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Version finale

31e législature, 4e session
(6 mars 1979 au 18 juin 1980)

Le mardi 21 août 1979 - Vol. 21 N° 160

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Auditions concernant le projet de loi no 48 - Loi modifiant la Loi de police


Journal des débats

 

Projet de loi no 48

(Dix heures quinze minutes)

Le Président (M. Boucher): A l'ordre, s'il vous plaît! La commission de la justice est réunie pour entendre les mémoires des organismes et des personnes concernant le projet de loi 48, Loi modifiant la Loi de police.

Les membres de la commission sont: M. Alfred (Papineau)...

M. Alfred: Présent.

Le Président (M. Boucher):... M. Bédard (Chicoutimi)...

M. Bédard: Présent.

Le Président (M. Boucher):... M. Blank (Saint-Louis)...

M. Blank: Présent.

Le Président (M. Boucher): ... M. Charbon-neau (Verchères), M. Clair (Drummond), M. Fontaine (Nicolet-Yamaska); M. Gravel (Limoilou) remplace M. Lacoste (Sainte-Anne); M. Lalonde (Marguerite-Bourgeoys), M. Samson (Rouyn-Noranda), M. Vaillancourt (Jonquière).

Les intervenants sont: M. Ciaccia (Mont-Royal), M. Cordeau (Saint-Hyacinthe), M. Duhaime (Saint-Maurice), M. Lavigne (Beauharnois), M. Léger (Lafontaine), M. Marois (Laporte), M. Pagé (Portneuf), M. Tardif (Crémazie).

Ce matin, les organismes invités sont: — je vais les nommer dans l'ordre où ils m'ont été donnés — d'abord, l'Association des chefs de police et pompiers de la province de Québec dont le porte-parole est M. Emile Turgeon; le Syndicat professionnel des chefs de police et pompiers et officiers supérieurs de la protection publique dont le porte-parole est Me Léonce-E. Roy; l'Union des conseils de comté et des municipalités locales du Québec dont le porte-parole est M. Jean-Marie Moreau, président; l'Association des policiers des autoroutes du Québec dont M. Marcel Ouellette est le porte-parole; l'Union des municipalités du Québec représentée par M. Luc Lacharité; la Ligue des droits et libertés représentée par M. Gordon Lefebvre.

On m'informe que M. Jérôme Proulx sera intervenant à la place du député de Saint-Maurice, M. Duhaime.

M. Lalonde: Et M. Fernand Grenier remplace M. Fontaine.

Le Président (M. Boucher): M. Grenier remplace M. Fontaine (Nicolet-Yamaska).

J'appellerais immédiatement l'Association des chefs de police et pompiers de la province de Québec. Maintenant, pour les mémoires, étant donné que nous en avons six aujourd'hui, il s'agirait de s'entendre peut-être sur le temps alloué pour chaque mémoire. On accorde habituellement 20 minutes pour l'exposé du mémoire et, par la suite, on peut s'entendre sur chacun des mémoires en dedans d'une heure.

M. Lalonde: M. le Président, si vous me le permettez, étant donné qu'on a une douzaine d'intervenants...

M. Bédard: Une douzaine de mémoires qui ont été présentés.

M. Lalonde: Est-ce qu'il y en a moins qui ont accepté d'être entendus, je ne le sais pas. Etant donné le petit nombre de représentations et les trois jours qui ont été — on verra s'ils seront consacrés après — mais qui ont été planifiés pour la tenue de cette commission parlementaire, M. le Président, je pense que je préférerais ne pas faire de carcan, de cadre, de limite de temps sur les mémoires. Je pense qu'on peut facilement voir au début comment se déroulent les travaux, quitte à s'autodiscipliner à mesure que le temps se déroulera pour arriver à un temps raisonnable.

On a fait, dans le passé, dans des commissions parlementaires où il y avait des dizaines et des dizaines d'intervenants, des ententes pour limiter le temps. En principe, donc, je ne suis pas contre, mais étant donné qu'on a un petit nombre ici de certains mémoires qui présentent des intérêts différents, qui peuvent provoquer une discussion beaucoup plus longue, j'aimerais simplement voir comment cela se déroule, quitte, demain matin peut-être, à s'entendre pour le déroulement des travaux à venir.

Le Président (M. Boucher): M. le ministre.

M. Bédard: Je crois effectivement qu'il y a lieu de s'ajuster, selon le déroulement de nos travaux, ayant à l'esprit, d'une part le respect de nos règles de commissions parlementaires et, également, un esprit d'ouverture pour permettre aux partis de pouvoir s'exprimer le plus longuement possible, le plus complètement possible.

Remarques préliminaires M. Marc-André Bédard

J'aimerais, avec votre permission, M. le Président, tout d'abord souhaiter la bienvenue à toutes les associations et les organismes qui ont bien voulu accepter de présenter des mémoires à la commission parlementaire de la justice, sur le projet de loi no 48 que nous avions déposé à la fin de nos travaux à l'Assemblée nationale en juin. Une partie importante de ce projet de loi fait suite au travail du groupe Saulnier qui, il y a un an et demi, me remettait un rapport que j'ai alors rendu public. Donc, le premier mérite de cette analyse du

rapport Saulnier, entre autres, c'est d'avoir fait le tour de la situation existante et d'avoir, je crois, décrit les balises de la problématique. Cette toile de fond constitue, je pense, un précieux éclairage des solutions susceptibles de favoriser ce que nous avons tous à l'esprit, à savoir l'efficacité policière.

Après la réception de ce rapport, le gouvernement a confié l'étude de ses recommandations au comité interministériel sur la décentralisation, et des officiers du secrétariat à l'aménagement, du Conseil exécutif, des officiers du conseil des Affaires municipales, des Finances et de la Justice ont travaillé à cette fin. Le rapport de ces travaux nous a été soumis récemment et le gouvernement a adopté certaines orientations pour fins de discussion. Celles-ci sont d'ailleurs largement réfléchies dans le projet de loi no 48, et les dispositions qui en résultent représentent à mes yeux, je le dis très humblement, une véritable solution pratique, je dis bien pratique, aux problèmes de la protection policière, solution pratique qui, je pense, doit tenir compte de deux principes qui sont éventuellement susceptibles d'entrer en conflit, à savoir le principe de la décentralisation et du respect de l'autonomie municipale et le principe du maintien obligatoire d'un service de protection policière sur l'ensemble du territoire québécois. C'est, en tout cas, nous le croyons, une solution d'équilibre. Je reste évidemment ouvert à toute proposition susceptible de parfaire cet équilibre. C'est avec un esprit de conciliation, il va sans dire, que je me déclare prêt à entamer les discussions sur ce projet de loi.

Le Président (M. Boucher): Avant d'aller plus loin, il y a un détail que j'ai oublié, c'est celui de nommer un rapporteur.

M. Alfred: Je propose, M. le député de Limoilou.

Le Président (M. Boucher): Alors, M. Gravel (Limoilou) sera le rapporteur. M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Fernand Lalonde

M. Lalonde: Seulement quelques mots, M. le Président, en entamant les travaux de cette commission. J'ai étudié très attentivement le projet de loi no 48 et j'ai été étonné d'entendre tantôt le ministre nous dire que c'est essentiellement le rapport Saulnier qu'on y retrouve...

M. Bédard: Cela fait suite. Je m'excuse, je me suis peut-être, au contraire...

M. Lalonde: Justement, j'ai lu plusieurs interventions, plusieurs mémoires et, de façon assez générale, on s'étonne, non pas de ce qu'il y a dans le projet de loi 48, mais de ce qu'il n'y a pas. Après trois ans de silence depuis l'infortuné projet de loi 41, on se demande ce que le ministre a fait, et surtout ce qu'il a fait avec le rapport Saulnier.

Il est naturellement prématuré de porter un jugement politique. Je pense que le ministre, en consultant les groupes, les individus qui ont bien voulu s'adresser à la commission parlementaire, a droit à un congé de jugement politique, à savoir qu'on doit lui laisser la chance de refaire son lit, mais il y a tellement de choses qu'on n'y retrouve pas, M. le Président, que j'étais heureux d'entendre le ministre, en concluant ses propos tantôt, dire qu'il est ouvert à toute suggestion. Je suis d'avis que le ministre et le gouvernement devront refaire leur travail et réellement s'imposer une démarche beaucoup plus pensée, beaucoup plus réfléchie que ce que nous propose le projet de loi no 48. Dans le projet de loi no 48, il y a certaines choses nouvelles, mais j'espère que le gouvernement ne se servira pas du projet de loi no 48 simplement pour innover, par exemple, le contrôle, pour imposer un contrôle sur des "agents de la paix" et on ne sait pas qui ils seront, que le gouvernement se conserve le droit incognito et en catimini de déterminer, en invitant le débat public, quel contrôle devrait être imposé sur les "agents de la paix", quels agents de la paix devraient être soumis à ce contrôle au-delà du contrôle qui existe actuellement sur les corps policiers provinciaux.

Je pense que, s'il est prématuré de porter un jugement actuellement sur la véritable portée du projet de loi no 48, on doit quand même, et je le fais au nom de l'Opposition, exprimer notre déception sur le fait que le ministre, après deux ans et demi d'administration de son ministère et surtout après le rapport Saulnier, n'a que ces quelques bribes de démarches à nous proposer et je l'invite d'avance à écouter d'une façon positive ce que les intervenants ont à dire. Par exemple, je vais terminer là-dessus, un cas particulier, le policier des autoroutes. C'est un cas particulier, ce n'est pas l'avenir du Québec qui est en jeu, mais, quand même, c'est un cas sur lequel des administrations passées se sont penchées et auquel elles ont proposé des solutions. Un cas qui a aussi été soumis à l'examen, à l'étude d'organismes.

Bon, il y a eu des solutions qui ont été proposées. Je disais tantôt qu'il est assez difficile, je ne veux pas qu'on refasse le projet de loi 41. Ce n'est pas mon intention, d'ailleurs, et ce n'est pas le but de la commission. Mais on ne peut pas oublier que cela a existé.

Alors, il y avait une proposition à ce moment-là. Mais ici, il n'y a rien. Il n'y a même pas une explication pourquoi on n'a rien là-dessus. J'invite le ministre à accepter d'accueillir, de façon très positive, les remarques qui y sont faites, non seulement par l'Association des policiers des autoroutes, mais aussi par les autres groupes qui, dans leurs mémoires, soit au projet de loi 48, soit au projet de loi 41, accueillaient aussi avec plaisir, la décision de faire un corps policier de plein droit de ce groupe; que ce soit par l'intégration à la Sûreté du Québec, que ce soit en en faisant un corps policier, il y a une solution à apporter à ce problème.

Il y a aussi, l'équilibre entre les pouvoirs, le rôle et les fonctions de la Commission de police,

comme organisme indépendant et le gouvernement, le ministère de la Justice, que ce soit la Direction générale de la sécurité publique ou autre.

Il n'y a pas de définition. On a des résultats, mais il n'y a pas eu de réflexions publiques. Il n'y a réellement rien qui nous rassure dans ce projet de loi, à savoir si le ministère, le gouvernement a fait son lit. Est-ce qu'il a expliqué pourquoi, par exemple, on donne beaucoup plus de pouvoir à la Commission de police actuellement, dans ce projet de loi et la façon dont on le fait?

Enfin, nous allons écouter avec beaucoup d'attention ceux qui ont des remarques à faire sur ce projet de loi 48 et nous allons, en concluant, inciter le gouvernement à aller beaucoup plus loin dans cette réflexion, qui devrait prouver et démontrer que depuis trois ans, il s'est passé quelque chose. Là, on arrive avec moins que ce qu'on avait il y a trois ans.

Alors, il me semble, avec le rapport Saulnier, que le ministre devrait nous proposer davantage par le projet de loi 48.

Le Président (M. Boucher): Merci, M. le député de Marguerite-Bourgeoys. M. Emile Tur-geon... M. le député de Mégantic-Compton, je vous laisse la parole.

M. Fernand Grenier

M. Grenier: M. le Président, je voudrais d'abord vous prier d'excuser le député de Nicolet-Yamaska, Me Serge Fontaine, qui ne peut pas être présent à cause du passage dans sa région d'un ministre et de ses fonctionnaires... il l'a à l'oeil aujourd'hui.

M. Lalonde: ... fonction de surveillance.

M. Grenier: Je pense que c'est important qu'il soit dans son comté à cause des crédits de voirie qui sont en train de se discuter, et Dieu sait si on en a besoin. Je voudrais vous dire qu'il sera présent au cours des autres journées afin d'entendre les autres mémoires. (10 h 30)

Je dois vous dire que nous, de l'Union Nationale, sommes conscients de l'importance que revêt cette audition de mémoires qui nous conduira à la bonification du projet de loi modifiant la Loi de police. Au nom de ma formation politique, je suis, bien sûr, disposé à écouter les intervenants des milieux concernés et ceux que nous devrons entendre au cours des deux, trois ou quatre prochaines journées.

Je voudrais faire quelques remarques concernant quelques points qui nous paraissent importants. Je tiens aussi à signaler que dans notre parti, nous avons toujours soutenu que la Commission de police du Québec devrait avoir juridiction sur toutes les forces policières et sur tout agent de la paix oeuvrant au Québec.

De plus, notre formation se range du côté des gouvernements du Québec et de l'Ontario qui ré- clament tous deux plusieurs milliards de dollars du fédéral pour des services policiers que ce gouvernement central ne donne pas à ces deux provinces. Nous espérons aussi que le gouvernement de M. Clark puisse se montrer plus coopératif à ce sujet. Sur ce point, je réitère le contenu d'une motion non annoncée qui fut présentée en Chambre par mon collègue de Nicolet-Yamaska, Me Serge Fontaine, qui disait: "Que cette Assemblée est d'avis que le gouvernement du Québec invite les représentants autorisés de tous les gouvernements provinciaux à se réunir à Québec dans les plus brefs délais pour discuter de la question de la juridiction des provinces en matière d'administration de la Justice, en vue de présenter au gouvernement fédéral une prise de position commune établissant clairement les revendications légitimes dans ce secteur."

M. le Président, ce projet de loi est obscur en plusieurs points. Ainsi, nous voulons nous assurer qu'il n'y ait pas de conflit d'intérêts au sein de la Commission de police du Québec qui jouera un rôle, d'une part, administratif et, d'autre part, quasi judiciaire. De plus, il faut définir dans la loi ce qu'est un agent de la paix et il faut compléter la loi qui semble avoir oublié certains groupes, tels les policiers des autoroutes. D'ailleurs, nous aurons l'occasion de les entendre.

Concernant les municipalités, le projet de loi les oblige aussi à fournir des services adéquats, mais, en cas de force majeure, telle une grève, devront-elles payer la note parce que la Sûreté du Québec aura pris la relève le temps que se règle le conflit? Plusieurs autres points obscurs seront soulevés par les intervenants, je l'imagine, telle l'opportunité des enquêtes publiques, mais je veux maintenant m'attarder quelque peu aux côtés plus positifs du projet de loi 48.

Le présent projet de loi a comme premier mérite de rajeunir l'actuelle Loi de police qui est maintenant âgée de onze ans. C'est ainsi qu'une plus grande protection sera accordée aux témoins qui devront se présenter devant la commission d'enquête. A ce titre, je cite l'article 22a, paragraphe c) qui autorise en particulier l'interrogatoire d'un témoin par son propre avocat. De plus, nous trouvons excellent l'établissement d'un code de déontologie et de discipline en ce qui concerne la Sûreté du Québec et nous souhaitons ardemment qu'il devienne le plus tôt possible applicable aux policiers municipaux et aux autres agents de la paix oeuvrant sur le territoire québécois.

Enfin, je me limiterai à citer un dernier point louable de ce projet de loi en ce qui a trait aux mécanismes prévus pour que la Sûreté du Québec puisse prêter assistance aux corps de police municipaux. Bien sûr, je ne veux pas m'attarder davantage puisque nous sommes ici pour entendre les représentants des différents organismes et nous aurons l'occasion, à notre tour, bien sûr, d'intervenir sur chacun des documents qui nous seront déposés.

Le Président (M. Laplante): Merci, M. le député de Mégantic-Compton.

Je demanderais à M. Emile Turgeon, porte-parole de l'Association des chefs de police et de pompiers de la province de Québec de bien vouloir s'identifier et d'identifier les gens qui l'accompagnent.

Mémoires

Association des chefs de police et de pompiers

M. Cyr (Marcellin): M. le Président, messieurs les membres de la commission parlementaire, le porte-parole, aujourd'hui, sera Marcellin Cyr, président de l'Association des chefs de police et de pompiers du Québec. J'aimerais, avant de débuter, vous présenter mes collègues. En commençant par la droite, le directeur Guy-Paul Simard, de Trois-Rivières, ex-président de l'association; le directeur adjoint de la police de Québec, M. Robert Vézina, président ex-officio de l'association; M. Emile Turgeon, directeur de la police de Beauport, premier vice-président de l'association et M. Gérard Giroux, directeur de la police de Chicoutimi, ex-président de l'association.

Messieurs, conscients des intentions du ministre de la Justice de déposer un projet de loi dont le but était d'amender la Loi de police pour corriger certaines situations que nous dénoncions, les membres de l'exécutif de l'Association des chefs de police et de pompiers du Québec ont désigné certains d'entre eux pour constituer un groupe de travail dans le but de soumettre un mémoire. Effectivement, nous remettions copie de ce mémoire au ministre de la Justice Ie7juin 1979 par l'entremise de l'ex-président de l'Association des chefs de police et de pompiers du Québec, M. Robert Vézina. L'intention de l'Association des chefs de police et de pompiers du Québec était d'influencer le ministre avant la formulation de son projet de loi. Nous constatons, à la lecture du projet de loi, que nous n'avons réussi que très partiellement.

L'exécutif de l'Association des chefs de police et de pompiers du Québec a donc convenu de saisir les membres de cette commission parlementaire de la justice de ses propres propositions d'amendement qui pourraient être considérées comme représentant la base d'un projet de loi dont la teneur est fort différente du projet de loi no 48, voire objectifs poursuivis et propositions d'amendement, par rapport au texte actuel de la Loi de police. C'est pourquoi, après avoir présenté notre projet d'une législation souhaitée, nous tenterons d'établir les points de concordance et de discordance avec le projet de loi no 48 à l'aide d'annotations et de commentaires. Nous serons disposés à examiner positivement les rapprochements possibles entre la position du ministre de la Justice, l'honorable Marc-André Bédard, et la nôtre, à l'occasion des auditions de votre commission parlementaire.

Les objectifs poursuivis dans ce mémoire. Les amendements à la Loi de police. Périodiquement...

Le Président (M. Boucher): M. Cyr... M. Cyr: Oui.

Le Président (M. Boucher): Je m'excuse! Est-ce que vous avez l'intention de lire au complet le mémoire ou si...

M. Cyr: Non.

Le Président (M. Boucher): ... vous avez préparé un résumé qui...

M. Cyr: C'est un peu le résumé, M. le Président.

Le Président (M. Boucher): Oui. M. Cyr: Je vais lire les objectifs...

Le Président (M. Boucher): Oui.

M. Cyr:... ensuite, nous irons au sommaire et aux conclusions.

Le Président (M. Boucher): D'accord.

M. Cyr: Je ne me vois pas lire tout ça aujourd'hui.

Périodiquement, l'Association des chefs de police et de pompiers du Québec a participé à des commissions parlementaires ou a soumis des avis par écrit chaque fois que les divers gouvernements qui se sont succédé ont désiré apporter des changements législatifs sur la police ou amender la Loi de police depuis son adoption en 1968. C'est ainsi que l'Association des chefs de police et de pompiers du Québec a participé à la formulation de la Loi de police et à la création de l'organisme moteur duquel dépendait une bonne partie de l'application de cette loi, la Commission de police du Québec.

En octobre 1973, l'Association des chefs de police et de pompiers du Québec transmettait le mémoire pour provoquer des amendements à l'article 63 de la Loi de police. En août 1976, devant une commission parlementaire, un autre mémoire suivit, portant, cette fois-ci, sur le projet de loi 41, qui devait modifier sensiblement certaines parties de la Loi de police. Or, ce projet de loi n'a franchi que l'étape de la première lecture, si bien que nous retrouvons souvent les mêmes revendications en mai 1979.

Faisant l'historique des commissions, en 1968 la Commission d'enquête sur l'administration de la justice en matière criminelle et pénale au Québec, présidée par le juge Yves Prévost, a déclenché, par le dépôt de son rapport, une réforme qui devait comprendre le domaine de la police. L'ex-ministre de la Justice, M. Jérôme Choquette, accordait, en 1971, une priorité au système policier dans un livre blanc intitulé "La police et la sécurité des citoyens", et, par ses propositions, indiquait ses intentions relativement au programme d'action

de son ministère. Même si le livre blanc de 1975 de M. Jérôme Choquette, "Justice contemporaine" ne portait pas seulement sur la police, l'ex-minis-tre a néanmoins désiré faire préciser les rôles de la Direction générale de la sécurité publique par rapport à ceux de la Commission de police du Québec.

En janvier 1978, le groupe de travail sur les fonctions policières présidé par M. Lucien Saul-nier déposait son rapport. Le 8 octobre 1976, un premier groupe de travail était constitué et son mandat découlait de l'impact des décisions de la Régie des mesures anti-inflationnistes, la préoccupation de se prononcer sur la nature et l'exercice des fonctions policières, ainsi que sur les organisations policières, n'étant pas éliminée.

Le 16 mars 1977, le gouvernement élargissait ce mandat pour comprendre le coût de financement de la protection policière et l'équité fiscale, les conditions de travail des policiers, le régime supplémentaire de rentes, ainsi que la définition et le partage des responsabilités des pouvoirs publics. Durant cette période, le Task Force and Policing in Ontario, présidé par M. Haie, a déposé son rapport en février 1974 sur le fonctionnement des organisations policières, des plans de développement des ressources humaines, l'escalade des coûts de la police et la stratégie fiscale.

De plus, il y a lieu de signaler que, le 12 décembre 1972, un comité d'étude sur l'administration de la justice dans le Nord québécois remettait un rapport sous le titre: La justice au-delà du 50e parallèle, où les recommandations furent formulées en regard de la protection des agglomérations d'Indiens et d'Inuit. D'autres considérations ont été apportées par deux représentants à l'Assemblée nationale dans des publications connues de la population: M. Guy Tardif dans "Police et politique" et M. Jean-Pierre Char-bonneau dans "La filière canadienne". Quel bilan doit-on faire à la suite de ces nombreux rapports?

Au niveau des structures d'organisation, la commission Prévost, en se référant à une meilleure coordination policière, écartait l'intégration complète de tous les corps de police à la Sûreté du Québec — danger d'Etat policier — suggérait l'abolition des services de police desservant des populations de moins de 10 000 habitants et recommandait le regroupement des forces policières en dix services de police régionaux.

Même si, dès 1971, le ministre de la Justice a soulevé la possibilité d'un ministère de l'intérieur et d'une sûreté nationale et même si la Sûreté du Québec a laissé germer l'idée de la gendarmerie nationale du Québec devant le groupe de travail sur les fonctions policières, le gouvernement du Québec ne semble pas avoir opté, pour l'instant, pour un système policier centralisé et unique. Le livre blanc sur la police et la sécurité des citoyens proposait une loi-cadre sur la régionalisation des forces policières, avec la nomination de commissaires-enquêteurs chargés de procéder dans chaque région à des inventaires et analyses pouvant permettre de recommander les formules d'organisation qui conviennent davantage à la région. Le rapport Saulnier, dans 34 zones désignées, recommande l'établissement de corps de police de districts.

Malgré ces travaux et la longue réflexion qui a eu cours dans les huit dernières années, la situation a peu évolué relativement à des modifications d'envergure au niveau du système policier qui prévaut encore aujourd'hui et de son fonctionnement. En matière de formation, le Québec a fait d'énormes progrès et peut même être cité comme un Etat innovateur par les programmes produits conjointement avec l'Institut de police du Québec dans les CEGEP et dans les universités. Les programmes de prévention étant abandonnés, à la suite du désistement de la Commission de police du Québec et des efforts timides de la Direction générale de la sécurité publique, l'Association des chefs de police et de pompiers a décidé de créer des mécanismes permettant l'implantation desdits programmes.

Le champ d'activité des policiers doit être mieux défini pour éviter l'imposture par le domaine parapolicier, la multiplication des organismes utilisant d'autres catégories d'agents de la paix. A cet égard, malgré la recommandation de divers rapports, nous sommes peu avancés Nous pourrions continuer l'exercice de ce bilan; toutefois, notre seul objectif était de faire ressortir l'impulsion que doit donner le gouvernement à certaines priorités et l'imminence de prendre des décisions à la suite de ces nombreux rapports.

Je reviens au texte original. Entre-temps, l'Association des chefs de police et de pompiers du Québec a encouragé les initiatives prises par le groupe de travail sur les fonctions policières par le dépôt de deux mémoires et la présence au sein de ce groupe de M. Gérard Giroux. Sans nécessairement appuyer toutes les propositions et se porter caution de tous les passages du rapport Saulnier, l'Association des chefs de police et de pompiers du Québec supportait les propositions majeures dont notamment celles sur la constitution de corps de police de districts, la création d'un inspectorat, le financement des services de police, le réaménagement des pouvoirs de la Commission de police du Québec, un régime minimal supplémentaire de rentes. Devant les hésitations du gouvernement à implanter la recommandation prioritaire du rapport, l'Association des chefs de police et de pompiers du Québec a déposé des documents et maintenu un échange de correspondance afin de démontrer la vigilance de son action en ce dossier.

Ce mémoire s'inscrit donc dans une continuité de démarches et respecte la philosophie de base développée par les membres de l'Association des chefs de police et de pompiers du Québec. Toutefois, étant donné l'intention du gouvernement d'apporter sous peu des amendements à la Loi de police par le biais du projet de loi no 48, nous émettrons des propositions d'amendement relativement à la Loi de police avant d'aborder toute autre question qui pourrait faire l'objet de réflexions par les instances gouvernementales. Nous ne manquerons pas de vous suggérer des

moyens pour que soient réalisées nos propositions d'amendement.

Implantation des mesures proposées dans le rapport Saulnier. Depuis que le rapport Saulnier a été déposé, les autorités gouvernementales semblent avoir été très peu loquaces sur leur plan d'action, de sorte qu'on a laissé le chemin libre à plusieurs initiatives et fantaisies. C'est ainsi que la majorité des municipalités au sens du Code municipal ont aboli leur corps de police, que des municipalités régies par la Loi des cités et villes en ont fait tout autant malgré l'obligation qu'elles ont de maintenir un service de police, que les effectifs ont été réduits considérablement, au point de mettre en danger le niveau de service et la qualité de la protection publique des populations visées. (10 h 45)

Enfin, d'autres municipalités refusent d'évaluer la pertinence des demandes d'accroissement d'effectifs, même dans les cas où le taux d'encadrement est en deçà d'un seuil acceptable par rapport à la criminalité et à la charge de travail. On pousse même l'odieux de la situation jusqu'à geler de façon indéfinie lesdits effectifs. Les vacuums ainsi créés amènent la Sûreté du Québec à être davantage présente dans ces municipalités et même à assumer dans certains cas l'entière responsabilité des affaires policières. Nous avons noté de l'improvisation dans les formules de la Sûreté du Québec et même l'absence de protocole d'entente à l'occasion. Il va sans dire que le gouvernement devra préciser les politiques et fournir des indications plus explicites sur le rôle de la Sûreté du Québec.

Que dire de la confusion entretenue sous la Direction générale de la sécurité publique et sa juridiction, surtout vis-à-vis de la Commission de police du Québec en matière de prévention du crime et en formation? Le rapport Saulnier pro-' posait plutôt un inspectorat qui répond à l'Assemblée nationale et voyait la Commission de police se limiter à un organisme quasi judiciaire. Encore Ici nous constatons que la commission bénéficie de très peu de pouvoirs exécutoires et que la Direction générale de la sécurité publique qui a été ignorée dans le rapport Saulnier n'a jamais vu son champ d'activité être bien délimité. Comme l'Association des chefs de police et de pompiers du Québec, sans nécessairement endosser tout le contenu du rapport Saulnier, s'est tout de même solidarisée sur les principales recommandations, notre association se permettra de reprendre certaines de ces recommandations et même d'en approfondir et d'en préciser la portée.

Les projets de réglementation de la Commission de police du Québec et rôle consultatif de l'Association des chefs de police et pompiers du Québec:

L'Association des chefs de police et de pompiers du Québec a participé à de nombreux comités que la Commission de police du Québec avait mis sur pied pour formuler des règlements qui reflètent davantage les besoins et priorités. Des membres de l'Association des chefs de police et pompiers du Québec étaient désignés pour prendre charge de ces divers dossiers et rendre compte à l'exécutif. Or, depuis quelques années, la commission semble avoir suspendu ses initiatives au plan de la réglementation et n'a pas convoqué l'Association des chefs de police et de pompiers du Québec pour de tels projets. Exemple, le code de déontologie, des normes d'embauche, insignes et grades. Il appert que la commission est à nous éloigner de notre rôle de consultation. La dernière expérience pour organiser la semaine de la police s'est plutôt avérée malheureuse puisque la commission a, à un moment donné, fait cavalier seul.

Tout indique que la Commission de police du Québec préfère consulter les organismes individuellement. C'est ainsi qu'elle a fait une tournée des régions et a tenu des rencontres séparées avec les syndicats, les directeurs de police et des administrateurs municipaux. Même si nous ne dénonçons pas de façon véhémente cette approche, nous trouvons que cette dernière ne cadre pas avec les politiques de rapprochement de la commission qui ont donné lieu à des journées d'étude annuelles et à des travaux en comité interorganisationnel.

Nous voulons que la Commission de police du Québec et que les autorités gouvernementales ne perdent pas leur pratique de consultation. De plus, la performance sur la réglementation nous laissant maintenant perplexes et sur nos appétits, nous nous chargerons d'exercer des pressions afin de réactiver plusieurs dossiers.

Mise sur pied de mécanismes susceptibles de garantir l'efficacité recherchée des forces policières. Soucieux que nous sommes d'assurer les services de protection et de prévention efficaces, nous nous permettrons de proposer des mécanismes tant permanents que de transition, la coordination opérationnelle et la décentralisation de la Commission de police du Québec seront parmi les cibles de nos suggestions.

Vers un concept global de sécurité publique. Plusieurs de nos membres s'occupent de la police, des incendies et même des services ambulanciers. Ils sont, de plus, impliqués dans l'organisation des mesures d'urgence municipales et certains occupent les fonctions de coordonnateurs municipaux. Cette polyvalence que l'on retrouve au plan municipal ne semble pas se répercuter au plan provincial où l'on n'a pas cessé de multiplier les services de protection constitués de constables spéciaux, de services d'enquête spécialisés et de services d'inspection. Ces tendances doivent malgré tout s'inscrire dans un concept de sécurité globale où l'on doit orienter toutes les organisations à mieux se coordonner et à être mieux encadrées.

Si vous me permettez, messieurs, je vais me reporter à la page 63, où débute l'approche comparative entre le projet de loi modifiant la Loi de police et les propositions de l'Association des chefs de police du Québec relatives à certaines dispositions de l'actuel texte de loi.

Je vais omettre de lire cette partie qui comprend le 3.1, page 63: appui inconditionnel de l'association à l'égard de certains articles du

projet de loi. Le 3.2, c'est page 63: appui conditionnel de l'association dû à des éléments de concordance. Le 3.3 à la page 68: propositions de l'Association des chefs de police et de pompiers du Québec modifiant la Loi de police sur des articles où le projet de loi no 48 a omis d'apporter des amendements. Finalement, au 3.4 à la page 72: divergences marquées entre le projet de loi no 48 et les propositions de l'Association des chefs de police et de pompiers du Québec. Je vais me diriger immédiatement vers le sommaire et les conclusions, si vous me le permettez.

Le Président (M. Boucher): Est-ce que vous tenez à ce que votre mémoire soit retranscrit au complet dans le journal des Débats?

M. Cyr: Je crois que ce serait cette partie. Il serait important que ce soit retranscrit dans le journal des Débats.

Le Président (M. Boucher): Ce sera retranscrit au journal des Débats. (Voir annexe A)

M. Cyr: Merci. Sommaire et conclusions. L'orientation corrective et palliative des propositions. Certaines de nos propositions ont pour but de corriger des situations que nous avons considérées comme lacunaires ou détériorées. Il faut évaluer davantage les sphères d'intervention des groupes responsables des affaires policières pour éviter des rôles conflictuels. Ainsi, il faudra voir à ce que la Commission de police du Québec concentre son action au domaine quasi judiciaire, que la Direction générale de la sécurité publique s'adonne à la coordination opérationnelle et à l'encadrement des activités, des programmes ayant une portée générale et des services spécialisés, tandis que l'inspectorat limite son rôle à la surveillance, au contrôle et à la vérification.

Les chevauchements doivent également être éliminés entre les organisations policières (Sûreté du Québec, services de police municipaux et Gendarmerie royale du Canada) puisque ce phénomène crée plutôt des structures compétitives et d'affrontement, alors que l'objectif visé devrait être une plus grande collaboration et complémentarité entre les services de police.

Un système disciplinaire doit comporter des mécanismes susceptibles d'assurer à la population que toutes les communautés régionales sont dotées de bureaux de plaintes accessibles et que, par voie de conséquence, le système instauré supporte une justice expéditive et équitable. Nous avons prévu que les divers paliers sont utlisés de façon à éviter que les plaintes futiles suivent toutes les étapes du processus. Les mesures à court terme concernant les organisations policières sont de nature palliative et transitoire. En effet, nous souhaitons qu'à moyen terme le gouvernement se fixe sur les recommandations du rapport Saulnier. Le caractère de nos propositions s'inscrit donc dans un désir de collaborer avec le gouvernement en étant conscients de contraintes quelquefois imprévisibles relativement à l'implantation de certaines propositions. Cette approche flexible devrait nous rendre crédibles dans la consultation gouvernementale: les projets devront de toute évidence être révisés fréquemment à la lumière de faits nouveaux. Nos. propositions à caractère correctif et palliatif sont formulées dans ce contexte de façon pratique et réaliste.

Protection adéquate de la population par l'application de mesures en vertu d'un échéancier de réalisation. A court terme. Les municipalités qui ont moins de 5000 de population seraient dorénavant protégées par la Sûreté à moins qu'elles ne soient dotées d'un service de police. Ce service ne peut toutefois réduire ses effectifs sans autorisation expresse du ministre de la Justice à la suite d'une évaluation de l'inspectorat. Les municipalités qui ont des populations entre 5000 et 20 000 habitants pourraient, par voie de contrat, voir leur territoire protégé par la Sûreté du Québec. Ces contrats comprendraient des clauses à l'égard de l'application des règlements municipaux par les agents de la Sûreté du Québec et de l'intégration des policiers municipaux à la Sûreté du Québec. Si les municipalités optent pour le maintien de leurs services de police, elles doivent répondre à l'inspectorat de leur efficacité et avoir des effectifs dont le seuil minimal est établi en tenant compte de divers facteurs (population, charge de travail, territoire à couvrir, criminalité). Les ententes intermunicipales peuvent être partielles et porter sur les communications, l'identité judiciaire, les services techniques et certaines fonctions spécialisées. Les ententes intermunicipales et les contretypes de la Sûreté du Québec devraient faire l'objet d'uniformisation et les modèles développés devraient être conservés à la Direction générale de la sécurité publique pour être remis comme information à toute partie intéressée.

Les municipalités qui ont à faire face à des besoins saisonniers reliés au tourisme peuvent procéder à la nomination de constables spéciaux pour des périodes pouvant aller jusqu'à quatre mois. Les constables spéciaux devront se conformer aux normes d'admissibilité en vigueur. De plus, ils doivent être encadrés par les organisations policières reconnues: un service de police municipal ou une unité opérationnelle de la Sûreté du Québec.

A moyen terme, la Direction générale de la sécurité publique devrait mettre sur pied des centres régionaux tactiques et opérationnels pour faciliter la coordination d'opérations policières d'envergure régionale, offrir une assistance compétente et professionnelle à l'égard de programmes à l'échelle du territoire.

A long terme, selon les critères du rapport Saulnier, le gouvernement délimiterait les juridictions territoriales et les rôles des corps de police de district et de la Sûreté du Québec. Même si, sur certains points, la Direction générale de la sécurité publique pourrait modifier le mandat des centres régionaux tactiques et opérationnels, ils devraient être maintenus pour les régions comprenant plusieurs de corps de police de district.

Droits acquis et sécurité des policiers municipaux lors d'intégrations. Les policiers municipaux qui sont touchés par des abolitions sont intégrés à la Sûreté du Québec à une fonction équivalente à celle qu'ils occupaient avant l'abolition. S'il s'agit d'une intégration, selon le scénario à la Sûreté du Québec, les policiers municipaux sont assimilés à la classe salariale de la Sûreté du Québec correspondant aux responsabilités d'une fonction équivalente à celle qu'ils occupent présentement. Ils peuvent de plus se prévaloir de droits acquis concernant les affectations et les transferts.

Renforcement des dispositions à l'égard des conditions de travail et du professionnalisme. Un dirigeant ou un gestionnaire d'un service de police, un cadre et un policier doivent être soumis, pour sauvegarder l'intégrité du milieu policier, à un code de déontologie uniforme. L'admissibilité à la profession policière se trouve assortie, pour ceux qui proviennent des CEGEP, d'une exigence additionnelle, à savoir un stage obligatoire avant la cinquième session. Cette étape serait éliminatoire pour ceux qui ne pourraient satisfaire aux assesseurs des services de police accrédités. Les municipalités ne pourraient congédier et réduire le traitement des directeurs, des non-salariés au sens du Code du travail et des policiers syndicables mais non représentés par une association dûment accréditée sans qu'il y ait eu enquête de la Commission de police du Québec.

Les policiers, par ces dispositions, sont présumés pouvant continuer d'exercer leurs fonctions jusqu'à l'issue de l'enquête de la Commission de police du Québec, à moins que lesdits policiers reconnaissent avoir commis une faute lourde et acquiescent que les mesures prises sont justifiées. Le fardeau de la preuve revient donc à la municipalité et la Commission de police du Québec doit mener ses enquêtes de façon expéditive à cause des incidences monétaires y rattachées.

Le droit d'appel n'existe que si la municipalité a pris lesdites dispositions sur recommandation de la Commission de police du Québec. L'échelle indicative de salaires serait remplacée par une autre formule qui donnerait au directeur d'un service de police un salaire égal à 150% du salarié le mieux rémunéré. L'écart entre chaque cadre intermédiaire ne serait pas supérieur à 10%. Les avantages sociaux du directeur et des autres non-salariés au sens du Code du travail sont ceux prévus par la convention collective.

Les rentes viagères des veuves et des enfants n'ayant pas atteint la majorité pourraient atteindre 70% du salaire du policier, avec 50% pour la veuve et 5% par enfant jusqu'à un maximum de 20%. De plus, nous introduisons le principe d'indexation pour éviter toute mesure aléatoire et suivre les fluctuations du coût de la vie.

La Commission de police, l'Inspectorat et la Direction générale de la sécurité publique. La Commission de police du Québec est confinée à des rôles qui découlent de ses pouvoirs quasi judiciaires. Ainsi, le fonctionnement des conseils régionaux de discipline et les préenquêtes relève- raient d'un commissaire qui pourrait administrer un bureau régional et être assisté, dépendant des demandes, d'enquêteurs et de conseillers.

Les préenquêtes s'effectueraient après les vérifications des enquêteurs et se tiendraient à huis clos. A cette phase, la commission pourrait décider de poursuivre au niveau de l'enquête proprement dite. Les conseils régionaux de discipline vont permettre d'épurer bon nombre de cas qui ne nécessitent pas l'intervention de la Commission de police du Québec. (11 heures)

Le rôle de conseiller les municipalités et les services de police se traduit par un service de conseillers techniques et évite que l'on ait recours aux firmes privées de consultants. Dans son rôle d'enquête, la Commission de police du Québec pourra dorénavant imposer des pénalités et même passer des ordonnances. Un palier d'appel serait toujours possible auprès de la Cour provinciale.

Inspectorat. L'inspectorat se rapporterait à l'Assemblée nationale et, dans son rôle de contrôle, soumettrait la Sûreté du Québec et tous les services de police municipaux à une inspection annuelle. En plus de soumettre le rapport de vérification aux autorités compétentes, l'inspectorat examinerait les performances des services gouvernementaux de sécurité et d'enquête et évaluerait de façon constante le niveau de services rendus par les organisations policières à l'aide d'indicateurs.

Direction générale de la sécurité publique. La Direction générale de la sécurité publique continuerait d'exercer un rôle de développement et de coordination en matière de formation de police scientifique, de la recherche et d'autres attributions reliées au support opérationnel des services de police. De plus, les centres régionaux tactiques opérationnels axeraient les initiatives de la Direction générale de la sécurité publique sur des opérations de collaboration des programmes interservices, dont l'analyse opérationnelle de la criminalité et la prévention du crime. Notre association présente cette répartition tripartite comme un palliatif et serait disposée à présenter des recommandations supplémentaires si tel était le souhait du gouvernement.

Egalité de statut — La Gendarmerie royale du Canada. Dorénavant, les membres de la Gendarmerie royale du Canada pourraient être soumis, à la suite de plaintes, aux enquêtes de la Commission de police du Québec. La Sûreté du Québec et les policiers municipaux, les directeurs de services de police municipaux bénéficient à maints endroits dans nos propositions des mêmes privilèges et droits que ceux du directeur général de la Sûreté du Québec.

Le Président (M. Boucher): Merci, M. Cyr.

M. Cyr: Si vous me le permettez, M. le Président, j'aurais seulement une petite intervention...

Le Président (M. Boucher): Allez-y.

M. Cyr: ... qui est un peu une mise en garde. Si vous voulez vous référer à la page 66, à l'article 3.2.7, l'article 29, nous trouvons quelque peu dangereux que la Sûreté du Québec agisse de sa propre initiative et nous proposons que, sur cet aspect, vous vous en remettiez à nos commentaires généraux de 2.13, 2.13.1 et 2.13.2, pages 35 et 36, qui se lisent comme suit: Commentaires généraux de l'association sur la section III portant sur la Sûreté du Québec. Lorsqu'un service de police municipal demande en assistance la Sûreté du Québec, il conserve sa juridiction et continue de diriger les opérations et de contrôler les initiatives. Néanmoins, si le service de police municipal transfère à la Sûreté du Québec sa responsabilité, l'intervention cesse d'être interprétée comme un cas d'assistance et la Sûreté du Québec considère cette intervention comme une activité qui lui est propre.

Dans une région donnée, lorsqu'il y a une situation d'urgence, nous ne croyons pas que seule la Sûreté du Québec pourrait être désignée pour diriger les opérations. En attendant la constitution des corps de police de district, la Direction générale de la sécurité publique, par des centres régionaux de coordination, pourrait confier à des coordonnateurs et un personnel de la Sûreté du Québec et des services de police municipaux qui l'assisteraient le soin de planifier et coordonner les opérations et programmes nécessitant une collaboration interservices.

Il est entendu que si cette solution n'est pas retenue, le leadership d'une situation peut être assumé par un directeur de service de police municipal.

Merci, M. le Président. Merci, messieurs de la commission parlementaire.

Le Président (M. Boucher): Merci, M. Cyr. M. le ministre.

M. Bédard: M. le Président, je tiens à remercier au nom des membres de la commission l'Association des chefs de police et de pompiers du Québec pour le mémoire très élaboré qu'elle nous a présenté. Il constitue, je pense, une contribution imposante aux travaux de cette commission et traduit bien l'attention continuelle et préventive, qu'on exprime au début du mémoire, de l'Association des chefs de police et de pompiers du Québec par rapport à toute modification concernant la Loi de police. Dans votre mémoire, il y a quelques points que je voudrais toucher. Je suis convaincu que mes collègues en ont aussi plusieurs; je me limiterai à trois ou quatre, dans un premier temps.

Vous parlez de la création d'un inspectorat relevant de l'Assemblée nationale ou, à titre de concession, tel que vous le dites, relevant de la Direction générale de la sécurité publique. Vous parlez également de la mise sur pied d'une véritable Direction générale de la sécurité publique. Pourriez-vous nous expliciter le plus possible les pouvoirs que vous verriez attribuer à un inspectorat, les pouvoirs que vous voulez voir attribuer à la

Direction générale de la sécurité publique, afin de nous permettre, au niveau des membres de la commission, d'examiner la différence?

M. Cyr: Si vous permettez, M. le ministre, mes collègues étaient préparés sur certains points. Je demanderais au directeur Emile Turgeon...

M. Bédard: Je vous demande d'expliciter ces pouvoirs parce que, dans votre mémoire, vous indiquez votre préférence pour la création d'un inspectorat et d'une véritable Direction générale de la sécurité publique, mais sans expliciter d'une façon particulière les pouvoirs que vous verriez attribuer à l'une ou l'autre de ces instances.

M. Cyr: Le directeur Gérard Giroux peut vous donner les explications.

M. Giroux (Gérard): M. le ministre, quand vous parlez de pouvoirs, dans notre mémoire, nous pensons à trois organismes: la Commission de police, la Direction générale et l'inspectorat. Les devoirs et obligations de la direction générale seraient des devoirs de coordination des efforts policiers, l'élaboration de programmes préventifs, la fourniture de services spécialisés et la coordination des efforts policiers. Je pense qu'en résumé, c'est vers cela qu'on se dirige, c'est cela qu'on suggère.

Quant à l'inspectorat, ce serait l'organisme qui serait chargé de faire l'évaluation des services policiers et de faire les inspections de services policiers, de façon à pouvoir avoir une perception juste de leur efficacité et évidemment, par le fait même, de déterminer certains besoins. Ce pouvoir de l'inspectorat, qui répondrait à l'Assemblée nationale, serait susceptible d'informer annuellement le gouvernement sur la situation policière.

Quant à la Commission de police, nous voyons son rôle confiné à un rôle quasi judiciaire et avec un pouvoir, quand même, dans certains domaines comme la discipline, d'émettre des ordonnances.

Je ne sais pas, M. le ministre, si cela répond à votre question.

M. Bédard: Cela traduit essentiellement ce qui est dans le mémoire. Je ne sais pas si vous pouvez être plus explicite sur certains de ces pouvoirs. Quand on parle de créer un nouvel organisme qui serait l'inspectorat, nous nous sommes posé la question, à savoir jusqu'à quel point on pouvait être efficace en créant continuellement d'autres organismes. Je pense que la prolifération des organismes en termes de surveillance...

M. Giroux: C'est parce que...

M. Bédard: A trop créer d'organismes, on évaluait le risque de devenir peut-être plus ou moins efficace. D'un autre côté, je vous demande si vous ne croyez pas que la fonction de l'inspectorat, qui est essentiellement de vérifier l'efficacité policière, l'efficacité de la protection policière à laquelle a droit l'ensemble des citoyens et

la planification des activités policières, ne peut pas se retrouver efficacement dans un même organisme. Est-ce que le fait de pouvoir vérifier l'efficacité policière ne constitue pas un apport important pour pouvoir mieux planifier l'efficacité policière?

Autrement dit, est-ce qu'il n'y a pas de danger, en répartissant trop de pouvoirs dans trop d'organismes, qu'on soit obligé à un moment donné presque d'en créer encore un autre pour faire une certaine planification entre ces organismes-là et de faire en sorte que l'expérience d'un organisme serve à d'autres organismes, à accoucher de solutions. C'est dans ce sens-là que nous — je vous le dis très humblement, je ne suis pas un spécialiste des activités policières — croyons qu'un organisme qui a la possibilité ou le devoir de vérifier l'efficacité policière, à la lumière de cette expérience de vérification, peut être bien placé pour, ensuite, planifier l'efficacité de l'opération policière.

M. Giroux: Vous pensez à la direction générale à ce moment-ci?

M. Bédard: Enfin, je ne pense pas à un endroit en particulier, je pense simplement au problème global que les citoyens ont en tête d'avoir la plus grande efficacité policière, la plus grande protection policière possible.

M. Giroux: Dans notre réflexion, nous voyons un danger à ce que la Commission de police soit l'organisme qui vérifie, inspecte et conseille les corps de police et, en même temps, l'organisme qui fait les enquêtes sur les corps de police. Nous voyons un conflit possible...

M. Bédard: Pourriez-vous donner des exemples précis où le conflit existe?

M. Giroux: Nous voyons un corps de police qui suivrait les recommandations après une étude de la Commission de police et qui arriverait en conflit ou qui serait sujet à des plaintes, la Commission de police devrait enquêter sur le corps de police parce qu'il a suivi ses propres recommandations. Or, à prime abord, la Commission de police devrait confier je pense dans le sens des recommandations... en fait, c'est de nature à créer un conflit certain. C'est une de nos préoccupations et c'est pour ça que nous suggérons la création d'un organisme de surveillance et de conseil des corps de police, un organisme de mesure d'efficacité. C'est là que l'inspectorat entre en ligne de compte.

Si on a suggéré la création d'un troisième organisme qui est l'inspectorat, c'est que, dans notre esprit, la Commission de police, dans son rôle quasi judiciaire, peut difficilement avoir un rôle de conseiller également, parce que conseiller et, par la suite, faire des enquêtes sur l'application des suggestions de la Commission de police et de la Direction générale de la sécurité publique, peut créer un état de conflit. Donc, quant à la direction générale de la sécurité, nous lui voyons un rôle de coordination et un rôle de programmation des activités policières en matière de prévention du crime, par exemple, l'élaboration de programmes de prévention du crime et la coordination dans l'application de ces programmes. Encore une fois, je pense que élaborer des programmes, les coordonner et ensuite les évaluer, ce n'est pas encore tout à fait... il y a encore un danger de conflit à ce moment-là. C'est pourquoi nous croyons que le troisième organisme est nécessaire pour l'évaluation de l'efficacité policière face aux outils qu'on lui fournit par la direction générale et face aussi à la possibilité que la commission doive tenir des enquêtes sur le comportement des corps policiers.

M. Bédard: Dans l'hypothèse où il y a, deux organismes à savoir: la Commission de police et la Direction générale de la sécurité publique, comment verriez-vous la répartition des pouvoirs?

M. Giroux: Entre les deux seulement?

M. Bédard: Oui. A partir du moment où on ne s'oriente pas vers l'établissement d'un nouvel organisme, la création d'un nouvel organisme, comment verriez-vous la répartition des pouvoirs entre les organismes qui existent présentement, qui sont, d'une part, la Commission de police et la Direction générale de la sécurité publique?

M. Giroux: Je crois, M. le ministre, que notre préoccupation, face aux pouvoirs de la Commission de police d'examiner et de conseiller, est inconciliable avec le pouvoir de faire enquête. Or, si le gouvernement pense à deux organismes, je pense qu'on devra confier à la direction générale certains pouvoirs de conseil et d'inspection, alors que la Commission de police devra s'en tenir à un rôle quasi judiciaire, parce que les deux peuvent difficilement aller de pair. (11 h 15}

M. Bédard: Si on allait dans le sens que vous dites, du partage dont vous faites mention, est-ce qu'il n'y aurait pas danger que le gouvernement ou encore le ministère de la Justice soit taxé de vouloir exercer un contrôle complet sur l'ensemble des corps policiers?

M. Giroux: C'est un peu pour cela, M. le ministre, c'est une des raisons pour lesquelles on suggère un inspectorat qui réponde à l'Assemblée nationale. Parce que si, en fait, l'inspectorat, qui va mesurer l'efficacité policière, qui va recommander les effectifs nécessaires pour être efficace, répond à l'Assemblée nationale, le gouvernement ne pourrait pas être taxé, à ce moment-là, d'ingérence dans les affaires policières. Il serait le conseil et celui qui prévoit les programmes. Par contre, il ne serait pas l'organisme qui évalue l'efficacité policière et qui coordonne l'activité policière.

M. Bédard: Dans votre mémoire, vous êtes d'accord sur l'instauration des constables spé-

ciaux. Vous dites qu'ils devraient relever — j'emploie vos termes — fonctionnellement de la Sûreté du Québec...

M. Giroux: Pas de la Sûreté du Québec.

M. Bédard: ... du corps de police municipal. Pourriez-vous être plus explicite de ce côté-là? Comment verriez-vous cette manière de relever...

M. Giroux: Nous prétendons, M. le ministre, que les constables spéciaux qui pourraient être engagés dans une municipalité par rapport à la vocation touristique d'une municipalité, pour une période de quatre mois, doivent répondre à un organisme policier opérationnel. Si la municipalité a déjà un corps de police et qu'elle engage des constables spéciaux pour la période estivale, ces constables spéciaux dépendent du corps de police, du directeur de police. Si c'est une municipalité qui n'a pas de corps de police municipal et qu'elle engage des constables spéciaux pour l'été, nous sommes d'opinion que ces constables spéciaux doivent dépendre d'un organisme opérationnel, c'est-à-dire du détachement de la Sûreté du Québec qui couvre ce territoire, de façon que ces constables spéciaux ne dépendent pas exclusivement de l'autorité municipale, mais dépendent d'un corps de police opérationnel dans la région.

Je ne sais pas si je me suis bien fait comprendre. Je répète cela. Si ce sont des constables spéciaux qui sont engagés par une municipalité pour augmenter les effectifs à cause de la période estivale et à cause du caractère touristique d'une municipalité, les constables spéciaux sont sous la direction du chef de police de la municipalité. Si c'est dans un territoire qui n'est pas couvert par la municipalité, les constables spéciaux qui sont engagés pour la période estivale sont sous l'autorité de la Sûreté du Québec qui couvre ce territoire. Evidemment, ces constables spéciaux sont obligés de respecter les normes d'admissibilité du règlement no 7 de la Commission de police.

M. Bédard: Je vous ferai remarquer que cela pourrait peut-être se faire sans même changer la loi, parce qu'à l'article 70 de la Loi de police on stipule que les constables spéciaux nommés en vertu de l'article 64 exercent leurs pouvoirs sous la direction du procureur général ou sous celle de la personne qu'il indique.

Une Voix: Mais il y a les normes d'embauche.

M. Giroux: II y a les normes d'embauche aussi. Si le procureur général donnait instruction que les constables spéciaux — il ne serait peut-être pas nécessaire d'avoir une loi — dépendent de l'autorité du service de police qui a juridiction sur le territoire, soit la Sûreté du Québec ou un corps de police municipal, cela revient à la même chose, je suis bien d'accord avec cela. Simplement, ce que nous voulons, c'est que les constables spéciaux dépendent d'une autorité policière opérationnelle pour le temps où ils sont en fonction.

M. Lalonde: Si vous le permettez, seulement parce que nous sommes dans les constables spéciaux, à l'article 64, je ne suis pas sûr qu'on parle des mêmes constables spéciaux. Quand vous parlez du tourisme, c'est pour une fonction bien particulière, alors que les constables spéciaux visés par l'article 64 ont une fonction policière; maintenir l'ordre, prévenir le crime. Si vous lisez la fonction des constables spéciaux dans l'article 64, ce sont des policiers d'urgence, au fond.

M. Giroux: C'est cela. C'est ce dont nous parlons.

M. Lalonde: C'est ce que vous voulez dire à la page 81. C'est la même chose?

M. Giroux: Oui.

M. Lalonde: D'accord.

M. Bédard: Dans votre mémoire, également, vous demandez l'établissement d'une préenquête lors de plaintes qui sont portées contre des policiers et vous demandez de prévoir même des amendes dans le cas de plaintes frivoles présentées par des citoyens. Pourriez-vous nous donner de plus amples explications, surtout sur le fait de lui demander de prévoir même des amendes dans le cas de plaintes frivoles?

M. Vézina (Robert): M. le ministre, M. le Président, si nous avons fait cette proposition, c'est pour éviter que des personnes ou des groupes de personnes puissent porter des plaintes contre des policiers et que ces plaintes ne soient pas réellement acceptables. C'est tout simplement pour éviter des abus. On demande une préenquête. Si c'est une plainte qui est jugée futile, qu'on applique les amendes suggérées.

M. Bédard: Selon l'expérience que vous avez, est-ce que vous prétendez qu'il y a des abus dans ce domaine?

M. Vézina: Personnellement, je ne suis pas en mesure de vous dire s'il y a eu des abus. Je pense que ce sont ceux qui font enquête qui sont en mesure de répondre à cette question. Ceux qui auraient des pouvoirs de faire enquête.

M. Bédard: Egalement, votre mémoire parle de la nécessité d'une enquête de la Commission de police sur toute destitution, réduction de salaire d'un policier non salarié ou non représenté par une association accréditée. Pourriez-vous nous donner de plus amples explications là-dessus ou nous expliquer quels sont les problèmes auxquels ont à faire face certains policiers dans le cas de réduction de salaire ou de destitution?

M. Giroux: Nous nous référons tout simplement à l'article 35 de la Loi de police, si je ne me trompe, qui détermine comment le directeur géné-

ral de la Sûreté du Québec peut être destitué. Il ne peut pas l'être par le gouvernement sans une enquête. Alors, nous voyons difficilement qu'il y ait deux modes différents de possibilité de congédiement d'un directeur de police. C'est pourquoi nous disons qu'il doit y avoir une enquête de la Commission de police avant que la résolution du conseil puisse s'appliquer.

Deuxièmement, nous trouvons odieux qu'une décision prise à la majorité absolue du conseil porte une suspension avec réduction de traitement. A ce moment-là, je trouve que l'on condamne avant même que l'enquête soit faite la personne qui est visée dans la résolution du conseil. C'est dans cette optique que nous prétendons qu'il doit y avoir une enquête de la Commission de police sur le congédiement ou la réduction de traitement d'une personne non syndiquée ou d'un policier qui n'est pas couvert par une accréditation syndicale. C'est dans ce sens qu'est notre préoccupation.

M. Bédard: Je vous remercie. On pourra revenir avec d'autres questions. Je vais laisser la parole à mes collègues.

Le Président (M. Boucher): M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: Merci, M. le Président. Je veux remercier les représentants de l'Association des chefs de police et de pompiers du Québec pour leur mémoire qui fait preuve d'une réflexion en profondeur et qui sera sûrement utile aux membres de la commission dans l'examen de ce projet de loi.

J'aurais quelques questions. Au départ, vous portez non pas des accusations, mais des jugements qui m'apparaissent graves dans un cas, par exemple, lorsque vous dites, à la page 3 de votre mémoire: "C'est ainsi que la majorité des municipalités, au sens du Code municipal, ont aboli leur corps de police." C'est factuel, j'imagine que c'est relativement facile de calculer s'il y a une majorité des municipalités au sens du Code municipal qui ont aboli leur corps de police. Et vous continuez: "... que des municipalités régies par la Loi des cités et villes en ont fait tout autant." Je pense que là, tout le monde est pas mal au courant aussi de ce phénomène qui a accompagné ou subi l'inflation dans les quelques dernières années.

Maintenant, vous allez plus loin. Vous dites que les effectifs ont été réduits considérablement au point de mettre en danger le niveau des services et la qualité de la protection publique des populations visées. Cela m'apparaît être un jugement qui est grave. Est-ce que vous pourriez élaborer votre pensée là-dessus? D'abord, est-ce que c'est un jugement général pour toutes les populations visées, c'est-à-dire la majorité des municipalités au sens du Code municipal et les municipalités au sens de la Loi des cités et villes qui ont aboli leur corps policier? Est-ce que, réellement, la protection publique des populations visées ou la qualité de la protection publique a été mise en danger? Est-ce que vous voulez dire que la population, en fait, a été mise en danger ou si c'est simplement une réduction que la Sûreté du Québec n'a pas été capable d'assumer? Est-ce que vous pourriez élaborer votre idée là-dessus?

M. Turgeon (Emile): Voici. Nous avons suivi ce dossier avec beaucoup d'attention, au cours des deux dernières années particulièrement, depuis que le phénomène se produit qu'il y a abandon de corps policiers, réduction des effectifs, non-remplacement des départs à l'intérieur des corps policiers. Cela s'est présenté particulièrement au niveau des petits corps policiers. La municipalité régie par le Code municipal, qui avait institué au cours des années un corps policier de 1, 2, 3, 4 ou 5 policiers, pour des raisons, pour une justification qu'on disait appuyée sur des raisons économiques, abandonnait tout simplement le corps policier et disait à la population: Dorénavant, ayez recours à la Sûreté du Québec, si vous avez besoin des services policiers. Depuis deux ans, il ne faut pas se leurrer, il y a un moratoire effectif sur les corps policiers en ce qui concerne l'embauchage, et il n'en va pas seulement des petits corps policiers, mais aussi des corps policiers d'envergure. Nous n'avons malheureusement pas le dossier ici. Nous avons un dossier monté là-dessus. On pourrait vous donner les endroits, les réductions effectives qui ont eu lieu dans toutes ces villes et villages de tout le Québec. C'est tout de même, à un moment donné, une situation qui est devenue alarmante.

C'est à ce point que nous avons pressé le ministre, à un moment donné, de saisir les municipalités des responsabilités auxquelles la loi les obligeait, particulièrement les villes assujetties à la Loi des cités et villes. Effectivement, le ministre a donné suite à nos pressions et il a fait une mise en garde aux autorités de ces villes. D'une façon peut-être encore plus sournoise, on a continué, dans certains cas, de discontinuer ou d'abandonner certains services policiers à la population en refusant d'embaucher le personnel requis et justifié et tout autant en ne remplaçant pas le personnel à remplacer. On en est venu à créer des situations tout à fait injustifiables. Par exemple, on pourrait citer le cas de villes ayant quatre ou cinq policiers, par écrit on pourrait donner en détail des cas où on abandonnait tout simplement les quatre ou cinq policiers qui étaient à la charge de cette ville, gardant en poste simplement un chef de police que l'on situait derrière un pupitre et qui avait à répondre aux appels téléphoniques et à transmettre ces appels et à faire part des besoins de la population à la Sûreté du Québec. Ce sont des choses qui se sont produites dans plusieurs endroits au Québec. Nous pourrions vous donner un dossier étoffé sur ce sujet. Notre dossier n'est malheureusement pas disponible ce matin.

M. Lalonde: J'interprète votre réponse comme si vous aviez déjà transmis ce dossier au ministre dans vos représentations.

M. Turgeon: II en a été saisi et il connaît aussi les préoccupations que nous avons là-dessus.

M. Lalonde: Est-ce que, depuis deux ans que le phénomène a commencé, il y a eu des correctifs autres que la mise en garde du ministre dont vous avez fait état? Est-ce qu'il y a eu des correctifs? Est-ce que vous pensez que la situation est encore alarmante ou si vous voyez une évolution dans cette situation?

M. Turgeon: La situation semble s'être atténuée. Toutefois, il reste des vestiges de cela et il reste tout de même que cela se perpétue dans le non-remplacement du personnel particulièrement dans les grands corps policiers ici, à l'inverse peut-être des autres, où il y a abandon des services policiers. Nous ne sommes peut-être pas en mesure de vous détailler tout cela, car ces grands corps policiers, nécessairement, ne se rapportent pas à nous pour nous faire part de leurs doléances en cette matière.

M. Bédard: Quand vous parlez de grands corps policiers vous parlez de la CUM, de Québec?

M. Turgeon: Cela pourrait être cela, et la Sûreté même, dont on a des bribes d'information indiquant que c'est une situation qui persiste. (11 h 30)

M. Lalonde: Est-ce que cette situation serait assez alarmante, d'après vous? Je ne veux pas me faire alarmiste; je veux quand même bien mesurer le jugement grave que vous portez. Peut-être que la situation est moins grave que ce qu'elle m'a paru quand j'ai lu votre mémoire. J'aimerais pouvoir terminer. Est-ce que vous croyez que c'est suffisamment grave pour soumettre ces phénomènes de non-remplacement, par exemple, ou de réductions des corps policiers plus considérables qui, d'après vous, n'embauchent pas suffisamment ou ne remplacent pas les départs? Est-ce que vous croyez que c'est suffisamment grave pour soumettre ça à la Commission de police pour enquête ou au ministère? Est-ce que vous l'avez fait?

M. Turgeon: Nous faisons face à une situation qui n'est peut-être pas le cas où l'on devrait faire des représentations à la Commission de police ou ailleurs. C'est une décision qui vient d'autres lois que celles qui affectent la Loi de police ou la bonne marche d'un service de police, par exemple. Ce sont effectivement des crédits qui sont votés dans les municipalités pour les besoins du service de police.

Alors, on doit déduire que le législateur municipal est en voie de nous dire: Voici, diminuez les services que vous devez donner à la population; en effet, il permet de diminuer les effectifs. C'est ce qui se produit dans les villes, par exemple, où l'on s'est départi de son corps policier. Alors, la Sûreté du Québec fait la relève pour l'application du Code de la route, par exemple, ou du Code criminel. La Sûreté du Québec se désiste d'appliquer les règlements municipaux. Alors, les citoyens de cette municipalité qui, au préalable, avaient des constables municipaux qui s'occupaient ou s'affairaient à l'application des règlements municipaux, n'ont tout simplement plus ces services. Les services policiers sont diminués d'autant dans cette agglomération ou au sein de cette population.

Nous faisons face à cette situation. Les services policiers aux citoyens sont à la baisse, effectivement.

M. Lalonde: Je vous remercie. J'aimerais poser quelques autres questions concernant les constables spéciaux ou tout le secteur parapoli-cier. L'association a des propos contre ce phénomène, disant qu'il y a une prolifération de services d'inspection ou de services... C'est dans votre mémoire quelque part, à la page 6, services d'enquête spécialisés. Est-ce que vous avez déterminé ou défini les critères qui devraient présider au choix de services spéciaux — je ne parle pas des constables spéciaux d'urgence, tel que prévu par l'article 64, mais des services d'inspection, par exemple, des services d'enquête spécialisés — à savoir si ça devrait appartenir au système policier ou non? Pensons, par exemple, quand on a, il y a quelques années — je ne sais pas si c'est deux ou trois ans — institué les services pour les billets de stationnement. Je pense que ça fait deux ans. Je pense bien que ça n'a pas soulevé de grands débats. Pensons toutefois aux remarques du groupe Saulnier, le groupe de travail, qui, à un moment donné, disait que, si on avait confié aux policiers le soin d'inspecter certaines installations, certains bâtiments, certains commerces, on n'aurait peut-être pas eu le phénomène de la viande avariée qu'on a découvert en 1975. Je pense que c'est mot à mot ou enfin que c'est un cas précis qui a été mentionné par le groupe Saulnier. Est-ce que vous vous êtes imposé cette réflexion? Quels sont les critères où le service policier commence et où ça finit? A ce moment, ce serait plus facile de déterminer si on confie aux services policiers actuels le soin de certaines surveillances, de certaines inspections. Ou bien si on doit, si les gouvernements doivent instaurer de nouveaux services d'inspection. Si vous voulez, vous pouvez parler des agents de sécurité dans votre réflexion, qu'on a vus...

M. Simard (Guy-Paul): M. le Président, une des raisons pour lesquelles nous nous inquiétons de la prolifération, de la multiplication des corps de police parapoliciers, c'est à cause du manque de coordination. Comme directeur de police dans nos villes, à un moment donné, on voit arriver toutes sortes d'organismes qui nous sont très peu connus et on s'aperçoit qu'ils ont un rôle d'enquête soit pour un ministère ou pour un autre. Nous nous apercevons, comme nous l'avons mentionné tantôt, que la Direction générale de la sécurité publique ne peut pas coordonner comme nous le désirerions. C'est pour cette raison que nous

demandions qu'il y ait un peu plus d'uniformité dans les enquêtes, que ce soit pour le ministère du Revenu, le ministère des Finances, le ministère des Affaires sociales. Nous pensons que les enquêtes appartiennent au policier. C'est pour cette raison que nous, les policiers municipaux, pensons que les citoyens urbains seraient mieux servis si nous continuions notre rôle d'enquêteur connaissant les citoyens, étant plus proches d'eux. Avec une multiplication de différents organismes d'enquête, nous trouvons que nous perdons le contrôle des enquêtes dans nos villes. Si on a besoin de spécialistes, on peut toujours aller en chercher, comme on voit les vérificateurs du ministère du Revenu ou de l'impôt qui, à un moment donné, viennent nous demander assistance pour des perquisitions. Je pense que c'est ainsi que cela devrait être fait, mais ne pas en faire des policiers eux-mêmes.

M. Lalonde: Mais ai-je bien compris votre réponse, à savoir qu'aussitôt qu'il y a possibilité d'enquête, quel que soit le degré de danger de la situation, cela devrait appartenir aux corps policiers? Est-ce que j'interprète bien votre réponse?

M. Simard: S'il y a des perquisitions à faire, comme vous le savez, comme agents de la paix, le Code criminel nous donne ce pouvoir. Nous comprenons mal que ce pouvoir...

M. Lalonde: Un instant! Si vous me le permettez, le Code criminel ne donne pas aux policiers plus de pouvoirs qu'aux citoyens en ce qui concerne les mandats de perquisition. N'importe qui peut aller en demander. C'est un juge qui les donne.

M. Simard: Pour l'exécution, M. le Président.

M. Lalonde: Ah! Pour l'exécution. Oui, d'accord, mais pas pour la demande. Est-ce que j'ai bien compris que c'est au niveau de l'enquête, à savoir aussitôt qu'il y a possibilité d'enquête, cela devrait appartenir à la police? Est-ce que je vous ai bien compris, parce que c'est important? Il y a des sous-enquêtes très simples, des enquêtes de routine, des inspecteurs enquêtent toujours, les agents de sécurité, non, probablement pas, mais est-ce qu'à ce moment-là vous voulez dire que tous les inspecteurs devraient appartenir aux corps policiers et avoir la formation que le policier a, par exemple?

M. Giroux: Ce qui nous préoccupe, ce qui a préoccupé le groupe de travail, le groupe Saulnier, ce sont tout simplement des juridictions qui n'appartiennent pas à la police. Nous sommes d'avis que toutes les lois devraient être appliquées par tous les policiers. Pour donner des exemples, la Loi des liqueurs qui est appliquée par 475 policiers au Québec, alors qu'il y en a 13 000, nous croyons que c'est une lacune parce que c'est impossible pour 450 ou 475 policiers de surveiller adéquatement 25 000 permis de boisson dans le

Québec. Quant à la Loi des transports, les surveillants ou les inspecteurs du ministère des Transports, c'est la même chose. Partout où la sécurité du public est en danger, nous croyons que la police devrait avoir juridiction. Justement, cette prolifération d'organismes parapoliciers confine la police dans un rôle où elle n'a pas de juridiction pour l'application de certaines lois et nous croyons que ce sont des contraintes à l'efficacité policière. Nous ne prétendons pas que la police devrait faire toutes les enquêtes d'inspection ou toutes les inspections.

M. Lalonde: C'est là ma question. Où cela commence-t-il et où cela finit-il? La première partie de votre réponse est tout à fait pertinente, sauf que ce n'était pas à ma question à savoir: Devrait-on confier — mais c'est une question strictement d'administration interne — par exemple, les enquêtes en ce qui concerne la Loi des liqueurs à une escouade spécialisée de 300 ou 400 personnes, alors que cela devrait être tous les policiers? C'est fort possible. C'est strictement... Cela ne demande pas une loi pour changer cela. Je ne pense pas, en tout cas. Ce n'est pas inscrit dans la loi.

M. Bédard: ... de certaines directives au niveau du service.

M. Lalonde: Oui, au niveau du service. Où se termine le service d'inspection et où commence la nécessité de confier cela à des policiers?

M. Giroux: Je pense que la police possède une juridiction sur l'application de toutes les lois; je vais essayer de vous illustrer cela par une image. Une hôtellerie ou un hôtel crée des problèmes sur l'application de certaines lois. Si l'on veut vérifier la sécurité de la bâtisse, on doit avoir recours à un organisme qui vérifie la sécurité de la bâtisse ou vérifier la propreté de l'établissement, on doit avoir recours à un autre organisme. En fait, il y a à peu près quatre ou cinq organismes qui pourraient être impliqués dans l'examen d'un endroit qui peut être non sécuritaire ou qui peut créer des problèmes.

Or, je pense que notre préoccupation, c'est le cloisonnement de chacun de ces organismes et un manque de supervision générale qui permettrait d'aller un peu plus loin ou qui permettrait une plus grande efficacité. Pour répondre strictement à votre question à savoir, si on a établi des critères où doivent s'arrêter les pouvoirs de l'inspection, on n'a pas établi de tels critères, mais je pense qu'on a plutôt réfléchi sur l'autre sens en recommandant d'éliminer les juridictions exclusives.

M. Lalonde: Merci. J'aurais quelques questions en ce qui concerne vos autres recommandations. Quant à l'article 29 — je pense que le ministre y a touché ou vous autres dans une réponse — vous savez que l'amendement proposé à l'article 29 permettrait... Je vais le lire; c'est un ajout, en fait, à l'article 29: "De plus, malgré

l'article 54, si un corps de police municipal n'a pas les effectifs, l'équipement ou l'expertise nécessaires pour agir adéquatement, la Sûreté doit, si elle en est requise par le procureur général, de sa propre initiative ou à la demande d'une municipalité, y assumer l'ordre ou y poursuivre une enquête, selon le cas."

Donc, il y a trois cas où la Sûreté du Québec peut intervenir dans une municipalité où il y a déjà un corps policier. Enfin, s'il n'y en a pas du tout, naturellement, la preuve à savoir si les équipements sont suffisants est facile à faire, mais s'il y en a déjà un, il y a trois cas. Non, c'est dans chaque cas, "si un corps de police municipal n'a pas les effectifs, l'équipement ou l'expertise nécessaires". Donc, c'est toujours dans un cas où il y a déjà un corps policier municipal. Il semble que, si c'est à l'initiative du procureur général, c'est un jugement du procureur général à savoir qu'il n'y a pas les effectifs ou l'expertise nécessaires. Mais, "de sa propre initiative", ce sera un jugement de la Sûreté du Québec à savoir que tel corps de police municipal n'a pas les effectifs, l'équipement ou l'expertise nécessaires. Cela peut même être à la demande d'une municipalité. Je présume — il y aura peut-être une correction à faire — que le ministre a voulu dire de la municipalité concernée et non pas d'une municipalité voisine. En tout cas, ce n'est pas tout à fait clair et on pourra le corriger.

Est-ce que vous ne trouvez pas inusité — enfin, quelle est votre opinion; je ne veux pas vous mettre la réponse dans la bouche — que maintenant la Sûreté du Québec pourra arriver dans une municipalité et dire: Ecoutez, vous n'avez pas l'expertise nécessaire, c'est nous qui en prenons charge?

M. Giroux: Cela voudrait dire que la Sûreté du Québec pourrait, de sa propre initiative — ce sur quoi on s'interroge, évidemment, la Sûreté du Québec, c'est qui? Est-ce que c'est le commandant d'un détachement? Est-ce que c'est ie caporal en charge d'un poste? Cela peut être cela, la Sûreté du Québec — décider, tout d'un coup, qu'on n'a pas l'expertise et arriver chez nous pour assurer l'ordre et la sécurité. C'est pour cela, M. le Président, sans discuter d'aucun des articles, que j'ai fait référence à l'article 29.

M. Lalonde: A la page 66, vous en parlez.

M. Giroux: Nous trouvons extrêmement dangereuse cette prescription du projet de loi parce que, de sa propre initiative, la Sûreté du Québec pourrait remplacer n'importe quel corps de police en prétendant qu'il n'a pas les effectifs et l'expertise. C'est pourquoi, dans notre recommandation, à ce sujet, on dit que cela devient un cas d'assistance et que le corps de police municipal conserve sa juridiction sur l'enquête en cours ou sur l'événement en cours tant et aussi longtemps qu'il ne s'en désiste pas lui-même. A ce moment-là, cela devient une action précise de la Sûreté du Québec.

Evidemment, nous nous inquiétons énormément des termes "de sa propre initiative", "la Sûreté du Québec, de sa propre initiative, peut", parce que, à toutes fins utiles, cela peut vouloir dire que, demain, la Sûreté du Québec peut prendre toutes les enquêtes à travers le Québec sous prétexte que nous n'avons pas l'expertise et les effectifs nécessaires pour résoudre un tel cas. (11 h 45)

M. Bédard: Vous poussez la situation à l'extrême, j'imagine, mais quelles balises, d'après vous, seraient nécessaires pour bien encercler cette réalité qui existe, que vous avez d'ailleurs soulignée, à savoir qu'il y a des corps de police municipaux qui, à la suite de certaines décisions municipales, n'ont pas toute l'expertise, n'ont pas tous les moyens à leur disposition pour donner une pleine efficacité policière, une pleine protection policière aux citoyens? Je pense que c'est une préoccupation que vous avez et que nous partageons. D'un autre côté, il ne faut pas en arriver à une situation, comme vous le dites, qui ferait que la Sûreté du Québec pourrait se permettre de prendre en charge, à la suite d'un jugement sommaire, l'ensemble des activités de protection policière. Comment baliseriez-vous cette réalité-là, dont il faut quand même tenir compte?

M. Giroux: C'est un des buts de notre suggestion, quand on parle de l'inspectorat, qui pourra juger de l'efficacité policière et de l'effectif, en fait, de sa capacité de maintenir l'ordre sur son territoire. C'est, selon nous, basé sur une analyse de l'inspectorat que la Sûreté du Québec pourrait s'introduire dans les municipalités, pour y remplacer les corps de police qui n'auraient pas l'effectif nécessaire. Je pense qu'il faudrait quand même qu'il y ait un moyen d'obliger les municipalités à avoir l'effectif nécessaire pour pouvoir protéger adéquatement la population, mais c'est en partant d'une inspection faite par l'inspectorat qu'on devrait établir l'obligation pour la Sûreté du Québec d'intervenir pour remplacer un corps de police, quand ce n'est pas par une demande d'aide. De son propre chef, je le répète, je pense qu'au point de vue pratique, ça pourrait être ça demain matin.

M. Simard: On pourrait peut-être aussi ajouter que dans le moment, nous trouvons qu'il y a un vacuum à remplir pour la coordination des opérations policières. Il n'y a personne actuellement pour coordonner les opérations policières municipales et de la Sûreté du Québec. C'est pourquoi nous recommandons que la direction générale remplisse ce rôle. Personnellement, je crois que la direction générale pourrait décider si l'effectif et l'expertise sont suffisants.

M. Lalonde: Merci beaucoup. J'aurais encore quelques questions, si vous me permettez, c'est assez considérable, votre mémoire. Il y a deux questions. Sans préjuger — on va attendre; d'ailleurs, ce n'est pas le rôle de l'Opposition de juger ni de décider, mais je suis assez réceptif à la division des pouvoirs que vous suggérez en ce qui

concerne la Direction générale de la sécurité publique, la Commission de police et l'inspectorat, quoiqu'il y a peut-être une petite contradiction — j'aimerais vous demander de corriger cette impression que j'ai. Aux pages 84 et 85, quand vous parlez de la Commission de police, vous souhaitez qu'elle conserve seulement des pouvoirs quasi judiciaires. Là-dessus, je pense que vous vous rangez du côté du rapport Saulnier. Mais à la page 85, vous dites, au troisième paragraphe: "Le rôle de conseiller les municipalités et les services de police se traduit par un service d'aviseurs techniques et évite que l'on ait recours aux firmes privées de consultants." Sans le dire carrément, je comprends que vous voudriez que la Commission de police conserve son rôle de conseiller, mais ça me semble contredire ce que vous avez dit tantôt, à savoir qu'il peut y avoir un conflit d'intérêts et je suis d'accord avec vous là-dessus. Lorsque la Commission de police conseille, par exemple, sur l'embauche d'un directeur et qu'il s'avère y avoir un problème six mois plus tard, la commission est dans une position assez difficile pour juger en dernier recours. Est-ce que je vous ai bien compris ou si c'est une erreur?

M. Giroux: Vous me laissez perplexe quant à ma réponse. L'énoncé qu'on fait à la page 85 vient du fait, je pense, que nous recommandons la décentralisation de la Commission de police, pour avoir des commissaires de chacune des régions de la province de Québec, de façon à rendre plus accessible, plus facile et plus expéditif le traitement des plaintes contre la police, contre les municipalités. On pense aussi que ces commissaires pourraient, à un certain moment, conseiller les municipalités. Evidemment, je suis d'accord avec vous qu'on accorde un pouvoir semblable à deux organismes de conseillers, c'est dans le concept d'une décentralisation de la Commission de police, et il y a peut-être, je dois admettre avec vous, une petite contradiction dans notre argumentation.

M. Lalonde: Si vous aviez à choisir, peut-être pas maintenant, est-ce que vous ne croyez pas plus logique et cohérent qu'on donne le rôle de conseiller à un organisme seulement pour éviter qu'il y ait des conseils contradictoires qui viennent de deux organismes? Est-ce que ce ne serait pas logique, d'après la position que vous avez prise jusqu'à maintenant, de confier ce rôle de conseiller, en plus du rôle de coordination, de dessin de programmes et tout ce qu'on a dit jusqu'à maintenant, à la direction générale, c'est-à-dire au gouvernement? Là-dessus, le ministre vous a demandé si vous ne croyiez pas qu'il pourrait y avoir un danger d'ingérence politique si le gouvernement, par le biais du ministère de la Justice, de sa Direction générale de la sécurité publique...

M. Bédard: M. le Président, je m'excuse, je voudrais quand même corriger la phraséologie. Je n'ai pas parlé d'ingérence politique, surtout de contrôle gouvernemental.

M. Lalonde: De contrôle gouvernemental, mais, dans la réponse, on a parlé d'ingérence politique.

M. Bédard: Je ne suis pas inquiet, de toute façon, je ne fais pas d'ingérence politique.

M. Lalonde: Non, pas de la part de... Le ministre est susceptible ce matin.

M. Bédard: Non.

M. Alfred: Si on laisse faire, M. le député...

M. Lalonde: Rassurez-vous.

M. Bédard: Je connais le sens des nuances de mon collègue.

M. Lalonde: C'est épouvantable de me prêter des intentions comme cela, M. le Président. Je voulais simplement dire...

M. Bédard: Je ne vous en ai pas prêté.

M. Lalonde: Je voulais simplement dire qu'il ne m'apparaît pas indésirable, au contraire, que le gouvernement prenne les décisions qui entraînent des dépenses. En fait, je pense que c'est tout à fait conforme aux principes mêmes de notre régime, à savoir que c'est celui qui taxe qui doit décider comment les dépenses sont faites. Au contraire, la situation actuelle m'apparaît même inusitée. Cela n'a peut-être pas créé de problème majeur qu'un organisme indépendant comme la Commission de police puisse, par ses pouvoirs de réglementation, occasionner des dépenses. Je comprends que ces règlements doivent être approuvés par le lieutenant-gouverneur en conseil, mais on sait très bien que, dans le système actuel, le lieutenant-gouverneur en conseil, le gouvernement ne peut même pas les modifier. Il peut simplement les refuser. Cela n'a jamais créé de problème particulier, parce qu'on se parle, mais il reste que c'est inusité et que, s'il y avait à choisir, actuellement, dans le cheminement de la réflexion, je pense qu'on devrait plutôt confier au gouvernement le soin de légiférer. Par la loi il l'a, mais aussi le soin de réglementer toute la mission de police.

M. Bédard: Vous faites bien de le noter.

M. Lalonde: D'ailleurs, c'était le sens, c'est-à-dire que la loi 41 allait à mi-chemin, elle donnait au gouvernement le pouvoir de réglementer, mais elle conservait à la Commission de police certains pouvoirs de réglementation et je vous avoue qu'actuellement, comme je le dis, après trois ans, une réflexion plus longue, je préférerais que toute réglementation qui peut entraîner des dépenses soit strictement réservée au gouvernement. L'ingérence politique dans la police, au fond, on l'a vu, ce n'est pas à ce niveau-là, c'est dans les opérations mêmes, et il n'est pas question que la Direction générale de la sécurité publique s'impli-

que dans les opérations policières, dans les enquêtes, etc. C'est strictement une question de définition de politique, et il me semble que définir une politique appartient à un gouvernement. Cela n'appartient pas à un organisme indépendant, qui peut servir de conseiller au gouvernement, qui peut servir de conseiller privilégié, si vous voulez, mais qui doit conserver aussi son indépendance. C'est pour cela que je pense que le rôle de conseiller devrait rester dans une définition qui serait beaucoup plus rigoureuse, qu'on ne retrouve pas d'ailleurs dans la loi 48, et je le déplore. Je pense qu'on devrait pencher vers la Direction générale de la sécurité publique pour le rôle de conseiller. C'est ce que je voulais clarifier ici dans votre mémoire.

M. Bédard: Me permettriez-vous une question? Ce serait, à la suite de ce que vous dites. Comment concilier ce contrôle gouvernemental au niveau de l'ensemble des opérations policières, de l'ensemble du problème de la sécurité des citoyens, avec un autre concept dont on parle souvent, qui est aussi important au moment où on parle de décentralisation, à savoir l'autonomie municipale. Il y a toujours un équilibre qu'il faut... Je parlais de "loi d'équilibre", dans le sens qu'il y a des concepts qui se heurtent continuellement. Il y a le concept de la protection policière nécessaire pour les citoyens. Il y a l'autre concept de la décentralisation et de l'autonomie des municipalités. Ce n'est pas toujours facile de trouver une solution. Il est presque impossible de trouver une solution qui satisfasse complètement les deux instances qui ont des préoccupations bien particulières, très légitimes.

M. Giroux: Le rapport Saulnier suggérait que l'inspectorat ait le pouvoir d'imposer à une municipalité un effectif policier, pour être capable de répondre adéquatement à toutes ces obligations. Evidemment, brutalement, cela est pas mal arbitraire; par contre, le rapport Saulnier suggérait aussi que la municipalité puisse, dans le domaine policier, avoir recours à la Commission de police, pour trancher le débat en ce qui concerne le domaine policier et à la Commission municipale, en ce qui concerne le domaine de la fiscalité ou des dépenses. Alors, je pense qu'à ce moment-là, cela conservait l'autonomie des municipalités, tout en assurant par cette mesure une sécurité adéquate aux citoyens. Vous savez, certaines municipalités peuvent attacher plus d'importance aux loisirs qu'à la police ou à la sécurité des citoyens. Evidemment, c'est pour cela que le rapport Saulnier trouvait importante cette chose-là et confiait le rôle à l'inspectorat d'étudier et de définir, en fait, les besoins en matière policière pour une municipalité, selon la criminalité du territoire à couvrir.

M. Lalonde: Si vous me permettez, j'aurais une question, avant de terminer ou avant de passer la parole à un autre. J'aurais une parenthèse sur l'inspectorat. Je vous avoue que je n'ai pas encore bien compris ce que le groupe de travail a voulu dire. Je comprends que c'est une suggestion qui doit subir la réflexion ultérieure. Mais c'est encore assez confus, je pense, à part le fait que cela relève de l'Assemblée nationale, ce qui rassure automatiquement tout le monde. Mais je me méfie de ces réassurances de tout le monde en disant que cela relève de l'Assemblée nationale quand on ne sait pas comment cela va marcher. Je pense que le ministre a raison de s'imposer une réflexion plus grande sur la question de strictement savoir ce qu'est l'inspectorat, comment cela marche et quel est le rôle de cet inspectorat indépendant du gouvernement, comparé au rôle de la Commission de police qui n'a, à ce moment-là, qu'un rôle quasi judiciaire, d'accord, mais qui perdrait même ses pouvoirs d'enquête. Quelle serait la coordination des pouvoirs d'enquête de la Commission de police et de l'inspectorat? C'est une autre chose. Il peut y avoir un chevauchement quasiment inévitable. Enfin. Je voulais vous poser une question concernant la Gendarmerie royale du Canada. Vous dites ici...

Une Voix:...

M. Lalonde: J'entends, de l'autre côté de la table, des mots que je ne répéterai pas, M. le Président.

M. Bédard: Je pense qu'on...

M. Lalonde: Le ministre n'aimerait pas que je les répète.

M. Grenier: Si vous les transférez en Haïti, ils vont avoir de l'ouvrage. (12 heures)

M. Lalonde: Dans votre inspectorat, par exemple, à la page 85, il se rapporterait à l'Assemblée nationale et, dans son rôle de contrôle, il soumettrait la Sûreté du Québec et tous les services de police municipaux, une inspection annuelle. La GRC n'est pas là-dedans. D'autre part, vous dites à la page 86: Dorénavant, les membres de la Gendarmerie royale du Canada pourraient être soumis à la suite des plaintes, aux enquêtes de la Commission de police du Québec... Je pense que c'est à peu près le seul endroit, peut-être qu'au début aussi vous en parlez, où vous parlez de la Gendarmerie royale du Canada, en particulier. On sait que la loi en parle sans en parler. C'est une indication du courage du gouvernement, à savoir, de faire indirectement par la voie de la réglementation ce qui est le principal but du projet de loi, soit de soumettre la GRC au contrôle du gouvernement.

M. Bédard: Pardon, Commission de police.

M. Lalonde: C'est encore plus courageux, on le fait faire par la Commission de police, imaginez-vous.

M. Bédard: Je ne pense pas qu'on ait nécessité.

M. Lalonde: Pour se cacher, on se cache dans ce gouvernement.

M. Bédard: On a déjà dit très clairement.

M. Alfred: Vous charriez.

M. Bédard: Juste deux secondes.

M. Lalonde: J'ai le droit d'être en désaccord avec le ministre, non?

Le Président (M. Boucher): S'il vous plaît, M. le député de Papineau.

M. Lalonde: Ici dans ce beau pays du Québec on a droit d'être en désaccord.

M. Alfred: Oui, on a même le droit de charrier. C'est la démocratie.

Le Président (M. Boucher): M. le député de Papineau, s'il vous plaît. M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: On sait qu'au cours des événements, surtout des dernières années, la situation où, d'une part, la province a la juridiction exclusive de l'administration de la justice et, d'autre part, à cause des deux niveaux de gouvernement des policiers relevant d'une autre juridiction travaillent dans le territoire, cette situation a créé des problèmes. Dans l'hypothèse, sans faire de jugement politique, où il serait désirable que pour exercer cette compétence d'administration de la justice qui, de toute évidence, englobe au moins en partie la mission policière... Premièrement, est-ce que vous croyez que simplement le pouvoir d'enquête que vous proposez à la page 86 est suffisant?

Deuxièmement, à la page 78, vous dites: Les chevauchements doivent également être éliminés entre les organisations policières, Sûreté du Québec, services de police municipaux et Gendarmerie royale du Canada, puisque ce phénomène crée plutôt des structures compétitives et d'affrontements, alors que l'objectif visé devrait être une plus grande collaboration et complémentarité entre les services de police.

Est-ce que, d'après vous, le projet de loi no 48 permettra d'accomplir cette plus grande collaboration et complémentarité?

M. Simard: Cela revient à ce que nous disions tantôt, M. le Président. C'est que dans le moment, il y a certaines lois que les policiers municipaux devraient être en mesure d'appliquer par leurs pouvoirs d'agents de la paix et qu'en pratique nous ne voyons pas. Comme par exemple, on a parlé de la Loi de l'alcool du Québec tantôt, en ce qui a trait à la GRC, en matière de drogue, nous savons qu'en théorie nous avons les pouvoirs, mais qu'en pratique plusieurs corps de police réfèrent cela à la GRC. Là encore, il y a un manque de coordination. Il y a un vacuum à remplir. C'est là-dessus que nous aimerions que le gouvernement partage mieux les rôles. En ce qui a trait au pouvoir d'enquête de la Commission de police, je pense que les membres de la GRC étant des policiers, se soumettraient à des plaintes non frivoles, mais à des plaintes légitimes, aux enquêtes de la GRC comme tout policier au Québec que ce soit municipal ou provincial.

M. Lalonde: Est-ce que vous croyez que le pouvoir d'enquête de la Commission de police serait suffisant pour obtenir les résultats escomptés? De plus, est-ce que le projet de loi no 48, tel que vous le connaissez, est suffisant pour obtenir la plus grande collaboration et la complémentarité entre les services de police que vous souhaitez?

M. Simard: Dans le moment, le projet de loi no 48 ne va pas loin dans ce sens.

M. Lalonde: D'après vous, cela n'accomplirait pas ce que vous demandez, ce que vous souhaitez à la page 78. On sait que le projet de loi no 48, en plus des pouvoirs d'enquête de la Commission de police, prévoit toute une série d'autres démarches, d'autres pouvoirs sur les agents de la paix dont on ne sait pas qui ils sont. Je ne sais pas si ça serait simplement des gardes-chasse ou de la GRC. Mais ce sera le gouvernement qui va décider ça tranquillement.

Le projet de loi 48 prévoit des pouvoirs de contrôle sur tous les policiers; de renseignement, les articles 2b, le nouveau 47b; les rapports du directeur, l'article 2c; les registres — on enregistre beaucoup dans ce gouvernement — les mécanismes de contrôle d'aptitudes, les pouvoirs d'enquête, la suspension de la prescription d'un droit, d'un recours à une convention collective ou d'une sentence arbitrale, l'ordonnance d'inhabilité à exercer les fonctions d'agent de la paix. Donc, beaucoup plus de pouvoirs que ceux que vous mentionnez, à savoir simplement le pouvoir d'enquête de la Commission de police.

Est-ce que tous ces pouvoirs, en plus des recommandations de sanction de l'article 17, sont de nature à obtenir ce que vous souhaitez à la page 78, c'est-à-dire une plus grande collaboration et complémentarité entre les services de police?

M. Simard: On a remarqué à l'article 47 qu'il est question d'un code de déontologie pour la Sûreté du Québec. Nous sommes en faveur d'un tel code; seulement, nous déplorons le fait qu'il n'est pas question qu'il soit appliqué aux policiers municipaux. Nous aimerions avoir le même code uniforme pour tous les policiers du Québec, en déontologie et en discipline. Nous remarquons qu'on parle seulement des policiers de la Sûreté du Québec. On ne voit pas pourquoi nous ne serions pas inclus là-dedans.

M. Lalonde: Je pense que ce n'est pas tout à fait la question que je vous avais posée. Mais, quand même, c'est...

M. Giroux: Je pense que le pouvoir d'enquête que nous souhaitons que la commission ait sur tous les agents de la paix... On sait que, quand la Commission de police fait une enquête sur un département, elle va en profondeur dans les dossiers et dans le travail. Ce pouvoir d'enquête par lequel la Commission de police aurait un pouvoir sur les membres de la Gendarmerie royale aurait pour effet d'examiner en profondeur les agissements de la Gendarmerie royale au Québec. Je pense que c'est une des préoccupations de votre question. Quant à moi, je pense que ce pouvoir permettrait à la Commission de police d'examiner les actes et les gestes posés par des gendarmes de la Gendarmerie royale en tant qu'individus ou en tant que groupes d'individus sur la plainte d'un citoyen ou la plainte d'un organisme quelconque. Elle aurait ce pouvoir d'examiner quand même le travail effectué par la Gendarmerie royale du Canada, comme elle a le pouvoir de le faire pour la Sûreté du Québec ou les corps de police municipaux.

M. Lalonde: Est-ce que vous voyez un conflit et de quelle façon pourriez-vous suggérer de dénouer ce conflit entre le pouvoir, par exemple, de déclarer un agent inhabile à exercer ici et le fait qu'il relève d'une juridiction séparée, différente? Au fond, c'est ça; je pense bien que tout le monde, en principe, est d'accord pour que la plus grande collaboration, la plus grande coordination des services policiers au Québec, qu'ils relèvent du gouvernement, des municipalités ou du fédéral, existe. Qu'est-ce que vous faites de la dualité de juridictions et comment vous arrangez-vous pour que ça marche? En ce qui me concerne, dans le projet de loi 48, il n'y a absolument rien pour que ça marche. Il y a un tas de choses pour créer des affrontements; des contrôles, d'accord. Mais est-ce qu'on veut que ça marche ou non? C'est la question. D'après ce que je vois — je ne veux pas vous mettre la réponse dans la bouche — le gouvernement, par le projet de loi 48, ne veut pas que ça fonctionne. Il veut que ce soit un affrontement et, comme le disait le député de Papineau tantôt, que la GRC sacre son camp du Québec. C'est à peu près ça que vous nous avez dit tantôt?

M. Bédard: Je ne crois pas que c'est ce qu'on a dit.

M. Lalonde: C'était ça? Non? A moins que vous ne le retiriez.

M. Alfred: Je m'excuse, M. le député.

M. Lalonde: Ce n'est pas ça que vous avez dit. Je suis prêt à m'excuser si j'ai...

M. Alfred: Vous continuez à charrier.

M. Lalonde: Ah bon! Alors, vous ne niez pas l'avoir dit. Au fond, est-ce que ça peut marcher, le projet de loi 48, avec les objectifs que vous définissez à la page 78, de collaboration, de complémentarité et de la plus grande coordination?

M. Giroux: Je pense qu'il y a deux volets à votre question. Evidemment, le pouvoir qu'accorde l'article 2 à la Commission de police de décréter qu'une personne n'ait plus les qualités pour être agent de la paix, je ne suis pas un expert en relations fédérales-provinciales, mais je ne sais pas si la Commission de police aurait ce pouvoir, selon nous, puisque le pouvoir d'enquête et tous les agents de la paix du Québec, elle aura également ce pouvoir pour les gens de la Gendarmerie royale du Canada. Cela impliquerait-il que le membre de la Gendarmerie royale ne serait plus un membre de la Gendarmerie royale? Je ne le pense pas du tout, parce qu'il s'agirait qu'il soit transféré dans une autre province pour qu'il continue d'avoir son droit d'agent de la paix.

M. Lalonde: Comme en Colombie-Britannique. A ce moment-là, par exemple, c'est en fonction d'une entente. C'est la GRC qui agit comme police quotidienne municipale, mais il y a un organisme de la province pour réglementer le comportement des policiers. Toutefois, la décision n'est pas que le membre n'est plus membre de la Gendarmerie royale, sauf qu'il est obligé d'aller... Soit qu'il soit suspendu par son propre corps policier, dépendant de l'acceptation, ou qu'il soit transféré ailleurs.

M. Giroux: Je pense que le pouvoir d'enquête de la Commission de police équivaut à la même chose ici au Québec. Evidemment, je ne pense pas non plus qu'il ne puisse plus être un policier, mais il pourra être un policier qui devra aller exercer ailleurs.

M. Lalonde: Je m'excuse d'avoir été si long, mais votre mémoire soulève beaucoup de problèmes. Il est très intéressant et nous a permis d'aborder, je pense, à peu près les principales questions soulevées par le projet de loi no 48. Je vous en remercie.

Le Président (M. Boucher): Merci, M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Bédard: M. le Président...

Le Président (M. Boucher): M. le ministre.

M. Bédard: ... me permettez-vous, sur cet angle-là, concernant les agents de la Gendarmerie royale et des différents corps policiers du Québec, je pense que nous avons la même préoccupation: qu'il y ait la plus grande collaboration possible entre les différents corps policiers en fonction d'une meilleure efficacité. Nous avons également la préoccupation que chaque agent de la paix, qu'il appartienne à quelque corps policier oeuvrant au Québec, oeuvre dans la légalité et selon des critères ou une discipline qui est la même pour tous les agents de la paix dans l'ensemble du

Québec. Je ne sais pas. Concernant le contrôle des opérations, la coordination des opérations qui sont des objectifs qui vous sont chers, je ne sais pas si vous avez une solution au problème constitutionnel, mais je pense que vous savez qu'on peut désirer le plus grand contrôle possible, la meilleure coordination possible de toutes les actions policières au Québec, sauf que vous savez que le contrôle des opérations de la Gendarmerie royale, le contrôle de la coordination et d'opération de la Gendarmerie royale ne relève pas de l'autorité provinciale, mais de l'autorité fédérale. Je pense qu'il y a certains jugements qui sont assez explicites, ce qui nous place dans la situation par un projet de loi, quels que soient les objectifs qu'on peut vouloir atteindre, il y a toujours les problèmes constitutionnels qui sont là, ce qui nous place dans la situation de ne pas pouvoir régler certains problèmes, mais d'en profiter peut-être pour espérer, comme vous le faites d'ailleurs, la plus grande coordination possible, la plus grande collaboration possible entre les différents corps policiers au Québec.

M. Giroux: Disons quand même, M. le ministre, que le simple fait que la commission ait le droit de faire enquête sur les agissements d'un membre de la Gendarmerie royale, devrait nécessairement avoir comme résultat une plus grande collaboration et une conduite similaire à celles des autres policiers du Québec.

Le Président (M. Boucher): M. le député de Mégantic-Compton.

M. Bédard: C'est l'avance que nous avions et nous l'avons prise complètement.

Le Président (M. Boucher): M. le député de Mégantic-Compton. M. le député de Papineau.

M. Alfred: M. le Président, tout à l'heure, le ministre de la Justice a parlé de l'autonomie municipale. Or, on a d'abord soumis la question d'une autonomie régionale. J'ai été conseiller municipal, et c'est la raison pour laquelle, lorsque mon tour viendra, je vais longuement vous interroger là-dessus. Vous êtes pour ou contre une autonomie municipale ou une autonomie régionale qui vous enlèverait, bien sûr, les caprices de certains conseillers municipaux ou de certains maires, ce que j'étais moi-même? On peut, à n'importe quel moment, décider: On vous veut ou on ne vous veut pas. Le ministre a parlé d'autonomie municipale — je le respecte — et il a été conseiller municipal. Je trouve que c'est une situation désavantageuse pour le policier. Moi-même, je parle en connaissance de cause. (12 h 15)

Je vais vous demander si vous allez opter pour une autonomie municipale ou pour une autonomie régionale?

M. Cyr: Je voudrais faire une seule intervention. Dans notre mémoire, nous optons...

M. Alfred: Je vais vous interroger longuement là-dessus.

M. Cyr: Ah bon!

Le Président (M. Boucher): Alors, vous allez revenir à votre tour, M. le député de Papineau? M. le député de Mégantic-Compton.

M. Grenier: M. le Président, je voudrais d'abord féliciter l'Association des chefs de police et de pompiers de la province de Québec de nous avoir fourni ce volumineux document qui a été pensé, qui n'est pas seulement en feuilles. On se rend compte qu'il contient de considérables suggestions qui seront à retenir, bien sûr. Elles attirent l'attention du gouvernement et des partis d'opposition à cette table. Vous y avez certainement mis plusieurs heures afin d'être vraiment positifs et d'apporter votre part à cette table de travail.

J'aimerais que vous nous disiez si les petites municipalités devaient se prévaloir de l'article 25 qui dit qu'une municipalité peut établir, par règlement, et maintenir dans son territoire un corps de police — cela veut donc dire qu'elle peut ne pas le maintenir — cela va avec l'article 52 de l'ancienne loi — pensez-vous que, maintenant, si plusieurs villes décidaient soudainement de se prévaloir de cet article et d'abolir leur corps policier, la Sûreté du Québec serait en mesure de répondre adéquatement, de combler ce vacuum qui pourrait nous arriver au Québec?

M. Cyr: M. le député de Mégantic-Compton, je ne crois pas que la Sûreté du Québec puisse remplir ce vacuum. Je peux peut-être vous donner des exemples assez concrets. J'habite une petite ville, qui se nomme Chambly. On est entouré de deux petites villes qui ont aboli leur corps de police. Depuis l'abolition de ces corps de police, la Sûreté du Québec nous demande assistance. S'il y a un accident grave de l'autre côté du pont, elle nous appelle. On est trop loin, voulez-vous nous assister? Sur une autre route, dans la ville voisine, s'il y a un accident grave, on est obligé d'assister la Sûreté du Québec. Je ne crois pas, messieurs, que la Sûreté du Québec puisse combler le vacuum de policiers manquant dans certaines de ces petites villes.

M. Grenier: Vous mentionnez, aux pages 80 et suivantes de votre mémoire, que, dans les municipalités de 5000 et moins de population qui décideraient de se prévaloir de cet article, les policiers pourraient être intégrés à différentes échelles de travail, différents types de travaux, mais je pense que vous nous donnez un témoignage selon lequel il ne faudrait quand même pas que, soudainement, on décide de se prévaloir de l'article 25 et d'abolir son corps policier. On l'a vu dans certaines municipalités qui ont enfreint l'article 52 de l'ancienne loi, avec les résultats qu'on connaît. Je pense qu'on devra, lorsqu'on étudiera l'article, si ça devait se produire, au moins donner du temps,

permettre qu'on ait le temps de s'organiser et d'intégrer, donner à ces gens qui pourraient être intégrés à la Sûreté du Québec le temps qu'il faudra. J'imagine que, si ce n'est pas dans la loi, il faudra au moins y penser dans les règlements. Vous n'avez pas de suggestion dans ce sens-là, pour des laps de temps qui pourraient être donnés, par exemple, pour intégrer ces membres de la sûreté municipale à la Sûreté du Québec?

M. Cyr: Cela a été pensé, mais ça n'a pas été mis sur papier. Cela prend peut-être un peu de temps avant de replacer un policier dans le même contexte. Peut-être qu'un an serait suffisant pour réintégrer ce policier dans un autre travail ou dans le travail policier, suivant sa compétence.

M. Grenier: Est-ce qu'il y a plusieurs petites villes qui pourraient se prévaloir de cet article? Chacun tient à son autorité locale — il faut vivre dans une petite ville pour le savoir, j'en ai quelques petites dans ma circonscription; on est jaloux de son autorité, de la bonne jalousie, j'entends — mais, si on n'est pas contraint par des problèmes de budget, est-ce que vous pensez qu'il y a plusieurs municipalités qui voudraient se départir de leur corps policier, si ce n'est pas une obligation, si elles n'y sont pas contraintes par le budget?

M. Cyr: On n'a pas tâté le pouls dans la province, mais, actuellement, nous avons 47 municipalités qui pourraient se prévaloir de cet article.

M. Grenier: Bon. D'après vous — j'aimerais que vous me répondiez bien honnêtement — est-ce qu'il y a des municipalités qui auraient avantage... Il y a dans votre groupe des gens... Je pense bien qu'on connaît les corps policiers municipaux. Est-ce difficile de travailler? Est-ce qu'il n'est pas plus facile, dans certains cas, de faire agir la Sûreté du Québec, dont les membres ne sont souvent pas des locaux... On sait que la CECO, par exemple, a fait oeuvre dans certaines municipalités, elle rend d'énormes services à des municipalités. Vous connaissez le travail et j'aimerais que vous me répondiez honnêtement. Est-ce que, dans certains cas, ce n'est pas préférable que des policiers, qui vivent à l'extérieur de nos petites villes, viennent, à l'occasion, régler certains problèmes que des policiers locaux ont plus de difficultés à régler? Il faut bien dire les choses comme elles le sont, ils ont de la difficulté à entrer à cause du contact, ils sont là depuis trop longtemps; ils vivent là, ils ont des parents, des amis, qui sont partout... Je touche un problème qui est vrai, je le sais, cela a été l'objet d'enquêtes récemment. Est-ce que cela se présente souvent ou si, dans l'ensemble — vous le savez — vous pouvez régler vos problèmes, dans les petites localités quand même assez correctement?

M. Cyr: Oui. Cela dépend de la municipalité, parce que nous parlons ici de municipalités de moins de 5000 et de plus de 5000 de population.

Nous suggérons qu'une ville de 5000 de population ait au moins un corps policier de dix membres. Ce qui peut créer des problèmes, c'est que les gens, comme vous le dites, demeurent dans l'endroit, ils ont été élevés là. Mais je vous donne l'exemple de ma ville où ce sont des gens qui viennent du milieu et ça n'a causé aucun problème; même, je crois qu'ils ont réglé certains problèmes peut-être mieux qu'un corps policier qui viendrait de l'extérieur, qui ne connaît pas les habitudes de ces gens qu'on traite peut-être un peu cavalièrement dans certaines occasions.

M. Grenier: Remarquez que je ne veux pas dire que localement parfois on rend difficile la vie des corps policiers locaux par les conseils municipaux qui souvent ne prennent pas leurs responsabilités. On l'a vécu dans certaines localités. Dans l'ensemble, vous nous dites que si les municipalités ne sont pas contraintes par le budget que cela rend de meilleurs services en gardant le corps policier local que de le transférer à la Sûreté du Québec.

M. Cyr: M. le député de Compton, est-ce que je pourrais demander à un de mes collègues, le directeur, M. Pouliot, de Drummondville d'intervenir? Il connaît bien le dossier.

M. Pouliot (Yves): M. le ministre, MM. les membres de la commission, souvent on entend dire que les agents de la police municipale au Québec, parce qu'ils vivent et travaillent dans un milieu où ils sont nés, cela peut être dangereux. Ce sont des policiers assermentés, les policiers du Québec et les constables municipaux. Le fait qu'ils soient nés dans une ville ne doit pas permettre qu'on mette en doute leur intégrité dans leur travail policier. Il y a une autre chose sur laquelle notre association est d'accord, c'est que lorsqu'une ville de 5000 habitants ou moins ne peut pas se payer un corps de police, la Sûreté du Québec assume la responsabilité. On est d'accord. Par contre, dans un but d'équité, que l'on dise ce que cela coûte à une ville qui ne veut pas maintenir son corps de police ou qui ne veut pas créer son corps de police préalablement. Cela va dissuader ceux qui veulent charrier, qui veulent abolir leur corps de police, par plaisir, ou par dépit parce qu'ils n'aiment pas la police. C'est au détriment des citoyens du Québec.

Il y a une autre chose, M. le Président, M. le ministre et MM. les membres, nous sommes d'accord qu'un corps de police municipal, à un certain moment, n'ait pas l'effectif nécessaire ou les personnes avec les qualifications requises dû à son nombre. Nous parlons d'une ville qui a dix ou douze policiers. On est d'accord, à ce moment-là, que la Sûreté du Québec prête assistance à ces corps de police municipaux, mais ce que nous disons par contre, c'est qu'il faudrait tout de même avoir un peu de décence et que le tout soit fait en collaboration avec le directeur de cette municipalité.

Notre association est pour l'autonomie de sa police locale, mais, lorsqu'on tient compte du rapport Saulnier, il dit: "Dans un but d'une plus grande efficacité, on devrait régionaliser les forces policières." Nous disons: On devrait régionaliser en tenant compte d'une régionalisation naturelle des services policiers. Nous croyons que, s'il y a une régionalisation naturelle des forces policières au Québec, à ce moment, vu que le corps policier sera plus nombreux, on pourra qualifier des personnes pour pouvoir enquêter sur à peu près toutes les formes de crimes, sauf peut-être des crimes particuliers.

En tant que vice-président de l'Association des chefs de police et de pompiers du Québec, je ne voudrais pas qu'on mette en doute la compétence des policiers municipaux du fait que ces gens sont venus au monde dans une ville. Seront-ils honnêtes ou malhonnêtes ou feront-ils bien leur travail de ce fait? Nous disons, nous de l'Association des chefs de police et de pompiers du Québec, qu'il faut repenser la police, qu'il faut faire de la police préventive au Québec. La seule manière de pouvoir faire de la police préventive au Québec, c'est en ayant des policiers qui connaissent leur milieu, qui vont pouvoir impliquer les citoyens, qui vont pouvoir inciter les citoyens à participer à leur propre protection. Merci.

M. Grenier: Merci. Je suis content de vous l'entendre dire, parce que j'étais pour entrer là-dedans en disant que la vraie prévention se fait par des gens. Quand on connaît bien les gens, il suffit d'avoir un peu de psychologie, je pense, pour le comprendre. Localement, c'est l'impression qu'on a.

Maintenant, quand vous dites, monsieur de Drummondville, qu'il faudrait savoir, par exemple, pourquoi les municipalités se départissent de leur sûreté locale, qu'il faudrait connaître les charges qui leur arriveront, parlez-vous des municipalités de 5000 habitants et moins ou de l'ensemble des municipalités qui devront se départir de leur corps policier?

M. Pouliot: Remarquez bien, monsieur de la commission, ce qui se produit, c'est que, dans notre mémoire, nous disons: II devrait y avoir la Commission de police, il devrait y avoir la sécurité publique et l'inspectorat. Maintenant, nous laissons au gouvernement le soin de décider ce qui sera fait. Selon nous, il devrait y avoir sûrement un organisme qui évaluerait quels sont les besoins de la population, quels sont les moyens de payer de la population, quels sont les genres de criminalité au niveau de ces régions. A la suite de ces études ou recherches, il pourrait peut-être recommander aux autorités gouvernementales, tant municipales que provinciales, des mesures à prendre.

Nous pensons qu'il devrait y avoir un organisme qui pourrait évaluer, au lieu de laisser cela à des administrateurs municipaux qui, à un certain moment, soit par caprice ou peut-être pour des raisons pécuniaires — on leur reconnaît ces problèmes — décident d'abolir tout simplement cavalièrement la police municipale au Québec. Ce qui est le plus regrettable, c'est que tous ces gens, qui ont aboli leur corps policier pensent qu'il n'y aura pas d'effet à cela. Messieurs, je vous mets en garde. La criminalité, on va pouvoir l'évaluer, à la suite de l'abolition de ces corps de police, à moyen terme et à long terme. Il ne faut pas se conter de peurs, il ne faut pas se faire d'illusions, on n'a pas augmenté le personnel de la Sûreté du Québec; ils étaient déjà débordés dans leurs fonctions et on dit: Ils vont assurer le vacuum. Je trouve cela regrettable parce que cela est fait au détriment de la sécurité publique. C'est fait au détriment de la police actuelle au Québec qui veut faire de la police préventive. On veut faire de la police préventive et on nous ôte des outils. On réduit notre personnel. Comment fera-t-on pour se rapprocher de la population, si on en vient à ne plus avoir de gens et qu'on peut tout simplement répondre aux urgences. En tout cas, je pense qu'il devrait y avoir un organisme qui évaluerait le bien-fondé de ces abolitions de corps de police ou de diminution de personnel, afin de conseiller tant les gouvernements municipaux que le gouvernement provincial, mais ne pas laisser cela au bon vouloir ou aux caprices d'administrateurs parfois peu scrupuleux.

M. Grenier: Merci. Vous avez là des suggestions qui vont certainement être retenues par les gens autour de la table ici. J'aimerais savoir l'impact que cela pourrait avoir sur l'efficacité de la Commission de police du Québec qui va voir passer son effectif à 18 000 agents de la paix. D'après vous, est-ce que vous pensez que c'est un saut qui est impressionnant, qui peut déranger, qui peut faire des chaos importants? (12 h 30)

M. Vézina: Messieurs les membres, je ne crois pas que ce soit un chaos aussi important que cela, personnellement. La Commission de police doit être capable de supporter cela.

M. Grenier: Maintenant, j'ai une dernière question sur les policiers d'autoroute que nous entendrons. J'aimerais connaître quand même votre opinion. On les rencontrera ici au cours de la journée; ils désirent, je pense, selon leur mémoire, être reconnus comme corps policier. Est-ce qu'une coopération, est-ce que cela peut être efficace pour vous que ces gens aient la même autorité et la même préparation d'abord, la même autorité et est-ce qu'il y a là occasion de coopération et d'appliquer une meilleure justice?

M. Giroux: Je pense bien, M. le Président, qu'on dit, dans notre mémoire, qu'on endosse les recommandations du rapport Saulnier sur la majorité des points, et nous sommes d'opinion que la police de l'autoroute devrait être une police à part entière, je veux dire être complètement policière. Par contre, nous suggérons, par rapport à ce qu'on disait tantôt, sur les juridictions limitées, que la police de l'autoroute soit intégrée à la Sûreté du Québec avec, évidemment, le statut que possèdent les agents de la Sûreté du Québec, de façon que ça soit une police à part entière, mais

qu'il n'y ait pas non plus de délimitation dans la juridiction des corps de police.

Le Président (M. Boucher): M. le député de Mégantic-Compton, nous devons suspendre nos travaux à 12 h 30 pour les reprendre à 14 heures.

M. Bédard: Me permettriez-vous une dernière question? Je ne sais pas si les membres de la commission ont encore plusieurs questions à poser. En ce qu'il me regarde, je n'en aurais qu'une.

Le Président (M. Boucher): Est-ce que vous êtes d'accord pour prolonger de cinq minutes?

M. Bédard: Oui, puis on en aura terminé. Le Président (M. Boucher): M. le ministre.

M. Bédard: J'aurais une question qui est soulevée dans d'autres mémoires qui vont suivre où on estime qu'il serait à propos que les policiers du Québec ne soient plus munis d'armes à feu. Qu'est-ce que vous pensez de cette suggestion?

M. Giroux: Je pourrais peut-être répondre-Une Voix: Si vous les mettez dans des chars blindés...

M. Giroux: ... M. le ministre, si vous nous assurez que les criminels n'auront plus d'armes non plus...

M. Bédard: A l'exemple de ce qui existe en Angleterre, comme vous le savez.

Une Voix: M. le ministre...

M. Bédard: C'est une suggestion parmi certaines qui nous sont avancées dans différents mémoires.

M. Pouliot: M. le ministre, on aimerait que cette question soit longuement étudiée. Nous croyons qu'il doit y avoir des modifications, peut-être dans les armes ou l'équipement qu'utilise la police. On est d'accord avec ça, que l'on repense à quel genre de travail ou quel genre de services doit rendre la police aux citoyens. Seulement, ce qui nous préoccupe, et on espère que les législateurs seront prudents, on ne veut pas évoluer trop vite, trop rapidement, parce que nous avons comme premier rôle de protéger la vie et les biens des citoyens et on est persuadé que les autorités vont nous laisser les moyens d'effectuer notre travail, qui est tout de même un travail dangereux. On vous fait confiance là-dessus, M. le ministre.

Ce qui nous préoccupe, c'est qu'on se pose la question à ce moment-ci, lorsqu'on voit avec quel... A tous les matins, on voit des meurtres gratuits, des meurtres crapuleux. On est inquiet du fait que, de plus en plus, on réduit les moyens mis à notre disposition. Si on veut que réellement on puisse protéger adéquatement les citoyens du Québec, si on veut qu'on puisse les servir, on demanderait à ceux qui nous dirigent, avant de prendre des décisions de cette importance, d'y réfléchir mûrement. On voudrait tout de même continuer d'être des policiers motivés. On voudrait tout de même continuer d'être de bons serviteurs pour les citoyens.

M. Bédard: Merci. Je n'ai pas d'autres questions. Je vous remercie encore une fois de votre mémoire.

Le Président (M. Boucher): M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: Je voudrais seulement savoir... Le député de Papineau avait indiqué son intention d'interroger longuement les membres de l'association...

M. Bédard: J'imagine que cela viendra.

M. Lalonde: II semble satisfait? Bon! Très bien. Je voulais simplement protéger le droit de parole du député de Papineau. Je vous remercie infiniment.

Le Président (M. Boucher): Merci. La commission suspend ses travaux jusqu'à 14 heures.

Suspension de la séance à 12 h 36

Reprise de la séance à 14 h 22

Le Président (M. Boucher): A l'ordre, s'il vous plaît!

A la fin de la séance de ce matin, nous avions terminé l'audition du mémoire de l'Association des chefs de police et de pompiers. J'appellerai maintenant le Syndicat professionnel des chefs de police et pompiers et officiers supérieurs de la protection publique, représenté par Me Léonce E. Roy.

M. Roy, est-ce que c'est vous qui représentez? Est-ce que vous voulez présenter les gens qui sont avec vous et procéder à la lecture de votre mémoire?

Syndicat professionnel des chefs de police et pompiers

M. Roy (Léonce E.): A ma gauche, M. Jules-André Houde qui est président du syndicat professionnel depuis quelques années et qui est aussi directeur de police de Vanier. A ma droite, M. Yvon Veilleux qui est directeur-trésorier du syndicat professionnel et qui est directeur de police de Lauzon.

M. le Président, MM. les membres de la commission, je n'ai pas l'intention de lire intégralement notre mémoire qui a une cinquantaine de pages, tenant pour acquis que les membres de

cette commission ont terminé au moins leur septième année, et très probablement un cours universitaire et qu'ils sont capables de lire des rapports qu'ils exigent d'ailleurs d'avoir au moins trois semaines avant qu'on se présente devant eux. Ils ont sûrement eu le temps de lire ce mémoire. Je voudrais surtout avoir l'occasion de répondre aux questions que peut susciter le mémoire que nous avons rédigé à l'intention du Syndicat professionnel des chefs de police.

De façon très brève, comme aperçu général, puisque c'est sur le projet de loi 48, inutile de vous souligner que nous avons été quelque peu surpris de son contenu. La Loi de police avait onze ans. En 1976, nous attendions une montagne du gouvernement précédent comme amendement à la Loi de police, puisque c'est une loi qui avait eu un certain rodage et qu'on s'était habitué à une Loi de police qui coordonne tout le secteur de la protection publique au Québec. Or, on nous est arrivé avec le projet de loi 41 qui nous a semblé être à peine un vallon.

M. Bédard: A peine un vallon!

M. Roy: Je ferai remarquer au ministre parrain — au sens non péjoratif du terme — qu'avec le projet de loi 48, on arrive avec un button. On a eu l'impression que le vallon n'avait guère augmenté; il est demeuré sensiblement le même, sinon il a diminué, M. le ministre. Respectueusement, je ne vous dirai pas que c'est une souris, mais c'est un button.

On avait beaucoup espéré de cette réforme de la Loi de police du Québec qui a onze ans d'usage, d'autant plus que le Parti québécois avait nommé le groupe Saulnier pour faire enquête ou plutôt le Parti québécois avait nommé le groupe Saulnier pour faire enquête sur la situation générale et faire rapport. Le gouvernement actuel connaissait déjà sensiblement l'état de la protection publique au Québec puisqu'un des membres éminents de ce gouvernement a rédigé un volume assez connu au Québec: "Police et politique" de Guy Tardif, ministre des Affaires municipales. Alors, M. Tardif a fait le tour du jardin. Lorsque nous relisons les commentaires et les remarques de l'honorable ministre Guy Tardif, on voit qu'au moins un des membres de ce gouvernement connaît très bien la situation qui prévaut au Québec depuis plusieurs années.

Quoi qu'il en soit, nous en sommes rendus au projet de loi no 48 et c'est sur ce projet de loi que nous avons l'intention de faire porter le principal de nos remarques. Dans un premier temps, nous avons récapitulé un peu ce qu'était la situation actuelle et vous verrez dans une première partie qu'on parle de l'intégration et de la dépolitisation des corps de police municipaux. Il nous semble que les principaux problèmes soulevés par l'administration policière au Québec, c'était que l'administration de ces corps de police était peut-être trop près des élus municipaux. Eventuellement, dans une intégration et dans un mouvement de régionalisation, peut-être que la police s'étant écartée des élus de la première base et montant à un second palier on pourrait voir la police devenir moins politique, comme le prétend M. Guy Tardif dans son volume.

Quoi qu'il en soit, on a beaucoup espéré du rapport Saulnier. Finalement, il est arrivé et il y a eu des recommandations. Il semble que le projet de loi no 48 garde le rapport Saulnier au moins à la chambre froide pour un certain temps puisque nous n'y avons pas vu les réformes auxquelles on pouvait s'attendre. Le projet de loi no 48 nous semble un projet assez timide, un projet qui est discret même sur certaines questions, un projet qui est même conciliant avec les administrations municipale, locale et régionale. Il y a même une certaine obscurité dans ce projet de loi.

M. le Président, nous avons parlé, dans une seconde sous-partie de la première partie de notre mémoire, de la Commission de police, de sa fonction, de son rôle. Nous avons signalé quelles étaient ces déficiences, ce qui nous semblait être certains vices au point de vue administratif, au point de vue juridictionnel et, dans une deuxième partie, nous avons abordé l'avenir avec les aspects positifs qu'apporte le projet de loi, puisqu'il y a certains aspects positifs, M. le ministre, et nous les avons soulignés avec emphase. Je dois même dire qu'il y a certains aspects positifs qu'on ne retrouvait pas même dans le projet de loi 41. Il y a aussi certains aspects négatifs qu'on voudrait, somme toute, voir corrigés avant que nos législateurs adoptent, d'une façon définitive, le projet de loi qui sera sanctionné par le lieutenant-gouverneur.

Dans les amendements qui doivent être soulignés, il y a entre autres l'article 2 du projet de loi 48, où on souligne que dorénavant: "... un policier municipal ou un constable spécial ne cesse pas d'agir à titre de préposé lorsqu'il exerce des fonctions d'agent de la paix. "Le Procureur général est, pour les fins du présent article, réputé l'employeur d'un policier municipal qui agit en qualité d'agent de la paix dans un territoire autre que celui de la municipalité qui l'emploie."

Bien sûr, pour certains députés ou membres de cette commission, cela peut paraître un article anodin, mais, messieurs, je vous signale que c'est loin d'être un article anodin puisque vous avez des directeurs de police et des membres d'état major qui ont été poursuivis dans l'exécution de leurs fonctions, qui n'ont pas été condamnés, qui ont été acquittés, qui ont dû payer des frais et des honoraires, tout au moins des honoraires de $2000, $3000, des chefs de police qui gagnaient $12 000 par année. Des juges qui ont été poursuivis dans l'exécution de leurs fonctions, je n'en ai jamais vus qui ont payé des honoraires professionnels; des députés qui ont été poursuivis dans l'exécution de leurs fonctions, je n'en ai jamais vus qui ont payé des honoraires professionnels, les ministres, strictement dans l'exécution de leurs fonctions — évidemment, s'ils sortent et font du libelle diffamatoire, c'est une autre question. (14 h 30)

Alors, vous avez des agents de la paix qui ont eu à se défendre avec des poursuites coûteuses. Je pense au cas d'un directeur de police de Mont-

magny, il y a peut-être une vingtaine d'années, à qui cela avait coûté $35 000 pour se défendre. Je pense au directeur de police pas loin de Montréal, pas loin de Saint-Hyacinthe à qui cela a coûté environ $10 000 pour se défendre. Finalement, ils n'avaient pas d'immunité, bien sûr, dans l'exécution de leurs fonctions, ils avaient des problèmes. Ils étaient poursuivis, ils étaient obligés d'assumer les frais de leur défense. Mais plus que cela, on a eu un directeur de police qui a pourchassé dans les limites de son territoire un criminel qui venait d'une autre municipalité. Il a été obligé de sortir des limites du territoire et, par la suite, il a été poursuivi en dommages et intérêts par ce criminel qui avait été condamné aux Sessions de la paix. Le gars, cela lui a coûté $3000 pour se défendre parce que la ville disait: Nous n'avons pas à défendre notre directeur, il n'exerce pas sa charge dans le cadre des limites de la municipalité, il exerce en dehors — j'allais dire le nom de la ville — alors, nous ne payons pas. Effectivement, la ville n'a pas payé et ce pauvre citoyen, directeur de police, a dû en prendre pour son rhume et payer ces dépenses.

Il est inutile de vous dire que l'article 2a est vu avec beaucoup d'attention par notre syndicat professionnel.

L'article 2b dit: "Toute personne qui appartient à une catégorie d'agents de la paix désignée par règlement du lieutenant-gouverneur en conseil "peut" fournir à la commission les renseignements prévus par ce règlement en la manière qui est prescrite." L'article 2c, bien sûr, c'est le revers de la médaille. Si le procureur général est responsable des agents de la paix qui sortent de leurs limites territoriales, qui sortent de la juridiction de leur municipalité, il est bien normal que le procureur général puisse exiger des rapports. Nous n'y voyons rien d'anormal, et je pense bien qu'on ne pourra pas taxer le gouvernement du Québec et le ministre de la Justice de vouloir faire une police d'Etat par cet article.

Messieurs les membres de la commission, parmi les autres articles importants, il y a l'article 52 de la Loi de police. Vous savez sans doute que les cités et villes du Québec, depuis plusieurs années, violent et défient la Loi de police, qui est une loi d'ordre public, que le ministre de la Justice et procureur général, article 106 de la loi actuelle, a l'obligation de faire respecter. Le ministre de la Justice avait l'obligation de le faire respecter même avant 1976. Eh bien, messieurs les membres de la commission, la Commission de police elle-même, dans un rapport qu'elle publiait il y a quelques mois, disait que 25 cités et villes ne respectaient pas la Loi de police. Cela, c'est la Commission de police, un organisme gouvernemental, qui le disait. Je le souligne dans mon mémoire. Mais, qui est le gardien de l'ordre public et de la paix et de la sécurité au Québec? Je comprends qu'on peut prétendre en certains lieux que la Gendarmerie royale pouvait avoir une certaine partie de ce gardiennage. Mais, encore, je pense que c'est le ministre de la Justice qui doit s'assurer de la protection de l'ordre public et du respect d'une loi d'ordre public. Or, quand on dit que 25 municipalités au Québec ne respectent pas une loi d'ordre public, où va-t-on? Vous savez, ce n'est pas tout de faire des lois, de les amender, de les corriger et d'ajouter des cataplasmes. Encore faut-il que ces lois soient appliquées. Je pense que la Loi de police est l'exemple d'une de ces lois qui était violée et défiée, mais, attention! par des autorités démocratiquement élues, des autorités locales.

MM. les membres de la commission, je ne veux pas flatter le gouvernement qui est au pouvoir; je dois dire que, depuis au moins deux ou trois ans, je l'ai dit dans mon mémoire, on a peut-être eu plus de facilité, disons, à obtenir une collaboration, une coopération du gouvernement pour que soit respectée la loi avec ses carences et ses faiblesses. Je vais vous le dire personnellement parce que j'en ai été témoin dans différents cas, mais, quand je vois des municipalités qui violaient la loi et que le ministère de la Justice ne voulait rien savoir... On disait: A chacun son jardin et qu'on applique la loi comme on voudra, nous autres, cela ne nous occupe pas. J'ai déjà entendu quelqu'un en autorité me dire cela. Les cheveux m'en dressaient sur la tête.

A l'occasion de cette refonte ou des amendements apportés à la Commission de police, je suis heureux de voir qu'à l'article 52 de la Loi de police, enfin, on veut donner des dents à cette loi. A ce moment, des dents, ce sont des dents financières et pécuniaires. Et les municipalités, les cités et villes qui ne voudront pas assumer ces obligations d'ordre public, qui ne constitueront pas leur corps de police ou qui ne le maintiendront pas en tout temps, le gouvernement, par son ministre de la Justice, sur recommandation de la Commission de police, pourra décider, à ce moment, d'assigner la Sûreté du Québec et de dire à la Sûreté du Québec: Assumez l'ordre et la paix au niveau local, au niveau régional et nous enverrons le compte à la municipalité. Si elle ne paie pas, on le fera homologuer, on saisira la municipalité s'il le faut. C'est cela que veut dire l'article 52c. C'est enfin une disposition qui a des dents et je crois qu'en 1968, lorsque le gouvernement d'alors a adopté la Loi de police, c'était une loi gâteau pour plaire à certaines associations qui réclamaient cette loi depuis plusieurs années, mais une loi qui n'avait aucune dent. Il y avait bien sûr une Commission de police qui faisait des recommandations, qui faisait des voeux, qui exprimait de bons voeux, mais, finalement, cela mourait au niveau des voeux. Avec l'article 52a, 52b et 52c, les amendements apportés par le gouvernement actuel, enfin, la Loi de police pourra être respectée.

Maintenant, MM. les membres de la commission, nous remarquons qu'il y a eu aussi certains amendements qui ont été apportés à l'article 63. Cet article 63, à notre avis... Je dois vous dire que je défends les intérêts socio-économiques des directeurs de police, membres d'état-major et les non-syndiqués au sens du Code du travail. Je ne défends pas d'abord l'ordre public. Je défends les intérêts socio-économiques de mes membres.

C'est ce que fait notre syndicat. MM. les commissaires, la seigneurie revient fréquemment, vous comprendrez pourquoi. D'ailleurs, quand je vois messieurs les juges ici, on a une déformation professionnelle.

Messieurs les membres de la commission, il y a eu un amendement apporté à l'article 63 de la Loi de police. A notre avis, cet amendement était ardemment sollicité et souhaité. Mais il nous semble que cet amendement est insuffisant. Je dois vous dire, il y a des membres de la Commission de police qui sont là, que même l'article 63 de la Loi de police, parfois, n'a pas été compris par les propres membres de la commission. Ils pourront me répondre. On dit: La destitution ou la réduction de traitements, prévue dans une résolution visée au présent article était uniquement: a), b) et c).

Je vais vous lire c): "A compter du moment où la commission approuve la résolution." Il y a des membres de la commission qui ont permis à une ville de retourner après l'adoption d'une de ses résolutions et dire à la ville: C'est vrai, on ne peut pas juger en appel; aller appliquer votre résolution. Mais ce n'est pas ça qu'on dit à l'article 63c. Il dit: "Avant que soit approuvée la résolution; à compter du moment où la commission approuve la résolution", donc après effet, après l'approbation par la commission et qu'est-ce qu'elle fait pour l'approuver? Il faut qu'elle entende l'appel. Alors, avant d'entendre l'appel, on dit: Aller appliquer votre résolution. C'est ce qui fait que des ambiguïtés se créent dans l'application d'une loi lorsqu'on l'applique avec certaines irrégularités.

Maintenant, je remarque que le gouvernement actuel dans son amendement à l'article 63 n'apporte guère d'éclaircissement sur le paragraphe c) de l'article 63. J'aurais aimé, j'aurais souhaité qu'il nous apporte cet éclaircissement.

Evidemment, les corrections que le législateur ou le ministre de la Justice, le parrain, apporte par l'amendement à l'article 63, vous les retrouvez à l'article 30 du projet de loi 48. Alors, pour être sûr que je suis bien compris, je reprends cet amendement: Cette résolution doit être signifiée à la personne qui en fait l'objet, de la même façon qu'une assignation en vertu du Code de procédure civile, avant, c'était dit: "en main propre". Je pense que dans le projet 41, on disait "en main propre". C'était bien, mais là, c'est un peu moins qu'en main propre, ça pourrait être une personne raisonnable de son domicile, ça pourrait être à la femme, ça pourrait être à n'importe qui. Le chef va être en dépression, il va être rendu à l'hôpital, on signifie ça à n'importe qui. C'est une amélioration rétrogradante.

En tout cas, continuons. "Cette personne peut, toutefois, interjeter appel de la décision de la commission si — là il y a trois petites subdivisions — a): "La municipalité a agi en l'absence d'une recommandation de la commission." Ah! Là, on voit que la Commission de police du Québec aura un pouvoir de recommandation, un pouvoir de conseil avant l'imposition de la sanction. Alors, vous allez voir une municipalité avec des élus municipaux qui font de la politique au bas niveau dont parlait Guy Tardif dans son volume qui vont aller à la commission et dire: Notre chef de police, il fonctionne mal. C'est une tête forte. Il n'est pas obéissant. Il est mauvais garçon. Il ne veut pas respecter nos voeux. Il ne veut pas respecter notre politique. Nous autres, on a l'intention de le suspendre pour trois mois ou de le destituer. Que pensez-vous de cela, messieurs de la commission, messieurs les commissaires? Les juges et commissaires vont dire: Etes-vous bien sûrs que c'est cela que vous nous dites, les représentations que vous faites? Oui, il n'est pas endurable. Il est ceci, il est cela. Ce sera un côté de la médaille. Ils vont dire: Oui, c'est un gars qui mériterait la porte. Il a quel âge? Il a 50 ans. Mettez-le à la porte. Alors, là, ils vont s'en retourner dans leur municipalité et ils vont dire: On a eu l'approbation de la commission: A la porte! Très belle sécurité pour les directeurs et membres de l'état-major, une sécurité que les juges n'aimeraient pas avoir, de toute manière.

Deuxième petit b): "Si la municipalité donne suite à une recommandation rendue par la commission, mais impose une sanction plus forte que celle qui est prévue." Voici le cas. On se présente vis-à-vis de la Commission de police, cet organisme-conseil qui a de l'expérience, que je respecte, puisque le passé nous démontre qu'il doit être respecté. La commission, savez-vous ce qu'elle va dire? Elle va dire: Oui, ce garçon-là n'est pas si mauvais que cela. On le connaît. Vous nous faites des représentations. Une journée de suspension pour le faire réfléchir un peu. Il va méditer pendant une journée et tout cela.

La ville va lui imposer un mois de suspension. Elle va se tromper et va mettre un mois. Le gérant municipal qui a tous les pouvoirs dans une municipalité va faire préparer la résolution: un mois de suspension. Alors, on va dire: Wo!, messieurs, vous avez excédé la recommandation qu'on vous a faite, nous de la Commission de police. Donc, le chef pourra venir en appel devant nous. Mais, encore là, le décor va être étalé, les arbres vont être plantés, les légumes vont être là. Vous arrivez devant la commission et ils vont vous entendre. Cela va être un banc qui ne saura pas le problème. Mais le banc va savoir que la Commission de police par ses membres est venue et a dit: Une journée de suspension, au moins une journée de suspension puisqu'ils vont dire: Vous avez excédé notre recommandation. Il va falloir que quelqu'un dise qu'il y a excès ou non et de combien. Encore là, la commission va se rasseoir et va dire: Nous, on est neutre dans cela. On va entendre cela.

Troisième division, petit c): "Des faits nouveaux sont survenus depuis la recommandation de la commission."

Imaginez-vous que si vous êtes un bon avocat, vous n'êtes pas une "bottine", vous allez vous présenter devant la commission et vous allez dire: Peut-être que c'est la recommandation que vous avez faite, messieurs de la commission, mais il y a des faits nouveaux. La commission va être obligée d'entendre cela, elle va dire: On va faire une preuve, comme on dit en droit criminel — M. le

ministre de la Justice le sait probablement — de voir dire. On va voir si le directeur peut invoquer des faits nouveaux par rapport aux faits qui étaient mis en preuve devant les membres de la commission. Quand les exposés auront été faits devant les membres de la commission, il n'y aura personne parmi les témoins pour représenter le chef. Il n'y aura que les fonctionnaires, les hauts fonctionnaires ou les membres, les commissaires qui vont entendre cela, et il va y avoir les élus municipaux, les braillards qui vont être là. Là, ils vont pleurer et dire: Non, ce n'est pas un fait nouveau, ils nous l'avaient dit quand ils sont venus nous voir.

Messieurs les commissaires, je pense que les amendements qui sont proposés à l'article 30, qui sont d'un bon naturel, qui sont des amendements qui voulaient sortir la commission d'une certaine ambiguïté — puisque la commission portait deux casquettes: casquette de conseil et casquette de quasi-tribunal avec pouvoir quasi judiciaire; on cassait la résolution et on rétablissait le chef dans son poste. Là, on a dit: On va sortir la commission de cette ambiguïté, des pouvoirs strictement cura-tifs qu'elle avait avant en vertu de l'article 63, on va lui donner des pouvoirs préventifs. Là, elle va prévenir le pire et les directeurs vont pouvoir s'assurer d'une justice et d'une équité très grandes puisque cela va se négocier avant qu'ils se présentent là. Les élus municipaux vont aller faire les jeux avant que la décision soit prise. (14 h 45)

En soi, l'intention de l'amendement à l'article 63, M. le parrain, est très honnête et très bonne, mais je pense que dans la pratique, vous allez mettre les directeurs de police, les membres d'état major et tous ces non-syndiqués membres de corps de police dans une situation plus inéquitable et plus injuste, même sans prêter de mauvaises intentions à la Commission de police. Dans le passé, j'ai vécu souvent avec les membres de la commission dans des décisions et je peux dire qu'ils font un excellent travail. Même sans collusion avec la Commission de police, imaginez-vous que la commission, c'est un organisme neutre, elle ne prend pas pour les policiers, ce n'est pas la commission de protection des policiers, et elle ne prend pas pour les citoyens, strictement. Elle ne prend pas pour les autorités municipales, elle est neutre, elle va arriver et M. le maire, avec son bras droit, celui qui crie le plus fort dans le conseil, va venir se plaindre à M. le Président ou à un de ses membres, juge, commissaire, et va dire: Ecoutez, M. le directeur Untel ne veut pas faire ce qu'on lui dit, on lui dit de ne pas prendre sa voiture-patrouille pour se rendre à son domicile et il la prend quand même. On lui dit, quand son détective fait une enquête, qu'il habille son détective, on aimerait qu'il soit costumé, et lui dit qu'il peut y aller en civil. Cela ne fait pas, il désobéit. Insubordination, suspension d'un mois! La commission dit: Non, une journée. Lorsqu'on va venir en droit d'appel, déjà les jeux vont être alignés entre un juge, la commission comme juge, et une des parties. Le procès va être amorcé à ce niveau.

Les amendements à l'article 63, je crois que ce sont des amendements quelque peu pitoyables. J'aurais même préféré, M. le ministre, les amendements qu'avait apportés le gouvernement qui a précédé le vôtre à la loi no 41 disaient: Lorsqu'il y aura une commission d'enquête, lorsque la Commission de police aura joué avec les autorités municipales, lorsqu'il y aura certaines — je ne parlerai pas de collusion — discussions entre elles, à ce moment-là, après une enquête, qu'elle soit privée ou publique, on déférera cela à la Cour provinciale, à un banc de trois juges, des juges qui ne sont pas à la Commission de police, mais trois juges qui sont à l'extérieur de la commission. Alors, on a la chance d'avoir quelque chose d'un peu plus objectif.

Ce que le Syndicat professionnel des chefs de police réclame, c'est que cette ambiguïté de l'ancien article 63 cesse et non pas que se perpétue l'ambiguïté par un nouveau texte encore plus ambigu, mais qu'on clarifie au moins le minimum, qu'on nous apporte l'amendement de la loi no 41 de 1976 du gouvernement précédent.

M. le Président et messieurs les membres, nous avons élaboré notre pensée à un certain moment, surtout en conséquence de l'article 52, sur le fait que des municipalités ne respectaient pas leurs obligations légales. Imaginez-vous! Ce sont des autorités élues, des conseils municipaux, et je dois vous dire que je suis même quelquefois en dissidence avec des tribunaux quand les tribunaux considèrent des conseils municipaux comme des incapables. Parfois, les tribunaux vont dire: Ecoutez! La municipalité a adopté un règlement ou une résolution, mais elle n'avait pas le pouvoir de le faire; on annule donc cela. Le contrat qui a été passé pour la réfection des chemins, c'est bien dommage, M. Untel — l'entrepreneur — vous avez investi $62 000 et vous perdez vos $62 000, parce que les conseillers municipaux sont des incapables. Ils n'avaient pas le droit d'adopter cela, ils n'avaient pas de fonds de réserve pour payer cela. Alors, oubliez cela.

J'ai représenté un client qui demeure près de Québec et qui avait investi quelque $60 000. A un moment donné, les juges disent: Non, on ne peut pas y aller; ces travaux-là n'auraient pas dû être faits. Le fond de la route, on dit: On va revenir chercher le gravier et le reste. La municipalité dit: Ne touchez pas à cela. On ne peut pas aller toucher à cela, parce que les incapables, les élus municipaux avaient adopté la résolution, et ce n'est pas la résolution qu'ils devaient adopter. Ce devait être un règlement et la proposition des électeurs propriétaires... En tout cas, ils n'avaient pas respecté la procédure. Vous savez, je n'en reviens pas encore de considérer les élus municipaux comme des incapables.

A ce moment-ci, avec les amendements qui sont projetés, avec la fonction de conseil préventif de la Commission de police, bien sûr qu'on considère encore les élus municipaux comme encore un petit peu plus incapables. Mais la solution n'est pas là: c'est dans la dépolitisation et la régiona-

lisation de la police. On le disait il y a cinq ans et on a encore la même position: on continue à le dire.

Je crois que le rapport Saulnier avait dressé la voie par ses recommandations. Je vais vous dire honnêtement que je n'ai pas analysé en profondeur le rapport Saulnier, parce que je n'ai pas qu'un dossier, je ne fais pas que du travail pour la police. J'ai lu en diagonale les recommandations et j'ai vu dans ces recommandations l'essentiel de la philosophie que poursuit le Syndicat professionnel des chefs de police. La voie de la régionalisation est une voie qui nous plaisait déjà depuis 1974-1975. On aurait préféré que le gouvernement s'embarque résolument dans cette voie et continue les recommandations de ce groupe d'étude Saulnier. On prend des experts, on prend des gens connaissants pour se faire éclairer et je pense qu'on avait là un rapport qui était à même d'aider ce gouvernement à faire un pas en avant. M. le ministre de la Justice, je crois que votre projet de loi, avec toute déférence et respect, ce n'est pas le projet de loi qui ferait dire du ministre Bédard que c'est le Napoléon de la codification des lois policières.

M. Bédard: Je n'y tiens pas.

M. Roy: M. le ministre, votre nom ne passera pas à la postérité avec ce projet de loi. Je crois sincèrement que vous aviez l'occasion rêvée, avec le rapport Saulnier, de passer à "l'aggiornamento" comme on disait durant le temps du concile, pour réaligner toute cette affaire-là avec une expérience de onze ans de la Loi de police, organisme qui a de l'expérience, qui a de la compétence, qui a l'effectif qu'il faut pour conseiller. Vous avez une Direction de la sécurité publique au ministère de la Justice, vous avez les grands corps de police des communautés urbaines, Québec, Hull; alors, avec tout cela, on pouvait réaligner une réforme de la protection publique au Québec sans que ce soit une aventure.

A un moment donné, je dis que le gouvernement du Québec s'est parfois montré complaisant et, au risque de faire moins rire ceux qui sont en face du ministre, je dirais que cette complaisance-là était peut-être plus forte avant 1976. Il y a une complaisance où on fermait les yeux pour l'application de la Loi de police. On fermait littéralement les yeux et la Loi de police, ce n'était pas important. Je vais vous montrer comment ce n'était pas important. Il y a eu un règlement no 11, M. le ministre, qui a été adopté en 1974. Ce règlement no 11, le gouvernement qui vous a précédé, pendant deux ans, n'a pas voulu le réviser. De 1976 à 1979, vous n'avez pas révisé le règlement no 11. Cela reste lettre morte.

On dit: On ne veut pas s'impliquer politiquement. Ce sont les affaires municipales. C'est une belle histoire. Je vais vous dire pourquoi c'est une belle histoire. Le jour où le gouvernement du Québec a dit, dans son Code du travail: Quand les policiers ne s'entendront pas pour négocier leurs conditions de travail, les conseils d'arbitrage, les présidents des conseils d'arbitrage, les arbitres patronaux, les arbitres syndicaux vont déterminer les conditions de travail. Qui sont-ils? Savez-vous qui c'est? Ce sont des émissaires nommés par le ministre du Travail qui déterminent la convention collective par voie de sentence arbitrale et qui vont dire aux autorités municipales: Messieurs de la municipalité, voilà un constable classe 3, classe 4, c'est $492 par semaine, ou c'est $441 par semaine. Vous allez dire: Oui, mais c'est la municipalité qui décide cela. Non. Vous savez bien que les conseils d'arbitrage sont nommés par le gouvernement du Québec, par le ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre. Le président est nommé sur une liste de 25. C'est lui qui détermine les conditions de travail des salariés syndiqués de la municipalité, mais, quand cela passe au chef ou aux membres de l'état-major, le gouvernement dit: Non, on ne se mêle pas de cela. On laisse cela aux élus municipaux. Le gouvernement précédent — M. Lalonde est là — nous a dit la même chose. A un moment donné, à un congrès de la Commission de police, il a dit: Vous savez, le principe "No taxation without representation", la taxe est perçue du gouvernement municipal, on n'a pas d'affaire à aller s'immiscer dans l'administration provinciale. C'est très beau, M. le ministre. Je devrais dire maintenant M. l'ex-ministre. C'est très beau, nous partageons votre opinion. Mais qu'est-ce que vous faites des syndiqués de la municipalité qui se voient imposer des conditions de travail par une autorité autre que les autorités municipales? Là, la réponse ne vient pas. Ce même gouvernement ne semble pas nous apporter la réponse dans son projet de loi no 48. Il ne l'apporte pas plus.

Le Président (M. Boucher): Me Roy, puis-je vous demander de vous adresser, toujours, au président?

M. Roy: Ah! M. le Président, excusez, je vous négligeais, mais à l'avenir je vous promets, M. le Président, que je ne vous négligerai pas une seule minute.

Le Président (M. Boucher): Je répéterai tout ce que vous direz aux membres.

M. Roy: J'ai remarqué, M. le Président, ce matin, que vous étiez peu loquace dans les questions. C'était tout le temps les autres qui les posaient.

Le Président (M. Boucher): Je ne parle jamais. Je ne pose pas de questions, moi.

M. Roy: J'avais une idée pourtant géniale et vous me l'avez fait manquer.

M. Bédard: Ce sont toujours les idées géniales qui nous éhappent.

M. Roy: Pardon?

M. Bédard: Ce sont toujours les idées géniales qui nous échappent.

Le Président (M. Boucher): Je m'excuse de l'interruption.

M. Roy: M. le Président, je vais faire comme à la cour, je vais demander de relire les notes sté-nographiques.

Pour le financement de la protection publique au Québec, il est bien sûr que les municipalités, quand cela touche l'ordre public, l'hygiène, la santé, que fait l'Etat? Il donne des subventions; réseau d'aqueduc et d'égouts, $2 500 000; réseau de protection-incendie, $1 500 000. Quand on arrive à la police, on dit: Cela, ce n'est pas important. La police, oublions cela c'est un mauvais... Vous savez, la police, cela c'est le "crémage" sur le gâteau.

M. le Président, nous avons particulièrement apprécié la collaboration du gouvernement actuel dans des dossiers très épineux depuis deux ans et demi, trois ans. Je dois le dire ici en commission parlementaire. Cependant, à un moment donné, entre autres, je me souviens que nous étions en Cour d'appel pour un cas très particulier et probablement que l'honorable ministre de la Justice le sait. Au même moment où on était devant la Cour d'appel et qu'on se battait ardemment, on a appris, je crois que c'est par le ministre de la Justice, qu'une municipalité venait de recevoir $450 000 pour améliorer son poste de la Sûreté du Québec dans les limites de la ville, ville qui violait la Loi de police du Québec. Il y a de ça un an. Alors, $450 000 pour améliorer son poste de la Sûreté du Québec. Alors, cette ville disait: La preuve qu'on n'a pas besoin de police, la Sûreté du Québec va avoir un poste de $450 000 pour l'améliorer, dans la ville. La Loi de police, on n'a pas besoin de cela. C'est la Sûreté du Québec qui nous organise. Cela ne coûte pas cher la Sûreté du Québec. Le même argument que retournait le gouvernement précédent, la Gendarmerie royale, payée par dix provinces, entre autres le Québec et l'Ontario, pour assumer la sûreté provinciale dans les huit autres provinces qui n'ont pas de sûreté provinciale. Ce n'est pas normal que le Québec et l'Ontario paient pour cela. Mais, actuellement, un certain nombre de villes se trouvent subventionnées par le biais de la protection policière, Sûreté du Québec, qui est financée par l'ensemble des citoyens du Québec. Alors que la loi leur fait une obligation d'avoir un corps de police, eux disent: Notre obligation, nous, c'est seulement dans le dos, et on n'en a pas de corps de police, on n'en veut pas. Quand bien même le ministre viendrait nous dire: Vous devez avoir un corps de police, on va couper le budget, on n'a plus d'argent. Que le ministre la paie la police, premièrement.

Deuxièmement, quand on disait: On a de l'argent, mais on ne veut pas avoir de problème avec le ministre: On va faire un référendum. Mais quand il y avait référendum on disait: Aimeriez-vous mieux avoir un policier dans la municipalité au lieu de dix? Deux policiers au lieu de dix? Trois policiers au lieu de dix? Si vous avez un policier, cela va vous coûter $10 000. Si vous en avez deux, cela va vous coûter $20 000, si vous en avez trois, cela va vous coûter $30 000, au lieu de dix, $110 000, et avec les équipements, $150 000. Le contribuable, pas fou, il a dit: Non, non, on aime mieux avoir un policier et même on aime mieux ne pas en avoir du tout parce que de la police on en a toujours trop. C'est clair. On en a trop. On n'en veut pas. Et, surtout que si on vient à en avoir besoin, si le feu prend ou si les difficultés arrivent, bien, on ira se mettre à genoux devant la Sûreté du Québec ou le ministre de la Justice et on dira: Ecoutez, protégez-nous. Venez nous protéger. On a des fous, des cambrioleurs, on a des "vestes de cuir", on a des motards chez nous. Envoyez-nous donc la Sûreté du Québec. Alors, l'ensemble des citoyens du Québec, les villes de Montréal, de Québec, les grandes villes qui respectent leurs obligations, non pas les villes bidons, mais les vraies villes, ces vraies villes-là paient leurs taxes municipales pour la Sûreté municipale et elles paient des taxes provinciales pour la Sûreté du Québec dans les villes bidons. C'est cela. Ce que le gouvernement actuel déplorait à Ottawa, il réclamait $200 000 à un moment donné, je m'en souviens, ce même gouvernement réclame encore et là, ce doit être rendu à $500 000 000, $1 000 000 000. Aujourd'hui la médication qu'on ne veut pas se faire appliquer au niveau fédéral-provincial, on se l'applique au niveau provincial-municipal. Nous autres, pauvres contribuables, au niveau municipal-provincial, on subventionne les villes qui sont non soucieuses du respect de leurs obligations légales. J'ai bien souligné cela dans notre mémoire. J'estime que les amendements qu'a apportés l'honorable ministre à l'article 52 et aux suivants, c'est au moins un vrai bon départ. (15 heures)

Maintenant, il y a un autre point que je voudrais signaler à cette commission, M. le Président, c'est que, quand la loi va être adoptée, là, les villes de moins de 5000 habitants, imaginez-vous si cela va être le "party". Là, on va dire: La police, c'est fini. Cela fait dix ans qu'on avait cela sur le dos. On n'en veut plus, cela coûte trop cher. Des gars comme X, Y, Z de Montréal qui nous arrivent avec des sentences arbitrales pour nos policiers — n'est-ce pas, M. Marcil — ces gens on ne les aura plus. Alors, finalement, cela va être la Sûreté du Québec qui va aller dans certaines villes de moins de 5000 habitants en cas de nécessité. Plus de 5000 habitants, on va s'adresser au gouvernement et on va dire: Ecoutez, pouvez-vous nous obtenir une dispense, une exemption? Maintenir un corps de police, nous autres, cela ne nous adonne pas, on n'a pas les moyens. C'est une ville plutôt de villégiature qui fonctionne cinq mois ou quatre mois par année et tout cela.

Là, le gouvernement pourra se garder quand même une discrétion et dire: Oui, on l'accorde ou on ne l'accorde pas. Mais, si on devait continuer à vivre dans l'ambiguïté après le projet de loi no 48 comme on a vécu dans l'ambiguïté avant le projet de loi no 48, on est aussi bien de ne pas apporter d'amendement. Entre autres, il y a le comité de reclassement. On prévoit un comité de reclasse-

ment pour les policiers dans les villes de 5000 habitants et plus. Là, quand il va y avoir une abolition du corps de police pour les villes de 5000 habitants et plus, il va y avoir un comité de reclassement pour réintégrer, réinsérer dans la vie civile ou la vie policière ordinaire; un comité de reclassement patronné par la Commission de police. En tout cas, il va y avoir beaucoup de monde impliqué dans cela. Mais si la ville a moins de 5000 habitants, cherchez dans la loi qu'est-ce qu'on va faire de ces effectifs. Si la ville a moins de 5000 habitants, le lendemain où le lieutenant-gouverneur va avoir sanctionné la loi, savez-vous, ce qui va arriver des effectifs policiers, messieurs? Ils vont tomber entre deux chaises. Fini. Le père a 55 ans. On va dire: Monsieur, c'est bien regrettable, on n'a plus besoin de vos services. Il va dire: Oui, mais moi, j'ai donné de fidèles et loyaux services pendant 25 ans à la municipalité. On va dire: Bien oui, mais qu'est-ce que tu veux, tu as été chanceux, tu as eu 25 ans. Là, bonjour, merci.

C'est cela, le projet de loi. On ne prévoit rien pour les villes de moins de 5000 habitants. Mais pourquoi n'a-t-on rien prévu même pour les villes qui n'auraient que 1000 habitants? S'il y a un pauvre chef de police qui est là depuis 20 ans, on va lui dire: Ecoute, c'est une petite ville de 1000 habitants et moins de 5000 ils n'ont plus besoin de corps de police. Tu vas où, toi? Ils vont dire: Va où tu veut, balayeur n'importe où; nous autres, on n'a plus besoin de toi. Le comité de reclassement ne joue pas pour les faibles. Il va jouer pour les "un-petit-peu-plus-forts". Quand ils sont 5000 habitants et plus, déjà cela peut crier un peu plus fort. Le projet de loi dit: Pour éviter que cela crie fort, on va y aller boucher ce trou. Cela, je le déplore énormément et je l'ai dit dans les aspects négatifs de ce projet de loi.

MM. les membres de la commission, M. le Président, c'est sûr que le projet de loi no 48, c'est une amélioration, c'est un avancement, c'est un pas. La cité, au sens grec ou romain du terme, ne s'est pas construite en un jour. On ne pensait pas que vous révolutionneriez le monde avec un projet de loi. On a attendu plus. On a eu moins. On avait attendu plus du projet 41, on a eu moins; bien plus, on n'en a pas eu du tout. C'est encore pire. M. le Président, nous espérons que le genre de conciliation secrète qu'il peut y avoir par le biais des amendements du projet de loi no 48 entre la Commission de police et les autorités municipales, cela va être biffé. Il n'y en aura pas de cela. De la cachette là, avant l'imposition de sanctions, on n'en veut pas. On va jouer cartes sur table. Amendez le projet de loi, s'il vous plaît; on trouve cela insupportable.

La situation des chefs et membres d'état-major devient pire avec votre projet de loi qu'elle ne l'était sous l'ancien article 63 avant, bien sûr, la loi 41 qui n'a jamais été adoptée, ni appliquée. Tout au moins, rabattez-vous sur la loi 41 et retranscrivez la loi 41 sous les amendements de l'article 63. Déjà, on va se sentir un petit peu plus en sécurité. On ira en Cour provinciale devant trois juges et non pas après avoir été à la Com- mission de police où il y aura des négociations et des tractations et bon! lâchez ceci et lâchez cela et, après cela, imposez votre sanction et on vous maintiendra en appel.

Vous imaginez-vous le rôle des avocats, venir devant la Commission de police du Québec, alors qu'il y a eu une recommandation. On va dire: Messieurs de la Commission de police, il y a des faits nouveaux. Ils vont rire et vont dire: Faites-nous la preuve des faits nouveaux. Là, on va avoir un barrage d'objections de la part de l'avocat de la ville. Il va dire: On ne veut rien savoir, etc., etc., c'est subséquent à la résolution. Ce seront des problèmes au point de vue juridique. Je vous le dis, on empire la vie des membres de l'état-major. On aurait été mieux de ne rien faire que de faire ce qu'on fait.

M. le Président et messieurs les commissaires, dans notre mémoire, on a un tas de points qu'on a soulignés. Je ne les relirai pas. Ce serait fastidieux pour vous. Les vacances ne sont même pas terminées. Mais je me soumets à toutes les questions que vous voudrez me poser et si je suis incapable d'y répondre, je suis certain que mes collaborateurs de droite et de gauche pourront apporter tout au moins une amorce de réponse et demain, avec les excellents présentateurs que vous aurez des autres mémoires, que j'ai rencontrés d'ailleurs, vous aurez sûrement la réponse finale et définitive. Merci.

Le Président (M. Boucher): Merci, M. Roy. M. le ministre.

M. Bédard: M. le Président, je tiens tout d'abord à remercier le Syndicat professionnel des chefs de police et pompiers et officiers supérieurs de la protection publique de son mémoire. Il me semble clair que si on est d'accord sur certains points, on est définitivement en désaccord sur d'autres.

L'intervention de Me Roy au nom du syndicat et l'ensemble du mémoire ont le mérite également de faire ressortir la complexité du problème, la difficulté de trouver la solution qui paraîtrait la plus adéquate à toutes les parties lorsqu'il s'agit de régler le problème de la protection policière en général, sur l'ensemble du territoire du Québec.

Je tiens à vous dire que je ne tiens pas à être le Napoléon, en termes de solutions, des forces policières, ni à être le Napoléon des municipalités qui sont aussi jalouses de leur autonomie. Mais la complexité du problème que vous avez fait ressortir me convainc d'autant plus que la solution qu'on doit rechercher pour amener des améliorations ne peut être qu'une solution d'équilibre — c'est dans ce sens que je me suis exprimé— qui tient compte des représentations et des principaux principes en jeu, le principe de la décentralisation et de l'autonomie, du respect de l'autonomie des municipalités, principes aussi très importants du droit des citoyens à une protection policière adéquate. En ce sens, une vraie solution d'équilibre — j'en étais conscient avant même qu'on prenne nos décisions; le gouvernement en était conscient avant

même de prendre les décisions que vous retrouvez au projet de loi 48 — en soi, c'est celle qui ne réussit pas à satisfaire pleinement l'ensemble des parties qui y ont des intérêts.

Cela peut paraître courageux ou sembler régler le problème que de ne prendre qu'un aspect de la situation. Je pense qu'il n'est pas question d'essayer de jouer au courage ou à quoi que ce soit, en fonction de trouver une solution. Il s'agit tout simplement de s'orienter vers une solution d'équilibre qui d'avance, on le sait, ne recontrera pas toutes les préoccupations de l'entente des parties concernées, mais qui peut être de nature, cependant, à améliorer une situation.

Il y a des points sur lesquels nous sommes carrément d'accord. Vous dites dans votre mémoire que vous vous opposez à ce que toutes les forces policières soient intégrées provincialement. Je pense bien qu'il n'y avait même pas, en ce qui nous regarde comme gouvernement, nécessité qu'il y ait opposition de ce côté, parce que, dès le début, j'ai bien explicité que je n'étais pas pour une intégration unitaire de toutes les forces policières au Québec.

Concernant le projet de loi 48, vous manifestez votre accord avec des points importants du projet de loi, à savoir l'article 2, concernant le statut d'agent de la paix, les articles concernant le huis clos, la réglementation au niveau des accidents de travail et également la procédure de destitution, vous avez exprimé votre accord. Vous avez également exprimé votre accord concernant les dispositions — et je pense que c'est un des points essentiels du mémoire, un des points essentiels du projet de loi 48 — transitoires sur l'obligation de maintenir un corps de police et sur le fait que nous avons prévu pour une fois que la loi ait des dents dans le sens qu'il y ait des pressions financières qui soient édictées pour les municipalités dans le cas de non-respect de la loi.

Je pense que c'est un des points importants du projet de loi. Ce n'est pas l'application du rapport Saulnier, — nous le savons — mais une décision dans le sens gouvernemental, qui est bien claire à long terme. A court terme, il y avait un problème. C'est le problème de l'abandon des corps policiers. Il fallait absolument, dans un premier temps, essayer de régler ce problème.

Sur d'autres solutions à long terme — comme l'ont d'ailleurs exprimé ceux qui vous ont précédés — concernant la régionalisation, on sait qu'il y a toute une sensibilisation à faire de ce côté. Il s'agit de parcourir le Québec, non seulement du point de vue des municipalités, mais dans bien d'autres secteurs d'influence. Il y a encore du travail à faire — vous le savez très bien — avant d'en arriver à un consensus sur la régionalisation.

Plutôt que d'attendre ce consensus, qui peut retarder indûment, je pense qu'un législateur responsable se doit de ne pas se retrancher derrière ce non-consensus pour ne pas régler des problèmes immédiats, entre autres la question de l'abandon des corps policiers et tout le problème de l'abandon des corps policiers. Une réglementation se retrouve au projet de loi 48 concernant l'obliga- tion des municipalités de maintenir, qu'elles soient régies en vertu du Code municipal ou de la Loi des cités et villes, un corps policier ou d'avoir un corps policier pour toute municipalité d'au-delà de 5000 habitants et, une fois pour toutes, d'essayer de régler le problème en termes d'obligations pour celles de moins de 5000 habitants.

Je pense que c'est une première étape, qui est nécessaire, parce que c'est un problème avec lequel on vit tous les jours. On ne vit pas tous les jours avec le problème de la régionalisation et de la non-régionalisation. A l'heure actuelle, on vit avec un problème de tous les jours, qui est celui de l'abandon des corps policiers et de la préoccupation que les policiers ont, que les municipalités ont et que le gouvernement a aussi, d'assurer la meilleure protection policière à l'ensemble des citoyens du Québec.

Dans votre mémoire, il y a plusieurs questions, plusieurs problèmes sur lesquels on pourrait discuter peut-être dans un premier temps, à la page 45 de votre mémoire. Vous avez soumis d'abord dans votre mémoire que la commission n'a pas vraiment les moyens de favoriser concrètement la prévention du crime et l'efficacité des services de police. C'est à la page 16. J'aimerais que vous nous explicitiez un peu plus en quoi, d'une façon précise, la commission n'a pas vraiment les moyens de favoriser concrètement la prévention du crime et l'efficacité des services de police. Que faudrait-il lui donner? Vous indiquez également à la page 16 de votre mémoire que le pouvoir d'enquête qui est prévu à l'article 19 de la loi s'avère fréquemment une soupape utile aux citoyens pour se défouler contre la police. J'aimerais que vous nous disiez, que vous nous explicitiez quels sont les faits, quelles sont les expériences qui vous amènent peut-être à croire et à formuler cet énoncé. Si vous me le permettez, je termine, parce qu'on va rester au niveau de la Commission de police.

A la page 45 de votre mémoire...

M. Roy: A la page 46 ou à la page 45?

M. Bédard: A la page 45 de votre mémoire, vous dites, entre autres, ceci, et je cite: "En ce qui concerne le pouvoir d'enquête de la Commission de police et la discrétion qu'elle a d'ordonner le huis clos, nous aurions préféré qu'au lieu de critères particuliers, le législateur prévoie plutôt un accord entre les autorités municipales d'une part et le chef de police ainsi que le syndicat des policiers d'autre part." Bon! Mais vous ajoutez: "Sur certaines questions précises, les pouvoirs de recommandation de la commission devraient devenir des pouvoirs exécutoires, comme nous l'avons déjà signalé." (15 h 15)

J'ai essayé de retrouver plus loin si on identifiait ces questions précises sur lesquelles la commission devrait avoir un pouvoir exécutoire, et je ne les ai pas retrouvées. J'aimerais que vous explicitiez ce point particulier. Quelles sont les questions précises sur lesquelles vous aimeriez que la

Commission de police ait plus qu'un pouvoir de recommandation, mais des pouvoirs exécutoires?

M. Roy: M. le Président, M. le ministre me parle de la page 45, en ce qui concerne le pouvoir d'enquête de la commission et la discrétion qu'elle a d'ordonner le huis clos. Nous aurions préféré qu'au lieu de critères particuliers, le législateur prévoie plutôt un accord entre les autorités municipales, d'une part, et la police ainsi que le syndicat des policiers, d'autre part. D'abord, sur le huis clos, je trouve toujours curieux que les policiers ou le chef de police soient soumis à un statut tout à fait particulier. Vous êtes en présence d'avocats, de notaires, de pharmaciens, d'ingénieurs, de corporations publiques, quoi! Quand vient le temps de la discipline... M. le ministre, essayez d'aller vous présenter devant un comité de discipline pour voir si vous allez être accepté: c'est le huis clos. C'est bon pour tous les professionnels, mais, quand ça arrive au chef de police, ce n'est plus bon. On dit: II exerce une fonction tellement publique que ça devrait être public. Si on va un peu plus loin, si on pousse le raisonnement... C'est vrai pour les juges aussi; on va enquêter aussi sur la conduite des juges.

Moi, je dis non. Qu'on fasse cela à huis clos comme on le fait pour les autres professionnels, comme on le fait pour les juges. Qu'on fasse la même chose pour les chefs de police et les membres de l'état-major. Mais attention! S'ils ont violé les dispositions du Code criminel, s'ils l'ont violé éperdument, s'ils ont défié la loi, le ministre de la Justice qui aura des rapports d'un comité de discipline ou de la Commission de police portera ses accusations comme le ferait une enquête du coroner. Il aura son rapport et portera les accusations au criminel. Qu'on aille! Mais, avant même qu'on connaisse la culpabilité d'un directeur ou la conduite coupable, responsable des membres de l'état-major, on leur fait subir le feu de l'enquête.

J'aurais aimé que la Commission de police du Québec vous confirme, sur onze ans de pratique, combien de rapports se sont terminés par: II n'y a rien là, les gens ont fait leur travail, ils ont fait leur devoir, ils n'avaient qu'à faire ce qu'ils devaient faire. Par contre, quand la commission a dit cela, ça ne paraît pas à la télévision, cela paraît très peu. Déjà, les réputations sont ternies. Même si le chef veut dire: Regardez, je suis bon garçon, la Commission de police l'a dit dans le rapport, le citoyen dit: Pas de fumée sans feu, ça sent mauvais, on sait que ça continue à sentir mauvais.

M. le Président, on aurait voulu que le huis clos soit la règle, que la publication soit l'exception. C'est clair, c'est juste cela. Si c'est bon pour les juges, si c'est bon pour les professions libérales, ça devrait être bon pour les chefs de police et les membres de l'état-major. Cela, c'est sur le huis clos.

M. Bédard: Je comprends vos représentations là-dessus, vos motivations. Sur l'autre aspect, concernant les questions précises...

M. Roy: Sur certaines questions précises, imaginez-vous que la Commission de police qui a une expertise, qui s'y connaît, dont les membres sont des gens qui ont oeuvré dans le champ, généralement, fait une enquête sur la conduite d'un chef de police et sur la conduite des membres; après enquête, la commission dit: Ils ont du boulot pour 22 policiers, mais ils sont 8 policiers. Evidemment, ils tournent les coins ronds, ils tournent vite les feuilles de papier, les systèmes de fichiers sont mal montés, on est mal organisé. Pourquoi? On est 8 pour faire le travail de 22. Or, la Commission de police du Québec a dit souvent... Messieurs, j'ai déjà entendu un honorable juge de la commission dire: Ecoutez, messieurs de la municipalité, vous lui faites porter une petite robe d'une fille de 8 ans et elle en a 24, elle est bien pourvue; qu'est-ce que vous voulez? Changez la robe, donnez-lui des policiers, donnez-lui des effectifs.

M. le Président, on a déjà vu un corps de police où le chef n'avait pas de bureau, n'avait pas de téléphone, n'avait pas de papeterie, n'avait pas de voiture-patrouille: il se promenait à bicyclette. Cela ne se dit pas dans la presse; le gars n'avait même pas le téléphone, c'est sa femme qui répondait au téléphone, chez lui, et le gars gagnait $140 par semaine alors que le salaire minimum était de $168 par semaine à cette époque. J'ai poursuivi, à la Cour provinciale, pour aller chercher, pour 60 heures de travail, au-delà du salaire minimum. Les honorables juges de la Cour provinciale m'ont dit: Ses heures sont invérifiables, c'est un salarié incontrôlable, on ne peut pas vous accorder les 60 heures par semaine. Alors, retournez avec votre petit plaisir et vos $140 par semaine.

Je dis que ce n'est pas la justice qui a apporté un soutien à ce membre de l'état-major qui était directeur, qui était tout seul, qui n'avait pas d'équipement, qui n'avait rien. Les gens de la commission ici présents savent de qui je veux parler. Je ne nommerai pas de nom. C'est arrivé souvent que la commission a fait des recommandations et les recommandations allaient à la poubelle rendues à certains lieux de l'administration, je ne dirai pas à quels lieux. Alors, qu'est-ce que cela donne pour une commission de police de siéger pendant sept jours, dix jours et douze jours, de faire des recommandations et que le papier aille dans la poubelle ou sur des tablettes ou qu'on rie de cela? J'ai déjà vu des députés avec qui j'étais ami qui riaient de cela. Ils disaient: Vous perdez votre temps; c'est entendu qu'on ne s'occupe pas de cela. Ah! Alors, la commission ne donne rien...

M. Bédard: Autrement dit, M. Roy, vous ne seriez pas opposé à ce que la commission ait le pouvoir exécutoire de déterminer les effectifs.

M. Roy: Voilà, M. le ministre, vous avez compris. C'est cela.

M. Bédard: Bon!

M. Roy: Au moins pour une partie.

M. Bédard: Puis-je vous dire que cela fait peut-être ressortir aussi jusqu'à quel point il n'est pas facile de trouver l'équilibre...

M. Roy: Oui.

M. Bédard: ... par rapport aux différents intérêts en cause.

M. Roy: Oui.

M. Bédard: Parce que vous savez très bien que, autant vous êtes convaincu de l'à-propos de cette solution-là, autant les municipalités...

M. Roy: Sont convaincues du contraire.

M. Bédard: ... elles sont convaincues que les effectifs ne doivent pas être déterminés par la Commission de police en termes de décision exécutoire, qu'il s'agit de leur autonomie municipale qui est en cause et, plus que cela, il s'agit pour elles d'évaluer les besoins non seulement que la population a, mais que la population est prête à se payer.

M. Roy: Oui.

M. Bédard: Je pense que le point que vous faites ressortir montre jusqu'à quel degré...

M. Roy: C'est difficile.

M. Bédard: Si on prend juste un côté, les solutions sont faciles à trouver. On peut trouver cela dans le temps de le dire.

M. Roy: Oui, mais...

M. Bédard: Si on essaie de trouver un équilibre, à ce moment-là, cela peut prendre un peu plusde temps. C'est peut-être moins attrayant tant pour l'une que pour l'autre des parties. Mais concernant ce sujet précis, c'est pourquoi dans la loi, plutôt que d'aller carrément dans le sens de l'Union des municipalités, carrément dans le sens des représentations que vous seriez disposé à nous faire, des convictions que vous émettez, nous avons prévu que lorsqu'il y a des cas de réduction d'effectifs policiers ou encore des cas qui se présentent comme ceux d'abandon de corps policiers, à ce moment-là, il y ait un comité de consultation où sont représentées les municipalités, entre les chefs de police, les policiers également, le ministère des Affaires municipales et le ministère de la Justice pour essayer d'en arriver, après évaluation, à une solution qui puisse satisfaire ou répondre à la situation; mais après une consultation de l'ensemble des agents intéressés.

M. Roy: M. le ministre, à ce propos, j'aurais aimé que la loi soit plus précise et plus articulée. Ecoutez! On a le droit de l'exiger.

M. Bédard: Pouvez-vous nous dire... Oui.

M. Roy: Savez-vous ce qu'en Cour d'appel...

M. Bédard: Pouvez-vous nous dire dans quel sens?

M. Roy: Savez-vous ce qu'une Cour d'appel a dit? Qu'un corps de police d'un seul homme comme à Saint-Luc, c'est un corps de police. Alors, ils ont dix policiers ou douze policiers. Ville de Saint-Luc réduit à un policier. La Cour d'appel dit quoi? La Loi de la police dit qu'elle doit maintenir un corps de police. Un corps de police, c'est un homme. Et même qu'un commissaire, le vice-président de la commission, a déjà dit qu'un corps de police peut être un seul homme. Finalement, allez-vous me faire croire qu'un corps de police d'une ville de dix policiers qui, du jour au lendemain, tombe avec un policier, c'est un corps de police? C'est évident que ce n'est pas un corps de police. Le ministre de la Justice est le procureur général chargé de l'application de la présente loi. Il n'y a pas de corps de police au sens de la loi. Pourquoi la loi n'a-t-elle pas dit: "Corps de police"; il y a des critères? Quand il y a une population d'un certain nombre de personnes, cela prend un minimum: un policier pour 850 habitants ou un policier pour 1240 habitants. Il aurait pu y avoir des normes chiffrées. Au moins, il faut qu'on parte avec quelque chose. Si la Cour d'appel dit: Ville de Saint-Luc, 8000 habitants, il y a un chef de police, c'est un corps de police aux yeux de la Cour d'appel. Mais c'était là l'occasion rêvée pour le ministre de la Justice de le préciser.

M. Bédard: Je vous ferai remarquer qu'à l'article 52c, on parle maintenant de services policiers adéquats.

M. Roy: Adéquats.

M. Bédard: Bon!

M. Roy: Mais c'est la commission.

M. Bédard: Adéquats. Non, ce n'est pas nécessairement la commission. Quand on parle de la suite de tout cela pour déterminer ce qui est adéquat, parce qu'il y a certaines décisions des cours qui ont été rendues — on les connaît — qui vous font dire que ces décisions ne répondent pas aux besoins adéquats.

C'est évident qu'une décision d'un tribunal qui dit: Un policier, c'est un corps de police, cela ne veut pas dire que cela répond nécessairement aux besoins adéquats d'une population d'avoir une protection policière. La continuation et la logique de cela, c'est que maintenant, pour déterminer ce que sont les services policiers adéquats, nous avons prévu qu'il y aurait une consultation, un comité de consultation clairement établi où siégeraient les différents agents intéressés. Ceci nous permettrait d'en arriver, après discussions, à la solution la plus adéquate possible pour l'ensemble des parties et des intérêts représentés plutôt que d'en arriver à des décisions qui font en sorte

qu'on n'a pas de solution et que les policiers et les municipalités demeurent toujours en état d'affrontement.

M. Roy: D'ailleurs, M. le Président, je l'ai dit tout à l'heure, les amendements à 52a), b) et c), ce sont des amendements heureux. Je pense que c'est l'épine dorsale de ce projet de loi. C'est déjà une amorce importante, mais je pense qu'il va y avoir encore beaucoup de discrétion et des discussions sur "adéquat". On va demeurer encore dans une certaine ambiguïté. Quand vous allez être d'un côté de la barrière, "adéquat", cela va être un et, quand vous allez être de l'autre côté de la barrière, "adéquat" cela va être quatre, cinq. Qui va décider en dernier ressort?

M. Bédard: Mais vous comprendrez qu'à moins d'en arriver à la solution d'avoir un taux d'encadrement précis...

M. Roy: Oui.

M. Bédard: ... on ne peut pas en arriver à des chiffres magiques. On parle de services policiers adéquats, après discussions et consultations avec les différents intéressés. Si cette réflexion se fait bien, peut-être que dans un an on pourra mieux préciser le mot "adéquat". A un moment donné, il faut quand même avoir un départ. Le seul départ heureux, la seule possibilité d'en arriver à un équilibre là-dedans, c'est justement de faire en sorte de trouver un forum où l'ensemble des parties concernées, avec leurs intérêts divergents, puisse se parler, se rencontrer pour aboutir à une décision.

M. Roy: Alors, c'est la Commission de police qui va décider, à un moment donné, après enquête, après discussions, ce qui est adéquat ou non. Le chiffrage sur-le-champ...

M. Bédard: Selon des critères. Vous remarquerez que, dans le projet de loi, il y a des critères. Je n'ai jamais eu la prétention que c'était une loi parfaite. Je ne pense pas qu'il y ait un législateur raisonnable qui puisse prétendre avoir accouché des lois parfaites. Je vous fais remarquer que nous avons prévu, dans le projet de loi, qu'il y aurait certains critères sur lesquels on devra se baser quand on parle de services policiers adéquats, par exemple des critères de criminalité, plutôt que d'en arriver à un taux d'encadrement qu'une des parties que vous connaissez, l'Union des municipalités, ne veut pas. On l'a dit déjà au départ. Que ce soit le rapport Saulnier ou n'importe quoi, en arriver avec les solutions imposées, je pense que ce n'est pas seulement une question de politique, de faire de la politique, loin de là. Il faut y penser deux fois avant d'imposer des décisions dans cet ordre de préoccupations que l'on a, surtout quand on regarde les coûts que cela peut représenter.

Alors, nous en sommes venus à énoncer quelques-uns des critères qui devraient être pris en considération, que ce soit par la Commission de police, que ce soit par le comité de consultation dont on fait état, à savoir le taux de criminalité. Il y a bien d'autres facteurs qui sont mentionnés. Il y a peut-être lieu d'en ajouter d'autres, je ne sais pas. Je pense que les travaux de cette commission peuvent nous éclairer encore mieux sur cet aspect. Mais c'est à la pratique de ces comités, également avec la consultation, des mécanismes de consultation entre les différents agents intéressés, qu'on va en arriver à une autre étape qui sera peut-être encore plus précise que celle qui est dans le projet de loi no 48.

Quand vous parlez de la Commission de police et des municipalités, dans votre mémoire, vous parlez souvent de l'ingérence municipale. Vous dites que l'ingérence municipale se reflète dans les opérations policières courantes. Vous avez employé l'expression tantôt dans le sens suivant, en parlant de la Commission de police. Vous disiez: "Lorsque la Commission de police aura joué avec les autorités municipales..." Vous avez précisé: "Je ne veux pas dire..."

M. Roy: Je n'ai pas dit cela dans le mémoire. (15 h 30)

M. Bédard: Non, je l'ai noté. Vous l'avez bien mentionné: "Je ne veux pas dire qu'il y a un complot entre les autorités municipales et la Commission de police. A ce moment-là, cela améliorera l'ensemble". Je pense qu'au niveau des décisions de la Commission de police, dont vous avez fait état longuement tout à l'heure, il reste qu'il y a une règle générale, c'est que la Commission de police ne fait pas de recommandations précises, elle ne donne même pas de conseils précis sans que, préalablement, toutes les parties aient été entendues.

M. Roy: Cela dépend.

M. Bédard: Cela ne se fait pas dans l'oreille. Je sais que ce n'est pas l'impression que vous avez voulu laisser.

M. Roy: Ah non, non!

M. Bédard: Cela ne se fait pas à l'oreille, ce qui peut se dire à huis clos ou en privé, entre certains représentants municipaux et des membres de la Commission de police. Je pense que toute recommandation de la Commission de police, à moins que je ne me trompe, M. le Président, quant aux enquêtes de conduite etc..

M. Roy: Non, non quant aux enquêtes de conduite, mais la Commission de police est un organisme-conseil auprès des autorités municipales. D'ailleurs, dans l'amendement qui a été apporté par le gouvernement dans son projet de loi, il semble qu'on ait voulu laisser tomber cette fonction conseil de la Commission de police auprès même des autorités municipales. Je pense que c'est une erreur "cléricale", vous devriez réviser cela.

M. Bédard: Je pense que c'est fondamental, cela, comme problème, à part la détermination de l'effectif, est-ce qu'il y a d'autres questions précises sur lesquelles vous voudriez que les décisions de la Commission de police aient un pouvoir exécutoire et non pas seulement de recommandation?

M. Roy: Oui, M. le Président, justement, nous, dans la première partie de notre mémoire, on parlait d'intégration et de dépolitisation des corps de police et de régionalisation. Evidemment, si la Commission de police, après des enquêtes multiples, se rend compte que, sur un territoire donné, avoir un corps de police, alors que chez le voisin il n'y en a pas et que chez le deuxième voisin il n'y en a pas, c'est inutile, qu'il devrait y avoir un corps de police pour un groupe de municipalités, trois ou quatre municipalités, il me semble que la recommandation de la Commission de police faite au ministère de la Justice pourrait, sans être exécutoire, être au moins financièrement alléchante. Si on disait: Les municipalités qui veulent accepter l'intégration ou le regroupement policier, on va vous donner des subventions de tant, d'une certaine façon, cela deviendrait exécutoire parce qu'actuellement l'arme qu'invoquent les municipalités, vous le savez très bien, M. le Président, c'est l'arme financière. Tout le monde se plaint d'être dépourvu, qu'ils n'en ont plus d'argent, qu'ils n'ont plus de budget. C'est évident que si vous dites: Pour les municipalités x, y, z qui sont dans un territoire restreint, s'il y a une seule force policière, à ce moment-là, il y aura un programme de subvention.

Je le dis dans mon mémoire. S'il y avait une force incitative dans le projet de loi pour aider le regroupement des forces policières, de telle sorte que Saint-Clin-Clin ait la même protection publique qu'à côté ou que le deuxième voisin... C'est le rôle du ministre de la Justice d'assurer la protection publique, l'ordre public, et autant que possible, sans nivellement, une certaine égalité des citoyens d'une région ou d'une localité à une autre, sans discrimination.

M. Bédard: Et dans le respect de certains principes qui existent aussi, n'est-ce pas?

M. Roy: Pardon?

M. Bédard: Dans le respect de certains principes qui existent, dont le moindre n'est pas celui de l'autonomie municipale.

M. Roy: Non, M. le Président, écoutez, nous ne sommes pas des subversifs ou des anarchistes. On ne voudrait pas être compris par le gouvernement comme étant des anarchistes, nous autres, la police.

M. Bédard: J'espère que mes propos ne vous incitent pas à penser cela. Ce n'est pas du tout mon opinion. Je ne voudrais pas prendre tout le temps qui nous est dévolu, quand même.

M. Roy: M. le Président, en dernier lieu, un point important que j'ai signalé à la Commission de police à différentes journées d'étude et que j'ai demandé souvent, même en privé, à des membres de la commission, le pouvoir de conciliation et d'arbitrage pour les directeurs de police et les membres d'état-major. Or, vous avez les directeurs de police qui recevaient $12 000 par année, ou $13 000 bloqués parce que le règlement no 11 n'a aucune force exécutoire et, à côté, le lieutenant gagne $18 000. Et le lieutenant rit, il dit: Envoie "Ti-Père", marche. Lui, il est syndiqué. Son salaire de base est de $14 500 et son chef, lui, il a $13 000 à côté. En plus, lui, comme syndiqué, il a le droit de faire du temps supplémentaire. Le chef non seulement a le droit, mais il a l'obligation de faire du temps supplémentaire. Lui, il peut faire 70 heures par semaine. Il n'y a pas de chiffre pour le chef. On dit: II aménage sa cédule pour lui-même. C'est beau, cela. Il a la responsabilité, nous dira la Commission de police dans des enquêtes publiques, 24 heures par jour du service de police. Elle va nous dire cela. Par contre, quand vient le temps du salaire, ah! le salaire, c'est pour huit heures. Alors, j'ai dit, dans mon mémoire: Pourquoi n'avez-vous pas donné un pouvoir de conciliation et d'arbitrage sur les conditions de travail du directeur et des membres d'état-major, des non-syndiqués, au sens du Code du travail?

Un jour, on nous dira: L'Opposition — elle disait cela au pouvoir — No taxation without... n'a pas d'affaire à s'immiscer là. Mais qu'est-ce que font les conseils d'arbitrage quand ils imposent des conditions salariales par des sentences arbitrales?

Il faut aller au bout de sa pensée. Pourquoi n'instituez-vous pas le pouvoir de conciliation et d'arbitrage devant la Commission de police? Il y aura une échelle indicative qui dira: Un chef de police, classe 4, c'est entre $14 000 et $18 000; classe 3, entre $18 000 et $26 000; classe 2, entre $26 000 et $32 000; classe 1, entre $32 000 et $40 000, disons.

Ce sont des chiffres absolument farfelus en mille dollars mais, à l'intérieur de cette échelle indicative, la Commission de police exercera le pouvoir de conciliation et d'arbitrage et pourra, compte tenu des responsabilités du chef, des effectifs qu'il a, du taux de criminalité, de ses obligations, dire: Vous lui donnez $14 000, mais vous devriez lui donner au moins $17 800, parce qu'il se rapproche plus de $18 000. Entre $14 000 et $18 000, il y a une discrétion, mais la commission pourrait intervenir, conciliation et arbitrage.

Je reviens à tout à l'heure, à mon chef de police qui avait 3000 habitants, qui gagnait $145 par semaine et qui faisait 60 heures. On a essayé de donner à la Commission de police un meilleur salaire. La commission a dit: On ne peut pas. Nous, on ne peut pas. Dans ce temps, il touchait $125 par semaine. La commission a dit: Ce n'est pas notre affaire à nous. Il y a une échelle indicative. Ils ne sont pas tenus de la suivre. M. le Président, est-ce que le rôle d'un procureur général, qui est de faire appliquer la Loi de police, c'est

de faire crever de faim un chef de police? On sait que le chef de police, s'il crève de faim, va mal faire son ouvrage. Il va mal le faire.

M. Bédard: Cela n'est sûrement pas le travail d'un ministre de la Justice. Je pense que c'est pour cela que vous avez cru bon d'indiquer le fait que vous déploriez que l'échelle indicative des traitements adoptée par la Commission de police n'ait pas été revue. Encore une fois, je vous remercie. Je ne veux pas monopoliser tout le temps de la commission. Je vous remercie de la contribution positive que vous apportez aux travaux de cette commission. Nous aurons sûrement l'occasion d'en rediscuter avec les autres membres de la commission et avec les membres de l'Opposition lors de l'étude du projet article par article.

Le Président (M. Boucher): Merci, M. le ministre. M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: M. le Président, je veux remercier le syndicat de ses représentations. Comme on disait en aparté; pendant votre représentation, il y en avait pour tout le monde. Ce n'est sûrement pas le but de cette commission de faire l'étude du projet de loi no 41. Cela a déjà été fait il y a trois ans à peu près jour pour jour, en 1976, au mois d'août, en commission parlementaire. Ce n'est quand même pas défendu de s'en inspirer. Il y a une inspiration que je prends à cette consultation, c'est votre demande qu'il y ait un huis clos pour les cas de discipline. Je sais que ce n'était pas inclus dans le projet de loi no 41. J'avais annoté certains des articles dans mes documents de travail que j'ai retrouvés. Je me souviens d'une lettre du 12 mai 1976 que le président Pelletier, de l'Association des chefs de police, m'avait fait parvenir. J'avais marqué: Proposition d'amendement à mon amendement. Autrement dit, je me souviens, et je suis encore du même avis, avoir réagi favorablement à cette suggestion. J'espère que le ministre pourra l'inclure dans son projet de loi comme amendement.

Votre analogie avec les professionnels, je pense, est valable. Il n'y a pas de vérité absolue là-dedans, mais il me semble que, dans la mesure où on peut protéger les réputations, on doit aller dans ce sens, quitte, si l'examen d'un cas particulier donne lieu à des poursuites, à ce que ce soit alors public. Au moment où il y aura eu déjà le fond du problème au niveau de la discipline qui aura été examiné, la protection de la réputation aura été assurée.

En ce qui concerne le règlement no 11, j'ai été déclaré coupable d'un retard de deux ans. Le ministre est coupable d'un retard de cinq ans. Naturellement, je lui demanderais quand est-ce qu'il a l'intention de le revoir. Le temps joue contre lui. Cela ne dépend pas totalement du ministre, cependant. Je ne sais si c'est par nature ou à cause de mes fonctions, je n'ai pas tellement de sympathie pour... En fait, dans l'Opposition, on est supposé s'opposer. Mais, dans ce cas-ci, j'ai un peu de sympathie à l'égard de la fonction du ministre, parce que l'initiative du règlement doit venir de la commission. Le gouvernement n'a pas l'initiative de la réglementation là-dedans, ce que voulait changer, d'ailleurs, le projet de loi no 41. C'est peut-être à la Commission de police qu'il faudrait demander quand elle a l'intention de réviser le règlement no 11.

Peut-être que le ministre pourra répondre à cette question. On sait que, dans des commissions parlementaires de la nature de celle qu'on a actuellement, le ministre n'est pas obligé de répondre à mes questions. J'espère qu'il pourra y répondre en temps et lieu.

M. Roy: M. le Président, juste sur cette question. Remarquez bien que je n'ai pas d'affaire à défendre la commission. La commission est bien représentée. J'ai déjà vu des projets qui avaient été préparés à l'intention de certains gouvernements et les projets sont demeurés lettre morte.

Vous savez, les projets se préparent.

M. Lalonde: Je le sais. Il y a une autre lacune dans cette loi que vous reconnaîtrez, j'en suis sûr, c'est que le gouvernement n'a même pas le pouvoir de modifier les projets de règlement, il peut simplement les approuver ou les rejeter.

M. Roy: C'est l'occasion d'amender la loi.

M. Lalonde: Oui, c'est seulement une occasion de mettre plus de souplesse là-dessus. Vous avez réussi, tout en disant au départ que ce serait trop fastidieux de lire votre mémoire de 50 pages, à tout le passer dans votre présentation; c'est sûrement faire preuve d'une habileté que vous avez apprise devant les cours de justice. Vous avez donc fait état d'à peu près tout ce qui est contenu dans votre mémoire. Il y aurait simplement une question que je voudrais clarifier; il s'agit du rôle de la Commission de police. Lorsque, à la page 19, vous dites: La Commission de police s'est vu confier un double rôle — vous parlez de la loi actuelle—à savoir celui d'enquêteur avec pouvoirs administratifs et celui de tribunal ou organisme quasi judiciaire. Je présume que le pouvoir de réglementation qui est contenu à l'article 17 actuel est compris dans le pouvoir administratif et non pas dans la fonction quasi judiciaire.

M. Roy: Du pouvoir administratif, mais aussi, c'est quasi législatif, parce qu'il prépare des règlements approuvés par le lieutenant-gouverneur en conseil. C'est quasi législatif et c'est administratif. C'est hybride, cette affaire-là.

M. Lalonde: C'est pour ça que je voulais vous poser la question. Ce ne peut pas être dans le pouvoir quasi judiciaire; donc, ça doit être dans l'autre puisque vous l'avez divisé en deux.

M. Roy: Oui, ça aurait pu être divisé en deux.

M. Lalonde: II y a réellement un pouvoir législatif ou quasi législatif de la part de la commission, ce qui est assez inusité d'un organisme indépen-

dant du gouvernement dont on invoque l'indépendance, dont on doit invoquer l'indépendance, cette indépendance sur laquelle on doit compter pour des décisions, des décisions quasi judiciaires.

M. Roy: Cela arrive assez fréquemment, M. le député. C'est-à-dire que la Commission du salaire minimum, la Commission des accidents du travail, certaines régies, la plupart des organismes ont un pouvoir quasi législatif aussi. Je ne sais pas si vous...

M. Lalonde: II y en a plusieurs. La Commission des valeurs mobilières a un certain nombre de règlements qu'elle peut édicter.

M. Roy: Oui, elles font des règlements et rendent des décisions.

M. Lalonde: Oui; donc le pouvoir de réglementation de l'article 17, vous considérez que ça fait partie du premier rôle administratif ou disons administratif législatif. Vous dites un peu plus loin, à la fin de la page 19: "Dans divers articles de notre revue, nous avions prétendu que la loi était confuse, parce que le législateur y avait mal disséqué le partage de ce double pouvoir de la CPQ." Est-ce que vous suggérez que l'on doive réduire le rôle de la Commission de police simplement à sa fonction quasi judiciaire et lui enlever sa fonction administrative? Quelle est la conclusion? Je la vois mal dans votre mémoire. (15 h 45)

M. Roy: M. le Président, je suis bien conscient, comme le député de Marguerite-Bourgeoys, que c'est une phase difficile, finale à... Je pense que le ministère de la Justice qui a une Direction générale de la sécurité publique devrait faire jouer un rôle plus important à cette direction générale. J'ai entendu nos prédécesseurs qui parlaient d'inspectorat. Je ne m'aventurerai pas dans cela. Vraiment, je n'ai pas très bien compris leur affaire d'inspectorat. Cela fait longtemps que cela marche, cette "bébelle". Mais si la Direction générale de la sécurité publique au ministère de la Justice jouait une fonction plus officielle et s'engageait de façon plus résolue, la Commission de police pourrait peut-être demeurer un organisme quasi judiciaire beaucoup plus au sens strict du terme. Sa fonction conseil pourrait continuer, mais j'ai l'impression que la Direction générale de la sécurité publique pourrait davantage assumer cette fonction. C'est justement le rôle ambigu de la commission. Même les cours, les tribunaux ont été appelés à un moment donné à prendre position. La Commission de police qui avait entendu, je ne sais pas, l'affaire Saulnier ou... Bon! A un moment donné, elle était rappelée à siéger pour décider quasi judiciairement si le gars avait été légalement congédié, si on avait respecté la loi, si la décision, si l'exercice de la discrétion par la municipalité avait été faite conformément à... si c'était opportun.

Finalement, la commission pouvait aller référer à ses notes de l'enquête publique et après cela, se rasseoir et juger en appel. A un moment donné, les cours ont dit: Non. Elles ont dit: Quand vous siégez après une enquête publique, oubliez ce que vous avez fait avant. Vous portez une autre casquette. Au besoin, ce serait préférable que ce soit un autre ban — les cours ne l'ont pas dit — et là, vous recommencez à neuf. Oubliez tout ce qui s'est passé. Là, vous agissez comme tribunal. Ce qui faisait un rôle ambigu parce que quand on disait la Commission de police, on ne disait pas: Ban no 1, Commission de police, ban no 2, Commission de police, ban administratif, enquête, ban quasi judiciaire. On disait toujours: Commission de police du Québec. Pour les justiciables, cela créait une ambiguïté, et cette ambiguïté, le projet de loi no 41 semblait vouloir nous sortir dès qu'il y avait eu Une enquête de la Commission de police, dans le projet de loi 41 du gouvernement précédent, on disait: Après enquête, cela ira devant un ban de la Cour provinciale qui ne sera pas de la Commission de police.

M. Lalonde: Si vous me le permettez en plus de cela, une tentative, — je ne veux pas en faire la critique favorable — de définition du rôle de la Direction générale de la sécurité publique pour tenter au moins de réduire la confusion entre les deux organismes et le rôle de conseiller — un autre organisme l'a dit avant vous ce matin — peut entraîner fatalement la Commission de police dans une situation de conflit, non pas de conflit d'intérêts, mais un conflit dans le sens très intellectuel du mot. C'est donc dans le but de clarifier la situation pour le meilleur intérêt de la Commission de police et des justiciables que, quant à moi, on devrait enlever ces possibilités de situations et confier tout ce qui relève de l'administration, de l'opération, de la planification, de la politique au sens large, la définition des objectifs, par exemple, des programmes au gouvernement, c'est-à-dire au ministère de la Justice. C'est son rôle. Ils sont élus pour cela. Vous disiez tantôt: No taxation without representation. Mais cela, c'est un cas patent où la Commission de police par un règlement peut créer, par exemple, en disant: A partir de maintenant, toutes les automobiles vont être peintes en bleu...

M. Roy: Qu'elle interprète son règlement.

M. Lalonde: Pas rien que cela, mais cela crée d'abord une certaine morosité dans la population. Cela crée des dépenses de la part des corps de police municipaux.

M. Roy: M. le Président, au sujet des remarques du député de Marguerite-Bourgeoys, il y a un principe qui existe en droit britannique et qui a été appliqué dans notre système puisqu'en droit public, on est de tradition britannique. Il faut que non seulement justice soit de facto rendue, mais qu'il apparaisse que justice est rendue. Quand un organisme prépare sa petite législation, se rasseoit ensuite sur le banc, l'interprète, l'applique et enquête avant d'entendre un appel, fait son enquête, ensuite entend un appel, que des apparences de justice

puissent être rendues sont ténébreuses. C'est ambigu et c'est là que le législateur devrait appliquer ce principe. Il faut que non seulement justice soit rendue, mais qu'il apparaisse et c'est cette apparence qu'on voulait faire voir plus limpide, plus lucide dans le projet de loi 41 où on disait: Quand il y aura eu enquête de la Commission de police, on s'en ira à la Cour provinciale, je trouvais cela raisonnable.

M. Lalonde: D'ailleurs, comme vous l'avez dit vous-même tantôt, — je le répète à mon compte — ce n'est pas comme critique du travail de la Commission de police, jusqu'à maintenant.

M. Roy: Non.

M. Lalonde: Je pense qu'il est quand même étonnant que, dans cette situation, ils aient pu faire le boulot qu'ils ont fait...

M. Roy: Qu'ils aient pu faire leur boulot, c'est extraordinaire.

M. Lalonde: ... sans accrocs majeurs depuis 11 ans.

M. Roy: C'est cela.

M. Lalonde: C'est simplement pour leur permettre de faire davantage, de le faire mieux et avec plus de facilité. C'étaient à peu près les remarques que je voulais vous faire clarifier, étant donné le temps qu'on a passé sur votre mémoire, et je vous remercie infiniment de vos représentations.

M. Roy: Merci, M. le député.

Le Président (M. Boucher): Merci. M. le député de Mégantic-Compton.

M. Grenier: M. le Président, je veux d'abord remercier le Syndicat professionnel des chefs de police et pompiers et officiers d'être devant nous et de nous avoir expliqué avec brio ses revendications face à cette loi 48. J'entendais Me Roy parler de la loi adoptée en 1968 qui manquait de dents. Je pense qu'il est suffisamment au courant des affaires pour comprendre que, d'abord, le ministre du temps, qui est devenu premier ministre un an après, était un homme qui faisait confiance à la population et qui voyait les répercussions plus tard pour ensuite mettre des dents, s'il y avait lieu. Ce n'était pas dans son tempérament, d'abord, de mettre des dents à une loi.

On se rendra peut-être compte, dix ans après celle-là — on l'adopte en 1979 — qu'elle aura trop de dents. Il faut vivre avec le temps et je pense que vous le donniez comme exemple. On est convaincu déjà qu'il peut y être apporté des changements.

Vous faisiez des analogies, aussi, entre les professionnels. Ce n'est pas un reproche que je vous fais. Vous disiez que les gens à cette table étaient tous du monde qui filait le bonheur parfait. J'aimerais vous faire savoir, aussi, qu'il y a peut-être des gens autour de la table qui changeraient leur immunité parlementaire pour des sécurités d'emploi; je suis un de ceux-là. On pourrait la troquer, parfois, avec grand avantage; cela nous arrive.

M. Roy: Là, il faudrait que vous vous compariez aux élus municipaux et non pas aux chefs de police. Les chefs de police, ce n'est pas comparable.

M. Grenier: Ils n'ont pas les deux; ils n'ont ni l'un ni l'autre.

M. Roy: Ils sont nommés; ils ne sont pas élus.

M. Grenier: Je suis d'accord avec vous. Il est toujours bon qu'on relève le sujet, puisque, souvent, on nous renvoie cette balle dans notre camp et j'aime bien faire savoir que ce n'est pas toujours de gaieté de coeur. Il y a même une personne, entre autres, en 1974, qui, se fiant sur son immunité parlementaire, s'est vu contestée au point qu'elle a perdu son immunité et son emploi, les deux en même temps.

M. Roy: Lui, il a eu le cadeau!

M. Grenier: Vous nous avez entretenus avec brio, encore une fois. J'aimerais quand même que vous nous disiez comment nous pouvons évaluer un corps de police dans le but de savoir s'il est adéquat. Auriez-vous des critères à nous donner qui pourraient nous aider?

M. Roy: M. le Président, déjà la Commission de police, avec son expertise et son expérience, avait, lors de journées d'étude, émis des critères. Bien sûr, d'abord, on va tenir compte de la population stable d'une municipalité; deuxièmement, de la population flottante. D'ailleurs, tous ces critères apparaissent au règlement no 11, si les municipalités avaient voulu s'inspirer du règlement no 11, mais des maires nous ont avoué, lors d'enquêtes publiques devant la Commission de police, ne pas le connaître et ne pas vouloir le connaître. Il a été approuvé par le lieutenant-gouverneur en conseil. Ils disaient: On ne le connaît pas et on ne veut pas le connaître. Les critères étaient là, M. le député. Si vous les reprenez à l'article... Je ne sais trop, je vais vous le dire; cela m'évitera de vous les dire un après l'autre, il y a plusieurs critères.

M. Grenier: Ce sont des critères qui vous vont.

M. Roy: Ce sont des critères établis par des experts...

M. Grenier: D'accord.

M. Roy:... des connaisseurs dans le domaine, des gens qui ont vécu toute leur vie dans l'admi-

nistration policière, la Commission de police du Québec. Voyez le règlement no 11 — je l'ai ici — entre autres, vous avez cela dans les articles 5, 6: Outre le critère de la population desservie et des effectifs permanents, en fait, il y a le taux de la criminalité, la population flottante, la population permanente.

M. Grenier: Ceux-là, on les connaît. Est-ce que ce sont des critères qui vous vont, au départ? Est-ce que vous les acceptez?

M. Roy: Les critères qui étaient établis dans ce règlement no 11 approuvé par le lieutenant-gouverneur en conseil nous apparaissaient des critères de base sérieux, raisonnables. Maintenant, ils peuvent être perfectionnés et améliorés. Bien sûr qu'aujourd'hui, avec les connaissances qu'on a, la CECO ayant fait son oeuvre, peut-être qu'on peut améliorer les critères pour combattre plus efficacement la criminalité. La Commission de police, qui a un président de la CECO parmi ses rangs, pourra peut-être façonner et modeler un peu ces critères, les améliorer.

M. Grenier: Maintenant, concernant la question de la régionalisation des forces policières que vous avez également effleurée, est-ce que vous avez des idées là-dessus, à savoir, par exemple, que cela pourrait être fait selon des districts naturels, si vous voulez, ou encore y voyez-vous des régions principales où cela devrait être régionalisé ou non?

M. Roy: M. le Président, sur ce point, je pense que des mariages de raison ou des mariages forcés ne font jamais des mariages heureux qui produisent de nombreux enfants. Les gouvernements précédents, dans le domaine municipal, ont tenté, à un moment donné, de faire des fusions, des annexions, des intégrations. Parfois, cela s'est avéré malheureux et coûteux. Il est bien sûr que des mariages raisonnables et voulus par les contractants, c'est préférable. C'est bien sûr que si vous avez une belle fille qui vaut $1 million, vous allez peut-être être porté à la regarder plus que si elle est toute nue dans la rue.

M. Bédard: Cela dépend.

M. Roy: Je vois certains membres de la commission qui ont l'air sceptiques. Je n'aurais jamais cru cela. Ce que je voulais dire, c'est ceci: Si le gouvernement était incitatif dans ses critères d'intégration, de régionalisation par des incitatifs monétaires, d'ordre monétaire, dans le but d'une meilleure protection publique, d'un plus grand ordre, d'une plus grande sécurité... Vous savez que $225 millions de dommages à la baie James ou $500 millions de dommages en retard aux Jeux olympiques, cela n'est pas cher, mais la police, c'est toujours trop cher, toujours trop cher. Quand la police est là, on dit: Cela a bien été. Ce n'est pas à cause de la police. Les gens sont bien dressés, ce sont de bons citoyens. Quand la police n'est pas là, on dit: S'il y avait eu la police. Si le gouvernement a une politique incitative pour aider cette régionalisation, cette intégration progressive des forces policières... On ne veut pas arriver avec une police d'Etat comme en France où il y a seulement un commissariat de police et la police française avec la casquette carrée. J'ai vécu là deux ans; je sais ce que c'est. Ce n'est pas cela qu'on désire. Qu'on ait au moins un police avec une certaine autonomie, une police régionale qui ne soit pas sous la férule de petits élus municipaux qui ne savent même pas lire. On a vu cela.

M. Grenier: Vous donnez un aspect pour la régionalisation. Je pense que c'est de l'incitation — je l'ai pris dans votre mémoire — à savoir de défrayer, par exemple, ou de remettre aux municipalités qui désireraient se régionaliser ou s'incorporer...

M. Roy: Oui.

M. Grenier:... à des villes plus grandes un per capita qui serait donné par le gouvernement.

M. Roy: Un per capita pour leur permettre... Qu'on le veuille ou non, lorsqu'il y a intégration des forces policières, cela ne coûte pas moins cher. L'expérience nous prouve que cela coûte toujours un peu plus cher. Cela peut coûter 25%, 30% et 40% plus cher. Les firmes de consultants le confirment chaque fois quand elles font des études. Evidemment, elle ne veulent pas déplaire aux administrateurs municipaux. Elles arrivent parfois avec des études qui disent: Vous allez économiser avec cela, mais, par la suite, on voit que cela coûte plus cher. Si le gouvernement est conscient que la protection publique, c'est une priorité, c'est une chose importante. Dans une société, c'est d'abord l'ordre, la sécurité, la paix et ensuite on avance. Ce n'est pas le désordre, l'insécurité et la guerre et ensuite on fait ce qu'on peut. C'est d'abord l'ordre. Alors, si cela est important, qu'on y mette le prix.

M. Grenier: Vous avez mentionné qu'à l'article 63 vous aviez retenu certaines propositions du défunt projet de loi no 41 qui avaient attiré votre attention et que vous estimiez assez intéressantes, qui auraient même pu faire l'objet de remplacement. Avez-vous d'autres éléments de solution à cet article de la loi?

M. Roy: D'autres éléments de solution. M. le Président, je dois vous dire que les éléments de solution ne sont pas faciles. Il me semble que la tentative de solution qu'avait esquissée le gouvernement précédent dans son projet de loi no 41 était raisonnable. Dans notre mémoire, on a dit que le gouvernement y allait de façon préventive et non plus curative avec le projet de loi no 48. Après y avoir bien repensé, c'est à la condition que la commission demeure intègre et toujours impartiale. Mais le jour où la commission va donner des conseils aux municipalités ou aux élus

municipaux qui vont aller se mettre à genoux et qui vont aller écouter la commission — il peut y avoir des tractations — je crains que les droits de nos membres, des non-syndiqués soient "scrapes" à la base — excusez le terme très français. Je crains qu'à un moment donné on aille dresser un portrait, une photo qui ne sera pas du tout la réalité. (16 heures)

Messieurs les membres de la commission, je vous prie de me croire, même si vous êtes un élu municipal, que vous avez fait le serment d'office... Je me souviens même d'un rapport de la Commission de police où on avait recommandé au procureur général de faire des poursuites contre des échevins qui avaient menti éperdument pendant l'enquête. Il n'y a jamais eu de ces poursuites. Je ne vous dirai pas quelle municipalité. C'étaient de faux témoignages par-dessus de faux témoignages. Le ministre d'alors aurait pu prendre des poursuites. J'ai lu le rapport. Demandez à la Commission de police, il n'y a pas eu de poursuite de prise.

M. Grenier: Ils ont réglé le problème pour éviter que les députés fassent des parjures à ce niveau-là et ne puissent plus se présenter au niveau des municipalités.

M. Roy: Si l'on est capable de se parjurer devant une commission d'enquête, devant une commission publique — je dirai seulement que le nom de la ville commence par "C" — si l'on était capable de se parjurer devant des juges, quand bien même on n'irait pas se parjurer devant des commissaires en catimini dans des chambres... Voyons donc. Il ne faut pas prendre l'homme pour un ange.

M. Grenier: Merci, M. Roy.

Le Président (M. Boucher): Merci. Au nom des membres de la commission, je remercie M. Roy ainsi que ceux qui l'accompagnent pour leur mémoire. J'inviterais maintenant à la barre l'Union des conseils de comté et des municipalités locales du Québec, représentée par M. Jean-Marie Mo-reau, président.

Je m'excuse, est-ce que M. Roy est encore dans la salle? Me Roy, est-ce que vous tenez quand même à ce que votre mémoire soit versé au journal des Débats?

M. Roy: Oui, la ligne de pensée pourrait être plus suivie. C'est le seul moyen efficace de lire le rapport. Alors, j'aimerais mieux que ce soit versé.

Le Président (M. Boucher): Alors, parfait. Le mémoire sera versé au journal des Débats. (Voir annexe B)

M. Moreau (Jean-Marie): Vous pouvez y mettre le nôtre aussi, ce ne sera pas long.

Le Président (M. Boucher): On a vu cela.

Alors, M. Moreau, veuillez procéder à la lecture de votre mémoire.

Union des conseils de comté et des municipalités locales

M. Moreau (Jean-Marie): M. le Président, je vous remercie de nous donner l'occasion de nous faire entendre. D'ailleurs, je pense bien que vous avez certainement eu le temps de lire notre document, parce qu'il n'est pas long. Je ne voudrais pas commenter certains commentaires, ce qu'on entend depuis ce matin, mais je vais essayer tout de même, M. le Président, de vous lire ce rapport.

L'Union des conseils de comté et des municipalités locales du Québec veut se prononcer principalement sur deux articles, soit l'article 25 du projet de loi et l'article 39.

Nous nous prononçons contre l'obligation imposée à toute municipalité de 5000 habitants ou plus régie par le Code municipal d'établir et de maintenir un corps de police.

Nous croyons que cette responsabilité devrait être facultative, et si une municipalité décide de son propre chef d'établir son corps policier, elle devrait obligatoirement procéder par référendum afin que sa population se prononce tant sur le besoin que sur l'opportunité de créer un tel corps de police.

Et, à cette fin, nous vous demandons d'apporter les amendements nécessaires à votre projet de loi.

M. le Président, c'est le contenu de notre mémoire.

Le Président (M. Boucher): Merci, M. Moreau. M. le ministre.

M. Bédard: Je vous remercie de votre mémoire. Il a sûrement le mérite d'aller droit au but. Je comprends que vous êtes d'accord sur la dispense qui est faite dans le projet de loi à toutes les municipalités de moins de 5000 habitants d'avoir et de maintenir un corps de police.

M. Moreau: Oui, d'accord.

M. Bédard: Est-ce que vous croyez qu'il devrait y être fait une distinction quand il s'agit de la protection policière entre les municipalités régies par le Code municipal et les municipalités régies par la Loi des cités et villes.

M. Moreau: II y a deux facteurs, je pense bien, M. le Président, dont il faut tenir compte, Nous nous référons particulièrement à la conférence provinciale-municipale, la dernière, sur la fiscalité; il était bien entendu qu'à ce moment-là les transferts fiscaux qui sont en cours, en processus, soient exclusivement pour les responsabilités présentes des municipalités régies par le Code municipal.

Je ne veux pas parler au nom des cités et villes, je pense bien qu'elles vont se charger elles-mêmes de faire les représentations qui s'imposent, mais il reste ceci, c'est qu'on tient pour acquis

qu'à ce moment-là, si on oblige les municipalités de 5000 habitants et plus — il y en a qui sont régies par le Code municipal — d'avoir à financer un corps de police ou sinon d'obtenir une permission spéciale et d'être cotisées à cette fin, cela implique d'autres responsabilités financières qui sont, à mon sens, en dehors de nos possibilités. Je connais, dans certaines régions du Québec, des municipalités de 5000 habitants qui sont obligées de maintenir un corps de police. Elles ne sont pas nécessairement régies par le Code municipal et elles font face à des situations pratiquement prohibitives.

M. Bédard: Si je comprends bien, c'est surtout sous l'angle des coûts financiers que cela représente que vous émettez cette opinion.

M. Moreau: C'est sous l'angle des coûts et aussi de la nécessité. Vous savez, il y a des municipalités... Si on laisse cela facultatif, je pense bien qu'on va couvrir pas mal de municipalités qui sont régies par le Code municipal. C'est-à-dire que, pour certaines municipalités à vocation touristiques, par exemple, où il y a un gros écart de population par rapport aux saisons, peut-être que c'est nécessaire d'avoir un corps de police et cela devrait être laissé à la discrétion de la municipalité locale, le fait de décider si, oui ou non, elle doit avoir un corps de police et cela doit être soumis aussi, parce que c'est toujours le contribuable qui a à payer, par voie de référendum à la population afin de déterminer si vraiment les gens veulent un corps de police ou s'ils n'en veulent pas. Je pense bien que cela traduit pas mal l'opinion de l'Union des conseils de comté du Québec.

M. Bédard: Je vous remercie de vos représentations.

Le Président (M. Boucher): Merci, M. le ministre. M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: Lorsque vous demandez la liberté, en fait, de décider d'établir un corps policier, je vois cela au quatrième paragraphe de votre mémoire: "Si une municipalité décide de son propre chef d'établir son corps policier, elle devrait obligatoirement procéder par référendum, afin que sa population se prononce tant sur le besoin que sur l'opportunité de créer un tel corps de police." Ne croyez-vous pas qu'une telle décision est en bonne partie influencée par le fait qu'il existe un corps policier qui peut remplacer l'absence d'un corps policier local, je veux parler de la Sûreté du Québec, qui est disponible et qui ne coûte pas directement de taxes aux citoyens? A ce moment-là, la question que vous posez aux citoyens de la municipalité en question, ce n'est pas de savoir s'ils veulent être protégés ou non, c'est s'ils veulent payer pour leur protection ou non, directement.

M. Moreau: Moi, M. le Président, je pense bien qu'il faut tout de même faire confiance aux contri- buables et aux citoyens du Québec. Il va falloir qu'en haut lieu, on sache à quelles fins on va utiliser la Sûreté du Québec. Je ne parle pas du domaine judiciaire, je parle du domaine de la Gendarmerie royale. Quels sont les critères, à partir de quelle population ce serait obligatoire d'avoir un corps policier? Je pense bien que le critère de 5000 n'est pas un critère sur lequel on peut se baser pour dire qu'à partir de là, il est absolument nécessaire d'avoir un corps de police. Je pense bien que les municipalités rurales sont bien conscientes qu'il y a quelqu'un qui paie la Sûreté du Québec. J'imagine que le citoyen ou le contribuable qui va aller se prononcer par voie référendaire est aussi au courant de cela. C'est à partir de ces critères-là. On n'a pas d'objection, nous, à ce qu'à un moment donné, les services qui sont donnés par un corps de police quelconque soient payés. On est conscient de cela. Mais, de là à s'embarquer dans des choses, parce qu'on connaît par expérience et particulièrement dans les municipalités à faible population, ce que coûte un corps de police. C'est vrai.

L'histoire de mettre un képi sur la tête de quelqu'un, lui donner un uniforme et l'habiller en amiral, cela ne règle pas les problèmes policiers dans une municipalité. On a vu des problèmes comme ceux-là souventefois dans la province de Québec. C'est dans ce sens que si vraiment les municipalités à faible densité ne sont pas financièrement en mesure de se payer un vrai corps de police, je ne vois pas pourquoi la collectivité du Québec, ensemble, ne participerait pas au financement de la Sûreté du Québec.

M. Lalonde: Je pense que vous venez de répondre à ma question, mais je vais vous la reposer. Est-ce que vous êtes d'avis qu'on doive laisser entièrement à la population locale la décision de se protéger directement par l'implantation d'un corps policier et que si cette décision est négative, pensez-vous, comme représentant de l'association, de l'union, que cela devrait être une décision qu'on doit imposer à la Sûreté à savoir de ne pas donner cette protection...

M. Moreau: Elle l'a déjà. C'est déjà une chose acquise. Dans une municipalité qui a un corps de police, est-ce que cela dégage toutes les responsabilités de la Sûreté du Québec? Est-ce que je peux poser cette question, M. le Président?

M. Lalonde: Oui. Pour les municipalités qui n'en ont pas actuellement, mais celles...

M. Moreau: Ou celles qui en ont aussi.

M. Lalonde: Non; la Sûreté est sûrement autour, mais la mission de protection pour la population en question est faite par le corps de police local et le rôle de la Sûreté est seulement supplétif. Si on suit votre raisonnement, qu'on laisse la décision strictement... que le législateur et le gouvernement ne s'en occupent pas, une municipalité de 7000 habitants, de plus de 5000,

décide d'éliminer son corps de police, à ce moment, il n'y a pas de Sûreté là et il n'y en avait pas depuis cinq ans. Elle a un corps de police depuis cinq ans. Cela veut dire que vous êtes d'avis que la Sûreté du Québec n'a pas à s'en occuper de la protection de la population. Je parle d'une façon hypothétique.

M. Moreau: ... s'ils ont déjà un corps de police.

M. Lalonde: Oui.

M. Moreau: Je pense bien que dans les municipalités rurales, les municipalités qui ont déjà un corps de police, c'est régi par le Code municipal, elles ne sont pas très nombreuses. Maintenant, celles qui décident de ne pas avoir un corps de police, là je pense bien qu'il y avait de la responsabilité de décider avant. Ce qu'on tient pour acquis, c'est qu'on vient de créer des normes, on vient de dire: Toutes les municipalités en haut de 5000 habitants et plus devront avoir un corps de police ou avoir une exemption et payer une partie du financement de leur protection. C'est cela qu'on demande dans la loi et c'est là-dessus qu'on s'inscrit en faux. Ce n'est pas dans le sens de vouloir, relativement aux corps de police déjà existants, demander aux municipalités de se désister. C'est qu'on veut établir une norme bien précise disant qu'à partir de 5000 et plus, toutes les municipalités devront avoir, devront passer par une certaine filière.

M. Lalonde: A partir de quelles normes seriez-vous prêt à dire: Maintenant, là oui, il faut que le gouvernement comme responsable de l'intérêt public intervienne en obligeant les municipalités de 10 000 habitants et plus, de 5000, de 7000, de 20 000 quoi...

M. Moreau: On parle du Code municipal, M. le Président. On dit: Les municipalités régies par le Code municipal. On ne parle pas des autres. Les autres, je pense bien qu'on va leur laisser la responsabilité de choisir si c'est à partir de 7000, de 10 000 ou 11 000. Nous disons: Toutes les municipalités de 5000 et plus régies par le Code municipal devraient être exemptées. Cela devrait être facultatif. Je pense bien qu'on ne va pas à 11 000 et on ne va pas à 8000 de population. Cela se limite autour de 5000 à 6000.

M. Lalonde: Peut-être que le ministre pourrait nous donner des chiffres sur le nombre de municipalités au sens du Code municipal qui ont, d'abord, 5000 habitants et plus, qui ne maintiennent pas de corps de police et je pense qu'il y a quelques années, il y en avait seulement quelques-unes. Il y en avait cinq ou six. (16 h 15)

M. Bédard: Pour répondre à votre question, l'application de ce seuil que nous avons fixé dans la loi aurait pour effet l'obligation suite à sept ou huit municipalités régies par le Code municipal d'avoir leur corps policier.

M. Moreau: M. le Président, nous avions déjà dans le passé suggéré la location, dans des moments où c'est absolument nécessaire pour ces municipalités, des services de la Sûreté du Québec. Cela a été proposé déjà et je pense bien que c'est encore ouvert à tout le monde. On n'a pas d'objection à ce qu'à un moment donné une municipalité qui se voit dans le besoin d'avoir... Cela peut être 5000 et cela peut être moins aussi. Cela peut être 2000 aussi. Il y a des municipalités où, l'hiver, il y a 1500 de population et l'été, il y en a 10 000. Cela veut dire que, si on crée une certaine obligation par rapport à un certain chiffre, ces gens vont payer un corps de police l'hiver et cela va leur coûter $300 000 par année pour veiller à la sécurité de 800 personnes. A ce moment, qu'on tienne pour acquis que c'est facultatif et que l'autorité municipale puisse rencontrer le ministre de la Justice, avec le président de la Commission de police, et déterminer à partir de quels critères et quels sont les besoins des municipalités régies par le Code municipal en termes policiers. On est bien ouvert à ça.

Mais de dire: A partir de 5000 de population, peu importent les besoins, c'est une obligation d'avoir un corps policier, dans les circonstances... Je rappelle, M. le Président, la question du transfert fiscal qui nous est dévolu; on tient pour acquis qu'un corps de police, le moindre mal, c'est $300 000 par année.

M. Bédard: Sauf que ce n'est pas peu importent les circonstances, parce que c'est pour ça qu'on prévoit un pouvoir de dispense qui tient compte du taux de criminalité, etc. Il y a une évaluation qui peut se faire.

M. Moreau: Je suis d'accord, M. le Président, mais, même si vous prévoyez une certaine dispense, elle va être compensée par une certaine rémunération. Alors, on part déjà d'un certain critère. Mais on devrait évaluer avant ça, à mon sens, les besoins, parce qu'il y a des municipalités que je connais qui ont une population de 5000. Il n'y a pas plus de problèmes dans la municipalité où il n'y a pas de police que dans la municipalité où il y en a, avec une population à peu près identique. Des fois, il y en a plus de l'autre côté.

M. Bédard: Quand on fait référence au taux de criminalité, on fait référence aux besoins. C'est un des critères pour évaluer un besoin, etc.

M. Moreau: C'est ce que je mentionnais tout à l'heure, M. le Président, au député de Marguerite-Bourgeoys. Je tiens pour acquis qu'il y a des municipalités régies par le Code municipal qui ont 1400 ou 1500 de population, qui peuvent avoir des besoins policiers, tandis qu'il y en a d'autres de 5000 qui n'en ont pas. Alors, il ne faudrait pas établir un critère qui dit: A partir de telle population — je parle au nom des municipalités régies par le

Code municipal — vous allez obtenir une dispense et, si vous obtenez une dispense, vous allez payer une compensation. C'est complètement en désaccord avec ce que le ministre des Finances nous a dit le printemps dernier, que la réforme fiscale serait exclusivement pour les responsabilités présentes. Je me pose la question si vraiment c'est cela que cela veut dire.

M. Lalonde: Je vous remercie infiniment, monsieur.

Le Président (M. Boucher): M. le député de Mégantic-Compton.

M. Grenier: M. Moreau, je n'ai pas l'intention de vous garder ici trop longtemps. On sait que vous êtes préoccupé par une autre commission, peut-être davantage que par celle-ci, sur la loi 125, concernant l'aménagement du territoire. On vous remercie d'être venu ici. Ce que vous nous donnez, même si ce n'est pas un volumineux dossier, nous fait préciser un point extrêmement important et je pense que vous connaissez le problème de votre milieu. Il m'a été donné de le vivre comme maire d'une municipalité. Vous touchez justement une loi qui a déjà existé, qui m'avait permis d'être maire d'une localité voisine. Cela concerne les municipalités où les corps policiers n'ont peut-être pas d'affaire l'hiver. La loi permettait, à ce moment, d'élire des conseillers, des maires de l'extérieur de leur localité pour l'administrer, parce que la population devenait trop basse au milieu de l'hiver.

Vous parlez d'une ville. C'est bien sûr que trancher dans un chiffre, c'est toujours compliqué. Vous parlez du chiffre 5000 depuis tout à l'heure; je voyais que c'était le problème. Pour les gens qui sont d'un côté ou de l'autre de ce chiffre, à savoir 5500, 6000 et 7000 — ça ne se pose probablement plus rendu à 10 000 ou à 11 000 — c'est là que la question est difficile à trancher. Je suis d'accord avec vous qu'il y a des localités de 1000 personnes qui ont peut-être besoin d'un système de police et que d'autres ailleurs de 8000 pourront s'en passer.

Je pense bien qu'on peut retenir de votre proposition ici que cela devrait être libre pour toutes les municipalités, qu'on ne devrait pas trancher dans un chiffre comme on le fait là. On ne devrait pas diviser en deux cet article 52, mais on devrait peut-être garder l'article à la ligne et demie où on dit: "La municipalité peut établir par règlement et maintenir dans son territoire un corps de police," sans aller plus loin dans l'article de la loi en amenant, bien sûr, ce que les avocats trouveront. Cela me semblerait beaucoup plus près de la logique et du bon sens, de ne pas imposer aux municipalités ce qu'on a là. J'aimerais savoir de vous, dans vos municipalités qui font partie de l'Union des conseils de comté, s'il en coûterait meilleur marché, d'après vous, à vos petites villes de louer les services de la Sûreté du Québec que de maintenir les services en place.

M. Moreau: M. le Président, ce n'est pas une question de coût comme une question d'efficacité. J'ai l'impression... Remarquez bien que je suis bien... Dans ma municipalité, on n'a pas de corps policier, mais il reste que les moyens des petites municipalités de maintenir un corps policier sont infiniment réduits, ils ne sont pas grand-chose. Si on veut avoir vraiment un service de qualité, je pense qu'il faut à ce moment utiliser les services d'un grand corps policier qui a tous les moyens techniques à sa disposition. On peut opter pour des gardes champêtres ou des policiers, mais je pense que si une municipalité — je fais abstraction de sa population — a vraiment besoin de services policiers, quant à payer quelque chose, elle est aussi bien de payer pour un excellent service. Remarquez bien que c'est sans préjudice aux différents corps de police municipaux dans les villes du Québec. Ce n'est pas cela... Je ne veux pas faire de comparaison et je ne veux pas généraliser. Mais je parle des possibilités financières d'une municipalité, si elle est capable de payer. Je pense bien que c'est au niveau de l'Etat, pour les municipalités qui n'ont pas l'envergure et les moyens financiers de se payer un corps policier adéquat, c'est au niveau de la Sûreté du Québec que cela doit se faire. Je pense bien que c'est...

M. Grenier: M. Moreau, je vous remercie sur ce point. Je pense que vous êtes d'avis — on dégage cela — qu'on devrait laisser libres les municipalités qui désirent s'en prévaloir ou pas. L'autre point qu'on n'a pas abordé avec vous, c'est la régionalisation. Avez-vous des idées? L'Union des conseils de comté s'est-elle fait une idée sur une éventuelle régionalisation des services policiers?

M. Moreau: M. le Président, vous savez que l'Union des conseils de comté — je parle au nom des municipalités locales du Québec régies par le code municipal — a toujours été dans le passé et va continuer de l'être très soucieuse de son autonomie. Je pense bien que si on parle de régionalisation, cela peut être valable pour certaines régions, la régionalisation, mais tant et aussi longtemps qu'on voudra régionaliser, les municipalités rurales auront quelque chose à dire là-dedans. Il y a toutes sortes de façons de régionaliser. On peut régionaliser et que les décisions ne se prennent pas collégialement. Il faut tenir compte, quand on veut régionaliser, de ce que tout le monde aura à dire, parce que, devant le danger de se faire imposer des corps policiers et de se faire imposer l'obligation de financer des corps policiers régionaux, il va falloir évaluer aussi la qualité des services. Je pense qu'à ce moment-là, il va falloir, M. le Président, être sur nos gardes quant aux décisions qui vont se prendre, voir à quel niveau cela se fera et quelle représentativité il y aura là-dedans. Autrement, on risque de payer la facture et ne pas toujours avoir les bons services.

M. Grenier: M. Moreau, si jamais cela nous arrive, on essaiera de se rencontrer en commission, parce qu'on va partager pas mal d'opinions, je pense.

M. Moreau: Cela me fait plaisir, M. le Président.

Le Président (M. Boucher): Merci, M. le député de Mégantic-Compton.

M. Bédard: La proposition de régionalisation du rapport Saulnier, avez-vous eu l'occasion de l'examiner, de l'approfondir?

M. Moreau: II y a des choses dans le rapport Saulnier... Je pense bien qu'il ne faudrait pas retenir l'assemblée au cours de l'après-midi, M. le Président... D'ailleurs, ce n'est pas la teneur de notre mémoire. Nous avons effectivement lu le rapport Saulnier de façon intégrale. Il y a des choses qui sont merveilleuses là-dedans et d'autres qui le sont moins. Pour ce qui est de la régionalisation, je ne voudrais pas faire l'historique de l'Union des conseils de comté, des positions qu'on a prises depuis dix ans en ce qui concerne les municipalités mandataires et des choses comme celle-là. Je n'ai pas besoin de répéter cela ici. Mais je pense bien qu'à ce moment-là, il va falloir tenir compte de cela si l'on veut régionaliser, parce que ce ne sera jamais la petite municipalité qui va avoir tellement à dire là-dedans.

C'est dans ce sens, M. le Président, que nous avons, vis-à-vis de la régionalisation, des opinions assez réservées. Cela ne veut pas dire que c'est fermé, que c'est pris dans le ciment, mais il faudrait se pencher sur ces choses d'une façon plus sérieuse si jamais on avait l'obligation de participer à cela.

Le Président (M. Boucher): Merci, M. Moreau. En mon nom et au nom des membres de la commission, je vous remercie pour la présentation de votre mémoire.

J'appelle maintenant l'Association des policiers des autoroutes du Québec, représentée par M. Marcel Ouellette.

M. Ouellette, si vous voulez présenter les gens qui vous accompagnent et procéder à la lecture de votre mémoire.

Association des policiers des autoroutes du Québec

M. Ouellette (Marcel): M. le Président, à ma droite, Marcel Côté, vice-président de l'Association des policiers des autoroutes; à ma gauche, Jean-Claude Fortin, secrétaire-trésorier de l'Association des policiers des autoroutes.

Je tiens à préciser que l'association représente 115 policiers des autoroutes qui, en fait, couvrent quatre autoroutes dans la région de Montréal, c'est une distance de 295 kilomètres qui passe, pour ainsi dire, dans dix-sept comtés de la province. Le fait que vous pouvez nous voir ici en uniforme cet après-midi, c'est qu'on a voulu montrer à la commission qu'on portait un uniforme de policier, comme on le dit bien dans notre mémoire. Dans la région de Québec, on n'est pas habitué aux policiers des autoroutes, chaque fois qu'on parle à des gens de Québec, ils disent: Les policiers des autoroutes, c'est quoi? Qu'est-ce que ça fait? On est venu montrer notre uniforme; les autos, on les a laissées au bureau.

Si vous permettez, M. le Président, je vais faire la lecture du mémoire. Depuis novembre 1976, les membres de l'Association des policiers des autoroutes nourrissaient secrètement beaucoup d'espoir. Après la grande déception de l'abandon du projet de loi 41, ne leur avait-on pas promis qu'enfin, bientôt, demain peut-être, un sort meilleur les attendait? On allait enfin, sous la forme la plus pure, présenter un projet de loi qui viendrait, par l'esprit et la forme, rendre justice à un groupe de travailleurs. Le jeu en valait la chandelle, et forts de ces promesses, tous se remirent à espérer et à patienter. D'une étude à l'autre, d'un mémoire à l'autre — Dieu sait qu'on en a présenté beaucoup — d'une promesse à l'autre — cela aussi, on en a eu beaucoup — les jours s'écoulent et passe le temps.

Août 1979. Le législateur aurait-il perdu la mémoire? Il ne peut sûrement s'agir d'une omission volontaire. Il doit sûrement manquer des pages au projet de loi 48 — c'est probablement ce qu'on va nous promettre tantôt — ou se peut-il qu'on ait décidé de régler définitivement le sort des policiers des autoroutes en les confinant dans leur rôle d'agents de la paix?

Le présent document ne se veut point un plaidoyer qui chercherait à établir la preuve que nous sommes et faisons un travail de policier. A notre humble avis, cette preuve fut largement démontrée dans le passé. Que l'on se reporte seulement au mémoire de l'Association du groupe de travail sur les fonctions policières. Le présent mémoire ne se veut pas non plus une supplique larmoyante auprès du législateur; nous avons quand même notre fierté de policiers.

Le présent mémoire tentera cependant de faire la preuve que le projet de loi 48, en omettant les inspecteurs des autoroutes de la juridiction de la Loi de police, perpétue un état de fait rendant difficile le travail des inspecteurs des autoroutes et consacre une situation discriminatoire envers ces derniers. Nous avons, de plus, pensé qu'il pourrait être opportun d'ajouter au présent document certaines suggestions d'amendement.

Le projet de loi et les policiers des autoroutes. Le projet de loi 48, tout en reconnaissant les inspecteurs comme des agents de la paix — on présume — les places sous la juridiction de la Commission de police, tout comme les policiers de la Sûreté du Québec ou les policiers municipaux. (16 h 30)

Cependant, cette juridiction nouvelle n'entraîne ni les privilèges ni les services normalement rattachés à celle-ci.

Nous croyons qu'il s'agit d'un net recul. Recul d'autant plus évident lorsque le projet de loi no 48 est comparé au projet de loi no 41. Pourtant, trente mois les séparent.

De plus, force nous est de déplorer cette situation discriminatoire puisqu'elle ne respecte même pas les données les plus fondamentales du Code du travail qui veut qu'à travail égal, salaire égal, et qui veut aussi que, pour un travail similaire, les mêmes outils soient fournis.

Qu'il nous soit permis d'apporter, à titre d'exemple, la semaine de la police. Tous les ans, l'invitation d'y participer nous parvient aimablement et charitablement par certains corps policiers et jamais directement par la Commission de police du Québec. Comment pourrait-il en être autrement? Nous ne sommes que des agents de la paix.

Nous croyons que seuls notre compétence et le type d'intervention auprès du public usager nous permettent cette charitable invitation. Ou s'agirait-il plutôt du fait que les autres corps policiers, bien avant le législateur, ont voulu ainsi, par souci de coordination et d'efficacité, corriger une situation déficiente?

Quoi qu'il en soit, puisque la Loi de police, appelée à être sous peu amendée par le projet de loi no 48, ne fait nullement mention des inspecteurs des autoroutes, faut-il en conclure que la police des autoroutes, de par son statut et de par les faits, va à l'encontre de la Loi de police puisque, depuis plusieurs années, elle patrouille avec des autos identifiées à cet effet?

Le jour n'est pas si loin où l'inspecteur des autoroutes devra lui-même se donner une contravention puisqu'il ira directement à l'encontre du paragraphe 35 de l'article 1 de l'avant-projet de loi du Code de la route: "Véhicule d'urgence: un véhicule autorisé à être utilisé comme véhicule de police par la Commission de police du Québec".

Nous ne leurrons personne. Tous croient en nous voyant que nous sommes des policiers "vrais". Seule la couleur des vêtements pourrait nous distinguer et encore...

Faut-il en conclure que les policiers des autoroutes sont passibles d'imposture, de personnification et de fausse représentation auprès du public?

Le projet de loi no 48 et le policier des autoroutes. Le projet de loi no 48, article 62, confirme au policier des autoroutes qu'il travaillera encore dans l'insécurité la plus grande: "Lorsqu'un policier municipal agit en qualité d'agent de la paix dans un territoire qui n'est pas soumis à la juridiction du corps de police de la municipalité qui l'emploie, le procureur général est réputé être son employeur pour les fins de la Loi des accidents du travail" (Statuts refondus 1964).

Gare au policier des autoroutes s'il s'aventure hors des limites de ses clôtures, car, à ce moment, même s'il vient en aide à un citoyen ou à un confrère d'un autre service de police, il reçoit, par voie de conséquence et en guise de récompense, la même protection qu'un simple citoyen.

Qu'arrive-t-il à un policier des autoroutes dans un échange de coups de feu, blessant un citoyen ou étant lui-même blessé?

Le policier des autoroutes est plus que jamais soucieux face au lendemain et à son avenir. Non seulement ne recevra-t-il aucune protection supplémentaire, mais, de plus, la Loi de police, projet de loi no 48, éteint toute lueur d'espoir quant à un plan de carrière, puisque, dans le cadre actuel de travail, le plan de carrière est, à toutes fins utiles, inexistant.

Un beau rêve s'écroule! Le policier des autoroutes devra faire face à la triste réalité et attendre patiemment l'heure de la retraite sans jamais avoir pu évoluer au sein d'un véritable corps policier. Toute sa vie, il aura fait semblant...

Le présent projet de loi no 48, lorsque sanctionné, confirmera que le policier des autoroutes ne pourra jamais être un policier, devenir un chef ou directeur d'un corps de police, penser évoluer comme enquêteur de la Commission de police ou même, s'il a plus de 30 ans, espérer un éventuel transfert dans un autre corps de police. La Loi de police amendée ne le reconnaît point policier.

Il n'en demeure pas moins que, tout en ayant la formation de policier, effectuant un travail de policier, participant à des opérations policières, pointé et vu par le public comme policier, le policier des autoroutes continuera à dispenser une qualité de travail professionnel sans la protection et les services normalement rattachés à la tâche.

Une omission et ses conséquences. Les'poli-ciers des autoroutes subissent depuis quelque temps un préjudice flagrant au domaine de l'information. Jadis, nous possédions un numéro de contributeur qui permettait d'interroger le centre de renseignement des policiers du Québec. Nous avions même l'espoir qu'un jour nous obtiendrions un écran cathodique et que celui-ci soit en permanence à nos bureaux de Montréal. Ce projet ne s'est point réalisé. Tout au contraire, nous avons été rayés du bottin des usagers du CRPQ. Afin de répondre à nos besoins, nous devons, pour obtenir l'information nécessaire, passer par des intermédiaires. Cette méthode, par personne interposée, n'est sûrement pas efficace et entraine, par voie de conséquence, des délais préjudiciables au bon exercice de notre profession, tout comme elle remet en question la sécurité des agents face au décalage entre la demande d'information et la réception de cette dernière. Cette façon de procéder concourt également à engendrer des possibilités d'erreurs dans la retransmission des informations.

Nous ne pouvons passer sous silence le fait qu'il nous est impossible d'alimenter le CRPQ. Cet état de chose a pour conséquence que des centaines de mandats dorment dans nos filières. Que dire aussi de l'imbroglio infernal que représente le fait de vouloir rayer le nom d'une personne recherchée, retrouvée ou bien d'une auto volée et retrouvée par notre service. Il faut alors passer par d'autres corps policiers et souhaiter qu'ils n'oublient pas d'en faire l'annulation.

A maintes reprises, dans le passé, la police des autoroutes a soulevé les difficultés de communication avec les autres corps policiers du Québec. Qu'il nous suffise aujourd'hui de citer un extrait de mémoire de l'Association des policiers provinciaux présenté au groupe de travail sur les

fonctions policières. "Le plus grand problème de ce service semble être la difficulté de communication de ses membres avec ceux de la Sûreté du Québec qu'ils côtoient pourtant à plusieurs endroits." Il est à souligner que dans cet extrait, on ne parle pas des autres corps policiers établis près des autoroutes à péage et avec qui nous sommes susceptibles d'être en relation professionnelle.

Un fait établi, une situation équivoque. Dans les paragraphes qui suivent, nous déposons le témoignage de quelques groupes policiers du Québec espérant ainsi rappeler le travail qu'exécutent les policiers des autoroutes.

Extrait du mémoire de la Sûreté du Québec au groupe de travail sur les fonctions policières: "Le service de la police des autoroutes a comme principale fonction la surveillance routière laquelle consiste à appliquer les règlements de circulation de la Loi des autoroutes et du Code de la route. A l'occasion, cet organisme applique également les articles du Code criminel qui relèvent de la conduite des véhicules automobiles et parfois il enquête sur des vols et des méfaits reliés à la propriété de l'Office des autoroutes."

Le travail que nous effectuons et que l'on dit s'apparenter à celui du patrouilleur de la Sûreté du Québec fut corroboré par la Sûreté du Québec elle-même dans son mémoire au groupe de travail sur les fonctions policières. "Force nous est de constater que leur travail s'apparente à celui des patrouilleurs de la Sûreté du Québec et même si jusqu'à présent nous sommes satisfaits des bonnes relations qui existent entre nous, nous déplorons le manque de coordination policière engendré par la pluralité des unités de commandement ainsi que par l'utilisation des réseaux de communication différents."

L'Association des policiers provinciaux dans son mémoire, à ce même groupe de travail, s'exprimait dans ces termes. "Actuellement, ces inspecteurs effectuent le même travail que les patrouilleurs de la Sûreté du Québec sur les autoroutes des Laurentides, des Cantons de l'Est, de la Rive-Nord et de Chomedey." Nous joignons de plus au témoignage précédent un extrait du rapport de vérification du Centre de renseignements policiers du Québec en date du 12 décembre 1977. "Il est facile de constater que votre travail s'apparente en tout point au travail de patrouille de n'importe quel corps policier. Vos hommes font face à des inconnus lors des vérifications sur la route et participent à des opérations 100, des blocages de routes selon le besoin de chaque région. De plus, vous avez un territoire à couvrir qui relève exclusivement de votre juridiction et vous appliquez le Code de la route, aussi bien que le Code criminel. Face au public, vos hommes sont officiellement identifiés comme des policiers. Il serait donc injuste que vous ne puissiez bénéficier du même outil de travail que tous les policiers ont a leur disposition à cause d'une technicité bureaucratique qui n'a pu être résolue jusqu'à date. "Il est malheureux que la loi 41 n'ait pas été adoptée, prévoyant votre reconnaissance à ce titre. Les normes du Centre d'information des policiers canadiens d'Ottawa sont très strictes à ce sujet et seuls les corps policiers reconnus officiellement peuvent avoir un numéro d'agence pour alimenter et interroger le système. Il est évident que vous effectuez le même travail que les patrouilleurs des différents corps policiers et que votre situation géographique est stratégique pour toute opération policière. Il est donc normal que vous ayez directement accès au CRPQ."

Une attente qui se prolonge. En 1976, les policiers des autoroutes considéraient le projet de loi 41 comme une étape importante que l'on s'apprêtait à franchir. En effet, ce projet de loi répondait en tout point aux attentes des policiers des autoroutes puisqu'il leur donnait d'office un statut de policiers et qu'il venait combler une lacune qui les handicapait dans leur travail quotidien.

Les articles 1 à 9, 13, 26 à 33, 37 à 39, 43, 49, 50 et 65 du projet de loi 41 répondaient à l'esprit des demandes et revendications des policiers des autoroutes.

Les événements en ont décidé autrement. Depuis ce temps, le Groupe de travail sur les fonctions policières a déposé son rapport et voici comment il s'exprime dans une de ses recommandations. "D'autoriser la Gendarmerie du Québec à se substituer aux services d'inspection du ministère des Transports et de la police des autoroutes." Il nous apparaît que la mise en application de cette recommandation aurait eu pour effet de conférer un véritable statut aux policiers des autoroutes.

Une suggestion... ou peut-être deux. Afin de corriger la situation qui prévaut, nous suggérons humblement ce qui suit: Que dans un premier temps, à l'occasion de la présentation du projet de loi 48, M. le ministre apporte les modifications qui s'imposent en incluant les policiers des autoroutes à la Loi de police, en les plaçant ainsi sous la juridiction de la Commission de police du Québec.

Que dans un deuxième temps et pour une période transitoire, les policiers des autoroutes relèvent du ministère de la Justice et hiérarchiquement de la Sûreté du Québec.

Que dans un troisième et dernier temps, les policiers des autoroutes soient tout bonnement intégrés à la Sûreté du Québec, comme certains le souhaitent au niveau du ministère de la Justice.

En conclusion. Au cours des quelque quinze minutes qui ont précédé, nous avons tenté de faire état d'une situation ambiguë entraînant un fonctionnement difficile et, par voie de conséquence, un rendement inadéquat. Nous avons dit, dans l'introduction, qu'il ne s'agirait point d'une supplique larmoyante; aussi ne ferons-nous point mention de la frustration et de l'insécurité établies en permanence chez les policiers des autoroutes.

En terminant, qu'il nous soit permis de citer le bon vieux dicton populaire qui dit: "Tant qu'il y a de la vie, il y a de l'espoir" et, comme le législateur nous apparaît bien vivant, on a encore de l'espoir.

Ceci met fin au mémoire qu'on a présenté à la commission parlementaire de la justice. Comme nous ne voulions pas répéter antérieurement ce que nous avions fait au mémoire sur les fonctions

policières, c'est pour cela, en fait, qu'il n'y a aucune statistique ou quoi que ce soit. Je pense que le ministre et les membres de la commission devraient être au courant. De toute façon, je suis ici pour répondre à vos questions.

Le Président (M. Boucher): Merci, M. Ouellette. M. le ministre.

M. Bédard: M. le Président, je tiens à remercier l'Association des policiers des autoroutes de sa participation aux travaux de cette commission parlementaire. Je pense que leur réputation n'est plus à faire en termes d'efficacité. Effectivement, tous ceux qui ont eu à porter des jugements sur l'efficacité des policiers affectés aux autoroutes l'ont fait de façon très favorable. Il n'y a aucune discussion là-dessus. (16 h 45)

Je vous dis très simplement que je comprends vos impatiences, je dirais même vos frustrations, du fait que des décisions n'ont pas été prises concernant les demandes précises que vous aviez formulées quant à la détermination de votre statut futur. Je comprends d'autant plus vos impatiences et vos frustrations, vu les différentes promesses que vous pourriez avoir eues dans le passé. On peut y ajouter des rencontres que nous avons eues ensemble, où j'ai exprimé très clairement mes préférences vers une solution qui serait l'intégration à la Sûreté du Québec. A la suite de nos rencontres, on sait qu'il y a eu, d'une part, une décision de l'ancien gouvernement dans le projet de loi no 41, qui était à l'effet de faire un corps de police distinct. Il y a eu le rapport Saulnier, qui a conclu à l'intégration. A la suite des rencontres que nous avons eues ensemble, vous savez que nous avons demandé à notre comité des relations de travail du ministère de la Justice et à la Sûreté du Québec de faire une étude sur ce que représenterait l'intégration de la Sûreté du Québec.

Nous avons eu ce rapport il y a trois mois à peu près, au mois de juin seulement. Entre-temps, il y a eu la formation d'un comité interministériel concernant l'ensemble de la sécurité routière; on y retrouve des représentants du ministère de la Justice, du ministère des Transports et également le représentant des consommateurs, du ministère des Consommateurs, Coopératives et Institutions financières. Je peux vous dire une chose: je comprends vos impatiences, vos frustrations, et j'ai l'intention et c'est l'intention de tous les membres de ce comité interministériel qu'un des sujets prioritaires sur lequel nous allons discuter dès que nous allons nous réunir soit le sujet que vous abordez en fonction de définir votre statut. Les premières de ces réunions auront lieu très prochainement de telle façon que je suis convaincu que, d'ici la deuxième lecture, c'est-à-dire d'ici l'adoption de cette loi, vous serez fixés sur la décision gouvernementale et en mesure de voir, comme vous l'avez exprimé avec beaucoup d'humour, s'il manque des pages à ce projet de loi.

M. Ouellette (Marcel): On les aurait trouvées.

M. Bédard: Je ne pose pas d'autres questions parce que, tel que vous l'explicitez dans votre mémoire, je suis au courant de certaines des difficultés que vous avez dans votre travail. On avait eu l'occasion, d'ailleurs, d'en discuter ensemble à l'occasion de nos rencontres. Avec le rapport Saulnier, c'est ce qui nous avait incités à demander un rapport, qu'on parle d'intégration ou de corps de police distincts, cela se fait quand même d'après certaines études, certaines évaluations. Nous n'avons pas tardé là-dessus parce que, dès le dépôt du rapport Saulnier, nous avions demandé à la Sûreté du Québec et à notre comité des relations de travail du ministère de nous fournir un rapport pour nous expliciter les problèmes que nous aurions peut-être à affronter pour fins d'intégration. Je pense que vous avez raison de dire que cela fait assez longtemps que cela traîne en fonction de l'efficacité dont vous avez toujours fait preuve dans votre travail malgré les difficultés auxquelles vous faisiez face. Il est nécessaire que la situation soit tranchée, qu'il y ait une décision gouvernementale. Encore une fois, ce sera un des premiers sujets prioritaires, au niveau du comité interministériel sur la sécurité routière, qui aboutira à une décision avant l'adoption de la troisième lecture de ce projet de loi.

M. Ouellette (Marcel): J'ai quand même le goût, M. le Président, de dire que même si on s'en va vers une recréation de la Sûreté du Québec, même si on s'en va peut-être vers la création d'une police routière, il nous faut quand même, avant de passer à ces étapes, obtenir notre statut de policier qui est primordial avant toute démarche. C'est pour cela qu'on était lésé du fait qu'on n'était pas dans le projet de loi 48 et toutes les étapes qu'il y a à encourir par la suite, il faut passer par là.

M. Bédard: Les recommandations de votre mémoire seront étudiées de façon très spécifique au comité interministériel sur la sécurité routière.

Le Président (M. Boucher): M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: M. le Président, je veux remercier M. Ouellette et ses collègues du mémoire qu'ils ont présenté. Même s'il s'agit peut-être de la nième représentation que l'association fait, c'est peut-être la première fois que vous vous adressez à une commission parlementaire et je veux vous remercier de la correction avec laquelle vous l'avez faite, malgré les frustrations bien compréhensibles qui vous animent.

Comme vous l'avez dit, je suis un peu mal placé pour parler objectivement de votre demande. En ce qui nous concerne, ça fait un bout de temps qu'on a fait notre lit, nous avons convenu, il y a déjà plus de trois ans, que les policiers des autoroutes devraient être reconnus comme corps policier et avoir le statut de policier. C'était strictement ce que voulait dire le projet de loi 41.

L'événement que vous mentionnez qui a fait en sorte qu'il n'a pas été adopté, bien, il y en a qui

pensent que c'est un catastrophe, mais en tout cas, je n'irai pas là-dessus. Mais il reste que je comprends mal, M. le Président, qu'après toutes les réflexions que se sont imposées les officiers du ministère de la Justice depuis plusieurs années — et un de nos prédécesseurs, M. Jérôme Cho-quette, avait même exprimé, on retourne en 1974-1975, son opinion dans le sens d'accorder le statut de policier à la police des autoroutes. Je suis déçu que le gouvernement en soit encore à des comités, à des groupes d'étude, alors que, je le sais, le ministère de la Justice possède dans ses dossiers tout ce qu'il faut pour prendre une décision: Oui ou non. Notre décision était oui, mais elle n'est peut-être pas partagée par le gouvernement actuel. Quand on change de gouvernement, les projets de loi qui sont sur les tablettes ou qui sont dans le moulin, c'est tout-à-fait normal, c'est dans l'ordre des choses qu'ils soient révisés, rejetés ou repris par le nouveau gouvernement. Je ne peux pas en discuter, mais ça fait déjà trois ans, enfin, deux ans et demi que le gouvernement est en place dans un dossier qui était très avancé, sur lequel une décision avait été prise, bonne ou mauvaise, mais dont les éléments de décision étaient prêts.

L'intégration éventuelle à la Sûreté du Québec, à mon sens, n'empêche pas d'accorder, dans ce projet de loi actuel, le statut de policier. Qu'on le fasse de la façon que le projet de loi 41 le faisait ou autrement, ce n'est pas la question, mais le rapport du groupe d'étude que le ministre a depuis deux mois, on ne sait pas ce qu'il y a dedans. Le ministre nous a fait à peine une prédiction sibylline. Ce n'est même pas une promesse. La seule promesse qu'on connaît, c'est qu'il va y avoir une décision avant que le projet de loi soit adopté. Cela vous renvoie chez vous avec une belle jambe. Vous ne savez pas quelle est la décision.

Naturellement, le ministre ne veut pas se compromettre, mais il connaît les conclusions du rapport du groupe d'étude qu'il a depuis deux mois. Pourrait-il nous donner des indications, à savoir dans quel sens ce rapport apporte des conclusions? Ces conclusions indiquent-elles qu'on doive reconnaître le statut de policier à la police des autoroutes? Est-ce un rapport qui recommande l'intégration éventuelle à la Sûreté du Québec? On n'est pas plus avancé. Maintenant, on a un comité concernant la sécurité routière. On va toujours avoir des problèmes. La question policière ne sera jamais complètement réglée. Pourquoi faire attendre davantage une situation qui n'est quand même pas — comme je l'ai dit ce matin — un problème majeur dont le sort des Québécois dépend? Non, mais il reste que c'est un problème qui est quasiment réglé. Pourquoi ne pas le faire maintenant? C'est ce que je ne comprends pas actuellement. Peut-être manque-t-il quelques éléments, la persuasion, la conviction du ministre. Je vais essayer, par quelques questions, d'éclairer le ministre, de savoir pourquoi vous êtes de vrais policiers. Portez-vous une arme?

M. Ouellette (Marcel): Oui, oui.

M. Lalonde: Mais est-ce légal? Avez-vous un permis de port d'arme?

M. Ouellette (Marcel): Bonne question. L'article 90 du Code criminel définit une certaine catégorie de personnes ou d'agents de la paix qui sont spécifiés dans le projet de loi C-51, ce qui fait que les policiers des autoroutes ne sont pas encore compris à l'intérieur de cela.

M. Lalonde: C'est-à-dire que vous êtes dans l'illégalité en portant votre arme?

M. Ouellette (Marcel): On est des agents de la paix, mais on n'est pas dans la catégorie de personnes autorisées à porter des armes.

M. Lalonde: Autorisées au port d'arme sans permis spécifique. Avez-vous déjà été arrêté pour port d'arme?

M. Ouellette (Marcel): Non, mais je peux l'être cet après-midi.

M. Lalonde: Vous pouvez l'être cet après-midi. L'équipement physique auquel vous avez droit — je ne parle pas du CRPQ — est-il à peu près de la même nature que celui des policiers qui font la patrouille, au point de vue des automobiles et des autres équipements connexes?

M. Ouellette (Marcel): Quant aux automobiles, elles sont conformes aux automobiles de police que la Sûreté du Québec, pour ainsi dire, achète. Elles sont identifiées comme étant des véhicules de police et même, elles sont peut-être plus identifiées que n'importe quel véhicule de police de la province de Québec, de sorte que c'est plus gros, plus large. C'est écrit plus grand.

M. Lalonde: Une étude n'a-t-elle pas été faite par la Commission de police sur l'équipement du corps policier des autoroutes?

M. Ouellette (Marcel): Ce n'est pas une étude. C'est un rapport d'inventaire d'équipement, en fait, tant physique qu'économique et du personnel, etc. qui a été fait par la Commission de police en 1976, lors du dépôt en première lecture du projet de loi no 41.

M. Lalonde: Y avait-il des conclusions dans ce rapport indiquant que votre équipement était conforme à ce qu'un corps policier devrait avoir?

M. Ouellette (Marcel): Oui. Cela semblait être conforme d'après l'étude. Cela semblait être conforme aux exigences de la Loi de police.

M. Lalonde: Le ministre a sûrement ce document. Y aurait-il d'autres statistiques que vous voudriez nous fournir concernant, par exemple, les formes de criminalité que vous devez affronter

quotidiennement, le degré de "dangerosité" de vos fonctions?

M. Ouellette (Marcel): Je ne m'attendais pas â avoir cette question au niveau des statistiques. Ce que j'ai pris brièvement dans un rapport, dans le rapport annuel de l'Office des autoroutes indique qu'au niveau des contraventions, pour à peu près 80 patrouilles — nous sommes 115 — l'an dernier, il s'est donné 43 000 contraventions, c'est-à-dire 43 000 billets au niveau du Code de la route. Il s'est effectué 1565 arrestations au niveau criminel et, à l'intérieur de cela, il y a eu 830 facultés affaiblies. Cela varie, au niveau des infractions criminelles: voies de fait, tentatives de viol, viols, attentat à la pudeur, etc. (17 heures)

M. Lalonde: Vous parlez de l'opération 100 dans votre mémoire, à la page 17, c'est le rapport de vérification du CRPQ. Pouvez-vous nous l'expliquer, pour ceux qui ne seraient pas familiers avec cette opération policière?

M. Ouellette (Marcel): La plupart du temps un corps de police municipal fait une demande à la Sûreté du Québec pour qu'on déclenche une opération 100, ce qui, en fait, équivaut à un ratissage d'un certain secteur donné; s'il y a eu un vol à main armée ou une infraction criminelle grave, on déclenche une opération 100. Nous, en tant que policiers des autoroutes, sommes dans le bouquin de la Sûreté du Québec, ce qui fait qu'on doit, à certains points stratégiques, être là pour vérifier. Même, on a déjà effectué, dans le passé, des arrestations de personnes qui avaient effectué un vol à main armée, etc., en collaboration avec la Sûreté du Québec et les corps de police municipaux.

M. Lalonde: Ce sont les seules questions que j'avais à vous poser. Je veux simplement conclure en vous disant que nous allons, du côté de l'Opposition, être vigilants et nous assurer que, non pas la promesse, mais la prédiction du ministre à savoir que vous allez être fixés sur votre sort, que vous aurez votre verdict avant le passage de cette loi en deuxième lecture... nous allons voir à ce que le droit — parce que je pense que c'est un droit qu'ont les policiers des autoroutes — d'avoir le statut de policier soit reconnu. Je vous remercie de votre présence ici.

Le Président (M. Boucher): M. le ministre.

M. Bédard: M. le Président, je comprends le député de Marguerite-Bourgeoys de s'attarder beaucoup sur les dispositions de son défunt projet de loi 41 ; je comprends qu'il s'y sente en sécurité en termes d'opposition. Je suis convaincu qu'il sera beaucoup moins long sur certains autres articles du projet de loi 41 qui allaient jusqu'à préconiser des perquisitions sans mandat.

M. Lalonde: ...

M. Bédard: Je puis vous dire que le choix peut paraître simple; il n'est pas si simple que cela, puisque je me rappelle que lorsque nous étions dans l'Opposition, j'avais fait des représentations dans le sens de celles que nous fait le député de Marguerite-Bourgeoys aujourd'hui. Cela a abouti, après trois ans, à un dépôt de projet de loi qui est défunt maintenant, pour les raisons que nous connaissons. Le choix n'est pas si simple que cela, puisque l'ancien gouvernement en était arrivé à une décision qui était la mise en place d'un corps de police distinct; un organisme qui a sa crédibilité aussi, le groupe Saulnier, en est arrivé à une autre décision, une autre recommandation qui était celle de l'intégration à la Sûreté du Québec. Il faut quand même se le rappeler. Je ne cherche pas d'excuses, parce que je vous ai très bien relaté l'essentiel des rencontres que nous avons eues ensemble et des préférences que j'avais évoquées à ce moment-là et qui restent les mêmes. Il faut quand même se dire que le groupe Saulnier a déposé son rapport au moment où vous le savez, et immédiatement on avait demandé un autre rapport plus en profondeur sur toutes les implications que cela pouvait représenter, ce qui indiquait déjà, je pense, la continuation effective d'une préférence que je vous avais évoquée clans mes entretiens particuliers.

Il y a, à l'heure actuelle, un comité interministériel sur la sécurité routière, ce sera un des premiers sujets, et nous allons aboutir, avant la troisième lecture, à une décision.

Le Président (M. Boucher): Merci, M. le ministre.

En mon nom personnel et au nom des membres de la commission, je remercie M. Ouellette et ceux qui l'accompagnent pour la présentation de leur mémoire.

J'appellerais maintenant l'Union des municipalités représentées par M. Luc Lacharité. M. Lacharité.

Union des municipalités

M. O'Bready (Jacques): Je vous remercie, M. le Président. M. Lacharité n'est pas présent; je suis Jacques O'Bready, vice-président de l'Union des municipalités. J'excuse également l'absence de certains de mes collègues qui siégeaient au comité de la police au niveau de l'union. Ils sont retenus à d'autres endroits. Je voudrais vous remercier au nom de l'Union de nous donner l'occasion de nous exprimer sur le projet de loi no 48. Vous me permettrez, M. le Président et messieurs, de vous lire le mémoire dont vous avez, je pense, déjà reçu copie quitte à peut-être y ajouter quelques commentaires ad libb et également à répondre à vos questions s'il y en a.

Le projet de loi no 48, Loi modifiant la Loi de police, nous est apparu à ce point important pour l'administration municipale que nous pouvions difficilement refuser l'invitation à venir le commenter devant cette commission.

L'Union des municipalités du Québec a toute raison de croire que les intentions du législateur, qui l'ont motivé à apporter des correctifs à la Loi de police, sont excellentes. Cependant, nous croyons qu'il s'agit d'un texte de loi incomplet par rapport à l'envergure du problème de la gestion des corps policiers municipaux. Aussi sommes-nous d'avis que le législateur a choisi une approche ponctuelle, pour ne pas dire timide, à l'égard d'une solution qui doit répondre à un besoin pressant, à savoir l'élaboration d'une véritable politique de la police au Québec.

Au cours des dernières années, il y a eu de nombreuses études et représentations faites au sujet de l'organisation et des fonctions de la police au Québec dont, plus récemment, le rapport Saulnier sur lequel l'union disait: "Nous sommes d'opinion que le rapport constitue une approche rationnelle au problème de l'organisation policière en ce sens qu'il cherche à offrir une solution mitoyenne entre le statu quo et la mise sur pied d'une gendarmerie nationale pouvant oeuvrer sur le plan local. Bref, le rapport est fort bien structuré et ses analyses et compilations statistiques sont importantes. Ainsi, il offre aux autorités gouvernementales des éléments de solution pour l'élaboration d'une politique de la police au Québec."

Si l'Union des municipalités demeure perplexe devant ce projet de loi, c'est qu'elle n'y trouve pas suffisamment d'éléments lui permettant de croire que le législateur ait tenu compte de cette étude du groupe de travail présidé par M. Saulnier. Par conséquent, il semble qu'on se sera contenté d'apporter quelques modifications à la Loi de police, lesquelles, selon nous, risquent davantage de perturber la situation actuelle vécue par l'autorité municipale en regard de son corps de police que de régler des problèmes dont l'Union des municipalités a maintes fois souligné l'urgence.

Il est vrai que nous formulions quelques réserves quant à certaines dispositions du rapport Saulnier et que nous n'acceptions pas d'emblée toutes les conclusions qu'on y retrouve. Cependant, nous n'étions pas rébarbatifs aux recommandations formulées dans ce rapport puisque nous croyions et croyons toujours que ce dernier offre une formule de compromis acceptable pour le citoyen et les parties en cause.

La recommandation du groupe de travail sur la régionalisation des corps policiers municipaux est celle qui a retenu le plus l'attention des élus. Toutefois, nous avons dit que les structures proposées dans le rapport étaient prématurées puisqu'elles risquaient d'entrer en contradiction avec l'éventuel découpage du territoire prévu par le projet de loi no 125, Loi sur l'aménagement et l'urbanisme. J'ajoute simplement comme commentaire, M. le Président, qu'il faut comprendre tout de même qu'au moment où le rapport Saulnier a été déposé le projet de loi no 125 ne l'était pas encore et ce n'est que par la suite, pour faire la concordance entre les deux projets de loi, que ces commentaires ont été formulés par l'union.

C'est avec satisfaction que nous reconnais- sons la volonté du législateur de ne pas légiférer sur la question de la régionalisation des corps de police municipaux tant et aussi longtemps que ne sera pas déterminé le découpage des futures municipalités régionales, tel que nous l'avions suggéré.

Le projet de loi no 48 qui, dans un premier temps, vise à accroître les pouvoirs d'enquête de la Commission de police propose dans un deuxième temps certaines règles concernant l'établissement des corps policiers municipaux et également l'organisation de ceux-ci. Même s'il nous apparaît nécessaire que ce projet de loi soit repensé pour l'intégrer dans un texte législatif global, nous devons commenter certaines parties de ce projet de loi, spécialement celles qui concernent les pouvoirs de la corporation locale et les corps municipaux de police.

Ainsi, nous aborderons, dans l'ordre numérique des articles, certains de nos commentaires afin de rendre notre intervention plus facile à suivre. Je commence l'analyse article par article.

A l'article 2 et à 2a, nous soulignons que le premier alinéa vient clore un débat ouvert par dix années de jurisprudence. Il appelle cependant certains éclaircissements. Ce policier agissant comme agent de la paix ne cesse pas d'être préposé du procureur général dans sa propre municipalité. Lorsqu'on lit les deux paragraphes de cet article ensemble, on pourrait penser le contraire, puisque le législateur ne parle pas pour ne rien dire. L'interprétation, au contraire, du premier alinéa risquerait d'augmenter la responsabilité civile et quasi délictuelle de la corporation municipale. Quant au second alinéa, l'Union des municipalités croit qu'elle ne vient pas changer la nature des ententes intermunicipales de services constabulaires.

A l'article 2c, malheureusement, il n'y a pas dans le projet de loi de définition de situations perturbatrices de l'ordre de la paix et de la sécurité publique. Elle est laissée à l'interprétation et, peut porter atteinte aux libertés civiles. Nous souhaiterions connaître les critères qui peuvent qualifier une situation comme perturbatrice de l'ordre, de la sécurité et de la paix publique. Que le directeur de police puisse, de sa propre initiative, faire rapport au Procureur général nous apparaît acceptable dans la mesure où celui-ci, sans avoir à en divulguer le contenu, avise simultanément le conseil municipal qu'il a effectivement fait parvenir un tel rapport. Aussi, faudrait-il stipuler que le directeur d'un corps de police municipal pourrait également être appelé à soumettre au procureur général un rapport circonstancié à partir d'une demande du conseil municipal.

A l'article 7, le dernier paragraphe stipule que la commission a le pouvoir d'adopter un règlement de déontologie et de discipline applicable aux membres des corps policiers municipaux selon l'article 47a et ce au même titre que le lieutenant-gouverneur en conseil pour la Sûreté du Québec. Cependant, ce dernier, le lieutenant-gouverneur, le fait sur la recommandation du directeur de la sûreté, et pas autrement, alors

que la commission le ferait après consultation des organismes municipaux concernés seulement. Encore une fois, voici une occasion pour le législateur de rectifier ce qui nous apparaît anormal et de respecter un tant soit peu les pouvoirs locaux. Nous demandons la possibilité que la commission puisse, par règlement, étendre l'application des dispositions de l'article 47a ou de parties de celle-ci à l'ensemble ou à une partie des policiers municipaux du Québec seulement sur recommandation des organismes représentatifs, c'est-à-dire l'Union des municipalités, l'Union des conseils de comté et l'Association des directeurs de police du Québec travaillant de concert pour les besoins de la cause. Ce processus ne doit pas empêcher la commission de demander aux organismes municipaux de produire des recommandations concernant la déontologie et la discipline.

D'autre part, il nous apparaît souhaitable que la commission définisse un code minimal de déontologie et d'éthique policière et que ce code s'applique là où il n'en existe pas ou ne s'applique, pour les autres municipalités, que là où le code de discipline ne répondrait pas aux dispositions du code minimal, ce qui laisse à l'autorité municipale la possibilité d'adopter son propre code ou d'accepter des normes minimales.

L'article 19 du projet de loi constitue un élément nouveau, lequel, selon nous, pourrait mettre fin à beaucoup d'incertitude et d'ambiguïté quant au rôle joué par la Sûreté du Québec lorsque les corps de police municipaux sont incapables d'agir adéquatement. Jusqu'à présent, ces services avaient été accordés sans base juridique claire. Quoique ce ne soit pas indiqué dans le mémoire, M. le Président, à l'article 19, nous avons une réserve assez sérieuse sur les termes "de sa propre initiative". Je pense qu'il faudrait ajouter cela aux représentations de l'Union des municipalités.

L'article 25, c'est probablement là le coeur de nos représentations, c'est un nouvel article portant le no 52, et c'est sans aucun doute ce qui nous apparaît le plus significatif dans ce projet de loi. La possibilité, pour les municipalités de 5000 habitants et moins, de constituer ou non un corps de police nous apparaît comme étant une solution souhaitée par plusieurs de nos membres, quoi-qu'au nom de l'équité, cette formule ne constitue vraiment pas la réponse à un juste partage des coûts de la sécurité publique au Québec, surtout que les municipalités seront appelées à vivre une nouvelle expérience en matière de fiscalité à compter du 1er janvier 1980, d'où l'intérêt d'une politique qui mette toutes les municipalités sur un même pied à partir de facteurs de coûts identiques ou presque. (17 h 15)

Ce même article permet au lieutenant-gouverneur en conseil de déterminer les effectifs d'un corps de police local, c'est-à-dire établir le taux d'encadrement policier dans une municipalité donnée. Rappelons que le rapport Saulnier soulignait que l'encadrement policier d'un service complet, selon une analyse faite pour un district urbanisé de 20 000 habitants, s'établissait à une moyenne minimale de 1.5 policier par 1000 habitants. Les auteurs croyaient important de souligner qu'il s'agissait là d'un ordre de grandeur donné à titre indicatif et que la fixation d'un taux d'encadrement pour un district est fonction de l'indice de la densité d'occupation du sol, de sa nature et de l'analyse suivie de la criminalité dans ce territoire et non seulement de la population.

Même s'il est intéressant de noter que le projet de loi 48 permet la fixation des taux d'encadrement à partir de facteurs locaux dont devrait tenir compte la commission dans son avis au lieutenant-gouverneur en conseil, nous considérons qu'il serait de loin préférable que le taux d'encadrement policier pour une municipalité donnée soit fixé conjointement par la Commission de police et la municipalité concernée ou l'organisme qui la représente.

Dans la fixation des effectifs policiers, la commission et la municipalité tiendraient compte de la capacité de payer de la municipalité, du taux de la criminalité dans les limites territoriales de celle-ci, des implications de cette décision sur les membres des corps de police concernés, de l'avis du directeur du service de police, des possibilités d'entente suivant les articles 60 et 60a, ainsi que des exigences de la municipalité concernant l'application des règlements municipaux.

Si la commission et la municipalité devaient en arriver à une impasse totale, celles-ci soumettraient leurs positions respectives au lieutenant-gouverneur en conseil, lequel pourrait, en dernier ressort, fixer les effectifs de ce corps de police. Cette approche nous apparaît beaucoup plus respectueuse du pouvoir local, tout en créant une nouvelle forme de collaboration entre, d'une part, une commission de police dont les objectifs sont assez mal compris et la neutralité parfois mise en doute et, d'autre part, le pouvoir local qui déplore le fait que le contrôle de son corps de police lui échappe de plus en plus. L'Union des municipalités du Québec n'est d'aucune façon prête à accepter que des représentants d'associations policières puissent intervenir de quelque façon que ce soit dans la fixation du taux d'encadrement policier. Selon nous, il appartiendrait au directeur de faire valoir les points susceptibles d'avoir un impact sur les membres du corps qu'il dirige et de faire les recommandations qu'il juge utiles.

La décision d'une municipalité de réduire ses effectifs policiers en tout ou en partie n'émane pas d'un caprice administratif, mais plutôt de contraintes budgétaires et de calculs démographiques. Le projet de loi accorde aux policiers ainsi mis à pied un traitement de faveur difficilement justifiable par rapport aux autres employés municipaux.

Plutôt que de procéder en vertu du principe lourd et coûteux en deniers publics d'un comité de reclassement, il serait de loin préférable que les municipalités autorisées à se départir de leur corps policier, puissent — et cela est à titre d'exemple — donner un avis de résiliation de contrat d'au moins douze mois et accorder à

chaque employé mis à pied une somme forfaitaire décidée par le lieutenant-gouverneur en conseil.

Article 52a. Nous comprenons que la décision du lieutenant-gouverneur de dispenser une municipalité de son obligation de maintenir un corps de police ou d'en réduire les effectifs n'aura d'effet que lorsque tous les efforts possibles auront été accomplis et qu'un processus aura été déployé pour trouver un emploi aux policiers ainsi déplacés.

Ce que le législateur a omis d'indiquer, ce sont les délais accordés au comité de reclassement avant que le lieutenant-gouverneur en conseil ne consente à dispenser une municipalité de son obligation. Faudrait-il comprendre qu'une municipalité ne pourra sous aucun prétexte diminuer ses effectifs policiers même si cette décision est justifiée et justifiable avant que ne soit constitué un comité de reclassement, que celui-ci n'ait examiné la situation et formulé ses recommandations, également qu'il n'ait étudié la possibilité pour le policier concerné de trouver un emploi dans un autre corps de police et que, finalement, ce même comité n'ait examiné avec la municipalité la possibilité de lui procurer un autre emploi? Faudrait-il comprendre que la municipalité ne pourra d'aucune façon diminuer ses effectifs tant et aussi longtemps que ce comité de reclassement n'ait pu trouver un autre emploi pour le ou les policiers ainsi mis à pied? Devons-nous comprendre qu'il faille aussi obtenir l'assentiment du policier concerné sur la qualité du nouvel emploi?

Nous comprenons difficilement l'absence de représentants de la Sûreté du Québec sur ce comité de reclassement puisqu'il est logique de supposer que ce corps policier serait le premier à embaucher les policiers municipaux affectés, soit par la cessation d'un service, soit par la réduction de ses effectifs.

En effet, lorsque, par exemple, une municipalité de 5000 habitants et moins est dispensée de son obligation de maintenir un corps de police, c'est à la Sûreté du Québec qu'incombe dorénavant la responsabilité de la sécurité de ce même territoire, d'où la nécessité d'augmenter ses effectifs. Le policier municipal ayant reçu la même formation que les membres de la Sûreté du Québec et au surplus étant familier avec le territoire laissé à la juridiction de la Sûreté, il nous apparaît normal que ce corps de police soit le premier intéressé à recruter les policiers affectés.

Article 52b. Nous comprenons bien et nous acceptons que le Procureur général pourrait demander à la commission de faire enquête afin de vérifier si une municipalité maintient des services policiers adéquats. Cependant, nous comprenons mal qu'un groupe de citoyens puisse faire une demande auprès de la commission sans que soit d'abord saisi le conseil de ville de cette plainte et qu'il n'ait pu tenir une audience publique sur le sujet, s'il est d'importance, ou apporter des correctifs administratifs, s'il est anodin, et que ce même groupe de citoyens n'ait reçu de lui sa réponse dans un délai raisonnable. Aussi, il faudrait définir ce qu'est un groupe de citoyens. Est- ce 2, 10, 100 personnes? Nous suggérons au législateur d'établir un nombre minimum de requérants, ce qui permet de garantir le sérieux de la plainte.

D'autre part, il nous apparaît tout à fait inconcevable qu'une association de policiers puisse, par requête, demander à la commission de faire enquête afin de vérifier si une municipalité maintient les services policiers adéquats. D'abord, il faudrait s'entendre sur la définition du mot "adéquat". On doit convenir qu'une association de policiers n'a pas nécessairement la même définition de l'adéquation en matière de services policiers que celle que pourrait avoir celui qui reçoit les services et paie la note. La municipalité, de son côté, pourrait très bien invoquer qu'un service policier adéquat doit également correspondre à sa capacité financière, c'est-à-dire ses pouvoirs de taxation. Ces remarques s'appliquent aussi aux citoyens qui portent une plainte. L'Union des municipalités croit qu'une assemblée publique tenue par le conseil peut lui permettre de justifier l'état de son service policier.

Article 52c. Cet article prévoit que le Procureur général peut charger la Sûreté de maintenir la paix, l'ordre et la sécurité publique dans le territoire soumis à la juridiction de la municipalité si, de l'avis de la commission, elle ne maintient pas de service policier adéquat. D'abord, il nous apparaît extrêmement important que la municipalité concernée soit saisie de l'avis de la commission et qu'elle ait un délai raisonnable pour se conformer avant que le procureur général puisse charger la Sûreté d'agir sur son territoire. Selon l'Union des municipalités, il faudrait faire une distinction quant à l'obligation pour la municipalité de fournir des services adéquats et l'impossibilité pour celle-ci de le faire pour des raisons résultant de conflits de travail. Nous suggérons que, dans pareil cas, les dispositions de l'article 19 du projet de loi soient appliquées et que, pour ces services qui sont rarement d'une longue durée, la Sûreté du Québec en assume les coûts.

Article 28. Cet article répond à un besoin et nous pensons qu'il servira à certaines de nos municipalités membres. Cependant, nous demandons la possibilité que ces ententes soient renégociables annuellement. Cela aurait pour effet de permettre aux deux parties de faire les ajustements s'il y a lieu.

Article 31. Cet article longtemps attendu par le monde municipal permettra aux petites municipalités qui connaissent des augmentations de population saisonnières, tels les lieux de villégiature, de pouvoir nommer, pour une période de temps raisonnable, des constables spéciaux.

Article 39. Nous croyons en toute objectivité et équité que cette période de deux ans accordée aux municipalités régies par le Code municipal devrait être accordée sans discrimination aux quelques municipalités régies par la Loi des cités et villes de même taille qui, jusqu'à ce jour et pour toutes sortes de raison, ne se seraient pas conformées aux dispositions de l'article 52 de la Loi de police.

En guise de conclusion, M. le Président, l'Union des municipalités du Québec se demande pourquoi le législateur n'a pas profité du projet de loi no 48 pour clarifier une fois pour toutes l'ambiguïté qui existe entre; d'une part, l'article 115 de la Loi des cités et villes et, d'autre part, l'article 55 de la Loi de police. Il nous semble qu'à l'aube d'une réflexion, si partielle soit-elle, sur le problème de la gestion des corps policiers municipaux, le législateur aurait pu délimiter les attributions et responsabilités des autorités civiles et policières.

M. Yves Ouellette, professeur à la faculté de droit de l'Université de Montréal, parlant du contrôle politique sur les services de police municipaux le 2 mars dernier, disait: "Une des faiblesses actuelles de l'organisation policière au Québec est l'insuffisance des contrôles gouvernementaux sur la gestion générale des services de police attribua-bles à l'immobilisme des divers gouvernements provinciaux et à leur retard à se donner des politiques bien articulées sur la gestion des services de police. "Si d'aucuns s'étonnent ou s'inquiètent de la puissance des syndicats de policiers et parlent de l'émergence d'un pouvoir policier, ce phénomène n'est peut-être pas entièrement attribuable à la seule gourmandise des policiers, mais tient aussi à l'inaction des gouvernements qui se laissent dépasser par la police. "En 112 ans de confédération, les réalisations des gouvernementaux provinciaux en matière de planification et de politiques policières n'impressionnent guère. On pouvait lire dans le livre blanc intitulé "La police et le citoyen." Si les structures actuelles présentent des lacunes graves, c'est en bonne partie parce que l'Etat n'a pas suffisamment assumé jusqu'à maintenant son rôle de principal planificateur du domaine policier. C'était en 1971. Depuis ce temps, le rapport Saulnier a été déposé et rien ne permet de croire qu'il se matérialisera prochainement en réalisation concrète et en législation."

C'était là la somme de nos premières réactions à ce projet de loi no 48. Nous espérons que nos commentaires invitant le législateur à revoir l'ensemble de la Loi de police seront bien accueillis. Sachez que notre seul but est l'amélioration de la qualité des services à la population et- ce, à l'intérieur d'un cadre juridique bien défini, ne laissant aucun doute quant aux devoirs et obligations de chacun. Je vous remercie.

Le Président (M. Boucher): Merci. M. le ministre.

M. Bédard: Je remercie, M. le Président, l'Union des municipalités de son rapport et de sa contribution aux travaux de notre commission parlementaire. Je vois que l'Union des municipalités, d'une part, se dit déçue du fait que je n'aie pas suivi le rapport Saulnier. Par contre, elle se déclare satisfaite du fait que la recommandation la plus importante du rapport Saulnier, soit celle concernant la régionalisation, ne soit pas dans le projet de loi. Mais c'était quand même une des recommandations clefs du rapport Saulnier.

Il reste que l'Union des municipalités — c'est normal — soucieuse de la protection de son autonomie, soucieuse aussi du fait qu'administrant les biens publics, veut avoir toutes les possibilités d'être insérée dans le processus de toute décision qui se traduit par des dépenses des deniers publics, attache une attention tout à fait particulière au processus qui est prévu dans la loi concernant le taux d'encadrement. C'est un des points importants.

La seule question que je me posais face à la suggestion qui nous est faite par l'Union des municipalités à savoir que ce taux d'encadrement soit décidé par la commission de police et la municipalité concernée seulement, je me demandais si le fait que le taux d'encadrement n'est fixé que par la commission de police et la municipalité concernée, il n'y a pas danger que la solution retenue le soit surtout et uniquement en vertu d'impératifs municipaux plutôt que l'on ait tendance, je ne présume pas, mais est-ce qu'il n'y a pas ce danger-là...

M. O'Bready: Je pense, M. le ministre, que si la Commission de police, conjointement en collaboration avec la municipalité concernée, établit ses taux d'encadrement, la Commission de police sera là pour faire respecter des critères possiblement différents ou, en tout cas, autres que ceux qu'une municipalité aurait peut-être tendance à faire valoir. C'est la raison pour laquelle on demande que la Commission de police, conjointement avec la municipalité le fasse et que s'il n'y a pas entente, que le lieutenant-gouverneur en conseil puisse trancher. Nous sommes absolument d'accord que les taux d'encadrement ne doivent pas être basés strictement sur des impératifs municipaux. C'est peut-être pour cette raison qu'on a des réticences à dire — j'écoutais tantôt d'autres interventions — pourquoi 5000? Pourquoi pas 6000, 7000 ou 4000? (17 h 30)

A toutes fins utiles, à notre avis, c'est bien certain que les petites municipalités de 5000 et moins ont tendance à ne pas vouloir maintenir des corps de police, mais cela, M. le Président, je pense que ce n'est pas uniquement pour des questions de population, mais à cause de l'absence de moyens de se doter d'effectifs policiers qui ont tous les outils pour être capables de travailler d'une façon vraiment adéquate. Si vous vous rappelez une des conclusions du rapport Saulnier ou un des passages importants du rapport Saulnier, ce n'était pas strictement la régionalisation ou quelques points que j'ai mentionnés, mais on avait dit beaucoup aussi sur la motivation des policiers. On attribuait une partie du malaise policier à une certaine démotivation qui n'est pas toujours le fait ou la responsabilité du policier, mais qui est due à l'impossibilité pour son employeur de lui fournir des instruments de travail adéquats. Je comprends qu'il doit être frustrant pour un policier, qui a passé un certain temps à se

former à l'Institut de police, qui a passé un certain temps à acquérir de l'expérience, de se voir limité dans ses moyens. Je veux dire que c'est un ensemble. Je voudrais que mon intervention de tantôt, en disant que le problème policier est un problème global et qu'on est un peu déçu, soit perçue dans ce sens et non dans un sens négatif.

M. Bédard: Concernant le comité de reclassement, vous émettez l'opinion que vous préféreriez plutôt un avis de résiliation de douze mois pour permettre au policier de se replacer sur le marché du travail. Ne croyez-vous pas que cette formule d'avis seulement de résiliation est de nature à mettre un peu de côté certains droits acquis par des policiers qui oeuvrent depuis longtemps dans certaines municipalités et qui, en fonction du respect de la loi, se voient privés de leur gagne-pain? Ne trouvez-vous pas que les policiers qui ont servi depuis longtemps une municipalité ont quand même certains droits acquis?

M. O'Bready: Je suis d'accord pour les policiers comme pour tout autre employé municipal qui pourrait, d'ailleurs, subir le même sort pour des raisons différentes. Mais vous aurez remarqué qu'on n'écarte pas nécessairement le comité de reclassement. Si on doit conserver cette formule, M. le ministre, on croit qu'au moins il faudrait préciser certains délais et certaines façons de faire, comme je l'ai expliqué tantôt dans le mémoire. Il va falloir établir des règles du jeu à ce comité tout de même parce que le comité de reclassement peut fonctionner pendant un an sans produire de résultats concrets ou efficaces. Qu'arrive-t-il, à ce moment-là, de la réduction des effectifs policiers ou de l'abolition du corps de police? Il ne faudrait quand même pas que cela traîne en longueur. La solution d'une indemnité de séparation est une alternative. Je l'ai souligné tantôt. C'est à titre d'exemple. Cela peut être une combinaison de ces différentes façons de procéder aussi. Cela peut être un comité de reclassement. Si à l'expiration du travail du comité de reclassement ou pour des raisons qu'on pourrait définir, il n'y a pas de solution, cela peut être une indemnité de séparation. On n'est pas intéressé à ce que de vieux employés municipaux se retrouvent sur le trottoir, pas plus pour les policiers que pour d'autres catégories d'employés. Il y a à peine 200 policiers, me dit-on, dans les corps policiers des villes de 5000 habitants et moins. Il y a à peu près 200 personnes. Je pense que ce ne serait tout de même pas un problème épouvantable. Il peut être réglé pour autant qu'on précise certaines choses.

M. Bédard: Si on devait fonctionner à partir du comité de reclassement, quelles seraient les balises que vous aimeriez voir établies? Vous avez dit qu'il faudrait quand même que cela se fasse dans une période assez restreinte, la moins longue possible. Il ne faudrait pas que cela s'éternise. Y a-t-il d'autres balises dont vous croiriez qu'il serait important de tenir compte?

M. O'Bready: S'il y a un comité de reclassement, étant donné qu'on a affaire à des policiers, je crois qu'il devrait y avoir au moins certaines... On a parlé, par exemple, de l'absence de représentants de la Sûreté du Québec. Ne serait-il pas intéressant que la Sûreté du Québec soit impliquée dans ce comité de reclassement? On dit que les policiers municipaux ont la même formation que ceux de la Sûreté du Québec. On dit que, si le corps policier d'une petite municipalité disparaît, à ce moment-là, c'est la Sûreté du Québec qui assume la responsabilité. S'il a la même formation, s'il a l'expérience du territoire, ne pourrait-on pas imposer une obligation qu'il soit intégré pour autant qu'il puisse accomplir les exigences normales de la tâche en respectant les autres contraintes des ententes syndicales, avoir, par exemple, un premier choix là et, ensuite, un premier choix dans d'autres municipalités? S'il n'y a plus de corps policier dans une ville, on va peut-être essayer de lui trouver une autre fonction. L'âge peut être un critère. La formation peut être un critère. Si ce sont de vieux policiers qui n'ont pas passé à l'Institut de police, leur impose-t-on une période de recyclage? Il faudrait peut-être préciser cela, sinon dans la loi, du moins dans une réglementation qui s'y adjoindrait.

M. Bédard: Enfin, on n'avait pas prévu la présence de la Sûreté du Québec, on avait prévu la présence du ministère de la Justice; on évaluera cela.

M. O'Bready: Oui.

M. Bédard: Vous avez souligné entre autres, je pense à bon escient, le fait qu'il y avait une ambiguïté entre l'article 115 de la Loi des cités et villes et l'article 55 de la Loi de police. Est-ce que vous auriez une solution à proposer?

M. O'Bready: C'est l'éternel conflit, M. le ministre, mais je pense qu'il va falloir, comme on dit, finir par prendre le taureau par les cornes et trouver une solution. C'est une occasion perpétuelle d'accrochages. Est-ce qu'il appartient au ministre de la Justice de déterminer, à ce moment-là? Je n'ai pas de solution immédiate à vous proposer, mais on pourrait certainement y travailler. Je serais prêt à ce que l'Union des municipalités travaille conjointement avec le ministère de la Justice et les autres personnes concernées, pour trouver une solution parce qu'il y a tout de même une contradiction flagrante.

M. Bédard: Cela va pour le moment. Si mes collègues ont d'autres questions...

Le Président (M. Boucher): Merci, M. le ministre. M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: Seulement quelques remarques, M. le Président, pour remercier, d'abord, l'Union des municipalités de son mémoire et aussi du caractère de son mémoire qui est extrêmement positif et qui, tout en reconnaissant la respon-

sabilité du gouvernement d'intervenir pour le maintien de l'ordre, le fait dans l'orientation du respect des structures locales. Je prends note, comme membre de cette commission, de plusieurs de vos suggestions qui seraient de nature à rendre plus acceptable l'intervention de l'Etat dans le processus d'application de vos propres responsabilités, des responsabilités de vos membres, pour le maintien d'un service policier adéquat.

J'aurais seulement quelques remarques. Je note — ce n'est pas dans votre mémoire, mais vous l'avez dit — relativement à l'article 19, je pense avoir compris, en tout cas, vous l'avez ajouté, que vous n'êtes pas d'accord que cette intervention soit faite de l'initiative de la Sûreté du Québec. Il s'agit, dans cet article 19, du pouvoir de la Sûreté, du devoir, même, de sa propre initiative, d'assumer l'ordre et de poursuivre une enquête, selon le cas, lorsqu'un corps de police municipal n'a pas "les effectifs, l'équipement ou l'expertise nécessaires." On en a parlé ce matin, c'est un article, je pense, sur lequel le gouvernement ou la commission parlementaire devra se pencher pour éviter des situations où la Sûreté aurait le pouvoir d'intervenir de façon intempestive en faisant elle-même son propre jugement à savoir que la municipalité n'a pas fait son devoir.

C'est dans le même sens pour beaucoup de vos recommandations. Au moins, il faut donner une chance à la municipalité, s'il y a une lacune, de la corriger elle-même. C'est dans ce sens que, je pense, votre mémoire est très positif, il est dans le sens du respect des structures locales.

M. O'Bready: C'est un ajout important, parce que le mémoire a été préparé assez rapidement. J'insiste pour qu'à l'article 19 soit notée non seulement la réserve, mais le refus des municipalités d'accepter que la Sûreté puisse, de sa propre initiative, intervenir, que ce soit à la demande du Procureur général, à la demande d'une municipalité ou par des mécanismes qui seront à préciser, mais je pense que de sa propre initiative... D'ailleurs, partout dans le mémoire, vous l'avez noté, on exige ou on demande tout de même le respect des autonomies locales.

On ne sait peut-être pas tous lire, mais je pense qu'on est tous capables de comprendre. A ce moment-là, j'ai l'impression qu'on est capables de prendre des décisions. Si on ne les prend pas, je pense qu'il y a toujours les autorités super au-dessus de nous autres pour rappeler aux petits élus municipaux quoi faire.

M. Lalonde: Dans les sections et les parties de ce projet de loi qui concernent plus particulièrement les municipalités que vous représentez, on retrouve à peu près à tous les endroits la Commission de police, qui a beaucoup de pouvoirs un peu partout dans le processus prévu par la loi. Vous n'avez pas fait de remarques sur les pouvoirs de la Commission de police, pouvoirs quasi judiciaires par rapport aux pouvoirs administratifs. Est-ce que vous avez des remarques à faire là-dessus?

M. O'Bready: Non, il n'était pas du mandat des gens qui ont rédigé le mémoire d'intervenir dans la séparation ou, en tout cas, dans la distinction des pouvoirs quasi judiciaires et des pouvoirs administratifs de la Commission de police, comprenant fort bien que plusieurs autres organismes ou personnes qui se présenteraient devant cette commission discuteraient certainement du sujet. Nous serions toujours prêts à en discuter, mais, pour des raisons de temps et de disponibilité de personnel, on n'a pas vraiment eu le temps de pousser la question à fond. Alors, plutôt que de se lancer dans un débat où on n'aurait pas eu des arguments vraiment structurés à faire valoir, on a préféré s'abstenir.

M. Lalonde: Alors, compte tenu de votre mandat et du caractère très articulé de votre mémoire, je n'ai pas d'autres questions. Je pense que votre message est passé et, comme membres de la commission parlementaire, ce sera sûrement une source d'inspiration lorsque l'étude de ce projet de loi ou d'un autre projet de loi qui pourra suivre nous sera soumise. Je vous remercie.

Le Président (M. Boucher): Merci, M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. O'Bready: J'aimerais que le mémoire, avec les quelques corrections que j'ai faites, soit inscrit au journal des Débats.

Le Président (M. Boucher): II sera inscrit au journal des Débats.

M. Bédard: II sera reproduit intégralement, (voir annexe C)

Le Président (M. Boucher): D'accord. M. Bédard: Merci beaucoup.

Le Président (M. Boucher): En mon nom personnel et au nom des membres de la commission, je vous remercie pour la présentation de votre mémoire. J'invite immédiatement à la barre la Ligue des droits et libertés représentée par M. Gordon Lefebvre. Est-ce qu'il y a accord pour que...

M. Bédard: Est-ce qu'on pourrait avoir une minute...

Le Président (M. Boucher): ... on va poursuivre après 18 heures?

M. Bédard: Est-ce qu'on pourrait suspendre pour une minute?

Le Président (M. Boucher): Nous suspendons pour cinq minutes.

Suspension de la séance à 17 h 43

Reprise de la séance à 17 h 47

Le Président (M. Boucher): A l'ordre, s'il vous plaît! Alors, M. Lefebvre, si vous voulez présenter les gens qui vous accompagnent. M. le député de Saint-Louis.

M. Blank: M. le Président, avant de commencer, j'ai lu le mémoire des gens qui sont devant nous et je le trouve très intéressant. Je pense qu'on passerait plusieurs minutes à en discuter. Il ne nous reste que treize minutes avant six heures et je pense que ça ne vaut pas la peine, avant six heures, de commencer. Pour la bonne marche de notre travail, est-ce qu'on ne pourrait pas le faire à huit heures? Je fais motion pour qu'on suspende la commission jusqu'à huit heures.

M. Bédard: II n'y a pas d'objection.

M. Lalonde: Peut-être qu'on pourrait demander s'ils ont des objections. Non?

M. Doré (Jean-André): Non. Nous sommes à la disposition de la commission. On a été convoqué pour aujourd'hui; alors, dans la mesure où vous pouvez nous assurer que vous allez entendre notre mémoire à une heure donnée, on va se présenter ici à l'heure qui vous conviendra.

M. Bédard: Même plus rapidement que cela avait été prévu, parce que cela a déboulé.

M. Lalonde: Nous serons tout oreilles.

Le Président (M. Boucher): Alors, la commission suspend ses travaux jusqu'à 20 heures.

M. Doré: Jusqu'à 20 heures? Merci. Suspension de la séance à 17 h 48

Reprise de la séance à 20 h 18

Le Président (M. Boucher): A l'ordre, messieurs!

Lors de la suspension j'avais demandé à la Ligue des droits et libertés de présenter son mémoire. J'inviterais le représentant à y aller immédiatement.

Ligue des droits et libertés

M. Doré (Jean-André): M. le Président, d'abord, j'ai peut-être deux remarques à faire. La première, j'aimerais me présenter d'abord. Je m'appelle non pas Gordon Lefebvre, qui est la personne qui a expédié le mémoire à la commission, mais Jean-André Doré. Je suis membre du conseil d'administration de la Ligue des droits et libertés et le porte-parole sur le projet de loi no 48.

Rapidement, à la table, ici, Alain Arseneault, à ma droite, membre du comité sur la brutalité policière à la Ligue des droits et libertés; Jean-Claude Bernheim, permanent à l'Office des droits des détenus. A ma gauche, Christiane Sauvé, permanente au comité sur la sécurité nationale et, à sa gauche, Pierre Doray — il n'y a pas de lien de parenté — qui est, de son côté, membre du comité sur la brutalité policière et également membre du conseil d'administration.

D'autre part, je le souligne tout de suite, même si je ne fais pas une lecture complète du document, j'en lirai quand même d'assez larges extraits et, pour les fins du journal des Débats, on préférerait, nous aussi, avoir le mémoire reproduit intégralement.

Le Président (M. Boucher): D'accord! (Voir annexe D)

M. Doré: Alors, c'est établi au départ. Ce n'est donc pas la première fois, et je ne pense pas que ce soit la dernière, que la Ligue des droits et libertés intervient auprès des pouvoirs publics au sujet des forces policières. De par ses objectifs de défense, de vigilance, de reconnaissance et d'élargissement des droits et liberté des citoyens, la ligue est quotidiennement confrontée aux violations de plus en plus fréquente de ces droits.

Mais ce que nous avons constaté, depuis quelques années, a, lorsqu'on s'y arrête quelque peu, de quoi surprendre et surtout inquiéter quiconque se soucie le moindrement de la qualité de la vie. En effet, à la Ligue des droits et liberté nous assistons, à ce qui nous semble une recrudescence remarquable de plaintes concernant le comportement des policiers. Ceux-là même, qui, de par leur fonction dans la société ont justement pour rôle de garantir à chacun le libre exercice de ses droits. Signalons également que depuis quelques années les budgets et les effectifs des corps policiers se sont accrus de façon substantielle, accroissement qui va de pair avec une sophistication de plus en plus poussée de l'arsenal technique mis à la disposition des forces de l'ordre.

Ce phénomène grandissant posé par le comportement des forces policières se traduit au niveau de l'organisation de la ligue par trois comités de travail dont je vous ai présenté l'essentiel des principaux artisans. Le dernier-né de ces comités est le comité contre la brutalité policière et s'est donné comme objectifs d'informer les citoyens de leurs droits lorsqu'ils sont en relation avec des policiers, d'aider les victimes de brutalité policière et, finalement, de contrecarrer ce type de pratique.

Depuis sa naissance, toute récente, en février 1979, ce comité a déjà compilé 102 dossiers de citoyens et de groupes qui se disent victimes de brutalité policière. Dans le traitement de ces plaintes, le comité est fréquemment entré en communication avec la Commission de police du Québec, cela va se soi, ainsi qu'avec divers comités de discipline interne des corps policiers.

De son côté, le comité sur la sécurité nationale est né quelque temps après le début des travaux de la commission Keable. Cette commis-

sion d'enquête que la ligue avait réclamée dès 1972 à la suite des saccages des locaux de l'Agence de presse libre du Québec, porte sur certains agissements illégaux ou répréhensibles des services policiers de sécurité en territoire québécois. Auparavant, la ligue s'était prononcée plusieurs fois sur les violations des droits fondamentaux engendrées par la doctrine dite de la sécurité nationale. Mais devant l'avalanche des révélations d'illégalités commises par cette police secrète et les services de sécurité, la ligue a mis sur pied un comité permanent pour approfondir cette question. Dans le cadre de cette réflexion, la ligue a publié toute une série de documents vulgarisés et d'analyses qui traitent de cette police secrète et dont, d'ailleurs, je pense que le ministre de la Justice a généralement reçu copie de ces documents. Le comité a également été saisi de nombreuses plaintes de la part de citoyens et d'associations, victimes de l'espionnage des services de sécurité des corps policiers.

Enfin, depuis sa formation en 1972, l'Office des droits des détenus a été confronté à une quantité impressionnante de plaintes venant de la part d'ex-détenus ou de détenus concernant le comportement violent de certains policiers lors d'arrestations ou d'interrogatoires. Le fait même que la Commission de police ait décidé d'enquêter sur les conditions de détention dans les postes de police, prouve d'ailleurs l'ampleur de ce problème.

La Ligue des droits et libertés a donc une connaissance sensible et fort concrète des problèmes engendrés par le comportement, trop souvent déviant, à notre point de vue, des policiers au Québec. C'est à ce titre que nous sommes depuis longtemps profondément insatisfaits par l'actuelle Loi de police et encore plus par les amendements que l'actuel gouvernement se propose de faire adopter.

Dans notre mémoire, nous analyserons, à l'aide d'exemples, ce qu'est la violence policière et comment réagissent les tribunaux et la Commission de police devant ce phénomène de plus en plus inquiétant. Nous aborderons ensuite l'épineuse question du port d'armes des policiers. Les aspects politiques du travail policier et plus particulièrement les violations de droits fondamentaux engendrées par les méthodes d'enquête et d'intervention des services policiers de sécurité, seront traités dans un deuxième temps. Enfin, nous étudierons le rôle et le fonctionnement de la Commission de police ainsi que les importants pouvoirs qui lui sont confiés par la Loi de police.

A la toute fin, vous trouverez, d'ailleurs, un résumé succinct des principales recommandations que la ligue transmet à cette commission relativement aux forces policières au Québec.

L'article 25 du Code criminel donne le droit à un agent de police d'employer la "force nécessaire" pour procéder à l'arrestation d'un citoyen. Mais cette "force nécessaire" dépasse trop souvent l'entendement. Et trop souvent aussi, les policiers responsables avec la bienveillante complaisance des tribunaux, bénéficient d'une immunité quasi complète. Suivent une série de cas que nous avons relatés parmi d'autres et qui, quant à nous, tendent à laisser voir que le comportement policier, que ce soit dans le cas de citoyens, de manifestations, de conflits de travail, se traduisent trop souvent par des manifestations à caractère violent.

Le cas Bouchard-Bégin. Nous sommes à l'époque des débrayages du Front commun 1975-1976. Le 8 avril 1976, un groupe de syndiqués manifeste devant la salle d'urgence de l'hôpital Notre-Dame. Le sergent Paul Lamoureux de la police de la CUM se détache de son groupe et matraque, à l'aide de son bâton réglementaire de trois pieds, Mlle Doris Bouchard, une des grévistes. Elle s'affaisse. Une consoeur, Raymonde Bégin, lui vient en aide. Le sergent Lamoureux matraque la seconde gréviste à la jambe alors que celle-ci lui tourne le dos. Les preuves sont éclatantes. Un photographe d'un quotidien de la Métropole a croqué toute la scène.

Poursuivi, le sergent Lamoureux plaide coupable à des accusations de voies de fait. Le 7 juin 1976, le juge Chaloux le libère sans condition, invoquant ses 29 années de service dans la police et ses antécédents judiciaires vierges.

Dans le cas Deschênes, il s'agit d'un étudiant à l'UQUAM qui, le 14 décembre 1977, marche paisiblement dans la rue Sainte-Catherine. Il est vêtu à la façon d'un motard, c'est-à-dire, portant une veste de cuir. Un policier d'une patrouille de la CUM l'interpelle et on cite au texte: "Hé toé, le sale, viens icitte, embarque dans le char". Deschênes demande des justifications. Le policier, tout en dégainant son arme à feu, lui lance: "Ne fais pas un geste, suis-moi, sinon je tire". Les autres policiers arrivent sur les lieux. On l'empoigne, on lui écrase un oeil, on lui sert la gorge, on lui tire les testicules par en arrière. Le suspect maîtrisé, on l'entraîne dans l'auto de patrouille; on prend soin de lui frapper la tête sur le bord de la portière en entrant.

Arrivé au poste 4, Deschênes constate que son linge est déchiré, qu'il a perdu ses lunettes et ses gants. On continue à le provoquer sous prétexte qu'il serait un motard et on le place en cellule sans qu'il puisse communiquer avec son avocat. La police logera par la suite des accusations d'avoir troublé la paix et de résister à son arrestation contre le citoyen Deschênes. La seule consolation sera de se faire dire par le juge Stalker: La preuve des deux côtés était bien contradictoire, dit le juge, mais en l'appréciant, je suis convaincu que, de fait, le défendeur criait dans la rue d'une manière à troubler la paix, et je le trouve coupable de ce chef. D'autre part, ayant vu le défendeur et entendu avec la preuve additionnelle le fait des blessures qu'il a reçues ce soir-là, je suis d'avis que les façons de procéder, employées par les policiers en faisant l'arrestation, étaient du moins discutables. Si le défendeur a résisté au constable Saint-Jean, ce pourrait avoir été provoqué par les actions des constables."

Luc Deschênes a demandé et finalement obtenu une enquête de la Commission de police du Québec sur son cas. Le jugement rendu dans cette

affaire exonérait de tout blâme les policiers impliqués.

Je passe, évidemment, par-dessus le cas Charest simplement pour rappeler que malgré l'exonération qui finalement a suivi le jugement du coroner Stanislas Déry, la Commission de police s'est quand même sentie obligée, suite à cette affaire, de mettre sur pied une enquête sur les conditions de détention dans les postes de police du Québec, enquête qui, à ma connaissance, se poursuit actuellement.

Le cas Duff. Il s'agit, en l'occurrence, d'un individu qu'on soupçonnait d'avoir trempé dans l'affaire de la Brink's en 1976 et qui a été gardé incomunicado pendant une trentaine d'heures au quartier général de la police et forcément victime de brutalité, sans que l'on puisse retracer ces éléments de fait au moment de sa comparution. Et là, on cite l'affaire des homosexuels à l'occasion de leur arrestation à Montréal en 1977 au bar Truxx. On procède dans ce cas-là à des arrestations au moment d'une descente dans ce bar, de toute évidence, non fondée. Le lendemain, une manifestation est organisée par ce groupe d'homosexuels pour protester contre le harcèlement policier dont ils avaient été victimes. Les forces de l'ordre interviennent et brutalisent de nombreux manifestants. Plus de 140 d'entre eux sont incarcérés pendant une quinzaine d'heures, soumis à des procédures humiliantes comme l'examen médical forcé. Plusieurs seront accusés sous des chefs d'accusation divers. D'ailleurs, je rappelle que cet incident a finalement amené, à la suite de demandes en ce sens, le gouvernement actuellement au pouvoir à présenter un amendement à la Charte des droits et libertés, définissant que l'orientation sexuelle était une cause de discrimination.

L'affaire "Battered Wives". Il s'agit, en l'occurrence, d'un groupe de musiciens anglophones qui répondaient au nom provocant de femmes battues "battered wives", donnant un spectacle au cinéma Saint-Denis devant lequel des militantes féministes manifestaient. La police, encore une fois, est intervenue. On donne ordre aux manifestantes de se disperser. La charge policière est déclenchée. Plusieurs femmes sont brutalisées et les inévitables accusations de troubler la paix publique sont logées contre certaines citoyennes qui croyaient, malgré elles, au droit de manifester.

Enfin, l'affaire des Haïtiens qui, je pense, est de notoriété publique et qui a provoqué, jusqu'à maintenant, une levée assez unanime de boucliers dans l'opinion publique et qui se poursuit.

Un rappel en page 6 de l'affaire des enseignants du MTA. Il s'agit d'une manifestation en 1976 d'enseignants anglophones devant le siège social du PSBGM, qui avait donné lieu, encore une fois, à l'usage de la matraque contre des manifestants qui utilisaient leur droit de manifester.

Enfin, l'affaire Santa Cabrini. Elle est intéressante à un double point de vue, d'une part, parce que c'est une répétition, bien sûr, d'incidents qu'on a déjà vus ailleurs, mais surtout parce que, dans ce cas-là, il y a eu une enquête de la Commission de police. Je pense qu'il est intéres- sant de regarder un certain nombre des éléments que contient ce rapport de la Commission de police à la suite de cet incident. Le 3 juin 1977, l'escouade tactique du SPCUM brise une ligne de piquetage érigée par des syndiqués de l'hôpital Santa Cabrini blessant de nombreuses personnes. A la suite de ces incidents, la Fédération des affaires sociales de la CSN porte plainte auprès de la Commission de police contre la force excessive exercée ou employée par les policiers. Une autre plainte fut, d'ailleurs, logée par un M. Leduc qui rentrait chez lui ce matin-là et, bien que n'étant en rien mêlé au conflit, avait été frappé par un policier. (20 h 30)

Dans son jugement concernant la plainte de la CSN d'abord, la Commission de police conclut que "les policiers ne sauraient être blâmés de leur conduite." Tout en accordant encore une fois l'absolution aux policiers, la Commission de police n'en est pas moins forcée de constater: "L'emploi indispensable de la force par les policiers a-t-elle donné lieu à des abus de leur part?" La commission répond: "Définitivement, il y eut des blessés chez les piqueteurs. Heureusement, ce n'est pas la majorité d'entre eux qui furent éclopés et les blessures subies n'ont pas été graves." J'imagine que la force utilisée par les policiers est directement proportionnelle au nombre de blessés. Du moins, c'est ce qu'il faut peut-être conclure de cet extrait, en page 45 du mémoire.

En page 47, on peut lire: "C'est avec un grand étonnement que cette enquête — c'est-à-dire la Commission de police — nous a révélé qu'immédiatement avant l'intervention des policiers, certains d'entre eux avaient enlevé leur insigne." Ainsi donc les commissaires s'étonnent de cette pratique pourtant connue et régulièrement utilisée par les policiers lors de certaines opérations et qui consiste soit à retirer leur insigne, soit — plus subtil encore — à se l'échanger entre confrères. Les policiers, impossibles à identifier bien sûr, peuvent ainsi brutaliser des gens tout en étant à couvert des responsabilités.

Il est également mis en preuve que les policiers n'ont pas agi brutalement pour se défendre des piqueteurs. Là, on cite encore le rapport de la commission, en page 41: "Rien, dans la preuve que nous avons recueillie, nous permet de conclure que l'une ou l'autre des personnes formant la principale ligne de piquetage se serait portée à des voies de fait sur des policiers avant que la ligne ne soit ouverte. Egalement, l'ensemble des piqueteurs ne posait aucun geste agressif à l'endroit des policiers."

Le jugement relate également, en page 37, qu'un certain M. Bisonnette aurait reçu des coups de pied alors qu'il gisait par terre et qu'il avait perdu conscience. Est-ce là la force nécessaire prévue à l'article 25 du Code criminel pour effectuer une arrestation? D'autant plus que le M. Bissonnette en question n'a jamais été arrêté. Malgré tout cela, les policiers sont blanchis.

Ce jugement, quant à nous, est une insulte à l'intelligence des citoyens. Il a d'ailleurs grandement contribué à retirer, en bon nombre de

milieux, toute légitimité de la Commission de police comme organe de contrôle démocratique des forces policières. J'ajouterai qu'en ce qui concerne le citoyen Leduc qui avait logé une plainte parallèlement à celle de la CSN, du moins au moment où ces lignes ont été écrites à la fin de juin, M. Leduc attendait toujours la décision de la Commission de police relativement à son cas.

Enfin, le gazage des piqueteurs à la Commonwealth Plywood, je pense que l'incident est maintenant largement connu depuis que la commission a commencé à étudier ce cas qui se poursuivra, semble-t-il, en septembre.

Que conclure de ces cas qu'on a, à toutes fins utiles, glanés au hasard, mais qu'on aurait peut-être pu, quant à nous, énumérer ad nauseam? D'une part, la brutalité policière se manifeste en différentes occasions et de diverses façons. Dans les cas mentionnés plus haut et qui sont loin de constituer une liste exhaustive, il apparaît clairement que des policiers ont abusé de leurs pouvoirs lors d'arrestations de citoyens, d'interrogatoires de suspects, à l'occasion de manifestations pacifiques et lors de conflits patron-ouvriers.

Du fait qu'ils bénéficient de la protection de la loi, — l'article 25 du Code criminel — de la clémence des tribunaux et de la bienveillante indulgence de la Commission de police du Québec, les policiers sont, à toutes fins utiles, à couvert des responsabilités. Ils peuvent ainsi impunément violer l'intégrité physique des citoyens, droit pourtant fondamental et reconnu dans la Charte des droits et libertés du Québec, les priver de leurs droits judiciaires, entraver le libre exercice des droits démocratiques, sans parler de l'intimidation psychologique tant de fois utilisée par les policiers, méthode qui sape un autre principe fondamental de notre droit criminel: la présomption d'innocence.

Mais il y a plus, quant à nous, relativement à cette question de la violence policière. De 1970 à 1974, 44 personnes ont été abattues par des policiers au Québec, ce qui place le Québec en tête des provinces canadiennes pour ce type d'incident ou de crime. L'an dernier, dans son analyse intitulée "Violence et presse écrite", rendue publique en novembre 1978, l'Office des droits des détenus de la Ligue des droits et libertés a été amené à s'intéresser à une catégorie bien spécifique d'actes violents: les guet-apens tendus par des groupes policiers spécialisés contre des individus soupçonnés de crime. "L'escadron de la mort au Québec ou l'étrange phénomène des homicides légaux," qui était le titre de l'article, retrace quelques-unes de ces fusillades déclenchées en pleine rue par des fonctionnaires payés à même les deniers publics.

Qu'un policier abatte un individu à corps défendant et qu'il plaide légitime défense s'explique, mais qu'un groupe de policiers hautement expérimentés, entraînés et fortement armés procède à ce qui nous apparaît être de véritables exécutions, qu'inlassablement ces policiers plaident légitime défense, qu'ils soient toujours absous, il y a de quoi s'inquiéter.

Le cas de l'assassinat d'Orazio Passinato, 18 ans, abattu le 26 octobre 1976 alors qu'il tentait de fuir à bord d'une auto volée est très significatif quant à l'attitude des coroners en de pareilles circonstances. Le coroner Roch Héroux exonéra de tout blâme le policier Clément, du poste 22, et affirma: "Le jour où je tiendrai un policier criminellement responsable selon les faits, il faudra que je m'en aille".

L'exécution de John Slawvey illustre également le phénomène. En rapport avec l'enquête sur le vol de la Brink's au printemps 1976, le nom d'un certain John Slawvey apparaît sur la liste des suspects. Le 15 mai, le sergent Savard, du SPCUM, accompagné de quelques confrères haut gradés, est embusqué au 2555 rue Benny, à Montréal. Selon la version policière, le suspect tenta de s'emparer d'un révolver. Les policiers qui l'entourent sont pourvus de fusils automatiques et de mitraillettes. Une vingtaine de projectiles l'atteignent, tirés par trois armes différentes. L'enquête du coroner a lieu le 13 juin suivant. Le verdict du coroner Héroux est clair: "Le jour où l'on n'aura plus de gens comme Slawvey, il n'y aura plus d'enquête du coroner à faire." Détail intéressant révélé par la presse: Slawvey était depuis longtemps suspecté de la mort du policier Sabourin, survenue quelques années auparavant, et avait même reçu des menaces de mort à cet effet.

On pourrait également citer le cas de Richard Blass qui, selon le rapport d'autopsie, a été atteint de "25 à 27 balles de mitraillettes". Les caméras de télévision avaient été invitées à retransmettre à des millions de téléspectateurs l'image de son cadavre troué de balles... Malgré une recommandation en ce sens, jamais le ministère de la Justice n'a enquêté sur ce phénomène des homicides légaux ni fait d'études exhaustives sur les jugements rendus par des coroners dans les affaires de ce genre.

Maintenant, on aborde un autre aspect, toujours dans le même secteur, celui des morts accidentelles. Se souvient-on entre autres, par exemple, du jeune Vassard, 16 ans, abattu par un policier de Sainte-Thérèse, policier nommé M. Goulet? Ou, plus récemment encore, du jeune écolier de six ans, Rui Sa, abattu lors d'une chasse à l'homme épique dans les rues de l'est de Montréal? Celle-ci, rappelons-le s'était terminée par une fusillade entre la police et un certain Denis Martel. Celui-ci, hors de la prison à la suite d'une erreur technique, avait pris en main un minibus scolaire plein d'enfants à la suite d'un vol de banque. Les policiers de la CUM, sans hésiter, avaient pris en chasse le véhicule à des vitesses folles dans les rues de Montréal, mettant en péril la sécurité de bien des personnes.

Une enquête du coroner présidée par Me Maurice Laniel, avait conclu, après une seule journée d'audience, à une mort violente sans responsabilité criminelle. Dans un compte rendu de cette enquête, le journal La Presse fait état des critiques du chauffeur du minibus scolaire dans lequel le petit Rui Sa a été abattu, M. Claude Chaput. Il estime qu'on n'a retenu que les déposi-

tions des policiers dans cette affaire. "Je crois qu'on a ri du monde", avait-il dit. Les parents des petits compagnons de Rui Sa ont également déploré l'intervention de la police. Quant au suicide de Denis Martel, le chauffeur de l'autobus n'y croit pas non plus. "Il y a trop de contradictions dans les témoignages pour affirmer que Martel s'est suicidé. Ce ne sont que des suppositions des experts en balistique?"

De tous ces cas, nous ne pouvons tirer qu'une conclusion. De la brutalité policière "ordinaire" à l'exécution sommaire de certains suspects, en passant par la mort "accidentelle" de citoyens innocents, nous sommes en présence d'un même phénomène, celui de la violence engendrée par des policiers. Mais pourquoi cette violence est-elle à ce point tolérée par la population?

Un policier, pour la majorité, c'est d'abord un fonctionnaire muni d'une arme à feu. Et le maintien de l'ordre, c'est la possibilité pour ses représentants d'arrêter, de blesser et même de tuer les contrevenants.

Mais quiconque s'interroge sur les notions de droits démocratiques ne peut que constater l'extrême nocivité d'une telle perception. On peut tirer au moins trois constats négatifs découlant de l'emploi d'armes à feu par les policiers.

Permièrement, les dispositifs légaux qui autorisent l'agent de police à utiliser son arme à feu lors d'une opération d'arrestation se limitent le plus souvent à énoncer quelques principes généraux — le concept "force nécessaire" — qui ne servent qu'à ouvrir la voie à des interprétations larges et même contraires à l'esprit des lois et au respect des droits.

Deuxièmement, l'impunité presque absolue du policier impliqué dans ce genre d'incident contribue grandement, quant à nous, à créer cet esprit de corps qui dégénère souvent en une sorte de conscience d'être "au-dessus de la loi".

Troisièmement, directement ou indirectement, la possession d'une arme à feu, et surtout le pouvoir de l'utiliser, expliquent, pour une très grande part, le phénomène de la violence policière dans la société. Directement, ces armes causent des lésions souvent mortelles à des citoyens. En dix ans, soit de 1965 à 1974, il y a eu 83 personnes tuées au Canada lors d'actions policières dirigées contre elles, dont 44 au Québec. A quoi sert-il d'abolir la peine capitale si les policiers en arrivent à se faire justice eux-mêmes?

Indirectement, l'attitude du fonctionnaire muni de ce pouvoir sans équivalent contribue à vicier les relations avec ses concitoyens.

Compte tenu de ces constats négatifs, est-il si utopique que cela de croire en une police efficace mais désarmée?

Une police démunie d'armes à feu n'est pas une utopie puisque le précédent existe en Angleterre depuis cent cinquante ans.

Le 19 juin 1829, le Parlement britannique adoptait son projet de loi sur la police métropolitaine.

Pour Sir Robert Peel, alors secrétaire d'Etat, il était impératif que les futurs services d'ordre répondent à une double exigence.

D'une part, les nouveaux corps policiers devraient être au service de la communauté. On était donc à mille lieues des polices d'Etat de France et de Prusse notamment, dont la vocation était alors strictement politique.

D'autre part, la police anglaise ne devrait en aucune façon servir à des fins de châtiment.

Les fameux "bobbies" qui devaient voir le jour après l'adoption de la loi sur la police métropolitaine n'étaient armés que d'un simple bâton court. On avait retenu à ce sujet les idées avancées par un certain Chadwick exposées en commission parlementaire. Pour ce dernier, la police ne devrait aucunement oeuvrer dans une perspective de châtiment. Et l'arme à feu est destinée précisément à cet usage.

De plus, Chadwick soulignait que l'énorme pouvoir discrétionnaire laissé au policier dans l'accomplissement de ses tâches ne devait pas avoir un caractère irrémédiable et usé. Une arme à feu pouvait nécessairement avoir de telles conséquences. Comme le policier est souvent seul dans l'accomplissement de ses tâches et vu l'aspect discrétionnaire de ses décisions, la société anglaise jugea logique de ne lui octroyer qu'un bâton court pour se défendre. Il y a aujourd'hui 100 000 "bobbies" en Grande-Bretagne. Certains sont munis d'armes à feu pour des cas de protection de hauts dignitaires, de protection d'ambassade, de poursuite de criminels particulièrement dangereux et, tout récemment, de la protection des centrales nucléaires. Une fois leur travail accompli, ces policiers remettent les armes à leurs officiers supérieurs. D'ailleurs, fait intéressant à noter, seulement 5% des policiers anglais reçoivent l'entraînement requis pour l'emploi d'armes à feu.

L'objection qui surgit forcément spontanément relativement à cet argument de l'armement ou du désarmement des policiers a trait à l'auto-protection des policiers. Démuni de cet outil jugé essentiel qu'est une arme à feu, le représentant de l'ordre ne risque-t-il pas d'être une proie facile? Les statistiques à ce sujet sont intéressantes. Il apparaît que les policiers sont finalement mieux protégés s'ils sont démunis d'armes à feu. De 1961 à 1975, 55 policiers ont été tués au Canada dans l'exercice de leurs fonctions. On peut se demander si le fait d'avoir une arme à feu a pu entraîner cette conséquence malheureuse. Pour ce faire, la comparaison entre deux pays dont les influences sur le Canada et le Québec sont nombreuses sur bien des plans apporte des informations intéressantes. Les Etats-Unis comptent environ 220 millions d'habitants. En 1969, leurs effectifs policiers atteignaient près de 300 000 hommes tous fortement armés. De 1965 à 1974, 947 agents de police ont été tués aux Etats-Unis. La Grande-Bretagne compte près de 60 millions d'habitants. Durant la même période, 12 agents de police ont été tués. En moyenne donc plus de 50 policiers américains sont victimes d'assassinat, c'est-à-dire, plus en un an que durant 50 ans en Grande-Bretagne pour les années 1910 à 1966.

Si on prend une grande ville américaine comme New York, par exemple, où encore les policiers sont fortement armés, on constate que

pour l'année 1970 seulement, les policiers ont employé leurs armes à feu 600 fois, tuant 50 citoyens et en blessant 212 autres. Du côté des forces de l'ordre, sept policiers tués et 242 blessés. Pour la même année, mais pour toute l'Angleterre, il y eut un policier tué et aucune victime des forces de l'ordre.

Dans l'excellente étude de Suzanne Arcand à laquelle on réfère en bas de page, on constate que sur 192 policiers décédés de 1945 à 1969, six seulement l'ont été pour une cause criminelle et, de ce nombre, cinq armes à feu. Pour les années 1960-1969, pour les villes de Montréal, Toronto et Vancouver, le nombre de ce type de décès est respectivement de trois, deux et un. Pour le Québec, maintenant, le nombre de décès imputables à des causes criminelles de 1960 à 1969 totalise douze cas.

Peut-on logiquement défendre que des homicides de policiers ont été évités du fait que ceux-ci transportent une arme? Si l'on examine le nombre de personnes tuées lors de confrontations avec les policiers, on constate que dans la très grande majorité des cas, des personnes suspectes tentaient d'échapper à leur capture en fuyant tout simplement. A ce sujet, le Comité canadien de la réforme pénale et correctionnelle écrivait: L'emploi d'armes à feu aux fins d'empêcher la fuite d'une personne qui a commis une infraction met souvent en danger, non seulement la vie de la personne qu'on cherche à appréhender, mais aussi celle d'honnêtes citoyens.

Le comité canadien d'ajouter: "Nous croyons qu'il est préférable, lorsqu'on ne peut empêcher la fuite sans l'utilisation d'armes à feu, à moins que le crime ne soit un crime grave comportant violence, d'abandonner temporairement la poursuite plustôt que d'exposer la vie de citoyens innocents ou de risquer l'exécution sommaire du criminel pour un crime mineur ou un crime non entaché de violence".

Un autre type d'argument invoqué pour l'armement des policiers va dans le sens qu'une telle protection pourrait empêcher des meurtres de citoyens. Selon les chiffres de la Commission de réforme du droit, plus de 70% des meurtres qui se commettent au Canada surviennent entre des personnes qui se connaissent et la majorité de ces crimes ont des causes passionnelles. On voit donc fort mal comment un policier patrouillant sur la rue, même armé, pourrait empêcher de tels drames. D'ailleurs, à notre connaissance, deux meurtres au Québec, celui de Paolo Violi et d'un certain Allard à la fin des années soixante se sont produits sous les yeux de policiers, donc, auraient pu être empêchés, mais les policiers ne sont intervenus qu'après le drame.

D'autres invoqueront que dans des crimes comme les vols de banque, les policiers doivent être armés pour faire face à ces criminels dangereux. Encore là, les statistiques démontrent que c'est là la catégorie de vols violents qui fait le moins de victimes sur le plan des pertes de vie des personnes volées. On fera aussi allusion pour repousser le modèle anglais qu'il s'agit d'une société différente de celle de l'Amérique du Nord, et que notre tradition de violence, la circulation d'une quantité importante d'armes à feu dans le public milite en faveur de forces de l'ordre puissamment équipées. (20 h 45)

Sur le plan du contrôle des armes, il est intéressant de noter qu'un contrôle particulièrement rigide ne s'est effectué en Angleterre, une centaine d'années après que les corps policiers non munis d'armes à feu aient été constitués, c'est-à-dire dans les années 1920, et que ce contrôle correspond à peu près à ce qui est en vigueur actuellement au Canada.

La violence dans une société s'explique par d'autres facteurs que la libre circulation des armes à feu. En Suisse, par exemple, la liberté à ce chapitre est quasi absolue pour une population à peu près équivalente à celle du Québec. Les corps policiers ne tiennent aucune statistique sur les homicides de policiers, parce qu'ils sont, à toutes fins utiles, inexistants.

Nous croyons donc que tous ces facteurs plaident dans le sens d'un désarmement, à tout le moins progressif, des policiers du Québec. C'est la première des recommandations, suite à ce chapitre sur la violence policière.

Dans le deuxième chapitre, que je peux peut-être tenter de résumer à grands traits, on aborde un chapitre qui tente de déterminer qu'à notre point de vue, la police, de façon générale, par certains de ses rôles n'est pas, au sens où on l'a dit souvent, une police neutre et qui est strictement conforme à la légalité.

D'une part, à l'aide des exemples qui sont à l'appui, que ce soit dans le cas de conflits ouvriers ou dans d'autres types d'opérations analogues, mais particulièrement dans le cas de conflits ouvriers, il se dégage très clairement à partir des exemples qui sont là et d'autres exemples qu'on peut aligner, que de façon systématique, les forces de l'ordre sont généralement toujours du côté du patronat et généralement contre la liberté d'exercice du droit de piquetage et du droit de manifestation du côté syndical. Cela nous apparaît être une constante qui se maintient à travers les dernières années.

On cite à cet appui, l'exemple, bien sûr, de la Commonwealth Plywood à Sainte-Thérèse. On cite l'exemple des perquisitions à CJTR à Trois-Rivières. On parle de la région de Sorel en page 5. On fait référence au conflit de la Celanese, d'ailleurs, conflit intéressant, parce qu'en 1976, à la Celanese, il y avait eu, lors d'une manifestation, l'utilisation de gaz lacrymogène par les forces policières. A cette occasion, la commission de police avait, de son propre chef, décidé d'instituer une enquête sur l'usage des gaz dans le contexte de manifestations et de conflits.

Or, depuis ce temps, il y a eu des incidences qu'on connaît à Commonwealth Plywood. Jamais, à notre connaissance, les recommandations ou les directives de la commission, suite à l'affaire de la Celanese n'ont été connues ou publiées. Mais ce qui est clair, c'est qu'à la Commonwealth, on a

refait l'usage des gaz et là, on assiste encore une fois, à une nouvelle enquête de la commission, précisément sur l'usage des gaz dans le contexte du conflit de la Commonwealth, qui jusqu'à maintenant, du moins — on verra évidemment à la fin des audiences et des conclusions de la commission — ne semble pas avoir été justifié par la façon dont cette manifestation s'est déroulée.

Dans un autre aspect du mémoire, en page 16, toujours dans ce chapitre de la police politique, on parle, bien sûr, de ce que la ligue a, évidemment, dans bon nombre de ses publications déjà dénoncé, c'est-à-dire, les activités et les services de sécurité. Il nous semble, en effet, grand temps que les autorités politiques s'interrogent sur les pratiques de renseignements et d'intervention des services des corps policiers au Québec, particulièrement ceux de la GRC, de la Sûreté du Québec et du Service de police de la communauté urbaine.

Encore une fois, force nous est de constater l'absence totale de la commission de police dans ce dossier. Quand on recoupe les renseignements qui proviennent des commissions d'enquête Kea-ble et McDonald et ceux fournis par de nombreux militants qui ont eu maille à partir avec cette police, il en ressort à la fois un tableau saisissant et troublant des multiples violations aux droits et libertés que sont les pratiques policières en matière de sécurité.

Les commissions d'enquête, n'ont à date, que très partiellement levé le voile sur les activités des services de sécurité et c'est surtout la Gendarmerie royale du Canada qui fut sur la sellette, celle qui, selon toute vraisemblance, n'est contrôlée par personne. Le ministère de la Justice du Québec n'a jamais rien su et ne sait pas encore exactement ce que fait la GRC au Québec. Quand au gouvernement fédéral, il a dû inventer une nouvelle théorie de l'irresponsabilité ministérielle, en matière d'opérations policières, pour tenter de surnager au-dessus des scandales.

Mais la portée très restreinte de l'enquête Keable, à la fois quant à l'époque et aux événements qui sont étudiés, est loin de signifier que la Sûreté du Québec ou le SPCUM soient à l'abri des illégalités et des pratiques douteuses. Au contraire, leur étroite collaboration avec les services de sécurité de la GRC tente plutôt à prouver le contraire.

Les commissions d'enquête nous ont appris que les gestes reprochés aux policiers ne sont pas des gestes isolés, mais font partie du modus operandi des escouades de sécurité. Ce mode opérationnel est un véritable système répressif qui nie des droits pourtant reconnus dans toutes les chartes de droits et confond, quant à nous, systématiquement l'exercice du droit à la dissidence avec la subversion.

Une espèce de culture organisationnelle propre aux services de sécurité, avec leurs règles, leur comportement, leur morale, s'est développée au cours des années grâce au secret absolu qui entoure toujours leurs budgets, les effectifs, les opérations et les méthodes des services de sécurité. La grande compartimentation qui caractérise l'organisation interne des services de sécurité, le roulement effarant de ses agents, de même que la théorie du "need to know" placent les policiers et leurs officiers supérieurs encore une fois à couvert de responsabilité.

Si on résume brièvement en quoi consistent les principales pratiques policières en cette matière, on peut à toutes fins utiles les ramener à trois grandes catégories. Tout d'abord, le renseignement qui est forcément la base de toute action répressive de la police et des services de sécurité. Il s'agit de savoir le maximum de choses sur le maximum de personnes, de groupes et d'événements. C'est l'étape qui prépare les étapes ultérieures que sont le fichage, l'analyse et, enfin, les opérations offensives, qu'elles soient ouvertes ou clandestines. Les policiers cumulent une quantité inimaginable de données tant sur la vie privée que sur la vie professionnelle et militante des citoyens.

La police secrète recueille et collige également une quantité impressionnante de données sur les groupes d'opposition. Cette catégorie, par ailleurs assez vaste, peut aller d'un comité de citoyens, exemple, le Comité des locataires de Val Martin, à un groupe d'extrême-gauche. Il n'y a pour ainsi dire jamais d'accusations de logées devant les tribunaux contre ces citoyens ou groupes ainsi espionnés par la police, mais cette surveillance indue suffit à entourer leurs activités d'un caractère trouble, et cela, c'est important, comme si lutter pour l'amélioration de ses conditions de travail et de ses conditions de vie avait quelque chose de suspect et d'illégal dans notre société. Des méthodes clandestines servent à la cueillette de ces renseignements. Il s'agit entre autres de l'interception de communications privées: écoute électronique, téléphonique, viol du courrier et des télégrammes, de la surveillance de locaux, de la photographie et de la filature, de l'utilisation d'informateurs payés ou non au sein des organisations, de l'entrée clandestine, du vol par effraction sans parler d'autres activités de même genre. Une fois ces renseignements recueillis, bien sûr, on les catalogue, on les analyse. Généralement, des citoyens peuvent être fichés selon leurs opinions politiques et ces renseignements circulent entre les corps policiers du Québec et du Canada et même à l'extérieur, grâce à des agences du type Interpol et Intertel.

De ces dossiers, on tire souvent des listes noires et celles-ci ont déjà condamné au chômage des personnes qui n'avaient fait qu'exercer dans la légalité leur droit à la dissidence. Il a été démontré, par exemple, que la GRC et la Sûreté du Québec refilent des informations sur le passé syndical ou politique à des employeurs, soit au moment de l'embauche, soit pour faire congédier des employés. Le cas de Reynald Michaud est à cet égard significatif. Bien que n'ayant rien à voir avec le FLQ, il a été congédié par la compagnie Sylvania, à la suite d'une visite d'un agent de la GRC. Michaud avait refusé de devenir indicateur de police.

Lors des Jeux olympiques, des travailleurs de la construction ont été privés de leur droit au

travail à cause toujours de ces fameuses listes noires. M. Jacques Doyon, embauché par la RIO, la Régie des installations olympiques, en 1975, a déclaré dans son témoignage devant la Commission Malouf: "J'en ai discuté avec les policiers responsables de la sécurité, MM. Toupin et Plouffe du SPCUM et j'ai eu l'impression qu'ils se servaient de la liste pour punir les syndicats, pour les casser." D'autres personnes ont été privées de travail à la suite du filtrage "sécuritaire" de la police.

Rappelons que la Ligue des droits de l'homme avait obtenu de la Commission des droits de la personne une enquête à la suite des congédiements arbitraires de deux employés du COJO sur l'avis de la Gendarmerie royale du Canada. La commission aurait voulu que la gendarmerie soit tenue de produire les renseignements et les dossiers sur lesquels elle se fondait pour donner un avis favorable au congédiement. Mais le Solliciteur général du Canada avait produit à ce moment-là un affidavit, invoquant la sécurité nationale. C'était bien sûr une façon d'empêcher que des personnes puissent jouir d'une défense pleine et entière, mais c'était également la première fois qu'on utilisait les affidavits en vertu de la Loi de la cour fédérale. Je pense que le ministre de la Justice connaît la suite de l'utilisation de ces affidavits.

Les renseignements servent enfin à planifier des opérations policières de type offensif et ces opérations peuvent être ouvertes ou clandestines. Et là, suit en bas de la page 19 un certain nombre de ces utilisations qu'on peut faire à partir des renseignements et de leur analyse. On cite à titre d'exemple l'exploitation des faiblesses caractérielles, "character weaknesses", de l'endettement, d'erreurs passées pour faire chanter, intimider ou encore recruter des informateurs; le lancement de rumeurs, de faux documents pour discréditer des personnes ou des groupes; l'utilisation de données confidentielles pour détruire des réputations; l'infiltration d'agents ou de policiers qui tentent par certains ou par tous les moyens de semer la zizanie au sein des groupes et entre ceux-ci (la technique de "m-fighting"); l'incitation à la violence ou à la commission d'actes criminels, le recours à des agents provocateurs, des techniques de "entrapment"; et enfin, l'incendie criminel, le vol de documents ou d'explosifs pour accréditer une source dans le milieu ou plus généralement l'existence d'une menace terroriste.

Face à l'ensemble de ces abus, la police "abrie" gentiment ses pratiques sous le grand manteau de la prévention. Mais on ne peut pas admettre dans une société démocratique que ce soit la police qui décide quelles organisations ont le droit d'exister et qu'elles sont celles qui doivent disparaître. On ne peut admettre non plus que, sous prétexte de prévenir la criminalité, la police commette des crimes (chantage, usage de faux, violence physique ou morale, vols, incendies).

Laisser cette situation se perpétuer équivaut à reconnaître qu'il existe deux catégories de citoyens: les policiers et les autres. C'est aussi courir le risque que les policiers deviennent plus dangereux pour la population et la démocratie que les "subversifs" qu'ils pourchassent. Des correctifs en profondeur s'imposent donc, mais par où commencer?

Nous croyons tout d'abord que les recherches et les enquêtes doivent continuer sur les cas et les méthodes de subversion social et politique utilisés par la police. Les services de sécurité, tel qu'ils fonctionnent actuellement, devraient être abolis. Leur mandat devrait exclure explicitement toute activité non criminelle. On aura l'occasion de revenir sur cette question, j'en suis sûr, au cours de certaines questions.

Tous les dossiers de citoyens et de groupes auxquels aucune activité criminelle n'est reprochée devraient être détruits. Un examen exhaustif doit être fait de toutes les pratiques d'enquête et d'intervention de la police et en particulier de celles des services de sécurité. Le pire n'est probablement pas encore sorti de l'ombre. Par exemple, toute la question de l'utilisation par la police d'informateurs doit être scrutée à la loupe. Ici, on cite un texte de Jean-Claude Leclerc, en préface d'un livre, La police secrète au Québec: "La police finance un vaste réseau de mercenaires plus ou moins tarés dont les crimes sont tus en contrepartie de divers services et qui peuvent ainsi en prendre plus large que les lois. Leur présence clandestine dans les bureaux gouvernementaux et dans les institutions et les entreprises permet à la police d'y exercer une influence et, au besoin, une subversion permanente. Les tribunaux et maints spécialistes tiennent les informateurs de police et la corruption qui les débauche et les alimente comme un mal nécessaire à l'administration de la justice. Le temps est maintenant venu de se demander si, au contraire, ce n'est pas là un mal aussi inutile à la justice véritable que dangereux dans toute société prétendant reposer sur l'intégrité des moeurs et des institutions. Le cancer social des informateurs tend à se généraliser avec la systématisation qu'en font les services de sécurité. De plus, chaque année, des millions de dollars sont ainsi invertis dans l'achat de renseignements et de sources sans qu'aucun contrôle de leur usage réel et de leur efficacité ne soit dûment exercé".

Au secret qui continue d'entourer la police, il faudrait que le gouvernement consacre, une fois pour toutes, par une loi d'accès à l'information le caractère public des informations gouvernementales et des dossiers de police. Pour, enfin, savoir quelle part des fonds publics et quel usage en font les corps policiers et en particulier les services de sécurité, il faudrait que soient rendus publics, annuellement et de façon intelligible, les renseignements sur les budgets, les effectifs, les affectations de ressources, les secteurs d'intervention et les mandats des services de sécurité.

Enfin, les devoirs de la Sûreté du Québec et des corps policiers municipaux devraient être précisés davantage dans l'article 29 de la loi. Des directives plus claires devraient être données aux policiers sur ce qu'ils peuvent ou ne peuvent pas faire pour "maintenir la paix, l'ordre et la sécurité

publique, prévenir le crime et en rechercher les auteurs". Le législateur devrait également aborder de front tous les problèmes engendrés par le recours systématique aux injonctions, eu égard au droit d'information et de pension que constitue le piquetage, problème, bien sûr, qui ne relève pas directement de la commission de la justice, mais dont le gouvernement a été souventefois saisi. Il faut s'assurer que la police ne puisse utiliser le prétexte de la violence appréhendée pour mettre le mouvement ouvrier en liberté surveillée.

Abordons maintenant la question des preuves illégalement obtenues. Bien sûr, cette question touche la Loi de la preuve du Canada. La portée en est donc beaucoup plus vaste que la Loi de police du Québec. Pourtant, l'admission de preuves illégalement obtenues explique toutes les techniques d'interrogatoire exercées contre des suspects ou des témoins importants. Il ne faut donc pas se surprendre que, tant et aussi longtemps qu'un tel principe de droit se maintiendra, des personnes, après leur arrestation, seront gardées incomunicado dans les postes de police et, de ce fait, empêchées de communiquer avec un avocat, interrogées, intimidées, menacées, humiliées, frappées, battues avec des objets contondants, menottées, attachées, dévêtues, gardées des heures et des jours avec le minimum de nourriture et de sommeil dans certains cas.

Les preuves obtenues illégalement devraient donc, comme aux Etats-Unis, être déclarées inadmissibles devant les tribunaux.

Le droit à l'objection de conscience pour les policiers devrait être inscrit dans la Loi de police. Cette mesure serait susceptible, croyons-nous, d'équilibrer la fameuse contrainte disciplinaire invoquée par les policiers à qui on reproche des actes illégaux ou illégitimes. Ces pratiques auraient pu être évitées si un texte de loi protégeait les policiers suite au refus de l'obéissance aveugle aux ordres venant de leurs supérieurs.

Enfin, la Loi de police devrait également garantir aux policiers le droit reconnu aux autres travailleurs de s'affilier à une centrale syndicale. Un des facteurs déterminants du comportement répressif des policiers vient, selon nous, du fossé qui existe entre les forces de l'ordre et l'ensemble de la collectivité. L'esprit de corps, la solidarité indéfectible face à toute critique, la vision manichéenne de la société, l'intouchabilité de la hiérarchie et de la discipline sont quelques unes des caractéristiques de cette catégorie de citoyens porteurs d'énormes pouvoirs. Leur rapprochement avec d'autres travailleurs nous paraît être un des seuls moyens permettant de donner aux interventions policières une perspective sociale. (21 heures)

Enfin, dans la dernière partie de notre mémoire, on aborde concrètement quelques-uns des pouvoirs qui, quant à nous, semblent contradictoires de la Commission de police. Rapidement, je peux rappeler ce qui a déjà été dit devant la commission ce matin et aujourd'hui, c'est-à-dire que la commission de par ses pouvoirs d'enquête, les pouvoirs à caractère quasi judiciaire, son pouvoir de réglementation, c'est-à-dire la possibili- té de réglementer les multiples aspects et facettes du fonctionnement d'un corps de police allant des conditions d'embauche jusqu'aux règles d'éthique, de procédure et pratique quant à la conduite de ses affaires, également des pouvoirs administratifs, c'est-à-dire ceux de veiller, de conseiller les corps de police, de faire des recherches en vue d'améliorer des méthodes et des procédures de la police dans la suppression du crime etc., il nous semble que ces pouvoirs portent en leurs germes, face à un organisme auquel on a donné comme mandat principal d'être le grand maître d'oeuvre des forces policières au Québec, des pouvoirs qui sont contradictoires et qui peuvent inévitablement entraîner, face à la multiplicité de ses rôles, le fait que la Commission de police puisse se retrouver à la fois juge et partie dans certaines de ses décisions.

En particulier, l'expérience que nous pouvons tirer, en page 25, du fonctionnement de la commission est on ne peut plus concluante au chapitre des plaintes des citoyens. L'exonération systématique de policiers objets d'enquête démontre, quant à nous, de façon éclatante qu'on ne peut demander à la fois à un organisme chargé d'encadrer, de conseiller et de réglementer la police de pouvoir en même temps jouir de l'objectivité, de l'impartialité et du recul nécessaire à un examen critique de la conduite de ceux qu'elle est appelée à diriger en dernier ressort. Or, le projet de loi no 48 non seulement ne met pas fin à cette situation, mais vient en fait renforcer le pouvoir d'enquête de la commission. C'est pourquoi nous croyons qu'il faut retirer de la juridiction de la Commission de police le pouvoir d'enquêter sur la conduite de tout policier au Québec à la suite d'une plainte d'un citoyen, d'un organisme ou une demande du lieutenant-gouverneur. Ce pouvoir d'enquête devrait être confié soit à un organisme indépendant de la Commission de police doté des pouvoirs nécessaires et sous contrôle civil, ou encore à la Commission des droits de la personne puisque les plaintes fondées constituent toujours ou presque toujours des violations ou des atteintes à des droits et à des libertés reconnus par la charte.

Quant à la CECO, la Ligue des droits et libertés a déjà fait connaître au ministre de la Justice son opposition au maintien et aux travaux de la CECO. Là, je fais référence au mémoire que le ministre a reçu au mois d'octobre 1978, mémoire d'une quarantaine de pages relativement à cette question. De commission d'enquête temporaire, la Commission d'enquête sur le crime organisé est devenue, avec le temps, un véritable tribunal d'exception permanent. Sous le couvert de vouloir mener une lutte au crime organisé, la CECO rend, pour ainsi dire, caduques les lois normales régissant notre système judiciaire, notamment au chapitre de la protection des droits des témoins qui sont en fait traités comme de véritables accusés et cela, sans parler de certaines tendances nettement xénophobes contre des groupes ethniques, exemple les Italo-Canadiens, du sensationnalisme des auditions, etc., sans parler non plus du traitement fait à certains témoins.

La position de la Ligue des droits et libertés est claire et connue à ce sujet: que ce soit pour le crime organisé, que ce soit pour le terrorisme ou la subversion, rien quant à nous ne justifie la tenue de telles enquêtes. Les policiers disposent déjà de suffisamment de pouvoirs, de ressources et de moyens techniques pour mener les enquêtes nécessaires et accumuler les preuves indispensables pour ensuite loger les accusations qui s'imposent contre les individus et les groupes soupçonnés d'activités criminelles. Le crime organisé, le terrorisme et la subversion sont déjà visés par le Code criminel canadien qui, par ailleurs, reconnaît à tout accusé des droits que la CECO refuse à ses propres témoins. C'est pourquoi nous réitérons notre demande de voir disparaître la CECO de même que l'article 19 de la Loi de police, de façon à retirer à la commission tout pouvoir d'enquête sur le crime organisé, le terrorisme et la subversion.

Quant à l'adoption d'un code de déontologie, et on termine là-dessus, pour des policiers, cette mesure nous apparaît à première vue comme une mesure, en principe, souhaitable. Nous disons en principe, parce qu'en pratique nous savons qu'un tel code sert plus souvent de paravent ou d'écran de fumée et ne constitue pas un moyen adéquat de contrôle des forces de l'ordre. Comment peut-on décemment soutenir que les policiers vont se soumettre à un code de déontologie quand certains d'entre eux ont posé des actes criminels (tels que l'ont révélé les commissions d'enquête Keable et McDonald) et cela, sans jamais voir d'accusations criminelles, portées contre eux pour des infractions importantes: faux, usage de faux, menaces, voies de fait, rapt, séquestration, vol, vol avec effraction, incendie pour ne mentionner que ceux-là. Certains des policiers ayant autorisé la commission d'actes criminels ont même été promus alors qu'ils auraient, quant à nous, dû être démis de leurs fonctions ou, à tout le moins, poursuivis comme n'importe quel autre citoyen. Par ailleurs, comment croire à l'efficacité d'un code de déontologie pour les policiers, surveillé et appliqué par des policiers. Les codes n'ont de valeur que lorsqu'on les applique et, à cet effet, la proposition du projet de loi no 48 ne comporte pas, quant à nous, suffisamment de garanties.

Voilà, M. le Président, quelques-unes des considérations que l'on a voulu livrer à cette commission relativement à l'examen de la Loi de police. Bien sûr, si cela déborde, dans certains cas, largement le cadre des réformes proposées dans ce projet de loi, c'est à dessein qu'on a voulu déborder c'est parce qu'il nous semble important de situer le problème dans une perspective d'ensemble, dans une perspective globale.

J'ajoute que, malheureusement, ce mémoire n'est peut-être pas suffisamment fouillé. Quant à nous, on en est profondément insatisfait et cela est, en partie, dû au délai quand même assez court à l'intérieur duquel on a dû fonctionner. Le projet de loi a été déposé à la fin de juin et on a dû forcément faire le travail à bout de bras pendant la période des vacances pour tout le monde pour le présenter au début d'août. Mais, quand même, on considère que, sur la base de l'expérience concrète qu'on a pu avoir à travers les comités de travail de la ligue, cela constitue quand même un point de départ intéressant dans une discussion sur quelques-uns des problèmes que suscite le comportement des forces policières au Québec.

Si vous avez des questions, messieurs les membres de la commission, on est entièrement disposé à tenter d'y répondre.

Le Président (M. Boucher): Merci, M. Doré. M. le ministre.

M. Bédard: M. le Président, je veux, tout d'abord remercier la Ligue des droits et libertés de collaborer à nos travaux. Je dois cependant vous dire, fermement et catégoriquement, que je n'accepte pas comme étant nécessairement vraies la relation et l'interprétation des faits et des jugements relatifs à des cas particuliers contenus dans votre mémoire, faits que vous avancez comme étant véridiques et prouvés. Je n'ai pas l'intention d'en discuter. J'ai cependant des questions à vous poser sur certaines des recommandations que vous faites et qui sont faites, comme vous le dites, en ayant à l'esprit l'amélioration de la protection policière de l'ensemble des citoyens du Québec, l'amélioration, aussi, du fonctionnement de nos corps policiers.

Peut-être en commençant par la fin de votre mémoire, je pense que nous avons tous la préoccupation que la meilleure protection policière soit accordée aux citoyens et que les policiers aient un comportement responsable vis-à-vis des citoyens. C'est pour cela que, dans le projet de loi 48, nous avons des dispositions qui feront en sorte q'un code de déontologie, tant pour les policiers de la Sûreté du Québec que pour l'ensemble des policiers des corps municipaux, soit édicté et puisse permettre une meilleure évaluation de l'éthique policière face au citoyen. Cependant, par rapport à cette disposition prévue dans le projet de loi 48 que nous étudions, à la page 26 de votre mémoire concernant l'établissement d'un code de déontologie, vous émettez des doutes traduits dans le sens suivant. Je cite l'avant-dernier paragraphe de la page 26: "Par ailleurs, comment croire à l'efficacité d'un code de déontologie pour les policiers surveillé et appliqué par des policiers?" Et vous demandez des garanties additionnelles. Est-ce que vous pourriez expliciter ces garanties additionnelles que vous pouvez avoir à l'esprit et qui seraient importantes? Quand vous doutez de l'efficacité d'un code de déontologie pour les policiers, surveillé et appliqué par les policiers, est-ce que vous avez une idée précise? Sous l'autorité de qui ce code de déontologie devrait-il être appliqué?

M. Doré: Si on s'appuie sur un exemple connu, celui du service de police de la Communauté urbaine de Montréal qui, je pense, peut en tout cas servir ou risque de servir de modèle au code de déontologie qu'on voudrait voir appliquer pour les gens de la Sûreté du Québec et éven-

tuellement d'autres corps policiers, je pense qu'il est souhaitable, il faut bien s'entendre là-dessus, en principe, que les policiers soient munis d'un code de déontologie, d'un code d'éthique, et que ce soit le même pour l'ensemble des policiers du Québec. Je pense qu'il n'y a pas de doute dans notre esprit que c'est une mesure souhaitable, de la même façon que c'est souhaitable, en principe, que l'on — je dirais — améliore la formation policière, non pas sur le plan paramilitaire ou sur le plan technique, mais sur le plan social, sur le plan, par exemple, des garanties légales offertes aux citoyens, sur le plan d'une meilleure connaissance des droits et libertés conférés aux citoyens.

M. Bédard: Comme vous le dites, et je pense que vous le dites à bon escient, le Code de déontologie ou quelque chose que ce soit n'a de valeur que lorsqu'on l'applique et selon la manière dont on l'applique...

M. Doré: Prenons l'exemple que je donnais tantôt, je parlais du SPCUM. Dans le cas du SPCUM, voilà un Code de déontologie qui fonctionne de la façon suivante: lorsqu'une plainte d'un citoyen est logée, c'est à la charge d'un comité composé de sept personnes d'examiner si la plainte "prima facie" est fondée ou non fondée. Dans ce comité, il y a quatre policiers, enfin quatre représentants du service de police de la Communauté urbaine de Montréal et trois "citoyens". Je mets "citoyens" entre guillemets parce que, dans le cas du SPCUM, c'est assez particulier. Les citoyens en question étant M. Yves Ryan, qui est le président du Conseil de la sécurité publique, M. Décarie, qui est également membre du Conseil de la sécurité publique et maire d'une municipalité de banlieue, et M. Ouellet, qui est le concepteur du projet du Code de déontologie, cela nous apparaît...

M. Bédard: Comme représentants du public.

M. Doré: Oui, c'est cela. De prime abord, cela nous apparaît être des représentants du public qui sont déjà un peu, à mon point de vue en tout cas, partie liée. L'un est concepteur du projet, les deux autres sont directement reliés à un organisme chargé de surveiller ou de contrôler les forces policières sur le territoire. Par ailleurs, ce qui est clair, c'est qu'il y a une majorité de membres du comité qui sont des policiers. C'est un premier aspect. Il nous apparaît que, dans ce cas, à tout le moins au niveau de l'examen des plaintes, il faudra avoir le minimum de certitude du point de vue du public que ces plaintes vont être examinées par un comité qui ne sera pas contrôlé majoritairement par des policiers. Deuxième élément, quant à l'enquête qui précède, encore une fois, cette enquête est généralement confiée à des policiers à l'intérieur du corps de police, à certains policiers qui s'occupent de faire les vérifications. Encore là, on n'a pas, à notre point de vue, les garanties suffisantes, quant à la protection des droits du public, que ces enquêtes vont se faire, disons avec tout le recul nécessaire et l'impartialité voulue pour reprendre certains des exemples que je vous donnais, des qualificatifs qu'on donnait tantôt quant aux critères qui nous semblent importants dans ce genre de truc. En ce sens, le projet de loi no 48 est, bien sûr en fait, muet sur cet aspect. C'est un peu ce qu'on soulignait lorsqu'on disait: Quant à nous, on veut bien qu'un Code de déontologie soit en soi, en principe, une mesure valable, mais on voudrait avoir davantage de garanties en pratique que ce code sera appliqué et qu'il ne sera pas appliqué sous le contrôle et sous la surveillance uniquement de policiers.

De ce point de vue, on attend de voir avant de se prononcer définitivement. C'est sûr qu'en principe on est d'accord qu'il y ait un Code de déontologie applicable à l'ensemble des forces policières au Québec et que, le plus possible, ce Code de déontologie, lorsqu'il sera appliqué, le soit d'une façon publique. Là-dessus, je reviens sur des remarques qui ont été faites précédemment par des gens qui sont intervenus devant la commission et qui ont tenté, en tout cas, de suggérer aux membres de la commission que, dans le cas de problèmes à caractère disciplinaire ou de plaintes de citoyens pouvant entraîner ce genre de réprimande, le tout devait se dérouler à huis clos pour la protection du droit du principal intéressé. Notre point de vue là-dessus est tout à fait le contraire. D'ailleurs, l'Office des professions, même dans le cas de professions qui actuellement fonctionnent, au niveau de leur comité de surveillance, dans l'application de leur code d'éthique, de façon fermée, tend de plus en plus à le faire de façon ouverte et il n'est pas improbable que même des professions comme la profession médicale ou la profession d'avocat puissent éventuellement avoir de ces comités qui siègent ouvertement. Je pense que c'est souhaitable qu'ils le soient, de la même façon que dans le cas d'un travailleur congédié ou d'un travailleur réprimandé, lorsqu'il vont en arbitrage, les tribunaux d'arbitrage se tiennent publiquement.

Exceptionnellement, peut-on déclarer le huis clos, mais, exceptionnellement. La règle est qu'il faut que justice soit rendue publiquement. Il faut que ce soit une chose qui se fasse au grand jour. De ce point de vue, c'est pour moi un autre principe important que doit sous-tendre l'application d'un Code de déontologie, sans parler du code lui-même évidemment.

M. Bédard: Vous ne considérez pas la présence d'hommes politiques élus, comme dans le cas de la Communauté urbaine, vous avez mentionné M. Ryan, vous ne partez pas du principe que les hommes politiques élus sont commis au départ en faveur des policiers ou en faveur d'une partie? (21 h 75)

M. Doré: Non, mais on aurait souhaité, d'une part, que dans l'application des normes de ce comité, qu'ils soient majoritaires, pour une part. Je pense qu'on n'est pas les seuls. Combien d'observateurs me l'ont fair remarquer! D'autre part, on souhaiterait aussi que les intérêts du public, au

sens large, soient peut-être, en tout cas... Prenons l'exemple du SPCUM. Voilà deux représentants du conseil de la sécurité publique chargés justement d'encadrer les forces policières avec lesquelles, forcément, ils ont des contacts, avec lesquelles, forcément, dans le quotidien, ils peuvent même avoir, dans certains cas, des affinités.

On aurait souhaité que, s'il y en avait un, ce qui est normal, une personne qui, normalement, a plus de pratique dans ses relations avec les policiers, et que, pour le reste, on aurait peut-être pu choisir des représentants qui soient autres que des gens du conseil de sécurité publique. Je parle du cas du SPCUM. Je pense que, là-dessus, un certain nombre d'observateurs, de journalistes et éditorialistes — je pense à Jean-Guy Dubuc, à la Presse, par exemple — ont souligné, au moment où ce cas de déontologie a été rendu publique, cet aspect lacunaire important au niveau procédural dans le fonctionnement de ce comité.

M. Bédard: Dans bien des organismes, nous avons eu assez régulièrement la préoccupation d'avoir des représentants du public. Je pense à un organisme qui aura une grande importance au niveau de l'administration de la justice au Québec, au conseil de la magistrature où nous avons délégué des représentants du public. Selon vous, ces représentants du public devraient être nommés par qui?

M. Doré: Forcément, ils doivent être nommés par les autorités politiques responsables, M. le ministre; cela m'apparaît évident. Je ne vois comment on pourrait procéder autrement. A la limite, au total, le principe de la responsabilité ministérielle et de la responsabilité politique demeurent dans notre système et je pense que, là-dessus, ça m'apparaît évident que ce sont forcément les gens qui ont à rendre compte de leurs décisions qui doivent porter les responsabilités de ces choix. Ils sont, d'ailleurs, les seules personnes désignées à le faire.

M. Bédard: Sur un autre aspect de votre mémoire, vous préconisez et recommandez qu'a-fin de contrer la violence policière, on procède à un désarmement progressif des policiers du Québec. Vous avez étayé une thèse avec force argumentations. Vous vous référez au cas de l'Angleterre qui est le seul cas, je pense. Est-ce que c'est le seul cas... vos recherches...

M. Doré: A notre point de vue, dans les pays comparables sur le plan industrialisé, je pense qu'effectivement, c'est le seul cas, historiquement, d'une force de police qui est très majoritairement désarmée, oui.

M. Bédard: Selon vous, par rapport à la recommandation que vous avez faite, j'imagine que vous avez également été mis en contact avec certaines réactions de la part du public. Est-ce que vous pensez, dans l'état actuel des choses qu'il y a un consensus dans ce sens, au niveau de la population?

M. Doré: Je pense que c'est évident — là-dessus, on ne se fait pas d'illusion — qu'en avançant une telle recommandation, on va à contre-courant. Là-dessus, je pense qu'on est assez réaliste pour s'en rendre compte. On va à contre-courant, mais on le fait précisément parce que le courant actuel va dans le sens de l'armement de plus en plus grand des forces policières. Nous nous posons la question: Jusqu'où doit aller l'escalade? Il n'y a pas si longtemps, un policier était muni d'un simple .38. Depuis quelque temps, on permet aux forces policières d'avoir, dans leur automobile, des fusils bien connus, avec le calibre .12 dans certains cas. La prochaine étape sera de remplacer les .38 par quoi? Par des magnums? Ils font de meilleurs trous, de plus gros trous. Lorsqu'ils blessent, c'est quoi?

La logique, après ça, c'est de remplacer les fusils par quoi? Par des mitraillettes? Eventuellement, il faudra remplacer les autos de police par quoi? par des chars antiémeutes? Là, vous allez dire: Vous charriez, vous caricaturez. Je suis tout à fait d'accord avec vous. Mais je dis: Actuellement, la politique et la conception que l'on se fait de l'armement policier s'inscrivent dans cette logique et supposément parce qu'en face des policiers, on a affaire, dans certains cas, à des gens qui utilisent les mêmes armes.

Nous pensons que ce n'est pas vraiment la logique dans laquelle ça doit s'inscrire, parce que, fondamentalement, un policier armé, c'est un fonctionnaire payé par les deniers publics qui est, à toutes fins utiles, distinct d'autres citoyens, dans ses relations avec les citoyens.

Le rôle de la police, ce n'est pas un rôle répressif. Le rôle de la police est, d'abord et avant tout, de permettre aux citoyens d'exercer librement des droits qui leur sont par nos institutions, droits d'ailleurs qui ont fait l'objet, dans bien des cas, de luttes longues, qui ont pu prendre des siècles avant qu'ils puissent s'affirmer, des droits auxquels tout le monde ici dans la salle est, j'imagine, sensible. Donc, le ministre de la Justice va l'être au premier chef, en tant que principal responsable de l'administration de la justice en territoire québécois.

Nous disons: Quand on vous fait la recommandation du désarmement des policiers— à tout le moins progressif — ce qu'on a à l'esprit, c'est d'affirmer qu'il faut aller à contre-courant du courant actuel, dans un premier temps. Dans un deuxième temps, c'est qu'il y a des choses qui nous semblent évidentes.

Je ne vois pas pourquoi, quand je vais dans un poste de la Sûreté du Québec simplement pour traiter d'une plainte ou régler une contravention ou des problèmes à caractère technique — mon auto avait un phare qui ne fonctionnait pas — le bonhomme qui me sert, et ce, dans n'importe quel endroit du Québec, doit être armé pour me parler. Je ne comprends pas.

Je ne comprends pas que le policier chargé, par exemple, à Montréal, des escouades de la jeunesse doive, sur le coin des rues, lorsqu'il s'entretient avec des jeunes, porter son .38 bien en vue. Je ne comprends pas.

Je ne comprends pas qu'on ne puisse pas élémentairement pour ce type de policier commencer tout de suite à affirmer le principe que l'idéal dans la police, ce n'est pas de convaincre le citoyen que la police est forte parce qu'elle possède un fusil, mais que la police est forte parce qu'elle est respectée des citoyens, parce qu'elle est capable d'assurer que ces citoyens vont pouvoir exercer leurs droits. Cela m'apparaît important. C'est plus qu'une question d'arme ou de désarmement. C'est une question de la formation ou de la conception de la police que l'on se fait et c'est pour cette raison qu'on pose le problème sentant très bien qu'on est impopulaire.

J'entendais, à une question que vous avez posée cet après-midi, si je ne me trompe pas, à un représentant du syndicat, je ne suis pas sûr si c'est le Syndicat professionnel des policiers, je pense que c'était le directeur de la police de Saint-Hyacinthe à qui vous avez posé la question, je ne me rappelle pas trop trop et qui disait...

M. Bédard: J'avais justement votre mémoire à l'idée, lorsque j'ai posé la question et je pense que c'était...

M. Doré: Oui, c'est cela. Vous anticipiez, je pense, une certaine réaction. J'ai vu très bien votre question. Il disait: II ne faudrait pas procéder trop vite. Il ne faudrait surtout pas démoraliser les troupes. Enfin, là, je résume peut-être mal sa pensée, mais je crois... Chose certaine, c'est qu'il a employé le terme "démoraliser". Moi, cela m'inquiète. Comme citoyen du Québec, cela m'inquiète qu'un chef de police pense ainsi. Est-ce que — si je comprends bien — le moral des troupes policières au Québec est directement proportionnel aux armes qu'elles possèdent? Si c'est cela, la logique, c'est dangereux, M. le ministre et c'est ce problème-là qu'on pose. Et on pose le problème, parce que des cas comme Rui Sa, des cas comme Vassard, il peut s'en produire d'autres, d'autant plus qu'on sait que les policiers en matière d'armement ne sont pas de grands spécialistes dans bien des cas. Je comprends qu'on puisse, à l'intérieur d'un corps de police, avoir des groupes d'élite, avoir des gens qui, dans ces situations difficiles, dans des cas où il y a des crimes violents, puissent dans certains cas limites faire usage d'armes lorsqu'il s'agit non pas seulement de protéger des biens, mais au minimum de protéger des vies. Encore là, faudrait-il voir s'il faut utiliser un magnum, s'il faut utiliser une arme à grande portée ou s'il ne serait peut-être pas possible d'utiliser, par exemple, des armes qui pourraient uniquement — je donne cet exemple et je le donne comme cela — tranquilliser les individus ou simplement les endormir.

On n'a jamais fait beaucoup de recherche de ce côté que je sache au niveau technique, mais il me semble peut-être que plutôt que de blesser ou de viser pour tuer, on pourrait peut-être simplement viser pour tranquilliser ou paralyser temporairement un individu qui est potentiellement dangereux et qui met la vie d'autres en danger. Mais je dis que c'est dans ce sens qu'il faut que la réflexion aille, dans ce sens que des organismes comme le ministère de la Justice ou la Commission de police devraient se pencher, sans quoi le danger, c'est que l'escalade dans laquelle on est embarqué nous mène inévitablement vers une plus grande violence et vers des affrontements de plus en plus violents. De cela, on n'en sort pas. On n'en sort pas aussi — je finis là-dessus — c'est inévitable que des gens qui veulent s'approprier, par exemple, illégalement des biens dans des cas de vol, forcément s'ils sont en face des gens qui les attendent armés, ils vont également aussi être armés et faire usage de leur arme. La logique est implacable de ce point de vue là. Je comprends qu'on ne doit pas attendre, on ne doit pas espérer de façon angélique que tous les criminels se désarment, parce que la police va se désarmer. Il ne s'agit pas de penser à cette chose-là, mais ce qui est clair, c'est qu'il faut au minimum commencer à poser des gestes politiques responsables pour en arriver à une société et à un genre de police qui soit autre qu'une police fondamentalement répressive. C'est cela le sens sous-jacent de la recommandation qu'on formule.

M. Bédard: En parlant d'étude et de recherche que devraient faire le ministère de la Justice et la Commission de police que vous évoquez, de votre part, y a-t-il eu une recherche ou une étude sociologique de la question par rapport à la société québécoise?

M. Doré: Si, à notre connaissance, il existe...

M. Bédard: Non, vous-même. Y a-t-il eu par rapport à ce que vous proposez... Avez-vous procédé à une certaine étude de cette question, une étude sociologique auprès de la population québécoise?

M. Doré: Non. Honnêtement, M. le ministre, là-dessus, on n'a pas fait de recherche sociologique, pour reprendre votre expression. Je dirais peut-être, de façon bassement intéressée, que cela dépendra forcément aussi de l'appui que le gouvernement pourra fournir à un organisme comme le nôtre...

M. Bédard: Ah!

M. Doré:... sous forme de subvention pour en faire. On n'est pas la Commission de police et on n'a pas les ressources forcément dont le gouvernement peut disposer. Là-dessus, honnêtement, on n'en a pas.

Jean-Claude, veux-tu ajouter quelque chose? Jean-Claude Bernheim pourrait peut-être compléter.

M. Bernheim (Jean-Claude): J'aimerais ajouter un point sur lequel vous avez parlé à propos de l'opinion publique ou du courant actuel. Si on compare avec la question de la peine de mort, on voit que le gouvernement fédéral a aboli la peine

de mort, même face à l'opinion publique qui est pour la peine de mort. Il y a un élément dans cela qui semble ne pas avoir été exploité par le gouvernement, c'est l'information. Le gouvernement possède beaucoup d'études très approfondies par rapport à la peine de mort, qui démontrent que la peine de mort n'est absolument pas dissuasive, mais il n'y a aucune information qui a été entreprise de la part du gouvernement.

Dans le cas du désarmement, c'est la même chose. Une telle prise de position va sûrement aller à rencontre de l'opinion publique. Quand le gouvernement veut adopter des projets, peu importent lesquels, il y met le paquet au point de vue financier pour informer les gens, mais quand il s'agit de mesures progressistes, on s'aperçoit qu'il y a peu de fonds alloués pour informer les gens. L'exemple de l'Angleterre, les chiffres qu'on a cités et les chiffres qui sont suffisamment connus au niveau des statistiques par rapport au nombre de personnes qui sont tuées lors de délits, démontrent que le désarmement abaisserait la violence. Je pense que, si le gouvernement avait une volonté politique d'aller dans ce sens, il pourrait très rapidement faire une étude, rendre cette étude publique et informer les gens de façon très approfondie et très intensive sur cette question. Je pense qu'une fois informé convenablement le public l'accepterait. Le public veut être protégé, il a le droit d'être protégé, mais il a aussi le droit d'être informé. Je pense que, de de côté-là, il y a beaucoup de carences.

M. Bédard: Je voudrais poser deux autres questions, parce que je sais que beaucoup d'autres questions pourront être posées par mes collègues de la commission. Entre autres, vous dites dans vos recommandations que "Le législateur devrait clarifier la question du droit d'information et de pression que constitue le piquetage, eu égard au recours systématique par les employeurs aux injonctions." Est-ce que vous pourriez préciser votre pensée de ce côté-là?

M. Doré: Je pense qu'on fait écho, par cette recommandation, à des critiques qui ont souven-tefois été formulées. D'ailleurs, le ministre du Travail du gouvernement dont vous faites partie a laissé entendre que, éventuellement, son ministère interviendrait pour tenter de clarifier cela. Essentiellement, dans notre droit, que ce soit dans le droit criminel canadien ou dans la jurisprudence en matière de travail, toute cette question du droit au piquetage comme droit de syndiqués à informer le public de l'existence d'un conflit et, forcément, sur quoi porte ce conflit, et aussi de l'efficacité du piquetage comme moyen de pression économique est inévitablement sapée lorsque l'employeur peut, au pied levé, invoquant des motifs d'urgence dans le contexte d'un conflit de travail, obtenir une injonction qui non seulement limite dans certains cas, mais, à toutes fins utiles, rend inefficace le recours à la grève comme moyen de pression, à toutes fins utiles, aussi, limite le piquetage d'une façon telle que ce droit d'informer le public de l'existence d'un conflit cesse. Et les policiers se retrouvent inévitablement pris. Là-dessus, je pense que bon nombre d'associations de policiers — je pense en particulier, ici, à la fraternité de la CUM — ont déjà largement décrié cette situation à laquelle les forces de l'ordre se trouvent confrontées, c'est-à-dire qu'en présence d'une injonction elles doivent forcément non seulement la faire respecter, mais la faire appliquer. Cela donne inévitablement lieu à des échauffourées, à des échanges au niveau d'une ligne de piquetage et à des cas de brutalité dans certains cas, de résistance, d'arrestations et de condamnations.

Nous, on dit par rapport à ce problème: Essayons donc, une fois pour toutes, de le regarder en face. Les injonctions dans le contexte des conflits de travail ne sont pas la solution pour régler ces problèmes et, tant que le gouvernement ne mettra pas un terme à cette situation, il est inévitable que les policiers vont se retrouver poignés, au sens volontaire du terme, coïncés entre, d'une part, un ordre du tribunal et, d'autre part, la possibilité pour des travailleurs d'exercer un droit qui leur est pour autant reconnu par le Code du travail. Les policiers, bien sûr, disent: Nous, on est coïncés, on n'a pas le choix, on est obligés de la faire appliquer et cela les place, dans bien des cas, dans des situations absolument intenables. Nous, on dit, là-dessus, qu'il est important que cette question soit clarifiée de façon à éviter ce qu'on a décrit très fréquemment comme étant des échauffourées, dans certains cas, de la brutalité policière qui existe à l'occasion de conflits de travail. (21 h 30)

M. Bédard: Est-ce que cette recommandation ne rejoint pas presque textuellement une recommandation faite par les commissaires de la Commission de police dans l'enquête Santa Cabrini?

M. Doré: En partie, je dirais que oui. Il en a été question. Si vous faites référence au jugement Santa Cabrini, je pense que les commissaires ont effectivement noté cette question, sauf que, évidemment, le jugement Santa Cabrini date de 1978 et on attend toujours forcément la décision. C'est pour cela qu'on la remet comme recommandation parce que, même si elle ne relève pas, comme je le disais tantôt — on en est conscient — de votre commission, je pense qu'elle a quand même des incidences policières, cette question.

M. Bédard: Deux petites questions rapides. Quand vous faites la recommandation que la GRC soit au même titre que les autres corps policiers oeuvrant au Québec, qu'elle soit soumise aux contrôles de la Commission de police et du ministère de la Justice, comment régiez-vous le problème constitutionnel?

M. Doré: Cela, on vous le laisse. Non, sérieusement, essentiellement, ce qu'on dit là-dessus, je pense que c'est clair. Nous considérons que, si le ministre de la Justice a la responsabilité de voir, sur le territoire du Québec, à l'administration de la

justice, forcément, cela implique le contrôle des actions, des gestes posés par la police et de ce point de vue-là, je crois que l'intention du ministre manifestée dans le projet de loi no 48 était, par le biais des agents de la paix, d'essayer d'avoir un contrôle du moins sur les agissements possibles de la GRC. Là-dessus, nous espérons que ce problème constitutionnel va se régler, je pense que c'est un problème politique du gouvernement. Ce qui est clair, c'est que comme organisme confronté à la police, on préfère avoir un interlocuteur en matière policière plutôt que deux et, dans ce cas-là, on préfère avoir le ministre de la Justice du Québec plutôt que le Solliciteur général à Ottawa.

M. Bédard: Une dernière question. Vous recommandez que le pouvoir d'enquête sur la conduite des policiers devrait être retiré de la juridiction de la Commission de police et confié à un organisme indépendant ou à la Commission des droits de la personne. Je vous demanderais tout simplement: Avez-vous une idée précise quand vous parlez d'organisme indépendant, la Commission des droits de la personne, on sait à quoi on se réfère, et peut-être plus précisément m'expliquer en quoi, dans votre optique, la Commission de police est un organisme moins indépendant que la Commission des droits de la personne.

M. Doré: Essentiellement, d'une part, la Commission des droits de la personne, c'est un organisme majoritairement civil et uniquement civil, composé de gens qui ont d'abord pour tâche de voir au respect de la Charte des droits et libertés de la personne, dont les enquêteurs aussi ne sont liés d'aucune façon à un corps de police et qui nous semblent avoir l'impartialité, le recul et l'objectivité nécessaires à l'examen d'une plainte.

Dans le cas de la Commission de police, ce que l'on constate, à la fois à cause de cette espèce de rôle tricéphale qui est celui de la Commission de police, de réglementation, d'administration et quasi judiciaire, on l'a mentionné, à la fois aussi à cause de la lourdeur et l'extrême lenteur des décisions de la commission depuis le moment où les plaintes sont logées, à la fois à cause du fait que, dans le cas de la Commission de police, bon nombre des plaintes sont d'abord traitées par des enquêteurs de la commission qui sont trop souvent, à notre point de vue, des gens qui sont liés, soit des policiers ou d'ex-policiers, à des corps policiers et à la fois aussi parce que la commission, comme organisme, n'a pas le choix d'être bien vue des forces policières puisqu'elle doit les conseiller, les visiter, les rencontrer, cela place la commission dans une situation où elle n'est pas en mesure de faire, à notre point de vue, un examen objectif et valable des plaintes qui sont formulées par les citoyens.

En ce sens-là, on a davantage confiance... Quand on parle d'une commission indépendante sous contrôle démocratique, on pourrait penser à une commission créée spécifiquement pour les fins de l'analyse de ces plaintes qui pourrait être sous contrôle, comme la Commission des droits de la personne, de l'Assemblée nationale. De ce point de vue là, cela pourrait être un hypothèse. On n'a pas fouillé cela. Ce qui est clair, c'est que la Commission de police, sur la base des décisions qu'on a pu examiner et de la performance qu'on a pu examiner au cours des dernières années, ne nous apparaît pas être l'organisme approprié. Elle n'a pas, je dirais, la crédibilité et, quant à nous, elle n'a plus la légitimité nécessaire pour faire l'examen impartial de ces plaintes. C'est le point de vue que l'on vous transmet et je dirais qu'il est largement partagé par bon nombre d'organismes dans le milieu.

J'ajouterai un dernier élément. Il semblerait important, lorsqu'on examinera cette question, aussi de bien cerner le rôle que peut avoir la commission dans l'enquête. Ce qui est clair actuellement, c'est que la commission, je veux dire que ce sont les procureurs de la Commission de police qui font l'enquête, qui convoquent les témoins. Dans certains cas, bien sûr, ils peuvent, à la demande du plaignant, en convoquer un certain nombre, mais, de notre point de vue, il faudrait que les règles soient plus souples et permettent davantage de fouiller des questions que celles strictement réservées au seul procureur de la commission, la gouverne et la façon de mener l'enquête, d'une part.

D'autre part, j'ajoute, en terminant, les recommandations du projet de loi 48 relativement à la protection des droits des témoins dans le cas des commissions d'enquête. On a fait état — et je reviens là-dessus parce que je trouve cela bien important — quant à nous, dans une de nos recommandations, de l'abolition de l'article 19 et de la Commission d'enquête sur le crime organisé. J'inviterais sérieusement le ministre de la Justice à relire le document qu'on vous a présenté en octobre 1978 et peut-être d'en saisir les membres de la commission, s'il y en a qui n'en ont pas eu copie. Je ne me rappelle pas à l'époque si, par exemple, l'Opposition officielle a eu ce document-là. Je sais qu'au ministre de la Justice, on le lui a adressé nommément. J'inviterais fortement les membres de la commission à relire ce document et à réexaminer cette question de la Commission d'enquête sur le crime organisé et des pouvoirs conférés en vertu de l'article 19.

Ce qu'on vous dit, c'est que ce n'est pas le fait d'ajouter, à notre point de vue, des amendements permettant à des témoins, éventuellement cités dans des commissions d'enquête, de pouvoir à leur tour venir expliquer certaines situations, con-tre-interroger, par le biais de leurs avocats, certains témoins ou encore appeler de nouveaux témoins. Que ces règles, qui sont des règles qu'on a déjà vu élaborées par le commissaire Keable dans le cadre de sa propre enquête et qui nous semblent intéressantes, cela ne devrait pas devenir un amendement de la loi de la Commision de police, cela devrait devenir un amendement de la Loi sur les commissions d'enquête. Il faudrait que la Loi sur les commissions d'enquête soit amendée, de façon que ces directives et ces règles de fonc-

tionnement soient à l'intérieur de la Loi sur les commissions d'enquête parce que, de notre point de vue — et je reviens là-dessus pour terminer sur cette question — les seules commissions d'enquête que l'on puisse accepter comme organisation préoccupée par des questions de droits démocratiques et de droits et libertés sont des commissions d'enquête qui portent, par exemple, sur les forces policières ou l'usage de fonds publics, c'est-à-dire des questions qui font qu'on doit, à cause du caractère secret de certaines opérations ou à cause du fait qu'on a affaire à des fonds publics... Je pense, par exemple, à la Commission d'enquête sur le coût des installations olympiques. Je pense que, dans ces cas-là, le recours à une commission d'enquête est le seul moyen dont on dispose pour peut-être faire la lumière pleine et entière sur une situation.

Encore là, il faut que ces règles que vous avez dans le projet de loi 48 soient dans la Loi sur les commissions d'enquête, de façon que tout commissaire nommé en vertu de la Loi des commissions d'enquête soit tenu de respecter ces règles-là et de garantir à chaque témoin, y compris les policiers, y compris les fonctionnaires, les ministres éventuellement, ou les maires des municipalités cités devant les commissions d'enquête, de jouir de ces droits. Mais ce qu'on dit, c'est que, quand il s'agit de citoyens, quand il s'agit de crimes, ou quand il s'agit du crime organisé, ou quand il s'agit de la subversion, ou quand il s'agit de... Je comprends qu'on n'a jamais fait d'enquête encore là-dessus, mais la loi permet d'en faire. Quand il s'agit de ces questions, nous, on dit que le Code criminel contient toutes les dispositions et tous les crimes y sont à peu près prévus. Si la police, dans le cadre de son travail d'enquête, relève des preuves sur des individus qu'elle soupçonne de poser des gestes criminels, d'être sur le point d'en poser, d'être acoquinés avec du monde qui en pose, à ce moment-là, qu'elle utilise les processus judiciaires normaux, qu'elle loge des accusations de façon que le citoyen, une fois accusé, puisse jouir de tous ses droits en tant qu'accusé, y compris le principe de la présomption d'innocence, et laisser le cours normal de la justice se faire. Le recours à des commissions d'enquête dans ces cas-là, à notre point de vue, est extrêmement dangereux, je pense à l'exemple de la CECO et je reviens, encore une fois, sur ce document auquel je fais référence. Si vous voulez, je peux en transmettre des copies à la commission. Le recours à des commissions d'enquête nous apparaît une forme de justice d'exception qui s'installe et est extrêmement nocive.

Je pense que le ministre de la Justice, à ce point de vue là, devrait être sensible à cet argument.

M. Bédard: M. le Président, je n'ai pas d'autres questions.

Le Président (M. Boucher): D'accord. M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: M. le Président, je voudrais remercier d'abord la Ligue des droits et libertés d'avoir présenté ce mémoire choc, à contre-courant, dans lequel je perçois un certain nombre d'éléments forts légitimes et qui supportent, en fait, des objectifs qui sont poursuivis par votre organisme, mais qui, à plusieurs égards, souffrent d'un manque de rigueur dans la preuve de ce que vous avancez.

Malheureusement, ce manque de rigueur peut affecter la crédibilité d'une présentation comme celle que vous venez de faire. Si on mesure son efficacité en fonction de l'audace, naturellement, on peut passer un bon moment. Je pense que cela pourrait, malheureusement, parce qu'il y a beaucoup d'éléments, à mon sens, qui sont très légitimes, très vrais au fond et qui perdent justement de leur efficacité par le ton un peu de panache de votre mémoire. J'espère que vous prendrez ces quelques remarques, très modestement dites, à bon escient, mais je pense que c'est important parce que la Ligue des droits et libertés qui existe quand même depuis un bon nombre d'années — vous êtes les héritiers de quelques vieillards actuellement qui sont rendus dans d'autres domaines — a peut-être vu une bonne partie de son champ d'action occupée par la Commission des droits et libertés de la personne et d'autres organismes semblables depuis quelques années, mais elle a encore, je suis convaincu, un rôle à jouer et elle doit conserver sa crédibilité.

Il manque en particulier dans votre mémoire une description peut-être aussi éloquente, en utilisant justement l'éloquence que vous avez, dont vous avez fait preuve dans votre mémoire, de la fonction difficile de police dans une société qui se veut libre. Le policier, en lisant votre mémoire, devrait être en prison de façon générale. Non, mais tous ou presque. Ce sont des subversifs, ils sont... c'est épouvantable. Cela, je le reproche à votre organisme, qui doit quand même représenter quelque chose, d'avoir présenté seulement un côté de la médaille. C'était peut-être tactiquement habile de votre part. Peut-être que vous vouliez choquer. A ce moment, vous allez recueillir les résultats de votre choix. Mais, je ne veux pas non plus faire du mélo là-dessus. Ce n'est pas facile d'être policier dans une société qui se veut libre, c'est-à-dire, qui est assujettie constamment aux critiques, qui est assujettie à un tas d'organismes et de lois. C'est beaucoup plus facile d'être policier dans une société à caractère totalitaire. Dans une société, comme peu de sociétés existent encore en ce bas monde, comme celle que nous voulons conserver, il faut aussi reconnaître que la fonction de police est extrêmement difficile. Il me semble que cet aspect manque dans votre mémoire.

C'est la même chose un peu pour la CECO que vous condamnez de façon assez allègre et qui s'est vue quasiment faire oeuvre de pionnier contre une forme de criminalité qui affectait, je pense, d'une façon aussi épouvantable que ce que vous décrivez de certains phénomènes policiers, des droits individuels de petites gens qui étaient sans

défense et que, très péniblement et en faisant un tas d'erreurs, les balbutiements de la CECO, en commençant par la première, à venir jusqu'à maintenant, ont réussi à mettre en lumière. (21 h 45)

Alors, votre condamnation de la CECO est un peu courte. Oui, il y a eu des erreurs. Il y a eu des excès et, si c'était à recommencer aujourd'hui, naturellement, on n'agirait peut-être pas de la même façon; je suis convaincu que le ministre prendra la leçon de l'expérience pour prendre des décisions, à savoir, d'abord, si ça doit continuer et, deuxièmement, de quelle façon. On a eu des délibérations ici il y a quelques années là-dessus et je suis convaincu que les élus du peuple qui sont actuellement à la gouverne de l'Etat sont fort conscients de tous les paramètres, de toutes les contraintes, à la fois pour protéger les droits individuels des témoins et aussi pour voir à ce que la lutte contre cette forme de criminalité extrêmement pernicieuse permette de libérer aussi des gens dont les droits individuels sont systématiquement mis en échec par cette forme de criminalité.

Je voudrais quand même peut-être revoir avec vous certains cas que vous mentionnez: l'affaire Battered wives. J'en suis convaincu autour de la table ici, à la lecture de votre mémoire, que chacun de nous a pu reconnaître que vous avez raison dans beaucoup de présentations des cas que vous avez choisis, que ce soit l'affaire des Haïtiens qui est encore toute chaude, dont l'enquête est à peine parvenue au ministère de la Justice, qui a soulevé sûrement l'intérêt de beaucoup de Québécois et j'en suis pour faire en sorte que si, effectivement, l'activité concrète de ces policiers ce soir-là en particulier, a pu être la preuve d'un commencement, ne serait-ce que d'un commencement de manifestation de racistes — et je ne veux pas le présumer — mais si c'était ça, eh bien! que des mesures soient prises pour que ce soit éliminé de notre société.

Je ne veux pas mentionner seulement les cas que vous soulevez et qui seraient survenus pendant la gouverne de celui qui est en face de moi. J'en ai eus aussi dans mon temps. Je vous l'ai mentionné.

Par exemple, quand je fais état de votre manque de rigueur, je ne peux pas ne pas le passer sous silence. Vous dites à la page 8: "De l'exécution des indésirables. De 1970 à 1974, 44 personnes ont été abattues par des policiers au Québec ce qui place celui-ci en tête des provinces canadiennes pour ce type de crime." Vous avez jugé sans procès, vous avez condamné sans procès 44 personnes ou 44 cas et vous avez décidé que c'étaient des crimes. Est-ce que comme legs de la liberté des personnes, vous ne vous trouvez pas un peu gêné? J'espère. C'est peut-être...

M. Doré: Là-dessus, je voudrais seulement... Je m'excuse, mais c'est important. Lorsque j'ai lu le document tantôt, délibérément, j'ai utilisé le terme "incident", c'est manifestement une correction qui a été apportée après coup, au texte. C'est clair qu'on ne peut pas présumer dans ce cas-là de crime. C'est clair qu'il n'y a eu personne de jugé et quand j'ai lu le texte tantôt, j'ai remplacé le mot "crime" par le mot "incident", M. le député de Marguerite-Bourgeoys, et là-dessus, je m'excuse.

M. Lalonde: Bon!

M. Doré: J'aurais peut-être dû souligner au départ les corrections qu'on a apportées au texte au fur et à mesure. Cela s'est fait vite.

M. Bédard: Vous êtes d'accord qu'on le corrige dans les notes sténographiques aussi de la transmission de votre mémoire?

M. Doré: Oui, cela va. M. Lalonde: Bon!

M. Bemheim: Seulement une information. Il faut lire 1965 et non 1970.

M. Lalonde: Ce n'était pas tellement la statistique qui me fatiguait que le terme.

M. Bernheim: Non, mais quant à y être.

M. Lalonde: Je passe rapidement, non pas que cela ne m'intéresse pas. Au contraire. Je pense que c'est un des aspects les plus positifs, quoiqu'on pourrait vous taxer d'angélisme à cet égard sur le port d'arme. Je pense que plusieurs d'entre nous autour de la table aimeraient vivre dans une société où on pourrait dire que nos concitoyens sont protégés par des policiers qui ne sont pas obligés de porter l'arme. Mais M. le ministre vous a quand même interrogé là-dessus assez en profondeur. Alors, pour aller plus rapidement, je vais passer là-dessus.

J'aimerais vous poser une question sur l'information, le renseignement et tout le rôle des informateurs dans la police.

Avant, j'aimerais ouvrir une parenthèse simplement pour vous dire qu'en ce qui me concerne — je suis convaincu que tous les membres de la commission partagent mon opinion — on ne doit pas admettre la commission de crime par la police. Il va sans dire — avec traduction littérale anglaise "that goes without saying" — on ne peut pas, que ce soit de façon systématique, que ce soit de façon exceptionnelle, accepter dans une société démocratique qu'on doive recourir au crime par la police pour protéger le citoyen. C'est contraire à l'entendement même d'une société démocratique. Là-dessus, je suis d'accord avec vous.

Mais quant à l'information, vous avez des remarques à la page 20, par exemple: "Toute la question de l'utilisation par la police d'informateurs doit être scrutée à la loupe. La police finance un vaste réseau de mercenaires plus ou moins tarés — j'imagine que la police ne choisit pas le degré de tare de ses informateurs — dont les crimes sont tus en contrepartie de divers services et qui peuvent ainsi en prendre plus large que les lois."

Une Voix: Avec les lois.

M. Lalonde: Avec les lois, je me demandais, aussi... C'est mineur. D'autre part, la forme de votre mémoire est remarquable. "Leur présence clandestine dans les bureaux gouvernementaux et dans les institutions et les entreprises... permet à la police d'y exercer une influence et, au besoin, une subversion permanente." Je voudrais vous demander si vous pouvez concevoir une police efficace qui ne serait pas informée. Je pense que je vous mets la réponse dans la bouche, il faut, pour être efficace, être informé, savoir ce qui se passe. Qu'est-ce que vous suggérez pour remplacer cette vieille habitude des polices d'acheter l'information à même les gens du milieu, les tarés? Est-ce que vous avez une suggestion à faire? Est-ce que vous voulez éliminer cela de nos habitudes policières; quand vous dites que cela doit être scruté à la loupe, est-ce que vous voulez savoir les montants d'argent qui sont dépensés ou si vous voulez savoir... — vous en concluez un peu vers la fin de votre paragraphe, c'est pour cela que je le mentionne — est-ce que vous voulez éliminer cela de nos habitudes policières? Si oui, de quelle façon remplacez-vous la cueillette d'information?

M. Doré: M. le Président, au départ, je vous ferai remarquer que le paragraphe que vous avez cité est, en fait, un texte qui est emprunté. Il est entre guillemets, d'ailleurs, à partir de "La police", tout de suite après, il y a des guillemets qui commencent au mot "finance" et qui se terminent en bas de page au mot "exercer", et renvoie à une préface de Jean-Claude Leclerc. Donc, on cite un texte de Jean-Claude Leclerc, éditorialiste au Devoir.

Ma deuxième remarque, cette question des informateurs, oui, justement — pour répondre à votre question — on serait extrêmement intéressé, comme organisme, qu'une étude soit faite, ne serait-ce qu'une étude coûts-bénéfices de l'utilisation des informateurs. Il ne faut pas oublier qu'on ne parle pas d'informateurs que la police peut utiliser à l'occasion pour, par exemple, démanteler un réseau de drogue ou d'importateurs d'héroïne, on parle de l'existence d'informateurs dans les organisations démocratiques aux fins de combler des renseignements pour des services de sécurité; c'est bien différent.

M. Lalonde: Je vous remercie de cette précision. Cela n'apparaissait pas de façon évidente.

M. Doré: D'une part. C'est dans ce chapitre-là, c'est dans ce contexte qu'on le situe, mais là-dessus, on ne connaît pas ce qui se fait au Québec, mais on sait ce qui s'est fait aux Etats-Unis par exemple, et on sait que le modèle de fonctionnement américain, que ce soit le FBI en particulier, par le biais des relations qui sont assez étroites, qui peuvent exister entre la police américaine et la police canadienne par le biais de la GRC et que d'autre part la GRC est un peu le modèle au ni- veau du fonctionnement qui a pu servir dans bien des cas à la SQ; un certain nombre des cadres de la Sûreté du Québec sont d'ex-grands chapeaux — vous le savez comme moi, M. le député, vous étiez Solliciteur général du temps — ce sont des gens qui ont été formés par la GRC, laquelle a reçu l'essentiel de ses informations par des gens du FBI et du côté américain, dans certains cas, même des forces armées américaines, au niveau du renseignement. Or, ces techniques...

M. Lalonde: ... mais je ne l'affirme pas.

M. Doré: Là, vous vérifierez auprès... Evidemment, l'ensemble de ce qui est contenu dans ce chapitre... je pourrais vous fournir l'ensemble des documents qu'on a publiés sur les services de renseignement et ce qui a été publié et rendu public dans les différentes commissions d'enquête. Vous savez que dans les commissions d'enquête il s'en publie des documents. La commission Keable a publié, je ne sais pas jusqu'à maintenant, quelque 160 documents, la commission McDonald c'est une montagne. Quand on se met à regarder cela, on découvre pas mal de choses intéressantes là-dedans. Ce qui est clair, c'est qu'au niveau de la formation il y a des gens qui, en témoignage et dans des documents, on voit très bien les liens de relations qui existent. Par ailleurs, on sait qu'aux Etats-Unis — parce que le FBI a fait plus l'objet d'enquêtes publiques, encore plus qua la GRC — on s'est rendu compte, par exemple, que dans le cas du FBI, il y avait une fraude épouvantable qui pouvait exister au niveau du réseau d'informateurs. Vous comprenez que souvent la valeur du policier, au niveau du renseignement, est fonction du nombre de renseignements qu'il va chercher en matière de sécurité et souvent du nombre d'informateurs qu'il peut avoir. Mais entre cela et faire des listes d'informateurs fictifs, entre cela et inventer de l'information dans certains cas, il y a une marge qui est assez facile à franchir et dans le cas des Etats-Unis en particulier, les enquêtes ont révélé des fraudes dans l'utilisation de sommes d'argent, de deniers publics, sous prétexte de financer des réseaux d'informateurs qui étaient, à toutes fins utiles, inexistants.

Alors, je vous dis: Quelle preuve avons-nous qu'au Québec... D'abord, premièrement, quelle est l'importance des fonds publics consacrés, à notre point de vue — et c'est important — au recrutement d'informateurs? Vous savez que quand toute l'affaire d'opération publique a circulé, il y a des gens qui ont avoué, dans des entrevues auprès de journalistes, que quand ils ont circulé dans les syndicats, ils y ont rencontré des gens qui étaient des gens infiltrés par la GRC et dans certains cas des gens qui payaient pour avoir du renseignement. Nous voulons savoir... On serait extrêmement intéressé à savoir quelles sont les sommes d'argent, les deniers publics qui sont consacrés à cette fin de recevoir des renseignements et quelle valeur ont ces renseignements, eu égard au fait qu'on sait que l'essentiel des activités en matière

de renseignements, que la police soit informée, est fondamentalement constituéeà 90%— et tout le monde est d'accord là-dessus quand on lit le moindrement dans ce secteur — de renseignements qui sont d'ordre public et qui sont simplement des renseignements colligés par les forces policières à partir de renseignements que tout le monde peut posséder sur les organismes en question.

De ce point de vue, on n'est pas sûr du tout que le recours aux informateurs soit la méthode indiquée. Surtout, on sait très bien que les informateurs qui sont recrutés — et cela, du côté de la GRC, c'est clair; c'est sorti à la Commission McDonald — le sont, dans certains cas, par pressions, le sont, dans certains cas, par le chantage, le sont, dans certains cas, parce qu'on a subtilisé le rapport médical par le biais de l'assurance-hospitalisation ontarienne, qu'on a su qu'un tel avait été traité dans un hôpital psychiatrique, qu'on s'en est servi en le menaçant de le discréditer dans son groupe pour qu'on puisse avoir des renseignements sur le fonctionnement à l'intérieur de son groupe.

Mais nous, on dit: Si c'est cela le type d'informateurs qu'on recrute, ces gens, une fois qu'ils ont accepté une première fois de recevoir de l'argent pour donner des renseignements sur des gens avec lesquels ils travaillent ou sur le groupe dans lequel ils fonctionnent, à un moment donné, la pression aidant et avec le chantage possible, peuvent peut-être être amenés à poser des gestes moins passifs que fournir des renseignements et plus actifs. C'est la deuxième étape normalement qui peut suivre. En tout cas, là-dessus, aux Etats-Unis, encore une fois, dans le cas du FBI, on a vu à quoi ce genre de type de recrutement... Quand on parle d'informateurs plus ou moins tarés, on ne parle pas des tares génétiques; on parle de gens qui, à cause, soit d'un passé, soit de faiblesses antérieures, soit d'endettement, soit d'alcoolisme, soit de traitements psychiatriques, sont des êtres qui sont plus susceptibles que d'autres ou plus exposés que d'autres au chantage et peuvent éventuellement non seulement fournir des renseignements, mais devenir des agents provocateurs à l'intérieur de groupes. C'est cela ce danger.

Quand on nous dit qu'on affirme simplement ces dangers, évidemment, ce document, il faut voir que c'est une synthèse peut-être trop rapide d'une série d'autres documents. C'est un peu comme la CECO, lorsque vous disiez tout à l'heure: C'est un peu trop rapide, le jugement que vous portez dans votre document sur la CECO. (22 heures)

J'en conviens que ce n'est pas les trois paragraphes de la page, je ne sais pas, 22, qui, à notre point de vue, justifient peut-être essentiellement nos avancés sur la CECO. Mais je vais vous faire parvenir, si vous ne l'avez pas, ce document de 40 pages qu'on a rendu public l'année dernière et que le ministre de la Justice a entre les mains sur une analyse plus systématique qu'on a faite de la CECO. Vous vous rendez compte que les quatre lignes qu'on cite dans ce document sont appuyées sur ce document. Là-dessus, je pense que la démonstration, en tout cas , à notre point de vue, elle est probante. De votre point de vue, elle serait peut-être à tout le moins un peu plus satisfaisante. C'est la même chose pour la question des informateurs.

M. Lalonde: Je vous remercie des détails que vous avez donnés sur la question des informateurs. En principe, que la police achète de l'information, des informateurs, vous n'avez pas d'objection.

M. Doré: Non, je n'ai pas dit cela.

M. Lalonde: Excusez-moi. Je n'ai pas terminé. Ce que vous reprochez, d'abord, c'est le chantage, ce sont les méthodes inacceptables qui peuvent être des attaques directes aux libertés des gens de donner l'information librement, que ce soit en contrepartie d'argent ou non.

M. Doré: Nous on pense que l'usage d'informateurs dans des groupes et le fait qu'ils soient payés sur la quantité de renseignements qu'ils fournissent, cela ne donne aucune possibilité aux gens sur qui ces informateurs donnent des informations de savoir qu'est-ce qu'on charrie en leur nom. De la même façon, pourquoi a-t-on réglementé l'écoute électronique? Pourquoi s'est-on senti obligé, à un moment donné, quant à l'utilisation des forces policières, de réglementer l'écoute électronique? On a légalisé cela d'une part, mais en lui fournissant un cadre avec lequel, dans certains cas, on est en désaccord, particulièrement en matière de sécurité nationale — mais cela, c'est un autre problème. Si l'écoute électronique est une intrusion dangereuse dans la vie privée d'un individu, pourquoi, à l'intérieur d'un groupe, l'utilisation des informateurs est-elle plus permissible et plus acceptable?

Pour nous, c'est aussi dangereux l'un que l'autre. On n'a aucune garantie actuellement. Dans le cas de l'écoute électronique, minimalement, on peut dire qu'il y a les dispositions du Code criminel. Encore faut-il dire que c'est passif l'écoute électronique, mais les informateurs, ce n'est pas passif. Ce n'est pas uniquement passif et surtout, on n'a aucun moyen de contrôle pour savoir non seulement qui ils sont, bien sûr, mais quel genre de renseignements ils transmettent, qu'est-ce qui est collige au bout du compte à partir de ces renseignements par les forces policières. De ce point de vue, on trouve que c'est dangereux et on s'est dit, on ne s'est jamais posé la question publiquement. On n'a jamais examiné cela. Cela nous apparaît important de le faire, particulièrement en matière de sécurité et de renseignement. C'est cela qu'on pose comme problème.

M. Lalonde: Je vous remercie. Un peu plus loin, vous dites: Au secret qui continue d'entourer la police, il faudrait que le gouvernement consacre, par une loi d'accès, le caractère public de l'information gouvernementale et des dossiers de

police. Est-ce que vous voulez dire que les dossiers de police devraient être rendus publics ou bien devraient être rendus accessibles à celui, au citoyen au singulier qui est concerné, parce que si vous rendez publics...

M. Doré: Non. On s'entend.

M. Lalonde: ... tous les dossiers de la police, vous savez que c'est la guerre ouverte.

M. Doré: Encore une fois, c'est formulé rapidement cette question, mais on attend du côté fédéral, comme du côté québécois, certains projets concrets relativement à des déclarations d'intentions sur cette question de l'accès à l'information. Mais elle est double. D'ailleurs, on la souligne. L'accès, d'une part, à l'information gouvernementale, ce qui est tout un type de problème. Pour nous, cela veut dire, entre autres, l'accès à des commissions, aux recherches qui sont faites par la Commission de police, par exemple, aux recherches qui peuvent être faites au ministère de la Justice, à l'utilisation qu'on fait de deniers publics sur des questions qui nous semblent d'intérêt public et auxquelles les organismes comme les nôtres et n'importe quel citoyen intéressé devraient normalement avoir accès. Il y a trop de secrets. Normalement, un gouvernement doit fonctionner dans la transparence et nous, on dit que l'ensemble du fonctionnement gouvernemental, à tous les niveaux, est entaché d'un secret. Il faut lever le voile du secret là-dessus. C'est sur l'information que détient le gouvernement, sur les recherches, les études qui peuvent se faire. C'est un aspect.

L'autre aspect, c'est sur l'information que détient le gouvernement sur des citoyens ou sur des organisations auxquelles ils appartiennent. Ce n'est pas là, mais c'est aussi... de toute façon, quand il s'agira de commenter plus à fond notre pensée là-dessus, ce sont les deux aspects.

Quant à moi, comme membre de la Ligue des droits et libertés, je serais extrêmement intéressé à savoir, par exemple, ce que contenait le fameux CAD qui a été détruit au niveau des fiches individuelles mais dont les fiches sur les organisations et les groupes continuent d'exister, et on ne sait pas trop où, on ne sait pas ce qui va arriver.

M. Lalonde: Apparemment, il attend je ne sais pas quoi pour les détruire. J'ai demandé à...

M. Doré: Je ne sais trop. On verra tantôt. Mais je dis que je serais curieux de le savoir pour le CAD, je parle juste du CAD. Mais je parle aussi des forces policières. Les services de sécurité du Québec, à la SQ ont sûrement un dossier sur l'organisation à laquelle j'appartiens. Je serais curieux de le connaître et d'en corriger les inexactitudes, s'il y en a, et je serais également intéressé, comme citoyen, à connaître mon propre dossier. Je ne peux pas le faire actuellement et c'est le sens de la recommandation qui est là. D'accord.

Le Président (M. Boucher): Messieurs...

M. Lalonde: Parce que...

M. Doré: ... l'Information Act aux Etats-Unis...

M. Bédard: Le député de Marguerite-Bourgeoys a l'air d'oublier que ces fiches individuelles ou ces rapports que nous avons présentement au ministère de la Justice n'ont pas été confectionnés par le présent gouvernement. Nous sommes les dépositaires.

Le Président (M. Boucher): Messieurs, je regrette...

M. Lalonde: Est-ce qu'on peut avoir un petit consentement en terminant.

M. Doré: En tout cas, que vous échangiez sur la paternité desdites fiches, quant à moi, je pense qu'on devrait les détruire. Alors, il faut les organiser. Les fiches individuelles l'ont été, semble-t-il, mais j'aimerais beaucoup que les fiches sur les groupes le soient également.

Le Président (M. Boucher): Je m'excuse, on dépasse l'heure de l'ajournement. Est-ce que la commission consent à continuer encore quelques minutes pour permettre au député de Marguerite-Bourgeoys de terminer ses questions?

M. Alfred: II reste le député de Papineau sur l'affaire des Haïtiens.

M. Lalonde: M. le Président, nous avons consacré plusieurs minutes à la lecture du mémoire et aussi à entendre des réponses très élaborées. J'aurais eu quelques autres questions, mais j'ai eu quand même les principales réponses, sauf peut-être une sur la question de la CECO. Vous affirmez à la page 26, au deuxième paragraphe, que les policiers disposent déjà de suffisamment de pouvoirs, de ressources et de moyens techniques pour mener les enquêtes nécessaires et accumuler les preuves indispensables pour ensuite loger les accusations qui s'imposent contre les individus et groupes soupçonnés d'activités criminelles. Dans une hypothèse qu'on identifie ou qu'on appelle le crime organisé ou l'intimidation, le meurtre, la menace, le chantage, qui font en sorte que les témoins disparaissent, est-ce que vous croyez que les ressources de la police, qui sont l'enquête, mais l'enquête à qui veut bien dire ce qu'il sait, les moyens techniques, oui... On parlait d'écoute électronique tantôt, en particulier comme moyen secret. Croyez-vous que ce serait suffisant pour amener devant les tribunaux de droit commun les auteurs, les principaux acteurs des réseaux, des groupes, des bandes qui vivent de la criminalité systématique et qui éliminent systématiquement les témoins?

M. Doré: Là-dessus, M. le député, je demanderais peut-être à Jean-Claude Bernheim, de l'Of-

fice des droits des détenus, d'amorcer une réponse à votre question, s'il vous plaît, si vous me le permettez; Jean-Claude.

M. Bernheim: J'aimerais répondre avant à votre question sur l'accessibilité aux dossiers de police. Je voudrais vous donner un autre exemple. Lors des enquêtes du coroner, il y a des enquêtes policières qui sont faites et ces dossiers de police ne sont pas accessibles aux personnes qui participent à l'enquête, aux avocats de la défense, entre autres. On remarque aussi, par rapport aux dossiers de police, qu'il y a certains journaux — on se demande comment cela se fait — qui sont plus privilégiés que d'autres et qui ont des informations policières qui sortent de ces dossiers. Avant qu'un procès ait lieu, on remarque que certains journaux spécialisés ont des informations que je qualifierais de privilégiées et qui sortent directement de l'enquête policière. Or, une enquête policière est confidentielle ou elle ne l'est pas. Mais il nous semble, par rapport à cela, que la confidentialité varie en fonction de l'interlocuteur.

Pour en revenir à la question de la CECO, c'est un problème qui est assez important et vaste. On pense que oui, les policiers ont des pouvoirs d'enquête suffisants pour pouvoir porter des accusations contre les gens quand ils ont des preuves. La façon dont fonctionne la CECO... Vous avez dit tout à l'heure que les gens sont traduits devant elle, mais, ce qu'on sait, c'est que, s'ils ne témoignent pas contre eux-mêmes ou contre des gens, ils seront condamnés pour outrage au tribunal et envoyés en prison. La forme de fonctionnement de la CECO est justement un tribunal d'exception où, sans avoir de preuve — vous le dites vous-même — puisqu'ils n'ont pas de preuve pour accuser les gens, on va chercher des témoins qui, éventuellement, auraient de l'information et on les force à parler. Si les gens refuent de parler, on dit: Ils ont quelque chose à cacher et on les envoie en prison pour outrage au tribunal. S'ils savent quelque chose, ils sont obligés de vendre des personnes, d'être des informateurs malgré eux. Donc, cette façon de procéder est antidémocratique. Quand on voit les problèmes auxquels s'attaque la CECO, ce sont des problèmes connus.

Si on prend des gens qui ont commis des crimes, si on le sait, on le sait et on peut porter des accusations si on a des preuves; si on ne le sait pas, il n'y a pas de raison de convoquer des gens pour aller à la pêche devant une commission d'enquête. Il est fondamental, pour nous, que ce genre de commission n'existe pas, parce que cela brime les droits des témoins. La preuve en est que le ministre a amené, dans son projet de loi, un article qui aide ou tente d'aider les droits de la défense d'un témoin, mais c'est encore assez superficiel, quand on lit l'article 22a qui serait remplacé par l'article 15 du projet de loi: c) "autoriser l'interrogatoire d'un témoin par son avocat ou le contre-interrogatoire d'un témoin par l'avocat d'une personne dont le nom ou les activités ont été mentionnés par ce témoin, ou l'avocat de ce dernier, si elle estime que cet inter- rogatoire ou que ce contre-interrogatoire permet de mieux servir les fins poursuivies."

Une demande est faite par écrit. Avant de pouvoir contre-interroger, il faut faire une demande par écrit pour justifier son droit de défense pleine et entière. Ce n'est pas acceptable dans une commission d'enquête, ce n'est acceptable dans aucun processus démocratique. Ou les droits des gens sont toujours respectés, ou bien ils ne le sont pas. Quand ils ne le sont pas, ça ne doit pas exister. A notre avis, le fonctionnement... une commission d'enquête comme la CECO ne peut pas fonctionner démocratiquement puisqu'elle va à la pêche, puisqu'ils n'ont pas de preuve et qu'il faut des informateurs recrutés, d'une façon ou d'une autre, pour pouvoir faire quelque chose.

Ensuite, la CECO est censée enquêter sur le crime organisé. C'est quoi le crime organisé? Légalement, cela se définit par quoi? Il suffit que quelques personnes décident qu'un groupe qui se forme, ça peut être du crime organisé. Cela devient, par le fait même, un crime de faire participer un groupe. Pour prendre un exemple concret: les motards. On sait pertinemment qu'il y a des motards qui commettent des délits, comme tout le monde, et on sait pertinemment qu'il y a beaucoup de groupes de motards qui ne commettent pas de délits. Mais toute la publicité qui est faite et la façon dont fonctionne ce tribunal incitent les gens à croire que toute personne qui fait partie d'un groupe de motards est un criminel. La publicité et le fonctionnement public de la CECO, c'est un fonctionnement qui est absolument anti-démocratique, qui fait peut-être percevoir aux gens que quelqu'un qui est assigné comme témoin, pour eux, est un coupable. Evidemment, légalement, ce n'est qu'un témoin, mais dans les faits, le publics perçoit cela comme des gens qui ont commis un délit.

Comme quelqu'un disait ce matin au cours de la présentation d'un mémoire, si je me rappelle bien, de l'Association des policiers, quand on critiquait le fait que la Commission de police avait des enquêtes publiques, il n'y a pas de fumée sans feu. Il n'y a pas de fumée sans feu pour les policiers, eux demandent le huis clos pour le respect de leurs propres droits, et on voit que les policiers assignent des gens ou travaillent dans une commission où, justement, aucun droit n'est respecté, et tout le monde dit exactement la même chose: II n'y a pas de fumée sans feu.

Alors, il ne faudrait pas avoir deux poids deux mesures, un pour les policiers, un pour le monde ordinaire. Je pense que tout le monde doit être traité sur le même pied, tant les policiers que les gens, et ils doivent avoir un droit de défense. C'est pour cela qu'on demande l'abolition éventuelle de la CECO et de tous les tribunaux de cet ordre-là.

M. Lalonde: Je vous remercie.

M. Bernheim: II y a une autre chose que vous avez dite au début de votre intervention, c'est qu'on n'avait pas parlé du travail difficile des policiers. Les objectifs de la Ligue des droits et liber-

tés, c'est de défendre les droits des gens, les gens les plus démunis. Il y a des catégories de gens qui sont plus démunis que d'autres dans la société et, si on prend comme exemple, les policiers, ils ont des associations pour les représenter, on l'a vu ce matin, on l'a vu tout au cours de la journée. Ces gens-là sont venus faire des représentations en fonction de leur travail et ont exposé leur situation, je pense, avec suffisamment de clarté. Notre rôle est de donner l'autre point de vue. Les associations de policiers ou les groupes de policiers qui sont venus témoigner aujourd'hui ont parlé de leur situation personnelle mais, comme groupe représentant les droits des gens, c'est la Ligue des droits et libertés qui parle de ce point de vue-là. C'est dans ce sens-là qu'on n'a pas commencé à faire état de ce qu'est le travail policier. Je pense qu'ils sont suffisamment à même de le faire.

M. Lalonde: Si vous permettez, M. le Président, je voudrais simplement dire ceci. Les groupes qui ont fait des représentations aujourd'hui l'ont fait de façon générale dans une perspective tout à fait réduite en fonction d'un article ou d'un autre, alors que votre présentation se veut une critique du système même, et c'est dans ce sens-là que je crois encore, malgré votre réponse, que votre présentation aurait bénéficié d'une rigueur plus grande dans la description de tous les éléments du système. C'est pour cela que je pense que votre mémoire aurait pu être plus crédible s'il avait fait état justement de cet élément dont j'ai fait mention au début. Je vous remercie. (22 h 15)

Le Président (M. Boucher): M. le député de Papineau.

M. Alfred: Dans votre mémoire, vous avez mentionné le cas des Haïtiens, c'est-à-dire l'affaire du 20 juin 1979. Etant donné que je suis un Québécois d'origine haïtienne, je m'en voudrais de ne pas en faire mention. Je regrette cependant — vous l'avez souligné, nous l'avons déploré — que certains aient voulu faire de ce cas des Haïtiens un cas où ils attaquent toute la population québécoise et certaines personnes, dont le Dr André Fortin que vous connaissez bien, a voulu par ce cas attaquer la réputation de toute la collectivité québécoise. Je pense que vous, comme défenseurs des droits de la personne, vous n'acceptez pas cela.

Deuxièmement, je pense que ce sont quelques policiers de la CUM qui ont posé des gestes en particulier. Le ministre a demandé une enquête qui ne doit pas être précipitée. Vous êtes au courant qu'on ne doit pas précipiter les choses pour le faire. Le Dr Fortin a précipité encore les choses et la confrontation entre la collectivité québécoise et la communauté noire, voulant se faire passer pour le défenseur ou pour le sauveur des nègres du Canada, ce contre quoi je lutte et vous aussi-Troisièmement, le Dr Fortin et certaines autres personnes, ont voulu prendre ce cas en particulier pour franchement porter un blâme sévère sur tout le corps policier du Québec. Je pense que vous n'acceptez pas cela non plus. Vous demandez une réforme policière, je suis d'accord sur cela. Tout le monde, le ministre de la Justice en est le premier conscient. Nous avons tous demandé une enquête pour savoir qui a raison ou qui a tort, mais personnellement je me suis levé contre ce cas-là et j'ai demandé au ministre de la Justice qu'une enquête soit faite et s'il y a culpabilité quelque part que les gens soient punis. Vous êtes d'accord avec moi, mais je regrette, par exemple, dans ce cas que vous avez souligné, qu'on ait voulu profiter de ce cas-là, d'une part, pour salir la réputation de tous les policiers du Québec et, d'autre part, pour salir la réputation de tous les Québécois. Je regrette qu'on ait voulu mêler à des fins partisanes l'affaire de la rue Bélanger. Vous l'avez souligné, bien sûr je fais confiance au ministre de la Justice, mais quand on arrive à mêler l'affaire de la rue Bélanger avec la loi 101, je pense que la Ligue des droits et libertés de la personne a le droit aussi de se lever contre ces personnes qui sont à l'origine même de l'agitation au Québec. Je vous remercie.

Le Président (M. Boucher): M. Doré, au nom des membres de la commission, je vous remercie de la présentation de votre mémoire, ainsi que les collègues qui vous accompagnent.

La commission ajourne ses travaux à demain dix heures.

Fin de la séance à 22 h 19

ANNEXE A

Mémoire de l'Association des chefs de police et de pompiers du Québec

relativement à des propositions d'amendements à la loi de police

et aux rôles de divers organismes gouvernementaux constitués

pour les affaires policières et le domaine de la sécurité publique

à la commission permanente de la justice relativement au projet de loi 48

Préambule

Conscients des intentions du ministre de la Justice de déposer un projet de loi dont le but était d'amender la Loi de police pour corriger certaines situations que nous dénoncions, les membres de l'exécutif de l'Association des chefs de police et de pompiers du Québec ont désigné certains d'entre eux pour constituer un groupe de travail dans le but de soumettre un mémoire. Effectivement, nous remettions copie de ce mémoire au ministre de la Justice le 7 juin 1979 par l'entremise de l'ex-président de l'Association des chefs de police et de pompiers du Québec monsieur Robert Vézina. L'intention de l'Association des chefs de police et de pompiers du Québec était d'influencer le Ministre avant la formulation de son projet de loi. Nous constatons à la lecture du projet de loi que nous n'avons réussi que très partiellement. L'exécutif de l'Association des chefs de police et de pompiers du Québec a donc convenu de saisir les membres de cette commission parlementaire sur la Justice de ses propres propositions d'amendements qui pourraient être considérés comme représentant la base d'un projet de loi dont la teneur est fort différente du projet de loi 48 (voir 1 Objectifs poursuivis et 2 Propositions d'amendements par rapport au texte actuel de la Loi de police).

C'est pourquoi, après avoir présenté notre projet d'une législation souhaitée, nous tenterons d'établir les points de concordance et de discordance avec le projet de loi 48 à l'aide d'annotations et de commentaires.

Nous serons disposés à examiner positivement les rapprochements possibles entre la position du ministre de la Justice l'Honorable Marc-André Bédard et la nôtre à l'occasion des auditions de votre commission parlementaire.

Marcellin Cyr, Président Association des chefs de police et de pompiers du Québec

1 Objectifs poursuivis dans ce mémoire 1.1 Amendements à la Loi de police. Mémoires législatifs

Périodiquement, l'Association des chefs de police et pompiers du Québec a participé à des commissions parlementaires ou a soumis des avis par écrit à chaque fois que les divers gouvernements qui se sont succédés ont désiré apporter des changements législatifs sur la police ou amender la Loi de police depuis son adoption en 1968. C'est ainsi que l'Association des chefs de police et pompiers du Québec a participé à la formulation de la Loi de police et à la création de l'organisme moteur duquel dépendait une bonne partie de l'application de cette loi la Commission de police du Québec.

En octobre 1973, l'Association des chefs de police et pompiers du Québec transmettait un mémoire pour provoquer des amendements à l'article 63 de la Loi de police. En août 1976, devant une commission parlementaire, un autre mémoire suivit portant cette fois-ci sur le projet de loi 41 qui devait modifier sensiblement certaines parties de la Loi de police. Or, ce projet de loi n'a franchi que l'étape de la première lecture si bien que nous retrouvons souvent les mêmes revendications en mai 1979.

Entre-temps, l'Association des chefs de police et pompiers du Québec a encouragé les initiatives prises par le groupe de travail sur les fonctions policières par le dépôt de deux mémoires et la présence au sein de ce groupe de monsieur Gérard Giroux. Sans nécessairement appuyer toutes les propositions et se porter caution à tous les passages du rapport Saulnier, l'Association des chefs de police et pompiers du Québec supportait les propositions majeures dont notamment celles sur la constitution de corps de police de district, la création d'un Inspectorat, le financement des services de police, le réaménagement des pouvoirs de la Commission de police du Québec, un régime minimal supplémentaire de rentes.

Devant les hésitations du gouvernement à implanter les recommandations prioritaires du rapport, l'Association des chefs de police et pompiers du Québec a déposé des documents et maintenu un échange de correspondance afin de démontrer la vigilance de son action en ce dossier.

Ce mémoire s'inscrit donc dans une continuité de démarches et respecte la philosophie de base développée par les membres de l'Association des chefs de police et pompiers du Québec. Toutefois, étant donné l'intention du gouvernement d'apporter sous peu des amendements à la Loi de police par le biais du projet de loi 48, nous émettrons des propositions d'amendements relativement à la Loi de police

avant d'aborder toute autre question qui pourrait faire l'objet de réflexions par les instances gouvernementales. Nous ne manquerons pas de vous suggérer des moyens pour que soient réalisées nos propositions d'amendements. 1.2 Implantation de mesures proposées dans le rapport Saulnier

Depuis que le rapport Saulnier a été déposé, les autorités gouvernementales semblent avoir été très peu loquaces sur leur plan d'action de sorte que l'on a laissé le chemin libre à plusieurs initiatives et fantaisies. C'est ainsi que la majorité des municipalités au sens du code municipal ont aboli leur corps de police, que des municipalités régies par la Loi des cités et villes en ont fait tout autant malgré l'obligation qu'elles ont de maintenir un service de police, que les effectifs ont été réduits considérablement au point de mettre en danger le niveau de services et la qualité de la protection publique des populations visées. Enfin, d'autres municipalités refusent d'évaluer la pertinence des demandes d'accroissement d'effectifs même dans les cas où le taux d'encadrement est en deçà d'un seuil acceptable par rapport à la criminalité et la charge de travail. On pousse même l'odieux de la situation jusqu'à geler de façon indéfinie lesdits effectifs.

Les vacuums ainsi créés amènent la Sûreté du Québec à être davantage présente dans ces municipalités et même à assumer en certains cas l'entière responsabilité des affaires policières. Nous avons noté de l'improvisation dans les formules de la Sûreté du Québec et même l'absence de protocoles d'ententes à l'occasion. Il va sans dire que le Gouvernement devra préciser les politiques et fournir des indications plus explicites sur le rôle de la Sûreté du Québec.

Que dire de la confusion entretenue sur la Direction générale de la Sécurité publique et sa juridiction surtout vis-à-vis la Commission de police du Québec en matière de prévention du crime et en formation! Le rapport Saulnier proposait plutôt un Inspectorat qui répond à l'Assemblée nationale et voyait la Commission de police se limiter à un organisme quasi-judiciaire. Encore ici, nous constatons que la Commission bénéficie de très peu de pouvoirs exécutoires et que la Direction générale de la Sécurité publique, qui a été ignorée dans le rapport Saulnier, n'a jamais vu son champ d'activités être bien délimité. Comme l'Association des chefs de police et pompiers du Québec, sans nécessairement endosser tout le contenu du rapport Saulnier, s'est tout de même solidarisée sur les principales recommandations, notre association se permettra de reprendre certaines de ces recommandations et même d'en approfondir et d'en préciser la portée. 1.3 Projets de réglementation de la Commission de police du Québec et rôle consultatif de l'Association des chefs de police et pompiers du Québec

L'Association des chefs de police et pompiers du Québec a participé à de nombreux comités que la Commission de police du Québec avait mis sur pied pour formuler des règlements qui reflètent davantage les besoins et priorités. Des membres de l'Association des chefs de police et pompiers du Québec étaient désignés pour prendre charge de ces divers dossiers et rendre compte à l'exécutif. Or, depuis quelques années, la Commission semble avoir suspendu ses initiatives au plan de la réglementation et n'a pas convoqué l'Association des chefs de police et pompiers du Québec pour de tels projets (ex.: code de déontologie, normes d'embauches, insignes de grades).

Il appert que la Commission est à nous éloigner de notre rôle de consultation. La dernière expérience pour organiser la semaine de la police s'est plutôt avérée malheureuse puisque la Commission a, à un moment, fait cavalier seul.

Tout indique que la Commission de police du Québec préfère consulter les organismes individuellement. C'est ainsi qu'elle a fait une tournée des régions et a tenu des rencontres séparées avec les syndicats, les directeurs de police et les administrateurs municipaux. Même si nous ne dénonçons pas de façon véhémente cette approche, nous trouvons que cette dernière ne cadre pas avec les politiques de rapprochement de la Commission qui ont donné lieu à des journées d'études annuelles et à des travaux en comités inter-organisationnels. Nous voulons que la Commission de police du Québec et que les autorités gouvernementales ne perdent pas leurs pratiques de consultation. De plus, la performance pour la réglementation nous laissant maintenant perplexes et sur nos appétits, nous nous chargerons d'exercer des pressions afin de réactiver plusieurs dossiers. 1.4 Mise sur pied de mécanismes susceptibles de garantir l'efficacité recherchée des forces policières

Soucieux que nous sommes d'assurer des services de protection et de prévention efficaces, nous nous permettrons de proposer des mécanismes tant permanents que de transition. La coordination opérationnelle et la décentralisation de la Commission de police du Québec seront parmi les cibles de nos suggestions. 1.5 Vers un concept global de sécurité publique

Plusieurs de nos membres s'occupent de la police, des incendies et même des services ambulanciers. Ils sont de plus impliqués dans l'organisation des mesures d'urgence municipales et

certains occupent les fonctions de coordonnateurs municipaux. Cette polyvalence que l'on retrouve au plan municipal ne semble pas répercuter au plan provincial où l'on n'a pas cessé de multiplier des services de protection constitués de constables spéciaux, des services d'enquêtes spécialisées et des services d'inspection.

Ces tendances doivent malgré tout s'inscrire dans un concept de sécurité global où l'on doit orienter toutes les organisations à mieux se coordonner et à être mieux encadrées.

2 Propositions d'amendements par rapport au texte actuel de la Loi de police 2.1 Article 1 — Corps de police 2.1.1 Texte actuel "Corps de police municipal": un corps de police établi par une municipalité. 2.1.2 Corps de police — proposition

Une force constabulaire pour assurer un niveau de service doit maintenir un effectif minimal de 10 policiers. 2.1.3 But de l'amendement

Différentes études démontrent que pour garantir un poste en permanence compte tenu de différentes variables comme les vacances, journées de maladie, congés hebdomadaires, il faut 5 policiers. Conséquemment, pour une patrouille à deux hommes, l'on doit compter sur 10 policiers. Si l'on doit se doter d'un centre de communications, il faut ajouter 4 civils comme répartiteurs et un policier-enquêteur pour les enquêtes générales.

Si une municipalité ne peut financièrement se procurer cet effectif minimal, il faudrait alors songer à la formule des corps de police de district du rapport Saulnier et à confier une responsabilité territoriale à la Sûreté du Québec pour couvrir les municipalités qui ne sont pas dans le rayon d'un corps de police de district. Par le minimum de 10 policiers, nous ne voudrions pas induire en erreur qui que ce soit puisqu'il s'agit là d'un indicateur arbitraire et qu'il faudrait pondérer et adapter cette donnée selon les besoins. Ceci signifie qu'une municipalité de moins de 5000 habitants ne peut se permettre d'établir un service de police et qu'il faille pour ces populations considérer la présence de la S.Q. si l'on désire obtenir des taux d'encadrement qui oscillent entre 1,5 policier à 2,0 par mille habitants et offrir des services complets de police. Le seuil de population pourrait passer de 5000 à 20 000 habitants lorsque nous considérons d'autres variables. En effet, la distance à parcourir (rayon de 10 milles), la charge de travail des policiers, la densité de la population et le degré de dangerosité des crimes commis peuvent modifier l'encadrement policier nécessaire. Le National Standards and Goals Commission des Etats-Unis établit à 75 policiers une force policière qui peut se permettre une certaine spécialisation. Pour les municipalités qui ont entre 10 et 75 policiers, la Commission américaine recommande qu'elles envisagent des regroupements. C'est donc dire que la solution du rapport Saulnier sur les corps de police de district n'apparaît nullement exagérée. A l'annexe "A", vous trouverez un mémoire que nous vous transmettons. Etant donné que sous ce rapport, nous appuyons le rapport Saulnier, même cette proposition d'amendement ne constitue pas notre objectif et ne représente qu'une étape. 2.2 Article 7 2.2.1 Texte actuel

Toute personne qui laisse croire faussement qu'elle est un cadet ou membre de la Sûreté, un cadet ou policier municipal ou un constable spécial, notamment au moyen du costume qu'elle porte ou d'insignes qu'elle arbore, commet une infraction et est passible, sur poursuite sommaire intentée par une personne autorisée à cette fin par le procureur général, d'une amende d'au moins cinquante dollars et d'au plus deux cents dollars, et des frais. 1968, c.17, a.7; 1970, c.12, a.4. 2.2.2 Proposition d'amendement

Ajouter: et pour les agences qui sont les employeurs l'amende ne peut être inférieure à cent dollars et pourrait être de cinq cents dollars. 2.2.3 But de l'amendement

Afin d'éviter la confusion d'identité avec des uniformes non différenciés, nous désirons renforcir ce pouvoir coercitif à l'adresse des agences. L'employeur est celui qui a décidé relativement aux spécifications de l'uniforme et doit être le premier pénalisé.

2.3 Article 9 2.3.1 Texte actuel

La Commission est formée de neuf membres, dont un président choisi parmi les juges des sessions ou de la Cour provinciale et un vice-président, nommés par le lieutenant-gouverneur en conseil qui fixe leur traitement, lequel ne peut être réduit par la suite. 2.3.2 Proposition d'amendement

Que dans la composition de la Commission de police du Québec, le nombre de membres issus du milieu policier soit égal à celui des non-policiers. 2.3.3 But de l'amendement

Dans le premier mémoire de l'Association des chefs de police et pompiers du Québec au comité Saulnier, notre association insistait pour que les policiers de carrière puissent davantage accéder aux postes de membres de la Commission de police du Québec. Sur ce point, nous désirons que le gouvernement voie dans cette mesure une norme décente de représentativité au sein de la Commission de police du Québec. 2.4 Article 10 2.4.1 Texte actuel

Le quorum de la Commission est de deux membres; sauf lorsque la Commission siège au cours d'une enquête qu'elle tient en vertu de la présente loi, ce quorum comprend le président. 1968, c.17, a.10; 1969, c.22, a.4. 2.4.2 Proposition d'amendement

Lorsqu'il y a une enquête en vertu de la présente loi, un rapport de recherches est transmis à deux commissaires qui procéderont à huis-clos à leur propre enquête. Le président est saisi des conclusions du rapport et exerce à ce moment son droit de révision sans qu'il lui soit nécessaire d'avoir siégé. A cette étape, sur la recommandation des commissaires, le président décide à savoir si la Commission tiendra une enquête publique ou s'il y a lieu d'arrêter à ce niveau le processus d'enquête. 2.4.3 But de l'amendement

Nous sommes réticents à ce que le président soit impliqué à toutes les phases du cheminement d'une plainte. Toutefois, nous lui conférerions un droit de révision et de décision à la lumière du rapport. 2.5 Article 11 2.5.1 Texte actuel

La Commission a son bureau principal à Québec ou dans une localité adjacente, mais elle peut tenir des séances à tout endroit dans le Québec. 2.5.2 Proposition d'amendement

La Commission établit des bureaux régionaux dans chaque région administrative. Un commissaire est désigné pour prendre la direction. Le commissaire préside un conseil disciplinaire de zone, décide sur les cas mineurs de discipline et renvoie les cas majeurs pour révision au bureau central. Il peut également conseiller les municipalités et les services de police. Pour les fins de leurs responsabilités, les commissaires régionaux bénéficient de l'assistance d'enquêteurs et de conseillers en matière policière de la Commission de police du Québec. 2.5.3 But de l'amendement

Dans le mémoire de notre association présenté au comité Saulnier, nous nous reposions sur un concept de décentralisation et déconcentration retenu par le présent gouvernement pour suggérer la décentralisation de la Commission de police. Ceci aurait pour effet d'éviter bon nombre d'enquêtes futiles et de permettre à la Commission d'être davantage consciente de particularismes locaux et régionaux. La Commission étant plus près des municipalités, le commissaire, lorsqu'il rend compte au bureau central et assiste à des réunions de la Commission, serait mieux informé et assurerait la Commission d'un apport régional essentiel. Certaines modalités de fonctionnement sont toutefois encore à déterminer.

2.6 Article 16 2.6.1 Texte actuel (extraits)

La Commission est chargée de favoriser la prévention du crime et l'efficacité des services de police au Québec et elle doit à ces fins b) conseiller la Sûreté, les corps de police municipaux et les municipalités en matière policière et à ces fins, les visiter ou les faire visiter par ses fonctionnaires et employés; 2.6.2 Proposition d'amendement 2.6.2.1 Début de l'article 16 - en éliminant la prévention du crime, le texte se lirait maintenant de la façon suivante: "La Commission est chargée de favoriser l'efficacité des services de police au Québec et elle doit à ces fins..." 2.6.2.2 Article 16b) -en éliminant "et à ces fins, les visiter ou les faire visiter par ses fonctionnaires et employés;" 2.6.2.3 Partage des pouvoirs avec un Inspectorat ou la Direction générale de la Sécurité publique.

La Direction générale de la Sécurité publique assure la coordination de l'action des divers corps de police, élabore les programmes de prévention du crime et propose les mesures pour promouvoir la sécurité routière. L'Inspectorat procède à des inspections annuelles des services de police, contrôle, analyse et vérifie l'exactitude des inventaires et rapports annuels des services de police et des services gouvernementaux de sécurité et d'enquête et formule toute recommandation utile au gouvernement et plus spécifiquement au procureur général. 2.6.3 But de l'amendement

Notre objectif de départ serait de situer la Commission dans un rôle quasi judiciaire et un rôle de conseiller.

Toutefois, nous lui retirons le devoir de visiter qui pourrait avoir le sens d'inspecter. De plus, même si les avis de la Commission pourraient comprendre la prévention du crime, l'élaboration des programmes de prévention serait confiée à la Direction générale de la Sécurité publique. Ces propositions d'amendements selon les champs d'attributions indiquées confient à un Inspectorat de véritables fonctions relatives à l'inspection et au contrôle de la qualité à la Direction générale de la Sécurité publique des fonctions relatives aux opérations. Chacun des trois organismes auraient conséquemment des rôles différents et précis.

Si le gouvernement trouve trop complexe une telle répartition tripartite, tout en optant pour un Inspectorat qui relève de l'Assemblée nationale, nous respecterions le choix d'une Direction générale de la Sécurité publique réaménagée qui pourrait comprendre à la fois une direction de la coordination opérationnelle et une direction de la surveillance et des contrôles.

Déjà, en 1976, le mémoire de l'Association des chefs de police et pompiers du Québec à la Commission parlementaire de la Justice sur le projet de loi 41 faisait état d'un nouveau partage de pouvoirs (voir annexe "B" p. 2-5) entre la Commission de police du Québec et la Direction générale de la Sécurité publique. 2.7 Article 17 2.7.1 Texte actuel 2.7.1.1 La Commission peut, par règlement, a) déterminer le niveau de scolarité et les cours de formation policière exigibles ainsi que les autres qualités requises pour devenir cadet ou membre de la Sûreté, cadet ou policier municipal, constable spécial ou directeur ou chef d'un corps de police municipal ainsi que pour exercer une fonction ou obtenir un grade dans un corps de police municipal;

2.7.1..2 b) prescrire les programmes de formation et de perfectionnement qui peuvent être dispensés à l'Institut de police du Québec et dans les écoles de police du Québec visés à la section VI; 2.7.1.3 c) déterminer les caractéristiques des uniformes et insignes qui peuvent être portés par les cadets et membres de la Sûreté, les cadets ou policiers municipaux et les constables spéciaux ainsi que de leur équipement; 2.7.1.4 d) déterminer les statistiques, archives, livres et comptes que doivent tenir la Sûreté et les corps de police municipaux de même que leurs membres et les constables spéciaux, ainsi que les formules qu'ils doivent utiliser; 2.7.1.5 e) prévoir la façon dont un membre de la Sûreté, un policier municipal ou un constable spécial doit disposer des sommes d'argent qui lui sont remises en paiement de frais ou d'honoraires ou à titre de dépôt ou qui sont autrement entrées en sa possession dans l'exercice de ses fonctions; 2.7.1.6 i) établir une échelle indicative de traitements susceptibles d'être versés au directeur ou chef d'un corps de police municipal ainsi qu'aux membres d'un tel corps qui ne sont pas des salariés au sens du Code du travail. 2.7.2 Propositions d'amendements 2.7.2.1 Début de l'article 17 et 17a)

Le pouvoir réglementaire est exercé par le gouvernement qui, selon l'objet de la réglementation peut référer la préparation dudit projet à la Commission de police du Québec, à l'Inspectorat ou à la Direction générale de la Sécurité publique. 2.7.2.2 Article 17b)

Les programmes de formation et les syllabus de cours sont élaborés par l'Institut de police en collaboration avec le ministère de l'Education et la Direction générale de la Sécurité publique; ils font l'objet ultérieurement d'une approbation du procureur général. L'Inspectorat peut contribuer à faire prescrire les examens et tests appropriés pour permettre la vérification des qualités requises pour devenir directeur d'un corps de police municipal ainsi que pour exercer une fonction ou obtenir un grade dans un corps de police municipal, faire administrer lesdits examens et les tests par la Direction générale de la Sécurité publique et déterminer la procédure à cette fin. 2.7.2.3 Article 17c)

Sur recommandation de l'Inspectorat le gouvernement peut déterminer les caractéristiques des uniformes et insignes qui peuvent être portés par les cadets et membres de la Sûreté, les cadets ou policiers municipaux et les constables spéciaux, ainsi que de leur équipement et la preuve de statut des constables spéciaux. 2.7.2.4 Article 17d)

Le gouvernement peut déterminer les documents et renseignements que doivent transmettre à l'Inspectorat, la Sûreté, les corps de police municipaux ainsi que les intervalles auxquels tels documents et renseignements doivent être transmis. 2.7.2.5 Article 17e)

Adopter sur recommandation de la Commission de police du Québec un code de déontologie relatif à l'éthique et à la conduite des cadets et membres de la Sûreté, des cadets et policiers municipaux et des constables spéciaux, ainsi que les sanctions applicables dans le cas de manquement, la procédure à suivre, la composition et les attributions des comités ou conseils de discipline et obliger les municipalités maintenant un corps de police à constituer un comité ou un conseil de discipline pour entendre, dans les cas mentionnés aux règlements, des affaires comportant un manquement aux règles.

Un conseil régional de discipline peut être établi par la Commission de police pour être saisi des cas où un comité local de discipline se désisterait pour conflits de juridiction ou faute majeure.

Le conseil régional de discipline est composé d'un président permanent à formation juridique, d'un citoyen qui pourrait être remplacé par d'autres citoyens selon des modalités à établir, d'un représentant permanent du syndicat et du commissaire de la Commission.

Le conseil régional de discipline analyse les faits reprochés et recommande au commissaire les mesures qui s'imposent. Le commissaire peut alors décider sans autres vérifications ou demander une pré-enquête à huis clos. 2.7.2.6 Article 17i)

L'article 17i) serait abrogé et remplacé par le texte suivant: i) les traitements susceptibles d'être versés au directeur d'un corps de police sont automatiquement ajustés à partir des conventions collectives de sorte que les directeurs aient comme traitements un salaire égal à 150% du salarié. le mieux payé par la convention. Les autres non salariés au sens du Code du travail appartiennent à des classes intermédiaires de salaire et les écarts entre chaque classe ne peuvent exéder 10%.

Les bénéfices marginaux sont les mêmes que ceux offerts aux syndiqués. 2.7.3 Buts des propositions d'amendements et commentaires 2.7.3.1 Nous croyons que les pouvoirs réglementaires devraient être exercés par le gouvernement lequel, avant adoption, demandera selon les compétences requises des projets de règlement à la Commission de police du Québec, à la Direction générale de la Sécurité publique ou à l'Inspectorat.

Si au contraire de cette proposition le gouvernement veut consentir à une certaine forme de délégation de son pouvoir réglementaire, nous appuierions une solution avancée à savoir que le gouvernement approuve les règlements de la Commission et y apporte les modifications qu'il juge nécessaires. 2.7.3.2 La formation policière et l'administration de tests d'aptitudes et de connaissances sont des sphères d'activités qui demandent des révisions continues et que nous ne pouvons voir comme étant du ressort de la Commission de police. C'est pourquoi nous verrions la Direction générale de la Sécurité publique (ou Inspectorat) dans une direction de la formation et des ressources humaines couvrir ces domaines. Pour ce faire, la Direction générale de la Sécurité publique élaborerait et reviserait les programmes de formation et de ressourcement, déterminerait le contenu et la durée des stages, certifierait les instructeurs, professeurs, chargés de cours et assesseurs de stages, établirait un processus de validation des tests psychométriques, uniformiserait les méthodes de recrutement et le processus de sélection. 2.7.3.3 Quelqu'un qui ne s'identifie pas correctement et ne présente pas sa preuve de statut pourrait être l'objet de poursuites, s'il s'agit de fausses représentations. 2.7.3.4 L'Inspectorat, la Direction générale de la Sécurité publique et la Commission de police du Québec seront chargés de fournir des renseignements propres à informer adéquatement l'Assemblée nationale (Inspectorat), le procureur général (la Direction générale de la Sécurité publique), les municipalités et le ministère de la Justice (la Commission de police du Québec). Pour ce faire, ces organismes gouvernementaux auront besoin par exemple du rapport annuel des activités des services de police. 2.7.3.5 II s'agit d'instaurer un système unique de discipline pour tous les policiers du Québec selon un code de déontologie qui pourrait s'inspirer d'un projet à l'annexe "C".

Pour les deux premiers paliers du système nous pourrions nous en remettre à l'approche de l'annexe "D" et coïncidant avec le niveau du comité ou conseil local de discipline et le conseil régional de discipline. Les niveaux qui suivraient seraient ceux établis par la Commission comme autorité centrale et de façon décisive dans l'utilisation du droit d'appel à la Cour provinciale.

2.7.3.6 Au lieu d'une échelle indicative de salaires, l'Association préfère l'énoncé de principes généraux qui suivraient l'évolution de la situation locale et régionale. Cette proposition a pour effet également d'impliquer les instances gouvernementales dans le contrôle concernant l'application de ces principes. 2.8 Article 18 2.8.1 Texte actuel

Les règlements de la Commission sont subordonnés à l'approbation du lieutenant-gouverneur en conseil. 2.8.2 Proposition d'amendements

Les règlements en matière policière sont soumis par le procureur général pour approbation par le lieutenant-gouverneur en conseil.

L'Inspectorat, la Commission de police du Québec et la Direction générale de la Sécurité publique préparent les projets de règlements qui ont égard à leurs attributions respectives. 2.8.3 Buts des amendements

II s'agit de s'éloigner d'une délégation des pouvoirs réglementaires par le gouvernement et à tout le moins de permettre au gouvernement d'apporter des changements sans lien de subordination ou de révision de la part des organismes qu'il a constitués.

Cependant, nous désirons conserver l'obligation de consulter les divers organismes gouvernementaux. 2.9 Article 20 2.9.1 Texte actuel

La Commission doit faire enquête sur la Sûreté ou tout corps de police municipal à la demande du lieutenant-gouverneur en conseil ainsi que sur la conduite de tout membre de la Sûreté, de tout policier municipal ou de tout constable spécial, chaque fois qu'elle en est requise par le procureur-général; elle est aussi tenue de faire enquête chaque fois qu'une municipalité, à la majorité absolue des membres du conseil, lui demande de le faire sur son corps de police ou sur la conduite de l'un des membres de ce corps ou d'un constable spécial nommé par le maire. La Commission peut aussi faire enquête sur la Sûreté ou tout corps de police municipal ainsi que sur la conduite de tout membre de la Sûreté, de tout policier municipal ou de tout constable spécial, de sa propre initiative, ou chaque fois qu'un citoyen lui en fait la demande par écrit et lui donne des raisons suffisantes à l'appui de sa demande. 1968, c. 17, a. 20; 1971, c. 16, a. 5. 2.9.2 Proposition d'amendements 2.9.2.1 Au texte actuel, nous ajouterions dans la nomenclature... les membres de la Gendarmeerie royale du Canada et autres agents de la paix fédéraux oeuvrant au Québec. 2.9.2.2. Dans son rapport d'enquête, la Commission peut rendre une ordonnance qui a effet d'un jugement déclaratoire pour déclarer qu'une personne qui a été l'objet d'une enquête n'a plus les qualités requises pour exercer les pouvoirs d'un agent de la paix. 2.9.2.3 L'article 20 est modifié en ajoutant le paragraphe suivant:

Aux fins du présent article, la Commission peut, avant de faire enquête, procéder à des recherches, soit pour préparer l'enquête qu'elle doit tenir, soit pour décider s'il y a lieu d'en tenir une, et, à cette fin, elle peut entendre les témoins dont l'audition lui semble nécessaire. Cette pré-enquête s'effectue à huis clos. 2.9.2.4 La Commission peut ordonner qu'un témoignage ne soit relaté en tout ou en partie par les media d'information.

Cette ordonnance de non publication et de non divulgation pourrait être permanente ou n'avoir effet que pour la durée de l'enquête.

2.9.3 Buts des amendements 2.9.3.1 II s'agit de soumettre au contrôle de la Commission de police du Québec la conduite de tout policier oeuvrant au Québec et avec statut d'agent de la paix qu'il soit un agent de la Sûreté du Québec, un policier municipal, un membre de la Gendarmerie royale du Canada, un policier fédéral des ports nationaux ou d'une des deux lignes de chemins de fer. 2.9.3.2 Nous acceptons que la Commission détienne certains pouvoirs coercitifs surtout lorsqu'il s'agit de policiers qui ont commis des actes criminels et/ou des fautes lourdes. D'ailleurs, il y va de l'intérêt de la profession de sauvegarder l'intégrité et la réputation des services de police. 2.9.3.3 Cette pré-enquête aurait comme conséquence de réduire les risques d'enquêtes frivoles et malicieuses. Ceci permettrait à la Commission de mieux évaluer le bien-fondé des plaintes et la décision de tenir une enquête publique.

Ceci permet d'effectuer les recherches au plan régional et d'éviter lorsque ce n'est pas nécessaire l'audition de témoins publiquement. 2.9.3.4 II s'agit d'éviter une publicité indue et de porter atteinte à la réputation de policiers. 2.10 Article 23 2.10.1 Texte actuel

La Commission doit, chaque fois qu'elle tient des séances publiques au cours d'une enquête effectuée en vertu de la présente loi, donner avis de la date et du lieu du début de ces séances dans un journal français et un journal anglais, publiés dans la localité la plus proche du lieu des séances. 2.10.2 Proposition d'amendements

Le premier alinéa de l'article 23 est abrogé et remplacé par le suivant: La Commission peut, si elle le juge d'intérêt public, lorsqu'elle tient des séances publiques au cours d'une enquête effectuée en vertu de la présente loi ou de l'article 241a de la Loi de la Communauté urbaine de Montréal, donner avis de la date et du lieu du début de ces séances dans un journal français, publié dans la localité la plus proche du lieu des séances. 2.10.3 Buts de la proposition d'amendements

II s'agit d'établir la règle de la non divulgation et de laisser à la Commission la discrétion de publier de tels avis, puisque la plupart du temps il n'y a aucun intérêt à le faire. 2.11 Article 25 2.11.1 Texte actuel

Lorsqu'une enquête a été faite conformément aux articles qui précèdent, la Commission est tenue de soumettre au procureur général un rapport écrit exposant les constatations qui ont été faites; lorsque l'enquête a été faite à la demande d'une municipalité, avis doit aussi être donné à la municipalité des conclusions de l'enquête; si l'enquête a été faite à la demande d'un citoyen, la Commission peut aussi l'aviser de ses conclusions, et aviser la municipalité intéressée s'il y a lieu. 2.11.2 Proposition d'amendements L'article 25 est remplacé par le suivant:

Lorsqu'une enquête a été faite conformément aux articles qui précèdent, la Commission est tenue de soumettre au procureur général un rapport écrit lui exposant ses constatations, ses conclusions et, le cas échéant, ses recommandations et de rendre des ordonnances pour déclarer qu'une personne qui a fait l'objet d'une enquête n'a plus les qualités requises pour exercer les pouvoirs d'agent de la paix; lorsque l'enquête a été faite à la demande d'une municipalité, une copie du rapport d'enquête doit lui être fournie; si l'enquête a été faite à la demande d'un citoyen, la Commission peut aussi lui faire parvenir, ainsi qu'à la municipalité intéressée, une copie de son rapport d'enquête. Si l'enquête concerne un membre de la Gendarmerie

royale du Canada ou un agent de la Sûreté du Québec, une copie du rapport sera transmise au commissaire de la Gendarmerie royale du Canada ou au directeur général de la Sûreté du Québec. 2.11.3 But de la proposition d'amendements

Le rapport de la Commission n'expose pas que des constatations mais également des conclusions, des recommandations et des ordonnances (lorsque l'ordre public l'exige). C'est l'organisation qui a procédé à l'embauche d'un policier qui est la première intéressée par le rapport d'enquête: La municipalité pour le Service de police, la Sûreté du Québec et la Gendarmerie royale du Canada. 2.12 Article 26 2.12.1 Texte actuel

Lorsqu'une enquête a été faite conformément aux articles qui précèdent, à la demande d'une municipalité, la Commission peut, si elle constate que la demande était frivole, fixer le montant de toutes les dépenses encourues par la Commission relativement à cette enquête et ordonner qu'elles soient payées par la municipalité; l'ordonnance à cette fin est homologuée sur requête de la Commission par la Cour provinciale ou, si le montant en jeu est de trois mille dollars ou plus, par la Cour supérieure; la Commission exécute ensuite le jugement contre la municipalité et transmet les deniers ainsi perçus au Ministre des finances qui les verse dans le fonds consolidé du revenu; la Commission a les pouvoirs requis pour agir à ces fins sous son nom. 1968, c. 17, a. 26; 1970, c. 12, a. 9. 2.12.2 Proposition d'amendements A ajouter: 26b) Lorsqu'une enquête demandée par un citoyen est considérée comme frivole et malicieuse, ce citoyen pourrait, même lors d'une pré-enquête, se voir imposer une amende qui n'excéderait pas cinq cents dollars. 2.12.3 But de la proposition

C'est pour prévenir des abus que nous introduisons cet amendement. 2.13 Commentaires généraux de l'Association sur la section III portant sur la Sûreté du Québec 2.13.1 Lorsqu'un service de police municipal demande en assistance la Sûreté du Québec, il conserve sa juridiction et continue de diriger les opérations et de contrôler les initiatives. Néanmoins, si le service de police municipal transfère à la Sûreté du Québec sa responsabilité, l'intervention cesse d'être interprétée comme un cas d'assistance et la Sûreté du Québec considère cette intervention comme une activité qui lui est propre. 2.13.2 Dans une région donnée, lorsqu'il y a une situation d'urgence, nous ne croyons pas que seule la Sûreté du Québec pourrait être désignée pour diriger les opérations. En attendant la constitution des corps de police de district, la Direction générale de la Sécurité publique par des centres régionaux de coordination pourrait confier à des coordonnateurs et un personnel de la Sûreté du Québec et des services de police municipaux qui l'assisteraient le soin de planifier et coordonner des opérations et programmes nécessitant une collaboration inter-services.

Il est entendu que si cette solution n'est pas retenue le leadership d'une situation peut être assumé par un directeur de service de police municipal. 2.13.3 Si les officiers de la Sûreté du Québec peuvent être des juges de la paix, les cadres supérieurs des forces policières municipales dont le directeur devraient l'être également. 2.13.4 L'Association des chefs de police et pompiers de la province de Québec se demande pourquoi à l'égard de la discipline (art. 47c) et des conditions d'admissibilité (art. 47d) la Sûreté du Québec serait régie différemment des autres services de police. 2.13.5 Pour éviter que les membres de la Sûreté du Québec s'adonnent à des pratiques de maraudage et de sollicitation de nature à provoquer l'abolition d'un service de police ou à en diminuer les effectifs, de telles formes d'intrusion devraient être

dénoncées auprès de la Commission de police du Québec dans l'immédiat. Suite à des amendements possibles, l'Inspectorat pourrait être l'instance qui examine cette situation. 2.14 Article 52 2.14.1 Texte actuel

Toute municipalité de cité ou de ville est tenue d'établir par règlement et de maintenir dans son territoire un corps de police; toutefois, le lieutenant-gouverneur en conseil peut dispenser, pour la période qu'il détermine, une telle municipalité de se conformer à cette obligation, s'il est d'avis que la population de la municipalité ou d'autres circonstances le justifient.

Toute autre municipalité locale au sens du Code municipal est autorisée à établir et maintenir un tel corps de police. 2.14.2 Proposition d'amendements 2.14.2.1 Jusqu'à ce que le rapport Saulnier soit appliqué, pour les municipalités dont la population est en deçà de 5000 habitants, à l'exception des municipalités déjà dotées d'un service de police, la Sûreté du Québec prend l'entière responsabilité de la protection policière de ces municipalités. Les municipalités qui optent pour le maintien du service de police ne peuvent réduire leurs effectifs sans une autorisation expresse du Ministre de la Justice suite à une évaluation de la part de l'Inspectorat. Quant aux municipalités dont la population est entre 5000 et 10 000 habitants, il ne peut y avoir des effectifs inférieurs à un seuil de 10 policiers. Pour les populations de 10 000 à 20 000 habitants, le taux d'encadrement minimal doit être de 1,5/1000 habitants, ce qui indique des effectifs minima de 15 à 30 policiers. 2.14.2.2Les municipalités dont les populations sont entre 5000 habitants et 20 000 habitants, lorsqu'elles réduisent leurs effectifs, les demandes de réduction doivent être transmises à l'Inspectorat pour vérifier le niveau des services offerts par rapport aux besoins. Ces municipalités peuvent choisir d'abandonner volontairement leurs services de police ou se voir forcer de le faire suite aux vérifications de l'Inspectorat. 2.14.2.3 La Sûreté du Québec facture les municipalités qui contractuellement sont protégées par la force policière provinciale ou qui ont fait défaut de respecter leurs obligations.

Les modalités de la facturation sont déterminées par des protocoles-type d'ententes dont le contenu fera l'objet de discussions avec l'Union des municipalités et l'Union des conseils de comté. 2.14.2.4 Nonobstant ce qui précède, les policiers municipaux qui sont affectés par des abolitions et réductions d'effectifs seront intégrés dans les rangs de la Sûreté du Québec.

Les policiers intégrés par la Sûreté du Québec sont assimilés à une fonction comportant des responsabilités équivalentes à la fonction qu'ils exerçaient auparavant. La classe salariale s'y rattachant est celle de la Sûreté du

Québec qui correspond à la fonction. Ils ont les mêmes avantages sociaux que la Sûreté du Québec.

Lesdits policiers peuvent se prévaloir de droits acquis et demeurer dans le territoire de la municipalité qu'ils desservent. Ils sont également éligibles aux promotions à l'intérieur des rangs de la Sûreté du Québec et peuvent demander un transfert.

Si un différend est signalé à l'occasion d'une telle intégration, il doit être réglé par la Commission de police du Québec. 2.14.3 But des propositions d'amendements

Pour éviter l'improvisation et clarifier certaines situations déjà énoncées (voir annexe "E") dans une résolution transmise au Ministre de la Justice, notre Association réaffirme qu'il s'agit de propositions transitoires et pour leur application immédiate. Il est à noter que nous ne faisons aucune distinction selon qu'il s'agit d'une municipalité régie par la Loi des cités et villes et une municipalité au sens du Code municipal. Notre mémoire de 1976 sur le projet de loi 41 (annexe "B") faisait déjà appel aux notions exprimées dans notre proposition.

2.15 Articles 53 et 53a) 2.15.1 Commentaires généraux

Comme les règlements adoptés en vertu des articles 53 et 53a) s'appliquent sous réserve, l'adoption d'un code de discipline ou de déontologie uniforme rendra les règlements concernant la discipline inapplicables. Quant à déterminer les endroits où les membres du corps de police peuvent avoir leur résidence, nous croyons que ce pouvoir réglementaire pourrait comporter un caractère discriminatoire. 2.16 Article 54 2.16.1 Texte actuel

Tout corps de police municipal et chacun de ses membres sont chargés de maintenir la paix, l'ordre et la sécurité publique dans le territoire de la municipalité pour laquelle il est établi, ainsi que dans tout autre territoire sur lequel cette municipalité a compétence, de prévenir le crime ainsi que les infractions à ses règlements et d'en rechercher les auteurs, 1968, c. 17, a. 54; 1968, c. 18, a. 2. 2.16.2 Proposition d'amendements

A ajouter dans un article 54b):

Les principales aires de responsabilité de la police en terme de fonctions: -identifier les criminels et circonscrire tous les actes criminels susceptibles de perturber l'équilibre social afin de procéder, lorsqu'approprié, à l'arrestation des suspects et de déclencher des procédures judiciaires; -contribuer à faire réduire, de façon significative, la commission de crimes par rétablissement de programmes de prévention, de surveillance par mode de patrouille préventive ou autres mesures jugées adéquates; -protéger les individus qui pourraient se voir sujets à des dangers physiques ou moraux; -sauvegarder les droits de la personne; -au niveau des communications, voir à ce que la mobilité, tant des personnes que des véhicules, ne soit pas gênée; -porter assistance à ceux qui ne peuvent s'occuper de leur propre personne pour des raisons de handicap physique, d'arriération mentale ou autres motifs; -se préoccuper des problèmes conflictuels; -identifier les problèmes qui pourraient être de nature à menacer la sécurité de l'Etat; -susciter un sentiment de sécurité dans la population; -procurer à la population une gamme de services d'urgence considérés comme nécessaires et utiles. 2.16.3 But de proposition d'amendements

S'appuyant sur une philosophie de base axée sur une police préventive, nous avons désiré apporter davantage de précision sur les fonctions policières. De plus, il faut permettre au directeur du service de police d'établir ses priorités à partir d'un cadre de références.

Ainsi, le directeur de service de police peut par une série d'indicateurs afin d'évaluer la pertinence des services rendus, à savoir: -déterminer si le service rendu est en étroite relation avec les objectifs établis par le service de police; -établir un estimé des coûts du service à être rendu; -bien informer la population que la continuité d'un tel service pourrait affecter le rendement des fonctions policières; -établir un protocole d'entente à l'effet que le service continuera d'être rendu jusqu'à ce qu'un autre organisme puisse le dispenser mieux que le service de police. 2.17 Article 55 2.17.1 Texte actuel

Tout corps de police municipal est sous la direction d'un directeur ou chef qui le commande. 2.17.2 Proposition d'amendements A ajouter:

Le directeur d'un corps de police dirige, administre et coordonne les activités administratives et opérationnelles du corps de police.

2.18 Article 60 2.18.1 Texte actuel

Le conseil de toute municipalité visée à l'article 52 peut faire des règlements pour conclure avec une autre municipalité entièrement ou partiellement située dans un rayon de vingt milles une entente ayant pour objet soit de lui fournir l'usage de ses lieux de détention et les services de son corps de police, soit d'en organiser un en commun avec elle; cette autre municipalité peut adopter un règlement pour accepter cette entente, pourvoir au paiement des dépenses et soumettre son territoire à la juridiction de ce corps de police.

L'entente doit être conclue pour une période de six ans et elle se renouvelle par périodes successives de trois ans à défaut d'avis écrit de six mois donné par une partie à l'autre.

L'entente peut prévoir la formation d'un comité intermunicipal et la délégation à ce comité de la totalité ou d'une partie des pouvoirs que possèdent les municipalités à l'égard de la fusion qui fait l'objet de l'entente.

Les règlements qui l'autorisent requièrent l'approbation du ministre des Affaires municipales et de la Commission. 1968, c. 17, a. 60; 1969, c. 22, a. 15. 2.18.2 Proposition d'amendements

A ajouter au premier paragraphe:

L'entente peut porter sur certains services techniques et spécialisés. 2.18.3 But de la proposition d'amendements

Notre objectif demeure une répartition des territoires à protéger entre les 34 corps de police de district et la Sûreté du Québec. Toutefois, dans une première phase, les services qui veulent mettre en commun les communications, le domaine des enquêtes, le service d'identité judiciaire peuvent ainsi le faire. Ceci constitue en quelque sorte une étape vers le regroupement et la régionalisation. Ces expériences prépareraient la voie à des ententes intermunicipales plus globales et se rapprochant d'un seuil de population de 20 000 habitants pour les corps de police de district. Dans cette période transitoire, un coordonnateur d'un centre régional tactique et opérationnel de la Direction générale de la Sécurité publique pourrait dans les régions offrir aux services de police municipaux et à la Sûreté du Québec des services d'analyse opérationnelle afin d'établir des cibles opérationnelles, de coordonner des opérations particulières qui dépassent les compétences sectorielles et territoriales, de requérir l'aide de certains services de police. Les programmes de prévention et certains services professionnels et techniques pourraient être générés par ce centre régional. Le personnel requis pour le centre régional pourrait être prêté par la Sûreté du Québec et les services de police municipaux selon des protocoles d'entente avec des modalités qui restent à définir. 2.19 Article 62 2.19.1 Texte actuel (premier paragraphe)

Lorsqu'un policier municipal agit en qualité d'agent de la paix dans un autre territoire que celui de la municipalité qui l'emploie, le procureur général est, à compter de l'entrée en vigueur de la présente loi, réputé être son employeur pour les fins de la Loi des accidents du travail (Statuts refondus, 1964, chapitre 159) et il fait partie de la cédule II de ladite loi. 2.19.2 Proposition d'amendement

L'article 62 est modifié par l'insertion, après le premier alinéa, du suivant: L'alinéa précédent s'applique également au cadet ou policier municipal qui participe à des cours de formation policière à l'Institut de police du Québec ou dans une école de police visée dans l'article 78, ainsi qu'à l'étudiant inscrit au programme d'enseignement de techniques policières dans un collège d'enseignement général et professionnel alors qu'il est en stage à l'Institut de police du Québec. 2.19.3 But de la proposition d'amendement

Nous trouvons équitable de protéger également les cadets, policiers et étudiants lorsqu'ils poursuivent des études et sont en dehors de leur territoire. L'un des principes qui doit ressortir et qui est relié à cette préoccupation: Le policier municipal étant sur son territoire un agent de la paix, la municipalité est réputée son employeur pourvu qu'il n'ait pas commis une faute lourde. Cette disposition devrait être incorporée dans la Loi de police.

2.20 Articles 62a à 62c. 2.20.1 Proposition relativement à la rente de veuve et aux enfants

Au cas de décès, la rente viagère de la veuve devrait être de 50% du traitement au moment du décès du policier. La rente versée aux enfants devrait être de 5% par enfant jusqu'à ce qu'ils aient atteint l'âge de la majorité de sorte que l'addition de rente de veuve et des rentes aux enfants garantisse un revenu familial égal à 70% du traitement du policier au moment du décès. 2.20.2 Proposition relativement au principe d'indexation

Ces rentes devraient être indexées chaque année en se basant sur l'indice du coût de la vie. 2.21 Article 63 2.21.1 Texte proposé

L'article 63 de ladite loi, modifié par l'article 16 du chapitre 22 des lois de 1969, l'article 15 du chapitre 12 des lois de 1970 et par l'article 6 du chapitre 16 des lois de 1971, est remplacé par le suivant:

Le conseil d'une municipalité visée dans l'article 52 ne peut, quelles que soient les modalités de son engagement, et malgré toute disposition inconciliable d'une loi générale ou spéciale, destituer le directeur ou chef de son corps de police ou réduire son traitement que par une résolution adoptée par le vote affirmatif d'au moins la majorité absolue de ses membres.

Le conseil d'une telle municipalité ne peut non plus, malgré toute disposition inconciliable d'une loi générale ou spéciale et quelles que soient les modalités de l'engagement, destituer un autre membre de son corps de police qui n'est pas un salarié au sens du Code du travail et qui aura été au service de la municipalité depuis au moins six mois, ni réduire son traitement que par une résolution adoptée par le vote affirmatif d'au moins la majorité absolue de ses membres.

Les dispositions du présent article s'appliquent également au policier municipal salarié au sens du Code du travail et qui n'est pas représenté par une association de salariés détenant une accréditation.

La résolution visée au premier ou au deuxième alinéa doit être signifiée à la personne qui en fait l'objet selon les dispositions prévues au Code de procédure civile; en cas d'impossibilité, la Commission détermine, à la requête de la municipalité, un autre mode de signification.

La Commission, à moins que la personne visée par la mesure ne démissionne et acquiesce aux allégations, procède à une enquête dans les 30 jours qui suivent la signification de la résolution.

Il incombe à la municipalité de prouver le bien-fondé de la destitution, de la réduction de traitement ou de la suspension sans traitement.

Si la résolution vise la destitution, elle emporte la suspension de la personne qui en fait l'objet, jusqu'à ce que la destitution prenne effet conformément à l'alinéa suivant: La destitution ou la réduction de traitement a effet uniquement: a) à compter du moment où la personne qui en fait l'objet y acquiesce; b) à compter du moment où l'ordonnance suite à l'enquête confirme la résolution. Si la résolution de la municipalité est maintenue, la Commission peut ordonner au directeur ou policier visé par les mesures de rembourser la municipalité d'une partie de traitement qui est en sus du montant auquel il aurait droit selon l'alinéa précédent et conséquemment pour une période qui n'est pas couverte.

L'ordonnance à ces fins est homologuée par la Cour provinciale ou, si le montant en jeu est de trois mille dollars ou plus, par la Cour supérieure; l'intimé peut ensuite exécuter le jugement contre la municipalité.

Malgré le quatrième alinéa, si la résolution de la municipalité fait suite à une recommandation de la Commission dans un rapport d'enquête, un appel est porté devant la Cour provinciale, dans le district judiciaire dont la municipalité fait partie. Cet appel est entendu par trois juges désignés par le juge en chef, lesquels statuent alors en conformité du présent article. 2.21.2 A l'instar de l'article 35 concernant le directeur général de la Sûreté du Québec nous désirons transformer le droit d'appel en une obligation d'enquête de la part de la Commission de police du Québec.

De cette façon, à moins qu'il ne s'agisse d'une faute lourde et que l'intimé acquiesce, le directeur et le non salarié au sens du Code du travail bénéficient d'une présomption d'innocence et continuent de recevoir la rémunération à laquelle ils ont droit jusqu'au jugement de la Commission.

Nous n'avons pas voulu limiter ces dispositions au directeur de police et nous acceptons que le policier municipal qui n'est pas représenté par une association de salariés détenant une accréditation puisse être couvert par la même obligation d'enquête.

Nous maintenons le principe d'homologation pour légaliser des actions ultérieures qui pourraient être prises.

Quant au droit d'appel, il existerait lorsque la municipalité donne suite à un rapport d'enquête de la Commission. Alors, l'appel serait entendu devant trois juges de la Cour provinciale.

Cette position eu égard à l'article 63, fait suite à notre mémoire de 1973 (annexe "F") et notre premier mémoire devant le comité Saulnier... 2.22 Article 64 2.22.1 Commentaires et proposition

L'Association des chefs de police et pompiers du Québec recommande que ceux qui ont le statut de constables spéciaux, à l'exception de ceux qui sont soumis à l'autorité du directeur du service de police d'une municipalité, relèvent fonction-nellement de la Sûreté du Québec.

En effet, l'encadrement de ces constables spéciaux surtout en milieu municipal n'est pas toujours assumé par une personne issue d'une carrière policière. La Sûreté du Québec se doterait alors d'un mécanisme de contrôle et de supervision adapté à ce contexte, les responsabilités administratives continuant de relever de ces organismes.

Toutefois, pour les constables spéciaux appartenant à des organismes gouvernementaux et para-gouvernementaux, nous continuons de proposer leur intégration à la Sûreté du Québec. 2.23 Article 65 2.23.1 Texte actuel

Le conseil de toute municipalité visée à l'article 52 peut, par règlement autoriser le maire à nommer par écrit, en cas d'urgence et pour une période n'excédant pas sept jours, des personnes désignées sous le titre de constables spéciaux, pour maintenir la paix, l'ordre et la sécurité publique dans le territoire de la municipalité ainsi que dans tout autre territoire dans lequel elle a compétence, de prévenir le crime ainsi que les infractions à ses règlements et d'en rechercher les auteurs. Tout règlement adopté en vertu de l'alinéa précédent peut prescrire le nombre maximum de personnes que le maire peut nommer constables spéciaux et fixer le montant maximum de la rémunération qui peut leur être accordée. 2.23.2 Proposition d'amendement

Nouveau paragraphe à intercaler entre le premier et le deuxième paragraphe du texte actuel:

Le conseil municipal peut adopter un règlement autorisant le maire à nommer pour une période n'excédant pas quatre mois des constables spéciaux pour des problèmes saisonniers particuliers provoquant une surcharge de travail au service de police.

Les constables spéciaux ainsi désignés sont assujettis aux mêmes exigences d'admissibilité que les policiers.

Le règlement municipal doit être approuvé par le procureur général et le ministre des

Affaires municipales après un avis de la part de l'Inspectorat.

Nouveau paragraphe, après le deuxième paragraphe actuel:

Dans les municipalités où des constables spéciaux ont fait l'objet d'une nomination, ces derniers relèvent soit du directeur d'un service de police municipal dans les municipalités qui maintiennent un tel service ou d'un officier désigné par le directeur général de la Sûreté du Québec pour les municipalités qui ne sont pas dotées d'un service de police.

Une municipalité qui enfreint la loi à cet égard est sujette à une amende maximum de $500 par jour. 2.23.3 Buts des amendements proposés

Nous voulons tout d'abord qu'il existe un peu plus de souplesse pour faire face aux problèmes saisonniers et touristiques et conséquemment conférer des pouvoirs de nomination pour les constables spéciaux qui soient néanmoins assujettis à des contrôles et des conditions spécifiques.

La ligne d'autorité au plan opérationnel ne pourrait venir que du directeur d'un service de police municipal ou d'un sous-officier ou officier de la Sûreté du Québec. Nous voyons dans cette mesure une excellente façon d'utiliser ceux qui ont complété leur formation policière et attendent qu'un poste dans un service de police soit créé ou laissé vacant.

Il nous apparaît important pour faire respecter ces dispositions qu'une pénalité sous forme d'amendes soit prévue puisque plusieurs municipalités passent actuellement outre à l'esprit des amendements projetés. 2.24 Article 67 2.24.1 Texte actuel

Tout constable spécial nommé en vertu de l'article 64 prête les serments prévus à l'article 4 devant le juge qui le nomme.

Tout constable spécial nommé par le maire d'une municipalité prête ces serments devant lui ou devant le greffier ou secrétaire-trésorier de la municipalité.

Un écrit constatant la prestation de ces serments doit être rédigé sur-le-champ en deux exemplaires dont l'un est remis à la personne qui le prête. 2.24.2 Proposition d'amendements au deuxième paragraphe

Tout constable spécial nommé par le maire d'une municipalité prête serment devant le directeur du service de police ou l'officier commandant de la Sûreté du Québec selon le cas. 2.24.3 Buts des amendements proposés

II est important que dès le départ les constables spéciaux sentent le lien d'autorité s'établir par le pouvoir de nomination du maire et l'assermentation devant un officier supérieur de police. 2.25 Article 72 2.25.1 Texte actuel

Tout constable spécial doit, chaque fois qu'il agit en cette qualité, porter un insigne conforme aux règlements de la Commission adoptés en vertu du paragraphe c de l'article 17 et garder sur lui, un exemplaire de l'écrit portant sa nomination et l'exhiber chaque fois qu'il en est requis à l'occasion d'un acte qu'il pose dans l'exercice de ses fonctions.

Tout constable spécial qui contrevient aux dispositions de l'alinéa précédent commet une infraction et est passible, sur poursuite sommaire, d'une amende de cent à deux cents dollars, et des frais. 2.25.2 Proposition d'amendements

Le premier paragraphe remplacé par: ... aux règlements relatifs à l'éthique professionnelle et l'adoption d'un code de déontologie uniforme dont la responsabilité de surveillance incombera à la Commission de police du Québec et garder sur lui... 2.25.3 Buts des amendements proposés

II faut que le constable spécial soit subordonné aux mêmes normes de discipline et d'éthique que les policiers puisqu'ils exercent les pouvoirs d'agents de la paix. 2.26 Article 75 2.26.1 Texte actuel

L'Institut est chargé de dispenser des cours de formation policière et de perfectionnement aux cadets et aux membres de la Sûreté. 2.26.2 Propositions d'amendements

La Direction générale de la Sécurité publique est chargée de concevoir et approuver les programmes de formation policière et à les faire préparer et dispenser par l'Institut de police du Québec pour les cours de formation de base, de spécialisation et de perfectionnement. Quant aux parties de programmes qui peuvent être dispensées par les collèges et universités, la Direction générale de la Sécurité publique exerce sa fonction de développement conjointement avec le ministère de l'Education et les organismes mis sur pied pour représenter les collèges et universités.

Les cours de formation policière et de perfectionnement sont destinés aux cadets et membres de la Sûreté, aux cadets et policiers des services de police municipaux. 2.26.3 Buts des amendements proposés

La conception, le développement et l'approbation des programmes de formation à l'intention des policiers du Québec sont des attributions qui sont conférées à la

Direction générale de la Sécurité publique qui doit impliquer d'autres instances concernées par le processus.

Les policiers municipaux non couverts par le texte actuel sont insérés afin de placer tout le monde sur un pied d'égalité.

Des principes d'équité et d'égalité de statuts devraient faire en sorte que les policiers municipaux qui suivent des cours à l'Institut de police du Québec se fassent payer leurs frais de scolarité et de transport par le gouvernement du Québec après que la

Direction générale de la Sécurité publique se soit montrée en accord avec ces initiatives, comme c'est le cas à Ottawa pour le Collège canadien de la police. 2.27 Article 77 2.27.1 Proposition

Abolir cet article à cause des changements à l'article 75. 2.28 Autres propositions en matière de formation policière

Le gouvernement du Québec devrait préciser par des politiques mieux explicitées ses politiques de contingentement ou d'admissibilité dans les CEGEP à l'option des techniques policières conduisant au D.E.C. en techniques auxiliaires de la justice.

De plus, l'Association des chefs de police et pompiers du Québec recommande un stage obligatoire dans des services de police accrédités par ce collège avant l'obtention d'un D.E.C. en techniques policières.

Ce stage devrait s'effectuer avant la cinquième session et serait considéré comme éliminatoire, de sorte que ceux qui ne peuvent poursuivre un plan de carrière en milieu policier fassent l'objet d'une nouvelle orientation. 2.29 Annexe A et B de la loi de police 2.29.1 Proposition

Dans les serments, on devrait toujours retrouver: "selon les prescriptions du Code de déontologie". 3.2 Appui conditionnel de l'Association dû à des éléments de concordance: 3.2.1 Article 1

Nous acceptons à l'article 1 les nouvelles significations de "municipalité" à f) et "directeur" à h).

Nous vous recommandons de remplacer l'actuelle définition de g) par la nôtre à la page 8 (2.1.2) de ce mémoire. 3.2.2 Article 2

A l'article 2a), nous qualifierions le "préposé" comme étant le préposé de la municipalité et nous vous recommandons de modifier votre texte en conséquence.

Quant à l'article 2b), vous vous référez à d'autres catégories d'agents de la paix. Nous vous mettons en garde sur la prolifération d'une police déguisée et la constitution au sein de divers ministères et de certaines sociétés d'Etat, de services de sécurité et d'enquête donnant souvent l'impression d'une police parallèle. A l'article 2c), nous vous référons à notre proposition concernant l'article 17d) sur des documents qui seraient transmis à l'Inspectorat et à nos remarques sur les renseignements qu'auront à transmettre la Direction générale de la sécurité publique, la Commission de police du Québec et l'Inspectorat (2.7.3.4 aux pages 25 et 26). 3.2.3 Article 10

Au texte de remplacement du projet de loi 48, nous ajouterions notre proposition d'amendement de 2.4.2 (pages 13 et 14). 3.2.4 Article 21

Nous appuyons les textes de remplacement, l'abrogation et l'addition dans la mesure où les dispositions de cet article s'appliquent à la Commission d'enquête sur le crime organisé. 3.2.5 Article 22

Nous restreignons la portée de cet article à la Commission d'enquête sur le crime organisé. 3.2.6 Article 22 a), b), d), e), f) et g)

Nous continuons de limiter ces dispositions à la Commission d'enquête sur le crime organisé. Au cas où le gouvernement déciderait d'en faire un article à portée générale selon le scénario du projet de loi 48, nous vous demandons d'examiner la conciliation possible entre ces dispositions et notre proposition relativement à l'article 63 (2.2.1.1), pages 50 - 54). 3.2.7. Article 29

Nous trouvons quelque peu dangereux que la Sûreté du Québec agisse de sa propre initiative et nous proposons que sur cet aspect vous vous en remettiez à nos commentaires généraux de 2.13.1 et 2.13.2 (pages 35 et 36). 3.2.8. Article 45

En vertu du principe énoncé à 4.6.2., nous serions d'avis que les directeurs des services de police municipaux aient les mêmes prérogatives. 3.2.9 Article 53

En vous référant à 2.15.1 à la page 41, nous recommandons que vous retiriez à a) "ainsi qu'à la discipline" et à b) "et prévoir les sanctions applicables en cas d'infraction aux règlements concernant la discipline", puisque nous proposons l'adoption d'un code de discipline ou de déontologie unique.

Conséquemment, nous acceptons la suppression du c) dans le projet de loi 48. Nous trouvons que l'article 53 d) pourrait aller à l'encontre de la charte des droits de la personne et entraîner éventuellement des plaintes de discrimination. Si vous conservez "déterminer les endroits où les membres du corps de police peuvent avoir leur résidence". 3.2.10 Article 53a)

Nous sommes d'accord pour qu'il soit abrogé puisque nous insistons sur le fait qu'il n'y ait qu'un seul code de discipline ou de déontologie pour tous les policiers du Québec. 3.2.11 Article 60a)

Nous appuyons l'amendement du projet de loi 48, en vous demandant d'ajouter notre proposition de 2.18.2 relativement à des ententes intermunicipales sur des services techniques et spécialisés en accord avec nos explications à 2.18.3 (pages 46 et 47). 3.2.12 Article 62

Nous acceptons les dispositions du projet de loi 48 et nous vous demandons d'ajouter notre proposition à 2.19.2 relativement aux cadets, policiers qui suivent des cours et étudiants inscrits au programme du D.E.C. en techniques auxiliaires de la Justice (option des techniques policières).

3.2.13 Article 65

Nous supportons le fond de l'addition du projet de loi 48 en préférant que le gouvernement choisisse le texte de notre proposition à 2.23.2 puisqu'il comprend des modalités d'encadrement et des moyens de contrôle qui n'ont pas été prévus par le projet de loi 48. 3.2.14 Article 72

Nous acceptons le texte de remplacement en suggérant que vous insériez notre proposition à 2.25.2 (page 59). 3.3 Propositions de l'Association des chefs de police et de pompiers du Québec modifiant la loi de police sur des articles où le projet de loi 48 a omis d'apporter des amendements. 3.3.1 Article 9

Au 2.3.2 (page 11) et 2.3.3, nous recommandons qu'il y ait au moins autant de membres policiers que non policiers à la Commission de police du Québec. Nous constatons d'ailleurs que le gouvernement continue à ignorer l'esprit de cette recommandation qui a déjà été formulée par le passé et procède surtout à la nomination de juges comme membres. 3.3.2 Article 11

Par notre proposition d'amendement à 2.5.2 et les explications de 2.5.3 (pages 13 et 14), nous prévoyons l'établissement de bureaux régionaux pour la Commission de police du Québec et les rôles des commissaires dans les régions. 3.3.3 Article 23

A 2.10.2 et selon les explications de 2.10.3, nous recommandons notre proposition des pages 31 et 32. 3.3.4 Article 25

Nous vous soumettons un nouveau texte à 2.11.2 (page 33) selon les motifs mentionnés à 2.11.3 (pages 33 et 34). 3.3.5 Article 54

Afin de spécifier davantage la nature du mandat des services de police et de permettre au directeur de mieux évaluer la pertinence des services rendus, notre proposition de 2.16.2 (pages 42 et 43) doit s'ajouter au présent texte de l'article 54. 3.3.6 Article 55

Pour éviter les risques d'ambiguïté à propos de la fonction de directeur de police, nous introduisons une proposition d'amendement à 2.17.2 (pages 44 et 45) que nous vous demandons d'incorporer. 3.3.7 Article 64

Sans nécessairement formuler une proposition précise, nous vous référons à 2.22.1 (page 54), relativement à l'autorité de qui devrait relever les constables spéciaux. 3.3.8 Article 67

Par notre proposition à 2.24.2 modifiant le deuxième paragraphe, nous désirons que le directeur d'un service de police ou un officier commandant de la Sûreté du Québec puisse procéder à l'assermentation des constables spéciaux. 3.3.9 Article 75

Par 2.26.2 nous conférons à la Direction générale de la sécurité publique des rôles de conception et d'approbation de programmes de formation policière. Nous vous suggérons de vous saisir des commentaires de 2.26.3. Nous vous référons de plus à notre proposition d'amendement de 2.7.3.2 pour les buts et commentaires de cet amendement. 3.3.10 Articles 77 et 78

Nous recommandons d'abolir ces articles à cause de notre proposition à l'article 75. Le texte de remplacement du projet de loi 48 à l'article 78, mis à part le rôle de la Commission de police du Québec, reflète l'esprit de notre proposition d'amendement de l'article 75 et le gouvernement devrait rejoindre notre position en adoptant ladite proposition.

3.3.11 Autres propositions en matière de formation policière

A 2.28 (page 62) l'Association propose entre autres un stage obligatoire dans des services de police accrédités. 3.4 Divergences marquées entre le projet de loi 48 et les propositions de l'Association des chefs de police et de pompiers du Québec. 3.4.1 Article 6

L'Association des chefs de police et de pompiers du Québec s'oppose à la suppression du troisième alinéa de l'article 6 et en recommande le maintien puisqu'il élimine des risques d'infiltration de la politique dans le domaine policier et prévoit des pénalités pour celui qui y contrevient. 3.4.2 Article 16

Par notre proposition à 2.6.2 nous favorisons une répartition tripartite entre la Commission de police qui se voit limitée à un rôle quasi judiciaire et un rôle conseil, à la Direction générale de la Sécurité publique la coordination de l'action opérationnelle des forces policières, l'élaboration des programmes de prévention et les mesures visant la sécurité routière, à l'Inspectorat les rôles d'inspection (le contrôle quasi judiciaire étant déjà assumé par la Commission de police du Québec) et d'analyse.

Cette position de notre part nous fait rejeter à l'article 16b) l'établissement d'un service général d'inspection et le projet de registre de l'article 16d) puisque l'Inspectorat exercera ces rôles (voir 2.6.3). De plus, nous ne voyons pas la Commission exercer un rôle direct en matière de prévention du crime. 3.4.3 Article 17

Notre proposition d'amendement à 2.7.2 (pages 20 à 24) et les motifs à son soutien à 2.7.3 (pages 24 à 27) a pour but d'enlever à la Commission de police du Québec le pouvoir de législation déléguée qui lui avait été conféré pour la restreindre à soumettre au gouvernement par l'intermédiaire du procureur-général une recommandation concernant un Code de déontologie. En effet, le pouvoir réglementaire est concentré vers le gouvernement. Dans cet article 17, nous indiquons des sphères propres aux trois organismes lorsqu'il s'agit d'assister le gouvernement dans l'exercice de son pouvoir réglementaire. De plus, par le biais de l'article 17e) à 2.7.2.5 et 2.7.3.5, nous proposons que soit instauré un système unique de discipline comprenant divers niveaux dont le comité local de discipline, un conseil régional de discipline, les enquêtes de la Commission de police du Québec et la Cour provinciale comme palier d'appel.

Par l'abrogation de l'article 17i), nous proposons un mécanisme automatique d'ajustement des salaires des directeurs et cadres non syndiqués au lieu d'une réglementation propre à une échelle indicative. 3.4.4 Article 18

Le projet de loi 48 permet au gouvernement de modifier un règlement de la Commission de police du Québec. Nous constatons qu'il s'agit là d'une amélioration. Toutefois, notre position est différente puisque tel que proposé à l'article 17, le pouvoir réglementaire doit être exercé par le gouvernement. 3.4.5 Article 20

Par notre proposition à 2.9.2.1, nous désirons soumettre au contrôle de la Commission de police du Québec les membres de la Gendarmerie royale du Canada aux autres catégories de policiers fédéraux oeuvrant au Québec. Nous introduisons les notions de pré-enquête à huis clos et de pouvoirs coercitifs à la Commission de police du Québec. 3.4.6 Article 24, premier alinéa

En concordance de nos diverses propositions sur un système disciplinaire et principalement en regard de l'article 17e), nous croyons que le premier alinéa est inutile. 3.4.7 Article 26

Selon notre proposition de 2.12.2, nous ajouterions au texte actuel une possibilité d'imposer des amendes aux demandes d'enquête frivoles et malicieuses afin d'éviter les abus. L'insertion du projet de loi 48 ne va pas aussi loin et nous recommandons que le gouvernement adopte cette recommandation.

3.4.8 Article 47a)

Nous vous référons à nouveau à l'article 17e) et à notre proposition d'un système de discipline unique. Nous ne pouvons admettre que la Sûreté du Québec ait un système parallèle et autonome de discipline et que son règlement de déontologie et de discipline soit éventuellement l'objet d'implantation dans les services de police municipaux. Nous recommandons ainsi que soient retirées toutes les dispositions qui visent les questions disciplinaires et d'éthique pour retenir notre proposition. 3.4.9 Article 52

Notre approche à la proposition 2.14.2 (pages 38 à 40), tout en comportant une certaine similitude dans le rationnel des points de référence (seuil de population de 5000 habitants, facturation par la Sûreté du Québec), suit un chemin critique différent et ne comporte pas les mêmes modalités d'application et ne prévoit pas les mêmes mécanismes. C'est ainsi que l'Inspectorat au lieu de la Commission de police du Québec procédera à l'évaluation du niveau de protection des municipalités, que la facturation par la Sûreté du Québec doit suivre les indications prévues dans des protocoles-types d'enquêtes, que les policiers seront intégrés à la Sûreté du Québec en bénéficiant des mêmes avantages. Seules les différends seraient soumis à la Commission de police du Québec.

A notre avis, cette proposition de 2.14.2 est cohérente avec notre vue d'ensemble général et nous apparaît comme plus logique si l'on procède par étapes. 3.4.10 Articles 62a) à 62c)

Nous recommandons que le gouvernement retienne notre principe à 2.20.1 pour l'établissement de la rente à la veuve et aux enfants et réajuste ce texte actuel. De plus, nous désirons que vous précisiez votre point de vue sur le principe d'indexation. 3.4.11 Article 63

Par 2.21.1 (pages 49 à 52) nous recommandons que soit modifié l'actuel droit d'appel dans les cas de destitution et réduction de traitement du directeur et des non salariés au sens du Code du travail dans les services de police en une obligation pour la Commission de faire enquête dans ces cas. L'appel prévu en serait de la décision de la Commission de police du Québec auprès de la Cour provinciale. Cette proposition ne se trouve nullement reflétée par le texte de remplacement du projet de loi 48.

4 Sommaire et conclusions 4.1 Orientation corrective et palliative des propositions

Certaines de nos propositions ont pour but de corrigerdes situationsque nous avons considérées comme lacunaires ou détériorées. Il faut évaluer davantage lessphèresd'intervention desgroupes responsables desaffaires policières pour éviter des rôles conflictuels. Ainsi, il faudrait voiràceque la Commission de police du Québec concentre son action au domaine quasi judiciaire, que la Direction générale de la Sécurité publique s'adonne à la coordination opérationnelle et à l'encadrement des activités, des programmes ayant une portée générale et des services spécialisés, tandis que l'Inspectorat limite son rôle à la surveillance, au contrôle et à la vérification. Les chevauchements doivent également être éliminés entre les organisations policières (Sûreté du Québec, Services de police municipaux et Gendarmerie Royale du Canada) puisque ce phénomène crée plutôt des structures compétitives et d'affrontement, alors que l'objectif visé devrait être une plus grande collaboration et complémentarité entre les services de police. Un système disciplinaire doit comporter des mécanismes susceptibles d'assurer la population que toutes les communautés régionales sont dotées de bureaux de plaintes accessibles et que par voie de conséquences le système instauré supporte une justice expéditive et équitable. Nous avons prévu que les divers paliers sont utilisés de façon à éviter que des plaintes futiles suivent toutes les étapes du processus.

Les mesures à court terme concernant les organisations policières sont de nature palliative et transitoire. En effet, nous souhaitons qu'à moyen terme le gouvernement se fixe sur les recommandations du rapport Saulnier.

Le caractère de nos propositions s'inscrit donc dans un désir de collaborer avec le gouvernement en étant conscient de contraintes quelquefois imprévisibles relativement à l'implantation de certaines propositions. Cette approche flexible devrait nous rendre crédible dans la consultation gouvernementale; les projets devront de toute évidence être révisés fréquemment à la lumière de faits nouveaux. Nos propositions à caractère correctif ou palliatif sont formulées dans ce contexte de façon pratique et réaliste.

4.2 Protection adéquate de la population par l'application de mesures en vertu d'un échéancier de réalisations. 4.2.1 A court terme. 4.2.1.1 Les municipalités qui ont moins de 5000 de population seraient dorénavant protégées par la Sûreté à moins qu'elles ne soient dotées d'un service de police. Ce service ne peut toutefois réduire ses effectifs sans autorisation expresse du ministre de la Justice suite à une évaluation de l'Inspectorat. 4.2.1.2 Les municipalités qui ont des populations entre 5000 et 20 000 habitants pourraient, par voie de contrat, voir leur territoire protégé par la Sûreté du Québec. Ces contrats comprendraient des clauses à l'égard de l'application des règlements municipaux par les agents de la Sûreté du Québec et de l'intégration des policiers municipaux à la Sûreté du Québec. Si les municipalités optent pour le maintien de leurs services de police, elles doivent répondre à l'Inspectorat de leur efficacité et avoir des effectifs dont le seuil minimal est établi en tenant compte de divers facteurs (population, charge de travail, territoire à couvrir, criminalité...). 4.2.1.3 Les ententes inter-municipales peuvent être partielles et portées sur les communications, l'identité judiciaire, les services techniques et certaines fonctions spécialisées. 4.2.1.4 Les ententes inter-municipales et les contrats types de la Sûreté du Québec devraient faire l'objet d'uniformisation et les modèles développés devraient être conservés à la Direction générale de la Sécurité publique pour être remis comme information à toute partie intéressée. 4.2.1.5 Les municipalités qui ont à faire face à des besoins saisonniers et reliés au tourisme peuvent procéder à la nomination de constables spéciaux pour des périodes pouvant aller jusqu'à quatre mois.

Ces constables spéciaux devront se conformer aux normes d'admissibilité en vigueur. De plus, ils doivent être encadrés par les organisations policières reconnues: un service de police municipal ou une unité opérationnelle de la Sûreté du Québec. 4.2.2 A moyen terme

La Direction générale de la Sécurité publique devrait mettre sur pied des centres régionaux tactiques et opérationnels pour faciliter la coordination d'opérations policières d'envergure régionale, offrir une assistance compétente et professionnelle à l'égard de programmes à l'échelle du territoire. 4.2.3 A long terme

Selon les critères du rapport Saulnier, le gouvernement délimiterait les juridictions territoriales et les rôles des corps de police de district et de la Sûreté du Québec. Même si sur certains points la Direction générale de la Sécurité publique pourrait modifier le mandat des centres régionaux tactiques et opérationnels, ils devraient être maintenus pour les régions comprenant plusieurs corps de police de district. 4.3 Droits acquis et sécurité des policiers municipaux lors d'intégrations 4.3.1 Les policiers municipaux qui sont touchés par des abolitions sont intégrés à la Sûreté du Québec à une fonction équivalente à celle qu'ils occupaient avant l'abolition. 4.3.2 S'il s'agit d'une intégration (selon le scénario: à la Sûreté du Québec), les policiers municipaux sont assimilés à la classe salariale de la Sûreté du Québec correspondant aux responsabilités d'une fonction équivalente à celle qu'ils occupent présentement. Ils peuvent de plus se prévaloir de droits acquis concernant les affectations et les transferts. 4.4 Renforcissement des dispositions à l'égard des conditions de travail et du professionnalisme. 4.4.1 Un dirigeant ou un gestionnaire d'un service de police (cadre) et un policier doivent être soumis, pour sauvegarder l'intégrité du milieu policier, à un Code de déontologie uniforme.

4.4.2 L'admissibilité à la profession policière se trouve assortie pour ceux qui proviennent de CEGEP d'une exigence additionnelle à savoir, un stage obligatoire avant la cinquième session. Cette étape serait éliminatoire pour ceux qui ne pourraient satisfaire aux assesseurs des services de police accrédités. 4.4.3 Les municipalités ne pourraient congédier et réduire le traitement des directeurs, des non salariés au sens du Code du travail et des policiers syndicables mais non représentés par une association dûment accréditée sans qu'il y ait eu enquête de la Commission de police du Québec. Les policiers par ces dispositions sont présumés comme pouvant continuer d'exercer leurs fonctions jusqu'à l'issu de l'enquête de la Commission de police du Québec à moins que lesdits policiers ne reconnaissent avoir commis une faute lourde et acquiescent que les mesures prises sont justifiées. Le fardeau de la preuve revient donc à la municipalité et la Commission de police du Québec doit mener ces enquêtes de façon expéditive à cause des incidences monétaires y rattachées.

Le droit d'appel n'existe que si la municipalité a pris lesdites dispositions sur recommandations de la Commission de police du Québec. 4.4.3 L'échelle indicative de salaires serait remplacée par une autre formule qui donnerait au directeur d'un service de police un salaire égal à 150% du salarié le mieux rémunéré. L'écart entre chaque cadre intermédiaire ne serait pas supérieur à 10%. Les avantages sociaux du directeur et des autres non salariés au sens du Code du travail sont ceux prévus par la convention collective. 4.4.4 Les rentes viagères des veuves et enfants n'ayant pas atteint la majorité pourraient atteindre 70% du salaire du policier avec 50% pour la veuve et 5% par enfant jusqu'à un maximum de 20%.

De plus, nous introduisons le principe d'indexation pour éviter toute mesure aléatoire et suivre les fluctuations du coût de la vie. 4.5 La Commission de police du Québec, l'Inspectorat et la Direction générale de la Sécurité publique. 4.5.1 La Commission de police du Québec

La Commission de police du Québec se voit confinée à des rôles qui découlent de ses pouvoirs quasi judiciaires. Ainsi, le fonctionnement des conseils régionaux de discipline et les pré-enquêtes relèveraient d'un commissaire qui pourrait administrer un bureau régional et être assisté, dépendant des demandes, d'enquêtes et de conseillers.

Les pré-enquêtes s'effectueraient après les vérifications des enquêteurs et se tiendraient à huis clos. A cette phase, la commission pourrait décider de poursuivre au niveau de l'enquête proprement dite.

Les conseils régionaux de discipline vont permettre d'épurer bon nombre de cas qui ne nécessitent pas l'intervention de la Commission de police du Québec.

Le rôle de conseiller les municipalités et les services de police se traduit par un service d'aviseurs techniques et évite que l'on ait recours aux firmes privées de consultants.

Dans son rôle d'enquête, la Commission de police du Québec pourra dorénavant imposer des pénalités et même passer des ordonnances.

Un palier d'appel serait toujours possible auprès de la Cour provinciale. 4.5.2 Inspectorat

L'Inspectorat se rapporterait à l'Assemblée nationale et dans son rôle de contrôle soumettrait la Sûreté du Québec et tous les services de police municipaux à une inspection annuelle. En plus de soumettre les rapports de vérification aux autorités compétentes, l'Inspectorat examinerait les performances des services gouvernementaux de sécurité et d'enquête et évaluerait de façon constante le niveau de services rendus par les organisations policières à l'aide d'indicateurs. 4.5.3 Direction générale de la Sécurité publique

La Direction générale de la Sécurité publique continuerait d'exercer un rôle de développement et de coordination en matière de formation, de police scientifique, de la recherche et d'autres attributions reliées au support opérationnel des services de police.

De plus, des centres régionaux tactiques opérationnels axeraient les initiatives de la Direction générale de la Sécurité publique sur des opérations de collaboration, des programmes inter-services dont l'analyse opérationnelle de la criminalité et la prévention du crime. 4.5.4 Notre association présente cette répartition tripartite comme un palliatif et serait disposée à présenter des recommandations supplémentaires si tel était le souhait du gouvernement. 4.6 Egalité de statut. 4.6.1 La Gendarmerie royale du Canada.

Dorénavant, les membres de la Gendarmerie royale du Canada pourraient être soumis, suite à des plaintes, aux enquêtes de la Commission de police du Québec. 4.6.2 La Sûreté du Québec et les policiers municipaux

Les directeurs des services de police municipaux bénéficient à maints endroits dans nos propositions des mêmes privilèges et droits que ceux du directeur général de la Sûreté du Québec.

Pour l'Association des chefs de police et de pompiers du Québec

Marcellin Cyr, Président

ANNEXE B

Mémoire à la commission parlementaire sur la Justice

concernant le projet de loi no 48

par le Syndicat professionnel des chefs de police

et pompiers et officiers supérieurs de la protection publique (S.P.C.O.S.)

Québec, le 3 août 1979.

INTRODUCTION Statut et rôle du Syndicat (S.P.C.O.S.)

Au nom de tous les membres du Syndicat Professionnel des Chefs de Police et Pompiers et Officiers Supérieurs de la Protection Publique (S.P.C.O.S.), nous désirons vous soumettre respectueusement le présent mémoire.

Ce document de travail est le fruit d'une réflexion et d'une prise de conscience collective de nos membres au cours des dernières années.

Depuis la constitution de notre Syndicat, dûment incorporé en vertu de la Loi des Syndicats Professionnels (S.R.Q. 1964, chap. 146), le 30 juin 1972, nous n'avons cessé de nous préoccuper de la promotion et de la défense des intérêts socio-économiques de nos membres. Nous avons agi régulièrement comme leur représentant auprès des employeurs publics. Nous nous sommes faits leur porte-parole auprès des organismes publics et para-publics, et particulièrement auprès des corporations municipales régies par la Loi des Cités et Villes.

Nous avons tenté de promouvoir parmi nos membres des relations professionnelles harmonieuses, en les incitant à la collaboration sur les plans local, régional et provincial. Développer l'efficacité du travail policier en faisant appel aux méthodes nouvelles de prévention et de répression du crime, ce fut un de nos principaux objectifs. Nous avons exhorté nos membres à se perfectionner en suivant des cours dans les CEGEP et institutions d'enseignement, en encourageant leurs effectifs policiers à le faire, tout en assistant à des congrès ou colloques.

Notre Syndicat a encouragé les membres à collaborer quotidiennement dans l'uniformisation des méthodes de travail. "Tous unis dans la lutte contre le crime et la prévention des incendies", telle fut notre devise. La société québécoise n'en exige pas moins de nous. L'opinion publique ne tolère plus l'incompétence, la médiocrité et l'inconscience dans le domaine policier. L'appui de la presse et de l'opinion publique au magnifique travail de la C.E.C.O. ne laissent plus de doute sur cette volonté populaire.

L'information de nos membres en particulier et du public en général nous a semblé également un devoir de première importance. Depuis environ cinq (5) ans, nous avons mis sur pied une revue trimestrielle destinée à l'information de nos membres et de leurs employeurs.

Dans le présent mémoire, nous traiterons des deux thèmes suivants, à savoir:

I.- La situation actuelle. Nous aborderons alors la question de l'intégration et de la dépolitisation des corps de police municipaux. Nous traiterons également du rôle et des pouvoirs de la Commission de Police du Québec.

II.- L'avenir. Dans un second temps, nous traiterons de l'avenir de la protection publique au Québec, plus particulièrement en nous attardant aux réformes proposées par le projet de loi no 48. Cette deuxième partie soulignera d'une part les aspects positifs du projet de loi no 48 et d'autre part les aspects négatifs ou ses déficiences.

— I —

La situation actuelle A.- L'intégration et la dépolitisation des corps de police municipaux

II y a présentement au Québec environ deux cent dix (210) corps de police municipaux, plus la Sûreté du Québec et la Police de la Communauté Urbaine de Montréal. On compte environ neuf mille cinq cents (9500) policiers permanents. La Commission Saulnier recommandait dans son rapport la réduction des corps de police à trente-sept (37) pour l'ensemble de la province. Il peut y avoir en outre quelques centaines de policiers à temps partiel, agissant comme constables spéciaux.

Ces corps de police municipaux souffrent souvent d'un manque d'effectifs compétents. L'ingérance municipale se reflète non seulement au niveau des opérations policières courantes, mais dans la limitation des budgets. Le chef ou directeur de police partage habituellement la direction de son corps de police avec les membres du conseil ou le comité de police, contrairement aux dispositions de l'article 55 de la Loi de Police (S.Q. 1968, chap. 17).

La création de la Commission de Police du Québec n'a pas suffi à dépolitiser ces différents corps policiers. Il nous semble que la politique de régionalisation, annoncée dans le Livre Blanc intitulé "La police et la sécurité des citoyens" serait la plus appropriée pour assurer cette dépolitisation locale, tout en évitant une politisation provinciale. La plupart des associations professionnelles ou syndicales ne désirent pas maintenant la création d'une police d'Etat. Notre Syndicat lui-même verrait d'un mauvais oeil que le Procureur Général du Québec ait une autorité directe sur toutes les forces policières du Québec. Nous ne sommes pas encore prêts pour ce changement.

Néanmoins il nous semble que le gouvernement devrait accroître ses efforts pour accélérer sa politique de régionalisation, en y associant plus étroitement les autorités municipales, locales et régionales.

Plus que jamais le maintien de l'ordre public doit être une priorité de l'Etat. Nul doute que la police en est l'instrument principal. Les autorités supérieures ne devraient rien économiser pour assurer une police de meilleure qualité. Lorsqu'il s'agit de la paix et de l'ordre public, l'Etat ne doit pas reculer devant les sacrifices ou les contraintes financières.

L'expérience québécoise nous prouve que même l'économie peut, à certains moments, être mise en danger suite à un manque d'ordre et de discipline. Souvenons-nous des difficultés majeures éprouvées dans le développement de la Baie James et dans la préparation des Jeux Olympiques. Ces difficultés sont peut-être redevables en partie à une protection publique précaire. Les contrôles étaient définitivement inadéquats.

L'expérience nous a démontré que plus la ville ou la municipalité est petite et sa population restreinte, plus le directeur de police et les membres d'Etat-Major sont asservis par les autorités municipales. Ils sont fréquemment les esclaves des petits politiciens municipaux. Ainsi ils deviennent incapables d'accomplir quotidiennement les tâches que leur impose la loi. Les citoyens en sont malheureusement les victimes.

Pour accélérer l'intégration générale des corps de police municipaux, l'Etat devrait prévoir un régime de subventions spéciales dans un plan quinquennal.

Lors de l'intégration de corps de police municipaux, la Commission de Police devrait être associée étroitement aux autorités municipales et provinciales, afin de protéger les effectifs policiers et particulièrement les membres d'Etat-Major.

Souvent des citoyens honnêtes qui ont investi une partie de leur vie pour la protection de leurs concitoyens, se voient privés de leurs droits par le nouvel employeur. La Commission de Police et l'Institut de Police du Québec devraient inciter tous les effectifs policiers, et spécialement les membres d'Etat-Major, à se recycler au cours des mois qui précèdent ou suivent l'intégration régionale.

Depuis quelques années, et particulièrement au cours des trois (3) dernières années, les conseils de ville et conseils municipaux se font les "fossoyeurs professionnels" de leur propre juridiction en matière policière.

Alors que le législateur québécois avait accordé aux villes et collectivités locales le pouvoir d'assurer la protection territoriale en leur octroyant le droit de constituer des corps de police, plusieurs d'entre elles ont décidé de ne plus exercer ce pouvoir. L'un des rôles d'une collectivité n'est-il pas d'assurer l'ordre, la paix et la sécurité à tous ses membres?

Au fait, les villes et corporations municipales ont été conçues comme de petits Etats aptes à assumer dans une certaine mesure leur propre protection. Le mécanisme des pouvoirs délégués leur permettait de s'auto-gérer et dans une certaine mesure de s'auto-financer.

En vertu de la Loi des Cités et Villes, avant l'adoption de la Loi de Police, les municipalités urbaines pouvaient par règlement constituer un corps de police pour assurer la protection des biens et des personnes dans le territoire. Il s'agissait d'un pouvoir discrétionnaire.

Avec l'adoption de la Loi de Police, sanctionnée le 21 juin 1968 (L.Q. 1968, chap. 17), toute municipalité de cité ou de ville est tenue d'établir par règlement et de maintenir un corps de police. C'est un pouvoir impératif. Seul le lieutenant-gouverneur en conseil peut dispenser une municipalité urbaine, pour une période déterminée, de se conformer à cette obligation. Encore faut-il que le lieutenant-gouverneur en conseil soit d'avis que la population de la municipalité ou d'autres circonstances, puissent le justifier.

Effectivement au 31 décembre 1978, la Commission de Police du Québec constatait que vingt-cinq (25) cités ou villes n'avaient pas établi un service de police et n'avaient pas réclamé ni obtenu l'exemption administrative prévue à l'article 52 de la Loi de Police (Rapport annuel de la Commission de Police, 1978, p. 28).

D'autres municipalités ont obtenu l'exemption après avoir défié et/ou violé la loi pendant plusieurs années. Souvent on forçait l'exemption gouvernementale par la technique du "fait accompli". Après avoir coupé le budget de la protection publique, on réduisait considérablement les effectifs policiers et puis on consultait la population par voie référendaire ou électorale. Le lieutenant-gouverneur en conseil ne pouvait faire autrement que d'acquiescer, sinon il aurait passé pour un trouble-fête.

Certaines municipalités urbaines ou semi-urbaines ont fait appel aux pouvoirs d'exemption du gouvernement. Ainsi quatorze (14) d'entre elles sont exemptées de maintenir un corps de police. Elles peuvent faire appel à la Sûreté du Québec.

Pour être juste et équitable, il faut souligner que certaines corporations municipales ont le statut de cité ou de ville, sans vraiment le mériter. A titre d'exemples, nous n'avons qu'à citer les collectivités suivantes: — Saguenay — 45 habitants — Ile Cadieux — 75 habitants — Lac St-Joseph — 76 habitants — Mont Gabriel — 25 habitants — Lac Sergent — 102 habitants — Pohénégamook — 184 habitants — Pointe du Moulin — 184 habitants — Lac Delage — 194 habitants — Fossambault sur le Lac — 304 habitants

II s'agit prioritairement d'endroits de villégiature. On comprend facilement que ces municipalités réclament la dispense de maintenir un corps de police en tout temps au cours de l'année. On peut même comprendre qu'elles fassent parfois défaut de demander cette dispense. C'est une distraction assez compréhensible, surtout que leurs conseillers municipaux sont vraiment à temps partiel...

Par contre, on comprend beaucoup moins d'autres municipalités qui ont une population importante et qui demandent cette dispense telles: —Val Bélair avec 10,716 habitants —Lachenaie avec 7,118 habitants —Ste-Anne-des-Monts, St-Luc et Ste-Agathe-des-Monts avec des populations respectives d'environ 6,000 habitants.

Il y a certaines municipalités urbaines telles que Beaupré, St-Raymond de Portneuf, St-Nicolas, Trois-Pistoles, St-Pamphile, Val-Bélair, Danville, Farnham et autres collectivités semblables qui devraient maintenir un corps de police, sans faire appel au service de la Sûreté du Québec.

Nous expliquons mal que l'ensemble des citoyens du Québec soient tenus de payer la protection municipale par le biais des taxes provinciales, en obligeant la Sûreté du Québec à dispenser certains services de protection publique locale. Pourtant dans les cités et villes normales, on y respecte l'obligation légale de maintenir une force constabulaire. Ce sont leurs citoyens qui paient eux-mêmes la protection publique par leurs taxes municipales.

Y aurait-il deux poids et deux mesures entre les vraies villes et les villes bidons? Pourtant ces villes que l'on pourrait qualifier de villes caricaturales ont obtenu un statut urbain en vue de récolter des subventions gouvernementales au cours des années 50, 60 et 70. Une fois qu'a déferlé la vague des subventions pour cités et villes, on ne veut plus assumer les obligations légales du statut.

On préfère agir dans l'illégalité, voire même utiliser tous les prétextes pour priver les citoyens de la protection publique requise par la loi.

Le principal de ces faux-fuyants est bien sûr la réduction des dépenses publiques. Il faut voir comment certaines municipalités administrent leurs budgets municipaux pour s'en convaincre. Les loisirs, les congrès et frais de représentation, les travaux de voirie, les immobilisations inutiles, tout passe avant la protection du territoire. On préfère demander les services de la Sûreté du Québec qui ne coûtent rien directement aux contribuables municipaux. Quant aux contribuables québécois, spécialement ceux résidant dans les vraies villes — non les villes à statut urbain caricatural — ils doivent assumer directement par le biais de leurs taxes municipales la protection de leur propre territoire. En outre, ils doivent supporter indirectement la protection du territoire des cités et villes qui font appel au service de la Sûreté du Québec.

Ils supportent donc financièrement à la fois leur sûreté municipale et la Sûreté du Québec qui agit fréquemment dans un cadre municipal.

Y aurait-il deux poids et deux mesures selon que les contribuables habitent des villes responsables ou des villes négligentes? Cette équité par la voie fiscale a été maintes fois dénoncée par les gouvernements québécois successifs en ce qui concerne l'entretien de la Sûreté sans la participation du gouvernement fédéral. Les huit (8) provinces canadiennes moins populeuses se servent des taxes des deux provinces les plus populeuses pour faire supporter leur protection publique interne, par le biais de la gendarmerie du Canada.

Cette iniquité canadienne, il ne faudrait surtout pas la perpétuer au niveau interne entre villes et municipalités. Pourtant le projet de loi 48, nous le verrons plus tard, apporte peu de changement à ce sujet. C'est presque la continuité dans l'immobilité.

Quoi qu'il en soit, nous croyons qu'il est plus que temps que l'Etat du Québec manifeste ses intentions de faire respecter la loi. Il est toujours surprenant de constater que des autorités publiques, démocratiquement élues, ne respectent pas la loi.

A ce sujet, nous nous souvenons du cas particulier d'une ville située à moins de quarante (40) milles de Québec, qui a décidé d'abolir son corps de police en congédiant son chef ainsi que tous les policiers. Après appel devant la Commission de Police, évocation en Cour supérieure et jugement de la Cour d'Appel, les tribunaux décidaient d'enjoindre cette ville de respecter les obligations légales prévues dans la Loi de Police. A la même époque, le gouvernement du Québec annonçait que cette ville recevrait une subvention d'environ $350 000.00 pour améliorer le poste de la Sûreté du Québec qui est dans les limites de cette municipalité qui agissait pourtant en marge de la loi. Nous nous sommes posés de sérieuses questions... C'était l'affaire de St-Raymond de Portneuf.

Quand on n'est pas en mesure d'administrer ou de gérer dans la légalité, il vaut mieux renoncer à ses pouvoirs et se départir de sa juridiction. C'est pourquoi nous prétendions au départ que les conseils de cité et de ville se font progressivement les fossoyeurs professionnels de leur propre juridiction en matière de protection publique. Un jour, l'Etat décidera de reprendre en main les pouvoirs qu'il leur a délégués sans succès.

Ce n'est pas tout de faire des congrès annuels pour clamer contre les autorités gouvernementales québécoises. Ces collectivités locales ou régionales qui participent à des congrès de maires ou d'édiles municipaux seraient beaucoup mieux de commencer à exercer leur propre juridiction avant de demander de l'accroître.

Quant aux budgets qu'elles administrent, dès janvier 1980 elles pourront récupérer une partie du champ fiscal scolaire abandonné.

Nous sommes d'opinion que ce sera la dernière chance offerte aux municipalités, si elles veulent conserver intacte leur juridiction. Ce sursis permettra aux autorités provinciales de vérifier si les autorités municipales sont encore de bonne foi...

Des villes comme St-Luc, St-Raymond de Portneuf, Château-Richer, Beaupré, Trois-Pistoles, Bécancour, St-Pascal, Malartic, Ste-Anne-des-Monts, Val-Bélair, Ste-Agathe-des-Monts, Lachenaie et autres ne méritent plus le statut urbain, car elles n'en assument plus les obligations légales. Le gouvernement devrait en tenir compte dans ses velléités de subventions.

Advenant le silence ou l'inertie des villes et cités dans le domaine policier, nous croyons que la porte demeure grande ouverte à la récupération par le Québec des pouvoirs municipaux délégués. Le secteur scolaire fut un secteur témoin...

Depuis bientôt cinq (5) ans, le gouvernement du Québec marque le pas en ce qui concerne l'intégration générale des forces policières et la création d'une gendarmerie du Québec. Rien dans le projet de loi 48 nous permet de croire que le rapport Saulnier n'a pas pris le chemin des oubliettes. Quelques "ré-formettes" sans importance. Comme nous le disions plus haut, c'est l'inertie dans la continuité en cette matière. Ce statu quo politique dans le domaine de la protection publique ne peut qu'ajouter à l'ambiguïté qui subsiste au sein des collectivités locales, spécialement en ce qui concerne la protection policière.

Quand donc se prendront les vraies décisions?

B.- La Commission de Police du Québec

Constituée par la législature provinciale, plus particulièrement par le chapitre 17 des lois de 1968, la Commission de Police est un organisme administratif et quasi judiciaire. La loi constituante fut sanctionnée et entra en vigueur le 21 juin 1968. De fait, la C.P.Q. commença ses activités dès le 1er août suivant.

Depuis lors, elle exerce principalement un rôle d'enquête, de normalisation et de surveillance à l'égard des divers corps de police municipaux du Québec. Depuis onze (11) ans, la C.P.Q. évolue dans un cadre juridictionnel passablement restreint.

Officiellement chargée de favoriser la prévention du crime et l'efficacité des services de police du Québec, la C.P.Q. a peu ou pas les moyens de le faire concrètement. Les beaux objectifs prévus aux articles 16 et 17 de la loi actuelle semblent se réaliser avec lenteur et hésitation. Pour ce qui est du pouvoir d'enquête octroyé à l'article 19 de la loi, il s'avère fréquemment une soupape utile aux citoyens pour se défouler contre la police. Sans blâmer directement la C.P.Q., le Syndicat tient à faire remarquer que les enquêtes publiques sur un corps de police municipal ou l'un de ses membres, sont malheureusement trop souvent la tribune dont profitent certains individus pour porter des accusations mal fondées. Par le fait même de la publicisation, elles prennent un relief qu'elles n'auraient pas autrement. D'ailleurs l'Association des Chefs de Police et Pompiers de la Province de Québec partage également notre opinion.

Le Syndicat ne s'objecte d'aucune manière à la tenue d'enquête sur les corps de police municipaux et sur la conduite de leurs membres. Bien au contraire, il estime que de telles enquêtes sont nécessaires et importantes dans l'intérêt des collectivités locales et du public en général. Cependant les Chefs de Police et Officiers Supérieurs de la Protection Publique croient qu'ils ont droit, comme tout autre citoyen, au respect de leur responsabilité et de leur réputation. Les enquêtes de la C.P.Q. sont en général l'objet d'une publicité considérable qui donne une dimension très importante à des accusations ou à des témoignages préjudiciables à leur réputation.

Le Syndicat déplore que les rapports de la C.P.Q., après enquêtes publiques, demeurent trop souvent lettres mortes, sans aucune diffusion par le bureau du Procureur Général. Pourtant on y rejette souvent des accusations et on y corrige des faits faussement allégués. Malheureusement il est trop tard et le dommage demeure irréparable. Avant même le rapport ou la décision, les citoyens croient leur opinion bien fondée.

Il serait important que le législateur reconnaisse aux directeurs de police et membres d'Etat-Major le droit comme tout autre individu de conserver intacte leur réputation. Il est dans l'intérêt même de la collectivité et pour l'efficacité de l'exercice de leurs fonctions, de continuer de jouir de la confiance de leur milieu de travail et de leur milieu social.

Comme nous le verrons dans la seconde partie de ce mémoire, le législateur semble avoir tenu compte de certaines suggestions concernant l'exercice du pouvoir d'enquête de la C.P.Q. dans le but de préserver la réputation et la crédibilité des directeurs de police, tout en assurant au public le droit à l'information.

A plusieurs reprises, nous avions signalé que lors d'une réforme de la Loi de Police il serait utile de prévoir la possibilité d'enquête à huis clos, que ce soit sur l'administration des corps de police ou la conduite de ses membres. Suite à ces enquêtes à huis clos, la C.P.Q. pourrait recommander au Procureur Général des poursuites contre l'un ou l'autre des membres d'un corps de police, y compris le directeur. A ce moment-là, les policiers seraient mis sur un pied d'égalité avec toutes les autres classes sociales, y compris les juges, les médecins, les avocats, les notaires, les ingénieurs, les comptables agréés ou autres hommes de métier.

En 1972, les pouvoirs de la C.P.Q. ont été modifiés et accrus de façon à lui confier des pouvoirs d'enquêtes sur le crime organisé. Les expériences menées par la C.E.C.O. semblent favoriser le dépistage du crime. Nous sommes d'opinion que le travail d'investigation de la C.E.C.O. a facilité le travail de nos membres dans le dépistage et la prévention du crime organisé.

Outre son pouvoir d'enquête sur l'administration et la conduite des policiers, la C.P.Q. peut également siéger en appel de toute destitution, suspension ou réduction de traitement d'un directeur ou chef de police.

A ce sujet, la Loi de Police nous semble incomplète et confuse. La Commission de Police s'est vu confier un double rôle, à savoir celui d'enquêteur avec pouvoirs administratifs et celui de tribunal ou organisme quasi judiciaire avec pouvoirs judiciaires. Dans son rôle de commission d'enquête, la C.P.Q. rend des ordonnances accompagnées de voeux et de recommandations. Ses pouvoirs non exécutoires sont de la même nature que ceux de l'ombudsman. Aucune sanction n'est possible. Seules l'opinion publique et la bonne volonté des autorités policières et municipales seront en mesure de bonifier ce travail d'investigation et de contrôle.

Dans son rôle de tribunal quasi-judiciaire, la C.P.Q. peut contrôler et reviser les décisions d'un conseil municipal, destituant ou réduisant le traitement d'un directeur de police ou d'un membre non syndi-cable (un cadre) d'un corps de police. Ses décisions sont exécutoires et finales. Elles lient les parties dont les autorités municipales elles-mêmes.

Dans divers articles de notre revue, nous avions prétendu que la loi était confuse parce que le législateur y avait mal disséqué le partage de ce double pouvoir de la C.P.Q. La Commission peut être appelée à reviser ses propres décisions en appel. D'une décision administrative, elle peut passer à une décision quasi-judiciaire.

Quelles sont les normes de preuve que devraient régir ce double rôle? Personne ne le sait. Certains bancs de la C.P.Q. prétendent ne pas être liés par la Loi sur la preuve du Canada, d'autres croient le contraire. Pourtant l'article 2 de la Loi (Les Statuts du Canada, 1979, chap. E-10) stipule que:

"Elle s'applique à toutes les procédures criminelles et à toutes les procédures civiles, ainsi qu'à toutes les matières de la compétence du gouvernement du Canada."

Il est toujours difficile pour les avocats et procureurs d'évoluer devant la C.P.Q., même si l'article 22 de la Loi prévoit qu'une personne a droit de se faire assister d'un avocat. On ne sait jamais quelle règle de procédure peut être retenue par l'un ou l'autre des bancs de la Commission.

Malgré qu'on insiste fréquemment sur la règle de la meilleure preuve, il arrive que la Commission tolère des preuves secondaires et des preuves d'ouï-dire. Par ailleurs, la C.P.Q. n'a jamais établi de règle de procédure et de pratique à la fois pour les enquêtes publiques et pour les appels logés en vertu de l'article 63 de la Loi. Pourtant le législateur a prévu à l'article 17, par. G), qu'elle peut établir par règlement des règles de procédure et de pratique pour la conduite des affaires qui sont de sa compétence et pour sa régie interne.

Le Syndicat a maintes fois déploré la déficience du texte de l'article 63 de la Loi qui nous apparaît ambigu et illogique.

Pendant la durée de l'appel d'un directeur, une personne qui se prévaut du droit qui lui est attribué par l'article 63 à l'encontre d'une destitution ou d'une réduction de traitement, est dans une position extrêmement difficile. Etant un simple salarié, le directeur ou membre d'Etat-Major doit faire face à une Ville-Employeur qui a une capacité financière souvent considérable.

L'appelant doit supporter les frais d'un appel, alors qu'il est même privé de toute rémunération depuis une certaine période de temps. Depuis longtemps, notre Syndicat croit que l'article 63 devrait être amendé d'une manière claire, de façon à indiquer que pendant la durée de l'appel, l'appelant a droit à son plein traitement. Cette position est logique puisque la résolution qui impose la destitution ou la réduction de traitement, ne devrait entrer en vigueur que sur l'approbation de la C.P.Q.

Une fois que la résolution du conseil de ville est approuvée, la récupération de l'appelant des montants qui lui ont été versés durant cette période nous apparaît un problème très simple. D'une part, le directeur a un fonds de pension et divers bénéfices marginaux d'accumulés dont des vacances. Lorsque la résolution est acceptée par la Commission, l'Employeur pourrait se rembourser à même les fonds qu'il administre pour le compte de ses employés.

Une telle modification à l'article 63 nous paraît s'imposer depuis longtemps et nous avons constaté avec plaisir que des amendements ont été apportés dans un but de clarification, d'équité et de justice.

Par ailleurs, la majorité des problèmes auxquels ont à faire face les directeurs de police et les membres d'Etat-Major, sont l'ingérance politique dans l'administration policière, l'imprécision de leurs conditions de travail, les limitations du salaire ou du traitement et la surcharge de travail. Certains chefs de police sont tenus d'avoir deux ou trois appareils téléphoniques à leur maison privée pour les fins policières. Ils sont en devoir vingt-quatre (24) heures par jour et souvent ils doivent y associer leur épouse et les membres de leur famille à titre gratuit.

Plus les corps de police sont petits, plus les chefs doivent faire face à toute sorte de manoeuvres de la part des conseils municipaux pour obtenir une amélioration de leur traitement.

Il serait urgent que le législateur accorde à la Commission de Police du Québec un pouvoir de conciliation et d'arbitrage. Ce pouvoir pourrait être exercé conformément aux articles 62 à 81 du Code du Travail.

On nous a déjà rétorqué que l'Etat ne veut pas s'immiscer dans l'administration des collectivités locales étant donné qu'il s'agit de pouvoirs délégués. A cela nous répondons qu'il le fait déjà depuis plus de vingt-cinq (25) ans en permettant à des conseils d'arbitrage, en vertu du Code du Travail, de fixer les conditions de travail des policiers syndiqués. Ce qui est bon pour les simples policiers ne devrait pas être si mauvais pour les directeurs et membres d'Etat Major.

Dès qu'un chef de police ou membre d'Etat-Major n'aurait pu s'entendre sur ses conditions de travail et son traitement, il serait loisible à l'une ou l'autre des parties de porter l'affaire devant la C.P.Q. pour qu'elle décide en dernier ressort. Cette solution aurait l'avantage de dépolitiser l'administration policière au niveau des petites villes. Souvent dans ce genre de villes, le constable le mieux payé touche 25% ou 30% de plus de salaire que son chef. Le directeur doit faire du temps supplémentaire non rémunéré, tandis que les constables sont toujours rémunérés, selon les termes mêmes de leur convention de travail.

Le législateur aurait avantage à compléter la Loi de Police en y insérant un nouveau pouvoir de conciliation et d'arbitrage afin de fixer des conditions de travail raisonnables et équitables, ainsi qu'un traitement suffisant pour permettre aux chefs et membres d'Etat Major de vivre convenablement et honorablement. Nous nous souvenons avec douleur du cas d'un directeur de police dans une localité située à moins de dix-huit (18) milles de la Ville de Québec qui gagnait $145.00 par semaine pour plus de soixante (60) heures de travail. A cela, il fallait associer le travail de sa femme qui devait constamment répondre au téléphone en dehors des heures de travail de son mari.

Dans une poursuite en Cour Provinciale pour obtenir l'application de la réglementation du salaire minimum à ce directeur de police, la Cour Provinciale avait refusé d'accéder à notre demande en soulignant qu'il s'agissait d'un salarié incontrôlable et dont les heures sont invérifiables.

Souvent on nous a signalé qu'il répugnait au législateur québécois de s'immiscer dans la fixation des traitements des officiers municipaux en vertu du principe "No taxation without representation". Comme nous l'avons souligné il y a quelques instants, le législateur l'a déjà fait par le biais du Code du

Travail en obligeant les municipalités à s'en reporter à la décision du conseil d'arbitrage au cas de conflit pour la négociation ou la conclusion d'une convention collective. La décision arbitrale tient alors lieu de convention collective. Cette brèche à l'autonomie des collectivités locales existe depuis bientôt vingt-cinq (25) ans.

Au niveau des recommandations, la Commission de Police devrait avoir le pouvoir de faire rapport à la fois au Procureur Général, au ministre des Affaires municipales et à la Commission municipale de Québec. Lorsqu'une corporation municipale néglige de respecter la Loi de Police et les règlements qui sont adoptés sous son empire, les autorités gouvernementales devraient refuser catégoriquement de lui verser des subventions statutaires ou autres.

Nul n'est censé ignorer la loi, y compris les corporations municipales et les villes. L'étanchéité entre les différents ministères ou commissions gouvernementales est peut-être l'une des principales causes de l'inefficacité administrative à la fois sur les plans provincial et municipal.

Dans une révision de la Loi de Police, le législateur aurait dû penser à faire indemniser les directeurs et chefs de police qui se voient aux prises avec une enquête publique ou un appel logé devant la C.P.Q. Que l'enquête soit déclarée frivole ou non, chaque fois que les autorités municipales sont en défaut, la C.P.Q. devrait avoir le pouvoir de décréter que les dépenses, frais et honoraires encourus par le chef ou le directeur de police ainsi que les autres membres d'Etat-Major, soient remboursés intégralement par la corporation municipale. Ce genre de protection existe pour les salariés au sens du Code du Travail. Les conventions collectives le prévoient, spécialement pour la responsabilité professionnelle.

Nous disions que la loi est inefficace et incomplète parce qu'elle ne protège ni le public, ni les effectifs des corps policiers, ni les autorités municipales qui auraient besoin d'obtenir des décisions exécutoires et non des ordonnances accompagnées de voeux pieux.

L'inégalité des forces en présence, soit d'une part les conseils municipaux et d'autre part les directeurs de police et membres d'Etat-Major, fait qu'il est difficile d'obtenir justice. Les pouvoirs économiques d'une corporation municipale sont hors de proportion avec ceux d'un directeur de police ou d'un membre d'Etat-Major. Lorsque l'un poursuit l'autre, les moyens financiers ne sont pas proportionnels.

A l'instar de toutes les conventions collectives qui assurent une protection aux policiers qui sont poursuivis devant les tribunaux, les chefs de police devraient pouvoir se procurer les services légaux nécessaires en s'assurant que le paiement en sera effectué par l'employeur lui-même. Il n'est pas normal que dans l'exercice de leurs fonctions, les chefs de police ne puissent pas être défendus aux frais de l'employeur. La majorité des policiers, salariés au sens du Code du Travail, ont cette protection dans la province de Québec. Pourtant les directeurs de police, les chefs pompiers et les membres d'Etat-Major n'ont pas encore cette protection, spécialement lorsqu'ils ne sont pas régis par un contrat de travail individuel.

En vertu de l'article 17, par. i), la C.P.Q. peut par règlement étabir une échelle indicative de traitement susceptible d'être versée au directeur ou au chef d'un corps de police municipal ainsi qu'aux membres d'un tel corps qui ne sont pas des salariés au sens du Code du Travail. Dans l'exercice de ce pouvoir que lui a confié le législateur, la C.P.Q. devrait reviser et adapter plus régulièrement l'échelle indicative de traitement, en tenant compte de l'augmentation du coût de la vie, du salaire payé dans les autres provinces aux directeurs et membres d'Etat-Major exerçant des fonctions similaires.

Nous déplorons avec véhémence le fait que le règlement no 11, et particulièrement l'échelle indicative, n'a pas été amendé depuis plus de cinq (5) ans. Pourtant les législateurs le font pour leur propre traitement en s'adoptant une loi spéciale à tous les deux (2) ou trois (3) ans. Les juges sollicitent ce genre d'amendement auprès du législateur.

Quant aux directeurs de police, ils étaient laissés à leur propre moyen face à des conseils municipaux souvent récalcitrants.

Il faut dire que le règlement no 11 concernant l'établissement d'une échelle indicative de traitement, a été d'une certaine utilité bien qu'on ait omis de la reviser régulièrement. Il serait indispensable que le lieutenant-gouverneur en conseil se décide d'approuver annuellement les modifications à ce règlement, spécialement lorsque la Commission de Police le lui demande.

Au cours des dernières années, plusieurs projets d'amendement sont demeurés sans suite sur le bureau des fonctionnaires ou des membres du Cabinet au ministère de la Justice.

— Il — L'avenir

Notre Syndicat envisage l'avenir dans les perspectives qu'on nous propose par le projet de loi no 48. Il était urgent que l'Etat procède à une réforme ou à des amendements majeurs de la Loi de Police du Québec. Après onze (11) ans d'usure, cette loi a fait ses preuves, mais elle avait besoin d'un rajeunissement.

Une étude rapide du projet de loi 48 nous révèle l'intention du législateur d'apporter des correctifs aux divers problèmes soulevés plus haut. Cependant nous notons, outre plusieurs aspects positifs, certains aspects négatifs ou quelques carences.

Dès à présent, nous aimerions souligner que les articles 2, 25 et 30 semblent apporter des modifications majeures.

A.- Les aspects positifs

C'est avec satisfaction que notre Syndicat constate que le législateur a voulu clarifier le statut du policier municipal qui agit en qualité d'agent de la paix dans un territoire autre que celui de la municipalité qui l'emploie.

Effectivement le Procureur Général sera réputé être l'Employeur du policier municipal lorsqu'il sort des limites de la municipalité ou lorsqu'il applique les lois provinciales dans les limites territoriales de la municipalité.

Souvent certains chefs de police avaient fait l'objet de poursuite à l'occasion de l'exercice de leurs fonctions. On les avait recherchés en dommage et intérêts parce qu'ils avaient pourchassé des prévenus hors les limites du territoire. Les corporations municipales refusaient de défendre leurs propres policiers en prétextant qu'ils cessaient d'être des sergents de ville pour devenir des agents de la paix. N'appliquant plus les règlements municipaux, mais bien le code de la route ou le code municipal, le conseil municipal se refusait de prendre fait et cause pour le policier poursuivi.

Une jurisprudence constante des tribunaux laissait croire que ce policier municipal était sans employeur responsable.

Ainsi à l'article 143 du Code municipal, le législateur n'apportait pas de remède aux directeurs et officiers de police poursuivis en responsabilité pour des actes faits dans l'exécution de leurs fonctions. La jurisprudence avait décidé que comme gardien de la paix et du bon ordre, lorsqu'un policier fait une arrestation en vertu du Code criminel, il devient le préposé de l'Etat et la corporation qui l'a nommé n'en est pas responsable. Ce n'est que si la corporation avait autorisé, approuvé ou adopté l'acte de son constable ou si elle tentait de le justifier qu'elle pouvait en être tenue responsable d'une certaine façon.

Cette interprétation jurisprudentielle a donné prise à de nombreuses injustices envers la force constabulaire, et particulièrement pour les directeurs et officiers qui ne sont pas des salariés au sens du Code du Travail.

Pour des derniers, il était impossible de négocier une clause particulière par laquelle leur employeur se serait engagé à les défendre ou à prendre fait et cause dans une poursuite en dommages et intérêts.

La dernière décision malheureuse que nous avons vécue fut celle dans l'affaire de Hinse et Houde vs Jean-Jacques Martin. Il s'agit d'une décision rendue par M. le Juge Michel Dumaine de la Cour Provinciale, le 29 mars 1978.

Malgré une tentative des procureurs du défendeur de l'exempter du paiement d'honoraires professionnels pour avoir assumé sa défense comme directeur de police, la Cour a décidé d'accueillir l'action et de condamner ce directeur à payer lui-même les frais et honoraires encourus pour assumer sa propre défense.

Soulignons que ce directeur avait par surcroît été exonéré de tout blâme à la fois en Cour Supérieure par le Juge Guy Lebrun et en Cour des Sessions de la Paix.

L'article 29 du projet vient compléter cette clarification en prévoyant que le Procureur Général est réputé l'Employeur du policier municipal pour les fins de la Loi des Accidents du Travail, spécialement lorsque le policier subit un accident de travail dans un territoire qui n'est pas soumis à la juridiction du corps de police de la municipalité qui l'emploie.

Bien plus, le législateur vient préciser qu'au cas de difficulté résultant de l'application de cette disposition, la Commission de Police sera appelée à décider exclusivement en dernier ressort après enquête. Voilà un remède appréciable qui était ardemment souhaité depuis de nombreuses années.

Bien sûr que le revers de la médaille de cet article 2a) se retrouve à l'article 2c) lorsque le Législateur prévoit que le Procureur Général peut demander au directeur d'un corps de police municipal de produire des rapports circonstanciés sur les situations pertubatrices de l'ordre, de la paix et de la sécurité publique qui surviennent dans le territoire soumis à sa juridiction ou relativement à la situation du crime dans ce territoire.

Notre Syndicat trouve cette disposition tout à fait logique et raisonnable. Le Procureur Général étant le maître ou commettant des agents de la paix lorsqu'ils appliquent les lois provinciales, il était normal que ceux-ci aient à faire rapport.

Avant de passer aux article 25 et 30 du projet, nous tenons à signaler que lors d'un amendement mineur apparaissant à l'article 6, particulièrement pour l'article 16b) de la Loi de Police, on semble avoir omis une partie du texte original. Ainsi la Commission devait agir comme conseiller de la Sûreté, des corps de police municipaux et des municipalités en matière policière. Dans le nouveau texte, le législateur laisse croire que la Commission doit établir un service général d'inspection chargée de conseiller en matière policière la Sûreté et les corps policiers municipaux et d'en faire l'inspection. On omet le pouvoir consultatif de la C.P.Q. pour les conseils municipaux comme cela existait par le passé. Encore faudrait-il que ces corporations municipales suivent les conseils qu'on veut bien leur prodiguer...

Mais les principaux amendements semblent être ceux apparaissant aux articles 25 et 30 du projet.

Dans un premier temps, le législateur vient redéfinir l'obligation mise à charge des cités et villes de maintenir un corps de police dans toute municipalité comptant cinq mille (5,000) habitants ou plus. Cette obligation ne peut être esquivée ou évitée.

Seul le lieutenant-gouverneur en conseil peut dispenser une municipalité de 5,000 habitants ou plus de maintenir un corps de police et même peut l'autoriser à réduire les effectifs de son corps de police. L'autorisation de réduire les effectifs du corps de police doit s'accompagner de directives quant à la quantité d'effectifs à maintenir.

Souvent les municipaliés faisaient indirectement ce que la loi leur défend de faire directement. Certaines corporations municipales qui avaient des corps de police de cinq (5), dix (10) et même quinze (15) policiers décidaient du jour au lendemain d'abolir ce corps de police de facto tout en le maintenant légalement en existence en retenant les services du seul directeur. Tous les policiers étaient mis à pied ou congédiés.

Les autorités municipales concluaient généralement qu'elles avaient un corps de police puisqu'elles avaient encore un chef. La Commission de Police et même la Cour d'Appel du Québec avaient déjà décidé qu'il suffit d'un seul policier pour qualifier cela de corps de police. Ainsi dans l'affaire de la Ville de St-Luc, la Cour d'Appel a déclaré que l'interprétation de la Loi de Police ne permettait aucunement de conclure qu'un corps de police doit contenir plus d'une personne. La C.P.Q. avait émis la même opinion dans l'affaire de St-Léonard d'Aston quelques années auparavant.

On se référait souvent aux origines du service de protection publique où il était fait mention qu'un seul homme était embauché. Se fondant sur une résolution ou un règlement, la corporation municipale prétendait que le corps de police était légalement constitué, dès qu'il y avait un seul policier.

Cet abus d'interprétation des textes a obligé le législateur à accorder des pouvoirs supplémentaires au lieutenant-gouverneur en conseil pour l'autoriser soit à dispenser une municipalité de se conformer à l'obligation de maintenir un corps de police ou l'autoriser à réduire ses effectifs selon certaines normes. Dans le troisième alinéa de l'article 52 reproduit à l'article 25 du projet, il est prévu que la Commission aura à donner un avis au lieutenant-gouverneur en conseil lorsque viendra le temps d'accorder des dispenses ou des réductions de corps de police. Cet avis pourra être également sollicité de divers organismes municipaux représentatifs et d'associations chargées de défendre les intérêts des policiers.

A l'article 52a) reproduit également à l'article 25 du projet, le législateur prévoit qu'il y aura un comité de reclassement lorsqu'on envisagera de dispenser une municipalité de maintenir un corps de police ou lorsqu'il sera prévu d'en réduire sensiblement les effectifs.

Notre Syndicat trouve qu'il s'agit d'une belle amélioration et surtout d'une protection indispensable.

Toutefois, et nous le soulignerons plus loin, nous avons constaté une carence dans cet amendement. Effectivement les cités et villes qui ont moins de cinq mille (5,000) habitants pourront abolir immédiatement leur corps de police après la sanction du projet de loi et ce comité de reclassement n'aura aucune juridiction sur les effectifs policiers. Le comité de reclassement ne se voit accorder juridiction que pour les cités et villes de cinq mille (5,000) habitants et plus qui obtiennent une dispense. A l'occasion de l'abolition des corps de police dans les cités et villes de moins de cinq mille (5,000) habitants, ce comité de reclassement ne semble pas pouvoir être utilisé selon le libellé même de l'article 52a).

Le législateur devrait prévoir que le comité de reclassement aura cette juridiction à la fois pour les cités et villes de moins de cinq mille (5,000) habitants comme pour celles de cinq mille (5,000) habitants et plus.

A l'article 52b), le législateur prévoit que la Commission de Police du Québec pourra faire enquête afin de vérifier si une corporation municipale maintient réellement les services policiers adéquats, et cela à la demande soit du Procureur Général, soit d'un groupe de citoyens ou d'une association de policiers reconnue. La C.P.Q. pourra alors tenir des audiences publiques et faire rapport au Procureur Général qui pourra alors prendre ses responsabilités conformément à l'article 106 de la Loi de Police.

A ce sujet, nous avons souvent constaté que le Procureur Général qui est chargé de l'application de la Loi de Police, semblait ne pas vouloir s'impliquer dans les décisions municipales. Nous croyons que la situation s'est beaucoup améliorée depuis deux (2) ou trois (3) ans.

Par ailleurs, le législateur a prévu à l'article 52c) une sanction permettant de rendre efficace l'obligation mise à la charge des municipalités de constituer et maintenir en tout temps un corps de police. Ainsi les municipalités récalcitrantes pourront être appelées à payer pour des frais encourus par la Sûreté du Québec pour assurer le maintien de la paix, de l'ordre et de la sécurité publique dans le territoire soumis à la juridiction de la municipalité lorsque cette dernière fait défaut de constituer et maintenir en tout temps son corps de police. C'est la première fois qu'on peut dire véritablement que la Loi de Police a des dents. L'aspect financier pourra peut-être faire réfléchir les cités et villes qui ne veulent pas assumer leurs obligations comme nous le disions plus haut.

Après avoir tenu une enquête, la Commission de Police pourra faire rapport au Procureur Général qui décidera ou non d'assigner la Sûreté du Québec pour assumer les fonctions d'un corps de police municipal. La Sûreté aura alors le pouvoir de faire appliquer les règlements municipaux comme toutes les autres lois nécessaires au maintien de la paix, de l'ordre et de la sécurité.

Dès lors, la municipalité recevra par le biais d'un jugement homologué le compte pour services publics rendus. Voilà un excellent remède aux velléités des édiles municipaux qui veulent économiser en mettant en jeu la paix, l'ordre et la sécurité dans le territoire.

Un dernier amendement majeur que l'on retrouve au projet de loi 48, c'est celui de l'article 30 qui amende l'article 63 de la Loi de Police.

Enfin le législateur sort de l'ambiguïté la Commission qui assumait un double rôle souvent incompatible.

Dans le projet de loi no 41, on avait tenté d'attribuer la juridiction d'appel de la Commission de Police à la Cour Provinciale avec un banc de trois juges.

Dans le présent projet de loi, le législateur semble revenir sur sa décision pour laisser en main tous les pouvoirs à la Commission de Police. Elle agira dorénavant non plus comme un organisme quasi-judiciaire avec pouvoirs curatifs, mais bien comme un organisme-conseil avec pouvoirs préventifs.

Ainsi on restreint le droit d'appel des directeurs et officiers d'Etat-Major en obligeant les municipalités à aller prendre conseil auprès de la Commission avant d'adopter de façon définitive une résolution de congédiement ou de réduction de traitement.

Le droit d'appel devant la C.P.Q. se trouve passablement restreint si les municipalités respectent les paragraphes a), b) et c) de l'article 30.

Dans un premier temps, la municipalité qui a obtenu une recommandation de la Commission et passe à l'action, n'aura pas à faire face à un appel puisque sa décision aura été fondée sur la recommandation de la Commission de Police.

Toutefois si la municipalité outrepasse la recommandation en imposant une sanction plus forte que celle qui est prévue, elle pourra alors être obligée de répondre de sa décision dérogatoire ou excessive.

De plus, le législateur a prévu que lorsqu'il y aura des faits nouveaux qui surviendront entre le moment de la recommandation de la C.P.Q. et la prise de décision de la municipalité, le directeur ou officier d'Etat-Major pourra encore interjeter appel en invoquant ces faits.

Dès lors, la Commission de Police du Québec sera plus intimement associée aux décisions des conseils municipaux. Si ces derniers font défaut de se conformer aux avis préventifs, c'est-à-dire les recommandations, ils auront à en répondre devant la Commission qui agira avec toute l'autorité d'un organisme quasi-judiciaire.

Notre Syndicat croit qu'il s'agit d'amendements clarifiant la situation. Toutefois il y a un danger qui se dessine à l'horizon. Nous croyons que les discussions administrativo-politiques entre la Commission et la municipalité pourront préjudicier les droits des directeurs et officiers d'Etat-Major.

Nos membres s'exposent à ce que leur employeur aille arracher des décisions de la C.P.Q. en ne faisant pas toutes les représentations utiles. On pourra également masquer la vérité. Les recommandations de la Commission de Police auront alors une valeur tout à fait relative.

Nous estimons que nos membres auront alors un droit d'appel en invoquant toujours des faits non portés à la connaissance de la Commission qui a fait une recommandation plus ou moins bien fondée.

Nous craignons également qu'il s'y glisse quelques pressions politiques. Le lobbying des conseils municipaux auprès de la Commission pour arracher une recommandation, pourrait être sûrement très préjudiciable pour la police et même la sécurité du public.

Quoi qu'il en soit, nous croyons en l'intégrité de la Commission pour prévenir de telles tentatives.

L'article 40 du projet de loi prévoit le maintien du statu quo à la fois pour les cités et villes qui ont moins de cinq mille (5,000) habitants et pour celles qui ont plus de cinq mille (5,000) habitants, et qui veulent obtenir une dispense du lieutenant-gouverneur en conseil.

En somme, nous croyons que le législateur a fait un effort louable pour améliorer les conditions de vie et de travail des effectifs policiers, et spécialement des salariés non régis par le Code du Travail.

Sous cet aspect positif des réformes qui y sont apportées, nous tenons à souligner l'article 22b) du projet en ce qui concerne la publicité des enquêtes et le huis clos possible. Le législateur semble avoir compris la situation difficile à laquelle étaient confrontés les directeurs et officiers supérieurs de la protection publique ainsi que tous les membres de la force constabulaire lorsque la Commission décidait de faire enquête.

B.- Les aspects négatifs

Nous nous en voudrions de ne pas signaler les aspects négatifs ou les carences du projet de loi no 48.

Dans une refonte de la Loi de Police, il aurait été souhaitable de penser à un régime de subventions aux corporations municipales qui acceptent de fusionner leurs services de police et pompiers. L'intégration policière régionale aurait pu se faire avec la collaboration étroite à la fois de la Commission de Police et de la Direction générale de la Sécurité publique.

Les aspects administratifs auraient pu être réservés, de préférence, à la Direction générale de la Sécurité publique sous l'autorité du Procureur Général, tandis que le contrôle, la surveillance et l'application auraient été sous la responsabilité de la Commission de Police, le tout avec le Procureur Général comme ministre responsable devant l'Assemblée nationale.

Notre Syndicat croit que le législateur aurait dû s'aventurer de façon plus audacieuse dans la réforme de notre système de protection publique, particulièrement en commençant à mettre en application le rapport du groupe de travail sur l'organisation et les fonctions policières au Québec, à savoir le rapport Saulnier,

Comme nous le disions plus haut, le rapport Saulnier semble être mis en veilleuse. On a suscité beaucoup d'espoir de réforme, et voilà qu'on arrive avec quelques modifications superficielles sans s'attaquer à l'ensemble.

Plusieurs fois notre Syndicat avait soulevé la question du pouvoir d'arbitrage sur les traitements et conditions de travail des chefs et membres d'Etat-Major. Ce pouvoir d'arbitrage aurait pu s'exercer conformément à ceux qu'exercent les arbitres ou les conseils d'arbitrage aux termes du Code du Travail.

Malheureusement l'échelle indicative de traitement, adoptée sous forme de règlement, n'a pas tout le résultat escompté depuis 1974. Bien plus, le lieutenant-gouverneur s'est catégoriquement refusé de reviser cette échelle indicative et de l'amender au gré des demandes des diverses associations représentatives.

Le règlement no 11 sur l'échelle indicative des traitements aurait pu être efficace, si les divers gouvernements avaient consenti à le tenir à jour. Les minima et maxima de l'échelle indicative, approuvés par le lieutenant-gouverneur en conseil, constituaient en quelque sorte une zone discrétionnaire à l'intérieur de laquelle la Commission aurait pu fixer le traitement du directeur ou des membres d'Etat-Major, après enquête et audition des deux parties.

Le législateur aurait donc pu octroyer un pouvoir de conciliation et d'arbitrage à la Commission de Police de façon à lui permettre de jouer le rôle que joue un conseil d'arbitrage en vertu des articles 62 à 81 du Code du Travail. D'ailleurs le législateur avait déjà élaboré sur les conditions de travail des policiers et pompiers aux articles 82 à 87 de ce même code. Ça n'aurait pas été une révolution de palais.

En ce qui concerne le pouvoir d'enquête de la Commission et la discrétion qu'elle a d'ordonner le huis clos, nous aurions préféré qu'au lieu de critères particuliers le législateur prévoit plutôt un accord entre les autorités municipales d'une part et le chef de police ainsi que le Syndicat des Policiers d'autre part. Sur certaines questions précises, les pouvoirs de recommandation de la Commission devraient devenir des pouvoirs exécutoires comme nous l'avons déjà signalé.

Nous croyons que les enquêtes publiques pourront être considérablement allongées lorsque viendra le temps de décider d'une requête pour ordonner le huis clos. Dès lors, les parties devront entreprendre une preuve et soumettre des faits particuliers en vue d'obtenir l'ordonnance de huis clos.

Il aurait été préférable de prévoir que ce huis clos puisse être obtenu sur simple accord des parties intéressées, à savoir les autorités municipales, les autorités policières et au besoin les plaignants.

Comment veut-on qu'un témoin puisse demander le huis clos, en alléguant qu'il sera l'objet de menaces ou de représailles par suite de son témoignage ou que le témoignage qu'il peut rendre sera de nature à compromettre la sécurité d'une autre personne? Pour ce faire, la Commission devra nécessairement entendre une preuve et décider si elle accorde le huis clos pour ces motifs.

Notre Syndicat croit que le législateur dresse un lit qui sera très inconfortable pour la Commission qui aura à décider de ces questions au cours d'enquêtes où le climat est souvent profondément survolté.

Nous tenons à souligner encore une fois que lors de l'abolition des corps de police dans les cités et villes de moins de cinq mille (5,000) habitants, le comité de reclassement de l'article 52a) devrait pouvoir jouer un rôle comme pour les municipalités de cités et de villes qui ont plus de cinq mille (5,000' habitants et qui veulent être dispensées du maintien d'un corps de police.

Comme dernière remarque sur les aspects négatifs ou les carences de ce projet de loi, nous constatons que les peines prévues à l'article 82c) sont nettement insuffisantes pour assurer l'application des articles 2b, 2c, 40 et 72 du projet de loi. Ainsi une municipalité qui déciderait d'abolir son corps de police ou d'en réduire sensiblement les effectifs sans l'autorisation du lieutenant-gouverneur en conseil est passible d'une amende d'au moins $100.00 et d'au plus $1000.00. Cette amende devrait être au moins calculée pour chaque jour de violation de l'article 52. Si une corporation municipale peut épargner des sommes annuelles de $50 000.00 et même $100 000.00, en ne maintenant pas un corps de police, elle sera très intéressée à payer de $100.00 à $1000.00 d'amende.

CONCLUSION

Quoi qu'il en soit, dans une révision de la Loi de Police, le législateur devait accentuer le rôle de la Commission de Police, sans toutefois perdre de vue la Société, l'Etat et la police qui sont trois concepts différents.

Comme le signalait habilement son Honneur le Juge Ludovic Laperrière, lors des journées d'étude tenues les 9 et 10 janvier 1975 à l'Hôtel Reine Elizabeth de Montréal, lorsque ces trois éléments sont confondus, la Société est alors sous la complète dépendance de la police. C'est ce qu'on appelle communément l'Etat-Policier.

Le rôle de la Commission de Police du Québec n'est pas de se substituer à l'Etat et aux collectivités locales, ni d'être au-dessus de l'Etat ou de ces collectivités. La C.P.Q. n'est pas et ne doit pas être opérationnelle. Strictement parlant, elle ne fait pas partie de l'intervention policière.

Jusqu'à date, les principales activités de la Commission de Police du Québec ont été les enquêtes, les appels et l'uniformisation de la réglementation.

Dans l'exercice de son pouvoir d'enquête, la C.P.Q. s'est limitée à de simples recommandations. Il n'y a jamais d'accusé ou de condamné, comme elle s'est plue à le répéter fréquemment. L'exercice de ce pouvoir d'enquête devait être revisé et précisé dans des textes de loi mieux articulés. C'est ce que le législateur a tenté de faire en y amendant l'article 22.

Dans son souci d'intégrité et de justice, le législateur devait préserver la réputation des effectifs policiers lors d'enquêtes publiques, en ordonnant le huis clos comme règle de base. Lors de dérogation

majeure à la discipline ou à l'éthique professionnelle, des chefs de police et officiers supérieurs de la protection publique peuvent être mis en accusation comme tout autre citoyen devant les tribunaux de droit commun.

Le Procureur Général qui reçoit rapport de la Commission de Police qui a fait l'enquête, est toujours libre de porter les accusations qu'il juge utiles compte tenu des recommandations de la Commission.

En ce qui concerne le pouvoir d'appel donné à la Commission, il a été maintenu avec certaines modifications.

Notre Syndicat aurait souhaité que les municipalités soient tenues de payer aux chefs et membres d'Etat-Major la totalité du traitement dont ils sont privés durant la période de destitution ou de suspension, jusqu'à ce qu'une décision finale de la Commission de Police intervienne sur l'appel logé. L'indemnisation des dépenses d'un appelant aurait pu être accordée ou refusée à la discrétion de la Commission, selon les torts ou manquements.

Nous notons que le droit d'appel des policiers non syndiqués est considérablement restreint par les modifications apportées dans le cadre de l'article 30 qui amende l'article 63 de la Loi de Police.

En ce qui concerne le pouvoir d'arbitrage, le législateur a fait défaut de donner suite à un désir depuis longtemps exprimé par notre Syndicat. Ainsi la Commission de Police aurait pu siéger en appel sur des décisions de municipalités gelant le salaire des officiers ou des directeurs, c'est-à-dire les non syndiqués. La sentence de la Commission aurait pu être finale et exécutoire. D'ailleurs elle aurait pu être exécutée sous l'autorité d'un tribunal compétent, sur poursuites intentées par une partie ou sur simples requêtes en homologation.

Dans une révision complète du système d'enquête sur un corps de police et la conduite de ses membres, le législateur aurait pu peut-être s'inspirer du Code des Professions du Québec. Avant d'aboutir à une enquête publique, il aurait été opportun qu'un chef de police ou un membre d'Etat-Major puisse être jugé par un comité de discipline composé de d'autres chefs de police tel que cela existe dans les autres professions libérales au Québec. Ce comité de trois (3) membres présidé par un homme de loi aurait été en mesure de recommander à la Commission de Police du Québec de procéder à une enquête publique.

Ce n'est que suite à cette décision du comité de discipline et de la Commission de Police en dernier ressort que le Procureur Général pourrait, éventuellement, porter des accusations contre un chef, un membre d'Etat-Major ou un simple policier.

Dans une refonte complète de la Loi de Police, le législateur québécois devrait éventuellement se pencher sur tous ces problèmes dans l'intérêt à la fois des chefs des directeurs de police, des membres d'Etat-Major, des effectifs policiers et de la population en général.

Il est urgent que cesse au sein des institutions policières cette remarque que faisait jadis un chef de police et que reproduisait dans son traité l'Honorable Guy Tardif: "Je passe bien plus de temps à me battre avec mon conseil qu'à lutter contre les criminels" (1)

Nous ne pouvons que vous féliciter de l'importance accrue que le législateur apporte, dans les lois, aux matières policières.

Notre Syndicat qui milite depuis bientôt sept (7) ans, n'a pas cessé de faire des recommandations et des suggestions par l'intermédiaire de ses membres et de sa revue.

Nous sommes heureux de constater que les amendements proposés constituent une première étape et nous espérons que le législateur continuera de vouloir amender cette loi et les autres lois, en matière de police, dans un sens favorable à l'intérêt public et à l'intérêt des membres représentés par notre Syndicat.

LE SYNDICAT PROFESSIONNEL DES

CHEFS DE POLICE ET POMPIERS ET

OFFICIERS SUPÉRIEURS DE LA

PROTECTION PUBLIQUE

Par: S/Jules-André Houde Jules-André Houde, président

S/ Yvon Veilleux Yvon Veilleux, sec.-trés.

(1) Guy Tardif, Police et politique au Québec, Edition de l'Aurore, Introduction, page 17.

ANNEXE C

Projet de loi no 48 Loi modifiant la Loi de police

Commentaires de l'Union des municipalités du Québec devant la commission parlementaire de la Justice

Montréal 21.08.79

INTRODUCTION

Le projet de loi no 48, Loi modifiant la Loi de police, nous est apparu à ce point important pour l'administration municipale que nous pouvions difficilement refuser l'invitation à venir le commenter devant cette commission.

L'Union des municipalités du Québec a toute raison de croire que les intentions du législateur qui l'ont motivé à apporter des correctifs à la Loi de police sont excellentes. Cependant, nous croyons qu'il s'agit d'un texte de loi incomplet par rapport à l'envergure du problème de la gestion des corps policiers municipaux. Aussi sommes-nous d'avis que le législateur a choisi une approche ponctuelle, pour ne pas dire timide, à l'égard d'une solution qui doit répondre à un besoin pressant, savoir, l'élaboration d'une véritable politique de la police au Québec.

Au cours des dernières années, il y a eu de nombreuses études et représentations faites au sujet de l'organisation et des fonctions de la police au Québec dont, plus récemment, le rapport Saulnier sur lequel nous disions:

Nous sommes d'opinion que le rapport constitue une approche rationnelle au problème de l'organisation policière en ce sens qu'il cherche à offrir une solution mitoyenne entre le statu quo et la mise sur pied d'une gendarmerie nationale pouvant oeuvrer sur le plan local. Bref, le rapport est fort bien structuré et ses analyses et compilations statistiques sont importantes. Ainsi il offre aux autorités gouvernementales des éléments de solution pour l'élaboration d'une politique de la police au Québec.

Si l'U.M.Q. demeure perplexe devant ce projet de loi, c'est quelle n'y trouve pas suffisamment d'éléments lui permettant de croire que le législateur ait tenu compte de cette étude du groupe de travail présidée par monsieur Saulnier. Par conséquent, il semble qu'on se sera contenté d'apporter quelques modifications à la Loi de police, lesquelles, selon nous, risquent davantage de perturber la situation actuelle vécue par l'autorité municipale en regard de son corps de police, que de régler des problèmes dont l'U.M.Q. a maintes fois souligné l'urgence.

Il est vrai que nous formulions quelques réserves quant à certaines dispositions du rapport Saulnier et que nous n'acceptions pas d'emblée toutes les conclusions qu'on y retrouve. Cependant, nous n'étions pas rébarbatifs aux recommandations formulées dans ce rapport, puisque nous croyions et croyons toujours que ce dernier offre une formule de compromis acceptable pour le citoyen et les parties en cause.

La recommandation du groupe de travail sur la régionalisation des corps policiers municipaux est celle qui a retenu le plus l'attention des élus. Toutefois, nous avons dit que les structures proposées dans le rapport étaient prématurées puisqu'elles risquaient d'entrer en contradiction avec l'éventuel découpage du territoire prévu par le projet de loi no 125, Loi sur l'aménagement du territoire et de l'urbanisme.

C'est avec satisfaction que nous reconnaissons la volonté du législateur de ne pas légiférer sur la question de la régionalisation des corps de police municipaux tant et aussi longtemps que ne sera pas déterminé le découpage des futures municipalités régionales tel que nous l'avions suggéré.

Le projet de loi no 48 qui, dans un premier temps, vise à accroître les pouvoirs d'enquête de la Commission de police, propose dans un deuxième temps, certaines règles concernant l'établissement des corps policiers municipaux et également l'organisation de ceux-ci. Même s'il nous apparaît nécessaire que ce projet de loi soit repensé pour l'intégrer dans un texte législatif global, nous devons commenter certaines parties de ce projet de loi, spécialement celles qui concernent les pouvoirs de la corporation locale et les corps municipaux de police. Ainsi, nous l'aborderons dans l'ordre numérique afin de rendre notre intervention plus facile à suivre.

ANALYSE Article 2. 2a. Le premier alinéa de cet article vient clore un débat ouvert par dix années de jurisprudence. Il appelle cependant certains éclaircissements: ce policier, agissant comme agent de la paix, ne cesse pas d'être préposé du procureur-général, dans sa propre municipalité. Lorsqu'on lit les

deux paragraphes de cet article ensemble, on pourrait penser le contraire puisque le législateur ne parle par pour ne rien dire. L'interprétation au contraire du premier alinéa risquerait d'augmenter la responsabilité civile et quasi-délictuelle de la corporation municipale. Quant au second alinéa, l'U.M.Q. croit qu'il ne vient pas changer la nature des ententes intermunicipales de services constabulaires. 2c. Malheureusement, il n'y a pas dans le projet de loi de définition de "situations perturbatrices de l'ordre, de la paix et de la sécurité publique". Elle est laissée à l'interprétation et peut porter atteinte aux libertés civiles. Nous souhaiterions connaître les critères qui peuvent qualifier une situation comme perturbatrice de l'ordre, de la sécurité et de la paix publique. Que le directeur de police puisse, de sa propre initiative, faire rapport au procureur général, nous apparaît acceptable dans la mesure où celui-ci, sans avoir à en divulguer le contenu, avise simultanément le conseil municipal qu'il a effectivement fait parvenir un tel rapport. Aussi, faudrait-il stipuler que le directeur d'un corps de police municipal pourrait également être appelé à soumettre au procureur général un rapport circonstancié à partir d'une demande du conseil municipal.

Article 7

Le dernier paragraphe stipule que la Commission a le pouvoir d'adopter un règlement de déontologie et de discipline applicable aux membres des corps policiers municipaux selon l'article 47a. et ce, au même titre que le lieutenant-gouverneur en conseil pour la Sûreté du Québec.

Cependant, ce dernier le fait sur la recommandation du directeur général et pas autrement, alors que la Commission le fait après consultation des organismes municipaux concernés seulement. Encore une fois, voici une occasion pour le législateur de rectifier ce qui nous apparaît anormal et de respecter un tant soit peu les pouvoirs locaux. Nous demandons la possibilité que la Commission puisse par règlement étendre l'application des dispositions de l'article 47a. ou de partie de celles-ci à l'ensemble ou à une partie des policiers municipaux du Québec, seulement sur recommandation des organismes municipaux représentatifs, c'est-à-dire, l'Union des municipalités du Québec et l'Association des directeurs de police du Québec travaillant de concert pour les besoins de la cause. Ce processus ne doit pas empêcher la Commission de demander aux organismes municipaux de produire des recommandations concernant la déontologie et la discipline. D'autre part, il nous apparaît souhaitable que la Commission définisse un code minimal de déontologie et d'éthique policière et que ce code s'applique là où il n'en existe pas ou ne s'applique pour les autres municipalités que là où le code de discipline ne rencontrerait pas les dispositions du code minimal. Ce qui laisse à l'autorité municipale la possibilité d'adopter son propre code ou d'accepter des normes minimales.

Article 19

Cet article du projet de loi constitue un élément nouveau lequel, selon nous, pourrait mettre fin à beaucoup d'incertitude et d'ambiguïté quant au rôle joué par la Sûreté du Québec lorsque les corps de police municipaux sont incapables d'agir adéquatement. Jusqu'à présent, ces services avaient été accordés sans base juridique claire.

Article 25

Ce nouvel article no 52 est sans aucun doute ce qui nous apparaît le plus significatif dans ce projet de loi. La possibilité pour les municipalités de 5000 habitants et moins de constituer ou non un corps de police nous apparaît comme étant une solution souhaitée par plusieurs de nos membres, quoique au nom de l'équité, cette formule ne constitue vraiment pas la réponse à un juste partage des coûts de la sécurité publique au Québec, surtout que les municipalités seront appelées à vivre une nouvelle expérience en matière de fiscalité à compter du 1er janvier 1980, d'où l'intérêt d'une politique qui mette toutes les municipalités sur un même pied à partir de facteurs de coûts identiques ou presque.

Ce même article permet au lieutenant-gouverneur en conseil de déterminer les effectifs d'un corps de police local, c'est-à-dire établir le taux d'encadrement policier dans une municipalité donnée. Rappelons que le rapport Saulnier soulignait que l'encadrement policier d'un service complet selon une analyse faite pour un district urbanisé de 20 000 habitants, s'établissait à une moyenne minima de 1.5 policier par mille habitants. Les auteurs croyaient important de souligner qu'il s'agissait là "d'un ordre de grandeur donné à titre indicatif et que la fixation d'un taux d'encadrement pour un district est fonction de l'indice et la densité d'occupation du sol, de sa nature et de l'analyse suivie de la criminalité dans ce territoire".

Même s'il est intéressant de noter que le projet de loi no 48 permet la fixation des taux d'encadrement à partir de facteurs locaux dont devrait tenir compte la Commission dans son avis au lieutenant-gouverneur en conseil, nous considérons qu'il serait de loin préférable que le

taux d'encadrement policier pour une municipalité donnée soit fixé conjointement par la Commission de police et la municipalité concernée ou l'organisme qui la représente. Dans la fixation des effectifs policiers, la Commission et la municipalité tiendraient compte de la capacité de payer de la municipalité, du taux de la criminalité dans les limites territoriales de celle-ci, des implications de cette décision sur les membres des corps de police concernés, de l'avis du directeur du service de police, des possibilités d'entente suivant les articles 60 et 60a. ainsi que des exigences de la municipalité concernant l'application des règlements municipaux. Si la Commission et la municipalité devaient en arriver à une impasse totale, celles-ci soumettraient leur position respective au lieutenant-gouverneur en conseil, lequel pourrait, en dernier ressort, fixer les effectifs de ce corps de police.

Cette approche nous apparaît beaucoup plus respectueuse du pouvoir local tout en créant une nouvelle forme de collaboration entre, d'une part, une Commission de police dont les objectifs sont assez mal compris et la neutralité parfois mise en doute et, d'autre part, le pouvoir local qui déplore le fait que le contrôle de son corps de police lui échappe de plus en plus. L'U.M.Q. n'est d'aucune façon prête à accepter que des représentants d'associations policières puissent intervenir de quelque façon que ce soit dans la fixation du taux d'encadrement policier. Selon nous, il appartiendrait au directeur de faire valoir les points susceptibles d'avoir un impact sur les membres du corps qu'il dirige et de faire les recommandations qu'il juge utiles. La décision d'une municipalité de réduire ses effectifs policiers en tout ou en partie n'émane pas d'un caprice administratif mais plutôt de contraintes budgétaires et de calculs démographiques. Le projet de loi accorde aux policiers ainsi mis-à-pied un traitement de faveur difficilement justifiable par rapport aux autres employés municipaux.

Plutôt que de procéder en vertu du principe lourd et coûteux en deniers publics du comité de reclassement, il serait de loin préférable que les municipalités, autorisées à se départir de leur corps policier, puissent donner un avis de résiliation de contrat d'au moins douze mois et accorder à chaque employé mis-à-pied une somme forfaitaire décidée par le lieutenant-gouverneur en conseil. 52a. Nous comprenons que la décision du lieutenant-gouverneur de dispenser une municipalité de son obligation de maintenir un corps de police ou d'en réduire les effectifs n'aura d'effet que lorsque tous les efforts possibles auront été accomplis et qu'un processus aura été déployé pour trouver un emploi aux policiers ainsi déplacés.

Ce que le législateur a omis d'indiquer, ce sont les délais accordés au comité de reclassement avant que le lieutenant-gouverneur en conseil ne consente à dispenser une municipalité de son obligation. Faudrait-il comprendre qu'une municipalité ne pourra sous aucun prétexte diminuer ses effectifs policiers même si cette décision est justifiée et justifiable avant que ne soit constitué un comité de reclassement, que celui-ci n'ait examiné la situation et formulé ses recommandations, également qu'il n'ait étudié la possibilité pour le policier concerné de trouver un emploi dans un autre corps de police et que finalement, ce même comité n'ait examiné avec la municipalité la possibilité de lui procurer un autre emploi? Faudrait-il comprendre que la municipalité ne pourra d'aucune façon diminuer ses effectifs tant et aussi longtemps que ce comité de reclassement n'ait pu trouver un autre emploi pour le ou les policier(s) ainsi mis-à-pied? Devons-nous comprendre qu'il faille aussi obtenir l'assentiment du policier concerné sur la qualité du nouvel emploi?

Nous comprenons difficilement l'absence de représentants de la Sûreté du Québec sur ce comité de reclassement puisqu'il est logique de supposer que ce corps policier serait le premier à embaucher les policiers municipaux affectés, soit par la cessation d'un service, soit par la réduction de ses effectifs. En effet, lorsque par exemple une municipalité de 5000 habitants et moins est dispensée de son obligation de maintenir un corps de police, c'est à la Sûreté du Québec qu'incombe dorénavant la responsabilité de la sécurité de ce même territoire, d'où la nécessité d'augmenter ses effectifs. Le policier municipal, ayant reçu la même formation que les membres de la Sûreté du Québec et, au surplus, étant familier avec le territoire laissé à la juridiction de la Sûreté, il nous apparaît normal que ce corps de police soit le premier intéressé à recruter les policiers affectés. 52b. Nous comprenons bien et nous acceptons que le procureur-général pourrait demander à la Commission de faire enquête afin de vérifier si une municipalité maintient ses services policiers adéquats. Cependant, nous comprenons mal qu'un groupe de citoyens puisse faire une demande auprès de la Commission, sans que soit d'abord saisi le conseil de ville de cette plainte et qu'il n'ait pu tenir une audience publique sur le sujet, s'il est d'importance, ou apporté des correctifs administratifs, s'il est anodin et que ce même groupe de citoyens n'ait reçu de lui sa réponse dans un délai raisonnable. Aussi, il faudrait définir ce qu'est un groupe de citoyens; est-ce 2, 10, 100 personnes, nous suggérons au législateur d'établir un nombre minimum de requérants, ce qui permet de garantir le sérieux de la plainte. D'autre part, il nous apparaît tout à fait inconcevable qu'une association de policiers puisse, par

requête, demander à la Commission de faire enquête afin de vérifier si une municipalité maintient des services policiers adéquats. D'abord il faudrait s'entendre sur la définition du mot "adéquat"; on doit convenir qu'une association de policiers n'a pas nécessairement la même définition de l'adéquation en matière de services policiers que pourrait avoir celui qui reçoit les services et paie la note. La municipalité, de son côté, pourrait très bien invoquer qu'un service policier adéquat doit également correspondre à sa capacité financière, c'est-à-dire, ses pouvoirs de taxation. Ces remarques s'appliquent aussi au citoyen qui porte une plainte à I'll.M.Q. croit qu'une assemblée publique tenue par le conseil peut lui permettre de justifier l'état de son service policier. 52c. Cet article prévoit que le procureur-général peut charger la Sûreté de maintenir la paix, l'ordre et la sécurité publique dans le territoire soumis à la juridiction de la municipalité, si, de l'avis de la Commission, elle ne maintient pas de services policiers adéquats.

D'abord il nous apparaît extrêmement important que la municipalité concernée soit saisie de l'avis de la Commission et qu'elle ait un délai raisonnable pour se conformer avant que le procureur-général puisse charger la Sûreté d'agir sur son territoire.

Selon l'U.M.Q., il faudrait faire une distinction quant à l'obligation pour la municipalité de fournir des services adéquats et l'impossibilité pour celle-ci de le faire pour des raisons résultant de conflits de travail. Nous suggérons que, dans pareil cas, les dispositions de l'article 19 du projet de loi soient appliquées et que, pour ces services qui sont rarement d'une longue durée, la Sûreté du Québec en assume les coûts.

Article 28

Cet article répond à un besoin et nous pensons qu'il servira à certaines de nos municipalités membres. Cependant, nous demandons la possibilité que ces ententes soient renégociables annuellement; cela aurait pour effet de permettre aux deux parties de faire les ajustements, s'il y a lieu.

Article 31

Cet article longtemps attendu par le monde municipal permettra aux petites municipalités qui connaissent des augmentations de population saisonnières, tels les lieux de villégiature, de pouvoir nommer pour une période de temps raisonnable des constables spéciaux.

Article 39

Nous croyons en toute objectivité et équité que cette période de deux ans accordée aux municipalités régie par le Code municipal devrait être accordée sans discrimination aux quelques municipalités régies par la Loi des cités et villes de même taille qui, jusqu'à ce jour et pour toutes sortes de raisons, ne se seraient pas conformées aux dispositions de l'article 52 de la Loi de police.

CONCLUSION

En guise de conclusion, l'U.M.Q. se demande pourquoi le législateur n'a pas profité du projet de loi no 48 pour clarifier une fois pour toutes l'ambiguïté qui existe entre, d'une part, l'article 115 de la Loi des cités et villes et, d'autre part, l'article 55 de la Loi de police. Il nous semble qu'à l'aube d'une réflexion, si partielle soit-elle, sur le problème de la gestion des corps policiers municipaux, le législateur aurait pu délimiter les attributions et responsabilités des autorités civiles et policières. Monsieur Yves Ouellette, professeur à la Faculté de droit de l'Université de Montréal, parlant du contrôle politique sur les services de police municipaux, le 2 mars dernier, disait:

Une des faiblesses actuelles de l'organisation policière au Québec est l'insuffisance des contrôles gouvernementaux sur la gestion générale des services de police, attribuable à l'immobilisme des divers gouvernements provinciaux et à leur retard à se donner des politiques bien articulées sur la gestion des services de police. Si d'aucuns s'étonnent ou s'inquiètent de la puissance des syndicats de policiers et parlent de l'émergence ou s'inquiètent de la puissance des syndicats de policiers et parlent de l'émergence d'un pouvoir policier, ce phénomène n'est peut-être pas entièrement attribuable à la seule gourmandise des policiers, mais tient aussi à l'inaction des gouvernements qui se laissent dépasser par la police.

En 112 ans de confédération, les réalisations des gouvernements provinciaux en matière de planification et de politique policières n'impressionnent gruère. On pouvait lire dans le Livre Blanc intitulé "La police et le citoyen": "Si les structures actuelles présentent des lacunes graves, c'est en bonne partie parce que l'Etat n'a pas suffisamment assumé jusqu'à maintenant son rôle de principal planificateur du domaine policier".

C'était en 1971. Depuis ce temps, le rapport Saulnier a été déposé et rien ne permet de croire qu'il se matérialisera prochainement en réalisations concrètes et en législation.

C'était là la somme de nos premières réactions à ce projet de loi no 48 et nous espérons que nos commentaires invitant le législateur à revoir l'ensemble de la Loi de police seront bien accueillis. Sachez que notre seul but est l'amélioration de la qualité des services à la population et ce à l'intérieur d'un cadre juridique bien défini ne laissant aucun doute quant aux devoirs et obligations de chacun.

ANNEXE D

Limiter les pouvoirs policiers: Une exigence démocratique

Recommandations de la Ligue des droits et libertés devant la commission parlementaire étudiant le projet de loi 48 et modifiant l'actuelle Loi de police

Août 1979 IV — Recommandations

Si nous avions été moins coincés par le temps trop court entre le dépôt de ce projet de loi et les audiences publiques en pleine période de vacances, nous aurions aimé nous livrer à une analyse plus en profondeur du phénomène policier.

Nous croyons cependant que la mise en application des mesures recommandées dans ce mémoire est susceptible de contribuer à faire des policiers non plus des fonctionnaires armés se situant au dessus des lois mais des employés d'un service public au service de leurs concitoyens ayant pour principal souci de garantir à chacun le libre exercice des droits reconnus par la Déclaration canadienne des droits ou la Charte des droits de la personne.

Voici donc un résumé des principales recommandations contenues dans ce mémoire: 1) Afin de contrer la violence policière, nous recommandons le désarmement progressif des policiers du Québec. 2) Contre la police secrète, nous recommandons que les enquêtes et les recherches continuent sur d'autres cas et méthodes de subversion sociale et politique utilisées par la police. 3) Les services policiers de sécurité tels qu'ils fonctionnent actuellement doivent être abolis et leur mandat doit exclure explicitement toute activité non criminelle. Tous les dossiers (de même que les fiches d'interpellation) de citoyens et d'organisations à qui aucune activité criminelle n'est reprochée doivent être détruits. 4) Un examen exhaustif des pratiques d'enquête et d'intervention de la police doit être fait. Par exemple toute la question de l'utilisation des informateurs doit être scrutée à la loupe. 5) Au secret qui continue d'entourer la police, le gouvernement doit opposer une loi d'accès à l'information — à l'exemple du Freedom of Information Act des Etats-Unis — qui comporterait trois éléments fondamentaux: l'accès des citoyens à l'information gouvernementale en général et d'autre part l'accès des citoyens et des organisations à l'information les concernant, notamment au chapitre des dossiers de police. Enfin que sur une base annuelle les escouades spécialisées rendent compte de leurs activités. 6) Les devoirs de la Sûreté du Québec et des corps de police municipaux doivent être précisés (cf. art. 29) et les directives plus claires données aux policiers. 7) Le législateur devrait clarifier la question du droit d'information et de pression que constitue le piquetage eu égard au recours systématique par les employeurs aux injonctions. 8) Les preuves obtenues illégalement devraient être déclarées inadmissibles devant les tribunaux. 9) Le droit à l'objection de conscience: c'est-à-dire pour un policier le droit de ne pas obéir à un ordre qu'il juge illégal ou illégitime, doit être garanti par la loi de police. 10) Le droit pour les policiers de s'affilier à une centrale syndicale, droit reconnu aux autres travailleurs, doit également être accordé. 11) Que la GRC soit au même titre que les autres corps policiers oeuvrant au Québec soumise au contrôle de la Commission de police et du ministère de la Justice. 12) Le pouvoir d'enquête sur la conduite des policiers doit être retiré de la juridiction de la Commission de police et être confié à un organisme indépendant ou à la Commission des droits de la personne.

13) Devenu un tribunal d'exception permanent, la CECO doit être abolie de même que l'art. 19 de la loi de police de façon à retirer à la Commission de police tout pouvoir d'enquête sur le crime organisé, le terrorisme et la subversion. 14) Que les policiers qui ont autorisé et/ou participé à la commission d'actes criminels soient poursuivis devant les tribunaux. 15) Que les garanties soient incluses dans le projet de loi concernant l'application et la gestion du Code de déontologie.

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