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(Dix heures sept minutes)
Le Président (M. Desbiens): À l'ordre, s'il vous
plaît!
La commission élue permanente de l'industrie, du commerce et du
tourisme est réunie pour entendre les représentations des
personnes intéressées par le projet de loi 59, Loi modifiant la
Loi sur les heures d'affaires des établissements commerciaux.
Les membres de cette commission sont MM. Rochefort (Gouin), Biron
(Lotbinière), Bourbeau (Laporte), Dubois (Huntingdon), Dussault
(Châteauguay), Mme Harel (Maisonneuve), MM. Lavigne (Beauharnois),
Fortier (Outremont), Maciocia (Viger), Paré (Shefford) et Tremblay
(Chambly).
Les intervenants sont MM. Beaumier (Nicolet), Bisaillon (Sainte-Marie),
Blais (Terrebonne), Champagne (Mille-Îles), Mme Dougherty
(Jacques-Cartier), MM. O'Gallagher (Robert Baldwin), Lafrenière
(Ungava), Mailloux (Charlevoix) et Rocheleau (Hull).
Il serait dans l'ordre de désigner un rapporteur à la
commission, s'il vous plaît.
M. Dussault: M. Tremblay, M. le Président...
Le Président (M. Desbiens): M.
Tremblay, député de Chambly.
Une voix: II sera là dans quelques minutes.
Le Président (M. Desbiens): Cela va?
M. Bourbeau: Pour autant que M. Tremblay est présent,
oui.
Le Président (M. Desbiens): D'accord. M. Tremblay
(Chambly) agira comme rapporteur de la commission.
L'ordre du jour est le suivant. Nous entendrons d'abord le Conseil
québécois du commerce de détail, la
Fédération interdisciplinaire de l'horticulture ornementale du
Québec Inc. de la Corporation des bijoutiers du Québec, ces trois
organismes devant se présenter ce matin. À la reprise, cet
après-midi, nous entendrons OCTOFRUIT, le Groupe Ro-Na Inc., la
Fédération des coopératives québécoises en
milieu scolaire et l'Association des administrateurs des expositions agricoles
du Québec Inc. et, ce soir, le Congrès juif canadien, les
Maîtres- fourreurs associés du Québec Inc., le Regroupement
des centres-villes du Québec, la SIDAC Promenade Masson et la SIDAC Mail
centre-ville Québec.
Je crois qu'il y a une entente pour que les groupes intervenants
puissent présenter un résumé de leur mémoire, avec,
en général, une quinzaine de minutes d'intervention, ce qui
laisse ensuite autant de temps aux députés de chaque
côté de la salle pour intervenir par des questions. Est-ce que, M.
le ministre, vous avez une intervention préliminaire à faire?
Oui? M. le ministre.
Exposés préliminaires M. Rodrigue
Biron
M. Biron: M. le Président, je veux d'abord souligner que
cette commission parlementaire fait suite à une enquête qu'on a
menée l'an dernier auprès des citoyens du Québec, en
particulier les commerçants du Québec, ce qui a amené le
dépôt de la Loi modifiant la Loi sur les heures d'affaires des
établissements commerciaux. La présente commission parlementaire
a été demandée par mon collègue, le
député de Laporte, afin de s'assurer, de part et d'autre de la
Chambre, du bien-fondé de la loi, des améliorations qu'on a
apportées à la loi existante et afin de pouvoir répondre
le mieux possible aux besoins des consommateurs, bien sûr, aux besoins
des travailleurs et des travailleuses, mais aussi aux besoins du
développement économique des entreprises du Québec.
C'est avec beaucoup d'ouverture d'esprit que j'ai accepté cette
suggestion et c'est aussi avec une grande ouverture d'esprit que, ce matin,
jeudi et vendredi, nous entendrons les principaux intervenants, ceux et celles
qui ont accepté de venir témoigner devant cette commission, afin
qu'ensemble nous puissions, après une période de
réflexion, apporter les améliorations et les changements
nécessaires au projet de loi qui est devant nous ou, tout simplement, si
cela s'avère le voeu, le consensus général de ceux qui se
seront présentés devant nous, de continuer ce projet de loi tel
qu'il a été présenté et aussi, bien sûr, d'y
apporter certaines améliorations.
La Loi sur les heures d'affaires des établissements commerciaux
se veut d'abord un outil de développement économique en assurant
aux entreprises de commerce de
détail un cadre d'heures d'ouverture compatible avec une bonne
rentabilité et une concurrence équilibrée, mais cette loi
doit aussi assurer aux consommateurs et consommatrices le temps
nécessaire pour effectuer leurs emplettes de façon posée
et réfléchie. Elle doit même leur assurer
l'approvisionnement de biens d'accommodation à toute heure de la
journée. La Loi sur les heures d'affaires des établissements
commerciaux doit également tenir compte du voeu des employés de
commerce et des petits commerçants de travailler un nombre d'heures
comparable à la semaine de travail qui prévaut dans d'autres
secteurs d'activité au Québec. C'est entre ces
intérêts souvent divergents que la Loi sur les heures d'affaires
des établissements commerciaux doit maintenir un équilibre, mais
c'est justement parce que ces intérêts peuvent changer qu'il y a
lieu de vérifier périodiquement la pertinence de cette loi et ses
principales clauses.
Un comité d'étude sur le fonctionnement et
l'évolution du commerce au Québec, dans un rapport qu'il
publiait, avait recommandé cette révision périodique de la
loi. Au début de 1983, à ma demande, fut entreprise au
ministère une vaste consultation auprès des divers publics
concernés par les heures d'ouverture. Permettez-moi de rappeler les
principaux résultats de cette consultation qui ont, depuis,
été incorporés au projet de loi 59.
La majorité des commerçants reconnaissaient le
bien-fondé d'une loi sur les heures d'affaires, mais se plaignaient de
nombreuses infractions commises le dimanche en contravention de la loi
fédérale sur le dimanche. À toutes fins utiles, cette loi
était devenue presque inopérante en raison des faibles amendes
qu'elle imposait.
Les employés de commerce, quant à eux, se sont
majoritairement déclarés favorables au maintien des principales
dispositions de la loi actuelle.
Nous avons reçu des mémoires d'associations de
consommateurs et consommatrices, mais une majorité d'entre eux se sont
plutôt exprimés lors de nombreuses émissions radiophoniques
dont les animateurs avaient soulevé cette question des heures
d'ouverture. Plusieurs avaient alors émis l'opinion que les changements
dans les structures familiales de même que l'augmentation du nombre des
femmes au travail devaient amener, sinon un bouleversement, du moins un
ajustement des heures d'ouverture des commerces de détail.
La consultation générale nous avait aussi indiqué
que même si les commerçants avaient recommandé
majoritairement le maintien, à peu de chose près, des heures
d'ouverture actuelles, plusieurs entreprises ou groupes d'entreprises
importants s'étaient carrément prononcés pour un
élargissement du cadre des heures d'ouverture. Plusieurs secteurs
favorables à une libéralisation totale avaient demandé
d'être exclus de l'application de la loi. C'est ainsi qu'après
avoir libéralisé la vente de livres à la fin de 1982,
à la demande des libraires, le présent projet de loi 59 exempte
maintenant la vente de produits d'horticulture, d'artisanat, d'oeuvres d'art,
d'antiquités, de piscines et même de monuments
funéraires.
Il nous a semblé tout à fait normal d'apporter un
élargissement à la loi en raison même de l'évolution
de l'activité commerciale et des besoins des consommateurs et
consommatrices, mais il nous est également apparu nécessaire de
reconnaître le bien-fondé du principe même de la Loi sur les
heures d'affaires des établissements commerciaux, comme l'ont
mentionné, dans leurs mémoires, le Conseil
québécois du commerce de détail et la Chambre de commerce
de la province de Québec. Le projet de loi 59 le reconnaît en
ajoutant le dimanche aux jours régis par la loi québécoise
et en prévoyant des amendes substantiellement plus
élevées.
Nous croyons toujours, à mon ministère, et je le crois
aussi, que la Loi sur les heures d'affaires des établissements
commerciaux, lorsqu'elle a été adoptée en 1969, est venue
pallier le désordre des heures d'ouverture qui prévalait un peu
partout au Québec. Il aurait peut-être été
souhaitable à ce moment que, comme sont parvenus à le faire les
dépositaires d'automobiles, les entreprises commerciales se fixent leurs
propres heures d'ouverture, mais l'expérience nous a maintenant
prouvé que les intérêts des commerçants, des
employés de commerce et des consommateurs peuvent être servis au
moyen d'une loi-cadre pour les heures d'ouverture. (10 h 15)
Alors qu'en Ontario, au Nouveau-Brunswick et dans d'autres provinces, la
loi ne régit que les heures d'ouverture le dimanche, celle du
Québec a aussi servi à déterminer les heures d'ouverture
les jours de semaine et les jours fériés. Par un certain
caractère protectionniste, cette loi a permis aux commerces
indépendants du Québec de se développer en
équilibre avec les grandes chaînes d'alimentation. De plus, en ce
qui concerne les jours fériés, la Loi sur les heures d'affaires
des établissements commerciaux s'inscrit dans le même sens que les
normes du travail et les dispositions de nombreuses conventions collectives qui
reconnaissent le droit des employés d'avoir une vie familiale ou de
loisir convenable.
En ce sens, la Loi sur les heures d'affaires des établissements
commerciaux a une portée sociale et humaine, en sus de son rôle
d'équilibre économique. Le projet de loi 59 est le produit d'une
expérience accumulée, au ministère de l'Industrie, du
Commerce et du Tourisme, depuis bientôt quinze ans. Il est aussi
le fruit de l'expression de divers groupes lors de la consultation de
l'été dernier. Il est également empreint de notre
désir d'accélérer le développement commercial en
s'appuyant davantage sur le principe de la liberté de commerce.
En terminant, M. le Président, j'aimerais résumer
brièvement les principales modifications que le projet de loi 59 apporte
à l'actuelle Loi sur les heures d'affaires des établissements
commerciaux: l'inclusion du dimanche dans les jours régis par la Loi sur
les heures d'affaires des établissements commerciaux, ce qui
n'était pas fait dans l'ancienne loi; l'augmentation des montants des
amendes payables à la suite d'infractions à la demande de la
plupart des intervenants; l'exclusion de l'application de la loi de quelques
catégories d'établissements, après avoir obtenu un
consensus des commerçants des secteurs d'activité
concernés; l'ajustement de la clause de trois employés en tout
temps pour les établissements qui vendent des denrées
alimentaires; l'ajustement des heures d'ouverture le samedi et à
certaines périodes de l'année pour tenir compte de
l'évolution des habitudes des consommateurs et consommatrices.
C'est avec beaucoup d'intérêt et d'ouverture d'esprit que
je recevrai les opinions concernant ce projet de loi. C'est d'ailleurs afin
d'en arriver à une loi la plus équitable possible que cette
commission parlementaire a été convoquée. Nous voulons que
chaque organisme ou personne qui a demandé à présenter son
point de vue puisse le faire durant les présentes audiences et
être écouté du gouvernement.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Laporte.
M. André Bourbeau
M. Bourbeau: Merci, M. le Président. L'Opposition aborde
les travaux de cette commission, chargée d'entendre les
représentations des groupes et personnes touchés par le projet de
loi 59 modifiant la Loi sur les heures d'affaires des établissements
commerciaux, sans être vraiment satisfaite des fondements que veut bien
lui donner le gouvernement. On n'a pas l'impression d'être devant une
véritable politique, mais plutôt devant un certain nombre de
compromis face à des intérêts multiples et disparates.
La loi actuelle a soulevé, par le passé, un certain nombre
de récriminations. La plus importante avait trait à
l'inefficacité du gouvernement à l'appliquer, en raison du faible
niveau des amendes, ce qui aurait pu être rajusté il y a fort
longtemps. Le comité d'étude sur le fonctionnement et
l'évolution du commerce, le CEFECQ, l'avait d'ailleurs formellement
recommandé dès 1979.
Outre cette question des amendes et quelques autres points liés
à l'application de la loi, le gouvernement avait à décider
s'il libéraliserait sa loi, soit en offrant un registre d'heures
d'ouverture plus étendu, soit en augmentant le type de commerces exclus
de l'application de la loi ou soit en restreignant la nombre de jours
fériés.
À la limite, il aurait pu simplement abroger la loi. D'un autre
côté, le gouvernement aurait pu prendre pour option de pousser
plus loin les contraintes de la loi: réduire les périodes
d'ouverture des commerces, diminuer le nombre des exemptions, uniformiser les
règles et tendre à ce qu'un nombre plus élevé de
commerces et de travailleurs québécois soient en congé en
même temps.
Le gouvernement a pris pour option de libéraliser la loi. Son
projet de loi aura principalement pour effet d'augmenter sensiblement le nombre
d'heures d'ouverture des commerces. Ce faisant, il touche directement la vie de
milliers de commerçants et de plusieurs dizaines de milliers de
travailleurs, en plus d'affecter, dans ses habitudes de consommation, la
société québécoise dans son ensemble.
Le gouvernement savait qu'il avait devant lui une partie qui
n'était pas facile à arbitrer. L'univers de la consommation,
celui de la concurrence et des relations du travail, cela engendre une lutte de
privilèges qu'il n'est pas facile de concilier. Avant de faire son lit,
il a choisi de procéder à une consultation sur la base d'un
document, en février 1983. Celui-ci trace, à grands traits,
l'importance de l'impact que pourraient avoir d'éventuelles
modifications à la loi sur les heures d'affaires et souligne dans un
paragraphe que, face aux diverses représentations du milieu, il est
essentiel de procéder à une étude en profondeur de
l'impact que pourraient avoir les modifications.
Voici, d'ailleurs, la teneur exacte de ce paragraphe: "Le
ministère de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme reçoit aussi
des représentations favorables à la libéralisation de la
loi. Ces suggestions proviennent parfois d'entreprises commerciales,
habituellement de grande taille, et parfois d'associations commerciales.
Acquiescer à ces demandes qui visent notamment à exclure de la
loi certaines catégories d'établissement pourrait avoir des
effets sur certaines autres catégories, de même que sur
l'activité commerciale en général. Il est donc essentiel
qu'avant d'y donner suite on procède à une étude en
profondeur des conséquences d'une telle décision."
Les fonctionnaires qui ont écrit le document estimaient donc
qu'outre le fait d'entendre des représentations il fallait se
pencher très spécifiquement sur les conséquences
d'une libéralisation des heures d'affaires. Une prudence analogue
inspirait les recommandations du CEFECQ en 1979. Or, à ce jour, le
ministre ne nous a pas produit d'étude sur les conséquences de
son projet de loi, ni sur le plan économique, ni sur le plan social. A
fortiori, il devient difficile d'évaluer l'impact qu'auraient pu avoir
d'autres solutions de rechange.
Y a-t-il une estimation approximative du rapport
coûts-bénéfices de cette libéralisation pour les
commerçants? Qu'en sera-t-il de l'impact sur le rapport de forces entre
gros et petits commerçants? Les consommateurs devront-ils payer le prix
de cette libéralisation? La qualité de vie des travailleurs
oeuvrant dans les commerces touchés par la loi sera-t-elle
augmentée ou diminuée? Quelles sont les conclusions du
gouvernement? Pour déposer son projet de loi, il a sans doute trouver
réponse à ces questions.
Pour revenir à cette consultation, ce qui m'étonne un peu,
c'est la méthode qu'a employée le ministre qui, dans un premier
temps, a choisi de susciter et de recevoir à son bureau des
recommandations plutôt que d'ouvrir un débat public au moyen d'un
sommet, par exemple, qui aurait peut-être davantage permis aux groupes en
présence de confronter leurs intérêts respectifs. Je suis
surpris de voir que les travailleurs de ce secteur faiblement syndiqué
se soient si peu fait entendre. Doit-on voir un lien entre la méthode du
gouvernement de consultation et le fait que ces employés voient
disparaître dans l'année cinq jours fériés et
chômés, et qu'ils doivent travailler une heure de plus le samedi?
Je suis étonné d'ailleurs de retrouver dans le projet de loi des
propositions qui ne semblent être appuyées par à peu
près aucun des groupes que le gouvernement a consultés; je pense
notamment à l'ouverture des magasins une heure de plus le samedi et
à l'ouverture jusqu'à 21 heures la semaine avant
Pâques.
La nouvelle consultation entreprise aujourd'hui ne comblera
peut-être pas les lacunes de la première consultation, mais elle
permet à tout le moins de constater qu'un certain nombre de demandes
sont demeurées lettre morte et que d'autres ne font pas
l'unanimité. L'Opposition entend apporter sa collaboration dans l'espoir
de mieux faire ressortir l'incidence de ce projet de loi pour les divers
intervenants. Par-dessus tout, elle souhaite que le ministre de l'Industrie, du
Commerce et du Tourisme révèle, pour le bénéfice de
tout le monde, quelle est exactement la nature des choix qui l'ont guidé
et leur impact. Cherche-t-il prioritairement la libéralisation des
heures d'affaires pour accroître d'abord le service à la
clientèle ou augmenter la profitabilité des entreprises? Veut-il
favoriser la concurrence et faire baisser les prix ou privilégier les
indépendants? Veut-il accroître le revenu des travailleurs ou les
forcer à travailler plus d'heures dans la semaine?
Si le ministre, à la suite de ses consultations, nous avait
produit un document expliquant ses choix et leurs conséquences, les
travaux de la commission et les mémoires des intervenants auraient pu
mettre à profit un tel éclairage. Il est possible qu'à la
lumière des explications du ministre et des témoignages que nous
entendrons l'effet réel du projet de loi soit mieux perçu;
l'Opposition sera alors heureuse de contribuer, le cas échéant,
à l'améliorer. Il paraît déjà évident,
toutefois, que, si on s'interroge à bon droit au sujet de ce que les
commerçants, les travailleurs et les consommateurs ont à y gagner
ou à y perdre, le grand gagnant toute catégorie de cet exercice
sera le ministère du Revenu, principalement avec sa taxe de vente. Je
vous remercie, M. le Président.
Auditions
Le Président (M. Desbiens): Merci.
Le premier groupe à être entendu ce matin est le Conseil
québécois du commerce de détail, dont M. Benoît
Gingras est le président. M. Gingras, si vous voulez présenter
les personnes qui vous accompagnent et procéder à la
présentation du mémoire, s'il vous plaît.
Conseil québécois du commerce de
détail
M. Gingras (Benoît): Merci, M. le Président.
J'aimerais présenter la délégation du Conseil
québécois du commerce de détail. D'abord, Mme Mariette
Clermont, qui est membre du comité exécutif du Conseil
québécois du commerce de détail et présidente de
Mariette Clermont Inc.; à ma gauche, M. Marc-André Filion, membre
du comité exécutif du Conseil québécois du commerce
de détail, vice-président, secrétaire et chef du
contentieux chez Zellers Inc.; à mon extrême droite, M. Guy
Poirier, vice-président exécutif du Conseil
québécois du commerce de détail; votre humble serviteur,
Benoît Gingras, président du Conseil québécois du
commerce de détail, directeur général régional de
la maison Sears Limitée.
J'aimerais d'abord remercier la commission de nous donner l'occasion de
nous exprimer sur un sujet qui est de première importance pour les
membres de notre association.
D'abord, qui sommes-nous comme association, quels sont nos buts? Nos
buts sont de promouvoir les intérêts du commerce de détail
au Québec - c'est écrit dans notre charte - d'aviser et
d'informer nos membres;
de recevoir les vues et les opinions des membres du commerce de
détail; de faire les représentations en leur nom au gouvernement
et autres autorités publiques et, enfin, d'assister le gouvernement, les
autorités publiques et les autres secteurs de l'industrie et du commerce
relativement à des sujets d'intérêt pour le commerce de
détail. Comme vous le voyez, on accomplit deux des points majeurs de
notre but ce matin.
Nous représentons des commerçants dans presque toutes les
sphères du commerce. Nos membres sont responsables de plus de 65% des
ventes de détail au Québec. Nous influençons ainsi environ
6200 établissements comprenant des petites, des moyennes et des grandes
entreprises.
Quel est le résumé de nos vues sur le projet de loi 59?
Nous avons inclus plus de détails dans notre mémoire, comme de
raison. Vous comprendrez facilement qu'une association comme la nôtre qui
représente une infinie variété de types et de grosseurs de
commerces ne puisse faire l'unanimité absolue sur le sujet des heures
d'affaires. Les points de vue présentés dans notre mémoire
et discutés ici présentent les opinions de la très grande
majorité de nos membres. Nous avons encouragé nos quelques
membres en position minoritaire sur le sujet à faire valoir leur propre
point de vue à cette commission.
Disons au départ que les amendements tels que présentement
formulés dans le projet de loi 59, à quelques exceptions
près, ne sont pas en contradiction marquée avec nos opinions
émises dans notre mémoire du mois de mars dernier et dans celui
que nous venons de faire parvenir à cette commission.
En effet, nous avons toujours appuyé la thèse du maintien
d'une loi des heures d'affaires, d'une loi plus claire et plus précise
et d'une loi qui contienne des mesures qui en assurent l'application. Le projet
de loi 59 semble, en général, répondre à ces
critères.
Ceci dit, j'aimerais maintenant parler davantage sur certains points
précis du projet de loi. Un point en particulier. Nous avons à
plusieurs reprises, et malheureusement jusqu'à maintenant sans
succès, tenté d'établir de façon permanente les
fêtes du 24 juin et du 1er juillet le lundi le plus proche de la
fête pour exempter la perte occasionnelle de traditionnelles bonnes
journées de magasinage, soit les jeudi, vendredi et samedi. Question
aussi, bien entendu, de permettre des jours consécutifs de congé
pour les employés du commerce. Nous réitérons ici notre
demande dans ce sens. (10 h 30)
Deuxièmement, le projet de loi propose de prolonger d'une heure
les heures d'affaires du samedi. Si le législateur désire
accorder une heure de plus au consommateur pour faire ses achats, la
majorité de nos membres préférerait plutôt ajouter
une demi-heure le jeudi et le vendredi soir, car le client n'a pas tendance
à s'attarder dans les magasins à la fin du samedi
après-midi. Par contre, il est souvent pressé par la fermeture de
21 heures les jeudi et vendredi, surtout durant les périodes les plus
occupées de l'année.
Quant à la proposition de permettre l'ouverture des magasins
jusqu'à 21 heures durant les six jours précédant le
dimanche de Pâques, nous n'y voyons aucun avantage. Pâques n'a que
très peu d'influence sur le commerce de détail, d'autant plus que
c'est une fête flottante qui peut se répartir sur un très
grand nombre de semaines d'une année à l'autre. Le client
bénéficie d'ailleurs déjà d'une journée
complète de magasinage le vendredi saint, en plus des autres
journées normales. Le projet de loi prévoyant, de plus,
l'ouverture maintenant le lundi de Pâques, cela rend encore moins logique
le projet d'ouvrir les commerces six soirs avant Pâques. Nous nous
opposons donc à ces soirs additionnels avant Pâques.
À l'article 5, le présent projet de loi s'appliquera si
plus de trois employés se trouvent sur le plancher aux heures normales
d'ouverture. Cependant, le dernier paragraphe stipule qu'à l'aide d'une
cloison il serait permis de faire ce que la loi ne permettrait pas autrement.
Peut-être avons-nous la mauvaise interprétation de ce point. Nous
aimerions avoir des éclaircissements sur cette clause. Nous aimerions la
voir exprimer plus clairement pour exempter toute interprétation
douteuse dans l'avenir.
À l'article 9, paragraphe 1, l'on stipule que nul ne peut
annoncer l'ouverture d'un établissement commercial à une heure ou
un jour où l'ouverture est interdite par la loi. Était-ce
l'intention du législateur d'y inclure les médias comme partie
à l'infraction?
Un autre point. Une partie de notre interprétation de l'article
9, paragraphe 4, conclut qu'un propriétaire de centre commercial ne
pourra plus encourager ses marchands à ouvrir en dehors des heures
permises. Nous aimerions avoir confirmation que notre interprétation est
correcte.
Permettez-moi ici un commentaire additionnel. Nous sommes heureux de
constater que le projet de loi se soit donné le moyen de se faire
respecter par des amendes plus fortes au contrevenant, amendes qui devraient
faire atteindre les buts visés si suffisamment d'inspecteurs sont
disponibles pour assurer l'application désirée de la loi.
En guise de conclusion, nous tenons à remercier le ministre de
l'Industrie, du Commerce et du Tourisme de nous avoir permis de nous exprimer
sur ce sujet si important pour nous. Une trop grande libéralisation de
cette loi aurait eu un effet désastreux sur beaucoup d'entreprises, mais
surtout sur la petite et la moyenne
entreprise qui n'aurait pu faire face à une augmentation le
moindrement marquée du nombre d'heures d'ouverture. Il est bien reconnu
que la PME occupe au Québec une place des plus importantes. C'est la
raison pour laquelle il ne faut pas lui rendre les conditions telles qu'il lui
serait financièrement difficile de rester en affaires.
Je crois que vous avez reconnu, dans le projet de loi 59 que le commerce
de détail a beaucoup plus besoin d'un pouvoir d'achat accru chez sa
clientèle que d'heures d'affaires additionnelles à outrance. Tout
en appréciant que le projet de loi ait évité les
changements extrêmes qui auraient facilement pu dépasser les
besoins réels de l'évolution, nous osons espérer que les
quelques recommandations spécifiques que nous proposons aujourd'hui
seront considérées comme des améliorations valables au
projet de loi.
Mes collègues et moi sommes maintenant disponibles pour
répondre à vos questions, et sur les commentaires de ce matin et
sur notre mémoire qui a été présenté au
préalable.
Le Président (M. Desbiens): Merci. M. le ministre.
M. Biron: M. Gingras, je vous remercie de votre intervention. Je
constate - parce que j'ai lu votre mémoire, je vous ai également
écouté - que vous êtes satisfait de la loi en
général, sur les principaux points, d'abord, couvrir le dimanche
et augmenter les amendes d'une façon considérable pour faire en
sorte, en tout cas, que la Loi sur les heures d'affaires puisse être
respectée.
Maintenant, il y a certains autres petits points qui sont importants et
que vous avez mentionnés. D'abord, les membres de votre association, qui
sont en position minoritaire, voulaient-ils l'ouverture complète ou si
vous pouvez quand même nous dire s'ils voulaient une certaine ouverture,
quelques heures le dimanche ou quelques heures la semaine? Est-ce qu'ils
représentaient certains secteurs d'activité? C'est ma
première question.
Quant à votre intervention sur le 24 juin et le 1er juillet, je
me souviens de mon expérience dans le monde des affaires, alors qu'on
signait des conventions entre les représentants de nos travailleurs et
l'entreprise pour changer ces dates et faire en sorte que nos travailleurs
aussi puissent bénéficier d'une plus longue fin de semaine. Je
reçois votre demande avec sympathie et on en discutera certainement au
cours de cette commission parlementaire ou un peu plus tard à
l'Assemblée nationale, si on pouvait prendre une décision qui
puisse satisfaire à la fois les commerçants et les travailleurs.
Mais il s'agit, je pense, de regarder tous les groupes concernés pour
savoir si cela répond véritablement au consensus
général, qu'on essaie de voir ce qu'on pourrait faire dans ce
sens-là.
Maintenant, je voudrais vous poser une question sur l'addition d'une
heure le samedi, de même que la semaine avant Pâques et les deux
semaines avant Noël. Ce qu'on a voulu faire, c'est de répondre
à une demande qui nous semblait importante, peut-être du groupe
minoritaire, même chez vous ou ailleurs, qui nous disait: Cela nous prend
plus d'heures d'ouverture pour faire plus de commerce. Je pense qu'on a comme
objectif, tous les deux, d'accentuer le commerce. Si le commerce s'accentue, on
va pouvoir créer plus d'emplois et nos entreprises vont être plus
vivantes.
Dans ce sens-là, est-ce que vous auriez des suggestions à
nous faire? Vous nous faites une première suggestion en disant: S'il
faut mettre une heure de plus, on aime mieux la mettre le jeudi et le vendredi
soir, une demi-heure chaque soir. Est-ce que ce ne serait pas mieux de mettre
une heure plutôt le mercredi soir ou quelque chose comme cela, pour
donner plus de temps aux gens pour faire leur magasinage, pour répondre
à la demande de ceux et celles, probablement minoritaires, qui demandent
plus d'heures d'ouverture? Et comme objectif, c'est d'essayer, dans le fond, de
donner une période... Ceux qui prêchent pour le dimanche
après-midi disent: C'est une période extraordinaire où la
famille ensemble a plus de temps pour magasiner. Au lieu de faire un magasinage
rapide, comme à l'épicerie ou ailleurs, on a plus le temps de
penser à notre achat et d'acheter un gros morceau, un meuble en
particulier ou quelque chose qui coûte plus cher; cela prend une
période de temps où on n'est pas bousculé par la
clientèle, comme le jeudi ou le vendredi soir. Est-ce qu'il n'y aurait
pas lieu de voir s'il n'y a pas moyen d'ajuster ces heures? Parce que
l'objectif de rajouter des heures à certaines périodes de
l'année ou le samedi soir, c'est pour donner une meilleure
période de temps à ceux qui veulent faire un achat plus
important. Je pense que, durant les heures régulières, les gens
sont capables de faire leur épicerie et leur petit commerce
régulier. La seule chose, c'est que des meubles, des vêtements
plus dispendieux ou des souffleuses à neige, ou quelque chose qui est
plus dispendieux, cela demande un peu plus de temps, cela demande souvent le
consensus de la famille. On a voulu donner l'occasion à des familles ou
à des chefs de famille d'avoir plus le temps de penser à leurs
achats et d'acheter.
Vous pourriez peut-être voir s'il y a lieu de changer et d'en
venir à un consensus sur des heures différentes. Je suis
réceptif à votre intervention vis-à-vis du samedi soir.
Vous me dites: Cela ne créera pas beaucoup plus de commerce et, s'il
faut créer plus de
commerce, on est mieux de le mettre ailleurs.
Finalement, simplement deux petites informations. Les médias ne
sont pas couverts par cela; on pense que c'est l'entreprise qui devrait
être poursuivie et non pas le média d'information. De même
que pour les centres commerciaux, s'il y a mention dans l'annonce qu'un centre
commercial sera ouvert, bien sûr, que les dirigeants du centre seraient
poursuivis, d'après la nouvelle loi.
Quant au cloisonnement, je ne vous cache pas qu'on a visé
certains commerces, par exemple les pharmacies, qui vendent aussi des produits
alimentaires. Alors, à notre point de vue, il y aura lieu de cloisonner
la section des produits alimentaires et de les considérer comme des
dépanneurs, c'est-à-dire ayant trois employés sur le
plancher. Quant à la pharmacie, si c'est une très grosse
pharmacie, s'il y a un besoin de huit personnes dans la pharmacie, il y en aura
huit. Si cela en est une petite, qui en a besoin seulement d'une, il n'y aura
qu'une personne, mais il faudra cloisonner véritablement la section, si
on a le droit d'ouvrir le dimanche, en vertu de la loi. Ce serait
considéré comme deux commerces différents. D'accord.
M. Gingras: Maintenant, est-ce que je peux répondre
à ces questions?
Le Président (M. Desbiens): Oui, M. Gingras.
M. Gingras: La première question avait trait aux membres
minoritaires et visait à savoir jusqu'à quel point ces
gens-là pouvaient être à l'extrême et où ils
se situaient. Quelques membres seulement et très peu de membres allaient
à l'extrême, pour dire: Abolissons toute loi et laissons la libre
entreprise jouer son jeu. Je parle ici d'une infime minorité, deux ou
trois membres, tout au plus. Les autres qui espéraient une plus grande
libéralisation, c'était, encore une fois, une infime
minorité. Lorsqu'on dit dans notre mémoire que la grande
majorité de nos membres était, au tout départ, pour le
statu quo sur les heures d'affaires, cela dit tout. Les quelques autres, c'est
un nombre minime comparativement à la totalité des membres.
En ce qui concerne les congés, vous m'avez répondu que
vous étiez réceptif à cette question, du moins à la
considérer de nouveau. Je crois que c'est un endroit où il y a un
avantage pour les deux, pour les employés et pour les
commerçants, et, je crois, aussi pour la clientèle, parce que,
présentement, si un congé du 24 juin arrive au milieu de la
semaine, il n'y a pas grand avantage à avoir un congé,
finalement, à moins qu'on ne puisse le combiner avec une partie des
vacances. Mais cela complique les choses. Ce n'est pas tout le monde qui est
capable de le faire. Si cela arrive un lundi, vous avez un dimanche où
c'est fermé, vous avez un lundi où c'est fermé, vous avez
deux beaux congés. La clientèle, à ce moment-là, y
gagne. On parle d'heures additionnelles. Au lieu de fermer un jeudi, parce que
c'est la Saint-Jean-Baptiste, on fermera le lundi suivant et tout le monde va
être heureux. C'est un des endroits où il y a avantage pour tout
le monde - comprenez-vous? - y incluant le 1er juillet, dont la fête est
de juridiction fédérale, mais il y aurait le même avantage
à le justifier un peu partout au pays. C'est peut-être un endroit
où il pourrait y avoir une entente à 100% entre les deux
gouvernements.
L'autre question avait trait à la semaine avant Pâques. On
a déjà très clairement fait part de notre position
là-dessus. Vous avez demandé s'il n'y avait pas une
contreproposition pour utiliser ces heures-là, disons, d'une autre
façon pour permettre d'avoir des heures additionnelles. Pour
répondre, je reviens à notre mémoire où on dit que
nos membres, au départ étaient encore une fois en majorité
pour le statu quo, et, comme commerçants, je ne sais pas quelle sorte de
commerce pourrait bénéficier des lundi, mardi, mercredi et samedi
soir avant Pâques. Je n'en connais pas beaucoup; même que je n'en
connais pas du tout. D'autant plus, encore une fois, que c'est la semaine
où il y a amplement de temps de magasinage. Il y a le vendredi saint; la
plupart des gens ne travaillent pas et les magasins sont ouverts toute la
journée, incluant le soir. '1 y a le samedi avant Pâques. En vertu
du projet de loi 59, les gens auraient la possibilité de magasiner le
lundi alors que plusieurs sont en congé. Cette année, concernant
les congés des écoles, justement, en plus, les écoles vont
être fermées les quelques jours qui vont suivre. Alors, cela
arrive au printemps. Je crois que les gens ont amplement de temps pour
magasiner et le fait que les commerces restent ouverts le soir les quelques
jours précédents, cela n'ajouterait que des coûts à
l'entreprise, ne ferait qu'étirer sur un plus grand nombre d'heures un
commerce qui, de toute façon, va se faire. C'est notre point de vue.
M. Biron: M. Gingras. M. Gingras: Oui.
Le Président (M. Desbiens): M. le ministre.
M. Biron: Sur cette question en particulier, si on ouvrait le
soir durant une semaine ou deux, par exemple, au début de mai, à
une époque où les gens magasinent
davantage - je comprends que Pâques, c'est une fête flexible
et c'est un argument qui me touche profondément, mais on sait que le
printemps arrive et on est prêt à faire des achats - est-ce que
vous pensez que cela pourrait être plus utile ou si, encore une fois, vos
mêmes arguments tiennent, à savoir qu'il y a quand même
assez d'heures pour magasiner? (10 h 45)
M. Gingras: Je crois qu'on a déjà une structure
d'heures qui, habituellement, permet à la clientèle de faire ses
achats. Il y a un élargissement de certaines heures que propose le
projet de loi 59, par exemple, certaines journées où, autrefois,
c'était fermé et où c'est maintenant ouvert. On parle de
cette heure additionnelle qui pourrait, à notre point de vue, être
ajoutée le jeudi et le vendredi soir. Le client nous a dit, dans les
recherches qu'on a pu faire tous ensemble, qu'il a le temps de faire ses achats
en général. Une très grande majorité des clients
nous disent que les heures d'affaires actuelles, en général, leur
donnent le temps de faire leurs achats.
Je comprends que, pour des achats majeurs, l'homme et la femme doivent
être ensemble. C'est pour cela que nous ne nous opposons pas trop
à ce que vous ajoutiez une demi-heure ici et une demi-heure là,
une journée de congé ici et une journée de congé
là. Cela ne va pas à l'encontre du principe du statu quo en
général. Mais, à part cela, un élargissement pour
faire un test sur une semaine ou une quinzaine durant une saison donnée,
je n'en vois pas le besoin et, ce qui est important, nos membres n'en voient
pas le besoin.
La même chose pourrait se présenter à l'automne et,
finalement, il pourrait y avoir confusion à savoir quand ces semaines
spéciales commencent, quand elles finissent, etc. C'est une situation
qui pourrait peut-être n'aider personne et compliquerait le commerce en
plus. C'est notre point de vue.
Mme Clermont (Mariette): On devrait ajouter...
Le Président (M. Desbiens): Oui, Mme Clermont.
Mme Clermont: Lorsque vous parlez d'achats importants, je
pourrais répondre, en ce qui concerne les meubles, que je ne crois pas
que le fait d'ouvrir une heure de plus, le mercredi soir, soit un avantage pour
la clientèle parce qu'il faudrait, à ce moment, changer les
habitudes de magasinage. Les gens sont habitués de magasiner les jeudi
et vendredi. Moi aussi, je trouverais souhaitable qu'il y ait une demi-heure de
plus parce que cela permettrait aux gens d'avoir un peu plus de temps,
étant donné que la famille va magasiner, après le souper;
elle arrive dans les magasins vers 19 h 30 ou 20 heures. Quand on doit prendre
une décision importante, actuellement, c'est un peu court si on ferme
à 21 heures. Si cette heure était reportée les jeudi et
vendredi, j'y verrais plus d'avantages; mais je n'en vois aucun pour le
mercredi.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Laporte.
M. Bourbeau: Merci, M. le Président. Au sujet des heures
d'ouverture des commerces le samedi, tel qu'il est prévu par le projet
de loi, vous nous dites, si j'ai bien compris votre mémoire, que,
vraisemblablement, il n'y a pas très forte demande de la part des
consommateurs durant cette période, n'est-ce pas?
M. Gingras: C'est bien cela. Le samedi soir, sauf durant les
périodes très fortes de l'année, à la fin de
l'après-midi, même avant 17 heures, l'achalandage cesse en
général vers 16 h 30. Quant à l'heure qui pourrait
être ajoutée par la loi 59, entre 17 heures et 18 heures, il ne se
fait pas beaucoup de commerce de toute façon, et ce serait presque une
heure perdue. On souhaiterait, si, encore une fois, le législateur pense
qu'il a besoin de ces heures additionnelles, les voir utilisées
différemment, comme Mme Clermont vient de le mentionner et comme nous
l'avons mentionné dans notre mémoire.
On mentionne de nouveau, ce matin, que, le jeudi et le vendredi soir,
assez fréquemment, le client se sent pressé de quitter les lieux
à 21 heures parce qu'il n'est arrivé qu'à 19 h 45 ou 20
heures et qu'il n'a pas eu le temps de compléter sa liste de magasinage.
Alors, il aurait le temps de la compléter avant 21 h 30; on rendrait
service et à la clientèle et au marchand qui a déjà
son personnel en place, à ce moment. Vous êtes inquiets quant au
personnel, comme vous l'avez mentionné dans votre introduction. Il y a
des ententes, au préalable, en ce qui concerne le nombre d'heures durant
lesquelles le personnel travaillera chaque jour. Le fait de demeurer ouvert
durant certaines journées de congé ne change en rien le nombre de
congés statutaires qu'il aura par année. C'est déjà
entendu, soit dans les règlements de compagnie ou dans les ententes ou
les contrats.
M. Bourbeau: Dans la loi actuelle, il y a certains jours
où les commerces doivent être fermés...
M. Gingras: Oui.
M. Bourbeau: ...et qui, dans la nouvelle loi, deviennent ouverts,
si je puis employer cette expression pour qu'on se comprenne. Exemple: le
lendemain de Noël et le
lendemain du jour de l'an. Actuellement, vous ne pouvez ouvrir avant 13
heures. Avec la nouvelle loi, vous pourrez ouvrir à partir de 8 h 30.
Est-ce important pour vous? Êtes-vous d'accord avec cela?
M. Gingras: Le lendemain de Noël et le lendemain du jour de
l'an, surtout le lendemain de Noël, sont des journées très
achalandées pour les commerçants et, tant qu'à ouvrir,
c'est mieux d'ouvrir une journée complète que d'y aller avec
quatre heures, surtout lorsqu'il s'agit de journées comme les lundi,
mardi et mercredi. Lorsque le lendemain de Noël tombe un jeudi, par
exemple, on est ouvert de 13 h 30 jusqu'à 21 heures, ce qui donne une
journée normale de magasinage. Vu qu'on ne le mentionne pas comme point
spécifique avec des contrepropositions, cela veut dire qu'en
général, là encore, on est prêt à amender
notre position de statu quo sur les heures d'affaires pour accommoder ces
heures additionnelles qui semblent être partie de l'évolution de
la clientèle. C'est ainsi qu'on le voit en général sans
aller à une libéralisation plus large. La même chose va
s'appliquer pour le jour d'Action de grâces et - on vient d'en parler -
le lundi de Pâques. C'est ce qui peut être accepté à
l'intérieur des principes de notre association sans aller
carrément contre les vues de nos marchands. S'il faut quelques heures
additionnelles - et on dit bien si le législateur pense qu'il a besoin
de quelques heures additionnelles - à part le fameux samedi
après-midi, les autres heures recommandées seraient le meilleur
des compromis en ce qui nous concerne.
M. Bourbeau: Vous avez parlé du deuxième lundi
d'octobre, qui est le jour d'Action de grâces. Le projet de loi actuel
exclut cette journée des jours chômés; autrement dit, les
commerces pourront être ouverts. Or, si je ne me trompe pas,
d'après la Loi sur les normes du travail, c'est un congé
chômé et payé. Donc, cela ne créera-t-il pas un
problème avec vos employés? Ne devrez-vous pas les payer à
temps double pour ouvrir cette journée-là? Pour vous, est-ce un
problème?
M. Gingras: Oui. Il y a un problème là et il y a un
problème qui se dresse aussi au niveau du législateur. Pour que
les lois puissent, comme on dit, se compléter un peu, il y aurait
avantage à réviser l'autre loi, si celle-là est reconnue
et adoptée avec cet aspect. On a la même chose pour les
congés statutaires qui sont officiels à l'intérieur de
certaines entreprises, mais qui ne sont pas listés dans la loi
provinciale et où on a la permission d'ouvrir. Il y a ce qui existe
à l'intérieur de chaque entreprise pour prendre soin de ces
faits. C'est entendu que c'est une complication additionnelle, mais
l'idéal serait, si c'est accepté que les magasins soient ouverts
le jour d'Action de grâces dans le but de satisfaire à la demande
de la clientèle, que ce ne soit pas en même temps un jour
chômé officiel, tout en respectant le nombre total de
congés pour l'employé, pour éviter que - comme votre
préoccupation du tout début - l'employé ait à payer
pour cette extension même minime de ces heures-là. Il y a moyen de
travailler à l'intérieur du même nombre d'heures de
travail, d'avoir les mêmes conditions d'emploi et de permettre
l'ouverture de quelques jours comme cela durant l'année, ce qui va aussi
rejoindre le but du ministère, à savoir que ce sont de
très bonnes journées de commerce. Au lieu de faire un pas majeur
vers l'élimination de la limite des heures d'affaires, de le permettre
comme cela, une journée ici, une journée là, lorsqu'il y a
un besoin, lorsqu'on répond à une demande de la clientèle,
je crois que, lorsque c'est limité à quelques jours comme cela,
cela ne va pas contre le principe de notre association. Cela répond-il
à votre question?
M. Bourbeau: Oui, cela va. M. Gingras: Encore une
fois...
M. Bourbeau: Je pense que M. le ministre a compris.
M. Gingras: ...je crois que l'idéal serait que les lois
soient organisées de façon qu'une n'aille pas à l'encontre
de l'autre, tout simplement.
M. Bourbeau: Je pourrais peut-être poser les questions au
ministre pour avoir les réponses, je vous les pose. Vous donnez les
réponses au ministre et j'espère qu'il comprend les messages que
vous lui transmettez.
M. Gingras: C'est par la bande, comme on dit.
M. Bourbeau: C'est cela, mais il faut fonctionner ainsi...
M. Gingras: Parfait!
M. Bourbeau: ...comme la question suivante, d'ailleurs, que je
vais vous poser. En fait, c'est au ministre que je voudrais la poser, mais je
vais vous la poser à vous. C'est au sujet des fameuses cloisons dont
vous avez parlé. Je dois vous avouer que cela m'a toujours un peu
étonné de voir ce paragraphe dans la loi. En fait, la loi dit que
les commerces doivent fermer le dimanche et à certaines autres heures
à l'exception de certains commerces. Dans le projet de loi, on allonge
la liste des commerces qui sont soustraits à la loi, donc, qui peuvent
ouvrir
en tout temps. Les commerces qui sont exclus depuis toujours, qui
l'étaient avant et qui le sont encore, sont: les librairies, les
tabagies, les restaurants, les pâtisseries et les pharmacies, entre
autres, et les épiceries qui n'ont pas plus de trois employés, du
genre dépanneur.
Après, on retrouve un paragraphe qui dit que les tabagies,
pâtisseries, confiseries ou pharmacies qui vendent des produits
caractéristiques... Remarquez qu'il n'y a pas de définition de ce
que sont les produits caractéristiques, c'est un des défauts de
la loi, il n'y a aucune définition. Qu'est-ce que c'est une tabagie,
exactement? Chacun peut avoir sa propre définition d'une tabagie, d'une
pâtisserie, d'une confiserie et surtout d'une pharmacie; cela peut aller
du plus petit au plus gros.
Le projet de loi mentionne que ces commerces peuvent aussi vendre des
denrées alimentaires pourvu qu'il n'y ait pas plus de trois
employés en même temps; déjà, cela surprend un peu.
Le paragraphe suivant reprend les exceptions de ces commerces pour dire que ces
commerces demeurent exclus de l'application de la loi si, en outre des produits
caractéristiques - encore là, on ne sait pas trop ce que cela
veut dire - on y vend de menus articles autres que ceux exclus par le
gouvernement. C'est quoi, des menus articles? Chacun peut encore avoir une
définition de menus articles; ils peuvent être "moins menus, plus
menus, gros menus, petits menus", c'est très difficile à dire.
C'est déjà très confus et cela laisse la place à
beaucoup d'interprétation.
Finalement, on termine en disant: "Aux fins du présent article,
une partie distincte et cloisonnée d'un établissement commercial
est réputée être un établissement commercial". Si on
comprend bien, à l'intérieur d'une pharmacie ou d'une librairie
ou d'une tabagie ou d'un restaurant ou d'un casse-croûte ou d'une
pâtisserie ou même des établissements de la
Société des alcools, qui sont dans les sept premiers paragraphes,
on pourrait avoir une section distincte où on pourrait vendre à
peu près de tout; peut-être que le ministre pourrait nous donner
des renseignements additionnels. Une cloison distincte, cela aussi, ce n'est
pas défini. Il y a une certaine jurisprudence qui s'est bâtie sur
la loi actuelle, mais cela ne va pas nécessairement avec la nouvelle
loi; quand on modifie une loi, évidemment, cela peut donner lieu
à des interprétations différentes par les tribunaux et ce
ne sont pas les mêmes mots qui sont employés. Maintenant, on parle
d'une partie distincte et cloisonnée; effectivement, c'est pas mal la
même terminologie.
La cloison peut être très haute ou moins haute; est-ce que
cela veut dire qu'il doit y avoir une caisse spéciale pour la partie
cloisonnée de sorte que ce soit vraiment un établissement
commercial séparé? Qu'est-ce qui arrive s'il n'y a pas de caisse?
Si c'est dans une librairie qu'on retrouve une section d'alimentation, s'il y a
une partie cloisonnée et que les gens sortent avec leurs denrées
alimentaires, ils passent à la caisse et, en payant leurs livres, ils
paient en même temps leurs pamplemousses, qu'est-ce qui arrive dans ce
cas?
On a vu dans la Presse d'aujourd'hui -c'est tout à fait
d'actualité - un article qui nous dit qu'une grosse chaîne de
pharmacies entend se lancer davantage dans l'alimentation. On dit
également que, question de compétition, les chaînes
alimentaires veulent se lancer dans la pharmacie. Finalement, ce sera le
fouillis total et complet au Québec: on aura des pharmacies qui vont
s'occuper d'alimentation et des magasins d'alimentation qui vont vendre de la
pharmacie. On va peut-être avoir des librairies ou des tabagies qui vont
vendre et de la pharmacie et de l'alimentation.
Je dois vous avouer que je suis très perplexe devant tout cela,
je me demande s'il n'y aurait pas lieu de définir les termes,
d'établir des règles qui s'appliqueraient à tout le monde
afin qu'on ne se retrouve pas, d'ici six mois ou un an, devant la confusion la
plus totale. Je ne suis pas convaincu que ce soit dans le meilleur
intérêt de tous. Je ne sais pas ce que vous en pensez,
peut-être que le ministre pourrait nous dire ce qu'il en pense
après. (11 heures)
M. Gingras: Juste un petit point. En ce qui a trait à la
partition, c'est une des raisons pour lesquelles on demandait un
éclaircissement, à savoir ce qu'on entendait par cela, pour
être sûr que dans le texte final de la loi, ce soit plus clair afin
d'éviter de mauvaises interprétations et des problèmes
à l'infini dans l'avenir.
Là-dessus, M. Poirier pourrait peut-être ajouter un point,
s'il vous plaît!
Le Président (M. Desbiens): M. Poirier.
M. Poirier (Guy L.): M. le Président, ce n'était
pas nécessairement sur la question du cloisonnement, malgré que
je verrais très bien, si quelqu'un veut vendre de l'alimentation, qu'on
laisse une cloison qui devienne un magasin d'alimentation avec les permis et
les licences qui s'imposent. Ça peut créer de la confusion, comme
le député de l'Opposition l'a mentionné.
Ce que je voulais faire ressortir, c'était un point que vous avez
justement soulevé tout à l'heure lorsque vous avez parlé
de qualité de vie de l'employé. Il y a aussi la qualité de
vie de l'employeur. Pendant des années au Québec, et probablement
ailleurs, on envoyait dans le commerce des gens qui n'avaient pas réussi
à devenir avocat,
médecin, député ou ministre. On disait: Toi, tu
n'es bon que pour le commerce. Je dois dire que depuis quelques années,
cela a drôlement évolué. Ce n'est pas n'importe qui qui se
lance dans le commerce aujourd'hui parce qu'il y a énormément
d'exigences. Vous devez être ferré dans plusieurs sujets, que ce
soit le marketing, la publicité, l'ordinateur, ou autre.
Je pense qu'on a réussi dans le commerce de détail, depuis
quelques années, à aller chercher des compétences. C'est
très important pour le ministre de regarder son projet de loi et de
dire: On ne veut pas créer une loi qui va démolir ce qu'on a fait
depuis quelques années. Lorsque vous parlez de qualité de vie,
j'imagine le petit détaillant, si on était pour ouvrir aux sept
jours, ce bonhomme-là doit être dans son entreprise tous les
jours. Il n'a pas les moyens de s'absenter.
Vous demandez à un individu d'être là sept jours par
semaine, quatorze heures par jour, je pense qu'on vient de balancer la
qualité de vie pour bien des gens. Je pense que le projet de loi 59
actuel a pris ça en considération, il ne faudrait pas apporter de
changements.
Il y a aussi un autre point de vue qu'il ne faudrait pas oublier, c'est
celui de tout projet de loi qu'on adopte aujourd'hui, qu'on semble oublier et
on a cette loi-là. On n'a qu'à regarder la loi
fédérale sur le dimanche qui date de 1909, je pense. On
évolue dans le commerce, on évolue dans plusieurs domaines
aujourd'hui et je pense qu'il faudrait dire: Ce qu'on pense être bien
aujourd'hui, est-ce que ça sera bien dans cinq ans? Est-ce qu'il ne
serait pas bon de dire: Cette loi-là devrait être
révisée à tous les trois ans, tous les cinq ans? Je ne le
sais pas. Par nécessité. Ne faudrait-il pas dire: Si quelqu'un y
pense ou si ça devient une priorité, on la regardera. Oui, dans
trois ans, on la révisera de nouveau. Si on a évolué et
s'il y a eu des changements qui nous disent qu'on devrait amender la loi, qu'on
le fasse, mais qu'on n'adopte pas le projet de loi pour ensuite mettre la loi
de côté en l'oubliant pour 10 ou 20 ans.
Le Président (M. Desbiens): M. le ministre.
M. Biron: Pour une réponse au député de
Laporte vis-à-vis de la permission de considérer une partie
cloisonnée comme un établissement indépendant, on va
prendre pour exemple une quincaillerie qui n'a pas le droit d'ouvrir le
dimanche, mais où il pourrait y avoir - on voit ça souvent
à la campagne - un commerce d'alimentation. Pour exploiter cette
quincaillerie et ce commerce d'alimentation, ça prend une douzaine
d'employés. Normalement, le propriétaire n'aurait pas le droit
d'ouvrir le dimanche, mais s'il fait une cloison - un cloisonnement - de sa
partie alimentation, avec une caisse pour cette partie, et qu'il n'a pas plus
de trois employés en même temps sur le plancher, il pourrait agir
comme un dépanneur et faire fonctionner sa partie alimentation en
laissant cloisonnée et fermée toute la section de quincaillerie.
C'est pour laisser un peu plus de flexibilité à certains
commerçants qui agissent dans certains milieux, dans certaines
régions, qui exploitent plusieurs commerces sous le même toit. On
veut leur permettre de pouvoir agir, s'ils le veulent, conformément
à la loi.
Si on n'a pas voulu être trop précis, en fait, c'est que
vous et moi n'aimons pas avoir trop de réglementation. On a fait tous
deux de longs discours sur la réglementation. On a essayé, au
sujet de ce projet de loi, de continuer ce qu'on faisait dans le passé.
Je pense que la loi qui existe depuis 1969 a rendu des services. Je pense qu'on
a dit: II faut l'ajuster après quinze ans, augmenter les amendes, revoir
certains petits détails. Mais, en règle générale,
c'est une loi qui a permis de fonctionner assez bien, qui a permis surtout de
développer beaucoup de petits commerces, de petites et moyennes
entreprises au Québec. Avec très peu de réglementation, on
négociait les menus articles, on négociait la forme de
cloisonnement. Finalement, on a réussi à vivre avec cela. Soit
dit en passant, concernant les menus articles, si vous voulez acheter une
souffleuse à neige, ce n'est pas un menu article. Habituellement, ce que
le tribunal reconnaît comme menu article, c'est quelque chose qui ne
coûte pas plus de 20 $ et qui peut se tenir dans une main.
M. Fortier: Un diamant.
M. Biron: Non. Cela prendrait un faux diamant, pour pas plus de
20 $. Il faut les deux conditions ensemble, ce qui laisse la petite marge de
manoeuvre nécesaire, qui fait une loi qui est là pour être
respectée, mais qui n'implique pas une montagne de paperasse à
suivre et à connaître.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Laporte.
M. Bourbeau: J'ai deux observations. Au début d'une
commission parlementaire, je pense qu'il faut s'ajuster. Le ministre n'a
absolument pas répondu - on est habitué à cela - à
la question.
M. Biron: Cela me surprendrait que vous disiez que je vous ai
répondu. Vous me dites toujours cela.
M. Bourbeau: Le ministre a dit: Les menus articles, c'est 20 $ et
moins. Cela n'a absolument pas de bon sens. Le député
d'Outremont a cité le cas d'un menu article, une bague à
diamant. Le mot "menu" signifie "petit" et non pas "pas cher", "pas
dispendieux". Une immense boîte de carton, on ne pourrait pas dire que
c'est un menu article, mais cela vaut moins de 2D $. Un menu article, c'est
menu; donc, c'est petit. Alors, ce peut être très cher; ce peut
être quelque chose qui peut valoir 10 000 $, mais c'est menu. C'est la
signification du mot "menu".
Deuxièmement, le ministre a dit: On n'a pas voulu mettre les
définitions dans le projet de loi parce que, vous et moi, on est contre
la réglementation. Je note, d'ailleurs, l'habitude qu'a prise le
ministre de toujours m'inclure dans son argumentation pour tenter que cela
passe mieux, mais il n'y a rien de commun entre une réglementation et
des définitions. J'ai demandé tout à l'heure de
définir les termes. C'est quoi une pâtisserie et c'est quoi une
pharmacie? Mais je n'ai pas demandé de nous inonder de
réglementation. Ce n'est pas du tout la même chose. Alors, je
continue à m'opposer à la réglementation abusive, comme le
ministre d'ailleurs, mais je continue également à croire qu'on
pourrait avoir une meilleure définition des termes, au moins en ce qui
concerne le genre des commerces qu'on veut réglementer.
Le Président (M. Desbiens): M. le ministre.
M. Biron: M. le Président, on s'entend pour dire que le
terme "menu article", pour nous, ce sont les deux conditions ensemble. Si le
terme n'est pas exact, on est prêt à le revoir, mais c'est quelque
chose qui ne coûte pas plus de 20 $ et qui peut se tenir dans une main.
C'est sûr que les gens qui voudraient vendre des diamants le dimanche,
c'est non. Je pense que tout le monde va s'opposer à cela d'ailleurs
chez les commerçants et les représentants des bijoutiers. Dans ce
sens-là, je pourrais le revoir pour être certain que le mot "menu"
soit bien compris par un tribunal qui verra à en juger
éventuellement.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Gouin.
M. Rochefort: Merci, M. le Président. Je voudrais profiter
de la présence du Conseil québécois du commerce de
détail pour au moins poser la question de fond de l'ensemble du
débat qui nous réunit ce matin, d'autant plus que je crois que le
ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme l'a abordée à
quelques reprises depuis le début de nos travaux ce matin.
Au fond, la question fondamentale sous-jacente à l'ensemble du
projet de loi qui est devant nous, c'est qu'il semble y avoir des individus qui
croient qu'il faut augmenter le nombre des heures d'affaires pour permettre
qu'il y ait plus de commerces. Est-ce que votre conseil, avec
l'expérience que vous avez et le nombre de membres que vous regroupez, a
le sentiment, quel qu'en soit le moment ou la forme, que ce soit à
partir de ce qui est prévu au projet de loi ou à partir d'autres
journées, y compris le dimanche, qu'on ajouterait des commerces à
ce qu'il y a actuellement ou si, au fond, les effets d'une telle loi ne
feraient que déplacer les activités commerciales d'un moment
à un autre? Il me semble que c'est la question de fond. Ce n'est pas la
première fois que j'entends le ministre poser cette question.
Tantôt, dans une des questions qu'il vous adressait, il disait: Oui, mais
peut-être que, dans la semaine de Pâques, ce n'est pas une bonne
semaine, mais le mois de mai, c'est le printemps, on est plein de "pep". Est-ce
que cela vaudrait la peine de permettre l'ouverture le soir pendant deux
semaines pour qu'il y ait plus de commerces? Est-ce que vous avez vraiment le
sentiment qu'il y a nécessité que nous élargissions les
heures d'affaires pour atteindre l'objectif d'augmenter les commerces en termes
quantitatifs au Québec ou si vous pensez que tout ce qu'on ferait, c'est
de déplacer le moment des activités commerciales?
Une voix: ...
M. Gingras: Est-ce que je peux répondre à la
question tout de suite?
M. Rochefort: Oui, le député d'Outremont va se
taire.
M. Gingras: On a répondu, dans notre mémoire et, ce
matin, à nouveau, que le commerce de détail avait beaucoup plus
besoin d'une amélioration du pouvoir d'achat de sa clientèle que
d'heures additionnelles. Maintenant, comme dans toute chose, tout extrême
est à éviter. Il y a des heures, dans une année, qui sont
meilleures que d'autres. Qu'il y ait quelques heures de plus pour
répondre à ce qui semble être une tendance chez la
clientèle d'avoir besoin de quelques heures - je souligne bien quelques
heures - je ne crois pas que cela irait contre le principe qu'on a de demander
le statu quo et du fait que ce ne sont pas les heures additionnelles qui vont
donner, tout d'un coup, une augmentation spectaculaire et surtout stable ou, du
moins, constante du commerce de détail. Ce n'est pas cela. Il y a un
certain pouvoir d'achat et il varie très peu. Il peut y avoir des achats
sous impulsion, il y en a, mais il y a déjà des achats sous
impulsion avec les heures qu'on a. Comprenez-vous? Est-ce qu'il y en aurait
tellement plus avec quelques heures ou plusieurs heures additionnelles? Je ne
le pense pas. Parce
qu'il arrive un temps où l'impulsion ne correspond plus au
pouvoir d'achat. Ou bien on déplace les achats d'un secteur à
l'autre et on n'est pas plus avancé.
Alors, je crois qu'on exprime à peu près la même
préoccupation. Ce n'est pas une avalanche d'heures additionnelles qui va
améliorer le commerce et, conséquemment, l'industrie. Je crois
bon que quelques heures soient rajoutées pour répondre à
certaines demandes de la clientèle, à une certaine
évolution de la clientèle. Encore une fois, je
répète que quelques heures, cela ne va pas contre nos principes.
Est-ce que cela répond à votre question?
M. Rochefort: Oui. La deuxième question que je voudrais
vous poser vise à clarifier une réponse que vous avez
déjà faite plutôt ce matin. Quand vous dites que si on
ajoute quelques journées de travail à des journées qui
étaient prévues comme des congés fériés dans
le passé, si on ajoute quelques heures de travail le soir, cela ne
posera pas de problème aux employés parce que, finalement, leurs
conditions de travail sont régies par des règlements de
compagnie, par des contrats. Est-ce que vous n'avez pas le sentiment que c'est
une réponse qui convient aux grands commerces parce que, avec un nombre
considérable d'employés, il y a moyen, justement, d'organiser des
heures de travail de façon que, effectivement, cela n'ajoute d'heures
à personne, que cela ne complique la vie à personne et que, au
bout de l'année, à peu près tout le monde ait
travaillé à peu près le même nombre d'heures par
semaine et ait eu à peu près le même nombre de
congés fériés? Est-ce que vous n'avez pas le sentiment
que, dans le cas de commerces de beaucoup plus petite importance - c'est
peut-être ceux que vous représentez personnellement, par exemple,
pas que vous représentez, mais pour qui vous travaillez - cela pourrait
poser un problème et que, dans le fond, la majorité des commerces
de détail au Québec sont des entreprises de petite taille plus
que des entreprises de grande taille avec un nombre élevé de
travailleurs?
M. Gingras: Je demanderai tantôt à Mme Clermont de
nous donner son point de vue là-dessus. Maintenant, j'aimerais dans ma
réponse, préciser que, en général, même chez
le petit commerçant, il y a un arrangement des heures,
présentement. Ce n'est pas tout le monde qui travaille le jeudi, le
vendredi, le dimanche, etc., de 8 heures à 22 heures. Il y a des
surnuméraires aussi, dans bien des entreprises, des gens qui travaillent
à temps partiel, etc. C'est un réaménagement des heures:
si on travaillait jusqu'à 21 h 30 le jeudi soir au lieu de 21 heures, je
n'y vois pas un gros problème. Encore une fois, on n'envisage pas en
même temps une révision de toute la réglementation. On
parle d'une exception. Au lieu d'ouvrir une heure de plus le samedi, on dit:
Pourquoi pas deux demi-heures, pour répondre aux vues de la
clientèle et, en même temps, se préoccuper du
bien-être de l'employé et dire: Est-ce que, en même temps,
cela peut être avantageux pour le commerçant? Je crois que cela
pourrait concilier le tout.
Pour répondre spécifiquement aux besoins du
propriétaire de ce magasin-là, de travailler lui-même une
demi-heure de plus les jeudi et vendredi soir et rallonger sa journée
d'ouvrage pour des années à venir, je vais demander à Mme
Clermont de répondre là-dessus si vous voulez bien.
Le Président (M. Desbiens): Mme
Clermont. (11 h 15)
Mme Clermont: Tel qu'on le recommande, on parle d'une heure,
c'est bien au singulier, une heure, je pense que c'est un déplacement,
une adaptation au genre de vie de la clientèle, aux besoins de la
clientèle. De plus en plus, les femmes sont sur le marché du
travail et, pour magasiner pour des achats importants, les gens le font en
couple. Donc, le matin, c'est beaucoup plus calme dans nos entreprises. On voit
de plus en plus d'entreprises qui, au lieu d'ouvrir à 9 heures, vont
ouvrir à 9 h 30, même à 10 heures. Je trouverais plus
intéressant d'avoir une demi-heure de plus les jeudi et vendredi et de
raccourcir le matin, parce que, chez moi, l'entreprise n'est pas tellement
importante, il n'y a pas tellement d'employés, il y a quelques
surnuméraires, mais très peu. Donc, on s'organiserait de cette
façon. Et même pour le personnel, c'est plus intéressant
d'être là quand il y a de l'activité les jeudi et vendredi
soir, il y a de l'activité. Comme on l'a mentionné tantôt,
M. Gingras a dit: Souvent, on est obligé de faire savoir aux gens que
c'est l'heure de quitter, c'est un peu dommage. Tandis que, le matin, la
circulation commence vers 10 h 30, 11 heures; c'est très peu actif le
matin. C'est simplement un déplacement des heures d'ouverture.
M. Rochefort: Je dois conclure de la réponse que vous nous
faites que, le samedi, je pense qu'à peu près tout le monde
s'entend pour dire qu'à compter de 16 heures, 16 h 30, les
activités sont à peu près réduites au minimum, et
que ce n'est pas du tout le cas le jeudi et le vendredi. Le jeudi et le
vendredi, à 21 heures, il y a encore une activité intense qui
règne dans l'ensemble des commerces de détail.
Mme Clermont: Ce sont des habitudes acquises déjà
depuis longtemps, ce sont des soirs de magasinage, tandis que, le samedi, les
gens ont toute la journée et, chez nous,
c'est la même chose, cela cesse vers 16 h 30.
M. Rochefort: Merci.
Le Président (M. Desbiens): M. le député
d'Outremont.
M. Fortier: M. Gingras, vous nous avez dit que vos membres
étaient satisfaits du statu quo. Vous nous avez dit également que
vous souhaitiez qu'il y ait plus de précision dans la loi. Par ailleurs,
dans le mémoire que vous nous avez distribué, vous disiez que
vous vous attendiez à ce que la loi soit mieux respectée ou que
le gouvernement s'organise pour qu'elle soit mieux respectée.
D'ailleurs, mon collègue de Laporte a fait état de ces
suggestions en demandant au ministre de préciser l'alinéa
à la fin du paragraphe 5 permettant la construction d'une cloison. Le
ministre a donné des explications en disant qu'il est en faveur d'une
certaine séparation, à la condition qu'il y ait une caisse
séparée; il a donné l'exemple d'une quincaillerie et de
l'alimentation et a dit: À la condition qu'il n'y ait qu'une caisse.
Donc, il serait souverain, et j'ai bien entendu, c'est une espèce de
souveraineté-association, mais l'explication ne nous a pas satisfaits
parce que tout est aussi confus qu'en 1980.
La question que j'aimerais vous poser a trait au commentaire du
paragraphe où vous dites: La faiblesse du gouvernement de ne pas
appliquer rigoureusement les exigences de la loi actuelle a eu pour
résultat un effet de boule de neige. On m'a dit - le ministre pourra me
corriger - qu'il y avait dans tout le Québec quatre inspecteurs qui,
malheureusement, ne travaillaient ni le dimanche, ni les jours de fête.
Comme de raison, faire respecter la loi, c'est assez embêtant. Et vous
nous avez dit que vous étiez en faveur du statu quo. Je me pose la
question et j'aimerais vous demander pour quelle raison modifier la loi si,
dans l'avenir, elle n'est pas plus respectée qu'elle l'est
présentement?
Et il y a une deuxième question que j'aimerais vous poser, parce
qu'en homme d'affaires, j'imagine, vous ne souhaitez pas que le gouvernement
augmente son personnel d'une façon trop considérable pour que nos
taxes n'augmentent pas d'une façon trop importante non plus; est-ce que
vous croyez que l'application de la loi pourrait se faire par des corps
policiers locaux ou est-ce que votre association a fait des recommandations au
ministre et au gouvernement dans le passé pour savoir de quelle
façon la loi pourrait être mieux respectée? Et pour quelle
raison dites-vous que la faiblesse du gouvernement à faire respecter la
loi actuelle a eu pour résultat de faire effet de boule de neige?
M. Gingras: II y a deux ou trois points dans cette question.
L'effet de boule de neige, c'est principalement relié aux ouvertures du
dimanche, aux marchés aux puces qui se sont multipliés etc.,
devant le manque de vigueur de la loi précédente au point de vue
de son application. Lorsque vous vous référez à notre
statu quo où on dit que, sur les heures d'affaires, la majorité
de nos marchands était en faveur d'un statu quo tout en étant
prêt à quelques petits amendements ici et là, le statu quo
ne s'appliquait pas du tout à la question du respect de la loi parce que
là, on avait des recommandations très spécifiques
d'augmentation des amendes - avec des montants qui ont été
spécifiés dans notre mémoire du mois de mars - qui
allaient jusqu'à 5000 $ et ensuite jusqu'à 10 000 $. C'est ce
qu'on revoit maintenant dans le projet de loi 59. Ce n'est pas le statu quo
pour toute la loi, parce qu'elle n'avait pas de dents, cette loi, et les gens
en abusaient de plus en plus; c'était une des principales raisons pour
en arriver à des amendements, à des changements, pour que les
gens puissent la suivre.
II y avait deux poids, deux mesures: les gens qui observaient la loi
devenaient de plus en plus désavantagés par rapport à ceux
qui ne l'observaient pas. Une loi doit normalement comporter ce qu'il lui faut
pour être respectée. C'est ce qu'on suggérait. On n'a pas
changé d'avis là-dessus, même si on parlait du statu quo,
en général, sur les heures. Le statu quo n'était
définitivement pas sur les amendes.
En ce qui concerne le nombre d'inspecteurs, on s'en préoccupe
aussi. S'il est vrai qu'on n'a que quatre inspecteurs, il est entendu que c'est
insuffisant. Vous dites qu'en homme d'affaires, vous n'êtes pas
prêt à suggérer que, tout d'un coup, on engage une
quantité énorme d'employés additionnels. Une suggestion a
déjà été faite dans le récent
mémoire, selon laquelle il y aurait possibilité de combiner le
travail des inspecteurs qui sont déjà un peu partout dans la
province pour d'autres buts, pour d'autres ministères. Cela se fait dans
l'entreprise privée et cela pourrait également se faire dans la
machine gouvernementale.
On a déjà des inspecteurs qui viennent dans les magasins
pour toutes sortes de raisons. S'ils venaient pour toutes ces raisons, on
pourrait multiplier la quantité des inspections et assurer la protection
des diverses lois dans les différents ministères. Je crois que le
cloisonnement ne s'applique pas seulement dans le commerce, le cloisonnement
entre les ministères cause un certain problème. Il pourrait,
à notre avis, y avoir des combinaisons de fonctions. Je ne dis pas que
cela serait facile d'application, mais c'est l'une de nos suggestions.
M. Fortier: Je crois que vous disiez, dans votre mémoire,
que vous vous inquiétez du fait que les poursuites ne pourraient pas
être intentées par quiconque. Je ne sais pas si c'est vous qui
avez mentionné cela; il y a quelqu'un tantôt qui a
mentionné la chose.
M. Gingras: Non, on n'a pas mentionné cela.
M. Fortier: Est-ce que votre association aimerait garder ce
pouvoir, tel que la loi le permet présentement? Il semblerait
qu'à l'avenir le droit de poursuite soit plutôt entre les mains du
gouvernement qu'entre les mains de quiconque?
M. Gingras: À notre point de vue, il ne faudrait pas se
fier exclusivement aux inspecteurs. Il pourrait y avoir un mécanisme de
plainte qui apporterait une réaction de la part du ministère
chargé de l'application de cette loi, pour qu'il y ait suffisamment de
gens pour en prendre soin. Est-ce que, parmi mes collègues ici,
quelqu'un pourrait ajouter quelques mots à la position que je viens de
décrire?
M. Poirier: II est certain que toute loi, quelle qu'elle soit, si
elle n'a pas de dents, les gens vont s'en moquer. Pour le détaillant qui
peut ouvrir le dimanche actuellement, et qui fait une certaine somme, payer une
amende, comme présentement, de 40 $ ou 50 $, c'est rire de la loi. C'est
plus payant de payer les 40 $ et d'en faire 5000 $. C'est pour cela qu'on a dit
qu'il est vrai que ce n'est pas facile. Probablement que c'est un trait des
gens d'Outremont, parce que je viens de là, moi aussi, M. le
député...
M. Fortier: Merci.
M. Poirier: ...et on n'aime pas dépenser l'argent des
contribuables. Est-ce qu'il serait plus rentable d'engager un paquet
d'inspecteurs si la loi, en bout de ligne, impose des amendes de 40 $? Cela ne
donnera rien. L'aspect des amendes est beaucoup plus important que l'aspect des
inspecteurs, je pense. Il faut se concentrer surtout sur cela.
Dans le projet de loi 59, on a donné des dents aux amendes. Ce
qui est important, c'est surtout le paragraphe qui dit que le juge doit prendre
en considération les profits réalisés par le
détaillant. Alors, s'il a fait beaucoup d'argent, il va payer une forte
amende. Je pense que c'est important et ce sont les dents qu'on demandait
d'insérer dans la loi.
M. Fortier: Merci beaucoup.
Le Président (M. Desbiens): M. le ministre, vous
avez...
M. Biron: En réponse au député d'Outremont,
il s'agit d'abord d'une vingtaine d'inspecteurs qu'on a à plein temps.
Deuxièmement, on prétend qu'on en a 40 000 à travers le
Québec, parce que tous les commerçants sont des inspecteurs, tous
les commerçants sont habilités à porter plainte. En plus,
c'est très facile pour nous de demander à la sûreté
municipale ou à la Sûreté du Québec de faire
enquête et de porter les plaintes nécessaires.
Le problème, je pense que M. Poirier l'a mentionné, le
dimanche, on vit sous l'ancienne loi fédérale, la loi actuelle de
1907, qui dit que les amendes sont de 1 $ à 40 $. Lors des
dernières plaintes portées par nos inspecteurs, le juge a
condamné le commerçant à 1 $ d'amende. Cela a
découragé les inspecteurs bien net. Ce qu'on faisait depuis un
an, on prenait des injonctions contre certains magasins qui annonçaient
qu'ils allaient ouvrir le dimanche pour dire qu'en vertu d'outrage au tribunal,
on allait les faire condamner. C'est à cause de cela. En fait, je pense
qu'on a répondu aux demandes, à peu près au rythme
suggéré par le Conseil québécois du commerce de
détail, pour augmenter sensiblement les amendes et en imposer dimanche,
pour que, finalement, la loi puisse être respectée.
M. Fortier: Mais, malgré cela, M. le ministre, des gens
m'ont fait remarquer qu'un commerçant avait porté plainte
à la police alors qu'un centre d'achat avait été ouvert.
La police est arrivée et comme il y avait beaucoup de circulation, la
police s'est engagée à diriger la circulation pour s'assurer que
cela aille bien; finalement, c'est ce qui est arrivé. Alors, il faudrait
que vous insistiez davantage auprès des corps policiers pour qu'ils
fassent respecter la loi.
M. Biron: C'est ce que je vous disais, dans le fond. Lorsque
quelques inspecteurs se font retourner parce que le juge condamne le
commerçant à 1 $ d'amende pour avoir ouvert le dimanche, cela
décourage les gars et ils ne veulent pas continuer plus loin. Alors, il
était grand temps de retoucher au moins cet aspect-là.
M. Fortier: D'accord.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Hull.
M. Rocheleau: Ecoutez, M. le Président, simplement
à titre de précision pour résumer un peu ce qui a
été mentionné. Si je comprends bien, le Conseil
québécois du commerce de détail souhaiterait que les
congés du 24 juin et 1er juillet soient, comme ce l'était avant,
ramenés au lundi le plus près de la fête. Disons que c'est
un objectif que vous poursuivez depuis plusieurs
années. Ceci était pratiqué antérieurement
et c'était souhaité, je pense, autant par l'employé que
par l'employeur, parce que le lundi est toujours une journée qui
représente moins d'affaires.
Vous avez mentionné le fait que la loi actuelle n'a pas de dents
et, par le fait même, n'a pas été appliquée ou
à peu près pas. Si on tient compte du ridicule du fait d'avoir
eu, au cours des dernières années, uniquement quatre inspecteurs,
pour couvrir -une vingtaine - l'ensemble du Québec, qu'on parle de
quatre ou de vingt, je pense que ce n'est pas tellement plus, d'autant plus
qu'ils ne travaillent pas les jours fériés, le dimanche et le
soir...
M. Biron: Ils n'ont pas droit aux heures d'affaires, eux!
M. Rocheleau: Alors, ils n'ont pas droit aux heures d'affaires.
Effectivement, cette loi devrait être appliquée par la
Sûreté du Québec là où il n'y a pas de corps
policier municipal; également que ces règlements soient
appliqués à la lettre pour le respect de la loi comme telle.
Vous avez mentionné un point qui est relativement important et je
pense que - une loi, c'est toujours restrictif à la base - ces
règlements doivent être assez souples quand même pour
permettre à l'ensemble du commerce au détail de se retrouver
parmi les besoins du consommateur. Il est un fait que le consommateur semble
souhaiter davantage de prolonger les heures d'ouverture du jeudi et du
vendredi, parce que la période d'après le souper est relativement
courte pour permettre cet achalandage que l'on remarque dans les commerces,
où, à 21 heures, c'est rempli de gens encore qui n'ont pas
terminé leurs emplettes ou les achats qu'ils voudraient faire. Il y a
aussi le fait que vous avez soulevé, à l'effet que plutôt
d'ajouter une heure le samedi, il serait préférable de le laisser
tel quel, parce que ce n'est pas une journée nécessairement des
plus achalandées, surtout en après-midi.
Par contre, on sait qu'il va y avoir plusieurs intervenants à
cette commission. Vous êtes plus particulièrement
intéressés par le commerce de détail, globalement.
À cause des tolérances - parce qu'il y a beaucoup de
tolérances au Québec, à moins que je fasse erreur - la loi
n'a pas toujours pénalisé les intervenants. Est-ce que dans
certaines catégories de commerces, commerces qui se pratiquent davantage
le dimanche pour satisfaire une clientèle, vous y avez émis
certaines objections? Est-ce que, de votre côté, vous êtes
aussi conscients du fait que cela puisse satisfaire un nombre quand même
assez important de gens qui, le dimanche, veulent fréquenter certains
établissements, pas nécessairement d'alimentation, mais
d'artisanat ou autres?
M. Gingras: Est-ce que je peux commencer par la dernière
question?
M. Rocheleau: Certainement. (11 h 30)
M. Gingras: On a exprimé clairement, en étant pour
le statu quo, que l'on n'est pas en faveur de l'ouverture le dimanche. La
très grande majorité de nos marchands n'est pas favorable
à l'ouverture le dimanche, pas du tout. Certains spécialistes -
vous mentionnez certaines catégories de marchandises - ont
considéré la possibilité d'ouvrir le dimanche. À
part certaines catégories prévues dans la loi existante et les
quelques exceptions additionnelles qui sont dans la nouvelle loi, qui, de toute
façon, reflètent la vie d'aujourd'hui, parce que les magasins
d'horticulture étaient déjà ouverts le dimanche, on
légalise quelque chose qui existait déjà, il n'y a pas
d'objection. Mais de là à dire que le commerce du meuble
bénéficierait de l'ouverture le dimanche, la position de notre
association est: pas du tout. Peut-être qu'un nombre très infime
de nos membres seraient d'accord avec cela. Des catégories
spécifiques de marchandises à part celles qui sont
déjà prévues dans la loi, on n'en voit pas où il y
aurait avantage, ni pour le commerçant ni pour l'employé, comme
de raison, et réellement pas pour la clientèle non plus.
On parlait tout à l'heure de qualité de vie, tout le monde
en parle. La qualité de vie, elle n'existe pas seulement pour les
employés, elle concerne la clientèle aussi. Si, tout d'un coup,
le dimanche devient, comme cela existe dans certains pays qu'on connaît
tous, comme n'importe quel jour de la semaine, si ça ne paraît
plus que c'est un jour pour se reposer et avoir la paix, tout en mettant de
côté la partie religieuse de la journée, c'est une
journée où on a présentement la paix, pendant laquelle on
peut rencontrer son voisin, ses parents, ses amis, quand tous les commerces
commenceront à ouvrir leurs portes le dimanche, ce sera un tout autre
genre de vie qu'on aura le dimanche et on aura perdu cela... La qualité
de vie ne s'applique pas seulement aux employés et aux
commerçants, elle s'applique à toute la clientèle mais
sans que le client, en général, ne s'en rende compte, il n'est
peut-être pas assez versé dans cet aspect. On n'a aucune intention
de promouvoir que certaines marchandises en particulier soient
avantagées par l'ouverture le dimanche.
M. Rocheleau: Comme dernier point, je souhaiterais que le
ministre soit beaucoup plus clair - mon collègue de Laporte l'a
mentionné et vous l'avez mentionné tantôt -sur la question
des cloisons qui divisent un ou plusieurs commerces. Je pense qu'on tente
de protéger le dépanneur qui, lui, emploie habituellement
moins de trois employés. Du même coup, on voudrait permettre dans
d'autres genres d'entreprises le cloisonnement qui permettrait à tout
genre de commerce d'ouvrir à l'intérieur d'un ensemble de
commerces. Je pense que c'est un des points sur lesquels il va falloir examiner
davantage ce qu'on veut arriver à dire par "cloisonnement" et par "genre
de commerce" qu'il serait loisible d'ouvrir.
M. Gingras: Nous sommes parfaitement d'accord pour une
clarification de cet aspect de la loi, c'est ce qu'on a demandé tout
à l'heure. Quelle est la cloison acceptée? On a eu l'impression
que la réponse parlait de deux commerces distincts. Si ce sont deux
commerces distincts, il n'y a aucun problème, la cloison existe
déjà et il y aura deux permis différents. Je ne vois pas
pourquoi faire une exception s'il y a une cloison complète. C'est un peu
ce qu'on demandait, un éclaircissement là-dessus, afin
d'éliminer toute possibilité d'interprétation qui nous
retournerait dans une petite jungle à démêler à
l'avenir. Est-ce que cela répond à vos préoccupations?
M. Fortier: Le message est compris.
Le Président (M. Desbiens): II n'y a pas d'autres
intervenants? Je vous remercie au nom des membres de la commission.
M. Gingras: C'est nous qui vous remercions.
Le Président (M. Desbiens): Je demande à la
Fédération interdisciplinaire de l'horticulture ornementale du
Québec Inc., de s'approcher, s'il vous plaît!
M. Jean Tremblay, si vous voulez bien présenter les personnes qui
vous accompagnent et procéder à la lecture de votre
mémoire.
Fédération interdisciplinaire de
l'horticulture ornementale du Québec Inc.
M. Tremblay (Jean): Avant tout, j'aimerais vous remercier, M. le
Président, d'offrir à la fédération l'occasion de
s'exprimer sur le projet de loi. Permettez-moi de vous présenter,
à ma droite, M. Gaétan Hamel, représentant de
l'Association Paysage Québec et président-directeur
général du Centre Jardin Hamel à Québec; à
ma gauche, M. Philippe Thompson, président de la section centre-jardin
de l'Association Paysage Québec, affiliée à la
fédération...
Une voix: On ne comprend rien.
Le Président (M. Desbiens): M.
Tremblay, y aurait-il moyen d'approcher votre micro, s'il vous
plaît? M. Tremblay (Jean): Oui.
Le Président (M. Desbiens): Peut-être simplement le
relever.
M. Tremblay (Jean): ...gestionnaire entre autres de W. H. Perron.
Sans plus tarder je vais demander au président de la section
centre-jardin, M. Philippe Thompson, de bien vouloir vous présenter les
doléances en ce qui a trait au projet de loi 59.
Le Président (M. Desbiens): M.
Thompson.
M. Thompson (Philippe): Merci. J'aimerais brièvement
présenter notre mémoire puisqu'il est assez bref et précis
quant à notre point de vue vis-à-vis du projet de loi. La
Fédération interdisciplinaire de l'horticulture ornementale du
Québec, reconnue par le gouvernement québécois
porte-parole officiel de l'industrie horticole et représentant les
intérêts des différents types d'entreprises tels que
pépinières, serricultures, paysagistes, centres de jardinage,
etc, tient à présenter à cette commission sa position sur
le projet de loi 59.
Cependant nous désirons vous faire part de quelques
caractéristiques de notre industrie et ce, afin de mieux appuyer les
recommandations que nous proposons.
Ceci dit, concernant les ventes dans l'industrie horticole, on constate
la particularité suivante, à savoir qu'elles sont
saisonnières. Ainsi, en moins de 60 jours, près de 70% du chiffre
d'affaires est réalisé et ce, habituellement entre la mi-avril et
la mi-juillet. Il importe donc de profiter au maximum des conditions
climatiques favorables sans lesquelles nos entreprises ne pourraient
exister.
Ainsi, aux États-Unis, des études ont
démontré que le premier loisir d'extérieur exercé
était l'horticulture. Par ailleurs, en examinant la situation au
Québec, on constate que depuis 1974, la demande pour les produits
horticoles augmente en moyenne de 14% par année. C'est donc dire
l'engouement du public québécois pour l'horticulture
pratiquée le samedi et surtout le dimanche.
Si le consommateur désire profiter d'un environnement
agréable, il doit s'approvisionner en produits horticoles et connexes
nécessaires à la pratique de ses loisirs écologiques.
Selon les objectifs poursuivis par la loi, il est en droit de recevoir un
service approprié. D'autant plus que celle-ci doit établir une
durée quotidienne d'exploitation des commerces qui doit, d'une part,
permettre bien sûr aux consommateurs d'acheter, et, d'autre part,
assurer aux commerçants une exploitation plus rentable de leur
entreprise.
Nous l'avons mentionné précédemment, les
goûts et les comportements du consommateur se sont modifiés. Comme
il est souligné dans le document de consultation de février 1983
sur la Loi sur les heures d'affaires des établissements commerciaux, des
tendances à plus long terme influent sur les pratiques commerciales,
principalement en raison de la situation économique et plus
particulièrement l'organisation du loisir.
Ceci se confirme compte tenu du fait qu'en moyenne les samedi et
dimanche comptent pour 38% à 40% du chiffre d'affaires hebdomadaire
d'une telle entreprise.
En résumé, considérant les faits suivants, à
savoir: 1° Le caractère saisonnier de l'entreprise horticole,
à savoir que près de 70% du chiffre d'affaires est
réalisé et ce, sur une période approximative de 60 jours;
2° que le consommateur qui exerce ses loisirs écologiques et ce,
surtout le dimanche, est en droit de se procurer les produits horticoles et
connexes nécessaires à la pratique de ses divertissements; 3°
que l'objectif de la loi est de chercher à maintenir un équilibre
optimal entre les intérêts du consommateur et du
commerçant, nous recommandons donc que le troisième alinéa
de l'article 5 du projet de loi 59 se lise comme suit: "Tout
établissement commercial visé aux paragraphes 1 à 8 du
premier alinéa, demeure exclu de l'application de la présente loi
même s'il vend, en outre des produits caractéristiques de son type
d'établissement, de menus articles autres que ceux exclus par le
règlement du gouvernement.
Notre principale crainte, c'est que certains articles qui ne seraient
peut-être pas inclus dans une interprétation très stricte
du mot "horticole" ne seraient pas compris dans cette interprétation.
Notre crainte, c'est que nous ne pourrions pas vendre ces articles. Par
exemple, nous avons de l'outillage, parfois des meubles de jardin, tous les
articles qui aident le consommateur à profiter de ses loisirs et qui
sont intimement liés à l'horticulture elle-même, qui en
sont presque indissociables.
Je vais céder la parole à M. Tremblay.
Le Président (M. Desbiens): M.
Tremblay.
M. Tremblay (Jean): Essentiellement, j'aimerais vous faire part
que, lors de la consultation en ce qui a trait aux heures d'affaires comme
telles, on avait mentionné qu'on était d'accord avec le principe
des amendes, l'augmentation des amendes. Pour nous, l'argumentation tourne
autour de ce qui suit: l'horticulture, c'est un loisir, entre autres, un loisir
écologique, le souci de l'environnement humain et son
amélioration. Ce qui m'amène à dire que, concernant
l'interprétation de la loi ou la modification qui a été
apportée relativement à la définition de "menus articles",
pour nous, c'est clair, ce que cela veut dire en ce qui concerne notre
industrie, parce que c'est vraiment différent d'autres commerces de
détail. En fait, ce sont des produits connexes. Prenons l'exemple d'un
individu qui - comme on vous l'a mentionné, dans notre mémoire -
le dimanche, cherche à fertiliser sa pelouse et va acheter de l'engrais.
S'il n'a pas d'épandeur à engrais pour faire l'entretien,
après avoir acheté le produit, effectivement, il ne pourra pas
exercer son loisir. Ce qui fait que, pour ce qui nous concerne, comme je vous
l'ai mentionné précédemment et peut-être pour
éclairer la question des menus articles, c'est surtout relié aux
produits connexes.
Pour ma part, c'est très clair et cela a été clair
aussi lors de la consultation auprès de nos membres. On l'a
souligné. Comme M. Thompson le mentionnait, notre crainte, c'est la
question de la définition des produits de l'horticulture. C'est
relié de près ou de loin, comme on vous le mentionnait
précédemment, aux produits connexes.
Le Président (M. Desbiens): Merci. M. le ministre.
M. Biron: Je voudrais simplement vous remercier d'être
venus présenter votre mémoire à la commission
parlementaire. Je me permets de demander à mon collègue, le
député de Châteauguay et adjoint parlementaire de mon
ministère, de faire une intervention à la suite de votre
présentation.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Châteauguay. (11 h 45)
M. Dussault: Merci, M. le Président. Ce que nous
comprenons de votre mémoire, c'est que, d'une façon
générale, vous êtes d'accord avec l'approche
gouvernementale quant au projet de loi 59. Nous comprenons aussi que vous avez
fait consensus dans votre secteur sur ces questions. C'est donc très
représentatif des personnes que vous représentez ici aujourd'hui.
Il semble qu'il y a une note sur laquelle, cependant, il n'y aurait pas accord,
mais cela demeure encore un sujet de discussion. C'est la question des menus
articles, ce que vous pouvez vendre. Tout à l'heure, vous avez
employé l'expression "produits connexes" pour identifier ce dont vous
parlez. C'est là-dessus que je voudrais vous poser une ou des
questions.
On sait qu'il y a eu une tendance générale, dans beaucoup
de commerces au
Québec, à tenter de revenir au modèle qu'on a connu
anciennement, ce qu'on appelle le magasin général. On sait que
cela se retrouve un peu partout au Québec dans différents
secteurs et cela s'explique sans doute - cela m'a d'ailleurs été
dit par différents marchands dans différents secteurs - par le
fait que les gens allant dans un magasin spécialisé et y trouvant
un intérêt dans cette relation de plus en plus intime qui se
crée entre le marchand et le consommateur, le marchand voudrait
davantage répondre aux besoins de la clientèle et, à un
moment donné, il découvre qu'il y a peut-être un secteur
qu'il peut davantage développer. C'est ce que vous avez appelé le
produit connexe, sauf qu'il y a un moment où on ne sait plus où
cela s'arrête, si, par exemple, cela mène à vendre de la
soupe dans une pharmacie. Il y a des gens qui sont venus me voir qui m'ont dit
que dans certaines pharmacies on vendait de la soupe. Cela m'a paru très
étrange, mais c'est à cela que cela mène effectivement.
C'est donc la difficulté du législateur de savoir où cela
doit s'arrêter, afin d'assurer une certaine cohésion dans notre
société. Une politique sur cette question doit être faite
de compromis; c'est un secteur où inévitablement le compromis
doit se faire. Jusqu'où peut-on faire des compromis? C'est le genre de
questions qu'on doit se poser aujourd'hui.
J'aimerais savoir ce que vous entendez par produits connexes dans votre
secteur et jusqu'où cela va. Je pense qu'il est facile de donner des
exemples de choses qui ont l'air de n'être plus de menus articles. Le
ministre a parlé tout à l'heure des menus articles: quelque chose
qui coûterait au maximum 20 $ et qui pourrait tenir dans la main. C'est
une façon d'exprimer la chose, peut-être que vous en avez une
autre. Est-ce qu'un tuyau d'arrosage relèverait encore d'un menu
article? Un jour, on devra trancher la question. En attendant, on vous
écoute, on va écouter tout le monde avec beaucoup d'attention; il
y a une très grande ouverture pour faire des corrections à la loi
si cela s'impose, mais il va falloir déterminer où s'arrête
la notion de produit connexe et où s'arrête la notion de menu
article. J'aimerais que vous nous donniez davantage d'éclairage
là-dessus.
Le Président (M. Desbiens): M. Hamel.
M. Hamel (Gaétan): M. le Président, M. le
député, je suis d'accord avec vous pour dire qu'il peut y avoir
ambiguïté au niveau de la définition de menus articles. Nous
aimerions que le terme soit changé pour parler d'articles connexes
à l'horticulture ornementale, c'est-à-dire que, si j'ai besoin
d'une balle de mousse de tourbe de six pieds cubes, bien entendu, cela
coûte moins de 20 $ et cela ne tient pas dans la main. On pourrait quand
même avoir beaucoup d'articles qui sont reliés à
l'horticulture.
Je vais vous donner quelques exemples: on pourrait sûrement vendre
un râteau, parce que c'est un article qui sert au jardinage, mais, sous
prétexte qu'on vend des râteaux, on ne parlera pas d'outils en
général et aller jusqu'à vendre un marteau et une
égoïne. Par contre, même si on ne vend pas
d'égoïne, on pourrait sûrement vendre une scie à
émonder parce que cela se rattache à l'horticulture. On pourrait
vendre un épandeur d'engrais, parce que cela aussi se rattache à
l'horticulture. Ce sont des types d'articles qui visent à la pratique de
l'horticulture et aux loisirs écologiques. L'influence américaine
nous touche toujours un peu et, dans les centres-jardins, depuis quelques
années, beaucoup de gens vendent, en outre des articles d'horticulture
proprement dits, des nichoirs d'oiseaux ou des nourrisseurs d'oiseaux et les
graines qui vont servir à nourrir les oiseaux sauvages. Ce seraient des
articles qui pourraient aussi être vendus dans les centres-jardins et
être considérés dans ce que vous appelez les menus articles
et qu'on aimerait appeler des articles connexes.
M. Dussault: Vous avez employé l'expression "articles
connexes à l'horticulture ornementale". Cela m'a l'air d'être le
champ défini à partir duquel on pourrait identifier les menus
articles en question ou les produits connexes. La tondeuse à gazon,
est-ce qu'elle n'entre pas dans le champ d'articles connexes à
l'horticulture ornementale que vous avez défini?
M. Hamel (Gaétan): Si j'ai dit "horticulture ornementale",
c'est peut-être par déformation professionnelle. Il faudrait
utiliser le mot englobant "horticulture" proprement dite. Pour utiliser votre
exemple, la tondeuse à gazon, éventuellement, pourrait être
acceptée comme article d'horticulture pour autant qu'on considère
que le centre-jardin ne deviendra pas un vendeur de tondeuses à gazon.
À ce moment, est-ce que l'entreprise devient horticole ou est-ce une
entreprise de machinerie agricole ou de machinerie horticole? À mon
sens, il y a une bonne distinction à ce niveau. Il y a toute une marge
aussi entre une tondeuse à gazon et un petit coupe-bordure qui va servir
simplement à faire l'entretien général de la
propriété et des appareils semblables.
M. Dussault: Quand vous nous demandez une ouverture à
cette notion d'articles connexes à l'horticulture, dans votre esprit,
est-ce que cela comprend tout ce que vous vendez présentement?
M. Hamel (Gaétan): Pas nécessairement
tout ce qu'on vend présentement, mais peut-être ce qu'on
aimerait vendre à l'avenir. Il y a sûrement des entreprises qui
sortent du domaine de l'horticulture proprement dit pour
bénéficier justement des largesses de la loi actuelle ou, en tout
cas, de la non-application de la loi actuelle, et qui en profitent pour vendre
toutes sortes de choses. Je pense qu'il faudrait se limiter à un cadre
bien précis et dire: Le matériel horticole, bien sûr, et
tous les matériaux qui vont de pair, si vous voulez, et qui
améliorent les loisirs écologiques. On voudrait se diriger plus
vers les loisirs écologiques y incluant, bien sûr,
l'horticulture.
M. Dussault: Je comprends donc que non seulement vous voudriez
continuer à vendre ce que vous vendez, mais vous voudriez
élargir, prendre de l'expansion au plan des articles de vente.
M. Hamel (Gaétan): Mais toujours à
l'intérieur du domaine de l'horticulture ou d'un loisir
écologique, par exemple, si on parle de la nourriture des oiseaux et des
instruments d'ornithologie.
M. Dussault: Par le fait même, on s'éloigne de la
notion de "menus articles" au sens où le ministre a essayé, tout
à l'heure, de la définir...
M. Hamel (Gaétan): Justement.
M. Dussault: ...ce qui n'est pas facile à faire. Je pense
que cela clarifie les choses. Je ne suis pas certain qu'on va avoir de la
facilité à vous donner raison là-dessus, cela peut amener
le rebondissement d'autres personnes, parce que cela empiète
nécessairement sur le champ de vente d'autres commerçants. Cela
n'est pas facile à régler.
Vous avez parlé, tout à l'heure, de meubles de jardin.
Est-ce que vous pourriez nous expliquer un peu plus ce que cela veut dire?
Dois-je comprendre, par exemple, qu'une table et des chaises ainsi qu'une
espèce de parasol, c'est un meuble de jardin, au sens où vous
l'employiez tout à l'heure?
M. Thompson: Présentement, cela fait partie des articles
que nous vendons. En fait, on le voit un peu dans le cadre d'un
aménagement. Nous vendons de l'aménagement extérieur. Si
le consommateur désire acheter des plantes et meubler son chez-soi, son
extérieur, les meubles sont là. On le voit dans cette optique.
C'est sûr que c'est un nouveau marché pour les
établissements concernés. Ce sont des marchés que le
domaine horticole a développés ou auxquels il a donné un
certain essor; non seulement les meubles, mais aussi les nichoirs d'oiseaux,
les produits pour les oiseaux et, évidemment, l'outillage qui est
intimement lié à la pratique du jardinage.
M. Dussault: Donc, le lien que vous faites entre le meuble au
sens où on vient de l'entendre, le meuble de jardin, et l'horticulture,
c'est peut-être qu'on peut s'asseoir confortablement pour regarder nos
oeuvres horticoles. J'ai beaucoup de difficulté à faire le lien
entre l'horticulture et les meubles de ce genre. En tout cas, vous avez
tenté de le faire. On va essayer de s'accommoder de ce que vous venez de
nous dire. Je répète ce que je disais tout à l'heure: ce
n'est pas facile. À ce compte-là, on va continuer à
élargir davantage et vous allez sûrement être d'accord.
J'entendais l'Opposition, tout à l'heure, dire que les
balançoires pourraient peut-être... Vous savez, il y a des
balançoires pour enfants qui fonctionnent sous forme de balance. Vous
avez les balançoires qui sont suspendues et qui nous permettent de
chanter tout en se balançant. On pourrait bien ajouter aussi les
glissoires pour les enfants qui pourraient s'occuper pendant que nous regardons
nos oeuvres horticoles. Il y a sûrement une limite qu'il va falloir
trouver quelque part. Je pense qu'il sera difficile - je conclus
là-dessus - de satisfaire votre demande; c'est le moins qu'on puisse
dire, mais on va chercher, on va regarder cela. On veut chercher, en tout cas.
Merci.
Le Président (M. Desbiens): M. Hamel.
M. Hamel (Gaétan): Une des raisons pour lesquelles on
aimerait aussi conserver des articles comme ceux-là, c'est que,
déjà, nos lignes de produits au Québec sont relativement
réduites en termes de nombre. On parle, dans un centre-jardin, d'environ
500 à 600 produits que l'on peut commercialiser. Si on se compare avec
une quincaillerie qui a la possibilité d'en garder jusqu'à 25
000, on est largement défavorisé. Ce qui n'empêche pas
quand même, durant les heures normales d'ouverture, les quincailleries de
vendre tous les articles de jardinage et de nous faire une compétition
que je trouve très sévère dans certains cas. Je ne vois
pas pourquoi on n'irait pas vendre chez nous des articles strictement
reliés à l'horticulture, même en incluant les meubles de
patio, même en incluant les balançoires et peut-être les
glissoires de piscine étant donné qu'elles sont aussi vendues le
dimanche, d'après les nouveaux articles de loi, dans un autre type de
commerce.
Le Président (M. Desbiens): Vous voulez ajouter quelque
chose, M. Tremblay?
M. Tremblay (Jean): J'aimerais renchérir sur la question
des meubles de
patio. Tantôt, M. Thompson faisait un parallèle avec
l'aménagement. Assez souvent, puisque c'est une des
caractéristiques des entreprises horticoles, il y a une diversité
des activités, c'est-à-dire qu'un centre-jardin peut faire de
l'aménagement paysager et il peut être également reconnu
comme producteur, selon la Loi sur les producteurs agricoles. Par exemple, un
centre-jardin qui va faire un aménagement peut vendre un
aménagement à titre de service. Si un individu cherche à
améliorer son terrain ou à apporter quelques
améliorations, il arrivera à l'occasion que le centre-jardin
offrira le service de faire cet aménagement. Il peut même aller
jusqu'à utiliser des produits qui peuvent être reliés de
près ou de loin aux meubles de patio, par exemple. L'individu peut
même faire ces meubles, parce qu'il y a quand même des techniques
développées à l'intérieur de notre industrie,
à partir, par exemple, de ce qu'on appelle communément des
dormants: du bois, du 6x6, et ainsi de suite.
Donc, la distinction entre les deux est infime, mais elle est quand
même reliée de façon très directe. C'est dans ce
sens-là qu'on dit qu'il faut quand même voir que les
catégories qu'on veut élargir, puisque, comme on le mentionnait
dans notre mémoire, la demande pour les produits horticoles et connexes
augmente à peu près de 14% par année, en moyenne... Il y a
quand même des modes qui existent, de nouvelles techniques qui se
développent et de nouveaux produits qui sont toujours reliés
à la pratique du loisir écologique, entre autres, l'horticulture
et l'ornithologie, et qui sait si d'ici un an on n'aura pas d'autres types de
loisir reliés de près à l'horticulture. C'est dans ce
sens-là qu'on essaie d'élargir toujours les lignes ou les
produits vendus sans faire compétition, bien sûr, ou sans aller
chercher une part du marché d'autres types de commerces de
détail, pour éclaircir là-dessus.
Le Président (M. Desbiens): Vous avez terminé, M.
le député de Châteauguay? M. le député de
Hull.
M. Rocheleau: Merci, M. le Président. Je voudrais,
premièrement, remercier la Fédération interdisciplinaire
de l'horticulture ornementale du Québec de la présentation de son
mémoire et de sa participation à cette séance de la
commission.
Il y a des points un peu particuliers que j'aimerais toucher qui ne sont
pas inclus dans votre mémoire, mais qui touchent de très
près à l'horticulture. On sait que depuis certaines modifications
à certaines lois, entre autres, la Loi sur la fiscalité
municipale, la loi 57 qui a touché à la fiscalité dans les
municipalités, et la Loi sur l'évaluation foncière,
plusieurs municipalités connaissent aujourd'hui certains
problèmes avec les vendeurs itinérants, c'est-à-dire les
vendeurs de fleurs le dimanche. Les municipalités ne semblent plus
pouvoir contrôler l'émission de permis parce que cela doit
être appliqué aujourd'hui sur la valeur locative, alors qu'il n'y
a pas de valeur locative applicable à un vendeur itinérant. (12
heures)
Je voudrais connaître votre position là-dessus,
étant donné que plusieurs détaillants de fleurs vendent
des fleurs à des vendeurs itinérants qui, le dimanche, circulent
un peu partout dans les municipalités et on a certaines plaintes de
fleuristes, par exemple, qui trouvent en ces vendeurs itinérants des
compétiteurs qui ne paient pas de loyer, de taxe d'affaires, de taxe
locative ou autres. J'aimerais vous entendre là-dessus. Vous dites, et
c'est un fait, que 70% de la vente des produits d'horticulture se font
habituellement durant les mois d'été et que les journées
où on retrouve le plus de ventes, ce sont le samedi et le dimanche.
J'aimerais savoir si vous avez des problèmes semblables et si on ne
devrait pas dans la loi préciser ce qu'est un détaillant de
produits d'horticulture.
M. Tremblay (Jean): Vous soulignez un point dont on a
déjà fait mention, entre autres pour l'expérience à
Québec. On a déjà fait des représentations en ce
qui a trait à ces fameux vendeurs itinérants auprès de la
Communauté urbaine de Québec et auprès des
différentes municipalités. Sauf erreur, je pense que ce sont des
réglementations qui relèvent des municipalités. On a
déjà porté à l'attention de la communauté
urbaine ainsi que des différentes municipalités ce
problème, à savoir que cela faisait effectivement
compétition à des entreprises de la taille de celles de M. Hamel
ou de W. H. Perron, à Montréal, qui paient des taxes assez
considérables alors que des vendeurs itinérants qui s'improvisent
horticulteurs à leurs heures vont faire une concurrence assez
déloyale aux entreprises bien implantées dans une
municipalité. On a déjà porté ce problème
à l'attention de la communauté urbaine; malheureusement, on n'a
pas eu l'attention qu'il aurait fallu avoir en ce qui a trait à ce
problème. Je pense que vous avez raison de souligner que cela nous porte
préjudice au niveau de la santé financière de
l'entreprise.
S'il s'agit d'une réglementation qui pourrait faire l'objet du
projet de loi 59 et qui pourrait être introduite, je pense que, pour
nous, cela serait très intéressant et favorable pour le
développement de l'industrie horticole. On continue à travailler
dans ce sens et à faire des pressions pour que ces vendeurs
itinérants puissent faire l'objet d'une réglementation ou
être peut-être complètement éliminés, compte
tenu de la contribution des entreprises par les impôts
et les taxes. Ces petites entreprises, ces individus - je n'appelerais
pas cela des entreprises - s'improvisent vendeurs itinérants et
concurrencent de façon déloyale les entreprises en place.
M. Rocheleau: Je tiens à noter cela, parce que c'est un
organisme assez représentatif au niveau de l'horticulture; mais on peut
retrouver, au niveau de l'alimentation, des vendeurs itinérants qui, le
dimanche, vont stationner le long des routes et vendre leurs produits sans
avoir de permis, sans payer une taxe d'affaires. Je tiens à noter pour
le ministre que, lorsqu'on a adopté à l'Assemblée
nationale le projet de loi 57 sur la fiscalité, on a modifié
considérablement l'imposition des permis d'affaires et plus
particulièrement en ce qui touche les vendeurs itinérants. Il
faudrait peut-être le noter et demander que certaines précisions
soient apportées. Lorsqu'on lit l'article 5.8 sur les détaillants
de produits d'horticulture, il est bien évident que cela pourrait
comprendre les vendeurs itinérants auxquels les municipalités ne
peuvent pas imposer de permis. Je pense qu'on devrait au moins, si le
gouvernement a l'intention de légiférer ou de réglementer,
trouver un mécanisme qui pourrait permettre aux municipalités
d'imposer, s'il y a lieu, des permis, de percevoir des taxes afin que ces
gens-là ne soient pas en compétition déloyale à
l'égard de ceux qui doivent défrayer une taxation annuelle pour
l'exploitation de leur commerce.
Est-ce que cela correspond aux objectifs que vous poursuivez et que les
municipalités, par le manque...
M. Hamel (Gaétan): Je vous remercie d'avoir fait allusion
à cette chose-là parce que, non seulement ces commerces-là
exploitent sans permis, mais bien souvent le font sur les terrains appartenant
au ministère des Transports, dans des endroits qui sont bien souvent
dangereux même pour la circulation automobile. En plus, au niveau des
municipalités, ces gens-là ne respectent pas certains
règlements municipaux qui devraient être appliqués à
l'intérieur des municipalités, entre autres la loi sur la marge
de recul, selon laquelle ils doivent exploiter leur commerce à 35 pieds
des limites d'une rue, selon les municipalités. Ces gens s'installent
sur le bord du chemin; leur stationnement, ce sont les rues et, bien souvent,
ils nuisent à la circulation et, en plus, au niveau du service à
la clientèle, ces gens vendent bien souvent à des prix assez
élevés, bien souvent plus cher que ce qui est vendu dans le
commerce et ces produits sont de qualité inférieure parce que, le
lendemain, ils ne sont plus là pour répondre aux demandes ou aux
questions des clients qu'ils ont servis la veille.
Le Président (M. Desbiens): Est-ce qu'il y a d'autres
intervenants? S'il n'y a aucune autre intervention, je vous remercie au nom des
membres de la commission pour la collaboration que vous avez
apportée.
J'invite maintenant la Corporation des bijoutiers du Québec
à s'approcher, s'il vous plaît.
Bonjour! C'est M. Bernard Gauthier?
M. Gauthier (Bernard): C'est cela, oui.
Le Président (M. Desbiens): Si vous voulez
présenter les gens qui vous accompagnent, s'il vous plaît!
Corporation des bijoutiers du Québec
M. Gauthier (Bernard): À ma droite, M. Réal Savard,
secrétaire exécutif. À ma gauche, M. Claude Mignault,
vice-président, et, à mon extrême gauche, M. Régent
Couture, secrétaire.
Je vais vous faire une lecture brève du mémoire que nous
avons présenté, une introduction si on veut.
La Corporation des bijoutiers du Québec est une association
professionnelle regroupant quelque 550 bijoutiers-détaillants
répartis sur l'ensemble du Québec. Si l'on veut dresser le
portrait de la bijouterie de détail, on constate qu'il s'agit d'une
entreprise familiale employant rarement plus de deux ou trois
salariés.
Depuis l'entrée en vigueur de la Loi sur les heures des
établissements commerciaux en 1970, il y a eu de nombreux débats
suscités par divers intervenants selon leur intérêt du
moment. Les tenants de la libération des heures d'affaires reviennent
régulièrement à la charge pour demander l'abolition de
cette réglementation.
À la suite des diverses pressions exercées, le MICT a
jugé utile d'entreprendre une consultation auprès des
intéressés. La Corporation des bijoutiers du Québec a fait
valoir le point de vue de ses membres et a présenté un tableau de
la situation des consommateurs et des commerçants en rapport avec la loi
sur les heures d'affaires. Cette association a fait certaines recommandations
aux autorités concernées à la suite de cette
consultation.
La Corporation des bijoutiers du Québec a toujours
été préoccupée par la réglementation des
heures d'ouverture des commerces.
Dès 1969, nous nous sommes prononcés en faveur d'une
réglementation à l'échelle provinciale. La situation
à l'époque était tellement chaotique que le gouvernement a
dû intervenir par la voie de la législation pour redresser la
situation.
Depuis, la Corporation des bijoutiers du Québec a souligné
régulièrement au MICT les carences de la loi en regard des
infractions
commises.
Nous avons toujours défendu la position des petits
commerçants dont plusieurs ont des magasins qui se trouvent
situés dans des centres commerciaux. Si la loi actuelle prolonge
l'ouverture des heures d'affaires, tel que projeté, les grandes
chaînes de magasins obligeront les propriétaires des centres
commerciaux à exiger que tous leurs locataires se conforment aux
nouvelles heures de commerce. Les petits commerçants n'auront pas le
choix, ils devront alors emboîter le pas et perdre les quelques heures de
loisir et les quelques jours de congé qu'ils avaient.
L'augmentation du nombre de jours d'ouverture des établissements
commerciaux mentionnée dans le projet de loi déséquilibre
la concordance entre deux lois provinciales: la Loi sur les heures d'affaires
des établissements commerciaux et la Loi sur les normes du travail.
Cette dernière obligera les membres de la corporation à payer du
temps double ou triple, selon le cas, à leurs employés. De plus,
elle enlève l'obligation de fermeture des établissements
commerciaux: le lundi de Pâques, le deuxième lundi d'octobre et
les lendemains du 2 janvier, du 26 décembre avant 13 heures, et elle ne
prévoit aucun remplacement aux fêtes du 24 juin et du 1er juillet,
lorsqu'elles tombent le dimanche, enlevant à la grande majorité
des membres de la corporation et à leurs employés, les quelques
jours de repos qu'ils pouvaient se permettre avec leur famille et leurs amis.
Parfois, les revenus de ces derniers sont moins élevés que pour
la majorité des autres corps de métiers qui
bénéficient de tels congés. Pour cette raison, la
corporation s'oppose aux changements proposés aux jours de
congé.
Les membres de la corporation ont voté pour le statu quo pour ce
qui concerne l'achalandage; le dimanche de Pâques ressemble tout à
fait à un autre dimanche et n'a aucun attrait spécial pour le
commerce de détail, sauf pour celui de la confiserie. 89,4% des membres
de la Corporation des bijoutiers du Québec demandaient, lors de la
consultation faite par le MICT, une diminution des heures d'ouverture; 62
heures d'ouverture par semaine sont suffisamment longues pour permettre aux
consommateurs de magasiner. Nos petits commerçants, après une
longue semaine de travail, ont hâte de quitter leur établissement.
Ils veulent vivre comme tout le monde et sortir le soir.
Les heures d'ouverture actuelles rendent difficile l'embauche
d'employés et la prolongation d'une heure le samedi ne ferait
qu'aggraver les choses. Une heure de plus contribuerait à augmenter les
coûts et n'apporterait pas plus de ventes, et l'équilibre
précaire entre les petits indépendants et les magasins à
succursale risquerait de se rompre au profit de ces derniers.
Maintenant, je voudrais passer la parole à mon collègue,
M. Mignault.
M. Mignault (Claude): Dans le projet, la définition des
professions ou des commerces, au lieu d'une énumération des
articles, peut prêter à diverses interprétations devant les
tribunaux. À titre d'exemple, quelle interprétation donneront les
tribunaux aux commerces suivants: tabagie, pharmacie, librairie, boutique
d'artisanat, galerie d'art, antiquaire, détaillant de marchandises
usagées, etc?
Les définitions qui existent dans la loi actuelle ont
déjà fait l'objet de décisions devant les tribunaux et
constituent une jurisprudence qui peut être des plus utiles. Nous
considérons alors que l'expérience vécue doit servir et
que les définitions actuelles ne doivent pas être changées,
à moins qu'elles ne soient l'objet de litiges devant les tribunaux et
qu'elles nuisent à l'application de la loi. Tel fut le cas de
l'interprétation par les tribunaux du mot "cloisonné" et du terme
"menu article", qui existent dans la loi actuelle et qui reviennent dans le
projet de loi. Nous recommandons à la commission de garder les
définitions qui existent dans la loi actuelle et de préciser ce
que signifient les mots "cloisonné" et "menus articles". Les mots et les
termes vente au détail, marchandises usagées, artisan, festival,
foire, salon ou exposition doivent être définis dans la loi afin
d'éviter tout genre d'interprétation.
Régions touristiques et limites territoriales. Accorder le
pouvoir au ministre d'autoriser les établissements commerciaux à
exercer leurs activités pendant des périodes interdites par la
loi nous paraît arbitraire, surtout si aucune procédure
appropriée n'est prévue pour permettre au consommateur
affecté par une telle décision de faire valoir ses objections
s'il y a lieu.
Le retrait à toute personne ou à toute association du
droit d'intenter des poursuites pour toute infraction à la
présente loi nous surprend et nous voulons en connaître les
raisons. La corporation demande que ce droit ne soit pas enlevé pour que
quiconque puisse intenter des poursuites, ce qui peut s'avérer
très utile dans certains cas.
En résumé, la Corporation des bijoutiers s'oppose à
ce que certains jours de congé où l'ouverture des
établissements commerciaux n'était pas permise par la loi
actuelle le deviennent; aux changements proposés aux heures d'affaires
pour le samedi et pour les jours avant Pâques; aux modifications
apportées aux définitions et la corporation demande de garder les
définitions qui existent dans la loi actuelle et de préciser en
quoi consistent le mot "cloisonné" et le terme "menu article"; à
accorder au ministre le pouvoir d'autoriser des exemptions à la loi
sans prévoir à ce sujet une procédure
appropriée; à enlever à toute personne ou à toute
association le droit d'intenter des poursuites. (12 h 15)
Nous présentons cette opposition dans le but d'apporter au projet
de loi 59 les améliorations qui permettront à la Loi sur les
heures d'affaires des établissements une entente acceptable pour les
détaillants.
Par ailleurs, notre corporation est favorable à ce que ce projet
de loi interdise l'ouverture des établissements commerciaux le dimanche,
rende illégale l'annonce de leur ouverture lorsque la loi l'interdit,
accorde plus de pouvoirs aux inspecteurs chargés de l'observance et
augmente les amendes.
En conclusion, les heures d'ouverture des établissements
commerciaux, tel que stipulé dans la loi actuelle, répondent
très bien aux exigences des consommateurs et constituent un cadre
acceptable par les membres de la Corporation des bijoutiers du Québec
qui demandent non seulement le statu quo, mais qu'elles ne soient pas non plus
déplacées. Les 89,4% des membres de notre corporation ont aussi
considéré le déplacement des heures d'ouverture et ils se
sont carrément prononcés contre. Merci.
Le Président (M. Desbiens): Merci. M. le ministre.
M. Biron: Je voudrais vous remercier de votre dépôt
de mémoire. Pour avoir des explications sur certains points bien
particuliers, je demanderais à mon collègue, le
député de Chambly, d'intervenir et de vous poser les questions
nécessaires.
M. Tremblay (Chambly): Vous me permettez quelques petites
questions que je qualifierais de préliminaires? Quelle sorte de membres
la Corporation des bijoutiers du Québec accepte-t-elle?
M. Gauthier (Bernard): Des commerçants, surtout des
membres par profession horlogers et bijoutiers, section gemmologie aussi, ce
qui se rapporte le plus à la bijouterie.
M. Tremblay (Chambly): D'accord. Vous dites que vous avez 550
membres. Est-ce que cela inclut presque tous les bijoutiers du
Québec?
M. Gauthier (Bernard): Non.
M. Tremblay (Chambly): C'est dans quelle proportion à peu
près?
M. Savard (Réal): Quand on parle de 550 bijoutiers, il
faut comprendre que ce sont les individus... Il y a là-dedans Birks qui
comprend 35 bijouteries, il y a aussi Peoples,
Mappins. Je ne vous ai pas parlé, ce matin, parce que je ne suis
pas en voix pour vous parler, mais disons que ça comprend plus de 550
détaillants, ça doit comprendre environ 650 à 700
détaillants. C'est à peu près 80% des bijoutiers.
M. Tremblay (Chambly): Si, par exemple, la corporation
décidait de contraindre ses membres à des heures de fermeture qui
seraient différentes de celles de la loi, est-ce qu'elle serait en
mesure de faire ça?
M. Savard: Non. La corporation n'a pas de pouvoirs restrictifs,
c'est-à-dire que la corporation est une corporation professionnelle
facultative. On y appartient parce qu'on adhère à ses objectifs,
à ses buts.
M. Tremblay (Chambly): Dans ce sens-là vous vous en
remettez au gouvernement pour déterminer les heures d'ouverture de vos
commerces.
M. Savard: C'est la raison pour laquelle nous travaillons avec
les autres associations depuis 1969. Nous avons été les pionniers
de cette loi que vous êtes en train de modifier. Nous nous sommes battus
pour abattre tous les règlements municipaux. Il y avait à peu
près, si vous regardez les environs de Montréal, 30
règlements municipaux. C'était un fouillis pour les chats et
personne ne s'y comprenait.
M. Tremblay (Chambly): Vous êtes donc d'accord que ce soit
le gouvernement du Québec qui réglemente.
M. Savard: Oui, nous sommes d'avis que le gouvernement est le
corps légal pour légiférer, pour aider en somme les
commerçants à restreindre leurs heures d'affaires.
M. Tremblay (Chambly): Vous parlez d'une consultation dans votre
mémoire. Comment cela se traite-t-il chez vos membres?
M. Savard: Par questionnaire auprès de nos membres.
M. Tremblay (Chambly): Par la poste? M. Savard: Par la
poste.
M. Tremblay (Chambly): Est-ce qu'un très grand nombre ont
répondu?
M. Savard: Cela a été une surprise pour nous. 95%
de nos membres ont répondu.
M. Tremblay (Chambly): Pour en venir
plus directement au projet de loi lui-même, parlons tout d'abord
des choses sur lesquelles on s'entend. Il semblerait qu'en
général vous êtes d'accord avec le projet de loi sur les
grands principes, c'est-à-dire d'abord interdire l'ouverture des
établissements commerciaux le dimanche; rendre illégale l'annonce
de leur ouverture lorsque la loi l'interdit; l'augmentation des amendes.
M. Savard: Nous trouvons que la loi est très bien dans son
ensemble. La seule chose que nous sommes surpris de voir, c'est qu'on donne une
autre définition au terme qui, pour nous, donne beaucoup de portes de
sortie. On préférait la façon dont c'était fait
autrefois. D'ailleurs, l'expérience vécue nous prouve qu'on ne
peut pas, qu'on ne doit pas toucher à des choses qui sont
déjà définies et qui ont été devant les
tribunaux. C'est plus facile de revenir avec une plainte devant les tribunaux
avec une loi que l'on connaît déjà que d'être
obligé d'expliquer devant le tribunal une autre définition.
M. Tremblay (Chambly): Si je comprends bien, si on revenait aux
définitions dans le projet de loi, cela vous satisferait.
M. Savard: Cela nous satisfait.
M. Tremblay (Chambly): D'accord. En ce qui concerne les heures
d'affaires, je comprends très bien que vous ne voulez pas augmenter le
nombre des heures ouvrables pour la même raison qu'on a
déjà établie ici. C'est que, même si vos commerces
étaient ouverts pendant 80 heures, les gens ne dépenseraient pas
plus d'argent chez vous. Ils dépensent déjà ce qu'ils
peuvent et...
M. Savard: Oui, on a connu le temps où nos commerces
étaient ouverts en même temps que les coiffeurs et les barbiers,
c'est-à-dire que vous pouviez ouvrir à minuit et il y avait
quelqu'un qui entrait se faire couper les cheveux. Ce temps-là, je
pense, est révolu.
M. Tremblay (Chambly): Oui, mais les gens ne se font plus couper
les cheveux non plus.
Des voix: Ah!
M. Savard: Ce dont on a souffert un peu...
M. Tremblay (Chambly): Ceux qui leur en reste...
M. Savard: On s'est aperçu que, dans le projet de loi,
vous nous enleviez le droit de poursuite. On avait, autrefois, dans la
loi...
M. Tremblay (Chambly): Oui, je veux en venir à cela. En
fait, on est assez surpris de voir cette affirmation. On aimerait que vous
spécifiiez ce qui, dans le projet de loi, vous fait croire que le droit
de poursuite est retiré.
M. Savard: Je vais vous le dire tout de suite.
M. Tremblay (Chambly): On est intéressé à le
savoir, parce que je suis persuadé qu'on corrigerait cette situation si
on en était convaincu.
M. Biron: M. Savard, je voudrais vous donner une explication
là-dessus. De la façon dont c'est rédigé, on dit
"en vertu de la Loi sur les poursuites sommaires". Vous allez être
obligé de le mettre dans la loi, apparemment, d'après nos savants
légistes -je ne suis pas avocat - ce qui donne le droit à tout
individu de poursuivre. Or, apparemment, la façon dont c'est
écrit dans la loi actuelle, en vertu de la Loi sur les poursuites
sommaires, vous avez la même protection que vous aviez avant. Comme l'a
dit mon collègue de Chambly, s'il y a quelque chose qui n'est pas clair,
on est prêt à le revoir, parce que, sur le fond...
M. Savard: Vous allez y revenir, parce que...
M. Biron: ...on veut vous donner l'occasion de faire la
même chose.
M. Savard: ...selon mon expérience, je ne le crois pas. Il
faut l'indiquer dans la loi. Si vous ne l'indiquez pas dans la loi...
Autrefois, c'était écrit: "Toute poursuite pour infraction
à la présente loi peut être intentée par quiconque".
C'était l'article 9 de la loi. Si vous faites disparaître cela,
vous faites disparaître le droit de poursuivre.
M. Biron: M. Savard, on m'informe que, l'automne dernier,
l'ancienne loi a été modifiée et, maintenant, en vertu de
la Loi sur les poursuites sommaires, cela vous donne les mêmes droits que
vous aviez avant.
M. Savard: Ah! S'il y a une poursuite...
M. Tremblay (Chambly): C'est en vertu d'une autre loi que cela a
été modifié.
Une dernière question, si vous me le permettez, même si je
comprends bien. Vous disiez, tout à l'heure, que vous ne vouliez pas
augmenter le nombre d'heures ouvrables. Est-ce que vous seriez d'accord pour
que les établissements soient ouverts plus longtemps le samedi et une
demi-heure de plus le jeudi et le vendredi soir?
M. Savard: On est contre toute
modification des heures actuelles d'ouverture.
M. Tremblay (Chambly): Est-ce que vous souhaiteriez qu'elles
soient réduites?
M. Savard: Parfois, oui. Il faut aussi bien comprendre que le
milieu de la bijouterie, c'est un milieu différent. Nos heures
d'ouverture concordent aussi avec nos augmentations de primes d'assurance.
M. Tremblay (Chambly): Ah oui!
M. Savard: Ce qui nous rend la tâche vraiment difficile
parce que rares sont les bijoutiers qui n'ont pas été victimes de
nombreux méfaits. En province, en regard des protections qui sont
accordées aux bijoutiers par la Sûreté du Québec il
est très difficile d'avoir même la permission des compagnies
d'assurances de pouvoir participer à ses programmes.
M. Tremblay (Chambly): Est-ce que vous vous êtes
penchés sur cette possibilité de réduire les heures
d'ouverture? Si vous vouliez les réduire, à quoi les
réduiriez-vous?
M. Savard: C'est assez difficile, mais disons que le lundi matin,
on n'aurait aucune objection, l'été, sur les rues commerciales,
le samedi après-midi, à ce que cela soit enlevé. C'est
toujours vers les centres commerciaux que la circulation se dirige et c'est
toujours le petit commerçant qui est pénalisé au profit de
ces grands développements.
M. Tremblay (Chambly): II ne faudrait quand même pas trop
compliquer l'application de la loi, parce que si on commence à
dire...
M. Gauthier (Bernard): Qu'on garde le statu quo et on sera
très heureux.
Le Président (M. Desbiens): Merci. M. Couture.
M. Couture (Régent): Simplement à titre d'exemple,
j'ai deux entreprises dans des centres commerciaux. Le samedi
après-midi, je dois respecter les règlements et rester ouvert et,
après 15 heures, je ne paie même pas le salaire de mes
employés.
M. Tremblay (Chambly): Pourquoi ne fermez-vous pas?
M. Couture: On n'a pas le droit. On fait partie d'un centre
commercial et celui-ci nous oblige à demeurer ouvert, sous peine de
pénalité. On n'a pas un commerce comme celui de l'alimentation;
la bijouterie, surtout durant l'été, après 15 heures,
c'est nul; si on ajoute une heure, on va la payer inutilement.
M. Tremblay (Chambly): L'été, durant les mois de
juillet et août, croyez que cela s'appliquerait à tous les
commerces des centres commerciaux?
M. Couture: Peut-être pas à tous les commerces mais,
dans notre genre de commerce, cela serait applicable. Disons que si,
l'été, l'entreprise était ouverte jusqu'à 13 heures
pour le service, ce serait pour un type en vacances; il part et il veut avoir
sa montre, sa chaîne - d'accord; mais, l'après-midi, il
prépare ses bagages; la fin de semaine s'en vient, il l'a
méritée.
M. Tremblay (Chambly): D'accord.
Le Président (M. Desbiens): M. le député
d'Outremont.
M. Fortier: M. Gauthier, j'aimerais revenir un peu sur le profil
de vos membres. Monsieur vient de nous dire qu'il a trois établissements
dans des centres commerciaux. Vous avez défini vos membres comme
étant surtout des entreprises familiales; on a parlé de Peoples
et de ces gens-là, ce sont de grosses familles. Pourriez-vous donner un
meilleur profil de vos membres? Est-ce qu'il s'agit de petites entreprises
établies sur le coin de la rue comme lorsque j'étais jeune ou si
vos membres possèdent plusieurs établissements et qui sont pour
la plupart dans des centres commerciaux?
M. Savard: Nos membres sont de petits bijoutiers établis
un peu partout au Québec. 80% sont des entreprises familiales. Les
grandes chaînes comme Peoples et Birks appartiennent à
l'organisation. Le reste des membres, ce sont tous de petits bijoutiers.
M. Fortier: Est-ce que ces établissements qui sont
propriétés d'un individu sont regroupés dans des
coopératives d'achat ou si chacun fait ses achats individuellement?
M. Savard: Ils font tous leurs achats individuellement. Ils ont
essayé les entreprises coopératives, autrefois, mais sans
succès.
M. Fortier: Vous achetez de grossistes, j'imagine...
M. Savard: C'est-à-dire que, dans la bijouterie, ce sont
des manufacturiers; il n'y a pas de grossistes entre la manufacture et le
bijoutier.
M. Fortier: II faudrait se comprendre. Quand on dit bijoutier,
est-ce que vous faites des oeuves d'art? Vous les réparez; vous vendez
des diamants. Je croyais que, dans la plupart des cas, vous n'étiez
qu'un revendeur et qu'à l'occasion vous les faisiez vous-
mêmes, quel...
M. Savard: II y a les deux cas. La plupart des gens
achètent des manufacturiers pour les revendre au public; il y en a
d'autres qui sont des artisans, qui vont fabriquer eux-mêmes, mais ce
sont les exceptions à la règle. Il y en a un certain nombre qui
font cela au Québec. L'industrie semble remplacer les bijouteries
d'autrefois; les premiers bijoutiers que j'ai connus faisaient eux-mêmes
leurs bijoux, et cela a été remplacé par l'industrie.
Aujourd'hui, il y a des jeunes qui recommencent à faire des bijoux. (12
h 30)
M. Fortier: Avec raison, vous demandez que les termes soient plus
précis. Je me demandais quelle était la différence entre
une boutique d'artisanat où un bijoutier vendra des bijoux certes de bon
goût, mais à meilleur prix et le bijoutier comme tel. J'imagine
que la définition du champ d'activité doit être assez
difficile à déterminer.
M. Savard: Oui, il n'y en a pas. Prenez un exemple. Dans la
corporation, parmi nos membres, vous avez de grands joailliers, des joailliers
qui ont même fabriqué des bijoux pour la princesse Diana. Ils sont
membres de notre organisation et sont détaillants dans la rue. Vous avez
aussi des artisans qui sont membres de la corporation. Quand on parle de
boutiques d'artisanat, il peut y avoir parmi elles de nos membres.
M. Fortier: Vous demandez que les termes soient
précisés parce que, suivant l'interprétation qui sera
donnée à la définition, cela pourrait rendre la loi
inapplicable?
M. Gauthier (Bernard): C'est cela.
M. Fortier: C'est là qu'est le problème.
M. Savard: On peut se déclarer artisan ou bijoutier.
M. Fortier: La proposition que vous faites est de revenir aux
termes définis dans la loi. En ce qui vous concerne, cette
définition vous satisfaisait?
M. Gauthier (Bernard): Oui.
M. Fortier: Est-ce que la jurisprudence est ainsi établie
que vous en êtes satisfaits?
M. Savard: C'est plus simple de définir les articles
exemptés par la loi qu'on peut vendre que de dire, par exemple, qu'une
pharmacie... Une pharmacie, c'est quoi? Il y a des pharmacies qui ont plus de
bijoux que nos membres peuvent en avoir.
M. Fortier: Pourriez-vous me préciser, dans la loi
actuelle, quels termes sont utilisés?
M. Savard: Toutes les exemptions de la loi actuelle. Si vous
regardez les exemptions, on y donne les articles exemptés.
M. Fortier: Oui, d'accord. La définition n'est pas aussi
étendue que ce que la loi actuelle va permettre.
M. Savard: Non, on n'a pas de chance de faire d'autres
interprétations.
M. Fortier: Ce qui veut dire que, selon la loi actuelle, il n'y a
pas la possibilité pour des boutiques d'artisanat d'être
ouvertes.
M. Gauthier (Bernard): C'est cela, c'est beaucoup plus
fermé.
M. Fortier: Mais, d'un autre côté, vous n'allez pas
jusqu'à demander la fermeture des boutiques d'artisanat, parce qu'elles
ne sont certainement pas des concurrentes pour vous.
M. Savard: Non, non. Les boutiques d'artisanat, nous
désirons qu'elles restent ouvertes, cela ne nous fait rien.
M. Gauthier (Bernard): Pour autant qu'on définisse les
raisons.
M. Fortier: Maintenant, quant aux régions touristiques,
vous vous en prenez au pouvoir que la loi donnerait au ministre, un pouvoir
discrétionnaire. Vous dites que cela vous paraît arbitraire -
c'est le terme que vous utilisez. Vous dites surtout: Si aucune
procédure appropriée n'est prévue. Quel genre de
procédure, à votre avis, serait souhaitable ou désirable
pour tempérer le pouvoir que la loi donnerait au ministre?
M. Savard: Si c'est dans une zone touristique, on lui demande de
prolonger l'exemption des commerces durant la période touristique. Le
ministre doit en donner avis dans un certain laps de temps, comme pour
n'importe quoi, afin de permettre à ceux qui s'opposeraient à
cette mesure d'en faire part.
M. Fortier: Seriez-vous d'accord pour dire que la demande devrait
être formulée par la chambre de commerce locale ou par un
regroupement de commerçants dans une région touristique
donnée?
M. Savard: On n'a pas mis de condition, on veut simplement que
cela se fasse d'une façon normale. Que ce ne soit pas une
décision comme cela et qu'à un moment
donné on sache que c'est une exemption.
M. Fortier: Si je comprends bien votre demande: Au lieu de
remettre à plus tard une réglementation sur laquelle le
législateur n'aurait pas de pouvoir, vous aimeriez que dans la loi
même les éléments de la procédure soient
indiqués dès maintenant.
M. Savard: Bien oui. Les bijoutiers pourraient être
affectés. Je pense qu'il y aurait lieu de savoir qu'une demande de
permis touristique a été faite quelque part. Ce peut être
un commerce de bijouterie; on ne le sait pas, si personne n'en donne avis.
M. Fortier: Si on avait un avis public, cela permettrait à
une organisation comme la vôtre de faire des représentations.
M. Savard: De faire opposition, oui, de faire des
représentations.
M. Fortier: Vous avez dit tout à l'heure que vous vous
opposiez à un plus grand nombre d'heures d'ouverture possible. On nous a
expliqué que dans certains centres commerciaux on n'a pas le choix, cela
augmente le coût de vos assurances. Vous vous opposez à
l'ouverture du 2 janvier et du 26 décembre en entier.
M. Savard: Si on ouvre une heure de plus...
M. Fortier: Oui, je comprends.
M. Savard: ...il faut penser aux risques de vol et aux risques de
toutes sortes.
M. Fortier: Ma question est celle-ci: En ce qui concerne le 24
juin et le 1er juillet, d'autres associations ont dit qu'elles seraient
favorables, lorsque ces fêtes arrivent en semaine, de les reporter au
lundi suivant. Est-ce que votre association serait favorable à cette
demande?
M. Gauthier (Bernard): On n'aurait pas d'objection à faire
ces changements-là pour autant qu'on ne les enlève pas.
M. Fortier: Je vous remercie, M. le Président.
M. Gauthier (Bernard): Merci.
Le Président (M. Desbiens): Merci. M. le ministre.
M. Biron: Juste une brève question pour revenir sur les
zones touristiques. À l'heure actuelle, dans la présente loi,
c'est le gouvernement qui décrète et, habituellement, cela se
fait lorsqu'une association - une exposition agricole par exemple - demande de
décréter zone touristique le lieu de l'exposition agricole, ou
bien plusieurs municipalités - je pense que c'est la région de
Hull en particulier - se mettent ensemble pour dire: Du 1er décembre au
14 décembre... Je pense que ça vient de la municipalité.
Peut-être que le député de Hull pourrait confirmer.
M. Rocheleau: M. le Président...
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Hull.
M. Rocheleau: ...pour le ministre, dans les régions
frontalières ou touristiques, mais plus particulièrement
frontalières, où dans certaines provinces, ce sont les
municipalités qui appliquent les règlements d'ouverture et de
fermeture, des demandes sont faites pour suivre la compétition à
toutes fins utiles.
M. Biron: Dans ce sens-là, on essaie de respecter les
demandes de plusieurs municipalités regroupées dans une
région ou d'une municipalité donnée, s'il y a une
exposition agricole ou une foire quelconque ou tout simplement un
événement touristique d'importance comme le carnaval. C'est
habituellement demandé par la ville de Québec.
Or, jusqu'à maintenant, je pense que personne n'a abusé,
les demandes ont été très raisonnables. Il y a la
procédure de passer par le ministère, l'autorisé par le
ministre et finalement le Conseil des ministres décrète. Cela
prend pas mal de temps. Je me souviens qu'on avait autorisé il y a deux
ans la région de l'Outaouais... On les avait avisés en disant:
Commencez, on sait que ça va passer automatiquement.
Si on publie des choses pour attendre la réponse des
commerçants de l'endroit, beaucoup de temps va passer et souvent
l'événement sera passé. Les organisateurs de ces
événements nous demandent à peu près à la
dernière minute...
C'est une procédure un peu compliquée s'il faut faire
beaucoup de consultations; c'est pour ça que j'aime la suggestion du
député d'Outremont à savoir que ce soit demandé par
la chambre de commerce, une municipalité ou un organisme quelconque
qu'on pourrait définir plus tard.
M. Gauthier (Bernard): Pour autant qu'il n'y a pas d'abus.
À Montréal, si vous prenez la Place Bonaventure, dans le temps
des fêtes il y a des organismes qui vendent énormément de
marchandises de bijouterie. Ils viennent à l'encontre des lois
déjà existantes. C'est une façon de les contourner
facilement.
M. Fortier: M. le ministre, je pense qu'on s'entend des deux
côtés de la table
pour dire qu'on est d'accord pour une loi provinciale, mais je crois que
si une telle demande était formulée il faudrait peut-être
qu'elle le soit par des élus. Je crois qu'en fin de compte ceux qui
seraient pénalisés indirectement pourraient s'en prendre à
des élus pour faire valoir leur point de vue. Peut-être que la
meilleure façon serait que cette demande soit formulée par une
municipalité ou une ville.
M. Biron: D'accord.
M. Fortier: II faut rester en démocratie.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Hull...
M. Rocheleau: Simplement pour ajouter que nous vivions dans
l'Outaouais, comme dans d'autres régions frontalières, des
problèmes assez particuliers. La ville de Hull va présenter un
mémoire - je pense que c'est jeudi - là-dessus. La
Société d'aménagement de l'Outaouais a déjà
fait une demande au nom des intervenants du milieu; malheureusement, quand elle
a eu l'autorisation, déjà les heures d'ouverture étaient
périmées parce que le temps était déjà
passé. Nous souhaitions à ce moment-là avoir des
modifications assez importantes, tenant compte que ça provient
d'associations de marchands, de chambres de commerce, en passant par le
gouvernement local, bien entendu, ou le gouvernement régional.
M. Biron: Chez vous, si je comprends bien, si c'était
demandé par une municipalité, on pourrait procéder
très rapidement pour que ce soit autorisé par le ministre. Au
moins il y aura un corps politique qui aurait à répondre devant
la population.
M. Gauthier (Bernard): Oui, d'accord.
Le Président (M. Desbiens): Cela va? Vous vouliez ajouter
quelque chose, M. Gauthier?
M. Gauthier (Bernard): Pour nous, l'augmentation des heures
d'ouverture, vu que ce sont des commerces vraiment familiaux, ça
diminuerait la qualité de vie de beaucoup.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Laporte.
M. Bourbeau: Tout à l'heure, le ministre a
résumé un peu votre mémoire en soulignant que vous
étiez d'accord avec l'interdiction de l'ouverture le dimanche et
l'imposition de plus fortes amendes. Je pense qu'il est convenable d'ajouter
aussi, parce que c'est le travail de l'Opposition de souligner non seulement
les points de concordance mais les points de non-concordance, qu'il ne faut
quand même pas oublier que vous vous opposez assez énergiquement
au projet de loi en ce qui concerne les jours additionnels d'ouverture qu'il
propose. Vous vous opposez à ce qu'on ouvre la semaine de Pâques
et le samedi, de 17 heures à 18 heures. Vous vous opposez
également, enfin vous émettez des réserves en ce qui
concerne la question du cloisonnement et des menus articles. Vous souhaitez
qu'il y ait une précision additionnelle à ce sujet. Vous vous
opposez également à ce que le ministre s'attribue un pouvoir
discrétionnaire, celui d'accorder des exemptions, et vous proposez qu'il
y ait une procédure appropriée qui permette de le faire d'une
façon plus démocratique.
M. Gauthier (Bernard): C'est cela.
M. Bourbeau: Très bien. C'est noté. On retient cela
également. Merci.
Le Président (M. Desbiens): II n'y a pas d'autres
interventions. Je vous remercie, au nom des membres de la commission, pour
votre participation.
M. Gauthier (Bernard): Merci, M. le Président.
Le Président (M. Desbiens): J'invite le groupe OCTOFRUIT
à s'approcher, s'il vous plaît!
Comme il reste 20 minutes, ce sera suffisant pour entendre le
mémoire et nous pourrions commencer, cet après-midi, par les
questions.
M. Jean-Claude Gravel et M. Claude Cormier. Est-ce exact? M. Gravel, si
vous voulez bien procéder à la lecture de votre mémoire et
nous procéderons, cet après-midi, à la période des
questions, à 15 heures.
OCTOFRUIT
M. Gravel (Jean-Claude): M. le Président, je vous
présente Me Cormier qui va lire le mémoire.
M. Cormier (Claude): M. le Président, M. le ministre, MM.
les membres de la commission, permettez-moi tout d'abord de vous dire le
plaisir que j'ai à être devant vous aujourd'hui, surtout parce que
j'ai été associé à la compagnie Léo Gravel
& Fils Inc. depuis son origine corporative et également depuis
l'origine corporative d'OCTOFRUIT Inc., une entreprise de commerce de vente au
détail de fruits et légumes. Pour vous expliquer l'historique de
la compagnie Léo Gravel & Fils Inc., il s'agit d'un distributeur,
d'un grossiste de fruits et légumes. Je me permets de vous
souligner que je ne lis pas le mémoire présentement, MM.
les membres de la commission.
La compagnie Léo Gravel & Fils Inc., tient son origine de M.
Léo Gravel, d'où elle tire son nom, le père de M.
Jean-Claude Gravel, l'actuel président de la corporation qui a
été mise sur pied en 1956. Quelques années plus tard, M.
Jean-Claude Gravel prenait les guides de l'entreprise et grossissait - c'est le
cas de le dire - son commerce de grossiste de fruits et légumes.
L'évolution des conditions de marché, cependant, allait amener M.
Gravel à mettre sur pied, plus tard, une compagnie appelée
OCTOFRUIT Inc. Le 1er octobre 1983, il y a quelques mois, les deux compagnies
se fusionnaient sous le nom de Léo Gravel & Fils Inc. Cette
compagnie, au moment où nous vous parlons, exploite des commerces de
vente au détail de fruits et légumes sous le nom d'OCTOFRUIT.
Nous avons conservé le nom OCTOFRUIT comme marque de commerce sous
laquelle est identifié tout comptoir de vente au détail de fruits
et légumes. II y a quatorze commerces de vente de fruits et
légumes au Québec exploités à l'heure actuelle par
la compagnie Léo Gravel & Fils Inc., sous ce nom-là. Cinq
commerces sont projetés; ils sont en voie de développement pour
une ouverture au cours de l'année 1984, probablement au cours de
l'été.
Léo Gravel & Fils Inc., ne se veut pas le représentant
officiel, puisque la compagnie ne l'est pas, des détaillants de fruits
et légumes du Québec. Elle se veut simplement un citoyen
corporatif qui veut vous présenter les remarques qu'elle a tirées
de son expérience, vous allez me dire récente peut-être,
dans le domaine de la vente au détail de fruits et légumes, mais
une expérience quand même de plusieurs années puisqu'elle
remonte à 1956 dans le domaine des fruits et légumes, à
titre de grossiste, avant 1977, année qui marque l'ouverture du premier
commerce de vente au détail de fruits et légumes. (12 h 45)
C'est dans cette perspective que nous vous avons présenté
le mémoire que vous avez devant vous. Nous avons fait distribuer
également aux membres de la commission une annexe à ce
mémoire que nous considérons importante justement pour vous
permettre de bien visualiser ce qu'est un commerce de vente au détail de
fruits et légumes. Nous avons utilisé dans notre exposé le
terme "commerce de vente exclusif de fruits et légumes". Les
établissements OCTOFRUIT ne vendent rien d'autre que des fruits et des
légumes frais; il ne s'agit pas de fruits et légumes en conserve,
il s'agit strictement de fruits et légumes frais auxquels s'ajoutent
également quelques produits de l'érable ainsi que du miel. C'est
une des raisons pour lesquelles nous avons cru bon de vous présenter en
annexe un album-photo qui vous illustre, mieux que je ne pourrais le faire avec
des paroles, le concept d'un magasin de fruits et légumes tel qu'il a
été développé, tel qu'il a été mis
sur pied par les dirigeants d'OCTOFRUIT depuis 1977.
Si vous le voulez bien, cette présentation de Léo Gravel
& Fils Inc., qui est le signataire de ce mémoire, tient lieu des
quelques premières pages du mémoire dont je vais commencer la
lecture, à la page 3, aux termes objectifs du mémoire.
Léo Gravel & Fils Inc., a pris connaissance du projet de loi
59, Loi modifiant la Loi sur les heures d'affaires des établissements
commerciaux. Consciente de ses responsabilités en tant que franchiseur
et toujours soucieuse de répondre aux besoins de sa clientèle,
Léo Gravel & Fils Inc., a l'honneur de présenter ce
mémoire à la commission permanente de l'industrie, du commerce et
du tourisme. Elle se fait le porte-parole des entrepreneurs indépendants
qui exploitent ces franchises et elle se veut en même temps au service de
ses nombreux clients qui fréquentent les magasins OCTOFRUIT.
Il est essentiel de préciser que les établissements
OCTOFRUIT constituent des commerces spécialisés. C'est une notion
extrêmement importante sur laquelle nous attirons toute votre attention.
On n'y offre en vente que des fruits et des légumes frais, quelques
fruits séchés, du miel et des produits de l'érable; c'est
dans cette perspective que le mémoire a été
rédigé. Il n'est pas dans l'intention de Léo Gravel &
Fils Inc., de discuter de l'ensemble du projet de loi 59 ou de ses principes,
mais plutôt de sensibiliser la commission permanente de l'industrie, du
commerce et du tourisme à la situation particulière de ses
établissements commerciaux exploités sous la bannière
OCTOFRUIT. Le but recherché par Léo Gravel & Fils Inc., dans
la présentation de ce mémoire est de convaincre le
législateur québécois de ne pas imposer de restrictions
quant aux heures d'affaires aux seuls établissements commerciaux dont
l'activité exclusive est la vente au détail de fruits et
légumes frais. J'insiste là-dessus.
Léo Gravel & Fils Inc. a toujours cru à sa vocation de
spécialiste dans le domaine des fruits et légumes. Son commerce
de vente au détail dans ses établissements repose essentiellement
et uniquement sur la mise en vente de fruits et légumes frais comprenant
les produits de l'érable et le miel. Depuis l'implantation de son
premier établissement, au mois de novembre 1977, Léo Gravel &
Fils Inc. a été fidèle à sa vocation originale de
spécialiste; elle a su résister aux tentations nombreuses et
diverses d'offrir en vente dans ses
établissements d'autres produits. Elle a toujours cru, et
aujourd'hui plus que jamais, que sa raison d'être sur le marché
québécois et le respect de sa clientèle exigeaient qu'elle
concentre ses efforts dans la vente des produits que l'expérience
l'avait amenée à bien connaître, soit les fruits et
légumes frais.
La politique mise en application dans les établissements
OCTOFRUIT est à l'origine de la marque de commerce du même nom
sous laquelle sont exploités les commerces. Le mot OCTOFRUIT se veut la
représentation des huit caractéristiques qui constituent les
principes directeurs de l'administration des commerces, soit la
fraîcheur, la quantité, la variété, la
qualité, le libre service, le vrac, l'accueil et le prix. Le respect de
ces principes, essentiel au succès, exige que ces établissements
soient ouverts tous les jours de la semaine de même que tous les soirs,
sauf les samedi et dimanche.
La tradition au Québec a voulu que, viennent les beaux jours de
l'été, des kiosques de vente de fruits et légumes fassent
leur apparition sur les nombreuses routes de campagne pour offrir les produits
de nos agriculteurs aux baladins du dimanche. On peut expliquer cette tradition
par deux éléments déterminants, soit la fraîcheur et
la qualité des produits offerts. C'est dans cette perspective que les
établissements OCTOFRUIT ont ouvert leurs portes aux consommateurs
québécois. Les établissements OCTOFRUIT constituent tout
simplement une version moderne du traditionnel kiosque de fruits et
légumes.
En se rapprochant d'autre part de son domicile, le kiosque OCTOFRUIT
permet au consommateur de se procurer des fruits et légumes frais durant
toute l'année et ce tous les jours de la semaine. La fraîcheur et
la qualité des produits offerts constituent deux critères
essentiels sur lesquels se sont appuyés les dirigeants de Léo
Gravel & Fils Inc., pour développer le concept et
l'aménagement des magasins OCTOFRUIT. On a également voulu offrir
dans les magasins des produits dans une quantité et une
variété permettant aux consommateurs de faire un choix qu'on veut
le plus agréable et le plus intéressant possible.
La fraîcheur, la quantité, la variété et la
qualité des produits offerts par OCTOFRUIT dans ses
établissements tiennent à ses heures d'ouverture, qui n'ont pas
changé depuis l'ouverture du premier établissement. Ouverts du
lundi au mercredi de 9 heures à 21 heures le soir, les jeudi et vendredi
de 9 heures à 22 heures et les samedi et dimanche de 9 heures à
18 heures, les établissements OCTOFRUIT peuvent ainsi offrir toute la
semaine durant leurs produits en quantité et dans un état de
qualité et de fraîcheur que des heures d'ouverture plus
restreintes ne pourraient pas permettre. En effet, le commerce de vente au
détail de fruits et légumes frais repose sur un principe
absolument essentiel, soit la rotation continuelle des produits. La fermeture
des établissements le soir ou le dimanche constituerait une entrave
sérieuse à la rotation des produits. Ce désavantage
affecterait directement le consommateur, en plus de causer de graves
inconvénients aux propriétaires de ces établissements.
L'implantation des établissements OCTOFRUIT répond
à un besoin croissant du consommateur québécois. Non
seulement les établissements OCTOFRUIT se chiffrent-ils au nombre de
quatorze aujourd'hui - et l'on prévoit l'ouverture prochaine de cinq
autres -mais encore faut-il constater que depuis quelques années un
très grand nombre de commerces de vente au détail se sont
établis partout à travers le Québec pour offrir en vente
des fruits et légumes frais. Cette tendance répond au
désir du consommateur québécois de se procurer une
nourriture saine dans laquelle il puisse retrouver toutes les vitamines et
protéines nécessaires à une alimentation
équilibrée. Les fruits et légumes frais constituent sans
contredit une partie essentielle d'un menu sain. D'ailleurs, depuis quelques
années, plusieurs organismes gouvernementaux ont sensibilisé la
population à cette nécessité par différentes
campagnes d'information. À l'instar des campagnes d'information des
différents organismes gouvernementaux et autres, Léo Gravel &
Fils Inc lançait à l'automne 1983 une campagne de promotion sous
le thème "Savourez la nature" lequel fait présentement l'objet
d'une demande d'enregistrement de marque de commerce. Ce thème repose
fondamentalement sur la consommation de produits frais.
Les établissements OCTOFRUIT croient ainsi contribuer au
mieux-être du consommateur en lui offrant une gamme de produits frais
dans lesquels il pourra trouver des éléments de base à une
alimentation saine et équilibrée. Les établissements
OCTOFRUIT croient également que leur vocation de spécialiste est
une condition essentielle à leur contribution à ce
mieux-être. En effet, aucun autre produit n'est mis en vente dans les
établissements, ce qui amène les employés à
apporter une attention constante à la rotation des produits afin de
maintenir à son plus haut standard la quantité, la
variété, la fraîcheur et la qualité des produits.
Les dirigeants des établissements OCTOFRUIT sont fiers de leur
contribution à l'amélioration de la santé des
Québécois. Cette contribution serait toutefois très
dangereusement menacée, ou peut-être même compromise, si les
heures d'ouverture devaient être restreintes.
Cette restriction quant aux heures d'ouverture ne pourrait avoir qu'un
effet
négatif sur la qualité et la fraîcheur des produits
offerts. Il serait beaucoup plus difficile, voire même impossible, de
maintenir les standards actuels quant à la qualité et à la
fraîcheur des produits et ce, au détriment du choix offert au
consommateur. Il faut comprendre que dans le domaine des fruits et
légumes frais une vente non réalisée est une vente perdue.
Le consommateur substituera aux fruits ou aux légumes non disponibles,
ou qu'il ne peut se procurer, un autre produit qui risque de ne pas
présenter les mêmes qualités nutritives que le fruit ou le
légume frais. En effet, le consommateur pourra substituer aux
légumes frais non disponibles une pâte ou un légume en
conserve, tandis qu'il pourra substituer aux fruits frais non disponibles une
sucrerie, lesquels ne présenteront certes pas les mêmes
qualités nutritives que le produit substitué.
Il faut donc s'assurer que le commerçant puisse offrir en tout
temps des fruits et légumes frais que le consommateur peut se procurer
lorsqu'il le désire. Il n'est pas question, en effet, pour ce dernier de
faire une provision pour plusieurs jours à l'avance contrairement aux
autres produits d'épicerie. Il est d'ailleurs utile de constater que les
ventes de fruits et légumes enregistrées dans les magasins
OCTOFRUIT du lundi au mercredi se réalisent à 50% du chiffre
d'affaires pour ces journées-là entre 18 heures et 21 heures.
D'ailleurs, un autre aspect fort révélateur des habitudes du
consommateur tient au fait que la moyenne de vente réalisée par
client n'est que de 7 $. Les études de marché
révèlent que dans les secteurs desservis par les
établissements OCTOFRUIT, il se consomme en moyenne pour 15 $ à
20 $ par semaine de fruits et légumes frais. Or, l'expérience de
vente constatée dans les établissements
OCTOFRUIT indique que le consommateur préfère acheter ses
fruits et légumes frais en petite quantité. Cette habitude se
comprend puisque le consommateur peut ainsi consommer des produits plus frais
et, par ses visites fréquentes, avoir accès à un meilleur
choix.
De même, il faut constater que l'ouverture des
établissements de fruits et légumes frais le dimanche
répond à un besoin et à une demande du consommateur qu'il
est important de continuer de satisfaire. Près de 15% des ventes
hebdomadaires des établissements OCTOFRUIT sont réalisées
le dimanche. C'est dire que, pour le consommateur québécois, le
dimanche représente une journée d'égale importance aux
autres journées de la semaine pour l'achat des fruits et légumes.
La saison estivale voit ce pourcentage augmenter considérablement
puisque les ventes du dimanche constituent environ 20% des ventes
hebdomadaires. Le consommateur québécois favorise de plus en plus
les repas basés sur des salades et des fruits et légumes frais.
Une visite de quelques minutes seulement chez le détaillant de fruits et
légumes frais lui permet de se procurer un assortiment varié de
produits frais.
La fermeture projetée le dimanche, de même que certains
soirs de la semaine, des établissements de vente de fruits et
légumes frais priverait le consommateur québécois d'un
service et d'un avantage qui lui sont présentement offerts et qu'on doit
estimer non seulement utiles, mais également bénéfiques
puisqu'il s'agit d'une invitation et d'une incitation à la consommation
d'un produit de base pour une nutrition saine. Il y a tout lieu de croire en
effet que les achats réalisés par le consommateur le dimanche ou
certains soirs de la semaine ne seraient pas reportés, puisque les
avantages de la qualité et de la fraîcheur qui amènent le
consommateur à se présenter aux établissements à
ces heures disparaîtraient.
La fermeture des établissements de vente au détail de
fruits et légumes frais aurait un impact économique
négatif certain. Les premières personnes touchées par une
telle fermeture seraient les employés. Les restrictions d'ouverture
certains soirs de la semaine et le dimanche entraîneraient dans les
établissements OCTOFRUIT une perte de 60 heures homme-semaine par
établissement. De plus, les employés susceptibles d'être
affectés par cette diminution d'heures sont des étudiants pour
qui cet emploi permet souvent de poursuivre leurs études. Ces
étudiants qui perdraient ainsi leur emploi pourraient difficilement
trouver dans leur communauté d'autres employeurs leur offrant du travail
à temps partiel avec un horaire compatible avec celui de leurs
cours.
Une telle mesure affecterait également les agriculteurs
québécois. En effet, les établissements de vente au
détail de fruits et légumes frais au Québec constituent
pour les agriculteurs québécois un débouché
intéressant pour leurs produits. À ce titre, rappelons qu'au
cours de l'été les ventes du dimanche augmentent
considérablement dans les établissements OCTOFRUIT. Les produits
québécois sont en grande partie les bénéficiaires
de cette augmentation de vente, ce qui s'explique non seulement par la plus
grande disponibilité de ceux-ci, mais également par l'expectative
du consommateur d'avoir accès à des produits frais. La fermeture
des établissements le dimanche entraînerait à coup
sûr des pertes pour les agriculteurs québécois.
Un autre inconvénient consiste dans le péril même
dans lequel se trouveraient à être confrontés les
propriétaires d'établissements de vente au détail de
fruits et légumes frais si leurs portes devaient rester fermées
le dimanche et certains soirs de la semaine. La rentabilité et la
viabilité
de leurs entreprises en seraient affectées à tel point
qu'il faudrait se résoudre à fermer définitivement les
portes, et ce n'est pas peu dire. En effet, les statistiques démontrent
que la fermeture du dimanche de leurs établissements entraînerait
une perte d'affaires irrécupérable de l'ordre de 15%, tandis que
la fermeture après 18 heures les lundi, mardi et mercredi soir
provoquerait une perte supplémentaire de 10% du chiffre d'affaires. Il
ne faut toutefois pas s'arrêter à cette seule diminution du
chiffre d'affaires de l'ordre de 25% au total. En effet, la fermeture des
établissements les lundis, mardis et mercredis soir et, en particulier,
le dimanche, affecterait considérablement la qualité et la
fraîcheur des produits. Cette diminution du rythme de rotation se
traduirait par un rejet plus important des produits qui ne répondent
plus aux normes.
L'exploitation des établissements OCTOFRUIT répond
à des critères très stricts. La salubrité,
l'hygiène et la propreté des lieux n'ont d'égal que la
qualité et la fraîcheur des produits qu'on y expose. Il n'est
toutefois possible d'atteindre de tels standards que sur la foi
d'investissements très considérables qui permettent un
entreposage et une disposition des fruits et légumes dans les meilleures
conditions. L'investissement requis pour les équipements de même
que les coûts du loyer et des aménagements locatifs impliquent une
perte du chiffre d'affaires de 25% et la perte découlant du rejet des
produits provoqué par le manque de rotation porterait atteinte directe
à la rentabilité de ses commerces.
Les détaillants de fruits et légumes frais se distinguent
des autres détaillants de denrées alimentaires ou de
marchandises. Essentiellement périssables, les produits mis en vente
dans ces établissements imposent des mesures de manutention et de
contrôle très sévères. La conception,
l'aménagement et l'administration des établissements OCTOFRUIT se
veulent une réponse à ces exigences. La solution
préconisée pour y satisfaire comporte deux volets, soit la
spécialisation et l'accessibilité.
Les comptoirs des établissements OCTOFRUIT n'offrent au
consommateur que des fruits et légumes frais et rien d'autre. Cette
politique a pour but de répondre aux attentes du consommateur qui
devient de plus en plus exigeant. Mieux informé, sensibilisé aux
bienfaits d'une nourriture équilibrée, ce dernier peut ainsi
choisir ses fruits et légumes frais dans des conditions qui lui offrent
la fraîcheur, la qualité et la variété qui sont
l'essence même d'un commerce de vente au détail de fruits et
légumes frais.
L'expérience acquise démontre que le consommateur va
échelonner ses achats hebdomadaires de fruits et légumes frais
sur quelques visites pour s'assurer d'une constance dans la qualité et
la fraîcheur des produits qu'il consomme. La superficie limitée
des établissements de vente au détail de fruits et légumes
frais et le mode de présentation des produits favorisent cette tendance,
puisque la présence du consommateur dans l'établissement ne dure
que quelques minutes.
L'accessibilité, en termes d'horaire et de distance, doit
constituer une caractéristique du commerce de fruits et légumes
frais. Les heures d'ouverture doivent être réparties sur tous les
jours de la semaine pour combler les attentes du consommateur. Elles sont
également nécessaires pour maintenir la qualité soutenue
des produits. La fermeture, le dimanche et certains soirs de la semaine, y
serait une atteinte directe. Son autre composante, la proximité du
bassin résidentiel, ne saurait à elle seule suppléer
à la perte résultant de cette fermeture. Le concept de
l'établissement spécialisé de vente au détail de
fruits et légumes frais exige la coexistence de ces deux composantes
pour répondre aux besoins nouveaux du consommateur.
Léo Gravel & Fils Inc. est convaincue que la présence
des établissements OCTOFRUIT et, en général, des
détaillants exclusifs de fruits et légumes frais constitue un
apport qualitatif d'importance au mieux-être du consommateur
québécois. L'accès en tout temps à des produits
frais est une mesure incitative bénéfique. Dans cette
perspective, il faut considérer que le détaillant de fruits et
légumes frais est au service de la cummunauté. Cette contribution
risque toutefois d'être sérieusement compromise, voire même
annihilée, par l'effet de la fermeture du dimanche ainsi que les lundi,
mardi et mercredi soir prévue par le projet de loi 59.
Léo Gravel & Fils Inc., se fait donc l'apôtre de
l'exclusion des détaillants de fruits et légumes frais du cadre
d'application de la Loi sur les heures d'affaires des établissements
commerciaux. Sa position fondée sur une vaste expérience du
marché des fruits et légumes au Québec s'inscrit dans le
cadre de l'amélioration de la qualité de vie des
Québécois dont une des composantes est une alimentation saine et
équilibrée. À cet égard, il faut encourager la
consommation de fruits et légumes frais. La fermeture le dimanche et
certains soirs de la semaine des détaillants de fruits et légumes
frais serait un geste contraire.
En conséquence, Léo Gravel & Fils Inc., propose que
les établissements commerciaux dont la seule activité est la
vente de fruits et légumes frais soient spécifiquement exclus de
l'application de la loi. Merci messieurs.
Le Président (M. Desbiens): Je vous remercie. Nous
reprendrons la période des
questions à 15 heures.
La commission élue permanente de l'industrie, du commerce et du
tourisme ajourne ses travaux à cet après-midi, 15 heures.
(Suspension de la séance à 13 h 1)
(Reprise de la séance à 15 h 13)
Le Président (M. Desbiens): À l'ordre, s'il vous
plaît!
La commission élue permanente de l'industrie, du commerce et du
tourisme reprend ses travaux pour poursuivre l'audition des
représentations des personnes intéressées par le projet de
loi 59, Loi modifiant la Loi sur les heures d'affaires des
établissements commerciaux.
Nous avons entendu à la fin de la matinée le groupe
OCTOFRUIT, qui a présenté son mémoire et, tel qu'entendu,
nous allons commencer par la période de questions, à moins que
vous n'ayez des choses à ajouter à votre mémoire
auparavant.
M. Cormier; Non, je pense qu'on va profiter de la période
de questions, si vous le permettez, pour compléter.
Le Président (M. Desbiens): M. le ministre.
M. Biron: Je vous remercie de votre mémoire de ce matin,
qui a éclairé la commission sur l'entreprise OCTOFRUIT. Je
demanderais à mon collègue, le député de Shefford,
de faire une analyse rapide de votre mémoire et de vous poser quelques
questions.
M. Paré: Oui, M. le Président, j'aurais quelques
questions. Pour commencer, je vous félicite pour le document que vous
nous avez fourni et pour les photographies. C'est vrai qu'elles nous portent
à vouloir en manger.
M. Cormier: On espère que vous l'avez fait durant l'heure
du lunch.
M. Paré: Oui, on en a profité, effectivement.
M. Tremblay (Chambly): J'aurais mangé des fruits, mais ils
n'étaient pas frais.
M. Cormier: C'est parce qu'on n'est pas encore installé
à Québec, M. le député.
M. Paré: J'aurais quelques questions de précision
et d'information à vous poser. J'ai déjà travaillé
chez un dépanneur et je suis un grossiste, mais jamais au niveau d'un
comptoir de fruits. La première question est d'information: vous vendez
des fruits et des légumes, vous êtes donc au niveau de
l'alimentation. Est-ce qu'OCTOFRUIT est membre de l'ADAQ, l'Association des
distributeurs alimentaires du Québec?
M. Gravel (Jean-Claude): Non.
M. Paré: Vous n'êtes pas membre de
l'Association...
M. Gravel (Jean-Claude): On n'est pas membre, non.
M. Paré: ...donc, on peut comprendre pourquoi il y a une
différence de point de vue au niveau de la présentation des
mémoires. À votre connaissance, vous n'êtes quand
même pas les seuls à vous spécialiser dans la vente des
fruits et des légumes. Vous devez en connaître d'autres; quelle
est la position de ces gens?
M. Gravel (Jean-Claude): On en connaît d'autres qui font le
même genre de travail que nous, mais nous n'avons pas eu de consultation
avec les autres membres, avec ceux qu'on appelle nos compétiteurs et nos
collègues. Il n'y a pas d'association comme telle de fruiteries dans la
province de Québec, pour l'instant. Je crois qu'à court et
à long terme, il va falloir nous unir davantage pour avoir une meilleure
force.
M. Paré: C'est probablement pour cela qu'au début
de votre mémoire vous prenez la peine de spécifier que vous le
faites en tant que citoyen corporatif.
M. Gravel (Jean-Claude): C'est cela.
M. Paré: D'accord, c'est la précision que vous
apportez. Ma deuxième question, c'est vraiment à titre d'individu
que je la pose. Cela revient - et c'est très bien que cela revienne,
c'est encourageant et rassurant aussi - tout au long de votre mémoire,
lorsque vous parlez de spécialité, de qualité des
produits, de rotation et de fraîcheur. Cela est vraiment une question de
curiosité. Je comprends qu'on offre de la fraîcheur, de la
qualité, des produits frais chaque jour durant l'été, mais
l'hiver?
M. Gravel (Jean-Claude): C'est qu'on est directement importateur
des produits de la Californie ou des autres provinces. Or, l'été,
on commence par prendre les produits du Québec qui sont le plus en
demande et, avec la mise en marché et tout ce que le ministère de
l'Agriculture a fait, la qualité du Québec devient
supérieure à celle des autres provinces. Mais rendu à
l'hiver, c'est sûr et certain qu'il faut aller voir à
l'étranger.
M. Paré: Je voudrais revenir à la page 13. Vous
donnez des chiffres pour montrer l'importance des ventes que vous effectuez le
dimanche et durant la soirée. On parle de 10% les lundi, mardi et
mercredi soir après 18 heures et de 15% quand on parle du dimanche et
des soirées; donc, 25% du chiffre d'affaires. On laisse entendre, et de
façon très claire, que cela mettrait en péril l'entreprise
advenant que la loi s'applique telle que présentée parce que 25%
des ventes sont effectuées à ces moments. Il semble se
dégager une interprétation selon laquelle la loi vient compliquer
davantage, en tout cas, rétrécir ce qui existe
déjà, alors qu'à mon avis la loi est une ouverture par
rapport à la loi 24 dans le sens qu'avant on permettait trois personnes
sur la liste de paie pour ouvrir son commerce en dehors des heures. Maintenant,
on retrouve dans le projet de loi trois personnes à la fois, trois
personnes qui soient sur place, mais cela peut être beaucoup plus que
cela, pour autant qu'il y a une rotation, mais qu'on en retrouve seulement
trois sur les lieux à chaque moment où des gens interviennent
à un moment précis; c'est trois personnes et pas plus. C'est
quand même une ouverture.
Vous ne pensez pas que vous seriez capables de vivre avec cette loi?
Trois personnes, c'est quand même important comme personnel pour
être capable de répondre à une clientèle qui,
finalement, si je me fie à ce qu'offre OCTOFRUIT comme service, des
comptoirs, j'ai vu cela, les gens se promènent... Cela vous prend un
caissier, cela vous prend peut-être un gardien, quelqu'un pour changer la
marchandise sur les tablettes, faire la rotation, ce qui est très
important. Vous ne pensez pas qu'avec trois vous pourriez vous accommoder de la
loi?
M. Gravel (Jean-Claude): Si vous prenez le dimanche, dès
fois, vous avez des affluences jusqu'à 900 clients qui passent au
magasin entre 10 heures et 16 heures l'après-midi. Cela veut dire qu'en
partant, vous avez de trois à cinq caissières requises pour
donner le service à la clientèle. Vous savez comme moi que, le
dimanche, le consommateur est pressé. Cela lui fait plaisir de venir te
visiter, mais il a autre chose à faire, alors il veut un service rapide
à la caisse.
C'est sûr, comme vous le dites, que placer les fruits et
légumes dans la nuit où le matin tôt, faire des "layouts",
cela peut être possible pour la présentation, mais pour le service
à la clientèle, j'en doute, parce qu'il y a la rotation à
faire. Vous ne placez pas des pommes ou de la salade à 9 heures le matin
trois, quatre, cinq pieds d'épais, comme vous allez le voir dans la
chaîne nationale. Vous arrivez vers 15 heures l'après-midi, vous
avez juste des feuilles de laitue, vous cherchez les pommes, elles sont en
dessous. Il faut que, continuellement, les comptoirs soient remis en ordre et
les aliments replacés pour offrir une qualité supérieure
à la clientèle.
M. Paré: Mais si on demande - parce que vous êtes
dans le domaine alimentaire -de permettre une libéralisation des heures
très vagues pour le domaine des fruits frais... Dans l'alimentation, il
y a beaucoup de domaines. Des gens peuvent arriver avec une
spécialisation au niveau du poisson frais, de la pâtisserie; c'est
presque illimité. Cela pourrait être divisé dans toutes les
sections. Si on permet vraiment de libéraliser au point où on
laisse un nombre illimité de personnes, est-ce que cela ne vient pas
tout simplement demander que cela soit ouvert sept jours par semaine et
vingt-quatre heures par jour, pour l'ensemble des secteurs? Il y a la viande
aussi. Si on ne met pas de maximum pour que ce soit considéré
comme dépanneur ou, en tout cas, si on ne restreint pas le nombre en
fonction d'un critère quelconque - celui qui est retenu, c'est le nombre
de personnes sur le plancher - si on n'a pas cette limite pour les fruits
frais, comment pourrait-on justifier de la mettre pour les autres secteurs?
M. Cormier: Si vous me permettez, pendant que j'ai un
élément de réponse à la mémoire, avant que
M. Gravel complète ma réponse, un des éléments
essentiels à ce domaine des fruits et légumes consiste dans la
mise en disponibilité pour les consommateurs d'un ensemble de fruits et
de légumes qui sont présentés de façon à
permettre aux consommateurs un choix des plus complets. Les denrées que
vous avez mentionnées, le poisson, la viande, généralement
ces denrées sont offertes dans des comptoirs qui sont
réfrigérés en tout temps alors que, dans le domaine des
fruits et légumes - vous pourrez le constater dans les photos - il y a
certains comptoirs qui sont réfrigérés mais d'autres ne le
sont pas. Si on demande, à ce moment-là, la fermeture le dimanche
- je vous donne l'exemple du dimanche - cela signifie que, durant la
période qui s'écoulerait entre le samedi soir, 18 heures ou 17
heures, selon le cas, et le lundi matin, 9 heures, on serait obligé,
pour préserver la qualité des fruits et des légumes, de
vider toutes les tables et d'entreposer dans les chambres
réfrigérées des entrepôts à l'arrière
de chaque magasin. À ce moment-là, cela exige une manutention
qui, d'une part, coûte plus cher, et, d'autre part, est dommageable pour
la qualité des fruits. Il ne faut quand même pas exagérer
la manutention dans ce domaine.
Les comptoirs réfrigérés, vous pouvez constater,
sur les photos, que certains fruits et légumes y sont entreposés
pour le
magasinage du consommateur; le froid vient frapper par le dessous ces
fruits-là, de telle sorte qu'il faut encore une rotation
régulière. Alors, même si on les conservait dans ces
comptoirs réfrigérés pendant toute la période du
dimanche, il resterait un phénomène de dégradation
naturelle parce que la chaleur viendrait par le haut alors que le fruit serait
presque congelé du bas. C'est la raison pour laquelle le
commerçant de fruits et de légumes se distingue, à cause
de cette particularité de son commerce, des autres commerçants de
denrées alimentaires. Je laisse M. Gravel vous donner des explications
peut-être plus techniques sur le sujet.
M. Gravel (Jean-Claude): Je vais vous faire une comparaison avec
la viande préemballée, coupée d'avance - on s'en vient de
plus en plus avec du "cré-o-vac" ou des coupes dites d'entrepôt.
Premièrement, les familles ne sont plus grosses; en l'espace de cinq
ans, de 3,7, c'est tombé à 3,2 et, dans certains secteurs,
à 2,7 personnes. Il faut offrir les fruits et légumes en vrac
pour permettre à la personne de choisir une ou deux pommes vertes, une
ou deux tomates. Donc, si on est restreint à appliquer la loi sur les
dépanneurs - trois personnes - il va falloir en venir au
préemballage: coût excessif et qualité moindre aux
consommateurs. On va être obligé d'embarquer un peu dans ce que la
chaîne nationale a été obligée de faire; avec une
réduction de personnel, tu es obligé d'offrir ton produit d'une
autre manière. Mais est-ce qu'on va avoir la même qualité?
Je dis que non.
Deuxièmement, le consommateur ne viendrait plus chercher ce qu'il
recherche. Regardez, des fruits, c'est dispendieux. Du raisin à 15 $ le
kilo, avant cela, 7 $ ou 8 $ la livre, on trouvait cela cher. Mais,
aujourd'hui, c'est plus cher, c'est le kilo qui l'a emporté. Le
consommateur va prendre un peu de raisin vert, mais il va en prendre pour son
besoin et cela ne lui sera pas imposé comme c'est le cas quand vous avez
des paquets de 15 $, 16 $ ou 17 $ dans les magasins. Et si on le laisse libre
de choisir... D'ailleurs, dans les huit critères d'OCTOFRUIT, vous avez
remarqué qu'il y a le libre service; c'est un peu pour le coût. Le
coût d'emballage est moindre.
M. Paré: Une dernière question. On a fait des
comparaisons au niveau des produits: fruit par rapport à viande. Si on
prenait maintenant les vendeurs de fruit: OCTOFRUIT par rapport aux autres
vendeurs de fruit. Vous dites que vous n'êtes pas réunis en
association, donc vous n'êtes pas le porte-parole de plusieurs, mais
seulement d'OCTOFRUIT - ni de l'Association des détaillants en
alimentation. Il y a quand même une multitude d'autres détaillants
qui vendent des fruits et légumes frais.
À la page 17 de votre mémoire, une chose m'a
frappé. On dit, au tout dernier paragraphe: "En conséquence,
Léo Gravel et Fils Inc. propose que les établissements
commerciaux dont la seule activité est la vente de fruits et
légumes frais soient spécifiquement exclus de l'application de la
loi." Je trouve cela restrictif, parce que - et j'aimerais avoir vos
commentaires là-dessus -nous avons une décision à prendre,
c'est évident, et c'est pour cela qu'on écoute et qu'on pose des
questions, c'est important. Sauf que, dans la décision que nous allons
prendre, il doit y avoir une question de justice pour l'ensemble du secteur
alimentaire, de tous ceux qui vendent, tout le commerce.
Il y a une question d'équité, aussi, entre les
détaillants et les vendeurs d'un même secteur. Cet avant-midi, on
a parlé avec un intervenant et, à l'intérieur des centres
commerciaux, il doit y en avoir aussi des vendeurs de fruits frais qui, eux, ne
peuvent probablement pas ouvrir le dimanche, si le centre commercial est
complètement fermé. Par contre, les autres détaillants
d'alimentation qui n'ont pas comme seule activité la vente de fruits
frais, même s'ils décidaient d'ouvrir avec trois personnes pour
être capables de vendre, d'autres commerces ne pourraient pas vendre de
fruits et de légumes, parce que leur seule activité ne serait pas
la vente de fruits et de légumes. Ne trouvez-vous pas que votre
conclusion, le dernier paragraphe est énormément restrictif et
limitatif?
M. Gravel (Jean-Claude): Oui, il est limitatif. Souvent, vous
allez voir à la porte d'un établissement commercial le mot
"fruiterie" en gros. Mais, une fois à l'intérieur, vous vous
demandez où sont les fruits. C'est une vogue d'ouvrir des fruiteries.
Beaucoup disent qu'elles sont un genre de "dépanneur". On dit
qu'OCTOFRUIT est un spécialiste en fruits et légumes. Vous avez
ici, dans la région de Québec, M. Côté qui se
spécialise seulement dans les fruits et légumes et il y en a
certainement d'autres ailleurs. Je crois qu'une spécialité de
fruits et légumes doit vendre des fruits et légumes et ne pas
dire: Fruits et légumes et produits connexes. Là, on tombe dans
l'alimentation.
C'est pour cela que, lorsqu'on demande la restriction fruits et
légumes, on aimerait que soit défini ce qu'est une fruiterie.
Cela aiderait tous les gens dans le domaine, les importateurs de fruits et
légumes et les fruitiers à bien définir et, aussi,
à diriger le consommateur vers de vrais spécialistes capables de
les renseigner sur les fruits et légumes, de les faire goûter et
de leur donner des recettes.
On pourrait travailler en collaboration avec les ministères,
autant celui de
l'Industrie et du Commerce et du Tourisme que celui de l'Agriculture,
des Pêcheries et de l'Alimentation pour progresser davantage et se
rapprocher du consommateur. Dans le moment, comme fruiteries au Québec,
vous avez les kiosques au bord du chemin, mais on commence à avoir une
spécialité. Si on pouvait devenir des spécialistes
regroupés, c'est sûr qu'il n'y aurait pas seulement OCTOFRUIT dans
une période de deux, trois ou quatre ans, si c'était vraiment
défini.
Je pense que ce serait bon pour tout le monde et également pour
promouvoir nos produits agricoles; travailler avec les écoles, comme
vous le faites, la santé par les fruits. Dans beaucoup de fruiteries,
c'est la santé par les fruits, mais ils offrent des bonbons à la
caisse. Ce n'est pas trop bon, rendu là.
M. Paré: Je comprends et je ne dis pas que je ne l'accepte
pas, mais cela revient à ce que je disais tantôt. En fait, c'est
une libéralisation qu'on demande pour tout ce qui serait une
spécialité, tous les commerces qui accepteraient d'être
plus spécialisés dans un domaine que dans un autre, ou seulement
dans un produit à vendre.
Si l'on reconnaît que, pour les fruits, c'est une
spécialité avec des gens compétents qui vendent un produit
frais et de qualité, il faudrait accepter d'élargir le nombre de
trois personnes; il faudrait le reconnaître, si l'on veut être
équitables comme législateurs, pour toutes les autres
spécialités. On ne peut pas se permettre, à mon avis,
d'avoir une exception au niveau de la spécification d'un produit et de
ne pas l'avoir au niveau des autres; si on veut être libéral, dans
le sens commercial du terme, où on accepte que le commerce soit libre
-je parle au niveau commercial - il faut le reconnaître pour les autres
à ce moment; cela ouvre donc la porte à beaucoup de commerces.
(15 h 30)
M. Cormier: Si vous me permettez de répondre à
cette question, je pense qu'il faut faire la distinction entre strictement la
spécificité d'un produit, comme les fruits et légumes, et
d'autres produits spécifiques également, qu'on parle de pain, de
croissan-terie, peu importe, et définir la nature même du produit.
Or, les fruits et légumes sont essentiellement des matières
périssables et probablement que vous ne pouvez pas retrouver dans le
marché des produits qui sont plus périssables et cela, à
cause de l'entreposage au niveau du présentoir dans les magasins qui
comporte des difficultés pour leur conservation. C'est la raison pour
laquelle nous en avons conclu à une demande dans le sens de celle que
nous avons formulée à la commission d'exclure les
établissements dont la seule activité commerciale est la vente au
détail de fruits et légumes frais.
En vertu de la nature même des produits, il faut tout d'abord
être compétent dans ce métier. Je vous parle en toute
connaissance de cause, parce que cela fait plusieurs années que je suis
associé à cette entreprise. Léo Gravel & Fils et
OCTOFRUIT, préalablement, ont tenté des expériences au
niveau de l'exploitation corporative des établissements, au niveau
également de la franchise et à l'heure actuelle, il
s'avère que le succès de ce commerce tient à un
opérateur. Il faut qu'il y ait un propriétaire opérateur,
à cause du contrôle qui est exigé dans la qualité du
produit. N'oubliez pas que nous ne vendons que des fruits et légumes, on
ne vend pas autre chose, cela ne représente pas 10% ou 20% de notre
chiffre d'affaires, on ne peut pas se permettre une perte, on vend à
100%. La perte, si minime soit-elle, a des répercussions énormes
dans notre commerce.
L'expérience nous l'a démontré, il faut
nécessairement qu'il y ait un propriétaire opérateur qui
s'occupe, pratiquement sur une base quotidienne, de l'administration de son
commerce afin d'éviter les pertes, afin également de
présenter à son public la quantité voulue aussi et la
qualité voulue dans le domaine des fruits et légumes. Vous voyez
les présentoirs sur les photos, la qualité du produit fait qu'on
ne peut pas se permettre de faire des comparaisons avec d'autres entreprises
qui peuvent également offrir des produits spécifiques qui ne
dépassent pas... qu'on parle de charcuterie, de boulangerie etc., encore
là, ces matières sont réfrigérées, sont dans
des comptoirs fermés et il n'y a pas de perte. Que le magasin reste
ouvert ou qu'il soit fermé, il n'y a pas de perte de ce
côté, sauf la perte naturelle, ce qui n'est pas le cas pour les
établissements de commerce de vente au détail de fruits et
légumes.
La raison pour laquelle, comme spécification, on vous dit que la
seule activité doit être la vente de fruits et légumes,
c'est qu'on ne veut pas non plus faire concurrence aux dépanneurs. On ne
veut pas vendre autre chose, on est des spécialistes là-dedans;
les opérateurs, les employés sont des spécialistes
là-dedans et c'est la raison pour laquelle on en arrive à cette
conclusion.
M. Paré: Merci, cela répond très bien.
Le Président (M. Desbiens): Merci. M. le
député de Viger.
M. Maciocia: M. le Président, moi aussi, je veux
féliciter Léo Gravel & Fils pour le mémoire qu'on nous
a présenté à cette commission et je peux dire, en toute
sincérité, que je suis très sensible à votre
situation dans le sens que je suis un de ceux qui, réellement, n'aiment
pas acheter des
fruits et légumes déjà empaquetés dans des
sacs en plastique et les garder ensuite chez nous pour les consommer le lundi,
le mardi, etc.
Vous avez quatorze établissements, je crois? Est-ce qu'on
pourrait savoir la superficie moyenne de chaque établissement?
M. Gravel (Jean-Claude): La superficie moyenne de chaque
établissement vendant, c'est 2500 pieds et, en arrière,
l'entrepôt, cela varie de 1500 à 2000 pieds, selon le local et le
quai de déchargement.
M. Maciocia: Cela explique un peu la raison pour laquelle, avec
trois employés, vous ne pouvez pas fonctionner.
M. Gravel (Jean-Claude): On ne peut pas fonctionner.
M. Maciocia: C'est aussi clair que cela. C'est justement pour
répondre à une question qui a été posée par
le député de Shefford.
Je dois dire une autre chose. Avec la loi actuelle, je crois que vous
pourriez fonctionner quand même avec 10, 15 ou 20 employés; je
vous l'explique, et ce n'est pas la raison de ma question. On lit, à la
fin de l'article 5: "Aux fins du présent article, une partie distincte
et cloisonnée d'un établissement commercial est
réputée être un établissement commercial", je ne
voudrais pas qu'à un certain moment vous soyez obligés d'avoir,
dans une partie cloisonnée, des pommes et des poires, et dans une autre
partie cloisonnée des carottes ou autre chose. À certains
moments, la loi permettrait cette manière de faire. Vous pourriez avoir
trois employés dans chaque partie cloisonnée, mais je ne crois
pas que ce soit le but de la loi et c'est pour cela que je dis qu'il faudrait
être un peu plus large d'esprit vis-à-vis de cette situation
particulière.
La loi actuelle ne le permet pas non plus; cela est clair, je crois. La
loi actuelle ne vous permet pas d'avoir plus de trois employés à
temps plein le dimanche, mais il y a tolérance de la part du
ministère et du gouvernement actuels vis-à-vis de cette
situation. C'est pourquoi je crois que le ministre devrait être sensible
à cela. Je ne vois pas pourquoi cette tolérance devrait
être abrogée à partir du moment où il y a, je ne
dirais pas des droits acquis, ce ne sont pas des droits acquis, mais, disons,
cette tolérance.
Est-ce que, pour les 25% de perte dont vous parlez, vous avez fait une
étude pour savoir si c'est vraiment 25% de perte...
M. Gravel (Jean-Claude): De perte de vente.
M. Maciocia: ...que vous encourez le dimanche et les fins de
soirée, les lundi, mardi et mercredi?
M. Gravel (Jean-Claude): Sur une période de treize
semaines, on a l'exemple d'une succursale: sur un chiffre d'affaires de 339 000
$, 42 000 $ se font le dimanche et 78 000 $ se font le lundi et le mardi; donc,
la moitié, 39 000 $, se fait le soir, les lundi et mardi, parce que les
gens arrêtent après le travail ou après l'école, ce
qui est bien normal. La personne qui travaille termine à 17 heures;
quand elle arrive chez elle, il est 18 heures et elle passe au magasin, ou
encore après le souper. Cela veut dire que sur les 339 000 $, pour les
treize premières semaines de l'année, vous avez une perte de 81
000 $ ou 23,97%. Pour la deuxième période, de la semaine quatorze
à la vingt-sixième, sur 387 000 $, vous avez une perte de 89 000
$ de vente, dont 45 000 $ le dimanche, ce qui fait 23%. Pour la
troisième période, vous avez 575 000 $ de vente; vous avez une
perte, le dimanche, de 68 705 $; vous avez les lundi, mardi et mercredi, 138
000 $, ce qui représente 69 000 $, pour un total de 137 000 $ ou 23,97%.
Pour la quatrième période, sur 463 000 $, le dimanche, c'est 52
000 $; les lundi, mardi et mercredi, c'est 136 000 $, ou 68 000 $, 50%, ce qui
représente 25,99%, pour une moyenne annuelle de 24,29%. Ceci a
été fait à la succursale de Fabreville; c'est une
succursale du siège social parce qu'on a trois magasins à nous et
onze en franchise.
M. Maciocia: Je comprends. Vous mentionnez, à un certain
moment, sur l'impact économique, que la fermeture la semaine, les fins
de semaine et le dimanche représente 60 heures-homme-semaine par
établissement.
M. Gravel (Jean-Claude): C'est cela.
M. Maciocia: Est-ce que c'est en se basant justement sur
cette...
M. Gravel (Jean-Claude): Voyez-vous, si on regarde de 18 heures
à 21 heures et que vous opérez ces soirées-là,
lundi, mardi et mercredi, avec deux employés au minimum, parce que le
magasin est monté, tout est là, et le dimanche, cela prend au
minimum cinq employés, vous avez 60 heures par semaine que vous perdez
parce que c'est 40 heures le dimanche et 20 heures le soir. Ce sont toujours
des étudiants de cégep ou de secondaire V qui viennent faire ces
heures-là pour avoir de l'argent de poche et payer leurs
dépenses. Voyez-vous, sur le budget pro forma, un magasin qui fait 1 800
000 $, le type qui investit 140 000 $ pour partir un magasin avec la franchise
peut aller chercher un retour de 59 000 $. S'il perd 400 000 $ de vente, il a
un retour de 9 000 $. Je ne
vois pas une personne qui a 65 000 $ de comptant pour partir un magasin
OCTOFRUIT à qui on dit: Écoute, à partir d'aujourd'hui,
ton investissement de 65 000 $ va te rapporter 9 000 $ en faisant plus d'heures
de travail... Je ne vois pas la rentabilité et comment faire pour
développer un commerce au détail spécialisé dans
les fruits et légumes.
M. Maciocia: Est-ce que, quand vous avez préparé
votre mémoire - je vous le demande à titre d'information - vous
avez consulté un peu aussi? J'imagine qu'il y a des agriculteurs du
Québec qui fournissent vos magasins pendant l'été. Est-ce
que vous avez eu une opinion de ces agriculteurs vis-à-vis de cette
situation qui pourrait se retrouver du jour au lendemain, dans quelques
semaines, à cause...
M. Gravel (Jean-Claude): Pour l'agriculteur, l'ouverture des
magasins de fruits et légumes le dimanche est l'un des plus beaux
débouchés qui soient. Vous savez comme moi que, si vous n'avez
pas de fruits et légumes chez vous, vous n'en consommerez pas. Si on
regarde l'agriculteur le dimanche - l'été, c'est le blé
d'Inde du Québec... Les agriculteurs sont fiers de cueillir le
blé d'Inde le matin pour l'amener à toutes nos succursales le
plus frais possible et offrir une qualité supérieure.
Si on n'est pas ouvert, à qui vont-ils le vendre? Ce sera un
surplus sur le marché le lundi ou le mardi matin, ou un produit trop
mûr et le prix en subira les conséquences. Pour eux, c'est un
débouché. C'est sûr que vous allez dire qu'il y a des
vendeurs itinérants sur la route, mais ils ne peuvent répondre
à la demande des clientèles qu'attirent les fruiteries.
M. Maciocia: Merci.
Le Président (M. Desbiens): Oui, M. le
député de Robert Baldwin.
M. O'Gallagher: Merci, M. le Président. Je suis heureux et
je vous félicite pour votre mémoire. Je vois que vous êtes
le chef d'une entreprise qui connaît de grands succès et je vous
en félicite. De toute évidence, comme chef d'une entreprise qui
connaît un tel succès, vous avez suivi l'évolution des
heures d'ouverture ailleurs qu'au Québec. Vous avez sans doute suivi
cette évolution aux États-Unis. Pourriez-vous nous
éclairer sur ce que vous avez trouvé au point de vue marketing
aux États-Unis, au point de vue des heures d'ouverture dans des
entreprises d'épicerie, de fruits ou autres?
M. Gravel (Jean-Claude): En tant que chef d'entreprise, je ne
peux pas vous informer des heures d'ouverture aux États-
Unis, ou quoi que ce soit. En tant que grossiste depuis 25 ans,
desservant des kiosques de fruits et légumes qui ont commencé au
bord du chemin, et étant donné la demande croissante du
consommateur québécois, on en est venu à connaître
la demande de nos consommateurs, ce qu'ils veulent avoir.
Aux États-Unis, certains secteurs ont une réglementation,
d'autres pas du tout. C'est un "free-for-all". Certains magasins d'alimentation
aux États-Unis ouvrent 24 heures par jour, 7 jours par semaine. À
partir de là, on ne peut pas prendre...
M. O'Gallagher: Mais, au point de vue marketing, trouvez-vous que
c'est une bonne ou une mauvaise affaire? Quelle sorte de réglementation
proposez-vous?
M. Gravel (Jean-Claude): Si on avait une population, dans une
ville comme Laval, où nous avons notre siège social, de 1 000 000
ou 2 000 000 d'habitants, comme dans certaines villes américaines ou
européennes, c'est sûr qu'on vous demanderait peut-être
d'être ouvert sept jours par semaine, 24 heures par jour, parce que la
demande serait là. Nous avons des territoires un petit peu plus grands
et la population, comme celle de Laval, qui travaille à 10% ou 15%
à Laval et le reste à Montréal... Il faut être
à l'écoute du consommateur et être là à son
retour du travail.
C'est pour cela qu'on demande que nos heures soient prolongées.
La personne qui arrive à 17 heures, s'il n'y a pas de magasin de fruits
et légumes ouvert, elle va s'en passer. Pour répéter le
commentaire que je faisais tout à l'heure, si, demain, pour
préparer le lunch des enfants ou du mari, il n'y a pas de pommes
à la maison, il n'y en aura pas dans la boîte à lunch; ce
n'est pas plus grave que cela, on va mettre une friandise. Cela va remplacer le
tout. C'est une perte de vente automatique.
M. O'Gallagher: Une autre question, M. Gravel. Quel pourcentage
de vos employés, le dimanche, sont des étudiants qui travaillent
à temps partiel? C'est quelque chose que le gouvernement cherche
à trouver aujourd'hui pour la jeunesse.
M. Gravel (Jean-Claude): II n'y a que le responsable. Dans le
magasin, il y a le gérant, l'adjoint du gérant et le
troisième homme. C'est l'un des trois qui est responsable du magasin le
dimanche. Les autres sont tous des étudiants.
M. O'Gallagher: Une dernière question. Ne trouvez-vous pas
un peu discriminatoire qu'une pâtisserie ou un magasin de la
Société des alcools, tel que proposé par un prochain
projet de loi, aurait le droit d'avoir plus de trois employés et
que vous, vous n'aurez pas ce droit?
M. Gravel (Jean-Claude): C'est sûr. Si on regarde la
Société des alcools qui s'en vient avec de la charcuterie
même et peut-être du fromage, automatiquement, la première
qui ira à l'encontre de la loi, c'est l'industrie qui appartient au
gouvernement.
M. O'Gallagher: Ne prévoyez-vous pas qu'il y aura une
terrible chicane entre tous les commerçants et une demande de police
épouvantable pour tenter de faire la paix dans les centres
commerciaux?
M. Gravel (Jean-Claude): Je crois que tous les commerçants
en général vont défier la loi et vont tenter de s'unir,
parce que si une entreprise gouvernementale défie la loi -elle ne la
défie pas, elle en est exclue -pourquoi une entreprise... (15 h 45)
M. O'Gallagher: On donne une préférence à la
boisson par rapport aux fruits!
M. Gravel (Jean-Claude): C'est cela! M. Biron: M. le
Président.
Le Président (M. Desbiens): M. le ministre.
M. Biron: Jusqu'à maintenant, cela n'a pas
été trop mal sauf que le député de Robert Baldwin
charrie passablement. Je ne veux pas dire qu'il est malhonnête en
commission parlementaire, mais je dis tout simplement qu'il charrie. Pour la
Société des alcools, c'était déjà dans
l'ancienne loi; ce n'est pas une décision nouvelle, c'était dans
l'ancienne loi. Et tout ce qui a été ajouté à la
liste des genres de commerces qui sont exclus, on a réussi à
faire des consensus de ces secteurs d'activité. Or, ce n'est pas une
décision gouvernementale, c'est une décision des gens d'affaires
du milieu.
Dans le cas de M. Gravel, je suis très sympathique à sa
demande. La seule chose, ce n'est pas ma faute si la majorité des
commerçants de son secteur disent: II faut fermer. Je pense que, si je
fais une suggestion à M. Gravel, c'est d'abord de militer parmi les gens
qui vendent de l'alimentation, le groupement québécois du
commerce de détail, l'Association des détaillants en
alimentation, mais les organismes de gens d'affaires québécois.
Dans le fond, c'est peut-être une faiblesse de l'économie
québécoise que les gens d'affaires soient tous divisés;
ils ne réussissent pas à se parler et ils ne font pas de
consensus. Finalement, ils tirent dans tous les sens. Le gouvernement est
obligé, de temps à autre, d'intervenir et de choisir à peu
près dans le milieu. C'est une faiblesse de l'économie
québécoise, à l'heure actuelle. Il me semble que ce serait
le temps que les autres comme vous - je vais faire la même suggestion aux
autres - militiez plus activement au sein de votre association ou de vos
associations pour faire valoir votre point de vue. C'est à 90% qu'on me
dit: Tu fermes. Alors, il faut quand même respecter la grande
majorité, en politique.
Dans ce sens-là, le présent projet de loi vous aide
énormément, parce que, d'après l'ancienne loi, vous
n'aviez pas le droit d'exploiter votre entreprise avec plus de trois personnes
sur votre liste de paie. Cela, vous le savez. Il y a eu des tolérances,
c'est vrai, parce qu'on a dit que la loi sur le dimanche, on poursuivait les
gars et le juge disait: C'est 1 $ d'amende. Finalement, tu arrêtais de
poursuivre. Mais là, les commerçants - pas le gouvernement - ont
demandé que les amendes soient augmentées et que la loi soit
respectée. À partir de là, on a dit: D'accord, on va
augmenter les amendes, on va faire respecter la loi, mais on va essayer de
donner des heures d'ouverture additionnelles à quelques commerces ou
quelques secteurs de commerce où on a un consensus et où on fait
la demande pour ouvrir.
En particulier, il y avait le secteur de l'alimentation dont vous
êtes. On dit: On va partir de trois personnes sur la liste de paie et on
va en permettre trois en même temps sur le plancher. Il me semble que
vous êtes tout près de cela. Vous avez mentionné, tout
à l'heure, que le soir vous en avez deux. Donc, il n'y a pas de
problème. Il y a le dimanche, où vous dites: On en a cinq. Cela
est un peu plus que les trois. Je le comprends. Est-ce qu'il y a moyen de
s'ajuster ou pas? C'est vous qui connaissez le mieux votre commerce, vous
êtes capables de prendre une décision là-dessus. Mais le
point que je veux faire ici, c'est que la présente loi vous
privilégie comparativement à l'ancienne loi qui vous
forçait à en avoir seulement trois. Et votre association, vos
confrères, les gens d'affaires nous disent: Nous, majoritairement et
fortement majoritairement, demandons que, dans l'alimentation, ce soit
respecté comme dans d'autres secteurs d'activité. Alors, si on
vous donne des permissions, il va falloir que, d'abord, les gens du milieu nous
demandent aussi la même chose, que ce soit pareil pour tout le monde. Il
n'est pas question de traiter une entreprise sur un pied et toutes les autres
entreprises du Québec sur l'autre pied. Ce n'est pas tellement sur la
qualité du produit, mais ce sont les gens d'affaires du Québec,
en très grande majorité, qui nous demandent d'augmenter les
amendes et de resserrer la loi.
M. Gravel (Jean-Claude): Oui, mais quand vous dites: Nos
confrères... Si vous remarquez, L'ADA, dès qu'elle fait une
pression - c'est elle qui représente les marchands. Les
spécialistes vont chercher une partie de leur marché, alors c'est
sûr qu'eux font pression parce qu'ils ne veulent pas l'implantation de
spécialistes. Mais quand vous regardez le consommateur dans une
épicerie, qui achète pour environ, au maximum, de 3 $ à 5
$, en moyenne, de fruits et légumes par transaction, chez un
spécialiste, on dit que c'est 7 $ mais que la personne vient de deux
à trois fois par semaine, ce qui fait une consommation de 20 $. On
augmente la demande, en étant spécialiste, ce que le magasin
d'alimentation conventionnel ne fera pas parce qu'on a toujours dit, dans
l'alimentation, que l'enfant pauvre, c'était le service des fruits et
légumes.
Regardez un magasin d'alimentation, qui vend pour 200 000 $ à 250
000 $, qui passe environ 3000 à 3500 clients, il vend pour environ 20
000 $ par semaine tandis que chez nous, s'il passe 3500 clients, on va vendre
pour 25 000 $ et peut-être 30 000 $ par semaine. La différence,
c'est qu'on offre une gamme de produits beaucoup plus sophistiqués et
aussi on a un étalage plus grand parce qu'on leur en met plein les yeux.
C'est pour cela que je vous dis que l'ADA est indirectement contre les
spécialistes, que ce soit en alimentation, en fruits et légumes,
en boucherie française ou quoi que ce soit, elle ne veut pas perdre le
château-fort qu'elle a toujours eu.
M. Biron: M. Gravel, les gens de l'alimentation vont venir devant
nous, mais leur argument, vous le savez aussi bien que moi, c'est de dire:
C'est sûr qu'ils font plus d'affaires, parce qu'ils sont ouverts dans
l'illégalité, en dehors des heures légales. Ce que je veux
vous dire, c'est qu'à mon point de vue les gens d'affaires du
Québec doivent s'organiser pour avoir une voix, un consensus dans tout
ça comme dans certains secteurs d'activité. On a
écouté le consensus des gens du milieu et on a dit: On ouvre dans
certains secteurs. Jusqu'à maintenant, dans le domaine de
l'alimentation, le consensus n'est pas d'ouvrir davantage, pour ceux et celles
qui ont plus de trois employés. On a discuté longuement avec eux,
on s'est rendu jusqu'à trois employés en même temps sur le
plancher, ce qui vous donne une marge de manoeuvre pour avoir probablement sept
ou huit employés pour faire votre chiffre d'affaires. Vous me dites: Ce
n'est peut-être pas assez. Je pense qu'il faudrait regarder par rapport
à cette situation et le regarder avec les associations.
Quant à nous, je vous dis que, personnellement, je suis cela d'un
oeil très sympathique. Je voudrais bien, cependant, que les gens
d'affaires du Québec me disent:
Oui, cela a du bon sens.
M. Gravel (Jean-Claude): Je suis d'accord avec vous. Si tous les
magasins OCTOFRUIT peuvent en venir un jour à avoir une association pour
être davantage représentatifs, je suis d'accord avec vous et je le
souhaite.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Laporte.
M. Bourbeau: M. le Président, je ne voudrais pas laisser
partir les gens d'OCTOFRUIT sans souligner comment le ministre a
été injuste envers mon collègue de Robert Baldwin tout
à l'heure. Il l'a accusé injustement, à mon sens, parce
que le député de Robert Baldwin n'a pas faussé les faits
et surtout, contrairement à ce qu'a dit le ministre, il n'a pas
attaqué le gouvernement actuel. Il a souligné que, dans la loi
actuelle, comme dans la nouvelle loi d'ailleurs, on donne un traitement de
faveur à la Société des alcools. On ne vous dit pas que
c'est vous qui avez originellement introduit ça, c'était comme
ça dans la loi et vous le gardez. Il y a un non-sens dans la loi.
Pourquoi permettrait-on à la Société des alcools de vendre
du vin, de l'alcool et des spiritueux le dimanche? Bientôt vous allez
permettre de vendre dans les magasins de la Société des alcools -
d'après la déclaration de votre nouveau président - de la
charcuterie et des fromages. Les Québécois pourront donc
s'approvisionner facilement en spiritueux et en vin le dimanche, mais, quand on
voudra avoir des fruits, on ne pourra peut-être pas en acheter le
dimanche, parce qu'il n'y aura que trois personnes.
Il pourra y avoir 25 personnes dans le magasin de la
Société des alcools, avec la charcuterie et les fromages, ils
sont exclus, eux. Mais, pour les fruits, il faudra se limiter à trois
personnes, c'est donc peut-être créer des problèmes.
C'est tout ce qu'a souligné le député de Robert
Baldwin et je ne comprends pas du tout... En fait, je me demande qui a
charrié, si c'est le député de Robert Baldwin ou le
ministre. À mon avis, c'est le ministre qui a charrié. C'est
tout.
Le Président (M. Desbiens): M. le ministre.
M. Biron: M. le Président, je pense qu'on s'entend bien
à dire que tout le vin que les Québécois et les
Québécoises veulent consommer, ils peuvent l'acheter n'importe
quand le dimanche, chez n'importe quel dépanneur. C'est clair. Qu'ils
puissent l'acheter en plus dans 360 autres places que chez les 10 000
dépanneurs du Québec, il y aura 10 360 places où ils
pourront l'acheter.
Quant aux produits de charcuterie ou
au fromage, c'est bien sûr que la SAQ sera, comme n'importe quel
commerce partout au Québec, soumise aux mêmes lois,
c'est-à-dire que, si elle veut vendre du fromage et de la charcuterie le
dimanche, il faudra que ce soit cloisonné. On nous a demandé ce
matin de retoucher la définition des articles permis par la loi et, au
lieu d'y aller sur le genre d'établissements, d'y aller beaucoup plus
sur la forme d'articles vendables. On va retourner dans ce cas-là
à l'ancienne loi. On est en train de regarder ça à la
suite de la suggestion qui nous a été faite ce matin par une des
associations entendues, celle des bijoutiers.
Je remercie moi aussi M. Gravel et je l'invite à continuer
à militer au sein de son association d'hommes d'affaires.
M. Gravel (Jean-Claude): Merci.
Le Président (M. Desbiens): S'il n'y a pas d'autre
intervention, je veux remercier le groupe OCTOFRUIT et j'invite maintenant le
Groupe Ro-Na Inc. à s'approcher, s'il vous plaît. M. Drouin?
Groupe Ro-Na Inc.
M. Drouin (Henri): Mon nom est Henri Drouin, président du
conseil d'administration du Groupe Ro-Na Inc. J'ai avec moi M. Limoges, qui est
responsable des opérations de détail de la bannière
Botanix, qui regroupe les centres de jardin.
Nous avons soumis deux mémoires, le premier conjointement avec le
groupe BMR et le groupe Dismat. Les trois groupes, Ro-Na, BMR et Dismat,
regroupent, dans le domaine des matériaux de construction et de la
quincaillerie, environ 555 établissements. Le chiffre d'affaires au
détail combiné de ces établissements doit être de
l'ordre de 900 000 000 $, dont environ 50% dans le domaine des matériaux
de construction.
Dans l'ensemble, nous approuvons le projet de loi tel qu'il a
été soumis. Nous avions fait des représentations en
février, je crois, et les principaux points qu'on suggérait
étaient le maintien de la fermeture le dimanche et l'application de la
loi avec des peines plus sévères pour la faire respecter. C'est
ce qu'on retrouve dans le projet de loi.
Cependant, à l'article 2 du projet de loi tel que proposé,
il est mentionné que l'heure d'ouverture des établissements
commerciaux ne devrait pas avoir lieu avant 8 h 30 le matin. Or, dans le
domaine des matériaux de construction, une partie importante du volume
est transigée avec les entrepreneurs. Vous savez que les chantiers de
construction opèrent habituellement bien avant 8 h 30 le matin. Bon
nombre de nos détaillants doivent ouvrir leurs portes pour servir ces
clients entrepreneurs. Il ne s'agit pas de vente au détail à des
consommateurs, à des particuliers, mais bien de donner un service
à la clientèle des entrepreneurs. En été, il est
très fréquent de voir nos centres de rénovation ouvrir
leurs portes à 7 heures le matin. Deux ou trois employés dans la
cour reçoivent les entrepreneurs ou préparent les commandes et
deux ou trois employés sont sur le plancher de vente pour
compléter les articles de la commande qui peuvent se trouver dans le
magasin. Ce n'est pas une pratique qui est annoncée; c'est plutôt
un service qui est donné. Ces heures-là sont plutôt
communiquées de bouche à oreille par le propriétaire du
magasin à son client entrepreneur.
De toute façon, l'ancienne loi ne permettait pas plus d'ouvrir
nos magasins avant 9 heures le matin, je crois. Alors, il y avait certainement
une tolérance de cette pratique, de ce service à la
clientèle des entrepreneurs. Vu que la nouvelle loi va avoir plus de
dents et qu'on vous demande de la faire respecter, on ne voudrait pas du
même coup pénaliser les centres de rénovation et les
quincailleries qui doivent ouvrir à bonne heure pour accommoder leur
clientèle d'entrepreneurs. De quelle façon ce point-là
peut-il être considéré... Oui, M. le ministre.
M. Biron: Je comprends que vous avez deux mémoires. Vous
voulez peut-être qu'on apporte une réponse précise à
ce mémoire-ci et il serait réglé. Ensuite, on
étudierait le deuxième.
M. Drouin (Henri): Oui.
M. Biron: Je demande au député de Châteauguay
qui a étudié votre mémoire d'y répondre.
M. Dussault: Merci, M. le ministre. Vous avez sans doute
remarqué, MM. les représentants de Ro-Na, de BMR et de Dismat,
que le projet de loi 59 s'intitule Loi modifiant la Loi sur les heures
d'affaires des établissements commerciaux. C'est une loi qui amende une
autre loi, mais qui ne fait pas disparaître les articles pour lesquels on
ne dit rien dans le projet de loi 59. Cela veut dire que l'ancienne loi, Loi
sur les heures d'affaires des établissements commerciaux, dans sa partie
interprétation, article 1, continue à valoir. On dit bien,
à cet article: "vente au détail". Les transactions que vous
faites avec les entrepreneurs, cela relève du commerce de gros. Cela
veut dire, à toutes fins utiles, que vous ne serez pas touchés
par la nouvelle loi qui amende la loi actuelle et que vous allez encore pouvoir
faire ce commerce de gros. (16 heures)
Votre inquiétude était sans doute fondée; à
votre place, j'aurais peut-être eu la même inquiétude. Dans
la pratique, vous
n'avez pas à vous en faire, ce n'est pas changé. C'est du
commerce de gros. Vous admettez que vous faites du commerce de gros avec ces
entrepreneurs; la loi ne vous touchait pas et ne vous touchera pas. Donc, vous
êtes encore libres de faire ce commerce aux heures où vous le
faites habituellement.
M. Drouin (Henri): Parfait. Cela répond bien à nos
questions là-dessus.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Robert Baldwin.
M. O'Gallagher: Le samedi matin, par exemple, monsieur, ce n'est
pas nécessairement une clientèle d'entrepreneurs; il y a beaucoup
de familles qui font des travaux, le samedi, soit la construction de
clôtures ou d'autres entreprises autour de la maison. Ces personnes ont
seulement une journée dans la semaine pour faire ce travail. Cela a
été le cas chez nous à plusieurs reprises, d'essayer
d'avoir des matériaux, de bonne heure le matin, pour pouvoir terminer le
travail à temps. Dans votre expérience, avez-vous remarqué
ce phénomène, qu'il y a une demande de la population pour la
vente de détail afin que ce soit plus à bonne heure que 9
heures?
M. Drouin (Henri): C'est un fait. Beaucoup de nos clients
viennent nous trouver, à la fin de leur période de travail de la
semaine, soit le vendredi. Ils viennent nous donner leurs commandes. Ils nous
demandent d'avoir cela le lendemain matin dans leur cour afin qu'ils puissent
compléter leurs travaux le plus rapidement possible. C'est un fait que
le samedi matin on a des clients particuliers qui voudraient prendre livraison
de leurs matériaux. Je vous avoue franchement, qu'ils viennent magasiner
très tôt le samedi matin, c'est plutôt rare. Ce qu'ils vont
plutôt nous demander, c'est d'aller porter ces matériaux
rapidement. Ceci est fait, habituellement, le jeudi soir ou le vendredi.
M. Biron: Aucun problème de ce
côté-là.
M. Drouin (Henri): D'accord.
Le Président (M. Desbiens): Pas d'autres questions? Si
vous désirez faire part de la deuxième partie de votre
mémoire.
M. Drouin (Henri): Parfait. Dans la loi, telle qu'elle existait,
on prévoyait une exemption d'application pour les commerces dont
l'activité était la vente de fleurs. Je pense que le projet de
loi correspond beaucoup plus à la nature des opérations d'un
centre-jardin lorsqu'on dit "détaillants de produits
d'horticulture".
Notre interrogation ou notre inquiétude est venue un peu plus
loin, dans le texte du projet de loi, lorsqu'on dit: "Tout établissement
commercial visé aux paragraphes 1 à 7 du premier alinéa
demeure exclu de l'application de la présente loi même s'il vend,
en outre des produits caractéristiques de son type
d'établissement, des menus articles autres que ceux exclus par
règlement du gouvernement." Il est évident que, dans un centre
d'horticulture qui est ouvert le dimanche et dont la loi permet l'ouverture le
dimanche, il y a peut-être des produits autres que des produits types
d'horticulture qui sont vendus. Alors, on s'est d'abord demandé: Est-ce
que ce paragraphe-là n'aurait pas dû se lire: Tout
établissement commercial visé aux paragraphes 1 à 8 ,
puisque les commerces d'horticulture se retrouvent au paragraphe 8°?
Mais, encore là, on parle de menus articles autres que ceux
d'horticulture. On dit: Ce n'est peut-être là qu'est l'essence de
notre inquiétude. On a dit: S'il existe des produits ou des morceaux de
bois qui sont nécessaires pour faire des soutènements de terrain
et que quelqu'un en a besoin le dimanche, les centres d'horticulture en
vendent. Alors, il faudrait peut-être ajouter, à la mention des
établissements de vente de produits d'horticulture: Et autres produits
connexes. Cela nous semblerait moins limitatif. Si nous pouvons répondre
à vos questions là-dessus, cela nous ferait plaisir.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Châteauguay.
M. Dussault: M. le Président, nous comprenons par les
explications du représentant de RO-NA, mais plus spécifiquement
Botanix, leur satisfaction à l'égard de l'élargissement de
la notion de vendeurs de fleurs qu'ils étaient sous l'ancienne loi
à, maintenant, ce qu'on appelle les détaillants de produits
horticoles. Nous comprenons aussi leur satisfaction à l'égard du
fait qu'on les exclut de l'application des heures strictes d'ouverture
puisqu'on sait que les produits horticoles sont reconnus comme pouvant se
vendre en dehors des heures strictes.
Nous sommes forcés, je pense, de reconnaître qu'il s'agit
du même sujet de discussion que j'ai abordé ce matin,
peut-être trop brièvement cependant, avec les représentants
de la fédération des détaillants de produits horticoles et
c'est la même question, dans le fond, qui se pose. Vous ne serez donc pas
surpris que je vous pose sensiblement les mêmes questions.
Le ministre, ce matin, a dit qu'il y a une ouverture dans la loi pour la
vente de menus articles - pour employer l'expression -en plus de ce qui est
fondamentalement
l'objet de vente du type de commerce que vous exercez. Il nous serait
utile que votre comparution à la commission nous permette d'identifier,
plus précisément, la portée de l'expression "menus
articles" pour ce qui vous concerne. Pour ce qui concerne le ministre, en tout
cas, selon l'expression qu'il a employée, il y a ce que la loi dit et
l'expression que vous employez, vous, qui est tout à fait analogue
à celle des détaillants de produits horticoles de ce matin. Vous
dites aussi: Des produits connexes.
Peut-être qu'il y a lieu d'ajuster la loi pour être bien
sûr qu'on vous satisfasse le mieux possible, mais notre inquiétude
est qu'en élargissant trop on se trouve à entrer dans les
plates-bandes d'autres - je pense que l'expression est bien appropriée
commerçants. Je vais vous poser la même question: Quelle est la
portée de l'expression que vous utilisez en disant: Produits
connexes?
M. Drouin (Henri): On a apporté la liste des produits
qu'on retrouve à l'intérieur de nos centres de jardin; est-ce
qu'on pourrait vous en faire part?
M. Dussault: Effectivement, cela est intéressant.
M. Drouin (Henri): M. Limoges, qui est coordonnateur des
opérations de détail, pourrait vous donner cela.
M. Dussault: Si la liste n'est pas trop longue; cela va
être inquiétant si elle est longue, je vous le dis tout de
suite.
M. Limoges (Mario): Elle est un peu longue, mais on peut la
raccourcir. Les produits de familles principales, comme on les a définis
ici, ce sont des produits bien reconnus pour un centre de jardin,
c'est-à-dire tous les produits vivants: les produits de
pépinière, fleurs, arbustes, conifères qui se retrouvent
dans un centre de jardin. Il y a également...
M. Dussault: Cela est l'objet fondamental de votre vente.
M. Limoges: C'est l'objet fondamental et ce sont aussi les
produits à l'intérieur du magasin, par exemple: les engrais de
toutes sortes, le terreau, les pesticides, de l'outillage aussi pour le
jardinage usuel.
M. Dussault: Pour vous, que veut dire l'outillage? Est-ce que
cela veut dire une tondeuse à gazon?
M. Limoges: Si on entre dans l'outillage, actuellement, plusieurs
de nos centres de jardin Botanix vendent des outils motorisés; par
exemple: des tondeuses à gazon, des bêcheuses, tous ces menus
articles qui sont motorisés. Or, étant donné que le sens
du secteur horticole a assez débordé dans les dernières
années, on en est rendu à du jardinage dans nos centres de jardin
plutôt que de l'horticulture stricte, ce qui fait qu'on rentre ces
produits dans nos centres de jardin, ils sont en vente.
Mais il y a également d'autres produits qui s'ajoutent depuis les
dernières années; on les nomme les produits de
complémentarité, c'est-à-dire que lorsqu'on fait des
aménagements extérieurs autour de la maison on a besoin de
lampadaires, de dormants, de roches, de recouvrement de sol et ces choses sont
actuellement en vente dans nos centres de jardin Botanix.
M. Dussault: Je veux revenir à la même question
parce que vous ne vous êtes pas rendu jusque là. Est-ce qu'il
s'agit aussi de meubles de patio, tables et chaises?
M. Limoges: Disons que dans la partie meubles de patio, il y a
présentement une ouverture pour ceux que des artisans peuvent faire.
Mais aussi, il y a des meubles de patio qui sont en vente dans d'autres types
de commerce.
M. Dussault: Je suppose que c'est la clientèle qui vous a
amené à les vendre. Elle a dû vous dire: Ce serait bien
commode que vous puissiez nous fournir telle chose, quand on vient vous voir.
Mais, est-ce qu'il vous apparaît naturel que, dans la notion
d'horticulture et de produits connexes, on en vienne à vendre ce genre
de produits? Est-ce que cela ne relève pas plutôt des vendeurs de
meubles tout simplement de vendre ce genre de choses?
M. Limoges: Peut-être que la logique même pourrait
nous conduire à cela. Si on regarde l'évolution qu'il y a eue
dans les centres de jardin ou dans le marché de l'horticulture ailleurs
qu'au Québec - parce qu'il faut dire qu'au Québec on est dans le
début de la croissance de ce marché - si on regarde, par exemple,
en Europe de l'Ouest, en Californie, même dans tous les États
américains, et surtout dans les États près du
Québec, on voit des centres de jardin ouverts sept jours par semaine et
qui offrent, en outre des produits strictement d'horticulture, tous ces
produits, c'est-à-dire tous les produits de "jardinage"; par exemple,
les meubles de patio sont inclus là-dedans. C'est pour cela que nos
membres Botanix, un peu pour répondre à la demande, ont introduit
ces nouveaux produits dans leur commerce.
M. Dussault: Les Botanix que je connais, ceux que je
fréquente comme consommateur, n'offrent pas encore, en tout cas, ce
genre de produits. Cela m'étonne
toujours de voir que... C'est parce que ce n'est pas encore rendu chez
moi, dites-vous? En tout cas, cela viendra peut-être, mais
peut-être que la loi ne le permettra pas. Je vous remercie de
l'éclaircissement. À ce moment-là, si je comprends bien,
la tentative de définition du ministre ce matin, qu'un menu article
serait quelque chose qui se vendrait 20 $ et moins et qui se tiendrait dans la
main ne serait pas bien commode pour faire respecter et réaliser vos
désirs.
M. Drouin (Henri): Absolument.
M. Dussault: Bon! Donc, on devra regarder s'il est possible de
satisfaire vos désirs, tout en demeurant correct à l'égard
des autres commerçants. Je vous remercie.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Robert Baldwin.
M. O'Gallagher: Très brièvement. Vous avez dit tout
à l'heure qu'au Québec nous sommes au pied de l'échelle
dans l'évolution de toute cette histoire d'heures d'ouverture,
particulièrement dans la région, la zone où vous oeuvrez
présentement. Pouvez-vous nous confirmer que nous sommes au pied de
l'échelle au point de vue de l'évolution pour les heures
d'ouverture?
M. Limoges: En fait, ce n'est pas exactement ce que j'ai dit.
C'était qu'au niveau de l'horticulture on est au début, tout
simplement, de la phase de croissance de ce marché au Québec. Je
pense que c'est un marché qui va aller en s'agrandissant.
M. O'Gallagher: II va être extrêmement difficile de
délimiter les articles que vous pourrez vendre dans vos entreprises, de
les délimiter par règlement ou par liste...
M. Limoges: Ah! les délimiter, oui! M. O'Gallagher:
Merci.
Le Président (M. Desbiens): M. le ministre.
M. Biron: De façon générale, je suis
d'accord avec ce que vous demandez, sauf que pour certains articles on va quand
même avoir de la difficulté à me convaincre ou, en tout
cas, à convaincre vos collègues, les commerçants. Quand
vous parlez de meubles de jardin, j'ai l'impression que, lorsqu'on va
écouter les autres mémoires, d'autres intervenants, la
Corporation des marchands de meubles, les détaillants, etc., ils vont
s'opposer à cela. Vendre des tondeuses... vendre quelque chose vraiment
plus gros qu'un menu article, il va être difficile de convaincre les
autres commerçants d'accepter cela.
Je le répète encore une fois, c'est fortement majoritaire.
Alors, je vous fais la même recommandation que j'ai faite à M.
Gravel tout à l'heure: il serait peut-être excellent que vous
militiez activement au sein de votre association de commerçants, que
vous discutiez avec eux et, finalement, que vous pesiez le pour et le contre
des décisions ou des recommandations que l'association devra faire.
Jusqu'à maintenant, la grande majorité des associations de
commerçants nous a dit: N'ouvrez pas trop la loi.
M. Fortier: M. le Président.
Le Président (M. Desbiens): M. le député
d'Outremont.
M. Fortier: Vos coopérateurs Botanix opèrent
séparément de ceux qui tiennent des ferronneries. Ce sont des
commerces qui sont l'un à côté de l'autre? C'est
complètement séparé?
M. Limoges: Ce sont des propriétaires de
pépinières et de centres de jardin complètement
indépendants des quincailliers Ro-Na ou...
M. Fortier: Alors, les deux établissements ne se
retrouvent pas dans le même local physiquement?
M. Limoges: Non, du tout.
M. Fortier: Merci. (16 h 15)
M. Drouin (Henri): Là où certains produits
d'horticulture peuvent se retrouver à l'intérieur soit d'une
quincaillerie ou d'un centre de rénovation, on ne leur accole pas une
bannière Botanix. Tous les quincailliers et centres de rénovation
peuvent vendre certains produits d'horticulture et certains produits de
jardinage. Cela ne les rend pas nécessairement admissibles à
pouvoir arborer une bannière Botanix.
M. Fortier: Je posais la question parce que je me demandais si
Botanix, cela aurait pu être un enclos à l'intérieur d'une
ferronnerie, pour revenir à la définition dont on discutait ce
matin, et qui pourrait vous amener indirectement assez facilement à
étendre la gamme des produits qui sont offerts. C'est la raison pour
laquelle je vous posais la question, à savoir si vos "franchiseurs" ou
si vos coopérateurs étaient tout à fait autonomes et dans
un endroit physique séparé de ceux qui opèrent dans les
chaînes Ro-Na comme dans d'autres spécialités.
M. Drouin (Henri): Pour être bien franc avec vous, ce n'est
pas le cas aujourd'hui,
mais il évident qu'à l'intérieur d'un groupement
comme Ro-Na, là où nous n'avons pas de représentation de
la bannière Botanix, si un quincaillier disait: J'élargis ma
gamme de produits, je voudrais partir un véritable centre de jardin
voisin de ma quincaillerie, s'il a la connaissance et la compétence, on
va lui permettre de le faire.
M. Fortier: C'est une raison additionnelle pour laquelle, quand
même, la définition doit se faire d'une façon assez
précise. Merci.
Le Président (M. Desbiens): S'il n'y a pas d'autres
interventions, je vous remercie au nom des membres de la commission de votre
participation. J'invite la Fédération des coopératives
québécoises en milieu scolaire à s'approcher, s'il vous
plaît! Le président, M. Robert Hamel...
M. Hamel (Robert): Bonjour, M. le Président.
Le Président (M. Desbiens): ...si vous voulez nous
présenter les personnes qui vous accompagnent et procéder, s'il
vous plaît!
Fédération des coopératives
québécoises en milieu scolaire
M. Hamel (Robert): J'ai ici M. Christian Rousseau, directeur
général de la fédération, et M.
Jean-François Beaudry, qui est le conseiller juridique de la
fédération.
Je me présente, je suis Robert Hamel, président de la
Fédération des coopératives québécoises en
milieu scolaire. Pour le bénéfice de la commission parlementaire,
j'aimerais situer l'organisme que je représente. La
Fédération des coopératives québécoises en
milieu scolaire regroupe plus d'une trentaine de coopératives qui
exercent leurs activités exclusivement dans les institutions
d'enseignement réparties sur l'ensemble du territoire du Québec
et ce, tant aux niveaux secondaire, collégial qu'universitaire. Le fait
d'être dans des maisons d'enseignement contraint les membres de la
fédération à s'adapter au secteur dans lequel ils exercent
leur mission économique et sociale.
En effet, les coopératives membres de la Fédération
des coopératives québécoises en milieu scolaire, comme
nous l'avons exposé dans notre mémoire tel que
déposé devant cette commission parlementaire, doivent offrir
à leurs membres ainsi qu'à la collectivité à
laquelle elles appartiennent un ensemble de services et de biens
nécessaires aux exigences tant matérielles que
pédagogiques de ces institutions d'enseignement et du ministère
de l'Éducation.
Afin de remplir adéquatement notre mission économique et
sociale, ainsi que nos engagements envers les institutions d'enseignement, les
coopératives en milieu scolaire se doivent d'avoir des heures d'affaires
correspondant aux heures d'ouverture des maisons d'enseignement auxquelles
elles sont associées.
Ainsi, à la suite de pressions de nos membres et suivant ce qui a
été exposé dans notre mémoire déposé
devant cette commission parlementaire, la Fédération des
coopératives québécoises en milieu scolaire, ainsi que
l'unanimité de ses membres, sollicite de cette commission parlementaire
qu'elle recommande au pouvoir législatif d'adopter le projet de loi
modifiant la Loi sur les heures d'affaires des établissements
commerciaux, et plus particulièrement l'article 5, en y incluant un
alinéa qui désignerait les coopératives en milieu scolaire
et ce afin qu'elles fassent partie des exclusions à l'application de la
Loi sur les heures d'affaires des établissements commerciaux.
Je vous remercie, M. le Président.
Le Président (M. Desbiens): M. le ministre.
M. Biron: Je demanderais - en remerciant les représentants
de la Fédération des coopératives
québécoises en milieu scolaire - au député de
Chambly de poser quelques questions et de faire une intervention.
M. Tremblay (Chambly): Oui, M. le Président. Merci. M.
Hamel, vous avez dit que vous représentiez quelque 25 ou 30
coopératives en milieu scolaire. Est-ce que c'est la totalité des
coopératives en milieu scolaire?
M. Hamel (Robert): Si vous voulez, je vais laisser à
parole au directeur général.
M. Rousseau (Christian): Ce n'est évidemment pas la
totalité des coopératives en milieu scolaire.
Présentement, au Québec, il existe plus ou moins 50
coopératives. La raison qui fait que ce ne sont pas toutes les
coopératives en milieu scolaire, c'est que la fédération
est venue au monde le 20 novembre 1983. Compte tenu de cela, il faut comprendre
qu'on est en train de bâtir notre "membership".
M. Tremblay (Chambly): Dans ces coopératives, j'imagine
que vous vendez différents articles qui sont normalement utilisés
dans l'école. Est-ce que ce sont exclusivement des choses qui sont
utilisées dans l'école?
M. Rousseau: La majorité des articles qu'on vend, ce sont
des articles qui doivent
servir aux cours: par exemple, des crayons, de la papeterie, des livres,
des disquettes, etc., et, évidemment, des notes de cours parce que la
majorité des coopératives en milieu scolaire assure le service
des notes de cours pour les institutions. Compte tenu de cela, vous savez aussi
que, dans les institutions, habituellement les cours commencent à 8 h
30. C'est difficile pour un étudiant d'avoir ses notes de cours -entre
autres, en début de session - avant d'aller à son cours si la
coopérative n'est pas ouverte. La même chose aussi pour les
étudiants qui sont au niveau du perfectionnement. 0e prends, par
exemple, le travailleur en usine qui travaille le jour, il ne peut pas sortir
de l'usine pour aller s'acheter le matériel dont il a besoin sur ses
heures de travail pour aller à son cours à 19 h 30. Il faut
nécessairement que la coopérative soit ouverte le soir pour
être capable de lui offrir le matériel dont il a besoin.
M. Tremblay (Chambly): Y a-t-il des articles que vous vendez qui
ne sont pas pour les cours?
M. Rousseau: II y a quelques articles que l'on vend qui ne sont
pas pour les cours, par exemple, des cigarettes; on peut toujours dire que
c'est pour les cours aussi parce que... La revue Croc peut être aussi
pour cela. Mais, de façon générale, il y a très peu
d'articles que l'on vend qui ne sont pas utilisés pour les cours,
très peu.
M. Tremblay (Chambly): Les coopératives sont
réservées aux étudiants.
M. Rousseau: Non, cela est à noter, je pense qu'il faut
apporter la nuance. Il y a très longtemps, on a parlé des
coopératives étudiantes; on ne parle plus maintenant de
coopératives étudiantes, on parle de coopératives en
milieu scolaire. La nuance, c'est que maintenant les professeurs, le personnel
de soutien, le personnel-cadre peuvent faire partie de la coopérative
comme membres et ils peuvent aussi s'impliquer au niveau du conseil
d'administration. Par exemple, à Rivière-du-Loup, le directeur
général du cégep de Rivière-du-Loup est membre de
la coopérative, est membre du conseil d'administration de cette
coopérative. Cela est maintenant ouvert à l'ensemble de la
collectivité de l'institution.
M. Tremblay (Chambly): En fait, l'inquiétude qu'on
pourrait avoir, c'est d'ouvrir la porte à la possibilité qu'une
coopérative se mette à faire du commerce général et
qu'elle puisse ouvrir au moment où les autres ne sont pas ouvertes.
Comment prévoyez-vous qu'on pourrait vous permettre d'ouvrir au moment
où cela est nécessaire pour donner le service aux
étudiants sans que cela dégénère en une porte
ouverte pour permettre de vendre des meubles de jardin?
M. Rousseau: Ce que l'on pense, c'est que les
coopératives, lorsqu'elles vendent un bien ou un service, c'est parce
que cela correspond à un besoin de leurs membres, d'accord! Les besoins
des membres des associations coopératives ont toujours été
associés à l'éducation. À mon avis, cela prendrait
un changement de mentalité fondamental pour faire en sorte qu'à
un bon moment donné, comme vous le dites, on se mette à vendre
des meubles. De toute façon, la plupart des étudiants n'ont pas
les moyens de s'en payer. On ne peut pas vendre non plus de matériel de
luxe, par exemple, ouvrir une galerie d'art quelque part, c'est difficile; on
ne peut pas ouvrir quelque chose comme cela. Le matériel qu'on vend,
c'est du matériel dont les étudiants ont vraiment besoin. Cela
fait 40 ans que les coopératives existent - par exemple, cette
année, on fête le quarantième anniversaire aux HEC,
à la polytechnique et à Laval - et les articles qu'elles vendent
ont toujours été les mêmes. On vend, peut-être,
maintenant des disquettes qui n'existaient pas en 1940.
M. Tremblay (Chambly): Dans ce contexte - je ne voudrais pas
parler pour tous mes collègues - j'ai l'impression que, dans la
perspective où les coopératives sont réservées pour
combler les besoins du milieu scolaire, il n'y a pas de problème pour
que vous ayez les mêmes heures d'ouverture que les institutions
d'enseignement. Merci.
Le Président (M. Desbiens): M. le député
d'Outremont.
M. Fortier: Dans la même veine, pour avoir quelques
précisions, ayant été à la tête de l'AGEUM,
je me souviens qu'il y avait une coopérative, à la polytechnique,
en particulier. Mais maintenant que cela fait un certain temps que j'ai
quitté ces institutions, vous dites que ce n'est pas seulement ouvert
aux étudiants, c'est ouvert à tous ceux qui travaillent ou qui
oeuvrent sur place. Est-ce qu'on peut en conclure, d'une façon certaine,
que vous ne faites pas de commerce à l'extérieur des lieux
mêmes d'une université, d'un collège ou d'un
cégep?
M. Rousseau: On ne fait pas de commerce à
l'extérieur des lieux mêmes des institutions dans lesquelles on
est. Tous les locaux des coopératives en milieu scolaire sont
situés à l'intérieur même des édifices, que
ce soient des cégeps, des polyvalentes ou des universités, on n'a
pas d'exercice à l'extérieur. On n'a pas pignon sur rue dans le
sens, par exemple, d'avoir un local
commercial sur le trottoir de la rue Sainte-Catherine ou de la rue
Saint-Denis ou ici, à Québec, sur le boulevard Laurier. On est
directement à l'intérieur des institutions.
M. Fortier: Les profits ou les surplus qui sont faits par ces
commerces - parce qu'il s'agit d'un commerce - de quelle façon sont-ils
généralement utilisés? Est-ce que toutes ces
coopératives sont régies de la même façon ou si cela
alimente des individus en particulier ou l'association étudiante? De
quelle façon les profits sont-ils partagés?
M. Rousseau: Finalement, on a deux missions: une qui est
économique, c'est-à-dire satisfaire des besoins en termes de
vente de biens, et une autre qui est sociale, qui consiste à
l'éducation coopérative. D'ailleurs, le ministère de
l'Éducation, avec M. Laurin, a reconnu l'importance des
coopératives en milieu scolaire pour la relève des
coopérateurs au Québec. La totalité des trop-perçus
au cours d'un exercice social sert majoritairement... Dans un premier temps, ce
qu'on a fait, c'est qu'on est en train de consolider tout le réseau
parce que le réseau a été sous un moratoire pendant dix
ans; donc, on est en train de consolider au niveau de la gestion de
l'entreprise avec ces sommes. Il y a des coopératives où la
gestion de l'entreprise ne faisait aucun doute, cela allait très bien,
elles se servent de ces sommes pour monter des programmes d'éducation
coopérative. Je prends, par exemple, le cas de la
fédération qui est en train de monter un programme de formation
des administrateurs et des gestionnaires avec des chercheurs de
l'Université du Québec à Montréal; ils sont quinze
là-dessus, ces sommes servent à cela.
M. Fortier: Vous parlez de la fédération, je
croyais qu'elle n'était qu'un lieu de rencontre. Vous êtes en
train de me dire que la fédération est rendue un organisme
administratif et financier assez important qui aide à l'achat de
certains équipements, dans certains cas, ce qui fait que la
fédération devient un grossiste à ce moment.
M. Rousseau: Non, on aimerait préciser. Nos statuts et
règlements nous interdisent d'être grossistes. Le seul mandat
qu'on a donné à la fédération, c'est de travailler
à l'éducation coopérative. Les membres individuellement ne
pouvaient s'offrir des services de formation et d'éducation
coopérative. Se payer un agent d'éducation de 10 000 $, 12 000 $,
15 000 $ par année, ce n'est quand même pas un salaire qui est
effrayant, alors que tu fais un chiffre d'affaires de 150 000 $ à 200
000 $ par année. Tu ne peux pas arriver quand tu as payé un
gérant ou d'autres personnes qui travaillent et où la plupart
sont des bénévoles.
Ce que fait la fédération, c'est qu'elle a ramassé
toutes ces sommes. On a un gros budget cette année, 63 000 $; c'est la
somme dont on dispose. Ce sont les membres qui nous l'ont donnée; donc,
on est autosuffisant, on ne compte sur aucune subvention. On se sert de ces
sommes pour aller négocier des ententes avec d'autres intervenants afin
d'être capables de réaliser des projets. Les trop-perçus
servent, entre autres, à cela pour les membres, c'est-à-dire
qu'ils retournent ces sommes à la fédération. (16 h
30)
M. Fortier: M. le Président, sous réserve des
commentaires qui pourront peut-être nous venir plus tard d'autres
intervenants, pour notre part, à ce moment-ci, nous n'aurions pas
d'objection à accéder à la demande de la
fédération.
M. Rousseau: Merci.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Robert Baldwin.
M. O'Gallagher: Concernant les règlements, dans votre
charte, avez-vous le droit de faire de l'annonce à l'extérieur
des institutions?
M. Rousseau: Je ne peux pas me prononcer là-dessus,
étant donné que chaque membre chez nous est indépendant et
chaque membre a la possibilité ou non, je ne le sais pas... Il faudrait
voir à l'intérieur de leurs statuts et règlements. Pour
nous, à la fédération, cela deviendrait, à ce
moment, de l'ingérence d'aller leur dire: Vous n'avez pas le droit de
faire ceci. Je ne suis pas capable de répondre à cette
question.
M. O'Gallagher: Vous ne contrôlez pas les activités
par des règlements de toutes les...
M. Rousseau: Absolument pas, c'est-à-dire que ce sont les
membres qui contrôlent les activités de la
fédération, présentement; dans la situation actuelle,
c'est exactement l'inverse.
M. O'Gallagher: Merci.
Le Président (M. Desbiens): M. le ministre.
M. Biron: Après cette discussion et la lecture de votre
mémoire, je crois qu'on va essayer d'ajuster, dans le sens des
exclusions de la loi, les coopératives en milieu scolaire pour vous
permettre de vendre les articles nécessaires pour les cours, parce que
les autres articles, tels que ceux de la tabagie, vous avez mentionné
des revues, des
journaux, c'est déjà exclu en vertu de la loi alors, il
n'y aura pas de problème à toucher ces articles. On va s'assurer
quand même, pour ne pas charrier à l'extrême, que vous ne
vendiez pas des meubles et tout cela en dehors des heures d'ouverture. Mais ce
dont vous avez besoin en milieu scolaire, il n'y aura pas de problème
là-dessus.
M. Rousseau: À la condition de payer ses taxes à M.
Parizeau.
Le Président (M. Desbiens): Merci. Nous vous remercions de
votre participation. Maintenant, j'invite l'Association des administrateurs des
expositions agricoles du Québec Inc. à se présenter
à l'avant, s'il vous plaît.
Association des administrateurs des expositions
agricoles du Québec Inc.
M. Charpentier (Fernand): Je remercie la commission de bien
vouloir nous entendre aujourd'hui et je donne la parole à Me Jules
Allard, qui a travaillé avec nous sur ce dossier.
Le Président (M. Desbiens): D'abord, si vous voulez
présenter les personnes qui vous accompagnent.
M. Allard (Jules): Je suis Jules Allard, avocat mandaté
par l'association. À ma droite, vous avez le président, M.
Charpentier; à mon extrême gauche, M. Jean Alarie, qui est
secrétaire de l'Exposition de Trois-Rivières, une exposition qui
en est à sa 79e année, je crois. Vous avez M. Richard Robert, de
Saint-Hyacinthe, qui, lui, a une exposition à l'année, qui a
duré 146 ans; M. Gérard Drouin, mon compatriote de Victoriaville,
qui est également l'administrateur et le directeur général
de l'Exposition agricole de Victoriaville. On est nombreux, parce que la
question est importante. Vous avez également, à mes
côtés, M. Pierre Brousseau, qui est le représentant de
l'Exposition provinciale de Québec, dont c'est le 75e ou 76e
anniversaire cette année. Vous avez M. Louis-Philippe McCarthy, qui est
de Montmagny et dont l'exposition aura 50 ans cette année. Est-ce que
j'en oublie?
Une voix: M. Charbonneau.
M. Allard: M. Charbonneau, de Rougemont, qui représente
notre exposition benjamine. Nous résumerons notre mémoire
-étant donné que vous en avez sans doute pris connaissance - de
la façon suivante, en vous disant d'abord qui nous sommes, ce que nous
voulons et pourquoi nous le voulons.
Premièrement, qui sommes-nous? Les administrateurs des
expositions agricoles, et c'est un euphémisme, administrent des
expositions agricoles reconnues par le ministère de l'Agriculture, parce
qu'il peut y avoir d'autres expositions agricoles. Ceux qui sont devant vous
sont les représentants d'expositions reconnues par le ministère
de l'Agriculture. L'ampleur du nombre des représentants des expositions
agricoles vous laisse à penser que ce sont des manifestations que le
législateur a consacrées depuis longtemps. Dès l'origine,
cette grande place du marché, cette grande foire a eu dans la loi des
objectifs bien précis. Non seulement l'agriculture mène-t-elle
à tout, mais l'aspect commercial, l'aspect industriel et l'aspect des
arts sont des objectifs à atteindre qui se font par
l'intermédiaire d'expositions agricoles. Les expositions agricoles
constituent toute une pluralité d'activités que l'on peut
difficilement dissocier si on veut qu'elles continuent à remplir leur
mission.
Quant aux aspects commerciaux, ils sont multiples. On sait qu'à
l'origine c'était l'endroit privilégié - et cela l'est
encore jusqu'à un certain point, si on parle de nouveautés, si on
parle de promotions, si on parle d'idées de pointe - où on
pouvait magasiner, acheter et se faire une idée de tout ce qui se
consomme au Québec. C'est pourquoi, nous, ce que nous voulons, c'est
d'être inclus dans les exclusions de l'article 5. Évidemment, on a
le texte de l'article 5.1 qui crée une certaine ouverture, mais qui
oblige, pour obtenir cette exclusion ou cette exemption - puisque la permission
est demandée - à procéder morceau par morceau,
c'est-à-dire que ce sont les établissements commerciaux qui
doivent demander l'exemption.
Lorsqu'on prend le texte du premier article de la loi, on définit
comme établissement commercial tout établissement ou autre
endroit où des denrées ou marchandises sont vendues ou offertes
en vente au détail. Évidemment, cela pose
énormément de problèmes, parce que l'endroit, c'est chez
nous. Les sociétés d'agriculture possèdent leur endroit
d'exposition ou leur terrain. Elles l'exploitent depuis de nombreuses
années, de sorte que la société d'agriculture, en plus de
chacun des commerçants qui composeraient cette exposition, ce carrefour
ou cette agora -puisque le terme redevient à la mode à
Québec - où les échanges se font dans un espace
très restreint pendant une semaine -treize jours au maximum - par des
commerçants qui sont déjà soumis en dehors du terrain
à la loi quant aux heures d'ouverture et qui paient pour venir chez nous
exposer et participer... C'est une classe bien particulière de clients.
C'est une clientèle qui paie également pour venir participer
à ces activités commerciales, agricoles et artistiques. C'est
pourquoi si le
texte, à notre avis - nous le soumettons et c'est notre crainte -
reste tel qu'il est, ce sera une impossibilité quant à
l'administration de chacune des expositions, de chacun des conseils
d'administration pour une raison simple: certains commerçants qui
paieront pour venir chez nous auront oublié de demander le permis ou
l'auront mal demandé, de sorte qu'on se retrouvera avec une multitude de
commerçants dont certains sont déjà exemptés par le
paragraphe 5 - ils font partie des exemptions et ils pourront ouvrir en dehors
des heures régulières - et d'autres auront omis de demander leur
permis et ne le pourront pas.
Finalement, nous, comme administrateurs d'exposition, si on prend les
dispositions coercitives qui comportent des pénalités ou des
sanctions, aux articles 8, 9 et suivants, nous nous retrouverons dans la
situation, premièrement, ce qui n'est pas agréable quand on fait
commerce avec quelqu'un, d'être des délateurs, de dénoncer
ceux qui ne sont pas en règle; deuxièmement, d'être
nous-mêmes complices des actes qui seraient posés en dehors des
heures de commerce. Imaginez-vous, au point de vue de la police, ce que cela va
devoir prendre pour surveiller tout cela dans notre petite enceinte.
Par conséquent, nous demandons, comme expositions, de faire
partie des exemptions, d'abord, je le répète, parce qu'il y en a
42. On en mentionne 36 dans le mémoire mais, apparemment, on serait 42
sociétés qui présentent des expositions. Si on nous oblige
à faire des demandes, ce sera beaucoup de boulot pour chacun des
établissements commerciaux et ce ne sera pas facilement praticable.
Pourquoi demande-t-on ça? On ne demande pas de privilège,
c'est l'histoire qui nous a faits ainsi. C'est le législateur qui,
à l'origine, a créé cette espèce de statut
privé des expositions agricoles parce qu'il y avait une mission
importante, un objectif important à remplir, la promotion de
l'agriculture, du commerce, de l'industrie et des arts. C'est écrit en
toutes lettres dans la loi. Le premier texte qui se lit de la façon
récitée dans notre mémoire, je l'ai trouvé en 1919,
je ne suis pas remonté plus loin. Pour cette mission-là, cette
espèce de statut, on l'a créé au niveau, par exemple, du
Code criminel. Lors de la tenue d'une exposition agricole, par exemple, les
bingos ont toujours été permis.
Vous avez toutes sortes d'exemptions comme ça qui collent
à la réalité qui est la suivante: une exposition agricole
se tient dans un lieu fermé. C'est une manifestation à
caractères multiples. C'est une manifestation où tout le monde
paie pour venir. C'est une manifestation qui ne peut pas échapper
à un contrôle facile parce que les sociétés sont
bien structurées. C'est également un endroit unique qui ressemble
à la fois à un marché public et à un centre
commercial sans avoir les inconvénients de durer toujours et de
concurrencer tout le monde. C'est un moment privilégié d'une
activité régionale.
On ne fera pas de cachette, ce qui fait vivre les expositions agricoles,
c'est l'activité commerciale. Il faut louer nos kiosques; pour louer nos
kiosques, il faut que les gens retirent des profits et attirent la
clientèle. Ce sont les gens qui passent aux barrières qui paient
une admission. Dans l'ensemble des expositions agricoles, les heures où
le commerce ne serait pas permis, sauf pour ceux qui sont exemptés par
l'article 5, représentent 75% de l'affluence sur les terrains. La
population y vient pour beaucoup d'autres objectifs, récréatifs
et autres, mais commerciaux aussi.
Quand on dit qu'il n'y a pas eu de situation privilégiée
faite aux expositions, c'est à cause de la nature même de cette
entité. Ce sont des corporations sans but lucratif qui ne gardent rien
dans leurs coffres, qui retournent au public les bénéfices faits
sous forme de promotion commerciale, industrielle ou autrement. Pour les
gouvernements, c'est évidemment un apport de taxes - taxe sur les repas,
etc. -parce que dans les régions comme les nôtres on voit
facilement, lorsque la température nous aide, la grande rue
bloquée. C'est parce qu'il y a beaucoup de gens qui viennent, ça
correspond encore à quelque chose. Les expositions durent depuis plus de
100 ans -chez nous, ce serait 107 ans - et d'une année à l'autre
on augmente la population parce qu'on se tient à la fine pointe dans
tous ces domaines-là.
Pour le retour qui est fait pour les villes, pour les gouvernements,
à Québec par exemple, notre mémoire souligne qu'il y a eu
303 000 $ retournés en taxe d'affaires. C'est quand même assez
important. (16 h 45)
Dans le domaine de la création d'emplois, on dit qu'on a
versé des salaires de 800 000 $. Ce sont des salaires directs. Si on
calculait, surtout dans le secteur rural, les contrats de sous-traitance, il
faudrait manifestement doubler ce chiffre.
L'Exposition de Québec à elle seule a retourné, en
1982, 643 000 $ en taxes à la ville de Québec.
Pour le citoyen, cela demeure une occasion privilégiée,
nous le répétons. C'est un carrefour de promotion. On demande que
soit consacré ce qui existait. On peut bien nous dire que c'est un
privilège qu'autrefois on ne soit pas venu nous visiter sur nos terrains
d'exposition, mais je pense que c'est plus à la suite d'un droit acquis,
d'une coutume fortement établie, une coutume qui devrait devenir loi.
C'est pourquoi il nous semble que le législateur devrait inclure,
dans les exemptions de l'article 5, les expositions agricoles...
Une voix: Reconnues...
M. Allard: ...reconnues par le ministère de l'Agriculture,
des Pêcheries et de l'Alimentation.
Le Président (M. Dussault): Me Allard, je vous
remercie.
M. le ministre.
M. Biron: Je demanderais à mon collègue, le
député de Shefford, d'intervenir concernant ce
mémoire.
Le Président (M. Dussault): M. le député de
Shefford.
M. Paré: Oui, M. le Président. D'abord, je veux
vous féliciter, parce que c'est vrai que vous jouez un rôle
très important dans ma région, les Cantons de l'Est. C'est vrai
que les expositions agricoles, au Québec, jouent un rôle bien
important parce que, dans plusieurs régions et dans plusieurs
municipalités, c'est l'activité de l'année. On en sait
quelque chose. Effectivement, cela a un impact économique
considérable et toute l'économie en profite.
Vous avez parlé de 36 et 42 tantôt. J'en ai perdu un bout
à ce sujet. Il y a 42 activités et vous représentez 36
associations.
M. Drouin (Gérard): Si vous me le permettez, 36
expositions sont membres de l'Association des administrateurs des expositions
agricoles du Québec Inc. sur 42 expositions agricoles qui seront en
activité en 1984.
M. Paré: Donc, c'est 36 sur 42 que vous représentez
en tant qu'association.
M. Drouin (Gérard): Oui.
M. Paré: Ce sont toutes des expositions agricoles
reconnues par le MAPAQ.
M. Drouin (Gérard): Reconnues, selon la liste
publiée par le ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et
de l'Alimentation.
M. Paré: D'accord. J'ai une question à vous poser.
À une exposition agricole, est-ce que vous voulez que les comptoirs, les
stands d'exposition soient ouverts à tout le monde? Ce matin, entre
autres, les représentants de la Corporation des bijoutiers du
Québec ont demandé qu'on soit limitatif concernant les heures
d'affaires. Est-ce que vous demandez que même les bijoutiers puissent
avoir un kiosque d'exposition aux expositions agricoles ou si vous accepteriez
que les expositions agricoles soient plutôt limitées à
l'artisanat, aux artisans locaux, des choses plutôt exceptionnelles, ou
que ce soit ouvert à l'ensemble des commerçants de la
région? Ils pourraient alors faire une demande pour un kiosque et vendre
leurs produits à des heures habituellement limitées sur la rue
principale ou dans un centre commercial.
Une voix: M. Robert.
M. Robert (Richard): Ce qu'on demande, c'est que ce soit ouvert
aux heures d'ouverture de l'exposition. Voici pourquoi cette permission. En
réalité, si on était inclus dans la liste des exemptions,
cela n'irait pas à l'encontre de la refonte de la loi parce que,
généralement, étant donné qu'on n'a pas un
caractère de permanence durant l'année, ce sont, dans bien des
cas, des marchands locaux qui viennent vendre des produits à ces
emplacements, à ces kiosques. On ne fait pas vraiment concurrence aux
gens de commerce qui sont déjà dans notre région.
Deuxièmement, la plupart des commerces que l'on retrouve dans nos
expositions sont des commerces... Ceux qui y viennent, évidemment, le
font volontairement, mais ceux qui n'y viennent pas et qui ont des commerces
non pas sur place, mais dans notre région, ne viennent pas parce que
cela ne les intéresse pas. Par exemple, on ne verra pas de pharmacie
dans nos expositions. On va voir des vendeurs de meubles locaux, mais on ne
fait pas vraiment concurrence aux gens qui sont déjà "ouverts" ou
pas "ouverts" chez nous. Si vous l'avez remarqué, en 160 ans
d'existence, il n'y a presque pas eu, je pense, sauf lorsqu'il y avait une
rivalité entre deux marchands locaux, de plaintes formulées par
les associations de marchands contre les expositions agricoles reconnues en
vertu de la Loi sur les sociétés d'agriculture, qui date de
plusieurs années.
Nous, ce qu'on n'aime pas, en fait, de l'article 5.1, même si vous
nous dites que nous avons l'ouverture dans 5.1, c'est qu'on n'a pas vraiment
cette ouverture. En effet, lorsque la loi a été
décrétée en 1907, lorsqu'on parlait d'exposition, c'est le
dernier mot du paragraphe 5.1, c'étaient vraiment des expositions
agricoles à cette époque, parce qu'il n'y avait aucun autre type
d'exposition, tandis que, maintenant, on ne se considère nullement
visé par cet article parce qu'on dit à la fin: "...lorsque se
produit un événement spécial." Lorsqu'on existe depuis 100
ans, ce n'est plus un événement spécial; je pense qu'on a
un caractère de permanence au niveau de la répétition de
l'événement qui est à considérer.
Deuxièmement, on parle de festival, mais on n'est pas non plus un
festival. On parle de foire, on n'est pas non plus une
foire. À ce moment, on parle de salon ou d'exposition, mais on ne
voudrait absolument pas être considéré au même titre
qu'un salon de l'habitation qui a lieu dans une ville pendant un an ou deux et
qui cesse ses activités pendant dix ou vingt ans, ou qu'une exposition
de monnaie rare ou, en fin de compte, de ce type d'exposition. On veut vraiment
que nos expositions soient reconnues au même titre que les librairies,
les tabagies, et tout cela. D'ailleurs, on existe depuis beaucoup plus
longtemps que la très grande majorité d'entre elles. On veut
être considéré comme des expositions agricoles vraiment
reconnues par le ministère et on sait qu'il ne peut pas y en avoir plus
ou à peu près le nombre qu'on avait, parce que toutes les
régions sont déjà couvertes. Il n'y en aura pas une
prolifération. On voudrait vraiment avoir un statut particulier au
même titre que les commerces qui sont exemptés en vertu de
l'article 5.1.
On ne voudrait pas qu'à chaque année les 40 expositions
aient à soumettre une demande au ministre pour être
exemptées. Là, évidemment, si on avait à faire
cela, les plus grosses expositions de la province auraient une chance
d'être considérées. Pour les plus petites, ce serait
beaucoup plus ardu parce que le personnel est différent. Tout d'abord,
elles ne sont pas munies du même personnel. Étant donné
l'importance qu'on leur connaît et sachant comment cela est
compliqué de faire accepter des choses, s'il y avait 40 demandes de
faites, on considère que cela serait discrétionnaire, parce qu'il
y a de ces petites expositions qui ont les mêmes buts que les plus
importantes mais qui ont dans leurs régions une importance capitale et,
à ce moment, elles seraient considérées comme des
activités mineures. On se dit qu'on devrait absolument les exempter et
qu'il faudrait qu'elles soient reconnues. Il y a d'abord, le caractère
de permanence de nos expositions et, secundo, non seulement le caractère
de permanence, mais l'importance de notre association, du fait que ce sont des
expositions qui sont reconnues par la Loi sur les sociétés
d'agriculture du ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de
l'Alimentation. Elles sont directement subventionnées par ce
ministère, qui a droit de leur accorder une reconnaissance ou pas. Je
pense aussi que le volet qu'on voulait soulever, c'est qu'on n'entre absolument
pas en concurrence avec des marchands locaux. On ne va donc pas à
l'encontre de l'esprit de la refonte de la loi.
M. Paré: Je comprends très bien votre
préoccupation et je la partage en partie. Je comprends qu'il ne faut pas
compliquer les choses et arriver avec beaucoup de paperasse. Comme on dit,
c'est un amendement ici à la Loi modifiant la Loi sur les heures
d'affaires des établissements commerciaux. On ne veut pas tout changer.
Ce qu'on ne touche pas, c'est que c'est encore là. Cela a
été dit tantôt et c'est toujours vrai. Votre
préoccupation, c'est d'avoir à faire la demande et d'attendre. On
a aussi très conscience que c'est important, ces expositions. Comme je
le disais tantôt, c'est même l'attrait principal au niveau de la
population, et même au niveau touristique de certaines régions,
c'est l'activité de l'année. Il n'est donc pas question que cela
ne fonctionne pas.
Comme c'est juste une demande, pensez-vous vraiment que vous ayez des
problèmes quand il s'agit pour les organisateurs de l'exposition de
faire une demande globale au ministère et non pas une demande par
commerce? À quel point voyez-vous des problèmes
là-dedans?
M. Drouin (Gérard): À mon point de vue,
étant donné que beaucoup de sociétés d'agriculture
et d'expositions sont peu organisées, du côté du
secrétariat, qu'elles ne sont organisées, je dirais, qu'à
50%, avec du bénévolat, avec des gens qui ne reçoivent pas
de salaire, elles vont quelquefois ouvrir un bureau deux semaines avant
l'exposition et vont le fermer la semaine suivante, n'ayant pas de bureau
permanent. Ces gens manquent d'expérience. Quand ils tombent dans des
formules gouvernementales, ils sont perdus. On le voit avec les
problèmes. Je ne sais pas combien de responsables d'exposition me
téléphonent pour me demander comment remplir les formules de
demande de bingo ou de la régie des loteries. C'est extrêmement
compliqué pour ces gens.
On nous dit qu'on pourrait demander qu'une exposition soit
déclarée zone touristique; on pourrait ouvrir nos commerces la
semaine de l'exposition. Si on a 40 ou 45 expositions qui font cette demande,
c'est sûr que cela entraîne encore de la papeterie, un travail de
bureau pour vous comme pour nous, avec tous les problèmes, mais si un
l'oublie et arrive en retard, ce sera la grosse chicane, les problèmes
qui commencent.
Tantôt, quand on demandait si les commerces qui sont sujets
à la loi de fermeture devraient fermer s'il y a une exposition, je dis
que cela est impossible. Si on fait cela, on vient de tuer - et je parle par
expérience: 40 années de travail dans les expositions - 50% et
peut-être 75% des expositions du Québec. Elles vont
disparaître, et en l'espace de deux ans. Qu'on fasse cela et je vous dis
qu'en deux ans ou moins, et je pense être assez libéral quand je
le dis - je ne parle pas politiquement - vous aurez tué 50% de vos
expositions agricoles.
Il y a ceci qui se passe: vous savez que l'homme, la femme et tout le
monde veut venir à l'exposition. L'homme est intéressé
à voir la machine agricole, les animaux et, pendant qu'il va là,
la femme va voir les
commerces, elle va magasiner; elle aime cela, c'est dans son
tempérament. Durant ce temps, l'homme va voir les machines et, ensuite,
ils se rencontrent. Si l'homme veut amener la femme voir les animaux et les
tracteurs et que cela ne l'intéresse pas, elle ne voudra pas y aller et
elle va dire: Toi non plus, tu n'iras pas. Tout de suite, vous allez voir
baisser nos barrières.
La location de ces kiosques représente 25% ou 30% de nos revenus.
Si on baisse nos revenus en nous enlevant ces commerces... Ces gens, si leur
commerce ne peut pas être ouvert, d'abord, ils vont être sujets
à la loi et nous aussi; nous, on ne voudra pas les voir et eux ne
voudront pas venir. Tout de suite, on vient de couper nos revenus. On coupe
aussi l'intérêt de nos expositions et je vous garantis, si cette
loi est appliquée, que dans deux ans vous aurez perdu 50% de vos
expositions. Je connais la position financière de toutes les expositions
du Québec. Je peux vous dire que tous les ans il y en a - et vous le
savez, d'ailleurs - qui viennent chercher une subvention pour boucher un trou
ici et là. Je pense qu'il faut leur donner toute la chance voulue de
pouvoir résister et de pouvoir vivre; elles n'en ont déjà
pas trop en ce moment.
M. Biron: Une clarification, parce que ce que vous venez de dire
m'a fait frissonner un peu. Vous avez dit: Si cette loi est appliquée,
dans deux ans, les expositions ferment. La loi ne change rien à
l'ancienne loi. Les expositions fonctionnent depuis 100 ans, on a l'ancienne
loi depuis 15 ans et les expositions fonctionnent quand même.
M. Drouin (Gérard): Je comprends...
M. Biron: Faites attention parce que je crois que vos paroles ont
dépassé votre pensée ou vous n'avez pas lu le projet de
loi. On ne change absolument rien à l'ancienne loi. Vous continuez
à tout simplement demander la même permission. Vous avez dit: Si
cette loi est adoptée, on ferme nos expositions dans deux ans.
M. Drouin (Gérard): M. Biron, il faudrait...
M. Biron: Je veux juste vous faire comprendre que la loi qui est
devant nous aujourd'hui ne change absolument rien, pas une virgule, à ce
qu'était l'ancienne loi. Ne me dites pas que cela ferme dans deux
ans.
M. Drouin (Gérard): Est-ce que la nouvelle loi, M. Biron,
va permettre la même tolérance qu'on a eue? C'est parce qu'on vit
avec une tolérance comme on est là, on ne vit pas selon une loi.
On opère avec des tolérances.
M. Biron: L'ancienne loi disait que vous deviez demander une
permission et elle était accordée partout où les
expositions agricoles demandaient des permissions. Vous l'aviez, c'était
automatique. La nouvelle loi dit exactement la même chose. C'est pour
cela que je veux être très clair: cette loi n'est pas faite pour
fermer les expositions agricoles, loin de là, cela n'a rien
changé pour vous.
M. Drouin (Gérard): Je ne dis pas que, si la loi est
appliquée telle qu'elle est là... Si la tolérance reste
comme elle était, cela ne nous dérange pas du tout. Qu'on
continue avec la loi telle quelle, qu'on nous tolère comme on le faisait
avant, si vous voulez écrire et dire qu'on va avoir des
tolérances, mais ce n'est pas cela que les gens pensent dans le champ.
Les gens sont inquiets parce qu'ils disent: Si on fait appliquer la loi telle
qu'elle est, et elle n'est pas neuve, elle n'a pas été faite, ce
n'est pas la nouvelle loi, elle était comme cela, mais si on la fait
appliquer, - vous savez que c'est assez difficile de vivre continuellement avec
des tolérances - est-ce que c'est cette année qu'on va nous
fermer? Est-ce que c'est cette année qu'on va venir dire à tous
nos commerces qu'ils doivent fermer leurs portes? Vivre avec des
tolérances, c'est très agaçant.
M. Biron: Ce n'est pas vrai, ce que vous venez de dire. Vous
savez bien que vous allez demander la permission et, le lendemain, vous allez
l'avoir. Alors, quand vous dites: Allez-vous fermer nos portes cette
année, ce n'est pas vrai ce que vous dites, vous le savez.
M. Drouin (Gérard): M. Biron, vous n'avez jamais - vous
avez vous-même fait partie d'une commission d'exposition demandé
de tolérances pour que les portes restent ouvertes. Je n'en ai jamais
demandé et jamais une exposition du Québec n'en a demandé.
On a toujours vécu avec des tolérances. Si on amende la loi, on
aimerait qu'elle soit amendée afin qu'on sache un peu, d'une
année à l'autre, où on s'en va, ce qu'elle nous permet et
ce qu'elle ne nous permet pas. Si elle est pour être appliquée
telle qu'elle est, telle qu'on la voit là ou telle qu'elle était,
je peux vous dire que cela va être dur pour les expositions agricoles.
(17 heures)
M. Allard: Une disposition disait: Elle ne vise pas non plus les
établissements situés dans les endroits déclarés
touristiques par règlement du gouvernement, pour des fins... et ainsi de
suite. Seulement, jamais une exposition agricole n'a demandé un
permis.
M. Biron: Oui, il y en a plusieurs. Peut-être que pour les
expositions ils étaient
au courant de la loi, ils demandaient tout simplement la permission,
c'était automatique et il n'y avait jamais de chicane là-dessus.
C'est ce que je veux vous dire, il n'y a absolument rien de changé.
C'est pour cela que je suis surpris d'entendre: Vous voulez nous faire fermer.
On n'a absolument rien changé. La seule chose, c'est que c'est sûr
que les amendes ont augmenté, ce n'est pas le gouvernement qui a
demandé d'augmenter les amendes, ce sont les commerçants qui
exposent chez vous. Il y a peut-être des questions que vous devriez vous
poser.
Ce matin, les bijoutiers sont venus nous voir en nous disant: Faites
attention quand vous émettez des permis de zones touristiques pour ne
pas faire fermer des bijouteries qui fonctionnent à temps plein. On
s'est demandé même, avec le député de Hull, si on ne
devait pas passer par les municipalités au moins pour que dans la
région où il y a une exposition la municipalité nous dise
oui ou non. Il y a peut-être lieu d'organiser une mécanique
très facile par l'entremise de la fédération des
expositions. Vous semblez assez bien structurés pour que vous fassiez
une demande, au début de l'année, pour vos 42 expositions. Et,
automatiquement, cela marcherait ou quelque chose comme cela. Il y a moyen de
le faire facilement. Mais ce que l'on ne veut pas, c'est que tout le monde se
serve du volet exposition agricole pour faire fermer d'autres commerces qui
fonctionnent à longueur d'année. Je ne pense pas que les gens du
Conseil québécois du commerce de détail seraient bien
heureux si on disait: On fait fermer les autres commerces parce qu'on fait une
exposition. C'est juste dans ce sens-là, pour que tout le monde soit sur
le même pied. Qu'on trouve la mécanique pour vous rendre service,
je suis prêt à cela en disant: Écrivez-moi une lettre au
début de l'année et cela va être accepté
automatiquement pour vos 42 expositions. Cela va se régler très
rapidement. Bien sûr qu'on va communiquer avec vos municipalités,
on va s'assurer que dans la municipalité il n'y a personne qui
chiâle au point de vue municipal. Je pense que ce sera juste.
Le Président (M. Desbiens): Cela va. Pas d'autre
intervention. M. le député de Laporte.
M. Bourbeau: Merci, M. le Président. M. Drouin, j'aurais
quelques questions à vous poser au sujet des expositions que vous tenez
à chaque année. Il y en a, si je comprends bien, une quarantaine
par année, n'est-ce pas?
M. Drouin (Gérard): Oui. Cet été, il va y
avoir 42 expositions agricoles.
M. Bourbeau: Quarante-deux expositions. En général,
ce sont toujours les mômes expositions qui ont lieu, d'une année
à l'autre, à peu près aux mêmes endroits.
M. Drouin (Gérard): Oui. Cette année, on va
reconnaître deux ou trois expositions nouvelles, qui sont des expositions
de comté. Mais, en général, ce sont les mêmes
expositions. La preuve, c'est qu'on a des expositions qui ont 150 ans.
C'est...
M. Bourbeau: La moyenne d'âge, si je peux dire, de vos
expositions, c'est quoi?
M. Drouin (Gérard): Plus vieille que moi et je ne suis pas
jeune!
M. Bourbeau: Bon, bon. Comment cela se passe exactement? On n'est
pas tous des experts dans les expositions agricoles. Quand vous décidez
de tenir l'exposition annuelle à Saint-Joachim, par exemple, est-ce
qu'automatiquement vous demandez une exclusion au ministre, en vertu de la loi
actuelle?
M. Drouin (Gérard): Bien, à ma connaissance, je
n'ai jamais demandé d'exemption. Je ne sais s'il y a de mes
confrères qui en ont déjà demandé concernant cet
article. C'est sûr qu'on a toujours vécu avec des
tolérances.
M. Bourbeau: Mais quand il y a eu des demandes - parce qu'il y en
a eu, des demandes - est-ce qu'il y a déjà eu des refus de la
part du ministère?
M. Drouin (Gérard): Je ne peux pas le dire, je n'ai jamais
eu connaissance d'une demande.
M. Bourbeau: II n'y a jamais eu de refus?
M. Drouin (Gérard): Non.
M. Bourbeau: Jamais eu de refus. Donc, cela a toujours bien
marché. Vous l'avez demandée quelquefois, la plupart du temps
vous ne l'avez pas demandée, le ministère savait qu'il y en avait
et il tolérait. Il n'y a jamais eu de refus. C'est à peu
près cela, la situation?
M. Drouin (Gérard): Je ne peux pas dire que j'ai eu des
refus parce que je n'ai jamais vu de demande. Mais je prends la parole de M.
Biron qui dit qu'il y en a eu. Mais je sais que, il y a trois ou quatre ans,
par exemple, à un moment donné, des inspecteurs ont
commencé à faire des visites et à avertir nos
commerçants. Cela a créé une espèce de panique.
C'est là qu'ont commencé les problèmes. On sait que...
M. Bourbeau: Alors, qu'est-ce qu'ils disaient...
M. Drouin (Gérard): ...l'on agissait, ni plus ni moins, en
dehors de la loi, qu'on fonctionnait avec des tolérances. Mais, si cela
fait depuis 1911 qu'on fonctionne avec des tolérances, des fois on
s'imagine que c'est devenu loi et ce n'est pas toujours vrai.
M. Bourbeau: Vous aviez prescrit, en vertu de la prescription
trentenaire, la tolérance. Écoutez, M. Drouin, nous avons pris
connaissance de votre mémoire avec beaucoup d'intérêt. Je
dois avouer que c'est très intéressant à lire. Cela nous
replonge un peu dans l'histoire du Québec. Comme vous le dites, votre
association, je pense, a quelque 160 ans, ou quelqu'un a lancé le
chiffre de 160 ans tout à l'heure. Évidemment, cela retourne pas
mal en arrière. Les paragraphes où vous traitez de l'ancienne loi
sur les sociétés d'agriculture, je trouve cela très
intéressant. Quand on parle des moyens qui vous étaient
donnés pour atteindre ces objectifs, la propagation des animaux de belle
race, ce sont des choses qui sont intéressantes. Quand on parle des
ustensiles...
M. Drouin (Gérard): C'est de l'histoire.
M. Bourbeau: ...d'agriculture, ce sont des choses qui font un peu
sourire quand on n'est pas très habitué à ce langage.
Évidemment, à la lecture de votre mémoire, on se convainc
très rapidement de l'importance non seulement sur le plan commercial,
mais sur le plan culturel, si je peux dire, du maintien de ces expositions.
C'est une tradition, comme dirait mon collègue.
Ce qui m'étonne à la lecture de votre mémoire,
c'est précisément ce système de tolérance qui
existe depuis toujours. Ce que je retiens de tout cela, c'est que dans le
projet de loi qui est déposé il y a un article qui exclut de la
loi certains établissements commerciaux. On en a fait une nomenclature
et on termine, au 16 , en disant que peut être également exclu de
la loi "tout autre établissement commercial déterminé par
règlement du gouvernement." Donc, le gouvernement s'est
réservé le pouvoir arbitraire d'ajouter à la liste en tout
temps, sans avoir à revenir devant l'Assemblée nationale pour
modifier la loi.
Un peu plus loin, on dit que le ministre non, ce n'est plus le
gouvernement maintenant, c'est le ministre - peut, lui aussi, autoriser des
établissements commerciaux à exercer leurs activités
même si, normalement, elles seraient interdites par la loi lorsqu'il
s'agit d'une région touristique ou près des limites territoriales
ou lorsque se produit un événement spécial tel un
festival, une foire, un salon ou une exposition. Vous avez justement bien
stipulé tantôt et établi, je pense, qu'une exposition
agricole n'est pas un événement spécial dans le sens de la
loi puisque, quand on dit "spécial", c'est quelque chose qui a lieu une
fois et qui n'a pas lieu après. Une foire peut avoir lieu une
année et ne pas avoir lieu l'année suivante. Elle peut avoir lieu
à un autre endroit. Ce sont toujours des événements
ponctuels, mais ils n'ont pas ce caractère de permanence qu'ont des
expositions comme les vôtres, puisque vous dites qu'elles existent depuis
un nombre d'années supérieur à votre âge à
vous.
Je comprends très bien, à ce moment-là, votre
préoccupation, à savoir que peut-être le ministre n'aura
même pas le pouvoir de vous exclure puisque vous n'êtes pas un
événement spécial. Des concurrents pourraient attaquer la
décision du ministre par injonction, par exemple, et dire que le
ministre n'a même pas le pouvoir de vous exclure puisque votre exposition
n'est pas un événement spécial. Je comprends très
bien vos préoccupations à ce sujet. Donc, il y a deux
séries de pouvoirs arbitraires dans le projet de loi, le pouvoir
arbitraire du ministre qui peut décider, un jour, qu'il vous donne
l'autorisation et, un autre jour, qu'il ne vous la donne pas - même si le
ministre prétend qu'il la donne toujours - et il y a le pouvoir du
gouvernement de décider que vous êtes parmi les exclusions
permanentes. Je pense que c'est ainsi qu'on peut résumer un peu la
situation.
Quant à nous, je dois avouer que nous nous méfions
toujours des pouvoirs arbitraires et je comprends très bien que vous ne
vouliez pas toujours revenir quêter devant le ministre, faire la
courbette et demander: Est-ce qu'on pourrait, s'il vous plaît, avoir une
autorisation cette fois-ci? On a aujourd'hui un ministre qui est très
tolérant. Il l'a dit lui-même, d'ailleurs, et on lui fait
confiance, mais avec les remaniements ministériels annoncés, on
ne sait pas, on pourrait en avoir un la prochaine fois ou la semaine prochaine
qui soit moins tolérant, qui va peut-être dire: Vous, je ne vous
aime pas la face. De quelle couleur êtes-vous? Je vais en donner à
M. Untel et je n'en donnerai pas à M. Untel. Enfin! Quand on est devant
l'arbitraire, c'est de l'arbitraire et je comprends que des gens qui ont un
commerce comme le vôtre, dont le chiffre d'affaires est de 8 000 000 000
$ par année - si c'est bien le chiffre que j'ai lu dans le rapport - ne
veulent pas être à la merci de l'arbitraire.
Je trouve cela un peu malsain, cette situation. Je vous le dis
franchement, M. le ministre. Probablement que vous-même, vous devez la
trouver un peu malsaine aussi. Je n'aimerais pas être dans la position de
quelqu'un qui a un pouvoir arbitraire et qui
l'exerce toujours de façon automatique, comme dit le ministre,
parce que là, c'est automatique. On se demande pourquoi le conserver,
pourquoi conserver un pouvoir automatique, pas un pouvoir, mais une
discrétion automatique. Si vous me disiez qu'on veut garder le pouvoir
arbitraire parce que, parfois, on va refuser; on fera une analyse exhaustive
des demandes et parfois, on les refusera, parfois, on les acceptera, selon
certains critères. Mais non, ce n'est pas cela, c'est automatique. Vous
le dites vous-même: Envoyez-nous une lettre au début de
l'année et on va vous exclure d'avance pour toute l'année. C'est
une folie, c'est un jeu d'enfant. On nage dans le ridicule. Si c'est
automatique, et si vous êtes prêt à donner une lettre au
début de l'année, poussons la logique jusqu'au bout et incluons
les expositions agricoles dans la liste des organismes qui sont exclus en
permanence. Il me semble que c'est là de la bonne logique. Quant au
reste, on condamne des gens à vivre toujours avec une épée
de Damoclès au-dessus de la tête et à se demander si, un
jour, peut-être, on sera devant un ministre qui sera moins complaisant,
qui va s'être levé du mauvais côté le matin et qui
dira: Aujourd'hui, vous autres, je ne vous exclus pas, je vous garde dans le
cadre de la loi, vous n'avez pas l'autorisation de tenir votre exposition.
Personnellement, je dois avouer que je suis assez stupéfait de
voir cette situation. Je n'étais pas tellement au courant avant, mais je
me suis renseigné un peu en entendant la lecture du mémoire et
surtout les déclarations du ministre, et je ne vois vraiment pas
pourquoi on conserverait une situation semblable où, à toutes
fins utiles, il n'y a plus de décision ministérielle, elle est
automatique. Si elle est automatique, soyons donc logiques avec
nous-mêmes, mettons-le dans la loi et n'en parlons plus. Il me semble que
c'est la seule solution que je verrais.
Si j'avais à ajouter autre chose, la seule restriction que je
pourrais faire pour protéger un peu la loi, c'est de baliser un peu la
définition de ce que peut être une exposition agricole. Il ne
faudrait quand même pas que l'exposition agricole, à la suite
d'une exclusion permanente, devienne une exposition agricole permanente, douze
mois par année, et qu'on recommence à en développer
d'autres. Il faudrait peut-être que ce soit limité au temps que
dure normalement une exposition agricole. Sous réserve de cette
restriction, quant à nous, je pense qu'il serait très logique et
normal d'inclure les expositions agricoles dans la liste des
établissements commerciaux auxquels on permet de tenir leurs expositions
de façon permanente sans avoir besoin de recourir à des
exceptions.
M. Drouin (Gérard): Si vous permettez, brièvement,
c'est pour ça qu'on voudrait faire ajouter au mémoire les
expositions agricoles reconnues. Si elles sont reconnues, elles ont
été acceptées par le ministère de
l'Agriculture.
M. Fortier: Quels sont les critères du ministère de
l'Agriculture? Est-ce qu'il y a des expositions qui durent une certaine
période de temps?
M. Drouin (Gérard): C'est basé sur le nombre et le
montant des prix payés pour reconnaître une exposition.
Une voix: La durée...
M. Drouin (Gérard): En fait, on ne peut pas avoir deux
expositions agricoles reconnues par le ministère dans le même
comté, par exemple. On peut avoir seulement une régionale par
division administrative et une provinciale. Ce sont des critères du
ministère.
Le Président (M. Desbiens): M. le ministre.
M. Biron: Je pense qu'il faut éviter d'y aller surtout par
pièces détachées. Je comprends que mon collègue, le
député de Laporte, suggère à un ou à l'autre
comme ça, mais il ne faudrait pas qu'il se chicane non plus ce matin
avec notre collègue, le député d'Outremont, qui faisait la
suggestion, vis-à-vis des expositions, qu'on passe par les
municipalités où on a un corps politique élu qui devrait
nous dire si c'est correct ou non. Si on donne un permis à une
exposition agricole, d'accord, mais peut-être que, dans la même
municipalité, il y a des gens qui sont là en permanence et que
ça ne fait pas leur affaire, car ils y exploitent un commerce 52
semaines par année.
Dans la discussion de ce matin, on s'est demandé comment on
pouvait faire pour baliser les demandes qui viendront des expositions. Dans ce
sens-là, oui, il y a beaucoup d'ouverture. Les gens qui animent des
expositions agricoles seront couverts pour pouvoir agir comme vous agissiez
autrefois, sauf qu'il faut respecter les commerces qui sont là
présentement, qui fonctionnent 52 semaines par année dans une
municipalité donnée et qui pourraient voir leur
rentabilité drôlement perturbée si on y allait à
gauche et à droite si on lançait n'importe quelle exposition
agricole dans le décor, ce qui serait possible. Les gens du commerce de
détail n'appuieront certainement pas un gouvernement qui irait à
l'encontre de leurs recommandations et de leur mémoire.
Dans ce sens-là, je dis qu'on est sympathique à ce que
vous nous demandez. Nous essaierons de le baliser le mieux possible pour faire
le moins de paperasse, le
moins de bureaucratie possible, mais pour faire en sorte aussi... Je
pense que le député de Laporte n'a peut-être mal
interprété tout à l'heure lorsque j'ai dit: Au
début de l'année, faites la demande et on vous donnera le permis.
Bien sûr, on va vérifier avec la municipalité et on va vous
donner le permis, non pas pour opérer 52 semaines par année, mais
pour opérer le temps que dure l'exposition agricole, trois jours, cinq
jours, une semaine, ça dépend du genre d'exposition. J'ai
aimé la suggestion du député d'Outremont qui disait ce
matin: Une fois que les gens de la municipalité nous diront: Ça
fait notre affaire.
Je pense qu'il y a certaines balises à faire; je ne peux pas
baliser cela tout de suite aujourd'hui, mais je peux répondre en gros
à votre préoccupation qui dit: On ne veut pas trop de
bureaucratie et on veut que ça marche rondement.
Le Président (M. Desbiens): M. Robert. (17 h 15)
M. Robert: Je voudrais dire là-dessus, M. le ministre, que
je ne suis pas tellement en accord avec ce que vous venez de soulever. Je vais
vous expliquer mon point de vue. Je suis bien d'accord que les conseils de
ville se prononcent sur la tenue des expositions dans leur secteur, mais il n'y
a pas vraiment de problème, parce que, déjà, la plupart
des expositions se tiennent dans des locaux qui appartiennent aux
municipalités, soit des arénas, des centres de loisirs, etc.
Alors, la municipalité a toujours un droit de regard là-dessus,
tandis que dans le cas des expositions agricoles, dans plusieurs cas, le
nôtre, par exemple, à Saint-Hyacinthe, on déborde
carrément de la municipalité. On regroupe six comtés. Si
j'ai bien compris votre intervention, vous demanderiez au conseil de ville de
Saint-Hyacinthe, s'il est d'accord, quand on touche des villes comme Sorel et
qu'on va dans six comtés.
M. Biron: La seule chose que je veux vous dire, c'est que c'est
très fortement majoritaire que des commerçants du Québec -
ce n'est pas ma faute, ce sont les commerçants du Québec - nous
disent: Resserrez la loi des heures d'affaires et empêchez des "come by
night", un bon jour, de faire fermer des commerces qui sont ouverts
régulièrement. Dans le fond, c'est beaucoup plus aux groupements
québécois de commerce de détail, aux chambres de commerce
du Québec ou à d'autres associations de gens d'affaires que vous
devriez vous adresser si je vous disais non, mais je vous dis oui, au
départ. Je trouve que votre demande est sympathique et on va trouver le
moyen d'y répondre, mais tout en respectant le voeu fortement
majoritaire des gens d'affaires du Québec. Il faut bien que vous
compreniez cela. Ce n'est pas le gouvernement qui décide de faire cela.
Dans le fond, tout ce qu'on fait aujourd'hui et ce qu'on va faire au cours des
prochains jours, c'est d'entendre les principaux intervenants. Dans ce
sens-là, les principaux intervenants, ce sont les commerçants du
Québec qui nous disent: Vous refermez la loi des heures d'affaires et
vous augmentez les amendes. Il faut quand même respecter ces
gens-là. Dans ce sens-là, on va discuter avec eux pour fixer les
modalités pour que vos 42 expositions agricoles - je pense qu'il n'y a
pas de problème jusqu'à maintenant - soient acceptées par
les gens d'affaires. Ce qu'ils ne voudraient pas voir, c'est une centaine
d'autres expositions naître au Québec; cela nuirait fortement aux
commerçants. Je pense qu'il faut prendre les dispositions
nécessaires pour répondre à leur demande et, en même
temps, répondre facilement à votre demande sans vous forcer
à faire beaucoup de paperasse. Je ne suis pas reconnu comme un amateur
de paperasse.
Le Président (M. Desbiens): M. le député
d'Outremont.
M. Fortier: Le ministre commence à lever le voile. Tout
à l'heure, il disait qu'il donnerait l'autorisation, automatiquement,
d'envoyer la lettre au mois de janvier et que, le 1er février, vous
auriez la réponse. Il semblerait que ce n'est pas tout à fait
automatique. Il y a une question que j'aimerais poser: On est ici pour voir le
fond du baril, il semblerait que le ministre a de l'information que nous
n'avons pas.
Une voix: ...
M. Fortier: Oui, mais s'il en a, qu'il le dise, parce que cela
fait un an qu'il joue avec les fonds publics pour savoir quel est le
problème réel. Il faudrait bien...
M. Biron: J'ai lu les mémoires.
M. Fortier: ...qu'il nous livre toute sa compétence et sa
connaissance, s'il en a une, sur ce sujet.
La question que j'aimerais poser, c'est: Est-ce qu'à votre
connaissance - on parle spécifiquement des expositions agricoles - il y
a eu des représentations de faites au ministre de l'Industrie, du
Commerce et du Tourisme parce que certains commerçants dans des villes
et des villages se sentaient brimés par la tenue d'une exposition
agricole près d'un village ou d'une ville? C'est le fond du
problème. Si le ministre veut soulever le problème, c'est cela.
Ce matin, il essayait de dire qu'on se contredisait, mon collègue et
moi-même, de ce côté-ci. Ce matin, lorsque le mémoire
de la Corporation des bijoutiers du Québec a été
présenté et
qu'on faisait référence au pouvoir arbitraire du ministre,
j'ai suggéré que, dans les cas où il y avait un pouvoir
discrétionnaire, pour limiter ce pouvoir discrétionnaire, la
recommandation vienne d'une municipalité. Il faut quand même
qu'une certaine recommandation vienne d'un corps organisé, mais on ne
parle pas d'une exposition qui viendrait de temps à autre. Comme vous
l'avez dit, on parle d'expositions agricoles qui existent depuis de nombreuses
années et qui reviennent chaque année. J'aimerais savoir - c'est
la question que je vous ai posée - si, à votre connaissance, dans
le cas des expositions agricoles qui existent et dont vous avez fait
état tout à l'heure, il y a eu des plaintes assez nombreuses - je
ne parle pas d'une plainte de temps à autre, mais de plaintes assez
nombreuses - de commerçants de villes ou villages qui se situaient tout
près de votre exposition agricole.
M. Drouin (Gérard): Je peux répondre.
Personnellement, non. On a vécu une expérience il y a cinq ou six
ans où un inspecteur a talonné trois ou quatre expositions dans
notre région. Après une courte enquête, la plainte serait
venue d'un commerçant. Ce serait lui qui se serait plaint, c'est ce
qu'on a su. Étant donné que la majorité des expositions
essaie de se limiter aux commerces ou donne priorité aux commerces
locaux... Si un gars de Saint-Hyacinthe m'appelle pour avoir un espace ou un
kiosque à l'exposition de Victoriaville, la réponse que je lui
fais, c'est: Je verrai s'il m'en reste; je donne la priorité aux gens de
la ville de Victoriaville. S'il me reste de la place; Dieu sait que j'en ai
refusé à peu près 50. Les expositions sont un peu toutes
dans ce cas. On a une priorité. Il peut rester un gars qui est jaloux
parce qu'il a un concurrent qui est à l'exposition et il va faire une
plainte, mais on peut dire que ce n'est pas une pratique courante.
Personnellement, je n'ai pas eu connaissance qu'il y ait une plainte de
formulée réellement solide parce que les commerces étaient
ouverts durant l'exposition.
M. Allard: Si vous me permettez là-dessus, c'est qu'on
assiste souvent au phénomène contraire. Lorsqu'une
nouveauté, par exemple, sort à l'occasion d'une exposition, vous
voyez facilement les autres commerçants qui n'étaient pas
exposants profiter des retombées de cela dans les semaines qui viennent.
C'est plutôt dans ce sens.
Le Président (M. Desbiens): Oui, M. Drouin.
M. Drouin (Gérard): Je vais finir. J'ai toujours craint,
j'ai toujours eu peur de ce qui reste discrétionnaire. Politiquement, on
dit, par exemple, que les lois sont là, les écrits restent, un
politicien passe. L'un change le lendemain et, si l'autre qui le remplace n'est
pas de cette idée, on se ramasse encore avec le même
problème. C'est pour cela que j'ai toujours pensé que dans une
loi, si on règle le problème, à mon avis, c'est
l'idéal. Un gars de l'exposition m'appelle: Qu'est-ce qu'on va faire
avec nos commerces? Je réponds: Attends, on est en train d'essayer
d'éclaircir cela. Cela inquiète les gars. Ils se demandent cela.
Les gars vont se demander: Est-ce que je vais être obligé de faire
la demande? D'après l'article tel qu'il était
rédigé, c'était presque le commerçant qui faisait
la demande.
M. Biron nous dit: On va presque pouvoir le faire en bloc pour
nos expositions. Cela veut dire que par la fédération, quand on a
notre assemblée au printemps, on peut passer une résolution et on
demande que nos expositions soient exemptées. Là, on va faire
encore une petite enquête sur le plan local. Si par hasard il y a un
échevin dans ma municipalité qui n'aime pas ma face, et Dieu sait
qu'il y en a parce que ce n'est pas tout le monde qui l'aime, s'il y en a un
qui ne l'aime pas, il va embarquer contre nous autres et il va dire:
Victoriaville, cette année, non. Les heures d'ouverture, il faut que ce
soit respecté. On va se ramasser encore avec la même chose.
Le Président (M Desbiens): M. le ministre.
M. Biron: M. Drouin, si vous dites: Moi, je n'aime pas le
discrétionnaire, imaginez-vous que les commerçants du
Québec, qui sont plusieurs milliers, n'aiment pas le
discrétionnaire non plus, laisser cela dans les mains de quelqu'un qui
peut monter une exposition agricole le lendemain matin. C'est pour cela que
c'est quand même délicat. Si les commerçants me disaient:
Tu ouvres, j'ouvrirais. Mais ils me disent: Tu n'ouvres pas, tu fermes. Vous,
vous dites: Nous autres, on veut ouvrir. Vous allez dans le sens contraire de
ce que les commerçants du Québec ont fait comme demande.
Lisez les mémoires. La Chambre de commerce du Québec a dit cela,
et beaucoup de gens. Dans ce sens, je vous dis qu'on va trouver la
mécanique nécessaire pour répondre à vos demandes
à condition, bien sûr, que vous en fassiez la demande.
Peut-être comme fédération. Qu'on vérifie avec les
municipalités et que ce soit accepté par ceux et celles qui,
chaque jour, chaque semaine, vivent du commerce de détail.
M. Fortier: On dirait que le ministre n'a pas tellement confiance
en son collègue de l'Agriculture, des Pêcheries et de
l'Alimentation. Ces expositions sont reconnues par le ministère.
M. Drouin (Gérard): C'est cela que je dis. Quand on parle
d'exposition en agriculture, on dit exposition reconnue. C'est justement pour
cela qu'on veut avoir le mot "reconnu" pour ne pas que n'importe qui
décide de faire une exposition comme il s'en est fait...
M. Biron: M. Drouin, ce que je veux vous dire c'est ceci. Si les
gens du commerce de détail me disent: II n'y a pas de problème,
tu l'acceptes, je vais l'accepter. Mais, jusqu'à maintenant, ils m'ont
dit: Tu fais attention pour ne pas donner des permis à gauche et
à droite. Alors, on respecte ce que la très grande
majorité des gens du commerce de détail nous dit. Je suis
prêt à vous aider malgré tout cela. Il faut quand
même que je respecte les gens que je représente, dans le fond, au
gouvernement.
Le Président (M. Desbiens): M. Robert.
M. Robert: Je comprends que ces gens disent cela, c'est la
position la plus facile pour eux. Si j'étais à leur place, je
dirais: Fermez partout. Ce n'est pas compliqué. L'avantage de tout cela,
c'est de ne voir aucun commerce fonctionnant en dehors des heures. Par contre,
je regarde l'article de la loi et, où on a l'air bête
là-dedans, c'est que les expositions... On dit: Le ministre peut
autoriser les établissements commerciaux, en tout cas... Ce n'est pas
nous que cela concerne. On est obligé de demander que les
établissements commerciaux soient considérés comme zone
touristique par chez nous.
M. Biron: Écoutez, voulez-vous, on ne compliquera pas ce
qui n'est pas compliqué. Il y avait un député qui avait
l'habitude de dire: Pourquoi simplifier quand c'est si simple de compliquer? On
ne compliquera pas ce qui n'est pas compliqué. C'est simple.
L'exposition demande le permis pour être reconnue ou la
municipalité demande le permis et là, je vous le dis, à la
suite de cette discussion, je vais regarder si la fédération ne
peut pas demander le permis pour les 42 expositions, quitte à ce que
nous communiquions avec les municipalités pour ne pas vous faire trop
d'affaires compliquées. Je pense que là, c'est passablement
simple. On va essayer de faire cela simple, mais en même temps, de
répondre à la demande fortement majoritaire - et très
fortement majoritaire - des commerçants du Québec. On va entendre
encore d'autres commerçants si vous voulez rester ce soir, jeudi et
vendredi. Vous allez voir. On va entendre les maîtres-fourreurs tout de
suite après vous. Ils ne nous diront pas: Tu ouvres tout le temps. Ils
vont dire: Fais attention, parce que nous avons investi de l'argent dans nos
commerces. Dans ce sens, il faut être prudent dans les permissions qu'on
va donner en dehors de la loi.
M. Robert: M. le ministre, en passant par les
municipalités, je ne suis pas certain que cela simplifie. Ce n'est pas
une chose très simple, comme vous le dites.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Laporte.
M. Bourbeau: Oui, seulement quelques mots. Je suis un peu
étonné d'entendre la façon de parler du ministre. Il dit:
J'écoute les gens du commerce de détail qui me disent: Tu fermes
ou tu resserres. Moi, je ferme, moi, je resserre. Je ne sais pas si le ministre
est ici seulement pour représenter les gens du commerce au
détail. Peut-être qu'on pourrait se demander ce que veulent les
consommateurs aussi. Je ne sais pas si cela préoccupe le ministre.
Peut-être que non, mais il n'y a pas seulement un groupe dans la
société qui devrait influencer le ministre. Je pense que
l'ensemble de la société devrait le faire et je pense qu'il y a
plus de consommateurs dans la société qu'il n'y a de
commerçants au détail. Je reviens encore à ce que je
disais tout à l'heure. On a un ministre actuellement qui donne des
assurances pour lui, évidemment, pas pour le gouvernement, qu'il va
accorder des exemptions en série. Par contre, on aura peut-être un
autre ministre. Ce sera peut-être le député de
Châteauguay, la semaine prochaine. On nous annonce un remaniement
ministériel. Ce sera peut-être un autre et peut-être que
lui, il ne voudra pas. Cela devient encore - je l'ai dit tantôt
l'arbitraire érigé en système. Je reviens à cela.
Je pense que le ministre devrait tenter de trouver une façon
d'empêcher ces gens de venir régulièrement quémander
au gouvernement. Je trouve que ce n'est pas sain. Quant à moi,
j'aimerais bien trouver une façon d'arrêter de parader
continuellement devant le gouvernement chaque année pour obtenir des
faveurs et des permissions à gauche et à droite. Il me semble que
ce serait bien préférable.
M. Biron: M. le Président, là-dessus, je vais
essayer de simplifier le plus possible, parce que je ne veux pas compliquer. Je
l'ai dit à plusieurs reprises et les gens me connaissent assez pour
cela. Deuxièmement, les consommateurs sont aussi des hommes et des
femmes qui travaillent le dimanche, en dehors des heures
régulières, et ils veulent avoir des heures normales de loisir.
Il ne s'agit pas seulement de donner des permissions chez nous. C'est aussi
l'impact sur tous les autres à l'extérieur de l'exposition
même, mais qui vivent dans la ville ou la région et qui vont
possiblement être forcés d'ouvrir le dimanche, ces
dimanches-là.
Dans le fond, ce n'est pas seulement un petit problème qu'on a
à régler. C'est pour cette raison, d'ailleurs, qu'on tient une
commission parlementaire, pour avoir une vision générale et
globale des différents intervenants, aussi bien les consommateurs, les
travailleurs et les travailleuses que les représentants d'expositions
agricoles ou les commerçants. À la fin de la commission
parlementaire, on essaiera de prendre les meilleures décisions possible.
Dans votre cas, en particulier, je pense que je peux répondre
déjà que votre demande est acceptée en principe. Il s'agit
d'y mettre des cadres et des modalités pour respecter aussi les autres
intervenants.
Une voix: Merci.
Le Président (M. Desbiens): Pas d'autre intervention? Je
vous remercie de votre participation.
J'invite maintenant les Maîtres-fourreurs associés du
Québec Inc. à s'approcher, s'il vous plaît. S'agit-il de M.
Georges Pouliot?
Maîtres-fourreurs associés du
Québec Inc.
M. Desjardins (Charles): Non. Charles Desjardins. M. Pouliot ne
pouvait pas se présenter.
Le Président (M. Desbiens): M. Desjardins? D'accord. Et
Mme Nicole Du Mouchel?
Mme Du Mouchel (Nicole): C'est cela. M. Desjardins remplace M.
Pouliot qui est retenu à Montréal par la maladie.
Peut-être pour vous situer au niveau de la situation des
Maîtres-fourreurs associés du Québec Inc. qui existe depuis
1955, il s'agit d'une association qui regroupe toute l'expertise du commerce de
la fourrure au détail au Québec et qui a un apport
économique important. Les MFA ou les Maîtres-fourreurs
associés se préoccupent principalement de la qualité des
services à la clientèle et ont accru leurs programmes
d'information, surtout au cours de la dernière année, en vue
d'informer les consommateurs quant à l'achat de leurs produits de la
fourrure, l'entretien et ont aussi fait progresser leur service après
vente à la clientèle. (17 h 30)
Présentement, la Loi sur les heures d'affaires existe et elle
vient compléter une loi fédérale concernant le respect du
jour du Seigneur, une loi de 1907. Au cours des dernières années,
les MFA ont à maintes reprises, reconnu l'existence de la loi, qu'ils
ont acceptée, mais ils ont sensibilisé le législateur
quant à l'application de la loi. Au cours de la journée, on a
entendu plusieurs déclarations quant à l'inefficacité de
son application, soit par les jugements insuffisants, soit par le non-pouvoir
du législateur d'aller faire les inspections, soit parce qu'il n'est pas
présent au moment des infractions, soit parce qu'il n'a pas le pouvoir
d'enquête, et on reconnaît cet aspect qui est apporté dans
le projet de loi 59. On espère que le projet de loi va nous amener les
conditions nécessaires à cette application.
Brièvement, sans lire le mémoire, je vais souligner les
principaux points sur lesquels l'association aimerait voir des
applications.
En ce qui concerne des définitions telles que celles de
marché aux puces, exposition, foire, galerie d'art, qu'on entende bien
ce que l'on veut dire. Par exemple, pour nous, marché aux puces,
ça devrait être des produits usagés, mais on remarque, par
exemple dans le domaine du meuble, qu'il s'introduit la liquidation de
produits neufs tels que de la fourrure qui n'est pas aussi usagée
qu'elle devrait l'être ou qui est mal identifiée. On veut que le
pouvoir puisse permettre d'accorder tous les contrôles. Au niveau des
interprétations légales, on trouvait que le terme "doit"
était plus fort que le terme "ne peut admettre le public", surtout
lorsqu'il s'agit de l'interprétation au niveau des jugements sur les
infractions.
Pour ce qui est de l'ouverture le dimanche, dans toute l'industrie de la
fourrure du détail au Québec, on ne voit aucune utilité
d'élargir la loi pour permettre l'ouverture le dimanche et on est
d'accord pour resserrer cette loi, parce que ça ne ferait que
déplacer le pouvoir d'achat à ce moment-ci.
Pour ce qui est de l'augmentation des heures d'ouverture la semaine
avant Pâques, pour ce qui est de l'augmentation des heures du samedi,
là encore, les MFA ne voient pas la nécessité d'augmenter
ces heures. Compte tenu du contexte social, culturel et économique qui
prévaut au Québec, on demande de maintenir le statu quo face aux
heures d'ouverture, d'avoir une loi qui soit mieux appliquée et
d'assurer une concordance avec la Loi sur les normes du travail, étant
donné qu'on doit faire appliquer les décrets et qu'il nous est
impossible, en tant qu'entrepreneurs, d'engager du personnel tout le temps
à temps et demi, à temps double ou à temps triple, au
moment où les décrets nous obligent à accorder des
congés, ce qui alourdirait le fardeau économique de
l'entrepreneur de façon très importante. Que les exceptions ne
viennent pas dépasser la règle générale, qu'on ne
fasse pas comme la grammaire française, qui a plus d'exceptions que la
règle générale, ce qui pourrait parfois compliquer
l'interprétation de la loi, surtout
en ce qui a trait aux zones touristiques et en ce qui a trait aux foires
et aux expositions où le marché peut devenir presque
complètement un marché de permanence, surtout dans des villes
principales, où il y a beaucoup d'exposition et où il se fait
continuellement de l'achat.
On dit que le consommateur a besoin de plus d'heures pour faire ses
achats. Par contre, on reconnaît dans l'industrie du travail que, de plus
en plus, on réduit le nombre des heures de travail, que les horaires
sont de plus en plus flexibles, que les semaines sont comprimées, que
les heures de loisir sont augmentées. On trouve donc qu'il y a assez de
temps actuellement pour pouvoir faire les emplettes nécessaires et les
achats importants.
On aimerait peut-être souligner quelques éléments en
ce qui concerne l'industrie de la fourrure du détail au Québec.
L'industrie du détail de la fourrure est une entreprise principalement
artisanale et de type familial, où il faut un personnel hautement
spécialisé tant au niveau de la production qu'au niveau du
service à la clientèle pour les ajustements, les designers, les
modifications, les retouches qu'il faut apporter pour le service après
vente. Ce personnel est restreint dans la province de Québec et ne peut
être recruté en assez grande quantité, d'autant plus que
les décrets empêchent actuellement d'engager à temps simple
certains de ceux chez qui se recrute ce personnel-là. C'est un service
individuel.
Souvent, le propriétaire de l'entreprise est le principal
spécialiste et artisan de la fourrure. Il doit s'impliquer autant dans
les étapes de la production que dans les étapes du service
à la clientèle. C'est un créateur et la griffe de chacune
des entreprises de la fourrure se reconnaît au Québec. C'est une
entreprise qui est reconnue mondialement et plusieurs touristes viennent faire
leurs achats de fourrure autant pour le service à la clientèle
que le service personnalisé de l'artisan.
C'est un produit qui est spécial, difficilement
appréciable; donc, la clientèle doit se fier à l'expertise
du maître-fourreur lorsqu'il fait l'achat de son produit. La
sélection d'une peau de fourrure doit se faire soigneusement et pas
nécessairement lors d'une sortie familiale d'un dimanche
après-midi. Selon nous, la dernière heure du samedi, l'achat
d'une pièce de fourrure et La soirée du hockey sont relativement
incompatibles.
L'ouverture, le dimanche, à des heures prolongées implique
des problèmes économiques importants, comme nous l'avons
souligné au début de notre présentation, liés
à des décrets selon les normes du travail, des besoins accrus de
sécurité, du recrutement d'un personnel hautement
spécialisé qui est peu disponible.
Actuellement, qui ouvre le dimanche dans l'industrie du détail de
la fourrure? On est devenus quelque peu des spécialistes, ces derniers
mois, à envoyer des télex et des communiqués au ministre
de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme pour faire appliquer la loi. Ce sont
souvent des vendeurs ambulants qui viennent s'installer dans une industrie
hôtelière pendant trois ou quatre jours et qui font une vente sous
pression. Ce sont des entreprises familiales qui ont des difficultés et
pour qui une entreprise plus importante fait la liquidation. Alors, c'est une
vente sous pression, un monopole, parce que l'industrie est fermée. Ce
sont des marchés aux puces qui vendent des manteaux usagés ou
neufs ou, comme je le disais, des vendeurs ambulants.
Si toutes les entreprises commerciales avaient la permission d'ouvrir le
dimanche, ce ne serait qu'une répartition du pouvoir d'achat sur une
plus longue période et il faudrait, concernant le commerce, penser
à l'augmentation des services publics, l'augmentation des inspecteurs
gouvernementaux, et les employés publics seraient obligés de
travailler les jours des achats pour que les contrôles soient
établis. Il faudrait aussi apporter des changements aux conventions
collectives et peut-être enlever certains droits acquis de
congé.
Il y a 95% des plaintes qui sont présentées aux MFA et
à l'Office de la protection du consommateur qui nous envoie les plaintes
et à qui on réfère celles qui ne sont pas des membres des
MFA, par exemple, les vendeurs ambulants. Les plaintes proviennent à la
suite d'achats pendant cette période de vente où les produits
sont difficilement identifiables, où il y a une grande quantité
de produits.
La demande dans le domaine de la fourrure est limitée. On n'a pas
besoin de sept jours d'ouverture pour y répondre. Un commerçant
qui respecte la loi reçoit un déluge d'inspecteurs de feu, de
sécurité, du revenu concernant l'application de la taxe de vente,
la police, le comité paritaire, le syndicat, la santé, les
services d'immeubles de la ville. Par contre, celui qui fonctionne dans
l'illégalité ne voit pas les inspecteurs parce qu'ils ne
travaillent pas le dimanche ou parce que l'annonce dans le journal n'a pas
été lue. Alors, il peut facilement frauder sur la qualité
de son produit et ne pas donner des garanties. S'il est vendeur ambulant, il
est probablement disparu trois jours après. Il ne sera certainement pas
là pour recevoir les plaintes du consommateur parce qu'il n'a pas fait
de cautionnement à la ville. La ville lui a donné un permis
même si c'est illégal de l'exploiter le dimanche. Il l'a
exploité et il a quitté.
C'est pourquoi les MFA demandent qu'il y ait beaucoup de
sévérité dans l'application des pénalités
à ceux qui enfreignent la loi,
selon la qualité du produit qui est vendu. Si c'est un vendeur
ambulant ou quelqu'un qui enfreint la loi et qui vend dans une manufacture ou
dans un entrepôt pendant quatre ou cinq jours, il a une amende de 50 $.
Un manteau peut se vendre de 2000 $ à 3000 $ et, s'il en vend dix, les
50 $... ils ont même offert, à un certain moment, de les
payer d'avance. C'est un peu rire du monde, comme on l'a dit au cours de la
journée, et si c'est 1 $ on n'y pense même pas.
Selon nous, nous faisons face à une nouvelle formule de monopole
d'entrepreneurs moins soucieux que les membres des MFA -ils ne sont pas
toujours dans la même municipalité - de répondre à
toutes les normes gouvernementales. Faute de compétence, ils font des
ventes sous pression, des ventes trompeuses, trouvent des tactiques pour
enfreindre la loi ou disent aux consommateurs qu'ils ne pourront recevoir la
qualité de produit offerte à une heure où les autres sont
fermés. Donc, en tant que commerce spécialisé, selon nous,
il n'y a aucun besoin pour le commerçant de fourrure d'ouvrir le
dimanche. La saison de Pâques, selon nous, est un mythe du passé.
L'heure supplémentaire du samedi, comme je l'ai dit, l'heure du hockey
et la fourrure, ce n'est pas nécessairement compatible.
Pour ce qui est de la fermeture les lendemains de Noël et du 1er
janvier, en accord avec d'autres associations, on croit qu'étant
donné le surcroît de travail qui est demandé aux
employés avant la période des fêtes un congé
pourrait être accordé ces jours-là. Pour nous, la notion de
libre concurrence s'évade un peu lorsque, dans un centre commercial,
vous avez un magasin à rayons qui aurait la permission d'ouvrir le
dimanche et qui vendrait de la fourrure; s'il y avait dans ce même centre
commercial un détaillant de fourrure il n'aurait plus la liberté,
le choix de ne pas ouvrir s'il veut être concurrentiel avec les autres.
Ceci se retrouverait aussi dans les zones commerciales telles que la Plaza
Saint-Hubert, pour des périodes de temps où il y aurait
ouverture.
Nous avons demandé que les permissions spéciales soient
encore émises au niveau gouvernemental, plutôt qu'au niveau du
ministre, pour permettre la consultation et on voudrait, par ce moyen, assurer
qu'il y ait consultation de l'entreprise visée. Si, par exemple, dans le
Vieux-Montréal, un détaillant de la fourrure a la permission
d'ouvrir parce qu'il est en zone touristique et qu'à deux rues de
là un autre détaillant n'a pas le droit d'ouvrir, à ce
moment, s'il n'y a pas eu de consultation, on doit assurer, même si le
processus est plus long, que l'industrie visée soit consultée. On
voudrait cette assurance, même au niveau du ministre, si cela
accélérait la bureaucratie, mais avec consultation des
entreprises visées.
Jusqu'à maintenant, les détaillants de la fourrure ont
remarqué des empires montés dans l'illégalité par
l'octroi de permis d'affaires par les municipalités lorsque la loi
demandait que la fermeture soit imposée le dimanche. Par acceptation de
situations de fait, des centres commerciaux ont été conçus
avec la ferme intention d'ouvrir le dimanche et les permis de construction ont
été accordés.
La difficulté à faire respecter la loi. Ceci, selon nous,
dans le projet de loi est relativement bien protégé au niveau du
pouvoir d'inspection ou du pouvoir d'imposition et du pouvoir d'accorder les
frais et les pénalités aux bons endroits et l'augmentation. Les
pénalités, pour nous, dans l'industrie de la fourrure, devraient
être beaucoup plus importantes que pour le vendeur de menus articles.
De façon générale, c'est notre prise de position.
Il nous ferait plaisir, avec M. Desjardins, de répondre à vos
questions. M. Desjardins est lui-même entrepreneur dans le domaine de
l'industrie de la fourrure. Il pourra entrer dans les détails.
Le Président (M. Desbiens): M. le ministre.
M. Biron: Je vous remercie de votre mémoire. Un
commentaire seulement avant de permettre à mon collègue, le
député de Châteauguay, de vous poser quelques questions. Je
constate, à la lecture de votre mémoire, que vous êtes
relativement satisfaits en tout cas de ce qu'on ait décidé
d'inclure le dimanche dans la Loi sur les heures d'affaires, ce qui
n'était pas inclus avant et d'augmenter les amendes d'une façon
considérable. Quant à votre dernière intervention
où vous dites que cela devrait être plus cher dans le domaine de
la fourrure, on en a tenu compte aussi dans la nouvelle loi. Cela vous a
peut-être glissé. On marque: "Dans la détermination du
montant de l'amende, le tribunal doit tenir compte notamment des
bénéfices que le contrevenant a retirés de l'infraction."
Cela veut dire que c'est sûr que si on vend de petits articles le
dimanche l'infraction peut être minimale; par contre, si on vend de la
fourrure, l'infraction ou l'amende va être au maximum parce qu'on permet
au juge de tenir compte du bénéfice. Cela a été une
des demandes qui sont venues de l'Association des maîtres-fourreurs
associés du Québec Inc.; on a voulu couvrir cette partie en
étant quand même assez flexible pour l'autre partie.
Bien sûr, quant à vos autres interventions, je remarque que
vous allez complètement dans le sens contraire des autres intervenants
avant vous qui disaient: II faut ouvrir complètement à l'occasion
d'expositions agricoles, quitte même à
libéraliser davantage. Alors que vous dites: Non, notre commerce,
cela demande quand même une certaine spécialisation, c'est
beaucoup d'argent. Pour les quelques questions à poser de ce
côté, je demande à mon collègue, le
député de Châteauguay d'intervenir. (17 h 45)
M. Dussault: Merci, M. le ministre. Si on n'est pas
complètement d'accord sur la question des heures d'ouverture, il reste
quand même que votre mémoire a le mérite d'être
très clair et complet quant aux questions qui vous touchent. Je ne
reprendrai pas tout ce qu'a dit le ministre, c'est bien sûr, mais
j'aimerais peut-être revenir sur la question du dimanche. Vous avez
beaucoup insisté dans votre mémoire là-dessus. Je pense
que le changement dans la loi est important, puisqu'il permettra
dorénavant que nous puissions avoir un contrôle le dimanche. Avec
la loi fédérale il restait que ce niveau de gouvernement devait
appliquer la loi et je pense qu'il y avait des insatisfactions. Maintenant,
nous avons un service complet qui verra dorénavant à ce que cette
partie de notre loi s'applique de la meilleure façon possible, à
votre satisfaction, je l'espère. Vous nous demandez, évidemment,
quelque chose qui relève du statu quo. D'autres nous demandent le
contraire. Il nous est dévolu un rôle d'arbitre. Nous essaierons
de le jouer le mieux possible. Je pense que vous comprendrez aussi que cela ne
vous donne pas totalement satisfaction.
J'ai quelques questions à vous poser. Vous avez parlé des
marchés aux puces. C'est un sujet sur lequel, évidemment, on a eu
à réfléchir, mais qu'il n'est pas facile, cependant, de
cerner. J'aimerais vous demander si vous avez des suggestions à nous
faire sur la façon de nous assurer qu'il ne se vende dans ces
entreprises que du vieux, puisque c'est leur vocation. Là-dessus, je
pense qu'on s'entend très bien. Avez-vous des suggestions sur la
façon d'y arriver?
M. Desjardins: La suggestion, je pense que ce serait tout
simplement de vérifier l'état des manteaux de fourrure. C'est
très facile de reconnaître un manteau qui est vieux d'un manteau
qui est neuf. Évidemment, cela ne prend pas nécessairement
quelqu'un de très compétent en fourrure pour s'apercevoir qu'un
manteau est usagé. L'usure peut paraître très facilement,
mais la question de vendre de la fourrure dans des marchés aux puces,
cela peut laisser une porte ouverte à un commerce de manteaux qui ne
sont presque pas usagés, mais qui le sont un peu. Cela peut être
dangereux à ce point de vue.
Mme Du Mouchel: II y a aussi au niveau des marchés aux
puces beaucoup de...
Dans les manteaux, ce n'est peut-être pas le gros commerce
nécessairement, mais vous avez des articles de fourrure, des chapeaux,
des boas, des collets, etc. C'est à ce moment-là qu'il y a une
certaine concurrence et qu'il faut des contrôles.
Vous avez mentionné aussi un point qui a trait à la
fermeture et aux pénalités. Nous vivons un problème
à l'heure actuelle et cela n'a rien à voir avec la loi
fédérale et la loi provinciale, mais il reste qu'il est
présentement défendu d'ouvrir le dimanche. Par contre, les
municipalités accordent un permis d'opération à un vendeur
ambulant qui va s'installer quatre jours dans un hôtel, le jeudi, le
vendredi, le samedi et le dimanche, et qui annonce publiquement dans les
journaux qu'il va être ouvert, mais il a un permis de la
municipalité pour opérer et ce permis va à l'encontre de
la loi. C'est aux niveaux provincial et municipal qu'il va falloir qu'il y ait
des contrôles ou des mécanismes d'inspection. Pour avoir eu
à les visiter - parce que n'étant pas fonctionnaire je peux
travailler le dimanche - j'ai pu inspecter des ventes à ces
endroits-là et il s'agit dans beaucoup de ces cas de marchandises non
identifiées quant à la qualité du produit, quant à
sa provenance et quant à son entreprise ou à la griffe du
détaillant comme tel. Ce sont les principaux problèmes que nous
vivons et nous sommes entièrement d'accord pour qu'il y ait des
contrôles par des personnes présentes au moment où
l'infraction est commise.
M. Dussault: Oui. Je vous remercie beaucoup du supplément
de clarification que vous nous avez apporté sur certains
problèmes que vous avez soulevés dans votre mémoire, mais
je voudrais revenir à cette question du marché aux puces. On n'en
a pas beaucoup parlé jusqu'à maintenant, mais je sais que c'est
extrêmement présent dans l'esprit de beaucoup de personnes. Des
marchands m'ont parlé de cette question avant même que la
commission parlementaire se tienne. M. Desjardins faisait une distinction entre
le vieux et le neuf en disant que c'est assez clair. Je ne sais pas s'il est
facile de distinguer le vieux... Je sais que c'est très facile de
distinguer le vieux, vieux, vieux du neuf, mais il y a le vieux vieux et le
neuf et il y a le vieux et le neuf. Il y a une gradation dans le vieux. C'est
vrai pour cela, mais c'est vrai pour beaucoup de choses dans le domaine des
vieilleries qui peuvent se vendre dans les marchés aux puces. Autant je
voudrais prendre la parole de M. Desjardins pour dire que c'est facile, autant
j'ai de la difficulté à adhérer à cette assertion
parce qu'il me semble que, dans la gradation, il y a un problème qui se
pose. Je voudrais être un de ceux qui auraient permis qu'une loi vienne
enfin régler ce problème-là, parce que ça me
préoccupe beaucoup. C'est pour ça que je vous pose la
question. Est-ce qu'il est techniquement possible - y avez-vous songé
-qu'au moment du passage d'un inspecteur on puisse arriver à
déterminer que ce n'est pas du vieux qui se vend là mais du neuf?
Bien sûr que si, juste à côté du vendeur, il y a une
boîte fermée dans laquelle il y a un amplificateur et que toutes
les indications de la compagnie sont là, comme ça se passe
habituellement, l'inspecteur verra assez facilement que le vendeur
s'apprête à vendre son amplificateur neuf et non pas le vieux.
Je pense que le problème doit se poser autrement pour ce qui est
de la fourrure, mais vous savez très bien que le vendeur, dans un
marché aux puces, ne garde pas son amplificateur dans la boîte
fermée à côté de lui. Il sort son amplificateur de
la boîte bien avant les ventes, il le tient là. Si c'est un
amplificateur d'un modèle pas trop récent avec des manettes
très, très modernes, c'est peut-être un petit peu plus
facile. Le vendeur du marché aux puces doit sûrement tenir compte
de ça aussi.
Il y a un problème. Est-ce que, techniquement, il serait possible
de généraliser dans une loi quelque chose, une technique qui
permettrait de régler ce problème-là? Sinon, je pense
qu'on va devoir tirer la conclusion qu'on n'y arrivera pas facilement et qu'il
faudra encore chercher.
J'aimerais qu'on puisse avoir des suggestions. Si vous n'en avez pas,
soyez bien à l'aise, j'ai une autre question de toute façon.
M. Desjardins: Premièrement, je pense que des manteaux de
fourrure, ça ne devrait pas se vendre dans des marchés aux puces.
On est ici pour deux raisons bien précises. On ne voit pas la
nécessité d'augmenter les heures d'ouverture. Le type de commerce
qu'on a et la circulation que nous avons dans nos magasins ne justifient en
aucune façon la nécessité d'ouvrir plus tard le jeudi soir
ou le vendredi soir, d'ouvrir jusqu'à 18 heures le samedi. C'est un peu
comme dans l'industrie du meuble - on entendait là-dessus Mme Clairmont
ce matin - et l'activité dans nos magasins, le samedi, arrête vers
16 heures. Il est rare qu'à 9 h 30 le matin on ait foule dans le magasin
pour acheter un manteau de fourrure. La cliente n'achète pas un manteau
de fourrure en passant devant un magasin. Elle est décidée, c'est
un investissement important, ce n'est pas du magasinage. On magasine dans le
sens que l'on fait des comparaisons entre les différents marchands, mais
on n'achète pas ça tout à coup, sous l'impulsion du
moment.
Si vous voulez absolument que les marchés aux puces vendent de la
fourrure, qu'ils se limitent à de vieux chapeaux, de vieux boas.
Peut-être que le commerce du manteau de fourrure usagé devrait
même se faire dans des commerces spécialisés dans la vente
de manteaux de fourrure usagés. Cela existe à Montréal et
dans d'autres villes au Canada. Il y en a même eu à Québec,
je ne sais pas s'il y en a encore. C'est là que devrait se faire la
vente d'un manteau de fourrure parce que, la plupart du temps, quand on vend un
manteau de fourrure, la cliente a besoin d'attention spéciale pour des
ajustements; elle a besoin aussi d'être conseillée au point de vue
du choix de la fourrure, au point de vue de la durabilité du manteau,
selon l'usage qu'elle va en faire. Je pense que la vente de la fourrure,
surtout dans le manteau, qu'il soit usagé ou neuf, devrait se faire par
l'entremise d'un détaillant de fourrure, qu'il vende de l'usagé
ou du neuf.
Quant à la question d'ouvrir le dimanche, c'est un point qui nous
fatigue beaucoup à Montréal, parce qu'il y a certains
commerçants qui ont commencé à ouvrir le dimanche et il y
en a qui ouvrent encore. Depuis longtemps, c'est annoncé en toutes
lettres dans les journaux et absolument rien ne se fait pour arrêter
ça. Étant donné que ce n'est pas nécessaire
d'allonger nos heures d'ouverture, l'ouverture le dimanche n'est pas
nécessaire. C'est simplement une façon d'annoncer une vente et
d'attirer une clientèle le dimanche plutôt que de le faire la
semaine. La cliente qui se laisse prendre à ça ne peut pas faire
de comparaisons le dimanche. Il peut n'y avoir qu'un seul commerçant
ouvert. Ce sont là des points importants qui nous ont amenés
à la commission.
M. Dussault: D'accord. En fait, vous ramenez votre réponse
sur cette question spécifique à votre principe
général, votre solution, c'est le statu quo. De toute
façon, je ne comprends pas nécessairement que les marchés
aux puces ne devraient pas exister mais, pour vous, il est bien clair qu'il y a
des choses qui ne devraient pas se vendre là-dedans, dont, entre autres,
les manteaux de fourrure.
Le Président (M. Desbiens): M.
Desjardins a quelque chose à ajouter.
M. Dussault: Oui, M. Desjardins.
M. Desjardins: Si les marchés aux puces ont la
possibilité de vendre des manteaux de fourrure usagés, c'est bien
facile de froisser une doublure de manteau de fourrure ou de faire un accroc
dedans pour justifier que c'est un manteau usagé, même s'il n'est
pas usagé. Je pense que ce serait laisser une porte ouverte à un
commerce qui pourrait prendre une certaine ampleur; si on voit qu'il y a une
faille de ce côté-là, il y en a qui peuvent essayer d'en
profiter. C'est un point de vue important et c'est notre
préoccupation. Le commerce de la fourrure ne justifie pas une
augmentation d'heures et il ne justifie pas qu'on vende de la fourrure le
dimanche. Ce n'est pas compliqué. C'est clair et net.
M. Dussault: D'accord. Je comprends votre point de vue, mais cela
n'a pas tout à fait réglé mon problème. On essaiera
de voir s'il y a des solutions ailleurs.
Vous faites, dans votre mémoire, une distinction entre...
Pardon?
M. Bourbeau: Le problème est plus grave que cela.
M. Dussault: On a chacun nos problèmes, M. le
député de Laporte.
M. Fortier: Cela va se régler aux prochaines
élections.
M. Dussault: On pourrait parler des vôtres,
peut-être. On le fera une autre fois.
Vous avez dans votre mémoire une distinction entre "public" et
"client". Je voudrais comprendre pourquoi. Le mot "client", dans un projet de
loi relatif à des heures de vente, cela me paraissait aller de soi,
parce que celui qui achète est un client. Vous voulez permettre la venue
ou la non-venue du public dans un lieu de commerce plutôt que des
clients. Vous insistez là-dessus dans votre mémoire et je
voudrais comprendre quelle est la distinction. Vous dites que cela a des
répercussions au chapitre des pénalités. Il semblerait
qu'il y a le "doit" et le "peut", mais il y a aussi le mot "client" et le mot
"public". Je voudrais savoir pourquoi vous insistez sur cette distinction.
Mme Du Mouchel: C'est au niveau du conseiller juridique de
plusieurs associations, d'ailleurs, que nous avons discuté ces termes de
"client" et de "public". Le client, c'est celui qui fait l'achat au moment
où il y aurait infraction, par exemple. S'il fait l'achat, il est
client, mais il pourrait être un public visiteur pour devenir client
à un autre moment. Cela pourrait être, par exemple, un groupe de
touristes qui viennent visiter l'endroit ou un groupe d'une exposition, parce
que ce sont des clients potentiels qui viennent voir le produit pour l'achat.
On a pensé que la notion de client était trop restreinte et alors
tout simplement de la fermer au public. C'était de façon
générale. Le client, c'était dans la notion de l'achat au
moment de la transaction tandis que le public, cela pouvait être un ou
des clients potentiels.
M. Dussault: Si je comprends bien... Mme Du Mouchel: Ce
n'est pas du public, mais ces personnes peuvent faire les transactions par
téléphone, quelque temps après.
M. Dussault: Donc, en dehors des heures, quelqu'un du public
pourrait regarder la marchandise, il pourrait se faire une idée de ce
que c'est...
Mme Du Mouchel: C'est cela.
M. Dussault: ...et compléter la transaction plus tard,
possiblement par téléphone ou même durant les heures
d'affaires.
Mme Du Mouchel: Cela pourrait être des groupes de visiteurs
et cela pourrait être une réception qui se donne, parce qu'un
groupe de visiteurs d'un congrès, c'est du public, ce ne sont pas des
clients parce qu'ils n'achètent pas. Par contre, on sait qu'il y a des
transactions qui vont se faire.
C'est parce qu'il y a eu des abus lors de certaines expositions, lors de
certaines foires. La notion de client était un peu galvaudée et
on a préféré dire: Le public n'est pas admis.
C'était général. C'est fermé, le public n'est pas
admis. On ne voulait pas non plus utiliser d'autres termes qui auraient pu
empêcher, par exemple, le propriétaire ou d'autres gens
d'être dans l'endroit à cause de certains décrets.
M. Dussault: Cette distinction, est-ce que vous l'avez
pensée en travaillant avec un homme de loi?
Mme Du Mouchel: Oui, il y avait un conseiller juridique et nous
étions plusieurs associations à travailler ensemble. Il y avait
la Corporation des marchands de meubles, un représentant du
ministère de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme, également
l'Association des détaillants du Québec, la Corporation des
bijoutiers du Québec, nous-mêmes, l'Ordre des pharmaciens. Nous
étions sept ou huit associations à ce moment. Il y avait aussi un
conseiller juridique et c'est à ce moment que la notion a
été étudiée par les diverses associations.
M. Dussault: Je vous remercie. Quant au reste, je pense que votre
mémoire était bien clair.
Oui, M. Desjardins.
M. Desjardins: Je m'excuse, je ne vous retiendrai pas plus
longtemps, mais, concernant la question du dimanche, est-ce que vous
prévoyez un certain mécanisme pour faire en sorte que ce soit
respecté, dans notre type de commerce, en tout cas? (18 heures)
M. Dussault: Étant donné que, maintenant, la
question sera sous juridiction
québécoise, puisque nous rapatrions, à toutes fins
utiles, dans la loi la couverture de la surveillance du dimanche, nous serons
en mesure d'appliquer la loi telle que nous l'aurons confectionnée,
telle que nous l'aurons sanctionnée avec les amendes qui sont maintenant
prévues, alors qu'auparavant cette question du dimanche était de
juridiction fédérale. C'était une loi
fédérale. On ne pouvait pas appliquer au dimanche la loi avec des
sanctions qui étaient de notre loi à nous. Maintenant, cela
devient complet. Vous savez, il peut arriver de temps à autre qu'il y
ait des avantages à rechercher l'unité de pouvoir; c'est un
exemple, je pense, frappant. De toute façon, nous allons en fait
créer une unité d'intervention le dimanche comme le reste de la
semaine. Vous allez avoir une meilleure protection, c'est évident.
M. Desjardins: Cela veut-il dire qu'à la prochaine
publicité pour vente de fourrure le dimanche, automatiquement, ce
commerçant va être poursuivi?
M. Dussault: À partir du moment où il sera
constaté qu'il va à l'encontre de la loi sur les heures
d'affaires, il sera poursuivi, c'est tout.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Laporte.
M. Bourbeau: Je ne serai pas long. Je sais qu'il est
déjà 18 heures. Je remercie le député de
Châteauguay pour son cours de droit. C'est très
intéressant. Il faudrait peut-être dire que le Québec, je
pense, a toujours eu la juridiction en matière de commerce et
qu'à mon avis il aurait pu exercer le droit de réglementer la
vente le dimanche depuis longtemps. Le fédéral, quand il l'a
fait, l'a fait sous l'angle spécifique de la question religieuse.
C'était ce qui avait motivé et justifié jusqu'à un
certain point l'intervention du fédéral dans la
législation de 1907 en vertu d'un principe national d'observance
religieuse. Sous l'angle strictement du commerce, le commerce provincial a
toujours été de juridiction provinciale. Je suis bien d'accord,
d'ailleurs, que le gouvernement rapatrie ce pouvoir qu'à mon sens il a
toujours eu. Parfois, on perd des choses, parfois on en gagne. On a
déjà perdu un droit de veto. Aujourd'hui, on rapatrie ce
pouvoir...
Je voudrais revenir à la question de la fourrure. En passant,
votre mémoire est très bien fait. Je vous félicite. On l'a
lu avec beaucoup d'attention. D'ailleurs, vous soulignez à juste titre
dans votre mémoire l'intérêt que vous avez toujours
porté à cette question et je sais que vous avez toujours
été un intervenant très actif dans le dossier des heures
d'affaires des établissements commerciaux. On parlait tout à
l'heure des marchés aux puces. C'est évidemment un des
problèmes qui vous concernent. Ce qui vous préoccupe, c'est la
concurrence déloyale à laquelle vous êtes confrontés
par des gens qui vendent soi-disant des fourrures usagées. Je trouve
toujours cela un peu indécent d'entendre parler de vente de fourrure ou
de bijoux usagés. Ce n'est pas indécent comme tel, mais quand on
parle de fourrure, je fais une certaine analogie entre la fourrure, les
fourreurs et les bijoux, parce que ce sont des produits extrêmement chers
et précieux. On conçoit assez mal que quelqu'un aille
s'approvisionner en fourrure, d'une façon sérieuse à des
marchés aux puces à moins qu'on ne veuille le faire uniquement
pour acheter vraiment une fourrure qui soit très vieille et qu'on peut
porter comme cela. Je conçois comme vous que c'est un problème
que de voir des gens qui tentent de vendre des fourrures soi-disant
usagées, mais qui ne le sont pas dans le fond - c'est bien
évident - sous le couvert d'un marché aux puces.
Pour revenir à votre mémoire, vous faites mention à
la page 6 des notes explicatives du projet de loi qui, d'après ce que
vous dites, signaleraient l'intention du ministre de libéraliser la
vente le dimanche. Or, on sait bien que, dans la loi, ce n'est pas le cas. La
lecture des notes explicatives, je dois l'avouer, donne cette impression. Il
faudrait peut-être, à un moment donné, qu'on rephrase les
notes explicatives.
Ces notes explicatives disent: "Ce projet de loi modifie la Loi sur les
heures d'affaires des établissements commerciaux afin notamment
d'inclure le dimanche, jusqu'à présent couvert par la loi
fédérale de 1907, dans la liste des jours couverts par la loi
québécoise..." Il n'y a rien là-dedans qui semble indiquer
qu'on veuille obliger ou interdire l'ouverture le dimanche. Quand on lit le
projet de loi, on peut l'interpréter de cette façon, mais
probablement qu'il y aurait avantage à ce que les notes explicatives
soient clarifiées.
Il y avait un autre point. Je voudrais revenir très succinctement
sur la question de la semaine de Pâques. Vous semblez dire qu'il n'y a
aucune augmentation du commerce. Évidemment, Pâques peut
être en mars, Pâques peut être en avril. Si Pâques est
à la fin d'avril, il va y avoir moins de gens qui se bousculent chez les
vendeurs de fourrure. Peut-être qu'au mois de mars il y en a plus. Est-ce
que, vraiment, il n'y a aucune espèce d'intérêt chez vous
à ouvrir jusqu'à 21 heures le soir la semaine avant
Pâques?
M. Desjardins: Non, aucun, monsieur, parce que pour la fourrure
la grosse période, c'est du début du mois d'août
jusqu'à la fin du mois de février en ce qui concerne la
vente.
M. Bourbeau: Mais le samedi... Oui?
M. Desjardins: À l'intérieur de ces sept mois, il y
a quand même quatre mois qui sont beaucoup plus importants et trois
autres qui le sont moins. Avant Pâques, il n'y a aucune
nécessité de ce point de vue.
M. Bourbeau: On ne se doutait pas. Et le samedi soir, de 17
heures à 18 heures, cela n'a aucune espèce d'importance pour vous
non plus?
M. Desjardins: Encore moins.
M. Bourbeau: Que diriez-vous - je vous demande cela un peu pour
aller à la pêche -s'il y avait interdiction d'ouvrir le lundi
matin, cela créerait-il un problème important chez vous?
M. Desjardins: Cela peut poser un problème au point de vue
de la production, mais, évidemment, au point de vue de la vente, si
personne ne peut ouvrir le lundi matin, à ce moment-là, tout le
monde est sur le même pied. Ce ne serait pas du tout un avantage pour
nous de fermer le lundi matin; au point de vue de la production, cela peut
déranger énormément, surtout en pleine saison. C'est
là que c'est important de produire.
M. Bourbeau: Bon! Tout à l'heure, le ministre, avant de
partir, résumait un peu votre mémoire en disant: Je retiens que
vous êtes favorables à la fermeture le dimanche et à
l'augmentation des amendes.
Une voix: ...
M. Bourbeau: Voulez-vous prendre la parole maintenant? Ah bon! Je
m'excuse.
Le ministre résumait un peu votre mémoire d'une
façon rapide en disant: Vous êtes d'accord avec la fermeture le
dimanche et les amendes, mais je pense qu'il faudrait peut-être ajouter
aussi que vous n'êtes pas d'accord avec tout. Vous signalez bien dans vos
recommandations que vous souhaiteriez qu'il y ait une meilleure
interprétation ou une meilleure définition des termes
"marché aux puces", "exposition", etc., de façon qu'on puisse
s'entendre sur ce que cela veut dire. Il y a la question légale, le "ne
doit pas" et le "ne peut pas", qui vous fatigue un peu aussi. Il y a la
question de l'heure additionnelle le samedi qui ne vous plaît pas du
tout. Enfin, vous vous opposez à cette ouverture de 17 heures à
18 heures le samedi après-midi.
M. Desjardins: Ce n'est pas nécessaire. M. Bourbeau:
Oui, d'accord.
M. Desjardins: C'est la raison... Ce serait de retourner... La
fin de la journée, le samedi, c'est finalement 16 heures. On ferme
à 17 heures. Ce serait ramener cela à 17 heures probablement
inutilement.
M. Bourbeau: Vous ne préconisez pas non plus l'ouverture
dans la semaine avant Pâques jusqu'à 21 heures, puisque vous dites
que cela n'aurait absolument aucune influence sur votre commerce.
M. Desjardins: Pas seulement pour nous, les commerçants,
mais le consommateur n'en a pas besoin.
M. Bourbeau: Oui, d'accord. Je suis en train de résumer
peut-être un peu trop rapidement. Vous pouvez bien ajouter à ce
que je dis. Vous souhaitez également qu'on facilite les poursuites, que
quiconque puisse intenter des poursuites... C'était dans vos
recommandations. Si je me trompe, vous me le direz. Vous préconisez une
augmentation du minimum des amendes de 200 $ à 1000 $ et de 400 $
à 2000 $ pour donner un peu plus de dents à la loi.
M. Desjardins: Oui. Ce serait un peu plus sérieux que des
amendes de 400 $ ou...
M. Bourbeau: Bref, on peut dire que, sur certains points vous
êtes d'accord et, sur d'autres points, vous n'êtes pas d'accord
avec le projet de loi, en fait, les points que je viens
d'énumérer pour faire pendant à ce que le ministre disait.
On retient de tout cela que, sur ces points-là, il faudrait une
amélioration du projet de loi et que, sur la question du dimanche, vous
êtes d'accord et...
M. Desjardins: C'est le point le plus important.
M. Bourbeau: Oui. Très bien. Je vous remercie.
M. Desjardins: Merci.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Chambly, une très brève question. Il est 18 h 10.
M. Tremblay (Chambly): Une courte question. Les
Maîtres-fourreurs Associés du Québec Inc. regroupent-ils
tous les fourreurs du Québec?
M. Desjardins: Malheureusement pas.
M. Tremblay (Chambly): Y a-t-il beaucoup de fourreurs qui ne sont
pas membres de votre association?
M. Desjardins: Notre association ne
regroupe pas un très grand nombre de marchands de fourrure au
point de vue du nombre de membres, mais l'association s'occupe de
négocier un contrat de travail avec des employés
syndiqués. À ce point de vue, elle représente tous les
marchands de fourrure qui ont presque tous des employés
syndiqués. L'association est représentative, parce qu'elle
s'occupe de créer un contrat de travail et tous les marchands membres et
non membres vont suivre ses directives.
M. Tremblay (Chambly): Suivent ou doivent les suivre?
M. Desjardins: Ils doivent les suivre, en principe.
M. Tremblay (Chambly): D'accord. Personnellement, plus la
journée avance, plus je réalise que les associations regroupent
toujours seulement un certain nombre d'entre elles, parce que ce serait cela,
la vraie solution. Si, par exemple, vous, vous aviez tous les
maîtres-fourreurs dans votre association, vous pourriez les contraindre
à des heures de fermeture qui feraient votre affaire et qui feraient
l'affaire des fourreurs. Ce qu'on fait ici, c'est une loi pour tous les
commerces au détail et vos besoins sont, de toute évidence,
différents de ceux d'autres commerces au détail. Peut-être
que ce que vous devriez réclamer, éventuellement, c'est la
formule Rand pour les associations et cela serait un commencement de
règlement.
Le Président (M. Desbiens): M. le député, en
terminant, au nom du ministre.
M. Dussault: Merci, M. le Président. Au nom du ministre,
je voudrais l'excuser, il a dû quitter à 18 heures, parce qu'il
avait un engagement qui l'obligait absolument à s'absenter.
Je voudrais dire, et je vais conclure là-dessus, que cette loi
que nous amendons présentement a à peu près 15 ans
d'existence qu'elle a satisfait beaucoup de gens et qu'elle a quand même
amené certaines personnes à revendiquer certains changements qui,
un jour, devaient se faire. Mais il faudrait rappeler au député
de Laporte que si cela pressait et qu'on aurait dû faire des changements
avant, le gouvernement de son équipe politique aurait pu faire ces
changements avant 1976, car il a eu une période de sept ans pour les
faire. Vous savez, les changements viennent en temps et lieu, quand les
revendications se font; elles se sont faites récemment et nous allons
essayer d'apporter les meilleures solutions possible aux demandes et, entre
autres, de satisfaire les vôtres. Au nom du ministre, je vous remercie
beaucoup.
Le Président (M. Desbiens): Mme Du
Mouchel.
Mme Du Mouchel: Un dernier point pour le "membership" de
l'association. L'association représente les principaux membres au niveau
du pouvoir d'achat, au niveau de l'importance. Nous avons des
détaillants de la fourrure qui fonctionnent de façon artisanale
à presque un artisan unique. À ce moment, ceux-là ont de
la difficulté à suivre le tempo. J'aimerais dire que nous avons
reçu, dans des régions éloignées de la province,
l'appui de détaillants qui ne sont pas encore membres, parce que la
structure de l'association est en train de se régionaliser dans toutes
les parties de la province. Alors, nous avons l'appui unanime des membres de
l'association, nous avons aussi l'appui de gens qui sont en voie de devenir
membres.
M. Tremblay (Chambly): Ce n'était pas à ce niveau,
je ne mettais pas en doute votre représentativité, je cherchais
seulement un moyen pour vous de réglementer vos membres, ce qui aurait
pu résoudre vos problèmes.
Le Président (M. Desbiens): Sur ce, nous vous remercions
de votre participation et la commission de l'industrie, du commerce et du
tourisme suspend ses travaux jusqu'à 20 heures, alors que nous recevrons
le Congrès juif canadien.
(Suspension de la séance à 18 h 14)
(Reprise de la séance à 20 h 22)
Le Président (M. Desbiens): La commission élue
permanente de l'industrie, du commerce et du tourisme reprend ses travaux pour
entendre les représentations des personnes intéressées par
le projet de loi 59, Loi modifiant la Loi sur les heures d'affaires des
établissements commerciaux. Nous avons, ce soir, à
réentendre le Congrès juif canadien; si ses représentants
veulent s'approcher s'il vous plaît! M. le député de
Châteauguay. Entre-temps, vous avez...
M. Dussault: M. le Président, je voudrais excuser le
ministre pour son retard. Il est retenu - on saura sans doute pourquoi un peu
plus tard. Mais, de façon à ne pas retarder nos travaux, nous
allons commencer immédiatement. Je vais remplacer le ministre le mieux
possible, à titre d'adjoint parlementaire. Merci, M. le
Président.
Le Président (M. Desbiens): M. Lévy.
M. Schlesinger (Frank): Bonjour.
Le Président (M. Desbiens): Bonjour. Si
vous voulez vous présenter ainsi que ceux qui vous
accompagnent.
Congrès juif canadien
M. Schlesinger: Je vous remercie de nous avoir invités.
Mon nom est Frank Schlesinger, je suis le vice-président national du
Congrès juif canadien et le président du comité des
relations communautaires du Congrès juif canadien, région de
Québec. À ma gauche, M. Mayer Lévy, qui est notre
directeur du comité des relations communautaires; à ma droite, M.
Jim Archibald, directeur général national et régional du
Congrès juif canadien, pour la région de Québec.
Avec votre permission, vu que notre mémoire est assez bref,
peut-être qu'il serait plus simple que je le lise au complet. Par la
suite, je pourrai répondre à vos questions. Ce serait
peut-être plus facile.
Le Congrès juif canadien, région de Québec,
organisme élu démocratiquement, est le porte-parole officiel de
la communauté juive, composée d'environ 105 000 âmes et
représente pratiquement tous les courants d'idées au sein de la
communauté.
Nous vous savons gré de l'occasion qui nous est donnée
pour vous soumettre un mémoire sur la question de la réforme de
la Loi sur les heures d'affaires des établissements commerciaux. En
regard de ce problème tout à fait particulier, nous avons de tout
temps manifesté un intérêt qui remonte à 1906,
année où la loi fédérale fut promulguée.
C'est avec grand intérêt que nous nous sommes
penchés sur le projet de loi 59 attendu qu'il y a un nombre toujours
croissant de coreligionnaires qui risquent d'être traduits devant les
tribunaux pour n'avoir pas obtempéré à la loi et ce, pour
des raisons d'ordre religieux.
Le paragraphe 16 de l'article 3 du projet de loi 59 stipule que le
gouvernement a le droit d'établir certaines exemptions.
Alors qu'il y eut des considérations accordées dans le
commerce, le gouvernement et l'industrie de même qu'envers les
transports, aucune mesure ne fut officiellement prise, prenant en
considération les convictions et besoins d'ordre religieux. Il
semblerait que la loi qui, à l'origine, fut fondée sur des
préceptes religieux, était la préoccupation d'une seule
religion. À cet égard, la loi constitue un paradoxe singulier du
droit, car celle-ci fut à l'origine et est encore de nos jours
fondée sur le respect des valeurs religieuses. Elle impose une grave
incapacité pour les personnes de religion autre et, en agissant ainsi,
la loi démontre son indifférence envers les vrais principes de
liberté de religion.
C'est une nette ironie de l'histoire de constater que la
communauté religieuse qui fut la première à observer le
précepte d'un jour de repos sur sept et qui en fit don au monde, doive
en aboutir, de par sa propre adhésion, à être
pénalisée et victime d'une forme de discrimination
économico-religieuse, car elle observe ce même précepte.
Ceci constitue une incapacité qui porte une grave atteinte à la
prétendue liberté de religion dont notre gouvernement se porte
garant par la Charte des droits et libertés de la personne.
Les commerçants de confession juive qui ferment leurs commerces
le vendredi avant le coucher du soleil se trouvent dans une situation qui,
selon nos informations, peut leur faire perdre environ un tiers de leurs ventes
s'ils ne peuvent ouvrir le dimanche.
La nécessité d'un amendement s'impose pour être en
conformité avec la recommandation qui vous a été
adressée par la Commission des droits de la personne du Québec
que le Congrès juif canadien appuie. Celui-ci recommande donc au
gouvernement: "Que, dans le respect du pluralisme qui caractérise notre
société québécoise et dans une optique de plus
grande tolérance à l'égard de nos différences, le
ministère de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme prévoie des
accommodements en termes de journées d'ouverture permettant à
chacun d'exercer la liberté de religion."
Ceci n'est pas un plaidoyer en faveur d'un seul groupe religieux.
Toutefois, si tel avait été le cas, sa validité n'aurait
pu en rien être diminuée. Notre pétition est faite au nom
du Congrès juif canadien et en celui de tous ceux qui observent leur
jour de repos un jour autre que le dimanche.
Nous recommandons donc qu'une disposition soit adoptée pour
permettre que les personnes qui observent le sabbat et qui s'abstiennent a
fortiori de travailler ou de faire des affaires le 7e jour correspondant dans
la loi juive au sabbat, soient capables de travailler ou de faire affaires le
premier jour de la semaine selon le calendrier juif.
Ceci est un principe qui est largement admis dans plusieurs juridictions
dont je vous donnerai des exemples et il est important de rectifier l'omission
de ces nombreuses décennies.
La province de l'Ontario a pris en considération cette situation
dans sa Loi sur les commerces de détail - dont j'ai des copies
ici - et des jours fériés de 1975. Dans l'esprit de cette loi,
nous recommandons qu'à l'article 3 l'on ajoute un article 3a qui se
lirait comme suit: "Un établissement commercial qui ferme pendant au
moins 24 heures consécutives du lundi au samedi à minuit pour des
raisons d'ordre religieux, peut ouvrir le dimanche."
Nous espérons que notre recommandation sera prise en
considération par le gouvernement et ce afin de rectifier
une inégalité de longue date.
Ceci termine notre texte formel. Je peux répondre à vos
questions, si vous voulez, et j'ai de la documentation à vous citer,
comme vous voudrez.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Châteauguay. (20 h 30)
M. Dussault: Merci, M. le Président. Au nom du ministre,
je remercie les représentants du Congrès juif canadien de leurs
représentations à cette commission. S'il arrive à temps,
le ministre vous posera sans doute des questions tout à l'heure. Je vais
laisser le député de Chambly poser des questions au groupe.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Chambly.
M. Tremblay (Chambly): Bonsoir, messieurs. A priori, je serais
tenté de vous dire oui immédiatement.
Une voix: On accepte.
M. Tremblay (Chambly): Cela n'impliquerait pas beaucoup le
gouvernement, un député qui ferait cela. J'aurais une
première question d'ordre pratique. Je vis dans la région de
Montréal et j'ai rarement vu des commerces fermés le vendredi
soir et le samedi. Est-ce qu'il y en a beaucoup?
M. Schlesinger: II n'y en pas beaucoup. Ce sont les Juifs qui
sont très religieux qui sont obligés de cesser toute
activité commerciale au coucher du soleil. J'ai apporté avec moi
- j'évite de mentionner des noms de personnes, de particuliers, parce
que ce ne serait quand même pas juste - des dossiers de la cour
où, au nom du Congrès juif canadien, je les représente
devant les tribunaux. Ce sont des gens qui, pour des raisons religieuses, sont
obligés de fermer le vendredi après-midi et toute la
journée du samedi. Pour cette raison, pour ne pas perdre le tiers de
leurs ventes, ils sont obligés, pour survivre même, d'ouvrir le
dimanche mais ils ont reçu des sommations devant les tribunaux.
M. Tremblay (Chambly): Est-ce que ces gens-là,
généralement, vendent des produits qui s'adressent à la
communauté ou si ce sont des commerces en général?
M. Schlesinger: Ce sont des commerces en général.
On a des commerces de textile. On a des vendeurs de meubles. Ce sont des
commerces de ce genre. Ce sont de petits commerces, en
général.
M. Tremblay (Chambly): D'accord. Le problème qui se pose
est un problème pratique. Si on était capable de le régler
ici, si on était capable de trouver une solution à ce
problème, j'imagine que cela en faciliterait l'acceptation, parce que
c'est vrai qu'on n'a pas à décider, individuellement, de quelle
façon les gens vont pratiquer leur religion. Leurs croyances, c'est
à eux; cela leur appartient. Du point de vue pratique, en tout cas, il
m'apparaît qu'il pourrait se poser un problème dans le sens qu'une
personne pourrait exploiter un commerce. On l'a vu, il y a des catholiques
aussi qui veulent ouvrir le dimanche pour faire des affaires même si,
théoriquement, ils ne sont pas censés le faire, selon leurs
croyances. Encore là, j'imagine que les catholiques très croyants
ou des croyants d'autre religion ferment le dimanche, de toute façon.
Mais il y a des gens qui veulent ouvrir le dimanche. On pourrait imaginer un
scénario où, par exemple, une personne de religion juive
fermerait effectivement son commerce le vendredi soir et le samedi et le
dimanche, pourrait en exploiter un autre qui serait à la porte voisine,
à la porte d'en arrière. Par des moyens détournés,
vous savez que, quand on est des gens d'affaires, on cherche tous à
dépasser la loi, ce qui fait qu'on se donne des avantages de cette
façon.
Est-ce que vous avez une solution pour faire en sorte que des gens ne
puissent pas exploiter un commerce le dimanche, ne l'utilisent pas comme
échappatoire à la loi et ne l'exploitent que le dimanche, le
vendredi et le samedi?
M. Schlesinger: D'abord, on ne peut pas, je crois, en
démocratie, adopter une loi basée sur le fait que les hommes ou
les citoyens vont essayer de la tricher. La loi, c'est la loi, et si on ne la
respecte pas, il y a des pénalités qui sont
édictées par le Parlement, par le gouvernement. Je peux vous
suggérer ce qui a été fait dans d'autres juridictions et
je peux vous donner des exemples. Dans les États du Connecticut, du
Kentucky, du Maine, du Michigan, de l'Oklahoma et du Vermont et aussi dans la
province de l'Ontario, on a trouvé des solutions. En
général, la solution, c'est: Si un commerce est fermé
pendant 24 heures consécutives, mais, avant 17 heures le samedi
après-midi, on a le droit d'ouvrir le dimanche. C'est évident que
les gens qui vont ouvrir le samedi ne pourront pas ouvrir le dimanche. D'autre
part, si quelqu'un veut choisir, c'est évident qu'il va choisir le
samedi, parce que le vendredi soir et le samedi sont les deux périodes
les plus rentables pour les commerçants. Si quelqu'un choisit
d'ouvrir le dimanche, c'est parce qu'il ne peut pas ouvrir le samedi ou le
vendredi soir. Maintenant, pour les tricheurs, la loi est là, vous avez
les enquêteurs du gouvernement qui vont probablement faire leur travail
et, si quelqu'un est trouvé dans
une fraude à la loi, il sera puni.
M. Tremblay (Chambly): Je ne voudrais pas parler des cas des
États-Unis, parce qu'on est moins au courant un peu de cela, mais
parlons de l'Ontario, qui a sa loi. Vous en faites mention dans votre
mémoire. Est-ce que vous êtes au courant de l'application? Est-ce
que cela a bien fonctionné en Ontario?
M. Schlesinger: Oui. On a des copies pour les membres de cette
commission, je vais vous le lire en anglais parce que c'est très court.
Si vous voulez, je peux le traduire par après. "Previsions dealing with
Sunday only, a store which would have to close on holidays under the rules
described above may open Sunday 1 if. it is closed Saturday; 2. if no more than
seven persons are working in the store on that Sunday; 3. if the shopping area
is less than 5000 square feet.
The Saturday closing must be for a period of not less then 24
consecutive hours between 4 p.m. on Friday and midnight on Saturday. Note that
this prevision deals only with Sunday opening and closing on Saturday and does
not permit opening on a holiday other than the following Sunday. The store
needs not adopt the Saturday option regularly and no licence or approval is
required."
Maintenant, si vous le voulez, je peux le traduire en
français.
M. Tremblay (Chambly): Non.
M. Schlesinger: C'est en effet ce qui est en vigueur en Ontario.
Il paraît que c'est une solution assez équitable.
M. Tremblay (Chambly): En Ontario, par exemple, est-ce qu'il n'y
a pas d'abus de commerçants qui se découvrent tout à coup
une foi juive et qui utilisent la loi comme une échappatoire? Est-ce que
vous êtes au courant de cas semblables?
M. Schlesinger: Non, parce que, comme je vous ai dit, si on a le
choix commercialement, c'est plus rentable d'ouvrir le samedi et le vendredi
soir. On n'aimerait pas fermer le vendredi soir et le samedi pour ouvrir le
dimanche.
M. Tremblay (Chambly): Ce serait plus rentable d'oeuvrer le
vendredi soir, le samedi et le dimanche.
M. Schlesinger: D'après ce que nous savons, je n'ai pas vu
de cas de ce genre.
M. Tremblay (Chambly): Mais on pourrait imaginer cela, un
commerçant qui pourrait avoir deux commerces finalement, pas loin l'un
de l'autre, en ouvrir un le dimanche et l'autre le samedi et le vendredi
soir.
M. Schlesinger: Je ne suis pas au courant d'un exemple de ce
genre. Ce que vous dites, je ne sais pas si cela peut se faire, mais je n'ai
pas d'exemple de cela.
M. Tremblay (Chambly): D'accord. Je vous remercie.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Laporte.
M. Bourbeau: Je vais laisser mon collègue, le
député d'Outremont, poser quelques questions. J'en aurai une
à la fin, à moins qu'elle ait été posée par
mon collègue d'Outremont.
M. Fortier: M. Schlesinger, M. Archibald et M. Lévy, le
problème qui est décrit, je le connais bien parce que, dans mon
comté d'Outremont, il y a de fait de ces petits commerçants qui
sont assez pratiquants. Je sais que, quand je voulais aller chez mon tailleur,
d'ailleurs, que je fréquente, le vendredi soir, c'était
fermé effectivement et c'était fermé toute la
journée le samedi. Il existe de ces Juifs très pratiquants de la
même façon qu'il existe des catholiques très pratiquants,
comme il existe des catholiques non pratiquants et des Juifs non pratiquants.
Quand on parle des Juifs qui pratiquent leur religion et qui ont assez de
principes pour appliquer les règles de la religion juive, on se comprend
bien là-dessus. Comme je le disais, c'est certainement un fait. Je ne
connais pas l'étendue du phénomène en termes de nombre de
magasins ou de volume commercial. Je ne sais pas si vous avez des indications
là-dessus. J'imagine la situation, lorsque vous dites que, par croyance
religieuse, on parle d'un petit commerçant qui est le
propriétaire de son commerce. Mais si on parlait d'un commerce par
actions, où il y aurait plusieurs actionnaires d'une certaine envergure,
même si les actionnaires étaient de religion juive, j'imagine
qu'à ce moment cela joue moins. Je me demandais si vous aviez
songé à cette difficulté de la loi qui pourrait
créer certains problèmes à certains endroits, parce que,
pour ma part, je dois vous dire, parce que j'ai beaucoup d'amis d'Outremont que
je fréquente et je sais qu'il s'agit plutôt de petits
commerçants, que, tant et aussi longtemps qu'il s'agit de petits
commerçants qui pratiquent leur religion, pour ma part, je crois qu'on
doit avoir assez de largeur d'esprit au Québec pour accepter la
proposition qu'on nous fait.
Cependant, s'il s'agissait d'un volume trop étendu, qui pourrait
provoquer des problèmes face à d'autres compétiteurs,
cela
pourrait créer des problèmes à des
commerçants d'autre région. Alors, je me demandais si vous aviez
d'autres recommandations qui limiteraient l'ampleur du problème ou de la
situation.
M. Schlesinger: Oui, je vous remercie de votre intervention. Pour
commencer, je crois que la plus grande partie, ce sont les commerces de
famille. Le simple fait de les incorporer ne devrait pas les priver de cette
protection; par exemple, s'ils sont incorporés pour fins d'impôts,
le fait d'être un petit commerce incorporé ne devrait pas les
priver de la protection de la loi qu'on prévoit.
D'autre part, on est d'accord que ce n'est pas envisagé pour
donner une protection aux grosses chaînes de magasins ni aux gros
commerces. J'ai une lettre qui provient du ministre Marc-André
Bédard, en date du 30 novembre 1977, dont vous avez peut-être une
copie, parce que cette lettre était écrite par M. Bédard
au ministre d'alors, M. Rodrigue Tremblay, qui prévoyait certains
barèmes pour ne pas prendre de poursuite contre certains
commerçants. Si cela vous intéresse, on pourra vous remettre des
copies de cette lettre.
M. Fortier: Oui, je serais intéressé d'en avoir une
copie.
M. Schlesinger: Le problème c'est que, pour l'instant, il
s'agit d'une tolérance et d'un privilège, mais non d'un droit. Il
ne faut pas oublier le principe: pour la liberté de la religion, c'est
un droit et non un privilège; un commerçant qui reçoit une
sommation ne devrait pas être obligé de venir voir le
Congrès juif canadien qui, ensuite, doit voir le ministère de la
Justice, puis le ministère de l'Industrie et du Commerce pour obtenir le
retrait de la plainte.
Cela devrait être un droit qu'il a sans encourir de
dépenses ou se voir comme un genre de criminel qui reçoit une
sorte d'exemption. C'est son droit. Il est citoyen, il ne peut pas... son
sabbat n'est pas le dimanche, mais le samedi. Le principe, c'est qu'il devrait
être en mesure d'observer son sabbat et non celui des autres, et ne pas
en être pénalisé.
M. Fortier: Mais, je crois, M. Schlesinger, que la question de
principe -même mon collègue de Chambly le disait, je ne veux pas
parler pour mes collègues, je vais parler pour moi - on l'accepte et on
essaie de voir les difficultés d'application. Pour ma part, je crois que
les possibilités qu'un petit magasin de famille cherche à
utiliser le règlement pour pouvoir ouvrir et le samedi et le dimanche,
serait très facilement identifié, parce qu'il s'agit, comme vous
le dites, de petits commerçants qui ferment effectivement du vendredi au
samedi soir...
M. Schlesinger: Si vous me permettez de vous interrompre, je peux
vous donner un bref exemple d'une personne dont j'ai le dossier de la cour ici;
je pourrai vous le montrer, si vous le voulez. J'ai agi comme avocat dans ce
dossier pour le Congrès juif canadien, alors il y a un petit
problème au point de vue de révéler son...
M. Fortier: ...oui, mais parmi... oui.
M. Schlesinger: ...il a reçu une sommation. Il est venu me
voir et il m'a dit: M. Schlesinger, s'il faut que je ferme le samedi et le
dimanche, je devrai fermer mes portes et congédier mes employés.
Je ne peux pas faire face à mes dettes et aux obligations de mon loyer,
si je n'ouvre pas le dimanche. En l'occurrence, la plainte a été
retirée, parce qu'on avait la lettre de M. Bédard, mais il a
fallu aller à la cour et voir le Procureur général.
C'était une affaire compliquée.
M. Fortier: Je crois qu'il y a d'autres représentations
qui nous ont été faites par des marchands de légumes, qui
nous donnaient l'importance du marché des fins de semaine. Je vous
crois, si quelqu'un doit fermer non seulement le samedi et le dimanche, mais le
vendredi soir en plus, c'est sûr que cela doit affecter son chiffre
d'affaires. Je pense que, là-dessus, vous nous avez convaincus.
Parmi les difficultés d'application, qu'est-ce qui se passe pour
les employés? On parle d'un patron ou d'une organisation familiale,
j'imagine, parmi les cas que je connais moi-même, ce sont la femme et les
enfants, donc de même religion, qui travaillent au même endroit.
D'autres situations pourraient se présenter qu'on n'aurait pu
prévoir; j'imagine que si quelqu'un - enfin, ce n'est pas le
problème -de religion chrétienne travaille pour une personne de
religion juive, il travaille lorsque le magasin est ouvert et il doit accepter
ces conditions à ce moment. (20 h 45)
M. Schlesinger: Normalement, d'après mon expérience
avec les personnes que j'ai représentées devant les tribunaux,
s'il y avait des chrétiens qui ne voulaient pas travailler le dimanche,
ce n'était jamais un problème, ils avaient congé le
dimanche. Généralement, ce sont des commerces de famille, comme
vous le dites, et on peut toujours trouver un ou deux employés pour y
travailler le dimanche. On ne veut pas, non plus, empêcher les personnes
d'autre religion de pratiquer leur religion, et on ne voudrait pas qu'un
chrétien pratiquant perde son emploi parce qu'il ne veut pas travailler
le dimanche. Ce n'est pas le but...
M. Fortier: Autrement dit, vous ne voulez pas imposer à un
chrétien...
M. Schlesinger: Non.
M. Fortier: ...ce que vous ne voulez pas...
M. Schlesinger: Certainement pas.
M. Fortier: ...que les chrétiens vous imposent à
vous.
M. Schlesinger: Exactement. C'est sûr et certain.
M. Fortier: Mais vous avez indiqué, tout à l'heure,
la lettre du ministre Bédard...
M. Schlesinger: Oui.
M. Fortier: ...qui semblait définir certains
critères. Je ne l'ai pas lue, mais j'imagine qu'il serait possible
d'insérer ces critères dans la loi. C'était
peut-être le sens de l'intervention du ministre Bédard, pour
limiter soit la dimension ou le genre de commerce pour lequel la clause dont
vous faites état, comme celle de l'Ontario, pourrait être
appliquée au Québec. Alors, si on allait dans cette direction,
est-ce que ce serait acceptable?
M. Schlesinger: Évidemment, nous aimerions avoir une
exemption plus large, mais on serait prêt à accepter qu'il y ait
quand même certains problèmes pour la mise en vigueur de la loi,
et, s'il faut accepter ces choses, c'est quand même dans les limites de
ce qui serait acceptable.
M. Fortier: Je vous remercie, M. Schlesinger.
M. Schlesinger: Merci bien.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Laporte.
M. Bourbeau: M. Schlesinger, la clause que vous suggérez
à l'avant-dernier paragraphe de votre mémoire, est-ce que c'est
effectivement la clause qui est utilisée présentement en
Ontario?
M. Schlesinger: Non. M. Bourbeau: Non?
M. Schlesinger: La clause de l'Ontario est plus restrictive. Nous
ne voulons pas avoir une loi strictement pour les Juifs. Nous voulons une loi
qui protège toutes les minorités. D'autre part, nous comprendrons
que, peut-être, ce que nous avons recommandé ici, est un peu
difficile à avaler pour le gouvernement. Alors, nous avons parlé,
en effet, du vendredi soir et du samedi. Il y a d'autres religions qui ont le
vendredi comme journée sainte. Mais je ne sais pas si les
commerçants sont obligés, nécessairement, de fermer durant
cette journée-là. Alors, en effet, la meilleure chose du monde,
ce serait peut-être d'avoir cette clause-là. Mais nous
comprendrons que ce serait nécessaire de restreindre cela au vendredi et
au dimanche, au vendredi soir et au samedi plutôt.
M. Bourbeau: La raison pour laquelle je vous posais cette
question, c'est qu'on a eu des gens qui sont venus nous expliquer que, dans
certains commerces, c'est plus payant d'ouvrir le dimanche que n'importe quel
autre jour de la semaine. Par exemple, pour les fruits. Pour OCTOFRUIT, le
dimanche, c'est une journée extraordinaire. On a les marchés
publics qui ouvrent le dimanche et qui, semble-t-il, font une très
grosse partie de leur chiffre d'affaires cette journée-là. Alors,
on pourrait concevoir une épicerie qui serait la propriété
d'un chrétien et qui considérerait que le lundi est une
très mauvaise journée pour faire des affaires. Il semble que
c'est vraiment la norme. Il dirait: Très bien, je ferme pendant 24
heures, du dimanche soir, à 23 heures, au lundi soir. Après cela,
j'ouvre tous les jours de la semaine, y compris le samedi et le dimanche, pour
des raisons religieuses, puisque, moi, je fais ma religion le lundi. Cela
s'invente, des religions, alors, je pourrais inventer ma propre religion et, le
lundi, je ferme.
Donc, au point de vue commercial, on pourrait avoir toute une nouvelle
religion qui s'implanterait au Québec, ce seraient tous des
commerçants d'épicerie ou de fruits, qui pratiqueraient cette
religion-là; ils seraient tous fermés le lundi, ouverts les
samedi et dimanche. Ils contourneraient la loi d'une façon
spectaculaire, et rentable surtout.
Je me demande si cette clause est vraiment une clause. Je ne veux pas
avoir un esprit retors comme on le disait tout à l'heure, quand on
arguait que les marchands ont coutume de contourner la loi, mais je verrais
très bien que cela pourrait se faire facilement. Il ne m'apparaît
pas que cette clause puisse résister très longtemps à
l'astuce de nos marchands. Si un politicien a pu y penser, c'est bien sûr
que les marchands vont y penser encore plus.
M. Schlesinger: On reconnaît les problèmes qui sont
soulevés et vous avez raison. C'est pour cette raison que, pour le
principe, il fallait que, dans notre mémoire, on stipule qu'on aimerait
voir cela appliqué pour tout le monde. Mais on reconnaît quand
même que, pratiquement, il faudrait probablement le restreindre au
vendredi soir
et au samedi. C'est vrai que, si l'on ferme le lundi, peut-être
qu'on ne perd pas beaucoup de notre chiffre d'affaires. Mais, d'autre part, si
on ferme le vendredi soir et le samedi, c'est une autre affaire. Je vois que,
probablement, c'est cela que la loi devrait stipuler. Vous n'aurez
peut-être pas d'alternative. Mais cela sera le strict minimum, en
effet.
M. Bourbeau: Je vous remercie.
M. Schlesinger: II faut comprendre que nous ne sommes pas une
religion nouvelle. Nous sommes ici depuis...
M. Fortier: Vous étiez là avant nous.
Le Président (M. Desbiens): Alors, s'il n'y a pas d'autre
intervention ou remarque, je remercie les membres du Conseil juif canadien de
leur participation à nos travaux.
M. Schlesinger: C'est nous qui vous remercions.
Le Président (M. Desbiens): J'inviterais maintenant le
Regroupement des centres-villes du Québec à s'approcher, s'il
vous plaît! M. Jean-Pierre Blackburn, voudriez-vous présenter les
membres qui vous accompagnent, s'il vous plaît, puis procéder?
Regroupement des centres-villes du
Québec
M. Pelletier (Romuald): Bonsoir, M. le Président...
Le Président (M. Desbiens): Bonsoir.
M. Pelletier (Romuald): ...M. le ministre, chers
délégués de cette salle, je me nomme Romuald Pelletier et
je suis président du Regroupement des centres-villes du Québec.
Je dois vous dire, avant de commencer, que le document qu'on vous dépose
ici est un document sommaire. Contrairement à vos habitudes, on va vous
demander diligence pour que vous acceptiez qu'on vous le lise. Nous sommes ici
ce soir plusieurs représentants du RCVQ qui se sont
déplacés de tous les coins du Québec. Pour ma part, je
viens de Rivière-du-Loup.
M. Blackburn, qui vient de Chicoutimi, va vous présenter le
document. M. Jen-O. Brosseau, à ma droite, vient de Granby. Il y a
également, dans la salle, des gens de Sherbrooke et de Montréal
qui font partie de notre organisation. J'aimerais ajouter que ce document
comporte une vaste campagne d'information qu'on a tenue parmi toutes nos
associations membres. On pourrait dire qu'une quarantaine d'associations se
sont prononcées, sans compter des corporations privées. Un
"listing" - si je peux me permettre cette expression - apparaît à
la fin du document et les questions que nous avons posées à nos
associations membres apparaissent aussi dans le document. L'esprit dans lequel
on présente ce document, on doit vous dire qu'il a été
vérifié et que nous tenons particulièrement à ce
que cette Assemblée, cette table prenne vraiment au sérieux ce
que l'on va vous déposer. Sans plus tarder, je vais remettre la parole
à notre représentant, M. Jean-Pierre Blackburn.
Le Président (M. Desbiens): M. le ministre.
M. Biron: Si je comprends, vous présentez le
mémoire au nom du Regroupement des centres-villes du Québec. Cela
inclut les présentations à peu près similaires de
l'association promenade Masson et de SIDAC mail centre-ville de
Québec.
M. Pelletier (Romuald): Non, à l'heure actuelle, ces
associations ont leurs propres revendications. Elles ont elles-mêmes un
document dont certaines parties apparaissent, comme de raison, dans le
nôtre, mais on a tenu à ce que ces deux documents soient distincts
dans leur présentation.
M. Biron: Cela veut dire qu'il y aura trois présentations
différentes pour les trois mémoires. C'est ce que vous nous
dites?
M. Pelletier (Romuald): À venir jusqu'à
présent, oui.
M. Biron: D'accord. Étant donné que tous les
membres de la commission ont pris connaissance de votre mémoire, je vous
prierais, s'il y avait possibilité, au moins d'y aller sur l'essentiel
et de résumer, ce qui nous donnerait assez de temps pour passer les deux
autres mémoires sans terminer trop tard ce soir.
M. Pelletier (Romuald): C'est un peu pour cela que je vous
demandais tout à l'heure... Notre mémoire est déjà
un résumé; si on le résumait davantage, peut-être
que cette salle manquerait d'information.
Le Président (M. Desbiens): Si vous voulez
procéder, M. Blackburn.
M. Blackburn (Jean-Pierre): M. le Président, M. le
ministre, MM. les députés, en février dernier, votre
ministère, le ministère de l'Industrie, du Commerce et du
Tourisme, nous faisait parvenir de la documentation à propos de
changements à apporter à la loi sur les heures d'affaires.
Dès lors, notre organisme, le Regroupement des centres-villes du
Québec, a entrepris une consultation à l'échelle
provinciale auprès des associations de commerçants et de gens
d'affaires oeuvrant dans les centres-villes, pour obtenir leur point de
vue sur le sujet. Chacun des conseils d'administration des associations
consultées nous a exprimé son opinion par résolution.
Les résultats de notre consultation furent acheminés
à votre attention, d'autant plus qu'elle portait sur des aspects
particuliers de la loi des heures d'affaires, c'est-à-dire: l'ouverture
des commerces le dimanche; l'augmentation des amendes pour ceux qui
contreviennent à la loi; les marchés aux puces; l'ouverture des
commerces les 26 décembre et 2 janvier et la prolongation des heures
d'affaires les jeudi et vendredi soir.
Le contexte qui a prévalu lors du débat était,
d'une certaine façon, polarisé chez les petits commerçants
indépendants, par la crainte de voir les commerces ouvrir le dimanche.
Les effets anticipés étaient lourds de conséquences pour
les PME et impliquaient un changement social non souhaité par celles-ci.
Ces ainsi que quelque 46 associations de centre-ville et groupements d'affaires
nous ont exprimé, par résolution, leur position.
Alors, en ce qui concerne le fait de savoir s'ils étaient
favorables à ouvrir le dimanche, c'était non pour 46.
Êtes-vous d'avis que le gouvernement devrait définir les
marchés aux puces dans la loi sur les heures d'affaires? Oui: 43; non: 1
et sans réponse: 2.
Les commerçants de votre centre-ville sont-ils favorables
à une prolongation des heures d'affaires les jeudi et vendredi soir? 43
associations ont dit non.
Êtes-vous en faveur d'une restructuration des amendes pour
décourager les commerçants qui contreviennent à la loi des
heures d'affaires? C'était oui à 43.
Seriez-vous favorable à inclure les 26 décembre et 2
janvier comme journées fériées? Oui: 40, non: 3 et sans
réponse: 3.
Vous avez en annexe, justement, la liste des associations qui ont
répondu à ce sondage au printemps dernier.
Nous apprécions, aujourd'hui, votre décision de
présenter cette commission parlementaire, laquelle nous permet de
préciser notre point de vue et accorde le privilège aux
différents organismes et entreprises de se prononcer sur les changements
proposés dans le projet de loi 59, Loi modifiant la Loi sur les heures
d'affaires des établissements commerciaux.
Appui du Regroupement des centres-villes du Québec.
Plusieurs aspects proposés dans le présent projet de loi
étaient souhaités et ont été recommandés par
notre organisme, le Regroupement des centres-villes du Québec, à
la suite de notre consultation entreprise au printemps dernier. Signalons,
entre autres, le fait d'inclure le dimanche parmi les journées où
aucun client ne pourrait être admis dans un établissement
commercial; de limiter à 21 heures la présence des clients dans
un établissement commercial, les jeudi et vendredi soir; et l'article
9.1, qui stipule que nul ne peut annoncer l'ouverture d'un établissement
commercial à une heure ou un jour où l'ouverture en est interdite
par la loi. Cette dernière mesure assure un respect plus grand de la loi
et protège nos entreprises des contrevenants.
D'autre part, certains aspects, bien qu'ils n'aient pas
été soulevés par notre organisme, ont été
accueillis très favorablement dans le milieu des affaires. D'une
façon particulière, le fait de rattacher à l'augmentation
des amendes, la clause voulant que le tribunal doit tenir compte notamment des
bénéfices que le contrevenant a retirés de l'infraction;
préciser et inclure les boutiques d'artisanat, les galeries d'art, les
détaillants de produits d'horticulture, les antiquaires et
détaillants de marchandises usagées, parmi les
établissements commerciaux auxquels ne s'applique pas la présente
loi; référer à l'attention du ministre le soin d'autoriser
les établissements commerciaux à exercer leurs activités
lorsque se produit un événement spécial, tel un festival,
une foire, un salon ou une exposition.
Ces aspects présentés dans le projet de loi sont
endossés par notre organisme et appréciés de nos membres.
Nous souhaitons qu'ils soient maintenus lors de l'adoption finale du projet de
loi. Cependant, nous attirons votre attention sur le dernier point
soulevé qui aurait besoin d'être clarifié un peu plus.
S'agit-il d'événements annuels?
Propositions n'ayant pas reçu l'appui de nos membres.
Parallèlement, nous désirons attirer votre attention, M.
le ministre, sur certains points qui n'ont pas été couverts dans
le présent projet de loi, ou encore qui ont suscité une
désapprobation dans le milieu que nous représentons,
c'est-à-dire les centres-villes. Parmi ces éléments, nous
retrouvons cette nouvelle suggestion de permettre l'ouverture des commerces
jusqu'à 21 heures les six jours précédant
Pâques.
A priori, cette suggestion apparaissait intéressante. Toutefois,
après consultation, il s'avère que cette mesure représente
un coût d'application dont d'aucuns ne voient la rentabilité et
qui augmente, par surcroît, la charge de travail chez les dirigeants au
sein des petites entreprises.
Les raisons exprimées découlent du fait que la fête
de Pâques, comparativement à celle de Noël, n'est pas
à date fixe. Pâques peut tout aussi bien tomber à la fin de
mars qu'au milieu ou à la fin d'avril, de telle sorte que le commerce,
exception faite de la vente de fleurs et de chocolat, n'est pas axé en
fonction de la fête de Pâques, mais plutôt en fonction du
printemps.
Prolonger les heures d'ouverture des commerces jusqu'à 21 heures
pendant ces six jours n'aurait pas l'impact commercial anticipé.
Souvenons-nous que fleuristes, tabagies et dépanneurs ne sont pas
couverts par la présente loi. Ainsi, chacun peut se procurer fleurs et
chocolat à son gré, même le dimanche. De plus, le vendredi
saint est une journée chômée, fériée et
payée selon la Loi sur les normes du travail. Il représente une
journée entière de magasinage pour beaucoup de catégories
de travailleurs. Dans les circonstances, nous ne croyons pas opportun de
prolonger indûment les heures de commerce avant Pâques. (21
heures)
Le lundi suivant la fête de Pâques est le jour d'Action de
grâces. C'est avec surprise que des commerçants ont pris
connaissance de l'intention de retirer ces journées de l'article 2 de la
loi sur les heures d'affaires parmi les jours de fermeture. Ces derniers
considèrent qu'il n'y a pas beaucoup d'occasions dans une année
où ils peuvent bénéficier de deux journées
consécutives de congé. Encore là, la Loi sur les normes du
travail inclut ces deux journées comme chômées,
fériées et payées, et nos commerçants
préfèrent que ces deux journées demeurent incluses parmi
les jours de fermeture dans la loi sur les heures d'affaires.
Les 26 décembre et 2 janvier. Dans la loi sur les heures
d'affaires présentement en vigueur, les établissements
commerciaux peuvent ouvrir leurs portes à compter de 13 heures. Dans le
nouveau projet de loi 59, il en est autrement puisque les commerces pourront
ouvrir à compter de 8 h 30 le matin. Ce changement va dans le sens
contraire de celui souhaité par nos membres.
Rappelons-nous que les commerces sont ouverts jusqu'à 21 heures
pendant les quatorze jours précédant la fête de Noël.
Au sein de la petite entreprise souvent aux prises avec des problèmes de
personnel restreint, cela implique une surcharge de travail
appréciable.
La tendance qui prévaut depuis quelques années est
justement que nombre d'entre elles n'ouvrent plus leurs portes les 26
décembre et 2 janvier. On préfère accorder une
journée de congé additionnelle aux employés. C'est une
tradition vieille comme le monde que les fêtes de Noël et du Nouvel
An soient des journées de rencontre familiale.
Permettre l'ouverture des commerces dès le lendemain de ces
fêtes, à 8 h 30, vient bousculer ce contexte social et
empêchera nombre de rencontres familiales parce que des membres de la
famille de régions éloignées ne pourront se
déplacer, faute de temps. Cela nous apparaît inapproprié
dans les circonstances. Notre organisme, le Regroupement des centres- villes du
Québec, a obtenu des résolutions presque unanimes sur ce point
prônant la fermeture des commerces les 26 décembre et 2
janvier.
En complément, nous désirons porter à votre
attention une des conclusions générales de l'étude
réalisée pour votre ministère par la firme Cogem, laquelle
fut publiée en septembre 1975 sur l'attitude des consommateurs et
détaillants face à la Loi sur les heures d'affaires des
établissements commerciaux. Cette étude recommandait, pour les
lendemains de Noël et du jour de l'an, de fermer complètement. Il
est mentionné que 81,4% des détaillants avaient
déclaré vouloir fermer complètement ces deux jours.
À la suite de ce désir clairement exprimé, nous souhaitons
que des modifications soient apportées en tenant compte de ces
éléments.
Ajouter une heure de commerce le samedi en reportant la fermeture des
commerces à 18 heures: cette suggestion ne reçoit pas d'appui
dans le milieu que nous représentons. D'aucuns s'expliquent mal les
raisons justifiant cette position, d'autant plus que le commerçant et
les consommateurs s'accommodent bien de la situation présente. La
journée du samedi est une journée de congé pour nombre de
consommateurs et jamais on n'a décelé de file d'attente à
l'intérieur de nos magasins à l'approche de la fermeture.
Le jour de la fête nationale, le 24 juin, et le 1er juillet.
Après consultation auprès de nos membres, le printemps dernier,
le Regroupement des centres-villes du Québec avait fait la suggestion de
reporter les fêtes du 24 juin et du 1er juillet au lundi suivant la
fête, sauf si celle-ci tombe un lundi. Les raisons invoquées sont
pour éviter de briser une semaine de commerce en plein milieu. Nos
commerçants préfèrent éviter ce genre de situation,
d'autant plus qu'on pourrait agrémenter la saison estivale,
déjà si courte, de deux journées de congé
consécutives, c'est-à-dire dimanche et lundi. Nous vous
réitérons cette suggestion. Si elle ne peut être retenue,
nos commerçants souhaitent qu'à tout le moins, lorsque les jours
de la fête nationale et du 1er juillet tombent un dimanche, que ces
congés soient reportés au lundi.
Clarifications et nouvelles propositions. Les marchés aux puces.
À ce propos, nous apprécierions obtenir des précisions sur
l'esprit du projet de loi 59 dans le cas d'un détaillant de marchandises
usagées qui vendrait des marchandises neuves sur semaine et le dimanche.
Nos commerçants sont inquiets et demandent une protection claire et sans
équivoque à ce propos. Il est inacceptable qu'il se vende des
marchandises neuves dans les marchés aux puces.
Les industries vendant au détail. Particulièrement en
vogue dans la métropole,
les commerçants sont devenus impuissants devant l'ampleur du
phénomène. Voilà que les manufacturiers vendent
directement aux consommateurs. En plus de faire perdre des millions en revenus
de taxes, impôts et autres, ils concurrencent les commerçants sur
leur propre terrain et ce, sans avoir à se conformer aux mêmes
règles. Cette situation anormale est lourde de conséquences chez
les commerçants avoisinants. Elle mérite d'être
clarifiée et incluse dans la présente loi sur les heures
d'affaires. Les industries et manufactures devraient s'en tenir à la
mission première de leur entreprise, fabriquer des produits pour vendre
aux détaillants.
Les liquidateurs et vendeurs itinérants. De plus en plus, nous
retrouvons des liquidateurs et vendeurs itinérants qui s'installent,
pignon sur rue, un peu partout dans nos villes pour une période de 10
à 30 jours. Ces derniers ne paient pas de taxe, ou à peu
près pas de taxe d'affaires, et nos villes n'ont pratiquement aucun
recours contre eux. Bien souvent, ils s'installent dans le meilleur temps de la
saison pour un produit donné et disparaissent par la suite.
C'est une concurrence déloyale pour nos commerçants, qui
doivent payer des loyers annuels, maintenir leur personnel en fonction, payer
des taxes de vente, taxes d'affaires, et maintenir leur entreprise en
opération même dans les mois les moins rentables.
La présente loi doit corriger cette lacune en exigeant des taxes
d'affaires à tout le moins comparables à celles que paient nos
commerçants pour une année complète d'opération et
ce, avant l'ouverture dudit commerce.
L'application de la loi. Le processus qui prévaut lorsqu'un
commerçant enfreint la loi sur les heures d'affaires est complexe et
long. Ne serait-il pas opportun de donner, à la Sûreté du
Québec ou à la police municipale, le soin de constater une
infraction, sur plainte et que, immédiatement, s'engage le processus
judiciaire légal, au même titre que cela prévaut lors d'une
infraction au Code de la route?
M. le ministre, nous vous avons exprimé, dans le présent
mémoire, la position des membres du Regroupement des centres-villes sur
les amendements proposés dans le projet de loi 59, sur la loi des heures
d'affaires. Nos suggestions tiennent compte de la rentabilité de nos
commerces, si fragile d'ailleurs chez les petits commerçants
indépendants, localisés majoritairement dans nos centres-villes,
ainsi que du désir des propriétaires et employés à
participer, un tant soit peu, à la société des loisirs et
à une vie familiale.
Tout changement qui aurait pour effet d'allonger les heures d'affaires
compromet la concurrence équilibrée entre les petits et les gros
commerçants.
Le Président (M. Desbiens): M. le ministre.
M. Biron: M. Blackburn et M. Pelletier, je vous remercie de votre
mémoire. À la lecture de celui-ci, je constate que vous
êtes d'accord, en gros, sur les principales décisions et
orientations de la loi 59, en particulier, sur le fait d'inclure le dimanche:
ce qui n'était pas fait avant. Avec 1 $ d'amende pour ceux qui
contreviennent à la loi sur le dimanche, vous comprendrez que
c'était difficile de la faire observer. Maintenant qu'on a inclut le
dimanche dans la Loi sur les heures d'affaires des établissements
commerciaux, en augmentant les amendes, je pense qu'on répond à
votre principale demande.
Deuxièmement, vous dites: On ne peut pas annoncer l'ouverture
d'un établissement commercial à une heure ou à un jour
alors que l'ouverture est interdite par la loi. C'est très clair dans
notre présent projet de loi. Là aussi, je pense qu'on
répond à une de vos demandes. Le fait d'augmenter les amendes
d'une façon considérable, on répond à l'essentiel
de vos demandes.
Vous aviez quelques petites demandes particulières auxquelles
nous avons pu répondre, et vous le notez: L'augmentation des amendes et
surtout la clause voulant que le tribunal doit tenir compte des
bénéfices pour les contrevenants. On s'aperçoit que si
c'est un petit commerce qui ne vend pas grand-chose, le tribunal va dire:
L'amende minimale; mais si on vend des manteaux de fourrure, l'amende va
être maximale. Je pense que tout le monde réalise que cela a
beaucoup plus de souplesse que l'ancienne loi. Inclure les boutiques
d'artisanat, les galeries d'art, etc., je pense que vous étiez
également d'accord là-dessus.
Il y a une question que je vais vous poser tout à l'heure, parce
que des gens sont venus qui sont dans le centre-ville ou le deviendront,
éventuellement, qui vendent, en particulier, des fruits et
légumes frais et disent: On voudrait faire partie des exclusions. Les
gens qui font des expositions agricoles - juste avant le souper ce soir
-disaient: On veut faire partie des exclusions. Donc, il y a beaucoup de gens
qui demandent d'être inclus dans les exclusions. Je vous demande votre
point de vue sur ces gens qui sont des commerçants de chez vous, de
votre groupement ou qui pourraient, éventuellement, devenir des
commerçants de votre groupement qui demandent d'être inclus dans
les exclusions.
Une voix: ...
M. Biron: C'est cela... Le soin d'autoriser les
établissements commerciaux à l'occasion
d'événements spéciaux, on veut quand même les normer
jusqu'à un certain
point. Aujourd'hui, on a eu des suggestions d'avoir au moins l'accord
minimum de la municipalité avant de dire: Oui, c'est une zone
touristique. Je pense qu'il faut limiter avant d'autoriser des exclusions
temporaires pour des activités dites touristiques.
Maintenant, parmi les autres demandes qui ne sont pas dans la loi, ou
que la loi comporte et que vous n'aviez pas demandé, ce sont les six
jours avant Pâques et le samedi. Vous comprendrez que l'objectif... il y
a des gens qui disent: II faut refermer la loi, la resserrer; d'autres disent:
II faut ouvrir la loi. C'est difficile de tirer en plein milieu. On ne peut pas
répondre juste à un groupe sans tenir compte des interventions
des autres.
Ceux qui veulent ouvrir davantage leur commerce nous disent: Plus on va
avoir d'heures d'affaires, plus on donne d'occasions au consommateur, plus il
va dépenser de l'argent. C'est une logique qui peut être suivie et
qui peut être acceptée. Ils disent: Donnez-nous plus d'occasions
de faire du commerce et on va vendre davantage. On a cherché des
périodes de l'année où on pourrait accentuer le commerce;
par exemple, deux semaines avant Noël et une semaine avant Pâques.
Je remarque que vous dites qu'étant donné que Pâques est
une fête flexible, cela ne rapportera pas autant de dividendes.
La question que je vous pose est la même que celle que j'ai
posée au Conseil québécois du commerce de détail.
N'y aurait-il pas une autre période de l'année, par exemple, les
deux premières semaines de mai, où l'on pourrait dire: C'est
statutaire, cela accélère le commerce, les gens
déménagent, c'est le printemps et les gens sont prêts
à acheter davantage? N'y aurait-il pas une autre période de
l'année, en plus de celle qui précède Noël et qui, je
pense, rapporte à tout le monde, où l'on pourrait dire: On fait
une certaine ouverture pour accélérer et accentuer le commerce?
Tout cela dans le but d'avoir de plus longues heures non pas pour le plaisir
d'avoir de plus longues heures, mais pour accentuer le commerce et inviter le
consommateur qui économise à investir plus d'argent dans
l'activité économique.
C'est la même chose pour le samedi. On a pensé qu'en
rajoutant une heure le samedi on répondait à la demande de
beaucoup de gens qui disaient: Rallongez les heures d'ouverture. À
présent, le Conseil québécois du commerce de détail
nous a dit: Non, le samedi, de 17 heures à 18 heures, on ne fera pas
plus d'affaires, mais si vous ajoutiez une demi-heure les jeudi et vendredi
soir, les gens qui entrent dans le magasin à 19 h 45 ou à 20
heures, après avoir travaillé, qui sont pressés de
ressortir et qui n'ont pas le temps de prendre une décision quant
à l'achat d'un objet lourd, un meuble, un téléviseur ou
quelque chose du genre, si cet homme pouvait venir avec sa femme le jeudi soir,
entrer au magasin à 19 h 45 ou 20 heures et en ressortir à 21 h
30, cela lui donnerait plus de temps pour prendre une décision et faire
son achat. Autrement, il ressort, il n'a pas encore décidé et il
s'en va ailleurs; et ce n'est pas sûr qu'il décide.
Je vous pose la même question: N'y aurait-il pas lieu de
déplacer - en tout cas, c'est une suggestion que nous avons eue du
Conseil québécois du commerce de détail -l'heure du samedi
à un autre jour de la semaine, ou au mercredi soir? Des gens nous ont
dit: Pourquoi ne rallongez-vous pas jusqu'à 19 heures le mercredi soir?
On va peut-être donner l'occasion aux gens de dépenser plus. Dans
ce sens, l'objectif est toujours d'essayer de répondre au maximum de
demandes qu'on a reçues d'un peu partout, de tous les secteurs
d'activité, qui nous disent: Donnez l'occasion aux gens de
dépenser un peu plus.
Le lendemain de la fête de Pâques, le jour de l'Action de
grâces, le 26 décembre et le 2 janvier sont, encore selon le
Conseil québécois du commerce de détail, d'excellents
jours pour les consommateurs. On nous a dit que le lendemain de Noël et du
jour de l'an, en particulier, alors qu'on est ouvert une demi-journée
seulement, plutôt que toute la journée - c'est ce que les gens du
commerce de détail nous ont dit - les gens dépenseraient plus, si
on pouvait ouvrir le matin et leur donner toute une journée. On aurait
l'occasion de faire d'excellentes journées de ventes. Je vous dis ce
qu'on a entendu et je vous demande ce que vous en pensez, s'il y a lieu de
regarder cela encore une fois, mais toujours dans l'optique de ne pas faire des
heures pour des heures, mais de donner l'occasion au consommateur de
dépenser davantage.
Quant au jour de la fête nationale, le 1er juillet,
déjà, la demande nous est venue ce matin. J'ai dit que
j'étais sympathique à cela, parce que je le faisais lorsque
j'étais dans les affaires; je signais des ententes avec mes syndicats
pour pouvoir reporter la fête au lundi ou au vendredi, pour allonger la
fin de semaine. En principe, je dis: Oui, je suis sympathique. Je pense que
l'Opposition a également dit: Oui, on y serait aussi sympathique, on
aimerait bien regarder cela avant de prendre une décision
définitive, mais il y aurait peut-être lieu d'en venir à
une suggestion ou à un consensus qu'on pourrait faire ensemble et
suggérer au gouvernement.
Quant aux marchés aux puces, en augmentant les amendes, on va
faire en sorte que les marchés aux puces vendent véritablement
des articles usagés et pas autre chose. Le fait de donner l'occasion aux
policiers de la Sûreté du Québec et aux policiers
municipaux de porter plainte en
vertu de cette loi, je pense, donne aux gens l'occasion de recevoir des
plaintes, d'aller voir et de porter tout de suite plainte. Étant
donné que les amendes sont plus élevées, on prétend
qu'au moins - on ne garantit pas que ce sera à 100% - ceux qui vendent
toute une vitrerie de montres, on pourra les arrêter facilement. Ils
peuvent peut-être vendre une, deux ou trois montres usagées, mais
ils ne peuvent pas vendre 50 montres usagées d'un coup sec. On pourrait
peut-être faire quelque chose rapidement, compte tenu que les amendes
sont augmentées, que les policiers municipaux et provinciaux peuvent
maintenant porter plainte directement. On est d'accord avec vous qu'il faut
absolument dire que les marchés aux puces vont vendre des choses
usagées, des articles usagés, mais rien d'autre. On croit qu'en
augmentant les amendes on pourra atteindre nos objectifs. En tout cas,
j'aimerais vous entendre aussi un peu là-dessus. (21 h 15)
Quant aux industries manufacturières qui vendent au
détail, les lois du marché vont jouer leur jeu. Les grossistes ou
les détaillants ne devraient pas, à mon point de vue, acheter des
entreprises qui leur font concurrence. Lorsque j'étais en affaires, je
n'aurais jamais pensé vendre à un client de mes clients, parce
que mes clients auraient cessé d'acheter chez moi. Mais ce n'est pas par
une loi qu'on est capable de discipliner le marché des manufacturiers,
des grossistes ou des détaillants. C'est par des pressions plus
économiques que vous pourriez faire dans ce sens. Je ne vois pas comment
on pourrait, nous autres, policer tout cela. Les liquidateurs, les vendeurs
itinérants, on est d'accord en principe avec vous qu'il faut qu'eux
aussi paient leurs taxes municipales comme n'importe qui d'autre. S'il faut
agir à travers les lois municipales pour les taxes d'affaires, il faudra
y voir, mais je ne crois pas que c'est à travers la loi sur les heures
d'ouverture qu'on peut réglementer l'autre loi qui a un objectif
précis - on est d'accord avec vous là-dessus - à savoir de
faire en sorte que ceux et celles qui vendent, même pour une
période de quelques semaines, temporairement, paient leurs taxes
municipales ou leurs taxes d'affaires de la même façon que les
établissements qui vendent 52 semaines par année.
Quant à l'application de la loi - je vous l'ai dit tout à
l'heure et je le répète - c'est maintenant permis à la
sûreté municipale et à la Sûreté du
Québec d'agir sur réception d'une plainte et on croit que cela va
aller beaucoup plus rapidement. Dans ce sens, on a répondu à
beaucoup de vos demandes, mais, quand même, j'aimerais vous entendre sur
cette ouverture ou cette demande que les gens nous font. Il y a beaucoup de
gens, dans le fond, qui ne respectent pas à l'heure actuelle la loi sur
les heures d'affaires ou la loi sur le dimanche parce que les amendes sont
tellement ridicules que cela vaut la peine de passer à
côté, mais il y a beaucoup de commerçants qui ne respectent
pas la loi présentement. Ils ont des raisons pour le faire. Ils
prétendent qu'il y a beaucoup de commerce à faire le dimanche
parce que la consommation a évolué considérablement. Il
faut quand même répondre à une partie de leurs demandes. Y
a-t-il lieu d'essayer de trouver un consensus quelconque parmi tous ces
gens-là pour faire en sorte de répondre à une
préoccupation qui peut être là, d'une partie du monde
économique et faire des changements là-dessus? J'ai dit au
début de la commission que nous sommes ouverts à toute
idée qui pourrait faire un consensus chez beaucoup de gens d'affaires et
qui aiderait à stimuler le développement économique du
Québec.
Le Président (M. Desbiens): M.
Blackburn.
M. Blackburn: M. le Président, M. le ministre. Je vais
d'abord continuer de parler de l'augmentation des amendes. En ce qui concerne
cet aspect, pour le Regroupement des centres-villes du Québec, ce qui a
été proposé nous apparaît très acceptable.
D'ailleurs, comme on le précisait, cela avait été une de
nos recommandations que les médias publicitaires ne puissent pas
publiciser un commerce qui veut contrevenir à la loi. Déjà
là, si on veut, c'est un double aspect ou une double
sécurité qui va venir empêcher ce type d'infraction. C'est
un aspect extrêmement intéressant. En ce qui concerne les
marchandises usagées, dans mon esprit, ce n'est pas clair, de la
façon que cela est rédigé. Supposons que, sur semaine, un
marché aux puces vende de la marchandise neuve. De quelle façon
devient-il illégal?
M. Biron: Sur semaine, il a le droit de vendre de la marchandise
neuve.
M. Blackburn: Et c'est un problème.
M. Biron: C'est un commerce comme n'importe quel autre durant les
heures d'affaires.
M. Blackburn: Oui.
M. Biron: Lorsqu'il tombe en dehors des heures d'affaires, il n'a
pas le droit de vendre de la marchandise neuve dans certains secteurs. Si
c'était dans l'alimentation, avec trois employés, il serait dans
l'ordre mais, aux heures d'affaires, il est considéré comme un
commerce, comme n'importe quel autre.
M. Blackburn: Bon! Mais c'est peut-être cet aspect qui nous
inquiète, parce que ce qui se vend dans ces marchés aux
puces,
lorsqu'on parle de marchandise neuve, bien souvent, le lendemain, une
semaine ou quinze jours après, vous ne pouvez plus retracer ces
gens-là. Et la marchandise neuve, d'où provient-elle? Il se
produit à ce moment-là une concurrence qui n'est pas correcte par
rapport à nos commerçants. Bien souvent, ces gens-là,
comme ils sont là pour peu de temps aussi, ne paient pas de taxes. Ils
ne paient rien. C'est pour cette raison qu'on pensait que l'esprit du projet,
c'était pour les marchandises usagées, qu'il n'était
absolument pas question que ces marchés aux puces puissent vendre de la
marchandise neuve en tout temps.
M. Biron: On ne peut pas contrôler cela, parce que
n'importe qui peut lancer un nouveau commerce aujourd'hui et le fermer le
lendemain. Ce sont les lois du marché qui veulent cela. Ceux qui
s'appellent des marchés aux puces peuvent, aux heures d'affaires, faire
ce que n'importe quel commerçant a le droit de faire. C'est un individu
qui a le droit de se lancer en commerce. En dehors des heures d'affaires -je
suis d'accord avec vous - il faut qu'il respecte la même loi que vous.
Aux heures d'affaires, il respecte la même loi que vous aussi. Il a le
droit de vendre de la marchandise neuve, parce que c'est un commerçant
comme n'importe quel autre qui paie ses taxes et tout cela.
M. Brosseau (Jen-O.): En réalité, c'est du neuf,
mais ils vont nous dire que c'est de la marchandise usagée. Il faudrait
spécifier dans la loi que c'est bien du vieux, de l'usagé, parce
que de l'usagé, il y en a partout. Il y en a plusieurs qui disent qui
vendent ça. Dans les jeans, c'est la même affaire, c'est vendu
là. Les accessoires électriques sont vendus là. Il faut
faire attention à ça, c'est rendu de vrais commerces.
M. Biron: Là-dessus, on est d'accord avec vous autres
qu'il faut faire en sorte que les marchés aux puces, qui vendent en
dehors des heures d'affaires, sont dans l'illégalité s'ils
vendent de la marchandise neuve...
M. Brosseau: Hors des heures d'affaires.
M. Biron: Hors des heures d'affaires, ce n'est que de la
marchandise usagée.
M. Brosseau: On est d'accord là-dessus.
M. Biron: Sur les heures d'affaires, ils sont
considérés comme n'importe quel commerce.
M. Brosseau: Pour revenir à vos questions de tout à
l'heure, c'est quand ce sont des expositions, des festivals ou des foires. Vous
avez dit: une exposition. C'est un mot qui en dit long et sur lequel on peut
jouer. C'est pour ça qu'on a ajouté "une foire annuelle". Dans un
centre commercial où on est commerçant... Vous nous avez dit tout
à l'heure qu'on était brillant. On ne l'est pas tout le temps. Si
ces gens font une exposition toutes les semaines, ils vont être ouverts
toutes les semaines. C'est pour ça que je veux qu'on ajoute
"annuellement".
M. Biron: D'accord. Je pense qu'on n'a jamais donné de
permis pour un centre commercial...
M. Brosseau: Non, mais en cas. Ils peuvent jouer sur les mots,
ils ont des experts. Nous, on n'a pas d'experts, il faut l'être
nous-mêmes.
M. Biron: C'est implicite pour nous, il s'agit juste de clarifier
tout ça.
M. Brosseau: Merci. Vous m'avez parlé de Pâques. Je
suis commerçant, j'ai un magasin de vêtements pour femmes d'une
assez bonne dimension. Cette semaine-là...
M. Biron: Les vêtements sont d'assez bonne dimension ou
votre magasin?
M. Brosseau: Mon magasin et mes vêtements aussi. La semaine
de Pâques, c'est une semaine zéro pour nous autres. La madame
achète avant parce que ce n'est pas le temps à Pâques de
faire réparer son stock. Ce n'est pas une bonne semaine. Vous me disiez
tout à l'heure, et je ne l'ai pas trouvé si pire: Essayez de
trouver une autre bonne semaine. Je suis d'accord avec vous, on peut trouver
une autre bonne semaine. La semaine de Pâques, c'est vraiment la semaine
des fleurs et du chocolat.
M. Biron: La seule question que je vous pose là-dessus est
celle-ci: L'idée, c'était de stimuler le commerce pendant deux
semaines l'hiver, à Noël, pour que les gens aient tellement
d'occasions... D'ailleurs, je pense que les marchands vont en profiter pour
dire: C'est ouvert, profitez-en. Ça fait une raison de faire de la
publicité. J'aurais voulu donner la même période au
printemps pour donner un boom. On sait que si c'est toujours ouvert les gens
vont se tanner et n'iront pas, mais si c'est ouvert pour une période
donnée et que ça referme après, ils vont peut-être
en profiter et cela va vous donner l'occasion de faire de la publicité.
C'est cette ouverture-là que je fais. Je comprends que Pâques
étant une fête flexible, ce n'est pas aussi bon, mais il y a
peut-être lieu d'en venir à une suggestion précise
où les gens pourraient dépenser plus.
M. Brosseau: C'est à y penser. Vos heures, 9 h 30 les
jeudi et vendredi, je ne suis pas contre. J'aime mieux ça que le samedi
parce que le samedi, si nous voulons sortir... Quand on ferme à 17
heures, on n'est pas sorti de là. Si on ferme à 18 heures,
ça veut dire qu'on est chez nous à 19 heures. Ensuite, si on veut
souper et aller quelque part, on ne le peut pas.
M. Biron: La question que je veux vous poser là-dessus est
celle-ci: Si vous aviez le choix d'une heure, vous aimeriez mieux une
demi-heure les jeudi et vendredi, parce que c'est meilleur pour le commerce,
que le samedi de 17 heures à 18 heures.
M. Brosseau: Oui, j'aimerais mieux une demi-heure chaque
soir.
M. Biron: D'accord.
M. Brosseau: À Noël et au jour de l'An, le jour de
l'An n'est pas bon. Mettez-vous ça dans la tête, ce n'est pas bon.
Même si on vous a dit que c'était bon... Noël, c'est bon pour
ceux qui vendent des décorations de Noël, des boules à 50%
de rabais. À part ça, ce n'est pas bon. Eux autres font de
grosses affaires parce qu'ils vendent à 50% ou font des remises. Moi, je
n'ouvre pas parce que je ne veux pas avoir de remises le lendemain. Je ne suis
pas menteur, je n'ouvre pas mon commerce, je ne l'ai jamais ouvert. Un gars
arrive, il a eu une chemise en cadeau de sa mère et il ne la veut pas.
Il dit: Remets-moi mon argent. Si le nom est moyennement bon, tu remets
l'argent. On s'est fait faire quelquefois et depuis ce temps-là on
n'ouvre plus. On s'habitue.
M. Blackburn: Si on permet d'ouvrir à 8 h 30 le matin,
ça n'a pas de bon sens. Imaginez-vous, les commerces ferment la veille
de Noël et ils vont ouvrir - ils n'ont qu'une journée de
congé - le lendemain matin à 8 h 30.
M. Brosseau: On n'a pas de congé dans l'année, nous
autres; on travaille six jours par semaine. Là, vous enlevez tous les
pauvres petits congés qu'on avait en cours de route. C'est dur de faire
avaler ça aux employés. Je leur en ai parlé et... Les
trois quarts ne sont qu'à temps partiel et ils ne veulent pas en
entendre parler non plus et on est obligé de les payer quand même.
Ceux qui en ont beaucoup doivent avoir un "staff" juste pour remplacer ceux qui
sont en vacances.
M. Biron: D'accord. Il y a beaucoup de gens qui, dans des
centres-villes... Il y a les Pharm-escomptes Jean Coutu, les Pharmaprix et les
autres. Vous aurez éventuellement des
OCTOFRUIT. En tout cas, il y a beaucoup de spécialistes qui ne
sont pas couverts par la loi dans le sens de leur permettre l'ouverture, mais
qui seront éventuellement dans vos associations des centres-villes.
Qu'est-ce que vous dites à ces gens-là?
M. Brosseau: Pour les pharmacies, il va falloir que vous mettiez
une limite, parce que c'est rendu des marchands généraux
modernes. On était à l'ancienne; on est rendu moderne. Ils
vendent des bas, des sous-vêtements. Ils vendent n'importe quoi
aujourd'hui. Qu'ils vendent ce qu'ils ont à vendre, je suis d'accord,
parce qu'ils vont avoir le droit de vendre des fleurs, du chocolat...
Là, on peut avoir n'importe quoi le dimanche.
Une voix: Même des claques.
M. Brosseau: Ils vendent des claques. Je n'aurai qu'à
aller au cours, prendre un cours de pharmacien et je vais pouvoir vendre
n'importe quoi dans mon maudit magasin et ouvrir le dimanche. Elle est anormale
cette loi. Un gars qui est assez brillant pour faire son cours de pharmacien,
il va avoir le droit de vendre du linge le dimanche, dans sa pharmacie. Il y a
de l'abus. Vous avez vu le nouveau magasin qu'ils ont construit, à
Saint-Léonard; il y a à peu près 40 000 pieds. Ce n'est
plus une pharmacie, bonne sainte Anne. Je suis allé voir cela.
M. Blackburn: Là-dessus, je pourrais ajouter quelques
mots, M. le ministre. Vous dites, entre autres, que les catégories 1
à 7 peuvent vendre de menus articles et, dans ces catégories 1
à 7, vous avez des librairies, tabagies, restaurants, pâtisseries,
pharmacies, épiceries et établissements de la
Société des alcools. C'est sûr que si l'expression "menus
articles" n'est pas précisée, cela va laisser place à
beaucoup d'abus à l'avenir.
M. Biron: D'accord. La cour, à cause de sa jurisprudence,
a déjà rendu plusieurs jugements en disant que "menus articles",
cela prend deux conditions ensemble: pas plus de 20 $ ou environ - ce peut
être 25 $ ou 30 $ avec les années, à cause de l'inflation -
et quelque chose qu'on peut tenir dans la main. C'est quand même
limité jusqu'à un certain point.
Dans la nouvelle loi, on a dit "les établissements", alors que,
dans l'ancienne, c'était "les produits". On nous a également
suggéré, ce matin, qu'on revienne d'ailleurs, il y aura d'autres
mémoires - à la définition de "produit" qui serait plus
claire que celle du mot "établissement". Je suppose que...
M. Brosseau: Bien d'accord là-dessus.
M. Biron: Vous êtes d'accord là-dessus.
M. Brosseau: Juste les catégories 1 à 7, ceux qui
vont avoir le droit de vendre dans les pharmacies, il me semble qu'ils en ont
pas mal. Ils pourraient se débrouiller suffisamment avec cela.
M. Biron: D'accord.
M. Blackburn: Je peux apporter un complément de
réponse, M. le ministre. Lorsqu'on parle de prolonger les heures
d'affaires, vous savez que chez les commerçants des centres-villes,
c'est la PME qu'on y retrouve. Ce sont les petits commerçants. Souvent,
c'est le patron lui-même qui est là avec ses enfants ou encore un
ou deux employés. Au moment même où vous prolongez les
heures d'affaires, vous leur donnez plus d'heures de travail et la
rentabilité est loin d'être prouvée. Je vous signale
également que le moment où les centres commerciaux font
l'importance de leurs chiffres d'affaires, c'est le jeudi soir, en tout cas les
jeudi, vendredi et samedi. Lorsqu'on va prolonger d'une demi-heure le jeudi
soir et le vendredi soir, je sais qui va faire de l'argent. C'est pour cela
qu'il faut être extrêmement prudent, sinon on va tout
déséquilibrer et, contrairement à ce qui s'en vient au
point de vue de la revitallisation des centres-villes, on risque d'avoir
l'effet inverse. Je trouve qu'il faut être très prudent, mettre la
pédale douce avant de prolonger les heures d'affaires. D'ailleurs, ce
n'est pas pour rien que 46 associations réparties à là
grandeur du Québec vous disent qu'elles n'en veulent pas. Elles veulent
le statu quo, elles se prononcent librement et elles refusent
catégoriquement de prolonger les heures d'affaires. S'il y avait la
moindre parcelle de rentabilité - ce sont aussi des hommes d'affaires -
elles auraient dit oui.
M. Biron: Vous devez reconnaître que lorsque les gens
demandent le statu quo, c'est qu'ils demandent que le dimanche ne soit pas
couvert, alors que nous avons mis davantage. On a couvert le dimanche. Dans la
Loi sur le dimanche, d'Ottawa, c'est 1 $ d'amende. N'importe qui pouvait passer
outre.
M. Blackburn: On s'entend sur le mot "dimanche".
M. Biron: Je pense qu'on s'entend là-dessus.
M. Blackburn: C'est bien sûr. Il n'y a pas de doute sur le
mot "dimanche". C'est clair. (21 h 3D)
M. Biron: D'accord. On s'entend que la présente loi
répond à la grande majorité de vos demandes. On n'a pas
répondu à 100%, parce que, d'autre part - c'est là le
problème, dans le fond, des gens d'affaires du Québec - il y a
d'autres gens d'affaires qui demandent la libéralisation
complète. C'est peut-être la faiblesse du monde économique
du Québec. C'est de ne pas se parler assez, de ne pas arriver à
un consensus, et d'arriver en désordre et dire au gouvernement: Vous
tranchez tout cela. On en a sur un bord et on en a sur l'autre. Il y a quand
même un bon nombre de gens qui ouvrent le dimanche présentement et
ces gens-là ont des raisons. Ils disent: Ne nous pénalisez pas
parce qu'on veut travailler. En fait, ce qu'on a choisi, c'est de
répondre à la demande de la grande majorité,
c'est-à-dire fermer le dimanche, augmenter les amendes pour que tout
soit bien étanche, mais de répondre quand même à la
demande de certaines minorités qui disaient: Donnez-nous au moins
l'occasion de travailler un peu plus. On a ajouté de petites choses,
mais de très petites choses. C'est dans ce sens, dans le fond, qu'on a
essayé de répondre le mieux possible aux demandes des
différentes associations de gens d'affaires qui intervenaient, alors
qu'à mon point de vue les associations de gens d'affaires auraient
dû se parler, en venir à un consensus quelconque et dire au
gouvernement: Voilà, on en est venu à un consensus; c'est dans ce
sens qu'on veut aller.
M. Blackburn: Je voudrais aussi revenir à l'histoire des
vendeurs itinérants et des marchés aux puces. Tel que la loi est
rédigée, si on a bien compris tantôt, le marché aux
puces va pouvoir vendre de la marchandise neuve sur semaine. C'est donc dire
que ça devient l'équivalent d'un vendeur itinérant et,
selon ce que je connais actuellement de la loi, un vendeur itinérant va
à la municipalité et demande un permis. On lui facture les frais,
le coût d'émission du permis, qui est à peu près de
5 $, 10 $, 15 $ ou 20 $, et la personne fait ses affaires. Cela veut dire qu'on
donne une accessibilité incroyable à ces gens par comparaison
à l'autre commerçant qui doit payer le loyer et respecter toutes
sortes de normes. Et les autres vont vendre n'importe quoi, de la marchandise
provenant d'on ne sait où.
M. Biron: M. Blackburn, je suis d'accord avec vous. La seule
chose, c'est que la loi sur les heures d'affaires ne va pas régler
l'autre loi sur la taxe d'affaires et tout cela. On est prêt à
faire des suggestions au ministre des Affaires municipales quant aux
municipalités, mais on ne peut régler par une loi sur les heures
d'affaires tout ce qui ne fonctionne pas ailleurs dans le commerce. Quant au
fond, je suis d'accord avec vous. Il
faut que ceux qui font des affaires paient au moins des taxes au
même titre que d'autres qui font des affaires.
M. Blackburn: Si on précisait que le marché aux
puces ne peut vendre de la marchandise neuve en tout temps, on réglerait
déjà une chose.
M. Biron: N'importe qui peut ouvrir un commerce. Il n'a
qu'à ne pas l'appeler marché aux puces et il a le droit de vendre
en tout temps. Marché aux puces, c'est un nom. On s'entend quand
même sur le fait qu'en dehors des heures d'affaires il faut que ce soit
très sévère.
M. Brosseau: Se servir du nom marché aux puces pour ouvrir
le dimanche.
M. Biron: C'est cela.
M. Brosseau: Pour revenir à la taxe, le greffier d'une
ville, ne peut rien faire. Cela prend au moins trois ans avant d'entreprendre
des procédures contre le gars. Il dit: Que veux-tu que je fasse? Il y en
a des intelligents; ils ouvrent le 4 et ils ferment le 28, ce qui fait qu'ils
n'ont pas de taxe à payer, ils n'ont même pas de permis à
demander.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Laporte.
M. Bourbeau: Le ministre vient de nous résumer votre
mémoire et, étant un ineffable optimiste, il a conclu que vous
étiez d'accord avec la très grande majorité du projet de
loi. Il reste quand même certains points où vous avez
marqué votre opposition, votre désapprobation. Je pense que, pour
faire la contrepartie, j'aimerais en parler un peu. Il y a la question de la
semaine de Pâques. En fait, c'est plutôt au ministre que je
voudrais adresser la question. J'ai lu plusieurs mémoires. Je ne les ai
pas tous lus encore, mais je vais le faire demain pour le reste. Je n'ai pas vu
encore un seul mémoire qui demande spécifiquement au ministre de
faire en sorte que la loi permette l'ouverture des magasins, durant la semaine
de Pâques, jusqu'à 21 heures. Puisque le ministre nous a dit
à plusieurs reprises qu'il tentait de répondre aux demandes du
milieu, je me demande pourquoi on fait un tel effort pour que la loi permette
l'ouverture le soir durant la semaine de Pâques, alors que personne ne la
demande.
C'est la même chose pour le samedi, de 17 à 18 heures. Je
n'ai vu cela dans aucun mémoire. Cela existe peut-être, vous me le
direz. Non seulement personne ne l'a demandé, mais la très grande
majorité des mémoires demande de ne pas ouvrir le samedi de 17
à 18 heures. On invoque toutes sortes d'arguments qui m'apparaissent
intéressants et valables. L'argument qui revient toujours, c'est celui
de la vie privée des employés, des commerçants qui veulent
protéger leur soirée du samedi. On parle de qualité de la
vie, etc. J'aimerais que le ministre nous dise pourquoi il tient tellement
à ouvrir le samedi, de 17 à 18 heures, quand il semble que
l'ensemble des intéressés s'oppose à cette mesure?
Pourquoi, également, permettrait-on d'ouvrir, le soir durant la
semaine de Pâques, alors que l'ensemble des intervenants demande de ne
pas le faire? Il faut bien penser que, si on permet l'ouverture, durant la
semaine de Pâques, jusqu'à 21 heures, il va y en avoir
quelques-uns, surtout les grandes chaînes... On voit dans les
mémoires que ce sont les chaînes qui poussent pour une plus grande
libéralisation. Et les chaînes, cela représente quoi? C'est
10%, peut-être, des commerçants; de 5% à 10%. Dans les
statistiques, on voit qu'elles ne sont pas tellement nombreuses. Tout cela va
forcer, par voie de conséquence, l'ensemble des petits
indépendants à suivre de force, si je peux dire, les
chaînes pour ne pas se faire avoir, pour employer une expression que vous
connaissez bien. J'aimerais que le ministre nous explique cela, une fois pour
toutes. Cela nous éviterait d'avoir à en reparler après et
la même remarque s'applique en ce qui concerne le lundi de Pâques
et le jour d'Action de grâces. Il y a beaucoup de réticence dans
plusieurs mémoires, mais peut-être un peu moins que les deux
autres fois. Au sujet du 26 décembre et du 2 janvier, on voit beaucoup
de mémoires qui demandent également de ne pas ouvrir. Certains
demandent le statu quo, jusqu'à 13 heures de l'après-midi. Ce
matin, il y a un groupe qui est venu et qui nous a dit: Nous, on aimerait
ouvrir à 8 h 30 le lendemain de Noël et le jour de l'An, mais cela
ne semble pas être... Il n'y en a beaucoup qui nous ont dit cela. Il y en
a très peu, en fait, d'après ce que j'ai pu voir. Quant à
la fête nationale et au 1er juillet, le ministre a indiqué une
ouverture tout à l'heure et possiblement qu'il y a moyen de trouver une
solution à ce problème. En fait, ce que je vois, c'est que cela
revient dans chaque mémoire, ces points-là, et j'aimerais que le
ministre nous éclaire un peu là-dessus.
M. Biron: Plusieurs commerçants ouvrent déjà
à l'heure actuelle en dehors des heures d'affaires - on sait combien il
y en a qui vendent maintenant le dimanche, en tout temps - et beaucoup de
consommateurs et de consommatrices nous disent: Nous voulons plus d'heures
d'ouverture, ouvrez. Au lieu de répondre globalement à ces gens
en disant: Oui, on répond à vos demandes, d'un autre
côté, on a aussi les associations de commerçants qui nous
disent: Non, n'ouvrez
pas. On a essayé de trouver une façon de répondre
en partie - et pas beaucoup, en très petite partie - à la demande
de ceux et celles qui nous demandent d'ouvrir plus en disant: On va choisir
certaines périodes de l'année ou une heure additionnelle par
semaine à une période... On a choisi le samedi. On a eu des
suggestions pour le vendredi soir et le jeudi soir qui me semblent, en tout
cas, intéressantes. Ce qu'on a voulu faire, dans le fond, c'est de
répondre en très petite partie aux groupes qui nous demandent
d'ouvrir davantage, mais d'ouvrir tout le temps en disant: On ne peut pas
ouvrir tout le temps, mais on limite un peu et on vous donne un peu plus
d'ouverture en répondant à la majorité des demandes de
l'autre groupe qui nous demande d'avoir des heures plus rigides avec des
amendes plus élevées. C'est sûr que le fait d'avoir des
amendes plus élevées va pénaliser tous ceux et celles qui
ouvrent maintenant le dimanche, parce qu'ils devront fermer leurs portes.
Est-ce qu'on peut leur dire: On vous pénalise et on ne vous donne rien
en contrepartie ou s'il ne faut pas dire: En contrepartie, on vous donne
quelques heures par ci par là, et essayez d'en profiter le mieux
possible, parce que l'argument de ces gens-là, c'est que, plus il y a
d'heures, plus il y a de commerce. On n'a pas voulu répondre à la
totalité - et loin de là - de leurs demandes, mais, d'un autre
côté, on essaie de répondre à la majorité des
commerçants.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Laporte.
M. Bourbeau: Une observation. Justement, le ministre nous dit: On
a eu des consommateurs... En fait, il est évident que la volonté
de libéraliser un peu les heures d'ouverture, cela ne pouvait venir que
des consommateurs, forcément, parce que, chez les marchands, on voit
qu'il y a une très forte réticence. Or, si j'ai bien compris, ce
que les consommateurs souhaitent, ce sont des heures additionnelles, mais c'est
surtout le dimanche. Je ne dis pas qu'il y a un très grand nombre de
consommateurs qui veulent voir ouvrir le dimanche, parce que je pense que les
statistiques donnent quand même au Québec moins de 40% des
consommateurs qui souhaiteraient une libéralisation le dimanche. C'est
surtout, je crois, le dimanche que les consommateurs voudraient des heures
additionnelles ou peut-être le jeudi et le vendredi, une demi-heure ou
une heure de plus, mais, la semaine de Pâques, je ne vois pas que les
consommateurs aient demandé cela. C'est peut-être ce qu'ils ont
demandé spécifiquement, mais je ne le pense pas, et je ne pense
pas également que les consommateurs aient demandé l'heure
additionnelle du samedi.
Dans le document de synthèse que le ministère a
préparé à la suite de la consultation, en regardant cela,
il m'apparaît - en tout cas, à première vue, je me trompe
peut-être - qu'on n'a pas fait une très grosse consultation
auprès des consommateurs. Si on regarde l'ensemble de tous ceux qui ont
été consultés, c'est plutôt des employés de
commerce, des commerçants, des associations locales de
commerçants, des associations provinciales de marchands que des
consommateurs. Il y a eu, en fait, d'après ce que je vois, douze
consommateurs et deux associations de consommateurs. Cela m'apparaît peu
par rapport à l'éventail de tous les autres qui ont
été consultés et qui sont des commerçants, des
marchands, etc.
J'ai l'impression que l'échantillonnage chez les consommateurs
est assez faible et qu'il y aurait peut-être lieu de pousser davantage la
consultation chez les consommateurs et peut-être qu'à ce
moment-là, on sera moins réticent à ouvrir la machine, si
je peux dire. De notre côté, ce qui nous apparaît
jusqu'à maintenant, c'est qu'il n'est pas du tout clair que les
consommateurs - enfin, ce n'est pas très clair - souhaitent beaucoup une
libéralisation. Je ne pense pas que la consultation ait
été faite d'une façon très poussée du
côté des consommateurs. En conséquence, on est très
hésitant à suivre le ministre dans la voie de la
libéralisation des heures d'affaires. De toute façon, même
si on nous prouvait que les consommateurs ont vraiment été
consultés d'une façon très efficace et qu'ils souhaitent
une libéralisation, je ne vois pas encore que la semaine de Pâques
et que le samedi de 17 heures à 18 heures, ça découle
nécessairement de la consultation.
M. Biron: Lorsque les consommateurs ou les commerçants
nous demandent l'ouverture des magasins le dimanche, on dit non. En disant non
et en augmentant les amendes, je pense qu'il faut quand même essayer de
faire comprendre à ces gens-là qu'on fait un effort
vis-à-vis d'eux parce qu'ils ont des arguments qui, jusqu'à un
certain point, sont crédibles. On a dit non aux principales demandes des
consommateurs et de certains commerçants pour le dimanche. On a dit non
en augmentant les amendes. Une fois faites ces deux réponses
négatives, on a essayé de compenser en disant: On vous donne
d'autres occasions et vous pourriez peut-être augmenter votre commerce.
Dans le fond, on a répondu - encore une fois, je le dis - à la
très grande majorité des demandes des associations de
commerçants. Cela a été notre préoccupation.
Le Président (M. Desbiens): M.
Blackburn.
M. Blackburn: Lorsqu'on dit que le
consommateur voudrait avoir plus d'heures pour magasiner, je pense que,
lorsqu'on offre aux gens un service additionnel sans leur faire mention que
ça peut leur coûter quelque chose de plus, tout le monde est
d'accord pour avoir un service additionnel, tout le monde aime ça. Il
faut regarder quelle est la conséquence pour ceux qui donneront le
service. Actuellement, il ne nous semble pas que le consommateur soit
défavorisé au Québec en ce qui concerne la loi sur les
heures d'affaires. Il y a quand même beaucoup d'heures de commerce durant
la semaine.
Le deuxième aspect que je voudrais souligner, c'est ceci: Si on
tient pour acquis que la masse monétaire disponible pour les achats est
fixe et qu'on la répartit sur un certain nombre d'heures de magasinage,
si certains vous demandent d'augmenter ce nombre d'heures... Ceux qui vous
demandent d'ouvrir plus d'heures, c'est parce qu'ils anticipent d'aller
conquérir un nouveau marché. Auprès de qui vont-ils
conquérir ce nouveau marché? Auprès des PME.
M. Biron: Le seul problème qu'il y a avec votre
théorie, c'est que le groupe de commerçants qui veut ouvrir le
dimanche dit: II y a plus d'argent et on est capable de mettre plus d'argent en
circulation. Au départ, on part dans une direction complètement
opposée et on pourrait discuter pendant des heures là-dessus. On
n'a pas voulu répondre à leur demande. Je le
répète: on a répondu à la grande majorité
des demandes des associations de commerçants qui nous disaient: Fermez
le dimanche et augmentez les amendes.
En fait, si vous regardez le projet de loi, vous pouvez vous dire avec
satisfaction, je pense, que le gouvernement vous a écoutés...
M. Brosseau: On est d'accord.
M. Biron: ...sur l'essentiel en mettant quand même un peu
de baume sur les plaies de ceux qu'on croit pénalisés en fermant
le dimanche et en augmentant les amendes.
M. Brosseau: Quand l'animateur à la
télévision demande au consommateur: Êtes-vous pour
l'ouverture des magasins le dimanche, il dit oui. S'il demande au gars: Si tu
travailles, es-tu encore pour l'ouverture, il dit non. C'est ça, nous
autres, on travaille là-dedans. Vous dites que certains ont dit qu'ils
sont capables d'augmenter l'argent, mais, si je gagne 200 $ par semaine et que
j'ai 100 $ à dépenser, c'est... Si un restaurant est ouvert 24
heures par jour, ça ne veut pas dire que tu vas manger cinq fois dans la
journée. Tu manges trois fois et c'est tout. C'est la même affaire
pour acheter des vêtements ou n'importe quoi. Tu achètes pour
l'argent que tu as. C'est impossible. S'ils ont ça, ils vont venir
chercher ça chez nous. C'est bon en ce moment pour les marchands qui
ouvrent le dimanche parce que personne n'est ouvert, mais si tout le monde
ouvre on est tous à terre. Si on ouvre le dimanche, le lundi, le mardi
et le mercredi, on ne fait rien. Déjà, on a du mal à
vivre. Si on ouvre le dimanche encore, il faut payer nos employés ces
trois jours-là aussi. C'est prouvé que, si on ouvre plus
longtemps le soir, c'est ça qui est dangereux, c'est le centre
commercial qui fait l'argent, ce n'est pas nous autres. C'est nous autres, les
petits magasins dans les centres-villes, qui mangeons encore la claque et
là on en mange. Vous n'avez qu'à venir voir nos pauvres
centres-villes dernièrement, ils sont rares. Une chance que ceux qui
viennent magasiner, ce sont des acheteurs au moins. On a cet avantage, on vend
avec ça.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Gouin. (21 h 45)
M. Rochefort: Merci, M. le Président. Il y a deux
questions que je voudrais poser aux représentants du Regroupement des
centres-villes du Québec. Une première a trait à la
dernière réponse que vous avez fournie tantôt. Je demande
rien de moins que d'être convaincu, parce que j'ai un
préjugé plus que favorable à la revitalisation des
centres-villes et des artères commerciales qu'on y retrouve. Vous dites
que la demi-heure additionnelle qu'on pourrait peut-être ajouter le jeudi
et le vendredi soir profitera beaucoup plus aux centres commerciaux qu'aux
commerçants installés dans les artères commerciales. Sur
quoi basez-vous ce dire?
M. Brosseau: C'est prouvé que, le soir, les gens qui
magasinent vont dans les centres commerciaux. Le stationnement y est plus
facile. D'accord. Nous autres, pour avoir un stationnement, il faut passer par
le gouvernement, il faut passer par la ville, etc. On a de la difficulté
à avoir des stationnements. Eux autres, ils les ont. C'est plus facile
d'aller là. Nous sommes d'accord avec eux, parce qu'ils ne viennent pas
dans les centres-villes. Dans ce temps-là, ils vont à un endroit
où il y a beaucoup de commerces.
M. Rochefort: Je veux être sûr de bien comprendre. Si
je suis votre raisonnement, est-ce que vous êtes en train de nous dire
qu'il serait préférable que tous les commerces soient
fermés le jeudi soir et le vendredi soir?
Une voix: Non, on n'ira pas jusque-là. M. Brosseau:
Non, pas jusqu'à ce point-
là.
M. Rochefort: J'essaie de voir. J'essaie de peser la valeur de
l'affirmation quand vous dites...
Une voix: Cela ne nous fait pas plaisir de vous le dire.
M. Rochefort: ...que les gens vont aller plutôt dans les
centres commerciaux, parce qu'il y a une demi-heure de plus.
M. Brosseau: Oui, parce qu'ils vont avoir plus de temps.
Là où on peut peut-être avoir un avantage...
M. Rochefort: Mais ceux qui vont chez vous vont aussi avoir une
demi-heure de plus.
M. Brosseau: ...c'est que, parfois, ils vont dans les centres
commerciaux et ils ne trouvent pas. Alors, ils viennent chez nous. Ils vont
arriver entre 20 h 15 et 20 h 30. Cela va peut-être nous donner une
chance. Nos jeudis et nos vendredis ne sont pas ce qu'ils étaient
auparavant. Je sais que j'ai mes journées de la semaine, parce que je
fais des affaires durant les journées de la semaine. Je ne fais pas des
affaires le soir, parce que, le soir, j'ai moins d'employés que durant
le jour. C'est drôle à dire, hein? Mais c'est comme cela que je
fonctionne.
M. Rochefort: J'ai une deuxième et dernière
question, M. le Président, pour être en mesure de mieux
évaluer la représentativité et l'importance de cette
représentativité et du mémoire qui nous est
présenté. Vous nous donnez, en annexe, la liste des 46
associations que vous représentez. Est-ce que vous avez
évalué combien de marchands ces 46 associations peuvent
représenter?
M. Blackburn: Cette évaluation avait été
faite lorsqu'on avait...
M. Rochefort: Un ordre de grandeur, en tout cas. Qu'est-ce que ce
serait?
M. Pelletier (Romuald): Au-delà de 3000.
M. Rochefort: 3000 marchands.
M. Blackburn: Je voudrais apporter une précision
additionnelle. Je vous disais tantôt que cela ne nous fait pas plaisir
d'admettre que le jeudi soir et le vendredi soir, les centres commerciaux ont
l'avantage sur nous en termes de clientèle, mais c'est une
réalité.
M. Rochefort: Cela ne me fait pas plaisir de vous entendre dire
cela non plus.
Merci.
Le Président (M. Desbiens): S'il n'y a pas d'autres
interventions...
M. Brosseau: Ceux qui ont eu des
SIDAC ont beaucoup amélioré, à l'heure actuelle,
leur sort le soir. C'est pour cela qu'on braille pour les avoir aussi.
M. Rochefort: ...
M. Brosseau: Oui, on s'en vient. Il y en a beaucoup
d'arrivées, mais nous autres, on est...
M. Rochefort: On a réglé cela. Tout le monde peut
en avoir.
Le Président (M. Desbiens): Je vous remercie, ainsi que
les membres du Regroupement des centres-villes du Québec pour leur
participation.
J'invite maintenant le groupe de la SIDAC promenade Masson à
s'approcher, s'il vous plaît. Il nous reste deux groupes à
entendre.
Avant de poursuivre les travaux, je vous fais remarquer qu'il reste dix
minutes. Il serait peut-être bon de s'entendre tout de suite avant de
commencer l'audition.
M. Fortier: Consentement, M. le Président.
Le Président (M. Desbiens): Consentement.
M. Fortier: Ces gens-là ont attendu. Il faudrait bien leur
donner le temps de s'exprimer.
M. Biron: On s'entend pour que vous ne fassiez pas la lecture de
tout votre mémoire - tout le monde l'a lu - et que vous parliez des
points vraiment essentiels qu'on n'a pas discutés avec l'autre groupe
qui vous a précédés.
Une voix: C'est seulement une partie de la synthèse qu'on
va présenter.
Une voix: Et les recommandations.
M. Biron: Plus les recommandations que la synthèse, parce
que je pense que tout le monde a lu votre mémoire. Si vous faites la
synthèse, vous allez viser en plein dans le mille.
SIDAC promenade Masson
M. Koury (Allan): Je voudrais bien présenter mes
collègues: à ma gauche, le directeur général de la
SIDAC promenade Masson, dans la personne de M. Marc
Dagenais; à ma droite, le président de la Plaza
Saint-Hubert, Paul Pelletier et moi-même, Allan Koury, président
de la promenade Masson.
Je voudrais, tout d'abord, vous remercier de nous fournir cette occasion
d'être entendus et de présenter nos revendications telles qu'elles
ont été exposées dans le mémoire que vous avez en
main. Je voudrais aussi ajouter à ce mémoire les synthèses
qu'on a préparées pour justement les faire circuler à la
commission.
Sans plus tarder, vu que le temps nous presse et que les heures
avancent, je voudrais mentionner quelques points qui ont été
apportés par le RCVQ, le Regroupement des centres-villes du
Québec. Je vais passer la parole immédiatement au directeur
général, M. Marc Dagenais, et on continuera avec les questions
tout à l'heure.
Le Président (M. Desbiens): M.
Dagenais.
M. Dagenais (Marc): Bonsoir. Nous avons préparé un
document qu'on aimerait vous remettre; c'est un exposé, un
résumé qui a quand même neuf pages, alors c'est quand
même assez long à lire et on ne le lira pas ce soir.
Forcément, à cause du temps, on va essayer de faire cela le plus
bref possible. C'est simplement un résumé de notre
résumé.
Deux points nous ont particulièrement frappés dans la loi,
dont l'augmentation des heures d'affaires. L'augmentation se répartit,
premièrement, en ajoutant une heure de travail le samedi, ce qui nous
semble financièrement non rentable, puisque c'est tout simplement
étaler le pouvoir d'achat du consommateur sur 63 heures au lieu des 62
heures actuelles. D'autant plus que je n'ai jamais vu une convention collective
où les employés demandaient de travailler plus d'heures dans une
semaine. C'est plutôt l'inverse qui se passe. On en est rendu à
des semaines généralement de moins de 40 heures ce qui laisse,
à l'heure actuelle, 22 heures par semaine pour magasiner en dehors des
40 heures. Je dis 40 heures et je suis généreux, encore
là. Je pense que les policiers, à Montréal, demandent des
semaines de 26 heures. Cela leur en laisse encore plus.
Donc, en se basant sur 40 heures, cela laisse 22 heures par semaine pour
magasiner en dehors des heures de travail. Selon nous, personne ne peut
être empêché de s'acheter un habit, s'il a besoin de s'en
acheter un, parce qu'il n'a pas le temps d'aller magasiner. C'est pareil pour
quelque autre produit que ce soit. Je pense que vous pouvez en être
conscients, vous travaillez plus que la moyenne. C'est évident. Il vous
arrive probablement le samedi, en fin d'après-midi, d'aller faire une
course très rapidement parce que vous finissez de travailler tard et
vous êtes occupés le samedi soir. Or, je pense que si vous arrivez
dans un magasin entre 16 heures et 17 heures le samedi vous ne serez pas
achalés par la foule, parce que les gens sont déjà rendus
chez eux en train de se préparer à dîner et à sortir
le soir. De 17 heures à 18 heures, vous le seriez encore moins.
Nous sommes convaincus que ce serait une heure commercialement non
rentable d'autant plus que, là où elle est située, cela
n'impliquerait qu'une augmentation des coûts. En se basant sur le simple
principe que le profit est égal aux revenus moins les dépenses,
si on augmente les dépenses sans augmenter les revenus, le profit
déjà très serré à la fin de la
récession tend à disparaître complètement, ou alors
on va laisser de côté le service personnalisé qui fait la
force du petit détaillant ou augmenter les prix à la consommation
et, donc, créer une inflation artificielle. Le résultat d'une
augmentation des heures d'affaires le samedi est automatiquement néfaste
pour le commerçant et aussi pour le consommateur.
Quant à la suggestion d'ajouter une demi-heure le jeudi soir et
le vendredi soir, forcément, nous nous y opposons et pour une raison
très simple. Si je prends notre exemple, nous qui sommes une affaire de
quartier à Montréal, 82% de notre clientèle se rend sur la
promenade Masson à pied.
Donc, 82% de notre clientèle reste dans un rayon de moins de cinq
minutes de marche. À Montréal, c'est toujours plus facile parce
qu'on parle quand même d'une population d'environ 60 000 personnes
à cinq minutes de marche de l'artère, et ces gens-là qui
arrivent de travailler le jeudi, vers 17 h 30 environ, vont souper à 19
h 30. À 20 heures, ils sont prêts à aller magasiner. Ils
descendent sur l'artère - parce que c'est à cinq minutes - font
leurs emplettes et retournent chez eux. Si on laisse les commerces ouvrir
jusqu'à 22 heures, il leur reste deux heures pour monter dans leur auto
et s'en aller au centre commercial. J'ignore si c'est le ministère de
l'Industrie, du Commerce et du Tourisme, mais je sais qu'il y a eu une
étude de faite - je ne sais pas trop quand - c'est très flou -
dans le sens qu'effectivement, c'était ce qui se produirait si on
ouvrait les commerces jusqu'à 22 heures. On parlait même dans
cette étude du cas de la personne de Saint-Jérôme qui
aurait le temps de descendre au centre Laval. À ce moment-là, on
tue carrément le centre-ville de Saint-Jérôme, qui a
déjà de la difficulté à vivre.
Ceci concerne l'augmentation des heures d'affaires. L'augmentation
durant la semaine de Pâques comme la semaine avant Noël... D'accord,
cette année, on va dire: Le temps rigoureux n'a peut-être pas
aidé, mais
la première des deux semaines où les commerces ont
été ouverts le soir, cela n'a rien valu au point de vue
commercial. Cela a été bon les derniers jours, parce que,
là, les gens ont pensé qu'ils n'avaient plus le temps. On est
d'accord. Il a plu. Il y a eu du verglas. Il y a eu toutes sortes
d'intempéries, un froid intense. Les gens n'étaient pas
motivés à sortir, mais, sur les dix jours ouverts, il y en a
peut-être eu trois ou quatre qui étaient valables et, même
le premier samedi, les marchands n'ont même pas ouvert, parce que cela ne
valait rien. Or, demander de rajouter quatre jours, cela serait quatre jours
qui ne seront sûrement pas, surtout qu'ils arrivent au début, une
chose extraordinaire au point de vue commercial. La même chose dans le
temps de Pâques. La mode d'étrenner une belle robe neuve ou un bel
habit neuf à Pâques n'existe plus, malheureusement.
Peut-être que le temps peut y contribuer. On peut avoir un jour de
Pâques sous la neige ou un jour de Pâques où il fait 90
degrés, par les temps qui courent. Qu'est-ce qu'on va étrenner?
Va-t-on étrenner un maillot de bain ou un manteau d'hiver? On ne le sait
plus. Toujours est-il que les achats au printemps sont répartis
considérablement à côté de ce que cela était.
Augmenter les heures d'affaires ne ferait que répartir encore plus les
achats sans en augmenter le volume. La capacité d'achat, nous croyons
qu'elle est ce qu'elle est aujourd'hui et ce n'est pas en ouvrant pendant plus
d'heures en général que nous allons pouvoir augmenter le volume
ou le potentiel d'achat du marché québécois.
Nous savons que certains considèrent que l'ouverture le dimanche
et à des heures supplémentaires, c'est rentable. C'est vrai que
c'est rentable, pour autant que le concurrent est fermé. On peut parler
de ceux qui ne respectent pas la loi. Parfois, ils ne la connaissent pas ou ils
ont des raisons de toutes sortes. Qui ouvre dans le temps des fêtes? Les
centres commerciaux ont été ouverts. Ils ont fait des ventes le
dimanche. C'est bien évident. Les artères commerciales ou
d'autres centres commerciaux étaient fermés. Donc, le client n'a
pas le choix d'aller à sa place coutumière. Il part de l'endroit
où il aurait acheté normalement pour aller acheter là
où c'est ouvert illégalement. Cela devient payant à ce
moment-là. Mais tout le monde est ouvert, ce n'est pas payant, parce que
la masse reste la même. Là-dessus, on parle de la même chose
pour les exceptions. Bon! Si, par exemple, un dépanneur est ouvert, il
dépanne les gens. Son rôle est vraiment de fournir des besoins
essentiels. Les gens ont oublié une boîte de conserve, une pinte
de lait, un pain ou des choses semblables ou même ils reçoivent et
ils ont oublié un élément du repas ou quelque besoin.
Nous reconnaissons le droit aux citoyens de se procurer ce qu'ils ont
oublié de se procurer ou un paquet de cigarettes. Je fume et je
n'aimerais pas ne pas fumer le dimanche, parce que je n'ai pas de cigarettes.
La même chose au niveau des médicaments. Nous reconnaissons le
droit à l'être humain de se procurer un médicament
lorsqu'il est malade et cela, 24 heures par jour, sept jours par semaine. Je
pense que c'est purement humain. La journée où on a besoin d'un
médicament, cela presse. On n'attend pas trois jours ou le lendemain
parce que c'est fermé. On en a besoin. Cependant, là est le
problème. Les pharmaciens, qui sont des professionnels de la
santé, sont rendus des professionnels du "quinze cents". Ils vendent de
menus articles jusqu'à 20 $ qu'on peut prendre dans nos mains. Des
montres, les bijoutiers n'ont pas le droit d'en vendre le dimanche. Eux, ils
ont le droit. Des disques, c'est en bas de 20 $, cela se prend dans une main.
Le disquaire n'a pas le droit, lui, d'en vendre. Le pharmacien a le droit.
Enfin! Il y en a plusieurs autres. Des sous-vêtements - cela se prend
dans les mains et c'est moins de 20 $ - ils en vendent. Là où ils
vont avoir des problèmes, c'est quand ils offrent de vendre des pneus
d'hiver, parce qu'il y en a qui ont vendu des pneus d'hiver, de l'antigel, etc.
Nous disons que cela devient contradictoire avec la Charte des droits et
libertés de la personne. Si, à un moment donné, en tant
que commerçant de disques, j'ouvre le dimanche et je me fais
arrêter, je vais devant le juge et, indépendamment des amendes
imposées, je plaide coupable de ne pas être pharmacien. C'est
ça l'offense. Ce n'est pas d'avoir vendu un disque le dimanche, c'est de
ne pas avoir été pharmacien, donc, de ne pas avoir le droit de
vendre de disques. (22 heures)
Je pense que ça devient très difficile dans ce
contexte-là de faire respecter la loi. Alors, votre proposition d'y
aller par description de biens autorisés - suggestions faites:
médicaments, produits d'hygiène et de santé... Dans
l'ancien texte de loi, c'était clair, en spécifiant cependant que
nous devons cloisonner l'établissement et ne pas placer les
médicaments complètement dans le fond, parce qu'il faut passer
à côté des rasoirs, des bonbons, du savon, de tous les
produits qu'on vend pour se rendre aux médicaments; que ce soit
clairement cloisonné à l'intérieur même du commerce.
C'est le cas des pharmacies et la même chose pour les dépanneurs
qui sont rendus avec des surfaces de plancher exorbitantes qui font directement
concurrence aux marchands d'alimentation et aux autres, parce qu'on vend des
disques, des livres, des cassettes, des vidéo-cassettes, etc. De par
leur fonction de dépanneurs, ils peuvent faire
ce qu'ils veulent, indépendamment des heures d'affaires. C'est
l'aspect économique des heures d'affaires.
L'aspect social est quand même important au Québec. On s'en
va vers une société qu'on a appelée la
société des loisirs: réduction des heures d'affaires,
augmentation des divertissements. Est-ce que cela devra être vrai pour
l'ensemble de la population québécoise, moins les 17% qui
travaillent dans le commerce? Est-ce que les rencontres des fêtes, de
Noël et du jour de l'an en famille devront être vraies pour
l'ensemble de la population québécoise, sauf toujours pour ceux
qui travaillent dans le commerce? C'est bien "plate" un souper de Noël
où il y a de la bonne tourtière, un bon vin, où on passe
une bonne veillée, mais il faut partir à 20 heures parce qu'on
travaille à 8 h 30 le lendemain matin, surtout si la famille est en
dehors de la ville. Cela va brimer directement la vie sociale et, donc, par
ricochet, la relève. C'est difficile d'inviter les jeunes finissants ou
les jeunes diplômés -peut-être pas ceux de pharmacologie,
mais au moins ceux de commerce - à se lancer en affaires parce qu'on
devra leur dire: À partir du moment où vous allez être
commerçants, oubliez que vous avez une vie sociale. Pour nous, ce
domaine-là est quand même dangereux. Je pense qu'il faudrait avoir
un oeil là-dessus.
Autre remarque au sujet des amendes pour faire respecter la loi. Nous
vous remercions à ce sujet-là, M. le ministre, vous respectez nos
demandes en augmentant les amendes. Par contre, nous constatons qu'il y a des
commerçants qui annoncent deux pages dans les quotidiens. Quand ils
ouvrent le dimanche, ils peuvent payer de 25 000 $ à 50 000 $ d'annonces
dans les quotidiens. Même si l'amende est de 10 000 $ à la
deuxième offense, cela peut quand même être rentable dans
certaines exceptions.
Nous suggérerions, puisque c'est une loi et que, normalement,
l'esprit d'une loi veut qu'elle soit appliquée et respectée,
qu'au moment de la deuxième infraction le juge qui entend la cause
émette automatiquement une injonction permanente avec toutes les
conséquences que cela entraîne de ne pas la respecter. On veut
faire respecter une loi et je ne pense pas qu'enlever de l'argent et, encore
là, on a la difficulté à normaliser ou à
évaluer l'amende... Si, à la deuxième offense, au moment
où il y a récidive, une injonction permanente est émise
par le juge à l'endroit d'un commerçant, veut, veut pas, il va
être mieux de la respecter parce que la troisième fois il n'est
plus question d'amende, il est question d'outrage au tribunal. C'est ce que
l'on proposerait pour assurer vraiment le respect de la loi.
Pour résumer, on a parlé tantôt des manufacturiers.
M. le ministre, vous avez fait une remarque très vraie en tant qu'homme
d'affaires. Vous avez dit que le boycottage des produits fabriqués par
un manufacturier qui vend au détail est la solution la plus logique pour
l'arrêter de vendre au détail. C'est normal et c'est reconnu dans
presque tous les milieux. Cependant, nous vivons dans une situation sociale et
économique que nous voulons respecter. On vous a déjà fait
parvenir des lettres à ce sujet et on a même mentionné la
possibilité d'un boycottage systématique des produits
manufacturés. Par contre, je ne pense pas que vous soyez prêts
à appuyer une demande d'enlever les contingentements pour nous permettre
d'aller nous approvisionner ailleurs.
Il y a un autre point concernant ce sujet. Au Québec, on doit se
tenir. On relève d'une situation économique pas très
agréable, pour ne pas dire une crise économique, ces derniers
mois. Cette crise a affecté tous les secteurs de l'économie,
qu'on parle des industries ou des commerces. Je ne pense pas que ce soit le
temps approprié pour déclarer une guerre économique entre
Québécois, guerre économique qui risquerait d'affecter
directement la PME manufacturière du Québec. On pourrait lancer
le boycottage et je pourrais même vous dire que, parfois, on a envie de
le lancer. C'est sacrant de voir qu'à Montréal le plus grand
centre commercial au Canada se trouve dans le coin de Chabanel et
Saint-Laurent, tout le secteur des manufactures. C'est le plus grand centre
commercial au Canada, à l'heure actuelle. On aurait le goût de
lancer le boycottage, M. le ministre. Je vous jure que ce n'est pas l'envie qui
nous manque. Par contre, quelles seraient les réactions ou quelles
seraient les conséquences économiques? Elles ne seraient
sûrement pas favorables à la reprise économique - je peux
vous le dire - ni pour l'industriel, ni pour le commerçant. Ce serait
vraiment une arme à deux tranchants et nous ne désirons pas
l'employer.
La raison pour laquelle nous nous présentons devant le
gouvernement et devant votre ministère, c'est pour vous demander s'il y
aurait une autre solution qu'une guerre. Je pense que le problème est au
niveau des manufacturiers. On pourrait même s'asseoir avec eux et
chercher ensemble une solution autre qu'une guerre systématique et un
boycottage systématique que l'on ne désire pas, parce que c'est
évident que cela n'aidera pas l'économie.
M. Biron: Brièvement, parce qu'on s'est dit qu'on serait
discipliné. D'abord, concernant votre dernier point, je vous ai dit que
je ne peux pas intervenir. Je ne peux pas défendre à des
manufacturiers de faire du commerce. Ils ont le droit de le faire.
Légalement, ils ont le droit de le faire. Il y
a peut-être d'autres façons d'intervenir. Par exemple, nous
pourrions nous rencontrer. Je pourrais les rencontrer et en parler avec eux,
mais non pas intervenir par une loi, parce que les gens d'affaires - c'est vous
autres - nous ont dit: Ne réglementez pas trop; laissez-nous travailler.
Maintenant, vous me dites: Oui, réglementez. J'ai de la
difficulté à suivre votre logique. Je n'ai pas l'intention, en
vertu de la Loi sur les heures d'affaires des établissements
commerciaux, de régler le problème des manufacturiers. On
pourrait peut-être en parler ensemble pour voir d'autres domaines.
Je remarque qu'on a répondu à la plupart de vos demandes.
Concernant les amendes, quand on est rendu à 10 000 $, il n'y a pas
beaucoup de magasins qui vont faire des affaires le dimanche, soit 10 000 $ de
profits, pour payer l'amende. Cela commence à faire pas mal. J'aimerais
que l'amende passe de 1000 $ à 10 000 $ avant d'entreprendre autre
chose.
Quant au reste, je pense que vous êtes satisfaits qu'on ait
adopté la loi pour restreindre les heures d'affaires, parce que le
dimanche, c'est restreint. Vous dites qu'on a augmenté. Je dis qu'on n'a
pas augmenté. Si on compte la totalité des heures d'affaires
-vous allez me dire, d'une façon illégale; c'est exact, mais
elles existent à l'heure actuelle - si vous enlevez tout cela, parce
qu'on va fermer beaucoup de magasins le dimanche, et que vous reportez tout
cela en semaine, ce n'est pas une heure de plus qui va changer grand-chose. Ce
n'est pas le fait qu'il y ait beaucoup plus d'heures d'affaires. Au contraire,
j'ai l'impression que cela va en faire moins, parce qu'il y a beaucoup de
magasins, des centaines de magasins qui sont maintenant ouverts le dimanche et
qui ne le seront plus.
Je vous dis ce que j'ai dit au groupe qui vous a
précédés. Ce qu'on a essayé de faire, dans le fond,
c'est de donner raison aux gens d'affaires pour l'essentiel, en disant qu'il y
a quand même des gens qu'on va pénaliser, ceux qui fonctionnent le
dimanche depuis un bon bout de temps. Maintenant, on leur dit: À compter
de maintenant, vous n'avez plus le droit de faire des affaires le dimanche.
Mais vous n'avez plus le droit de dire: Vous n'avez plus le droit et on ne vous
donne rien en retour; allez vous faire pendre. Eux autres disent: On stimule
l'économie; on développe le commerce; on met plus d'argent en
circulation; au moins, donnez-nous une petite marge de manoeuvre. On a choisi
la petite marge de manoeuvre. Si vous me dites: D'accord, remplacez le samedi
par le jeudi soir et le vendredi soir, comme le suggère le Conseil
québécois du commerce de détail, ou remplacez-le par une
autre heure ailleurs, on va changer cela, mais au moins pour donner raison, en
partie, à beaucoup de commerçants et de consommateurs qui nous
disent: Stimulez le commerce... On est prêt, on est réceptif et
c'est d'ailleurs pour cela qu'on a une commission parlementaire.
Je répète, en terminant, que pour l'essentiel on a voulu
donner raison aux gens d'affaires qui nous disaient: Fermez le dimanche et
augmentez les amendes pour être certain que ce soit respecté.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Gouin.
M. Rochefort: Vous me permettrez, en premier lieu, de souhaiter
la bienvenue à notre commission parlementaire aux représentants
des SIDAC Masson et Saint-Hubert qui sont, en partie, dans le comté de
Gouin. J'aimerais adresser un certain nombre de questions aux
représentants des deux SIDAC devant nous. Dans un premier temps, je
dirais que le fond de la question, on l'a abordé à quelques
reprises au cours de la journée. Un certain nombre de commerçants
ont la prétention que le fait d'augmenter le nombre d'heures d'affaires
durant la semaine permettrait d'augmenter le chiffre d'affaires de l'ensemble
des commerçants et la rentabilité du monde du commerce de
détail au Québec. Je sais que vous avez présenté un
mémoire, vous avez fait un plaidoyer tantôt pour nous expliquer
que vous ne partagiez pas ce point de vue. Je pense qu'il serait
peut-être intéressant que vous nous disiez votre réaction
à cela.
Tantôt, le ministre disait: Moi, je pense qu'il faut ajouter un
certain nombre d'heures d'affaires. J'avais pensé à la semaine de
Pâques. Il semble que ce ne soit pas bon. Il a adressé la question
à quelques reprises depuis le début de la journée: Y
a-t-il d'autres moments plus propice durant l'année, par exemple, les
deux premières semaines du mois de mai parce que c'est le printemps ou
quelque chose comme cela? Est-ce que, dans un premier temps, vous pensez que
cela pourrait être utile ou si vous avez, comme hommes d'affaires, la
conviction profonde que quelque augmentation que ce soit du nombre total des
heures d'affaires n'ajoutera rien au développement du potentiel
commercial? Sinon, justement, quelle serait l'autre période de
l'année qui pourrait vous sembler plus intéressante que la
semaine de Pâques, si vous pensez qu'il peut y avoir une marge
d'ajoutée?
M. Pelletier (Paul): Qu'est-ce qu'on peut faire ici? Je pense que
ce serait de résister à un autre Père Noël durant
l'année. Il y en a seulement un. C'est le bon. C'est pour cela,
d'ailleurs, que c'est une dizaine de jours avant Noël que c'est
très populaire. Ce n'est que dix jours, environ. Même une semaine,
huit jours à peu près avant Noël, c'est réellement
valable. La semaine avant n'est pas tellement valable.
Moi, je représente, comme vous le savez, nos 400 marchands de la
rue Saint-Hubert et je peux vous donner une idée concernant la
demi-heure supplémentaire, surtout que le conseil
québécois y tient beaucoup. Tout le monde sait qu'à
l'heure actuelle nous sommes régis par la loi qui dicte la fermeture
à 21 heures le jeudi soir et le vendredi soir. Par contre, on a le droit
de tolérer les clients dans nos magasins jusqu'à 21 h 30. Je suis
commerçant et je vais vous dire de quelle façon cela se passe.
C'est justement le contraire du raisonnement des gens du conseil
québécois. Eux disent: Écoutez, les gens qui entrent
à 20 h 10, 20 h 15, n'ont pas assez de temps. Il faut qu'ils s'en
aillent à 21 heures parce que le magasin ferme. C'est faux. Le magasin
peut rester ouvert jusqu'à 21 h 30. C'est dans la loi. Je peux vous dire
que cela nous arrive -on est fautif peut-être - souvent d'être
là jusqu'à 21 h 40, 21 h 45 parce qu'à 21 h 30 le contrat
est rédigé.
M. Biron: On va envoyer nos inspecteurs vous voir!
M. Pelletier (Paul): C'est pour vous dire qu'à l'heure
actuelle, la plupart du temps - c'est arrivé dans certains cas, dans mon
cas, chez nous, et ailleurs aussi - nos employés n'aiment pas tellement
cela, mais ils sont obligés de rester, à cause d'une belle vente,
d'un meuble surtout, jusqu'à 21 h 45, 22 heures, malgré une loi
qui nous dit que 21 heures est l'heure de fermeture. C'est la demi-heure
supplémentaire qui s'échelonne et qui donne ce droit. Je n'y
crois pas, c'est impensable, si on réfléchit un peu, de dire
à un client qui va entrer à 20 h 45, 20 h 50: À 21 heures,
il faut qu'il parte. Ce n'est pas ce qui se produit. Il peut rester
jusqu'à 21 h 30. À 21 h 30, le personnel commence à
être fatigué. Souvent, il est là depuis 9 heures ou 9 h 30.
Je me rappelle, j'ai déjà fait ces heures jusqu'à 22
heures. On fermait à 22 heures à l'époque et cela nous
menait souvent jusqu'à 22 h 30, 22 h 45, 23 heures. Quand la nouvelle
loi est arrivée, on s'est dit: Bon, le plus tard qu'on peut aller
maintenant, c'est 21 h 30, 21 h 45. Cela commence à avoir de l'allure et
nos familles commençaient à respirer un peu.
Or, maintenant, le consommateur voudrait avoir un peu plus, etc. Je
pense que le consommateur, on lui donne beaucoup d'heures. 62 heures
d'ouverture, c'est quelque chose! Quand on pense que dans les pays Scandinaves
on ouvre 52 heures, 10 heures de moins. Là-bas, en Scandinavie, en
Suède et au Danemark, on ouvre un soir par semaine, le jeudi ou le
vendredi, mais jusqu'à 20 heures. Le samedi, c'est ouvert jusqu'à
14 heures. Nous, le samedi, on est là encore jusqu'à 17 heures.
Imaginez-vous la différence!
(22 h 15)
Cette demi-heure supplémentaire du jeudi et du vendredi soir - on
l'a répété ici tantôt et les gens des centres-villes
avaient donc raison quand ils ont dit qu'on va favoriser les centres de la
périphérie des grandes villes. C'est certain. Avec une demi-heure
supplémentaire, cela donne le temps aux gens de se rendre dans ces
centres commerciaux un peu plus loin et de revenir. Cela ne pénalisera
certainement pas les marchands des artères commerciales. À
l'heure actuelle, nous, les marchands des centres-villes, on voudrait
être de plus en plus avec les villes et même le gouvernement
provincial nous aide beaucoup à stimuler les artères
commerciales. Je le sais et je remercie en passant le gouvernement qui fait un
bon travail dans ce sens, mais je ne voudrais pas, par contre, avec cette
demi-heure supplémentaire, que nous soyons pénalisés, car
on inviterait alors nos clients à aller voir les grands centres
commerciaux dans la périphérie. C'est un danger réellement
critique.
Il y a un autre point très important. Dans nos commerces, vous
savez qu'on devient de plus en plus professionnel. On s'adresse aussi à
des jeunes qui s'en vont dans nos commerces, de jeunes cadres professionnels,
des jeunes qui sortent de l'université, des gestionnaires, des
designers. De plus en plus, il faut sophistiquer nos commerces. C'est dans ce
sens-là qu'on travaille de plus en plus, dans tous les domaines. Cela
veut dire que ces gens-là sont prêts. Ils sont très
intéressants aussi. D'ailleurs, leurs suggestions nous aident beaucoup
dans ce sens-là. En passant, bravo! C'est un élément
réellement exceptionnel, parce que j'en ai quelques-uns chez moi et je
trouve que ces jeunes sont exceptionnels. Normalement, peut-être que je
ne l'aurais pas découvert et je trouve que leurs suggestions, en
passant, pour faire une parenthèse, sont exceptionnelles.
Par contre, ces jeunes-là aussi, qui sont des professionnels,
veulent avoir une vie sociale normale, une qualité de vie
intéressante, un peu comme les professionnels du droit et les
professionnels dans d'autres domaines. Il faut leur donner une qualité
de vie intéressante et ce n'est pas avec des heures rallongées
comme cela, jusqu'à 21 h 30 ou 22 heures. Cela va nous mener dans bien
des cas jusqu'à 22 heures. J'étais chez Eaton dernièrement
et je faisais l'achat de quelques disques. J'ai forcé le magasin
à fermer à 21 h 15 ou 21 h 20, je m'en suis rendu compte, le
département et le magasin. Cela veut dire qu'on peut réussir
cela. Ils ne nous envoient pas parce que c'est déjà 17 heures ou
21 heures. C'est un aspect du problème. Si on veut que nos jeunes
diplômés continuent, M. le ministre, à accéder au
commerce, il faut leur donner aussi des
heures intéressantes, des semaines de Pâques
intéressantes, des congés de deux jours intéressants.
C'est important. Les gens du Regroupement des centres-villes du Québec
en ont parlé tantôt et je les appuie. C'est dans ce
sens-là... Il faut respirer un peu aussi, nous, les gens du commerce.
C'est une chose qui, dans le passé... On a payé tellement des
heures et des heures. Nos parents ont été victimes de cela.
Aujourd'hui, je pense qu'avec la vie moderne, on devrait... Et c'est dans ce
sens-là que nos marchands vous demandent, s'il vous plaît, de bien
reconsidérer le tout. Merci.
M. Rochefort: Sur la question de l'augmentation des heures
d'affaires de la semaine - l'heure prévue pour le samedi pourrait
possiblement être ramenée à une demi-heure le jeudi et le
vendredi - je pense qu'il est important qu'on soit très attentif
à l'argumentation que vous avez développée, qui n'est pas
une objection à l'élargissement des heures d'affaires. Ce n'est
pas au fond de la question que vous vous opposez, mais bien plus au fait que
l'augmentation d'une demi-heure va avoir pour effet de drainer du commerce
qu'on a réussi à ramener dans les centres-villes au
Québec, notamment à Montréal, dans les centres
commerciaux, ce qui irait à l'encontre des efforts gouvernementaux, tant
au niveau provincial qu'au niveau des municipalités, qui ont
été faits jusqu'à maintenant dans ce sens-là. C'est
quelque chose que je retiens.
Sur la question de l'ensemble des ouvertures qui étaient faites
dans le projet de loi - il y avait la semaine de Pâques,
l'élimination du congé du lundi de Pâques, du jour d'Action
de grâces, l'ouverture le matin du 26 décembre et du 2 janvier et
possiblement une heure ailleurs et tout cela. Ce matin, les
représentants du Conseil québécois du commerce de
détail nous disaient que, finalement, pour eux, cela ne posait pas
beaucoup de problèmes en termes de gestion de personnel, parce qu'il
s'agissait d'organiser leurs affaires en conséquence et tout cela. Or,
j'ai cru comprendre que, finalement, ils représentent des
commerçants qui ont souvent un nombre d'employés suffisamment
important pour qu'on puisse effectivement jouer avec les heures d'un certain
nombre sans que cela pose un problème. Toutefois, je voudrais profiter
de votre présence ici pour que vous nous décriviez ce que cela
peut représenter pour un commerçant de moindre importance comme
problème de gestion de personnel que d'avoir à vivre avec de
nouveaux horaires comme ceux-là.
M. Pelletier (Paul): Les conséquences que...
M. Biron: Puis-je vous demander d'être le plus bref
possible dans vos réponses parce qu'on a un autre groupe qui attend
aussi? Il est déjà 22 h 20 et on va terminer pas mal tard avec
l'autre groupe.
Une voix: On va fermer tard.
M. Rochefort: M. le ministre, on va quand même entendre les
réponses, d'autant plus qu'on les a avertis à midi aujourd'hui
qu'ils comparaissaient ce soir.
M. Biron: Je ne les empêche pas de répondre.
M. Rochefort: Les commerçants votent dans votre
comté?
M. Bourbeau: Ils sont représentés par eux,
d'ailleurs.
M. Rochefort: De toute façon, M. le Président, si
ça n'intéresse pas le député de Laporte, il peut se
retirer.
Le Président (M. Desbiens): À l'ordre, s'il vous
plaît! M. Pelletier, vous avez la parole.
M. Pelletier (Paul): Très bien. Concernant les heures,
c'est certain que le conseil québécois est pour cette demi-heure
supplémentaire, parce qu'il représente en général
de grosses organisations, des entreprises très importantes, les grandes
chaînes, etc. C'est certain que plusieurs peuvent se structurer
facilement avec des surnuméraires et ça devient réellement
plus facile.
Prenons seulement mon centre, 400 marchands; on peut dire qu'à
80%, ce sont de petites boutiques familiales qui fonctionnent avec deux, trois
ou quatre personnes. Je parle de la rue Saint-Hubert. Ces gens-là sont
réellement affectés parce qu'ils n'ont souvent pas les moyens
nécessaires d'avoir des surnuméraires ou d'avoir seulement une
personne. Cela les oblige à payer davantage pour avoir une ou deux
personnes supplémentaires. Pour tous les marchands, c'est beaucoup,
surtout pour les congés comme Pâques, la semaine de Pâques,
les fêtes, le lundi de Pâques, la fête d'Action de
grâces. Ou ce sera le propriétaire qui sera encore captif, il sera
obligé de le faire lui-même parce que plusieurs n'ont pas les
moyens de payer des surnuméraires. C'est le problème que cette
proposition apporte.
M. Rochefort: Je voudrais vous poser une autre question qui a
trait à une recommandation que vous faites en page 8 qui m'a un peu
surpris. Vous proposez la création d'une régie du commerce au
détail qui verrait à étudier les cas et à faire
les
recommandations pertinentes au ministre quant à l'application
générale de la loi. Ma question comporte deux volets: dans un
premier temps, vous êtes donc plus ou moins satisfaits des
mécanismes qui sont prévus dans le projet de loi pour appliquer
la loi. Deuxième question que je vous pose principalement à titre
d'hommes d'affaires: Vous ne pensez pas, justement, qu'on en a beaucoup des
régies? C'est habituellement ce qu'on entend. J'ai le goût de vous
dire: Une autre?
M. Koury: Je pense que je vais répondre à celle-ci.
Il y a toujours un problème de temps. À partir de la
contravention, la pénalité et le temps de rencontrer ces gens qui
ont commis une infraction, je crois que le mécanisme de tout ce
processus prend trop de temps. C'est essayer de viser le plus rapidement le
problème qui existe dès l'infraction. S'il y a certains
problèmes qui se posent, on pourrait toujours avoir un comité
spécialisé sur le commerce, comme il y en a pour l'industrie et
comme il y en a dans... Je crois que les hauts fonctionnaires ont tellement de
travail à faire sur différents projets qu'ils sont pris et qu'ils
ne pourraient pas faire le travail qui serait requis d'eux
immédiatement.
M. Rochefort: Mais devant les assurances que le ministre a
exprimées au cours de la journée, que vous n'avez peut-être
pas eu l'occasion d'entendre, mais il disait que, finalement, il y aurait un
certain nombre d'inspecteurs additionnels qui pourraient travailler à
faire appliquer cette loi et qu'on pourrait s'organiser avec la
Sûreté du Québec pour qu'elle fasse sa part, ainsi que les
corps de police municipaux, etc. Est-ce que ça pourrait répondre
à vos attentes et éviter la création d'une autre
régie?
M. Koury: Si je peux répondre, bien que ce soit dans
le...
M. Dagenais: Je vérifie dans le dictionnaire le terme
"régie". Il faut dire aussi que ce n'est pas péjoratif face au
ministre. Ce que nous entendons essentiellement par une régie
commerciale, c'est un groupe - cela pourrait être les fonctionnaires du
ministère - qui recevra les différentes demandes. On parle des
demandes des foires, des exemptions, des exclusions, des régions
touristiques, etc.; il faut regarder et analyser chaque dossier afin de faire
des recommandations au ministre. Nous ne mettons pas en doute, en aucun temps,
l'honnêteté - forcément - et surtout le droit du ministre
de décider. La décision appartient au ministre. Cependant, afin
de lui faciliter le travail et afin de lui donner un caractère plus
stable, nous suggérons qu'il y ait une équipe - la grosseur de
l'équipe serait définie par le terme "régie"; une
régie cela peut être un groupe, cela peut être deux
personnes - un nombre quelconque de personnes, près du ministère,
qui étudient les demandes, les évaluent selon des critères
objectifs. De là, elles feraient leurs recommandations au ministre qui,
naturellement, en dernier lieu, prend la décision de trancher la
question en tant que ministre. C'est dans ce sens qu'on parle d'une
régie. Je sais que l'on avait parlé souvent d'un régie au
niveau du commerce relativement à la promenade Masson. Encore tout
récemment, on parlait d'une certaine forme de régie. C'est un
autre problème.
M. Rochefort: C'est un autre domaine.
M. Dagenais: Maintenant, c'est dans ce sens qu'on parle de
régie. Je pourrais peut-être parler d'un autre point pour la
réponse à la question de tantôt sur les coûts. Qu'on
regarde ce qu'est la force de vente dans le commerce au détail. Il y a
un petit croquis dans notre mémoire qui explique que plus un produit est
complexe et cher, plus la force de vente devient importante, plus le service
personnalisé est important; à savoir que cela prend une force de
vente beaucoup plus importante pour vendre un DC-8 que pour vendre une paire de
lacets. Je pense que c'est la logique en allant aux extrêmes. Ce qui
caractérise principalement l'artère commerciale et le
centre-ville, de même que tous les commerces indépendants, c'est
essentiellement le service personnalisé donné à la
clientèle. L'homme d'affaires, propriétaire du commerce, est sur
place et vérifie drôlement afin que la clientèle ait un
service. Combien de fois, dans une artère commerciale ou un
centre-ville, les clients entrent simplement saluer le monde dans le magasin
parce qu'ils sont habitués de passer à la porte et ils le
connaissent. La journée où ils ont besoin de quelque chose, ils
vont aller là. C'est là qu'on estime que ce service est beaucoup
plus dispendieux à tenir à l'heure du principe de la vente
visuelle. On veut voir une chemise grandeur 15 1/2, manches 34. On a une belle
affiche sur le mur, 15 1/2, 34. On regarde la couleur qu'on veut, on la prend
et on va payer à la caisse. Là, les vendeurs ne coûtent pas
cher. Ce sont les pancartes.
Ou encore, le type de magasin qui vend essentiellement des biens
très bon marché. Je n'enlève pas la qualité du
commerce, mais disons un 15 cents, ou ce qu'on appelait un 15 cents. Les gens
entrent en passant et achètent un produit. Ils en sortent avec trois ou
quatre autres, parce qu'en passant dans les allées ils ont pris
différentes choses. C'est un type qui a sa place, c'est bien
évident. C'est là où la force de vente n'a pas la
même importance que chez un tailleur
ou chez un magasin où les vendeurs doivent expliquer les meubles,
expliquer les différents tissus, etc. C'est là que le coût
de l'augmentation du nombre d'heures varie d'un type de commerce à un
autre. Alors, on dit qu'il affecte particulièrement les centres-villes
et les artères commerciales. Toute augmentation d'heures, peu importe
où elle est placée, devient une perte directe de profit ou encore
une augmentation des prix de vente, ou encore des mises à pied pour
résoudre le problème des trop fortes dépenses par rapport
aux revenus. C'est là qu'on s'est dit que c'est plus critique.
M. Rochefort: Merci. Deux derniers commentaires, M. le
Président, avant de vous remettre la parole. Le premier, à
l'endroit du ministre, a trait au phénomène des manufactures. Je
voudrais attirer son attention de façon très particulière
à ce problème, qui est peut-être un problème
particulier à Montréal ou, en tout cas, c'est là qu'il se
vit avec le plus d'intensité. Je crois qu'il faut absolument que des
gens de votre ministère et que vous aussi vous vous penchiez sur ce
problème, parce que c'est un problème qui est vécu
dramatiquement pour plusieurs commerçants de Montréal et qui
prend une ampleur de plus en plus prononcée. Je suis un peu agacé
par le réflexe que vous avez, qui est de dire: Écoutez, faites
des menaces que vous n'achèterez plus d'eux autres, parce que souvent la
solution de rechange va être: Achetons Ontario.
Je ne suis pas convaincu qu'on sera gagnant à la fin sur cette
question. Si ce n'est pas par la loi sur les heures d'affaires qu'on peut
régler ce problème, je souhaite que les gens de votre
ministère se mettent au travail le plus rapidement possible,
peut-être avec les gens des SIDAC, puisque ce sont eux qui expriment le
plus de revendications par rapport à ce problème, de façon
qu'on puisse y trouver une solution rapidement; parce que c'est un
problème considérable à l'heure actuelle pour les
commerçants de la région de Montréal.
Finalement, je voudrais inciter les représentants de deux SIDAC
montréalaises qui ont toutes deux une succursale de la
Société des alcools sur leur artère commerciale à
profiter de la présence du ministre responsable de la
Société des alcools du Québec pour exprimer une
revendication. Vous avez exprimé, à plusieurs reprises, que les
succursales de la Société des alcools ne participent pas,
financièrement, à la SIDAC comme n'importe quel autre
commerçant est obligé de le faire par la loi. Vous avez
peut-être une belle tribune pour prêcher, une fois de plus, sur
cette question. (22 h 30)
M. Koury: Oui. M. le ministre, à plusieurs reprises, je
vous ai écrit à ce sujet. Les comptes de taxes de la SIDAC
étaient envoyés justement aux différents
établissements de la ville de Montréal où les SIDAC
existent. Ils ont toujours été retournés à la ville
de Montréal disant qu'ils ne faisaient pas partie d'une
société comme les commerçants, qu'ils étaient une
société du gouvernement provincial et que, de ce fait, ils
n'étaient pas imposables pour cette taxe-là. Les
représentants de la ville de Montréal m'ont convoqué
à une assemblée et ils m'ont mandaté à
l'époque, en 1981-1982, de rencontrer les responsables de la
Société des alcools. J'ai essayé d'expliquer à M.
Marier, je crois, qui est la personne chargée des relations publiques,
ce qui en était; j'attends, encore aujourd'hui, une réponse,
qu'elle soit positive ou négative, à ce sujet.
Je ne crois pas qu'elles doivent être exemptes des taxes de la
SIDAC parce que la revitalisation d'une artère commerciale
représente, M. le ministre, des budgets énormes. On en a besoin
pour la revitalisation des centres-villes, des centres commerciaux qu'on a. Je
crois que c'est le moment approprié de porter cela à votre
attention très spéciale et je crois que nous devrions avoir une
réponse de vous, possiblement ce soir, à savoir s'il est de votre
intention d'y adhérer.
M. Biron: J'ai pris connaissance de votre intervention dans votre
mémoire et je me propose de rencontrer, au cours des semaines qui
viennent, le nouveau président de la Société des alcools
pour discuter avec lui de cette éventualité. Mais vous savez tout
le remue-ménage qu'on apporte à la Société des
alcools, la possibilité qu'un jour les travailleurs deviennent
propriétaires d'une succursale sous forme de coopérative ou autre
chose, une autre formule qui pourrait venir. C'est un grand chambardement, mais
je m'engage à en parler à M. Lord, qui est le président de
la Société des alcools.
Quant à la demande du député de Gouin pour les
manufacturiers, je pense que la meilleure formule est de rencontrer les
manufacturiers, qui ne sont pas intéressés à vendre
à l'extérieur, à perdre leurs clients
québécois. D'un autre côté, il est sûr que ce
sont des choses qui se décident, qui se discutent entre les deux
groupes. On dit toujours qu'en affaires, c'est donnant-donnant. J'ai toujours
appris cela. Si les commerçants québécois
n'achètent pas assez des manufacturiers québécois, il faut
comprendre qu'eux disent: On vend notre matériel directement. Je pense
que c'est une question de négociation entre les deux.
M. Koury: Si je peux répondre, M. le ministre, avant
d'aller un peu plus loin...
M. Biron: Je voudrais juste...
Le Président (M. Desbiens): M. le
ministre a la parole.
M. Biron: ...vous dire que... M. Koury: Oui.
M. Biron: ...je m'engage à en parler avec eux et à
regarder avec vous ce qu'il est possible de faire pour qu'au moins ce soit
équitable pour les deux parties.
M. Koury: Oui.
M. Biron: Je voudrais juste terminer en disant ceci. M. Pelletier
nous a parlé de la Suède, de la Norvège et de tout cela.
On n'est pas en Suède, ni en Norvège. On est en Amérique
du Nord et il faut réaliser que, dans toutes les autres provinces
canadiennes et États américains qui sont autour de nous, il y a
plus d'heures d'affaires qu'au Québec. Au Québec, à cause
de la loi sur les heures d'affaires, qui n'était pas parfaite parce
qu'on l'améliore, on a réussi à protéger beaucoup
de PME québécoises; c'est ici qu'on a le plus de PME, en fait.
Avant de faire un virage en U et de revoir les pays nordiques d'Europe, je
pense qu'il faut quand même vivre dans un contexte nord-américain
et être prudent dans l'évolution de notre loi sur les heures
d'affaires, parce qu'elle a été bonne jusqu'à maintenant.
Il s'agit juste d'y apporter certaines améliorations sans tout
chambarder.
Le Président (M. Desbiens): M. Koury.
M. Koury: Merci. M. le ministre, au sujet des manufacturiers, la
situation est très sérieuse; peut-être n'êtes-vous
pas conscient de ce problème. Je peux vous dire que, si on boycottait
les manufacturiers qui vendent au public, je pense qu'il ne resterait pas une
seule manufacture qui ne serait pas boycottée à Montréal.
C'est de nature très sérieuse et je crois qu'on devrait se
rencontrer dans les plus brefs délais possible parce que ceci,
réellement, force les commerçants à vendre un peu plus
cher car ils vendent beaucoup moins. Les manufacturiers eux-mêmes sont
subventionnés de nos propres fonds à plusieurs reprises au cours
des années et eux vendent au public et ce n'est pas
déclaré comme revenu.
M. Biron: M. Koury, la seule chose que j'ai dite, c'est que
j'étais prêt à rencontrer les représentants des
manufacturiers et les représentants des commerçants. Je me
souviens, dans le temps que j'étais en affaires, j'étais
manufacturier et certains grossistes me disaient: Ne vends pas à telle
place, mais ils n'achetaient pas de moi. S'ils n'achètent pas de moi, je
suis bien obligé de vendre mon matériel quelque part, je ne le
mets pas dans mon salon. Dans le fond, je ne sais pas comment vous achetez des
manufacturiers, je ne sais pas leur chiffre d'affaires et leur production, mais
je suis prêt à regarder cela avec vous et avec eux pour voir
comment on peut s'entendre pour améliorer la situation et que tout le
monde soit heureux.
M. Koury: Dans mon commerce, j'achète à 99%, M. le
ministre...
M. Biron: D'accord, parfait, bravo!
M. Koury: ...de Montréal et du Québec.
M. Biron: Bravo!
Le Président (M. Desbiens): M. le député
d'Outremont.
M. Fortier: M. le Président, j'ai bien
apprécié les mots du ministre, qui nous disait qu'il ne fallait
peut-être pas trop regarder la situation en Suède et en
Norvège. Il n'y a pas si longtemps, il y avait un ministre du
Développement économique qui passait son temps à comparer
la performance du Québec avec la performance des pays nordiques mais,
là, vous devez changer votre discours parce qu'il semblerait que le
gouvernement a appris qu'on était en Amérique du Nord.
M. le Président, je crois que la situation que M. Koury nous a
décrite va au-delà du thème qui était
proposé mais je crois qu'il était bon que nous en discutions
parce que, de toute évidence, cela vous a permis d'étaler des
problèmes, qui étaient sous-jacents et sur lesquels, d'ailleurs,
vous sembliez avoir alerté le ministère depuis un certain temps
et auxquels vous n'avez pas trouvé de solution jusqu'à
maintenant.
Au début de votre mémoire, vous donnez des statistiques
sur l'importance du commerce au détail. Certaines statistiques semblent
indiquer que l'apport du marché des indépendants était
allé en régressant depuis 1971. J'imagine que la formation des
SIDAC, avec la collaboration de la ville de Montréal, depuis trois
ans...
M. Koury: Deux ans et demi, cela va faire trois ans cet
automne.
M. Fortier: Est-ce qu'on peut quand même laisser un message
d'espoir pour dire que cette formule, avec la collaboration de la ville, a
donné des effets favorables?
M. Koury: C'est une formule-miracle.
M. Fortier: Parce que l'impression que j'avais du tableau que
vous avez brossé, c'était que la situation économique
était tellement difficile qu'une ouverture de quelques heures de plus ou
que les heures d'ouverture pouvaient mettre en danger d'une
façon assez appréciable la viabilité de vos
commerces. Si c'est rendu à ce point, malgré les effets
bénéfiques de la formule des SIDAC, je crois que cela veut dire
que les marchands que vous représentez vivent des moments
extrêmement difficiles présentement. Est-ce que c'est cela le
message que vous avez voulu nous donner?
M. Koury: Exactement. On vit présentement dans un contexte
économique très difficile. D'ailleurs, on n'est pas les seuls, je
pense que tous les commerçants et les gouvernements eux-mêmes
ressentent ce problème. Possiblement, la vie économique ou le
commerce en général va prendre de l'ampleur, mais d'ici au moment
où tout reviendra dans l'ordre comme c'était auparavant, avant
les années difficiles, les années 1982-1983 surtout, je crois que
cela va prendre encore deux ou trois ans.
L'addition des deux heures ou trois heures, d'une soirée, il ne
faut pas s'en faire, cela n'ajoutera pas des revenus supplémentaires
dans les poches des gens. Les gens ont un budget et celui-ci ne peut pas
être étendu. Si on étend les ventes sur sept jours, cela va
être divisé en sept, cela veut dire...
M. Fortier: Je pense que votre message là-dessus a
été très clair et, pour ma part, je pense que vous avez
argumenté de différentes façons, les trois d'entre vous,
mais pour argumenter que cela augmenterait, d'après votre
expérience, les dépenses et pas tellement les revenus.
En ce qui concerne la concurrence déloyale, vous en avez fait
état dans votre mémoire. Vous avez parlé de la
Société des alcools; je voulais l'aborder, vous venez d'en
parler. Vous avez parlé des marchés aux puces et des autres
commerçants qu'il faudrait... Et là, vous exigez une
définition beaucoup plus précise, celle de revenir à ce
que la loi disait au préalable sur les produits et non pas les magasins
comme tels. On retient cela.
En ce qui concerne les manufacturiers, qui semblent un problème
très sérieux...
Une voix: Majeur.
M. Fortier: Quand on parle de manufacturiers dans votre domaine,
j'imagine qu'on parle des vêtements. Est-ce bien des vêtements dont
il s'agit?
M. Koury: La majorité, ce sont des vêtements,
oui.
M. Fortier: Ce problème que vous vivez présentement
et qui vous rend la vie si difficile, depuis quand est-il si aigu? Depuis quand
les manufacturiers montréalais - tout le monde sait que les
manufacturiers sont très nombreux à Montréal - ont-ils
créé une situation qui vous rend la vie si difficile?
M. Koury: De plus en plus critique, j'oserais dire. D'ailleurs,
cela a toujours existé que les quelques manufacturiers... Quand je dis
toujours, à ma connaissance, c'est depuis les années
soixante.
M. Fortier: Mais depuis quand est-ce rendu un
phénomène...
M. Koury: Cela s'est accéléré depuis le
milieu de 1975. Depuis ce temps-là, d'une manufacture à l'autre,
on s'est donné le mot de passe et, aujourd'hui, elles sont devenues les
plus grands centres commerciaux en Amérique du Nord: l'avenue de
Gaspé et aussi la rue Meilleur. Il faut être là pour le
vivre. Il faut aller voir. Il n'y a pas de place pour stationner. Les gens
stationnent en triple et non en double.
M. Fortier: Est-ce que ce phénomène-là
existe à Toronto ou dans d'autres villes que vous connaissez ou si c'est
uniquement à Montréal, à votre connaissance?
M. Koury: Non, cela doit exister aussi en Ontario. Cela doit.
Maintenant, c'est avec un point d'interrogation. Je peux vous dire que les
problèmes de l'Ontario ne sont pas nos problèmes.
M. Fortier: Je sais bien que cela ne règle pas votre
problème.
M. Koury: Nous autres, il faut régler nos problèmes
chez nous.
M. Fortier: J'essayais de voir si...
M. Koury: Non, je ne le sais pas. Je vous comprends.
M. Fortier: Je voulais savoir si l'Ontario avait vécu une
situation semblable et de quelle façon il l'avait réglée,
mais vous n'avez pas la réponse à cette question.
M. Koury: Pas du tout. Est-ce que tu voudrais ajouter quelques
mots?
M. Dagenais: J'ai eu une expérience à un moment
donné. J'étais représentant dans l'industrie de l'acier.
Cela n'a peut-être pas de rapport avec l'industrie du vêtement,
mais on va y arriver. C'était une compagnie manufacturière dans
l'acier et il n'était pas question de vendre au détail pour une
seule raison: c'est que nos détaillants se tenaient et que la
journée où nous aurions vendu au détail, on aurait
été boycotté par tout le monde et cela aurait
entraîné une faillite automatique. D'accord?
Dans l'industrie du vêtement, il est
arrivé un phénomène. Dans la chaussure, c'est la
même chose. Maintenant, on parle des meubles chez les manufacturiers.
Vous n'avez qu'à ouvrir votre télévision, votre radio ou
encore le journal, c'est annoncé à pleine page ou à plein
programme. Il y a peut-être eu une faiblesse de la part des
détaillants lorsque quelques manufacturiers ont ouvert. On disait: Ce
sont des marginaux, cela ne nous affecte pas. C'est la même chose lorsque
les centres commerciaux ont commencé à apparaître dans les
années soixante: le commerçant détaillant n'a rien vu ou
n'a pas vu l'importance des centres commerciaux. Il se disait: Regardez cela.
Il riait presque des centres commerciaux qui ouvraient. Une bâtisse en
plein champ, c'était ridicule dans le temps. Il y a peut-être eu
une lacune à ce niveau-là, mais, aujourd'hui, cette lacune,
comment devons-nous la corriger? Je pense que le problème est là.
Au début, même il y a cinq ans, on parlait d'environ 20% des
manufacturiers qui vendaient au détail. Il y en avait peut-être un
peu plus, mais c'était isolé; là, cela a poussé
comme des champignons, ils vendent tous ou presque tous au détail. Ce
n'est plus simplement un problème. À un moment donné, on a
beau dire: D'accord, le début du problème, c'est peut-être
une lacune au niveau des détaillants qui n'ont pas vu
immédiatement à faire interdire cela, mais est-ce qu'on doit
aujourd'hui laisser aller cela? Est-ce qu'on doit partir une guerre qui serait
certainement nuisible à l'économie du Québec? S'il n'y a
pas moyen de faire autrement, peut-être que oui, mais on se refuse au
départ à nuire à l'économie. On essaie de se
remplacer, de se redresser. Je pense que la question est peut-être
là.
M. Fortier: Écoutez! Je pense que vous avez fait
état du problème. Je suis surpris de constater qu'il existe quand
même depuis plusieurs années. Je rejoins mon collègue de
Gouin, à savoir que le ministre et le ministère devraient
l'examiner de plus près. Pour vous dire franchement, comme le ministre
le disait, il n'a pas de solution et il en a une, mais je ne crois pas qu'on
puisse laisser le problème en plan, tel qu'il est là. On doit
vous féliciter pour la franchise avec laquelle vous avez
communiqué vos problèmes et des éléments de
solution. Je vous remercie.
Le Président (M. Desbiens): Nous vous remercions de votre
participation aux travaux de la commission. J'invite maintenant les
représentants de la SIDAC mail centre-ville de Québec à
s'approcher, s'il vous plaît!
SIDAC mail centre-ville Québec
M. Filion (Guy): M. le Président, j'aimerais faire un
compromis. Je pense que vous êtes fatigué et, si vous me donniez
la permission de revenir jeudi matin, je préférerais.
Le Président (M. Desbiens): Est-ce que vous êtes de
Québec?
M. Filion: Je suis de Québec. Est-ce que cela vous...
M. Biron: Jeudi soir, on va également terminer tard,
très tard.
M. Filion: Alors, vous êtes patients?
M. Biron: Non, étant donné qu'on a parlé
beaucoup des problèmes des SIDAC, ce sur quoi on a discuté, il ne
faudrait peut-être pas y revenir. Si on a oublié des points
particuliers, j'aimerais qu'on en discute. Parce que si vous posez les
mêmes questions ou faites les mêmes interventions, vous allez avoir
les mêmes réponses. Alors, je pense bien qu'on va se passer de
répondre et on va tout simplement vous écouter. Mais s'il y avait
lieu de donner certains points qu'on a peut-être oubliés dans les
deux autres SIDAC qui ont été entendues, ce serait
intéressant.
M. Filion: D'accord. C'est un travail ardu que vous me demandez,
on a dit tellement de choses.
Le Président (M. Desbiens): M. Filion, c'est cela?
M. Filion: Je m'appelle Guy Filion, président de la SIDAC
mail centre-ville de Québec, la première en dehors de
Montréal, gagnée de dure façon. J'espère que les
autres centres-villes de la province auront la chance que ce soit plus facile,
en allégeant peut-être la façon de faire.
Je suis sûr, M. le ministre, que vous avez pris connaissance de
notre court mémoire. J'ai cru reconnaître une partie de vos
remarques, à un moment donné, lorsqu'on vous disait: - vous en
excuserez le ton cavalier - Retournons au travail; vous, à corriger
certaines lois pour nous faciliter la tâche, et nous, à faire du
commerce et à être plus productifs à l'avenir. Je ne
voudrais pas que vous preniez cela d'un ton accrochant, mais on aime bien les
mots francs et directs pour ne pas perdre de temps. (22 h 45)
Je voudrais dire que ce mémoire reflète aussi la position,
par d'autres rôles personnels que j'ai, d'un groupement d'achat et de
distribution d'articles de bureau dans toute la province de Québec; il
s'appelle SOPA Inc.; M. Chamberland peut peut-être vous donner au moins
l'historique du début. J'ai fait ce sondage lors d'une assemblée
générale de tous ces marchands de papeterie
et d'articles de bureau, au mois de juin dernier, au niveau de cette
position; ils sont d'accord à presque 90%. Aussi, j'ai fait le
même sondage au niveau d'une assemblée générale de
l'Association des papetiers de Montréal, de la très grande
région de Montréal et celle de l'Estrie. Je peux vous affirmer
qu'ils sont d'accord à 90% avec cette position.
J'aimerais apporter les points supplémentaires suivants. Je pense
que notre mémoire, de toute façon, résume pas mal les
points de vue de tout le monde. Mais c'est plutôt fait d'une façon
théorique, mais une théorie qui est prouvable si j'avais les
moyens financiers de le faire et ce, par toutes sortes d'études. Donc,
les points importants à retenir, qu'on mentionne au niveau de
l'investisseur, ce que cela peut refléter de changer des heures
d'affaires ou d'autres conditions. Pour le consommateur -ce qu'on dit, dans ce
mémoire, est absolument vrai et exact - cela ne lui donnera rien de
plus, sauf qu'il va être plus gâté, mais il va falloir qu'il
paie la note, pour les raisons qu'on mentionne. Alors, il serait
peut-être mieux, d'une façon gentille, de dire au consommateur:
Attention, vous voulez être gâté, mais cela va coûter
un prix. Et le marché du travail, pour celui-ci -si vous lisez bien le
mémoire - cela ne changera pas grand-chose, au contraire, cela va faire
perdre des impôts qui, actuellement, sont perçus par le
gouvernement du Québec, à la source, des employés qui
travaillent régulièrement.
Un petit point: J'avais, au début, l'intention de mentionner que
tout cela, de toute façon, permettait une porte ouverte pour de
l'égrainage d'heures d'ouverture supplémentaires, au fil des
années. Je me dis: On accepte une fois et, l'année prochaine,
c'est encore une autre petite demi-heure par ci et, dans deux ans, ce sera
encore une autre petite demi-heure par là, et une semaine de plus, pour
se retrouver à sept jours par semaine sur sept à être
ouverts, douze heures par jour. C'est peut-être cela à Miami,
c'est peut-être cela dans certains pays; cela ne veut pas dire qu'on est
obligé de faire pareil. On n'est pas obligé non plus de
détériorer les conditions de travail du petit propriétaire
de commerce et de ses employés autour de lui. Il y aurait
peut-être moyen de faire la part des choses.
Bien sûr, nous voulons dire aussi que lorsque nous demandons le
statu quo, c'est le statu quo par rapport à ce qui existe aujourd'hui;
nous avons fait une faute parce que nous n'avons pas fait nos devoirs comme il
le faut, nous aurions dû dire: Sauf, évidemment, pour l'histoire
du dimanche. Nous sommes entièrement d'accord avec vous
là-dessus, on ne veut pas entendre parler du dimanche. Mais, j'aimerais
vous demander: Qu'est-ce qu'il faut faire avec toutes les exceptions qu'il y a
dans la loi au niveau de ceux qui peuvent ouvrir le dimanche, pour celui qui
vend des pommes, des bananes et des carottes, celui qui vend des bouquins,
celui qui vend des pilules? Est-ce que, dans un magasin de disques,
éventuellement, si je rajoute deux ou trois bananes et un bouquin,
j'aurai le droit d'ouvrir le dimanche? Parce que, à un moment
donné, on peut être astucieux en poussant à
l'extrême. Est-ce que, dans une papeterie, en rajoutant un livre Marabout
ou un dictionnaire, cela me permettra d'ouvrir le dimanche maintenant? À
l'avenir, quand vous aurez tout sanctionné d'ici quelques temps, les
marchands qui sont peut-être plus agressifs que d'autres vont se dire:
Écoutez, s'il y a un paquet d'exceptions qui permettent à environ
la moitié des commerces d'ouvrir, nous aussi, on va essayer de
détourner la loi d'une certaine façon, on va jouer astucieusement
et on va installer un "stand" de Marabout dans un magasin de disques, ou deux
ou trois bananes. Je ne vous propose pas de solution; je n'ai pas eu le temps
d'y penser mais, au nom de mes commettants, on va peut-être en arriver
à cela.
De par ma position personnelle et celle de ceux que je
représente, en général, nous évitons les
affrontements, nous n'aimons pas nous battre, dans le sens d'exagérer.
Comme j'ai appris, de par ma petite expérience politique de quartier,
que de temps à autre il était peut-être
préférable de faire des compromis pour en arriver à
satisfaire, peut-être pas tout le monde, mais au moins quelques-uns, je
pense que je me permettrais d'essayer d'influencer nos commettants et
peut-être les autres membres des centres-villes qui sont passés
juste avant moi en leur disant: Écoutez, le samedi soir, c'est vrai que
c'est ridicule d'ouvrir de 17 heures à 18 heures, mais une demi-heure de
plus les jeudi et vendredi soir, pour un centre-ville, ce que vous avez dit
tantôt n'est pas tout à fait vrai, parce que le même
problème existe dans le centre commercial.
Le personnage qui termine son travail, comme vous, à 17 heures,
18 heures ou 18 h 30 et qui veut se rendre magasiner a le choix d'aller
là où il veut, dans un centre-ville ou dans un centre commercial.
Or, les jeudi et vendredi il a le même problème: la gardienne,
l'automobile, papa et maman qui n'arrivent pas. Il est 19 h 15 quand il arrive
au centre commercial ou au centre-ville. Son choix n'a pas été
différent parce qu'il prend l'autobus, le taxi ou l'auto. Il arrive
à 19 heures. Faire le tour d'un centre-ville ou d'un centre commercial,
cela prend le même temps. Il y en a des plus gros et des plus petits.
À ce moment-là, on se retrouve tous, à 20 h 30, à
sortir d'un centre-ville ou d'un centre commercial et c'est le même
problème: il y a beaucoup de
circulation, des lumières, des sens uniques. Les autobus, dans un
centre-ville ou autour d'un centre commercial, ne passent pas à toutes
les deux minutes, mais à toutes les quinze minutes, en
général. Donc, les gens se sauvent plus rapidement. C'est le
même problème dans un centre-ville que dans un centre
commercial
Si, au nom des gens que je représente, il faut faire un
compromis, ma foi du bon Dieu, je pense que la demi-heure supplémentaire
des jeudi et vendredi soir versus l'heure supplémentaire du samedi sera
drôlement bienvenue. En plus, le fait de faire déplacer un patron,
sa fille, son garçon ou quelques employés pour travailler de 17
heures à 21 heures, qu'est-ce que cela change que de rajouter une
demi-heure? En général, les jeudi et vendredi soir, ce sont des
employés supplémentaires, ce sont des étudiants ou ce que
j'appelle dans mon mémoire des seconds salaires de famille. Donc, ce ne
sont pas des employés - sauf peut-être un responsable - qui ont
travaillé douze heures d'affilée durant la journée.
Dans ce sens, si on a ouvert les lumières à 9 heures le
matin, les fermer une demi-heure plus tard ne changera pas grand-chose, si
c'est une question d'éviter un fardeau supplémentaire de 17
heures à 18 heures le samedi. L'ouverture des magasins le soir durant la
semaine de Pâques, à mon avis, M. le ministre, je m'en excuse,
c'est complètement ridicule et farfelu comme compromis, ce n'est pas du
tout là qu'il faut aller. Il faut plutôt faire une étude
plus approfondie pour trouver, éventuellement, une période
supplémentaire - je suis d'accord avec vous - mais pas celle-là.
Au printemps, de toute façon, les gens sont réveillés; ils
veulent se réveiller et sauter dans les airs. Il s'agit plutôt
d'essayer de les réveiller dans un moment où ils sont endormis,
sauf, évidemment, durant la période de Noël qui, bien
sûr, est une période naturelle.
Avant d'arriver avec un projet de loi et dire qu'on va ouvrir le soir
durant la semaine de la rentrée des classes ou une semaine du mois de
juillet, parce qu'on va faire un Père Noël au mois de juillet,
avant de faire l'exercice qu'on fait aujourd'hui, faisons-le à l'envers.
Consultons toutes les associations, si possible, connues de centres-villes, de
centres commerciaux, de commerce, mais, de grâce, évitons les
chambres de commerce. En réalité, les chambres de commerce sont
des chambres d'industrie. À ma grande surprise, il n'y a presque pas de
membres commerçants, de vrais, qui font partie des chambres de commerce,
presque pas. Ils ont plutôt un autre point de vue, celui de l'industrie.
Je comprends que, pour vous, ce soit un interlocuteur très valable, mais
ce n'est pas la bonne place, à mon avis.
Donc, j'aimerais bien qu'on repense à cette semaine, qu'on
élimine carrément la semaine de Pâques, mais qu'on
étudie la question. Peut-être qu'éventuellement,
après des explications de chaque côté et une étude
réelle technique, on va trouver une semaine qui fera un compromis
acceptable. Il faudrait y penser, au moins, presque de six à douze mois
au minimum, avant de se retourner.
Il y a une chose. L'association des centres-villes concernant les
conditions de travail au niveau des congés, le lendemain de Noël,
le lendemain du jour de l'an, tous ceux-là, on est tous d'accord avec
eux à 100%. Et cela après nombre d'années de
récriminations de la part de l'ensemble de tous les employés du
commerce de détail. Il serait temps que, du point de vue social, on
fasse ce mouvement. Ces employés aussi veulent vivre comme du monde.
Une petite remarque en passant. On me dira peut-être que
j'enfreins le règlement, c'est au niveau, du ministre des Affaires
municipales, éventuellement. Je vous en ai déjà fait part,
d'ailleurs, lors d'un petit sommet économique qui s'est passé
dernièrement dans une petite capitale, la nôtre ici, c'est
l'équitabilité au niveau de la valeur locative. On
détermine la valeur locative dans le commerce de détail en
fonction de la performance des gens, ce qui, à mon avis, n'est pas tout
à fait équitable pour tout le monde. Pour la grande surface, il
se paie des valeurs locatives en fonction de baux négociés par la
force des bras et la force de la persuasion; c'est parfait, pas de
problème là-dessus, mais le petit commerçant se trouve
à repayer la différence, parce qu'il n'a pas la force de la
négociation. Une bonne journée, il "pète au fret" et c'est
le petit bonhomme qui a 25 succursales en Ontario et 12 au Manitoba qui prend
sa place. Si, au moins, on pouvait arriver, éventuellement, grâce
au ministre des Affaires municipales ou à son ministère, à
établir une valeur locative équitable par un
procédé différent de celui de l'évaluer par le
loyer de base... Enfin, que ce soit au centre-ville ou dans un centre
commercial, cela revient au même d'une certaine manière. Cette
façon de changer les choses au niveau des taxes de base permettrait,
à mon avis, à l'ensemble des petits commerçants
d'être plus "performants" et de mieux réinvestir dans leur
commerce. À ce moment, ils n'auraient pas les problèmes, qu'ils
exposaient tantôt, de revitaliser les centres-villes, cela se ferait
automatiquement, parce qu'ils seraient capables de réinvestir un peu
plus dans leur commerce en ayant une vraie équitabilité. Une
suggestion: valeur locative au pied carré et non pas une valeur locative
établie un peu parfois aux dés. Je vais arrêter là.
J'espère que...
M. Biron: M. Filion, vous permettrez bien que je ne
réponde pas à votre dernière
intervention, sauf pour en prendre note, parce que ce n'est pas avec la
loi sur les heures d'affaires qu'on va corriger cela.
M. Filion: Non, je sais.
M. Biron: Je vous remercie de votre ouverture. Vous me semblez un
négociateur habitué à donner, à recevoir et
à échanger des choses. C'est pour cela qu'on fait la commission
parlementaire et je l'ai bien dit au début, que je voulais participer
à cette commission. D'ailleurs, les collègues des deux
côtés: Parti québécois comme Pari libéral,
ont dit qu'ils étaient ici eux aussi comme moi, avec beaucoup
d'ouverture d'esprit pour écouter les gens et essayer d'en arriver
à la fin à la meilleure décision possible.
Vous dites que vous êtes d'accord avec le statu quo mais on
s'entend que ce n'est pas le statu quo que vous voulez, c'est-à-dire que
vous ne voulez pas laisser les magasins ouverts le dimanche, vous voulez fermer
ceux qui sont ouverts. On pénalise alors des gens dont, à l'heure
actuelle, le commerce est ouvert le dimanche. Il faut bien se mettre cela dans
la tête quand même et, pour eux, on est obligé de faire
certaines choses, certaines concessions parce qu'ils ont véritablement
des arguments qui, pour eux, jusqu'à un certain point, encore une fois,
peuvent être valables. Tu ne peux pas leur dire: Allez vous faire pendre
ailleurs. Il y a des choses qu'il faut discuter avec eux et en venir à
un consensus entre des gens d'affaires qui veulent développer
l'économie.
Maintenant, sur votre intervention vis-à-vis des exclusions de la
loi, on s'entend tu ne peux pas acheter une bouteille de pilules dans un coin
et par la suite opérer une quincaillerie parce que tu vends quelques
pipules. L'activité exclusive ou à peu près exclusive
serait la vente de tabac, de journaux, etc. Bien sûr, si tu as de menus
articles à côté, vraiment de menus articles, et vraiment
à côté, c'est permis jusqu'à un certain point, mais
on ne peut certainement pas se servir d'une partie, de serait 5% ou 10% du
commerce, pour passer à côté de la loi pour 90% du
commerce. Jusqu'à maintenant, on a essayé de faire respecter cela
avec des problèmes à cause des amendes, mais on entend bien dire,
à cause des nouvelles amendes qui sont imposées, des nouvelles
lois: Maintenant, ce sont ces articles qu'on a le droit de vendre, dans les
entreprises qui vendent des journaux ou des périodiques, parce qu'on
nous a fait la suggestion, ce matin, de revenir à la description des
articles vendus plutôt que du genre de commerce et ce sont elles qui ont
le droit d'opérer. Les autres n'ont pas le droit de vendre quelques
livres et toutes les autres choses qui sont interdites par la loi. (23
heures)
Vous avez mentionné les disquaires, cela est un exemple. C'est
fort possible que si l'Association des disquaires du Québec en arrive
à un consensus à peu près général et nous
dit: Nous voudrions être considérés, dans le domaine du
disque, comme celui du livre, des journaux, bien sûr, on va recevoir sa
demande, mais on va attendre d'abord qu'il y ait le même consensus qu'il
y a déjà eu dans certains autres domaines. Les librairies sont
arrivées à un consensus de 90% à 95% en disant: On veut
être considéré sur le même pied que ceux qui vendent
des journaux et des périodiques. On a accepté. Alors, on est
prêt à regarder cela, mais seulement lorsque la très grande
majorité des intervenants commerciaux d'un secteur d'activité va
nous en faire la demande. Là, on sera ouvert à cela, mais pas
s'il y a juste un petit groupe qui nous le demande. C'est de cette façon
qu'on a procédé pour les gens des galeries d'art, les
antiquaires, ceux qui vendent des articles de piscine, des monuments
funéraires. Cela a été à peu près la
totalité des commerçants dans ce secteur-là. Alors, une
fois que cela a atteint la totalité des commerçants, on est
prêt à les recevoir.
Je répète, dans le fond, ce que j'ai dit depuis ce matin:
On a voulu répondre à l'essentiel et aux nombreuses demandes qui
nous ont été faites de la part des gens d'affaires. À
côté, on a quand même voulu faire quelque chose pour des
gens qui nous semblaient avoir certains arguments, mais pas assez forts pour
leur donner l'ouverture le dimanche et à toute heure du jour ou de la
nuit. Tout simplement, par exemple, on est prêt à discuter avec
eux et à essayer de se rendre à certains points de vue selon
lesquels on doit donner plus d'occasions aux consommateurs de dépenser
plus, mais cela n'a pas été beaucoup, c'est à peu
près 2% de plus d'ouverture. Alors...
M. Filion: Ah bon!
M. Biron: ...c'est très peu.
M. Filion: M. le ministre, un problème
égoïste: vous parliez des disquaires et des libraires. Je
représente, bien sûr, 135 commerces au centre-ville de
Québec, mais aussi beaucoup de papeteries. Alors, j'ai un
problème particulier: une papeterie, en général, cela peut
vendre parfois des livres dans certaines petites villes et, dans les grandes
villes, elles se spécialisent: ce sont des papeteries ou des librairies;
c'est l'un ou l'autre, mais c'est facile, dans le milieu de la papeterie, de
faire les deux, c'est un peu le même milieu. Alors, je me dis: Si tous
les libraires confrères de ma région sont ouverts le dimanche
parce qu'ils vendent des livres, ils vendent aussi, bien sûr, ce qu'on
appelle "on the side", pour compléter la ligne, quoi, de la papeterie.
Je me dis: Je suis un peu
frustré dans mon domaine. Je ne suis pas capable de vendre de la
papeterie le dimanche - je n'en ai pas le droit - mais eux vont en vendre. Et
ce qu'ils vendent le dimanche, je trouve cela déloyal, je ne le vends
pas le lundi. Donc, éventuellement, si cela devient encore très
large, on se dit, dans le milieu de la papeterie et des articles de bureau:
Écoutez, cela va être facile, les gars, la moitié de votre
magasin devient du livre demain matin et vous êtes ouverts le dimanche,
un peu partout.
Alors, je me dis: Où arrête cette histoire? Est-ce que tous
les groupes des différents commerces spécialisés vont
finir par venir vous voir, éventuellement, et vous dire: Voici, on
s'entend, on est capable de s'installer, on est d'accord pour ouvrir le
dimanche. Là, groupe par groupe, il va arriver que la loi sur les heures
d'affaires n'existera plus, tout le monde va être ouvert. Je me dis:
Où cela va-t-il arrêter?
M. Biron: Cela va arrêter lorsque les gens d'affaires...
Cela va aller dans la direction que les gens d'affaires vont nous demander,
mais, encore une fois, je vous dis et je l'ai dit à plusieurs reprises
aujourd'hui - que je déplore que les gens d'affaires du Québec ne
se parlent pas assez et ne forment pas de consensus. La preuve, c'est qu'il y a
des gens qui disent: Tu fermes le dimanche, et il y a beaucoup de gens qui
disent: On ouvre le dimanche. Ce sont tous des gens d'affaires, à mon
point de vue. Alors, il y a un groupe qui est majoritaire et l'autre
minoritaire. Mais le groupe minoritaire, quand même, si on circule
à travers les villes, de ceux et celles qui ouvrent le dimanche, il y en
a beaucoup. Je pense qu'il y a lieu que ces gens-là se parlent et se
parlent davantage, et qu'ils arrivent entre eux, entre gens d'affaires
disciplinés, à un consensus à présenter au
gouvernement disant: Voilà, nous en sommes venus à un consensus,
c'est ce que nous voulons. Ce serait tellement facile. C'est sûr que,
s'il y a deux groupes, le gouvernement est toujours obligé de trancher
entre les deux jusqu'à forcer....
M. Filion: Et le compromis chaque fois. M. Biron: ...une
sorte de compromis.
M. Filion: J'aimerais vous dire, au sujet de se parler, que,
lorsque cela va bien dans le commerce en général, les gens ne se
parlent pas. Ils sont même jaloux. Alors, il faut se parler le moins
possible. Il faut dire que cela va mal depuis quelques années. Alors, on
se parle de plus en plus. La preuve: des groupes de centres-villes, des SIDAC,
des associations spécialisées et ainsi de suite. C'est parce que
cela va mal. Alors, là, par contre - c'est peut-être un bien - on
commence à se parler, on commence à se connaître. Mais, mon
Dieu, cela va prendre encore bien des années, on n'est pas
habitué. On se reconnaît de temps à autre, mais cela va
peut-être prendre dix ans.
M. Biron: C'est une grosse amélioration, dans le fond,
parce qu'on n'a pas une longue tradition au Québec dans ce
sens-là...
M. Filion: Pas du tout.
M. Biron: ...de professionnaliser notre action économique
et puis tant mieux. Je pense que les SIDAC, là-dessus, sont utiles comme
tous les groupements de gens d'affaires.
M. Filion: Un bénéfice extraordinaire, mais cela va
peut-être prendre plusieurs années avant que tout le monde se
parle. Alors, n'allez pas trop vite, s'il vous plaît! Évoluons
lentement, au même rythme qu'on va se parler.
M. Biron: C'est ce qu'on a fait par ce projet de loi.
M. Filion: Oui!
Le Président (M. Desbiens): Est-ce qu'il y a d'autres
interventions? M. le député de Robert Baldwin.
M. O'Gallagher: Je voudrais vous poser une question en supposant
que je sois commerçant. Je vous soumets un problème qui survient
dans mon comté et qui va se produire sans doute bientôt à
Québec, il s'agit des marchés publics. Vous êtes dans le
centre-ville, mais il y a deux marchés publics qui vont ouvrir dans la
région de Québec bientôt. Je pense qu'il y en a
déjà un d'ouvert à Charny ou aux environs.
M. Filion: Bientôt, oui.
M. O'Gallagher: Dans mon comté, il y a le marché de
l'ouest qui obtient une popularité extraordinaire. Environ 10 000
personnes y passent, tous les dimanches. Le centre est spécialisé
en alimentation, il y a au moins trois ou quatre boucheries, deux poissonneries
et une grosse épicerie. Il y a beaucoup de monde, c'est beau, c'est
attirant, et le marketing est extraordinaire. C'est une sorte de Nations Unies,
si vous voulez...
M. Filion: C'est un loisir.
M. O'Gallagher: ...c'est très populaire. Avec cette loi,
si on restreint le personnel à trois employés, dans les magasins
qui vendent des fruits, dans les poissonneries ou les boucheries, ou dans le
grand marché qui a
une superficie d'environ 10 000 pieds carrés, que va-t-il
arriver? Cela va être la guerre. Les commerçants, d'ailleurs, ne
seront pas contents, ni les employés qui, en majorité, le
dimanche, sont des jeunes qui travaillent à temps partiel. Vous avez une
population d'environ 10 000 personnes qui passe là à tous les
dimanches. C'est un phénomène qu'on voit de plus en plus à
Montréal -d'ailleurs un mémoire sera présenté jeudi
-et cette même expérience sera tentée bientôt
à Québec. Je vous pose la question pour nous instruire en tant
que législateur. C'est un fait, ce n'est pas quelque chose qu'on peut
manipuler. C'est l'expression de la population.
M. Filion: Est-ce que ces grands marchés - je n'en ai pas
encore vu à Québec, sauf peut-être un petit à
Sainte-Foy - sont strictement alimentaires?
M. O'Gallagher: Oui.
M. Filion: Bon. S'ils sont strictement alimentaires, dans un
premier temps, c'est acceptable. Il faudra vivre l'expérience pour nous,
de Québec, bien sûr, bientôt. Je pourrai peut-être
vous répondre plus adéquatement dans six mois ou dans un an.
Malheureusement, je ne suis pas Montréalais, malgré que je
fréquente trop cette ville à mon point de vue, je la
fréquente par affaires et non pas pour y vivre...
M. Tremblay (Chambly): Avez-vous de mauvaises
fréquentations?
M. Filion: Non, c'est plutôt parce qu'il faut parcourir 150
milles et la Sûreté du Québec ne m'aime pas.
M. Rochefort: II y a des Montréalais qui viennent
siéger à Québec, habituellement dans l'autre sens.
M. Filion: Bienvenue. Je vous jure que je fais vivre vos
hôtels. Alors, nous, les gens de Québec, n'avons pas vécu
cette expérience encore. Si elle se limite, dans un premier temps,
strictement à l'alimentaire, c'est acceptable, à mon point de
vue. Par contre...
Une voix: Steinberg. M. Filion: ...oui...Une
voix:Oui?
M. Filion: Par contre, je dois vous dire qu'au départ, je
vois tout de suite un premier défaut dans mon affaire: dans mon
centre-ville, j'ai un alimentaire à côté de chez nous qui,
lui, attire du monde durant la semaine. Là, forcément, si les
gens sont allés faire leur alimentation le dimanche, ces gens ne
viendront plus chez moi, à mon centre-ville, dans mon alimentaire, pour
dépenser. Donc, j'aurai moins de clients éventuellement. C'est
bien évident.
M. O'Gallagher: Alors, on va mettre la police pour empêcher
le monde d'entrer dans les centres commerciaux le dimanche. On est rendu
loin.
M. Filion: Une chose est certaine, il va falloir évoluer
avec son temps. Le consommateur va mettre de plus en plus de pression et il va
falloir y aller tranquillement, sinon, un moment donné, on va se
retrouver...
M. O'Gallagher: Mais, on y est arrivé... M. Filion:
On y est arrivé, mais...
M. O'Gallagher: ...peut-être pas à Québec,
mais à Montréal on y est.
M. Filion: Oui, mais comme je le disais à M. Biron
tantôt, il va falloir évoluer, bien sûr, mais n'allons pas
trop vite et allons-y tous à la même vitesse. Alors, dans un
premier temps... Écoutez, on ne pourra pas se battre contre cette
expérience. Cela ne me donne rien de commencer à inventer toutes
les théories et tous les critères qu'il faut pour vous dire:
Fermez-les les marchés le dimanche. Je n'ai pas d'arguments
actuellement, je n'ai pas pu vivre cela. Je vois déjà un premier
danger. Peut-être que, demain matin, tous les marchands des
centres-villes ou d'ailleurs vont être obligés d'aller ouvrir des
succursales dans ces endroits et d'accepter de vivre avec un petit domaine de
succursales. Là, c'est une autre histoire.
M. Fortier: J'aurais seulement un...
Le Président (M. Desbiens): M. le député
d'Outremont.
M. Fortier: ...un petit commentaire. Je pense que vous venez de
dire quelque chose de très important. Vous dites qu'il faut
évoluer avec son temps, mais qu'il ne faut pas aller trop vite et faire
face, par ailleurs, à des phénomènes nouveaux. La
commission parlementaire en cours nous a permis d'évoquer des
phénomènes nouveaux; on va discuter, jeudi, des marchés
publics. Par ailleurs, avec les groupes qui vous ont
précédés, on a parlé de phénomènes
comme ceux des manufacturiers qui ne sont pas des phénomènes
nouveaux; cela remonte à 1975. Je crois que le fait de tenir une
commission parlementaire comme celle-ci, soi-disant pour traiter uniquement des
heures d'ouverture, nous permet d'aborder des problèmes
d'ensemble et de faire en sorte que le législateur et le
ministère responsable du commerce s'aperçoivent qu'il y a des
problèmes importants chez les commerçants.
Vous venez de dire quelque chose qui m'a frappé. Peut-être
qu'il faudrait regarder cela dans un an ou dans un an et demi. Ce matin,
quelqu'un suggérait qu'on inclue un article dans cette loi, "a sunset
clause", disant: Nous devrons réviser cette loi dans deux ou trois ans.
Je me demandais si ce que vous venez de dire pourrait, en fait, devenir une
recommandation de le faire, c'est-à-dire que nécessairement,
à cause de l'évolution des choses de la vie, à cause des
expériences que nous allons vivre durant les deux ou trois prochaines
années, on devrait inclure dans la loi: Dans deux ou trois ans, on devra
revoir cette loi, l'examiner ensemble et entendre les doléances de
toutes les parties.
M. Filion: Je suis d'accord avec vous parce que, si on refuse
d'évoluer avec son temps même dans les centres-villes, c'est la
pire bêtise qu'on puisse faire. Il va falloir qu'on apprenne à
vivre avec cela; sinon, c'est la faillite encore plus vite qu'on ne peut le
penser. On n'a pas le choix. Si on veut, de par des lois, mettre des carcans,
il est certain qu'éventuellement on va se faire dépasser par les
événements. Il faut vivre avec son temps et il va falloir que les
centres-villes deviennent des centres commerciaux; ce n'est pas
compliqué. Il va falloir que les centres-villes deviennent des centres
commerciaux avec les mêmes qualités. C'est pour cela que j'essaie
de dire, de temps à autre, à mon cher ministre: Ma foi du bon
Dieu, forçons les gens à se parler, donnons-leur les moyens pour
qu'ils soient capables d'investir, donc, de faire au moins des profits
intelligents et respectables.
Troisième chose, les SIDAC vont amener ces gens à se
parler et leur donner les moyens. Le représentant de SIDAC, promenade
Masson, disait tantôt: La Société des alcools, la
Commission des normes du travail, la régie de ci et la régie de
ça, si elles ne paient pas leur part dans un centre-ville, elle ne sont
pas de bons citoyens.
Éventuellement, les gens qui ont les moyens d'apprendre des
techniques d'ailleurs, ce qui se passe ailleurs dans le monde,
l'évolution, seront capables de les appliquer chez eux et ils auront les
mêmes critères que le centre commercial. Malheureusement, ils ont
peut-être vingt ans à reprendre. Il va falloir un petit coup de
pouce. Peut-être pas un coup de pouce financier, mais un coup de pouce
technique parce que, quand on demande des subventions, personnellement, je
n'aime pas cela, c'est de l'attachement. Il y a des moyens, par exemple, pour
évoluer plus rapidement et en arriver aux mêmes performances.
C'est ce qu'il va falloir faire avec les centres-villes.
Le Président (M. Desbiens): Je vous remercie de votre
participation. La commission élue permanente de l'industrie, du commerce
et du tourisme ajourne ses travaux à jeudi matin, 10 heures.
(Fin de la séance à 23 h 13)