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Projet de loi no 48
(Dix heures quinze minutes)
Le Président (M. Boucher): A l'ordre, s'il vous
plaît! La commission de la justice est réunie pour entendre les
mémoires des organismes et des personnes concernant le projet de loi 48,
Loi modifiant la Loi de police.
Les membres de la commission sont: M. Alfred (Papineau)...
M. Alfred: Présent.
Le Président (M. Boucher):... M. Bédard
(Chicoutimi)...
M. Bédard: Présent.
Le Président (M. Boucher):... M. Blank
(Saint-Louis)...
M. Blank: Présent.
Le Président (M. Boucher): ... M. Charbon-neau
(Verchères), M. Clair (Drummond), M. Fontaine (Nicolet-Yamaska); M.
Gravel (Limoilou) remplace M. Lacoste (Sainte-Anne); M. Lalonde
(Marguerite-Bourgeoys), M. Samson (Rouyn-Noranda), M. Vaillancourt
(Jonquière).
Les intervenants sont: M. Ciaccia (Mont-Royal), M. Cordeau
(Saint-Hyacinthe), M. Duhaime (Saint-Maurice), M. Lavigne (Beauharnois), M.
Léger (Lafontaine), M. Marois (Laporte), M. Pagé (Portneuf), M.
Tardif (Crémazie).
Ce matin, les organismes invités sont: je vais les nommer
dans l'ordre où ils m'ont été donnés
d'abord, l'Association des chefs de police et pompiers de la province de
Québec dont le porte-parole est M. Emile Turgeon; le Syndicat
professionnel des chefs de police et pompiers et officiers supérieurs de
la protection publique dont le porte-parole est Me Léonce-E. Roy;
l'Union des conseils de comté et des municipalités locales du
Québec dont le porte-parole est M. Jean-Marie Moreau, président;
l'Association des policiers des autoroutes du Québec dont M. Marcel
Ouellette est le porte-parole; l'Union des municipalités du
Québec représentée par M. Luc Lacharité; la Ligue
des droits et libertés représentée par M. Gordon
Lefebvre.
On m'informe que M. Jérôme Proulx sera intervenant à
la place du député de Saint-Maurice, M. Duhaime.
M. Lalonde: Et M. Fernand Grenier remplace M. Fontaine.
Le Président (M. Boucher): M. Grenier remplace M. Fontaine
(Nicolet-Yamaska).
J'appellerais immédiatement l'Association des chefs de police et
pompiers de la province de Québec. Maintenant, pour les mémoires,
étant donné que nous en avons six aujourd'hui, il s'agirait de
s'entendre peut-être sur le temps alloué pour chaque
mémoire. On accorde habituellement 20 minutes pour l'exposé du
mémoire et, par la suite, on peut s'entendre sur chacun des
mémoires en dedans d'une heure.
M. Lalonde: M. le Président, si vous me le permettez,
étant donné qu'on a une douzaine d'intervenants...
M. Bédard: Une douzaine de mémoires qui ont
été présentés.
M. Lalonde: Est-ce qu'il y en a moins qui ont accepté
d'être entendus, je ne le sais pas. Etant donné le petit nombre de
représentations et les trois jours qui ont été on
verra s'ils seront consacrés après mais qui ont
été planifiés pour la tenue de cette commission
parlementaire, M. le Président, je pense que je
préférerais ne pas faire de carcan, de cadre, de limite de temps
sur les mémoires. Je pense qu'on peut facilement voir au début
comment se déroulent les travaux, quitte à s'autodiscipliner
à mesure que le temps se déroulera pour arriver à un temps
raisonnable.
On a fait, dans le passé, dans des commissions parlementaires
où il y avait des dizaines et des dizaines d'intervenants, des ententes
pour limiter le temps. En principe, donc, je ne suis pas contre, mais
étant donné qu'on a un petit nombre ici de certains
mémoires qui présentent des intérêts
différents, qui peuvent provoquer une discussion beaucoup plus longue,
j'aimerais simplement voir comment cela se déroule, quitte, demain matin
peut-être, à s'entendre pour le déroulement des travaux
à venir.
Le Président (M. Boucher): M. le ministre.
M. Bédard: Je crois effectivement qu'il y a lieu de
s'ajuster, selon le déroulement de nos travaux, ayant à l'esprit,
d'une part le respect de nos règles de commissions parlementaires et,
également, un esprit d'ouverture pour permettre aux partis de pouvoir
s'exprimer le plus longuement possible, le plus complètement
possible.
Remarques préliminaires
M.
Marc-André Bédard
J'aimerais, avec votre permission, M. le Président, tout d'abord
souhaiter la bienvenue à toutes les associations et les organismes qui
ont bien voulu accepter de présenter des mémoires à la
commission parlementaire de la justice, sur le projet de loi no 48 que nous
avions déposé à la fin de nos travaux à
l'Assemblée nationale en juin. Une partie importante de ce projet de loi
fait suite au travail du groupe Saulnier qui, il y a un an et demi, me
remettait un rapport que j'ai alors rendu public. Donc, le premier
mérite de cette analyse du
rapport Saulnier, entre autres, c'est d'avoir fait le tour de la
situation existante et d'avoir, je crois, décrit les balises de la
problématique. Cette toile de fond constitue, je pense, un
précieux éclairage des solutions susceptibles de favoriser ce que
nous avons tous à l'esprit, à savoir l'efficacité
policière.
Après la réception de ce rapport, le gouvernement a
confié l'étude de ses recommandations au comité
interministériel sur la décentralisation, et des officiers du
secrétariat à l'aménagement, du Conseil exécutif,
des officiers du conseil des Affaires municipales, des Finances et de la
Justice ont travaillé à cette fin. Le rapport de ces travaux nous
a été soumis récemment et le gouvernement a adopté
certaines orientations pour fins de discussion. Celles-ci sont d'ailleurs
largement réfléchies dans le projet de loi no 48, et les
dispositions qui en résultent représentent à mes yeux, je
le dis très humblement, une véritable solution pratique, je dis
bien pratique, aux problèmes de la protection policière, solution
pratique qui, je pense, doit tenir compte de deux principes qui sont
éventuellement susceptibles d'entrer en conflit, à savoir le
principe de la décentralisation et du respect de l'autonomie municipale
et le principe du maintien obligatoire d'un service de protection
policière sur l'ensemble du territoire québécois. C'est,
en tout cas, nous le croyons, une solution d'équilibre. Je reste
évidemment ouvert à toute proposition susceptible de parfaire cet
équilibre. C'est avec un esprit de conciliation, il va sans dire, que je
me déclare prêt à entamer les discussions sur ce projet de
loi.
Le Président (M. Boucher): Avant d'aller plus loin, il y a
un détail que j'ai oublié, c'est celui de nommer un
rapporteur.
M. Alfred: Je propose, M. le député de
Limoilou.
Le Président (M. Boucher): Alors, M. Gravel (Limoilou)
sera le rapporteur. M. le député de Marguerite-Bourgeoys.
M. Fernand Lalonde
M. Lalonde: Seulement quelques mots, M. le Président, en
entamant les travaux de cette commission. J'ai étudié très
attentivement le projet de loi no 48 et j'ai été
étonné d'entendre tantôt le ministre nous dire que c'est
essentiellement le rapport Saulnier qu'on y retrouve...
M. Bédard: Cela fait suite. Je m'excuse, je me suis
peut-être, au contraire...
M. Lalonde: Justement, j'ai lu plusieurs interventions, plusieurs
mémoires et, de façon assez générale, on
s'étonne, non pas de ce qu'il y a dans le projet de loi 48, mais de ce
qu'il n'y a pas. Après trois ans de silence depuis l'infortuné
projet de loi 41, on se demande ce que le ministre a fait, et surtout ce qu'il
a fait avec le rapport Saulnier.
Il est naturellement prématuré de porter un jugement
politique. Je pense que le ministre, en consultant les groupes, les individus
qui ont bien voulu s'adresser à la commission parlementaire, a droit
à un congé de jugement politique, à savoir qu'on doit lui
laisser la chance de refaire son lit, mais il y a tellement de choses qu'on n'y
retrouve pas, M. le Président, que j'étais heureux d'entendre le
ministre, en concluant ses propos tantôt, dire qu'il est ouvert à
toute suggestion. Je suis d'avis que le ministre et le gouvernement devront
refaire leur travail et réellement s'imposer une démarche
beaucoup plus pensée, beaucoup plus réfléchie que ce que
nous propose le projet de loi no 48. Dans le projet de loi no 48, il y a
certaines choses nouvelles, mais j'espère que le gouvernement ne se
servira pas du projet de loi no 48 simplement pour innover, par exemple, le
contrôle, pour imposer un contrôle sur des "agents de la paix" et
on ne sait pas qui ils seront, que le gouvernement se conserve le droit
incognito et en catimini de déterminer, en invitant le débat
public, quel contrôle devrait être imposé sur les "agents de
la paix", quels agents de la paix devraient être soumis à ce
contrôle au-delà du contrôle qui existe actuellement sur les
corps policiers provinciaux.
Je pense que, s'il est prématuré de porter un jugement
actuellement sur la véritable portée du projet de loi no 48, on
doit quand même, et je le fais au nom de l'Opposition, exprimer notre
déception sur le fait que le ministre, après deux ans et demi
d'administration de son ministère et surtout après le rapport
Saulnier, n'a que ces quelques bribes de démarches à nous
proposer et je l'invite d'avance à écouter d'une façon
positive ce que les intervenants ont à dire. Par exemple, je vais
terminer là-dessus, un cas particulier, le policier des autoroutes.
C'est un cas particulier, ce n'est pas l'avenir du Québec qui est en
jeu, mais, quand même, c'est un cas sur lequel des administrations
passées se sont penchées et auquel elles ont proposé des
solutions. Un cas qui a aussi été soumis à l'examen,
à l'étude d'organismes.
Bon, il y a eu des solutions qui ont été proposées.
Je disais tantôt qu'il est assez difficile, je ne veux pas qu'on refasse
le projet de loi 41. Ce n'est pas mon intention, d'ailleurs, et ce n'est pas le
but de la commission. Mais on ne peut pas oublier que cela a existé.
Alors, il y avait une proposition à ce moment-là. Mais
ici, il n'y a rien. Il n'y a même pas une explication pourquoi on n'a
rien là-dessus. J'invite le ministre à accepter d'accueillir, de
façon très positive, les remarques qui y sont faites, non
seulement par l'Association des policiers des autoroutes, mais aussi par les
autres groupes qui, dans leurs mémoires, soit au projet de loi 48, soit
au projet de loi 41, accueillaient aussi avec plaisir, la décision de
faire un corps policier de plein droit de ce groupe; que ce soit par
l'intégration à la Sûreté du Québec, que ce
soit en en faisant un corps policier, il y a une solution à apporter
à ce problème.
Il y a aussi, l'équilibre entre les pouvoirs, le rôle et
les fonctions de la Commission de police,
comme organisme indépendant et le gouvernement, le
ministère de la Justice, que ce soit la Direction générale
de la sécurité publique ou autre.
Il n'y a pas de définition. On a des résultats, mais il
n'y a pas eu de réflexions publiques. Il n'y a réellement rien
qui nous rassure dans ce projet de loi, à savoir si le ministère,
le gouvernement a fait son lit. Est-ce qu'il a expliqué pourquoi, par
exemple, on donne beaucoup plus de pouvoir à la Commission de police
actuellement, dans ce projet de loi et la façon dont on le fait?
Enfin, nous allons écouter avec beaucoup d'attention ceux qui ont
des remarques à faire sur ce projet de loi 48 et nous allons, en
concluant, inciter le gouvernement à aller beaucoup plus loin dans cette
réflexion, qui devrait prouver et démontrer que depuis trois ans,
il s'est passé quelque chose. Là, on arrive avec moins que ce
qu'on avait il y a trois ans.
Alors, il me semble, avec le rapport Saulnier, que le ministre devrait
nous proposer davantage par le projet de loi 48.
Le Président (M. Boucher): Merci, M. le
député de Marguerite-Bourgeoys. M. Emile Tur-geon... M. le
député de Mégantic-Compton, je vous laisse la parole.
M. Fernand Grenier
M. Grenier: M. le Président, je voudrais d'abord vous
prier d'excuser le député de Nicolet-Yamaska, Me Serge Fontaine,
qui ne peut pas être présent à cause du passage dans sa
région d'un ministre et de ses fonctionnaires... il l'a à l'oeil
aujourd'hui.
M. Lalonde: ... fonction de surveillance.
M. Grenier: Je pense que c'est important qu'il soit dans son
comté à cause des crédits de voirie qui sont en train de
se discuter, et Dieu sait si on en a besoin. Je voudrais vous dire qu'il sera
présent au cours des autres journées afin d'entendre les autres
mémoires. (10 h 30)
Je dois vous dire que nous, de l'Union Nationale, sommes conscients de
l'importance que revêt cette audition de mémoires qui nous
conduira à la bonification du projet de loi modifiant la Loi de police.
Au nom de ma formation politique, je suis, bien sûr, disposé
à écouter les intervenants des milieux concernés et ceux
que nous devrons entendre au cours des deux, trois ou quatre prochaines
journées.
Je voudrais faire quelques remarques concernant quelques points qui nous
paraissent importants. Je tiens aussi à signaler que dans notre parti,
nous avons toujours soutenu que la Commission de police du Québec
devrait avoir juridiction sur toutes les forces policières et sur tout
agent de la paix oeuvrant au Québec.
De plus, notre formation se range du côté des gouvernements
du Québec et de l'Ontario qui ré- clament tous deux plusieurs
milliards de dollars du fédéral pour des services policiers que
ce gouvernement central ne donne pas à ces deux provinces. Nous
espérons aussi que le gouvernement de M. Clark puisse se montrer plus
coopératif à ce sujet. Sur ce point, je réitère le
contenu d'une motion non annoncée qui fut présentée en
Chambre par mon collègue de Nicolet-Yamaska, Me Serge Fontaine, qui
disait: "Que cette Assemblée est d'avis que le gouvernement du
Québec invite les représentants autorisés de tous les
gouvernements provinciaux à se réunir à Québec dans
les plus brefs délais pour discuter de la question de la juridiction des
provinces en matière d'administration de la Justice, en vue de
présenter au gouvernement fédéral une prise de position
commune établissant clairement les revendications légitimes dans
ce secteur."
M. le Président, ce projet de loi est obscur en plusieurs points.
Ainsi, nous voulons nous assurer qu'il n'y ait pas de conflit
d'intérêts au sein de la Commission de police du Québec qui
jouera un rôle, d'une part, administratif et, d'autre part, quasi
judiciaire. De plus, il faut définir dans la loi ce qu'est un agent de
la paix et il faut compléter la loi qui semble avoir oublié
certains groupes, tels les policiers des autoroutes. D'ailleurs, nous aurons
l'occasion de les entendre.
Concernant les municipalités, le projet de loi les oblige aussi
à fournir des services adéquats, mais, en cas de force majeure,
telle une grève, devront-elles payer la note parce que la
Sûreté du Québec aura pris la relève le temps que se
règle le conflit? Plusieurs autres points obscurs seront soulevés
par les intervenants, je l'imagine, telle l'opportunité des
enquêtes publiques, mais je veux maintenant m'attarder quelque peu aux
côtés plus positifs du projet de loi 48.
Le présent projet de loi a comme premier mérite de
rajeunir l'actuelle Loi de police qui est maintenant âgée de onze
ans. C'est ainsi qu'une plus grande protection sera accordée aux
témoins qui devront se présenter devant la commission
d'enquête. A ce titre, je cite l'article 22a, paragraphe c) qui autorise
en particulier l'interrogatoire d'un témoin par son propre avocat. De
plus, nous trouvons excellent l'établissement d'un code de
déontologie et de discipline en ce qui concerne la Sûreté
du Québec et nous souhaitons ardemment qu'il devienne le plus tôt
possible applicable aux policiers municipaux et aux autres agents de la paix
oeuvrant sur le territoire québécois.
Enfin, je me limiterai à citer un dernier point louable de ce
projet de loi en ce qui a trait aux mécanismes prévus pour que la
Sûreté du Québec puisse prêter assistance aux corps
de police municipaux. Bien sûr, je ne veux pas m'attarder davantage
puisque nous sommes ici pour entendre les représentants des
différents organismes et nous aurons l'occasion, à notre tour,
bien sûr, d'intervenir sur chacun des documents qui nous seront
déposés.
Le Président (M. Laplante): Merci, M. le
député de Mégantic-Compton.
Je demanderais à M. Emile Turgeon, porte-parole de l'Association
des chefs de police et de pompiers de la province de Québec de bien
vouloir s'identifier et d'identifier les gens qui l'accompagnent.
Mémoires
Association des chefs de police et de pompiers
M. Cyr (Marcellin): M. le Président, messieurs les membres
de la commission parlementaire, le porte-parole, aujourd'hui, sera Marcellin
Cyr, président de l'Association des chefs de police et de pompiers du
Québec. J'aimerais, avant de débuter, vous présenter mes
collègues. En commençant par la droite, le directeur Guy-Paul
Simard, de Trois-Rivières, ex-président de l'association; le
directeur adjoint de la police de Québec, M. Robert Vézina,
président ex-officio de l'association; M. Emile Turgeon, directeur de la
police de Beauport, premier vice-président de l'association et M.
Gérard Giroux, directeur de la police de Chicoutimi, ex-président
de l'association.
Messieurs, conscients des intentions du ministre de la Justice de
déposer un projet de loi dont le but était d'amender la Loi de
police pour corriger certaines situations que nous dénoncions, les
membres de l'exécutif de l'Association des chefs de police et de
pompiers du Québec ont désigné certains d'entre eux pour
constituer un groupe de travail dans le but de soumettre un mémoire.
Effectivement, nous remettions copie de ce mémoire au ministre de la
Justice Ie7juin 1979 par l'entremise de l'ex-président de l'Association
des chefs de police et de pompiers du Québec, M. Robert Vézina.
L'intention de l'Association des chefs de police et de pompiers du
Québec était d'influencer le ministre avant la formulation de son
projet de loi. Nous constatons, à la lecture du projet de loi, que nous
n'avons réussi que très partiellement.
L'exécutif de l'Association des chefs de police et de pompiers du
Québec a donc convenu de saisir les membres de cette commission
parlementaire de la justice de ses propres propositions d'amendement qui
pourraient être considérées comme représentant la
base d'un projet de loi dont la teneur est fort différente du projet de
loi no 48, voire objectifs poursuivis et propositions d'amendement, par rapport
au texte actuel de la Loi de police. C'est pourquoi, après avoir
présenté notre projet d'une législation souhaitée,
nous tenterons d'établir les points de concordance et de discordance
avec le projet de loi no 48 à l'aide d'annotations et de commentaires.
Nous serons disposés à examiner positivement les rapprochements
possibles entre la position du ministre de la Justice, l'honorable
Marc-André Bédard, et la nôtre, à l'occasion des
auditions de votre commission parlementaire.
Les objectifs poursuivis dans ce mémoire. Les amendements
à la Loi de police. Périodiquement...
Le Président (M. Boucher): M. Cyr... M. Cyr:
Oui.
Le Président (M. Boucher): Je m'excuse! Est-ce que vous
avez l'intention de lire au complet le mémoire ou si...
M. Cyr: Non.
Le Président (M. Boucher): ... vous avez
préparé un résumé qui...
M. Cyr: C'est un peu le résumé, M. le
Président.
Le Président (M. Boucher): Oui. M. Cyr: Je vais
lire les objectifs...
Le Président (M. Boucher): Oui.
M. Cyr:... ensuite, nous irons au sommaire et aux
conclusions.
Le Président (M. Boucher): D'accord.
M. Cyr: Je ne me vois pas lire tout ça aujourd'hui.
Périodiquement, l'Association des chefs de police et de pompiers
du Québec a participé à des commissions parlementaires ou
a soumis des avis par écrit chaque fois que les divers gouvernements qui
se sont succédé ont désiré apporter des changements
législatifs sur la police ou amender la Loi de police depuis son
adoption en 1968. C'est ainsi que l'Association des chefs de police et de
pompiers du Québec a participé à la formulation de la Loi
de police et à la création de l'organisme moteur duquel
dépendait une bonne partie de l'application de cette loi, la Commission
de police du Québec.
En octobre 1973, l'Association des chefs de police et de pompiers du
Québec transmettait le mémoire pour provoquer des amendements
à l'article 63 de la Loi de police. En août 1976, devant une
commission parlementaire, un autre mémoire suivit, portant, cette
fois-ci, sur le projet de loi 41, qui devait modifier sensiblement certaines
parties de la Loi de police. Or, ce projet de loi n'a franchi que
l'étape de la première lecture, si bien que nous retrouvons
souvent les mêmes revendications en mai 1979.
Faisant l'historique des commissions, en 1968 la Commission
d'enquête sur l'administration de la justice en matière criminelle
et pénale au Québec, présidée par le juge Yves
Prévost, a déclenché, par le dépôt de son
rapport, une réforme qui devait comprendre le domaine de la police.
L'ex-ministre de la Justice, M. Jérôme Choquette, accordait, en
1971, une priorité au système policier dans un livre blanc
intitulé "La police et la sécurité des citoyens", et, par
ses propositions, indiquait ses intentions relativement au programme
d'action
de son ministère. Même si le livre blanc de 1975 de M.
Jérôme Choquette, "Justice contemporaine" ne portait pas seulement
sur la police, l'ex-minis-tre a néanmoins désiré faire
préciser les rôles de la Direction générale de la
sécurité publique par rapport à ceux de la Commission de
police du Québec.
En janvier 1978, le groupe de travail sur les fonctions
policières présidé par M. Lucien Saul-nier déposait
son rapport. Le 8 octobre 1976, un premier groupe de travail était
constitué et son mandat découlait de l'impact des
décisions de la Régie des mesures anti-inflationnistes, la
préoccupation de se prononcer sur la nature et l'exercice des fonctions
policières, ainsi que sur les organisations policières,
n'étant pas éliminée.
Le 16 mars 1977, le gouvernement élargissait ce mandat pour
comprendre le coût de financement de la protection policière et
l'équité fiscale, les conditions de travail des policiers, le
régime supplémentaire de rentes, ainsi que la définition
et le partage des responsabilités des pouvoirs publics. Durant cette
période, le Task Force and Policing in Ontario, présidé
par M. Haie, a déposé son rapport en février 1974 sur le
fonctionnement des organisations policières, des plans de
développement des ressources humaines, l'escalade des coûts de la
police et la stratégie fiscale.
De plus, il y a lieu de signaler que, le 12 décembre 1972, un
comité d'étude sur l'administration de la justice dans le Nord
québécois remettait un rapport sous le titre: La justice
au-delà du 50e parallèle, où les recommandations furent
formulées en regard de la protection des agglomérations d'Indiens
et d'Inuit. D'autres considérations ont été
apportées par deux représentants à l'Assemblée
nationale dans des publications connues de la population: M. Guy Tardif dans
"Police et politique" et M. Jean-Pierre Char-bonneau dans "La filière
canadienne". Quel bilan doit-on faire à la suite de ces nombreux
rapports?
Au niveau des structures d'organisation, la commission Prévost,
en se référant à une meilleure coordination
policière, écartait l'intégration complète de tous
les corps de police à la Sûreté du Québec
danger d'Etat policier suggérait l'abolition des services de
police desservant des populations de moins de 10 000 habitants et recommandait
le regroupement des forces policières en dix services de police
régionaux.
Même si, dès 1971, le ministre de la Justice a
soulevé la possibilité d'un ministère de
l'intérieur et d'une sûreté nationale et même si la
Sûreté du Québec a laissé germer l'idée de la
gendarmerie nationale du Québec devant le groupe de travail sur les
fonctions policières, le gouvernement du Québec ne semble pas
avoir opté, pour l'instant, pour un système policier
centralisé et unique. Le livre blanc sur la police et la
sécurité des citoyens proposait une loi-cadre sur la
régionalisation des forces policières, avec la nomination de
commissaires-enquêteurs chargés de procéder dans chaque
région à des inventaires et analyses pouvant permettre de
recommander les formules d'organisation qui conviennent davantage à la
région. Le rapport Saulnier, dans 34 zones désignées,
recommande l'établissement de corps de police de districts.
Malgré ces travaux et la longue réflexion qui a eu cours
dans les huit dernières années, la situation a peu
évolué relativement à des modifications d'envergure au
niveau du système policier qui prévaut encore aujourd'hui et de
son fonctionnement. En matière de formation, le Québec a fait
d'énormes progrès et peut même être cité comme
un Etat innovateur par les programmes produits conjointement avec l'Institut de
police du Québec dans les CEGEP et dans les universités. Les
programmes de prévention étant abandonnés, à la
suite du désistement de la Commission de police du Québec et des
efforts timides de la Direction générale de la
sécurité publique, l'Association des chefs de police et de
pompiers a décidé de créer des mécanismes
permettant l'implantation desdits programmes.
Le champ d'activité des policiers doit être mieux
défini pour éviter l'imposture par le domaine parapolicier, la
multiplication des organismes utilisant d'autres catégories d'agents de
la paix. A cet égard, malgré la recommandation de divers
rapports, nous sommes peu avancés Nous pourrions continuer l'exercice de
ce bilan; toutefois, notre seul objectif était de faire ressortir
l'impulsion que doit donner le gouvernement à certaines priorités
et l'imminence de prendre des décisions à la suite de ces
nombreux rapports.
Je reviens au texte original. Entre-temps, l'Association des chefs de
police et de pompiers du Québec a encouragé les initiatives
prises par le groupe de travail sur les fonctions policières par le
dépôt de deux mémoires et la présence au sein de ce
groupe de M. Gérard Giroux. Sans nécessairement appuyer toutes
les propositions et se porter caution de tous les passages du rapport Saulnier,
l'Association des chefs de police et de pompiers du Québec supportait
les propositions majeures dont notamment celles sur la constitution de corps de
police de districts, la création d'un inspectorat, le financement des
services de police, le réaménagement des pouvoirs de la
Commission de police du Québec, un régime minimal
supplémentaire de rentes. Devant les hésitations du gouvernement
à implanter la recommandation prioritaire du rapport, l'Association des
chefs de police et de pompiers du Québec a déposé des
documents et maintenu un échange de correspondance afin de
démontrer la vigilance de son action en ce dossier.
Ce mémoire s'inscrit donc dans une continuité de
démarches et respecte la philosophie de base développée
par les membres de l'Association des chefs de police et de pompiers du
Québec. Toutefois, étant donné l'intention du gouvernement
d'apporter sous peu des amendements à la Loi de police par le biais du
projet de loi no 48, nous émettrons des propositions d'amendement
relativement à la Loi de police avant d'aborder toute autre question qui
pourrait faire l'objet de réflexions par les instances gouvernementales.
Nous ne manquerons pas de vous suggérer des
moyens pour que soient réalisées nos propositions
d'amendement.
Implantation des mesures proposées dans le rapport Saulnier.
Depuis que le rapport Saulnier a été déposé, les
autorités gouvernementales semblent avoir été très
peu loquaces sur leur plan d'action, de sorte qu'on a laissé le chemin
libre à plusieurs initiatives et fantaisies. C'est ainsi que la
majorité des municipalités au sens du Code municipal ont aboli
leur corps de police, que des municipalités régies par la Loi des
cités et villes en ont fait tout autant malgré l'obligation
qu'elles ont de maintenir un service de police, que les effectifs ont
été réduits considérablement, au point de mettre en
danger le niveau de service et la qualité de la protection publique des
populations visées. (10 h 45)
Enfin, d'autres municipalités refusent d'évaluer la
pertinence des demandes d'accroissement d'effectifs, même dans les cas
où le taux d'encadrement est en deçà d'un seuil acceptable
par rapport à la criminalité et à la charge de travail. On
pousse même l'odieux de la situation jusqu'à geler de façon
indéfinie lesdits effectifs. Les vacuums ainsi créés
amènent la Sûreté du Québec à être
davantage présente dans ces municipalités et même à
assumer dans certains cas l'entière responsabilité des affaires
policières. Nous avons noté de l'improvisation dans les formules
de la Sûreté du Québec et même l'absence de protocole
d'entente à l'occasion. Il va sans dire que le gouvernement devra
préciser les politiques et fournir des indications plus explicites sur
le rôle de la Sûreté du Québec.
Que dire de la confusion entretenue sous la Direction
générale de la sécurité publique et sa juridiction,
surtout vis-à-vis de la Commission de police du Québec en
matière de prévention du crime et en formation? Le rapport
Saulnier pro-' posait plutôt un inspectorat qui répond à
l'Assemblée nationale et voyait la Commission de police se limiter
à un organisme quasi judiciaire. Encore Ici nous constatons que la
commission bénéficie de très peu de pouvoirs
exécutoires et que la Direction générale de la
sécurité publique qui a été ignorée dans le
rapport Saulnier n'a jamais vu son champ d'activité être bien
délimité. Comme l'Association des chefs de police et de pompiers
du Québec, sans nécessairement endosser tout le contenu du
rapport Saulnier, s'est tout de même solidarisée sur les
principales recommandations, notre association se permettra de reprendre
certaines de ces recommandations et même d'en approfondir et d'en
préciser la portée.
Les projets de réglementation de la Commission de police du
Québec et rôle consultatif de l'Association des chefs de police et
pompiers du Québec:
L'Association des chefs de police et de pompiers du Québec a
participé à de nombreux comités que la Commission de
police du Québec avait mis sur pied pour formuler des règlements
qui reflètent davantage les besoins et priorités. Des membres de
l'Association des chefs de police et pompiers du Québec étaient
désignés pour prendre charge de ces divers dossiers et rendre
compte à l'exécutif. Or, depuis quelques années, la
commission semble avoir suspendu ses initiatives au plan de la
réglementation et n'a pas convoqué l'Association des chefs de
police et de pompiers du Québec pour de tels projets. Exemple, le code
de déontologie, des normes d'embauche, insignes et grades. Il appert que
la commission est à nous éloigner de notre rôle de
consultation. La dernière expérience pour organiser la semaine de
la police s'est plutôt avérée malheureuse puisque la
commission a, à un moment donné, fait cavalier seul.
Tout indique que la Commission de police du Québec
préfère consulter les organismes individuellement. C'est ainsi
qu'elle a fait une tournée des régions et a tenu des rencontres
séparées avec les syndicats, les directeurs de police et des
administrateurs municipaux. Même si nous ne dénonçons pas
de façon véhémente cette approche, nous trouvons que cette
dernière ne cadre pas avec les politiques de rapprochement de la
commission qui ont donné lieu à des journées
d'étude annuelles et à des travaux en comité
interorganisationnel.
Nous voulons que la Commission de police du Québec et que les
autorités gouvernementales ne perdent pas leur pratique de consultation.
De plus, la performance sur la réglementation nous laissant maintenant
perplexes et sur nos appétits, nous nous chargerons d'exercer des
pressions afin de réactiver plusieurs dossiers.
Mise sur pied de mécanismes susceptibles de garantir
l'efficacité recherchée des forces policières. Soucieux
que nous sommes d'assurer les services de protection et de prévention
efficaces, nous nous permettrons de proposer des mécanismes tant
permanents que de transition, la coordination opérationnelle et la
décentralisation de la Commission de police du Québec seront
parmi les cibles de nos suggestions.
Vers un concept global de sécurité publique. Plusieurs de
nos membres s'occupent de la police, des incendies et même des services
ambulanciers. Ils sont, de plus, impliqués dans l'organisation des
mesures d'urgence municipales et certains occupent les fonctions de
coordonnateurs municipaux. Cette polyvalence que l'on retrouve au plan
municipal ne semble pas se répercuter au plan provincial où l'on
n'a pas cessé de multiplier les services de protection constitués
de constables spéciaux, de services d'enquête
spécialisés et de services d'inspection. Ces tendances doivent
malgré tout s'inscrire dans un concept de sécurité globale
où l'on doit orienter toutes les organisations à mieux se
coordonner et à être mieux encadrées.
Si vous me permettez, messieurs, je vais me reporter à la page
63, où débute l'approche comparative entre le projet de loi
modifiant la Loi de police et les propositions de l'Association des chefs de
police du Québec relatives à certaines dispositions de l'actuel
texte de loi.
Je vais omettre de lire cette partie qui comprend le 3.1, page 63: appui
inconditionnel de l'association à l'égard de certains articles
du
projet de loi. Le 3.2, c'est page 63: appui conditionnel de
l'association dû à des éléments de concordance. Le
3.3 à la page 68: propositions de l'Association des chefs de police et
de pompiers du Québec modifiant la Loi de police sur des articles
où le projet de loi no 48 a omis d'apporter des amendements. Finalement,
au 3.4 à la page 72: divergences marquées entre le projet de loi
no 48 et les propositions de l'Association des chefs de police et de pompiers
du Québec. Je vais me diriger immédiatement vers le sommaire et
les conclusions, si vous me le permettez.
Le Président (M. Boucher): Est-ce que vous tenez à
ce que votre mémoire soit retranscrit au complet dans le journal des
Débats?
M. Cyr: Je crois que ce serait cette partie. Il serait important
que ce soit retranscrit dans le journal des Débats.
Le Président (M. Boucher): Ce sera retranscrit au journal
des Débats. (Voir annexe A)
M. Cyr: Merci. Sommaire et conclusions. L'orientation corrective
et palliative des propositions. Certaines de nos propositions ont pour but de
corriger des situations que nous avons considérées comme
lacunaires ou détériorées. Il faut évaluer
davantage les sphères d'intervention des groupes responsables des
affaires policières pour éviter des rôles conflictuels.
Ainsi, il faudra voir à ce que la Commission de police du Québec
concentre son action au domaine quasi judiciaire, que la Direction
générale de la sécurité publique s'adonne à
la coordination opérationnelle et à l'encadrement des
activités, des programmes ayant une portée générale
et des services spécialisés, tandis que l'inspectorat limite son
rôle à la surveillance, au contrôle et à la
vérification.
Les chevauchements doivent également être
éliminés entre les organisations policières
(Sûreté du Québec, services de police municipaux et
Gendarmerie royale du Canada) puisque ce phénomène crée
plutôt des structures compétitives et d'affrontement, alors que
l'objectif visé devrait être une plus grande collaboration et
complémentarité entre les services de police.
Un système disciplinaire doit comporter des mécanismes
susceptibles d'assurer à la population que toutes les communautés
régionales sont dotées de bureaux de plaintes accessibles et que,
par voie de conséquence, le système instauré supporte une
justice expéditive et équitable. Nous avons prévu que les
divers paliers sont utlisés de façon à éviter que
les plaintes futiles suivent toutes les étapes du processus. Les mesures
à court terme concernant les organisations policières sont de
nature palliative et transitoire. En effet, nous souhaitons qu'à moyen
terme le gouvernement se fixe sur les recommandations du rapport Saulnier. Le
caractère de nos propositions s'inscrit donc dans un désir de
collaborer avec le gouvernement en étant conscients de contraintes
quelquefois imprévisibles relativement à l'implantation de
certaines propositions. Cette approche flexible devrait nous rendre
crédibles dans la consultation gouvernementale: les projets devront de
toute évidence être révisés fréquemment
à la lumière de faits nouveaux. Nos. propositions à
caractère correctif et palliatif sont formulées dans ce contexte
de façon pratique et réaliste.
Protection adéquate de la population par l'application de mesures
en vertu d'un échéancier de réalisation. A court terme.
Les municipalités qui ont moins de 5000 de population seraient
dorénavant protégées par la Sûreté à
moins qu'elles ne soient dotées d'un service de police. Ce service ne
peut toutefois réduire ses effectifs sans autorisation expresse du
ministre de la Justice à la suite d'une évaluation de
l'inspectorat. Les municipalités qui ont des populations entre 5000 et
20 000 habitants pourraient, par voie de contrat, voir leur territoire
protégé par la Sûreté du Québec. Ces contrats
comprendraient des clauses à l'égard de l'application des
règlements municipaux par les agents de la Sûreté du
Québec et de l'intégration des policiers municipaux à la
Sûreté du Québec. Si les municipalités optent pour
le maintien de leurs services de police, elles doivent répondre à
l'inspectorat de leur efficacité et avoir des effectifs dont le seuil
minimal est établi en tenant compte de divers facteurs (population,
charge de travail, territoire à couvrir, criminalité). Les
ententes intermunicipales peuvent être partielles et porter sur les
communications, l'identité judiciaire, les services techniques et
certaines fonctions spécialisées. Les ententes intermunicipales
et les contretypes de la Sûreté du Québec devraient faire
l'objet d'uniformisation et les modèles développés
devraient être conservés à la Direction
générale de la sécurité publique pour être
remis comme information à toute partie intéressée.
Les municipalités qui ont à faire face à des
besoins saisonniers reliés au tourisme peuvent procéder à
la nomination de constables spéciaux pour des périodes pouvant
aller jusqu'à quatre mois. Les constables spéciaux devront se
conformer aux normes d'admissibilité en vigueur. De plus, ils doivent
être encadrés par les organisations policières reconnues:
un service de police municipal ou une unité opérationnelle de la
Sûreté du Québec.
A moyen terme, la Direction générale de la
sécurité publique devrait mettre sur pied des centres
régionaux tactiques et opérationnels pour faciliter la
coordination d'opérations policières d'envergure
régionale, offrir une assistance compétente et professionnelle
à l'égard de programmes à l'échelle du
territoire.
A long terme, selon les critères du rapport Saulnier, le
gouvernement délimiterait les juridictions territoriales et les
rôles des corps de police de district et de la Sûreté du
Québec. Même si, sur certains points, la Direction
générale de la sécurité publique pourrait modifier
le mandat des centres régionaux tactiques et opérationnels, ils
devraient être maintenus pour les régions comprenant plusieurs de
corps de police de district.
Droits acquis et sécurité des policiers municipaux lors
d'intégrations. Les policiers municipaux qui sont touchés par des
abolitions sont intégrés à la Sûreté du
Québec à une fonction équivalente à celle qu'ils
occupaient avant l'abolition. S'il s'agit d'une intégration, selon le
scénario à la Sûreté du Québec, les policiers
municipaux sont assimilés à la classe salariale de la
Sûreté du Québec correspondant aux responsabilités
d'une fonction équivalente à celle qu'ils occupent
présentement. Ils peuvent de plus se prévaloir de droits acquis
concernant les affectations et les transferts.
Renforcement des dispositions à l'égard des conditions de
travail et du professionnalisme. Un dirigeant ou un gestionnaire d'un service
de police, un cadre et un policier doivent être soumis, pour sauvegarder
l'intégrité du milieu policier, à un code de
déontologie uniforme. L'admissibilité à la profession
policière se trouve assortie, pour ceux qui proviennent des CEGEP, d'une
exigence additionnelle, à savoir un stage obligatoire avant la
cinquième session. Cette étape serait éliminatoire pour
ceux qui ne pourraient satisfaire aux assesseurs des services de police
accrédités. Les municipalités ne pourraient
congédier et réduire le traitement des directeurs, des
non-salariés au sens du Code du travail et des policiers syndicables
mais non représentés par une association dûment
accréditée sans qu'il y ait eu enquête de la Commission de
police du Québec.
Les policiers, par ces dispositions, sont présumés pouvant
continuer d'exercer leurs fonctions jusqu'à l'issue de l'enquête
de la Commission de police du Québec, à moins que lesdits
policiers reconnaissent avoir commis une faute lourde et acquiescent que les
mesures prises sont justifiées. Le fardeau de la preuve revient donc
à la municipalité et la Commission de police du Québec
doit mener ses enquêtes de façon expéditive à cause
des incidences monétaires y rattachées.
Le droit d'appel n'existe que si la municipalité a pris lesdites
dispositions sur recommandation de la Commission de police du Québec.
L'échelle indicative de salaires serait remplacée par une autre
formule qui donnerait au directeur d'un service de police un salaire
égal à 150% du salarié le mieux
rémunéré. L'écart entre chaque cadre
intermédiaire ne serait pas supérieur à 10%. Les avantages
sociaux du directeur et des autres non-salariés au sens du Code du
travail sont ceux prévus par la convention collective.
Les rentes viagères des veuves et des enfants n'ayant pas atteint
la majorité pourraient atteindre 70% du salaire du policier, avec 50%
pour la veuve et 5% par enfant jusqu'à un maximum de 20%. De plus, nous
introduisons le principe d'indexation pour éviter toute mesure
aléatoire et suivre les fluctuations du coût de la vie.
La Commission de police, l'Inspectorat et la Direction
générale de la sécurité publique. La Commission de
police du Québec est confinée à des rôles qui
découlent de ses pouvoirs quasi judiciaires. Ainsi, le fonctionnement
des conseils régionaux de discipline et les préenquêtes
relève- raient d'un commissaire qui pourrait administrer un bureau
régional et être assisté, dépendant des demandes,
d'enquêteurs et de conseillers.
Les préenquêtes s'effectueraient après les
vérifications des enquêteurs et se tiendraient à huis clos.
A cette phase, la commission pourrait décider de poursuivre au niveau de
l'enquête proprement dite. Les conseils régionaux de discipline
vont permettre d'épurer bon nombre de cas qui ne nécessitent pas
l'intervention de la Commission de police du Québec. (11 heures)
Le rôle de conseiller les municipalités et les services de
police se traduit par un service de conseillers techniques et évite que
l'on ait recours aux firmes privées de consultants. Dans son rôle
d'enquête, la Commission de police du Québec pourra
dorénavant imposer des pénalités et même passer des
ordonnances. Un palier d'appel serait toujours possible auprès de la
Cour provinciale.
Inspectorat. L'inspectorat se rapporterait à l'Assemblée
nationale et, dans son rôle de contrôle, soumettrait la
Sûreté du Québec et tous les services de police municipaux
à une inspection annuelle. En plus de soumettre le rapport de
vérification aux autorités compétentes, l'inspectorat
examinerait les performances des services gouvernementaux de
sécurité et d'enquête et évaluerait de façon
constante le niveau de services rendus par les organisations policières
à l'aide d'indicateurs.
Direction générale de la sécurité publique.
La Direction générale de la sécurité publique
continuerait d'exercer un rôle de développement et de coordination
en matière de formation de police scientifique, de la recherche et
d'autres attributions reliées au support opérationnel des
services de police. De plus, les centres régionaux tactiques
opérationnels axeraient les initiatives de la Direction
générale de la sécurité publique sur des
opérations de collaboration des programmes interservices, dont l'analyse
opérationnelle de la criminalité et la prévention du
crime. Notre association présente cette répartition tripartite
comme un palliatif et serait disposée à présenter des
recommandations supplémentaires si tel était le souhait du
gouvernement.
Egalité de statut La Gendarmerie royale du Canada.
Dorénavant, les membres de la Gendarmerie royale du Canada pourraient
être soumis, à la suite de plaintes, aux enquêtes de la
Commission de police du Québec. La Sûreté du Québec
et les policiers municipaux, les directeurs de services de police municipaux
bénéficient à maints endroits dans nos propositions des
mêmes privilèges et droits que ceux du directeur
général de la Sûreté du Québec.
Le Président (M. Boucher): Merci, M. Cyr.
M. Cyr: Si vous me le permettez, M. le Président, j'aurais
seulement une petite intervention...
Le Président (M. Boucher): Allez-y.
M. Cyr: ... qui est un peu une mise en garde. Si vous voulez vous
référer à la page 66, à l'article 3.2.7, l'article
29, nous trouvons quelque peu dangereux que la Sûreté du
Québec agisse de sa propre initiative et nous proposons que, sur cet
aspect, vous vous en remettiez à nos commentaires généraux
de 2.13, 2.13.1 et 2.13.2, pages 35 et 36, qui se lisent comme suit:
Commentaires généraux de l'association sur la section III portant
sur la Sûreté du Québec. Lorsqu'un service de police
municipal demande en assistance la Sûreté du Québec, il
conserve sa juridiction et continue de diriger les opérations et de
contrôler les initiatives. Néanmoins, si le service de police
municipal transfère à la Sûreté du Québec sa
responsabilité, l'intervention cesse d'être
interprétée comme un cas d'assistance et la Sûreté
du Québec considère cette intervention comme une activité
qui lui est propre.
Dans une région donnée, lorsqu'il y a une situation
d'urgence, nous ne croyons pas que seule la Sûreté du
Québec pourrait être désignée pour diriger les
opérations. En attendant la constitution des corps de police de
district, la Direction générale de la sécurité
publique, par des centres régionaux de coordination, pourrait confier
à des coordonnateurs et un personnel de la Sûreté du
Québec et des services de police municipaux qui l'assisteraient le soin
de planifier et coordonner les opérations et programmes
nécessitant une collaboration interservices.
Il est entendu que si cette solution n'est pas retenue, le leadership
d'une situation peut être assumé par un directeur de service de
police municipal.
Merci, M. le Président. Merci, messieurs de la commission
parlementaire.
Le Président (M. Boucher): Merci, M. Cyr. M. le
ministre.
M. Bédard: M. le Président, je tiens à
remercier au nom des membres de la commission l'Association des chefs de police
et de pompiers du Québec pour le mémoire très
élaboré qu'elle nous a présenté. Il constitue, je
pense, une contribution imposante aux travaux de cette commission et traduit
bien l'attention continuelle et préventive, qu'on exprime au
début du mémoire, de l'Association des chefs de police et de
pompiers du Québec par rapport à toute modification concernant la
Loi de police. Dans votre mémoire, il y a quelques points que je
voudrais toucher. Je suis convaincu que mes collègues en ont aussi
plusieurs; je me limiterai à trois ou quatre, dans un premier temps.
Vous parlez de la création d'un inspectorat relevant de
l'Assemblée nationale ou, à titre de concession, tel que vous le
dites, relevant de la Direction générale de la
sécurité publique. Vous parlez également de la mise sur
pied d'une véritable Direction générale de la
sécurité publique. Pourriez-vous nous expliciter le plus possible
les pouvoirs que vous verriez attribuer à un inspectorat, les pouvoirs
que vous voulez voir attribuer à la
Direction générale de la sécurité publique,
afin de nous permettre, au niveau des membres de la commission, d'examiner la
différence?
M. Cyr: Si vous permettez, M. le ministre, mes collègues
étaient préparés sur certains points. Je demanderais au
directeur Emile Turgeon...
M. Bédard: Je vous demande d'expliciter ces pouvoirs parce
que, dans votre mémoire, vous indiquez votre préférence
pour la création d'un inspectorat et d'une véritable Direction
générale de la sécurité publique, mais sans
expliciter d'une façon particulière les pouvoirs que vous verriez
attribuer à l'une ou l'autre de ces instances.
M. Cyr: Le directeur Gérard Giroux peut vous donner les
explications.
M. Giroux (Gérard): M. le ministre, quand vous parlez de
pouvoirs, dans notre mémoire, nous pensons à trois organismes: la
Commission de police, la Direction générale et l'inspectorat. Les
devoirs et obligations de la direction générale seraient des
devoirs de coordination des efforts policiers, l'élaboration de
programmes préventifs, la fourniture de services
spécialisés et la coordination des efforts policiers. Je pense
qu'en résumé, c'est vers cela qu'on se dirige, c'est cela qu'on
suggère.
Quant à l'inspectorat, ce serait l'organisme qui serait
chargé de faire l'évaluation des services policiers et de faire
les inspections de services policiers, de façon à pouvoir avoir
une perception juste de leur efficacité et évidemment, par le
fait même, de déterminer certains besoins. Ce pouvoir de
l'inspectorat, qui répondrait à l'Assemblée nationale,
serait susceptible d'informer annuellement le gouvernement sur la situation
policière.
Quant à la Commission de police, nous voyons son rôle
confiné à un rôle quasi judiciaire et avec un pouvoir,
quand même, dans certains domaines comme la discipline, d'émettre
des ordonnances.
Je ne sais pas, M. le ministre, si cela répond à votre
question.
M. Bédard: Cela traduit essentiellement ce qui est dans le
mémoire. Je ne sais pas si vous pouvez être plus explicite sur
certains de ces pouvoirs. Quand on parle de créer un nouvel organisme
qui serait l'inspectorat, nous nous sommes posé la question, à
savoir jusqu'à quel point on pouvait être efficace en
créant continuellement d'autres organismes. Je pense que la
prolifération des organismes en termes de surveillance...
M. Giroux: C'est parce que...
M. Bédard: A trop créer d'organismes, on
évaluait le risque de devenir peut-être plus ou moins efficace.
D'un autre côté, je vous demande si vous ne croyez pas que la
fonction de l'inspectorat, qui est essentiellement de vérifier
l'efficacité policière, l'efficacité de la protection
policière à laquelle a droit l'ensemble des citoyens et
la planification des activités policières, ne peut pas se
retrouver efficacement dans un même organisme. Est-ce que le fait de
pouvoir vérifier l'efficacité policière ne constitue pas
un apport important pour pouvoir mieux planifier l'efficacité
policière?
Autrement dit, est-ce qu'il n'y a pas de danger, en répartissant
trop de pouvoirs dans trop d'organismes, qu'on soit obligé à un
moment donné presque d'en créer encore un autre pour faire une
certaine planification entre ces organismes-là et de faire en sorte que
l'expérience d'un organisme serve à d'autres organismes, à
accoucher de solutions. C'est dans ce sens-là que nous je vous le
dis très humblement, je ne suis pas un spécialiste des
activités policières croyons qu'un organisme qui a la
possibilité ou le devoir de vérifier l'efficacité
policière, à la lumière de cette expérience de
vérification, peut être bien placé pour, ensuite, planifier
l'efficacité de l'opération policière.
M. Giroux: Vous pensez à la direction
générale à ce moment-ci?
M. Bédard: Enfin, je ne pense pas à un endroit en
particulier, je pense simplement au problème global que les citoyens ont
en tête d'avoir la plus grande efficacité policière, la
plus grande protection policière possible.
M. Giroux: Dans notre réflexion, nous voyons un danger
à ce que la Commission de police soit l'organisme qui vérifie,
inspecte et conseille les corps de police et, en même temps, l'organisme
qui fait les enquêtes sur les corps de police. Nous voyons un conflit
possible...
M. Bédard: Pourriez-vous donner des exemples précis
où le conflit existe?
M. Giroux: Nous voyons un corps de police qui suivrait les
recommandations après une étude de la Commission de police et qui
arriverait en conflit ou qui serait sujet à des plaintes, la Commission
de police devrait enquêter sur le corps de police parce qu'il a suivi ses
propres recommandations. Or, à prime abord, la Commission de police
devrait confier je pense dans le sens des recommandations... en fait, c'est de
nature à créer un conflit certain. C'est une de nos
préoccupations et c'est pour ça que nous suggérons la
création d'un organisme de surveillance et de conseil des corps de
police, un organisme de mesure d'efficacité. C'est là que
l'inspectorat entre en ligne de compte.
Si on a suggéré la création d'un troisième
organisme qui est l'inspectorat, c'est que, dans notre esprit, la Commission de
police, dans son rôle quasi judiciaire, peut difficilement avoir un
rôle de conseiller également, parce que conseiller et, par la
suite, faire des enquêtes sur l'application des suggestions de la
Commission de police et de la Direction générale de la
sécurité publique, peut créer un état de conflit.
Donc, quant à la direction générale de la
sécurité, nous lui voyons un rôle de coordination et un
rôle de programmation des activités policières en
matière de prévention du crime, par exemple, l'élaboration
de programmes de prévention du crime et la coordination dans
l'application de ces programmes. Encore une fois, je pense que élaborer
des programmes, les coordonner et ensuite les évaluer, ce n'est pas
encore tout à fait... il y a encore un danger de conflit à ce
moment-là. C'est pourquoi nous croyons que le troisième organisme
est nécessaire pour l'évaluation de l'efficacité
policière face aux outils qu'on lui fournit par la direction
générale et face aussi à la possibilité que la
commission doive tenir des enquêtes sur le comportement des corps
policiers.
M. Bédard: Dans l'hypothèse où il y a, deux
organismes à savoir: la Commission de police et la Direction
générale de la sécurité publique, comment
verriez-vous la répartition des pouvoirs?
M. Giroux: Entre les deux seulement?
M. Bédard: Oui. A partir du moment où on ne
s'oriente pas vers l'établissement d'un nouvel organisme, la
création d'un nouvel organisme, comment verriez-vous la
répartition des pouvoirs entre les organismes qui existent
présentement, qui sont, d'une part, la Commission de police et la
Direction générale de la sécurité publique?
M. Giroux: Je crois, M. le ministre, que notre
préoccupation, face aux pouvoirs de la Commission de police d'examiner
et de conseiller, est inconciliable avec le pouvoir de faire enquête. Or,
si le gouvernement pense à deux organismes, je pense qu'on devra confier
à la direction générale certains pouvoirs de conseil et
d'inspection, alors que la Commission de police devra s'en tenir à un
rôle quasi judiciaire, parce que les deux peuvent difficilement aller de
pair. (11 h 15}
M. Bédard: Si on allait dans le sens que vous dites, du
partage dont vous faites mention, est-ce qu'il n'y aurait pas danger que le
gouvernement ou encore le ministère de la Justice soit taxé de
vouloir exercer un contrôle complet sur l'ensemble des corps
policiers?
M. Giroux: C'est un peu pour cela, M. le ministre, c'est une des
raisons pour lesquelles on suggère un inspectorat qui réponde
à l'Assemblée nationale. Parce que si, en fait, l'inspectorat,
qui va mesurer l'efficacité policière, qui va recommander les
effectifs nécessaires pour être efficace, répond à
l'Assemblée nationale, le gouvernement ne pourrait pas être
taxé, à ce moment-là, d'ingérence dans les affaires
policières. Il serait le conseil et celui qui prévoit les
programmes. Par contre, il ne serait pas l'organisme qui évalue
l'efficacité policière et qui coordonne l'activité
policière.
M. Bédard: Dans votre mémoire, vous êtes
d'accord sur l'instauration des constables spé-
ciaux. Vous dites qu'ils devraient relever j'emploie vos termes
fonctionnellement de la Sûreté du Québec...
M. Giroux: Pas de la Sûreté du Québec.
M. Bédard: ... du corps de police municipal. Pourriez-vous
être plus explicite de ce côté-là? Comment
verriez-vous cette manière de relever...
M. Giroux: Nous prétendons, M. le ministre, que les
constables spéciaux qui pourraient être engagés dans une
municipalité par rapport à la vocation touristique d'une
municipalité, pour une période de quatre mois, doivent
répondre à un organisme policier opérationnel. Si la
municipalité a déjà un corps de police et qu'elle engage
des constables spéciaux pour la période estivale, ces constables
spéciaux dépendent du corps de police, du directeur de police. Si
c'est une municipalité qui n'a pas de corps de police municipal et
qu'elle engage des constables spéciaux pour l'été, nous
sommes d'opinion que ces constables spéciaux doivent dépendre
d'un organisme opérationnel, c'est-à-dire du détachement
de la Sûreté du Québec qui couvre ce territoire, de
façon que ces constables spéciaux ne dépendent pas
exclusivement de l'autorité municipale, mais dépendent d'un corps
de police opérationnel dans la région.
Je ne sais pas si je me suis bien fait comprendre. Je
répète cela. Si ce sont des constables spéciaux qui sont
engagés par une municipalité pour augmenter les effectifs
à cause de la période estivale et à cause du
caractère touristique d'une municipalité, les constables
spéciaux sont sous la direction du chef de police de la
municipalité. Si c'est dans un territoire qui n'est pas couvert par la
municipalité, les constables spéciaux qui sont engagés
pour la période estivale sont sous l'autorité de la
Sûreté du Québec qui couvre ce territoire. Evidemment, ces
constables spéciaux sont obligés de respecter les normes
d'admissibilité du règlement no 7 de la Commission de police.
M. Bédard: Je vous ferai remarquer que cela pourrait
peut-être se faire sans même changer la loi, parce qu'à
l'article 70 de la Loi de police on stipule que les constables spéciaux
nommés en vertu de l'article 64 exercent leurs pouvoirs sous la
direction du procureur général ou sous celle de la personne qu'il
indique.
Une Voix: Mais il y a les normes d'embauche.
M. Giroux: II y a les normes d'embauche aussi. Si le procureur
général donnait instruction que les constables spéciaux
il ne serait peut-être pas nécessaire d'avoir une loi
dépendent de l'autorité du service de police qui a
juridiction sur le territoire, soit la Sûreté du Québec ou
un corps de police municipal, cela revient à la même chose, je
suis bien d'accord avec cela. Simplement, ce que nous voulons, c'est que les
constables spéciaux dépendent d'une autorité
policière opérationnelle pour le temps où ils sont en
fonction.
M. Lalonde: Si vous le permettez, seulement parce que nous sommes
dans les constables spéciaux, à l'article 64, je ne suis pas
sûr qu'on parle des mêmes constables spéciaux. Quand vous
parlez du tourisme, c'est pour une fonction bien particulière, alors que
les constables spéciaux visés par l'article 64 ont une fonction
policière; maintenir l'ordre, prévenir le crime. Si vous lisez la
fonction des constables spéciaux dans l'article 64, ce sont des
policiers d'urgence, au fond.
M. Giroux: C'est cela. C'est ce dont nous parlons.
M. Lalonde: C'est ce que vous voulez dire à la page 81.
C'est la même chose?
M. Giroux: Oui.
M. Lalonde: D'accord.
M. Bédard: Dans votre mémoire, également,
vous demandez l'établissement d'une préenquête lors de
plaintes qui sont portées contre des policiers et vous demandez de
prévoir même des amendes dans le cas de plaintes frivoles
présentées par des citoyens. Pourriez-vous nous donner de plus
amples explications, surtout sur le fait de lui demander de prévoir
même des amendes dans le cas de plaintes frivoles?
M. Vézina (Robert): M. le ministre, M. le
Président, si nous avons fait cette proposition, c'est pour
éviter que des personnes ou des groupes de personnes puissent porter des
plaintes contre des policiers et que ces plaintes ne soient pas
réellement acceptables. C'est tout simplement pour éviter des
abus. On demande une préenquête. Si c'est une plainte qui est
jugée futile, qu'on applique les amendes suggérées.
M. Bédard: Selon l'expérience que vous avez, est-ce
que vous prétendez qu'il y a des abus dans ce domaine?
M. Vézina: Personnellement, je ne suis pas en mesure de
vous dire s'il y a eu des abus. Je pense que ce sont ceux qui font
enquête qui sont en mesure de répondre à cette question.
Ceux qui auraient des pouvoirs de faire enquête.
M. Bédard: Egalement, votre mémoire parle de la
nécessité d'une enquête de la Commission de police sur
toute destitution, réduction de salaire d'un policier non salarié
ou non représenté par une association accréditée.
Pourriez-vous nous donner de plus amples explications là-dessus ou nous
expliquer quels sont les problèmes auxquels ont à faire face
certains policiers dans le cas de réduction de salaire ou de
destitution?
M. Giroux: Nous nous référons tout simplement
à l'article 35 de la Loi de police, si je ne me trompe, qui
détermine comment le directeur géné-
ral de la Sûreté du Québec peut être
destitué. Il ne peut pas l'être par le gouvernement sans une
enquête. Alors, nous voyons difficilement qu'il y ait deux modes
différents de possibilité de congédiement d'un directeur
de police. C'est pourquoi nous disons qu'il doit y avoir une enquête de
la Commission de police avant que la résolution du conseil puisse
s'appliquer.
Deuxièmement, nous trouvons odieux qu'une décision prise
à la majorité absolue du conseil porte une suspension avec
réduction de traitement. A ce moment-là, je trouve que l'on
condamne avant même que l'enquête soit faite la personne qui est
visée dans la résolution du conseil. C'est dans cette optique que
nous prétendons qu'il doit y avoir une enquête de la Commission de
police sur le congédiement ou la réduction de traitement d'une
personne non syndiquée ou d'un policier qui n'est pas couvert par une
accréditation syndicale. C'est dans ce sens qu'est notre
préoccupation.
M. Bédard: Je vous remercie. On pourra revenir avec
d'autres questions. Je vais laisser la parole à mes
collègues.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: Merci, M. le Président. Je veux remercier les
représentants de l'Association des chefs de police et de pompiers du
Québec pour leur mémoire qui fait preuve d'une réflexion
en profondeur et qui sera sûrement utile aux membres de la commission
dans l'examen de ce projet de loi.
J'aurais quelques questions. Au départ, vous portez non pas des
accusations, mais des jugements qui m'apparaissent graves dans un cas, par
exemple, lorsque vous dites, à la page 3 de votre mémoire: "C'est
ainsi que la majorité des municipalités, au sens du Code
municipal, ont aboli leur corps de police." C'est factuel, j'imagine que c'est
relativement facile de calculer s'il y a une majorité des
municipalités au sens du Code municipal qui ont aboli leur corps de
police. Et vous continuez: "... que des municipalités régies par
la Loi des cités et villes en ont fait tout autant." Je pense que
là, tout le monde est pas mal au courant aussi de ce
phénomène qui a accompagné ou subi l'inflation dans les
quelques dernières années.
Maintenant, vous allez plus loin. Vous dites que les effectifs ont
été réduits considérablement au point de mettre en
danger le niveau des services et la qualité de la protection publique
des populations visées. Cela m'apparaît être un jugement qui
est grave. Est-ce que vous pourriez élaborer votre pensée
là-dessus? D'abord, est-ce que c'est un jugement général
pour toutes les populations visées, c'est-à-dire la
majorité des municipalités au sens du Code municipal et les
municipalités au sens de la Loi des cités et villes qui ont aboli
leur corps policier? Est-ce que, réellement, la protection publique des
populations visées ou la qualité de la protection publique a
été mise en danger? Est-ce que vous voulez dire que la
population, en fait, a été mise en danger ou si c'est simplement
une réduction que la Sûreté du Québec n'a pas
été capable d'assumer? Est-ce que vous pourriez élaborer
votre idée là-dessus?
M. Turgeon (Emile): Voici. Nous avons suivi ce dossier avec
beaucoup d'attention, au cours des deux dernières années
particulièrement, depuis que le phénomène se produit qu'il
y a abandon de corps policiers, réduction des effectifs,
non-remplacement des départs à l'intérieur des corps
policiers. Cela s'est présenté particulièrement au niveau
des petits corps policiers. La municipalité régie par le Code
municipal, qui avait institué au cours des années un corps
policier de 1, 2, 3, 4 ou 5 policiers, pour des raisons, pour une justification
qu'on disait appuyée sur des raisons économiques, abandonnait
tout simplement le corps policier et disait à la population:
Dorénavant, ayez recours à la Sûreté du
Québec, si vous avez besoin des services policiers. Depuis deux ans, il
ne faut pas se leurrer, il y a un moratoire effectif sur les corps policiers en
ce qui concerne l'embauchage, et il n'en va pas seulement des petits corps
policiers, mais aussi des corps policiers d'envergure. Nous n'avons
malheureusement pas le dossier ici. Nous avons un dossier monté
là-dessus. On pourrait vous donner les endroits, les réductions
effectives qui ont eu lieu dans toutes ces villes et villages de tout le
Québec. C'est tout de même, à un moment donné, une
situation qui est devenue alarmante.
C'est à ce point que nous avons pressé le ministre,
à un moment donné, de saisir les municipalités des
responsabilités auxquelles la loi les obligeait, particulièrement
les villes assujetties à la Loi des cités et villes.
Effectivement, le ministre a donné suite à nos pressions et il a
fait une mise en garde aux autorités de ces villes. D'une façon
peut-être encore plus sournoise, on a continué, dans certains cas,
de discontinuer ou d'abandonner certains services policiers à la
population en refusant d'embaucher le personnel requis et justifié et
tout autant en ne remplaçant pas le personnel à remplacer. On en
est venu à créer des situations tout à fait
injustifiables. Par exemple, on pourrait citer le cas de villes ayant quatre ou
cinq policiers, par écrit on pourrait donner en détail des cas
où on abandonnait tout simplement les quatre ou cinq policiers qui
étaient à la charge de cette ville, gardant en poste simplement
un chef de police que l'on situait derrière un pupitre et qui avait
à répondre aux appels téléphoniques et à
transmettre ces appels et à faire part des besoins de la population
à la Sûreté du Québec. Ce sont des choses qui se
sont produites dans plusieurs endroits au Québec. Nous pourrions vous
donner un dossier étoffé sur ce sujet. Notre dossier n'est
malheureusement pas disponible ce matin.
M. Lalonde: J'interprète votre réponse comme si
vous aviez déjà transmis ce dossier au ministre dans vos
représentations.
M. Turgeon: II en a été saisi et il connaît
aussi les préoccupations que nous avons là-dessus.
M. Lalonde: Est-ce que, depuis deux ans que le
phénomène a commencé, il y a eu des correctifs autres que
la mise en garde du ministre dont vous avez fait état? Est-ce qu'il y a
eu des correctifs? Est-ce que vous pensez que la situation est encore alarmante
ou si vous voyez une évolution dans cette situation?
M. Turgeon: La situation semble s'être
atténuée. Toutefois, il reste des vestiges de cela et il reste
tout de même que cela se perpétue dans le non-remplacement du
personnel particulièrement dans les grands corps policiers ici, à
l'inverse peut-être des autres, où il y a abandon des services
policiers. Nous ne sommes peut-être pas en mesure de vous
détailler tout cela, car ces grands corps policiers,
nécessairement, ne se rapportent pas à nous pour nous faire part
de leurs doléances en cette matière.
M. Bédard: Quand vous parlez de grands corps policiers
vous parlez de la CUM, de Québec?
M. Turgeon: Cela pourrait être cela, et la
Sûreté même, dont on a des bribes d'information indiquant
que c'est une situation qui persiste. (11 h 30)
M. Lalonde: Est-ce que cette situation serait assez alarmante,
d'après vous? Je ne veux pas me faire alarmiste; je veux quand
même bien mesurer le jugement grave que vous portez. Peut-être que
la situation est moins grave que ce qu'elle m'a paru quand j'ai lu votre
mémoire. J'aimerais pouvoir terminer. Est-ce que vous croyez que c'est
suffisamment grave pour soumettre ces phénomènes de
non-remplacement, par exemple, ou de réductions des corps policiers plus
considérables qui, d'après vous, n'embauchent pas suffisamment ou
ne remplacent pas les départs? Est-ce que vous croyez que c'est
suffisamment grave pour soumettre ça à la Commission de police
pour enquête ou au ministère? Est-ce que vous l'avez fait?
M. Turgeon: Nous faisons face à une situation qui n'est
peut-être pas le cas où l'on devrait faire des
représentations à la Commission de police ou ailleurs. C'est une
décision qui vient d'autres lois que celles qui affectent la Loi de
police ou la bonne marche d'un service de police, par exemple. Ce sont
effectivement des crédits qui sont votés dans les
municipalités pour les besoins du service de police.
Alors, on doit déduire que le législateur municipal est en
voie de nous dire: Voici, diminuez les services que vous devez donner à
la population; en effet, il permet de diminuer les effectifs. C'est ce qui se
produit dans les villes, par exemple, où l'on s'est départi de
son corps policier. Alors, la Sûreté du Québec fait la
relève pour l'application du Code de la route, par exemple, ou du Code
criminel. La Sûreté du Québec se désiste d'appliquer
les règlements municipaux. Alors, les citoyens de cette
municipalité qui, au préalable, avaient des constables municipaux
qui s'occupaient ou s'affairaient à l'application des règlements
municipaux, n'ont tout simplement plus ces services. Les services policiers
sont diminués d'autant dans cette agglomération ou au sein de
cette population.
Nous faisons face à cette situation. Les services policiers aux
citoyens sont à la baisse, effectivement.
M. Lalonde: Je vous remercie. J'aimerais poser quelques autres
questions concernant les constables spéciaux ou tout le secteur
parapoli-cier. L'association a des propos contre ce phénomène,
disant qu'il y a une prolifération de services d'inspection ou de
services... C'est dans votre mémoire quelque part, à la page 6,
services d'enquête spécialisés. Est-ce que vous avez
déterminé ou défini les critères qui devraient
présider au choix de services spéciaux je ne parle pas des
constables spéciaux d'urgence, tel que prévu par l'article 64,
mais des services d'inspection, par exemple, des services d'enquête
spécialisés à savoir si ça devrait
appartenir au système policier ou non? Pensons, par exemple, quand on a,
il y a quelques années je ne sais pas si c'est deux ou trois ans
institué les services pour les billets de stationnement. Je pense
que ça fait deux ans. Je pense bien que ça n'a pas soulevé
de grands débats. Pensons toutefois aux remarques du groupe Saulnier, le
groupe de travail, qui, à un moment donné, disait que, si on
avait confié aux policiers le soin d'inspecter certaines installations,
certains bâtiments, certains commerces, on n'aurait peut-être pas
eu le phénomène de la viande avariée qu'on a
découvert en 1975. Je pense que c'est mot à mot ou enfin que
c'est un cas précis qui a été mentionné par le
groupe Saulnier. Est-ce que vous vous êtes imposé cette
réflexion? Quels sont les critères où le service policier
commence et où ça finit? A ce moment, ce serait plus facile de
déterminer si on confie aux services policiers actuels le soin de
certaines surveillances, de certaines inspections. Ou bien si on doit, si les
gouvernements doivent instaurer de nouveaux services d'inspection. Si vous
voulez, vous pouvez parler des agents de sécurité dans votre
réflexion, qu'on a vus...
M. Simard (Guy-Paul): M. le Président, une des raisons
pour lesquelles nous nous inquiétons de la prolifération, de la
multiplication des corps de police parapoliciers, c'est à cause du
manque de coordination. Comme directeur de police dans nos villes, à un
moment donné, on voit arriver toutes sortes d'organismes qui nous sont
très peu connus et on s'aperçoit qu'ils ont un rôle
d'enquête soit pour un ministère ou pour un autre. Nous nous
apercevons, comme nous l'avons mentionné tantôt, que la Direction
générale de la sécurité publique ne peut pas
coordonner comme nous le désirerions. C'est pour cette raison que
nous
demandions qu'il y ait un peu plus d'uniformité dans les
enquêtes, que ce soit pour le ministère du Revenu, le
ministère des Finances, le ministère des Affaires sociales. Nous
pensons que les enquêtes appartiennent au policier. C'est pour cette
raison que nous, les policiers municipaux, pensons que les citoyens urbains
seraient mieux servis si nous continuions notre rôle d'enquêteur
connaissant les citoyens, étant plus proches d'eux. Avec une
multiplication de différents organismes d'enquête, nous trouvons
que nous perdons le contrôle des enquêtes dans nos villes. Si on a
besoin de spécialistes, on peut toujours aller en chercher, comme on
voit les vérificateurs du ministère du Revenu ou de l'impôt
qui, à un moment donné, viennent nous demander assistance pour
des perquisitions. Je pense que c'est ainsi que cela devrait être fait,
mais ne pas en faire des policiers eux-mêmes.
M. Lalonde: Mais ai-je bien compris votre réponse,
à savoir qu'aussitôt qu'il y a possibilité d'enquête,
quel que soit le degré de danger de la situation, cela devrait
appartenir aux corps policiers? Est-ce que j'interprète bien votre
réponse?
M. Simard: S'il y a des perquisitions à faire, comme vous
le savez, comme agents de la paix, le Code criminel nous donne ce pouvoir. Nous
comprenons mal que ce pouvoir...
M. Lalonde: Un instant! Si vous me le permettez, le Code criminel
ne donne pas aux policiers plus de pouvoirs qu'aux citoyens en ce qui concerne
les mandats de perquisition. N'importe qui peut aller en demander. C'est un
juge qui les donne.
M. Simard: Pour l'exécution, M. le Président.
M. Lalonde: Ah! Pour l'exécution. Oui, d'accord, mais pas
pour la demande. Est-ce que j'ai bien compris que c'est au niveau de
l'enquête, à savoir aussitôt qu'il y a possibilité
d'enquête, cela devrait appartenir à la police? Est-ce que je vous
ai bien compris, parce que c'est important? Il y a des sous-enquêtes
très simples, des enquêtes de routine, des inspecteurs
enquêtent toujours, les agents de sécurité, non,
probablement pas, mais est-ce qu'à ce moment-là vous voulez dire
que tous les inspecteurs devraient appartenir aux corps policiers et avoir la
formation que le policier a, par exemple?
M. Giroux: Ce qui nous préoccupe, ce qui a
préoccupé le groupe de travail, le groupe Saulnier, ce sont tout
simplement des juridictions qui n'appartiennent pas à la police. Nous
sommes d'avis que toutes les lois devraient être appliquées par
tous les policiers. Pour donner des exemples, la Loi des liqueurs qui est
appliquée par 475 policiers au Québec, alors qu'il y en a 13 000,
nous croyons que c'est une lacune parce que c'est impossible pour 450 ou 475
policiers de surveiller adéquatement 25 000 permis de boisson dans
le
Québec. Quant à la Loi des transports, les surveillants ou
les inspecteurs du ministère des Transports, c'est la même chose.
Partout où la sécurité du public est en danger, nous
croyons que la police devrait avoir juridiction. Justement, cette
prolifération d'organismes parapoliciers confine la police dans un
rôle où elle n'a pas de juridiction pour l'application de
certaines lois et nous croyons que ce sont des contraintes à
l'efficacité policière. Nous ne prétendons pas que la
police devrait faire toutes les enquêtes d'inspection ou toutes les
inspections.
M. Lalonde: C'est là ma question. Où cela
commence-t-il et où cela finit-il? La première partie de votre
réponse est tout à fait pertinente, sauf que ce n'était
pas à ma question à savoir: Devrait-on confier mais c'est
une question strictement d'administration interne par exemple, les
enquêtes en ce qui concerne la Loi des liqueurs à une escouade
spécialisée de 300 ou 400 personnes, alors que cela devrait
être tous les policiers? C'est fort possible. C'est strictement... Cela
ne demande pas une loi pour changer cela. Je ne pense pas, en tout cas. Ce
n'est pas inscrit dans la loi.
M. Bédard: ... de certaines directives au niveau du
service.
M. Lalonde: Oui, au niveau du service. Où se termine le
service d'inspection et où commence la nécessité de
confier cela à des policiers?
M. Giroux: Je pense que la police possède une juridiction
sur l'application de toutes les lois; je vais essayer de vous illustrer cela
par une image. Une hôtellerie ou un hôtel crée des
problèmes sur l'application de certaines lois. Si l'on veut
vérifier la sécurité de la bâtisse, on doit avoir
recours à un organisme qui vérifie la sécurité de
la bâtisse ou vérifier la propreté de
l'établissement, on doit avoir recours à un autre organisme. En
fait, il y a à peu près quatre ou cinq organismes qui pourraient
être impliqués dans l'examen d'un endroit qui peut être non
sécuritaire ou qui peut créer des problèmes.
Or, je pense que notre préoccupation, c'est le cloisonnement de
chacun de ces organismes et un manque de supervision générale qui
permettrait d'aller un peu plus loin ou qui permettrait une plus grande
efficacité. Pour répondre strictement à votre question
à savoir, si on a établi des critères où doivent
s'arrêter les pouvoirs de l'inspection, on n'a pas établi de tels
critères, mais je pense qu'on a plutôt réfléchi sur
l'autre sens en recommandant d'éliminer les juridictions exclusives.
M. Lalonde: Merci. J'aurais quelques questions en ce qui concerne
vos autres recommandations. Quant à l'article 29 je pense que le
ministre y a touché ou vous autres dans une réponse vous
savez que l'amendement proposé à l'article 29 permettrait... Je
vais le lire; c'est un ajout, en fait, à l'article 29: "De plus,
malgré
l'article 54, si un corps de police municipal n'a pas les effectifs,
l'équipement ou l'expertise nécessaires pour agir
adéquatement, la Sûreté doit, si elle en est requise par le
procureur général, de sa propre initiative ou à la demande
d'une municipalité, y assumer l'ordre ou y poursuivre une enquête,
selon le cas."
Donc, il y a trois cas où la Sûreté du Québec
peut intervenir dans une municipalité où il y a
déjà un corps policier. Enfin, s'il n'y en a pas du tout,
naturellement, la preuve à savoir si les équipements sont
suffisants est facile à faire, mais s'il y en a déjà un,
il y a trois cas. Non, c'est dans chaque cas, "si un corps de police municipal
n'a pas les effectifs, l'équipement ou l'expertise nécessaires".
Donc, c'est toujours dans un cas où il y a déjà un corps
policier municipal. Il semble que, si c'est à l'initiative du procureur
général, c'est un jugement du procureur général
à savoir qu'il n'y a pas les effectifs ou l'expertise
nécessaires. Mais, "de sa propre initiative", ce sera un jugement de la
Sûreté du Québec à savoir que tel corps de police
municipal n'a pas les effectifs, l'équipement ou l'expertise
nécessaires. Cela peut même être à la demande d'une
municipalité. Je présume il y aura peut-être une
correction à faire que le ministre a voulu dire de la
municipalité concernée et non pas d'une municipalité
voisine. En tout cas, ce n'est pas tout à fait clair et on pourra le
corriger.
Est-ce que vous ne trouvez pas inusité enfin, quelle est
votre opinion; je ne veux pas vous mettre la réponse dans la bouche
que maintenant la Sûreté du Québec pourra arriver
dans une municipalité et dire: Ecoutez, vous n'avez pas l'expertise
nécessaire, c'est nous qui en prenons charge?
M. Giroux: Cela voudrait dire que la Sûreté du
Québec pourrait, de sa propre initiative ce sur quoi on
s'interroge, évidemment, la Sûreté du Québec, c'est
qui? Est-ce que c'est le commandant d'un détachement? Est-ce que c'est
ie caporal en charge d'un poste? Cela peut être cela, la
Sûreté du Québec décider, tout d'un coup,
qu'on n'a pas l'expertise et arriver chez nous pour assurer l'ordre et la
sécurité. C'est pour cela, M. le Président, sans discuter
d'aucun des articles, que j'ai fait référence à l'article
29.
M. Lalonde: A la page 66, vous en parlez.
M. Giroux: Nous trouvons extrêmement dangereuse cette
prescription du projet de loi parce que, de sa propre initiative, la
Sûreté du Québec pourrait remplacer n'importe quel corps de
police en prétendant qu'il n'a pas les effectifs et l'expertise. C'est
pourquoi, dans notre recommandation, à ce sujet, on dit que cela devient
un cas d'assistance et que le corps de police municipal conserve sa juridiction
sur l'enquête en cours ou sur l'événement en cours tant et
aussi longtemps qu'il ne s'en désiste pas lui-même. A ce
moment-là, cela devient une action précise de la
Sûreté du Québec.
Evidemment, nous nous inquiétons énormément des
termes "de sa propre initiative", "la Sûreté du Québec, de
sa propre initiative, peut", parce que, à toutes fins utiles, cela peut
vouloir dire que, demain, la Sûreté du Québec peut prendre
toutes les enquêtes à travers le Québec sous
prétexte que nous n'avons pas l'expertise et les effectifs
nécessaires pour résoudre un tel cas. (11 h 45)
M. Bédard: Vous poussez la situation à
l'extrême, j'imagine, mais quelles balises, d'après vous, seraient
nécessaires pour bien encercler cette réalité qui existe,
que vous avez d'ailleurs soulignée, à savoir qu'il y a des corps
de police municipaux qui, à la suite de certaines décisions
municipales, n'ont pas toute l'expertise, n'ont pas tous les moyens à
leur disposition pour donner une pleine efficacité policière, une
pleine protection policière aux citoyens? Je pense que c'est une
préoccupation que vous avez et que nous partageons. D'un autre
côté, il ne faut pas en arriver à une situation, comme vous
le dites, qui ferait que la Sûreté du Québec pourrait se
permettre de prendre en charge, à la suite d'un jugement sommaire,
l'ensemble des activités de protection policière. Comment
baliseriez-vous cette réalité-là, dont il faut quand
même tenir compte?
M. Giroux: C'est un des buts de notre suggestion, quand on parle
de l'inspectorat, qui pourra juger de l'efficacité policière et
de l'effectif, en fait, de sa capacité de maintenir l'ordre sur son
territoire. C'est, selon nous, basé sur une analyse de l'inspectorat que
la Sûreté du Québec pourrait s'introduire dans les
municipalités, pour y remplacer les corps de police qui n'auraient pas
l'effectif nécessaire. Je pense qu'il faudrait quand même qu'il y
ait un moyen d'obliger les municipalités à avoir l'effectif
nécessaire pour pouvoir protéger adéquatement la
population, mais c'est en partant d'une inspection faite par l'inspectorat
qu'on devrait établir l'obligation pour la Sûreté du
Québec d'intervenir pour remplacer un corps de police, quand ce n'est
pas par une demande d'aide. De son propre chef, je le répète, je
pense qu'au point de vue pratique, ça pourrait être ça
demain matin.
M. Simard: On pourrait peut-être aussi ajouter que dans le
moment, nous trouvons qu'il y a un vacuum à remplir pour la coordination
des opérations policières. Il n'y a personne actuellement pour
coordonner les opérations policières municipales et de la
Sûreté du Québec. C'est pourquoi nous recommandons que la
direction générale remplisse ce rôle. Personnellement, je
crois que la direction générale pourrait décider si
l'effectif et l'expertise sont suffisants.
M. Lalonde: Merci beaucoup. J'aurais encore quelques questions,
si vous me permettez, c'est assez considérable, votre mémoire. Il
y a deux questions. Sans préjuger on va attendre; d'ailleurs, ce
n'est pas le rôle de l'Opposition de juger ni de décider, mais je
suis assez réceptif à la division des pouvoirs que vous
suggérez en ce qui
concerne la Direction générale de la
sécurité publique, la Commission de police et l'inspectorat,
quoiqu'il y a peut-être une petite contradiction j'aimerais vous
demander de corriger cette impression que j'ai. Aux pages 84 et 85, quand vous
parlez de la Commission de police, vous souhaitez qu'elle conserve seulement
des pouvoirs quasi judiciaires. Là-dessus, je pense que vous vous rangez
du côté du rapport Saulnier. Mais à la page 85, vous dites,
au troisième paragraphe: "Le rôle de conseiller les
municipalités et les services de police se traduit par un service
d'aviseurs techniques et évite que l'on ait recours aux firmes
privées de consultants." Sans le dire carrément, je comprends que
vous voudriez que la Commission de police conserve son rôle de
conseiller, mais ça me semble contredire ce que vous avez dit
tantôt, à savoir qu'il peut y avoir un conflit
d'intérêts et je suis d'accord avec vous là-dessus. Lorsque
la Commission de police conseille, par exemple, sur l'embauche d'un directeur
et qu'il s'avère y avoir un problème six mois plus tard, la
commission est dans une position assez difficile pour juger en dernier recours.
Est-ce que je vous ai bien compris ou si c'est une erreur?
M. Giroux: Vous me laissez perplexe quant à ma
réponse. L'énoncé qu'on fait à la page 85 vient du
fait, je pense, que nous recommandons la décentralisation de la
Commission de police, pour avoir des commissaires de chacune des régions
de la province de Québec, de façon à rendre plus
accessible, plus facile et plus expéditif le traitement des plaintes
contre la police, contre les municipalités. On pense aussi que ces
commissaires pourraient, à un certain moment, conseiller les
municipalités. Evidemment, je suis d'accord avec vous qu'on accorde un
pouvoir semblable à deux organismes de conseillers, c'est dans le
concept d'une décentralisation de la Commission de police, et il y a
peut-être, je dois admettre avec vous, une petite contradiction dans
notre argumentation.
M. Lalonde: Si vous aviez à choisir, peut-être pas
maintenant, est-ce que vous ne croyez pas plus logique et cohérent qu'on
donne le rôle de conseiller à un organisme seulement pour
éviter qu'il y ait des conseils contradictoires qui viennent de deux
organismes? Est-ce que ce ne serait pas logique, d'après la position que
vous avez prise jusqu'à maintenant, de confier ce rôle de
conseiller, en plus du rôle de coordination, de dessin de programmes et
tout ce qu'on a dit jusqu'à maintenant, à la direction
générale, c'est-à-dire au gouvernement? Là-dessus,
le ministre vous a demandé si vous ne croyiez pas qu'il pourrait y avoir
un danger d'ingérence politique si le gouvernement, par le biais du
ministère de la Justice, de sa Direction générale de la
sécurité publique...
M. Bédard: M. le Président, je m'excuse, je
voudrais quand même corriger la phraséologie. Je n'ai pas
parlé d'ingérence politique, surtout de contrôle
gouvernemental.
M. Lalonde: De contrôle gouvernemental, mais, dans la
réponse, on a parlé d'ingérence politique.
M. Bédard: Je ne suis pas inquiet, de toute façon,
je ne fais pas d'ingérence politique.
M. Lalonde: Non, pas de la part de... Le ministre est susceptible
ce matin.
M. Bédard: Non.
M. Alfred: Si on laisse faire, M. le député...
M. Lalonde: Rassurez-vous.
M. Bédard: Je connais le sens des nuances de mon
collègue.
M. Lalonde: C'est épouvantable de me prêter des
intentions comme cela, M. le Président. Je voulais simplement
dire...
M. Bédard: Je ne vous en ai pas prêté.
M. Lalonde: Je voulais simplement dire qu'il ne m'apparaît
pas indésirable, au contraire, que le gouvernement prenne les
décisions qui entraînent des dépenses. En fait, je pense
que c'est tout à fait conforme aux principes mêmes de notre
régime, à savoir que c'est celui qui taxe qui doit décider
comment les dépenses sont faites. Au contraire, la situation actuelle
m'apparaît même inusitée. Cela n'a peut-être pas
créé de problème majeur qu'un organisme indépendant
comme la Commission de police puisse, par ses pouvoirs de
réglementation, occasionner des dépenses. Je comprends que ces
règlements doivent être approuvés par le
lieutenant-gouverneur en conseil, mais on sait très bien que, dans le
système actuel, le lieutenant-gouverneur en conseil, le gouvernement ne
peut même pas les modifier. Il peut simplement les refuser. Cela n'a
jamais créé de problème particulier, parce qu'on se parle,
mais il reste que c'est inusité et que, s'il y avait à choisir,
actuellement, dans le cheminement de la réflexion, je pense qu'on
devrait plutôt confier au gouvernement le soin de
légiférer. Par la loi il l'a, mais aussi le soin de
réglementer toute la mission de police.
M. Bédard: Vous faites bien de le noter.
M. Lalonde: D'ailleurs, c'était le sens,
c'est-à-dire que la loi 41 allait à mi-chemin, elle donnait au
gouvernement le pouvoir de réglementer, mais elle conservait à la
Commission de police certains pouvoirs de réglementation et je vous
avoue qu'actuellement, comme je le dis, après trois ans, une
réflexion plus longue, je préférerais que toute
réglementation qui peut entraîner des dépenses soit
strictement réservée au gouvernement. L'ingérence
politique dans la police, au fond, on l'a vu, ce n'est pas à ce
niveau-là, c'est dans les opérations mêmes, et il n'est pas
question que la Direction générale de la sécurité
publique s'impli-
que dans les opérations policières, dans les
enquêtes, etc. C'est strictement une question de définition de
politique, et il me semble que définir une politique appartient à
un gouvernement. Cela n'appartient pas à un organisme
indépendant, qui peut servir de conseiller au gouvernement, qui peut
servir de conseiller privilégié, si vous voulez, mais qui doit
conserver aussi son indépendance. C'est pour cela que je pense que le
rôle de conseiller devrait rester dans une définition qui serait
beaucoup plus rigoureuse, qu'on ne retrouve pas d'ailleurs dans la loi 48, et
je le déplore. Je pense qu'on devrait pencher vers la Direction
générale de la sécurité publique pour le rôle
de conseiller. C'est ce que je voulais clarifier ici dans votre
mémoire.
M. Bédard: Me permettriez-vous une question? Ce serait,
à la suite de ce que vous dites. Comment concilier ce contrôle
gouvernemental au niveau de l'ensemble des opérations policières,
de l'ensemble du problème de la sécurité des citoyens,
avec un autre concept dont on parle souvent, qui est aussi important au moment
où on parle de décentralisation, à savoir l'autonomie
municipale. Il y a toujours un équilibre qu'il faut... Je parlais de
"loi d'équilibre", dans le sens qu'il y a des concepts qui se heurtent
continuellement. Il y a le concept de la protection policière
nécessaire pour les citoyens. Il y a l'autre concept de la
décentralisation et de l'autonomie des municipalités. Ce n'est
pas toujours facile de trouver une solution. Il est presque impossible de
trouver une solution qui satisfasse complètement les deux instances qui
ont des préoccupations bien particulières, très
légitimes.
M. Giroux: Le rapport Saulnier suggérait que l'inspectorat
ait le pouvoir d'imposer à une municipalité un effectif policier,
pour être capable de répondre adéquatement à toutes
ces obligations. Evidemment, brutalement, cela est pas mal arbitraire; par
contre, le rapport Saulnier suggérait aussi que la municipalité
puisse, dans le domaine policier, avoir recours à la Commission de
police, pour trancher le débat en ce qui concerne le domaine policier et
à la Commission municipale, en ce qui concerne le domaine de la
fiscalité ou des dépenses. Alors, je pense qu'à ce
moment-là, cela conservait l'autonomie des municipalités, tout en
assurant par cette mesure une sécurité adéquate aux
citoyens. Vous savez, certaines municipalités peuvent attacher plus
d'importance aux loisirs qu'à la police ou à la
sécurité des citoyens. Evidemment, c'est pour cela que le rapport
Saulnier trouvait importante cette chose-là et confiait le rôle
à l'inspectorat d'étudier et de définir, en fait, les
besoins en matière policière pour une municipalité, selon
la criminalité du territoire à couvrir.
M. Lalonde: Si vous me permettez, j'aurais une question, avant de
terminer ou avant de passer la parole à un autre. J'aurais une
parenthèse sur l'inspectorat. Je vous avoue que je n'ai pas encore bien
compris ce que le groupe de travail a voulu dire. Je comprends que c'est une
suggestion qui doit subir la réflexion ultérieure. Mais c'est
encore assez confus, je pense, à part le fait que cela relève de
l'Assemblée nationale, ce qui rassure automatiquement tout le monde.
Mais je me méfie de ces réassurances de tout le monde en disant
que cela relève de l'Assemblée nationale quand on ne sait pas
comment cela va marcher. Je pense que le ministre a raison de s'imposer une
réflexion plus grande sur la question de strictement savoir ce qu'est
l'inspectorat, comment cela marche et quel est le rôle de cet inspectorat
indépendant du gouvernement, comparé au rôle de la
Commission de police qui n'a, à ce moment-là, qu'un rôle
quasi judiciaire, d'accord, mais qui perdrait même ses pouvoirs
d'enquête. Quelle serait la coordination des pouvoirs d'enquête de
la Commission de police et de l'inspectorat? C'est une autre chose. Il peut y
avoir un chevauchement quasiment inévitable. Enfin. Je voulais vous
poser une question concernant la Gendarmerie royale du Canada. Vous dites
ici...
Une Voix:...
M. Lalonde: J'entends, de l'autre côté de la table,
des mots que je ne répéterai pas, M. le Président.
M. Bédard: Je pense qu'on...
M. Lalonde: Le ministre n'aimerait pas que je les
répète.
M. Grenier: Si vous les transférez en Haïti, ils vont
avoir de l'ouvrage. (12 heures)
M. Lalonde: Dans votre inspectorat, par exemple, à la page
85, il se rapporterait à l'Assemblée nationale et, dans son
rôle de contrôle, il soumettrait la Sûreté du
Québec et tous les services de police municipaux, une inspection
annuelle. La GRC n'est pas là-dedans. D'autre part, vous dites à
la page 86: Dorénavant, les membres de la Gendarmerie royale du Canada
pourraient être soumis à la suite des plaintes, aux enquêtes
de la Commission de police du Québec... Je pense que c'est à peu
près le seul endroit, peut-être qu'au début aussi vous en
parlez, où vous parlez de la Gendarmerie royale du Canada, en
particulier. On sait que la loi en parle sans en parler. C'est une indication
du courage du gouvernement, à savoir, de faire indirectement par la voie
de la réglementation ce qui est le principal but du projet de loi, soit
de soumettre la GRC au contrôle du gouvernement.
M. Bédard: Pardon, Commission de police.
M. Lalonde: C'est encore plus courageux, on le fait faire par la
Commission de police, imaginez-vous.
M. Bédard: Je ne pense pas qu'on ait
nécessité.
M. Lalonde: Pour se cacher, on se cache dans ce gouvernement.
M. Bédard: On a déjà dit très
clairement.
M. Alfred: Vous charriez.
M. Bédard: Juste deux secondes.
M. Lalonde: J'ai le droit d'être en désaccord avec
le ministre, non?
Le Président (M. Boucher): S'il vous plaît, M. le
député de Papineau.
M. Lalonde: Ici dans ce beau pays du Québec on a droit
d'être en désaccord.
M. Alfred: Oui, on a même le droit de charrier. C'est la
démocratie.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Papineau, s'il vous plaît. M. le député de
Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: On sait qu'au cours des événements,
surtout des dernières années, la situation où, d'une part,
la province a la juridiction exclusive de l'administration de la justice et,
d'autre part, à cause des deux niveaux de gouvernement des policiers
relevant d'une autre juridiction travaillent dans le territoire, cette
situation a créé des problèmes. Dans l'hypothèse,
sans faire de jugement politique, où il serait désirable que pour
exercer cette compétence d'administration de la justice qui, de toute
évidence, englobe au moins en partie la mission policière...
Premièrement, est-ce que vous croyez que simplement le pouvoir
d'enquête que vous proposez à la page 86 est suffisant?
Deuxièmement, à la page 78, vous dites: Les chevauchements
doivent également être éliminés entre les
organisations policières, Sûreté du Québec, services
de police municipaux et Gendarmerie royale du Canada, puisque ce
phénomène crée plutôt des structures
compétitives et d'affrontements, alors que l'objectif visé
devrait être une plus grande collaboration et
complémentarité entre les services de police.
Est-ce que, d'après vous, le projet de loi no 48 permettra
d'accomplir cette plus grande collaboration et
complémentarité?
M. Simard: Cela revient à ce que nous disions
tantôt, M. le Président. C'est que dans le moment, il y a
certaines lois que les policiers municipaux devraient être en mesure
d'appliquer par leurs pouvoirs d'agents de la paix et qu'en pratique nous ne
voyons pas. Comme par exemple, on a parlé de la Loi de l'alcool du
Québec tantôt, en ce qui a trait à la GRC, en
matière de drogue, nous savons qu'en théorie nous avons les
pouvoirs, mais qu'en pratique plusieurs corps de police réfèrent
cela à la GRC. Là encore, il y a un manque de coordination. Il y
a un vacuum à remplir. C'est là-dessus que nous aimerions que le
gouvernement partage mieux les rôles. En ce qui a trait au pouvoir
d'enquête de la Commission de police, je pense que les membres de la GRC
étant des policiers, se soumettraient à des plaintes non
frivoles, mais à des plaintes légitimes, aux enquêtes de la
GRC comme tout policier au Québec que ce soit municipal ou
provincial.
M. Lalonde: Est-ce que vous croyez que le pouvoir d'enquête
de la Commission de police serait suffisant pour obtenir les résultats
escomptés? De plus, est-ce que le projet de loi no 48, tel que vous le
connaissez, est suffisant pour obtenir la plus grande collaboration et la
complémentarité entre les services de police que vous
souhaitez?
M. Simard: Dans le moment, le projet de loi no 48 ne va pas loin
dans ce sens.
M. Lalonde: D'après vous, cela n'accomplirait pas ce que
vous demandez, ce que vous souhaitez à la page 78. On sait que le projet
de loi no 48, en plus des pouvoirs d'enquête de la Commission de police,
prévoit toute une série d'autres démarches, d'autres
pouvoirs sur les agents de la paix dont on ne sait pas qui ils sont. Je ne sais
pas si ça serait simplement des gardes-chasse ou de la GRC. Mais ce sera
le gouvernement qui va décider ça tranquillement.
Le projet de loi 48 prévoit des pouvoirs de contrôle sur
tous les policiers; de renseignement, les articles 2b, le nouveau 47b; les
rapports du directeur, l'article 2c; les registres on enregistre
beaucoup dans ce gouvernement les mécanismes de contrôle
d'aptitudes, les pouvoirs d'enquête, la suspension de la prescription
d'un droit, d'un recours à une convention collective ou d'une sentence
arbitrale, l'ordonnance d'inhabilité à exercer les fonctions
d'agent de la paix. Donc, beaucoup plus de pouvoirs que ceux que vous
mentionnez, à savoir simplement le pouvoir d'enquête de la
Commission de police.
Est-ce que tous ces pouvoirs, en plus des recommandations de sanction de
l'article 17, sont de nature à obtenir ce que vous souhaitez à la
page 78, c'est-à-dire une plus grande collaboration et
complémentarité entre les services de police?
M. Simard: On a remarqué à l'article 47 qu'il est
question d'un code de déontologie pour la Sûreté du
Québec. Nous sommes en faveur d'un tel code; seulement, nous
déplorons le fait qu'il n'est pas question qu'il soit appliqué
aux policiers municipaux. Nous aimerions avoir le même code uniforme pour
tous les policiers du Québec, en déontologie et en discipline.
Nous remarquons qu'on parle seulement des policiers de la Sûreté
du Québec. On ne voit pas pourquoi nous ne serions pas inclus
là-dedans.
M. Lalonde: Je pense que ce n'est pas tout à fait la
question que je vous avais posée. Mais, quand même, c'est...
M. Giroux: Je pense que le pouvoir d'enquête que nous
souhaitons que la commission ait sur tous les agents de la paix... On sait que,
quand la Commission de police fait une enquête sur un département,
elle va en profondeur dans les dossiers et dans le travail. Ce pouvoir
d'enquête par lequel la Commission de police aurait un pouvoir sur les
membres de la Gendarmerie royale aurait pour effet d'examiner en profondeur les
agissements de la Gendarmerie royale au Québec. Je pense que c'est une
des préoccupations de votre question. Quant à moi, je pense que
ce pouvoir permettrait à la Commission de police d'examiner les actes et
les gestes posés par des gendarmes de la Gendarmerie royale en tant
qu'individus ou en tant que groupes d'individus sur la plainte d'un citoyen ou
la plainte d'un organisme quelconque. Elle aurait ce pouvoir d'examiner quand
même le travail effectué par la Gendarmerie royale du Canada,
comme elle a le pouvoir de le faire pour la Sûreté du
Québec ou les corps de police municipaux.
M. Lalonde: Est-ce que vous voyez un conflit et de quelle
façon pourriez-vous suggérer de dénouer ce conflit entre
le pouvoir, par exemple, de déclarer un agent inhabile à exercer
ici et le fait qu'il relève d'une juridiction séparée,
différente? Au fond, c'est ça; je pense bien que tout le monde,
en principe, est d'accord pour que la plus grande collaboration, la plus grande
coordination des services policiers au Québec, qu'ils relèvent du
gouvernement, des municipalités ou du fédéral, existe.
Qu'est-ce que vous faites de la dualité de juridictions et comment vous
arrangez-vous pour que ça marche? En ce qui me concerne, dans le projet
de loi 48, il n'y a absolument rien pour que ça marche. Il y a un tas de
choses pour créer des affrontements; des contrôles, d'accord. Mais
est-ce qu'on veut que ça marche ou non? C'est la question.
D'après ce que je vois je ne veux pas vous mettre la
réponse dans la bouche le gouvernement, par le projet de loi 48,
ne veut pas que ça fonctionne. Il veut que ce soit un affrontement et,
comme le disait le député de Papineau tantôt, que la GRC
sacre son camp du Québec. C'est à peu près ça que
vous nous avez dit tantôt?
M. Bédard: Je ne crois pas que c'est ce qu'on a dit.
M. Lalonde: C'était ça? Non? A moins que vous ne le
retiriez.
M. Alfred: Je m'excuse, M. le député.
M. Lalonde: Ce n'est pas ça que vous avez dit. Je suis
prêt à m'excuser si j'ai...
M. Alfred: Vous continuez à charrier.
M. Lalonde: Ah bon! Alors, vous ne niez pas l'avoir dit. Au fond,
est-ce que ça peut marcher, le projet de loi 48, avec les objectifs que
vous définissez à la page 78, de collaboration, de
complémentarité et de la plus grande coordination?
M. Giroux: Je pense qu'il y a deux volets à votre
question. Evidemment, le pouvoir qu'accorde l'article 2 à la Commission
de police de décréter qu'une personne n'ait plus les
qualités pour être agent de la paix, je ne suis pas un expert en
relations fédérales-provinciales, mais je ne sais pas si la
Commission de police aurait ce pouvoir, selon nous, puisque le pouvoir
d'enquête et tous les agents de la paix du Québec, elle aura
également ce pouvoir pour les gens de la Gendarmerie royale du Canada.
Cela impliquerait-il que le membre de la Gendarmerie royale ne serait plus un
membre de la Gendarmerie royale? Je ne le pense pas du tout, parce qu'il
s'agirait qu'il soit transféré dans une autre province pour qu'il
continue d'avoir son droit d'agent de la paix.
M. Lalonde: Comme en Colombie-Britannique. A ce moment-là,
par exemple, c'est en fonction d'une entente. C'est la GRC qui agit comme
police quotidienne municipale, mais il y a un organisme de la province pour
réglementer le comportement des policiers. Toutefois, la décision
n'est pas que le membre n'est plus membre de la Gendarmerie royale, sauf qu'il
est obligé d'aller... Soit qu'il soit suspendu par son propre corps
policier, dépendant de l'acceptation, ou qu'il soit
transféré ailleurs.
M. Giroux: Je pense que le pouvoir d'enquête de la
Commission de police équivaut à la même chose ici au
Québec. Evidemment, je ne pense pas non plus qu'il ne puisse plus
être un policier, mais il pourra être un policier qui devra aller
exercer ailleurs.
M. Lalonde: Je m'excuse d'avoir été si long, mais
votre mémoire soulève beaucoup de problèmes. Il est
très intéressant et nous a permis d'aborder, je pense, à
peu près les principales questions soulevées par le projet de loi
no 48. Je vous en remercie.
Le Président (M. Boucher): Merci, M. le
député de Marguerite-Bourgeoys.
M. Bédard: M. le Président...
Le Président (M. Boucher): M. le ministre.
M. Bédard: ... me permettez-vous, sur cet angle-là,
concernant les agents de la Gendarmerie royale et des différents corps
policiers du Québec, je pense que nous avons la même
préoccupation: qu'il y ait la plus grande collaboration possible entre
les différents corps policiers en fonction d'une meilleure
efficacité. Nous avons également la préoccupation que
chaque agent de la paix, qu'il appartienne à quelque corps policier
oeuvrant au Québec, oeuvre dans la légalité et selon des
critères ou une discipline qui est la même pour tous les agents de
la paix dans l'ensemble du
Québec. Je ne sais pas. Concernant le contrôle des
opérations, la coordination des opérations qui sont des objectifs
qui vous sont chers, je ne sais pas si vous avez une solution au
problème constitutionnel, mais je pense que vous savez qu'on peut
désirer le plus grand contrôle possible, la meilleure coordination
possible de toutes les actions policières au Québec, sauf que
vous savez que le contrôle des opérations de la Gendarmerie
royale, le contrôle de la coordination et d'opération de la
Gendarmerie royale ne relève pas de l'autorité provinciale, mais
de l'autorité fédérale. Je pense qu'il y a certains
jugements qui sont assez explicites, ce qui nous place dans la situation par un
projet de loi, quels que soient les objectifs qu'on peut vouloir atteindre, il
y a toujours les problèmes constitutionnels qui sont là, ce qui
nous place dans la situation de ne pas pouvoir régler certains
problèmes, mais d'en profiter peut-être pour espérer, comme
vous le faites d'ailleurs, la plus grande coordination possible, la plus grande
collaboration possible entre les différents corps policiers au
Québec.
M. Giroux: Disons quand même, M. le ministre, que le simple
fait que la commission ait le droit de faire enquête sur les agissements
d'un membre de la Gendarmerie royale, devrait nécessairement avoir comme
résultat une plus grande collaboration et une conduite similaire
à celles des autres policiers du Québec.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Mégantic-Compton.
M. Bédard: C'est l'avance que nous avions et nous l'avons
prise complètement.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Mégantic-Compton. M. le député de Papineau.
M. Alfred: M. le Président, tout à l'heure, le
ministre de la Justice a parlé de l'autonomie municipale. Or, on a
d'abord soumis la question d'une autonomie régionale. J'ai
été conseiller municipal, et c'est la raison pour laquelle,
lorsque mon tour viendra, je vais longuement vous interroger là-dessus.
Vous êtes pour ou contre une autonomie municipale ou une autonomie
régionale qui vous enlèverait, bien sûr, les caprices de
certains conseillers municipaux ou de certains maires, ce que j'étais
moi-même? On peut, à n'importe quel moment, décider: On
vous veut ou on ne vous veut pas. Le ministre a parlé d'autonomie
municipale je le respecte et il a été conseiller
municipal. Je trouve que c'est une situation désavantageuse pour le
policier. Moi-même, je parle en connaissance de cause. (12 h 15)
Je vais vous demander si vous allez opter pour une autonomie municipale
ou pour une autonomie régionale?
M. Cyr: Je voudrais faire une seule intervention. Dans notre
mémoire, nous optons...
M. Alfred: Je vais vous interroger longuement
là-dessus.
M. Cyr: Ah bon!
Le Président (M. Boucher): Alors, vous allez revenir
à votre tour, M. le député de Papineau? M. le
député de Mégantic-Compton.
M. Grenier: M. le Président, je voudrais d'abord
féliciter l'Association des chefs de police et de pompiers de la
province de Québec de nous avoir fourni ce volumineux document qui a
été pensé, qui n'est pas seulement en feuilles. On se rend
compte qu'il contient de considérables suggestions qui seront à
retenir, bien sûr. Elles attirent l'attention du gouvernement et des
partis d'opposition à cette table. Vous y avez certainement mis
plusieurs heures afin d'être vraiment positifs et d'apporter votre part
à cette table de travail.
J'aimerais que vous nous disiez si les petites municipalités
devaient se prévaloir de l'article 25 qui dit qu'une municipalité
peut établir, par règlement, et maintenir dans son territoire un
corps de police cela veut donc dire qu'elle peut ne pas le maintenir
cela va avec l'article 52 de l'ancienne loi pensez-vous que,
maintenant, si plusieurs villes décidaient soudainement de se
prévaloir de cet article et d'abolir leur corps policier, la
Sûreté du Québec serait en mesure de répondre
adéquatement, de combler ce vacuum qui pourrait nous arriver au
Québec?
M. Cyr: M. le député de Mégantic-Compton, je
ne crois pas que la Sûreté du Québec puisse remplir ce
vacuum. Je peux peut-être vous donner des exemples assez concrets.
J'habite une petite ville, qui se nomme Chambly. On est entouré de deux
petites villes qui ont aboli leur corps de police. Depuis l'abolition de ces
corps de police, la Sûreté du Québec nous demande
assistance. S'il y a un accident grave de l'autre côté du pont,
elle nous appelle. On est trop loin, voulez-vous nous assister? Sur une autre
route, dans la ville voisine, s'il y a un accident grave, on est obligé
d'assister la Sûreté du Québec. Je ne crois pas, messieurs,
que la Sûreté du Québec puisse combler le vacuum de
policiers manquant dans certaines de ces petites villes.
M. Grenier: Vous mentionnez, aux pages 80 et suivantes de votre
mémoire, que, dans les municipalités de 5000 et moins de
population qui décideraient de se prévaloir de cet article, les
policiers pourraient être intégrés à
différentes échelles de travail, différents types de
travaux, mais je pense que vous nous donnez un témoignage selon lequel
il ne faudrait quand même pas que, soudainement, on décide de se
prévaloir de l'article 25 et d'abolir son corps policier. On l'a vu dans
certaines municipalités qui ont enfreint l'article 52 de l'ancienne loi,
avec les résultats qu'on connaît. Je pense qu'on devra, lorsqu'on
étudiera l'article, si ça devait se produire, au moins donner du
temps,
permettre qu'on ait le temps de s'organiser et d'intégrer, donner
à ces gens qui pourraient être intégrés à la
Sûreté du Québec le temps qu'il faudra. J'imagine que, si
ce n'est pas dans la loi, il faudra au moins y penser dans les
règlements. Vous n'avez pas de suggestion dans ce sens-là, pour
des laps de temps qui pourraient être donnés, par exemple, pour
intégrer ces membres de la sûreté municipale à la
Sûreté du Québec?
M. Cyr: Cela a été pensé, mais ça n'a
pas été mis sur papier. Cela prend peut-être un peu de
temps avant de replacer un policier dans le même contexte.
Peut-être qu'un an serait suffisant pour réintégrer ce
policier dans un autre travail ou dans le travail policier, suivant sa
compétence.
M. Grenier: Est-ce qu'il y a plusieurs petites villes qui
pourraient se prévaloir de cet article? Chacun tient à son
autorité locale il faut vivre dans une petite ville pour le
savoir, j'en ai quelques petites dans ma circonscription; on est jaloux de son
autorité, de la bonne jalousie, j'entends mais, si on n'est pas
contraint par des problèmes de budget, est-ce que vous pensez qu'il y a
plusieurs municipalités qui voudraient se départir de leur corps
policier, si ce n'est pas une obligation, si elles n'y sont pas contraintes par
le budget?
M. Cyr: On n'a pas tâté le pouls dans la province,
mais, actuellement, nous avons 47 municipalités qui pourraient se
prévaloir de cet article.
M. Grenier: Bon. D'après vous j'aimerais que vous
me répondiez bien honnêtement est-ce qu'il y a des
municipalités qui auraient avantage... Il y a dans votre groupe des
gens... Je pense bien qu'on connaît les corps policiers municipaux.
Est-ce difficile de travailler? Est-ce qu'il n'est pas plus facile, dans
certains cas, de faire agir la Sûreté du Québec, dont les
membres ne sont souvent pas des locaux... On sait que la CECO, par exemple, a
fait oeuvre dans certaines municipalités, elle rend d'énormes
services à des municipalités. Vous connaissez le travail et
j'aimerais que vous me répondiez honnêtement. Est-ce que, dans
certains cas, ce n'est pas préférable que des policiers, qui
vivent à l'extérieur de nos petites villes, viennent, à
l'occasion, régler certains problèmes que des policiers locaux
ont plus de difficultés à régler? Il faut bien dire les
choses comme elles le sont, ils ont de la difficulté à entrer
à cause du contact, ils sont là depuis trop longtemps; ils vivent
là, ils ont des parents, des amis, qui sont partout... Je touche un
problème qui est vrai, je le sais, cela a été l'objet
d'enquêtes récemment. Est-ce que cela se présente souvent
ou si, dans l'ensemble vous le savez vous pouvez régler
vos problèmes, dans les petites localités quand même assez
correctement?
M. Cyr: Oui. Cela dépend de la municipalité, parce
que nous parlons ici de municipalités de moins de 5000 et de plus de
5000 de population.
Nous suggérons qu'une ville de 5000 de population ait au moins un
corps policier de dix membres. Ce qui peut créer des problèmes,
c'est que les gens, comme vous le dites, demeurent dans l'endroit, ils ont
été élevés là. Mais je vous donne l'exemple
de ma ville où ce sont des gens qui viennent du milieu et ça n'a
causé aucun problème; même, je crois qu'ils ont
réglé certains problèmes peut-être mieux qu'un corps
policier qui viendrait de l'extérieur, qui ne connaît pas les
habitudes de ces gens qu'on traite peut-être un peu cavalièrement
dans certaines occasions.
M. Grenier: Remarquez que je ne veux pas dire que localement
parfois on rend difficile la vie des corps policiers locaux par les conseils
municipaux qui souvent ne prennent pas leurs responsabilités. On l'a
vécu dans certaines localités. Dans l'ensemble, vous nous dites
que si les municipalités ne sont pas contraintes par le budget que cela
rend de meilleurs services en gardant le corps policier local que de le
transférer à la Sûreté du Québec.
M. Cyr: M. le député de Compton, est-ce que je
pourrais demander à un de mes collègues, le directeur, M.
Pouliot, de Drummondville d'intervenir? Il connaît bien le dossier.
M. Pouliot (Yves): M. le ministre, MM. les membres de la
commission, souvent on entend dire que les agents de la police municipale au
Québec, parce qu'ils vivent et travaillent dans un milieu où ils
sont nés, cela peut être dangereux. Ce sont des policiers
assermentés, les policiers du Québec et les constables
municipaux. Le fait qu'ils soient nés dans une ville ne doit pas
permettre qu'on mette en doute leur intégrité dans leur travail
policier. Il y a une autre chose sur laquelle notre association est d'accord,
c'est que lorsqu'une ville de 5000 habitants ou moins ne peut pas se payer un
corps de police, la Sûreté du Québec assume la
responsabilité. On est d'accord. Par contre, dans un but
d'équité, que l'on dise ce que cela coûte à une
ville qui ne veut pas maintenir son corps de police ou qui ne veut pas
créer son corps de police préalablement. Cela va dissuader ceux
qui veulent charrier, qui veulent abolir leur corps de police, par plaisir, ou
par dépit parce qu'ils n'aiment pas la police. C'est au détriment
des citoyens du Québec.
Il y a une autre chose, M. le Président, M. le ministre et MM.
les membres, nous sommes d'accord qu'un corps de police municipal, à un
certain moment, n'ait pas l'effectif nécessaire ou les personnes avec
les qualifications requises dû à son nombre. Nous parlons d'une
ville qui a dix ou douze policiers. On est d'accord, à ce
moment-là, que la Sûreté du Québec prête
assistance à ces corps de police municipaux, mais ce que nous disons par
contre, c'est qu'il faudrait tout de même avoir un peu de décence
et que le tout soit fait en collaboration avec le directeur de cette
municipalité.
Notre association est pour l'autonomie de sa police locale, mais,
lorsqu'on tient compte du rapport Saulnier, il dit: "Dans un but d'une plus
grande efficacité, on devrait régionaliser les forces
policières." Nous disons: On devrait régionaliser en tenant
compte d'une régionalisation naturelle des services policiers. Nous
croyons que, s'il y a une régionalisation naturelle des forces
policières au Québec, à ce moment, vu que le corps
policier sera plus nombreux, on pourra qualifier des personnes pour pouvoir
enquêter sur à peu près toutes les formes de crimes, sauf
peut-être des crimes particuliers.
En tant que vice-président de l'Association des chefs de police
et de pompiers du Québec, je ne voudrais pas qu'on mette en doute la
compétence des policiers municipaux du fait que ces gens sont venus au
monde dans une ville. Seront-ils honnêtes ou malhonnêtes ou
feront-ils bien leur travail de ce fait? Nous disons, nous de l'Association des
chefs de police et de pompiers du Québec, qu'il faut repenser la police,
qu'il faut faire de la police préventive au Québec. La seule
manière de pouvoir faire de la police préventive au
Québec, c'est en ayant des policiers qui connaissent leur milieu, qui
vont pouvoir impliquer les citoyens, qui vont pouvoir inciter les citoyens
à participer à leur propre protection. Merci.
M. Grenier: Merci. Je suis content de vous l'entendre dire, parce
que j'étais pour entrer là-dedans en disant que la vraie
prévention se fait par des gens. Quand on connaît bien les gens,
il suffit d'avoir un peu de psychologie, je pense, pour le comprendre.
Localement, c'est l'impression qu'on a.
Maintenant, quand vous dites, monsieur de Drummondville, qu'il faudrait
savoir, par exemple, pourquoi les municipalités se départissent
de leur sûreté locale, qu'il faudrait connaître les charges
qui leur arriveront, parlez-vous des municipalités de 5000 habitants et
moins ou de l'ensemble des municipalités qui devront se départir
de leur corps policier?
M. Pouliot: Remarquez bien, monsieur de la commission, ce qui se
produit, c'est que, dans notre mémoire, nous disons: II devrait y avoir
la Commission de police, il devrait y avoir la sécurité publique
et l'inspectorat. Maintenant, nous laissons au gouvernement le soin de
décider ce qui sera fait. Selon nous, il devrait y avoir sûrement
un organisme qui évaluerait quels sont les besoins de la population,
quels sont les moyens de payer de la population, quels sont les genres de
criminalité au niveau de ces régions. A la suite de ces
études ou recherches, il pourrait peut-être recommander aux
autorités gouvernementales, tant municipales que provinciales, des
mesures à prendre.
Nous pensons qu'il devrait y avoir un organisme qui pourrait
évaluer, au lieu de laisser cela à des administrateurs municipaux
qui, à un certain moment, soit par caprice ou peut-être pour des
raisons pécuniaires on leur reconnaît ces problèmes
décident d'abolir tout simplement cavalièrement la police
municipale au Québec. Ce qui est le plus regrettable, c'est que tous ces
gens, qui ont aboli leur corps policier pensent qu'il n'y aura pas d'effet
à cela. Messieurs, je vous mets en garde. La criminalité, on va
pouvoir l'évaluer, à la suite de l'abolition de ces corps de
police, à moyen terme et à long terme. Il ne faut pas se conter
de peurs, il ne faut pas se faire d'illusions, on n'a pas augmenté le
personnel de la Sûreté du Québec; ils étaient
déjà débordés dans leurs fonctions et on dit: Ils
vont assurer le vacuum. Je trouve cela regrettable parce que cela est fait au
détriment de la sécurité publique. C'est fait au
détriment de la police actuelle au Québec qui veut faire de la
police préventive. On veut faire de la police préventive et on
nous ôte des outils. On réduit notre personnel. Comment fera-t-on
pour se rapprocher de la population, si on en vient à ne plus avoir de
gens et qu'on peut tout simplement répondre aux urgences. En tout cas,
je pense qu'il devrait y avoir un organisme qui évaluerait le
bien-fondé de ces abolitions de corps de police ou de diminution de
personnel, afin de conseiller tant les gouvernements municipaux que le
gouvernement provincial, mais ne pas laisser cela au bon vouloir ou aux
caprices d'administrateurs parfois peu scrupuleux.
M. Grenier: Merci. Vous avez là des suggestions qui vont
certainement être retenues par les gens autour de la table ici.
J'aimerais savoir l'impact que cela pourrait avoir sur l'efficacité de
la Commission de police du Québec qui va voir passer son effectif
à 18 000 agents de la paix. D'après vous, est-ce que vous pensez
que c'est un saut qui est impressionnant, qui peut déranger, qui peut
faire des chaos importants? (12 h 30)
M. Vézina: Messieurs les membres, je ne crois pas que ce
soit un chaos aussi important que cela, personnellement. La Commission de
police doit être capable de supporter cela.
M. Grenier: Maintenant, j'ai une dernière question sur les
policiers d'autoroute que nous entendrons. J'aimerais connaître quand
même votre opinion. On les rencontrera ici au cours de la journée;
ils désirent, je pense, selon leur mémoire, être reconnus
comme corps policier. Est-ce qu'une coopération, est-ce que cela peut
être efficace pour vous que ces gens aient la même autorité
et la même préparation d'abord, la même autorité et
est-ce qu'il y a là occasion de coopération et d'appliquer une
meilleure justice?
M. Giroux: Je pense bien, M. le Président, qu'on dit, dans
notre mémoire, qu'on endosse les recommandations du rapport Saulnier sur
la majorité des points, et nous sommes d'opinion que la police de
l'autoroute devrait être une police à part entière, je veux
dire être complètement policière. Par contre, nous
suggérons, par rapport à ce qu'on disait tantôt, sur les
juridictions limitées, que la police de l'autoroute soit
intégrée à la Sûreté du Québec avec,
évidemment, le statut que possèdent les agents de la
Sûreté du Québec, de façon que ça soit une
police à part entière, mais
qu'il n'y ait pas non plus de délimitation dans la juridiction
des corps de police.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Mégantic-Compton, nous devons suspendre nos travaux à 12 h 30
pour les reprendre à 14 heures.
M. Bédard: Me permettriez-vous une dernière
question? Je ne sais pas si les membres de la commission ont encore plusieurs
questions à poser. En ce qu'il me regarde, je n'en aurais qu'une.
Le Président (M. Boucher): Est-ce que vous êtes
d'accord pour prolonger de cinq minutes?
M. Bédard: Oui, puis on en aura terminé. Le
Président (M. Boucher): M. le ministre.
M. Bédard: J'aurais une question qui est soulevée
dans d'autres mémoires qui vont suivre où on estime qu'il serait
à propos que les policiers du Québec ne soient plus munis d'armes
à feu. Qu'est-ce que vous pensez de cette suggestion?
M. Giroux: Je pourrais peut-être répondre-Une
Voix: Si vous les mettez dans des chars blindés...
M. Giroux: ... M. le ministre, si vous nous assurez que les
criminels n'auront plus d'armes non plus...
M. Bédard: A l'exemple de ce qui existe en Angleterre,
comme vous le savez.
Une Voix: M. le ministre...
M. Bédard: C'est une suggestion parmi certaines qui nous
sont avancées dans différents mémoires.
M. Pouliot: M. le ministre, on aimerait que cette question soit
longuement étudiée. Nous croyons qu'il doit y avoir des
modifications, peut-être dans les armes ou l'équipement qu'utilise
la police. On est d'accord avec ça, que l'on repense à quel genre
de travail ou quel genre de services doit rendre la police aux citoyens.
Seulement, ce qui nous préoccupe, et on espère que les
législateurs seront prudents, on ne veut pas évoluer trop vite,
trop rapidement, parce que nous avons comme premier rôle de
protéger la vie et les biens des citoyens et on est persuadé que
les autorités vont nous laisser les moyens d'effectuer notre travail,
qui est tout de même un travail dangereux. On vous fait confiance
là-dessus, M. le ministre.
Ce qui nous préoccupe, c'est qu'on se pose la question à
ce moment-ci, lorsqu'on voit avec quel... A tous les matins, on voit des
meurtres gratuits, des meurtres crapuleux. On est inquiet du fait que, de plus
en plus, on réduit les moyens mis à notre disposition. Si on veut
que réellement on puisse protéger adéquatement les
citoyens du Québec, si on veut qu'on puisse les servir, on demanderait
à ceux qui nous dirigent, avant de prendre des décisions de cette
importance, d'y réfléchir mûrement. On voudrait tout de
même continuer d'être des policiers motivés. On voudrait
tout de même continuer d'être de bons serviteurs pour les
citoyens.
M. Bédard: Merci. Je n'ai pas d'autres questions. Je vous
remercie encore une fois de votre mémoire.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: Je voudrais seulement savoir... Le
député de Papineau avait indiqué son intention
d'interroger longuement les membres de l'association...
M. Bédard: J'imagine que cela viendra.
M. Lalonde: II semble satisfait? Bon! Très bien. Je
voulais simplement protéger le droit de parole du député
de Papineau. Je vous remercie infiniment.
Le Président (M. Boucher): Merci. La commission suspend
ses travaux jusqu'à 14 heures.
Suspension de la séance à 12 h 36
Reprise de la séance à 14 h 22
Le Président (M. Boucher): A l'ordre, s'il vous
plaît!
A la fin de la séance de ce matin, nous avions terminé
l'audition du mémoire de l'Association des chefs de police et de
pompiers. J'appellerai maintenant le Syndicat professionnel des chefs de police
et pompiers et officiers supérieurs de la protection publique,
représenté par Me Léonce E. Roy.
M. Roy, est-ce que c'est vous qui représentez? Est-ce que vous
voulez présenter les gens qui sont avec vous et procéder à
la lecture de votre mémoire?
Syndicat professionnel des chefs de police et
pompiers
M. Roy (Léonce E.): A ma gauche, M. Jules-André
Houde qui est président du syndicat professionnel depuis quelques
années et qui est aussi directeur de police de Vanier. A ma droite, M.
Yvon Veilleux qui est directeur-trésorier du syndicat professionnel et
qui est directeur de police de Lauzon.
M. le Président, MM. les membres de la commission, je n'ai pas
l'intention de lire intégralement notre mémoire qui a une
cinquantaine de pages, tenant pour acquis que les membres de
cette commission ont terminé au moins leur septième
année, et très probablement un cours universitaire et qu'ils sont
capables de lire des rapports qu'ils exigent d'ailleurs d'avoir au moins trois
semaines avant qu'on se présente devant eux. Ils ont sûrement eu
le temps de lire ce mémoire. Je voudrais surtout avoir l'occasion de
répondre aux questions que peut susciter le mémoire que nous
avons rédigé à l'intention du Syndicat professionnel des
chefs de police.
De façon très brève, comme aperçu
général, puisque c'est sur le projet de loi 48, inutile de vous
souligner que nous avons été quelque peu surpris de son contenu.
La Loi de police avait onze ans. En 1976, nous attendions une montagne du
gouvernement précédent comme amendement à la Loi de
police, puisque c'est une loi qui avait eu un certain rodage et qu'on
s'était habitué à une Loi de police qui coordonne tout le
secteur de la protection publique au Québec. Or, on nous est
arrivé avec le projet de loi 41 qui nous a semblé être
à peine un vallon.
M. Bédard: A peine un vallon!
M. Roy: Je ferai remarquer au ministre parrain au sens non
péjoratif du terme qu'avec le projet de loi 48, on arrive avec un
button. On a eu l'impression que le vallon n'avait guère
augmenté; il est demeuré sensiblement le même, sinon il a
diminué, M. le ministre. Respectueusement, je ne vous dirai pas que
c'est une souris, mais c'est un button.
On avait beaucoup espéré de cette réforme de la Loi
de police du Québec qui a onze ans d'usage, d'autant plus que le Parti
québécois avait nommé le groupe Saulnier pour faire
enquête ou plutôt le Parti québécois avait
nommé le groupe Saulnier pour faire enquête sur la situation
générale et faire rapport. Le gouvernement actuel connaissait
déjà sensiblement l'état de la protection publique au
Québec puisqu'un des membres éminents de ce gouvernement a
rédigé un volume assez connu au Québec: "Police et
politique" de Guy Tardif, ministre des Affaires municipales. Alors, M. Tardif a
fait le tour du jardin. Lorsque nous relisons les commentaires et les remarques
de l'honorable ministre Guy Tardif, on voit qu'au moins un des membres de ce
gouvernement connaît très bien la situation qui prévaut au
Québec depuis plusieurs années.
Quoi qu'il en soit, nous en sommes rendus au projet de loi no 48 et
c'est sur ce projet de loi que nous avons l'intention de faire porter le
principal de nos remarques. Dans un premier temps, nous avons
récapitulé un peu ce qu'était la situation actuelle et
vous verrez dans une première partie qu'on parle de l'intégration
et de la dépolitisation des corps de police municipaux. Il nous semble
que les principaux problèmes soulevés par l'administration
policière au Québec, c'était que l'administration de ces
corps de police était peut-être trop près des élus
municipaux. Eventuellement, dans une intégration et dans un mouvement de
régionalisation, peut-être que la police s'étant
écartée des élus de la première base et montant
à un second palier on pourrait voir la police devenir moins politique,
comme le prétend M. Guy Tardif dans son volume.
Quoi qu'il en soit, on a beaucoup espéré du rapport
Saulnier. Finalement, il est arrivé et il y a eu des recommandations. Il
semble que le projet de loi no 48 garde le rapport Saulnier au moins à
la chambre froide pour un certain temps puisque nous n'y avons pas vu les
réformes auxquelles on pouvait s'attendre. Le projet de loi no 48 nous
semble un projet assez timide, un projet qui est discret même sur
certaines questions, un projet qui est même conciliant avec les
administrations municipale, locale et régionale. Il y a même une
certaine obscurité dans ce projet de loi.
M. le Président, nous avons parlé, dans une seconde
sous-partie de la première partie de notre mémoire, de la
Commission de police, de sa fonction, de son rôle. Nous avons
signalé quelles étaient ces déficiences, ce qui nous
semblait être certains vices au point de vue administratif, au point de
vue juridictionnel et, dans une deuxième partie, nous avons
abordé l'avenir avec les aspects positifs qu'apporte le projet de loi,
puisqu'il y a certains aspects positifs, M. le ministre, et nous les avons
soulignés avec emphase. Je dois même dire qu'il y a certains
aspects positifs qu'on ne retrouvait pas même dans le projet de loi 41.
Il y a aussi certains aspects négatifs qu'on voudrait, somme toute, voir
corrigés avant que nos législateurs adoptent, d'une façon
définitive, le projet de loi qui sera sanctionné par le
lieutenant-gouverneur.
Dans les amendements qui doivent être soulignés, il y a
entre autres l'article 2 du projet de loi 48, où on souligne que
dorénavant: "... un policier municipal ou un constable spécial ne
cesse pas d'agir à titre de préposé lorsqu'il exerce des
fonctions d'agent de la paix. "Le Procureur général est, pour les
fins du présent article, réputé l'employeur d'un policier
municipal qui agit en qualité d'agent de la paix dans un territoire
autre que celui de la municipalité qui l'emploie."
Bien sûr, pour certains députés ou membres de cette
commission, cela peut paraître un article anodin, mais, messieurs, je
vous signale que c'est loin d'être un article anodin puisque vous avez
des directeurs de police et des membres d'état major qui ont
été poursuivis dans l'exécution de leurs fonctions, qui
n'ont pas été condamnés, qui ont été
acquittés, qui ont dû payer des frais et des honoraires, tout au
moins des honoraires de $2000, $3000, des chefs de police qui gagnaient $12 000
par année. Des juges qui ont été poursuivis dans
l'exécution de leurs fonctions, je n'en ai jamais vus qui ont
payé des honoraires professionnels; des députés qui ont
été poursuivis dans l'exécution de leurs fonctions, je
n'en ai jamais vus qui ont payé des honoraires professionnels, les
ministres, strictement dans l'exécution de leurs fonctions
évidemment, s'ils sortent et font du libelle diffamatoire, c'est une
autre question. (14 h 30)
Alors, vous avez des agents de la paix qui ont eu à se
défendre avec des poursuites coûteuses. Je pense au cas d'un
directeur de police de Mont-
magny, il y a peut-être une vingtaine d'années, à
qui cela avait coûté $35 000 pour se défendre. Je pense au
directeur de police pas loin de Montréal, pas loin de Saint-Hyacinthe
à qui cela a coûté environ $10 000 pour se défendre.
Finalement, ils n'avaient pas d'immunité, bien sûr, dans
l'exécution de leurs fonctions, ils avaient des problèmes. Ils
étaient poursuivis, ils étaient obligés d'assumer les
frais de leur défense. Mais plus que cela, on a eu un directeur de
police qui a pourchassé dans les limites de son territoire un criminel
qui venait d'une autre municipalité. Il a été
obligé de sortir des limites du territoire et, par la suite, il a
été poursuivi en dommages et intérêts par ce
criminel qui avait été condamné aux Sessions de la paix.
Le gars, cela lui a coûté $3000 pour se défendre parce que
la ville disait: Nous n'avons pas à défendre notre directeur, il
n'exerce pas sa charge dans le cadre des limites de la municipalité, il
exerce en dehors j'allais dire le nom de la ville alors, nous ne
payons pas. Effectivement, la ville n'a pas payé et ce pauvre citoyen,
directeur de police, a dû en prendre pour son rhume et payer ces
dépenses.
Il est inutile de vous dire que l'article 2a est vu avec beaucoup
d'attention par notre syndicat professionnel.
L'article 2b dit: "Toute personne qui appartient à une
catégorie d'agents de la paix désignée par
règlement du lieutenant-gouverneur en conseil "peut" fournir à la
commission les renseignements prévus par ce règlement en la
manière qui est prescrite." L'article 2c, bien sûr, c'est le
revers de la médaille. Si le procureur général est
responsable des agents de la paix qui sortent de leurs limites territoriales,
qui sortent de la juridiction de leur municipalité, il est bien normal
que le procureur général puisse exiger des rapports. Nous n'y
voyons rien d'anormal, et je pense bien qu'on ne pourra pas taxer le
gouvernement du Québec et le ministre de la Justice de vouloir faire une
police d'Etat par cet article.
Messieurs les membres de la commission, parmi les autres articles
importants, il y a l'article 52 de la Loi de police. Vous savez sans doute que
les cités et villes du Québec, depuis plusieurs années,
violent et défient la Loi de police, qui est une loi d'ordre public, que
le ministre de la Justice et procureur général, article 106 de la
loi actuelle, a l'obligation de faire respecter. Le ministre de la Justice
avait l'obligation de le faire respecter même avant 1976. Eh bien,
messieurs les membres de la commission, la Commission de police
elle-même, dans un rapport qu'elle publiait il y a quelques mois, disait
que 25 cités et villes ne respectaient pas la Loi de police. Cela, c'est
la Commission de police, un organisme gouvernemental, qui le disait. Je le
souligne dans mon mémoire. Mais, qui est le gardien de l'ordre public et
de la paix et de la sécurité au Québec? Je comprends qu'on
peut prétendre en certains lieux que la Gendarmerie royale pouvait avoir
une certaine partie de ce gardiennage. Mais, encore, je pense que c'est le
ministre de la Justice qui doit s'assurer de la protection de l'ordre public et
du respect d'une loi d'ordre public. Or, quand on dit que 25
municipalités au Québec ne respectent pas une loi d'ordre public,
où va-t-on? Vous savez, ce n'est pas tout de faire des lois, de les
amender, de les corriger et d'ajouter des cataplasmes. Encore faut-il que ces
lois soient appliquées. Je pense que la Loi de police est l'exemple
d'une de ces lois qui était violée et défiée, mais,
attention! par des autorités démocratiquement élues, des
autorités locales.
MM. les membres de la commission, je ne veux pas flatter le gouvernement
qui est au pouvoir; je dois dire que, depuis au moins deux ou trois ans, je
l'ai dit dans mon mémoire, on a peut-être eu plus de
facilité, disons, à obtenir une collaboration, une
coopération du gouvernement pour que soit respectée la loi avec
ses carences et ses faiblesses. Je vais vous le dire personnellement parce que
j'en ai été témoin dans différents cas, mais, quand
je vois des municipalités qui violaient la loi et que le
ministère de la Justice ne voulait rien savoir... On disait: A chacun
son jardin et qu'on applique la loi comme on voudra, nous autres, cela ne nous
occupe pas. J'ai déjà entendu quelqu'un en autorité me
dire cela. Les cheveux m'en dressaient sur la tête.
A l'occasion de cette refonte ou des amendements apportés
à la Commission de police, je suis heureux de voir qu'à l'article
52 de la Loi de police, enfin, on veut donner des dents à cette loi. A
ce moment, des dents, ce sont des dents financières et
pécuniaires. Et les municipalités, les cités et villes qui
ne voudront pas assumer ces obligations d'ordre public, qui ne constitueront
pas leur corps de police ou qui ne le maintiendront pas en tout temps, le
gouvernement, par son ministre de la Justice, sur recommandation de la
Commission de police, pourra décider, à ce moment, d'assigner la
Sûreté du Québec et de dire à la Sûreté
du Québec: Assumez l'ordre et la paix au niveau local, au niveau
régional et nous enverrons le compte à la municipalité. Si
elle ne paie pas, on le fera homologuer, on saisira la municipalité s'il
le faut. C'est cela que veut dire l'article 52c. C'est enfin une disposition
qui a des dents et je crois qu'en 1968, lorsque le gouvernement d'alors a
adopté la Loi de police, c'était une loi gâteau pour plaire
à certaines associations qui réclamaient cette loi depuis
plusieurs années, mais une loi qui n'avait aucune dent. Il y avait bien
sûr une Commission de police qui faisait des recommandations, qui faisait
des voeux, qui exprimait de bons voeux, mais, finalement, cela mourait au
niveau des voeux. Avec l'article 52a, 52b et 52c, les amendements
apportés par le gouvernement actuel, enfin, la Loi de police pourra
être respectée.
Maintenant, MM. les membres de la commission, nous remarquons qu'il y a
eu aussi certains amendements qui ont été apportés
à l'article 63. Cet article 63, à notre avis... Je dois vous dire
que je défends les intérêts socio-économiques des
directeurs de police, membres d'état-major et les non-syndiqués
au sens du Code du travail. Je ne défends pas d'abord l'ordre public. Je
défends les intérêts socio-économiques de mes
membres.
C'est ce que fait notre syndicat. MM. les commissaires, la seigneurie
revient fréquemment, vous comprendrez pourquoi. D'ailleurs, quand je
vois messieurs les juges ici, on a une déformation professionnelle.
Messieurs les membres de la commission, il y a eu un amendement
apporté à l'article 63 de la Loi de police. A notre avis, cet
amendement était ardemment sollicité et souhaité. Mais il
nous semble que cet amendement est insuffisant. Je dois vous dire, il y a des
membres de la Commission de police qui sont là, que même l'article
63 de la Loi de police, parfois, n'a pas été compris par les
propres membres de la commission. Ils pourront me répondre. On dit: La
destitution ou la réduction de traitements, prévue dans une
résolution visée au présent article était
uniquement: a), b) et c).
Je vais vous lire c): "A compter du moment où la commission
approuve la résolution." Il y a des membres de la commission qui ont
permis à une ville de retourner après l'adoption d'une de ses
résolutions et dire à la ville: C'est vrai, on ne peut pas juger
en appel; aller appliquer votre résolution. Mais ce n'est pas ça
qu'on dit à l'article 63c. Il dit: "Avant que soit approuvée la
résolution; à compter du moment où la commission approuve
la résolution", donc après effet, après l'approbation par
la commission et qu'est-ce qu'elle fait pour l'approuver? Il faut qu'elle
entende l'appel. Alors, avant d'entendre l'appel, on dit: Aller appliquer votre
résolution. C'est ce qui fait que des ambiguïtés se
créent dans l'application d'une loi lorsqu'on l'applique avec certaines
irrégularités.
Maintenant, je remarque que le gouvernement actuel dans son amendement
à l'article 63 n'apporte guère d'éclaircissement sur le
paragraphe c) de l'article 63. J'aurais aimé, j'aurais souhaité
qu'il nous apporte cet éclaircissement.
Evidemment, les corrections que le législateur ou le ministre de
la Justice, le parrain, apporte par l'amendement à l'article 63, vous
les retrouvez à l'article 30 du projet de loi 48. Alors, pour être
sûr que je suis bien compris, je reprends cet amendement: Cette
résolution doit être signifiée à la personne qui en
fait l'objet, de la même façon qu'une assignation en vertu du Code
de procédure civile, avant, c'était dit: "en main propre". Je
pense que dans le projet 41, on disait "en main propre". C'était bien,
mais là, c'est un peu moins qu'en main propre, ça pourrait
être une personne raisonnable de son domicile, ça pourrait
être à la femme, ça pourrait être à n'importe
qui. Le chef va être en dépression, il va être rendu
à l'hôpital, on signifie ça à n'importe qui. C'est
une amélioration rétrogradante.
En tout cas, continuons. "Cette personne peut, toutefois, interjeter
appel de la décision de la commission si là il y a trois
petites subdivisions a): "La municipalité a agi en l'absence
d'une recommandation de la commission." Ah! Là, on voit que la
Commission de police du Québec aura un pouvoir de recommandation, un
pouvoir de conseil avant l'imposition de la sanction. Alors, vous allez voir
une municipalité avec des élus municipaux qui font de la
politique au bas niveau dont parlait Guy Tardif dans son volume qui vont aller
à la commission et dire: Notre chef de police, il fonctionne mal. C'est
une tête forte. Il n'est pas obéissant. Il est mauvais
garçon. Il ne veut pas respecter nos voeux. Il ne veut pas respecter
notre politique. Nous autres, on a l'intention de le suspendre pour trois mois
ou de le destituer. Que pensez-vous de cela, messieurs de la commission,
messieurs les commissaires? Les juges et commissaires vont dire: Etes-vous bien
sûrs que c'est cela que vous nous dites, les représentations que
vous faites? Oui, il n'est pas endurable. Il est ceci, il est cela. Ce sera un
côté de la médaille. Ils vont dire: Oui, c'est un gars qui
mériterait la porte. Il a quel âge? Il a 50 ans. Mettez-le
à la porte. Alors, là, ils vont s'en retourner dans leur
municipalité et ils vont dire: On a eu l'approbation de la commission: A
la porte! Très belle sécurité pour les directeurs et
membres de l'état-major, une sécurité que les juges
n'aimeraient pas avoir, de toute manière.
Deuxième petit b): "Si la municipalité donne suite
à une recommandation rendue par la commission, mais impose une sanction
plus forte que celle qui est prévue." Voici le cas. On se
présente vis-à-vis de la Commission de police, cet
organisme-conseil qui a de l'expérience, que je respecte, puisque le
passé nous démontre qu'il doit être respecté. La
commission, savez-vous ce qu'elle va dire? Elle va dire: Oui, ce
garçon-là n'est pas si mauvais que cela. On le connaît.
Vous nous faites des représentations. Une journée de suspension
pour le faire réfléchir un peu. Il va méditer pendant une
journée et tout cela.
La ville va lui imposer un mois de suspension. Elle va se tromper et va
mettre un mois. Le gérant municipal qui a tous les pouvoirs dans une
municipalité va faire préparer la résolution: un mois de
suspension. Alors, on va dire: Wo!, messieurs, vous avez excédé
la recommandation qu'on vous a faite, nous de la Commission de police. Donc, le
chef pourra venir en appel devant nous. Mais, encore là, le décor
va être étalé, les arbres vont être plantés,
les légumes vont être là. Vous arrivez devant la commission
et ils vont vous entendre. Cela va être un banc qui ne saura pas le
problème. Mais le banc va savoir que la Commission de police par ses
membres est venue et a dit: Une journée de suspension, au moins une
journée de suspension puisqu'ils vont dire: Vous avez
excédé notre recommandation. Il va falloir que quelqu'un dise
qu'il y a excès ou non et de combien. Encore là, la commission va
se rasseoir et va dire: Nous, on est neutre dans cela. On va entendre cela.
Troisième division, petit c): "Des faits nouveaux sont survenus
depuis la recommandation de la commission."
Imaginez-vous que si vous êtes un bon avocat, vous n'êtes
pas une "bottine", vous allez vous présenter devant la commission et
vous allez dire: Peut-être que c'est la recommandation que vous avez
faite, messieurs de la commission, mais il y a des faits nouveaux. La
commission va être obligée d'entendre cela, elle va dire: On va
faire une preuve, comme on dit en droit criminel M. le
ministre de la Justice le sait probablement de voir dire. On va
voir si le directeur peut invoquer des faits nouveaux par rapport aux faits qui
étaient mis en preuve devant les membres de la commission. Quand les
exposés auront été faits devant les membres de la
commission, il n'y aura personne parmi les témoins pour
représenter le chef. Il n'y aura que les fonctionnaires, les hauts
fonctionnaires ou les membres, les commissaires qui vont entendre cela, et il
va y avoir les élus municipaux, les braillards qui vont être
là. Là, ils vont pleurer et dire: Non, ce n'est pas un fait
nouveau, ils nous l'avaient dit quand ils sont venus nous voir.
Messieurs les commissaires, je pense que les amendements qui sont
proposés à l'article 30, qui sont d'un bon naturel, qui sont des
amendements qui voulaient sortir la commission d'une certaine
ambiguïté puisque la commission portait deux casquettes:
casquette de conseil et casquette de quasi-tribunal avec pouvoir quasi
judiciaire; on cassait la résolution et on rétablissait le chef
dans son poste. Là, on a dit: On va sortir la commission de cette
ambiguïté, des pouvoirs strictement cura-tifs qu'elle avait avant
en vertu de l'article 63, on va lui donner des pouvoirs préventifs.
Là, elle va prévenir le pire et les directeurs vont pouvoir
s'assurer d'une justice et d'une équité très grandes
puisque cela va se négocier avant qu'ils se présentent là.
Les élus municipaux vont aller faire les jeux avant que la
décision soit prise. (14 h 45)
En soi, l'intention de l'amendement à l'article 63, M. le
parrain, est très honnête et très bonne, mais je pense que
dans la pratique, vous allez mettre les directeurs de police, les membres
d'état major et tous ces non-syndiqués membres de corps de police
dans une situation plus inéquitable et plus injuste, même sans
prêter de mauvaises intentions à la Commission de police. Dans le
passé, j'ai vécu souvent avec les membres de la commission dans
des décisions et je peux dire qu'ils font un excellent travail.
Même sans collusion avec la Commission de police, imaginez-vous que la
commission, c'est un organisme neutre, elle ne prend pas pour les policiers, ce
n'est pas la commission de protection des policiers, et elle ne prend pas pour
les citoyens, strictement. Elle ne prend pas pour les autorités
municipales, elle est neutre, elle va arriver et M. le maire, avec son bras
droit, celui qui crie le plus fort dans le conseil, va venir se plaindre
à M. le Président ou à un de ses membres, juge,
commissaire, et va dire: Ecoutez, M. le directeur Untel ne veut pas faire ce
qu'on lui dit, on lui dit de ne pas prendre sa voiture-patrouille pour se
rendre à son domicile et il la prend quand même. On lui dit, quand
son détective fait une enquête, qu'il habille son
détective, on aimerait qu'il soit costumé, et lui dit qu'il peut
y aller en civil. Cela ne fait pas, il désobéit. Insubordination,
suspension d'un mois! La commission dit: Non, une journée. Lorsqu'on va
venir en droit d'appel, déjà les jeux vont être
alignés entre un juge, la commission comme juge, et une des parties. Le
procès va être amorcé à ce niveau.
Les amendements à l'article 63, je crois que ce sont des
amendements quelque peu pitoyables. J'aurais même
préféré, M. le ministre, les amendements qu'avait
apportés le gouvernement qui a précédé le
vôtre à la loi no 41 disaient: Lorsqu'il y aura une commission
d'enquête, lorsque la Commission de police aura joué avec les
autorités municipales, lorsqu'il y aura certaines je ne parlerai
pas de collusion discussions entre elles, à ce moment-là,
après une enquête, qu'elle soit privée ou publique, on
déférera cela à la Cour provinciale, à un banc de
trois juges, des juges qui ne sont pas à la Commission de police, mais
trois juges qui sont à l'extérieur de la commission. Alors, on a
la chance d'avoir quelque chose d'un peu plus objectif.
Ce que le Syndicat professionnel des chefs de police réclame,
c'est que cette ambiguïté de l'ancien article 63 cesse et non pas
que se perpétue l'ambiguïté par un nouveau texte encore plus
ambigu, mais qu'on clarifie au moins le minimum, qu'on nous apporte
l'amendement de la loi no 41 de 1976 du gouvernement
précédent.
M. le Président et messieurs les membres, nous avons
élaboré notre pensée à un certain moment, surtout
en conséquence de l'article 52, sur le fait que des municipalités
ne respectaient pas leurs obligations légales. Imaginez-vous! Ce sont
des autorités élues, des conseils municipaux, et je dois vous
dire que je suis même quelquefois en dissidence avec des tribunaux quand
les tribunaux considèrent des conseils municipaux comme des incapables.
Parfois, les tribunaux vont dire: Ecoutez! La municipalité a
adopté un règlement ou une résolution, mais elle n'avait
pas le pouvoir de le faire; on annule donc cela. Le contrat qui a
été passé pour la réfection des chemins, c'est bien
dommage, M. Untel l'entrepreneur vous avez investi $62 000 et
vous perdez vos $62 000, parce que les conseillers municipaux sont des
incapables. Ils n'avaient pas le droit d'adopter cela, ils n'avaient pas de
fonds de réserve pour payer cela. Alors, oubliez cela.
J'ai représenté un client qui demeure près de
Québec et qui avait investi quelque $60 000. A un moment donné,
les juges disent: Non, on ne peut pas y aller; ces travaux-là n'auraient
pas dû être faits. Le fond de la route, on dit: On va revenir
chercher le gravier et le reste. La municipalité dit: Ne touchez pas
à cela. On ne peut pas aller toucher à cela, parce que les
incapables, les élus municipaux avaient adopté la
résolution, et ce n'est pas la résolution qu'ils devaient
adopter. Ce devait être un règlement et la proposition des
électeurs propriétaires... En tout cas, ils n'avaient pas
respecté la procédure. Vous savez, je n'en reviens pas encore de
considérer les élus municipaux comme des incapables.
A ce moment-ci, avec les amendements qui sont projetés, avec la
fonction de conseil préventif de la Commission de police, bien sûr
qu'on considère encore les élus municipaux comme encore un petit
peu plus incapables. Mais la solution n'est pas là: c'est dans la
dépolitisation et la régiona-
lisation de la police. On le disait il y a cinq ans et on a encore la
même position: on continue à le dire.
Je crois que le rapport Saulnier avait dressé la voie par ses
recommandations. Je vais vous dire honnêtement que je n'ai pas
analysé en profondeur le rapport Saulnier, parce que je n'ai pas qu'un
dossier, je ne fais pas que du travail pour la police. J'ai lu en diagonale les
recommandations et j'ai vu dans ces recommandations l'essentiel de la
philosophie que poursuit le Syndicat professionnel des chefs de police. La voie
de la régionalisation est une voie qui nous plaisait déjà
depuis 1974-1975. On aurait préféré que le gouvernement
s'embarque résolument dans cette voie et continue les recommandations de
ce groupe d'étude Saulnier. On prend des experts, on prend des gens
connaissants pour se faire éclairer et je pense qu'on avait là un
rapport qui était à même d'aider ce gouvernement à
faire un pas en avant. M. le ministre de la Justice, je crois que votre projet
de loi, avec toute déférence et respect, ce n'est pas le projet
de loi qui ferait dire du ministre Bédard que c'est le Napoléon
de la codification des lois policières.
M. Bédard: Je n'y tiens pas.
M. Roy: M. le ministre, votre nom ne passera pas à la
postérité avec ce projet de loi. Je crois sincèrement que
vous aviez l'occasion rêvée, avec le rapport Saulnier, de passer
à "l'aggiornamento" comme on disait durant le temps du concile, pour
réaligner toute cette affaire-là avec une expérience de
onze ans de la Loi de police, organisme qui a de l'expérience, qui a de
la compétence, qui a l'effectif qu'il faut pour conseiller. Vous avez
une Direction de la sécurité publique au ministère de la
Justice, vous avez les grands corps de police des communautés urbaines,
Québec, Hull; alors, avec tout cela, on pouvait réaligner une
réforme de la protection publique au Québec sans que ce soit une
aventure.
A un moment donné, je dis que le gouvernement du Québec
s'est parfois montré complaisant et, au risque de faire moins rire ceux
qui sont en face du ministre, je dirais que cette complaisance-là
était peut-être plus forte avant 1976. Il y a une complaisance
où on fermait les yeux pour l'application de la Loi de police. On
fermait littéralement les yeux et la Loi de police, ce n'était
pas important. Je vais vous montrer comment ce n'était pas important. Il
y a eu un règlement no 11, M. le ministre, qui a été
adopté en 1974. Ce règlement no 11, le gouvernement qui vous a
précédé, pendant deux ans, n'a pas voulu le
réviser. De 1976 à 1979, vous n'avez pas révisé le
règlement no 11. Cela reste lettre morte.
On dit: On ne veut pas s'impliquer politiquement. Ce sont les affaires
municipales. C'est une belle histoire. Je vais vous dire pourquoi c'est une
belle histoire. Le jour où le gouvernement du Québec a dit, dans
son Code du travail: Quand les policiers ne s'entendront pas pour
négocier leurs conditions de travail, les conseils d'arbitrage, les
présidents des conseils d'arbitrage, les arbitres patronaux, les
arbitres syndicaux vont déterminer les conditions de travail. Qui
sont-ils? Savez-vous qui c'est? Ce sont des émissaires nommés par
le ministre du Travail qui déterminent la convention collective par voie
de sentence arbitrale et qui vont dire aux autorités municipales:
Messieurs de la municipalité, voilà un constable classe 3, classe
4, c'est $492 par semaine, ou c'est $441 par semaine. Vous allez dire: Oui,
mais c'est la municipalité qui décide cela. Non. Vous savez bien
que les conseils d'arbitrage sont nommés par le gouvernement du
Québec, par le ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre. Le
président est nommé sur une liste de 25. C'est lui qui
détermine les conditions de travail des salariés syndiqués
de la municipalité, mais, quand cela passe au chef ou aux membres de
l'état-major, le gouvernement dit: Non, on ne se mêle pas de cela.
On laisse cela aux élus municipaux. Le gouvernement
précédent M. Lalonde est là nous a dit la
même chose. A un moment donné, à un congrès de la
Commission de police, il a dit: Vous savez, le principe "No taxation without
representation", la taxe est perçue du gouvernement municipal, on n'a
pas d'affaire à aller s'immiscer dans l'administration provinciale.
C'est très beau, M. le ministre. Je devrais dire maintenant M.
l'ex-ministre. C'est très beau, nous partageons votre opinion. Mais
qu'est-ce que vous faites des syndiqués de la municipalité qui se
voient imposer des conditions de travail par une autorité autre que les
autorités municipales? Là, la réponse ne vient pas. Ce
même gouvernement ne semble pas nous apporter la réponse dans son
projet de loi no 48. Il ne l'apporte pas plus.
Le Président (M. Boucher): Me Roy, puis-je vous demander
de vous adresser, toujours, au président?
M. Roy: Ah! M. le Président, excusez, je vous
négligeais, mais à l'avenir je vous promets, M. le
Président, que je ne vous négligerai pas une seule minute.
Le Président (M. Boucher): Je répéterai tout
ce que vous direz aux membres.
M. Roy: J'ai remarqué, M. le Président, ce matin,
que vous étiez peu loquace dans les questions. C'était tout le
temps les autres qui les posaient.
Le Président (M. Boucher): Je ne parle jamais. Je ne pose
pas de questions, moi.
M. Roy: J'avais une idée pourtant géniale et vous
me l'avez fait manquer.
M. Bédard: Ce sont toujours les idées
géniales qui nous éhappent.
M. Roy: Pardon?
M. Bédard: Ce sont toujours les idées
géniales qui nous échappent.
Le Président (M. Boucher): Je m'excuse de
l'interruption.
M. Roy: M. le Président, je vais faire comme à la
cour, je vais demander de relire les notes sté-nographiques.
Pour le financement de la protection publique au Québec, il est
bien sûr que les municipalités, quand cela touche l'ordre public,
l'hygiène, la santé, que fait l'Etat? Il donne des subventions;
réseau d'aqueduc et d'égouts, $2 500 000; réseau de
protection-incendie, $1 500 000. Quand on arrive à la police, on dit:
Cela, ce n'est pas important. La police, oublions cela c'est un mauvais... Vous
savez, la police, cela c'est le "crémage" sur le gâteau.
M. le Président, nous avons particulièrement
apprécié la collaboration du gouvernement actuel dans des
dossiers très épineux depuis deux ans et demi, trois ans. Je dois
le dire ici en commission parlementaire. Cependant, à un moment
donné, entre autres, je me souviens que nous étions en Cour
d'appel pour un cas très particulier et probablement que l'honorable
ministre de la Justice le sait. Au même moment où on était
devant la Cour d'appel et qu'on se battait ardemment, on a appris, je crois que
c'est par le ministre de la Justice, qu'une municipalité venait de
recevoir $450 000 pour améliorer son poste de la Sûreté du
Québec dans les limites de la ville, ville qui violait la Loi de police
du Québec. Il y a de ça un an. Alors, $450 000 pour
améliorer son poste de la Sûreté du Québec. Alors,
cette ville disait: La preuve qu'on n'a pas besoin de police, la
Sûreté du Québec va avoir un poste de $450 000 pour
l'améliorer, dans la ville. La Loi de police, on n'a pas besoin de cela.
C'est la Sûreté du Québec qui nous organise. Cela ne
coûte pas cher la Sûreté du Québec. Le même
argument que retournait le gouvernement précédent, la Gendarmerie
royale, payée par dix provinces, entre autres le Québec et
l'Ontario, pour assumer la sûreté provinciale dans les huit autres
provinces qui n'ont pas de sûreté provinciale. Ce n'est pas normal
que le Québec et l'Ontario paient pour cela. Mais, actuellement, un
certain nombre de villes se trouvent subventionnées par le biais de la
protection policière, Sûreté du Québec, qui est
financée par l'ensemble des citoyens du Québec. Alors que la loi
leur fait une obligation d'avoir un corps de police, eux disent: Notre
obligation, nous, c'est seulement dans le dos, et on n'en a pas de corps de
police, on n'en veut pas. Quand bien même le ministre viendrait nous
dire: Vous devez avoir un corps de police, on va couper le budget, on n'a plus
d'argent. Que le ministre la paie la police, premièrement.
Deuxièmement, quand on disait: On a de l'argent, mais on ne veut
pas avoir de problème avec le ministre: On va faire un
référendum. Mais quand il y avait référendum on
disait: Aimeriez-vous mieux avoir un policier dans la municipalité au
lieu de dix? Deux policiers au lieu de dix? Trois policiers au lieu de dix? Si
vous avez un policier, cela va vous coûter $10 000. Si vous en avez deux,
cela va vous coûter $20 000, si vous en avez trois, cela va vous
coûter $30 000, au lieu de dix, $110 000, et avec les équipements,
$150 000. Le contribuable, pas fou, il a dit: Non, non, on aime mieux avoir un
policier et même on aime mieux ne pas en avoir du tout parce que de la
police on en a toujours trop. C'est clair. On en a trop. On n'en veut pas. Et,
surtout que si on vient à en avoir besoin, si le feu prend ou si les
difficultés arrivent, bien, on ira se mettre à genoux devant la
Sûreté du Québec ou le ministre de la Justice et on dira:
Ecoutez, protégez-nous. Venez nous protéger. On a des fous, des
cambrioleurs, on a des "vestes de cuir", on a des motards chez nous.
Envoyez-nous donc la Sûreté du Québec. Alors, l'ensemble
des citoyens du Québec, les villes de Montréal, de Québec,
les grandes villes qui respectent leurs obligations, non pas les villes bidons,
mais les vraies villes, ces vraies villes-là paient leurs taxes
municipales pour la Sûreté municipale et elles paient des taxes
provinciales pour la Sûreté du Québec dans les villes
bidons. C'est cela. Ce que le gouvernement actuel déplorait à
Ottawa, il réclamait $200 000 à un moment donné, je m'en
souviens, ce même gouvernement réclame encore et là, ce
doit être rendu à $500 000 000, $1 000 000 000. Aujourd'hui la
médication qu'on ne veut pas se faire appliquer au niveau
fédéral-provincial, on se l'applique au niveau
provincial-municipal. Nous autres, pauvres contribuables, au niveau
municipal-provincial, on subventionne les villes qui sont non soucieuses du
respect de leurs obligations légales. J'ai bien souligné cela
dans notre mémoire. J'estime que les amendements qu'a apportés
l'honorable ministre à l'article 52 et aux suivants, c'est au moins un
vrai bon départ. (15 heures)
Maintenant, il y a un autre point que je voudrais signaler à
cette commission, M. le Président, c'est que, quand la loi va être
adoptée, là, les villes de moins de 5000 habitants, imaginez-vous
si cela va être le "party". Là, on va dire: La police, c'est fini.
Cela fait dix ans qu'on avait cela sur le dos. On n'en veut plus, cela
coûte trop cher. Des gars comme X, Y, Z de Montréal qui nous
arrivent avec des sentences arbitrales pour nos policiers n'est-ce pas,
M. Marcil ces gens on ne les aura plus. Alors, finalement, cela va
être la Sûreté du Québec qui va aller dans certaines
villes de moins de 5000 habitants en cas de nécessité. Plus de
5000 habitants, on va s'adresser au gouvernement et on va dire: Ecoutez,
pouvez-vous nous obtenir une dispense, une exemption? Maintenir un corps de
police, nous autres, cela ne nous adonne pas, on n'a pas les moyens. C'est une
ville plutôt de villégiature qui fonctionne cinq mois ou quatre
mois par année et tout cela.
Là, le gouvernement pourra se garder quand même une
discrétion et dire: Oui, on l'accorde ou on ne l'accorde pas. Mais, si
on devait continuer à vivre dans l'ambiguïté après le
projet de loi no 48 comme on a vécu dans l'ambiguïté avant
le projet de loi no 48, on est aussi bien de ne pas apporter d'amendement.
Entre autres, il y a le comité de reclassement. On prévoit un
comité de reclasse-
ment pour les policiers dans les villes de 5000 habitants et plus.
Là, quand il va y avoir une abolition du corps de police pour les villes
de 5000 habitants et plus, il va y avoir un comité de reclassement pour
réintégrer, réinsérer dans la vie civile ou la vie
policière ordinaire; un comité de reclassement patronné
par la Commission de police. En tout cas, il va y avoir beaucoup de monde
impliqué dans cela. Mais si la ville a moins de 5000 habitants, cherchez
dans la loi qu'est-ce qu'on va faire de ces effectifs. Si la ville a moins de
5000 habitants, le lendemain où le lieutenant-gouverneur va avoir
sanctionné la loi, savez-vous, ce qui va arriver des effectifs
policiers, messieurs? Ils vont tomber entre deux chaises. Fini. Le père
a 55 ans. On va dire: Monsieur, c'est bien regrettable, on n'a plus besoin de
vos services. Il va dire: Oui, mais moi, j'ai donné de fidèles et
loyaux services pendant 25 ans à la municipalité. On va dire:
Bien oui, mais qu'est-ce que tu veux, tu as été chanceux, tu as
eu 25 ans. Là, bonjour, merci.
C'est cela, le projet de loi. On ne prévoit rien pour les villes
de moins de 5000 habitants. Mais pourquoi n'a-t-on rien prévu même
pour les villes qui n'auraient que 1000 habitants? S'il y a un pauvre chef de
police qui est là depuis 20 ans, on va lui dire: Ecoute, c'est une
petite ville de 1000 habitants et moins de 5000 ils n'ont plus besoin de corps
de police. Tu vas où, toi? Ils vont dire: Va où tu veut, balayeur
n'importe où; nous autres, on n'a plus besoin de toi. Le comité
de reclassement ne joue pas pour les faibles. Il va jouer pour les
"un-petit-peu-plus-forts". Quand ils sont 5000 habitants et plus,
déjà cela peut crier un peu plus fort. Le projet de loi dit: Pour
éviter que cela crie fort, on va y aller boucher ce trou. Cela, je le
déplore énormément et je l'ai dit dans les aspects
négatifs de ce projet de loi.
MM. les membres de la commission, M. le Président, c'est
sûr que le projet de loi no 48, c'est une amélioration, c'est un
avancement, c'est un pas. La cité, au sens grec ou romain du terme, ne
s'est pas construite en un jour. On ne pensait pas que vous
révolutionneriez le monde avec un projet de loi. On a attendu plus. On a
eu moins. On avait attendu plus du projet 41, on a eu moins; bien plus, on n'en
a pas eu du tout. C'est encore pire. M. le Président, nous
espérons que le genre de conciliation secrète qu'il peut y avoir
par le biais des amendements du projet de loi no 48 entre la Commission de
police et les autorités municipales, cela va être biffé. Il
n'y en aura pas de cela. De la cachette là, avant l'imposition de
sanctions, on n'en veut pas. On va jouer cartes sur table. Amendez le projet de
loi, s'il vous plaît; on trouve cela insupportable.
La situation des chefs et membres d'état-major devient pire avec
votre projet de loi qu'elle ne l'était sous l'ancien article 63 avant,
bien sûr, la loi 41 qui n'a jamais été adoptée, ni
appliquée. Tout au moins, rabattez-vous sur la loi 41 et retranscrivez
la loi 41 sous les amendements de l'article 63. Déjà, on va se
sentir un petit peu plus en sécurité. On ira en Cour provinciale
devant trois juges et non pas après avoir été à la
Com- mission de police où il y aura des négociations et des
tractations et bon! lâchez ceci et lâchez cela et, après
cela, imposez votre sanction et on vous maintiendra en appel.
Vous imaginez-vous le rôle des avocats, venir devant la Commission
de police du Québec, alors qu'il y a eu une recommandation. On va dire:
Messieurs de la Commission de police, il y a des faits nouveaux. Ils vont rire
et vont dire: Faites-nous la preuve des faits nouveaux. Là, on va avoir
un barrage d'objections de la part de l'avocat de la ville. Il va dire: On ne
veut rien savoir, etc., etc., c'est subséquent à la
résolution. Ce seront des problèmes au point de vue juridique. Je
vous le dis, on empire la vie des membres de l'état-major. On aurait
été mieux de ne rien faire que de faire ce qu'on fait.
M. le Président et messieurs les commissaires, dans notre
mémoire, on a un tas de points qu'on a soulignés. Je ne les
relirai pas. Ce serait fastidieux pour vous. Les vacances ne sont même
pas terminées. Mais je me soumets à toutes les questions que vous
voudrez me poser et si je suis incapable d'y répondre, je suis certain
que mes collaborateurs de droite et de gauche pourront apporter tout au moins
une amorce de réponse et demain, avec les excellents
présentateurs que vous aurez des autres mémoires, que j'ai
rencontrés d'ailleurs, vous aurez sûrement la réponse
finale et définitive. Merci.
Le Président (M. Boucher): Merci, M. Roy. M. le
ministre.
M. Bédard: M. le Président, je tiens tout d'abord
à remercier le Syndicat professionnel des chefs de police et pompiers et
officiers supérieurs de la protection publique de son mémoire. Il
me semble clair que si on est d'accord sur certains points, on est
définitivement en désaccord sur d'autres.
L'intervention de Me Roy au nom du syndicat et l'ensemble du
mémoire ont le mérite également de faire ressortir la
complexité du problème, la difficulté de trouver la
solution qui paraîtrait la plus adéquate à toutes les
parties lorsqu'il s'agit de régler le problème de la protection
policière en général, sur l'ensemble du territoire du
Québec.
Je tiens à vous dire que je ne tiens pas à être le
Napoléon, en termes de solutions, des forces policières, ni
à être le Napoléon des municipalités qui sont aussi
jalouses de leur autonomie. Mais la complexité du problème que
vous avez fait ressortir me convainc d'autant plus que la solution qu'on doit
rechercher pour amener des améliorations ne peut être qu'une
solution d'équilibre c'est dans ce sens que je me suis
exprimé qui tient compte des représentations et des
principaux principes en jeu, le principe de la décentralisation et de
l'autonomie, du respect de l'autonomie des municipalités, principes
aussi très importants du droit des citoyens à une protection
policière adéquate. En ce sens, une vraie solution
d'équilibre j'en étais conscient avant même qu'on
prenne nos décisions; le gouvernement en était conscient
avant
même de prendre les décisions que vous retrouvez au projet
de loi 48 en soi, c'est celle qui ne réussit pas à
satisfaire pleinement l'ensemble des parties qui y ont des
intérêts.
Cela peut paraître courageux ou sembler régler le
problème que de ne prendre qu'un aspect de la situation. Je pense qu'il
n'est pas question d'essayer de jouer au courage ou à quoi que ce soit,
en fonction de trouver une solution. Il s'agit tout simplement de s'orienter
vers une solution d'équilibre qui d'avance, on le sait, ne recontrera
pas toutes les préoccupations de l'entente des parties
concernées, mais qui peut être de nature, cependant, à
améliorer une situation.
Il y a des points sur lesquels nous sommes carrément d'accord.
Vous dites dans votre mémoire que vous vous opposez à ce que
toutes les forces policières soient intégrées
provincialement. Je pense bien qu'il n'y avait même pas, en ce qui nous
regarde comme gouvernement, nécessité qu'il y ait opposition de
ce côté, parce que, dès le début, j'ai bien
explicité que je n'étais pas pour une intégration unitaire
de toutes les forces policières au Québec.
Concernant le projet de loi 48, vous manifestez votre accord avec des
points importants du projet de loi, à savoir l'article 2, concernant le
statut d'agent de la paix, les articles concernant le huis clos, la
réglementation au niveau des accidents de travail et également la
procédure de destitution, vous avez exprimé votre accord. Vous
avez également exprimé votre accord concernant les dispositions
et je pense que c'est un des points essentiels du mémoire, un des
points essentiels du projet de loi 48 transitoires sur l'obligation de
maintenir un corps de police et sur le fait que nous avons prévu pour
une fois que la loi ait des dents dans le sens qu'il y ait des pressions
financières qui soient édictées pour les
municipalités dans le cas de non-respect de la loi.
Je pense que c'est un des points importants du projet de loi. Ce n'est
pas l'application du rapport Saulnier, nous le savons mais une
décision dans le sens gouvernemental, qui est bien claire à long
terme. A court terme, il y avait un problème. C'est le problème
de l'abandon des corps policiers. Il fallait absolument, dans un premier temps,
essayer de régler ce problème.
Sur d'autres solutions à long terme comme l'ont d'ailleurs
exprimé ceux qui vous ont précédés
concernant la régionalisation, on sait qu'il y a toute une
sensibilisation à faire de ce côté. Il s'agit de parcourir
le Québec, non seulement du point de vue des municipalités, mais
dans bien d'autres secteurs d'influence. Il y a encore du travail à
faire vous le savez très bien avant d'en arriver à
un consensus sur la régionalisation.
Plutôt que d'attendre ce consensus, qui peut retarder
indûment, je pense qu'un législateur responsable se doit de ne pas
se retrancher derrière ce non-consensus pour ne pas régler des
problèmes immédiats, entre autres la question de l'abandon des
corps policiers et tout le problème de l'abandon des corps policiers.
Une réglementation se retrouve au projet de loi 48 concernant l'obliga-
tion des municipalités de maintenir, qu'elles soient régies en
vertu du Code municipal ou de la Loi des cités et villes, un corps
policier ou d'avoir un corps policier pour toute municipalité
d'au-delà de 5000 habitants et, une fois pour toutes, d'essayer de
régler le problème en termes d'obligations pour celles de moins
de 5000 habitants.
Je pense que c'est une première étape, qui est
nécessaire, parce que c'est un problème avec lequel on vit tous
les jours. On ne vit pas tous les jours avec le problème de la
régionalisation et de la non-régionalisation. A l'heure actuelle,
on vit avec un problème de tous les jours, qui est celui de l'abandon
des corps policiers et de la préoccupation que les policiers ont, que
les municipalités ont et que le gouvernement a aussi, d'assurer la
meilleure protection policière à l'ensemble des citoyens du
Québec.
Dans votre mémoire, il y a plusieurs questions, plusieurs
problèmes sur lesquels on pourrait discuter peut-être dans un
premier temps, à la page 45 de votre mémoire. Vous avez soumis
d'abord dans votre mémoire que la commission n'a pas vraiment les moyens
de favoriser concrètement la prévention du crime et
l'efficacité des services de police. C'est à la page 16.
J'aimerais que vous nous explicitiez un peu plus en quoi, d'une façon
précise, la commission n'a pas vraiment les moyens de favoriser
concrètement la prévention du crime et l'efficacité des
services de police. Que faudrait-il lui donner? Vous indiquez également
à la page 16 de votre mémoire que le pouvoir d'enquête qui
est prévu à l'article 19 de la loi s'avère
fréquemment une soupape utile aux citoyens pour se défouler
contre la police. J'aimerais que vous nous disiez, que vous nous explicitiez
quels sont les faits, quelles sont les expériences qui vous
amènent peut-être à croire et à formuler cet
énoncé. Si vous me le permettez, je termine, parce qu'on va
rester au niveau de la Commission de police.
A la page 45 de votre mémoire...
M. Roy: A la page 46 ou à la page 45?
M. Bédard: A la page 45 de votre mémoire, vous
dites, entre autres, ceci, et je cite: "En ce qui concerne le pouvoir
d'enquête de la Commission de police et la discrétion qu'elle a
d'ordonner le huis clos, nous aurions préféré qu'au lieu
de critères particuliers, le législateur prévoie
plutôt un accord entre les autorités municipales d'une part et le
chef de police ainsi que le syndicat des policiers d'autre part." Bon! Mais
vous ajoutez: "Sur certaines questions précises, les pouvoirs de
recommandation de la commission devraient devenir des pouvoirs
exécutoires, comme nous l'avons déjà signalé." (15
h 15)
J'ai essayé de retrouver plus loin si on identifiait ces
questions précises sur lesquelles la commission devrait avoir un pouvoir
exécutoire, et je ne les ai pas retrouvées. J'aimerais que vous
explicitiez ce point particulier. Quelles sont les questions précises
sur lesquelles vous aimeriez que la
Commission de police ait plus qu'un pouvoir de recommandation, mais des
pouvoirs exécutoires?
M. Roy: M. le Président, M. le ministre me parle de la
page 45, en ce qui concerne le pouvoir d'enquête de la commission et la
discrétion qu'elle a d'ordonner le huis clos. Nous aurions
préféré qu'au lieu de critères particuliers, le
législateur prévoie plutôt un accord entre les
autorités municipales, d'une part, et la police ainsi que le syndicat
des policiers, d'autre part. D'abord, sur le huis clos, je trouve toujours
curieux que les policiers ou le chef de police soient soumis à un statut
tout à fait particulier. Vous êtes en présence d'avocats,
de notaires, de pharmaciens, d'ingénieurs, de corporations publiques,
quoi! Quand vient le temps de la discipline... M. le ministre, essayez d'aller
vous présenter devant un comité de discipline pour voir si vous
allez être accepté: c'est le huis clos. C'est bon pour tous les
professionnels, mais, quand ça arrive au chef de police, ce n'est plus
bon. On dit: II exerce une fonction tellement publique que ça devrait
être public. Si on va un peu plus loin, si on pousse le raisonnement...
C'est vrai pour les juges aussi; on va enquêter aussi sur la conduite des
juges.
Moi, je dis non. Qu'on fasse cela à huis clos comme on le fait
pour les autres professionnels, comme on le fait pour les juges. Qu'on fasse la
même chose pour les chefs de police et les membres de
l'état-major. Mais attention! S'ils ont violé les dispositions du
Code criminel, s'ils l'ont violé éperdument, s'ils ont
défié la loi, le ministre de la Justice qui aura des rapports
d'un comité de discipline ou de la Commission de police portera ses
accusations comme le ferait une enquête du coroner. Il aura son rapport
et portera les accusations au criminel. Qu'on aille! Mais, avant même
qu'on connaisse la culpabilité d'un directeur ou la conduite coupable,
responsable des membres de l'état-major, on leur fait subir le feu de
l'enquête.
J'aurais aimé que la Commission de police du Québec vous
confirme, sur onze ans de pratique, combien de rapports se sont terminés
par: II n'y a rien là, les gens ont fait leur travail, ils ont fait leur
devoir, ils n'avaient qu'à faire ce qu'ils devaient faire. Par contre,
quand la commission a dit cela, ça ne paraît pas à la
télévision, cela paraît très peu.
Déjà, les réputations sont ternies. Même si le chef
veut dire: Regardez, je suis bon garçon, la Commission de police l'a dit
dans le rapport, le citoyen dit: Pas de fumée sans feu, ça sent
mauvais, on sait que ça continue à sentir mauvais.
M. le Président, on aurait voulu que le huis clos soit la
règle, que la publication soit l'exception. C'est clair, c'est juste
cela. Si c'est bon pour les juges, si c'est bon pour les professions
libérales, ça devrait être bon pour les chefs de police et
les membres de l'état-major. Cela, c'est sur le huis clos.
M. Bédard: Je comprends vos représentations
là-dessus, vos motivations. Sur l'autre aspect, concernant les questions
précises...
M. Roy: Sur certaines questions précises, imaginez-vous
que la Commission de police qui a une expertise, qui s'y connaît, dont
les membres sont des gens qui ont oeuvré dans le champ,
généralement, fait une enquête sur la conduite d'un chef de
police et sur la conduite des membres; après enquête, la
commission dit: Ils ont du boulot pour 22 policiers, mais ils sont 8 policiers.
Evidemment, ils tournent les coins ronds, ils tournent vite les feuilles de
papier, les systèmes de fichiers sont mal montés, on est mal
organisé. Pourquoi? On est 8 pour faire le travail de 22. Or, la
Commission de police du Québec a dit souvent... Messieurs, j'ai
déjà entendu un honorable juge de la commission dire: Ecoutez,
messieurs de la municipalité, vous lui faites porter une petite robe
d'une fille de 8 ans et elle en a 24, elle est bien pourvue; qu'est-ce que vous
voulez? Changez la robe, donnez-lui des policiers, donnez-lui des
effectifs.
M. le Président, on a déjà vu un corps de police
où le chef n'avait pas de bureau, n'avait pas de
téléphone, n'avait pas de papeterie, n'avait pas de
voiture-patrouille: il se promenait à bicyclette. Cela ne se dit pas
dans la presse; le gars n'avait même pas le téléphone,
c'est sa femme qui répondait au téléphone, chez lui, et le
gars gagnait $140 par semaine alors que le salaire minimum était de $168
par semaine à cette époque. J'ai poursuivi, à la Cour
provinciale, pour aller chercher, pour 60 heures de travail, au-delà du
salaire minimum. Les honorables juges de la Cour provinciale m'ont dit: Ses
heures sont invérifiables, c'est un salarié incontrôlable,
on ne peut pas vous accorder les 60 heures par semaine. Alors, retournez avec
votre petit plaisir et vos $140 par semaine.
Je dis que ce n'est pas la justice qui a apporté un soutien
à ce membre de l'état-major qui était directeur, qui
était tout seul, qui n'avait pas d'équipement, qui n'avait rien.
Les gens de la commission ici présents savent de qui je veux parler. Je
ne nommerai pas de nom. C'est arrivé souvent que la commission a fait
des recommandations et les recommandations allaient à la poubelle
rendues à certains lieux de l'administration, je ne dirai pas à
quels lieux. Alors, qu'est-ce que cela donne pour une commission de police de
siéger pendant sept jours, dix jours et douze jours, de faire des
recommandations et que le papier aille dans la poubelle ou sur des tablettes ou
qu'on rie de cela? J'ai déjà vu des députés avec
qui j'étais ami qui riaient de cela. Ils disaient: Vous perdez votre
temps; c'est entendu qu'on ne s'occupe pas de cela. Ah! Alors, la commission ne
donne rien...
M. Bédard: Autrement dit, M. Roy, vous ne seriez pas
opposé à ce que la commission ait le pouvoir exécutoire de
déterminer les effectifs.
M. Roy: Voilà, M. le ministre, vous avez compris. C'est
cela.
M. Bédard: Bon!
M. Roy: Au moins pour une partie.
M. Bédard: Puis-je vous dire que cela fait peut-être
ressortir aussi jusqu'à quel point il n'est pas facile de trouver
l'équilibre...
M. Roy: Oui.
M. Bédard: ... par rapport aux différents
intérêts en cause.
M. Roy: Oui.
M. Bédard: Parce que vous savez très bien que,
autant vous êtes convaincu de l'à-propos de cette
solution-là, autant les municipalités...
M. Roy: Sont convaincues du contraire.
M. Bédard: ... elles sont convaincues que les effectifs ne
doivent pas être déterminés par la Commission de police en
termes de décision exécutoire, qu'il s'agit de leur autonomie
municipale qui est en cause et, plus que cela, il s'agit pour elles
d'évaluer les besoins non seulement que la population a, mais que la
population est prête à se payer.
M. Roy: Oui.
M. Bédard: Je pense que le point que vous faites ressortir
montre jusqu'à quel degré...
M. Roy: C'est difficile.
M. Bédard: Si on prend juste un côté, les
solutions sont faciles à trouver. On peut trouver cela dans le temps de
le dire.
M. Roy: Oui, mais...
M. Bédard: Si on essaie de trouver un équilibre,
à ce moment-là, cela peut prendre un peu plusde temps. C'est
peut-être moins attrayant tant pour l'une que pour l'autre des parties.
Mais concernant ce sujet précis, c'est pourquoi dans la loi,
plutôt que d'aller carrément dans le sens de l'Union des
municipalités, carrément dans le sens des représentations
que vous seriez disposé à nous faire, des convictions que vous
émettez, nous avons prévu que lorsqu'il y a des cas de
réduction d'effectifs policiers ou encore des cas qui se
présentent comme ceux d'abandon de corps policiers, à ce
moment-là, il y ait un comité de consultation où sont
représentées les municipalités, entre les chefs de police,
les policiers également, le ministère des Affaires municipales et
le ministère de la Justice pour essayer d'en arriver, après
évaluation, à une solution qui puisse satisfaire ou
répondre à la situation; mais après une consultation de
l'ensemble des agents intéressés.
M. Roy: M. le ministre, à ce propos, j'aurais aimé
que la loi soit plus précise et plus articulée. Ecoutez! On a le
droit de l'exiger.
M. Bédard: Pouvez-vous nous dire... Oui.
M. Roy: Savez-vous ce qu'en Cour d'appel...
M. Bédard: Pouvez-vous nous dire dans quel sens?
M. Roy: Savez-vous ce qu'une Cour d'appel a dit? Qu'un corps de
police d'un seul homme comme à Saint-Luc, c'est un corps de police.
Alors, ils ont dix policiers ou douze policiers. Ville de Saint-Luc
réduit à un policier. La Cour d'appel dit quoi? La Loi de la
police dit qu'elle doit maintenir un corps de police. Un corps de police, c'est
un homme. Et même qu'un commissaire, le vice-président de la
commission, a déjà dit qu'un corps de police peut être un
seul homme. Finalement, allez-vous me faire croire qu'un corps de police d'une
ville de dix policiers qui, du jour au lendemain, tombe avec un policier, c'est
un corps de police? C'est évident que ce n'est pas un corps de police.
Le ministre de la Justice est le procureur général chargé
de l'application de la présente loi. Il n'y a pas de corps de police au
sens de la loi. Pourquoi la loi n'a-t-elle pas dit: "Corps de police"; il y a
des critères? Quand il y a une population d'un certain nombre de
personnes, cela prend un minimum: un policier pour 850 habitants ou un policier
pour 1240 habitants. Il aurait pu y avoir des normes chiffrées. Au
moins, il faut qu'on parte avec quelque chose. Si la Cour d'appel dit: Ville de
Saint-Luc, 8000 habitants, il y a un chef de police, c'est un corps de police
aux yeux de la Cour d'appel. Mais c'était là l'occasion
rêvée pour le ministre de la Justice de le préciser.
M. Bédard: Je vous ferai remarquer qu'à l'article
52c, on parle maintenant de services policiers adéquats.
M. Roy: Adéquats.
M. Bédard: Bon!
M. Roy: Mais c'est la commission.
M. Bédard: Adéquats. Non, ce n'est pas
nécessairement la commission. Quand on parle de la suite de tout cela
pour déterminer ce qui est adéquat, parce qu'il y a certaines
décisions des cours qui ont été rendues on les
connaît qui vous font dire que ces décisions ne
répondent pas aux besoins adéquats.
C'est évident qu'une décision d'un tribunal qui dit: Un
policier, c'est un corps de police, cela ne veut pas dire que cela
répond nécessairement aux besoins adéquats d'une
population d'avoir une protection policière. La continuation et la
logique de cela, c'est que maintenant, pour déterminer ce que sont les
services policiers adéquats, nous avons prévu qu'il y aurait une
consultation, un comité de consultation clairement établi
où siégeraient les différents agents
intéressés. Ceci nous permettrait d'en arriver, après
discussions, à la solution la plus adéquate possible pour
l'ensemble des parties et des intérêts représentés
plutôt que d'en arriver à des décisions qui font en
sorte
qu'on n'a pas de solution et que les policiers et les
municipalités demeurent toujours en état d'affrontement.
M. Roy: D'ailleurs, M. le Président, je l'ai dit tout
à l'heure, les amendements à 52a), b) et c), ce sont des
amendements heureux. Je pense que c'est l'épine dorsale de ce projet de
loi. C'est déjà une amorce importante, mais je pense qu'il va y
avoir encore beaucoup de discrétion et des discussions sur
"adéquat". On va demeurer encore dans une certaine
ambiguïté. Quand vous allez être d'un côté de la
barrière, "adéquat", cela va être un et, quand vous allez
être de l'autre côté de la barrière, "adéquat"
cela va être quatre, cinq. Qui va décider en dernier ressort?
M. Bédard: Mais vous comprendrez qu'à moins d'en
arriver à la solution d'avoir un taux d'encadrement précis...
M. Roy: Oui.
M. Bédard: ... on ne peut pas en arriver à des
chiffres magiques. On parle de services policiers adéquats, après
discussions et consultations avec les différents
intéressés. Si cette réflexion se fait bien,
peut-être que dans un an on pourra mieux préciser le mot
"adéquat". A un moment donné, il faut quand même avoir un
départ. Le seul départ heureux, la seule possibilité d'en
arriver à un équilibre là-dedans, c'est justement de faire
en sorte de trouver un forum où l'ensemble des parties
concernées, avec leurs intérêts divergents, puisse se
parler, se rencontrer pour aboutir à une décision.
M. Roy: Alors, c'est la Commission de police qui va
décider, à un moment donné, après enquête,
après discussions, ce qui est adéquat ou non. Le chiffrage
sur-le-champ...
M. Bédard: Selon des critères. Vous remarquerez
que, dans le projet de loi, il y a des critères. Je n'ai jamais eu la
prétention que c'était une loi parfaite. Je ne pense pas qu'il y
ait un législateur raisonnable qui puisse prétendre avoir
accouché des lois parfaites. Je vous fais remarquer que nous avons
prévu, dans le projet de loi, qu'il y aurait certains critères
sur lesquels on devra se baser quand on parle de services policiers
adéquats, par exemple des critères de criminalité,
plutôt que d'en arriver à un taux d'encadrement qu'une des parties
que vous connaissez, l'Union des municipalités, ne veut pas. On l'a dit
déjà au départ. Que ce soit le rapport Saulnier ou
n'importe quoi, en arriver avec les solutions imposées, je pense que ce
n'est pas seulement une question de politique, de faire de la politique, loin
de là. Il faut y penser deux fois avant d'imposer des décisions
dans cet ordre de préoccupations que l'on a, surtout quand on regarde
les coûts que cela peut représenter.
Alors, nous en sommes venus à énoncer quelques-uns des
critères qui devraient être pris en considération, que ce
soit par la Commission de police, que ce soit par le comité de
consultation dont on fait état, à savoir le taux de
criminalité. Il y a bien d'autres facteurs qui sont mentionnés.
Il y a peut-être lieu d'en ajouter d'autres, je ne sais pas. Je pense que
les travaux de cette commission peuvent nous éclairer encore mieux sur
cet aspect. Mais c'est à la pratique de ces comités,
également avec la consultation, des mécanismes de consultation
entre les différents agents intéressés, qu'on va en
arriver à une autre étape qui sera peut-être encore plus
précise que celle qui est dans le projet de loi no 48.
Quand vous parlez de la Commission de police et des
municipalités, dans votre mémoire, vous parlez souvent de
l'ingérence municipale. Vous dites que l'ingérence municipale se
reflète dans les opérations policières courantes. Vous
avez employé l'expression tantôt dans le sens suivant, en parlant
de la Commission de police. Vous disiez: "Lorsque la Commission de police aura
joué avec les autorités municipales..." Vous avez
précisé: "Je ne veux pas dire..."
M. Roy: Je n'ai pas dit cela dans le mémoire. (15 h
30)
M. Bédard: Non, je l'ai noté. Vous l'avez bien
mentionné: "Je ne veux pas dire qu'il y a un complot entre les
autorités municipales et la Commission de police. A ce moment-là,
cela améliorera l'ensemble". Je pense qu'au niveau des décisions
de la Commission de police, dont vous avez fait état longuement tout
à l'heure, il reste qu'il y a une règle générale,
c'est que la Commission de police ne fait pas de recommandations
précises, elle ne donne même pas de conseils précis sans
que, préalablement, toutes les parties aient été
entendues.
M. Roy: Cela dépend.
M. Bédard: Cela ne se fait pas dans l'oreille. Je sais que
ce n'est pas l'impression que vous avez voulu laisser.
M. Roy: Ah non, non!
M. Bédard: Cela ne se fait pas à l'oreille, ce qui
peut se dire à huis clos ou en privé, entre certains
représentants municipaux et des membres de la Commission de police. Je
pense que toute recommandation de la Commission de police, à moins que
je ne me trompe, M. le Président, quant aux enquêtes de conduite
etc..
M. Roy: Non, non quant aux enquêtes de conduite, mais la
Commission de police est un organisme-conseil auprès des
autorités municipales. D'ailleurs, dans l'amendement qui a
été apporté par le gouvernement dans son projet de loi, il
semble qu'on ait voulu laisser tomber cette fonction conseil de la Commission
de police auprès même des autorités municipales. Je pense
que c'est une erreur "cléricale", vous devriez réviser cela.
M. Bédard: Je pense que c'est fondamental, cela, comme
problème, à part la détermination de l'effectif, est-ce
qu'il y a d'autres questions précises sur lesquelles vous voudriez que
les décisions de la Commission de police aient un pouvoir
exécutoire et non pas seulement de recommandation?
M. Roy: Oui, M. le Président, justement, nous, dans la
première partie de notre mémoire, on parlait d'intégration
et de dépolitisation des corps de police et de régionalisation.
Evidemment, si la Commission de police, après des enquêtes
multiples, se rend compte que, sur un territoire donné, avoir un corps
de police, alors que chez le voisin il n'y en a pas et que chez le
deuxième voisin il n'y en a pas, c'est inutile, qu'il devrait y avoir un
corps de police pour un groupe de municipalités, trois ou quatre
municipalités, il me semble que la recommandation de la Commission de
police faite au ministère de la Justice pourrait, sans être
exécutoire, être au moins financièrement alléchante.
Si on disait: Les municipalités qui veulent accepter
l'intégration ou le regroupement policier, on va vous donner des
subventions de tant, d'une certaine façon, cela deviendrait
exécutoire parce qu'actuellement l'arme qu'invoquent les
municipalités, vous le savez très bien, M. le Président,
c'est l'arme financière. Tout le monde se plaint d'être
dépourvu, qu'ils n'en ont plus d'argent, qu'ils n'ont plus de budget.
C'est évident que si vous dites: Pour les municipalités x, y, z
qui sont dans un territoire restreint, s'il y a une seule force
policière, à ce moment-là, il y aura un programme de
subvention.
Je le dis dans mon mémoire. S'il y avait une force incitative
dans le projet de loi pour aider le regroupement des forces policières,
de telle sorte que Saint-Clin-Clin ait la même protection publique
qu'à côté ou que le deuxième voisin... C'est le
rôle du ministre de la Justice d'assurer la protection publique, l'ordre
public, et autant que possible, sans nivellement, une certaine
égalité des citoyens d'une région ou d'une localité
à une autre, sans discrimination.
M. Bédard: Et dans le respect de certains principes qui
existent aussi, n'est-ce pas?
M. Roy: Pardon?
M. Bédard: Dans le respect de certains principes qui
existent, dont le moindre n'est pas celui de l'autonomie municipale.
M. Roy: Non, M. le Président, écoutez, nous ne
sommes pas des subversifs ou des anarchistes. On ne voudrait pas être
compris par le gouvernement comme étant des anarchistes, nous autres, la
police.
M. Bédard: J'espère que mes propos ne vous incitent
pas à penser cela. Ce n'est pas du tout mon opinion. Je ne voudrais pas
prendre tout le temps qui nous est dévolu, quand même.
M. Roy: M. le Président, en dernier lieu, un point
important que j'ai signalé à la Commission de police à
différentes journées d'étude et que j'ai demandé
souvent, même en privé, à des membres de la commission, le
pouvoir de conciliation et d'arbitrage pour les directeurs de police et les
membres d'état-major. Or, vous avez les directeurs de police qui
recevaient $12 000 par année, ou $13 000 bloqués parce que le
règlement no 11 n'a aucune force exécutoire et, à
côté, le lieutenant gagne $18 000. Et le lieutenant rit, il dit:
Envoie "Ti-Père", marche. Lui, il est syndiqué. Son salaire de
base est de $14 500 et son chef, lui, il a $13 000 à côté.
En plus, lui, comme syndiqué, il a le droit de faire du temps
supplémentaire. Le chef non seulement a le droit, mais il a l'obligation
de faire du temps supplémentaire. Lui, il peut faire 70 heures par
semaine. Il n'y a pas de chiffre pour le chef. On dit: II aménage sa
cédule pour lui-même. C'est beau, cela. Il a la
responsabilité, nous dira la Commission de police dans des
enquêtes publiques, 24 heures par jour du service de police. Elle va nous
dire cela. Par contre, quand vient le temps du salaire, ah! le salaire, c'est
pour huit heures. Alors, j'ai dit, dans mon mémoire: Pourquoi
n'avez-vous pas donné un pouvoir de conciliation et d'arbitrage sur les
conditions de travail du directeur et des membres d'état-major, des
non-syndiqués, au sens du Code du travail?
Un jour, on nous dira: L'Opposition elle disait cela au pouvoir
No taxation without... n'a pas d'affaire à s'immiscer là.
Mais qu'est-ce que font les conseils d'arbitrage quand ils imposent des
conditions salariales par des sentences arbitrales?
Il faut aller au bout de sa pensée. Pourquoi n'instituez-vous pas
le pouvoir de conciliation et d'arbitrage devant la Commission de police? Il y
aura une échelle indicative qui dira: Un chef de police, classe 4, c'est
entre $14 000 et $18 000; classe 3, entre $18 000 et $26 000; classe 2, entre
$26 000 et $32 000; classe 1, entre $32 000 et $40 000, disons.
Ce sont des chiffres absolument farfelus en mille dollars mais, à
l'intérieur de cette échelle indicative, la Commission de police
exercera le pouvoir de conciliation et d'arbitrage et pourra, compte tenu des
responsabilités du chef, des effectifs qu'il a, du taux de
criminalité, de ses obligations, dire: Vous lui donnez $14 000, mais
vous devriez lui donner au moins $17 800, parce qu'il se rapproche plus de $18
000. Entre $14 000 et $18 000, il y a une discrétion, mais la commission
pourrait intervenir, conciliation et arbitrage.
Je reviens à tout à l'heure, à mon chef de police
qui avait 3000 habitants, qui gagnait $145 par semaine et qui faisait 60
heures. On a essayé de donner à la Commission de police un
meilleur salaire. La commission a dit: On ne peut pas. Nous, on ne peut pas.
Dans ce temps, il touchait $125 par semaine. La commission a dit: Ce n'est pas
notre affaire à nous. Il y a une échelle indicative. Ils ne sont
pas tenus de la suivre. M. le Président, est-ce que le rôle d'un
procureur général, qui est de faire appliquer la Loi de police,
c'est
de faire crever de faim un chef de police? On sait que le chef de
police, s'il crève de faim, va mal faire son ouvrage. Il va mal le
faire.
M. Bédard: Cela n'est sûrement pas le travail d'un
ministre de la Justice. Je pense que c'est pour cela que vous avez cru bon
d'indiquer le fait que vous déploriez que l'échelle indicative
des traitements adoptée par la Commission de police n'ait pas
été revue. Encore une fois, je vous remercie. Je ne veux pas
monopoliser tout le temps de la commission. Je vous remercie de la contribution
positive que vous apportez aux travaux de cette commission. Nous aurons
sûrement l'occasion d'en rediscuter avec les autres membres de la
commission et avec les membres de l'Opposition lors de l'étude du projet
article par article.
Le Président (M. Boucher): Merci, M. le ministre. M. le
député de Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: M. le Président, je veux remercier le syndicat
de ses représentations. Comme on disait en aparté; pendant votre
représentation, il y en avait pour tout le monde. Ce n'est
sûrement pas le but de cette commission de faire l'étude du projet
de loi no 41. Cela a déjà été fait il y a trois ans
à peu près jour pour jour, en 1976, au mois d'août, en
commission parlementaire. Ce n'est quand même pas défendu de s'en
inspirer. Il y a une inspiration que je prends à cette consultation,
c'est votre demande qu'il y ait un huis clos pour les cas de discipline. Je
sais que ce n'était pas inclus dans le projet de loi no 41. J'avais
annoté certains des articles dans mes documents de travail que j'ai
retrouvés. Je me souviens d'une lettre du 12 mai 1976 que le
président Pelletier, de l'Association des chefs de police, m'avait fait
parvenir. J'avais marqué: Proposition d'amendement à mon
amendement. Autrement dit, je me souviens, et je suis encore du même
avis, avoir réagi favorablement à cette suggestion.
J'espère que le ministre pourra l'inclure dans son projet de loi comme
amendement.
Votre analogie avec les professionnels, je pense, est valable. Il n'y a
pas de vérité absolue là-dedans, mais il me semble que,
dans la mesure où on peut protéger les réputations, on
doit aller dans ce sens, quitte, si l'examen d'un cas particulier donne lieu
à des poursuites, à ce que ce soit alors public. Au moment
où il y aura eu déjà le fond du problème au niveau
de la discipline qui aura été examiné, la protection de la
réputation aura été assurée.
En ce qui concerne le règlement no 11, j'ai été
déclaré coupable d'un retard de deux ans. Le ministre est
coupable d'un retard de cinq ans. Naturellement, je lui demanderais quand
est-ce qu'il a l'intention de le revoir. Le temps joue contre lui. Cela ne
dépend pas totalement du ministre, cependant. Je ne sais si c'est par
nature ou à cause de mes fonctions, je n'ai pas tellement de sympathie
pour... En fait, dans l'Opposition, on est supposé s'opposer. Mais, dans
ce cas-ci, j'ai un peu de sympathie à l'égard de la fonction du
ministre, parce que l'initiative du règlement doit venir de la
commission. Le gouvernement n'a pas l'initiative de la réglementation
là-dedans, ce que voulait changer, d'ailleurs, le projet de loi no 41.
C'est peut-être à la Commission de police qu'il faudrait demander
quand elle a l'intention de réviser le règlement no 11.
Peut-être que le ministre pourra répondre à cette
question. On sait que, dans des commissions parlementaires de la nature de
celle qu'on a actuellement, le ministre n'est pas obligé de
répondre à mes questions. J'espère qu'il pourra y
répondre en temps et lieu.
M. Roy: M. le Président, juste sur cette question.
Remarquez bien que je n'ai pas d'affaire à défendre la
commission. La commission est bien représentée. J'ai
déjà vu des projets qui avaient été
préparés à l'intention de certains gouvernements et les
projets sont demeurés lettre morte.
Vous savez, les projets se préparent.
M. Lalonde: Je le sais. Il y a une autre lacune dans cette loi
que vous reconnaîtrez, j'en suis sûr, c'est que le gouvernement n'a
même pas le pouvoir de modifier les projets de règlement, il peut
simplement les approuver ou les rejeter.
M. Roy: C'est l'occasion d'amender la loi.
M. Lalonde: Oui, c'est seulement une occasion de mettre plus de
souplesse là-dessus. Vous avez réussi, tout en disant au
départ que ce serait trop fastidieux de lire votre mémoire de 50
pages, à tout le passer dans votre présentation; c'est
sûrement faire preuve d'une habileté que vous avez apprise devant
les cours de justice. Vous avez donc fait état d'à peu
près tout ce qui est contenu dans votre mémoire. Il y aurait
simplement une question que je voudrais clarifier; il s'agit du rôle de
la Commission de police. Lorsque, à la page 19, vous dites: La
Commission de police s'est vu confier un double rôle vous parlez
de la loi actuelleà savoir celui d'enquêteur avec pouvoirs
administratifs et celui de tribunal ou organisme quasi judiciaire. Je
présume que le pouvoir de réglementation qui est contenu à
l'article 17 actuel est compris dans le pouvoir administratif et non pas dans
la fonction quasi judiciaire.
M. Roy: Du pouvoir administratif, mais aussi, c'est quasi
législatif, parce qu'il prépare des règlements
approuvés par le lieutenant-gouverneur en conseil. C'est quasi
législatif et c'est administratif. C'est hybride, cette
affaire-là.
M. Lalonde: C'est pour ça que je voulais vous poser la
question. Ce ne peut pas être dans le pouvoir quasi judiciaire; donc,
ça doit être dans l'autre puisque vous l'avez divisé en
deux.
M. Roy: Oui, ça aurait pu être divisé en
deux.
M. Lalonde: II y a réellement un pouvoir législatif
ou quasi législatif de la part de la commission, ce qui est assez
inusité d'un organisme indépen-
dant du gouvernement dont on invoque l'indépendance, dont on doit
invoquer l'indépendance, cette indépendance sur laquelle on doit
compter pour des décisions, des décisions quasi judiciaires.
M. Roy: Cela arrive assez fréquemment, M. le
député. C'est-à-dire que la Commission du salaire minimum,
la Commission des accidents du travail, certaines régies, la plupart des
organismes ont un pouvoir quasi législatif aussi. Je ne sais pas si
vous...
M. Lalonde: II y en a plusieurs. La Commission des valeurs
mobilières a un certain nombre de règlements qu'elle peut
édicter.
M. Roy: Oui, elles font des règlements et rendent des
décisions.
M. Lalonde: Oui; donc le pouvoir de réglementation de
l'article 17, vous considérez que ça fait partie du premier
rôle administratif ou disons administratif législatif. Vous dites
un peu plus loin, à la fin de la page 19: "Dans divers articles de notre
revue, nous avions prétendu que la loi était confuse, parce que
le législateur y avait mal disséqué le partage de ce
double pouvoir de la CPQ." Est-ce que vous suggérez que l'on doive
réduire le rôle de la Commission de police simplement à sa
fonction quasi judiciaire et lui enlever sa fonction administrative? Quelle est
la conclusion? Je la vois mal dans votre mémoire. (15 h 45)
M. Roy: M. le Président, je suis bien conscient, comme le
député de Marguerite-Bourgeoys, que c'est une phase difficile,
finale à... Je pense que le ministère de la Justice qui a une
Direction générale de la sécurité publique devrait
faire jouer un rôle plus important à cette direction
générale. J'ai entendu nos prédécesseurs qui
parlaient d'inspectorat. Je ne m'aventurerai pas dans cela. Vraiment, je n'ai
pas très bien compris leur affaire d'inspectorat. Cela fait longtemps
que cela marche, cette "bébelle". Mais si la Direction
générale de la sécurité publique au
ministère de la Justice jouait une fonction plus officielle et
s'engageait de façon plus résolue, la Commission de police
pourrait peut-être demeurer un organisme quasi judiciaire beaucoup plus
au sens strict du terme. Sa fonction conseil pourrait continuer, mais j'ai
l'impression que la Direction générale de la
sécurité publique pourrait davantage assumer cette fonction.
C'est justement le rôle ambigu de la commission. Même les cours,
les tribunaux ont été appelés à un moment
donné à prendre position. La Commission de police qui avait
entendu, je ne sais pas, l'affaire Saulnier ou... Bon! A un moment
donné, elle était rappelée à siéger pour
décider quasi judiciairement si le gars avait été
légalement congédié, si on avait respecté la loi,
si la décision, si l'exercice de la discrétion par la
municipalité avait été faite conformément
à... si c'était opportun.
Finalement, la commission pouvait aller référer à
ses notes de l'enquête publique et après cela, se rasseoir et
juger en appel. A un moment donné, les cours ont dit: Non. Elles ont
dit: Quand vous siégez après une enquête publique, oubliez
ce que vous avez fait avant. Vous portez une autre casquette. Au besoin, ce
serait préférable que ce soit un autre ban les cours ne
l'ont pas dit et là, vous recommencez à neuf. Oubliez tout
ce qui s'est passé. Là, vous agissez comme tribunal. Ce qui
faisait un rôle ambigu parce que quand on disait la Commission de police,
on ne disait pas: Ban no 1, Commission de police, ban no 2, Commission de
police, ban administratif, enquête, ban quasi judiciaire. On disait
toujours: Commission de police du Québec. Pour les justiciables, cela
créait une ambiguïté, et cette ambiguïté, le
projet de loi no 41 semblait vouloir nous sortir dès qu'il y avait eu
Une enquête de la Commission de police, dans le projet de loi 41 du
gouvernement précédent, on disait: Après enquête,
cela ira devant un ban de la Cour provinciale qui ne sera pas de la Commission
de police.
M. Lalonde: Si vous me le permettez en plus de cela, une
tentative, je ne veux pas en faire la critique favorable de
définition du rôle de la Direction générale de la
sécurité publique pour tenter au moins de réduire la
confusion entre les deux organismes et le rôle de conseiller un
autre organisme l'a dit avant vous ce matin peut entraîner
fatalement la Commission de police dans une situation de conflit, non pas de
conflit d'intérêts, mais un conflit dans le sens très
intellectuel du mot. C'est donc dans le but de clarifier la situation pour le
meilleur intérêt de la Commission de police et des justiciables
que, quant à moi, on devrait enlever ces possibilités de
situations et confier tout ce qui relève de l'administration, de
l'opération, de la planification, de la politique au sens large, la
définition des objectifs, par exemple, des programmes au gouvernement,
c'est-à-dire au ministère de la Justice. C'est son rôle.
Ils sont élus pour cela. Vous disiez tantôt: No taxation without
representation. Mais cela, c'est un cas patent où la Commission de
police par un règlement peut créer, par exemple, en disant: A
partir de maintenant, toutes les automobiles vont être peintes en
bleu...
M. Roy: Qu'elle interprète son règlement.
M. Lalonde: Pas rien que cela, mais cela crée d'abord une
certaine morosité dans la population. Cela crée des
dépenses de la part des corps de police municipaux.
M. Roy: M. le Président, au sujet des remarques du
député de Marguerite-Bourgeoys, il y a un principe qui existe en
droit britannique et qui a été appliqué dans notre
système puisqu'en droit public, on est de tradition britannique. Il faut
que non seulement justice soit de facto rendue, mais qu'il apparaisse que
justice est rendue. Quand un organisme prépare sa petite
législation, se rasseoit ensuite sur le banc, l'interprète,
l'applique et enquête avant d'entendre un appel, fait son enquête,
ensuite entend un appel, que des apparences de justice
puissent être rendues sont ténébreuses. C'est ambigu
et c'est là que le législateur devrait appliquer ce principe. Il
faut que non seulement justice soit rendue, mais qu'il apparaisse et c'est
cette apparence qu'on voulait faire voir plus limpide, plus lucide dans le
projet de loi 41 où on disait: Quand il y aura eu enquête de la
Commission de police, on s'en ira à la Cour provinciale, je trouvais
cela raisonnable.
M. Lalonde: D'ailleurs, comme vous l'avez dit vous-même
tantôt, je le répète à mon compte ce
n'est pas comme critique du travail de la Commission de police, jusqu'à
maintenant.
M. Roy: Non.
M. Lalonde: Je pense qu'il est quand même étonnant
que, dans cette situation, ils aient pu faire le boulot qu'ils ont fait...
M. Roy: Qu'ils aient pu faire leur boulot, c'est
extraordinaire.
M. Lalonde: ... sans accrocs majeurs depuis 11 ans.
M. Roy: C'est cela.
M. Lalonde: C'est simplement pour leur permettre de faire
davantage, de le faire mieux et avec plus de facilité. C'étaient
à peu près les remarques que je voulais vous faire clarifier,
étant donné le temps qu'on a passé sur votre
mémoire, et je vous remercie infiniment de vos
représentations.
M. Roy: Merci, M. le député.
Le Président (M. Boucher): Merci. M. le
député de Mégantic-Compton.
M. Grenier: M. le Président, je veux d'abord remercier le
Syndicat professionnel des chefs de police et pompiers et officiers
d'être devant nous et de nous avoir expliqué avec brio ses
revendications face à cette loi 48. J'entendais Me Roy parler de la loi
adoptée en 1968 qui manquait de dents. Je pense qu'il est suffisamment
au courant des affaires pour comprendre que, d'abord, le ministre du temps, qui
est devenu premier ministre un an après, était un homme qui
faisait confiance à la population et qui voyait les répercussions
plus tard pour ensuite mettre des dents, s'il y avait lieu. Ce n'était
pas dans son tempérament, d'abord, de mettre des dents à une
loi.
On se rendra peut-être compte, dix ans après
celle-là on l'adopte en 1979 qu'elle aura trop de dents.
Il faut vivre avec le temps et je pense que vous le donniez comme exemple. On
est convaincu déjà qu'il peut y être apporté des
changements.
Vous faisiez des analogies, aussi, entre les professionnels. Ce n'est
pas un reproche que je vous fais. Vous disiez que les gens à cette table
étaient tous du monde qui filait le bonheur parfait. J'aimerais vous
faire savoir, aussi, qu'il y a peut-être des gens autour de la table qui
changeraient leur immunité parlementaire pour des
sécurités d'emploi; je suis un de ceux-là. On pourrait la
troquer, parfois, avec grand avantage; cela nous arrive.
M. Roy: Là, il faudrait que vous vous compariez aux
élus municipaux et non pas aux chefs de police. Les chefs de police, ce
n'est pas comparable.
M. Grenier: Ils n'ont pas les deux; ils n'ont ni l'un ni
l'autre.
M. Roy: Ils sont nommés; ils ne sont pas élus.
M. Grenier: Je suis d'accord avec vous. Il est toujours bon qu'on
relève le sujet, puisque, souvent, on nous renvoie cette balle dans
notre camp et j'aime bien faire savoir que ce n'est pas toujours de
gaieté de coeur. Il y a même une personne, entre autres, en 1974,
qui, se fiant sur son immunité parlementaire, s'est vu contestée
au point qu'elle a perdu son immunité et son emploi, les deux en
même temps.
M. Roy: Lui, il a eu le cadeau!
M. Grenier: Vous nous avez entretenus avec brio, encore une fois.
J'aimerais quand même que vous nous disiez comment nous pouvons
évaluer un corps de police dans le but de savoir s'il est
adéquat. Auriez-vous des critères à nous donner qui
pourraient nous aider?
M. Roy: M. le Président, déjà la Commission
de police, avec son expertise et son expérience, avait, lors de
journées d'étude, émis des critères. Bien
sûr, d'abord, on va tenir compte de la population stable d'une
municipalité; deuxièmement, de la population flottante.
D'ailleurs, tous ces critères apparaissent au règlement no 11, si
les municipalités avaient voulu s'inspirer du règlement no 11,
mais des maires nous ont avoué, lors d'enquêtes publiques devant
la Commission de police, ne pas le connaître et ne pas vouloir le
connaître. Il a été approuvé par le
lieutenant-gouverneur en conseil. Ils disaient: On ne le connaît pas et
on ne veut pas le connaître. Les critères étaient
là, M. le député. Si vous les reprenez à
l'article... Je ne sais trop, je vais vous le dire; cela m'évitera de
vous les dire un après l'autre, il y a plusieurs critères.
M. Grenier: Ce sont des critères qui vous vont.
M. Roy: Ce sont des critères établis par des
experts...
M. Grenier: D'accord.
M. Roy:... des connaisseurs dans le domaine, des gens qui ont
vécu toute leur vie dans l'admi-
nistration policière, la Commission de police du Québec.
Voyez le règlement no 11 je l'ai ici entre autres, vous
avez cela dans les articles 5, 6: Outre le critère de la population
desservie et des effectifs permanents, en fait, il y a le taux de la
criminalité, la population flottante, la population permanente.
M. Grenier: Ceux-là, on les connaît. Est-ce que ce
sont des critères qui vous vont, au départ? Est-ce que vous les
acceptez?
M. Roy: Les critères qui étaient établis
dans ce règlement no 11 approuvé par le lieutenant-gouverneur en
conseil nous apparaissaient des critères de base sérieux,
raisonnables. Maintenant, ils peuvent être perfectionnés et
améliorés. Bien sûr qu'aujourd'hui, avec les connaissances
qu'on a, la CECO ayant fait son oeuvre, peut-être qu'on peut
améliorer les critères pour combattre plus efficacement la
criminalité. La Commission de police, qui a un président de la
CECO parmi ses rangs, pourra peut-être façonner et modeler un peu
ces critères, les améliorer.
M. Grenier: Maintenant, concernant la question de la
régionalisation des forces policières que vous avez
également effleurée, est-ce que vous avez des idées
là-dessus, à savoir, par exemple, que cela pourrait être
fait selon des districts naturels, si vous voulez, ou encore y voyez-vous des
régions principales où cela devrait être
régionalisé ou non?
M. Roy: M. le Président, sur ce point, je pense que des
mariages de raison ou des mariages forcés ne font jamais des mariages
heureux qui produisent de nombreux enfants. Les gouvernements
précédents, dans le domaine municipal, ont tenté, à
un moment donné, de faire des fusions, des annexions, des
intégrations. Parfois, cela s'est avéré malheureux et
coûteux. Il est bien sûr que des mariages raisonnables et voulus
par les contractants, c'est préférable. C'est bien sûr que
si vous avez une belle fille qui vaut $1 million, vous allez peut-être
être porté à la regarder plus que si elle est toute nue
dans la rue.
M. Bédard: Cela dépend.
M. Roy: Je vois certains membres de la commission qui ont l'air
sceptiques. Je n'aurais jamais cru cela. Ce que je voulais dire, c'est ceci: Si
le gouvernement était incitatif dans ses critères
d'intégration, de régionalisation par des incitatifs
monétaires, d'ordre monétaire, dans le but d'une meilleure
protection publique, d'un plus grand ordre, d'une plus grande
sécurité... Vous savez que $225 millions de dommages à la
baie James ou $500 millions de dommages en retard aux Jeux olympiques, cela
n'est pas cher, mais la police, c'est toujours trop cher, toujours trop cher.
Quand la police est là, on dit: Cela a bien été. Ce n'est
pas à cause de la police. Les gens sont bien dressés, ce sont de
bons citoyens. Quand la police n'est pas là, on dit: S'il y avait eu la
police. Si le gouvernement a une politique incitative pour aider cette
régionalisation, cette intégration progressive des forces
policières... On ne veut pas arriver avec une police d'Etat comme en
France où il y a seulement un commissariat de police et la police
française avec la casquette carrée. J'ai vécu là
deux ans; je sais ce que c'est. Ce n'est pas cela qu'on désire. Qu'on
ait au moins un police avec une certaine autonomie, une police régionale
qui ne soit pas sous la férule de petits élus municipaux qui ne
savent même pas lire. On a vu cela.
M. Grenier: Vous donnez un aspect pour la régionalisation.
Je pense que c'est de l'incitation je l'ai pris dans votre
mémoire à savoir de défrayer, par exemple, ou de
remettre aux municipalités qui désireraient se
régionaliser ou s'incorporer...
M. Roy: Oui.
M. Grenier:... à des villes plus grandes un per capita qui
serait donné par le gouvernement.
M. Roy: Un per capita pour leur permettre... Qu'on le veuille ou
non, lorsqu'il y a intégration des forces policières, cela ne
coûte pas moins cher. L'expérience nous prouve que cela
coûte toujours un peu plus cher. Cela peut coûter 25%, 30% et 40%
plus cher. Les firmes de consultants le confirment chaque fois quand elles font
des études. Evidemment, elle ne veulent pas déplaire aux
administrateurs municipaux. Elles arrivent parfois avec des études qui
disent: Vous allez économiser avec cela, mais, par la suite, on voit que
cela coûte plus cher. Si le gouvernement est conscient que la protection
publique, c'est une priorité, c'est une chose importante. Dans une
société, c'est d'abord l'ordre, la sécurité, la
paix et ensuite on avance. Ce n'est pas le désordre,
l'insécurité et la guerre et ensuite on fait ce qu'on peut. C'est
d'abord l'ordre. Alors, si cela est important, qu'on y mette le prix.
M. Grenier: Vous avez mentionné qu'à l'article 63
vous aviez retenu certaines propositions du défunt projet de loi no 41
qui avaient attiré votre attention et que vous estimiez assez
intéressantes, qui auraient même pu faire l'objet de remplacement.
Avez-vous d'autres éléments de solution à cet article de
la loi?
M. Roy: D'autres éléments de solution. M. le
Président, je dois vous dire que les éléments de solution
ne sont pas faciles. Il me semble que la tentative de solution qu'avait
esquissée le gouvernement précédent dans son projet de loi
no 41 était raisonnable. Dans notre mémoire, on a dit que le
gouvernement y allait de façon préventive et non plus curative
avec le projet de loi no 48. Après y avoir bien repensé, c'est
à la condition que la commission demeure intègre et toujours
impartiale. Mais le jour où la commission va donner des conseils aux
municipalités ou aux élus
municipaux qui vont aller se mettre à genoux et qui vont aller
écouter la commission il peut y avoir des tractations je
crains que les droits de nos membres, des non-syndiqués soient "scrapes"
à la base excusez le terme très français. Je crains
qu'à un moment donné on aille dresser un portrait, une photo qui
ne sera pas du tout la réalité. (16 heures)
Messieurs les membres de la commission, je vous prie de me croire,
même si vous êtes un élu municipal, que vous avez fait le
serment d'office... Je me souviens même d'un rapport de la Commission de
police où on avait recommandé au procureur général
de faire des poursuites contre des échevins qui avaient menti
éperdument pendant l'enquête. Il n'y a jamais eu de ces
poursuites. Je ne vous dirai pas quelle municipalité. C'étaient
de faux témoignages par-dessus de faux témoignages. Le ministre
d'alors aurait pu prendre des poursuites. J'ai lu le rapport. Demandez à
la Commission de police, il n'y a pas eu de poursuite de prise.
M. Grenier: Ils ont réglé le problème pour
éviter que les députés fassent des parjures à ce
niveau-là et ne puissent plus se présenter au niveau des
municipalités.
M. Roy: Si l'on est capable de se parjurer devant une commission
d'enquête, devant une commission publique je dirai seulement que
le nom de la ville commence par "C" si l'on était capable de se
parjurer devant des juges, quand bien même on n'irait pas se parjurer
devant des commissaires en catimini dans des chambres... Voyons donc. Il ne
faut pas prendre l'homme pour un ange.
M. Grenier: Merci, M. Roy.
Le Président (M. Boucher): Merci. Au nom des membres de la
commission, je remercie M. Roy ainsi que ceux qui l'accompagnent pour leur
mémoire. J'inviterais maintenant à la barre l'Union des conseils
de comté et des municipalités locales du Québec,
représentée par M. Jean-Marie Mo-reau, président.
Je m'excuse, est-ce que M. Roy est encore dans la salle? Me Roy, est-ce
que vous tenez quand même à ce que votre mémoire soit
versé au journal des Débats?
M. Roy: Oui, la ligne de pensée pourrait être plus
suivie. C'est le seul moyen efficace de lire le rapport. Alors, j'aimerais
mieux que ce soit versé.
Le Président (M. Boucher): Alors, parfait. Le
mémoire sera versé au journal des Débats. (Voir annexe
B)
M. Moreau (Jean-Marie): Vous pouvez y mettre le nôtre
aussi, ce ne sera pas long.
Le Président (M. Boucher): On a vu cela.
Alors, M. Moreau, veuillez procéder à la lecture de votre
mémoire.
Union des conseils de comté et des
municipalités locales
M. Moreau (Jean-Marie): M. le Président, je vous remercie
de nous donner l'occasion de nous faire entendre. D'ailleurs, je pense bien que
vous avez certainement eu le temps de lire notre document, parce qu'il n'est
pas long. Je ne voudrais pas commenter certains commentaires, ce qu'on entend
depuis ce matin, mais je vais essayer tout de même, M. le
Président, de vous lire ce rapport.
L'Union des conseils de comté et des municipalités locales
du Québec veut se prononcer principalement sur deux articles, soit
l'article 25 du projet de loi et l'article 39.
Nous nous prononçons contre l'obligation imposée à
toute municipalité de 5000 habitants ou plus régie par le Code
municipal d'établir et de maintenir un corps de police.
Nous croyons que cette responsabilité devrait être
facultative, et si une municipalité décide de son propre chef
d'établir son corps policier, elle devrait obligatoirement
procéder par référendum afin que sa population se prononce
tant sur le besoin que sur l'opportunité de créer un tel corps de
police.
Et, à cette fin, nous vous demandons d'apporter les amendements
nécessaires à votre projet de loi.
M. le Président, c'est le contenu de notre mémoire.
Le Président (M. Boucher): Merci, M. Moreau. M. le
ministre.
M. Bédard: Je vous remercie de votre mémoire. Il a
sûrement le mérite d'aller droit au but. Je comprends que vous
êtes d'accord sur la dispense qui est faite dans le projet de loi
à toutes les municipalités de moins de 5000 habitants d'avoir et
de maintenir un corps de police.
M. Moreau: Oui, d'accord.
M. Bédard: Est-ce que vous croyez qu'il devrait y
être fait une distinction quand il s'agit de la protection
policière entre les municipalités régies par le Code
municipal et les municipalités régies par la Loi des cités
et villes.
M. Moreau: II y a deux facteurs, je pense bien, M. le
Président, dont il faut tenir compte, Nous nous référons
particulièrement à la conférence provinciale-municipale,
la dernière, sur la fiscalité; il était bien entendu
qu'à ce moment-là les transferts fiscaux qui sont en cours, en
processus, soient exclusivement pour les responsabilités
présentes des municipalités régies par le Code
municipal.
Je ne veux pas parler au nom des cités et villes, je pense bien
qu'elles vont se charger elles-mêmes de faire les représentations
qui s'imposent, mais il reste ceci, c'est qu'on tient pour acquis
qu'à ce moment-là, si on oblige les municipalités
de 5000 habitants et plus il y en a qui sont régies par le Code
municipal d'avoir à financer un corps de police ou sinon
d'obtenir une permission spéciale et d'être cotisées
à cette fin, cela implique d'autres responsabilités
financières qui sont, à mon sens, en dehors de nos
possibilités. Je connais, dans certaines régions du
Québec, des municipalités de 5000 habitants qui sont
obligées de maintenir un corps de police. Elles ne sont pas
nécessairement régies par le Code municipal et elles font face
à des situations pratiquement prohibitives.
M. Bédard: Si je comprends bien, c'est surtout sous
l'angle des coûts financiers que cela représente que vous
émettez cette opinion.
M. Moreau: C'est sous l'angle des coûts et aussi de la
nécessité. Vous savez, il y a des municipalités... Si on
laisse cela facultatif, je pense bien qu'on va couvrir pas mal de
municipalités qui sont régies par le Code municipal.
C'est-à-dire que, pour certaines municipalités à vocation
touristiques, par exemple, où il y a un gros écart de population
par rapport aux saisons, peut-être que c'est nécessaire d'avoir un
corps de police et cela devrait être laissé à la
discrétion de la municipalité locale, le fait de décider
si, oui ou non, elle doit avoir un corps de police et cela doit être
soumis aussi, parce que c'est toujours le contribuable qui a à payer,
par voie de référendum à la population afin de
déterminer si vraiment les gens veulent un corps de police ou s'ils n'en
veulent pas. Je pense bien que cela traduit pas mal l'opinion de l'Union des
conseils de comté du Québec.
M. Bédard: Je vous remercie de vos
représentations.
Le Président (M. Boucher): Merci, M. le ministre. M. le
député de Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: Lorsque vous demandez la liberté, en fait, de
décider d'établir un corps policier, je vois cela au
quatrième paragraphe de votre mémoire: "Si une
municipalité décide de son propre chef d'établir son corps
policier, elle devrait obligatoirement procéder par
référendum, afin que sa population se prononce tant sur le besoin
que sur l'opportunité de créer un tel corps de police." Ne
croyez-vous pas qu'une telle décision est en bonne partie
influencée par le fait qu'il existe un corps policier qui peut remplacer
l'absence d'un corps policier local, je veux parler de la Sûreté
du Québec, qui est disponible et qui ne coûte pas directement de
taxes aux citoyens? A ce moment-là, la question que vous posez aux
citoyens de la municipalité en question, ce n'est pas de savoir s'ils
veulent être protégés ou non, c'est s'ils veulent payer
pour leur protection ou non, directement.
M. Moreau: Moi, M. le Président, je pense bien qu'il faut
tout de même faire confiance aux contri- buables et aux citoyens du
Québec. Il va falloir qu'en haut lieu, on sache à quelles fins on
va utiliser la Sûreté du Québec. Je ne parle pas du domaine
judiciaire, je parle du domaine de la Gendarmerie royale. Quels sont les
critères, à partir de quelle population ce serait obligatoire
d'avoir un corps policier? Je pense bien que le critère de 5000 n'est
pas un critère sur lequel on peut se baser pour dire qu'à partir
de là, il est absolument nécessaire d'avoir un corps de police.
Je pense bien que les municipalités rurales sont bien conscientes qu'il
y a quelqu'un qui paie la Sûreté du Québec. J'imagine que
le citoyen ou le contribuable qui va aller se prononcer par voie
référendaire est aussi au courant de cela. C'est à partir
de ces critères-là. On n'a pas d'objection, nous, à ce
qu'à un moment donné, les services qui sont donnés par un
corps de police quelconque soient payés. On est conscient de cela. Mais,
de là à s'embarquer dans des choses, parce qu'on connaît
par expérience et particulièrement dans les municipalités
à faible population, ce que coûte un corps de police. C'est
vrai.
L'histoire de mettre un képi sur la tête de quelqu'un, lui
donner un uniforme et l'habiller en amiral, cela ne règle pas les
problèmes policiers dans une municipalité. On a vu des
problèmes comme ceux-là souventefois dans la province de
Québec. C'est dans ce sens que si vraiment les municipalités
à faible densité ne sont pas financièrement en mesure de
se payer un vrai corps de police, je ne vois pas pourquoi la
collectivité du Québec, ensemble, ne participerait pas au
financement de la Sûreté du Québec.
M. Lalonde: Je pense que vous venez de répondre à
ma question, mais je vais vous la reposer. Est-ce que vous êtes d'avis
qu'on doive laisser entièrement à la population locale la
décision de se protéger directement par l'implantation d'un corps
policier et que si cette décision est négative, pensez-vous,
comme représentant de l'association, de l'union, que cela devrait
être une décision qu'on doit imposer à la
Sûreté à savoir de ne pas donner cette protection...
M. Moreau: Elle l'a déjà. C'est déjà
une chose acquise. Dans une municipalité qui a un corps de police,
est-ce que cela dégage toutes les responsabilités de la
Sûreté du Québec? Est-ce que je peux poser cette question,
M. le Président?
M. Lalonde: Oui. Pour les municipalités qui n'en ont pas
actuellement, mais celles...
M. Moreau: Ou celles qui en ont aussi.
M. Lalonde: Non; la Sûreté est sûrement
autour, mais la mission de protection pour la population en question est faite
par le corps de police local et le rôle de la Sûreté est
seulement supplétif. Si on suit votre raisonnement, qu'on laisse la
décision strictement... que le législateur et le gouvernement ne
s'en occupent pas, une municipalité de 7000 habitants, de plus de
5000,
décide d'éliminer son corps de police, à ce moment,
il n'y a pas de Sûreté là et il n'y en avait pas depuis
cinq ans. Elle a un corps de police depuis cinq ans. Cela veut dire que vous
êtes d'avis que la Sûreté du Québec n'a pas à
s'en occuper de la protection de la population. Je parle d'une façon
hypothétique.
M. Moreau: ... s'ils ont déjà un corps de
police.
M. Lalonde: Oui.
M. Moreau: Je pense bien que dans les municipalités
rurales, les municipalités qui ont déjà un corps de
police, c'est régi par le Code municipal, elles ne sont pas très
nombreuses. Maintenant, celles qui décident de ne pas avoir un corps de
police, là je pense bien qu'il y avait de la responsabilité de
décider avant. Ce qu'on tient pour acquis, c'est qu'on vient de
créer des normes, on vient de dire: Toutes les municipalités en
haut de 5000 habitants et plus devront avoir un corps de police ou avoir une
exemption et payer une partie du financement de leur protection. C'est cela
qu'on demande dans la loi et c'est là-dessus qu'on s'inscrit en faux. Ce
n'est pas dans le sens de vouloir, relativement aux corps de police
déjà existants, demander aux municipalités de se
désister. C'est qu'on veut établir une norme bien précise
disant qu'à partir de 5000 et plus, toutes les municipalités
devront avoir, devront passer par une certaine filière.
M. Lalonde: A partir de quelles normes seriez-vous prêt
à dire: Maintenant, là oui, il faut que le gouvernement comme
responsable de l'intérêt public intervienne en obligeant les
municipalités de 10 000 habitants et plus, de 5000, de 7000, de 20 000
quoi...
M. Moreau: On parle du Code municipal, M. le Président. On
dit: Les municipalités régies par le Code municipal. On ne parle
pas des autres. Les autres, je pense bien qu'on va leur laisser la
responsabilité de choisir si c'est à partir de 7000, de 10 000 ou
11 000. Nous disons: Toutes les municipalités de 5000 et plus
régies par le Code municipal devraient être exemptées. Cela
devrait être facultatif. Je pense bien qu'on ne va pas à 11 000 et
on ne va pas à 8000 de population. Cela se limite autour de 5000
à 6000.
M. Lalonde: Peut-être que le ministre pourrait nous donner
des chiffres sur le nombre de municipalités au sens du Code municipal
qui ont, d'abord, 5000 habitants et plus, qui ne maintiennent pas de corps de
police et je pense qu'il y a quelques années, il y en avait seulement
quelques-unes. Il y en avait cinq ou six. (16 h 15)
M. Bédard: Pour répondre à votre question,
l'application de ce seuil que nous avons fixé dans la loi aurait pour
effet l'obligation suite à sept ou huit municipalités
régies par le Code municipal d'avoir leur corps policier.
M. Moreau: M. le Président, nous avions déjà
dans le passé suggéré la location, dans des moments
où c'est absolument nécessaire pour ces municipalités, des
services de la Sûreté du Québec. Cela a été
proposé déjà et je pense bien que c'est encore ouvert
à tout le monde. On n'a pas d'objection à ce qu'à un
moment donné une municipalité qui se voit dans le besoin
d'avoir... Cela peut être 5000 et cela peut être moins aussi. Cela
peut être 2000 aussi. Il y a des municipalités où, l'hiver,
il y a 1500 de population et l'été, il y en a 10 000. Cela veut
dire que, si on crée une certaine obligation par rapport à un
certain chiffre, ces gens vont payer un corps de police l'hiver et cela va leur
coûter $300 000 par année pour veiller à la
sécurité de 800 personnes. A ce moment, qu'on tienne pour acquis
que c'est facultatif et que l'autorité municipale puisse rencontrer le
ministre de la Justice, avec le président de la Commission de police, et
déterminer à partir de quels critères et quels sont les
besoins des municipalités régies par le Code municipal en termes
policiers. On est bien ouvert à ça.
Mais de dire: A partir de 5000 de population, peu importent les besoins,
c'est une obligation d'avoir un corps policier, dans les circonstances... Je
rappelle, M. le Président, la question du transfert fiscal qui nous est
dévolu; on tient pour acquis qu'un corps de police, le moindre mal,
c'est $300 000 par année.
M. Bédard: Sauf que ce n'est pas peu importent les
circonstances, parce que c'est pour ça qu'on prévoit un pouvoir
de dispense qui tient compte du taux de criminalité, etc. Il y a une
évaluation qui peut se faire.
M. Moreau: Je suis d'accord, M. le Président, mais,
même si vous prévoyez une certaine dispense, elle va être
compensée par une certaine rémunération. Alors, on part
déjà d'un certain critère. Mais on devrait évaluer
avant ça, à mon sens, les besoins, parce qu'il y a des
municipalités que je connais qui ont une population de 5000. Il n'y a
pas plus de problèmes dans la municipalité où il n'y a pas
de police que dans la municipalité où il y en a, avec une
population à peu près identique. Des fois, il y en a plus de
l'autre côté.
M. Bédard: Quand on fait référence au taux
de criminalité, on fait référence aux besoins. C'est un
des critères pour évaluer un besoin, etc.
M. Moreau: C'est ce que je mentionnais tout à l'heure, M.
le Président, au député de Marguerite-Bourgeoys. Je tiens
pour acquis qu'il y a des municipalités régies par le Code
municipal qui ont 1400 ou 1500 de population, qui peuvent avoir des besoins
policiers, tandis qu'il y en a d'autres de 5000 qui n'en ont pas. Alors, il ne
faudrait pas établir un critère qui dit: A partir de telle
population je parle au nom des municipalités régies par
le
Code municipal vous allez obtenir une dispense et, si vous
obtenez une dispense, vous allez payer une compensation. C'est
complètement en désaccord avec ce que le ministre des Finances
nous a dit le printemps dernier, que la réforme fiscale serait
exclusivement pour les responsabilités présentes. Je me pose la
question si vraiment c'est cela que cela veut dire.
M. Lalonde: Je vous remercie infiniment, monsieur.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Mégantic-Compton.
M. Grenier: M. Moreau, je n'ai pas l'intention de vous garder ici
trop longtemps. On sait que vous êtes préoccupé par une
autre commission, peut-être davantage que par celle-ci, sur la loi 125,
concernant l'aménagement du territoire. On vous remercie d'être
venu ici. Ce que vous nous donnez, même si ce n'est pas un volumineux
dossier, nous fait préciser un point extrêmement important et je
pense que vous connaissez le problème de votre milieu. Il m'a
été donné de le vivre comme maire d'une
municipalité. Vous touchez justement une loi qui a déjà
existé, qui m'avait permis d'être maire d'une localité
voisine. Cela concerne les municipalités où les corps policiers
n'ont peut-être pas d'affaire l'hiver. La loi permettait, à ce
moment, d'élire des conseillers, des maires de l'extérieur de
leur localité pour l'administrer, parce que la population devenait trop
basse au milieu de l'hiver.
Vous parlez d'une ville. C'est bien sûr que trancher dans un
chiffre, c'est toujours compliqué. Vous parlez du chiffre 5000 depuis
tout à l'heure; je voyais que c'était le problème. Pour
les gens qui sont d'un côté ou de l'autre de ce chiffre, à
savoir 5500, 6000 et 7000 ça ne se pose probablement plus rendu
à 10 000 ou à 11 000 c'est là que la question est
difficile à trancher. Je suis d'accord avec vous qu'il y a des
localités de 1000 personnes qui ont peut-être besoin d'un
système de police et que d'autres ailleurs de 8000 pourront s'en
passer.
Je pense bien qu'on peut retenir de votre proposition ici que cela
devrait être libre pour toutes les municipalités, qu'on ne devrait
pas trancher dans un chiffre comme on le fait là. On ne devrait pas
diviser en deux cet article 52, mais on devrait peut-être garder
l'article à la ligne et demie où on dit: "La municipalité
peut établir par règlement et maintenir dans son territoire un
corps de police," sans aller plus loin dans l'article de la loi en amenant,
bien sûr, ce que les avocats trouveront. Cela me semblerait beaucoup plus
près de la logique et du bon sens, de ne pas imposer aux
municipalités ce qu'on a là. J'aimerais savoir de vous, dans vos
municipalités qui font partie de l'Union des conseils de comté,
s'il en coûterait meilleur marché, d'après vous, à
vos petites villes de louer les services de la Sûreté du
Québec que de maintenir les services en place.
M. Moreau: M. le Président, ce n'est pas une question de
coût comme une question d'efficacité. J'ai l'impression...
Remarquez bien que je suis bien... Dans ma municipalité, on n'a pas de
corps policier, mais il reste que les moyens des petites municipalités
de maintenir un corps policier sont infiniment réduits, ils ne sont pas
grand-chose. Si on veut avoir vraiment un service de qualité, je pense
qu'il faut à ce moment utiliser les services d'un grand corps policier
qui a tous les moyens techniques à sa disposition. On peut opter pour
des gardes champêtres ou des policiers, mais je pense que si une
municipalité je fais abstraction de sa population a
vraiment besoin de services policiers, quant à payer quelque chose, elle
est aussi bien de payer pour un excellent service. Remarquez bien que c'est
sans préjudice aux différents corps de police municipaux dans les
villes du Québec. Ce n'est pas cela... Je ne veux pas faire de
comparaison et je ne veux pas généraliser. Mais je parle des
possibilités financières d'une municipalité, si elle est
capable de payer. Je pense bien que c'est au niveau de l'Etat, pour les
municipalités qui n'ont pas l'envergure et les moyens financiers de se
payer un corps policier adéquat, c'est au niveau de la
Sûreté du Québec que cela doit se faire. Je pense bien que
c'est...
M. Grenier: M. Moreau, je vous remercie sur ce point. Je pense
que vous êtes d'avis on dégage cela qu'on devrait
laisser libres les municipalités qui désirent s'en
prévaloir ou pas. L'autre point qu'on n'a pas abordé avec vous,
c'est la régionalisation. Avez-vous des idées? L'Union des
conseils de comté s'est-elle fait une idée sur une
éventuelle régionalisation des services policiers?
M. Moreau: M. le Président, vous savez que l'Union des
conseils de comté je parle au nom des municipalités
locales du Québec régies par le code municipal a toujours
été dans le passé et va continuer de l'être
très soucieuse de son autonomie. Je pense bien que si on parle de
régionalisation, cela peut être valable pour certaines
régions, la régionalisation, mais tant et aussi longtemps qu'on
voudra régionaliser, les municipalités rurales auront quelque
chose à dire là-dedans. Il y a toutes sortes de façons de
régionaliser. On peut régionaliser et que les décisions ne
se prennent pas collégialement. Il faut tenir compte, quand on veut
régionaliser, de ce que tout le monde aura à dire, parce que,
devant le danger de se faire imposer des corps policiers et de se faire imposer
l'obligation de financer des corps policiers régionaux, il va falloir
évaluer aussi la qualité des services. Je pense qu'à ce
moment-là, il va falloir, M. le Président, être sur nos
gardes quant aux décisions qui vont se prendre, voir à quel
niveau cela se fera et quelle représentativité il y aura
là-dedans. Autrement, on risque de payer la facture et ne pas toujours
avoir les bons services.
M. Grenier: M. Moreau, si jamais cela nous arrive, on essaiera de
se rencontrer en commission, parce qu'on va partager pas mal d'opinions, je
pense.
M. Moreau: Cela me fait plaisir, M. le Président.
Le Président (M. Boucher): Merci, M. le
député de Mégantic-Compton.
M. Bédard: La proposition de régionalisation du
rapport Saulnier, avez-vous eu l'occasion de l'examiner, de l'approfondir?
M. Moreau: II y a des choses dans le rapport Saulnier... Je pense
bien qu'il ne faudrait pas retenir l'assemblée au cours de
l'après-midi, M. le Président... D'ailleurs, ce n'est pas la
teneur de notre mémoire. Nous avons effectivement lu le rapport Saulnier
de façon intégrale. Il y a des choses qui sont merveilleuses
là-dedans et d'autres qui le sont moins. Pour ce qui est de la
régionalisation, je ne voudrais pas faire l'historique de l'Union des
conseils de comté, des positions qu'on a prises depuis dix ans en ce qui
concerne les municipalités mandataires et des choses comme
celle-là. Je n'ai pas besoin de répéter cela ici. Mais je
pense bien qu'à ce moment-là, il va falloir tenir compte de cela
si l'on veut régionaliser, parce que ce ne sera jamais la petite
municipalité qui va avoir tellement à dire là-dedans.
C'est dans ce sens, M. le Président, que nous avons,
vis-à-vis de la régionalisation, des opinions assez
réservées. Cela ne veut pas dire que c'est fermé, que
c'est pris dans le ciment, mais il faudrait se pencher sur ces choses d'une
façon plus sérieuse si jamais on avait l'obligation de participer
à cela.
Le Président (M. Boucher): Merci, M. Moreau. En mon nom et
au nom des membres de la commission, je vous remercie pour la
présentation de votre mémoire.
J'appelle maintenant l'Association des policiers des autoroutes du
Québec, représentée par M. Marcel Ouellette.
M. Ouellette, si vous voulez présenter les gens qui vous
accompagnent et procéder à la lecture de votre
mémoire.
Association des policiers des autoroutes du
Québec
M. Ouellette (Marcel): M. le Président, à ma
droite, Marcel Côté, vice-président de l'Association des
policiers des autoroutes; à ma gauche, Jean-Claude Fortin,
secrétaire-trésorier de l'Association des policiers des
autoroutes.
Je tiens à préciser que l'association représente
115 policiers des autoroutes qui, en fait, couvrent quatre autoroutes dans la
région de Montréal, c'est une distance de 295 kilomètres
qui passe, pour ainsi dire, dans dix-sept comtés de la province. Le fait
que vous pouvez nous voir ici en uniforme cet après-midi, c'est qu'on a
voulu montrer à la commission qu'on portait un uniforme de policier,
comme on le dit bien dans notre mémoire. Dans la région de
Québec, on n'est pas habitué aux policiers des autoroutes, chaque
fois qu'on parle à des gens de Québec, ils disent: Les policiers
des autoroutes, c'est quoi? Qu'est-ce que ça fait? On est venu montrer
notre uniforme; les autos, on les a laissées au bureau.
Si vous permettez, M. le Président, je vais faire la lecture du
mémoire. Depuis novembre 1976, les membres de l'Association des
policiers des autoroutes nourrissaient secrètement beaucoup d'espoir.
Après la grande déception de l'abandon du projet de loi 41, ne
leur avait-on pas promis qu'enfin, bientôt, demain peut-être, un
sort meilleur les attendait? On allait enfin, sous la forme la plus pure,
présenter un projet de loi qui viendrait, par l'esprit et la forme,
rendre justice à un groupe de travailleurs. Le jeu en valait la
chandelle, et forts de ces promesses, tous se remirent à espérer
et à patienter. D'une étude à l'autre, d'un mémoire
à l'autre Dieu sait qu'on en a présenté beaucoup
d'une promesse à l'autre cela aussi, on en a eu beaucoup
les jours s'écoulent et passe le temps.
Août 1979. Le législateur aurait-il perdu la
mémoire? Il ne peut sûrement s'agir d'une omission volontaire. Il
doit sûrement manquer des pages au projet de loi 48 c'est
probablement ce qu'on va nous promettre tantôt ou se peut-il qu'on
ait décidé de régler définitivement le sort des
policiers des autoroutes en les confinant dans leur rôle d'agents de la
paix?
Le présent document ne se veut point un plaidoyer qui chercherait
à établir la preuve que nous sommes et faisons un travail de
policier. A notre humble avis, cette preuve fut largement
démontrée dans le passé. Que l'on se reporte seulement au
mémoire de l'Association du groupe de travail sur les fonctions
policières. Le présent mémoire ne se veut pas non plus une
supplique larmoyante auprès du législateur; nous avons quand
même notre fierté de policiers.
Le présent mémoire tentera cependant de faire la preuve
que le projet de loi 48, en omettant les inspecteurs des autoroutes de la
juridiction de la Loi de police, perpétue un état de fait rendant
difficile le travail des inspecteurs des autoroutes et consacre une situation
discriminatoire envers ces derniers. Nous avons, de plus, pensé qu'il
pourrait être opportun d'ajouter au présent document certaines
suggestions d'amendement.
Le projet de loi et les policiers des autoroutes. Le projet de loi 48,
tout en reconnaissant les inspecteurs comme des agents de la paix on
présume les places sous la juridiction de la Commission de
police, tout comme les policiers de la Sûreté du Québec ou
les policiers municipaux. (16 h 30)
Cependant, cette juridiction nouvelle n'entraîne ni les
privilèges ni les services normalement rattachés à
celle-ci.
Nous croyons qu'il s'agit d'un net recul. Recul d'autant plus
évident lorsque le projet de loi no 48 est comparé au projet de
loi no 41. Pourtant, trente mois les séparent.
De plus, force nous est de déplorer cette situation
discriminatoire puisqu'elle ne respecte même pas les données les
plus fondamentales du Code du travail qui veut qu'à travail égal,
salaire égal, et qui veut aussi que, pour un travail similaire, les
mêmes outils soient fournis.
Qu'il nous soit permis d'apporter, à titre d'exemple, la semaine
de la police. Tous les ans, l'invitation d'y participer nous parvient
aimablement et charitablement par certains corps policiers et jamais
directement par la Commission de police du Québec. Comment pourrait-il
en être autrement? Nous ne sommes que des agents de la paix.
Nous croyons que seuls notre compétence et le type d'intervention
auprès du public usager nous permettent cette charitable invitation. Ou
s'agirait-il plutôt du fait que les autres corps policiers, bien avant le
législateur, ont voulu ainsi, par souci de coordination et
d'efficacité, corriger une situation déficiente?
Quoi qu'il en soit, puisque la Loi de police, appelée à
être sous peu amendée par le projet de loi no 48, ne fait
nullement mention des inspecteurs des autoroutes, faut-il en conclure que la
police des autoroutes, de par son statut et de par les faits, va à
l'encontre de la Loi de police puisque, depuis plusieurs années, elle
patrouille avec des autos identifiées à cet effet?
Le jour n'est pas si loin où l'inspecteur des autoroutes devra
lui-même se donner une contravention puisqu'il ira directement à
l'encontre du paragraphe 35 de l'article 1 de l'avant-projet de loi du Code de
la route: "Véhicule d'urgence: un véhicule autorisé
à être utilisé comme véhicule de police par la
Commission de police du Québec".
Nous ne leurrons personne. Tous croient en nous voyant que nous sommes
des policiers "vrais". Seule la couleur des vêtements pourrait nous
distinguer et encore...
Faut-il en conclure que les policiers des autoroutes sont passibles
d'imposture, de personnification et de fausse représentation
auprès du public?
Le projet de loi no 48 et le policier des autoroutes. Le projet de loi
no 48, article 62, confirme au policier des autoroutes qu'il travaillera encore
dans l'insécurité la plus grande: "Lorsqu'un policier municipal
agit en qualité d'agent de la paix dans un territoire qui n'est pas
soumis à la juridiction du corps de police de la municipalité qui
l'emploie, le procureur général est réputé
être son employeur pour les fins de la Loi des accidents du travail"
(Statuts refondus 1964).
Gare au policier des autoroutes s'il s'aventure hors des limites de ses
clôtures, car, à ce moment, même s'il vient en aide à
un citoyen ou à un confrère d'un autre service de police, il
reçoit, par voie de conséquence et en guise de récompense,
la même protection qu'un simple citoyen.
Qu'arrive-t-il à un policier des autoroutes dans un
échange de coups de feu, blessant un citoyen ou étant
lui-même blessé?
Le policier des autoroutes est plus que jamais soucieux face au
lendemain et à son avenir. Non seulement ne recevra-t-il aucune
protection supplémentaire, mais, de plus, la Loi de police, projet de
loi no 48, éteint toute lueur d'espoir quant à un plan de
carrière, puisque, dans le cadre actuel de travail, le plan de
carrière est, à toutes fins utiles, inexistant.
Un beau rêve s'écroule! Le policier des autoroutes devra
faire face à la triste réalité et attendre patiemment
l'heure de la retraite sans jamais avoir pu évoluer au sein d'un
véritable corps policier. Toute sa vie, il aura fait semblant...
Le présent projet de loi no 48, lorsque sanctionné,
confirmera que le policier des autoroutes ne pourra jamais être un
policier, devenir un chef ou directeur d'un corps de police, penser
évoluer comme enquêteur de la Commission de police ou même,
s'il a plus de 30 ans, espérer un éventuel transfert dans un
autre corps de police. La Loi de police amendée ne le reconnaît
point policier.
Il n'en demeure pas moins que, tout en ayant la formation de policier,
effectuant un travail de policier, participant à des opérations
policières, pointé et vu par le public comme policier, le
policier des autoroutes continuera à dispenser une qualité de
travail professionnel sans la protection et les services normalement
rattachés à la tâche.
Une omission et ses conséquences. Les'poli-ciers des autoroutes
subissent depuis quelque temps un préjudice flagrant au domaine de
l'information. Jadis, nous possédions un numéro de contributeur
qui permettait d'interroger le centre de renseignement des policiers du
Québec. Nous avions même l'espoir qu'un jour nous obtiendrions un
écran cathodique et que celui-ci soit en permanence à nos bureaux
de Montréal. Ce projet ne s'est point réalisé. Tout au
contraire, nous avons été rayés du bottin des usagers du
CRPQ. Afin de répondre à nos besoins, nous devons, pour obtenir
l'information nécessaire, passer par des intermédiaires. Cette
méthode, par personne interposée, n'est sûrement pas
efficace et entraine, par voie de conséquence, des délais
préjudiciables au bon exercice de notre profession, tout comme elle
remet en question la sécurité des agents face au décalage
entre la demande d'information et la réception de cette dernière.
Cette façon de procéder concourt également à
engendrer des possibilités d'erreurs dans la retransmission des
informations.
Nous ne pouvons passer sous silence le fait qu'il nous est impossible
d'alimenter le CRPQ. Cet état de chose a pour conséquence que des
centaines de mandats dorment dans nos filières. Que dire aussi de
l'imbroglio infernal que représente le fait de vouloir rayer le nom
d'une personne recherchée, retrouvée ou bien d'une auto
volée et retrouvée par notre service. Il faut alors passer par
d'autres corps policiers et souhaiter qu'ils n'oublient pas d'en faire
l'annulation.
A maintes reprises, dans le passé, la police des autoroutes a
soulevé les difficultés de communication avec les autres corps
policiers du Québec. Qu'il nous suffise aujourd'hui de citer un extrait
de mémoire de l'Association des policiers provinciaux
présenté au groupe de travail sur les
fonctions policières. "Le plus grand problème de ce
service semble être la difficulté de communication de ses membres
avec ceux de la Sûreté du Québec qu'ils côtoient
pourtant à plusieurs endroits." Il est à souligner que dans cet
extrait, on ne parle pas des autres corps policiers établis près
des autoroutes à péage et avec qui nous sommes susceptibles
d'être en relation professionnelle.
Un fait établi, une situation équivoque. Dans les
paragraphes qui suivent, nous déposons le témoignage de quelques
groupes policiers du Québec espérant ainsi rappeler le travail
qu'exécutent les policiers des autoroutes.
Extrait du mémoire de la Sûreté du Québec au
groupe de travail sur les fonctions policières: "Le service de la police
des autoroutes a comme principale fonction la surveillance routière
laquelle consiste à appliquer les règlements de circulation de la
Loi des autoroutes et du Code de la route. A l'occasion, cet organisme applique
également les articles du Code criminel qui relèvent de la
conduite des véhicules automobiles et parfois il enquête sur des
vols et des méfaits reliés à la propriété de
l'Office des autoroutes."
Le travail que nous effectuons et que l'on dit s'apparenter à
celui du patrouilleur de la Sûreté du Québec fut
corroboré par la Sûreté du Québec elle-même
dans son mémoire au groupe de travail sur les fonctions
policières. "Force nous est de constater que leur travail s'apparente
à celui des patrouilleurs de la Sûreté du Québec et
même si jusqu'à présent nous sommes satisfaits des bonnes
relations qui existent entre nous, nous déplorons le manque de
coordination policière engendré par la pluralité des
unités de commandement ainsi que par l'utilisation des réseaux de
communication différents."
L'Association des policiers provinciaux dans son mémoire,
à ce même groupe de travail, s'exprimait dans ces termes.
"Actuellement, ces inspecteurs effectuent le même travail que les
patrouilleurs de la Sûreté du Québec sur les autoroutes des
Laurentides, des Cantons de l'Est, de la Rive-Nord et de Chomedey." Nous
joignons de plus au témoignage précédent un extrait du
rapport de vérification du Centre de renseignements policiers du
Québec en date du 12 décembre 1977. "Il est facile de constater
que votre travail s'apparente en tout point au travail de patrouille de
n'importe quel corps policier. Vos hommes font face à des inconnus lors
des vérifications sur la route et participent à des
opérations 100, des blocages de routes selon le besoin de chaque
région. De plus, vous avez un territoire à couvrir qui
relève exclusivement de votre juridiction et vous appliquez le Code de
la route, aussi bien que le Code criminel. Face au public, vos hommes sont
officiellement identifiés comme des policiers. Il serait donc injuste
que vous ne puissiez bénéficier du même outil de travail
que tous les policiers ont a leur disposition à cause d'une
technicité bureaucratique qui n'a pu être résolue
jusqu'à date. "Il est malheureux que la loi 41 n'ait pas
été adoptée, prévoyant votre reconnaissance
à ce titre. Les normes du Centre d'information des policiers canadiens
d'Ottawa sont très strictes à ce sujet et seuls les corps
policiers reconnus officiellement peuvent avoir un numéro d'agence pour
alimenter et interroger le système. Il est évident que vous
effectuez le même travail que les patrouilleurs des différents
corps policiers et que votre situation géographique est
stratégique pour toute opération policière. Il est donc
normal que vous ayez directement accès au CRPQ."
Une attente qui se prolonge. En 1976, les policiers des autoroutes
considéraient le projet de loi 41 comme une étape importante que
l'on s'apprêtait à franchir. En effet, ce projet de loi
répondait en tout point aux attentes des policiers des autoroutes
puisqu'il leur donnait d'office un statut de policiers et qu'il venait combler
une lacune qui les handicapait dans leur travail quotidien.
Les articles 1 à 9, 13, 26 à 33, 37 à 39, 43, 49,
50 et 65 du projet de loi 41 répondaient à l'esprit des demandes
et revendications des policiers des autoroutes.
Les événements en ont décidé autrement.
Depuis ce temps, le Groupe de travail sur les fonctions policières a
déposé son rapport et voici comment il s'exprime dans une de ses
recommandations. "D'autoriser la Gendarmerie du Québec à se
substituer aux services d'inspection du ministère des Transports et de
la police des autoroutes." Il nous apparaît que la mise en application de
cette recommandation aurait eu pour effet de conférer un
véritable statut aux policiers des autoroutes.
Une suggestion... ou peut-être deux. Afin de corriger la situation
qui prévaut, nous suggérons humblement ce qui suit: Que dans un
premier temps, à l'occasion de la présentation du projet de loi
48, M. le ministre apporte les modifications qui s'imposent en incluant les
policiers des autoroutes à la Loi de police, en les plaçant ainsi
sous la juridiction de la Commission de police du Québec.
Que dans un deuxième temps et pour une période
transitoire, les policiers des autoroutes relèvent du ministère
de la Justice et hiérarchiquement de la Sûreté du
Québec.
Que dans un troisième et dernier temps, les policiers des
autoroutes soient tout bonnement intégrés à la
Sûreté du Québec, comme certains le souhaitent au niveau du
ministère de la Justice.
En conclusion. Au cours des quelque quinze minutes qui ont
précédé, nous avons tenté de faire état
d'une situation ambiguë entraînant un fonctionnement difficile et,
par voie de conséquence, un rendement inadéquat. Nous avons dit,
dans l'introduction, qu'il ne s'agirait point d'une supplique larmoyante; aussi
ne ferons-nous point mention de la frustration et de l'insécurité
établies en permanence chez les policiers des autoroutes.
En terminant, qu'il nous soit permis de citer le bon vieux dicton
populaire qui dit: "Tant qu'il y a de la vie, il y a de l'espoir" et, comme le
législateur nous apparaît bien vivant, on a encore de
l'espoir.
Ceci met fin au mémoire qu'on a présenté à
la commission parlementaire de la justice. Comme nous ne voulions pas
répéter antérieurement ce que nous avions fait au
mémoire sur les fonctions
policières, c'est pour cela, en fait, qu'il n'y a aucune
statistique ou quoi que ce soit. Je pense que le ministre et les membres de la
commission devraient être au courant. De toute façon, je suis ici
pour répondre à vos questions.
Le Président (M. Boucher): Merci, M. Ouellette. M. le
ministre.
M. Bédard: M. le Président, je tiens à
remercier l'Association des policiers des autoroutes de sa participation aux
travaux de cette commission parlementaire. Je pense que leur réputation
n'est plus à faire en termes d'efficacité. Effectivement, tous
ceux qui ont eu à porter des jugements sur l'efficacité des
policiers affectés aux autoroutes l'ont fait de façon très
favorable. Il n'y a aucune discussion là-dessus. (16 h 45)
Je vous dis très simplement que je comprends vos impatiences, je
dirais même vos frustrations, du fait que des décisions n'ont pas
été prises concernant les demandes précises que vous aviez
formulées quant à la détermination de votre statut futur.
Je comprends d'autant plus vos impatiences et vos frustrations, vu les
différentes promesses que vous pourriez avoir eues dans le passé.
On peut y ajouter des rencontres que nous avons eues ensemble, où j'ai
exprimé très clairement mes préférences vers une
solution qui serait l'intégration à la Sûreté du
Québec. A la suite de nos rencontres, on sait qu'il y a eu, d'une part,
une décision de l'ancien gouvernement dans le projet de loi no 41, qui
était à l'effet de faire un corps de police distinct. Il y a eu
le rapport Saulnier, qui a conclu à l'intégration. A la suite des
rencontres que nous avons eues ensemble, vous savez que nous avons
demandé à notre comité des relations de travail du
ministère de la Justice et à la Sûreté du
Québec de faire une étude sur ce que représenterait
l'intégration de la Sûreté du Québec.
Nous avons eu ce rapport il y a trois mois à peu près, au
mois de juin seulement. Entre-temps, il y a eu la formation d'un comité
interministériel concernant l'ensemble de la sécurité
routière; on y retrouve des représentants du ministère de
la Justice, du ministère des Transports et également le
représentant des consommateurs, du ministère des Consommateurs,
Coopératives et Institutions financières. Je peux vous dire une
chose: je comprends vos impatiences, vos frustrations, et j'ai l'intention et
c'est l'intention de tous les membres de ce comité
interministériel qu'un des sujets prioritaires sur lequel nous allons
discuter dès que nous allons nous réunir soit le sujet que vous
abordez en fonction de définir votre statut. Les premières de ces
réunions auront lieu très prochainement de telle façon que
je suis convaincu que, d'ici la deuxième lecture, c'est-à-dire
d'ici l'adoption de cette loi, vous serez fixés sur la décision
gouvernementale et en mesure de voir, comme vous l'avez exprimé avec
beaucoup d'humour, s'il manque des pages à ce projet de loi.
M. Ouellette (Marcel): On les aurait trouvées.
M. Bédard: Je ne pose pas d'autres questions parce que,
tel que vous l'explicitez dans votre mémoire, je suis au courant de
certaines des difficultés que vous avez dans votre travail. On avait eu
l'occasion, d'ailleurs, d'en discuter ensemble à l'occasion de nos
rencontres. Avec le rapport Saulnier, c'est ce qui nous avait incités
à demander un rapport, qu'on parle d'intégration ou de corps de
police distincts, cela se fait quand même d'après certaines
études, certaines évaluations. Nous n'avons pas tardé
là-dessus parce que, dès le dépôt du rapport
Saulnier, nous avions demandé à la Sûreté du
Québec et à notre comité des relations de travail du
ministère de nous fournir un rapport pour nous expliciter les
problèmes que nous aurions peut-être à affronter pour fins
d'intégration. Je pense que vous avez raison de dire que cela fait assez
longtemps que cela traîne en fonction de l'efficacité dont vous
avez toujours fait preuve dans votre travail malgré les
difficultés auxquelles vous faisiez face. Il est nécessaire que
la situation soit tranchée, qu'il y ait une décision
gouvernementale. Encore une fois, ce sera un des premiers sujets prioritaires,
au niveau du comité interministériel sur la
sécurité routière, qui aboutira à une
décision avant l'adoption de la troisième lecture de ce projet de
loi.
M. Ouellette (Marcel): J'ai quand même le goût, M. le
Président, de dire que même si on s'en va vers une
recréation de la Sûreté du Québec, même si on
s'en va peut-être vers la création d'une police routière,
il nous faut quand même, avant de passer à ces étapes,
obtenir notre statut de policier qui est primordial avant toute
démarche. C'est pour cela qu'on était lésé du fait
qu'on n'était pas dans le projet de loi 48 et toutes les étapes
qu'il y a à encourir par la suite, il faut passer par là.
M. Bédard: Les recommandations de votre mémoire
seront étudiées de façon très spécifique au
comité interministériel sur la sécurité
routière.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: M. le Président, je veux remercier M.
Ouellette et ses collègues du mémoire qu'ils ont
présenté. Même s'il s'agit peut-être de la
nième représentation que l'association fait, c'est
peut-être la première fois que vous vous adressez à une
commission parlementaire et je veux vous remercier de la correction avec
laquelle vous l'avez faite, malgré les frustrations bien
compréhensibles qui vous animent.
Comme vous l'avez dit, je suis un peu mal placé pour parler
objectivement de votre demande. En ce qui nous concerne, ça fait un bout
de temps qu'on a fait notre lit, nous avons convenu, il y a déjà
plus de trois ans, que les policiers des autoroutes devraient être
reconnus comme corps policier et avoir le statut de policier. C'était
strictement ce que voulait dire le projet de loi 41.
L'événement que vous mentionnez qui a fait en sorte qu'il
n'a pas été adopté, bien, il y en a qui
pensent que c'est un catastrophe, mais en tout cas, je n'irai pas
là-dessus. Mais il reste que je comprends mal, M. le Président,
qu'après toutes les réflexions que se sont imposées les
officiers du ministère de la Justice depuis plusieurs années
et un de nos prédécesseurs, M. Jérôme
Cho-quette, avait même exprimé, on retourne en 1974-1975, son
opinion dans le sens d'accorder le statut de policier à la police des
autoroutes. Je suis déçu que le gouvernement en soit encore
à des comités, à des groupes d'étude, alors que, je
le sais, le ministère de la Justice possède dans ses dossiers
tout ce qu'il faut pour prendre une décision: Oui ou non. Notre
décision était oui, mais elle n'est peut-être pas
partagée par le gouvernement actuel. Quand on change de gouvernement,
les projets de loi qui sont sur les tablettes ou qui sont dans le moulin, c'est
tout-à-fait normal, c'est dans l'ordre des choses qu'ils soient
révisés, rejetés ou repris par le nouveau gouvernement. Je
ne peux pas en discuter, mais ça fait déjà trois ans,
enfin, deux ans et demi que le gouvernement est en place dans un dossier qui
était très avancé, sur lequel une décision avait
été prise, bonne ou mauvaise, mais dont les
éléments de décision étaient prêts.
L'intégration éventuelle à la Sûreté
du Québec, à mon sens, n'empêche pas d'accorder, dans ce
projet de loi actuel, le statut de policier. Qu'on le fasse de la façon
que le projet de loi 41 le faisait ou autrement, ce n'est pas la question, mais
le rapport du groupe d'étude que le ministre a depuis deux mois, on ne
sait pas ce qu'il y a dedans. Le ministre nous a fait à peine une
prédiction sibylline. Ce n'est même pas une promesse. La seule
promesse qu'on connaît, c'est qu'il va y avoir une décision avant
que le projet de loi soit adopté. Cela vous renvoie chez vous avec une
belle jambe. Vous ne savez pas quelle est la décision.
Naturellement, le ministre ne veut pas se compromettre, mais il
connaît les conclusions du rapport du groupe d'étude qu'il a
depuis deux mois. Pourrait-il nous donner des indications, à savoir dans
quel sens ce rapport apporte des conclusions? Ces conclusions indiquent-elles
qu'on doive reconnaître le statut de policier à la police des
autoroutes? Est-ce un rapport qui recommande l'intégration
éventuelle à la Sûreté du Québec? On n'est
pas plus avancé. Maintenant, on a un comité concernant la
sécurité routière. On va toujours avoir des
problèmes. La question policière ne sera jamais
complètement réglée. Pourquoi faire attendre davantage une
situation qui n'est quand même pas comme je l'ai dit ce matin
un problème majeur dont le sort des Québécois
dépend? Non, mais il reste que c'est un problème qui est
quasiment réglé. Pourquoi ne pas le faire maintenant? C'est ce
que je ne comprends pas actuellement. Peut-être manque-t-il quelques
éléments, la persuasion, la conviction du ministre. Je vais
essayer, par quelques questions, d'éclairer le ministre, de savoir
pourquoi vous êtes de vrais policiers. Portez-vous une arme?
M. Ouellette (Marcel): Oui, oui.
M. Lalonde: Mais est-ce légal? Avez-vous un permis de port
d'arme?
M. Ouellette (Marcel): Bonne question. L'article 90 du Code
criminel définit une certaine catégorie de personnes ou d'agents
de la paix qui sont spécifiés dans le projet de loi C-51, ce qui
fait que les policiers des autoroutes ne sont pas encore compris à
l'intérieur de cela.
M. Lalonde: C'est-à-dire que vous êtes dans
l'illégalité en portant votre arme?
M. Ouellette (Marcel): On est des agents de la paix, mais on
n'est pas dans la catégorie de personnes autorisées à
porter des armes.
M. Lalonde: Autorisées au port d'arme sans permis
spécifique. Avez-vous déjà été
arrêté pour port d'arme?
M. Ouellette (Marcel): Non, mais je peux l'être cet
après-midi.
M. Lalonde: Vous pouvez l'être cet après-midi.
L'équipement physique auquel vous avez droit je ne parle pas du
CRPQ est-il à peu près de la même nature que celui
des policiers qui font la patrouille, au point de vue des automobiles et des
autres équipements connexes?
M. Ouellette (Marcel): Quant aux automobiles, elles sont
conformes aux automobiles de police que la Sûreté du
Québec, pour ainsi dire, achète. Elles sont identifiées
comme étant des véhicules de police et même, elles sont
peut-être plus identifiées que n'importe quel véhicule de
police de la province de Québec, de sorte que c'est plus gros, plus
large. C'est écrit plus grand.
M. Lalonde: Une étude n'a-t-elle pas été
faite par la Commission de police sur l'équipement du corps policier des
autoroutes?
M. Ouellette (Marcel): Ce n'est pas une étude. C'est un
rapport d'inventaire d'équipement, en fait, tant physique
qu'économique et du personnel, etc. qui a été fait par la
Commission de police en 1976, lors du dépôt en première
lecture du projet de loi no 41.
M. Lalonde: Y avait-il des conclusions dans ce rapport indiquant
que votre équipement était conforme à ce qu'un corps
policier devrait avoir?
M. Ouellette (Marcel): Oui. Cela semblait être conforme
d'après l'étude. Cela semblait être conforme aux exigences
de la Loi de police.
M. Lalonde: Le ministre a sûrement ce document. Y aurait-il
d'autres statistiques que vous voudriez nous fournir concernant, par exemple,
les formes de criminalité que vous devez affronter
quotidiennement, le degré de "dangerosité" de vos
fonctions?
M. Ouellette (Marcel): Je ne m'attendais pas â avoir cette
question au niveau des statistiques. Ce que j'ai pris brièvement dans un
rapport, dans le rapport annuel de l'Office des autoroutes indique qu'au niveau
des contraventions, pour à peu près 80 patrouilles nous
sommes 115 l'an dernier, il s'est donné 43 000 contraventions,
c'est-à-dire 43 000 billets au niveau du Code de la route. Il s'est
effectué 1565 arrestations au niveau criminel et, à
l'intérieur de cela, il y a eu 830 facultés affaiblies. Cela
varie, au niveau des infractions criminelles: voies de fait, tentatives de
viol, viols, attentat à la pudeur, etc. (17 heures)
M. Lalonde: Vous parlez de l'opération 100 dans votre
mémoire, à la page 17, c'est le rapport de vérification du
CRPQ. Pouvez-vous nous l'expliquer, pour ceux qui ne seraient pas familiers
avec cette opération policière?
M. Ouellette (Marcel): La plupart du temps un corps de police
municipal fait une demande à la Sûreté du Québec
pour qu'on déclenche une opération 100, ce qui, en fait,
équivaut à un ratissage d'un certain secteur donné; s'il y
a eu un vol à main armée ou une infraction criminelle grave, on
déclenche une opération 100. Nous, en tant que policiers des
autoroutes, sommes dans le bouquin de la Sûreté du Québec,
ce qui fait qu'on doit, à certains points stratégiques,
être là pour vérifier. Même, on a déjà
effectué, dans le passé, des arrestations de personnes qui
avaient effectué un vol à main armée, etc., en
collaboration avec la Sûreté du Québec et les corps de
police municipaux.
M. Lalonde: Ce sont les seules questions que j'avais à
vous poser. Je veux simplement conclure en vous disant que nous allons, du
côté de l'Opposition, être vigilants et nous assurer que,
non pas la promesse, mais la prédiction du ministre à savoir que
vous allez être fixés sur votre sort, que vous aurez votre verdict
avant le passage de cette loi en deuxième lecture... nous allons voir
à ce que le droit parce que je pense que c'est un droit qu'ont
les policiers des autoroutes d'avoir le statut de policier soit reconnu.
Je vous remercie de votre présence ici.
Le Président (M. Boucher): M. le ministre.
M. Bédard: M. le Président, je comprends le
député de Marguerite-Bourgeoys de s'attarder beaucoup sur les
dispositions de son défunt projet de loi 41 ; je comprends qu'il s'y
sente en sécurité en termes d'opposition. Je suis convaincu qu'il
sera beaucoup moins long sur certains autres articles du projet de loi 41 qui
allaient jusqu'à préconiser des perquisitions sans mandat.
M. Lalonde: ...
M. Bédard: Je puis vous dire que le choix peut
paraître simple; il n'est pas si simple que cela, puisque je me rappelle
que lorsque nous étions dans l'Opposition, j'avais fait des
représentations dans le sens de celles que nous fait le
député de Marguerite-Bourgeoys aujourd'hui. Cela a abouti,
après trois ans, à un dépôt de projet de loi qui est
défunt maintenant, pour les raisons que nous connaissons. Le choix n'est
pas si simple que cela, puisque l'ancien gouvernement en était
arrivé à une décision qui était la mise en place
d'un corps de police distinct; un organisme qui a sa crédibilité
aussi, le groupe Saulnier, en est arrivé à une autre
décision, une autre recommandation qui était celle de
l'intégration à la Sûreté du Québec. Il faut
quand même se le rappeler. Je ne cherche pas d'excuses, parce que je vous
ai très bien relaté l'essentiel des rencontres que nous avons
eues ensemble et des préférences que j'avais
évoquées à ce moment-là et qui restent les
mêmes. Il faut quand même se dire que le groupe Saulnier a
déposé son rapport au moment où vous le savez, et
immédiatement on avait demandé un autre rapport plus en
profondeur sur toutes les implications que cela pouvait représenter, ce
qui indiquait déjà, je pense, la continuation effective d'une
préférence que je vous avais évoquée clans mes
entretiens particuliers.
Il y a, à l'heure actuelle, un comité
interministériel sur la sécurité routière, ce sera
un des premiers sujets, et nous allons aboutir, avant la troisième
lecture, à une décision.
Le Président (M. Boucher): Merci, M. le ministre.
En mon nom personnel et au nom des membres de la commission, je remercie
M. Ouellette et ceux qui l'accompagnent pour la présentation de leur
mémoire.
J'appellerais maintenant l'Union des municipalités
représentées par M. Luc Lacharité. M.
Lacharité.
Union des municipalités
M. O'Bready (Jacques): Je vous remercie, M. le Président.
M. Lacharité n'est pas présent; je suis Jacques O'Bready,
vice-président de l'Union des municipalités. J'excuse
également l'absence de certains de mes collègues qui
siégeaient au comité de la police au niveau de l'union. Ils sont
retenus à d'autres endroits. Je voudrais vous remercier au nom de
l'Union de nous donner l'occasion de nous exprimer sur le projet de loi no 48.
Vous me permettrez, M. le Président et messieurs, de vous lire le
mémoire dont vous avez, je pense, déjà reçu copie
quitte à peut-être y ajouter quelques commentaires ad libb et
également à répondre à vos questions s'il y en
a.
Le projet de loi no 48, Loi modifiant la Loi de police, nous est apparu
à ce point important pour l'administration municipale que nous pouvions
difficilement refuser l'invitation à venir le commenter devant cette
commission.
L'Union des municipalités du Québec a toute raison de
croire que les intentions du législateur, qui l'ont motivé
à apporter des correctifs à la Loi de police, sont excellentes.
Cependant, nous croyons qu'il s'agit d'un texte de loi incomplet par rapport
à l'envergure du problème de la gestion des corps policiers
municipaux. Aussi sommes-nous d'avis que le législateur a choisi une
approche ponctuelle, pour ne pas dire timide, à l'égard d'une
solution qui doit répondre à un besoin pressant, à savoir
l'élaboration d'une véritable politique de la police au
Québec.
Au cours des dernières années, il y a eu de nombreuses
études et représentations faites au sujet de l'organisation et
des fonctions de la police au Québec dont, plus récemment, le
rapport Saulnier sur lequel l'union disait: "Nous sommes d'opinion que le
rapport constitue une approche rationnelle au problème de l'organisation
policière en ce sens qu'il cherche à offrir une solution
mitoyenne entre le statu quo et la mise sur pied d'une gendarmerie nationale
pouvant oeuvrer sur le plan local. Bref, le rapport est fort bien
structuré et ses analyses et compilations statistiques sont importantes.
Ainsi, il offre aux autorités gouvernementales des
éléments de solution pour l'élaboration d'une politique de
la police au Québec."
Si l'Union des municipalités demeure perplexe devant ce projet de
loi, c'est qu'elle n'y trouve pas suffisamment d'éléments lui
permettant de croire que le législateur ait tenu compte de cette
étude du groupe de travail présidé par M. Saulnier. Par
conséquent, il semble qu'on se sera contenté d'apporter quelques
modifications à la Loi de police, lesquelles, selon nous, risquent
davantage de perturber la situation actuelle vécue par l'autorité
municipale en regard de son corps de police que de régler des
problèmes dont l'Union des municipalités a maintes fois
souligné l'urgence.
Il est vrai que nous formulions quelques réserves quant à
certaines dispositions du rapport Saulnier et que nous n'acceptions pas
d'emblée toutes les conclusions qu'on y retrouve. Cependant, nous
n'étions pas rébarbatifs aux recommandations formulées
dans ce rapport puisque nous croyions et croyons toujours que ce dernier offre
une formule de compromis acceptable pour le citoyen et les parties en
cause.
La recommandation du groupe de travail sur la régionalisation des
corps policiers municipaux est celle qui a retenu le plus l'attention des
élus. Toutefois, nous avons dit que les structures proposées dans
le rapport étaient prématurées puisqu'elles risquaient
d'entrer en contradiction avec l'éventuel découpage du territoire
prévu par le projet de loi no 125, Loi sur l'aménagement et
l'urbanisme. J'ajoute simplement comme commentaire, M. le Président,
qu'il faut comprendre tout de même qu'au moment où le rapport
Saulnier a été déposé le projet de loi no 125 ne
l'était pas encore et ce n'est que par la suite, pour faire la
concordance entre les deux projets de loi, que ces commentaires ont
été formulés par l'union.
C'est avec satisfaction que nous reconnais- sons la volonté du
législateur de ne pas légiférer sur la question de la
régionalisation des corps de police municipaux tant et aussi longtemps
que ne sera pas déterminé le découpage des futures
municipalités régionales, tel que nous l'avions
suggéré.
Le projet de loi no 48 qui, dans un premier temps, vise à
accroître les pouvoirs d'enquête de la Commission de police propose
dans un deuxième temps certaines règles concernant
l'établissement des corps policiers municipaux et également
l'organisation de ceux-ci. Même s'il nous apparaît
nécessaire que ce projet de loi soit repensé pour
l'intégrer dans un texte législatif global, nous devons commenter
certaines parties de ce projet de loi, spécialement celles qui
concernent les pouvoirs de la corporation locale et les corps municipaux de
police.
Ainsi, nous aborderons, dans l'ordre numérique des articles,
certains de nos commentaires afin de rendre notre intervention plus facile
à suivre. Je commence l'analyse article par article.
A l'article 2 et à 2a, nous soulignons que le premier
alinéa vient clore un débat ouvert par dix années de
jurisprudence. Il appelle cependant certains éclaircissements. Ce
policier agissant comme agent de la paix ne cesse pas d'être
préposé du procureur général dans sa propre
municipalité. Lorsqu'on lit les deux paragraphes de cet article
ensemble, on pourrait penser le contraire, puisque le législateur ne
parle pas pour ne rien dire. L'interprétation, au contraire, du premier
alinéa risquerait d'augmenter la responsabilité civile et quasi
délictuelle de la corporation municipale. Quant au second alinéa,
l'Union des municipalités croit qu'elle ne vient pas changer la nature
des ententes intermunicipales de services constabulaires.
A l'article 2c, malheureusement, il n'y a pas dans le projet de loi de
définition de situations perturbatrices de l'ordre de la paix et de la
sécurité publique. Elle est laissée à
l'interprétation et, peut porter atteinte aux libertés civiles.
Nous souhaiterions connaître les critères qui peuvent qualifier
une situation comme perturbatrice de l'ordre, de la sécurité et
de la paix publique. Que le directeur de police puisse, de sa propre
initiative, faire rapport au Procureur général nous
apparaît acceptable dans la mesure où celui-ci, sans avoir
à en divulguer le contenu, avise simultanément le conseil
municipal qu'il a effectivement fait parvenir un tel rapport. Aussi,
faudrait-il stipuler que le directeur d'un corps de police municipal pourrait
également être appelé à soumettre au procureur
général un rapport circonstancié à partir d'une
demande du conseil municipal.
A l'article 7, le dernier paragraphe stipule que la commission a le
pouvoir d'adopter un règlement de déontologie et de discipline
applicable aux membres des corps policiers municipaux selon l'article 47a et ce
au même titre que le lieutenant-gouverneur en conseil pour la
Sûreté du Québec. Cependant, ce dernier, le
lieutenant-gouverneur, le fait sur la recommandation du directeur de la
sûreté, et pas autrement, alors
que la commission le ferait après consultation des organismes
municipaux concernés seulement. Encore une fois, voici une occasion pour
le législateur de rectifier ce qui nous apparaît anormal et de
respecter un tant soit peu les pouvoirs locaux. Nous demandons la
possibilité que la commission puisse, par règlement,
étendre l'application des dispositions de l'article 47a ou de parties de
celle-ci à l'ensemble ou à une partie des policiers municipaux du
Québec seulement sur recommandation des organismes
représentatifs, c'est-à-dire l'Union des municipalités,
l'Union des conseils de comté et l'Association des directeurs de police
du Québec travaillant de concert pour les besoins de la cause. Ce
processus ne doit pas empêcher la commission de demander aux organismes
municipaux de produire des recommandations concernant la déontologie et
la discipline.
D'autre part, il nous apparaît souhaitable que la commission
définisse un code minimal de déontologie et d'éthique
policière et que ce code s'applique là où il n'en existe
pas ou ne s'applique, pour les autres municipalités, que là
où le code de discipline ne répondrait pas aux dispositions du
code minimal, ce qui laisse à l'autorité municipale la
possibilité d'adopter son propre code ou d'accepter des normes
minimales.
L'article 19 du projet de loi constitue un élément
nouveau, lequel, selon nous, pourrait mettre fin à beaucoup
d'incertitude et d'ambiguïté quant au rôle joué par la
Sûreté du Québec lorsque les corps de police municipaux
sont incapables d'agir adéquatement. Jusqu'à présent, ces
services avaient été accordés sans base juridique claire.
Quoique ce ne soit pas indiqué dans le mémoire, M. le
Président, à l'article 19, nous avons une réserve assez
sérieuse sur les termes "de sa propre initiative". Je pense qu'il
faudrait ajouter cela aux représentations de l'Union des
municipalités.
L'article 25, c'est probablement là le coeur de nos
représentations, c'est un nouvel article portant le no 52, et c'est sans
aucun doute ce qui nous apparaît le plus significatif dans ce projet de
loi. La possibilité, pour les municipalités de 5000 habitants et
moins, de constituer ou non un corps de police nous apparaît comme
étant une solution souhaitée par plusieurs de nos membres,
quoi-qu'au nom de l'équité, cette formule ne constitue vraiment
pas la réponse à un juste partage des coûts de la
sécurité publique au Québec, surtout que les
municipalités seront appelées à vivre une nouvelle
expérience en matière de fiscalité à compter du 1er
janvier 1980, d'où l'intérêt d'une politique qui mette
toutes les municipalités sur un même pied à partir de
facteurs de coûts identiques ou presque. (17 h 15)
Ce même article permet au lieutenant-gouverneur en conseil de
déterminer les effectifs d'un corps de police local, c'est-à-dire
établir le taux d'encadrement policier dans une municipalité
donnée. Rappelons que le rapport Saulnier soulignait que l'encadrement
policier d'un service complet, selon une analyse faite pour un district
urbanisé de 20 000 habitants, s'établissait à une moyenne
minimale de 1.5 policier par 1000 habitants. Les auteurs croyaient important de
souligner qu'il s'agissait là d'un ordre de grandeur donné
à titre indicatif et que la fixation d'un taux d'encadrement pour un
district est fonction de l'indice de la densité d'occupation du sol, de
sa nature et de l'analyse suivie de la criminalité dans ce territoire et
non seulement de la population.
Même s'il est intéressant de noter que le projet de loi 48
permet la fixation des taux d'encadrement à partir de facteurs locaux
dont devrait tenir compte la commission dans son avis au lieutenant-gouverneur
en conseil, nous considérons qu'il serait de loin
préférable que le taux d'encadrement policier pour une
municipalité donnée soit fixé conjointement par la
Commission de police et la municipalité concernée ou l'organisme
qui la représente.
Dans la fixation des effectifs policiers, la commission et la
municipalité tiendraient compte de la capacité de payer de la
municipalité, du taux de la criminalité dans les limites
territoriales de celle-ci, des implications de cette décision sur les
membres des corps de police concernés, de l'avis du directeur du service
de police, des possibilités d'entente suivant les articles 60 et 60a,
ainsi que des exigences de la municipalité concernant l'application des
règlements municipaux.
Si la commission et la municipalité devaient en arriver à
une impasse totale, celles-ci soumettraient leurs positions respectives au
lieutenant-gouverneur en conseil, lequel pourrait, en dernier ressort, fixer
les effectifs de ce corps de police. Cette approche nous apparaît
beaucoup plus respectueuse du pouvoir local, tout en créant une nouvelle
forme de collaboration entre, d'une part, une commission de police dont les
objectifs sont assez mal compris et la neutralité parfois mise en doute
et, d'autre part, le pouvoir local qui déplore le fait que le
contrôle de son corps de police lui échappe de plus en plus.
L'Union des municipalités du Québec n'est d'aucune façon
prête à accepter que des représentants d'associations
policières puissent intervenir de quelque façon que ce soit dans
la fixation du taux d'encadrement policier. Selon nous, il appartiendrait au
directeur de faire valoir les points susceptibles d'avoir un impact sur les
membres du corps qu'il dirige et de faire les recommandations qu'il juge
utiles.
La décision d'une municipalité de réduire ses
effectifs policiers en tout ou en partie n'émane pas d'un caprice
administratif, mais plutôt de contraintes budgétaires et de
calculs démographiques. Le projet de loi accorde aux policiers ainsi mis
à pied un traitement de faveur difficilement justifiable par rapport aux
autres employés municipaux.
Plutôt que de procéder en vertu du principe lourd et
coûteux en deniers publics d'un comité de reclassement, il serait
de loin préférable que les municipalités autorisées
à se départir de leur corps policier, puissent et cela est
à titre d'exemple donner un avis de résiliation de contrat
d'au moins douze mois et accorder à
chaque employé mis à pied une somme forfaitaire
décidée par le lieutenant-gouverneur en conseil.
Article 52a. Nous comprenons que la décision du
lieutenant-gouverneur de dispenser une municipalité de son obligation de
maintenir un corps de police ou d'en réduire les effectifs n'aura
d'effet que lorsque tous les efforts possibles auront été
accomplis et qu'un processus aura été déployé pour
trouver un emploi aux policiers ainsi déplacés.
Ce que le législateur a omis d'indiquer, ce sont les
délais accordés au comité de reclassement avant que le
lieutenant-gouverneur en conseil ne consente à dispenser une
municipalité de son obligation. Faudrait-il comprendre qu'une
municipalité ne pourra sous aucun prétexte diminuer ses effectifs
policiers même si cette décision est justifiée et
justifiable avant que ne soit constitué un comité de
reclassement, que celui-ci n'ait examiné la situation et formulé
ses recommandations, également qu'il n'ait étudié la
possibilité pour le policier concerné de trouver un emploi dans
un autre corps de police et que, finalement, ce même comité n'ait
examiné avec la municipalité la possibilité de lui
procurer un autre emploi? Faudrait-il comprendre que la municipalité ne
pourra d'aucune façon diminuer ses effectifs tant et aussi longtemps que
ce comité de reclassement n'ait pu trouver un autre emploi pour le ou
les policiers ainsi mis à pied? Devons-nous comprendre qu'il faille
aussi obtenir l'assentiment du policier concerné sur la qualité
du nouvel emploi?
Nous comprenons difficilement l'absence de représentants de la
Sûreté du Québec sur ce comité de reclassement
puisqu'il est logique de supposer que ce corps policier serait le premier
à embaucher les policiers municipaux affectés, soit par la
cessation d'un service, soit par la réduction de ses effectifs.
En effet, lorsque, par exemple, une municipalité de 5000
habitants et moins est dispensée de son obligation de maintenir un corps
de police, c'est à la Sûreté du Québec qu'incombe
dorénavant la responsabilité de la sécurité de ce
même territoire, d'où la nécessité d'augmenter ses
effectifs. Le policier municipal ayant reçu la même formation que
les membres de la Sûreté du Québec et au surplus
étant familier avec le territoire laissé à la juridiction
de la Sûreté, il nous apparaît normal que ce corps de police
soit le premier intéressé à recruter les policiers
affectés.
Article 52b. Nous comprenons bien et nous acceptons que le Procureur
général pourrait demander à la commission de faire
enquête afin de vérifier si une municipalité maintient des
services policiers adéquats. Cependant, nous comprenons mal qu'un groupe
de citoyens puisse faire une demande auprès de la commission sans que
soit d'abord saisi le conseil de ville de cette plainte et qu'il n'ait pu tenir
une audience publique sur le sujet, s'il est d'importance, ou apporter des
correctifs administratifs, s'il est anodin, et que ce même groupe de
citoyens n'ait reçu de lui sa réponse dans un délai
raisonnable. Aussi, il faudrait définir ce qu'est un groupe de citoyens.
Est- ce 2, 10, 100 personnes? Nous suggérons au législateur
d'établir un nombre minimum de requérants, ce qui permet de
garantir le sérieux de la plainte.
D'autre part, il nous apparaît tout à fait inconcevable
qu'une association de policiers puisse, par requête, demander à la
commission de faire enquête afin de vérifier si une
municipalité maintient les services policiers adéquats. D'abord,
il faudrait s'entendre sur la définition du mot "adéquat". On
doit convenir qu'une association de policiers n'a pas nécessairement la
même définition de l'adéquation en matière de
services policiers que celle que pourrait avoir celui qui reçoit les
services et paie la note. La municipalité, de son côté,
pourrait très bien invoquer qu'un service policier adéquat doit
également correspondre à sa capacité financière,
c'est-à-dire ses pouvoirs de taxation. Ces remarques s'appliquent aussi
aux citoyens qui portent une plainte. L'Union des municipalités croit
qu'une assemblée publique tenue par le conseil peut lui permettre de
justifier l'état de son service policier.
Article 52c. Cet article prévoit que le Procureur
général peut charger la Sûreté de maintenir la paix,
l'ordre et la sécurité publique dans le territoire soumis
à la juridiction de la municipalité si, de l'avis de la
commission, elle ne maintient pas de service policier adéquat. D'abord,
il nous apparaît extrêmement important que la municipalité
concernée soit saisie de l'avis de la commission et qu'elle ait un
délai raisonnable pour se conformer avant que le procureur
général puisse charger la Sûreté d'agir sur son
territoire. Selon l'Union des municipalités, il faudrait faire une
distinction quant à l'obligation pour la municipalité de fournir
des services adéquats et l'impossibilité pour celle-ci de le
faire pour des raisons résultant de conflits de travail. Nous
suggérons que, dans pareil cas, les dispositions de l'article 19 du
projet de loi soient appliquées et que, pour ces services qui sont
rarement d'une longue durée, la Sûreté du Québec en
assume les coûts.
Article 28. Cet article répond à un besoin et nous pensons
qu'il servira à certaines de nos municipalités membres.
Cependant, nous demandons la possibilité que ces ententes soient
renégociables annuellement. Cela aurait pour effet de permettre aux deux
parties de faire les ajustements s'il y a lieu.
Article 31. Cet article longtemps attendu par le monde municipal
permettra aux petites municipalités qui connaissent des augmentations de
population saisonnières, tels les lieux de villégiature, de
pouvoir nommer, pour une période de temps raisonnable, des constables
spéciaux.
Article 39. Nous croyons en toute objectivité et
équité que cette période de deux ans accordée aux
municipalités régies par le Code municipal devrait être
accordée sans discrimination aux quelques municipalités
régies par la Loi des cités et villes de même taille qui,
jusqu'à ce jour et pour toutes sortes de raison, ne se seraient pas
conformées aux dispositions de l'article 52 de la Loi de police.
En guise de conclusion, M. le Président, l'Union des
municipalités du Québec se demande pourquoi le législateur
n'a pas profité du projet de loi no 48 pour clarifier une fois pour
toutes l'ambiguïté qui existe entre; d'une part, l'article 115 de
la Loi des cités et villes et, d'autre part, l'article 55 de la Loi de
police. Il nous semble qu'à l'aube d'une réflexion, si partielle
soit-elle, sur le problème de la gestion des corps policiers municipaux,
le législateur aurait pu délimiter les attributions et
responsabilités des autorités civiles et policières.
M. Yves Ouellette, professeur à la faculté de droit de
l'Université de Montréal, parlant du contrôle politique sur
les services de police municipaux le 2 mars dernier, disait: "Une des
faiblesses actuelles de l'organisation policière au Québec est
l'insuffisance des contrôles gouvernementaux sur la gestion
générale des services de police attribua-bles à
l'immobilisme des divers gouvernements provinciaux et à leur retard
à se donner des politiques bien articulées sur la gestion des
services de police. "Si d'aucuns s'étonnent ou s'inquiètent de la
puissance des syndicats de policiers et parlent de l'émergence d'un
pouvoir policier, ce phénomène n'est peut-être pas
entièrement attribuable à la seule gourmandise des policiers,
mais tient aussi à l'inaction des gouvernements qui se laissent
dépasser par la police. "En 112 ans de confédération, les
réalisations des gouvernementaux provinciaux en matière de
planification et de politiques policières n'impressionnent guère.
On pouvait lire dans le livre blanc intitulé "La police et le citoyen."
Si les structures actuelles présentent des lacunes graves, c'est en
bonne partie parce que l'Etat n'a pas suffisamment assumé jusqu'à
maintenant son rôle de principal planificateur du domaine policier.
C'était en 1971. Depuis ce temps, le rapport Saulnier a
été déposé et rien ne permet de croire qu'il se
matérialisera prochainement en réalisation concrète et en
législation."
C'était là la somme de nos premières
réactions à ce projet de loi no 48. Nous espérons que nos
commentaires invitant le législateur à revoir l'ensemble de la
Loi de police seront bien accueillis. Sachez que notre seul but est
l'amélioration de la qualité des services à la population
et- ce, à l'intérieur d'un cadre juridique bien défini, ne
laissant aucun doute quant aux devoirs et obligations de chacun. Je vous
remercie.
Le Président (M. Boucher): Merci. M. le ministre.
M. Bédard: Je remercie, M. le Président, l'Union
des municipalités de son rapport et de sa contribution aux travaux de
notre commission parlementaire. Je vois que l'Union des municipalités,
d'une part, se dit déçue du fait que je n'aie pas suivi le
rapport Saulnier. Par contre, elle se déclare satisfaite du fait que la
recommandation la plus importante du rapport Saulnier, soit celle concernant la
régionalisation, ne soit pas dans le projet de loi. Mais c'était
quand même une des recommandations clefs du rapport Saulnier.
Il reste que l'Union des municipalités c'est normal
soucieuse de la protection de son autonomie, soucieuse aussi du fait
qu'administrant les biens publics, veut avoir toutes les possibilités
d'être insérée dans le processus de toute décision
qui se traduit par des dépenses des deniers publics, attache une
attention tout à fait particulière au processus qui est
prévu dans la loi concernant le taux d'encadrement. C'est un des points
importants.
La seule question que je me posais face à la suggestion qui nous
est faite par l'Union des municipalités à savoir que ce taux
d'encadrement soit décidé par la commission de police et la
municipalité concernée seulement, je me demandais si le fait que
le taux d'encadrement n'est fixé que par la commission de police et la
municipalité concernée, il n'y a pas danger que la solution
retenue le soit surtout et uniquement en vertu d'impératifs municipaux
plutôt que l'on ait tendance, je ne présume pas, mais est-ce qu'il
n'y a pas ce danger-là...
M. O'Bready: Je pense, M. le ministre, que si la Commission de
police, conjointement en collaboration avec la municipalité
concernée, établit ses taux d'encadrement, la Commission de
police sera là pour faire respecter des critères possiblement
différents ou, en tout cas, autres que ceux qu'une municipalité
aurait peut-être tendance à faire valoir. C'est la raison pour
laquelle on demande que la Commission de police, conjointement avec la
municipalité le fasse et que s'il n'y a pas entente, que le
lieutenant-gouverneur en conseil puisse trancher. Nous sommes absolument
d'accord que les taux d'encadrement ne doivent pas être basés
strictement sur des impératifs municipaux. C'est peut-être pour
cette raison qu'on a des réticences à dire
j'écoutais tantôt d'autres interventions pourquoi 5000?
Pourquoi pas 6000, 7000 ou 4000? (17 h 30)
A toutes fins utiles, à notre avis, c'est bien certain que les
petites municipalités de 5000 et moins ont tendance à ne pas
vouloir maintenir des corps de police, mais cela, M. le Président, je
pense que ce n'est pas uniquement pour des questions de population, mais
à cause de l'absence de moyens de se doter d'effectifs policiers qui ont
tous les outils pour être capables de travailler d'une façon
vraiment adéquate. Si vous vous rappelez une des conclusions du rapport
Saulnier ou un des passages importants du rapport Saulnier, ce n'était
pas strictement la régionalisation ou quelques points que j'ai
mentionnés, mais on avait dit beaucoup aussi sur la motivation des
policiers. On attribuait une partie du malaise policier à une certaine
démotivation qui n'est pas toujours le fait ou la responsabilité
du policier, mais qui est due à l'impossibilité pour son
employeur de lui fournir des instruments de travail adéquats. Je
comprends qu'il doit être frustrant pour un policier, qui a passé
un certain temps à se
former à l'Institut de police, qui a passé un certain
temps à acquérir de l'expérience, de se voir limité
dans ses moyens. Je veux dire que c'est un ensemble. Je voudrais que mon
intervention de tantôt, en disant que le problème policier est un
problème global et qu'on est un peu déçu, soit
perçue dans ce sens et non dans un sens négatif.
M. Bédard: Concernant le comité de reclassement,
vous émettez l'opinion que vous préféreriez plutôt
un avis de résiliation de douze mois pour permettre au policier de se
replacer sur le marché du travail. Ne croyez-vous pas que cette formule
d'avis seulement de résiliation est de nature à mettre un peu de
côté certains droits acquis par des policiers qui oeuvrent depuis
longtemps dans certaines municipalités et qui, en fonction du respect de
la loi, se voient privés de leur gagne-pain? Ne trouvez-vous pas que les
policiers qui ont servi depuis longtemps une municipalité ont quand
même certains droits acquis?
M. O'Bready: Je suis d'accord pour les policiers comme pour tout
autre employé municipal qui pourrait, d'ailleurs, subir le même
sort pour des raisons différentes. Mais vous aurez remarqué qu'on
n'écarte pas nécessairement le comité de reclassement. Si
on doit conserver cette formule, M. le ministre, on croit qu'au moins il
faudrait préciser certains délais et certaines façons de
faire, comme je l'ai expliqué tantôt dans le mémoire. Il va
falloir établir des règles du jeu à ce comité tout
de même parce que le comité de reclassement peut fonctionner
pendant un an sans produire de résultats concrets ou efficaces.
Qu'arrive-t-il, à ce moment-là, de la réduction des
effectifs policiers ou de l'abolition du corps de police? Il ne faudrait quand
même pas que cela traîne en longueur. La solution d'une
indemnité de séparation est une alternative. Je l'ai
souligné tantôt. C'est à titre d'exemple. Cela peut
être une combinaison de ces différentes façons de
procéder aussi. Cela peut être un comité de reclassement.
Si à l'expiration du travail du comité de reclassement ou pour
des raisons qu'on pourrait définir, il n'y a pas de solution, cela peut
être une indemnité de séparation. On n'est pas
intéressé à ce que de vieux employés municipaux se
retrouvent sur le trottoir, pas plus pour les policiers que pour d'autres
catégories d'employés. Il y a à peine 200 policiers, me
dit-on, dans les corps policiers des villes de 5000 habitants et moins. Il y a
à peu près 200 personnes. Je pense que ce ne serait tout de
même pas un problème épouvantable. Il peut être
réglé pour autant qu'on précise certaines choses.
M. Bédard: Si on devait fonctionner à partir du
comité de reclassement, quelles seraient les balises que vous aimeriez
voir établies? Vous avez dit qu'il faudrait quand même que cela se
fasse dans une période assez restreinte, la moins longue possible. Il ne
faudrait pas que cela s'éternise. Y a-t-il d'autres balises dont vous
croiriez qu'il serait important de tenir compte?
M. O'Bready: S'il y a un comité de reclassement,
étant donné qu'on a affaire à des policiers, je crois
qu'il devrait y avoir au moins certaines... On a parlé, par exemple, de
l'absence de représentants de la Sûreté du Québec.
Ne serait-il pas intéressant que la Sûreté du Québec
soit impliquée dans ce comité de reclassement? On dit que les
policiers municipaux ont la même formation que ceux de la
Sûreté du Québec. On dit que, si le corps policier d'une
petite municipalité disparaît, à ce moment-là, c'est
la Sûreté du Québec qui assume la responsabilité.
S'il a la même formation, s'il a l'expérience du territoire, ne
pourrait-on pas imposer une obligation qu'il soit intégré pour
autant qu'il puisse accomplir les exigences normales de la tâche en
respectant les autres contraintes des ententes syndicales, avoir, par exemple,
un premier choix là et, ensuite, un premier choix dans d'autres
municipalités? S'il n'y a plus de corps policier dans une ville, on va
peut-être essayer de lui trouver une autre fonction. L'âge peut
être un critère. La formation peut être un critère.
Si ce sont de vieux policiers qui n'ont pas passé à l'Institut de
police, leur impose-t-on une période de recyclage? Il faudrait
peut-être préciser cela, sinon dans la loi, du moins dans une
réglementation qui s'y adjoindrait.
M. Bédard: Enfin, on n'avait pas prévu la
présence de la Sûreté du Québec, on avait
prévu la présence du ministère de la Justice; on
évaluera cela.
M. O'Bready: Oui.
M. Bédard: Vous avez souligné entre autres, je
pense à bon escient, le fait qu'il y avait une ambiguïté
entre l'article 115 de la Loi des cités et villes et l'article 55 de la
Loi de police. Est-ce que vous auriez une solution à proposer?
M. O'Bready: C'est l'éternel conflit, M. le ministre, mais
je pense qu'il va falloir, comme on dit, finir par prendre le taureau par les
cornes et trouver une solution. C'est une occasion perpétuelle
d'accrochages. Est-ce qu'il appartient au ministre de la Justice de
déterminer, à ce moment-là? Je n'ai pas de solution
immédiate à vous proposer, mais on pourrait certainement y
travailler. Je serais prêt à ce que l'Union des
municipalités travaille conjointement avec le ministère de la
Justice et les autres personnes concernées, pour trouver une solution
parce qu'il y a tout de même une contradiction flagrante.
M. Bédard: Cela va pour le moment. Si mes collègues
ont d'autres questions...
Le Président (M. Boucher): Merci, M. le ministre. M. le
député de Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: Seulement quelques remarques, M. le Président,
pour remercier, d'abord, l'Union des municipalités de son mémoire
et aussi du caractère de son mémoire qui est extrêmement
positif et qui, tout en reconnaissant la respon-
sabilité du gouvernement d'intervenir pour le maintien de
l'ordre, le fait dans l'orientation du respect des structures locales. Je
prends note, comme membre de cette commission, de plusieurs de vos suggestions
qui seraient de nature à rendre plus acceptable l'intervention de l'Etat
dans le processus d'application de vos propres responsabilités, des
responsabilités de vos membres, pour le maintien d'un service policier
adéquat.
J'aurais seulement quelques remarques. Je note ce n'est pas dans
votre mémoire, mais vous l'avez dit relativement à
l'article 19, je pense avoir compris, en tout cas, vous l'avez ajouté,
que vous n'êtes pas d'accord que cette intervention soit faite de
l'initiative de la Sûreté du Québec. Il s'agit, dans cet
article 19, du pouvoir de la Sûreté, du devoir, même, de sa
propre initiative, d'assumer l'ordre et de poursuivre une enquête, selon
le cas, lorsqu'un corps de police municipal n'a pas "les effectifs,
l'équipement ou l'expertise nécessaires." On en a parlé ce
matin, c'est un article, je pense, sur lequel le gouvernement ou la commission
parlementaire devra se pencher pour éviter des situations où la
Sûreté aurait le pouvoir d'intervenir de façon intempestive
en faisant elle-même son propre jugement à savoir que la
municipalité n'a pas fait son devoir.
C'est dans le même sens pour beaucoup de vos recommandations. Au
moins, il faut donner une chance à la municipalité, s'il y a une
lacune, de la corriger elle-même. C'est dans ce sens que, je pense, votre
mémoire est très positif, il est dans le sens du respect des
structures locales.
M. O'Bready: C'est un ajout important, parce que le
mémoire a été préparé assez rapidement.
J'insiste pour qu'à l'article 19 soit notée non seulement la
réserve, mais le refus des municipalités d'accepter que la
Sûreté puisse, de sa propre initiative, intervenir, que ce soit
à la demande du Procureur général, à la demande
d'une municipalité ou par des mécanismes qui seront à
préciser, mais je pense que de sa propre initiative... D'ailleurs,
partout dans le mémoire, vous l'avez noté, on exige ou on demande
tout de même le respect des autonomies locales.
On ne sait peut-être pas tous lire, mais je pense qu'on est tous
capables de comprendre. A ce moment-là, j'ai l'impression qu'on est
capables de prendre des décisions. Si on ne les prend pas, je pense
qu'il y a toujours les autorités super au-dessus de nous autres pour
rappeler aux petits élus municipaux quoi faire.
M. Lalonde: Dans les sections et les parties de ce projet de loi
qui concernent plus particulièrement les municipalités que vous
représentez, on retrouve à peu près à tous les
endroits la Commission de police, qui a beaucoup de pouvoirs un peu partout
dans le processus prévu par la loi. Vous n'avez pas fait de remarques
sur les pouvoirs de la Commission de police, pouvoirs quasi judiciaires par
rapport aux pouvoirs administratifs. Est-ce que vous avez des remarques
à faire là-dessus?
M. O'Bready: Non, il n'était pas du mandat des gens qui
ont rédigé le mémoire d'intervenir dans la
séparation ou, en tout cas, dans la distinction des pouvoirs quasi
judiciaires et des pouvoirs administratifs de la Commission de police,
comprenant fort bien que plusieurs autres organismes ou personnes qui se
présenteraient devant cette commission discuteraient certainement du
sujet. Nous serions toujours prêts à en discuter, mais, pour des
raisons de temps et de disponibilité de personnel, on n'a pas vraiment
eu le temps de pousser la question à fond. Alors, plutôt que de se
lancer dans un débat où on n'aurait pas eu des arguments vraiment
structurés à faire valoir, on a préféré
s'abstenir.
M. Lalonde: Alors, compte tenu de votre mandat et du
caractère très articulé de votre mémoire, je n'ai
pas d'autres questions. Je pense que votre message est passé et, comme
membres de la commission parlementaire, ce sera sûrement une source
d'inspiration lorsque l'étude de ce projet de loi ou d'un autre projet
de loi qui pourra suivre nous sera soumise. Je vous remercie.
Le Président (M. Boucher): Merci, M. le
député de Marguerite-Bourgeoys.
M. O'Bready: J'aimerais que le mémoire, avec les quelques
corrections que j'ai faites, soit inscrit au journal des Débats.
Le Président (M. Boucher): II sera inscrit au journal des
Débats.
M. Bédard: II sera reproduit intégralement, (voir
annexe C)
Le Président (M. Boucher): D'accord. M. Bédard:
Merci beaucoup.
Le Président (M. Boucher): En mon nom personnel et au nom
des membres de la commission, je vous remercie pour la présentation de
votre mémoire. J'invite immédiatement à la barre la Ligue
des droits et libertés représentée par M. Gordon Lefebvre.
Est-ce qu'il y a accord pour que...
M. Bédard: Est-ce qu'on pourrait avoir une minute...
Le Président (M. Boucher): ... on va poursuivre
après 18 heures?
M. Bédard: Est-ce qu'on pourrait suspendre pour une
minute?
Le Président (M. Boucher): Nous suspendons pour cinq
minutes.
Suspension de la séance à 17 h 43
Reprise de la séance à 17 h 47
Le Président (M. Boucher): A l'ordre, s'il vous
plaît! Alors, M. Lefebvre, si vous voulez présenter les gens qui
vous accompagnent. M. le député de Saint-Louis.
M. Blank: M. le Président, avant de commencer, j'ai lu le
mémoire des gens qui sont devant nous et je le trouve très
intéressant. Je pense qu'on passerait plusieurs minutes à en
discuter. Il ne nous reste que treize minutes avant six heures et je pense que
ça ne vaut pas la peine, avant six heures, de commencer. Pour la bonne
marche de notre travail, est-ce qu'on ne pourrait pas le faire à huit
heures? Je fais motion pour qu'on suspende la commission jusqu'à huit
heures.
M. Bédard: II n'y a pas d'objection.
M. Lalonde: Peut-être qu'on pourrait demander s'ils ont des
objections. Non?
M. Doré (Jean-André): Non. Nous sommes à la
disposition de la commission. On a été convoqué pour
aujourd'hui; alors, dans la mesure où vous pouvez nous assurer que vous
allez entendre notre mémoire à une heure donnée, on va se
présenter ici à l'heure qui vous conviendra.
M. Bédard: Même plus rapidement que cela avait
été prévu, parce que cela a déboulé.
M. Lalonde: Nous serons tout oreilles.
Le Président (M. Boucher): Alors, la commission suspend
ses travaux jusqu'à 20 heures.
M. Doré: Jusqu'à 20 heures? Merci. Suspension de la
séance à 17 h 48
Reprise de la séance à 20 h 18
Le Président (M. Boucher): A l'ordre, messieurs!
Lors de la suspension j'avais demandé à la Ligue des
droits et libertés de présenter son mémoire. J'inviterais
le représentant à y aller immédiatement.
Ligue des droits et libertés
M. Doré (Jean-André): M. le Président,
d'abord, j'ai peut-être deux remarques à faire. La
première, j'aimerais me présenter d'abord. Je m'appelle non pas
Gordon Lefebvre, qui est la personne qui a expédié le
mémoire à la commission, mais Jean-André Doré. Je
suis membre du conseil d'administration de la Ligue des droits et
libertés et le porte-parole sur le projet de loi no 48.
Rapidement, à la table, ici, Alain Arseneault, à ma
droite, membre du comité sur la brutalité policière
à la Ligue des droits et libertés; Jean-Claude Bernheim,
permanent à l'Office des droits des détenus. A ma gauche,
Christiane Sauvé, permanente au comité sur la
sécurité nationale et, à sa gauche, Pierre Doray il
n'y a pas de lien de parenté qui est, de son côté,
membre du comité sur la brutalité policière et
également membre du conseil d'administration.
D'autre part, je le souligne tout de suite, même si je ne fais pas
une lecture complète du document, j'en lirai quand même d'assez
larges extraits et, pour les fins du journal des Débats, on
préférerait, nous aussi, avoir le mémoire reproduit
intégralement.
Le Président (M. Boucher): D'accord! (Voir annexe D)
M. Doré: Alors, c'est établi au départ. Ce
n'est donc pas la première fois, et je ne pense pas que ce soit la
dernière, que la Ligue des droits et libertés intervient
auprès des pouvoirs publics au sujet des forces policières. De
par ses objectifs de défense, de vigilance, de reconnaissance et
d'élargissement des droits et liberté des citoyens, la ligue est
quotidiennement confrontée aux violations de plus en plus
fréquente de ces droits.
Mais ce que nous avons constaté, depuis quelques années,
a, lorsqu'on s'y arrête quelque peu, de quoi surprendre et surtout
inquiéter quiconque se soucie le moindrement de la qualité de la
vie. En effet, à la Ligue des droits et liberté nous assistons,
à ce qui nous semble une recrudescence remarquable de plaintes
concernant le comportement des policiers. Ceux-là même, qui, de
par leur fonction dans la société ont justement pour rôle
de garantir à chacun le libre exercice de ses droits. Signalons
également que depuis quelques années les budgets et les effectifs
des corps policiers se sont accrus de façon substantielle, accroissement
qui va de pair avec une sophistication de plus en plus poussée de
l'arsenal technique mis à la disposition des forces de l'ordre.
Ce phénomène grandissant posé par le comportement
des forces policières se traduit au niveau de l'organisation de la ligue
par trois comités de travail dont je vous ai présenté
l'essentiel des principaux artisans. Le dernier-né de ces comités
est le comité contre la brutalité policière et s'est
donné comme objectifs d'informer les citoyens de leurs droits lorsqu'ils
sont en relation avec des policiers, d'aider les victimes de brutalité
policière et, finalement, de contrecarrer ce type de pratique.
Depuis sa naissance, toute récente, en février 1979, ce
comité a déjà compilé 102 dossiers de citoyens et
de groupes qui se disent victimes de brutalité policière. Dans le
traitement de ces plaintes, le comité est fréquemment
entré en communication avec la Commission de police du Québec,
cela va se soi, ainsi qu'avec divers comités de discipline interne des
corps policiers.
De son côté, le comité sur la sécurité
nationale est né quelque temps après le début des travaux
de la commission Keable. Cette commis-
sion d'enquête que la ligue avait réclamée
dès 1972 à la suite des saccages des locaux de l'Agence de presse
libre du Québec, porte sur certains agissements illégaux ou
répréhensibles des services policiers de sécurité
en territoire québécois. Auparavant, la ligue s'était
prononcée plusieurs fois sur les violations des droits fondamentaux
engendrées par la doctrine dite de la sécurité nationale.
Mais devant l'avalanche des révélations
d'illégalités commises par cette police secrète et les
services de sécurité, la ligue a mis sur pied un comité
permanent pour approfondir cette question. Dans le cadre de cette
réflexion, la ligue a publié toute une série de documents
vulgarisés et d'analyses qui traitent de cette police secrète et
dont, d'ailleurs, je pense que le ministre de la Justice a
généralement reçu copie de ces documents. Le comité
a également été saisi de nombreuses plaintes de la part de
citoyens et d'associations, victimes de l'espionnage des services de
sécurité des corps policiers.
Enfin, depuis sa formation en 1972, l'Office des droits des
détenus a été confronté à une
quantité impressionnante de plaintes venant de la part
d'ex-détenus ou de détenus concernant le comportement violent de
certains policiers lors d'arrestations ou d'interrogatoires. Le fait même
que la Commission de police ait décidé d'enquêter sur les
conditions de détention dans les postes de police, prouve d'ailleurs
l'ampleur de ce problème.
La Ligue des droits et libertés a donc une connaissance sensible
et fort concrète des problèmes engendrés par le
comportement, trop souvent déviant, à notre point de vue, des
policiers au Québec. C'est à ce titre que nous sommes depuis
longtemps profondément insatisfaits par l'actuelle Loi de police et
encore plus par les amendements que l'actuel gouvernement se propose de faire
adopter.
Dans notre mémoire, nous analyserons, à l'aide d'exemples,
ce qu'est la violence policière et comment réagissent les
tribunaux et la Commission de police devant ce phénomène de plus
en plus inquiétant. Nous aborderons ensuite l'épineuse question
du port d'armes des policiers. Les aspects politiques du travail policier et
plus particulièrement les violations de droits fondamentaux
engendrées par les méthodes d'enquête et d'intervention des
services policiers de sécurité, seront traités dans un
deuxième temps. Enfin, nous étudierons le rôle et le
fonctionnement de la Commission de police ainsi que les importants pouvoirs qui
lui sont confiés par la Loi de police.
A la toute fin, vous trouverez, d'ailleurs, un résumé
succinct des principales recommandations que la ligue transmet à cette
commission relativement aux forces policières au Québec.
L'article 25 du Code criminel donne le droit à un agent de police
d'employer la "force nécessaire" pour procéder à
l'arrestation d'un citoyen. Mais cette "force nécessaire" dépasse
trop souvent l'entendement. Et trop souvent aussi, les policiers responsables
avec la bienveillante complaisance des tribunaux, bénéficient
d'une immunité quasi complète. Suivent une série de cas
que nous avons relatés parmi d'autres et qui, quant à nous,
tendent à laisser voir que le comportement policier, que ce soit dans le
cas de citoyens, de manifestations, de conflits de travail, se traduisent trop
souvent par des manifestations à caractère violent.
Le cas Bouchard-Bégin. Nous sommes à l'époque des
débrayages du Front commun 1975-1976. Le 8 avril 1976, un groupe de
syndiqués manifeste devant la salle d'urgence de l'hôpital
Notre-Dame. Le sergent Paul Lamoureux de la police de la CUM se détache
de son groupe et matraque, à l'aide de son bâton
réglementaire de trois pieds, Mlle Doris Bouchard, une des
grévistes. Elle s'affaisse. Une consoeur, Raymonde Bégin, lui
vient en aide. Le sergent Lamoureux matraque la seconde gréviste
à la jambe alors que celle-ci lui tourne le dos. Les preuves sont
éclatantes. Un photographe d'un quotidien de la Métropole a
croqué toute la scène.
Poursuivi, le sergent Lamoureux plaide coupable à des accusations
de voies de fait. Le 7 juin 1976, le juge Chaloux le libère sans
condition, invoquant ses 29 années de service dans la police et ses
antécédents judiciaires vierges.
Dans le cas Deschênes, il s'agit d'un étudiant à
l'UQUAM qui, le 14 décembre 1977, marche paisiblement dans la rue
Sainte-Catherine. Il est vêtu à la façon d'un motard,
c'est-à-dire, portant une veste de cuir. Un policier d'une patrouille de
la CUM l'interpelle et on cite au texte: "Hé toé, le sale, viens
icitte, embarque dans le char". Deschênes demande des justifications. Le
policier, tout en dégainant son arme à feu, lui lance: "Ne fais
pas un geste, suis-moi, sinon je tire". Les autres policiers arrivent sur les
lieux. On l'empoigne, on lui écrase un oeil, on lui sert la gorge, on
lui tire les testicules par en arrière. Le suspect
maîtrisé, on l'entraîne dans l'auto de patrouille; on prend
soin de lui frapper la tête sur le bord de la portière en
entrant.
Arrivé au poste 4, Deschênes constate que son linge est
déchiré, qu'il a perdu ses lunettes et ses gants. On continue
à le provoquer sous prétexte qu'il serait un motard et on le
place en cellule sans qu'il puisse communiquer avec son avocat. La police
logera par la suite des accusations d'avoir troublé la paix et de
résister à son arrestation contre le citoyen Deschênes. La
seule consolation sera de se faire dire par le juge Stalker: La preuve des deux
côtés était bien contradictoire, dit le juge, mais en
l'appréciant, je suis convaincu que, de fait, le défendeur criait
dans la rue d'une manière à troubler la paix, et je le trouve
coupable de ce chef. D'autre part, ayant vu le défendeur et entendu avec
la preuve additionnelle le fait des blessures qu'il a reçues ce
soir-là, je suis d'avis que les façons de procéder,
employées par les policiers en faisant l'arrestation, étaient du
moins discutables. Si le défendeur a résisté au constable
Saint-Jean, ce pourrait avoir été provoqué par les actions
des constables."
Luc Deschênes a demandé et finalement obtenu une
enquête de la Commission de police du Québec sur son cas. Le
jugement rendu dans cette
affaire exonérait de tout blâme les policiers
impliqués.
Je passe, évidemment, par-dessus le cas Charest simplement pour
rappeler que malgré l'exonération qui finalement a suivi le
jugement du coroner Stanislas Déry, la Commission de police s'est quand
même sentie obligée, suite à cette affaire, de mettre sur
pied une enquête sur les conditions de détention dans les postes
de police du Québec, enquête qui, à ma connaissance, se
poursuit actuellement.
Le cas Duff. Il s'agit, en l'occurrence, d'un individu qu'on
soupçonnait d'avoir trempé dans l'affaire de la Brink's en 1976
et qui a été gardé incomunicado pendant une trentaine
d'heures au quartier général de la police et forcément
victime de brutalité, sans que l'on puisse retracer ces
éléments de fait au moment de sa comparution. Et là, on
cite l'affaire des homosexuels à l'occasion de leur arrestation à
Montréal en 1977 au bar Truxx. On procède dans ce cas-là
à des arrestations au moment d'une descente dans ce bar, de toute
évidence, non fondée. Le lendemain, une manifestation est
organisée par ce groupe d'homosexuels pour protester contre le
harcèlement policier dont ils avaient été victimes. Les
forces de l'ordre interviennent et brutalisent de nombreux manifestants. Plus
de 140 d'entre eux sont incarcérés pendant une quinzaine
d'heures, soumis à des procédures humiliantes comme l'examen
médical forcé. Plusieurs seront accusés sous des chefs
d'accusation divers. D'ailleurs, je rappelle que cet incident a finalement
amené, à la suite de demandes en ce sens, le gouvernement
actuellement au pouvoir à présenter un amendement à la
Charte des droits et libertés, définissant que l'orientation
sexuelle était une cause de discrimination.
L'affaire "Battered Wives". Il s'agit, en l'occurrence, d'un groupe de
musiciens anglophones qui répondaient au nom provocant de femmes battues
"battered wives", donnant un spectacle au cinéma Saint-Denis devant
lequel des militantes féministes manifestaient. La police, encore une
fois, est intervenue. On donne ordre aux manifestantes de se disperser. La
charge policière est déclenchée. Plusieurs femmes sont
brutalisées et les inévitables accusations de troubler la paix
publique sont logées contre certaines citoyennes qui croyaient,
malgré elles, au droit de manifester.
Enfin, l'affaire des Haïtiens qui, je pense, est de
notoriété publique et qui a provoqué, jusqu'à
maintenant, une levée assez unanime de boucliers dans l'opinion publique
et qui se poursuit.
Un rappel en page 6 de l'affaire des enseignants du MTA. Il s'agit d'une
manifestation en 1976 d'enseignants anglophones devant le siège social
du PSBGM, qui avait donné lieu, encore une fois, à l'usage de la
matraque contre des manifestants qui utilisaient leur droit de manifester.
Enfin, l'affaire Santa Cabrini. Elle est intéressante à un
double point de vue, d'une part, parce que c'est une répétition,
bien sûr, d'incidents qu'on a déjà vus ailleurs, mais
surtout parce que, dans ce cas-là, il y a eu une enquête de la
Commission de police. Je pense qu'il est intéres- sant de regarder un
certain nombre des éléments que contient ce rapport de la
Commission de police à la suite de cet incident. Le 3 juin 1977,
l'escouade tactique du SPCUM brise une ligne de piquetage érigée
par des syndiqués de l'hôpital Santa Cabrini blessant de
nombreuses personnes. A la suite de ces incidents, la Fédération
des affaires sociales de la CSN porte plainte auprès de la Commission de
police contre la force excessive exercée ou employée par les
policiers. Une autre plainte fut, d'ailleurs, logée par un M. Leduc qui
rentrait chez lui ce matin-là et, bien que n'étant en rien
mêlé au conflit, avait été frappé par un
policier. (20 h 30)
Dans son jugement concernant la plainte de la CSN d'abord, la Commission
de police conclut que "les policiers ne sauraient être
blâmés de leur conduite." Tout en accordant encore une fois
l'absolution aux policiers, la Commission de police n'en est pas moins
forcée de constater: "L'emploi indispensable de la force par les
policiers a-t-elle donné lieu à des abus de leur part?" La
commission répond: "Définitivement, il y eut des blessés
chez les piqueteurs. Heureusement, ce n'est pas la majorité d'entre eux
qui furent éclopés et les blessures subies n'ont pas
été graves." J'imagine que la force utilisée par les
policiers est directement proportionnelle au nombre de blessés. Du
moins, c'est ce qu'il faut peut-être conclure de cet extrait, en page 45
du mémoire.
En page 47, on peut lire: "C'est avec un grand étonnement que
cette enquête c'est-à-dire la Commission de police
nous a révélé qu'immédiatement avant l'intervention
des policiers, certains d'entre eux avaient enlevé leur insigne." Ainsi
donc les commissaires s'étonnent de cette pratique pourtant connue et
régulièrement utilisée par les policiers lors de certaines
opérations et qui consiste soit à retirer leur insigne, soit
plus subtil encore à se l'échanger entre
confrères. Les policiers, impossibles à identifier bien
sûr, peuvent ainsi brutaliser des gens tout en étant à
couvert des responsabilités.
Il est également mis en preuve que les policiers n'ont pas agi
brutalement pour se défendre des piqueteurs. Là, on cite encore
le rapport de la commission, en page 41: "Rien, dans la preuve que nous avons
recueillie, nous permet de conclure que l'une ou l'autre des personnes formant
la principale ligne de piquetage se serait portée à des voies de
fait sur des policiers avant que la ligne ne soit ouverte. Egalement,
l'ensemble des piqueteurs ne posait aucun geste agressif à l'endroit des
policiers."
Le jugement relate également, en page 37, qu'un certain M.
Bisonnette aurait reçu des coups de pied alors qu'il gisait par terre et
qu'il avait perdu conscience. Est-ce là la force nécessaire
prévue à l'article 25 du Code criminel pour effectuer une
arrestation? D'autant plus que le M. Bissonnette en question n'a jamais
été arrêté. Malgré tout cela, les policiers
sont blanchis.
Ce jugement, quant à nous, est une insulte à
l'intelligence des citoyens. Il a d'ailleurs grandement contribué
à retirer, en bon nombre de
milieux, toute légitimité de la Commission de police comme
organe de contrôle démocratique des forces policières.
J'ajouterai qu'en ce qui concerne le citoyen Leduc qui avait logé une
plainte parallèlement à celle de la CSN, du moins au moment
où ces lignes ont été écrites à la fin de
juin, M. Leduc attendait toujours la décision de la Commission de police
relativement à son cas.
Enfin, le gazage des piqueteurs à la Commonwealth Plywood, je
pense que l'incident est maintenant largement connu depuis que la commission a
commencé à étudier ce cas qui se poursuivra, semble-t-il,
en septembre.
Que conclure de ces cas qu'on a, à toutes fins utiles,
glanés au hasard, mais qu'on aurait peut-être pu, quant à
nous, énumérer ad nauseam? D'une part, la brutalité
policière se manifeste en différentes occasions et de diverses
façons. Dans les cas mentionnés plus haut et qui sont loin de
constituer une liste exhaustive, il apparaît clairement que des policiers
ont abusé de leurs pouvoirs lors d'arrestations de citoyens,
d'interrogatoires de suspects, à l'occasion de manifestations pacifiques
et lors de conflits patron-ouvriers.
Du fait qu'ils bénéficient de la protection de la loi,
l'article 25 du Code criminel de la clémence des tribunaux
et de la bienveillante indulgence de la Commission de police du Québec,
les policiers sont, à toutes fins utiles, à couvert des
responsabilités. Ils peuvent ainsi impunément violer
l'intégrité physique des citoyens, droit pourtant fondamental et
reconnu dans la Charte des droits et libertés du Québec, les
priver de leurs droits judiciaires, entraver le libre exercice des droits
démocratiques, sans parler de l'intimidation psychologique tant de fois
utilisée par les policiers, méthode qui sape un autre principe
fondamental de notre droit criminel: la présomption d'innocence.
Mais il y a plus, quant à nous, relativement à cette
question de la violence policière. De 1970 à 1974, 44 personnes
ont été abattues par des policiers au Québec, ce qui place
le Québec en tête des provinces canadiennes pour ce type
d'incident ou de crime. L'an dernier, dans son analyse intitulée
"Violence et presse écrite", rendue publique en novembre 1978, l'Office
des droits des détenus de la Ligue des droits et libertés a
été amené à s'intéresser à une
catégorie bien spécifique d'actes violents: les guet-apens tendus
par des groupes policiers spécialisés contre des individus
soupçonnés de crime. "L'escadron de la mort au Québec ou
l'étrange phénomène des homicides légaux," qui
était le titre de l'article, retrace quelques-unes de ces fusillades
déclenchées en pleine rue par des fonctionnaires payés
à même les deniers publics.
Qu'un policier abatte un individu à corps défendant et
qu'il plaide légitime défense s'explique, mais qu'un groupe de
policiers hautement expérimentés, entraînés et
fortement armés procède à ce qui nous apparaît
être de véritables exécutions, qu'inlassablement ces
policiers plaident légitime défense, qu'ils soient toujours
absous, il y a de quoi s'inquiéter.
Le cas de l'assassinat d'Orazio Passinato, 18 ans, abattu le 26 octobre
1976 alors qu'il tentait de fuir à bord d'une auto volée est
très significatif quant à l'attitude des coroners en de pareilles
circonstances. Le coroner Roch Héroux exonéra de tout blâme
le policier Clément, du poste 22, et affirma: "Le jour où je
tiendrai un policier criminellement responsable selon les faits, il faudra que
je m'en aille".
L'exécution de John Slawvey illustre également le
phénomène. En rapport avec l'enquête sur le vol de la
Brink's au printemps 1976, le nom d'un certain John Slawvey apparaît sur
la liste des suspects. Le 15 mai, le sergent Savard, du SPCUM,
accompagné de quelques confrères haut gradés, est
embusqué au 2555 rue Benny, à Montréal. Selon la version
policière, le suspect tenta de s'emparer d'un révolver. Les
policiers qui l'entourent sont pourvus de fusils automatiques et de
mitraillettes. Une vingtaine de projectiles l'atteignent, tirés par
trois armes différentes. L'enquête du coroner a lieu le 13 juin
suivant. Le verdict du coroner Héroux est clair: "Le jour où l'on
n'aura plus de gens comme Slawvey, il n'y aura plus d'enquête du coroner
à faire." Détail intéressant révélé
par la presse: Slawvey était depuis longtemps suspecté de la mort
du policier Sabourin, survenue quelques années auparavant, et avait
même reçu des menaces de mort à cet effet.
On pourrait également citer le cas de Richard Blass qui, selon le
rapport d'autopsie, a été atteint de "25 à 27 balles de
mitraillettes". Les caméras de télévision avaient
été invitées à retransmettre à des millions
de téléspectateurs l'image de son cadavre troué de
balles... Malgré une recommandation en ce sens, jamais le
ministère de la Justice n'a enquêté sur ce
phénomène des homicides légaux ni fait d'études
exhaustives sur les jugements rendus par des coroners dans les affaires de ce
genre.
Maintenant, on aborde un autre aspect, toujours dans le même
secteur, celui des morts accidentelles. Se souvient-on entre autres, par
exemple, du jeune Vassard, 16 ans, abattu par un policier de
Sainte-Thérèse, policier nommé M. Goulet? Ou, plus
récemment encore, du jeune écolier de six ans, Rui Sa, abattu
lors d'une chasse à l'homme épique dans les rues de l'est de
Montréal? Celle-ci, rappelons-le s'était terminée par une
fusillade entre la police et un certain Denis Martel. Celui-ci, hors de la
prison à la suite d'une erreur technique, avait pris en main un minibus
scolaire plein d'enfants à la suite d'un vol de banque. Les policiers de
la CUM, sans hésiter, avaient pris en chasse le véhicule à
des vitesses folles dans les rues de Montréal, mettant en péril
la sécurité de bien des personnes.
Une enquête du coroner présidée par Me Maurice
Laniel, avait conclu, après une seule journée d'audience,
à une mort violente sans responsabilité criminelle. Dans un
compte rendu de cette enquête, le journal La Presse fait état des
critiques du chauffeur du minibus scolaire dans lequel le petit Rui Sa a
été abattu, M. Claude Chaput. Il estime qu'on n'a retenu que les
déposi-
tions des policiers dans cette affaire. "Je crois qu'on a ri du monde",
avait-il dit. Les parents des petits compagnons de Rui Sa ont également
déploré l'intervention de la police. Quant au suicide de Denis
Martel, le chauffeur de l'autobus n'y croit pas non plus. "Il y a trop de
contradictions dans les témoignages pour affirmer que Martel s'est
suicidé. Ce ne sont que des suppositions des experts en balistique?"
De tous ces cas, nous ne pouvons tirer qu'une conclusion. De la
brutalité policière "ordinaire" à l'exécution
sommaire de certains suspects, en passant par la mort "accidentelle" de
citoyens innocents, nous sommes en présence d'un même
phénomène, celui de la violence engendrée par des
policiers. Mais pourquoi cette violence est-elle à ce point
tolérée par la population?
Un policier, pour la majorité, c'est d'abord un fonctionnaire
muni d'une arme à feu. Et le maintien de l'ordre, c'est la
possibilité pour ses représentants d'arrêter, de blesser et
même de tuer les contrevenants.
Mais quiconque s'interroge sur les notions de droits
démocratiques ne peut que constater l'extrême nocivité
d'une telle perception. On peut tirer au moins trois constats négatifs
découlant de l'emploi d'armes à feu par les policiers.
Permièrement, les dispositifs légaux qui autorisent
l'agent de police à utiliser son arme à feu lors d'une
opération d'arrestation se limitent le plus souvent à
énoncer quelques principes généraux le concept
"force nécessaire" qui ne servent qu'à ouvrir la voie
à des interprétations larges et même contraires à
l'esprit des lois et au respect des droits.
Deuxièmement, l'impunité presque absolue du policier
impliqué dans ce genre d'incident contribue grandement, quant à
nous, à créer cet esprit de corps qui
dégénère souvent en une sorte de conscience d'être
"au-dessus de la loi".
Troisièmement, directement ou indirectement, la possession d'une
arme à feu, et surtout le pouvoir de l'utiliser, expliquent, pour une
très grande part, le phénomène de la violence
policière dans la société. Directement, ces armes causent
des lésions souvent mortelles à des citoyens. En dix ans, soit de
1965 à 1974, il y a eu 83 personnes tuées au Canada lors
d'actions policières dirigées contre elles, dont 44 au
Québec. A quoi sert-il d'abolir la peine capitale si les policiers en
arrivent à se faire justice eux-mêmes?
Indirectement, l'attitude du fonctionnaire muni de ce pouvoir sans
équivalent contribue à vicier les relations avec ses
concitoyens.
Compte tenu de ces constats négatifs, est-il si utopique que cela
de croire en une police efficace mais désarmée?
Une police démunie d'armes à feu n'est pas une utopie
puisque le précédent existe en Angleterre depuis cent cinquante
ans.
Le 19 juin 1829, le Parlement britannique adoptait son projet de loi sur
la police métropolitaine.
Pour Sir Robert Peel, alors secrétaire d'Etat, il était
impératif que les futurs services d'ordre répondent à une
double exigence.
D'une part, les nouveaux corps policiers devraient être au service
de la communauté. On était donc à mille lieues des polices
d'Etat de France et de Prusse notamment, dont la vocation était alors
strictement politique.
D'autre part, la police anglaise ne devrait en aucune façon
servir à des fins de châtiment.
Les fameux "bobbies" qui devaient voir le jour après l'adoption
de la loi sur la police métropolitaine n'étaient armés que
d'un simple bâton court. On avait retenu à ce sujet les
idées avancées par un certain Chadwick exposées en
commission parlementaire. Pour ce dernier, la police ne devrait aucunement
oeuvrer dans une perspective de châtiment. Et l'arme à feu est
destinée précisément à cet usage.
De plus, Chadwick soulignait que l'énorme pouvoir
discrétionnaire laissé au policier dans l'accomplissement de ses
tâches ne devait pas avoir un caractère irrémédiable
et usé. Une arme à feu pouvait nécessairement avoir de
telles conséquences. Comme le policier est souvent seul dans
l'accomplissement de ses tâches et vu l'aspect discrétionnaire de
ses décisions, la société anglaise jugea logique de ne lui
octroyer qu'un bâton court pour se défendre. Il y a aujourd'hui
100 000 "bobbies" en Grande-Bretagne. Certains sont munis d'armes à feu
pour des cas de protection de hauts dignitaires, de protection d'ambassade, de
poursuite de criminels particulièrement dangereux et, tout
récemment, de la protection des centrales nucléaires. Une fois
leur travail accompli, ces policiers remettent les armes à leurs
officiers supérieurs. D'ailleurs, fait intéressant à
noter, seulement 5% des policiers anglais reçoivent l'entraînement
requis pour l'emploi d'armes à feu.
L'objection qui surgit forcément spontanément relativement
à cet argument de l'armement ou du désarmement des policiers a
trait à l'auto-protection des policiers. Démuni de cet outil
jugé essentiel qu'est une arme à feu, le représentant de
l'ordre ne risque-t-il pas d'être une proie facile? Les statistiques
à ce sujet sont intéressantes. Il apparaît que les
policiers sont finalement mieux protégés s'ils sont
démunis d'armes à feu. De 1961 à 1975, 55 policiers ont
été tués au Canada dans l'exercice de leurs fonctions. On
peut se demander si le fait d'avoir une arme à feu a pu entraîner
cette conséquence malheureuse. Pour ce faire, la comparaison entre deux
pays dont les influences sur le Canada et le Québec sont nombreuses sur
bien des plans apporte des informations intéressantes. Les Etats-Unis
comptent environ 220 millions d'habitants. En 1969, leurs effectifs policiers
atteignaient près de 300 000 hommes tous fortement armés. De 1965
à 1974, 947 agents de police ont été tués aux
Etats-Unis. La Grande-Bretagne compte près de 60 millions d'habitants.
Durant la même période, 12 agents de police ont été
tués. En moyenne donc plus de 50 policiers américains sont
victimes d'assassinat, c'est-à-dire, plus en un an que durant 50 ans en
Grande-Bretagne pour les années 1910 à 1966.
Si on prend une grande ville américaine comme New York, par
exemple, où encore les policiers sont fortement armés, on
constate que
pour l'année 1970 seulement, les policiers ont employé
leurs armes à feu 600 fois, tuant 50 citoyens et en blessant 212 autres.
Du côté des forces de l'ordre, sept policiers tués et 242
blessés. Pour la même année, mais pour toute l'Angleterre,
il y eut un policier tué et aucune victime des forces de l'ordre.
Dans l'excellente étude de Suzanne Arcand à laquelle on
réfère en bas de page, on constate que sur 192 policiers
décédés de 1945 à 1969, six seulement l'ont
été pour une cause criminelle et, de ce nombre, cinq armes
à feu. Pour les années 1960-1969, pour les villes de
Montréal, Toronto et Vancouver, le nombre de ce type de
décès est respectivement de trois, deux et un. Pour le
Québec, maintenant, le nombre de décès imputables à
des causes criminelles de 1960 à 1969 totalise douze cas.
Peut-on logiquement défendre que des homicides de policiers ont
été évités du fait que ceux-ci transportent une
arme? Si l'on examine le nombre de personnes tuées lors de
confrontations avec les policiers, on constate que dans la très grande
majorité des cas, des personnes suspectes tentaient d'échapper
à leur capture en fuyant tout simplement. A ce sujet, le Comité
canadien de la réforme pénale et correctionnelle écrivait:
L'emploi d'armes à feu aux fins d'empêcher la fuite d'une personne
qui a commis une infraction met souvent en danger, non seulement la vie de la
personne qu'on cherche à appréhender, mais aussi celle
d'honnêtes citoyens.
Le comité canadien d'ajouter: "Nous croyons qu'il est
préférable, lorsqu'on ne peut empêcher la fuite sans
l'utilisation d'armes à feu, à moins que le crime ne soit un
crime grave comportant violence, d'abandonner temporairement la poursuite
plustôt que d'exposer la vie de citoyens innocents ou de risquer
l'exécution sommaire du criminel pour un crime mineur ou un crime non
entaché de violence".
Un autre type d'argument invoqué pour l'armement des policiers va
dans le sens qu'une telle protection pourrait empêcher des meurtres de
citoyens. Selon les chiffres de la Commission de réforme du droit, plus
de 70% des meurtres qui se commettent au Canada surviennent entre des personnes
qui se connaissent et la majorité de ces crimes ont des causes
passionnelles. On voit donc fort mal comment un policier patrouillant sur la
rue, même armé, pourrait empêcher de tels drames.
D'ailleurs, à notre connaissance, deux meurtres au Québec, celui
de Paolo Violi et d'un certain Allard à la fin des années
soixante se sont produits sous les yeux de policiers, donc, auraient pu
être empêchés, mais les policiers ne sont intervenus
qu'après le drame.
D'autres invoqueront que dans des crimes comme les vols de banque, les
policiers doivent être armés pour faire face à ces
criminels dangereux. Encore là, les statistiques démontrent que
c'est là la catégorie de vols violents qui fait le moins de
victimes sur le plan des pertes de vie des personnes volées. On fera
aussi allusion pour repousser le modèle anglais qu'il s'agit d'une
société différente de celle de l'Amérique du Nord,
et que notre tradition de violence, la circulation d'une quantité
importante d'armes à feu dans le public milite en faveur de forces de
l'ordre puissamment équipées. (20 h 45)
Sur le plan du contrôle des armes, il est intéressant de
noter qu'un contrôle particulièrement rigide ne s'est
effectué en Angleterre, une centaine d'années après que
les corps policiers non munis d'armes à feu aient été
constitués, c'est-à-dire dans les années 1920, et que ce
contrôle correspond à peu près à ce qui est en
vigueur actuellement au Canada.
La violence dans une société s'explique par d'autres
facteurs que la libre circulation des armes à feu. En Suisse, par
exemple, la liberté à ce chapitre est quasi absolue pour une
population à peu près équivalente à celle du
Québec. Les corps policiers ne tiennent aucune statistique sur les
homicides de policiers, parce qu'ils sont, à toutes fins utiles,
inexistants.
Nous croyons donc que tous ces facteurs plaident dans le sens d'un
désarmement, à tout le moins progressif, des policiers du
Québec. C'est la première des recommandations, suite à ce
chapitre sur la violence policière.
Dans le deuxième chapitre, que je peux peut-être tenter de
résumer à grands traits, on aborde un chapitre qui tente de
déterminer qu'à notre point de vue, la police, de façon
générale, par certains de ses rôles n'est pas, au sens
où on l'a dit souvent, une police neutre et qui est strictement conforme
à la légalité.
D'une part, à l'aide des exemples qui sont à l'appui, que
ce soit dans le cas de conflits ouvriers ou dans d'autres types
d'opérations analogues, mais particulièrement dans le cas de
conflits ouvriers, il se dégage très clairement à partir
des exemples qui sont là et d'autres exemples qu'on peut aligner, que de
façon systématique, les forces de l'ordre sont
généralement toujours du côté du patronat et
généralement contre la liberté d'exercice du droit de
piquetage et du droit de manifestation du côté syndical. Cela nous
apparaît être une constante qui se maintient à travers les
dernières années.
On cite à cet appui, l'exemple, bien sûr, de la
Commonwealth Plywood à Sainte-Thérèse. On cite l'exemple
des perquisitions à CJTR à Trois-Rivières. On parle de la
région de Sorel en page 5. On fait référence au conflit de
la Celanese, d'ailleurs, conflit intéressant, parce qu'en 1976, à
la Celanese, il y avait eu, lors d'une manifestation, l'utilisation de gaz
lacrymogène par les forces policières. A cette occasion, la
commission de police avait, de son propre chef, décidé
d'instituer une enquête sur l'usage des gaz dans le contexte de
manifestations et de conflits.
Or, depuis ce temps, il y a eu des incidences qu'on connaît
à Commonwealth Plywood. Jamais, à notre connaissance, les
recommandations ou les directives de la commission, suite à l'affaire de
la Celanese n'ont été connues ou publiées. Mais ce qui est
clair, c'est qu'à la Commonwealth, on a
refait l'usage des gaz et là, on assiste encore une fois,
à une nouvelle enquête de la commission, précisément
sur l'usage des gaz dans le contexte du conflit de la Commonwealth, qui
jusqu'à maintenant, du moins on verra évidemment à
la fin des audiences et des conclusions de la commission ne semble pas
avoir été justifié par la façon dont cette
manifestation s'est déroulée.
Dans un autre aspect du mémoire, en page 16, toujours dans ce
chapitre de la police politique, on parle, bien sûr, de ce que la ligue
a, évidemment, dans bon nombre de ses publications déjà
dénoncé, c'est-à-dire, les activités et les
services de sécurité. Il nous semble, en effet, grand temps que
les autorités politiques s'interrogent sur les pratiques de
renseignements et d'intervention des services des corps policiers au
Québec, particulièrement ceux de la GRC, de la
Sûreté du Québec et du Service de police de la
communauté urbaine.
Encore une fois, force nous est de constater l'absence totale de la
commission de police dans ce dossier. Quand on recoupe les renseignements qui
proviennent des commissions d'enquête Kea-ble et McDonald et ceux fournis
par de nombreux militants qui ont eu maille à partir avec cette police,
il en ressort à la fois un tableau saisissant et troublant des multiples
violations aux droits et libertés que sont les pratiques
policières en matière de sécurité.
Les commissions d'enquête, n'ont à date, que très
partiellement levé le voile sur les activités des services de
sécurité et c'est surtout la Gendarmerie royale du Canada qui fut
sur la sellette, celle qui, selon toute vraisemblance, n'est
contrôlée par personne. Le ministère de la Justice du
Québec n'a jamais rien su et ne sait pas encore exactement ce que fait
la GRC au Québec. Quand au gouvernement fédéral, il a
dû inventer une nouvelle théorie de l'irresponsabilité
ministérielle, en matière d'opérations policières,
pour tenter de surnager au-dessus des scandales.
Mais la portée très restreinte de l'enquête Keable,
à la fois quant à l'époque et aux événements
qui sont étudiés, est loin de signifier que la
Sûreté du Québec ou le SPCUM soient à l'abri des
illégalités et des pratiques douteuses. Au contraire, leur
étroite collaboration avec les services de sécurité de la
GRC tente plutôt à prouver le contraire.
Les commissions d'enquête nous ont appris que les gestes
reprochés aux policiers ne sont pas des gestes isolés, mais font
partie du modus operandi des escouades de sécurité. Ce mode
opérationnel est un véritable système répressif qui
nie des droits pourtant reconnus dans toutes les chartes de droits et confond,
quant à nous, systématiquement l'exercice du droit à la
dissidence avec la subversion.
Une espèce de culture organisationnelle propre aux services de
sécurité, avec leurs règles, leur comportement, leur
morale, s'est développée au cours des années grâce
au secret absolu qui entoure toujours leurs budgets, les effectifs, les
opérations et les méthodes des services de
sécurité. La grande compartimentation qui caractérise
l'organisation interne des services de sécurité, le roulement
effarant de ses agents, de même que la théorie du "need to know"
placent les policiers et leurs officiers supérieurs encore une fois
à couvert de responsabilité.
Si on résume brièvement en quoi consistent les principales
pratiques policières en cette matière, on peut à toutes
fins utiles les ramener à trois grandes catégories. Tout d'abord,
le renseignement qui est forcément la base de toute action
répressive de la police et des services de sécurité. Il
s'agit de savoir le maximum de choses sur le maximum de personnes, de groupes
et d'événements. C'est l'étape qui prépare les
étapes ultérieures que sont le fichage, l'analyse et, enfin, les
opérations offensives, qu'elles soient ouvertes ou clandestines. Les
policiers cumulent une quantité inimaginable de données tant sur
la vie privée que sur la vie professionnelle et militante des
citoyens.
La police secrète recueille et collige également une
quantité impressionnante de données sur les groupes d'opposition.
Cette catégorie, par ailleurs assez vaste, peut aller d'un comité
de citoyens, exemple, le Comité des locataires de Val Martin, à
un groupe d'extrême-gauche. Il n'y a pour ainsi dire jamais d'accusations
de logées devant les tribunaux contre ces citoyens ou groupes ainsi
espionnés par la police, mais cette surveillance indue suffit à
entourer leurs activités d'un caractère trouble, et cela, c'est
important, comme si lutter pour l'amélioration de ses conditions de
travail et de ses conditions de vie avait quelque chose de suspect et
d'illégal dans notre société. Des méthodes
clandestines servent à la cueillette de ces renseignements. Il s'agit
entre autres de l'interception de communications privées: écoute
électronique, téléphonique, viol du courrier et des
télégrammes, de la surveillance de locaux, de la photographie et
de la filature, de l'utilisation d'informateurs payés ou non au sein des
organisations, de l'entrée clandestine, du vol par effraction sans
parler d'autres activités de même genre. Une fois ces
renseignements recueillis, bien sûr, on les catalogue, on les analyse.
Généralement, des citoyens peuvent être fichés selon
leurs opinions politiques et ces renseignements circulent entre les corps
policiers du Québec et du Canada et même à
l'extérieur, grâce à des agences du type Interpol et
Intertel.
De ces dossiers, on tire souvent des listes noires et celles-ci ont
déjà condamné au chômage des personnes qui n'avaient
fait qu'exercer dans la légalité leur droit à la
dissidence. Il a été démontré, par exemple, que la
GRC et la Sûreté du Québec refilent des informations sur le
passé syndical ou politique à des employeurs, soit au moment de
l'embauche, soit pour faire congédier des employés. Le cas de
Reynald Michaud est à cet égard significatif. Bien que n'ayant
rien à voir avec le FLQ, il a été congédié
par la compagnie Sylvania, à la suite d'une visite d'un agent de la GRC.
Michaud avait refusé de devenir indicateur de police.
Lors des Jeux olympiques, des travailleurs de la construction ont
été privés de leur droit au
travail à cause toujours de ces fameuses listes noires. M.
Jacques Doyon, embauché par la RIO, la Régie des installations
olympiques, en 1975, a déclaré dans son témoignage devant
la Commission Malouf: "J'en ai discuté avec les policiers responsables
de la sécurité, MM. Toupin et Plouffe du SPCUM et j'ai eu
l'impression qu'ils se servaient de la liste pour punir les syndicats, pour les
casser." D'autres personnes ont été privées de travail
à la suite du filtrage "sécuritaire" de la police.
Rappelons que la Ligue des droits de l'homme avait obtenu de la
Commission des droits de la personne une enquête à la suite des
congédiements arbitraires de deux employés du COJO sur l'avis de
la Gendarmerie royale du Canada. La commission aurait voulu que la gendarmerie
soit tenue de produire les renseignements et les dossiers sur lesquels elle se
fondait pour donner un avis favorable au congédiement. Mais le
Solliciteur général du Canada avait produit à ce
moment-là un affidavit, invoquant la sécurité nationale.
C'était bien sûr une façon d'empêcher que des
personnes puissent jouir d'une défense pleine et entière, mais
c'était également la première fois qu'on utilisait les
affidavits en vertu de la Loi de la cour fédérale. Je pense que
le ministre de la Justice connaît la suite de l'utilisation de ces
affidavits.
Les renseignements servent enfin à planifier des
opérations policières de type offensif et ces opérations
peuvent être ouvertes ou clandestines. Et là, suit en bas de la
page 19 un certain nombre de ces utilisations qu'on peut faire à partir
des renseignements et de leur analyse. On cite à titre d'exemple
l'exploitation des faiblesses caractérielles, "character weaknesses", de
l'endettement, d'erreurs passées pour faire chanter, intimider ou encore
recruter des informateurs; le lancement de rumeurs, de faux documents pour
discréditer des personnes ou des groupes; l'utilisation de
données confidentielles pour détruire des réputations;
l'infiltration d'agents ou de policiers qui tentent par certains ou par tous
les moyens de semer la zizanie au sein des groupes et entre ceux-ci (la
technique de "m-fighting"); l'incitation à la violence ou à la
commission d'actes criminels, le recours à des agents provocateurs, des
techniques de "entrapment"; et enfin, l'incendie criminel, le vol de documents
ou d'explosifs pour accréditer une source dans le milieu ou plus
généralement l'existence d'une menace terroriste.
Face à l'ensemble de ces abus, la police "abrie" gentiment ses
pratiques sous le grand manteau de la prévention. Mais on ne peut pas
admettre dans une société démocratique que ce soit la
police qui décide quelles organisations ont le droit d'exister et
qu'elles sont celles qui doivent disparaître. On ne peut admettre non
plus que, sous prétexte de prévenir la criminalité, la
police commette des crimes (chantage, usage de faux, violence physique ou
morale, vols, incendies).
Laisser cette situation se perpétuer équivaut à
reconnaître qu'il existe deux catégories de citoyens: les
policiers et les autres. C'est aussi courir le risque que les policiers
deviennent plus dangereux pour la population et la démocratie que les
"subversifs" qu'ils pourchassent. Des correctifs en profondeur s'imposent donc,
mais par où commencer?
Nous croyons tout d'abord que les recherches et les enquêtes
doivent continuer sur les cas et les méthodes de subversion social et
politique utilisés par la police. Les services de
sécurité, tel qu'ils fonctionnent actuellement, devraient
être abolis. Leur mandat devrait exclure explicitement toute
activité non criminelle. On aura l'occasion de revenir sur cette
question, j'en suis sûr, au cours de certaines questions.
Tous les dossiers de citoyens et de groupes auxquels aucune
activité criminelle n'est reprochée devraient être
détruits. Un examen exhaustif doit être fait de toutes les
pratiques d'enquête et d'intervention de la police et en particulier de
celles des services de sécurité. Le pire n'est probablement pas
encore sorti de l'ombre. Par exemple, toute la question de l'utilisation par la
police d'informateurs doit être scrutée à la loupe. Ici, on
cite un texte de Jean-Claude Leclerc, en préface d'un livre, La police
secrète au Québec: "La police finance un vaste réseau de
mercenaires plus ou moins tarés dont les crimes sont tus en contrepartie
de divers services et qui peuvent ainsi en prendre plus large que les lois.
Leur présence clandestine dans les bureaux gouvernementaux et dans les
institutions et les entreprises permet à la police d'y exercer une
influence et, au besoin, une subversion permanente. Les tribunaux et maints
spécialistes tiennent les informateurs de police et la corruption qui
les débauche et les alimente comme un mal nécessaire à
l'administration de la justice. Le temps est maintenant venu de se demander si,
au contraire, ce n'est pas là un mal aussi inutile à la justice
véritable que dangereux dans toute société
prétendant reposer sur l'intégrité des moeurs et des
institutions. Le cancer social des informateurs tend à se
généraliser avec la systématisation qu'en font les
services de sécurité. De plus, chaque année, des millions
de dollars sont ainsi invertis dans l'achat de renseignements et de sources
sans qu'aucun contrôle de leur usage réel et de leur
efficacité ne soit dûment exercé".
Au secret qui continue d'entourer la police, il faudrait que le
gouvernement consacre, une fois pour toutes, par une loi d'accès
à l'information le caractère public des informations
gouvernementales et des dossiers de police. Pour, enfin, savoir quelle part des
fonds publics et quel usage en font les corps policiers et en particulier les
services de sécurité, il faudrait que soient rendus publics,
annuellement et de façon intelligible, les renseignements sur les
budgets, les effectifs, les affectations de ressources, les secteurs
d'intervention et les mandats des services de sécurité.
Enfin, les devoirs de la Sûreté du Québec et des
corps policiers municipaux devraient être précisés
davantage dans l'article 29 de la loi. Des directives plus claires devraient
être données aux policiers sur ce qu'ils peuvent ou ne peuvent pas
faire pour "maintenir la paix, l'ordre et la sécurité
publique, prévenir le crime et en rechercher les auteurs". Le
législateur devrait également aborder de front tous les
problèmes engendrés par le recours systématique aux
injonctions, eu égard au droit d'information et de pension que constitue
le piquetage, problème, bien sûr, qui ne relève pas
directement de la commission de la justice, mais dont le gouvernement a
été souventefois saisi. Il faut s'assurer que la police ne puisse
utiliser le prétexte de la violence appréhendée pour
mettre le mouvement ouvrier en liberté surveillée.
Abordons maintenant la question des preuves illégalement
obtenues. Bien sûr, cette question touche la Loi de la preuve du Canada.
La portée en est donc beaucoup plus vaste que la Loi de police du
Québec. Pourtant, l'admission de preuves illégalement obtenues
explique toutes les techniques d'interrogatoire exercées contre des
suspects ou des témoins importants. Il ne faut donc pas se surprendre
que, tant et aussi longtemps qu'un tel principe de droit se maintiendra, des
personnes, après leur arrestation, seront gardées incomunicado
dans les postes de police et, de ce fait, empêchées de communiquer
avec un avocat, interrogées, intimidées, menacées,
humiliées, frappées, battues avec des objets contondants,
menottées, attachées, dévêtues, gardées des
heures et des jours avec le minimum de nourriture et de sommeil dans certains
cas.
Les preuves obtenues illégalement devraient donc, comme aux
Etats-Unis, être déclarées inadmissibles devant les
tribunaux.
Le droit à l'objection de conscience pour les policiers devrait
être inscrit dans la Loi de police. Cette mesure serait susceptible,
croyons-nous, d'équilibrer la fameuse contrainte disciplinaire
invoquée par les policiers à qui on reproche des actes
illégaux ou illégitimes. Ces pratiques auraient pu être
évitées si un texte de loi protégeait les policiers suite
au refus de l'obéissance aveugle aux ordres venant de leurs
supérieurs.
Enfin, la Loi de police devrait également garantir aux policiers
le droit reconnu aux autres travailleurs de s'affilier à une centrale
syndicale. Un des facteurs déterminants du comportement répressif
des policiers vient, selon nous, du fossé qui existe entre les forces de
l'ordre et l'ensemble de la collectivité. L'esprit de corps, la
solidarité indéfectible face à toute critique, la vision
manichéenne de la société, l'intouchabilité de la
hiérarchie et de la discipline sont quelques unes des
caractéristiques de cette catégorie de citoyens porteurs
d'énormes pouvoirs. Leur rapprochement avec d'autres travailleurs nous
paraît être un des seuls moyens permettant de donner aux
interventions policières une perspective sociale. (21 heures)
Enfin, dans la dernière partie de notre mémoire, on aborde
concrètement quelques-uns des pouvoirs qui, quant à nous,
semblent contradictoires de la Commission de police. Rapidement, je peux
rappeler ce qui a déjà été dit devant la commission
ce matin et aujourd'hui, c'est-à-dire que la commission de par ses
pouvoirs d'enquête, les pouvoirs à caractère quasi
judiciaire, son pouvoir de réglementation, c'est-à-dire la
possibili- té de réglementer les multiples aspects et facettes du
fonctionnement d'un corps de police allant des conditions d'embauche jusqu'aux
règles d'éthique, de procédure et pratique quant à
la conduite de ses affaires, également des pouvoirs administratifs,
c'est-à-dire ceux de veiller, de conseiller les corps de police, de
faire des recherches en vue d'améliorer des méthodes et des
procédures de la police dans la suppression du crime etc., il nous
semble que ces pouvoirs portent en leurs germes, face à un organisme
auquel on a donné comme mandat principal d'être le grand
maître d'oeuvre des forces policières au Québec, des
pouvoirs qui sont contradictoires et qui peuvent inévitablement
entraîner, face à la multiplicité de ses rôles, le
fait que la Commission de police puisse se retrouver à la fois juge et
partie dans certaines de ses décisions.
En particulier, l'expérience que nous pouvons tirer, en page 25,
du fonctionnement de la commission est on ne peut plus concluante au chapitre
des plaintes des citoyens. L'exonération systématique de
policiers objets d'enquête démontre, quant à nous, de
façon éclatante qu'on ne peut demander à la fois à
un organisme chargé d'encadrer, de conseiller et de réglementer
la police de pouvoir en même temps jouir de l'objectivité, de
l'impartialité et du recul nécessaire à un examen critique
de la conduite de ceux qu'elle est appelée à diriger en dernier
ressort. Or, le projet de loi no 48 non seulement ne met pas fin à cette
situation, mais vient en fait renforcer le pouvoir d'enquête de la
commission. C'est pourquoi nous croyons qu'il faut retirer de la juridiction de
la Commission de police le pouvoir d'enquêter sur la conduite de tout
policier au Québec à la suite d'une plainte d'un citoyen, d'un
organisme ou une demande du lieutenant-gouverneur. Ce pouvoir d'enquête
devrait être confié soit à un organisme indépendant
de la Commission de police doté des pouvoirs nécessaires et sous
contrôle civil, ou encore à la Commission des droits de la
personne puisque les plaintes fondées constituent toujours ou presque
toujours des violations ou des atteintes à des droits et à des
libertés reconnus par la charte.
Quant à la CECO, la Ligue des droits et libertés a
déjà fait connaître au ministre de la Justice son
opposition au maintien et aux travaux de la CECO. Là, je fais
référence au mémoire que le ministre a reçu au mois
d'octobre 1978, mémoire d'une quarantaine de pages relativement à
cette question. De commission d'enquête temporaire, la Commission
d'enquête sur le crime organisé est devenue, avec le temps, un
véritable tribunal d'exception permanent. Sous le couvert de vouloir
mener une lutte au crime organisé, la CECO rend, pour ainsi dire,
caduques les lois normales régissant notre système judiciaire,
notamment au chapitre de la protection des droits des témoins qui sont
en fait traités comme de véritables accusés et cela, sans
parler de certaines tendances nettement xénophobes contre des groupes
ethniques, exemple les Italo-Canadiens, du sensationnalisme des auditions,
etc., sans parler non plus du traitement fait à certains
témoins.
La position de la Ligue des droits et libertés est claire et
connue à ce sujet: que ce soit pour le crime organisé, que ce
soit pour le terrorisme ou la subversion, rien quant à nous ne justifie
la tenue de telles enquêtes. Les policiers disposent déjà
de suffisamment de pouvoirs, de ressources et de moyens techniques pour mener
les enquêtes nécessaires et accumuler les preuves indispensables
pour ensuite loger les accusations qui s'imposent contre les individus et les
groupes soupçonnés d'activités criminelles. Le crime
organisé, le terrorisme et la subversion sont déjà
visés par le Code criminel canadien qui, par ailleurs, reconnaît
à tout accusé des droits que la CECO refuse à ses propres
témoins. C'est pourquoi nous réitérons notre demande de
voir disparaître la CECO de même que l'article 19 de la Loi de
police, de façon à retirer à la commission tout pouvoir
d'enquête sur le crime organisé, le terrorisme et la
subversion.
Quant à l'adoption d'un code de déontologie, et on termine
là-dessus, pour des policiers, cette mesure nous apparaît à
première vue comme une mesure, en principe, souhaitable. Nous disons en
principe, parce qu'en pratique nous savons qu'un tel code sert plus souvent de
paravent ou d'écran de fumée et ne constitue pas un moyen
adéquat de contrôle des forces de l'ordre. Comment peut-on
décemment soutenir que les policiers vont se soumettre à un code
de déontologie quand certains d'entre eux ont posé des actes
criminels (tels que l'ont révélé les commissions
d'enquête Keable et McDonald) et cela, sans jamais voir d'accusations
criminelles, portées contre eux pour des infractions importantes: faux,
usage de faux, menaces, voies de fait, rapt, séquestration, vol, vol
avec effraction, incendie pour ne mentionner que ceux-là. Certains des
policiers ayant autorisé la commission d'actes criminels ont même
été promus alors qu'ils auraient, quant à nous, dû
être démis de leurs fonctions ou, à tout le moins,
poursuivis comme n'importe quel autre citoyen. Par ailleurs, comment croire
à l'efficacité d'un code de déontologie pour les
policiers, surveillé et appliqué par des policiers. Les codes
n'ont de valeur que lorsqu'on les applique et, à cet effet, la
proposition du projet de loi no 48 ne comporte pas, quant à nous,
suffisamment de garanties.
Voilà, M. le Président, quelques-unes des
considérations que l'on a voulu livrer à cette commission
relativement à l'examen de la Loi de police. Bien sûr, si cela
déborde, dans certains cas, largement le cadre des réformes
proposées dans ce projet de loi, c'est à dessein qu'on a voulu
déborder c'est parce qu'il nous semble important de situer le
problème dans une perspective d'ensemble, dans une perspective
globale.
J'ajoute que, malheureusement, ce mémoire n'est peut-être
pas suffisamment fouillé. Quant à nous, on en est
profondément insatisfait et cela est, en partie, dû au
délai quand même assez court à l'intérieur duquel on
a dû fonctionner. Le projet de loi a été
déposé à la fin de juin et on a dû forcément
faire le travail à bout de bras pendant la période des vacances
pour tout le monde pour le présenter au début d'août. Mais,
quand même, on considère que, sur la base de l'expérience
concrète qu'on a pu avoir à travers les comités de travail
de la ligue, cela constitue quand même un point de départ
intéressant dans une discussion sur quelques-uns des problèmes
que suscite le comportement des forces policières au Québec.
Si vous avez des questions, messieurs les membres de la commission, on
est entièrement disposé à tenter d'y répondre.
Le Président (M. Boucher): Merci, M. Doré. M. le
ministre.
M. Bédard: M. le Président, je veux, tout d'abord
remercier la Ligue des droits et libertés de collaborer à nos
travaux. Je dois cependant vous dire, fermement et catégoriquement, que
je n'accepte pas comme étant nécessairement vraies la relation et
l'interprétation des faits et des jugements relatifs à des cas
particuliers contenus dans votre mémoire, faits que vous avancez comme
étant véridiques et prouvés. Je n'ai pas l'intention d'en
discuter. J'ai cependant des questions à vous poser sur certaines des
recommandations que vous faites et qui sont faites, comme vous le dites, en
ayant à l'esprit l'amélioration de la protection policière
de l'ensemble des citoyens du Québec, l'amélioration, aussi, du
fonctionnement de nos corps policiers.
Peut-être en commençant par la fin de votre mémoire,
je pense que nous avons tous la préoccupation que la meilleure
protection policière soit accordée aux citoyens et que les
policiers aient un comportement responsable vis-à-vis des citoyens.
C'est pour cela que, dans le projet de loi 48, nous avons des dispositions qui
feront en sorte q'un code de déontologie, tant pour les policiers de la
Sûreté du Québec que pour l'ensemble des policiers des
corps municipaux, soit édicté et puisse permettre une meilleure
évaluation de l'éthique policière face au citoyen.
Cependant, par rapport à cette disposition prévue dans le projet
de loi 48 que nous étudions, à la page 26 de votre mémoire
concernant l'établissement d'un code de déontologie, vous
émettez des doutes traduits dans le sens suivant. Je cite
l'avant-dernier paragraphe de la page 26: "Par ailleurs, comment croire
à l'efficacité d'un code de déontologie pour les policiers
surveillé et appliqué par des policiers?" Et vous demandez des
garanties additionnelles. Est-ce que vous pourriez expliciter ces garanties
additionnelles que vous pouvez avoir à l'esprit et qui seraient
importantes? Quand vous doutez de l'efficacité d'un code de
déontologie pour les policiers, surveillé et appliqué par
les policiers, est-ce que vous avez une idée précise? Sous
l'autorité de qui ce code de déontologie devrait-il être
appliqué?
M. Doré: Si on s'appuie sur un exemple connu, celui du
service de police de la Communauté urbaine de Montréal qui, je
pense, peut en tout cas servir ou risque de servir de modèle au code de
déontologie qu'on voudrait voir appliquer pour les gens de la
Sûreté du Québec et éven-
tuellement d'autres corps policiers, je pense qu'il est souhaitable, il
faut bien s'entendre là-dessus, en principe, que les policiers soient
munis d'un code de déontologie, d'un code d'éthique, et que ce
soit le même pour l'ensemble des policiers du Québec. Je pense
qu'il n'y a pas de doute dans notre esprit que c'est une mesure souhaitable, de
la même façon que c'est souhaitable, en principe, que l'on
je dirais améliore la formation policière, non pas sur le
plan paramilitaire ou sur le plan technique, mais sur le plan social, sur le
plan, par exemple, des garanties légales offertes aux citoyens, sur le
plan d'une meilleure connaissance des droits et libertés
conférés aux citoyens.
M. Bédard: Comme vous le dites, et je pense que vous le
dites à bon escient, le Code de déontologie ou quelque chose que
ce soit n'a de valeur que lorsqu'on l'applique et selon la manière dont
on l'applique...
M. Doré: Prenons l'exemple que je donnais tantôt, je
parlais du SPCUM. Dans le cas du SPCUM, voilà un Code de
déontologie qui fonctionne de la façon suivante: lorsqu'une
plainte d'un citoyen est logée, c'est à la charge d'un
comité composé de sept personnes d'examiner si la plainte "prima
facie" est fondée ou non fondée. Dans ce comité, il y a
quatre policiers, enfin quatre représentants du service de police de la
Communauté urbaine de Montréal et trois "citoyens". Je mets
"citoyens" entre guillemets parce que, dans le cas du SPCUM, c'est assez
particulier. Les citoyens en question étant M. Yves Ryan, qui est le
président du Conseil de la sécurité publique, M.
Décarie, qui est également membre du Conseil de la
sécurité publique et maire d'une municipalité de banlieue,
et M. Ouellet, qui est le concepteur du projet du Code de déontologie,
cela nous apparaît...
M. Bédard: Comme représentants du public.
M. Doré: Oui, c'est cela. De prime abord, cela nous
apparaît être des représentants du public qui sont
déjà un peu, à mon point de vue en tout cas, partie
liée. L'un est concepteur du projet, les deux autres sont directement
reliés à un organisme chargé de surveiller ou de
contrôler les forces policières sur le territoire. Par ailleurs,
ce qui est clair, c'est qu'il y a une majorité de membres du
comité qui sont des policiers. C'est un premier aspect. Il nous
apparaît que, dans ce cas, à tout le moins au niveau de l'examen
des plaintes, il faudra avoir le minimum de certitude du point de vue du public
que ces plaintes vont être examinées par un comité qui ne
sera pas contrôlé majoritairement par des policiers.
Deuxième élément, quant à l'enquête qui
précède, encore une fois, cette enquête est
généralement confiée à des policiers à
l'intérieur du corps de police, à certains policiers qui
s'occupent de faire les vérifications. Encore là, on n'a pas,
à notre point de vue, les garanties suffisantes, quant à la
protection des droits du public, que ces enquêtes vont se faire, disons
avec tout le recul nécessaire et l'impartialité voulue pour
reprendre certains des exemples que je vous donnais, des qualificatifs qu'on
donnait tantôt quant aux critères qui nous semblent importants
dans ce genre de truc. En ce sens, le projet de loi no 48 est, bien sûr
en fait, muet sur cet aspect. C'est un peu ce qu'on soulignait lorsqu'on
disait: Quant à nous, on veut bien qu'un Code de déontologie soit
en soi, en principe, une mesure valable, mais on voudrait avoir davantage de
garanties en pratique que ce code sera appliqué et qu'il ne sera pas
appliqué sous le contrôle et sous la surveillance uniquement de
policiers.
De ce point de vue, on attend de voir avant de se prononcer
définitivement. C'est sûr qu'en principe on est d'accord qu'il y
ait un Code de déontologie applicable à l'ensemble des forces
policières au Québec et que, le plus possible, ce Code de
déontologie, lorsqu'il sera appliqué, le soit d'une façon
publique. Là-dessus, je reviens sur des remarques qui ont
été faites précédemment par des gens qui sont
intervenus devant la commission et qui ont tenté, en tout cas, de
suggérer aux membres de la commission que, dans le cas de
problèmes à caractère disciplinaire ou de plaintes de
citoyens pouvant entraîner ce genre de réprimande, le tout devait
se dérouler à huis clos pour la protection du droit du principal
intéressé. Notre point de vue là-dessus est tout à
fait le contraire. D'ailleurs, l'Office des professions, même dans le cas
de professions qui actuellement fonctionnent, au niveau de leur comité
de surveillance, dans l'application de leur code d'éthique, de
façon fermée, tend de plus en plus à le faire de
façon ouverte et il n'est pas improbable que même des professions
comme la profession médicale ou la profession d'avocat puissent
éventuellement avoir de ces comités qui siègent
ouvertement. Je pense que c'est souhaitable qu'ils le soient, de la même
façon que dans le cas d'un travailleur congédié ou d'un
travailleur réprimandé, lorsqu'il vont en arbitrage, les
tribunaux d'arbitrage se tiennent publiquement.
Exceptionnellement, peut-on déclarer le huis clos, mais,
exceptionnellement. La règle est qu'il faut que justice soit rendue
publiquement. Il faut que ce soit une chose qui se fasse au grand jour. De ce
point de vue, c'est pour moi un autre principe important que doit sous-tendre
l'application d'un Code de déontologie, sans parler du code
lui-même évidemment.
M. Bédard: Vous ne considérez pas la
présence d'hommes politiques élus, comme dans le cas de la
Communauté urbaine, vous avez mentionné M. Ryan, vous ne partez
pas du principe que les hommes politiques élus sont commis au
départ en faveur des policiers ou en faveur d'une partie? (21 h 75)
M. Doré: Non, mais on aurait souhaité, d'une part,
que dans l'application des normes de ce comité, qu'ils soient
majoritaires, pour une part. Je pense qu'on n'est pas les seuls. Combien
d'observateurs me l'ont fair remarquer! D'autre part, on souhaiterait aussi que
les intérêts du public, au
sens large, soient peut-être, en tout cas... Prenons l'exemple du
SPCUM. Voilà deux représentants du conseil de la
sécurité publique chargés justement d'encadrer les forces
policières avec lesquelles, forcément, ils ont des contacts, avec
lesquelles, forcément, dans le quotidien, ils peuvent même avoir,
dans certains cas, des affinités.
On aurait souhaité que, s'il y en avait un, ce qui est normal,
une personne qui, normalement, a plus de pratique dans ses relations avec les
policiers, et que, pour le reste, on aurait peut-être pu choisir des
représentants qui soient autres que des gens du conseil de
sécurité publique. Je parle du cas du SPCUM. Je pense que,
là-dessus, un certain nombre d'observateurs, de journalistes et
éditorialistes je pense à Jean-Guy Dubuc, à la
Presse, par exemple ont souligné, au moment où ce cas de
déontologie a été rendu publique, cet aspect lacunaire
important au niveau procédural dans le fonctionnement de ce
comité.
M. Bédard: Dans bien des organismes, nous avons eu assez
régulièrement la préoccupation d'avoir des
représentants du public. Je pense à un organisme qui aura une
grande importance au niveau de l'administration de la justice au Québec,
au conseil de la magistrature où nous avons délégué
des représentants du public. Selon vous, ces représentants du
public devraient être nommés par qui?
M. Doré: Forcément, ils doivent être
nommés par les autorités politiques responsables, M. le ministre;
cela m'apparaît évident. Je ne vois comment on pourrait
procéder autrement. A la limite, au total, le principe de la
responsabilité ministérielle et de la responsabilité
politique demeurent dans notre système et je pense que,
là-dessus, ça m'apparaît évident que ce sont
forcément les gens qui ont à rendre compte de leurs
décisions qui doivent porter les responsabilités de ces choix.
Ils sont, d'ailleurs, les seules personnes désignées à le
faire.
M. Bédard: Sur un autre aspect de votre mémoire,
vous préconisez et recommandez qu'a-fin de contrer la violence
policière, on procède à un désarmement progressif
des policiers du Québec. Vous avez étayé une thèse
avec force argumentations. Vous vous référez au cas de
l'Angleterre qui est le seul cas, je pense. Est-ce que c'est le seul cas... vos
recherches...
M. Doré: A notre point de vue, dans les pays comparables
sur le plan industrialisé, je pense qu'effectivement, c'est le seul cas,
historiquement, d'une force de police qui est très majoritairement
désarmée, oui.
M. Bédard: Selon vous, par rapport à la
recommandation que vous avez faite, j'imagine que vous avez également
été mis en contact avec certaines réactions de la part du
public. Est-ce que vous pensez, dans l'état actuel des choses qu'il y a
un consensus dans ce sens, au niveau de la population?
M. Doré: Je pense que c'est évident
là-dessus, on ne se fait pas d'illusion qu'en avançant une
telle recommandation, on va à contre-courant. Là-dessus, je pense
qu'on est assez réaliste pour s'en rendre compte. On va à
contre-courant, mais on le fait précisément parce que le courant
actuel va dans le sens de l'armement de plus en plus grand des forces
policières. Nous nous posons la question: Jusqu'où doit aller
l'escalade? Il n'y a pas si longtemps, un policier était muni d'un
simple .38. Depuis quelque temps, on permet aux forces policières
d'avoir, dans leur automobile, des fusils bien connus, avec le calibre .12 dans
certains cas. La prochaine étape sera de remplacer les .38 par quoi? Par
des magnums? Ils font de meilleurs trous, de plus gros trous. Lorsqu'ils
blessent, c'est quoi?
La logique, après ça, c'est de remplacer les fusils par
quoi? Par des mitraillettes? Eventuellement, il faudra remplacer les autos de
police par quoi? par des chars antiémeutes? Là, vous allez dire:
Vous charriez, vous caricaturez. Je suis tout à fait d'accord avec vous.
Mais je dis: Actuellement, la politique et la conception que l'on se fait de
l'armement policier s'inscrivent dans cette logique et supposément parce
qu'en face des policiers, on a affaire, dans certains cas, à des gens
qui utilisent les mêmes armes.
Nous pensons que ce n'est pas vraiment la logique dans laquelle
ça doit s'inscrire, parce que, fondamentalement, un policier
armé, c'est un fonctionnaire payé par les deniers publics qui
est, à toutes fins utiles, distinct d'autres citoyens, dans ses
relations avec les citoyens.
Le rôle de la police, ce n'est pas un rôle répressif.
Le rôle de la police est, d'abord et avant tout, de permettre aux
citoyens d'exercer librement des droits qui leur sont par nos institutions,
droits d'ailleurs qui ont fait l'objet, dans bien des cas, de luttes longues,
qui ont pu prendre des siècles avant qu'ils puissent s'affirmer, des
droits auxquels tout le monde ici dans la salle est, j'imagine, sensible. Donc,
le ministre de la Justice va l'être au premier chef, en tant que
principal responsable de l'administration de la justice en territoire
québécois.
Nous disons: Quand on vous fait la recommandation du désarmement
des policiers à tout le moins progressif ce qu'on a
à l'esprit, c'est d'affirmer qu'il faut aller à contre-courant du
courant actuel, dans un premier temps. Dans un deuxième temps, c'est
qu'il y a des choses qui nous semblent évidentes.
Je ne vois pas pourquoi, quand je vais dans un poste de la
Sûreté du Québec simplement pour traiter d'une plainte ou
régler une contravention ou des problèmes à
caractère technique mon auto avait un phare qui ne fonctionnait
pas le bonhomme qui me sert, et ce, dans n'importe quel endroit du
Québec, doit être armé pour me parler. Je ne comprends
pas.
Je ne comprends pas que le policier chargé, par exemple, à
Montréal, des escouades de la jeunesse doive, sur le coin des rues,
lorsqu'il s'entretient avec des jeunes, porter son .38 bien en vue. Je ne
comprends pas.
Je ne comprends pas qu'on ne puisse pas élémentairement
pour ce type de policier commencer tout de suite à affirmer le principe
que l'idéal dans la police, ce n'est pas de convaincre le citoyen que la
police est forte parce qu'elle possède un fusil, mais que la police est
forte parce qu'elle est respectée des citoyens, parce qu'elle est
capable d'assurer que ces citoyens vont pouvoir exercer leurs droits. Cela
m'apparaît important. C'est plus qu'une question d'arme ou de
désarmement. C'est une question de la formation ou de la conception de
la police que l'on se fait et c'est pour cette raison qu'on pose le
problème sentant très bien qu'on est impopulaire.
J'entendais, à une question que vous avez posée cet
après-midi, si je ne me trompe pas, à un représentant du
syndicat, je ne suis pas sûr si c'est le Syndicat professionnel des
policiers, je pense que c'était le directeur de la police de
Saint-Hyacinthe à qui vous avez posé la question, je ne me
rappelle pas trop trop et qui disait...
M. Bédard: J'avais justement votre mémoire à
l'idée, lorsque j'ai posé la question et je pense que
c'était...
M. Doré: Oui, c'est cela. Vous anticipiez, je pense, une
certaine réaction. J'ai vu très bien votre question. Il disait:
II ne faudrait pas procéder trop vite. Il ne faudrait surtout pas
démoraliser les troupes. Enfin, là, je résume
peut-être mal sa pensée, mais je crois... Chose certaine, c'est
qu'il a employé le terme "démoraliser". Moi, cela
m'inquiète. Comme citoyen du Québec, cela m'inquiète qu'un
chef de police pense ainsi. Est-ce que si je comprends bien le
moral des troupes policières au Québec est directement
proportionnel aux armes qu'elles possèdent? Si c'est cela, la logique,
c'est dangereux, M. le ministre et c'est ce problème-là qu'on
pose. Et on pose le problème, parce que des cas comme Rui Sa, des cas
comme Vassard, il peut s'en produire d'autres, d'autant plus qu'on sait que les
policiers en matière d'armement ne sont pas de grands
spécialistes dans bien des cas. Je comprends qu'on puisse, à
l'intérieur d'un corps de police, avoir des groupes d'élite,
avoir des gens qui, dans ces situations difficiles, dans des cas où il y
a des crimes violents, puissent dans certains cas limites faire usage d'armes
lorsqu'il s'agit non pas seulement de protéger des biens, mais au
minimum de protéger des vies. Encore là, faudrait-il voir s'il
faut utiliser un magnum, s'il faut utiliser une arme à grande
portée ou s'il ne serait peut-être pas possible d'utiliser, par
exemple, des armes qui pourraient uniquement je donne cet exemple et je
le donne comme cela tranquilliser les individus ou simplement les
endormir.
On n'a jamais fait beaucoup de recherche de ce côté que je
sache au niveau technique, mais il me semble peut-être que plutôt
que de blesser ou de viser pour tuer, on pourrait peut-être simplement
viser pour tranquilliser ou paralyser temporairement un individu qui est
potentiellement dangereux et qui met la vie d'autres en danger. Mais je dis que
c'est dans ce sens qu'il faut que la réflexion aille, dans ce sens que
des organismes comme le ministère de la Justice ou la Commission de
police devraient se pencher, sans quoi le danger, c'est que l'escalade dans
laquelle on est embarqué nous mène inévitablement vers une
plus grande violence et vers des affrontements de plus en plus violents. De
cela, on n'en sort pas. On n'en sort pas aussi je finis là-dessus
c'est inévitable que des gens qui veulent s'approprier, par
exemple, illégalement des biens dans des cas de vol, forcément
s'ils sont en face des gens qui les attendent armés, ils vont
également aussi être armés et faire usage de leur arme. La
logique est implacable de ce point de vue là. Je comprends qu'on ne doit
pas attendre, on ne doit pas espérer de façon angélique
que tous les criminels se désarment, parce que la police va se
désarmer. Il ne s'agit pas de penser à cette chose-là,
mais ce qui est clair, c'est qu'il faut au minimum commencer à poser des
gestes politiques responsables pour en arriver à une
société et à un genre de police qui soit autre qu'une
police fondamentalement répressive. C'est cela le sens sous-jacent de la
recommandation qu'on formule.
M. Bédard: En parlant d'étude et de recherche que
devraient faire le ministère de la Justice et la Commission de police
que vous évoquez, de votre part, y a-t-il eu une recherche ou une
étude sociologique de la question par rapport à la
société québécoise?
M. Doré: Si, à notre connaissance, il existe...
M. Bédard: Non, vous-même. Y a-t-il eu par rapport
à ce que vous proposez... Avez-vous procédé à une
certaine étude de cette question, une étude sociologique
auprès de la population québécoise?
M. Doré: Non. Honnêtement, M. le ministre,
là-dessus, on n'a pas fait de recherche sociologique, pour reprendre
votre expression. Je dirais peut-être, de façon bassement
intéressée, que cela dépendra forcément aussi de
l'appui que le gouvernement pourra fournir à un organisme comme le
nôtre...
M. Bédard: Ah!
M. Doré:... sous forme de subvention pour en faire. On
n'est pas la Commission de police et on n'a pas les ressources forcément
dont le gouvernement peut disposer. Là-dessus, honnêtement, on
n'en a pas.
Jean-Claude, veux-tu ajouter quelque chose? Jean-Claude Bernheim
pourrait peut-être compléter.
M. Bernheim (Jean-Claude): J'aimerais ajouter un point sur lequel
vous avez parlé à propos de l'opinion publique ou du courant
actuel. Si on compare avec la question de la peine de mort, on voit que le
gouvernement fédéral a aboli la peine
de mort, même face à l'opinion publique qui est pour la
peine de mort. Il y a un élément dans cela qui semble ne pas
avoir été exploité par le gouvernement, c'est
l'information. Le gouvernement possède beaucoup d'études
très approfondies par rapport à la peine de mort, qui
démontrent que la peine de mort n'est absolument pas dissuasive, mais il
n'y a aucune information qui a été entreprise de la part du
gouvernement.
Dans le cas du désarmement, c'est la même chose. Une telle
prise de position va sûrement aller à rencontre de l'opinion
publique. Quand le gouvernement veut adopter des projets, peu importent
lesquels, il y met le paquet au point de vue financier pour informer les gens,
mais quand il s'agit de mesures progressistes, on s'aperçoit qu'il y a
peu de fonds alloués pour informer les gens. L'exemple de l'Angleterre,
les chiffres qu'on a cités et les chiffres qui sont suffisamment connus
au niveau des statistiques par rapport au nombre de personnes qui sont
tuées lors de délits, démontrent que le désarmement
abaisserait la violence. Je pense que, si le gouvernement avait une
volonté politique d'aller dans ce sens, il pourrait très
rapidement faire une étude, rendre cette étude publique et
informer les gens de façon très approfondie et très
intensive sur cette question. Je pense qu'une fois informé
convenablement le public l'accepterait. Le public veut être
protégé, il a le droit d'être protégé, mais
il a aussi le droit d'être informé. Je pense que, de de
côté-là, il y a beaucoup de carences.
M. Bédard: Je voudrais poser deux autres questions, parce
que je sais que beaucoup d'autres questions pourront être posées
par mes collègues de la commission. Entre autres, vous dites dans vos
recommandations que "Le législateur devrait clarifier la question du
droit d'information et de pression que constitue le piquetage, eu égard
au recours systématique par les employeurs aux injonctions." Est-ce que
vous pourriez préciser votre pensée de ce
côté-là?
M. Doré: Je pense qu'on fait écho, par cette
recommandation, à des critiques qui ont souven-tefois été
formulées. D'ailleurs, le ministre du Travail du gouvernement dont vous
faites partie a laissé entendre que, éventuellement, son
ministère interviendrait pour tenter de clarifier cela. Essentiellement,
dans notre droit, que ce soit dans le droit criminel canadien ou dans la
jurisprudence en matière de travail, toute cette question du droit au
piquetage comme droit de syndiqués à informer le public de
l'existence d'un conflit et, forcément, sur quoi porte ce conflit, et
aussi de l'efficacité du piquetage comme moyen de pression
économique est inévitablement sapée lorsque l'employeur
peut, au pied levé, invoquant des motifs d'urgence dans le contexte d'un
conflit de travail, obtenir une injonction qui non seulement limite dans
certains cas, mais, à toutes fins utiles, rend inefficace le recours
à la grève comme moyen de pression, à toutes fins utiles,
aussi, limite le piquetage d'une façon telle que ce droit d'informer le
public de l'existence d'un conflit cesse. Et les policiers se retrouvent
inévitablement pris. Là-dessus, je pense que bon nombre
d'associations de policiers je pense en particulier, ici, à la
fraternité de la CUM ont déjà largement
décrié cette situation à laquelle les forces de l'ordre se
trouvent confrontées, c'est-à-dire qu'en présence d'une
injonction elles doivent forcément non seulement la faire respecter,
mais la faire appliquer. Cela donne inévitablement lieu à des
échauffourées, à des échanges au niveau d'une ligne
de piquetage et à des cas de brutalité dans certains cas, de
résistance, d'arrestations et de condamnations.
Nous, on dit par rapport à ce problème: Essayons donc, une
fois pour toutes, de le regarder en face. Les injonctions dans le contexte des
conflits de travail ne sont pas la solution pour régler ces
problèmes et, tant que le gouvernement ne mettra pas un terme à
cette situation, il est inévitable que les policiers vont se retrouver
poignés, au sens volontaire du terme, coïncés entre, d'une
part, un ordre du tribunal et, d'autre part, la possibilité pour des
travailleurs d'exercer un droit qui leur est pour autant reconnu par le Code du
travail. Les policiers, bien sûr, disent: Nous, on est
coïncés, on n'a pas le choix, on est obligés de la faire
appliquer et cela les place, dans bien des cas, dans des situations absolument
intenables. Nous, on dit, là-dessus, qu'il est important que cette
question soit clarifiée de façon à éviter ce qu'on
a décrit très fréquemment comme étant des
échauffourées, dans certains cas, de la brutalité
policière qui existe à l'occasion de conflits de travail. (21 h
30)
M. Bédard: Est-ce que cette recommandation ne rejoint pas
presque textuellement une recommandation faite par les commissaires de la
Commission de police dans l'enquête Santa Cabrini?
M. Doré: En partie, je dirais que oui. Il en a
été question. Si vous faites référence au jugement
Santa Cabrini, je pense que les commissaires ont effectivement noté
cette question, sauf que, évidemment, le jugement Santa Cabrini date de
1978 et on attend toujours forcément la décision. C'est pour cela
qu'on la remet comme recommandation parce que, même si elle ne
relève pas, comme je le disais tantôt on en est conscient
de votre commission, je pense qu'elle a quand même des incidences
policières, cette question.
M. Bédard: Deux petites questions rapides. Quand vous
faites la recommandation que la GRC soit au même titre que les autres
corps policiers oeuvrant au Québec, qu'elle soit soumise aux
contrôles de la Commission de police et du ministère de la
Justice, comment régiez-vous le problème constitutionnel?
M. Doré: Cela, on vous le laisse. Non,
sérieusement, essentiellement, ce qu'on dit là-dessus, je pense
que c'est clair. Nous considérons que, si le ministre de la Justice a la
responsabilité de voir, sur le territoire du Québec, à
l'administration de la
justice, forcément, cela implique le contrôle des actions,
des gestes posés par la police et de ce point de vue-là, je crois
que l'intention du ministre manifestée dans le projet de loi no 48
était, par le biais des agents de la paix, d'essayer d'avoir un
contrôle du moins sur les agissements possibles de la GRC.
Là-dessus, nous espérons que ce problème constitutionnel
va se régler, je pense que c'est un problème politique du
gouvernement. Ce qui est clair, c'est que comme organisme confronté
à la police, on préfère avoir un interlocuteur en
matière policière plutôt que deux et, dans ce
cas-là, on préfère avoir le ministre de la Justice du
Québec plutôt que le Solliciteur général à
Ottawa.
M. Bédard: Une dernière question. Vous recommandez
que le pouvoir d'enquête sur la conduite des policiers devrait être
retiré de la juridiction de la Commission de police et confié
à un organisme indépendant ou à la Commission des droits
de la personne. Je vous demanderais tout simplement: Avez-vous une idée
précise quand vous parlez d'organisme indépendant, la Commission
des droits de la personne, on sait à quoi on se réfère, et
peut-être plus précisément m'expliquer en quoi, dans votre
optique, la Commission de police est un organisme moins indépendant que
la Commission des droits de la personne.
M. Doré: Essentiellement, d'une part, la Commission des
droits de la personne, c'est un organisme majoritairement civil et uniquement
civil, composé de gens qui ont d'abord pour tâche de voir au
respect de la Charte des droits et libertés de la personne, dont les
enquêteurs aussi ne sont liés d'aucune façon à un
corps de police et qui nous semblent avoir l'impartialité, le recul et
l'objectivité nécessaires à l'examen d'une plainte.
Dans le cas de la Commission de police, ce que l'on constate, à
la fois à cause de cette espèce de rôle tricéphale
qui est celui de la Commission de police, de réglementation,
d'administration et quasi judiciaire, on l'a mentionné, à la fois
aussi à cause de la lourdeur et l'extrême lenteur des
décisions de la commission depuis le moment où les plaintes sont
logées, à la fois à cause du fait que, dans le cas de la
Commission de police, bon nombre des plaintes sont d'abord traitées par
des enquêteurs de la commission qui sont trop souvent, à notre
point de vue, des gens qui sont liés, soit des policiers ou
d'ex-policiers, à des corps policiers et à la fois aussi parce
que la commission, comme organisme, n'a pas le choix d'être bien vue des
forces policières puisqu'elle doit les conseiller, les visiter, les
rencontrer, cela place la commission dans une situation où elle n'est
pas en mesure de faire, à notre point de vue, un examen objectif et
valable des plaintes qui sont formulées par les citoyens.
En ce sens-là, on a davantage confiance... Quand on parle d'une
commission indépendante sous contrôle démocratique, on
pourrait penser à une commission créée
spécifiquement pour les fins de l'analyse de ces plaintes qui pourrait
être sous contrôle, comme la Commission des droits de la personne,
de l'Assemblée nationale. De ce point de vue là, cela pourrait
être un hypothèse. On n'a pas fouillé cela. Ce qui est
clair, c'est que la Commission de police, sur la base des décisions
qu'on a pu examiner et de la performance qu'on a pu examiner au cours des
dernières années, ne nous apparaît pas être
l'organisme approprié. Elle n'a pas, je dirais, la
crédibilité et, quant à nous, elle n'a plus la
légitimité nécessaire pour faire l'examen impartial de ces
plaintes. C'est le point de vue que l'on vous transmet et je dirais qu'il est
largement partagé par bon nombre d'organismes dans le milieu.
J'ajouterai un dernier élément. Il semblerait important,
lorsqu'on examinera cette question, aussi de bien cerner le rôle que peut
avoir la commission dans l'enquête. Ce qui est clair actuellement, c'est
que la commission, je veux dire que ce sont les procureurs de la Commission de
police qui font l'enquête, qui convoquent les témoins. Dans
certains cas, bien sûr, ils peuvent, à la demande du plaignant, en
convoquer un certain nombre, mais, de notre point de vue, il faudrait que les
règles soient plus souples et permettent davantage de fouiller des
questions que celles strictement réservées au seul procureur de
la commission, la gouverne et la façon de mener l'enquête, d'une
part.
D'autre part, j'ajoute, en terminant, les recommandations du projet de
loi 48 relativement à la protection des droits des témoins dans
le cas des commissions d'enquête. On a fait état et je
reviens là-dessus parce que je trouve cela bien important quant
à nous, dans une de nos recommandations, de l'abolition de l'article 19
et de la Commission d'enquête sur le crime organisé. J'inviterais
sérieusement le ministre de la Justice à relire le document qu'on
vous a présenté en octobre 1978 et peut-être d'en saisir
les membres de la commission, s'il y en a qui n'en ont pas eu copie. Je ne me
rappelle pas à l'époque si, par exemple, l'Opposition officielle
a eu ce document-là. Je sais qu'au ministre de la Justice, on le lui a
adressé nommément. J'inviterais fortement les membres de la
commission à relire ce document et à réexaminer cette
question de la Commission d'enquête sur le crime organisé et des
pouvoirs conférés en vertu de l'article 19.
Ce qu'on vous dit, c'est que ce n'est pas le fait d'ajouter, à
notre point de vue, des amendements permettant à des témoins,
éventuellement cités dans des commissions d'enquête, de
pouvoir à leur tour venir expliquer certaines situations,
con-tre-interroger, par le biais de leurs avocats, certains témoins ou
encore appeler de nouveaux témoins. Que ces règles, qui sont des
règles qu'on a déjà vu élaborées par le
commissaire Keable dans le cadre de sa propre enquête et qui nous
semblent intéressantes, cela ne devrait pas devenir un amendement de la
loi de la Commision de police, cela devrait devenir un amendement de la Loi sur
les commissions d'enquête. Il faudrait que la Loi sur les commissions
d'enquête soit amendée, de façon que ces directives et ces
règles de fonc-
tionnement soient à l'intérieur de la Loi sur les
commissions d'enquête parce que, de notre point de vue et je
reviens là-dessus pour terminer sur cette question les seules
commissions d'enquête que l'on puisse accepter comme organisation
préoccupée par des questions de droits démocratiques et de
droits et libertés sont des commissions d'enquête qui portent, par
exemple, sur les forces policières ou l'usage de fonds publics,
c'est-à-dire des questions qui font qu'on doit, à cause du
caractère secret de certaines opérations ou à cause du
fait qu'on a affaire à des fonds publics... Je pense, par exemple,
à la Commission d'enquête sur le coût des installations
olympiques. Je pense que, dans ces cas-là, le recours à une
commission d'enquête est le seul moyen dont on dispose pour
peut-être faire la lumière pleine et entière sur une
situation.
Encore là, il faut que ces règles que vous avez dans le
projet de loi 48 soient dans la Loi sur les commissions d'enquête, de
façon que tout commissaire nommé en vertu de la Loi des
commissions d'enquête soit tenu de respecter ces règles-là
et de garantir à chaque témoin, y compris les policiers, y
compris les fonctionnaires, les ministres éventuellement, ou les maires
des municipalités cités devant les commissions d'enquête,
de jouir de ces droits. Mais ce qu'on dit, c'est que, quand il s'agit de
citoyens, quand il s'agit de crimes, ou quand il s'agit du crime
organisé, ou quand il s'agit de la subversion, ou quand il s'agit de...
Je comprends qu'on n'a jamais fait d'enquête encore là-dessus,
mais la loi permet d'en faire. Quand il s'agit de ces questions, nous, on dit
que le Code criminel contient toutes les dispositions et tous les crimes y sont
à peu près prévus. Si la police, dans le cadre de son
travail d'enquête, relève des preuves sur des individus qu'elle
soupçonne de poser des gestes criminels, d'être sur le point d'en
poser, d'être acoquinés avec du monde qui en pose, à ce
moment-là, qu'elle utilise les processus judiciaires normaux, qu'elle
loge des accusations de façon que le citoyen, une fois accusé,
puisse jouir de tous ses droits en tant qu'accusé, y compris le principe
de la présomption d'innocence, et laisser le cours normal de la justice
se faire. Le recours à des commissions d'enquête dans ces
cas-là, à notre point de vue, est extrêmement dangereux, je
pense à l'exemple de la CECO et je reviens, encore une fois, sur ce
document auquel je fais référence. Si vous voulez, je peux en
transmettre des copies à la commission. Le recours à des
commissions d'enquête nous apparaît une forme de justice
d'exception qui s'installe et est extrêmement nocive.
Je pense que le ministre de la Justice, à ce point de vue
là, devrait être sensible à cet argument.
M. Bédard: M. le Président, je n'ai pas d'autres
questions.
Le Président (M. Boucher): D'accord. M. le
député de Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: M. le Président, je voudrais remercier d'abord
la Ligue des droits et libertés d'avoir présenté ce
mémoire choc, à contre-courant, dans lequel je perçois un
certain nombre d'éléments forts légitimes et qui
supportent, en fait, des objectifs qui sont poursuivis par votre organisme,
mais qui, à plusieurs égards, souffrent d'un manque de rigueur
dans la preuve de ce que vous avancez.
Malheureusement, ce manque de rigueur peut affecter la
crédibilité d'une présentation comme celle que vous venez
de faire. Si on mesure son efficacité en fonction de l'audace,
naturellement, on peut passer un bon moment. Je pense que cela pourrait,
malheureusement, parce qu'il y a beaucoup d'éléments, à
mon sens, qui sont très légitimes, très vrais au fond et
qui perdent justement de leur efficacité par le ton un peu de panache de
votre mémoire. J'espère que vous prendrez ces quelques remarques,
très modestement dites, à bon escient, mais je pense que c'est
important parce que la Ligue des droits et libertés qui existe quand
même depuis un bon nombre d'années vous êtes les
héritiers de quelques vieillards actuellement qui sont rendus dans
d'autres domaines a peut-être vu une bonne partie de son champ
d'action occupée par la Commission des droits et libertés de la
personne et d'autres organismes semblables depuis quelques années, mais
elle a encore, je suis convaincu, un rôle à jouer et elle doit
conserver sa crédibilité.
Il manque en particulier dans votre mémoire une description
peut-être aussi éloquente, en utilisant justement
l'éloquence que vous avez, dont vous avez fait preuve dans votre
mémoire, de la fonction difficile de police dans une
société qui se veut libre. Le policier, en lisant votre
mémoire, devrait être en prison de façon
générale. Non, mais tous ou presque. Ce sont des subversifs, ils
sont... c'est épouvantable. Cela, je le reproche à votre
organisme, qui doit quand même représenter quelque chose, d'avoir
présenté seulement un côté de la médaille.
C'était peut-être tactiquement habile de votre part.
Peut-être que vous vouliez choquer. A ce moment, vous allez recueillir
les résultats de votre choix. Mais, je ne veux pas non plus faire du
mélo là-dessus. Ce n'est pas facile d'être policier dans
une société qui se veut libre, c'est-à-dire, qui est
assujettie constamment aux critiques, qui est assujettie à un tas
d'organismes et de lois. C'est beaucoup plus facile d'être policier dans
une société à caractère totalitaire. Dans une
société, comme peu de sociétés existent encore en
ce bas monde, comme celle que nous voulons conserver, il faut aussi
reconnaître que la fonction de police est extrêmement difficile. Il
me semble que cet aspect manque dans votre mémoire.
C'est la même chose un peu pour la CECO que vous condamnez de
façon assez allègre et qui s'est vue quasiment faire oeuvre de
pionnier contre une forme de criminalité qui affectait, je pense, d'une
façon aussi épouvantable que ce que vous décrivez de
certains phénomènes policiers, des droits individuels de petites
gens qui étaient sans
défense et que, très péniblement et en faisant un
tas d'erreurs, les balbutiements de la CECO, en commençant par la
première, à venir jusqu'à maintenant, ont réussi
à mettre en lumière. (21 h 45)
Alors, votre condamnation de la CECO est un peu courte. Oui, il y a eu
des erreurs. Il y a eu des excès et, si c'était à
recommencer aujourd'hui, naturellement, on n'agirait peut-être pas de la
même façon; je suis convaincu que le ministre prendra la
leçon de l'expérience pour prendre des décisions, à
savoir, d'abord, si ça doit continuer et, deuxièmement, de quelle
façon. On a eu des délibérations ici il y a quelques
années là-dessus et je suis convaincu que les élus du
peuple qui sont actuellement à la gouverne de l'Etat sont fort
conscients de tous les paramètres, de toutes les contraintes, à
la fois pour protéger les droits individuels des témoins et aussi
pour voir à ce que la lutte contre cette forme de criminalité
extrêmement pernicieuse permette de libérer aussi des gens dont
les droits individuels sont systématiquement mis en échec par
cette forme de criminalité.
Je voudrais quand même peut-être revoir avec vous certains
cas que vous mentionnez: l'affaire Battered wives. J'en suis convaincu autour
de la table ici, à la lecture de votre mémoire, que chacun de
nous a pu reconnaître que vous avez raison dans beaucoup de
présentations des cas que vous avez choisis, que ce soit l'affaire des
Haïtiens qui est encore toute chaude, dont l'enquête est à
peine parvenue au ministère de la Justice, qui a soulevé
sûrement l'intérêt de beaucoup de Québécois et
j'en suis pour faire en sorte que si, effectivement, l'activité
concrète de ces policiers ce soir-là en particulier, a pu
être la preuve d'un commencement, ne serait-ce que d'un commencement de
manifestation de racistes et je ne veux pas le présumer
mais si c'était ça, eh bien! que des mesures soient prises pour
que ce soit éliminé de notre société.
Je ne veux pas mentionner seulement les cas que vous soulevez et qui
seraient survenus pendant la gouverne de celui qui est en face de moi. J'en ai
eus aussi dans mon temps. Je vous l'ai mentionné.
Par exemple, quand je fais état de votre manque de rigueur, je ne
peux pas ne pas le passer sous silence. Vous dites à la page 8: "De
l'exécution des indésirables. De 1970 à 1974, 44 personnes
ont été abattues par des policiers au Québec ce qui place
celui-ci en tête des provinces canadiennes pour ce type de crime." Vous
avez jugé sans procès, vous avez condamné sans
procès 44 personnes ou 44 cas et vous avez décidé que
c'étaient des crimes. Est-ce que comme legs de la liberté des
personnes, vous ne vous trouvez pas un peu gêné? J'espère.
C'est peut-être...
M. Doré: Là-dessus, je voudrais seulement... Je
m'excuse, mais c'est important. Lorsque j'ai lu le document tantôt,
délibérément, j'ai utilisé le terme "incident",
c'est manifestement une correction qui a été apportée
après coup, au texte. C'est clair qu'on ne peut pas présumer dans
ce cas-là de crime. C'est clair qu'il n'y a eu personne de jugé
et quand j'ai lu le texte tantôt, j'ai remplacé le mot "crime" par
le mot "incident", M. le député de Marguerite-Bourgeoys, et
là-dessus, je m'excuse.
M. Lalonde: Bon!
M. Doré: J'aurais peut-être dû souligner au
départ les corrections qu'on a apportées au texte au fur et
à mesure. Cela s'est fait vite.
M. Bédard: Vous êtes d'accord qu'on le corrige dans
les notes sténographiques aussi de la transmission de votre
mémoire?
M. Doré: Oui, cela va. M. Lalonde: Bon!
M. Bemheim: Seulement une information. Il faut lire 1965 et non
1970.
M. Lalonde: Ce n'était pas tellement la statistique qui me
fatiguait que le terme.
M. Bernheim: Non, mais quant à y être.
M. Lalonde: Je passe rapidement, non pas que cela ne
m'intéresse pas. Au contraire. Je pense que c'est un des aspects les
plus positifs, quoiqu'on pourrait vous taxer d'angélisme à cet
égard sur le port d'arme. Je pense que plusieurs d'entre nous autour de
la table aimeraient vivre dans une société où on pourrait
dire que nos concitoyens sont protégés par des policiers qui ne
sont pas obligés de porter l'arme. Mais M. le ministre vous a quand
même interrogé là-dessus assez en profondeur. Alors, pour
aller plus rapidement, je vais passer là-dessus.
J'aimerais vous poser une question sur l'information, le renseignement
et tout le rôle des informateurs dans la police.
Avant, j'aimerais ouvrir une parenthèse simplement pour vous dire
qu'en ce qui me concerne je suis convaincu que tous les membres de la
commission partagent mon opinion on ne doit pas admettre la commission
de crime par la police. Il va sans dire avec traduction littérale
anglaise "that goes without saying" on ne peut pas, que ce soit de
façon systématique, que ce soit de façon exceptionnelle,
accepter dans une société démocratique qu'on doive
recourir au crime par la police pour protéger le citoyen. C'est
contraire à l'entendement même d'une société
démocratique. Là-dessus, je suis d'accord avec vous.
Mais quant à l'information, vous avez des remarques à la
page 20, par exemple: "Toute la question de l'utilisation par la police
d'informateurs doit être scrutée à la loupe. La police
finance un vaste réseau de mercenaires plus ou moins tarés
j'imagine que la police ne choisit pas le degré de tare de ses
informateurs dont les crimes sont tus en contrepartie de divers services
et qui peuvent ainsi en prendre plus large que les lois."
Une Voix: Avec les lois.
M. Lalonde: Avec les lois, je me demandais, aussi... C'est
mineur. D'autre part, la forme de votre mémoire est remarquable. "Leur
présence clandestine dans les bureaux gouvernementaux et dans les
institutions et les entreprises... permet à la police d'y exercer une
influence et, au besoin, une subversion permanente." Je voudrais vous demander
si vous pouvez concevoir une police efficace qui ne serait pas informée.
Je pense que je vous mets la réponse dans la bouche, il faut, pour
être efficace, être informé, savoir ce qui se passe.
Qu'est-ce que vous suggérez pour remplacer cette vieille habitude des
polices d'acheter l'information à même les gens du milieu, les
tarés? Est-ce que vous avez une suggestion à faire? Est-ce que
vous voulez éliminer cela de nos habitudes policières; quand vous
dites que cela doit être scruté à la loupe, est-ce que vous
voulez savoir les montants d'argent qui sont dépensés ou si vous
voulez savoir... vous en concluez un peu vers la fin de votre
paragraphe, c'est pour cela que je le mentionne est-ce que vous voulez
éliminer cela de nos habitudes policières? Si oui, de quelle
façon remplacez-vous la cueillette d'information?
M. Doré: M. le Président, au départ, je vous
ferai remarquer que le paragraphe que vous avez cité est, en fait, un
texte qui est emprunté. Il est entre guillemets, d'ailleurs, à
partir de "La police", tout de suite après, il y a des guillemets qui
commencent au mot "finance" et qui se terminent en bas de page au mot
"exercer", et renvoie à une préface de Jean-Claude Leclerc. Donc,
on cite un texte de Jean-Claude Leclerc, éditorialiste au Devoir.
Ma deuxième remarque, cette question des informateurs, oui,
justement pour répondre à votre question on serait
extrêmement intéressé, comme organisme, qu'une étude
soit faite, ne serait-ce qu'une étude
coûts-bénéfices de l'utilisation des informateurs. Il ne
faut pas oublier qu'on ne parle pas d'informateurs que la police peut utiliser
à l'occasion pour, par exemple, démanteler un réseau de
drogue ou d'importateurs d'héroïne, on parle de l'existence
d'informateurs dans les organisations démocratiques aux fins de combler
des renseignements pour des services de sécurité; c'est bien
différent.
M. Lalonde: Je vous remercie de cette précision. Cela
n'apparaissait pas de façon évidente.
M. Doré: D'une part. C'est dans ce chapitre-là,
c'est dans ce contexte qu'on le situe, mais là-dessus, on ne
connaît pas ce qui se fait au Québec, mais on sait ce qui s'est
fait aux Etats-Unis par exemple, et on sait que le modèle de
fonctionnement américain, que ce soit le FBI en particulier, par le
biais des relations qui sont assez étroites, qui peuvent exister entre
la police américaine et la police canadienne par le biais de la GRC et
que d'autre part la GRC est un peu le modèle au ni- veau du
fonctionnement qui a pu servir dans bien des cas à la SQ; un certain
nombre des cadres de la Sûreté du Québec sont d'ex-grands
chapeaux vous le savez comme moi, M. le député, vous
étiez Solliciteur général du temps ce sont des gens
qui ont été formés par la GRC, laquelle a reçu
l'essentiel de ses informations par des gens du FBI et du côté
américain, dans certains cas, même des forces armées
américaines, au niveau du renseignement. Or, ces techniques...
M. Lalonde: ... mais je ne l'affirme pas.
M. Doré: Là, vous vérifierez
auprès... Evidemment, l'ensemble de ce qui est contenu dans ce
chapitre... je pourrais vous fournir l'ensemble des documents qu'on a
publiés sur les services de renseignement et ce qui a été
publié et rendu public dans les différentes commissions
d'enquête. Vous savez que dans les commissions d'enquête il s'en
publie des documents. La commission Keable a publié, je ne sais pas
jusqu'à maintenant, quelque 160 documents, la commission McDonald c'est
une montagne. Quand on se met à regarder cela, on découvre pas
mal de choses intéressantes là-dedans. Ce qui est clair, c'est
qu'au niveau de la formation il y a des gens qui, en témoignage et dans
des documents, on voit très bien les liens de relations qui existent.
Par ailleurs, on sait qu'aux Etats-Unis parce que le FBI a fait plus
l'objet d'enquêtes publiques, encore plus qua la GRC on s'est
rendu compte, par exemple, que dans le cas du FBI, il y avait une fraude
épouvantable qui pouvait exister au niveau du réseau
d'informateurs. Vous comprenez que souvent la valeur du policier, au niveau du
renseignement, est fonction du nombre de renseignements qu'il va chercher en
matière de sécurité et souvent du nombre d'informateurs
qu'il peut avoir. Mais entre cela et faire des listes d'informateurs fictifs,
entre cela et inventer de l'information dans certains cas, il y a une marge qui
est assez facile à franchir et dans le cas des Etats-Unis en
particulier, les enquêtes ont révélé des fraudes
dans l'utilisation de sommes d'argent, de deniers publics, sous prétexte
de financer des réseaux d'informateurs qui étaient, à
toutes fins utiles, inexistants.
Alors, je vous dis: Quelle preuve avons-nous qu'au Québec...
D'abord, premièrement, quelle est l'importance des fonds publics
consacrés, à notre point de vue et c'est important
au recrutement d'informateurs? Vous savez que quand toute l'affaire
d'opération publique a circulé, il y a des gens qui ont
avoué, dans des entrevues auprès de journalistes, que quand ils
ont circulé dans les syndicats, ils y ont rencontré des gens qui
étaient des gens infiltrés par la GRC et dans certains cas des
gens qui payaient pour avoir du renseignement. Nous voulons savoir... On serait
extrêmement intéressé à savoir quelles sont les
sommes d'argent, les deniers publics qui sont consacrés à cette
fin de recevoir des renseignements et quelle valeur ont ces renseignements, eu
égard au fait qu'on sait que l'essentiel des activités en
matière
de renseignements, que la police soit informée, est
fondamentalement constituéeà 90% et tout le monde est
d'accord là-dessus quand on lit le moindrement dans ce secteur de
renseignements qui sont d'ordre public et qui sont simplement des
renseignements colligés par les forces policières à partir
de renseignements que tout le monde peut posséder sur les organismes en
question.
De ce point de vue, on n'est pas sûr du tout que le recours aux
informateurs soit la méthode indiquée. Surtout, on sait
très bien que les informateurs qui sont recrutés et cela,
du côté de la GRC, c'est clair; c'est sorti à la Commission
McDonald le sont, dans certains cas, par pressions, le sont, dans
certains cas, par le chantage, le sont, dans certains cas, parce qu'on a
subtilisé le rapport médical par le biais de
l'assurance-hospitalisation ontarienne, qu'on a su qu'un tel avait
été traité dans un hôpital psychiatrique, qu'on s'en
est servi en le menaçant de le discréditer dans son groupe pour
qu'on puisse avoir des renseignements sur le fonctionnement à
l'intérieur de son groupe.
Mais nous, on dit: Si c'est cela le type d'informateurs qu'on recrute,
ces gens, une fois qu'ils ont accepté une première fois de
recevoir de l'argent pour donner des renseignements sur des gens avec lesquels
ils travaillent ou sur le groupe dans lequel ils fonctionnent, à un
moment donné, la pression aidant et avec le chantage possible, peuvent
peut-être être amenés à poser des gestes moins
passifs que fournir des renseignements et plus actifs. C'est la deuxième
étape normalement qui peut suivre. En tout cas, là-dessus, aux
Etats-Unis, encore une fois, dans le cas du FBI, on a vu à quoi ce genre
de type de recrutement... Quand on parle d'informateurs plus ou moins
tarés, on ne parle pas des tares génétiques; on parle de
gens qui, à cause, soit d'un passé, soit de faiblesses
antérieures, soit d'endettement, soit d'alcoolisme, soit de traitements
psychiatriques, sont des êtres qui sont plus susceptibles que d'autres ou
plus exposés que d'autres au chantage et peuvent éventuellement
non seulement fournir des renseignements, mais devenir des agents provocateurs
à l'intérieur de groupes. C'est cela ce danger.
Quand on nous dit qu'on affirme simplement ces dangers,
évidemment, ce document, il faut voir que c'est une synthèse
peut-être trop rapide d'une série d'autres documents. C'est un peu
comme la CECO, lorsque vous disiez tout à l'heure: C'est un peu trop
rapide, le jugement que vous portez dans votre document sur la CECO. (22
heures)
J'en conviens que ce n'est pas les trois paragraphes de la page, je ne
sais pas, 22, qui, à notre point de vue, justifient peut-être
essentiellement nos avancés sur la CECO. Mais je vais vous faire
parvenir, si vous ne l'avez pas, ce document de 40 pages qu'on a rendu public
l'année dernière et que le ministre de la Justice a entre les
mains sur une analyse plus systématique qu'on a faite de la CECO. Vous
vous rendez compte que les quatre lignes qu'on cite dans ce document sont
appuyées sur ce document. Là-dessus, je pense que la
démonstration, en tout cas , à notre point de vue, elle est
probante. De votre point de vue, elle serait peut-être à tout le
moins un peu plus satisfaisante. C'est la même chose pour la question des
informateurs.
M. Lalonde: Je vous remercie des détails que vous avez
donnés sur la question des informateurs. En principe, que la police
achète de l'information, des informateurs, vous n'avez pas
d'objection.
M. Doré: Non, je n'ai pas dit cela.
M. Lalonde: Excusez-moi. Je n'ai pas terminé. Ce que vous
reprochez, d'abord, c'est le chantage, ce sont les méthodes
inacceptables qui peuvent être des attaques directes aux libertés
des gens de donner l'information librement, que ce soit en contrepartie
d'argent ou non.
M. Doré: Nous on pense que l'usage d'informateurs dans des
groupes et le fait qu'ils soient payés sur la quantité de
renseignements qu'ils fournissent, cela ne donne aucune possibilité aux
gens sur qui ces informateurs donnent des informations de savoir qu'est-ce
qu'on charrie en leur nom. De la même façon, pourquoi a-t-on
réglementé l'écoute électronique? Pourquoi s'est-on
senti obligé, à un moment donné, quant à
l'utilisation des forces policières, de réglementer
l'écoute électronique? On a légalisé cela d'une
part, mais en lui fournissant un cadre avec lequel, dans certains cas, on est
en désaccord, particulièrement en matière de
sécurité nationale mais cela, c'est un autre
problème. Si l'écoute électronique est une intrusion
dangereuse dans la vie privée d'un individu, pourquoi, à
l'intérieur d'un groupe, l'utilisation des informateurs est-elle plus
permissible et plus acceptable?
Pour nous, c'est aussi dangereux l'un que l'autre. On n'a aucune
garantie actuellement. Dans le cas de l'écoute électronique,
minimalement, on peut dire qu'il y a les dispositions du Code criminel. Encore
faut-il dire que c'est passif l'écoute électronique, mais les
informateurs, ce n'est pas passif. Ce n'est pas uniquement passif et surtout,
on n'a aucun moyen de contrôle pour savoir non seulement qui ils sont,
bien sûr, mais quel genre de renseignements ils transmettent, qu'est-ce
qui est collige au bout du compte à partir de ces renseignements par les
forces policières. De ce point de vue, on trouve que c'est dangereux et
on s'est dit, on ne s'est jamais posé la question publiquement. On n'a
jamais examiné cela. Cela nous apparaît important de le faire,
particulièrement en matière de sécurité et de
renseignement. C'est cela qu'on pose comme problème.
M. Lalonde: Je vous remercie. Un peu plus loin, vous dites: Au
secret qui continue d'entourer la police, il faudrait que le gouvernement
consacre, par une loi d'accès, le caractère public de
l'information gouvernementale et des dossiers de
police. Est-ce que vous voulez dire que les dossiers de police devraient
être rendus publics ou bien devraient être rendus accessibles
à celui, au citoyen au singulier qui est concerné, parce que si
vous rendez publics...
M. Doré: Non. On s'entend.
M. Lalonde: ... tous les dossiers de la police, vous savez que
c'est la guerre ouverte.
M. Doré: Encore une fois, c'est formulé rapidement
cette question, mais on attend du côté fédéral,
comme du côté québécois, certains projets concrets
relativement à des déclarations d'intentions sur cette question
de l'accès à l'information. Mais elle est double. D'ailleurs, on
la souligne. L'accès, d'une part, à l'information
gouvernementale, ce qui est tout un type de problème. Pour nous, cela
veut dire, entre autres, l'accès à des commissions, aux
recherches qui sont faites par la Commission de police, par exemple, aux
recherches qui peuvent être faites au ministère de la Justice,
à l'utilisation qu'on fait de deniers publics sur des questions qui nous
semblent d'intérêt public et auxquelles les organismes comme les
nôtres et n'importe quel citoyen intéressé devraient
normalement avoir accès. Il y a trop de secrets. Normalement, un
gouvernement doit fonctionner dans la transparence et nous, on dit que
l'ensemble du fonctionnement gouvernemental, à tous les niveaux, est
entaché d'un secret. Il faut lever le voile du secret là-dessus.
C'est sur l'information que détient le gouvernement, sur les recherches,
les études qui peuvent se faire. C'est un aspect.
L'autre aspect, c'est sur l'information que détient le
gouvernement sur des citoyens ou sur des organisations auxquelles ils
appartiennent. Ce n'est pas là, mais c'est aussi... de toute
façon, quand il s'agira de commenter plus à fond notre
pensée là-dessus, ce sont les deux aspects.
Quant à moi, comme membre de la Ligue des droits et
libertés, je serais extrêmement intéressé à
savoir, par exemple, ce que contenait le fameux CAD qui a été
détruit au niveau des fiches individuelles mais dont les fiches sur les
organisations et les groupes continuent d'exister, et on ne sait pas trop
où, on ne sait pas ce qui va arriver.
M. Lalonde: Apparemment, il attend je ne sais pas quoi pour les
détruire. J'ai demandé à...
M. Doré: Je ne sais trop. On verra tantôt. Mais je
dis que je serais curieux de le savoir pour le CAD, je parle juste du CAD. Mais
je parle aussi des forces policières. Les services de
sécurité du Québec, à la SQ ont sûrement un
dossier sur l'organisation à laquelle j'appartiens. Je serais curieux de
le connaître et d'en corriger les inexactitudes, s'il y en a, et je
serais également intéressé, comme citoyen, à
connaître mon propre dossier. Je ne peux pas le faire actuellement et
c'est le sens de la recommandation qui est là. D'accord.
Le Président (M. Boucher): Messieurs...
M. Lalonde: Parce que...
M. Doré: ... l'Information Act aux Etats-Unis...
M. Bédard: Le député de Marguerite-Bourgeoys
a l'air d'oublier que ces fiches individuelles ou ces rapports que nous avons
présentement au ministère de la Justice n'ont pas
été confectionnés par le présent gouvernement. Nous
sommes les dépositaires.
Le Président (M. Boucher): Messieurs, je regrette...
M. Lalonde: Est-ce qu'on peut avoir un petit consentement en
terminant.
M. Doré: En tout cas, que vous échangiez sur la
paternité desdites fiches, quant à moi, je pense qu'on devrait
les détruire. Alors, il faut les organiser. Les fiches individuelles
l'ont été, semble-t-il, mais j'aimerais beaucoup que les fiches
sur les groupes le soient également.
Le Président (M. Boucher): Je m'excuse, on dépasse
l'heure de l'ajournement. Est-ce que la commission consent à continuer
encore quelques minutes pour permettre au député de
Marguerite-Bourgeoys de terminer ses questions?
M. Alfred: II reste le député de Papineau sur
l'affaire des Haïtiens.
M. Lalonde: M. le Président, nous avons consacré
plusieurs minutes à la lecture du mémoire et aussi à
entendre des réponses très élaborées. J'aurais eu
quelques autres questions, mais j'ai eu quand même les principales
réponses, sauf peut-être une sur la question de la CECO. Vous
affirmez à la page 26, au deuxième paragraphe, que les policiers
disposent déjà de suffisamment de pouvoirs, de ressources et de
moyens techniques pour mener les enquêtes nécessaires et accumuler
les preuves indispensables pour ensuite loger les accusations qui s'imposent
contre les individus et groupes soupçonnés d'activités
criminelles. Dans une hypothèse qu'on identifie ou qu'on appelle le
crime organisé ou l'intimidation, le meurtre, la menace, le chantage,
qui font en sorte que les témoins disparaissent, est-ce que vous croyez
que les ressources de la police, qui sont l'enquête, mais l'enquête
à qui veut bien dire ce qu'il sait, les moyens techniques, oui... On
parlait d'écoute électronique tantôt, en particulier comme
moyen secret. Croyez-vous que ce serait suffisant pour amener devant les
tribunaux de droit commun les auteurs, les principaux acteurs des
réseaux, des groupes, des bandes qui vivent de la criminalité
systématique et qui éliminent systématiquement les
témoins?
M. Doré: Là-dessus, M. le député, je
demanderais peut-être à Jean-Claude Bernheim, de l'Of-
fice des droits des détenus, d'amorcer une réponse
à votre question, s'il vous plaît, si vous me le permettez;
Jean-Claude.
M. Bernheim: J'aimerais répondre avant à votre
question sur l'accessibilité aux dossiers de police. Je voudrais vous
donner un autre exemple. Lors des enquêtes du coroner, il y a des
enquêtes policières qui sont faites et ces dossiers de police ne
sont pas accessibles aux personnes qui participent à l'enquête,
aux avocats de la défense, entre autres. On remarque aussi, par rapport
aux dossiers de police, qu'il y a certains journaux on se demande
comment cela se fait qui sont plus privilégiés que
d'autres et qui ont des informations policières qui sortent de ces
dossiers. Avant qu'un procès ait lieu, on remarque que certains journaux
spécialisés ont des informations que je qualifierais de
privilégiées et qui sortent directement de l'enquête
policière. Or, une enquête policière est confidentielle ou
elle ne l'est pas. Mais il nous semble, par rapport à cela, que la
confidentialité varie en fonction de l'interlocuteur.
Pour en revenir à la question de la CECO, c'est un
problème qui est assez important et vaste. On pense que oui, les
policiers ont des pouvoirs d'enquête suffisants pour pouvoir porter des
accusations contre les gens quand ils ont des preuves. La façon dont
fonctionne la CECO... Vous avez dit tout à l'heure que les gens sont
traduits devant elle, mais, ce qu'on sait, c'est que, s'ils ne
témoignent pas contre eux-mêmes ou contre des gens, ils seront
condamnés pour outrage au tribunal et envoyés en prison. La forme
de fonctionnement de la CECO est justement un tribunal d'exception où,
sans avoir de preuve vous le dites vous-même puisqu'ils
n'ont pas de preuve pour accuser les gens, on va chercher des témoins
qui, éventuellement, auraient de l'information et on les force à
parler. Si les gens refuent de parler, on dit: Ils ont quelque chose à
cacher et on les envoie en prison pour outrage au tribunal. S'ils savent
quelque chose, ils sont obligés de vendre des personnes, d'être
des informateurs malgré eux. Donc, cette façon de procéder
est antidémocratique. Quand on voit les problèmes auxquels
s'attaque la CECO, ce sont des problèmes connus.
Si on prend des gens qui ont commis des crimes, si on le sait, on le
sait et on peut porter des accusations si on a des preuves; si on ne le sait
pas, il n'y a pas de raison de convoquer des gens pour aller à la
pêche devant une commission d'enquête. Il est fondamental, pour
nous, que ce genre de commission n'existe pas, parce que cela brime les droits
des témoins. La preuve en est que le ministre a amené, dans son
projet de loi, un article qui aide ou tente d'aider les droits de la
défense d'un témoin, mais c'est encore assez superficiel, quand
on lit l'article 22a qui serait remplacé par l'article 15 du projet de
loi: c) "autoriser l'interrogatoire d'un témoin par son avocat ou le
contre-interrogatoire d'un témoin par l'avocat d'une personne dont le
nom ou les activités ont été mentionnés par ce
témoin, ou l'avocat de ce dernier, si elle estime que cet inter-
rogatoire ou que ce contre-interrogatoire permet de mieux servir les fins
poursuivies."
Une demande est faite par écrit. Avant de pouvoir
contre-interroger, il faut faire une demande par écrit pour justifier
son droit de défense pleine et entière. Ce n'est pas acceptable
dans une commission d'enquête, ce n'est acceptable dans aucun processus
démocratique. Ou les droits des gens sont toujours respectés, ou
bien ils ne le sont pas. Quand ils ne le sont pas, ça ne doit pas
exister. A notre avis, le fonctionnement... une commission d'enquête
comme la CECO ne peut pas fonctionner démocratiquement puisqu'elle va
à la pêche, puisqu'ils n'ont pas de preuve et qu'il faut des
informateurs recrutés, d'une façon ou d'une autre, pour pouvoir
faire quelque chose.
Ensuite, la CECO est censée enquêter sur le crime
organisé. C'est quoi le crime organisé? Légalement, cela
se définit par quoi? Il suffit que quelques personnes décident
qu'un groupe qui se forme, ça peut être du crime organisé.
Cela devient, par le fait même, un crime de faire participer un groupe.
Pour prendre un exemple concret: les motards. On sait pertinemment qu'il y a
des motards qui commettent des délits, comme tout le monde, et on sait
pertinemment qu'il y a beaucoup de groupes de motards qui ne commettent pas de
délits. Mais toute la publicité qui est faite et la façon
dont fonctionne ce tribunal incitent les gens à croire que toute
personne qui fait partie d'un groupe de motards est un criminel. La
publicité et le fonctionnement public de la CECO, c'est un
fonctionnement qui est absolument anti-démocratique, qui fait
peut-être percevoir aux gens que quelqu'un qui est assigné comme
témoin, pour eux, est un coupable. Evidemment, légalement, ce
n'est qu'un témoin, mais dans les faits, le publics perçoit cela
comme des gens qui ont commis un délit.
Comme quelqu'un disait ce matin au cours de la présentation d'un
mémoire, si je me rappelle bien, de l'Association des policiers, quand
on critiquait le fait que la Commission de police avait des enquêtes
publiques, il n'y a pas de fumée sans feu. Il n'y a pas de fumée
sans feu pour les policiers, eux demandent le huis clos pour le respect de
leurs propres droits, et on voit que les policiers assignent des gens ou
travaillent dans une commission où, justement, aucun droit n'est
respecté, et tout le monde dit exactement la même chose: II n'y a
pas de fumée sans feu.
Alors, il ne faudrait pas avoir deux poids deux mesures, un pour les
policiers, un pour le monde ordinaire. Je pense que tout le monde doit
être traité sur le même pied, tant les policiers que les
gens, et ils doivent avoir un droit de défense. C'est pour cela qu'on
demande l'abolition éventuelle de la CECO et de tous les tribunaux de
cet ordre-là.
M. Lalonde: Je vous remercie.
M. Bernheim: II y a une autre chose que vous avez dite au
début de votre intervention, c'est qu'on n'avait pas parlé du
travail difficile des policiers. Les objectifs de la Ligue des droits et
liber-
tés, c'est de défendre les droits des gens, les gens les
plus démunis. Il y a des catégories de gens qui sont plus
démunis que d'autres dans la société et, si on prend comme
exemple, les policiers, ils ont des associations pour les représenter,
on l'a vu ce matin, on l'a vu tout au cours de la journée. Ces
gens-là sont venus faire des représentations en fonction de leur
travail et ont exposé leur situation, je pense, avec suffisamment de
clarté. Notre rôle est de donner l'autre point de vue. Les
associations de policiers ou les groupes de policiers qui sont venus
témoigner aujourd'hui ont parlé de leur situation personnelle
mais, comme groupe représentant les droits des gens, c'est la Ligue des
droits et libertés qui parle de ce point de vue-là. C'est dans ce
sens-là qu'on n'a pas commencé à faire état de ce
qu'est le travail policier. Je pense qu'ils sont suffisamment à
même de le faire.
M. Lalonde: Si vous permettez, M. le Président, je
voudrais simplement dire ceci. Les groupes qui ont fait des
représentations aujourd'hui l'ont fait de façon
générale dans une perspective tout à fait réduite
en fonction d'un article ou d'un autre, alors que votre présentation se
veut une critique du système même, et c'est dans ce sens-là
que je crois encore, malgré votre réponse, que votre
présentation aurait bénéficié d'une rigueur plus
grande dans la description de tous les éléments du
système. C'est pour cela que je pense que votre mémoire aurait pu
être plus crédible s'il avait fait état justement de cet
élément dont j'ai fait mention au début. Je vous remercie.
(22 h 15)
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Papineau.
M. Alfred: Dans votre mémoire, vous avez mentionné
le cas des Haïtiens, c'est-à-dire l'affaire du 20 juin 1979. Etant
donné que je suis un Québécois d'origine haïtienne,
je m'en voudrais de ne pas en faire mention. Je regrette cependant vous
l'avez souligné, nous l'avons déploré que certains
aient voulu faire de ce cas des Haïtiens un cas où ils attaquent
toute la population québécoise et certaines personnes, dont le Dr
André Fortin que vous connaissez bien, a voulu par ce cas attaquer la
réputation de toute la collectivité québécoise. Je
pense que vous, comme défenseurs des droits de la personne, vous
n'acceptez pas cela.
Deuxièmement, je pense que ce sont quelques policiers de la CUM
qui ont posé des gestes en particulier. Le ministre a demandé une
enquête qui ne doit pas être précipitée. Vous
êtes au courant qu'on ne doit pas précipiter les choses pour le
faire. Le Dr Fortin a précipité encore les choses et la
confrontation entre la collectivité québécoise et la
communauté noire, voulant se faire passer pour le défenseur ou
pour le sauveur des nègres du Canada, ce contre quoi je lutte et vous
aussi-Troisièmement, le Dr Fortin et certaines autres personnes, ont
voulu prendre ce cas en particulier pour franchement porter un blâme
sévère sur tout le corps policier du Québec. Je pense que
vous n'acceptez pas cela non plus. Vous demandez une réforme
policière, je suis d'accord sur cela. Tout le monde, le ministre de la
Justice en est le premier conscient. Nous avons tous demandé une
enquête pour savoir qui a raison ou qui a tort, mais personnellement je
me suis levé contre ce cas-là et j'ai demandé au ministre
de la Justice qu'une enquête soit faite et s'il y a culpabilité
quelque part que les gens soient punis. Vous êtes d'accord avec moi, mais
je regrette, par exemple, dans ce cas que vous avez souligné, qu'on ait
voulu profiter de ce cas-là, d'une part, pour salir la réputation
de tous les policiers du Québec et, d'autre part, pour salir la
réputation de tous les Québécois. Je regrette qu'on ait
voulu mêler à des fins partisanes l'affaire de la rue
Bélanger. Vous l'avez souligné, bien sûr je fais confiance
au ministre de la Justice, mais quand on arrive à mêler l'affaire
de la rue Bélanger avec la loi 101, je pense que la Ligue des droits et
libertés de la personne a le droit aussi de se lever contre ces
personnes qui sont à l'origine même de l'agitation au
Québec. Je vous remercie.
Le Président (M. Boucher): M. Doré, au nom des
membres de la commission, je vous remercie de la présentation de votre
mémoire, ainsi que les collègues qui vous accompagnent.
La commission ajourne ses travaux à demain dix heures.
Fin de la séance à 22 h 19
ANNEXE A
Mémoire de l'Association des chefs de police et
de pompiers du Québec
relativement à des propositions d'amendements
à la loi de police
et aux rôles de divers organismes
gouvernementaux constitués
pour les affaires policières et le domaine de
la sécurité publique
à la commission permanente de la justice
relativement au projet de loi 48
Préambule
Conscients des intentions du ministre de la Justice de déposer un
projet de loi dont le but était d'amender la Loi de police pour corriger
certaines situations que nous dénoncions, les membres de
l'exécutif de l'Association des chefs de police et de pompiers du
Québec ont désigné certains d'entre eux pour constituer un
groupe de travail dans le but de soumettre un mémoire. Effectivement,
nous remettions copie de ce mémoire au ministre de la Justice le 7 juin
1979 par l'entremise de l'ex-président de l'Association des chefs de
police et de pompiers du Québec monsieur Robert Vézina.
L'intention de l'Association des chefs de police et de pompiers du
Québec était d'influencer le Ministre avant la formulation de son
projet de loi. Nous constatons à la lecture du projet de loi que nous
n'avons réussi que très partiellement. L'exécutif de
l'Association des chefs de police et de pompiers du Québec a donc
convenu de saisir les membres de cette commission parlementaire sur la Justice
de ses propres propositions d'amendements qui pourraient être
considérés comme représentant la base d'un projet de loi
dont la teneur est fort différente du projet de loi 48 (voir 1 Objectifs
poursuivis et 2 Propositions d'amendements par rapport au texte actuel de la
Loi de police).
C'est pourquoi, après avoir présenté notre projet
d'une législation souhaitée, nous tenterons d'établir les
points de concordance et de discordance avec le projet de loi 48 à
l'aide d'annotations et de commentaires.
Nous serons disposés à examiner positivement les
rapprochements possibles entre la position du ministre de la Justice
l'Honorable Marc-André Bédard et la nôtre à
l'occasion des auditions de votre commission parlementaire.
Marcellin Cyr, Président Association des chefs de police et de
pompiers du Québec
1 Objectifs poursuivis dans ce mémoire 1.1 Amendements
à la Loi de police. Mémoires législatifs
Périodiquement, l'Association des chefs de police et pompiers du
Québec a participé à des commissions parlementaires ou a
soumis des avis par écrit à chaque fois que les divers
gouvernements qui se sont succédés ont désiré
apporter des changements législatifs sur la police ou amender la Loi de
police depuis son adoption en 1968. C'est ainsi que l'Association des chefs de
police et pompiers du Québec a participé à la formulation
de la Loi de police et à la création de l'organisme moteur duquel
dépendait une bonne partie de l'application de cette loi la Commission
de police du Québec.
En octobre 1973, l'Association des chefs de police et pompiers du
Québec transmettait un mémoire pour provoquer des amendements
à l'article 63 de la Loi de police. En août 1976, devant une
commission parlementaire, un autre mémoire suivit portant cette fois-ci
sur le projet de loi 41 qui devait modifier sensiblement certaines parties de
la Loi de police. Or, ce projet de loi n'a franchi que l'étape de la
première lecture si bien que nous retrouvons souvent les mêmes
revendications en mai 1979.
Entre-temps, l'Association des chefs de police et pompiers du
Québec a encouragé les initiatives prises par le groupe de
travail sur les fonctions policières par le dépôt de deux
mémoires et la présence au sein de ce groupe de monsieur
Gérard Giroux. Sans nécessairement appuyer toutes les
propositions et se porter caution à tous les passages du rapport
Saulnier, l'Association des chefs de police et pompiers du Québec
supportait les propositions majeures dont notamment celles sur la constitution
de corps de police de district, la création d'un Inspectorat, le
financement des services de police, le réaménagement des pouvoirs
de la Commission de police du Québec, un régime minimal
supplémentaire de rentes.
Devant les hésitations du gouvernement à implanter les
recommandations prioritaires du rapport, l'Association des chefs de police et
pompiers du Québec a déposé des documents et maintenu un
échange de correspondance afin de démontrer la vigilance de son
action en ce dossier.
Ce mémoire s'inscrit donc dans une continuité de
démarches et respecte la philosophie de base développée
par les membres de l'Association des chefs de police et pompiers du
Québec. Toutefois, étant donné l'intention du gouvernement
d'apporter sous peu des amendements à la Loi de police par le biais du
projet de loi 48, nous émettrons des propositions d'amendements
relativement à la Loi de police
avant d'aborder toute autre question qui pourrait faire l'objet de
réflexions par les instances gouvernementales. Nous ne manquerons pas de
vous suggérer des moyens pour que soient réalisées nos
propositions d'amendements. 1.2 Implantation de mesures proposées dans
le rapport Saulnier
Depuis que le rapport Saulnier a été déposé,
les autorités gouvernementales semblent avoir été
très peu loquaces sur leur plan d'action de sorte que l'on a
laissé le chemin libre à plusieurs initiatives et fantaisies.
C'est ainsi que la majorité des municipalités au sens du code
municipal ont aboli leur corps de police, que des municipalités
régies par la Loi des cités et villes en ont fait tout autant
malgré l'obligation qu'elles ont de maintenir un service de police, que
les effectifs ont été réduits considérablement au
point de mettre en danger le niveau de services et la qualité de la
protection publique des populations visées. Enfin, d'autres
municipalités refusent d'évaluer la pertinence des demandes
d'accroissement d'effectifs même dans les cas où le taux
d'encadrement est en deçà d'un seuil acceptable par rapport
à la criminalité et la charge de travail. On pousse même
l'odieux de la situation jusqu'à geler de façon indéfinie
lesdits effectifs.
Les vacuums ainsi créés amènent la
Sûreté du Québec à être davantage
présente dans ces municipalités et même à assumer en
certains cas l'entière responsabilité des affaires
policières. Nous avons noté de l'improvisation dans les formules
de la Sûreté du Québec et même l'absence de
protocoles d'ententes à l'occasion. Il va sans dire que le Gouvernement
devra préciser les politiques et fournir des indications plus explicites
sur le rôle de la Sûreté du Québec.
Que dire de la confusion entretenue sur la Direction
générale de la Sécurité publique et sa juridiction
surtout vis-à-vis la Commission de police du Québec en
matière de prévention du crime et en formation! Le rapport
Saulnier proposait plutôt un Inspectorat qui répond à
l'Assemblée nationale et voyait la Commission de police se limiter
à un organisme quasi-judiciaire. Encore ici, nous constatons que la
Commission bénéficie de très peu de pouvoirs
exécutoires et que la Direction générale de la
Sécurité publique, qui a été ignorée dans le
rapport Saulnier, n'a jamais vu son champ d'activités être bien
délimité. Comme l'Association des chefs de police et pompiers du
Québec, sans nécessairement endosser tout le contenu du rapport
Saulnier, s'est tout de même solidarisée sur les principales
recommandations, notre association se permettra de reprendre certaines de ces
recommandations et même d'en approfondir et d'en préciser la
portée. 1.3 Projets de réglementation de la Commission de police
du Québec et rôle consultatif de l'Association des chefs de police
et pompiers du Québec
L'Association des chefs de police et pompiers du Québec a
participé à de nombreux comités que la Commission de
police du Québec avait mis sur pied pour formuler des règlements
qui reflètent davantage les besoins et priorités. Des membres de
l'Association des chefs de police et pompiers du Québec étaient
désignés pour prendre charge de ces divers dossiers et rendre
compte à l'exécutif. Or, depuis quelques années, la
Commission semble avoir suspendu ses initiatives au plan de la
réglementation et n'a pas convoqué l'Association des chefs de
police et pompiers du Québec pour de tels projets (ex.: code de
déontologie, normes d'embauches, insignes de grades).
Il appert que la Commission est à nous éloigner de notre
rôle de consultation. La dernière expérience pour organiser
la semaine de la police s'est plutôt avérée malheureuse
puisque la Commission a, à un moment, fait cavalier seul.
Tout indique que la Commission de police du Québec
préfère consulter les organismes individuellement. C'est ainsi
qu'elle a fait une tournée des régions et a tenu des rencontres
séparées avec les syndicats, les directeurs de police et les
administrateurs municipaux. Même si nous ne dénonçons pas
de façon véhémente cette approche, nous trouvons que cette
dernière ne cadre pas avec les politiques de rapprochement de la
Commission qui ont donné lieu à des journées
d'études annuelles et à des travaux en comités
inter-organisationnels. Nous voulons que la Commission de police du
Québec et que les autorités gouvernementales ne perdent pas leurs
pratiques de consultation. De plus, la performance pour la
réglementation nous laissant maintenant perplexes et sur nos
appétits, nous nous chargerons d'exercer des pressions afin de
réactiver plusieurs dossiers. 1.4 Mise sur pied de mécanismes
susceptibles de garantir l'efficacité recherchée des forces
policières
Soucieux que nous sommes d'assurer des services de protection et de
prévention efficaces, nous nous permettrons de proposer des
mécanismes tant permanents que de transition. La coordination
opérationnelle et la décentralisation de la Commission de police
du Québec seront parmi les cibles de nos suggestions. 1.5 Vers un
concept global de sécurité publique
Plusieurs de nos membres s'occupent de la police, des incendies et
même des services ambulanciers. Ils sont de plus impliqués dans
l'organisation des mesures d'urgence municipales et
certains occupent les fonctions de coordonnateurs municipaux. Cette
polyvalence que l'on retrouve au plan municipal ne semble pas répercuter
au plan provincial où l'on n'a pas cessé de multiplier des
services de protection constitués de constables spéciaux, des
services d'enquêtes spécialisées et des services
d'inspection.
Ces tendances doivent malgré tout s'inscrire dans un concept de
sécurité global où l'on doit orienter toutes les
organisations à mieux se coordonner et à être mieux
encadrées.
2 Propositions d'amendements par rapport au texte actuel de la Loi de
police 2.1 Article 1 Corps de police 2.1.1 Texte actuel "Corps de
police municipal": un corps de police établi par une
municipalité. 2.1.2 Corps de police proposition
Une force constabulaire pour assurer un niveau de service doit maintenir
un effectif minimal de 10 policiers. 2.1.3 But de l'amendement
Différentes études démontrent que pour garantir un
poste en permanence compte tenu de différentes variables comme les
vacances, journées de maladie, congés hebdomadaires, il faut 5
policiers. Conséquemment, pour une patrouille à deux hommes, l'on
doit compter sur 10 policiers. Si l'on doit se doter d'un centre de
communications, il faut ajouter 4 civils comme répartiteurs et un
policier-enquêteur pour les enquêtes générales.
Si une municipalité ne peut financièrement se procurer cet
effectif minimal, il faudrait alors songer à la formule des corps de
police de district du rapport Saulnier et à confier une
responsabilité territoriale à la Sûreté du
Québec pour couvrir les municipalités qui ne sont pas dans le
rayon d'un corps de police de district. Par le minimum de 10 policiers, nous ne
voudrions pas induire en erreur qui que ce soit puisqu'il s'agit là d'un
indicateur arbitraire et qu'il faudrait pondérer et adapter cette
donnée selon les besoins. Ceci signifie qu'une municipalité de
moins de 5000 habitants ne peut se permettre d'établir un service de
police et qu'il faille pour ces populations considérer la
présence de la S.Q. si l'on désire obtenir des taux d'encadrement
qui oscillent entre 1,5 policier à 2,0 par mille habitants et offrir des
services complets de police. Le seuil de population pourrait passer de 5000
à 20 000 habitants lorsque nous considérons d'autres variables.
En effet, la distance à parcourir (rayon de 10 milles), la charge de
travail des policiers, la densité de la population et le degré de
dangerosité des crimes commis peuvent modifier l'encadrement policier
nécessaire. Le National Standards and Goals Commission des Etats-Unis
établit à 75 policiers une force policière qui peut se
permettre une certaine spécialisation. Pour les municipalités qui
ont entre 10 et 75 policiers, la Commission américaine recommande
qu'elles envisagent des regroupements. C'est donc dire que la solution du
rapport Saulnier sur les corps de police de district n'apparaît nullement
exagérée. A l'annexe "A", vous trouverez un mémoire que
nous vous transmettons. Etant donné que sous ce rapport, nous appuyons
le rapport Saulnier, même cette proposition d'amendement ne constitue pas
notre objectif et ne représente qu'une étape. 2.2 Article 7 2.2.1
Texte actuel
Toute personne qui laisse croire faussement qu'elle est un cadet ou
membre de la Sûreté, un cadet ou policier municipal ou un
constable spécial, notamment au moyen du costume qu'elle porte ou
d'insignes qu'elle arbore, commet une infraction et est passible, sur poursuite
sommaire intentée par une personne autorisée à cette fin
par le procureur général, d'une amende d'au moins cinquante
dollars et d'au plus deux cents dollars, et des frais. 1968, c.17, a.7; 1970,
c.12, a.4. 2.2.2 Proposition d'amendement
Ajouter: et pour les agences qui sont les employeurs l'amende ne peut
être inférieure à cent dollars et pourrait être de
cinq cents dollars. 2.2.3 But de l'amendement
Afin d'éviter la confusion d'identité avec des uniformes
non différenciés, nous désirons renforcir ce pouvoir
coercitif à l'adresse des agences. L'employeur est celui qui a
décidé relativement aux spécifications de l'uniforme et
doit être le premier pénalisé.
2.3 Article 9 2.3.1 Texte actuel
La Commission est formée de neuf membres, dont un
président choisi parmi les juges des sessions ou de la Cour provinciale
et un vice-président, nommés par le lieutenant-gouverneur en
conseil qui fixe leur traitement, lequel ne peut être réduit par
la suite. 2.3.2 Proposition d'amendement
Que dans la composition de la Commission de police du Québec, le
nombre de membres issus du milieu policier soit égal à celui des
non-policiers. 2.3.3 But de l'amendement
Dans le premier mémoire de l'Association des chefs de police et
pompiers du Québec au comité Saulnier, notre association
insistait pour que les policiers de carrière puissent davantage
accéder aux postes de membres de la Commission de police du
Québec. Sur ce point, nous désirons que le gouvernement voie dans
cette mesure une norme décente de représentativité au sein
de la Commission de police du Québec. 2.4 Article 10 2.4.1 Texte
actuel
Le quorum de la Commission est de deux membres; sauf lorsque la
Commission siège au cours d'une enquête qu'elle tient en vertu de
la présente loi, ce quorum comprend le président. 1968, c.17,
a.10; 1969, c.22, a.4. 2.4.2 Proposition d'amendement
Lorsqu'il y a une enquête en vertu de la présente loi, un
rapport de recherches est transmis à deux commissaires qui
procéderont à huis-clos à leur propre enquête. Le
président est saisi des conclusions du rapport et exerce à ce
moment son droit de révision sans qu'il lui soit nécessaire
d'avoir siégé. A cette étape, sur la recommandation des
commissaires, le président décide à savoir si la
Commission tiendra une enquête publique ou s'il y a lieu d'arrêter
à ce niveau le processus d'enquête. 2.4.3 But de l'amendement
Nous sommes réticents à ce que le président soit
impliqué à toutes les phases du cheminement d'une plainte.
Toutefois, nous lui conférerions un droit de révision et de
décision à la lumière du rapport. 2.5 Article 11 2.5.1
Texte actuel
La Commission a son bureau principal à Québec ou dans une
localité adjacente, mais elle peut tenir des séances à
tout endroit dans le Québec. 2.5.2 Proposition d'amendement
La Commission établit des bureaux régionaux dans chaque
région administrative. Un commissaire est désigné pour
prendre la direction. Le commissaire préside un conseil disciplinaire de
zone, décide sur les cas mineurs de discipline et renvoie les cas
majeurs pour révision au bureau central. Il peut également
conseiller les municipalités et les services de police. Pour les fins de
leurs responsabilités, les commissaires régionaux
bénéficient de l'assistance d'enquêteurs et de conseillers
en matière policière de la Commission de police du Québec.
2.5.3 But de l'amendement
Dans le mémoire de notre association présenté au
comité Saulnier, nous nous reposions sur un concept de
décentralisation et déconcentration retenu par le présent
gouvernement pour suggérer la décentralisation de la Commission
de police. Ceci aurait pour effet d'éviter bon nombre d'enquêtes
futiles et de permettre à la Commission d'être davantage
consciente de particularismes locaux et régionaux. La Commission
étant plus près des municipalités, le commissaire,
lorsqu'il rend compte au bureau central et assiste à des réunions
de la Commission, serait mieux informé et assurerait la Commission d'un
apport régional essentiel. Certaines modalités de fonctionnement
sont toutefois encore à déterminer.
2.6 Article 16 2.6.1 Texte actuel (extraits)
La Commission est chargée de favoriser la prévention du
crime et l'efficacité des services de police au Québec et elle
doit à ces fins b) conseiller la Sûreté, les corps de
police municipaux et les municipalités en matière
policière et à ces fins, les visiter ou les faire visiter par ses
fonctionnaires et employés; 2.6.2 Proposition d'amendement 2.6.2.1
Début de l'article 16 - en éliminant la prévention du
crime, le texte se lirait maintenant de la façon suivante: "La
Commission est chargée de favoriser l'efficacité des services de
police au Québec et elle doit à ces fins..." 2.6.2.2 Article 16b)
-en éliminant "et à ces fins, les visiter ou les faire visiter
par ses fonctionnaires et employés;" 2.6.2.3 Partage des pouvoirs avec
un Inspectorat ou la Direction générale de la
Sécurité publique.
La Direction générale de la Sécurité
publique assure la coordination de l'action des divers corps de police,
élabore les programmes de prévention du crime et propose les
mesures pour promouvoir la sécurité routière.
L'Inspectorat procède à des inspections annuelles des services de
police, contrôle, analyse et vérifie l'exactitude des inventaires
et rapports annuels des services de police et des services gouvernementaux de
sécurité et d'enquête et formule toute recommandation utile
au gouvernement et plus spécifiquement au procureur
général. 2.6.3 But de l'amendement
Notre objectif de départ serait de situer la Commission dans un
rôle quasi judiciaire et un rôle de conseiller.
Toutefois, nous lui retirons le devoir de visiter qui pourrait avoir le
sens d'inspecter. De plus, même si les avis de la Commission pourraient
comprendre la prévention du crime, l'élaboration des programmes
de prévention serait confiée à la Direction
générale de la Sécurité publique. Ces propositions
d'amendements selon les champs d'attributions indiquées confient
à un Inspectorat de véritables fonctions relatives à
l'inspection et au contrôle de la qualité à la Direction
générale de la Sécurité publique des fonctions
relatives aux opérations. Chacun des trois organismes auraient
conséquemment des rôles différents et précis.
Si le gouvernement trouve trop complexe une telle répartition
tripartite, tout en optant pour un Inspectorat qui relève de
l'Assemblée nationale, nous respecterions le choix d'une Direction
générale de la Sécurité publique
réaménagée qui pourrait comprendre à la fois une
direction de la coordination opérationnelle et une direction de la
surveillance et des contrôles.
Déjà, en 1976, le mémoire de l'Association des
chefs de police et pompiers du Québec à la Commission
parlementaire de la Justice sur le projet de loi 41 faisait état d'un
nouveau partage de pouvoirs (voir annexe "B" p. 2-5) entre la Commission de
police du Québec et la Direction générale de la
Sécurité publique. 2.7 Article 17 2.7.1 Texte actuel 2.7.1.1 La
Commission peut, par règlement, a) déterminer le niveau de
scolarité et les cours de formation policière exigibles ainsi que
les autres qualités requises pour devenir cadet ou membre de la
Sûreté, cadet ou policier municipal, constable spécial ou
directeur ou chef d'un corps de police municipal ainsi que pour exercer une
fonction ou obtenir un grade dans un corps de police municipal;
2.7.1..2 b) prescrire les programmes de formation et de perfectionnement
qui peuvent être dispensés à l'Institut de police du
Québec et dans les écoles de police du Québec visés
à la section VI; 2.7.1.3 c) déterminer les
caractéristiques des uniformes et insignes qui peuvent être
portés par les cadets et membres de la Sûreté, les cadets
ou policiers municipaux et les constables spéciaux ainsi que de leur
équipement; 2.7.1.4 d) déterminer les statistiques, archives,
livres et comptes que doivent tenir la Sûreté et les corps de
police municipaux de même que leurs membres et les constables
spéciaux, ainsi que les formules qu'ils doivent utiliser; 2.7.1.5 e)
prévoir la façon dont un membre de la Sûreté, un
policier municipal ou un constable spécial doit disposer des sommes
d'argent qui lui sont remises en paiement de frais ou d'honoraires ou à
titre de dépôt ou qui sont autrement entrées en sa
possession dans l'exercice de ses fonctions; 2.7.1.6 i) établir une
échelle indicative de traitements susceptibles d'être
versés au directeur ou chef d'un corps de police municipal ainsi qu'aux
membres d'un tel corps qui ne sont pas des salariés au sens du Code du
travail. 2.7.2 Propositions d'amendements 2.7.2.1 Début de l'article 17
et 17a)
Le pouvoir réglementaire est exercé par le gouvernement
qui, selon l'objet de la réglementation peut référer la
préparation dudit projet à la Commission de police du
Québec, à l'Inspectorat ou à la Direction
générale de la Sécurité publique. 2.7.2.2 Article
17b)
Les programmes de formation et les syllabus de cours sont
élaborés par l'Institut de police en collaboration avec le
ministère de l'Education et la Direction générale de la
Sécurité publique; ils font l'objet ultérieurement d'une
approbation du procureur général. L'Inspectorat peut contribuer
à faire prescrire les examens et tests appropriés pour permettre
la vérification des qualités requises pour devenir directeur d'un
corps de police municipal ainsi que pour exercer une fonction ou obtenir un
grade dans un corps de police municipal, faire administrer lesdits examens et
les tests par la Direction générale de la Sécurité
publique et déterminer la procédure à cette fin. 2.7.2.3
Article 17c)
Sur recommandation de l'Inspectorat le gouvernement peut
déterminer les caractéristiques des uniformes et insignes qui
peuvent être portés par les cadets et membres de la
Sûreté, les cadets ou policiers municipaux et les constables
spéciaux, ainsi que de leur équipement et la preuve de statut des
constables spéciaux. 2.7.2.4 Article 17d)
Le gouvernement peut déterminer les documents et renseignements
que doivent transmettre à l'Inspectorat, la Sûreté, les
corps de police municipaux ainsi que les intervalles auxquels tels documents et
renseignements doivent être transmis. 2.7.2.5 Article 17e)
Adopter sur recommandation de la Commission de police du Québec
un code de déontologie relatif à l'éthique et à la
conduite des cadets et membres de la Sûreté, des cadets et
policiers municipaux et des constables spéciaux, ainsi que les sanctions
applicables dans le cas de manquement, la procédure à suivre, la
composition et les attributions des comités ou conseils de discipline et
obliger les municipalités maintenant un corps de police à
constituer un comité ou un conseil de discipline pour entendre, dans les
cas mentionnés aux règlements, des affaires comportant un
manquement aux règles.
Un conseil régional de discipline peut être établi
par la Commission de police pour être saisi des cas où un
comité local de discipline se désisterait pour conflits de
juridiction ou faute majeure.
Le conseil régional de discipline est composé d'un
président permanent à formation juridique, d'un citoyen qui
pourrait être remplacé par d'autres citoyens selon des
modalités à établir, d'un représentant permanent du
syndicat et du commissaire de la Commission.
Le conseil régional de discipline analyse les faits
reprochés et recommande au commissaire les mesures qui s'imposent. Le
commissaire peut alors décider sans autres vérifications ou
demander une pré-enquête à huis clos. 2.7.2.6 Article
17i)
L'article 17i) serait abrogé et remplacé par le texte
suivant: i) les traitements susceptibles d'être versés au
directeur d'un corps de police sont automatiquement ajustés à
partir des conventions collectives de sorte que les directeurs aient comme
traitements un salaire égal à 150% du salarié. le mieux
payé par la convention. Les autres non salariés au sens du Code
du travail appartiennent à des classes intermédiaires de salaire
et les écarts entre chaque classe ne peuvent exéder 10%.
Les bénéfices marginaux sont les mêmes que ceux
offerts aux syndiqués. 2.7.3 Buts des propositions d'amendements et
commentaires 2.7.3.1 Nous croyons que les pouvoirs réglementaires
devraient être exercés par le gouvernement lequel, avant adoption,
demandera selon les compétences requises des projets de règlement
à la Commission de police du Québec, à la Direction
générale de la Sécurité publique ou à
l'Inspectorat.
Si au contraire de cette proposition le gouvernement veut consentir
à une certaine forme de délégation de son pouvoir
réglementaire, nous appuierions une solution avancée à
savoir que le gouvernement approuve les règlements de la Commission et y
apporte les modifications qu'il juge nécessaires. 2.7.3.2 La formation
policière et l'administration de tests d'aptitudes et de connaissances
sont des sphères d'activités qui demandent des révisions
continues et que nous ne pouvons voir comme étant du ressort de la
Commission de police. C'est pourquoi nous verrions la Direction
générale de la Sécurité publique (ou Inspectorat)
dans une direction de la formation et des ressources humaines couvrir ces
domaines. Pour ce faire, la Direction générale de la
Sécurité publique élaborerait et reviserait les programmes
de formation et de ressourcement, déterminerait le contenu et la
durée des stages, certifierait les instructeurs, professeurs,
chargés de cours et assesseurs de stages, établirait un processus
de validation des tests psychométriques, uniformiserait les
méthodes de recrutement et le processus de sélection. 2.7.3.3
Quelqu'un qui ne s'identifie pas correctement et ne présente pas sa
preuve de statut pourrait être l'objet de poursuites, s'il s'agit de
fausses représentations. 2.7.3.4 L'Inspectorat, la Direction
générale de la Sécurité publique et la Commission
de police du Québec seront chargés de fournir des renseignements
propres à informer adéquatement l'Assemblée nationale
(Inspectorat), le procureur général (la Direction
générale de la Sécurité publique), les
municipalités et le ministère de la Justice (la Commission de
police du Québec). Pour ce faire, ces organismes gouvernementaux auront
besoin par exemple du rapport annuel des activités des services de
police. 2.7.3.5 II s'agit d'instaurer un système unique de discipline
pour tous les policiers du Québec selon un code de déontologie
qui pourrait s'inspirer d'un projet à l'annexe "C".
Pour les deux premiers paliers du système nous pourrions nous en
remettre à l'approche de l'annexe "D" et coïncidant avec le niveau
du comité ou conseil local de discipline et le conseil régional
de discipline. Les niveaux qui suivraient seraient ceux établis par la
Commission comme autorité centrale et de façon décisive
dans l'utilisation du droit d'appel à la Cour provinciale.
2.7.3.6 Au lieu d'une échelle indicative de salaires,
l'Association préfère l'énoncé de principes
généraux qui suivraient l'évolution de la situation locale
et régionale. Cette proposition a pour effet également
d'impliquer les instances gouvernementales dans le contrôle concernant
l'application de ces principes. 2.8 Article 18 2.8.1 Texte actuel
Les règlements de la Commission sont subordonnés à
l'approbation du lieutenant-gouverneur en conseil. 2.8.2 Proposition
d'amendements
Les règlements en matière policière sont soumis par
le procureur général pour approbation par le
lieutenant-gouverneur en conseil.
L'Inspectorat, la Commission de police du Québec et la Direction
générale de la Sécurité publique préparent
les projets de règlements qui ont égard à leurs
attributions respectives. 2.8.3 Buts des amendements
II s'agit de s'éloigner d'une délégation des
pouvoirs réglementaires par le gouvernement et à tout le moins de
permettre au gouvernement d'apporter des changements sans lien de subordination
ou de révision de la part des organismes qu'il a constitués.
Cependant, nous désirons conserver l'obligation de consulter les
divers organismes gouvernementaux. 2.9 Article 20 2.9.1 Texte actuel
La Commission doit faire enquête sur la Sûreté ou
tout corps de police municipal à la demande du lieutenant-gouverneur en
conseil ainsi que sur la conduite de tout membre de la Sûreté, de
tout policier municipal ou de tout constable spécial, chaque fois
qu'elle en est requise par le procureur-général; elle est aussi
tenue de faire enquête chaque fois qu'une municipalité, à
la majorité absolue des membres du conseil, lui demande de le faire sur
son corps de police ou sur la conduite de l'un des membres de ce corps ou d'un
constable spécial nommé par le maire. La Commission peut aussi
faire enquête sur la Sûreté ou tout corps de police
municipal ainsi que sur la conduite de tout membre de la Sûreté,
de tout policier municipal ou de tout constable spécial, de sa propre
initiative, ou chaque fois qu'un citoyen lui en fait la demande par
écrit et lui donne des raisons suffisantes à l'appui de sa
demande. 1968, c. 17, a. 20; 1971, c. 16, a. 5. 2.9.2 Proposition d'amendements
2.9.2.1 Au texte actuel, nous ajouterions dans la nomenclature... les membres
de la Gendarmeerie royale du Canada et autres agents de la paix
fédéraux oeuvrant au Québec. 2.9.2.2. Dans son rapport
d'enquête, la Commission peut rendre une ordonnance qui a effet d'un
jugement déclaratoire pour déclarer qu'une personne qui a
été l'objet d'une enquête n'a plus les qualités
requises pour exercer les pouvoirs d'un agent de la paix. 2.9.2.3 L'article 20
est modifié en ajoutant le paragraphe suivant:
Aux fins du présent article, la Commission peut, avant de faire
enquête, procéder à des recherches, soit pour
préparer l'enquête qu'elle doit tenir, soit pour décider
s'il y a lieu d'en tenir une, et, à cette fin, elle peut entendre les
témoins dont l'audition lui semble nécessaire. Cette
pré-enquête s'effectue à huis clos. 2.9.2.4 La Commission
peut ordonner qu'un témoignage ne soit relaté en tout ou en
partie par les media d'information.
Cette ordonnance de non publication et de non divulgation pourrait
être permanente ou n'avoir effet que pour la durée de
l'enquête.
2.9.3 Buts des amendements 2.9.3.1 II s'agit de soumettre au
contrôle de la Commission de police du Québec la conduite de tout
policier oeuvrant au Québec et avec statut d'agent de la paix qu'il soit
un agent de la Sûreté du Québec, un policier municipal, un
membre de la Gendarmerie royale du Canada, un policier fédéral
des ports nationaux ou d'une des deux lignes de chemins de fer. 2.9.3.2 Nous
acceptons que la Commission détienne certains pouvoirs coercitifs
surtout lorsqu'il s'agit de policiers qui ont commis des actes criminels et/ou
des fautes lourdes. D'ailleurs, il y va de l'intérêt de la
profession de sauvegarder l'intégrité et la réputation des
services de police. 2.9.3.3 Cette pré-enquête aurait comme
conséquence de réduire les risques d'enquêtes frivoles et
malicieuses. Ceci permettrait à la Commission de mieux évaluer le
bien-fondé des plaintes et la décision de tenir une enquête
publique.
Ceci permet d'effectuer les recherches au plan régional et
d'éviter lorsque ce n'est pas nécessaire l'audition de
témoins publiquement. 2.9.3.4 II s'agit d'éviter une
publicité indue et de porter atteinte à la réputation de
policiers. 2.10 Article 23 2.10.1 Texte actuel
La Commission doit, chaque fois qu'elle tient des séances
publiques au cours d'une enquête effectuée en vertu de la
présente loi, donner avis de la date et du lieu du début de ces
séances dans un journal français et un journal anglais,
publiés dans la localité la plus proche du lieu des
séances. 2.10.2 Proposition d'amendements
Le premier alinéa de l'article 23 est abrogé et
remplacé par le suivant: La Commission peut, si elle le juge
d'intérêt public, lorsqu'elle tient des séances publiques
au cours d'une enquête effectuée en vertu de la présente
loi ou de l'article 241a de la Loi de la Communauté urbaine de
Montréal, donner avis de la date et du lieu du début de ces
séances dans un journal français, publié dans la
localité la plus proche du lieu des séances. 2.10.3 Buts de la
proposition d'amendements
II s'agit d'établir la règle de la non divulgation et de
laisser à la Commission la discrétion de publier de tels avis,
puisque la plupart du temps il n'y a aucun intérêt à le
faire. 2.11 Article 25 2.11.1 Texte actuel
Lorsqu'une enquête a été faite conformément
aux articles qui précèdent, la Commission est tenue de soumettre
au procureur général un rapport écrit exposant les
constatations qui ont été faites; lorsque l'enquête a
été faite à la demande d'une municipalité, avis
doit aussi être donné à la municipalité des
conclusions de l'enquête; si l'enquête a été faite
à la demande d'un citoyen, la Commission peut aussi l'aviser de ses
conclusions, et aviser la municipalité intéressée s'il y a
lieu. 2.11.2 Proposition d'amendements L'article 25 est remplacé par le
suivant:
Lorsqu'une enquête a été faite conformément
aux articles qui précèdent, la Commission est tenue de soumettre
au procureur général un rapport écrit lui exposant ses
constatations, ses conclusions et, le cas échéant, ses
recommandations et de rendre des ordonnances pour déclarer qu'une
personne qui a fait l'objet d'une enquête n'a plus les qualités
requises pour exercer les pouvoirs d'agent de la paix; lorsque l'enquête
a été faite à la demande d'une municipalité, une
copie du rapport d'enquête doit lui être fournie; si
l'enquête a été faite à la demande d'un citoyen, la
Commission peut aussi lui faire parvenir, ainsi qu'à la
municipalité intéressée, une copie de son rapport
d'enquête. Si l'enquête concerne un membre de la Gendarmerie
royale du Canada ou un agent de la Sûreté du Québec,
une copie du rapport sera transmise au commissaire de la Gendarmerie royale du
Canada ou au directeur général de la Sûreté du
Québec. 2.11.3 But de la proposition d'amendements
Le rapport de la Commission n'expose pas que des constatations mais
également des conclusions, des recommandations et des ordonnances
(lorsque l'ordre public l'exige). C'est l'organisation qui a
procédé à l'embauche d'un policier qui est la
première intéressée par le rapport d'enquête: La
municipalité pour le Service de police, la Sûreté du
Québec et la Gendarmerie royale du Canada. 2.12 Article 26 2.12.1 Texte
actuel
Lorsqu'une enquête a été faite conformément
aux articles qui précèdent, à la demande d'une
municipalité, la Commission peut, si elle constate que la demande
était frivole, fixer le montant de toutes les dépenses encourues
par la Commission relativement à cette enquête et ordonner
qu'elles soient payées par la municipalité; l'ordonnance à
cette fin est homologuée sur requête de la Commission par la Cour
provinciale ou, si le montant en jeu est de trois mille dollars ou plus, par la
Cour supérieure; la Commission exécute ensuite le jugement contre
la municipalité et transmet les deniers ainsi perçus au Ministre
des finances qui les verse dans le fonds consolidé du revenu; la
Commission a les pouvoirs requis pour agir à ces fins sous son nom.
1968, c. 17, a. 26; 1970, c. 12, a. 9. 2.12.2 Proposition d'amendements A
ajouter: 26b) Lorsqu'une enquête demandée par un citoyen est
considérée comme frivole et malicieuse, ce citoyen pourrait,
même lors d'une pré-enquête, se voir imposer une amende qui
n'excéderait pas cinq cents dollars. 2.12.3 But de la proposition
C'est pour prévenir des abus que nous introduisons cet
amendement. 2.13 Commentaires généraux de l'Association sur la
section III portant sur la Sûreté du Québec 2.13.1
Lorsqu'un service de police municipal demande en assistance la
Sûreté du Québec, il conserve sa juridiction et continue de
diriger les opérations et de contrôler les initiatives.
Néanmoins, si le service de police municipal transfère à
la Sûreté du Québec sa responsabilité,
l'intervention cesse d'être interprétée comme un cas
d'assistance et la Sûreté du Québec considère cette
intervention comme une activité qui lui est propre. 2.13.2 Dans une
région donnée, lorsqu'il y a une situation d'urgence, nous ne
croyons pas que seule la Sûreté du Québec pourrait
être désignée pour diriger les opérations. En
attendant la constitution des corps de police de district, la Direction
générale de la Sécurité publique par des centres
régionaux de coordination pourrait confier à des coordonnateurs
et un personnel de la Sûreté du Québec et des services de
police municipaux qui l'assisteraient le soin de planifier et coordonner des
opérations et programmes nécessitant une collaboration
inter-services.
Il est entendu que si cette solution n'est pas retenue le leadership
d'une situation peut être assumé par un directeur de service de
police municipal. 2.13.3 Si les officiers de la Sûreté du
Québec peuvent être des juges de la paix, les cadres
supérieurs des forces policières municipales dont le directeur
devraient l'être également. 2.13.4 L'Association des chefs de
police et pompiers de la province de Québec se demande pourquoi à
l'égard de la discipline (art. 47c) et des conditions
d'admissibilité (art. 47d) la Sûreté du Québec
serait régie différemment des autres services de police. 2.13.5
Pour éviter que les membres de la Sûreté du Québec
s'adonnent à des pratiques de maraudage et de sollicitation de nature
à provoquer l'abolition d'un service de police ou à en diminuer
les effectifs, de telles formes d'intrusion devraient être
dénoncées auprès de la Commission de police du
Québec dans l'immédiat. Suite à des amendements possibles,
l'Inspectorat pourrait être l'instance qui examine cette situation. 2.14
Article 52 2.14.1 Texte actuel
Toute municipalité de cité ou de ville est tenue
d'établir par règlement et de maintenir dans son territoire un
corps de police; toutefois, le lieutenant-gouverneur en conseil peut dispenser,
pour la période qu'il détermine, une telle municipalité de
se conformer à cette obligation, s'il est d'avis que la population de la
municipalité ou d'autres circonstances le justifient.
Toute autre municipalité locale au sens du Code municipal est
autorisée à établir et maintenir un tel corps de police.
2.14.2 Proposition d'amendements 2.14.2.1 Jusqu'à ce que le rapport
Saulnier soit appliqué, pour les municipalités dont la population
est en deçà de 5000 habitants, à l'exception des
municipalités déjà dotées d'un service de police,
la Sûreté du Québec prend l'entière
responsabilité de la protection policière de ces
municipalités. Les municipalités qui optent pour le maintien du
service de police ne peuvent réduire leurs effectifs sans une
autorisation expresse du Ministre de la Justice suite à une
évaluation de la part de l'Inspectorat. Quant aux municipalités
dont la population est entre 5000 et 10 000 habitants, il ne peut y avoir des
effectifs inférieurs à un seuil de 10 policiers. Pour les
populations de 10 000 à 20 000 habitants, le taux d'encadrement minimal
doit être de 1,5/1000 habitants, ce qui indique des effectifs minima de
15 à 30 policiers. 2.14.2.2Les municipalités dont les populations
sont entre 5000 habitants et 20 000 habitants, lorsqu'elles réduisent
leurs effectifs, les demandes de réduction doivent être transmises
à l'Inspectorat pour vérifier le niveau des services offerts par
rapport aux besoins. Ces municipalités peuvent choisir d'abandonner
volontairement leurs services de police ou se voir forcer de le faire suite aux
vérifications de l'Inspectorat. 2.14.2.3 La Sûreté du
Québec facture les municipalités qui contractuellement sont
protégées par la force policière provinciale ou qui ont
fait défaut de respecter leurs obligations.
Les modalités de la facturation sont déterminées
par des protocoles-type d'ententes dont le contenu fera l'objet de discussions
avec l'Union des municipalités et l'Union des conseils de comté.
2.14.2.4 Nonobstant ce qui précède, les policiers municipaux qui
sont affectés par des abolitions et réductions d'effectifs seront
intégrés dans les rangs de la Sûreté du
Québec.
Les policiers intégrés par la Sûreté du
Québec sont assimilés à une fonction comportant des
responsabilités équivalentes à la fonction qu'ils
exerçaient auparavant. La classe salariale s'y rattachant est celle de
la Sûreté du
Québec qui correspond à la fonction. Ils ont les
mêmes avantages sociaux que la Sûreté du Québec.
Lesdits policiers peuvent se prévaloir de droits acquis et
demeurer dans le territoire de la municipalité qu'ils desservent. Ils
sont également éligibles aux promotions à
l'intérieur des rangs de la Sûreté du Québec et
peuvent demander un transfert.
Si un différend est signalé à l'occasion d'une
telle intégration, il doit être réglé par la
Commission de police du Québec. 2.14.3 But des propositions
d'amendements
Pour éviter l'improvisation et clarifier certaines situations
déjà énoncées (voir annexe "E") dans une
résolution transmise au Ministre de la Justice, notre Association
réaffirme qu'il s'agit de propositions transitoires et pour leur
application immédiate. Il est à noter que nous ne faisons aucune
distinction selon qu'il s'agit d'une municipalité régie par la
Loi des cités et villes et une municipalité au sens du Code
municipal. Notre mémoire de 1976 sur le projet de loi 41 (annexe "B")
faisait déjà appel aux notions exprimées dans notre
proposition.
2.15 Articles 53 et 53a) 2.15.1 Commentaires généraux
Comme les règlements adoptés en vertu des articles 53 et
53a) s'appliquent sous réserve, l'adoption d'un code de discipline ou de
déontologie uniforme rendra les règlements concernant la
discipline inapplicables. Quant à déterminer les endroits
où les membres du corps de police peuvent avoir leur résidence,
nous croyons que ce pouvoir réglementaire pourrait comporter un
caractère discriminatoire. 2.16 Article 54 2.16.1 Texte actuel
Tout corps de police municipal et chacun de ses membres sont
chargés de maintenir la paix, l'ordre et la sécurité
publique dans le territoire de la municipalité pour laquelle il est
établi, ainsi que dans tout autre territoire sur lequel cette
municipalité a compétence, de prévenir le crime ainsi que
les infractions à ses règlements et d'en rechercher les auteurs,
1968, c. 17, a. 54; 1968, c. 18, a. 2. 2.16.2 Proposition d'amendements
A ajouter dans un article 54b):
Les principales aires de responsabilité de la police en terme de
fonctions: -identifier les criminels et circonscrire tous les actes criminels
susceptibles de perturber l'équilibre social afin de procéder,
lorsqu'approprié, à l'arrestation des suspects et de
déclencher des procédures judiciaires; -contribuer à faire
réduire, de façon significative, la commission de crimes par
rétablissement de programmes de prévention, de surveillance par
mode de patrouille préventive ou autres mesures jugées
adéquates; -protéger les individus qui pourraient se voir sujets
à des dangers physiques ou moraux; -sauvegarder les droits de la
personne; -au niveau des communications, voir à ce que la
mobilité, tant des personnes que des véhicules, ne soit pas
gênée; -porter assistance à ceux qui ne peuvent s'occuper
de leur propre personne pour des raisons de handicap physique,
d'arriération mentale ou autres motifs; -se préoccuper des
problèmes conflictuels; -identifier les problèmes qui pourraient
être de nature à menacer la sécurité de l'Etat;
-susciter un sentiment de sécurité dans la population; -procurer
à la population une gamme de services d'urgence considérés
comme nécessaires et utiles. 2.16.3 But de proposition d'amendements
S'appuyant sur une philosophie de base axée sur une police
préventive, nous avons désiré apporter davantage de
précision sur les fonctions policières. De plus, il faut
permettre au directeur du service de police d'établir ses
priorités à partir d'un cadre de références.
Ainsi, le directeur de service de police peut par une série
d'indicateurs afin d'évaluer la pertinence des services rendus, à
savoir: -déterminer si le service rendu est en étroite relation
avec les objectifs établis par le service de police; -établir un
estimé des coûts du service à être rendu; -bien
informer la population que la continuité d'un tel service pourrait
affecter le rendement des fonctions policières; -établir un
protocole d'entente à l'effet que le service continuera d'être
rendu jusqu'à ce qu'un autre organisme puisse le dispenser mieux que le
service de police. 2.17 Article 55 2.17.1 Texte actuel
Tout corps de police municipal est sous la direction d'un directeur ou
chef qui le commande. 2.17.2 Proposition d'amendements A ajouter:
Le directeur d'un corps de police dirige, administre et coordonne les
activités administratives et opérationnelles du corps de
police.
2.18 Article 60 2.18.1 Texte actuel
Le conseil de toute municipalité visée à l'article
52 peut faire des règlements pour conclure avec une autre
municipalité entièrement ou partiellement située dans un
rayon de vingt milles une entente ayant pour objet soit de lui fournir l'usage
de ses lieux de détention et les services de son corps de police, soit
d'en organiser un en commun avec elle; cette autre municipalité peut
adopter un règlement pour accepter cette entente, pourvoir au paiement
des dépenses et soumettre son territoire à la juridiction de ce
corps de police.
L'entente doit être conclue pour une période de six ans et
elle se renouvelle par périodes successives de trois ans à
défaut d'avis écrit de six mois donné par une partie
à l'autre.
L'entente peut prévoir la formation d'un comité
intermunicipal et la délégation à ce comité de la
totalité ou d'une partie des pouvoirs que possèdent les
municipalités à l'égard de la fusion qui fait l'objet de
l'entente.
Les règlements qui l'autorisent requièrent l'approbation
du ministre des Affaires municipales et de la Commission. 1968, c. 17, a. 60;
1969, c. 22, a. 15. 2.18.2 Proposition d'amendements
A ajouter au premier paragraphe:
L'entente peut porter sur certains services techniques et
spécialisés. 2.18.3 But de la proposition d'amendements
Notre objectif demeure une répartition des territoires à
protéger entre les 34 corps de police de district et la
Sûreté du Québec. Toutefois, dans une première
phase, les services qui veulent mettre en commun les communications, le domaine
des enquêtes, le service d'identité judiciaire peuvent ainsi le
faire. Ceci constitue en quelque sorte une étape vers le regroupement et
la régionalisation. Ces expériences prépareraient la voie
à des ententes intermunicipales plus globales et se rapprochant d'un
seuil de population de 20 000 habitants pour les corps de police de district.
Dans cette période transitoire, un coordonnateur d'un centre
régional tactique et opérationnel de la Direction
générale de la Sécurité publique pourrait dans les
régions offrir aux services de police municipaux et à la
Sûreté du Québec des services d'analyse
opérationnelle afin d'établir des cibles opérationnelles,
de coordonner des opérations particulières qui dépassent
les compétences sectorielles et territoriales, de requérir l'aide
de certains services de police. Les programmes de prévention et certains
services professionnels et techniques pourraient être
générés par ce centre régional. Le personnel requis
pour le centre régional pourrait être prêté par la
Sûreté du Québec et les services de police municipaux selon
des protocoles d'entente avec des modalités qui restent à
définir. 2.19 Article 62 2.19.1 Texte actuel (premier paragraphe)
Lorsqu'un policier municipal agit en qualité d'agent de la paix
dans un autre territoire que celui de la municipalité qui l'emploie, le
procureur général est, à compter de l'entrée en
vigueur de la présente loi, réputé être son
employeur pour les fins de la Loi des accidents du travail (Statuts refondus,
1964, chapitre 159) et il fait partie de la cédule II de ladite loi.
2.19.2 Proposition d'amendement
L'article 62 est modifié par l'insertion, après le premier
alinéa, du suivant: L'alinéa précédent s'applique
également au cadet ou policier municipal qui participe à des
cours de formation policière à l'Institut de police du
Québec ou dans une école de police visée dans l'article
78, ainsi qu'à l'étudiant inscrit au programme d'enseignement de
techniques policières dans un collège d'enseignement
général et professionnel alors qu'il est en stage à
l'Institut de police du Québec. 2.19.3 But de la proposition
d'amendement
Nous trouvons équitable de protéger également les
cadets, policiers et étudiants lorsqu'ils poursuivent des études
et sont en dehors de leur territoire. L'un des principes qui doit ressortir et
qui est relié à cette préoccupation: Le policier municipal
étant sur son territoire un agent de la paix, la municipalité est
réputée son employeur pourvu qu'il n'ait pas commis une faute
lourde. Cette disposition devrait être incorporée dans la Loi de
police.
2.20 Articles 62a à 62c. 2.20.1 Proposition relativement à
la rente de veuve et aux enfants
Au cas de décès, la rente viagère de la veuve
devrait être de 50% du traitement au moment du décès du
policier. La rente versée aux enfants devrait être de 5% par
enfant jusqu'à ce qu'ils aient atteint l'âge de la majorité
de sorte que l'addition de rente de veuve et des rentes aux enfants garantisse
un revenu familial égal à 70% du traitement du policier au moment
du décès. 2.20.2 Proposition relativement au principe
d'indexation
Ces rentes devraient être indexées chaque année en
se basant sur l'indice du coût de la vie. 2.21 Article 63 2.21.1 Texte
proposé
L'article 63 de ladite loi, modifié par l'article 16 du chapitre
22 des lois de 1969, l'article 15 du chapitre 12 des lois de 1970 et par
l'article 6 du chapitre 16 des lois de 1971, est remplacé par le
suivant:
Le conseil d'une municipalité visée dans l'article 52 ne
peut, quelles que soient les modalités de son engagement, et
malgré toute disposition inconciliable d'une loi générale
ou spéciale, destituer le directeur ou chef de son corps de police ou
réduire son traitement que par une résolution adoptée par
le vote affirmatif d'au moins la majorité absolue de ses membres.
Le conseil d'une telle municipalité ne peut non plus,
malgré toute disposition inconciliable d'une loi générale
ou spéciale et quelles que soient les modalités de l'engagement,
destituer un autre membre de son corps de police qui n'est pas un
salarié au sens du Code du travail et qui aura été au
service de la municipalité depuis au moins six mois, ni réduire
son traitement que par une résolution adoptée par le vote
affirmatif d'au moins la majorité absolue de ses membres.
Les dispositions du présent article s'appliquent également
au policier municipal salarié au sens du Code du travail et qui n'est
pas représenté par une association de salariés
détenant une accréditation.
La résolution visée au premier ou au deuxième
alinéa doit être signifiée à la personne qui en fait
l'objet selon les dispositions prévues au Code de procédure
civile; en cas d'impossibilité, la Commission détermine, à
la requête de la municipalité, un autre mode de signification.
La Commission, à moins que la personne visée par la mesure
ne démissionne et acquiesce aux allégations, procède
à une enquête dans les 30 jours qui suivent la signification de la
résolution.
Il incombe à la municipalité de prouver le
bien-fondé de la destitution, de la réduction de traitement ou de
la suspension sans traitement.
Si la résolution vise la destitution, elle emporte la suspension
de la personne qui en fait l'objet, jusqu'à ce que la destitution prenne
effet conformément à l'alinéa suivant: La destitution ou
la réduction de traitement a effet uniquement: a) à compter du
moment où la personne qui en fait l'objet y acquiesce; b) à
compter du moment où l'ordonnance suite à l'enquête
confirme la résolution. Si la résolution de la
municipalité est maintenue, la Commission peut ordonner au directeur ou
policier visé par les mesures de rembourser la municipalité d'une
partie de traitement qui est en sus du montant auquel il aurait droit selon
l'alinéa précédent et conséquemment pour une
période qui n'est pas couverte.
L'ordonnance à ces fins est homologuée par la Cour
provinciale ou, si le montant en jeu est de trois mille dollars ou plus, par la
Cour supérieure; l'intimé peut ensuite exécuter le
jugement contre la municipalité.
Malgré le quatrième alinéa, si la résolution
de la municipalité fait suite à une recommandation de la
Commission dans un rapport d'enquête, un appel est porté devant la
Cour provinciale, dans le district judiciaire dont la municipalité fait
partie. Cet appel est entendu par trois juges désignés par le
juge en chef, lesquels statuent alors en conformité du présent
article. 2.21.2 A l'instar de l'article 35 concernant le directeur
général de la Sûreté du Québec nous
désirons transformer le droit d'appel en une obligation d'enquête
de la part de la Commission de police du Québec.
De cette façon, à moins qu'il ne s'agisse d'une faute
lourde et que l'intimé acquiesce, le directeur et le non salarié
au sens du Code du travail bénéficient d'une présomption
d'innocence et continuent de recevoir la rémunération à
laquelle ils ont droit jusqu'au jugement de la Commission.
Nous n'avons pas voulu limiter ces dispositions au directeur de police
et nous acceptons que le policier municipal qui n'est pas
représenté par une association de salariés détenant
une accréditation puisse être couvert par la même obligation
d'enquête.
Nous maintenons le principe d'homologation pour légaliser des
actions ultérieures qui pourraient être prises.
Quant au droit d'appel, il existerait lorsque la municipalité
donne suite à un rapport d'enquête de la Commission. Alors,
l'appel serait entendu devant trois juges de la Cour provinciale.
Cette position eu égard à l'article 63, fait suite
à notre mémoire de 1973 (annexe "F") et notre premier
mémoire devant le comité Saulnier... 2.22 Article 64 2.22.1
Commentaires et proposition
L'Association des chefs de police et pompiers du Québec
recommande que ceux qui ont le statut de constables spéciaux, à
l'exception de ceux qui sont soumis à l'autorité du directeur du
service de police d'une municipalité, relèvent fonction-nellement
de la Sûreté du Québec.
En effet, l'encadrement de ces constables spéciaux surtout en
milieu municipal n'est pas toujours assumé par une personne issue d'une
carrière policière. La Sûreté du Québec se
doterait alors d'un mécanisme de contrôle et de supervision
adapté à ce contexte, les responsabilités administratives
continuant de relever de ces organismes.
Toutefois, pour les constables spéciaux appartenant à des
organismes gouvernementaux et para-gouvernementaux, nous continuons de proposer
leur intégration à la Sûreté du Québec. 2.23
Article 65 2.23.1 Texte actuel
Le conseil de toute municipalité visée à l'article
52 peut, par règlement autoriser le maire à nommer par
écrit, en cas d'urgence et pour une période n'excédant pas
sept jours, des personnes désignées sous le titre de constables
spéciaux, pour maintenir la paix, l'ordre et la sécurité
publique dans le territoire de la municipalité ainsi que dans tout autre
territoire dans lequel elle a compétence, de prévenir le crime
ainsi que les infractions à ses règlements et d'en rechercher les
auteurs. Tout règlement adopté en vertu de l'alinéa
précédent peut prescrire le nombre maximum de personnes que le
maire peut nommer constables spéciaux et fixer le montant maximum de la
rémunération qui peut leur être accordée. 2.23.2
Proposition d'amendement
Nouveau paragraphe à intercaler entre le premier et le
deuxième paragraphe du texte actuel:
Le conseil municipal peut adopter un règlement autorisant le
maire à nommer pour une période n'excédant pas quatre mois
des constables spéciaux pour des problèmes saisonniers
particuliers provoquant une surcharge de travail au service de police.
Les constables spéciaux ainsi désignés sont
assujettis aux mêmes exigences d'admissibilité que les
policiers.
Le règlement municipal doit être approuvé par le
procureur général et le ministre des
Affaires municipales après un avis de la part de
l'Inspectorat.
Nouveau paragraphe, après le deuxième paragraphe
actuel:
Dans les municipalités où des constables spéciaux
ont fait l'objet d'une nomination, ces derniers relèvent soit du
directeur d'un service de police municipal dans les municipalités qui
maintiennent un tel service ou d'un officier désigné par le
directeur général de la Sûreté du Québec pour
les municipalités qui ne sont pas dotées d'un service de
police.
Une municipalité qui enfreint la loi à cet égard
est sujette à une amende maximum de $500 par jour. 2.23.3 Buts des
amendements proposés
Nous voulons tout d'abord qu'il existe un peu plus de souplesse pour
faire face aux problèmes saisonniers et touristiques et
conséquemment conférer des pouvoirs de nomination pour les
constables spéciaux qui soient néanmoins assujettis à des
contrôles et des conditions spécifiques.
La ligne d'autorité au plan opérationnel ne pourrait venir
que du directeur d'un service de police municipal ou d'un sous-officier ou
officier de la Sûreté du Québec. Nous voyons dans cette
mesure une excellente façon d'utiliser ceux qui ont
complété leur formation policière et attendent qu'un poste
dans un service de police soit créé ou laissé vacant.
Il nous apparaît important pour faire respecter ces dispositions
qu'une pénalité sous forme d'amendes soit prévue puisque
plusieurs municipalités passent actuellement outre à l'esprit des
amendements projetés. 2.24 Article 67 2.24.1 Texte actuel
Tout constable spécial nommé en vertu de l'article 64
prête les serments prévus à l'article 4 devant le juge qui
le nomme.
Tout constable spécial nommé par le maire d'une
municipalité prête ces serments devant lui ou devant le greffier
ou secrétaire-trésorier de la municipalité.
Un écrit constatant la prestation de ces serments doit être
rédigé sur-le-champ en deux exemplaires dont l'un est remis
à la personne qui le prête. 2.24.2 Proposition d'amendements au
deuxième paragraphe
Tout constable spécial nommé par le maire d'une
municipalité prête serment devant le directeur du service de
police ou l'officier commandant de la Sûreté du Québec
selon le cas. 2.24.3 Buts des amendements proposés
II est important que dès le départ les constables
spéciaux sentent le lien d'autorité s'établir par le
pouvoir de nomination du maire et l'assermentation devant un officier
supérieur de police. 2.25 Article 72 2.25.1 Texte actuel
Tout constable spécial doit, chaque fois qu'il agit en cette
qualité, porter un insigne conforme aux règlements de la
Commission adoptés en vertu du paragraphe c de l'article 17 et garder
sur lui, un exemplaire de l'écrit portant sa nomination et l'exhiber
chaque fois qu'il en est requis à l'occasion d'un acte qu'il pose dans
l'exercice de ses fonctions.
Tout constable spécial qui contrevient aux dispositions de
l'alinéa précédent commet une infraction et est passible,
sur poursuite sommaire, d'une amende de cent à deux cents dollars, et
des frais. 2.25.2 Proposition d'amendements
Le premier paragraphe remplacé par: ... aux règlements
relatifs à l'éthique professionnelle et l'adoption d'un code de
déontologie uniforme dont la responsabilité de surveillance
incombera à la Commission de police du Québec et garder sur
lui... 2.25.3 Buts des amendements proposés
II faut que le constable spécial soit subordonné aux
mêmes normes de discipline et d'éthique que les policiers
puisqu'ils exercent les pouvoirs d'agents de la paix. 2.26 Article 75 2.26.1
Texte actuel
L'Institut est chargé de dispenser des cours de formation
policière et de perfectionnement aux cadets et aux membres de la
Sûreté. 2.26.2 Propositions d'amendements
La Direction générale de la Sécurité
publique est chargée de concevoir et approuver les programmes de
formation policière et à les faire préparer et dispenser
par l'Institut de police du Québec pour les cours de formation de base,
de spécialisation et de perfectionnement. Quant aux parties de
programmes qui peuvent être dispensées par les collèges et
universités, la Direction générale de la
Sécurité publique exerce sa fonction de développement
conjointement avec le ministère de l'Education et les organismes mis sur
pied pour représenter les collèges et universités.
Les cours de formation policière et de perfectionnement sont
destinés aux cadets et membres de la Sûreté, aux cadets et
policiers des services de police municipaux. 2.26.3 Buts des amendements
proposés
La conception, le développement et l'approbation des programmes
de formation à l'intention des policiers du Québec sont des
attributions qui sont conférées à la
Direction générale de la Sécurité publique
qui doit impliquer d'autres instances concernées par le processus.
Les policiers municipaux non couverts par le texte actuel sont
insérés afin de placer tout le monde sur un pied
d'égalité.
Des principes d'équité et d'égalité de
statuts devraient faire en sorte que les policiers municipaux qui suivent des
cours à l'Institut de police du Québec se fassent payer leurs
frais de scolarité et de transport par le gouvernement du Québec
après que la
Direction générale de la Sécurité publique
se soit montrée en accord avec ces initiatives, comme c'est le cas
à Ottawa pour le Collège canadien de la police. 2.27 Article 77
2.27.1 Proposition
Abolir cet article à cause des changements à l'article 75.
2.28 Autres propositions en matière de formation policière
Le gouvernement du Québec devrait préciser par des
politiques mieux explicitées ses politiques de contingentement ou
d'admissibilité dans les CEGEP à l'option des techniques
policières conduisant au D.E.C. en techniques auxiliaires de la
justice.
De plus, l'Association des chefs de police et pompiers du Québec
recommande un stage obligatoire dans des services de police
accrédités par ce collège avant l'obtention d'un D.E.C. en
techniques policières.
Ce stage devrait s'effectuer avant la cinquième session et serait
considéré comme éliminatoire, de sorte que ceux qui ne
peuvent poursuivre un plan de carrière en milieu policier fassent
l'objet d'une nouvelle orientation. 2.29 Annexe A et B de la loi de police
2.29.1 Proposition
Dans les serments, on devrait toujours retrouver: "selon les
prescriptions du Code de déontologie". 3.2 Appui conditionnel de
l'Association dû à des éléments de concordance:
3.2.1 Article 1
Nous acceptons à l'article 1 les nouvelles significations de
"municipalité" à f) et "directeur" à h).
Nous vous recommandons de remplacer l'actuelle définition de g)
par la nôtre à la page 8 (2.1.2) de ce mémoire. 3.2.2
Article 2
A l'article 2a), nous qualifierions le "préposé" comme
étant le préposé de la municipalité et nous vous
recommandons de modifier votre texte en conséquence.
Quant à l'article 2b), vous vous référez à
d'autres catégories d'agents de la paix. Nous vous mettons en garde sur
la prolifération d'une police déguisée et la constitution
au sein de divers ministères et de certaines sociétés
d'Etat, de services de sécurité et d'enquête donnant
souvent l'impression d'une police parallèle. A l'article 2c), nous vous
référons à notre proposition concernant l'article 17d) sur
des documents qui seraient transmis à l'Inspectorat et à nos
remarques sur les renseignements qu'auront à transmettre la Direction
générale de la sécurité publique, la Commission de
police du Québec et l'Inspectorat (2.7.3.4 aux pages 25 et 26). 3.2.3
Article 10
Au texte de remplacement du projet de loi 48, nous ajouterions notre
proposition d'amendement de 2.4.2 (pages 13 et 14). 3.2.4 Article 21
Nous appuyons les textes de remplacement, l'abrogation et l'addition
dans la mesure où les dispositions de cet article s'appliquent à
la Commission d'enquête sur le crime organisé. 3.2.5 Article
22
Nous restreignons la portée de cet article à la Commission
d'enquête sur le crime organisé. 3.2.6 Article 22 a), b), d), e),
f) et g)
Nous continuons de limiter ces dispositions à la Commission
d'enquête sur le crime organisé. Au cas où le gouvernement
déciderait d'en faire un article à portée
générale selon le scénario du projet de loi 48, nous vous
demandons d'examiner la conciliation possible entre ces dispositions et notre
proposition relativement à l'article 63 (2.2.1.1), pages 50 - 54).
3.2.7. Article 29
Nous trouvons quelque peu dangereux que la Sûreté du
Québec agisse de sa propre initiative et nous proposons que sur cet
aspect vous vous en remettiez à nos commentaires généraux
de 2.13.1 et 2.13.2 (pages 35 et 36). 3.2.8. Article 45
En vertu du principe énoncé à 4.6.2., nous serions
d'avis que les directeurs des services de police municipaux aient les
mêmes prérogatives. 3.2.9 Article 53
En vous référant à 2.15.1 à la page 41, nous
recommandons que vous retiriez à a) "ainsi qu'à la discipline" et
à b) "et prévoir les sanctions applicables en cas d'infraction
aux règlements concernant la discipline", puisque nous proposons
l'adoption d'un code de discipline ou de déontologie unique.
Conséquemment, nous acceptons la suppression du c) dans le projet
de loi 48. Nous trouvons que l'article 53 d) pourrait aller à l'encontre
de la charte des droits de la personne et entraîner éventuellement
des plaintes de discrimination. Si vous conservez "déterminer les
endroits où les membres du corps de police peuvent avoir leur
résidence". 3.2.10 Article 53a)
Nous sommes d'accord pour qu'il soit abrogé puisque nous
insistons sur le fait qu'il n'y ait qu'un seul code de discipline ou de
déontologie pour tous les policiers du Québec. 3.2.11 Article
60a)
Nous appuyons l'amendement du projet de loi 48, en vous demandant
d'ajouter notre proposition de 2.18.2 relativement à des ententes
intermunicipales sur des services techniques et spécialisés en
accord avec nos explications à 2.18.3 (pages 46 et 47). 3.2.12 Article
62
Nous acceptons les dispositions du projet de loi 48 et nous vous
demandons d'ajouter notre proposition à 2.19.2 relativement aux cadets,
policiers qui suivent des cours et étudiants inscrits au programme du
D.E.C. en techniques auxiliaires de la Justice (option des techniques
policières).
3.2.13 Article 65
Nous supportons le fond de l'addition du projet de loi 48 en
préférant que le gouvernement choisisse le texte de notre
proposition à 2.23.2 puisqu'il comprend des modalités
d'encadrement et des moyens de contrôle qui n'ont pas été
prévus par le projet de loi 48. 3.2.14 Article 72
Nous acceptons le texte de remplacement en suggérant que vous
insériez notre proposition à 2.25.2 (page 59). 3.3 Propositions
de l'Association des chefs de police et de pompiers du Québec modifiant
la loi de police sur des articles où le projet de loi 48 a omis
d'apporter des amendements. 3.3.1 Article 9
Au 2.3.2 (page 11) et 2.3.3, nous recommandons qu'il y ait au moins
autant de membres policiers que non policiers à la Commission de police
du Québec. Nous constatons d'ailleurs que le gouvernement continue
à ignorer l'esprit de cette recommandation qui a déjà
été formulée par le passé et procède surtout
à la nomination de juges comme membres. 3.3.2 Article 11
Par notre proposition d'amendement à 2.5.2 et les explications de
2.5.3 (pages 13 et 14), nous prévoyons l'établissement de bureaux
régionaux pour la Commission de police du Québec et les
rôles des commissaires dans les régions. 3.3.3 Article 23
A 2.10.2 et selon les explications de 2.10.3, nous recommandons notre
proposition des pages 31 et 32. 3.3.4 Article 25
Nous vous soumettons un nouveau texte à 2.11.2 (page 33) selon
les motifs mentionnés à 2.11.3 (pages 33 et 34). 3.3.5 Article
54
Afin de spécifier davantage la nature du mandat des services de
police et de permettre au directeur de mieux évaluer la pertinence des
services rendus, notre proposition de 2.16.2 (pages 42 et 43) doit s'ajouter au
présent texte de l'article 54. 3.3.6 Article 55
Pour éviter les risques d'ambiguïté à propos
de la fonction de directeur de police, nous introduisons une proposition
d'amendement à 2.17.2 (pages 44 et 45) que nous vous demandons
d'incorporer. 3.3.7 Article 64
Sans nécessairement formuler une proposition précise, nous
vous référons à 2.22.1 (page 54), relativement à
l'autorité de qui devrait relever les constables spéciaux. 3.3.8
Article 67
Par notre proposition à 2.24.2 modifiant le deuxième
paragraphe, nous désirons que le directeur d'un service de police ou un
officier commandant de la Sûreté du Québec puisse
procéder à l'assermentation des constables spéciaux. 3.3.9
Article 75
Par 2.26.2 nous conférons à la Direction
générale de la sécurité publique des rôles de
conception et d'approbation de programmes de formation policière. Nous
vous suggérons de vous saisir des commentaires de 2.26.3. Nous vous
référons de plus à notre proposition d'amendement de
2.7.3.2 pour les buts et commentaires de cet amendement. 3.3.10 Articles 77 et
78
Nous recommandons d'abolir ces articles à cause de notre
proposition à l'article 75. Le texte de remplacement du projet de loi 48
à l'article 78, mis à part le rôle de la Commission de
police du Québec, reflète l'esprit de notre proposition
d'amendement de l'article 75 et le gouvernement devrait rejoindre notre
position en adoptant ladite proposition.
3.3.11 Autres propositions en matière de formation
policière
A 2.28 (page 62) l'Association propose entre autres un stage obligatoire
dans des services de police accrédités. 3.4 Divergences
marquées entre le projet de loi 48 et les propositions de l'Association
des chefs de police et de pompiers du Québec. 3.4.1 Article 6
L'Association des chefs de police et de pompiers du Québec
s'oppose à la suppression du troisième alinéa de l'article
6 et en recommande le maintien puisqu'il élimine des risques
d'infiltration de la politique dans le domaine policier et prévoit des
pénalités pour celui qui y contrevient. 3.4.2 Article 16
Par notre proposition à 2.6.2 nous favorisons une
répartition tripartite entre la Commission de police qui se voit
limitée à un rôle quasi judiciaire et un rôle
conseil, à la Direction générale de la
Sécurité publique la coordination de l'action
opérationnelle des forces policières, l'élaboration des
programmes de prévention et les mesures visant la sécurité
routière, à l'Inspectorat les rôles d'inspection (le
contrôle quasi judiciaire étant déjà assumé
par la Commission de police du Québec) et d'analyse.
Cette position de notre part nous fait rejeter à l'article 16b)
l'établissement d'un service général d'inspection et le
projet de registre de l'article 16d) puisque l'Inspectorat exercera ces
rôles (voir 2.6.3). De plus, nous ne voyons pas la Commission exercer un
rôle direct en matière de prévention du crime. 3.4.3
Article 17
Notre proposition d'amendement à 2.7.2 (pages 20 à 24) et
les motifs à son soutien à 2.7.3 (pages 24 à 27) a pour
but d'enlever à la Commission de police du Québec le pouvoir de
législation déléguée qui lui avait
été conféré pour la restreindre à soumettre
au gouvernement par l'intermédiaire du procureur-général
une recommandation concernant un Code de déontologie. En effet, le
pouvoir réglementaire est concentré vers le gouvernement. Dans
cet article 17, nous indiquons des sphères propres aux trois organismes
lorsqu'il s'agit d'assister le gouvernement dans l'exercice de son pouvoir
réglementaire. De plus, par le biais de l'article 17e) à 2.7.2.5
et 2.7.3.5, nous proposons que soit instauré un système unique de
discipline comprenant divers niveaux dont le comité local de discipline,
un conseil régional de discipline, les enquêtes de la Commission
de police du Québec et la Cour provinciale comme palier d'appel.
Par l'abrogation de l'article 17i), nous proposons un mécanisme
automatique d'ajustement des salaires des directeurs et cadres non
syndiqués au lieu d'une réglementation propre à une
échelle indicative. 3.4.4 Article 18
Le projet de loi 48 permet au gouvernement de modifier un
règlement de la Commission de police du Québec. Nous constatons
qu'il s'agit là d'une amélioration. Toutefois, notre position est
différente puisque tel que proposé à l'article 17, le
pouvoir réglementaire doit être exercé par le gouvernement.
3.4.5 Article 20
Par notre proposition à 2.9.2.1, nous désirons soumettre
au contrôle de la Commission de police du Québec les membres de la
Gendarmerie royale du Canada aux autres catégories de policiers
fédéraux oeuvrant au Québec. Nous introduisons les notions
de pré-enquête à huis clos et de pouvoirs coercitifs
à la Commission de police du Québec. 3.4.6 Article 24, premier
alinéa
En concordance de nos diverses propositions sur un système
disciplinaire et principalement en regard de l'article 17e), nous croyons que
le premier alinéa est inutile. 3.4.7 Article 26
Selon notre proposition de 2.12.2, nous ajouterions au texte actuel une
possibilité d'imposer des amendes aux demandes d'enquête frivoles
et malicieuses afin d'éviter les abus. L'insertion du projet de loi 48
ne va pas aussi loin et nous recommandons que le gouvernement adopte cette
recommandation.
3.4.8 Article 47a)
Nous vous référons à nouveau à l'article
17e) et à notre proposition d'un système de discipline unique.
Nous ne pouvons admettre que la Sûreté du Québec ait un
système parallèle et autonome de discipline et que son
règlement de déontologie et de discipline soit
éventuellement l'objet d'implantation dans les services de police
municipaux. Nous recommandons ainsi que soient retirées toutes les
dispositions qui visent les questions disciplinaires et d'éthique pour
retenir notre proposition. 3.4.9 Article 52
Notre approche à la proposition 2.14.2 (pages 38 à 40),
tout en comportant une certaine similitude dans le rationnel des points de
référence (seuil de population de 5000 habitants, facturation par
la Sûreté du Québec), suit un chemin critique
différent et ne comporte pas les mêmes modalités
d'application et ne prévoit pas les mêmes mécanismes. C'est
ainsi que l'Inspectorat au lieu de la Commission de police du Québec
procédera à l'évaluation du niveau de protection des
municipalités, que la facturation par la Sûreté du
Québec doit suivre les indications prévues dans des
protocoles-types d'enquêtes, que les policiers seront
intégrés à la Sûreté du Québec en
bénéficiant des mêmes avantages. Seules les
différends seraient soumis à la Commission de police du
Québec.
A notre avis, cette proposition de 2.14.2 est cohérente avec
notre vue d'ensemble général et nous apparaît comme plus
logique si l'on procède par étapes. 3.4.10 Articles 62a) à
62c)
Nous recommandons que le gouvernement retienne notre principe à
2.20.1 pour l'établissement de la rente à la veuve et aux enfants
et réajuste ce texte actuel. De plus, nous désirons que vous
précisiez votre point de vue sur le principe d'indexation. 3.4.11
Article 63
Par 2.21.1 (pages 49 à 52) nous recommandons que soit
modifié l'actuel droit d'appel dans les cas de destitution et
réduction de traitement du directeur et des non salariés au sens
du Code du travail dans les services de police en une obligation pour la
Commission de faire enquête dans ces cas. L'appel prévu en serait
de la décision de la Commission de police du Québec auprès
de la Cour provinciale. Cette proposition ne se trouve nullement
reflétée par le texte de remplacement du projet de loi 48.
4 Sommaire et conclusions 4.1 Orientation corrective et
palliative des propositions
Certaines de nos propositions ont pour but de corrigerdes situationsque
nous avons considérées comme lacunaires ou
détériorées. Il faut évaluer davantage
lessphèresd'intervention desgroupes responsables desaffaires
policières pour éviter des rôles conflictuels. Ainsi, il
faudrait voiràceque la Commission de police du Québec concentre
son action au domaine quasi judiciaire, que la Direction générale
de la Sécurité publique s'adonne à la coordination
opérationnelle et à l'encadrement des activités, des
programmes ayant une portée générale et des services
spécialisés, tandis que l'Inspectorat limite son rôle
à la surveillance, au contrôle et à la vérification.
Les chevauchements doivent également être éliminés
entre les organisations policières (Sûreté du
Québec, Services de police municipaux et Gendarmerie Royale du Canada)
puisque ce phénomène crée plutôt des structures
compétitives et d'affrontement, alors que l'objectif visé devrait
être une plus grande collaboration et complémentarité entre
les services de police. Un système disciplinaire doit comporter des
mécanismes susceptibles d'assurer la population que toutes les
communautés régionales sont dotées de bureaux de plaintes
accessibles et que par voie de conséquences le système
instauré supporte une justice expéditive et équitable.
Nous avons prévu que les divers paliers sont utilisés de
façon à éviter que des plaintes futiles suivent toutes les
étapes du processus.
Les mesures à court terme concernant les organisations
policières sont de nature palliative et transitoire. En effet, nous
souhaitons qu'à moyen terme le gouvernement se fixe sur les
recommandations du rapport Saulnier.
Le caractère de nos propositions s'inscrit donc dans un
désir de collaborer avec le gouvernement en étant conscient de
contraintes quelquefois imprévisibles relativement à
l'implantation de certaines propositions. Cette approche flexible devrait nous
rendre crédible dans la consultation gouvernementale; les projets
devront de toute évidence être révisés
fréquemment à la lumière de faits nouveaux. Nos
propositions à caractère correctif ou palliatif sont
formulées dans ce contexte de façon pratique et
réaliste.
4.2 Protection adéquate de la population par l'application de
mesures en vertu d'un échéancier de réalisations. 4.2.1 A
court terme. 4.2.1.1 Les municipalités qui ont moins de 5000 de
population seraient dorénavant protégées par la
Sûreté à moins qu'elles ne soient dotées d'un
service de police. Ce service ne peut toutefois réduire ses effectifs
sans autorisation expresse du ministre de la Justice suite à une
évaluation de l'Inspectorat. 4.2.1.2 Les municipalités qui ont
des populations entre 5000 et 20 000 habitants pourraient, par voie de contrat,
voir leur territoire protégé par la Sûreté du
Québec. Ces contrats comprendraient des clauses à l'égard
de l'application des règlements municipaux par les agents de la
Sûreté du Québec et de l'intégration des policiers
municipaux à la Sûreté du Québec. Si les
municipalités optent pour le maintien de leurs services de police, elles
doivent répondre à l'Inspectorat de leur efficacité et
avoir des effectifs dont le seuil minimal est établi en tenant compte de
divers facteurs (population, charge de travail, territoire à couvrir,
criminalité...). 4.2.1.3 Les ententes inter-municipales peuvent
être partielles et portées sur les communications,
l'identité judiciaire, les services techniques et certaines fonctions
spécialisées. 4.2.1.4 Les ententes inter-municipales et les
contrats types de la Sûreté du Québec devraient faire
l'objet d'uniformisation et les modèles développés
devraient être conservés à la Direction
générale de la Sécurité publique pour être
remis comme information à toute partie intéressée. 4.2.1.5
Les municipalités qui ont à faire face à des besoins
saisonniers et reliés au tourisme peuvent procéder à la
nomination de constables spéciaux pour des périodes pouvant aller
jusqu'à quatre mois.
Ces constables spéciaux devront se conformer aux normes
d'admissibilité en vigueur. De plus, ils doivent être
encadrés par les organisations policières reconnues: un service
de police municipal ou une unité opérationnelle de la
Sûreté du Québec. 4.2.2 A moyen terme
La Direction générale de la Sécurité
publique devrait mettre sur pied des centres régionaux tactiques et
opérationnels pour faciliter la coordination d'opérations
policières d'envergure régionale, offrir une assistance
compétente et professionnelle à l'égard de programmes
à l'échelle du territoire. 4.2.3 A long terme
Selon les critères du rapport Saulnier, le gouvernement
délimiterait les juridictions territoriales et les rôles des corps
de police de district et de la Sûreté du Québec. Même
si sur certains points la Direction générale de la
Sécurité publique pourrait modifier le mandat des centres
régionaux tactiques et opérationnels, ils devraient être
maintenus pour les régions comprenant plusieurs corps de police de
district. 4.3 Droits acquis et sécurité des policiers municipaux
lors d'intégrations 4.3.1 Les policiers municipaux qui sont
touchés par des abolitions sont intégrés à la
Sûreté du Québec à une fonction équivalente
à celle qu'ils occupaient avant l'abolition. 4.3.2 S'il s'agit d'une
intégration (selon le scénario: à la Sûreté
du Québec), les policiers municipaux sont assimilés à la
classe salariale de la Sûreté du Québec correspondant aux
responsabilités d'une fonction équivalente à celle qu'ils
occupent présentement. Ils peuvent de plus se prévaloir de droits
acquis concernant les affectations et les transferts. 4.4 Renforcissement des
dispositions à l'égard des conditions de travail et du
professionnalisme. 4.4.1 Un dirigeant ou un gestionnaire d'un service de police
(cadre) et un policier doivent être soumis, pour sauvegarder
l'intégrité du milieu policier, à un Code de
déontologie uniforme.
4.4.2 L'admissibilité à la profession policière se
trouve assortie pour ceux qui proviennent de CEGEP d'une exigence additionnelle
à savoir, un stage obligatoire avant la cinquième session. Cette
étape serait éliminatoire pour ceux qui ne pourraient satisfaire
aux assesseurs des services de police accrédités. 4.4.3 Les
municipalités ne pourraient congédier et réduire le
traitement des directeurs, des non salariés au sens du Code du travail
et des policiers syndicables mais non représentés par une
association dûment accréditée sans qu'il y ait eu
enquête de la Commission de police du Québec. Les policiers par
ces dispositions sont présumés comme pouvant continuer d'exercer
leurs fonctions jusqu'à l'issu de l'enquête de la Commission de
police du Québec à moins que lesdits policiers ne reconnaissent
avoir commis une faute lourde et acquiescent que les mesures prises sont
justifiées. Le fardeau de la preuve revient donc à la
municipalité et la Commission de police du Québec doit mener ces
enquêtes de façon expéditive à cause des incidences
monétaires y rattachées.
Le droit d'appel n'existe que si la municipalité a pris lesdites
dispositions sur recommandations de la Commission de police du Québec.
4.4.3 L'échelle indicative de salaires serait remplacée par une
autre formule qui donnerait au directeur d'un service de police un salaire
égal à 150% du salarié le mieux
rémunéré. L'écart entre chaque cadre
intermédiaire ne serait pas supérieur à 10%. Les avantages
sociaux du directeur et des autres non salariés au sens du Code du
travail sont ceux prévus par la convention collective. 4.4.4 Les rentes
viagères des veuves et enfants n'ayant pas atteint la majorité
pourraient atteindre 70% du salaire du policier avec 50% pour la veuve et 5%
par enfant jusqu'à un maximum de 20%.
De plus, nous introduisons le principe d'indexation pour éviter
toute mesure aléatoire et suivre les fluctuations du coût de la
vie. 4.5 La Commission de police du Québec, l'Inspectorat et la
Direction générale de la Sécurité publique. 4.5.1
La Commission de police du Québec
La Commission de police du Québec se voit confinée
à des rôles qui découlent de ses pouvoirs quasi
judiciaires. Ainsi, le fonctionnement des conseils régionaux de
discipline et les pré-enquêtes relèveraient d'un
commissaire qui pourrait administrer un bureau régional et être
assisté, dépendant des demandes, d'enquêtes et de
conseillers.
Les pré-enquêtes s'effectueraient après les
vérifications des enquêteurs et se tiendraient à huis clos.
A cette phase, la commission pourrait décider de poursuivre au niveau de
l'enquête proprement dite.
Les conseils régionaux de discipline vont permettre
d'épurer bon nombre de cas qui ne nécessitent pas l'intervention
de la Commission de police du Québec.
Le rôle de conseiller les municipalités et les services de
police se traduit par un service d'aviseurs techniques et évite que l'on
ait recours aux firmes privées de consultants.
Dans son rôle d'enquête, la Commission de police du
Québec pourra dorénavant imposer des pénalités et
même passer des ordonnances.
Un palier d'appel serait toujours possible auprès de la Cour
provinciale. 4.5.2 Inspectorat
L'Inspectorat se rapporterait à l'Assemblée nationale et
dans son rôle de contrôle soumettrait la Sûreté du
Québec et tous les services de police municipaux à une inspection
annuelle. En plus de soumettre les rapports de vérification aux
autorités compétentes, l'Inspectorat examinerait les performances
des services gouvernementaux de sécurité et d'enquête et
évaluerait de façon constante le niveau de services rendus par
les organisations policières à l'aide d'indicateurs. 4.5.3
Direction générale de la Sécurité publique
La Direction générale de la Sécurité
publique continuerait d'exercer un rôle de développement et de
coordination en matière de formation, de police scientifique, de la
recherche et d'autres attributions reliées au support
opérationnel des services de police.
De plus, des centres régionaux tactiques opérationnels
axeraient les initiatives de la Direction générale de la
Sécurité publique sur des opérations de collaboration, des
programmes inter-services dont l'analyse opérationnelle de la
criminalité et la prévention du crime. 4.5.4 Notre association
présente cette répartition tripartite comme un palliatif et
serait disposée à présenter des recommandations
supplémentaires si tel était le souhait du gouvernement. 4.6
Egalité de statut. 4.6.1 La Gendarmerie royale du Canada.
Dorénavant, les membres de la Gendarmerie royale du Canada
pourraient être soumis, suite à des plaintes, aux enquêtes
de la Commission de police du Québec. 4.6.2 La Sûreté du
Québec et les policiers municipaux
Les directeurs des services de police municipaux
bénéficient à maints endroits dans nos propositions des
mêmes privilèges et droits que ceux du directeur
général de la Sûreté du Québec.
Pour l'Association des chefs de police et de pompiers du
Québec
Marcellin Cyr, Président
ANNEXE B
Mémoire à la commission parlementaire
sur la Justice
concernant le projet de loi no 48
par le Syndicat professionnel des chefs de
police
et pompiers et officiers supérieurs de la
protection publique (S.P.C.O.S.)
Québec, le 3 août 1979.
INTRODUCTION Statut et rôle du Syndicat
(S.P.C.O.S.)
Au nom de tous les membres du Syndicat Professionnel des Chefs de Police
et Pompiers et Officiers Supérieurs de la Protection Publique
(S.P.C.O.S.), nous désirons vous soumettre respectueusement le
présent mémoire.
Ce document de travail est le fruit d'une réflexion et d'une
prise de conscience collective de nos membres au cours des dernières
années.
Depuis la constitution de notre Syndicat, dûment incorporé
en vertu de la Loi des Syndicats Professionnels (S.R.Q. 1964, chap. 146), le 30
juin 1972, nous n'avons cessé de nous préoccuper de la promotion
et de la défense des intérêts socio-économiques de
nos membres. Nous avons agi régulièrement comme leur
représentant auprès des employeurs publics. Nous nous sommes
faits leur porte-parole auprès des organismes publics et para-publics,
et particulièrement auprès des corporations municipales
régies par la Loi des Cités et Villes.
Nous avons tenté de promouvoir parmi nos membres des relations
professionnelles harmonieuses, en les incitant à la collaboration sur
les plans local, régional et provincial. Développer
l'efficacité du travail policier en faisant appel aux méthodes
nouvelles de prévention et de répression du crime, ce fut un de
nos principaux objectifs. Nous avons exhorté nos membres à se
perfectionner en suivant des cours dans les CEGEP et institutions
d'enseignement, en encourageant leurs effectifs policiers à le faire,
tout en assistant à des congrès ou colloques.
Notre Syndicat a encouragé les membres à collaborer
quotidiennement dans l'uniformisation des méthodes de travail. "Tous
unis dans la lutte contre le crime et la prévention des incendies",
telle fut notre devise. La société québécoise n'en
exige pas moins de nous. L'opinion publique ne tolère plus
l'incompétence, la médiocrité et l'inconscience dans le
domaine policier. L'appui de la presse et de l'opinion publique au magnifique
travail de la C.E.C.O. ne laissent plus de doute sur cette volonté
populaire.
L'information de nos membres en particulier et du public en
général nous a semblé également un devoir de
première importance. Depuis environ cinq (5) ans, nous avons mis sur
pied une revue trimestrielle destinée à l'information de nos
membres et de leurs employeurs.
Dans le présent mémoire, nous traiterons des deux
thèmes suivants, à savoir:
I.- La situation actuelle. Nous aborderons alors la question de
l'intégration et de la dépolitisation des corps de police
municipaux. Nous traiterons également du rôle et des pouvoirs de
la Commission de Police du Québec.
II.- L'avenir. Dans un second temps, nous traiterons de l'avenir de la
protection publique au Québec, plus particulièrement en nous
attardant aux réformes proposées par le projet de loi no 48.
Cette deuxième partie soulignera d'une part les aspects positifs du
projet de loi no 48 et d'autre part les aspects négatifs ou ses
déficiences.
I
La situation actuelle
A.- L'intégration
et la dépolitisation des corps de police municipaux
II y a présentement au Québec environ deux cent dix (210)
corps de police municipaux, plus la Sûreté du Québec et la
Police de la Communauté Urbaine de Montréal. On compte environ
neuf mille cinq cents (9500) policiers permanents. La Commission Saulnier
recommandait dans son rapport la réduction des corps de police à
trente-sept (37) pour l'ensemble de la province. Il peut y avoir en outre
quelques centaines de policiers à temps partiel, agissant comme
constables spéciaux.
Ces corps de police municipaux souffrent souvent d'un manque d'effectifs
compétents. L'ingérance municipale se reflète non
seulement au niveau des opérations policières courantes, mais
dans la limitation des budgets. Le chef ou directeur de police partage
habituellement la direction de son corps de police avec les membres du conseil
ou le comité de police, contrairement aux dispositions de l'article 55
de la Loi de Police (S.Q. 1968, chap. 17).
La création de la Commission de Police du Québec n'a pas
suffi à dépolitiser ces différents corps policiers. Il
nous semble que la politique de régionalisation, annoncée dans le
Livre Blanc intitulé "La police et la sécurité des
citoyens" serait la plus appropriée pour assurer cette
dépolitisation locale, tout en évitant une politisation
provinciale. La plupart des associations professionnelles ou syndicales ne
désirent pas maintenant la création d'une police d'Etat. Notre
Syndicat lui-même verrait d'un mauvais oeil que le Procureur
Général du Québec ait une autorité directe sur
toutes les forces policières du Québec. Nous ne sommes pas encore
prêts pour ce changement.
Néanmoins il nous semble que le gouvernement devrait
accroître ses efforts pour accélérer sa politique de
régionalisation, en y associant plus étroitement les
autorités municipales, locales et régionales.
Plus que jamais le maintien de l'ordre public doit être une
priorité de l'Etat. Nul doute que la police en est l'instrument
principal. Les autorités supérieures ne devraient rien
économiser pour assurer une police de meilleure qualité.
Lorsqu'il s'agit de la paix et de l'ordre public, l'Etat ne doit pas reculer
devant les sacrifices ou les contraintes financières.
L'expérience québécoise nous prouve que même
l'économie peut, à certains moments, être mise en danger
suite à un manque d'ordre et de discipline. Souvenons-nous des
difficultés majeures éprouvées dans le
développement de la Baie James et dans la préparation des Jeux
Olympiques. Ces difficultés sont peut-être redevables en partie
à une protection publique précaire. Les contrôles
étaient définitivement inadéquats.
L'expérience nous a démontré que plus la ville ou
la municipalité est petite et sa population restreinte, plus le
directeur de police et les membres d'Etat-Major sont asservis par les
autorités municipales. Ils sont fréquemment les esclaves des
petits politiciens municipaux. Ainsi ils deviennent incapables d'accomplir
quotidiennement les tâches que leur impose la loi. Les citoyens en sont
malheureusement les victimes.
Pour accélérer l'intégration générale
des corps de police municipaux, l'Etat devrait prévoir un régime
de subventions spéciales dans un plan quinquennal.
Lors de l'intégration de corps de police municipaux, la
Commission de Police devrait être associée étroitement aux
autorités municipales et provinciales, afin de protéger les
effectifs policiers et particulièrement les membres d'Etat-Major.
Souvent des citoyens honnêtes qui ont investi une partie de leur
vie pour la protection de leurs concitoyens, se voient privés de leurs
droits par le nouvel employeur. La Commission de Police et l'Institut de Police
du Québec devraient inciter tous les effectifs policiers, et
spécialement les membres d'Etat-Major, à se recycler au cours des
mois qui précèdent ou suivent l'intégration
régionale.
Depuis quelques années, et particulièrement au cours des
trois (3) dernières années, les conseils de ville et conseils
municipaux se font les "fossoyeurs professionnels" de leur propre juridiction
en matière policière.
Alors que le législateur québécois avait
accordé aux villes et collectivités locales le pouvoir d'assurer
la protection territoriale en leur octroyant le droit de constituer des corps
de police, plusieurs d'entre elles ont décidé de ne plus exercer
ce pouvoir. L'un des rôles d'une collectivité n'est-il pas
d'assurer l'ordre, la paix et la sécurité à tous ses
membres?
Au fait, les villes et corporations municipales ont été
conçues comme de petits Etats aptes à assumer dans une certaine
mesure leur propre protection. Le mécanisme des pouvoirs
délégués leur permettait de s'auto-gérer et dans
une certaine mesure de s'auto-financer.
En vertu de la Loi des Cités et Villes, avant l'adoption de la
Loi de Police, les municipalités urbaines pouvaient par règlement
constituer un corps de police pour assurer la protection des biens et des
personnes dans le territoire. Il s'agissait d'un pouvoir
discrétionnaire.
Avec l'adoption de la Loi de Police, sanctionnée le 21 juin 1968
(L.Q. 1968, chap. 17), toute municipalité de cité ou de ville est
tenue d'établir par règlement et de maintenir un corps de police.
C'est un pouvoir impératif. Seul le lieutenant-gouverneur en conseil
peut dispenser une municipalité urbaine, pour une période
déterminée, de se conformer à cette obligation. Encore
faut-il que le lieutenant-gouverneur en conseil soit d'avis que la population
de la municipalité ou d'autres circonstances, puissent le justifier.
Effectivement au 31 décembre 1978, la Commission de Police du
Québec constatait que vingt-cinq (25) cités ou villes n'avaient
pas établi un service de police et n'avaient pas réclamé
ni obtenu l'exemption administrative prévue à l'article 52 de la
Loi de Police (Rapport annuel de la Commission de Police, 1978, p. 28).
D'autres municipalités ont obtenu l'exemption après avoir
défié et/ou violé la loi pendant plusieurs années.
Souvent on forçait l'exemption gouvernementale par la technique du "fait
accompli". Après avoir coupé le budget de la protection publique,
on réduisait considérablement les effectifs policiers et puis on
consultait la population par voie référendaire ou
électorale. Le lieutenant-gouverneur en conseil ne pouvait faire
autrement que d'acquiescer, sinon il aurait passé pour un
trouble-fête.
Certaines municipalités urbaines ou semi-urbaines ont fait appel
aux pouvoirs d'exemption du gouvernement. Ainsi quatorze (14) d'entre elles
sont exemptées de maintenir un corps de police. Elles peuvent faire
appel à la Sûreté du Québec.
Pour être juste et équitable, il faut souligner que
certaines corporations municipales ont le statut de cité ou de ville,
sans vraiment le mériter. A titre d'exemples, nous n'avons qu'à
citer les collectivités suivantes: Saguenay 45 habitants
Ile Cadieux 75 habitants Lac St-Joseph 76 habitants
Mont Gabriel 25 habitants Lac Sergent 102 habitants
Pohénégamook 184 habitants Pointe du Moulin
184 habitants Lac Delage 194 habitants Fossambault
sur le Lac 304 habitants
II s'agit prioritairement d'endroits de villégiature. On comprend
facilement que ces municipalités réclament la dispense de
maintenir un corps de police en tout temps au cours de l'année. On peut
même comprendre qu'elles fassent parfois défaut de demander cette
dispense. C'est une distraction assez compréhensible, surtout que leurs
conseillers municipaux sont vraiment à temps partiel...
Par contre, on comprend beaucoup moins d'autres municipalités qui
ont une population importante et qui demandent cette dispense telles: Val
Bélair avec 10,716 habitants Lachenaie avec 7,118 habitants
Ste-Anne-des-Monts, St-Luc et Ste-Agathe-des-Monts avec des populations
respectives d'environ 6,000 habitants.
Il y a certaines municipalités urbaines telles que
Beaupré, St-Raymond de Portneuf, St-Nicolas, Trois-Pistoles,
St-Pamphile, Val-Bélair, Danville, Farnham et autres
collectivités semblables qui devraient maintenir un corps de police,
sans faire appel au service de la Sûreté du Québec.
Nous expliquons mal que l'ensemble des citoyens du Québec soient
tenus de payer la protection municipale par le biais des taxes provinciales, en
obligeant la Sûreté du Québec à dispenser certains
services de protection publique locale. Pourtant dans les cités et
villes normales, on y respecte l'obligation légale de maintenir une
force constabulaire. Ce sont leurs citoyens qui paient eux-mêmes la
protection publique par leurs taxes municipales.
Y aurait-il deux poids et deux mesures entre les vraies villes et les
villes bidons? Pourtant ces villes que l'on pourrait qualifier de villes
caricaturales ont obtenu un statut urbain en vue de récolter des
subventions gouvernementales au cours des années 50, 60 et 70. Une fois
qu'a déferlé la vague des subventions pour cités et
villes, on ne veut plus assumer les obligations légales du statut.
On préfère agir dans l'illégalité, voire
même utiliser tous les prétextes pour priver les citoyens de la
protection publique requise par la loi.
Le principal de ces faux-fuyants est bien sûr la réduction
des dépenses publiques. Il faut voir comment certaines
municipalités administrent leurs budgets municipaux pour s'en
convaincre. Les loisirs, les congrès et frais de représentation,
les travaux de voirie, les immobilisations inutiles, tout passe avant la
protection du territoire. On préfère demander les services de la
Sûreté du Québec qui ne coûtent rien directement aux
contribuables municipaux. Quant aux contribuables québécois,
spécialement ceux résidant dans les vraies villes non les
villes à statut urbain caricatural ils doivent assumer
directement par le biais de leurs taxes municipales la protection de leur
propre territoire. En outre, ils doivent supporter indirectement la protection
du territoire des cités et villes qui font appel au service de la
Sûreté du Québec.
Ils supportent donc financièrement à la fois leur
sûreté municipale et la Sûreté du Québec qui
agit fréquemment dans un cadre municipal.
Y aurait-il deux poids et deux mesures selon que les contribuables
habitent des villes responsables ou des villes négligentes? Cette
équité par la voie fiscale a été maintes fois
dénoncée par les gouvernements québécois successifs
en ce qui concerne l'entretien de la Sûreté sans la participation
du gouvernement fédéral. Les huit (8) provinces canadiennes moins
populeuses se servent des taxes des deux provinces les plus populeuses pour
faire supporter leur protection publique interne, par le biais de la
gendarmerie du Canada.
Cette iniquité canadienne, il ne faudrait surtout pas la
perpétuer au niveau interne entre villes et municipalités.
Pourtant le projet de loi 48, nous le verrons plus tard, apporte peu de
changement à ce sujet. C'est presque la continuité dans
l'immobilité.
Quoi qu'il en soit, nous croyons qu'il est plus que temps que l'Etat du
Québec manifeste ses intentions de faire respecter la loi. Il est
toujours surprenant de constater que des autorités publiques,
démocratiquement élues, ne respectent pas la loi.
A ce sujet, nous nous souvenons du cas particulier d'une ville
située à moins de quarante (40) milles de Québec, qui a
décidé d'abolir son corps de police en congédiant son chef
ainsi que tous les policiers. Après appel devant la Commission de
Police, évocation en Cour supérieure et jugement de la Cour
d'Appel, les tribunaux décidaient d'enjoindre cette ville de respecter
les obligations légales prévues dans la Loi de Police. A la
même époque, le gouvernement du Québec annonçait que
cette ville recevrait une subvention d'environ $350 000.00 pour
améliorer le poste de la Sûreté du Québec qui est
dans les limites de cette municipalité qui agissait pourtant en marge de
la loi. Nous nous sommes posés de sérieuses questions...
C'était l'affaire de St-Raymond de Portneuf.
Quand on n'est pas en mesure d'administrer ou de gérer dans la
légalité, il vaut mieux renoncer à ses pouvoirs et se
départir de sa juridiction. C'est pourquoi nous prétendions au
départ que les conseils de cité et de ville se font
progressivement les fossoyeurs professionnels de leur propre juridiction en
matière de protection publique. Un jour, l'Etat décidera de
reprendre en main les pouvoirs qu'il leur a délégués sans
succès.
Ce n'est pas tout de faire des congrès annuels pour clamer contre
les autorités gouvernementales québécoises. Ces
collectivités locales ou régionales qui participent à des
congrès de maires ou d'édiles municipaux seraient beaucoup mieux
de commencer à exercer leur propre juridiction avant de demander de
l'accroître.
Quant aux budgets qu'elles administrent, dès janvier 1980 elles
pourront récupérer une partie du champ fiscal scolaire
abandonné.
Nous sommes d'opinion que ce sera la dernière chance offerte aux
municipalités, si elles veulent conserver intacte leur juridiction. Ce
sursis permettra aux autorités provinciales de vérifier si les
autorités municipales sont encore de bonne foi...
Des villes comme St-Luc, St-Raymond de Portneuf, Château-Richer,
Beaupré, Trois-Pistoles, Bécancour, St-Pascal, Malartic,
Ste-Anne-des-Monts, Val-Bélair, Ste-Agathe-des-Monts, Lachenaie et
autres ne méritent plus le statut urbain, car elles n'en assument plus
les obligations légales. Le gouvernement devrait en tenir compte dans
ses velléités de subventions.
Advenant le silence ou l'inertie des villes et cités dans le
domaine policier, nous croyons que la porte demeure grande ouverte à la
récupération par le Québec des pouvoirs municipaux
délégués. Le secteur scolaire fut un secteur
témoin...
Depuis bientôt cinq (5) ans, le gouvernement du Québec
marque le pas en ce qui concerne l'intégration générale
des forces policières et la création d'une gendarmerie du
Québec. Rien dans le projet de loi 48 nous permet de croire que le
rapport Saulnier n'a pas pris le chemin des oubliettes. Quelques
"ré-formettes" sans importance. Comme nous le disions plus haut, c'est
l'inertie dans la continuité en cette matière. Ce statu quo
politique dans le domaine de la protection publique ne peut qu'ajouter à
l'ambiguïté qui subsiste au sein des collectivités locales,
spécialement en ce qui concerne la protection policière.
Quand donc se prendront les vraies décisions?
B.- La Commission de Police du Québec
Constituée par la législature provinciale, plus
particulièrement par le chapitre 17 des lois de 1968, la Commission de
Police est un organisme administratif et quasi judiciaire. La loi constituante
fut sanctionnée et entra en vigueur le 21 juin 1968. De fait, la C.P.Q.
commença ses activités dès le 1er août suivant.
Depuis lors, elle exerce principalement un rôle d'enquête,
de normalisation et de surveillance à l'égard des divers corps de
police municipaux du Québec. Depuis onze (11) ans, la C.P.Q.
évolue dans un cadre juridictionnel passablement restreint.
Officiellement chargée de favoriser la prévention du crime
et l'efficacité des services de police du Québec, la C.P.Q. a peu
ou pas les moyens de le faire concrètement. Les beaux objectifs
prévus aux articles 16 et 17 de la loi actuelle semblent se
réaliser avec lenteur et hésitation. Pour ce qui est du pouvoir
d'enquête octroyé à l'article 19 de la loi, il
s'avère fréquemment une soupape utile aux citoyens pour se
défouler contre la police. Sans blâmer directement la C.P.Q., le
Syndicat tient à faire remarquer que les enquêtes publiques sur un
corps de police municipal ou l'un de ses membres, sont malheureusement trop
souvent la tribune dont profitent certains individus pour porter des
accusations mal fondées. Par le fait même de la publicisation,
elles prennent un relief qu'elles n'auraient pas autrement. D'ailleurs
l'Association des Chefs de Police et Pompiers de la Province de Québec
partage également notre opinion.
Le Syndicat ne s'objecte d'aucune manière à la tenue
d'enquête sur les corps de police municipaux et sur la conduite de leurs
membres. Bien au contraire, il estime que de telles enquêtes sont
nécessaires et importantes dans l'intérêt des
collectivités locales et du public en général. Cependant
les Chefs de Police et Officiers Supérieurs de la Protection Publique
croient qu'ils ont droit, comme tout autre citoyen, au respect de leur
responsabilité et de leur réputation. Les enquêtes de la
C.P.Q. sont en général l'objet d'une publicité
considérable qui donne une dimension très importante à des
accusations ou à des témoignages préjudiciables à
leur réputation.
Le Syndicat déplore que les rapports de la C.P.Q., après
enquêtes publiques, demeurent trop souvent lettres mortes, sans aucune
diffusion par le bureau du Procureur Général. Pourtant on y
rejette souvent des accusations et on y corrige des faits faussement
allégués. Malheureusement il est trop tard et le dommage demeure
irréparable. Avant même le rapport ou la décision, les
citoyens croient leur opinion bien fondée.
Il serait important que le législateur reconnaisse aux directeurs
de police et membres d'Etat-Major le droit comme tout autre individu de
conserver intacte leur réputation. Il est dans l'intérêt
même de la collectivité et pour l'efficacité de l'exercice
de leurs fonctions, de continuer de jouir de la confiance de leur milieu de
travail et de leur milieu social.
Comme nous le verrons dans la seconde partie de ce mémoire, le
législateur semble avoir tenu compte de certaines suggestions concernant
l'exercice du pouvoir d'enquête de la C.P.Q. dans le but de
préserver la réputation et la crédibilité des
directeurs de police, tout en assurant au public le droit à
l'information.
A plusieurs reprises, nous avions signalé que lors d'une
réforme de la Loi de Police il serait utile de prévoir la
possibilité d'enquête à huis clos, que ce soit sur
l'administration des corps de police ou la conduite de ses membres. Suite
à ces enquêtes à huis clos, la C.P.Q. pourrait recommander
au Procureur Général des poursuites contre l'un ou l'autre des
membres d'un corps de police, y compris le directeur. A ce moment-là,
les policiers seraient mis sur un pied d'égalité avec toutes les
autres classes sociales, y compris les juges, les médecins, les avocats,
les notaires, les ingénieurs, les comptables agréés ou
autres hommes de métier.
En 1972, les pouvoirs de la C.P.Q. ont été modifiés
et accrus de façon à lui confier des pouvoirs d'enquêtes
sur le crime organisé. Les expériences menées par la
C.E.C.O. semblent favoriser le dépistage du crime. Nous sommes d'opinion
que le travail d'investigation de la C.E.C.O. a facilité le travail de
nos membres dans le dépistage et la prévention du crime
organisé.
Outre son pouvoir d'enquête sur l'administration et la conduite
des policiers, la C.P.Q. peut également siéger en appel de toute
destitution, suspension ou réduction de traitement d'un directeur ou
chef de police.
A ce sujet, la Loi de Police nous semble incomplète et confuse.
La Commission de Police s'est vu confier un double rôle, à savoir
celui d'enquêteur avec pouvoirs administratifs et celui de tribunal ou
organisme quasi judiciaire avec pouvoirs judiciaires. Dans son rôle de
commission d'enquête, la C.P.Q. rend des ordonnances accompagnées
de voeux et de recommandations. Ses pouvoirs non exécutoires sont de la
même nature que ceux de l'ombudsman. Aucune sanction n'est possible.
Seules l'opinion publique et la bonne volonté des autorités
policières et municipales seront en mesure de bonifier ce travail
d'investigation et de contrôle.
Dans son rôle de tribunal quasi-judiciaire, la C.P.Q. peut
contrôler et reviser les décisions d'un conseil municipal,
destituant ou réduisant le traitement d'un directeur de police ou d'un
membre non syndi-cable (un cadre) d'un corps de police. Ses décisions
sont exécutoires et finales. Elles lient les parties dont les
autorités municipales elles-mêmes.
Dans divers articles de notre revue, nous avions prétendu que la
loi était confuse parce que le législateur y avait mal
disséqué le partage de ce double pouvoir de la C.P.Q. La
Commission peut être appelée à reviser ses propres
décisions en appel. D'une décision administrative, elle peut
passer à une décision quasi-judiciaire.
Quelles sont les normes de preuve que devraient régir ce double
rôle? Personne ne le sait. Certains bancs de la C.P.Q. prétendent
ne pas être liés par la Loi sur la preuve du Canada, d'autres
croient le contraire. Pourtant l'article 2 de la Loi (Les Statuts du Canada,
1979, chap. E-10) stipule que:
"Elle s'applique à toutes les procédures criminelles et
à toutes les procédures civiles, ainsi qu'à toutes les
matières de la compétence du gouvernement du Canada."
Il est toujours difficile pour les avocats et procureurs
d'évoluer devant la C.P.Q., même si l'article 22 de la Loi
prévoit qu'une personne a droit de se faire assister d'un avocat. On ne
sait jamais quelle règle de procédure peut être retenue par
l'un ou l'autre des bancs de la Commission.
Malgré qu'on insiste fréquemment sur la règle de la
meilleure preuve, il arrive que la Commission tolère des preuves
secondaires et des preuves d'ouï-dire. Par ailleurs, la C.P.Q. n'a jamais
établi de règle de procédure et de pratique à la
fois pour les enquêtes publiques et pour les appels logés en vertu
de l'article 63 de la Loi. Pourtant le législateur a prévu
à l'article 17, par. G), qu'elle peut établir par
règlement des règles de procédure et de pratique pour la
conduite des affaires qui sont de sa compétence et pour sa régie
interne.
Le Syndicat a maintes fois déploré la déficience du
texte de l'article 63 de la Loi qui nous apparaît ambigu et
illogique.
Pendant la durée de l'appel d'un directeur, une personne qui se
prévaut du droit qui lui est attribué par l'article 63 à
l'encontre d'une destitution ou d'une réduction de traitement, est dans
une position extrêmement difficile. Etant un simple salarié, le
directeur ou membre d'Etat-Major doit faire face à une Ville-Employeur
qui a une capacité financière souvent considérable.
L'appelant doit supporter les frais d'un appel, alors qu'il est
même privé de toute rémunération depuis une certaine
période de temps. Depuis longtemps, notre Syndicat croit que l'article
63 devrait être amendé d'une manière claire, de
façon à indiquer que pendant la durée de l'appel,
l'appelant a droit à son plein traitement. Cette position est logique
puisque la résolution qui impose la destitution ou la réduction
de traitement, ne devrait entrer en vigueur que sur l'approbation de la
C.P.Q.
Une fois que la résolution du conseil de ville est
approuvée, la récupération de l'appelant des montants qui
lui ont été versés durant cette période nous
apparaît un problème très simple. D'une part, le directeur
a un fonds de pension et divers bénéfices marginaux
d'accumulés dont des vacances. Lorsque la résolution est
acceptée par la Commission, l'Employeur pourrait se rembourser à
même les fonds qu'il administre pour le compte de ses
employés.
Une telle modification à l'article 63 nous paraît s'imposer
depuis longtemps et nous avons constaté avec plaisir que des amendements
ont été apportés dans un but de clarification,
d'équité et de justice.
Par ailleurs, la majorité des problèmes auxquels ont
à faire face les directeurs de police et les membres d'Etat-Major, sont
l'ingérance politique dans l'administration policière,
l'imprécision de leurs conditions de travail, les limitations du salaire
ou du traitement et la surcharge de travail. Certains chefs de police sont
tenus d'avoir deux ou trois appareils téléphoniques à leur
maison privée pour les fins policières. Ils sont en devoir
vingt-quatre (24) heures par jour et souvent ils doivent y associer leur
épouse et les membres de leur famille à titre gratuit.
Plus les corps de police sont petits, plus les chefs doivent faire face
à toute sorte de manoeuvres de la part des conseils municipaux pour
obtenir une amélioration de leur traitement.
Il serait urgent que le législateur accorde à la
Commission de Police du Québec un pouvoir de conciliation et
d'arbitrage. Ce pouvoir pourrait être exercé conformément
aux articles 62 à 81 du Code du Travail.
On nous a déjà rétorqué que l'Etat ne veut
pas s'immiscer dans l'administration des collectivités locales
étant donné qu'il s'agit de pouvoirs
délégués. A cela nous répondons qu'il le fait
déjà depuis plus de vingt-cinq (25) ans en permettant à
des conseils d'arbitrage, en vertu du Code du Travail, de fixer les conditions
de travail des policiers syndiqués. Ce qui est bon pour les simples
policiers ne devrait pas être si mauvais pour les directeurs et membres
d'Etat Major.
Dès qu'un chef de police ou membre d'Etat-Major n'aurait pu
s'entendre sur ses conditions de travail et son traitement, il serait loisible
à l'une ou l'autre des parties de porter l'affaire devant la C.P.Q. pour
qu'elle décide en dernier ressort. Cette solution aurait l'avantage de
dépolitiser l'administration policière au niveau des petites
villes. Souvent dans ce genre de villes, le constable le mieux payé
touche 25% ou 30% de plus de salaire que son chef. Le directeur doit faire du
temps supplémentaire non rémunéré, tandis que les
constables sont toujours rémunérés, selon les termes
mêmes de leur convention de travail.
Le législateur aurait avantage à compléter la Loi
de Police en y insérant un nouveau pouvoir de conciliation et
d'arbitrage afin de fixer des conditions de travail raisonnables et
équitables, ainsi qu'un traitement suffisant pour permettre aux chefs et
membres d'Etat Major de vivre convenablement et honorablement. Nous nous
souvenons avec douleur du cas d'un directeur de police dans une localité
située à moins de dix-huit (18) milles de la Ville de
Québec qui gagnait $145.00 par semaine pour plus de soixante (60) heures
de travail. A cela, il fallait associer le travail de sa femme qui devait
constamment répondre au téléphone en dehors des heures de
travail de son mari.
Dans une poursuite en Cour Provinciale pour obtenir l'application de la
réglementation du salaire minimum à ce directeur de police, la
Cour Provinciale avait refusé d'accéder à notre demande en
soulignant qu'il s'agissait d'un salarié incontrôlable et dont les
heures sont invérifiables.
Souvent on nous a signalé qu'il répugnait au
législateur québécois de s'immiscer dans la fixation des
traitements des officiers municipaux en vertu du principe "No taxation without
representation". Comme nous l'avons souligné il y a quelques instants,
le législateur l'a déjà fait par le biais du Code du
Travail en obligeant les municipalités à s'en reporter
à la décision du conseil d'arbitrage au cas de conflit pour la
négociation ou la conclusion d'une convention collective. La
décision arbitrale tient alors lieu de convention collective. Cette
brèche à l'autonomie des collectivités locales existe
depuis bientôt vingt-cinq (25) ans.
Au niveau des recommandations, la Commission de Police devrait avoir le
pouvoir de faire rapport à la fois au Procureur Général,
au ministre des Affaires municipales et à la Commission municipale de
Québec. Lorsqu'une corporation municipale néglige de respecter la
Loi de Police et les règlements qui sont adoptés sous son empire,
les autorités gouvernementales devraient refuser catégoriquement
de lui verser des subventions statutaires ou autres.
Nul n'est censé ignorer la loi, y compris les corporations
municipales et les villes. L'étanchéité entre les
différents ministères ou commissions gouvernementales est
peut-être l'une des principales causes de l'inefficacité
administrative à la fois sur les plans provincial et municipal.
Dans une révision de la Loi de Police, le législateur
aurait dû penser à faire indemniser les directeurs et chefs de
police qui se voient aux prises avec une enquête publique ou un appel
logé devant la C.P.Q. Que l'enquête soit déclarée
frivole ou non, chaque fois que les autorités municipales sont en
défaut, la C.P.Q. devrait avoir le pouvoir de décréter que
les dépenses, frais et honoraires encourus par le chef ou le directeur
de police ainsi que les autres membres d'Etat-Major, soient remboursés
intégralement par la corporation municipale. Ce genre de protection
existe pour les salariés au sens du Code du Travail. Les conventions
collectives le prévoient, spécialement pour la
responsabilité professionnelle.
Nous disions que la loi est inefficace et incomplète parce
qu'elle ne protège ni le public, ni les effectifs des corps policiers,
ni les autorités municipales qui auraient besoin d'obtenir des
décisions exécutoires et non des ordonnances accompagnées
de voeux pieux.
L'inégalité des forces en présence, soit d'une part
les conseils municipaux et d'autre part les directeurs de police et membres
d'Etat-Major, fait qu'il est difficile d'obtenir justice. Les pouvoirs
économiques d'une corporation municipale sont hors de proportion avec
ceux d'un directeur de police ou d'un membre d'Etat-Major. Lorsque l'un
poursuit l'autre, les moyens financiers ne sont pas proportionnels.
A l'instar de toutes les conventions collectives qui assurent une
protection aux policiers qui sont poursuivis devant les tribunaux, les chefs de
police devraient pouvoir se procurer les services légaux
nécessaires en s'assurant que le paiement en sera effectué par
l'employeur lui-même. Il n'est pas normal que dans l'exercice de leurs
fonctions, les chefs de police ne puissent pas être défendus aux
frais de l'employeur. La majorité des policiers, salariés au sens
du Code du Travail, ont cette protection dans la province de Québec.
Pourtant les directeurs de police, les chefs pompiers et les membres
d'Etat-Major n'ont pas encore cette protection, spécialement lorsqu'ils
ne sont pas régis par un contrat de travail individuel.
En vertu de l'article 17, par. i), la C.P.Q. peut par règlement
étabir une échelle indicative de traitement susceptible
d'être versée au directeur ou au chef d'un corps de police
municipal ainsi qu'aux membres d'un tel corps qui ne sont pas des
salariés au sens du Code du Travail. Dans l'exercice de ce pouvoir que
lui a confié le législateur, la C.P.Q. devrait reviser et adapter
plus régulièrement l'échelle indicative de traitement, en
tenant compte de l'augmentation du coût de la vie, du salaire payé
dans les autres provinces aux directeurs et membres d'Etat-Major
exerçant des fonctions similaires.
Nous déplorons avec véhémence le fait que le
règlement no 11, et particulièrement l'échelle indicative,
n'a pas été amendé depuis plus de cinq (5) ans. Pourtant
les législateurs le font pour leur propre traitement en s'adoptant une
loi spéciale à tous les deux (2) ou trois (3) ans. Les juges
sollicitent ce genre d'amendement auprès du législateur.
Quant aux directeurs de police, ils étaient laissés
à leur propre moyen face à des conseils municipaux souvent
récalcitrants.
Il faut dire que le règlement no 11 concernant
l'établissement d'une échelle indicative de traitement, a
été d'une certaine utilité bien qu'on ait omis de la
reviser régulièrement. Il serait indispensable que le
lieutenant-gouverneur en conseil se décide d'approuver annuellement les
modifications à ce règlement, spécialement lorsque la
Commission de Police le lui demande.
Au cours des dernières années, plusieurs projets
d'amendement sont demeurés sans suite sur le bureau des fonctionnaires
ou des membres du Cabinet au ministère de la Justice.
Il L'avenir
Notre Syndicat envisage l'avenir dans les perspectives qu'on nous
propose par le projet de loi no 48. Il était urgent que l'Etat
procède à une réforme ou à des amendements majeurs
de la Loi de Police du Québec. Après onze (11) ans d'usure, cette
loi a fait ses preuves, mais elle avait besoin d'un rajeunissement.
Une étude rapide du projet de loi 48 nous révèle
l'intention du législateur d'apporter des correctifs aux divers
problèmes soulevés plus haut. Cependant nous notons, outre
plusieurs aspects positifs, certains aspects négatifs ou quelques
carences.
Dès à présent, nous aimerions souligner que les
articles 2, 25 et 30 semblent apporter des modifications majeures.
A.- Les aspects positifs
C'est avec satisfaction que notre Syndicat constate que le
législateur a voulu clarifier le statut du policier municipal qui agit
en qualité d'agent de la paix dans un territoire autre que celui de la
municipalité qui l'emploie.
Effectivement le Procureur Général sera
réputé être l'Employeur du policier municipal lorsqu'il
sort des limites de la municipalité ou lorsqu'il applique les lois
provinciales dans les limites territoriales de la municipalité.
Souvent certains chefs de police avaient fait l'objet de poursuite
à l'occasion de l'exercice de leurs fonctions. On les avait
recherchés en dommage et intérêts parce qu'ils avaient
pourchassé des prévenus hors les limites du territoire. Les
corporations municipales refusaient de défendre leurs propres policiers
en prétextant qu'ils cessaient d'être des sergents de ville pour
devenir des agents de la paix. N'appliquant plus les règlements
municipaux, mais bien le code de la route ou le code municipal, le conseil
municipal se refusait de prendre fait et cause pour le policier poursuivi.
Une jurisprudence constante des tribunaux laissait croire que ce
policier municipal était sans employeur responsable.
Ainsi à l'article 143 du Code municipal, le législateur
n'apportait pas de remède aux directeurs et officiers de police
poursuivis en responsabilité pour des actes faits dans
l'exécution de leurs fonctions. La jurisprudence avait
décidé que comme gardien de la paix et du bon ordre, lorsqu'un
policier fait une arrestation en vertu du Code criminel, il devient le
préposé de l'Etat et la corporation qui l'a nommé n'en est
pas responsable. Ce n'est que si la corporation avait autorisé,
approuvé ou adopté l'acte de son constable ou si elle tentait de
le justifier qu'elle pouvait en être tenue responsable d'une certaine
façon.
Cette interprétation jurisprudentielle a donné prise
à de nombreuses injustices envers la force constabulaire, et
particulièrement pour les directeurs et officiers qui ne sont pas des
salariés au sens du Code du Travail.
Pour des derniers, il était impossible de négocier une
clause particulière par laquelle leur employeur se serait engagé
à les défendre ou à prendre fait et cause dans une
poursuite en dommages et intérêts.
La dernière décision malheureuse que nous avons
vécue fut celle dans l'affaire de Hinse et Houde vs Jean-Jacques Martin.
Il s'agit d'une décision rendue par M. le Juge Michel Dumaine de la Cour
Provinciale, le 29 mars 1978.
Malgré une tentative des procureurs du défendeur de
l'exempter du paiement d'honoraires professionnels pour avoir assumé sa
défense comme directeur de police, la Cour a décidé
d'accueillir l'action et de condamner ce directeur à payer
lui-même les frais et honoraires encourus pour assumer sa propre
défense.
Soulignons que ce directeur avait par surcroît été
exonéré de tout blâme à la fois en Cour
Supérieure par le Juge Guy Lebrun et en Cour des Sessions de la
Paix.
L'article 29 du projet vient compléter cette clarification en
prévoyant que le Procureur Général est
réputé l'Employeur du policier municipal pour les fins de la Loi
des Accidents du Travail, spécialement lorsque le policier subit un
accident de travail dans un territoire qui n'est pas soumis à la
juridiction du corps de police de la municipalité qui l'emploie.
Bien plus, le législateur vient préciser qu'au cas de
difficulté résultant de l'application de cette disposition, la
Commission de Police sera appelée à décider exclusivement
en dernier ressort après enquête. Voilà un remède
appréciable qui était ardemment souhaité depuis de
nombreuses années.
Bien sûr que le revers de la médaille de cet article 2a) se
retrouve à l'article 2c) lorsque le Législateur prévoit
que le Procureur Général peut demander au directeur d'un corps de
police municipal de produire des rapports circonstanciés sur les
situations pertubatrices de l'ordre, de la paix et de la sécurité
publique qui surviennent dans le territoire soumis à sa juridiction ou
relativement à la situation du crime dans ce territoire.
Notre Syndicat trouve cette disposition tout à fait logique et
raisonnable. Le Procureur Général étant le maître ou
commettant des agents de la paix lorsqu'ils appliquent les lois provinciales,
il était normal que ceux-ci aient à faire rapport.
Avant de passer aux article 25 et 30 du projet, nous tenons à
signaler que lors d'un amendement mineur apparaissant à l'article 6,
particulièrement pour l'article 16b) de la Loi de Police, on semble
avoir omis une partie du texte original. Ainsi la Commission devait agir comme
conseiller de la Sûreté, des corps de police municipaux et des
municipalités en matière policière. Dans le nouveau texte,
le législateur laisse croire que la Commission doit établir un
service général d'inspection chargée de conseiller en
matière policière la Sûreté et les corps policiers
municipaux et d'en faire l'inspection. On omet le pouvoir consultatif de la
C.P.Q. pour les conseils municipaux comme cela existait par le passé.
Encore faudrait-il que ces corporations municipales suivent les conseils qu'on
veut bien leur prodiguer...
Mais les principaux amendements semblent être ceux apparaissant
aux articles 25 et 30 du projet.
Dans un premier temps, le législateur vient redéfinir
l'obligation mise à charge des cités et villes de maintenir un
corps de police dans toute municipalité comptant cinq mille (5,000)
habitants ou plus. Cette obligation ne peut être esquivée ou
évitée.
Seul le lieutenant-gouverneur en conseil peut dispenser une
municipalité de 5,000 habitants ou plus de maintenir un corps de police
et même peut l'autoriser à réduire les effectifs de son
corps de police. L'autorisation de réduire les effectifs du corps de
police doit s'accompagner de directives quant à la quantité
d'effectifs à maintenir.
Souvent les municipaliés faisaient indirectement ce que la loi
leur défend de faire directement. Certaines corporations municipales qui
avaient des corps de police de cinq (5), dix (10) et même quinze (15)
policiers décidaient du jour au lendemain d'abolir ce corps de police de
facto tout en le maintenant légalement en existence en retenant les
services du seul directeur. Tous les policiers étaient mis à pied
ou congédiés.
Les autorités municipales concluaient généralement
qu'elles avaient un corps de police puisqu'elles avaient encore un chef. La
Commission de Police et même la Cour d'Appel du Québec avaient
déjà décidé qu'il suffit d'un seul policier pour
qualifier cela de corps de police. Ainsi dans l'affaire de la Ville de St-Luc,
la Cour d'Appel a déclaré que l'interprétation de la Loi
de Police ne permettait aucunement de conclure qu'un corps de police doit
contenir plus d'une personne. La C.P.Q. avait émis la même opinion
dans l'affaire de St-Léonard d'Aston quelques années
auparavant.
On se référait souvent aux origines du service de
protection publique où il était fait mention qu'un seul homme
était embauché. Se fondant sur une résolution ou un
règlement, la corporation municipale prétendait que le corps de
police était légalement constitué, dès qu'il y
avait un seul policier.
Cet abus d'interprétation des textes a obligé le
législateur à accorder des pouvoirs supplémentaires au
lieutenant-gouverneur en conseil pour l'autoriser soit à dispenser une
municipalité de se conformer à l'obligation de maintenir un corps
de police ou l'autoriser à réduire ses effectifs selon certaines
normes. Dans le troisième alinéa de l'article 52 reproduit
à l'article 25 du projet, il est prévu que la Commission aura
à donner un avis au lieutenant-gouverneur en conseil lorsque viendra le
temps d'accorder des dispenses ou des réductions de corps de police. Cet
avis pourra être également sollicité de divers organismes
municipaux représentatifs et d'associations chargées de
défendre les intérêts des policiers.
A l'article 52a) reproduit également à l'article 25 du
projet, le législateur prévoit qu'il y aura un comité de
reclassement lorsqu'on envisagera de dispenser une municipalité de
maintenir un corps de police ou lorsqu'il sera prévu d'en réduire
sensiblement les effectifs.
Notre Syndicat trouve qu'il s'agit d'une belle amélioration et
surtout d'une protection indispensable.
Toutefois, et nous le soulignerons plus loin, nous avons constaté
une carence dans cet amendement. Effectivement les cités et villes qui
ont moins de cinq mille (5,000) habitants pourront abolir immédiatement
leur corps de police après la sanction du projet de loi et ce
comité de reclassement n'aura aucune juridiction sur les effectifs
policiers. Le comité de reclassement ne se voit accorder juridiction que
pour les cités et villes de cinq mille (5,000) habitants et plus qui
obtiennent une dispense. A l'occasion de l'abolition des corps de police dans
les cités et villes de moins de cinq mille (5,000) habitants, ce
comité de reclassement ne semble pas pouvoir être utilisé
selon le libellé même de l'article 52a).
Le législateur devrait prévoir que le comité de
reclassement aura cette juridiction à la fois pour les cités et
villes de moins de cinq mille (5,000) habitants comme pour celles de cinq mille
(5,000) habitants et plus.
A l'article 52b), le législateur prévoit que la Commission
de Police du Québec pourra faire enquête afin de vérifier
si une corporation municipale maintient réellement les services
policiers adéquats, et cela à la demande soit du Procureur
Général, soit d'un groupe de citoyens ou d'une association de
policiers reconnue. La C.P.Q. pourra alors tenir des audiences publiques et
faire rapport au Procureur Général qui pourra alors prendre ses
responsabilités conformément à l'article 106 de la Loi de
Police.
A ce sujet, nous avons souvent constaté que le Procureur
Général qui est chargé de l'application de la Loi de
Police, semblait ne pas vouloir s'impliquer dans les décisions
municipales. Nous croyons que la situation s'est beaucoup
améliorée depuis deux (2) ou trois (3) ans.
Par ailleurs, le législateur a prévu à l'article
52c) une sanction permettant de rendre efficace l'obligation mise à la
charge des municipalités de constituer et maintenir en tout temps un
corps de police. Ainsi les municipalités récalcitrantes pourront
être appelées à payer pour des frais encourus par la
Sûreté du Québec pour assurer le maintien de la paix, de
l'ordre et de la sécurité publique dans le territoire soumis
à la juridiction de la municipalité lorsque cette dernière
fait défaut de constituer et maintenir en tout temps son corps de
police. C'est la première fois qu'on peut dire véritablement que
la Loi de Police a des dents. L'aspect financier pourra peut-être faire
réfléchir les cités et villes qui ne veulent pas assumer
leurs obligations comme nous le disions plus haut.
Après avoir tenu une enquête, la Commission de Police
pourra faire rapport au Procureur Général qui décidera ou
non d'assigner la Sûreté du Québec pour assumer les
fonctions d'un corps de police municipal. La Sûreté aura alors le
pouvoir de faire appliquer les règlements municipaux comme toutes les
autres lois nécessaires au maintien de la paix, de l'ordre et de la
sécurité.
Dès lors, la municipalité recevra par le biais d'un
jugement homologué le compte pour services publics rendus. Voilà
un excellent remède aux velléités des édiles
municipaux qui veulent économiser en mettant en jeu la paix, l'ordre et
la sécurité dans le territoire.
Un dernier amendement majeur que l'on retrouve au projet de loi 48,
c'est celui de l'article 30 qui amende l'article 63 de la Loi de Police.
Enfin le législateur sort de l'ambiguïté la
Commission qui assumait un double rôle souvent incompatible.
Dans le projet de loi no 41, on avait tenté d'attribuer la
juridiction d'appel de la Commission de Police à la Cour Provinciale
avec un banc de trois juges.
Dans le présent projet de loi, le législateur semble
revenir sur sa décision pour laisser en main tous les pouvoirs à
la Commission de Police. Elle agira dorénavant non plus comme un
organisme quasi-judiciaire avec pouvoirs curatifs, mais bien comme un
organisme-conseil avec pouvoirs préventifs.
Ainsi on restreint le droit d'appel des directeurs et officiers
d'Etat-Major en obligeant les municipalités à aller prendre
conseil auprès de la Commission avant d'adopter de façon
définitive une résolution de congédiement ou de
réduction de traitement.
Le droit d'appel devant la C.P.Q. se trouve passablement restreint si
les municipalités respectent les paragraphes a), b) et c) de l'article
30.
Dans un premier temps, la municipalité qui a obtenu une
recommandation de la Commission et passe à l'action, n'aura pas à
faire face à un appel puisque sa décision aura été
fondée sur la recommandation de la Commission de Police.
Toutefois si la municipalité outrepasse la recommandation en
imposant une sanction plus forte que celle qui est prévue, elle pourra
alors être obligée de répondre de sa décision
dérogatoire ou excessive.
De plus, le législateur a prévu que lorsqu'il y aura des
faits nouveaux qui surviendront entre le moment de la recommandation de la
C.P.Q. et la prise de décision de la municipalité, le directeur
ou officier d'Etat-Major pourra encore interjeter appel en invoquant ces
faits.
Dès lors, la Commission de Police du Québec sera plus
intimement associée aux décisions des conseils municipaux. Si ces
derniers font défaut de se conformer aux avis préventifs,
c'est-à-dire les recommandations, ils auront à en répondre
devant la Commission qui agira avec toute l'autorité d'un organisme
quasi-judiciaire.
Notre Syndicat croit qu'il s'agit d'amendements clarifiant la situation.
Toutefois il y a un danger qui se dessine à l'horizon. Nous croyons que
les discussions administrativo-politiques entre la Commission et la
municipalité pourront préjudicier les droits des directeurs et
officiers d'Etat-Major.
Nos membres s'exposent à ce que leur employeur aille arracher des
décisions de la C.P.Q. en ne faisant pas toutes les
représentations utiles. On pourra également masquer la
vérité. Les recommandations de la Commission de Police auront
alors une valeur tout à fait relative.
Nous estimons que nos membres auront alors un droit d'appel en invoquant
toujours des faits non portés à la connaissance de la Commission
qui a fait une recommandation plus ou moins bien fondée.
Nous craignons également qu'il s'y glisse quelques pressions
politiques. Le lobbying des conseils municipaux auprès de la Commission
pour arracher une recommandation, pourrait être sûrement
très préjudiciable pour la police et même la
sécurité du public.
Quoi qu'il en soit, nous croyons en l'intégrité de la
Commission pour prévenir de telles tentatives.
L'article 40 du projet de loi prévoit le maintien du statu quo
à la fois pour les cités et villes qui ont moins de cinq mille
(5,000) habitants et pour celles qui ont plus de cinq mille (5,000) habitants,
et qui veulent obtenir une dispense du lieutenant-gouverneur en conseil.
En somme, nous croyons que le législateur a fait un effort
louable pour améliorer les conditions de vie et de travail des effectifs
policiers, et spécialement des salariés non régis par le
Code du Travail.
Sous cet aspect positif des réformes qui y sont apportées,
nous tenons à souligner l'article 22b) du projet en ce qui concerne la
publicité des enquêtes et le huis clos possible. Le
législateur semble avoir compris la situation difficile à
laquelle étaient confrontés les directeurs et officiers
supérieurs de la protection publique ainsi que tous les membres de la
force constabulaire lorsque la Commission décidait de faire
enquête.
B.- Les aspects négatifs
Nous nous en voudrions de ne pas signaler les aspects négatifs ou
les carences du projet de loi no 48.
Dans une refonte de la Loi de Police, il aurait été
souhaitable de penser à un régime de subventions aux corporations
municipales qui acceptent de fusionner leurs services de police et pompiers.
L'intégration policière régionale aurait pu se faire avec
la collaboration étroite à la fois de la Commission de Police et
de la Direction générale de la Sécurité
publique.
Les aspects administratifs auraient pu être
réservés, de préférence, à la Direction
générale de la Sécurité publique sous
l'autorité du Procureur Général, tandis que le
contrôle, la surveillance et l'application auraient été
sous la responsabilité de la Commission de Police, le tout avec le
Procureur Général comme ministre responsable devant
l'Assemblée nationale.
Notre Syndicat croit que le législateur aurait dû
s'aventurer de façon plus audacieuse dans la réforme de notre
système de protection publique, particulièrement en
commençant à mettre en application le rapport du groupe de
travail sur l'organisation et les fonctions policières au Québec,
à savoir le rapport Saulnier,
Comme nous le disions plus haut, le rapport Saulnier semble être
mis en veilleuse. On a suscité beaucoup d'espoir de réforme, et
voilà qu'on arrive avec quelques modifications superficielles sans
s'attaquer à l'ensemble.
Plusieurs fois notre Syndicat avait soulevé la question du
pouvoir d'arbitrage sur les traitements et conditions de travail des chefs et
membres d'Etat-Major. Ce pouvoir d'arbitrage aurait pu s'exercer
conformément à ceux qu'exercent les arbitres ou les conseils
d'arbitrage aux termes du Code du Travail.
Malheureusement l'échelle indicative de traitement,
adoptée sous forme de règlement, n'a pas tout le résultat
escompté depuis 1974. Bien plus, le lieutenant-gouverneur s'est
catégoriquement refusé de reviser cette échelle indicative
et de l'amender au gré des demandes des diverses associations
représentatives.
Le règlement no 11 sur l'échelle indicative des
traitements aurait pu être efficace, si les divers gouvernements avaient
consenti à le tenir à jour. Les minima et maxima de
l'échelle indicative, approuvés par le lieutenant-gouverneur en
conseil, constituaient en quelque sorte une zone discrétionnaire
à l'intérieur de laquelle la Commission aurait pu fixer le
traitement du directeur ou des membres d'Etat-Major, après enquête
et audition des deux parties.
Le législateur aurait donc pu octroyer un pouvoir de conciliation
et d'arbitrage à la Commission de Police de façon à lui
permettre de jouer le rôle que joue un conseil d'arbitrage en vertu des
articles 62 à 81 du Code du Travail. D'ailleurs le législateur
avait déjà élaboré sur les conditions de travail
des policiers et pompiers aux articles 82 à 87 de ce même code.
Ça n'aurait pas été une révolution de palais.
En ce qui concerne le pouvoir d'enquête de la Commission et la
discrétion qu'elle a d'ordonner le huis clos, nous aurions
préféré qu'au lieu de critères particuliers le
législateur prévoit plutôt un accord entre les
autorités municipales d'une part et le chef de police ainsi que le
Syndicat des Policiers d'autre part. Sur certaines questions précises,
les pouvoirs de recommandation de la Commission devraient devenir des pouvoirs
exécutoires comme nous l'avons déjà signalé.
Nous croyons que les enquêtes publiques pourront être
considérablement allongées lorsque viendra le temps de
décider d'une requête pour ordonner le huis clos. Dès lors,
les parties devront entreprendre une preuve et soumettre des faits particuliers
en vue d'obtenir l'ordonnance de huis clos.
Il aurait été préférable de prévoir
que ce huis clos puisse être obtenu sur simple accord des parties
intéressées, à savoir les autorités municipales,
les autorités policières et au besoin les plaignants.
Comment veut-on qu'un témoin puisse demander le huis clos, en
alléguant qu'il sera l'objet de menaces ou de représailles par
suite de son témoignage ou que le témoignage qu'il peut rendre
sera de nature à compromettre la sécurité d'une autre
personne? Pour ce faire, la Commission devra nécessairement entendre une
preuve et décider si elle accorde le huis clos pour ces motifs.
Notre Syndicat croit que le législateur dresse un lit qui sera
très inconfortable pour la Commission qui aura à décider
de ces questions au cours d'enquêtes où le climat est souvent
profondément survolté.
Nous tenons à souligner encore une fois que lors de l'abolition
des corps de police dans les cités et villes de moins de cinq mille
(5,000) habitants, le comité de reclassement de l'article 52a) devrait
pouvoir jouer un rôle comme pour les municipalités de cités
et de villes qui ont plus de cinq mille (5,000' habitants et qui veulent
être dispensées du maintien d'un corps de police.
Comme dernière remarque sur les aspects négatifs ou les
carences de ce projet de loi, nous constatons que les peines prévues
à l'article 82c) sont nettement insuffisantes pour assurer l'application
des articles 2b, 2c, 40 et 72 du projet de loi. Ainsi une municipalité
qui déciderait d'abolir son corps de police ou d'en réduire
sensiblement les effectifs sans l'autorisation du lieutenant-gouverneur en
conseil est passible d'une amende d'au moins $100.00 et d'au plus $1000.00.
Cette amende devrait être au moins calculée pour chaque jour de
violation de l'article 52. Si une corporation municipale peut épargner
des sommes annuelles de $50 000.00 et même $100 000.00, en ne maintenant
pas un corps de police, elle sera très intéressée à
payer de $100.00 à $1000.00 d'amende.
CONCLUSION
Quoi qu'il en soit, dans une révision de la Loi de Police, le
législateur devait accentuer le rôle de la Commission de Police,
sans toutefois perdre de vue la Société, l'Etat et la police qui
sont trois concepts différents.
Comme le signalait habilement son Honneur le Juge Ludovic
Laperrière, lors des journées d'étude tenues les 9 et 10
janvier 1975 à l'Hôtel Reine Elizabeth de Montréal, lorsque
ces trois éléments sont confondus, la Société est
alors sous la complète dépendance de la police. C'est ce qu'on
appelle communément l'Etat-Policier.
Le rôle de la Commission de Police du Québec n'est pas de
se substituer à l'Etat et aux collectivités locales, ni
d'être au-dessus de l'Etat ou de ces collectivités. La C.P.Q.
n'est pas et ne doit pas être opérationnelle. Strictement parlant,
elle ne fait pas partie de l'intervention policière.
Jusqu'à date, les principales activités de la Commission
de Police du Québec ont été les enquêtes, les appels
et l'uniformisation de la réglementation.
Dans l'exercice de son pouvoir d'enquête, la C.P.Q. s'est
limitée à de simples recommandations. Il n'y a jamais
d'accusé ou de condamné, comme elle s'est plue à le
répéter fréquemment. L'exercice de ce pouvoir
d'enquête devait être revisé et précisé dans
des textes de loi mieux articulés. C'est ce que le législateur a
tenté de faire en y amendant l'article 22.
Dans son souci d'intégrité et de justice, le
législateur devait préserver la réputation des effectifs
policiers lors d'enquêtes publiques, en ordonnant le huis clos comme
règle de base. Lors de dérogation
majeure à la discipline ou à l'éthique
professionnelle, des chefs de police et officiers supérieurs de la
protection publique peuvent être mis en accusation comme tout autre
citoyen devant les tribunaux de droit commun.
Le Procureur Général qui reçoit rapport de la
Commission de Police qui a fait l'enquête, est toujours libre de porter
les accusations qu'il juge utiles compte tenu des recommandations de la
Commission.
En ce qui concerne le pouvoir d'appel donné à la
Commission, il a été maintenu avec certaines modifications.
Notre Syndicat aurait souhaité que les municipalités
soient tenues de payer aux chefs et membres d'Etat-Major la totalité du
traitement dont ils sont privés durant la période de destitution
ou de suspension, jusqu'à ce qu'une décision finale de la
Commission de Police intervienne sur l'appel logé. L'indemnisation des
dépenses d'un appelant aurait pu être accordée ou
refusée à la discrétion de la Commission, selon les torts
ou manquements.
Nous notons que le droit d'appel des policiers non syndiqués est
considérablement restreint par les modifications apportées dans
le cadre de l'article 30 qui amende l'article 63 de la Loi de Police.
En ce qui concerne le pouvoir d'arbitrage, le législateur a fait
défaut de donner suite à un désir depuis longtemps
exprimé par notre Syndicat. Ainsi la Commission de Police aurait pu
siéger en appel sur des décisions de municipalités gelant
le salaire des officiers ou des directeurs, c'est-à-dire les non
syndiqués. La sentence de la Commission aurait pu être finale et
exécutoire. D'ailleurs elle aurait pu être exécutée
sous l'autorité d'un tribunal compétent, sur poursuites
intentées par une partie ou sur simples requêtes en
homologation.
Dans une révision complète du système
d'enquête sur un corps de police et la conduite de ses membres, le
législateur aurait pu peut-être s'inspirer du Code des Professions
du Québec. Avant d'aboutir à une enquête publique, il
aurait été opportun qu'un chef de police ou un membre
d'Etat-Major puisse être jugé par un comité de discipline
composé de d'autres chefs de police tel que cela existe dans les autres
professions libérales au Québec. Ce comité de trois (3)
membres présidé par un homme de loi aurait été en
mesure de recommander à la Commission de Police du Québec de
procéder à une enquête publique.
Ce n'est que suite à cette décision du comité de
discipline et de la Commission de Police en dernier ressort que le Procureur
Général pourrait, éventuellement, porter des accusations
contre un chef, un membre d'Etat-Major ou un simple policier.
Dans une refonte complète de la Loi de Police, le
législateur québécois devrait éventuellement se
pencher sur tous ces problèmes dans l'intérêt à la
fois des chefs des directeurs de police, des membres d'Etat-Major, des
effectifs policiers et de la population en général.
Il est urgent que cesse au sein des institutions policières cette
remarque que faisait jadis un chef de police et que reproduisait dans son
traité l'Honorable Guy Tardif: "Je passe bien plus de temps à me
battre avec mon conseil qu'à lutter contre les criminels" (1)
Nous ne pouvons que vous féliciter de l'importance accrue que le
législateur apporte, dans les lois, aux matières
policières.
Notre Syndicat qui milite depuis bientôt sept (7) ans, n'a pas
cessé de faire des recommandations et des suggestions par
l'intermédiaire de ses membres et de sa revue.
Nous sommes heureux de constater que les amendements proposés
constituent une première étape et nous espérons que le
législateur continuera de vouloir amender cette loi et les autres lois,
en matière de police, dans un sens favorable à
l'intérêt public et à l'intérêt des membres
représentés par notre Syndicat.
LE SYNDICAT PROFESSIONNEL DES
CHEFS DE POLICE ET POMPIERS ET
OFFICIERS SUPÉRIEURS DE LA
PROTECTION PUBLIQUE
Par: S/Jules-André Houde Jules-André Houde,
président
S/ Yvon Veilleux Yvon Veilleux, sec.-trés.
(1) Guy Tardif, Police et politique au Québec, Edition de
l'Aurore, Introduction, page 17.
ANNEXE C
Projet de loi no 48 Loi modifiant la Loi de
police
Commentaires de l'Union des municipalités du
Québec devant la commission parlementaire de la Justice
Montréal 21.08.79
INTRODUCTION
Le projet de loi no 48, Loi modifiant la Loi de police, nous est apparu
à ce point important pour l'administration municipale que nous pouvions
difficilement refuser l'invitation à venir le commenter devant cette
commission.
L'Union des municipalités du Québec a toute raison de
croire que les intentions du législateur qui l'ont motivé
à apporter des correctifs à la Loi de police sont excellentes.
Cependant, nous croyons qu'il s'agit d'un texte de loi incomplet par rapport
à l'envergure du problème de la gestion des corps policiers
municipaux. Aussi sommes-nous d'avis que le législateur a choisi une
approche ponctuelle, pour ne pas dire timide, à l'égard d'une
solution qui doit répondre à un besoin pressant, savoir,
l'élaboration d'une véritable politique de la police au
Québec.
Au cours des dernières années, il y a eu de nombreuses
études et représentations faites au sujet de l'organisation et
des fonctions de la police au Québec dont, plus récemment, le
rapport Saulnier sur lequel nous disions:
Nous sommes d'opinion que le rapport constitue une approche rationnelle
au problème de l'organisation policière en ce sens qu'il cherche
à offrir une solution mitoyenne entre le statu quo et la mise sur pied
d'une gendarmerie nationale pouvant oeuvrer sur le plan local. Bref, le rapport
est fort bien structuré et ses analyses et compilations statistiques
sont importantes. Ainsi il offre aux autorités gouvernementales des
éléments de solution pour l'élaboration d'une politique de
la police au Québec.
Si l'U.M.Q. demeure perplexe devant ce projet de loi, c'est quelle n'y
trouve pas suffisamment d'éléments lui permettant de croire que
le législateur ait tenu compte de cette étude du groupe de
travail présidée par monsieur Saulnier. Par conséquent, il
semble qu'on se sera contenté d'apporter quelques modifications à
la Loi de police, lesquelles, selon nous, risquent davantage de perturber la
situation actuelle vécue par l'autorité municipale en regard de
son corps de police, que de régler des problèmes dont l'U.M.Q. a
maintes fois souligné l'urgence.
Il est vrai que nous formulions quelques réserves quant à
certaines dispositions du rapport Saulnier et que nous n'acceptions pas
d'emblée toutes les conclusions qu'on y retrouve. Cependant, nous
n'étions pas rébarbatifs aux recommandations formulées
dans ce rapport, puisque nous croyions et croyons toujours que ce dernier offre
une formule de compromis acceptable pour le citoyen et les parties en
cause.
La recommandation du groupe de travail sur la régionalisation des
corps policiers municipaux est celle qui a retenu le plus l'attention des
élus. Toutefois, nous avons dit que les structures proposées dans
le rapport étaient prématurées puisqu'elles risquaient
d'entrer en contradiction avec l'éventuel découpage du territoire
prévu par le projet de loi no 125, Loi sur l'aménagement du
territoire et de l'urbanisme.
C'est avec satisfaction que nous reconnaissons la volonté du
législateur de ne pas légiférer sur la question de la
régionalisation des corps de police municipaux tant et aussi longtemps
que ne sera pas déterminé le découpage des futures
municipalités régionales tel que nous l'avions
suggéré.
Le projet de loi no 48 qui, dans un premier temps, vise à
accroître les pouvoirs d'enquête de la Commission de police,
propose dans un deuxième temps, certaines règles concernant
l'établissement des corps policiers municipaux et également
l'organisation de ceux-ci. Même s'il nous apparaît
nécessaire que ce projet de loi soit repensé pour
l'intégrer dans un texte législatif global, nous devons commenter
certaines parties de ce projet de loi, spécialement celles qui
concernent les pouvoirs de la corporation locale et les corps municipaux de
police. Ainsi, nous l'aborderons dans l'ordre numérique afin de rendre
notre intervention plus facile à suivre.
ANALYSE Article 2. 2a. Le premier alinéa de cet article
vient clore un débat ouvert par dix années de jurisprudence. Il
appelle cependant certains éclaircissements: ce policier, agissant comme
agent de la paix, ne cesse pas d'être préposé du
procureur-général, dans sa propre municipalité. Lorsqu'on
lit les
deux paragraphes de cet article ensemble, on pourrait penser le
contraire puisque le législateur ne parle par pour ne rien dire.
L'interprétation au contraire du premier alinéa risquerait
d'augmenter la responsabilité civile et quasi-délictuelle de la
corporation municipale. Quant au second alinéa, l'U.M.Q. croit qu'il ne
vient pas changer la nature des ententes intermunicipales de services
constabulaires. 2c. Malheureusement, il n'y a pas dans le projet de loi de
définition de "situations perturbatrices de l'ordre, de la paix et de la
sécurité publique". Elle est laissée à
l'interprétation et peut porter atteinte aux libertés civiles.
Nous souhaiterions connaître les critères qui peuvent qualifier
une situation comme perturbatrice de l'ordre, de la sécurité et
de la paix publique. Que le directeur de police puisse, de sa propre
initiative, faire rapport au procureur général, nous
apparaît acceptable dans la mesure où celui-ci, sans avoir
à en divulguer le contenu, avise simultanément le conseil
municipal qu'il a effectivement fait parvenir un tel rapport. Aussi,
faudrait-il stipuler que le directeur d'un corps de police municipal pourrait
également être appelé à soumettre au procureur
général un rapport circonstancié à partir d'une
demande du conseil municipal.
Article 7
Le dernier paragraphe stipule que la Commission a le pouvoir d'adopter
un règlement de déontologie et de discipline applicable aux
membres des corps policiers municipaux selon l'article 47a. et ce, au
même titre que le lieutenant-gouverneur en conseil pour la
Sûreté du Québec.
Cependant, ce dernier le fait sur la recommandation du directeur
général et pas autrement, alors que la Commission le fait
après consultation des organismes municipaux concernés seulement.
Encore une fois, voici une occasion pour le législateur de rectifier ce
qui nous apparaît anormal et de respecter un tant soit peu les pouvoirs
locaux. Nous demandons la possibilité que la Commission puisse par
règlement étendre l'application des dispositions de l'article
47a. ou de partie de celles-ci à l'ensemble ou à une partie des
policiers municipaux du Québec, seulement sur recommandation des
organismes municipaux représentatifs, c'est-à-dire, l'Union des
municipalités du Québec et l'Association des directeurs de police
du Québec travaillant de concert pour les besoins de la cause. Ce
processus ne doit pas empêcher la Commission de demander aux organismes
municipaux de produire des recommandations concernant la déontologie et
la discipline. D'autre part, il nous apparaît souhaitable que la
Commission définisse un code minimal de déontologie et
d'éthique policière et que ce code s'applique là où
il n'en existe pas ou ne s'applique pour les autres municipalités que
là où le code de discipline ne rencontrerait pas les dispositions
du code minimal. Ce qui laisse à l'autorité municipale la
possibilité d'adopter son propre code ou d'accepter des normes
minimales.
Article 19
Cet article du projet de loi constitue un élément nouveau
lequel, selon nous, pourrait mettre fin à beaucoup d'incertitude et
d'ambiguïté quant au rôle joué par la
Sûreté du Québec lorsque les corps de police municipaux
sont incapables d'agir adéquatement. Jusqu'à présent, ces
services avaient été accordés sans base juridique
claire.
Article 25
Ce nouvel article no 52 est sans aucun doute ce qui nous apparaît
le plus significatif dans ce projet de loi. La possibilité pour les
municipalités de 5000 habitants et moins de constituer ou non un corps
de police nous apparaît comme étant une solution souhaitée
par plusieurs de nos membres, quoique au nom de l'équité, cette
formule ne constitue vraiment pas la réponse à un juste partage
des coûts de la sécurité publique au Québec, surtout
que les municipalités seront appelées à vivre une nouvelle
expérience en matière de fiscalité à compter du 1er
janvier 1980, d'où l'intérêt d'une politique qui mette
toutes les municipalités sur un même pied à partir de
facteurs de coûts identiques ou presque.
Ce même article permet au lieutenant-gouverneur en conseil de
déterminer les effectifs d'un corps de police local, c'est-à-dire
établir le taux d'encadrement policier dans une municipalité
donnée. Rappelons que le rapport Saulnier soulignait que l'encadrement
policier d'un service complet selon une analyse faite pour un district
urbanisé de 20 000 habitants, s'établissait à une moyenne
minima de 1.5 policier par mille habitants. Les auteurs croyaient important de
souligner qu'il s'agissait là "d'un ordre de grandeur donné
à titre indicatif et que la fixation d'un taux d'encadrement pour un
district est fonction de l'indice et la densité d'occupation du sol, de
sa nature et de l'analyse suivie de la criminalité dans ce
territoire".
Même s'il est intéressant de noter que le projet de loi no
48 permet la fixation des taux d'encadrement à partir de facteurs locaux
dont devrait tenir compte la Commission dans son avis au lieutenant-gouverneur
en conseil, nous considérons qu'il serait de loin
préférable que le
taux d'encadrement policier pour une municipalité donnée
soit fixé conjointement par la Commission de police et la
municipalité concernée ou l'organisme qui la représente.
Dans la fixation des effectifs policiers, la Commission et la
municipalité tiendraient compte de la capacité de payer de la
municipalité, du taux de la criminalité dans les limites
territoriales de celle-ci, des implications de cette décision sur les
membres des corps de police concernés, de l'avis du directeur du service
de police, des possibilités d'entente suivant les articles 60 et 60a.
ainsi que des exigences de la municipalité concernant l'application des
règlements municipaux. Si la Commission et la municipalité
devaient en arriver à une impasse totale, celles-ci soumettraient leur
position respective au lieutenant-gouverneur en conseil, lequel pourrait, en
dernier ressort, fixer les effectifs de ce corps de police.
Cette approche nous apparaît beaucoup plus respectueuse du pouvoir
local tout en créant une nouvelle forme de collaboration entre, d'une
part, une Commission de police dont les objectifs sont assez mal compris et la
neutralité parfois mise en doute et, d'autre part, le pouvoir local qui
déplore le fait que le contrôle de son corps de police lui
échappe de plus en plus. L'U.M.Q. n'est d'aucune façon
prête à accepter que des représentants d'associations
policières puissent intervenir de quelque façon que ce soit dans
la fixation du taux d'encadrement policier. Selon nous, il appartiendrait au
directeur de faire valoir les points susceptibles d'avoir un impact sur les
membres du corps qu'il dirige et de faire les recommandations qu'il juge
utiles. La décision d'une municipalité de réduire ses
effectifs policiers en tout ou en partie n'émane pas d'un caprice
administratif mais plutôt de contraintes budgétaires et de calculs
démographiques. Le projet de loi accorde aux policiers ainsi
mis-à-pied un traitement de faveur difficilement justifiable par rapport
aux autres employés municipaux.
Plutôt que de procéder en vertu du principe lourd et
coûteux en deniers publics du comité de reclassement, il serait de
loin préférable que les municipalités, autorisées
à se départir de leur corps policier, puissent donner un avis de
résiliation de contrat d'au moins douze mois et accorder à chaque
employé mis-à-pied une somme forfaitaire décidée
par le lieutenant-gouverneur en conseil. 52a. Nous comprenons que la
décision du lieutenant-gouverneur de dispenser une municipalité
de son obligation de maintenir un corps de police ou d'en réduire les
effectifs n'aura d'effet que lorsque tous les efforts possibles auront
été accomplis et qu'un processus aura été
déployé pour trouver un emploi aux policiers ainsi
déplacés.
Ce que le législateur a omis d'indiquer, ce sont les
délais accordés au comité de reclassement avant que le
lieutenant-gouverneur en conseil ne consente à dispenser une
municipalité de son obligation. Faudrait-il comprendre qu'une
municipalité ne pourra sous aucun prétexte diminuer ses effectifs
policiers même si cette décision est justifiée et
justifiable avant que ne soit constitué un comité de
reclassement, que celui-ci n'ait examiné la situation et formulé
ses recommandations, également qu'il n'ait étudié la
possibilité pour le policier concerné de trouver un emploi dans
un autre corps de police et que finalement, ce même comité n'ait
examiné avec la municipalité la possibilité de lui
procurer un autre emploi? Faudrait-il comprendre que la municipalité ne
pourra d'aucune façon diminuer ses effectifs tant et aussi longtemps que
ce comité de reclassement n'ait pu trouver un autre emploi pour le ou
les policier(s) ainsi mis-à-pied? Devons-nous comprendre qu'il faille
aussi obtenir l'assentiment du policier concerné sur la qualité
du nouvel emploi?
Nous comprenons difficilement l'absence de représentants de la
Sûreté du Québec sur ce comité de reclassement
puisqu'il est logique de supposer que ce corps policier serait le premier
à embaucher les policiers municipaux affectés, soit par la
cessation d'un service, soit par la réduction de ses effectifs. En
effet, lorsque par exemple une municipalité de 5000 habitants et moins
est dispensée de son obligation de maintenir un corps de police, c'est
à la Sûreté du Québec qu'incombe dorénavant
la responsabilité de la sécurité de ce même
territoire, d'où la nécessité d'augmenter ses effectifs.
Le policier municipal, ayant reçu la même formation que les
membres de la Sûreté du Québec et, au surplus, étant
familier avec le territoire laissé à la juridiction de la
Sûreté, il nous apparaît normal que ce corps de police soit
le premier intéressé à recruter les policiers
affectés. 52b. Nous comprenons bien et nous acceptons que le
procureur-général pourrait demander à la Commission de
faire enquête afin de vérifier si une municipalité
maintient ses services policiers adéquats. Cependant, nous comprenons
mal qu'un groupe de citoyens puisse faire une demande auprès de la
Commission, sans que soit d'abord saisi le conseil de ville de cette plainte et
qu'il n'ait pu tenir une audience publique sur le sujet, s'il est d'importance,
ou apporté des correctifs administratifs, s'il est anodin et que ce
même groupe de citoyens n'ait reçu de lui sa réponse dans
un délai raisonnable. Aussi, il faudrait définir ce qu'est un
groupe de citoyens; est-ce 2, 10, 100 personnes, nous suggérons au
législateur d'établir un nombre minimum de requérants, ce
qui permet de garantir le sérieux de la plainte. D'autre part, il nous
apparaît tout à fait inconcevable qu'une association de policiers
puisse, par
requête, demander à la Commission de faire enquête
afin de vérifier si une municipalité maintient des services
policiers adéquats. D'abord il faudrait s'entendre sur la
définition du mot "adéquat"; on doit convenir qu'une association
de policiers n'a pas nécessairement la même définition de
l'adéquation en matière de services policiers que pourrait avoir
celui qui reçoit les services et paie la note. La municipalité,
de son côté, pourrait très bien invoquer qu'un service
policier adéquat doit également correspondre à sa
capacité financière, c'est-à-dire, ses pouvoirs de
taxation. Ces remarques s'appliquent aussi au citoyen qui porte une plainte
à I'll.M.Q. croit qu'une assemblée publique tenue par le conseil
peut lui permettre de justifier l'état de son service policier. 52c. Cet
article prévoit que le procureur-général peut charger la
Sûreté de maintenir la paix, l'ordre et la sécurité
publique dans le territoire soumis à la juridiction de la
municipalité, si, de l'avis de la Commission, elle ne maintient pas de
services policiers adéquats.
D'abord il nous apparaît extrêmement important que la
municipalité concernée soit saisie de l'avis de la Commission et
qu'elle ait un délai raisonnable pour se conformer avant que le
procureur-général puisse charger la Sûreté d'agir
sur son territoire.
Selon l'U.M.Q., il faudrait faire une distinction quant à
l'obligation pour la municipalité de fournir des services
adéquats et l'impossibilité pour celle-ci de le faire pour des
raisons résultant de conflits de travail. Nous suggérons que,
dans pareil cas, les dispositions de l'article 19 du projet de loi soient
appliquées et que, pour ces services qui sont rarement d'une longue
durée, la Sûreté du Québec en assume les
coûts.
Article 28
Cet article répond à un besoin et nous pensons qu'il
servira à certaines de nos municipalités membres. Cependant, nous
demandons la possibilité que ces ententes soient renégociables
annuellement; cela aurait pour effet de permettre aux deux parties de faire les
ajustements, s'il y a lieu.
Article 31
Cet article longtemps attendu par le monde municipal permettra aux
petites municipalités qui connaissent des augmentations de population
saisonnières, tels les lieux de villégiature, de pouvoir nommer
pour une période de temps raisonnable des constables
spéciaux.
Article 39
Nous croyons en toute objectivité et équité que
cette période de deux ans accordée aux municipalités
régie par le Code municipal devrait être accordée sans
discrimination aux quelques municipalités régies par la Loi des
cités et villes de même taille qui, jusqu'à ce jour et pour
toutes sortes de raisons, ne se seraient pas conformées aux dispositions
de l'article 52 de la Loi de police.
CONCLUSION
En guise de conclusion, l'U.M.Q. se demande pourquoi le
législateur n'a pas profité du projet de loi no 48 pour clarifier
une fois pour toutes l'ambiguïté qui existe entre, d'une part,
l'article 115 de la Loi des cités et villes et, d'autre part, l'article
55 de la Loi de police. Il nous semble qu'à l'aube d'une
réflexion, si partielle soit-elle, sur le problème de la gestion
des corps policiers municipaux, le législateur aurait pu
délimiter les attributions et responsabilités des
autorités civiles et policières. Monsieur Yves Ouellette,
professeur à la Faculté de droit de l'Université de
Montréal, parlant du contrôle politique sur les services de police
municipaux, le 2 mars dernier, disait:
Une des faiblesses actuelles de l'organisation policière au
Québec est l'insuffisance des contrôles gouvernementaux sur la
gestion générale des services de police, attribuable à
l'immobilisme des divers gouvernements provinciaux et à leur retard
à se donner des politiques bien articulées sur la gestion des
services de police. Si d'aucuns s'étonnent ou s'inquiètent de la
puissance des syndicats de policiers et parlent de l'émergence ou
s'inquiètent de la puissance des syndicats de policiers et parlent de
l'émergence d'un pouvoir policier, ce phénomène n'est
peut-être pas entièrement attribuable à la seule
gourmandise des policiers, mais tient aussi à l'inaction des
gouvernements qui se laissent dépasser par la police.
En 112 ans de confédération, les réalisations des
gouvernements provinciaux en matière de planification et de politique
policières n'impressionnent gruère. On pouvait lire dans le Livre
Blanc intitulé "La police et le citoyen": "Si les structures actuelles
présentent des lacunes graves, c'est en bonne partie parce que l'Etat
n'a pas suffisamment assumé jusqu'à maintenant son rôle de
principal planificateur du domaine policier".
C'était en 1971. Depuis ce temps, le rapport Saulnier a
été déposé et rien ne permet de croire qu'il se
matérialisera prochainement en réalisations concrètes et
en législation.
C'était là la somme de nos premières
réactions à ce projet de loi no 48 et nous espérons que
nos commentaires invitant le législateur à revoir l'ensemble de
la Loi de police seront bien accueillis. Sachez que notre seul but est
l'amélioration de la qualité des services à la population
et ce à l'intérieur d'un cadre juridique bien défini ne
laissant aucun doute quant aux devoirs et obligations de chacun.
ANNEXE D
Limiter les pouvoirs policiers: Une exigence
démocratique
Recommandations de la Ligue des droits et libertés devant la
commission parlementaire étudiant le projet de loi 48 et modifiant
l'actuelle Loi de police
Août 1979 IV Recommandations
Si nous avions été moins coincés par le temps trop
court entre le dépôt de ce projet de loi et les audiences
publiques en pleine période de vacances, nous aurions aimé nous
livrer à une analyse plus en profondeur du phénomène
policier.
Nous croyons cependant que la mise en application des mesures
recommandées dans ce mémoire est susceptible de contribuer
à faire des policiers non plus des fonctionnaires armés se
situant au dessus des lois mais des employés d'un service public au
service de leurs concitoyens ayant pour principal souci de garantir à
chacun le libre exercice des droits reconnus par la Déclaration
canadienne des droits ou la Charte des droits de la personne.
Voici donc un résumé des principales recommandations
contenues dans ce mémoire: 1) Afin de contrer la violence
policière, nous recommandons le désarmement progressif des
policiers du Québec. 2) Contre la police secrète, nous
recommandons que les enquêtes et les recherches continuent sur d'autres
cas et méthodes de subversion sociale et politique utilisées par
la police. 3) Les services policiers de sécurité tels qu'ils
fonctionnent actuellement doivent être abolis et leur mandat doit exclure
explicitement toute activité non criminelle. Tous les dossiers (de
même que les fiches d'interpellation) de citoyens et d'organisations
à qui aucune activité criminelle n'est reprochée doivent
être détruits. 4) Un examen exhaustif des pratiques
d'enquête et d'intervention de la police doit être fait. Par
exemple toute la question de l'utilisation des informateurs doit être
scrutée à la loupe. 5) Au secret qui continue d'entourer la
police, le gouvernement doit opposer une loi d'accès à
l'information à l'exemple du Freedom of Information Act des
Etats-Unis qui comporterait trois éléments fondamentaux:
l'accès des citoyens à l'information gouvernementale en
général et d'autre part l'accès des citoyens et des
organisations à l'information les concernant, notamment au chapitre des
dossiers de police. Enfin que sur une base annuelle les escouades
spécialisées rendent compte de leurs activités. 6) Les
devoirs de la Sûreté du Québec et des corps de police
municipaux doivent être précisés (cf. art. 29) et les
directives plus claires données aux policiers. 7) Le législateur
devrait clarifier la question du droit d'information et de pression que
constitue le piquetage eu égard au recours systématique par les
employeurs aux injonctions. 8) Les preuves obtenues illégalement
devraient être déclarées inadmissibles devant les
tribunaux. 9) Le droit à l'objection de conscience: c'est-à-dire
pour un policier le droit de ne pas obéir à un ordre qu'il juge
illégal ou illégitime, doit être garanti par la loi de
police. 10) Le droit pour les policiers de s'affilier à une centrale
syndicale, droit reconnu aux autres travailleurs, doit également
être accordé. 11) Que la GRC soit au même titre que les
autres corps policiers oeuvrant au Québec soumise au contrôle de
la Commission de police et du ministère de la Justice. 12) Le pouvoir
d'enquête sur la conduite des policiers doit être retiré de
la juridiction de la Commission de police et être confié à
un organisme indépendant ou à la Commission des droits de la
personne.
13) Devenu un tribunal d'exception permanent, la CECO doit être
abolie de même que l'art. 19 de la loi de police de façon à
retirer à la Commission de police tout pouvoir d'enquête sur le
crime organisé, le terrorisme et la subversion. 14) Que les policiers
qui ont autorisé et/ou participé à la commission d'actes
criminels soient poursuivis devant les tribunaux. 15) Que les garanties soient
incluses dans le projet de loi concernant l'application et la gestion du Code
de déontologie.