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Version finale

29e législature, 4e session
(15 mars 1973 au 25 septembre 1973)

Le mercredi 16 mai 1973 - Vol. 13 N° 49

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Etude des crédits du ministère de la Justice


Journal des débats

 

Commission permanente de la justice

Etude des crédits du ministère de la Justice

Séance du mercredi 16 mai 1973

(Dix heures dix minutes)

M. BLANK (président de la commission permanente de la justice): A l'ordre, messieurs!

Pour le moment, le seul changement est le suivant: le député de Verdun, M. Caron, remplace M. Cournoyer, de Chambly. Maintenant, nous pouvons commencer l'étude des crédits du ministère de la Justice avec un exposé général du ministre, député d'Outremont. Je lui cède la parole.

Remarques préliminaires

M. CHOQUETTE: Merci, M. le Président.

M. le Président, chers collègues, je voudrais faire un exposé général sur les politiques du ministère ainsi que sur les aspects les plus généraux des crédits que nous demandons pour la Justice, cette année.

Vous me permettrez, tout d'abord, de faire état, très brièvement, des principales initiatives qui ont été prises par le ministère de la Justice, au cours de l'année 1972. Cet exposé sur cette question n'a pas pour but de flatter le ministère et son titulaire, mais plutôt de fixer un point de départ pour que vous puissiez considérer, dans un contexte approprié, les priorités et les initiatives du ministère pour l'année 1973.

Simplement pour fins de rappel, je vous ferai une courte énumération des principales initiatives, au point de vue législatif ou administratif, que nous avons adoptées en 1972. Nous avons adopté la Loi de l'aide juridique et nous avons constitué la commission des services juridiques, au cours du mois d'août dernier, commission qui a été chargée, en vertu des termes de la Loi de l'aide juridique, de préparer les règlements, d'organiser, sur le plan administratif, les centres juridiques qui dispenseront l'aide juridique dans l'avenir. Nous avons adopté des amendements importants à la Loi de police et, à la suite de l'adoption de ces amendements, le lieutenant-gouverneur en conseil a ordonné l'institution d'une enquête sur le crime organisé, enquête qui a débuté et qui se poursuit actuellement.

Nous avons adopté une Loi créant le service de la police de la Communauté urbaine de Montréal et cette loi prévoit la constitution d'un service de la police unifié sur l'île de Montréal. Nous sommes actuellement en voie d'organiser ce service unifié, avec tous les problèmes que cela comporte.

Au ministère même, nous avons institué un service des fraudes, de façon à combattre plus efficacement la criminalité économique, en particulier dans le domaine de la faillite et les autres domaines où la fraude peut exister. Des policiers enquêteurs ainsi que des comptables, des avocats ont été affectés à ce service des fraudes. Au ministère même toujours, nous avons créé un service de sécurité qui a pour but d'assumer les responsabilités qui avaient été précédemment assumées par la Sûreté du Québec, au point de vue de la garde des ministres ou de la garde de leur résidence, dans certains cas. La création de ce service de sécurité a correspondu, d'une part, au besoin d'économiser du personnel de la sûreté, pour des fins de protection de certaines personnalités gouvernementales, et d'autre part, de réaliser des économies sur le plan des dépenses, car on sait que les agents de la sûreté, avec les salaires qui leur sont payés, à l'heure actuelle, représentent un coût important lorsqu'ils sont affectés à des tâches de sécurité individuelle.

Nous avons institué un programme d'émission de cartes d'identité des fonctionnaires. Nous avons mis en oeuvre la Loi favorisant l'accès à la justice, puisque la cour Provinciale, le 1er septembre 1972, a commencé à exercer sa compétence en matière de petites créances, suivant la procédure qui était fixée dans la Loi favorisant l'accès à la justice.

Finalement, nous avons étendu nos programmes de réinsertion sociale aux services de probation et de détention du ministère.

Je vous fournis ces détails afin de vous situer dans le cadre des priorités du ministère pour l'année 1973 et des initiatives que nous entendons adopter. Je vais maintenant en faire une courte énumération. Dès le 1er juin 1973, c'est-à-dire dans quelques jours, nous avons l'intention de proclamer la Loi de l'aide juridique et d'assurer des services complets d'aide juridique dans toutes les régions du Québec, suivant les dispositions du projet de loi no 10, qui a été adopté par l'Assemblée nationale. Alors, incessamment, le règlement s'appliquant à l'aide juridique sera adopté par le lieutenant-gouverneur en conseil et sera publié dans la Gazette officielle, de façon à être en vigueur le 1er juin.

Par ailleurs, nous poursuivons nos négociations avec le Barreau du Québec et la Fédération des avocats du Québec, pour en arriver à déterminer les tarifs qui s'appliqueront aux avocats de la pratique privée qui assumeront des causes, soit par voie de référé, ou soit par suite de l'exercice de la faculté de libre choix qui a été adoptée dans le projet de loi. J'espère que la négociation de ces tarifs aboutira pour le 1er septembre. Si elle ne devait pas aboutir, nous envisageons d'autres solutions, à ce moment-là, de façon à faire en sorte que l'aide juridique puisse être disponible et accessible aux citoyens.

Nous continuons le rodage et la mise au point de la Loi favorisant l'accès à la justice, c'est-à-dire l'adoption de la procédure qui a été arrêtée dans la Loi favorisant l'accès à la justice et qui s'applique aux petites créances. A ce

sujet, je dois dire que les résultats obtenus dépassent mes espérances au départ, car il ne fait aucun doute que nous avons innové dans ce domaine, qu'il y avait des risques que nous avons su assumer, en introduisant ce type nouveau de procédure, mais que les résultats sont extrêmement heureux à l'heure actuelle; autant les justiciables que les juges nous ont communiqué leur satisfaction devant ce genre d'administration de la justice. Nous n'avons reçu que très peu de plaintes de la part de justiciables, quant à la façon dont fonctionne cette loi.

Au cours de l'année 1973, nous avons l'intention d'adopter la législation concernant les loyers, c'est-à-dire la Loi concernant le louage de choses, ainsi que la Loi du tribunal des loyers, évidemment, après- avoir pris en considération les représentations qui nous seraient faites en commission parlementaire, de façon que, le 1er janvier 1974, nous ayons une législation générale et permanente concernant le louage de choses et en particulier le louage de locaux d'habitation.

D'autre part, nous avons institué un programme de développement de l'enseignement et de la formation policière. Au mois de décembre dernier, j'annonçais les grandes lignes de ce programme. Depuis ce moment, un comité a été formé à la Commission de police, qui réunit autant les représentants des états-majors que du syndicalisme policier et des autres secteurs intéressés dans la formation policière, de façon à examiner les grandes lignes de ce programme et à le mettre au point d'une façon définitive. Il n'y a pas de doute que le programme que nous avons énoncé à cette occasion représente des changements considérables par rapport au système de formation policière qui existait antérieurement.

Je ne me cache pas les difficultés pratiques que le nouveau programme peut affronter. C'est la raison pour laquelle, tout en maintenant le programme dans ses grandes lignes, en considérant toujours qu'il est acceptable et qu'il représenterait un progrès important au point de vue de l'enseignement et de la formation policière, je veux absolument tenir compte des aspects pratiques et des représentations qui pourront me parvenir des différents milieux policiers, c'est-à-dire des milieux qui ont trouvé que le programme, sous certains aspects, était prématuré et ne pourrait pas être mis en vigueur aux dates fixées, soit encore qu'il devrait être amendé ou corrigé, sous certains aspects.

A ce sujet, je tiens à faire part à la commission présente, ce matin, que j'ai rencontré moi-même, d'ailleurs à la suggestion du député de Sainte-Anne, les représentants de tous les étudiants des CEGEP qui dispensent actuellement l'enseignement de la technique policière. Comme vous le savez peut-être, sept CEGEP dispensent cet enseignement. Chaque CEGEP avait délégué trois étudiants pour venir m'exposer les problèmes que posait l'enseignement de la technique policière dans les CEGEP, car c'est là le centre du nouveau système d'enseignement et de formation policière que nous avons l'intention de mettre sur pied et de proposer comme solution à long terme. Les jeunes que j'ai rencontrés à cette occasion m'ont fait part de l'intérêt que présentaient les cours. Ils m'ont évidemment aussi souligné les faiblesses de l'enseignement. La réunion n'avait pas été instituée pour que je reçoive l'approbation générale, mais bien plutôt pour que je me rende compte des problèmes posés.

Il y a une question que j'ai posée à ces jeunes à la fin de la réunion et qui m'a pas mal éclairé. Dans certains milieux policiers traditionnels, la réaction au nouveau programme de formation policière a été la suivante: Dans les CEGEP, vous n'avez que des étudiants qui fument du pot et qui ont les cheveux longs. En somme, ce seraient des désoeuvrés, pour la totalité. Or, les jeunes que j'ai rencontrés à cette occasion m'ont dit que même vis-à-vis de leurs confrères de CEGEP qui ont choisi des disciplines différentes ou des cours différents, tels que littérature, mathématiques et toutes les autres options qui sont offertes aux étudiants, le cours de technique policière ne représentait qu'une option parmi tant d'autres et qui recrutait un certain nombre d'étudiants vivement intéressés dans ce genre de carrière. Par conséquent, le fait d'introduire l'enseignement de la technique policière en milieu cégépien ne représente pas, aux yeux de ces jeunes, un problème et surtout un problème insurmontable, pas du tout. Evidemment, au départ, c'est quand même une condition sine qua non.

Parmi les autres initiatives que nous envisageons pour cette année, il y a la publication du livre blanc sur l'organisation de la justice au Québec, sur lequel travaille une équipe du ministère, à l'heure actuelle, en collaboration avec les milieux du Barreau, les milieux judiciaires et les milieux des autres professions intéressées. J'ai bon espoir que ce livre blanc sera publié l'automne prochain et qu'il constituera un examen général de l'administration de la justice, de l'organisation de la justice au Québec et qu'il proposera un certain nombre de réformes, de façon à améliorer notre système de justice.

Nous avons mis sur pied un programme d'intégration des cours Municipales et, dès à présent, une équipe travaille sur cette politique du ministère. Il s'agit pour nous d'instituer des cours Municipales qui cesseraient d'avoir le caractère temporaire et local des cours Municipales, à l'heure actuelle, pour acquérir un caractère régional et qui seraient présidées par des juges permanents. Nous n'avons pas l'intention de procéder à toute vitesse, dans ce programme. Nous avons plutôt l'intention de procéder par voie d'expériences pilotes. Ainsi en est-il des démarches que nous faisons actuellement avec les municipalités de la rive sud de Montréal, de façon à réunir l'ensemble des cours Municipales en une cour Régionale.

Lorsque nous aurons pu faire quelques expé-

riences pilotes de ce genre, nous pourrons généraliser à ce moment-là les cours Municipales régionales qui cesseront de s'appeler les cours Municipales et deviendront des cours Régionales suivant une appellation qui pourrait être désignée à ce moment-là.

Nous avons l'intention de poursuivre nos efforts de régionalisation des services du ministère. Déjà, Ie ministère est très répandu sur le territoire québécois par suite de l'existence des districts judiciaires, de la présence des prisons, de la présence de la Sûreté du Québec, des centres judiciaires qui administrent la Loi des petites créances, par suite de la Régie des loyers, de tous les services en somme qu'offre le ministère de la Justice à la population québécoise. Un effort du côté de l'organisation régionale du ministère se poursuit très intensément dans tous les secteurs que j'ai énumérés.

Quant à la Sûreté du Québe, nous entendons accélérer des programmes de mobilité du personnel et de remplacement du personnel policier par du personnel civil. On sait que le déplacement de la police est un des facteurs les plus importants dans une police moderne et, à ce point de vue, des mesures sont prises sur le plan technique de façon à faire en sorte que notre police puisse se déplacer suivant les besoins avec le plus de rapidité possible.

Quant au remplacement du personnel policier par du personnel civil, on sait que c'est là le moyen de réaliser des économies sur le plan policier et nous avons sur pied un programme qui va faire en sorte que des civils vont remplacer des policiers dans certaines fonctions de bureau ou autres, c'est-à-dire des fonctions là où le personnel civil peut servir aussi adéquatement que le personnel policier. Car on est toujours un peu surpris lorsqu'on voit un policier avec une carrure par exemple ressemblant à celle du député de Sainte-Anne derrière un clavigraphe en train de taper quelques rapports ou en train de répondre à un coup de téléphone. Il y a des fonctions dans la police qui peuvent sûrement être exécutées par le personnel civil.

Ceci permet de libérer...

LE PRESIDENT (M. Blank): Je pense que c'est le meilleur moment, à ce moment-ci, de nommer le député de Sainte-Anne, M. Springa-te, comme rapporteur de cette commission. On a besoin de lui.

M. PAUL: M. le Président, je comprends que c'est vous qui le nommez, ce n'est pas la commission qui le fait.

LE PRESIDENT (M. Blank): Avec le consentement de la commission.

M. CHOQUETTE: Je disais donc qu'il y a des fonctions où le personnel civil peut remplacer de façon satisfaisante le personnel policier et que ceci permet à ce moment-là aux agents de police de s'occuper de fonctions proprement policières.

Dans le domaine de la police toujours, nous avons institué le Centre de renseignements policier du Québec qui est un centre d'informatique installé à la Sûreté du Québec à Montréal et qui recueillera les renseignements pertinents sur la criminalité, sur les criminels et sur les activités de ceux-ci. Ce centre de renseignements, que j'ai eu l'occasion de visiter dimanche et qui sera au point vers la fin de l'année, rendra accessibles aux différents corps de police municipaux du Québec les informations qui peuvent leur être utiles. De plus, ce centre est relié au centre national institué par la GRC et, par conséquent, des informations pourront être échangées entre les deux organisations, qui poursuivent un rôle parallèle ou semblable.

Je considère que l'institution d'un Centre de renseignements policier du Québec sera un progrès très considérable dans la rapidité des enquêtes que pourront faire nos policiers à l'occasion d'incidents criminels.

Il est également question, dans le projet de loi 65 actuellement pendant devant la Chambre, de transférer une partie de la responsabilité, sur les cas de protection d'enfants, du ministère des Affaires sociales au ministère de la Justice. Je n'en dis pas plus long sur ce sujet car il fait l'objet d'une discussion et d'audition en commission parlementaire, mais une part des responsabilités, en ce qui concerne les cas de protection et les cas de jeunes délinquants, incomberait maintenant au ministère de la Justice.

Finalement, nous avons l'intention de passer à l'action dans le domaine de la justice auprès des Esquimaux et des Indiens et, en particulier, de la mise en oeuvre du programme qui était énoncé dans le rapport que j'ai publié récemment et intitulé "La justice au-delà du cinquantième parallèle". Des mesures concrètes seront adoptées incessamment de façon à mettre ce programme en vigueur après que nous aurons procédé aux consultations appropriées avec les groupes d'Indiens et d'Esquimaux qui y seront intéressés.

Voilà dans quels domaines nous avons l'intention d'oeuvrer principalement au ministère de la Justice au cours de l'année 1973. Ceci n'exclut pas d'autres initiatives qui pourraient être prises par le ministère, mais je voulais exposer principalement les lignes de force de l'action du ministère au moment où nous nous parlons. Certainement que d'autres initiatives seront prises au cours de l'année qui vient, mais je ne voudrais pas m'engager aujourd'hui même dans des secteurs où nous ne sommes pas encore sûrs des mesures que nous allons prendre.

Je voudrais maintenant passer aux questions financières qui concernent le ministère de la Justice. Vous me permettrez tout d'abord de faire état de ce que le programme de formation policière dont j'ai parlé tout à l'heure a été

préparé suivant la méthode du PPBS, c'est-à-dire suivant la formule de la rationalisation des choix budgétaires. Il s'agissait là d'une des premières initiatives prises par le gouvernement dans ce domaine et il se fait que c'est dans le domaine de la formation policière qu'il nous a été possible d'utiliser cette méthode. Je tiens à dire également que le ministère de la Justice a été le premier à réaliser un programme suivant cette formule.

Nous sommes actuellement à étudier un autre programme du même genre et ceci, dans le domaine de l'expertise scientifique et des enquêtes pour fins judiciaires. C'est-à-dire le fonctionnement de l'Institut de médecine légale ainsi que les coroners et les commissaires d'incendie. Toutes ces activités, qui constituent un support indispensable à la justice criminelle, font actuellement l'objet de la préparation d'un programme de façon que nous puissions déterminer comment nous pouvons dépenser notre argent de la façon la plus avantageuse possible.

Les crédits du ministère de la Justice, vous l'aurez constaté, sont répartis en 17 programmes. Simplement pour donner les ordres de grandeur, je dirai que, si on se réfère aux crédits adoptés par l'Assemblée nationale en 72/73 ainsi que les budgets supplémentaires qui ont été adoptés en cours d'année, nous arrivons à un chiffre de $129,162,800, soit le total des crédits qui ont été adoptés par rapport à un chiffre de $153,711,700 qui est proposé dans les crédits de 73/74, ce qui représente une augmentation, dans les crédits de la Justice, de 19 p.c. Cependant, je tiens à souligner que dans les crédits de 72/73 ne figuraient pas les montants qui ont été acquittés et payés par le ministère des Finances à la suite de la négociation des conventions collectives.

Ces montants ont donné lieu à des transferts de fonds par le ministère des Finances au ministère de la Justice, de telle sorte qu'en fait les dépenses totales encourues par le ministère de la Justice pour l'année financière 72/73 se sont élevées à $142,985,500. ON se souviendra que les montants qui devaient être alloués pour des augmentations de traitements à la suite de la négociation des conventions collectives n'étaient pas inclus dans les crédits des différents ministères et en particulier celui de la Justice pour l'année 72/73.

Par conséquent, M. le Président, abstraction faite des augmentations de traitements là où il y a lieu de faire des rajustements entre le ministère de la Justice et le ministère des Finances, l'augmentation des crédits réclamés pour la Justice en 72/73 est de $142,985,500 à $153,711,700 pour l'année 73/74. Cette différence, soit $9,892,800, représente un accroissement de 7.7 p.c. des crédits alloués à la Justice, ce qui situe le ministère dans la moyenne générale d'augmentation des ministères du gouvernement.

Ce chiffre de $9,892,800, ou 7.7 p.c. de notre budget, peut être divisé de la façon suivante: 1.3 p.c, ou $1,733,600, représente du personnel additionnel ou l'accroissement de nos dépenses dans des programmes déjà existants. Par conséquent, il s'agit d'un simple accroissement dans le rythme de croisière des programmes existants. 6.4 p.c, ou $8,159,200 représentent de nouveaux projets ou l'extension de projets qui existaient déjà. Maintenant, pour ce qui est des nouveaux projets ou l'extension de projets qui existaient déjà, je vous renvoie principalement aux priorités du ministère pour l'année 73/74 que j'ai énumérées tout à l'heure dans mon exposé général. Par conséquent, on peut dire que le chiffre de $8,159,200 sera principalement consacré aux nouvelles initiatives dont je vous ai fait part tout à l'heure.

Pour conclure sur l'aspect de la dépense, M. le Président, on peut donc résumer la situation comme suit: par rapport aux crédits votés par l'Assemblée nationale en 72/73, l'augmentation des crédits de la Justice, cette année, de 19 p.c. se répartit comme suit: 11.3 p.c. en accroissement de traitements par suite des conventions collectives qui sont entrées en vigueur; 6.4 p.c. pour de nouveaux projets et l'extension de projets anciens et 1.3 p.c. en augmentation d'effectifs et augmentation de dépenses dans des programmes existants.

Maintenant, quels sont les principaux programmes qui sont affectés par l'augmentation de 7.7 p.c. dont j'ai fait état tout à l'heure? Ce sont les programmes suivants: programme numéro 6 : Protection de la société, des citoyens et de leurs biens; programme numéro 7: Gestion interne et soutien de la Sûreté du Québec; programme numéro 1: Fonctionnement du système judiciaire; programme numéro 11 : Garde des détenus et prévenus; programme numéro 17 : Aide juridique. L'accroissement dans ces cinq programmes représente un pourcentage de 14.2 p.c. du pourcentage total de 19 p.c. dont j'ai fait état tout à l'heure comme représentant l'augmentation...

M. PAUL: Est-ce que le ministre pourrait répéter les programmes qui sont affectés?

M. CHOQUETTE: Programme no 6: Protection de la société, des citoyens et de leurs biens; programme no 7: Gestion interne et soutien de la Sûreté; programme no 1: Fonctionnement du système judiciaire; programme no 11: Garde des détenus et des prévenus; programme no 17: Aide juridique. Ces programmes, dans l'ensemble de l'augmentation de 19 p.c, représentent 14.2 p.c.

Maintenant, je tiens à attirer votre attention sur le fait que les principaux programmes affectés, c'est-à-dire les cinq que je viens d'énumérer, sont ceux où il y a le plus de personnel. En effet, on doit considérer, quand on analyse la situation du ministère de la Justice, qu'il s'agit du ministère qui a le personnel le plus nombreux de tous les ministères gouvernementaux. Le personnel s'élève à environ 11,000 ou

12,000 personnes. Tout à l'heure, je donnerai les chiffres précis sur le personnel.

Par conséquent, tout accroissement dans les conventions collectives ou toute augmentation de salaires se répercutent immédiatement dans les programmes où sont regroupés les plus grands secteurs en personnel.

A ce sujet, je puis dire qu'en gros 80 p.c. du budget de la Justice vont en salaires, c'est-à-dire aux 11,000 ou 12,000 employés de notre ministère. Quand on examine les répercussions de l'augmentation de 19 p.c, on voit immédiatement que les principaux programmes affectés sont essentiellement ceux où il y a un personnel nombreux, à l'exception de l'aide juridique, mais là tout s'explique plutôt par l'impulsion qui a été donnée dans les dernières années à l'aide juridique et par la décision gouvernementale de consacrer beaucoup plus d'argent à ce secteur d'activité.

Je voudrais faire quelques brefs commentaires sur la gestion du personnel au ministère de la Justice. En 1972, l'effectif total autorisé au ministère était de 11,202 personnes. En mai 1973, l'effectif total autorisé au ministère sera de 11,706 postes, ce qui représente un accroissement de 504 postes par rapport à la situation de 1972.

D'autre part, il y a lieu de considérer l'effectif réel au 28 février 1973, car un certain nombre des postes autorisés en 1972 n'étaient pas comblés. Ainsi, avions-nous, au 28 février 1973, un effectif réel de 10,481 personnes, de telle sorte que, prenant en considération l'accroissement dans l'effectif autorisé en 1973 et les postes à combler qui n'avaient pas été remplis par rapport à l'effectif de 1972, nous nous trouvons devant 1,225 postes à combler, ce qui comprend les 504 nouveaux postes autorisés.

Finalement, dans les considérations générales que je voudrais faire ce matin, il y a lieu de considérer les revenus de l'activité du ministère, car le ministère de la Justice n'est pas seulement un ministère qui dépense. Certaines sources de revenus nous appartiennent. En 73/74, nous prévoyons des revenus de $38,550,000, tandis qu'en 72/73 nos revenus étaient de $36,235,000.

Quant aux sources principales de revenus, elles se situent en grande partie au niveau de l'administration des permis d'alcool, des bureaux d'enregistrement, des timbres judiciaires, de la réglementation des loteries et des courses, ainsi que de diverses autres sources telles que les amendes et les condamnations à des montants en argent. Tout cela fait un total prévu, pour 73/74, de $38,550,000.

Ceci conclut mon exposé général sur la situation du ministère de la Justice et des initiatives qu'il entend adopter au cours de cette année.

LE PRESIDENT (M. Blank): Le député de Maskinongé.

M.PAUL: M. le Président, je voudrais d'abord remercier le ministre pour ce tour d'horizon qu'il vient de nous faire faire sur les réalisations de son ministère, sur les projets qu'il entend mettre de l'avant. Au tout début de ses remarques, il a mentionné que ce n'était pas par vantardise de sa part qu'il nous énumérait toute cette liste de réalisations. Loin de moi, M. le Président, d'attribuer de la vanité au ministre. J'ai plutôt réalisé que c'était un hommage qu'il voulait rendre aux compétents fonctionnaires qui oeuvrent avec lui pour la bonne administration du ministère.

J'en profite pour saluer d'anciens collaborateurs; non pas qu'ils soient âgés, mais il me fait plaisir de voir qu'ils sont toujours en place quoique des figures nouvelles, rajeunies soient arrivées au ministère. Je vais leur souhaiter de s'acquitter de leur tâche avec autant de compétence et d'efficacité que leurs prédécesseurs.

Le ministre, avec raison, nous a fait part de certaines réalisations. Je n'ai pas l'intention de soulever un débat autour ou à l'occasion de l'étude des crédits du ministère de la Justice. Cette année, il n'y a pas lieu de soulever de grand débat parce que l'administration de la Justice va son bonhomme de chemin sans que nous ayons à faire face à des perturbations sociales ou à des problèmes qui captivent l'opinion publique ou qui étreignent en quelque sorte la population ou les citoyens du Québec.

Le ministre, d'abord, dans les réalisations, nous a parlé de la mise en application de la Loi de l'aide juridique qu'il espère voir se réaliser à compter du 1er juin prochain. Je sais que tout est mis en oeuvre, au ministère, pour que cette loi puisse répondre aux besoins de la population, des économiquement faibles. Je voudrais cependant signaler au ministre que l'inquiétude s'empare quelque peu de la population par suite du manque de renseignements que les personnes en charge dans les différents bureaux d'aide juridique sont incapables, de fournir, ne sachant pas d'abord eux-mêmes si, effectivement, la loi pourra être mise en application à compter du 1er septembre.

M. CHOQUETTE: Du 1er juin.

M. PAUL: Du 1er juin, je m'excuse. Il reste toujours cette question secondaire pour la population mais très intéressante pour les professionnels du droit qui ont hâte de savoir si, enfin, le ministre de la Justice a reconnu un interlocuteur valable pour discuter du tarif. Est-ce dans la plus complète harmonie que se déroulent les négociations? Je comprends — c'est fort explicable — que le ministre ne puisse pas assister à ces négociations, mais peut-être que dans le cours de l'étude des crédits il nous fera part du rôle joué d'un côté par le Barreau et d'un autre côté par la fédération. Il semblerait que la fédération assiste aux délibérations sans avoir voix d'autorité ou d'opinion. Peut-être que je me trompe. Il

s'agit, pour le ministre, d'un problème extrêmement délicat. Je suis certain que de l'expérience qu'il a connue déjà comme médiateur à l'occasion de la grève de la Sûreté du Québec à Drummondville, il a tiré certaines données qui lui permettront d'être un ambassadeur de bonne entente entre les membres du Barreau et la fédération des avocats.

Farce à part, je souhaite sincèrement que ces négociations puissent être menées à bonne fin pour l'avantage de ceux qui devront bénéficier de l'aide juridique car il va de soi que c'est le contribuable qui, en dernier ressort, paiera la note, ainsi cette Loi de l'aide juridique, bien comprise, bien appliquée, surtout avec une rémunération... Les avocats n'espèrent pas une rémunération aussi généreuse que celle que rapporte la "castonguette", à l'acte juridique, mais je suis certain que ces négociations permettront aux professionnels du droit d'être adéquatement rémunérés pour leurs services professionnels.

Le ministre nous a parlé de l'enquête sur le crime organisé. Disons qu'il est de prudence, pour le moment, de ne pas faire de commentaires très élaborés sur ce qui s'y passe. Il y a, cependant, un principe de droit contre lequel, j'en suis sûr, tous réagissent; c'est la preuve de ouï dire qu'on accepte régulièrement devant cette commission d'enquête sur le crime organisé. Je me demande si les membres de cette commission d'enquête finiront par trouver certaines règles de pratique ou l'imposition du huis clos en certaines circonstances pour que le nom de certaines personnalités ne soit pas mentionné dans cette enquête nécessaire sur le crime organisé. Il va de soi que l'appétit des journalistes à la recherche de nouvelles sensationnelles pour promouvoir la vente du journal ou pour recevoir considération de la part de leurs employeurs les incite à faire diligence dans la publication des nouvelles parfois incomplètes au début, mais qui ne sont pas sans affecter la réputation, de laisser planer des doutes sur la conduite d'hommes respectables qui se voient entraînés dans le tourbillon de cette enquête sans qu'on ait pris le soin ou qu'on ait exigé l'observance des règles de la preuve.

Ces propos, M. le Président, ne doivent pas, cependant, être considérés comme un blâme à l'endroit du ministre de la Justice. Il faudrait peut-être que la commission, de proprio motu, adopte une politique ou un huis clos en certaines circonstances, qui serait bénéfique à tout le monde sans pour autant paralyser le travail qu'elle a à accomplir pour mener à bonne fin la tâche que lui a assignée le ministre de la Justice.

Le ministre de la Justice nous a parlé du service de police de la Communauté urbaine de Montréal. Ce ne fut pas sans douleurs que cet accouchement se fit et Dieu sait que, pour quelques-uns, les relevailles ont été assez difficiles. Je n'ai qu'à vous rappeler, M. le ministre, cette participation généreuse de notre collègue de l'Assemblée nationale, le député de Baldwin, qui, à un moment donné, n'était pas placé sur la même longueur d'onde que tous les avocats.

M. CHOQUETTE: Cela l'a rendu malade; on ne l'a pas vu depuis, l'avez-vous remarqué?

M.PAUL: Effectivement, M. le Président; j'espère qu'au moins il n'a pas été séquestré. De toute façon, je crois que c'est une amélioration qui s'imposait pour une efficacité administrative de la police de Montréal. Nous avons été très heureux à l'époque, toutes les Oppositions, de collaborer avec le ministre pour adopter une loi qui ne semble pas, cependant, retenir l'attention des autres communautés urbaines, comme celle de Québec ou comme celle de l'Outaouais. Peut-être qu'on veut vivre l'expérience que connaîtra le service de sécurité de la ville de Montréal, avant d'aller plus de l'avant avec une centralisation de toutes les forces policières dans le territoire des communautés urbaines de Québec et de l'Outaouais.

Le ministre nous a signalé l'implantation, au sein de son ministère, d'un service de la fraude ou des fraudes. Encore là, le ministre doit recevoir considération et appréciation de cette initiative peut-être pas nouvelle, parce que je pense bien que, de tout temps, au ministère de la Justice, on s'est occupé du problème des fraudes, de ou des faillites frauduleuses. C'est un domaine extrêmement difficile de pénétration.

Il a raison d'engager des professionnels, et même je dirai que ça prend des professionnels chevronnés pour déchiffrer cette comptabilité, frauduleuse d'abord, qui est à la base de toutes ces faillites frauduleuses. Tant et aussi longtemps que le ministre recourra à la compétence, quelle qu'elle soit, et qu'il ne sera pas paralysé par la rémunération que commandent, à bon droit, ces compétences, il y a lieu d'espérer que l'enquête qu'il mène nous apportera le résultat espéré pour mettre fin à cette activité frauduleuse de trop de citoyens ou de spécialistes en la matière.

Le ministre nous a glissé une économie qu'il aurait implantée ou instaurée à son ministère lorsqu'il nous parle du remplacement de membres de la Sûreté par un service de sécurité. Ce n'est qu'une économie apparente parce qu'à toutes fins pratiques la mise en place de ce personnel de sécurité, pour la protection des personnes, des ministres, des membres de l'Exécutif, pour la protection des biens dans certaines circonstances, n'entraîne pas pour autant le congédiement ou le renvoi ou le remplacement de membres de la Sûreté du Québec. Si l'on tient compte, cependant, que la rémunération pour la tâche à accomplir est moins dispendieuse que ce que peut coûter un employé de la Sûreté du Québec, je rejoindrai le ministre en disant que c'est une économie parce que l'agent de la Sûreté du Québec peut accomplir un travail beaucoup plus rentable ou qui cadre

mieux avec sa profession sans qu'il soit assigné derrière un bureau ou derrière une machine, un clavigraphe, comme le signalait tout à l'heure le ministre, alors qu'il y a tellement à faire dans le domaine de l'administration de la justice ou de la répression du crime.

Cette économie, disons que c'est une économie apparente parce qu'en réalité il s'agit de déboursés additionnels, au ministère de la Justice. Je n'en ai pas contre cette politique qu'a implantée le ministre et qui, avec l'expérience vécue dans le passé, s'avérait nécessaire, mais il ne faudrait pas, cependant, que le premier ministre, dans une prochaine édition de son volume "1,000 jours de pouvoir", ou d'administration, nous laisse croire que le ministère de la Justice est devenu un ministère très rentable pour le collègue ministre des Finances.

Pour ce qui a trait à un autre problème soulevé par le ministre de la Justice, Loi favorisant l'accès à la Justice, je ne pratique plus beaucoup, étant, en quelque sorte, un peu en divorce avec la profession par suite de la profession à temps plein que commande aujourd'hui le poste de membre de l'Assemblée nationale.

On peut se permettre, en dehors des sessions ou à l'occasion des ajournements, de flirter encore quelque peu avec la clientèle pour ne pas rouiller, rester en contact avec l'administration de la justice, mais des rapports, je suis sûr qu'il en a été fait également à d'autres membres de la commission ou à d'autres confrères. Cette administration de la Loi de l'aide juridique a donné de bon résultats et, dans l'ensemble, le citoyen part satisfait de cette expérience qu'il vient de vivre avec la justice. Pour quelques-uns, c'est la première expérience. Craintifs qu'ils étaient de faire face à tout le rouage et à l'administration de la justice, ils en repartent satisfaits devant la simplicité des procédures qui s'y déroulent et pour la complaisance avec laquelle les juges se penchent sur les problèmes juridiques qui leur sont soumis.

Il reste cependant que le ministre devrait tenir compte de certains éventails de droits qui sont perdus par suite de l'ignorance — je l'ai dit sans reproche — des greffiers ou des assistants-greffiers qui, ne possédant pas la formation juridique, sont incapables d'informer totalement et adéquatement celui qui veut se prévaloir de cette Loi des petites créances.

Ainsi, par exemple, en est-il de quelqu'un qui aurait une réclamation à présenter. Cela s'est produit récemment dans un greffe du district judiciaire de Trois-Rivières, quand un individu s'est présenté à une cour d'accès à la justice et a fait des représentations pour obtenir le remboursement d'une facture de réparation d'un réfrigérateur de certaines dépenses qu'il avait été obligé d'encourir pour mettre en bon état de fonctionnement l'appareil qu'il avait acheté. Finalement, l'individu n'ayant aucune satisfaction, s'est rendu voir un avocat. Ce dernier a constaté la véritable nature du problè- me, c'était l'action rédhibitoire qui aurait pu être prise, contrairement aux dispositions — je crois que c'est l'article 1529 et l'article 1530 — du code civil. Finalement, le droit d'action était prescrit, parce que cela n'était pas dans un délai raisonnable.

Il y a également cette procédure de saisie-gagerie avec droit de suite qui semble être du latin pour les fonctionnaires préposés au greffe qui reçoivent les clients ou les créanciers qui se voient aux prises avec certaines créances de la part de locataires fuyants.

Tout cela n'est pas pour critiquer l'administration de cette Loi des petites créances, mais peut-être que le ministre devrait envisager une possibilité de permettre ou de faciliter l'accès au tribunal des petites créances de l'avocat qui pourrait s'y présenter aux frais de son client. C'est une expérience que nous avons vécue jusqu'à maintenant. Est-ce qu'elle s'avère concluante? Est-ce que le ministre a l'intention de maintenir hors de cette Cour des petites créances la présence de l'avocat et en aucun temps, cependant, cela ne devrait être aux dépens ou aux frais de l'autre partie mais toujours aux frais de celui qui retient les services professionnels d'un avocat.

Le ministre a sûrement entendu parler de la crainte qu'éprouvent les avocats de voir ce palier de $300 monter, éventuellement, à $500 et aujourd'hui, avec l'inflation, on en a mentionné même pouvant aller jusqu'à $999.99.

J'espère qu'avant d'aller dans un tel champ d'action ou jusqu'à une telle compétence le ministre brimera ou analysera les recommandations qui peuvent lui être faites dans ce sens, souvent de la part de gens bien intentionnés, mais qui n'ont aucune expérience pratique de la profession.

Le ministre nous a également parlé de l'adoption qu'il souhaite de deux projets de loi, 78 et 79, la Loi concernant le louage de choses et la Loi du tribunal des loyers, pour que ces lois entrent en vigueur le 1er janvier 1974. La commission a déjà siégé. Nous avons entendu d'excellents mémoires et je crois que le ministre pourra donner suite à cette recommandation, à cette suggestion, à ce projet qu'il avait d'entendre des experts de la construction pour permettre aux membres de la commission d'être parfaitement et complètement renseignés sur ce problème de la construction, de sorte que nous ayons une loi qui puisse satisfaire le plus de gens possible.

Quant à nous, de la loyale Opposition, que ce soit l'avocat populaire du Ralliement crédi-tiste ou mon collègue, le député de Maisonneuve, nous sommes désireux, anxieux de voir cette loi rendue à terme le plus tôt possible. Je me demande si le ministre de la justice aura assez de cran, assez de volonté pour ne pas s'en laisser imposer par un de ses collègues centralisateur et accapareur des activités de l'Assemblée nationale, et j'ai parlé de son collègue, le ministre des Affaires sociales. J'espère que, si le ministre des

Affaires sociales veut une fois de plus paralyser les travaux de la Chambre avec le code des professions ou des lois connexes, mon honorable collègue, le député de Bourassa, viendra à notre secours pour que le ministre de la Justice puisse avoir préséance pour l'adoption des lois 78 et 79.

Je sais que tous les ministres sont victimes des exigences de ce grand ministre ricaneur par excellence qu'est le ministre des Affaires sociales.

M. TREMBLAY (Bourassa): Cela dépend des ministres.

M. PAUL: Quand je parle de ricaneur, je ne parle pas de vous. Vous, on vous voit sourire et même rire, mais il y en a d'autres qui sont placides constamment. Je souhaite que le ministre puisse entretenir de bonnes relations avec le leader du gouvernement. Il pourra compter sur notre collaboration pour que ces lois puissent être adoptées avant l'ajournement de l'été, j'espère avant la prorogation des Chambres, surtout avant la dissolution des Chambres.

M. CHOQUETTE: Est-ce que vous êtes au courant de la date?

M. PAUL: Absolument pas, même si le patroneux dans mon comté convoquait une réunion publique récemment, un déjeuner aux fèves au lard — en soi, il n'y a rien de mal — pour annoncer sous le sceau de la confidence, que les élections générales auraient lieu au mois d'avril 1974.

M. CHOQUETTE: II me semble que, si on se base sur l'expérience historique, ce n'est pas un bon choix, pour un gouvernement.

M.PAUL: Non. Le ministre connaît trop le privilège exclusif du premier ministre pour nous prêter des intentions d'indiscrétion en la matière. C'est une invitation à l'action, à ce qu'il bouge pour la présentation de ces deux lois très importantes et nécessaires. Le ministre nous a parlé du développement de l'enseignement de la formation policière, enseignement qui est dispensé dans sept CEGEP au Québec. Je voudrais savoir du ministre quels sont les critères d'admission au CEGEP en sciences policières. Est-ce que ce sont les mêmes critères que les critères de recrutement de la Sûreté du Québec ou de la Gendarmerie royale du Canada? Il se peut que certains jeunes se dirigent vers cet enseignement de la science policière, en cette spécialisation du CEGEP, et qu'à toutes fins pratiques, après avoir complété ces études, ils ne répondent pas aux critères d'admissibilité de la Sûreté du Québec.

Alors, sûrement que le ministre verra à nous fournir quelques renseignements à ce sujet tout à l'heure.

Le livre blanc qui doit être publié à l'autom- ne. Je félicite le ministre d'être prudent avec son livre blanc, parce qu'il y a un de ses collègues qui en a déjà publié, un livre blanc, le ministre des Affaires municipales, le député de Rimouski, qui, dans l'espace de quelques minutes, dans l'espace de quatre ou cinq minutes, avait mentionné 17 fois "mon livre blanc" qui est devenu son livre noir parce qu'il a quitté le ministère sans qu'il soit adopté ou étudié par l'Assemblée nationale. Alors, je suis sûr que le ministre, entouré d'experts, d'hommes compétents, sincères comme je les connais, nous présentera un excellent livre blanc attendu avec beaucoup d'impatience par tous ceux qui s'intéressent à l'administration de la justice.

J'ai été très intéressé par l'information que nous a transmise le ministre sur le futur rôle des cours municipales et la permanence de certains juges ou du moins de la compétence que l'on veut leur donner, compétence administrative ou juridictionnelle, pour en faire des juges régionaux de nos cours municipales. Cela cadre parfaitement avec une politique que nous avions commencé à ébaucher, et je fais appel aux souvenirs de ceux qui ont travaillé avec moi au ministère de la Justice pour se rappeler qu'effectivement, au mois d'octobre 1969, à Sainte-Marguerite-du-lac-Masson, alors que nous avions rencontré nos juges municipaux, il avait justement été question de cette réforme envisagée et qui était encore à l'état embryonnaire. J'invite le ministre à aller de l'avant avec ce projet qui ne sera que bénéfique pour tous les justiciables à ce niveau de nos cours, et j'espère que son travail, sa compréhension du problème seront très bien reçus par toute la population.

La Sûreté du Québec. M. le Président, si je n'avais pas occupé déjà le poste de ministre de la Justice, je serais peut-être dur à l'endroit de la Sûreté du Québec, non pas quant à son administration, non pas quant aux têtes dirigeantes, non pas quant à son directeur qui est extrêmement compétent, mais je me demande s'il n'y a pas un certain relâchement de la part de beaucoup de membres de la Sûreté du Québec qui semblent, trop souvent hélas! avoir oublié les règles de la courtoisie et de la politesse. Je n'en dis pas davantage et je suis certain que le directeur de la sûreté, M. Saint-Pierre, pourra rappeler à ces nouveaux promus à la Sûreté du Québec que les relations humaines restent toujours nécessaires et sont beaucoup plus efficaces pour la bonne administration de la justice, de la sécurité publique.

Je termine ici mes remarques sur cet aspect ou ce point particulier de la Sûreté du Québec.

M. CHOQUETTE: Est-ce que le député de Maskinongé permet une question à ce moment-ci?

M. PAUL: Certainement.

M. CHOQUETTE: D'illustrer par des exemples concrets, s'il en a à sa disposition.

M. PAUL: Je pourrai peut-être citer certains faits au ministre.

Remarquez bien que je ne veux en aucune façon attaquer le corps de la Sûreté du Québec, mais il existe certains relâchements dans des régions et je pourrai en donner des exemples au ministre. Quelqu'un me souffle des noms. Je n'irai pas personnellement jusqu'à citer des noms, mais j'ai des exemples. Je ne voudrais en aucune façon entacher l'excellente réputation des membres de la Sûreté du Québec comme groupe, mais il y a un relâchement qui semble se propager. C'est sur ce point que j'ai voulu soulever le problème. Pour ce qui est des exemples, je me permettrai de les signaler au ministre avec empressement, sans mentionner de noms parce que je ne voudrais en aucune façon avoir contribué de près ou de loin à une mutation ou à une "démotion", dans certains cas, de membres de la Sûreté du Québec.

Je voudrais, M. le Président, inviter le ministre à continuer ces négociations déjà entreprises, qui sont sûrement difficiles à moins que les hommes ne soient tellement changés, avec son collègue, le ministre des Affaires sociales, pour le transfert au ministère de la Justice, dans l'administration de cette future loi de la protection de la jeunesse, des jeunes délinquants ou des cas de protection de la jeunesse. Ce n'est pas facile. Il faut aller contre un courant d'idées, mais il faut, dans certaines circonstances, que le ministère de la Justice exerce un droit de regard sur le jeune, surtout pour le protéger de la société. Je suis sûr que ces négociations menées par des fonctionnaires sincères, sous la surveillance de ministres éclairés, tant le ministre des Affaires sociales que le ministre de la Justice, pourront aboutir à une solution de ce problème qui nous fut signalé, dans certains cas avec beaucoup de détails, par ceux qui se sont présentés devant la commission parlementaire.

Il semblerait qu'à la suite d'une décision du comité directeur l'étude de cette loi a été reportée à la période d'été, période qui conviendrait le mieux pour continuer le travail déjà amorcé, si l'on tient compte que nous devons compléter l'étude des crédits, adopter certaines lois nécessaires, comme les lois 78 et 79, et quelques autres avant l'ajournement d'été.

Je retiens avec beaucoup d'intérêt les propos tenus par le ministre de la Justice quant à une politique qu'il a l'intention de mettre en application à la suite de la publication d'un volume "La justice au-delà du cinquantième parallèle". C'est dommage que les media d'information n'y aient pas donné plus de publicité. Je comprends qu'il y a certaines pages dont la publication aurait été sans attrait et, surtout, sans aucune compréhension, spécialement la page où le ministre de la Justice adresse ses bons voeux en esquimau. Il reste que, s'il y a une étude très bien faite du problème que vivent ces gens du cinquantième parallèle, c'est bien celle qui a été préparée par Me Alexandre Mierzwinski, soute- nu dans son travail par des gens dont la compétence et l'efficacité sont déjà reconnues depuis plusieurs années. M. Jean-Claude Duchesneaux, entre autres, qui était secrétaire, je crois, de cette commission et qui est également secrétaire au ministère de la Justice.

Me John D'Arcy Asselin, procureur de la couronne à Québec. M. Guy Poitras, sous-ministre adjoint des Richesses naturelles. M. Jean Tellier, inspecteur-chef à la Sûreté du Québec, division de Montréal, et M. Marcel Vigneault, qui est devenu chef de police de la municipalité de la baie James. Ce sont des gens du milieu qui ont très bien analysé le problème et chapeau bas devant ce rapport extrêmement bien préparé et qui pousse le ministre de la Justice, à bon droit, à présenter des lois pour répondre aux besoins du milieu.

Je suis d'autant plus fier, M. le Président, de cette publication du ministre actuel de la Justice, que j'avais décidé cette enquête à la suite d'une recommandation qui m'avait été faite en ce sens par deux anciens sous-ministres dont l'un malheureusement est décédé, M. Dubé, et l'autre, M. Gérald Boisvert. Spécialement le juge Boisvert, avec toute la compétence qui le marquait, avait vite réalisé qu'il y avait un problème de l'administration de la justice. C'est alors que cette enquête avait été commandée, dont le rapport nous a été communiqué, et j'en profite pour féliciter son président, Me Mierzwinski, et tous ceux qui y ont travaillé. J'espère que les media d'information donneront toute la publicité qui s'impose dans les circonstances, lorsque le ministre décidera d'appliquer certaines mesures de ce rapport qu'il nous présentait, je crois, au mois de mars dernier.

Le ministre nous a parlé de l'aspect financier du ministère de la Justice. Je n'ai pas l'intention d'entrer dans toutes ces grandes données que nous a signalées le ministre, parce que, personnellement, j'ai toujours été mauvais comptable et j'ai toujours eu de la difficulté avec les chiffres. Je pense que le ministre n'est pas meilleur que moi. Mais heureusement, il y a des fonctionnaires compétents pour l'éclairer, l'aider et nous renseigner. Demander au ministre, par exemple, de nous décrire dans ses moindres détails le PPBS, ce serait faire injure à sa science que de lui poser une telle question et la réponse serait tellement longue qu'il retarderait lui-même, l'adoption de ses crédits. C'est pourquoi je n'ai pas l'intention de le questionner sur tout ce programme qu'il connaît très bien puisque, déjà, il nous a signalé que c'est à son ministère que la première expérience a été vécue.

Pour ce qui est des crédits, une augmentation de $9,892,000 est une augmentation qui correspond aux besoins et surtout aux conséquences de la dernière convention de travail qui a été signée par le gouvernement. Ce qu'il y a d'intéressant à noter, c'est cette disponibilité de personnel à engager dans environ 1,225 postes. On pourra combler 1,225 postes, puisqu'au 28 février dernier il y avait 504 postes nouveaux

qui n'avaient pas encore été comblés, alors que les crédits nécessaires avaient été votés à cette fin.

Pour ce qui est des revenus du ministère, le ministre des Finances s'inquiète toujours des revenus que lui apportera le ministère de la Justice parce que, comme il le signalait si bien, c'est un ministère non pas à vocation économique, mais qui, sur certains points, intéresse grandement le ministre des Finances.

Nous aurons l'occasion, au fur et à mesure que se déroulera l'étude des crédits, d'obtenir les informations du ministre qui, par la bouche ou sur les renseignements que lui communiqueront ses fonctionnaires, pourra répondre à notre curiosité bien justifiée et nécessaire dans les circonstances.

M. le Président, en résumé, c'étaient les quelques remarques que j'avais à faire.

Malheureusement, le temps m'a manqué en fin de semaine pour me pencher sur tous les rapports du ministère de la Justice, captif que j'ai été dans l'étude d'un projet de loi extrêmement important qui a retenu l'attention de la Chambre hier, la loi 9. Mais, nous avons tellement de collaboration de la part des fonctionnaires, lorsque nous étudions les crédits du ministère de la Justice, que nous nous présentons ce matin, confiants d'accomplir notre besogne, non pas dans un but de critique destructive, mais au contraire, d'à-propos et de remarques qui, dans certains cas, souhaitons-le, ne pourront qu'augmenter la confiance que doit avoir le public dans le fonctionnement de la justice et dans la justice au Québec.

M. le Président, c'est dans cet esprit de bonne collaboration que nous entreprenons, mon collègue, le député de Dubuc, et moi-même, l'étude des crédits du ministère de la Justice.

LE PRESIDENT (M. Blank): Le député de Portneuf.

M. DROLET: Je suis toujours un peu mal à l'aise lorsque je dois prendre la parole à la commission de la justice, surtout à la suite d'exposés de la part du ministre ou encore de la part du député de Maskinongé qui, lui, a été ministre, et de la part du député de Maisonneuve, qui est reconnu comme un brillant avocat, et devant toute cette équipe qui entoure le ministre, cette équipe compétente et les autres membres de la commission, qui sont, même vous, M. le Président, tous des avocats. Heureusement, ce matin, j'ai avec moi le député de Trois-Rivières et le député de Dubuc qui ne sont pas des avocats et qui, peut-être, pourront faire entendre la voix du peuple...

M. BACON: Le député de Bourassa. Finalement, il y en a pas mal.

M. TREMBLAY (Bourassa): II n'y a pas que les avocats qui sont intelligents.

M. PAUL : Je crois que les avocats sont capables de faire la distinction.

M. DROLET: J'avais oublié le ministre. Je remercie le ministre de son exposé général sur la situation de la justice au Québec et du tour d'horizon qu'il a fait des principales activités que son ministère entend faire sur le budget que nous avons à étudier présentement, le budget de l'exercice financier 73/74.

Toutefois, depuis trois ans que je siège à cette commission, je commence à prendre un peu d'expérience, et avec l'équipe qui travaille avec nous, notre équipe de recherchistes, la venue de notre nouveau chef, nous avons eu l'occasion de nous pencher sur les problèmes qui existent au ministère de la Justice et je vais essayer d'apporter toute la collaboration qu'un parti politique doit apporter à l'étude de ces crédits.

Ce n'est certainement pas une chose facile que d'être ministre de la Justice dans les années que nous traversons. C'est peut-être pour cela que des journaux rapportent assez souvent que le ministre de la Justice est un homme qui suit la ligne dure. En ce qui nous concerne, nous l'avons déjà dit et nous continuons à le dire: Ce n'est pas être dur que de faire appliquer les lois et de les faire respecter.

Le ministre de la Justice nous a parlé, au tout début, de différents amendements qui ont été apportés lors de la dernière session, amendements qui lui ont permis de former cette commission d'enquête sur le crime organisé. Nous avons eu l'occasion déjà d'en parler brièvement. Nous avions, à ce moment, appuyé le ministre lorsqu'il avait annoncé cette commission d'enquête pour mettre "knockout", si vous voulez, le crime organisé dans la province, mais nous nous posons certaines questions sur la façon de procéder de cette commission.

Je n'ai pas la compétence pour tracer des lignes de conduite au ministre ou à toute son équipe qui l'entoure mais, quand même, nous trouvons assez curieux de voir régulièrement dans les journaux des pages complètes nous disant que M. Untel est passé devant cette commission et assez souvent ne va là que pour y faire des déclarations spectaculaires, sensationnelles et même salir certaines réputations comme le disait si bien, dans un article paru dans le journal La Presse du mercredi 18 avril, mon collègue le député de Sainte-Anne, M. Springate. Nous demandons au ministre de la Justice d'apporter une attention tout à fait spéciale à cette commission d'enquête et peut-être aussi d'y apporter certains changements s'il le juge à propos, surtout à la suite de l'expérience de quelques semaines que dure cette enquête à Montréal. M. le Président, notre parti a eu l'occasion de faire un exposé général sur l'administration de la justice dans la province dernièrement que certains journaux ont rapporté brièvement, et j'aimerais livrer à la commission certains passages de ce que nous voudrions voir améliorer dans la justice au Québec.

Nous avons déploré surtout la lenteur qui existe à l'échelle de la justice. Le ministre nous a parlé l'année dernière de l'augmentation du salaire des juges et nous avions rétorqué, non pas que nous ne voulions pas voir les juges obtenir une augmentation, mais que nous étions en faveur d'abord de voir le nombre de juges augmenter afin de voir accélérer la marche de plusieurs causes qui traînent présentement dans la province. Si on regarde seulement les événements d'octobre 1970 toute cette lenteur administrative dans le domaine de la justice, on est en train de se demander si le ministre, M. Laporte, n'est pas mort subitement, s'il n'y aurait plus de coupable...

L'administration de la justice en général au Québec, constitue le secteur de l'administration publique et gouvernementale qui, plus que toute autre, doit nous donner l'exemple à la fois de la plus grande intégrité et de la plus grande efficacité possible. M. le Président, la piètre image projetée actuellement dans la population par l'administration de la justice doit être refaite le plus tôt possible. C'est pourquoi nous avons demandé au cours de l'année qui s'est écoulée, au ministère de la Justice, de prendre certaines mesures afin que cette image de la justice soit refaite au Québec. Nous croyons que le mode de nomination des juges doit être repensé et nous nous étions alors basés sur les recommandations faites par la commission Prévost sur l'administration de la justice en matière criminelle, qui disait que le mode de nomination devrait se faire par le tamisage des candidats par des groupes représentatifs et indépendants et la sélection finale par l'Exécutif.

M. le Président, nous croyons que le ministre a amélioré un peu ce mode de nomination de juges. La façon d'agir, par le passé, nous démontrait qu'on nommait assez souvent les juges seulement pour les remercier de services rendus à un parti politique. Aujourd'hui, de plus en plus, on semble changer cette image et nous croyons qu'il est dans les meilleurs intérêts de la justice de changer définitivement ce mode de nomination.

Il existe aussi d'autres facteurs qui contribuent à éloigner l'appareil judiciaire du citoyen ordinaire. Il serait cependant illusoire de vouloir en faire un inventaire complet. Nous avons cru bon de relever, parmi ceux-ci, celui qui, à notre avis, répugne le plus aux justiciables. Je peux ici vous parler en tant que citoyen d'un comté rural qui a à rencontrer assez souvent des électeurs qui viennent à nos bureaux.

Il s'agit de la grande complexité des différentes procédures et des phases par lesquelles doit passer celui qui veut voir reconnaître un de ses droits ou clarifier une situation qui l'affecte. Les lois qu'a à affronter toute notre population, les petites gens du peuple trouvent que ces lois sont extrêmement difficiles à comprendre et c'est extrêmement compliqué pour ces gens de faire valoir leurs droits. Nous croyons donc qu'il est urgent d'essayer de les résoudre.

Face à cela, nous croyons qu'il y aurait peut-être deux façons d'améliorer cette chose. La première mesure est assez peu originale mais quand même nécessaire. Elle consiste à tenter tous les efforts possibles pour simplifier la procédure et clarifier les textes à venir. Je me rappelle, lorsque je commençais à m'occuper de politique, qu'un député libéral fédéral qui portait le même nom que le ministre actuel de la Justice avait déclaré au Parlement fédéral — et cela, je l'avais lu dans le journal des Débats— que le gouvernement faisait souvent exprès pour faire des lois compliquées afin de permettre aux avocats de vivre. Ce député avait déclaré publiquement cela et il représentait un comté rural. Je me demande si ce n'est pas cela qui l'a fait battre aux élections suivantes.

M. PAUL : Vous allez admettre que ce n'était pas une déclaration auguste.

M. DROLET: Ceci ne donnerait peut-être que de faibles résultats si on en restait là car, en effet, cela ne Vaudrait que pour les lois futures. Mais en ce qui concerne les lois et les procédures actuellement en vigueur, il serait utopique de vouloir changer du tout au tout et nous croyons que le gouvernement devrait s'employer à promouvoir la diffusion des textes des lois et procédures les plus usuelles en fournissant à la population toute l'information nécessaire à ce sujet. Il pourrait fournir cette documentation, cette diffusion des lois et des textes des procédures par le biais peut-être des corporations régionales d'aide juridique nouvellement créées par la loi no 10.

Nous soulevons à nouveau le principe du droit à la représentation par un avocat dans toute cause où une personne peut être impliquée. Il ne faut pas oublier que l'accessibilité de la justice ne s'acquiert pas en éliminant de façon systématique ceux qui ont la préparation juridique pour faire valoir les arguments de la personne impliquée. Je prends un exemple, si on ouvre toutes grandes les portes des hôpitaux et que, par contre, on suspende les médecins, où iront les soins aux malades?

De la même façon, où sera la justice si nous prétendons d'année en année que toute personne est capable d'assumer adéquatement sa propre défense?

Toujours dans le domaine de l'administration de la justice en général, nous recommandons — et nous l'avons demandé l'année dernière — la création d'un Institut provincial de réhabilitation compétent en vue de mieux intégrer psychologiquement et socialement au marché du travail les individus libérés des institutions pénales québécoises.

Quant à la Sûreté du Québec...

M. CHOQUETTE: Vous faites allusion à des gens qu'on connaît.

M. DROLET: ... nous recommandons que des cours spéciaux d'entraînement physique, de

maniement d'armes à feu et de comportement parmi une foule soient obligatoires.

J'ai entendu tout à l'heure mon collègue de Maskinongé faire une allusion à certains membres de la Sûreté provinciale qui auraient peut-être certaines leçons à recevoir pour les replacer dans le bon chemin. Mais en ce qui me concerne, dans la région où je suis ou encore dans le comté que je représente, j'ai eu l'occasion, durant l'année dernière, de vérifier certains faits en particulier concernant le comportement des membres de la Sûreté du Québec.

J'avais demandé au ministre l'été dernier de voir à ce que l'ordre soit maintenu dans les régions de Saint-Alban et de Saint-Raymond lors des différents troubles où des manifestants étaient venus envahir des clubs privés. Je m'étais rendu sur place pour voir se dérouler ces manifestations qui étaient rapportées en grosses manchettes dans des journaux à l'effet que la Sûreté provinciale avait envahi la ville de Saint-Raymond et le village de Saint-Alban avec des camions, des bâtons, des matraques et tout ce que vous voulez. J'ai vérifié personnellement, et je peux vous dire que les membres de la Sûreté s'étaient comportés comme des gens civilisés. Les policiers de la Sûreté du Québec n'avaient brusqué personne, ils avaient tout simplement fait respecter la loi et avaient protégé les citoyens dans la ville même de Saint-Raymond où, le samedi précédent il y avait eu des manifestations et des automobiles avaient été tournées à l'envers et tout ce que vous voulez. Alors, je peux rendre cet hommage aux membres de la Sûreté provinciale, qui se sont comportés comme des gens civilisés, car il n'y avait pas eu du tout de coups de bâton et toutes ces choses-là. D'ailleurs, M. le Président, j'ai eu l'occasion, cet hiver, au cours d'un voyage en France, de voir comment se comportaient les membres de la police française et je peux vous dire que les policiers de la Sûreté du Québec se comportent très bien lorsqu'il y a de ces manifestations ici dans la province.

M. le Président, étant justement à l'étude du programme concernant la Sûreté du Québec, j'aimerais revenir à ce dont le ministre nous a parlé tout à l'heure, à savoir que, dans certains bureaux, il y avait des policiers qui devaient remplir le rôle de secrétaire soit sur les machines à écrire ou pour répondre au téléphone. Donc, il manque de personnel. Je pense qu'il a raison. Je prends seulement l'exemple de mon comté où nous avons 36 municipalités et seulement deux postes de police de la Sûreté du Québec. Il manque véritablement de personnel. Je l'avais souligné l'année dernière au ministre, les membres de la Sûreté ne peuvent absolument pas couvrir toute cette grande étendue de terrain, et en même temps faire du travail, en plus, au bureau même de la Sûreté à Portneuf ou à Saint-Raymond. Le ministre devrait voir à ce que le personnel soit augmenté, que ce soit le personnel de bureau ou le personnel policier lui-même, sur la route.

M. le Président, dans l'ensemble, nous croyons que le ministre de la Justice, même si ce n'est pas toujours facile, a quand même su diriger son ministère durant l'année qui vient de se terminer de façon satisfaisante pour tous les citoyens de la province de Québec. Nous avons toujours dit et nous le disons encore que nous serons derrière le ministre lorsqu'il voudra bien démontrer qu'il est là dans les meilleurs intérêts de la province. On rapporte assez souvent que le ministre actuel est un homme qui suit la ligne dure, mais, en ce qui nous concerne, je l'ai dit au début, il n'est pas question d'être dur quand on fait appliquer la loi et nous avons appuyé le ministre. D'ailleurs, j'ai moi-même fait un communiqué qui a paru dans le journal, hier, sur la position qu'ont prise le ministre et le gouvernement dans l'affaire des trois chefs syndicaux. Si on permet à une ou deux ou trois personnes de sortir pour le simple plaisir de sortir, qu'on le fasse pour tous les autres citoyens, car la justice doit être égale pour tout le monde. Nous croyons que le gouvernement a bien agi dans les circonstances et nous continuerons à appuyer cette façon de procéder du ministère tout en demandant au ministre d'être le plus diplomate possible parce que c'est sûr que, dans les années que nous traversons, avec les contestations qu'il y a, ce n'est certainement pas facile.

Dans sa réplique, j'aimerais aussi que le ministre nous dise où il en est rendu dans le projet de loi qu'il est censé déposer devant la Chambre concernant l'intégration de la Protection civile à la Fonction publique. Le ministre m'avait répondu en Chambre qu'un projet de loi était prêt. Nous n'en avons jamais entendu parler et ça depuis 1971, je crois.

Il m'avait dit en 1972 que le projet de loi était prêt de nouveau et qu'il le déposerait sous peu. Nous attendons toujours de savoir du ministre où il en est rendu dans ce projet de loi concernant la protection civile.

Alors, M. le Président, je pense que dans l'ensemble, il y aura peut-être également les bureaux d'enregistrement, mais on va y revenir lorsque nous étudierons les crédits programme par programme. Mais, encore là, l'année passée le ministre avait admis qu'il y avait beaucoup de bureaux d'enregistrement où il manquait de personnel et c'est le cas chez nous. Depuis 1970 on promet d'année en année, que de nouveaux employés, de nouvelles secrétaires seront là et on attend toujours, ce qui provoque énormément de retard au travail qui se fait présentement dans les bureaux d'enregistrement.

Alors, M. le Président, je pense que dans l'ensemble, c'était le tour d'horizon rapide que je tenais à faire. Au fur et à mesure que nous étudierons les programmes du ministère de la Justice, je sais que le ministre et toute son équipe sauront répondre adéquatement à toutes les questions que nous aurons à poser.

LE PRESIDENT (M. Blank): Le député de Maisonneuve.

M. BURNS: M. le Président, dans les questions d'ordre général, je n'ai qu'un seul point à formuler. J'admets au départ qu'il y aurait peut-être un autre endroit où le soulever, c'est-à-dire au programme 16, puisque cela concerne la Loi de la probation. Je le formule â ce moment-ci en me disant que le président et les membres de la commission vont être plus compréhensifs à mon égard si je le formule ici à cause de l'actualité de la question, à cause de l'annonce qui a été faite relativement à la libération temporaire ou l'absence temporaire des trois présidents de centrales. Je ne pense pas qu'il y ait quelqu'un qui ait d'objection à ce qu'on le formule à ce moment-ci.

M. CHOQUETTE: Je ne m'y oppose pas.

M. BURNS: D'ailleurs, je n'ai pas l'intention de discuter du problème. Je pense qu'on a eu l'occasion, M. le ministre et moi, de dire ce qu'on en pensait â un moment donné, antérieurement. Ce que j'aimerais savoir et ce qu'il serait intéressant de savoir pour l'ensemble de la population, c'est, d'une part, le nombre actuellement de gens, de détenus, qui bénéficient d'absence temporaire de ce genre-là?

M. CHOQUETTE: Si le député me permet de lui donner une réponse, je crois que je ne peux pas répondre absolument précisément aujourd'hui, mais je peux lui dire que les permissions d'absence temporaire ou les permissions de s'absenter des prisons à certaines conditions ont été données dans 1,388 cas l'année dernière.

M. BURNS: L'année 1972.

M. CHOQUETTE: L'année 1972. Alors, ceci lui donne une idée de l'ordre de grandeur des permissions qui sont accordées. Maintenant, je peux lui dire aussi que la population moyenne, dans nos prisons provinciales, excluant les pénitenciers fédéraux, pour lesquels le député comprendra que je ne veux assumer aucune responsabilité...

M. BURNS: Oui, je sais, surtout de ce temps-là.

M. PAUL: Est-ce que par hasard c'est un sujet trop élastique?

M. CHOQUETTE: La population moyenne, dans nos prisons provinciales, est de 650 personnes.

M. BURNS: Vous ne les envoyez pas au Salon de la femme, vous.

M. CHOQUETTE: Pour ce qui est du cas du prisonnier qui était allé voir le Salon de la femme, cela m'a frappé, moi aussi, quand j'ai vu cela dans les journaux. C'était un détenu de l'Institut Pinel, et l'Institut Pinel ne dépend pas directement de mon ministère, mais il est sous l'autorité du ministère des Affaires sociales.

M. PAUL: Mais, ce n'est pas mieux que d'arroser les patinoires.

M. CHOQUETTE: J'ai vu que l'ancien ministre de la Justice avait fait des déclarations à la Chambre à Ottawa sur les évasions, je parle évidemment de M. Claude Wagner, on connaît sa compétence, n'est-ce pas, en la matière.

M. PAUL: Ce qui est drôle, c'est que celui qui a ramassé Rivard, quand il s'était échappé de la prison, c'était justement le chauffeur du ministre de la Justice de l'époque.

M. CHOQUETTE: Oui?

M. BURNS: Maintenant, est-ce que, pour revenir à nos moutons, le ministre est en mesure de nous dire —je ne sais pas s'il l'a annoncé encore — quelles sont les conditions qui seront imposées?

M. CHOQUETTE: Oui. J'ai publié hier un communiqué où les conditions étaient mentionnées.

M. BURNS: C'est ce que je me demandais, parce que je n'ai pas eu le temps de lire les journaux ce matin encore.

M. CHOQUETTE: Est-ce que le député veut que je lui en donne le détail immédiatement? Je peux le faire.

M. BURNS: Oui.

M. CHOQUETTE: Alors, à compter du 16 mai, c'est-à-dire ce matin même, MM. Pepin, Laberge et Charbonneau bénéficieront de l'absence temporaire du dimanche, à 18 heures jusqu'au samedi suivant à 12 heures.

Ils pourront jouir d'une absence et de toute latitude durant cette période quant à leurs allées et venues, l'organisation de leur travail, leurs rencontres et tout cela. Ils auront la permission de faire toutes déclarations qu'ils jugent opportunes sauf trois sujets qui ont été mentionnés: Commenter publiquement les conditions d'absence temporaire qui leur sont appliquées, critiquer le jugement qui les a condamnés, faire des déclarations incitant des individus ou des groupes à l'illégalité. Ils auront la permission de voyager dans les limites du Québec. Tout déplacement à l'extérieur du Québec devra au préalable recevoir l'approbation du directeur général d'approbation et de la détention, selon la procédure établie dans le règlement no 2. Il se peut que les chefs syndicaux soient dans l'obligation, de par leur fonction de président, de participer à des activités au cours d'une fin de semaine. Dans un

tel cas, ils soumettront leur cas suivant la procédure établie et, s'ils bénéficient de la permission de ne pas entrer en prison en fin de semaine parce qu'ils ont une justification, réunions ou autres motifs, ils accepteront de faire un temps équivalent durant la semaine. Le fait de contrevenir à toute loi du Québec, du code criminel ou aux conditions s'appliquant à leur absence temporaire entrafnera la perte du privilège.

Alors, ce sont, en gros, les conditions qui s'appliquent à leur absence temporaire.

Maintenant, je tiens à dire qu'ils avaient accompli un tiers de leur sentence et qu'en vertu du règlement no 2, dans l'application de ce règlement, à mon sens, ils devenaient éligibles comme n'importe quel autre prisonnier à une permission d'absence temporaire. Là, il fallait apprécier dans quelles conditions leur donner une absence temporaire, parce qu'il y a des prisonniers qui peuvent avoir une absence temporaire qui est assortie de conditions plus draconiennes ou plus strictes que celles qui s'appliquent aux chefs syndicaux. Par exemple, pour un prisonnier qui Offrirait un certain danger, on pourrait lui permettre d'aller travailler, mais on exigerait de lui qu'il revienne coucher à la prison tous les soirs, ou on pourrait lui permettre d'aller faire des études, mais on exigerait qu'il revienne à la prison tous les soirs.

Evidemment, je n'ai jamais considéré MM. Pepin, Laberge et Charbonneau comme des criminels qui offrent un danger au point de vue de la sécurité immédiate des citoyens.

Alors, il fallait apprécier leurs conditions, leur personnalité...

M. BURNS: II est important aussi de se souvenir qu'ils n'ont pas été condamnés en vertu du code criminel, c'est plutôt en vertu du code de procédure...

M. CHOQUETTE: C'est exact. C'est la raison pour laquelle je considère que nous avons été, enfin, larges sur la latitude qui leur est donnée durant toute la semaine. Evidemment, aujourd'hui, j'ai vu des critiques provenant des milieux syndicaux et portant sur le fait que nous aurions été mesquins ou vexatoires en exigeant une présence en prison trente heures par semaine, mais il faut quand même faire respecter le jugement de la cour et la justice, et ses institutions et ses jugements doivent recevoir une certaine application.

C'est la raison pour laquelle cette exigence a été posée. Ce n'est pas pour vexer ou pour être mesquins à leur égard, c'est parce que, jusqu'à un changement, la politique du ministère de la Justice est de maintenir l'autorité des tribunaux et l'autorité de leurs jugements sans verser dans — comment pourrais-je dire — une attitude hargneuse à l'égard de ceux qui tombent sous notre juridiction, dans nos établissements de détention, parce qu'ils ont été condamnés.

Cela a été le fondement de la décision.

M. BURNS: Maintenant, des 1,100 cas environ que vous avez mentionnés...

M. CHOQUETTE: Oui.

M. BURNS: ...qui, au cours de l'année...

M. CHOQUETTE: 1,300.

M. BURNS: Des 1,300 cas qui ont bénéficié de telle absence, est-ce que le ministre est en mesure de nous dire combien se sont vu imposer, une fois l'absence accordée, de faire une partie de leur temps en prison après le tiers de leur sentence?

M. CHOQUETTE: Toujours, toujours, parce que...

M. BURNS: Dans tous les cas?

M. CHOQUETTE: Oui, parce que, si nous permettons l'absence temporaire, nous exigeons par contre la présence en prison pour un certain temps qui peut être la fin de semaine ou le coucher en prison, comme je l'ai dit.

M. BURNS: La raison...

M. CHOQUETTE: Toujours. On n'a jamais dit : II y a absence temporaire, à partir d'aujourd'hui vous n'êtes plus obligé de revenir à la prison.

M. BURNS: Bon. La raison pour laquelle je pose cette question, c'est qu'un avocat, il y a quelque temps...

M. CHOQUETTE: Me Clément Richard.

M. BURNS: ...Me Clément Richard, oui, a déclaré qu'il arrivait, à sa connaissance — c'est comme ça que j'ai compris sa déclaration — que certaines gens, je pense qu'il citait surtout des cas d'infractions au code de la route ou d'infractions aux lois criminelles en matière de conduite d'automobile, avaient à se présenter une fois à la prison et qu'ils n'y retournaient pas pour le reste de la durée de leur sentence. Cela voudrait dire que c'était inexact, ce que Me Richard a dit?

M. CHOQUETTE: J'ai lu l'article que Me Richard a publié dans le journal Le Devoir, il y a déjà un mois environ et j'ai pris connaissance de certaines déclarations qu'il a faites récemment. Je crois qu'en gros il a tort; je crois qu'il est dans l'erreur. Evidemment, il peut y avoir des cas où nous sommes plus larges encore que nous l'avons été dans le cas de MM. Pepin, Laberge et Charbonneau. Je vais donner un exemple: Si quelqu'un est malade, si quelqu'un souffre d'une maladie qui fait que sa détention en prison devient — comment pourrais-je dire — préjudiciable à sa santé, nous avons des disposi-

tions dans nos règlements qui vont même nous permettre de dire à cette personne condamnée : Vous allez rester à la maison. Je donne un exemple: l'ancien maire de Saint-Michel avait été condamné pour des affaires de corruption municipale. Il est d'ailleurs mort depuis. Pendant la durée de son procès, il est devenu mentalement malade; il n'était peut-être pas fou, mais il était devenu psychologiquement déséquilibré. H a été condamné à un an de prison. Nous n'avons pas exigé qu'il fasse un an de prison; nous avons exigé qu'il fasse, enfin...

M. BURNS: Le tiers de sa sentence?

M. CHOQUETTE: Même pas le tiers de sa sentence. Je crois qu'il a été tout simplement renvoyé chez lui parce qu'il s'agissait pour nous d'un cas où des raisons humanitaires l'emportaient sur le règlement. D'ailleurs, le règlement prévoit de telles circonstances.

Dans le cas de sentences de très courte durée, comme c'est souvent le cas, par exemple dans le domaine des infractions au code de la route, comme huit jours, des dispositions particulières sont prises. Si le député me le permet, je vais passer la parole à M. Gauthier pour qu'il puisse dire qu'il y a des cas où l'application d'une très courte sentence se fait dans des conditions différentes.

M. BURNS: La raison pour laquelle — je suis d'accord, d'ailleurs, pour que M. Gauthier nous donne des détails là-dessus — je soulève le problème, c'est que ça va sûrement faire l'objet de commentaires nombreux dans les jours à venir, j'imagine, dans les journaux, etc. C'est pourquoi je veux qu'on place le problème sur une vraie base au départ.

M. CHOQUETTE: Le député a raison. Je puis l'assurer que nous avons appliqué, dans le cas de MM. Pepin, Laberge et Charbonneau, le règlement et nous l'avons appliqué en tenant compte de leur condition particulière. Nous avons respecté l'esprit du règlement et l'esprit du jugement qui avait été rendu mais sans imposer des conditions trop draconiennes, en leur donnant les avantages qui découlaient du règlement.

M. BURNS: Dernière question au ministre avant que M. Gauthier nous donne les détails. Est-ce qu'il est possible qu'au cours du reste de leur sentence les conditions qu'on impose actuellement à MM. Pepin, Laberge et Charbonneau puissent changer?

M. CHOQUETTE: Je ne veux pas m'engager pour l'avenir mais ça n'est pas impossible que les conditions soient libéralisées dans une certaine mesure si leur comportement est tel qu'il nous permet de le faire. Je ne sais pas si le député me comprend. S'ils observent les conditions qui leur ont été posées, s'ils sont de bonne foi avec nous et s'ils ne cherchent pas, par toutes sortes de moyens, en somme, à violer d'une façon ou de l'autre les conditions qui leur ont été posées, à ce moment-là on peut envisager la possibilité que, toujours à l'intérieur du règlement, les conditions soient améliorées.

LE PRESIDENT (M. Blank): Le député de Maskinongé a une question.

M. PAUL: Est-ce que le ministre pourrait nous dire si, à chaque fin de semaine, MM. Pepin, Charbonneau et Laberge doivent retourner à la prison d'Orsainville ou s'ils peuvent faire un séjour ailleurs qu'à Orsainville?

M. CHOQUETTE : Ils auront le choix. M. PAUL: Ils auront le choix?

M. CHOQUETTE: Oui. Si, pour certains d'entre eux, leur base, leur famille ou leurs affaires sont plutôt dans la région de Montréal et s'ils préfèrent aller à une prison dans la région de Montréal, nous sommes disposés à faire le nécessaire à ce sujet-là. Ils ne sont pas obligés de faire le voyage jusqu'à Québec.

M. DROLET: Cela sort mieux.

LE PRESIDENT (M. Blank): Dr Gauthier.

M. CHOQUETTE: Merci, M. le Président. Pour répondre à la question de Me Burns, chaque cas, comme les règlements l'indiquent, est étudié au mérite. Il arrive très souvent, surtout pour les petites sentences, que nous recevons un appel téléphonique avant même que la personne rentre. Là, comme c'est arrivé il y a trois semaines, par exemple, dans le cas d'un délit qui remontait à 1971 — le mandat était exécuté pour une sentence de deux semaines — on nous a dit ceci: La personne, dans le moment présent, est très malade, est à l'article de la mort. On veut exécuter le mandat. C'est évident qu'à ce moment-là nous, tout ce qu'on a demandé, on s'est même rendu à la maison pour pouvoir prendre toute la documentation nécessaire et on a appliqué l'article 20.

Pour illustrer les règlements, voici un cas extrême où nous avons adapté nos règlements. Tout détenu ordinnaire doit commencer à rentrer à la prison; là, vous avez une étude qui est faite par les autorités et nous ne prenons aucune décision au ministère tant que nous n'avons pas un rapport écrit sur la personne. C'est strictement après avoir reçu tous les détails, une histoire sociale; ordinairement, ce que nous faisons, nous communiquons, dans la plupart des cas, avec le juge, le procureur de la couronne, souvent avec le curé ou le maire, dans les petites villes, et c'est à partir de toutes ces données que nous prenons nos recommandations.

Il peut certainement arriver des exceptions,

comme il en est arrivé aussi dans le cas des trois chefs syndicaux, où, même dans le tiers du temps, nous avons donné, à certains moments, des permissions qui, généralement, ne se donnent pas mais nous avons tenu compte de l'aspect essentiel de la permission. Nous les avons données et c'est ce qui se passe dans n'importe quel autre cas. En d'autres termes, chaque demande doit être étudiée au mérite. C'est pour cette raison que nous avons exigé que chaque personne fasse elle-même la demande de façon qu'on sache exactement ce que la personne désire, ce qu'elle veut, quel genre de permission. C'est à partir de cela que nous faisons nos recommandations.

Je crois qu'ici la meilleure façon serait plutôt de répondre à des questions. Il est difficile, vous savez, de généraliser. C'est facile de dire que, dans un cas particulier, il s'est passé telles choses mais il faudrait justement, à ce moment- là, qu'on étudie le cas particulier et tous les aspects du cas. Souvent, comme je vous le dis, on ne dit pas qu'on ne commet pas d'erreur, c'est évident, tout le monde est humain mais d'une façon générale, jusqu'ici, à chaque fois que nous avons donné des permissions on n'a pas eu — je parle de notre population — de critiques de favoritisme, par exemple. Les gens en auraient entendu parler. Je peux vous dire qu'on essaie de l'appliquer de la façon la plus juste possible.

M. BURNS: Merci.

LE PRESIDENT (M. Blank): Messieurs, nous ajournons la séance sine die. Peut-être que nous allons continuer mardi matin prochain. C'est possible, mais cela sera annoncé en Chambre. Nous ajournons nos travaux sine die.

(Fin de la séance à 12 h 6)

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