L'utilisation du calendrier requiert que Javascript soit activé dans votre navigateur.
Pour plus de renseignements

Accueil > Travaux parlementaires > Travaux des commissions > Journal des débats de la Commission permanente de la justice

Recherche avancée dans la section Travaux parlementaires

La date de début doit précéder la date de fin.

Liens Ignorer la navigationJournal des débats de la Commission permanente de la justice

Version finale

29e législature, 4e session
(15 mars 1973 au 25 septembre 1973)

Le mercredi 2 mai 1973 - Vol. 13 N° 21

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Étude détaillée du projet de loi no 78 — Loi concernant le louage de choses
Étude détaillée du projet de loi no 79 - Loi du tribunal des loyers


Journal des débats

 

Commission permanente de la justice

Projet de loi no 78 — Loi concernant le louage de choses

Projet de loi no 79 Loi du tribunal des loyers

Séance du mercredi 2 mai 1973

(Dix heures une minute)

M. BLANK (président de la commission permanente de la justice): A l'ordre, messieurs!

Maintenant, le député de Saguenay remplace le député de Maisonneuve et le député des Iles-de-la-Madeleine remplace le député de Terrebonne.

M. DROLET: C'est une grosse amélioration. M. LACROIX: Merci.

LE PRESIDENT (M. Blank): Le premier groupe, est-ce que le Barreau du Québec est ici? Il n'y est pas. La Fédération des associations de locataires du Québec est ici. M. Langlois?

Fédération des associations de locataires du Québec

M. LANGLOIS: Oui.

LE PRESIDENT (M. Blank): Avez-vous d'autres documents à nous donner ou si ce sont les mêmes que nous avons déjà?

M. LANGLOIS: J'en ai un autre.

LE PRESIDENT (M. Blank): Est-ce qu'on peut donner ça à quelqu'un?

M. LANGLOIS: MM. les membres de la commission parlementaire, je représente la Fédération des associations de locataires du Québec qui a été fondée il y a un an et demi maintenant et qui groupe au-delà d'une soixantaine d'associations de locataires de tout le Québec. L'orientation de mon intervention aujourd'hui a été élaborée il y a trois semaines lors d'une réunion du conseil général de la fédération à Montréal qui a réuni une quarantaine de militants, de délégués venant des associations de locataires de tout le Québec.

Comme vous le savez, la Fédération des associations de locataires du Québec a déjà présenté devant cette même commission de la justice un volumineux mémoire, l'automne dernier, qui faisait le point sur nos revendications concernant le défunt bill 59 qui a été retiré pour être remplacé par les deux nouveaux projets de loi que nous étudions aujourd'hui. Il faut dire que les locataires avaient beaucoup investi lors de la préparation de ce mémoire; une vingtaine de mémoires étaient parvenus à la fédération venant de toutes les associations locales et nous les avions groupés dans un seul mémoire qui a été présenté devant la commission ici.

Lorsque le bill 59 a été retiré l'automne dernier, juste avant Noël, on a noté dans les associations de locataires une désillusion assez forte face à l'inaction du gouvernement. Les locataires se sont dit: Nous avons beaucoup investi dans le jeu des mécanismes actuels et ça n'a rien donné. Ce qui fait que, lors de cette réunion que nous avons tenue à Montréal il y a trois semaines, les associations ont bien dit à l'exécutif de la fédération que c'était fini le temps où on faisait le jeu du gouvernement en ce sens qu'on travaillait sur les projets de loi soumis par le gouvernement, et le gouvernement, bien sûr, écoutait avec beaucoup de bienveillance les représentants des associations mais, par la suite, on légiférait trop souvent sans en tenir compte.

On légiférait surtout, bien souvent, dans le sens des intérêts des bien nantis qui se présentent en même temps que nous devant les instances du gouvernement, notamment la commission parlementaire. Ce qui fait que les représentants des associations de locataires nous ont dit: C'est fini le temps où on présente de nouveau une analyse très fouillée des projets de loi que nous étudions aujourd'hui.

C'est fini, donc, le temps où on va investir beaucoup trop de temps, avec des ressources trop maigres et des ressources financières encore plus maigres, dans une démarche qui ne porte pas fruit devant les membres de la commission parlementaire, et surtout devant le gouvernement. A titre d'exemple, j'ai distribué devant vous aujourd'hui un document qui est, en fait, une analyse que nous avons faite des changements survenus dans les bills 78 et 79 par rapport au bill 59.

C'est seulement un échantillon de ces changements puisque l'analyse n'est pas exhaustive. Vous avez, quand même, ici les principaux changements survenus dans les bills 78 et 79, changements qui, en fait, manifestent que le gouvernement a accepté la majorité des recommandations faites par les propriétaires, les constructeurs, les groupes financiers concernant les différents points qui sont là.

Vous avez, entre autres, le retrait du bill 59, qui a été effectué en décembre 1972. Eh bien, ce retrait avait été demandé, évidemment, avec beaucoup de force par différents groupes devant la commission parlementaire. Concernant le contrôle des augmentations de loyer, c'est la même chose. Entre autres, on avait beaucoup critiqué le critère des 5 p.c. pour insister sur l'importance de baisser ce critère à 3 p.c, mais sur l'importance aussi de conserver un critère comme celui-là, afin de prévenir les hausses de loyer et surtout afin d'enlever l'odieux de la démarche que doit faire le locataire devant la régie, de lui enlever cette nécessité de faire la

démarche, pour que ce soit le propriétaire aussi qui la fasse lorsqu'il veut obtenir une augmentation plus élevée que 3 p.c.

Evidemment, ce critère de 5 p.c. ou de 3 p.c. a été beaucoup critiqué par les groupes financiers, les constructeurs, les propriétaires et, bien sûr, plutôt que de retenir le point de vue des locataires, on a préféré, retenir le point de vue, encore une fois, des propriétaires. Même chose pour le Barreau et la Chambre des notaires qui, évidemment, ont fait des recommandations dans ce sens.

Je pourrais, bien sûr, continuer la lecture. Notamment, je vais insister beaucoup sur le champ d'application de la loi. Plusieurs groupes ont insisté pour que la loi s'applique aux logements construits seulement après cinq ans. Evidemment, nous avions demandé, pour notre part, que tous les logements soient assujettis sans distinction d'année.

Plusieurs groupes, notamment l'Association provinciale des constructeurs, ont demandé cinq ans. Ils ont dit: C'est parce que ça nous prend cinq ans avant que ce soit rentable. Le gouvernement, encore une fois, a accordé à ce groupe' ce critère de cinq ans. La Ligue des propriétaires avait fait des recommandations dans ce sens. On pourrait poursuivre avec l'éviction, la résiliation où on note encore certains gains pour les groupes que j'ai mentionnés, même chose pour les prohibitions, notamment le Barreau, dans ce cas-ci, a eu gain de cause, etc.

En gros, pourquoi a-t-on retiré le bill 59, bill qui devait remplacer la loi vétuste de conciliation entre propriétaires et locataires? Il serait bon ici de rappeler — c'est le deuxième texte que vous avez en main — que le projet de loi en question, le code des loyers, était attendu depuis fort longtemps et que plusieurs groupes avaient manifesté leur mécontentement quant à l'absence d'une loi adéquate dans le domaine du logement, la loi de la régie, bien sûr, étant complètement désuète et toujours temporaire.

Le bill 59 apportait une première ébauche d'une politique visant à protéger les locataires, mais cette ébauche a été — on ne sait encore trop pourquoi — retirée. Lors de la tenue d'une commission parlementaire sur le projet de loi 59, les différents organismes intéressés ont tous manifesté un certain désaccord sur le projet de loi. Les locataires jugeaient le contenue du projet trop limité tandis que les propriétaires et les autres groupes économiques le jugeaient trop progressiste. Les intérêts respectifs des deux parties se posaient évidemment. Pour le locataire, le bill 59 constituait une certaine amélioration par rapport à la Loi de la Régie des loyers et quelques-uns de ses articles permettaient d'entrevoir une amorce de loi plus conforme aux droits et aux besoins des locataires.

Nous faisons référence ici au contrôle des augmentations de loyer et à l'application plus étendue de la loi. Pour les propriétaires, les financiers et autres groupes de ce genre, le bill 59 représentait une menace de diminution de profit par la voie d'un contrôle étatique de l'augmentation du coût des loyers. Quoique très partiel, ce contrôle des loyers, tel qu'élaboré dans le bill 59, laissait prévoir une emprise plus forte de l'Etat dans un domaine qui jusqu'ici avait été exclusivement sous le contrôle de l'entreprise privée. Les revendications des deux groupes se formulèrent donc ainsi : les locataires appuyaient le bill 59 quoique avec plusieurs réserves et, en mentionnant toujours que ce bill ne réglait pas les véritables problèmes d'habitation au Québec, ils apportaient plus de 60 modifications que vous avez d'ailleurs en main et que nous considérons toujours valables.

Elle demandait et demande toujours un contrôle très sévère du prix des loyers et une application universelle de la loi. Les propriétaires constructeurs d'habitations, les investisseurs immobiliers demandaient, eux, le retrait pur et simple de ce projet de loi, l'abolition de tout contrôle sur le prix des loyers et l'exclusion de plusieurs catégories d'habitations de la juridiction de la Commission des loyers. La divergence d'intérêts était donc très claire et inconciliable. Le gouvernement, lui, se disait neutre et prêt à écouter toutes les parties concernées. Mais on a vu, dans le texte que j'ai présenté, que le gouvernement a surtout écouté une des deux parties concernées.

Deux mois plus tard, le ministre Choquette, responsable du bill 59, annonçait qu'il n'existait plus de bill 59 et que ce dernier était remplacé par deux nouveaux projets de loi, 78 et 79, créant ainsi, bien sûr, un va-et-vient de projets de loi qui a beaucoup mêlé la population et qui, à mon avis, est préjudiciable aux intérêts de cette même population. Prétextant qu'aucune des parties n'arrivait à s'entendre et que toutes étaient mécontentes du projet de loi 59, le ministre a jugé bon de le retirer tout simplement et de présenter deux nouveaux projets de loi qui étaient d'un tout autre ordre. En effet, dans les bills 78 et 79, on ne retrouvait plus les éléments valables du bill 59, par exemple, le contrôle des augmentations de loyer et l'application plus vaste de la loi. Comme vous le savez, les bills 78 et 79 prévoient que la régie s'appliquera simplement après cinq ans de construction entre autres.

De plus, plusieurs modifications de moindre importance furent apportées, changeant ainsi tout l'esprit de la loi et diminuant considérablement les petits avantages que les locataires avaient obtenus avec le bill 59. Comment expliquer un tel revirement? Si on reprend la lecture des deux projets de loi et parallèlement la lecture de tous les mémoires qui ont été présentés devant la commission parlementaire, on remarque sans trop de difficulté, car c'est une évidence flagrante, que toutes les recommandations de fond, des propriétaires et des groupes financiers se retrouvent dans ces deux bills, tandis qu'aucune des recommandations

importantes des locataires ou des centrales syndicales n'y figure. Le gouvernement a satisfait les demandes des capitalistes en mettant de côté son propre projet de loi et les revendications de la majorité de la population locataire. Ce n'est pas la première fois qu'on assiste ainsi à ce type de manoeuvre. Le gouvernement essaie de donner l'illusion aux travailleurs qu'il travaille pour eux, mais on finit toujours par se retrouver avec des lois qui ne favorisent qu'une partie de la population. Ce n'est pas étonnant puisque le gouvernement et les capitalistes ne forment en réalité qu'un seul groupe. Le premier est là pour défendre les intérêts du second.

M. CHOQUETTE: Excusez-moi de vous interrompre. Etes-vous venu nous dire ces banalités à la commission parlementaire juste pour le plaisir de nous insulter ou bien si vous avez quelque chose qui va contribuer au projet de loi actuel?

M. LANGLOIS: Le sens de cette intervention, c'est, d'une part, de bien expliquer au gouvernement qu'il faut légiférer pour la population et qu'il faut entendre le point de vue que nous soulevons. Je pense que le premier texte que nous avons soumis montre très bien que beaucoup de nos recommandations n'ont pas reçu une oreille attentive ou n'ont pas fait l'objet d'une analyse attentive du gouvernement. J'arrive à l'instant aux recommandations majeures que nous voulons faire et qui sont présentes dans le mémoire que nous avons soumis. Je voulais faire cette analyse qui me parait importante pour bien expliquer comment il se fait que beaucoup de groupes maintenant sont désillusionnés face aux mécanismes de participation que le gouvernement a voulu mettre sur pied pour entendre la population.

Je pense que les membres de la commission doivent être bien conscients que cela existe dans la population, des groupes qui ne font plus confiance à ces mécanismes que vous avez prévus pour écouter la population.

Je pense, M. le ministre, que nous avons fait un effort extrêmement sérieux dans la préparation de nos revendications sur le bill 59. D'ailleurs, vous l'avez admis vous-même lorsque je suis venu le présenter.

M. CHOQUETTE: Maintenant, aujourd'hui, c'est moins vrai.

M. LANGLOIS: Vous comprendrez aussi... M. CHOQUETTE: Pardon?

M. LESSARD: On vous démontre justement qu'on n'a pas écouté ces groupements populaires mais on a écouté les autres qui ont plus de force et plus d'influence. Allez-y, c'est intéressant.

M. LANGLOIS: Alors donc,...

M.LESSARD: Est-ce qu'il comprend quelque chose là-dedans, le député de Bourassa?

M. TREMBLAY (Bourassa): Oui, je comprends pas mal l'affaire.

M. LANGLOIS: Je vais terminer, j'en ai pour quelques secondes encore, si vous me permettez.

M. TREMBLAY (Bourassa): J'en ai des documents dans mon comté.

M. LANGLOIS: Je voulais surtout insister sur cette idée qu'il faut bien comprendre que la population ne se laisse pas charrier pendant très longtemps de cette façon. A un moment donné, les gens sont tannés. Les gens préfèrent plutôt travailler au niveau de la base, travaÛler à s'organiser et à régler leurs problèmes au niveau de leur quartier alors qu'on a cette désillusion face au gouvernement.

Concernant nos revendications face à la loi, elles sont résumées dans le mémoire, c'est la grande feuille que vous avez reçue et que vous avez en main. 1. Nous demandons que la loi s'applique à tous les logements du Québec sans exception. Donc, nous avons demandé que le fameux délai de cinq ans, demandé par l'Association des constructeurs, ne soit pas inclus dans la loi mais plutôt qu'on accorde la même protection à tous les locataires sans distinction. 2. Nous demandons que l'on maintienne le tribunal des loyers et la Commission des loyers et nous nous opposons, en ce sens, à une recommandation du Barreau qui veut que l'on retire cette forme de tribunal administratif. 3. Nous demandons qu'il incombe au propriétaire de s'adresser au tribunal des loyers pour toute hausse de loyer. Alors, nous pensons, par cette façon, régler le problème d'accès à la Régie des loyers simplement en demandant que tout propriétaire qui veut obtenir une hausse de loyer en fasse la demande à la Commission des loyers. Celle-ci établira les mécanismes pour entendre cette demande de hausse. 4. Nous demandons qu'il soit établi, après consultation publique, des critères officiels permettant un contrôle rigoureux des loyers et empêchant les hausses de nature spéculative. Nous avons d'ailleurs déjà soumis au ministre Choquette une liste de ces critères que nous avions dévoilés l'automne dernier. 5. Qu'un bail type soit adopté pour tout le Québec. Evidemment, le ministère est déjà sensible à cette recommandation que nous avons faites maintes et maintes fois et je ne vois pas pourquoi je développerais longuement cette chose-là. On l'a déjà développée à plusieurs reprises. Cela fait des années qu'on en parle. On en a parlé longuement lors de la dernière commission parlementaire. Alors que voulez-vous qu'on vous dise de plus concernant ce bail

type, si ce n'est qu'il est nécessaire, à notre avis?

On demande enfin que la reprise de possession d'un logement, pour fins de conversion, soit supprimée.

Alors, bien sûr, en fait, les locataires qui ont étudié ces deux nouveaux projets de loi pensent — et moi aussi je le pense avec eux — que c'est un peu de répéter devant la commission parlementaire que de refaire la démarche que nous avions déjà faite devant vous. C'est pour cela qu'aujourd'hui j'ai voulu faire cette analyse, pour bien sensibiliser les membres de la commission sur l'importance de recevoir les intérêts de toute la population et non pas seulement les revendications de certains groupes, comme le montre notre premier texte.

En terminant, je voudrais soulever deux points. Je termine avec ces deux points. Premièrement, à Montréal, dernièrement, a été menée ce qu'on a appelé une action de la Régie des loyers. Cette action visait à un réexamen des façons d'intervenir de la Régie des loyers dans l'application courante de la loi, notamment de la loi d'urgence. Or, on s'est aperçu de plusieurs choses, notamment qu'il y avait, bien sûr, des difficultés de fonctionnement d'ordre administratif qui nous laissent songeurs devant l'application des deux nouveaux projets de loi que vous avez en main aujourd'hui, parce que ces deux projets de loi auront beau être conçus de la meilleure façon possible, si la régie continue de fonctionner comme elle fonctionne actuellement, on aura, bien sûr, une protection plus ou moins adéquate pour les locataires qui sont aux prises avec des difficultés sérieuses.

Ensuite, je voudrais insiter sur l'information qui est donnée par la Régie des loyers. Lorsque vous avez adopté la loi d'urgence concernant les hausses abusives, il y a eu, bien sûr, une campagne d'information mais une campagne d'information, dans les journaux, qui a été faite de telle façon qu'on a souvent induit en erreur les locataires, de même que certaines informations données par la Régie des loyers ont induit en erreur des locataires.

Par exemple —je donne simplement un exemple — les annonces dans les journaux laissaient entendre que le propriétaire devait envoyer un nouvel avis d'augmentation de loyer s'il avait envoyé son premier avis avant le 2 février. Or, la Régie des loyers a donné comme conseil aux propriétaires que ce n'était pas nécessaire de faire cette démarche, alors que souvent, les locataires attendaient que le propriétaire envoie ce deuxième avis, ce qui fait que moi, je connais beaucoup de cas, entre autres ici à Québec et à Montréal, de locataires qui ont attendu jusqu'après le délai prévu par la loi, ce qui fait qu'ils n'ont pas pu se prévaloir des recours que leur donnait cette loi. Donc, la publicité était faite trop rapidement et souvent de façon fausse, qui induisait en erreur les locataires.

Ensuite, je voudrais commenter une politique qui semble avoir cours à la Régie des loyers qui est de refuser la réduction des loyers lorsque le propriétaire ne remplit pas ses charges et obligations. Il semble actuellement — et j'aimerais beaucoup avoir des statistiques là-dessus, malheureusement je n'en ai pas — que la Régie des loyers, systématiquement, n'applique pas cette partie de sa loi qui consiste à accorder une diminution du prix des loyers lorsqu'il a une diminution de jouissance.

Du moins, les cas soumis sont peu nombreux et les fonctionnaires de la régie découragent les locataires de faire une telle démarche. Cela me parait inacceptable et d'ailleurs ça a été dénoncé par les groupes de Montréal qui contesté la Régie des loyers et notamment cette clause.

En terminant — et c'est mon dernier point — je voudrais revenir sur le cas de Sainte-Scholasti-que. J'en ai parlé longuement devant la commission parlementaire lorsque je suis venu pour la première fois, mais malheureusement on n'a pas eu de réponse adéquate. On ne retrouve pas dans les projets de loi une réponse satisfaisante aux commentaires que j'avais faits.

Je ne reprendrai pas ces commentaires que j'avais faits pour éviter que M. Choquette ne m'accuse de me redire. Vous pouvez les relire dans l'intervention que j'avais faite, mais je voudrais simplement signaler qu'il s'agit sur ce territoire de Sainte-Scholastique d'une population importante de locataires qui est aux prises avec des difficultés d'aménagement de territoire qui sont très sérieuses et qui est aux prises avec un gouvernement fédéral qui est trop souvent arrogant à son égard.

Il me paraît important que le gouvernement du Québec prenne ses responsabilités à cet égard et qu'il prévoie des mécanismes essentiels pour assurer la même protection à ces locataires que celle qui est assurée aux autres locataires.

C'est tout ce que j'avais à dire ce matin. En terminant je veux simplement reprendre — même si le ministre Choquette n'a pas aimé cette intervention du début — l'idée qu'actuellement les associations de locataires préfèrent s'organiser elles-mêmes, faire un front commun très fort plutôt que de jouer le jeu des mécanismes de consultation qui souvent sont perçus comme à notre désavantage. Je pense dans certains cas que ça se révèle vrai.

C'est tout ce que j'avais à dire. Je ne sais pas si vous avez des questions maintenant.

LE PRESIDENT (M. Blank): Merci, M. Langlois.

M. CHOQUETTE: M. le Président, je voudrais dire, au début de ces séances de la commission parlementaire de la justice qui a reçu mandat d'étudier les bills 78 et 79, que nous avons reçu une douzaine de mémoires sur les projets de loi.

Nous allons, je l'espère, au cours des deux

prochaines journées, épuiser l'étude de ces mémoires et entendre les représentations des groupes qui nous les ont fait tenir. Mais, par la suite, je voulais suggérer aux membres de la commission parlementaire, étant donné l'importance et la portée de ces projets de loi, que nous entendions des experts sur les conséquences économiques, sociales et autres des projets de loi, parce qu'il ne fait pas de doute que les projets de loi en question affectent une large partie de la population québécoise. On n'a qu'à penser qu'il y a environ 800,000 logements locatifs au Québec, que l'industrie de la construction et, en particulier, de la construction domiciliaire est très importante. Par conséquent, ce n'est pas le genre de projets de loi qu'il faut adopter sans prendre les précautions appropriées de façon à sauvegarder les intérêts légitimes tant des locataires que des propriétaires et des constructeurs. Si les membres de la commission agréent ma suggestion, nous pourrons prendre les mesures nécessaires pour que des experts soient entendus devant la commission sur les différents aspects des projets de loi. Maintenant, je vais commencer par la fin de...

LE PRESIDENT (M. Blank): Est-ce qu'on peut décider sur cette question immédiatement?

M. CHOQUETTE: Si les membres de la commission veulent en parler tout de suite.

M.PAUL: M. le Président, je souscris à l'intéressante suggestion du ministre de la Justice, mais il faudrait bien que ceux qui se présentent devant nous ne présument pas que les témoins que nous ferons entendre, même s'ils sont experts, ne seront convoqués que dans le but de protéger les capitalistes, mais que notre travail en sera un de protection à l'endroit de toutes les classes de la société. Comme je sais que c'est la politique qu'entend suivre le gouvernement et que c'est la seule qui a toujours présidé aux délibérations des différentes commissions, personnellement, j'accepte avec empressement la recommandation et la suggestion du ministre de la Justice.

LE PRESIDENT (M. Blank): Le député de Portneuf.

M. DROLET: M. le Président, en ce qui nous concerne également, nous sommes d'accord sur la suggestion que vient de nous faire le ministre de la Justice. Il s'agit, en effet, de bills d'une extrême importance. On s'en rend compte, d'ailleurs, par les articles que nous lisons dans les journaux sur ces bills et par les mémoires qui seront déposés devant cette commission. Du fait que nous sommes là pour protéger tous les citoyens du Québec, je pense qu'il est très important que nous nous renseignions le plus possible avant que ces bills soient adoptés en

Chambre. Nous acceptons la suggestion du ministre.

LE PRESIDENT (M. Blank): Le député de Saguenay.

M. LESSARD: M. le Président, toute personne a eu la possibilité de se faire entendre à cette commission parlementaire et différentes parties se sont fait entendre, en tout cas, sur le bill 59 et, sur les deux projets de loi qui nous sont soumis aujourd'hui, nous aurons à entendre différentes autres parties. Pour notre part, nous n'avons pas d'objection à entendre des experts, mais, cependant, nous espérons que le but de cette proposition du ministre n'est pas de tenter de ne pas donner suite à certaines revendications de groupes de locataires du Québec qui représentent une large partie de la population. Pour ma part, il n'y a aucun problème à entendre des experts, des économistes, des personnes qui nous expliqueront les conséquences économiques sur la construction, sur l'économie québécoise, à un moment donné, de ces projets de loi.

Cependant, nous l'avons dit depuis 1970, il y a un problème qui existe au niveau des locataires du Québec et ce problème-là demande des solutions concrètes. Certaines remarques qui ont été faites, ce matin, nous les avions nous-mêmes faites, nous avions fait valoir par exemple certains points concernant l'université, mais je ne veux pas commencer à discuter ça.

LE PRESIDENT (M. Blank): Ce n'est pas le moment encore.

M.LESSARD: D'accord. Pas d'opposition, M. le Président, tant et aussi longtemps que nous continuerons d'entendre quand même les groupements populaires et que ce n'est pas pour cacher les revendications de la population qu'on fera entendre des experts.

LE PRESIDENT (M. Blank): Alors, la motion du ministre de la Justice pour faire venir des experts afin de les entendre devant cette commission est acceptée unanimement?

M. PAUL: Adopté.

M. CHOQUETTE: Mes chers collègues, je vous remercie. Est-ce que le député de Lac-Saint-Jean avait quelque chose à dire? Je vous remercie de votre collaboration. Je crois que nous allons choisir des experts. D'ailleurs, je n'ai pas d'objection à soumettre le nom de ces experts aux membres de la commission au moment où j'aurai la liste, mais je pense que ces experts pourront nous éclairer.

M. LESSARD: Si le ministre peut présenter une liste d'experts, est-ce qu'il est possible aux partis de l'Opposition aussi soit de contester ou de proposer aussi la venue d'experts?

M. CROQUETTE: Bien écoutez, dans un autre sens, le député de Saguenay ne voudrait pas, je pense, prolonger d'une façon excessive les séances de la commission. S'il voulait nous proposer des experts, il pourra peut-être nous soumettre le nom et nous pourrons juger au mérite à ce moment-là, si l'on considère à la commission que le témoignage de ce ou ces personnes serait utile. Je ne voudrais pas fermer la porte, mais je ne voudrais pas non plus engager le gouvernement à entendre, vous savez, une série de témoignages sans fin et qui retarderaient de façon indue l'adoption de la loi ou des lois.

Alors, si le député de Saguenay avait des noms à nous soumettre, une fois que je lui aurai présenté notre liste, nous pourrons examiner ses suggestions. Est-ce que le député est satisfait de cette façon de procéder?

M. LESSARD: D'accord.

M. CHOQUETTE: Merci. Maintenant, je voudrais, pour faire suite à l'exposé de M. Langlois, représentant de la Fédération des locataires, tout d'abord faire remarquer que, quant aux cas des locataires à Sainte-Scholasti-que qu'il dit victimes de l'arrogance du gouvernement fédéral, bien M. Langlois, ces locataires si vous ne le savez pas, je vais vous en informer, bénéficient de la loi d'urgence que nous avons adoptée au Parlement au mois de février.

Par conséquent, la protection que nous avons donnée à tous les locataires du Québec, elle leur est accordée. Alors, ça ne sert à rien de venir faire des...

M. LANGLOIS : Est-ce qu'ils bénéficient en cas d'éviction?

M. CHOQUETTE : Bien certainement, ils sont comme tout autre locataire, ils sont sur le même pied que...

M. LANGLOIS: Non, je ne crois pas, parce que j'avais téléphoné à des officiers de votre ministère et je m'excuse de vous contredire, mais ils m'avaient dit qu'à cause du fait que c'était une zone en voie d'aménagement, le gouvernement se réservait le droit d'exproprier les gens au fur et à mesure s'il y avait des routes, etc. Donc, ils ne sont pas tout à fait sur le même pied que les autres locataires.

M. CHOQUETTE: Bien oui, mais c'est comme dans tout autre cas d'expropriation.

Qu'est-ce que vous voulez? L'expropriation s'est faite dans l'intérêt public ; par conséquent, le propriétaire subit les effets de l'expropriation et son locataire, par voie de conséquence, aussi. Vous ne pouvez pas dire : On va assurer un droit permanent au locataire de demeurer sur les lieux malgré une expropriation.

M. LANGLOIS: Non, je voulais simplement reprendre une remarque que vous avez faite. Vous avez laissé entendre qu'ils étaient protégés en cas d'éviction et je voulais simplement vous signaler qu'ils n'étaient pas protégés.

M. PAUL: Est-ce que le ministre me permet une question?

M. CHOQUETTE: Oui.

M. PAUL: Il n'y a pas de traitement d'exception pour les locataires de Sainte-Scholastique. Si, à Saint-Simon, la situation se présente telle que l'expropriation doive se faire, ce sont les mêmes règles qui vont s'appliquer.

M. CHOQUETTE: Exactement la même chose. Les locataires de Sainte-Scholastique, au point de vue des effets d'une expropriation, sont sous le même régime juridique que n'importe quel autre locataire ou propriétaire à l'occasion d'une autre expropriation gouvernementale, municipale ou scolaire.

M. LANGLOIS: D'accord, j'accepte vos explications.

M. CHOQUETTE: Remarquez une chose. Au point de vue du louage même et des termes des conditions du louage pendant la période où ils sont locataires à Sainte-Scholastique, ils bénéficient des lois ou de la loi que nous avons adoptée au mois de février.

M. LANGLOIS: Oui, c'est tout à fait normal.

M. CHOQUETTE: Ne faites pas une tempête dans un verre d'eau avec une situation que vous relevez comme étant déplorable.

M. LANGLOIS: Est-ce que, dans les deux nouveaux projets de loi, ils auront exactement la même protection que les autres locataires?

M. CHOQUETTE: Sans aucun doute, ils seront sous le régime général au point de vue de l'expropriation mais au point de vue du traitement comme locataires, pendant qu'ils sont sur les lieux, ils auront les mêmes conditions que les autres locataires.

M.PAUL: Connaissez-vous beaucoup de classes de la société qui sont soustraites de l'application du code civil?

M. LANGLOIS: Du code civil? Je ne suis pas avocat, je ne crois pas.

M. PAUL: La loi 78...

M. LANGLOIS: Si je me souviens bien, je pense qu'il y a certaines exceptions mais je ne saurais pas le dire, il faudrait poser la question à un avocat. Vous êtes vous-même avocat, vous pourriez le dire.

M. PAUL: La loi 78 va s'appliquer à tous les citoyens du territoire du Québec.

M. CHOQUETTE: A ce point de vue je relève immédiatement un point. Vous avez réclamé l'universalité de ces lois. Remarquez que dans le projet original, le bill 59, nous avions fait exception pour les villes de 5,000 et moins tandis qu'ici nous l'avons étendue à toutes ces villes. Par conséquent, ne dites pas que vous n'avez pas eu gain de cause sur certains points.

M. LANGLOIS: Pour cela, oui, mais par contre on a perdu beaucoup, je pense, M. le ministre, et vous allez l'admettre aussi, lorsque vous avez dit que ce seraient les loyers construits simplement après cinq ans. Je pense que cette période de cinq ans est préjudiciable. Le gain que nous avons fait d'une main, qui est un gain mineur, nous en perdons beaucoup de l'autre main.

M. CHOQUETTE: Vous perdez, oui, mais on ne peut pas regarder l'être humain strictement comme un locataire sans le regarder comme un consommateur, sans le regarder comme un travailleur. La disposition de cinq ans d'exonération a strictement pour but de ne pas mettre en péril la construction; par conséquent votre locataire, que vous dites venir défendre ici aujourd'hui à la commission parlementaire, c'est peut-être un ouvrier de la construction que vous mettriez en péril dans son emploi si vous aviez des dispositions plus rigides au point de vue de l'application de la loi.

M. LANGLOIS: Ecoutez, M. le ministre...

M. CHOQUETTE: Nous, comme législateurs, on ne peut pas juste regarder l'individu comme locataire, il faut le regarder aussi comme travailleur, il faut regarder la situation économique.

M. LANGLOIS: M. le ministre, vous avez admis vous-même devant la commission parlementaire que l'application de la Régie des loyers, notamment lorsqu'on parlait de Charlesbourg et de Québec l'automne dernier, n'a pas eu d'influence directe sur la construction et vous venez me dire aujourd'hui que cela risquerait d'avoir de l'influence. Je pense que, si on comprend bien les mécanismes d'intervention du gouvernement ou des différents groupes financiers dans le domaine du logement, ce n'est pas aussi simple que cela. Cela relève surtout d'une bonne politique financière, d'une incitation à investir,etc., beaucoup plus que d'une menace de contrôle plus ou moins réelle.

M. CHOQUETTE: Mais l'incitation à investir, nous la maintenons en assurant cette période de cinq ans où le marché sera non contrôle ou non régi.

M. LANGLOIS: Je pense, M. le ministre, qu'il y a d'autres moyens, notamment les moyens financiers de la politique fiscale pour maintenir...

M. CHOQUETTE: Ecoutez, M. Langlois...

M. LANGLOIS: ... cette capacité d'investir. Je pense que le projet de loi, tel qu'il est formulé actuellement, n'est pas si rigoureux qu'on doive être obligé de retarder son application jusqu'après cinq ans, au moment où la nouvelle construction devient rentable aux dires des constructeurs.

M. CHOQUETTE: C'est votre opinion mais ce n'est pas la nôtre. Pour autant que nous sommes concernés, nous ne voulons pas mettre l'industrie de la construction en péril. J'ajouterai un autre facteur aussi, que vous devriez être plus capable de comprendre, c'est que le stock des logements disponibles aux locataires à travers le Québec, et particulièrement dans les régions les plus urbanisées, il faut que le législateur, que le gouvernement voie à ce que le stock de logements aille en croissant, en augmentant pour qu'il y ait plus de logements disponibles, pour que la construction marche, et ainsi, qu'il y ait aussi un remplacement des logements devenus vétustes.

Si la politique gouvernementale est trop rigide, elle risquerait d'amener une baisse dans la construction des logements d'habitation et par conséquent, en fin de course, ce seraient les locataires qui paieraient les conséquences d'une politique trop rigide de la part du gouvernement. C'est la raison pour laquelle il nous faut, nous, trouver une politique équilibrée qui tienne compte à la fois de l'aspect social dont nous tenons compte au plus haut degré puisque la législation gouvernementale a certainement un objectif social, mais il nous faut tenir compte également de la dimension économique. C'est-à-dire que l'activité économique dans la construction continue et qu'on alimente le stock de logements disponibles pour les locataires.

M. LANGLOIS: Je pense, M. le ministre, que votre analyse relève d'une connaissance un peu sommaire des mécanismes de l'économie. Vous pourrez interroger les experts qui vont venir devant vous et ils pourront vous apporter beaucoup d'autres solutions que celles que vous signalez.

M. CHOQUETTE: Bien oui, nous verrons à ce moment-là. Mais de toute façon, vous avez dit aussi que les projets de loi 78 et 79 n'avaient retenu aucune suggestion venant de votre groupe ou encore n'avaient représenté en aucune façon des progrès...

M. LANGLOIS: Suggestion majeure.

M. CHOQUETTE: Un instant, je ne vous demande pas de m'interrompre, j'ai la parole.

M. LANGLOIS: Ah bon!

M. CHOQUETTE: Vous allez me permettre de faire une liste des choses sur lesquelles, soit que nous avons retenu vos suggestions ou encore que nous avons apporté des améliorations au projet de loi précédent. Premièrement, tout le droit substantif relatif aux baux, c'est-à-dire aux relations juridiques entre propriétaire et locataire a été repris au complet, puisque le bill 59 n'affectait aucunement le chapitre du code civil au sujet du louage de choses. Alors, nous avons repris par conséquent... je ne vous demande pas de m'interrompre, j'ai la parole.

M. LANGLOIS: Non, mais je ne comprends pas le droit substantif, je ne sais pas ce que c'est, je ne suis pas avocat.

M. CHOQUETTE: Le droit substantif, c'est-à-dire le fondement du droit contractuel entre propriétaires et locataires. A la faveur du bill 78, nous avons repris entièrement toute la législation, tout le chapitre du code civil qui traite du louage de choses. Deuxièmement, la livraison des lieux en bon état d'habitabilité a été incorporée, c'est-à-dire que le propriétaire est obligé de livrer des lieux qui sont en bon état d'habitabilité et cette clause est d'ordre public dans les projets de loi que nous présentons.

Troisièmement, le locataire ne peut être tenu qu'aux réparations locatives. Et là encore il s'agit d'une clause d'ordre public. Quand je dis clause d'ordre public, ceci veut dire que propriétaires et locataires ne peuvent y déroger même de consentement. Or ceci est encore une mesure qui protège le locataire à l'égard de pressions de la part du propriétaire pour incorporer des clauses de responsabilité pour des réparations au-delà des réparations locatives que le propriétaire pourrait vouloir imposer dans un bail.

Quatrièmement, la langue du bail est au choix du locataire, également une autre disposition que nous avons incorporée.

Cinquièmement, sont sans effet les clauses de déchéance de terme, des clauses d'exonération de responsabilité en faveur du locateur, c'est-à-dire que le locateur ne peut pas, dans un bail, stipuler qu'il ne sera pas responsable à l'égard de certains actes dont la loi le rend responsable. Au point de vue de la réductibilité des clauses pénales, il s'agit là encore d'une disposition qui ne peut pas être écartée de consentement. La sous-location est maintenant permise, c'est-à-dire que le locataire aura plus de flexibilité au point de vue de la location. Le bail type que vous revendiquez est implicitement dans le bill 78, parce qu'il y a une foule de clauses d'ordre public, c'est-à-dire dont les parties ne peuvent déroger et qui doivent obligatoirement être comprises dans un bail écrit.

J'ajouterai ceci: j'ai demandé à mes légistes de préparer un bail qui ferait partie d'une cédule ou d'une annexe du projet de loi et qui incorporera toutes les clauses d'ordre public à l'égard desquelles les parties ne peuvent déroger. Ce sera le fondement, n'est-ce pas, du bail type que vous revendiquez. Alors là encore, je dis que vos objectifs, en large mesure, ont été satisfaits. Le locataire est également maintenu dans les lieux malgré la vente de l'immeuble. Voilà une disposition qui n'existait pas dans la loi précédente.

Le locataire a un recours contre le propriétaire en cas de préjudice causé par des colocataires dans l'immeuble, une autre disposition nouvelle. Le droit du locataire de procéder lui-même aux réparations urgentes et nécessaires lorsque le propriétaire refuse ou néglige d'agir, c'est-à-dire que, lorsqu'il y a une obligation sur le propriétaire de faire des réparations urgentes ou nécessaires, le locataire, en vertu du nouveau projet de loi, pourra y procéder si le propriétaire néglige de le faire. Le droit du locataire de réclamer la réduction de loyer dans certains cas. Finalement, la législation est applicable dans tout le Québec. Par conséquent, elle devient universelle. La loi, dans son ensemble, est d'ordre public, c'est-à-dire qu'on ne peut y déroger, comme je l'ai dit.

Je dis donc qu'il est inexact d'affirmer que les projets de loi 78 et 79 sont un recul par rapport au bill 59. Au contraire, je crois qu'ils sont un approfondissement, un progrès. Vos représentations d'ailleurs, comme celles des autres groupes qui sont venus devant la commission, nous ont permis de mettre encore plus au point les projets de loi que nous présentons, elles nous ont permis d'approfondir et d'aller beaucoup plus loin dans le fondement du droit qui s'applique entre propriétaires et locataires.

Maintenant, nous ne vous avons pas donné raison sur toute la ligne. Mais est-ce qu'aucun groupe peut revendiquer, lorsqu'il vient en commission parlementaire, d'avoir raison sur toute la ligne et de voir toutes ses prétentions et ses revendications incorporées dans les projets de loi du gouvernement? Je pense qu'aucun groupe n'aurait la prétention de l'affirmer, parce que nous sommes ici, en commission parlementaire, pour entendre les représentations des groupes qui ont des intérêts adverses. Mais le législateur doit trancher dans le sens de trouver où se situe l'intérêt général.

Vous avez également dit que la Régie des loyers, après l'adoption de la loi d'urgence au mois de février, ainsi que le ministère de la Justice auraient trompé la population sur certains aspects de la loi d'urgence qui a été adoptée. Ceci est manifestement faux, M. Langlois, et vous le savez. La publicité que le ministère de la Justice a faite, l'information qu'il a donnée dans les journaux étaient strictement exactes. En aucun moment n'avons-nous été obligés d'apporter des corrections pour dire que nos annonces antérieures ne correspondaient pas au projet de loi. D'ailleurs, à la Régie des

loyers, il n'y a pas eu de plainte venant de propriétaires ou de locataires qui avaient été trompés par l'information gouvernementale. Au contraire, je trouve que cette campagne d'information a été particulièrement bien menée, bien comprise et perçue parce que la loi, qui a été adoptée par le Parlement à ce moment-là, a permis de stabiliser, à travers le Québec, tous les conflits qui semblaient surgir entre propriétaires et locataires. Le fait est que nous avons eu assez peu de litiges entre propriétaires et locataires à la suite de l'adoption de cette loi et de la publicité qui a été faite autour d'elle. C'est-à-dire que la loi était suffisamment bien faite, suffisamment bien comprise pour que les parties règlent leurs litiges entre elles avant d'aller à la Régie des loyers, ce qui était certainement un des objectifs visés par le législateur.

M. LANGLOIS: Est-ce que vous me permettez un seul commentaire?

M. CHOQUETTE: Vous me permettrez de terminer mon intervention.

M. LANGLOIS: Oui.

M. CHOQUETTE: Je dis donc que vous vous trompez ou que vous ne connaissez pas la situation réelle. Ce n'est pas du tout la réaction que nous avons eue à la Régie des loyers ou au ministère de la Justice, que des gens avaient été trompés ou induits en erreur. Je dis donc qu'à ce point de vue il y aurait lieu, pour vous, de corriger ou à tout le moins d'atténuer ce que vous avez affirmé à ce sujet.

Maintenant, je pense que le gouvernement, avec les projets de loi 78 et 79, présente une législation très moderne en matière de louage, une législation qui, je dirais, dépasse toute autre législation connue en Amérique du Nord. C'est aussi simple que cela. Je pense que, si les associations de locataires sont honnêtes et ne viennent pas ici juste pour faire de la démagogie, j'insiste "juste pour faire de la démagogie", elles vont reconnaître que la législation que nous entendons présenter est à l'avant-garde de tout ce qui est connu en Amérique du Nord et peut-être même dans tout l'hémisphère occidental. Alors, je ne pense pas que le gouvernement retarde même si nous ne vous donnons pas gain de cause dans toutes vos revendications.

Je crois aussi que, si on va voir les locataires, ils l'apprécient en réalité, parce que je commence à croire que les locataires pris individuellement ont pas mal plus de bon sens que ceux qui prétendent les représenter ici, en commission parlementaire.

M. LANGLOIS: Enfin, c'est votre opinion, M. le ministre. Concernant la dernière remarque que vous avez faite, je dois vous dire que nous avons quand même effectué une large consultation, tout comme nous l'avions fait, d'ailleurs, lors de la première étape des consultations sur le bill 59. Mais vous comprendrez que je ne peux pas passer à côté des réactions généralisées dans toutes les associations de locataires qui nous disent: II faut faire les interventions dans tel et tel sens. Alors, moi, je me suis fait le porte-parole, j'espère, le plus fidèle possible de l'esprit qui existait dans les associations face aux revendications que nous faisons devant le gouvernement.

Maintenant, j'aimerais relever vos remarques sur la Régie des loyers, que vous avez faites en réponse aux commentaires que j'avais faits. Laissez-moi vous dire, d'abord, que j'avais fait personnellement des appels téléphoniques à Montréal et à Québec, auprès d'officiers de la régie pour demander des explications sur l'annonce officielle qui était parue dans tous les journaux. On m'a dit aux deux endroits — et je pourrai vous dire personnellement les noms si vous me le demandez — qu'il y avait une erreur — ce n'était pas en soi une erreur grave, mais plutôt une imprécision, sans doute involontaire — qui s'était glissée dans ces annonces, de sorte qu'on laissait planer une certaine ambiguë té sur la nécessité ou non, pour le propriétaire, d'envoyer un deuxième avis d'augmentation lorsqu'il avait envoyé son premier avis avant le 2 février.

Je sais que cette confusion était très réelle. Moi-même, mon propriétaire m'a envoyé un deuxième avis —pourtant, c'est un notaire; donc, il connaît très bien la loi— parce que lui-même avait perçu qu'il fallait envoyer un deuxième avis. Par contre, d'autres propriétaires —et je pourrais en nommer — notamment les Entreprises Couillard, à Sainte-Foy, se sont renseignés auprès de la Régie des loyers et on leur a dit: Vous n'avez pas l'obligation d'envoyer un deuxième avis. C'était sans doute vrai, mais il faut que vous soyez très conscients que beaucoup de gens, dans la population, ont perçu cette annonce comme signifiant qu'on attendait obligatoirement un deuxième avis. Alors, je pense que mon affirmation concernant l'annonce était fondée.

Maintenant, vous n'avez pas répondu à ma question qui concerne l'espèce de coutume, maintenant, que la régie a de décourager la demande de diminution de prix du loyer lorsqu'il y a une diminution de jouissance. J'aimerais beaucoup avoir des éclaircissements là-dessus. J'admets que, souvent, mes connaissances des statistiques de la régie sont imprécises. Cela, je vous le confirme. C'est pour cela que je viens ici, pour vous poser des questions, M. le ministre. Et j'accepte mal, enfin, certaines remarques que vous faites au sujet des commentaires qu'on fait, en nous accusant de démagogie et tout, alors que, dans le fond, on demande certaines informations, souvent.

M. CHOQUETTE: Monsieur, on me donne un dépliant qui porte le titre Loi pour empêcher les hausses abusives de loyer en 1973, publié par le ministère de la Justice, gouverne-

ment du Québec. Je lis l'article 3: "Les avis d'éviction ou d'augmentation de loyer donnés par les propriétaires à leurs locataires avant le 2 février sont sans effet et les propriétaires, s'ils veulent obtenir l'éviction ou une augmentation de loyer, doivent envoyer de nouveaux avis. Le locataire n'est pas tenu de partir même s'il en a avisé son propriétaire. Toutefois, il peut quand même partir s'il avise de nouveau son propriétaire avant le 15 mars", qui était la nouvelle date prévue par la loi.

Alors, pour moi, cela me parait clair comme de l'eau de roche!

M. LANGLOIS: Vous, vous êtes avocat, vous êtes ministre de la Justice, mais prenez les gens ordinaires, je pense qu'ils ne perçoivent...

M. CHOQUETTE: Ne les traitez donc pas d'imbéciles. Ils ont fort bien compris la publicité.

LE PRESIDENT (M. Blank): Le député de Maskinongé.

M. PAUL: M. le Président, on dit souvent que la première impression est la meilleure. Je préfère retenir les propos qui nous furent livrés à l'occasion de l'étude du projet de loi no 59 par le groupement des propriétaires...

M. LANGLOIS: Des locataires.

M. PAUL: ... des locataires, dont M. Langlois est le porte-parole ce matin.

M. LANGLOIS: C'était un lapsus!

M. PAUL: Quant à moi, je déchirerai certaines pages du mémoire qui nous a été soumis ce matin pour ne pas avoir une indigestion démagogique, comme vous le signalait le ministre.

Je continuerai de me pencher avec beaucoup d'intérêt sur le problème des locataires, mais en aucune façon je ne voudrais être complice de certaines idées douteuses que l'on veut tenter de vendre à ces locataires, membres d'associations dont le travail peut être plus ou moins discutable, et surtout le but visé plus ou moins louable.

Ce sont les seules remarques que je voulais faire au sujet du mémoire qui nous a été présenté ce matin.

LE PRESIDENT (M. Blank): Le député de Portneuf.

M. DROLET: M. le Président, on se rend compte que les commissions parlementaires sont toujours très utiles, spécialement quand il s'agit de projets de loi aussi importants.

La Fédération des associations de locataires du Québec, par la voix de M. Langlois, vient de nous présenter son mémoire, et je pense que comme dans n'importe lequel des mémoires qui ont été déposés devant une commission parlementaire, il y a des choses que le gouvernement doit retenir et il y a des choses — comme le dit le ministre — qui nécessairement ne peuvent être acceptées.

Dans les recommandations que nous a faites la fédération ce matin —il y en a cinq, je crois — il y a certainement des choses qui sont acceptables et il y a d'autres suggestions qui, à notre avis, semblent demander que le gouvernement soit peut-être plus rigide sur certains points.

En ce qui nous concerne, nous allons continuer à écouter, à entendre les discussions, et lorsque le projet de loi sera étudié devant la Chambre, à ce moment-là nous prendrons les positions qui s'imposent. Mais en ce qui nous concerne, nous allons essayer de déchiffrer toute cette paperasse, afin d'être capables de prendre position pour défendre les citoyens du Québec qui ont le droit d'être défendus dans une telle loi.

LE PRESIDENT (M. Blank): Le député de Saguenay.

M. LESSARD: M. le Président, j'aurai deux questions à poser à M. Langlois. D'abord concernant les taux qui ont été tout simplement abolis, taux de 5 p.c, mais qui semblent avoir été remplacés par ce qu'on appelle, dans le projet de loi 79, à l'article 39, la création d'un service technique qui a pour fonction de surveiller, d'analyser.

Pourriez-vous me dire pourquoi votre organisme croit que ce n'est pas suffisant, si c'est le cas, ce service technique, pour protéger les locataires?

M. LANGLOIS: Je pense qu'ici on fait face à deux ordres de problèmes. Si j'ai bien perçu la fonction du service technique, c'est d'élaborer un certain nombre de critères qui vont sous-tendre les décisions prises par la Régie des loyers dans la région, de même que de fournir au gouvernement un ensemble de statistiques et de renseignements sur le logement pour les régions. Tout ça dans le but d'en arriver à l'application meilleure de la loi.

Lorsqu'on parle de 3 p.c. ou de 5 p.c, c'était dans l'optique de faire une démarche pour aller devant la Régie des loyers. Nous, nous avons déjà proposé il y a six mois un critère de 3 p.c. pour d'une part essayer de partager les démarches entre propriétaires et locataires, c'est-à-dire qu'en bas de 3 p.c. nous avons suggéré que le locataire puisse aller quand même contester la hausse, et en haut de 3 p.c. c'était le propriétaire qui lui-même faisait la démarche pour éviter que ce soit toujours le locataire qui soit obligé de faire la démarche.

Et aussi pour éviter que beaucoup de locataires ne se prévalent pas de la loi, parce que souvent, il faut bien les comprendre, ils craignent différentes représailles qui bien sûr ne

viennent pas souvent, mais ils les perçoivent comme réelles.

A ce moment-là, nous voyons ça, le service technique et les critères de 3 p.c. et de 5 p.c, comme deux choses complémentaires. Supposons que le propriétaire fasse une demande d'augmentation de 6 p.c, il faudra que la régie se réfère à certains critères. Donc, ces critères pourront être élaborés par le service technique. Moi, je vois ça comme étant complémentaire, ces deux services de la régie, qui, d'une part, contrôle les augmentations et, d'autre part, élabore un service technique qui consultera la population et qui donnerait des critères pour évaluer le premier rôle qui est de statuer sur les augmentations.

J'insiste pour défendre à nouveau cette recommandation qui nous est venue des associations locales à savoir qu'il faudrait simplement, pour simplifier l'application de la loi, qu'on crée vraiment un tribunal des loyers qui porterait sur le contrôle des hausses de loyer. C'est pour ça que nous avons revendiqué que toute hausse de loyer soit déférée à ce tribunal.

M. LESSARD: Pour notre part, en ce qui concerne le taux, M. le Président, nous croyons qu'on doit conserver un certain taux. A partir de ce seuil, je crois que le propriétaire devrait lui-même être dans l'obligation de s'adresser à la régie.

M. CHOQUETTE: Vous êtes en désaccord avec votre collègue, le député de Maisonneuve.

M. LESSARD: Oui, M. le Président, je suis d'accord avec lui.

M. CHOQUETTE: Vous êtes en désaccord avec lui.

M. LESSARD: Non, non, en accord. Nous croyons, M. le Président...

M. CHOQUETTE: Non, parce qu'il a dit le contraire.

M. LESSARD: C'est-à-dire qu'au-delà d'un certain seuil, M. le Président,...

M. CHOQUETTE: C'est consigné dans les Débats.

M. LESSARD: ... nous croyons que le propriétaire devrait lui-même, j'ai la déclaration du député de Maisonneuve, s'adresser à la régie au lieu que ce soit continuellement le locataire. Deuxième question: Le ministre parlait tout à l'heure d'un bail type ou, en fait, de certaines clauses du bail type qui seraient inscrites dans la loi 78. Vous avez sans doute pris connaissance de certaines clauses en particulier concernant les infractions. Est-ce que, pour la Fédération des associations de locataires du Québec, ça constitue une certaine protection? Est-ce que ça constitue en fait ce que le ministre tente d'appeler un bail type pour protéger les locataires?

M. LANGLOIS: J'ai appris moi aussi en même temps que vous, par la déclaration de M. Choquette, qu'il y aurait un bail type d'annexé, ce que je ne savais pas, pour être honnête; d'ailleurs le ministre ne l'avait pas déclaré. J'ai été très heureux de l'apprendre. Il faut bien s'entendre là-dessus, il faudra que ce bail type soit fait de telle façon, d'une part, qu'il soit en vigueur sur tout le territoire du Québec et aussi qu'il comporte une protection que nous jugeons, nous, efficace; et d'ailleurs je me référerai à ce moment-là au bail type que nous avons déjà soumis. Pour nous, si le bail type que vous entendez est plus ou moins près du bail type que nous avons suggéré, je serai très heureux bien sûr. Mais déjà je suis heureux du principe qu'au moins on ait dans un bail type les clauses qui sont présentes dans la loi. Je pense que c'est un net progrès sur la situation antérieure, je vous l'accorde.

En fait, ce que je n'ai pas aimé tout à l'heure, c'est que vous nous reprochez souvent de faire des commentaires qui sont durs et qui vous semblent, en tout cas, inadéquats ou injustes. Mais je vous ferai remarquer qu'entre autres, sur cette question du bail type, on ne savait pas ce qui en était et c'est pour ça qu'on a remis, encore une fois, notre revendication. On ne peut pas nous reprocher d'ignorer...

M. CHOQUETTE: Non, non.

M. LANGLOIS: ...ce que vous avez déclaré sur le bail type.

M. CHOQUETTE: Sur ce point, je trouve que vous avez tout à fait raison d'attirer notre attention. Le bail type était virtuellement dans le projet de loi dans le sens que, comme je l'ai dit, il y a des clauses auxquelles on ne pourra pas déroger dans les baux. Vous comprenez ce que je veux dire? Il y a des clauses où les propriétaires, les locataires pourront ajuster leurs conditions...

UNE VOIX: Le droit d'avoir un chat, entre autres.

M. CHOQUETTE: Oui, il y a des clauses auxquelles ils ne pourront pas déroger et ça c'est le fondement du bail type. Pour que ce soit encore plus explicite, plus précis et mieux compris, j'ai demandé aux légistes de préparer une annexe qui comprendra toutes les clauses obligatoires.

M. LESSARD: Je pose la question au ministre: Le ministre parle d'un certain nombre de clauses qui devront être insérées à l'intérieur du bail, et il y a une série d'infractions qui sont prévues à la section III du projet de loi 78. Mais

à l'article 1665 p) on dit — et je demanderais au ministre comment expliquer cela — que lorsque, en fait, ça ne sera pas compris, lorsqu'il y aura des infractions, et là je me demande si c'est vraiment efficace...

M. CHOQUETTE: Ecoutez, vous m'interrogez sur l'article 1665 p); il s'agit de la partie pénale du projet de loi.

M. LESSARD: D'accord, mais c'est une personne. En fait, les poursuites en vertu de cet article 1665 o) devront être intentées par toute personne autorisée par le gouverneur général, suivant la loi. Cela veut dire que, si le gouverneur général décide de ne pas intenter des poursuites, ils n'en intenteront pas. Quels seront à ce moment-là les moyens que pourront prendre les locataires?

M. CHOQUETTE: Oui, mais quand on se réfère aux poursuites pénales, on se réfère par exemple aux clauses non discriminatoires. Vous vous rappelez que nous avons introduit deux types de clauses non discriminatoires, une à l'égard des enfants, c'est-à-dire que les familles avec enfants ne pouvaient pas faire l'objet de discrimination à l'occasion d'un louage. Evidemment, tout en prenant en considération le nombre, c'est-à-dire la grandeur des lieux par rapport à la famille qu'on veut y faire loger. Qu'on veuille par exemple loger une famille de 15, c'est-à-dire, père, mère et 13 enfants dans un local de cinq pièces ou de quatre pièces, je pense bien que là, le propriétaire aurait des raisons valables de s'opposer parce qu'il y aurait tout simplement trop de monde dans les lieux. Mais, le fait d'avoir des enfants ne pourra pas donner l'occasion à la discrimination de la part du propriétaire, si les lieux sont suffisants. Or, là vous avez une infraction qui est créée par la loi, si le propriétaire "discrimine" à cause de ça, refuse un bail à cause de ça. Et là, on pourra introduire une poursuite pénale à l'égard de ce propriétaire qui a "discriminé".

M. LESSARD: Est-ce que ça va être automatique?

M. CHOQUETTE: Bien automatique, en matière de justice...

M. LESSARD: Oui.

M. CHOQUETTE: ... ça ne peut pas être automatique dans le sens qu'il faut quand même que quelqu'un...

M.LESSARD: Est-ce que ça va être le propriétaire? Le propriétaire pourra se plaindre à ce moment-là et une fois que le propriétaire,...

M. CHOQUETTE: Le locataire. M.LESSARD: ... le locataire, excusez-moi, une fois que le locataire se sera plaint, bien la poursuite deviendra automatique.

M. CHOQUETTE: C'est-à-dire qu'une poursuite pourra être intentée au niveau pénal. Il y a un autre type, un autre genre de discrimination, c'est la discrimination pour religion, langue, origine ethnique, sexe, etc. Là aussi il s'agit d'introduire un autre type d'infraction pour une discrimination sur cette base. Alors là encore, c'est la même chose, une poursuite pénale pourra être engagée pour sanctionner une discrimination qui aurait été faite par un propriétaire pour ces motifs-là.

Maintenant, là vous n'êtes pas dans le bail type, par exemple. Vous êtes dans les nouvelles dispositions législatives et, à proprement parler, on ne peut pas dire que vous êtes dans le bail type, parce que le bail type ne peut pas être toute la loi. Il faut que le bail type retienne l'essentiel des relations contractuelles entre propriétaires et locataires. Je ne me souviens plus de certaines clauses qui peuvent être introduites dans un bail type, mais, par exemple, sur la question des réparations locatives, pour vous donner un exemple, en vertu de la loi que nous proposons, le locataire sera seulement responsable des réparations locatives, tandis que le propriétaire sera toujours responsable des grosses réparations. Par conséquent, dans le bail type, il y aura une clause à l'effet que ceci est obligatoire et régit automatiquement les parties et les parties ne pourront pas y déroger à moins, je pense, dans un bail commercial où on pourrait s'adresser à la cour pour avoir un changement, parce que dans les baux commerciaux, les conditions peuvent être différentes. Il s'agit moins du rôle social du gouvernement ou du législateur de protéger les locataires, il s'agit bien plus d'une question d'activité économique, dans les baux commerciaux.

Mais le bail type, par conséquent, contiendra une série de dispositions qui vont faire que les relations entre propriétaires et locataires vont être beaucoup plus clairement établies, les responsabilités légales de l'un vis-à-vis de l'autre vont être clairement établies, on ne pourra pas y déroger.

M. LESSARD: Est-ce que le ministre a l'intention de soumettre ce bail type?

M. CHOQUETTE: Sans doute. J'ai demandé de le faire rédiger, en somme, de prendre toutes les clauses d'ordre public qui sont déjà dans le bill 78 et de préparer une formule de bail qui comprendra ces clauses. Alors, à la fin du projet, nous pourrions avoir, mettons, cédule A, et voici les clauses obligatoires. Maintenant, sur le prix du loyer, sur les autres conditions, évidemment, il appartient aux propriétaires ou aux locataires de s'entendre. Le législateur ne peut pas dicter aux parties quelles seront les conditions contractuelles dans lesquelles ils vont contracter.

Et sur les responsabilités respectives de part et d'autre, eh bien, les baux à l'avenir devront se conformer au moins à ces clauses-là, à ces conditions-là. Et c'est la formule albertaine, je crois, dans l'ensemble de ce que je vous dis, parce que c'est ça qu'on a en Alberta; c'est la seule autre province canadienne où il y a une formule qui s'approche du bail type auquel vous avez fait allusion.

M. LANGLOIS: Est-ce qu'on peut avoir bientôt une formule de ce bail type?

M. CHOQUETTE: Bien j'ai demandé qu'on le rédige et puis...

M. LESSARD: Cela veut dire quand, à peu près, pourra-t-on en prendre connaissance?

M. CHOQUETTE: Peut-être pas aujourd'hui ou demain, mais lors de la prochaine séance de la commission parlementaire, dans le courant du mois de mai.

M. LANGLOIS: M. le Président, j'aurais une question à poser au ministre. Vous avez dit, dans vos explications tout à l'heure, que le tribunal des loyers était un organisme qui allait reconnaître les augmentations justes de loyer. Si tel est le cas, je comprends mal que vous refusiez de soumettre à la juridiction de la Régie des loyers des logements construits entre un et cinq ans, c'est-à-dire vieux de moins de cinq ans. Si les augmentations de loyer sont justes, évidemment, elles seront justes aussi pour cette classe de la population, et le locataire pourra bénéficier, comme tous les autres locataires, des services de la régie et le propriétaire ne sera pas mis en faillite ou encore ses investissements ne seront pas mis en péril ou encore il n'aura pas lieu de craindre puisque la régie lui donnera des augmentations justes.

Je trouve que, si telle est l'optique de la régie que vous envisagez, à savoir un tribunal qui va reconnaître des augmentations justes, on pénalise les locataires de ces habitations en ne leur donnant pas le recours à la régie notamment pour tous les autres problèmes: problème de renouvellement de bail, problème d'éviction, etc.

M. CHOQUETTE : Les locataires, dans les premiers cinq ans, seront soumis comme les autres locataires aux conditions d'ordre public qui sont dans la loi.

M. LANGLOIS: Oui, je me souviens, j'ai fait une erreur; d'accord.

M. CHOQUETTE: La loi s'appliquera entièrement autant aux locataires des cinq premières années qu'aux locataires de lieux plus anciens mais c'est sur l'intervention du tribunal des loyers. Dans les premiers cinq ans, nous avons proposé qu'il ne puisse pas intervenir parce qu'il ne faut pas oublier que le propriétaire ou le constructeur, quand il construit un immeuble, avant de louer tous les lieux ça peut prendre un peu de temps, il ne loue pas cela nécessairement rapidement; le niveau des loyers, il ne le trouve pas automatiquement lors de la première location suivant les conditions économiques.

A part cela, il faut quand même lui donner une certaine incitation à construire. Après tout, les logements construits dans les cinq premières années, ce n'est qu'une petite catégorie par rapport à l'ensemble des loyers disponibles pour les locataires.

M. LANGLOIS: C'est quand même important.

M. CHOQUETTE : Oui, mais socialement, je crois qu'il faut plutôt protéger la majorité et protéger ceux qui sont dans les logements les plus anciens. Ceux qui vont vers les nouveaux logements, ils vont accepter ce risque de se trouver dans un nouveau logement et de ne pas avoir la protection intégrale du tribunal des loyers; c'est un risque qu'ils vont assumer mais ils sauront exactement à quoi s'en tenir. A ce point de vue-là, nous prenons en considération, comme je l'ai dit tout à l'heure, l'intérêt de stimuler la construction de logements.

Je pense qu'on admettra que le gouvernement ne doit pas, par sa politique, décourager la construction de logements parce qu'en définitive ce seront les locataires, dans 5, 10, 15 ou 20 ans, qui paieraient les conséquences de cette action gouvernementale qui, en se voulant sociale, aurait eu des implications économiques défavorables sur la construction de logements. C'est à la lumière de ces impératifs que nous suggérons la formule qui se trouve dans ce projet de loi.

M. LANGLOIS: II faudrait d'ailleurs demander à ces nouveaux locataires s'ils sont prêts à assumer ce risque. Vous dites qu'ils sont prêts mais, moi, je trouve que cette partie de la population sera pénalisée d'autant plus que, si j'accepte votre point de vue disant que la Régie des loyers va accorder des augmentations justes, je ne vois pas du tout pourquoi le gouvernement refuserait d'inclure cette catégorie de logements.

Pour moi, cette explication n'est par claire. Je pense que les locataires ne l'acceptent pas non plus.

M. CHOQUETTE : Voici un facteur. Il ne s'agit pas juste d'une question de justice théorique. Dans l'immeuble, ce qui se produit souvent c'est qu'une maison construite aujourd'hui, théoriquement, commence à se déprécier à raison de 5 p.c. par année. Le capital, théoriquement, se déprécie à raison de 5 p.c. par année, mais cela n'est pas si vrai que cela dans le domaine des maisons d'habitation. Même si, sur le plan fiscal, les propriétaires prennent, auprès

des autorités gouvernementales, des dépréciations annuelles de 5 p.c, nous savons tous qu'en réalité l'immeuble ne se déprécie pas à cette vitesse-là.

Evidemment, je veux bien croire qu'il est rare qu'un immeuble, par exemple, dure plus de 100 ans; au bout de 100 ans, il n'y a pas de doute qu'il a subi sa dépréciation complète et qu'il est prêt à être démoli. Sur une période de 30 ou 40 ans, un immeuble ne perd pas de valeur, c'est-à-dire que je peux acheter un immeuble aujourd'hui $50,000 et je suis quasi assuré, dans le marché dans lequel nous vivons en Amérique du Nord, que cet immeuble de $50,000 aura une valeur d'au moins $50,000 dans 10 ans d'ici et peut-être dans 20 ans d'ici.

Par conséquent, la dépréciation que nous prenons à certains points de vue sur les immeubles ne correspond pas à la réalité du marché. Je comprends qu'il y a des facteurs qui jouent et qui l'expliquent. Il y a, par exemple, l'accroissement dans les coûts de construction. En effet, je peux avoir construit un immeuble en fonction d'un décret existant il y a dix ans, où les ouvriers et les menuisiers étaient payés $2.50 l'heure, tandis qu'aujourd'hui ils sont peut-être payés $7.50 l'heure. L'accroissement du coût de la construction fait que la dépréciation ne s'accomplit pas comme prévu dans les lois fiscales.

Deuxièmement, le phénomène de l'inflation. On sait qu'on vit une période inflationnaire à peu près constante depuis 15 ans, 20 ans ou 30 ans, au rythme de 4 p.c. ou 5 p.c. par année. Ceci a des répercussions dans l'immeuble.

Troisièmement, je pense qu'en plus de cela la dépréciation sur les immeubles n'est pas aussi réelle que les 5 p.c. qu'on donne habituellement dans le marché immobilier à cause peut-être aussi du fait qu'il n'y a jamais eu tellement de — comment pourrais-je dire? — on n'est pas devant un marché où l'offre est constamment très très ouverte en matière de logements et d'habitations. Le marché tolère toujours une très petite part de logements non loués, 2 p.c, 1 p.c., 5 p.c. Dans les garçonnières, par exemple, à Montréal, c'est allé, certaines mauvaises années, jusqu'à 7 1/2 p.c., peut-être 10 p.c. Là, vous avez vu une chute dans le marché de ce genre d'habitations. Mais, en règle générale, dans l'habitation, quasi tous les logements sont occupés.

Vous avez constamment une demande économique, vous avez toujours la valeur économique des immeubles, qui sert à soutenir la valeur de remplacement de ces immeubles, c'est-à-dire la valeur de la construction des immeubles. Aujourd'hui, on évalue un immeuble bien plus en termes de rendement qu'on l'évalue en termes du coût de la construction. Tous ces facteurs font donc que la dépréciation des immeubles ne se fait pas probablement au rythme où certaines lois le prévoient.

Alors, ceci, par conséquent, pour moi, fait que je crois que le gouvernement a raison d'intervenir sur le plan social au bout d'un certain temps, par exemple cinq ans, et là de dire: Ecoutez, les propriétaires, vous n'avez pas droit à un rendement aussi considérable, parce que, même si vous nous dites que votre immeuble a subi une dépréciation, en fait, il n'a pas subi une telle dépréciation. Le propriétaire jouit à ce moment-là, à mon sens, d'une rente, c'est-à-dire d'une espèce de rendement économique qui est discutable et je pense qu'il faut en donner les avantages aux locataires également. De là, l'intervention d'un tribunal des loyers ou d'une Régie des loyers pour faire en sorte qu'on modère la hausse des loyers, par conséquent, qu'on donne un des avantages de cette rente aux locataires autant qu'aux propriétaires.

Je ne me situe pas dans une économie socialiste ou une économie de contrôle des loyers, mais dans une économie de restriction des hausses abusives des loyers. A part cela, il ne faut pas oublier — c'est également la philoso-phi de cette loi — qu'il ne s'agit pas de contrôler les loyers pour éviter toute activité économique ou pour éviter les lois du marché, mais qu'il s'agit d'éviter des abus. C'est beaucoup plus dans le sens d'une loi de protection du consommateur comme locataire que cette loi se situe dans le contexte d'une loi de réglementation de tout le secteur de l'habitation.

LE PRESIDENT (M. Blank): Le député de Bourassa.

M. TREMBLAY (Bourassa): Merci, M. le Président. M. Langlois, je voyais dans votre rapport que vous disiez qu'en 1969, 82.4 p.c. des locataires n'avaient pas eu gain de cause à la Régie des loyers et je voyais aussi, en 1970, que 92 p.c. n'avaient pas eu gain de cause à la Régie des loyers. Est-ce exact? Vous avez ça dans votre rapport.

M. LANGLOIS: Il s'agissait d'une enquête par échantillonnage, effectuée à Montréal. L'ordre de grandeur des chiffres est à peu près exact, sauf qu'il y a eu une erreur d'impression, ce qui fait qu'il y a une différence de 4 p.c. ou 5 p.c.

M. TREMBLAY (Bourassa): II peut y avoir une erreur.

M. LANGLOIS: Mais l'ordre de grandeur est le même. C'est-à-dire que c'était beaucoup plus élevé en faveur du propriétaire. Du moins, à partir de l'échantillonnage qu'on a fait. D'ailleurs, j'aimerais avoir les statistiques officielles, puisque nous ne les avons pas, encore une fois. Peut-être que M. le ministre...

M. TREMBLAY (Bourassa): Comme ça, ce n'est pas officiel?

M. LANGLOIS: Bien, ce sont les chiffres officiels d'une enquête.

M. TREMBLAY (Bourassa): Vous venez de le dire, c'est bien ça.

M. LANGLOIS: Ce n'est pas le chiffre officiel de la régie, on ne peut pas l'obtenir.

M. TREMBLAY (Bourassa): D'accord. Maintenant, la deuxième question, vous avez parlé des logements de cinq ans et moins, c'est-à-dire que vous voudriez qu'ils fassent partie, d'après votre idée, votre exposé, du tribunal des loyers. Est-ce bien cela?

M. LANGLOIS: Oui.

M. TREMBLAY (Bourassa): A ce moment-là, est-ce que vous seriez d'accord avec moi pour dire que la construction est le plus gros employeur au Québec, après le gouvernement et le secteur parapublic?

M. LANGLOIS: Sans doute.

M. TREMBLAY (Bourassa): Vous êtes d'accord avec moi. Mais est-ce que vous seriez d'accord, d'un autre côté, pour que l'on ait un tribunal aussi rigide au point de vue des salaires des menuisiers, des ouvriers, des briqueteurs qui travaillent beau temps mauvais temps, que l'on soit aussi sévère? Est-ce que vous voudriez cela aussi?

M. LANGLOIS: A ce moment-là, vous posez tout le problème du contrôle des salaires, mais il faut parler du contrôle des profits aussi.

M. TREMBLAY (Bourassa): Non, non, écoutez. Vous allez comprendre, comme moi, que chez les locataires on a beaucoup de gens... Vous venez d'accepter avec moi que la construction est une des plus grosses entreprises après le gouvernement et le secteur paragouver-nemental. D'accord? Alors, si l'on veut appliquer cela aux nouveaux logements de cinq ans et moins, on va geler les salaires. On va avoir un tribunal pour que les salaires n'augmentent pas plus que X pour cent pour arriver avec les loyers. Cela est une économie qui s'équilibre.

M. LANGLOIS: Ecoutez, on m'a accusé tantôt de faire de la démagogie. Je ne relancerai pas la même accusation.

M.TREMBLAY (Bourassa): Ecoutez, c'est bien ça. Vous m'avez donné une feuille de papier à lire et je l'ai lue.

M. LANGLOIS: Mais la réponse à votre question est très simple.

M. TREMBLAY (Bourassa): Je vous ai très bien suivi, mais j'aimerais bien savoir votre idée sur les logements de cinq ans et moins. Est-ce que l'on va pénaliser nos gens de la construction parce que la construction est le deuxième plus gros employeur?

M. LANGLOIS: Oui.

M. TREMBLAY (Bourassa): Parmi ces gens-là, il y en a sûrement plusieurs qui ont des logements. Est-ce que l'on voudrait les pénaliser, eux aussi?

M. LANGLOIS: Alors, vous me permettez de répondre sans m'interrompre?

M. TREMBLAY (Bourassa): Oui, je vous le permets.

M. LANGLOIS: Premièrement, la loi — là, je conteste votre interprétation— qui protégera les locataires, même dans les habitations construites entre un et cinq ans, n'arrêtera pas la construction pour la bonne raison que la construction, cela relève aussi des politiques fiscales du gouvernement. Les experts pourront vous les expliquer. Si vous incitez par des politiques fiscales le domaine de la construction, même s'il y a une Régie des loyers, qui est d'ailleurs, entendons-nous, une régie au sens où l'entend M. Choquette, qui contrôle les hausses abusives, à ce moment-là, c'est une régie inoffensive pour ces nouveaux propriétaires. Donc, la construction ne sera pas gelée du tout. Je trouve que, si l'on insiste trop sur cet argument, on fait de la démagogie après m'avoir accusé tantôt d'en faire. Laissez-moi terminer, s'il vous plait! La construction ne sera pas arrêtée. La construction dépend des politiques du gouvernement, de l'argent qu'on injecte là-dedans. Elle ne sera pas influencée, à mon avis, par une loi au sens où vous l'entendez, vous les membres de la commission parlementaire.

Donc, ne venez pas me dire que le fait que l'on va appliquer la régie aux logements construits depuis un an jusqu'à cinq ans, cela va réduire la construction. Ce n'est pas vrai. Le fait d'utiliser les locataires, travailleurs dans la construction comme argument, je trouve que ce n'est pas valable parce que la construction ne sera pas gelée.

M. TREMBLAY (Bourassa): Ce n'est pas valable dans votre cas. Je suis très à l'aise pour en parler parce que je n'ai aucune propriété que je loue. Alors, je suis très à l'aise pour en parler. Je n'ai pas d'investissements dans ce sens-là.

M. LANGLOIS: Et moi non plus.

M. TREMBLAY (Bourassa): Mais les personnes qui vont faire des emprunts pour réaliser des projets de construction, on est d'accord, avec le coût de la vie qui augmente de 6 p.c, 7 p.c. ou 8 p.c. par année — il y en a que c'est $0.20 l'heure d'augmentation par année — sûrement qu'on ne veut pas les pénaliser puisqu'ils travaillent fort. Je suis prêt à accepter cela. Mais, d'un autre côté, il faut accepter aussi qu'au lieu de coûter $15,000 par logement à construire, si cela en coûte $20,000 pour les premiers cinq ans, il faut bien, pour ces

logements, si vous voulez dire comme moi, si on veut en construire, qu'ils puissent charger un prix un peu plus élevé.

M. LANGLOIS: Mais la régie le reconnaît, semble-t-il. La régie dit: On va accorder les hausses normales.

M. TREMBLAY (Bourassa): Ils ne sont pas obligés jusqu'à cinq ans. Je trouve, à ce moment-là, sur le plan économique, qu'on va à l'encontre, si vous voulez...

LE PRESIDENT (M. Blank): L'honorable député de Saguenay.

M.TREMBLAY (Bourassa): ... de tous les investissements.

M. LESSARD: Est-ce que je pourrais faire remarquer qu'il ne s'agit pas, dans ce projet de loi, de geler l'augmentation des loyers?

M. TREMBLAY (Bourassa): Je n'ai pas parlé au député de Saguenay; j'ai parlé à M. Langlois.

M. LESSARD: II s'agit simplement d'empêcher des hausses abusives.

M. TREMBLAY (Bourassa): Je ne suis pas intéressé à répondre au député de Saguenay.

M. LESSARD: Or, M. le Président, il semble qu'on permette...

M. TREMBLAY (Bourassa): M. Langlois m'a répondu.

LE PRESIDENT (M. Blank): A l'ordre!

M.LESSARD: ... dans ce projet de loi des hausses abusives de loyer pour les logements qui sont construits depuis moins de cinq ans et qu'on établisse un certain contrôle pour les autres logements. Il ne s'agit pas tout simplement de contrôler l'augmentation des loyers; il s'agit de faire en sorte que ces augmentations de logement se fassent sur des critères et des normes qui ne sont pas abusifs. C'est tout simplement cela.

M.TREMBLAY (Bourassa): Je vais vous répondre à vous, M. le Président.

M. LESSARD: Je ne comprends pas pourquoi il y aurait les cinq ans et une autre période.

M. TREMBLAY (Bourassa): Je suis convaincu que, de un à cinq ans, si pour les logements les prix sont abusifs, vous savez comme moi qu'ils ne se loueront pas. Alors pour mettre un point final à cela, ils ne se loueront pas, point.

LE PRESIDENT (M. Blank): Merci beaucoup. Merci, M. Langlois. Le Barreau du Québec.

Groupement des locataires du Québec métropolitain

M. GAUMOND: M. le Président, avec votre permission, je me suis entendu avec ma consoeur et mon confrère pour soumettre notre mémoire ou nos prétentions rapidement à cette commission. Par après, ils ont consenti. Si vous voulez entériner cette décision.

LE PRESIDENT (M. Blank): D'accord, d'accord. Elle m'a dit que vous vous étiez arrangés pour cinq minutes.

M. GAUMOND: Cinq minutes et ce ne sera pas plus de cinq minutes.

LE PRESIDENT (M. Blank): Le Groupement des locataires du Québec métropolitain. Et vous, vous êtes Me...

M. GAUMOND: Gilles Gaumond, procureur du Groupement des locataires du Québec métropolitain et à ma gauche, M. Roger Bourgeois, président du Groupement des locataires.

M. le Président, M. le ministre, messieurs les députés, cela fait quatre ans qu'à titre de procureur du groupement des locataires je travaille dans le domaine du logement. Je ne veux pas mettre ici en doute ma compétence. Vous pourrez la critiquer de votre côté mais je n'accepterai certainement pas qu'on me renvoie avec des phrases lapidaires comme on l'a fait tout à l'heure.

M. le ministre, vous étiez choqué, tout à l'heure, par nos revendications mais laissez-moi vous dire qu'à la veille de Noël, lorsque vous avez retiré le bill 59 sans rien prévoir à la place, laissant le champ libre aux spéculations et aux augmentations abusives, il y avait une large partie de la population qui était parfaitement choquée. D'ailleurs, vous avez été obligé, à ce moment-là, de refaire une autre loi, une loi, qu'on peut dire, de "patchage".

Quant à moi et quant à l'association que je représente, après avoir mûrement réfléchi sur les dispositions que nous vous avons soumises lors de l'audition du bill 59, nous n'avons absolument rien à ajouter. Les remarques que nous voulons faire, nous les ferons à la population parce que nous ne croyons pas que vous êtes représentatifs des locataires et capables d'assumer leurs droits et de prévoir une législation qui serait à leur avantage ou tout au moins qui protégerait leurs droits.

Dans le bill 78 et dans le bill 79 qui sont présentement en discussion, il y a des points sur lesquels on est d'accord. Mais on ne peut même pas venir ici et dire qu'on est d'accord parce qu'on a peur que d'autres organismes viennent dire: Ah ça, enlevez ça. On ne veut pas d'un tribunal administratif. Confiez-le à la juridiction de la cour Provinciale ou d'autres affaires. Et on n'est même pas sûr que vous ne céderez pas là-dessus, parce que l'expérience antérieure démontre que vous avez cédé complètement.

Là-dessus, on pourrait reprendre tout le bill, un article après l'autre, seulement sur les clauses prohibitives dont vous faites grand état. Si on les regarde et si on les compare au bill 59, c'est simple; on s'aperçoit qu'à l'article 1665 vous disiez qu'il ne devrait pas y avoir de chèques postdatés, qu'on ne devrait pas forcer à un dépôt mais vous ne faites pas un dépôt. Qu'est-ce que vous faites? Vous demandez qu'on fournisse un chèque pour le dernier mois du loyer. Alors c'était beaucoup plus virulent dans le bill 59 parce qu'on empêchait tout, tout dépôt et caution. Cela avait été bien reconnu ici, c'est que tout simplement on abusait et on ne les remettait pas purement et simplement.

Aujourd'hui, on arrive ici. La dernière fois, on s'est fait écouter. On s'est fait dire: Vous avez fait un excellent travail. Vous avez préparé un mémoire sérieux. M. Rémi Paul — il est cité dans le journal des Débats — a dit: Nous sommes heureux, ce matin, d'entendre la voix des gagne-petit et d'entendre une autre version.

M. PAUL: Je n'ai pas changé d'opinion.

M. GAUMOND: Je sais que vous n'avez pas changé d'opinion mais, dans les faits, regardons les lois, regardons...

M.PAUL: Attendez le débat de deuxième lecture. Cela reste toujours un avant-projet de loi.

M. GAUMOND: C'est un avant-projet de loi mais regardons ce qui est arrivé sur le dernier bill 59. Je suis d'accord, si on voulait profiter de l'Office de révision du code civil, à ce moment-là on aurait dû, si on retirait le bill 59, prévoir immédiatement une loi de remplacement. Au lendemain, au début de janvier, il a fallu reprendre encore le collier, compiler des plaintes, aller lutter à la Régie des loyers, rencontrer des associations pour faire valoir au gouvernement qu'on avait mis les locataires dans une situation tout simplement défavorisée.

Le gouvernement n'a pas compris cela.

Si vous représentez la population, alors que 56 p.c. de la population est locataire, on n'a pas besoin de grands palabres et tout ça pour vous faire savoir le pouls de cette population. Et aujourd'hui, ce sont tout simplement nos prétentions. Je ne viendrai pas me faire dire: On vous fait déchirer votre feuille ici aujourd'hui. Je suis choqué !

Effectivement, on a le droit d'être choqué. Je ne profiterai pas du fait que vous êtes du bon côté d'une tribune pour me faire insulter, et surtout faire insulter les locataires. Vous avez une législation. Vous avez des points importants dans cette législation, et c'est à vous d'être capables de percevoir le pouls de la population là-dessus et ne pas céder aux pressions des associations de propriétaires et des associations assimilées à ces propriétaires. Tout le monde ici véhicule les mêmes intérêts, semble-t-il, et ce sont les intérêts du propriétaire.

Quant à nous, nous considérons que nous n'avons rien à ajouter là-dessus et nous avons des prétentions que nous soumettrons sûrement et simplement à la population. Merci.

LE PRESIDENT (M. Blank): Merci. A l'ordre, s'il vous plaît!

Barreau du Québec

MME AUDETTE-FILION: M. le Président, M. le ministre, MM. les membres de la commission parlementaire, mon nom est Micheline Audette-Filion, recherchiste au Barreau du Québec, accompagnée ce matin de Me André Trotier, de Québec. Nous allons essayer de faire nos représentations dans une atmosphère plus sereine.

Le Barreau du Québec était présent, il y a quelques mois à peine, devant cette commission parlementaire et il faisait des recommandations au sujet du projet de loi 59, le code des loyers. A la suite de certains inconvénients soulevés devant la commission, le ministre de la Justice retirait le projet de loi 59 et le remplaçait par les projets de loi 78 et 79, préparés —nous avait-il dit — avec la collaboration de l'Office de révision du code civil de façon à en arriver à une réforme plus globale de toute la législation concernant le louage de choses.

Nous sommes très heureux de cette attitude du ministre, même si les délais occasionnés ont eu le désavantage de créer des remous dans la population qui ont amené par la suite l'adoption — nécessaire sans doute — du bill 280.

Pour le Barreau, la législation prévue par les bills 78 et 79 représente d'énormes améliorations sur le projet de code des loyers et apporte des modificattions dont nous nous réjouissons, modifications que nous avions, en partie, proposées devant la commission, ou qui avaient été proposées par certains autres organismes.

En effet, cette législation prévoit un mécanisme d'intervention sur demande seulement dans le domaine de la fixation des prix des loyers, sans pour autant geler les loyers, ni intervenir là où les parties se mettent d'accord sauvegardant ainsi le principe de la liberté contractuelle.

Elle introduit de nouvelles dispositions de nature à protéger le consommateur en prévoyant, par exemple, la possibilité de faire réviser un contrat qui serait injuste à son égard. S'intégrant dans le code civil lui-même, elle corrige les chevauchements des législations de droit substantif créées par la coexistence de lois parallèles et les incohérences et les contradictions qui en résultaient.

Le Barreau prend acte de la prise de position de l'Etat au sujet de la nécessité d'intervenir dans la mesure où il le fait en matière de prolongement des baux et de fixation de loyers, mais s'interroge sur l'opportunité de confier toute autre juridiction à un organisme administratif plutôt qu'au tribunal de droit commun

intégré et la juridiction d'appel à un tribunal séparé du circuit normal.

En effet, la législation proposée confie, pour toute l'étendue de la province, à des commissaires aux loyers — donc â des fonctionnaires de l'Etat — et à un tribunal séparé du circuit des tribunaux de droit commun, le tribunal des loyers, non seulement la fixation des loyers et le prolongement des baux, mais aussi toute l'application de la loi et des principes de droit civil en matière de locaux d'habitation.

Cette innovation est non souhaitable en principe et créera dans les faits des difficultés inextricables. Mon confrère, Me Trotier, va élaborer pour vous les principes que nous défendons à ce sujet et je pourrai par la suite peut-être reprendre quelques-uns des articles du projet de loi 78 sur certaines modalités proposées.

M. TROTIER: M. le Président, après les scènes que j'ai vues ici ce matin, scènes disgracieuses entre autres, j'oublie le texte du mémoire que je devais vous présenter et je vais me mettre en cause quelques instants avant de vous faire valoir les recommandations du Barreau.

J'ai été appelé à être administrateur de la Régie des loyers durant douze ans; j'ai siégé à Québec. J'ai vu à ce moment-là les besoins du peuple, j'ai vu surtout les abus du peuple. J'ai vu des propriétaires et des locataires qui étaient des gens qui méritent toute la considération que l'on doit leur porter; j'en ai vu d'autres cependant qui ont abusé de ces lois. Je me dis qu'à l'occasion de la nouvelle législation que nous sommes à créer nous devons procéder avec une prudence extrême sans tenir compte, je vous le demande en grâce, des interventions comme celles de ce matin qui font en sorte que nous n'avançons en rien si ce n'est à créer un climat qui décourage les gens valables de venir vous soumettre des mémoires valables. Ce n'est pas le cas du Barreau; le Barreau est serein, le Barreau doit être au-dessus de toutes ces personnalités. C'est dans cet esprit que je vais vous faire un résumé des recommandations du Barreau en ce qui concerne les bills 78 et 79.

Il est dommage que ces gens soient partis parce qu'il ne s'agit pas d'un organisme qui parle à ce moment-ci...

M. LESSARD : M. le Président, sur un point de règlement. Je pense bien que nous aurons à juger tout simplement nous-mêmes du mémoire. Si vous avez à critiquer certaines propositions qui ont été faites par les représentants des locataires, vous ferez la différence entre vous autres et les autres; vous n'avez pas grand-chose à perdre, c'est probablement ça qui arrive.

M. PAUL: M. le Président, sur un rappel au règlement.

LE PRESIDENT (M. Blank): A l'ordre!

M. LESSARD: Présentez tout simplement votre mémoire, on va l'écouter et, comme d'habitude, on l'étudiera.

LE PRESIDENT (M. Blank): A l'ordre!

M. LESSARD: Comme d'habitude, le ministre se soumettra...

LE PRESIDENT (M. Blank): A l'ordre, cest moi qui vais décider s'il est hors d'ordre ou non.

M. LESSARD: Je suis obligé de soulever un point de règlement, M. le Président, je pense qu'il n'appartient pas à une association qui vient se faire entendre ici de juger une autre association.

LE PRESIDENT (M. Blank): C'est à moi de juger.

Le député de Maskinongé.

M.PAUL: M. le Président, est-ce que je pourrais faire remarquer à mon confrère qu'il peut exposer calmement son point de vue? Il aura un écho fidèle de ses propos par la voix du député de Saguenay, qui se chargera de transmettre aux absents les remarques qu'il voudra bien nous adresser avec calme.

M. LESSARD: M. le Président, il n'y a pas de point de règlement là du tout. Je demande à un organisme de présenter son mémoire et ses propositions sans commencer à discuter du mémoire de l'organisme précédent. S'ils ne sont pas d'accord, qu'ils le disent à partir de résolutions comme telles qui sont présentées et qu'ils ne commencent pas...

LE PRESIDENT (M. Blank): Je pense que...

M. LESSARD: ... à un moment donné de juger; on aura à juger, nous autres.

LE PRESIDENT (M. Blank): ... le député de Saguenay a entendu les paroles de M. Langlois. Je pense que M. Langlois a fait des remarques assez dures sur les autres groupements. Je pense que le Barreau peut discuter des autres mémoires s'il le veut.

M. LESSARD: M. le Président, M. Langlois n'a pas parlé du tout du Barreau, il a fait des remarques au ministre de la Justice. C'est ça...

LE PRESIDENT (M. Blank): Lisez le journal des Débats, vous trouverez autre chose.

M. TROTIER: Ceci étant dit...

M. LESSARD: Allez-y, on vous écoute.

M. TROTIER: ... si vous permettez, M. le Président, le Barreau est d'avis que la création du nouveau tribunal administratif suggéré par le bill 78 mérite d'être analysée et de peut-être, nous vous le soumettons respectueusement, prendre une autre forme. Il ne faut pas oublier

que le chapitre du louage est, après le chapitre de la vente, celui qui est le plus important à l'intérieur de notre code civil et, conséquemment, il régit des rapports de droit commun. Or, le Barreau considère que ces rapports de droit commun doivent continuer à être administrés par la cour Provinciale et non par un tribunal de droit administratif entièrement séparé.

Qu'il nous soit permis à ce moment-ci de sauter à une conclusion immédiate: Pourquoi ne pas créer à l'intérieur de la cour Provinciale, qui est déjà structurée, une division spéciale? Nous vous le soumettons.

Nous avons déjà les juges, nous avons déjà les greffes, nous avons déjà tous les instruments en main. C'est pourquoi nous ne voyons pas pourquoi il y aurait lieu de créer un tribunal administratif pour administrer uniquement le louage de choses, alors qu'à l'intérieur de notre système judiciaire nous avons déjà cet organisme voulu.

C'est la première recommandation du Barreau qui apparaît tout particulièrement aux pages 8 et 9 du mémoire. Et nous posons la question au bas de la page 9, entre autres, en disant: "En résumé, il nous paraît inutile de créer un tribunal administratif devant lequel seront mues des causes de droit civil pur qu'on aura soustraites à la compétence des tribunaux de droit commun spécialisés dans le domaine. Verra-t-on dans l'avenir des tribunaux administratifs s'occuper l'un du contrat de vente, l'autre du contrat de mandat, l'autre du contrat de société et des tribunaux de droit commun qui n'auront plus de dossiers à régler, si bien qu'on leur demandera de s'occuper de questions administratives? "

Et nous résumons nos conclusions à la page 10 en disant: "En résumé, le Barreau s'oppose aux dispositions du projet de loi 79 qui accordent aux commissaires des pouvoirs autres que des pouvoirs administratifs véritables."

En fait, le souci qu'a le Barreau c'est de demeurer dans un champ d'activité donné. Lorsque nous parlons d'administration, occupons-nous des questions administratives, mais lorsqu'il s'agit de litiges qui relèvent du droit commun, que l'on revienne à ce moment-là aux tribunaux existants. C'est le grand souci qui nous guide. Si vous vous référez à la page 5 de notre mémoire, vous verrez quelle est la juridiction des commissaires maintenant.

Autrefois l'assistant administrateur y fixait le loyer, puis comme pouvoir accessoire l'administrateur s'occupait des demandes de prolongation ou de non-prolongation de bail. Aujourd'hui, en vertu du nouveau bill, on donne aux commissaires des pouvoirs de droit commun. On lui dit: Vous aurez le droit d'apprécier les demandes en résiliation de bail, etc. Mais par ailleurs, on supprime la procédure. H y a une disposition dans le bill qui dit que le code de procédure ne s'applique pas.

Alors, on se dit nous, en regard de tout cela: Activons le règlement des causes en créant une section spéciale de la cour; et quant aux commissaires, donnons-leur des pouvoirs administratifs uniquement et laissons donc aux tribunaux le soin de se prononcer sur les problèmes de droit commun.

M. PAUL: Est-ce que nous ne pourrions pas nous référer à ce qui se produit actuellement à l'endroit des petites créances?

M. TROTIER: Exactement. Exactement. Nous pourrions adopter un système identique, mais là, l'application relève non pas d'un tribunal administratif séparé, mais d'une cour existante.

D'ailleurs, si vous voulez bien vous référer à la page 6, vous allez voir toute une série d'exemples que nous avons donnés sur la juridiction du commissaire. On lui fera entendre une demande en nullité de bail, entre autres. Défaut caché.

C'est pourquoi, à la page 11, nous recommandons de donner aux commissaires seulement des pouvoirs qui étaient accordés aux anciens administrateurs, et croyez-moi, ça allait bien. Les anciens administrateurs jugeaient du prix du loyer et jugeaient des prolongations, c'étaient toutes des fonctions administratives qu'ils remplissaient très bien. Mais de là cependant à leur faire juger de la nullité d'un bail, je considère que nous nous inférons dans un problème de droit commun qui relève uniquement d'un tribunal.

Telles étaient donc, en substance, les remarques du Barreau. Nous demandons à votre commission de bien vouloir en tenir compte si elle le juge à propos. Merci.

LE PRESIDENT (M. Blank): Le ministre de la Justice.

M. CHOQUETTE: Si je comprends bien l'exposé de Me Trotier et de Mme Audette-Filion, on trouve qu'il n'y a pas lieu de créer un tribunal particulier ou spécial pour les problèmes ou les conflits entre propriétaires et locataires, que ce soient des conflits qu'on pourrait qualifier d'administratifs, lorsqu'il s'agit de la fixation d'un loyer ou de la prolongation d'un bail, ou encore des litiges sur la nullité d'un bail ou tous les autres litiges qui peuvent résulter du contrat qui est intervenu entre propriétaire et locataire.

Evidemment, la législation, le domaine dans lequel nous sommes engagés à l'occasion des bills 78 et 79, nous met à cheval à la fois sur le domaine administratif et sur le domaine judiciaire. Parce que la portée des deux projets de loi est autant administrative lorsqu'il s'agit, par exemple, d'un locataire qui ne veut pas quitter les lieux et qui demande à l'autorité, qu'elle soit administrative ou judiciaire, de fixer son loyer, ou lorsqu'il s'agit d'un litige qui est engagé sur l'interprétation d'un bail.

II y a une possibilité, pour sortir de cette impasse, qui m'a amené à réfléchir à une solution possible de cette difficulté, et ce serait la création d'une chambre de la cour Provinciale spécialisée en matière de problèmes de louage. Il y aurait, sans aucun doute, des juges de la cour Provinciale qui siégeraient dans cette chambre spécialisée pour entendre et connaître des litiges qui ont une nature judiciaire, par exemple, l'interprétation des clauses d'un bail, ou l'annulation d'un bail, enfin, tout ce domaine-là; mais il y aurait dans cette chambre, au-dessous des juges, les commissaires qui sont prévus au projet de loi 79 qui, eux, pourraient trancher les problèmes administratifs, c'est-à-dire les problèmes de détermination de loyer ou de prolongation de bail. Si les parties n'étaient pas satisfaites, elles pourraient aller en appel devant les juges qui, eux, siégeraient à ce moment-là comme cour d'Appel des décisions des loyers. Nous aurions pu ainsi réconcilier les problèmes qui résultent de l'administration et les problèmes qui résultent du judiciaire.

Je crois que ce modèle ne serait pas du tout différent du modèle qui existe au niveau du tribunal du travail. On sait qu'au niveau du tribunal du travail il y a des juges qui appartiennent à la cour Provinciale, qui sont affectés au tribunal du travail et qui sont appelés à rendre des décisions judiciaires et également qui siègent en appel des décisions qui sont rendues par les enquêteurs qui eux, par exemple, vont vérifier les accréditations syndicales, savoir si tel syndicat est représentatif ou non et qui, eux, rendent certaines décisions de nature administrative. La solution que nous propose le Barreau, je le dis immédiatement, m'intéresse et je crois qu'elle tiendrait compte des deux dimensions. Je crois qu'elle permettrait également de traiter toutes ces causes-là avec assez de rapidité.

Un des problèmes que nous avons, c'est qu'en matière de louage je crois qu'il est dans l'intérêt public que les causes soient traitées avec rapidité. Il n'y a rien, pour traiter des causes avec rapidité, qu'un tribunal ou au moins une division de la cour qui est spécialisée dans ce domaine-là, où les juges sont très familiers avec ces problèmes, où ils connaissent tous les problèmes qui sont posés et où ils peuvent acquérir beaucoup de compétence parce qu'ils sont constamment dans ces litiges. Sans m'engager aujourd'hui, je dirais que cette idée offre de l'intérêt, elle est compatible avec la réforme des tribunaux dans laquelle nous sommes engagés et qui voudrait recréer l'unité du système judiciaire, ramener les différentes cours à un système, dans l'ensemble, assez unique.

Evidemment, en ce faisant, nous avons toujours la difficulté de réconcilier le judiciaire avec l'administratif, ce qui est toujours un gros défi.

Mais c'est faisable dans certains domaines, peut-être dans le domaine des loyers, comme vous l'avez souligné ce matin.

MME AUDETTE-FILION: Le résumé que vous venez de faire, M. le ministre, correspond assez bien à la position du Barreau. Il y a peut-être un point que j'aimerais souligner lorsqu'on parle d'affectation des juges au domaine des loyers. Il semblerait que cette affectation pourrait sans doute se faire par le juge en chef de façon qu'elle se fasse en fonction des besoins. Il se peut que, dans certains districts judiciaires, il ne soit pas nécessaire d'avoir une division spéciale, mais simplement une procédure plus expéditive, sommaire. Vous n'aurez peut-être pas besoin de juge à temps plein dans ce domaine à certains endroits.

M. CHOQUETTE: Une chose très intéressante, c'est la question de la procédure. Evidemment, il ne faut pas que la procédure dépasse le droit, à mon sens. C'est la raison pour laquelle, lorsque nous avons pensé en termes de régler des litiges dans le domaine des conflits entre propriétaires et locataires, nous avons voulu que la procédure soit simple et expéditive. Par conséquent, il pourrait y avoir une procédure spéciale pour ces litiges.

MME AUDETTE-FILION: Sauf que, dans le domaine strictement judiciaire, il ne faudrait pas mettre de côté en fait la procédure, les règles de preuve fondamentale...

M. CHOQUETTE: Non.

MME AUDETTE-FILION: ... et les règles ordinaires du code de procédure civile, mais il peut y avoir des règles de pratique qui simplifient la procédure. Au niveau de la procédure d'appel, auquel on faisait d'ailleurs allusion aussi tout à l'heure, la prétention du Barreau est qu'il puisse y avoir appel des décisions des commissaires en matière de fixation des loyers et de prolongement des baux au judiciaire, au juge de la cour Provinciale. La procédure proposée par le bill 79 est tout simplement que le commissaire, à l'article 7, dresse un procès-verbal de ce qui se passe devant lui et ce procès-verbal est transmis au juge et fait preuve prima facie sans qu'il n'y ait ni de sténographie, ni de procès nouveau, sauf en cas exceptionnel sur demande du juge. Je crois que la procédure suggérée n'est pas une très bonne garantie pour le justiciable. Il serait sans doute préférable d'exiger peut-être un procès de novo, un procès nouveau, nouvelle preuve puisque tout ce dont le juge disposera sera les notes du commissaire. Alors, nécessairement, aller en appel d'un jugement d'un commissaire à la lumière de ses seules notes me semble offrir peu de garantie.

M. TROTIER: Si vous me permettez, M. le Président, j'endosse les paroles de mon savant confrère, parce qu'au cours de cette expérience que j'ai vécue je faisais moi-même les procès-verbaux d'enquêtes et je les expédiais à la Commission d'appel. Je vous assure que durant

douze ans il faut être extrêmement prudent en ce sens qu'on a tendance, à un moment donné, à rédiger le procès-verbal de la façon qu'on aimerait que la Commission d'appel entérine la décision de première instance que nous avons rendue. Il y a là un danger sérieux et c'est pourquoi je vous demande de bien vous pencher sur cet article 7. Il vaudrait peut-être mieux accorder à ce moment-là un procès de novo.

MME AUDETTE-FILION: Les autres recommandations que je désirais faire sur le texte du bill 78 lui-même sont consignées aux pages 13 et suivantes à la fin de notre mémoire. Nous avons pensé tout de même qu'il s'agissait d'un chapitre important du code civil, alors il y avait lieu qu'on s'y attache. En général, le projet de loi nous semble satisfaisant et il nous plaît. Nous avons relevé quelques petites choses article par article, je ne veux pas reprendre tous les articles un à un sur lesquels nous avons fait des représentations. Nos représentations dans ce domaine peuvent peut-être se grouper sous trois chefs. Certains articles nous semblent à clarifier, l'interprétation est difficile à certains endroits. D'autre part, certains articles qui sont mentionnés comme étant obligatoires ou d'ordre public ne nous semblent pas devoir nécessairement l'être. Je mentionnerai rapidement l'article 1613, quant à la sous-location, l'article 1619, quant aux réparations urgentes et nécessaires, l'article 1620 également.

Il ne nous semble pas que ces dispositions doivent être étendues à tous les baux. Par exemple, en matière commerciale, il serait très utile que l'on puisse y déroger et que ces articles ne soient pas d'ordre public. Il serait très utile que les parties puissent s'entendre quant aux réparations urgentes. Très souvent, dans les baux commerciaux en particulier, les modalités sont déjà prévues au cas où des réparations seraient nécessaires. Si la loi dit que ces dispositions sont d'ordre public et sont imposées à tous les baux en matière immobilière, on a les mains liées, à ce moment-là. Je pense que cette disposition devrait être d'abord limitée aux baux d'habitation eux-mêmes seulement et les parties pourraient, en certaines circonstances, y déroger.

L'autre chef sous lequel on peut grouper nos représentations est l'équilibre des droits et des obligations des parties. A un certain moment, les parties ont des droits et n'ont pas les obligations qui en résultent. Je ne veux pas m'étendre outre mesure. Par exemple, il est question des réparations urgentes et nécessaires, encore une fois, je pense que c'est l'article 1619. Je vous réfère à l'ancien article 1634 qui disait que, lorsque des réparations urgentes et nécessaires doivent être faites dans un immeuble, le locataire doit les souffrir à condition que la durée de ces réparations ne soit pas de plus de 40 jours et à condition que l'occupation ne soit pas impossible. Si l'occupation est impossi- ble, le locataire pouvait demander la résiliation du bail. Si la durée était de plus de 40 jours, il pouvait demander une diminution. Sinon, il devait souffrir les réparations. Je soumets que toute la philosophie de cette nouvelle législation est de donner au locataire un droit dans le bail, de lui assurer de pouvoir conserver son logement et de faire fixer le prix par l'administrateur.

Ce droit dans le bail a des obligations qui lui sont inhérentes, puisque l'on présume que, lorsque le locataire prend possession des lieux, les lieux sont en bon état de réparation. On peut supposer qu'au bout d'un certain nombre d'années, s'il y a renouvellement d'année en année, la bâtisse aura besoin de réparations qui ne résultent ni de la faute du locataire, ni de la faute du propriétaire, mais qui sont inhérentes à la bâtisse.

Alors, sans doute que l'obligation de souffrir ces réparations est la contrepartie du droit du locataire dans le bail, d'une part. D'autre part, à un autre endroit dans le projet de loi, le privilège du propriétaire sur l'immeuble n'est pas indiqué. Il a sans doute été oublié. C'est-à-dire que non, excusez-moi. Le privilège du locataire est mentionné à l'article 1631, je crois, mais on a oublié de mentionner l'obligation, qui est le corollaire, de garnir les lieux loués.

Il y a également d'autres représentations quant aux délais pour faciliter l'application de la loi. Le droit de suite nous semble assez court avec la situation actuelle. Les gens disparaissent facilement et sont difficiles à trouver. Le droit de suite, qui était de huit jours, aujourd'hui est assez peu utile, est illusoire, est trop court. Lorsqu'il faut rechercher quelqu'un, surtout à Montréal maintenant, cela prend plus de temps que cela.

Ensuite, le délai de cinq jours de la tacite reconduction, qui est mentionné à l'article 1636, semble également court. Dans l'optique de l'uniformisation des délais, nous suggérons qu'un délai de dix jours, qui correspond au délai prévu par le code de procédure habituellement, serait peut-être plus réaliste et exprimerait vraiment une présomption que les parties ont convenu de faire la tacite reconduction, que vraiment le locataire a l'intention de rester et que vraiment le propriétaire a l'intention de le garder.

Ensuite, disons que l'avis de cinq jours qui existait dans le code de procédure civile, qui était à l'article 741, est aboli par le projet de loi. Nous soumettons que cet article était très utile et avantageux et pour le propriétaire et pour le locataire, parce qu'il évitait aux deux parties des frais souvent très onéreux. C'est un moyen, disons, facile, à la disposition du propriétaire, de renoncer à certains de ses droits, mais d'obtenir l'éviction et, d'autre part, pour le locataire, c'est un moyen très utile de se retrouver sans obligations, d'être libéré de ses obligations à l'égard de son propriétaire, sans

qu'on soit obligé de recourir aux tribunaux et d'entreprendre des procédures, de part et d'autre, très coûteuses.

Nous soumettons qu'on devrait le conserver à l'avantage des deux parties.

Quant à la clause d'échelle mobile qui est, à l'article 1665, maintenant défendue, je me demande si on ne devrait pas y repenser puisque c'est souvent la façon la plus juste pour permettre un ajustement du montant du loyer à la suite de fins indépendantes de la volonté et du propriétaire et du locataire, sans qu'il soit besoin, pour cela, d'intervention judiciaire ou d'intervention des commissaires. Si les parties se mettent d'accord, au départ, je ne vois pas pourquoi cette clause ne pourrait pas exister. Si elle n'est pas raisonnable, le locataire peut se prévaloir, comme dans tous les autres cas, des recours auprès de l'administrateur, en disant que le montant est disproportionné, etc.

Ecoutez, je ne sais pas, est-ce que vous avez d'autres questions sur des points particuliers? Là, je ne veux pas reprendre les articles un à un. Ce qui nous a gouvernés dans tout cela, c'est d'essayer de demander que soient clarifiés certains articles, d'apporter certaines notions nouvelles qui seraient peut-être utiles, par exemple, le droit de superficie en matière de louage n'est mentionné nulle part. Il pourrait peut-être y avoir quelque chose dans la section des baux immobiliers qui prévoirait cela. C'est quelque chose qui se produit souvent. On voit souvent des centres d'achat, par exemple, qui sont bâtis sur des terrains en vertu d'un droit de superficie louée, qui apporte avec lui des droits de nature immobilière, c'est-à-dire que cela peut être hypothéqué, tout cela participe à un droit immobilier. Ce serait peut-être bon de le mentionner.

Limiter l'application de certains articles obligatoires. Pensez justement aux baux commerciaux où cela ne devrait pas s'appliquer et où on l'impose, où les parties pourraient déroger. Je pense entre autres, justement, à l'obligation du locateur qui veut faire des réparations de s'adresser au tribunal pour obtenir la permission de faire ces réparations et l'éviction temporaire du locataire. Il semblerait, d'après l'article 1621, je crois, qu'on soit obligé de s'adresser au tribunal, alors que les parties pourraient très bien s'entendre sans que l'intervention judiciaire soit nécessaire.

Ensuite, ce que je mentionnais tantôt, l'équilibre des droits et des obligations de part et d'autre. Alors c'est ce qui a gouverné nos représentations, en particulier dans le cas des articles 1619, 1621, 1622, 1630, 1631, 1664 j), 1664 x) et 1665 a).

Maintenant, il y a un point bien important que j'allais oublier. C'est la question de la preuve testimoniale. Il y a un article, dans le projet de loi no 78, je crois, qui prévoit que la preuve testimoniale serait admise pour contredire un écrit valablement fait. Cette disposition, naturellement, va à l'encontre de toute l'économie de notre droit, de toute la tradition.

Je soumets qu'il est inutile de prendre la peine de rédiger un bail ou une convention quelconque si on peut, en aucun temps, venir devant le tribunal et dire le contraire. A ce moment-là, l'écrit n'a plus aucune valeur, il est tout à fait inutile.

Il y a une tendance dans ce sens-là qu'on a retrouvée dans la Loi de la protection du consommateur, je l'admets. Egalement dans le projet de loi sur les transactions immobilières, il y a une disposition semblable aussi. Mais ces dispositions ne vont pas du tout aussi loin que la disposition qui est ici.

Ces dispositions disent, en particulier dans la Loi de la protection du consommateur, que si les formalités qui sont nécessaires n'ont pas été remplies au moment de la conclusion du contrat, une fois que vous aurez prouvé que ces formalités nécessaires n'ont pas été remplies, le contrat comme tel n'a plus la même valeur et vous pourrez nous contredire par une preuve testimoniale.

Mais ici ce n'est pas le cas, il n'y a pas de modalités imposées qui sont la condition de la validité du contrat. Nous nous élevons de toutes nos forces contre cette disposition qui menace de renverser toute la preuve en droit civil et en matière loc. et loc.

Je reviens également à l'article 1664 x). Nous avions fait des représentations au sujet du projet de loi 59, et il semble qu'elles n'ont pas été suivies. Nous pensions que, lorsqu'un locataire désirait louer un local dans une habitation à loyer modique, il devait quand même assumer les obligations qu'il avait à assumer et trouver un nouveau locataire.

Il y a un mécanisme qui est prévu, mais qui ne nous semble pas très utile puisqu'un avis de trois mois, de toute façon, est l'avis ordinaire d'annulation d'un bail, de dommages pouvant être réclamés à la suite de l'annulation d'un bail. Alors, à toutes fins pratiques, je ne pense pas que le mécanisme soit très utile, et je continue à penser que celui qui a trouvé un autre logement doit respecter l'engagement qu'il a pris et trouver un sous-locataire acceptable.

Ce sont les principales recommandations. Si vous avez des questions, ça me fera plaisir.

LE PRESIDENT (M. Blank): Merci, madame. Est-ce qu'il y a des questions? C'était très clair votre exposé.

M. CHOQUETTE: Je voudrais seulement dire aux représentants du Barreau que vous avez bien reconnu toute la base de la loi que nous proposons lorsque vous avez dit qu'en plus de moderniser, perfectionner tout notre système juridique, pour autant qu'il traite des relations de propriétaire à locataire, il visait à créer pour le locataire le droit au bail. Et ceci est, à mon sens, une innovation majeure dans notre droit, que seules certaines associations de locataires refusent de voir.

Et également j'ajouterais aussi l'introduction

du principe antilésionnaire c'est-à-dire que le législateur va encore plus loin et ne tolère pas la lésion même à l'égard des majeurs. Ceci est également une très grande innovation.

Sur les articles sur lesquels vous avez fait des commentaires particuliers, vous pouvez être sûrs que nous allons les étudier avec nos légistes, et aujourd'hui je voulais m'abstenir de commenter vos propositions, mais nous allons examiner tout ça, et modifier les articles du projet de loi, s'il y a lieu.

M. PAUL: M. le Président, je veux remercier les membres du Barreau de la qualité du mémoire qu'ils nous ont présenté, ce qui va faciliter le travail. Je souhaite que le ministre garde les bonnes dispositions qui l'animent ce matin, spécialement à l'endroit du projet de loi 79, et qu'il garde à la mémoire l'excellente suggestion qui lui a été faite par Me Trotier au nom du Barreau pour qu'il y ait possibilité de faire vivre la loi 79 à l'intérieur du tribunal de la cour Provinciale.

Le ministre pourrait peut-être craindre que certains amendements s'imposent à la Loi des tribunaux judiciaires pour augmenter le nombre de juges. Lorsque le ministre présentera en deuxième lecture la Loi des tribunaux juriciai-res, je me permettrai de lui faire officiellement une proposition d'amendement pour lui permettre de retenir l'engagement de juges de la cour Provinciale à leur retraite, sur une base de per diem, comme cela pourra se produire devant la cour des Sessions de la paix.

Peut-être qu'ainsi nous pourrons garder une certaine efficacité administrative sans paralyser d'autant la bonne marche de la cour Provinciale.

Je remercie MM. les membres du Barreau.

LE PRESIDENT (M. Blank): L'avocat populaire, le député de Portneuf.

M. DROLET: Merci, M. le Président. J'ai très peu de chose à ajouter. Tooutefois, comme vient de le souligner le président, pour un type qui n'est pas avocat et qui est entouré d'avocats de chaque côté, ce n'est pas facile de s'y comprendre. J'ai retenu une suggestion de Mme Audette-Filion qui disait, à un moment donné, que le ministre devrait porter une attention à certains articles du projet de loi, les rendre plus clairs, si vous voulez, afin que le petit peuple, les petites gens, ceux qui ne sont pas avocats puissent comprendre encore plus facilement ce projet de loi.

M. PAUL: Le tout sans agitation, cependant.

M. DROLET: Toujours. Alors, je pense que les lois sont toujours assez compliquées et que le ministre devrait porter une attention tout à fait spéciale à cela. En terminant, je félicite le Barreau de la qualité de son mémoire qui semble très intéressant. Nous allons certainement l'étudier du commencement à la fin afin d'être mieux éclairés lorsque nous aurons à le discuter lors du débat de deuxième lecture en Chambre.

M. LESSARD: Pas de commentaires, M. le Président.

LE PRESIDENT (M. Blank): Merci, madame, merci, maître. On ajourne sine die ou jusqu'à demain matin?

M. CHOQUETTE: Je crois que c'est demain matin.

LE PRESIDENT (M. Blank): A quelle heure demain matin?

M. CHOQUETTE: A 9 h 30.

M. DROLET: A 9 h 30 ou 10 heures?

M. CHOQUETTE: A 9 h 30, M. l'avocat.

LE PRESIDENT (M. Blank): La commission ajourne ses travaux à 9 h 30 demain matin.

(Fin de la séance à 12 h 7)

Document(s) associé(s) à la séance