dans un débat,
et c'est le voeu de la présidence, d'ailleurs, je pense, qui vient de
vous être exprimé par l'opinion que le président vient de
nous lire, relativement à un référendum en
particulier.
Je prends bonne note de votre acceptation d'une loi-cadre. Si je
comprends bien, vous êtes favorables à ce qu'une loi-cadre sur la
consultation populaire soit mise sur pied. Là-dessus, je partage
entièrement, évidemment, votre opinion. Je l'ai exprimée
dans le livre blanc.
Quant à certaines de vos recommandations particulières, il
y en a une, évidemment, que vous faites avec beaucoup d'humour et qui
rappelle cette rencontre que nous avions eue au cours du printemps dernier, je
crois, lorsque vous nous aviez soumis un mémoire au nom de la
Société nationale de l'Est du Québec. Je me rappelle
très bien que vous nous disiez alors clairement que vous ne vouliez pas
de réformette. Vous faites un rappel à cette suggestion en nous
disant que peut-être devrions-nous dès maintenant nous lancer dans
l'initiative populaire ou, si vous voulez, des référendums qui
pourraient peut-être être tenus à la suite d'une initiative
populaire et non seulement à l'initiative gouvernementale, comme nous le
suggérons.
Je dois vous dire, M. Lavertu, que nous nous sommes penchés
très sérieusement sur ce problème lorsque nous avons
rédigé le livre blanc. Je dois vous dire que, personnellement, je
trouve qu'éventuellement et le plus rapidement possible il faudrait se
rendre à cette réforme. Mais, comme on le dit dans le livre blanc
et comme vous ne manquez pas de le relever vous-même, nous avons un
certain nombre de craintes de partir complètement en l'air sur la
possibilité qu'il y ait des référendums à tout bout
de champ, à l'initiative populaire et à l'initiative
gouvernementale. Nous pensons qu'il serait beaucoup plus sage, tout en
admettant qu'il est désirable, éventuellement, d'avoir des
référendums à l'initiative populaire, qu'il serait
beaucoup plus sage de roder la machine référen- daire si
je peux utiliser l'expression avant d'ouvrir vraiment cette machine
complètement.
C'est la raison pour laquelle le gouvernement, dans son livre blanc, a
tendance à dire: Essayons d'abord de mettre en place tous les
mécanismes qui vont permettre une consultation populaire à la
demande du gouvernement, pour ensuite lui donner plus d'extension,
l'élargir à l'initiative populaire. Dans ce sens, il ne faudrait
pas interpréter dans le livre blanc la position gouvernementale comme
étant un refus de recourir à l'initiative populaire.
Pour ma part, je vous dirais que quant à moi je suis très
favorable à élargir éventuellement, et le plus rapidement
possible, le recours aux référendums à l'initiative
populaire également.
M. Lavertu: Je suis heureux de vous l'entendre dire, M. le
ministre. Nous voulions simplement signaler dans notre mémoire que, si
c'était le régime parlementaire actuel qui vous empêchait
d'aller vers l'initiative populaire, il était peut-être temps de
mettre en branle le processus de mise en place d'un régime
présidentiel, tel que prévu dans le programme de votre parti.
M. Burns: J'ai bien vu l'allusion, M. Lavertu, mais je dois vous
dire que ce n'est pas le régime actuel qui nous empêche de faire
cela. C'est une certaine prudence purement et simplement. C'est un nouveau
système auquel on est peu habitué au Québec, auquel le
régime actuel ne se prête que difficilement, il n'y a pas de
doute. Mais comme on sait que le régime actuel ne sera pas changé
dans les délais que nous nous sommes imposés du moins, je
ne le pense pas on se dit: Allons au plus pressé pour
répondre à un engagement électoral que nous avons pris, de
mettre sur pied, le plus rapidement possible, les mécanismes d'une
consultation populaire et en vue d'un certain référendum
on ne se le cache pas celui sur l'avenir politique du Québec.
C'est un engagement électoral. Mais on n'écarte pas la
possibilité que vous nous suggérez. Bien au contraire, d'ailleurs
je pense que le livre blanc laisse entendre que nous avons
considéré cela. J'irais même plus loin que cela, on
considère même, éventuellement, la possibilité,
lorsque cette machine sera en marche, d'aller aussi loin que d'utiliser la
consultation référendaire relativement au rappel des
députés. Cela est quelque chose qui va beaucoup plus loin encore.
Je n'insiste pas là-dessus, je ne vous dis pas que cela va se faire dans
un an, dans six mois ou dans deux ans ou dans quatre ans, mais ce sont tous des
éléments qui ont été pris en considération,
lorsque nous avons rédigé le livre blanc. Mais, je dirais, par un
certain conservatisme normal, lorsqu'on change nos institutions, lorsqu'on
amène de nouvelles institutions, il est essentiel d'y aller
prudemment.
M. Lavertu: La chose que nous ne faisions pas ressortir
peut-être suffisamment dans notre mémoire, c'est que l'institution
n'est peut-être pas aussi nouvelle qu'on peut le penser au Québec
et
que cette habitude de l'initiative populaire existe dans une multitude
d'organismes où les gens peuvent contester.
M. Burns: J'ai pris bonne note des exemples que vous prenez au
niveau municipal, au niveau syndical, entre autres; il n'y a pas de doute que
ces habitudes existent, mais au niveau national québécois, je
pense qu'on est peu habitué à cela. Il y a même beaucoup de
gens qui sont réticents à la formule parce qu'ils se disent: On
se lance dans quelque chose de nouveau au niveau de l'ensemble du
Québec. Comme tel, c'est ce qui nous a indiqué qu'il serait
normal, dans un premier temps, d'avoir plus de précautions à
l'égard de la mise sur pied de ce système et des
mécanismes que cela exige. Tout cela pour vous dire que je prends bonne
note de votre suggestion; elle n'est pas tombée dans l'oreille d'un
sourd. D'autre part, elle est partagée fondamentalement par le ministre
responsable actuellement.
Vous nous faites également des recommandations relativement
à la formulation de la question. Là-dessus, j'aimerais avoir des
précisions de votre part. Je comprends que vous nous dites que c'est la
responsabilité du gouvernement de formuler la question et vous ne voulez
pas que le gouvernement se défile devant ses responsabilités;
d'autre part, vous acceptez votre recommandation est un peu ambiguë
dans mon esprit qu'il y ait un débat à l'Assemblée
nationale d'une durée de 25 heures. Je me demande en quoi c'est
conciliable que le gouvernement arrive avec une question qui, à toutes
fins pratiques, ne serait pas amendable même s'il y a un débat de
25 heures. Est-ce bien cela que vous voulez nous dire?
M. Lavertu: Oui, ce serait un peu une période
d'information des membres de l'Assemblée nationale, les premiers
intéressés, concernant cette question. Le débat de 25
heures, on le voit de la même façon que le débat de 25
heures sur le message inaugural ou le discours du budget.
M. Burns: Mais n'oubliez pas que sur le message inaugural ou sur
le discours du budget il peut y avoir des votes de blâme. Si le
gouvernement les perdait, dans le système de responsabilité
parlementaire que nous vivons, il est placé vis-à-vis d'une
démission, purement et simplement. C'est pour cela que je me dis: On a
fait le parallèle, relativement aux 25 heures, avec ces débats,
celui sur le message inaugural, celui également sur le discours du
budget, mais on se dit que même si, au départ, on croit que
l'initiative de la formulation de la question doit venir du Conseil des
ministres du gouvernement, quoi il reste quand même qu'on
reconnaît à l'Opposition le droit de formuler des suggestions
d'amendement. C'est dans ce sens qu'on croyait que c'était beaucoup plus
normal et beaucoup plus dans le cadre des deux autres débats auxquels on
fait référence actuellement.
M. Lavertu: On voyait cela aussi un peu comme une
élection, comme le déclenchement d'une élection; que le
parti au pouvoir décide de déclencher une élection
n'importe quand, c'est une décision sur laquelle il n'a de compte
à rendre à personne.
M. Burns: Quant au déclenchement, quant à
l'initiative elle-même, je partage vos vues. Quant à la
formulation de la question, qu'elle provienne du gouvernement, je partage
également votre point de vue, comme, d'ailleurs, n'importe quel projet
de loi à caractère public qui implique des dépenses pour
l'Etat vient d'une initiative gouvernementale, mais, comme pour n'importe quel
projet de loi, on pense qu'en cours de route, dans le processus de discussion
ou dans le débat, l'Opposition ou même des représentants
ministériels pourraient suggérer des modifications à la
question telle que présentée, comme on le fait, par exemple,
à l'égard d'un projet de loi.
C'est un peu le point de vue qu'il y a derrière cela. Est-ce
qu'on se comprend bien dans le sens qu'il y a un parallèle qui pourrait
être fait entre l'utilisation du débat, limité, d'accord,
à 25 heures, pour faire modifier la question qui est
suggérée par le gouvernement, si nécessaire?
M. Desrosiers (Jean-Louis): Je me demande, M. le ministre, si,
pour résoudre cette question, on n'a pas les mêmes
difficultés présentement que celles que nous avons eues quand
nous en avons discuté en comité. On s'est dit: L'objectif est de
discuter d'une loi qui aurait pour but de permettre un nouvel usage, un nouveau
moyen démocratique de consultation. On a évité de plein
gré de parler d'une consultation constitutionnelle et cela peut changer
les observations qu'on ferait subsé-quemment.
J'ai cru comprendre tantôt que le ministre Burns nous a
confirmé publiquement que, le droit d'initiative, était
temporairement réservé à la partie gouvernementale pour
pouvoir passer plus tard, dans un deuxième temps, à l'initiative
populaire. Dans notre recommandation, nous avons été très
clairs; nous pensons que tout ce qui regarde le domaine constitutionnel devrait
faire l'objet de l'initiative gouvernementale, mais, que, pour tout ce qui
regarde le domaine législatif, le gouvernement devrait accepter
l'initiative populaire conjointement.
Dans le cadre de l'initiative populaire conjointement avec le
gouvernement, il nous apparaît clair qu'on ne devrait pas s'assujettir
à des projets de loi conventionnels. On aimerait, parce que, dans notre
esprit, le référendum, ce n'est pas une course contre la montre,
que cela soit fait à des dates fixes, dans le mois de juin. Tout le
monde le sait à l'avance. Cela permet à tout le monde de
s'organiser en temps et lieu et, à l'occasion d'un message inaugural, le
gouvernement annonce qu'il tiendra, au mois de juin d'une autre année,
un référendum sur tel sujet. On se demande pourquoi il faudrait
faire sanctionner par un vote du Parlement une chose de ce genre-là.
C'est l'esprit dans lequel, nous, on élaborait notre pensée.
M. Burns: Je comprends très bien votre sug-
gestion et j'en prends note. Ce sont justement toutes ces idées
qui nous sont soumises en commission parlementaire qui vont être
réexaminées et nous aider à préparer le projet de
loi. Là, je comprends très bien votre position. Je vous remercie.
Je passe le plus rapidement possible, parce que je sais que nous avons un
horaire très chargé aujourd'hui. Ce n'est pas par manque
d'intérêt pour votre mémoire, mais parce que je veux aller
aux points qui m'apparaissent essentiels.
Une de vos suggestions voudrait que les Québécois qui
travaillent ou qui étudient à l'extérieur du Québec
puissent éventuellement avoir le droit de vote. Je pense que ce serait
relativement facile d'application dans des pays où déjà il
y a une délégation générale du Québec. Je
pense, par exemple, à la France, à l'Angleterre, à
l'Italie, à Bruxelles, à la Belgique et à tous les autres
pays où nous avons des délégations
générales. Là, déjà, nous avons même,
jusqu'à un certain point, une connaissance, sinon un contrôle,
parce que je ne pense pas qu'on ait un contrôle.
On a au moins une connaissance de la présence de la plupart des
ressortissants québécois qui sont soit à Londres, soit
à Paris ou à Bruxelles ou à Milan ou à Rome. Je me
demande, dans les faits, s'il serait facile, étant donné que nous
n'avons pas comme telles des ambassades, et comme telles des
délégations générales un peu partout à
travers le monde, s'il serait facile d'appliquer cela lors d'un
référendum. C'est la grande question que nous nous posons
actuellement. Remarquez que je ne suis pas réfractaire à cette
suggestion que vous avez faite. Il faudrait pratiquement, dans les faits,
demander à toutes les ambassades canadiennes de nous donner un coup de
main quant à la mise en application de cela. Je ne sais pas si c'est
souhaitable. Je pose le problème comme tel parce que si on le fait pour
les gens qui sont à Haïti, pour les gens qui sont à Londres,
à Bruxelles, etc., ou à Dusseldorf, pourquoi ne le ferions-nous
pas pour les gens qui sont à Oslo? C'est la question pratique qui se
pose.
Encore, à Toronto, il y a une délégation, mais
à Vancouver il n'y en a pas. C'est la question pratique qui se pose.
Comme on n'a pas au Québec la tradition de faire voter, lors des
élections générales, les personnes qui sont à
l'extérieur du Québec, cela nous pose de sérieux
problèmes parce qu'on n'a jamais été habitué
à faire cela. J'en ai, personnellement, parlé avec le directeur
général des élections du Québec, M. le juge Drouin,
et évidemment, il pense que ce ne serait absolument pas faisable en
pratique, sans avoir cette généralisation du droit de vote des
ressortissants québécois à l'étranger.
M. Lavertu: Nous avons vu ce problème aussi, lors de nos
délibérations sur le livre blanc, mais dans l'optique où
ce livre blanc ou la loi sur les référendums s'appliquerait, non
pas simplement pour un seul référendum, mais pour l'ensemble des
référendums que le Québec pourrait tenir, et dans
l'éventualité où le Québec pourrait devenir un
pays, je pense que le problème d'avoir des am- bassades ou des
délégations un peu partout, un peu plus tard, se poserait de
façon différente.
M. Burns: Oui, le Québec ayant des ambassades de
façon générale, cela simplifierait
énormément les choses, mais au stade actuel, je pense que ce
serait difficilement praticable. C'est la seule remarque que je faisais, tout
en vous disant que je considère que votre suggestion vient d'un bon
motif, c'est-à-dire en permettant à l'ensemble des
Québécois de voter, surtout sur des problèmes
constitutionnels qui les affecteront, selon la décision qui sera prise
et ce qui pourra s'ensuivre.
M. Desrosiers: Je remarque, M. le ministre, qu'on dispose, en
commission parlementaire, beaucoup plus facilement de cet article que, nous, on
l'a fait lorsqu'on a siégé, parce qu'il nous apparaissait, au
point de départ, que le droit de vote, c'était une question
fondamentale. Avant de parler d'ambassades à l'étranger, on parle
de droit de vote et de qualité d'électeurs. On veut que ce soit
retenu à la commission parlementaire. On s'est posé la question:
on fait voter qui, on fait voter de quel âge à quel âge, on
fait voter où? Il nous apparaît comme principe de base et
fondamental que tout électeur québécois qui a sa
qualité d'électeur devrait avoir accès au vote dans un
référendum. C'est le point important.
Tant qu'on n'a pas d'ambassades parce que le Québec n'est pas un
pays souverain, on est quand même à l'intérieur de la
confédération canadienne, qu'on emploie les mots qu'on veut, et
il y a des ambassades; qu'on s'en serve, Bon Dieu! Je pense que ce qui prime
d'abord, premièrement, c'est le droit de vote.
M. Burns: Le problème est beaucoup plus compliqué
que cela.
M. Desrosiers: Vous parlez de l'application, nous parlons d'un
principe.
M. Burns: Oui, d'accord.
M. Desrosiers: La commission parlementaire nous dit que les gens
qui sont Québécois pourront voter à l'occasion d'un
référendum; cela nous plaît.
M. Burns: Actuellement, on est obligé de prendre le stade
actuel de la législation. Actuellement, cela n'existe pas, la
citoyenneté québécoise. Il faut bien se le dire. C'est le
problème. Un passeport québécois n'existe pas. Ce qui
permet, par exemple, lors d'élections fédérales, au
gouvernement fédéral de faire voter les soldats qui sont en poste
à l'extérieur, les représentants d'ambassade, les
employés d'ambassade.
C'est le fait qu'ils ont une citoyenneté canadienne avec un
passeport. Donc, il y a contrôle. Qu'est-ce qui m'assure, par exemple,
que M. Romuald Saint-Amours qui demeure actuellement à Moncton est un
ressortissant québécois et qu'il a la citoyenneté
québécoise? C'est cela la difficulté
qui se pose parce que la Loi électorale exige actuellement une
résidence minimum d'un an au Québec pour avoir le droit de vote.
C'est le seul contrôle que nous puissions avoir. D'une part, que ce soit
un citoyen canadien et cela se vérifie
deuxièmement, que ce M. Romuald Saint-Amours, demeurant à
Moncton, ait déménagé au Québec depuis un an ou
quitté le Québec depuis X temps. A quel titre se
prétendra-t-il Québécois à ce moment?
M. Grenier: ... s'il est de Moncton, oui.
M. Burns: J'imagine oui. C'est cela la difficulté qui se
pose pour nous. Tant et aussi longtemps qu'on ne peut pas vérifier la
citoyenneté québécoise, il devient très difficile
de faire voter des Québécois à l'étranger.
M. Desrosiers: Pourrait-on comprendre, M. le ministre, que vous
nous affirmez et vous allez le redire après moi si c'est bien
votre pensée que ce que nous voulons vendre par ce paragraphe
c'est le droit de vote à tout Québécois quel que soit
l'endroit où il est au moment où on fait un
référendum? C'est un principe sur lequel on aimerait entendre
votre opinion. Je ne l'ai pas entendue. J'ai entendu parler du mécanisme
difficile.
M. Burns: Evidemment on discute d'un livre blanc. Mais à
certains égards, étant donné qu'on a laissé
ouvertes certaines positions, par exemple le décompte du scrutin, selon
l'expression que je donnais la semaine dernière, c'est un livre blanc
avec des coins verts qui laisse une ouverture à des modifications. Au
moment où on se parle, j'aurais très peu tendance à
accepter votre recommandation là-dessus pour la raison que je vais vous
mentionner. Je ne me sentirais pas en mesure de recommander au gouvernement
actuel de faire cela parce que je ne serais pas assuré du fait suivant.
Par exemple, prenons le cas de M. Armand Steinberg qui demeure en Floride ou
qui est actuellement étudiant à Paris et qui demeure là
depuis trois ans; on ne sait pas s'il va revenir éventuellement au
Québec. C'est la difficulté qui me permet de vous dire que, tout
en reconnaissant le bien-fondé et le bon motif qu'il y a derrière
votre recommandation, je la trouve difficilement applicable.
Je vais également vous poser des questions sur un autre sujet qui
apparaît dans votre mémoire relativement à
l'équité financière entre les diverses options. Vous
suggérez qu'elle soit assurée en interdisant aux partis toute
aide au comité et en versant, à même les fonds publics, la
somme de $0.50 par électeur. Est-ce que cela va jusqu'à dire que
même les individus citoyens électeurs ne devraient pas fournir
à une option ou à l'une ou l'autre des options s'il y en a
plusieurs?
M. Lavertu: L'optique de cette recommandation, c'est
d'éviter des déséquilibres trop grands entre deux options,
par exemple, lors d'un même référendum.
M. Burns: Vous ne croyez pas, par exemple, que le Parti
québécois, favorisant d'une façon générale
une option, ne puisse pas, comme parti, verser à cette option un montant
qu'il aurait à sa disposition? Ou encore le Parti libéral,
favorisant telle autre option, ne puisse pas arriver et dire: J'ai tel montant
disponible? Quitte à y mettre un maximum, vous ne croyez pas qu'un parti
puisse directement fournir à telle ou telle option?
M. Desrosiers: La réponse est non. M. Burns: Vous
n'y croyez pas.
M. Desrosiers: La réponse est non. Mais, encore une fois,
parce qu'on ne mélange pas et on répète encore ce qu'on
vous a dit: Ce dont on parle, c'est une loi pour des référendums.
Je ne vois pas si on adoptait une loi, éventuellement, si on
avait besoin d'une loi de ce genre, sur l'avortement et qu'on avait un
référendum à faire le monde se diviser ainsi:
moitié hommes, moitié femmes. J'ai l'impression que cela pourrait
se diviser de toutes sortes de manières, et je ne vois pas ce que les
partis politiques viennent faire là-dedans; ce n'est même pas
l'histoire des hommes, c'est l'histoire des femmes. Cela, c'est une opinion
personnelle.
M. Burns: C'est sûr que si jamais on tient un
référendum sur l'avortement, on va nous suggérer que
seulement les femmes aient le droit de vote.
M. Desrosiers: Ce n'est peut-être pas bête! M.
Burns: Ce n'est peut-être pas bête.
M. Desrosiers: Mais à partir de l'idée qu'on aurait
des référendums sur des questions qui prendraient naissance...
Vous m'avez dit tantôt que, plus tard, l'initiative pourrait être
conjuguée avec celle du gouvernement. Toujours dans l'idée que le
droit d'initiative est conjugué avec celui du gouvernement, dans des
questions qui auraient un caractère législatif, pour des
référendums à être tenus toujours à une date
fixe dans le mois de juin, qui ont été prévus par un
message inaugural sur lequel vous avez fait une commission ad hoc, dont vous
avez discuté, apparemment, pendant 25 heures, nous disons: C'est clair,
on manque le bateau si on ne donne pas l'égalité des chances,
$0.50 par électeur pour les deux options qui sont opposées, oui
et non.
M. Burns: Ce qui donnerait, actuellement, à peu
près $2 millions par option. D'accord. Je voulais simplement faire
préciser votre point de vue là-dessus. Je ne me prononce pas;
c'est justement là une des choses auxquelles on va songer. On avait
pensé, au départ, utiliser purement et simplement les
règles du projet de loi no 2, Loi régissant le financement des
partis politiques, en l'appliquant à la consultation
référendaire, mais je pense que votre position là-dessus
est très précise.
M. Lavertu: Je voudrais vous faire remarquer que c'était
un maximum de $0.50 par électeur, et que le bénévolat est
toujours permis à l'intérieur de cela.
M. Burns: Oui, d'accord, j'ai bien pris note de cela.
M. Lavertu: C'est quand même l'aspect de
déséquilibre financier dans la défense de l'une ou l'autre
des options lors d'un référendum qu'on voulait éviter avec
cela.
M. Burns: En tout cas, je vous mentionne également
et je vais terminer avec cela que je trouve intéressante votre
suggestion relative à la tenue à date fixe des
référendums. Je vous avoue bien humblement qu'on ne s'est pas
penché là-dessus. D'ailleurs, il semble que la
Société nationale de l'Est du Québec nous fasse toujours
des suggestions qui nous surprennent souvent mais que je trouve comme la
dernière fois qu'on s'est rencontré très positives
et très intéressantes.
M. Lavertu: Je pense que c'est important chez nous, cela, M. le
ministre.
M. Burns: Oui.
M. Lavertu: Entre autres, on a vu d'autres mémoires qui
recommandaient octobre. Or, en octobre, pour nous autres, déjà
les tempêtes de neige sont commencées, souvent.
M. Burns: Effectivement, oui. Je pense que vous n'êtes pas
le seul groupe qui nous suggère cela, mais je pense que, lors de
l'occasion précédente, j'avais dit que je voyais difficile la
consultation référendaire en dehors de périodes qui
pourraient se résumer de mars à juin, ou de septembre à
novembre. Vous insistez sur le fait que même octobre pose des
problèmes, et je considère qu'en certains endroits, au
Québec, cela pose des problèmes. Si on veut avoir la plus large
consultation possible, c'est bien sûr qu'il ne faut pas faire cela durant
la période estivale, durant la période où tout le monde
est parti à son chalet, ou est parti en vacances ailleurs, ou quoi que
ce soit sur cela, il n'y a pas de doute ni, non plus, en
hiver.
Je retiens votre suggestion. Dans votre cas, pourquoi nous
suggérez-vous plus particulièrement un dimanche?
M. Roy (Bruno): C'était pour permettre vraiment que les
gens puissent user de leur droit en toute liberté parce qu'il n'est pas
sûr, en dépit des lois existantes, que les employeurs favorisent
toujours la possibilité du vote. En le plaçant un jour
férié où tout le monde est en congé la
grande majorité des gens chacun peut vraiment disposer de sa
liberté pour exercer son droit. C'est une des raisons pour
lesquelles...
M. Burns: Mais si les règles applicables aux
élections générales, par exemple, l'obligation pour
l'employeur de donner trois heures pour aller vo- ter s'appliquaient à
une consultation référendaire, ne croyez-vous pas que cela
pourrait être tenu un jour de semaine?
M. Desrosiers: II y avait un autre argument, aussi, qu'on peut
servir et qui est le suivant: quant aux endroits de scrutin, nous, on
prétendait qu'on utiliserait les écoles, alors, on ne
dérange pas les enfants. C'est ce genre de pensée qui nous
amenait à penser plutôt au dimanche parce qu'on dérange le
moins de monde possible.
Vous apportez un argument d'ajustement législatif à partir
d'une législation qui nous gouverne présentement. J'ai envie de
vous répondre ce que Napoléon Bonaparte disait: Faites
fléchir le règlement au bénéfice du bon sens. Si
cela coûte $2 millions et qu'on vous économise de l'argent dans
les écoles, arrangez-vous avec l'autre problème.
M. Burns: Quant au dépouillement du scrutin au niveau des
circonscriptions, je peux vous dire que je prends également très
bonne note de votre suggestion. Je ne suis pas au stade où je puis vous
dire que je suis entièrement d'accord avec cela, comme je ne peux pas
dire que je suis en désaccord avec cela. Ce point est probablement un
des points grands ouverts dans le livre blanc. Nous allons être
obligés de nous pencher sur cette question à la lumière de
toutes les suggestions qui nous sont faites. Mais je suis content que vous
m'ayez fait cette suggestion et surtout de la façon précise dont
vous le faites.
M. Lavertu: II nous apparaissait important, M. le ministre, de
pouvoir analyser les résultats de n'importe quel
référendum. A ce moment, un dépouillement par comté
facilitait cette analyse. Il y a très peu d'enseignements à tirer
de résultats recueillis d'un dépouillement à
l'échelle nationale.
M. Burns: D'accord. Il ne me reste que l'agréable devoir
de vous remercier pour ce très bon mémoire. On voit que vous vous
êtes penchés sur les problèmes essentiels qui sont
soulevés par le livre blanc. Je pense que, dès le mois de
décembre, vous verrez jusqu'à quel point on a pu suivre ou ne pas
suivre vos recommandations, lorsque le projet de loi sera déposé.
Je vous remercie justement de cet effort très franc et très
honnête de votre part de nous dire ce que vous pensez du livre blanc.
Comme je le disais au début, c'est exactement le genre de mémoire
qu'on espérait recevoir tout au cours de notre consultation,
c'est-à-dire des gens qui nous disaient ce qu'ils en pensaient
fondamentalement, sans avoir derrière la tête toutes sortes
d'idées relativement à un référendum en
particulier, même si je connais vos intérêts relativement
à un référendum en particulier.
M. Grenier: Chut!
M. Burns: Je n'ai pas dit lequel. M. Lavertu, M. Dubé, M.
Pineau, M. Otis, M. Desrosiers, Mlle Mi-chaud et M. Roy, je tiens à vous
dire un grand
merci au nom du parti ministériel, ce qui ne veut pas dire que
d'autres de mes collègues n'auront pas des questions à vous poser
un peu plus tard au cours de cette séance.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):
Merci, M. le ministre.
M. le député de Mont-Royal.
M. Ciaccia: M. le Président, au nom de l'Opposition
officielle, je voudrais souhaiter la bienvenue à nos invités et
les remercier aussi pour leur mémoire qui, sans doute, rencontre les
directives du président et qui répond au livre blanc du ministre
en ce qui concerne la consultation populaire en général,
plutôt que de s'arrêter seulement sur un sujet. J'ai trouvé
très intéressant le commentaire d'un des invités à
savoir que, dans ces discussions avec le ministre, la première
étape serait d'avoir une loi sur le référendum et, en
second lieu, il y aurait la possibilité ou le droit d'avoir un
référendum qui pourrait être initié par la
population. Est-ce qu'il y a une raison pour laquelle on ne fait pas tout en
même temps et on ne donne pas ce droit?
M. Burns: Comme je le disais tout à l'heure à M.
Lavertu, je ne suis pas, comme ministre responsable de ce dossier, contre ce
recours à l'initiative populaire, sauf que c'est par une espèce
de prudence normale...
M. Ciaccia: Des changements, un petit peu à la fois.
M. Burns: ... qu'au début on va essayer de mettre sur pied
les mécanismes en vue d'une consultation populaire, quitte à ce
qu'on songe le plus rapidement possible à étendre ce droit
à l'initiative populaire elle-même.
M. Ciaccia: Quand vous approuvez une loi-cadre plutôt
qu'une loi spécifique, est-ce que vous ne voyez pas la
possibilité, par exemple, que certains référendums soient
plus importants que d'autres? Peut-être, pour certains
référendums, il pourrait y avoir différentes
règles, différentes contraintes. Je m'arrête à votre
suggestion, par exemple, de faire voter tous les Québécois
à un référendum.
Je présume que cette suggestion serait plus importante sur un
référendum en particulier, soit le référendum sur
l'avenir constitutionnel. Ce ne serait pas important de faire voter tous les
Québécois s'il y avait un référendum sur un
élément moins important, sur une question nucléaire ou une
autre question.
Ne voyez-vous pas que, pour un certain référendum,
peut-être que la loi devrait être spécifique, parce que
c'est plus important que d'autres questions?
M. Lavertu: La raison pour laquelle nous accordons notre appui
à une loi-cadre plutôt qu'à une loi portant sur un seul
référendum, c'est pour éviter d'avoir à refaire une
loi à chaque fois qu'il y aurait un référendum. Il y
aurait peut-être aussi des distinctions à faire, dans le cadre de
cette loi, entre des référendums constitutionnels et des
référendums législatifs. C'est bien sûr que les deux
ne seraient probablement pas traités de la même façon qu'en
Suisse où il y a beaucoup de référendums. Il faut
l'initiative populaire, lors des référendums législatifs,
où on demande que 30 000 personnes signent une requête, alors que
pour ces référendums constitutionnels, on demande 50 000
personnes. Ce sont des variations qui peuvent fort bien exister à
l'intérieur d'une loi-cadre, mais dans cette loi-cadre s'il est pour
être question, d'une part, de référendums constitutionnels
et, d'autre part, de référendums législatifs. A notre avis
aussi, si l'Etat décide de faire des référendums, je pense
que tous ces référendums sont importants.
M. Ciaccia: Si je comprends bien votre position, vous
reconnaissez que, s'il y a un référendum spécifique, par
exemple, sur la constitution, il serait peut-être nécessaire
d'avoir différentes règles, d'élaborer plus en vue de
l'importance de cette question plutôt que s'il y avait un
référendum sur une autre question. Si je comprends bien, dans
votre loi-cadre, vous verriez certaines restrictions ou certaines règles
spécifiques sur ce genre de question.
M. Lavertu: II serait possible d'avoir des régies
spécifiques s'appliquant aux référendums
constitutionnels.
M. Ciaccia: Maintenant, quand vous parlez de
référendums...
M. Desrosiers: Me serait-il permis d'ajouter un commentaire sur
votre question, s'il vous plaît?
M. Ciaccia: Oui.
M. Desrosiers: II me semble que vous nous entraînez
à dire une chose que moi je n'ai pas envie de dire. Je vous
spécifie mon point de vue. D'une part, lorsqu'on a fait cette
discussion, on a parlé du droit de vote, à qui il appartenait,
sans penser à la constitution, en disant que ce qu'on nous propose comme
réflexion, c'est une loi sur les référendums. On disait:
L'idéal, c'est que tout le monde vote. Le ministre nous a
répondu, par Jeux fois parce que cela m'a pris du temps à
comprendre, qu'au niveau de l'application, c'était de nature impossible
même si, en principe, idéalement, cela aurait de l'allure. Au
niveau de la distinction et on ne nous a pas demandé de
réfléchir sur la constitution vous nous apporterez un
argument nouveau en disant: Si on avait un référendum
constitutionnel. La seule remarque qu'on a faite était la suivante:
C'est réservé au gouvernement de faire un
référendum de ce genre. Vous avez posé des questions qui
allaient plus loin que notre propre réflexion. Nous, on s'en est tenu
aux référendums à caractère législatif
sachant bien que, dans les deux cas, il n'y a aucune procédure juridique
qui ferait qu'un gouvernement serait
obligé de suivre l'un ou l'autre et l'un et l'autre. C'est
simplement à caractère consultatif. Il y aurait une force
peut-être morale contraignante pour un gouvernement. Et si la force
morale est contraignante, on a demandé qu'au niveau du message
inaugural, ce soit annoncé, que ce soit à date fixe. C'est le
mécanisme qu'on prévoyait. On voulait que celui qui annonce qu'on
va tenir un référendum législatif en porte l'odieux ou le
bonheur, selon le cas ou l'autre. C'est dans ce sens qu'on faisait notre
argumentation.
M. Ciaccia: Ce n'est pas mon intention de vous mettre en
contradiction. La seule chose que je voulais savoir c'est si vous pensiez qu'il
y avait certaines questions qui seraient plus importantes que d'autres, dans un
référendum, et qu'il devrait avoir certaines règles
spécifiques. Dans ce cas, la question du droit de vote de tous les
Québécois deviendrait encore plus importante que dans d'autres
questions. Je sais que cela n'a pas été précisé
dans votre mémoire, mais je crois que le début d'une discussion
est inclus et je voulais seulement avoir votre point de vue sur cet aspect de
la question.
Maintenant, quand vous parlez de référendums en
général nous n'avons pas le régime
présidentiel, nous avons le régime parlementaire
voyez-vous un danger, si on a une loi générale des
référendums, qu'à chaque fois que le gouvernement voudra
poser une question il pourra utiliser cette loi? Ne voyez-vous pas le danger
qu'un gouvernement pourrait se dégager un peu de sa
responsabilité? Dans notre régime parlementaire, le gouvernement
est responsable pour ses actions à l'Assemblée nationale et il
doit y répondre pour ses actions au temps des élections. Il y en
a qui soulignent ce danger que ce serait une façon facile pour un
gouvernement je ne parle pas seulement de la question constitutionnelle,
je parle d'autres questions de dire: Je ne prends pas de
décision, on va demander au peuple. Ne voyez-vous pas un peu ce danger
d'avoir toujours recours au référendum?
M. Lavertu: II peut y avoir des occasions où ce n'est pas
considéré comme un abus de retourner au peuple pour lui demander
de se prononcer sur une question sur laquelle il n'avait pas eu l'occasion de
se prononcer lors d'élections. Je ne sais pas s'il y en a qui voudraient
préciser ce point.
M. Ciaccia: Par exemple, à la page 4 de votre
mémoire, vous parlez d'un référendum et, en parlant du
gouvernement, vous dites: II devrait en prendre, lui seul, les
responsabilités comme lorsqu'il déclenche une élection.
Voulez-vous dire par cela que si le gouvernement perd le
référendum il devrait démissionner? Dans une
élection, c'est ce qui arrive. Si on la perd, le gouvernement
démissionne. Iriez-vous si loin que cela?
M. Lavertu: Dans ce sens-là, on fait une très
grande différence. La différence existe aussi dans les faits
entre une élection et un référendum; il est bien
évident qu'un référendum ne met pas en jeu le siège
des ministres et des députés.
M. Ciaccia: D'après vous...
M. Lavertu: C'est contre l'esprit même d'un
référendum de mettre en jeu des individus. Ce sont des
idées qui sont proposées à l'électorat au moment
d'un référendum.
M. Ciaccia: Alors, cela n'impliquera pas une démission du
gouvernement, mais est-ce que le gouvernement devrait s'engager, même
avant le référendum, à être lié par le
résultat d'une consultation populaire? Comme vous le soulignez, cela ne
peut pas être d'un caractère décisif, d'après notre
loi constitutionnelle, mais vous dites, à la page 2, que la
volonté populaire, exprimée clairement, possède en soi une
force si contraignante qu'un gouvernement ne serait pas justifié
d'ignorer l'avis de la majorité de la population.
D'après vous, le gouvernement devrait-il être lié
par la décision d'un référendum?
M. Lavertu: Par le fait qu'une volonté populaire
exprimée clairement possède en soi une force contraignante, le
gouvernement n'a pas à se lier dans la loi et il n'a pas à dire,
par exemple, si 50% de l'électorat votent en faveur, qu'on doit
nécessairement faire une loi là-dessus. Les résultats
peuvent être interprétés; dans certains cas, 50% peuvent
être suffisants, dans d'autres cas, d'autres pourcentages peuvent
être plus valables. C'est dans ce sens que nous avons recommandé
le décompte par comté; les résultats pourront être
analysés par comté et pourront permettre de dégager un peu
plus le sens du vote.
M. Ciaccia: Mais, sans l'inclure dans la loi, est-ce que le
gouvernement devrait s'engager à être lié par le vote, par
la décision?
M. Pineau (Jean): Si on tient compte de l'exemple de la
dernière élection, un parti s'est présenté avec un
programme qui était très clair; il proposait effectivement le
référendum. Advenant l'éventualité que le
référendum soit battu, je ne considère pas personnellement
que le parti se sente pour autant battu. Cela répond en partie à
la première question que vous posiez tout à l'heure.
Quant à se sentir lié par le résultat du
référendum, il y a, ce qu'on pourrait peut-être appeler une
liaison morale quand même, mais jusqu'à un prochain scrutin
électoral. Un parti qui véhicule une idéologie propose
cette idéologie à chacun des scrutins. On a des élections
à tous les quatre ans, on peut toujours changer de gouvernement.
M. Ciaccia: Je ne parle pas d'élections là, je
parle de référendum. Supposons qu'il y a un
référendum...
M. Pineau: Parlons de référendum, M. le
représentant de l'Opposition. Je m'excuse, je ne connais pas votre nom.
Maintenant, advenant l'éventualité...
M. Ciaccia: Député de Mont-Royal.
M. Pineau: ... qu'un référendum soit battu, je
considère qu'un parti peut très bien se représenter,
véhiculer la même idéologie à une élection
qui suivra et, à ce moment-là, en son âme et conscience,
présenter le même sujet comme objet d'un
référendum.
M. Ciaccia: Excusez-moi, si je comprends bien, à une autre
élection, naturellement, on a tous la liberté de nos
pensées politiques, la liberté de notre programme, ce n'est pas
ce que je demande. Je demande si, à la suite d'un
référendum, par exemple si le référendum
était en faveur d'une certaine position, vous pensez que le gouvernement
doit suivre la volonté du peuple, à la suite de ce
référendum. Je ne parle pas de la question d'une élection
subséquente, je parle des actions du gouvernement entre ce
référendum et les prochaines élections.
M. Lavertu: Ce que le gouvernement nous propose ici, c'est une
loi sur la consultation. Il est bien sûr qu'il s'en va, par un processus
comme celui-là, chercher l'opinion de la population, mais cette opinion
peut toujours être interprétée.
M. Ciaccia: Alors, quand vous dites que cette opinion peut
être interprétée, est-ce que cela veut dire que la question
qui serait posée, que ce soit sur n'importe quel sujet, ne devrait pas
être claire et précise? Est-ce que vous pouvez nous expliquer, je
n'ai pas tout à fait saisi votre remarque?
M. Lavertu: De toute façon, je parle plutôt des
résultats. On a déjà donné l'exemple, devant la
commission ici, d'un référendum, par exemple, sur le zonage
agricole. Si 60% de la population étaient contre le zonage agricole et
que ces 60% de population se trouvaient en grande partie dans les zones
urbaines, peut-être qu'on devrait interpréter les résultats
à la faveur d'un décompte par comté pour voir si les
régions rurales, les agriculteurs ne sont pas plutôt pour...
M. Ciaccia: Ce que je peux interpréter par vos remarques
si je relie cela à une analyse par comté j'ai vu cela dans
d'autres mémoires, mais je ne sais pas si je saisis bien votre
pensée c'est que si dans certains comtés, disons
anglophones, il y a un vote d'une certaine façon et, dans certains
comtés francophones, il y a un autre genre de vote, votre
interprétation est que vous ne prenez pas le résultat global sur
tout le territoire; vous prenez seulement certains comtés. Est-ce
cela?
M. Lavertu: Sans prendre simplement l'opinion d'une partie de la
population, il est intéressant quand même de savoir, sur certaines
questions, qui a voté en faveur de quoi, pas nécessairement par
individu mais je veux dire par groupe d'individus.
M. Ciaccia: Mais pourquoi? C'est la question que je me pose. Il y
a beaucoup de mémoires qui ont suggéré des votes par
région, pas par comté, et pour plusieurs raisons; parce qu'il y a
certaines conséquences sociales qui vont arriver, le gouvernement, je
crois, devrait être dans l'obligation d'éviter autant que possible
des perturbations sociales, les conséquences d'un
référendum, alors il y a ceux qui ont suggéré un
scrutin par région. Pour quelles raisons voulez-vous analyser le vote
comté par comté? Est-ce qu'il y a une raison
spécifique?
M. Desrosiers: Cela part, M. le Président, de notre point
majeur, de notre première affirmation. Présentement, les
Québécois peuvent se sentir sous-représentés ou
surreprésentés, selon que politiquement on puisse être dans
une formation ou dans l'autre. Moi, je dis que cela ne prouve absolument rien.
Il demeure un fait sociologique qui est le suivant.
Malgré tous les mécanismes qu'on a présentement,
malgré la représentation que nous avons présentement, les
Québécois disent qu'il y aurait peut-être moyen, au niveau
de l'utilisation de la démocratie, d'ajouter un mécanisme nouveau
qui s'appelle le référendum, pas pour refaire ce qu'on fait
déjà en politique, mais pour faire autre chose. Cette autre
chose, c'est de savoir au niveau de l'ensemble d'une population quelle est son
opinion sur un sujet. On pourrait très bien voir, à l'occasion
d'une campagne référendaire, un député de
comté et son agent officiel être totalement en désaccord.
Cela n'a aucun rapport avec la politique; c'est la base. On pourrait
très bien voir des députés ministériels être
en faveur d'un oui et d'autres être en faveur d'un non. On pourrait aussi
voir l'Opposition se diviser autrement. C'est justement ce nouveau
mécanisme, qui doit être traité comme un nouveau
mécanisme, qui ne doit pas imposer un cadre juridique obligatoire au
niveau gouvernemental. C'est une consultation au niveau de la population,
à caractère tout à fait différent, de telle
façon que les Québécois puissent dire: Nous avons
donné notre opinion; maintenant, les gens au Parlement pourront
continuer à en discuter et pourront juger de l'opportunité
d'adopter une loi subséquemment.
Ceci étant dit, on trouve important de pouvoir connaître,
par comté, l'opinion de nos gens, parce que ce n'est pas une question
politique, mais une question sociologique. Après, cela devient une
question politique. J'ai l'impression que nous sommes en train de discuter de
deux aspects de la question en même temps, et le niveau sociologique et
le niveau politique. On n'en est pas sortis lorsqu'on a fait ensemble cette
discussion. On s'est dit: Essayons d'établir une ligne de pensée
de sorte que, si on établit un nouveau processus démocratique, il
soit tellement souple qu'il permette à des gens de la même
formation politique d'être d'opinion contraire et de ne pas s'en vouloir
pour tout cela, mais que cela ne paralyse pas l'appareil démocratique
gouvernemental. Ainsi, quand il connaîtra d'une façon
différente l'opinion du peuple québécois il pourra, lui
et lui, c'est le gouvernement se débattre avec son
Opposition, à ce moment-là, pour établir une loi
subséquem-
ment à la consultation populaire. C'est dans ce sens qu'on fait
notre argumentation.
M. Ciaccia: Ce qui m'inquiétait dans la réponse que
j'ai reçue tantôt, quand j'ai demandé: Le gouvernement
devrait-il être lié par la réponse du
référendum, c'est qu'on a semblé dire: Cela dépend
de l'interprétation. Est-ce que cela veut dire que la question ne sera
pas claire ou précise? Cela est une question d'interprétation. Si
la question est claire et précise, est-ce que vous allez
interpréter les différentes régions du Québec par
rapport à d'autres ou si vous allez traiter cela comme la volonté
populaire, 60%, 70%, 55%? Que voulez-vous dire quand vous dites que cela
dépend de l'interprétation qu'on va y donner?
M. Lavertu: Cela ne veut pas dire qu'à notre sens la
question devrait être embrouillée ou confuse; au contraire, elle
devrait être claire, précise et permettre aux gens d'exprimer
très clairement leur choix lors du référendum.
M. Ciaccia: Si 60% disent oui ou disent non.
M. Lavertu: Je prends l'exemple de 50%. Le même pourcentage
ne veut pas toujours dire la même chose lors de différents
référendums. C'est à peu près ce que je voulais
dire quand je parlais d'interprétation tantôt. Si j'ai
débordé sur le décompte par comté, on pourrait
peut-être ajouter aussi qu'il est souhaitable qu'un député
sache exactement ce que les électeurs de son comté pensent d'une
question, alors que, lors d'un décompte à l'échelle
nationale, il serait impossible pour le député de savoir ce que
les électeurs de son comté pensent de la question soumise au
référendum.
M. Ciaccia: Vous ne croyez pas que ce serait
préférable que le gouvernement dise: Oui, je vais être
lié par le résultat. Cela enlèverait toute
ambiguïté, l'incertitude et, comme cela, le monde saurait une fois
pour toutes ce que le peuple du Québec veut décider sur cette
question.
M. Lavertu: Cela ne nous apparaît pas
nécessaire...
M. Ciaccia: Ce n'est pas nécessaire que ce soit clair?
M. Lavertu: ... que le gouvernement soit lié, soit
à l'intérieur de la loi ou soit qu'il s'engage.
M. Ciaccia: Vous ne voyez pas de dangers de continuer toujours
l'incertitude et l'ambiguïté dans ce sens? Vous ne trouvez pas que
les gens voudraient savoir une fois pour toutes leur avenir, où ils s'en
vont, sans cette continuelle ambiguïté?
M. Lavertu: Je constate que vous me parlez d'un
référendum en particulier, lorsqu'on devrait être en train
de discuter de l'ensemble des référendums.
M. Ciaccia: Non, je parle du référendum auquel vous
vous référez, à la page huit. Je suis pas mal certain,
lorsque vous dites que votre société entend intervenir chaque
fois qu'elle le jugera nécessaire, que sur un référendum
de moindre importance...
M. Lavertu: Nous avons déjà pris position comme
société sur d'autres questions que celle-là.
M. Ciaccia: Passons donc à un autre sujet parce qu'on
semble vouloir continuer l'ambiguïté. Cela m'étonne un peu.
J'ai l'impression que vous n'êtes pas certain du résultat que vous
voulez avoir. C'est pour cela que vous voulez vous couvrir.
M. Pineau: Du tout. J'aimerais soulever un point, mon cher
monsieur, si vous me le permettez. Dans notre mémoire, ceci est
clairement indiqué. Je crois bien que ce sera de nature à
répondre aux questions que vous avez posées tout à
l'heure: "II nous apparaît que la volonté populaire
exprimée clairement possède en soi une force si contraignante
qu'un gouvernement ne serait pas justifié d'ignorer l'avis de la
majorité de la population." C'est la position de la SNEQ, d'une part.
Cela rejoint, d'autre part, l'idée que nous véhiculons, à
savoir que ce devrait être le gouvernement qui devrait prendre à
lui seul les responsabilités. J'en reviens à ce que j'ai dit lors
de ma première intervention. Si un gouvernement ne se croit pas
justifié d'ignorer la majorité de la population et, toujours dans
notre ligne de pensée, s'il prend à lui seul les
responsabilités, il paiera pour, lors d'un prochain scrutin
électoral. Ce sera son problème. On est dans un pays
démocratique.
M. Ciaccia: En tout cas, il me semble que j'ai eu deux
différentes réponses. Je vais prendre une réponse que vous
voulez claire, que c'est assez contraignant que le gouvernement ne serait pas
justifié d'ignorer l'avis de la majorité de la population.
Vous dites que le libellé de tout référendum devra
être rédigé dans la langue nationale, suivant les
dispositions de la loi no 101. Je ne veux pas entrer dans un débat
linguistique à savoir que le français est la langue de
communication au Québec. Pour certaines raisons historiques, il peut y
avoir des groupes qui ne sont pas tellement familiers ou assez familiers avec
la langue française. Dans un référendum qui peut poser une
question assez importante pour l'avenir de chacun de nous, ne voyez-vous pas un
danger que, si la question est libellée seulement dans une langue, une
grande partie de la population ne pourra pas vraiment s'exprimer? Il se peut
qu'elle ne comprenne pas assez profondément la langue officielle pour
pouvoir saisir complètement la portée de la question. N'y a-t-il
pas un danger d'enlever le droit de vote à un grand secteur de la
population qui pourra être de bonne foi et qui se considère
Québécois autant que vous et moi? N'y a-t-il pas ce danger?
M. Burns: C'est obsessionnel.
M. Lavertu: Nous ne le croyons pas, M. le dé-
puté. La question aura d'abord été discutée
à l'Assemblée nationale et rapportée abondamment dans
l'ensemble des journaux. Des personnes auront fait campagne en faveur de l'une
ou l'autre des deux options pendant toute la période
préréférendaire et pendant la campagne
référendaire. A ce moment, surtout si la ou les questions sont
courtes, claires et précises, je ne crois pas que cela pose des
problèmes et que cela ait pour effet d'empêcher certaines
personnes de s'exprimer lors d'un référendum, quel qu'il soit, en
passant.
Nous croyons, étant donné que la loi no 101 a
été adoptée il y a peu de temps, que ce serait un des
endroits où il serait très mauvais de reculer sur une loi qui a
été adoptée par l'Assemblée nationale et qui
prévoit que la langue nationale, c'est le français.
M. Ciaccia: Ne croyez-vous pas qu'il y aurait un danger de
critique contre le gouvernement, à savoir qu'il essaie de restreindre
les gens qui pourraient voter dans un tel référendum? Et je crois
que cela serait important pour que le gouvernement paraisse prendre toutes les
précautions possibles et avoir une largeur d'esprit pour permettre
à tous les Québécois de voter. Ne croyez-vous pas que cela
serait une critique et que cela serait quelque chose qui pourrait aussi avoir
des conséquences sur le résultat d'un tel
référendum? La critique ne pourrait pas être faite au
gouvernement, après, et dire: Ecoutez, ce n'est pas tout le monde qui a
eu le droit de voter, ils n'ont pas compris; alors, ce n'est pas clair. Cela
continuerait l'ambiguïté. Mais, si le gouvernement prenait toutes
les précautions possibles et permettait à ces gens de s'exprimer
dans l'autre langue, cette critique ne pourrait pas être faite contre le
gouvernement.
M. Lavertu: Nous ne sommes pas d'accord avec cette
interprétation qui veut que le fait de libeller le bulletin simplement
en français empêche des gens de s'exprimer.
M. Ciaccia: Pour celui qui ne comprend pas le français, et
il y en a beaucoup, je ne dis pas que cela justifie, mais, malheureusement, il
y en a beaucoup qui ne le comprennent pas.
M. Lavertu: Mais il y aura quand même une période
d'information assez longue auparavant pour que les gens sachent exactement ce
que représentent ces deux options.
M. Desrosiers: Je ne sais pas où on peut soulever cette
ambiguïté possible. Je comprends, so-ciologiquement, qu'il y a une
partie des Québécois qui ne s'expriment pas en français,
malheureusement. Mais, avec la loi 101, je pense que dans un avenir très
rapproché, et au moment où on adoptera le fameux
référendum qui semble toujours planer au-dessus de cette salle,
messieurs les anglophones pourront comprendre très bien le
libellé français. Peut-être que je m'amuse un peu, mais il
faudrait quand même dire ceci: D'une part, on a dit droit de vote,
priorité; d'autre part, clarté de la question, concision, et,
avec un temps prédéterminé, avec annonce a l'avance qu'un
référendum se tiendra, je me fie à messieurs les Anglais
pour en faire une bonne traduction. Je ne vois pas d'ambiguïté
là, ils vont comprendre correctement.
M. Ciaccia: Vous avez peut-être une perception de messieurs
les Anglais qui n'est peut-être pas aussi exacte qu'on peut le croire ou
qu'on peut le penser. Parfois, on se fait certaines idées d'une certaine
communauté, et c'est tout à fait l'inverse. A la page 6 de votre
mémoire, vous parlez je vais conclure sur cela parce que je vois
que mon temps achève de la campagne référendaire et
vous dites qu'il faudra encadrer les media par des règlements, des codes
d'éthique. Pouvez-vous détailler un peu quelle sorte de
règlement vous voudriez voir?
M. Desrosiers: Cela, lorsqu'on a détaillé ce point,
on a été vraiment aux prises avec un problème insoluble,
et on voulait attirer l'attention de la commission parlementaire sur cet
aspect, et j'exprime plus clairement ma pensée en disant ceci. On veut
donner chance égale à chacun des électeurs en mettant la
question au clair, en donnant une période précise, en permettant
de le savoir à l'avance. En affectant un montant payé par les
deniers publics égal des deux côtés des deux options, on se
disait ceci: Lorsqu'on va utiliser les media, que ce soit parlés ou
écrits, comment allons-nous faire pour contrôler les media, parce
que les ondes franchissent les barrières provinciales très
facilement? Est-ce qu'on pourrait contrôler une chose comme cela? Cela
nous est apparu une difficulté insurmontable. On pourrait quand
même être noyé de publicité qui nous vienne des
ondes, qui serait contraire à l'objectif qu'on poursuit de donner la
chance au Québécois, quelle que soit son option, de pouvoir
s'exprimer clairement et d'avoir les mêmes chances de succès.
Or, on disait: II faudrait que la commission parlementaire
réfléchisse sur des mécanismes à trouver de telle
façon qu'on puisse soit par une loi-cadre au niveau de la presse,
ou encore par différentes formules que nous n'avons pas, mais nous vous
faisons confiance pour les trouver, par exemple restreindre, à un
moment donné, ce qui pourrait émarger et être non
contrôlable. C'est dans ce sens qu'on fait la recommandation, et pas plus
que cela, mais autant que cela.
M. Ciaccia: Mais est-ce que cela ne risque pas d'être
perçu comme une contrainte à la liberté de la presse,
à la liberté d'expression, pour un journaliste de s'exprimer d'un
côté ou de l'autre?
Ne trouvez-vous pas cela un peu dangereux d'essayer d'adopter des
règlements pour contrôler ou restreindre les journalistes de dire
leur façon de penser?
M. Desrosiers: C'est un bon argument. Je le reçois et nous
le recevons, comme groupe. On s'est posé la même question. On se
disait: II faudrait et on vous le demande essayer de trouver les
mécanismes nécessaires de telle façon que
la propagande et la nouvelle journalistique soient bien
différenciées. Je pense qu'on ne devrait pas restreindre,
à ce moment, le journaliste quand il s'agit de faire ses nouvelles.
Mais, au niveau de la propagande organisée par une option ou par
l'autre, que celle-là soit bien cadrée. J'admets que ce n'est pas
l'idéal, mais ce qu'on vise, c'est d'essayer de vous faire
réfléchir sur les moyens à trouver, de telle façon
qu'on puisse bien équilibrer les deux options.
M. Ciaccia: Dans nos traditions démocratiques, il est
difficile de faire une distinction entre les deux parce qu'un côté
va appeler de la propagande, ce que l'autre dit, lui, être de
l'information, et vice versa. C'est assez dangereux d'essayer de
suggérer des contrôles sur la liberté de la presse, la
liberté d'expression.
M. Desrosiers: N'étant pas familiers avec le milieu
anglophone, nous, au niveau francophone, on avait cette perception que vous
venez d'énoncer. Est-ce que vous nous dites que c'est la même
chose au niveau anglophone, qu'on a la même perception? Ce n'est pas
facile de distinguer propagande, nouvelle journalistique...
M. Ciaccia: C'est une question d'opinion. Chacun a droit à
son opinion.
M. Desrosiers: C'est ce que je pensais.
M. Ciaccia: Je crois que nos traditions, que ce soit anglophones
ou francophones, les traditions de ce pays-ci ont toujours donné la plus
grande liberté possible à la presse écrite, aux media.
Quand il y a eu certaines exceptions, je pense qu'on s'est bien fait entendre
et on a été défendu par la majorité du peuple.
M. Lavertu: ... un certain nombre de restrictions ou de lois qui
s'appliquent aux campagnes électorales, et s'il y a une loi sur les
référendums et sur la consultation populaire au Québec, il
y aura une chose nouvelle qui va se produire, c'est qu'il y aura non plus des
campagnes électorales, mais des campagnes d'opinions. Je pense qu'il
devrait y avoir une législation concernant les campagnes d'opinions,
à savoir le temps que chacune des options, par exemple, pourrait se voir
consacré dans les différents media, l'argent que chacune des
options pourrait consacrer à la promotion de l'une ou l'autre des
options, et ainsi de suite.
Ensuite, lorsque nous parlions de code d'éthique, peut-être
que la formulation de notre texte n'était pas fidèle tout
à fait à nos intentions et au débat que nous avions eu
là-dessus. C'est que le code d'éthique serait un code que les
journalistes se donneraient eux-mêmes pour en arriver à couvrir
des événements de la façon la plus équitable
possible.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Merci,
M. le député de Mégantic-Compton.
M. Ciaccia: M. le Président...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Oui.
M. Ciaccia: Avant de terminer, je voudrais vous remercier,
j'aurais d'autres questions, mais, malheureusement, le temps est
écoulé. Je vous remercie beaucoup pour les réponses que
vous m'avez fournies.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Mégantic-Compton.
M. Grenier: Merci, M. le Président. Je voudrais d'abord,
au nom de notre parti, vous remercier pour la présentation de votre
mémoire. Je le fais au nom de l'Union Nationale, que vous avez reconnue,
sans doute. Vous avez vraiment un mémoire valable et dans l'esprit de ce
qu'on attend à cette commission. Je ne sais pas si vous avez
été orientés par des gens près de la commission ou
pas, je ne fais pas allusion aux partis politiques, mais vous êtes
vraiment dans l'esprit de ce qu'on demande ici. Vous nous fournissez, ce matin,
des lumières qu'on n'a peut-être pas eues dans tous les autres
mémoires de ceux qui vous ont précédés. Je ne
voudrais pas me faire juge pour les autres, mais je peux vous dire que celui-ci
cadre bien dans ce qu'on a besoin d'entendre à cette commission.
D'autant plus qu'il se rapproche énormément des positions
qui sont celles de notre parti. C'est peut-être pour cela que je le
trouve si bien. En dehors de cela, je trouve que c'est absolument opportun ce
sur quoi vous vous interrogez. Vous n'allez pas, bien sûr, dans la
plomberie d'un référendum, mais vous faites des suggestions qui
sont importantes pour la commission. Vous allez même jusqu'à nous
proposer une date précise pour les référendums au
Québec. A ce moment, vous tenez compte de tous les
éléments qui peuvent influencer un référendum au
Québec, y compris même la température. Quand on
suggère le mois de juin, vous vous rapprochez de dates soumises à
des périodes assez régulières par différents partis
politiques pour la tenue d'élections générales. Si on le
fait pour des élections générales, comme on s'en rapporte
à des référendums, c'est pas mal semblable quand il est
question pour les gens de se déplacer pour aller voter.
Vous avez un paquet d'excellentes recommandations qui seront sans aucun
doute retenues par la commission et qui serviront de références
au gouvernement. Je voudrais vous en remercier.
Comme réflexion, à la page 1, vous parlez
d'élections-référendums. Je ne sais pas si vous avez
à la mémoire l'élection provinciale de 1962. Quand vous
avez parlé d'élections-référendums, moi j'ai
perçu que cela pouvait être au moins celle-là qui a
porté sur un thème majeur. Une société juste, c'en
était un. Il est assez rare qu'il n'y a pas un courant qui se
dégage d'une élection générale, bien sûr,
mais on ne peut pas dire que c'est à chaque élection. Je pense
être honnête en disant
qu'une élection générale doit d'abord porter sur
l'administration d'un gouvernement sortant. C'est d'abord cela, le thème
majeur d'une élection. On ne peut pas dire que cela a été
cela en 1962. Cela a peut-être été cela en 1976. On ne peut
pas dire que c'était cela en 1962. Je pense que, si on avait eu,
à ce moment, en 1962, une loi-cadre des référendums, on
s'en serait peut-être servi pour un référendum au lieu
d'une élection. Cela aurait peut-être été plus
correct.
Cela me rapproche d'une autre question que j'aurais pu me poser et je
vous la pose tout de suite. Vous parlez de décompte du vote par secteur,
par district électoral. Vous faites une recommandation quant à ce
décompte par district. M. Lavertu est peut-être ici depuis le
dépôt de plusieurs mémoires, parce que j'ai remarqué
qu'il semblait informé sur plusieurs autres mémoires. Ce n'est
peut-être pas le cas pour tout le monde, mais j'aime informer les autres
représentants qui sont ici que cette question revient à peu
près à chaque dépôt de mémoires. Les opinions
sont assez diversifiées.
Un point qui n'a pas été soumis. On semble vouloir
répondre à plusieurs questions. On voudrait analyser les
référendums. On voudrait savoir ce que telle partie de la
population peut penser sur telle question. Je pense, par exemple, au
référendum sur le zonage des terres agricoles. Il serait
peut-être intéressant de savoir ce que Montréal pense de
cela. Il serait peut-être intéressant de savoir ce que la
région de Lotbinière pense de cela, la région du
Bas-du-Fleuve, des choses comme cela. On n'a peut-être pas besoin de le
savoir par circonscription. Il y a, bien sûr, un danger que vous
soupçonnez, mais que vous n'avez pas dit dans votre mémoire, au
décompte par district. Il y a également un manque d'information
si on ne le donne pas. Je pense que les media d'information voudront analyser
la tenue d'un référendum. Il y aurait peut-être lieu de
s'interroger et que, pour fournir à tout le monde un point de
repère, on fasse, par exemple je vous le dis comme cela; on
pourra revenir ensuite sur le décompte par district quatre
décomptes bien précis dans la province sur un
référendum en particulier, qui pourrait être fait pour
plusieurs référendums aussi.
On pourrait bien faire un décompte dans Mont-Royal qui est un
comté à caractère anglophone, en faire un dans
Sainte-Marie qui est dans Montréal, qui est un comté
majoritairement francophone, en faire un à Rouyn qui est une ville dans
le Québec qui ressemble à la vôtre, soit celle de Rimouski,
mais pour une autre raison que vous connaissez, et Lotbinière aussi qui
est un comté qui ne compte pas un seul "poll" urbain. Vous avez quatre
points dans le Québec qui pourraient faire l'objet d'une analyse bien
spécifique. Je nomme ceux-là; on pourrait en nommer d'autres.
Vous avez là-dedans quatre partis qui sont représentés. On
ne cause pas de préjudice aux partis politiques, parce que tout ce qui
sous-tend cela, c'est peut-être l'avantage ou le désavantage
politique.
Je ne vous cache pas que je serais un peu malheureux pour le
député de Rimouski qui va être pour un
référendum qui dirait, par exemple: Etes-vous pour la
souveraineté du Québec? Il irait se battre pour la
souveraineté du Québec et d'autres gens se battraient contre.
S'il se faisait battre à trois contre un dans son comté et qu'une
élection devait suivre dans les deux mois du référendum,
je ne suis pas sûr qu'un député de ce genre... Je pourrais
prendre mon comté, si cela peut blesser quelqu'un. Je prends mon
comté, puis je décide que je suis pour un
référendum qui demande la souveraineté pour le
Québec, en parlant d'un référendum en particulier. Je me
fais battre à trois contre un. Je ne suis pas sûr que les
électeurs ne se rappelleront pas cela deux mois après. Je ne suis
pas sûr que cela n'influencera pas le vote considérablement dans
mon comté au point qu'ils peuvent se passer d'un excellent
député à Québec. Je ne vous cache pas que cela
pourrait être le cas de plusieurs députés aussi.
Tenant compte de ça, j'aimerais que vous vous penchiez davantage
sur cette proposition que vous faites. Pour l'analyse dont vous avez besoin,
cela pourrait se faire, des points dans la province pour analyser les votes et
ne pas désavantager les partis politiques, en prendre dans chacun des
partis; on répondrait là à votre question. Pour les
référendums, ce n'est pas si utile que ça de savoir que
tel député était en faveur ou contre, on n'a pas besoin de
savoir ça. On n'a pas besoin de démolir une formation politique
non plus pour ça. Je prends un exemple. S'il arrivait que dans un
référendum qu'on a à l'esprit, qui viendrait, la question
suivante se pose. Je la pose farfelue au possible: Etes-vous pour plus de
pouvoirs dans la province de Québec? C'est défendu par le
gouvernement et l'Opposition serait contre là-dedans; si on gagnait
à trois pour un, vous voyez un gouvernement mis en difficulté
lors d'une élection générale qui pourrait suivre deux mois
après. C'est farfelu, d'accord, mais prenez le contraire. C'est un
danger pour l'Opposition. On ne serait pas plus heureux de ne pas avoir
d'Opposition à Québec, on l'a déjà vécu et
cela n'a pas été bien bon. Cela a duré quatre ans, sans
Opposition, à Québec ou avec une Opposition de six ou huit
députés, à ce moment-là. Ce n'était pas
assez dans la Chambre, l'Opposition se faisait dans la rue, vous vous en
souvenez. On faisait l'impossible dans la Chambre, mais on sentait que
l'Opposition n'était pas suffisamment représentée en
Chambre.
On n'a pas le droit, par des référendums, de supprimer la
carrière politique de certains députés. Je vois cela dans
un référendum d'envergure, pas dans tous les
référendums. Si on devait faire un référendum
demain sur l'urgence ou la nécessité de la fin du monde, je ne
suis pas sûr qu'on ferait battre des députés, mais il y a
des sortes de référendums qui pourraient le faire quand ce sont
des référendums qui touchent tous les citoyens. Les
référendums, en général, devraient toucher tous les
citoyens, on ne devrait pas avoir de référendums qui portent sur
un secteur ou une partie de la population ou une partie de la province
seulement, ce n'est pas là-dessus que devront porter les
référendums.
J'aimerais vous voir vous interroger là-dessus
puisque vous y allez d'une proposition assez claire, vous autres. C'est
peut-être la seule avec laquelle je ne suis pas entièrement
d'accord dans tout votre mémoire.
M. Lavertu: M. Grenier, nous nous sommes interrogés assez
longuement là-dessus et ces interrogations nous sont venues aussi du
même type que celles que vous venez de nous soumettre. Notre point de vue
s'est plutôt attaché à examiner ça du point de vue
de la population plutôt que de celui du député. Ce serait
déplorable qu'un député subisse un sort terrible lors
d'une élection deux mois après un référendum, mais
cela nous paraît assez peu vraisemblable, de toute façon. Ce qui
remporterait...
M. Grenier: Cela vous paraît assez invraisemblable,
avez-vous dit?
M. Lavertu: Oui, c'est ça.
M. Grenier: J'aimerais vous donner un exemple, j'ai
été battu, déjà. J'ai été battu sur
une question bien précise, parce que j'ai défendu le gouvernement
sur une question qui n'était pas la mienne, cela s'appelait le bill 63.
Une bonne partie de ma défaite est due à cette question. Je peux
vous dire tout de suite que je n'étais pas syndiqué et j'ai perdu
mon "job". Je peux vous dire que je n'ai pas trouvé cela drôle. Je
n'aimerais pas qu'à cause d'un référendum on se prive de
députés valables d'un bord ou de l'autre de la Chambre. Un
référendum, ce n'est pas nécessairement une loi et ce
n'est pas nécessairement tout le monde qui le veut. Il y a certains
référendums qui voudront qu'il y ait des partis qui
défendent les positions du gouvernement; remarquez bien que je ne serais
pas surpris lors du prochain référendum, celui qu'on a à
l'esprit à moins qu'il en vienne un sur la loi de Mme Payette
que des positions changent. Je ne voudrais pas présumer, mais
l'Opposition changera peut-être sur un côté et le
gouvernement sur l'autre. A cause de cela, on pourra peut-être avoir une
élection qui suivra pas longtemps après et se priver de bons
hommes.
M. Lavertu: J'ai un peu de mal à comprendre vos
objections. Pour mettre fin à vos inquiétudes, il faudrait que
les députés ne prennent pas parti pendant la bataille
référendaire.
M. Grenier: Non, non, je veux qu'ils prennent parti.
M. Lavertu: Si un député prend parti pour une
option qui est battue au référendum, il peut se faire battre
à l'élection suivante.
M. Grenier: Pas nécessairement. Un
référendum, ce n'est pas une loi. On ne doit pas intégrer
une loi à un référendum, ce n'est pas pareil. Le
gouvernement qui défend sa loi, il a à payer pour. On a
payé pour notre loi 63, nous autres, en 1970. En tout cas, moi, j'ai
payé! En 1976, d'autres ont payé pour la loi 22 et
peut-être bien qu'en 1980 il y en a d'autres qui paieront pour la loi
101, on ne le sait pas, les années vont nous montrer cela. C'est une loi
et je pense qu'on ne doit pas faire la même chose avec un
référendum. En tout cas, je laisse ce point à votre
interrogation.
M. Lavertu: On se posera peut-être des questions aussi sur
l'établissement de vos comtés baromètres.
M. Grenier: Oui, vous savez, j'ai donné ceux-là au
pif.
M. Lavertu: Cela pourrait s'avérer très
difficile.
M. Grenier: C'est au pifomètre que j'ai trouvé
ceux-là. Je ne voudrais pas qu'on trouve que ce sont les vrais
comtés. Mais c'est peut-être une région, où il
faudrait enquêter. Il faudrait enquêter sur une région en
particulier; je le donne juste pour illustrer mon exemple.
Vous parlez également, à la page 3, du régime
présidentiel. Je vous rappelle un fait là-dessus, c'est assez
étrange, le régime présidentiel avait été
préconisé par notre parti à l'élection de 1973,
vous vous en souvenez? C'était dans le programme de notre parti,
c'était un aspect important de notre programme. Il est réapparu
en 1976 dans une autre formation politique, tout simplement parce qu'on n'a pas
réussi à le vendre en 1973. On était le parti qui passait
pour être assis entre deux chaises.
Vous dites que le gouvernement devrait l'envisager. D'autres ont
réussi à passer cette opinion et la personne qui avait
proposé dans notre parti ce régime présidentiel est
actuellement un député du parti ministériel, mais les
ventes ne se sont pas faites de la même façon; les gens
n'étaient peut-être pas mûrs pour une question comme
celle-là et cela revient actuellement.
Je pense que ce n'est pas un reproche que vous faites, mais vous
signalez avec beaucoup d'à-propos, je pense, qu'un régime
présidentiel permettrait qu'une initiative vienne de la base et non pas
du gouvernement, comme cela se fait aux Etats-Unis d'une façon
particulière comme on l'a vécu, M. le Président, en
Californie. C'est l'Etat le plus démocratique peut-être; dans
certains coins on trouve qu'ils le sont trop puisqu'ils en sont rendus à
élire le chef de police. C'est là-dessus qu'on a vu que ces
questions pouvaient être soulevées par la population. C'est
certainement une faiblesse; encore là ce n'est pas un reproche qu'on
fait, on ne peut pas tout régler dans un an. Même si on
célèbre aujourd'hui un anniversaire, on ne peut pas tout
régler. C'est peut-être une question qui viendra, et ce n'est pas
le même anniversaire auquel tout le monde peut penser. Je
célèbre aujourd'hui l'arrivée, le retour au pouvoir de
l'Union Nationale, c'est-à-dire comme parti politique. C'est notre
journée aujourd'hui. D'autres célèbrent d'autres choses,
à chacun sa satisfaction.
M. Burns: II y en a qui se satisfont de peu.
M. Grenier: De pas mal. Quand on a oeuvré tant
d'années, je peux vous dire que les satisfactions sont grandes. Vous le
rappelez avec beaucoup d'à-propos, ce régime présidentiel,
c'est peut-être une chose qui viendra corriger pas mal de lacunes.
M. Lavertu: II est encore au programme?
M. Grenier: Oui. Ah oui, puis cela reviendra, je pense bien que
je peux vous l'assurer aujourd'hui. Les formes seront peut-être
différentes, mais je pense que là-dessus on ne pourra pas se
chicaner bien fort, parce que...
M. Ciaccia: Comment allez-vous le mettre en vigueur dans notre
constitution actuelle, votre régime présidentiel?
M. Grenier: C'est-à-dire qu'il y aura peut-être des
modifications de base qu'on pourra faire. On discutera de cela en temps et
lieu. A la page 4, vous revenez avec une commission ad hoc; remarquez bien
qu'elle prend des dénominations différentes selon chaque groupe
qui vient ici. Vous n'êtes pas sans savoir qu'on parle d'un conseil de
référendum depuis longtemps; est-ce que cela pourrait
s'apparenter à ce qu'on appelle un conseil de référendum?
M. Lavertu, vous avez vu passer d'autres mémoires, j'imagine?
M. Lavertu: Oui, on parlait de comité de sages à un
moment donné aussi. Evidemment c'était dans l'optique où
le gouvernement gardait l'entière responsabilité de la question.
A ce moment-là on se disait: Le gouvernement devrait, pour pouvoir
formuler une question vraiment claire, précise et très
éclairée, justement, aller chercher, sur la question qui va
être en cause lors de l'un ou l'autre des référendums, les
individus, les personnes, les ressources qui pourraient l'éclairer de la
façon la plus adéquate. Mais cela n'enlève pas
finalement...
M. Grenier: Vu le fait qu'on n'est pas en régime
présidentiel, le fait qu'il est difficile en dehors d'un régime
présidentiel de permettre à la base de faire des suggestions,
vous suggérez qu'il devrait y avoir, aux côtés des
oppositions et du gouvernement, une espèce de comité ad hoc ou
conseil de sages ou conseil de référendum pour faire au
gouvernement des propositions dépolitisées, si vous voulez.
M. Lavertu: Cela nous semblerait souhaitable.
M. Grenier: Le ministre retient cela sûrement, je suis
sûr que cela le frappe, je ne manque pas de le lui suggérer
à chaque mémoire. Je voudrais bien qu'il la retienne parce que
c'est une de nos volontés chères et que le ministre semble
retenir de plus en plus parce qu'il est "ouvert"; comme diraient les Anglais,
il est "open", je ne l'ai jamais tant vu.
Il y a des mémoires qui nous ont proposé, et cela
m'intéresserait de connaître votre proposi- tion, vous n'en faites
pas mention je pense, d'abaisser l'âge à seize ans pour le vote
référendaire.
Est-ce que vous aviez retenu des suggestions?
M. Lavertu: C'était une proposition, entre autres, du
Mouvement national des Québécois, organisme qui est la
fédération des sociétés nationales. Nous en faisons
partie.
M. Grenier: La maison mère.
M. Lavertu: Nous souscrivons à une transformation de la
loi électorale en permanence pour permettre d'abaisser le vote à
16 ans, mais ce qui nous a retenus de le placer dans notre mémoire, ce
sont des considérations pratiques qu'on pourrait peut-être
qualifier de stratégiques de la part d'un gouvernement qui voudrait
faire voter les électeurs sur une question, dans le sens que cela
apparaît comme voulant fausser les règles du jeu au départ.
Cela nous apparaîtrait souhaitable d'abaisser l'âge à 16
ans, mais on a peur que le fait de procéder à cette
opération de baisser l'âge...
M. Grenier: Soit onéreuse à défendre...
M. Lavertu: ... oui... amène une interprétation des
résultats...
M. Grenier: J'aurais dû vous poser la question au
départ. J'avais un monsieur devant moi une fois et je lui avais
demandé combien de personnes il représentait. Il m'avait dit: 6
millions. Je lui avais demandé sa recette parce qu'on avait besoin de
recruter des membres dans notre parti et il avait l'air d'aller bien.
C'étaient les Fils du Québec. Vous dites que vous
représentez environ 30 000 personnes, et je vois que votre
mémoire, je ne vous le cache pas, a l'air de correspondre à
plusieurs questions qu'on se pose. J'aimerais savoir comment vous avez
procédé, brièvement. Cela pourrait être une question
d'une demi-heure, mais j'aimerais que vous preniez sur mon temps et que vous
nous disiez brièvement comment vous avez procédé pour
avoir autant d'éléments qui correspondent à autant de
réalités.
M. Burns: C'est parce qu'ils sont représentatifs.
M. Grenier: Je n'en doute pas parce que je lis le mémoire
et je le sens.
M. Desrosiers: Je pense qu'on peut donner une réponse
courte, si vous permettez. On s'est tellement engueulés ensemble parce
qu'on représentait des opinions divergentes, mais pour produire le
document que vous avez dans les mains, il a fallu se mettre tous d'accord.
C'est aussi simple que cela. On n'a pas choisi des gens qui partaient avec la
même opinion au point de départ. On en a choisi qui avaient des
opinions contraires. Quand on est arrivé aux faits, à
l'écriture, comme, par exemple, la question que vous venez de poser
sur
le fait de baisser l'âge à 16 ans, on a dit: Oui, cela peut
avoir du sens, mais au niveau de la concordance légale, quand on fera
des élections... On a dit: D'abord, qualité d'électeurs,
deuxièmement, message inaugural, troisièmement, date fixe. On a
voulu vraiment répondre au peuple, à ce moment, dans ce qu'il y
avait de plus fondamental. Toujours pour s'assurer que les gens qui sont
habitués au parlementarisme britannique, à notre façon de
procéder, s'habituent à un nouveau mode de consultation
populaire, on a dit: Gardons les mêmes formes; les mêmes
électeurs qui votaient avant vont voter encore demain. C'est dans ce
sens qu'on est arrivé aussi facilement.
M. Grenier: Avez-vous, après d'autres mémoires qui
nous ont proposé de retirer le droit ou de le donner, frappé
quelqu'un d'incapacité de voter, comme le sont les juges et les
prisonniers?
M. Lavertu: Notre position là-dessus c'est de conserver
les mêmes règles d'application de la loi électorale
actuelle.
M. Desrosiers: On ne peut pas concevoir comment on pourrait
récompenser quelqu'un qui est prisonnier, qui a été
privé de certaines libertés fondamentales pour des raisons x,
comment on pourrait lui donner une autre liberté qu'on considère
fondamentale, la liberté de s'exprimer. S'il a perdu une liberté,
il a aussi perdu celle-là. Tant pis pour lui. C'est raide, mais c'est
cela.
M. Grenier: Même si c'est momentané, même si
c'est, comme disait le ministre dans le temps, pour ne pas avoir payé
son permis.
M. Desrosiers: Mais le hasard de sa peine, grâce au juge,
pourrait être raccourci de telle façon qu'il pourra voter au
référendum parce que le juge saura d'avance quand le
référendum aura lieu. Votre objection tombe.
M. Grenier: J'aimerais que vous détailliez un peu plus sur
la campagne de financement à $0.50 par électeur. Vous êtes
au courant de l'organisme parapluie qu'il pourrait y avoir. Est-ce que ce
serait avant ou après le vote que vous pourriez déterminer le
montant? Est-ce que vous avez étudié cela à
l'intérieur de votre commission?
M. Otis (Claude): C'est un montant qui va jusqu'à $0.50.
Cela pourrait être celui qui déclenche le référendum
ou encore l'Assemblée nationale qui le fixerait, selon l'importance de
la question, à savoir qu'on irait disons à $0.25, $0.35 ou $0.50
par électeur.
M. Grenier: Montant qui ensuite serait partagé entre les
différentes formations mises en branle pour le référendum,
mais qui ferait...
M. Otis: Egalement.
M. Grenier: ... un total de $0.50 incluant, comme vous le disiez
tout à l'heure, votre bénévolat.
M. Desrosiers: Jusqu'à $0.50. Il faudrait comprendre quand
même plus loin que cela. C'est toujours la même genèse qui
préside à cette question. Nous avons dit que ce sera clair. Ce
sera une question qui ne liera pas le gouvernement de façon juridique.
Tout à l'heure, lorsque vous avez parlé de la délimitation
de comtés pour le décompte du vote, vous avez quand même eu
l'habileté de la relier à la vocation et la carrière
politique du député. Je vous ai trouvé habile, mais je ne
suis pas du tout d'accord avec vous. Je suis encore convaincu qu'il faut
l'avoir comté par comté, parce que dans un comté, dans une
question à caractère consultatif, si le député ne
veut pas s'en mêler, il ne s'en mêlera pas, mais il ne perd pas son
droit de vote. S'il veut s'en mêler pour une option,
indépendamment de sa formation politique, il pourra s'en mêler.
Comme vous avez si bien dit qu'on juge un gouvernement à la
compétence qu'il a au niveau de l'application des règles et de
l'art de gouverner en soi, je pense que c'est sur cette question qu'on jugera
les députés, comme on a les jugés dans le passé. Je
ne crois pas, même si vous l'avez affirmé et que vous semblez en
être convaincu j'aimerais vous convaincre du contraire
qu'on puisse faire ombrage à un député qui, sur la
fluoration de l'eau, pourrait être en désaccord avec le fait de la
fluorer, alors que ses électeurs dans son comté pourraient
être d'opinion contraire. Je ne vois pas comment sa carrière
politique pourrait être mise en jeu. Lorsque vous nous servez des
arguments, vous avez toujours à l'esprit le référendum
constitutionnel sur lequel on n'a pas demandé d'exprimer nos
opinions.
M. Grenier: S'il est un parti qui est dégagé de
tout cela et qui voudrait parler de tous les référendums, c'est
bien le nôtre. Notre parti est pour une loi-cadre, exactement dans votre
esprit. Je continue de maintenir mes positions, parce que je suis en politique
depuis onze ans, et je dis qu'on peut facilement battre un député
sur la fluoration de l'eau ou sur le drainage d'une rivière dans une
région importante de son comté, aussi bien que sur la question de
l'avenir constitutionnel de la province. C'est aussi pire que cela.
M. Desrosiers: Si le député est battu, c'est parce
que sa population dans sa circonscription électorale voudra
connaître son opinion et voudra savoir de quel côté le
député se range. C'est dans ce sens que le
référendum deviendra une force contraignante autant pour...
M. Grenier: Vous n'avez jamais fait partie d'un parti politique
comme député? Vous n'avez jamais été obligé
de défendre les couleurs d'un parti politique?
M. Desrosiers: J'ai été heureux. C'est cela qu'on
veut éviter dans le référendum, que le membre d'une
formation politique soit aux prises justement avec cette contrainte.
M. Grenier: On essaiera de demander que le vote soit libre quand
on arrivera au référendum. J'avais une autre question avant de
terminer et avant que le président me fasse signe que mon temps est
épuisé.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): II n'est
pas épuisé, mais cela achève.
M. Grenier: Cela va bien. Cela tire sur la fin. M. Burns:
II s'épuise. Le député ou le temps? M. Grenier:
Les deux.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): II vous
reste trois ou quatre minutes, M. le député de
Mégantic-Compton.
M. Grenier: J'entendais tout à l'heure le
député de Mont-Royal parler de la possibilité que la
question soit bilingue ou pas. Vous étiez d'opinion que, si la question
est brève et claire, elle n'a pas à être dans les deux
langues. Ce n'est pas sur cet aspect que je veux revenir. L'aspect que je veux
relever de cela, c'est que vous êtes pour une question claire, une
question à laquelle on répondrait par un oui ou par un non. Vous
avez vu la question qui a été posée par le Parti
libéral fédéral à l'occasion d'un plébiscite
qu'il y avait eu autour de 1900. Est-ce que c'est possible de trouver une
question plus embrouillée que cela? Pensez-vous que le gouvernement peut
en trouver une moins claire que cela?
M. Desrosiers: J'espère que c'est à cause de cette
question qu'ils ont été battus à un moment
donné.
M. Grenier: Cela n'a peut-être pas nui. Il me reste du
temps comme représentant officiel de mon parti. Je reviendrai, s'il y a
lieu, avant la fin de votre mémoire. Sinon, je veux vous remercier et
vous encourager à faire de même si jamais on fait appel à
vos services. Vous avez l'air d'avoir ce qu'il faut pour présenter des
mémoires qui éclairent une commission. Vous avez l'air de vous
enligner immédiatement dans la bonne voie; s'il y a un sujet, vous vous
en tenez au sujet et vous tâchez d'apporter à cette commission qui
a besoin d'éclairage ce qu'on attend de vous. Je veux vous remercier au
nom de notre parti. Soyez assurés que le document que vous nous laissez
ici tombe dans de la bonne terre.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Merci.
M. le député de Matapédia, avec le consentement des
membres de la commission.
M. Burns: M. le Président, le député de
Matapédia n'est pas membre de la commission, mais la commission serait
d'accord pour lui donner le droit de parole.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Matapédia.
M. Marquis: Je vous remercie, M. le Président, ainsi que
les membres des deux Oppositions. Je voudrais d'abord saluer avec plaisir la
présence de gens de l'Est du Québec, en particulier plusieurs
sont de mon comté, des comtés de Rimouski et de Matane
également. Comme représentant des gens de l'Est du Québec
et des autres députés de l'Est du Québec, j'aurais
quelques brèves questions à poser.
Evidemment, je ne reprendrai pas toutes les argumentations de mon
collègue, le député de Maisonneuve, ni ceux de
l'Opposition. Je pense que le mémoire a été passablement
épluché jusqu'à maintenant. C'est pour cela que mes
questions seront brèves, et aussi pour permettre à ceux qui sont
venus présenter le mémoire de peut-être se reposer
tantôt, parce qu'ils sont partis, je pense, vers cinq ou six heures du
matin. Ce qui prouve que les gens de l'Est du Québec, quand ils
décident de se prononcer, de faire un travail efficace sur un sujet, ils
sont capables de le faire, et je suis assuré qu'à l'avenir cela
va continuer comme cela.
Evidemment, j'ai d'excellents amis, dans le groupe qui est là,
qui ne sont pas nécessairement tous de mon avis, mais j'ai quand
même d'excellents amis. Je voudrais revenir d'abord sur la question d'une
date fixe. Vous avez mentionné le mois de juin en parlant, entre autres,
des étudiants, et, aussi, en vous basant sur le fait que jusqu'au 24
juin, jusqu'à la fête nationale des Québécois, les
enfants sont encore à l'école, les parents, les familles n'ont
pas commencé à déménager, à prendre le
chemin des vacances dans les chalets, etc. Cependant, lors de vos discussions,
pour vous arrêter d'une façon aussi précise sur le mois de
juin, avez-vous tenu compte des étudiants des CEGEP et des
universités? Pourquoi n'êtes-vous pas allés au mois de
septembre où, d'après mon humble opinion, cela aurait
peut-être été un peu plus favorable?
M. Lavertu: II semble que cette période de septembre soit
un peu perturbée par le retour en classe, le retour au travail actif des
gens qui ont pris des vacances pendant l'été, la reprise des
activités dans la plupart des organismes et des mouvements dans les
régions. Il nous a semblé que le mois de juin n'était pas
un empêchement pour les étudiants de CEGEP et d'université
parce que ces étudiants ont terminé depuis le mois d'avril ou le
début de mai, et ils sont installés quelque part pour
l'été, soit chez leurs parents ou à l'endroit où
ils vont travailler pendant l'été.
Vraiment, cette conclusion de juin et même on avait
parlé du début de juin à laquelle nous sommes
arrivés, après des discussions assez longues et après
avoir exclu la plupart des autres mois de l'année...
M. Marquis: Donc, en fait, vous visez le début de juin
très clairement. Un autre point. Je vais revenir sur le scrutin et sur
le dépouillement du scrutin. Pour arriver à vous prononcer d'une
façon aussi catégorique, également, êtes-vous partis
de précédents, soit dans d'autres pays, à part,
évi-
demment, le plébiscite sur la conscription, parce que je pense,
d'après mes renseignements, qu'il y avait eu un dépouillement par
comté. Je me souviens de les avoir vus, les résultats, par
circonscriptions électorales. Mais êtes-vous partis d'exemples
concrets ailleurs pour suggérer le dépouillement par
circonscriptions électorales?
M. Dubé (Réal): On peut dire que non, nous ne
sommes pas partis d'exemples concrets. Cependant, parce que nous disons qu'un
référendum, c'est d'abord et avant tout une vaste consultation,
il faut être en mesure de l'analyser, cette consultation. Et dans la
mesure où on fait une analyse, sur le plan national, cela ne nous dit
pas grand-chose, cette analyse.
C'est strictement par secteur ou rigueur de l'analyse qu'on s'est dit
qu'il faudrait la faire au plan des circonscriptions électorales. De
plus, j'en profite pour revenir sur ce que disait un peu M. Grenier
tantôt. Nous voyons un référendum comme étant une
consultation sur une idée, alors que l'élection d'un
député, c'est bien différent. Cela se fait à partir
d'un paquet de considérations, cela se fait à partir du programme
d'un parti politique, cela se fait à partir de la valeur d'un individu
et un paquet d'autres éléments. Un référendum,
c'est strictement une consultation sur une idée. On se dit à ce
moment: Les gens de la circonscription doivent être en mesure de juger de
la valeur d'un député, et non seulement à partir de
l'opinion qu'il a émise sur une idée. Si importante que puisse
être cette consultation on peut parler du référendum
constitutionnel, justement les gens d'un comté ne doivent pas
juger de la valeur de l'individu strictement en fonction de l'opinion qu'il
peut avoir sur une idée.
Pour répondre au député Marquis de façon
précise, on n'est pas parti d'un cas concret.
M. Roy (Bruno): M. Marquis, M. le député... M.
Marquis: Oui, allez-donc.
M. Roy (Bruno): Pourrais-je ajouter ici, M. le
député, que notre préoccupation qui voulait qu'on ne
s'éloigne pas trop des lois électorales actuelles nous faisait
aussi adopter un mode de dénombrement par comté? Cela
s'inscrivait dans le cadre général de notre mémoire,
où on ne voulait pas trop changer les règles établies de
façon à ne pas embrouiller la population avec des règles
nouvelles.
M. Marquis: Une dernière et brève question encore.
Vous avez parlé du dimanche. Vous suggérez le dimanche comme
étant la journée la plus favorable à la tenue, non
seulement d'un référendum, mais je pense que vous êtes
prêts à aller dans la même idée s'il s'agit d'une
élection. Vous avez parlé des écoles. Cela a
peut-être moins rapport avec votre déposition aujourd'hui, mais
cela pourrait m'aider dans des suggestions que nous aurons à faire au
ministre d'Etat à la réforme parlementaire et électorale.
Est-ce que vous êtes favorables à la disparition des bureaux de
scrutin en milieu rural dans les maisons privées pour arriver à
centraliser cela dans les écoles ou un autre édifice public tel
qu'un hôtel de ville, etc.? J'avoue que je m'éloigne du sujet.
M. Lavertu: J'avoue que nous n'avons pas réfléchi
à la question.
M. Desrosiers: Mais la réflexion ne sera pas longue. Si
vous pouvez le faire chez vous, pourquoi ne le faites-vous pas chez vous? Les
écoles appartiennent à la province de Québec,
appartiennent à tous les contribuables. Cela ne veut pas dire qu'on est
contre les maisons privées mais, si on peut en sortir, pourquoi n'en
sortirions-nous pas? C'est le gros bon sens.
M. Grenier: Sur le tapis de ma tante Rose-Anna, elle n'aime pas
cela.
M. Burns: Je m'excuse auprès du député de
Matapédia, même si ce n'est pas directement le sujet de notre
commission. Je tiens à vous dire que j'ai de plus en plus de
représentations de milieux ruraux qui me disent, et de la part de
présidents locaux d'élection, que cela devient de plus en plus
difficile de trouver des résidences où on peut tenir normalement
et régulièrement des élections. Il n'y a pas de doute
qu'au niveau du ministre d'Etat à la réforme parlementaire cette
recommandation est très bien reçue.
M. Marquis: Je dois dire que cela cause des problèmes aux
différents candidats qui doivent parcourir les rangs le jour du scrutin
pour saluer les électeurs et les membres, les gens. Là-dessus,
comme j'ai des collègues qui ont probablement quelques dernières
questions à vous poser, je vous remercie encore une fois. Nous
espérons avoir le plaisir de vous entendre sur d'autres sujets
importants que nous aurons à soumettre en commission parlementaire dans
les années à venir. Merci.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Merci,
M. le député de Matapédia. Y aurait-il d'autres
interventions?
M. Burns: M. le Président, il me reste encore une fois des
remerciements à adresser à M. Lavertu et à son groupe de
la Société nationale de l'Est du Québec. Merci pour ce
très bon mémoire qui va nous faire réfléchir, qui
va nous faire réfléchir, qui va nous faire réexaminer un
certain nombre de choses avant la présentation de la loi.
M. Lavertu: On remercie la commission d'avoir bien voulu nous
entendre.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Merci
beaucoup au nom des membres pour votre collaboration à cette commission
parlementaire.
M. Burns: M. le Président, nous avions la
possibilité d'entendre la Société nationale du Centre du
Québec. Je ne sais pas s'il y a des représentants qui sont
là actuellement.
M. Blanchard (René): Oui.
M. Burns: Je ne sais pas si cela vous causerait d'énormes
problèmes, étant donné qu'il est 12 h 50 et que
normalement nos travaux cessent à 13 heures, de revenir après la
période de questions, cet après-midi. Je trouve que ce serait un
peu injuste à votre endroit de vous faire commencer la
présentation de votre mémoire pour suspendre à 13 heures
et vous dire ensuite: On recommence vers 16 h 15 ou 16 h 30. Est-ce qu'il y a
quelqu'un au nom de la Société nationale du Centre du
Québec qui pourrait...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):
Etes-vous d'accord sur la solution proposée?
M. Blanchard (René): Oui, M. le Président.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Vous
êtes d'accord? Y a-t-il consentement unanime?
M. Burns: II y a consentement de la commission, je
présume.
M. Ciaccia: Consentement. M. Grenier: Oui.
M. Burns: M. le Président, je propose l'ajournement de nos
travaux sine die tout en disant que nous reviendrons après la
période de questions, cet après-midi.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Les
travaux de la commission sont ajournés sine die.
(Fin de la séance à 12 h 50)
Reprise de la séance à 17 h 6
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A
l'ordre, messieurs!
Les membres de la commission pour la présente séance sont:
M. Bertrand (Vanier), M. Bisaillon (Sainte-Marie) remplacé par M. de
Bellefeuille (Deux-Montagnes); M. Brochu (Richmond), M. Burns (Maisonneuve), M.
Gratton (Gatineau), M. Grenier (Mégantic-Compton), M. Fallu (Terrebonne)
en remplacement de M. Johnson (Anjou); M. Laberge (Jeanne-Mance), M. Ciaccia
(Mont-Royal) en remplacement de M. Lamontagne (Roberval); M. La-voie (Laval),
M. Marcoux (Rimouski) en remplacement de M. Lévesque (Taillon); M.
Mackasey (Notre-Dame-de-Grâce), M. Martel (Richelieu), M. Gosselin
(Sherbrooke) en remplacement de M. Morin (Louis-Hébert); M. Morin
(Sauvé), M. Paquette (Rosemont), M. Roy (Beauce-Sud), M. Samson
(Rouyn-Noranda) et M. Vaugeois (Trois-Rivières).
Société nationale des
Québécois du centre du Québec
J'inviterais maintenant la Société nationale des
Québécois du centre du Québec et ses porte-parole à
bien vouloir présenter leur mémoire de même qu'à se
présenter eux-mêmes, s'il vous plaît!
M. Blanchard (René): Très bien. Merci, M. le
Président. M. le ministre, MM. les députés, mon nom est
René Blanchard. Je suis membre du conseil d'administration de la
Société nationale des Québécois du centre du
Québec. Je suis délégué au comité de travail
sur le référendum.
Permettez-moi de vous présenter les personnes qui m'accompagnent.
A ma gauche, Mme Louise Langlois; à ma droite, Mme Lucille Lefeb-vre,
et, à mon extrême droite, M. Georges Dumaine, qui sont tous
membres du comité de travail sur le référendum.
Voici comment nous aimerions procéder, parce qu'il y a quelques
corrections à apporter au premier texte que nous avons fait parvenir.
Nous avons tenu par la suite deux assemblées et quelques amendements ont
été apportés à ce texte. Si vous nous en donnez la
permission, nous allons faire lecture du texte. Cela ne va prendre, je pense,
que dix minutes. Les corrections se feront automatiquement.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):
Auparavant, M. Blanchard, j'aimerais vous dire quelque chose que j'ai, au
préalable, dit à tous les autres organismes qui se sont
présentés devant cette commission. Cette commission ne doit pas
devenir une tribune pour émettre des opinions de fond sur des objets ou
des sujets pouvant éventuellement faire l'objet d'une consultation
populaire au Québec.
Cette directive dite, je vous laisse la parole.
M. Blanchard: Merci beaucoup! Présentation de la
société. La Société Saint-Jean-Baptiste vit le
jour dès 1895 dans notre région. La première
manifestation importante eut lieu à Drummondville le 19 juin 1902 et
concernait l'organisation d'une Fête de la Saint-Jean.
En 1944, il y eut un regroupement de quelques sections de Drummondville,
de Victoriaville et de la région de Nicolet. Ce regroupement fut
à la base de la fondation de la Société
Saint-Jean-Baptiste du diocèse de Nicolet. Les objectifs poursuivis
alors étaient la mise sur pied de structures organisationnelles en vue
d'une action plus efficace pour la défense des intérêts des
Canadiens français. Sur les plans national, local et régional, la
Société Saint-Jean-Baptiste participait à toutes les
grandes luttes pour l'émancipation des Canadiens français.
Les transformations sociales engendrées par la révolution
tranquille des années soixante touchèrent aussi la
société. Elle devait, désormais, faire face à de
nouveaux défis. De ce fait, au congrès annuel de 1969, une
résolution fut adoptée concernant l'orientation
idéologique de la Société Saint-Jean-Baptiste du
diocèse de Nicolet. Elle reconnaissait au peuple québécois
sont droit à la souveraineté. A partir de ce nouvel engagement de
la Société face à l'avenir du Québec, il
était de mise de changer le nom de la Société
Saint-Jean-Baptiste pour celui de Société nationale des
Québécois; ce qui fut fait officiellement le 16 juin 1970.
Aujourd'hui, la Société nationale des
Québécois du centre du Québec compte 20 000 membres et
recouvre le territoire comprenant les comtés d'Arthabaska, de Drummond,
de Nicolet et de Yamaska. La Société nationale du centre du
Québec appuie l'idée de démocratisation des institutions
politiques telle que prônée dans le livre blanc. Nous croyons
qu'il revient au peuple de décider par voie de référendum
de l'orientation et de l'organisation de sa vie collective. Nous croyons que le
modèle de procédure référendaire utilisé en
Grande-Bretagne, lors de la consultation sur le maintien de son adhésion
au marché commun en 1975, convient plus équitablement à
nos institutions politiques que celles existant en France, en Italie et en
Suisse.
Le contenu du mémoire: La méthodologie du mémoire
que nous vous présentons sera la suivante: Premièrement, l'ordre
dans lequel nous commenterons les sujets élaborés sera le
même que celui du livre blanc. Deuxièmement, on retrouvera les
recommandations que notre société croit pertinentes en vue de
l'élaboration du futur projet de loi qui régira les
référendums au Québec. Finalement, nous nous permettrons
de vous livrer quelques brèves réflexions sur un
référendum, en particulier, celui qui mettra en jeu l'avenir
constitutionnel du Québec.
Le caractère consultatif: Nous croyons que dans la situation
actuelle du Québec, au sein de la Fédération canadienne,
il serait inutile de mener une bataille constitutionnelle sur la
validité d'un référendum délibératif. Si
nous nous référons à l'Acte de l'Amérique du Nord
britannique, il est clair qu'à cause de l'article 92.1, le
lieutenant-gouverneur n'a pas le pouvoir de sanctionner un vote direct
exprimé par le peuple sur une loi ou une constitution quelconque. Nous
concevons donc que d'ici l'accession du Québec à sa
souveraineté politique, les référendums qui se tiendront
auront un caractère consultatif. Nous espérons que lors des
campagnes référendaires, le gouvernement s'engagera à
respecter les résultats du scrutin, comme cela s'est produit en
Angleterre en 1975.
Le droit d'initiative: Le texte du livre blanc nous paraît un peu
ambigu et demanderait des éclaircissements sur les rôles
respectifs du gouvernement et de l'Assemblée nationale. Nous reviendrons
sur ce point dans les recommandations. On espère bien
qu'éventuellement, le droit d'initiative sera élargi et qu'il
permettra à la population de demander des référendums
quand elle le jugera nécessaire. Pour ce faire, on pourrait
étudier les possibilités d'adaptation de la loi suisse des
référendums.
Formulation de la question: Nous considérons que le fait de
recourir à une motion du gouvernement qui ferait l'objet d'un
débat privilégié d'une durée maximale de 25 heures
empêche les possibilités de "filibuster" et qu'il en est
très bien ainsi. Que le gouvernement soit le proposeur de la formulation
finale de la question nous apparaît conséquent avec le fait que
celui-ci représente le pouvoir légitime. Des remarques sur la
langue à utiliser sur le bulletin de vote et sur les modalités de
formulation seront comprises dans les recommandations que nous ferons.
Droit de vote: La société trouve plus démocratique
le fait de donner le droit de vote aux personnes qui en sont privées
lors des élections, tel que mentionné dans le livre blanc, les
juges, le Protecteur du citoyen, les substituts permanents du Procureur
général et les prisonniers.
Participants: La mise sur pied des organisations ad hoc permettra de
bien identifier les options en jeu et un meilleur contrôle des
dépenses encourues lors d'une campagne référendaire. Ces
organisations reconnues demanderont une implication plus grande des citoyens
qui voudront vraiment se prononcer sur la question en litige.
Mise sur pied des organisations: On déplore le fait qu'au sein du
comité provisoire, il n'y ait que des membres de l'Assemblée
nationale. Par contre, pour éviter une certaine lourdeur administrative,
il en est peut-être mieux ainsi.
Contrôle des dépenses: Nous trouvons très opportun
que les agents officiels des organisations contrôlent les dépenses
qu'impliqueront les campagnes référendaires. On évitera
ainsi les possibilités de déséquilibre entre les
organisations et ceci sera très important lors du
référendum sur l'avenir constitutionnel du Québec.
Contrôle des revenus: Nous remarquons une imprécision dans
le texte du livre blanc en ce qui concerne le transfert des fonds de la part
des partis politiques. On devrait spécifier que les sommes venant des
partis politiques regroupés au sein d'une même organisation ne
devraient pas dépasser $0.25 par électeur.
Si le montant des fonds recueillis par les organisations, suivant les
règles établies dans le li-
vre blanc, est supérieur au montant des dépenses,
qu'adviendrait-il de cet argent? Cette situation pourrait se produire, entre
autre, si un très grand nombre d'électeurs participaient au
financement des organisations.
On croit qu'il conviendrait alors de prévoir la création
d'une caisse administrée par l'Etat et dont les fonds serviraient
uniquement au financement des référendums.
Des mécanismes seraient aussi à prévoir pour
inciter les électeurs à participer au financement des
organisations comme, par exemple, fournir des rapports des revenus de
façon régulière pendant la campagne.
Décompte des suffrages: Après une certaine
hésitation, quant au choix des modalités de décompte, il
nous apparaît normal qu'on continue à respecter la Loi
électorale actuelle, c'est-à-dire qu'on fasse le décompte
par circonscriptions électorales. On avait aussi pensé au
décompte par régions administratives, mais nous ne croyons pas
que celles-ci représentent des particularités régionales
suffisamment intéressantes pour être utilisées, du moins
telles qu'elles sont divisées actuellement.
Conclusion: Les recommandations du comité: Globalement, nous
croyons que le projet de loi qui régira les référendums
devra être beaucoup plus élaboré que le livre blanc. La
Société nationale des Québécois du centre du
Québec propose: Premièrement, que la décision de recourir
à la consultation populaire, tout comme le libellé de la
question, devrait faire l'objet d'une motion du gouvernement. Les 25 heures
prévues pour les débats comprendraient alors les discussions
autour de la date de la tenue du référendum et la formulation de
la question. La motion permettrait d'éviter un filibuster et aurait sa
raison d'être en cas de gouvernement minoritaire.
Deuxièmement: Que, lors d'un référendum, une seule
question soit posée permettant une réponse à deux volets,
positive et négative. Que la langue officielle du Québec soit
généralement utilisée sur le bulletin de vote et sur toute
publication ayant trait au référendum et que, dans les
comtés où il y a 10% et plus de population anglophone, tous les
documents soient disponibles en langue anglaise. Que la formulation de la
question soit courte, précise et positive.
Troisièmement: Qu'au niveau des participants à la campagne
référendaire, il y ait: premièrement, les
électeurs, et, deuxièmement, les groupes légalement
constitués et ayant leur siège social au Québec. Qu'ils
soient habilités à faire partie d'une organisation. Qu'une
réglementation stricte et facilement applicable concernant les
modalités de participation soit intégrée au projet de loi
sur la consultation populaire, dans le même esprit que les articles
traitant du financement des partis politiques (projet de loi no 2).
Quatrièmement: Qu'une limite de temps maximale soit prévue
entre la formation du comité provisoire et celle définitive du
comité national afin d'éviter les possibilités de
sabotage. Nous recommandons un délai de sept jours, ce qui reviendrait
à dire que, dix jours après l'émission du bref, tous les
mécanismes d'organisation seraient sur pied et que la campagne
référendaire, en tant que telle, ait une durée maximale de
30 jours.
Cinquièmement: Que le décompte des suffrages se fasse au
niveau des circonscriptions électorales.
Sixièmement: Qu'aucun sondage ne soit permis pendant la campagne
référendaire, pour éviter la manipulation de l'opinion des
citoyens.
Septièmement: Que le gouvernement précise quels seront les
thèmes sur lesquels les référendums pourront être
tenus, constitution, revision de la constitution, ratification de textes ayant
force législative, problèmes de gestion administrative, et le
reste.
Huitièmement: Que le gouvernement, par l'entremise du directeur
général des référendums, prenne en charge
l'impression d'une brochure et l'expédition de celle-ci à chaque
électeur. Cette brochure contiendrait les règlements du projet de
loi concernant les électeurs et le libellé de la question. Selon
l'article 10 du projet de loi 101, une version anglaise sera imprimée et
publiée, laquelle pourra être expédiée aux
électeurs qui en feront la demande.
Réflexions. Du fait qu'il n'y ait aucune tradition
référendaire au Québec, nous croyons que le gouvernement
actuel doit faire preuve de rigueur intellectuelle dans l'élaboration de
ce projet de loi. Un des points manquants dans le livre blanc, qui devra
absolument être intégré dans la loi sur la consultation
populaire, concerne les thèmes qui seront sujets à
référendum. On évitera ainsi un abus au recours au vote
direct du peuple, et ceci donnera plus de crédibilité au projet
de loi en question.
Il va sans dire que des décisions importantes se rapportant
à la vie collective d'un peuple ne peuvent se prendre à la
légère. Les électeurs devront être bien
informés et c'est pourquoi nous avons cru bon de demander dans nos
recommandations une certaine prise en charge de ce rôle d'informateur par
le gouvernement.
Le fait de rendre les Québécois responsables de leur
destin en tant que citoyens d'un pays présente une occasion
rêvée d'éducation politique. Si la majorité
canadienne-française du Québec a connu depuis 1867 les
phénomènes de décultura-tion, d'exploitation et de
domination, de la part d'une minorité canadienne-anglaise, elle aura
à se prononcer sur le maintien ou le refus de cette situation lors d'un
référendum particulier, celui qui se rapportera à l'avenir
constitutionnel de son territoire.
Le principe de base qui présida à la prise de position
souverainiste de la Société nationale des Québécois
en 1969 fut la reconnaissance du droit des peuples à disposer
d'eux-mêmes. Ce droit peut être exercé à partir de
deux concepts de base reconnus par l'ordre international: la possibilité
pour toute collectivité ayant une identité nationale de
constituer un Etat et la prise en main par le peuple de cet Etat des
institutions de droit internes qui lui conviennent. Dans un système
démocratique, la procédure la plus appropriée pour ce
faire est bien sûr l'utilisation du référendum.
"Le référendum est devenu le rite indispensable des
grandes décisions qui affectent la vie d'un peuple. Il est le sacrement
démocratique par lequel le peuple assume son propre destin."
Dans la constitution française de 1958, il est écrit: "La
souveraineté nationale appartient au peuple qui l'exerce par ses
représentants ou par la voie du référendum." Ce moyen de
consultation populaire convient très bien à notre régime
démocratique.
Pour terminer, nous ferons une récapitulation des étapes
doctrinales et dates historiques qui ont fait entrer le droit à
l'autodétermination dans les principes généraux du droit
public, tant interne qu'international; affirmation conjointe du principe des
nationalités et de la souveraineté nationale par les
révolutions américaine et française à la fin du
XVIIle siècle; utilisation qui en est faite aussi bien pour
l'unification italienne et l'unification allemande que pour la constitution de
micro-Etats issus de la décolonisation espagnole au XIXe siècle;
solennisation et "juridicisation" dans les 14 points du président Wilson
et les traités de 1919, puis de la Charte des Nations-Unies au XXe
siècle.
Puisque le droit et le recours à l'autodétermination des
peuples font partie d'un processus d'évolution historique, le peuple
québécois devra être conscient de l'enjeu du
référendum qui lui permettra "de se libérer".
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M.
Blanchard, je cède la parole au ministre.
M. Burns: M. Blanchard, je vous remercie de la
présentation de votre mémoire. J'aurais peut-être deux
heures de questions à vous poser, mais je vais tenter, et pour les
autres intervenants et pour vous-mêmes, de me limiter à quelques
minutes seulement; ceci permettra à mes collègues de
l'Assemblée nationale et membres de la commission de vous poser
également leurs questions.
Je constate d'abord que vous êtes favorables, je pense bien,
à une loi-cadre, une loi qui s'appliquerait à n'importe quelle
consultation référendaire. C'est bien exact?
M. Blanchard: C'est bien exact.
M. Burns: Est-ce que vous avez des commentaires à formuler
là-dessus? Est-ce qu'il y a quelque chose qui vous a menés
à cette décision ou si, dans le moment, vous nous soumettez ce
point de vue purement et simplement parce que vous croyez que le livre blanc
est bien orienté là-dessus?
M. Blanchard: Non, je pense que le principe de ce livre blanc est
indiscutable, surtout les points que nous citons à la fin du
mémoire, que c'est une excellente méthode d'éducation
politique. Nous avons longtemps déploré le fait que cette
éducation politique ait difficilement percé dans nos
institutions. Nous pensons qu'effectivement, peut-être pour soumettre aux
Canadiens français de rattraper "certains retards sur ce plan, le
référendum est une excellente méthode. C'est dans l'esprit
général des discussions que nous avons eues, nous avons
nous-même, longtemps et durant l'histoire de la société
nationale, tenu à l'intérieur de notre organisation de nombreuses
consultations populaires.
C'est lors de ces consultations populaires sur divers sujets, la
souveraineté du Québec, la langue française, même la
conscription, que nous avons fait avancer cette éducation populaire,
cette éducation démocratique.
C'est à la lumière de cette expérience, historique
chez nous, que nous sommes tout à fait d'accord avec l'initiative que
vous avez prise.
M. Burns: Dans un deuxième point, M. Blanchard, je vous
signale, un peu comme je le disais, ce matin, à la Société
nationale de l'Est du Québec, qui nous faisait à peu près
la même remarque que vous nous faites, que l'initiative populaire n'est
pas mise de côté en ce qui nous concerne, elle est temporairement
en veilleuse, si je peux dire. Nous croyons qu'on doit s'habituer à ce
régime de consultation référendaire et, par la suite, se
retrouver peut-être avec l'initiative populaire.
Mais c'est un peu par prudence que, dans un premier temps, le
gouvernement dit: C'est peut-être nécessaire de mettre en marche
les rouages, les mécanismes de la consultation, pour, par la suite, les
appliquer de façon générale. S'il y a une
possibilité de consultation référendaire, à la
demande de la population, si les rouages ne sont pas prêts à la
recevoir, cela risque de poser un certain nombre de problèmes.
C'est dans ce sens, et uniquement dans ce sens, qu'actuellement, nous
mettons un peu en veilleuse, tout en disant que cela figure dans nos projets,
celui de les faire fonctionner le plus rapidement possible.
Dans ce sens, nous sommes d'accord avec l'une de vos suggestions,
c'est-à-dire que les référendums ne soient pas uniquement
à l'initiative gouvernementale, mais aussi à l'initiative
populaire, tout en vous disant que, dans un premier temps, dans une
première loi que nous soumettrions à l'Assemblée
nationale, il n'y aurait pas d'initiative populaire, du moins, pour le
moment.
Je ne sais pas si cela répond à la question que vous posez
dans votre mémoire?
M. Blanchard: Cela a été un sujet de
préoccupation aussi. On s'est demandé quel mécanisme vous
alliez prévoir et si on pouvait être assuré, dès
l'adoption de ce livre blanc, que les consultations populaires pourraient
être éventuellement possibles.
M. Burns: L'idée est là, mais dans une
première loi, je ne pense pas que l'idée de la consultation
populaire comme telle soit présente dans le projet de loi que nous
déposerons probablement vers la mi-décembre.
Je m'arrête à deux autres de vos recommandations, M.
Blanchard, celle où vous suggérez une question à deux
volets et celle où vous nous dites
que la question devrait être formulée de façon
courte, claire et précise.
Quant au deuxième aspect de ces deux remarques, je vous dis que
je suis totalement d'accord avec vous; que la question soit claire, courte et
précise, je suis entièrement d'accord. Qu'elle soit à deux
volets, cela m'intéresse beaucoup d'entendre vos commentaires
additionnels. Je pense que vous avez peut-être entendu, la semaine
dernière, ma réaction à une telle suggestion. Je disais
qu'en ce qui me concerne cela ne lie pas le gouvernement je suis
porté à croire que la question devrait être unique, avec un
oui ou un non comme réponse, mais, évidemment, cela demeure
encore une question tout à fait personnelle en ce qui me concerne.
Quelle est votre raison de suggérer une seule question? Y a-t-il quelque
chose de particulier ou est-ce que c'est relié au deuxième
aspect, à la question claire, nette et précise?
M. Blanchard: C'est surtout relié au deuxième
aspect. C'est pour empêcher justement que la question ne soit pas claire,
précise et concise. Nous sommes préoccupés par ce que le
public... Admettons, par exemple, qu'il y ait un problème
constitutionnel que l'on veut résoudre à l'aide du
référendum. Ces problèmes sont évidemment
très complexes. Ce que nous suggérons, dans un même bloc,
c'est que le gouvernement lui-même publie un livre, au préalable,
et, évidemment, explique bien à tout électeur et à
chaque électeur la teneur du problème et fasse aussi mention de
la question qui sera posée. On voudrait que, déjà, dans
les informations transmises...
M. Burns: En passant, M. Blanchard, je trouve votre suggestion
là-dessus très intéressante, non pas seulement
là-dessus, il y en a beaucoup que je trouve intéressantes, mais
celle-là, je la trouve très intéressante aussi. Je vous
pose simplement la question relativement à l'émission d'une
certaine publicité qui pourrait provenir du gouvernement, à
savoir si vous ne croiriez pas que le gouvernement aurait l'air, à ce
moment-là, de s'immiscer de façon très précise et
très partisane dans la bataille, quelle que soit la bataille, s'il y en
avait une relativement à une question ou à des questions, que ce
soit relativement à un référendum ou à plusieurs
autres référendums. Je voudrais tout simplement avoir vos
commentaires là-dessus, savoir ce que vous en pensez.
M. Blanchard: Je pense que le gouvernement, de toute
façon, a décidé de s'immiscer dans cette question et il va
devoir continuer. Qu'il le fasse avec des modalités comme on l'a fait
dans l'éducation en créant le Conseil supérieur ou que
l'on crée un conseil des référendums, c'est
peut-être une voie de sortie, d'évitement de ce que vous signalez
comme dangers pour le gouvernement ou peut-être aussi que c'est une voie
qui permettrait d'éviter certains reproches que l'on pourrait faire au
gouvernement de postuler lui-même son référendum avec les
moyens du bord, avec les moyens un peu partisans.
C'est dans cette idée que nous retenons peut-être la
création d'une structure à laquelle on pourrait confier la
publication de ce volume et ensuite l'approche générale de la
question.
M. Burns: En somme, cela ne vous surprendrait pas de voir le
gouvernement donner à l'ensemble de la population un certain nombre de
renseignements relativement à un référendum ou à
des référendums, peu importe le sujet qui...
M. Blanchard: On croit que c'est absolument essentiel d'abord,
parce qu'on a signalé souvent, et les députés de
l'Opposition l'ont mentionné très souvent, que ce n'est pas dans
nos moeurs politiques, ce n'est pas l'habitude, ce n'est pas la tradition, je
pense, bien qu'on puisse répondre à cela. Nous sommes
parfaitement conscients que le référendum est un excellent outil
qui permet enfin aux Canadiens français de s'impliquer dans les
structures politiques qui les gouvernent. Nous n'avons jamais choisi
l'organisation politique, l'organisation gouvernementale. Il est
peut-être grand temps de demander aux Canadiens français, en
général, de sanctionner des institutions politiques qu'ils n'ont
pas été en mesure de choisir dans leur histoire. Nous supposons
qu'au départ, il faudrait tout de même le faire au profit de
chaque électeur, et non pas au profit de l'organisation qui serait
partisane d'une solution ou d'une autre, à l'occasion d'un
référendum donné, mais au profit de chaque
électeur, préalablement, une excellente information
d'approche.
M. Burns: Je vous signale, M. Blanchard, que vous n'êtes
pas loin du modèle britannique qui est un peu le modèle que nous
suivons dans notre approche. Le modèle britannique prévoyait
justement que chaque position, en l'occurrence le comité du oui et le
comité du non, distribuerait à l'ensemble des électeurs
son point de vue, et le gouvernement, en plus, distribuerait son point de vue
également, toujours sur les mêmes fonds. Evidemment, cela peut
peut-être, au Québec, mériter un certain nombre de
rajustements, mais c'est très près de ce modèle que nous
adoptons, même si on nous dit que nous nous en écartons de
façon sérieuse.
M. Blanchard: Oui, c'est cela... On est tout à fait
d'accord aussi que l'effort ici soit plus poussé que le modèle
britannique, parce que justement, on a un retard terrible à rattraper
à ce niveau, la sensibilisation des électeurs, des citoyens au
gouvernement.
M. Burns: D'accord. Je prends bonne note, M. Blanchard, de votre
recommandation de porter le délai de trois jours, sauf erreur, à
sept jours, relativement à la formation du comité ad hoc
permanent par rapport à la formation du comité provisoire de
députés. Je pense que vous n'êtes pas le premier groupe
à nous faire cette suggestion. Il y a peut-être lieu de
reconsidérer notre position là-dessus. On pensait que, dès
que le débat aurait été entamé à
l'Assemblée nationale, déjà il y aurait
beaucoup de gens passez-moi l'expression qui seraient
branchés, relativement à une position ou à une autre. Dans
ce sens, on se disait que peut-être trois jours, c'était
suffisant. C'était le délai qui avait d'ailleurs
été utilisé en Grande-Bretagne. Si un certain nombre de
groupes nous suggèrent de changer cela et de l'allonger, je pense bien
qu'il n'y a pas de difficulté là-dessus. Il y a moyen de
réexaminer cela et de voir comment on peut y arriver. Evidemment, le
livre blanc surtout est d'accord avec votre recommandation, à savoir que
les sommes venant des partis soient limitées à $0.25 par
électeur. Je pense bien que, là-dessus, on est d'accord.
Le décompte des suffrages au niveau des circonscriptions. Cela
m'intéresse beaucoup de vous entendre là-dessus. Quelle est la
raison qui vous a fait... Là-dessus, le livre blanc est ouvert. Il dit:
Au niveau national, au niveau régional ou au niveau des
circonscriptions...
M. Blanchard: C'est une question qui nous a retenus assez
longtemps. On s'est demandé, par exemple...
M. Burns: Oui, j'imagine. Nous aussi, d'ailleurs. Je peux vous
dire que...
M. Blanchard: Oui, comme cela a été pendant une
longue session d'étude... On s'est dit: Effectivement, il existe au
Québec une Loi électorale qui a été souvent
amendée, qui est, je pense, assez parfaite pour qu'on cesse, pendant un
moment, de la tripoter. Qu'on s'en serve effectivement et qu'on n'y
déroge pas lors des consultations populaires. Pourquoi? Parce que les
gens s'habituent à un mécanisme et ils sont bien plus à
l'aise quand ce mécanisme connu est requis, chaque fois qu'une
consultation est déclenchée. Or, ça nous semble tout
à fait normal, économique et rationnel d'utiliser la Loi
électorale, les agents en place, le président des
élections, tout ce mécanisme bien connu et qui, à mon
avis, donne un excellent résultat au Québec à l'heure
présente.
M. Burns: Dernière question, M. Blanchard. L'une de vos
recommandations veut qu'aucun sondage ne soit permis pendant la période
référendaire. Vous êtes-vous penchés, de
façon précise, sur le contrôle qui peut être
exercé par le gouvernement du Québec dans l'état actuel de
la législation et de la compétence du Québec sur cette
possibilité? Par exemple, si Radio-Canada, qui est sous le
contrôle du CRTC, qui est de juridiction fédérale,
décidait de faire un sondage et de le publier, est-ce que vous croyez
qu'on pourrait, dans l'état actuel, avoir un certain contrôle sur
la prohibition qu'on pourrait mettre dans la loi relative à des sondages
d'opinion quant à un référendum en particulier ou pas?
M. Blanchard: Quelle que soit la question, je pense qu'il faut
tout de même s'arrêter aujourd'hui sur, justement, le sondage, sur
ce qu'implique le sondage, sur l'utilisation qu'on en fait, sur,
évidemment, l'intérêt qu'ont certains groupes à le
dévier. Les dernières expériences vécues nous
amènent à dire, surtout la dernière... On voyait, par
exemple, qu'un sondage comparé à un autre, donnait des
résultats tout à fait opposés ou, du moins, que ces
sondages partaient de prémisses différentes. C'est
peut-être pour ça qu'on est arrivé à des
résultats qui ne correspondaient pas. Alors, au lieu de mêler les
gens avec des sondages, au lieu, évidemment, d'inciter les gens qui ne
possèdent pas la maturité nécessaire, qui ne se
renseignent pas, qui ont tendance à aller du côté où
des chiffres plus significatifs pourraient les entraîner, ce qui n'est
pas tellement démocratique, on a pensé que ce serait normal,
à l'heure actuelle, connaissant la possibilité des media, la
puissance de certaines publicités, on a pensé qu'il valait mieux
que l'Etat, déjà, à ce moment-ci, et peut-être
à l'occasion de cette question particulière, statue sur le
tripotage de l'opinion publique par les sondages.
M. Burns: Je vous remercie, M. Blanchard, pour la
présentation de votre mémoire. Je remercie également Mme
Langlois et Mme Lefebvre qui vous accompagnent. Peut-être ai-je
oublié un de vos collaborateurs qui est là?
M. Blanchard: M. Dumaine.
M. Burns: M. Dumaine, je vous remercie également de votre
présentation. Je pense que votre mémoire est très positif;
il tient compte du fait que nous cherchons ensemble, sans les imposer à
qui que ce soit, des normes qui déplairaient, nous cherchons ensemble
à trouver ce qui va assurer une certaine impartialité, une
certaine efficacité éventuellement a la tenue de quelque
référendum que ce soit. Je pense que votre mémoire tient
compte de ces préoccupations et je vous en remercie.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Merci,
M. le ministre. M. le député de Laval.
M. Lavoie: Bonjour, M. Blanchard, je crois que cela me rappelle
certains souvenirs. N'étions-nous pas confrères sur des bancs de
collège, quelque part, il y a de très nombreux mois?
Une Voix: II a bien tourné, lui!
M. Lavoie: Je ne m'attarderai pas aux propos du
député, l'humour existe de notre côté, vous
savez!
M. Blanchard: Je voudrais signaler, Me Lavoie, qu'on avait
organisé déjà la visite de M. Maurice Duplessis, lorsqu'on
était à l'Université de Montréal.
M. Lavoie: Nous étions parmi les premiers
contestataires.
M. Blanchard: Vous avez raison.
M. Marcoux: Vous étiez autonomiste dans ce
temps-là?
M. Burns: Cela a bien changé!
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A
l'ordre!
M. Lavoie: Non, je ne suis pas devenu gamin comme vous.
M. Marcoux: Vous ne l'êtes pas devenu, vous l'êtes
toujours.
M. Lavoie: M. Blanchard, je voudrais que vous puissiez
élaborer votre pensée quelque peu; vous nous dites, dans votre
mémoire qui est d'ailleurs très bien fait et dont je tiens
à vous féliciter la concordance que vous voyez dans la
philosophie du livre blanc avec l'expérience anglaise de 1975.
Pourriez-vous nous établir les points de concordance que vous trouvez
entre cette expérience de 1975 et celle que nous envisageons, ici,
actuellement au Québec?
M. Blanchard: II y a une concordance de mécanismes, parce
que nous avons trouvé que, chez les Anglais, la consultation populaire,
pour des raisons qui commencent en 1215, à la Grande Charte, et qui se
poursuivent en 1710, avec le Bill des droits, tout ce contexte anglophone a
peut-être permis aux Anglais d'avoir, au point de vue des
mécanismes de consultation populaire, ce qui est peut-être le
mieux réussi, actuellement, dans l'histoire de la démocratie. La
différence que nous y trouvons, c'est que la question que l'on posait
aux Britanniques était une question très précise. On leur
demandait s'ils voulaient maintenir leur adhésion ou la rejeter.
Evidemment, en arrière de cette question très précise, il
y a tout un contexte historique qui bouleversait complètement toute
l'histoire de l'Angleterre, une histoire qui, comme on le sait, est
l'insularité et celle-ci était pour eux presque un dogme;
c'était en fait aussi la pierre philo-sophale de leur style de commerce
et peut-être de démocratie, de présence militaire. Or, il
nous est apparu, justement à cause de l'enjeu, que les Anglais avaient
soigneusement mis à point, avaient pris toutes les précautions
voulues pour que le référendum soit assez parfait pour qu'il ne
puisse pas être entaché d'interventions gouvernementales ou
autres.
Cela nous est apparu comme un chef-d'oeuvre, pour le moment. Les
chefs-d'oeuvre changent, selon le temps, mais pour la science des
référendums, ils nous sont apparus, à cause de l'enjeu qui
était le leur, comme un achèvement. On a
préféré cela au modèle suisse en particulier, parce
que le modèle suisse est un modèle par cantons. Il y a des
référendums régionaux, etc. Comme la tradition ici, qu'on
nous a imposée, qu'on a choisie parfois à bon escient, ce qui
nous a dérangés aussi, parce que la façon de manipuler le
parlementarisme britannique, il faut dire que c'est pour nous assez original,
mais il reste quand même que c'est peut-être la forme de
parlementarisme à laquelle, traditionnellement, on est attaché et
qui, avec quelques améliorations, et surtout peut-être un
changement de climat parfois à l'As- semblée nationale, nous va
comme un gant, du moins qui nous permet d'assez bien fonctionner, surtout avec
les "refactures" que les présidents d'Assemblée ont pu
réaménager quant à la conduite des débats. Je pense
qu'on est assez bien dans ce parlementarisme pour continuer à le faire
fonctionner en utilisant ce qui ailleurs a été adossé
à ce parlementarisme et qui est dans le même esprit, soit la loi
anglaise sur les référendums. Je ne sais pas si cela peut vous
expliquer l'esprit dans lequel on a évolué.
M. Lavoie: M. Blanchard, quels sont vos commentaires sur le fait
qu'en Angleterre, au lieu de présenter, étant donné les
comparaisons qu'on peut faire entre les deux, entre les institutions
britanniques et les institutions du Québec, institutions politiques et
moyens de fonctionner pour le Parlement et le gouvernement, comment
trouvez-vous la différence suivante, entre autres, que les Anglais aient
jugé à propos de faire une loi spéciale pour un
référendum en particulier, peut-être du fait, comme nous,
qu'ils n'étaient pas habitués à cette tradition de
démocratie directe... quelle est votre considération, dis-je, sur
le fait que, là-bas, ils aient opté pour une loi spéciale
sur un sujet bien précis, qui était un problème avec
beaucoup d'acuité, celui de demander à la population si elle
décidait de maintenir l'appartenance au marché commun ou de s'en
sortir, alors qu'ici également, comme la plupart de tous nos
témoins, des groupes qui sont venus ici, même si on a un livre
blanc sur les consultations populaires, je pense que tout le monde
privilégie, tout le monde porte son attention d'une manière
particulière sur un référendum en particulier, celui de
l'avenir constitutionnel du Québec? Quelle est votre réaction du
fait qu'en Angleterre, on ait décidé de voter une loi
spéciale, mais qu'ici on vote une loi-cadre sur une multitude de
possibilités de référendums? Est-ce que vous ne voyez pas
là une certaine différence?
M. Blanchard: II y a une différence et c'est un peu ce que
nous soulignions tout à l'heure. Les Anglais possèdent un
instrument qu'ils ont eux-mêmes développé
traditionnellement, qui est une émanation naturelle de leur concept de
démocratie, tandis qu'au Québec, c'est une institution
parlementaire britannique qu'on nous a tout de même imposée lors
de la conquête. On est parti avec cela et il faut dire que parfois on l'a
rnanoeu-vrée assez mal et peut-être qu'on n'a pas su s'en servir
au mieux. On se retrouvait peut-être moins bien dans cette institution
que si elle avait émané, tranquillement comme pour les Anglais,
d'une lente expérience historique. Ce qui nous apparaît
actuellement acceptable, surtout dans le cas d'une loi-cadre, c'est que cette
loi-cadre va peut-être permettre au gouvernement de consulter plus
souvent et plus efficacement la population sur les questions qui engagent son
destin et qui sont en fait des questions, comme la question constitutionnelle,
extrêmement graves. C'est une question qui est peut-être plus grave
que celle qu'on trouvait en Angleterre, malgré l'importance du maintien
dans le Marché commun.
Personnellement, je suppose qu'une loi-cadre permettrait, à prime
abord, au gouvernement, de roder l'expérience sur une question moins
importante que celle-là pour que la consultation soit plus
démocratique et plus valable.
M. La voie: Vous référez peut-être à
ce que le ministre responsable du dossier a appelé, une fois, un "dry
run", cela se dit sur les chantiers, une pratique quoi.
Quand même, vous reconnaissez, au départ, une distinction
entre le processus britannique et le processus qu'entreprend le Québec;
au lieu d'adopter une loi spécifique, on adopte une loi-cadre. Il y a
quand même une première différence.
M. Blanchard: Oui, certainement.
M. Lavoie: Quels seraient vos commentaires sur, je dirais, la
deuxième différence, sur le fait qu'en Angleterre, avant de
publier le livre blanc, le gouvernement là-bas, qui était le
gouvernement travailliste, ait jugé à propos de consulter, entre
autres, tous les partis qui siégeraient au Parlement, non pas seulement
les politiciens, mais également les groupes existants, avant la
publication du livre blanc. Est-ce que vous croyez que cela aurait
été préférable qu'il y ait eu une consultation?
Surtout sur un sujet où on a besoin, comme le ministre l'a dit, de
l'apport de tout le monde, sur une expérience de la sorte, est-ce que
cela n'aurait pas été souhaitable qu'il y ait eu plus de
concertation ou de consultation avant de se lancer dans quelque chose
où, au départ, il y a un danger de se séparer?
Séparer dans le sens législatif seulement.
M. Blanchard: Je pense que c'est une question de choix. Les deux
interprétations sont acceptables. Je pense que les personnes qui ont
manifesté un intérêt à faire connaître leur
opinion comme notre groupement, on se trouve ici cet après-midi, et je
crois que c'est valable. Aller demander à des chambres de commerce qui
ne voulaient pas se prononcer ou qui n'étaient pas
intéressés à étudier au préalable la
question, dans un autre mécanisme, de se prononcer sur une semblable
loi, cela aurait peut-être été beaucoup de temps perdu et
beaucoup de deniers de l'Etat; l'acheminement d'une commission
itinérante qui se serait promenée à travers le
Québec... Je ne sais pas.
Quant à nous, nous sommes satisfaits de ce projet qui nous
demande de venir vous rencontrer ici.
M. Lavoie: Quels seraient vos commentaires sur le fait qu'en
Angleterre, en 1975, les gens aient jugé à propos, dans le livre
blanc, de formuler au départ la question? Est-ce qu'il n'aurait pas
été souhaitable, ici également, que la question ait pu
être formulée dans le livre blanc.
M. Blanchard: La question, en Angleterre, était
déjà connue depuis longtemps et on avait annoncé, depuis
six ans ou sept ans, qu'on en arriverait à poser cette question au
peuple; les gou- vernements travaillistes, surtout, ont eu assez de peine
à se faire admettre et même à être élus pour
ne pas courir le risque de faire autrement.
Dans le cas qui nous préoccupe, je pense bien que ça nous
va tout de même; on n'a pas trouvé que les partis d'Opposition
pouvaient être lésés puisque la discussion, surtout la
répartition du temps, les questions, l'acheminement, nous semblent
parfaitement démocratiques et on peut répondre, au mieux de notre
connaissance, aux interventions autant du parti au pouvoir que de
l'Opposition.
M. Lavoie: Lorsque vous dites que vous êtes d'accord sur la
nette concordance entre la philosophie du livre blanc britannique sur la
consultation populaire et celle du Québec, j'aimerais que vous
élaboriez peut-être sur les comités ad hoc, ou les
comités d'organisation qui existaient effectivement en Angleterre et qui
vont exister ici, peut-être pas selon le même mécanisme, si
vous voulez. Mais pourriez-vous nous faire le parallèle?
Préféreriez-vous qu'on se colle plus sur l'exemple britannique
que sur ce qui est proposé dans le livre blanc actuellement, sur
l'organisation des comités ad hoc des différentes options?
M. Blanchard: II y a un problème qui n'existe pas en
Angleterre. Je ne sais pas si on a assez insisté là-dessus, mais
ici il y a évidemment des partisans d'une autre forme de gouvernement
qui vont intervenir par certaines organisations, qui vont devoir entrer dans
ces comités ad hoc, c'est-à-dire que chacun devra choisir son
orientation pour participer à la campagne
référendaire.
Je pense que c'est tenir compte d'un contexte très particulier
dans lequel une question comme la question de la souveraineté du
Québec pourrait être débattue. L'intervention des personnes
de l'extérieur du Québec, l'intervention des personnes à
l'intérieur de structures corporatives, pourrait fausser le débat
si on n'avait pas créé ces comités qui vont
intégrer les partisans des deux options.
Qu'on ait poussé plus loin la similitude avec ce qui existe en
Angleterre... Je me demande si l'auteur du livre blanc n'a pas tenu compte de
la différence qu'il y avait entre les deux expériences, celle qui
a été vécue en Angleterre dernièrement et celle que
nous sommes appelés à vivre dans un contexte un peu
différent, quoique cela s'approche terriblement. Il n'y a pas de
grosse...
M. Lavoie: Vous me répondrez si cela s'approche. Vous
savez qu'en Angleterre, dans la loi spécifique qu'ils ont passée
pour le référendum, il n'y avait pas de problème; la
question était bien claire: Est-ce que vous désirez le maintien
de l'appartenance de la Grande-Bretagne au Marché commun, etc.? Oui ou
non?
Là-bas, vous êtes au courant sans doute, il y avait deux
comités qui étaient obligatoires. C'étaient des
comités qui avaient de l'aide de l'Etat dans la campagne
référendaire. Même si l'aide était assez minime,
c'était 125 000 livres sterling que l'Etat donnait à chaque
option, à chaque camp. 250 000 dollars pour une population de
50 millions, cela veut dire que la contribution de l'Etat était
plutôt minime, comparée à ce que le gouvernement ici
propose, $0.25 par électeur. En proportion, c'est peut-être 50
fois plus que la contribution britannique.
Mais, êtes-yous au courant qu'en Angleterre ceux qui
désiraient participer à la campagne référendaire,
en dehors de ces deux blocs qui avaient l'aide de l'aide de l'Etat, avaient
toute la latitude et la liberté voulue pour participer à la
campagne référendaire?
M. Blanchard: C'est un problème typiquement anglais
où les interventions extérieures n'étaient pas à
craindre.
M. Lavoie: Comment voyez-vous cela ici? Ne croyez-vous pas qu'il
pourrait y avoir, en forçant les gens de tout acabit à se joindre
à deux groupes ou à six groupes parce que, s'il y a trois
questions, cela fera six groupes. Il y aura deux possibilités à
chaque question de les forcer à joindre ces camps des atteintes
à une charte je ne sais pas si vous croyez... j'espère que
vous croyez en la Charte des droits et libertés de la personne, loi qui
a été votée à l'unanimité du Parlement, il y
a à peine deux ou trois ans dans laquelle on reconnaît une
liberté, des libertés fondamentales d'opinion, d'expression,
d'association? Ne croyez-vous pas qu'en ayant des contraintes très
sévères on puisse brimer des droits fondamentaux qui
appartiennent à chacun des citoyens du Québec?
M. Blanchard: Cela peut arriver. Il existe aussi, de l'autre
côté, le même danger. Si vous permettez à des groupes
très puissants de financer, avec les moyens d'information, les media, la
publicité, d'influencer le vote, il se peut fort bien que vous fassiez
courir à l'ensemble de la population le même danger.
M. Lavoie: Vous n'avez pas confiance en l'intelligence de la
population. Vous croyez que la population va se faire acheter.
M. Blanchard: On a confiance en son intelligence, mais on a aussi
un regard sur l'histoire. On sait comment, par exemple, les consultations
populaires peuvent être influencées par une trop forte insistance,
de mises de fonds, surtout grâce aux media.
Que l'expérience anglaise se soit permis ce libéralisme,
je pense bien que tous les gens en Angleterre étaient essentiellement
intéressés au sort de l'Angleterre, au sort de l'ethnie
anglaise.
Ici, je pense qu'en faisant confiance à l'intelligence de tout le
monde, il se peut, si on ouvre trop larges les portes des associations qui
peuvent venir de tout bord, tout côté, même de pays
étrangers intéressés, par exemple, à ce que le
Québec garde sa place et sa place tranquillement, qu'on fasse aussi
envers les Québécois une opération qui ne soit pas
tellement favorable à la démocratie.
On s'est posé la question. On en a discuté as- sez
longuement et on s'est dit: Entre les deux possibilités qui s'offrent,
on choisit effectivement celle qui limite. $0.25, cela nous paraissait
déjà exorbitant. On a été surpris, ce matin, de
voir que des gens préconisaient $0.50.
Cela nous semble un montant parfaitement suffisant, pour le moment,
compte tenu des campagnes électorales que nous connaissons. Il nous est
paru aussi que la façon dont on forçait les groupes à se
diviser... Remarquez bien que nous, à ce moment, on s'est posé
aussi la question: Est-ce que cela ne fait pas partie de l'option de certains
gouvernements qui obligent au bipartisme à l'intérieur des cadres
de partis? Ici, on permet évidemment à des partis de
naître, de tomber, et certains s'en trouvent bien. Seulement, il n'y a
peut-être pas aussi plus de dérogation à la mesure que veut
prendre le gouvernement qu'à une autre mesure où, dans certains
pays, on oblige les gens à s'inscrire dans deux partis.
M. Lavoie: II y a des référendums dans certains
pays, il y en a eu deux ou trois en Suède sur une période d'une
cinquantaine d'années, il y en a eu en Nouvelle-Zélande, il y en
a eu en Italie, à Terre-Neuve, quelques-uns en France. Pouvez-vous me
donner un exemple dans le monde, spécialement en France ou ailleurs,
où on a trouvé une formule pour restreindre les orgies de
publicité ou le tapage publicitaire...
M. Burns: Oui, en Angleterre. M. Lavoie: Un instant! M.
Burns: En Angleterre.
M. Lavoie: M. le Président, je n'ai pas interrompu le
ministre. Il sait que ce qu'il dit là, c'est faux, parce qu'en
Angleterre, on a laissé la liberté aux gens en dehors des deux
camps. Voulez-vous être honnête et me laisser parler, s'il vous
plaît?
M. Burns: Oui, mais...
M. Lavoie: Je ne vous ai pas interrompu une seconde durant vos
questions.
M. Burns: C'est pour vous aider que je dis cela.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Allez,
M. le député de Laval.
M. Lavoie: Ce que vous dites est faux, d'ailleurs, parce qu'en
Angleterre, on n'a pas trouvé la formule pour brimer les gens dans deux
camps bétonnés, si vous voulez. Voulez-vous me donner un autre
exemple où on a trouvé une formule? On la cherche
peut-être. On est un peu comme Dio-gène. Pour trouver une formule,
il faut mettre un frein à des dépenses exagérées de
fonds privés ou de fonds publics. Si vous en avez, est-ce que vous avez
un exemple, en France, en Suisse, en Italie, en Suède, en Australie, en
Nouvelle-Zélande ou en Norvège, où on a trouvé une
formule, tout en lais-
sant la liberté des droits fondamentaux aux gens et en mettant
des freins à des orgies de dépenses publicitaires ou autres?
M. Blanchard: Non, je ne pense pas qu'il y ait de formule
absolument parfaite. Elle est, comme vous le dites, toujours perfectible et on
la recherche encore.
M. Lavoie: Même en Angleterre, d'ailleurs.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Voici,
il est 18 heures. Normalement, je serais censé suspendre nos travaux
jusqu'à 20 heures. M. le député de Laval, il vous reste
dix minutes. M. le député de Mégantic-Compton m'informe
qu'il en aurait pour...
M. Grenier: Pour une demi-heure.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Vous en
avez pour une demi-heure?
M. Grenier: C'est-à-dire que le règlement me donne
une demi-heure.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):
D'accord. Il m'informe qu'il en aurait pour cinq minutes. Alors, les travaux de
la commission sont suspendus jusqu'à 20 heures. Vous allez pouvoir
être ici à 20 heures?
M. Blanchard: Oui, M. le Président.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Les
travaux de la commission sont suspendus jusqu'à 20 heures.
(Suspension de la séance à 18 heures)
Reprise de la séance à 20 h 14
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A
l'ordre, s'il vous plaît!
Il s'agit de la continuation de la séance qui avait
commencé cet après-midi et la parole était, lors de la
suspension à 18 heures, au député de Laval. M. le
député de Laval.
M. Lavoie: M. Blanchard, avant le dîner, nous avions
relevé quelques distinctions entre le fonctionnement
référendaire britannique en 1975 et celui que nous
prévoyons avoir ici au Québec, notamment en ce qui concerne la
loi spéciale par rapport à une loi-cadre. La question figurait
là-bas dans le livre blanc et dans la loi et, ici, du fait qu'on propose
une loi spéciale, il est sûr que la question ne peut pas
être incluse dans la loi. Nous étions sur les organisations
obligatoires ad hoc et nous nous demandions quelle formule trouver pour qu'il y
ait justice pour un peu tout le monde dans cette obligation de
s'intégrer à des organisations ad hoc.
Le dilemme, c'est que nous avons, d'un côté, une
réglementation qui forcerait les citoyens qui désirent participer
à cette opération référendaire dans un sens ou dans
l'autre à s'intégrer à des organismes bien définis
et, de l'autre côté, certaines contraintes que nous avons par des
statuts, par des lois sur des droits fondamentaux. Ne croyez-vous pas, s'il y a
un choix à faire entre les deux, qu'on devra, quand même, le mieux
qu'on peut, privilégier les droits fondamentaux des citoyens, droit
d'expression, d'association et d'opinion? Où faire la
démarcation? Ce n'est pas facile.
M. Blanchard: C'est bien sûr, M. le député de
Laval, qu'entre l'exercice de droits fondamentaux, des droits personnels et des
droits collectifs, il y a toujours une certaine marge qui,
particulièrement, et à ce moment-ci de l'histoire du
Québec, crée des tensions. Si on prend, par exemple, la question
des référendums ailleurs, on sait très bien que ce
phénomène, par exemple, où il y a deux groupes nationaux
qui vont être appelés à se prononcer sur une question
nationale impliquant une majorité à l'intérieur d'une
province et une autre majorité dont une partie est à
l'intérieur de la province et une autre partie est à
l'extérieur.
M. Lavoie: Qu'est-ce qui vous fait dire que cette majorité
ne pourrait pas être également dans la même province? Vous
n'avez pas le droit de présupposer qu'il y a nécessairement
majorité dans une province.
M. Blanchard: Non, mais c'est un état de fait dont il faut
tenir compte lorsqu'on prévoit, par exemple, les mécanismes. Par
exemple, si l'on dit, comme on est en droit peut-être, dans certains cas,
de le prétendre, que la question des Canadiens français
québécois va se régler par les Canadiens français
québécois.
M. Lavoie: ... prioritaire.
M. Blanchard: Comment prévoir, par exemple que l'autre
groupe national, les anglophones du Québec, va se prononcer à
l'intérieur même d'une question qui ne concernerait à
priori qu'un groupe national majoritaire? Je pense que dans un comité
comme le nôtre, nous n'avons ni l'éclairage ni probablement la
compétence politique pour trouver le meilleur cheminement. Mais je pense
que l'on peut faire confiance à l'Assemblée nationale, le
débat est bien lancé et on va certainement trouver les
mécanismes qu'il faut pour que le droit personnel et le droit collectif
puissent se côtoyer honorablement dans une loi.
M. Lavoie: II ne faudrait pas oublier qu'en Angleterre ils ont
déclaré qu'ils n'ont pas trouvé la formule d'une
application. Ce qui est facilement applicable, en vertu de la loi 2 ou de notre
Loi électorale pour la limite des dépenses, autant c'est facile
d'application si on trouve un délinquant. Il y a une peine de
disqualification s'il dépense plus que prévu par la loi pour son
élection. C'est quand même de la juridiction, de la
compétence provinciale d'élire ces représentants du
peuple. D'ailleurs, on vit cette loi depuis 1964, on dit que dans tel
comté on a le droit à tant. On peut vérifier, on peut
prouver si quelqu'un ne respecte pas la loi. Il y a des sanctions. Mais vous
voyez le problème, dans une question idéologique, sur une
question référendaire? Comment trouver la formule sans brimer
quand même les droits fondamentaux des gens? Je ne parle pas des
anglophones, les droits fondamentaux de tous les Québécois,
francophones, anglophones ou autres.
M. Blanchard: Moi, je crois qu'on va s'acheminer vers un projet
pilote qui va même éclairer le droit international. Il pourrait
même, par ricochet, servir à l'Angleterre, si elle voulait, par
exemple, discuter avec les Irlandais, dans un même
référendum, l'insertion des Irlandais dans une nouvelle
constitution.
M. Lavoie: Je vais vous donner l'hypothèse suivante: votre
groupement, la Société nationale des Québécois du
centre du Québec, est sans doute un groupe dynamique et tout. Comme
d'autres groupes, vous avez le droit à vos opinions, vous avez le droit
de les exercer, vous avez le droit de les défendre, vous avez le droit
de les faire valoir, vous avez le droit de faire du prosélytisme.
Bon, prenons l'hypothèse suivante, qu'il y ait un
référendum sur l'exemple qui nous concerne d'une manière
toute particulière, sur l'avenir constitutionnel du Québec. La
question, décidée par le gouvernement, est soumise à la
majorité parlementaire gouvernementale, majorité on ne
peut s'en cacher partisane d'un gouvernement qui va avoir le dernier mot
sur la formulation de la question. Disons que pour une raison ou une autre
cette question ne va pas assez loin à votre goût et qu'il y ait,
de la majorité ministérielle, un comité ad hoc pour une
option et un comité ad hoc contre cette option. Il peut arriver que
votre société ne soit pas acceptée dans un groupe parce
que vous êtes trop d'avant-garde. Le groupe qui va contrôler
l'option gouvernementale dit: Non, vous êtes trop avant-gardistes, on ne
veut pas vous avoir dans notre campagne référendaire. On dit:
Non, vous n'avez pas le droit.
Qu'est-ce que va faire votre groupement, la Société
nationale du centre du Québec, ou d'autres qui ne seront pas
acceptés parce que trop d'avant-garde? Est-ce que cela voudra dire que
vous devrez rester muets pendant la campagne référendaire et que
vos membres n'auront pas le droit de tenir de réunion, etc.? Autant
l'hypothèse tient d'un côté, autant elle tient de l'autre
aussi. Seriez-vous consentant, comme groupe représentant quelques
milliers de Québécois, à rester chez vous pendant toute la
campagne référendaire?
M. Blanchard: Non, le mécanisme que nous
préconisons ne permet pas de rejeter un groupe. On admet que la
formation des groupes se fasse, par exemple, par les partis politiques pour une
part, qui vont souscrire chacun $0.25 par électeur, ils auront le droit.
Mais, de la façon dont on prévoit le mécanisme, cela va
provenir d'une motion, là où s'exerce le pouvoir légitime,
c'est le gouvernement qui va lancer le débat. Il va y avoir trois jours
pour la formation du comité provisoire.
M. Lavoie: C'est court un peu.
M. Blanchard: Tout le monde est assez bien sensibilisé;
autrement, on perdrait du temps. Ensuite, il y aura sept jours pour que les
organisations se branchent.
M. Lavoie: Se greffent à cela.
M. Blanchard: C'est ça. A partir de là, il y a 30
jours pour la campagne, mais personne ne peut nous empêcher, quelque
avant-gardistes que nous soyons, de nous greffer à l'un des groupes ad
hoc, pas plus, par exemple, que certains partis politiques en démocratie
n'ont le droit d'écarter a priori les maoïstes parce qu'ils sont
maoïstes ou autres.
M. Lavoie: Attention, ils ont le droit en vertu du livre blanc,
en vertu de la philosophie mise sur papier actuellement. Prenons par
hypothèse qu'un des groupes hypothétiquement est majoritairement
contrôlé par le Parti libéral puis, qu'il arrive que le
Parti communiste ou léniniste-marxiste, maoïste ou quoi que ce
soit, est favorable, dans l'hypothèse d'un référendum,
à l'appartenance au Canada. On aurait le droit de refuser les
communistes, maoïstes ou marxistes dans notre groupe et c'est cela la
philosophie. De l'autre côté, cela s'applique de la même
façon. S'il y a un camp formé par le gouvernement qui serait
hypothétiquement contrôlé par des modérés, il
pourrait refuser des radicaux dans ce groupe. C'est ce qui est dans le livre
blanc et c'est cela qui...
M. Blanchard: Nous ne sommes pas d'accord si c'est ce qui est
dans le livre blanc.
M. Lavoie: C'est ce que je voulais vous entendre dire.
M. Blanchard: Un libéralisme le plus grand et le plus
honnête possible devrait être permis à ce moment-là,
c'est-à-dire que tous les groupes devraient s'inscrire dans un des deux
camps.
M. Lavoie: Une autre question. M. Blanchard, dans cette nouvelle
expérience que nous acceptons, nous, nous ne sommes pas contre une
loi-cadre référendaire. Par contre, nous doutons de la
répétition ou de l'utilité fréquente et continuelle
de recours à la démocratie populaire. D'ailleurs,
l'expérience qu'il y a eu dans les autres pays, la plupart des pays
qu'on connaît, sauf la Suisse où on vote quasiment sur la place
publique à toutes les fins de semaine, la Suède, la
Nouvelle-Zélande, l'Australie, l'Italie, l'Irlande, sur des
périodes de 50 ou de 60 ans, c'est qu'on a eu à peine deux ou
trois référendums.
En France, il y a eu l'époque gaullienne où il y en a eu
un peu plus. Mais on a des doutes sur la répétition. Je pense que
notre système, nos institutions, en passant, que vous avez un peu, pas
critiquées, loin de là, mais sur lesquelles vous avez fait
certaines remarques... Il faudrait dire en passant qu'on n'a pas accepté
peut-être librement 1791 lors de notre première Chambre
d'assemblée. Il faudrait relire peut-être nos représentants
de l'époque, l'élément nationaliste de l'époque,
pour ne citer que Panais, Papineau ou Bédard, le Parti canadien. Vous
savez qu'ils ont été les grands... Ils ont vanté, de 1793
jusqu'à 1834, nos institutions de l'époque, et cela faisait une
transition fort radicale pour eux, les témoins du temps, avec ce qu'ils
avaient connu avant 1760.
Evidemment, ils ont respiré la démocratie pendant
très longtemps. On va relire les discours de Papineau même
jusqu'en 1834.
Si on demande aux Québécois actuellement qu'est-ce que
cela veut dire, référendum, je pense que tous ont à
l'esprit vous également, comme la plupart de ceux qui sont venus
devant cette commission un certain référendum qui a
été promis, d'ailleurs, par le gouvernement actuel avant
l'élection. Ne croyez-vous pas qu'on ne devrait pas mêler toute
l'opération référendaire, en somme qu'il faudrait donner
une valeur accrue à ce référendum constitutionnel par
rapport à une multitude d'autres référendums? Dans
certains pays, il y a eu des référendums sur la prohibition, sur
les heures d'ouverture des bars ou des débits de boissons, même
sur le divorce en Italie, sur la conscription aussi. Il y a eu un
référendum sur la religion catholique en Irlande. Ne croyez-vous
pas qu'on devrait privilégier l'aspect constitutionnel ou le changement
constitutionnel par référendum par rapport à toutes les
autres possibilités de consultation directe, de démocratie
directe?
Je m'explique. On sait que le référendum, d'abord, dans
notre constitution actuelle, n'est que consultatif. C'est un grand sondage, en
somme. C'est sûr qu'un sondage sur l'euthanasie, où il y aurait.
une participation de 40% ou de 35% de la population pourrait être
valable, parce que c'est déjà beaucoup que 35% ou 40% de la
population se prononcent sur l'euthanasie ou sur l'avortement. Mais, lorsqu'il
y a une question réfé- rendaire sur une constitution qui change
quand même la régie interne et externe d'un pays, il faudrait sans
doute une participation plus prononcée. Ne trouvez-vous pas qu'on
devrait privilégier davantage un référendum au point de
vue constitutionnel par rapport à toute autre sorte de
référendum par lequel la population pourrait se prononcer?
M. Blanchard: Nous nous sommes arrêtés longuement
sur cela et justement les arguments que vous nous apportez nous incitent
à dire qu'on ne devrait pas privilégier un
référendum sur la constitution, parce que c'est un nouveau
mécanisme qu'on n'a pas expérimenté et qui demande
certainement, comme vous le disiez un peu avant le dîner, un
rôdage, une expérience, une expertise, pour habituer la
population.
Nous croyons, effectivement, que pour intégrer ce
mécanisme à nos institutions, il faudrait le faire sans tout
à coup arriver avec ce que j'appelle la plus grosse partie à
jouer où tous les gens n'auront peut-être pas l'occasion de se
sensibiliser suffisamment au mécanisme, de recevoir l'information, de
s'inquiéter des incidences de cette question. On devrait peut-être
faire un test avec une autre question avant de passer à
celle-là.
M. Lavoie: N'oubliez pas que cela coûte $8 millions
à $10 millions un référendum. Attention, une
élection coûte $8 millions à $10 millions au
Québec.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A
l'ordre, s'il vous plaît. M. le député de
Mégantic-Compton.
M. Grenier: Merci, M. le Président. J'ai fait des
remarques à un groupe qui est venu ici. Il s'appelait Québec
Canada. Je leur ai dit que je n'étais pas trop heureux de leur
mémoire. J'aimerais vous dire qu'on est porté à faire des
comparaisons entre le mémoire qui nous a été
présenté ce matin et le vôtre puisque c'était quand
même des groupes assez semblables dans leur philosophie. Je me sens
obligé de signaler que vous semblez défendre une loi-cadre des
référendums. Par contre, je vois votre mémoire
teinté d'opinions qui ne devraient pas faire l'objet d'un mémoire
qui est présenté ici.
Je vous signale des propos que vous avez tenus en dehors de la lecture
de votre mémoire. Je vous signale également un court texte
figurant à la page trois de même qu'à la page douze.
J'aurais aimé je ne vous le cache pas vous voir
dégager un peu plus cette opinion afin de nous informer un peu plus.
A la page trois, pour introduire le caractère consultatif vous
nous dites: "Nous concevons donc que d'ici l'accession du Québec
à sa souveraineté politique", et à la page douze vous
terminez en disant: "Le peuple québécois devra être
conscient de l'enjeu du référendum qui lui permettra de se
libérer." Je ne vous cache pas, M. Blanchard, les reproches que
j'adressais l'autre jour à Québec Canada qui venait ici pour dire
qu'il n'avait à peu près aucune confiance dans le gou-
vernement. Sur un mémoire d'une douzaine de pages, il prenait
neuf pages pour dire que le gouvernement qui était là
n'était pas fiable. Autant je leur ai reproché que ce
n'était pas cela qu'on voulait entendre, autant j'aurais aimé que
le mémoire de votre groupe, qui, pour moi, est fort
représentatif, ne soit pas teinté d'opinions comme
celles-là. Au début de votre allocution, en réponse
à des questions, des précisions que vous avez données,
vous avez dit qu'il était peut-être temps que les Canadiens
français du Québec décident de s'immiscer ou de
s'intégrer dans l'administration politique. J'aurais aimé mieux
vous entendre dire, comme on le dit à cette commission et comme on l'a
dit dans d'autres commissions, que c'est à peu près le temps que
les Québécois prennent en main leurs affaires et s'immiscent dans
les directives politiques.
Si c'était un mémoire qui n'avait pas de valeur pour moi,
je ne le signalerais même pas, mais je sais que vous êtes un groupe
de qualité, et j'aurais aimé que votre mémoire se tienne
dans la ligne, comme on en a reçu un cet avant-midi. Je ne sais si vous
pourriez m'expliquer pourquoi cette expression à la toute fin...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Mégantic-Compton, puis-je me permettre de
souligner qu'au groupe qui est devant nous, comme à d'autres, la
présidence a laissé passer quelques remarques qui étaient
peut-être à l'extérieur du cadre de notre mandat? Les
députés, à cette commission, ne se sont pas
embarqués sur ces sujets. Je vous demanderais, en autant que possible,
de ne pas poser des questions sur le fond, puisqu'il est extrêmement
difficile pour tous les intervenants on s'en rend compte, c'est pour
cela que la présidence fait preuve de souplesse pour tous les
groupes, quels qu'ils soient, parfois de ne pas lire un passage d'un
mémoire qui a été préparé, bien souvent, il
y a 30 ou 50 jours. Mais je demande, en autant que possible, aux
députés et cela a été respecté
intégralement depuis une dizaine de jours de ne pas relever ces
passages qui sont en dehors des cadres de notre mandat.
M. Grenier: M. le Président, je veux bien, je pense, me
soumettre à votre directive. Cependant, si M. Blanchard se sent un peu
malheureux ou mal à l'aise de ce que j'ai dit là, s'il avait des
explications à fournir, je voudrais lui laisser le choix; si vous jugez
que cela n'est pas opportun, je suis bien prêt à procéder
à des questions, à moins que M. Blanchard veuille expliquer
certains termes qui sont au mémoire.
M. Blanchard: Non. M. le Président, je voudrais un peu
expliquer ce passage, peut-être que la rédaction est un peu
ambiguë. Je voudrais bien souligner que notre mouvement, en 1969, s'est
prononcé carrément sur la souveraineté, que ce soit
souveraineté politique, association...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): C'est la
crainte que j'avais en avertissant le député de
Mégantic-Compton; alors, j'arrête immédiatement ce
débat.
M. Grenier: M. Blanchard, vous parlez du droit de vote, à
la page 4 de votre mémoire. Remarquez bien que, si je signale ces
points, je ne voudrais pas que vous pensiez que je dévalorise votre
mémoire; vous avez d'excellentes propositions, qu'on n'a pas
perçues dans d'autres, et je pense que vous donnez encore là des
lumières dont on a besoin. Vous parlez du droit de vote, ici, et je
cite: "La société trouve plus démocratique le fait de
donner le droit de vote aux personnes qui en sont privées..."
Vous avez été témoin, je pense, cet avant-midi, de
l'autre mémoire qui disait qu'eux ne voyaient pas de raison de donner le
droit de vote aux juges, aux personnes qui en sont privées actuellement.
Est-ce que vous pourriez donner une brève explication
là-dessus?
M. Blanchard: Oui, il nous semble qu'une élection n'a pas
la même portée qu'un référendum sur la constitution
qui modifie considérablement le statut politique des personnes. Alors,
il nous est apparu que le fait d'être juge, cela n'était pas,
à mon avis, un poste qui pouvait écarter une personne fort
intelligente et en mesure de voter sciemment d'un référendum. La
même chose pour des prisonniers qui, par exemple, seraient à
Par-thenais, qui auraient normalement droit de se prononcer sur ces questions
référendaires.
Il nous a semblé que c'était en fait pousser un peu loin
que d'exclure ces personnes d'un vote à l'occasion d'un
référendum. Par exemple, sur la peine de mort, je ne vois pas
comment des prisonniers détenus à Parthenais n'auraient pas le
droit de se prononcer.
M. Grenier: Egalement, à la même page 4, vous parlez
des participants aux comités d'organisation et vous suggérez des
comités ad hoc. Est-ce que vous aviez présent à l'esprit
vous aussi un conseil du référendum, un comité de sages ou
un comité qui serait apolitique pour proposer au gouvernement, je
m'excuse, aux parlementaires, par exemple, des formes de questions, des dates,
et des choses comme cela pour des référendums fixes comme on l'a
déjà signalé? Est-ce que vous faites allusion à un
comité qui pourrait être mis en place?
M. Blanchard: Supposons qu'énormément de
difficultés seraient aplanies s'il y avait un comité apolitique
qui serait chargé du mécanisme d'un référendum ou
des référendums.
M. Grenier: A la page 6, vous parlez du décompte des votes
et je pense que vous proposez qu'il soit fait par circonscription, si je ne
fais erreur. Vous faites allusion aux régions administratives qui
existent actuellement dans la province. D'après vous, qu'est-ce qui
compte dans un référendum? Est-ce que c'est l'analyse qu'on doit
en faire ou c'est le résultat lui-même?
M. Blanchard: Je crois que les deux...
M. Grenier: Tenant compte de l'ensemble des
référendums, je veux dire.
M. Blanchard: ... sont importants. Je pense bien qu'il est normal
que l'on prenne le pouls d'une population, mais qu'effectivement, pour des
raisons d'information, des buts informatifs, le gouvernement possède des
résultats et le public possède des résultats. Quant
à penser à des régions administratives, nous savons fort
bien qu'elles ne reflètent pas la plupart du temps les mentalités
qui sont mieux intégrées à des découpures
électorales. Par exemple, nous, à Drummondville, nous sommes dans
le CRD-4 pour l'économique, nous sommes dans le CRD-5 pour les soins
hospitaliers et nous ne sommes nulle part pratiquement pour l'éducation,
une partie à Sorel, une partie à Saint-Hyacinthe. On voit bien
que cette dimension, cette structure ne correspond pas aussi fidèlement
aux mentalités qui se sont développées le long d'une
rivière, dans un axe commercial, etc.
Pour des raisons d'ordre pratique, on préférerait que l'on
conserve ce que définit la Loi électorale.
M. Grenier: Les circonscriptions actuelles. Vous parlez des
sondages également, d'enlever la période de sondage pendant le
parcours ou le temps parcouru pendant la période
référendaire. Vous dites de ne pas manipuler la population,
d'éviter la manipulation de l'opinion des citoyens. D'après vous,
est-ce que les sondages... Certains nous ont affirmé devant la
commission qu'ils seraient heureux d'avoir des sondages puisque cela donne un
éclairage aux citoyens ayant de voter, et vous nous dites, vous affirmez
qu'il y a du danger de manipuler l'opinion de l'électeur. Est-ce que
vous pourriez donner un peu plus d'explications?
M. Blanchard: C'est bien sûr que pour les groupes
très silencieux, les groupes qui ne sont pas portés à
suivre la politique et qui, à un moment donné, s'en vont vers
presque une provocation du nombre de votants pour une option, ces gens, il faut
tout de même les préserver un peu et les forcer personnellement
à s'éduquer politiquement, à se renseigner, à
s'informer plutôt que de leur laisser l'hypothèse tout à
coup d'être charriés par un mouvement plus fort dans un sens ou
dans l'autre.
Il nous semble que les sondages, surtout avec les moyens que l'on
possède aujourd'hui, les moyens électroniques et tous ces moyens
visuels, sont effectivement devenus les outils d'orientation peut-être de
l'opinion publique. Je ne pense pas que ce soit tellement souhaitable.
M. Grenier: Une toute dernière question. Vous avez une
chose à la page 9 qui m'intéresse. Vous dites que le gouvernement
devrait choisir les thèmes sur lesquels devraient porter les
référendums. Il y a des thèmes qui s'excluent
d'eux-mêmes, c'est bien évident, mais vous êtes-vous
arrêtés suffisamment longtemps sur cela pour pouvoir nous
émettre quelques thèmes généraux? Je sais qu'on a
dit autour de cette table qu'une loi-cadre des référendums
n'était pas de toute urgence. De fait, comme cela ne s'est pas fait au
Québec depuis toujours, on ne voyait pas l'urgence d'avoir une
loi-cadre. Peut-être, comme on l'a dit cet après-midi, si on avait
eu une loi-cadre en 1962, qu'on n'aurait pas eu d'élections
générales, puisqu'on aurait parlé de l'étatisation
de l'électricité. Mais vous êtes-vous penchés
suffisamment longtemps sur cela pour être capables de nous
énumérer quelques thèmes que le gouvernement devrait
retenir sur lesquels on pourrait faire des référendums?
M. Blanchard: La remarque que vous faites justement nous est
venue à l'esprit lorsqu'on a parlé des référendums.
On s'est dit que les référendums auraient dû exister; cela
nous aurait évité, justement, ce cas de
l'électricité. Cela aurait évité aussi que
peut-être des députés, à un moment donné, sur
la question de la loi 63, se voient dans l'obligation de naviguer difficilement
et orageusement lors de campagnes électorales où ces questions,
à mon avis, étaient des questions su-praélectorales. On
aurait peut-être pu avec avantage conserver de fort bons
députés, comme vous l'avez signalé, n'eussent
été ces aventures électorales qu'on a poursuivies sur des
questions qui, normalement, étaient des questions
référendaires. C'est ce qui nous a frappés aussi.
Le fait de prévoir dans la loi la hauteur des questions que l'on
devrait mettre en cause lors d'un référendum, à notre
avis, c'est essentiel pour éviter ce que le député de
Laval disait tout à l'heure, qu'à tout bout de champ on lance $10
millions pour percevoir le pouls de la population, alors que l'Assemblée
nationale, sur bien des cas, est parfaitement capable de déterminer le
bien commun.
M. Grenier: Moi, je suis d'accord avec vous, en disant que
l'Assemblée nationale peut décider en grande partie. Il serait
honteux, que le gouvernement décide à tout propos de faire un
référendum sur des questions qui n'en valent pas la peine.
Simplement, je pensais que vous auriez pu vous asseoir et avoir peut-être
des bribes d'information à nous fournir. Je pense que c'est un
thème qui est tellement vrai, à le voir seulement, qu'on ne peut
pas se permettre, je pense bien, de lancer des référendums
à tout propos.
M. Blanchard: Pour éclairer ce débat, j'aimerais
vous dire qu'on s'est arrêté sur des grandes questions, par
exemple: l'avortement, la peine de mort, le changement d'allégeance
politique comme à Terre-Neuve. Ou on s'accroche au Canada ou on en sort.
Evidemment, si on a la possibilité d'y entrer, cela suppose qu'on ait
aussi, dans le même cadre législatif, la possibilité d'en
sortir. Ce sont des choses qu'on peut soumettre à la population et qu'on
peut déterminer.
M. Grenier: Si vous me le permettez, je reviens sur une question
que je vous ai posée tout à
l'heure. Votre réponse ne m'a pas suffi et j'aimerais vous
entendre l'expliciter davantage. Eliminons la possibilité du
référendum que tout le monde a à l'esprit, que plusieurs
personnes ont à l'esprit, et parlons des référendums en
général.
Quand vous parlez du vote par circonscription électorale. Prenez
un cas bien précis; par exemple, si je vous mentionne un
référendum sur la nécessité de zoner les terres
arables au Québec, cela doit intéresser le milieu urbain aussi,
bien sûr, de plus loin que le milieu rural qui est impliqué, mais
voyez-vous l'urgence d'un référendum de ce genre qui serait
dépouillé par circonscription électorale?
M. Blanchard: Non. On pourrait utiliser la méthode
italienne ou la méthode suisse, à ce moment-là, ce sont
des choses régionales. On pourrait procéder par région,
consulter une région comme celle de Mirabel, disons, et demander
à la population de Mirabel de se prononcer. Peut-être qu'on en
viendra à des gouvernements régionaux; ce serait parfaitement
logique, peut-être, dans certains cas, de consulter des populations
régionales sur des politiques qui les concernent d'une façon
majoritaire ou principale. Dans ces questions du zonage des terres arables, du
zonage agricole, la population de Montréal ne se sentirait pas tellement
impliquée. Il vaudrait mieux peut-être que l'Assemblée
nationale légifère sur cette question en consultant des experts
et en ayant peut-être aussi à l'idée sa grande vocation de
préserver le bien commun, de préserver le territoire, le
patrimoine. Ce sont effectivement nos députés qui sont
probablement les plus qualifiés à ce niveau.
M. Grenier: M. Blanchard, j'ai peut-être mal choisi mon
exemple. J'en prends un des vôtres, cette fois. Sur l'avortement,
verriez-vous la nécessité de faire un décompte
comté par comté, par circonscription électorale?
M. Blanchard: Dans notre comité, il y avait des femmes qui
prétendaient que seules les femmes devraient voter sur une telle
question.
M. Grenier: Oui, mais vous ne répondez pas à ma
question. Vous feriez peut-être un bon politicien aussi. Pour
répondre à ma question, qu'est-ce que vous me diriez?
M. Blanchard: Sur une question semblable et chaque fois,
d'ailleurs, qu'il y aurait un référendum, l'Assemblée
nationale devrait, au préalable, examiner la question et
découvrir les mécanismes les plus appropriés.
M. Grenier: Vous êtes bon! Vous êtes allé
à l'école avec le député de...
M. Lavoie: C'est une loi spéciale à chaque
référendum, dans ce cas-là.
M. Grenier: Pas nécessairement.
M. Blanchard: A l'intérieur d'une loi-cadre.
M. Grenier: Vous êtes allés à la même
école, mais vous n'avez pas continué dans les mêmes
opinions.
M. Blanchard, je vous remercie, ainsi que votre groupe, pour ce
magnifique travail que vous nous soumettez ce soir.
M. Blanchard: Merci, M. Grenier.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Y a-t-il
d'autres députés qui voudraient intervenir? M. le
député de Notre-Dame-de-Grâce et après M. le
député de Rosemont.
M. Mackasey: Peut-être est-ce le tour de...
M. Burns: Je pense que le député de Rosemont avait
demandé la parole avant.
M. Mackasey: Oui, allez-y. Cela ne presse pas.
M. Paquette: Ce serait peut-être mieux d'alterner.
M. Mackasey: Sérieusement, allez-y.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Je n'ai
pas entendu "M. le Président" et je l'avais reconnu en premier. En tout
cas, M. le député de Rosemont.
M. Paquette: Je note toute une série de recommandations
fort intéressantes que vous nous faites. Il y en a une qui est nouvelle,
je pense que vous êtes le premier groupe, à ma connaissance,
à proposer cela. Vous aimeriez que des rapports des revenus des
différentes organisations soient fournis régulièrement
pendant la campagne, pour quelle raison?
M. Blanchard: D'abord, on propose qu'il y ait des limites aux
mises de fonds venant des électeurs, des partis politiques et des
corporations légalement constituées, mais incorporées au
Québec. Nous voudrions être en mesure de voir le rythme de
progression des fonds, si on permet aux associations de concourir à un
tonds sans limite; on voudrait connaître la progression pour savoir
effectivement comment, par exemple, certains groupes vont peut-être
privilégier une option plutôt qu'une autre.
On a peur que le gouvernement ne détermine pas à l'avance
les montants, comme on l'a signalé dans le cas de l'Angleterre, $250 000
d'un côté et $250 000 de l'autre.
S'il fallait que les fonds entrent subrepticement sans que l'on
connaisse leur provenance, on risquerait fort de déséquilibrer
les forces en opposition.
M. Paquette: Contrairement à une élection, on ne
pourra pas disqualifier l'option une fois que le référendum va
être terminé, alors que dans une élection on peut toujours
obtenir la disqualification du candidat. C'est un peu une mesure
préventive que vous proposez.
M. Blanchard: Une mesure préventive, pour assurer
davantage la démocratie de la consultation.
M. Paquette: Oui, d'accord. Maintenant, sur la formulation de la
question, vous dites que vous privilégiez une seule question permettant
une réponse à deux volets. Est-ce que vous voudriez voir inscrire
ceci dans la loi-cadre? Autrement dit, est-ce que dans tout
référendum, quel que soit le sujet, quel que soit l'état
de l'opinion, vous voudriez exiger qu'on ait toujours une seule question, avec
réponse à deux volets? On pourrait également
prétendre que, dépendant de l'opinion publique, il peut y avoir
à un certain moment dans la société, non pas deux courants
très forts mais trois courants très forts.
Par exemple, lors du maintien de la Grande-Bretagne dans le
Marché commun européen, il y aurait pu, ce n'était pas le
cas, mais il aurait pu y avoir trois courants d'opinions; un voulant le
maintien, l'autre le retrait puis une autre une certaine forme d'association au
Marché commun avec un statut particulier ou je ne sais. Autrement dit,
est-ce que vous voulez qu'on inscrive cela dans la loi-cadre?
M. Blanchard: C'est une question qui est assez embêtante,
parce qu'on se dit qu'un référendum constitutionnel cela a droit
à une question précise, un oui ou un non, claire, aucune
ambiguïté. Par exemple, si on dit aux gens: N'est-il pas vrai que
vous souhaiteriez...? Evidemment, à ce moment-là, on tombe dans
le dubitatif, dans l'hypothèse et il faut absolument écarter
cela. Nous disions tout à l'heure que dans certains cas, selon le
référendum que l'on veut organiser sur une question
particulière, il y a lieu peut-être, grâce au consentement
de l'Assemblée, de déroger parce que c'est toujours le
Parlement qui va formuler la question à cette chose-là.
Puisque c'est une motion du gouvernement qui introduit le
référendum, on peut, d'accord avec l'Opposition, essayer de
trouver la meilleure formule, la meilleure question, mais c'est dangereux parce
qu'à l'intérieur d'une loi-cadre il est fort probable qu'une
question constitutionnelle peut venir. A ce moment-là on pense qu'il
faut une question très claire.
M. Paquette: Je pense au référendum qui a eu lieu
à Terre-Neuve pour l'entrée de Terre-Neuve dans la
Confédération; cela s'est fait en deux tours. Dans un premier
temps, il y eut trois options de soumises à la population et ensuite on
a éliminé celle qui avait recueilli le moins de suffrages pour
finalement en retenir deux, puis c'était une question
constitutionnelle.
M. Blanchard: C'était une question constitutionnelle, mais
ils ont reconnu qu'ils ont pratiquement erré lors de la première
consultation. Elle n'a rien donné effectivement. Ils ont
décidé de se reprendre en éliminant la tierce voie. On
parlait des partis, c'est comme aux Etats-Unis. Pourquoi arrive-t-on au
bipartisme? C'est parce que, par un mécanisme préalable, on
élimine des choix secondaires. On pourrait peut-être
prévoir une modalité semblable.
M. Paquette: Maintenant, une dernière question. Vous
souhaitez que le gouvernement s'engage à respecter les résultats
du scrutin. Je pense que cela va de soi, mais le problème qui se pose,
c'est à partir de quel pourcentage? Il y en a qui soutiennent qu'on
devrait exiger les deux tiers. Qu'est-ce que vous en pensez, est-ce que selon
vous cela dépend de la nature de la question?
Encore une fois, est-ce qu'on devrait mettre telle chose qu'un
pourcentage dans la loi-cadre ou simplement laisser le gouvernement s'engager
sur le pourcentage qu'il voudra à chaque question d'après le
sujet du référendum?
M. Blanchard: Je pense que dans nos traditions, si on veut copier
ce qu'on a toujours fait dans les assemblées délibérantes
à l'intérieur même des corporations que nous avons
évidemment accrochées au code Morin, par exemple, il faudrait
tout de même obtenir les deux tiers; qu'au moins les deux tiers des
citoyens se prononcent pour vraiment engager le gouvernement. Cela me semble
tout à fait normal puisque effectivement si on arrive, comme aux
élections municipales, à 40% des gens qui votent, on n'est pas
tellement sûr que la représentation est assurée et que le
gouvernement, à partir de là, peut vraiment se prononcer et
imposer des mesures.
M. Paquette: Alors, ce que vous dites c'est qu'en bas des deux
tiers le gouvernement n'a pas à se sentir lié par...
M. Blanchard: Cela a été un des points que nous
avons discuté et on s'est dit: II faudrait peut-être se rallier
à une longue tradition qui permet, dans une corporation, au conseil
d'administration de n'être engagé que par les deux tiers, par
exemple, dans certains cas qui touchent à l'orientation majeure d'une
compagnie ou dans une assemblée, par exemple, selon la loi
délibérante, à une question majeure.
M. Paquette: Est-ce que vous souhaitez qu'on inscrive cette
chose-là au niveau de la loi-cadre, que ce soit une règle
générale?
M. Blanchard: Nous vous laissons cette réponse.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Monsieur
le député de Notre-Dame-de-Grâce.
M. Mackasey: Merci beaucoup. M. Blanchard, je vous
félicite pour votre mémoire, il y a beaucoup de clauses, beaucoup
de choses que je partage avec vous.
Le député de Rosemont vient justement de parler de
quelques sections à la page 7. Comme vous le dites, lors du
référendum, une seule question doit être posée
permettant une réponse à
deux volets, positive ou négative; plus tard, vous dites aussi
que la formulation de la question doit être courte, précise et
positive. Pensez-vous que c'est possible dans un cas aussi complexe que le
référendum qui relève de la constitution?
M. Blanchard: C'est certainement possible si d'abord on informe
les électeurs. Cet après-midi on a préconisé que le
gouvernement ou, disons, le conseil ou le comité apolitique
chargé de la conduite du référendum fasse parvenir
à chaque électeur au préalable une brochure explicative
dans laquelle on pourrait retrouver la question et évidemment tous les
sous-entendus à la question. Or il est possible, probablement, en
éclairant bien l'électorat, de poser une question bien claire,
bien précise, bien positive.
M. Mackasey: Je sais, M. Blanchard, que plus loin vous avez dit
j'aimerais citer exactement vos paroles par exemple, à la
page 9, à la recommandation no 8 que vous venez de citer, je pense, que
c'est important que le gouvernement, par l'entremise du directeur du
référendum, prenne en charge l'impression d'une brochure et
l'expédition de celle-ci à chaque électeur. Cette brochure
contiendrait les règlements du projet de loi concernant les
électeurs aussi important ici et le libellé de la
question. Pensez-vous que vraiment tout le monde va laisser, sans exception, ce
pouvoir dans la main du gouvernement par l'entremise du directeur
général?
M. Blanchard: M. Mackasey, si vous lisez bien, c'est
l'impression. Ce n'est pas la rédaction. On confie au gouvernement
l'impression, c'est-à-dire qu'on fait en sorte que le gouvernement
fournisse les fonds pour qu'un conseil ou un directeur général
rédige et, ensuite, expédie.
M. Mackasey: M. Blanchard, je suis complètement d'accord
avec vous que le temps est arrivé d'avoir un référendum.
C'est facile à comprendre, on parle du même
référendum. Si on lit la fin de votre mémoire, que je
respecte naturellement, à la page douze, on sait bien qu'on parle du
référendum sur l'avenir du Québec et du Canada. C'est
inutile de penser qu'on parle de choux ou de carottes. On accepte cela.
Mais je pense que c'est important de comprendre aussi la question.
Là, je pense que nous sommes d'accord. Pour ce référendum,
vous avez souligné vous-même que cela devrait être au moins
66% des participants potentiels qui devraient y participer. Ce n'est pas un
geste qu'on pose si facilement. Ceux qui croient à l'indépendance
du Québec, je les admire si vraiment c'est basé sur la
sincérité. Je pense que vous êtes très
sincères. Je vous admire pour votre intégrité dans ce
sens. Qui va donner la définition des mots "séparation" et
"indépendance"?
Qui vraiment va décrire cela ou en faire une définition?
Seulement le gouvernement?
M. Blanchard: Je ne sais quels sont les groupes qui s'acharnent
à employer le terme sépara- tion. Il n'y a pas effectivement de
séparation possible sans aucun cadre constitutionnel.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A
l'ordre. Je vous demanderais de ne pas tomber dans le fond du débat.
C'est peut-être la question qui vous a amené à traiter du
fond.
M. Mackasey: Le problème, M. Blanchard, c'est que je n'ai
pas le droit de vous poser certaines questions, à vous, un homme que je
respecte et qui n'a pas peur du mot "séparation", ni moi.
Peut-être est-ce finalement la manière d'en arriver à une
bonne entente entre le Québec et le reste du Canada. Cela a
peut-être un avantage, ce qui s'est passé depuis plusieurs
années. Je ne viens ici pour juger vos pensées, ni vous pour
juger les miennes. Il y a un respect mutuel ici. J'ai plus de difficulté
avec les membres de la commission qu'avec les témoins.
Qui va donner la définition? C'est à la page onze et vous
avez raison. Vous essayez d'être très justes dans votre
mémoire. Vous êtes le premier groupe à suggérer la
nécessité d'expliquer complètement à la population
ce que cela veut dire une telle phrase, un tel mot. Qu'est-ce que cela veut
dire la séparation? L'indépendance, qu'est-ce que cela veut dire?
La question de la souveraineté-association, qu'est-ce que cela veut dire
pour la population? Pensez-vous que c'est nécessaire que la population
comprenne exactement ce que cela veut dire?
M. Blanchard: L'effort que l'on fait, c'est pour amener, par les
voies d'un référendum, une sensibilisation et une connaissance
politiques plus élaborées chez les deux éléments.
C'est pour cela qu'on a préconisé que, lorsqu'il y a 10% de la
population, il y ait nécessairement impression de toute la documentation
et même du mécanisme du vote dans les deux langues. Cela montre
jusqu'à quel point on est tout de même sensible à ce fait
que le but final du référendum, c'est d'augmenter les
connaissances politiques et de sensibiliser davantage les gens à leur
propre gouvernement. Le "self government" c'est important.
M. Mackasey: M. Blanchard, à la page douze, je ne pense
pas que vous parlez de l'avortement quand vous dites: "Puisque le droit et le
recours à l'auto-détermination des peuples fait partie d'un
processus d'évolution historique, le peuple québécois
devra être conscient de l'enjeu du référendum qui lui
permettra de se "libérer". Est-ce qu'on parle d'avortement?
M. Blanchard: Non, mais remarquez bien que "libérer",
d'une façon bien orthographique, est entre guillemets, parce qu'on peut
se libérer de ses fantasmes, on peut évidemment se libérer
de son racisme, on peut se libérer de ses craintes. Le
référendum est une voie qui permet de se libérer de
beaucoup de stress.
M. Mackasey: M. Blanchard, j'ai beaucoup de respect pour vous,
cela fait un an que je vous
écoute et vous me semblez intelligent, je pense que vous
êtes un homme intègre, aussi. Je vous rends hommage de ce que vous
pensez, quand vous parlez de même, ne parlez-vous pas de
l'indépendance? Avec raison, si vous voulez, ce n'est pas la fin du
monde, mais, certainement, on ne parle pas de l'avortement, on parle de
l'avenir du Québec.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M.
Blanchard, n'essayez pas de succomber à la tentation qui vous est
offerte.
M. Mackasey: N'ayez pas peur, M. Blanchard, parce que moi, je
n'ai aucune crainte du tout. Vous dites, avec raison, que lors d'un
référendum, une seule question je partage vos sentiments
doit être posée permettant une réponse à deux
volets: oui ou non. Et cela, par exemple, réglerait pas mal la question
de financement parce que le gouvernement va aider chaque organisation qui est
pour ou contre une option. S'il n'y a qu'une seule question claire, cela rend
la tâche bien plus facile que si, par exemple, on avait quatre questions,
trois pour le fédéralisme et une contre le
fédéralisme, ou le contraire. Et quand vous dites que la
formulation de la question doit être courte et positive, nous sommes
d'accord.
Quand vous dites que quelqu'un, au moins, devrait et je me
réfère encore aux brochures essayer d'expliquer à
la population ce que veulent dire les questions, ou la seule question que vous
recommandez, nous ne sommes pas nécessairement d'accord, quand vous
dites que c'est le gouvernement, par cette entremise, parce que, moi, je
n'appuie pas ce gouvernement. Alors, j'aimerais avoir une explication de la
définition de souveraineté-association.
M. Blanchard: Non, nous le définissons très bien,
au paragraphe 8 de la page 9. Nous disons, effectivement, que le gouvernement,
par l'entremise du directeur général des
référendums ou d'un conseil des référendums prenne
en charge l'impression d'une brochure. Nous ne voulons pas dire que c'est au
gouvernement de faire l'école, de sensibiliser le public, d'informer le
public sur les notions de référendum, sur les définitions,
comme vous en appeliez tout à l'heure. Mais on ne voudrait pas, non
plus, qu'on arrive à une loi générale qui
spécifierait, par exemple: Etes-vous d'accord que, dans certains cas, la
Gendarmerie Royale puisse ouvrir le courrier? Cela, ce ne sont pas des
choses...
M. Mackasey: Où le directeur général des
référendums va-t-il prendre conseil? Va-t-il en prendre du
gouvernement, le directeur général des référendums?
Quand il va préparer la brochure, comment va-t-il décider ce que
veut aire souveraineté-association?
M. Blanchard: M. Mackasey, je pense que c'est assez facile
de...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Notre-Dame-de-Grâce...
M. Blanchard:... demander, par exemple, à des
universitaires, des hommes chargés de l'application de la justice,
l'ombudsman, dans certains cas, c'est absolument apolitique, comme la
nomination de nos juges. On peut espérer que, dans un groupe ethnique
comme le nôtre, on trouve des gens parfaitement objectifs qui ne soient
pas d'un côté ou de l'autre de la barricade.
M. Mackasey: II faudrait peut-être prendre la
définition du premier ministre du Québec qu'il a donnée
cet après-midi; pour moi, c'est acceptable. C'est un homme
intègre et je prends en bien sa définition.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député...
M. Blanchard: Moi, je serais prêt, aussi, à demander
à M.Trudeau de nous donner la définition, ce serait faisable.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): S'il
vous plaît, ne succombez pas à la tentation!
M. Mackasey: Ce n'est pas un débat, je respecte M.
Blanchard.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):Ne vous
laissez pas corrompre, M. Blanchard.
M. Mackasey: M. Blanchard, n'ayez pas peur d'eux, je vois que
vous n'avez pas peur de moi, non plus, c'est pour cela que je vous respecte,
et, d'autant plus, la peur du mot séparation, peur du mot
indépendance, peur du mot souveraineté-association, tout cela
veut dire la même chose. Je vous remercie.
M. Burns: C'est un commercial payé...
M. Mackasey: ... payé par quelqu'un qui aime son pays et
qui aime le Québec.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A
l'ordre, s'il vous plaît! M. le ministre, voulez-vous...
M. Burns: M. le Président, je veux remercier M. Blanchard
et ses deux collaboratrices qui l'accompagnent de ce mémoire qu'il nous
a présenté. Je tiens à vous dire, comme je l'ai dit,
d'ailleurs, aux autres groupes, aujourd'hui, que nous avons rencontrés,
qu'effectivement, on va tenir compte, de façon très importante et
des suggestions qui apparaissent dans votre mémoire et des
réponses que vous avez données aux nombreuses questions qui vous
ont été posées au cours des travaux de la commission,
aujourd'hui.
Soyez certains que ce ne sera pas inutile que vous soyez venus ici.
Merci bien.
M. Lavoie: M. le Président...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Oui.
M. Lavoie:... je pense que je ne peux pas aller aussi loin que le
ministre et vous assurer que je vais en tenir compte, parce que je n'ai pas
l'autorité et le mandat d'en tenir compte. J'espère que le
ministre retiendra ce qu'il y a de meilleur dans votre mémoire.
M. Grenier: Je vous remercie.
M. Blanchard: M. le Président, M. le ministre, messieurs,
nous vous remercions de votre courtoisie.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Merci,
M. Blanchard.
M. Mackasey: Thank you very much.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): S'il
vous plaît. J'inviterais maintenant la Société nationale de
l'Outaouais et son ou ses porte-parole de bien vouloir venir nous
présenter leur mémoire. Ce ne sera pas long, MM. les
invités, quelques minutes et nous sommes à vous.
Puis-je demander au porte-parole de bien vouloir se présenter, de
même que celui qui l'accompagne, s'il vous plaît?
Société nationale des
Québécois de l'Outaouais
M. Savoie (Claude): Oui, je suis Claude Savoie et je suis
accompagné de Maurice Boivin. Nous sommes tous les deux membres du
conseil d'administration de la Société nationale des
Québécois de l'Outaouais.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):
Monsieur, avant que vous commenciez, puis-je me permettre de vous rappeler,
comme à tous les autres vous souriez, je pense que vous
connaissez la directive que cette tribune ne doit pas devenir une
occasion pour les intervenants d'émettre des opinions sur des questions
de fond pouvant éventuellement faire l'objet d'un
référendum? Merci beaucoup et je vous cède la parole.
M. Savoie: D'ailleurs, le mémoire que nous vous
présentons aujourd'hui n'est pas une expertise du problème de la
théorie d'un référendum, mais une opinion d'un groupe de
citoyens sur le livre blanc sur la consultation populaire au Québec. On
s'est donc attaché, dans l'étude de ce livre blanc, beaucoup plus
à étudier et à réfléchir sur l'esprit qui
l'avait guidé que sur les technicités. En règle
générale, on est d'accord avec les principes qui ont guidé
le livre blanc. Nous considérons que c'est excessivement important ce
processus de démocratisation de nos institutions politiques. C'est ce
qu'on remarque de prioritaire et c'est pourquoi, dans le fond, on fait deux
principales recommandations à la com- mission. Donc, dans l'esprit de
cette démocratisation de nos institutions politiques, on aimerait que le
gouvernement tienne compte de deux principales recommandations. La
première, c'est d'accorder aux citoyens un temps de réflexion
suffisant pour que ce soit vraiment une participation démocratique,
efficace et de qualité dans le processus démocratique.
On voudrait aussi, pour la même raison, que les questions qui
seraient posées lors de consultations populaires soient des questions le
plus larges possible et qu'on ne demande pas à la population de
simplement cautionner un choix ou une orientation du gouvernement. On aimerait
que, dans la mesure du possible, la population soit appelée à
donner son opinion avec le plus de nuances possible. C'est pour cela qu'on
suggère qu'il y ait une question avec le plus d'options possible, compte
tenu des limites réalistes et compte tenu aussi des opinions qui
existent dans la société.
Il y a trois points sur lesquels on s'est particulièrement
attaché concernant les technicités contenues dans le livre blanc.
Le premier point c'est la portée consultative de la loi sur les
référendums. On est évidemment d'accord sur la position du
gouvernement puisque dans notre système parlementaire on ne peut pas
faire autrement. On se rallie à l'idée aussi que l'initiative
populaire soit retardée, mais fondamentalement, on est d'accord pour
qu'il y ait le droit à l'initiative populaire en matière de
référendum. On comprend que dans un premier temps on ne puisse
pas passer directement à cette étape, mais on espère que
l'étape va venir le plus rapidement possible.
On se rallie aussi à la position du gouvernement face à
une organisation unique par option, mais on y voit beaucoup de zones grises. On
n'a pas de conseil à donner à la commission parlementaire ou
à l'Assemblée nationale sur cette question. Pour nous, on a
beaucoup plus de questions à poser que de réponses à
apporter là-dessus. Il nous semble que c'est une question difficile. On
voudrait à la fois garantir le droit d'association, le droit
d'expression de la population, mais on trouve extrêmement important que
les différentes options aient les mêmes possibilités de
s'exprimer sans qu'il y ait surcharge pour une ou l'autre des options.
Le troisième point de technicité auquel on a
touché, c'est le décompte des votes. Là-dessus, notre
société nationale était assez divisée, parce qu'il
nous manquait des informations qui nous semblent importantes. Les raisons pour
lesquelles on serait favorable à un décompte au niveau national,
ce sont des raisons d'unité de conscience nationale. Les raisons qui
motiveraient un décompte par comté étant un manque
d'information, on se demandait si le fait de faire un décompte national
empêcherait l'information au niveau du comté. Si un
décompte national n'empêchait pas les citoyens d'être
conscients des résultats par comté, on préférerait
évidemment un décompte au niveau national.
En fait, on se demandait: Est-ce qu'un décompte national veut
dire vider toutes les urnes les unes dans les autres et faire un seul
décompte
ou si un décompte national c'était simplement mettre
l'accent sur un décompte au niveau national mais évidemment
l'information concernant chaque comté et même chaque "poil"
restant disponible pour les gens qui veulent connaître ces
résultats au niveau des "polls". C'est le mémoire que nous vous
présentons. C'est un mémoire, encore une fois, qui n'est pas une
expertise de spécialistes mais l'opinion d'un groupe de citoyens.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Merci
beaucoup M. Savoie. M. le ministre.
M. Burns: Je vous remercie également, M. Savoie. J'ai
retenu de votre mémoire quatre grands points, pour ne pas revenir sur
tous les points qui ont été discutés tout au cours de la
journée. Je note qu'à la page 2 de votre mémoire, dans
l'ensemble, vous vous dites satisfait du livre blanc en général,
quitte à avoir un certain nombre de réticences et de
modifications à suggérer au passage. Je prends bonne note de
votre affirmation à caractère général à la
page 2, que je mentionne.
J'aurais une question à vous poser sur une chose que vous dites
à la page 3, sous l'article b), "Un temps de réflexion
suffisant." Je vous cite le passage en question: "Nous apprécions le
fait, par exemple, que le référendum sur l'avenir constitutionnel
promis par l'actuel gouvernement aura laissé au moins deux ans de
réflexion à la population avant que cette dernière ait
à se prononcer." Vous continuez en disant: "Nous suggérons
également que, pour les autres référendums, on nous laisse
aussi cette opportunité."
Suggérez-vous que n'importe quel référendum devrait
être présenté à la population au moins deux ans
avant ou cet ordre d'importance au point de vue de la durée
que la question soit véritablement posée?
M. Lavoie: En fait, on a considéré que le livre
blanc sur la consultation populaire était d'abord destiné
à améliorer la participation du citoyen au processus
démocratique. A partir de cet éclairage, il nous paraît
bien plus important que la population soit appelée à
réfléchir sur une question, à échanger des
idées, à s'informer que de tout simplement à cautionner ou
à se prononcer à un moment donné.
En fait, on souhaite deux ans, pas nécessairement
qu'il y ait un temps...
M. Burns: A peu près.
M. Savoie: ... de réflexion de façon que les gens
ne prennent pas une décision suite à une campagne, mais que les
gens prennent une décision suite à une longue période de
conscientisa-tion, de réflexion, d'échanges et,
évidemment, après, qu'ils se prononcent.
M. Burns: Vous verriez ce délai dans n'importe quel
référendum?
M. Savoie: Oui.
M. Burns: Si, par hasard, un peu comme vous le suggérez
dans votre mémoire, on avait recours à des
référendums sur d'autres sujets, par exemple, si on en avait le
pouvoir, sur l'avortement ou encore sur ce dont on parlait la semaine
dernière, l'euthanasie, ou encore sur le problème de
l'orientation québécoise en matière d'énergie, vous
croiriez qu'il serait nécessaire de mettre le problème devant la
population au moins deux ans d'avance? Je fais la distinction suivante, M.
Savoie; actuellement, le problème de l'avenir politique du
Québec, de l'avenir constitutionnel du Québec, bien sûr,
est sous-jacent à tout ce problème qu'on se prépare
à mettre sur pied une loi plus particulière, même si elle a
un caractère général, parce que déjà ce
problème est dans l'air.
Une fois que les mécanismes généraux seront mis en
place, ne croyez-vous pas que dans un temps normal, c'est-à-dire moins
d'une année, peut-être de six mois, il est possible de
préparer un référendum, une consultation populaire sans
qu'on ait besoin de sasser et de ressasser le problème pendant de
nombreux mois?
M. Savoie: Je ne pense pas. Si vous me demandez ce que je pense
d'une politique énergétique pour le Québec...
M. Burns: Oui, c'est ce que je vous demande.
M. Savoie: ... je ne pense pas être capable, d'une
façon éclairée et intelligente, de vous apporter une
réponse dans 60 jours. J'ai besoin d'y penser, d'échanger,
d'être informé dans un contexte qui est autre qu'un contexte
électoral. Une question comme celle d'une politique
énergétique, c'est une question importante. Si vous me posiez une
question comme celle-là, j'aurais tendance à faire comme
n'importe quel autre citoyen, à regarder la crédibilité
des gens qui défendent l'une ou l'autre des options et à faire un
choix qui serait électoraliste. J'aimerais bien faire un choix
qui...
M. Burns: Qui serait autre qu'électoraliste.
M. Savoie: Si le projet de loi de la consultation populaire est
un mécanisme de démocratisation de notre société,
il faut que les gens qui vont s'exprimer s'expriment avec le plus de recul
possible, avec le plus de dégagement possible et non pas sous
l'influence de propagande ou de contexte électoraliste.
M. Burns: Là-dessus, M. Savoie, j'ai simplement une
remarque à vous faire, c'est que d'expérience, un peu partout
où des référendums se tiennent, les gens veulent que la
campagne référendaire dure le moins longtemps possible, parce
qu'ils viennent à un stade où ils en ont vraiment soupé
d'entendre parler du problème.
M. Savoie: Je ne parlais pas de campagne...
M. Burns: Et c'est pour cela que je me posais la question tout
haut, avec vous. Prenons le cas, par exemple, de la discussion qui a eu lieu
autour
de la loi 101. Je me rappelle que, vers les mois de juillet et
août, il y avait beaucoup de gens qui nous disaient carrément:
qu'est-ce que vous attendez pour arrêter de nous parler du
phénomène de la langue; adoptez-là la loi, ou mettez-la au
panier, faites ce que vous voudrez, mais on est tanné d'en entendre
parler.
Et j'ai nettement l'impression que, dans une campagne
référendaire, on a exactement la même réaction, du
moins un peu partout où se fait une campagne référendaire.
C'est...
M. Savoie: En fait, la nuance, c'est... M. Burns: ... ce
qu'on nous a dit.
M. Savoie: ... c'est qu'il ne s'agit pas de campagne
référendaire qui durerait deux ou trois ans. Il s'agit d'informer
la population qu'il y aura éventuellement une campagne
référendaire sur telle ou telle question, de façon que les
media d'information concentrent plus d'information concernant une question ou
une autre, de façon que les gens aient le temps de
réfléchir et de mûrir la question. C'est bien sûr que
la campagne référendaire qui se déroulerait en 60 jours,
on se rallie à cela, mais ne nous sortez pas demain matin un projet de
référendum pour dans 60 jours sur les politiques
énergétiques. La population ne serait sûrement pas capable
d'avoir une opinion intelligente dans 60 jours.
M. Burns: M. Savoie, vous allez admettre ceci, quand même,
que le livre blanc propose. Il y a déjà une période de
réflexion que vous exigez qui est, à toutes fins pratiques,
présente par l'introduction, devant l'Assemblée nationale, de la
question et du débat de 25 heures. Ne croyez-vous pas que durant ce
débat de 25 heures, quand on sait ce que cela veut dire à
l'Assemblée nationale, c'est-à-dire à peu près au
moins deux semaines devant l'Assemblée nationale, déjà
tous les media sont mis en action et comprennent ce que va être la
question, comment elle va se présenter avec tout le pour et le contre
qui peut être donné, tant par les députés de
l'Opposition que par les députés ministériels relativement
à un problème très particulier?
Je ne pense pas en tout cas que le livre blanc dise que nous arrivons
avec une question surprise qui va, à l'intérieur d'une
période de 35 à 60 jours, être soumise à la
population sans auparavant qu'il y ait eu une discussion assez large sur le
sujet. Je pense qu'au contraire le livre blanc laisse entendre qu'il y aura eu,
avant même la période référendaire, ou la campagne
référendaire, une discussion assez large là-dessus?
M. Savoie: C'est ce qu'on veut dire, en fait.
M. Burns: Très bien. Alors, on s'entend bien, parfait.
Vous nous suggérez que les référendums ne demandent pas
à la population de se prononcer par un oui ou par un non,
c'est-à-dire que vous suggérez, donc, je présume, une
espèce d'éventail de questions.
M. Savoie: En fait, on a étudié le livre blanc sur
la consultation populaire avec les remarques que le président nous
faisait tout à l'heure derrière la thèse,
c'est-à-dire qu'on s'est efforcé de ne pas parler du
référendum auquel tout le monde pense, mais on a pensé
vraiment en termes très larges.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Ce que
je veux dire, vous pouvez en parler sans émettre d'opinions de fond.
M. Savoie: De toute façon, quand on a étudié
le livre blanc...
M. Burns: Non, non, c'est cela, d'ailleurs le président
nous a donné une directive qui ne nous empêche pas de parler de ce
référendum, mais...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):
Absolument pas.
M. Burns: ... ce que la présidence ne veut pas, du moins
si j'ai bien compris sa directive, c'est de ne plaider pour ou contre une
position.
M. Savoie: De toute façon, quand on a étudié
le livre blanc, on a étudié un livre blanc qui se rapportait,
pour nous...
M. Burns: A l'ensemble.
M. Savoie: ... à un processus de démocratisation.
Un processus de démocratisation, cela veut donc dire que les citoyens
ont un rôle de plus en plus intelligent à jouer dans le
mécanisme gouvernemental. Autant il nous paraît qu'il faut des
délais raisonnables pour que les citoyens prennent conscience d'une
question, autant il nous semble que, dans un contexte qui n'est pas
électo-raliste, où le but n'est pas d'amener les gens à
cautionner une position gouvernementale, il est préférable que
les gens aient le plus de possibilités de s'exprimer. C'est rare les
gens intelligents qui se prononcent par un oui ou un non, sans faire de
nuances. On aimerait bien qu'il y ait le plus de nuances possible, tout en
étant, évidemment, réaliste.
Logiquement, si on...
M. Burns: Dans le contexte, M. Savoie, qui m'apparaît
sous-tendre tout votre mémoire, d'un désir de question claire, de
question facile j'allais faire un anglicisme mais à
laquelle il est facile de répondre, j'allais dire: qu'il est facile de
répondre à, mais ce n'est pas ce que je dis, c'est l'Irlandais
qui prend le dessus, que voulez-vous? Dans le contexte d'une question à
laquelle il est facile de répondre, comme vous le suggérez
d'ailleurs je pense que cela sous-tend les grandes lignes de votre
mémoire n'est-il pas exact qu'une question, d'après vous,
à laquelle on répondrait par un oui ou un non serait beaucoup
plus claire, beaucoup plus précise, beaucoup plus nette?
M. Savoie: Un gouvernement qui aurait la réponse oui ou
non, selon ce qu'il veut avoir comme réponse, cela cautionnerait
beaucoup mieux et beaucoup plus facilement sa position. C'est certain que c'est
beaucoup plus facile, beaucoup plus clair d'avoir un résultat à
un référendum où 70% des gens ont dit: Oui. Il n'y a pas
d'hésitation. Mais est-ce que cela reflète vraiment au maximum la
participation du citoyen au mécanisme gouvernemental? Nous pensons que
non, et qu'il vaut mieux que les citoyens s'expriment avec plus de nuances,
même si la réponse s'avère moins claire pour
l'interprétation du gouvernement.
M. Burns: Je n'exclus pas la possibilité du recours
à plusieurs questions, lors d'un référendum, mais je me
demande si, au départ, le gouvernement ne devrait pas se forcer de poser
une question à laquelle on répond par un oui ou un non. Si ce
n'est pas possible, évidemment, je n'exclus pas le recours à la
solution que vous nous suggérez. Je veux que vous me compreniez
très bien là-dessus.
Par exemple, dans le cas de l'adhésion de Terre-Neuve à la
Confédération canadienne, qu'on appelle encore
confédération même si cela n'en est pas une, le premier
référendum était formulé en termes de trois
questions. De ces trois questions, on a enlevé un certain nombre de
points de vue qui ne semblaient pas rallier la population et, dans un
deuxième référendum, on est arrivé par un oui ou un
non, à cause de cela. C'est simplement pour vous dire ceci: Dans votre
mémoire, vous sembliez nous dire qu'il faut absolument qu'il y ait plus
d'une question à laquelle on puisse répondre par un oui ou un
non.
M. Savoie: En fait, si on situait le problème sur une
ligne horizontale, et qu'il y avait, d'un côté, une
démarche qui est essentiellement stratégique, pour que le
gouvernement fasse cautionner une de ses décisions par la population,
à ce moment, on poserait une question à laquelle on
répondrait par un oui ou un non.
Vous avez l'autre extrême de la ligne, chose qu'on ne vous propose
pas parce que c'est sûrement irréaliste; c'est que les citoyens
iraient vous dire leur position face à une grande question qu'ils
formuleraient eux-mêmes finalement. Evidemment, ce serait difficile
à contrôler et à compter, cela, mais entre ces deux
extrêmes on aimerait qu'il y ait le plus de marge possible pour que les
citoyens s'expriment tout en étant suffisamment...
M. Burns: Dans le fond, vous nous suggérez une grande
souplesse là-dessus. C'est probablement ce que...
M. Savoie: Oui. Une souplesse dans laquelle prévaut la
notion de démocratisation des structures politiques davantage qu'une
préoccupation de gagner un référendum.
M. Burns: Je passe par-dessus la discussion très
intéressante qu'on pourrait avoir relativement à l'initiative
populaire. Je pense que vous étiez là, M. Savoie et M. Boivin,
cet après-midi lorsque nous avons discuté avec une autre
société nationale. Je n'ai pas à répéter
à votre endroit le point de vue que j'ai émis à ce moment
en tant que ministre et en tant que membre du gouvernement.
Dernière chose, et c'est peut-être le dernier point que
j'ai l'intention de soulever avec vous, vous suggérez que le
décompte se fasse au niveau des circonscriptions électorales.
Voudriez-vous me dire très brièvement ce qui, fondamentalement,
vous incite à nous faire cette suggestion?
M. Savoie: C'est un manque d'information. A notre première
démarche, on préférait un décompte national.
M. Burns: J'ai vu dans votre mémoire que vous aviez
commencé par nous dire cela et dans le reste de votre mémoire
vous nous dites le contraire.
M. Savoie: Ensuite on s'est trouvé partagé à
peu près également entre des gens qui croyaient enfin je
ne croyais pas à cela, mais il y a des gens qui le croyaient
qu'un décompte national voulait dire vider toutes les boîtes de
scrutin dans un grand paquet et faire un décompte. Si c'est cela un
décompte national, on est pour le décompte de comté. Si un
décompte national, c'est laisser les boîtes de scrutin où
elles sont, en faire décompte et additionner les votes au niveau
national, on serait plutôt pour un décompte national. Comme on ne
savait pas ce que vous vouliez dire par décompte national ou de
comté on a...
M. Burns: Le problème auquel nous avons à faire
face, c'est celui de savoir si dans chaque section de vote on fait le
décompte. Si on fait cela, évidemment c'est clair et net que le
décompte va être su et connu au niveau de la circonscription
électorale. Il va s'additionner automatiquement parce que vous avez
actuellement, du moins au niveau électoral, des organisations qui sont
bâties autour de la circonscription électorale. L'autre question
était de savoir si on ne prenait pas tous ces votes au niveau de la
circonscription, si on ne les versait pas dans un "pool" au niveau
régional ou une poule comme dit plus exactement le député
des Deux-Montagnes.
M. de Bellefeuille: Expression sportive.
M. Burns: Oui, c'est tout à fait exact. Il y a cette
question qui se pose. Il y a aussi la question de dire à un niveau tout
à fait centralisé, au niveau national, au niveau
québécois, si le décompte se fait même si
l'opération a lieu circonscription par circonscription. Vous avez un
décompte qui n'est connu qu'au niveau national. Alors c'est cela dans le
fond la question qui se pose.
Vous dites, je ne me souviens pas à quelle page de votre
mémoire: On serait favorable à un décompte à
caractère régional mais en y pensant on est peut-être plus
favorable au décompte au niveau de la circonscription.
M. Boivin: Etant donné que le référendum est
une décision collective, cela va être le résultat
additionné des votes. Evidemment, on voudrait que ceci ressorte. On n'a
pas pu imaginer, parce qu'on n'avait pas les techniques et les connaissances
nécessaires pour l'imaginer de quelle façon on pourrait arriver
à ceci tout en gardant l'information et la possibilité d'analyser
le vote, à la suite d'un référendum. On a les deux
pôles, là.
M. Burns: Je pense que l'aspect analyse...
M. Boivin: On a ce volet qui est l'accumulation des
renseignements qui amènent à un référendum
populaire et, de l'autre côté, la possibilité
d'analyser...
M. Burns: C'est peut-être le deuxième ou le
troisième mémoire qui nous parle dans les mêmes termes,
sans se répéter, évidemment je ne pense pas qu'il y
ait de plagiat; ce n'est pas dans ce sens-là que je le dis de
l'analyse nécessaire à la suite du résultat d'un
référendum. Je pense que c'est un élément important
dans votre choix du décompte par circonscription. Si je ne me trompe
pas, c'est l'élément important.
M. Savoie: C'est l'élément décisif.
M. Boivin: Que ce soit copié sur les comtés ou les
régions, etc., cela nous laisse assez indifférents, pour autant
que ce n'est pas quelque chose de farfelu totalement. Mais on aimerait bien
savoir et je pense bien, aussi, que les citoyens d'une région
donnée aimeraient le savoir ce qu'il est advenu, par exemple, de
sa région et des autres régions, aussi, qu'on connaît bien.
Il apparaît important d'avoir cette information.
M. Savoie: C'est-à-dire que, si on protège le droit
du public à l'information concernant le résultat de son vote dans
son bureau de scrutin, dans sa localité, dans son comté ou dans
sa région, on ne s'oppose pas à ce qu'on fasse le décompte
au niveau national, pourvu que le droit du public à cette information
soit disponible.
M. Burns: D'accord. Je vous remercie de ces renseignements. Je
vous remercie de votre mémoire, également, que je trouve
très intéressant. Je me restreins à cause de l'heure,
parce que j'aurais le goût de vous poser bien d'autres questions et
d'utiliser tout le temps qui m'est disponible pour vous en poser.
Non, je n'ai pas utilisé tout mon temps et je m'impose cette
discipline de ne pas vous poser d'autres questions, même si j'aurais le
goût de vous en poser, parce que je suis convaincu qu'il y a d'autres
membres de la commission qui vont vous en poser, qui vont m'éclairer
également sur d'autres aspects de votre mémoire. Merci beaucoup,
M. Savoie et M. Boivin.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Laval.
M. Lavoie: M. Savoie, je crois remarquer, dans votre
mémoire, que vous avez un respect des libertés individuelles, des
libertés fondamentales, surtout d'opinion, d'expression, d'association,
etc. Je voudrais lire deux paragraphes, dont l'un se trouve dans
l'introduction: "Voulant embarquer immédiatement dans le débat
que constituera l'étude en commission parlementaire de ce livre blanc,
la Société nationale des Québécois de l'Outaouais
désire se joindre à toutes les forces progressistes du
Québec pour suggérer à cette commission parlementaire des
mesures qui permettront de tenir compte à la fois de la saine
démocratisation de nos institutions politiques, tout en ne brimant pas
les droits de ceux et celles qui pourront éventuellement s'opposer
à une législation dans ce domaine."
Je cite également, à la page suivante, le troisième
paragraphe: "La réforme proposée par le législateur ne
doit pas être seulement quantitative, mais également qualitative.
Aussi, est-il préférable, selon nous, de faire en sorte que
seulement quelques centaines de milliers de Québécois soient
impliqués dans un processus de réflexion sur une question
importante que de compter des millions de préjugés, même si
ces préjugés étaient favorables à l'idée que
nous défendons".
Pourriez-vous détailler ce deuxième paragraphe, s'il vous
plaît?
M. Savoie: C'est un peu ce que je disais tout à l'heure:
Quand on a étudié ce livre blanc, on l'a pensé en termes
d'une réforme de démocratisation de nos structures
gouvernementales, donc d'une plus grande participation du citoyen au processus
démocratique. Quand on parle, comme moyen pratique, de période de
réflexion suffisante, cela veut dire cela. Cela veut dire que le
citoyen, on ne va pas le comprimer dans une campagne... Du moins, ce qu'on ne
voudrait pas qu'il arrive, c'est qu'on comprime le citoyen dans une campagne de
propagande sous pression et lui demander tout de suite de prendre une
décision sur un sujet complexe. On aimerait qu'il y ait le plus de temps
possible pour décomprimer tout cela, pour permettre aux gens d'avoir des
idées, de se faire une idée, de changer d'idée, de
réfléchir, d'en parler à d'autres, de changer
d'idée deux ou trois fois s'ils le veulent, de façon qu'au moment
où ils vont prendre une décision, ce soit une décision
avec le plus de qualité possible. C'est cela qu'on veut dire.
M. Lavoie: Maintenant, vous considérez qu'une
période de deux ans serait normale pour une question assez complexe pour
permettre la bonne intelligence de la population, de ceux qui auront à
s'exprimer sur une décision. Vous considérez cette période
de deux ans comme normale.
M. Savoie: On n'a pas mis deux ans. On a donné l'exemple
d'une période de deux ans dans le cas d'une promesse électorale
d'un parti politique. Mais, en fait, un temps de réflexion suffisant,
cela peut varier d'une question à l'autre. Il y a des
sujets sur lesquels la population est beaucoup plus sensibilisée.
L'idée, tout à l'heure, d'un référendum sur une
politique énergétique, je ne vois pas comment on fait cela en six
mois. Que les gens puissent se prononcer intelligemment en six mois, cela me
paraît court dans un sujet comme cela. Une question comme l'avortement,
c'est dans l'air depuis pas mal plus longtemps, dans le fond. Il ne s'agit pas
qu'une campagne référendaire dure six mois ou un an ou trois ans.
Que la question soit suffisamment dans l'air depuis assez longtemps de sorte
que la population sache qu'il va y avoir un référendum sur cette
question dans un certain temps et que les gens aient le temps d'y
réfléchir.
M. Lavoie: Maintenant, je vais vous poser une question sur un
référendum qui fait l'objet des conversations, je dirais, des
boulevards et de la rue et même du parlement, actuellement, au
Québec, le référendum sur l'avenir constitutionnel du
Québec. Est-ce que vous appliqueriez également ce temps de
réflexion additionnel d'un autre deux ans avant de tenir un tel
référendum?
M. Savoie: Je comprends mal.
M. Lavoie: Le référendum qui doit se tenir au
Québec, éventuellement, sur l'avenir constitutionnel, est-ce que
vous adapteriez ce moment additionnel de réflexion de deux ans pour la
tenue du référendum sur l'avenir constitutionnel du
Québec, ou considérez-vous que la population est assez
informée, comme on le dit couramment, suffisamment informée
après au moins sept ans?
M. Savoie: C'est cela. Je considère que c'est
évidemment...
M. Burns: M. le Président, je m'excuse, M. Savoie. Je ne
veux pas intervenir dans le débat, mais si j'ai bien compris, M. Savoie,
il nous suggère d'utiliser le délai de deux ans qui est à
peu près celui qu'on évalue actuellement pour n'importe quel
autre référendum.
M. Lavoie: Encore une fois, je ne vous ai pas interrompu.
M. Burns: Non, je ne veux pas vous interrompre, j'essaie de vous
éclairer...
M. Lavoie: Laissez donc répondre le témoin. M.
Burns: Bon, d'accord.
M. Lavoie: Ecoutez, ce n'est pas de l'apologétique qu'on
fait ici.
M. Burns: J'essaie de sauver du temps à la commission.
M. Lavoie: Sauver du temps, en tout cas... Après qu'il a
pris 30 minutes pour poser ses questions, personne ne l'a interrompu, il
interrompt les autres.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A
l'ordre, s'il vous plaît!
M. Burns: Je ne vous interromps pas, c'est avec votre permission
que j'ai demandé...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A
l'ordre! M. Savoie, vous pouvez répondre.
M. Savoie: Pour répondre à votre question, je pense
qu'effectivement on a eu suffisamment de temps pour réfléchir
à ce référendum.
M. Lavoie: Qui pourrait se tenir dans les meilleurs
délais. Pour les fins du journal des Débats, pourriez-vous
répondre, s'il vous plaît?
M. Savoie: Bien, oui.
M. Boivin: On considère que la période de
réflexion est valable en soi pour favoriser la participation de
l'électeur à la chose publique, et qu'une période de temps
suffisante, c'est intéressant ou c'est souhaitable en ce sens que
pendant cette période, le citoyen s'intéresse à la
question, la débat, et il y a une espèce d'éveil chez
l'électeur et le citoyen à la chose publique et aux grandes
questions.
M. Lavoie: Je comprends comme vous que si on précipitait
un référendum sur l'énergie nucléaire ou quelque
chose comme cela, cela pourrait amener une très grande abstention des
citoyens qui n'auraient pas le temps de se former une opinion de cela.
Maintenant, il y a une chose qui attire mon attention dans votre
mémoire, c'est que vous êtes à peu près le seul
groupe qui est venu devant notre commission, sur une quinzaine jusqu'à
maintenant, qui propose vous êtes un des rares en tout cas
des questions multiples. La plupart des gens, la grande majorité des
organismes qui sont venus demandaient une question claire, précise, par
un oui, par un non, sans équivoque, etc.
Tout en étant favorable je vous le dis, j'annonce mes
couleurs à une question claire et précise, dans un but
pragmatique, ne trouvez-vous pas que si sur un problème particulier ou
sur un objet particulier il y a trois ou quatre possibilités soumises
à la population cela ne mène nulle part? D'abord dans une
décision, si on veut respecter l'intelligence de la population, il faut
que l'interprétation du résultat soit assez précise. Il
faut que cela éclaire le Parlement ou le gouvernement pour apporter une
solution à un problème donné qui est soumis à la
population et qui amène je le souhaite un résultat.
Il ne faut pas qu'on soit, après le référendum, encore
plus dans les limbes qu'avant.
Je vous donne l'hypothèse suivante sur une question de l'avenir
constitutionnel, et je ne vais pas au fond de la question. On peut demander
à la population: Voulez-vous le statu quo? Voulez-vous un
fédéralisme renouvelé? Voulez-vous la
souveraineté-association? Voulez-vous l'indépendance du
Québec? On pourrait avoir le résultat hypothétique
suivant: 20% pour le statu quo prenez-le en note mon chervoisin
des Deux-Montagnes le fédéralisme renouvelé, 35%
c'est tout à fait hypothétique
souveraineté-association, 30% et séparation, indépendance
ou souveraineté je veux épargner toutes les
susceptibilités 15%. Dans quelle position serait le gouvernement
ou le Parlement pour trouver une solution au problème constitutionnel
que nous vivons actuellement, si nous avons un résultat de la sorte,
20%, 35%, 30% et 15%?
M. Savoie: Quand on a étudié ce livre blanc, on
s'est justement forcé pour ne pas penser au référendum sur
l'avenir constitutionnel.
M. Lavoie: Vous avez fait un effort terrible.
M. Savoie: On a fait un terrible effort, puis on a essayé
d'objectiver le référendum comme processus de
démocratisation. C'est bien sûr que ce que vous dites, j'aimerais
bien mieux cela, un vote bien clair, par un oui ou par un non.
Stratégiquement, si j'étais un politicien, je me sentirais bien
plus en confiance d'être appuyé par une majorité de la
population.
Si on regarde le livre blanc comme un processus de
démocratisation, le but n'est pas de faire cautionner un choix du
gouvernement, mais d'amener la population à se prononcer sur des
options. Plus il y aura d'options, plus la population pourra faire un choix
nuancé. Sauf pour le référendum sur l'avenir
constitutionnel, la population aurait intérêt à se
prononcer d'une façon beaucoup plus nuancée sur des questions
comme l'avortement, sur des questions comme la politique
énergétique.
M. Lavoie: Un instant, je vous interromps. Comment voulez-vous
avoir des questions pour que ce soit nuancé sur l'avortement? Donnez-moi
un exemple, pour que ce soit nuancé, il faudrait quasiment qu'il y ait
trois questions sur l'avortement.
M. Savoie: Cela pourrait être le cas. Par exemple, vous
pouvez demander aux gens si on est d'accord avec l'avortement sur demande, avec
l'avortement thérapeutique, avec l'avortement sur demande à la
condition que la grossesse soit de moins de six semaines ou quelque chose comme
cela c'est la position de l'Eglise unie, par exemple ou si les
gens sont contre l'avortement.
M. Lavoie: Vous pourriez avoir un résultat de 20% à
25% dans chacune des quatre options. Il ne faut pas oublier que les hommes
publics sont là pour prendre des décisions; on n'est pas
là pour faire des dissertations, on est là pour apporter des
résultats.
M. Savoie: Le livre blanc parle d'une consultation, donc
l'Assemblée nationale reste libre de faire des lois. Ce que cela vous
donne un référendum sur l'avortement où vous auriez 25% de
réponses dans chacune des options, cela vous dit qu'il y a 25% des gens
qui sont contre l'avorte- ment, qu'il y en a 25% qui l'accepteraient dans
certaines situations; à vous de vous laisser éclairer par ces
résultats.
M. Boivin: Je pense que dans le cas d'un référendum
qui impliquerait une obligation assez forte de la part du gouvernement à
respecter la décision, il faudrait peut-être avoir une question
qui simplifie énormément; enfin, la réponse devrait
être très simple par un oui, un non, par exemple. A ce moment, il
y aurait possibilité d'avoir une action assez précise à la
suite de réponses semblables, suivant les pourcentages. Mais nous sommes
en face d'une loi-cadre sur la consultation populaire.
A ce moment, le gouvernement doit prendre ses responsabilités
vis-à-vis des résultats de cette consultation et la population
doit avoir pu exprimer toutes les nuances vis-à-vis des questions ou de
la question à plusieurs volets. On souhaite que ce soit le cas et qu'en
autant que les volets ou les questions, comme on l'indique dans le
mémoire, reflètent l'opinion d'une large partie de la population,
au départ, qu'on sache que cela reflète une large partie de
l'opinion de la population. On préfère que la population puisse
nuancer davantage.
M. Lavoie: Je respecte votre opinion, même si je ne la
partage pas. Vous attachez peut-être, et c'est votre droit, plus
d'importance aux moyens de démocratisation qu'à la fin, qu'au
résultat.
M. Savoie: Oui.
M. Boivin: On ne veut pas substituer...
M. Lavoie: Vous êtes plus académique que moi et je
respecte votre position.
M. Boivin: On ne veut pas substituer l'appareil normal de gestion
publique qu'est l'Assemblée nationale.
M. Lavoie: Ou plutôt le gouvernement. M. Boivin:
Oui, le gouvernement.
M. Lavoie: Par contre, ce que je crains c'est une
dernière remarque que je fais, on s'en plaint d'ailleurs, et c'est une
complainte généralisée dans le monde que les gouvernements
sont souvent lents à agir, que la machine de l'Etat est lente à
prendre des décisions et que le processus est compliqué
avec votre formule, si vous trouvez un moyen, par l'exercice de la
démocratie, de compliquer davantage la situation, au sein des caucus de
la majorité du gouvernement, c'est que vous allez retarder encore plus,
vous allez mettre des freins à l'appareil de l'Etat et il sera encore
plus lent à prendre des décisions et à agir si vous lui
donnez l'occasion de faire naître une multitude d'hypothèses et
des moyens de division. Je respecte votre opinion, mais c'est une crainte que
j'ai.
Une dernière question que j'aurais à vous poser; vous avez
souvent dit que le processus réfé-
rendalre ne doit pas être mis en place pour cautionner un
gouvernement en place quel qu'il soit, le gouvernement actuel ou l'Opposition
qui pourrait devenir le gouvernement, etc., dans notre régime
d'alternance. Je suis tout à fait d'accord sur ce point avec vous.
Est-ce que cela voudrait dire que le gouvernement devrait faire un effort
spécial, extraordinaire pour se dégager de l'opération
partisane référendaire? En somme, je rejoins une idée
émise par l'Union Nationale, qui a été endossée par
nous à cet effet. Elle a même été suivie en
Angleterre alors qu'on a confié l'étude de l'opération
référendaire à un haut fonctionnaire de l'Etat non
politisé qui était un M. Jamieson, un ancien sous-ministre de
l'Education qui, lui, a préparé avec une équipe non
partisane et non politisée l'opération référendaire
en Angleterre.
Vous émettez le voeu d'affranchir le gouvernement ou de tenter de
le libérer pour qu'il ne soit pas en conflit d'intérêts
pour se faire cautionner dans une opération référendaire.
Souhaiteriez-vous, en résumé, que l'opération
référendaire soit détachée le plus possible, dans
l'élaboration du processus, dans la fabrication de la loi, dans la
formulation de la question ou dans l'exercice référendaire
lui-même, et faite possiblement par un conseil du
référendum non partisan et non politique?
M. Savoie: Vous parliez, tout à l'heure, de
l'efficacité de l'appareil gouvernemental. En fait, cela ne me semble
pas très important que ce soit non partisan, qu'il y ait plusieurs
partis, etc. Ce qui est important, c'est que la population puisse s'exprimer
avec le plus de liberté possible, avec le moins de pressions possible,
avec le moins de manipulations possible. C'est certain qu'on s'attend que le
processus référendaire soit le plus dégagé possible
de ces manipulations, que le gouvernement se comporte comme ça.
Est-ce que le gouvernement peut, seul, s'au-todiscipliner suffisamment
pour apporter des questions qui ne sont pas manipulées?
M. Lavoie: La chair est faible, vous savez.
M. Savoie: De toute façon, il existe des partis
d'Opposition et la population est aussi capable d'estimer jusqu'à quel
point le gouvernement tente de se faire cautionner malhabilement ou
démocratiquement.
M. Lavoie: Très brièvement, je vois au
deuxième chapitre que vous avez des craintes, des appréhensions
sur l'obligation pour tous les groupes de pression, pour les individus ou pour
les tendances de s'intégrer dans des corridors ou dans des groupes
très restrictifs qui pourraient porter atteinte à certains droits
fondamentaux. Vous pencheriez, d'après la lecture de votre
mémoire, vers une tendance plutôt libre et libérale, dans
le sens philosophique du mot, pour que les individus ou les groupes au
Québec puissent s'exprimer le plus librement possible dans une campagne
référendaire.
M. Savoie: En fait, je pense qu'un principe qui nous semble
valable, c'est d'égaliser dans la mesure du possible les chances de
toutes les tendances. Notre option, c'est d'intervenir le moins possible par
des moyens de censure ou des choses comme cela. On voudrait que ce soit le plus
égal possible. On ne voudrait pas brimer les droits d'association ou les
droits de parole de quelque individu ou association. Maintenant, on voudrait
que ce soit suffisamment contrôlé pour que des organismes ne
sabotent pas le processus référendaire.
M. Lavoie: M. Savoie, j'ai terminé et je vous remercie de
la présentation de votre mémoire.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Mégantic-Compton.
M. Grenier: Bien brièvement, je ne veux pas
répéter les questions des autres qui sont ici, parce que vous
allez m'accuser de vous faire perdre du temps. Si je les répète,
vous pouvez aussi m'accuser de ne pas être intelligent et de ne pas
comprendre. Un député ne peut jamais admettre cela publiquement.
Vous avez affirmé, à la toute fin du questionnaire du
député de Laval, que vous étiez pour une loi-cadre, je
pense. Je ne le sens pas dans le mémoire, en tout cas je ne l'ai vu
nulle part. Cela se dégage peut-être et je ne l'ai pas
suffisamment exploité, mais vous seriez d'accord sur une loi-cadre des
référendums?
M. Savoie: On parle de l'ensemble d'un processus de consultation
le plus permanent possible; c'est certain que cela doit être une
loi-cadre.
M. Grenier: C'est dans cet esprit que vous avez
préparé votre mémoire. Vous avez parlé des
tendances, tout à l'heure, sur les questions qui pourraient être
posées. C'était là une de mes questions. Il y a quelqu'un
qui nous a même proposé d'avoir un deuxième
référendum, tenu dans l'espace d'une semaine, une fois qu'on
aurait réussi à faire une première synthèse des
quatre ou cinq questions, un peu comme dans un régime
présidentiel, si vous voulez. Il est bien sûr qu'autour de la
table ici en tout cas à l'Assemblée nationale, vous avez
peut-être plusieurs députés qui ne représentent pas
la majorité de leurs électeurs. Cela s'explique pour un
député, dans ce sens que le système est comme cela. Cela
ne veut pas dire qu'il est parfait. Un régime présidentiel
clarifierait peut-être la question de sorte que chaque
député pourrait représenter plus que la moitié de
ses électeurs, alors qu'il y en a peut-être qui en
représentent à peine le tiers ou en bas de la moitié. Mais
dégager des tendances, je pense que cela ne peut pas être comme
cela pour un référendum. Cela ne peut pas être suffisant
avec toutes les difficultés que cela peut causer. Vous n'avez pas
apporté cette opinion pour permettre ensuite la tenue d'un autre
référendum pour réduire les questions, j'imagine?
M. Savoie: Non.
M. Grenier: Simplement un éclairage au gouvernement.
M. Savoie: C'est cela.
M. Grenier: II tirera de cela ce qui serait bon pour
légiférer ensuite.
M. Savoie: C'est que normalement, si on envisage le livre blanc
tel qu'il est fait, c'est certain qu'on pense à un
référendum en particulier, mais on est allé beaucoup plus
loin que cela, puis on a pensé à un processus permanent. Donc, en
général, les référendums, ce sera beaucoup moins
émotif que celui auquel tout le monde pense. Normalement, pour un
référendum sur une politique énergétique, ce n'est
pas très important d'avoir un résultat très clair qui va
donner un mandat au gouvernement jusqu'à ce qu'on le change.
C'est important de donner un résultat très clair, mais qui
peut être très nuancé, c'est-à-dire qu'un
gouvernement n'attend pas après cela pour avoir un mandat. Les
résultats du référendum vont être une indication au
gouvernement pour procéder plus ou moins vite.
M. Grenier: Vous n'en avez pas parlé dans votre
mémoire, mais vous avez mentionné une période de
peut-être deux ans pour permettre aux gens de discuter sur la place
publique d'une idée, d'un référendum qui pourrait venir,
par exemple, sur le système nucléaire ou sur l'avortement et vous
avez même parlé de l'avenir constitutionnel du Québec.
D'après vous, est-ce qu'il est des questions qui peuvent
être réglées, je pense à ces trois exemples que vous
avez donnés, vous avez semblé affirmer, à force de
sous-questions, qu'il est un référendum qui pourrait être
passé immédiatement. Je dois vous dire que moi, personnellement,
je ne me sentirais pas prêt à voter sur ce
référendum qu'on a à l'esprit demain matin, pour la bonne
raison qu'on manque pas mal d'éclairage à plusieurs points de
vue. Pensez-vous que là-dessus on n'aurait pas besoin d'une
période d'une couple d'années aussi, si on veut arriver à
dégager des tendances, être capable d'avoir d'autres
propositions?
M. Savoie: C'est rare que, dans une société en
évolution, on arrive à avoir un comportement ou une opinion bien
tranchée. Normalement, une société évolue. Si on
avait demandé un référendum sur, je ne sais quoi, la
libération de la pornographie en 1950, cela aurait été
battu à 99%. Si on le demandait maintenant, ce serait pas mal plus
nuancé, et si on refaisait le même référendum dans
dix ans, ce serait peut-être différent. La population change
d'idée, finalement; je pense que c'est normal et qu'il faut respecter
ces possibilités de la population de changer d'idée.
M. Grenier: Je pense que c'est cela que vous vouliez dire par
votre période de deux ans. Plus le problème est important...
M. Savoie: Pas un référendum sur la
législation de la pornographie.
M. Grenier: Vous êtes d'accord, je pense, que plus la
question est importante et plus le retour pourrait être difficile sur une
question par exemple, plus la période de réflexion pourrait
être longue pour permettre aux gens de vraiment arriver avec un
éclairage presque parfait quand ils auront à se prononcer, parce
que le retour peut être compliqué alors qu'une loi sera
passée. Je pense bien qu'à ce moment-là on devrait s'en
tenir, comme vous le dites, avec le minimum d'une couple d'années pour
avoir un éclairage complet.
Vous avez parlé du décompte, et c'était large,
évidemment, sans préciser si c'est au niveau du comté,
parce que vous n'étiez pas suffisamment au courant, par le livre blanc,
de l'opportunité d'avoir un décompte au niveau de ces
circonscriptions, et vous ne saviez pas dans quel contexte on pourrait faire un
décompte au niveau national. Mais advenant que la plomberie de tout cela
ferait en sorte que le décompte pourrait être fait sur un plan
régional, en éliminant, par exemple, les régions
économiques, mais un plan régional des référendums,
trouveriez-vous que cela rendrait plus justice qu'un plan de district
électoral ou bien un plan national?
M. Savoie: Notre préoccupation est une
préoccupation du droit du public à l'information concernant les
résultats du référendum. Si on garantit que le public aura
toujours accès à l'information, nous on aurait tendance à
privilégier un décompte au niveau national de façon qu'il
y ait une solidarité nationale plus grande.
M. Grenier: Vous voyez que je n'insiste pas sur la question
puisqu'on a eu le témoignage d'autres personnes, et ce que vous me dites
est peut-être assez correct aussi pour me permettre de continuer. Le
conseil du référendum, on vous l'a signalé ici, groupe
dépolitisé, si vous voulez, la question vous était
posée tout à l'heure, mais un conseil qui aurait, par exemple,
à éclairer le gouvernement sur la question à poser, sur la
date des référendums à venir, les questions à
poser, la date des référendums, ne pensez-vous pas qu'on serait
plus en sécurité si c'était donné à des gens
en dehors de la politique? A nous voir travailler, vous vous demandez si vous
êtes en toute sécurité quand vous le donnez à des
politiciens ou si ce ne serait pas mieux de le confier à d'autres
personnes? Ne pensez-vous pas qu'il y aurait un travail qui pourrait se faire,
vraiment plus dépolitisé, dans un groupe qui s'appellerait un
conseil que d'être laissé au gouvernement? Je parle du
gouvernement qui est tout le monde des deux côtés de la table.
M. Savoie: En fait, quand on a étudié le livre
blanc, on a émis l'hypothèse que le gouvernement ne serait pas
toujours le gouvernement qu'on désire avoir. Donc, si on est dans
l'opposition, comment on va réagir devant une loi qui serait une loi de
l'Assemblée nationale? Il ne nous semble
pas que, dans un contexte démocratique, ce soit un bien gros
problème qu'il y ait des organismes dépolitisés et des
partisans et tout cela. J'ai l'impression qu'on peut faire confiance au
gouvernement qu'on a actuellement et à un autre gouvernement. Dans un
Etat démocratique, le gouvernement ne peut pas se permettre de fausser
les règles du jeu, de poser des questions pièges qui se feraient
battre. Je pense que la conscience politique des gens est assez
avancée...
M. Grenier: Je veux bien prendre votre parole là-dessus.
Vous ne vous souvenez sans doute pas, mais vous avez du le lire ou quelqu'un
vous l'a raconté, du vote qui a été pris à Ottawa
sur la conscription obligatoire. Si cela avait été à un
conseil de référendum, je ne suis pas sûr que la question
aurait été aussi mêlée. On avait peut-être
avantage à mettre la question pas mal ténébreuse alors
qu'on voulait faire voter des gens pour savoir s'ils étaient pour ou
contre la conscription. A ce moment on a eu une des questions des plus
ténébreuses qu'il m'ait été donné de
rencontrer.
M. Boivin: Si on avait affaire à un seul
référendum sur une période très longue...
M. Grenier: Si on avait affaire à un seul...
M. Boivin: ... à une seule consultation populaire sur une
période assez longue, peut-être qu'on serait tenté d'amener
des mesures de ce genre pour protéger, etc. Mais, dans un contexte de
consultation populaire qui se régularise, j'ai l'impression qu'il y
aurait une espèce d'éveil ou de conscientisation de la
population. On n'aurait pas besoin de la surprotéger. Même
à la limite, des organismes de surprotection en essayant d'objectiver,
etc., feraient perdre à la population ce sens parce qu'on
développerait une espèce d'instinct de se fier sur des experts
pour régler les problèmes fondamentaux. Evidemment, il faut bien
placer notre position dans ce contexte d'une consultation populaire qui se rode
et qui devient une espèce d'habitude que l'on crée. A ce moment,
il y aurait de moins en moins de possibilités de manipuler. Si jamais
une fois on a manipulé la population, une autre fois les gens le
sauraient. Ils seraient de plus en plus avisés vis-à-vis de ce
genre de manipulation.
M. Grenier: Juste une toute dernière question en
terminant. Vous dites à la page quatre de votre texte: Comment concilier
la réglementation qui sera apportée par la loi des
référendums et le principe de la liberté de parole et
d'association? Vous vous interrogez. Généralement quand on
s'interroge on a quand même des éléments de solutions.
Qu'est-ce que vous proposez là-dessus?
M. Savoie: Rien. On est d'accord avec le principe que chaque
option puisse s'exprimer le plus librement possible, avec le plus
d'égalité possible. Ceci dit, cela prend des mécanismes de
contrôle, des mécanismes qui empêchent des abus d'un
côté ou de l'autre, des mécanismes qui essaient
d'égaliser les chances. D'autre part, on tient beaucoup au principe du
droit d'association et du droit de parole. On aimerait bien qu'on trouve des
mécanismes qui censurent le moins possible ces droits.
M. Grenier: M. Savoie et M. Boivin, au nom de notre parti, je
vous remercie.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Merci
beaucoup, M. le député de Mégantic-Compton. Au nom de tous
les membres de la commission, merci beaucoup pour votre participation et votre
collaboration.
J'inviterais maintenant la Société nationale des
Québécois de Lanaudière, son ou ses porte-parole à
venir présenter leur mémoire, s'il vous plaît.
Société nationale des
Québécois de Lanaudière
M. Charette (René): M. le Président, je me nomme.
Je suis René Charette, directeur général de la
Société nationale des Québécois de
Lanaudière. A ma droite c'est le vice-président de la
Société nationale des Québécois de
Lanaudière, Me Michel Fréchette, et, à ma gauche, M.
Evangéliste Saint-Georges, organisateur de la Société
nationale des Québécois de Lanaudière.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Alors
avant de commencer, êtes-vous au courant de la directive que je donne
à tous les intervenants?
M. Charette: Oui.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Alors
vous me dispensez de la répéter.
M. Charette: Oui. M. le Président, je voudrais vous
indiquer qu'il est 22 heures 10. Nous avons été convoqués
pour ce matin à 10 heures précises et nous étions ici
à 10 heures. Je trouverais un peu indécent que la
Société nationale des Québécois... Elle a fait des
consultations dans son milieu, à partir de son comité, de son
conseil d'administration et son assemblée générale pour
venir vous présenter aujourd'hui un mémoire peut-être pas
avec toute la phraséologie qu'on a retrouvée dans certains
mémoires, mais une certaine argumentation de discussion qu'on voulait
faire avec la commission. C'est dans cet esprit qu'on venait ici, et non
nécessairement avec toute la vérité acquise de notre part,
pour engager, avec la commission, un dialogue franc et honnête à
partir de ce qu'on pensait chez nous. On ne voudrait pas, comme souvent on
l'est dans nos régions, être traité comme une
sous-région de Montréal.
Je vous dis qu'il est 22 heures 10. Vous avez consacré ce matin,
à compter de 10 heures 30 à peu près, en moyenne, une
heure et demie à deux heures par mémoire. Je pense que le
nôtre apporte des arguments sur certains aspects du livre blanc qui nous
paraissent importants, non pas la
vérité toute faite, mais propres à susciter une
franche discussion qu'on voudrait avoir avec tous les membres de la commission,
notamment sur l'âge du vote, sur une série d'aspects qu'on
soulève dans notre mémoire.
Je trouverais cela, en tout cas, un petit peu indécent que ce
soir, on vous présente notre mémoire, qui a huit ou neuf pages,
pour avoir à peu près une dizaine de minutes de discussion avec
vous.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M.
Charette, je pense.
M. Charette: Oui.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):
Effectivement, vous avez été convoqués à 22
heures et je dois vous dire que vous ne devez pas nécessairement
présumer, à cause du fait que vous avez commencé à
22 h 10, que les membres de la commission vont nécessairement terminer
l'étude de votre mémoire à 23 heures. S'il arrive que les
intervenants ou que les membres de la commission ont des questions
supplémentaires à poser, soyez sans aucune crainte que les
travaux seront ajournés mais qu'on pourra continuer de vous entendre
demain matin. L'autre organisme sera refoulé, comme on dit en langage
judiciaire. Vous êtes ici en toute liberté, au pied du rôle,
comme on dit, et même s'il était 22 h 35, cela ne vous
enlèverait pas votre droit d'être entendus et de continuer demain
matin, si les membres de la commission ont d'autres questions à vous
poser. D'accord?
M. Charette: D'accord.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):
D'ailleurs, je dois vous dire que ce que je viens de vous dire là s'est
passé à plusieurs reprises depuis le début des travaux de
cette commission. Alors, on vous écoute.
M. Charette: M. le Président, messieurs les membres de la
commission, à l'invitation du gouvernement québécois de
présenter des mémoires à votre commission relativement
à l'étude du livre blanc sur la consultation populaire au
Québec, la Société nationale des Québécois
de Lanaudière a cru de son devoir de vous communiquer ses remarques et
son point de vue général sur la question. Pour votre information,
la Société nationale des Québécois de
Lanaudière regroupe 15 000 membres répartis sur l'ensemble de son
territoire qui couvre 52 villes et municipalités pour une population de
142 000 habitants.
Conscients de l'importance de la future législation en
matière de référendum, il nous apparaît que le livre
blanc, d'une façon générale, rencontre les objectifs de
notre société. Cependant, nous voulons vous livrer quelques
observations et recommandations à la suite de l'étude du livre
blanc.
Premièrement, des référendums de consultation. Sur
ce point, notre société est d'accord avec le contenu du livre
blanc, compte tenu du fait que si le référendum avait un
caractère législatif, il irait à l'encontre des pouvoirs
et fonctions de notre forme actuelle de gouvernement, et qu'il faudrait amender
la constitution québécoise, ce qui nous apparaît comme un
processus fastidieux, et quand on dit "contraire au régime
parlementaire", c'est surtout en termes de caractère législatif.
Nous sommes d'accord pour dire que tant et aussi longtemps que le Québec
n'aura pas atteint sa pleine souveraineté, il vaut mieux se conformer au
processus prévu par le livre blanc sur cette question.
Deuxièmement, le droit d'initiative. A notre avis, deux
observations s'imposent à ce chapitre. Tout d'abord, le livre blanc nous
dit que le droit d'initiative appartiendra à l'Exécutif et au
Parlement, ce avec quoi nous sommes d'accord tout en vous soulignant qu'il
faudrait, dès maintenant, étudier les possibilités
d'élargir ce droit d'initiative aux groupes et aux citoyens, dans
l'avenir. Par ailleurs, quand vous limitez ce droit à l'Exécutif
et au Parlement, vous dites et, là, on cite le livre blanc: "Le
gouvernement propose que ce soit l'Assemblée nationale qui, à la
suite d'une proposition du gouvernement, décide de la formulation finale
de la question sur laquelle la population aura à se prononcer". Pour
cette raison, nous vous demandons: Que vaudra une question formulée par
un gouvernement minoritaire si l'Assemblée nationale, par son opposition
majoritaire, peut ou décide d'en changer le sens, le contenu ou la
forme? Ne craignez-vous pas que le gouvernement, à ce moment-là,
soit à la merci de ceux qui sont en opposition avec lui, à
commencer par l'opposition parlementaire elle-même qui serait libre de
reformuler la question à son avantage et, par le fait même, contre
le gouvernement? Comme exemple, nous vous disons qu'à la dernière
élection un gouvernement comme celui du Parti québécois
disait, dans ses promesses électorales, qu'il ferait un
référendum dans l'optique que le gouvernement du Parti
québécois serait élu d'une façon minoritaire, qu'il
aurait eu le pouvoir et que la question à formuler aurait
été laissée à l'Assemblée nationale.
Peut-être que le sens de la question que le gouvernement aurait voulu
poser aurait pu avoir un tout autre sens, en fin de compte, que celui qu'il
aurait voulu.
La formulation de la question. Quant à la forme de question, nous
nous permettons de vous dire que nous souhaitons que la ou les questions
posées soient claires et précises afin qu'il n'y ait pas
d'ambiguïté possible sur l'interprétation de la
volonté des répondants.
A notre avis, la crédibilité du gouvernement serait mise
en cause si la formulation des questions n'était pas claire et
précise.
Les préalables au scrutin. A ce sujet, notre
société se dit d'accord avec le contenu du livre blanc.
Cependant, il nous semble que la Loi électorale devrait permettre aux
jeunes de seize et dix-sept ans de voter, car beaucoup de lois au Québec
et au Canada les considèrent comme des citoyens adultes à
l'âge seize ans. Mais qu'on soit bien compris sur cette question: si le
législateur maintient l'âge du droit de vote aux élections
à 18
ans, nous ne voulons pas qu'il en soit autrement pour le
référendum, car nous souhaitons de plus en plus qu'il y ait
concordance dans les lois qui font appel au vote du citoyen.
La campagne référendaire. Tout en étant d'accord
avec le contenu du livre blanc, sur cette question, notre société
voudrait que le gouvernement s'assure, par sa loi ou sa réglementation,
que les débats sur la consultation populaire se feront et se discuteront
entre Québécois. Le livre blanc ne nous donne pas toutes les
garanties nécessaires sur ce point. Ce n'est pas brimer le droit
d'expression des citoyens de vouloir, par nos lois et nos règlements,
protéger les Québécois contre toute intrusion de
l'extérieur qui, dans certains cas, viendrait contrer les objectifs des
Québécois et, dans ce cas précis, celui du devenir
politique du Québec qui, en somme, ne regarde que les
Québécois.
Quant au scrutin, la société pense que le décompte
des votes doit être fait sur la base des comtés, tout comme aux
élections, si l'on veut respecter les liens de concordance entre les
lois. Etant donné la valeur consultative du référendum, il
est d'une grande importance de décompter les résultats par
comté afin d'avoir en main les données les plus précises
possible pour en faire une analyse en profondeur et y attacher une plus grande
valeur. Par exemple, lors d'une consultation sur le zonage des terres
agricoles, il serait important, comme valeur indicatrice, de connaître le
résultat dans les zones agricoles comparativement aux zones
urbaines.
Enfin, nous faisons référence à M. Jacques
Brossard, professeur titulaire à la faculté de droit de
l'Université de Montréal. Après avoir consulté au
préalable le livre de M. Jacques Brossard, autorité
québécoise en droit constitutionnel et intitulé
L'accession à la souveraineté et le cas du Québec, nous
sommes d'avis que le gouvernement actuel respectera toutes les normes pour que
les futurs référendums, qui seront régis par cette loi,
soient parfaitement satisfaisants. M. Brossard spécifie, d'ailleurs,
à la page 345 de son volume: En effet, pour qu'il le fût, il
faudrait respecter au minimum les normes suivantes: 1.- Les conditions de ce
référendum devraient être déterminées par les
parlementaires aussi bien que par l'exécutif ce qui n'eut pas
été le cas des référendums prévus par le
projet québécois de 1968 (page 291); 2.- L'alternative
posée devrait être à la fois claire, complète et
impartiale et objective; 3.- La campagne préparatoire devrait
échapper à l'emprise des partis politiques comme tels, puisqu'il
ne s'agirait pas d'appuyer un parti, mais d'approuver ou de rejeter une
décision politique ou un projet de constitution. 4.- Elle devrait
être absolument honnête et permettre à l'électeur de
s'informer de façon objective et suffisante, notamment au niveau des
media d'information. 5.- La campagne et le vote ne devraient porter
réellement que sur la question posée. On sait que ce ne fut pas
le cas, par exemple, du référendum français de 1968 sur la
participation et sur la régionalisation, ni celui de 1972 sur l'Europe,
qui donnèrent plutôt lieu à des manifestations d'opposition
ou d'appuis partisans. 6.- Le droit devrait être reconnu à tous
ceux qui sont directement intéressés par la question. "A
condition de respecter ces normes, un référendum est sans doute
la façon la moins insatisfaisante de vérifier l'état
quantitatif de la volonté populaire à un moment donné,
pour autant que cette volonté sache s'exprimer réellement. Cela
dit, il faut reconnaître qu'aucune des autres voies n'est parfaitement
satisfaisante non plus, notamment pour ce qui est de l'information objective et
suffisante de l'électeur, ou pour ce qui est de la primauté de
l'intérêt public sur les intérêts particuliers".
Conclusion. En somme, comme vous le voyez, nous sommes d'accord en
général sur le livre blanc de la consultation populaire au
Québec et nous croyons que le gouvernement actuel a été
respectueux de son mandat en insistant pour que la future loi sur les
référendums se situe dans le cadre juridique et politique du
Québec d'aujourd'hui, soit celui réglementé par le droit
et la tradition britanniques de nos institutions parlementaires, et aussi en
respectant les élus du peuple qui auront en main le droit d'initiative
en ce domaine.
Messieurs de la commission parlementaire, nous vous remercions de nous
avoir entendus et nous espérons que vous prendrez en sérieuse
considération nos remarques et recommandations. Nous sommes à
votre disposition pour répondre à vos questions.
Le Président (M. Paquette): Merci aux représentants
de la Société nationale des Québécois de
Lanaudière. M. le ministre d'Etat à la réforme
parlementaire et électorale.
M. Burns: M. Charette, je vous remercie pour la
présentation de votre mémoire qui est très clair. Je me
limiterai probablement à une ou deux questions, parce que si je revenais
sur un certain nombre de choses, je reviendrais peut-être sur d'autres
questions que j'ai posées à d'autres groupes qui sont venus
aujourd'hui. Je prends bonne note du fait qu'en général vous
êtes d'accord sur le livre blanc, donc, en principe, vous êtes
favorable à une loi-cadre plutôt qu'une loi spécifique.
M. Charette: Oui.
M. Burns: Relativement à quelque référendum
que ce soit. Là-dessus, vous êtes en bonne compagnie avec le
Barreau, avec le Mouvement national des Québécois, avec la
Société Saint-Jean-Baptiste, avec les diverses
sociétés nationales. Il y a même des groupes
fédéralistes qui, la semaine dernière, nous ont dit
exactement la même chose. Je pense que, là-dessus, le consensus
semble se dégager de plus en plus, relativement à une loi-cadre.
J'ai même entendu, à mon grand étonnement, le
député de Laval nous dire,
tout à l'heure, qu'il est en train de se ranger vers cette
position.
M. Lavoie: Ne me prêtez rien, surtout pas des paroles.
M. Burns: Non, mais écoutez, parce que je vous
considère intelligent, je vous vois évoluer, c'est normal. C'est
tout à fait normal que vous veniez à cette position.
M. Lavoie: Je préférerais que le gouvernement, dans
son ensemble, évolue.
M. Burns: Le gouvernement évolue. D'ailleurs, je n'ai
jamais fermé la porte, relativement au livre blanc, sur quoi que ce
soit.
M. Lavoie: A propos, vous me permettriez une question?
M. Burns: Bien oui.
M. Lavoie: Cela fait plusieurs fois que vous nous dites, depuis
quinze jours trois semaines, que vous souhaiteriez, d'ailleurs comme le groupe
qui est devant nous actuellement, que personnellement vous favorisez de tout
coeur une question claire, précise, sans équivoque, mais vous
avez insisté sur le côté personnel. Vous avez l'occasion,
j'imagine, de rencontrer fréquemment vos collègues du
cabinet.
M. Burns: Cela m'arrive au moins une fois par semaine.
M. Lavoie: Est-ce que vous pourriez nous dire maintenant si vous
avez une réponse du cabinet, depuis deux ou trois semaines que vous
exprimez votre désir? Votre voeu personnel est-il endossé par les
membres du cabinet sur une question claire, précise, honnête, sans
équivoque?
M. Burns: Je vais être très clair et très
précis à l'endroit du député de Laval. Je ne crois
pas qu'il soit normal de ma part, surtout pas décent à l'endroit
des gens que nous invitons à venir nous donner leur point de vue, je ne
crois pas que je sois capable actuellement de soumettre un nouveau
mémoire au Conseil des ministres pour leur donner mon point de vue
là-dessus. Je vais attendre la fin des travaux de la commission pour
retourner devant le Conseil des ministres relativement à l'orientation
que devra avoir ou se donner la loi éventuelle qui devrait être
déposée vers la mi-décembre.
M. Grenier: Vous informez vos collègues que la question
claire n'a pas été retenue.
M. Burns: La question claire, je peux le dire bien ouvertement,
je suis convaincu que mes collègues du Conseil des ministres sont tout
à fait d'accord avec moi sur le fait que la question doit être
bien claire, la ou les questions, comme dit le député.
M. Lavoie: Cela devient moins clair, quand ce sont les
questions.
M. Burns: Non, mais écoutez. Une Voix: On parle
d'une loi-cadre.
M. Burns: C'est une loi-cadre. Il peut y avoir une
occasion...
M. Lavoie: Cela se brouille.
M. Burns: Non, il peut y avoir une occasion où on devrait
avoir plus d'une question, d'autres occasions où il devrait y avoir une
question.
M. Charette: M. le Président, lorsqu'on a mentionné
la ou les questions, on s'est situé dans une loi-cadre.
M. Burns: Oui, j'ai compris exactement que c'était dans ce
cadre que vous vous placiez.
Donc, je pense bien que je n'insisterai pas sur ce
phénomène.
Sur l'aspect que vous soulevez dans votre mémoire quant à
élargir la possibilité de recours à la consultation
populaire via l'initiative populaire, je pense que cet après-midi j'ai
fait mes commentaires. Si je me rappelle bien, vous étiez
présent.
M. Charette: On vous a entendu.
M. Burns: Alors, je n'ai pas à répéter,
là-dessus, notre point de vue. Je vous dis que je partage vos vues
là-dessus.
M. Charette: Mais on espère que cela se fera à
brève échéance, parce que...
M. Burns: Le plus rapidement possible, c'est également mon
souhait.
M. Charette: ... quand on parle, dans l'exemple, de chez nous,
où on vit dans une région à majorité rurale, on
imagine qu'un groupe comme l'UPA, par exemple, s'il est un groupe
représentatif du moins, j'imagine qu'il l'est aurait
demandé au gouvernement des questions précises à poser
à la population sur des problèmes agricoles. C'est un groupe qui
pourrait être considéré comme représentatif en
termes de consultation populaire.
M. Burns: J'irais plus loin, M. Charette, je dirais même
amorcer de la législation; si on peut en arriver à ce point, cela
me paraîtrait un exemple de démocratie en Amérique du
Nord.
M. Charette: D'accord.
M. Burns: Je vous dis tout de suite, tenant compte de mes
commentaires de cet après-midi et peut-être des jours qui ont
précédé, que je partage vos vues là-dessus.
M. Charette: Nous voulons vous dire, M. le ministre, que dans
l'exercice du pouvoir, d'une nouvelle forme de pouvoir, parce que c'est quand
même nouveau, les référendums au Québec, nous sommes
d'accord que dans le livre blanc il y ait un exercice préliminaire de ce
nouveau phénomène de consultation populaire. Nous sommes d'accord
pour dire qu'au départ on fait confiance à l'initiative de
l'exécutif et du pouvoir législatif pour le déterminer;
par la suite, à l'exercice de ce pouvoir, je pense que les élus
du peuple l'élargiront. On fait confiance à tous les élus,
de quelque parti qu'ils soient. On espère qu'ils vont aller plus loin
que cela parce que l'exercice du pouvoir se manifeste quand même dans les
municipalités, on l'a souligné cet après-midi; on est
habitué, dans les municipalités, à aller voter sur des
référendums pour des règlements d'emprunt ou des choses
comme ça. Les citoyens ne sont quand même pas complètement
en dehors de cette question, mais je trouve qu'il est sage de la part du
gouvernement actuel qu'on commence par le faire par les élus du peuple,
quitte à l'étendre éventuellement. Je pense que c'est
ça, l'exercice du pouvoir.
M. Burns: D'accord, je vous remercie beaucoup de cette confiance
que vous nous manifestez, M. Charette. Quant au fait que les questions soient
claires et précises, je pense bien que, de façon incidente et
accessoire, je l'ai dit au début de mon intervention et j'ai eu
l'occasion de le dire à de nombreuses reprises depuis le début de
nos travaux, il n'y a aucune espèce de doute que le gouvernement tient
à une ou des questions claires et précises. La question
relativement au référendum sur l'avenir constitutionnel du
Québec n'est évidemment pas déterminée. Je ne suis
pas en mesure de vous dire, aujourd'hui, s'il y aura une question à
laquelle on répondra par un oui ou par non ou plusieurs questions, mais
je prends bonne note de cette recommandation et je tiens à vous dire
également qu'on partage entièrement votre avis là-dessus
au niveau gouvernemental.
M. Charette: Je voudrais bien que vous soyez conscient de cet
aspect en termes de clarification au niveau des questions quel que soit le
référendum que vous commanderiez parce que dans nos
régions...
M. Burns: Oui, c'est cela.
M. Charette: ... des groupes de pression comme le nôtre et
d'autres vont faire valoir auprès de la population le besoin d'avoir des
choses précises et claires lorsqu'on lui demandera de répondre
à quelque chose dans un référendum.
M. Burns: D'accord.
M. Charette: Je puis vous assurer que, si vous ne suivez pas
cette ligne de pensée, on sera directement en opposition avec vous
autres.
M. Burns: D'accord, c'est parfaitement votre droit, M. Charette,
de le faire. J'apprécierais que si vous n'étiez pas d'accord avec
nous, à ce moment-là, vous fassiez valoir vos droits
démocratiques en étant en opposition par rapport au gouvernement,
même s'il y a un certain nombre de choses qui nous rapprochent.
M. Charette: D'accord.
M. Burns: J'ai également fait mes commentaires
relativement au décompte au niveau de la circonscription, de sorte que
je n'y reviendrai pas encore une fois. C'est un des éléments que
nous retenons et c'est probablement un des éléments que nous
allons examiner le plus sérieusement possible parce que c'est un des
points que nous avons laissés ouverts dans le livre blanc en se posant
la question et en la posant en même temps aux gens qui venaient
intervenir devant nous. Là-dessus, vous nous avez donné l'opinion
très claire que vous préférez le décompte au niveau
de la circonscription. Ce sera examiné de très près et
cela va transparaître, je pense bien, dans la loi qui va être
déposée, soit dans un sens ou soit dans l'autre.
M. Charette: D'accord.
M. Burns: Je ne vous dis pas d'avance que ce sera un
décompte par circonscription, mais il semble que de plus en plus les
gens sont favorables au décompte par circonscription.
M. Charette: Ce que je veux dire là-dessus, M. le
ministre, M. le Président, c'est que je pense que l'argumentation qu'on
peut apporter sur le décompte au niveau des comtés, c'est que
c'est d'abord une tradition, une habitude des gens de recevoir les
décomptes par comté, en tout cas au niveau des élections,
surtout que la loi du référendum, en fin de compte, le livre
blanc, se rapproche beaucoup en termes de mécanisme d'application de la
Loi électorale.
En tout cas, sur des sujets primordiaux pour la nation
québécoise, il nous apparaît très important que ce
décompte se fasse par comté. Je ne veux pas mettre en relation
l'ethnie anglaise et l'ethnie française, mais je pense qu'il
appartiendra quand même au peuple à un moment donné de
juger sur des questions fondamentales en termes de constitutionnalité
pour le Québec, si on va dans des référendums dans ce
sens, de voir jusqu'à quel point les francophones sont d'accord avec un
gouvernement qui veut faire tel cheminement par rapport à d'autres qui
ne veulent pas y aller. Et cela je pense que c'est important.
M. Burns: D'accord, M. Charette. Tout cela pour vous dire que les
quatre points que je viens de vous mentionner sont des points sur lesquels nous
nous penchons de façon régulière. Je ne veux pas que vous
croyiez qu'à l'intérieur de votre mémoire on a mis de
côté ce point de vue-là si je ne vous pose pas de questions
là-dessus. Je vais m'arrêter simplement à deux aspects de
votre mémoire. Le premier est presque résolu par votre
mémoire dans ce sens que vous nous dites que
peut-être que les gens qui ont entre 16 et 18 ans, d'une part,
devraient voter; d'autre part vous nous dites que si les règles
générales qui s'appliquent aux élections ne sont pas
changées, vous n'auriez pas de sérieux problèmes à
garder la même règle pour une consultation
référendaire tant et aussi longtemps que ce ne sera pas
changé.
Dans le cas du référendum sur l'avenir politique du
Québec, je pense bien que ce serait très mal vu je pense
que vous allez partager mon opinion là-dessus que pour un
référendum en particulier nous changions les règles qui
s'appliquent actuellement à l'ensemble des consultations
électorales pour les appliquer à une consultation
référendaire. Est-ce que vous partagez mon avis
là-dessus?
M. Charette: M. le Président, M. le ministre,
là-dessus tout simplement lorsqu'on a dit à 10 h 10 qu'on voulait
discuter avec vous, on n'avait pas l'impression d'avoir la pleine
vérité quand on arrivait. On nous avait dit que la commission
parlementaire, c'est un échange de points de vue entre les intervenants
et les membres de la commission. Là-dessus tout ce que je voudrais dire,
pour le vote à 16 et 17 ans, c'est qu'il y a des arguments quand
même favorables; il y a des gens, quand même, qui ont
soulevé cette question. Je pense que ce ne sont pas les
sociétés nationales, mais je parle d'un bonhomme, je pense, qui a
été respecté par tous les parlementaires, qui s'appelle
Jean-Charles Bonenfant, qui disait au congrès du Barreau du
Québec, au printemps dernier, que pour le référendum
il le prenait dans une optique bien particulière, celle du
devenir politique du Québec il faudrait la consultation la plus
grande possible. Il ajoutait même qu'il n'y avait pas
d'inconvénient à ce que les gens de 17 ans votent. Il a dit cela
à Québec, lors d'un congrès du Barreau. On pourrait le
relever, et je pense que quand on parle de Jean-Charles Bonenfant, on ne parle
pas de l'esprit le plus libéral qui puisse avoir existé. Je pense
que c'est un homme qui connaissait les institutions parlementaires et qu'il a
aidé tout le monde ici au Parlement et les groupes comme le nôtre
à nous faire faire des réflexions sur le devenir politique du
Québec. Il avait des positions très réfléchies.
Alors, lui l'a dit. Il a parlé de 17 ans.
L'UNESCO dit, pas nécessairement en fonction du Québec,
mais l'UNESCO dit souvent dans ses mémoires, dans ses expressions
publiques, en tout cas au niveau des pays du Tiers-Monde: On est prêt
à donner le vote à 16, 17 ans dans ces pays-là, pour qu'il
y ait une plus grande légitimité au niveau de l'expression
populaire qui s'exprime. Nous c'est dans ce sens, mais remarquez, on revient
toujours au même point. Si vous voulez le faire uniquement pour une
question de référendum on n'est pas d'accord, mais si vous
l'élargissez au niveau du vote, si vous faites appel aux citoyens sur
toute question, qu'elle soit électorale ou en termes de
référendum, on dit: Vraiment, faites-le, parce que nous sommes
d'accord, pour apporter une concordance entre la Loi électorale et
l'approche que vous faites avec le livre blanc.
Nous sommes d'accord avec cela. Pour nous, c'est fondamental. Je pense
que cela reste dans les mentalités, dans les traditions, dans l'approche
que les gens se font quand ils vont voter. Ils savent en fonction de quoi ils
votent, ils savent ce qui les régit par rapport au vote.
Nous disons: Ne faites pas une exception pour le
référendum, en disant aux gens de 16 et 17 ans: Vous allez avoir
le droit de vote pour un référendum et, au niveau de
l'élection, vous n'aurez pas le droit de vote. Nous ne sommes pas
d'accord sur cela. Si le législateur dit qu'il vaut la peine de le
faire, à 16 et 17 ans, pour le vote en général, lors des
élections, on vous dit: Transposez-le aussi pour le
référendum.
M. Burns: Je pense, M. Charette, que nous sommes sur la
même longueur d'onde là-dessus. Je vous remercie de cette
précision que vous nous apportez.
M. Charette: D'accord.
M. Burns: La dernière question que j'aurais à vous
poser est celle-ci: Dans votre mémoire, vous nous laissez entendre que
le gouvernement devrait s'assurer que les débats se feront entre
Québécois. Entre autres, je cite un extrait de votre
mémoire, qu'on trouve à la page 4; vous nous dites, au chapitre
5, La campagne référendaire: "Tout en étant d'accord avec
le contenu du livre blanc sur cette question, notre société
voudrait que le gouvernement s'assure, par sa loi ou sa réglementation,
que les débats sur la consultation populaire se feront et se discuteront
entre Québécois."
J'aimerais simplement avoir vos commentaires sur cela, peut-être
de façon un peu plus élargie. Je vous donne le cas qui m'est
souvent soulevé lorsque je participe à une ligne ouverte à
ce sujet ou encore lorsque je suis dans une assemblée où la
question est soulevée. Par exemple, dans le cas d'un
référendum plus particulier sur l'avenir politique du
Québec je m'excuse, M. le Président, je le donne à
titre d'exemple selon ce que vous dites, M.Trudeau devrait-il être
contrôlé? D'autre part, M. Allan Blakeney, qui est premier
ministre du Manitoba...
Une Voix: De la Saskatchewan.
M. Burns: De la Saskatchewan, pardon. C'est parce que cela a
changé depuis quelque temps. Ou M. Lyon, qui est premier ministre du
Manitoba, vient tout à fait par hasard au Québec et décide
de faire une conférence de presse, à un moment donné.
Est-ce que cela couvre cela, selon vous?
M. Charette: M. le Président, M. le ministre, MM. les
membres, bien sûr, c'est une question qui n'est pas facile à
régler. Nous sommes bien conscients de cela et nous n'avons pas
proposé de solution en pensant que les gens de la commission pourraient
faire une réflexion plus poussée que la nôtre sur cela. Ce
que je veux dire,
c'est que je trouverais malheureux, peu importe le type de
référendum... Encore une fois, on se situe dans la loi-cadre. On
veut bien déterminer cela, même si, dans l'esprit des gens, on
peut penser à la question de la souveraineté ; c'est bien
sûr que cela en fera partie aussi dans un référendum. Je
veux dire qu'on aimerait le plus possible que le gouvernement, dans la mesure
de ses pouvoirs législatifs de réglementer les choses, fasse que
les débats qui concernent les Québécois, qu'ils portent
sur la question agricole, sur la question constitutionnelle ou sur une question
linguistique, demeurent entre nous en termes de discussion.
Bien sûr, nous avons des exemples. Ce matin, je lisais le Devoir.
Il y a un professeur émérite qui apportait des exemples sur cela.
La Cour suprême est à la veille de se prononcer sur une question
concernant la loi des consommateurs au Québec. Je trouverais malheureux,
sur une question fondamentale pour les Québécois, qu'il se trouve
des gens de l'extérieur du Québec qui nous inondent, à un
moment donné, de journaux, de messages à la
télévision ou à la radio. Bien sûr, on sait qu'en
tant que Québécois on ne contrôle pas ce milieu, en fin de
compte. Le gouvernement au pouvoir a dit qu'éventuellement il
présenterait une loi-cadre sur la question de la presse, la possession,
etc., mais ce n'est pas encore fait.
Ce qui m'inquiète le plus, c'est que je ne voudrais pas
qu'à la veille d'un référendum au Québec
encore une fois, peu importe sur quel sujet ce sera; ce sera un sujet qui
concerne uniquement les Québécois on voie arriver une
tonne de journaux qui entreraient la veille des élections et qui
déferaient l'opinion publique par une propagande éhontée
de toutes sortes de façons.
Je trouverais cela un peu dégueulasse de ne pas permettre aux
Québécois de s'autodéterminer par eux-mêmes et de
prendre conscience par eux-mêmes de leurs propres problèmes.
Encore une fois, je le situe dans tous les types de consultation que vous
pourriez faire demain matin.
M. Burns: Vous reconnaissez, M. Charette, que dans le cadre
constitutionnel actuel...
M. Charette: C'est difficile.
M. Burns: ... il y a un certain nombre de difficultés
auxquelles nous devrons faire face.
M. Charette: J'espère ne pas blesser les journalistes
lorsque je le dis, mais il faudrait peut-être qu'ils adoptent un code
d'éthique beaucoup plus poussé que celui qu'ils ont actuellement
pour permettre de contrer cette publicité ou cette information qui
pourrait nous arriver du jour au lendemain. En tout cas, ce n'est pas facile.
Je suis d'accord avec vous. On le soulève parce qu'on voudrait tellement
que cela se passe entre Québécois sur des questions
québécoises.
M. Burns: Vous avez bien raison. Je vous remercie, M. Charette.
Merci beaucoup pour votre mémoire. Merci également pour votre
présentation et l'aspect positif que vous avez donné dans votre
mémoire.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Merci,
M. le ministre. M. le député de Laval.
M. Lavoie: Je n'ai pas voulu intervenir tout à l'heure
lorsque le leader parlementaire du gouvernement me prêtait certaines
paroles. Je ne susciterai pas de débat. Du moins je voudrais
établir clairement ma position personnelle en ce qui concerne la
loi-cadre. Sur le principe même de la consultation populaire, nous
n'avons pas d'objection qu'à certaines occasions bien définies,
on puisse se servir de ce moyen qui s'apparente à la démocratie
directe sur des grandes questions. Je me pose la question justement, avec
l'expérience moyenne que j'ai ici au Parlement depuis près de 20
ans, à savoir combien de problèmes auraient pu être soumis
à la population québécoise durant les 20 dernières
années. Peut-être la nationalisation de
l'électricité, en 1962. Je me pose des questions sur l'entreprise
de la baie James.
M. Burns: Les jeux olympiques.
M. Lavoie: La loi 101, les jeux olympiques. Je voudrais que mes
collègues de la commission...
M. Burns: L'opération 55, la centralisation de
l'éducation.
M. Lavoie: ... se posent des questions avec moi. D'ailleurs,
c'est mentionné dans le mémoire et c'est tout à fait dans
le sujet du mémoire qui est soumis devant nous. C'est dans les propos et
les exemples donnés par M. Jacques Brassard, professeur de la
faculté de droit de l'Université de Montréal qui se
réfère, entre autres, aux expériences
référendaires françaises où on sait qu'il est
tellement facile de faire dévier, sans fausser, mais de faire bifurquer
le résultat référendaire.
En France, on sait que le référendum ne se faisait pas sur
la cinquième constitution. Il se faisait sur la régionalisation
ou sur des amendements à la constitution, mais il se faisait sur la
tête du chef de l'Etat. Il y a toujours un danger. Je me pose des
questions, comme parlementaire et comme législateur, entre autres, sur
l'à-propos, à l'occasion, et même sur des questions aussi
importantes que la peine de mort.
Il y a le danger de l'hypothèse d'avoir un chef d'Etat qui serait
de tendance centre-droite un peu et que lui-même serait pour la peine de
mort. Il pourrait profiter d'une occasion où l'économie d'un
pays, d'un Etat serait favorable, que toute la situation économique
serait positive, le chômage à un taux minime, un budget des plus
favorables. Il en profiterait pour faire un référendum et faire
bifurquer l'opinion des gens vers le maintien de la peine de mort. D'ailleurs,
on connaît l'habileté de certains politiciens, c'est cela, et je
vous pose encore la question sur l'énergie nucléaire. On va
prendre 110 députés, ici, avec tout notre boulot, notre travail;
dans une question de politique d'énergie nucléaire, combien, des
110 députés qui
seront appelés à voter directement une telle loi,
prendront le temps de s'informer à fond sur les décisions qu'ils
auront à prendre? Là, on peut même douter du temps et de
l'intention et de la volonté des députés de se pencher sur
un sujet aussi complexe que l'énergie nucléaire, mais on se
retourne et on confie le problème à 4 millions de gens d'une
population. Est-ce qu'elle aura les moyens de porter un jugement vraiment
approprié sur une question aussi complexe?
Je donnais, à une séance précédente, la
question du cas de la baie James, en 1970 ou en 1971, qui s'avère
aujourd'hui une décision des plus valables. Il y a toujours le danger
qu'à un certain moment un gouvernement n'ait pas la faveur populaire, la
cote d'amour ou d'estime. C'est le cas actuellement, peut-être, pour le
gouvernement d'en face, au moment où je vous parle. Cela peut arriver
à un autre gouvernement qui pourrait soumettre à la population un
cas aussi valable que le projet de la baie James. Il y a le danger que cela se
politise et que la population, peut-être par un manque d'information ou
par émotivité ou rancoeur contre un gouvernement en place,
rejette une position qui, malheureusement, serait peut-être de salut
public pour un Etat.
C'est le doute que j'entretiens sur une loi-cadre. Je me dis que les
occasions sont assez peu fréquentes que nous serions plus
disposés, dans chaque cas d'espèce, qu'il y ait une loi
spécifique pour un référendum. On le sait que cela ne
viendra pas tous les ans, des référendums. Le Parlement adopte
200 lois par année; qu'on en adopte une loi, actuellement, sur un
référendum qui a une certaine portée, une certaine
acuité, une certaine urgence, qu'on adopte une loi sur cela. Si, dans
deux ou trois ans, il se soulève un autre problème, qu'est-ce qui
nous empêche, au Parlement, d'adopter une autre loi spécifique sur
un autre sujet? Et, encore là, il est important de distinguer un
référendum sur une question constitutionnelle. Même dans le
droit des compagnies, pour certaines décisions d'une compagnie, il faut
un vote majoritaire de 75%, de 66%, ou de 60% pour changer la constitution d'un
groupe donné, d'une corporation donnée ou d'un parti politique
donné. C'est même inclus dans nos propres structures. Pour un
référendum donné, on pourrait être satisfait
peut-être d'une participation moindre que dans un autre
référendum.
C'est sûr qu'un référendum sur l'avenir
constitutionnel du Québec va amener une participation plus importante
que si on soumet à la population le zonage des terres agricoles. Dans
les milieux urbains, on ne se dérangera même pas pour aller voter.
C'est pour cela que je vous dis: Nous n'avons rien contre une loi-cadre si vous
en voulez une. Nous n'avons rien contre une consultation, mais on ne trouve pas
l'utilité ni l'avantage d'avoir une loi-cadre pour des décisions
qu'on peut soumettre à la population d'une manière tout à
fait occasionnelle. Est-ce que c'est assez clair?
M. Burns: Est-ce que le député me permet une
question?
M. Lavoie: Oui. C'est l'expérience anglaise. On a
adopté une loi spéciale.
M. Charette: M. le Président, M. le leader parlementaire
de l'Opposition me permettra une remarque là-dessus. Nous sommes
d'accord avec une loi-cadre, on ne l'a pas dit dans le mémoire, mais je
peux vous dire quand même la position de notre société
là-dessus. Ce que je veux dire, c'est qu'il y a quand même des
dimensions de questions, à un moment donné, par rapport à
un référendum, qu'on posera à des gens. Quand on dit que
cela n'engage pas le gouvernement, que c'est un référendum
consultatif, on est d'accord là-dessus. Mais, ce que je veux dire, c'est
que si demain matin...
M. Lavoie: C'est un sondage.
M. Charette: C'est plus que cela pour nous en tant qu'organisme.
Ce que je veux vous dire, en tant que Société nationale des
Québécois de La-naudière, c'est que nous pensons que si,
demain matin, le gouvernement va dans une consultation populaire sur un
référendum qui demanderait si demain le Québec doit
devenir un Etat indépendant ou vivre la souveraineté-association,
et qu'il se faisait battre là-dessus, je pense que le gouvernement
devrait être conscient qu'il doit déclencher des élections
à brève échéance par rapport à cela. Se
faire battre sur une question de zonage agricole, c'est différent. Mais
sur une question aussi fondamentale que de s'appartenir, à un moment
donné, je pense que s'il était renversé là-dessus,
il devrait normalement, en tout cas, c'est notre opinion en tant que
société nationale, à brève échéance
aller déclencher une élection parce que cela engage vraiment la
nation, la question qu'il a posée.
M. Grenier: C'est bien proche de la vérité, en tout
cas.
M. Charette: En tout cas, c'est notre position là-dessus.
Je peux vous dire qu'il y a une nuance c'est pour cela qu'on est
d'accord sur une loi-cadre mais dans la loi-cadre, bien sûr que
dans le type de consultation qu'on va faire, il faudra tenir compte de qui on
va consulter. C'est important pour nous.
Une Voix: C'est juste, c'est une bonne question.
M. Lavoie: Je suis, d'ailleurs, d'accord avec un autre point
traité dans votre mémoire. Je crois que vous avez
mentionné, à un certain endroit, qu'un gouvernement, quel qu'il
soit, ne doit pas prendre ce moyen référendaire pour se faire
cautionner.
M. Charette: On est d'accord là-dessus.
M. Lavoie: C'est pour cela qu'à la page 3, lorsque vous
posez une question dans un cas, dans l'hypothèse d'un gouvernement
minoritaire,
je crois justement que dans un temps de gouvernement avec une
très faible majorité, ou même minoritaire, cela deviendrait
une assurance et une garantie d'objectivité sur la question, parce qu'il
serait tenu de consulter les partis de l'Opposition.
M. Charette: Sur cela, je ne suis pas tout à fait d'accord
avec vous.
M. Lavoie: Ce serait beaucoup plus objectif et il y aurait moins
de chance d'avoir de la partisane-rie ou de la manipulation politique que
lorsque c'est uniquement le gouvernement ou une majorité gouvernementale
qui a le dernier mot, d'ailleurs, dans le processus référendaire,
dans le déroulement, dans le mécanisme, dans la formulation de la
question.
M. Charette: M. Lavoie, je ne vous apprendrai pas le droit
britannique et le processus parlementaire. Je pense que vous l'avez
vécu, vous l'avez établi d'une certaine façon, vous avez
apporté des règles nouvelles au niveau de l'Assemblée
nationale et tout cela.
M. Lavoie: Merci beaucoup, monsieur.
M. Charette: II faut le reconnaître, je pense. Quand les
choses sont là, il faut les voir comme elles sont. D'ailleurs, je pense
que le parti au pouvoir...
M. Burns: Avec l'aide d'un certain nombre de personnes.
M. Charette: Oui, d'accord. Ce que je veux dire...
M. Lavoie: Je le reconnais.
M. Charette: ... c'est que, dans cette tradition britannique de
nos institutions que nous vivons actuellement, on reconnaît quand
même que le gouvernement doit gouverner, doit établir ses
règles et c'est lui qui doit en prendre la responsabilité. C'est
pour cela qu'on trouverait un peu malheureux qu'un gouvernement soit mis en
minorité à un moment donné en posant une question au
peuple. Il doit en prendre la responsabilité, c'est ce que je veux
dire.
M. Lavoie: Par contre, il ne faudrait pas que vous créiez
trop de contradictions avec les références que vous faites dans
votre mémoire à M. Jacques Brassard. Il dit au paragraphe 3 de la
citation: "La campagne préparatoire devrait échapper à
l'emprise des partis politiques comme tels, puisqu'il ne s'agirait pas
d'appuyer un parti, mais d'approuver ou de rejeter une décision
politique ou un projet de constitution.
M. Charette: Une fois que la question est po- sée.
M. Lavoie: Que voulez-vous dire par la campagne
préparatoire?
M. Charette: Une fois que le gouvernement a établi, en fin
de compte, quelle est la question qu'on pose au peuple, on dit: D'accord, les
partis politiques, retirez-vous; laissez s'exprimer le peuple.
Je pense que le livre blanc nous donne toutes les preuves
là-dessus.
M. Lavoie: II y a également le deuxième paragraphe
de la citation de M. Brassard: "L'alternative posée devrait être
à la fois claire, complète, impartiale et objective."
M. Charette: On est d'accord là-dessus.
M. Lavoie: C'est d'essayer de se détacher de la
partisanerie politique le plus possible.
M. Charette: Je pense que le gouvernement n'a pas
démontré le contraire, actuellement, dans son livre blanc.
M. Lavoie: Mais cela fait un mois qu'on veut connaître,
d'abord, une certaine date. Deuxièmement, je pense que les
Québécois seraient en mesure, après sept ans de
débat, de connaître quelle question va être
posée.
M. Charette: On ne parle pas de date.
M. Lavoie: Est-ce que c'est une boîte de Pandore, cela?
M. Paquette: Le fait que vous ne connaissiez pas la question,
cela ne veut pas dire qu'elle ne sera pas claire. C'est dans le programme du
parti depuis cinq ans.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A
l'ordre, s'il vous plaît.
M. Charette: Je pense que le fait de ne pas connaître la
question n'enlève rien au fait que "l'alternative posée devrait
être à la fois claire, complète, impartiale et
objective."
M. Lavoie: En tout cas, j'espère que vous les premiers,
vous serez satisfaits et que nous, par la suite, on pourra être
satisfaits, quand même, que la question respecte l'intelligence des
Québécois au point de vue de la clarté, au point de vue de
l'objectivité, au point de vue de l'impartialité. C'est un voeu
et on le demande au gouvernement, mais, malheureusement, la réponse
tarde à venir.
M. Charette: On leur fait confiance.
M. Lavoie: Tant mieux pour vous si vous avez la foi; moi, je ne
l'ai pas encore.
J'aurais une dernière question, très brièvement.
Une autre référence; vous dites à la page 7 de votre
mémoire. "La campagne et le vote ne devraient porter réellement
que sur la question posée (on sait que ce ne fut pas le cas, par
exemple, du référendum français de 1968 sur la
participation et sur la régionalisation, ni de celui de 1972
sur l'Europe qui donnèrent plutôt lieu à des
manifestations d'opposition ou d'appui partisan).
C'est un voeu, d'ailleurs, qui est tout à fait méritoire.
Mais comment peut-on s'assurer c'est relié au doute que j'ai sur
des référendums trop fréquents où il est facile de
bifurquer que la campagne ne devrait porter réellement que sur la
question posée? Avez-vous une formule pour cela?
M. Charette: Je pars, en fin de compte, de la question
formulée par l'Assemblée nationale et je dis, à partir de
cette question, que la campagne devrait porter sur cette question.
M. Lavoie: II y a énormément de danger, justement.
Dans tous les pays du monde, c'est arrivé. Ne vous en faites pas, c'est
arrivé en Allemagne, c'est arrivé en Italie, c'est arrivé
partout que la campagne, la plupart du temps, dévie en cours de route.
Elle quitte le but précis, le focus de la question posée.
M. Charette: II faudrait peut-être que les partis
politiques et les hommes politiques pensent qu'un référendum
n'est pas une campagne électorale.
M. Lavoie: Mais tant qu'il y a des hommes, il y a de l'hommerie!
Vous savez ça?
M. Charette: Oui, je suis d'accord là-dessus, mais il
faudrait avoir la maturité, comme Québécois, de dire qu'un
référendum c'est autre chose qu'une élection. Une
élection, vous allez en convenir avec moi, porte sur plusieurs sujets
à la fois, c'est-à-dire qu'on fait le bilan de l'administration
d'un gouvernement, on peut se prononcer sur tel type de législation
qu'il a adoptée, qu'on soit d'accord ou pas d'accord. Mais dans un
référendum, on pose une question précise et je pense que
l'intention du gouvernement est d'être clair et précis dans la
formulation de la question qu'il va poser au peuple. Moi, en tout cas, je lui
fais confiance, jusqu'à preuve du contraire, là-dessus.
M. Lavoie: Une dernière question. Avez-vous abordé
la partie du livre blanc qui traite de certaines restrictions pour
l'intégration dans des camps distincts, dans des groupes distincts
d'organisation des partisans d'une ou de plusieurs options, les genres de
contraintes que tous les gens qui ne seraient pas intégrés
forcément dans ces groupes ne pourraient pas participer, qu'ils ne
pourraient pas s'exprimer, qu'ils ne pourraient pas jouer un rôle
quelconque dans une campagne référendaire?
M. Charette: Remarquez qu'on n'a pas eu le temps, à cause
des délais qu'on nous a imposés par rapport à la
présentation des mémoires, d'étudier tous les aspects du
livre blanc. On a essayé de toucher les aspects qu'on croyait
primordiaux; là-dessus, dans la formulation que le livre blanc nous
propose, tout le monde peut y trouver son compte et s'intégrer vraiment
dans les formes de groupe qu'on nous propose. Je pense qu'il n'y a pas
d'inconvénient là-dessus pour nous.
M. Lavoie: Si vous êtes satisfait, je vais arrêter
mes questions, je ne changerai pas votre taux de satisfaction.
M. Charette: Merci.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Mégantic-Compton.
M. Grenier: M. le Président, M. Charette, bien
brièvement, puisqu'on est quand même limité un peu par le
temps. Vous constatez, pour avoir passé la journée avec nous, que
votre mémoire nous rappelle plusieurs autres questions qu'on a
posées aujourd'hui sur lesquelles on a demandé les
lumières de ceux qui étaient de l'autre côté, et on
répéterait peut-être certaines choses. Cela n'enlève
pas la valeur au vôtre, c'est simplement parce qu'il a été
codifié après celui des autres. S'il était arrivé
ce matin, c'est peut-être le vôtre qui aurait pris une heure et
trente ou deux heures de la journée.
J'aurais voulu m'informer un peu plus sur le droit d'initiative à
la page 3, mais je dois passer. Vous parlez du vote possible à 16 et 17
ans. Vous êtes au courant sans doute qu'un pays, en fin de semaine,
après avoir donné le vote à 18 ans se prépare par
une loi à le redonner à 19 ans. Vous avez dû lire cela en
fin de semaine, cela fait partie de votre mémoire.
M. Charette: Je veux dire que je n'essaie pas de faire de
comparaison avec d'autres pays, je me prends pour ce qu'on est ici au
Québec.
M. Grenier: J'aimerais avoir l'article ici, c'est un pays
démocratique, un pays évolué, un pays qui avait l'air de
constater qu'il avait fait une erreur en donnant le vote à 18 ans et la
majorité. Il se prépare par une loi à les redonner
à 19 ans. Mais cela...
M. Charette: M. Grenier, là-dessus, nous on le
soulève, on pense que cela pourrait être étendu à 16
et 17 ans, mais pour nous c'est en termes aussi d'interrogation, c'est
une...
M. Grenier: Ce qui m'intéresse là-dedans...
M. Charette: ... réflexion qu'on pose avec vous autres
là-dessus.
M. Grenier: ... M. Charette c'est que les sociétés
nationales ont à peu près toutes abordé ce
problème, en proposant, non pas pour un référendum, mais
pour une élection, le vote à 16 et 17 ans.
M. Charette: C'est ce qu'on dit.
M. Grenier: J'aimerais savoir une chose bien précise, si,
dans votre organisme, il y a un comité
qui s'est penché de façon particulière ou si cela
s'est fait au niveau provincial. Vous arrivez avec une référence
qui est à peu près la même dans chacun des mémoires
qu'on a étudiés depuis ce matin, pour établir le vote
à 16 et 17 ans. Comme moi, vous avez vécu, dans une autre
décennie, l'âge de 16 et 17 ans. Vous êtes comme moi sans
doute et vous vivez actuellement près de jeunes qui ont 16 et 17 ans. Je
ne sais pas si comme moi vous avez vécu dans des institutions où
il y a des jeunes de 16 et 17 ans, mais j'aimerais savoir, dans votre
organisme, qui a pesé dans la balance pour demander qu'il y ait un vote
à 16 et 17 ans. Cela m'intéresse.
M. Charette: Remarquez que notre société, comme
celles qui sont passées ce matin, appartient à un mouvement qui
s'appelle le Mouvement national des Québécois, qui est une
espèce de fédération qui regroupe les seize et dix-sept
sociétés régionales. Lors de notre congrès à
Chicoutimi, au mois de juin dernier, il y a eu un vote majoritaire proposant
que dans les futures lois, en fin de compte, en regard des
référendums ou des consultations populaires, on étende le
droit de vote à 16 ou 17 ans et aussi au niveau de la loi
électorale, pour le vote au niveau électoral. Nous,
là-dessus, comme je l'ai dit tout à l'heure, bien sûr qu'on
se sent solidaires de cette position-là, mais on apporte aussi une
discussion avec vous autres pour pouvoir... On n'arrive pas ex cathedra en
disant qu'il faut absolument que ce soit 16 et 17 ans, mais on pose des
interrogations pour que la commission réfléchisse sur cette
question à partir de certaines argumentations. Vous en soulevez contre,
vous; moi je dis que M. Bonenfant en a soulevé pour, je vais le prendre
à témoin.
M. Grenier: Je m'interroge, je ne suis pas sûr que je
serais contre.
M. Charette: L'UNESCO en a parlé elle aussi. Nous on dit,
en termes de légitimité, que peut-être, avec les
années qui s'en viennent, la jeunesse va prendre une plus grande
maturité au Québec, sur les problèmes politiques qui la
concernent. Alors on se pose nous aussi une interrogation là-dessus, on
veut en discuter, on vous l'apporte en termes de réflexion, pas en
termes de vous dire: II faut absolument que ce soit à 16 ou 17 ans.
M. Grenier: Vous êtes au courant sans doute, pour l'avoir
en tout cas entendu dans un congrès à caractère
provincial, du fait que si on s'interroge sur le vote a 16 et 17 ans, c'est
uniquement fondé sur le taux de scolarité qui est plus
élevé qu'il ne l'était au Québec. Il faut en
même temps analyser, je pense, si on a été dans des milieux
d'éducation, la situation des jeunes qui ne sont plus sur le
marché du travail à 16 et 17 ans. On sait que le marché du
travail donne un taux de maturité assez important et que plusieurs
n'évaluent pas égal au taux de scolarité qu'ils peuvent
avoir. L'un ne compense pas pour l'autre; c'est là deux écoles de
pensée qui sont fort différentes l'une de l'autre. J'aurais voulu
savoir si c'était basé sur un rapport de comité.
M. Charette: Ce qu'on veut dire nous aussi, c'est qu'on va
peut-être le ramener à un référendum en particulier,
celui que tout le monde pense, sur la question constitutionnelle du
Québec. Je pense que c'est important pour les jeunes de 16 et 17 ans,
parce que dans ce type de référendum leur avenir est
engagé pour un nombre d'années à venir, ce sont les
citoyens de demain. Je pense qu'ils sont de plus en plus conscients de ce qui
se vit au Québec et du degré de politisation qu'on tente de
donner...
M. Grenier: C'est sur cela que j'attire votre attention. Il faut
qu'ils soient conscients non pas uniquement en termes de taux de
scolarité, mais aussi conscients dans le secteur économique de ce
qui se passe au Québec. Quand je vous apporte cette argumentation, je
veux savoir de quel comité vous avez tiré cette résolution
pour savoir si ce comité s'était penché sur le fait que
les jeunes de 16 et 17 ans ne sont plus sur le marché du travail depuis
une bonne dizaine d'années. C'était source de maturité
pour les jeunes, c'est cela qui est le problème des deux écoles
de pensée dans ce secteur.
M. Charette: En tant que société nationale, chez
nous dans notre région, je vais être bien honnête avec vous,
on n'a pas fait de recherches particulières, on est parti d'une
résolution du Mouvement national des Québécois et on a
essayé d'apporter une certaine argumentation qu'on a soulevée
avec M. Bonenfant, avec l'UNESCO.
M. Grenier: Je vais faire rapidement. Je ne veux pas
étirer le débat. Rendu à ces heures de la journée,
vous comprenez que tout le monde a une grosse journée de faite et
principalement le mardi parce que la plupart des députés sont
partis de leur domicile ce matin. Il y en a qui ont plus de 18 heures de faites
aujourd'hui. Je suis de ceux-là.
Vous dites, à la page cinq, que cela ne doit regarder que les
Québécois. J'ai été un de ceux qui ont fait cette
déclaration lorsque le gouvernement central est venu nous annoncer qu'on
se mêlerait de lancer un référendum sur la place publique.
Il y a certains secteurs où on peut trancher nous-mêmes de toute
évidence, mais dans un référendum particulier, si la
question devait porter, par exemple et je ne veux pas entrer sur le fond
sur la souveraineté-association, je ne suis pas sûr qu'on
serait seul à pouvoir parler de cela. Il y a une partie qu'on peut
traiter tout seul. La deuxième, je n'en suis pas assuré
jusqu'à maintenant.
M. Charette: Je vous laisse votre opinion, mais je pense que cela
ne regarde que les Québécois.
M. Grenier: Oui, d'accord, mais, si on parle d'association, il va
falloir que l'autre partie nous en parle un peu aussi.
M. Charette: Cela dépend de la façon dont la
question sera formulée. Ce que je veux dire, c'est qu'au départ
les questions qui seront posées au niveau des Québécois
regardent le peuple Québécois, dans leur essence, avec toute
l'information qu'on peut lui donner. Là-dessus, le livre blanc nous
donne des garanties.
M. Grenier: II ne nous donne pas suffisamment de garanties et
vous le dites dans votre mémoire.
M. Charette: Suffisamment de garanties par rapport aux gens de
l'extérieur qui pourraient venir contrer la volonté des
Québécois.
M. Grenier: C'est justement pour cela que le livre blanc ne les
donne peut-être pas, parce qu'on ne peut pas préciser dans le
livre blanc, cette partie des questions éventuelles.
M. Charette: On est conscient qu'il y a des juridictions qui nous
échappent en termes d'information, soit Radio-Canada ou, en fin de
compte, des choses comme celle-là. On espère que le gouvernement
québécois, par ses députés, par sa commission
parlementaire, va trouver des mécanismes pour permettre que le plus
possible ce débat et, en fin de compte, tous les débats sur la
question référendaire se passent entre les
Québécois. C'est dans ce sens.
M. Grenier: D'accord. M. Charette à la page sept je
termine, c'est ma dernière question vous dites: "Le droit de vote
devrait être reconnu à tous ceux qui sont directement
intéressés par la question". Pourriez-vous expliciter
davantage?
M. Charette: On se réfère à la Loi
électorale, parce que le livre blanc nous en parle et qu'on est d'accord
avec cela. On part de ce principe.
M. Grenier: C'est à peu près la même
recommandation que la Loi électorale. Je vous remercie grandement de
votre participation.
M. Charette: Cela me fait plaisir, M. Grenier.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Terrebonne.
M. Fallu: Vous venez tout juste de répondre à la
question que j'allais poser. C'était la dernière question du
député de Mégantic-Compton. Je vous remercie.
M. Charette: L'exclusion en termes de ce qui s'appelle
Québécois, c'est tout le monde qui vit au Québec et
à qui, la Loi électorale, confère le droit de vote.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
ministre...
M. Burns: M. le Président, je remercie beaucoup la
Société nationale de Lanaudière de la présentation
de son mémoire, comme je le disais tout à l'heure. Je vous
remercie, aussi, d'avoir été très patients à
l'endroit de la commission, parce que vous êtes ici depuis ce matin, et
on termine l'audition de votre mémoire à 23 h 10. Je remercie
également tous les membres de la commission d'avoir été
aussi prêts à collaborer avec le programme que nous nous
étions fixés. Je remercie en particulier le député
de Notre-Dame-de-Grâce d'avoir été, pour une fois,
aujourd'hui, gentil.
M. Mackasey: D'un autre côté, vous m'insultez,
là!
M. Burns: Non, je retire ces dernières paroles pour ne pas
provoquer un débat inutile. M. le Président, je vous signale que,
demain, le 16 novembre, nous aurons à entendre le mémoire
présenté par la Northern Quebec Inuit Association, le
mémoire no 19M, et c'est le seul qui est prévu pour demain. Si,
par malheur pour nos invités de ce soir, on n'avait pas terminé
l'audition de leur mémoire, on les aurait invités à
revenir demain matin, mais, comme c'est terminé, on pense bien que nous
n'aurons, demain matin, qu'un seul mémoire à compter de 10
heures.
Sur ce, M. le Président, je propose l'ajournement de nos travaux
sine die.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):
Mes remarques ne seront pas aussi personnelles que celles du ministre,
mais je remercie tous les membres de la commission d'avoir respecté les
directives de la présidence.
M. Burns: Oui, demain matin, à 10 heures. Je m'excuse
d'avoir dit: Sine die. C'est la fatigue, peut-être.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Les
travaux de la commission sont ajournés à demain matin, 10 heures,
à la salle 81-A.
(Fin de la séance à 23 h 9)