L'utilisation du calendrier requiert que Javascript soit activé dans votre navigateur.
Pour plus de renseignements

Accueil > Travaux parlementaires > Travaux des commissions > Journal des débats de la Commission permanente de la justice

Recherche avancée dans la section Travaux parlementaires

La date de début doit précéder la date de fin.

Liens Ignorer la navigationJournal des débats de la Commission permanente de la justice

Version finale

29e législature, 4e session
(15 mars 1973 au 25 septembre 1973)

Le mercredi 20 juin 1973 - Vol. 13 N° 92

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Étude détaillée du projet de loi no 80 — Loi des huissiers


Journal des débats

 

Commission permanente de la Justice Projet de loi no 80 - Loi des huissiers

Séance du mercredi 20 juin 1973

(Dix heures six minutes)

M. BLANK (président de la commission permanente de la justice): A l'ordre, messieurs!

La commission commence l'étude du projet de loi 80. Nous avons certains groupes ce matin. Je ne sais pas si vous avez l'ordre du jour.

Le premier groupe est la Chambre des huissiers de justice du Québec; le deuxième groupe sera CRABS (Citizens rights against bailiff seizures); le troisième sera le Barreau du Québec; le quatrième sera la Clinique juridique communautaire de la rive sud Inc. ; le cinquième sera la Corporation des huissiers du district de Montréal; et le sixième sera South Shore Citizens Association.

M. THOMAS: J'ai écrit une lettre au nom de l'Association des huissiers de Montréal.

LE PRESIDENT (M. Blank): On peut ajouter votre nom. Si nous avons le temps aujourd'hui, nous vous entendrons.

Nous entendrons, premièrement, le représentant de la Chambre des huissiers de justice du Québec, Me Hubert Walters.

Chambre des huissiers de justice du Québec

M. WALTERS: M. le Président, messieurs les membres de la commission, je dois tout d'abord présenter les personnes qui m'accompagnent. J'ai à ma droite M. André Sénéchal, qui est président de la Chambre des huissiers de justice du Québec et, à ma gauche, M. Germain Rose, de Montréal, qui est le secrétaire de la chambre.

En tout premier lieu, je voudrais vous remercier de nous avoir permis de présenter un mémoire devant la commission parlementaire. La Chambre des huissiers de justice du Québec est une association bona fide qui existe depuis 1967 et qui groupe tous les huissiers de la province de Québec.

La chambre félicite le gouvernement d'avoir déposé un projet de loi qui créerait la Loi des huissiers et, en même temps, nous nous permettons de faire quelques remarques et quelques suggestions sur le projet de loi qui a été déposé.

Une remarque préliminaire est que nous aurions, peut-être, aimé prendre connaissance des règlements qui auront certainement une grande importance dans l'application de la loi.

M. PAUL: Nous déplorons cela, nous aussi, à l'Assemblée nationale. Nous ne voyons pas souvent les règlements. Nous sommes comme vous; nous les apprenons quand ils sont adoptés. Le ministre de la Justice n'est pas un ministre comme les autres. On ne sait pas ce qui arrivera.

M. WALTERS: Peut-être qu'à force d'insister, on pourra avoir les règlements, à un certain moment, en même temps que la loi.

Quoiqu'il en soit, il est possible que certaines des remarques et des suggestions que nous allons faire n'auront plus leur application lorsque les règlements auront été déposés.

M. PAUL: Arrêtez donc! Heureusement que dans Outremont, vous avez beaucoup de voix.

M. BACON: II s'est fait débobiner la gorge.

M.WALTERS (Hubert): Comme je l'ai dit tout à l'heure, nous sommes bien heureux de constater qu'un projet de loi a été déposé et nous espérons qu'il sera adopté le plus rapidement possible. Notre mémoire touche certains articles et j'aimerais faire les commentaires appropriés.

Tout d'abord, à l'article 1 du projet de loi, nous désirons que l'huissier soit neutre, mais nous désirons également que l'huissier puisse avoir un rôle social à exercer qui pourrait consister, par exemple, à donner certaines informations lorsqu'il fait la signification d'une procédure, dans un sens qui pourrait peut-être aider le défendeur qui la reçoit.

Ceci pourrait peut-être se faire sous forme d'un écrit ou d'un document qui pourrait être remis au défendeur, mais nous espérons qu'on pourra nous indiquer quel est le rôle exact que l'on attend de l'huissier. Qu'on n'en fasse pas simplement un percepteur, si on peut dire, mais que vraiment il ait un rôle à jouer.

C'est ce que je viens de suggérer, M. le ministre. C'est qu'à un certain moment, tout en restant neutre, on ne puisse pas nous faire le reproche d'avoir été... Par exemple, que l'avocat vienne dire: Monsieur, vous avez été simplement du côté du défendeur, ou que le défendeur dise: Vous êtes ici pour agir au nom d'un créancier, vous ne me donnez aucune facilité. Est-ce qu'à ce moment-là l'huissier ne pourrait pas, par exemple, indiquer au défendeur ce qui lui arrive? C'est une procédure, ce qu'il peut faire. Il peut aller voir un avocat. Il y a des délais à respecter.

M. PAUL: Qu'est-ce qui les empêche de le faire, actuellement?

M.WALTERS: C'est qu'il semble y avoir une tendance qui voudrait que l'huissier soit simplement un percepteur. Qu'on lui dise: Ton travail, c'est de signifier une procédure et rien d'autre. M. le Président de la corporation aurait peut-être un mot à ajouter.

M. SENECHAL: Effectivement, dans la pratique, je crois que les huissiers remplissent partiellement ce rôle actuellement. Vous n'êtes pas sans savoir, avec les nombreuses lois sociales

qui existent... Je vais vous donner un exemple. Quelqu'un peut être poursuivi devant la cour Provinciale actuellement et ne pas savoir qu'il peut se référer à la Loi des petites créances. C'est bien sûr que chacun des débiteurs qui reçoit des procédures ne peut pas être au courant de toutes les lois. Je crois même qu'un écrit, une brochure comme on le suggère à certains endroits, ne pourra jamais être complet, en ce sens qu'il ne peut pas donner toutes les différentes options qu'un défendeur peut prendre.

C'est là-dessus qu'on veut que le rôle social de l'huissier soit de pouvoir le donner, et on voudrait que la définition de l'huissier soit assez complète pour pourvoir à cela.

M. PAUL: Est-ce que vous avez déjà reçu des plaintes de la part du Barreau à ce sujet, sur des informations que vous auriez transmises à certains défendeurs?

M. SENECHAL: Des informations fausses? Comme notre avocat vous l'a dit, on a actuellement tendance à vouloir que le rôle de l'huissier se limite à livrer les procédures et simplement exécuter sans donner des informations. Plusieurs insistent et voudraient que ce soit simplement cela. Nous, nous voudrions qu'il soit un officier de justice comme le gouvernement semble vouloir le définir et on voudrait qu'il soit aussi un officier neutre.

M. CHOQUETTE: Est-ce qu'il n'y a pas un danger que l'huissier qui donne des conseils à un débiteur donne des conseils intéressés en faveur du créancier? Ou, est-ce qu'il n'y a pas un danger aussi que n'ayant pas une formation juridique...

M. SENECAL: D'accord.

M. CHOQUETTE: Je ne dis pas que les huissiers sont ignorants en droit, parce qu'il y en a beaucoup qui connaissent bien les questions de droit, mais malgré tout ils n'ont pas suivi un cours de droit à l'université. D y a danger qu'ils donnent des renseignements erronés à une des parties.

M. SENECAL: Je pense qu'il ne faudrait pas aller trop loin, si vous permettez. Il faut tout de même se reporter à un cas concret. Le type qui reçoit une procédure, habituellement c'est un type qui la plupart du temps n'a pas les connaissances requises. Il faut lui dire qu'en fait il reçoit une action qui est poursuivie même si c'est écrit au nom de la reine et toute la formalité qui existe dans la procédure... On lui dit: Si vous voulez comparaître, vous avez dix jours. Vous allez dire: C'est inscrit dans la procédure, mais c'est sûr que s'il était plus intelligent que tout le monde, il ne serait peut-être pas poursuivi, le bonhomme.

Ce que nous voulons, c'est pouvoir lui dire en quoi consiste la procédure qu'il reçoit et parfois aussi, les options qui peuvent se poser dans ce cas-là. C'est simplement cela. On ne veut pas aller dans le domaine juridique, donner des références juridiques mais on voudrait que l'huissier soit habilité à pouvoir expliquer le sens de la procédure que le défendeur reçoit.

M. BACON: Si je comprends bien, vous ne pensez pas qu'au point de vue pratique vous vous embarquez dans un gros bateau en faisant une affaire comme celle-là?

M. SENECAL: Oui, on s'embarque dans un gros bateau, mais on voudrait que...

M. BACON: Mais quand vous dites — je n'ai pas votre expérience — que vous signifiez une action ou quelque chose à un individu, peu importe son degré d'instruction, il sent qu'il y a quelque chose qui se passe, s'il ne le sait pas tout à fait comme vous le dites. D'après mon peu d'expérience dans ce domaine, le gars sait et d'ailleurs, il le sait très bien avant, qu'il s'est mis dans le pétrin. Le rôle que vous mentionnez devrait être peut-être avant qu'il arrive une action, mais là ce ne serait pas vous autres qui devriez le jouer. C'est tout un mécanisme un moment donné. Je veux spécifier que, M. le Président, M. le ministre, je ne suis pas avocat.

M. SENECHAL: Je voudrais apporter seulement une petite...

M. BACON: Ce que vous voulez avoir...

M. DROLET: Cela va bien, tu n'es pas avocat, mais tu fais bien ça.

M. BACON: Je ne suis pas avocat populaire, non plus. On laisse ça au député de Portneuf. Par la manière dont vous semblez expliquer votre rôle, par l'idée que je m'en faisais, j'ai l'impression que vous vous embarquez dans un sacré bateau. Si vous commencez à vouloir expliquer, si je comprends bien, à un gars ce qu'il y a, quel choix il a, qu'est-ce qu'il devrait faire, vous n'êtes pas réchappé, vous allez avoir des sacrés problèmes tout à l'heure.

LE PRESIDENT (M. Blank): Je pense que la situation a changé. Puisque je suis président, peut-être avec le consentement de mes confrères... Avant, dès que vous signifiiez une procédure, vous aviez à expliquer, parce que peut-être le gars était pauvre, il n'a pas l'argent pour aller voir un avocat... La situation a changé. Vous pouvez lui dire la même chose: Allez voir un avocat, l'assistance judiciaire, point. C'est accessible à tout le monde.

M. SENECHAL: C'est dans ce sens, M. le Président, qu'on peut lui dire qu'il y a des cliniques juridiques: Si vous êtes trop pauvre, vous pouvez vous référer à elles. Mais les gens

lui posent des questions chaque fois qu'ils reçoivent des procédures. Mais pour répondre à ce monsieur, c'est sûr que les gens qui reçoivent des...

LE PRESIDENT (M. Blank): Cest M. Bacon de Trois-Rivières.

M. SENECHAL: M. Bacon de Trois-Rivières, c'est sûr que les gens qui sont poursuivis attendent toujours d'être mal pris et attendent toujours le matin de la vente pour essayer de se déprendre. Ils attendent même que les affaires soient vendues, souvent.

M. PAUL: Si je comprends bien votre point de vue, vous voudriez être à l'abri des reproches qui pourraient vous être adressés au cas où vous fourniriez des renseignements aux défendeurs qui vous demandent quoi faire avec la procédure que vous leur apportez ou qui vous demandent : Qu'est-ce que c'est ce papier.

M. SENECHAL: Exactement.

M. PAUL: C'est ça qui est votre point de vue.

M. SENECHAL: C'est exactement ça, on ne peut pas aller plus loin que ça.

M. WALTERS: A l'article 4 du projet de loi, on mentionne qu'un permis devrait être accordé à un huissier. Ici, notre suggestion serait que le permis soit permanent avec des formalités administratives annuelles et non pas que le permis soit annuel et renouvelé, disons, faire une demande complète chaque année. Simplement, notre demande est que le permis soit permanent avec formalités administratives annuelles.

M. PAUL: Vous voudriez être comme le Barreau, reçu huissier pour la vie. L'avocat est reçu avocat pour la vie pour autant qu'il paie sa contribution. Il a le droit de continuer à pratiquer à moins qu'il ne commette des actes dérogatoires.

M. WALTERS: Oui, parce que la loi prévoit des dispositions contre un huissier qui ne fait pas son travail d'une façon satisfaisante ou qui outrepasserait ses devoirs.

Alors là, pourquoi n'auraient-ils pas, un permis qui serait permanent avec, si le ministère le désire, un certain contrôle administratif qui pourrait s'exercer chaque année? On peut lui demander, par exemple, de fournir certains documents chaque année et que le permis ne soit pas annuel en tant que tel.

M. CHOQUETTE: En principe il n'y aurait pas d'objection à ça, sauf que vous auriez peut-être un droit à payer tous les ans pour exercer votre profession.

M. WALTERS: C'est ça!

M. CHOQUETTE: II y a aussi une possibilité de contrôler si vous êtes toujours dans les conditions requises pour exercer la profession.

M. WALTERS: Nous sommes d'accord.

M. CHOQUETTE: Je pense bien que nous allons pouvoir accéder à cette demande avec ces modifications.

M. WALTERS: Nous passons ensuite à l'article 5 du projet de loi qui est peut-être l'article qui va prêter le plus à controverse. Cet article prévoit qu'il y a une possibilité que des huissiers n'aient le droit d'agir que dans certains districts. La position de la Chambre que je représente est qu'un huissier doit avoir le droit de pratiquer dans toute la province, sans restriction et sans limitation.

Comme vous pourrez le constater, il y a divergence sur ce point et il va y avoir d'autres groupes qui vont venir exprimer — au moins quant à un groupe — une opinion différente, en ce sens qu'il existe à Montréal la Corporation des huissiers de Montréal qui, eux, je présume peut-être, demandent qu'il y ait un statut qu'on pourrait appeler particulier pour les huissiers de la région de Montréal. La Chambre des huissiers, dans ses recommandations; demande que la pratique soit permise pour un huissier dans tous les districts. Les membres de la Corporation des huissiers de Montréal font partie de notre chambre. Ils vont exprimer leur point de vue seulement sur ce point.

M. CHOQUETTE: M. Walters, pour expliquer la situation qui existe, pour analyser le problème, je crois qu'il faut connaître la situation qui prévaut, si vous me permettez d'expliquer dans quel contexte historique on se situe. Autrefois, les huissiers étaient habilités à n'exercer leur profession ou occupation que dans un district judiciaire déterminé. Par conséquent, c'était la règle qui s'appliquait aux huissiers du district de Montréal, qui formaient une corporation professionnelle avec certains pouvoirs, si je me rappelle bien.

Mais quand le code de procédure a été amendé, vers 1966 ou 1964, on a permis aux huissiers d'exercer dans tous les districts judiciaires de telle sorte que sont arrivés sur le marché montréalais, très lucratif au point de vue de la signification des procédures, toutes sortes d'huissiers plus ou moins compétents. Enfin, il y en avait peut-être des compétents, mais il y en avait de plus ou moins compétents. Ces gens ont fait une concurrence indue aux huissiers de Montréal, ici, représentés par M. Linteau, qui se considéraient, peut-être à juste titre, la crème des huissiers. Alors, d'où, n'est-ce pas, ce problème qui s'est produit. Actuellement, les huissiers de Montréal continuent à se plaindre de la concurrence d'huissiers qui ne

pratiquent qu'en vertu de l'autorisation de juges de la cour Supérieure, qui peut être donnée, vous le savez, dans des conditions ex parte, c'est-à-dire sans trop d'analyse sur la compétence du candidat. Les huissiers de Montréal disent: Nous, nous sommes en butte à cette concurrence.

Il ne faut pas oublier que le projet de loi veut faire, d'une certaine façon, table rase du passé, dans ce sens qu'il n'y aura pas plusieurs corporations de huissiers, qu'il n'y aura pas les huissiers de Montréal dans une corporation, les huissiers de campagne dans une autre ou les huissiers de Québec dans une autre. Ce sera un seul groupe d'huissiers.

Qu'est-ce qui fait rire le député de Trois-Rivières?

M. BACON: Les huissiers de campagne ou les huissiers de Québec?

M. CASTONGUAY: Pardon?

M. BACON: Les huissiers de campagne.

M. CASTONGUAY: Je crois que le député de Trois-Rivières n'a pas saisi exactement ce que je viens de dire.

M. PAUL : Ce n'est pas la première fois, vous savez, qu'il n'est pas sur la même longueur d'ondes que le ministre.

M. CASTONGUAY: Cela lui arrive, oui.

Quoiqu'il en soit, la situation que nous voulons établir est d'avoir une seule corporation d'huissiers avec le droit pour les huissiers d'exercer leur profession dans toute la province, lorsqu'ils sont qualifiés. Mais il se peut que, dans certains districts judiciaires éloignés ou dans certains villages ou villes éloignées, là où il n'y a pas d'huissier professionnel présent, nous soyons obligés d'avoir recours pour la signification des procédures à des gens qui ont des qualifications moindres que celles des huissiers de la grande corporation. Et ces huissiers de qualifications moindres, nous entendrions les limiter, au point de vue de leurs actions, à certains districts judiciaires. Par exemple, on sait très bien qu'à l'heure actuelle, il y a des huissiers dans les campagnes qui exercent toutes sortes d'autres occupations que celle de huissiers.

Il y a des barbiers, enfin toutes les occupations y passent. Je ne dis pas que ces gens ne rendent pas service parce que, quand on est avocat et qu'on a une procédure â faire signifier, je donne un exemple hypothétique, mettons à Sainte-Rose-du-Dégelis, on ne peut peut-être pas s'attendre à ce qu'il y ait un huissier à temps plein qui travaille là. On est content si on trouve un huissier, soit à cet endroit ou à un endroit environnant, qui peut s'occuper de la signification de la procédure et le faire très bien. C'est dans cet esprit que nous entendrions limiter à un certain district judiciaire la pratique de certains huissiers qui n'ont pas les qualifications de tout le monde.

M. ROSE: Si vous me permettez, M. le ministre, j'aimerais tout simplement ajouter que nous serions d'accord sur vos définitions...

MLE PRESIDENT (M. Blank): Votre nom, s'il vous plaît?

M. ROSE: Mon nom est Germain Rose. Nous serions d'accord sur la définition que vous venez de donner et nous sommes conscients que, dans l'immédiat, il faudrait peut-être admettre ou accepter qu'il puisse y avoir des différences, comme à Sainte-Rose-du-Dégelis, comme vous l'avez mentionné. Cependant, et ça ne devrait pas être conditionné par le volume d'ouvrage ou le volume de procédures à signifier, nous espérerions qu'avec les années tous les huissiers de la province en viennent réellement à une compétence véritable, et je pense que tout le monde ne peut que souhaiter cette chose-là.

M. WALTERS: Ce qui arrive, c'est qu'au moment où on a pris connaissance du projet de loi, on ne pouvait peut-être pas connaître quelle était la portée exacte de cet article 6. C'est pourquoi nous avons exprimé dans notre mémoire l'opinion qu'un huissier avait le droit de pratiquer dans toute la province, bien qu'il y ait eu certaines dissidences parmi les membres de la chambre et que c'était une opinion majoritaire qui était exprimée.

L'article suivant, l'article 7, fait état de la suspension, de la nullité ou de l'annulation du permis que détient un huissier. Ici, notre suggestion serait que ce soit le comité de discipline qui pourrait être formé à l'intérieur de la corporation dont on voit la formation plus loin. A l'article 23, on prévoit qu'une corporation serait chargée de l'administration de la loi. C'est ici que nous suggérons, nous, qu'il y ait un conseil de discipline qui soit celui chargé de prendre ces décisions.

M. DROLET: Le conseil de discipline à la place du ministre.

M. WALTERS: C'est une formule que nous suggérons.

M. CHOQUETTE: M. Walters, j'attire votre attention sur l'article 23, paragraphe m): "Pour confier à une corporation formée d'huissiers le mandat d'appliquer, en tout ou en partie, aux conditions qu'il détermine, la présente loi et les règlements adoptés en vertu du présent article." Cet article permet par conséquent au ministre de déléguer en tout ou partie ses pouvoirs à la corporation suivant le sérieux de la corporation que vous formerez aussitôt que la loi sera adoptée. Vous pouvez être sûr que, personnellement, il n'y a rien qui ne me plairait plus que de

déléguer la plus grande part de mes pouvoirs pour que vous vous administriez vous-mêmes, mais je crois que pour le moment, étant donné que dans les premières années on ne peut pas être absolument sûr de ce qui va se produire, il était nécessaire que le ministre de la Justice exerce les pouvoirs qui lui sont conférés par la loi.

M. WALTERS: Nous prenons bonne note de vos remarques à l'effet que vous êtes prêt à déléger des pouvoirs; d'ailleurs, ce que nous avons demandé dans notre mémoire, c'est que le ministre délègue ses pouvoirs à ce conseil qui serait issu de la corporation à être formée; nous sommes conscients et nous souhaitons qu'une corporation soit formée. Seulement, encore ici, vu que nous en sommes limités à un projet de loi et qu'on ne donne pas de détails sur cette corporation, l'étendue de ses pouvoirs, c'est pour cela que nous avons exprimé ce désir.

LE PRESIDENT (M. Blank): Le député de Maskinongé.

M. PAUL: M. le Président, il va de soi que le ministre ne pourra pas agir ou appliquer les dispositions de l'article 7 sans qu'il reçoive un rapport de quelqu'un ou d'un organisme quelconque. Je retiens les recommandations du ministre et — je ne fais que penser tout haut — peut-être aussi que, dans le but de protéger le ministre de l'odieux de la décision, il pourrait peut-être être ajouté à l'article 7: Le ministre peut, sur recommandation du conseil consultatif, suspendre ou annuler le permis de toute personne jusqu'à ce que le mécanisme prévu par l'article 23, paragraphe m) soit mis en place à l'effet que le ministre obtienne tous les pouvoirs nécessaires pour confier un mandat à un organisme déterminé, à savoir dans les circonstances une corporation.

M. WALTERS: Si vous permettez, nous voyons plutôt le conseil consultatif, comme un organisme qui doit, comme on dit, conseiller et il doit y avoir, à notre point de vue, une distinction bien évidente entre le comité consultatif et la corporation elle-même qui serait formée, que ce soient deux entités différentes.

Nous voyons plutôt qu'un comité de discipline à l'intérieur de la corporation soit chargé de faire les recommandations ou de prendre les décisions plutôt que le comité consultatif lui-même, dans un autre ordre d'idées. D est entendu que le comité consultatif et la corporation doivent travailler au même but. Les deux sont faits en fonction des huissiers et pour aider à l'application de la loi mais quand même ce sont deux corps que nous voyons séparés bien que le comité consultatif...

M. ROSE : Si je retiens la suggestion de Me Paul, il voudrait donner au comité consultatif un rôle qui serait éventuellement dévolu à la corporation à être formée, alors que dans notre optique l'éventuel comité consultatif prévu dans la loi n'a qu'un rôle de consultation tel que c'est dit et n'a pas de pouvoir administratif. C'est comme cela que nous le voyons.

M.PAUL: Remarquez bien que je n'en fais pas l'objet d'un amendement. Je vous ai tout simplement exposé le point de vue justement pour connaître votre réaction et vos remarques sur une telle suggestion, sans y attacher plus d'importance de ma part sur cette suggestion faite au ministre.

M.WALTERS: A l'article 7, il y aurait un autre point sur lequel nous désirons ajouter quelque chose. Nécessairement, l'huissier dont on veut, par exemple, suspendre le permis ou à qui on fait un reproche, doit avoir le droit de se faire entendre. Il semble que, d'après l'article 7, on ne lui donne pas ce droit de se faire entendre. Il faudrait qu'il puisse s'exprimer de façon que cela ne soit pas une décision rendue par défaut contre lui ou ex parte.

M. CHOQUETTE: J'ai fortement l'impression que le principe audi alteram partem s'appliquerait même si cela n'est pas dit, mais on peut sûrement inscrire à l'article 7 que l'huissier qui est sujet à perdre ou voir son permis suspendu ait l'occasion d'être entendu. Je crois que cela serait tout simplement normal de l'inscrire au projet de loi.

M.WALTERS: C'est un principe que l'on retrouve partout...

M. CHOQUETTE: C'est cela.

M. WALTERS: ... qu'une partie a toujours le droit de se faire entendre lorsqu'on veut la condamner ou qu'on l'attaque.

M. CHOQUETTE: Exactement. Cela ne sera pas moi. Ce seront d'autres qui vont l'entendre parce que...

LE PRESIDENT (M. Blank): Le député de Dorion.

M. BOSSE: J'aimerais que les huissiers aient autant de latitude vis-à-vis des clients avec qui ils font affaires, c'est-à-dire parfois donner à ces derniers le droit de se faire entendre.

J'ai été témoin, personnellement, de certaines de leurs attitudes. Les huissiers sont d'une attitude assez radicale dans leurs moyens lorsqu'ils procèdent à des saisies. Ils exigent ici, devant la commission parlementaire, qu'on les entende, qu'on ait à leur égard beaucoup de compréhension.

Dans leurs actions, je les ai vus procéder et ils sont loin d'être compréhensifs et d'être capables de discussion avec les clients avec qui ils font affaires.

M.PAUL: Est-ce que l'honorable député de Dorion se rend compte que l'huissier exécute un ordre de la cour?

M. BOSSE: Je suis conscient que l'huissier exécute des ordres de cour mais il y a des moyens humains de le faire sans pour cela procéder d'une façon presque gestaposienne si on peut dire cela.

M. PAUL: S. S.

M. CHOQUETTE: Pour rétablir les faits et les situer dans leur contexte exact, il est indiscutable qu'il y a des abus de la part de certains huissiers à l'heure actuelle. Je pense qu'on ne le niera pas de l'autre côté de la barre parmi les huissiers. Mais la raison de cet état de choses, c'est l'espèce de désorganisation qui existe dans la profession en général à l'heure actuelle. C'est justement ce que le projet de loi va tenter de guérir.

LE PRESIDENT (M. Blank): A l'ordre! On n'a pas le droit de manifester ici. Je donne la parole au député de Papineau.

M. ASSAD: M. le Président, en cas d'abus ou si cela devient une question d'interprétation d'un huissier, est-ce que le ministre de la Justice se réserve le droit de renverser la décision du comité de discipline?

M. CHOQUETTE: Oui.

M. WALTERS: II y a un appel de prévu — si on me permet de répondre — au sujet de la décision qui suspend le permis d'un huissier ou qui le condamne. Il y a un appel prévu dans la loi.

M. PAUL: Un juge de la cour Provinciale.

M. WALTERS: Un juge de la cour Provinciale.

M. CHOQUETTE: Voyez-vous, supposons que le ministre suspende un huissier et que celui-ci ne soit pas satisfait de la décision, il peut aller en appel à la cour Provinciale en vertu de l'article 10.

M. BOSSE: Entre autres, M. le ministre... Je voulais terminer lorsque j'ai été interrompu par mon très cher collègue. Je voulais noter au passage la conduite en particulier d'un individu qui s'appelle Pelletier, qui agit comme huissier et opère dans la région de Joliette, c'est-à-dire qui a un permis pour opérer dans la région de Joliette, mais qui vient faire ses incartades dans la région de Montréal. Je sais que la loi va corriger beaucoup de choses, seulement, je voulais rappeler au ministre certains abus qui ont été commis.

M. CHOQUETTE: J'espère que le député de

Dorion n'a pas été victime de saisies intempestives.

M. BOSSE: Justement, par inadvertance et par erreur, mais il n'y avait pas lieu de discuter avec de tels individus.

M. PAUL: Est-ce dans le cours de votre travail sur l'étude du problème du taxi?

M. BOSSE: Certainement pas parce qu'à cette occasion les saisies sont opérées d'une façon beaucoup plus raffinée, par des gens beaucoup plus habiles dans la procédure, beaucoup plus subtils. Celui-ci manquait même de finesse.

M. DROLET: Les chauffeurs de taxi ont au moins saisi cela.

M. WALTERS: M. le Président, nous sommes bien conscients, comme le démontre la remarque du député de Dorion, qu'il y a peut-être des individus qui vont à l'extrême et commettent des abus. Mais c'est pour cela que nous sommes bien satisfaits qu'une loi soit déposée afin de rétablir l'ordre. Nous sommes tout à fait d'accord qu'il doit y avoir un ordre qui soit mis dans l'exercice de la profession et qu'une corporation soit formée justement pour surveiller et mettre fin aux abus qui pourraient se produire.

Nous allons ensuite à l'article 8. Ici, je voudrais souligner que, dans le mémoire que nous avons déposé, il s'est glissé deux erreurs à la page 5. Je voudrais les rectifier ici. C'est que, dans le mémoire, nous mentionnons certains commentaires que nous référons à l'article 10 alors que de fait, ils devraient être sous l'article 8.

Nous demandons qu'une requête soit signifiée à la partie et cette requête qui est prévu à l'article 10 fait déjà l'objet d'une signification, mais c'est à l'article 8 qu'on dit: "Le ministre doit informer, par écrit, de sa décision la personne à qui il refuse d'accorder un permis ou dont il suspend ou annule le permis..." Nous désirons à ce moment-ci que cette décision, si elle était, par exemple, du conseil de discipline, soit signifiée à la partie qui en fait l'objet. Si on trouve que cela va trop loin par une signification, nous avons suggéré dans notre mémoire que ce soit au moins par poste recommandée qu'on lui fasse connaître la décision qui le concerne. C'est quand même une décision qui est très importante parce qu'on peut le priver de son gagne-pain; alors, qu'il en soit informé le plus tôt possible vu qu'il y a un délai d'appel qui est prévu à l'article 10. Alors, soit une signification ou encore que l'avis soit par poste recommandée, alors qu'on dit tout simplement par écrit. On sait bien qu'on peut, par poste recommandée, s'assurer qu'une personne a bien reçu le document qui lui était adressé. C'est une preuve de réception, en fait, qui est une petite carte rose que le bureau de poste remet à

l'expéditeur à l'effet que vraiment la lettre a été reçue par le destinataire.

M. CHOQUETTE: Nous notons votre suggestion.

M.WALTERS: A l'article 10, au deuxième paragraphe, on dit: "Dès réception de l'avis d'appel, le ministre transmet au greffier de la cour Provinciale le dossier relatif à la décision dont il fait appel." Alors, nous suggérons qu'il pourrait y avoir un délai de prévu pour la transmission du dossier, pour qu'il ne reste pas trop longtemps en suspens et que cela retarde indûment l'appel du défendeur qui a été condamné. Ce pourrait être un délai de 15 jours, par exemple, que nous avons suggéré, c'est une suggestion, mais qu'à ce moment-là, le ministre ou celui qui agira à sa place, le conseil de discipline si c'est lui, transmette le dossier dans un délai à une partie.

M. PAUL : Me Walters, quand vous parlez d'un délai de quinze jours, vous ne trouvez pas que vous vous embarrassez davantage parce que l'article dit: Dès la réception de l'avis d'appel. A ce moment-là, les fonctionnaires du ministère devront voir à ce que le dossier soit expédié. Si vous leur donnez un délai de quinze jours, ils vont se dire: On a quinze jours pour le faire.

M. WALTERS: Par contre, s'il n'y a pas de délai, on peut peut-être avoir également une réaction contraire, c'est que cela prenne du temps avant que le dossier soit transmis et qu'il reste sur les tablettes.

M. PAUL: Vous ne connaissez pas la vigilance du sous-ministre de la Justice, section du droit civil, Me André Desjardins, parce que...

M. WALTERS: Je ne doute pas de sa vigilance, mais ce ne sera peut-être pas toujours lui, justement, qui aura à appliquer la vigilance; alors à ce moment-là...

M. PAUL: Je suis bien à l'aise pour en parler parce qu'il n'est pas ici ce matin; du moins, je ne l'ai pas vu.

M. BOSSE : Le député de Maskinongé se fait des amis continuellement.

M. PAUL: Non. Je veux garder mes amis. J'en ai assez. Cela fait quinze ans qu'ils me sont fidèles, tandis que vous, ce n'est pas sûr.

M. BOSSE: Vous connaissez le proverbe.

M. WALTERS: Il y avait une deuxième suggestion que nous faisions ici à ce deuxième paragraphe de l'article 10, ce serait que l'appel qui est interjeté soit placé sur un rôle d'urgence, s'il en existe un dans le district où l'appel sera fait. Mais je crois, justement que pour assurer la plus grande protection possible...

M. PAUL: II faudrait que ce soit une requête, de préférence à la première journée ou au premier terme, de la cour de pratique.

M. WALTERS: Une requête de préséance qui serait accordée pour l'audition de l'appel.

Maintenant, il y a ici une remarque qui va à l'article 17, mais qui peut également se placer à l'article 10, parce que les deux articles se complètent; c'est que l'on donne un droit d'appel devant un juge de la cour Provinciale. Quant à nous, nous préférons que l'appel soit devant trois juges de la cour Provinciale. Par exemple, on voit cela au tribunal de sécurité routière, au code de la route. Nous croyons qu'il y aurait, à ce moment-là, plus de sécurité, si c'étaient trois juges qui entendaient l'appel de la décision et non pas un seul. Je crois que ceci rejoint d'autres organismes qui ont des remarques à faire devant vous, ce matin.

M. PAUL: Vous voudriez bien admettre que dans certains districts judiciaires, il n'y a pas de juges résidents. Vous obligeriez le juge en chef à déléguer trois juges pour aller siéger, un jour donné, pour entendre cette requête qui serait de nature privilégiée suivant vos propos.

M. WALTERS: Oui, bien qu'à ce moment-là ils deviendraient des juges itinérants, peut-être, pour une seule journée. Mais encore, c'est pour assurer une meilleure protection de la justice pour celui dont on a suspendu le permis. Je comprends que ça peut créer au point de vue administratif certaines difficultés, mais ce sont certainement des difficultés auxquelles on peut remédier.

M. PAUL: A toutes fins pratiques...

M. WALTERS: D'ailleurs, on présume qu'il n'y aura pas énormément d'appels, parce que nos huissiers font très bien leur travail et qu'il y a rarement lieu de faire appel d'une décision suspendant l'exercice d'un permis.

M. PAUL: Personnellement, ça fait 25 ans que je pratique et je n'ai jamais eu de difficulté avec aucun huissier. Je comprends que je n'ai pas toute l'expérience de la pratique qu'a mon collègue, le député de Dorion.

M. BOSSE: Je regrette, je ne faisais pas référence ici à la livraison de certains documents. Je pense que les huissiers accomplissent leur travail très bien, de ce côté. Je faisais allusion à d'autres formes de pratique qui n'ont rien à voir avec la livraison de documents. Je reconnais l'expérience en droit de mon collègue de Maskinongé, mais j'ai vu l'autre aspect...

M. PAUL: Je regrette, je n'ai pas votre expérience dans le taxi.

M. BOSSE: Mais ça roule, ça roule.

M. PAUL: Cela roule très mal, d'ailleurs le règlement no 6 n'est pas encore déposé.

LE PRESIDENT (M. Blank): A l'ordre!

M. TREMBLAY (Bourassa): Revenons au bill 80.

LE PRESIDENT (M. Blank): Me Walters, on a d'autres représentations.

M. WALTERS: A l'article 12, nous voulons inverser ce qui est suggéré dans la loi où l'on prévoit que l'appel ne suspend pas l'exécution de la décision du ministre. Quant à nous, nous désirons que ce soit le contraire, mais que l'appel suspende l'exécution de la décision qui a été rendue. D'ailleurs, c'est un principe que l'on retrouve dans le code de procédure, où on dit que, lorsqu'il y a appel de décision, il y a suspension de l'exécution du jugement.

M. PAUL: Sauf en matière d'injonction, entre autres.

M. WALTERS: II peut y avoir certains cas très particuliers. Mais la règle générale, c'est quand même que l'appel suspende l'exécution du jugement. C'est ce qu'on retrouve dans le code des professions; on prévoit qu'il y aura suspension d'une décision. C'est ce qu'on retrouve également dans la Loi du Barreau.

M. CHOQUETTE: Si on suivait votre suggestion, ce serait une incitation pour un huissier qui est trouvé coupable de quelque chose, qui perd son permis, de traîner les procédures pendant très longtemps. On ne peut pas donner suite à cette suggestion. Je pense que le deuxième alinéa de l'article 12 donne une protection suffisante à l'huissier qui aurait perdu un permis.

M. SENECHAL: Si vous permettez, M. le ministre, on prévoit que, par exemple, dans un cas très grave, le ministre puisse faire suspendre le huissier et, sur requête, signifier la solution. On inverse tout simplement votre texte de loi. Il peut arriver un cas très grave...

M. CHOQUETTE: Si on inverse les principes et que l'appel suspend l'exécution de la décision du ministre, les juges vont dire: C'est le grand principe et à moins que vous soyez capable de nous prouver quelque chose de particulier dans ce cas-là, on va être obligé de suivre le grand principe. Finalement, l'huissier va continuer à pratiquer sa profession pendant X temps, pendant que l'appel va durer. Il peut faire des procédures dilatoires et tout.

M. SENECHAL: On avait entrevu ça comme un cas extrêmement grave dans le cas où vous auriez demandé, vous autres, sur requête, que le ministre demande sur requête... Il s'agit ici d'une profession libérale et, si le type est suspendu, admettons qu'il gagne en appel, prenons les choses au pire, il se retrouve probablement après cinq ou six mois devant absolument rien, c'est-à-dire qu'il est complètement dans le chemin, parce qu'il a perdu sa clientèle à toutes fins pratiques.

M. CHOQUETTE: Mais le juge peut remédier à la décision du ministre en donnant le droit à l'huissier s'il considère qu'il y a des faits qui le justifient.

M. WALTERS: Nous allons ensuite à l'article 20 où on prévoit la formation du comité consultatif composé d'au plus six personnes choisies parmi les huissiers et les membres du Barreau de Québec. Notre suggestion est qu'il y ait, quant à la proportion, cinq membres qui soient des huissiers et que le sixième soit un représentant du ministère de la Justice. Cela n'ira peut-être pas en accord avec...

M. PAUL: Vous éliminez le Barreau. M. WALTERS: Pas nécessairement.

M. PAUL : Vous voulez être les complices du ministre actuel qui semblerait vouloir éliminer les avocats.

M. WALTERS: Non.

M. SENECHAL: Le représentant choisi peut être un membre du Barreau, ce peut être un avocat du ministère de la Justice qui peut être membre du Barreau.

M. CHOQUETTE: Oui. Ecoutez, je crois que le conseil consultatif doit comprendre des représentants du Barreau parce que les huissiers, en fait, travaillent pour les avocats, même si les avocats travaillent pour les clients. Je veux dire que le rapport entre l'huissier et l'avocat est tel que, au conseil consultatif, il faut avoir un certain nombre d'avocats. Ce sont eux vraiment qui vont pouvoir donner des conseils au ministre, dire comment les huissiers se comportent, comment va la profession d'huissier. Ce sont eux qui voient le travail des huissiers, en fait.

M. WALTERS: C'est pourquoi nous suggérons qu'il y en ait au moins un qui soit un membre du Barreau.

M. CHOQUETTE: Vous n'êtes pas très généreux pour le Barreau.

M. WALTERS: Non.

M. CHOQUETTE: Je crois qu'il faut qu'il y ait un nombre substantiel de membres du Barreau au conseil consultatif.

M.PAUL: Vous accomplissez bien votre mandat.

M. WALTERS: En étant un membre du Barreau. Il y aurait aussi une suggestion que nous faisons personnellement, à ce moment-ci, savoir que les huissiers qui seront membres du comité consultatif soient choisis parmi la Chambre des huissiers de justice qui est quand même le groupe qui représente les huissiers de la province.

Nous allons ensuite à l'article 23 et ses nombreux paragraphes. Nous apprécierions pouvoir participer — ici je parle au nom de la Chambre des huissiers de justice — à la rédaction des règlements ou au moins pouvoir émettre notre opinion sur les règlements qui vont être d'une très grande importance en ce qui regarde l'exercice de la profession dans l'avenir. C'est un voeu que nous exprimons. En ce qui regarde les différents paragraphes, il y en a quelques-uns sur lesquels nous avons des remarques à faire.

Tout d'abord, au sous-paragraphe a), on mentionne "pour déterminer la forme, la teneur, les catégories de permis et les droits que le requérant doit verser". A ce moment-ci, quant à nous, nous croyons qu'il ne devrait y avoir qu'un seul permis. Cela revient un peu à ce que nous avons dit, tout à fait au début de notre exposé, à l'effet qu'il y ait un permis, bien que l'on ait exprimé l'avis, de la part du comité, qu'il y aurait peut-être des huissiers qui agiraient avec un certain droit limité dans les régions lointaines. Mais quant à nous, nous désirons qu'il y ait un seul permis, que tous les huissiers soient sur le même pied.

Au sous-paragraphe 23 b): "déterminer les qualités requises d'une personne qui demande un permis". Bien entendu, on ne sait pas à quoi s'en tenir, vu que nous n'avons pas les règlements devant nous. Il y a peut-être un point; je présume que l'on exigera, de celui qui fait la demande, qu'il soit majeur. Alors, la majorité est à 18 ans. Est-ce qu'on juge qu'une personne de 18 ans pourra exercer le métier d'huissier? Ne serait-il pas mieux de dire, par exemple, qu'il soit âgé de 21 ans? En tout cas, c'est une simple remarque que nous faisons en passant.

M. CHOQUETTE: Cela prend beaucoup de maturité pour être huissier d'après ce que je vois.

M. WALTERS: Pardon?

M. CHOQUETTE: Vous pensez que cela prend beaucoup de maturité pour être huissier?

M. WALTERS: Si on se réfère à certaines remarques qui ont été faites au tout début, ce serait peut-être préférable.

En tout cas, ce n'est qu'une remarque que nous faisons en passant...

M. PAUL : Est-ce que la taille doit entrer en ligne de compte?

M. WALTERS: Non, du tout.

Nous en sommes plutôt sur des questions de généralités, vu que nous ne connaissons pas les règlements et quelles sont les exigences que l'on va demander pour accorder un permis. Il y aurait également la question de la scolarité, ce que l'on exigera. Est-ce qu'il sera prévu, par exemple, qu'un huissier doit avoir une dixième, une onzième ou une douzième année? On ne sait pas à quoi s'en tenir. Alors, on aimerait bien être renseigné sur les exigences qui seront fixées dans les règlements.

Quant à nous, nous serions prêts à suggérer que ce soit une douzième année qui serait, si vous voulez, la norme requise pour qu'un huissier puisse se qualifier pour l'obtention de son permis.

Mais en disant une douzième année, je veux apporter une précision, ce sera pour ceux qui seront nommés à l'avenir. Ici, ma remarque se greffe également au paragraphe c) de cet article 23. Ceux qui sont actuellement en fonction, ceux qui exercent actuellement la profession d'huissier ont nécessairement une très grande expérience. Nous demandons, que, pour eux, la norme soit l'expérience ou un examen qui pourrait être passé, mais que l'on exige pas d'eux une scolarité qui soit celle que l'on exigera des futurs candidats. En somme, laisser le droit acquis à ceux qui l'ont, basé sur leur expérience, quitte à subir un examen.

M. CHOQUETTE: On peut dire, droit acquis dans une certaine mesure, n'est-ce pas?

M. WALTERS: Bien, dans une certaine mesure, oui.

M. CHOQUETTE: Mais quand on forme une nouvelle corporation, dans tous les cas où cela s'est fait, dans le passé, on admet toujours au départ que ceux qui exerçaient cette occupation-là ne soient pas astreints à des exigences aussi strictes que celles qui peuvent prévaloir pour l'avenir. Alors, nous appliquerons le même genre de principe dans le cas des huissiers, ce qui ne veut pas dire que tous ceux qui exercent actuellement vont automatiquement avoir le droit de faire partie de la chambre et d'exercer la profession.

M. WALTERS: Nous sommes d'accord.

M. SENECHAL: D'ailleurs, M. le ministre, les huissiers en journée d'étude ont consenti unanimement à subir un examen sur le code de procédure. Ceux qui sont déjà huissiers sont prêts à s'astreindre à cela pour pouvoir peut-être, comme vous le dites, éliminer les indésirables, s'il y en a.

M. CHOQUETTE: Justement.

M. BOSSE : Pour fins d'exemple, M. le Président, s'il arrivait, dans le cas d'un huissier qui pratique présentement et qui a déjà — c'est peut-être grossir le problème — été condamné à

cinq ans de prison pour fraude, si l'on découvre cela, je pense que ce serait un motif... C'est peut-être exagéré...

M. SENECHAL: Non, on est d'accord. D'ailleurs, cela entre dans les normes d'exigibilité.

M. BOSSE: J'exagère peut-être un peu, mais peut-être pas non plus.

M. WALTERS: C'est d'ailleurs prévu actuellement dans les normes qui sont définies dans la loi.

LE PRESIDENT (M. Blank): S'il vous plaît, nous devons suspendre les travaux de la commission à midi, aujourd'hui. Il y en a beaucoup d'autres qui veulent se faire entendre.

M. WALTERS: La remarque suivante que nous avions à faire était à l'article 23, paragraphe f ), c'était encore une fois que tous les huissiers aient le droit de pratiquer dans toute province, mais on en a parlé au début, alors on n'y revient pas.

A l'article 23, paragraphe j), "pour déterminer les professions, métiers, industries, commerces, charges ou fonctions incompatibles avec la dignité ou l'exercice de la fonction d'huissier", à ce moment-ci, encore là, nous ne connaissons pas les règlements qui seront mis en vigueur. Mais nous avons suggéré dans notre mémoire qu'il y aurait peut-être lieu, par exemple, que ce soit strictement un huissier qui exerce la profession et qu'il n'y ait pas de profession accessoire à ce moment-là. Par exemple, qu'un employé de commission scolaire ou de municipalité, que les policiers municipaux et même que les fonctionnaires du ministère de la Justice, à l'exception du shérif, ne puissent agir comme huissiers. Il y a peut-être d'autres cas, on a mentionné à un certain moment, dans certains cas, qu'un agent d'assurance agissait comme huissier. Il nous apparaît que ce serait incompatible avec l'exercice de la profession.

Nous allons à l'article 23, paragraphe m) qui prévoit la formation d'une corporation. Nous exprimons le voeu que cette corporation soit formée, nous aimerions bien connaître sa composition, ses pouvoirs, la durée du mandat de ceux qui en feront partie. Encore ici, nous suggérons que la corporation qui sera formée pourrait être, aux conditions que le ministre déterminera, soit la Chambre des huissiers, qui pourra obtenir un statut qui lui sera déterminé par le ministre, qui serait cette corporation chargée de l'application de la loi.

Maintenant, quelques remarques d'ordre général avant de terminer. On a parlé tout à l'heure de ce que pourrait être la scolarité exigée de la part des candidats. Nous avons suggéré dans notre mémoire qu'il soit possible à un moment donné qu'une formation professionnelle soit prévue. Ce pourraient être, par exemple, des cours qui se donnent dans un

CEGEP, comme on le fait actuellement pour les techniques policières, afin de permettre de bien former les huissiers de sorte qu'ils connaissent exactement la loi et le travail qu'ils auront à exercer.

Nous suggérons également la création d'un code de déontologie qui pourrait réglementer la concurrence, qui pourrait réglementer la publicité. Je vois que j'entre dans les vues du député de Dorion.

M. BOSSE: Vous entrez dans mes vues, je comprends!

M. WALTERS: C'était une autre suggestion, la création d'un code de déontologie. Nous suggérons également des nouveaux champs d'action, par exemple, la possibilité que les huissiers puissent faire les constats d'accident, travail qui pourrait leur être confié, qui étendrait le travail qu'ils font déjà en élargissant les cadres de l'exercice de la profession. C'est une suggestion. S'il y en a d'autres qui nous sont faites...

M. BOSSE: Quel type d'accidents?

M. WALTERS: Les accidents d'automobiles.

M. BOSSE: Exclusivement?

M. CHOQUETTE: En France, est-ce que les huissiers ont le droit de faire des constats d'accident?

M. SENECHAL: En France et en Belgique actuellement, c'est admis comme preuve, surtout en France, il y a deux distinctions: il y a les constats qui sont demandés par le tribunal lui-même à un huissier. Cela évite les expertises, si vous voulez. Et il y a les constats qui sont mis en preuve à la suite de la demande des clients ou des avocats, que ce soit pour un cas d'accident...

M. CHOQUETTE: Les agents de police font des constats d'accident aussi en France, je pense?

M. SENECHAL: Je ne veux pas parler d'une manière générale, mais je crois que ce sont surtout les huissiers actuellement qui sont habilités à faire tous les constats en France.

M. CHOQUETTE: Ah oui?

M. SENECHAL: Us en font énormément aussi en Belgique, quoique ce ne soit pas admis exactement comme preuve comme en France.

M. CHOQUETTE: Mais comment procèdent-ils? S'il y a un accident, est-ce qu'on appelle l'huissier et on dit: Viens-t-en, et qu'il dit où est la position des véhicules, où sont les débris, tout ça?

M. SENECHAL: C'est ça. Mais les constats

peuvent être d'un tout autre ordre, pour répondre au député de Dorion, que ceux d'un accident. Cela peut être, je ne le sais pas, une inondation dans votre cave, si vous voulez faire une preuve qu'il y a eu une inondation le 23 mars...

M. BOSSE: Cela a trait à l'incendie aussi, par exemple.

M. SENECHAL: Cela peut être un incendie, ça peut être des bris de maison, ça peut être même les constats pour une preuve d'adultère, pour la séparation de corps, c'est très varié.

M. BOSSE: Pour autant que ce ne sont pas les huissiers qui les causent...

M. SENECHAL: Ah non! il y a ça.

M. BOSSE: ... parce qu'il y en a qui en ont déjà causé.

M. SENECHAL: Ah oui! il faudrait surtout se méfier...

UNE VOIX: Des huissiers de Joliette...

M. BOSSE: Remarquez que je ne suis pas particulièrement agressif pour l'ensemble des huissiers, je sais que la majorité, en fait, sont des gens très affables et dont les avocats utilisent les services avec beaucoup de doigté. Mais je faisais rapport tout à l'heure à l'exception qui confirme la règle.

M. CHOQUETTE: IL n'y a pas de doute qu'un bon constat, mettons dans le cas d'un accident d'automobile, représente souvent un avantage extraordinaire, plus tard, pour le règlement de la cause. On m'a dit à moi que nos agents de la sûreté, qui sont de plus en plus compétents, font d'excellents constats d'accidents à la suite de collisions d'automobiles et souvent on arrive à l'enquête du coroner ou enfin plus tard, soit au procès et souvent avant le procès, et le rapport de police est tellement clair sur ce qui a été constaté que la faute est apparente et qu'on voit qui est responsable de l'accident. Cela a un très grand avantage pour l'administration de la justice. Nous notons votre intérêt de ce côté.

M.WALTERS: Sur la remarque que vous venez de faire, M. le ministre, d'accord, les agents de la sûreté font un rapport; mais ce que l'on obtient — là, je parle en tant qu'avocat — c'est une partie du rapport ; lorsque l'on écrit au ministère, on nous fournit tout simplement le nom des parties, mais où on n'a pas les constatations qu'ils ont pu faire, par exemple en règle générale, et c'est souvent simplement au moment du procès; du moins, moi, c'est l'expérience que j'ai.

M. CHOQUETTE: Je ne comprends pas comment il se fait que cela marche comme cela, parce que, en réalité, j'ai toujours trouvé que les rapports de police étaient disponibles pour le public en général; ces rapports de police ne sont pas faits pour que la police les garde et les classe dans des dossiers et que finalement ils ne soient pas disponibles. Je trouve que le rapport devait être disponible pour tous ceux qui le demandent.

M. PAUL: M. le ministre, on...

M. CHOQUETTE: ... et les instructions sont données dans ce sens-là.

M. BOSSE: Puis-je rappeler au ministre que, depuis quelque temps, du moins en ce qui a trait à la ville de Montréal, pour des accidents d'ordre mineur, la police se refuse à faire des rapports et invite les parties pour des dommages de $100 et moins — c'est assez difficile à établir les dommages de $100 et moins ou plus — à faire entre elles des rapports mutuels, ce qui ne fait pas toujours des rapports mutuels nécessairement pacifiques.

LE PRESIDENT (M. Blank): M. Walters.

M. WALTERS: Tout à l'heure, le député de Dorion, M. le Président, a soulevé certaines remarques à l'encontre de saisies qui auraient pu être faites d'une façon arbitraire, peut-être aussi sur le comportement cavalier de certains huissiers, se référant ici, à l'exécution de saisies...

M. BOSSE: ...Ne parlez pas d'un cavalier, parlez d'un régiment!

M.WALTERS: Oui. Quelque étendue qu'on puisse donner au nombre de personnes, je voudrais ici faire une remarque en ce sens que c'est la Loi des huissiers que nous examinons; s'il y a certaines modifications qui devraient être apportées à l'exécution des jugements, aux règles qui doivent être suivies, au moment où un jugement fait l'objet de son exécution, cela devrait relever du code de procédure, cela ne relève pas, en tant que tel, de la Loi des huissiers que nous étudions aujourd'hui. Je peux donner un exemple, par exemple, si on étudie la Loi du Barreau, à ce moment-là, on ne dit pas de quelle façon la substitution d'un procureur doit être faite, cela relève du code de procédure. C'est la même chose, quant à nous. C'est sur la Loi des huissiers qu'on a déposé un mémoire et s'il y a lieu, à un moment donné, de modifier l'exécution pour la rendre peut-être plus agréable ou du moins d'une façon plus humaine vis-à-vis du défendeur qui en reçoit exécution, que cela relève de modifications à être faites au code de procédure et non pas à la Loi des huissiers.

M. BOSSE: A cela, si vous me le permettez, M. le Président, je répondrai que quelle que soit

la loi, dans son application, et je dis quelle que soit la loi, je généralise, s'il n'y avait pas cette part de compréhension et d'humanité, toutes les lois en fait permettraient... Si vous voulez vous appuyer et vous asseoir confortablement sur la loi pour en faire l'application, je vous dis, au départ, que si on appliquait les mêmes règles en vertu de cette nouvelle loi, vous auriez aussi des difficultés. Quelle que soit la loi, ici, on songe, par exemple, à l'application intégrale de la Loi des alcools ou de n'importe quelle autre loi, d'une façon toujours très rigide, très ferme, il y a des lois où enfin les citoyens se trouveraient continuellement en difficulté. Nous le savons et je pense que le député de Maskinongé, mon savant confrère, qui a de longues années de pratique, connaît très bien cela.

M.PAUL: Savant collègue, parce que vous venez de commettre une injure au Barreau, en employant le mot confrère.

M. BOSSE: Mon collègue me permettra cette incartade. Cependant, vous savez très bien que si vous voulez vous appuyer sur l'application de la loi, strictement, en ignorant les autres facteurs qui entrent en ligne de compte, telle la courtoisie, tel l'échange lorsque vous faites affaires avec un client souvent dépourvu, souvent démuni de moyens... Je ne crois pas que cela vous ouvre la porte toute grande, que vous devriez vous asseoir trop confortablement sur l'application de la loi parce que les autres lois, y compris la vôtre, pourraient vous jouer de mauvais tours.

M. WALTERS: Tout ce que nous demandons, c'est que, s'il y a des injustices causées par l'application actuelle des règles de la saisie dans le code de procédure, l'on modifie le code de procédure et non pas la Loi des huissiers qui n'est pas, à notre point de vue, l'endroit où on doit modifier les règles d'exécution.

LE PRESIDENT (M. Blank): Je suis d'accord avec vous, M. Walters. Comme je l'ai justement dit au ministre, on doit faire une distinction entre des saisies commerciales et des saisies aux maisons et dans les saisies aux domiciles, on doit éliminer l'affaire des gardiens. On doit laisser les choses là jusqu'à la vente et si les choses ne sont pas disponibles, on peut appliquer des articles du code criminel. Cela va éviter beaucoup de problèmes. Le plus grand problème que j'ai comme avocat est le suivant : II y a un client qui me téléphone et qui me dit: L'huissier est ici, il veut sortir mon téléviseur. C'est cela, le problème. On doit faire une distinction entre des saisies commerciales et des saisies aux domiciles et on doit éliminer la question des gardiens pour trouver une autre formule.

M. BOSSE: Surtout lorsque le téléviseur a été emprunté à quelqu'un d'autre.

M. CHOQUETTE: Là, c'est insaisissable.

M. SENECHAL: Nous sommes complètement d'accord.

Nous nous rangeons derrière l'idée que vous émettez, mais nous croyons que cela ne regarde pas actuellement la Loi des huissiers et nous aurions peut-être plusieurs suggestions à apporter au code de procédure.

M. CHOQUETTE: Vous avez raison. Cela ne fait rien. Le sujet est très pertinent.

M. SENECHAL: Oui, d'accord.

M. CHOQUETTE: Je trouve que vous avez eu raison de l'aborder et que le président a eu raison de nous faire part de son expérience comme avocat pratiquant.

LE PRESIDENT (M. Blank): Merci.

M. CHOQUETTE: Est-ce que c'est une chose que nous devrions abolir, le fameux recors? Le recors qui suit l'huissier et qui au fond, joue un rôle totalement passif. Qu'est-ce que vous en pensez?

M. SENECHAL: Pour quelle raison voulez-vous l'abolir?

M. CHOQUETTE: Pardon?

M. SENECHAL: Quelle raison précise...

M. CHOQUETTE: Quel rôle le recors joue-t-il vraiment?

M. SENECHAL: Si vous voulez aller saisir une automobile et qu'il faut que vous appeliez un remorqueur, il faut toujours bien qu'une personne reste sur les lieux, que vous soyez aidé d'une manière quelconque. A part cela, c'est toujours pour assister. Il est toujours déplaisant... Si vous allez dans un domicile et qu'il y a une femme seule, on aime bien être deux pour dire: Nous nous sommes tenus honnêtement. Que cela soit pour éviter des chantages ou des choses comme cela, il est toujours plus agréable d'être deux. Cela peut éviter bien des discussions. Je ne sais pas si vous voyez le point dans le détail mais quand ce sont des cas compliqués, on peut se référer à eux pour se faire aider, que cela soit pour différents motifs et, quand ce sont des cas très simples, je crois qu'il est avantageux... Lorsqu'il y a une distinction à apporter, les recors vont seulement aux exécutions. Ils ne viennent pas aux assignations et aux subpoenas. C'est seulement pour les exécutions et, dans ces cas, je crois qu'on entre dans un domicile, on "se fait un peu force de chose" et on prend un peu possession des lieux jusqu'à un certain point. Il faut visiter et faire un inventaire et tout de même, je crois qu'il y a avantage à ce que nous soyons deux. Personnellement, je le vois très bien comme cela actuelle-

ment. La loi le prescrit même: "... doit être accompagné de son assistant pour...", dans le code de procédure.

M. CHOQUETTE: Est-ce que le recors peut agir comme gardien? Il fait les deux?

M. SENECHAL: Cela arrive souvent pour pallier justement l'objection dont parlait le président tout à l'heure. Il arrive souvent des cas où les objets ont très peu de valeur. Les gens n'ont pas toujours des gardiens. On fait signer le recors comme gardien pour pouvoir laisser les objets là. Mais on se range absolument derrière l'idée du président qu'effectivement, si la loi permettait de laisser... D'ailleurs, c'est permis actuellement avec l'autorisation du créancier ou de l'avocat du créancier de laisser les effets saisis en la possession du défendeur. C'est permis actuellement. Et il y a un recours de mépris de cour contre celui qui dilapide ses biens, on les enlève. C'est permis actuellement, mais avec la permission...

Mais si cela était généralisé, on éviterait un paquet de problèmes et nous en sommes très conscients. D'ailleurs, si jamais on aborde les amendements au code de procédure, nous aurions peut-être plusieurs suggestions qui seraient dans cette ligne, qu'on ne peut pas aborder actuellement. Nous aurions peut-être plusieurs suggestions spécialement d'ordre pratique, qui touchent la pratique de très près, que nous pourrions vous faire.

M. CHOQUETTE: Merci.

M. WALTERS: M. le Président, c'est à peu près tout ce que nous avions à dire. Nous vous remercions. Nous espérons que la loi sera adoptée le plus tôt possible. Nous espérons aussi que la Chambre des huissiers sera appelée à participer ou à conseiller, et qu'elle pourra travailler activement à l'élaboration et à l'application de la loi.

LE PRESIDENT (M. Blank): Merci beaucoup. Au nom de la commission, on vous remercie.

Maintenant, voici le mémoire des Citizens Rights Againts Bailiff Seizures (CRABS). Avant de poursuivre, on doit noter des changements pour le journal des Débats. M. Joron remplace M. Burns, M. Bossé remplace M. Hardy, M. Gauthier remplace M. Loubier, M. Assad remplace M. Springate et M. Leduc remplace M. Vézina. Avec le consentement de la commission, on doit nommer un rapporteur. Puis-je suggérer le député de Portneuf?

M. BOSSE: Ah oui! A l'unanimité.

M. CHOQUETTE: On est sûr d'avoir un bon rapport.

M. BOSSE: On est sûr d'avoir la majorité.

M. PAUL: C'est un homme qui est toujours assidu aux séances des commissions. Il n'est pas que de passage avec nous, c'est pour cela.

M. BOSSE: Remarque très pertinente.

LE PRESIDENT (M. Blank): M. Donald-S. Thompson?

Citizens Rights Against Bailiff Seizures

M. ROSENTHALL: Non. MM. Rosenthall, Dowie et Nother. Est-ce que le microphone fonctionne?

LE PRESIDENT (M. Blank): Oui, il fonctionne.

M. ROSENTHALL: M. le Président, MM. les membres de la commission, on vous remercie tout d'abord de cette occasion que vous nous fournissez de présenter notre mémoire sur le projet de loi 80. C'est un projet de loi, selon nous, qui laisse beaucoup à désirer. Notre mémoire répète d'une façon différente deux ou trois choses suggérées par Me Walters, mais il contient quelques points que nous jugeons bien plus importants surtout du point de vue des victimes des abus des huissiers. Je pense que, pour épargner du temps, on peut passer directement à la page 4. Voulez-vous que je la lise mot à mot? Ce serait plus facile.

UNE VOIX: Est-ce 2M ou 2R?

M. ROSENTHALL: Vous avez tous une copie du mémoire bilingue.

M. BOSSE: Oui, mais nous avons 2M et 2R.

M. PAUL: Vous avez également le résumé de votre mémoire.

M. ROSENTHALL: Je ne parle pas du résumé du mémoire.

M. BOSSE: D'accord. Des CRABS.

M. ROSENTHALL: Les différents groupes associés sous le nom "CRABS" sont formés de travailleurs à faible revenu et de bénéficiaires du bien-être social. Ces citoyens se sont organisés dans le but d'encourager ceux qui partagent leur sort à s'occuper eux-mêmes de leurs affaires et à se donner les outils nécessaires pour garantir le respect de leurs droits.

Trois ans d'expérience et d'observations dans le domaine de la protection du consommateur ne nous permettent qu'une seule conclusion: notre système d'entreprises privées, s'il doit subsister, a besoin d'être changé de fond en comble. La liberté que comporte un tel système

s'acquiert au prix de l'oppression sous laquelle ploie le travailleur à faible revenu, victime des pires iniquités. Les mécanismes de correction de ces abus deviennent eux-mêmes un fardeau de plus en plus lourd à porter pour l'ensemble de notre société. C'est-à-dire que ces abus réussissent trop souvent à pousser un travailleur à faible revenu, criblé de dettes, à quitter pour toujours le marché du travail et à devenir un client perpétuel de l'assistance sociale.

D'abord victime de l'échange inégal de son travail contre un certain pouvoir d'achat, dans ce système, le travailleur se trouve ensuite placé face à face avec une machine infernale qui ne connaît qu'une seule loi: le profit maximal. Tous les moyens sont bons à ce monstre pour atteindre son but: publicité acharnée, malhonnête, sans pudeur, qui ne respecte même pas l'imagination sensible des enfants afin de mieux mettre la patte sur le portefeuille déjà mince de l'ouvrier. On lui vend du rêve et, en lui offrant des facilités de crédit alléchantes, on lui fait croire que ces rêves peuvent devenir réalité. En fait, les taux usuraires que recouvre tout ce beau tapage n'auront servi qu'à l'enfermer dans un cercle vicieux où il risque bien de se débattre toute sa vie.

Bien plus, ce système s'évertue à produire des biens souvent inutiles quand ils ne sont pas tout simplement inutilisables, biens dont la piètre qualité et le rythme de détérioration tendent à faire du citoyen un automate insatiable au service de la société de consommation. En fin de compte, les bureaux de recouvrement et les avocats à leur service referment le cercle autour du travailleur et se chargent de garder son portefeuille à plat.

Pour se maintenir, un tel système a besoin de ses hommes de main. C'est le huissier qui prend ce rôle; c'est lui qui, en dernier ressort, doit confronter le débiteur récalcitrant avec les obligations dans lesquelles il s'est désespérément empêtré.

Aussi, à l'occasion de la présentation devant l'Assemblée nationale du projet de loi 80, la Loi des huissiers, nous considérons de notre devoir de présenter respectueusement à votre commission parlementaire certaines modifications que nous jugeons indispensables pour supprimer la violence du système, spécialement au stade où le travailleur a déjà été poussé au bord de l'abîme. L'éclatement de ce maillon essentiel dans la chaîne qui entrave le travailleur est, peut-être, la première étape vers l'avènement d'une société plus humaine.

Premièrement, un officier de la cour. La plus importante des modifications concerne la situation du huissier, une situation qui ne sera pas modifiée si le rapport de loi 80 est adopté tel que présenté. Aujourd'hui, trop souvent le huissier n'est ni plus ni moins qu'un valet anxieux de plaire au créancier.

Pour mieux comprendre l'activité du huissier, divisons son travail selon deux aspects différents: premièrement, sa fonction en tant que messager officiel du système judiciaire lorsqu'il signifie les subpoenas, les brefs d'assignation, etc. et, deuxièmement, sa fonction lorsqu'il exécute des saisies et mène des ventes.

Le premier aspect de sa fonction entraîne rarement des abus et de toute façon se prête mal à l'oppression d'un des parties par une autre. Le huissier, en agissant ainsi, ne fait pas plus que le facteur qui livre des comptes, des invitations désagréables, ou quelques autres mauvaises nouvelles. Par conséquent, nous croyons que ce n'est pas particulièrement cet aspect du travail du huissier qui demande des changements. Notre opinion est cependant tout autre, en ce qui concerne le second aspect de son travail, c'est-à-dire lorsqu'il exécute une saisie ou qu'il préside à une vente judiciaire. La concurrence force les huissiers à mettre les pouvoirs dont ils sont investis au service de leurs clients, les avocats, et pour garder cette clientèle, tous les moyens leur semblent bons. La menace, l'extorsion, et d'autres moyens semblables font souvent partie de l'arsenal du huissier, assuré qu'il est de l'impunité que lui garantit la protection de ses employeurs à savoir les avocats des créanciers. Les conséquences de la compétition, moteur de l'entreprise privée, auront fait d'une fonction nécessaire et honorable un vulgaire instrument de chantage et de pression sur les classes les plus faibles de notre société.

Ainsi, que ce soit au début du processus judiciaire ou à la fin, que ce soit une saisie avant jugement ou une vente judiciaire, la justice délègue son autorité et son prestige à un individu qui les avilit en les mettant au service d'une seule des parties impliquées au mépris de toute impartialité, de toute équité. Si ce souci d'impartialité interdit au juge de décider de sa propre cause ou de celle de son fils, par exemple, comment peut-on prétendre à cette même impartialité quand on laisse un huissier décider, alors qu'il n'est au service que d'un des adversaires en présence? N'est-ce pas exactement ce qu'on lui permet de faire lorsqu'en exécutant une saisie il décide de la solvabilité d'un gardien, dresse un inventaire des biens saisis, et aussi lorsqu'il préside à une vente judiciaire?

LE PRESIDENT (M. Blank): Est-ce que vous avez l'intention de lire tout le mémoire mot à mot?

M. ROSENTHALL: C'est comme vous voulez.

LE PRESIDENT (M. Blank): Non. Parce que nos règlements sont que quand, dans un cas comme celui-ci, vous avez un mémoire, vous avez 20 minutes pour présenter un résumé de votre mémoire et il reste 40 minutes à la commission pour vous questionner. Dans l'autre groupe, il y a seulement des détails, on a questionné sur chacun des détails, parce que

c'étaient des choses précises, mais si vous faites une thèse de toute l'affaire, vous avez 20 minutes seulement pour la faire.

M. ROSENTHALL : II y a combien de temps de passé jusqu'à maintenant?

LE PRESIDENT (M. Blank): Dix minutes. Cela veut dire que j'espère que vous allez faire un résumé de toute l'affaire et qu'on pourra vous questionner sur l'affaire.

M. BOSSE; On peut peut-être faire ressortir les points les plus importants. On va lire le mémoire mais mettre l'accent, avec le verbe.

M. ROSENTHALL : Ce que je voudrais faire, c'est lire encore quelques pages parce que les points les plus importants sont dans les prochaines pages.

M.PAUL: Vous avez vingt minutes dont vous pouvez disposer à votre guise.

M. ROSENTHALL: Je vais poursuivre. J'en étais à la page 8. Dans chacun de ces cas, les circonstances invitent l'huissier à mettre tout le poids des intérêts de son client dans la balance de la justice, causant parfois un préjudice irréparable au débiteur concerné, particulièrement si celui-ci ignore ses droits ou, économiquement faible, n'est pas en mesure de les faire respecter. Par cette façon de procéder, d'immenses sommes d'argent sont extorquées des faibles au profit de ceux qui les exploitent. Cette exploitation n'est rendue possible que par la complicité de l'huissier qui croit ainsi faire un bon travail pour son client. Cette situation intolérable entrafne les pires injustices. C'est maintenant que je veux faire le point principal de tout ce mémoire.

Nous soumettons qu'aussi longtemps que l'aspect discrétionnaire de la fonction de l'huissier est restreint aux mains de l'entreprise privée, la soif d'argent et, disons-le, la malhonnêteté de certains créanciers, ne pourront faire autrement que d'exploiter la situation qui prévaut présentement et qui continuera à prévaloir si le projet de loi 80 est accepté tel que présenté. Quels que soient les contrôles mis en place ou les sanctions prévues, ils ne changeront rien à la situation. Nous soumettons donc que cette situation déplorable ne sera corrigée que par la création d'une nouvelle fonction dont les devoirs seront de pratiquer les saisies et de présider aux ventes judiciaires. Cette nouvelle fonction devra être attribuée exclusivement à un officier de la cour, salarié et employé par le ministère de la Justice. En somme, ce qu'on demande, c'est qu'on fasse de l'huissier un shérif. C'est la même chose, je pense. Mais en ce qui concerne les biens meubles au lieu des biens immeubles.

Si vous voulez, je peux juste lire la liste des soumissions au début du mémoire. Je ne sais si ça aura du bon sens parce que c'est arraché du contexte, mais on peut essayer. Est-ce que vous êtes à la première page?

M. CHOQUETTE: Oui, monsieur.

M. ROSENTHALL: La deuxième soumission ressemble à la suggestion faite par M. Walters, c'est qu'à chaque fois que l'huissier signifie ou exécute une procédure légale, il devrait remettre au même moment à la partie en cause une brochure indiquant à celle-ci ses droits et les recours possibles concernant cette même procédure. Dans le texte du mémoire, on dit que cette brochure devrait être écrite dans un langage ordinaire et qu'elle devrait être publiée par le ministère de la Justice.

Troisièmement, on soumet qu'il est essentiel de prévoir dans la Loi des huissiers la mise sur pied d'une commission d'inspection et d'évaluation qui devra fonctionner indépendamment des huissiers eux-mêmes. Ce qu'on dit ici, c'est qu'il est très difficile de faire une évaluation des meubles, surtout des meubles usagés. Mais c'est ce qu'un huissier doit faire chaque fois qu'il exécute une saisie.

M. BOSSE: Me permettez-vous une question?

M. ROSENTHALL: Bien sûr.

M. BOSSE: Voulez-vous dire par là que, pour une saisie de $150, par exemple, vous désirez faire des représentations à l'effet que l'huissier n'en saisisse pas pour $2,500?

M. ROSENTHALL : Cela arrive.

M. BOSSE: Est-ce que c'est ce que vous voulez dire?

LE PRESIDENT (M. Blank): II y a $1,000 d'exemption.

M. CHOQUETTE: En vertu du code de procédure civile, un huissier doit laisser au moins $1,000 de meubles meublants sur les lieux lorsqu'il effectue une saisie.

UNE VOIX: D'ameublement.

M. CHOQUETTE: C'est lui, en somme, qui a l'appréciation de la valeur des $1,000.

M. BOSSE: Vous voulez dire en vertu du code civil, la procédure telle qu'elle existait antérieurement ou nouvellement?

M. CHOQUETTE: Nouvellement.

M. BOSSE: Nouvellement.

LE PRESIDENT (M. Blank): Depuis 1964.

M. CHOQUETTE: Autrefois ce qui était exempt de saisie, c'étaient les chaises, les tables, les lits, les ustensiles.

M. BOSSE: Depuis 1964, je pourrais, de mémoire, nommer au moins une dizaine de cas où il n'y avait pas pour $1,000 de meubles et on a procédé quand même à des saisies. C'est pour donner plus d'ampleur à votre argument.

M. ROSENTHALL: Vous devez comprendre que...

M. BOSSE: L'évaluation était faite par l'huissier, comme vous nous dites.

M. ROSENTHALL: 99 p.c. des saisies sont faites dans les maisons pauvres...

M. BOSSE: Hélas!

M. ROSENTHALL: ... et il est rare de trouver un ménage qui possède $1,000 de meubles, d'ustensiles, etc.

M. BOSSE : Vous suggérez un évaluateur indépendant de l'huissier pour établir la valeur...

M. ROSENTHALL: Un évaluateur du gouvernement...

M. BOSSE: Du gouvernement.

M. ROSENTHALL: ... du ministère, qui sera obligé de faire l'inspection et une nouvelle évaluation, si la victime de la saisie n'est pas satisfaite. Est-ce clair?

M. BOSSE: Je m'excuse, je n'ai pas entendu vos dernières paroles.

M. ROSENTHALL: Je disais que, si la victime de la saisie n'est pas satisfaite de l'évaluation de l'huissier, elle peut demander à ce comité d'inspection et d'évaluation du gouvernement de faire une nouvelle évaluation pour corriger la situation.

M. PAUL: Est-ce que vous comprenez?

M. BOSSE: Oui, ce que je comprends dans les faits, c'est qu'évaluer une fois que les meubles sont partis ce n'est pas bien pratique. Je pense que la question qui se pose, c'est: Est-ce que cela a été évalué avant saisie?

M. ROSENTHALL: Non, après saisie. M. BOSSE: Après saisie, faites attention. M. ROSENTHALL: Ce qu'il peut faire...

M. CHOQUETTE: Je pense que le député de Dorion est plus compétent en matière de taxi qu'en matière de saisie.

M. DROLET: On s'en était rendu compte.

M. PAUL: D'ailleurs, le député de Dorion est plus...

M. BOSSE: Probablement, mais il veut comprendre, le député de Dorion, en matière de saisie et en matière de petites gens qui se font saisir.

M. PAUL: C'est pour ça qu'hier matin vous étiez au code des professions pour embarrasser le ministre.

M. BOSSE: Pas pour embarrasser le ministre, le député de Maskinongé sait très bien que c'était pour aider le ministre.

M. ROSENTHALL: La plupart des problèmes concernent ce qui est laissé dans la maison et non pas ce qui est enlevé.

UNE VOLX: Les $1,000.

M. ROSENTHALL: L'exemption de $1,000 dans la plupart des cas, c'est ça le problème.

LE PRESIDENT (M. Blank): En d'autres termes, vous voulez, à part de faire une motion à la cour pour déclarer tel montant de $1,000, un recours direct à un officier nommé par le ministre de la Justice.

M. ROSENTHALL: Oui, parce qu'une affaire de cour ça prend du temps et...

LE PRESIDENT (M. Blank): Cela prend du temps et ça coûte de l'argent.

M. ROSENTHALL: C'est ça! Exactement.

LE PRESIDENT (M. Blank): Je comprends votre affaire.

M. ROSENTHALL: A l'article 4, on dit qu'à la demande de n'importe quelle des parties intéressées — on parle maintenant de l'article 7 — le ministre devra suspendre un huissier si les circonstances prévues à l'article 7 d) de la Loi des huissiers se présentent et il devra congédier un huissier dans les cas prévus aux paragraphes a), b) et c) de l'article 7. Mais on dit que — voici une autre chose qui ressemble à ce qu'a dit Me Walters — il faudrait modifier l'article 17 et dans les cas prévus à l'article 7 a), b) et c) permettre au huissier de se pourvoir en appel jusqu'à la cour d'Appel de la province de Québec ou de se faire entendre par un autre comité quel qu'il soit.

A l'article 6, on dit que, dans la composition du comité consultatif, il faudrait contrebalancer les intérêts du monde des affaires qui sera représenté par les avocats, je pense, par la présence au sein de ce comité de membres représentant le monde du travail et les citoyens à faible revenu.

A l'article 7, on dit que les membres du comité consultatif devraient être rémunérés selon l'importance de leur fonction et de leurs responsabilités.

M. PAUL: ... selon l'importance de leur fonction en affaires, dans la vie publique, ou l'importance de leur fonction au sein du conseil consultatif?

M. ROSENTHALL: L'importance en ce qui concerne le comité, leur travail dans le comité. Je ne sais pas si tout le monde aura les mêmes responsabilités, parce que l'on apporte du travail volontaire et parce que c'est toujours les plus riches qui auront l'avantage.

M. PAUL: Par qui serait choisi ce représentant des citoyens à faible revenu?

M. ROSENTHALL: C'est un problème qui relève du ministère.

M. DOWIE: Cela peut être un membre des organismes...

M. ROSENTHALL: Les syndicats de travail.

M. DOWIE: ... ou la protection aux consommateurs, comme nous ou comme ceux des secteurs français.

M. ROSENTHALL: Ce serait un choix difficile évidemment, parce que certains ne seront pas satisfaits du choix, mais je pense que c'est un choix qu'il faut faire.

A l'article 8, on dit qu'il serait préférable pour le comité consultatif d'embaucher un secrétaire selon la Loi de la fonction publique, au lieu de la situation où le ministre de la Justice choisirait selon ses critères.

A l'article 9, on demande que la Loi des huissiers soit appliquée par une corporation formée suivant les mêmes lignes que celles que nous suggérons pour le comité consultatif. Quant au comité consultatif, on va y arriver plus bas.

LE PRESIDENT (M. Blank): M. RosenthaU, vous avez dépassé vos vingt minutes. Voulez-vous, dans votre liste, indiquer ce qui est le plus important.

M. ROSENTHALL: Choisir le plus important?

LE PRESIDENT (M. Blank): Oui. Et l'on peut vous questionner s'il y a lieu.

M. ROSENTHALL: Selon moi, les autres choses les plus importantes se rapportent au changement que nous suggérons, que vous suggériez, au sujet du code de procédure civile. Je peux y aller assez vite. On dit, premièrement, à propos de l'exemption, que l'exemption prévue à l'article 552 du code soit haussée immédiatement à $2,000 pour tenir compte de la hausse du niveau de vie et du coût de la vie et que l'exemption s'ajuste annuellement en s'in-dexant au taux d'inflation plus un autre 2 p.c. pour le coût de la vie.

M. PAUL: ... contre le principe de réajustement, quelle que soit la profession, ou peu importe le milieu, d'un réajustement de salaire, par exemple, indexé selon le coût de la vie...

M. ROSENTHALL: D'un réajustement de salaire?

M.PAUL: Par exemple, vous dites, ici, que cette hausse d'exemption de base de $2,000 devienne non saisissable, devrait comprendre également réajustement au taux d'inflation plus un autre 2 p.c.

Alors, est-ce que vous êtes pour le principe, par exemple, d'une hausse annuelle indexée sur le coût de la vie?

M. BOSSE: Indexée sur la valeur... M. ROSENTHALL: Pour le salaire?

M.PAUL: En général, pour les salaires. Je vous ai posé la question pour les salaires.

M. ROSENTHALL: Bien, en général... Il y a quelques points sur les ventes judiciaires qui sont assez importants.

On dit que pour les ventes judiciaires, il faudrait fixer un minimum dans les mises à prix, égal à un certain pourcentage de la valeur marchande actuelle, parce que maintenant il y a des acheteurs professionnels qui hantent les ventes par huissier et qui peuvent s'emparer des marchandises vendues pour presque rien. C'est vraiment dommage. On dit que si aucune offre n'est faite à une vente judiciaire, même par le débiteur, les biens mis en vente devraient devenir automatiquement la propriété du créancier saisissant qui devrait alors créditer le montant de la mise à prix sur la dette de son débiteur.

On dit qu'il devrait être interdit à tous les employés d'un huissier instrumentant ainsi qu'à tous les membres de sa famille immédiate d'enchérir sur les effets mis en vente ou de s'en rendre adjudicataires. En effet, ce qui reste des points, ce sont relativement des petites choses.

LE PRESIDENT (M. Blank): Est-ce qu'il y a des questions par les membres de la commission?

M. BOSSE: Je voudrais savoir combien de membres vous représentez, environ?

M. ROSENTHALL: Vous parlez de CRABS maintenant?

M. BOSSE: Oui.

M. ROSENTHALL: CRABS, ce sont des membres de plusieurs services communautaires et d'organismes d'antipauvreté dans la ville de Montréal.

M. BOSSE: Vous voulez dire des groupes de pression. Cela représente combien de groupes environ et combien de personnes actives?

M. ROSENTHALL: Je dirais une quinzaine de groupes. Malheureusement, ce ne sont que des groupes anglophones maintenant, parce qu'il y a des divisions de philosophie, entre autres.

M. BOSSE: Ce n'est pas malheureux, il en existe des anglophones dans l'île de Montréal.

M. ROSENTHALL: Quelques-uns, oui. Disons que dans les groupes que nous représentons, il y a 200 à 300 membres dans l'ensemble.

LE PRESIDENT (M. Blank): Ils viennent du sud-ouest de Montréal, Pointe-Saint-Charles, Saint-Henri?

M. ROSENTHALL: Pointe-Saint-Charles, Verdun, Côte-des-Neiges, la partie ouest en général.

LE PRESIDENT (M. Blank): Est-ce qu'il y a d'autres questions?

M. CHOQUETTE: J'ai seulement une observation à faire. C'est sur votre première proposition à l'effet que l'huissier devrait être un employé de la cour ou du ministère de la Justice, qui serait un fonctionnaire, en fait, et qui agirait pour le cas de saisie. Je crois que sur le plan, en somme, théorique, peut-être que si l'huissier était un fonctionnaire, on pourrait s'attendre qu'il y ait moins d'abus, comme vous l'avez signalé. Mais, sur le plan pratique, vous savez, un huissier à salaire, ça ne fera pas beaucoup de significations par jour et de saisies par jour. Alors, ça va être une dépense énorme d'argent pour employer ces gens, d'une certaine façon, à faire des travaux... Parce que vous savez, aujourd'hui, les huissiers s'organisent pour faire des routes; ils font énormément de significations en même temps. Je crois qu'au point de vue économique, c'est plus valable. C'est pour ça que je crois que la profession, tout en étant une profession privée, mais suffisamment contrôlée et surveillée et rendue suffisamment consciente de ses obligations vis-à-vis du public, peut remplir un rôle sans se fonctionnariser.

M. ROSENTHALL: Mais le but de notre mémoire, c'est d'exprimer le doute que le projet de loi 80 n'ait pas réglé suffisamment les activités des huissiers.

M. CHOQUETTE: Je comprends que vous avez d'autres suggestions, mais je vous dis, sur le fond du problème, que nous n'avons pas eu recours à la nationalisation ou à l'étatisation des huissiers, parce que ça nous semble une solution qui, sur le plan, disons donc, d'une vision socialiste de la réalité, peut paraître intéressante. Il faut quand même tenir compte de l'aspect pratique et qu'une corporation d'huissiers qui est assez encadrée et suivie par le ministère, le conseil consultatif, où il y a des mécanismes de discipline, où même le citoyen peut protester, faire valoir ses droits, tout ça nous semble devoir, sur le plan social en général, apporter de meilleurs résultats que de prendre, mettons, 500 huissiers pour faire des significations dans le Québec avec tout le coût que ça comporte et qui sera finalement payé par les contribuables.

M. DROLET: M. le Président, j'appuie le ministre de la Justice là-dessus. Je ne crois pas que cela réglerait le problème que de nationaliser, comme il l'a si bien dit, cette fonction; en présentant cette loi et en améliorant, si vous le voulez, ce qui existe déjà, je pense que cela peut du moins résoudre plusieurs problèmes plutôt que d'essayer de rendre ces gens des fonctionnaires de l'Etat. Je crois que la pensée du ministre de la Justice, du moins dans ce domaine, tombe en plein dans la mienne.

M. JORON: M. le Président...

LE PRESIDENT (M. Blank): Le député de Gouin.

M. JORON: ...je n'avais pas l'intention, puisque je remplace mon collègue, le député de Maisonneuve, de me mêler du fond du débat, mais je voudrais profiter de l'occasion quand même pour poser une question. On tourne autour d'un sujet qui me tente beaucoup, parce qu'on oppose en quelque sorte une rentabilité économique donnée ou une rentabilité administrative à ce qui pourrait être en toute contrepartie une meilleure rentabilité sociale, s'il y a des choix d'objectifs qui tournent autour de tout cela, et je ne suis pas sûr qu'on ait bien établi le pour et le contre des deux avant de choisir. Peut-être que le député de Portneuf a appuyé le ministre un peu prématurément, en tout cas, peu importe. La question que je voudrais poser à M. Rosenthall est qu'il m'explique... Je ne le comprends pas bien, je vous dis d'avance que je ne suis pas familier avec le domaine de la justice ce n'est pas généralement ma spécialité, mais comment relie-t-il les abus ou les injustices sociales à la méthode de rétribution actuelle des huissiers?

M. ROSENTHALL: Qu'est-ce qu'on fait?

M. JORON: Oui, comment reliez-vous les deux? Dans quelle mesure, en d'autres mots, les abus, dans la critique que vous faites au

début, qui est peut-être fort sévère, mais que je partage en grande partie, comment reliez-vous ces abus avec la façon dont les huissiers sont rétribués à l'heure actuelle?

M. ROSENTHALL: C'est très difficile, il faut généralement embaucher un avocat. Lorsqu'il y a une saisie, par exemple, je vais vous citer un cas, une affaire que nous avons: Une femme avait des meubles, un ménage valant peut-être $200, moi, je ne lui aurais rien donné pour l'ameublement.

M. JORON: Pardon?

M. ROSENTHALL: J'en aurais fixé la valeur à $50, disons $200 au maximum. On avait fait une saisie parce qu'elle devait $50 à quelques colporteurs. On avait saisi la moitié de ses meubles. Vous pouvez comprendre la détresse d'une femme comme cela, elle ignore ses droits. Elle vient chez nous, tout ce qu'on peut faire, c'est une opposition, embaucher un avocat — parce que nous autres, nous ne sommes pas des avocats — pour faire opposition à la saisie et peut-être charger les frais au créancier saisissant ou peut-être payer les frais et aller à la cour de petites créances pour faire une action contre le huissier. C'est une affaire de $40 et c'est beaucoup d'activité pour...

M. CHOQUETTE: Oui, mais il y a deux choses justement, comme dit le député de Maskinongé. Premièrement, elle avait droit à une exemption de base de $1,000.

M. ROSENTHALL: C'est cela.

M. CHOQUETTE: Au fond, il fallait que l'huissier soit vraiment de mauvaise foi pour aller saisir pour $200, des meubles qui avaient une valeur marchande de $200.

M. ROSENTHALL: C'est ce que je dis exactement.

M. CHOQUETTE: Oui. Ceci étant dit, je ne dirais pas que tous les huissiers sont de mauvaise foi, cependant.

M. ROSENTHALL: Je ne dis pas qu'ils sont tous des sadiques, mais j'en connais.

M. CHOQUETTE: II ne faut pas oublier ceci pour répondre au député de Gouin, l'aide juridique est actuellement accessible à tout le monde dans le Québec depuis le 4 juin dernier.

M. ROSENTHALL: Depuis huit jours. J'allais dire qu'avec le nouveau programme d'assistance juridique, une partie de ce mémoire serait changée parce que maintenant c'est plus facile si on connaît ses droits — je suis un avocat — de s'assurer que ces lois soient respectées. Ce ne sont pas les affaires simples, ce ne sont pas les affaires une par une qu'on veut changer. On veut changer le système.

M. JORON: Je comprends; mais sur le point précis, le premier qui est peut-être un des très importants, que les huissiers deviennent des officiers de la cour, salariés et employés, des fonctionnaires, le fait que, si on acceptait cette proposition, les huissiers deviennent des fonctionnaires, en quoi cela garantit-il qu'il y aura moins d'abus par rapport à la façon dont ils sont rémunérés dans le moment?

M. ROSENTHALL: Parce qu'un huissier a un tarif de frais pour chaque opération qu'il fait.

M. JORON: Plus il en fait, plus il fait d'argent.

M. ROSENTHALL: S'il arrive dans une maison où il ne peut pas saisir, cela ne le paie pas. Mais maintenant, s'il...

M. PAUL: Un instant.

LE PRESIDENT (M. Blank): Quand cela est fait nulla bona, il exige aussi une somme.

M.PAUL: C'est cela. L'avocat est obligé de payer. Sur le rapport nulla bona qu'il adresse à son procureur, le procureur paie les honoraires de l'huissier.

M. ROSENTHALL: Mais s'il ne saisit pas, on ne le paie pas.

M.PAUL: C'est clair. D ne peut pas être payé pour ce qu'il ne fait pas. Mais pour la procédure qu'il a faite, il est rémunéré. Ce n'est pas le débiteur qui le rémunère, c'est l'avocat.

M. ROSENTHALL: Très bien. C'est juste le début du processus. S'il saisit, s'il enlève les biens, il y a des frais pour les enlever, pour le transport, pour l'entreposage. Et c'est dans ces étapes de l'opération que beaucoup d'abus arrivent.

M. DOWIE: Aussi, cela arrive souvent qu'un huissier arrive dans une maison et qu'il n'a rien à faire. Dans le système actuel, si vous êtes avocat et si vous employez un huissier — et cela arrive souvent— il n'a rien à faire. Tu vas chercher un autre huissier qui va saisir. C'est pourquoi la plupart du temps, l'huissier vient à la maison et j'ai vu des fois où il n'a rien vu mais il est entré dans la maison, il a dit: Le téléviseur, le stéréo, ceci et cela et puis, c'est tout ce qui reste dans la maison. Et il doit le faire parce que c'est son intérêt d'être employé souvent. Et s'il ne fait rien, il ne sera pas employé souvent. Il aura la réputation...

M. CHOQUETTE: ... qu'il ne collecte pas. M. DOWIE: ... qu'il ne collecte pas. Si

l'avocat pour la créance voit souvent qu'il ne fait rien, il trouvera un autre huissier qui va faire quelque chose.

M. JORON: L'essentiel de votre point en somme, c'est que vous dites que, dans le système actuel de rémunération, il y a une motivation qui peut inciter...

M. DOWIE: La concurrence.

M. CHOQUETTE: Mais on peut dire que c'est dans n'importe quelle occupation. Si on nationalisait les avocats, on serait sûr que les avocats, on pourrait dire théoriquement qu'ils vont juste aller plaider des causes justes, des causes fondées en droit, parce qu'ils n'auront pas d'intérêt à faire valoir des mauvaises causes. Par contre, voyez-vous les inconvients de la nationalisation ou de l'étatisation des avocats? Les avocats iraient en cour pour la forme, pour faire semblant de défendre le client. Ce serait à peu près le système qui peut exister dans les pays derrière le rideau de fer, c'est-à-dire dans les pays communistes. Pensez-vous que les clients seraient mieux servis par ce système que par des avocats qui veulent réellement défendre leurs clients? Je trouve que c'est une vision un peu irréaliste que de s'imaginer que, parce qu'on fonctionnarise quelqu'un, on en fait quelqu'un de juste et compétent. Ce n'est pas vrai. La plupart du temps, il y a une propension à en faire un individu assez paresseux et inefficace.

M. DROLET: On en a d'ailleurs l'exemple avec les médecins. Cela cause de fichus problèmes.

M. DOWIE: M. le ministre, je pense que vous ne pouvez pas faire une comparaison entre les avocats et les huissiers. Je pense que ce n'est pas valable. Ce n'est pas le même genre de travail du tout.

M. CHOQUETTE: Non, mais je dirais que c'est une façon de comparer. De toute façon, actuellement dans le Québec, il y a — je ne sais combien de huissiers qui pratiquent — 1,000, et le territoire québécois est très étendu. Mettons à Causapscal en Gaspésie. On a un huissier qui y travaille à temps partiel. De temps à autre, peut-être trois ou quatre fois par semaine, il va faire une signification d'un bref parce qu'un avocat de Montréal ou de Québec lui envoie une action. Est-ce qu'en adoptant un système d'huissiers salariés, on va désigner les huissiers salariés pour couvrir tout le territoire du Québec qui est très vaste et où la densité de population est très limitée? Je trouve qu'au point de vue économique, ce serait une erreur formidable, sans compter le problème des 500 ou 1,000 qui sont là, qui travaillent et gagnent leur vie.

M. BOSSE: Ce qui m'a frappé dans votre représentation, c'est l'information qu'on doit fournir au client ou à la personne qui est saisie. Moi-même, ce matin, grâce à la science du ministre et du député de Maskinongé, j'ai appris certaines choses, mais il apparaît que c'est dans la pratique au fond et à cause de l'ignorance de certaines parties de la loi que certains citoyens subissent des préjudices et des abus de la part de certains huissiers. Cependant, dans les remarques que vous avez faites, j'ai noté aussi que vous étiez souvent d'accord avec Me Walters sur certains points. Sur l'ensemble de la loi, on peut dire que c'est bonifier la situation, si je comprends bien votre opinion et vos représentations, par rapport à ce qu'elle était antérieurement. C'est-à-dire que c'est déjà une amorce vers la fin des abus.

On a senti aussi dans la représentation des huissiers, brillamment exposée d'ailleurs comme Me Walters, qu'eux-mêmes se trouvant devant une situation presque obligatoire, étaient prêts à faire une révision de leurs propres cadres, des quelque 500 huissiers à l'oeuvre dans la province et à mettre de l'ordre et à mettre un terme aux abus avant que les citoyens regroupés collectivement mettent leur propre ordre vis-à-vis des huissiers. Est-ce que je me méprends en disant que, sur l'ensemble, sur le corps même de la loi, il y a un cadre qui va permettre une meilleure protection aux citoyens et aux plus défavorisés, aux plus démunis, en particulier? Je note l'aspect publicitaire des droits du citoyen.

M. ROSENTHALL: Oui, mais que pensez-vous par exemple de la suggestion de M. Walters que le comité consultatif soit formé de cinq huissiers et un membre du ministère de la Justice? Est-ce que vous pensez qu'un corps de métiers est mieux réglé par ses propres membres ou par un corps extérieur?

M. BOSSE: Je crois que, quand le ministère de la Justice délègue des représentants, ils représentent le peuple parce qu'ils sont élus par le peuple.

M. CHOQUETTE: Vous savez, un ministère de la Justice, c'est très étendu, il y a beaucoup de monde là-dedans et...

LE PRESIDENT (M. Blank): Le député de Maskinongé.

M.PAUL: M. Rosenthall, dans le système dans lequel nous vivons, vous avez analysé la situation, vous nous faites des recommandations, vous nous présentez des suggestions, quelques-unes très intéressantes; mais pourriez-vous nous dire quelle a été la considération que vous avez donnée au droit du créancier d'être payé?

M. ROSENTHALL: Nous travaillons pour le côté opposé. Je peux avouer que, dans bien des cas, j'ai plus de sympathie pour les créanciers que pour les débiteurs.

M. PAUL : Est-ce que vous allez admettre que nous, législateurs, nous devons tâcher d'établir un juste équilibre entre d'un côté les droits des créanciers et d'un autre côté protéger les économiquement faibles et les moins bien nantis que sont les débiteurs en certaines circonstances?

M. ROSENTHALL: Je doute que ce soit possible.

M. PAUL: A cause du système.

M. ROSENTHALL: A cause du système. On ne peut pas protéger les deux côtés.

M. PAUL: Et en suivant votre raisonnement, le système idéal pour vous serait le socialisme pur.

M. ROSENTHALL: Un genre, oui. M. PAUL: Très bien, c'est là... M. BOSSE : Quelle était votre réponse? M. PAUL: C'est là, oui.

M. ROSENTHALL: J'ai dit un genre de socialisme. Il y a des problèmes sous tous les régimes.

M. CHOQUETTE: Quelle que soit votre option politique, je tiens à vous dire qu'il y a beaucoup de suggestions qui sont intéressantes au point de vue pratique et que nous allons étudier à leur mérite. Je voudrais revenir à la suggestion qui a été faite par le président qui obvierait aux difficultés actuelles dans l'action des huissiers lors de saisies. C'est l'obligation au domicile de laisser les meubles meublants en place.

M. ROSENTHALL: En place, oui. M. CHOQUETTE: Obligation.

LE PRESIDENT (M. Blank): Avec ça et le recours à l'assistance judiciaire pour régler la question des $1,000, ça règle presque 99 p.c. de vos problèmes.

M. ROSENTHALL: Une autre chose, c'est que l'avocat a le choix de faire une interview avec la partie saisie. Mais il le fait rarement pour savoir exactement...

M. CHOQUETTE: Un interrogatoire sur les biens et créances.

M. PAUL: Ce sont des frais que vous voulez faire encourir au débiteur. Il y a des honoraires là-dessus, il y a des frais.

LE PRESIDENT (M. Blank): ... ça coûte au moins une vingtaine de dollars, au moins au débiteur.

M. DOWIE: Est-ce que je peux poser une question? M. le ministre, est-ce que vous donnerez des considérations à nos suggestions de mettre des citoyens au...

M. CHOQUETTE: Oui, j'ai trouvé que c'était une suggestion qui avait du bon sens. Au conseil consultatif, il ne devrait pas seulement y avoir des huissiers, pas seulement des membres du Barreau, mais des gens suffisamment représentatifs d'autres groupes sociaux capables de représenter les intérêts de ces gens. Je suis tout à fait d'accord.

M. PAUL: M. le Président, si vous me permettez, est-ce que je pourrais vous inviter à obtenir une copie du mémoire du Barreau et spécialement vous arrêter à la page 13 du mémoire où on va parler de la publicité qui devrait être faite, non pas de la publicité, mais de l'information qui devrait être donnée à un débiteur? Quant à moi, c'est une excellente recommandation. J'aimerais que vous analysiez cette recommandation, cette suggestion du Barreau qui va sûrement calmer les inquiétudes que vous avez soulevées, à bon droit, à l'égard de certains problèmes, de certains abus.

LE PRESIDENT (M. Blank): Merci à M. Rosenthall et à son groupe.

M. ROSENTHALL: Je vous remercie, M. le Président.

LE PRESIDENT (M. Blank): II est midi moins trois minutes, c'est terminé pour aujourd'hui. La date la plus rapprochée où nous pourrons siéger à nouveau sera mardi prochain, le 26 juin à 9 h 30, le matin. On entendra les membres du Barreau. La commission ajourne ses travaux au 26 juin, à 9 h 30.

(Fin de la séance à 11 h 59)

Document(s) associé(s) à la séance