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Projet de loi no 48
(Dix heures treize minutes)
Le Président (M. Boucher): A l'ordre, s'il vous
plaît messieurs!
La commission de la justice est réunie ce matin pour entendre les
mémoires des organismes et individus concernant le projet de loi no 48,
Loi modifiant la Loi de police.
Les membres de la commission sont: M. Alfred (Papineau), M.
Bédard (Chicoutimi), M. Blank (Saint-Louis)...
M. Blank: Présent.
Le Président (M. Boucher): ... M. Charbon- neau
(Verchères), M. Clair (Drummond), M. Fontaine (Nicolet-Yamaska); M.
Gravel (Limoilou) remplace M. Lacoste (Sainte-Anne); M. Lalonde
(Marguerite-Bourgeoys), M. Samson (Rouyn-Noranda), M. Vaillancourt
(Jonquière).
Les intervenants sont: M. Ciaccia (Mont-Royal), M. Cordeau
(Saint-Hyacinthe), M. Duhaime (Saint-Maurice), M. Lavigne (Beauharnois), M.
Léger (Lafontaine), M. Marois (Laporte), M. Pagé (Portneuf); M.
Tardif (Crémazie) remplacé par M. Jérôme Proulx
(Saint-Jean).
Aujourd'hui, nous avons cinq organismes qui présenteront des
mémoires. Je vais les énumérer dans l'ordre pour que les
gens sachent dans quel ordre ils vont passer aujourd'hui. D'abord, il y a la
Fédération des policiers du Québec
représentée par M. Guy Marcil, directeur exécutif;
l'Association des policiers provinciaux du Québec
représentée par M. Raymond Richard; la municipalité de
Rock Forest représentée par M. Richard Tremblay; le Service de
police de la Communauté urbaine de Montréal
représenté par Me Guy Lafrance et' M. René Bellerose
à titre personnel présentera un mémoire.
J'invite immédiatement la Fédération des policiers
du Québec, représentée par M. Guy Marcil. Il voudra bien
présenter les gens qui sont avec lui et procéder à la
lecture du mémoire.
Fédération des policiers du
Québec
M. Marcil (Guy): Guy Marcil est mon nom, mais la
présentation sera faite par le président de la
fédération, qui, du même coup, vous fera la
présentation des membres qui nous accompagnent. Sans plus tarder, M.
André Nadon, président de la fédération. (10 h
15)
M. Nadon (André): M. le Président, MM. les membres
de la commission, j'ai le plaisir de vous présenter, à ma gauche,
M. Raoul Fortier, vice-président de la fédération, ainsi
que M. Robert Miron, directeur des services techniques à la
fédération.
Nous allons vous faire la présentation de notre mémoire
d'une vingtaine de pages. J'invite les membres de la commission à
intervenir au mo- ment où on fera la présentation ou l'analyse
article par article s'ils le veulent ou à réserver leurs
questions à la toute fin du mémoire.
Dans son analyse du projet de loi no 48 et dans ses remarques, la
Fédération des policiers du Québec a tenté de se
limiter à ce qui pouvait affecter directement et concrètement les
policiers municipaux. Il convient d'abord, avant de procéder à
commenter un par un les articles où elle croit utile de faire des
observations, de faire part au législateur de deux réflexions
d'ordre général.
D'une part, en ce qui concerne le problème le plus
immédiat et l'inquiétude la plus grande formulée par la
fédération, soit la sécurité d'emploi chez les
policiers municipaux, celle-ci reconnaît d'emblée que le projet de
loi no 48 constitue une amélioration certaine à l'état de
chose existant actuellement et que, si les mécanismes prévus
audit projet de loi sont appliqués non seulement dans le but de
protéger l'emploi des policiers, mais également et
peut-être même surtout dans le but d'assurer une protection
efficace aux citoyens, et non pas dans le but de permettre aux
municipalités de se décharger de leurs responsabilités et
de présenter de beaux budgets aux électeurs, le but visé
pourrait avoir été pratiquement atteint.
D'autre part, le projet de loi semble vouloir confier à la
Commission de police du Québec un rôle de plus en plus
prépondérant, une présence de plus en plus quotidienne et
un contrôle de plus en plus absolu sur les corps policiers municipaux,
leurs membres, le comportement de ceux-ci et leurs activités. Or, sur ce
plan, la fédération émet de sérieuses
réserves sur le transfert apparent d'une partie et peut-être la
partie la plus importante de l'autorité des employeurs des policiers
municipaux en faveur de la Commission de police et nous ne saurions trop
insister sur les dangers que cela comporte indépendamment de
l'inefficacité qui pourrait en résulter.
En effet, la Commission de police du Québec risque de devenir un
monstre administratif, éloigné tant des policiers que des
citoyens, sans âme et sans coeur, avec le résultat que les
policiers seront réduits au rang de numéros matricules
jugés par des gens coupés du milieu et donc, d'une part, soumis
à une autorité agissant suivant des normes, critères et
objectifs différents de ceux qui s'appliquent à tous les autres
employés municipaux et, d'autre part, dans certaines circonstances,
privés des recours qui appartiennent à tous les travailleurs
syndiqués en vertu du Code du travail. Nous ne croyons pas que la
situation dans les services de police municipaux exige une telle intrusion de
la part d'un corps étranger dans leur administration et nous ne croyons
pas que l'on doive payer ce prix pour obtenir une certaine
sécurité d'emploi dont profitent nombre d'autres travailleurs, y
compris les serviteurs de l'Etat.
Nous allons maintenant faire l'analyse des articles, ceux qui touchent
particulièrement les policiers ou du moins ceux où nous avons
senti le besoin d'intervenir. A l'article 2 du projet de loi, l'insertion des
paragraphes 2a, 2b et 2c après
l'article 2 de la loi révèle certes d'excellentes
intentions.
Cependant, en ce qui concerne plus spécifiquement l'article 2a
et, en particulier, la deuxième phrase de celui-ci, certaines questions
se posent quant à la signification de celle-ci. Si le Procureur
général est réputé l'employeur d'un policier
municipal agissant en qualité d'agent de la paix dans un territoire
autre que celui de la municipalité qui l'emploie, est-ce que cela
signifie que le Procureur général assume alors toutes les
obligations d'une municipalité prévues à la convention
collective et qui correspondent à autant de bénéfices en
faveur du policier lorsqu'il est blessé au cours de son travail, quant
au temps supplémentaire qu'il peut réclamer, s'il intervient de
son propre chef lors de la commission d'un crime et alors qu'il n'est pas sur
ses heures régulières de travail, quant à la
défense qui lui est fournie et aux moyens de produire celle-ci, si
jamais il est poursuivi au criminel ou au civil par suite d'acte
exécuté dans l'exercice de ses fonctions?
Nous croyons qu'il y aurait lieu de préciser que le Procureur
général assume, à ce moment-là, toutes les
obligations qui auraient été celles de la municipalité
pour laquelle le policier travaille normalement, si celui-ci agit sur son
territoire.
Une autre question se pose à savoir si cette protection
s'applique également lorsque le policier agit comme agent de la paix
hors du territoire du Québec. La fédération
considère qu'il y aurait lieu d'assurer cette protection aux policiers
qui, comme agents de la paix, sont tenus d'intervenir, s'ils constatent la
commission d'un crime, d'une infraction, ou dont on s'attend qu'ils portent
aide et assistance beaucoup plus qu'un autre citoyen.
Finalement, si la convention collective à laquelle est assujetti
le policier concerné est muette quant aux bénéfices
prévus pour ledit policier en cas de poursuite contre lui par suite
d'actes exécutés dans l'exercice de ses fonctions, quelle est la
protection dont bénéficiera alors le policier concerné, et
quelle obligation entend assumer le Procureur général? Il y
aurait un point qu'on aimerait aussi soulever ici, qui n'est pas indiqué
dans le mémoire, et qui pourrait peut-être, selon les dispositions
de ces articles, porter à confusion. Je vais vous donner un exemple,
celui d'un policier de la CUM qui serait appelé, à un moment
donné, à intervenir pour le compte de la CUM dans un autre
territoire que le sien. Est-ce qu'à ce moment-là, le Procureur
général serait réputé être son employeur ou,
à toutes fins utiles, serait-ce toujours la CUM qui assumerait ses
obligations vis-à-vis de ce policier si jamais il était
blessé dans l'exercice de ses fonctions ou poursuivi civilement,
criminellement, ou ainsi de suite?
Je pense que l'article 2c pourrait porter à confusion. Je pense
bien que ce n'est pas dans l'esprit du législateur de voir à ce
que le policier ainsi appelé à exercer ses fonctions soit
privé de la protection à laquelle il aurait eu droit s'il avait
limité son intervention dans son territoire.
L'article 3 du projet de loi. Le troisième alinéa de
l'article 6 biffé par cet article 3 du projet de loi se retrouve
à l'article 82a proposé, sauf que l'amende y a été
augmentée considérablement. Nous ne pouvons que regretter que le
législateur n'ait pas fait disparaître cet article, mais, au
contraire, ait cru bon de le rendre encore plus sévère. Il n'y a
aucune espèce de raison pour qu'un policier ne puisse participer
entièrement à la vie de sa communauté, y compris et
surtout même, vu la confiance qu'il doit inspirer et les
responsabilités qu'il a vis-à-vis de ses concitoyens, en assumant
des fonctions publiques tant sur le plan fédéral, provincial,
municipal ou scolaire. Nous ne voyons vraiment pas l'avantage que le
législateur voit à museler ainsi cette catégorie de
citoyens qui est déjà suffisamment considérée
à part par le public et qu'on les empêche en plus d'être des
citoyens à part entière.
Ces dispositions sont désuètes, elles ont
été héritées d'une époque où les
politiciens engageaient les policiers et évidemment tenaient à
tout prix à ce que ceux-ci, par la suite, ne puissent travailler contre
eux, et elles émanent d'une mentalité suivant laquelle les
policiers, étant l'instrument du pouvoir, ne pouvaient pas en être
le critique ni y participer activement.
A moins que le législateur ne nous fournisse d'excellentes
raisons pour maintenir cette situation injuste, nous soutenons que celui-ci
doit faire disparaître complètement l'article 6 de la Loi de
police.
J'aimerais ici ouvrir une parenthèse. Lors de notre dernier
congrès à la fédération, une motion a
été adoptée par les congressistes à l'effet de voir
à clarifier le présent article 6 de la Loi de police et de nous
indiquer ou, du moins, par l'entremise du Procureur général, si
la question référendaire était une question qui
revêtait un caractère de partisa-nerie politique ou non. Je pense
que nous avons adressé cela au ministre de la Justice et,
évidemment, nous croyons quand même que la question
référendaire est au-delà de toute partisanerie politique;
nous attendons une réponse et j'espère que nous allons la
recevoir avant le référendum.
Une Voix: ...
M. Lalonde: Pas de danger.
M. Bédard: Soyez sans crainte là-dessus. Il tremble
déjà en avant de moi.
M. Lalonde: Ah oui!
M. Bédard: C'est prématuré, s'il fallait en
croire M. Ryan.
M. Lalonde: On a commencé à trembler à
Beauce-Sud, d'ailleurs.
M. Bédard: M. Ryan le demandait...
Une Voix: ...
M. Lalonde: C'était bien.
M. Clair: Pensez-vous en avoir...
M. Bédard: Quand on lui donne, il dit que c'est
prématuré.
M. Lalonde: Qui cela? Moi?
M. Bédard: Enfin, on est pas ici pour aborder ce
sujet-là, sous cet angle-là.
M. Lalonde: Qui a dit cela? M. Ryan?
M. Nadon: En fait, c'était tout simplement pour indiquer
que cette question-là, comme celle qui est soulevée en vertu de
l'amendement qui est proposé, intéresse les policiers et nous
voulons être considérés comme n'étant pas des
marginaux dans la société.
L'article 6 du projet de loi. L'article 16 proposé,
étudié en particulier en regard de l'article 36 du projet de loi,
modifiant l'article 4 de la Loi du ministère de la Justice, nous laisse
perplexes quant aux responsabilités confiées d'une part, à
la Commission de police et, d'autre part, à la direction
générale de la sécurité publique.
En effet, on confie à la commission le soin d'établir un
service de documentation et de statistiques permettant d'évaluer
l'état de la criminalité et l'efficacité de l'action
policière, alors que la direction générale, quant à
elle, est chargée de promouvoir la coordination des activités
policières. N'y a-t-il pas là double emploi, chevauchement ou
distinction beaucoup trop subtile entre les juridictions de chacun pour qu'un
jour on puisse s'y retrouver.
Dans le préambule de cet article 16, on dit que la commission est
chargée, entre autres choses, de favoriser la prévention du crime
et d'assurer l'efficacité des services de police au Québec; or,
le paragraphe f) de l'article 4 de la Loi du ministère de la Justice,
tel qu'amendé par l'article 36 du projet de loi no 48, confère
à la direction générale de la sécurité
publique le soin de promouvoir la prévention de la
criminalité.
Comment peut-on également délimiter les
responsabilités de chacun en ce qui concerne l'établissement par
la commission d'un service général d'inspecteurs chargés
de conseiller, en matière policière, la sûreté et
les corps policiers municipaux, et celle confiée à la direction
générale de la sécurité publique d'élaborer
des politiques et des programmes de sécurité publique et d'en
assurer l'implantation.
Il nous semble donc que la Commission de police, composée de
juges et de technocrates, était au départ et devait demeurer une
commission chargée de faire des enquêtes et non pas un organisme
à qui l'on confie le soin de conseiller soit le ministre ou soit les
corps policiers sur la façon d'administrer ceux-ci, de faire le travail,
etc.
Il ne nous semble aucunement que le rôle que l'on veut confier
actuellement à la Commission de police, et qu'elle avait d'ailleurs
déjà commencé à assumer en partie, soit celui d'une
véritable commission qui doit, quant à nous, pour garder sa
crédibilité et son indépendance, ne pas avoir à se
mêler de l'administration et du fonctionnement quotidien des corps
policiers, ne pas être la source des informations utiles aux corps
policiers et la banque d'informations fournies par ceux-ci tant en ce qui
concerne la criminalité que les membres des corps policiers.
Il nous semble que cette tendance nous conduit vers une superdirection
de la police qui chapeautera la direction de tous les corps policiers dans la
province, avec le résultat que ceux-ci perdront de plus en plus leur
autonomie.
Cela est d'autant plus dangereux que cette commission, banque
d'informations, conseillère, enquêteur, détenant un pouvoir
de réglementation très vaste, se verrait également confier
non seulement des pouvoirs de recommandation en ce qui concerne les membres des
corps policiers municipaux, mais également le pouvoir de priver ceux-ci
de leur statut d'agents de la paix lorsque la commission décidera
d'intervenir directement et de décider d'une plainte formulée
contre l'un d'entre eux.
Nous croyons que c'est la responsabilité du ministre de la
Justice de coordonner les activités policières, d'assurer la
prévention du crime, de fournir aux corps policiers les outils
nécessaires pour assurer cette prévention du crime et pour en
faire la répression. Nous croyons que c'est le rôle de la
Commission de police de faire des enquêtes et d'émettre des
recommandations. Pour qu'elle soit objective, la Commission de police doit
jouir d'une indépendance complète vis-à-vis du pouvoir
exécutif.
Or, le pouvoir exécutif doit avoir accès à toutes
les informations policières et doit pouvoir influencer et diriger les
activités de celle-ci. Si ces responsabilités sont
confiées à la Commission de police, ou bien l'exécutif
devra influencer ou diriger la Commission de police, ou bien l'exécutif
perdra tout contrôle sur ces matières dont il aura confié
la responsabilité à ladite commission. Dans les deux cas, nous
entrevoyons la situation ainsi créée comme extrêmement
délicate, non souhaitable et dangereuse pour le bon fonctionnement de
nos institutions, et de nature à faire perdre à celles-ci toute
crédibilité.
Article 7 du projet de loi. Si le paragraphe b) suggéré
signifie que la commission, par l'établissement de mécanismes de
contrôle d'aptitudes à exercer les fonctions d'agent de la paix,
peut, par là, s'arroger le pouvoir de vérifier la
moralité, la conduite, etc., de tout candidat policier, autant dire que
les municipalités perdent à peu près toute autonomie en ce
qui concerne l'engagement des personnes qu'elles choisissent actuellement
elles-mêmes comme candidats policiers, à partir du moment
où ils rencontrent les exigences minimales et objectives établies
par les règlements de la commission. Dans un semblable cas, il est
évident que la fédération s'oppose à ce que,
à toutes fins pratiques, ce soit dorénavant la Commission de
police du Québec qui dise aux municipalités qui embaucher et qui
ne pas embaucher.
En ce qui concerne le paragraphe c) proposé, la
fédération s'oppose fermement à ce que la Commission de
police soit celle qui détermine
quelle est l'utilisation qui doit être faite de
l'équipement fourni aux policiers. D'une part, ladite commission n'est
pas responsable des opérations policières et ne doit pas le
devenir et, d'autre part, elle pourrait, par ce biais, rendre caduques
certaines clauses contenues dans de nombreuses conventions collectives et en
particulier, pour ne nommer que celle-là, la clause qui prévoit
que deux hommes devront patrouiller ensemble sur chaque auto-patrouille. Il est
entendu que l'auto-patrouille fait partie, en quelque sorte, de
l'équipement du policier. Or, l'utilisation de cet équipement a
fait l'objet de négociations et en fera encore l'objet entre les parties
aux conventions collectives et ne doit pas faire l'objet d'une ordonnance de la
commission. Encore une fois, il n'est pas question pour la
fédération, que la Commission de police devienne l'employeur,
c'est-à-dire qu'elle embauche pratiquement, qu'elle dirige les
opérations, qu'elle applique la discipline, etc. (10 h 30)
En ce qui concerne le paragraphe b) de l'article 7 du projet de loi,
nous soumettons que le paragraphe f) de l'article 17 de la Loi de police
devrait demeurer tel quel. Nous ferons, par ailleurs, des commentaires plus
loin lorsque nous étudierons l'article 24 du projet de loi. En ce qui
concerne la dernière phrase proposée à l'article 17 de la
Loi de police, nous soumettons que la Commission de police doit non seulement
consulter les organismes municipaux représentatifs, mais
également les associations chargées de défendre les
intérêts des policiers.
En effet, les policiers ont suffisamment le sens de leurs
responsabilités pour vouloir collaborer à l'élaboration
d'un règlement de déontologie et les effets d'un semblable
règlement peuvent influencer suffisamment leur vie et leur
carrière pour qu'on en discute avec eux avant de l'adopter.
Article 8 du projet de loi. En ce qui concerne l'article 18 de la Loi de
police, tel que proposé, nous soumettons que le lieutenant-gouverneur en
conseil, s'il n'est pas obligé d'approuver automatiquement un
règlement adopté par la Commission de police, doit par ailleurs,
s'il veut que ce règlement soit modifié, le retourner à la
Commission de police qui devra alors de nouveau faire des consultations et les
modifications proposées. En effet, à quoi servirait-il de
consulter des organismes municipaux représentatifs et les associations
de policiers sur le contenu d'un quelconque règlement si le
lieutenant-gouverneur en conseil peut le modifier avant de l'adopter et ce,
à un tel point que les consultations s'avèrent une
complète illusion.
D'ailleurs, compte tenu des remarques déjà faites, la
commission devrait recommander l'adoption de certains règlements et le
lieutenant-gouverneur en conseil devrait les adopter après consultation.
Quant à nous, encore une fois, surtout dans le domaine policier, le
pouvoir d'adopter les règlements devrait être entre les mains du
lieutenant-gouverneur en conseil et non pas entre les mains d'un organisme
réputé indépendant.
L'article 18a proposé prévoit qu'un règlement
adopté en vertu de l'article 17 prévaut sur un règlement
municipal au même effet. Par ailleurs, le règlement municipal peut
jusqu'à un certain point avoir été négocié
et, dans certains cas, il est même réputé faire partie de
la convention collective, surtout en ce qui concerne évidemment les
sanctions disciplinaires prévues et qui limitent dans ce cas le pouvoir
de révision d'un arbitre de griefs, tel que prévu à
l'article 88m du Code du travail. Ainsi, si le règlement sur la
déontologie devait être adopté sans consultation des
associations accréditées pour représenter des policiers,
on nierait là, et de façon rétroactive, à ceux-ci
le droit de négocier et l'on ferait disparaître des droits acquis
en leur faveur ou on leur imposerait en quelque sorte des modifications
à leur convention collective sans qu'ils aient leur mot à dire.
Nous croyons que ce n'est pas là l'intention du législateur et
c'est pourquoi nous insistons de nouveau sur la recommandation formulée
en ce qui concerne l'obligation de la commission de consulter avant d'adopter
de semblables règlements.
Article 14 du projet de loi. Nous ne voyons aucunement pour quels motifs
les criminels bénéficieraient de ce qui est proposé par
l'article 14 du projet de loi et que les policiers, faisant l'objet d'une
enquête en vertu de l'article 20 de la Loi de police, n'en jouiraient pas
eux aussi. D'ailleurs, le premier alinéa de l'article 22 tel qu'il
existe couvre les personnes qui témoignent au cours des enquêtes
prévues et à l'article 19 et à l'article 20. Pourquoi
alors restreindre les droits accordés aux témoins à
l'enquête visée dans l'article 19.
Article 15. Les mêmes remarques que celles qui ont
été faites au sujet de l'article 14 du projet de loi s'appliquent
également ici. Au cours d'une enquête visée à
l'article 20, il se peut également qu'une personne soit nommée ou
que ses activités soient mentionnées et cette personne devra
avoir les mêmes droits que toute personne dont le nom ou les
activités ont été mentionnés au cours d'une
enquête visée à l'article 19. Par conséquent, les
articles 22a, 22b et 22c devraient être modifiés et inclure les
enquêtes visées à l'article 20.
L'article 16 du projet de loi, compte tenu des remarques
précédentes à l'article 22e proposé, devrait
également mentionner les enquêtes visées à l'article
20. Les remarques faites aux articles 14 et 15 s'appliquent, mutatis
mutandis.
Il n'est absolument pas question pour la Fédération des
policiers du Québec d'accepter que la Commission de police puisse,
à la suite d'une enquête visée à l'article 20,
priver un policier municipal de son statut d'agent de la paix, ce qui
équivaudrait évidemment à une suspension pour la
période prévue ou même à un congédiement, si
son statut d'agent de la paix lui est retiré indéfiniment ou pour
toujours.
Les policiers ont droit, comme tout autre travailleur, à
l'arbitrage des griefs, y compris les griefs formulés à la suite
de l'imposition de sanctions disciplinaires. Les arbitres de griefs ont, en
vertu du Code du travail et en particulier de l'article 88m de celui-ci, le
pouvoir de substituer à la décision de l'employeur toute
décision qui peut
paraître au tribunal d'arbitrage juste et raisonnable, compte tenu
de toutes les circonstances de l'affaire. Il n'est aucunement question que la
Fédération des policiers du Québec accepte que, selon le
bon désir de la commission d'intervenir ou non à la place d'un
comité de discipline, un policier municipal soit soumis à la
juridiction de la Commission de police, et les autres à la juridiction
des tribunaux d'arbitrage de griefs.
Les tribunaux d'arbitrage de griefs n'ont aucune espèce de
couleur politique et leur indépendance a été
entièrement reconnue. On sait qu'à l'occasion de certains
conflits ouvriers ou autres manifestations, des affrontements ont eu lieu entre
policiers et manifestants.
Politiquement, on comprend que des enquêtes aient dû
être ordonnées dans certains cas. On comprend également que
la Commission de police ait pu, compte tenu des circonstances, faire certaines
recommandations à l'égard de certains policiers. Il est cependant
toujours revenu à l'employeur et cela doit continuer de revenir
à l'employeur de décider s'il suit ces recommandations;
compte tenu du contexte municipal, compte tenu des besoins de la
municipalité, il doit demeurer de la juridiction des arbitres de griefs
de décider si la sanction imposée par l'employeur est
justifiée dans les circonstances.
On peut comprendre que la Commission de police se soit quelquefois
sentie frustrée de voir que certaines de ses recommandations n'aient pas
été suivies ou que même, ayant été suivies
par l'employeur, un arbitre de griefs ait modifié la sanction
recommandée.
Or, les policiers sont suffisamment considérés comme des
travailleurs à part sans qu'on les prive, en plus, des recours en
révision prévus pour les autres travailleurs.
L'article 24b proposé, surtout avec le rôle accru dans tous
les domaines que l'on veut confier à la Commission de police, fait que
celle-ci est pratiquement juge et partie, étant celle qui édicte
les règlements d'éthique, qui fait les enquêtes et qui
décide du sort d'un agent de la paix, et ceci par une décision
finale et sans appel, sauf excès de juridiction, bien entendu.
Dans des représentations verbales ou écrites
antérieures, la Fédération des policiers du Québec,
pour éviter cette situation injuste où la commission est presque
juge et partie, avait demandé que, même dans le cas des policiers
non salariés au sens du Code du travail, le rôle de la commission
se limite soit à enquêter ou soit à siéger en appel
des décisions de l'employeur dans les cas de ces policiers non
salariés au sens du Code du travail.
En effet, si la Commission de police fait enquête et recommande
une sanction disciplinaire quelconque, elle ne peut évidemment
siéger en appel de la décision de l'employeur, surtout si ce
dernier a suivi la recommandation.
Par conséquent, la commission doit de deux choses l'une, ou bien
ne plus être l'organisme qui siège en appel, en ce qui concerne
ses policiers, si elle maintient son pouvoir d'enquête et de recom-
mandation, ou bien elle doit se départir de son pouvoir d'enquête
et de recommandation, si elle veut siéger en appel.
Pour tenter de corriger cette injustice en ce qui concerne les policiers
non salariés au sens du Code du travail, le projet de loi, à son
article 30, a limité le droit d'appel, c'est-à-dire qu'il l'a
fait disparaître dans le cas où la municipalité a suivi
à la lettre la recommandation de la Commission de police. Cette
proposition est inconcevable, inique et contraire à l'esprit de toutes
nos lois, dans le domaine des relations du travail, ainsi qu'à d'autres
lois, telle que la Loi des cités et villes, qui permet aux autres
officiers municipaux d'en appeler d'une sanction disciplinaire devant la
Commission municipale du Québec.
En ce qui concerne les policiers salariés au sens du Code du
travail, ceux-ci avaient le droit de s'adresser à un tribunal
d'arbitrage quoi qu'ait recommandé la Commission de police et quoi
qu'ait décidé l'employeur. Ce droit doit demeurer
entièrement, aucun organisme ne devant à notre époque
posséder un droit de vie ou de mort absolu sans appel sur quelque
travailleur que ce soit. En ce qui concerne l'article 24c, il devrait y
être prévu que les recommandations de la Commission de police
n'affectent en rien la juridiction des tribunaux d'arbitrage ou de griefs, tel
qu'établi à l'article 88m du Code du travail. Il se trouvera en
effet facilement des procureurs patronaux disposés à plaider
jusqu'en Cour suprême que les arbitres de griefs sont liés par ces
recommandations et les policiers feront encore les frais de ces
procédures. En vertu de cet article proposé, j'aimerais faire un
aparté et vous lire quelques paragraphes des mots de bienvenue qui
avaient été adressés par le juge Guy Tremblay à
l'occasion de l'enquête de la Commission de police sur la Commonwealth
Plywood, il y a quinze jours.
C'est pour cette raison qu'on vous dit, M. le Président, que cet
article, on le voit dangereux et, évidemment, nous nous opposons
fortement à ce qu'il puisse éventuellement être
adopté. Je vous cite quelques extraits. "L'obligation que nous avons
n'est pas, comme je le disais au début, de rendre un jugement, de rendre
justice. Notre obligation est de cerner la vérité pour
rédiger et faire rapport de nos constatations. Notre rôle se
termine par la rédaction d'un rapport qui est expédié au
Procureur général de la province de Québec et qui contient
les constatations que nous avons faites ainsi que certaines recommandations.
Nous n'avons pas de pouvoir exécutoire. Nous ne sommes pas l'employeur
de policiers qui oeuvrent au Québec; même si, pour les fins de la
discussion, nous constations qu'un policier a manqué à
l'éthique professionnelle, nous constations qu'il ait mal agi, nous ne
pouvons pas le congédier. "Tout ce que nous pouvons faire, c'est de
recommander que des mesures disciplinaires soient prises contre lui et que, si
les actes qu'il a commis sont à notre égard suffisamment graves,
nous pouvons recommander au Procureur général que des plaintes
criminelles soient prises contre lui. On peut recommander aussi que ce
policier
disparaisse de la circulation et cesse de faire partie d'un corps de
police. Mais ce ne sont là que des pouvoirs de recommandation. Nous
avons certaines informations qui nous permettent de croire que ces pouvoirs
peuvent bientôt être augmentés, ce que nous souhaitons
chaleureusement et ce que nous désirons ardemment. Or, on nous a dit
et je ne révèle pas le secret des dieux qu'un
projet de loi avait été déposé au cours du mois de
juin je pense, M. Breault apportant certaines modifications
à la Loi de police, reconnaissant que les membres de la Commission de
police, à la suite de la tenue d'une enquête, peuvent, et c'est ce
que nous souhaitons, émettre une ordonnance reconnaissant qu'un policier
est inhabile à exercer cette profession dans la province de
Québec. C'est un pouvoir que nous n'aimerions peut-être pas
appliquer, mais que nous désirons posséder pour être en
mesure de l'appliquer si nous en venons à de telles conclusions et
ainsi, nous aurions des pouvoirs exécutoires plutôt que de
travailler comme des nègres et faire des recommandations qui, en
certaines circonstances, ne sont pas appliquées, et nous aurions
d'autres pouvoirs moins sévères que celui-là, en vertu
desquels nous pourrions faire des recommandations encore, mais des
recommandations étant précisées dans un texte de loi. Ces
recommandations pourraient s'échelonner entre l'application de toutes
les gradations que l'on retrouve dans les mesures disciplinaires, pouvoir de
remontrance ou de suspension avec ou sans solde et congédiement".
Je pense que cela se passe évidemment de commentaires.
M. Bédard: Je comprends que vous faites témoigner
indirectement la Commission de police.
M. Lalonde: Avec la permission.
M. Nadon: L'article 19 du projet de loi. La
fédération voit une contradiction possible entre l'alinéa
proposé à la fin de l'article 29 de la Loi de police et les
articles 52, 52a, 52b et 52c proposés par l'article 25 du projet de loi.
En effet, d'une part, par les articles ci-haut mentionnés, on oblige les
municipalités de 5000 habitants et plus à créer et
à maintenir un corps de police sur leur territoire et, d'autre part,
l'amendement proposé par le présent article 19 prévoit la
possibilité pour la sûreté d'intervenir dans une
municipalité pour y assumer l'ordre et pour y poursuivre une
enquête, soit à la demande du Procureur général ce
qui, par ailleurs, n'est pas différent, quant à nous, du droit et
des responsabilités actuelles du Procureur général, mais
également sur l'initiative propre de la sûreté ou à
la demande d'une municipalité.
Qu'adviendrait-il si, à chaque fois qu'il y a une enquête
criminelle à faire sur le territoire de la municipalité, celle-ci
faisait appel à l'aide de la sûreté? Qu'adviendrait-il si
un responsable de la sûreté plutôt zélé, dans
une région quelconque, décidait d'étendre sa protection au
territoire d'une municipalité où il y a déjà des
policiers? Par ce biais, les obligations créées aux articles 52
et suivants, proposés par le projet de loi, pourront être
ignorées. Les corps policiers municipaux pourront se départir
complètement de leurs policiers chargés d'enquêtes et se
limiter à faire du travail de gendarmerie et d'application de
règlements municipaux, et ainsi le nombre des policiers municipaux ira
toujours en diminuant.
Ceci est vrai autant pour les petites municipalités que pour la
Communauté urbaine de Montréal, où nous soupçonnons
certains policiers de souhaiter ardemment de refiler les enquêtes
à la Sûreté du Québec, afin d'avoir à leur
disposition des constables disponibles pour la circulation, l'application des
règlements municipaux et peut-être même au regretté
système en vertu duquel les policiers municipaux servaient de courriers
aux édiles municipaux, et même de chauffeurs à ceux-ci et
aux membres de leurs familles.
Il est donc inacceptable pour la fédération que la
sûreté puisse, de sa propre initiative, à la demande d'une
municipalité, et même à la demande du Procureur
général, assumer l'ordre sur le territoire d'une
municipalité ou y poursuivre des enquêtes, à moins qu'il ne
s'agisse de cas vraiment exceptionnels et que, momentanément, à
cause d'événements passagers, le corps de police municipal ne
soit en mesure, avec l'aide possiblement d'autres corps policiers municipaux,
de maintenir l'ordre et de faire enquête.
En l'absence de cet alinéa qu'on propose, l'aide de la
Sûreté du Québec a d'ailleurs été maintes
fois requise et maintes fois fournie dans de semblables cas. Nous ne voyons
donc aucune utilité au texte proposé; cependant, nous y voyons un
danger considérable, si un jour, la politique et la Dolitique
seule devait guider certains dirigeants agissant uniquement par raison
d'économie ou pour des buts électoralistes à court
terme.
L'article 24. Les articles 47a), b) et c) pourraient évidemment,
selon les amendements proposés à l'article 7 du projet de loi,
s'appliquer éventuellement aux policiers municipaux. Il doit être
bien compris que la Fédération des policiers du Québec
n'est aucunement contre l'adoption d'un règlement sur la
déontologie, mais qu'elle est même favorable à
l'idée que ce règlement soit, dans la mesure du possible,
uniforme pour tous les policiers du Québec. Cependant, la
fédération a certaines réserves en ce qui concerne le
contenu proposé d'un semblable règlement. (10 h 45)
En ce qui concerne l'alinéa b) de l'article 47a, la
fédération soumet qu'il devrait être inscrit à la
loi que les occupations, activités ou emplois interdits aux policiers
devraient être uniquement ceux qui sont incompatibles avec la fonction de
policier. Nous avons déjà recommandé que l'adoption d'un
règlement sur la déontologie fasse l'objet de consultations. Si
c'est une question de savoir si certaines occupations, activités ou
emplois sont incompatibles avec la fonction de policier, nous soumettons qu'un
organisme neutre, tel que la Commission des droits et libertés de la
personne, devrait avoir juridiction pour décider
de tout litige survenant entre l'un quelconque des intervenants
possibles et de la Commission de police. En effet, dans le même esprit
que les remarques faites au sujet des activités publiques ou politiques
possibles, nous soumettons que le fait d'être policier ne doit pas
empêcher celui-ci d'avoir d'autres activités ou d'exercer d'autres
métiers qui ont, malgré peut-être une certaine
réputation dans le passé, acquis quand même aujourd'hui
leurs lettres de noblesse comme n'importe quel autre métier.
Ainsi, beaucoup de règlements sur la déontologie dans le
passé interdisaient à un policier d'exercer le métier de
chauffeur de taxi. Il faudrait qu'on nous dise s'il y a là quelque chose
de déshonorant, s'il est préférable d'avoir comme
chauffeurs de taxi des repris de justice plutôt que des policiers, si
l'on pense qu'un policier qui veut vraiment avoir des activités
illicites ou mêmes criminelles a besoin d'exercer un semblable
métier pour le faire.
Egalement, et à moins que le policier ne se serve de son statut
pour obtenir des faveurs ou pour échapper à l'application de la
justice ou des règlements municipaux ou provinciaux, comment pourrait-on
justifier qu'un policier ne puisse être actionnaire dans un commerce
détenant un permis de boissons alcooliques et même d'y travailler
personnellement, alors que l'on sait très bien que de bons pères
de famille, des veuves ou également des bandits notoires sont
indifféremment actionnaires ou employés de semblables
commerces?
Quant à la fédération, aucun métier en
lui-même n'est incompatible avec la fonction de policier, pas plus
d'ailleurs qu'avec quelque fonction que ce soit.
Seul le fait d'utiliser ce métier pour des fins illicites ou
illégales, ou le fait de se servir de son statut de policier, de
professionnel, de député ou de ministre pour obtenir des faveurs
ou jouir d'un statut spécial sont à éviter et doivent
faire l'objet d'une défense ou de répression. Il est notoire que
le Vatican lui-même possède des intérêts nombreux
dans des compagnies qui ont toutes sortes d'activités. Or, on ne saurait
exiger des policiers qu'ils soient plus catholiques que le pape.
En ce qui concerne l'alinéa c) de l'article 47a, il doit
être bien entendu qu'au comité d'examens de plaintes, on doit
retrouver au moins un représentant des policiers, un représentant
du public et un représentant de la direction du corps de police
municipal.
Quant à la fédération, il ne saurait être
question qu'on y retrouve un représentant de la Commission de police qui
commencerait déjà là son enquête, avant de pouvoir
possiblement devenir enquêteur pour le compte de la commission qui,
à son tour, aurait à prendre la décision.
Par ailleurs, il faudrait aussi éviter la présence
à ces comités, de dirigeants élus des
municipalités. Ceci, dans le but d'éviter que la politique se
mêle de l'application de la discipline et du règlement sur la
déontologie.
L'alinéa c) du paragraphe 47a tel que proposé nous semble
donc trop vague. Il doit être prévu que ce comité de
discipline n'a que des pouvoirs de recommandation à l'employeur qui
demeure celui à qui la décision finale et que cette
recommandation ne lie en rien tout organisme prévu par la loi pour
réviser la décision de l'employeur.
Quant à l'alinéa g), les sanctions disciplinaires
prévues en regard de certaines infractions ne devraient en aucune
façon lier l'employeur et le tribunal d'arbitrage des griefs qui, compte
tenu des circonstances, pourrait choisir d'imposer toute autre sanction.
Quant à l'alinéa i), il est maintenant reconnu que les
lois sont habituellement rédigées en termes
généraux, et que ce sont les règlements qui font foi de
tout. Cependant, la fédération arrive mal à saisir les
limites de ce qui pourrait être prévu et réglementé
en ce qui concerne toute autre matière relative au développement
de la conscience professionnelle et à l'esprit de la fonction
disciplinaire dans un corps de police municipal. La fédération
compte évidemment sur les consultations proposées avant
l'adoption d'un tel règlement pour voir à ce que le métier
de policier ne devienne pas une religion.
Quant à l'article 47c, la fédération soumet encore
une fois que le lieutenant-gouverneur en conseil, s'il veut modifier le
règlement adopté en vertu de l'article 47a, doit ou bien le
retourner à la commission pour de nouvelles consultations, ou bien
prévoir la possibilité de consultations directes avec les
organismes intéressés.
Article 25 du projet de loi. Tel que mentionné déjà
dans le préambule de ses remarques, il semble à la
fédération que les amendements proposés à l'article
25 du projet de loi puissent être pour le moment suffisants pour
atteindre le but visé, soit la protection des citoyens par des policiers
municipaux qui puissent ainsi jouir d'une certaine sécurité
d'emploi.
La fédération a une seule réserve, soit sur
l'orientation qui pourrait être donnée suivant l'époque
où le gouvernement en place à l'application de ces articles, ou
sur l'importance relative accordée à l'alinéa
ajouté à l'article 29 de la Loi de police par l'article 19 du
projet de loi déjà commenté, ou à l'article 60a de
la Loi de police tel que proposé par l'article 28 du projet de loi. En
fait, ce qui permet de diluer considérablement l'article 52, tel
qu'amendé.
Il est évident que ce n'est qu'à l'usage que la
fédération pourra se rendre compte si oui ou non ces articles
sont utilisés à bon escient et atteignent le but visé, et
elle souhaite ainsi ne pas avoir dans le futur à revenir à la
charge pour demander de nouveaux amendements ou de nouvelles précisions.
A l'article 52b, il devrait être prévu que la demande est faite au
ministre de la Justice et que c'est le comité prévu à
l'article 52a qui fait l'étude des effectifs jugés
nécessaires et qui formule des recommandations au ministre.
La fédération ne voit ni la nécessité ni le
but visé par la disparition des articles 62 à 62d de la Loi de
police et leur remplacement par l'article 62 proposé. Nous sommes
d'ailleurs d'avis que la
disparition de ces articles va causer un préjudice sérieux
pour certains de nos membres.
Nous aurons à donner des explications là-dessus et nous
croyons vraiment que la situation qui est proposée en vertu de cela est
discriminatoire à l'égard du policier, tenant compte des
dispositions de la loi actuelle en vertu des articles 62 à 62d. Nous
avons préparé des chiffres et nous vous les soumettrons par la
suite.
L'article 30 du projet de loi. La Fédération des policiers
du Québec a déjà eu l'occasion de faire des remarques au
sujet du droit d'appel qui doit exister en faveur de tout travailleur, y
compris les policiers non salariés au sens du Code du travail, à
la suite de l'imposition par leur employeur d'une sanction disciplinaire
quelconque.
Or, nous ne pouvons que répéter que la façon dont
l'on tente ici d'éviter le problème causé par le fait que
la Commission de police peut à la fois être celle qui a
enquêté et celle qui décide en appel, constitue une
injustice, un délit de justice, une façon de vouloir conserver
à la Commission de police du Québec toutes les juridictions, en
privant pour cela le justiciable de droits fondamentaux.
La façon même de rédiger l'article, qui semble
accorder un droit d'appel aux personnes visées alors que le but
visé est de les en priver dans certaines circonstances, nous
apparaît trompeuse. Il faut être assez honnête pour
écrire carrément que le droit d'appel n'existe pas dans les cas
où la municipalité applique à la lettre les
recommandations de la commission. On le découvre évidemment
à la lecture des différentes circonstances où l'appel est
permis. Cependant, loin de corriger le problème qui existait et qui
constituait une injustice pour les policiers non salariés au sens du
code, ceci aggrave encore la situation.
L'article 31 du projet de loi. L'alinéa proposé à
la fin de l'article 65 doit prévoir que cette possibilité
accordée aux municipalités ne peut avoir pour effet de
réduire les obligations prévues aux articles 52, 52a, b et c,
proposées à l'article 25 du projet de loi.
L'article 35 du projet de loi. En ce qui concerne l'article 82a, vu que
la fédération a proposé la disparition de l'article 6 de
la Loi de police, évidemment elle soumet que ledit article 82a, tel que
proposé, ne devrait pas exister.
En ce qui concerne l'article 82b, on devrait supprimer les mots "et
quiconque continue à exercer des fonctions d'agent de la paix", compte
tenu des représentations que nous avons faites concernant l'article 24b
proposé par l'article 17 du projet de loi.
En terminant, M. le Président, la Fédération des
policiers du Québec aurait souhaité que ce projet de loi aurait
amendé la Loi de police pour permettre la création du corps de
police des autoroutes, tel qu'il était prévu, avec ses
concordances, dans le projet de loi no 41 déposé en
première lecture en juin 1976. D'ailleurs, à cette époque,
tout le monde en commission parlementaire, y compris le gouvernement, avait
accepté la création de ce corps de police.
Nous aimerions aussi vous faire part d'un certain désappointement
que nous éprouvons à la fédération du fait que le
rapport Saulnier a rejoint ses prédécesseurs sur les tablettes,
entre autres, le rapport Prévost. Nous avions misé beaucoup chez
nous sur certaines réformes, tout particulièrement au niveau de
la structuration des corps de police.
Il semble que le voeu qu'exprimait le groupe de travail en concluant ce
rapport n'a pu être réalisé et nous le citons: "Bref, si la
volonté de changement peut être inspirée et soutenue par
les pouvoirs publics, communiquée aux citoyens et aux policiers, ce
redressement peut être envisagé avec optimisme, car le monde
policier au Québec réunit toutes les ressources humaines et
matérielles propres à le réaliser. "
Nous tenons, M. le Président, à vous remercier, ainsi que
les membres de la commission parlementaire de nous avoir permis de vous
présenter ce mémoire qui, nous l'espérons, sera utile.
Nous sommes disposés à répondre aux questions des membres
de la commission.
Le Président (M. Boucher): Merci, M. Nadon. M. le
ministre.
M. Bédard: M. le Président, nous tenons à
remercier et à féliciter la Fédération des
policiers du Québec de son mémoire très positif,
très fouillé, structuré. Je comprends qu'on émet
certaines divergences ou certaines restrictions concernant des articles du
projet de loi, mais on est à même de constater qu'une
argumentation est apportée pour essayer de justifier chacun des points
de la fédération. Vous pouvez être assurés que nous
prenons bonne note des remarques ou des demandes de précision de
certains articles, entre autres aux articles 2a, 2b, 2c et à d'autres
articles. Nous allons également considérer avec beaucoup
d'attention vos représentations sur le besoin qu'il y aurait d'avoir un
droit d'appel concernant certaines dispositions majeures de la Commission de
police.
Nous allons également profiter de votre passage à la
commission, vous vous en doutez bien, pour vous poser certaines questions sur
des avancés, sur certains jugements que vous portez. Entre autres,
à la page 2 de votre mémoire, vous portez un jugement, le moins
qu'on puisse dire, très sévère à l'endroit de la
Commission de police et vous émettez des craintes sur lesquelles
j'aimerais vous voir expliciter, à savoir que la Commission de police
risque de devenir un monstre administratif éloigné tant des
policiers que des citoyens, sans âme et sans coeur, etc.
J'aimerais que vous explicitiez plus longuement ce qui justifie les
craintes que vous énoncez. D'une part, vous demandez, d'une certaine
façon, que la Commission de police ne soit qu'un organisme quasi
judiciaire. Vous évoquez certains conflits d'intérêts qu'il
peut y avoir au niveau de la Commission de police, étant donné
certaines attributions et certains devoirs qu'ils ont. Il reste que ces devoirs
ou ces pouvoirs de conseiller
certaines municipalités dans d'autres domaines de l'ensemble de
la vie policière sont de nature non pas à les couper du monde
policier, mais à les rapprocher en termes de compréhension du
monde policier.
Ne pensez-vous pas que si on en fait un organisme strictement quasi
judiciaire, ce sera un organisme qui sera beaucoup plus coupé du monde
policier, ce que vous craignez dans votre mémoire?
M. Nadon: En fait, M. le Président, nous ne croyons pas
que le rôle de la Commission de police devrait s'orienter dans le but de
se substituer à l'employeur, d'une part, parce qu'on veut lui
conférer certains pouvoirs qui sont de la responsabilité ou la
juridiction des municipalités actuellement.
D'autre part, les pouvoirs qui, en vertu du projet de loi 48, sont
proposés maintenant à la commission, nous prétendons que
cela ne devrait pas appartenir à la Commission de police. Nous sommes
d'opinion, à la fédération, que le pouvoir de
réglementation devrait appartenir au Procureur général, au
pouvoir exécutif. Nous croyons que c'est le pouvoir exécutif qui
devrait, en fin de compte, avoir le contrôle sur les activités
policières et non pas la Commission de police. Nous croyons que les
pouvoirs qui sont visés à l'article je n'ai pas le
numéro devraient être transmis plutôt à la
DGSP, non pas des pouvoirs de réglementation, mais des pouvoirs de faire
des recommandations à l'Assemblée nationale ou au Procureur
général. (11 heures)
Vu la mission de la Commission de police d'être un organisme qui a
un statut juridique, qui, d'autre part, a des pouvoirs quasi judiciaires, qui
doit être considéré comme neutre et crédible, nous
sommes d'opinion que la Commission de police ne devrait pas servir de paravent
au Procureur général ou au gouvernement, pour que les
décisions que le gouvernement pourrait prendre deviennent par la suite
la responsabilité de la Commission de police qui aura à les
justifier. Je pense que le gouvernement ou le Procureur général
devrait prendre ses responsabilités en matière policière
et voir à ce que ce soient ses décisions, sa
réglementation qui devraient provenir justement de son
ministère.
M. Bédard: A la page 21 de votre mémoire, vous
dites entre autres choses ceci, au deuxième paragraphe: "La
fédération ne voit ni la nécessité, ni le but
visé par la disparition des articles 62 à 62d de la Loi de police
et leur remplacement par l'article 62 proposé. Nous sommes d'ailleurs
d'opinion que la disparition de cet article va causer un préjudice
sérieux à certains de nos membres." Vous nous avez indiqué
également que vous aviez de plus amples informations qui pourraient nous
éclairer sur les préjudices qui pourraient être faits
envers certains de vos membres. Est-ce que vous pourriez être plus
explicite là-dessus?
M. Nadon: Certainement, M. le Président.
Présentement, aux articles 62 et 62a, c'est que si le policier qui, soit
dans l'exercice de ses fonctions pour le compte de sa municipalité ou
à l'extérieur de sa municipalité il y a deux
articles différents devient totalement invalide, à ce
moment-là, la protection qui lui est accordée, en vertu de
l'article 62, fait qu'il reçoit une indemnité des quatre
cinquièmes de son salaire indexé au coût de la vie. Tandis
que, présentement, ce qui nous est proposé en vertu de l'article
62, "lorsqu'un policier municipal agit en qualité d'agent de la paix
dans un territoire qui n'est pas soumis à la juridiction du corps de
police dans la municipalité, etc." En fait, c'est que le policier se
verrait indemnisé par la Loi des accidents du travail, dont le maximum
est de $20 000. A ce moment, nous avons quand même des policiers, des
lieutenants ou des capitaines qui font évidemment au-delà de ce
montant. Si jamais ils devenaient invalides totalement, à ce
moment-là, les quatre cinquièmes d'un salaire de $25 000 ou $26
000 sont évidemment supérieurs à ce que vous proposez dans
votre article 62.
C'est la même chose en vertu de l'autre, concernant le
décès d'un policier dans l'exercice de ses fonctions, et nous
avons préparé un tableau. Je ne sais pas si vous l'avez. C'est
annexé à la fin. Il n'y est pas. Nous avions prévu que M.
Claude Legault, qui est président de l'ABRPCUM, serait parmi nous pour
vous l'expliquer plus en détail. Evidemment, j'ai regardé en
arrière, il n'est pas ici. Mais on aimerait vous donner, de façon
sommaire, quelques chiffres; au besoin, si on veut plus
d'éclaircissements, on fera le nécessaire pour vous remettre
toute la documentation.
A l'article 62, dans le cas d'incapacité totale et permanente, la
rente annuelle est égale aux quatre cinquièmes du traitement
à la date de l'accident. Exemple, un policier marié, deux
enfants, quatre cinquièmes de $20 000. Prenons comme hypothèse
que le policier fait $20 000 dans les circonstances. Cela lui donne un montant
de $16 000 et, dans le cas d'une veuve, d'un policier qui décède,
c'est la demie du traitement, la moitié du traitement. Exemple, $8000,
ce qui correspondrait si vous voulez à un salaire hebdomadaire de
$177.84. Maintenant, en vertu de la Loi des accidents du travail, pour
incapacité totale et permanente, vous obtenez 80% du revenu net. Prenons
l'exemple d'un policier marié et père de deux enfants, le revenu
net est 90% de ce montant, ce qui représente un montant de $13 574.65,
donc $261.05 comparativement à un montant de $16 000, ce qui
était les quatre cinquièmes, en vertu de l'article 62, ou
$307.69.
Dans le cas d'une veuve et deux enfants, c'est 70% du montant de $13
574, ce qui représente un montant de $8 823.52. Cela représente
ici un montant de $169.68, comparativement à un montant de $177.84 dans
le cas de 62a.
Dans le projet de loi, pour le célibataire, il y a une diminution
de $68.04 par semaine; marié, deux enfants, $46.64; veuve, $8.16. C'est
d'une
façon très sommaire qu'on vous donne les
différences, mais il y a une différence notable. Là, on
parle uniquement d'un policier qui touche un montant de $20 000. Dans le cas
d'un policier qui gagnerait $25 000, $26 000 ou $27 000 selon le cas,
évidemment, le préjudice causé est d'autant
augmenté.
M. Bédard: Si vous avez d'autres représentations
à nous faire sur ce point-là, on vous invite à les faire.
Nous avons déjà à l'heure actuelle certaines discussions
avec M. Legault au niveau du ministère de la Justice. Cela pourra nous
permettre d'amener peut-être des éléments additionnels au
niveau de la discussion et de la réflexion que nous avons
déjà engagées sur les répercussions possibles de
ces articles.
M. Nadon: Maintenant, si vous me le permettez, M. le
Président, il y a seulement une chose que j'aimerais ajouter
là-dessus. Vous savez que ce n'est pas une clause ou un article qui est
souvent appliqué. A ma connaissance, je pense que nous avons un cas au
Québec, à l'heure actuelle, qui bénéficie des
dispositions de l'article 62 et c'est l'ancien policier de Drummondville,
Douglas Lyons. Je pense que cet article avait été
créé, à ce moment-là, pour tenir compte justement
du cas exceptionnel de Lyons, parce qu'il n'avait aucune protection de sa
municipalité pour le couvrir dans les circonstances. Ce ne sont pas des
choses qui arrivent régulièrement, mais on tient quand même
à vous aviser que, dans l'éventualité où un
semblable cas viendrait à se répéter, nous ne voudrions
quand même pas qu'un préjudice soit causé à l'un de
nos policiers.
M. Bédard: D'une façon générale,
lorsqu'on parle de la nécessité d'un code de déontologie,
d'un code d'éthique pour l'ensemble des policiers du Québec, je
pense que vous n'êtes pas contre le fait qu'il y ait un code de
déontologie, un code d'éthique. Vous demandez que des
consultations appropriées soient faites avant sa mise en application, si
j'ai bien compris le sens de vos représentations.
M. Nadon: En fait, évidemment, on n'est pas contre un code
de déontologie et, comme on l'indique dans notre mémoire, on
aimerait qu'il soit le plus uniforme possible à travers la province,
sauf que nous avons de sérieuses réserves quant à
l'application du code de déontologie, surtout avec les pouvoirs qu'on
s'apprête à accorder à la Commission de police. Nous ne
voulons pas que la Commission de police se substitue à l'employeur et
nous voulons toujours maintenir le recours que nous avons, en vertu du Code du
travail, à l'article 88m, dans le cas où une municipalité
prendrait une décision qui, dans les circonstances, pourrait nous
apparaître comme étant un préjudice à un policier.
Nous voulons maintenir quand même ce recours et je pense que c'est
fondamental et nécessaire. En vertu de l'article 24 proposé, on
s'apprêterait à accorder à la Commis- sion de police,
à toutes fins utiles, les pouvoirs de suspendre un policier selon
l'enquête qu'elle mènerait et ce policier se verrait par la suite
ou pourrait se voir privé d'un recours dans l'éventualité
où la commission émettrait une ordonnance.
Une ordonnance pour relever ur policier de son statut de policier, c'est
évidemment l'équivalent d'une suspension, et chaque fois que la
Commission de police aura à intervenir, elle pourrait tout simplement
sanctionner ses décisions par une ordonnance et, à ce
moment-là, ça donne des pouvoirs à la Commission de police
de suspendre et ainsi de suite. Une fois qu'un policier est relevé de
son statut d'agent de la paix, la municipalité qui l'a engagé
comme tel ne le gardera certainement pas à son emploi. On va lui dire:
Ecoute, va-t-en chez vous, quand tu seras réinstallé dans tes
fonctions, à ce moment-là, tu reprendras le travail. Nous sommes
très inquiets et nous émettons de sérieuses
réserves quant à ces dispositions.
M. Bédard: Vous faisiez état de la
nécessité d'une plus grande crédibilité de la
Commission de police. Dans ce sens, vous avez évoqué certains
dangers de conflits d'intérêts qui devraient être
évités, mais le fond de votre pensée est quand même
de désirer que la Commission de police ait le plus de
crédibilité possible selon les pouvoirs qui lui sont
octroyés. De la même façon, vous avez cité un
extrait du jugement du juge Tremblay qui déplorait le fait que la
Commission de police ne pouvait que faire des recommandations et n'avait pas de
pouvoirs exécutoires. Est-ce que vous pensez que le fait, pour la
Commission de police, d'avoir autre chose que des pouvoirs exécutoires
serait de nature à augmenter la crédibilité de la
Commission de police?
M. Nadon: M. le Président, je pense qu'au contraire, si la
Commission de police veut préserver ce qui lui reste de sa
crédibilité, elle doit maintenir... même pas maintenir en
fait, parce qu'il y a quand même des pouvoirs qui lui ont
été conférés au cours des années et,
étant donné que c'était le seul organisme qui
s'apparentait aux activités policières, à ce
moment-là on lui a confié beaucoup de pouvoirs, que la DGSP, qui
a été créée par la suite, s'est
avérée une complète illusion. En fait, comme on l'a
indiqué dans notre mémoire, nous verrions que la DGSP
possède ces fonctions et que, par la suite, elle fasse ses
recommandations à l'endroit du Procureur général. Nous
crovons que c'est le Procureur général qui devrait avoir le
contrôle sur les activités policières au Québec et
qui devrait être conseillé par la DGSP.
Hier, on entendait le mémoire de l'Association des chefs qui
parlait de l'inspectorat général, mais, en fait, c'était
aussi une des dispositions qui étaient prévues dans le rapport
Saulnier. Même, à un moment donné, nous avons cru que la
question de l'inspectorat général était pour faire l'objet
d'une ratification par le gouvernement, mais il y a probablement eu des
influences exercées par la suite et ça a été mis de
côté.
J'aimerais vous faire part de ce qui est prévu à l'heure
actuelle dans le rapport Saulnier. En fait, on s'est un peu inspiré de
ces recommandations. Le comité qui siégeait sur les fonctions
policières a vu le danger, à ce moment-là et je
pense...
M. Lalonde: A quelle page?
M. Nadon: C'est à la page 372, dans le bas de la page:
"Compte tenu des intentions du gouvernement si vous permettez et
du rôle complexe qu'a pu exercer la commission jusqu'à ce jour, la
DGSP estime que des modifications doivent être apportées à
sa mission. La Commission de police est et devrait demeurer un organisme quasi
judiciaire. A cette fin, elle devrait conserver son pouvoir en matière
d'enquête ce que nous ne contestons pas, d'ailleurs et ce
pouvoir devrait être ainsi défini: Statuer sur les appels des
policiers non salariés au sens du Code du travail et fixer les
indemnités à verser à toute personne visée par une
destitution ou une réduction de traitement, enquêter sur la
conduite de tout policier de la gendarmerie du Québec et des autres
services policiers québécois, de même que sur celle des
constables spéciaux et prendre les sanctions, le cas
échéant. A la demande du lieutenant-gouverneur en conseil ou du
procureur général, faire toute enquête jugée
nécessaire sur les corps policiers du Québec; décider,
après enquête, de tout différent relevant de l'application
de la Loi de police ou de l'un de ses règlements. Décider seul ou
en dernier ressort, après enquête, de toute difficulté
résultant de l'application des articles 62 à 62c de la Loi de
police. Arbitrer toute décision rendue en matière de police par
un conseil de district évidemment, en vertu d'autres
recommandations de la DGSP contre laquelle une municipalité
aurait fait valoir son droit de veto. (11 h 15)
Décider en dernier ressort d'une ordonnance émise par
l'inspectorat général en matière d'assistance permanente
entre les corps de police et ainsi de suite, entendre et en décider tout
différend ne relevant pas de l'une ou de l'autre des dispositions
prévues au Code du travail, et qu'à l'égard de la
Gendarmerie Royale du Canada ou de tout policier d'une société de
la Couronne, ou de toute autre personne exerçant des fonctions
policières du Québec, la Commission de police, par
législation, puisse enquêter sur leur conduite. On dit finalement:
La DGSP recommande que les pouvoirs quasi judiciaires de la Commission de
police lui soit confirmés, qu'elle puisse les exercer à l'endroit
de tout corps de police mentionné dans la loi ou de tout policier en
service au Québec; que les pouvoirs de conseil qu'elle détient
soient donnés à l'inspectorat général de la police;
que son pouvoir de réglementation soit réservé au
lieutenant-gouverneur en conseil.
Quant à la question de l'inspectorat général, j'ai
saisi en fait la remarque que vous avez faite hier que peut-être trop
d'organismes viendraient à un moment donné à
s'entremêler au niveau de leur juridiction respective. Quant à
nous, nous pensons que la DGSP comme telle pourra avoir ces fonctions-là
sans nécessairement... Pourrait agir en fait comme inspectorat
général...
M. Bédard: ... créer un autre organisme...
M. Nadon: Sans créer un autre organisme, non.
M. Bédard: J'aurais peut-être d'autres questions
à poser; je vais laisser mes collègues enchaîner.
Le Président (M. Boucher): Merci, M. le ministre. M. le
député de Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: Merci, M. le Président. Je veux remercier la
Fédération des policiers du Québec de leur mémoire
que j'ai lu avec beaucoup d'attention. Vous avez exprimé plusieurs
griefs à l'égard du projet de loi qui est devant nous. J'aimerais
simplement en repasser quelques-uns avec vous. D'abord vous avez posé un
tas de questions et j'avais laissé des blancs pour inscrire la
réponse du ministre et c'est encore en blanc.
M. Bédard:... pour consulter. C'est une...
M. Lalonde: Le ministre a pris bonne note de vos questions, par
exemple, alors soyez rassurés, soyez confortables et retournez chez vous
en toute paix du coeur et de l'âme; le ministre vous a entendus. Vous
n'êtes pas beaucoup plus avancés, par exemple, mais ça,
c'est une autre histoire...
C'est malheureux, parce qu'au fond, quand on consulte la population et
les organismes aussi structurés et articulés que le vôtre,
ce ne devrait pas seulement être dans un sens unique et on devrait quand
même au moins offrir des commencements de réponse de ce qu'on
sait, même si on ne sait pas toute la réponse, à ceux qui
viennent nous donner des réponses aussi. Si je l'ai fait à la
blague, c'est simplement pour ne pas imprimer un caractère trop
contradictoire aux séances de la commission actuellement en
présence des organismes, mais je suis déçu du peu de
réponses que le ministre nous donne aux questions posées, ne
serait-ce qu'à savoir ce que veut dire un article. Est-ce que ça
veut dire telle et telle chose? Vous en avez posé des questions, sur
l'article 3 du projet de loi, entre autres. Vous avez posé des questions
sur l'article 2 du projet de loi. Est-ce que ça veut dire que le
Procureur général assume alors toutes les obligations? Est-ce que
ça veut dire que le Procureur général assume toutes les
obligations de l'employeur? Vous avez posé cette question, il me semble
que la moindre chose qu'on pourrait vous dire, c'est oui, ou non, ou on ne le
sait pas, ou on prend bonne note, mais c'est une question extrêmement
pertinente, à savoir ce qui va arriver du policier municipal qui est
à l'extérieur de sa municipalité? Vous avez même
étendu la question un peu plus loin: Celui qui est à
l'extérieur du Québec? On sait qu'il arrive que soit
en fonction ou non, mais souvent en fonction, des policiers municipaux
sont à l'extérieur du Québec. Vous n'avez pas eu de
réponse là-dessus.
Aussi vous avez posé une question concernant les policiers de la
CUM. Le libellé de l'article actuel parle de municipalités.
Est-ce que ça veut dire que... Comme à la CUM ils ne sont pas
employés d'une municipalité, est-ce que ça veut dire que
cet article ne s'applique pas du tout? On saura peut-être la
réponse un jour.
Vous avez beaucoup insisté sur un point qui me semble
escamoté par le projet de loi no 48. Je l'ai dit au début. Je
pense que vous avez assisté à la séance d'hier et cela est
revenu à plusieurs reprises. C'est la confusion qui est non seulement
maintenue, mais même entretenue entre les pouvoirs de la DGSP, la
direction générale, donc les pouvoirs du gouvernement et les
pouvoirs de la Commission de police comme telle. Je ne veux pas revenir et
faire la comparaison entre l'ancien gouvernement où le projet de loi no
41 y a subi son sort c'est parfait mais au moins il y avait un
effort de rationalisation entre les deux organismes qui ont leur raison
d'être. Il m'apparaît malheureux que cet effort qui n'était,
au fond, que la conclusion d'une réflexion qui avait été
commencée, bien avant que j'arrive là, par M. Cho-quette, entre
autres dans son livre blanc, semble avoir été simplement
oublié, escamoté, sans explication.
J'ai l'intention, vous n'avez pas eu de réponse aujourd'hui,
étant donné les fonctions que j'occupe, de poursuivre la
discussion avec le gouvernement dans l'étude de ce projet de loi en
deuxième lecture, article par article, pour que, d'une part, il y ait
une rationalisation dans les fonctions de ces deux organismes et, d'autre part,
qu'on évite ce que vous appelez la situation extrêmement
délicate non souhaitable et dangereuse. Je ne pense pas qu'on puisse
vous taxer d'avoir utilisé des termes exagérés, à
savoir que la Commission de police aurait tous ou à peu près tous
les pouvoirs. Là-dessus, je répète encore une fois
je l'ai dit hier que cela ne s'adresse pas du tout à ceux qui
occupent la fonction actuellement. Je pense que depuis onze ans je le
répète parce qu'il n'est pas méchant de le dire chaque
jour la Commission de police a fait un travail absolument
considérable dans des situations difficiles avec souvent un personnel
incomplet, insuffisant. Donc, cela ne s'adresse pas du tout à la
qualité de son travail jusqu'à maintenant. Cela s'adresse
à la structure qui est suggérée par le gouvernement dans
son projet de loi. Je pense qu'il est injuste d'imposer à des personnes
de fonctionner selon des structures qui sont susceptibles de leur apporter des
problèmes.
Il y a une tendance cela ne s'adresse pas simplement au
gouvernement actuel, tous les gouvernements sont tombés dans cet
excès à confier à des organismes
indépendants des problèmes dont on ne sait pas de quelle
façon les régler ou qu'on a peur de se faire accuser de les avoir
réglés. Là-dessus, je pense qu'il est temps, après
onze ans d'expérience avec la Commission de police divers
gouvernements ont vécu là-dessus; je pense que tous ceux autour
de la table présentement qui ont représenté les partis ont
vécu avec la Commission de police, ont participé à
l'expérience de déterminer ce qui appartient à un
organisme indépendant, donc quelles sont les décisions qui
doivent être prises en dehors de toute politique, de toute influence
politique c'est cela le rôle d'un organisme indépendant
et, d'autre part, ce qui est de la politique, c'est-à-dire
établir des politiques de police. Qu'est-ce que la politique du
gouvernement concernant la mission policière, le maintien de l'ordre?
Cela appartient au gouvernement. Que ce soit la direction
générale de la sécurité publique ou n'importe quel
autre organisme qu'on voudrait inventer, il m'apparaît que c'est
là que la décision doit être prise, que la discussion doit
avoir lieu, la délibération, la consultation et les
décisions bonnes ou mauvaises. Si elles sont mauvaises, au moins il y a
le sort électoral qui attend ceux qui prennent une mauvaise
décision. Croyez-moi, je parle de ce que je connais.
Dans ce cas-ci, je voudrais voir avec vous quelques articles. La Loi de
police telle qu'amendée par le projet de loi no 48,
éventuellement, en ce qui concerne la Commission de police, va
prévoir ses fonctions, à l'article 16, les pouvoirs de
réglementation à l'article 17 et à l'article 18a, et les
pouvoirs d'enquête aux articles 19 et 20, pour élaborer les
procédures aux articles 24 et suivants. On retrouve le rôle de la
Commission de police à l'article 52, mais c'est surtout un rôle de
conseiller du gouvernement. A l'article 16, je peux naturellement vous dire mon
opinion, mais c'est surtout la vôtre que je veux.
Après avoir, de façon générale,
exprimé votre opinion et votre souhait, à savoir que la fonction
d'opération policière soit maintenue à la DGSP, qu'est-ce
que vous verriez, à l'article 16, qui n'appartient pas à la
Commission de police ou vice versa, qu'est-ce que vous conserveriez à la
Commission de police? Je vais vous le lire, il est très court, "la
commission est chargée d'exercer la juridiction qui lui est
conférée par la présente loi..." jusque-là, je
pense bien que la police n'aurait pas pu dire mieux, mais c'est probablement
très important et très pertinent que ce soit là.
M. Bédard: II faut que ce soit là.
M. Lalonde: Probablement que les légistes savent pourquoi
c'est fait comme ça, mais en tout cas... et de favoriser la
prévention du crime et l'efficacité des services de police au
Québec". Là, on entre de plein pied dans la confusion avec la
fonction de la DGSP. A ces fins, la commission doit notamment,
premièrement, établir un service de documentation et de
statistiques permettant d'évaluer l'état de la criminalité
et l'efficacité de l'action policière.
Est-ce que vous pensez qu'il appartienne à la commission, comme
organisme indépendant, que seul un organisme indépendant puisse
faire, savoir d'établir ce service de documentation?
Avant que vous répondiez, je vais vous poser la même
question pour les autres sous-paragraphes. Il y a, entre autres, le
sous-paragraphe c) qui m'étonne, que le service de recherche pour
l'amélioration des méthodes de détection et de
répression du crime soient aussi là.
M. Nadon: En fait, ce que nous suggérons qui ne devrait
pas être du ressort de la commission, ce sont les pouvoirs qu'on
s'apprête à accorder en vertu de l'article 16, qu'il s'agisse
d'établir un service de documentation, etc., établir un service
général d'inspection chargé de conseiller, ainsi de suite,
organiser un service de recherche pour détection et répression du
crime, établir un registre des agents de la paix, promouvoir la
coordination des activités policières, promouvoir la
prévention de la criminalité et remplir toute autre fonction
assignée par le lieutenant-gouverneur en conseil; on ne pense pas que
ça devrait appartenir à la Commission de police d'exercer ces
fonctions.
M. Lalonde: Votre réponse est très claire, j'en
conclus que ceci appartiendrait au gouvernement, c'est-à-dire au
ministère de la Justice et en particulier, si c'est le désir du
ministre de la Justice, à la DGSP.
Il y a aussi des pouvoirs de réglementation. Sur les pouvoirs de
réglementation, j'avoue que ce n'est pas tout à fait clair. Parce
que dans votre mémoire, vous souhaitez que les règlements ne
soient pas modifiés par le gouvernement, alors que le gouvernement
propose un amendement à la loi qui lui donnerait le pouvoir de
modification des règlements de la commission, mais qui soit
retourné à la commission. D'autre part, en réponse
à une question du ministre tout à l'heure, vous avez dit que la
commission ne devrait avoir aucun pouvoir de règlement, que ça
devrait appartenir au gouvernement.
Il n'y a peut-être pas de contradiction dans ce que vous avez dit
ou écrit, je vous ai mal compris, est-ce que vous pourriez
expliciter?
M. Nadon: En fait, vous avez raison, le comité qui a
préparé le mémoire, suite à des réunions que
nous avons eues par la suite, à toutes fins utiles, répondait
à l'article qui était suggéré. On disait que si le
lieutenant-gouverneur en conseil doit approuver un règlement et s'il a
le pouvoir de le modifier, ce qui n'est pas le cas présentement, qu'il
soit retourné à la commission pour d'autres consultations. (11 h
30)
C'était pour répondre en quelque sorte à l'article
qui était proposé. Mais, somme toute, nous sommes d'avis que les
pouvoirs de réglementation devraient appartenir au Procureur
général, comme on le dit d'ailleurs dans le mémoire,
qu'à toutes fins utiles, les lois sont votées, mais ce sont les
règlements qui font foi de tout. On pense qu'en ce qui concerne les
opérations policières, les activités et ainsi de suite,
c'est le Procureur général, le gouvernement qui doit
réglementer, prendre ses responsabilités en vertu des
activités policières.
M. Lalonde: Je vous remercie de cette clarification et je
comprends maintenant pourquoi cela semble être contradictoire. Vous vous
êtes adressé à un article qui existait tel quel. Vous
vouliez en atténuer la portée, mais, fondamentalement, vous
pensez que cela devrait appartenir au gouvernement, c'est-à-dire que les
pouvoirs contenus à l'article 17, pour que ce ne soit pas seulement un
voeu pieux, mais que cela s'adresse concrètement à un article,
les pouvoirs prévus à l'article 17 tel quel, tel qu'il est
actuellement et tel qu'on propose de le modifier, ne seraient plus à la
commission tel que c'est inscrit actuellement, mais ce serait le gouvernement,
le lieutenant-gouverneur en conseil, et cela pourrait être ajouté
aux pouvoirs de réglementation qui sont déjà contenus dans
le projet de loi no 48 pour le gouvernement. Cela comprend le pouvoir de
déterminer le niveau de scolarité, les cours de formation. C'est
probablement une décision du gouvernement à savoir quel genre,
quelle qualité de services policiers il a les moyens de donner ou pense
que la population désire avoir. C'est une décision de
gouvernement.
Cela comprend le fait de prescrire pour les catégories d'agents
de la paix que la loi indique des mécanismes de contrôle
d'aptitude à exercer de telles fonctions. D'ailleurs, le gouvernement
s'est bien conservé dans le nouveau projet de loi le pouvoir de
déterminer par règlements quelles seraient ces catégories
d'agents de la paix. Entre nous, cela veut dire que le pouvoir pour la GRC,
cela paraît bien de le faire comme cela. Cela comporte de
déterminer les caractéristiques des uniformes, pièces
d'identité et insignes qui peuvent être portés par les
cadets et les membres de la Sûreté, les cadets, les policiers
municipaux et les constables spéciaux ainsi que leur équipement,
l'utilisation de celui-ci. Cela répondrait à votre critique
à savoir que, par ce pouvoir de réglementation, la commission lui
permettrait de s'impliquer dans les opérations policières.
M. Nadon: Evidemment.
M. Lalonde: Si on remet cela au gouvernement, à ce moment,
on répond à votre critique. Je vais passer. Vous le demandez, en
quelque sorte, à la page 11, et là-dessus je pense que le
ministre n'a pas répondu non plus. J'aimerais peut-être qu'il en
profite pour nous dire s'il aurait des objections à co que les mesures
précises que l'on prévoit pour la CECO, en ce qui concerne la
protection des droits des témoins, soient aussi accordées aux
enquêtes en vertu de l'article 20. Probablement que personne n'y a
pensé, mais je ne vois pas d'objection de principe. Le ministre semble
m'exprimer...
M. Bédard: II n'y a pas d'objection de principe.
M. Nadon: A l'heure actuelle, c'est déjà
prévu à l'article 22 de la Loi de police.
M. Lalonde: Oui.
M. Nadon: Nous avons la protection en vertu de l'article 22
actuellement et, en vertu des nouvelles dispositions, cela s'adresse uniquement
aux enquêtes visées à l'article 19.
M. Lalonde: Je prends note aussi de votre suggestion concernant
l'article 19, à savoir c'est cela, l'article 19, qui change
l'article 29 que l'initiative accordée à la
Sûreté d'intervenir semble indésirable, d'après
vous, si j'ai bien compris votre position qui, d'ailleurs, a été
partagée hier par plusieurs intervenants y compris l'Union des
municipalités et d'autres groupes.
Sur la question des métiers incompatibles avec la fonction de
policier, j'aimerais que vous élaboriez un peu votre pensée,
parce qu'il semble que vous fassiez abstraction de tout le cheminement que,
comme société, on a fait pour protéger la fonction de
policier, pour lui donner un caractère je dirais encore plus
inattaquable, justement aussi en lui imposant des restrictions en ce qui
concerne l'incompatibilité de fonction, etc.
On peut, si vous voulez, faire une petite analogie qui, comme toutes les
comparaisons, est boiteuse. Prenons les procureurs de la couronne, par exemple,
les juges. On leur avait enlevé le droit de vote pour tenter d'ajouter,
si possible, au caractère absolument inattaquable de leur
indépendance. On avait fait la même chose c'est
probablement au début des années soixante-dix pour les
procureurs de la couronne et on est revenu en arrière, en disant: Au
fond, on n'a pas besoin d'aller jusque-là. Est-ce que c'est un peu le
cheminement que vous faites actuellement? Mais vous concluez qu'aucun
métier, en lui-même, n'est incompatible avec la fonction de
policier.
M. Nadon: Enfin, nous prétendons qu'aujourd'hui, à
notre époque, le policier ne devrait pas être soumis à
certaines contraintes, comme c'est le cas, selon diverses dispositions qui sont
contenues d'une part dans la Loi de police et également au Code du
travail. On y interdit par exemple aux associations policières de
s'affilier avec d'autres organismes de salariés, pour autant qu'elles
soient des associations de policiers municipaux. C'est donc dire, à
toutes fins utiles, à ce chapitre-là, que les policiers
municipaux du Québec... évidemment, ça ne nous concerne
pas ici, mais c'est une des restrictions qui nous est imposée. On a
voulu, par diverses lois, encarcaner, si vous voulez, le policier et le priver
de certains droits.
Je pense qu'aujourd'hui le policier devrait certainement prendre une
part plus active dans la société; il ne devrait pas être
considéré comme un marginal; il devrait avoir les mêmes
droits que n'importe quel autre citoyen.
Je profite de l'occasion pour souligner que vous avez
déjà, l'article 53, l'alinéa d) qui dit:
"Déterminer les endroits où les membres du corps de police
peuvent avoir leur résidence, établir les classes parmi eux,
ainsi que les grades". Encore là, je pense que c'est drôlement
discriminatoire à l'égard du policier. Vous avez les policiers
qui vont travailler, par exemple, dans des secteurs drôlement
huppés. Pour en nommer certains, vous avez ici Sillery et vous avez
d'autres endroits. Si la municipalité décide de passer un
règlement, à toutes fins utiles, le policier est confiné
à l'intérieur de sa municipalité et il est obligé
de trouver les moyens voulus pour se porter acquéreur d'une maison alors
que, bien des fois, il n'en a pas les moyens. On pense que ça devrait
être laissé à la discrétion du policier de demeurer
où il veut, pour autant qu'il puisse se rapporter à son travail
de façon régulière, etc. C'est là une autre
contrainte qui nous est imposée en vertu de la Loi de police. Quant
à ce qui est prévu à l'article 47a pour le code de
déontologie pour les policiers de la Sûreté du
Québec et quant au fait qu'on puisse se prévaloir que la
commission peut en faire une recommandation et que cela s'applique
également aux policiers municipaux, nous pensons que, quel que soit le
métier, pour autant que cela ne devienne pas abusif encore
là, nous avons un code de déontologie, de discipline et ainsi de
suite et que le policier ne se serve de son statut de policier pour fins
d'influence ou profiter de sa fonction pour aller chercher un gain, on souligne
que cela pourrait également s'appliquer à un
député, à un ministre et ainsi de suite, et nous ne voyons
pourquoi cette restriction devrait être imposée au policier
aujourd'hui.
Je pense qu'il est temps de considérer le policier comme un
citoyen à part entière. Je ne pense pas que cela puisse donner un
caractère de noblesse ou un caractère inattaquable, comme vous le
précisiez tantôt, du fait qu'on décide de priver le
policier de certains droits qui sont accordés à la
société en général.
M. Bédard: Avec la permission de mon collègue, sur
ce point-là, le fait de ne pas avoir le droit à deux
métiers en même temps, cela n'équivaut pas à
considérer quelqu'un comme marginal. Vous semblez avoir le raisonnement
que, si on ne donne pas cela aux policiers, c'est parce qu'on les
considère comme des marginaux. Les fonctionnaires n'ont pas droit
à deux emplois et ils ne sont pas considérés comme des
marginaux, que je sache. Ils sont considérés comme des citoyens
à part entière qui, à cause de certaines fonctions qu'ils
ont à exercer, ont certaines restrictions.
M. Nadon: Mais laissez-moi vous dire, M. le Président,
qu'en fait c'est une atteinte à leurs droits. Cela ne veut pas dire que
le policier ayant le droit d'occuper un deuxième emploi le ferait
nécessairement, mais le fait qu'on lui enlève ce droit est une
atteinte à ses droits. Nous disons: En quoi cela peut-il servir le
justiciable du fait que le policier ait à exercer un autre emploi, si
son contexte familial et ainsi de suite l'obligent en quelque sorte à
exercer un double emploi? Vous savez que les policiers au Québec, si on
parle de salaire, ne sont pas tous rémunérés de la
même façon. Vous avez des écarts considérables de
salaire et, au niveau des avantages, des conventions collectives, ce n'est pas
uniforme. Peut-être y a-t-il des
policiers où, à certains endroits reculés, c'est
nécessaire d'aller chercher une source financière additionnelle.
Mais, comme on le disait tantôt dans notre mémoire, si cette
fonction est de nature, par le fait qu'il est policier, à influencer ou
du moins à profiter de son statut de policier pour aller chercher des
droits ailleurs en exerçant une autre fonction, à ce
moment-là vous avez des recours qui sont prévus ou qui seraient
prévus en vertu d'un code de déontologie qui pourraient
l'empêcher, à un moment donné, d'agir comme tel.
M. Bédard: A bon droit, tout à l'heure, vous
étiez, dans vos représentations concernant la Commission de
police, très soucieux d'éviter toute situation qui puisse amener
des conflits d'intérêts. Cela ne veut pas dire qu'il y en aurait,
mais vous étiez très soucieux d'éviter toute situation qui
pourrait amener des conflits d'intérêts ou en provoquer. Comment
conciliez-vous cette même préoccupation avec la possibilité
de permettre deux emplois aux policiers?
M. Nadon: M. le Président, cela peut s'ap-piiquer à
quiconque qui est assis à la table ici. Un maire peut exercer une autre
occupation qui pourrait, à première vue, être
interprétée comme pouvoir entrer en conflit
d'intérêts avec l'occupation qu'il exerce comme maire, mais, si
jamais c'est démontré qu'il agit comme tel, à ce
moment-là, on verra à utiliser les procédures contre lui.
C'est ce qu'on demande, en fait. Ce n'est pas seulement le fait qu'il y ait
apparence ou absence de conflit d'intérêts qui ferait en sorte que
quelqu'un ne pourrait pas exercer à mauvais escient son métier,
sans nécessairement occuper un double emploi.
M. Bédard: Prenez, par exemple, le policier qui est
propriétaire ou détenteur d'un permis de boisson et qui, en
même temps, a comme devoir de faire appliquer les règlements et
les lois dans ce domaine. Ne croyez-vous pas qu'il y a là un conflit
d'intérêts assez marqué?
M. Nadon: Oui, en fait...
M. Bédard: On parlait de la Commission de police qui fait
de la réglementation et qui a à faire appliquer sa
réglementation. Vous aviez des représentations et nous en avons
pris bonne note je tiens à vous le dire sur cette
préoccupation d'éviter tout conflit d'intérêts. (11
h 45)
J'aimerais simplement que vous explicitiez comment vous conciliez cela
avec ce même désir que j'estime être le vôtre
d'éviter tout conflit d'intérêts.
M. Marcil: C'est peut-être anodin, M. le ministre, comme
réponse, mais un policier qui a un permis de conduire fait tout de
même appliquer le Code de la route; il ne profite pas de son permis de
conduire pour passer sur un feu de circulation.
Je vais peut-être à l'extrême, mais... Il y a une
chose, si le policier profite de son statut pour contrevenir à la loi,
on n'a que la peine de sévir.
Dans un cas particulier je vais vous citer un exemple le
premier policier qui a eu un permis à Montréal, ç'a
exigé de longues discussions pour avoir son permis pour une tabagie.
Effectivement, après de nombreuses rencontres avec le directeur du
service, celui-ci a dit: D'accord, je vais donner la permission pour qu'il ait
la tabagie, la seule chose que le monde va prendre, c'est le cancer. C'est
à peu près la réflexion du directeur du temps.
Effectivement, le bonhomme en question a obtenu un permis. Je tiens à
vous dire qu'il était surveillé par la police, à un moment
donné, il y a eu une belle petite descente et on y a trouvé des
magazines pornographiques. Vous savez, aujourd'hui, on en voit plusieurs, mais
dans le temps, c'était absolument, semble-t-il, pornographique. Le type
a été traduit en cour, condamné en Cour municipale, il a
perdu son emploi, il a fait un grief et ce grief a été
rejeté; aujourd'hui, il ne fait plus partie de la police.
Je prends ce cas comme exemple. Est-ce qu'à cause d'une telle
situation, à cause de l'exemple du type et des magazines de
pornographie, tous les policiers du Québec ne devraient pas avoir une
tabagie parce qu'il y en a un qui a été condamné? On a
statué dans son cas, il a passé dans les différentes
cours, il a subi son procès, il a été condamné. Je
ne vois pas pourquoi un policier qui, à un moment donné, a des
besoins et que ses besoins ne sont pas nécessairement mes besoins et les
besoins de mon confrère... Si, dans un cas, il y en a un qui a six ou
sept enfants, que ses enfants vont aux études... Plusieurs de mes
policiers travaillent depuis 25 ou 30 ans et, aujourd'hui, on retrouve dans ces
familles une classe de professionnels qui ont coûté
extrêmement cher. Pourquoi le statuer à $18 000 ou à $20
000 par année? Chaque cas est jugé à sa propre valeur.
Dans un autre incident, au moment des mesures de guerre en octobre 1970,
on avait donné une auto de patrouille pour qu'un policier puisse rester
à l'intérieur, c'était froid. On l'a surpris à
dormir, on a enlevé la voiture-patrouille. Pourquoi n'a-t-on pas puni le
gars?
Je reviens à votre question. Il peut sembler, au départ,
qu'il y ait peut-être des fonctions qui soient réellement contre
l'éthique, surtout quand on touche les cabarets. Soyez assurés
que notre but n'est pas d'être les "bouncers", mais on dit, il y a une
grande ligne, il y a eu une évolution de notre société,
pourquoi toujours restreindre le policier, le mettre à part? Dans la Loi
de police, il y a un petit article qui dit: "Le conseil de ville peut, par voie
de règlement, édicter l'endroit où un policier va rester."
Vous avez ici un mille carré, c'est une classe de société
de travailleurs, le policier y est confiné. Il y en a qui ont eu du
sucre dans leur réservoir de voiture, d'autres ont eu des menaces, mais
le gars est confiné dans un mille carré. En plus de cela, il ne
peut pas travailler, il ne peut pas se présenter aux élections
municipales, il ne peut pas se présenter aux élections
scolaires,
pas de droit de grève, pas de droit d'association. S'il va en
arbitrage, il va à l'encontre de l'article 87, il faut que le
juge...
Cette même société dit... la Ligue des droits de
l'homme, des libertés individuelles, arrive et on dit à un
policier: Projette donc, à un moment donné et on va enlever vos
armes. D'un autre côté, toute la législation vient dire aux
policiers: On te confine dans un milieu bien strict. M. le ministre, cette
évolution de la société, on l'a vécue, vous l'avez
tous vécue. Pourquoi, vous, encore, être toujours pris avec de
vieilles mentalités à savoir que, pour être policier, il
faut pratiquement que tu restes dans ton secteur où tu ne peux pas faire
de politique, où tu ne peux pas avoir un autre emploi.
Je l'ai dit, ce n'est pas la première fois que je vous dis cela
ici, si vous retournez aux autres commissions parlementaires depuis douze ans
que je viens ici, je l'ai déjà dit. Tout de même, je devais
vous faire ce boniment et l'article, évidemment...
Dans une autre question dont vous parliez tantôt concernant le
code de déontologie, je veux simplement vous dire que les pouvoirs de la
Commission de police que vous semblez donner... en fait, je le regrette parce
que tout de même, dans le projet de loi no 41, il y avait une
évolution qui avait été faite dans le sens de scinder un
peu le rôle de la Commission de police et de revenir avec la direction
générale, avec des pouvoirs qui vous donnaient tout de même
un droit au niveau de l'exécutif de donner, à la direction
générale, la philosophie en matière policière du
gouvernement à des gens qui étaient dans des structures pour
l'opérer, pas à la Commission de police. La Commission de police
c'est un pouvoir judiciaire, un pouvoir d'enquête.
Quand on retourne, tout de même, je suis venu ici au temps
où M. Bertrand était ministre de la Justice, M. Rémi Paul,
ministre de la Justice, M. Choquette, M. Lalonde et vous-même, c'est tout
de même la cinquième fois et l'évolution s'est faite
à un moment donné au niveau du livre blanc de M. Choquette.
Là, on voit que ce sont les événements de 1969, la
grève des policiers, les événements de 1970, la crise
d'octobre et on arrive avec un livre blanc où on décortique, on
synthétise que ça nous prend un ministre de l'intérieur.
C'est ce que reflétait le rapport de ce temps-là. A la
fédération on s'est objecté, on a dit: On s'en va dans un
état policier, cela a fait la manchette des journaux, mais par contre,
on est arrivé avec des suggestions. On a dit: II faut que le ministre
soit bien consulté et bien conseillé surtout par une direction
générale, par un sous-ministre qui aurait pu, lors des
événements de 1970, dire au ministre: Ne pesez pas sur un bouton
de panique, la situation à Montréal est telle. On est au courant
de l'évolution des services de police, mais, évidemment, dans le
temps, cela ne s'est pas fait dans ce sens-là et par la suite on a
créé la Direction générale de la police et le
projet de loi no 41 lui a donné tout de même des pouvoirs qui nous
semblaient à ce moment-là être réellement
inhérents à la direction générale.
Il a semblé... Je ne sais pas pourquoi vous revenez au niveau de
la Commission de police avec d'autres pouvoirs que ceux qu'elle a
présentement. Je sais que le président de la Commission de police
est là avec ses autres membres, ce n'est pas une question de
personnalité. Je veux bien le dire, il n'y a aucune question de
personnalité avec les membres de la Commission de police.
Dans le domaine policier, je dois le dire, elle a perdu de la
crédibilité. Elle a perdu énormément de
crédibilité. Entre autres avec le début d'une
enquête à Trois-Rivières. Je tiens à vous dire que
les syndicats policiers sont peut-être bien plus sévères et
on ne fait pas la manchette des journaux avec nos propres membres. Je tiens
à vous dire que lorsqu'il y a de nos membres qui sont condamnés
ou qui sont accusés au niveau criminel, on prend nos
responsabilités. Cela, depuis 30 ans que je suis dans le milieu, je peux
vous dire depuis 30 ans. Quand la Commission de police, dans ses
recommandations, entre autres à Trois-Rivières, la ville a suivi
ces recommandations, les policiers ont été renvoyés. Les
policiers ont levé un grief qui a été gagné. La
ville a dit: nonobstant, je ne les reprends pas. La ville, en Cour
supérieure, a été obligée de donner $100 000; $60
000 à l'un et $40 000 à l'autre pour dire je ne les reprends pas.
Il y a eu un mécanisme qui nous était donné par le code et
c'est là-dessus qu'on ne veut pas sortir. On vous dit tout de
même: Laissez-nous à l'intérieur du Code du travail. C'est
au moins une des choses, qu'on nous considère comme des travailleurs.
Encore avec un mécanisme qui nous restreint: pas de droit de
grève, pas de droit d'association, au niveau de la convention à
l'article 87, mais je ne suis pas là pour expliquer les problèmes
du code, mais je vous dis simplement: au niveau des pouvoirs de la Commission
de police, ce que nous aimerions. D'ailleurs le comité Saulnier en a
tenu compte et je pense que dans les recommandations qu'il vous fait, on s'est
inspiré dans la présentation de notre mémoire, un peu de
la philosophie que le rapport Saulnier dégageait à ce
moment-là.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Nicolet-Yamaska, sur le même sujet.
M. Fontaine: Je voudrais intervenir sur le même sujet si
possible. Je vous remercie des éclaircissements que vous nous avez
donnés. Ce qui se dégage de votre argumentation, je pense que ce
que vous voudriez, c'est qu'il n'y ait pas de restriction, que les policiers
puissent exercer n'importe quelle fonction, mais qu'il y ait des sanctions si
à un moment donné quelqu'un exerce une fonction incompatible avec
la fonction de policier, que le pouvoir d'enquête de la Commission de
police s'exerce et que les sanctions, à ce moment-là puissent
intervenir. Est-ce bien votre interprétation?
M. Marcil: Evidemment quand on regarde les fonctions compatibles,
on pense tout de suite "bouncer" dans les clubs, c'est toujours ce qu'on
nous a mis de l'avant et je peux vous dire que dans un état comme
le Minnesota où je suis allé, les gens qu'on a engagés
pendant de nombreuses années, c'était des policiers qui
étaient à la porte. Je peux vous dire que la protection a
diminué dans les clubs et je peux vous dire que les heures de fermeture
à deux heures étaient respectées et un paquet de
réglementations du fait que c'était un policier qui
était... Je ne vous dis pas que j'épouse toute cette
philosophie-là, mais je peux vous dire que dans le Minnesota et à
Saint-Paul, cela a fonctionné. Il y a quelques années que je n'y
suis pas allé, mais nous ne sommes pas prêts à dire que les
gars soient "bouncers" dans les clubs; pourtant c'est un peu ce qu'on nous a
dit pour nous empêcher d'avoir un double emploi ou avoir un commerce.
Aujourd'hui, je peux vous dire une chose: les policiers n'ont pas le
droit de commercer; les commerces de boissons sont au nom des épouses,
sont au nom du beau-père, sont au nom du père. Ce n'est plus par
la bande; c'est simplement tout ce mécanisme-là par lequel le
gars est propriétaire du débit comme tel, mais c'est toute la
famille qui l'a. On ne voit pas directement ce qu'on pourrait leur faire
à cause de la loi.
M. Fontaine: Accepteriez-vous, par exemple, que quelques
fonctions soient incompatibles? Tantôt, vous avez donné l'exemple
du policier qui applique le Code de la route. Ce n'est pas une fonction
incompatible, c'est sûr, mais il ne peut pas s'arrêter
lui-même. Dans le cas d'un débit de boisson, s'il a un permis
à son nom, il pourrait être obligé, dans l'exercice de ses
fonctions, d'effectuer une descente à son propre établissement. A
ce moment-là, peut-être que des fonctions pourraient être
incompatibles.
M. Lalonde: Concurrence. M. Bédard: L'établissement
voisin. M. Fontaine: Ou l'établissement voisin. M. Lalonde:
Concurrence.
M. Fontaine: Avez-vous des commentaires à formuler
à ce sujet?
M. Marcil: Remarquez bien que ce sont des hypothèses que
vous soulevez, mais tout de même je pense qu'il faut que vous nous
donniez un certain sens de maturité. On a tout de même eu une
évolution. Je peux peut-être retourner à certains bouquins
de Victor Hugo et faire des hypothèses là-dessus. Je dis tout de
même qu'on n'est pas là pour concurrencer le voisin et effectuer
une descente chez lui. Evidemment, il y a des cas exceptionnels dans la police.
Je l'ai déjà dit: Au bout de quinze jours, un jeune policier qui
entre voit des choses qu'une société ne voit pas dans 60 ans.
Evidemment, il y en a qui s'adaptent à ce climat-là et qui
s'acclimatent au rôle de policier, mais, il y en a d'autres pour qui,
effectivement, cela n'est pas leur milieu. Il faut faire certaines
distinctions. On le dit dans notre mémoire: Si quelqu'un commet des
infractions criminelles, on sévira selon ce qu'il a fait. Mon gars du
permis tout à l'heure, il a été le premier à
détenir un permis à Montréal après vingt
années d'efforts. Il se fait prendre avec des magazines à $7 ou
à $8 qui venaient je ne sais pas du Danemark ou de la
Suède.
M. Fontaine: Merci.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: Avant de conclure, je vous remercie de
l'éclairage que vous avez donné à la commission. Le
ministre vous a posé la question concernant le caractère
exécutoire des décisions de la commission qui viendrait
éventuellement du projet de loi. A moins que je n'aie mal compris la
question, dans quelle mesure ce caractère exécutoire
affecterait-il la crédibilité de la commission? J'ai cru
comprendre que c'était dans la perspective d'un conflit
d'intérêts, de sembler être dans une situation de conflit
d'intérêts. Je pense que cette discussion est mal engagée
si on l'engage sur la voie du caractère exécutoire. Je ne pense
pas que c'est le fait que les décisions de la commission soient
exécutoires qui ferait entrer la commission dans un conflit
d'intérêts si, d'autre part, on enlève à la
commission les fonctions de réglementation et les fonctions qui
normalement devraient appartenir au gouvernement. Je pense qu'il y a une
distinction importante à apporter et aussi en tenant compte de la
distinction que vous avez apportée, de la mise en garde pour qu'il n'y
ait pas de conflit entre les décisions exécutoires de la
commission et le Code du travail.
Actuellement, il y a un conflit. Seulement au niveau de la
réglementation, les règlements de la commission approuvés
par le gouvernement, modifiés si la loi est adoptée telle que
proposée, ont préséance sur les règlements
municipaux. Le ministre, par certaines questions hier en particulier, semblait
attacher une importance très grande à l'autonomie municipale,
à savoir que le gouvernement ne s'engage pas dans ce secteur.
Malgré cette préoccupation apparente du ministre, le projet de
loi no 48 engage le gouvernement de plain-pied dans l'autonomie municipale, que
ce soit par les règlements de la commission qui ont
préséance sur les règlements municipaux, que ce soit aussi
par la décision d'envoyer un compte, de faire payer par la
municipalité des services de la Sûreté du Québec au
cas où une municipalité ne se conformerait pas à la loi
qui demande d'établir et de maintenir un corps policier. (12 heures)
Ce sont les seules remarques que je voulais faire en conclusion et je
vous remercie, encore une fois, du caractère très articulé
de votre mémoire, très concret aussi, très pragmatique,
qui s'adresse à des articles précis, qui va, en ce qui me
concerne en tout cas, nous aider à continuer la
délibération sur ce projet de loi. Je vous remercie.
Le Président (M. Boucher): Merci, M. le
député de Marguerite-Bourgeoys. M. le député de
Nicolet-Yamaska.
M. Fontaine: Merci, M. le Président. Je voudrais, à
mon tour, remercier la Fédération des policiers provinciaux du
Québec pour la présentation de son mémoire. Je pense qu'en
général il y a une recherche assez poussée qui a
été effectuée. Je sais que vous avez formé des
comités pour l'étude de ce projet de loi et je pense qu'en
général le mémoire que vous nous présentez est des
plus intéressants.
Je voudrais, en premier lieu, revenir à un point qui a
été touché par le député de
Marguerite-Bourgeoys tout à l'heure quant aux pouvoirs de
réglementation et aux pouvoirs quasi judiciaires qu'exerce la
commission. Est-ce que vous pourriez nous délimiter un peu plus
précisément le rôle que vous voudriez voir jouer à
la commission? Je pense plus particulièrement au domaine des
enquêtes que la commission peut faire quant à la brutalité
policière. Je n'étais malheureusement pas présent à
la commission hier, mais on m'a fait part du fait que la Ligue des droits et
libertés de la personne a fait certaines recommandations quant à
ce pouvoir d'enquête. Est-ce que vous pourriez nous dire ce que vous
préconisez comme solution dans ce domaine?
M. Nadon: En fait, que ces pouvoirs d'enquête soient
maintenus tels qu'ils sont à l'heure actuelle et que, suite aux
conclusions de l'enquête, surtout si ce sont des enquêtes
visées à l'article 20, il y ait des recommandations qui soient
adressées si on constate qu'un policier a eu un comportement
répréhensible; que ces recommandations soient adressées
à la municipalité qui emploie le policier et ce sera, à ce
moment-là, toujours dans le but de préserver l'autonomie
municipale, de voir à ce que la municipalité endosse ou non les
recommandations. Dans le cas où la municipalité l'endosse et
où on croit que le policier est lésé par cette
recommandation, que les pouvoirs ou les recours qui sont présentement
prévus à l'article 88n du Code du travail demeurent. Nous croyons
que c'est le rôle des municipalités qui embauchent d'avoir
à sanctionner un policier.
M. Fontaine: C'est dans ce sens que vous parlez, tout au long de
votre mémoire, d'autonomie policière, d'autonomie municipale. A
la page 11 de votre mémoire vous dites: "II n'est absolument pas
question pour la Fédération des policiers du Québec
d'accepter que la Commission de police puisse, suite à une enquête
visée dans l'article 20, priver un policier municipal de son statut
d'agent de la paix, ce qui équivaudrait évidemment à une
suspension pour la période prévue ou même à un
congédiement si son statut d'agent de la paix lui est retiré
indéfiniment ou pour toujours."
M. Nadon: En fait, ce qui est grave là-dedans, M.
Fontaine, ce qui est sérieux pour nous autres, c'est que la commission
pourrait, à toutes fins utiles, émettre une ordonnance et qu'une
fois que l'ordonnance est émise vous n'ayez pas de droit d'appel.
L'ordonnance est consacrée et vous devez vous en tenir à
ça, vous n'avez aucun mécanisme prévu par la suite pour
faire valoir vos droits. Alors, on pense que c'est antidémocratique
à notre époque et que ces recours devraient être maintenus.
Au niveau des tribunaux d'arbitrage, on a quand même assez
d'expérience là-dessus. Par les décisions qui ont
été rendues, les tribunaux d'arbitrage ont acquis une certaine
crédibilité au cours des années et je ne pense pas qu'on
puisse aujourd'hui mettre ça en doute.
M. Fontaine: D'accord, je voudrais revenir à une autre
question, à la page 3 de votre mémoire, quand vous parlez de
l'article 2 de la loi. Vous avez posé des questions au ministre et on a
dit que le ministre n'avait pas répondu. Est-ce que vous pourriez nous
donner votre opinion à vous sur ce qui devrait exister? Est-ce que le
Procureur général devrait devenir l'employeur d'un policier qui
exerce ses fonctions à l'extérieur de sa municipalité?
Est-ce que toutes les conséquences dont il est question à
l'article 2 devraient en découler, que ce soit le Procureur
général qui ait à défrayer le coût de ces
opérations?
M. Nadon: En fait, nous sommes d'accord avec cet article de loi
parce qu'à l'heure actuelle, nous n'avons aucune protection pour le
policier qui, dans l'exercice de ses fonctions, intervient ailleurs que dans sa
propre municipalité. Je pense qu'il est de la responsabilité du
gouvernement de pouvoir protéger le policier, qu'il advienne un accident
de travail ou qu'il fasse l'objet d'une enquête ou de poursuites au civil
ou au criminel. Je pense que cela devrait être exactement la même
chose comme cela l'est lorsqu'il agit à l'intérieur de sa
municipalité et qu'il devrait avoir les mêmes avantages que sa
convention collective lui procure. Comme on l'a dit tantôt, dans les cas
où une convention collective serait muette vis-à-vis d'une
certaine protection qui devrait être accordée aux policiers,
à ce moment, on devrait la prévoir. Je pense que c'est de la
responsabilité du gouvernement de prévoir que lorsqu'un policier
agit dans un territoire qui est autre que le sien parce que la
municipalité, elle, qui serait à un moment donné,
poursuivie à la suite d'un acte que le policier aurait pu commettre dans
l'exercice de ses fonctions comme agent de la paix, va dire: Ecoute, nous
autres, on est là pour te protéger en fait lorsque tu agis pour
le compte de la municipalité, mais si tu agis à
l'extérieur, ce n'est pas de notre responsabilité. Je pense que
le policier devrait être à l'abri des poursuites qui pourraient
être intentées ou des accidents de travail qui peuvent
survenir.
M. Fontaine: A ce moment, cela oblige le policier à
s'adresser lui-même au Procureur général pour être
dédommagé ou recevoir du salaire ou des choses comme cela.
N'aimeriez-vous pas
mieux que la municipalité soit obligée de
dédommager le policier et que le gouvernement, le Procureur
général indemnise la municipalité plutôt que le
policier?
M. Nadon: Quel que soit le mécanisme, M. Fontaine, en fait
nous, c'est le protection que nous recherchons. Qu'elle soit faite par le biais
de la municipalité et que, par la suite, la municipalité soit
remboursée par le gouvernement, cela nous convient. En fait même,
ce serait peut-être l'idéal.
M. Fontaine: C'est l'opinion que je vous demande parce que je
pense qu'il y a une très grande différence pour le policier entre
être obligé de s'adresser au Procureur général ou
être obligé de s'adresser à la municipalité qui est
son employeur.
M. Nadon: Vous avez raison.
M. Fontaine: II y a un argument à la page 4 que j'ai de la
difficulté à saisir. Vous dites: "Le troisième
alinéa de l'article 6 en haut de la page biffé par
cet article 3 du projet de loi, se retrouvant à l'article 82a
proposé, sauf que l'amende a été augmentée
considérablement, nous ne pouvons que regretter que le
législateur n'ait pas fait disparaître cet article." Si on se
réfère à l'article 82a de la loi, on dit: "Quiconque,
directement ou indirectement, ordonne à un membre de la
Sûreté, à un constable spécial, à un cadet ou
à un policier municipal de se livrer à une activité
partisane contrairement à l'article 6 ou incite un policier à le
faire commet une infraction et est passible d'une amende d'au moins cent
dollars et d'au plus trois mille dollars." Vous semblez suggérer de
faire disparaître cet article. Je ne comprends pas cela.
M. Nadon: En fait, ce que nous demandons d'avoir le droit de
faire, pour les policiers qui pourront en exprimer le désir, c'est de la
politique si jamais le désir en est manifesté par un de nos
membres. Alors, au moment où le policier pourra avoir ce droit, je ne
pense pas que quiconque pourrait ordonner à un policier de faire ou de
ne pas faire de la politique. Il aura, à ce moment, le privilège
de pouvoir le faire. Automatiquement, vous voyez, c'est cela, l'article devient
caduc.
M. Fontaine: L'article 82 vise à empêcher qu'une
personne ordonne, se serve de son pouvoir de supérieur sur un policier
pour lui ordonner d'exécuter une fonction partisane, une activité
partisane. Je pense que même si le policier avait le droit d'exercer une
fonction en politique partisane, cela ne voudrait pas dire qu'un
supérieur aurait quand même le droit de lui ordonner de le faire.
C'est pour cela que l'article 82, je pense, devrait demeurer quand
même.
M. Nadon: Mais, en fait, le policier, qui, à ce
moment-là, comme je le disais tantôt, aurait le droit de faire de
la politique ou de se porter candidat ou quoi que ce soit, n'aurait tout
simplement qu'à refuser. A ce moment, en refusant, et si jamais
l'officier supérieur voulait entreprendre des procédures
d'insubordination contre lui, vous avez tout le mécanisme du code de
déontologie qui verrait à la protection du policier.
M. Fontaine: Mais l'article 82 vise une infraction pour la
personne qui veut exercer cette influence. Alors, l'infraction, en tant que
telle, demeurait quand même.
M. Nadon: Ce qu'on veut dire, c'est que, si vous avez le droit de
le faire, c'est comme si vous aviez un autre article qui dirait: II est
défendu à un membre supérieur d'ordonner à un
policier de faire quelque chose qui est répréhensible selon la
loi. Evidemment, si la loi, au départ, l'interdit, à ce
moment-là l'article prend de l'importance, mais si elle ne l'interdit
pas, cette prévision en vertu de la loi semble n'avoir aucun effet.
M. Fontaine: Merci beaucoup.
Le Président (M. Boucher): Merci, M. le
député de Nicolet-Yamaska.
M. Fontaine: Excusez, M. le Président, j'avais une autre
question concernant les municipalités...
Le Président (M. Boucher): Allez-y.
M. Fontaine: ... de 5000 habitants. Vous en parlez dans votre
mémoire, à la page 15. Il en a été question
également hier avec l'Union des municipalités. Quelle est votre
position face à l'obligation pour une municipalité d'avoir un
corps policier à l'intérieur des limites de sa
municipalité? Est-ce que vous pensez que cela devrait être
obligatoire ou si, comme on l'a suggéré hier, cela pourrait
passer par l'entremise d'un référendum avant d'avoir une telle
obligation?
M. Nadon: Lorsqu'il y a eu l'avènement du projet de loi
41, je me souviens très bien de la réaction que nous avions eue
à ce moment, parce que nous étions complètement
opposés à ce qu'une municipalité d'une population de 5000
habitants et moins puisse être dispensée par le
lieutenant-gouverneur en conseil de ses obligations de maintenir un corps de
police. Nous avions fait alors des représentations par l'entremise de
notre directeur exécutif.
Aujourd'hui, on se voit, avec le projet de loi 48, avec une disposition
qui prévoit l'obligation pour les municipalités de maintenir un
corps de police, si la population de ces municipalités est de 5000 et
plus. J'ai entendu hier les remarques de certains intervenants et, en fait, le
chiffre de 5000 peut, à certains égards, paraître
arbitraire, entre autres choses.
Nous, d'une part, considérons que c'est supérieur à
ce que prévoit la loi je dis bien la loi, parce qu'encore
là, c'est une définition comme telle. On a vu ce qui est
arrivé dans des causes où
on a poursuivi les municipalités parce qu'on avait l'impression
ou qu'on prétendait que les municipalités s'étaient
soustraites à l'obligation de maintenir un corps de police en vertu de
52. Ou a eu des jugements qui disaient: Un corps de police, c'est quoi? Ce
n'est pas défini par la loi; alors, en fait, en maintenant un directeur
de police, cela peut être un corps de police.
Or, pour nous, le chiffre de 5000, c'est un compromis qui est
supérieur à la condition, à la situation actuelle. Par
contre, on voit, à l'article 19 du projet de loi, qui est ajouté
à l'article 29 qui se lit comme suit: "De plus, malgré l'article
54, si un corps de police municipal n'a pas les effectifs, l'équipement
ou l'expertise nécessaires pour agir adéquatement, la
Sûreté, de sa propre initiative, par le Procureur
général ou à la demande d'une municipalité..." Ah!
Nous, on dit, en fait, les 5000 qui sont prévus à l'article 52,
de quelle façon cela pourra-t-il être appliqué? On pense
que l'article 52 est considérablement atténué par cette
autre disposition. Si vous regardez également à l'article 28 du
projet de loi, par l'addition de l'alinéa 60a, qui dit que le Procureur
général peut conclure une entente avec une municipalité
visée dans l'article 52, aux fins d'autoriser la Sûreté
à fournir dans son territoire la totalité ou une partie des
services de police, de quelle façon ces ententes prendront-elles forme?
Je ne le sais pas. Dans quelle mesure le gouvernement ou le Procureur
général vont-ils accorder des dispenses? Encore là, on ne
le sait pas et on pense que l'article comme tel, l'article 25 proposé,
qui modifie l'article 52 est considérablement atténué ou
son effet est considérablement atténué justement par
l'addition de ces deux autres articles qui sont prévus ailleurs. (12 h
15)
Evidemment, on aurait souhaité, par le projet de loi no 48, qu'il
y ait quand même des dispositions qui nous éclairent davantage
là-dessus, mais ce n'est pas le cas. Pour répondre à votre
question: Est-ce que cela devrait être 5000, 4000, 3000?, nous, on
était d'avis que ceux qui avaient maintenu un corps de police au cours
des années et qui s'étaient dotés d'un mécanisme de
protection vis-à-vis de la population, en fait... Encore là, pour
revenir à une des allusions qui avaient été faites par Me
Léonce E. Roy hier, qui disait que ce que le gouvernement provincial
réclame du gouvernement fédéral pour les services de
police provinciaux ici, on devrait avoir l'équivalent des subventions
qui représenteraient, je pense, $1 milliard, mais en fait, le même
paradoxe est ici au Québec entre les relations provinciales et
municipales, c'est-à-dire que vous dispensez, à une certaine
partie de la population, l'obligation de maintenir dans son territoire un corps
de police et de payer à ces fins des impôts fonciers. Vous avez la
même situation qui fait que, dans d'autres provinces du Canada, au
même titre qu'au Québec ici, les Québécois doivent
payer pour la GRC qui assume une police provinciale dans différentes
provinces autres que le Québec et l'Ontario. Nous sommes d'accord avec
cela. Je pense qu'ici même au Québec, on devrait appliquer le
même raison- nement et je pense que les citoyens qui viennent d'une
municipalité urbaine ou qui viennent d'ailleurs devraient avoir les
mêmes obligations financières.
M. Fontaine: Mais, dans la mesure où ce qui est important,
c'est la protection du public, seriez-vous d'accord avec l'argument qui dit
qu'il y a une entente avec un autre corps policier; au lieu du maintien d'un
corps policier municipal, qu'une entente avec une autre municipalité ou
un corps policier provincial pourrait avoir les mêmes
résultats?
M. Nadon: Indirectement, ce qu'on vise par là, c'est un
peu ce qui était préconisé dans le mémoire qu'on
avait déposé à la commission Saulnier, qui
prévoyait les régionalisations. Par la bande, on ferait un peu
indirectement ce qui, nous prétendons, aurait pu être fait lors du
dépôt du rapport Saulnier par une législation qui
prévoirait quand même des régionalisations qui verraient,
à ce moment-là, à assumer ou à accorder à
une population donnée les mêmes services sophistiqués
qu'une grosse municipalité peut avoir par rapport à une autre. Ce
qu'on recherchait par là, c'était une uniformisation au niveau de
la protection policière et des services qui en découlent.
Bien sûr que là, rien de cela n'est fait, il n'y a aucune
amorce, et excusez l'expression c'est du "patchage" ici et
là. Pour nous, comme je vous le dis, c'est préférable
à la situation actuelle où les municipalités peuvent se
soustraire à l'obligation de maintenir un corps de police parce que vous
avez quand même 5000 habitants, mais, évidemment, ce n'est pas
l'idéal.
M. Bédard: Etes-vous d'accord avec le principe
c'est quand même un des points importants de la loi qui
crée l'obligation pour toute municipalité au-delà de 5000
habitants d'avoir un corps policier?
M. Nadon: Evidemment, nous ne sommes pas contre, c'est bien
sûr. Nous sommes d'accord avec cette disposition, comme je l'indiquais
tantôt, ce qui est préférable à ce qui se fait
à l'heure actuelle, mais cela ne correspond quand même pas aux
propositions que nous avions faites à l'intérieur de notre
mémoire, soit la régionalisation.
M. Bédard: C'est difficile de trouver l'équilibre
entre...
M. Nadon: C'est difficile, oui et non. A un moment donné,
au niveau des structures policières telles qu'elles existent à
l'heure actuelle, je pense que vous serez le premier, M. le ministre, à
reconnaître qu'elles sont désuètes. Je pense que, à
un moment donné, une décision courageuse devra être prise
par nos élus, qui dise: La police, aujourd'hui, la protection du
territoire, c'est une priorité et, en fait, on devrait mettre la hache
dans tout ce qui constitue un anachronisme au niveau
de la protection policière au Québec. A mon avis, c'est
inadmissible que dans une municipalité, cinq ou six policiers puissent
accorder la même protection que dans une municipalité de la
Communauté urbaine ou autre, parce qu'on ne dispose pas de tous les
outils nécessaires pour pouvoir exercer adéquatement une
tâche. C'est pour cette raison que nous avons dit: Regardons l'exemple de
l'Ontario. En Ontario, on a pris des décisions, le gouvernement est
intervenu, per capita, on a accepté, à un moment donné, de
subventionner jusqu'à un montant de $15 dans le temps où on a
visité les régions concernées. Aujourd'hui, ils sont
rendus à neuf ou dix régions qui couvrent à peu
près le territoire complet de l'Ontario, sauf les endroits
complètement isolés.
Ici au Québec, que ce soit au niveau du crime organisé ou
de la recrudescence de la criminalité, je pense qu'une décision
courageuse devrait être prise. Mais, on ne voit pas cela en vertu du
projet de loi no 48.
Le Président (M. Boucher): Merci, M. Nadon. Au nom de tous
les membres de la commission, je vous remercie pour la présentation de
votre mémoire.
M. Nadon: Si vous me permettez, M. le Président, on vous
remercie, ainsi que les membres de la commission d'avoir bien voulu
écouter nos doléances. Nous sommes toujours à la
disposition du gouvernement s'il y avait autre chose qui méritait plus
d'éclaircissement; on pourra fournir des détails. Merci.
Le Président (M. Boucher): Merci. Compte tenu de l'heure,
est-ce qu'on pourrait suspendre immédiatement et revenir à 14
heures? D'accord?
La commission suspend ses travaux jusqu'à 14 heures.
Suspension de la séance à 12 h 22
Reprise de la séance à 14 h 18
Le Président (M. Boucher): A l'ordre, messieurs!
A la suspension de midi, nous en étions à l'Association
des policiers provinciaux du Québec, représentée par M.
Raymond Richard. M. Richard, si vous voulez identifier les gens qui sont avec
vous et procéder à la lecture de votre mémoire, s'il vous
plaît.
Association des policiers provinciaux du
Québec
M. Richard (Raymond): M. le Président, Raymond Richard,
président de l'Association des policiers provinciaux. A ma droite, notre
conseiller juridique, Me Laurian Barré; à ma gauche, le vice-
président de l'association, M. Jean-Marie Bouchard, M. Jacques Tessier,
secrétaire général, ainsi que M. Eddy Bertrand,
secrétaire-trésorier de l'association.
Si vous le permettez, M. le Président, nous n'allons pas
nécessairement faire toute la lecture du mémoire qu'on a soumis
aux membres de la commission. Nous allons commenter certains articles.
Le Président (M. Boucher): II sera versé au complet
au journal des Débats.
M. Richard (Raymond): D'accord. Il y a un peu plus de deux ans,
l'Association des policiers provinciaux du Québec avait l'occasion de
soumettre au comité d'étude sur les fonctions policières
diverses représentations susceptibles de mieux définir le statut
du policier et d'améliorer l'efficacité policière.
L'association nourrissait l'espoir que les recommandations de ce comité
soumises en janvier 1978 puissent servir de base à une refonte de la Loi
de police. Force nous est de constater, un an et demi après la parution
de ce rapport, que les amendements proposés à la Loi de police
ont, de façon générale, une portée bien
différente. Plutôt que de tendre vers une clarification du statut
du policier et de son rôle, une détermination des fonctions
policières ou encore l'établissement de mécanismes de
regroupement, l'actuel projet est principalement axé sur la Commission
de police. Par exemple, contrairement à ce qui pouvait être
prévu à la suite du rapport Saulnier, on ne retrouve aucune
disposition concernant l'intégration des policiers des autoroutes
à la Sûreté du Québec. Le projet de loi étend
le rôle de la Commission de police, accroît ses pouvoirs, lui donne
plus d'autorité et ce, même au détriment de la
Sûreté du Québec qu'on se plaît pourtant à
envisager, par ailleurs, comme une Sûreté nationale. Ces nouvelles
dispositions contribuent davantage, à notre avis, à faire de la
Commission de police une espèce de superstructure omniprésente
qui ne cadre pas nécessairement avec le rôle qui est dévolu
à un corps de police, en particulier celui confié à la
Sûreté du Québec par l'article 29 de la Loi de police.
Nous estimons que la commission a un rôle à jouer, mais
qu'elle ne devrait pas tendre à se substituer aux corps de police. Les
attributions quasi judiciaires qui lui sont dévolues devraient faire en
sorte que ses attributions administratives ne deviennent pas trop
étendues, risquant du même coup les conflits de juridictions.
L'association note, d'autre part, que l'article 36 du projet de loi apporte des
modifications aux pouvoirs du Procureur général, tels que
définis à l'article 4 de ja Loi du ministère de la
Justice.
Nous croyons que ces nouvelles dispositions non seulement risquent
d'entrer en conflit avec les pouvoirs généraux de la Commission
de police, mais sont de nature à favoriser l'intervention des pouvoirs
publics dans le travail policier. Il s'agit là, à notre avis,
d'attributions qui devraient appartenir
à la Sûreté du Québec et qui, du reste, lui
sont accordées par l'article 29 de la loi.
Nous réalisons ainsi, à la suite de ces pouvoirs accrus
qui sont accordés à la Commission de police et au Procureur
général, que le rôle de la Sûreté s'en trouve
réduit d'autant, ce qui risque de devenir un premier pas dans la
direction où la Sûreté du Québec serait
l'exécutant de politiques, programmes ou décisions venant de
l'extérieur. De là à faire de la Sûreté du
Québec un instrument au service des pouvoirs publics, la distance n'est
plus tellement longue à franchir.
Nous allons, dans les pages qui vont suivre, commenter divers
amendements proposés dans ce projet de loi. Nous tenions cependant
à exprimer nos impressions sur l'ensemble du projet, comme nous aurons
d'ailleurs l'occasion de le faire lors de la commission parlementaire sur
l'avant-projet de loi du Code de la route. Mais si le Code de la route
mérite des éloges, nous ne pouvons malheureusement en dire autant
du projet de loi modifiant la Loi de police.
A la page 5 de notre mémoire, concernant l'article 2 du projet de
loi, nous disons que cet article doit se lire avec l'article 6 du projet,
l'article 16d. Nous sommes d'accord avec ces nouvelles dispositions, mais nous
croyons qu'il faudrait préciser dans les nouveaux articles 2b et 47b la
nature des renseignements à fournir, d'autant plus qu'on prévoit
une infraction à l'égard de celui qui contrevient à
l'article 2b. Ces renseignements devraient se rapporter à
l'identification de l'agent de la paix lui-même et de ses fonctions.
Nous commençons à la page 7 concernant l'article 3 du
projet de loi. Nous soumettons que l'article 6 de la Loi de police devrait
également être amendé pour placer les membres de la
Sûreté du Québec sur un pied d'égalité avec
les policiers municipaux. Ainsi, le membre de la Sûreté devrait
pouvoir se porter candidat à une élection municipale ou scolaire
ou se livrer à une activité partisane lors de telle
élection, hors des limites du district judiciaire dont fait partie son
poste.
L'article 6 du projet de loi. Comme nous l'avons souligné au
début de ce mémoire, ce nouvel article accroît les pouvoirs
de la commission tout en restreignant ceux de la Sûreté du
Québec qui devient soumise à cet égard à la
commission. De conseillère et collaboratrice qu'elle est actuellement,
la commission acquiert un rôle d'initiateur de services de documentation,
statistiques et inspection.
Nous croyons que l'exercice de ces pouvoirs doit aller de pair avec le
mandat qui incombe à la Sûreté suivant l'article 29 de la
Loi de police. L'établissement et le maintien des services
concernés par un organisme autre que celui qui est chargé
d'effectuer le travail policier nous apparaît comme susceptible de
diminuer l'efficacité policière.
Pour qu'un organisme comme la Sûreté du Québec
puisse fonctionner adéquatement, il faut qu'elle puisse se doter
elle-même des outils dont elle sait avoir besoin, qui ne sont pas
nécessairement les outils dont un autre organisme croit qu'elle a besoin
ou croit qu'ils devraient être utili- sés de telle ou telle
façon. Par ailleurs, nous voyons, dans les modifications
apportées au premier paragraphe de cet article 16 concernant les
pouvoirs généraux de la commission, une nette indication du
rôle de plus en plus considérable qu'on entend donner à la
commission et qui dépasse celui de conseiller qu'elle devrait continuer
d'exercer.
Sur l'article 7 du projet de loi, nos commentaires sont les
suivants:
Le fait d'accorder à la commission un pouvoir de
réglementation sur l'utilisation par les membres de la
Sûreté du Québec et sur l'équipement dont peuvent
être dotés les véhicules automobiles utilisés, nous
paraît difficilement conciliable avec la situation qui prévaut
actuellement.
En vertu des ententes et des mécanismes existants, l'association
collabore et participe à l'élaboration de normes de
sécurité dans l'exercice des fonctions de ses membres.
L'association ne peut donc concevoir les pouvoirs de réglementation qui
seraient ainsi dévolus à la commission, laquelle n'est aucunement
tenue de consulter l'association ou d'entendre ses représentations et
encore moins de faire les études appropriées avec ladite
association.
Au surplus, nous ne voyons pas comment la commission peut être
justifiée de déterminer par règlement l'utilisation de
l'équipement policier et l'équipement dont peuvent être
dotés les véhicules utilisés par les policiers, les
exigences et les besoins ne sont pas nécessairement les mêmes pour
tous.
L'article 19 du projet de loi et l'article 17 également, nous les
commentons de la façon suivante.
Indépendamment de tout aspect litigieux que pourrait soulever
l'application de cette disposition, nous ne voyons pas dans ce pouvoir
d'enquête accordé à la commission d'éléments
susceptibles d'améliorer l'efficacité policière au
Québec, qui devrait être la priorité de la commission.
Cette nouvelle disposition nous semble plutôt confirmer le
contrôle de plus en plus étendu que l'on veut donner à la
commission, même en matière d'enquête, en le faisant porter
sur d'autres personnes agissant comme agents de la paix, à défaut
de pouvoir l'étendre à d'autres organismes policiers.
D'autre part, ce qui soulève de nombreuses questions' à
l'égard de l'article 20, premier et deuxième paragraphes de la
Loi de police, c'est la dimension nouvelle qu'apporte ce projet de loi dans
l'application de la discipline à la Sûreté du
Québec. Etant donné que l'article 24 du projet de loi introduit
(par l'article 47a) de nouvelles normes en matière disciplinaire et fait
connaître l'adoption et la teneur de telles normes, nous voyons mal que
la Commission de police conserve son pouvoir d'enquête sur la conduite
des membres de la Sûreté du Québec.
En effet, non seulement la commission a une juridiction concurrente avec
la Sûreté en matière disciplinaire, mais l'exercice de sa
juridiction a même priorité sur celle de la Sûreté.
Suivant le nouvel article 24, édicté par l'article 17 du
projet
de loi, si la commission poursuit son enquête, un tel
comité (de discipline) doit surseoir à toute procédure. De
plus, la commission acquiert le pouvoir de recommander des sanctions
spécifiques, tout comme elle peut désormais, en vertu du nouvel
article 24b, émettre une ordonnance à l'effet de rendre un membre
inhabile à exercer ses fonctions d'agent de la paix.
Par contre, on note que le projet de loi n'accorde aucun droit ou
privilège additionnel au policier qui fait l'objet d'une telle
enquête. Pourtant, le projet fournit des droits et privilèges
additionnels à toute personne qui témoigne devant la commission,
lors d'une enquête qu'elle tient en vertu de l'article 19. Bien plus, le
droit du policier qui est l'objet d'une enquête, sous l'article 20, de se
faire assister d'un avocat, même s'il est reconnu à l'article 22
de la loi, ne lui procure pas pour autant le droit à une défense
pleine et entière.
M. le Président, nous avons, lors de la révision de notre
mémoire, noté une erreur à la page 20. Est-ce que tous les
membres ont la correction?
Le Président (M. Boucher): Tous les membres ont
été informés.
M. Richard (Raymond): Pouréviterque le membre de la
Sûreté ne soit soumis à une double juridiction en
matière disciplinaire, qui ne peut que lui causer préjudice, il
faut opter pour un régime unique en matière de discipline et
conférer l'administration ainsi que l'application de cette discipline
à la Sûreté, comme le prévoit le nouvel article 47a.
L'exercice de ce pouvoir disciplinaire par la Sûreté permet au
membre un recours en vertu de la convention collective qui le régit. Ce
recours ou grief n'existe pas nécessairement à la suite d'une
décision rendue par la commission. C'est notamment le cas de
l'ordonnance que la Commission de police pourrait rendre suivant laquelle un
agent de la paix est inhabile à exercer ses fonctions, contre laquelle
le membre se trouve démuni de recours en appel ou révision. Le
régime disciplinaire unique en faveur de la Sûreté, que
nous préconisons pour les membres, correspond à la situation qui
prévaut en vertu du Code des professions où la juridiction en
matière de discipline est accordée à la corporation
professionnelle et la juridiction d'appel, au tribunal des professions.
Le droit de grief existant, en vertu de la convention collective,
devrait servir de mécanisme d'appel à la suite d'une
décision disciplinaire rendue par la Sûreté. Rien ne
s'oppose à ce que la commission puisse conserver son pouvoir
d'enquête sur les corps de police en tant qu'organisme, mais sa
juridiction concurrente avec un corps de police comme la Sûreté du
Québec, concernant la discipline des membres, devrait être abolie
ou à tout le moins restreinte au seul cas où la
Sûreté refuserait d'agir. Dans un tel cas, le projet de loi
devrait prévoir de façon claire les droits et privilèges
des membres qui font l'objet d'une enquête, notamment quant à
l'usage que l'on tend à faire de la déclaration et à ce
droit d'être représenté par un avocat. La commission
pourrait également agir comme un tribunal d'appel du droit au grief
suivant la convention collective.
L'article 22 du projet de loi. Lors de l'étude en commission
parlementaire du projet de loi no 41, au mois d'août 1976, nous avions
fait valoir que l'article 45 devait être amendé de façon
à relier ce pouvoir de suspension aux règles applicables en
matière de discipline et prévues à l'article 47. Le projet
de loi no 41 prévoyait d'ailleurs une modification au même effet
de l'article 46. Pour les mêmes raisons, étant donné que le
nouvel article 47 prévoit un règlement visant entre autres
à déterminer le pouvoir du directeur général, des
officiers et à déterminer les sanctions disciplinaires, nous
prétendons que l'article 45, s'il doit demeurer, réfère
aux règlements disciplinaires. La même remarque vaut
également pour l'article 46 qui accorde au directeur de la
Sûreté un pouvoir de congédiement pour cause. (14 h 30)
L'absence de référence aux règlements de l'article
47a risque d'être interprétée comme un pouvoir
disciplinaire que le directeur ou un adjoint possède en dehors des
normes et des règles de l'article 47a. Ce nouvel article 47a est
très explicite par lui-même et il ne faudrait pas qu'un membre
soit soumis à un double régime de discipline au sein de la
Sûreté.
L'article 24 du projet de loi. En plus de nos remarques sur
l'administration de la discipline soumise précédemment, nous
voudrions ajouter certains commentaires au sujet de cet article. Le paragraphe
b) de ce nouvel article permet de déterminer les occupations, les
activités ou les emplois interdits aux membres, en raison de leur
statut. Cette disposition risque fort de devenir inapplicable, à moins
que ne soit modifié dans le même sens, soit abroger l'article 39
de la loi qui comporte une interdiction absolue. D'ailleurs, l'article 39 de la
loi dit: "Les cadets et les membres de la Sûreté doivent s'occuper
exclusivement du travail de la Sûreté et des devoirs de leurs
fonctions".
D'autre part, étant donné la portée de ce nouvel
article et la possibilité pour le lieutenant-gouverneur en conseil de
modifier et même d'adopter un tel règlement, il faudrait que soit
reconnu, le pouvoir de l'association de faire des représentations
relativement au code de discipline.
L'association, en vertu de cette prérogative que lui
confère la loi qui la régit, a d'ailleurs eu l'occasion de faire
ses représentations et de collaborer à l'élaboration par
la Sûreté, d'un code de discipline qui est toutefois
demeuré en suspens depuis environ quatre ans.
En résumé, M. le Président, si on s'en reporte aux
notes préliminaires de notre mémoire, l'Association des policiers
provinciaux du Québec, à tout le moins, est très
déçue du contenu du projet de loi 48. Nous avons vu, depuis deux
jours, plusieurs personnes ou groupes présenter des mémoires
devant la commission parlementaire et tous les groupes, à quelques
exceptions près, se sont référés au rapport
Saulnier, et on voit,
d'après les intervenants, qu'il y avait eu beaucoup d'espoir de
mis entre les mains de ce comité, comité dont le mandat final a
été élaboré par le présent gouvernement, M.
le Président, et dont les membres avaient été choisis
également par le gouvernement actuel.
Nous avions, de notre côté aussi à ce moment, soumis
des recommandations au groupe de travail Saulnier et en se
référant à notre mémoire qui avait
été soumis à cette époque, à la page 45, on
avait dit dans le dernier paragraphe: "Pour en arriver à cette
uniformisation souhaitée, il importe que les recommandations qui
émaneront de ce comité on parlait du comité
Saulnier ne demeurent pas de lettre morte et que les autorités
gouvernementales aient le désir et la volonté ferme de
réaménager les structures et l'organisation policières au
Québec dans l'intérêt non seulement des policiers, mais
surtout de la collectivité." Notre déception vient du fait que le
projet de loi 48 donne d'énormes pouvoirs à la Commission de
police, pouvoirs qui, à notre sens, ne sont pas justifiés. Nous
n'avons rien contre les membres de la Commission de police qui ont fait du bon
travail depuis quelques années, sauf qu'à notre avis rien ne
justifie les pouvoirs accrus qu'on veut donner à la Commission de
police. Après avoir fait une analyse des pouvoirs nouveaux qu'on voulait
donner à la Commission de police, on en vient au nombre de treize
pouvoirs additionnels. Avant de présenter ce projet de loi le ministre
de la Justice, M. le Président, aurait, je pense, dû attendre
peut-être encore quelques mois, et étudier plus en profondeur les
recommandations du rapport Saulnier.
Nous mentionnons et plusieurs l'ont mentionné le
cas des policiers des autoroutes. Il me semble que le présent
gouvernement a fait faire une étude et on le voit dans la
recommandation du rapport Saulnier qui recommandait l'intégration
à la Sûreté du Québec des policiers des autoroutes.
Nous avions l'espoir de voir au moins dans le projet de loi 48 cette
recommandation mise en application étant donné que, d'une part,
la Sûreté du Québec et ses représentants
étaient favorables, étaient d'accord avec cela. Les policiers des
autoroutes étaient également d'accord, ainsi que l'Association
des policiers. On ne voit rien dans le projet de loi 48 et, en gros, nous
sommes très déçus du peu d'amendements pour
améliorer l'efficacité policière. Il y a évidemment
quelques amendements qui vont aller pour l'amélioration de
l'efficacité policière au Québec, mais je pense, M. le
Président, qu'on aurait dû aller plus en profondeur et prendre des
mesures, comme le disait M. Nadon ce matin, plus courageuses. Merci.
Le Président (M. Boucher): Merci, M. Richard. M. le
ministre.
M. Bédard: M. le Président, je remercie
l'Association des policiers provinciaux du Québec du mémoire
très étoffé qu'ils ont présenté aux membres
de la commission et de leur collaboration positive aux travaux de notre
commission. Nous sommes à même de constater que plusieurs des
points que vous touchez ont été touchés dans des rapports
remis à la commission précédemment. Entre autres,
plusieurs des points que vous soulevez l'ont été cet avant-midi,
lors de la présentation du mémoire de la Fédération
des policiers du Québec.
Cependant, il y a certains aspects de votre mémoire sur lesquels
j'aimerais avoir plus d'explications de votre part. Vous avez indiqué
tout à l'heure votre souci, qui est le nôtre, en fonction d'une
amélioration la plus grande possible de l'efficacité
policière. D'autre part, vous dites, à la page 10 de votre
mémoire, que l'efficacité policière peut s'en ressentir du
fait que la Commission de police se voit donner les pouvoirs qui sont
énumérés à l'article 16. Est-ce que vous pourriez
expliciter davantage en quoi ces pouvoirs, s'ils sont donnés à la
Commission de police, peuvent influencer l'efficacité
policière?
M. Richard (Raymond): En fait, ce que nous prétendions,
c'est qu'avec ces pouvoirs accrus à la Commission de police,
éventuellement, dans un avenir assez rapproché, cela risque de
mettre la Commission de police dans des situations de conflit et,
vis-à-vis des policiers, de perdre de la crédibilité.
M. Bédard: Sur l'aspect de la crédibilité,
je le comprends, mais sur l'aspect de l'efficacité...
M. Richard (Raymond): Nous voyons la Commission de police... En
fait, c'est tout cela. La Commission de police, de par son rôle, devrait
avoir un pouvoir de consultant. Actuellement, ce sont des pouvoirs quasi
judiciaires, des pouvoirs d'enquête. Si on lui donne tous ces pouvoirs
accrus, la Commission de police va faire des enquêtes, va faire des
règlements, la Commission de police va également s'occuper du
dossier disciplinaire et, en plus de cela, va agir, en quelque sorte, comme
consultant. Il me semble qu'à un moment où à l'autre, cela
va définitivement enlever de la crédibilité à la
Commission de police. Il ne faut pas seulement donner des pouvoirs à une
commission, quand les membres de cette Commission de police se
présenteront dans un corps policier ou feront des recommandations, il
faut que ce soit bien vu des policiers, il faut tout de même avoir
l'accord des policiers, il faut avoir de la consultation. C'est dans ce sens
qu'on dit que dans un avenir plus ou moins rapproché, tous ces pouvoirs
risquent, pour les policiers au Québec, de mettre la Commission de
police à part. A ce moment-là, ils n'auront pas de
crédibilité, et ils vont être perçus un peu comme
des gars qui viennent faire enquête pour les poigner, comme on dit dans
le métier.
M. Lalonde: Si le ministre le permet...
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: M. le Président, si le ministre le permet, il
s'est référé à la page 10 de votre mémoire.
Je vous suggérerais de relire le premier paragraphe, où vous
dites que "l'établissement et le maintien des services concernés
par un organisme autre que celui qui est chargé d'effectuer le travail
nous apparaît comme susceptible de diminuer l'efficacité
policière". Je pense que c'était la question du ministre.
M. Bédard: C'est justement parce que je veux revenir
à quelques questions précises que vous avez devinées.
M. Lalonde: Je m'excuse de vous avoir interrompu.
M. Bédard: Vous nous parlez de ces pouvoirs que nous
donnons à la Commission de police en vertu de l'article 16 du projet de
loi 48; est-ce que votre opinion est que ce sont des pouvoirs qui devraient
être exercés par un organisme comme la Direction
générale de la sécurité publique?
M. Richard (Raymond): Etant donné que le projet de loi no
48 était muet sur la Direction générale de la
sécurité publique, nous avions l'impression que cet organisme
était appelé à disparaître. Nous verrions,
évidemment, certains pouvoirs donnés à cet organisme, si
cet organisme continue d'exister, c'est évident, ou demeurer avec
certains pouvoirs pour la Sûreté du Québec, suivant
l'article 29. Il y aurait lieu de séparer certains pouvoirs et de faire
le partage entre ce que la Commission de police pourrait faire et ce que la
Direction générale de la sécurité publique pourrait
faire également. Nous avions l'impression, c'est pour cela qu'on n'a pas
touché ce point, que la Direction générale de la
sécurité publique était appelée à
disparaître. A ce moment-là, il y a un organisme au Québec
qui ferait à peu près tout, ce serait la Commission de police.
C'est dans ce sens-là.
M. Bédard: Disons qu'il n'y en a pas qui sont
appelés à disparaître, pour les fins de la discussion.
M. Richard (Raymond): A ce moment, il s'agit de faire le partage,
M. le Président, entre la Commission de police et la Direction
générale de la sécurité publique.
M. Bédard: Quels pouvoirs voudriez-vous voir donner
à la DGSP?
M. Barré (Laurian): Si vous me permettez, M. le
Président, peut-être pour revenir un peu en arrière
à ce que le ministre de la Justice mentionnait
précédemment, ce que vise peut-être devantage le premier
paragraphe de la page 10 de notre mémoire est peut-être surtout
les nouvelles dispositions de l'article 16a, par exemple. On constate que, dans
l'actuelle loi 10, ce pouvoir incombe actuellement à la
Sûreté du Québec. On dit que la commission collabore
à l'établissement par la SQ d'un service central de
renseignements et de statistiques ayant pour but de faciliter la
détection du crime, le dépistage de leurs auteurs et au maintien
de ce service à la disposition des corps de police. Par les nouvelles
dispositions, on note, par exemple, que l'établissement du service de
documentation et de statistiques va maintenant relever, et ceci de façon
obligatoire, puisqu'on en fait une obligation pour la commission, de la
commission, donc un pouvoir qui appartenait à la Sûreté,
que la Sûreté établissait en collaboration avec la
Commission de police mais qui est maintenant dévolu exclusivement
à la Commission de police. Un autre exemple également qu'on peut
souligner, que l'on retrouve, par exemple, au nouvel article 17 proposé,
l'article 17c plus précisément, où on parle, par exemple,
de la réglementation que la Commission de police peut adopter à
l'égard non seulement des caractéristiques de
l'équipement, tel que cela existe actuellement, mais également
à l'égard de l'utilisation de l'équipement et à
l'égard aussi de l'équipement dont peuvent être
dotés les véhicules automobiles qu'elle utilise.
Comme le souligne justement notre mémoire là-dessus, il
existe déjà, à l'heure actuelle, en fonction de la loi du
régime syndical applicable à la Sûreté, des
mécanismes prévus, des mécanismes qui fonctionnent et qui
font en sorte que des comités conjoints avec représentants de la
Sûreté et de l'association se rencontrent pour discuter, par
exemple, de questions relatives à l'équipement. Je pense, entre
autres, à un comité qui s'appelle le comité
d'hygiène et de sécurité et qui est appelé à
faire certaines études, à faire certaines évaluations et,
par la suite, à faire certaines recommandations visant la question de
l'équipement. On voit mal, par exemple, que la Commission de police
puisse avoir à cet égard un pouvoir de réglementation,
compte tenu des mécanismes ou des dispositions d'une autre loi qui, par
ailleurs, nous régit.
Ceci, simplement pour donner une indication qu'il nous apparaît
que la Sûreté perd peut-être de son je dirais
"indépendance" si vous me permettez le mot
vis-à-vis de la Commission de police possiblement, vis-à-vis
peut-être du Procureur général également puisque
l'on mentionne, dans la première partie de notre mémoire, une
modification qui est apportée à la Loi du ministère de la
Justice et qui a pour effet ou qui pourrait plutôt avoir pour effet
éventuellement d'accentuer davantage le contrôle qui pourrait
être exercé par les pouvoirs publics sur un organisme comme la
Sûreté du Québec.
Notre position en tant qu'association est de dire: Si l'on veut vraiment
que la Sûreté remplisse le rôle ou le mandat qui lui est
confié par la Loi de police, plus particulièrement et de
façon très générale à l'article 29 de la Loi
de police, il faut quand même lui laisser les coudées franches, il
faut quand même lui laisser la possibilité de manoeuvrer dans ce
secteur, pas nécessairement en l'absence de tout consultant ou en
l'absence de
tout conseiller, mais lui permettre de voir, étant donné
qu'elle est dans le champ, ce dont elle a besoin et de se doter de ce dont elle
a besoin. A la page 10 de notre mémoire, on a employé le terme
"outils": des outils dont elle peut avoir besoin pour exécuter ou
accomplir le mandat qui lui est confié, mais un mandat qui lui incombe
en tant qu'un organisme policier distinct des pouvoirs publics et non pas
à charge, par exemple, d'exécuter des programmes ou des
décisions qui sont élaborés, qui sont
édictés de l'extérieur et que la Sûreté n'est
simplement chargée que de mettre en application. (14 h 45)
M. Bédard: Vous savez, quand on parle des pouvoirs de
l'article 16, il y a quand même certains dilemmes auxquels on a à
faire face et qu'il faut trancher. D'une part, il y a vous avez
été à même de le constater des
représentations, suivant lesquelles, si ces pouvoirs sont exercés
par la Commission de police, à ce moment-là cela crée trop
de dangers, de conflits d'intérêts par rapport au rôle quasi
judiciaire qu'a la Commission de police.
D'autre part, si vous prenez ces pouvoirs-là et que vous les
donnez tel que cela nous a été recommandé dans
plusieurs mémoires à la Direction générale
de la sécurité publique, il se peut qu'il y ait le danger que
vous évoquez, une certaine mainmise des pouvoirs publics ou des pouvoirs
politiques sur des opérations policières.
Vous arrivez avec une autre solution qui serait de doter la
Sûreté du Québec elle-même de ces outils qu'on
retrouve dans l'énoncé de l'article 16 du projet de loi 48 et je
suis porté à vous poser la question suivante: Que faites-vous des
autres corps policiers? Quand on parle d'établir un service de
documentation et de statistiques permettant d'évaluer l'état de
la criminalité et l'efficacité de l'action policière,
c'est dans le but que cet instrument puisse, pour autant qu'il devienne
efficace, servir non seulement à la Sûreté du
Québec, mais à l'ensemble des corps policiers du Québec,
autrement dit, puisse servir la cause de l'amélioration de la
sécurité policière sur l'ensemble du territoire
québécois.
M. Barré: Je pense, M. le Président, qu'à
cette question du ministre de la Justice, on pourrait répondre
facilement que c'est peut-être dans une perspective d'une
sûreté nationale ou d'une gendarmerie nationale au Québec
que l'on mentionne cet aspect. Mais je ne pense pas que le fait de dire qu'on
laisse parce que les dispositions de la loi actuelle de police font que
c'est la Sûreté qui exerce, par exemple on parle du pouvoir
prévu à l'article 16a, ce pouvoir à la
Sûreté du Québec ce pouvoir n'empêche pas les autres
corps policiers municipaux de pouvoir travailler en collaboration avec la
Sûreté du Québec.
C'est également vrai, comme vous le mentionniez aussi
précédemment, que ce qui cause des difficultés, tout le
monde le reconnaît, c'est la double juridiction, si on peut dire, de la
Commission de police, tant sur le plan administratif que quasi judiciaire. A
partir de quel moment la Commission de police agit-elle comme organisme
administratif et organisme quasi judiciaire? On peut très bien dire,
à partir du moment où elle réglemente et à partir
du moment où elle fait enquête, mais ce n'est pas toujours aussi
simple que ça, d'établir, dans la réalité, une
ligne de démarcation entre les deux. Ce que nous craignons, c'est que si
on doive, d'une part, augmenter ou accroître le pouvoir administratif ou
le pouvoir de réglementation, appelons-le le pouvoir quasi
législatif de la commission à cet égard, et que si,
d'autre part, on augmente également son pouvoir d'enquête, on
risque je dis bien on risque de se retrouver dans la situation
où on a peut-être un conflit de juridiction possible à
l'intérieur de la commission.
Maintenant, comme mentionnait tantôt M. Richard, on n'exclut pas,
loin de là, l'organisme prévu dans le projet de loi 41, de
défunte mémoire, sur la Direction générale de la
sécurité publique et on n'exclut pas non plus la
possibilité qu'une partie des pouvoirs, par exemple, qui incombent ou
qui sont donnés à la Commission de police puissent
éventuellement être accordés à cette direction
générale. Là, je ne prétends pas donner de solution
toute faite, mais simplement pour raisonner bien haut et dire: II y a
peut-être une amorce de solution je dis bien une amorce de
solution peut-être peut-on envisager une redistribution de
pouvoirs où ;a Commission de police aurait une juridiction en
matière d'organisation policière et que la direction
générale aurait une juridiction en matière
d'activité policière, mais toujours en tenant compte
également du mandat confié à la Sûreté du
Québec.
M. Bédard: Mais, en gardant tout cela en perspective, vos
préoccupations bien normales pour la Sûreté du
Québec, quels sont les pouvoirs que vous verriez attribués
à la Direction générale de la sécurité
publique?
M. Barré: Comme je l'ai mentionné
brièvement, c'est que la Direction générale de la
sécurité publique pourrait très bien avoir des pouvoirs
qui sont davantage concentrés dans le domaine de l'activité
policière, pouvoirs, si vous voulez, que l'on retrouve, par exemple,
dans le projet de loi qui modifie l'article 4 de la Loi du ministère de
la Justice où on dit que le Procureur général sera
chargé de promouvoir la coordination des activités
policières. C'est peut-être un pouvoir que l'on verrait davantage,
par exemple, à une direction générale. Même chose
pour l'élaboration de politiques ou de programmes de
sécurité publique. Quoique là, étant donné
les remarques que je faisais précédemment, on aurait
également des réticences ou des réserves à formuler
pour ne pas quand même empiéter sur une juridiction qui doit
être laissée à la Sûreté du Québec.
Dans la même veine, si on regarde les dispositions de l'article 16 du
projet de loi, il y a peut-être des dispositions qui peuvent rester
à la Commission de police en tant qu'organisme chargé de voir
à l'organisation
policière au sens général du terme comme le
paragraphe b), si on veut faire une ligne de démarcation entre
organisation et activités, paragraphe b) qui permet
l'établissement, à toutes fins utiles, d'un inspectorat.
Je note, cependant, que, par exemple, le rapport Saulnier favorisait le
retrait, si vous voulez, de cette juridiction de la commission et voulait
plutôt la confier à un organisme qui s'appelait l'inspectorat de
police, alors qu'on le confère ici à la commission.
Peut-être que la commission pourrait exercer ce pouvoir, mais, en
contre-partie, on devrait peut-être laisser à la direction
générale des pouvoirs concernant les activités
policières proprement dites au niveau du crime, des moyens de combattre
le crime, des moyens de favoriser l'efficacité policière.
M. Bédard: Enfin...
M. Richard (Raymond): On admet, M. le Président, que ce
n'est pas facile de faire un partage de tout cela.
M. Bédard: C'est le problème auquel on a à
faire face comme législateur. C'est pour cela qu'on est bien heureux de
pouvoir compter sur les lumières de tous ceux qui s'y connaissent
également dans le domaine. Concernant l'article 16, pour être bien
collé au projet de loi, selon vous, est-ce que vous verriez la Direction
générale de la sécurité publique établir un
service de documentation, de statistiques permettant d'évaluer
l'état de la criminalité, l'efficacité de l'action
policière, qui peut servir à l'ensemble des corps policiers?
M. Richard (Raymond): Cela pourrait être dévolu
à la Direction générale de la sécurité
publique. Oui, cela pourrait.
M. Bédard: Mais je comprends que vous aimez mieux que ce
soit plutôt chez vous.
M. Richard (Raymond): C'est évident qu'on aimerait mieux
que ce soit à la Sûreté, que ce soit chez nous. On avait
étudié le projet de loi no 48 dans la perspective que la
Direction générale de la sécurité publique
disparaissait. A ce moment, on a dit: Arrêtons d'en donner à la
Commission de police et on va en garder un petit peu chez nous.
M. Bédard: Je comprends très bien c'est la
situation, quand on parle d'autres sujets, de pas mal d'autres corps
intéressés que vous préféreriez que ce soit
chez vous. Ma préoccupation est la suivante, c'est qu'un service
oublions à quelle place il est de documentation, de statistiques
permettant d'évaluer la criminalité et l'efficacité
policière, c'est important. Vous pensez que cela devrait être chez
vous. Vous pensez également, j'en suis convaincu, que, si de telles
statistiques se font, si de telles recherches se font, elles doivent servir
à l'ensemble de la collectivité policière qui oeuvre sur
le territoire du Québec.
M. Richard (Raymond): C'est évident.
M. Bédard: Si je comprends bien, cela pourrait être
à la Sûreté du Québec qui, elle, aurait la
responsabilité de...
M. Richard (Raymond): Cela pourrait être à la
Sûreté du Québec...
M. Bédard: ... de le dispenser aux autres corps, d'en
faire profiter les autres corps policiers.
M. Richard (Raymond):... M. le Président, ou, cela
pourrait être à la Direction générale de la
sécurité publique. Mais on dit, nous, que tous ces
pouvoirs-là ne devraient pas être donnés à la
Commission de police.
M. Bédard: D'accord. Si c'est à la direction...
tout au long de ce mémoire et dans certains rapports que nous avons eus
devant la commission, il y a une accusation que nous n'avons pas eue, c'est
celle de vouloir, comme Procureur général ou comme gouvernement,
mettre la main sur des responsabilités précises qui pourraient
avoir pour effet de mettre les corps policiers au service du gouvernement ou
des hommes politiques. Personne ne nous a fait ce reproche-là. Au
contraire, on nous a dit qu'on devrait plutôt penser à
récupérer, par l'entremise de la Direction générale
de la sécurité publique, plusieurs juridictions, plusieurs
responsabilités, ce qui permettrait au Procureur général
d'avoir un meilleur contrôle et une meilleure coordination de l'ensemble
des opérations policières au Québec. Vous êtes les
seuls qui, à un moment donné, dites dans votre mémoire que
cela accroît les pouvoirs de la Commission de police. J'en conviens, tout
le monde en convient, mais vous êtes les seuls qui dites que ce projet de
loi accroît les pouvoirs du Procureur général et que si on
continue, selon votre expression à la page 4 de votre mémoire, eh
bien, la Sûreté du Québec deviendrait l'exécutant de
politiques, de programmes ou de décisions venant de l'extérieur
et que de là à faire de la Sûreté du Québec
un instrument au service des pouvoirs publics, la distance ne serait plus
tellement longue à franchir.
Le sens de tous les mémoires a été plutôt que
le Procureur général, justement, ne récupérait pas
certains pouvoirs ou certaines responsabilités qui devraient lui
être octroyés. Vous avez dans le sens contraire... il faudrait
bien que vous vous expliquiez là-dessus, parce que je pense que j'ai
toujours été très clair non seulement dans mes
déclarations, mais également dans ma manière d'agir comme
Procureur général. Je n'ai jamais pensé, je ne penserai
jamais que quelque corps policier que ce soit puisse être de quelque
manière que ce soit au service du pouvoir politique quel qu'il soit.
Je m'étonne grandement de cela, parce que tous les autres
mémoires sont dans le sens contraire.* Je voudrais que vous
m'expliquiez, que vous explicitiez peut-être un peu sur ce sujet.
M. Richard (Raymond): Voici, M. le Président, d'abord
peut-être une remarque bien amicale à
l'égard du ministre de la Justice. Le ministre de la Justice
emploie le terme "reproche". On ne retrouve pas dans notre mémoire de
reproches à l'égard du ministre de la Justice, du Procureur
général ou de qui que ce soit. C'est une constatation que nous
faisons et c'est une appréhension que nous voulons livrer à cette
commission et si on en veut un exemple, on se réfère, entre
autres, à la nouvelle disposition qui se retrouverait à l'article
4 de la Loi du ministère de la Justice et qui est reproduite à la
page 17 du projet de loi, à l'article 36 du projet de loi, qui dit, par
exemple: 'Le Procureur général est chargé
d'élaborer des politiques et des programmes de sécurité
publique et d'en assurer l'implantation".
Alors, on se pose, face à un pouvoir comme cela, qui n'est pas
explicité ou précisé davantage, la question suivante:
C'est beau de dire que le Procureur général va élaborer
des politiques et des programmes de sécurité publique et en
assurer l'implantation. Reste que qui va assurer ou faire cette implantation?
Qui va exécuter les politiques ou les programmes? On s'est dit qu'il y
avait deux possibilités: ou bien on crée un nouveau corps de
police, une espèce de police parallèle, chargée d'assurer
l'implantation de ces politiques ou de ces programmes de sécurité
publique et rapidement, on dit: Ce n'est pas acceptable, je ne pense pas que ce
soit la position envisagée par le ministère.
M. Bédard: Je peux vous dire déjà qu'il n'en
est pas question.
M. Richard (Raymond): D'accord.
M. Bédard: Votre autre réflexion? (15 heures)
M. Barré: En deuxième lieu, on se dit: A ce
moment-là, le mandat d'exécuter va incomber aux corps de police
municipaux et en particulier à la Sûreté du Québec.
A ce moment-là, que fait la Sûreté du Québec? Elle
assure la mise en application ou elle assure l'exécution de programmes,
de politiques ou de décisions qui n'émanent pas du tout de la
Sûreté du Québec, mais qui émanent d'une autre
autorité et on se dit: et je pense avec raison N'est-ce
pas là un premier pas dans la direction où un organisme ou une
autorité publique quelconque va prendre des décisions, va adopter
des politiques et la Sûreté du Québec ou un autre corps de
police n'aura que comme mandat d'exécuter ce qui a été
décidé ailleurs? C'est en ce sens-là qu'on vous a soumis,
M. le Président, la remarque que le ministre de la Justice souligne dans
notre mémoire.
M. Bédard: Je comprends l'état d'esprit dans lequel
vous avez explicité dans votre rapport les éléments
auxquels je viens de faire référence. Autrement dit, si certains
pouvoirs prévus à l'article 16 étaient dévolus
à la Direction générale de la sécurité
publique, vous n'en tireriez pas la conclusion que le Procureur
général ou le gouvernement veut mettre la main sur la police.
M. Barré: On aurait peut-être moins de
réticence, M. le Président, tout en ayant quand même
certaines réserves, si vous me permettez ce jeu de mots.
M. Bédard: II y a la Sûreté du Québec
comme corps policier, et on sait que c'est un corps policier imposant,
important, au Québec. Il y a aussi tous les autres corps policiers
à propos desquels on doit avoir la préoccupation, comme Procureur
général, de leur donner tous les moyens possibles, de mettre tous
les moyens possibles à leur disposition pour les rendre plus
efficaces.
M. Barré: Effectivement. M. le Président, nous
n'excluons pas la collaboration ou la coopération qui doivent
nécessairement exister, à notre point de vue, entre la
Sûreté et les autres corps de police. Loin de nous cette
idée de vouloir prétendre que la Sûreté doit faire
bande à part et fonctionner en vase clos. Je pense que ce n'est pas la
situation qui prévaut actuellement et ce n'est évidemment pas la
situation que nous envisageons. Par ailleurs, pourquoi la Sûreté,
par exemple, en tant que Sûreté ou éventuelle
Sûreté nationale ou gendarmerie appelons-la comme on veut
ne serait-elle pas chargée de l'élaboration de politiques
ou de programmes de sécurité publique sous une direction
quelconque qui serait là justement pour favoriser l'établissement
ou l'élaboration de telles politiques ou de tels programmes? C'est un
peu ce qu'on veut souligner par nos remarques à cet effet.
M. Bédard: Vous comprendrez qu'il n'est pas possible de
penser qu'un corps de police puisse établir des politiques et des
programmes pour l'ensemble des autres corps de police. Je pense que,
là-dessus...
M. Barré: Oui. C'est pour cette raison que j'ai
mentionné et j'ai répété que je...
M. Bédard: Et...
M. Barré: ... ne faisais pas de la Sûreté une
entité distincte des autres. Je disais que la Sûreté doit
travailler en collaboration évidemment et en coopération
étroite avec les autres corps de police. Resterait dans le cadre d'une
Direction générale de la sécurité publique à
cet organisme, à cette direction, d'édicter comment pourraient
être mis en application ces politiques ou ces programmes, soit par la
Sûreté soit en collaboration entre la Sûreté et tel
ou tel corps de police ou l'ensemble des corps de police municipaux.
M. Bédard: Oui, c'est bien. Je reviendrai tout à
l'heure avec d'autres questions.
Le Président (M. Boucher): Merci, M. le ministre. M. le
député de Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: Merci, M. le Président. Je veux tout d'abord,
suivant la tradition, remercier l'as-
sociation de son mémoire, de son intérêt à la
question soulevée par le projet de loi 48.
Vous avez tout d'abord exprimé une déception
générale. C'est peut-être mon interprétation
à moi, mais je veux dire qu'elle a été partagée par
beaucoup d'autres organismes relativement au projet de loi no 48,
déception que je partage. J'avais exprimé l'avis moi aussi, au
début, qu'étant donné les instruments et les moyens dont
dispose le gouvernement, actuellement, pour apporter des solutions plus
concrètes à la question de l'efficacité de l'organisation
policière... Vous avez mentionné, je pense, deux
éléments particuliers quant à votre déception; il
s'agit du rapport Saulnier qui est quand même entre les mains du
gouvernement depuis un an et demi, depuis janvier 1978, et aussi le manque de
rationalisation dans la définition des pouvoirs de la commission, de la
direction générale ou du gouvernement; il s'agit de la même
chose. Ce sont, je pense, les deux principaux points qui, après une
journée et demie d'audition, reviennent constamment dans les
mémoires.
Vous avez même été portés à croire que
le projet de loi faisait disparaître la Direction générale
de la sécurité publique. Il s'agit peut-être quand
même d'une impression; je ne veux pas jouer sur cette question ce
serait facile, remarquez mais il faut quand même reconnaître
que, lorsque le ministère voit sa loi amendée à l'article
4 de la façon qui est proposée par le projet de loi no 48, il
s'agit de la direction générale aussi, parce qu'il n'en a jamais
été question, même dans la loi 41, quoique la loi 41 le
fît d'une autre façon; elle le faisait par un amendement à
la Loi de police qui se référait spécifiquement à
la Direction générale de la sécurité publique, mais
qui n'avait pas pour effet de créer un organisme distinct.
Je pense, en toute honnêteté, qu'on doit reconnaître
que cet amendement à la loi 48 a à peu près le même
effet. Ce qui est, je pense, quand même décevant, c'est que,
malgré cet amendement, à cause des pouvoirs additionnels qu'on
accorde à la commission, à cause du fait qu'on perpétue la
confusion des pouvoirs entre la commission et le ministère, on arrive
à la situation où personne ne s'y retrouve et cela a aussi
été le cas de votre association, qui a même
présumé, à l'examen de cette loi, que la Direction
générale de la sécurité publique disparaissait.
Dans votre mémoire, vous reconnaissez que les amendements
à l'article 16 enlèvent un certain pouvoir à la
Sûreté du Québec, et j'en conviens. Sauf que je serais
plutôt porté à adopter l'attitude exprimée, quoique
avec une extrême prudence, par le ministre tantôt, à savoir
que, si on doit donner des outils, des moyens, des ressources concernant
l'établissement des politiques policières, on devrait les donner
au niveau du ministère plutôt qu'au niveau de la
Sûreté du Québec, parce qu'il reste que la
Sûreté du Québec n'a qu'une mission partielle dans
l'activité policière au Québec.
Le service de recherche, par exemple, je vois mal pourquoi on le
confierait à la Commission de police. Mais je verrais très bien
qu'on le confie à la
Direction générale de la sécurité publique,
tout en mettant à la disposition de tous les corps policiers, avec les
meilleurs moyens de communication possible, les ressources qui seraient
attribuées à ce service de recherche; c'est la même chose
pour la documentation.
Je pense qu'il est assez clair qu'il ressort des
délibérations jusqu'à maintenant que le projet de loi no
48 a besoin d'un effort de rationalisation en ce qui concerne les pouvoirs
attribués à la Commission de police, pour lui éviter les
écueils des conflits d'intérêts, des conflits en
général, pour donner aussi au gouvernement les pouvoirs
d'établir des politiques. Quand on parle d'établir des
politiques, on ne parle pas de politiques partisanes, d'interventions
cachées, subreptices, en catimini et tout ce que vous voulez, dans
l'activité policière. Tantôt, monsieur je ne me
souviens plus de votre nom...
M. Barré: Barré.
M. Lalonde: M. Barré. ... quand vous avez fait la
différence entre l'organisation policière et les activités
policières dans une réponse à une question: Quelle est la
distinction que vous faites? Pouvez-vous expliciter? Je verrais mal la
Direction générale de la sécurité publique
s'impliquer dans les activités policières. Cela appartient
à la police, aux différents corps de policiers, y compris la
Sûreté du Québec pour sa mission particulière. Mais
je verrais mal aussi qu'on confie à la Sûreté du
Québec seulement ou même à un corps policier ou à
l'ensemble des corps policiers l'établissement des politique
policières, les politiques de sécurité publique. C'est
à un gouvernement élu de dire, à tort ou à raison
et à ce moment-là il y a quand même le verdict
populaire au bout de la ligne quelle est la politique de
sécurité publique qu'il adopte, quelles sont les mesures de
sécurité, qualité de police il se donne directement ou
indirectement par les municipalités, quelles sont les ressources
financières qu'il attribue à cette sécurité
publique. Cela appartient, je pense, à un gouvernement et cela
n'appartient pas à une commission. Cela appartient à un
gouvernement élu à réélire ou à battre, mais
au niveau des activités policières cela appartient aux corps
policiers de les appliquer sans intervention politique. Je ne sais pas si la
distinction que je porte correspond à celle que vous avez voulu exprimer
par votre réponse, quand vous avez fait une distinction entre
l'organisation policière et les activités policières.
M. Barré: Effectivement, M. le Président, quand
nous avons suggéré et je pense qu'on aura compris un peu
mon intervention là-dessus bien modestement une amorce de
solution ou de discussion, on parlait d'une part d'organisation
policière de façon générale, d'organisation
policière qui pourrait être dévolue à la Commission
de police, par là on entend un peu de son pouvoir de
réglementation qui existe déjà ou qui est modifié
par le présent projet de loi, à l'article 17. Par
exemple, prescrire les mécanismes de contrôle d'aptitude,
les programmes de formation, les uniformes, les pièces
d'identité, les insignes, enfin un peu ce qui se retrouve à
l'article 17 qu'on coiffait du titre, juste ou non, d'organisation
policière par rapport, par exemple, à un autre domaine qu'on a
appelé activité policière qui peut s'appeler
opération, au sens général, encore une fois, mais non pas
une implication dans la police elle-même, mais activité ou
opération dans le sens du rôle que devrait jouer la police, sa
lutte contre la criminalité, un peu dans le sens également de ce
qu'on retrouve à l'article 36, modifiant les pouvoirs du Procureur
général du projet de loi.
Alors, c'est dans ce sens-là. Peut-être que le terme choisi
d'activité policière n'est peut-être pas des plus heureux,
mais on aura compris que c'est une distinction qu'on a voulu faire
d'organisation, au sens général du terme, par rapport à
opération sur leur rôle, enfin, ce à quoi ils devraient
davantage se consacrer ou dans quel domaine ils devraient davantage oeuvrer, ce
qui n'implique absolument pas une implication de cette direction
générale dans l'activité policière au sens
où on l'entend de la police au jour le jour.
M. Lalonde: Dans votre mémoire, à la page 4, vous
reprochez depuis quelques lignes au projet de loi de donner trop de pouvoirs
à la Commission de police, mais vous concluez, au début du
paragraphe de la page 4: "De là à faire de la Sûreté
du Québec un instrument au service des pouvoirs publics, la distance
n'est plus tellement longue à franchir." Je ne sais pas quel sens vous
donnez aux termes "au service des pouvoirs publics", mais j'ai toujours compris
que les fonctionnaires, en général, que la Sûreté du
Québec, en particulier, sans les inclure dans le terme de fonctionnaire
sont au service des pouvoirs publics. Ils ne sont peut-être pas au
service d'un parti politique, mais il me semble qu'il faut faire attention dans
l'emploi des mots. N'est-ce pas le rôle des pouvoirs publics
d'édicter les lois et de mettre en place des structures de
contrôle et de surveillance que sont les policiers?
M. Barré: Je pense qu'en fonction des explications qui ont
été fournies précédemment, M. le Président,
et même à la lumière du texte qui vous a été
soumis, on aura très bien compris ce qui est envisagé par la
remarque qui est faite. D'ailleurs, j'avais l'occasion de répondre
à une question similaire du ministre de la Justice
précédemment et je pense que lui-même voyait très
bien le sens ou la portée de ce commentaire qui apparaît au
mémoire.
M. Lalonde: Ce que vous voulez dire, je pense, si vous me le
permettez, c'est que vous craignez que la Sûreté du Québec
ne devienne un instrument au service d'un pouvoir politique particulier. C'est
cela, j'imagine? C'est, d'ailleurs, une préoccupation constante,
j'imagine, des pouvoirs policiers de ne pas devenir un instrument au service
d'un pouvoir politique.
M. Bédard: De quelque pouvoir politique que ce soit.
M. Lalonde: De quelque pouvoir politique que ce soit. Alors, j'ai
compris.
M. Bédard: C'est cela.
M. Barré: C'est sûrement une des principales
facettes envisagées par cette remarque.
M. Lalonde: Vous avez, dans votre mémoire ou par la suite
en réponse à une question, mentionné le fait que le projet
de loi no 48 créait treize nouveaux pouvoirs à la Commission de
police. J'en avais vu plusieurs. Maintenant, étant donné que vous
les avez dénombrés, est-ce que vous pourriez nous en donner la
liste?
M. Barré: Ce qui a été mentionné
là-dessus, c'est qu'une vérification sommaire des dispositions du
projet de loi no 48 concernant les pouvoirs de la Commission de police nous a
permis de constater cela uniquement dans le domaine policier; on ne
touche pas aux pouvoirs additionnels qui pourraient être accordés
à la Commission de police lors d'enquêtes qu'elle tient en vertu
de l'article 19, par exemple, mais strictement en ce qui concerne le domaine
policier par exemple, qu'à l'article 16, le premier paragraphe
nous semblait nettement une indication d'un rôle nouveau de la Commission
de police.
M. Lalonde: Vous pouvez prendre les quatre paragraphes de
l'article 16; ce sont quatre nouveaux pouvoirs.
M. Barré: Oui, si l'on veut. M. Lalonde: Oui.
M. Barré: Alors, on les notait. Enfin, on en avait
noté trois nouveaux accordés à la Commission de police par
l'article 16. On en notait également un quatrième au nouveau
paragraphe c) de l'article 17, plus particulièrement en ce qui concerne
l'utilisation de l'équipement et l'équipement dont peuvent
être dotés les véhicules automobiles.
M. Lalonde: Oui.
M. Barré: On voyait également un nouveau pouvoir au
même article 17, dernier paragraphe, où la commission peut, par
règlement, extension-ner si l'on peut dire le
règlement disciplinaire adopté en vertu de l'article 47a. On
avait, par ailleurs, noté au nouvel article 20, à la page 6 du
projet de loi, un autre pouvoir de la commission dont je pense on a
déjà fait état antérieurement et qui permet
à la commission de faire enquête sur la conduite de toute autre
personne qui agit au Québec en qualité d'agent de la paix. On
l'aura sûrement noté, celui-là.
M. Lalonde: Sûrement.
M. Barré: A l'article 21, on a également
noté "aux fins d'une enquête que la commission tient en vertu de
la présente loi ou de toute autre loi", comme étant un pouvoir
additionnel prévu dans ce projet de loi.
M. Lalonde: Excusez-moi. La Commission de police n'avait-elle pas
déjà les pouvoirs des commissaires en vertu de la Loi des
commissions d'enquête?
M. Barré: Oui, effectivement. M. Lalonde: Elle les
avait déjà.
M. Barré: Effectivement, sauf que le texte tel que
proposé en mentionnant "en vertu de la présente loi ou de toute
autre loi" nous semblait peut-être plus explicite que ne pouvait
l'être la loi.
M. Lalonde: Une extension des pouvoirs.
M. Barré: Vous aviez un huitième pouvoir que nous
avions noté au nouvel article 22a en ce qui concerne les enquêtes,
celui-ci cependant je le souligne étant un pouvoir
accordé à la commission lors d'enquêtes qu'elle tient en
vertu de l'article 19. Nous avions également noté un pouvoir
accordé à la commission aux termes de l'article 24 proposé
par l'article 17 du projet de loi, au bas de la page 9, notamment en
matière disciplinaire.
Nous avons également noté, toujours dans le même
domaine disciplinaire, le pouvoir de la commission, en vertu de l'article 24b,
de rendre une ordonnance, ordonnance rendant un constable ou un agent de la
paix inhabile à exercer ses fonctions au Québec,
l'équivalent, selon nous, d'un pouvoir de suspension ou de destitution.
Nous avons également noté une précision additionnelle
à l'article 24c quant à son pouvoir de recommandation, où
on précise la nature ou le genre de recommandation qui peut être
imposée par la commission, suite à ces enquêtes en vertu de
l'article 20.
Nous avons aussi noté un pouvoir accordé en vertu de
l'article 52, lorsqu'une municipalité décide de ne plus maintenir
un corps de police.
M. Lalonde: En fait, c'est un pouvoir de conseiller, à ce
moment-là.
M. Barré: Un pouvoir de conseil, si vous voulez. Il y a
également un pouvoir similaire à l'article 52b, où le
Procureur général pouvait demander à la commission
d'enquête afin de vérifier si la municipalité maintenait
les services policiers adéquats.
M. Lalonde: Je vous remercie, vous aviez un compte assez juste.
Pour les superstitieux, il y en a peut-être un qui est disparu, on arrive
à une douzaine.
M. Barré: Je préfère ça, M. le
Président, qu'on arrive à douze au lieu de treize.
M. Lalonde: M. le Président, je pense que le
mémoire de l'association est quand même très explicite et
précis. Je n'ai pas d'autres questions particulières,
j'espère que vous êtes satisfait des réponses que le
ministre vous a données. Je ne suis pas sûr que vous en ayez
obtenu, mais j'espère que s'il ne vous les a pas données
maintenant, en d'autres occasions, lors des délibérations
concernant ce projet de loi, nous réussirons à obtenir les
réponses que vous avez recherchées. Nous allons sûrement
tenir compte, au nom de l'Opposition officielle, de vos suggestions dans
l'étude de ce projet de loi.
Le Président (M. Boucher): Merci, M. le
député de Marguerite-Bourgeoys. M. le député de
Nicolet-Yamaska.
M. Fontaine: Merci, M. le Président. Je ne voudrais pas
allonger le débat inutilement, je pense que les grandes questions ont
été posées jusqu'à maintenant. Le principal point
qu'on retient, c'est que la Sûreté du Québec voit des
conflits de juridiction entre les pouvoirs qui sont habituellement
exercés par la Sûreté du Québec et ceux qu'on veut
donner à la Commission de police, tant au point de vue administratif que
disciplinaire. Je retiens simplement un point que vous avez soumis à la
dernière page de votre mémoire; vous dites: "L'association, en
vertu de cette prérogative que lui confère la loi qui la
régit, a d'ailleurs eu l'occasion de faire des représentations et
de collaborer à l'élaboration, par la Sûreté, d'un
code de discipline qui est toutefois demeuré en suspens depuis environ
quatre ans."
Face à ce délai que vous nous avouez et puisque vous nous
demandez en même temps d'essayer de conserver ce pouvoir disciplinaire,
est-ce que vous pouvez nous dire pourquoi cela prend autant de temps et quelles
sont les garanties de succès d'un éventuel code de discipline, si
ce pouvoir vous était laissé?
M. Richard (Raymond): M. le Président, avec la
Sûreté du Québec, de 1971 à 1976, nous avons
élaboré ensemble un code de discipline et il a été
soumis au Procureur général et est resté sur les tablettes
depuis ce temps. Je pense que le ministre de la Justice pourrait
répondre à l'autre partie de la question, pourquoi est-ce que
cela n'a pas été approuvé?
M. Fontaine: On vous renvoie la balle, M. le ministre. Je n'avais
pas d'autres questions, c'était la seule que je voulais poser, si le
ministre a une réponse à donner à ce sujet, parce que la
Sûreté du Québec demande de conserver la juridiction sur le
pouvoir disciplinaire et, d'un autre côté, elle nous dit qu'on a
tenté d'élaborer un code de discipline et la réponse est
que ce serait sur les tablettes au ministère de la Justice. S'il y a
quelqu'un qui est en retard, on voudrait bien savoir qui.
M. Bédard: On pourrait peut-être vérifier si
ce n'est pas sur les tablettes à la Sûreté du
Québec.
M. Richard (Raymond): Je n'ai pas compris, M. le
Président. Je m'excuse.
M. Bédard: On pourrait peut-être vérifier si
ce n'est pas sur les tablettes à la Sûreté du
Québec.
M. Barré: II est possible, effectivement, M. le
Président, qu'il soit sur la tablette à la Sûreté du
Québec. Effectivement, le projet de code de discipline en question est
un projet élaboré par la Sûreté, élaboration
à laquelle l'association avait participé en faisant des
suggestions, des recommandations dont certaines ont été retenues,
d'autres, non, et qui avaient donné lieu effectivement à un
document, un code de discipline qui n'a pas été appliqué
pour des raisons que nous ignorons, mais dont les termes ou les dispositions,
je pense, ont été achevés au début de
l'année 1975, je crois.
M. Richard (Raymond): Maintenant, M. le Président,
à la Sûreté du Québec, évidemment, à
la suite de séances au comité paritaire et conjoint, on nous
avait assurés que ce code de discipline avait été transmis
au Procureur général et au contentieux, mais il se peut que, sur
100 ou 150 officiers, il y ait quelques officiers endormis, même à
la Sûreté du Québec. On pourrait s'informer.
M. Bédard: Je ne crois pas qu'il faille
l'interpréter dans ce sens.
M. Fontaine: Est-ce que le code de discipline a besoin
d'être entériné par le ministre de la Justice avant
d'être mis en application à la Sûreté du
Québec?
M. Barré: Suivant l'actuelle Loi de police, oui. C'est un
code qui est adopté en vertu de l'actuel article 47 de la Loi de police.
C'est un règlement pour régir la discipline. Evidemment, il est
beaucoup moins élaboré que le nouvel article 47a qui est
proposé dans l'actuel projet de loi et contre lequel, évidemment,
nous vous avons fait part de deux réserves relativement à
l'élaboration de ce nouveau code ou à la mise en application du
code déjà discuté il y a quelques années.
M. Bédard: Quant au projet de loi no 48, par
lui-même, je n'ai pas d'objection, au contraire, je crois à la
nécessité d'un code de déontologie et d'éthique
pour les policiers, que ce soit la Sûreté du Québec ou
d'autres corps policiers. Des représentations nous ont été
faites concernant certains corps policiers, il n'y a pas tellement longtemps,
il y a des codes d'éthique qui sont présentement en application.
Je pense à la CUM, entre autres.
M. Barré: Je m'excuse, M. le Président, en fait, il
faudrait bien se comprendre. Nous ne prétendons pas qu'il n'existe pas
à l'heure actuelle de code de discipline à la
Sûreté. Il en existe un adopté en 1966, je crois, en vertu
de la loi qui s'appelait à l'époque la Loi de la
Sûreté provinciale. Ce code est toujours en application, mais il
est devenu, à certains égards, désuet, et c'est pourquoi,
en 1974 et 1975, un nouveau code, si l'on peut dire, avait été
élaboré, et c'est ce code qui est resté lettre morte
depuis, mais l'ancien code adopté en 1966 continue toujours d'exister et
de s'appliquer.
M. Richard (Raymond): M. le Président, le nouveau code
avait comme titre: Dispositions relatives à la conduite des membres de
la Sûreté du Québec. Il a été
révisé pour la dernière fois en novembre 1975 avant
d'être soumis en février 1976, d'après ce qu'on nous a dit
à la Sûreté, au gouvernement, au lieutenant-gouverneur en
conseil.
M. Barré: C'est que, la dernière fois...
M. Richard (Raymond): Au mois de février 1976.
M. Barré: Pour ajouter à cela, ce qui est
arrivé, c'est qu'en 1976, les avocats du ministère avaient
trouvé que les termes n'étaient pas assez légalistes et
les membres du comité qui avaient étudié cela trouvaient
par ailleurs qu'il ne fallait pas trop mettre de termes légalistes.
C'était plutôt une discipline progressive. A ce moment, on a voulu
faire des corrections pour mettre des termes plus légalistes, parce que
le gouvernement n'était pas prêt à accepter des textes qui
étaient flous, qui portaient à interprétation. A ce
moment, on nous a consultés et nous avons dit: C'est correct. On n'avait
pas négocié ce code de discipline. On n'avait pas discuté
avec la Sûreté et l'exécutif en place. A ce moment, on
avait certaines corrections à apporter aussi. Lorsqu'on a fait la
proposition qu'on voulait apporter ces corrections, les avocats du gouvernement
nous ont dit qu'ils ne touchaient pas à cela pour le moment. C'est pour
cela qu'on a dit que le code était resté sur les tablettes.
M. Bédard: II pourrait être transféré
au bureau de la législation déléguée.
M. Fontaine: Je pense qu'il est important que le ministre de la
Justice s'informe sur quelle tablette il est rendu. (15 h 30)
M. Bédard: La loi 48 explicite très clairement la
préoccupation qu'on a, que j'ai, comme Procureur général,
que chaque corps de police ait un code d'éthique et de
déontologie. Pour revenir à l'article 16, pour les fins de la
discussion, en oubliant de quel organisme responsable cela pourrait relever,
est-ce que je peux conclure que, du point de vue du principe, la
Sûreté du Québec est d'accord que, pour
l'amélioration de l'efficacité policière de l'ensemble des
forces policières, il y a avantage à établir un service de
documentation et de statistiques permettant d'évaluer l'état
de la criminalité et l'efficacité de l'action
policière, d'établir également un service
général d'inspection. Qu'on l'appelle inspectorat ou autrement,
je pense que, quand on veut lire entre les lignes... Il y en a plusieurs qui
nous parlent de l'inspectorat. Je les invite à lire le paragraphe b) de
l'article 16 "établir un service général d'inspection
chargé de conseiller, en matière policière, la
Sûreté et les corps policiers municipaux et d'en faire
l'inspection; organiser également un service de recherche chargé
d'améliorer les méthodes de détection et de
répression du crime; établir un registre des personnes
exerçant les fonctions d'agents de la paix".
Est-ce que du point de vue du principe, pour les fins de la discussion,
en oubliant de qui cela relèvera, il est nécessaire que ce
travail soit fait pour le bénéfice de l'ensemble des corps
policiers du Québec?
M. Richard (Raymond): Nous sommes d'accord avec cela.
M. Barré: Si vous me permettez, M. le Président,
c'est simplement pour ajouter une remarque, à la suite de ce que le
ministre de la Justice vient de mentionner. Lorsque je me suis
référé tantôt à l'inspectorat, je me
référais à l'inspectorat suivant le rapport de la
commission Saul nier, lequel rapport favorisait le retrait de ce pouvoir de la
Commission de police et l'établissement d'un service d'inspectorat
distinct de la Commission de police. Mais je n'ai jamais dit que l'article 16
ne prévoyait pas l'équivalent entre les mains de la Commission de
police.
M. Bédard: Je n'ai pas voulu vous faire dire cela. Je me
référais à d'autres mémoires qui ont
été présentés.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: Pendant mon absence de quelques minutes, j'ai cru
comprendre qu'il était question d'un code de discipline de la
Sûreté du Québec. Cela m'intéresse beaucoup, parce
que j'ai reçu du ministre de la Justice, le 4 juillet 1979, à la
suite de l'étude des crédits, un code de discipline daté
du 7 décembre 1966. Est-ce qu'il y en a eu d'autres depuis ce
temps-là?
M. Richard (Raymond): M. le Président, c'est le code de
discipline qui régit actuellement les membres de la Sûreté.
Il y a eu, de 1971 à 1975, des pourparlers entre les parties et un autre
code de discipline qui a été envoyé au ministère de
la Justice en janvier ou en février 1976. Ce nouveau code de discipline
n'est pas encore approuvé et on fonctionne encore avec celui de
1966.
M. Lalonde: Est-ce que votre association a collaboré
à l'élaboration de ce nouveau code? Je le présume, pendant
cinq ans. Est-ce que vous avez eu des communications du ministère de
la
Justice depuis janvier ou février 1976, et plus
particulièrement depuis novembre 1976?
Ml. Richard (Raymond): M. le Président, nous avons eu des
communications par le comité paritaire et conjoint, avec les
problèmes... Apparemment, c'était trop légaliste. Cela a
fait en sorte que, d'une journée à l'autre, le code était
censé être approuvé par le lieutenant-gouverneur et il
n'est pas approuvé depuis ce temps.
M. Lalonde: Bon.
M. Bédard: II a été transmis au mois de
février 1976.
M. Richard (Raymond): 1976.
M. Lalonde: Depuis novembre 1976, vous n'avez pas eu de
nouvelles? Je prends note de cela.
M. Bédard: II faudrait surtout s'informer si on nous a
redonné des nouvelles de cela. Alors, je m'abstiendrai de remarques,
à partir du moment où cela a été transmis en
février 1976.
M. Lalonde: Ne me dites pas que vous ne l'avez pas trouvé
depuis deux ans et demi!
M. Bédard: C'est-à-dire qu'il y a peut-être
certaines indications qui ne sont pas rendues là où elles doivent
se rendre.
M. Lalonde: Peut-être que le ministre aurait besoin d'un
service de recherche. Peut-être que la Sûreté pourrait
l'aider à trouver son code de discipline.
M. Bédard: C'est-à-dire que les autorités de
la Sûreté pourraient peut-être avoir un mot à
dire.
Le Président (M. Boucher): M. Richard.
M. Richard (Raymond): M. le Président, nous aimerions dire
que l'association a relevé un dernier point et nous aimerions que le
ministre de la Justice porte une attention toute particulière au dernier
point que nous allons soulever. Nous faisons référence aux
articles 6 et 39 de la Loi de police actuelle. L'article 39 dit: "Les cadets et
membres de la Sûreté doivent s'occuper exclusivement du travail de
la Sûreté et des devoirs de leurs fonctions. Ils ne peuvent
remplir aucun autre emploi ni se livrer, directement ou indirectement à
aucun commerce".
Contrairement à ce qui est dit pour les policiers municipaux,
l'article 6 défend même à un policier de la
Sûreté du Québec de se présenter comme
échevin, alors que c'est permis aux policiers municipaux. Nous avons
soumis une recommandation concernant l'article 6. A l'égard de l'article
39, dès le début de l'association, tous les présidents qui
ont été à l'association, tous les membres, tous les
conseils de direction ont tou-
jours dénoncé cet article qui, à notre sens, est
injuste et prive les policiers de la Sûreté du Québec
d'être des citoyens à part entière. La
société a évolué. C'est un article qui nous cause
énormément de problèmes il va sans dire
actuellement. Nous croyons qu'il est temps une fois pour toutes et il ne
s'agit pas à notre sens d'un geste qui demande beaucoup de courage de la
part du gouvernement de rayer tout simplement cet article de la Loi de
police et permettre aux policiers de la Sûreté du Québec de
pouvoir occuper d'autres emplois ou de pouvoir faire autre chose que seulement
le travail de la Sûreté. Je pense qu'il est temps que cet article
soit une fois pour toutes biffé de la Loi de police.
M. Bédard: Auriez-vous d'autres arguments sur ce point
à ajouter à ceux qui ont été exprimés ce
matin par la Fédération des policiers du Québec?
M. Richard (Raymond): M. le Président, comme argument
peut-être supplémentaire, en tant que représentant de
l'Association des policiers provinciaux, nous croyons, avec un code de
déontologie que tout le monde souhaite et d'ailleurs nous en
avons un actuellement que rayer cet article ne donnera pas plus de
problèmes et si, à un moment donné, un policier fait des
choses qu'il ne devrait pas faire, il sera jugé suivant les
procédures du code de discipline et condamné si c'est
prouvé qu'il a agi illégalement ou a fait des choses qui ne sont
pas correctes. Ce que nous disons à nos membres, c'est qu'avant tout, le
policier de la Sûreté du Québec a une responsabilité
envers l'employeur. On doit, pendant le temps où on est en fonction,
être efficace et donner un bon rendement. Ce que le membre fait
après, c'est une autre affaire en autant qu'il se conduit de
façon régulière. A ce moment-là, si le membre fait
des vols ou ne fait pas son travail parce qu'il a un commerce ou parce que sa
femme a un commerce, il pourra être régi par le code de
déontologie. On ne voit aucun problème.
M. Bédard: Plusieurs entreprises privées refusent
le double emploi à leurs employés.
M. Richard (Raymond): Peut-être, M. le Président,
que d'autres entreprises refusent. Ce n'est pas, à mon sens, une raison
pour que les policiers de la Sûreté du Québec n'aient pas
le droit et je pense.. Y a-t-il quelque chose d'illégal pour un membre
de la Sûreté du Québec de faire de la sculpture sur
bois...
M. Bédard: Ce n'est sûrement pas une raison
fondamentale...
M. Richard (Raymond): ... avec un petit commerce. Ce sont des
choses comme celle-là.
M. Bédard:... pour refuser, ne pas faire suite à la
demande que vous faites. A ce stade-ci de la discussion, je dois vous dire que
je ne crois pas que c'est parce que les policiers de la Sûreté du
Québec ou d'autres corps policiers n'ont pas le droit au double emploi
on peut conclure qu'ils ne sont pas des citoyens à part entière.
Les fonctionnaires sont des citoyens à part entière et cependant,
il est très bien stipulé qu'ils ne doivent avoir qu'un emploi.
L'argumentation dans le sens que si on ne donne pas le double emploi aux
policiers, c'est qu'on a décidé d'en faire des marginaux ou d'en
faire des citoyens qui ne sont pas à part entière, je ne trouve
pas que c'est un argument...
M. Richard (Raymond): M. le Président, le fait de ne pas
avoir le droit d'aller se défouler à l'extérieur,
d'être libre, de pouvoir si on a un hobby, que ce soit la peinture ou
d'autre chose... je pense que le policier doit avoir aujourd'hui la
possibilité et on le dit de s'impliquer dans toutes sortes
de choses, d'être dans toutes sortes de mouvements. A ce
moment-là, il va être connu de la population également. Il
n'y a rien de malheureux que ce soit le policier ou son épouse qui ait
un commerce ou une épicerie et qu'il soit vu là, en autant qu'il
fait son travail, mais il faut regarder en premier lieu l'efficacité
policière.
L'association défend, depuis le début, depuis 1968,
à ses membres, ou plutôt dit à ses membres: En premier
lieu, parce que votre employeur, c'est la Sûreté du Québec,
même si vous avez un double emploi il ne faut se le cacher,
beaucoup ont un double emploi; c'est mis au nom de la femme; on a eu des
représentations ce matin, cela ne règle pas le problème
vous devez donner un rendement, vous devez être efficaces. A ce
moment-là, ce serait un moyen d'intégrer davantage le policier
dans la société et de le faire voir. C'est urgent, c'est un point
extrêmement important, M. le Président.
M. Lalonde: M. le Président...
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: Est-ce que vous voulez dire que vous vous opposeriez
aussi à ce qu'une telle interdiction se retrouve dans le code de
discipline?
M. Richard (Raymond): C'est-à-dire que nous serions
prêts... Il y a deux tendances. Il y a certains groupes qui disent: On
devrait avoir nos doubles emplois, pas de iimite. il y a une autre tendance
à savoir que certains emplois pourraient être interdits. Ce qui
revient toujours, c'est "bouncer" dans un club, avoir un permis de la
Régie des alcools. Il pourrait peut-être y avoir certaines
nuances. Il s'agit de regarder la question et peut-être, dans un premier
temps, de dire: Telle catégorie, c'est défendu et on verra ce que
ça donnera. Peut-être que ce serait une solution à
mi-chemin.
M. Lalonde: Si je m'en remets au code de discipline actuel, celui
de 1966, même si on enlevait l'article en question dans la loi, serait
considérée comme une conduite indigne de se livrer à
un
autre métier, emploi ou besogne ou de participer directement ou
indirectement à l'opération d'un commerce quelconque; c'est
à l'article 17.1. Vous auriez toutefois le droit, avec la permission du
directeur général, de prendre part à toute mise en
scène ou réalisation de cinéma et de théâtre,
puisque vous avez parlé de vos "hobbys". Il n'y a aucun doute que le
code de discipline... Je ne sais pas ce que le nouveau gouvernement, depuis
deux ans et demi, a fait de votre nouveau projet. Ils ne le savent pas, ils ne
l'ont pas trouvé encore, mais j'imagine que cela existe aussi dans le
nouveau code.
M. Richard (Raymond): II faut dire, M. le Président, que
le code auquel on réfère, c'est un code qui a été
fait par des anciens gars de la GRC; c'est un code plutôt très
strict. Il est désuet, on devrait le mettre de côté, parce
qu'il a une histoire, ce code.
Quand on regarde l'article 47a et l'article 47b: "Le directeur
général pourrait on voit qu'on essaie d'évoluer un
peu déterminer les occupations, activités ou emplois
interdits aux cadets et aux membres de la Sûreté en raison de leur
statut d'agents de la paix." Donc, on ne pourra pas l'appliquer si on demeure
avec l'article 39 de la Loi de police.
Une Voix: Quel article?
M. Lalonde: L'article de la loi 48.
M. Richard (Raymond): Au projet de loi 48.
M. Bouchard: Ce qui arrive aussi, c'est que, depuis
décembre 1978, on a au comité paritaire créé un
sous-comité où les deux parties sont représentées;
le gouvernement est représenté, de même que l'association.
On a un sous-comité qui est chargé d'étudier le double
emploi, ce qui serait permissible et ce qui serait défendu. A ce
moment-là, si l'article 39 n'est pas abrogé ou n'est pas
modifié, à toutes fins utiles, cela ne donne rien
d'étudier. A l'article 47a, le directeur peut déterminer des
emplois permissibles, mais l'article 39 l'interdit. Alors, le
sous-comité qui est créé par le gouvernement et par
l'association, à toutes fins utiles, ne vaut absolument rien.
M. Lalonde: Est-ce que je pourrais, comme hypothèse,
proposer le scénario suivant? Le comité arrive à une
conclusion, à un moment donné, c'est positif et, par la suite, la
loi est amendée. Je ne vois pas d'objection. Enfin, on va laisser le
ministre, d'abord, trouver le code de discipline et on verra ensuite ce qui va
arriver.
M. Bédard: Que vous aviez reçu au mois de
février; vous ne vous le rappeliez pas.
M. Richard (Raymond): M. le Président, ce que nous devons
mentionner également, c'est que...
M. Lalonde: J'étais parfaitement conscient de l'existence
de ce code.
M. Richard (Raymond): M. le Président, à chaque
congrès annuel des délégués... Nous avons eu un
congrès au mois de juin et, encore là, il y a eu une
résolution pour vous montrer l'importance unanimement,
visant à faire biffer cet article 39 de la Loi de police. Je pense qu'on
devrait, au moins à l'égard de cet article, porter une attention
un peu plus particulière, espérant une réponse
favorable.
Le Président (M. Boucher): Merci, M. Richard. M.
Richard (Raymond): Merci, M. le Président.
Le Président (M. Boucher): Au nom des membres de la
commission, je vous remercie, M. Richard, ainsi que ceux qui vous accompagnent
pour la présentation de votre mémoire.
M. Richard (Raymond): M. le Président, je vous remercie,
au nom de l'association, de nous avoir permis de vous présenter ce
mémoire. (15 h 45)
Le Président (M. Boucher): J'appellerais maintenant la
municipalité de Rock Forest, service de la police,
représentée par M. Richard Tremblay.
M. Tremblay, si vous voulez procéder à la lecture de votre
mémoire.
Service de la police de Rock Forest
M. Tremblay (Richard): M. le Président, M. le ministre,
distingués membres de la commission, comme vous pouvez le constater, les
mémoires se suivent, mais le nombre des orateurs commence à
diminuer.
Je tenterai, dans quelques minutes, de vous donner deux aperçus
qui représentent le point de vue d'un policier qui travaille dans une
section communautaire dans l'Estrie, à Rock Forest spécialement,
dans l'agglomération de Sherbrooke. Cette opinion est quand même
basée sur une masse de population qui oeuvre, elle aussi, dans le
milieu. Je pense qu'il est quand même important, lors de la modification
d'une loi, d'avoir l'opinion de ces gens.
Nous remarquons dans le projet de loi 48 plusieurs articles augmentant,
comme à l'article 20, les pouvoirs de la Commission de police sur la
conduite d'une personne qui oeuvre comme agent de la paix. Maintenant les
sanctions pourront être déterminées par la commission.
Il demeure très important, à ce stade-ci, de vous
souligner deux recommandations qui, je pense, sont une base très
importante sur l'évolution d'un service de police.
Tout au cours de la journée, j'ai assisté à cette
commission et mes confrères policiers, soit de la
fédération ou de la Sûreté du Québec, ont
très bien débattu des points très importants. Je pense
qu'ils ont fait énormément de travail. Cet après-
midi je viens respectueusement dire à cette commission qu'il est
important, lors de la formation de nos cadets-policiers, d'augmenter les cours
en relations humaines pour justement permettre à ces futurs policiers de
travailler, selon l'évolution de notre travail, de façon vraiment
professionnelle.
M. le ministre, MM. les membres de cette distinguée commission,
avant de poursuivre, il est opportun de vous souligner la grande fierté
que la majorité des policiers du Québec a à l'égard
de l'Institut de police du Québec qui, depuis le 16 juin 1969, diffuse
le plus professionnellement possible l'entraînement nécessaire
à notre rôle policier.
Nous retrouvons, à l'institut, plusieurs secteurs d'admission,
soit les secteurs de base, spécialisation, parapolicier et formation de
cadets.
Notre première recommandation en est une au niveau de la
formation dite de base, qui prépare justement le cadet-policier au
rôle qu'il devra jouer dans notre société.
Rapidement, je vais vous énumérer les classifications, les
cinq éléments que contient le cours de base; il contient des
cours en orientation et formation générale, lois et
règlements, conditionnement et techniques particulières,
activités du patrouilleur (théorie et pratique) et administration
pédagogique.
A la suite d'une brève analyse de l'orientation et de la
formation générale, nous constatons que ce bloc de
matières vise à inculquer au stagiaire des connaissances d'ordre
général. Cette partie du programme tente donc, par diverses
matières pertinentes, de rendre le stagiaire apte à
répondre aux attentes du public, ainsi qu'à entretenir des
relations constructives avec le citoyen, ses supérieurs et ses
compagnons de travail.
Le contenu des cours développera particulièrement des
notions sur les relations humaines, les premiers soins, le syndicalisme
policier et le rôle du protecteur du citoyen. En outre, ce bloc
comportera des informations sur l'histoire des corps policiers, la juridiction
et le rôle du policier. Enfin, on y informera le stagiaire des exigences
auxquelles il doit se soumettre lors de son séjour à l'Institut
de police, et le tout sur une base d'environ 64 périodes.
Nous retrouvons, en deuxième lieu, l'élément qui
discute de la loi et des règlements sur une base de 145 périodes.
En troisième lieu, nous retrouvons le conditionnement et les techniques
particulières.
Le conditionnement physique est un critère essentiel en ce qui
concerne la formation policière. Le policier doit être prêt
à réagir efficacement aux diverses situations pouvant survenir
dans l'exercice de ses fonctions.
Pour ces raisons, nous jugeons important que le policier soit habile
à maîtriser parfaitement les diverses techniques policières
qui lui seront indispensables pour accomplir sa tâche.
Dans la recherche de cette performance, il est bien important de
connaître les "comment" de la technique sans oublier de s'interroger sur
les "avec quoi" on réalise les objectifs fixés.
Il va sans dire que les candidats qui auront une certaine
familiarité de base avec le conditionnement physique seront fortement
avantagés.
Cet ensemble de cours est axé principalement sur le
conditionnement physique, le défendo, le tir, les exercices militaires
et le contrôle de foule. A cela s'ajoutent des notions sur les
procédures à suivre lors d'un appel à la bombe, le
comportement sur la scène d'un différend ou d'un conflit ouvrier
et le service d'ordre sur la scène d'un incendie, sur une base de 203
périodes.
A l'analyse du quatrième élément, nous retrouvons
les activités du patrouilleur: en théorie, 172 périodes et
en pratique, 144.
Pour conclure, avec le cinquième élément,
l'administration générale, 64 périodes.
Nous aimerions porter à votre attention, messieurs les membres de
cette commission, la grande démarcation entre le nombre de
périodes contenues dans le premier élément, orientation et
formation générale, 64, et le troisième
élément, conditionnement et techniques particulières, 203.
Nous pouvons alors noter une différence de 139 périodes de plus
pour le troisième élément comparativement au premier
élément.
Nous remarquons au niveau de cette formation de base que le
conditionnement physique tient une très grande importance. Malgré
l'addition de 145 périodes pratiques à l'élément 4,
activités du patrouilleur, contenant des expériences
simulées de relations humaines, il n'en demeure pas moins qu'en
pourcentage, ces dernières représentent un taux nettement
insuffisant compte tenu de la méthode de vie sociale d'aujourd'hui
où les gens sont de plus en plus en contact avec le policier.
Cette critique se veut des plus constructives. Nous ne doutons en aucun
temps de la qualité hautement professionnelle des cours de formation de
l'Institut de police du Québec. Néanmoins, nous jugeons qu'il est
de notre devoir de citoyen et de policier de vous informer de nos
expériences passées au sein de notre communauté.
Je ne vous apprendrai rien, M. le ministre, en vous disant que nos
activités policières en 1979 sont, pour un pourcentage
très élevé, étrangères au contrôle du
crime et au respect de la loi.
En effet, la police touche de très près la population en
détresse; elle est disponible 24 heures par jour; elle reçoit
constamment des appels à l'aide et y répond à la fois par
le truchement du téléphone ou par une visite à
domicile.
Dans un système social bien intégré, le rôle
de la police est, par définition et par la loi, explicitement celui de
protecteur de la société et de gardien de la loi.
Mais l'expérience prouve que les services rendus par les forces
policières débordent largement leur mandat initial.
Citons brièvement quelques références: dans la
ville de Syracuse, une étude faite par Cumming, Cumming et Edell
démontre que plus de la moitié des appels reçus
quotidiennement par la police sont reliés à des demandes d'aide
concernant à la fois des problèmes d'ordre personnel ou
interpersonnel. Selon les auteurs de cette recherche, les
policiers en général ont peu d'entraînement pour ce
genre de service et ceci constitue pourtant la moitié de leur
tâche.
En fait, Bard et Berkovitz de même qu'Epstein vont plus loin et
estiment que 80% à 90% des activités du policier sont
étrangères au contrôle du crime et au respect de la
loi.
Quant à sa participation dans le domaine de l'intervention
auprès des malades mentaux, Li-berman, dans une recherche
effectuée, à Baltimore, révèle que 50% des malades
mentaux admis dans les hôpitaux d'Etat de ce district, ou leur famille,
ont eu d'abord recours à la police comme ressources communautaires avant
leur hospitalisation. D'après un échantillonnnage, 94% de ces
malades se défendent de considérer leur état comme maladie
mentale, tandis que seulement 29% de l'échantillonnage des malades
mentaux admis par l'intervention de médecins et de psychiatres opposent
le même refus.
Cela peut indiquer que les patients qui viennent en contact avec la
police sont, en général, sensiblement plus récalcitrants.
Ils refusent d'admettre leur besoin d'aide professionnelle et ils sont moins
aptes à utiliser les ressources disponibles. Comme vous pouvez le
constater, M. le ministre, il demeure plus qu'important d'assister les
policiers dans l'exercice de leurs fonctions, qui ont trait aux
problèmes d'ordre personnel et interpersonnel des gens en
détresse, ce qui représentera une aide considérable
à la police et à la population, et ce, en augmentant les
périodes de relations humaines et l'étude plus approfondie des
lois sociales qui protègent nos citoyens souvent en contact avec
nous.
Demeurez, M. le ministre, dans l'assurance que nous ne voulons en aucun
moment désapprouver la tenue de plus de 203 périodes relatives au
conditionnement physique et aux techniques particulières, mais nous
croyons fermement que la population a droit à plus de
compréhension et il demeure essentiel que nos futurs policiers soient
des mieux préparés à aider, servir et protéger pour
qu'ensemble, nous vivions dans un mieux-être qui nous est dû.
En terminant cette première suggestion, une deuxième
recommandation qui doit être, à notre sens, sérieusement
analysée par vous et votre commission. Elle touche
l'élargissement, au niveau de tous les districts administratifs de votre
ministère, de la méthode de diffusion des cours dispensés
par l'Institut de police du Québec. L'exemple de l'Université de
Trois-Rivières dispensant un cours de gestion universitaire
préparé en collaboration avec l'institut est accueilli avec joie
par nous, policiers; des cours spécialisés dispensés dans
les universités, aux CEGEP du Québec, préparés par
l'Institut de police permettraient une plus grande motivation chez nous tous
et, par le fait même, correspondraient de plus en plus aux besoins de
notre société moderne.
Nous croyons que ce rôle maintiendra la raison d'être de
l'école de police, malgré la situation d'embauche
désastreuse qui neutralise l'engagement des cadets-policiers pour les
pro- chaines années. Je pense que cela résume assez bien pourquoi
nous avons pris la décision de présenter ces remarques à
la présente commission. Tout au cours de la journée, on a
débattu des points fort importants et il demeure une chose, au niveau de
la base même où le futur policier se dirige pour travailler
auprès des gens dans le milieu, il est important que ce bonhomme soit
vraiment bien préparé et, inévitablement, le tout aidera
à une meilleure collaboration avec le public. Comme le disaient si bien
des confrères de la Sûreté du Québec, une meilleure
participation à l'intérieur du milieu des policiers, en faire des
gens à part entière dans la société, je pense que
cela ne fera pas de tort d'agir de cette façon.
L'autre point que je suis venu débattre assez rapidement, pour
permettre à mes confrères de la CUM d'être entendus
aujourd'hui, c'est relativement au même projet de loi qui oblige une
ville de plus de 5000 de population à établir ou maintenir un
corps de police.
Pourquoi j'ai présenté la deuxième partie de ce
mémoire? C'est à ce sujet. Nous croyons fermement que le temps de
jouer au chat et à la souris est révolu. Nous croyons que le
policier qui opère le radar en se cachant dans une courbe, une
côte, près d'une haie de cèdres, l'automobiliste
surveillant d'un oeil agressif ce dernier, le jeu commence et recommence de
jour en jour à travers la majorité des villes du Québec.
Pourquoi suis-je venu vous présenter cette partie de mémoire, que
je présente aussi au ministre des Transports? C'est pour poser la
question, à savoir si, dans l'éventuelle modification de la Loi
de police, l'obligation de maintenir ou d'établir un corps de police
pour les municipalités de 5000 habitants et plus... La question
m'inquiète de savoir si certaines villes il ne faut pas se le
cacher ne taxeront pas nos automobilistes de ce fardeau d'établir
un corps de police dans leur municipalité respective. (16 heures)
Une chose est certaine: ni l'un ni l'autre policier et automobiliste qui
jouent au chat et à la souris, ne deviendront de très bons amis
à la suite de ces manières plutôt cavalières.
L'automobiliste intercepté dans un piège de radar, ne saura, dans
l'avenir, de bon coeur offrir sa collaboration au service de l'ordre. Il n'aura
pas accepté l'attitude du policier et ce même après des
années. La vie continue, une nouvelle section se forme dans le corps de
police où réside l'automobiliste, une section communautaire ayant
comme but principal d'oeuvrer auprès de la communauté pour
connaître ses besoins, travailler ensemble et le sensibiliser à la
prévention routière. Obtenir sa collaboration face à la
lutte contre le crime. Bien non, le pauvre policier qui croit à cette
nouvelle orientation, y sera bien vite déçu car, comment
voulez-vous qu'un citoyen, un automobiliste, un sportif, une personne
âgée aient de l'intérêt envers ce nouveau rôle
très important pour l'évolution d'une ville et de la police, s'il
possède encore en mémoire la manière peu orthodoxe que
j'ai personnellement, moi, comme mes confrères utilisée,
procéder d'une façon cavalière à la capture
d'individus au radar.
Je demeure convaincu, M. le ministre, du rôle important que le
policier joue en opérant judicieusement le radar sur nos routes au
Québec. Etant moi-même policier, je refuse d'endosser cette
méthode de capture de radar exploitée au Québec et
ailleurs. Cette méthode développe de part et d'autre une course
et cela n'en finit plus. Par le fait même, limite nos actions
communautaires sur d'autres facettes importantes du rôle du policier dans
la lutte contre la criminalité. Croyez-vous, M. le ministre, qu'un
automobiliste ainsi capturé saura faire fi de son orgueil lorsque ce
dernier sera témoin d'un accident grave et devrait en principe donner
son nom comme témoin pour une enquête? Certes il aidera les
blessés peut-être, mais il dira que la police fasse son travail
comme la dernière fois quand il m'a capturé au radar, il est
payé pour cela. Témoin d'un véhicule suspect dans la rue,
il hésitera avant d'en communiquer la chose à son service
policier car inévitablement il n'aura encore pas digéré sa
capture. Combien de temps pour réparer cet état de chose. C'est
difficile à dire car, selon chaque individu, c'est très
différent.
Considérant le dernier rapport de la Sûreté du
Québec en 1978, la Sûreté du Québec a
enquêté sur 893 accidents mortels, 8165 accidents avec blessures
corporelles et 50 992 accidents matériels. Les causes sont quand
même demeurées en pourcentage comme les années
précédentes par importance, la vitesse. Les vitesses excessives
dans les zones de 80 à 100 kilomètres. Ces données, M. le
ministre, sont quand même très inquiétantes et il faut
effectuer des vérifications de radar sur nos routes, mais il faut quand
même jouer franc jeu dans les méthodes ajustées à
notre société. Permettez-moi, MM. les membres de cette
commission, de vous faire part d'une méthode qui, actuellement, est
à l'essai dans la région de l'Estrie et qui justement
évite de la part de policiers de faire des abus qui seraient nuisibles
évidemment à l'opinion de l'automobiliste face à ce
policier et à une éventuelle collaboration. Nous avons dans
l'Estrie, depuis le mois de mai, spécialement chez nous, mis en fonction
une opération qui s'appelle "agenda radar" et les automobilistes ont pu
se procurer le calendrier annuel et savent les journées où le
radar sera en fonction et les gens peuvent écouter à chaque poste
de radio, de Sherbrooke, les rues qui sont sous surveillance routière
ces jours-là. Nous avons connu quand même une baisse importante
d'accidents. C'est bien évident que nous arrêtons des
automobilistes pour vitesse excessive et des billets sont émis sur notre
territoire, mais la tension des relations do travail sont moins agressives
qu'auparavant avec l'automobiliste pris en situation d'infraction.
Un plus grand nombre d'automobilistes respectent leur vitesse et en
prennent régulièrement l'habitude, radar ou non. Ils respectent
la loi. Donner à l'automobiliste l'habitude volontaire du respect de la
vitesse permise sur les artères en utilisant plus souvent l'information,
de son propre gré il développe volontairement le respect de la
vie, le respect des limites de vitesse qui tue tant de gens annuellement au
Québec. La prévention ne doit pas être dans un sens unique.
Développons une collaboration mutuelle. Cette nouvelle méthode en
est une parmi tant d'autres qui peut être exploitée chez nous dans
l'avenir. Admettons qu'il est très tôt pour analyser cette
méthode à fond, en déterminer sa valeur face à nos
objectifs, devons-nous l'ignorer? Certes pas. Il demeure important que la
commission sous votre habile direction en retienne sérieusement, M. le
Président, l'attention et que cette dernière s'interroge avant
d'en émettre des recommandations finales et en crée un projet
pilote au Québec pour enfin commenter sur ce projet et sûrement
plusieurs autres en votre possession. N'oublions pas que le policier comme le
citoyen, l'automobiliste, la vie cela compte. Nous possédons des moyens
différents pour la conserver, mais le but à atteindre est
similaire.
Alors, je tiens encore à le répéter: Le chat et la
souris, c'est une période qui est révolue. En rendant
professionnelle l'utilisation des appareils de radar, nous développons
une approche humaine favorable policier versus citoyen, une habitude du respect
des lois au Québec et, indirectement, une collaboration face à
nos responsabilités sociales.
Alors, je fais allusion à l'article 7 du présent projet de
loi qui modifie l'article 17 de ladite loi, modifié par l'article 5 du
chapitre 22 des Lois de 1969 et par l'article 7 du chapitre 12 des Lois de
1970: "déterminer les caractéristiques des uniformes,
pièces d'identité et insignes qui peuvent être
portés par les cadets et les membres de la Sûreté, les
cadets et les policiers municipaux et les constables spéciaux, ainsi que
leur équipement, l'utilisation de celui-ci et l'équipement dont
peuvent être dotés les véhicules automobiles qu'ils
utilisent."
Je pense, M. le Président, qu'il est très important de
rassurer les automobilistes du Québec sur l'éventuelle
possibilité que de futurs corps policiers soient fondés au
Québec et que ce soient ces automobilistes qui subissent une taxe
supplémentaire par l'utilisation de ces appareils de radar de
façon vraiment abusive. C'est pour cette raison que nous avons
pensé qu'il était important de vous soumettre ces quelques
suggestions et nous verrions d'un très bon oeil qu'on annexe à
cet article des méthodes d'utilisation d'appareils de radar dans cette
loi modifiant l'équipement et le contenu des véhicules de
patrouille. Je pense que c'est très important.
Comme vous avez pu le constater, messieurs les membres de la commission,
cela a été assez bref. Je laisserai à mes confrères
les autres gros problèmes à régler, mais je pense qu'au
niveau des citoyens et des policiers il est très important d'augmenter
les cours de relations humaines à l'école de police pour un
meilleur travail et aussi dans l'espoir que, s'il y a bientôt au
Québec d'autres corps de police qui sont mis sur pied, l'utilisation de
certains appareils ne soit pas abusive et que ce ne soit pas les automobilistes
du Québec qui en paient la note.
Le Président (M. Boucher): Merci, M. Tremblay. M. le
ministre.
M. Bédard: M. le Président, je tiens à vous
remercier de votre contribution personnelle aux travaux de cette commission et
également à vous féliciter de la préoccupation que
vous avez sur la nécessité de la meilleure préparation
possible du policier en fonction de son travail vis-à-vis du citoyen, de
cette préoccupation que vous avez en fonction de l'aspect humain et
social de la tâche du policier.
Je remarque que, dans l'évaluation de la formation qui est
donnée à l'Institut de police de Ni-colet, pour en arriver
à rejoindre la préoccupation que vous énoncez en fonction
d'une meilleure préparation du policier dans le domaine des relations
humaines vis-à-vis du citoyen qu'il a à servir, vous n'en arrivez
pas à la conclusion de diminuer les sessions ou les périodes qui
sont affectées aux autres éléments, mais plutôt
peut-être d'intensifier ou d'augmenter le nombre de périodes qui
sont consacrées à l'orientation et à la formation
générale du policier. Je pense que cette préoccupation est
tout à votre honneur, parce qu'effectivement à bien des
reprises, on a l'occasion de le dire et de le constater, tout ce que nous en
sommes le policier a vraiment un rôle social très important
à remplir et son attitude vis-à-vis du citoyen est capitale dans
la perception que ce même citoyen se fera du policier chargé
d'assurer l'ordre et la sécurité publique.
Vous demandez également, dans votre mémoire, de trouver le
moyen d'élargir le plus possible la diffusion des cours dispensés
à l'Institut de police du Québec. Vous référez
à une expérience qui est déjà en cours à
l'Université de Trois-Rivières. Auriez-vous, sur ce
point-là, des idées qui seraient dans le sens d'en arriver
à l'objectif que vous désirez, à savoir élargir le
plus possible la dispensation de ces cours?
M. Tremblay (Richard): Pourquoi ce cours qui est offert à
l'Université de Trois-Rivières ne l'est-il pas à
Sherbrooke ou à Montréal? C'est une question de
disponibilité. Ce n'est pas toujours facile pour un bonhomme qui habite
à 150 milles de l'école de police ou près de
l'école de police, à Trois-Rivières, de se rendre postuler
pour suivre ce cours. Je dis qu'il serait quand même très
important que les policiers déjà en service au Québec
aient la chance de poursuivre leur entraînement tout au cours de
l'année par des cours qui seraient offerts dans les CEGEP, mais qui
seraient préparés par l'école de police. Je ne vois pas
pourquoi le cours d'enquête judiciaire ne serait pas offert au CEGEP de
Sherbrooke, un cours qui peut très bien se donner là et
être préparé par l'école de police. Cela
éviterait à plusieurs policiers de la région de l'Estrie
ou des policiers de la région de Montréal d'aller passer trois
semaines à Nicolet pour suivre cet entraînement.
M. Bédard: Concernant l'orientation et la formation
générale qui est le premier élément au ni- veau de
l'Institut de police du Québec, outre le fait de demander qu'il y ait
des heures additionnelles qui soient consacrées à cet
élément, au niveau du contenu même, pensez-vous qu'il y a
des choses qui devraient être ajoutées?
M. Tremblay (Richard): En ce qui concerne le contenu, je pense
que prioritairement parlant, c'est d'augmenter même les relations
humaines. C'est à ce seul niveau que mon intervention était faite
aujourd'hui. Pour ce qui est du cours de l'Institut de police, les cinq
éléments du cours de base, ils possèdent évidemment
tout pour permettre à un policier de démarrer dans sa
carrière, mais on note, même les gens qui enseignent à
l'école de police, les spécialistes au niveau de la psychologie
notent qu'ils ne possèdent pas assez de temps pour donner au policier
plus d'information au niveau des relations humaines.
M. Bédard: Si je vous comprends bien, le contenu de ce qui
se donne à l'Institut de police du Québec est très valable
et vous en êtes sur le fait qu'on pourrait augmenter le nombre...
M. Tremblay (Richard): Améliorer les relations humaines
à l'intérieur de...
M. Bédard: ...de sessions ou quoi? Vous n'en êtes
pas sur le contenu.
M. Tremblay (Richard): C'est cela, le nombre de sessions, de
périodes, le nombre de périodes à l'intérieur de
lois et règlements. On ne travaille pas assez au niveau des relations
humaines avec les futurs policiers.
M. Bédard: Si je comprends votre préoccupation sur
l'amélioration de cet aspect, quand vous dites, par exemple, que les
activités policières en 1979, à la page... Ce n'est pas
numéroté. Vous dites: "Nos activités policiè'res en
1979 sont en pourcentage très élevé
étrangères au contrôle du crime et au respect de la loi."
Pourriez-vous donner des détails sur ce sujet?
M. Tremblay (Richard): Là-dessus, je me
réfère à des études effectuées par des
spécialistes, à la page suivante, que je vous ai
mentionnées, mais il est chose très courante de voir un
policier...
M. Bédard: Vous, par exemple, votre expérience...
Là, je comprends que vous référez à des
études qui ont été faites et tout cela, mais,
au-delà de ces études, quelle est votre expérience
personnelle?
M. Tremblay (Richard): II y a énormément d'appels
où le policier se doit justement d'intervenir dans des problèmes
de famille où souvent on n'a pas à intervenir avec des lois. Ce
n'est pas d'hier, M. le ministre, vous le savez, même si la loi 24 existe
depuis le 15 janvier, depuis longtemps, nous nous rendions dans des familles
où le problème avec un juvénile était très
important, où la po-
lice intervenait. Il n'y avait aucune procédure intentée
au niveau de la Cour du bien-être social parce que l'enfant avait commis
quelques erreurs. C'était un travail au niveau de la famille qui
était très important. Le travail du policier nécessitait
des interventions par des visites. Par la suite, il refilait des personnes
ressources compétentes qui pouvaient permettre à cette famille de
régler une fois pour toutes un problème. Personnellement, M. le
ministre, je suis affecté à une section communautaire et je ne
vous dis pas qu'en pourcentage, c'est une réussite à 100%, mais
lorsque nous avons des problèmes sérieux avec des individus et
que nous tentons de prendre le temps de nous asseoir et d'analyser le
problème avec un individu... (16 h 15)
Régulièrement, nos autos-patrouilles doivent se rendre
dans des débits de boisson pour des désordres. Ce sont les
mêmes individus qui créent des problèmes. A certains
moments, nous intervenons d'une façon communautaire et nous nous
référons à des personnes-ressources. Les gens ne
coûtent plus rien au niveau de la gestion policière en temps et en
frais de cour. Il y a énormément d'appels où nous devons
intervenir pour des problèmes de famille, des problèmes
d'automobilistes mais qui ne touchent aucune loi sur le Code de la route, ou
des choses comme cela. Cela prend énormément de formation pour en
arriver à cela. Nous avons beaucoup de difficulté, lorsque nous
avons un nouveau policier qui arrive, à lui expliquer la méthode
à suivre. On lui explique la Loi de la protection du malade mental. Vous
savez que des interventions auprès des malades mentaux, il y en a
beaucoup, et il est important d'agir d'une façon vraiment
professionnelle. Nous avons de jeunes policiers qui arrivent de l'école
de police et qui nous disent: On n'a pas eu le temps de voir cela, ou on ne
nous en parle pas à l'école de police, ou on effleure seulement
le sujet. Il demeure quand même une chose, je me rends à un appel
pour une altercation de famille, je sais pertinemment que j'aurai à
faire face à un bonhomme qui est très agressif, pour bien des
raisons. Je pense que la meilleure solution, si j'ai affaire à un
bonhomme dangereux ou si j'ai un doute raisonnable de penser qu'il peut devenir
dangereux pour lui ou pour les autres, c'est de prendre un moyen vraiment
humain pour m'en occuper, et non pas de le mettre derrière les
barreaux.
Par les années passées, je suis personnellement intervenu
dans de tels incidents, et je vous dis que c'est important d'agir d'une
façon professionnelle. Sans avoir suivi une formation
supplémentaire à ce niveau, j'aurais brimé largement la
liberté de tel individu en le mettant en prison et je n'aurais
absolument rien réglé. Dans six mois, une autre auto-patrouille
se serait rendue faire la même intervention et nous aurions
recommencé et recommencé d'année en année en
multipliant les difficultés, les dangers et les frais.
M. Bédard: Que pensez-vous du port d'arme des policiers
dans l'exécution de leurs fonctions?
M. Tremblay (Richard): C'est bien évident que l'arme de
service, c'est bien important, mais tout dépend à quelle section
on est affecté. Je suis affecté à une section
communautaire. Je vous avouerai que je ne couvre pas les appels pour vol
à main armée, je ne couvre pas tous les appels pour suspects. Je
ne porte pas mon arme, parce que je travaille au niveau des écoles, de
la communauté, je fais partie d'une section communautaire. Pour ce qui
est des policiers qui travaillent au niveau des appels, c'est bien
évident qu'on a besoin d'une arme de service. Cela fait
déjà plusieurs années que je travaille au niveau des
écoles primaires. Lorsque j'entrais dans une école primaire, la
première chose qu'un enfant me demandait, c'était: Richard,
est-ce que tu veux me montrer ton fusil qui tue les voleurs?
Depuis quelques années, M. le ministre, cela les intéresse
de moins en moins parce qu'on explique aux enfants que le fusil ne fait pas le
policier. On tente de donner une éducation à nos jeunes, de les
préparer et de les amener à avoir une opinion différente
de la police. On met beaucoup d'emphase dans ce travail.
M. Bédard: Vous vous êtes beaucoup
intéressé au domaine de la circulation, vous avez même
certaines expériences que vous relatez, par exemple, dans le domaine
concernant le patrouilleur en auto, sur la surveillance de la circulation.
Est-ce que vous voyez la nécessité du port d'arme?
M. Tremblay (Richard): Oui, je vois la nécessité du
port d'arme pour le policier qui travaille dans une auto-patrouille, qui
répond à des appels, qui fait de la circulation, absolument.
Lorsque je fais allusion à la dernière partie du mémoire,
je fais allusion à cet agenda-radar. Mais, si on tourne autour de tout
cela, on parle encore d'une approche et d'un contact humain avec
l'automobiliste. Cela revient toujours à la même chose. Cet
automobiliste qui aura un contact vraiment professionnel aura une tendance
à collaborer avec la police, de quelque endroit que ce soit, à
une éventuelle amélioration de la lutte à la
criminalité, ou à quelque niveau que ce soit.
M. Bédard: D'ailleurs, votre mémoire est vraiment
dans le sens d'une nouvelle approche, d'une préoccupation en fonction
d'une approche, de l'amélioration de l'approche du policier par rapport
au travail qu'il a à faire, par rapport aux citoyens qu'il a à
rencontrer. C'est dans ce sens que je vous félicite de cette
préoccupation que vous énoncez.
D'après l'expérience particulière que vous avez
faite et que vous avez baptisée agenda-radar, pourrions-nous
espérer que vous ayez des statistiques assez précises sur une
longueur de temps déterminée?
M. Tremblay (Richard): Cela paraît peut-être
drôle qu'un policier vienne, à cette commission, défendre
les droits de l'automobiliste, du citoyen, etc. Je savais pertinemment bien que
ma fédéra-
tion, représentée par M. le président Nadon,
s'occuperait de faire valoir certains points de vue auxquels j'adhère
avec beaucoup de plaisir, mais, au niveau de l'agenda-radar, M. Bédard,
je ne dis pas que ce projet en est un qui est parfait, mais nous avons
noté une amélioration des relations de travail avec nos
automobilistes, nous avons eu une meilleure collaboration avec les media
d'information. Je n'ai pas fait de radar hier, mais, avant-hier, j'ai fait une
tentative; nous avons, depuis environ trois semaines, des enseignes qui
indiquent, deux milles avant d'arriver au véhicule de police qui va
vérifier votre vitesse, à une distance de 3000 pieds, une annonce
qui est sur le gravier, près de la voie, et qui indique: Attention, nous
vérifions votre vitesse au radar. L'individu entend onze fois par jour,
à la radio, les annonceurs mentionner que la police les avise qu'elle
est sur tel chemin. C'est bien évident, M. le ministre...
M. Bédard: Est-ce que l'individu en vient à
être conditionné au point de croire qu'il y a des radars
partout?
M. Lalonde: ... il n'y en a nulle part!
M. Tremblay (Richard): Je vais vous expliquer le principe, c'est
très facile; lorsque, le matin, nous mentionnons aux media d'information
que nous allons vérifier tel boulevard à telle rue, nous y allons
à environ quatre à cinq rues par jour; évidemment, si je
dis, à Sherbrooke, que je vérifie le boulevard Bourque, les gens
qui demeurent dans la région de Sherbrooke savent très bien que
le boulevard Bourque a douze milles dans un sens et douze milles dans l'autre.
Alors, l'individu ne sait absolument pas à quelle intersection se trouve
l'appareil, les annonces sont sur le bord de la chaussée: Nous
vérifions aujourd'hui votre vitesse au radar; toutes les rues qui sont
vérifiées ont des annonces, mais les gens ne savent pas à
quel moment précis ils seront vérifiés. Par contre, la
pancarte fait autant d'ouvrage que mon véhicule de radar, la radio fait
autant de travail que mon véhicule de radar, parce qu'il faut quand
même mobiliser du personnel, mais il faut aussi en laisser ailleurs. Vous
savez, ce n'est pas le nombre de personnes que j'arrête qui est
important, c'est le nombre de personnes qui ralentissent et qui respectent la
vitesse permise; ça, c'est drôlement important. Le gars qui se
fait arrêter chez nous et qui paie un billet d'infraction dit: Mea culpa,
parce que j'avais tous les moyens nécessaires pour le savoir. Les
relations n'en sont que meilleures, parce que j'en rencontre
régulièrement et, lorsque les gens reçoivent une
infraction sur un papier rose avec un nouveau calendrier, parce qu'ils l'ont
sûrement perdu, ils disent: La prochaine fois, je le saurai et je ferai
attention. Cela développe une amitié; sans charrier, ça
développe des relations de travail beaucoup plus intéressantes
pour le policier et l'automobiliste.
M. Bédard: Cela rend le citoyen plus respectueux.
M. Tremblay (Richard): C'est ça, parce que ce citoyen,
moi, je le revois, j'ai affaire à lui, je lui demande sa collaboration
pour des mouvements tels que parents-secours, je lui demande sa collaboration
pour des mouvements tels qu'opération Volcan, pour le faire participer.
Si je n'ai pas sa collaboration sur d'autres facettes, on perd royalement notre
temps. C'est pour ça que je pensais qu'il était très
pertinent de venir rencontrer la commission pour dire: Ecoutez, je suis
d'accord sur certaines parties de la Loi modifiant la Loi de police; ma
fédération, la Sûreté du Québec, la CUM font
des recommandations sur des points très importants, mais il faut quand
même avoir le point de vue du citoyen. J'ai rencontré des
citoyens, on l'a analysé, on en a parlé et je vous le mentionne,
je suis un peu le porte-parole de ces gens; je pense qu'il est important, au
niveau du jeune policier, de le préparer et de mettre des
méthodes appropriées à notre époque.
Lorsque je vous parlais tout à l'heure, M. le ministre,
j'espère que ce ne seront pas les automobilistes qui seront taxés
pour les nouveaux services de police qui seront bientôt mis en
activité au Québec. Je suis très réaliste en vous
disant ça, parce qu'il ne faut vraiment pas se le cacher, il y a des
municipalités où la rentabilité du service de police est
supportée par les infractions payées au radar. Ce serait
malheureux que ce soient les automobilistes qui en subissent les frais d'une
façon vraiment abusive; je ne trouverais pas ça normal. Je ne
veux pas me faire ici le défenseur des automobilistes du Québec,
absolument pas, mais je veux faire un travail professionnel et je pense que
c'est en venant vous rencontrer que ça peut aider et je pense que tous
les corps policiers devraient faire de même.
M. Bédard: Vous avez des préoccupations
professionnelles qui vous honorent. Je vous remercie encore une fois de votre
présence.
M. Tremblay (Richard): Merci. M. Lalonde: M. Tremblay.
Le Président (M. Clair): M. le député de
Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: Je veux simplement vous remercier. Vous avez
répondu aux questions du ministre et à plusieurs questions que
j'avais. Il n'y a aucun doute, ne serait-ce que pour sensibiliser les membres
de la commission et aussi la population en général, étant
donné qu'il s'agit quand même d'une tribune, que votre
intervention est fort valable en mettant l'accent sur l'aspect des relations
humaines du policier qui doit nécessairement recourir à la
répression de temps à autre, mais dont la prévention est
devenue depuis quelques années un élément encore plus
important qu'autrefois.
En ce qui concerne le radar, j'espère simplement que votre
suggestion sera entendue par la Sûreté du Québec sur la
route 20. Cela permettra
peut-être aux limousines des ministres de ralentir de temps en
temps. J'espère que votre suggestion trouvera son écho à
cet endroit.
Pour ma part, j'avoue qu'à première vue je trouvais cela
un peu surprenant d'avertir les gens d'avance, mais après
réflexion, vous vous trouvez à multiplier par un indice de je ne
sais pas quel pourcentage l'efficacité de votre action. Vous en prenez
moins, j'espère. On ne vous a pas posé cette question-là
et vous n'y avez pas répondu. Est-ce que vous avez un nombre plus
restreint d'infractions?
M. Tremblay (Richard): Je vais vous répondre que j'ai une
diminution importante du nombre d'accidents. Je dois vous dire qu'avant-hier
j'ai fait des opérations radar et j'en ai arrêté avec
beaucoup de...
M. Lalonde: De regret?
M. Tremblay (Richard): ... d'honnêteté.
M. Lalonde: De regret et de peine?
M. Tremblay (Richard): Non, pas du tout de regret. Pas de regret
parce qu'on ne peut pas regretter avec cette façon de travailler, je
pense bien.
M. Lalonde: Comment...
M. Tremblay (Richard): Mais l'important...
M. Lalonde: ... distribuez-vous votre calendrier?
M. Tremblay (Richard): Ces calendriers ont été
distribués par les media d'information et dans tous les commerces chez
nous.
M. Lalonde: Ah bon!
M. Tremblay (Richard): Tout le monde allait dans les banques et
pouvait en trouver. On en a distribué seulement 10 000 et nous en avons
manqué. Selon une petite statistique que nous avons établie
à la fête de la Confédération, 247 véhicules
ont été arrêtés en deux jours, 86% étant des
gens de l'extérieur. Ce qui veut indiquer que les gens de mon coin,
Sherbrooke, Magog, Lac-Mégantic, ne se font pas arrêter sur le
boulevard Bourque.
M. Lalonde: Cela peut prouver qu'ils étaient dans d'autres
régions aussi pour la fête.
M. Tremblay (Richard): Oui, mais...
M. Lalonde: Vous savez, les statistiques, on peut leur faire dire
n'importe quoi.
M. Tremblay (Richard): Oui, on peut les faire parler. Je peux
quand même vous assurer, M. Lalonde, qu'au niveau des accidents mortels
chez nous, le taux a diminué en importance ainsi qu'au niveau des
accidents avec blessés. Pour moi, cela veut dire quelque chose. Soyez
assuré que je ferai parvenir aux autorités des statistiques
à cet effet. Je le répète et je pense que c'est
très important: je ne suis pas venu ici pour détendre la
commission et vous permettre de vous relaxer un peu. Je suis très
sérieux dans les avances que j'ai dites devant vous aujourd'hui. Je
pense qu'il est très important qu'elles soient prises en
considération. Pour moi, l'important, c'est que sur les routes du
Québec, cela circule très bien. Je ne tiens absolument pas
à ce que des policiers, dans tel patelin, parce qu'ils sont
obligés de donner des billets d'infraction, pénalisent en abusant
certains automobilistes qui vivent chez nous parce que c'est moi qui vais
travailler avec ces automobilistes demain et j'aurai besoin de leur
collaboration éventuellement. C'est à cet effet-là que
j'ai peur et je suis inquiet.
M. Lalonde: Je vous remercie... M. Tremblay (Richard):
Merci.
M. Lalonde: ... très sincèrement et si on a pu voir
certains sourires, ce n'était pas parce qu'on ne prenait pas vos
recommandations au sérieux. Je vous remercie encore une fois.
Le Président (M. Boucher): Merci. M. le
député de Nicolet-Yamaska.
M. Fontaine: Merci, M. le Président. M. Tremblay, je dois
tout d'abord vous remercier de votre mémoire au nom de l'Institut de
police. Je pense que vous en faites des éloges tout à fait
particuliers, d'autant plus qu'on sait que cet Institut de police a
été mis en place en 1969 par un gouvernement de l'Union
Nationale.
M. Bédard: Ce doit être pour cette raison. M.
Fontaine: Oui, c'est cela.
M. Lalonde: Quand on est rendu à aller dix ans en
arrière, pour être en mesure d'invoquer des choses. (16 h 30)
M. Fontaine: Non, non. Cela prouve que les institutions qu'on a
mises en place ont encore leur raison d'être.
M. Lalonde: Qu'est-ce que vous avez fait en 1939?
M. Fontaine: On a fait bien des choses en 1939.
M. Bédard: Cela prouve qu'on a amélioré
l'instrument.
M. Fontaine: D'autant plus que l'Institut de police est
situé dans mon comté; alors, j'en suis tout à fait
honoré.
M. Lalonde: Cela, ça parle fort.
M. Fontaine: Je voudrais revenir sur la question de
l'agenda-radar. Vous notez dans votre mémoire qu'on a quand même
des accidents assez considérables au Québec et qu'ils sont dus
surtout à des vitesses excessives. Vous avez fait la liste des causes
d'accidents. D'un autre côté, vous me dites qu'avec votre
système d'agenda-radar, en avertissant les automobilistes à
l'avance, vous effectuez moins d'arrestations, qu'il y a moins d'accidents et
qu'on circule moins vite. Je suis bien d'accord avec vous. Cela améliore
aussi les relations avec la clientèle, si on peut appeler ça une
clientèle.
Ce qu'on remarque, vous l'avez dit tantôt, c'est que ce sont
surtout les visiteurs qui se font prendre parce qu'ils ne sont pas au courant
du système. Ce qu'il serait peut-être intéressant de noter,
vous n'en avez pas parlé c'est si vous avez fait des expériences
parallèles, à savoir d'installer un véhicule lorsqu'il n'y
a pas d'avertissement donné pour savoir si les gens continuent à
respecter la limite de vitesse, même s'il n'y a pas d'avertissement ou
s'ils se font prendre plus lorsqu'il n'y a pas d'avertissement? Est-ce que vous
avez fait cette expérience?
M. Tremblay (Richard): D'abord, je vais vous mentionner que c'est
vrai, lors de l'analyse que j'ai effectuée le 1er juillet, le jour de la
fête de la Confédération, 86% des gens étaient de
l'extérieur. Pour ce qui est de l'agenda-radar, j'expliquais le principe
à M. Lalonde tout à l'heure, je tente, par l'entremise des media
d'information, la présence de deux véhicules sur le chemin, mon
intercepteur et celui qui vérifie, et par les enseignes sur le bord de
la chaussée de multiplier les efforts de mon service de police. En aucun
temps, c'est évident que sur un chemin de douze milles de long, je ne
dirai: Je serai à 10 h 12 stationnaire au coin de telle rue et telle
rue. Par contre, l'individu qui sait que la journée en rouge et qu'il y
a un radar va faire attention toute la journée parce qu'il ne sait pas
à quel moment l'appareil va être en vérification.
Deuxième chose, nous avons constaté que les
journées en bleu, nous avions moins d'accidents.
M. Fontaine: Donc, le rouge est plus dangereux que le bleu.
M. Tremblay (Richard): Le rouge, c'est signe que la
majorité des gens qui ne font pas attention ce ne sont pas des gens de
notre coin et les gens qui ont des accidents, ce sont des gens qui viennent de
l'extérieur. Je pousserai quand même l'analyse de cette
expérience très à fond, parce que je suis en train de
travailler là-dessus. Je ne peux pas vous donner ça seulement
depuis le mois de mai jusqu'à aujourd'hui, mais je pense que, d'ici
à la fin des opérations pour novembre, je serai capable de vous
donner en détail les heures et que je pourrai évaluer les heures
plus difficiles que nous avons rencontrées.
Chose certaine, c'est que nous avons développé chez les
gens une collaboration que nous ne connaissions pas auparavant. Les gens
disent: Les gars sont corrects, on va essayer de collaborer avec eux. On les
arrête, on leur explique qu'il n'y a vraiment pas de possibilité
de s'en sortir. Que voulez-vous, on n'est pas pour leur donner un cadeau de
Noël quand on les arrête! Par contre, il n'y a absolument personne
qui est toléré et les gens comprennent; la collaboration va
très bien.
M. Fontaine: Je comprends. Ce que vous essayez de faire, c'est
d'éduquer la population à respecter les limites de vitesse. Ce
que j'aimerais que vous nous disiez, c'est si vous avez fait des
expériences lorsqu'il n'y a pas d'avertissement. Est-ce que les gens
continuent à respecter les limites de vitesse? C'est pour savoir si
votre système est efficace.
M. Tremblay (Richard): On n'a pas de statistiques
là-dessus actuellement. Mais je peux vous dire que, depuis l'an
passé, depuis janvier, les accidents mortels ont baissé, une
grosse baisse et aussi les accidents avec blessés. Pour moi, cela parle
beaucoup. C'est très important. C'est drôlement important qu'il
n'y ait pas de morts à noter à cause de la vitesse chez nous.
C'est très important.
L'individu qui se fait arrêter d'une façon cavalière
dans un autre endroit parce que les gens travaillent d'une façon
camouflée, cela me crée des problèmes
éventuellement pour la collaboration de ce bonhomme sur d'autres points
de vue policiers dont j'ai besoin. Je ne suis pas policier jusqu'à la
semaine prochaine, je suis policier pour plusieurs années et
l'orientation de la police change et elle va changer encore beaucoup, alors je
pense pour demain.
M. Fontaine: Merci.
Le Président (M. Boucher): Merci M. Tremblay, au nom des
membres de la commission, pour la présentation de votre
mémoire.
Communauté urbaine de Montréal
J'appellerais maintenant la Communauté urbaine de
Montréal, représentée par Me Guy La-france, conseiller
juridique.
M. Lafrance (Guy): M. le Président, permettez-moi, au
départ, de souligner un amendement qui a été
apporté au mémoire que nous avons distribué d'avance,
principalement aux pages 6, 7 et 8 qui ont été modifiées.
J'ai fait des photocopies complètes du mémoire que j'ai remis au
secrétaire. De plus, j'aimerais excuser l'absence du directeur qui
aurait voulu être présent aujourd'hui pour vous présenter
lui-même son mémoire, mais, malheureusement, il est retenu
à l'extérieur du Québec.
Quoique le service de police de la Communauté urbaine de
Montréal soit régi par un texte de loi spécifique, la Loi
de police nous concerne directement. La définition proposée au
terme
"municipalité" sert d'exemple. Ainsi, la référence
à la Loi de police contenue au deuxième alinéa de
l'article 349 de la Loi de la Communauté urbaine de Montréal
deviendrait répétitive. Toutefois, nous limiterons nos
commentaires aux articles du projet de loi qui nous affectent d'une
façon plus immédiate, laissant à d'autres le soin
d'examiner les dispositions du projet de loi qui les concernent plus
particulièrement.
L'article 2. Cet article prévoit l'addition de trois articles
à l'article 2 de la Loi de police. Nous commentons l'article 2b
proposé. A notre avis, le texte de cet article accorde un pouvoir
illimité à la commission pour obtenir des renseignements
même personnels sur des agents de la paix. Ce texte nous apparaît
trop vague et permettrait une intrusion possible et non désirable dans
la vie privée des policiers. Les policiers, comme tous les autres
citoyens, ont droit à la protection de leur vie privée. Nous
sommes d'opinion que le texte de loi devrait préciser le type de
renseignements susceptibles d'être demandés, sans toutefois tomber
dans un excès contraire et prescrire des critères
stériles. Ainsi, nous croyons que les seuls renseignements ayant trait
à l'exécution des fonctions d'agent de la paix peuvent faire
l'objet d'une enquête.
A la lumière de ce qui précède, nous
suggérons que l'article 2b soit rédigé dans les termes
suivants: "Toute personne qui appartient à une catégorie d'agents
de la paix désignée par règlement du lieutenant-gouverneur
en conseil doit fournir à la commission les renseignements ayant trait
à l'exécution de ses fonctions d'agent de la paix prévus
par ce règlement en la manière qui y est prescrite." Cet
amendement renforcerait le principe déjà énoncé
à l'article 5 de la Charte des droits et libertés de la personne.
Il n'y a pas de citoyen de seconde zone. Les policiers doivent
bénéficier des mêmes droits que les autres citoyens. En
plus, cet amendement éliminerait toute équivoque sur l'intention
du législateur de retirer ou de maintenir un droit fondamental des
policiers et préciserait les limites à l'intérieur
desquelles les policiers seraient tenus de répondre. Ainsi, les
policiers ne pourraient pas plaider ignorance.
Article 3. Dans sa version actuelle, l'article 3 du projet de loi
transporte l'infraction créée au dernier alinéa de
l'article 6 de la Loi de police à l'article 82a. Nous suggérons
plutôt d'ajouter un paragraphe à l'article 6 proscrivant la
participation partisane lors d'une consultation populaire telle que
prévue par la Loi sur la consultation populaire. Présentement,
l'article 6 de la Loi de police interdit aux policiers d'exercer une
activité électorale partisane. Les opinions varient quant
à savoir si le texte prévoit une activité partisane lors
d'une consultation de la population au sens de la Loi sur la consultation
populaire. Il nous semble avantageux que le législateur élimine
toute ambiguïté à ce sujet.
Nous sommes d'avis que les motifs qui ont engendré la
rédaction de l'article 6 de la Loi de police s'appliquent
également dans le cas de consultations populaires. Nous croyons que les
consultations faites en vertu de la Loi sur la consultation populaire sont
susceptibles de soulever des passions politiques encore plus émotives
que lors d'élections. Les policiers, en tant qu'officiers publics,
doivent demeurer neutres aux yeux du public. Leur image doit être
imprégnée de la plus complète intégrité. Il
faut absolument éviter qu'on puisse les associer à quelque
groupement que ce soit. En conséquence, nous proposons l'amendement
suivant à l'article 3 du projet de loi no 48: "L'article 6 de ladite
loi, modifié par l'article 3 du chapitre 2 des lois de 1970, est de
nouveau modifié par le remplacement du troisième alinéa
par le suivant: "Les cadets et membres de la Sûreté, de même
que les cadets et policiers municipaux ne peuvent être membres
sympathisants ou associés de quelque façon à un
comité national établi en vertu de la Loi sur les consultations
populaires. De plus, ils ne peuvent se livrer à aucune activité
partisane, lors de la période référendaire, tel que
définie par ladite loi."
Cet amendement ne concerne pas les cas de référendums qui
pourraient être décrétés en vertu de la Loi des
cités et villes, du Code municipal, de la charte d'une ville ou d'une
autre loi. Il n'empêche pas, non plus, les policiers de voter à
l'occasion de consultations populaires.
L'article 15 vise à remplacer les articles 22a à 22c de la
Loi de police. Nous sommes particulièrement intéressés par
l'article 22c proposé.
Nous ne pouvons qu'applaudir cette reconnaissance implicite du
législateur de la nécessité de protéger les
informateurs. Vraisemblablement, cet article a également pour but de
protéger les individus qui désirent fournir des renseignements,
tout en gardant l'anonymat.
On y reconnaît ainsi la possibilité de recueillir des
témoignages de façon confidentielle. De plus, on statue que ces
renseignements ne peuvent être utilisés de manière à
révéler l'identité de l'informateur.
Toutefois, ces dispositions nous semblent contrevenir en quelque sorte
aux principes énoncés à l'article 22a proposé,
permettant à une personne mise en cause par l'enquête de
contre-in-terroger et de présenter des témoins.
De plus, il nous apparaît souhaitable, afin de limiter toute forme
de critique, que le texte de l'article 22c précise clairement que
l'utilisation de l'audition doit se faire exceptionnellement.
Ce texte de loi rejoindrait ce qui serait sûrement la pratique
devant la commission créée aux termes de l'article 19 de la Loi
de police.
L'article 17 prévoit le remplacement de l'article 24 de la Loi de
police par les articles 24, 24a, 24b, 24c, et 24d. L'un des buts du projet de
loi est de permettre une uniformisation des codes de déontologie et de
discipline des policiers du Québec. Le service de police de la
Communauté urbaine de Montréal a déjà son
règlement sur la déontologie et la discipline, adopté en
vertu de l'article 235 de la Loi de la Communauté urbaine de
Montréal.
Notre règlement sur la déontologie et la discipline est en
vigueur depuis le 14 juin 1978. Ce
règlement prévoit la possibilité d'auditions
disciplinaires devant deux instances tout à fait différentes.
Toutefois, l'article 24 ne propose une suspension des procédures que
dans le cas d'une seule des deux instances, le comité de discipline.
Il y aurait donc lieu d'éviter de parler à l'article 24
d'un comité de discipline, puisqu'on ne se réfère
qu'à un seul volet de la procédure disciplinaire. Il nous
apparaît préférable de parler tout simplement d'instance
disciplinaire.
Etant donné que notre règlement sur la déontologie
et la discipline des policiers prévoit que la procédure
disciplinaire débute par une accusation disciplinaire, nous croyons
préférable de ne pas parler d'enquête, mais plutôt
d'accusation devant une instance disciplinaire, et ceci dans le but de faire
concorder les deux textes. Afin d'éviter des problèmes sur le
plan pratique, nous suggérons que la Commission de police ait le devoir
de faire parvenir à l'organisme impliqué un avis écrit
indiquant qu'elle poursuit une enquête. De plus, la loi doit
prévoir que, sur réception d'un tel avis, l'organisme
impliqué doit surseoir à toute procédure.
A cette fin, nous suggérons le texte suivant qui deviendrait
l'article 24 de la Loi de police, incorporé par l'article 17 du projet
de loi: "La commision peut refuser d'entreprendre ou de poursuivre une
enquête en vertu de l'article 20, si le membre de la Sûreté
ou le policier municipal sur lequel elle enquête est, par les mêmes
faits, l'objet d'une accusation devant une instance disciplinaire
instituée conformément à un règlement adopté
en vertu du deuxième alinéa de l'article 17, de l'article 47a ou
de l'article 235 de la Loi de la Communauté urbaine de Montréal.
"Toutefois, sur réception d'un avis écrit de la commission
adressé au directeur du corps de police concerné, à
l'effet qu'elle poursuit son enquête, nulle procédure ne peut
être entreprise ou poursuivie devant une instance disciplinaire".
De plus, nous tenons à souligner que la Loi de la
Communauté urbaine de Montréal prévoit deux paliers
décisionnels distincts en matière disciplinaire, à savoir
le Conseil de sécurité, pour les policiers qui ne sont pas des
salariés au sens du Code du travail, et le directeur du service de
police, pour les policiers qui sont des salariés au sens du Code du
travail.
Nous offrons notre collaboration aux légistes du gouvernement,
afin de voir, au point de vue technique, à l'harmonisation des deux
régimes disciplinaires, soit celui de la Loi de police et celui de la
Communauté urbaine de Montréal, qui est complet en
lui-même.
A titre d'exemple, l'article 30 du projet de loi qui modifie l'article
63 de la Loi de police devrait être modifié pour que le mot
"municipalité" inclue le Conseil de sécurité publique. (16
h 45)
Enfin, le service de la police de la Communauté urbaine de
Montréal profite du fait que cette commission parlementaire examine les
dispositions de la Loi de police du Québec pour suggérer un
amendement à l'article 58 de la Loi de police, relativement au pouvoir
d'arrestation en matière de contravention à un règlement
municipal. Les li- mites imposées au pouvoir d'arrestation sans mandat
par l'article 58 nous apparaissent justifiées. Toutefois, il y a des cas
de contravention à des règlements municipaux pour lesquels il n'y
a pas de pouvoir d'arrestation sans mandat selon le droit actuel et il nous
apparaît souhaitable que ce pouvoir soit accordé. Tel est le cas
du contrevenant qui refuse de donner son nom et son adresse à un
policier qui lui demande de s'identifier, de façon à pouvoir le
poursuivre en justice et remplir ses obligations légales.
La Cour suprême du Canada s'est déjà
prononcée sur une question semblable dans un arrêt maintenant
connu, l'arrêt Moore. La Colombie-Britannique est le lieu d'origine de
cette cause. Le jugement de la Cour d'appel de cette province conclut que le
refus de s'identifier constitue une entrave à un agent de la paix aux
termes de l'article 118 du Code criminel. Les policiers pouvaient donc
procéder à l'arrestation en application de l'article 449 du Code
criminel. Pour décider du litige, la Cour suprême a
préféré utiliser des textes de loi qui n'ont pas leur
pendant au Québec. Peut-on appliquer le jugement de la Cour d'appel de
la Colombie-Britannique au Québec sans compliquer la tâche du
policier qui doit intervenir pour une simple contravention à un
règlement municipal? Est-il raisonnable d'occasionner à un
citoyen de se retrouver devant les tribunaux face à une accusation
d'entrave à un agent de la paix en vertu du Code criminel, après
avoir été détenu pour une période de temps à
la suite d'une contravention souvent minime? Le remède utilisé
n'apparaît-il pas disproportionné par rapport au mal
diagnostiqué?
C'est pourquoi nous croyons que l'article 58 de la Loi de police devrait
prévoir une obligation pour le citoyen pris à commettre une
infraction à un règlement municipal de s'identifier au policier
qui intervient. A cet effet, nous nous permettons de suggérer le texte
suivant pour l'article 58 de la Loi de police: "Nonobstant toute disposition
inconciliable de la charge d'une municipalité, nul ne peut être
arrêté pour avoir commis une infraction à la Loi des
cités et villes, au Code municipal, à la charte d'une
municipalité ou à un règlement municipal, à moins
qu'un mandat n'ait été délivré à cette fin
par un juge de paix. Toutefois, tout policier municipal peut arrêter sans
mandat toute personne qu'il trouve en train de troubler la paix, l'ordre, la
santé ou la sécurité publique, contrairement à un
règlement municipal. Le policier municipal, croyant pour des motifs
raisonnables et probables qu'une contravention à un règlement
municipal a été commise peut requérir de la personne
soupçonnée de la contravention, dans le but de déposer une
dénonciation, qu'elle s'identifie. A défaut de ce faire, la
personne à qui a été intimé l'ordre de s'identifier
pourra être arrêtée sans mandat. Toute personne
arrêtée par un policier municipal pour une infraction visée
au présent article doit être traduite sans retard devant le
tribunal compétent."
En bref, le texte proposé circonscrit le cas où un
policier peut demander l'identification d'une personne et prescrit que ce doit
être dans le but
de déposer une dénonciation. Le genre de règlement
municipal n'est pas restreint. Le refus d'un citoyen d'obtempérer
à l'ordre de s'identifier ne constitue pas une infraction
supplémentaire. Considérant que, sur le territoire de la
Communauté urbaine de Montréal et ailleurs au Québec, les
policiers ont le devoir de poursuivre en justice les auteurs de contraventions
aux règlements municipaux, il nous apparaît que ce pouvoir
conféré au policier et cette obligation faite au citoyen sont
essentiels à l'application de la réglementation municipale.
Quelle serait l'utilité de créer des obligations pour les
policiers si, parallèlement, on ne leur accordait pas les instruments
nécessaires à l'accomplissement de ces tâches? A notre
avis, l'instrument recherché n'est pas abusif. Il correspond
précisément et essentiellement à un besoin. Je vous
remercie, M. le Président, de m'avoir offert le privilège de
soumettre ce mémoire.
Le Président (M. Boucher): Merci, M. Lafran-ce. M. le
ministre.
M. Bédard: M. Lafrance, nous vous remercions de votre
contribution aux travaux de cette commission parlementaire, au nom du service
de police de la Communauté urbaine de Montréal, concernant
certains articles précis auxquels vous faites allusion dans votre
mémoire. Concernant l'article 2b, vous avez soulevé certaines
interrogations que d'autres qui vous ont précédé ont
soulevées également. Je puis vous dire que l'intention du
législateur n'est pas de se permettre une intrusion possible et non
désirable, comme vous le dites, dans la vie des policiers et nous
partageons votre opinion en disant qu'il y aurait lieu de préciser le
type de renseignements qui pourraient être demandés sans
toutefois, comme vous le dites dans votre mémoire, tomber dans un
excès contraire et prescrire des critères stériles.
Nous vous remercions également de votre offre de collaboration
qui est exprimée à la page 7 de votre mémoire,
collaboration aux fins d'harmoniser les deux régimes disciplinaires,
celui de la Loi de police et celui de la Communauté urbaine de
Montréal. Je pense qu'il y a lieu, effectivement, de faire en sorte
qu'il n'y ait aucune ambiguïté possible. Nous nous attarderons
à certains amendements qui peuvent être apportés aux fins
de préciser les articles du présent projet de loi.
Quant à l'article 3 qui concerne les consultations populaires,
effectivement, comme vous le dites, l'état actuel de la situation, avec
la loi 92, permet aux policiers de participer à une consultation
populaire. Vous demandez au législateur d'interdire cette
possibilité de participation des policiers lors d'une consultation
populaire, de la même façon qu'il est interdit aux policiers
d'exercer une activité électorale partisane, en fonction de
l'article 6. Nous allons prendre ce point en considération.
Je serais porté à vous poser au moins une question
à cet égard. Est-ce que vous désirez que les policiers ne
soient habilités à participer à aucune consultation
populaire? A un point tel que s'il y avait une consultation populaire sur la
peine de mort, par exemple, est-ce que vous pensez que les policiers doivent
être absents du débat? J'interprète la consultation
populaire, au sens de la loi 92, comme n'étant pas une activité
partisane, mais un grand débat sur une question précise. S'il y
avait une consultation populaire sur l'énergie, est-ce que vous pensez
que les policiers devraient être écartés du débat?
Autrement dit, l'essentiel de votre mémoire, c'est que les policiers
soient inhabiles, en fonction de l'application de la loi 92, concernant...
M. Lafrance: On s'est posé la même question que vous
nous posez, M. le ministre. La réponse à laquelle on en vient,
c'est qu'on est dans l'impossibilité de définir des
catégories de consultations populaires auxquelles les policiers
devraient participer, et d'autres catégories auxquelles ils ne devraient
pas participer. Nous considérons que lorsque deux positions distinctes,
avec des mécanismes tels que prévus par la loi, permettent de
faire une opposition entre deux parties, cela implique nécessairement,
au niveau policier, une non-neutralité. Nous croyons que les policiers
comme tels devraient, dans tous les cas, être neutres, et voir
plutôt au bon déroulement de la consultation populaire, que
d'être parties à l'une ou à l'autre des deux parties en
cause.
Pour cette raison, évidemment, on a pensé à la
question de la peine de mort, aussi, sur laquelle déjà des
policiers ont manifesté certains désirs, ou du moins
appuyé certaines recommandations; nous croyons qu'il est
différent de faire des recommandations devant une commission
parlementaire et de participer activement, au niveau du public, à des
consultations populaires. Dans ce sens, nous croyons qu'il n'y a pas lieu que
les policiers participent à des consultations populaires quelles
qu'elles soient puisqu'il nous est impossible de définir les
catégories d'une façon précise.
M. Bédard: Nous allons prendre vos représentations
en considération.
Je n'ai pas d'autres questions étant donné que les autres
sujets ont déjà été abordés dans d'autres
mémoires.
Le Président (M. Boucher): Merci, M. le ministre. M. le
député de Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: Je veux remercier le Service de police de la
Communauté urbaine de Montréal pour son mémoire qui est
très spécifique et qui est très bien supporté par
une augmentation élaborée.
Quant au premier point soulevé, à savoir le pouvoir
illimité de la commission pour obtenir des renseignements, je suis
d'accord avec vous que la loi, et non pas les règlements, devrait
contenir des balises qui permettent de savoir quels renseignements doivent
être donnés par les policiers. Nous allons, lors de l'étude
article par article de ce projet de loi, tenir compte, au nom de l'Opposition
officielle, de cette suggestion.
En ce qui concerne l'article 3, j'aurais peut-être une question
à savoir si l'interdiction de participer à des activités
électorales partisanes, qui existe actuellement dans cette loi, à
l'article 6, ne tient pas plutôt à une question de protection de
l'indépendance du policier à l'égard des pouvoirs
politiques qu'à l'expression de ce que vous appelez "les passions
politiques", même plus émotives peut-être lors d'une
consultation populaire que lors d'une élection. Au fond, la raison
d'être de cette interdiction, c'est de protéger
l'indépendance du policier à l'égard des pouvoirs
politiques. Mais, si vous avez une consultation populaire sur la question de
l'avortement, par exemple, sur un concept à savoir si la population le
favorise ou non, ne croyez-vous pas que le policier pourrait fort bien, sans
nuire à son indépendance, exprimer ses opinions?
M. Lafrance: C'est que la Loi sur la consultation populaire, qui
est effectivement basée sur la Loi électorale en grande partie,
divise les clans en deux partis distincts, contrairement à une
consultation populaire où on pourrait tout simplement, en vertu de la
Loi des cités et villes, faire un appel à la population pour
connaître son point de vue. Dans ce cas, on les structure; il y a une
structure qui est faite de deux partis distincts et, dans ce sens, on trouve
que ça rejoint en partie la Loi électorale, dans la forme de
rédaction du texte de loi et dans ses mécanismes. Donc, selon le
même principe du pouvoir politique qui pourrait s'appliquer au niveau
policier, il est évident que le gouvernement en place favorisera une
position ou une autre en allant chercher son information. C'est dans ce sens
qu'on veut éviter que le pouvoir policier soit aussi non pas à la
solde, mais soumis un peu au pouvoir politique. C'est que déjà la
loi, telle qu'elle est rédigée, le structure en deux partis
distincts.
M. Lalonde: Autrement dit, votre inquiétude tient sa
pertinence simplement dans l'hypothèse où une consultation
populaire verrait le gouvernement, comme gouvernement, prendre position en
faveur de l'une ou l'autre option. Si on se réfère, par exemple,
à la consultation populaire de l'Angleterre pour le Marché
commun, des membres du parti gouvernemental à ce moment,
c'était le Parti travailliste ont fait partie des deux clans, le
"oui" et le "non".
M. Lafrance: Oui, je suis d'accord, mais il ne faudrait jamais
oublier que, au niveau policier, il y a aussi une impartialité. Si vous
avez une consultation populaire et que cette consultation populaire, à
cause du débat en cours, entraîne des manifestations,
entraîne des gens à aller sur la place publique pour discuter,
vous avez aussi des agents de la paix qui vont aller faire la surveillance et
assurer le bon ordre. Si eux sont partisans du clan qui manifeste, à ce
moment vous risquez, s'ils sont affichés publiquement en faveur de ce
clan, qu'ils n'aient plus l'indépendance voulue pour faire respecter la
paix et l'ordre publics. Les deux aspects entrent en ligne de compte danser 7
heures)
M. Lalonde: Je vous remercie de votre explication. Je pense que
cela donne un détail additionnel. Pour les autres questions, je pense
qu'elles sont d'ordre assez technique, concernant la structure même du
processus disciplinaire de la Communauté urbaine. Je n'ai pas d'autres
questions et je vous remercie de votre contribution.
M. Lafrance: Merci.
Le Président (M. Boucher): Merci, M. le
député de Marguerite-Bourgeoys. M. le député de
Nicolet-Yamaska.
M. Fontaine: Merci, M. le Président. Je voudrais revenir
sur cette même question. Si je comprends bien en lisant votre
mémoire, ce que vous voulez, c'est vous abstenir de participer au
débat, mais vous ne voulez quand même pas obliger les policiers de
la Communauté urbaine à ne pas voter lors du
référendum.
M. Lafrance: Aucunement. M. Fontaine: D'accord.
M. Lafrance: Nous n'avons aucune objection à ce que les
policiers votent comme ils votent lors d'une élection municipale,
provinciale ou fédérale.
M. Fontaine: Pouvez-vous nous dire je vois que M. Masse
est présent en arrière si vous avez...
M. Lafrance: II n'est sûrement pas d'accord.
M. Fontaine:... consulté l'Association des policiers avant
d'émettre une telle opinion? On a vu tout à l'heure, lors de la
présentation de l'autre mémoire, que l'Association des policiers
provinciaux demandait le contraire.
M. Lafrance: II est bien évident que nous n'avons pas
consulté l'association et la Fraternité des policiers de la CUM
pour rédiger cette partie du mémoire et aucune partie du
mémoire d'ailleurs. Je pense que les deux mémoires
reflètent des prises de position qui sont nettement opposées sur
ce sujet.
M. Fontaine: D'accord. Un dernier point. A la page 9 de votre
mémoire, vous demandez le pouvoir de faire des arrestations sans mandat.
Vous dites au quatrième paragraphe: "Est-il raisonnable d'occasionner
à un citoyen de se retrouver devant les tribunaux face à une
accusation d'entrave à un agent de la paix, en vertu du Code criminel,
après avoir été détenu pour une période de
temps à la suite d'une contravention souvent minime?" En fait, ce que
vous demandez, c'est de pouvoir effectuer une arrestation sans mandat.
M. Lafrance: Oui, mais ce qu'on ne veut pas, c'est d'être
obligé de porter une accusation en vertu du Code criminel
supplémentaire à une infraction minime, à supposer que le
citoyen qui a traversé à une intersection sur un feu rouge
pourrait être passible d'une infraction. Il n'y a aucune obligation pour
lui de s'identifier. Donc, s'il refuse de s'identifier, le policier va
l'accuser d'avoir commis une entrave à un agent de la paix et il va le
garder en cellule pendant une nuit. Cela lui fait deux accusations: une
municipale qui est minime en soi et une qui commence à être
beaucoup plus grave en vertu du Code criminel. Nous croyons que la
deuxième n'est pas justifiée. Le pouvoir d'arrestation pourrait
être conféré dans ces cas-là, mais, au moins, qu'on
ne taxe pas le citoyen inutilement d'une infraction criminelle pour une
infraction aussi minime à un règlement municipal.
M. Fontaine: D'accord. C'est tout.
Le Président (M. Boucher): Merci, M. Lafrance.
M. Lafrance: Merci.
Le Président (M. Boucher): Au nom des membres de la
commission, je vous remercie de la présentation de votre mémoire.
J'appelle immédiatement M. René Bellerose, s'il veut bien
présenter son mémoire. Allez-y, M. Bellerose.
M. et Mme René Bellerose
M. Bellerose (René): M. le Président, avant de
débuter, est-ce que je pourrais demander la protection de la commission
parlementaire, s'il vous plaît?
Le Président (M. Boucher): Dans quel sens? Est-ce que
c'est relatif à votre mémoire?
M. Bellerose: Dans le sens que les paroles ou enfin... Compte
tenu que pour une partie, l'implication de mon nom sur le sujet traité
pourrait porter à croire que je veux traiter de choses qui sont sub
judice quand tel n'est pas le cas.
Le Président (M. Boucher): Si vous traitez de choses sub
judice...
M. Fontaine: Question de règlement.
Le Président (M. Boucher): Oui, M. le député
de Nicolet-Yamaska.
M. Fontaine: Je pense que si vous aviez l'occasion de fouiller
dans les décisions qui ont été rendues lors d'une
commission parlementaire par l'ex-vice-président de la Chambre, M.
Cardinal, vous verriez qu'il y a une décision qui porte sur ce sujet,
qui permettait effectivement à un témoin de demander la
protection de la commission parlementaire.
Le Président (M. Boucher): Alors, il y a un
précédent?
M. Bédard: Je pense qu'il veut dire la protection de la
cour.
M. Fontaine: Ce que je crois comprendre que le témoin
demande, c'est de permettre que ce qu'il va dire ici aujourd'hui ne puisse pas
servir devant les tribunaux judiciaires.
Le Président (M. Boucher): Je pense qu'à ce
moment-là, la protection qui peut être accordée, c'est tout
simplement que les paroles que monsieur va dire ici, qui sont quand même
consignées au journal des Débats, pourraient être
invoquées par les personnes qui vont témoigner, si cela se
présente devant une cour.
M. Fontaine: C'est justement ce qu'il vous demande, que cela ne
puisse pas servir devant une cour.
M. Bédard: M. le Président désirerait
prendre une minute ou deux pour consulter pour cette décision?
Le Président (M. Boucher): On suspend pour cinq
minutes.
M. Bellerose: M. le Président, mon intention n'est pas de
traiter des aspects ou des opinions, ou de donner des appréciations pour
ce qui est sub judice. Je ne voudrais pas que ce soit interprété
comme ça et c'est dans ce sens que...
M. Lalonde: Si vous ne voulez pas que ce soit
interprété comme ça, ça ne le sera pas. La seule
chose dont on ne peut pas vous protéger, c'est le gouvernement. Prenez
vos risques.
M. Bédard: II n'a pas à se protéger contre
le gouvernement, il n'y a pas d'inquiétude là-dessus. C'est
plutôt l'implication vis-à-vis d'une cour de justice.
M. Bellerose: Mon but est de participer pleinement à la
commission par des recommandations.
Le Président (M. Boucher): Si on s'en tient au texte du
mémoire, je n'y vois rien...
M. Bellerose: Quand arrivera...
Le Président (M. Boucher): ... de compromettant.
M. Bellerose: C'est ça. S'il arrive des questions qui
seraient biaises et que je ne saurais pas voir le biaisé des questions,
je ne voudrais pas être pris dans une trappe chaude.
M. Bédard: Ce que vous avez à nous dire est-il
contenu dans votre mémoire?
M. Bellerose: C'est ça. C'est en rapport avec les
questions postérieures qui pourraient venir.
M. Bédard: Si vous vous limitez à votre
mémoire, c'est parfait.
M. Fontaine: Ce qu'on pourrait suggérer au témoin,
c'est que si jamais il y avait une ou des questions auxquelles il pense ne pas
devoir répondre, il aurait toujours la possibilité de s'abstenir
ou de demander la protection de la commission.
Le Président (M. Boucher): Justement, si on vous pose des
questions où vous sentez un danger possible, vous pouvez refuser de
répondre.
M. Bellerose: C'est ça, pour éviter que mon
intervention soit interprétée comme une ingérence dans le
cours normal de la justice.
Le Président (M. Boucher): Si cela tient compte de ce que
vous dites dans votre mémoire, il n'y a rien qui exige la
protection...
M. Bellerose: Je vous remercie, M. le Président.
M. le Président, M. le ministre de la Justice, MM. les membres de
la commission parlementaire, nous apprécions hautement l'occasion qui
nous est offerte aujourd'hui de vous communiquer certaines de nos
représentations sur le projet de loi no 48, Loi modifiant la Loi de la
police et visant notamment à accroître la juridiction et le
pouvoir d'enquête de la Commission de police.
Nos motivations et objectifs. C'est en tant que citoyens que nous
présentons aujourd'hui ce mémoire, en tant que citoyens qui ont
eu l'occasion de participer, à titre de témoins, à une
enquête de ladite commission et où il nous fut permis
d'évaluer plus à fond et les avantages et les désavantages
qui affectent le citoyen qui a ainsi recours au service de cet organisme.
Nos observations porteront plus précisément sur les
sections II et sous-sections I, II et III. Vous voudrez bien alors comprendre
et accepter que nous limitons nos observations et nos recommandations plus
particulièrement aux articles qui visent les relations entre les
policiers, les citoyens et la Commission de police du Québec, parce que
la mesure de nos moyens nous y oblige en premier lieu et que, de plus, nous
jugeons préférable de nous abstenir de traiter des autres
articles, préférant laisser ce soin aux organismes et personnes
plus qualifiés en ce sens pour nous en tenir seulement au sujet
où une connaissance implicite nous autorise à intervenir avec
pertinence.
Nos considérations sur la formation, la composition et le quorum
de la Commission de police du Québec. Nous sommes d'accord avec l'esprit
de la loi, à savoir que, dans sa formation et sa composition, il soit
prévu que le président de la commission soit choisi parmi les
juges, tel que précisé. Toutefois, compte tenu du nombre
grandissant de demandes d'enquêtes de toutes sortes provenant du public,
nous déplorons le fait que ni la loi, ni le projet de loi ne contiennent
quelque stipulation garantissant, au niveau de la formation, de la composition
et du quorum de la commission, la présence d'un citoyen n'ayant aucune
affiliation passée ou présente avec le Barreau ou quelque corps
policier.
Pouvoirs et devoirs par rapport aux fonctions. A la suite d'une lecture
attentive de la loi, un aspect très particulier nous a frappés.
C'est l'esprit qui nous a semblé à la gouverne des articles
portant sur les pouvoirs et devoirs de la Commission de police du Québec
dans ses agirs, en regard des enquêtes qu'elle "doit" ou "peut"
effectuer.
En effet, la lettre nous amène à conclure de la sorte
lorsqu'on lit que la Commission de police "doit", lorsqu'il s'agit de demandes
d'enquête émanant du bureau du Procureur général ou
d'une autorité municipale et "peut", lorsqu'une telle demande provient
d'un simple citoyen. Exemple: Certains articles, entre autres 20 et 25. Or,
dans les amendements suggérés par le projet de loi no 48, nous
constatons que l'article 6 atténue l'esprit distinctif qui se
dégage de la partie intitulée: Pouvoirs et devoirs de la
sous-section 2, de la section II, en le remplaçant par: Fonctions.
Tandis que l'ajout de l'alinéa mentionné à l'article 9
véhicule le même esprit de distinction déjà
remarqué entre pouvoirs et devoirs, selon les provenances des demandes
d'enquête.
Au niveau des enquêteurs. Considérant qu'inhérente
à la demande de toute enquête sur un corps policier de la part
d'un citoyen auprès de la Commission de police du Québec, il y a
une implication de manque de la part du corps de police en cause à
donner suite à cette plainte originalement portée au niveau
local, nous déplorons que ni la loi, ni le projet de loi n'aient
prévu la nécessité pour le citoyen de pouvoir compter sur
les services d'un enquêteur spécial qui saurait recueillir, dans
les plus brefs délais, toutes les preuves susceptibles de supporter les
allégations que comporte la plainte telle que portée
originalement au niveau local et transportée obligatoirement, vu au
manque de donner suite à la Commission de police du Québec.
Car il est évident que ces preuves sont absolument
nécessaires au plaignant, au même degré que pour tout
plaignant dans des causes conventionnelles, si vous me permettez l'expression,
entre citoyens nécessitant l'intervention d'enquêteurs.
Au sujet des délais. De plus, considérant les risques de
dommages injustes et irréparables inhérents aux délais
trop longs entraînés tant par les prises de décision que
par les enquêtes et la rédaction du rapport à la suite
d'une demande dans ce sens de la part du citoyen, nous déplorons que ni
la loi, ni le projet de loi ne prévoient de limite de temps à
l'intérieur de laquelle devrait être tenue l'enquête et
soumis le rapport.
Le recours en appel. Considérant que le citoyen, à la
suite de la publication d'un rapport qui lui serait défavorable, puisse
être laissé avec une impression d'être à la merci
d'un jugement erroné de la part des commissaires et cela, sans
possibilité de vérification par des instances supé-
rieures et indépendantes du système policier; et
considérant que, dans de telles conditions, la Commission de police du
Québec est trop souvent perçue comme un instrument de protection
ou de devanture de l'ordre policier, n'intervenant que dans les cas
dramatiques, publics ou évidents, il est regrettable que le projet de
loi ne contienne aucun amendement qui aurait pour but de créer une
instance supérieure et indépendante du système policier et
qui aurait pour effet d'éviter des erreurs toujours possibles au niveau
d'une première instance et, par là même, les effets
néfastes en découlant. (17 h 15)
Nos recommandations. Nous espérons qu'à la lumière
des points que nous avons soulevés, vous saurez introduire dans la loi,
des articles garantissant la présence d'un citoyen au niveau de sa
formation, au sein de la Commission de police. Deuxièmement, une
égalité de droit, assurant une équivalence entre
l'attention qui doit être apportée aux plaintes d'où
qu'elles proviennent. Troisièmement, l'assurance pour le plaignant de
pouvoir compter sur les services d'un enquêteur spécial qui lui
serait assigné, afin que tous ses droits soient sauvegardés,
garantissant d'éliminer tout délai dans l'exécution de son
mandat par la Commission de police, de les porter en conséquence pour
les parties en cause, garantissant la possibilité d'en appeler pour les
parties visées, par tout rapport de la Commission de police, suite
à une enquête provoquée par une plainte d'un citoyen.
En conclusion, vous comprendrez que ce mémoire n'a pour but que
d'essayer de vous suggérer des moyens visant à contrer la vague
grandissante de brutalité policière je n'aime pas
l'expression de brutalité de certains policiers, afin d'en
éviter les effets néfastes, tant pour les corps policiers que
pour les citoyens et ainsi assurer de meilleurs rapports entre les parties
concernées pour une plus grande efficacité. Je vous remercie.
Le Président (M. Boucher): Merci, M. Bellerose. M. le
ministre.
M. Bédard: M. et Mme Bellerose, nous tenons à vous
remercier de la présentation de ce mémoire et à vous
féliciter pour l'esprit positif dont vous faites preuve, tant dans vos
recommandations que dans l'explicitation de l'ensemble de vos motivations.
Même si, tel que vous l'avez dit, vous avez eu affaire à la
Commission de police, vous avez su garder un niveau général de
discussion élevé et je pense que vous méritez amplement
d'en être félicité. Autrement dit, vous n'avez pas
essayé, devant les membres de cette commission, de régler un cas
personnel. On est à même de constater que vous êtes
animés d'un esprit positif, en fonction d'améliorer certains
mécanismes et le rouage, de façon générale, de la
Commission de police, face aux citoyens.
Je peux vous dire que, personnellement, je prendrai en très
grande considération un des éléments de votre
mémoire qui préconise la présence d'un citoyen au sein de
la Commission de police.
Ceci s'inscrira dans une tendance. Je pense que nous avons eu
jusqu'à maintenant, quand c'est possible, vu à ce que le citoyen
soit représenté dans des instances qui le touchent
particulièrement au niveau de la justice. Nous l'avons fait, en ce qui a
trait au Conseil de la magistrature. Nous l'avons fait à d'autres
occasions également.
Nous prendrons cette suggestion que vous nous faites, avec beaucoup de
considération. Vous semblez avoir quelque chose à ajouter
là-dessus?
M. Bellerose: Ce qui m'avait frappé, d'autant plus que le
mot "citoyen" était justement employé dans un sens distinctif
dans les différents articles de la loi et du projet de loi. On parle de
diverses catégories et on dit "le citoyen". C'est pour cela que le mot
"citoyen" prenait toute son importance.
M. Bédard: Sans entrer toujours, tout en gardant le ton
général que vous avez adopté jusqu'à maintenant,
lorsque vous parlez de la nécessité pour le plaignant de pouvoir
compter sur les services d'un enquêteur spécial, pourriez-vous
expliquer davantage? Comme on le sait, la Commission de police a des
enquêteurs qui sont assignés à la Commission de police de
façon spéciale.
M. Bellerose: Nous avons pu constater depuis des années
que lorsqu'il s'agit d'augmenter les effectifs d'un corps policier, par
exemple, l'argument avancé est la nécessité d'avoir les
effectifs nécessaires pour être le plus vite possible en mesure
dans quelque cause que ce soit après la commission d'un crime ou d'un
présumé crime, de recueilliret cela vaut pour tous les
corps policiers le plus d'éléments possible susceptibles
de bâtir une preuve. On ceinture les lieux où a eu lieu
l'événement pour ne pas changer la nature des choses
conséquentes de l'acte et cela, dans le plus bref délai. Quand,
parce qu'il y a une impossibilité, par une incompatibilité ou
quoi que ce soit, d'établir un parallèle avec un crime
conventionnel ou avec une situation de crime conventionnelle, il faut recourir
à la Commission de police. La Commission de police devrait tout de suite
faire diligence pour recueillir dans les plus brefs délais tous les
éléments de preuve susceptibles de servir à quelque partie
que ce soit en cause, à quelque partie que ce soit. Le reste, vous le
trouverez dans les notes sténographiques.
M. Bédard: Merci, encore une fois, de votre
mémoire.
M. Bellerose: Je ne sais pas si je suis assez clair.
M. Bédard: Non, je pense que vous êtes assez clair
sur ce point précis sur lequel je voulais avoir certaines explications
additionnelles.
Le Président (M. Boucher): Merci, M. le ministre. M. le
député de Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: Seulement quelques mots, M. le Président. M.
et Mme Bellerose, votre mémoire témoigne d'une aliénation
entre la Commission de police et le citoyen. L'impression que je retiens, c'est
que vous percevez à tort ou à raison je ne veux pas porter
de jugement là-dessus la Commission de police comme faisant
partie de l'appareil policier. Vous corrigerez mon impression si je fais
erreur, mais, d'après le ton ou, enfin, quelques remarques,
d'après vous, les dés sont pipés en faveur des policiers
lorsque vous vous présentez à la Commission de police.
M. Bellerose: Je vais revenir à mon texte.
L'aliénation, le mot est fort pour moi...
M. Lalonde: Pas aliéner dans le sens de fou. Je parle
d'une séparation, d'un bris.
M. Bellerose: Un bris avec le contact de la
réalité.
M. Lalonde: Oui, oui. Pas nécessairement cela, enfin, je
vais essayer de trouver un terme un peu plus juste.
M. Bellerose: Je vais prendre l'esprit plutôt que la
lettre. Vous faites allusion plus particulièrement à mon
impression ici en ce qui concerne le recours en appel. Ce serait dans ce
passage. J'aimerais répondre assez précisément. Vous
faites allusion...
M. Lalonde: Oui, je l'ai souligné. Justement, c'est dans
ce paragraphe-là, vers la fin du premier paragraphe: "La Commission de
police est trop souvent perçue comme un instrument de protection ou de
devanture de l'ordre policier." C'est strictement ce passage-là qui m'a
donné cette impression que vous croyez qu'il y a une présomption
en faveur du policier lorsqu'un citoyen se présente à la
Commission de police.
M. Bellerose: Non. La phrase, telle que rédigée
ici, c'est que je ne perçois pas la Commission de police, mais la
Commission de police est perçue.
M. Lalonde: Bon! Donc, vous vous faites le témoin d'un
groupe.
M. Bellerose: Justement. A la suite du fait comme j'y ai
fait allusion d'avoir témoigné, ceci m'a amené
à avoir plusieurs demandes à savoir: Devrais-je porter cela ou
devrait-on porter cela devant la Commission de police? Je dois vous dire, M. le
Président, que, pour nous, dans une situation donnée, la
Commission de police, c'était quelque chose de grandiose. C'était
une présence, une présence réconfortante. J'avais
prévu la question ici sur l'heure du dîner et, si vous me le
permettez, je vais essayer de m'en tenir à cela.
Toute la bienveillance que nous avions constatée face aux
citoyens de la part de la Commission de police du Québec nous
amène à nous demander, aujourd'hui, si ce n'était pas...
Cela nous amène à nous demander, on n'a pas de réponse, je
ne peux pas vous donner de réponse. On a un gros point d'interrogation
et on voudrait que ce soit l'instrument, mais on se demande si cela n'a pas
servi à nous endormir, à un moment donné. On se le
demande. On est ici pour parler en toute franchise, on veut avancer tous
ensemble; on ne cherche pas des coupables. Celui qui s'endort, est-ce que c'est
la pilule qui est coupable de l'avoir endormi ou si c'est lui qui est coupable
de s'être laissé endormir par la pilule? Je ne le sais pas, mais
le réveil est brutal. A ce moment-là, on est obligé de
changer de point de vue et dire: Je ne le sais pas, pauvres vieux, faites-en
l'expérience vous-mêmes. Cela, c'est au niveau de l'appel qu'on le
saura.
M. Lalonde: Je prends à la lettre, naturellement...
M. Bellerose: C'est dans aucun sens péjoratif, c'est un
gros point d'interrogation.
M. Lalonde: Non, vous faites preuve d'une extrême prudence,
vous n'aviez aucunement besoin de la protection de quiconque. Je pense que vous
vous protégez très bien dans vos réponses, mais il reste
et je le dis très sérieusement qu'étant
donné surtout les pouvoirs accrus des témoins,
tantôt, en ont dénombré une douzaine que le projet
de loi no 48 a l'intention d'accorder à la commission et de rendre son
rôle encore plus important que le gouvernement a l'intention de lui
confier, vos suggestions prennent une pertinence beaucoup plus
immédiate. Quant à nous, nous allons sûrement en tenir
compte pour tenter, avec les autres membres de cette commission, à
l'Assemblée nationale, d'améliorer le projet de loi, de sorte que
le rôle de la Commission de police ne soit plus jamais, si c'est
possible, idéalement, perçu comme étant plutôt
penché d'un côté que de l'autre, et que sa perception dans
le public soit positive.
M. Bellerose: Le problème, ce n'est pas de pencher, mais
de rester sur la clôture, c'est dangereux.
M. Lalonde: Je vous remercie.
Le Président (M. Boucher): Merci, M. le
député de Marguerite-Bourgeoys. M. le député de
Nicolet-Yamaska.
M. Fontaine: Merci, M. le Président. A mon tour, je
voudrais, M. et Mme Bellerose, vous féliciter pour la façon dont
vous vous êtes exprimés face aux recommandations que vous aviez
à faire sur le projet de loi no 48 et en rapport avec la Commission de
police. Je sais que vous avez dû vivre une expérience, à la
Commission de police, et qu'il vous a peut-être été
difficile de garder la discussion à un tel niveau, et je pense que vous
devez en être félicités.
Je voudrais revenir sur un point particulier qui a été
abordé tout à l'heure, quand il a été question
d'enquêteur spécial. Je pense qu'on doit mettre cela en relation
avec la limite de temps à l'intérieur de laquelle devrait
être tenue une enquête de la Commission de police. Vous avez eu
à vivre une expérience personnelle avec la Commission de police.
Sans nous indiquer quelle est la teneur de cette enquête et tout cela,
sans nous donner de détails, est-ce que vous pourriez nous dire, selon
l'expérience vécue, quel a été le délai
d'intervention? Quand vous parlez d'enquêteur spécial, si on met
cela en relation avec la discussion que vous venez d'avoir avec le
député de Marguerite-Bourgeoys, qui devrait être cet
enquêteur spécial? D'après ce que je peux comprendre, cela
ne devrait pas être un policier.
M. Bellerose: Premièrement, ce qui est important, c'est
l'objectif, au bout, de servir la justice de la meilleure façon possible
et la plus proche de la réalité qu'il est humainement possible de
le faire. Ceci implique de faire une cueillette des preuves dans les plus brefs
délais. Cela, c'est au niveau de l'enquête. Quand les preuves sont
recueillies, si elles sont recueillies aux fins de servir la Commission de
police du Québec, vous voyez le citoyen qui, lui, dans sa perception des
choses, est dans une situation où il se sent brimé, après
avoir été la victime d'un acte qu'on considère, à
ce stade, présumé criminel. (17 h 30)
Vous avez aussi, peut-être dans l'immédiat, tant dans
l'espace que dans le temps, une autre personne qui, elle, est témoin de
ce geste. Normalement, il y a un service, un corps policier constitué
qui doit répondre et faire une enquête, soit à la suite de
la plainte ou à la suite de l'information qui est donnée par le
témoin. Ce corps policier, ne répondant pas à ces
demandes, soit à la plainte ou à l'information qui requiert une
requête, c'est la Commission de police qui est obligée de la
faire, mais la cueillette des preuves qui est faite par la Commission de
police, si elle n'est pas à la disposition du plaignant, comme elle le
serait si elle avait été faite à la suite de la plainte ou
de la dénonciation, telle qu'originalement portée au corps
normalement susceptible de recevoir cette plainte ou cette
dénonciation... Si je me fais voler mon automobile, je porte plainte et
je donne des indications et au fur et à mesure. Si je la retrouve trois
rues plus loin, je ne peux pas me reporter acquéreur de mon automobile.
A ce moment, je communique et je dis: C'est mon automobile que j'ai vue
à l'autre coin de rue. Il y a un dialogue qui existe pour arriver
à des fins justes et normales.
Compte tenu qu'il y a d'autres procédures que les fins
mêmes de l'enquête de la Commission de police, quels sont les
recours du citoyen face à d'autres procédures judiciaires?
Où est la possibilité de dire: Voici, il y a des preuves, elles
ont été cueillies et elles sont là? Il n'y en a pas. C'est
pour ça que je dis et que je suggère "assignés au
plaignant". Qu'ils proviennent de n'importe quel corps. C'est sûr qu'on
ne peut pas prendre un médecin pour aller faire l'enquête, il va
être bon pour opérer, mais il ne sera pas bon pour faire une
enquête policière. C'est sûr qu'il doit avoir une
expérience policière. J'aurais peur, s'il n'était pas
policier, il faut qu'il ait acquis une expérience.
Mme Bellerose: Peut-être dans le cas de quelqu'un qui
serait en dehors de la localité où le geste s'est passé.
Parce que si un geste criminel se produit dans une certaine localité, un
geste présumé criminel, qu'on voit de nos yeux, on le retrouve.
Si c'est directement impliqué à un corps policier ou à un
policier, c'est entendu qu'eux sont plus proches des preuves pour les faire
disparaître pour arranger toutes les choses. Alors, il ne reste aucun
recours au citoyen, il ne lui reste aucun moyen de prouver ses
allégations, parce que les preuves ne sont plus là. C'est dans ce
sens que ça prendrait peut-être, quand il s'agit de
brutalité policière là, c'est vraiment dans le but
de pouvoir améliorer les choses, parce que je crois que la
brutalité policière va en s'accroissant et ça nuit autant
aux policiers et aux corps policiers qui se devraient d'être sans
reproche. C'est vraiment ce que la population perçoit aujourd'hui,
d'après ce qu'on a vécu et le temps qu'on en entend parler. Je
crois que la population sent vraiment que le citoyen n'a plus aucune
protection, quand il s'agit de policiers.
Ils sont incapables de faire quoi que ce soit, acceptant plutôt
d'être accusés, se disant: II faut que ça finisse au plus
vite, parce que, de toute façon, c'est toute notre vie qui est perdue. A
ce moment, quel recours reste-t-il au citoyen? Les policiers ont beaucoup de
choses pour les protéger, ils demandent toute sorte de protection au
gouvernement, mais si on porte une plainte directement reliée à
un policier, comment voulez-vous que l'enquêteur, qui est un policier, un
confrère, puisse faire une enquête appropriée? Ce serait
peut-être bien d'avoir un enquêteur qui serait d'une tout autre
localité et qui serait assigné directement par le ministre de la
Justice.
M. Fontaine: M. le ministre, est-ce que la commission n'a pas des
enquêteurs définis?
M. Bédard: Elle a des enquêteurs
désignés. Maintenant...
M. Bellerose: Pour préciser...
M. Bédard:... je pense que l'argumentation de madame est
que, premièrement, ce n'est peut-être pas assez rapide. On n'a pas
à blâmer...
M. Bellerose: C'est au niveau du délai.
M. Bédard: Ce que vous évoquez, le fait que
l'enquête est faite par des policiers, confrères, ou
d'ex-policiers alors que la plainte est portée à l'endroit de
l'un de leurs confrères...
M. Bellerose: Est-ce que je pourrais préciser sa
pensée?
M. Bédard: ... vous fait poser des questions que vous nous
soumettez.
M. Bellerose: Je vais essayer de préciser sa
pensée. Si cela n'est pas correct, elle peut me reprendre parce que chez
nous, c'est libre.
M. Bédard: Vive l'égalité.
M. Bellerose: Oui, parce qu'un sans l'autre, on n'est rien. C'est
cela qui est embêtant; on est ensemble. Ce qui arrive, c'est
qu'effectivement notre expérience... Ce n'est pas grave si je dis "notre
expérience"?
M. Bédard: Non.
M. Bellerose: II y a eu une enquête et...
M. Bédard: Cela montre jusqu'à quel point...
M. Bellerose: ... il y a eu des éléments de
ramassés, mais, à cause de la date, il en manque.
M. Clair: A cause des délais.
M. Bellerose: Des délais. Ce n'est pas la faute de
l'enquêteur. Je ne voudrais pas que cela soit perçu comme quelque
chose qu'on tente d'émettre. Non. Je ne veux pas qualifier le travail de
qui que ce soit. Moi, je me situe dans les lieux et dans le temps. Je ne me
situe pas au niveau des personnes.
M. Bédard: Vos recommandations sont
générales.
M. Bellerose: C'est cela. Excepté qu'au lieu d'être
un Jos Bleau qui était au coin de la rue et qui ne connaît rien et
qui dit: Cet après-midi, je vais aller faire un tour en commission
parlementaire et on va parler pour ne rien dire, non, je pense que cela a une
certaine pertinence. Si je peux éclairer, c'est dans ce sens-là.
Au niveau du délai, je crois que c'est primordial. Comme tous les corps
policiers demandent à avoir assez d'effectifs pour pouvoir agir
immédiatement après la commission d'un acte. C'est dans ce
sens-là. Maintenant, je demeure à votre disposition pour...
M. Bédard: De plus amples informations?
M. Fontaine: Vous parlez également de droit d'appel.
M. Bellerose: Oui.
M. Fontaine: A la suite d'une décision qui a
été rendue par la commission, vous voudriez qu'il y ait une
possibilité d'interjeter appel de la décision. Pourriez-vous
préciser? Est-ce que ce serait devant un tribunal judiciaire ordinaire
ou quoi? Est-ce que vous avez quelque chose en vue?
M. Bellerose: Je ne suis pas assez versé dans le domaine
du droit pour dire que cela prend telle formule de telle forme et de telle
dimension. Dans tous les domaines, il y a toujours une occasion de
vérifier; il y en a en comptabilité. D'ailleurs, le gouvernement
vérifie tous les rapports d'impôt de nos comptables. Il y a une
vérification de faite. Pourquoi ne vérifierait-il pas les
rapports de la Commission de police? J'appelle cela un recours en appel qui
serait partie... A ce moment-là, comme il y a assez de modèles au
niveau des cours: il y a la Cour des sessions de la paix, la Cour d'appel.
D'après ce que je peux voir, il y a une dizaine de façons d'en
appeler au niveau judiciaire. Il y a appel contre-appel et ainsi de suite. Je
ne sais pas, mais vous devez certainement être plus versé que moi
pour savoir comment trouver la formule et où la situer, mais qui
comprendrait toujours, comme vous l'avez précisé au début,
un homme versé dans la magistrature, donc un juge qui ferait partie de
cela; quelqu'un qui est versé dans le domaine policier et quelqu'un qui
est versé dans le domaine social.
M. Fontaine: Justement...
M. Bellerose: Le policier qui s'est présenté avant
moi tout à l'heure, c'était donc rafraîchissant de
l'entendre! Lui, il a compris son rôle de policier. Vous autres, vous
adoptez des lois, vous déléguez des pouvoirs à des
municipalités ou à d'autres organismes et eux
délèguent à quelqu'un les pouvoirs de faire observer cela.
Il a dit: Je veux être policier et c'est dans ce sens-là que je
veux travailler. C'est comme ça que je vois la police.
M. Fontaine: Concernant la nomination d'un citoyen à la
Commission de police, comment verriez-vous le choix de ce citoyen? Est-ce qu'il
devrait représenter un organisme? Vous parlez de quelqu'un qui est
versé dans les affaires sociales.
M. Bellerose: A ce moment-là, écoutez! Je ne sais
pas, est-ce qu'au niveau de la loi, il y a des ententes que vous n'avez pas
prévues, au niveau de déjudiciariser, vous n'avez pas
prévu une partie... Dans les hôpitaux, par exemple...
M. Bédard: II y a le système des personnes
désignées par le ministre de la Justice.
M. Bellerose: Oui. Il y a des noms qui peuvent être
suggérés par des organismes reconnus, qui connaissent le milieu
et il y a des fédérations qui coiffent ça et à un
moment donné, cela arrive sur la table du ministre. La formule, je ne
voudrais pas entrer dans la quincaillerie. Je n'ai pas les compétences
pour aller jusque-là.
M. Fontaine: Merci beaucoup. M. Bellerose.
Le Président (M. Boucher): Merci beaucoup, M. et Mme
Bellerose de la présentation de votre mémoire, au nom de tous les
membres de la commission.
M. Bellerose: Je vous remercie beaucoup.
Le Président (M. Boucher): Etant donné que nous en
sommes au dernier mémoire, la commission ajourne ses travaux sine
die.
M. Lalonde: M. le Président, on n'aura même pas le
plaisir de conclure.
Le Président (M. Boucher): Vous voulez conclure...
M. Lalonde: Je ne sais pas, est-ce que le ministre va nous faire
des promesses, des engagements, tenir compte...
Conclusions
M. Bédard: Je pense que ce sont des auditions qui ont
été très positives, M. le Président. Nous avons eu
l'occasion de le dire lors de chacun des mémoires
présentés. Je pense que toutes les questions que nous avons
posées, pour ma part, l'ont été dans le but de voir
jusqu'à quel point on peut améliorer le projet de loi,
jusqu'à quel point on peut donner suite à certaines
recommandations, améliorations ou amendements faits par les
différents organismes qui se sont présentés devant nous.
Au ministère de la Justice, nous allons étudier l'ensemble des
représentations qui ont été faites, avec beaucoup de
considération. En temps et lieu, si des amendements sont
apportés, ils le seront.
M. Lalonde: M. le Président, est-ce qu'on peut s'attendre
d'avoir une réimpression du projet de loi ou s'il va être
présenté ainsi en deuxième lecture, malgré la
déception générale...
M. Bédard: Vous faites de la politique, déception
générale, c'est facile de prendre...
M. Lalonde: On n'est pas ici pour faire de la politique, je
m'excuse, je me suis trompé d'endroit.
M. Bédard: Vous pouvez prendre chacun des petits extraits
dans chacun des mémoires, pouvant conclure...
M. Lalonde: Voulez-vous que je vous en sorte, il y en a
plusieurs?
M. Bédard: C'est sûr. Puisque nous recherchons un
équilibre, nous étions d'avance certains que cela ne
correspondrait pas aux vues de chacune des parties intéressées.
Nous l'avons dit au début de l'étude de ce projet de loi: des
principes importants sont en jeu, principe de l'autonomie des
municipalités, principe de la décentralisation gouvernementale,
principe de l'application de la fiscalité municipale telle
qu'exposée par le ministre des Finances, également un autre grand
principe, celui d'assurer la meilleure protection policière pour
l'ensemble des citoyens du Québec.
Il est clair qu'une loi qui aurait été pensée
seulement en fonction des intérêts d'un groupe n'aurait pas
été une loi adéquate, que ce soit un groupe ou l'autre,
toute loi doit rechercher un certain équilibre. Nous avons dit
d'ailleurs, dès le départ des travaux de cette commission, que
nous étions ouverts aux suggestions qui pourraient nous être
formulées. Elles ont été formulées. Nous allons les
étudier avec beaucoup de considération et poser les gestes
nécessaires en temps et lieu.
M. Lalonde: M. le Président, si vous me permettez
seulement de conclure, nous avons trouvé les séances de cette
commission très utiles. Je pense que, maintenant, on s'est rendu compte,
j'espère que le ministre s'est rendu compte que son projet de loi a
déçu beaucoup de monde, qu'on l'a trouvé
généralement timide et incomplet. Ce projet constitue d'ailleurs,
d'après un grand nombre d'intervenants je ne veux pas être
trop violent dans mon langage quasiment une taloche au rapport Saulnier.
Avant même d'avoir accordé une attention le moindrement
décente au rapport Saulnier, on renie, dans ce projet de loi, une de ses
recommandations les plus essentielles quant à la Commission de police,
c'est-à-dire en faire un organisme quasi judiciaire. (17 h 45)
J'espère, M. le Président, que le gouvernement va tenir
compte de ces remarques de la part des différents groupes qui se sont
fait entendre pour apporter les amendements qui vont donner à ce projet
de loi une certaine rationalisation dans les pouvoirs et aussi, si possible
il reste quand même quelques mois, disons, plusieurs semaines
avant la reprise de la session de faire avancer sa réflexion
quant au rapport Saulnier, ce que la majorité au moins des
clientèles directement impliquées ou affectées par une
telle loi considère comme une réforme attendue depuis longtemps,
tel que proposé par le rapport Saulnier; que ce soit dans ce sens ou
dans un autre, au moins pour faire avancer la réorganisation
policière au Québec.
Le Président (M. Boucher): Merci, M. le
député de Marguerite-Bourgeoys. M. le député de
Nicolet-Yamaska, est-ce que vous avez une conclusion?
M. Fontaine: Oui, M. le Président. La conclusion, c'est
que je pense que les mémoires ont été très
intéressants et ont proposé plusieurs formes d'amendements. Tout
ce qu'on peut espérer, c'est que le ministre en tiendra compte dans la
grande majorité des cas. Maintenant, bien sûr, je ne voudrais pas
répéter tout ce que vient de dire le député de
Marguerite-Bourgeoys, mais je pense également que le rapport Suulnier a
été laissé pour compte en grande partie.
J'espérerais que le ministre continue à réfléchir
sur ce dossier et peut-être puisse en arriver à la conclusion que,
plutôt que de présenter un projet de loi tellement partiel comme
celui-là, il serait peut-être mieux de repenser le dossier au
complet et de nous présenter de véritables modifications, tel que
préconisé dans le rapport Saulnier.
Le Président (M. Boucher): Merci.
M. Bédard: Je voudrais faire remarquer que tous les
groupes parlaient, se référaient à l'application du
rapport Saulnier, mais, une fois que cela était dit, on se
référait à des aspects particuliers du rapport Saulnier,
en oubliant des points majeurs du rapport Saulnier sur lesquels on
n'était manifestement pas d'accord. C'est dans ce sens que l'application
intégrale du rapport Saulnier, nous l'aurions proposée que nous
aurions eu des mémoires pour et contre. C'est bien clair et c'est dans
ce sens que nous avons travaillé pour essayer de trouver une loi qui
atteigne un équilibre par rapport aux revendications de chacun des
groupes. Maintenant, tel que...
M. Fontaine: On a parlé depuis deux ans de grandes
réformes dans le domaine policier et on arrive avec une
"réformette".
M. Lalonde: Même pas.
M. Bédard: Je n'ai pas parlé de grandes
réformes dans le domaine policier. J'ai dit qu'une fois le rapport
Saulnier déposé, nous verrions...
M. Fontaine: A l'étude des crédits, depuis trois
ans que vous en parlez.
M. Bédard: Je vous invite je suis d'ordinaire assez
prudent à relire certaines...
M. Lalonde: Trop! La prudence, c'est parfait, mais l'attentisme
et la timidité, c'est autre chose.
M. Bédard: Oh bien, pour ce que vous avez fait!
Après trois ans au pouvoir...
M. Lalonde: Je n'ai pas eu le temps.
M. Bédard: ... oui, vous n'avez pas eu le temps. Vous
l'avez déposé et vous n'avez rien fait.
M. Lalonde: C'est un an, quand même. Ah, si le projet de
loi 41 avait été adopté, vous savez, il y a beaucoup de
gens ici qui sont venus qui auraient été très satisfaits.
Avec tous les amendements que vous avez l'intention d'y apporter...
M. Bédard: Oui et il y aurait eu d'autres mémoires
dans l'autre sens. J'en suis très heureux, cependant. J'écoutais
avec beaucoup d'attention la lecture des mémoires, parce que je suis
convaincu que si, du point de vue gouvernemental, nous avions
déposé un projet de loi qui aurait eu pour effet de
transférer tous les pouvoirs que nous donnons à la Commission de
police tel que suggéré, à la Direction
générale de la sécurité publique, nous aurions
été accusés de vouloir mettre la main sur l'ensemble du
système policier. Je puis vous dire que je n'ai pas écouté
seulement les mémoires avec attention, j'ai écouté
également avec beaucoup d'attention certaines représentations qui
ont été faites par les membres de l'Opposition.
M. Lalonde: J'espère qu'on ne parle pas dans le vide.
M. Bédard: Quand nous y donnerons suite, il y aura
probablement plus de chances qu'on ne soit pas taxé de vouloir mettre la
main sur l'appareil policier.
M. Lalonde: M. le Président, il semble que le ministre
veut attendre que tout le monde soit d'accord avant d'agir. Naturellement,
toute réforme que le ministre apportera va recevoir un accueil
différent, dépendant des milieux concernés. Mais si c'est
cela que le ministre attend, que tout le monde soit d'accord, on n'ira nulle
part. En ce qui concerne l'Opposition officielle, je n'ai pas
hésité. J'ai répété je ne sais pas combien
de fois vous le relirez que la rationalisation des pouvoirs va
sûrement, doit sûrement inclure un certain transport de pouvoirs,
au niveau de la définition des politiques, à la direction
générale, au ministère ou à l'exécutif.
C'est là que cela appartient. D'ailleurs, j'aime beaucoup mieux avoir le
ministre devant moi, responsable de ses actes, plutôt que caché en
arrière de la Commission de police. A ce moment, on pourrait lui
parler.
M. Bédard: Vous pourriez demander à la Commission
de police je ne pense pas que ce soit sa perception...
M. Lalonde: Je m'entends très bien avec la Commission de
police.
M. Bédard: Cela a paru dans les débats que nous
avons tenus devant cette commission. Je pense bien que la Commission de police
n'a jamais eu l'impression que le ministre de la Justice se cachait
derrière elle, au contraire.
Le Président (M. Boucher): Merci, messieurs, de votre
collaboration. La commission ajourne ses débats sine die.
Fin de la séance à 17 h 52