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(Dix heures quinze minutes)
Le Président (M. Desbiens): À l'ordre, s'il vous
plaît!
La commission permanente de la justice est réunie pour faire
l'étude des crédits budgétaires du ministère de la
Justice pour l'année financière 1983-1984.
Les membres de la commission sont: M. Bédard (Chicoutimi), M.
Brouillet (Chauveau), M. Charbonneau (Verchères), M. Dauphin
(Marquette), Mme Juneau (Johnson), M. Kehoe (Chapleau), Mme Lachapelle
(Dorion), M. Lafrenière (Ungava), M. Leduc (Saint-Laurent), M. Boucher
(Rivière-du-Loup) à la place de M. Martel (Richelieu) et M. Marx
(D'Arcy McGee).
Les intervenants sont: M. Bisaillon (Sainte-Marie), M. Blank
(Saint-Louis), M. Dupré (Saint-Hyacinthe), M. Dussault
(Châteauguay), M. Fallu (Groulx), Mme Lavoie-Roux (L'Acadie), M. Marquis
(Matapédia), M. Paradis (Brome-Missisquoi) et M. Saintonge
(Laprairie).
On décidera plus tard de la nomination d'un rapporteur. On va
procéder aux remarques générales.
M. le ministre.
Remarques générales M. Marc-André
Bédard
M. Bédard: M. le Président, avant de commencer le
texte d'ouverture de l'étude des crédits, vous me permettrez sans
doute de présenter mes principaux collaborateurs et collaboratrices: Me
Daniel Jacoby, sous-ministre et sous-procureur général, M.
Jacques Beaudoin, directeur général de la Sûreté du
Québec, Me Rémy Bouchard, sous-ministre associé aux
affaires criminelles, M. Robert Diamant, sous-ministre adjoint et directeur
général de la probation et des établissements de
détention, M. Jean-Claude Dubois, directeur du budget, Me Jacques
Lachapelle, sous-ministre associé aux services judiciaires, M.
Clément Ménard, sous-ministre associé au personnel, Me
Roch Rioux, président de la Commission de refonte des lois et
règlements et responsable de la Direction générale des
affaires législatives, Me Christine Tourigny, sous-ministre
associée aux affaires civiles et pénales, Me Pierre Verdon,
sous-ministre associé à la sécurité publique et
sous-ministre associé à la probation et aux établissements
de détention,
M. le juge Dorion, président du Tribunal d'expropriation, Mme
Francine Fournier, laquelle viendra nous rejoindre dans quelques minutes, M.
Maurice Gauthier, président de la Commission québécoise
des libérations conditionnelles, M. le juge Roger Gosselin,
président de la Commission de police du Québec, Me Ghislain K.
Laflamme, président de la Régie des permis d'alcool du
Québec; Me Yves Lafontaine, président de la Commission des
services juridiques; M. Michel Lambert, directeur du Bureau de la protection
civile représenté par... D'accord; Me Yves Lauzon, directeur
général et secrétaire du Fonds d'aide au recours
collectif; M. Jacques Tellier, président du Comité de la
protection de la jeunesse; M. Germain Halle, sous-ministre associé
à l'administration.
M. le Président, ce sont mes principaux collaborateurs et
collaboratrices. Je sais qu'il y en a bien d'autres qu'on pourrait nommer.
Le Président (M. Desbiens): Le rapporteur.
M. Bédard: Nous pourrions procéder à la
nomination du rapporteur.
Le Président (M. Desbiens): Mme
Juneau (Johnson), agira comme rapporteur. Est-ce que vous acceptez? M.
le ministre.
M. Bédard: M. le Président, la séance que
nous commençons aujourd'hui constitue un moment privilégié
de procéder à un bilan des activités du ministère
de la Justice pour l'année écoulée. La commission
parlementaire est appelée à faire l'examen d'un réseau de
plus de 600 points de service, un des plus décentralisés,
regroupant plus de 13 000 employés et dont le budget dépasse les
600 000 000 $.
Il m'apparaît important de rappeler l'éventail des services
rendus par le ministère et par les organismes qui relèvent du
ministère de la Justice: législation et information juridique,
jurisconsulte du gouvernement, poursuites pénales et criminelles,
enregistrements officiels, toute l'action policière, soutien aux cours
de justice, sécurité publique, administration
d'établissements de détention et réinsertion sociale des
contrevenants, aide juridique, protection de la jeunesse et, également,
protection des droits et libertés de la
personne. Voilà autant de domaines où les employés
du ministère et des organismes relevant du ministre oeuvrent
quotidiennement. Nous aurons sûrement l'occasion, au cours de
l'étude des crédits des différents programmes, de discuter
de chacun de ces domaines d'une façon plus approfondie.
Plusieurs mesures réalisées par le ministère au
cours de la dernière année ayant débouché sur des
projets de loi, je vous tracerai d'abord un bilan de la législation du
ministère et vous ferai part de mes intentions dans ce domaine pour
1983. De plus, plusieurs commentaires ayant été formulés
au cours de l'année concernant le processus législatif, j'en
traiterai également au cours de mon exposé et, naturellement,
nous sommes toujours prêts à en discuter avec les membres de la
commission.
Outre le plan législatif, il y a aussi naturellement des mesures
administratives qui se rapportent à la gestion du ministère.
Même si elles n'ont presque jamais la publicité des mesures
à caractère législatif, il ne faut pas les ignorer pour
autant, puisqu'elles permettent d'assurer la mise en oeuvre des politiques et
d'offrir les meilleurs services possible aux diverses clientèles. Nous
ferons donc un tour d'horizon des mesures administratives que le
ministère a poursuivies ou entreprises au cours de la dernière
année.
En matière de législation, le ministère de la
Justice a présenté, au cours de l'année 1982, dix projets
de loi à l'Assemblée nationale, projets qui répondaient
à des besoins manifestes de la collectivité
québécoise. Il n'est pas dans mon intention de reprendre point
par point ces projets. J'aimerais cependant en dégager les principaux
thèmes qui représentent, en bonne partie, les orientations que le
ministère s'était donné au cours des dernières
années. Ces thèmes sont: l'égalité, la
liberté des membres de la famille dans l'organisation de leurs relations
en ce qui a trait à la réforme du Code civil, une protection
accrue des droits et libertés par la révision de la Charte des
droits et libertés de la personne, une plus grande humanisation de la
justice, notamment, par la réduction des délais d'audition devant
les tribunaux et le développement d'alternatives à
l'emprisonnement.
Dans le cadre de la réforme du Code civil, au cours du printemps
1982, nous avons procédé à l'étude et à
l'adoption de la loi 18, Loi assurant l'application de la réforme du
droit de la famille et modifiant le Code de procédure civile. Cette loi
a permis de concrétiser et d'assurer l'application des principes
introduits à l'occasion de la réforme du droit de la famille.
Ainsi, la loi 18 a notamment modifié la procédure à suivre
en matière familiale de façon à atténuer le
caractère contradictoire des débats, à faciliter le
règlement des conflits, à humaniser davantage le processus
judiciaire et à impliquer les parties dans le règlement de leurs
difficultés dans leur meilleur intérêt et dans le meilleur
intérêt de leurs enfants.
Elle s'est employée, de plus, à éliminer le
caractère sexiste qui apparaissait dans certaines lois et les
distinctions entre les enfants qui, en raison des circonstances de leur
naissance, subsistaient dans de nombreuses lois sectorielles. L'entrée
en vigueur de la loi 18, le 1er décembre dernier, a donc permis de
mettre également en vigueur un deuxième volet important de la
réforme du droit de la famille déjà amorcée,
c'est-à-dire toutes les dispositions relevant de la juridiction du
Québec.
Dorénavant, en plus de bénéficier d'un contexte de
règlement plus favorable à l'occasion de conflits familiaux, les
conjoints pourront obtenir une séparation de corps sur simple
présentation d'un projet d'accord, réglant les effets de leur
rupture, ou encore l'un d'eux pourra enfin faire valoir son droit à
l'obtention d'une prestation compensatoire, soit à l'occasion d'une
séparation de corps, d'un divorce ou d'un décès.
Puisque nous sommes en matière de droit familial, j'aimerais
faire le point sur les résultats d'une mesure législative
introduite en 1980, soit la perception des pensions alimentaires. Le service de
perception des pensions alimentaires est en vigueur depuis le 1er janvier 1981.
Durant la première année, le service a perçu 1 800 000 $.
Durant l'année 1982, le service a atteint vraisemblablement sa vitesse
de croisière en percevant près de 4 300 000 $. L'effet direct de
la perception des pensions alimentaires s'est fait sentir sur l'attribution de
l'aide sociale. Depuis le 1er janvier 1981, l'économie quant au budget
de l'aide sociale se chiffre autour de 9 800 000 $. Je pense que ces chiffres
illustrent éloquemment la nécessité qu'il y avait de
mettre en place un tel service des perceptions alimentaires dont ont pu
bénéficier de nombreuses femmes, puisque c'est surtout cette
clientèle qui en a bénéficié.
Dans la poursuite de la réforme du Code civil, un deuxième
bloc législatif a été amorcé en 1982: la
réforme du droit des personnes, des successions et des biens. Dans le
cadre des travaux sur ce bloc, j'ai déposé, à
l'Assemblée nationale, en décembre dernier, deux projets de loi,
les projets de loi 106 et 107, portant réforme du droit des personnes et
des successions. La commission parlementaire de la justice qui a
été tenue en avril dernier sur ces deux projets de loi a permis
à plus de 20 groupes ou organismes de se faire entendre sur des sujets
qui les concernent. Les commentaires formulés à cette occasion
nous ont confirmé l'importance et la nécessité de la
consultation de la population sur la réforme
de cette loi fondamentale que constitue le Code civil. Ce bloc
législatif sera complété au cours de la prochaine
année par un projet de loi assurant l'application de la réforme
du droit des personnes, des successions et des biens. Ces quatre projets seront
discutés et devraient être adoptés dans le cours de
l'année.
Quant à la Charte des droits et libertés de la personne,
le projet de loi numéro 86, adopté en décembre dernier, a
apporté d'importantes modifications dans le domaine des droits et
libertés de la personne. De nouveaux motifs illicites de discrimination
ont été ajoutés. La prépondérance de la
charte a été largement accrue. La discrimination disparaît
dans les régimes d'assurances et d'avantages sociaux et des programmes
d'accès à l'égalité pourront être
implantés sur une base volontaire ou ordonnés par un tribunal. Ce
projet faisait suite à une réflexion en profondeur sur cette loi
fondamentale, à partir de l'expérience acquise au cours des
années, de l'évolution de la société
québécoise et aussi, de l'interprétation qu'en ont
donnée les tribunaux. La Commission des droits de la personne
complète actuellement l'examen des impacts administratifs de toutes ces
modifications législatives afin d'être en mesure de les appliquer
dans les meilleurs délais lorsqu'elles seront proclamées en
vigueur par le gouvernement. Cette proclamation devrait s'effectuer très
prochainement.
De plus, le ministère, à titre de jurisconsulte du
gouvernement, met au point présentement le mécanisme de
révision des lois et règlements qui est nécessaire pour
assurer la prépondérance des dispositions de la charte.
Je vous avais annoncé l'an dernier, au cours de l'étude
des crédits du ministère, que nous allions présenter des
modifications législatives importantes pour faire suite aux nombreuses
consultations que nous avions jugé bon d'entreprendre concernant les
délais d'audition devant les tribunaux. Des modifications
législatives ont été incorporées au projet de loi
no 67, Loi modifiant la Loi sur les poursuites sommaires, le Code de
procédure civile et d'autres dispositions législatives, loi qui a
été sanctionnée le 23 juin 1982 et au projet de loi no
101, Loi modifiant diverses dispositions législatives, loi
sanctionnée le 16 décembre dernier. Ces modifications concernent
les aspects suivants: la simplification des procédures en appel, le
seuil des appels de plein droit à la Cour d'appel des jugements de la
Cour supérieure est passé de 6000 $ à 10 000 $, les
jugements interlocutoires et ceux autorisant un bref d'évocation ne sont
appelables que sur permission. J'ouvre ici une parenthèse pour
mentionner que les modifications en matière d'appel ont
déjà amené une réduction sensible des délais
d'audition. De 30 mois qu'ils étaient en septembre 1982, les
délais d'audition sont passés à 21 mois en mai et
passeront vraisemblablement à 15 mois en septembre prochain. Nous
croyons qu'il y a encore possibilité d'amélioration.
La juridiction de la division des petites créances de la Cour
provinciale a été augmentée de 500 $ à 800 $. On a
également modifié certaines dispositions sur le taux
d'intérêt légal pour permettre aux juges d'ajouter en
matière contractuelle une indemnité fixée par
référence à un règlement adopté en vertu de
la Loi sur le ministère du Revenu. La juridiction de la Cour provinciale
a été portée de 6000 $ à 10 000 $. Le nombre de
juges à la Cour supérieure a également été
augmenté de 9. Je peux dès maintenant vous annoncer que si ces
mesures sont de nature à améliorer la situation - nous en avons
déjà des preuves tangibles - nous n'allons pas cependant nous
arrêter là. D'autres modifications législatives seront
bientôt soumises à votre attention, qui viseront notamment
à alléger la procédure applicable à l'injonction et
à certains recours extraordinaires prévus au Code de
procédure civile. Un projet de loi sera déposé avant le
1er juin. (10 h 30)
Le projet de loi no 67 contenait des dispositions importantes ayant pour
but d'éliminer le plus possible l'incarcération pour le non
paiement d'amende. Elles sont entrées en vigueur le 1er
janvier dernier; j'y reviendrai un peu plus loin au moment où je vous
parlerai des orientations du ministère à propos des services
correctionnels.
Parmi les autres mesures législatives qui ont été
soumises à l'Assemblée nationale, j'aimerais vous en souligner
quelques-unes qui m'apparaissent importantes. Le projet de loi no 71 a
modifié la Loi sur l'aide juridique pour assurer principalement une
certaine forme de participation des bénéficiaires au coût
des services juridiques et pour revoir le partage du pouvoir
réglementaire entre la Commission des services juridiques et le
gouvernement. Je crois qu'il est important de rappeler que le régime
québécois d'aide juridique se compare non seulement
avantageusement aux régimes des autres provinces mais qu'il est l'un des
plus généreux sur le plan des services offerts et que
l'État québécois y consacre des ressources
financières plus importantes que la majorité des autres
provinces. Dans ce projet de loi auquel je viens de référer
concernant les modifications à l'aide juridique, nous avons eu un long
débat concernant les possibilités d'imposer un ticket
modérateur. Avec les résultats de négociations qui se
devaient d'être entreprises avec le fédéral dans ce
domaine, nous sommes en mesure d'affirmer qu'il n'y aura pas
nécessité d'imposer de frais d'ouverture de dossiers ou
de ticket modérateur, ce qui sera tant mieux pour l'ensemble des
bénéficiaires qui auraient pu être touchés par cette
mesure.
Une autre pièce législative à incidence
économique importante a été présentée par le
ministère, soit le projet de loi 97 sur la cession des biens en stock.
Le ministère voit actuellement à l'implantation d'un
système central informatisé d'enregistrement des cessions
susceptible de répondre aux exigences très strictes des
institutions financières au niveau de la véracité et de la
certitude des renseignements qui seront contenus dans ce genre de
système.
Des modifications au Code des professions et au Code du travail ont
été soumises pour faire suite à un arrêt de la Cour
suprême concluant à l'incons-titutionnalité de l'octroi au
Tribunal des professions d'une juridiction exclusive d'appel des
décisions d'un comité de discipline d'une corporation
professionnelle. En raison d'un problème de délai majeur qui
nuisait au bon fonctionnement des recours collectifs, à savoir l'appel
des décisions concernant le droit de poursuivre au mérite, j'ai
fait amender le Code de procédure civile pour n'autoriser que l'appel
des décisions refusant l'exercice du recours. D'autres modifications ont
également été apportées afin de faciliter la prise
de recours collectif et en vue d'assurer une plus grande souplesse quant
à l'exercice des pouvoirs financiers du fonds d'aide au recours
collectif.
J'ai également fait suite à une demande de la
conférence des juges visant à assurer une plus grande
immunité au juge comme corrollaire du principe de l'indépendance
de la magistrature. L'Assemblée nationale a adopté une
disposition en ce sens dans le projet de loi no 67. Je pense, M. le
Président, avoir brossé un tableau qui, sans être
exhaustif, reflète bien ce que fut la législation du
ministère pour l'année 1982.
De quoi maintenant sera faite l'année 1983? Je vous ai
déjà annoncé que nous poursuivrons la révision du
Code civil et l'adoption des mesures visant à améliorer les
délais d'audition devant les tribunaux. En plus de ces modifications je
prévois déposer cet automne un projet de loi fixant un cadre
juridique unique et clair au processus de préparation et d'adoption des
règlements, notamment au niveau de la publicité et de
l'entrée en vigueur de ceux-ci.
Ce projet de loi fait suite à une analyse poussée
entreprise au ministère. Il tiendra compte évidemment des
considérations contenues au rapport que publiera prochainement la
commission parlementaire spéciale sur la législation
déléguée qui est présidée par le
député de Trois-Rivières, M. Denis Vaugeois, et tiendra
compte également des recommandations que pourra également
formuler le ministre délégué aux relations avec les
citoyens, M. Denis Lazure.
Un autre important projet de loi, également destiné
à permettre aux citoyens de mieux s'y retrouver face à la
justice, un projet de loi sur l'unification des tribunaux relevant du
Québec, sera déposé au cours de l'année. Cette
mesure visera à regrouper en une seule cour de justice composée
de divisions spécialisées la Cour des sessions de la paix, le
Tribunal de la jeunesse, la Cour provinciale ainsi qu'un bon nombre de
tribunaux administratifs.
Un autre projet de loi dont je prévois le dépôt
à l'automne visera à moderniser, rationaliser, préciser et
humaniser le processus pénal contenu dans la Loi sur les poursuites
sommaires. Il s'agira d'un véritable Code de procédure
pénale.
Un projet de loi sera déposé cette année concernant
les aspects civils de l'enlèvement extraprovincial d'enfants. Il s'agit
d'une mesure destinée à donner suite, sur le plan juridique,
à la convention internationale de La Haye, laquelle a été
signée en 1980, et qui facilitera la reconnaissance réciproque
entre pays des jugements concernant la garde d'enfants ainsi que le retour de
ces enfants dans leur pays d'origine. Le Québec a participé
activement aux travaux de préparation de cette convention avec
l'intention d'y adhérer officiellement.
De plus, des amendements à la Loi sur la protection de la
jeunesse seront déposés cette année afin de tenir compte
du rapport de la commission parlementaire spéciale sur la protection de
la jeunesse présidée par M. Jean-Pierre Charbonneau et d'apporter
aussi les ajustements qui font l'objet d'un certain consensus entre les divers
intervenants dans ce domaine, et ce, dans le but d'améliorer le
régime de protection des jeunes ainsi que le traitement de la
délinquance.
Enfin, le processus de refonte de la Loi sur les coroners devrait
s'amorcer à l'Assemblée nationale dès ce printemps. Comme
nous sommes à quelques semaines de la fin de la session, cela veut
très clairement dire qu'un projet de loi sera déposé avant
la fin de nos travaux de juin. Cette refonte confirmera l'indépendance
du coroner et visera à développer son rôle afin de lui
permettre de se concentrer davantage sur la recherche des causes et des
circonstances des décès et à atténuer la
portée de ses pouvoirs en matière criminelle. La loi actuelle,
sous certains aspects, est devenue désuète par rapport à
l'évolution des besoins et il s'avère nécessaire de
l'adapter aux impératifs d'aujourd'hui. Il m'apparaît
également essentiel que des correctifs soient apportés de
manière à assurer la protection de la vie privée des
individus appelés à comparaître lors des audiences et
à garantir aux témoins le respect de certains droits
qu'on leur reconnaît autrement devant les tribunaux.
Après avoir fait le tour de la législation de 1982 et de
celle à venir en 1983, j'aimerais aborder avec vous la question du
processus législatif qui a fait l'objet de divers commentaires au cours
de l'année. Prolifération législative, dit-on en certains
milieux, entraînant difficultés de recherche et de connaissance de
la législation. On reproche également la mauvaise qualité
de la loi, l'entrée en vigueur de projets de loi par proclamation et
l'existence de projets de loi dits omnibus.
Pour ma part, il m'apparaît extrêmement risqué de
vouloir engager une discussion sur le fait qu'il y a trop ou pas assez de lois
comme s'il pouvait s'agir d'un indicateur valable de la performance d'un
gouvernement. Il faut bien se rendre compte que l'Assemblée nationale,
comme tout autre législateur, ne légifère pas pour le
plaisir de légiférer. Les législations s'élaborent
la plupart du temps à partir des demandes qui sont faites par des
groupes de citoyens, soit pour corriger des injustices, soit pour
prévenir des abus. Les parlementaires lorsqu'ils votent ces lois ne font
qu'accomplir leur devoir de représentation et de pondération des
intérêts de la population qui les a élus. C'est là
l'essence même de leur fonction.
C'est dans cette optique qu'il faut noter que sur l'ensemble des lois
adoptées, plus des deux tiers ne sont pas des lois nouvelles mais des
lois qui visent à modifier des lois existantes, de façon à
mieux les adapter aux réalités nouvelles de la
société. Le phénomène de l'augmentation des lois
qui remonte d'ailleurs aux années soixante n'est pas propre au
Québec, c'est un phénomène que l'on retrouve dans tous les
pays, que ce soit en Amérique du Nord ou en Europe. De toute
façon, si on veut absolument tenir un débat stastistique sur ce
sujet, j'aimerais signaler qu'au cours des trois dernières
années, l'Assemblée nationale a adopté deux fois moins de
lois publiques qu'au cours des trois années précédentes.
Il m'apparaît donc excessif de parler d'un prolifération
qrandissante de la législation.
Il faut dire que cette impression de la prolifération des lois
est accentuée par la nature même du processus parlementaire
actuel. Une proposition du leader parlementaire est actuellement à
l'étude par un sous-comité de l'Assemblée nationale, et la
solution ne pourra venir que des parlementaires eux-mêmes.
Je suis conscient, par ailleurs, d'une certaine méconnaissance,
pour ceux qui ont à se servir des lois, principalement les avocats, des
outils mis à leur disposition pour connaître la législation
et la réglementation. Je constate, par exemple, qu'il n'y a que 985
abonnements en français aux feuillets de première lecture des
projets de loi et 1793 abonnements aux feuillets de ces projets de loi
sanctionnés. C'est bien peu quand on sait qu'il y a 9200 avocats au
Québec. Dans un même ordre d'idées, il n'y a que 1221
abonnements à la refonte des lois et seulement 526 abonnés
à la refonte des règlements, deux outils indispensables avec
leurs suppléments réguliers et l'index.
Quant à la qualité formelle de nos lois, je crois qu'elle
s'est grandement accrue, améliorée, depuis notre accession au
pouvoir et que cela est directement relié au fait que le gouvernement du
Québec est le seul qui ait mis sur pied, depuis 1977, un programme
d'amélioration de la rédaction des textes législatifs et
réglementaires, et ce, d'une manière systématique.
Mis à part l'effort énorme de la Commission de refonte des
lois et règlements sur le plan de la mise à jour des lois
adoptées par l'Assemblée nationale, il y a donc lieu de signaler
et de réaffirmer, au niveau gouvernemental, une volonté
très nette de se doter de ressources humaines et de structures
adéquates pour assurer une meilleure cohérence
législative. Sur le plan de ces structures, il y a, d'ailleurs, eu
progrès et innovations.
Au niveau du Conseil exécutif, le Comité de
législation a pour fonction de s'assurer, une fois les décisions
prises par le Conseil exécutif, de la cohérence
législative et juridique des projets de loi qui en découlent et,
plus particulièrement, de l'harmonisation de chaque projet de loi avec
l'ensemble de la législation applicable au Québec.
Au niveau du ministère de la Justice, le Bureau des lois
rattaché à la Direction générale des affaires
législatives fournit un soutien technique au Comité de
législation et assume la fonction d'expert-conseil auprès des
ministères et organismes du gouvernement lorsque ceux-ci le
requièrent dans la rédaction et la révision des projets de
loi. Au cours des trois dernières années, environ 50% du volume
législatif total à caractère public soumis à
l'Assemblée nationale a été traité par le Bureau
des lois. De plus, le fait que, depuis l'automne 1982, j'ai été
appelé à présider le Comité de législation
permet d'espérer une coordination encore plus étroite et plus
soutenue entre les divers intervenants en matière de
législation.
Il est toujours possible, à partir de certaines dispositions
isolées, de laisser croire qu'il y a une confusion totale de la
législation au Québec. Il est également très facile
de critiquer à partir d'amendements qui n'ont pour unique but que de
corriger des erreurs ou oublis contenus dans nos lois: versions anglaises,
oubli de la refonte, etc.
Je pense qu'il faut porter un jugement global. À mon avis, s'il y
a place pour des améliorations, ce que je ne conteste pas,
d'importants progrès ont été réalisés
et je m'efforcerai d'améliorer encore davantage la cohérence
législative et la qualité de la législation
québécoise.
Quant au recours à la technique de l'entrée en vigueur par
proclamation qui est de plus en plus utilisée, non seulement par nous,
mais aussi par d'autres Parlements, il faut y voir, d'abord et avant tout, une
volonté ferme du gouvernement d'accorder aux citoyens une période
de temps raisonnable pour prendre connaissance des lois nouvelles et des
changements qui en découlent. Ce délai que le gouvernement
s'impose lui permet de sensibiliser la population aux modifications
législatives adoptées par l'Assemblée nationale, ce qui en
facilite l'application.
C'est ce que nous avons fait et qui est extrêmement important et
demandé, d'ailleurs, par tous les organismes en ce qui a trait à
l'adoption du droit de la famille. Cela représentait d'énormes
changements. Durant un an, nous avons fait toute la publicité
nécessaire pour faire en sorte que, une fois la législation
entrée en vigueur, on ne prenne personne par surprise. Il est
évident que le recours trop systématique à cette technique
ainsi que l'harmonisation des dispositions des lois traitant des pouvoirs
d'inspection et des amendes feront cependant l'objet d'une attention
particulière du Comité de législation au cours de la
prochaine année. (10 h 45)
Enfin, en ce qui concerne les projets de loi omnibus, j'ai eu
l'occasion, lors de l'étude à l'Assemblée nationale du
projet de loi 101, Loi modifiant diverses dispositions lévislatives,
d'énumérer un certain nombre d'améliorations au processus
d'adoption des projets de loi omnibus. Il y en a qui parlent comme si ces
améliorations au processus d'adoption n'avaient pas existé. Je
dirais qu'après entente avec l'Opposition. Ces améliorations
comprenaient notamment la transmission de renseignements et d'explications sur
le contenu des articles pour faciliter aux parlementaires l'étude du
projet de loi omnibus; l'engagement de faire connaître, dès la
deuxième lecture, la liste des amendements et des nouveaux articles;
l'engagement que les ministres responsables ou que les ministres
concernés par certains amendements ou articles nouveaux soient à
la disposition des parlementaires, sinon à l'Assemblée nationale
lors du débat en deuxième lecture, sûrement lors de
l'étude article par article du projet de loi.
Je crois que cette première expérience d'un
véritable projet de loi omnibus gouvernemental contenant des
dispositions de fond a été, avec la collaboration des membres de
l'Opposition, un succès. Ce procédé, s'il est soumis
à des règles de fonctionnement semblables à celles qui ont
prévalu lors de l'adoption de la loi 101, peut être des plus
productifs puisqu'il a l'avantage d'éviter une surcharge inutile du
feuilleton de l'Assemblée nationale par l'addition de plusieurs petits
projets de loi particuliers.
De plus, bien que le nombre de lois touchées par un projet de loi
omnibus puisse paraître élevé dans certains cas, il faut
considérer que dans un délai d'au plus six mois après
l'adoption d'un tel projet de loi omnibus, la Commission de refonte des lois et
règlements intègre ces modifications dans chacune des lois
concernées, de manière que tout citoyen puisse s'y retrouver
facilement à l'intérieur d'un texte intégré,
continu et cohérent. Voilà les quelques commentaires que j'avais
à formuler sur le processus législatif. Nous aurons d'ailleurs le
loisir d'en discuter, j'en suis convaincu, au moment de l'étude du
programme des affaires législatives.
Nous aborderons maintenant, M. le Président, les mesures
administratives et la gestion des ressources du ministère. En raison de
la nature même du ministère de la Justice, beaucoup de nos
activités touchent directement la population. Les personnes ainsi
touchées forment d'une certaine façon notre clientèle que
nous devons desservir du mieux possible. Nos actions sont orientées vers
la satisfaction des besoins de cette clientèle.
Avant de souligner certaines de nos actions, il m'apparaît
important de signaler que nous avons cherché à améliorer
la cohésion des réseaux du ministère et à impliquer
les autres intervenants dans la recherche de solutions aux problèmes
auxquels nous faisons face. Cette démarche se révèle
très fructueuse. Les comités régionaux de la justice
regroupant les divers intervenants constituent un forum fort utile pour la
solution des problèmes en matière d'administration de la justice.
Ces comités ont le mérite de mettre en commun des
expériences dans des domaines variés et d'être le plus
près possible des problèmes des citoyens.
L'engagement que j'avais pris, d'humaniser l'administration de la
justice, s'est également confirmé par la nomination d'une
personne responsable dont le mandat consiste essentiellement à
coordonner les multiples programmes d'humanisation de la justice. De plus, mon
sous-ministre et quelques-uns de ses collaborateurs ont entrepris l'an dernier
une série de tournées régionales qui les a conduits en
Outaouais, dans l'Estrie, sur la rive sud de Montréal, dans la Beauce et
au Saguenay-Lac-Saint-Jean. Ces tournées qui se poursuivront cette
année, ont essentiellement pour but de rencontrer les employés et
les intervenants du système judiciaire pour discuter des orientations du
ministère ainsi que des besoins et problèmes du milieu en
matière
d'administration de la justice. Elles serviront également
à orienter le ministère vers une plus grande
décentralisation. Elles ont permis également de résoudre
plusieurs problèmes locaux et régionaux.
Ce besoin d'échange s'est également
concrétisé par l'organisation d'un colloque régional au
Saguenay-Lac-Saint-Jean, sur l'administration de la justice, à la fin
d'avril dernier. Je suis sûr que cet exemple sera suivi par d'autres
régions. Toutes ces initiatives contribuent à améliorer
grandement les relations entre les divers intervenants du processus
judiciaire.
Quant à l'information des citoyens, le ministère a
produit, entre autres, au cours de l'année dernière, une
cinquantaine d'émissions de télévision d'une durée
de quinze minutes chacune qui furent diffusées dans la région de
Hull. Le programme cherchait à répondre aux besoins particuliers
de cette région en matière d'information juridique. Il semble,
d'ailleurs, que cette initiative fut fort appréciée. Parmi les
retombées de ce projet, soulignons l'intérêt soulevé
auprès de plusieurs enseignants qui ont l'intention de se servir de ces
émissions dans le cadre des cours qu'ils dispensent. Il est possible
également que ces émissions soient de nouveau diffusées au
cours de l'année 1983.
Parmi les outils d'information élaborés par le
ministère, il faut mentionner le magazine Justice qui a entamé,
en janvier dernier, sa cinquième année d'existence. Au cours du
dernier exercice financier - nous avons d'ailleurs avec nous, M. le
Président, la directrice des communications, Mlle Micheline Bouzigon,
qui a porté une attention spéciale à cette revue Justice,
qui a connu de nombreuses transformations - la fréquence de parution est
passée de six à huit numéros par an et de nouvelles
chroniques ont été ajoutées ainsi que la populaire trousse
juridique qui contient des guides pratiques. Ces additions, ainsi qu'une
nouvelle disposition graphique ont contribué à faire passer - et
c'est important de le mentionner - le nombre des abonnés de 81 000 en
mars 1982 à plus de 200 000 à ce jour, c'est-à-dire la
revue gouvernementale à plus fort tirage. Je dirais la première
au Québec.
J'aimerais aborder maintenant un sujet qui constitue une
préoccupation majeure pour le ministère. Il s'agit des victimes
d'actes criminels. Depuis quelques années, le ministère a mis de
l'avant divers programmes à leur intention. Permettez-moi de vous les
présenter. Le ministère a tout d'abord favorisé les
sentences dites de restitution à la victime d'un délit. Par cette
mesure, nous pensons atteindre, de façon plus rationnelle, l'objectif de
la sanction. Non seulement la victime se voit-elle compensée pour le
dommage subi, mais encore l'auteur du délit se trouve-t-il à
prendre davantage conscience du préjudice qu'il a causé à
la victime elle-même, ce qui est de nature à susciter chez-lui une
réflexion personnelle qui constitue un élément clé
dans un processus de redressement de comportement et de réinsertion
sociale. En corollaire, la société est dispensée d'assumer
les coûts de l'incarcération qui, en plus d'être
onéreuse, ne contribue pas pour autant à offrir
nécessairement le remède le plus adéquat. Les
expériences menées jusqu'ici se révèlent
très positives. Ce type de sentence devrait être prononcé
de plus en plus souvent au cours des années à venir.
De plus, le ministère a favorisé des expériences en
matière de déjudiciarisation et de conciliation. Je sais que
cette approche a donné d'excellents résultats, tant pour la
victime que pour l'auteur du délit. Une évaluation approfondie de
ces expériences devrait permettre au ministère de préciser
son orientation générale à l'égard de la
déjudiciarisation en milieu adulte. C'est aussi cette
préoccupation du sort réservé aux victimes qui animait le
ministère de la Justice lorsqu'il avait organisé, il y a quelques
années, des colloques régionaux sur la violence, notamment
exercée à l'endroit des femmes et des enfants. Les statistiques
et les faits nous ont confirmé que ces membres de la
société sont malheureusement, avec les personnes
âgées, parmi les plus vulnérables, ou si l'on veut, parmi
les plus visées par les diverses manifestations de la
criminalité. Il s'ensuivit, entre autres, un programme de subventions
qui a permis de soutenir 173 projets communautaires permettant de sensibiliser
l'ensemble de la population, de développer des instruments d'action,
d'engager des programmes de prévention ou d'implanter des modules d'aide
et de support aux victimes.
Dans la même veine, la formation policière a
été ajustée en conséquence. Ainsi, à
l'Institut de police de Nicolet, on a apporté des modifications aux
programmes pour que les policiers soient mieux préparés pour
faire face aux différentes situations de violence, notamment lors de
conflits familiaux, et pour qu'ils soient également sensibilisés
à l'approche qui soit la plus rassurante et la plus efficace pour la
victime. Cet effort de sensibilisation des intervenants de la justice s'est
exercé aussi auprès des substituts du procureur
général qui ont, eux aussi, des rapports constants avec la
victime. Les procureurs ont contribué à l'élaboration des
règles précises d'intervention en matière de viol dans le
but de faciliter les contacts de la victime avec le processus judiciaire. Dans
la mesure du possible, on s'efforce de confier la responsabilité de ces
dossiers à des procureurs spécialement sensibilisés
à ce genre de causes. Déjà, à Montréal,
où les ressources le permettent davantage, les
poursuites sont intentées par un groupe spécial de
procureurs.
D'autre part, le ministère a collaboré activement à
la préparation d'un protocole médical d'intervention en
matière de viol de façon à faciliter la preuve lors des
procès et à assurer un traitement plus adéquat à la
victime de ce type d'agression.
De plus, la remise à la victime des biens saisis pour les fins de
preuve constitue aussi une autre de nos préoccupations. Des
représentations ont été faites à plusieurs reprises
afin que des modifications au Code criminel soient apportées sur ce
sujet; entre-temps, les procureurs ont entrepris des efforts pour favoriser une
remise rapide à leur propriétaire des biens retenus à des
fins de preuve en recourant à la preuve photographique dans tous les cas
où cela est possible.
À cette énumération sommaire de certaines des
actions entreprises par le ministère dans le but d'humaniser davantage
le système judiciaire à l'égard de la victime, je voudrais
ajouter un élément que j'ai présenté lors du
dernier colloque de la Société de criminologie du Québec.
Il s'agit du programme d'information destiné aux victimes d'infractions.
La diffusion de l'information à la victime se répartit en quatre
étapes et a pour but de fournir aux victimes, plaignants et
témoins un certain nombre de renseignements utiles. Elle
nécessite d'autre part la collaboration de divers intervenants en
matière de justice.
Ainsi, premièrement, un court dépliant d'information sur
l'enquête policière, les procédures éventuelles
devant les tribunaux ainsi que les recours possibles de la victime d'infraction
sont remis systématiquement à tous les plaignants par le
policier. Ce feuillet permettra aussi à ce dernier de consigner à
l'intention du plaignant certains renseignements utiles en rapport avec la
plainte tels l'identité du policier recevant la plainte et le
numéro du dossier.
Deuxièmement, après la dénonciation, une lettre
sera systématiquement acheminée à la victime ou au
plaignant par le ministère de la Justice afin de l'en aviser
officiellement et de lui indiquer la nature de l'infraction et des
renseignements qui y sont relatifs.
Troisièmement, lorsque les procédures seront
terminées, les plaignants ou les victimes seront formellement
avisés des résultats, par lettre.
Enfin, toute personne appelée à témoigner pour la
poursuite dans les procédures criminelles recevra en même temps
que le subpoena un carton d'information sur le rôle du témoin, le
déroulement des procédures et les remboursements auxquels elle a
droit.
Cette initiative qui s'inscrit dans la démarche du
ministère d'humaniser la justice permet, à mon avis, de
personnifier, de personnaliser et d'améliorer la qualité des
rapports avec la victime et les témoins lors de leur participation au
processus judiciaire.
Le ministère de la Justice a poursuivi, au cours de la
dernière année, son rôle de coordination et de support en
matière de prévention du crime. Nous nous attachons à
canaliser les efforts déployés par les dix comités
régionaux de prévention du crime qui eux-mêmes jouent un
rôle de coordination et de consultation régionale dans le domaine
de la criminalité.
Parmi les réalisations de cette année, mentionnons celle
qui a trait à la participation permanente d'animateurs régionaux
auprès des comités régionaux de la rive sud de
Montréal et du Saguenay-Lac-Saint-Jean. Le choix de ces régions
est fonction des caractéristiques socio-économiques de ces deux
parties de territoire qui, en somme, reflètent l'ensemble du
Québec. En fait, ces expériences permettront d'évaluer des
formules destinées à consolider, à développer et
à élargir au besoin les mécanismes de concertation
régionale que constituent les comités régionaux de
prévention du crime.
Il y a également le programme annuel "Piquer c'est voler"
parrainé par le Conseil québécois du commerce au
détail auquel le ministère collabore activement. L'ampleur du
phénomène justifie, à mon avis, le support apporté
à cette activité annuelle. Dans la même veine, il y a un
mois, le ministère lançait un nouveau programme de
prévention du vol dans les commerces, élaboré
conjointement avec les corps policiers et les représentants des
commerçants du Québec. Il m'apparaît d'ailleurs important
de souligner que ce programme dont le thème est
"Action-Prévention", est conçu en collaboration avec ceux qui
peuvent se faire les artisans d'une prévention encore plus
présente et plus efficace, soit les commerçants et les policiers.
(11 heures)
Je tiens à ajouter également que le ministère a
développé et instauré à l'Institut de police du
Québec un cours de perfectionnement visant la formation pour les
organisations policières de moniteurs en prévention du crime.
Je n'ai pas l'intention de reprendre ici toutes les actions ponctuelles
des policiers en matière de prévention du crime; on sait que la
Sûreté du Québec y joue un rôle de toute
première valeur. J'aimerais cependant leur rappeler, comme à nous
tous d'ailleurs, que le ministère croit que la prévention est la
meilleure arme pour lutter contre la criminalité et qu'il encourage
toute initiative en ce sens.
Les agents de la Sûreté du Québec ont
participé à diverses campagnes en matière de
prévention du crime et également en matière
de sécurité routière. Je citerai, entre autres, le
programme de la protection du voisinage qui apparaît comme un moyen
efficace de prévenir les vols par effraction et les vols de tout genre
puisqu'il fait appel aux ressources de la communauté leur permettant de
s'impliquer activement dans la prévention. Au cours de 1982, la plupart
des comités existants, soit une trentaine, ont été
maintenus et plusieurs autres ont été mis sur pied, notamment
dans les districts de Montréal et de Trois-Rivières, où
respectivement quinze et douze comités ont été
établis.
En matière de criminalité économique, un
troisième colloque a été organisé à
l'Intitut de police de Nicolet réunissant quelque 200
délégués provenant de milieux d'affaires et du secteur
public. Ce colloque s'inscrit également dans l'optique d'une meilleure
prévention. Un comité permanent sur la prévention de la
criminalité économique a été formé.
J'ajouterais, enfin, que la Sûreté du Québec a
poursuivi son programme d'information en milieu scolaire qui fut
expérimenté auprès de 17 000 élèves de
niveaux préscolaire, primaire et secondaire. Étant fort bien
accueilli dans les milieux scolaires autant par les parents et
éducateurs que par les étudiants, ce programme sera mis à
jour régulièrement. En plus de l'expérimentation
mentionnée, les agents de la Sûreté du Québec ont
rencontré plus de 50 000 élèves l'an dernier, la plupart
du temps à la demande d'enseignants ou de commissions scolaires.
En terminant ce chapitre, je m'en voudrais de ne pas profiter de
l'occasion pour me réjouir publiquement du fait que, pour la
première fois depuis fort longtemps, il y a eu une baisse
générale sensible de la criminalité rapportée au
Québec, en 1982. Une baisse qui, par rapport à 1981,
représente 4,5% pour les crimes de violence, 3,2% pour les crimes contre
la propriété et 4,6% pour les autres infractions au Code
criminel. Il y a certes une multitude de facteurs qui ont pu concourir à
cette baisse de la criminalité. Je pense, par ailleurs, qu'il faut
largement l'imputer à l'implication et au sens des
responsabilités accru de notre collectivité, ainsi qu'à
l'orientation de plus en plus préventive que se donne la police au
Québec. Il y a lieu de s'en féliciter ouvertement.
Maintenant, il est un sujet sur lequel j'aimerais faire le point, non
pas tant pour tracer l'historique des actions posées que pour indiquer
les orientations du ministère.
J'ai déjà eu l'occasion, lors du colloque juridique des
étudiants en droit à l'Université de Montréal, en
mars dernier, de faire un bref rappel historique des actions du
ministère. Il n'est pas dans mon intention de vous rappeler aujourd'hui
les objectifs et le fonctionnement des travaux rémunérés,
des absences temporaires, des travaux communautaires, de la Commission
québécoise des libérations conditionnelles, des
instruments d'information mis à la disposition des prévenus et
des détenus sur leurs droits et les programmes qui s'offrent à
eux, du règlement relatif aux établissements de détention
qui encadre les diverses activités qui se déroulent dans le
milieu de la détention et des travaux compensatoires que nous venons
tout juste d'instaurer et dont les résultats préliminaires depuis
le début de l'année s'avèrent très positifs, tant
en termes d'une perception accrue des amendes que d'un recours moindre à
la détention.
La seule énumération de ces mesures, cependant,
élaborées et mises en place depuis que je suis titulaire du
ministère de la Justice démontre que j'ai toujours
prôné les alternatives à l'incarcération, celle-ci
devant être perçue comme un recours ultime. Ces mesures ont
produit des résultats qui démontrent leur bien-fondé.
À titre d'exemple, le programme d'absence temporaire permet à une
personne incarcérée, selon des conditions
préétablies, d'occuper un emploi à l'extérieur de
l'établissement de détention, de faire appel à une
ressource communautaire, de visiter sa famille, de s'absenter du centre de
détention pour recevoir des soins médicaux ou pour poursuivre des
études. Sachant que ce programme connaît un taux de succès
de 95%, on ne peut que conclure que la société entière y
retire des avantages importants.
Outre ces considérations humaines et sociales qui militent en
faveur de ces mesures alternatives, on ne doit pas ignorer que
l'incarcération n'est pas l'unique solution pour la protection de la
société. Si la crise économique actuelle contribue
à sensibiliser les administrateurs au bien-fondé du recours aux
mesures alternatives, elle produit, par contre, l'effet inverse auprès
d'une partie de la population en une période propice à la
violence. Certaines personnes voient d'un mauvais oeil la perspective d'une
plus grande ouverture dans le domaine de la détention. Il faut donc
rappeler et insister sur le fait que ces mesures s'adressent, dans les
établissements québécois, à des personnes
incarcérées pour des délits mineurs, en grande partie non
violents, et dont les peines sont généralement inférieures
à six mois. La société devrait-elle maintenant envisager
l'introduction de telles mesures s'adressant à des détenus
incarcérés pour des délits plus graves? Devrions-nous,
comme nous le faisons pour les jeunes contrevenants, encourager la
déjudiciarisation dans certains délits mineurs commis par des
adultes?
Voilà deux questions qui méritent, à mon sens,
d'être débattues. J'ai déjà annoncé que, dans
le but d'expliciter la position de mon ministère sur ces questions,
j'ai
constitué un groupe restreint de travail chargé de
formuler des recommandations appropriées. Ce comité
évaluera, par exemple, la possibilité de retirer du circuit
judiciaire habituel le comportement de certains adultes qui relèverait
davantage de troubles psychosociaux que d'un comportement criminel. Je pense,
par exemple, aux victimes d'alcoolisme, aux clochards et aux toxicomanes. Les
causes de ces comportements délictuels pourraient relever davantage du
réseau de la santé que du réseau de la justice.
Ceci dit, je ne vous cacherai pas que nous vivons actuellement un
sérieux problème de surpopulation dans nos établissements
de détention. Cependant, la comparaison du taux d'incarcération
démontre que celui du Québec est relativement peu
élevé en regard de celui des États-Unis et des autres
provinces du Canada. Nous avons donc une position privilégiée en
Amérique du Nord et, à ce chapitre, nous devons nous efforcer
d'améliorer encore davantage la situation.
L'impératif de rationalisation des coûts de fonctionnement
doit également être considéré. Il faut nous rappeler
que, comparé au coût annuel moyen de 27 000 $ pour garder une
personne en institution de détention, il en coûte 12 000 $ dans un
centre d'hébergement communautaire et seulement 800 $ pour exercer une
surveillance en milieu ouvert.
Malgré les nuances qu'il faut faire, cependant, en
établissant des comparaisons, je crois qu'il est utile de se
remémorer qu'il en coûte moins cher qu'ailleurs aux contribuables
québécois pour l'ensemble des différents services
correctionnels offerts. L'écart des coûts par rapport au
résultat doit stimuler notre réflexion et nous orienter vers des
façons nouvelles de voir et de faire les choses. Ce défi m'a donc
amené à redéfinir le mandat de la Direction
générale de la probation et des établissements de
détention à partir d'une philosophie renouvelée.
Ainsi, alors qu'auparavant on avait tendance ``a percevoir la personne
incarcérée comme dangereuse et ayant besoin d'encadrement, on
doit maintenant la considérer et la traiter comme une personne humaine,
responsable et non violente, à moins ou jusqu'à preuve du
contraire. Si, toutefois, la personne incarcérée manifeste de la
violence et représente un danger pour elle et les autres, la mesure
sécuritaire doit viser à maîtriser des situations ou des
comportements qui ne peuvent être autrement contrôlés.
Ce renouvellement se traduit également dans la récente
proposition d'un cadre général de planification des
établissements de détention où il apparaît qu'une
transition importante devrait s'effectuer d'ici les prochaines années.
En effet, on y développe les concepts de sécurité
périphériques plutôt que de sécurité interne,
on mise sur l'implantation d'un processus visant à améliorer le
contrôle personnel, le sens des responsabilités et la prise en
charge de la personne par elle-même. Cette nouvelle approche favorisera
l'exercice de relations très positives entre le détenu et son
entourage.
Avec ces modifications, nous recherchons l'utilisation plus rationnelle
des ressources humaines, matérielles et financières. Ainsi, le
développement de nos ressources à Trois-Rivières et
à Sherbrooke contribuera à décongestionner celles de
Montréal où, par ailleurs, un réaménagement complet
sera fait d'ici peu. Ce réaménagement, qui ne vise pas à
augmenter le nombre de cellules, permettra enfin d'atteindre l'objectif de la
fermeture du centre Parthenais. Pour ce faire, il faudra redéfinir la
vocation du centre de détention de Bordeaux pour y accueillir les
prévenus et les détenus et y incarcérer les personnes
condamnées aux peines les plus lourdes. Le cadre physique de cette
institution devra donc être modifié en conséquence.
Il n'est pas besoin d'insister ici sur le désir du
ministère d'aménager un nouveau centre de détention
à LaSalle pour y accueillir un maximum de 350 détenus, lequel
sera conçu entièrement en fonction de la nouvelle politique de
sécurité périphérique. La clientèle du futur
centre de LaSalle sera constituée de personnes ayant
démontré une réceptivité positive à
l'égard des programmes axés davantage sur la réinsertion
sociale que sur la restriction de liberté. Il va de soi que ceux qui
adopteront un comportement empreint de violence seront écartés du
centre de LaSalle. J'espère que les ragots et le rumeurs de toutes
sortes cesseront et que nous pourrons le plus rapidement possible
procéder aux aménagements nécessaires. J'espère
qu'on cessera d'alimenter des peurs ou des inquiétudes qui sont
véhiculées auprès de la population et qui n'ont aucun
fondement. J'ai, d'ailleurs, eu l'occasion d'apporter des précisions
là-dessus.
Peut-être que, pour certains, les choses ne vont pas assez
rapidement dans le domaine du réaménagement des centres de
détention. Ces mêmes personnes devraient également examiner
les solutions d'ensemble que nous avons préparées au fil des ans;
elles s'apercevraient que nous nous efforçons de maintenir les meilleurs
services possible. Je suis le premier à souhaiter que nos
équipements soient revus et modernisés le plus rapidement
possible.
Nos projets de modernisation d'établissements ne s'arrêtent
pas aux établissements de détention. En effet, les services
judiciaires, dans leur ensemble, ont subi des transformations majeures au cours
de la dernière année. On a ainsi assisté à
l'inauguration de nouveaux palais de justice à Shawinigan
vendredi et à Alma. De plus, les services judiciaires occupent des
espaces plus modernes à La Sarre et à La Tuque. On peut aussi
parler de réfection et de réaménagements importants aux
palais de justice de Sherbrooke et de Longueuil et de
réaménagements mineurs un peu partout dans les points de service
du Québec. De plus, des programmes de besoins ont été
réalisés ou sont en cours pour réaménager le palais
de justice de Saint-Joseph-de-Beauce.
Par ailleurs, le Conseil du trésor doit prendre une
décision visant à autoriser un réaménagement majeur
et un agrandissement substantiel du palais de justice de Joliette. Dans le cas
de celui de Longueuil, le ministère des Travaux publics et de
l'Approvisionnement a transmis au Conseil du trésor une demande
d'autorisation de principe pour la construction d'un nouveau palais de justice.
Un nouveau palais de justice sera érigé à Sherbrooke et
déjà les professionnels ont été engagés pour
les travaux. J'ajouterai, enfin, que le nouveau palais de justice de
Québec ouvrira ses portes, tel que prévu, en octobre
prochain.
Si les équipements doivent être adaptés aux besoins
d'aujourd'hui, je crois que nos méthodes de travail doivent
également être modernisées. La technologie de pointe est
présente et il nous appartient de nous en servir pour améliorer
notre productivité, les services que nous rendons et la qualité
de vie au travail de nos employés. L'informatique et la bureautique sont
des instruments fort importants pour toute organisation moderne.
Ainsi, le programme d'informatisation des services judiciaires s'est
poursuivi en 1982-1983. Après les services judiciaires de
Montréal, Québec, Saint-Jérôme, Longueuil, Joliette,
Rivière-du-Loup, toutes les capitales régionales profitent de
l'informatique pour la gestion des greffes et des centres de distribution. Les
points de service ainsi informatisés en 1982-1983 ont été
Amos, Sept-Îles, Hull, Saint-Hyacinthe, Trois-Rivières,
Sherbrooke, Rimouski et Chicoutimi. Il y a également parmi les projets
informatiques du ministère celui concernant l'accessibilité aux
banques de données à caractère juridique. Une quarantaine
de bureaux d'avocats auront accès incessamment, à titre de projet
pilote, aux banques de données informatiques.
En matière de bureautique, le ministère a commencé
les travaux visant à se doter d'un plan de développement qui
permettra une coordination des activités et une comptabilité des
appareils. Le ministère utilise déjà des appareils
à traitement de textes; quant aux autres fonctions, elles sont à
développer pour faciliter le travail et augmenter la productivité
du personnel. (11 h 15)
Ces instruments modernes aident également à la cueillette
des données et, par le fait même, à la gestion. Au plan
ministériel, nous avons développé un système
d'information de gestion qui, au fil des ans, permettra d'avoir un portrait
rapide de la situation de l'ensemble des réseaux du ministère.
Remplaçant la saisie et le traitement manuel des données par un
système informatisé, le ministère pourra suivre encore
mieux l'évolution des activités. À cet égard, en
1982-1983, le système d'information de gestion de la Direction
générale des services judiciaires a fait l'objet d'une
révision complète. Cette révision avait pour but
d'intégrer les données d'évaluation des nouvelles
législations (perception d'amendes, Code de sécurité
routière) et de parfaire la normalisation des données
déjà inscrites. Également, en 1982, la Direction de la
probation a procédé à la conception et à la mise
sur pied d'un système d'information de gestion informatisé. Les
objectifs de ce nouveau système sont de permettre à chaque palier
décisionnel de l'organisation une meilleure prise de décision, de
refléter de façon plus exacte la somme de travail
effectuée au niveau opérationnel et de faciliter la gestion des
dossiers et la distribution du travail aux agents de probation.
Le système d'information de gestion s'ajoute aux outils que le
ministère possède déjà: évaluation de
programmes, plan de développement des ressources, étude sur les
fonctions de soutien administratif, rapport statistique sur le budget. Je
désire que le ministère, qui est déjà cité
en exemple par les autres provinces du Canada en matière de statistiques
judiciaires, soit doté des meilleurs instruments pour améliorer
encore davantage la gestion de ses ressources. Il faut concevoir ces outils non
pas comme des fins en soi, mais comme des moyens en vue d'une meilleure
gestion. J'attache donc beaucoup d'importance à la sensibilisation et
à la formation du personnel à ces nouvelles technologies.
Concernant le développement des ressources humaines, les
employés - je tiens à le répéter même si,
pour certains, il peut s'agir d'un cliché - sont les ressources les plus
importantes de toute organisation. Ce sont les employés qui, par leurs
actions à l'égard du public, leur souci de bien travailler et de
poursuivre les objectifs de l'organisation, donnent une image de celle-ci. Nous
n'attacherons jamais assez d'importance aux ressources humaines et à
leur développement.
En plus de participer activement aux programmes gouvernementaux
d'amélioration des relations avec les citoyens et
d'égalité des chances en emploi, le ministère a investi
dans la formation de son personnel au cours de la dernière année.
La période que nous
traversons exige des connaissances encore plus aiguës en
matière de gestion des ressources. Si nous avons été
habitués à gérer en période de
développement, il a fallu s'habituer à penser davantage en termes
de rationalisation, d'efficacité et de productivité. Aussi, des
programmes mis à la disposition du personnel tiennent compte de cette
situation. Le plan de développement des ressources humaines vise
à développer le potentiel de créativité des
employés en matière de gestion et à les sensibiliser au
principe de la qualité de vie au travail. C'est ainsi que plus de 200
gestionnaires du ministère ont profité d'un cours sur la gestion
en période de rareté des ressources organisé conjointement
par le ministère et l'Ecole nationale d'administration publique. Cette
expérience est unique dans l'administration publique
québécoise. Outre le plan de développement des ressources
humaines, d'autres mesures se sont poursuivies pour améliorer les
connaissances professionnelles de nos employés: revue de droit
pénal à l'intention des substituts du Procureur
général, bulletin de légistique à l'intention des
avocats et notaires de la fonction publique, programme de formation des
officiers de justice et réunions ministérielles dont le contenu
était axé sur l'acquisition de connaissances.
Pour terminer mon exposé, je vous présenterai les chiffres
comparatifs de l'exercice financier 1983-1984 par rapport à celui qui
vient de se terminer. Ces comparaisons se feront tant en ce qui concerne le
budget qu'en ce qui a trait aux ressources humaines.
Pour l'année 1983-1984, le total des crédits du
ministère de la Justice s'établit à 619 863 700 $. Si on
compare ces chiffres au budget des dépenses pour l'année
1982-1983, on constate une diminution de 6 069 300 $, soit une diminution de
0,96%.
Ces crédits se répartissent entre sept secteurs et 17
programmes. La majorité du budget, soit 82%, sera affecté
à cinq programmes du ministère, dont 276 797 000 $ à la
Sûreté du Québec, 93 575 900 $ à la garde des
détenus et à la réinsertion sociale des
délinquants, 62 625 900 $ au soutien administratif à
l'activité judiciaire, 52 712 700 $ à l'aide aux justiciables et
24 426 400 $ à la formulation de jugements.
Une analyse du budget par nature de dépenses nous
révèle que le poste budgétaire Traitements
représente 75% du budget, soit des crédits de 465 441 000 $. Le
poste budgétaire Fonctionnement - Autres dépenses
représente 13%, soit 79 441 500 $, le poste Transfert 10%, soit 67 267
900 $ et le poste Équipement 1%, soit 7 713 300 $.
L'écart de 6 069 300 $ entre le budget de 1982-1983 et celui de
1983-1984 s'explique de la façon suivante. Des compressions de l'ordre
de 29 000 000 $ ont été demandées au ministère.
À ces compressions, se sont ajoutés des montants de 7 960 000 $
représentant la réduction de l'enveloppe budgétaire
affectée aux traitements par suite de l'application des nouvelles
conditions de travail et de 3 000 000 $ représentant les
indemnités à verser par le Bureau de la protection civile du
Québec.
Par ailleurs, des sommes additionnelles ont été
accordées au budget du ministère pour une somme de l'ordre de 33
500 000 $. Les ajouts concernent, notamment, des sommes pour le Régime
de retraite des juges et des policiers, les projets informatiques, l'aide
juridique, les services communautaires et l'augmentation de l'indice des prix
à la consommation. L'écart de 6 069 300 $ est donc la
différence entre les sommes retranchées et celles qui ont
été ajoutées.
En ce qui concerne les compressions budgétaires de 29 000 000 $,
la compression des effectifs entraîne une réduction de l'ordre de
10 000 000 $ au budget. Le solde, soit 19 000 000 $, provient de certaines
mesures administratives faisant suite à une révision et à
une rationalisation de nos méthodes de travail.
Les effectifs du ministère de la Justice s'établissent au
1er avril 1983 à 12 765 employés permanents et 532
employés occasionnels, soit un total de 13 297 employés.
L'effectif total du ministère au 1er avril 1982 était de 13 760,
dont 13 164 employés permanents et 596 occasionnels. La diminution
totale de ces effectifs du 1er avril 1982 au 1er avril 1983 a donc
été de 463 postes, résultant d'une diminution de 399
postes permanents et de 64 postes occasionnels.
Cette diminution s'explique ainsi: en ce qui concerne les permanents, du
1er avril 1982 au 31 décembre 1982, l'effectif a étéporté de 13 164 à 13 039, comme l'indique le livre officiel
des crédits, soit une diminution de 125 postes. Depuis le 31
décembre 1982, il y a eu une diminution de 274 postes pour une
diminution totale durant l'année de 399 postes permanents.
Ce chiffre de 399 postes permanents provient du nombre de postes
supprimés aux fins de la compression des effectifs, soit 257, auquel
nous ajoutons ceux supprimés à la suite des mesures de
compressions additionnelles, soit 151 postes. Par ailleurs, neuf postes ont
été transférés par suite de
réaménagements interministériels, ce qui donne un total de
399 postes permanents de moins qu'au 1er avril 1982.
Pour ce qui est des employés occasionnels, on constatera que
ceux-ci sont passés de 592 à 532, soit une réduction de 60
postes.
M. le Président, j'ai voulu, par cet exposé,
présenter aux membres de la commission parlementaire un portrait des
réalisations et des orientations du ministère et vous
faire part également des crédits que nous soumettons à
votre analyse et à votre approbation. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
D'Arcy McGee.
M. Herbert Marx
M. Marx: Merci, M. le Président. J'aimerais remercier tous
les collaborateurs et les collaboratrices, soit les fonctionnaires, soit les
membres du cabinet, qui sont venus assister aux discussions concernant les
crédits. Je suis sûr qu'ils vont fournir une aide précieuse
au ministre qui ne peut pas être au courant des détails de tous
ses dossiers. J'aimerais leur demander de se nommer quand ils prennent la
parole, parce que, de temps à autre, en lisant le journal des
Débats, je ne sais pas si c'est le ministre qui a parlé ou si
c'est un fonctionnaire. Je pense que ce serait utile si les fonctionnaires se
nommaient quand ils prennent la parole.
Notons que, à la différence de l'Ontario ou du
gouvernement fédéral, notre ministre de la Justice est aussi
Procureur général, Solliciteur général, ministre
délégué à la réforme électorale,
président du comité de législation et j'en passe. Je pense
- ou plutôt je suis certain - que c'est le ministre le plus
surchargé au Québec, peut-être même le plus
surchargé au Canada. Et, cela m'a toujours surpris qu'il n'ait
même pas un adjoint parlementaire. Vous savez que nous avons maintenant
15 adjoints parlementaires à l'Assemblée nationale. Par exemple,
le ministre délégué à l'Aménagement et au
Développement régional a un adjoint parlementaire. Franchement,
il y a des gens qui se demandent ce que le ministre fait. De toute
façon, ce ministre...
M. Bédard: Moi, je travaille.
M. Marx: ...a un adjoint parlementaire. Il y a aussi le ministre
des Transports qui a un adjoint parlementaire, le ministre des Affaires
culturelles, et ainsi de suite. Il y a 15 adjoints parlementaires et notre
ministre de la Justice, qui est le plus surchargé de tous ces ministres,
n'en a pas. De l'avis de l'Opposition, le ministre de la Justice mérite
bien son adjoint parlementaire - au moins un - et même, en tant que
porte-parole de l'Opposition, j'ai demandé au premier ministre de penser
à nommer un adjoint parlementaire au ministre de la Justice. Il n'a dit
ni oui ni non. Le temps va nous dire s'il va donner de l'aide au ministre de la
Justice.
M. Bédard: ...qui deviennent toujours ministre.
M. Marx: M. le Président, j'ai la parole. Je n'ai pas
interrompu le ministre durant 70 minutes. J'en demande autant de sa part.
Merci.
M. Bédard: C'était une farce. C'était une
farce.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
D'Arcy McGee, vous avez la parole.
M. Marx: Merci. J'ai entendu le ministre ce matin; j'ai
même lu le document qu'il a déposé. Et il m'a
confirmé ce matin que sa politique en matière de justice est de
ne pas avoir de politique. Au lieu d'une politique, il a trouvé un
slogan: Humaniser la justice. Le problème avec son slogan, c'est qu'il
ne l'a jamais mis en oeuvre. Je m'explique. Visitez les prisons
québécoises, M. le Président, et vous verrez qu'il n'a pas
mis en oeuvre le slogan Humaniser la justice. Visitez, par exemple, le secteur
C à Bordeaux et vous allez voir qu'il manque encore à la mise en
oeuvre de son slogan. Assistez aux enquêtes de coroners et vous allez
voir qu'il n'a pas donné suite à son slogan. Pour ceux qui
subissent des délais devant la Commission des droits de la personne,
devant la Cour supérieure à Montréal, il va de soi que le
ministre n'a pas humanisé le système judiciaire au Québec.
Enfin, lisez la loi 111 et vous allez voir que, en ce qui concerne
l'humanisation de la justice au Québec, il manque quelque chose. (11 h
30)
L'absence d'une politique cohérente du ministère de la
Justice est évidente dans bon nombre de dossiers. Je ne vais pas
reprendre aujourd'hui toutes les critiques que l'Opposition a faites depuis
l'étude des crédits en 1982, mais je peux énumérer
les critiques que l'Opposition a faites: les lenteurs de la justice, une
injustice, mai 1982; l'aide juridique au Québec, pourquoi et pour qui,
septembre 1982; déclaration sur la Loi modifiant la Charte des droits et
libertés de la personne, projet de loi no 86, octobre 1982; les travaux
parlementaires de fin de session, un "rush" inutile, novembre 1982;
l'exploitation financière des actes criminels et de la justice
contemporaine au Québec, janvier 1983; le coroner, une institution
dénaturée et à repenser, février 1983;
l'état de la législation québécoise en 1982 une
vraie tour de Babel, mars 1983; la nouvelle politique correctionnelle du
gouvernement du Québec, avril 1983; de l'érosion des
libertés sous le Parti québécois, mai 1983. Voilà
une liste des études et des déclarations que l'Opposition a
rendues publiques depuis la dernière étude des crédits. Je
ne vais pas reprendre ce que l'Opposition a fait et l'Opposition ne publie pas,
non plus, un
rapport annuel comme le ministre.
De toute façon, j'aimerais, à titre d'exemple, et à
titre d'exemple seulement, parler de certains dossiers où je trouve
qu'il y a un manque, une absence totale de politique. Premièrement,
prenons la réforme du Code civil. Le ministre est ministre de la Justice
depuis 1976. Il a commencé la réforme du Code civil en 1980,
c'est-à-dire après à peu près trois ans. En 1980,
il a déposé le projet de loi no 89 sur la famille, lequel a
été adopté. Notons, M. le Président, que les
avocats, les praticiens se plaignent que dans cette loi il y a des articles qui
sont en vigueur et d'autres qui ne le sont pas, d'autres articles qui
n'entreront jamais en vigueur parce qu'ils ne sont pas de la compétence
de l'Assemblée nationale. Les avocats se plaignent qu'ils ne peuvent pas
se retrouver dans cette loi et les lois afférentes. Le seul avocat au
Québec qui est content de cette loi est le ministre de la Justice.
Aujourd'hui, il a fait l'aveu qu'il est aussi le seul avocat au Québec
content de toute la législation québécoise.
Peut-être est-ce le seul avocat qui peut s'y retrouver facilement
étant donné qu'il a 12 000 employés pour faire la
recherche. Je trouve très curieux que seulement le ministre de la
Justice soit content, heureux de sa propre législation.
Dans cette réforme du Code civil, on fait tellement d'erreurs que
cela prendrait toutes les douze heures disponibles à l'Opposition lors
de l'étude des crédits pour en faire la liste. Je vais en prendre
une à titre d'exemple: la loi 18. Dans la loi 18, il y a des
modifications qui ont empiré la situation. Voici un exemple: il y
l'article 813.8 du Code de procédure civile qui vise les mesures
provisoires considérées comme urgentes en cas de
séparation ou de divorce, telles l'exclusion du mari du domicile,
pension alimentaire, garde des enfants, etc. Savez-vous qu'aujourd'hui, si vous
allez prendre une action en vertu de cet article on vous donnera une date vers
le début de juillet pour vous faire entendre, c'est-à-dire que
cela prendra au moins six semaines, et cela, c'est pour les mesures d'urgence.
Souvent on arrive après six semaines et le juge ne peut pas entendre la
cause pour une raison ou pour une autre; cela prend encore six semaines.
J'insiste une autre fois, il s'agit d'une requête d'urgence. Les
praticiens que j'ai consultés sur cette question m'ont dit que la
situation est pire aujourd'hui qu'avant cette réforme de la loi no
18.
Revenons au Code civil. Bien sûr, nous avons adopté le
chapitre sur la famille en 1980. En 1983, il y a quelques semaines, nous avons
reçu des mémoires sur les lois nos 106 et 107 qui portent sur les
successions et sur les personnes. Le ministre a promis de déposer la loi
sur les biens avant la fin de la session, c'est-à-dire probablement
avant le 20 juin. On aura une autre commission parlementaire qui
étudiera ce nouveau projet de loi sur les biens. Une fois qu'on aura
adopté ces trois projets de loi, le ministre déposera une loi
d'application. Il a dit aujourd'hui que cette loi d'application serait
déposée en 1984.
Une voix: Cette année.
M. Marx: Cette année, en 1983?
M. Bédard: C'est cela.
M. Marx: Cette loi sera déposée en 1983.
M. Bédard: Cette année.
M. Marx: Ce serait optimiste de penser qu'on adoptera ces trois
projets de loi et la loi d'application avant le printemps 1984,
c'est-à-dire les chapitres sur les personnes, les successions, les biens
et la loi d'application.
Restent les chapitres sur les obligations, les sûretés, la
prescription et le droit international privé. Au rythme où l'on
va, la réforme du Code civil se terminera peut-être en 1986 ou
1987. Il me semble bien que cette réforme sera terminée par un
autre ministre de la Justice. Je vois mal que ce soit le même ministre,
parce que son mandat sera terminé avant qu'il ait le temps de faire ce
gros travail. Pour ce ministre de la Justice, dix ans ne seront pas assez pour
faire la réforme du Code civil; c'est ce que cela veut dire. Certains
articles du Code civil seront déjà désuets lors de
l'entrée en vigueur d'autres articles. C'est déjà
arrivé. C'est un fouillis impossible, le Code civil aujourd'hui.
Demandez à n'importe quel avocat, à n'importe quel praticien au
Québec ce qu'il pense de la réforme du Code civil et il vous dira
exactement ce que je vous ai dit il y a quelques minutes. Le barreau se plaint,
tout le monde se plaint, mais le ministre insiste que c'est clair que les
avocats ne s'abonnent pas assez aux recueils judiciaires, etc. Le fait reste
que c'est très mal fait et on a l'impression qu'il n'y a pas de
politique globale, quoi qu'on dise dans les rapports annuels du
ministère.
Le deuxième exemple, le système correctionnel. J'ai
demandé au ministre de définir sa politique en matière
correctionnelle. Pour des raisons qu'il garde secrètes, il ne veut pas
faire savoir aux Québécois quelle est exactement sa politique en
matière correctionnelle. Le ministre tient deux discours en même
temps. Le ministre met souvent l'accent sur les mesures alternatives à
l'emprisonnement. Il a dit que l'emprisonnement devrait être l'ultime
recours et nous sommes tout à fait d'accord. Je pense que tous les
Québécois seront
d'accord avec une telle prise de position. Cependant, en même
temps, le ministre parle de la construction de nouvelles prisons. Aujourd'hui,
il a annoncé pour la nième fois qu'il va construire cette prison
à la ville de LaSalle; c'est à voir parce qu'il a promis de
consulter la population et il ne l'a pas fait. Il y a un autre ministre, le
ministre des Affaires sociales, qui a déjà dit: II y a des
moments où il n'est pas nécessaire pour le gouvernement de
respecter sa signature. J'imagine que, pour le cas devant nous, la prison
à la ville de LaSalle, il n'est peut-être pas nécessaire
pour le ministre de respecter ses paroles. C'est à voir!
Le ministre parle de la construction de cette prison. Il y a des rumeurs
disant que le ministre a l'intention de construire une prison à
Trois-Rivières, d'en construire une autre à Sherbrooke et ainsi
de suite. Je vois mal qu'on construise une prison à
Trois-Rivières où, la dernière fois que j'ai visité
la prison, il y avait 22 détenus. Je pense que ce n'est pas l'endroit
pour construire une prison de 200 cellules, mais il y a des rumeurs dans la
région disant que le ministre est prêt à construire une
prison de 200 cellules. Peut-être démentira-t-il cette rumeur
aujourd'hui. Il y a aussi des rumeurs disant que le ministre a des plans pour
construire une prison de 200 cellules à Sherbrooke où il y a
à peu près 50 détenus.
Une voix: 175.
M. Marx: 175 cellules à Sherbrooke?
M. Bédard: À Trois-Rivières et 130 à
Sherbrooke.
M. Marx: 175 à Trois-Rivières, ce n'est pas aussi
pire que je le pensais, et 130 à Sherbrooke.
M. Bédard: C'est bon d'être précis.
M. Marx: On va suivre la "Parkinson's Law". On va remplir les
cellules vides. On va trouver le monde pour remplir les cellules vides parce
que c'est plus efficace d'avoir un détenu pour chaque cellule, car une
cellule vide coûte plus cher. On va donc trouver les moyens. Mais je ne
comprends pas la politique du ministre de vouloir construire une prison de 175
cellules à Trois-Rivières où il y a 22 détenus, et
peut-être que parmi ces 22 il y a des toxicomanes, des handicapés
mentaux et ainsi de suite, des gens qui ne méritent même pas
d'être là.
J'ai toutes sortes d'exemples sur cette politique incohérente en
matière correctionnelle. Par exemple, à Bordeaux, il y a des
détenus qui vont travailler à sept heures le matin et reviennent
à 23 heures pour y coucher. Je trouve que c'est bien trop cher de les
garder dans une telle institution quand on a des centres d'hébergement
où les détenus font exactement la même chose; ils vont
aller travailler à sept heures le matin et reviendront à 23
heures et cela coûtera beaucoup moins cher. À Bordeaux, il en
coûte environ 80 $, 90 $, peut-être 100 $ et dans les centres
d'hébergement il n'en coûte que 25 $ ou 27 $ par détenu. Le
centre d'hébergement que j'ai visité au centre-ville fonctionne
très bien. Malheureusement, il y a une rumeur que le ministre veut
couper le nombre des places dans ce centre d'hébergement.
Peut-être est-ce une autre rumeur qu'il pourrait confirmer ou
démentir lors de l'étude des crédits. (11 h 45)
Enfin, est-ce trop demander au ministre de la Justice que de lui
demander de publier un livre vert sur sa politique en matière
correctionnelle au Québec pour qu'on puisse avoir un débat
public? Est-ce trop demander au ministre que de lui demander de nous faire
état de sa politique, qui coûte environ 100 000 000 $ par
année, pour qu'on puisse avoir un débat sur la place publique?
Tous les ministres font état de leur politique dans les livres verts,
bleus, jaunes ou d'une autre couleur. Le ministre peut prendre comme exemple
son collègue de l'Éducation ou son collègue des Affaires
culturelles et ainsi de suite. Je ne pense pas que c'est trop demander au
ministre de la Justice de nous livrer, sous forme de livre vert ou de livre
bleu, toute sa pensée et toute sa politique en matière
correctionnelle. Avant qu'on puisse voir globalement sa politique dans ce
domaine, c'est difficile de comprendre ce qu'il veut faire, comment et
pourquoi, parce que, si on analyse vraiment les discours du ministre, par
exemple, le discours qu'il a fait à l'Université de
Montréal, on trouve qu'il y a des contradictions. Lors de l'étude
des crédits, on peut faire une discussion de fond sur ces questions.
J'ai l'intention de revenir sur ces questions et peut-être que, lors des
discussions sur ces questions, on aura au moins une idée de la direction
de la politique du ministre dans ce domaine.
Troisièmement, j'aimerais prendre comme exemple l'absence de
politique -peut-être que j'ai mal choisi mes mots - la politique confuse
en matière des libertés publiques. Nous avons ici un gouvernement
issu d'un parti politique qui s'est déclaré en faveur de la
protection des libertés publiques le gouvernement a même
essayé de raffermir la Charte des droits et libertés de la
personne - mais, en même temps, nous avons un gouvernement qui a
déposé le projet de loi no 94 en 1978, qualifié à
l'époque comme une loi des mesures de guerre. Heureusement, le
gouvernement a laissé ce projet de loi mourir au feuilleton. Si le
ministre veut se rafraîchir la mémoire concernant ce projet de
loi, il peut lire
l'article dans le Devoir du 13 février 1978.
De plus, le gouvernement a mené une campagne de propagande contre
l'enchâssement des droits et des libertés dans la constitution. La
brochure Minute Ottawa! est l'exemple classique, si je peux utiliser ce mot, de
cette campagne de propagande. Dans cette brochure, Minute Ottawa!, il y a des
arguments tendancieux qui frisent même le mensonge. Il y a quelques mois,
le ministre de la Justice a déclaré solennellement que
l'enchâssement de l'égalité des deux sexes dans la charte
canadienne va diminuer les droits des Québécoises. Il n'a jamais
expliqué comment cela pourrait arriver, mais il a tenu un tel discours
et on peut s'imaginer pourquoi il a dit de telles choses.
Il y a aussi la loi 62 que le ministre a défendue è
l'Assemblée nationale. Dans cette loi 62, le gouvernement a soustrait
les lois du Québec de l'application des droits fondamentaux et des
droits judiciaires de la charte canadienne. Il n'y a aucune raison, en ce qui
concerne la protection des droits et libertés de la personne, qu'un
gouvernement fasse une telle chose. Finalement, il y a la loi 111 où,
pour la première fois au Québec, on a donné
préséance à toute une loi sur les deux chartes, soit la
charte québécoise, soit la charte canadienne, c'est-à-dire
qu'en cas de conflit entre la loi 111 et un des articles ou quelques-uns des
articles dans ces chartes ce serait la loi 111 qui aurait
préséance.
Le ministre de la Justice préside depuis bientôt sept ans
à l'érosion de nos droits et libertés. Je pense qu'il est
entaché par cette érosion, pas seulement le ministre, mais aussi
son gouvernement. L'érosion des droits de la personne se voit aussi dans
d'autres dossiers. Par exemple, partout ou presque partout en Amérique
du Nord, on a refait les lois concernant les coroners. Le ministre a promis
aujourd'hui que, une autre fois, il déposera une nouvelle loi sur les
coroners. J'ai vérifié dans mes dossiers ce matin et j'ai
trouvé un article de la Presse du 18 novembre 1980. J'aimerais seulement
vous lire les manchettes: "Refonte de la Loi sur les coroners, pas avant le
printemps". On n'a pas spécifié l'année, donc, j'avais
peut-être tort de penser au printemps 1981. Cela peut être le
printemps 1983, 1984 ou 1989 et ainsi de suite.
Le ministère a eu un gros document en 1979, un document qui n'a
jamais été rendu public, quoique son chef de cabinet adjoint ait
dit aux journalistes de la Presse, le 19 novembre 1980, qu'il rendrait ce
rapport public. Cela n'a jamais été fait. Le ministre a ce grand
document qui a été publié en 1979. L'Opposition a
mentionné ce document dans un de ses rapports. Il y a maintenant quatre
ans de cela! Qu'est-ce que le ministre a fait avec ce document depuis 1979? Il
a le document depuis quatre ans et la loi n'est pas encore prête. On me
dit que le fonctionnaire le plus frustré au Québec est celui qui
travaille à la nouvelle loi sur les coroners. On me dit qu'il est
frustré parce qu'il travaille à ce projet de loi depuis
maintenant cinq ou six ans.
Le ministre a fait une promesse aujourd'hui, en ce sens que le projet de
loi sera déposé bientôt, peut-être même cette
année. Maintenant, le ministre parle de session, le projet de loi sera
déposé cette session. Vous savez bien, M. le Président,
que cette session pourrait se terminer seulement l'an prochain. La session ne
se termine pas avant l'été.
J'ai vu, dans le journal Le Quotidien du 22 avril 1983, que le ministre
a promis de faire adopter la nouvelle loi sur les coroners avant la fin de la
présente session. On ne sait pas si cela veut dire cette année ou
l'an prochain, mais on verra.
Enfin, le ministre a fait les manchettes avec les mêmes promesses
à quelques reprises durant la session. Je vais vous donner des exemples.
En ce qui concerne les coroners, il fait les manchettes avec ses promesses
depuis 1980. Si vous prenez des coupures de journaux, vous verrez que, à
tous les six mois, il y a une autre déclaration du ministre disant qu'il
déposera la loi sur les coroners. Cela fait à peu près six
ou sept fois depuis 1980.
Aussi, le ministre fait les manchettes chaque fois qu'il parle de la
réforme du Code civil. Il fait des promesses deux ou trois fois par
année et souvent, pour reculer les délais, il dit: Ce que j'ai
promis au printemps de cette année sera retardé à l'hiver
ou au printemps l'an prochain, soit à l'automne, ainsi de suite.
Le ministre fait aussi les manchettes avec sa déclaration disant
qu'il fermera le centre de prévention Parthenais à
Montréal. Il fait les manchettes avec cette déclaration depuis
1977. Mais, en 1977, le ministre a dit: Je vais fermer Parthenais d'ici
quelques mois. Après cela, il a parlé de fermer Parthenais dans
un an ou deux. Maintenant, il parle de fermer Parthenais, mais il ne donne pas
de date. Je pense qu'il y a un message dans tout cela. Depuis deux ou trois
ans, le ministre fait la promesse de regrouper les tribunaux
québécois. Il a, encore une fois, fait la promesse aujourd'hui,
mais j'ai ici les exemplaires du Devoir du 9 septembre 1982 et du 21 avril
1983, où le ministre a dit exactement ce qu'il dit aujourd'hui. Je ne
serais pas surpris si, l'an prochain, lors de l'étude des
crédits, il faisait exactement la même promesse. C'est rare que
les disques changent d'une année à l'autre, d'une session
à l'autre.
En somme, en matière de justice, les Québécois
souffrent d'un manque de politique et d'un excès de promesses.
Voilà.
Le Président (M. Desbiens): M. le
ministre.
Réplique du ministre
M. Bédard: M. le Président, peut-être que mon
collègue est le seul avocat au Québec à souffrir à
propos d'un manque de politique au niveau du ministère de la Justice,
puisque l'ensemble des législations que j'ai évoquées,
tout à l'heure, ne serait-ce que pour l'année 1982-1983, qui ont
été adoptées, l'ensemble des législations
adoptées depuis 1977, au niveau du ministère de la Justice,
représente un bilan qui n'a même aucune comparaison avec le nombre
de lois qui ont pu être touchées par le ministère de la
Justice sous d'autres administrations, non seulement des lois modifiées,
mais des réformes très importantes amorcées, entre autres,
la réforme du Code civil avec le droit de la famille.
J'ai écouté avec beaucoup d'attention M. le
député de D'Arcy McGee qui, au début de ses remarques,
prétendait que l'humanisation de la justice est un slogan, alors que
nous avons été en mesure de constater toutes les mesures
pratiques mises de l'avant pour que l'humanisation de la justice ne soit pas un
slogan, mais bien une préoccupation constante à laquelle
s'attachent des réalisations. Il est évident que, lorsqu'on parle
d'humanisation de la justice, on n'en arrivera jamais à un moment
où l'on pourra dire: La justice est complètement humanisée
et il n'y a plus rien à faire. Le jour où on en arrivera à
une telle conclusion, ce serait le commencement de la déshumanisation de
la justice. Je pense que, lorsqu'on parle d'humanisation de la justice, il
s'agit d'un objectif à atteindre, il s'agit d'essayer d'apporter, au fil
des ans, le plus d'améliorations possible pour humaniser davantage, tout
en étant conscient qu'il y aura toujours des améliorations qui
pourront être apportées.
En évoquant l'humanisation de la justice comme n'étant
qu'un slogan, le député de D'Arcy McGee s'est
référé à certains dossiers en particulier. Il a
parlé des lenteurs de la justice en se référant aux
délais, alors qu'il sait très bien, contrairement à ce qui
a pu être fait sous la juridiction d'autres ministres de la Justice,
qu'il n'y a jamais eu autant de projets de loi ayant pour effet ou pour
objectif de réduire les délais. Le député de D'Arcy
McGee le sait. J'ai mentionné dans mes remarques préliminaires,
et je ne veux pas y revenir, que nous étions déjà en
mesure de signaler des améliorations très importantes concernant
la réduction des délais devant les cours. Cela ne veut pas dire
que le problème est complètement réglé. En
principe, les délais sont toujours trop longs pour les justiciables et
il faut travailler sans cesse à essayer de les rendre les plus courts
possible.
(12 heures)
Déjà, au niveau de la Cour d'appel, c'est presque de
moitié que nous avons réduit les délais existant
auparavant. On sait que, dans la plupart des cours, par exemple au niveau des
sessions, les délais sont plus que raisonnables, au moment où on
se parle, dans l'ensemble du Québec. C'est la même chose à
la Cour provinciale. Maintenant, on peut parler d'une amélioration
vraiment remarquable avec le concours du juge en chef à la Cour d'appel
du Québec. Il restait - et je l'avais mentionné - le
problème des délais concernant la Cour supérieure à
Montréal. Il faut bien préciser que les délais à la
Cour supérieure, en dehors de Montréal, se sont
améliorés. À Montréal, cela demeure un
problème. Cela ne veut pas dire que nous n'avons pas posé des
gestes pour améliorer la situation. Par exemple, cela fait
déjà sept ou huit mois que nous avons octroyé, par une
disposition dans un projet de loi omnibus, neuf juges additionnels à la
Cour supérieure. Je suis obligé de constater que le gouvernement
fédéral n'a même pas, au moment où on se parle,
adopté la loi nécessaire aux fins de nomination de ces juges. Ce
qui fait que le feu vert a été donné au gouvernement
fédéral pour qu'il puisse procéder à la nomination
de neuf juges additionnels.
M. Marx: Puis-je vous poser une question sur ces nominations, M.
le ministre? A l'époque - je pense que ces nominations étaient
prévues dans la loi 101 - je vous avais demandé si le
gouvernement fédéral était d'accord pour nommer ces juges.
Et la réponse avait été: II n'y a pas de
problème.
M. Bédard: Non, non, il n'y en avait pas. Il y avait
même de la correspondance. J'espère que vous ne trouverez pas le
moyen de...
M. Marx: On va vous aider auprès du ministre de la Justice
du Canada pour faire ces nominations. Je trouve que...
M. Bédard: Si...
M. Marx: Est-ce que le ministre...
M. Bédard: ...au moins, on pouvait compter sur la
contribution du député de D'Arcy McGee, j'en serais très
heureux. Vous me permettrez...
M. Marx: Non, mais, est-ce que le ministre de la Justice a
formellement promis...
M. Bédard: Vous me permettrez de terminer la...
M. Marx: ...de nommer ces juges?
M. Bédard: M. le Président...
Le Président (M. Desbiens): M. le ministre, vous avez la
parole.
M. Bédard: ...il y a eu un échange de
correspondance. Il est évident qu'il y avait un besoin pour des
nominations additionnelles. On ne peut quand même pas être
blâmé s'il y a des retards à ces nominations qui
dépendent non pas du gouvernement du Québec, mais du gouvernement
fédéral. Il y a eu un accord de principe.
Alors, on peut voir que, concernant les lenteurs de la justice, nous
avons posé de nombreux gestes pour améliorer la situation.
Effectivement, nous sommes en mesure de constater une amélioration
très importante. D'autres amendements - je l'ai annoncé tout
à l'heure - seront déposés et adoptés avant la fin
de la prochaine session, toujours dans le but de lutter contre cette situation
de délais trop longs. Je pense que c'est un élément
important quand on parle de l'humanisation de la justice. Quand le
député de D'Arcy McGee dit que l'humanisation de la justice n'est
qu'un slogan, dans ce domaine-là, il erre complètement.
Le député de D'Arcy McGee continuait dans ses remarques en
parlant des amendements à la charte. Je dirais que je ne vois pas
comment il peut en venir... Dans ce domaine-là, s'il y a un gouvernement
qui a bougé, c'est bien le nôtre, puisque nous avons
adopté, il n'y a pas si longtemps, des amendements majeurs à la
Charte des droits et libertés de la personne. C'est un projet de loi qui
a d'ailleurs été voté à l'unanimité à
l'Assemblée nationale.
Toujours à propos de l'humanisation de la justice comme
n'étant qu'un slogan - ce que les faits contredisent complètement
au ministère de la Justice - le député de D'Arcy McGee
parlait des fins de session, des projets de loi omnibus, des "rush" - pour
employer son expression - de fins de session, alors qu'il sait très
bien, en ce qui a trait aux projets de loi omnibus, que nous avons
trouvé le moyen, de concert avec l'Opposition, de mettre en place un
mécanisme d'adoption qui soit plus valable et qui permette à tous
les parlementaires d'être plus au fait du contenu de ces projets de
loi.
Vous ne pouvez pas parler de "rush" concernant les projets de loi du
ministère de la Justice puisque - le député de D'Arcy
McGee le sait mieux que quiconque - pour les réformes très
importantes, on a toujours pris soin de déposer - je pense, par exemple,
au Code civil, la réforme du droit de la famille, la réforme
concernant les personnes, la Charte des droits et libertés de la
personne, les successions - plusieurs mois à l'avance nos projets de loi
de manière à permettre aux parlementaires et à la
population d'en prendre connaissance. Pour la plupart de ces projets de loi,
nous avons tenu des commissions parlementaires. Quand le député
de D'Arcy McGee vient nous parler des "rush" de fins de session, je crois qu'il
est en dehors de la réalité en ce qui a trait aux projets de loi
concernant le ministère de la Justice puisque toutes les
précautions sont prises afin que le plus grand nombre de personnes aient
connaissance de ces projets de loi.
Il y a également d'autres sujets sur lesquels je pourrais
revenir. Une grande partie des remarques du député de D'Arcy
McGee ont porté sur ce qu'il appelle l'érosion des
libertés sous le présent gouvernement. Le député
prétend qu'il y a eu érosion des libertés sous le
gouvernement du Parti québécois en traitant
pêle-mêle, dans un pot-pourri juridique dont lui seul a le secret,
de notions de droit aussi différentes que celles soulevées par le
projet de loi no 102 qu'il a évoqué, l'utilisation des clauses
dérogatoires, l'enchâssement des droits et libertés et la
loi 111, un pot-pourri complet. Le député de D'Arcy McGee
crée ainsi lui-même l'impression factice d'une atteinte aux droits
et libertés pour ensuite mieux la critiquer en essayant de prendre
l'ensemble de ces mesures-là sans les traiter en profondeur. On pourrait
peut-être prendre le temps parce que, lorsqu'on parle de protection des
droits et libertés, on peut prendre le temps de faire le point. Vous
avez évoqué la loi 62, l'utilisation des clauses
dérogatoires, l'enchâssement des droits et libertés, la loi
111. On pourrait faire le point sur chacun de ces éléments que
vous avez mentionnés.
Par exemple, en ce qui concerne la loi 62, on sait que cette loi tente,
tout simplement, de réduire le plus possible les atteintes de la charte
fédérale sur les droits et pouvoirs de l'Assemblée
nationale du Québec, tout en assurant - il ne faudrait pas l'oublier,
c'est cela le but de la loi 62... Que les droits et pouvoirs de
l'Assemblée nationale ne veuillent rien dire au député de
D'Arcy McGee, c'est son problème. C'était quand même
à la suite d'une motion unanime adoptée par l'Assemblée
nationale selon laquelle les droits et pouvoirs de l'Assemblée nationale
ne pouvaient être affectés sans son consentement. Or, de la
manière que la réforme de la constitution a été
faite et également la charte fédérale des droits et
libertés, on pouvait rapidement voir l'atteinte qu'il y avait aux
droits, privilèges et libertés de l'Assemblée
nationale.
En ce qui a trait à la loi 62, l'objectif de cette loi-là
était de réduire le plus possible les atteintes de la charte
fédérale aux droits et pouvoirs de l'Assemblée nationale
du Québec tout en assurant, d'une certaine façon, la
primauté de notre Charte des droits et libertés de la personne en
matière de protection de droits et libertés.
On peut ne pas être sur la même longueur d'onde, mais il est
bon de rappeler quel était l'objectif premier de cette loi. Si
l'utilisation de la clause dérogatoire prévue dans la charte
canadienne est globale, c'est qu'il nous apparaissait - tel que le stipule la
loi 62 - que c'était la meilleure façon de protéger et de
maintenir l'homogénéité de notre système juridique,
tout en limitant au minimum les risques d'incertitude juridiques pouvant
découler de l'application des deux champs. Des juges en chef ont
très clairement exprimé qu'avant qu'on connaisse exactement
toutes les conséquences de l'application de la charte
fédérale, cela prendrait de cinq à dix ans,
d'insécurité et d'incertitude que nous avions prévus. Les
objectifs que la loi 62 visait, à ce moment, étaient:
premièrement, de préserver les droits et les privilèges,
c'est-à-dire les pouvoirs de l'Assemblée nationale;
deuxièmement, de protéger l'homogénéité de
notre droit et, troisièmement, de diminuer, dans ce sens, les
incertitudes dont les citoyens sont obligés de faire les frais à
coups de recours aux tribunaux.
Le député a mentionné de nouveau que - il faisait
référence à un article publié dans le Devoir -
à cause de la loi 62, les Québécois seraient moins bien
protégés. Je pense que c'est tout le contraire. Notre charte,
avant le projet de loi 86, contenait déjà un nombre
considérable de droits et de libertés que ne contient pas la loi
constitutionnelle. Qu'il suffise de citer le droit au secours, le droit
à la sauvegarde de la réputation, le droit au respect de la vie
privée et de la demeure, le droit à la non-discrimination
fondée sur la langue, la condition sociale, les convictions politiques,
un handicap, l'orientation sexuelle, l'état civil, le droit d'un
détenu d'être soumis à un régime distinct
approprié à son sexe, son âge et sa condition physique ou
mentale, le droit d'une personne arrêtée de prévenir ses
proches, le droit de l'enfant à la protection, à la
sécurité et à l'attention, le droit à l'instruction
publique gratuite, le droit à l'information, le droit à des
conditions de travail justes et raisonnables, le droit de toute personne
âgée ou handicapée d'être protégée
contre toute forme d'exploitation, le droit des minorités ethniques de
maintenir et de faire progresser leur propre vie culturelle. Ce n'est qu'une
énumération, mais c'est une énumération magistrale
d'un ensemble de dispositions incluses dans notre Charte des droits et
libertés de la personne et qu'on ne retrouve pas dans la charte
fédérale. Heureusement qu'on a la Charte québécoise
des droits et libertés de la personne, parce que, si on n'avait que
cette charte fédérale des droits et libertés, combien de
temps faudrait-il attendre avant que ces droits que je viens
d'énumérer fassent l'objet d'une préoccupation ou encore
fassent l'objet d'un amendement constitutionnel pour le meilleur
bénéfice des citoyens et des citoyennes concernés par tous
ces droits?
Bref, c'est mon opinion. Je sais que le député de D'Arcy
McGee ne la partage pas. La charte québécoise offre aux
Québécois une protection infiniment plus étendue que celle
qu'offre la loi constitutionnelle. Par exemple, si on ajoute la protection
accrue offerte par les nouveaux amendements qui vont bientôt entrer en
vigueur, je crois que notre charte s'affirmera encore une fois comme une des
plus à l'avant-garde, une des plus progressistes, non seulement au
Canada, mais au monde. Notons, en passant, qu'une protection... Le
député de D'Arcy McGee va sûrement nous dire: Votre charte
des droits et libertés et les amendements que vous y avez
apportés, que nous avons adoptés à l'unanimité au
niveau de l'Assemblée nationale, ne sont pas encore en application au
moment où on se parle. J'aurai toutes les explications
nécessaires, tout à l'heure, pour expliquer non pas le retard,
mais tout simplement le délai normal nécessaire avant de mettre
tous ces amendements en application. Il faudrait penser que, dans la charte
fédérale - là-dessus, je n'ai jamais entendu le
député de D'Arcy McGee faire un plat plus qu'il ne le faut - sur
tous les motifs illicites de discrimination mentionnés à
l'article 10 de notre charte concernant l'égalité - s'il y a un
sujet important, c'est bien l'égalité des citoyens et citoyennes
dans une société - l'ensemble de cette optique, dans la loi
fédérale, n'aura pas d'effet avant 1985, alors que cela existe
depuis sept ans ici.
Que dire aussi, M. le Président, des programmes d'accès
à l'égalité, du harcèlement sexuel, des
antécédents judiciaires qu'on ne retrouve pas dans la charte
fédérale et qu'on retrouvera dans la nôtre? Enfin, tous ces
éléments, M. le Président, ne m'ont fait, en aucune
façon, changer d'idée. Notre charte représentait une
protection beaucoup plus importante que la charte fédérale. C'est
d'ailleurs pour cela que nous travaillons continuellement à
l'améliorer. L'autre argument apporté par le député
de D'Arcy McGee - je le retrouvais d'ailleurs dans ses notes au Devoir - porte
sur le fait que la protection serait plus solide s'il y avait
enchâssement des droits. Voilà encore, M. le Président, un
point sur lequel nous divergeons. (12 h 15)
M. Marx: Les juges l'ont dit; ce n'est pas moi.
M. Bédard: Pas tous les juges. Vous avez, dans votre
article... J'ai vu cela et vous l'avez répété tout
à l'heure. Il y a des juges qui peuvent vous référer aux
juges....
M. Marx: ...
M. Bédard: Mais non; je n'en fais pas un débat
passionnel, M. le Président. Je pense qu'on peut, le plus objectivement,
analyser les choses. Le député de D'Arcy McGee, à l'appui
de sa thèse, se réfère à des citations du juge en
chef M. Laskin. Je pense que c'est tout à fait normal.
M. Marx: M. Deschênes aussi.
M. Bédard: D'autre part, il oublie aussi certaines prises
de position faites par des juges en chef de la Cour suprême. Je pense
à M. Pigeon et je pense à d'autres qui ne voient pas dans
l'enchâssement...
M. Marx: Pouvez-vous me donner la citation de M. Pigeon où
il a contredit M. Laskin?
M. Bédard: Non. Vous permettez... Quand on a eu le
débat sur la loi 62, nous l'avons cité à profusion, M. le
Président. Ce n'est pas la même manière de voir et cela ne
veut pas dire...
M. Marx: ...le débat sur la loi 62. Je n'ai pas
trouvé ces citations.
M. Bédard: Cela peut peut-être expliquer que vous
critiquez pour critiquer parce que, lorsqu'on a adopté la loi 62
-peut-être n'êtes-vous pas au courant de ce qu'elle contenait et
vous la critiquez sans savoir - je me souviens très bien, à ce
moment, que nous avions quand même cité plusieurs autorités
juridiques pouvant ne pas avoir la même perception des choses concernant
l'importance de l'enchâssement, parce qu'il est loin d'être
sûr, M. le Président, qu'un enchâssement équivaille
à une meilleure protection des droits. Outre le fait que ce sont les
tribunaux qui définissent les limites de nos droits et libertés,
lorsqu'il y a enchâssement, il devient extrêmement difficile
d'amender la charte pour y inclure des dispositions répondant aux
besoins réels de la population. Il y a des enchâssements de charte
dans d'autres pays. Vous avez les meilleures chartes du monde dans des pays
totalitaires. Vous avez l'enchâssement, vous avez tout ce que vous
voudrez et cela n'empêche pas que certains actes soient posés.
M. Marx: ...le Parti québécois se donne comme
programme...
M. Bédard: D'autre part, on sait que, lorsqu'il y a
enchâssement, il y a, à ce moment, nécessité
d'amendements constitutionnels avec toutes les complications et tous les
délais que cela représente. Aux États-Unis, certains
amendements, depuis des années et des années, non seulement sont
réclamés, mais tout le processus de mise en marche... Par
exemple, à l'égard de l'égalité des sexes aux
États-Unis, cela fait des années qu'on essaie d'obtenir toutes
les conditions nécessaires et tous les consentements nécessaires
pour amender, sauf que, au moment où on se parle, cela fait des
années et cela a été refusé...
M. Marx: II n'y avait pas...
M. Bédard: Et avant même d'être refusé,
cela a pris des années avant de savoir, une fois pour toutes, que
c'était refusé. Je ne dis pas qu'il n'y a pas certains avantages
à l'enchâssement, mais, lorsqu'on fait la somme des avantages et
des inconvénients, ma conviction est toujours la même: le
processus que nous avons et qui nous permet d'amender notre charte selon des
besoins spécifiques, selon des situations très
spécifiques, dans des délais normaux...
M. Marx: Dans un Québec indépendant, va-t-on avoir
une charte enchâssée?
M. Bédard: Écoutez, laissez-moi parler; vous
parlerez après.
M. Marx: Vous parlez déjà depuis 145 minutes sur
une possibilité de 120 minutes.
Le Président (M. Desbiens): M. le ministre.
M. Bédard: Oui, mais vous affirmez tellement de choses
dans vos remarques qu'à un moment donné, il faut bien en venir
à...
M. Marx: Dans un Québec indépendant, va-t-on avoir
une charte enchâssée, oui ou non?
M. Bédard: M. le Président.
Le Président (M. Desbiens): À l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Bédard: Vous affirmez tellement de choses à peu
près qu'à un moment donné, il faut bien venir
rétablir la situation.
M. Marx: Ah oui!
M. Bédard: J'ai parlé, lorsqu'il y a
enchâssement, des difficultés d'adopter les amendements qui
s'imposent. Vous verrez jusqu'à quel point cela prend du temps, au
niveau de la charte fédérale, avec l'enchâssement, à
apporter certains amendements qui, pourtant, s'imposeraient de soi. Vous en
avez un. On parlait de l'amendement à la charte concernant le droit de
propriété. Prenez l'orientation sexuelle. En fait, je pourrais
vous donner bien d'autres
exemples et vous verrez combien de temps cela prendra. Il y a plusieurs
ministres de la Justice et plusieurs gouvernements qui auront peut-être
l'occasion de passer avant que certains amendements, qui pourtant s'imposaient,
soient devenus réalité au niveau de la charte canadienne...
M. Marx: Mais, dans un Québec indépendant...
M. Bédard: Également, je crois que la
possibilité laissée à nos élus d'amender notre
charte pour la faire évoluer représente une approche beaucoup
plus constructive et responsable. Les amendements proposés par le projet
de loi no 86 sont un exemple concret des avantages de cette façon de
concevoir le rôle des élus et du Parlement par rapport à
une charte. S'il y a des choses pas correctes, la population, à ce
moment, peut faire connaître sa satisfaction ou son insatisfaction par
rapport à des gestes posés.
M. Marx: M. le Président, j'ai l'impression que le
ministre...
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
D'Arcy McGee.
M. Marx: J'ai l'impression que le ministre lit maintenant son
deuxième discours.
M. Bédard: Non. Je fais le tour...
M. Marx: II lit un discours sur la charte. Ce n'est pas le temps
de lire son discours sur la charte.
M. Bédard: Voyons donc! Vous avez mentionné des
lois tout à l'heure, la loi 111, la loi 62...
M. Marx: II ne peut pas parler pendant une heure sur mes
commentaires qui n'ont duré que vingt minutes.
M. Bédard: C'est facile. Cela montre une chose...
M. Marx: II lit un discours de 25 pages. M. Bédard:
M. le Président...
M. Marx: On va être pris avec cela jusqu'à 15
heures.
M. Bédard: Monsieur...
M. Marx: C'est le deuxième discours qu'il lit aujourd'hui.
Ce n'est pas cela, les crédits.
M. Bédard: Le député de D'Arcy McGee aurait
de la difficulté s'il fallait qu'il ait...
M. Marx: C'est tapé, voilà: II lit un
deuxième discours maintenant.
M. Bédard: ...certaines responsabilités. M.
Marx: Ce n'est pas cela, les crédits.
M. Bédard: C'est très facile, l'attaque. Cela ne
démontre qu'une chose, c'est que l'attaque est très facile.
M. Marx: Je peux revenir avec mes anciens discours et les
lire.
M. Bédard: Je suis en train de vous répondre.
M. Marx: Pas pendant 25 minutes.
M. Bédard: Vous répandez tellement de
faussetés.
M. Marx: J'ai touché un point sensible.
M. Bédard: Vous avez fait le bilan de vos critiques.
M. Marx: Vous êtes taché par cela.
M. Bédard: Permettez qu'on réponde à
chacune...
M. Marx: Vous n'effacerez jamais les taches, c'est
impossible.
Le Président (M. Desbiens): À l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Marx: Allez-y, continuez.
Le Président (M. Desbiens): M. le ministre.
M. Bédard: Comme je le disais, M. le Président,
à ce moment-là, la responsabilité des élus est
primordiale en ce qui concerne des amendements qui pourraient être faits
à une charte et une population a le droit de se prononcer si ces
amendements ne sont pas valables. Le député a parlé...
M. Marx: M. le Président, il parle pendant 25
minutes...
M. Bédard: Oui, mais raconter 25 mensonges prend 2
minutes, sauf que rétablir la vérité prend quelquefois un
peu plus de temps.
M. Marx: Pour seulement énumérer les mensonges de
son discours, cela me prendrait une heure. Je pense que c'est un peu
exagéré, 25 minutes, M. le Président.
Le Président (M. Desbiens): Monsieur...
M. Bédard: Avez-vous fini vos remarques?
M. Marx: Si le ministre insiste, je n'ai pas d'objection. Je
demanderai...
M. Bédard: Nous insistons dans le sens suivant: C'est
très facile...
M. Marx: Mais il n'y a pas de limites...
M. Bédard: ...d'affirmer des choses, dans une seule
phrase, qui sont contraires à la réalité...
M. Marx: Demandez à un de vos fonctionnaires
d'écrire un article pour le Devoir, on aura la réponse.
M. Bédard: ...mais pour trouver le moyen, par exemple...
Ne dites pas cela, je vous regarde dans les yeux. Arrêtez de dire des
choses qui ne tiennent pas debout...
M. Marx: II répète la même chose qu'il a
déjà dite.
M. Bédard: Pour dire des choses qui rétablissent la
vérité, il faut prendre tout le temps qu'il faut.
M. Marx: Mais nous avons chacun 20 minutes.
Le Président (M. Desbiens): II y a habituellement...
M. Marx: Oui, il a un peu exagéré. M.
Bédard: Vous avez parlé...
Le Président (M. Desbiens): ...une entente qui est de
laisser tout le temps désiré au ministre pour la
présentation de ses crédits et, également, de laisser
autant de temps qu'il faut à l'Opposition. C'est une entente qui se vit
régulièrement. Maintenant...
M. Marx: Je pense que c'est le temps, pour le ministre, de
conclure.
Le Président (M. Desbiens): ...si vous voulez passer
à l'étude des programmes et revoir, au moment de l'étude
des éléments, certaines de ces questions, on peut bien passer
à l'étude de ces programmes.
M. Bédard: À ce moment-là, M. le
Président, on n'aura pas besoin de reprendre tous ces points, lors de
l'étude de chacun des programmes. J'ai écouté, tout
à l'heure, le député de D'Arcy McGee et c'est sûr
que, dans une demi-heure, lorsque, à chaque phrase, on essaie de porter
un jugement de valeur et de faire une critique...
M. Marx: ...oui, mais est-ce que le ministre convient...
M. Bédard: Mais vous nous avez parlé... M. le
Président...
M. Marx: ...qu'il a lu le même discours...
M. Bédard: M. le Président, est-ce que j'ai la
parole ou encore c'est le...
Le Président (M. Desbiens): À l'ordre! À
l'ordre, s'il vous plaît!
M. Marx: ...lors de l'étude de la loi 62? Je ne veux pas
qu'il me lise les mêmes discours chaque trois mois. Je connais ses
discours sur la loi 62 et c'est dans le journal des Débats.
M. Bédard: J'ai parlé pendant deux minutes de la
loi 62. Sauf que, lorsque vous parlez d'un sujet comme la protection des droits
et libertés et que vous vous permettez de dire, dans une phrase, qu'il y
a érosion des droits et libertés...
M. Marx: ...je n'ai pas choisi le titre...
M. Bédard: ...sous un gouvernement du Parti
québécois...
M. Marx: ...mais c'est un bon titre.
M. Bédard: ...je m'excuse, M. le Président, le
député de D'Arcy McGee sourit, mais je ne trouve pas cela
drôle du tout. Je trouve qu'un sujet aussi important que la protection
des droits et libertés, lorsqu'un critique se permet de dire, dans une
phrase, comme cela, qu'il y a érosion des droits et libertés sous
un gouvernement du Parti québécois en se référant
à différentes lois, la loi 62 dont il a parlé, les
dérogations, la loi 111, au niveau des amendements à la charte,
je m'excuse! Pour vous, c'est peut-être facile de faire une affirmation
globale dans une seule phrase, une accusation.
M. Marx: Question de règlement, M. le
Président.
Le Président (M. Desbiens): À l'ordre, s'il vous
plaît! M. le député de D'Arcy McGee sur une question de
règlement.
M. Marx: Le ministre est en train de répondre à un
article que j'ai écrit dans le Devoir, il y a quelques jours.
M. Bédard: Vous l'avez repris dans vos critiques.
M. Marx: Je ne l'ai pas repris...
M. Bédard: Non, c'est un rêve.
M. Marx: ...dans mes propos, mais ce n'est pas le temps de
répondre à mes articles dans le Devoir. J'en ai fait tellement
que le ministre va peut-être prendre trois jours à répondre
à tous mes articles.
M. Bédard: Est-ce que le député...
M. Marx: Ce n'est pas cela les crédits.
M. Bédard: Est-ce que le député de D'Arcy
McGee veut m'affirmer que, tout à l'heure, il n'a pas parlé
d'érosion des droits et libertés sous le gouvernement du Parti
québécois, qu'il ne s'est pas référé
à la loi 62, qu'il n'a pas...
M. Marx: J'ai parlé pendant trois minutes.
M. Bédard: ...je m'excuse, mais...
M. Marx: Vous avez pris trente minutes...
M. Bédard: ...bien oui, mais...
Le Président (M. Desbiens): A l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Marx: ...pour répondre à mes trois minutes.
M. Bédard: Tout cela pour vous dire que, lorsqu'on porte
une accusation, c'est très facile. Mais il faut être prêt
à prendre la réplique et après à engager la vraie
discussion.
Le Président (M. Desbiens): A l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Bédard: Je pourrais vous permettre de parler pendant
deux heures, si vous le voulez, seulement sur le sujet des droits et
libertés, parce que je trouve cela fondamental. Mais je n'accepterai pas
une accusation de la part du député de D'Arcy McGee, accusation
que je considère comme complètement gratuite et selon laquelle
les droits et libertés se sont érodés sous un gouvernement
du Parti québécois, qu'on soit limité dans la
réplique et qu'on n'ait pas la possibilité de répondre
à chacun des arguments qu'il a mis de l'avant pour étayer son
affirmation. Si vous le voulez, vous prendrez deux heures pour répondre
à mon argumentation sur chacun des points que vous avez
soulevés.
M. Marx: Je vais répondre...
Le Président (M. Desbiens): A l'ordre, à l'ordre!
Je comprends...
M. Marx: J'ai déjà répondu dans le
débat sur...
Le Président (M. Desbiens): A l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Marx: ...la loi 62, en deuxième lecture...
Le Président (M. Desbiens): A l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Marx: J'ai répondu à chacun de vos
arguments...
Le Président (M. Desbiens): Je comprends que vous n'avez
pas l'intention de passer à l'étude des programmes
immédiatement, mais la commission ajourne ses travaux sine die.
(Suspension de la séance à 12 h 29)
(Reprise de la séance à 15 h 51)
Le Président (M. Champagne): A l'ordre, messieurs!
La commission élue permanente de la justice poursuit ses travaux
de l'étude des crédits budgétaires du ministère de
la Justice pour l'année 1983-1984.
Sont membres de la commission: MM. Bédard (Chicoutimi), Brouillet
(Chauveau), Charbonneau (Verchères), Dauphin (Marquette), Mme Juneau
(Johnson), M. Kehoe (Chapleau), Mme Lachapelle (Dorion), MM. Lafrenière
(Ungava), Leduc (Saint-Laurent), Martel (Richelieu) remplacé par Boucher
(Rivière-du-Loup), Marx (D'Arcy McGee).
Les intervenants sont: MM. Bisaillon (Sainte-Marie), Blank
(Saint-Louis), Dupré (Saint-Hyacinthe), Dussault (Châteauguay),
Fallu (Groulx), Mme Lavoie-Roux (L'Acadie), MM. Marquis (Matapédia),
Paradis (Brome-Missisquoi), Saintonge (Laprairie).
Messieurs, avez-vous des commentaires à faire?
M. le ministre.
M. Bédard: C'est moi qui avais la parole. Au moment
où nous avons suspendu nos travaux, nous en étions à
discuter sur un sujet très important pour l'ensemble de la
société, la protection des droits et libertés. J'aurais
beaucoup à dire encore concernant l'affirmation globale et
erronée du député de D'Arcy McGee, à savoir qu'il y
a eu érosion des droits et libertés sous le gouvernement du Parti
québécois. Je me limiterai aux commentaires que j'ai faits
jusqu'à maintenant, sauf peut-être pour évoquer un dernier
point sur lequel le député de D'Arcy
McGee avait porté son attention, à savoir le
problème des dérogations à la charte.
D'abord, cette possibilité de déroger à la charte
n'existe pas seulement au niveau de la Charte des droits et libertés de
la personne, mais également au niveau de la charte
fédérale. Deuxièmement, je pense que le
député de D'Arcy McGee conviendra avec moi qu'à partir du
moment où on dit qu'il y a eu un tel nombre de dérogations
à la charte de la part d'un gouvernement, ceci ne nous permet pas de
conclure qu'il y a érosion des droits et libertés ou encore qu'il
y a attaque aux droits et libertés de la part du gouvernement en
question, puisque plusieurs de ces dérogations non seulement peuvent
être faites, mais ont été faites à l'avantage des
citoyens et des citoyennes qui pouvaient être concernés par
certaines lois.
Il n'est pas question d'insister plus qu'il ne faut, mais j'ai ici la
liste de toutes les dérogations qui ont été faites par le
gouvernement du Parti québécois depuis 1976-1977. On est à
même de constater que plusieurs, que la plupart de ces dérogations
ont représenté une nécessité et même une
amélioration de la situation pour les justiciables. Le
député de D'Arcy McGee fait signe que non. Je lui donnerai
quelques exemples. D'abord, le Parti libéral a aussi fait des
dérogations du temps qu'il était au pouvoir.
M. Marx: Lesquelles?
M. Bédard: La Loi sur les jurés.
M. Marx: Ensuite...
M. Bédard: II y a eu aussi, concernant les
présomptions, des dérogations, des lois spéciales
concernant le... Écoutez, M. le Président, je vais terminer et,
si le député de D'Arcy McGee a des choses à ajouter, je
n'ai pas d'objection.
Le Président (M. Champagne): La parole est au ministre et
je pense que vous aurez ensuite le droit de réplique, M. le
député.
M. Bédard: II y a eu des lois spéciales de la part
de plusieurs gouvernements qui se sont succédé où il y a
eu des dérogations à la charte. Je pense qu'avant de conclure
à l'érosion des droits et des libertés, cela demande un
examen plus approfondi et plus sérieux que celui qui est fait par le
député de D'Arcy McGee. On peut donner des exemples.
Lorsqu'il y a eu une dérogation à la charte concernant la
Loi sur la protection de la jeunesse en ce qui a trait au huis clos, ce
n'était sûrement pas dans le sens de procurer un
désavantage à la clientèle qui était visée;
au contraire, cela a été accepté par tout le monde. Je
pense à une dérogation de la charte concernant la loi sur les
petites créances où, on le sait, il n'y a pas de
possibilité de retenir les services d'un avocat, sauf que l'ensemble de
ce système est fait, a été pensé en fonction d'un
meilleur service à l'ensemble des justiciables. La preuve est faite que
cela a représenté un service beaucoup plus approprié,
beaucoup plus efficace pour l'ensemble des justiciables depuis que ce
système est mis en application.
Je pourrais, M. le Président, en nommer bien d'autres. Je pense
à la Loi favorisant la libération conditionnelle des
détenus, où il y a eu une dérogation à la charte,
mais qui a représenté, à ce moment-là, une
amélioration et non pas une érosion des droits et des
libertés des détenus ou encore de la population en
général. Il y a également la Loi assurant l'exercice des
droits des personnes handicapées, où il y a eu une
dérogation à la charte, mais il est clair que cela a
été... Tout le monde était d'accord, elle était
nécessaire et elle a été faite en fonction d'une
amélioration des droits et des libertés et non pas dans le but de
priver qui que ce soit des droits et des libertés. Enfin, il y a
beaucoup d'exemples.
Je sais bien que l'Opposition va nous parler d'un exemple, la loi 111.
J'aimerais en discuter très longuement avec le député de
D'Arcy McGee, mais je ne veux pas - je l'ai dit tout à l'heure -
m'étendre plus qu'il ne faut sur le sujet parce que, quand on parle de
dérogation à la charte, il faut aussi étudier en
profondeur l'ensemble des circonstances qui amènent un gouvernement
à poser certains gestes de dérogation. Alors, si on suivait le
député de D'Arcy McGee concernant son affirmation selon laquelle
on ne devrait jamais déroger - est-ce que c'est exact? - ce devrait
être enchâssé...
M. Marx: Je serais pour l'abrogation des clauses de
dérogation.
M. Bédard: Si on en venait à cela, M. le
Président...
M. Marx: À la charte fédérale.
M. Bédard: ...on réalise rapidement jusqu'à
quel point le législateur rencontrerait des difficultés pour,
à un moment donné, répondre aux besoins de certaines
dérogations aux fins d'améliorer la situation de personnes qui
sont nommément visées par des législations, lesquelles
dérogations représentent une amélioration. Les exemples
que je viens de donner sont suffisants pour illustrer le point. Alors, je ne
m'étendrai pas plus longtemps sur ce sujet, à moins d'une
affirmation, encore une fois, globale et erronée du député
de D'Arcy McGee concernant le fait qu'il y a érosion des droits et des
libertés sous un gouvernement
du Parti québécois. Si le député revient sur
le sujet, à ce moment-là, j'aviserai en conséquence, M. le
Président.
Je terminerai simplement en donnant ma réplique aux remarques du
député de D'Arcy McGee. Il a parlé de la réforme du
Code civil et, à moins que je ne me trompe, il a laissé entendre,
il a dit, à juste titre, que, normalement, l'ensemble de la
réforme serait réalisé autour des années 1985,
1986; c'est exact. Maintenant, quand le député de D'Arcy McGee
dit cela, il semble laisser entendre qu'il y a, de la part du ministère
de la Justice, une lenteur à légiférer. (16 heures)
M. Marx: ...de toute façon.
M. Bédard: Je m'excuse, M. le Président, quand on
parle de la réforme du Code civil, on ne parle pas d'une petite loi qui
est présentée à l'Assemblée nationale. Je voudrais
quand même rappeler au député de D'Arcy McGee que l'Office
de révision du Code civil a siégé 25 ans avant d'aboutir
à un rapport global. Si, dans l'espace de cinq ou six ans, on
réussit à concrétiser l'ensemble de la réforme du
Code civil, je crois qu'au contraire nous aurons, à ce moment,
procédé avec beaucoup de célérité, que nous
aurons adopté, à ce moment, une vitesse de croisière
remarquable parce que, quand on parle de la réforme du Code civil, on ne
parle quand même pas de n'importe quelle réforme. On l'a vu avec
le droit de la famille. Je pense que, pour les deux, cela a été
adopté à l'unanimité de l'Assemblée nationale, tout
le monde a essayé d'y aller avec le plus de diligence possible. Quand
même, ce sont des lois qui ne peuvent être adoptées à
la vapeur, qui représentent énormément de principes qui
sont ressassés en fonction des prochaines années.
Nous avons déposé jusqu'à maintenant le chapitre
tel que je l'ai dit, je pense avoir respecté toutes les
échéances que j'ai annoncées jusqu'à maintenant. Le
député de D'Arcy McGee dit souvent que je répète la
même chose. C'est évident. Je ne change pas d'idée à
tous les jours selon le vent. Lorsqu'on discute de n'importe quel sujet sur
lequel j'ai eu l'occasion de me prononcer, il est évident que je reviens
avec la même argumentation parce que je ne change pas d'argumentation
selon les perceptions politiques du moment. Quand le député de
D'Arcy McGee me dit cela, je le prends plutôt comme un compliment
qu'autre chose, parce que, s'il fallait qu'un ministre change d'argumentation
selon le moment, change d'idée selon le moment, selon la perception
politique, je pense qu'à ce moment il y aurait lieu de faire des
reproches.
Encore une fois, si l'ensemble de la réforme du Code civil se
termine en 1986, tout le monde sera en mesure de dire que c'est une vitesse de
croisière remarquable, j'en suis convaincu, étant donné
l'ampleur du projet. Le député de D'Arcy McGee, en parlant de la
réforme du droit de la famille, nous a dit qu'il y avait des articles
qui n'étaient pas en vigueur. Il n'y en a qu'un seul qui n'est pas en
vigueur au moment où on se parle, c'est celui concernant le huis clos.
La raison en est très simple. Je l'ai déjà
expliqué. Mécaniquement, il y a une préparation... Oui,
sur la réforme du Code civil, vous avez dit qu'il y avait des
dispositions qui ne sont pas en vigueur. Une seconde, je suis capable de vous
relire. Je vous ai bien entendu. Vous avez parlé aussi de chapitres ou
de dispositions qui ne peuvent être en vigueur. Vous vous
référiez certainement à ce moment à toute la partie
de la réforme du droit de la famille concernant le divorce. C'est exact.
On l'a dit quand on a fait l'adoption du droit de la famille.
Il fallait penser globalement à l'ensemble lorsqu'on parlait de
séparation de corps, à un moment donné; l'ensemble du
droit de la famille, il faut que cela soit pensé globalement. Nous
avions dit à ce moment que nous étions conscients que ce chapitre
concernant le divorce ne pourrait être mis en application que lorsque le
gouvernement fédéral, puisqu'il en était question,
retournerait aux provinces la juridiction complète en matière
familiale. Je n'ai pas changé d'idée depuis ce temps. Lors des
discussions constitutionnelles, il semblait y avoir de très bonnes
chances que le fédéral, enfin, réponde aux exigences des
provinces de remettre à celles-ci l'ensemble de la juridiction sur le
droit de la famille; les chances étaient excellentes, à ce
moment. Je crois qu'au moment où on se parle les chances d'une
décision en ce sens de la part des autorités
fédérales vont plutôt en s'amenuisant, ce qui est
terriblement malheureux.
Le député de D'Arcy McGee nous a parlé des
délais à la Cour supérieure de Montréal. Nous en
avons parlé ce matin. Il a souligné le délai de six
semaines qui est nécessaire en ce qui a trait aux décisions
à rendre concernant les demandes de pension provisoire et la question de
la garde des enfants. Effectivement, même si c'est un délai qui
n'est pas exorbitant au moment où on se parle, c'est quand même un
délai qui est trop long. C'est en ayant cela à l'esprit que
j'avais fait adopter une disposition qui donnait neuf juges de plus à la
Cour supérieure, dont cinq à Montréal. À partir de
ce moment-là, mon travail est fait. La nomination de ces juges, la loi
à adopter par le gouvernement fédéral pour effectivement
les nommer, je pense que c'est la responsabilité du
fédéral. Je ne suis pas ici pour le critiquer, mais je ne suis
quand même pas ici pour recevoir des reproches qui, manifestement,
doivent être adressés à
un autre palier de gouvernement. Ce que me dit mon sous-ministre, c'est
que le délai de six semaines qui existe présentement devrait
très rapidement tomber à deux semaines ou à environ deux
semaines à cause d'une décision du juge en chef d'assigner deux
juges spécialement pour entendre ces requêtes. Tant mieux!
Quand on parlait de la réforme du Code civil, le
député de D'Arcy McGee disait que, si on termine la
réforme en 1986, les premiers chapitres adoptés risquent
d'être désuets lorsqu'on terminera. Je pense que ce danger
n'existe pas. Que faudrait-il penser des premiers chapitres qui ont
été rédigés par les commissaires
préposés à la réforme du droit qui ont mis 25 ans
à faire leur rapport? C'est évident qu'il y avait aussi des
choses qui étaient désuètes là-dedans. Cela nous a
obligés, avec le temps...
M. Marx: II y a des choses que vous n'avez pas
respectées.
M. Bédard: Non. Je pense, pour en avoir discuté
avec l'ensemble des membres, qu'ils ne s'attendent pas que l'Assemblée
nationale soit la copie carbone du rapport de l'Office de révision du
Code civil. Je ne crois pas que les commissaires... D'ailleurs, plusieurs
d'entre eux sont décédés. Quant à ceux qui restent,
je ne crois pas qu'ils aient l'impression d'avoir à ce point des
solutions à tous les problèmes pour s'attendre que les membres de
l'Assemblée nationale vont carrément adopter sans discussion
l'ensemble de leur rapport en termes de législation.
Le dernier point sur les remarques du député de D'Arcy
McGee, c'est concernant le système correctionnel. Le
député...
M. Marx: ...
M. Bédard: Je ferai quelques remarques, quitte à
revenir sur le sujet.
M. Marx: J'aimerais seulement signaler au ministre que sa
réplique est trois fois plus longue que mon intervention. Si cela
continue ainsi, je n'aurai pas le temps de poser des questions.
M. Bédard: Oui. Cela aura l'avantage... M. le
Président, je pense que la remarque du député de D'Arcy
McGee est à propos, sauf que, même après avoir... Il
admettra qu'il y est allé de plusieurs affirmations globales qui
méritaient, en fait, une réponse. Quand viendra la discussion sur
les programmes, entre autres, le programme correctionnel, ce que je dirai
maintenant, je n'aurai pas à le redire. Je veux faire seulement quelques
remarques. C'est que...
M. Marx: Nous sommes en commission...
Le Président (M. Champagne): Un instant!
M. Marx: ...depuis 2 heures et 45 minutes. J'ai parlé
pendant 20 minutes.
Le Président (M. Champagne): Voici...
M. Marx: Vous avez noirci cinq fois plus de papier.
Le Président (M. Champagne):
Messieurs...
M. Bédard: Oui, mais écoutez...
M. Marx: Vous avez pris toute la place.
M. Bédard: ...en cinq minutes, vous avez fait un paquet
d'affirmations que je crois, pour ma part, erronées et...
M. Marx: Vous, non? Vous avez fait des affirmations aussi.
M. Bédard: ...porté des jugements globaux qui ne
sont pas de nature à éclaircir la situation. Au contraire. On
dirait qu'on essaie manifestement, à la suite d'une série
d'affirmations et de jugements globaux, de compliquer la situation plutôt
que d'essayer de l'éclaircir.
En ce qui a trait au système correctionnel, par exemple, le
premier point, contrairement à ce qui a été dit par le
député de D'Arcy McGee, c'est qu'il n'y a pas d'augmentation - je
le dis et le redis une fois pour toutes - pour l'ensemble du plan de
rationalisation; quant aux institutions de détention, il n'y a pas
d'augmentation de places par rapport à celles qui existent
déjà dans l'ensemble du réseau.
Le Président (M. Champagne): On pourrait essayer de
trouver la façon de partager le temps. Vous avez fait votre
réplique... Deux minutes...
M. Bédard: J'en ai pour deux minutes, M. le
Président, c'est cela.
Le Président (M. Champagne): ...ensuite vous arrivez
à l'étude des programmes.
M. Bédard: Voilà!
Le Président (M. Champagne): Alors, on vous laisse aller,
M. le ministre.
M. Bédard: C'est selon la coutume. Alors, il n'y a pas
d'augmentation de places...
M. Marx: Nouvelle coutume!
M. Bédard: D'accord? Une fois pour
toutes. Est-ce qu'il y a une politique correctionnelle? C'est
évident, à moins de vouloir se fermer les yeux
délibérément. Il y a la série de mesures que j'ai
évoquées dans mes propos d'ouverture, la série de
programmes: travaux communautaires, programmes de restitution, programmes de
travaux communautaires, programmes de travaux compensatoires, travail
rémunéré en prison. Il me semble qu'il y a là tous
les éléments qui montrent, pour qui veut voir, qu'il y a
certainement une orientation, une politique cohérente en matière
correctionnelle au ministère de la Justice.
Ceci terminera mes remarques, quitte, sur ce sujet comme sur tous les
autres, à y aller plus en détail lors de l'étude des
programmes.
M. Marx: J'ai juste un point à relever.
Premièrement, sur le temps. Le ministre a pris quatre fois plus de temps
que moi. Je trouve que c'est un peu exagéré. Sur tout ce que le
ministre a dit, je n'ai pas grand-chose à dire, sauf que cela m'a fait
penser à Pangloss dans Candide qui a dit: C'est le meilleur des mondes.
Mais c'est seulement Pangloss qui a vu cela comme cela.
Maintenant, j'ai seulement une précision pour le ministre. Quand
j'ai fait des critiques sur la loi, le ministre est responsable de la
législation à titre de président du Comité de
législation... Je veux que cela soit clair; je suis sûr qu'il
admettra cela.
Maintenant, sur toute la question des droits et des libertés, le
ministre a répondu à mon article dans le Devoir du 14 mai 1983.
Je n'ai pas l'intention de revenir sur cette question, sauf sur un petit point.
J'ai dit que j'étais pour l'abolition de la clause de dérogation
dans la charte canadienne. Le ministre a bien souligné le fait que les
libéraux ont utilisé une fois la clause de dérogation dans
la Loi sur les jurés. Je pense que ce n'était pas
nécessaire, ils étaient mal conseillé à
l'époque.
M. Bédard: Dans les lois spéciales aussi. M.
Marx: Pas dans les lois spéciales. M. Bédard: Bien
oui!
M. Marx: Donnez-moi la liste des lois spéciales
avec...
M. Bédard: Le retour au travail des
infirmières...
M. Marx: II n'y a pas de clause...
M. Bédard: ...concernant les présomptions de
culpabilité. Je vous l'ai mentionné déjà à
deux reprises dans des lois spéciales. Je vous le dis.
M. Marx: II y a juste un point technique, c'est vérifiable
par l'un de vos 12 000 fonctionnaires.
M. Bédard: Sûrement.
M. Marx: C'est-à-dire qu'il y avait neuf
dérogations à la charte québécoise avant la loi
111. L'une était faite par les libéraux; huit par votre
gouvernement. À mon avis, vous étiez mal conseillé de
déroger de la charte québécoise huit fois et surtout la
neuvième fois, avec la loi 111. J'aimerais seulement souligner un
point.
M. Bédard: Bon, ils me donneront le renseignement.
M. Marx: C'est qu'en Saskatchewan, il y a aussi une clause de
dérogation dans la charte, mais cette province n'a jamais invoqué
cette clause de dérogation. C'est tout ce que j'ai à dire sur
cette question. Quelqu'un qui veut connaître les débats lira le
Devoir et verra vos remarques. Ce sera clair.
M. Bédard: M. le Président.
Le Président (M. Champagne): Oui, M. le ministre.
M. Bédard: La Charte des droits et libertés de la
personne, je le rappelle au député de D'Arcy McGee, a
été adoptée en 1975 et est entrée en vigueur en
1976. Dans la seule année 1976 - vous ne pouvez pas parler de 1977, vous
n'étiez plus au pouvoir - il y a eu deux dérogations de la part
du gouvernement du Parti libéral: l'une concernant la Loi sur les
jurés et l'autre en ce qui a trait à la Loi concernant les
services de santé dans certains établissements, comme je l'ai
mentionné tout à l'heure.
M. Marx: Est-ce que c'est dans une loi ou dans un
règlement?
M. Bédard: Mais non, dans deux lois. M. Marx:
Donnez-moi la deuxième loi.
M. Bédard: Mais la différence... Loi concernant les
services de santé dans certains établissements.
M. Marx: Quelle est la référence?
M. Bédard: Pour vous retrouver et pour vous éviter
d'autres affirmations, je pourrai vous donner...
M. Marx: Donnez-moi la référence, la
référence. (16 h 15)
M. Bédard: Tiens, en 1976, j'ai même la loi ici: Loi
sur les services de santé dans certains établissements.
C'était fait d'une façon sournoise alors que nous, on le dit
carrément, quand on met la Charte des droits et libertés de la
personne de côté. Dans cette loi adoptée par le Parti
libéral, on dit à l'article 14: "Nonobstant le chapitre 6 des
Lois de 1975..." Pour quelqu'un qui ne s'y connaît pas, cela ne veut rien
dire, il pense qu'il n'y a rien là, mais quelqu'un qui s'y
connaît...
M. Marx: Ils ont fait deux erreurs à l'époque.
M. Bédard: ...sait que c'est une dérogation
à la charte.
M. Marx: Ils ont fait deux erreurs, pas seulement une.
M. Bédard: Non, ce n'est pas nécessairement deux
erreurs.
M. Marx: Cela ne me convainc pas.
M. Bédard: C'est la différence d'argumentation.
M. Marx: D'accord.
M. Bédard: C'est la différence entre moi et le
député de D'Arcy McGee. Le député de D'Arcy
McGee...
M. Marx: Vous le direz tantôt.
M. Bédard: Laissez-moi vous répondre; vous m'avez
demandé des explications et je vous les donne tout de suite. Je n'ai pas
besoin de 12 000 fonctionnaires, je vous les donne. Vous les avez
mentionnés avant. La différence fondamentale, au niveau de la
discussion, est que le député de D'Arcy McGee dit qu'il y a tant
de dérogations de la part d'un gouvernement à la Charte des
droits et libertés de la personne, donc, il y a de la part de ce
gouvernement une tendance à l'érosion des droits et
libertés.
M. Marx: Je n'ai jamais dit cela.
M. Bédard: Je m'excuse, si vous ne l'avez pas dit, vous
direz très clairement ce que vous avez à dire à un moment
donné. Même si, dans la seule année 1976, il y a eu deux
dérogations du Parti libéral à la Charte des droits et
libertés de la personne, je ne tire pas la conclusion que le Parti
libéral était nécessairement contre la protection des
droits et libertés et qu'il y avait érosion de cesdits droits et
libertés parce que les deux dérogations pouvaient être
justifiées. Je l'ai, d'ailleurs, démontré. Je l'ai
énoncé. Même s'il y en avait dix, le problème n'est
pas de savoir s'il y a dix dérogations, s'il y en a sept ou une, cela ne
fonctionne pas par addition simple comme cela, c'est de savoir pourquoi ces
dérogations. Je l'ai dit tout à l'heure et je ne le
répète pas.
Dans le cas du gouvernement du Parti québécois, il y en a
eu une concernant un jugement rendu par la Cour suprême du Canada, on
n'avait pas le choix. Il y en a eu une concernant la Loi sur la protection de
la jeunesse, le huis clos, une autre concernant les libérations
conditionnelles, une autre concernant la Régie du logement, pour
éliminer le droit de l'avocat devant la régie, comme on avait
éliminé, à un moment donné, le droit de l'avocat
devant la Cour des petites créances. Ce n'est pas avec des exemples
comme ceux-là qu'on tire des conclusions globales sur l'attitude d'un
gouvernement vis-à-vis des droits et des libertés. Il y en a eu
une autre concernant les personnes handicapées.
M. Marx: Vous avez terminé?
M. Bédard: Pour une fois, on a ce qui nous
différencie, le député de D'Arcy McGee et moi. Ce n'est
pas à partir d'un nombre de dérogations qu'on doit tirer des
conclusions globales comme il l'a fait jusqu'à maintenant.
M. Marx: J'ai dit que le ministre est entaché par cette
érosion des libertés des Québécois.
M. Bédard: Ce sont des affirmations globales.
M. Marx: Je ne me suis pas basé sur le nombre de fois
où le ministre a dérogé à la charte
québécoise, j'ai donné beaucoup de raisons. C'était
à la fin de mon article, c'était dit non seulement pour
blâmer le gouvernement péquiste, mais aussi pour blâmer le
gouvernement fédéral qui, en 1970, a fait la même chose.
Quand les libéraux ont dérogé à la Loi sur les
jurés, je pense que ça a été une erreur. À
mon avis, ce n'était pas nécessaire. Mais c'est une autre
discussion. Le ministre ne m'a pas convaincu de quoi que ce soit. Il
connaît bien mon argument. S'il veut me faire un procès
d'intention pour ériger un homme de paille, parce que ce sera plus
facile de détruire l'homme de paille, bon, il l'a fait et maintenant on
va continuer l'étude des programmes.
M. Bédard: Je ne veux pas faire de procès
d'intention au député de D'Arcy McGee, mais, pour une fois, on a
la possibilité de rétablir les choses et on le fait. Comparer la
loi des mesures d'urgence, la loi des mesures de guerre, qui a
été appliquée par le gouvernement fédéral
lors
de la crise d'octobre, à la Loi sur la protection des personnes
et des biens en cas de sinistre, je vous assure qu'il faut être
démagogue pour essayer d'établir une relation entre ces deux
lois. Ce n'est pas parce que le Parti libéral a dit de cette loi, la loi
94, que c'était la loi des mesures de guerre qu'il faut le croire. La
meilleure preuve est que, par la suite, avec quelques changements, elle a
été adoptée. La Loi sur la protection des biens et des
personnes en cas de sinistre n'a fait que des heureux jusqu'à maintenant
puisqu'elle a été un instrument qui nous a permis, pour une fois,
d'avoir une politique coordonnée pour essayer d'apporter de l'aide
à des gens lorsqu'il y a des sinistres. C'est pas mal différent
de la situation de la crise d'octobre et de la mise en prison de gens sans
mandat pour des périodes indéterminées. C'est ce que
j'appelle de la démagogie. Vous avez mentionné, ce matin, la loi
no 94, pour parler de l'érosion des droits.
M. Marx: La loi no 94, ce n'est pas moi qui ai dit cela. Ce sont
des professeurs de droit de l'UQAM qui ont intitulé un article, loi des
mesures de guerre, en parlant de votre loi no 94. Ce n'est pas moi qui ai dit
cela.
M. Bédard: M. le Président, je voudrais savoir ce
que dit le député de D'Arcy McGee.
M. Marx: D'accord. Allez donner un cours à l'UQAM pour
réfuter cela.
M. Bédard: M. le Président, je ne réponds
pas à l'article des professeurs qu'évoque le député
de D'Arcy McGee, sauf que, quand il évoque ces articles-là, c'est
comme s'il les reprenait à son compte. S'il ne les reprend pas à
son compte, je suis très heureux d'en être informé
aujourd'hui.
M. Marx: Tout ce que j'ai fait dans mon article, c'est
d'énumérer toutes les dérogations qu'on a faites au
Canada, au provincial et au fédéral. Le gouvernement
fédéral l'a fait une fois. Le gouvernement du Québec l'a
fait neuf fois, sous les péquistes et sous les libéraux. En
Saskatchewan, où ils ont une clause de dérogation, ils n'ont
jamais invoqué cette clause de dérogation. Ce ne sont que de
simples faits. Je n'ai rien inventé. J'ai simplement aligné les
faits. Si vous n'êtes pas d'accord avec les faits, contestez-les.
M. Bédard: C'est ce que je vous dis. C'est tellement
simple que c'est démagogique et cela manque de sérieux,
finalement.
M. Marx: Mais, enfin.
M. Bédard: Vous venez de le faire. Ce n'est pas à
partir du compte qu'on fait du nombre de dérogations qu'on tire des
conclusions. Ce qui est important quand on est sérieux, c'est d'aller
voir si ces dérogations...
M. Marx: Demandez à votre attaché politique.
M. Bédard: ...étaient justifiées. Il a beau
y avoir 25 dérogations à la Charte des droits et libertés
de la personne, s'il y a 25 bonnes justifications et qu'en fin de compte des
gens non seulement n'ont pas vu leurs droits et libertés diminuer, mais,
au contraire, ont, par ces dérogations, obtenu une protection accrue, il
n'y a pas de conclusions à tirer concernant l'érosion des droits
et libertés.
M. Marx: Peut-être puis-je demander au ministre...
M. Bédard: C'est ce que je reproche au
député.
M. Marx: ...de consulter son attaché politique ou son
sous-ministre, qui ont lu l'article, avant de faire sa réponse.
M. Bédard: Je m'excuse.
M. Marx: Je vois qu'il est tellement loin de ce que j'ai
écrit que cela n'a pas de bon sens.
M. Bédard: De quoi parlez-vous? Parlez-vous de votre
article à vous ou de l'article des professeurs?
M. Marx: Du mien. C'est de cela qu'on parle.
M. Bédard: Votre article, vous y avez fait allusion ce
matin.
M. Marx: Ils ne parlent pas des dérogations ici.
M. Bédard: Vous avez parlé de la loi no 62; j'ai
répondu là-dessus ce matin. Vous avez fait écho de la loi
no 111; on peut en discuter durant deux heures, si vous le voulez. Il y a des
nuances là-dessus. Vous avez parlé de l'enchâssement; je
vous ai répondu ce matin. Vous avez parlé des dérogations,
etc., et on en parle.
M. Marx: Le ministre veut tellement parler de cela qu'on va lui
donner l'occasion de parler de cette question lors d'un débat à
l'Assemblée nationale.
M. Bédard: N'importe quand et cela va me permettre de
faire la lumière sur les attitudes ou les déclarations
démagogiques du
député de D'Arcy McGee. Les gens vont comprendre.
M. Marx: C'est cela. Le ministre est académique et pas
démagogique. Jamais démagogique. Toujours académique,
à l'Assemblée nationale. Programme 1.
Le Président (M. Champagne): Est-ce que les remarques
préliminaires sont terminées?
M. Bédard: Je pense que toutes les réponses...
M. Marx: Je pense que ce que j'ai dit est la
vérité.
M. Bédard: ... que j'ai faites à vos affirmations
n'étaient pas démagogiques.
M. Marx: Exceptionnelles, vos réponses.
M. Bédard: Ce que je dis, c'est que vous l'êtes
quand vous faites des affirmations globales, sans nuance.
M. Marx: Exceptionnelles.
Le Président (M. Champagne): Alors, on peut conclure que
les remarques préliminaires sont terminées. Nous entreprenons
l'étude des différents programmes. MM. les députés,
vous avez 17 programmes et il nous reste neuf heures de débat. Est-ce
que vous aimeriez qu'on passe environ une demi-heure par programme ou si vous
étudiez l'ensemble? Je laisse cela a votre discrétion.
Une voix: C'est douze heures.
Le Président (M. Champagne): C'est douze heures, mais il y
a déjà environ trois heures de passées.
M. Bédard: Nous allons procéder, M. le
Président, comme d'habitude, programme par programme.
Le Président (M. Champagne): D'accord. M. Marx:
Programme par programme.
M. Bédard: En n'étant pas plus rigide qu'il ne le
faut, si les députés de l'Opposition oublient certaines questions
ou ne posent pas les questions au moment même où le programme est
étudié ou après qu'il a été adopté,
je n'ai pas d'objection à revenir en arrière.
Le Président (M. Champagne): J'appelle le programme 1,
Formulation de jugements. Est-ce que vous avez des remarques
préliminaires, M. le ministre?
Formulation de jugements
M. Bédard: Comme on le sait, ce programme est
composé de deux éléments, à savoir
l'élément 1 concernant la magistrature sous la
responsabilité des juges en chef. L'élément 2 traite de la
déontologie judiciaire, du perfectionnement des juges, du Conseil de la
magistrature. Quant aux ressources humaines et financières, l'effectif
autorisé de ce programme est de 266 postes, soit trois postes au Conseil
de la magistrature et 263 postes de juges. Cet effectif de 263 postes de juges
est affecté à la Cour provinciale, 142; à la Cour des
sessions de la paix, 69; au Tribunal de la jeunesse, 36; au Tribunal du
travail, 10; au Tribunal minier, 1; au Tribunal de l'expropriation, 5. Les
autres postes de juges autorisés par la Loi sur les tribunaux
judiciaires sont affectés à titre de présidents ou de
membres aux différentes commissions ou régies.
Concernant l'élément 2, je porte tout simplement à
l'attention des députés que les crédits de ce programme
sont des crédits permanents en vertu de la Loi sur les tribunaux
judiciaires, à l'exception de la contribution du ministère aux
régimes de retraite et de pension des juges, qui totalisent une somme de
7 355 000 $. Il y a une diminution qu'on peut remarquer au programme 1. Cette
diminution provient du fait qu'aucune augmentation n'a été
prévue au budget 1983-1984 pour le traitement des juges alors qu'un
pourcentage de 7,55% était prévu au budget 1982-1983.
M. Marx: J'ai quelques questions.
M. Bédard: On parlait des délais surtout.
M. Marx: Je ne sais pas si cela tombe exactement dans ce
programme; le ministre pourra décider s'il veut répondre à
ce moment ou non. J'ai eu des formules des cours criminelles qui sont
imprimées en français seulement. Par exemple, j'en ai une ici, un
subpoena et c'est attendu que, a été inculpé, etc., tout
l'avis, toutes les instructions sont uniquement en français.
M. Bédard: Est-ce qu'on pourrait en avoir une copie?
M. Marx: Oui. Voilà une citation à
comparaître. C'est imprimé uniquement en français. Je pense
que cela est nouveau. J'aimerais savoir comment le ministre s'attend que
certaines personnes qui ont de la difficulté à lire le
français, qui ne lisent pas le français vont comprendre les
instructions. J'aimerais demander au ministre s'il serait favorable à
imprimer ces formules en français et en anglais.
M. Bédartt: On me fait remarquer que d'autres formulaires
sont en préparation et, sur ces formulaires, il y aura toujours
l'indication qu'une version anglaise peut être livrée sur demande,
ce qui est conforme au jugement Blaikie de la Cour suprême.
M. Marx: Si je vous ai donné cet exemple, c'est que,
dès 1968 ou 1966, j'ai trouvé que la situation au Manitoba
était injuste même avant la cause du Manitoba. Est-ce que le
ministre serait prêt à demander au ministre de la Justice du
Canada de faire en sorte que tous ces formulaires assortis du Code criminel
soient imprimés en anglais et en français? Étant
donné que ces formules sont exigées par le Code criminel, la
langue, si je peux m'exprimer de cette façon, de ces formules pourrait
relever du Parlement fédéral. Le ministre serait-il d'accord pour
que ces formules soient bilingues "from coast to coast"? (16 h 30)
M. Bédard: Si vous le permettez, M. le sous-ministre
aurait une remarque à faire sur ce point.
Le Président (M. Champagne): M. le sous-ministre.
M. Marx: Peut-il s'identifier pour les fins du journal des
Débats?
M. Bédard: Daniel Jaeoby. Sur cette question, les avis
juridiques - si on parle sur un plan strictement juridique - nous indiquent que
la langue est déterminée par l'émetteur et non pas par le
récepteur. Par ailleurs, sur le plan strictement administratif, comme
l'indiquait M. le ministre tout à l'heure, les nouveaux formulaires qui
sont en impression actuellement vont indiquer que le document peut être
fourni dans la langue anglaise. Il est difficile de déterminer d'avance
si une personne est de langue française ou de langue anglaise.
M. Marx: Je me suis peut-être mal exprimé parce que
vous n'avez pas saisi le point important. Je comprends que la langue dans
laquelle le document sera rédigé est la langue de
l'émetteur. Par exemple, dans les jugements, c'est la langue du juge; il
peut utiliser l'une ou l'autre langue. Je parle des paragraphes
imprimés. S'il y a des imprimés sur le document, cela ne change
pas, c'est-à-dire que la personne qui remplit la formule va taper la
date, les noms des parties et ainsi de suite. Je parle de la formule que vous
avez en main, "avis de convocation". Pour l'en-tête, je propose que ce
soit imprimé "avis de convocation" et la phrase en anglais; partout dans
le document où il y a quelque chose d'imprimé, que ce soit
imprimé dans les deux langues et pas seulement pour le Québec,
mais pour tout le Canada. Je suggère qu'on demande au ministre de la
Justice fédéral de prévoir, dans la révision du
Code criminel, que tout document ou toute formule exigée par le Code
criminel soit imprimée dans les deux langues partout au Canada. Je pense
que c'est plus important que ces documents soient bilingues que des
boîtes de "Corn Flakes". C'est une question d'opinion.
M. Bédard: Oui, mais il ne s'agit pas là de
procédure criminelle au sens de la constitution. Il s'agit de
l'administration de la justice criminelle. En conséquence, on n'a pas
à avoir des formules bilingues, sauf sur une base volontaire.
M. Marx: Non, mais si le sous-ministre va consulter le Code
criminel, il verra que les formules sont déjà
désignées dans le Code criminel. Étant donné que le
gouvernement fédéral peut désigner les formules, il me
semble qu'il pourrait désigner la langue de ces formules. Mais, de toute
façon, le ministre serait-il d'accord, sur le plan politique, pour
demander au ministre fédéral de la Justice d'utiliser l'anglais
et le français sur ces formules dans tout le Canada? Tout le monde sera
sur un plan d'égalité. En ce qui concerne les mots qui sont
écrits sur le document, ce sera dans la langue de l'émetteur,
comme le sous-ministre l'a dit.
M. Bédard: II me semble que le gouvernement
fédéral, s'il a des suggestions à faire concernant le
bilinguisme, est capable de prendre ses décisions. Je peux toujours
prendre en considération la demande faite par le député de
D'Arcy McGee, mais je ne conclurai pas aujourd'hui là-dessus. Il y a
quand même déjà - on l'a fait remarquer tout à
l'heure - au point de vue de l'administration de la justice, des situations qui
existent depuis toujours. Je ne me sentirais pas très responsable de
prendre une décision ipso facto à la suite d'une question ou
encore d'une suggestion qui m'est faite -je le sais - d'une façon
très positive par le député de D'Arcy McGee. Tout ce que
je peux lui dire pour le moment concernant ce sujet, c'est que je le prendrai
en considération.
M. Marx: J'ai deux points sur cette question de prendre le
ministre par surprise. J'ai déjà écrit au ministre sur
cette question.
M. Bédard: Je n'ai jamais dit que vous me preniez par
surprise.
M. Marx: Non, d'accord. Je vous ai écrit il y a quelques
mois et j'ai eu une réponse de l'un de vos attachés politiques
sur
cette même question; donc, j'imagine qu'il a vérifié
avec vous le cas échéant.
Deuxièmement, les formules étaient bilingues il y a
quelques années. Le ministre a donc changé la politique qui
était courante au Québec parce qu'autrefois les formules
étaient bilingues à Montréal, mais, il y a quelques mois
ou quelques années, quelqu'un a donné l'ordre que ces formules
soient seulement en langue française; peut-être que l'Office de la
langue française était mêlé à ce dossier.
N'est-ce pas vrai que c'était bilingue et qu'on a changé la
politique pour que ce soit des documents unilingues?
M. Bédard: Sur ce point, je pense que le
député de D'Arcy McGee me connaît assez pour savoir que je
ne changerai pas d'idée ou de réponse en l'espace de quelques
instants. Je lui ai dit que je prendrais le tout en considération.
M. Marx: Si je prends l'expérience des autres dossiers,
cela peut prendre deux mandats.
M. Bédard: Je n'ai pas compris.
M. Marx: Cela peut prendre des années avant que le
ministre se prononce sur la question.
M. Bédard: Je m'excuse, M. le Président.
M. Marx: Sur la question précise...
M. Bédard: Vous parlez de ce dossier en particulier et,
sur bien d'autres dossiers, vous savez que les gestes ont été
posés avec célérité; c'est tout.
M. Marx: C'est cela, mais sur cette question, est-ce qu'il n'est
pas vrai qu'autrefois, quand le ministre est arrivé au pouvoir, ces
formules étaient bilingues à Montréal?
M. Bédard: Oui, c'est exact; il y a eu aussi la Charte de
la langue française qui...
M. Marx: Oui, mais la charte, est-ce que...
M. Bédard: ...spécifiait que la langue des
communications était le français. Il y a eu également
l'arrêt Blaikie. Je voudrais qu'une chose soit claire: nous nous
conformons à la loi. Le député parlait de la situation au
Manitoba qu'il déplorait. Si on parle de l'arrêt Blaikie et de la
célérité du gouvernement du Québec, par rapport au
gouvernement du Manitoba, à donner suite au jugement Blaikie, je pense
que sur cet aspect le gouvernement du Québec a donné l'exemple,
si on fait une comparaison avec les suites qui ont été
données à ce même jugement par le gouvernement du
Manitoba.
M. Marx: Ce n'est pas ma faute si l'arrêt Forest a pris
tellement de temps parce qu'en soi...
M. Bédard: Je ne parle pas du temps qu'a pris
l'arrêt Forest. Je parle du temps pour se conformer au jugement; c'est
bien différent. Indépendamment du temps qui s'est
écoulé jusqu'à ce que la Cour suprême rende un
jugement sur le cas Forest, à partir du moment où le jugement a
été rendu, le gouvernement du Québec est en mesure, quant
à lui, de dire qu'il s'y est conformé intégralement.
M. Marx: D'accord.
M. Bédard: Et avec célérité, avec
rapidité. On se rappelle que j'avais fait adopter une loi dans les jours
qui ont suivi le jugement. Je ne pourrais, malheureusement, pas dire la
même chose du Manitoba...
M. Marx: Oui, mais tout ce que j'ai à dire à cela,
c'est qu'en...
M. Bédard: ...et du gouvernement manitobain.
M. Marx: ...1967, j'ai écrit un article... M.
Bédard: En 1967?
M. Marx: ...dans le Week End Magazine pour dire que quelqu'un
devrait faire un "test case" sur le Manitoba. J'étais prêt
à le prendre moi-même; mais personne ne m'a offert le cas. Donc,
je me sens très à l'aise pour proposer ce que je propose. Je ne
suis pas ici pour défendre la Cour suprême. En fait, j'ai
passé quelques années à critiquer les jugements de la Cour
suprême; ce n'est pas le procès de la Cour suprême ici.
Est-ce que le ministre peut nous expliquer pourquoi...
M. Bédard: J'ai un exemple additionnel. Je pourrais
même dire au député de D'Arcy McGee que,
présentement, nous traduisons même en anglais les jugements rendus
en français, sur demande, ce qui ne serait pas obligatoire si nous
suivions strictement le jugement de la Cour suprême.
M. Marx: C'est très gentil, mais je suis très
intéressé d'apprendre cela, parce que, tel que me l'a
demandé, même aujourd'hui, le député de
Westmount...
M. Bédard: Vous avez dû le dire en 1966.
M. Marx: Non, parce que je n'ai jamais trouvé cela
nécessaire.
M. Bédard: Vous avez écrit un article en 1966
là-dessus?
M. Marx: Mais je peux en écrire un autre si le ministre a
le temps de le lire.
M. Bédard: Ah! Non, on dit cela gentiment.
M. Marx: Mais c'est très intéressant d'apprendre
cela parce que le député de Westmount a un cas comme
celui-là, où la femme a voulu un jugement en anglais et s'est
adressée à la cour. On lui a dit: On ne fait pas cela ici.
Maintenant, je vais dire au député qu'il peut contacter le
ministre.
J'aimerais savoir pourquoi le ministre a modifié les formules qui
étaient bilingues pour les rendre unilingues.
M. Bédard: Parce que le ministre de la Justice a
respecté les lois, entre autres, le jugement de la Cour
suprême.
M. Marx: C'est cela la raison.
M. Bédard: Quand c'est plus indiqué -je faisais
référence à la traduction des jugements sur demande -
à ce moment-là, on essaie de fournir un service additionnel.
À un moment donné, il y a un point de démarcation.
M. Marx: Est-ce que cela faisait partie de son programme
d'humaniser la justice? Finalement, il y a des gens qui reçoivent ces
formules et qui ne savent pas quoi faire avec. Les instructions, les avis sont
en français. Je pose la question au ministre, à savoir s'il est
prêt à m'appuyer...
M. Bédard: Pardon?
M. Marx: ...s'il est prêt à demander au ministre de
la Justice du Canada de faire en sorte que ces formules soient bilingues "coast
to coast". Je pense que ce serait bon pour tout le monde au Canada.
Peut-être que les boîtes de "Corn Flakes" sont plus importantes. On
va avoir des boîtes de "Corn Flakes" bilingues et des formules en droit
criminel unilingues. Le ministre ne veut pas se mouiller. Il va "checker" avec
le ministre de l'Éducation, le ministre des Communautés
culturelles et de l'Immigration ou quelqu'un d'autre. Passons à un autre
dossier.
M. Bédard: Se mouiller dans des articles où on dit
n'importe quoi, de telle façon que, quoi qu'il arrive, on l'aura
dit...
M. Marx: Vous faites cela toute la journée.
M. Bédard: ...puis prendre des décisions qui sont
conformes à des jugements et y aller d'une administration de la justice
qui soit correcte et respectueuse des lois, je pense que c'est deux choses.
J'avoue que je ne suis pas un "écriveux" d'articles. Je ne suis pas un
ministre qui rédige livre blanc sur livre blanc, livre vert sur livre
vert. Dans le domaine correctionnel; il n'y a pas eu de livre vert, mais, par
exemple...
M. Marx: Mais il rédige la loi 111, vite.
M. Bédard: ...je suis en mesure de dire qu'il y a une
série de gestes qui sont posés et qui vont dans le sens
d'humaniser la justice.
M. Marx: Je suis très...
M. Bédard: La loi 67 que nous avons fait adopter en est
une autre illustration.
M. Marx: On va y revenir.
M. Bédard: On en connaît les résultats
très intéressants pour l'ensemble de la population.
M. Marx: Est-ce que le ministre peut demander à son
sous-ministre de me retourner mes formules, parce que, maintenant, on sait que
cela ne sert pas à grand-chose de l'autre côté de la
table?
Le Président (M. Champagne): Est-ce qu'il y a d'autres
questions au programme 1?
M. Bédard: M. le Président, encore là, c'est
une affirmation...
M. Marx: Peut-être que le député de
Sainte-Marie a une question.
M. Bédard: ...gratuite du député de D'Arcy
McGee que sa dernière affirmation. Je lui ai dit - je n'ai pas
changé d'idée en cinq minutes - que je prendrais le tout en
considération. Je lui ai déjà dit - cela l'a réjoui
- que nous avions pris certaines initiatives concernant la rédaction des
jugements dans les deux langues, sur demande.
Le Président (M. Champagne): Est-ce qu'il y a d'autres
questions au programme 1? Est-ce que le programme...
M. Bédard: Les délais, est-ce que c'est
là-dessus?
Une voix: Au programme 2.
M. Marx: À cause de la Charte canadienne des droits et
libertés qui, veux veux pas, est en vigueur au Québec pour
certaines lois, des lois fédérales, est-ce que le ministre a
prévu des cours pour des policiers, des colloques pour des juges, afin
qu'ils apprennent le contenu de cette charte et comment l'appliquer, le cas
échéant, en ce qui concerne les policiers. (16 h 45)
M. Bédard: Dès que la charte canadienne, dans les
semaines subséquentes, a été en application pour la partie
s'appliquant au Québec - je pense, entre autres, à tout le Code
criminel - des instructions et des directives ont été
données aux policiers.
M. Marx: À la Sûreté du Québec ou
à tous les corps policiers?
M. Bédard: II y a eu un programme, j'ai déjà
dit que nous avions posé des gestes. Vous m'avez posé la question
il y a plusieurs mois.
Le Président (M. Champagne): M. le sous-ministre.
M. Bédard: En fait, des séances d'information ont
été données à la magistrature et à la
police, mais la Commission de police du Québec va émettre
bientôt un guide particulier sur l'application de la charte canadienne
des droits.
M. Marx: Pour tous les corps policiers.
M. Bédard: Oui.
M. Marx: C'est bon, cela.
M. Bédard: Vous avez le droit de me féliciter,
encore une fois.
M. Marx: Je félicite le président de la Commission
de police pour l'initiative d'envoyer un tel...
M. Bédard: Je regrette, mais ce n'est pas une initiative
de la Commission de police. Vous m'avez posé la question, il y a
plusieurs mois, et je vous ai dit que nous avions pris les dispositions
nécessaires concernant les parties de la charte fédérale
qui s'appliquent au Québec pour qu'il y ait une information
adéquate.
M. Marx: J'ai un dossier qui m'a été envoyé
par un individu, peut-être que le ministre a reçu une copie de ce
dossier. Cette personne, apparemment, a été victime d'une fraude
pour un certain montant d'argent. Elle a demandé à la police de
faire une enquête; celle-ci en a emtamé mais elle n'a pas
recueilli toute la preuve. Donc, cette personne a engagé un
détective privé pour continuer l'enquête et, effectivement,
ce détective privé a trouvé la preuve nécessaire.
Apparemment, le procureur de la couronne a intenté une action en Cour
criminelle contre une certaine personne. Cette femme a écrit pour
demander au ministre de la Justice de la dédommager pour l'argent
dépensé pour faire en sorte qu'il y ait une poursuite dans cette
cause. Je ne veux pas mentionner les noms parce que la cause est devant les
tribunaux, je ne veux pas mentionner les noms sur la place publique.
M. Bédard: Je pense que le député de D'Arcy
McGee comprendra que je peux difficilement répondre sur des
dossiers...
M. Marx: Est-ce que le ministre a reçu ce dossier?
M. Bédard: ...si je ne connais même pas les noms des
personnes peuvant être concernées. Est-ce que c'est vous qui nous
avez écrit?
M. Marx: Non, c'est la femme elle-même.
M. Bédard: Maintenant, vous pourriez
peut-être...
M. Marx: Comment...
M. Bédard: ...même si cela ne vient pas dans ce
programme, je n'ai pas d'objection à ce que le député de
D'Arcy McGee en fasse état, mais...
M. Marx: Oui, mais, dans un tel cas...
M. Bédard: ...peut-être serait-il opportun que le
député de D'Arcy McGee nous communique...
M. Marx: Mais, dans un tel cas...
M. Bédard: ...le contenu de ce dont il veut parler et de
qui il veut parler, parce qu'on reçoit des centaines de lettres au cours
d'une année; à ce moment-là, on va pouvoir faire la
recherche nécessaire. Si je crois opportun de répondre sur des
cas particuliers avant la fin de l'étude des crédits, je pourrai
le faire plus tard, mais nous ferons la vérification
nécessaire.
M. Marx: Mais, lorsqu'une personne, pour avoir justice, doit
poursuivre une enquête elle-même, est-ce que le ministre a un
programme ou une politique de remboursement ou est-ce qu'un remboursement est
possible, le cas échéant, selon les circonstances? Dans ce
dossier, je ne blâme pas les policiers. Ils ont beaucoup de choses
à faire. Ils n'ont pas pensé, à
première vue, que c'était une bonne cause.
M. Bédard: Je m'excuse, question de règlement. Je
ne suis pas capable de m'habituer à cette manière du
député de D'Arcy McGee d'éclabousser tout le monde comme
cela avec un dossier dont il nous parle, dont on n'a pas les noms. Il se permet
de dire que la police n'a pas dû trouver cela important. On ne peut pas
éclabousser tout le monde comme cela.
M. Marx: Je n'ai pas dit cela. Je n'ai pas dit: Peut-être
qu'ils n'ont pas trouvé qu'à première vue c'était
une bonne cause. Ils ont tellement de raisons de faire enquête.
M. Bédard: Vous parlez pour tout le monde. Il me semble
que ce n'est pas... Si on commence dans de petits cas particuliers... En plus
de cela, je ne sais pas les noms des personnes. Le député de
D'Arcy McGee ne trouverait sûrement pas le ministre de la Justice
responsable si je lui répondais comme cela. Ce que je lui dis...
M. Marx: Sur le principe, quelle est votre politique?
Le Président (M. Champagne): Excusez, oui.
M. Bédard: ...en termes de responsabilité,
donnez-nous les éléments, on peut aller au fond des choses. Si on
a des remarques à faire, je le ferai avec plaisir, mais je ne serais pas
responsable de répondre comme cela.
Le Président (M. Champagne): M. le député de
Sainte-Marie.
M. Bisaillon: C'est une question d'information, M. le
Président. Je n'étais pas là au moment où se sont
prises les ententes sur le partage du temps et la façon de travailler.
J'avais cru comprendre qu'on était au programme 1, actuellement.
Le Président (M. Champagne): C'est cela.
M. Bisaillon: Est-ce qu'il a été convenu qu'on
pourrait sauter d'un programme à l'autre ou si on vide une question?
C'est parce que je me demandais si on était rendu dans un autre
programme. Je pensais que cela pouvait faire partie des ententes.
M. Bédard: ...au député de D'Arcy McGee
concernant le problème auquel il veut faire référence.
Qu'il me donne plus d'information. Nous irons au fond des choses et, lorsque
viendra le programme où la police est concernée, le programme
concernant l'action policière, la sécurité, cela se
situerait plutôt à ce moment, et je serai peut-être en
mesure de donner des indications.
M. Marx: ...de vos attachés politiques dans ce dossier,
mais dans un autre contexte.
Le Président (M. Champagne): Est-ce qu'il y a des
questions sur le programme 1?
Une voix: Un instant.
M. Bédard: Les programmes 1 et 2, les délais sont
concernés, on le sait.
Une voix: ...
M. Bédard: C'est l'élément 2, au programme
2, les délais, je m'excuse.
Le Président (M. Champagne): Est-ce qu'il y a d'autres
questions sur le programme 1?
M. Marx: Non.
Le Président (M. Champagne): Le programme 1 est-il
adopté.
Une voix: Oui.
Le Président (M. Champagne): Adopté. J'appelle le
programme 2, Soutien administratif à l'activité judiciaire. M. le
ministre.
Soutien administratif à l'activité
judiciaire
M. Bédard: C'est assez long, M. le Président.
Disons que le programme 2 est constitué de trois éléments
et regroupe les activités concernant le soutien aux cours de justice
civiles et criminelles, le soutien aux tribunaux administratifs et le Tribunal
de l'expropriation. À l'exception des activités qui ont trait au
Tribunal de l'expropriation dont M. le juge Dorion, que je vous ai
présenté ce matin, est le responsable, l'ensemble des autres
activités de ce programme est sous la responsabilité de la
Direction générale des services judiciaires, soit M. Jacques
Lachapelle, sous-ministre associé. Cela implique donc aussi la
supervision administrative des activités relatives aux tribunaux du
travail et des mines.
La Direction générale des services judiciaires a pour
mandat d'assurer l'administration de soutien de l'appareil judiciaire de sorte
que justice soit rendue dans les meilleurs délais et au meilleur
coût. Elle fournit un soutien administratif au fonctionnement des
tribunaux en faisant le lien entre le citoyen et le système judiciaire
et en assurant la bonne marche des
procédures ainsi que le dépôt des archives et des
autres documents judiciaires. Elle exerce également une surveillance sur
les officiers de justice dans l'exercice des pouvoirs judiciaires qui leur sont
conférés par les lois et règlements. Enfin, elle est
responsable du service d'aide socio-économique et familial.
Le Tribunal de l'expropriation est un organisme chargé de fixer
des indemnités en matière d'expropriation d'immeubles ou de
droits réels immobiliers et d'imposition de réserve pour fins
publiques. Les décisions du tribunal sont rendues par ordonnances qui
deviennent exécutoires par homologation de la Cour
supérieure.
Quant aux ressources humaines et financières, un total de 2339
personnes-année sont nécessaires à la réalisation
des activités prévues à ce programme, soient 2201
employés réguliers et 138 employés occasionnels. La
répartition de ces effectifs par élément est la suivante:
Soutien administratif aux cours de justice civiles et criminelles qu'on
retrouve à l'élément 1, il y a 2163 employés
permanents; 132 occasionnels. Concernant le soutien aux tribunaux
administratifs, qu'on retrouve à l'élément 2, il y a 21
employés réguliers, un occasionnel. Au Tribunal de
l'expropriation qu'on retrouve à l'élément 3, il y a 17
employés réguliers et 5 occasionnels.
Quant aux ressources financières, les crédits de ce
programme sont de 62 625 900 $ et se répartissent de la façon
suivante entre les trois éléments du programme: Soutien aux cours
de justice civiles et criminelles, 61 777 500 $; soutien aux tribunaux
administratifs, 551 400 $; Tribunal de l'expropriation, 297 000 $.
Pour l'élément soutien aux cours de justice civiles et
criminelles, la majeure partie des crédits, soit 52 329 100 $ ou 84,7%
du budget sera utilisée pour défrayer des salaires aux
employés réguliers ou occasionnels. Les traitements des 2163
employés réguliers autorisés sont de 49 360 500 $ ou 79,9%
du budget, alors que le traitement des employés occasionnels est de 2
968 600 $ ou 4,8% du budget. Quant aux autres dépenses de
fonctionnement, elles représentent des crédits de 8 904 400 $,
soit 14,4% du budget. Ainsi, les dépenses de transport et de
communication dont l'utilisation principale est faite pour défrayer les
frais de déplacement des employés entre les nombreux points de
service sont évalués à 938 200 $, soit 1,5% du budget. Au
chapitre des services professionnels, des crédits de 5 755 600 $ sont
prévus, soit 9,3% du budget. La presque totalité de ces
crédits sera utilisée pour défrayer les coûts
suivants: 2 120 000 $ pour les huissiers qui signifient ou exécutent les
procédures judiciaires; 226 000 $ pour les interprètes effectuant
la traduction simultanée à l'audience; 1 422 000 $ pour les
jurés lors des procès aux assises criminelles et 1 510 000 $ pour
les témoins assignés lors de procès.
Pour les loyers, une somme de 773 000 $ a été
prévue, soit 1,2% du budget. Ces crédits seront utilisés
pour défrayer le coût des photocopieurs, des machines à
timbre judiciaire; des fournitures accapareront des crédits de l'ordre
de 1 213 400 $, soit 2% du budget; ces crédits servent à l'achat
de formulaires, chemises, fournitures de bureau, bobines d'enregistrement
mécanique et également à rembourser le fonds renouvelable
au Service général des achats.
Les autres dépenses de fonctionnement sont évaluées
à 224 100 $ ou 1,4% du budget et servent principalement au
perfectionnement des employés et à la réparation
d'équipement. Finalement, le budget d'équipement est de 44 000 $
ou 0,9% du budget. Ces crédits serviront à l'achat de
système d'enregistrement mécanique et de duplicatrice de
cassettes.
Pour l'élément soutien aux tribunaux administratifs, les
traitements de 22 employés permanents et occasionnels sont de 492 500 $,
soit 89,3% du budget. Les autres dépenses de fonctionnement retiennent
36 700 $ ou 6,7% du budget, alors que les dépenses de capital accaparent
22 200 $. Le budget de fonctionnement du Tribunal de l'expropriation fut
établi à 297 000 $ à partir d'une rationalisation du mode
de fonctionnement du tribunal qui entraînait nécessairement une
compression du budget déjà existant. Je pense que cela fait pas
mal le tour. Je me suis permis de lire tout cela...
M. Marx: Ce n'était pas nécessaire.
M. Bédard: ...mais l'essentiel des renseignements a
déjà été communiqué aux membres de
l'Opposition. Quand on abordera l'étude d'un programme, s'il y a
nécessité de donner certaines informations préliminaires,
mais je ne veux pas en donner plus que ne le désire l'Opposition.
Le Président (M. Champagne): M. le député de
Saint-Laurent.
Tribunal de l'expropriation
M. Leduc (Saint-Laurent): À l'élément
Tribunal de l'expropriation, on note une coupure de 84%. Je veux bien croire
qu'on puisse rationaliser, mais cela me semble quasiment le faire
disparaître, à 297 000 $, près de 1 900 000 $ selon le
budget de l'an passé. (17 heures)
M. Bédard: D'abord, contrairement à la nouvelle qui
avait paru concernant la disparition du Tribunal de l'expropriation, je
suis en mesure de dire que c'est faux. D'une façon
spéciale, le sous-ministre en titre a eu l'occasion de discuter avec le
président du Tribunal de l'expropriation, Me Dorion. J'ai moi-même
eu l'occasion de discuter du problème globalement avec lui. Les montants
qui sont consacrés pour le présent budget au Tribunal de
l'expropriation n'empêcheront pas ce tribunal de fonctionner et de rendre
les services qu'il se doit de rendre à la population.
M. Leduc (Saint-Laurent): Donc, vous voulez le maintenir?
M. Bédard: C'est cela.
M. Leduc (Saint-Laurent): Où avez-vous coupé?
M. Bédard: Nous avons les coupures...
M. Marx: II va rédiger le jugement là-bas.
M. Bédard: L'essentiel des coupures ont été
faites dans le personnel de soutien et dans le personnel technique.
M. Leduc (Saint-Laurent): Vous pensez qu'on peut fonctionner
après avoir coupé de 85%? Ils ne se déplaceront plus; il
n'y a plus de mobilité.
Le Président (M. Champagne): M. le sous-ministre,
allez-y.
M. Bédard: Effectivement, il y a des compressions
budgétaires au Tribunal de l'expropriation, le budget est encore en
discussion, mais il y a une entente d'intervenue pour faire en sorte que
l'efficacité du Tribunal de l'expropriation ne soit pas remise en
question. Il y a eu énormément de collaboration de la part du
président pour faire en sorte de mettre en commun certains services
qu'on retrouvait à Montréal et à Québec et qui
travailleront maintenant en commun; également au niveau du personnel de
soutien. L'important est que les délais d'audition n'augmentent pas
devant le Tribunal de l'expropriation. Si jamais des circonstances majeures
faisaient en sorte que les délais devraient augmenter, on reverrait
éventuellement le budget.
M. Leduc (Saint-Laurent): Vous ne prévoyez pas que cela
augmentera; si cela augmente, vous avez un palliatif.
M. Bédard: Oui.
M. Leduc (Saint-Laurent): Mais vous continuerez de vous servir du
Tribunal de l'expropriation.
M. Bédard: Absolument; dans le système actuel,
oui.
M. le Président, concernant l'autre remarque faite par le
député en ce qui a trait à la disparition du Tribunal de
l'expropriation, disons que, dans l'état actuel des choses, avec nos
cours organisées selon le système que nous connaissons
présentement, il n'est pas question de faire disparaître le
Tribunal de l'expropriation. Ceci ne veut pas dire qu'il n'y a pas une
réflexion qui continue; d'ailleurs, on sera en mesure d'en discuter plus
tard en ce qui a trait à un projet dont j'ai parlé et qui me
semble de toute première importance, à savoir l'unification des
cours sous la juridiction du Québec. Ce sera un moment
privilégié pour continuer la réflexion.
M. Leduc (Saint-Laurent): Évidemment, quand on parle du
Tribunal des professions, ce sont des juges de la Cour provinciale qui
siègent au Tribunal des professions. Est-ce que....
M. Bédard: Ce ne sont pas seulement des juges.
M. Leduc (Saint-Laurent): Non, je suis d'accord.
M. Bédard: II y a des...
M. Leduc (Saint-Laurent): Mais également il y a des
juges.
M. Bédard: Est-ce que vous parlez du Tribunal des
professions?
M. Leduc (Saint-Laurent): Oui. M. Bédard: Ah! Je
m'excuse.
M. Leduc (Saint-Laurent): Non, c'est vrai, il n'y a pas seulement
des juges.
M. Bédard: Excusez, je croyais que vous étiez
encore au Tribunal de l'expropriation, où il n'y a pas seulement des
juges, on le sait; c'est la même chose au Tribunal des professions.
M. Leduc (Saint-Laurent): Non, je reviens en arrière.
Est-ce que vous permettez? Oui? Vous n'en parlez pas parce que vous
considérez que c'est inclus au programme 1. Que faites-vous de ceux qui
ne sont pas juges?
M. Bédard: Ils sont inclus dans le programme 2.
M. Leduc (Saint-Laurent): Je ne vois pas le Tribunal des
professions. Vous parlez de la Cour des sessions de la paix, de la Cour
provinciale, du Tribunal de la jeunesse,
du Tribunal du travail, du Tribunal minier et du Tribunal de
l'expropriation.
M. Bédard: Ce sont des juges qui sont
détachés...
M. Leduc (Saint-Laurent): Et ceux qui ne sont pas juges? Je pense
qu'il y en a cinq.
M. Bédard: Concernant les émoluments, on retrouve
cela dans le programme 1. Il y a lieu de corriger. Au Tribunal de
l'expropriation, il n'y a pas que des juges.
M. Leduc (Saint-Laurent): C'est cela.
M. Bédard: Mais, au Tribunal des professions, il n'y a que
des juges de la Cour provinciale qui sont détachés...
M. Leduc (Saint-Laurent): Vous n'en faites pas état
ici.
M. Bédard: ...momentanément.
M. Leduc (Saint-Laurent): C'est dans un autre programme, au
programme 1.
M. Bédard: Ils sont détachés en termes
d'activités, mais, quand on parle de leur rémunération,
etc, on retrouve tout cela au programme 1.
Le Président (M. Champagne): Est-ce qu'il y a d'autres
questions, M. le député de Saint-Laurent?
M. Leduc (Saint-Laurent): Cela va.
Le Président (M. Champagne): D'autres questions, M. le
député de D'Arcy McGee?
M. Marx: Je suis informé, M. le Président, que,
devant le Tribunal du travail à Québec, une requête en
accréditation prend à peu près douze à quatorze
mois pour être accordée. Est-ce vrai? On me dit qu'à
Montréal, cela prend à peu près trois mois. Y a-t-il un
blocage au Tribunal du travail à Québec? Est-ce votre
responsabilité?
M. Bédard: Je vous avoue sincèrement que j'ai moins
de renseignements à donner concernant le Tribunal du travail parce que
la tradition a été que, pour les questions concernant l'ensemble
du fonctionnement de ce tribunal et du volume ou des choses dont il a à
traiter, la discussion se retrouvait surtout au niveau du ministère du
Travail. On peut quand même faire les vérifications. Ce que je
suis en mesure de dire, c'est que je dois incessamment combler un poste au
Tribunal du travail pour la région de Québec.
M. Marx: Compte tenu de la nature des requêtes, il me
semble que le ministre devrait avoir un plus grand intérêt dans ce
qui se passe devant ce tribunal.
M. Bédard: Ce n'est pas une question de manque
d'intérêt. Je ne voudrais pas que vous concluiez toujours, comme
c'est le cas...
M. Marx: On ne connaît pas le dossier.
M. Bédard: ...d'une façon à susciter un
débat. Ce n'est pas une question de connaître ou non. Je vous dis
que l'essentiel de la discussion concernant le Tribunal du travail se faisait
au niveau des crédits du ministère du Travail.
M. Marx: La personne qui s'occupe de ce dossier dans votre
ministère est-elle ici aujourd'hui?
M. Bédard: Oui. Mon sous-ministre m'informe d'ailleurs
qu'il n'y a pas tellement longtemps encore, il y a eu une rencontre avec le
juge en chef du Tribunal du travail et qu'il a effectivement été
question des délais. C'est pour cela que je vous mentionne qu'il y a un
poste à combler.
M. Marx: Puis-je demander au ministre de vérifier...
M. Bédard: D'accord.
M. Marx: ...cette question pour demain? C'est parfait. En ce qui
concerne les palais de justice...
M. Bédard: Je vous avoue cependant que j'étais
prêt sur toutes les questions de délai concernant les autres
cours, mais...
M. Marx: Ce n'est pas cela. C'est pourquoi on a posé la
question...
M. Bédard: ...comme l'Opposition ne semble pas en parler
beaucoup, cette année, ces gens ont compris qu'il y avait une
amélioration importante.
M. Marx: L'Opposition connaît les problèmes devant
tous les autres tribunaux. L'Opposition a fait une étude sur cette
question. On n'a pas posé de questions. On ne pose pas de questions
là où on a déjà des réponses.
M. Bédard: À propos des problèmes de
délais, dans les autres cours - je l'ai dit et je vous le redis -
à la Cour des sessions de la paix, il n'y a pas de problème de
délais. Là où il y en avait, nous les avons
réglés dans la plupart des cas. Au niveau de la Cour provinciale,
il y a eu amélioration. Au niveau de la Cour d'appel, il y a eu une
très
nette amélioration sur les délais - je l'ai
mentionné ce matin - et nous continuons à aller de l'avant avec
d'autres mesures qui seront dans le projet de loi omnibus que je
déposerai avant le 1er juin. Il reste un problème au niveau de la
Cour supérieure de Montréal.
M. Marx: Souvent, la Gazette donne raison au ministre dans ses
éditoriaux et même dans ses articles. Cette semaine, il y a un
article qui ne donne pas tout à fait raison au ministre. C'est dans la
Gazette du 16 mai 1983 et le titre est: "Justice is slow in Montreal's Superior
Court". Il y a des sous-titres, par exemple: "Delays in Toronto are only a
third as lengthly as those in Montreal". "There is also no sense of urgency
discernible and tackling the delays", etc. Je veux signaler que cette
étude a été faite par un journaliste, Henry Aubin, et il
n'était pas "coaché" par l'Opposition. Je signale cela au
ministre pour son intérêt.
M. Bédard: Je vous signale que ce n'est pas un article
où le journaliste est nécessairement en désaccord avec le
ministre de la Justice puisque j'ai moi-même dit qu'il y avait un
problème concernant les délais. Ils se situent d'une façon
spéciale au niveau de la Cour supérieure à
Montréal, pas dans tous les districts judiciaires. Déjà
nous avons fait adopter des mesures - le député de D'Arcy McGee
le sait - dans des projets de loi omnibus ayant pour objectif de diminuer les
délais, et, il y a eu une diminution sensible, mais insuffisante
toutefois. C'est pour cela que nous allons continuer nos efforts pour essayer
d'en arriver à une amélioration encore plus significative parce
qu'il est clair que, lorsque les délais sont longs, en fin de compte,
cela équivaut à un déni de justice pour bien des
personnes.
M. Marx: Je suis prêt à vous féliciter pour
avoir essayé d'améliorer la situation. Maintenant, à
propos des palais de justice, est-ce que le ministre a pris des mesures pour
couper les frais d'éclairage, de chauffage, enfin toutes sortes de frais
au palais de justice à Montréal?
M. Bédard: Votre question devrait s'adresser au
ministère des Travaux publics puisque cet aspect est assurément
sous sa responsabilité. Certaines remarques m'ont été
faites et je suis convaincu que le ministre des Travaux publics serait en
mesure de vous dire qu'il y a des mesures qui ont été prises.
M. Marx: Si je me suis trompé de ministre...
M. Bédard: Je pense au stationnement, entre autres. (17 h
15)
M. Marx: Malheureusement, on a déjà fait les
crédits du ministre des Travaux publics. J'ai eu de l'information, selon
laquelle, pour faire des économies, on a fermé une lampe
fluorescente sur deux, c'est-à-dire que, par hasard, on a fermé
les lampes fluorescentes placées au-dessus des juges, si les juges
siègent; je ne sais pas si c'était une bonne économie. Il
y a eu d'autres coupures pour faire des économies; on a enlevé
les serviettes dans certaines toilettes et on a mis la note suivante: Utilisez
le séchoir, mais il n'y a pas de séchoir dans ces toilettes et
ainsi de suite. Peut-être que le ministre pourrait faire une
enquête auprès du ministre des Travaux publics pour voir s'il fait
de fausses économies.
M. Bédard: Sur les toilettes!
Le Président (M. Champagne): M. le ministre, si vous
voulez bien répondre.
M. Bédard: Je vous promets de mobiliser toute la
Sûreté du Québec pour voir ce qu'il en est.
M. Marx: Je pense que c'est une bonne idée, surtout en ce
qui concerne l'illumination. Peut-être que le ministre pourrait jeter un
peu de lumière sur la question. Je suis heureux d'apprendre que ce n'est
pas vous ou un de vos sous-ministres qui êtes responsable de cette
situation.
M. Bédard: Naturellement, les sources du gouvernement ne
sont pas nécessairement les mêmes que celles du
député de D'Arcy McGee, mais on me m'a pas signalé... il
n'y a pas eu de tollés de protestation concernant certaines mesures
prises par le ministère des Travaux publics pour essayer de restreindre
les dépenses. Je vérifierai les petits cas dont me parle le
député de D'Arcy McGee.
M. Marx: Le ministre comprend...
M. Bédard: II y a peut-être d'autres sujets, par
exemple, où il y a eu plus de remue-ménage. Je pense, entre
autres, à la politique du ministère des Travaux publics en ce qui
a trait au stationnement.
M. Marx: Le ministre comprend bien que les gens sont parfois
gênés de dire au parti au pouvoir ce qu'ils sont prêts
à dire à l'Opposition.
M. Bédard: Je n'ai pas eu cette impression jusqu'à
maintenant.
M. Marx: C'est comme les détenus de Bordeaux. Après
avoir écrit quinze fois au ministre, ils m'écrivent.
M. Bédard: Je trouve qu'il n'y a pas grand-chose qu'on ne
dit pas. Je crois même qu'il y a certains députés qui
disent n'importe quoi.
M. Marx: C'est cela. Le ministre, député de
Chicoutimi, est parmi cette "gang".
M. Bédard: Je vous assure que je ne voulais pas vous
viser.
M. Marx: Non, mais, par exemple, à Bordeaux, le ministre
ne fait jamais d'inspection. Il faut que quelqu'un de l'Assemblée
nationale fasse la "job" pour lui. Il faut que...
M. Bédard: En tout cas! Cela ne me semble pas
sérieux par rapport...
M. Marx: Non, c'est très sérieux...
M. Bédard: ...aux sujets sérieux de la Justice dont
on parle.
M. Marx: ...parce qu'il y a beaucoup d'institutions que le
ministre n'a jamais visitées.
Le Président (M. Champagne): Y a-t-il d'autres questions
directement sur le programme 2?
M. Bédard: Si jamais j'ai un adjoint... M. Marx:
Ah! Ah!
M. Bédard: ...même si c'était le
député de D'Arcy McGee, je vois qu'il aurait peut-être du
travail intéressant à faire.
Le Président (M. Champagne): II n'y a pas d'autres
questions sur le programme 2 et ses éléments? Le programme 2 et
les trois éléments qui le composent sont-ils adoptés?
M. Marx: Pour le moment.
Le Président (M. Champagne): C'est adopté.
J'appelle le programme 3, Enquêtes et expertises scientifiques pour fins
judiciaires. M. le ministre.
Enquêtes et expertises scientifiques pour fins
judiciaires
M. Bédard: Le programme 3, Enquêtes et expertises
scientifiques pour fins judiciaires, se compose des trois
éléments suivants: élément 1, enquêtes sur
les décès et des incendies; élément 2, expertises
médico-légales; élément 3, expertises
scientifiques. Les éléments 1 et 2 sont sous la
responsabilité de la Direction générale des affaires
criminelles et l'élément 3 relève de la Direction
générale de la sécurité publique. Les effectifs
dont disposent les directions générales des affaires criminelles
et de la sécurité publique pour remplir les mandats qui leur ont
été confiés dans les domaines
énumérés sont de 110 postes réguliers et de 3
postes occasionnels.
Vous me permettrez de me limiter à des commentaires
généraux. Tel que mentionné précédemment, le
budget de ce programme est évalué à 5 553 600 $ pour
l'année financière 1983-1984, soit une augmentation de 149 000 $
par rapport au budget de 1982-1983. Cette augmentation résulte d'une
diminution de 97 300 $ aux catégories de traitements par suite d'une
diminution de l'effectif régulier de deux postes et de l'application des
nouvelles conditions de travail, ainsi que d'une augmentation de 246 500 $ pour
les autres dépenses de fonctionnement et de capital.
Des crédits additionnels ont été prévus,
d'une part, pour l'augmentation des honoraires et, d'autre part, pour la
révision des tarifs des coroners. La révision des tarifs des
pathologistes, à la suite de l'augmentation de 14% accordée aux
médecins spécialistes par le ministère des Affaires
sociales, représente une somme additionnelle de 69 700 $
À l'élément 3, on prévoit une augmentation
des dépenses de fonctionnement de 38 900 $ en raison de l'implantation
d'un protocole médical pour les victimes d'agression sexuelle. On sait
qu'aux crédits, l'an dernier, j'avais mentionné que nous
étions en discussion pour en arriver à l'implantation d'un
protocole médical concernant les victimes d'agression sexuelle. Ce
protocole est maintenant une réalité avec les coûts que
cela représente, comme je viens de le mentionner.
Le Président (M. Champagne): Est-ce que cela va?
M. Bédard: II s'agit de l'essentiel de mes remarques.
Le Président (M. Champagne): Est-ce qu'il y a des
commentaires ou des questions à poser sur le programme 3.
M. Marx: Oui, parce que cela touche...
Le Président (M. Champagne): M. le député de
D'Arcy McGee.
M. Marx: ...le dossier préféré du ministre.
Ce que Jean-Claude Leclerc a appelé, dans le Devoir, le scandale des
coroners.
Une voix: Pas tant que cela.
M. Bédard: II ne faut quand même pas
oublier qu'ils n'ont pas seulement fait du mal depuis que l'institution
est en place.
M. Marx: Quel est le statut du coroner? Est-ce qu'il ressemble
à celui du juge? Par exemple, est-ce que le coroner paie l'assurance
chômage? Est-ce qu'il est fonctionnaire ou non?
M. Bédard: Je m'excuse. Il y a un certain bruit, je ne
comprends pas toutes les questions du député de D'Arcy McGee.
M. Marx: On peut suspendre les travaux. Je pose la même
question pour la troisième fois.
M. Bédard: Vous ne m'en faites sûrement pas
reproche; allez-y.
M. Marx: Non. Quel est le statut du coroner? Est-ce que le
coroner est fonctionnaire? Est-ce qu'il a tous les avantages des
fonctionnaires? Est-ce qu'il a les avantages sociaux des juges? Comment cela
fonctionne-t-il sur le plan administratif?
Le Président (M. Champagne): M. le sous-ministre.
M. Marx: J'ai essayé de trouver des réponses dans
les documents du ministère, mais c'était difficile à
trouver; donc, je pose la question aujourd'hui. C'est le sous-ministre qui
répond?
Le Président (M. Champagne): Oui, c'est cela. Je lui ai
donné la parole...
M. Bédard: Voulez-vous me dire que vous avez fait une
grande thèse sans savoir comment ils étaient nommés, quel
était leur statut, etc?
M. Marx: Non, je sais comment ils sont nommés. C'est un
autre problème dont on peut discuter.
M. Bédard: Oui, d'accord.
Il y a deux types de coroners par rapport au statut. Il y a ceux qui
sont membres de la fonction publique et qui occupent des postes
d'administrateurs IV, donc des cadres; il y en a cinq de cette
catégorie. Ces coroners bénéficient du régime de
rémunération et du régime d'avantages sociaux des cadres
supérieurs du gouvernement. Il s'agit là de ce qu'on appelle les
coroners permanents.
Quant aux autres, notamment les coroners qui sont nommés dans les
régions, ils bénéficient d'un tarif et d'honoraires et
n'ont pas d'avantages sociaux particuliers; ils n'ont pas de régime
particulier de rémunération, ils sont payés à
l'acte.
M. Marx: Donc, les coroners contribuent à l'assurance
chômage, quoique les juges ne le font pas, parce qu'ils ne seront jamais
en chômage.
M. Bédard: Pour des raisons historiques, les coroners
permanents n'ont pas de statut qui s'apparente, en termes de conditions de
travail, à celui des juges. Conséquemment, ils paient toutes les
cotisations que, normalement, les fonctionnaires paient.
M. Marx: Que les juges ne paient pas, par exemple.
M. Bédard: Que les juges ne paient pas.
M. Marx: Est-ce que les juges ont certains avantages que les
fonctionnaires n'ont pas?
M. Bédard: Aucun avantage autre que ceux qui sont
attribués aux administrateurs dans IV.
M. Marx: D'accord, et les protections qui sont prévues
dans la Loi sur les coroners.
M. Bédard: C'est cela.
M. Marx: C'est-à-dire la destitution et ainsi de
suite.
Le Président (M. Champagne): Oui, M. le ministre.
M. Bédard: Je me permettrais d'ajouter que ce sont des
gens indépendants dans le travail qu'ils ont à effectuer.
M. Marx: II ne sont pas indépendants, si on se fie au
rapport de votre ministère.
M. Bédard: Je m'excuse, M. le Président. Si le
député de D'Arcy McGee ne veut pas aborder le sujet, je suis bien
prêt à l'aborder. Dans une étude, dans un rapport du
député de D'Arcy McGee - je ne sais pas quel numéro - qui
référait...
M. Marx: C'est sans numéro, il n'y a qu'une date.
M. Bédard: ...comme tous les autres rapports, à
l'essentiel de ce qui était contenu déjà dans des
réflexions faites au ministère de la Justice, le
député de D'Arcy McGee disait que le ministère avait
émis des directives - je cite - "pour indiquer aux coroners les cas
devant faire l'objet d'une recherche ou d'une enquête", alors que c'est
complètement faux. Je tiens à le dire parce qu'on a émis
de telles directives seulement dans le cas des autopsies, mais pas pour
désigner des cas de recherche ou d'enquête. Jamais.
M. Marx: Dans un cas bien connu a Montréal, n'est-il pas
vrai qu'un coroner a été saisi de ce cas et qu'un autre coroner a
reçu un appel de Québec de dessaisir le premier coroner et de
faire l'enquête lui-même? C'est un cas bien connu, en 1977.
M. Bédard: II n'y a pas de directives qui sont
données.
M. Marx: Quelqu'un a téléphoné pour lui
dire: On ne veut pas que ce soit vous qui vous vous occupiez de ce dossier, on
veut que ce soit un autre coroner qui s'en occupe. Est-ce vrai ou faux? Tout le
monde sait de quoi je parle. C'était un cas d'accident d'automobile.
N'est-il pas vrai que quelqu'un a demandé qu'un coroner soit dessaisi de
l'affaire et que le dossier soit donné à un autre?
M. Bédard: Je peux faire des vérifications, mais je
suis en mesure de dire qu'aucune directive...
M. Marx: C'est un fait notoire.
M. Bédard: Quels que soient les coroners en place,
à partir du moment où ils ont un mandat, ils ont à
accomplir ce mandat sans directive.
M. Marx: II n'y a jamais eu de directive venant de Québec
qui aurait dit: On ne veut pas que ce soit vous qui fassiez cette
enquête, on veut que ce soit un autre coroner? Jamais?
M. Bédard: Le Procureur général peut nommer
un coroner, c'est dans l'ordre normal des choses.
M. Marx: II arrive qu'un coroner soit saisi d'un dossier, d'un
cas particulier; pourquoi quelqu'un, à Québec, va-t-il dessaisir
un coroner d'un certain dossier? Cela arrive. Si le ministre ne connaît
pas le cas auquel je réfère, je peux lui donner les noms des
parties, mais je ne pense pas que cela va ajouter quoi que ce soit. Si le
sous-ministre dit qu'il va vérifier, les noms ne vont pas...
M. Bédard: Je n'ai aucune objection.
M. Marx: Vous avez dit qu'il n'y a pas d'immixtion du
ministère...
M. Bédard: II n'y en a pas.
M. Marx: ...dans les travaux du coroner. C'est totalement
faux!
M. Bédard: II n'y en a pas. Ce que vous dites, ce que vous
avez laissé entendre, à un moment donné, c'est qu'il y
avait des directives qui pouvaient être données aux coroners dans
les cas devant faire l'objet d'une enquête ou d'une recherche. Il me
semble que c'est une affirmation importante. Ce que je vous dis, tout
simplement, c'est que ce n'est pas le cas. Je pense que cela mérite
d'être corrigé.
M. Marx: Est-ce que le ministre a terminé?
M. Bédard: Pardon?
Le Président (M. Champagne): Avez-vous terminé
votre réponse, M. le ministre? C'est ce qu'on vous demande.
M. Marx: C'est parce que j'aimerais citer l'un de ces rapports;
peut-être qu'il ne s'en souvient pas parce que c'est un rapport qui date
de 1979. Dans un rapport de novembre 1979, intitulé: Pour la
réforme de l'institution des coroners, qui a été
écrit par des personnes inconnues de la direction de la recherche, au
ministère de la Justice... (17 h 30)
M. Bédard: C'est là qu'on voit où le
député de D'Arcy McGee prend ses sources.
M. Marx: Je prends mes informations des meilleures sources
possible. Pour cette citation, je trouvais que c'était la meilleure
source, la meilleure preuve. Le ministre connaît cela, il a
pratiqué le droit criminel. Dans ce rapport, aux pages 24 et 25, on lit:
"L'on peut s'interroger sérieusement sur le degré
d'indépendance des coroners permanents au niveau de la prise de
décisions, lorsque l'on songe qu'ils sont actuellement
évalués par le sous-ministre général adjoint et
directeur général des affaires criminelles à la suite
d'une fiche de notation comme tous les autres cadres d'un ministère et
qu'ils ont parfois à apprécier la conduite d'officiers du
Procureur général comme les policiers et les gardiens de prison.
Cette mise en doute de leur indépendance est d'autant plus grande
lorsque l'on songe que, d'une part, ils ont parfois è apprécier
la conduite de policiers ou gardiens de prison à l'occasion d'une
recherche ou d'une enquête sur un décès et que, d'autre
part, ils sont administrativement supervisés par le sous-procureur
général adjoint et directeur général des affaires
criminelles." Cela donne une idée de l'indépendance des
coroners.
M. Bédard: Le député de D'Arcy McGee
admettra avec moi que ce qu'il cite est l'opinion personnelle d'un
recherchiste. Ce que je vous dis, personnellement, comme Procureur
général, c'est que je n'ai jamais donné de directives. Il
n'y a jamais de directives qui ont été émises aux coroners
en ce qui a trait aux enquêtes ou à ce qui doit
faire l'objet d'enquêtes ou de recherches. C'est normal. Je fais
la mise au point.
M. Marx: J'imagine que le ministre n'a jamais donné une
directive écrite. Peut-être a-t-il téléphoné
à quelqu'un qui a lui-même téléphoné à
quelqu'un d'autre et ainsi de suite. Je ne sais pas comment cela
fonctionne.
M. Bédard: Non, je m'excuse. Je ne laisserai pas passer
cela. M. le député de D'Arcy McGee, on va arrêter de
divaguer. Je m'excuse!
M. Marx: Vous avez lu votre rapport.
M. Bédard: Je me fous de toutes les citations que vous
pourriez m'apporter provenant de qui que ce soit que ce soit du
député de D'Arcy McGee ou de quelque fonctionnaire que ce soit.
Tout ce que je vous dis - pour moi, c'est ce qui compte -c'est que, comme
Procureur général, je n'ai jamais émis de directives et je
n'ai pas l'intention d'en émettre.
M. Marx: Est-ce que des personnes sous votre direction ont
donné des directives?
M. Bédard: II n'y en a pas de directives. Concernant les
autopsies, c'est un autre sujet, le député de D'Arcy McGee le
comprendra.
M. Marx: Je pense qu'il serait bon que le ministre vérifie
les documents qui sortent de son ministère avant qu'ils sortent parce
qu'apparemment il y a toutes sortes de renseignements qui sont faux. Il y a un
autre rapport que je pourrais citer où on a repris les mêmes
propos.
M. Bédard: Quand je dis cela, cela ne veut pas dire,
encore une fois - d'ailleurs, je pense que, là-dessus, on est sur la
même longueur d'onde, le député de D'Arcy McGee et
moi-même - qu'il n'y a pas nécessité d'une réforme
de la Loi sur les coroners. Effectivement, il y en aura une qui sera faite en
profondeur. J'ai mentionné l'essentiel de ce sur quoi elle porterait
dans mon discours d'ouverture; je ne veux pas revenir là-dessus.
Cependant, concernant les délais que nous avons pris pour en
arriver au dépôt d'une réforme il y a quelques explications
à donner. Le député de D'Arcy McGee et d'autres peuvent
avoir eu l'impression qu'il y avait un retard difficilement acceptable, sauf
que je pense que ce retard peut s'expliquer. À la fin de 1979, nous
avons eu un rapport. Maintenant, ce premier rapport représentait, s'il
avait été mis en application, des impacts financiers très
importants. J'ai demandé - je pense que c'était tout à
fait normal - après de nombreuses consultations, qu'on essaie de trouver
le moyen de faire une refonte de la loi sans en arriver à la mise en
place d'une structure qui coûterait énormément cher, ce qui
a justifié d'autres études nécessaires. Ensuite,
après que j'ai eu tous les rapports -parce que c'est une réforme
très importante si on se place sous l'angle du respect des droits et
libertés, etc., j'ai demandé l'opinion du Conseil consultatif de
la justice, ce qui a occasionné également d'autres délais
que je crois justifiés. Maintenant, nous serons prêts, comme je
l'ai dit, à procéder dans les semaines qui viennent. Je crois
aussi, que, compte tenu d'autres priorités, quand on regarde toutes les
lois qui ont été présentées par le ministère
de la Justice et les réformes faites, l'ensemble du tableau peut
permettre de comprendre que la réforme de la Loi sur les coroners vient
en son temps et au moment le plus rapide, tenant compte des autres
circonstances. On compte sur la collaboration de l'Opposition. Cela devrait
bien aller.
M. Marx: Vous avez toujours la collaboration de l'Opposition
quand vous avez une bonne loi. C'est une rareté ici, mais on
espère...
M. Bédard: Comme la loi 67.
M. Marx: On va aider le ministre à l'améliorer et
on va avoir, je l'espère, une commission parlementaire pour recevoir des
mémoires. Je pense que ce serait utile dans un tel dossier, parce que
vraiment, il faut avoir - comment dirais-je? - l'opinion des gens qui sont dans
la pratique, qui font ce travail chaque jour, soit des coroners, soit des
avocats. Le ministre peut-il nous donner une idée sur cela?
M. Bédard: II n'y a pas de décision de prise
concernant le fait qu'il y ait une commission parlementaire ou non. On avisera
en conséquence, après le dépôt du projet de loi.
Nécessairement, il y a, à ce moment-là, des remarques
faites de part et d'autre par différents organismes; quand la
réforme est telle que l'essentiel semble susciter l'assentiment de
presque tout le monde, à ce moment-là, il y a lieu
d'évaluer si on a besoin d'une commission parlementaire.
M. Marx: C'est cela. Je fais cette suggestion dans
l'intérêt de tout le monde. Le ministre peut-il nous donner une
idée de sa vision de l'institution des coroners? Comment voit-il cette
institution? Je ne veux pas qu'il nous parle des détails; seulement
qu'il nous donne une vue d'ensemble de l'institution. Comment voit-il cette
institution dans l'administration de la justice au Québec?
M. Bédard: M. le Président, je résiste
difficilement à la tentation d'en parler en profondeur, sachant que je
dois déposer un projet de loi prochainement à ce sujet. Il reste
que...
M. Marx: C'est votre philosophie; pas une question de
détails.
M. Bédard: ...les habitudes sont quand même que les
premiers à connaître le contenu de l'ensemble du projet de loi
sont les parlementaires autant que possible. C'est ce que j'ai toujours
essayé de faire. J'ai indiqué...
M. Marx: Non, je ne veux pas de détails; seulement la
philosophie du ministre dans ce dossier.
M. Bédard: ...dans mes propos d'ouverture, l'essentiel de
la nouvelle orientation qui sera prise, à savoir, d'une part, confirmer
l'indépendance du coroner, essayer de développer son rôle
afin de lui permettre de se concentrer davantage sur la recherche des causes et
des circonstances du décès plutôt que vers la conclusion de
responsabilité criminelle ou pas. Également -j'ai eu l'occasion
de le dire, on en est tous conscients - cette loi qui a quand même eu ses
effets bénéfiques, sous bien des rapports était
désuète quant à l'organisation, aussi en ce qui a trait
à la protection des droits et libertés des individus. Donc, de ce
côté, sous l'angle de la protection des droits et libertés
des personnes qui auront à se faire entendre devant les coroners,
concernant le respect de la vie privée, il y aura une
amélioration plus que substantielle.
M. Marx: Je suis très heureux de voir que le ministre
rejoint pas mal les conclusions de l'Opposition sur cette question.
M. Bédard: Les conclusions de votre rapport originant du
rapport qui était déjà présenté au
ministère de la Justice.
M. Marx: Bon, le ministre peut le qualifier comme il veut.
M. Bédard: Quand vous avez des bonnes sources, on se
comprend tout le temps.
M. Marx: C'est cela. On m'a déjà demandé
lors d'une interview à la télévision: Qu'est-ce que le
ministre fait avec vos suggestions? Et ma réponse était simple,
le ministre répond toujours: J'ai déjà pensé
à cela.
M. Bédard: II faut dire que...
M. Marx: C'est cela. Le ministre a déjà
pensé à cela, comme toujours.
M. Bédard: Quand même je vous dirais...
M. Marx: Non, je pense que c'est bon. Cela démontre que le
ministre pense à tout et vite.
M. Bédard: Sur la question des coroners... Non, c'est
déjà très rassurant, j'en conviens avec vous.
M. Marx: Non, je trouve que c'est très bon.
M. Bédard: Cela montre que l'Opposition pense et c'est
rassurant aussi.
M. Marx: "Great minds think alike" comme on dit en anglais.
M. Bédard: Dans le cas des coroners, comme je dois dire la
vérité, je ne peux quand même pas dire qu'on n'y a pas
pensé avant. Avant même que le député de D'Arcy
McGee présente un rapport, il y avait des études au
ministère, il y avait déjà l'acheminement de l'ensemble du
rapport au Conseil consultatif de la justice. Alors, tant mieux quand
l'Opposition et le gouvernement pensent en même temps à des
choses!
M. Marx: Merci, M. le ministre. Je vais mettre les débats
d'aujourd'hui dans mon curriculum vitae, le cas échéant.
M. Bédard: Je ne sais pas de quoi vous me remerciez, par
exemple.
M. Marx: Le ministre a parlé du respect de la vie
privée des personnes qui se présentent devant le coroner et ainsi
de suite. Est-ce qu'on aura toujours ce qu'on appelle dans la loi actuelle le
témoin important? Est-ce que ce régime sera changé?
M. Bédard: Le député comprendra que j'entre
dans le contenu même des...
M. Marx: Non, je comprends. Je m'excuse, M. le ministre.
M. Bédard: Je peux vous dire que je résiste
difficilement à la tentation de répondre à cette
dernière question. Je pense que le projet de refonte apportera vraiment
une réponse satisfaisante.
M. Marx: Est-ce que le ministre vise un système, par
exemple, comme en Ontario, où il y a plutôt un "medical examiner",
un système qu'ils n'ont pas pris 10 ans à instaurer? Cela s'est
fait vite là-bas, peut-être parce qu'ils ont trouvé que
c'était une
priorité. Mais est-ce que c'est cela que le ministre envisage en
gros?
M. Bédard: Avant de condamner continuellement nos lois par
comparaison avec celles de l'Ontario, je pense qu'il faut toujours tenir compte
du fait qu'il y a des habitudes, des us et coutumes qui existent, qui ont
existé et des attentes du Québec qui ne sont pas
nécessairement celles qui existent en Ontario. Si on faisait des
comparaisons, je vous assure que ce n'est pas gênant de comparer
l'évolution de l'ensemble de nos lois avec l'Ontario.
M. Marx: Je prends la loi de l'Ontario comme modèle. Je
peux prendre la loi de l'État de l'Illinois ou je ne sais pas de quel
État des États-Unis si cela fait plaisir au ministre. J'ai pris
cela comme exemple.
M. Bédard: Une chose est certaine, on s'oriente - je l'ai
dit tout à l'heure - vers une structure légère, la plus
légère possible. C'est pour cela que je disais tout à
l'heure...
M. Marx: Si le ministre veut avoir notre collaboration, qu'il
dépose une loi avec des structures très légères...
(17 h 45)
M. Bédard: Qui répondent aux besoins.
M. Marx: ...qu'on n'érige pas toute une structure pour
rien. Je pense que c'est important.
M. Bédard: Vous êtes en train de toucher du doigt
pourquoi cela a pris plus de temps que prévu malgré ma
préoccupation d'aboutir le plus rapidement possible avec cette
réforme. Dans un premier temps, ce qu'on avait porté à mon
attention représentait, à mon sens, une structure beaucoup trop
lourde, beaucoup trop coûteuse; c'est pour cela qu'il a fallu approfondir
tout le dossier, ce qui a occasionné des délais additionnels.
M. Marx: Est-ce que le ministre va garder en place le commissaire
qui enquête sur les incendies? Est-ce que le ministre va garder cette loi
en vigueur? Ces deux lois se rejoignent. Il y a une loi qui vise le commissaire
qui fait enquête sur les incendies et il y a la Loi sur les coroners. Il
y a des chevauchements dans ces deux lois. Est-ce qu'on va fondre ces deux lois
en une? Est-ce qu'on aura un fonctionnaire au lieu de deux?
M. Bédard: Ce que je peux dire, c'est que nous sommes
très sensibles aux réalités qu'évoque le
député de D'Arcy McGee. Je comprends son impatience d'avoir un
projet de loi, mais le député est conscient aussi de nos coutumes
parlementaires. Il m'a demandé d'y aller de certaines indications sur
l'ensemble de la philosophie du projet de loi. Je pense avoir donné
l'essentiel.
M. Marx: Étant donné que le ministre se propose de
déposer un projet de loi, je ne veux pas faire état de tous les
problèmes de la loi actuelle, je ne veux pas répéter tout
ce que j'ai déjà dit sur cette question.
Le Président (M. Champagne): Le député de
Saint-Laurent avait demandé la parole.
M. Leduc (Saint-Laurent): On annonce un projet de loi. Il ne
s'agit pas de faire le post mortem, mais, particulièrement pour les
coroners qui n'étaient pas à temps plein, est-ce que le fait
qu'ils étaient payés à l'acte, sans considération
des cas, n'a pas été une raison pour laquelle on a
constaté qu'ils pouvaient manquer de sérieux? Peut-être que
dans certains cas on pouvait conclure un peu rapidement. Est-ce que,
d'après vous, cela pourrait être une raison pour laquelle on a
souvent décrié les coroners et leur fonction?
M. Bédard: Honnêtement, je ne crois pas que le fait
d'être payé à l'acte soit incompatible avec le
sérieux qui se devait d'être donné aux enquêtes.
M. Leduc (Saint-Laurent): Moi, j'ai des doutes.
M. Bédard: II peut toujours y avoir certaines exceptions,
mais je crois que, dans l'ensemble...
M. Leduc (Saint-Laurent): II n'y a jamais deux cas identiques.
Dans certains cas, cela peut demander un travail énorme. Je ne veux pas
douter de l'éthique professionnelle de ces gens, mais, tout de
même, je pense que ce n'était pas une formule très
appropriée. J'espère que vous ne la retiendrez pas dans votre
nouvelle loi.
M. Marx: J'aimerais lire le rapport de l'Opposition à la
page 4 sur cette question des honoraires. Je cite: "Le gouvernement a
adopté un tarif des coroners qui prévoit, par exemple, que, dans
le cas d'une recherche suivie d'une enquête, il verse une somme de 100 $
plus 30 $ pour chaque heure d'audition de témoins. En d'autres mots, le
100 $ couvre la recherche sur les circonstances d'une mort suspecte, la tenue
de l'enquête, sauf les heures d'audition des témoins, une visite
des lieux le cas échéant, la rédaction des verdicts et des
recommandations, s'il y a lieu. De plus, si le coroner doit se déplacer
par automobile, il reçoit une allocation de 0,12 $ par
kilomètre", alors que les fonctionnaires du Québec
reçoivent, je pense, 0,24 $ par kilomètre parcouru.
"S'il s'agit d'une recherche où le coroner en arrive à la
conclusion qu'il s'agit d'une mort naturelle, le gouvernement lui verse
actuellement des honoraires de 50 $, alors qu'au début de 1979 un
coroner recevait 100 $ pour une telle recherche. Il nous apparaît ici
assez curieux que des honoraires soient reliés à la nature du
verdict rendu. Imaginons, un instant, ce que serait l'administration de la
justice s'il fallait que les juges soient rémunérés en
fonction de leurs jugements, le juge étant mieux payé, par
exemple, lorsqu'il trouve le prévenu coupable de telle infraction, de
tel acte criminel."
Le ministre est déjà en fonction depuis 1976. Il avait le
temps de changer le tarif des coroners, mais, évidemment, il
était bien occupé avec d'autres choses. C'est évident.
Voilà.
M. Bédard: C'était pire avant. Il reste, quand
même, que sur ce sujet particulier des tarifs...
M. Marx: En 1843, c'était encore pire qu'il y a quelques
années. Cela dépend où on veut commencer.
M. Bédard: Ce que je veux vous dire c'est qu'avant
c'était pire. Vous avez terminé? Nous avons, quand même,
apporté un amendement, vous ne vous le rappelez pas, concernant les
tarifs parce que cette situation, on la trouvait plutôt
déplorable. Maintenant, quand nous aurons fait l'amendement, nous
n'aurons pas fait la réforme de toute la Loi sur les coroners parce que
nous savons que nous devons aboutir à une réforme
complète.
M. Leduc (Saint-Laurent): Rémunéré à
l'heure.
M. Marx: Ce sont des coroners à temps partiel. Ce ne sont
pas des coroners à temps plein.
M. Leduc (Saint-Laurent): À temps plein, ils ont une
rémunération fixe. En fait, c'est inconcevable. On les paie
à l'acte.
M. Bédard: En fait, vous êtes en train
d'évoquer tous les éléments qui font qu'il y ait une
réforme en profondeur du système des coroners.
M. Marx: Je ne suis pas prêt à excuser le ministre
aussi vite. Comme le...
M. Bédard: II me semblait.
M. Marx: ...tarif des coroners...
M. Leduc (Saint-Laurent): Tu pourrais lui donner l'absolution,
Herb.
M. Marx: ...se trouve dans un règlement, le ministre ne
peut pas plaider que c'est difficile de faire changer le règlement
étant donné que ce n'est pas nécessaire de passer par
l'Assemblée nationale; il peut passer par le Conseil
exécutif.
M. Bédard: Les enquêtes publiques d'un coroner,
c'est à l'heure. Un coroner ad hoc pour des enquêtes publiques,
c'est à l'heure.
M. Marx: Est-ce que le ministre veut que je lui rappelle ce que
j'ai déjà dit?
M. Bédard: Non, vous n'avez pas besoin de le
répéter. Je le déplore autant que vous et c'est pour cela
que nous déposons une réforme du système des coroners.
M. Marx: Déplorer, ce n'est pas une réponse. On
peut déplorer tout ce qui se passe au Québec; si le ministre est
prêt à déplorer ce qui arrive à Bordeaux, ce qui
arrive à Parthenais, il peut toujours répondre: Je
déplore, et cela va continuer.
M. Bédard: Vous ne voulez vraiment pas comprendre. Ma
réponse n'est pas que je déplore, ma réponse est que je
vous dis qu'il va y avoir une réforme en profondeur. C'est cela, ma
réponse.
M. Marx: Qu'est-ce qui a empêché le ministre de
changer le tarif depuis sept ans?
M. Bédard: II y a eu des changements aux tarifs.
M. Marx: Pour rempirer la situation. C'est cela, vos
changements.
M. Bédard: Tirez vos conclusions comme vous voudrez. Je
vous ai dit qu'il y avait eu des aménagements et des changements aux
tarifs. C'est, justement, à partir de la constatation de toute cette
situation qu'on a dit: Ce n'est pas avec de petits amendements qu'on va
régler les problèmes. Il va falloir y aller d'une réforme
en profondeur. Je pense que ceci a été fait, quand même,
avec une certaine célérité étant donné la
précaution qu'il faut y apporter lorsqu'on parle de remise en cause du
système complet. Je vous ai évoqué tout à l'heure
les études qui avaient été faites, les réanalyses
des premières études qui nous avaient été
proposées, qui représentaient...
M. Marx: Le ministre peut-il nous décrire les changements
qu'il a faits et quand il a fait ces changements?
M. Bédard: Ce que je vous ai dit, c'est que nous avons
été à même de constater la situation
qu'évoque le député de D'Arcy
McGee. Dès le départ, nous avons demandé une
étude. Il y avait déjà un travail. Cela fait longtemps,
d'ailleurs, qu'une réflexion était amorcée concernant une
réforme de la Loi sur les coroners. Pour ma part, j'ai eu ce rapport
à la fin de juin 1979, début 1980. Le premier rapport qui m'a
été présenté n'était pas satisfaisant parce
que cela représentait une structure, encore une fois, trop lourde et
trop coûteuse. J'ai demandé de réapprofondir. En plus, j'ai
demandé - je pense que cela s'imposait - une consultation ou un avis
auprès du Conseil consultatif de la justice. Toutes ces démarches
ayant été faites, nous serons en mesure dans quelques semaines de
déposer le projet de réforme.
M. Marx: Quand le ministre a-t-il pris la décision
libérale d'augmenter le kilométrage des coroners à 0,12 $
le kilomètre? C'est 0,24 $ pour les fonctionnaires et 0,12 $ pour les
coroners. Ils ne sont pas tout à fait égaux. Pour les
députés, c'est seulement 0,20 $, mais il faut que les
députés se serrent la ceinture.
Le ministre a compris le sens de mes questions et j'ai compris le sens
de ses réponses. Pendant sept ans, il n'a pas fait grand-chose et cela
prendra encore quelques mois, sinon une année, avant qu'on apporte des
solutions à cette question, parce que la loi ne sera pas
déposée avant le 1er juillet; j'ai demandé au ministre de
modifier le tarif des coroners jusqu'à l'adoption de la nouvelle loi.
Pourquoi ne pas apporter, entretemps, une solution qui soit plus juste?
Pourquoi faire attendre encore les coroners pendant des mois avec des tarifs un
peu ridicules, comme le ministre l'a admis?
M. Bédard: M. le Président, au cours de
l'année 1983, cette réforme sera une réalité.
M. Marx: Pourquoi faire souffrir les coroners encore quelques
mois?
M. Bédard: Sur un point particulier concernant le prix du
kilométrage, si le député de D'Arcy McGee le veut, nous
pourrons faire un amendement très rapide au niveau du bill omnibus.
M. Marx: Non, mais ce n'est pas...
M. Bédard: Ce sera adopté avant la fin de la
présente partie de la session.
M. Marx: La Loi sur les coroners? M. Bédard: Le
tarif.
M. Marx: Ah! Le tarif ne dépend pas de l'Opposition. C'est
dans un règlement. Donc, cela dépend seulement du ministre, mais
les règlements ne sont pas adoptés à l'Assemblée
nationale, que je sache. Ai-je raison, M. le ministre? Ai-je raison? Ai-je
raison?
M. Bédard: Sur...
M. Marx: Sur le tarif des coroners. Cela se fait par
règlement.
M. Bédard: On me dit que cela prendrait, quand même,
un amendement.
M. Marx: À la loi?
M. Bédard: À la loi, pour préciser les
pouvoirs habilitants, etc.
M. Marx: Pour changer le kilométrage des coroners, cela
prend une loi? C'est incroyable! Cela prend quatre gars pour la même
question.
M. Bédard: Sur la possibilité de certains
amendements, je me donnerai jusqu'à demain pour
réfléchir.
M. Marx: Non. Pour changer le kilométrage, est-ce que cela
prend une loi ou un règlement? Cela prend une consultation de sept
personnes. Ce n'est pas fort, mais peut-être que j'attendrai
jusqu'à demain...
M. Bédard: Je serais porté à dire...
M. Marx: ...pour que le ministre ait le temps de consulter la
personne qui a le renseignement exact.
M. Bédard: ...que c'est pire de consulter six ou sept
personnes que d'en consulter une seule.
M. Marx: Je ne m'attends pas que le ministre ait cet
renseignement à la portée de la main, quoique j'ai lu le
règlement et il me semble que c'est par règlement. J'ai lu le
règlement. Je ne l'ai pas avec moi maintenant, mais je l'ai lu et
c'était comme une "joke". C'était très drôle.
M. Bédard: Je suis porté à croire que c'est
seulement par règlement, mais on fera de plus amples
vérifications.
M. Marx: Lors de la reprise à 20 heures ce soir, le
ministre pourra-t-il nous fournir ce renseignement?
M. Bédard: Oui, oui... M. Marx: Oui? Merci. M.
Bédard: ...avec plaisir.
Le Président (M. Champagne): S'il n'y a pas d'autres
questions sur le programme 3, pourrait-on l'adopter?
M. Marx: On va voir à 20 heures.
Le Président (M. Champagne): Vous allez attendre?
D'accord. La commission élue permanente de la justice suspend ses
travaux jusqu'à ce soir, 20 heures.
(Suspension de la séance à 18 heures)
(Reprise de la séance à 20 h 11)
Le Président (M. Champagne): À l'ordre, s'il vous
plaît! Il y a plusieurs observateurs ici.
La commission élue permanente de la justice reprend ses travaux.
Nous en étions au programme 3. On s'est laissé sur une question
venant du député de D'Arcy McGee et on laisse la réponse
à M. le ministre.
M. Bédard: M. le Président, concernant le sujet sur
lequel nous nous sommes laissés et auquel je devais apporter une
réponse, j'ai parlé avec le député de D'Arcy McGee
et nous avons convenu que, d'ici la fin des crédits, je trouverais le
moyen d'arriver avec une décision ou une réponse. J'ai des avis
partagés, donc l'obligation normale de faire les évaluations
nécessaires.
Le Président (M. Champagne): M. le député de
D'Arcy McGee.
M. Marx: C'est une façon élégante de s'en
sortir et je l'accepte.
M. Bédard: D'accord. Après cela, je ferai
connaître la décision au député de D'Arcy McGee;
alors, on verra où est l'élégance.
M. Marx: Sur les honoraires des coroners, on aura la
réponse vers la fin de la commission.
J'ai une autre question. J'ai parlé d'un dossier qui a
été enlevé à un coroner et donné à un
autre en 1967; c'était un dossier qui impliquait un personnage
important. En même temps, je demande au ministre de faire enquête
sur cette question et de nous donner la réponse, à savoir si
c'est vrai ou non.
M. Bédard: Je n'ai pas d'enquête à faire sur
cette question. J'ai déjà - je vous le dis honnêtement -
répondu à toutes les questions qui m'ont été
posées à l'occasion de crédits successifs et je n'ai pas
autre chose à ajouter; tout est là.
M. Marx: Peut-être qu'il y a des faits nouveaux?
M. Bédard: Non, il n'y a pas de faits nouveaux.
M. Marx: Non?
M. Bédard: Non, honnêtement, il n'y a pas de faits
nouveaux.
M. Marx: Que serait un fait nouveau? Ce serait un affidavit de
quelqu'un qui était impliqué? Est-ce que c'est cela?
M. Bédard: Tout ce que je peux vous dire, c'est qu'il n'y
a pas de faits nouveaux.
M. Marx: Le ministre donne comme réponse qu'on n'a pas
dessaisi un coroner d'un dossier et que celui-ci n'a pas été
donné à un autre, qu'il n'y avait pas d'immixtion du
ministère.
M. Bédard: J'ai dit - je ne pense pas que ce soit
nécessaire de le répéter - que, contrairement à ce
qu'on a pu laisser entendre, jamais des directives n'ont été
émises par le ministère de la Justice. Pour ce qui est de toutes
les autres questions concernant ce sujet, j'y ai déjà
répondu à l'occasion de deux périodes de crédits.
Aucun fait nouveau n'a été porté à mon attention
qui soit de nature à me faire ajouter quoi que ce soit.
M. Marx: Non. Malheureusement, je n'étais pas ici. J'ai lu
les débats des autres sessions de crédits et je n'ai pas
trouvé la réponse. J'ai pensé que peut-être,
à la sixième fois, le ministre serait prêt à faire
un peu de lumière sur cette question.
M. Bédard: Toute la lumière a été
faite là-dessus et j'ai répondu à toutes les
questions.
M. Marx: J'ai vérifié dans le journal des
Débats avec un...
M. Bédard: On peut ne pas être du même avis,
cher ami.
M. Marx: ..."flash light" et je n'ai rien trouvé.
M. Bédard: Même avec deux "flashlight".
M. Marx: Le ministre veut-il dire que jamais des instructions ne
sont données par qui que ce soit du ministère aux coroners?
M. Bédard: II faut faire la distinction entre les
autopsies...
M. Marx: ...pour des enquêtes... M. Bédard:
J'ai dit ce qui en était. M. Marx: À votre
connaissance?
M. Bédard: C'est la même question. Je ne peux faire
autrement que de donner la même réponse, pour la bonne et simple
raison que la réponse que je vous ai donnée, c'est la
réalité.
M. Marx: II peut y avoir une réponse différente
pour un personnage et une réponse différente concernant un cas
général.
M. Bédard: Non, surtout pas. Quant à la justice,
les réponses et les décisions ne sont surtout pas fonction des
personnes; elles sont toujours prises en fonction des principes qui
s'appliquent à tous les citoyens et citoyennes à partir du grand
principe d'égalité de tous les citoyens devant la loi.
Le Président (M. Champagne): Est-ce que cela va, M. le
député?
M. Marx: Cela ne va pas, mais je n'ai pas le choix.
M. Bédard: Je ne vois pas pourquoi ça ne va pas. Je
ne peux pas vous répondre.
M. Marx: Pourquoi ça ne va pas? Parce que c'est un fait
notoire qu'un coroner a été dessaisi d'un dossier concernant un
personnage important. Le dossier a été donné à un
autre. Même si vous ne voulez pas l'admettre, tout le monde est au
courant. Peut-être que ça ne ferait pas grand-chose si le ministre
faisait l'aveu de cette situation.
M. Bédard: Je n'ai aucun aveu à faire, sinon de
dire que toutes les réponses aux questions qui ont été
posées, concernant le sujet qui préoccupe le député
de D'Arcy McGee, ont été données déjà
à l'occasion de deux périodes de crédits. Je n'ai rien
d'autre à ajouter.
M. Marx: J'aimerais poser une dernière question. Les
réponses ont été données à quel
député? Est-ce que c'était le député de
Saint-Laurent, qui était le porte-parole de l'Opposition, le
député de Marguerite-Bourgeoys ou un autre?
M. Bédard: C'est à l'occasion de deux
périodes de crédits. Je ne suis quand même pas en mesure de
dire s'il y en a quatre ou cinq qui m'ont posé des questions ou
seulement un.
Le Président (M. Champagne): M. le député de
D'Arcy McGee, j'ai bien entendu que c'était votre dernière
question.
M. Marx: Oui, c'est parce que le ministre ne veut pas
répondre.
M. Bédard: Ce n'est pas que je ne veux pas
répondre, je vous ai dit que j'ai répondu.
C'est bien différent. Ne me faites pas dire ce que je n'ai pas
dit.
M. Marx: La torture est illégale en vertu de la charte
fédérale qui ne s'applique pas ici...
M. Bédard: Oui, la torture vient de votre
côté.
M. Marx: ...mais je vais arrêter mes questions.
M. Bédard: Vous allez arrêter votre
harcèlement.
Le Président (M. Champagne): S'il n'y a plus d'autres
questions, est-ce que le programme 3, avec les trois éléments qui
le composent, est adopté?
Des voix: Adopté.
Le Président (M. Champagne): Adopté. J'appelle le
programme 4, Protection des droits et libertés de la personne.
M. le ministre, à vous les commentaires.
Protection des droits et libertés de la
personne
M. Bédard: Oui, M. le Président. On retrouve,
à l'intérieur de ce programme, deux organismes: le Comité
de la protection de la jeunesse, qui est sous la responsabilité de M.
Tellier, qui est avec nous, et la Commission des droits de la personne, dont la
présidence est assumée par Mme Francine Fournier qui doit nous
rejoindre dans quelques instants.
La Commission des droits de la personne, comme on le sait, a
été créée en 1975 par la Charte des droits et
libertés de la personne et a pour mandat de promouvoir, par toutes les
mesures appropriées, les principes contenus dans la Charte des droits et
libertés de la personne, d'exercer des pouvoirs et d'exécuter des
devoirs prescrits par celle-ci. De plus, la commission reçoit et
étudie des demandes du public touchant les droits de la personne et fait
ensuite au gouvernement les recommandations qu'elle juge appropriées. Ce
mandat fut modifié afin de l'adapter davantage aux besoins de la
société québécoise et pour accroître la
protection qu'elle confère à ses membres.
Le Comité de la protection de la jeunesse a le mandat de veiller
à ce que les mesures de protection soient rendues accessibles à
l'enfant dont la sécurité ou le développement est
compromis et de veiller à ce que des services adéquats soient
également rendus aux adolescents et adolescentes qui ont commis un
délit et dont la décision à leur égard exige des
services.
Le comité doit, en outre, assurer le respect des droits reconnus
par la loi à ces enfants ou adolescents. Les autres
responsabilités du comité concernent la promotion de
l'information, de la prévention et de la participation d'individus ou de
groupes aux activités de la protection de la jeunesse ainsi que la
poursuite d'études et de recherches.
Le budget de ce programme s'établit à 4 425 100 $ dont 2
773 000 $ pour la Commission des droits de la personne et 1 652 100 $ pour le
Comité de la protection de la jeunesse. Les crédits
affectés à la Commission des droits de la personne devront
être ajustés en fonction des responsabilités additionnelles
qui lui ont été confiées par la loi 86. La commission est
en train de préparer son plan d'organisation en conséquence pour
adoption par le Conseil du trésor. Les sommes requises seront prises sur
le fonds consolidé du revenu pour l'année 1983-1984.
Maintenant, on pourrait peut-être en aborder l'étude. Nous
avons avec nous M. Tellier. On pourrait peut-être commencer avec M.
Tellier, si vous n'avez pas d'objection, étant donné que Mme
Fournier n'est pas arrivée encore.
Comité de la
protection de la jeunesse
M. Marx: On peut poser la première question. Qu'advient-il
des amendements à la Loi sur la protection de la jeunesse?
Qu'arrive-t-il à votre projet de loi qui a été "rush,
rush, rush" il y a un an? Maintenant, est-il renvoyé aux calendes
grecques?
M. Bédard: Le député de D'Arcy McGee a
toujours une manière d'aborder les choses qui permettent difficilement
les discussions saines et constructives. Je dois lui dire, premièrement,
que la préoccupation du gouvernement et du ministère de la
Justice en ce qui a trait à des amendements apportés à la
Loi sur la protection de la jeunesse a toujours été très
présente. Nous avions même préparé des amendements
pour être adoptés, sauf qu'à un moment donné, il y a
eu la mise sur place de la commission Charbonneau, travaux auxquels a
participé l'Opposition, qui a abouti au rapport que l'on sait. C'est
quand même un sujet vaste que celui dont nous parlons. Le rapport est
aussi très élaboré. Il demande que des discussions soient
entreprises entre les deux différents ministères
concernés. À la Justice, nous sommes responsables de
l'application d'une partie de la loi ainsi que le ministère des Affaires
sociales quant à l'autre.
Je suis en mesure de dire au député de D'Arcy McGee que,
d'ici à une semaine ou deux, au plus tard - ce sujet est à
l'ordre du jour du Comité de développement social - il sera
indiqué de terminer les discussions qui doivent avoir lieu entre les
deux ministères. Une fois cette étape franchie, comme c'est la
coutume, des recommandations, des mémoires seront acheminés au
niveau du Conseil des ministres qui aura à prendre les décisions.
Maintenant, il n'est pas impossible que nous puissions en arriver au
dépôt d'un projet de loi avant la fin de la présente partie
de la session. Cela n'est pas assuré.
M. Marx: J'étais à cette commission Charbonneau, M.
Sirros aussi, et on nous a dit que la loi était urgente pour
l'été 1982. Maintenant, nous en sommes presque à
l'été 1983. C'est devenu moins urgent.
M. Bédard: Effectivement...
M. Marx: ...et ce ne sera pas adopté avant juillet.
M. Bédard: ...elle était urgente, parce que nous
avions des problèmes réels d'ajustement avec l'ensemble de
l'action policière. Étant conscients, à partir de la mise
en place d'une commission, de la nécessité d'aller au fond des
choses, ensuite, étant conscients qu'une fois les travaux de cette
commission terminés il y aurait l'obligation de débats entre les
ministères concernés et au niveau gouvernemental, nous avons
été en mesure de faire en sorte que l'urgence que je mentionnais
tout à l'heure puisse souffrir un délai.
M. Marx: Nous en sommes au programme 4 et, dans chaque programme,
le ministre nous donne comme réponse: Nous avons eu des
problèmes. Ce n'est pas facile. C'est difficile. J'ai beaucoup de
sympathie pour le ministre, mais finalement...
M. Bédard: Évidemment, M. le Président, je
n'accepte pas cette version du député de D'Arcy McGee. Il invente
des réponses que je n'ai pas données. Il y a des programmes
où, très clairement, on a indiqué les gestes posés.
Vous l'avez... À partir des jugements, vous avez eu toutes les
réponses nécessaires concernant les délais...
M. Marx: Rien n'est réglé.
M. Bédard: ...dans toutes les questions que vous avez
posées.
M. Marx: Mais rien n'est réglé dans chacun des
programmes. Il y a toujours un bout que le ministre n'a pas soit le temps de
faire, soit la volonté politique, soit les ressources, soit l'argent; il
y a toujours une excuse.
M. Bédard: Question de règlement. Je m'excuse, M.
le Président.
M. Marx: C'est malheureux. C'est malheureux.
Le Président (M. Champagne): Question de règlement,
M. le ministre.
M. Bédard: Si le député de D'Arcy McGee veut
des réponses dans le sens que tout est réglé au
ministère de la Justice, que tous les problèmes sont
réglés en fonction des dix prochaines années, il n'aura
jamais cette réponse de moi. Ce n'est pas le temps de fermer le
ministère de la Justice. Nous réglons des problèmes. Il y
en a toujours d'autres à régler et je pense que ce sera toujours
ainsi.
M. Marx: Je ne veux pas continuer cette discussion, mais
j'aimerais que le ministre arrive une fois et dise: J'ai réglé
des problèmes au programme 3 ou au programme 4, j'ai fait quelque chose
pour régler des problèmes. De toute façon, je...
M. Bédard: Vous l'avez dans mes notes
préliminaires. Vous avez vu tout le bilan du ministère de la
Justice - il est imposant, à part cela - concernant l'année
1982-1983 dans le domaine des lois, au niveau des décisions
administratives, en termes de gestion administrative ou dans l'organisation
administrative du ministère, etc. Vous avez eu, à ce
moment-là, l'occasion de voir, de constater...
M. Marx: Ce n'est pas impressionnant.
M. Bédard: ...que beaucoup de problèmes avaient
été réglés et que beaucoup de lois avaient
été adoptées. Si vous pouvez me contredire
là-dessus, j'accepterai votre verdict, mais vous ne pouvez pas me
contredire.
Le Président (M. Champagne): Oui, oui. Il faudrait
peut-être faire attention de respecter le droit de parole de chacun, s'il
vous plaît, et peut-être en rester aussi au programme qu'on
étudie. J'avais retenu la demande du député de
Sainte-Marie.
M. Bisaillon: M. le Président, si je comprends bien, on
étudie l'élément 2.
Le Président (M. Champagne): On étudie le programme
4...
M. Bisaillon: Le programme 4 au complet?
Le Président (M. Champagne): ...et les
éléments 1 et 2.
M. Bisaillon: M. le Président, mes questions porteront
davantage sur l'élément 1 du programme 4.
Une voix: ...
M. Bisaillon: C'est ce que j'avais compris, étant
donné que M. Tellier était là.
Le Président (M. Champagne): Je pense qu'au point de
départ on a été quand même assez, j'allais dire,
"élastique", à savoir qu'on étudie le programme, parce
que, M. le député... Tout à l'heure, vous parliez d'autres
programmes dans vos interventions. Je pense bien que, si on parle du programme
4, on peut parler à la fois des éléments 1 et 2.
M. Marx: Oui, mais la présidente de la Commission des
droits de la personne est ici.
M. Bisaillon: M. le Président, étant donné
que Mme Fournier est arrivée, ne pourrait-elle pas se joindre au
ministre pour qu'on puisse indistinctement poser des questions sur les
éléments 1 et 2?
Le Président (M. Champagne): Oui, d'accord. Mme Fournier
est-elle ici?
M. Bédard: Oui. Il me semble, M. le
Président...
Le Président (M. Champagne): Oui? Cela dépend aussi
du ministre. Est-ce que vous...
M. Bédard: Ce que nous avons convenu... Pardon?
M. Bisaillon: Cela ne dépend pas seulement du ministre.
Cela dépend aussi des membres de la commission.
M. Bédard: Oui, mais j'espère que le ministre peut
encore avoir son opinion.
M. Bisaillon: Oui, oui, il peut avoir un droit de parole.
M. Bédard: Oui?
Le Président (M. Champagne): Non, non. Je pense qu'il
répond. S'il veut donner la parole...
M. Bédard: Non, mais, M. le Président...
M. Bisaillon: Je n'ai pas de questions sur
l'élément 2. (20 h 30)
M. Bédard: La protection de la jeunesse, nous n'en avons
pas pour trois heures à en parler, M. le Président. De toute
façon, au début des travaux, j'ai indiqué que M. le
président du Comité de la protection de la jeunesse était
avec nous. Nous l'avons invité à s'avancer. Il me semble que nous
pourrions disposer de l'élément concernant la
protection de la jeunesse.
Une voix: J'ai d'autres questions sur l'élément
2.
Le Président (M. Champagne): Ah!
D'accord. Si on s'entend là-dessus. M. le député de
Marquette, avez-vous une question sur l'élément 2? M. Tellier est
prêt à répondre.
M. Dauphin: Oui, d'accord. Alors, je remercie M. Tellier
d'être ici. À vrai dire, il a été une
personne-ressource remarquable au sein de la commission itinérante de la
protection de la jeunesse.
Quelques petites questions sur le fond, M. le ministre. La commission
Charbonneau, dans son rapport, recommandait la réduction de l'âge
pour la responsabilité criminelle, qui était abaissé
à l'âge de 12 ans, si ma mémoire est bonne. Je sais
pertinemment que le premier ministre, par son message inaugural, a l'intention
d'aller de l'avant, vous l'avez dit vous-même tantôt, sur certains
amendements à la loi 24, Loi sur la protection de la jeunesse. Est-ce
que le ministre...
M. Bédard: Je ne sais pas s'il est allé de l'avant
sur la réduction de l'âge, mais, comme vous le dites...
M. Dauphin: J'aimerais savoir ce que pense le ministre de cette
réduction de l'âge à 12 ans, pour la responsabilité
criminelle.
M. Bédard: M. le Président, je ne veux pas entrer
dans la discussion du projet de loi à être déposé.
Au moment où on se parle, nous en sommes à acheminer la position
du ministère de la Justice au Comité de développement
social. Le ministère des Affaires sociales en fera de même et,
à partir de cette discussion, il y a la référence au
Conseil des ministres pour décision. Je pense que le
député comprendra qu'à partir du moment où on est
en mesure de dire qu'incessamment un projet de loi pourrait être
déposé, je ne peux quand même pas en livrer le contenu
avant même que les discussions soient complétées ou que les
décisions soient prises par le Conseil des ministres.
M. Dauphin: Autrement dit, si je comprends bien, cela ne nous
sert à rien d'aborder le fond d'un éventuel projet de loi au
stade où nous en sommes présentement. Je me limiterai aux
chiffres que nous avons devant nous. Pour 1982-1983, les crédits au
Comité de la protection de la jeunesse étaient de 3 272 000 $;
pour 1983-1984, ils sont de 1 600 000 $. On nous explique dans le cahier des
crédits que cela représente l'objectif initial de compression.
Est-ce qu'on pourrait savoir du ministre ce qu'il entend par objectif initial
de compression? Est-ce que c'est l'abolition des PDMJ éventuellement?
Est-ce que le ministre pourrait nous donner des détails à ce
sujet?
M. Bédard: La compression dont il est question dans le
livre ne vise pas les PDMJ parce que les personnes désignées par
le ministre de la Justice relèvent d'un autre programme qui est celui du
soutien administratif aux tribunaux, le programme 2.
L'objectif de compression qui est ici est un objectif qui est
déterminé par les mesures d'austérité. Il y a
plusieurs critères qui nous aident à déterminer ce qui
doit être comprimé ou compressé, suivant certains. C'est
soient les endroits où il y a beaucoup de gras, comme on dit, ou les
endroits où on pense que, dans certaines vocations gouvernementales ou
paragouvernementales, il peut y avoir certains conflits
d'intérêts. Bien avant que la commission Charbonneau ne remette
son rapport, on avait fixé comme objectif d'essayer de réduire au
minimum les conflits d'intérêts qu'il pouvait y avoir entre les
deux grandes missions du Comité de la protection de la jeunesse, soit un
mandat, d'une part, de surveillance des institutions des différents
réseaux et le mandat de recherche et de préparation de
politique.
Les institutions sont critiquées à l'occasion parce
qu'elles cumulent différentes vocations contradictoires. C'est dans
cette optique qu'on a pris cet objectif de compression. À toutes fins
utiles, cela veut dire que les services de recherche, les services
d'information et les services d'animation du Comité de la protection de
la jeunesse avaient été visés comme cibles. Cependant, au
moment où on se parle, l'opération est suspendue, étant
donné que les décisions finales à l'égard de la loi
24 ou de ses modifications ne sont pas prises. Cet objectif de compression
représente 22 postes. Donc, tout est en suspens au moment où on
se parle. D'ailleurs, je pourrais peut-être demander à M. Tellier,
président du Comité de la protection de la jeunesse, d'expliciter
cela davantage. Cet objectif de compression avait été fixé
d'un commun accord avec cet organisme, même qu'il sentait qu'il
remplissait des missions quelque peu inconciliables.
D'ailleurs, c'est pour cela que, dans les notes explicatives qui vous
sont parvenues, on mentionne bien que, à la lumière des
décisions qui seront prises en regard des recommandations du rapport
concernant la Loi sur la protection de la jeunesse, des ajustements peuvent
être apportés avec des implications budgétaires, il va sans
dire, selon la nature des choses, selon les décisions finales du Conseil
des ministres et la nature des amendements qui seront apportés ou
retenus.
M. Dauphin: M. le Président, je voudrais seulement
corroborer les propos que mon collègue de D'Arcy McGee a tenus
tantôt. Au début, nous avons eu l'occasion de siéger
à la commission et, malheureusement, on a dû quitter. Mais on
avait une espèce d'épée de Damoclès nous limitant
à trois ou quatre mois. Là, on se retrouve, un an plus tard, et
on se demande même si le projet de loi sera déposé pendant
la session. C'était mon dernier commentaire.
Le Président (M. Champagne): Y a-t-il d'autres questions
concernant l'élément 2?
M. Marx: C'est difficile d'entamer une discussion parce que tout
est encore secret. Qu'est-ce qu'on va discuter?
Le Président (M. Champagne): Ce qui veut dire que
l'élément 2...
M. Marx: Le ministre gagne par défaut.
M. Bédard: Le député de D'Arcy McGee le
dit...
M. Bisaillon: C'est la façon habituelle de gagner du
ministre de la Justice.
M. Marx: C'est cela, voilà quelqu'un qui le connaît
bien.
M. Bédard: Le député de D'Arcy McGee l'a dit
avec le sourire. Je ne gagne pas par défaut. Il y a déjà
une Loi sur la protection de la jeunesse qui a été adoptée
à l'unanimité de l'Assemblée nationale. On espère
que la réflexion qui doit se faire et aboutir à un projet de loi
sera telle qu'on pourra en arriver encore à un consensus de
l'Assemblée nationale au niveau d'amendements à apporter à
la loi déjà existante. Quand je ne réponds pas, je ne fais
qu'obéir à l'usage que tous les parlementaires connaissent:
à partir du moment où un projet de loi doit être
déposé...
M. Marx: Je vais parler de choses qui ne sont pas
secrètes. Le ministre est-il au courant qu'un jugement de la Cour
suprême du Canada empêche les policiers de la ville de
Montréal d'appliquer la loi telle que rédigée? Est-ce que
le sous-ministre est au courant? J'imagine que le président doit
être au courant. C'est un jugement de la Cour suprême, non?
Le Président (M. Champagne): M. le sous-ministre.
M. Bédard: Ce n'est pas un jugement d'hier.
M. Marx: Ce n'est pas un jugement d'hier, mais c'est cela. C'est
pourquoi on veut, depuis deux ans, modifier la loi.
M. Bédard: Oui, sûrement.
M. Marx: Est-ce que les policiers, à Montréal,
n'ont pas dit à la commission qu'il faut faire quelque chose, qu'il faut
un changement? Ils ont demandé un changement, il y a maintenant au moins
un an et demi ou deux ans. Qu'est-ce qui arrive? Où s'en va-ton? On nous
a dit qu'il était essentiel d'avoir ce changement pour
l'été 1982. Maintenant, le ministre parle de déposer ce
projet de loi après le 1er juin. Ce sera donc adopté
à la fin de l'année et peut-être même pas, cela va
dépendre s'il s'entend avec le ministre des Affaires sociales, etc.
M. Bédard: Je m'excuse, mais il ne faudrait pas faire une
montagne avec rien. Le jugement auquel se réfère le
député de D'Arcy McGee n'a pas pour fins de rendre la loi 24
inapplicable; au contraire, cela touche...
M. Marx: Applicable d'une autre façon, telle que
rédigée.
M. Bédard: Non, cela touche simplement un point
précis...
M. Marx: Important.
M. Bédard: ...c'est la possibilité, pour un
individu, de pouvoir porter plainte. C'est tout. Tout le reste de la loi est
applicable. Il n'y a absolument rien qui vient à l'encontre...
M. Marx: Donc, il n'y a pas urgence. Si c'est juste ce petit
point, j'imagine que quelqu'un a induit la commission en erreur, l'an
dernier.
M. Bédard: M. le président de la commission peut
peut-être ajouter quelque chose à mes propos, mais je crois que
c'est le problème auquel nous avions à faire face, et qui n'est
pas de nature à rendre la loi 24 inapplicable, comme le laisse entendre
le député de D'Arcy McGee.
M. Marx: M. le Président...
M. Bédard: À la suite du jugement, on comprend que
tout citoyen ne peut pas être empêché et peut donc
directement s'adresser au tribunal sans passer par le mécanisme
prévu par la loi. Il le peut. Il peut aussi utiliser les
mécanismes prévus par la loi.
M. Marx: Est-ce que le président est au courant du fait
que le corps de police de la Communauté urbaine de Montréal a
demandé, de façon urgente, au ministre de faire
amender cette loi pour qu'elle puisse être appliqué telle
que rédigée, ou qu'il y a eu des difficultés dans
l'application de la loi?
M. Bédard: Je dois dire que le corps de police de la
Communauté urbaine de Montréal, à partir du jugement, nous
avait demandé d'intervenir, sauf que, lorsqu'il y a eu la mise en place
de la commission Charbonneau, je pense que tout le monde, à ce
moment-là - j'y ai fait référence tout à l'heure,
c'est ce à quoi je faisais allusion quand je parlais de l'action
policière où il y avait des urgences qui ont disparu parce qu'il
y a eu des impatiences qui se sont atténuées à la suite de
la mise en place de la commission Charbonneau, tout le monde était bien
conscient qu'il fallait mener à terme ces travaux pour aboutir à
des amendements à la loi qui, nous l'espérons, répondront
au consensus des membres de l'Assemblée nationale.
M. Marx: Donc, si je comprends bien la conclusion que j'en tire,
et je veux que ce soit clair et que le ministre soit d'accord avec la
conclusion que je tire, c'est que ce n'est pas urgent maintenant de modifier
cette loi parce qu'on peut... Non.
M. Bédard: N'allez pas à l'autre extrême.
M. Marx: Mais c'est quoi la conclusion?
M. Bédard: La conclusion, c'est que vous avez fait
référence à un jugement. Le jugement dont vous avez fait
mention n'empêche pas la loi 24 de s'appliquer. Il y avait un
problème.
M. Marx: Mais un problème de taille. M. Bédard:
Oui, je vous ai dit que...
M. Marx: Écoutez, c'est un problème important et
cela prend des mesures...
M. Bédard: Quelles mesures? Qu'est-ce que vous voulez dire
par là?
M. Marx: Je répète que le corps de police de la
Communauté urbaine de Montréal a dit que c'était urgent
qu'on fasse des modifications à cette loi sinon il sera nécesaire
d'appliquer la loi d'une façon qui n'est pas prévue dans la loi
elle-même, c'est-à-dire...
M. Bédard: Je vous dis qu'il n'y a rien dans le jugement
auquel vous faites référence qui empêche la loi 24 de
s'appliquer comme il n'y a rien qui empêche le jugement de
s'appliquer.
M. Marx: Parfait.
Le Président (M. Champagne): Si c'est parfait, nous allons
revenir...
M. Marx: Celui qui aimerait avoir l'information va lire les
Débats et essayer de trouver la réponse.
Le Président (M. Champagne): D'accord.
M. Bédard: Celui qui lira nos Débats, je peux lui
dire qu'il va être capable de lire le début des remarques que j'ai
faites. À la suite des travaux de la commission Charbonneau, nous nous
orientons vers un dépôt de projet de loi qui, à ce
moment-là, nous l'espérons, répondra à l'attente
des clientèles visées.
Le Président (M. Champagne): Alors, c'est bien. Nous
revenons à l'élément 1, la Commission des droits de la
personne. Le député de Sainte-Marie demande la parole.
M. le ministre, on pourrait peut-être demander Mme Fournier pour
l'élément 1. Mme Fournier, s'il vous plaît.
M. Bédard: Avec plaisir, en remerciant M. le
président de sa collaboration.
Le Président (M. Champagne): M. le député de
Sainte-Marie.
Commission des droits de la personne
M. Bisaillon: M. le Président, l'étude des
crédits est bien sûr l'occasion de scruter le budget ou les
prévisions budgétaires des ministères, mais c'est aussi
l'occasion de s'interroger sur les grandes orientations qui sont mises de
l'avant, de même que sur le rendement des années
antérieures par rapport à ce qu'on prévoit
actuellement.
Dans ce sens, je voudrais demander au ministre à quel moment il
prévoit que l'ensemble des amendements qui ont été
apportés à la charte deviendront en vigueur. À quel moment
le seront-ils complètement? Est-ce que c'est pour bientôt? Est-ce
que l'ensemble des mesures qui étaient contenues dans la loi 86 sont
actuellement en vigueur, sinon à quel moment cela le sera-t-il? (20 h
45)
Deuxièmement, une des parties du mandat de la commission, c'est
de faire des recommandations au gouvernement à la suite de ses
activités. Je voudrais savoir combien il y a eu de recommandations
acheminées au gouvernement par la commission. Comment ces
recommandations ont-elles été traitées, non seulement par
le ministère de la Justice, mais par le gouvernement, puisque je pense
que la charte fait référence au gouvernement plutôt qu'au
ministre de la Justice?
Troisième question, on voit qu'il y a une diminution des
crédits à la Commission des droits de la personne qui est de
l'ordre
d'environ 80 000 $, 79 900 $, ce qui représente à peu
près 2%. Je voudrais savoir d'où vient cette diminution. Est-ce
parce qu'on jugeait qu'à cause de la prescription de la loi 111 et de
l'inclusion de l'article 28 dans la loi 111 la commission aurait moins de
travaux à faire et qu'en conséquence on pouvait diminuer son
budget? C'est une troisième question. Je vais poser mes questions en
vrac, si le ministre me le permet.
M. Bédard: Si vous voulez y aller à un rythme un
peu plus raisonnable pour qu'au moins je les prenne en note.
M. Bisaillon: Certainement, vous n'êtes pas
sténographe, M. le ministre. D'accord.
La troisième concernait la diminution des crédits. Comment
se justifie cette diminution des crédits? Comment le ministre peut-il
nous expliquer une diminution des crédits puisqu'il y a davantage de
responsabilités accordées à la commission et que son champ
d'activité est élargi?
Ma quatrième question s'adresse au ministre de la Justice en lui
demandant de laisser de côté sa prudence quasi légendaire.
Je veux parler du CAD, l'ancien Centre d'analyse et de documentation. Qu'est-ce
qui arrive au Centre d'analyse et de documentation? Est-ce qu'il existe sous
une autre forme que celle qu'on a connue? Je voudrais savoir si les fiches qui
existaient au centre de documentation ont été traitées.
Est-ce qu'on peut nous assurer qu'elles n'ont pas été
traitées autrement? Par exemple, avant leur destruction, ont-elles
été refilées à d'autres organismes? Mon dossier,
autrement dit, M. le ministre, ma fiche qui était dans le CAD, est-ce
qu'elle est rendue à la GRC sous une forme ou sous une autre?
Cinquième question, dans les crédits du ministère,
il y a l'élément qui s'appelle Direction de la recherche et du
développement, qui compte dix-sept employés pour lequel on
prévoit un budget de 1 698 000 $.
M. Bédard: Votre dernière.
M. Bisaillon: Dans les crédits, on retrouve un
élément intitulé Direction de la recherche et du
développement, qui compte dix-sept employés et qui prévoit
un budget de 1 698 000 $. Je voudrais savoir quels sont les objectifs
poursuivis par cet organisme. Autrement dit, est-ce que cet organisme, comme il
y a un centre de documentation, un service de statistique, fait ce que le CAD
faisait auparavant, sous une autre forme? Autrement dit, est-ce qu'il renferme
un groupe d'analyse et de coordination des renseignements?
Puisqu'on parle de la protection des droits et des libertés de la
personne, je voudrais que le ministre nous parle aussi des
événements qu'on a connus et qui ont été
traités dans les journaux par rapport à la Régie du
logement. On sait qu'un certain nombre de propriétaires se dressaient
une liste noire de locataires - je pense que la commission s'est
déjà penchée sur ce problème aussi - à
partir de données informatiques qui étaient disponibles. Est-ce
que le ministre a l'intention d'agir dans ce dossier? Est-ce qu'il pourrait
présenter une loi, un projet de loi ou une réglementation qui
irait dans le sens de la loi 65 ou utilisant des mécanismes proches de
ceux de la loi 65 pour contrôler ce genre de banques de données
qui servent peut-être à des fins autres que celles pour lesquelles
elles sont constituées?
Une autre question. Des informations nous indiquent qu'un certain nombre
d'organismes privés, commerciaux, font signer des formules aux personnes
qu'ils engagent, pour qu'elles les dégagent d'un certain nombre
d'obligations et, de façon régulière, les soumettent au
détecteur de mensonges. Il y a des employeurs qui, au moment de
l'engagement, font signer des accords aux employés qu'ils engagent.
Évidemment, si l'employé ne signe pas la formule, il ne sera pas
engagé. Dans la période qu'on connaît actuellement, comme
l'emploi est difficile, les gens ont tendance à signer le papier, sauf
que cela mène à des abus, à savoir être soumis de
façon régulière au détecteur de mensonges. Trois ou
quatre fois durant l'année, l'employeur va faire venir l'employé
et va le soumettre au détecteur de mensonges. Je pense que c'est aussi
une question qui a été analysée. Je voudrais savoir ce
qu'il en est là-dessus et comment le ministre va intervenir
là-dedans. Y a-t-il des moyens, soit au niveau de la recherche, soit au
niveau d'un service particulier du ministère, de se pencher
là-dessus? Quels sont les crédits qui seront affectés
à cette question?
Ma dernière question - vous voyez que je ne suis pas exigeant, M.
le Président -concerne aussi quelque chose qui a fait les manchettes
durant l'année, c'est-à-dire l'infiltration des groupes
populaires et des syndicats. Ces procédures ont-elles été
arrêtées par le ministère ou par le ministre de la Justice?
A-t-on pris des moyens pour empêcher que les organisations populaires et
les syndicats soient infiltrés? S'agissait-il de policiers? S'il
s'agissait de policiers, à quel service appartenaient-ils?
Dans ce sens, cela m'amène à poser une dernière
question - ce sera vraiment la dernière - en ce qui a trait aux
informateurs. On m'a dit qu'il y avait des budgets affectés aux
informateurs, soit policiers, soit politiques ou de nature politique si cela
s'adresse à des groupes, par exemple, à des syndicats. On ne peut
pas
dire que c'est de l'information policière proprement dite. C'est
de l'information qui est plus large que par rapport à un crime qui a
été commis ou qui se planifie. Je voudrais savoir s'il y a des
budgets qui sont affectés à cela et, si oui, à quel
endroit ils apparaissent dans les crédits. De même, je demanderai
au ministre - j'ai parlé tantôt de la Direction de la recherche et
du développement - quand on m'aura expliqué quel est le mandat de
cette direction, si ce n'est pas à cet endroit qu'on fait du recueil de
données et d'informations, à quel endroit cela se trouve, comment
c'est dissimulé dans le budget, où on le voit dans les
crédits du ministère, comment cet argent est
dépensé. C'est tout, M. le Président.
Le Président (M. Champagne): La parole est au
ministre.
M. Bédard: Je voudrais seulement ne pas me faire accuser
d'être long pour répondre à la question...
M. Marx: Non, j'espère que le ministre...
M. Bédard: ...ou aux questions du député de
Sainte-Marie.
M. Marx: ...va se perdre dans les questions et pas dans les
réponses.
M. Bédard: Arrêtez de marmonner et parlez. Faites un
des deux.
Le Président (M. Champagne): M. le ministre, à vous
la parole.
M. Bédard: Le député de D'Arcy McGee
s'ennuie.
M. Marx: Je suis très heureux. Il a posé une bonne
question.
M. Bédard: Enfin! Je trouve que cela prend quelqu'un pour
poser de vraies questions.
M. Marx: Je suis tout à fait d'accord. Maintenant, on va
évaluer les réponses.
M. Bédard: Cela me rappelle un peu nos crédits et
la manière dont on les faisait. On ne passait pas notre temps, comme on
l'a fait...
M. Bisaillon: On pourrait peut-être s'essayer sur les
réponses, M. le ministre.
M. Bédard: ...depuis le début, à parler de
cas dont on ne souligne même pas les noms.
Le Président (M. Champagne): Oui. À l'ordre, s'il
vous plaît! M. le ministre, à vous la parole pour répondre
aux questions du député de Sainte-Marie.
M. Bédard: Voilà! M. le Président,
premièrement, concernant les amendements à la charte, j'ai eu
l'occasion - je n'en fais pas reproche au député de Sainte-Marie
- de répondre à plusieurs des questions qu'il a posées
depuis le début de nos travaux. Mais je pense que c'est normal; il est
seul. Il ne peut pas être à toutes les commissions en même
temps.
M. Bisaillon: Le ministre a fort bien compris, M. le
Président, d'autant plus que je suis arrivé pour le programme sur
lequel j'avais des questions.
M. Bédard: D'accord. Ce que j'ai dit lors de l'ouverture
des travaux concernant les amendements qui ont été adoptés
à la Charte des droits et libertés - les amendements majeurs -
c'est que la Commission des droits de la personne complétait
actuellement l'examen des impacts administratifs de toutes ces modifications
législatives afin d'être en mesure de les mettre en oeuvre dans
les meilleurs délais lorsqu'elles seront proclamées comme
étant en vigueur par le gouvernement. Cette proclamation devrait
être faite très prochainement. De plus, au niveau du
ministère, à titre de jurisconsulte du ministère, nous
avons mis sur pied un mécanisme de révision de toutes les lois
antérieures, puisqu'à une date qui est déterminée
dans la loi viendra un temps où la charte aura
prépondérance sur toutes ces lois antérieures; donc, il y
a la nécessité d'en faire une étude approfondie. Nous
avons mis en place un mécanisme de vérification en ce sens.
Le député demande dans sa deuxième question,
comment expliquer la diminution des crédits alors qu'il y a des charges
additionnelles qui seront octroyées à la Commission des droits de
la personne par la mise en vigueur des amendements à la charte. La
diminution des crédits qui est évoquée est simplement
causée par l'application des conventions collectives.
M. Bisaillon: Donc, une diminution causée par
l'application des conventions collectives.
M. Bédard: Voilà! Pour ce qui est de l'augmentation
nécessaire des budgets à partir du moment où les
amendements à la charte seront en application, j'ai eu l'occasion de
dire ce matin qu'à ce moment, il y aura de la part du Conseil du
trésor, par la force des choses, des crédits additionnels
supplémentaires qui seront octroyés, pris à même le
fonds consolidé du
revenu. En ce sens, je crois même qu'au Conseil du trésor
on a déjà acheminé - ou c'est sur le point d'être
fait, me dit Mme la présidente - en fait, les besoins qui...
M. Bisaillon: Les besoins nouveaux payés par l'application
de la loi.
M. Bédard: C'est cela, voilà!
M. Bisaillon: De quel ordre seraient les besoins nouveaux qui ont
été acheminés au Conseil du trésor?
M. Bédard: À ce qu'on m'a dit, ils ne sont pas
encore acheminés, mais ils sont à la veille de l'être.
M. Bisaillon: De quel ordre? Autrement dit, j'esaie de mesurer,
M. le ministre, je n'essaie pas de connaître des secrets.
M. Bédard: Non, non.
M. Bisaillon: Je ne suis pas si tatillon que cela.
M. Bédard: On pourrait discuter longtemps sur ce
sujet.
M. Bisaillon: J'essaie juste de savoir de quel ordre cela
peut-être...
M. Bédard: II n'y a pas de chiffre définitif, mais,
par rapport à ce que cela coûte maintenant, cela peut
représenter une relation du simple au double. C'est évident que
cela représentera des crédits additionnels substantiels. C'est ce
que je peux dire pour le moment.
M. Bisaillon: Le reste, dans un an.
M. Bédard: Avant un an. J'ai indiqué tout à
l'heure que nous voulions proclamer prochainement la mise en vigueur de ces
amendements. Ceci implique qu'il y aura les fonds disponibles pour que la
commission puisse faire son travail en conséquence. Il ne sera pas
nécessaire d'attendre les prochains crédits pour connaître
les montants.
Concernant le CAD...
M. Bisaillon: Les recommandations. J'avais posé une
question à savoir quel était le nombre de recommandations qui
avaient été acheminées par la commission au gouvernement.
De quel ordre étaient ces recommandations? Et quel était le
traitement que ces recommandations avaient reçu soit de la part du
ministre de la Justice, soit de la part du gouvernement?
M. Bédard: Vous avez la liste. Nous avons produit la liste
de toutes les opinions qui nous ont été acheminées par la
commission. Vous les retrouverez...
M. Bisaillon: Dans les demandes de renseignements?
M. Bédard: Oui. Vous retrouverez cela là.
M. Bisaillon: Comme j'ai eu le document seulement en fin
d'après-midi.
M. Bédard: Je ne vous en fais pas reproche, mais je pense
que vous avez la réponse à votre question.
M. Bisaillon: C'est en termes de nombre.
M. Bédard: Vous avez la liste de toutes les opinions qui
ont été transmises au ministère de la Justice et aux
ministères qui peuvent avoir fait des demandes d'opinions etc., tout
cela.
M. Bisaillon: Je consulterai le document, M. le ministre. C'est
la liste, mais cela ne nous donne pas le traitement qu'elles ont reçu.
Autrement dit, dans quel pourcentage les recommandations acheminées par
la commission aux différents ministères ont-elles reçu une
approbation ou ont-elles été accueillies favorablement par les
différents ministères? (21 heures)
M. Bédard: Je ne pense pas que cela puisse
s'évaluer mathématiquement. Pour être en mesure de porter
un jugement de valeur, il faudrait prendre chacune des opinions et
évaluer jusqu'à quel point une suite a été
donnée ou si, à certains moments, il y a eu divergence nette de
la part du gouvernement en fonction de l'opinion de la commission. Il n'y a pas
de statistiques mathématiques qui me permettraient de vous dire qu'on a
suivi l'opinion de la commission à tant de reprises ou encore que des
nuances ont été apportées à l'opinion de la
commission. Il faudrait traiter de chacun des sujets et ce ne sont pas toujours
des opinions; il y a des lettres...
M. Bisaillon: Je comprends. De toute façon, ma question ne
touche pas uniquement le ministre de la Justice; c'est sur l'ensemble du
ministère. J'aurais voulu profiter du fait que la présidente de
la commission est avec nous pour connaître son évaluation. Je ne
veux pas avoir l'évaluation de chacune des recommandations, mais, en
gros, est-ce que la commission peut se déclarer satisfaite du traitement
des recommandations qu'elle a faites aux différents ministères du
gouvernement?
M. Bédard: Je n'ai pas d'objection à ce que Mme la
présidente fasse les remarques qu'elle trouve appropriées, c'est
tout.
Le Président (M. Champagne): Mme
Fournier, à vous la parole.
M. Bédard: Concernant cette question spécifique.
Cela dépend du député de Sainte-Marie; je pourrais
répondre à toutes les autres questions, quitte,
après...
M. Bisaillon: Oui.
M. Bédard: ...à ce que Mme la présidente
vous donne ses commentaires sur cette question principale.
M. Bisaillon: Cela va.
M. Bédard: En ce qui concerne l'année 1982 en
particulier, bien sûr, plusieurs de nos recommandations ont beaucoup
porté sur la Charte des droits et libertés de la personne
elle-même. Nous avons donc fait beaucoup d'interventions
regroupées dans un même mémoire à la commission
parlementaire sur la réforme de la Charte des droits et libertés
de la personne. Je pense qu'on peut dire que plusieurs de nos recommandations
ont été accueillies favorablement, pas toutes, bien sûr. On
peut souligner en particulier que certains droits économiques et sociaux
n'ont pas été accueillis. Cependant, plusieurs demandes
très importantes ont été accueillies. On peut souligner
les programmes d'accès à l'égalité et les questions
relevant des avantages sociaux. Bien sûr, il va falloir voir ce qui suit
en termes de règlements par rapport à la loi elle-même.
M. Bisaillon: Les règlements là-dessus ne sont pas
prêts actuellement?
M. Bédard: Non, ce n'est pas encore prêt. Sur des
questions spécifiques, c'est vrai qu'il est difficile de faire un
commentaire global par rapport à nos interventions. Si je prends le
projet de loi no 65, plusieurs de nos recommandations ont été
suivies en ce qui concerne l'accès aux renseignements. En ce qui
concerne la Curatelle publique, cela n'a pas été suivi;
cependant, les principes de ce qu'on a demandé ont été
intégrés dans le projet de réforme du Code civil. J'essaie
de voir. Je dirais que, dans plusieurs situations, des interventions ou des
recommandations de fond sont accueillies et, dans des cas particuliers, elles
ne l'ont pas été. Ce sont peut-être les cas les plus
connus.
M. Bisaillon: Si vous aviez un pourcentage à nous donner,
de quel ordre serait-il?
M. Bédard: J'aurais peut-être dû le calculer,
mais c'est difficile parce que, parfois, à l'intérieur d'une
même intervention, d'une même demande, des choses sont accueillies
et d'autres ne le sont pas. Si je disais 30% de non accueillies, ce ne serait
pas très sérieux...
M. Bisaillon: Mais c'est à peu près...
M. Bédard: Sincèrement, je pense que je ne peux pas
vous donner de pourcentage sérieux. En gros, je peux dire qu'il y a des
choses qui sont accueillies et que d'autres ne le sont pas.
M. Bisaillon: On y reviendra.
M. Bédard: Ce que je peux dire à la suite des
remarques de Mme la présidente, c'est que la majorité...
M. Bisaillon: Ce n'est pas risqué de dire "la
majorité".
M. Bédard: Non. On parle de 30-70. En tout cas, je suis
d'accord avec Mme la présidente, d'autant plus que je l'ai dit avant,
qu'on ne peut pas évaluer cela à partir d'un pourcentage. Je
pense que c'est un peu plus nuancé que cela lorsqu'on parle de
protection des droits et des libertés de la personne. Une chose est
certaine, c'est que les opinions de la Commission des droits de la personne ont
beaucoup de poids auprès du gouvernement. Je conçois - et je
pense que n'importe qui peut le concevoir - que sur certains sujets on puisse
ne pas être d'accord dans le respect mutuel des uns et des autres, sur
certaines recommandations. Je pourrais à ce moment passer à une
autre question du député de Sainte-Marie.
M. Bisaillon: Le CAD?
M. Bédard: Le CAD, c'est facile à répondre,
il n'y en a plus de CAD.
M. Bisaillon: Sous aucune forme?
M. Bédard: Sous aucune forme. Ce que voulait savoir, entre
autres, le député de Sainte-Marie, c'était si sa fiche
avait pu être transférée quelque part.
M. Bisaillon: J'ai pris mon exemple, comme cela.
M. Bédard: Non, je sais, mais c'est le meilleur exemple.
C'est toujours à partir... Non seulement...
M. Bisaillon: Tout le monde va me demander: C'était
quoi?
M. Bédard: ...la fiche a été
détruite, mais tout ce qui reste du député de
Sainte-Marie...
M. Bisaillon: A été détruit aussi?
M. Bédard: ...reste dans mon esprit. Il y avait, comme on
le sait, certains dossiers concernant... Autrement dit, toutes les fiches
personnelles, on se le rappelle, ont été
brûlées.
M. Bisaillon: Est-ce qu'il se peut qu'elles aient
été informatisées ailleurs avant?
M. Bédard: Nous avions pris les précautions pour
qu'il n'y ait pas, autrement dit, de copies.
M. Bisaillon: À tout le monde.
M. Bédard: Alors, ça, pas de problème.
Si vous me permettez de terminer, on sait qu'il y avait des fiches
concernant des associations, organismes, etc., qui avaient été
acheminées au ministère de la Justice. Elles ont
été placées dans un caveau et il doit y avoir deux, trois
pouces de poussière dessus. Pour répondre à une question
du député de Sainte-Marie, il n'y a eu aucun traitement de ces
documents. De toute façon, quand on parle de renseignements, on sait
qu'après plusieurs années, quand il n'y a pas de traitement, cela
ne veut plus rien dire ces choses, à mon idée.
M. Bisaillon: Lorsque le ministre me dit que le centre...
M. Bédard: Le CAD.
M. Bisaillon: ...d'analyse n'existe pas, je demande: Sous aucune
forme? Il n'y a aucun organisme ou service au ministère de la Justice
qui a comme objet de préparer des statistiques ou des renseignements sur
des groupes, sur des individus ou sur des...
M. Bédard: Non, au ministère de la Justice, il
n'existe aucun organisme de cette nature. Le CAD est disparu, c'est tout.
Concernant l'infiltration des syndicats, je peux dire au député
de Sainte-Marie qu'il n'y a pas d'infiltration des syndicats. C'est aussi clair
que cela.
M. Bisaillon: S'il y en a encore, c'est à l'insu du
ministre de la Justice? S'il y en avait encore, pour corriger ma question, ce
serait à l'insu du ministre de la Justice?
M. Bédard: Je serais porté à dire: Cela
dépend qui infiltre parce que je sais que le député de
Sainte-Marie s'y connaît beaucoup en termes d'infiltration.
M. Bisaillon: M. le Président, oh!
M. Bédard: Non, j'entendais sur la notion d'infiltration.
Cela a toujours été une préoccupation du
député de Sainte-Marie d'être contre l'infiltration pour
quelque temps que ce soit ou quelque motif que ce soit. Je suis en mesure de
lui dire que cela a été très clair dès que j'ai
pris la responsabilité du ministère de la Justice qu'il ne devait
pas y avoir d'infiltration. J'ai pris tous les moyens nécessaires pour
être en mesure de vous dire qu'il n'y a pas d'infiltration.
Maintenant, concernant la Régie du logement et la confection de
listes noires des locataires par les propriétaires, nous avons eu des
représentations au niveau du Code civil. Je pense que les principes
généraux concernant la protection de la vie privée, etc.,
se retrouvent non seulement dans la charte, mais également dans le Code
civil au chapitre des personnes. Nous avons entendu bien des groupes
là-dessus. Je crois que, si on parle d'une façon
spécifique des listes noires de locataires confectionnées par les
propriétaires et de tous les problèmes créés par
l'informatique...
M. Bisaillon: L'échange de données.
M. Bédard: ...l'échange de données, etc., ce
n'est pas le Code civil qui va régler ce problème puisqu'on y va
surtout de principes généraux. Ce que j'ai eu l'occasion de dire
à ce moment-là, c'est que je crois vraiment, étant
donné l'ampleur du phénomène des banques de
données, en fait, de l'informatique, des changements technologiques,
etc., il va y avoir lieu d'approfondir toutes les conséquences que cela
peut avoir sur la vie des citoyens. Je crois plutôt qu'on devrait aboutir
peut-être à une loi spécifique après avoir fait les
analyses nécessaires.
M. Bisaillon: Mais il y a des ententes actuellement entre le
gouvernement fédéral et les provinces au sujet de
l'échange de données. Est-ce que cela existe actuellement? Est-ce
que des dossiers existent, même si c'est seulement le nom des individus
et leur numéro d'assurance sociale et un certain nombre d'autres
renseignements qui sont détenus par différents ministères?
Est-ce colligé dans un dossier central et y a-t-il des dossiers au
ministère de la Justice? Pas des dossiers dans le sens négatif du
terme; des dossiers dans le sens de fiches.
M. Bédard: Là-dessus, encore une fois, je dirai au
député de Sainte-Marie que nous avons donné à
l'Opposition, puisque la demande nous en avait été faite, la
liste de tous les fichiers qui sont au gouvernement. Je suis en mesure de vous
dire qu'il n'y a pas de fichier central qui établirait la connexion
entre ces différentes banques de données.
M. Bisaillon: Non plus qu'il y a d'échanges avec le
gouvernement fédéral là-dessus?
M. Marx: Qu'est-ce qu'on a fait physiquement avec le CAD, avec
les dossiers? Qu'a-t-on fait de ces dossiers? A-ton brûlé ces
dossiers? A-t-on découpé ces dossiers? Qu'a-t-on fait de ces
dossiers? A-ton envoyé ces dossiers aux archives? Qu'est-ce qu'on en a
fait?
M. Bisaillon: C'est une autre affaire, ça.
M. Bédard: Est-ce qu'on termine ce sujet, quitte à
revenir à d'autres?
Le Président (M. Champagne): D'accord. Je vais retenir
votre droit de parole, M. le député de D'Arcy McGee.
M. Bédard: En tout cas, pour répondre tout de
suite, je vous ai dit tout à l'heure que toutes les fiches personnelles
avaient été brûlées. Le reste... Oui?
Le Président (M. Champagne): Allez-y, M. le ministre, pour
les autres réponses.
M. Bisaillon: J'ai demandé s'il y avait des ententes avec
le gouvernement fédéral sur l'échange de
données.
Une voix: Au criminel?
M. Bisaillon: Non, pas au criminel, au niveau des renseignements
autres que d'ordre criminel. Je comprends que pour le ministre le fait de
s'appeler Bisaillon peut être un crime, mais en dehors de cela. Je ne
parle pas des dossiers d'ordre criminel. Je parle de renseignements sur les
citoyens, qui ne sont pas d'ordre criminel.
M. Bédard: Non, certainement pas, à ma
connaissance. Évidemment, le député de Sainte-Marie a pris
la précaution de faire la distinction entre les dossiers d'ordre
criminel et les autres. C'est évident que quand on parle de dossiers au
criminel...
M. Blank: Y a-t-il échange?
M. Bédard: ...d'enquêtes, etc., il y a toujours des
échanges et je pense qu'il doit y avoir, heureusement, des
échanges et de la collaboration entre les différents corps de
police. Mais c'est dans le domaine criminel.
M. Blank: N'y a-t-il pas un échange concernant le nom des
enfants pour les allocations familiales entre les deux gouvernements?
M. Bédard: Je parlais du ministère de la
Justice.
M. Blank: Ah! Dans les autres ministères?
M. Bédard: D'ailleurs, j'avais à l'esprit que
probablement... (21 h 15)
M. Bisaillon: C'est ce dont je parlais aussi, d'ententes
signées par le ministère de la Justice avec d'autres. Vous me
dites que cela n'existe pas. Il peut en exister pour d'autres
ministères, mais je parle du ministère de la Justice de dossiers
centralisés.
M. Bédard: Pour le ministère de la Justice, il n'y
a pas d'ententes à ce sujet. Je concevrais qu'il y ait des ententes ou
des échanges en ce qui a trait à d'autres ministères.
Sûrement. Je pense aux affaires sociales, aux allocations familiales, au
domaine de la santé, etc. C'est sûrement possible.
M. Blank: Les impôts.
M. Bédard: Les impôts, le domaine des
impôts.
M. Blank: On fait des échanges là-dessus.
Une voix: Malheureusement.
M. Bédard: Je pense que cela répond à pas
mal toutes les questions du député de D'Arcy...
M. Bisaillon: Il y a la question des détecteurs de
mensonge, des entreprises qui font subir l'épreuve du détecteur
de mensonge. Premièrement, est-ce que le ministre est au courant de
cette pratique? Deuxièmement, s'il est au courant, est-ce qu'il entend
intervenir?
M. Bédard: J'ai été mis au courant d'un cas
qui nous a été signalé. Maintenant, je crois qu'il y a eu
une plainte à la Commission des droits de la personne. Mme la
présidente.
Le Président (M. Champagne): Mme
Fournier, allez.
M. Bédard: Ce que nous avons eu, ce sont des demandes de
clarification en termes des droits impliqués par rapport à
l'utilisation des détecteurs de mensonge; effectivement, oui, nous avons
eu cela. Notre analyse vise à appliquer à cette pratique les
mêmes principes que ceux que nous appliquons au respect de la vie
privée, c'est-à-dire les principes qui sont appliqués en
vertu de la loi 65, si on simplifie les choses.
Donc, un employeur ne peut pas exiger d'une personne des interventions
ou des explications qui portent atteinte à sa vie privée ou
à certains de ses droits fondamentaux.
M. Bisaillon: Maintenant, cela...
M. Bédard: Mais ceci est au niveau du principe et n'a pas
été appliqué à des dossiers particuliers.
M. Bisaillon: Cela peut être contourné par la
signature qu'on exige de l'employé au moment de son engagement.
M. Bédard: C'est cela, exactement. C'est le
problème qui existe actuellement. Est-ce que nous pouvons accepter
qu'une personne renie ses propres droits dans un contrat?
M. Bisaillon: Là-dessus, ma question au ministre
était: Vu les explications qu'on a, est-ce que quelque chose de
particulier sera fait à cet égard en termes de
législation?
M. Bédard: J'allais dire que nous n'avons pas encore
envoyé de demande particulière au ministre sur cette question.
Mais il serait sans doute approprié de le faire.
M. Bisaillon: Est-ce qu'on peut savoir quelle serait la
réaction du ministre au moment où il recevra la
recommandation?
M. Bédard: Ma première réaction -c'est
tellement gros - est que je serais porté à croire que
l'application de certaines dispositions de la charte puisse être de
nature à empêcher une telle pratique, mais, si tel n'est pas le
cas, ma réaction est que ce n'est sûrement pas une situation qui
peut être acceptable; elle devra donc être corrigée par les
moyens appropriés.
M. Bisaillon: J'aurais terminé pour l'instant, M. le
Président.
Le Président (M. Champagne): M. le député de
Saint-Louis.
M. Blank: J'ai une question pour le ministre et peut-être
pour Mme Fournier. Une question de base sur la charte. On a la charte
fédérale et la charte provinciale. Tout le monde pense que la
charte fédérale est un peu enchâssée, mais on voit
qu'elle ne l'est pas. Il y a des pressions au fédéral pour
essayer de changer cela, de protéger un peu plus les droits et les
libertés de tous les Canadiens. Mettez cela de côté,
parlons de notre charte. Je trouve quelque chose d'un peu anormal. Il faut les
deux tiers de la Chambre pour nommer Mme la présidente et les autres
commissaires, mais il faut seulement la majorité plus un pour annuler la
charte, changer une section ou tout éliminer. C'est dire qu'on peut
même destituer madame et ses commissaires par un vote simple. Ce
n'était pas l'intention de la Législature quand on a
adopté cette loi. On peut seulement abroger la loi et elle n'existe
plus. Mais on dit qu'on ne peut pas la destituer sans obtenir l'assentiment des
deux tiers de la Chambre. Ne pensez-vous pas que, pour donner un peu plus de
protection aux citoyens du Québec avec notre propre charte, dont vous
dites que c'est la meilleure au monde, au moins cela prendrait les deux tiers
de la Chambre pour l'abroger, comme on le fait dans la loi 111, ou en
éliminer des sections, comme dans d'autres lois? J'aimerais aussi avoir
l'opinion de Mme Fournier.
Le Président (M. Champagne): M. le ministre.
M. Marx: ...recommandation qu'il n'a jamais suivie.
Le Président (M. Champagne): M. le ministre.
M. Bédard: M. le député de D'Arcy McGee fait
des remarques incongrues, je ne sais pas s'il a d'autres remarques à
ajouter.
Le Président (M. Champagne): M. le ministre, allez-y
donc.
M. Marx: M. le ministre a fait sa farce. Continuez.
M. Bédard: Première remarque. La situation qui
existe présentement, évoquée par le député,
est celle qui prévaut en fonction de décisions qui ont quand
même été prises par le gouvernement qui nous a
précédés lors de l'adoption de la charte.
M. Blank: On a été battu à
l'élection.
M. Bédard: II faudrait clarifier les choses. Il ne
faudrait pas que les propos du député soient
interprétés comme si c'était nous, le gouvernement actuel,
qui avions décidé de la situation que nous vivons
présentement concernant les amendements possibles à la charte,
etc. C'est une situation qui dure depuis que la charte est en vigueur.
Pour ce qui est de l'autre partie, je demanderais, dans un premier
temps, à Mme la présidente d'y aller de ses commentaires.
Le Président (M. Champagne): Mme
Fournier, la parole est à vous.
M. Bédard: Merci. Au moment de la commission parlementaire
de la justice sur la Charte des droits et libertés de la personne,
la recommandation de la commission avait été que les
dérogations à la charte soient faites au deux tiers de
l'Assemblée nationale.
M. Blank: Est-ce que le ministre a pris soin de ces
recommandations? Qu'est-ce qu'il pense en faire?
M. Bédard: Nous avons procédé aux
amendements à la charte. Ce sujet a été en discussion
lorsque nous avons procédé aux amendements à la Charte des
droits et libertés de la personne, des amendements majeurs.
M. Blank: Est-ce que c'est l'intention du ministre de faire cette
recommandation au Conseil des ministres?
M. Bédard: Effectivement, ce point de vue n'a pas
été retenu par le gouvernement. Même si la...
M. Blank: Est-ce que le ministre...
M. Bédard: ...loi 86 concernant les amendements à
la charte a été adoptée à l'unanimité, je
sais que l'Opposition avait fait aussi des représentations qui
s'orientaient dans le sens que les...
M. Blank: Est-ce que le ministre a fait des...
M. Bédard: ...dérogations devraient être
faites au deux tiers.
M. Blank: Est-ce que le ministre a fait ses recommandations au
Conseil des ministres? Est-ce qu'il a fouillé les recommandations de la
commission?
M. Bédard: Le député sait très bien
que la solidarité ministérielle ne me permet pas de
répondre.
M. Blank: J'ai la réponse.
M. Bédard: Non, je ne dis pas que j'ai répondu, car
pour moi un silence n'est pas un acquiescement et il ne faut pas le prendre
comme cela. Si vous voulez la formule usuelle, je n'infirme ni ne confirme rien
de ce que vous avancez.
M. Blank: Ne pensez-vous pas que ce soit une bonne
idée?
M. Bédard: Quand même vous risquez d'être
artificiel parce que, de toute façon, un gouvernement, lorsqu'il est
élu, en ce qui a trait à la protection des droits et
libertés de la personne, lorsqu'il a à prendre des
décisions majeures qui peuvent être de nature à venir
à l'encontre de certaines dispositions de la charte, a à prendre
ses responsabilités. C'est le fondement de notre système, en
fait, d'avoir la majorité simple...
M. Blank: C'est vrai, c'est vrai...
M. Bédard: ...quitte à rendre des comptes si des
gestes...
M. Blank: ...je suis d'accord avec le ministre...
M. Bédard: ...non appropriés sont posés ou
encore si certains gestes posés par un gouvernement ne sont pas
amplement justifiés, suffisamment justifiés. Je crois qu'à
ce moment-là, une sauvegarde encore plus importante que les deux tiers
existe dans le système démocratique. C'est la volonté
exprimée des citoyens qui peuvent porter un jugement.
M. Blank: Ce qui peut être fait en quatre ans, M. le
ministre. C'est déjà arrivé. Ne pensez-vous pas qu'il n'y
a aucune restriction dans la charte pour abroger certaines sections par rapport
à une insurrection réelle ou appréhendée ou
n'importe quelle urgence décidée par le gouvernement? Cela va un
peu plus loin.
M. Bédard: Si le gouvernement décide des urgences
factices, je pense que la population est à même d'en faire
l'évaluation. S'il prend des décisions qui ne sont pas
appropriées concernant le respect et la protection des droits et
libertés, la population est à même de porter un jugement.
Je ne veux pas dire par là qu'infailliblement j'ai raison ou que le
gouvernement a raison, sauf que, sur ce sujet, le député
conviendra que nous avons adopté la même attitude que celle du
gouvernement précédent lorsqu'il a fait adopter la charte.
M. Blank: Oui, mais il y avait beaucoup d'amendements. Depuis
sept ans que vous êtes au pouvoir, vous avez changé beaucoup de
lois à votre goût. Vous avez beaucoup parlé de cette loi,
mais depuis vous n'avez fait aucun changement. Si je suis votre pensée,
on a la liberté et la démocratie seulement une fois dans quatre
ans et, entretemps, le gouvernement peut abroger tous nos droits, nonobstant la
volonté de la population, pendant quatre ans.
M. Bédard: Oui, mais vous conviendrez que cela peut
être artificiel. Je vais vous donner une situation qui a
déjà existé d'ailleurs. Si un parti est élu avec
plus des deux tiers des députés, la disposition que vous
évoquez n'a aucun effet...
M. Blank: C'est à la population de
parler.
M. Bédard: Je veux dire que c'est une situation qui est
déjà arrivée.
M. Blank: En fait, la réponse, c'est d'avoir une charte
enchâssée, point. Cela finit là.
M. Bédard: Je ne voudrais pas reprendre la discussion qui
a duré quand même quelques heures cet avant-midi sur la question
de l'enchâssement...
M. Marx: Un monologue, ce n'était pas une discussion.
M. Bédard: ...les avantages et les inconvénients.
Le député ne me demandera pas de recommencer...
M. Blank: On n'a pas eu l'avantage d'avoir madame ici ce
matin.
M. Bédard: ...l'argumentation, quoique je sois prêt
à convenir que, sur des points comme ceux-là, on puisse
différer d'avis tout en étant de bonne foi de part et d'autre.
C'est vraiment une question de perception et d'opinion, mais le gouvernement
qui se livrerait à des excès en ce qui a trait à
l'atteinte à la protection des droits et libertés, je pense qu'il
aurait à subir les foudres de la population qui est concernée au
premier chef.
M. Blank: Oui. Le gouvernement précédent a
abrogé une section de la loi, mais jamais toute la loi comme vous l'avez
fait, jamais.
M. Bédard: Si on veut discuter de la loi 111, je suis
prêt à en discuter...
M. Blank: C'est plutôt aux députés à
se marrer...
M. Bédard: ...tout le temps nécessaire. J'ai eu
l'occasion de faire part, tant à la Commission des droits de la personne
qu'au barreau, de mes remarques concernant les évaluations qui avaient
été faites sur les effets de la disposition 28. Alors, si vous
voulez qu'on reprenne tout le débat, je n'ai aucune objection.
M. Marx: Avant de le permettre...
M. Blank: Je pense que le public a compris.
M. Marx: On ne veut pas reprendre le monologue de ce matin, M. le
ministre.
M. Bédard: Le public a compris que nous étions dans
une situation d'illégalité sans précédent et que
nous étions face à des groupes qui, d'avance...
M. Bisaillon: À l'ordre, cela n'a rien à voir.
M. Marx: À l'ordre, M. le Président.
M. Bédard: ...avaient indiqué leur intention de
violer la loi...
M. Bisaillon: À l'ordre!
M. Bédard: En tout cas, le gouvernement a pris ses
responsabilités, la population décidera.
Des voix: À l'ordrel
Le Président (M. Champagne): Alors, on s'en va
peut-être... Le député de D'Arcy McGee, est-ce toujours
l'élément 1?
M. Marx: Oui, c'est cela.
Le Président (M. Champagne): Allez-y. (21 h 30)
M. Marx: J'ai seulement deux commentaires pour commencer. En ce
qui concerne la liste noire des locataires, j'aimerais demander au ministre de
la Justice de s'entendre avec son homologue, le ministre de l'Habitation, qui a
dit à la télévision qu'il n'y a pas de problème
avec la liste noire des locataires, que cela n'existe pas, et ainsi de suite.
Donc, je pense que, pour qu'on puisse bénéficier de la
solidarité ministérielle, il y a une entente entre vous autres,
à savoir s'il y a ou s'il n'y a pas de problème. Je pense que
vous avez raison, il y aurait un problème, mais l'autre ministre ne voit
pas le problème. C'est ce qu'il a dit à la
télévision.
M. Bédard: Écoutez, vous avez une drôle de
manière d'évaluer les choses. Est-ce que vous venez de me dire
que le ministre de l'Habitation et de la Protection du consommateur a dit qu'il
n'y avait pas de liste noire?
M. Marx: Qu'il n'y avait pas de problème de liste noire.
Que cela n'existe pas, en fait, et qu'on ne peut pas faire quoi que ce
soit.
M. Bédard: Écoutez, s'il n'y a pas de liste noire,
c'est évident que je vais dire comme le ministre de l'Habitation et de
la Protection du consommateur. Pas de problème. On ne peut toujours pas
en inventer pour le plaisir de la chose. S'il y en a, vous avez ma
réponse, il y a un problème.
M. Marx: Je vous ai demandé de faire une enquête, il
y a maintenant plusieurs
semaines, pour savoir s'il y en a ou s'il n'y en a pas. Quand il y a un
problème, c'est au ministre de la Justice de faire quelque chose, de
voir s'il y a un problème ou non, si c'est dans l'intérêt
public ou non. Qu'est-ce que le ministre a fait depuis des semaines sur cette
question de liste noire?
M. Bédard: M. le Président, nous avons eu
l'occasion d'en discuter à la suite de la parution d'un groupe devant la
commission parlementaire sur la réforme du Code civil portant sur les
personnes. Je ne veux pas reprendre le débat ici. Je l'ai
résumé tout à l'heure, à savoir que, concernant
tous ces problèmes de banques de données, il y aurait lieu de
penser à une loi spécifique. Pour le moment, nous essayons,
disons, d'approfondir la réflexion à partir de remarques qui nous
ont été faites par la Commission des droits de la personne sur
l'ensemble de ce problème.
M. Marx: Sur ma deuxième remarque, j'aimerais
féliciter le ministre de s'entendre assez bien avec la commission et les
commissaires à la Commission des droits de la personne, sauf sur deux
recommandations que je trouve de taille et qui sont plus importantes
peut-être que toutes les autres. Premièrement, il y a
l'enchâssement de la charte. Deuxièmement, il y a la loi 111,
l'article 28; le ministre du Travail a admis que c'est la première fois
au Québec qu'on a soustrait toute une loi de l'application de la charte
québécoise, c'est-à-dire, comme je l'ai dit ce matin,
qu'en cas de conflit entre la loi 111 et la charte québécoise,
c'est la loi 111 qui a préséance. Je ne veux pas que le ministre
me répète son monologue de ce matin.
M. Bédard: Autrement dit, vous me posez des questions,
vous faites des remarques et vous ne voulez pas de réponse.
M. Marx: Je vois que vous êtes en train de me lire une
autre fois...
M. Bédard: Je peux peut-être m'en aller aussi. Cela
aiderait.
M. Marx: Avec plaisir. Laissez votre adjoint. Le ministre a
déjà...
M. Bédard: Soyons sérieux un peu. Si vous
commencez, comme ce matin, à faire des affirmations gratuites, globales,
je peux vous dire que je ne les laisserai pas passer et, si vous voulez une
discussion sur la loi 111, vous allez en avoir une. Cela me fait plaisir.
M. Marx: Est-ce que le ministre du Travail a tort?
M. Bédard: Quelle est la contradiction avec le ministre du
Travail? Il a dit exactement ce qu'il en est. Je n'ai pas dit le contraire.
M. Marx: Mais j'ai répété ce que le ministre
du Travail a dit.
M. Bédard: Je ne vous ai pas dit le contraire. De
là à formuler, par exemple, une opinion telle que celle que vous
formulez, c'est une autre chose, sur les conséquences.
M. Marx: Les conséquences...
M. Bédard: Ce ne sont pas tous les droits.
M. Marx: J'ai dit, et je mesure chacun de mes mots, qu'en cas de
conflit entre la loi 111 et la charte québécoise, c'est la loi
111 qui a la préséance. J'ai répété cela
chaque fois. Je n'ai jamais voulu mal interpréter ce que le ministre a
voulu faire. J'ai dit et je répète que, sur ces deux
recommandations de taille, le ministre n'a pas suivi les recommandations de la
commission. Sur toute autre recommandation, s'il a pris une partie des
recommandations et s'il a donné suite à un autre paragraphe et
ainsi de suite, cela ne m'impressionne* pas au même degré que de
ne pas suivre les recommandations de fond. Il ne faut pas oublier que, quand le
gouvernement a déposé le projet de loi no 1 qui a
été adopté, finalement, comme la loi 101, on a voulu,
à cette époque, modifier la charte des droits pour exclure
l'application de la charte québécoise dans la Charte de la langue
française. Il y a eu beaucoup d'objections à un tel amendement de
la charte québécoise...
M. Bédard: On ne va pas recommencer le débatl
M. Marx: ...et cela a été retiré. Je vois
que, dans la loi 111, on n'a vraiment pas voulu écouter soit la
commission, soit la population sur cette question.
Le Président (M. Champagne): M. le député,
avez-vous une question précise après votre préambule?
M. Marx: Ce sont mes deux commentaires après une heure de
discussion sur la charte.
Le Président (M. Champagne): Mais une question?
M. Marx: Maintenant, j'ai...
M. Bédard: Non. M. le Président, on a une belle
illustration des techniques du
député de D'Arcy McGee, encore une fois, d'y aller
d'affirmations globales et erronées. Cela nous prend le temps qu'il faut
pour essayer de voir la vérité dans toutes les accusations du
député de D'Arcy McGee par rapport à des attitudes que le
gouvernement ou que le ministre de la Justice a à prendre. Une
fausseté, d'abord: vous dites que je n'ai pas suivi la recommandation de
la commission concernant l'enchâssement de la Charte des droits et
libertés de la personne. C'est complètement faux. Je n'ai jamais
eu de recommandation de la Commission des droits de la personne en ce qui a
trait à l'enchâssement.
M. Marx: J'ai compris qu'on a dit que...
M. Bédard: Vous comprenez toujours. Vous comprenez comme
vous voulez. Bon!
M. Marx: Oui, oui.
Le Président (M. Champagne): À vous la parole, M.
le ministre. Continuez.
M. Marx: Mais j'ai seulement compris ce dont on a discuté
avec le député de Sainte-Marie, à savoir qu'il y avait une
recommandation d'enchâssement, de l'enchâsser. Si j'ai bien...
Le Président (M. Champagne): À vous la parole, M.
le ministre, s'il vous plaît. Avez-vous...
M. Marx: L'enchâssement aux deux tiers, c'est
l'enchâssement.
M. Bédard: Ah non! Les deux tiers, l'enchâssement,
il y a des choses...
M. Marx: Non, mais l'enchâssement, c'était les deux
tiers.
M. Bédard: Non, ce n'est pas la même chose, et vous
le savez très bien, à part cela.
M. Marx: Bon! Si le ministre veut faire des distinctions entre
l'enchâssement aux deux tiers et l'enchâssement constitutionnel, il
peut faire toutes sortes d'enchâssements.
M. Bédard: Ne reconnaissez-vous pas qu'il y a une
différence entre la notion des deux tiers et l'enchâssement
constitutionnel?
M. Marx: Mais les deux s'appellent l'enchâssement.
M. Bédard: Franchement!
M. Marx: Lisez la thèse de Beaudoin de l'Université
d'Ottawa. Vous allez voir que l'enchâssement, cela peut être aux
deux tiers. Cela peut être dans la constitution. Il y a toutes sortes de
façons d'enchâsser.
M. Bédard: M. le Président, la distinction
s'imposait en ce qui regarde... Le député nous a fait une longue
argumentation ce matin sur l'enchâssement constitutionnel. Je suis en
mesure de vous dire que je n'ai jamais eu de recommandation en ce sens de la
part de la Commission des droits de la personne.
M. Marx: Mais...
M. Bédard: Concernant la loi 111...
M. Marx: ...on ne peut pas l'enchâsser d'une façon
constitutionnelle. Comment peut-on faire...
Le Président (M. Champagne): S'il vous plaît, M. le
député, la parole est au ministre pour la réponse. Vous
avez eu votre droit de parole tout à l'heure.
M. Marx: Je veux seulement dire, M. le Président, qu'on ne
peut pas enchâsser d'une façon constitutionnelle dans la situation
actuelle. Ce serait bien difficile de trouver une façon de le faire.
Le Président (M. Champagne): M. le ministre, avez-vous
autre chose à ajouter? Enfin... D'accord?
M. Bédard: M. le Président, concernant la loi 111,
je ne veux pas reprendre le débat qui a déjà
été fait. C'est peut-être facile de parler de droits et
libertés d'une façon générale, mais, lorsqu'on est
dans l'obligation de concilier - et c'est la responsabilité du
gouvernement de concilier des situations qui font que certains droits sont
violés d'une façon systématique et qu'il y a lieu
de...
Le Président (M. Champagne): Une question de la part du
député...
M. Bédard: Je ne veux pas recommencer le débat.
M. Bisaillon: C'est parce que cela relance le débat. Le
ministre de la Justice contribue aussi à le relancer.
Le Président (M. Champagne): Oui, oui. Si on peut...
M. Bisaillon: On va être obligé de discuter
là-dessus.
Le Président (M. Champagne): Oui, oui. Si vous n'avez pas
d'objection, on pourrait, s'il n'y a plus d'autres questions... Je sais bien
que cela fait environ une heure et quarante-cinq minutes qu'on discute du
programme 4 avec des questions...
M. Marx: J'ai d'autres questions. En fait, j'ai beaucoup de
questions.
M. Bédard: M. le Président, je vais simplifier
votre travail. Je ne recommencerai pas le débat que nous avons eu ce
matin concernant...
Le Président (M. Champagne): D'accord.
M. Bédard: ...les affirmations globales et erronées
du député de D'Arcy McGee. Je demanderai simplement au
lecteur...
M. Marx: Ma question...
M. Bédard: ...du journal des Débats de se
référer au début des travaux de cette commission. Je pense
qu'il trouvera réponse à toutes ces affirmations.
M. Marx: Ma question ne portait pas sur la possibilité
d'adopter ou de ne pas adopter la loi 111. Ma question, en fait, n'en
était pas une, c'était un commentaire. J'ai dit que le ministre
n'a pas accepté la recommandation de la commission de ne pas adopter
l'article 28 dans la loi 111. J'ai seulement voulu ajouter cela.
Maintenant, j'ai une question assez précise avant de passer aux
questions générales.
Le Président (M. Champagne): M. le député,
votre question, s'il vous plaît.
M. Marx: Ma question précise concerne une lettre que j'ai
reçue de M. Jean-Marc Bougie. Je pense que le ministre le connaît
assez bien, il était devant la commission. C'est un ex-détenu qui
a fait son cours de droit à l'Université du Québec
à Montréal -ou à l'Université de Montréal,
peu importe -il est maintenant diplômé. Il a fait une demande pour
être accepté au barreau; il a été refusé
parce que c'est un ex-détenu. Je pense que le ministre a reçu une
copie de cette lettre que j'ai ou je peux en faire une copie pour le
ministre.
J'aimerais rappeler au ministre l'article suivant qu'on a ajouté
à la charte et qui n'est pas encore en vigueur.
M. Bédard: Vous voulez parler de l'amendement concernant
les antécédents judiciaires.
M. Marx: C'est cela, c'est exactement cela.
Dans ce dossier particulier, j'aimerais demander au ministre ce qu'il a
l'intention de faire. Je pense que c'est un cas particulier, un cas un peu
exceptionnel. Le ministre a souvent parlé de la réhabilitation
des détenus. Voici un cas de réhabilitation. Est-ce qu'on a
besoin d'une intervention administrative, une intervention de la loi dans ce
cas? J'aimerais poser ces questions au ministre.
M. Bédard: M. le Président, nous sommes...
Le Président (M. Champagne): M. le ministre, oui.
M. Bédard: ...dans des cas très particuliers...
M. Marx: Ce n'est pas exclue. Quand discutera-t-on de cela?
Voulez-vous que je pose la question en Chambre?
M. Bédard: Je n'ai pas fait de remarques. J'ai dit - je
pense que vous êtes d'accord, M. le député - que nous
sommes dans des cas très particuliers.
M. Marx: C'est cela. Les crédits sont pour ceux-là
aussi.
M. Bédard: Je me demande jusqu'à quel point
l'amendement que nous avons apporté à la Charte des droits et
libertés en ce qui a trait aux antécédents judiciaires
n'est pas de nature à apporter une solution au cas que vous avez
évoqué pour moi très succinctement.
M. Marx: Je suis prêt à revenir demain matin pour
discuter de ce cas. Je suis sûr que le ministre se souvient que M. Bougie
était déjà devant cette commission - je pense que
c'était au mois d'octobre 1982 - il a même demandé au
ministre, lors de l'étude des amendements à la charte
québécoise, ce que le ministre fera dans un tel cas. Je pense que
le ministre a été plutôt sympathique à sa cause,
mais il n'a pas pris de décision.
M. Bédard: On peut difficilement ne pas être
sympathique aux cas personnels. Maintenant, jusqu'à quel point peut-on
le régler par une disposition générale...
M. Marx: II y a toujours une loi privée possible.
M. Bédard: Vous pourrez toujours me communiquer
l'essentiel de...
M. Marx: Je ferai une copie de ce document et peut-être
que, demain matin, ce serait possible de...
M. Bédard: Si on peut trouver une solution ad hoc... (21 h
45)
M. Marx: D'ici à la fin de la commission,
demain.
M. Bédard: Je ne suis pas en mesure... Je ne m'engage pas
à trouver une solution à tous les cas ad hoc qu'on veut me
soumettre ici lors de l'étude des crédits. J'ai l'impression
qu'il y aurait foule.
M. Marx: Non, c'est un cas spécial. Je prends le
ministre...
M. Bédard: Je ne m'engage pas à régler tous
les cas personnels, mais je suis sensible à la situation qui est
évoquée par le cas dont fait référence le
député de D'Arcy McGee.
Le Président (M. Champagne): M. le député de
D'Arcy McGee peut-on demander, de toute façon, d'imprimer cette
chose-là ou de la photocopier? Est-ce que vous voulez une réponse
publique ou bien si vous vous contenteriez d'une réponse
privée?
M. Marx: J'aimerais obtenir une réponse affirmative, soit
en public ou en privé.
Le Président (M. Champagne): Alors, considérant que
c'est un cas particulier, vous aurez sûrement une réponse au moins
en privé.
M. Marx: Oui, mais je vais faire...
M. Bédard: Cela touche en grande partie l'application de
la Loi sur le barreau avec toutes les implications que cela comporte.
M. Marx: J'ai évoqué le problème des lois
québécoises autres que la Loi sur le barreau qui comportent
l'exigence qu'un exdétenu ne peut pas accéder à certaines
professions. Je pense qu'il y a quelques lois qui ont de telles exclusions.
M. Bédard: Enfin, je m'interroge tout haut. Jusqu'à
quel point le cas ne peut-il pas être solutionné s'il y a une
demande de pardon de faite et d'accordée?
M. Marx: Bon, mais je vais...
M. Bédard: Si tel était le cas, il me sembe que la
voie tout indiquée serait...
M. Marx: Puis-je demander au ministre de...
M. Bédard: ...d'obtenir le pardon. Il est facile à
obtenir du gouvernement dans les circonstances, avec les éléments
que vous portez à ma connaissance. Il est...
M. Marx: Oui, mais...
M. Bédard: ...indiqué dans les circonstances.
M. Marx: II reste encore deux ans pour obtenir le pardon et, de
toute façon, cela pourrait être refusé à cause des
bonnes moeurs du demandeur. Je vais laisser le dossier au ministre et
j'aimerais demander au ministre de me dire dans un délai assez court ce
qu'il entend faire de ce cas.
M. Bédard: D'accord.
Le Président (M. Champagne): Cela va.
M. Marx: Je pense qu'en fait cela entre dans la politique
correctionnelle du ministère de promouvoir la réhabilitation des
détenus ou des ex-détenus et cela tombe aussi quelque part dans
les amendements à la charte. Peut-être que ce n'est pas couvert
exactement par l'amendement. Ce sera aux tribunaux de décider
éventuellement.
M. Bédard: Après réflexion, il est fort
possible que cela ne soit pas couvert par l'amendement...
M. Marx: C'est cela...
M. Bédard: ...apporté à la charte puisqu'il
porte surtout sur l'embauche de façon spécifique.
M. Marx: C'est cela. Cela dépend de
l'interprétation que les tribunaux donneront à cet article.
M. Bédard: Donc, il faudra probablement essayer de voir
s'il y a une solution ailleurs.
M. Marx: J'aimerais savoir, M. le ministre, où sont les
problèmes à la Commission des droits de la personne? Est-ce qu'il
y a vraiment des problèmes? Quel est le point chaud dans la commission?
Où est-ce que cela bloque, si cela bloque?
Le Président (M. Champagne): M. le ministre.
M. Bédard: II me semble qu'il y a quelque chose qui ne
marche pas, mais ce n'est pas du côté de la Commission des droits
de la personne, ni du côté du ministre; c'est plutôt du
côté du député de D'Arcy McGee. Franchement, c'est
le genre de questions... De quoi voulez-vous que je vous parle?
M. Marx: C'est bien connu de tout le monde...
M. Bédard: Si je trouve le monde gentil tout le temps,
etc.?
M. Marx: Je vais demander au ministre ce qui ne marche pas
à la Cour supérieure de Montréal. Il est courant qu'il y.
a des délais impossibles...
M. Bédard: II y a des problèmes de délai, je
vous l'ai mentionné. Si vous commencez à me demander s'il y a
quelque chose qui ne marche pas dans les relations...
M. Marx: On va commencer avec ce problème.
M. Bisaillon: II a déjà de la difficulté
à nous expliquer ce qui marche sans qu'on lui demande en plus des
explications!
Le Président (M. Champagne): S'il vous plaît!
Pourriez-vous poser des questions plus précises, s'il vous plaît,
M. le député de D'Arcy McGee?
M. Bédard: On voit que le député de
Sainte-Marie n'était pas ici au début des crédits. Je vais
lui passer mes notes préliminaires qui font état de toutes les
réalisations...
M. Marx: Un des problèmes...
M. Bédard: ...du ministère de la Justice.
M. Marx: Le ministre conviendra qu'un des problèmes, c'est
qu'il y a des délais un peu exceptionnels à la Commission des
droits de la personne, à tel point que beaucoup de gens ont perdu leurs
espoirs d'aller devant la commission. Le ministre doit être au courant de
tout cela. Qu'entend-il faire?
M. Bédard: Certainement, il y a un problème de
délai. Nous espérons qu'avec le nouveau programme d'effectifs,
cela contribuera à régler ce problème.
M. Marx: Avec le nouveau programme, on va régler ce
problème. Un des amendements qu'on a...
M. Bédard: On ne le réglera sûrement pas avec
l'ancien, puisque la situation existe.
M. Marx: C'est cela. Parce que le ministre a créé
le problème depuis qu'il est là.
M. Bédard: À partir du moment où
peut-être il y aura - non seulement peut-être - des effectifs
substantiels d'ajoutés à la commission, cela ne peut que
contribuer à améliorer la situation évoquée par le
député de D'Arcy McGee.
M. Marx: Ce n'est pas sûr. Supposons qu'on ajoute du
personnel qui fera de la recherche, cela n'aidera pas les enquêtes; tout
dépend de ce qu'on fait avec le personnel.
M. Bédard: Là, je voudrais être très
clair. Lorsque...
M. Marx: S'ils font l'étude des règlements et des
lois pour remplir les exigences de l'article 67, paragraphe d, alors qu'elle
n'a jamais eu le personnel...
M. Bédard: ...l'ensemble du dossier sera discuté au
Conseil du trésor, en ce qui a trait aux besoins d'objectifs
additionnels, je peux assurer le député de D'Arcy McGee que notre
argumentation ne portera pas seulement sur les effectifs nécessaires en
fonction de l'application des nouvelles dispositions de la charte, mais tiendra
compte aussi de l'évaluation de l'ensemble des problèmes de la
commission, entre autres celui des délais, pour essayer de corriger des
situations. C'est global.
M. Marx: Bon, je vais revenir à cette question. À
l'article 10.1, on a ajouté l'article suivant et je cite: "Nul ne doit
harceler une personne en raison de l'un des motifs visés dans l'article
10."
M. Bédard: Cela s'appliquait ici, monsieur. Je pensais
justement au député de D'Arcy McGee quand j'ai fait cet
amendement.
M. Marx: C'est difficile de harceler le ministre parce qu'il ne
me donne pas gain de cause.
M. Bédard: On dit cela en souriant.
M. Marx: II répond tellement bien aux questions. Il patine
quand on a besoin d'un gardien de but.
M. Bédard: Oui, mais si répondre à vos
questions, c'est toujours vous donner raison, je vous dis d'avance que vous ne
serez pas satisfait d'ici à la fin de votre mandat.
M. Marx: Sur cette question de harcèlement, le ministre
est-il au courant qu'il y a un tel article dans la loi en Ontario et qu'il a
donné pas mal de travail à la commission ontarienne? Est-ce que
j'ai raison de dire, Mme la présidente, qu'à peu près 75%
des causes portées devant la commission ontarienne des droits de la
personne sont des causes de harcèlement? Imaginez-vous, M. le ministre,
si la commission québécoise était inondée de
milliers de causes qui portent sur le harcèlement, qu'est-ce...
M. Bédard: D'abord, je ne suis pas sûr
que...
M. Marx: ...qu'on va faire? Cela serait impossible, les
délais seront plus longs.
M. Bédard: Premièrement, je ne suis pas sûr
que la situation va se répéter nécessairement au
Québec. Il est fort probable, non seulement fort probable, mais il est
certain que cela va représenter une augmentation de la
clientèle...
M. Marx: Est-ce que vous avez fait une évaluation?
M. Bédard: Est-ce que le député de D'Arcy
McGee veut me dire qu'il était plus ou moins d'accord avec cette
disposition? Je pense que nous avons eu l'occasion de discuter des amendements.
Ces amendements ont été acceptés unanimement par
l'Assemblée nationale.
M. Marx: M. le ministre, ici en commission, c'est l'Opposition
qui pose les questions au gouvernement, l'Opposition ne répond pas aux
questions...
M. Bédard: Non, je m'interrogeais, je ne vous interrogeais
pas.
M. Marx: Dans un an ou deux, on va répondre aux
questions.
M. Bédard: Non, c'est parce que c'est trop facile de jouer
sur les deux tableaux, d'essayer de faire croire que c'est une mauvaise
disposition parce que cela va représenter une augmentation
considérable des travaux de la commission et en même temps
d'être d'accord avec la notion qui a été incluse, la
nouvelle notion concernant le harcèlement sexuel.
M. Marx: Est-ce que le ministre a fait l'évaluation en ce
qui concerne le nombre de causes qui pourraient être portées
devant la commission? Parce que je me souviens d'une autre loi, par exemple, la
loi 67, en ce qui concerne l'application aux municipalités. Le ministre
a adopté la loi, après cela il a commencé à faire
l'évaluation avec les municipalités. C'est pourquoi je pense que
j'aimerais savoir...
M. Bédard: Une évaluation est en cours. Par la
force des choses puisque, lorsqu'il y aura un dossier de produit au niveau du
Conseil du trésor, aux fins de demander des effectifs additionnels, il
est évident qu'une évaluation de cet aspect de la situation est
nécessaire.
M. Marx: Et qu'avez-vous trouvé dans votre
évaluation?
M. Bédard: On vous l'a dit. Elle n'est pas terminée
puisque le dossier n'a pas encore été déposé devant
le Conseil du trésor.
M. Marx: Quelle est l'échéance pour ce dossier?
M. Bédard: D'ici à deux ou trois semaines.
M. Marx: Deux à trois semaines.
M. Bisaillon: C'est bien lui! II vient d'ajouter une semaine!
M. Bédard: Mon sous-ministre me disait deux semaines,
mais, avec ma prudence habituelle, connaissant surtout les difficultés
qui peuvent se présenter en cours de route...
M. Marx: C'est trois semaines.
M. Bédard: Je ne crois pas qu'il soit
exagéré...
M. Marx: Vous ne voulez pas vérifier avec votre
attaché politique? Il est encore plus prudent, cela peut être
quatre semaines.
M. Bédard: Sachant que le député de D'Arcy
McGee me suit au jour le jour, deux à trois semaines. Est-ce que cela
vous va?
M. Marx: Trois semaines. Quand l'évaluation sera faite,
est-ce que le ministre peut prendre l'engagement de répondre en Chambre
aux questions que je viens de lui poser ou de s'expliquer en Chambre en vertu
de...
M. Bédard: Si vous voulez me poser certaines questions en
Chambre, ce sera de votre ressort. Comme à l'habitude, j'y
répondrai.
M. Marx: Non, mais est-ce que... Non, ce n'est pas
nécessaire de poser des questions orales.
M. Bédard: Maintenant, quand le dossier sera
déposé devant le Conseil du trésor, une décision
sera rendue sur le nombre d'employés additionnels. On sera probablement
en mesure d'évaluer jusqu'à quel point le décision du
Conseil du trésor répond aux exigences ou aux attentes.
M. Marx: D'accord. Donc, dans la commission, je vois qu'il y a
six services: service de l'accueil et des communications, service des
enquêtes, service de l'éducation, service de la recherche, service
administratif, bureau de Québec. Je pense qu'il y a six services, si je
comprends bien. Où manque-t-il des effectifs dans ces services? Est-ce
que c'est au bureau de
Québec? Est-ce que c'est au service administratif? Où
manque-t-il vraiment de personnel?
M. Bédard: Je pense qu'au moment où on se parle, on
pourrait dire que c'est un peu partout qu'il manque des effectifs.
M. Marx: Où en manque-t-il le plus? C'est une question
simple, j'imagine.
M. Bédard: Mme la présidente me spécifie que
les besoins se situent, d'une façon prioritaire, d'abord partout, tel
que je l'ai dit.
M. Marx: Cela, on l'a compris.
M. Bédard: Si vous voulez y aller au niveau de
l'intensité des besoins, ceux-ci se situeraient...
Le Président (M. Champagne):
Messieurs, cela prendrait le consentement, si on continuait...
M. Bédard: On va terminer la réponse. Le
Président (M. Champagne): D'accord.
M. Bédard: Ceux-ci se situeraient au niveau de l'accueil,
de la recherche et du domaine des enquêtes.
Le Président (M. Champagne): Sur une question de
règlement, M. le député de
Sainte-Marie.
(22 heures)
M. Bisaillon: Ce n'est pas tout à fait une question de
règlement, M. le Président. Je sais qu'on doit, normalement,
cesser nos activités à dix heures, sauf que le ministre, en fin
renard qu'il est, a omis de répondre à une des questions que je
lui avais posées. Comme, pour moi, cela réglerait le programme
4... Voulez-vous que je la répète, M. le ministre? Je disais que
le ministre, en fin renard qu'il était, avait omis de répondre
à une des questions que je lui avais posées. Comme cela
réglerait le programme 4 pour moi et que je n'aurais plus rien à
ajouter, est-ce que je pourrais avoir cette réponse avant qu'on ajourne
les travaux?
Le Président (M. Champagne): Quelle question?
M. Bisaillon: C'était la question qui concernait la
Direction de la recherche et du développement. J'ai dit que j'avais
retrouvé dans les crédits que cela comportait 17 employés,
pour un budget de 1 698 000 $. Comme j'ai fait la moyenne, cela ne peut pas
être seulement du salaire. Cela nous donne en moyenne 99 700 $. Ce ne
sont pas tous des sous-ministres. J'ai posé des questions à ce
niveau parce que je me demandais, comme cela comporte un centre de
documentation et des statistiques, quelles étaient les fins
véritables de ce service pour savoir si cela avait des connotations avec
les enquêtes.
M. Bédard: Votre question ne porte pas sur le
programme...
M. Bisaillon: Je voulais savoir quel était le mandat de
cet organisme.
M. Bédard: ...que nous étudions. C'est un
programme...
M. Bisaillon: Ou alors indiquez-moi à quel programme cela
se trouve.
M. Bédard: C'est le programme 13. Ce qu'on me dit, c'est
que ceci concernerait les statistiques en matière de
criminalité.
M. Bisaillon: Donc, c'est à un autre programme.
M. Bédard: C'est au programme 13.
M. Bisaillon: Alors, au programme 13, est-ce qu'on pourra revenir
sur cette question?
M. Bédard: Je n'ai pas d'objection.
M. Bisaillon: Cela me satisfait, M. le Président.
Le Président (M. Champagne): Vous êtes satisfait
pour le programme 4. Est-ce qu'on pourrait penser que le programme 4 et les
deux éléments qui sont concernés sont adoptés?
M. Marx: Non, ils ne sont pas encore adoptés.
Le Président (M. Champagne): Alors, voulez-vous qu'on
reprenne la discussion demain?
M. Marx: Si le ministre veut.
M. Bédard: M. le Président, je n'aurais pas eu
objection à ce que nous continuions nos travaux avec l'accord de
l'Opposition, il va sans dire. Maintenant...
Le Président (M. Champagne): Mais il y a des
collègues qui sont déjà partis.
M. Bédard: ...je dois rencontrer... Je devais rencontrer
à dix heures - le temps est déjà dépassé -
le Solliciteur général du Canada concernant certains
problèmes.
Le Président (M. Champagne): D'accord.
M. Bisaillon: Une entente, encore?
M. Marx: Le ministre ne sera pas ici demain à dix
heures?
M. Bédard: Non, non; ce soir.
Le Président (M. Champagne): Alors, la commission
élue permanente de la justice ajourne ses travaux.
M. Bédard: M. le Président, avant de terminer, je
pense que les membres de la commission seraient d'accord pour que nous
libérions Mme la présidente de la Commission des droits de la
personne.
Le Président (M. Champagne): II me semble que j'ai bien
compris...
M. Marx: Je ne veux pas rendre la vie difficile à qui que
ce soit.
M. Bédard: Vous êtes gentil.
M. Marx: Sauf que, si la présidente reste à
Québec, de toute façon...
M. Bédard: Alors, à demi gentil.
M. Marx: Non, mais est-ce que la présidente reste à
Québec, de toute façon?
M. Bédard: Non, mais prévoyez-vous d'autres
questions? Le programme étant étudié...
M. Marx: Je vais voir les réponses que vous allez me
fournir. Je ne peux pas...
M. Bédard: II n'y a plus de questions au moment où
on se parle.
M. Marx: J'ai quelques questions... M. Bédard:
Parce que...
M. Marx: ...qu'on peut peut-être régler dans cinq
à dix minutes. D'accord!
M. Bédard: D'accord, M. le Président, si le
député de D'Arcy McGee veut faire en sorte que Mme la
présidente demeure ici à Québec, nous allons le faire. Ce
n'est pas plus compliqué que cela.
Le Président (M. Champagne): Pour demain ou pour ce
soir?
M. Bédard: Pour demain.
Le Président (M. Champagne): Pour demain. C'est parce
qu'il y a des personnes qui sont parties. Alors, madame...
M. Marx: J'ai demandé à Mme la présidente si
elle restait.
Le Président (M. Champagne): C'est qu'il n'y a pas de
consentement. M. le député de D'Arcy McGee, il n'y a pas...
M. Bédard: Non, il n'y a pas d'interrogatoire sur les
allées et venues des personnes. Décidez-vous!
M. Marx: D'accord, demain.
M. Bédard: Si vous ne voulez pas, vous ne voulez pas.
C'est tout.
Le Président (M. Champagne): II n'y a pas de
consentement.
Alors, la commission élue permanente de la justice ajourne ses
travaux à demain dix heures.
(Fin de la séance à 22 h 04)