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Commission permanente de l'industrie et du
commerce
Séance du 12 août 1969
(Dix heures douze minutes)
M. LEDUC (Laviolette), (président de la Commission permanente de
l'industrie et du commerce): Bienvenue à tous. Avec votre permission,
nous allons changer certains noms de membres de la commission, en autant que
c'est adopté de façon unanime. Du côté du
gouvernement, vous avez M. Simard, M. Beaulieu, M. Beaudry, ministre, M.
Charbonneau sera remplacé par M. Sauvageau, et M. Hamel sera
remplacé par M. Shooner. Avec votre indulgence, je vais présider.
M. Baillargeon sera remplacé par M. Philippe Lacroix et M. Cadieux
remplacera M. Maltais.
Je pense que la procédure est qu'après que le ministre
sera appelé à souhaiter la bienvenue, les corps
intermédiaires suivants ou les organismes intéressés
parleront à tour de rôle. Les membres de la commission ont le
droit d'interroger les personnes qui viennent représenter des
organismes, mais, par contre, entre organismes, on ne peut poser de
questions.
M. Murray remplacera M. Beaulieu.
Lorsqu'une personne représentant un organisme viendra au
microphone, je lui demanderais de bien vouloir donner son nom, de s'identifier,
et de donner également le nom de l'organisme qu'elle
représente.
Alors, M. Beaudry, ministre, s'il vous plaît.
M. BEAUDRY: M. le Président, permettez-moi de souligner que la
présente réunion est la première que tient la nouvelle
commission de l'Industrie et du Commerce. Aux membres qui en font partie, je
transmets mes sincères remerciements, sachant leur désir que nos
délibérations soient des plus fructueuses et se traduisent dans
les actes. En votre nom et au nom des membres de cette commission, je souhaite
la bienvenue aux organismes qui sont ici représentés en cette
occasion.
Tel que le mentionnait l'avis de convocation, nous sommes réunis
pour recueillir les opinions officielles et finales des organismes qui ont
exprimé des opinions contraires quant à la portée du
projet de bill sur les heures d'ouverture et de fermeture des commerces en
regard des décrets de convention collective. Pour bien délimiter
le sujet en cause, il me semble nécessaire d'établir clairement
dans son optique véritable le problème en jeu.
Premièrement, il ne s'agit pas des heures quotidiennes ou
hebdomadaires de travail des employés. Il ne s'agit pas non plus de
fixer l'heure à laquelle les employés pourront commencer ou
cesser leur travail.
Deuxièmement, il s'agit exclusivement des commerces
eux-mêmes et de la fixation des heures quotidiennes durant lesquelles ces
commerces seront accessibles à la population, et pourront ainsi
satisfaire aux besoins de la clientèle. Certes, il existe une
étroite interdépendance entre les deux notions « heures
d'affaires » et « heures de travail ». Mais la ligne de
démarcation entre ces deux concepts doit être clairement
établie de sorte que, dans un même domaine, à savoir
l'ouverture et la fermeture des commerces, une législation ne soit pas
amputée de son essence même et devienne impraticable.
M. le Président, les mémoires antérieurs
présentés à la commission spéciale qui a
étudié le bill 89, ont prôné d'une manière
formelle la nécessité de rendre cette loi universelle,
c'est-à-dire ayant effet partout au Québec et pour tout le
secteur du commerce de détail, compte tenu de la portée
restrictive de l'article 5.
Lors de la réunion du 16 avril dernier, J'ai
suggéré une solution au dilemme que posait la portée des
décrets de convention collective eu égard aux heures d'ouverture
et de fermeture des commerces. Cette suggestion a reçu l'approbation
unanime des membres de la commission spéciale et fut adoptée
telle quelle, comme en fait foi le journal des Débats de
l'Assemblée nationale du 16 avril 1969, page 1175.
Subséquemment, le climat s'est détérioré, et
l'on a assisté à un déploiement d'efforts fantastiques,
tant à l'intérieur du Parlement que dans des rencontres
publiques, pour retarder la mise en application du projet. Les moyens
utilisés à cette fin furent pénibles;
Interprétations tendancieuses du projet de loi, attaques insidieuses
contre les hommes publics, circulation de tracts fielleux, même dans le
portique d'une église à Montréal, à l'insu des
autorités religieuses. Bref, ce genre de tactiques, qui s'inspirent
surtout de la passion plutôt que de la froide honnêteté
intellectuelle, a retardé le progrès de cette législation
et a privé la population, les commerçants et les employés
du secteur tertiaire d'une mesure législative des plus urgentes.
Maintenant que l'orage est passé, que la température des
esprits semble revenue à la normale, j'ai l'impression, M. le
Président, que la présente réunion se déroulera
sous le signe de l'objectivité et que le dialogue qui suivra montrera
que nous sommes des adultes sérieux.
Je suis convaincu que les interlocuteurs ici
présents sauront faire preuve d'impartialité et de
réalisme dans l'exposé de leurs points de vue respectifs. Il sera
possible, alors, d'assurer le respect intégral des devoirs et des droits
des commerçants et de leurs employés vis-à-vis des
consommateurs. Ce faisant, nous aurons tous contribué, une fois de plus,
à sauvegarder le bien commun, même si certains
intérêts particuliers sont mis en veilleuse temporairement.
M. LE PRESIDENT: Je vous remercie.
M. CADIEUX: M. le Président, j'aurais une petite correction
à faire à ce que vient de dire le ministre de l'Industrie et du
Commerce. Lorsqu'il a proposé un amendement à un article qui
touchait les conventions collectives, ce fut fait à la toute
dernière minute, tel que le journal des Débats, d'ailleurs, peut
le rapporter. Du côté de l'Opposition, plusieurs avaient cru
comprendre que la séance était ajournée et qu'aucun autre
amendement ne serait apporté. Je crois que j'étais même le
seul à mon siège en train de causer et qu'on se préparait
à sortir.
Si le mot ( adopté » a été
prononcé, on n'a pas pensé que c'était à propos de
cet amendement. On croyait que tout le monde était d'accord sur le texte
qui était déjà devant nous et non avec l'amendement. C'est
la seule correction que je voulais faire à ce stade-ci.
M. LE PRESIDENT: D'autres questions, messieurs? Alors, je vais demander
au représentant de l'Association des détaillants en alimentation
du Québec Inc. de bien vouloir présenter son mémoire.
M. LEVEILLE: Fernand Léveillé, administrateur
général de l'Association des détaillants en alimentation
du Québec, siège social à Montréal. Nous avons
remis des copies de notre mémoire à M. Bonin.
Introduction. Le présent mémoire est soumis à votre
bienveillante attention par l'Association des détaillants en
alimentation du Québec, association professionnelle des épiciers
progressifs du Québec.
Le siège social de notre association est situé au centre
de l'Alimentation, 6000 est, boulevard Métropolitain, Montréal,
Saint-Léonard. Le président général est M.
Réal Lanctôt, épicier de Valleyfield et l'administrateur
général, M. Fernand Léveillé, votre humble
serviteur.
Notre association compte dans ses rangs au-delà de 2,000 membres
répartis en 10 régionales qui sont: Bas Saint-Laurent,
Bols-Francs, L'Estrie, Laurentides, Mauricie, Montréal, l'Ouest
québécois, Québec, Richelieu et
Saguenay-Lac-Saint-Jean.
Le présent mémoire a pour but d'exposer le point de vue de
l'association concernant un article précis du bill 24. Nous nous
permettons de l'appeler le bill 24 parce que dans la convocation du
secrétaire des commissions il est bien mentionné: Bill 24, Loi
des heures d'affaires des établissements commerciaux. Nous
référons à l'article 11 parce que nous nous inspirons du
journal des Débats du 16 avril, page 1175, où on mentionne que
l'article 13 du bill 89 devient l'article 11. Vous nous excuserez si nous
mentionnons l'article 11 et le bill 24, nous nous sommes
référés à ces deux documents. Prise de position
de l'ADA du Québec
Lorsque l'ADA du Québec a présenté un
mémoire le 13 février dernier, à la première
séance de la commission parlementaire de l'Industrie et du Commerce,
elle avait pris en considération la situation anormale où dans
six régionales, soit le Bas Saint-Laurent, les Bois-francs, les
Laurentides, la Mauricie, l'Ouest-québécois et le Richelieu, il
n'existe aucune loi d'ouverture et de fermeture à l'exception de
quelques règlements municipaux. Notre association était aussi
consciente de la présence de décrets de convention collective qui
régissaient les principales agglomérations urbaines telles que
Montréal, Québec, Sherbrooke, Chicoutimi et Jonquière.
Après avoir suivi attentivement les délibérations dudit
comité et de la commission parlementaire permanente, nos membres
régis par des décrets se sont ralliés au bill 24 qui
régirait les heures d'affaires des établissements
commerciaux.
Relativement à l'article 11 du bill 24, nous citons le texte de
l'intervention de M. Jean-Paul Beaudry, consignée à la page 1175
des Débats de l'Assemblée nationale du Québec, commission
spéciale de l'Industrie et du Commerce, bill 89, le 16 avril 1969.
Je vais vous dispenser de la lecture de l'article parce que je
croîs que vous avez le journal des Débats devant vous. Je continue
en disant que pour confirmer notre appui à ladite Loi des heures
d'affaires des établissements commerciaux, les membres de la
régionale de Montréal, réunis en assemblée
générale le 21 mai 1969, par résolution dûment
proposée, secondée et adoptée à l'unanimité,
accordaient un appui total au ministre de l'Industrie et du Commerce et
à sa position concernant l'article 11 du bill 24 qui traitait
précisément des décrets de convention collective.
Nos membres de la régionale du Saguenay-Lac-Saint-Jean
s'étaient d'abord prononcés en faveur du maintien des
décrets de convention collective, mais se sont ralliés par la
suite
au texte de l'article 11 consigné à la page 1175 des
Débats du 16 avril, commission spéciale de l'Industrie et du
Commerce, Copie de cette résolution de la régionale ci-haut
mentionnée est attachée aux présentes. Elle était
ici à la fin... La province est grande et nos membres sont
arrivés ce matin de la régionale... Disons qu'elle n'est pas
attachée mais insérée dans le document que nous venons de
vous remettre.
Les membres de la régionale de l'Estrie, par la voix de leur
président, M. Lucien Lemay, de Sherbrooke, avaient aussi
présenté un mémoire devant le comité parlementaire.
Dans ce mémoire, nos membres de l'Estrie demandaient le statu quo
concernant les décrets de convention collective. Depuis, nos membres de
l'Estrie se sont ralliés également à l'article 11 du bill
24. Une copie de la résolution de la régionale est aussi
attachée aux présentes. Vous la trouvez à la fin du
mémoire. C'est la deuxième résolution que vous voyez
attachée.
Les membres de la régionale de Québec, qui sont
régis par un décret de convention collective se rallient
également à l'article 11 du bill 24 et leur président, M.
Clément Lapointe, dûment mandaté, est ici présent
pour appuyer ce mémoire. J'ai ici, à côté de moi, M.
Lemay, président de la régionale de l'Estrie, M. Marc
Côté, président de la régionale du Saguenay et M,
Clément Lapointe de Québec. Recommandations
Le conseil d'administrationde notre association, au nom de ses membres
actifs, réitère son appui total au bill 24 et recommande à
cette commission qu'il soit soumis de nouveau à l'Assemblée
nationale pour adoption et promulgation dans le plus bref délai possible
et que cette loi s'applique à tous les commerces visés.
Nous tenons à assurer le comité de la plus entière
collaboration de notre association et du désir de nos membres d'observer
cette nouvelle loi.
Respectueusement soumis.
Réal Lanctôt, président ici présent et votre
humble serviteur.
M. LE PRESIDENT: Merci, M. Léveillé.
Je remarque l'arrivée de notre bon ami, M. Laurier Baillargeon,
membre de la commission. M. Lacroix, qui l'avait temporairement
remplacé, va lui céder sa place. Avez-vous des questions à
poser? Je demande immédiatement au représentant de l'Association
des épiciers en gros du Québec, M. Bernard Tur-cot, de prendre la
parole.
M. DEAUDELIN: Bonjour, messieurs. Jean-Guy Deaudelin, président
de l'Association des épiciers en gros du Québec. Nous n'avons pas
préparé de mémoire, comme nos amis les détaillants,
puisque la majorité de nos marchands est déjà
représentée par l'ADA. Je crois comprendre que l'ADA a un mandat
bien précis pour représenter nos épiciers. Toutefois,
j'aimerais faire quelques constatations. D'abord, l'ADA représente nos
épiciers affiliés. Il reste, quand même un grand nombre
d'épiciers non affiliés qui ne sont pas représentés
par l'ADA. Cela ne représente peut-être pas la majorité des
commerçants. Les épiciers affiliés sont ceux qui font le
plus gros chiffre d'affaires. En somme, l'ADA représente la plus grande
partie du chiffre d'affaires de nos épiciers.
Il reste encore un grand nombre de détaillants à qui il
faudrait penser et qui vivent du commerce de l'alimentation. Ceci est ma
première constatation. Je m'excuse de n'avoir rien
préparé; c'est la première fois que j'ai l'occasion de me
présenter devant vous. De plus, lors des dernières
réunions de la commission, j'étais à l'extérieur et
je n'ai pu, malheureusement, y assister.
La première constatation, c'est que je voudrais que l'on pense au
grand nombre d'épiciers qui ne sont pas membres de l'ADA.
Deuxièmement, j'aimerais que la loi qui sera adoptée soit
assez hermétique pour ne laisser aucun coulage. Je pense à
certains commerces qu'on aurait oubliés et qui pourraient quand
même faire des ventes en dehors des heures prévues par la loi. En
plus de ça, il faut aussi penser au public consommateur. Il faudrait
savoir si les heures d'ouverture sont suffisamment étendues pour
répondre aux besoins du consommateur. L'alimentation étant un
service, il faut sûrement penser au consommateur.
C'est tout ce que j'ai à ajouter aux paroles de M.
Léveillé. Je vous remercie.
M. LE PRESIDENT; Je remercie M. Deau-delin.
M. DEAUDELIN: Y a-t-il quelqu'un qui aurait des questions?
M. BEAUDRY: Appuyez-vous le mémoire de l'ADA?
M. DEAUDELIN: Sûrement que j'appuie le mémoire de l'ADA,
puisque, comme je l'ai dit, la plupart de nos marchands qui ont un gros chiffre
d'affaires sont membres de l'ADA. L'ADA est mandatée pour les
représenter.
M. BEAUDRY: M. le Président, en tant que grossiste
vous-même et en tant que président de l'Association des
épiciers en gros, croyez-vous que la majorité de vos clients qui
n'appartiennent pas à l'ADA soit en faveur de cette loi?
M. DEAUDELIN: Il m'est difficile de répondre avec
précision, parce que je n'ai pas eu l'occasion de leur parler un
à un, ni même en groupe. Toutefois, je sais que certains petits
marchands craignent cette loi et prétendent que les heures d'ouverture
proposées ne leur permettront pas de gagner leur vie. Là, je vous
donne les commentaires de quelques-uns. Je ne me fais pas l'interprète
de tout le groupe. Il est très difficile de rencontrer tous ces
marchands, comme on peut le faire au sein de nos groupes affiliés.
M. CADIEUX: Je suis d'accord qu'on ne pourra jamais avoir
l'unanimité de tous les commerçants en détail du
Québec.
M. DEAUDELIN: Je suis d'accord qu'il est difficile d'avoir
l'unanimité.
M. CADIEUX: Si nous pouvions avoir un bon 90%.
M. DEAUDELIN: 901 Enfin, je ne veux pas vous donner de chiffre. Il est
entendu qu'il faut prévoir le service au consommateur.
De plus, comme je le disais tout à l'heure, la classification des
commerces doit être bien établie. Je pense que c'est un autre
problème assez complexe que de définir une épicerie ou un
restaurant. Remarquez que je n'ai pas étudié la loi et que je ne
veux pas trop m'étendre sur le sujet. Toutefois, je tiens à
souligner que la classification est très importante du point de vue de
la loi.
M. BEAUDRY: Maintenant, M. le Président, vous êtes
certainement au courant que l'artisan ne serait pas inclus dans cette loi.
M. DEAUDELIN: Oui, justement, je suis au courant de cela et je tiens
à appuyer ce point-là. Maintenant, vous mentionnez le commerce;
il compte combien de personnes d'après votre loi? C'est encore une autre
précision très difficile a...
M. BEAUDRY: C'est entendu. Merci, M. le Président.
M. DEAUDELIN: Merci.
M. LE PRESIDENT: Merci, M. Deaudelin. Pas d'autres questions?
Alors, je donne la parole immédiatement au représentant du
Conseil d'alimentation du Québec, M. Cantin, je pense.
M. CANTIN: M. le Président, mon nom est J.-R. Cantin,
représentant M. Jean Granger, du Conseil d'alimentation du
Québec. Le Conseil d'alimentation du Québec, à
l'unanimité, appuie fortement la position de l'ADA, celle de
l'Association des magasins à succursales multiples, des grossistes, des
grossistes en fruits et légumes, et cette fois nous pouvons dire qu'au
conseil, nous avons eu entente et unanimité sur ce point-là. Nous
les appuyons fortement. Merci, messieurs.
M. LE PRESIDENT: Très bien, M. Cantin. Des questions?
Le représentant de la Confédération des syndicats
nationaux, M. Parent.
M. PARENT: Raymond Parent, secrétaire général de la
Confédération des syndicats nationaux et de la
Fédération du commerce.
Nous n'avons pas de mémoire, nous ferons appel à votre
mémoire et peut-être à des tracts et à des brochures
que nous avons publiés, car nous en avons publié et nous en
reconnaissons la paternité. On y a fait allusion tantôt. Nous
ferons appel à votre mémoire parce que nous
répéterons essentiellement les choses qui ont été
dites devant vous, le 12 mars 1969, lorsque nous avons comparu devant le
môme comité au sujet de ce qui s'appelait, à ce
moment-là, le bill 89.
Nous avons dit alors que nous étions favorables à une
réglementation par voie législative des heures d'ouverture et de
fermeture. Nous avons dit, par conséquent, que nous étions
d'accord sur le principe d'une loi qui aurait pour effet de réglementer
publiquement cette partie au moyen d'une loi. Mais nous avions mis, non
seulement une réserve, mais une objection très sérieuse
à certaines imprécisions du bill qui sont maintenant devenues des
précisions dans le bill 24, c'est-à-dire que le projet de loi, le
bill 24, aurait pour effet, inévitablement, d'amender une autre loi qui
est la Loi de la convention collective ou la Loi de l'extension juridique de la
convention collective. Là-dessus, nous maintenons cette objection
très formelle, nous croyons que le législateur, c'est
d'ailleurs toute l'économie de notre législation et notre loi du
travail ne doit intervenir que quand les parties ne sont pas capables
elles-mêmes de régler leurs différends.
Alors, le présent bill chambarde complètement ou fait fi
de ce principe de base que les parties ne pourraient plus contracter sur les
heures d'ouverture et de fermeture. Tout à l'heure, dans son
exposé, le ministre de l'Industrie et du Commerce, M. Beaudry, signalait
qu'il fallait faire la distinction entre les heures de commerce, ou les heures
d'ouverture et de fermeture, et les heures de travail. Ces deux points sont
essentiellement et fondamentalement liés l'un à l'autre. C'est
pourquoi d'ailleurs, nous sommes surpris que ce bill 24 n'ait pas
été renvoyé au Conseil consultatif du travail et de la
main-d'oeuvre, organisme qui a été créé par une loi
à la dernière session, qui a justement pour mission de conseiller
le ministre du Travail dans le domaine de la législation du travail.
Le bill 24, même s'il est parrainé par le ministre de
l'Industrie et du Commerce, a pour effet, à toutes fins pratiques,
d'amender la loi de la convention collective et de soustraire ce
point-là à l'extension juridique et à la
négociation des parties.
Cette disposition de la loi a d'ailleurs pour effet de faire perdre
à l'heure actuelle et ferait perdre inévitablement des droits
acquis à des groupes de travailleurs.
Nous avons à l'heure actuelle, par voie de décret,
à Montréal dans l'alimentation une réglementation qui est
plus généreuse pour les travailleurs que les cadres de la loi
elle-même. Nous avons exactement la même chose dans l'alimentation
à Québec. Nous avons la même chose au Saguenay. D'ailleurs,
au Saguenay, l'Association des détaillants et les syndicats viennent de
s'entendre sur une nouvelle convention collective. Ils sont à
préparer conjointement les amendements qui seront
présentés au ministre du Travail pour extension juridique et qui
prévoient la fermeture complète des établissements
d'alimentation le samedi.
De gré à gré les parties ont convenu de cette
disposition, et maintenant elles ne pourraient plus demander l'extension
Juridique et l'obtenir. Alors, nous sommes d'accord pour qu'une
législation prévoie des cadres comme dans l'ensemble de notre
législation du travail. Dans le domaine où il n'y a pas de
convention collective, on a des ordonnances, on aie salaire minimum, les
vacances minimuns. On a un certain nombre de cadres minimums qui font que
personne ne peut aller au-delà de cela.
La loi doit rester minimale pour tout le monde, un cadre
général. Mais à l'intérieur de la loi, a
l'intérieur de ces cadres, on doit garder aux parties le droit de
contracter et de disposer d'elles-mêmes, de s'autodéterminer
elles-mêmes.
Là-dessus nous avons publié des tracts. Nous avons
évidemment informé nos membres. Il est clair que, si ces
dispositions-là doivent demeurer dans le bill, nous vous le disons
carrément: Nous continuerons nécessairement de le combattre parce
que nous croyons qu'il est exorbitant du droit général de
travail, qu'il ne répond absolument pas à l'économie
générale de nos relations de travail, qu'il enlève aux
parties le droit de contracter librement et d'obtenir l'extension sur cette
partie. En conséquence, nous considérons que si le bill doit
garder cette disposition et que la loi doit être là-dessus, non
pas une loi qui permette aux parties de contracter, mais une loi absolument
unique et définitive, nous préférons ne pas avoir le bill,
ne pas avoir de loi, même si nous considérons que
généralement il devrait y avoir un cadre au-delà duquel
les entreprises ne pourraient pas aller.
Nous ne voyons pas d'ailleurs quel motif pourrait faire qu'on
empêcherait les parties de contracter régionalement et d'avoir des
choses qui seraient à l'intérieur du cadre de la loi. Nous ne
voyons pas quels intérêts cela pourrait brimer. Aucune raison
économique ne peut le Justifier.
Par exemple, si les gens du Saguenay, parce qu'ils sont dans un milieu
donné, sont d'accord pour convenir travailleurs et patrons
que, dans l'alimentation, c'est fermé le samedi, qu'est-ce que cela
change à l'économie du Saguenay? Absolument rien! Il y a
simplement une habitude à créer chez les consommateurs pour que
les affaires se déplacent. Cela ne change rien au volume total des
affaires.
Cela, c'est vrai. Nous avons fait un examen de cette question. Je vous
réfère au Survey of markets publié par le Financial Post.
ce n'est pas une organisation syndicale qui démontre que
dans les secteurs où il y a eu des décrets, où il y a eu
des réglementations, il y a un taux de commerce de détail
général aussi élevé et sinon plus
élevé que ce qui existe dans les autres régions.
Par conséquent, nous ne pouvons absolument pas souscrire à
cette partie de la loi. Nous croyons que l'article 15 devrait être
biffé. Par ailleurs, on devrait préciser que la loi n'est qu'un
cadre minimal ou maximal d'heures et qu'à l'intérieur de cela les
organisations syndicales et les organisations patronales ont le droit de
contracter des choses distinctes et des choses différentes. L'article 12
est aussi relié à ce point-là.
Il y a aussi un autre point, même si l'article 15 était
biffé. Il reste que cette législation contient, quant à
nous, un principe auquel nous ne pouvons pas souscrire, c'est-à-dire que
pour
porter une plainte, pour voir à l'observance de la loi, on
prévoit que le ministre en a la surveillance générale,
mais que ce sont les individus qui doivent porter plainte et entreprendre des
procédures Judiciaires.
On introduit par conséquent la notion de délation et nous
ne sommes pas d'accord. Nous croyons que la loi devrait prévoir son
propre mécanisme, ses propres dents pour être appliquée.
Nous croyons d'ailleurs qu'on devrait accepter la même économie
dans cette loi que dans la Loi du salaire minimum où il y a une
commission, où il y a des inspecteurs pour faire observer la loi. Il
devrait être de responsabilité publique de faire observer la loi;
cela ne devrait pas simplement dépendre de plaintes privées.
A l'heure actuelle, il n'y a rien dans la loi qui le précise. Au
contraire. Ce sont les deux points principaux, par conséquent, sur
lesquels nous maintenons les positions qui ont été prises devant
vous le 12 mars. Nous considérons qu'on doit laisser aux parties le
droit de contracter et qu'on ne doit pas enlever, même à
retardement, au bout de dix-huit mois, les droits acquis. A moins que cela ne
soit biffé, nous ne pouvons absolument pas souscrire au bill, même
si nous sommes d'accord sur le principe d'une réglementation
générale.
M. LE PRESIDENT (M. Leduc, Laviolette): Merci, M. Parent. Les membres
ont-ils des questions à poser à M. Parent ou à d'autres
personnes?
M. BEAUDRY: M. le Président, je vois un membre du
Saguenay-Lac-Saint-Jean. M. Parent mentionnait que dans la région du
Saguenay, des commerces étaient fermés le samedi. Est-ce nouveau
cela, M. Harvey, étant donné que...
M. PARENT: Si vous le permettez, je voudrais tout simplement bien
préciser. J'ai mentionné qu'il y avait eu accord entre les
parties et qu'on était, à l'heure actuelle, à
rédiger les amendements pour demander l'extension juridique permettant
de fermer le samedi.
M. HARVEY: Pourriez-vous répéter votre question, M. le
ministre?
M. BEAUDRY: Y a-t-il eu accord entre tous les marchands du
Saguenay-Lac-Saint-Jean pour la fermeture de leurs établissements le
samedi toute la journée?
M. HARVEY: Aucunement.
M. LE PRESIDENT (M. Leduc Laviolette): Avant de répondre,
pourriez-vous vous identifier, s'il vous plaît?
M. HARVEY: Oui. Germain Harvey, représentant de la
régionale Saguenay-Lac-Saint-Jean au provincial.
M. LE PRESIDENT (M. Leduc, Laviolette): Dans l'ADA?
M. GERMAIN HARVEY: Dans l'ADA. Voici. Nous avons été
convoqués à une assemblée entre la partie syndicale et la
partie patronale pour étudier un certain sujet. Avant que
l'assemblée ne commence, la partie syndicale nous a
présenté un mémoire au sujet des amendements à
apporter au décret.
A l'heure actuelle, quelques membres seulement sont au courant des
amendements à apporter, et qui sont à l'étude. Aucun
épicier n'a été contacté; l'association
elle-même n'a pas encore été contactée pour
approuver ces amendements. Ces amendements, à l'heure actuelle, sont
encore 1 l'étude et nous ne nous sommes pas encore prononcés sur
quelque point que ce soit.
M. BELLEMARE: Quel serait votre point de vue personnel, vous qui avez de
l'expérience dans la région, et quel serait le point de vue des
adhérents a votre mouvement concernant la fermeture le samedi?
M. GERMAIN HARVEY: A mon point de vue personnel je ne puis me
prononcer pour les autres il n'est aucunement question de fermer le
samedi.
M. BELLEMARE: II n'est aucunement question d'entente?
M. GERMAIN HARVEY: Il n'est certainement pas question d'entente pour moi
parce que je ne suis pas intéressé à fermer le samedi.
M. BELLEMARE: A fermer le samedi? M. GERMAIN HARVEY: A fermer le
samedi.
M. BELLEMARE: De la part de vos membres?
M. GERMAIN HARVEY: Ce sera probablement la même réponse,
mais je ne peux pas donner de réponse définitive, parce que je ne
suis pas ici un porte-parole délégué pour ce que nous
venons d'entreprendre...
M. BELLEMARE: Vous contredisez ce que vient de dire M. Parent?
M. GERMAIN HARVEY: Oui.
M. HARVEY (Jonqulère-Kénogami): C'est un point de vue
personnel?
M. GERMAIN HARVEY: Personnel.
M. HARVEY (Jonquière Kénogami): Maintenant, si je vous
posais une autre question: Se-riez-vous d'accord pour fermer le lundi?
M. GERMAIN HARVEY: Pour la fermeture le lundi?
M. HARVEY (Jonquière-Kénogami): Personnellement, le
lundi?
M. GERMAIN HARVEY: Oui, nous le faisons à l'heure actuelle et
ça ne nous dérange pas du tout.
M. BELLEMARE: Vous le faites déjà?
M. GERMAIN HARVEY: Nous le faisons déjà.
M. BELLEMARE: M. Parent vient d'affirmer qu'il y avait eu entente.
M. GERMAIN HARVEY: Pas du tout.
M. BELLEMARE: Nous avons entendu ça tout à l'heure.
M. GERMAIN HARVEY: C'est faux. M. BELLEMARE: Alors, c'est faux?
M. PARENT: Si vous me le permettez, pour qu'il n'y ait pas
d'équivoque, là-dessus nous déposerons devant la
commission la convention collective signée entre les parties et dans
laquelle il y a une prévision à l'effet que l'on demande
l'extension juridique.
M. BELLEMARE: Vous la demandez, mais vous ne l'avez pas obtenue.
M. PARENT: C'est ce que j'ai mentionné: nous n'avons pas obtenu
l'extension juridique.
M. BELLEMARE: D'accord.
M. PARENT: Ce n'est pas nous qui décidons ça.
M. BELLEMARE: C'est certain, vous ne serez pas tout seuls.
M. GERMAIN HARVEY: M. le Président, je crois qu'à l'heure
actuelle tout ce que nous pouvons dire, c'est que nous appuyons à cent
pour cent le mémoire de l'ADA.
M. BELLEMARE: C'est ça.
M. LE PRESIDENT (M. Leduc, Laviolette): Maintenant, le
représentant de la Fédération des travailleurs du
Québec, M. Mérineau, je pense?
M. MERINEAU: Oui. Claude Mérineau, secrétaire
général de la FTQ. J'en suis encore au bill 89. Je n'ai
peut-être pas évolué, mais...
M. BELLEMARE: M. Mérineau, me permettriez-vous, juste une minute,
d'informer la commission que les deux décrets concernant le Lac
Saint-Jean et Chicoutimi sont prolongés pour un mois et que s'il n'y a
pas entente, ils cesseront d'exister? D'accord?
M. PARENT: Mais il y a entente.
M. BELLEMARE: Je vous dis qu'il n'y a pas entente.
M. PARENT: Une convention collective a été
signée.
M. BELLEMARE: On verra cela. On verra cela.
M. PARENT: Si vous permettez, je voudrais bien clarifier la chose. Il
est clair que ce n'est pas nous qui gouvernons l'extension juridique, c'est le
ministre. Bon. Ce que j'ai mentionné...
M. BELLEMARE: Et le ministre la gouverne selon l'équité et
les droits acquis.
M. PARENT: Oui, oui. Mais ce que je veux répéter, c'est ce
que j'ai dit tantôt, parce qu'on a semblé mettre ma parole en
doute: il y a une convention collective de signée entre les employeurs
et le syndicat. La convention collective prévoit la fermeture le
samedi.
Donc, dans ces dispositions, là où les employeurs sont
liés individuellement à la convention, c'est déjà
entendu. Il y a là-dedans une clause prévoyant que les deux
parties sont d'accord pour demander l'extension juridique. C'est cela...
M. BELLEMARE: Nous venons d'entendre le contraire...
M. PARENT: Non, non. Mais cela est tellement...
M. BELLEMARE: ... de la part des employeurs.
M. PARENT: ... vérifiable que la convention est
déposée, selon la loi, à la CRT. C'est un document
public.
M. LE PRESIDENT: M. Mérineau.
M. MERINEAU: Je continue. D'abord, disons que je n'ai pas
préparé de mémoire spécial pour aujourd'hui. Nous
avions pris certaines positions que je vais préciser. Sur la
généralité du bill, nous avions des restrictions, par
exemple à l'article 1 qui restreignait l'application à des
municipalités de plus de 1,500 habitants. Nous avions des restrictions
car nous croyons que cela devrait être un chiffre inférieur
à 1,500, soit environ 1,000.
Si nous passons S l'article 6...
M. CADIEUX: M. le Président, voulez-vous m'excuser une minute? Je
crois que nous avons été convoqués pour n'étudier
qu'un article. Vous étiez en désaccord, mais tout cela a
été biffé.
M. MERINEAU: D'accord.
M. C ADIEUX: C'est seulement sur l'article...
M. MERINEAU: Alors disons que pour ce qui est de l'article en litige,
qui est l'article 13, au nom de notre affilié, le Syndicat des
employés de commerce, qui groupe quelque 15,300 travailleurs dans le
commerce pas tous dans l'alimentation, bien entendu, soit environ 11,000
dans l'alimentation et aussi au nom de la Fédération des
travailleurs du Québec, nous avons considéré
qu'étant donné la situation actuelle et le fait que le commerce
est un des facteurs économiques qui produit le plus d'emplois par
rapport à l'investissement, étant donné aussi que le
syndicat est capable de négocier avec les employeurs pour
réglementer les heures de travail et que de toute façon, dans
toutes les conventions collectives qui ont été
négociées par notre affilié, le Syndicat des
employés de commerce, il y a des restrictions quant au nombre maximal
d'heures de travail qui peuvent être faites à temps simple, qu'il
y a d'autre part des restrictions quant au temps supplémentaire et que
le temps supplémentaire étant payé soit à temps et
demi ou à temps double selon les jours, cela rend le travail
supplémentaire pendant des heures plus longues tellement onéreux
pour les commerçants que règle générale ils
préfirent employer d'autre main-d'oeuvre.
C'est un facteur qui, je crois, doit être pris en
considération, surtout si nous tenons compte du pourcentage de
chômage qui existe au Québec. Il est probable qu'avec des
négociations entre les employeurs et le syndicat il y a même moyen
de créer de l'emploi. C'est pour cette raison que la restriction
exprimée par la FTQ quant à l'application de l'article 13
disparaît aujourd'hui.
M. BELLEMARE: Vous seriez favorable au bill, M. Mérineau?
M. MERINEAU: Oui, mais disons que j'aimerais qu'on tienne compte des
restrictions que nous avions manifestées et aussi de la partie que mon
confrère, M. Parent, a mentionnée tantôt quant à la
police. Nous ne croyons pas qu'il soit bon de laisser les individus
entreprendre des poursuites parce qu'à ce moment-là cette loi ne
serait pas respectée et qu'il n'y aurait aucun moyen d'en
contrôler l'application. Alors, nous croyons...
M. BELLEMARE: Etes-vous en faveur de la police?
M. MERINEAU: Dans le cas de ce décret-là, oui. Mais pas
dans le cas de la construction.
M. HARVEY (Jonquière-Kénogami): M. Mérineau, la
commission, lors de sa dernière réunion, s'est entendue sur un
texte concernant les poursuites. Le texte disait que n'importe quel individu
pouvait intenter une poursuite après dénonciation au
ministère, qu'il n'avait aucun frais à payer et que les
fonctionnaires du ministère avaient également le droit de porter
plainte dans l'exercice de leurs fonctions. Et maintenant, dans le texte
original du bill 89 nous ne l'avons pas.
M. MERINEAU: Je crois, monsieur le député, que lors de ma
précédente intervention, j'étais allé
jusqu'à suggérer des moyens de faire respecter cette loi et
j'avais mentionné qu'on pourrait même avoir recours aux
inspecteurs de la Loi du salaire minimum.
M. HARVEY: Cela avait été étudié, nous nous
sommes entendus sur un texte. Je demanderais au président de la
Commission de bien vouloir nous lire le texte que nous avions adopté
unanimement. Je crois qu'il y aurait certainement moyen de vous donner
satisfaction.
M. LE PRESIDENT: Si vous voulez bien le lire là.
M. BELLEMARE: M. Mérineau, quand il a relu les
procès-verbaux, une suggestion a été faite ce que
vous appelez la police, vous suivant laquelle une personne ou un
fonctionnaire désigné par nous, en utilisant les services
déjà existants, soit les inspecteurs de la Commission du salaire
minimum ou même les inspecteurs du comité paritaire, pourrait
comme le dit la loi et les amendements, après avoir rayé le mot
« quiconque », faire une dénonciation en bonne et due forme,
et nous, ensuite, pourrions prendre les dispositions nécessaires pour y
donner suite.
M. MERINEAU: Mais est-ce que c'est compris dans le nouveau texte?
M. BELLEMARE: Oui. C'est compris. Il y a eu une entente entre les deux
ministres, l'honorable M. Beaudry et moi-même, suivant laquelle un
fonctionnaire serait affecté à l'application de cette loi. Il
agirait comme un directeur général, et se servant des
enquêteurs que nous avons présentement à la Commission du
salaire minimum et ceux du comité paritaire, pourrait faire des
dénonciations en bonne et due forme.
M. MERINEAU: Bien disons, prima facie, que je n'ai pas tellement
d'objections. Par contre, j'aime bien la suggestion de M. Raymond Parent
d'instituer une commission chargée de l'application de cette loi.
M. BELLEMARE: Oh, on en a trop de commissions. Vous nous reprochez
ça...
M. MERINEAU: Cela vous fera quelques emplois de plus à
donner.
M. BELLEMARE: .... des commissions, des commissions. Vous nous dites: ce
sont toutes des commissions, le gouvernement! Et plus que cela, vous dites que
les députés, souvent, sont a commission.
M. MERINEAU: Je ne pense pas avoir dit ça, je vous l'entends
dire.
M. BELLEMARE: Vous l'avez peut-être entendu.
M. LE PRESIDENT: D'autres questions? Article 6, Association des magasins
à chaîne du Québec. Le représentant, M.
Berthiaume.
M. BERTHIAUME: M. le Président, messieurs, mon nom est Jacques
Berthiaume. Je suis l'administrateur-gérant de l'Association des
magasins à chaîne du Québec et du Conseil canadien du
commerce de détail, section du Québec. Je vois que vous avez des
exemplaires de notre aide-mémoire. C'est à dessein que nous
l'avons appelé aide-mémoire, parce que, comme plusieurs d'entre
vous le savez, nous avons présenté un mémoire le 13
février ici. Je me permets de lire. « L'Association des magasins
à chaîne du Québec et la section du Québec du
Conseil canadien du commerce de détail vous remercient et nous
voulons vous remercier au pluriel. de cette nouvelle occasion de
discuter le très important problème des heures d'affaires dans la
province de Québec. Nous reconnaissons et apprécions le travail
immense déjà accompli par votre commission, la commission
spéciale, le ministère de l'Industrie et du Commerce et le
ministère du Travail et de la Main-d'Oeuvre et, quoique nous convenions
de la nature très complexe du problème, nous osons espérer
qu'il sera résolu prochainement.
L'avis de convocation de cette réunion réfère au
bill 24 et laisse entendre que seules les représentations ayant trait
aux « Avis relatifs aux décrets de conventions collectives »
seront considérées.
Nous nous voyons donc dans la délicate situation d'avoir à
commenter un bill dont les clauses n'ont pas encore été
publiées. Il faudra donc tenir compte de cet aspect en étudiant
le présent mémoire. » Et vous constaterez aussi que nous
appelons le bill aussi bien bill 89 et 24 pour cette raison. « Nos
remarques se borneront principalement aux clauses du bill 89 et aux conclusions
et recommandations de la commission spéciale de l'Industrie et du
commerce, telles que rapportées dans le journal des Débats du 16
avril 1969, alors que la commission reconnaissait la primauté du bill
sur les décrets.
L'Association des magasins chaîne du Québec et la
section du Québec du conseil canadien du commerce de détail et
leurs compagnies-membres ... » Lors de la présentation du 13
février, nous avions alors déposé une liste de nos
membres, parmi lesquels je suis heureux de remarquer que nous comptons la
plupart des détaillants les mieux connus au Québec. « Donc
nous sommes unanimement opposés au maintien ou à l'adoption d'une
loi par laquelle les heures d'affaires seraient réglementées par
décret.
A ce sujet, nous sommes en parfait accord avec la sixième
recommandation du Rapport du comité d'étude sur les heures
d'ouverture
et de fermeture des établissements commerciaux du Québec,
mieux connu sous le nom de « comité Rameau », que l'on
retrouve à la page 77, et qui se lit comme suit: « Pour ces
motifs, le comité recommande que la Loi des décrets de convention
collective soit modifiée de façon que les décrets du
lieutenant-gouverneur en conseil ne puissent plus déterminer les jours
ou parties de jour ouvrables et non-ouvrables, ni l'heure à laquelle
débute le travail d'une journée, ni celle à laquelle il se
termine pour quelque catégorie de salariés que ce soit, dans le
monde du commerce de détail ».
De plus, le comité Rameau recommande: « que cette
modification à la Loi des décrets de convention collective soit
effectuée dans la mesure où la nouvelle forme de
législation proposée par le présent rapport est
adoptée. « Ce faisant, le comité Rameau est conscient de
sauvegarder les privilèges déjà dévolus aux
salariés ».
Aussi, nous approuvons fortement la décla- ration faite par
l'honorable ministre Jean-Paul
Beaudry à la commission spéciale et rapportée
à la page 1175 du journal des Débats de l'Assemblée
nationale, en date du 16 avril 1969. Je vous fais grâce de la lecture,
puisque d'autres, avant moi, l'ont faite.
Distinction entre les heures d'affaires et les heures de travail. Nous
croyons que tout le problème est là, du moins une bonne partis du
problème.
Le rapport du comité Rameau et nous-mêmes, dans notre
mémoire présenté devant cette commission le 13
février 1969, avons déjà insisté sur la
nécessité d'une distinction très nette entre les heures
d'affaires et les heures de travail, laquelle distinction devrait être
reconnue par la loi.
Il faut absolument que cesse cette pratique par laquelle les
décrets régissent effectivement les heures d'affaires, sous
prétexte de contrôler les heures de travail.
Il n'y a pas que les employés et les propriétaires qui
sont concernés et affectés par les heures d'ouverture et de
fermeture des établissements commerciaux, il y a aussi les
consommateurs, les fournisseurs et différents ministères du
gouvernement qui représentent l'intérêt public. Il nous
apparaît important que tous ces intérêts soient bien
considérés. Malheureusement, le bill 89 n'atteindra pas ce but,
justement parce qu'il permettra que soient restreintes par décret les
heures d'affaires de tout le commerce de détail, alors que le bill a
pour objet d'établir l'uniformité et des normes raisonnables.
D'autant plus que seulement une minorité des nombreuses parties
intéressées au problème des heures d'affaires participe
aux négociations de conventions collectives qui pourraient faire la base
d'un décret.
Les heures de travail
Les droits indéniables des employés à un salaire
raisonnable pour une journée honnête de travail sont d'ores et
déjà acquis aux employés. Ces droits sont bien
protégés par les lois actuelles, c'est-à-dire la Loi du
salaire minimum, la Loi des établissements industriels et commerciaux,
la Loi du dimanche, le code du travail et de nombreuses autres mesures
législatives. Il n'y a donc aucune nécessité de lier le
nombre d'heures de travail avec celui des heures durant lesquelles les
établissements commerciaux peuvent ouvrir. Ce sont là deux
questions tout à fait différentes.
Dans une étude récente des heures d'affaires
préparée par le professeur Bruce Malien, de l'université
Sir George Williams, il est déclaré: « That there is not a
necessary corela-tion between hours of operation in the retail business and the
length of hours worked by employees. » C'était à la page 22
d'un travail intitulé « Summary of a Study on the Benefits and
Costs of Evening Shopping to the Canadian Economy ».
D'ailleurs, cette opinion correspond à celle de la commission
Rameau qui dit explicitement, à la page 77: « que les heures de
travail durant lesquelles les portes d'un commerce peuvent rester ouvertes au
public chaque jour sont d'un ordre absolument distinct de celui des conditions
de travail de l'un ou l'autre des employés ou de l'ensemble des
employés de ce commerce. » Les heures d'affaires
Le secteur du commerce de détail est très important dans
l'économie du Québec. En effet, un rapport émanant du
Bureau fédéral de la statistique révèle que, en
1966, il y avait 46,980 magasins de détail dans la province de
Québec dont le chiffre total des ventes atteignait $5,822,110,800. Deux
cent un mille sept cent quarante-sept (201,747) personnes y travaillaient dont
40,377 propriétaires. Les salaires s'élevaient à $522
millions.
Par ailleurs, le détaillant, on le sait, est au service du
public. Il doit être au service du public. Il doit tenir compte des
besoins et désirs de ce public pour réussir dans son entreprise.
Ainsi, dans la ville de Québec, dans le commerce d'alimentation, nous
savons qu'au moins 21% du commerce fait durant la semaine est fait
le samedi, et pourtant les magasins sont fermés.
M. BELLEMARE: Vous dites, monsieur, que...
M. BERTHIAUME: Au moins 21% du commerce de la semaine, dans
l'alimentation se fait le samedi.
M. BELLEMARE: II y a 21% du commerce... M. BERTHIAUME: Au moins.
M. BELLEMARE: ... de l'alimentation qui se fait le samedi. Avez-vous une
raison majeure, une raison qui incite les gens à acheter plus cette
journée-là qu'une autre?
M. BERTHIAUME: C'est tout simplement l'évolution des besoins du
consommateur. Nous vivons sur le continent nord-américain. Les gens vont
veiller le vendredi, je ne sais pas, ou il y a trop de personnes dans les
magasins le vendredi. Nous ne pouvons pas expliquer cela, c'est tout simplement
la tendance. Nos chiffres nous le démontrent.
M. BELLEMARE: Est-ce que les 21% que vous nous donnez
présentement sont plus ou moins qu'il y a deux ans, cinq ans ou dix
ans?
M. BERTHIAUME: II faudrait que je le demande à mes acolytes pour
vous donner la réponse, M. Bellemare.
UNE VOIX: Ce sont presque les mêmes chiffres, cela a
diminué un peu.
M. BELLEMARE: Cela a diminué?
UNE VOIX: II y a deux ans devant le sous-ministre, M. Quimper, un grand
nombre de représentants de l'alimentation ont déclaré que
le chiffre peut varier entre 20% et 26% dans la région de
Québec.
M. BELLEMARE: Pour le samedi?
M. DOYLE: Oui, il y a deux ou trois ans.
M. BELLEMARE: Dans l'alimentation seulement? C'est une statistique qui
n'est pas dans votre mémoire qui vient...
M. BERTHIAUME: Non, que j'ai ajoutée. M. BELLEMARE: ...
d'où vient-elle?
M. BERTHIAUME: J'avais une note ici... Nous l'avions
présentée, M. Bellemare, lors de la réunion du 23
mai...
M. BELLEMARE: Vous l'avez présentée...
M. BERTHIAUME: ... nous l'avions donnée en votre présence.
Nous avions donné la référence.
M. BELLEMARE: C'est une statistique de votre organisation?
M. BERTHIAUME: Oui, mais nous l'avions prise ici au Québec au
cours des quelques semaines qui avaient précédé la
réunion du 23 mai 1968. C'était sous l'égide de M. Beaudry
et de vous-même, M. Bellemare.
M. CADIEUX: Avez-vous des statistiques pour le lundi, puisque ce sont
les deux jours qui concernent...?
M. BERTHIAUME: Non, malheureusement, je ne suis pas
préparé a vous donner cela ici aujourd'hui. Mais nous pourrions
vous les fournir, par exemple. Cest évident qu'il y a moins d'affaires
le lundi. C'est la plus petite journée de la semaine.
Alors, avec votre permission, je continue. Je reprends ici: Le
détaillant doit donc tenir compte des besoins et des désirs de ce
public pour réussir dans son entreprise, et ainsi continuer à
participer au développement économique, à la
stabilité de l'emploi et au progris de sa région. Votre
commission doit donc prendre ces facteurs en considération dans la
préparation de tout projet de loi. Notre société et les
besoins des consommateurs changent continuellement. Il y a eu un
développement remarquable des banlieues et des régions
métropolitaines. L'usage de l'automobile et l'amélioration des
routes ont favorisé l'avènement des centres commerciaux. Ces
facteurs, plus le fait que presque le tiers des femmes mariées
travaillent à l'extérieur du foyer, ont changé les
habitudes de toute la population, surtout sa façon de magasiner. Je
pense qu'il faut retenir ce chiffre-là. Et cette évolution
continue avec le « redéveloppement » des grands centres
urbains. Evidemment, avec plus de loisirs, le consommateur n'accepte pas
facilement des restrictions déraisonnables à son droit de
magasiner.
Ici, j'ai ajouté un paragraphe. Le gouvernement, qui
représente l'intérêt public en général, doit
donc aussi protéger les intérêts spécifiques des
consommateurs qui comptent sûrement sur
leur député pour défendre leurs droits. C'est,
d'ailleurs, ce qui a suscité la création de ministères des
consommateurs, aussi bien au niveau provincial qu'au niveau
fédéral.
On a aussi pu constater en ces derniers mois, une tendance chez beaucoup
d'administrateurs publics à répondre aux besoins du public
acheteur. Citons, par exemple, le prolongement des heures d'affaires dans les
magasins de la Régie des alcools du Nouveau-Brunswick, dont le
vice-président, M. Russell Colpitts, a motivé ce geste par un
désir bien arrêté de mieux servir le client.
M. BELLEMARE: Et aussi la province en taxes.
M. BERTHIAUME: D'accord. Et chacun de nous en particulier.
A Shawinigan Falls et cela date de deux semaines le
conseil municipal a autorisé l'ouverture des commerces le jeudi soir, de
sorte que les heures d'affaires actuelles correspondent à peu
près à celles proposées par le bill 89.
M. BELLEMARE: On a commencé par dire non. Il y a eu un vote, cela
a été un vote majoritaire du maire. La semaine suivante, le
tollé général s'est fait dans la ville de Shawinigan. Le
conseil municipal a été obligé de revenir sur sa
décision et de permettre l'ouverture le jeudi.
M. LE PRESIDENT: Cest exact, je vous remercie.
M. BELLEMARE: La ville de Grand'Mère a déjà ses
magasins ouverts depuis longtemps.
M. CADIEUX: Valleyfield, depuis deux mois.
M. BERTHIAUME: Alors, tout cela explique les tendances.
La tendance actuelle est très forte pour une semaine de travail
de plus en plus courte.
Si la nouvelle loi permet qu'un décret puisse imposer un rapport
artificiel entre heures de travail et heures d'affaires, quel en sera le
résultat lorsque nous aurons une semaine de travail de 30 heures? Est-ce
que cela veut dire que les magasins ouvriront 30 heures?
En fait, c'est la question qu'il faut se poser. C'est pour cela qu'il
faut faire la distinction entre heures de travail et heures d'affaires. Est-ce
que l'employé aura même le temps de faire ses achats? Le public
acheteur pourra-t-il se faire servir? L'entreprise sera-t-elle encore rentable?
Peut-on vraiment imaginer que l'em- ployeur pourra maintenir ou même
augmenter le nombre de ses employés?
Ici, j'ai un petit paragraphe que vous n'avez pas dans votre
mémoire. Sachant que ce sont justement les services comme le commerce de
détail qui peuvent le mieux absorber la main-d'oeuvre
déplacée dans l'industrie ou ailleurs... J'avais ce petit
paragraphe dans le mémoire du 13 février, incidemment. Alors, on
peut dire, par exemple, que le décret de l'alimentation dans la ville de
Québec a contribué à réduire sensiblement l'emploi
chez nos marchands membres.
M. BELLEMARE: Avez-vous les proportions?
M. BERTHIAUME: Monsieur, ici, me dit 10%. Chez un de nos membres, je
pense que 302 personnes ont été congédiées.
M. BELLEMARE: 302 personnes? Quant au nouveau décret de
l'alimentation à Québec?
M. BERTHIAUME: C'est cela. Non, non non. 302 heures.
M. BELLEMARE: 302 heures de réduction.
M. BERTHIAUME: De réduction, oui, excusez- moi.
M. BELLEMARE: Vous dites que cela a réduit le personnel de
combien?
M. BERTHIAUME: Effectivement. Parce qu'on a besoin de moins
d'employés temporaires pour combler les...
M. HARVEY: 302 heures ouvrables par mois?
M. BERTHIAUME: Par semaine.C'est facile de déduire qu'une telle
restriction imposée aux commerces de détail aurait des effets
néfastes.
Il serait alors surprenant que l'Assemblée nationale adopte une
loi qui puisse réduire l'emploi, surtout si l'on considère que
7.1% ou 162,000 personnes sont présentement sans travail au
Québec. C'est aussi un fait économique que le détaillant
soit continuellement en concurrence avec d'autres secteurs de l'économie
qui veulent accaparer le dollar du consommateur. Par exemple, le secteur des
spectacles.
M. BELLEMARE: Oui.
M. BERTHIAUME: Ce que nous voulons dire, c'est que si nous sommes
fermés le bonhomme va aller dépenser son argent ailleurs.
M. BELLEMARE: Ah! oui.
M. BERTHIAUME: Comme il le fait, d'ailleurs. C'est ce que
révèle le livre des graphiques qui porte le titre « Current
Trends in Canada, National Industrial Conference Board, édition de 1967.
En effet, 64.15% des dépenses personnelles au Canada en 1957 allaient
aux magasins de détail. Et en 1967,donc l0 ans après, ce chiffre
est tombé 52.63%. Le maintien ou des restrictions additionnelles des
heures d'affaires par les comités paritaires ne feraient qu'empirer
cette situation. C'est pourquoi, entre autres raisons, nous appuyons les
heures-cadres proposées par le bill 89. En effet, l'uniformité de
ces heures, à l'échelle provinciale, mettra fin aux heures
disparates des décrets du commerce de détail tout en permettant
l'établissement d'heures d'affaires raisonnables dans les régions
que le décret ne touche pas. Unanimité du secteur de
l'alimentation. A la suite d'une résolution adoptée le 9 juin
1969 lors d'une assemblée spéciale du Conseil de l'alimentation
du Québec dont nous avons entendu le représentant, M.
Cantin, tout à l'heure lequel représente la plupart des
détaillants de l'industrie de l'alimentation de la province de
Québec, il a été convenu, à l'unanimité, que
les heures d'affaires ne devraient pas être assujetties au contrôle
des comités paritaires. Une copie de cette résolution a
été envoyée à l'honorable ministre de l'Industrie
et du Commerce de même qu'à chacun des membres de votre
commission.
Conclusion
A cause des raisons ci-devant invoquées et considérant
l'unanimité qui règne au sein du secteur de l'alimentation, nous
demandons respectueusement à cette commission qu'elle recommande a
l'Assemblée nationale que le pouvoir de contrôler les heures
d'affaires au moyen de décrets soit abrogé et qu'elle adopte le
bill 89 tel qu'approuvé par la Commission spéciale de l'industrie
et du commerce.
M. LE PRESIDENT: Merci, M. Berthiaume. Avez-vous des questions, les
membres de la commission, à poser à M. Berthiaume? Pas de
questions? Article 7, Conseil canadien du commerce de détail. C'est le
même? Alors, article 8, Conseil du patronat du Québec M. Charles
Per-reault, je pense. Si vous voulez vous identifier.
M. PERREAULT: Charles Perreault, président du Conseil du patronat
du Québec.
M. BELLEMARE: Avez-vous un mémoire, M. Perreault?
M. PERREAULT: Non, M. le ministre, cela sera d'ailleurs très
bref.
M. BELLEMARE: Ah! Prenez votre temps, vous êtes fort
intéressant.
M. PERREAULT: Sans même m'avoir entendu, c'est très
êlogieux.
M. le Président, le Conseil du patronat du Québec groupe
quelque 46 associations patronales dont la Fédération des
détails et du service à laquelle sont affiliés
l'Association des détaillants en alimentation que vous avez entendue
tout à l'heure et le Conseil canadien, représenté par M.
Berthiaume, que vous venez également d'entendre.
Dès la déclaration de l'honorable Jean-Paul Beaudry, au
mois d'avril, et la publication, dans le journal des Débats, de ses
recommandations à la commission, dont ceux qui m'ont
précédé ont fait état à plusieurs reprises,
nous avons fait savoir au ministre que nous appuyions fortement cet amendement,
surtout en ce qui a trait! ce qui nous concerne aujourd'hui. Nous lui disions:
« Vous nous permettrez, M. le ministre, de vous exprimer notre
satisfaction pour ces deux amendements qui viennent, une fois pour toutes,
clarifier l'ambiguïté qui existait dans ce domaine entre les
juridictions respectives de deux ministères, le vôtre et celui du
Travail. Nous espérons que l'Assemblée nationale sera
appelée à ratifier ce projet de loi dans un avenir
rapproché. »
Nous avions également préparé quelques notes
à la suite de consultations auprès des associations membres du
Conseil du patronat et nous en avons conclu à l'unanimité de ceux
qui sont affiliés et dont j'ai fait mention il y a quelques minutes.
Nous avions préparé à cet effet une déclaration
appuyant la recommandation faite au rapport Rameau, à laquelle il y a
encore eu référence plus tôt et que je ne citerai pas.
Donc, la position prise par l'honorable ministre de l'Industrie et du
Commerce, le 16 avril 1969, nous apparaît conforme à cette
recommandation du rapport Rameau, endossée par le Conseil du
patronat.
M. le Président, voilà donc, en quelques mots, la position
de notre conseil.
M. LE PRESIDENT: Merci, M. Perreault. Est-ce que les membres de la
commission ont des questions à poser? Aucune question.
M. BELLEMARE: M. Perreault, vous êtes président du Conseil
du patronat?
M. PERREAULT: Oui.
M. BELLEMARE: Dans le secteur de l'alimentation particulièrement,
pourriez-vous nous dire combien vous représentez de membres, à
peu près?
M. PERREAULT: C'est assez difficile à dire à cause de la
structure de ces choses. Par exemple, comme je le disais, l'Association des
détaillants en alimentation, qui a paru devant vous et dont plusieurs
représentants sont ici, est effectivement affiliée au Conseil du
patronat par le truchement de la Fédération des détails et
du service.
M. BELLEMARE: M. Perreault, c'est cela qu'il faudrait dire. Tout le
monde connaît la FTQ; tout le monde connaît l'ADA, tout le monde
connaît, et pour cause, la CSN, mais le Conseil du patronat est moins
connu.
M. PERREAULT: C'est aussi beaucoup plus récent.
M. BELLEMARE: Le Conseil du patronat est un organisme qui a
été fondé il y a quelques mois et qui représente
maintenant différents organismes jumelés, réunis qui ont
donné un mandat bien précis à votre organisation, celui
d'appuyer le bill. Est-ce exact?
M. PERREAULT: C'est exact.
M. BELLEMARE: Actuellement, le Conseil du patronat représente
combien de juridictions?
M. PERREAULT: Par le truchement des associations membres, nous
représentons à peu près tous les employeurs du
Québec.
M. BELLEMARE: Tous les employeurs?
M. PERREAULT: Oui. Non seulement le secteur manufacturier, mais les
secteurs de service et de commerce sont effectivement
représentés.
Il y a aussi les secteurs parapublics, comme vous le savez, par exemple
les commissions scolaires et les hôpitaux. C'est donc dire qu'il n'y a
pas beaucoup d'employeurs au Québec, à l'heure actuelle, qui ne
se rattachent pas au Conseil du patronat par le truchement d'une ou même
de plusieurs associations.
M. CADIEUX: Si jamais vous aviez besoin d'un publiciste, vous pourriez
vous adresser au ministre du Travail.
M. BELLEMARE: C'est une organisation dont j'avais souhaité,
depuis plusieurs années, la venue. Pour une fois, je pense qu'on le
constate, dans le monde du patronat, on a décidé de mettre de
côté ses susceptibilités personnelles et son
égoïsme pour se donner la main et former ce que l'on appelle
aujourd'hui le grand Conseil du patronat. C'est une institution qui
était nécessaire dans la province et qui rendra
immensément service à tout le monde; au public d'abord, parce
que, devant les grandes centrales syndicales, le monde des employeurs
était un peu divisé.
Aujourd'hui, vous prenez position dans ces relations
patronales-ouvrières et c'est, je pense, un mouvement
nécessaire.
M. CADIEUX: Où est situé votre siège social?
M. PERREAULT: A Montréal, I la Maison du commerce, 1080, Beaver
Hall.
M. BELLEMARE: Je ne voudrais pas que l'honorable M. Cadieux me croie
engagé pour le patronat. Il y a assez de la CSN qui m'a marié
dernièrement à tous les entrepreneurs et à la FTQ.
M. CADIEUX: J'avais plutôt l'impression que c'était un
divorce tantôt.
M. BELLEMARE: Ah non, ce n'est pas un divorce, au contraire. Ah non, il
n'y apas eu de mariage forcé chez nous!
M. LE PRESIDENT: II n'a pas été consommé?
M. BELLEMARE: Pas encore.
M. LE PRESIDENT: Très bien, M. Perreault, Merci.
M. C ADIEUX: Nous vous reverrons dans neuf mois.
M. LE PRESIDENT: Je ne sais pas si c'est dans neuf mois, mais nous
passons à l'article9: Association des petits épiciers du
Québec métropolitain.
M. BELLEMARE: Monsieur qui?
M. LE PRESIDENT: Mémoire de M.Ouellet, je pense.
M. OUELLET: Jean-Eudes Ouellet, représentant l'Association des
petits épiciers du Québec métropolitain.
M. le Président, nous n'avons pas présenté de
mémoire auparavant parce que, dans le bill 89,
l'article 6 protégeait nos membres. A la lumière des
renseignements que nous avons obtenus concernant le bill 24, l'article 6 aurait
été biffé. Alors, si vous le permettez, j'aimerais vous
faire lecture d'un mémoire qui n'est pas tant basé sur les
statistiques que sur la réalité et sur les faits. « Toute
loi...
M. BELLEMARE: M. Ouellet... M. OUELLET: Oui.
M. LE PRESIDENT: A moins qu'il n'y ait consentement unanime, car Je
pense que la convocation d'aujourd'hui porte sur un aspect assez précis
du projet de loi...
M. BELLEMARE: Vous dites, M. Ouellet simplement, pour continuer
sur ce que le président vient de vous demander que vous avez
reçu des avis selon lesquels l'article 6 de l'ancienne loi, le bill 89,
aurait été biffé?
M. OUELLET: Oui.
M. BELLEMARE: Vous voulez parler des artisans, si je comprends bien?
M. OUELLET: Oui, c'est cela.
M. BELLEMARE: Je peux vous donner l'assurance et le ministre, M.
Beaudry, peut le faire également que cela a été
respecté intégralement.
M. BEAUDRY: En ce qui regarde les artisans, ils ne sont pas inclus dans
le nouveau bill 24.
M. OUELLET: Alors, M. le ministre, est-ce que je pourrais savoir si
l'article 6, tel qu'il a été rédigé dans le bill
89, se retrouvera dans le bill 24?
M. BEAUDRY: II se retrouve sous une autre forme, mais pas sous celle qui
existe dans le bill 89. Il y a eu des modifications.
M. OUELLET: Je demanderais, M. le Président, la permission de
présenter ce mémoire, étant donné que, lors de la
présentation du bill 89, l'article 6 se lisait de la façon
suivante: « La présente loi ne s'applique pas à un
établissement commercial... »
M. LE PRESIDENT: Un instant, s'il vous plaît. Avant de continuer,
il faudrait qu'il y ait consentement unanime parce que, tout à l'heure,
si vous vous en souvenez bien, M. Mérineau, je pense, a
été obligé de revenir sur un aspect bien précis de
la loi. S'il y a consentement unanime, d'accord.
Alors, vous voulez, si je comprends bien, lire tout le
mémoire?
M. OUELLET: II n'est pas long.
M. BELLEMARE: M. Ouellet, ne serait-il pas préférable pour
vous de rencontrer M. Rameau, par exemple, qui est bien au courant de la loi ou
même quelqu'un de la commission? Vous pourriez discuter avec eux de ce
que vous considérez, vous, comme des droits acquis, du fait qu'on semble
vous léser dans vos droits et des modifications que le ministère
a apportées dans l'article 6.
M. OUELLET: J'ai communiqué avec M. Rameau, effectivement.
M. BELLEMARE: Bon.
M. OUELLET: II y avait un M. Murray, je crois, qui était
président?
M. BELLEMARE: Oui.
M. OUELLET: J'avais demandé la permission de présenter un
mémoire. M. Rameau m'a dit qu'effectivement l'article 6 serait
biffé et qu'il y aurait un autre article.
A ce moment-là, étant donné que nous étions
protégés dans le bill 89, nous n'avions pas affaire à
présenter le mémoire.
M. BELLEMARE: Si la commission le permettait, M. Ouellet, si M. Rameau
vous affirmait que vos droits sont protégés de la même
manière, mais différemment, est-ce que cela vous satisferait?
M. OUELLET: D'accord, M. le ministre, à condition que la
différence...
M. BELLEMARE: Que vous soyez pour la différence.
M. OUELLET: Oui. Que nous soyons pour la différence et que cela
affecte...
M. BEAUDRY: M. le Président, étant donné que
monsieur est hors d'ordre, j'accepte qu'il présente son
mémoire.
Lors d'une autre entrevue, à huis clos, avec les membres du
comité, nous en discuterons.
Mais aujourd'hui, ce mémoire est hors d'ordre et je maintiens ma
position.
M. LE PRESIDENT: Si je comprends bien, vous voulez dire que M. Ouellet
aurait le droit de déposer le mémoire..»
M. BEAUDRY: Mais il ne peut pas en discuter aujourd'hui.
M. LE PRESIDENT: ... mais non d'en discuter aujourd'hui. Vous pouvez
déposer votre mémoire pour que les membres du comité en
prennent connaissance et qu'ils tiennent compte, s'il y a lieu, de vos
représentations. Est-ce que c'est le désir des membres? Si vous
avez d'autres...
M. CADIEUX: D'accord. DES VOIX: D'accord.
M. LE PRESIDENT: Alors tout le monde est unanime. Maintenant, si vous
voulez, vous avez tout de même le droit de parole sur le sujet
précis de la convocation.
M. OUELLET: Non. Je vous remercie. C'était l'article 6 et puis le
bill 24...
M. BELLEMARE: M. Ouellet, vous allez sûrement recevoir un bon
accueil de la part des membres de la commission et l'assurance de vos
revendications d'aujourd'hui. Cela a été bien de le dire. La
commission sera sensibilisée à votre point de vue et
certainement, autour de cette table, nous allons faire bien attention pour voir
si le véritable principe de l'article 6 a été maintenu.
Vous avez bien fait de nous le dire.
M. OUELLET: Oui, parce que, voyez-vous, les petits épiciers
indépendants ne sont pas des...
M. BELLEMARE: D'ailleurs, c'est le but fondamental de la loi de ne pas
léser les droits des petits, surtout des artisans.
M. LE PRESIDENT: Je dois vous dire, M. Ouellet, si je sors pour trois
secondes de mon rôle de président, qu'à titre d'individu et
de commerçant, je suis moi-même excessivement sympathique à
votre mémoire. Mais ce n'est pas à titre de président.
M. CADIEUX: Hors d'ordre. Aucune discussion, M. le Président.
M. OUELLET: J'émets le voeu, M. le Président, que les
membres de cette commission li- sent ce mémoire, qui n'est pas tellement
long. Il a à peine neuf pages.
M. LE PRESIDENT: D'accord.
M. OUELLET: Nous ne voulons pas déroger aux
règlements.
M. BEAUDRY: Je tiens à remercier les membres de cette commission
qui ont bien voulu se déplacer aujourd'hui pour assister aux
délibérations de cette commission. Je les en félicite. Je
les remercie du bon travail qu'ils ont apporté. Je remercie
également les membres des associations qui ont bien voulu apporter leurs
mémoires, afin de nous éclairer. Je puis les assurer, à
l'unanimité, de concert avec le président de la commission, que
nous siégerons sous peu, probablement la semaine prochaine ou dans
quinze jours, et qu'une législation sera apportée dès le
début de la session.
M. TETLEY: Si vous me permettez, M. le Président, je voudrais
noter tout simplement, pas à huis clos, mais ce matin, qu'il y a sans
doute des associations de consommateurs, et peut-être faudrait-il les
inviter aussi. Nous avons entendu les patrons et les syndiqués, mais je
crois qu'il faudrait inviter les consommateurs aussi,
M. BELLE MARE: Je crois, M. le député, que les avis qui
ont été affichés partout ont donné libre cours
à tous ceux qui avaient des représentations à faire,
pendant la séance du mois de mai et celle d'aujourd'hui. D'ailleurs,
depuis ce temps-là, nous avons reçu, le ministre et
moi-même, de nombreuses pétitions de la part des consommateurs
qui, s'ils avaient voulu se faire entendre ce matin, auraient pu venir.
Du fait qu'ils n'aient pas répondu à l'appel public, nous
ne pouvons pas prendre une précaution particulière, parce
qu'à ce compte-là, les gens diraient: Bien, nous allons attendre
d'être reconvoqués. Je pense que l'institution qui est ici, comme
commission permanente, donne une sécurité à tout le monde
et assure le respect, surtout, de l'opinion de chacun.
M. BEAUDRY: Nous avons également envoyé des convocations
à tous les groupes de consommateurs, dont Consumers Association of
Canada. Le 19 mars 1969, nous avons reçu une lettre de M. McFarlane,
président. M. McFarlane n'a pas assisté à nos
réunions subséquentes. Alors j'imagine qu'il a fait ses
recommandations. Nous allons tenir compte des recommandations du
président, M. McFarlane.
M. TETLEY: Merci, M. le Ministre.
M. CADIEUX: D'ailleurs, M. le Président, Je crois que tout le
monde a eu la chance de se prononcer non seulement devant cette commission mais
aussi devant le comité Rameau qui, lui, siège depuis plusieurs
années.
Alors au nom des membres de l'Opposition, Je joins ma voix à
celle du ministre, et je remercie toutes les associations qui ont
présenté des mémoires. Je suis d'accord avec ce qui vient
d'être proposé, soit que la commission siège de nouveau
dans quelques semaines pour...
M. BELLEMARE: Un jour pas trop éloigné.
M. CADIEUX: ... tâcher de rédiger un texte. J'espère
très sincèrement que le projet de loi sera adopté
dès le début de la reprise de la session, dans
l'intérêt des consommateurs, de tous les commerçants
également de la province de Québec et de tous les employés
des commerces.
M. LE PRESIDENT: Merci i. tout le monde. Les membres de la commission
recevront une convocation incessamment. Nous espérons que tous y seront
en bonne santé et en bonne forme.
(Fin de la séance: 11 h 25)