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Version finale

31e législature, 4e session
(6 mars 1979 au 18 juin 1980)

Le mardi 29 mai 1979 - Vol. 21 N° 101

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Étude des crédits du ministère de l'Industrie et du Commerce


Journal des débats

 

Étude des crédits du ministère de l'Industrie et du Commerce

(Dix heures neuf minutes)

Le Président (M. Laplante): La commission de l'industrie et du commerce se réunit pour étudier le budget 1979/80, programme par programme.

Sont membres de cette commission: M. Dubois (Huntingdon), M. Gosselin (Sherbrooke), M. Grégoire (Frontenac), Mme Leblanc (Îles-de-la-Madeleine), M. Lefebvre (Viau), M. Ouellette (Beauce-Nord), M. Raynauld (Outremont), M. Sco-wen (Notre-Dame-de-Grâce), M. Shaw (Pointe-Claire), M. Tremblay (Gouin).

Les intervenants sont: M. Gagnon (Champlain), M. Godin (Mercier), M. Goulet (Bellechasse) M. Landry (Fabre), M. Marchand (Laurier), M. Mi-chaud (Laprairie), M. Perron (Duplessis), M. Samson (Rouyn-Noranda). Rapporteur: M. Lefebvre (Viau).

Comme on le fait ordinairement dans toutes ces études de crédits, M. le ministre, si vous voulez commencer par vos énoncés de principe.

Une voix: M. le Président, est-ce que nous avons quorum?

Le Président (M. Laplante): Cela fait longtemps qu'on l'a; nous sommes sept et le quorum est de six. Le président fait partie du quorum.

Une voix: Vous comptez au moins pour trois ou quatre!

M. Tremblay: La Beauce a la balance du pouvoir!

Des voix: Ah, ah, ah!

Remarques générales M. Rodrigue Tremblay

M. Tremblay: M. le Président, c'est avec plaisir que, pour la troisième année consécutive, je propose à la commission de l'industrie et du commerce l'étude des crédits de mon ministère. J'espère que tous les membres ont reçu à temps une copie du budget détaillé du ministère qu'à chaque année je fais établir, que je fais préparer. Je pense que tout le monde l'a, du côté de l'Opposition.

Permettez-moi, tout d'abord, de vous faire part de certains changements qui ont été apportés à la direction du ministère. M. Michel Audet a été nommé, en mars dernier, au poste de sous-ministre associé aux questions économiques. Un de nos sous-ministres adjoints, M. Christian Lator-tue, qui a été un collaborateur précieux du ministère, nous a quittés il y a quelques mois pour le ministère des Affaires intergouvernementales et occupe maintenant un poste à la Maison du Qué- bec à Caracas, au Venezuela. Enfin, M. André Dicaire, le nouveau secrétaire du ministère, a été nommé en remplacement de M. Jean Houde qui a été détaché à la Société générale de financement.

Le budget que j'ai l'honneur de présenter à cette commission, pour l'année financière 1979/80, se chiffre par $126 millions, en incluant les crédits statutaires de $6 500 000 accordés au Centre de recherche industrielle du Québec. Si l'on soustrait la part du CRIQ, les crédits du ministère qu'il nous faut examiner aujourd'hui se chiffrent par environ $120 millions. Le budget net équivalent pour l'année financière 1978/79 était de $129 millions.

Avant de poursuivre et afin de dissiper toute équivoque, j'aimerais expliquer les raisons de cette diminution apparente. En effet, le budget de l'an dernier incluait une contribution de $25 millions dans le cadre de l'entente auxiliaire pour la construction de l'usine Donohue à Saint-Félicien. Par ailleurs, le présent budget comprend la subvention de $10 millions qui a été accordée à la Société générale de financement dans le cadre de la loi 108 votée en décembre dernier par l'Assemblée nationale dans le but d'assainir la situation financière de Marine Industrie.

Donc, en éliminant ces diverses contributions du budget des années financières 1978/79 et 1979/80, on calculera facilement que le budget de cette année comporte une augmentation nette de $6 millions, soit $110 millions cette année contre $104 millions l'an dernier. Il s'agit effectivement d'une augmentation relativement petite, mais dans une perspective d'accroissement de la productivité de notre ministère, comme la plus grande partie de ce budget porte sur des salaires et des dépenses administratives, je crois qu'il s'agit d'une situation que nous devons encourager.

D'autre part, les efforts de promotion industrielle et commerciale du ministère se reflètent davantage, sinon plus, dans les déboursés extrabudgétaires qui sont faits par des agences ou des sociétés rattachées au ministère, tels ceux de la SDI, de la Direction générale des pêches maritimes en ce qui concerne les prêts aux pêcheurs, par exemple — je souligne qu'il y a déjà un projet de loi qui est devant l'Assemblée nationale, le projet de loi no 29 qui vise à augmenter de $50 millions les prêts que pourra accorder la Direction générale des pêches maritimes aux pêcheurs au cours des cinq prochaines années — de même que l'Institut national de productivité et des autres sociétés d'État à vocation industrielle et commerciale sur lesquelles je reviendrai plus tard.

Permettez-moi maintenant de faire un tour d'horizon rapide des activités du ministère à la lumière de nos énoncés d'intention de l'an dernier et à la lumière aussi de nouvelles priorités que nous avons dégagées depuis lors. J'avais longuement insisté l'an dernier à cette date sur le fait que des priorités du gouvernement étaient de procéder à une réévaluation des fonctions et des modes d'action des sociétés d'État. (10 h 15)

Les membres de cette commission savent que plusieurs des sociétés d'État les plus importantes sont sous la responsabilité directe du ministre de l'Industrie et du Commerce. À cet égard, je suis heureux de pouvoir vous affirmer que nous n'avons pas été inactifs par rapport à l'objectif que nous nous étions fixé l'an dernier. Comme je l'ai rappelé tout à l'heure, nous avons présenté l'automne dernier, la loi 108 sur la Société générale de financement. Outre un certain nombre de dispositions financières visant à consolider la situation de cette société, eu égard notamment aux pertes subies par Marine, la loi redéfinissait en le précisant et en le restreignant le mandat de la Société générale de financement. L'objectif de la rentabilité a été explicitement incorporé dans ce mandat de la SGF, si vous vous le rappelez bien.

La loi prévoyait de plus que la Société générale de financement soumettrait au gouvernement, au plus tard le 1er juin de cette année, un programme de redressement industriel pour Marine Industrie. Cela a été fait comme prévu et, à ma plus entière satisfaction. La semaine prochaine, cette commission sera saisie de ce plan de reconversion de Marine Industrie. Par ailleurs, l'Assemblée nationale est actuellement saisie de la deuxième lecture du projet de loi no 7 qui modifie substantiellement le mandat et le mode de fonctionnement de la Société de développement industriel. Je n'insisterai pas outre mesure sur ce point puisque nous aurons l'occasion d'en discuter davantage dans d'autre forum. Je mentionnerai quand même, M. le Président, que la SDI qui est en quelque sorte la direction générale du financement industriel du ministère verra son autonomie comme intermédiaire financier considérablement accrue tandis que son champ d'intervention sera passablement élargi.

Enfin, en ce qui concerne SIDBEC, nous en avons réorganisé la haute direction, comme je l'ai annoncé hier à Montréal, et nous procéderons au cours de l'été à l'adoption définitive du plan de développement quinquennal de cette société. Ce plan sera vraisemblablement examiné en commission parlementaire, au début de l'automne. L'Assemblée nationale sera appelée à préciser le nouveau mandat de l'entreprise. Une des innovations les plus importantes du présent gouvernement a été d'insister sur la nécessité pour les pouvoirs publics d'avoir une politique d'achat cohérente dans le but de favoriser notre développement industriel. Si on considère que nous étions parmi l'ensemble des pays industrialisés un des seuls gouvernements à ne pas avoir de politique d'achat, il est évident qu'un changement s'imposait.

Qu'on n'en ait pas adopté une plus tôt semble inexplicable, si ce n'est peut-être pour quelques raisons obscures que seuls les membres du précédent gouvernement sauraient nous expliquer. Je puis vous affirmer aujourd'hui, M. le Président, que la mise...

M. Raynauld: ...

M. Tremblay: Pardon?

M. Raynauld: Cela ne veut pas dire que vous écouterez plus qu'avant si on vous le disait.

M. Tremblay: On y reviendra tout à l'heure à la négaciation du GATT. Vous avez soulevé cette question. Je puis vous affirmer, M. le Président, que la mise sur pied de cette politique, que mon ministère est chargé de coordonner, a considérablement progressé. Certains, probablement par fausse naïveté, nous ont reproché l'an dernier de ne pas progresser assez rapidement dans ce domaine. Or, on ne peut s'attendre à des changements spectaculaires étalés sur quelques mois seulement lorsqu'il s'agit d'une modification en profondeur des habitudes d'achat non seulement du gouvernement comme tel, mais aussi de l'ensemble des organismes parapublics.

Le principal instrument utilisé jusqu'à maintenant dans le cadre de cette politique a été le regroupement des achats des organismes publics et parapublics. Pour compléter cette action, le gouvernement a adopté, en décembre dernier, une nouvelle réglementation sur les contrats de construction de façon à donner priorité à l'utilisation de produits québécois, de façon aussi que notre politique soit reflétée dans les devis et les cahiers de charge. J'aimerais souligner aussi l'importance, dans ce domaine, de l'action du Bureau de normalisation du Québec, un service qui dépend aussi de mon ministère, même si son mandat n'est qu'en partie relié à la politique d'achat.

Je me permettrai maintenant de tracer un bilan sommaire d'un certain nombre d'autres mesures, à incidence industrielles et commerciales, mises en marche l'an dernier, et d'indiquer, M. le Président, lorsqu'il y a lieu, les développements les plus récents ou les prolongements actuels des mêmes politiques.

La Loi sur les stimulants fiscaux au développement industriel, la loi 48, qui permet aux PME industrielles de verser 50% de l'impôt autrement payable dans un fonds propre de relance industrielle et que mon ministère a introduite en 1977, en est maintenant à sa deuxième année d'exercice. Au cours de l'année qui vient de s'écouler, l'administration du fonds de relance industrielle a reçu 1026 nouvelles demandes de certificats. À ceci, il faut ajouter 149 demandes reportées de l'an dernier pour un total de 1175 demandes. Sur ce nombre, au 31 mars 1979, 954 certificats avaient été mis pour des investissements industriels projetés de $350 millions, ce qui représente un peu plus de 7000 nouveaux emplois.

Le programme PME Innovation, visant à favoriser l'expansion de la petite et de la moyenne entreprise innovatrice, a plus que dépassé les résultats escomptés en 1978/79. Je rappelle que le programme permet d'offrir aux entreprises des prêts jusqu'à un maximum de $500 000 ne comportant aucune garantie spécifique, ce qui permet d'assimiler cette forme de financement à du capital de risque. Au 31 mars 1979, 51 projets avaient fait l'objet de recommandations favorables pour un montant cumulatif de $15 millions. Ce programme est reconduit pour l'année qui vient et ses crédits seront augmentés.

Dans le même cadre d'idées, le gouvernement a adopté en décembre dernier deux nouveaux programmes, soit le programme Innovation meuble et le programme Innovation chaussure. L'objectif de ces programmes est d'aider financièrement, sous forme de subventions allant jusqu'à 50% des dépenses admissibles, les entreprises démontrant une volonté d'innovation au niveau des produits, surtout, mais aussi au niveau des procédés de fabrication et de commercialisation. Évidemment, le gouvernement a donné un coup de pouce bénéfique aux industries du textile, du vêtement et de la chaussure quand nous avons décidé d'abolir de façon permanente la taxe de vente de 8% à l'achat de ces biens, biens qui sont non seulement socialement nécessaires, mais économiquement cruciaux pour l'équilibre économique de plusieurs petites municipalités et de plusieurs petites entreprises du Québec.

Par ailleurs, certaines décisions antérieures ont commencé à porter fruit. En ce qui concerne les SODEQ, sociétés de développement de l'entreprise québécoise, dont on se souviendra qu'elles sont des banques d'affaires régionales, il y en a maintenant deux en opération régulière, deux en étape de souscription et sept autres dont le dossier progresse rapidement. Donc, M. le Président, petit à petit, le Québec se dote d'instruments efficaces pour financer le développement économique.

Dans un autre ordre d'idées, l'Institut national de productivité, créé l'an dernier, est maintenant opérationnel depuis janvier 1979. Bien plus, l'institut peut compter à sa présidence un des meilleurs propagandistes des valeurs économiques en la personne de M. Alfred Rouleau. Enfin, le Comité d'étude sur le fonctionnement et l'évolution du commerce au Québec nous a soumis son rapport au début de l'année courante. Les modifications que nous apportons actuellement à la loi de la SDI reflètent déjà, dans une certaine mesure, les recommandations contenues dans le rapport.

Les mesures à venir déjà annoncées dans le discours inaugural par le premier ministre en ce qui concerne les franchises et la création éventuelle d'une société commerciale d'exportation pour les PME sont aussi en partie le reflet de ce rapport. L'étude des recommandations de ce rapport très fouillé et des annexes se poursuit présentement à mon ministère et nul doute que plusieurs d'entre elles seront mises en application soit en 1979, soit en 1980. Enfin, si je peux me permettre de m'exprimer ainsi, la mesure la plus spectaculaire introduite l'an dernier — et ce n'est que depuis l'an dernier, M. le Président, même si maintenant on s'y est habitué et que c'est entré dans les moeurs; c'est une mesure spectaculaire pour les consommateurs comme pour les épiciers indépendants — s'est avérée, un franc succès. Je veux, bien sûr, parler ici de l'élargissement de la vente du vin dans les épiceries. Non seulement le chiffre d'affaires de la Société des alcools du Québec a-t-il augmenté, mais la vente des vins produits ou embouteillés au Québec s'est considérablement accrue, ce qui était justement un des objectifs visés par cette mesure. Ces ventes se sont accrues en déplaçant certains produits embouteillés à l'étranger.

J'ai insisté, M. le Président, l'an dernier, lors de l'étude des crédits... Je vois que mon collègue de l'Union Nationale se rappelle les débats que nous avions eus à la suite du projet de loi no 21 permettant aux épiceries de vendre des vins et je me demande s'il répéterait les mêmes choses si nous reprenions la discussion aujourd'hui.

Une voix: Ce serait un problème. M. Dubois: En grande partie.

M. Tremblay: Je disais, M. le Président, que l'an dernier, lors de l'étude des crédits du ministère, j'ai insisté sur l'importance qu'il fallait accorder à l'augmentation de nos exportations manufacturières. Mon ministère a été particulièrement actif dans ce domaine au cours de l'année qui vient de s'écouler. Le programme APEX d'aide à l'exportation s'est avéré particulièrement rentable. Je propose, d'ailleurs, d'augmenter ses crédits pour l'exercice 1979/80. Par l'intermédiaire de la Direction générale de l'industrie, le ministère a, de plus, collaboré à la formation de divers consortiums d'exportation. En outre et de façon générale, le ministère est de plus en plus présent sur les marchés étrangers. La création récente d'un bureau économique au Venezuela, comme je le mentionnais tout à l'heure, n'en est qu'un exemple. Enfin, nous sommes à mettre la dernière main au projet de création d'une société commerciale d'exportation pour nos PME industrielles.

Je soulignerai aussi au chapitre du commerce international que jamais peut-être un gouvernement du Québec n'a suivi avec autant de minutie et d'attention les négociations en vue des baisses tarifaires qui se sont achevées cette année dans leurs grandes lignes avec la signature d'un protocole parmi les pays industrialisés, il y a quelques semaines. Non seulement avons-nous fait connaître aux négociateurs canadiens la position du Québec sur quelque 3000 catégories de produits, mais je me suis moi-même rendu à Genève pour rencontrer les représentants du Canada, de même que ceux de la Communauté économique européenne, des États-Unis et du Japon.

Au chapitre du développement industriel régional, il me fait plaisir de rappeler que nous avons consolidé les quelque 57 commissariats industriels, en augmentant de 50% la subvention statutaire que verse mon ministère à ces organismes. Celle-ci est passée de $30 000 à $45 000. Les 228 municipalités qui collaborent au fonctionnement de ces commissariats ont donc dans le MIC un allié sûr pour asseoir et renforcer le développement industriel de nos régions.

D'ailleurs, c'est mon désir le plus fervent de décentraliser le plus possible les services d'assistance industrielle et commerciale, de même que financière du ministère dans toutes les régions du Québec. Le ministère de l'Industrie et du Commerce est déjà présent dans 14 bureaux régionaux, et

un nouveau vient juste d'être ouvert à Saint-Georges-de-Beauce. De même, la SOI exploite sept bureaux régionaux et poursuivra son effort de régionalisation en 1979.

Bien sûr, il n'y a pas manifestation plus concrète d'une volonté politique que la concrétisation des paroles et des voeux. La décentralisation de la Direction générale des pêches maritimes à Gaspé est non seulement décidée et amorcée, mais la décision de construire un nouveau centre administratif général est déjà annoncée, tandis que l'importance qu'accorde le gouvernement au développement de cette industrie éminemment régionalisée ne pouvait être mieux illustrée à la décision de consacrer $225 millions pour la réalisation d'un plan quinquennal de l'industrie des pêches maritimes, plan que j'ai annoncé avec les députés et les ministres de la région, jeudi dernier. (10 h 30)

C'est la première fois de notre histoire, je crois, qu'un gouvernement du Québec prend véritablement les pêches maritimes au sérieux. D'ailleurs indépendamment des sommes additionnelles maintenant prévues au plan quinquennal, le budget de la Direction des pêches maritimes du Québec, que je soumets à la commission aujourd'hui, passe de $14 500 000 environ l'an dernier à un peu plus de $18 millions cette année.

On en conviendra, il s'agit d'un bilan qu'on peut certainement qualifier d'impressionnant de la part du gouvernement et du ministère de l'Industrie et du Commerce pour renforcer notre base industrielle et commerciale. D'ailleurs, quoique d'autres facteurs, comme la dépréciation du dollar canadien, ont aussi joué, les résultats sont là pour témoigner que le Québec est en pleine phase de relance au plan industriel et manufacturier. Les investissements manufacturiers, en 1978, se sont accrus de 18,7% tandis qu'ils s'abaissaient de 0.5% en Ontario et n'augmentaient que d'environ 8,5% pour l'ensemble du Canada, ce qui plaçait le Québec juste derrière I'Alberta au chapitre de ses investissements. De l'avis de tous, les secteurs traditionnels du Québec tournent à plein, le climat du milieu des affaires s'est aussi considérablement amélioré au cours de la dernière année, en partie, bien sûr, à cause des actions du gouvernement en matières économiques et industrielles, mais aussi en partie parce que les bénéfices nets, après impôts, des sociétés manufacturières canadiennes et québécoises ont crû de 68% pour le premier trimestre de 1979 tandis que ces mêmes profits s'étaient élevés trois fois plus rapidement que les ventes l'an dernier.

Au chapitre de la concertation économique et de la cohésion sociale, le ministère de l'Industrie et du Commerce a participé activement au sommet économique de Montebello les 14, 15 et 16 mars derniers comme il l'avait fait à La Malbaie l'année précédente. Cette initiative du gouvernement de regrouper les agents économiques autour d'une même table, ajoutée à la baisse marquée dans le nombre de grèves, de jours-homme perdus l'an passé par les entreprises et la baisse aussi dans les lock-out, est sans aucun doute un facteur très positif pour la croissance économique du Québec.

Sur un plan plus général peut-être, je dirais que la vigueur de l'économie du Québec, vigueur toute relative étant donné que nous traversons, au plan mondial, une période de ralentissement de la croissance économique, se reflète dans le rétrécissement absolu et relatif de l'écart dans le revenu personnel par habitant au Québec par rapport à celui du Canada dans son ensemble. Ainsi, en 1978, le revenu personnel par habitant au Québec était de l'ordre de $7626 contre $8126 pour l'ensemble du Canada, soit un écart de $500 ou de 6,1%. En 1975, il y a quatre ans, l'écart était de l'ordre de $533 ou de 8,8%.

Il s'agit, M. le Président, d'un indicateur économique qui témoigne, avec d'autres indicateurs, du bien-être économique collectif d'une société. Donc, on peut dire que depuis quelques années, au chapitre de la richesse individuelle au Québec, il y a un certain rattrapage qui se fait, rattrapage, évidemment, qui ne peut se faire à toute vitesse mais qui va dans la bonne direction.

De même, au chapitre du chômage, malgré un niveau qui est chroniquement supérieur à celui de l'Ontario et à celui de l'ensemble du Canada — et celui depuis toujours, du moins depuis que nous pouvons compter sur des statistiques sûres — il s'est créé 52 000 nouveaux emplois au Québec en 1978. De plus, les chiffres dont nous disposons pour les quatre premiers mois de l'année présente, l'année 1979, indiquent que le rythme de création annuelle d'emplois est passé à 58 000. D'ailleurs, ceci s'est reflété dans le taux de chômage pour le mois d'avril 1979 par rapport à 1978 alors que le taux brut est passé de 11,8% à 10,7%, soit une baisse supérieure à une plein point de pourcentage.

De même, au cours de la même période d'un an, le taux de chômage désaisonnalisé est passé de 11,1% à 10,2%, ce qui constitue une baisse plus prononcée que dans l'ensemble du Canada où le taux est passé de 8,5% à 7,9%. Ceci ne signifie nullement que le Québec est sur le point de résoudre tous ses problèmes économiques. Bien au contraire, ce n'est qu'un début de rattrapage et de relance. La contribution du gouvernement du Québec dans ce renforcement de l'économie consiste principalement à mettre la priorité là où elle s'impose, soit dans l'investissement productif, afin de préparer l'avenir économique pour les générations montantes et pour la prospérité de nos retraités. C'est dans cette optique qu'il faut voir les efforts du gouvernement en vue de renforcer notre réseau de PME industrielles, notre industrie des pâtes et papiers, notre industrie pétrochimique, nos secteurs industriels traditionnels, notre industrie des pêches maritimes, notre industrie agricole, notre industrie minière et plus généralement la transformation plus poussée de nos richesses naturelles et de nos matières premières comme l'amiante, le fer, l'aluminium.

Je crois sincèrement que nous avons vraiment là, depuis deux ans et demi, la marque indéniable d'un gouvernement préoccupé de l'avenir écono-

mique du Québec. Je n'hésiterai point à dire que c'est aussi la marque d'un bon gouvernement...

M. Scowen: Vous hésitez là.

M. Raynauld: Vous n'avez pas besoin de continuer, on le sait.

M. Tremblay: II est peut-être bon, M. le Président...

M. Scowen: II ne peut pas lever les yeux.

M. Tremblay: ... de le souligner ici ce matin, pour terminer mes commentaires initiaux, car malgré tout ce que j'ai dit tout à l'heure et malgré la situation économique relative du Québec, malgré les nombreuses initiatives qu'a prises le gouvernement du Québec — et je pense que ces initiatives sont probablement les plus déterminantes qui aient jamais été prises dans l'histoire du Québec par un gouvernement du Québec — malgré tout ce bilan extraordinairement positif, il est évident — et cela, il ne faut pas se le cacher — que l'option constitutionnelle que propose le gouvernement sur l'avenir du Québec amène plusieurs adversaires de cette option, que l'on peut qualifier d'option Québec, à tenter de rapetisser le Québec en vue d'insuffler un certain sentiment de résignation et de défaitisme économique chez les Québécois. On pense ainsi qu'en créant des doutes dans les esprits quant à notre capacité d'entrepreneurship, quant à la solidité de l'économie québécoise, on pourra plus facilement détourner les Québécois de l'accession à une saine maturité politique et à arracher ainsi par la peur une réponse négative au prochain référendum sur l'avenir collectif.

M. le Président, vous le savez, je le sais, la réalité est bien autre. Le Québec est éminemment riche et regorge d'opportunités économiques fort abondantes et n'eussent été la négligence des gouvernements précédents en matière économique et le carcan que nous imposent des institutions politiques fédérales centralisées, contrôlées par d'autres et pour d'autres, le développement de l'économie du Québec serait autrement plus avancé qu'il ne l'est maintenant. J'ai confiance, M. le Président, que les générations actuelles et nouvelles du Québec ne reculeront pas devant le défi de développer leur territoire et de contrôler leur économie. C'est, du moins, dans cette optique plus large que je situe l'action du ministère de l'Industrie et du Commerce dont je vous recommande aujourd'hui l'adoption des crédits pour l'année 1979/80.

Le Président (M. Laplante): Merci, M. le ministre. M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Grégoire: M. le Président, une demande de direction.

Le Président (M. Laplante): Oui, monsieur.

M. Grégoire: Est-ce que je pourrais demander au ministre si le président de la SDI sera présent et quand on pourra le voir ici à la commission parlementaire?

M. Tremblay: Évidemment, les crédits de la SDI seront étudiés à l'onglet 5 — donc, je présume que ce sera cet après-midi — et je ferai en sorte que le président soit ici.

M. Grégoire: Très bien, merci.

Le Président (M. Laplante): M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Reed Scowen

M. Scowen: Merci, M. le Président. Je veux remercier le ministre de ses commentaires d'ouverture. Pour ma part, je l'ai trouvé très intéressant parce que cela me donne une idée de la perspective du ministre et de son gouvernement en ce qui concerne l'industrie et le commerce. Pour ma part, je trouve que ses commentaires sont le reflet d'un gouvernement qui est, premièrement, paresseux et, en deuxième lieu, qui ne comprend pas très bien l'activité économique ou a une politique qui vise délibérément à ne pas stimuler le secteur qui est clairement le plus important, soit le secteur privé. Je regrette de ne pas avoir entendu du ministre au tout début de ses commentaires une idée globale de la situation économique au Québec.

Il est clair que, même ces jours-ci, même depuis l'arrivée au pouvoir du Parti québécois, c'est encore le secteur privé, l'entreprise privée, les entrepreneurs — dont il a parlé à la fin de son discours — qui sont le moteur clé de l'économie du Québec. D'après moi, le rapport annuel du ministre de l'Industrie et du Commerce doit commencer par un survol de l'investissement pour l'année, des détails secteur par secteur, une discussion sur le climat, une discussion des questions d'infrastructure et des choses qui sont faites pour qu'il y ait un climat pour l'investissement privé et des résultats qui ont été réalisés.

Cependant, M. le Président, le ministre a commencé son énoncé par une évaluation des sociétés d'État comme si c'était l'aspect le plus important de l'économie du Québec. Il a parlé en outre de la politique d'achat qui est quelque chose, en soi, de pas mauvais, mais qui a quand même une tendance à nous renfermer malgré nous. Enssuite, il a parlé des stimulants fiscaux pour les entreprises qui manquent de ressources financières, qui sont en position de perte, des municipalités qui ont besoin d'aide plutôt que de parler de ces compagnies vitales, fortes, qui n'ont pas besoin du tout d'aide financière mais qui sont en train de se déplacer, ainsi que leurs investissements, vers les autres régions du Canada, simplement parce que le climat ici est mauvais.

M. Ouellette: II pleut.

M. Scowen: Le climat. M. Ouellette: II pleut.

M. Scowen: Je trouve, M. le Président, que ce manque de compréhension fondamentale de la mission du ministre de l'Industrie et du Commerce au Québec est le reflet parfait du manque de performance qu'on a remarqué depuis deux ans. Nous avons soulevé, de notre côté, à maintes reprises, le fait que l'industrie au Québec, dans le secteur privé où les personnes ont le droit d'investir ou de ne pas investir, d'après leurs propres perspectives, ne sera pas assainie ici avant que le Parti québécois et le gouvernement changent leur politique d'hostilité envers la fédération canadienne, envers l'entreprise privée. Cette hostilité se reflète non seulement dans le programme du Parti québécois, mais également dans les déclarations du ministre. Le ministre Landry disait, il y a quelques semaines, qu'il ne regrettait pas le départ des compagnies privées du Québec. (10 h 45)

Finalement, leur politique d'hostilité envers la langue anglaise a réalisé un nouveau sommet, la semaine dernière, quand le ministre Landry a commencé à désigner les gratte-ciel de Montréal par rapport à leur origine ethnique. Nous avons maintenant des gratte-ciel francophones, des gratte-ciel anglophones, et d'autres. Mais il a déclaré qu'il n'y a que deux seuls gratte-ciel francophones à Montréal. Celui de l'Hydro-Québec et celui du complexe Desjardins. Tous les autres gratte-ciel appartiennent à d'autres. Je ne sais pas si ce jugement s'appuie sur l'architecte, le propriétaire, le constructeur ou les locataires. C'est incroyable. Je dis cela simplement pour vous expliquer que cette hostilité envers la langue anglaise, ajoutée à l'hostilité envers le secteur privé et l'hostilité envers le Canada, les trois ensemble créent ici un climat qui rend impossible le travail du ministre de l'Industrie et du Commerce et dont il est en partie responsable.

J'aurais aussi aimé, si le ministre avait accepté au début de cette déclaration de principes généraux, qu'il élabore d'une façon un peu plus profonde une discussion sur les quatre faiblesses primordiales qu'il a soulevées au cours de son discours sur le projet de loi 7. Vous vous souvenez qu'il a cité quatre facteurs comme étant les plus grandes faiblesses du Québec et les choses qu'il faut régler avant que l'économie de la société québécoise soit assainie. De toute façon, il n'en a pas parlé du tout.

En effet, cette perspective globale, cette vision, cette idée de la vraie nature des problèmes et des solutions est très évidente, je pense, dans le discours du ministre. J'ai dit au début que je ne savais pas s'il était trop préoccupé ou si c'est une question d'un peu de paresse de sa part, mais, franchement, on n'a pas une vision de l'économie du Québec qui soit ressortie ce matin de ce discours du ministre.

Le ministre a poursuivi le début de ses déclarations ce matin avec un bref sommaire de la si- tuation des sociétés d'État. Nous aurons beaucoup de questions à poser là-dessus. On va y revenir plus tard mais sur la question de la SGF, je me rappelle très bien qu'avant Noël on a parlé de la question de la rentabilité de cette société et je suis complètement d'accord que cela doit être un objectif. On a aussi parlé de la question de la mission de la SGF, et le ministre a accepté de limiter les activités de cette société à trois grandes missions. Il reste la question: Comment va-t-on disposer des sociétés qui sont dans la SGF à l'heure actuelle mais qui ne font pas partie de cette mission parce que la rentabilité n'est pas le seul objectif, n'est pas le seul aspect de l'avenir de l'encadrement de cette société?

Comme nous l'avons déjà dit sur la Société de développement industriel, le projet de loi maintenant devant l'Assemblée nationale est une petite loi qui ne fait pas grand-chose; le ministre l'admet lui-même. Il a parlé, dans son discours en deuxième lecture, je pense, 15 ou 20 minutes là-dessus. Il a parlé un peu des questions globales, économiques mais c'est clair que ni lui ni moi trouvons que c'est une loi importante. Sur la question de SIDBEC, j'espère que le ministre va ajouter à la mission de SIDBEC comme à la SGF une mission de rentabilité et vite parce qu'on est rendu maintenant à $200 millions pour les contribuables québécois. J'ai lu ce matin qu'on espère que les pertes seront peut-être réduites un peu pour l'année 1979, mais le bout de ce tunnel n'est pas encore en vue.

Nous aurons beaucoup de questions à poser aussi sur la politique d'achat. C'est une question qui intéresse non seulement moi-même, mais c'est un peu une spécialité de mon collègue, le député d'Outremont, et ensemble on va se lancer là-dedans.

Je pense que c'est avec une certaine fierté que le ministre a parlé de la question du vin dans les épiceries. Je trouve que c'est une démonstration de la mauvaise administration et un contour-nement total des priorités de ce ministère de croire que la réalisation de la vente de vin dans les épiceries est un aspect important du développement industriel du Québec. C'est quelque chose dont on peut parler, mais parmi tous les grands problèmes que nous avons aujourd'hui, je trouve que c'est quelque chose qui doit venir assurément en deuxième place.

Nous aurons également des questions à poser au ministre sur le GATT. Il nous fera plaisir d'avoir une perspective sur les politiques précises qu'il a proposées au gouvernement du Canada et surtout les résultats précis qu'il a réalisés.

En ce qui concerne les pêches maritimes, nous avons non seulement les crédits, mais un projet de loi devant nous à ce moment et on va discuter cela tantôt.

Le ministre a dit, vers la fin de son discours, que le climat économique au Québec s'est beaucoup amélioré l'année passée. M. le Président, j'ai l'impression que c'est une folie pure de faire une telle affirmation. Nous avons, en effet, la grande majorité du secteur privé en guerre ouverte avec le

gouvernement. Le Conseil du patronat; l'industrie textile menacée par le ministre des Finances; l'industrie minière menacée par le ministre des Richesses naturelles; l'industrie pharmaceutique menacée par le ministre d'État au développement économique; l'industrie de l'amiante, mon Dieu! l'industrie de l'amiante... En effet, c'est une guerre totale de tous les agents économiques, une perte de sièges sociaux, une perte des industries dans le domaine clé qu'est le secteur manufacturier.

Il y a le danger imminent de la première perte dans le domaine de l'aérospatial avec la Pratt and Whitney qui est presque prête à commencer le déménagement d'une partie de son groupe d'ingénierie à Toronto. Si on commence à perdre l'aérospatial au Québec, les coûts pour tous les Québécois, non seulement les Montréalais, seront désastreux. On a vécu plusieurs pertes depuis les dernières années, mais c'est la première dans le domaine de l'aérospatial. C'est un point critique, M. le Président, et c'est quelque chose qui s'est développé cette année.

Je pense qu'on a assez abordé la question du climat, ici à l'Assemblée nationale et dans les commissions parlementaires, qu'il n'est pas question d'aller plus loin en ce moment. Je pense qu'il reste à prouver que le climat économique au Québec, en 1978/79 s'est nettement amélioré. C'est un homme très brave qui peut faire cette allégation.

Je veux parler d'une question au moins: l'investissement. Le gouvernement, ces derniers mois, a insisté, à chaque critique qu'on a faite sur la perte des investissements et le manque de construction ici, sur le fait que l'investissement au Québec en 1978 a augmenté de 18%, la plus grande augmentation de toutes les provinces du Canada, sauf l'Alberta. S'il y a une cassette à l'Assemblée nationale, c'est bien là-dessus.

Je pense que ce chiffre a besoin d'être ventilé et nuancé. J'espère que le ministre va le faire. Premièrement, il faut parler des secteurs. C'est clair, quand vous étudiez les chiffres, que cet investissement manufacturier est un investissement accru qui est réalisé dans quelques secteurs seulement. De plus, il y a les investissements du secteur public là-dedans. Parce que, quand le ministre parle de l'industrie manufacturière, sont incluses là-dedans les sociétés d'État, par exemple. C'est un fait qui doit être explicité pour que nous puissions savoir dans quels domaines cette augmentation est réalisée et dans quels domaines il y a une baisse. C'est surtout dans les secteurs traditionnels et dans les secteurs où il y a de fortes sociétés d'État qu'il y a une augmentation des investissements.

Deuxièmement, le niveau d'investissements a augmenté de 18% par rapport à 1977, mais la baisse de 1976/77 a été si forte que, l'année passée, nous étions rendus seulement au niveau où on était en 1975. Alors, pas de progrès depuis trois ans. Cela est quelque chose à souligner.

Un troisième élément à souligner — quand le ministre fait des comparaisons avec l'Ontario, il doit le dire — c'est que l'investissement manufacturier l'année passée en Ontario était de $3 150 000 000 et, au Québec, $1 400 000 000; $3 200 000 000 contre $1 400 000 000. C'est très bien de dire que nous avons eu une augmentation de 18%, mais il faut admettre que notre investissement manufacturier se situe aujourd'hui à moins de 40% de celui de l'Ontario et l'écart est sensiblement augmenté depuis les trois dernières années. Ce sont toutes des choses qu'il faut nuancer un peu quand on déclare dans une seule phrase que tout va bien ici au Québec.

Un dernier aspect de cette situation — on a soulevé cette question plusieurs fois au ministre — c'est que l'augmentation en 1978 était de 18%, mais qu'à Montréal il y avait une baisse de 2%. À Montréal, l'année passée, l'investissement manufacturier a subi une baisse de 2%. Ce n'est pas très fort.

Le chômage un autre indicateur dont le ministre a parlé avec fierté, parce qu'il y a un mois ou deux ici qui est bien par rapport à l'année passée. En effet, l'écart à combler, le rattrapage, ce n'est pas un rattrapage par rapport aux années soixante-dix, c'est un rattrapage par rapport au début de l'arrivée au pouvoir du Parti québécois. Parce que, dès le début de l'arrivée au pouvoir du Parti québécois, l'écart entre le Québec et l'Ontario en ce qui concerne le chômage est monté de 50%. On avait toujours plus de chômage ici qu'en Ontario et, depuis le début de 1977, l'écart, la différence a augmenté de 50%. On a un grand rattrapage à faire pour arriver au point où on était il y a deux ans et demi.

Finalement, le ministre a terminé en nous parlant de façon très brève, avant qu'il cite l'évangile du Parti québécois à la toute fin de son discours, des priorités pour l'année prochaine. Il disait: On veut d'abord stimuler l'investissement productif. Il n'a pas dit privé ou public — cela pourrait être les deux — mais il a dit l'investissement productif. Il sait autant que moi que la grande majorité, 85% si je me rappelle bien, de cet investissement productif, si c'est réalisé, sera réalisée par le secteur privé. Il n'a rien dit du tout de ses intentions de changer le climat, ce qui est essentiel si on veut réaliser cet investissement. (11 heures)

II n'a pas parlé de la fameuse question de la politique d'impôt de M. Parizeau, il n'a pas parlé des déclarations ministérielles qui révèlent aux gens qu'ils ne sont pas les bienvenus, il n'a pas parlé du tout du problème aigu que j'ai décrit tantôt.

Cet investissement productif, l'année passée, était presque inexistant. Une question qu'on veut poser au ministre — peut-être pourra-t-il nous donner les chiffres d'ici la fin de cette étude des crédits — est celle-ci. On aimerait savoir, avec une liste aussi détaillée que possible, quels sont les nouveaux investissements réalisés dans les parcs industriels du Québec depuis les deux dernières années. C'est un renseignement qu'on n'a pas. Si je me rappelle bien mes années passées à ce ministère, au moins pour les parcs publics, des rapports arrivent sur une base plus ou moins régulière. Nous aimerions avoir une liste des in-

vestissements, qui se font depuis les deux dernières années, comparés à ceux de 1975/76, dans les parcs industriels du Québec, privés et publics, mais au moins publics. J'espère que le ministre a les deux; il doit les avoir.

En terminant, je ne veux pas commenter la dernière partie du discours du ministre en ce qui concerne l'avenir des Québécois, la peur, le doute, la question d'entrepreneurship; ce sont là des choses qu'il répète, parce que cela fait partie d'une obligation du parti. On l'entend dans chacun de leurs discours. Je tiens simplement à vous dire, M. le ministre, que la grande partie de la population ne se laisse pas tromper par ces exercices, pas plus que nous de l'Opposition. On va laisser tomber cette partie du discours, parce que cela ne fait pas partie, d'après moi, de l'étude des crédits.

Nous aurons des questions précises à poser sur les différents programmes du ministère. Je termine mes remarques.

Le Président (M. Lefebvre): Merci. M. le député de Huntingdon.

M. Claude Dubois

M. Dubois: Merci, M. le Président. Je voudrais, premièrement, remercier le ministre d'avoir bien voulu nous faire parvenir une volumineuse copie du budget 1979/80 du ministère de l'Industrie et du Commerce. Quant à moi, cette belle copie, c'est à peu près sa meilleure performance cette année.

M. le ministre nous a fait état de plusieurs programmes de son ministère, il a fait état de la situation économique ainsi que des efforts et des réalisations du ministère dont il est responsable. Le ministre semble très satisfait de sa performance et cela m'inquiète passablement. Le ministre a fait état de la création de 52 000 emplois; je me demande quel pourcentage de cette création d'emplois sera affecté à l'administration des diverses mesures gouvernementales. Il y a quand même eu une augmentation de l'emploi dans le secteur public. J'aimerais savoir quel pourcentage de cette création d'emplois se dirige vers le secteur administratif, en ce qui concerne toutes les mesures que nous avons connues depuis un bon bout de temps. On pourrait s'en passer...

Le ministre ne nous a pas présenté grand-chose de concret pour appuyer ses paroles, pour appuyer son enthousiasme vis-à-vis de la situation actuelle. Ses remarques préliminaires ont été très limitées à mon avis, et elles ne reflètent pas du tout la situation économique actuelle. Je pense qu'il y aura lieu, tout à l'heure, d'y aller plus profondément de la part du ministre, afin qu'il puisse nous prouver que son enthousiasme est bien fondé et qu'il peut l'appuyer avec des chiffres concrets.

Le ministre a fait état tout à l'heure de la politique d'achat chez nous. En ce qui a trait aux achats faits par les institutions gouvernementales et paragouvernementales, j'aimerais bien savoir jusqu'à quel point les fonctionnaires de ces institutions se soumettent à l'ordre du ministère d'acheter de plus en plus de produits fait chez nous, des produits québécois. Il semblerait que beaucoup d'institutions gouvernementales et paragouvernementales ne se plient pas aux exigences du ministère, aux exigences du gouvernement actuel de donner priorité aux achats chez nous. J'aimerais bien qu'on puisse approfondir cette question un peu.

Il a fait état aussi de la création de sa société commerciale pour aider les PME ou, enfin, leur fournir l'aide technique nécessaire à l'exportation. J'aimerais bien connaître à ce moment-ci — enfin, le ministre pourra répondre tout à l'heure — dans quel "red tape" seront plongées nos PME quand il s'agira de se prévaloir des services gouvernementaux. Face à tous les programmes de votre ministère, on s'aperçoit que le "red tape" est l'élément principal auquel doivent faire face la plupart de nos PME, qui sont perdues dans la paperasse gouvernementale. Je pense qu'il devient tellement onéreux pour les petites PME de se prévaloir des services gouvernementaux qu'elles les laissent généralement tomber. Il y aurait lieu d'une révision de la politique du ministère de l'Industrie et du Commerce dans ce domaine en particulier. C'est bien beau de vouloir les aider avec un programme mais il faut que le programme soit à la portée de nos industries, et présentement c'est un cas très urgent, je pense.

Dans le budget que nous présente le ministre, on semble oublier la politique de développement agro-alimentaire. On dirait que c'est un élément qui n'est pas primordial pour le gouvernement actuel; pourtant on sait que 22%, 23% des revenus disponibles des Québécois se dirigent vers l'achat de produits alimentaires, soit aliments et boissons. Dans les politiques de développement de marchés, le ministre semble oublier complètement exclure cette préoccupation du développement agro-alimentaire. Il n'est question nulle part d'aller à la recherche de nouveaux marchés; on ne voit aucun budget dans ce domaine.

Cela me fait penser à une rencontre que j'ai eue l'an dernier avec le professeur Marcel Gagnon; il me parlait de CRESALA, que le ministre connaît certainement, le centre de recherche. En 1978, CRESALA avait un budget de $17 000 au niveau de la recherche sur la boisson alcoolique. Avec $17 000, on ne peut même pas engager un technicien à la recherche. Alors, je me le demande, c'est rire de ce centre de recherche qui de lui donner un budget de $17 000, étant donné qu'il y a un marché très vaste dans les boissons alcooliques et que nous importons à peu près tout; le budget de $17 000 était strictement pour fins de développement des boissons alcooliques.

M. Tremblay: M. le Président, c'est un budget qui relevait du ministère de l'Agriculture...

M. Dubois: Le ministère de l'Agriculture nous a dit la semaine dernière que cela relevait du ministère de l'Industrie et du Commerce. Je ne

sais pas, un bon jour, il va falloir s'entendre là-dessus.

M. Tremblay: Je pense que c'est l'Université du Québec, cela ne vient pas du MIC.

M. Dubois: L'UQAM, oui, c'est l'UQAM, à Montréal.

M. Tremblay: Et l'Université du Québec est rattachée au ministère de l'Éducation.

M. Dubois: On ne semblait pas tellement au courant de ce budget. Étant donné que cela touche à l'aide au développement de marchés, cela peut aussi à certains moment relever du ministère de l'Industrie et du Commerce quand même.

M. Tremblay:... relève du ministère de l'Industrie et du Commerce.

M. Dubois: Alors, vous avez le dernier mot, vous êtes responsable. C'est ce que je voulais vous faire dire de toute façon. Plus tard aussi, je poserai peut-être quelques questions au ministre, au niveau de la lenteur de la Commission de protection du territoire agricole. Il va me dire que cela relève du ministre de l'Agriculture, oui. L'application relève de lui. Il reste que notre développement économique présentement, la main-d'oeuvre dans la construction, la fabrication de produits, de matériaux de construction sont grandement affectés par la lenteur de la commission à répondre.

Il y a 7000 cas devant la commission, présentement, et je connais des cas précis dans ma région où des commerces, des industries, des résidences sont retardés dans leur construction à cause du projet de loi 90. Je pense qu'il serait temps que le ministre de l'Industrie et du Commerce y voie un peu. C'est son collègue et je pense qu'au Conseil des ministres, cela pourrait faire l'objet d'une bonne discussion. Exactement le domaine qui est le plus affecté au Québec, c'est la construction. Elle est déjà encore plus affectée à cause de la lenteur à répondre aux demandes d'exclusion à la suite du projet de loi 90. J'aimerais que le ministre nous donne l'assurance qu'il verra à ce qu'on ait plus de personnel afin de répondre aux demandes qui sont formulées à la commission de contrôle.

Le ministre a fait état tout à l'heure du projet de loi 21. Je me souviens bien du débat ici, en commission parlementaire. J'avais évoqué ma peur, au niveau de la production de cidre québécois. J'aimerais que le ministre, avec chiffres à l'appui, nous dise où en est la production de cidre au Québec. Est-ce qu'elle fut affectée ou est-ce qu'elle a augmenté par suite du projet de loi 21 et des 9600 présentoirs dans les différents magasins ou différentes épiceries du Québec? Également, au niveau des vins produits au Québec, le ministre a fait état d'un gros chiffre d'affaires supplémentaire qu'a produit le projet de loi 21. J'aimerais savoir en chiffres, au niveau de la production des vins québécois, et non pas des vins embouteillés au Québec — parce que la majorité des vins embouteillés au Québec le sont par la SAQ — dans les douze industries, qu'on a, je pense Québec, quelle est l'augmentation de leur chiffre d'affaires et quel est le chiffre d'affaires au niveau des ventes du cidre dans les épiceries. À ce moment-là, ma première préoccupation était surtout au niveau des cidres québécois. C'était une industrie qui était passablement affectée à cause du déclin de la consommation, et le ministre nous avait assurés que cela ferait revivre l'industrie du cidre au Québec. J'aimerais savoir jusqu'à quel point cela l'a fait revivre. Si cela a vraiment aidé, je suis prêt à féliciter le ministre. L'an dernier, j'ai eu des craintes quand même très grandes là-dessus. Avec des chiffres à l'appui, j'aimerais bien que le ministre nous en parle tout à l'heure.

Le ministre pourrait peut-être nous parler aussi brièvement un peu plus tard du dossier de GM dans la région de Beauharnois. Je pense que c'est un dossier qui le touche de près. Ford, c'est déjà un fait accompli. On sait qu'ils sont en Ontario. Mais cela fait quand même un an et demi ou deux ans que ce dossier traîne sur la table; le ministre pourrait peut-être nous faire état de la situation actuelle.

Dans un autre domaine, le Québec doit participer, je crois, en 1979, à au moins 70 événements commerciaux à travers le monde. J'aimerais savoir du ministre quels seront les secteurs privilégiés au niveau de ces événements en ce qui a trait au Québec.

L'agro-alimentaire, une fois de plus, n'est pas dans le portrait, à moins que le ministre puisse me prouver le contraire. Je ne sais pas si les compagnies comme Marine Industrie aussi bien que Davie Shipbuilding participeront à certains événements pour promouvoir la vente de bateaux québécois à l'étranger. En tout cas, j'attends la réponse du ministre tout à l'heure là-dessus. En ce qui a trait à SIDBEC, le ministre a eu, je crois, une conférence de presse hier. Il a parlé de $400 millions pour un programme quinquennal, ou à peu près. Le ministre pourrait peut-être nous donner plus de renseignements tout à l'heure. En ce qui a trait au développement des marchés au Québec et de la promotion des marchés au Québec, cela fait assez longtemps qu'on entend parler de l'identification du produit québécois. En fait, on en parle assez brièvement et on touche rarement à ce sujet de l'identification des produits québécois, afin de pouvoir vérifier une fois pour toutes si vraiment les Québécois sont nationalistes, s'ils sont protectionnistes envers leurs produits. (11 h 15)

Je pourrais vous dire que, si les Québécois étaient seulement aussi protectionnistes que les Ontariens le sont envers leurs produits, je pense qu'on pourrait accroître de beaucoup nos ventes ici au Québec. Je pense qu'il serait temps pour le ministère, enfin le ministère responsable dans ce domaine, d'arriver avec un sigle québécois pour les produits, surtout dans les secteurs mous: vêtements, chaussures, meubles. La plupart des

usagers ont de la difficulté à retracer si les produits sont vraiment québécois. En fait, ils sont tellement peu identifiés que c'est assez difficile de savoir s'ils sont vraiment québécois ou non. On achète à peu près n'importe quoi sans connaître la provenance des produits. Je pense que ce serait peut-être une mesure intéressante d'identifier mieux nos produits ici au Québec. C'est là qu'on verrait si les Québécois ont l'instinct ou le désir d'acheter des produits fabriqués au Québec.

Au niveau des accords du GATT, le ministre a fait état tout à l'heure de modifications dans les tarifs, dans les barrières tarifaires. Je pense que les modifications ont été assez minimes si on les regarde sous l'aspect canadien, mais, à titre de Québécois strictement, je crois que ces ententes peuvent avoir un effet néfaste sur nos secteurs mous. Je comprends que, si on les regarde du point de vue canadien, c'est peut-être minime, mais il reste que nous sommes les producteurs canadiens ici de textiles et de meubles. Les secteurs mous, c'est nous autres qui les avons. Je pense que nous serons affectés par cette entente. Le ministre nous a fait part de sa participation à certaines conférences du GATT. Je comprends que tout ce que le ministre peut faire présentement, c'est regarder passer le train parce que les décisions sont prises par le gouvernement fédéral. J'aimerais quand même que le ministre consacre plus d'efforts à convaincre nos partenaires fédéraux d'apporter une protection accrue aux produits québécois, surtout dans ces secteurs-là où sont les produits principaux manufacturés au Québec. Je pense que notre économie est pas mal basée sur ces produits.

M. le Président, j'ai remarqué dernièrement — je ne parle pas du ministère de l'Industrie et du Commerce — une attitude assez générale de la part de certains fonctionnaires qui exprimaient clairement le point de vue d'un ministre, à ce moment-là, sur l'exportation de produits de la ferme. Par exemple, si on prend le porc, on a atteint ici au Québec un degré d'autosuffisance de 140% et cela fait peur au ministère et à certains fonctionnaires.

M. Tremblay: Ce n'est pas au ministère de l'Industrie et du Commerce.

M. Dubois: Non, mais il reste que, quand on fait du commerce extérieur, cela devrait aussi toucher le ministre de l'Industrie et du Commerce. Le commerce extérieur ne relève pas strictement du ministère de l'Agriculture même dans tous les produits. Cela relève aussi du ministère de l'Industrie et du Commerce. Je pense qu'il y aurait lieu d'arrêter de s'apeurer devant un degré d'autosuffisance dans certains produits. Si je prends l'exemple du porc, on en exporte dans quelques pays du monde, aux États-Unis et au Japon surtout. Là, on a peur d'augmenter notre autosuffisance dans un produit où nous avons une qualité incomparable sur les marchés mondiaux et où les produits du Québec sont reconnus comme de qualité no 1. Je pense que les normes dans cette production sont... Enfin, quand on spécifie une norme, on dit: Produit du Québec, norme Saint-Jean. Présentement, c'est cela dans le marché mondial du porc. Je pense qu'il y aurait lieu que le ministre de l'Industrie et du Commerce parle un petit peu au ministre de l'Agriculture pour qu'il laisse les producteurs libres d'accroître leur degré d'auto-suffisance et d'inonder les marchés mondiaux avec ces produits-là. Au moins, quand on a une production qui fonctionne, je pense qu'on devrait ouvrir la porte et laisser aller les producteurs au lieu d'essayer de les ralentir comme cela se fait présentement.

J'aimerais aussi savoir du ministre — quand il pourra nous répondre dépendant de l'élément où cela pourrait se situer — son point de vue qui ne semble pas être partagé par la plupart des ministres concernant notre développement des marchés extérieurs. Je pense que le ministre de l'Industrie et du Commerce prône un développement nord-sud, tandis que d'autres ministres, apparemment, prôneraient un développement est-ouest. Alors, j'aimerais connaître, d'une façon plus explicite, la position du ministre de l'Industrie et du Commerce dans ce sens-là.

Également, sur l'Institut national de productivité, c'est un projet de loi qui date d'un an ou à peu près. J'aimerais que le ministre nous fasse le point sur ce dossier et nous donne les résultats jusqu'à ce jour et les effets prévus à courte et moyenne échéance de cet institut. On ne peut pas mettre le doigt sur une réalisation actuelle et j'aimerais savoir ce qu'il y a dans le four présentement au niveau de l'Institut national de productivité.

M. le Président, je pense avoir terminé mes remarques préliminaires. J'aurai l'occasion de revenir plus tard sur une foule de questions, peut-être qu'une de celles-là pourra être la construction navale ici au Québec, soit l'avenir de Marine Industrie et de Davie Shipbuilding. Est-ce qu'il y aura fusion de ces deux sociétés? Est-ce qu'il y aura nationalisation de Davie Shipbuilding? Qu'adviendra-t-il de ces deux sociétés? Plus tard, le ministre pourra nous répondre. Pour le moment, je termine mes remarques préliminaires. J'aurai une foule de questions à poser tout à l'heure. Merci.

Le Président (M. Laplante): M. le député d'Outremont.

M. André Raynauld

M. Raynauld: Merci, M. le Président. Je suppose qu'à cette étape des remarques préliminaires, il est aussi bien que je fasse ces remarques dès maintenant de façon que le ministre puisse répondre à l'ensemble de ces remarques. Je n'apporterai pas beaucoup d'éléments nouveaux, suite aux remarques qui ont déjà été faites. Je voudrais simplement souligner quelques points qui m'intéressent plus particulièrement de façon à obtenir, si c'était possible, un peu plus tard au cours des travaux de la commission parlementaire, un certain nombre de réponses aux questions

que je voudrai poser et sur lesquelles je reviendrai au moment de l'étude élément par élément et programme par programme.

D'abord, en ce qui concerne la politique d'achat, le rapport qui nous est soumis ne contient pas d'informations utiles. L'année dernière, il y avait déjà eu une discussion assez approfondie sur ce sujet. J'avais demandé des informations, on nous a promis des réponses; on a par exemple promis, l'année dernière, qu'il y aurait un relevé qui serait produit et rendu public à l'automne 1978. On est rendu au mois de mai 1979, et à moins que ces rapports m'aient échappé, ils n'ont pas été publiés. Sur ces rapports, on avait été assez précis d'ailleurs, on avait dit que ces rapports comprendraient non seulement des pourcentages généraux d'achats faits au Québec, soit par le service des achats, l'Hydro-Québec ou d'autres services dans le secteur de l'enseignement ou de la santé, mais qu'ils comprendraient le détail des coûts que représente cette politique d'achats. Quelle est la prime que l'on a donnée en réalité au contenu québécois? Le ministre nous avait bien dit à plusieurs reprises qu'il ne s'agissait pas de tarif préférentiel mais qu'il s'agissait d'une prime au contenu québécois. Une prime au contenu québécois, cela se calcule comme autre chose. Le ministre avait même mentionné dans un discours, un jour — je ne me rappelle plus où — que cette prime, dans mon esprit, c'était 2% à 3%. Une prime au contenu québécois, cela veut dire... J'aimerais avoir les soumissions dans les rapports sur le plan global. Je ne veux pas avoir de rapports particuliers, ce n'est pas ce qui m'intéresse; ce qui m'intéresse, c'est au niveau global. Quelles ont été les soumissions qui ont été refusées parce que le contenu québécois n'était pas suffisant? Qu'est-ce qu'on a dû payer, comme société, comme gouvernement, lorsqu'on a imposé un contenu québécois plus élevé?

Comme on nous avait promis ces relevés l'année dernière, je voudrais redemander un rapport détaillé sur l'application de la politique d'achat. Après tout, ce nouveau gouvernement nous a cassé les oreilles pendant deux ans pour nous dire, premièrement, qu'il n'y avait pas de politique d'achat dans l'ancien gouvernement, alors qu'il y en avait une et, deuxièmement, que c'était un instrument majeur d'intervention de sa part. Je pense bien que si c'était un moyen d'intervention majeur, on est en droit de connaître les résultats de l'application de cet instrument important.

J'ai noté, bien entendu, dans le rapport qui nous est donné ici, qu'on donne le contenu des achats, qu'on donne des pourcentages, 76% pour l'Hydro-Québec, 73% pour le Service des achats. Je sais également qu'en ce qui concerne le Service des achats le pourcentage a été augmenté par rapport à ce qui, semble-t-il en tout cas, existait auparavant. Ce n'est pas seulement un chiffre comme celui-là qui m'intéresse. Je veux savoir également, au-delà de ces pourcentages, quels ont été les résultats en termes pratiques, quand on a passé outre à des soumissions aux coûts les plus bas en faveur d'un contenu québécois plus élevé. C'est le premier point.

Il y a un deuxième point que je voudrais soulever. Je voudrais revenir sur un certain nombre d'autres promesses que le ministre nous a faites depuis qu'il est arrivé. Il est évident que le ministre aime bien se vanter de son ministère, et avec raison sans aucun doute. Mais, quand on fait ces choses on a l'habitude, on a la tentation d'annoncer les projets pendant de nombreuses années avant qu'ils ne soient réalisés.

Par exemple, le ministre a annoncé qu'il y aurait éventuellement une loi-cadre sur les sociétés d'État, dont je n'ai pas vu le jour. Le ministre a également annoncé la création d'une société de réorganisation industrielle. On n'a jamais vu la naissance de cette société. Il nous a promis un institut de commerce international qui serait lié au centre mondial de commerce. Il nous a promis une société pour l'exportation. Ce sont quatre promesses que le ministre nous a faites et qui après deux ans et demi, près de trois ans de pouvoir n'ont pas encore été remplies. Lorsqu'on en est rendu à deux ou trois ans de travail où on fait des discours, où on dit que le gouvernement est le meilleur gouvernement qu'on ait jamais eu, à ce moment, il faudrait peut-être aussi insister; sûrement on est en droit de s'attendre à ce que le ministre exécute au moins les promesses qu'il a faites. C'était mon deuxième point. J'aimerais que le ministre fasse le point sur ces projets dont il nous a parlé à plusieurs reprises, mais qu'on n'a pas encore eu le privilège de voir naître.

Mon troisième point se rapporte — c'était, bien entendu, prévu — à l'application de la loi 48 sur les stimulants fiscaux. J'aimerai là aussi avoir des informations additionnelles et j'aimerais, en particulier, que le ministre relie les résultats de l'application de cette loi aux prévisions qui avaient été faites pour nous rendre service; c'est probablement plus facile pour lui de nous faire cela que, pour nous, essayer de les calculer. Par exemple, j'aimerais qu'il nous dise quelle est la valeur des certificats qui ont été déposés au ministère du Revenu et ces valeurs, je suppose, ont représenté des investissements à venir. J'aimerais que ces investissements à venir et projetés nous soient également projetés sur une base annuelle autant que possible de façon à voir le rythme de croissance, le rythme de croisière éventuel de l'application de cette nouvelle politique de stimulation fiscale aux entreprises. Je soulèverai un certain nombre de problèmes, évidemment, en cours de route à propos des SODEQ, de la SDI et des politiques sur le plan extérieur. Je voudrais m'en tenir, peut-être, pour terminer, simplement à des considérations un peu plus générales sur la situation économique. (11 h 30)

J'aimerais dire ici que même si le ministre veut être responsable des résultats de l'ensemble de l'économie du Québec, je pense que c'est une prétention injustifiée. Je ne le tiendrai pas responsable de tout ce qui peut se produire sur le plan économique au Québec, parce qu'à ce moment, peut-être qu'il aurait de la difficulté à dormir.

M. Tremblay: Merci. C'est une promesse?

M. Raynauld: II aurait de la difficulté à dormir...

M. Scowen: Ni le bon, ni le mauvais.

M. Raynauld: ... s'il était responsable de tout ce qui se passe, parce que sur le plan de la situation économique dans l'ensemble, je pense que le ministre ne doit pas être bien fier, même s'il peut de temps à autre se consoler avec la lecture d'un ou deux indicateurs ici et là, bien soigneusement choisis, soit mensuels, soit particuliers, comme celui qu'il a cité ce matin: le revenu personnel par habitant. Je pense que la réalité, si on veut être sérieux, c'est que la situation économique au Québec est mauvaise. Ce n'est pas du défaitisme de constater ces faits, ce n'est pas non plus faire peur aux Québécois. Je pense, au contraire, que c'est essayer d'alerter, si nous suivons l'évolution économique, le gouvernement aux décisions qu'il doit prendre pour corriger les faiblesses de l'économie québécoise. Le ministre de l'Industrie et du Commerce lui-même, à plusieurs reprises, dans le passé, a montré qu'il se préoccupait de la structure économique du Québec, qu'il se préoccupait de l'évolution de la conjoncture québécoise. S'il n'est pas complètement aveuglé par le fait qu'il soit devenu membre d'un cabinet, d'un gouvernement, il devra reconnaître que la situation économique est mauvaise à l'heure actuelle, qu'elle se détériore, en particulier à Montréal.

Pour chaque indicateur qu'il pourrait nous donner, je peux lui en donner 20 autres qui vont dire le contraire. Je crois qu'il y a un consensus très large, à l'heure actuelle parmi la population, à savoir que la situation économique, particulièrement à Montréal, est très mauvaise et qu'elle se détériore encore plus que tout ce que les indicateurs conjoncturels peuvent nous démontrer. Le ministre sait très bien qu'à l'heure actuelle il y a un vide qui se fait par les départs d'entreprises, par des investissements qui devraient se faire, qui auraient dû se faire et qui ne se font pas, qui n'apparaissent évidemment pas dans les statistiques. Il y a un affaiblissement de la structure économique et industrielle à Montréal qui est absolument évident pour quiconque veut le voir.

Je pense qu'au lieu de se raconter des histoires entre nous, essayant de montrer que l'Opposition exagère, et essayant, nous, de notre côté, de montrer que tel indicateur particulier est plus ou moins significatif, au contraire, on devrait reconnaître de bonne foi, de part et d'autre, qu'il y a un affaiblissement dans la structure économique, particulièrement à Montréal, et qu'il faut que le gouvernement prenne des décisions de façon urgente pour corriger ces tendances qui se font jour à l'heure actuelle et qui n'apparaissent pas toujours, encore une fois, dans des indicateurs économiques généraux.

Il n'y a aucun doute dans mon esprit que même lorsqu'une économie s'affaiblit de façon structurelle et fondamentale, il y aura toujours des in- vestissements qui vont se faire ici ou là; il y aura toujours une certaine création d'emplois qui se fera ici ou là. C'est bien évident, parce qu'une économie ce n'est pas un robinet qui se ferme complètement et qui s'ouvre complètement. Il y a une force d'inertie considérable dans une économie, on ne bouge que lentement. C'est pour cela qu'il ne faut pas être aveuglé par des phénomènes passagers, temporaires, certains indicateurs qui peuvent être plus ou moins favorables. Je pense que la réalité de fond, si on veut être honnête, c'est qu'il y a un affaiblissement très très significatif et grave qui se produit à l'heure actuelle.

Je sais bien que pour ceux qui veulent concentrer toute leur action, qui veulent faire une confiance absolue à l'ensemble des régions du Québec et qui sont disposés à laisser aller le rôle international que Montréal a toujours joué et qui est absolument indispensable à son dynamisme et à sa croissance ultérieure.

Je sais bien que ceci peut paraître sans importance, mais pour ceux qui, au contraire, pensent que, lorsque vous avez une région qui produit de 55% à 60% de l'activité économique dans une province et que cette région est celle qui fait le lien, la liaison avec tous les marchés extérieurs, sauf dans le domaine de l'exportation des matières premières à l'état brut, lorsqu'on fait face à une région comme celle-là et que c'est cette région qui faiblit, que c'est cette région-là où on trouve des adaptations qui sont néfastes, un gouvernement, s'il veut être responsable, doit s'attaquer à ce problème et doit faire autre chose que des discours pour modifier la situation. Il doit s'attaquer aux raisons pour lesquelles cet affaiblissement s'effectue.

Jusqu'à maintenant, nous n'avons jamais vu que le gouvernement du Québec était disposé à adapter ses politiques de façon à faire face à ces difficultés. C'est ce qui nous inquiète et ce serait bien plus important pour le ministre de l'Industrie et du Commerce qu'il s'attaque à ce problème que de faire marcher des programmes particuliers les uns à la suite des autres, ce qui, évidemment, est nécessaire, mais qui est une action quotidienne. J'aimerais bien qu'il s'attaque aux problèmes fondamentaux parce que, pendant tout ce temps où il peut invoquer que telle loi particulière a donné de . bons résultats, que les vins dans les épiceries ont donné de bons résultats, aussi longtemps qu'on s'occupe de ces détails, on oublie l'essentiel. L'essentiel est situé à Montréal et il faut s'attaquer aux problèmes de structures qui se posent à Montréal. Le gouvernement, jusqu'à maintenant, et le ministre de l'Industrie et du Commerce lui-même, qui connaît très bien cette situation, refusent de s'y attaquer et c'est l'essentiel qui s'en va. Ce sont des petites grenailles ici et là qui permettent au gouvernement de penser qu'il fait du travail éminemment utile.

Merci, M. le Président.

Le Président (M. Laplante): Merci, messieurs. Y a-t-il d'autres membres qui aimeraient parler? Oui, M. le député de Beauce-Nord.

M. Adrien Ouellette

M. Ouellette: J'aimerais faire des remarques non pas sur le discours du ministre, mais à la suite des remarques que j'ai entendues de la part, en particulier, du député de Huntingdon qui, à mon sens, a quelque peu charrié tout à l'heure — cela le fait sourire! — lorsqu'il parlait de la production du porc et de l'attitude du ministère de l'Agriculture en rapport avec cette production porcine au Québec. D'abord, le député de Huntingdon disait que nous produisions actuellement 140% du porc consommé au Québec. Je crois qu'aux derniers chiffres, à moins d'erreur, on avait atteint le pourcentage de 160, ce qui est assez inquiétant.

M. Dubois: Les experts ne s'entendent pas là-dessus.

M. Ouellette: Enfin, entendons-nous pour 150%, cela ne me dérange pas du tout.

M. Dubois: C'est inquiétant, dites-vous?

M. Ouellette: C'est inquiétant non pas de voir la production s'accroître, mais de voir que cette production se vend sur deux marchés extérieurs bien particuliers, les État-Unis et le Japon. Ce qu'il y a d'inquiétant là-dedans, c'est de voir qu'à peu près tous les agriculteurs se lancent dans cette production sans trop savoir que du jour au lendemain, advenant que les Américains ou les Japonais s'organisent — on sait qu'ils sont en train de le faire — ces marchés pourront s'effondrer. C'est bien beau pour l'instant, les marchés sont bons, les producteurs font énormément d'argent, mais, si jamais il devait y avoir une défaillance quelconque au niveau de l'exportation, derrière tout cela se cachent des investissements, des espoirs qui seraient déçus et qui entraîneraient chez les producteurs qui se sont lancés là-dedans des problèmes assez graves non seulement sur le plan économique, mais aussi sur le plan social.

Là où je suis moins d'accord avec le député de Huntingdon, c'est lorsqu'il semble reprocher au ministre, lorsqu'il l'accuse même de dire aux producteurs: Écoutez, ne vous lancez pas là-dedans, soyez réservés, ne profitez pas des marchés qui sont bons. Ce n'est pas du tout ce que dit le ministre de l'Agriculture; il met plutôt en garde les producteurs contre les dangers de se lancer corps et âme dans ce type de production en leur disant: Faites attention, il pourrait arriver, étant donné qu'il n'y a pas de plan conjoint notamment, que ce secteur s'effondre et que vous ayez à payer la note. Je pense, par exemple, à ce qui s'est produit il y a quelques années dans le secteur de la motoneige et ce qui s'est produit plus récemment dans celui des maisons mobiles, où tout le monde s'est lancé dans une production de maisons mobiles alors que le marché était extraordinaire. On sait que ce marché s'est drôlement affaissé, de telle sorte que la plupart des producteurs — je pense même la majorité — ont dû fermer leurs portes, entraînant des faillites, entraînant également des mises à pied, augmentant le chômage, tout cela parce que, semble-t-il, on avait oublié de prévoir.

Reprocher au ministre de l'Agriculture et à ses hauts fonctionnaires d'être prudents et d'avertir ces producteurs, ce serait exactement comme si le ministre de l'Industrie et du Commerce prenait une tribune bien écoutée du jour au lendemain et disait aux producteurs, dans n'importe quel secteur de l'industrie: Allez-y, produisez mes enfants, vous avez des matériaux, vous avez de la main-d'oeuvre, vous avez les usines; ne vous préoccupez pas des marchés, investissez, produisez. Jusqu'au jour où, incapables de vendre leurs produits, ces producteurs se retrouvent acculés à une faillite créant ce qu'on a vu exactement dans le secteur des maisons mobiles. Donc, je pense que les propos qu'a tenus le député de Huntingdon à l'endroit du ministère de l'Agriculture et de son ministre ne sont pas tout à fait le reflet de la vérité. Au contraire, on dit qu'administrer c'est prévoir; je pense que le ministre de l'Agriculture fait très bien d'avertir les producteurs de porc qu'il y a danger. Surtout qu'il est député d'un comté rural, il doit savoir que presque à chaque jour le ministère de l'environnement émet des permis additionnels de production du porc, de telle sorte qu'on peut prévoir — si on fait une projection — que d'ici un an on aura doublé la production porcine au Québec par rapport à ce qu'elle était il y a deux ans et on a raison d'être inquiets puisqu'il ne semble pas y avoir de précaution suffisamment sûre qui soit prise par l'UPA parce qu'on n'a pas de plan conjoint, non plus que par les producteurs de porc eux-mêmes quant à leur avenir. Voilà mes remarques.

Le Président (M. Laplante): Merci, monsieur. M. le ministre.

M. Rodrigue Tremblay

M. Tremblay: M. le Président, je remercie les membres de la commission pour leurs commentaires. Il est évident que je ne peux apporter toutes les réponses détaillées aux questions soulevées après un seul tour d'horizon. Je pense que lorsque nous allons passer crédit par crédit, il sera plus facile d'apporter des réponses chiffrées étant donné que tous mes assistants seront ici et nous pourrons déposer alors certaines données qui ont fait l'objet de demandes.

Je voudrais peut-être maintenant revenir sur certaines interrogations et certains jugements qui ont été portés par les intervenants avant moi. Au-delà des faits, quand même, il y a aussi l'approche que nous devons avoir au développement industriel, au développement commercial, parce qu'il S'agit du ministère de l'Industrie et du Commerce, et je pense qu'ici nous divergeons passablement de l'approche des membres de l'Opposition. D'abord, j'aimerais quand même saluer le nouvel allié que le gouvernement a dans la force, dans la loi de l'inertie pour le développement économique

du Québec; c'est un allié de force que nous avons, je pense, et je n'ai pas d'objection à ce que l'on dise, évidemment, que l'économie du Québec va bien d'elle-même, mais que cela relève d'une certaine inertie, mais en même temps, il ne faudrait pas aussi se servir du gouvernement actuel comme bouc émissaire pour dire que tout va mal, comme tentent de le faire croire, depuis deux ans et demi, certains journaux, surtout anglophones.

Ou cela va bien, ou cela va mal, mais la loi de l'inertie ne peut pas fonctionner dans les deux directions en même temps. Je trouve quand même un peu ironique que la loi de l'inertie fonctionne surtout pour le gouvernement d'un Parti québécois, pour le développement de l'économie, après que nous ayons mis de l'avant, depuis deux ans et demi, un nombre sans précédent de mesures de développement économique, mais qu'elle jouait moins dans les années passées. (11 h 45)

Je regarde simplement au niveau de la fabrication. On parlait des investissements tout à l'heure. De 1975 à 1976, au Québec, les investissements manufacturiers s'étaient abaissés de 17,6%. Cela devait être dû à la loi de l'inertie. Ils se sont accrus, de 1977 à 1978, de 18,7%. Là, je comprends que ce doit être aussi la loi de l'inertie. Mais la loi de l'inertie est responsable quand cela monte. Je présume qu'elle est responsable aussi quand cela a chuté dramatiquement en 1976, l'investissement manufacturier. Il est vrai qu'il y a des cycles économiques. Mais, si les fluctuations dans les investissements découlent des cycles économiques, il ne faudrait pas dire qu'elles découlent d'un parti au pouvoir. Il faudra se brancher une fois pour toutes parce que, ce qu'on entend depuis deux ans et demi, c'est que c'est parce qu'on a un parti qui est nationaliste au Québec que cela va mal.

Si c'était un parti qui n'était pas nationaliste, cela irait très bien. Si c'était un parti qui ne voulait pas défendre la langue française, cela irait très bien. Si tout le monde se couchait à terre au Québec et cessait de respirer, cela irait très bien. On ferait venir des entreprises de l'extérieur qui développeraient le Québec et ce serait très bien. La loi de l'inertie ne s'appliquerait pas à l'époque. On serait tous par terre, on se ferait cracher dessus et on se ferait dire: "Speak white". Là, ce serait très bien. On a déjà connu cette période-là, mais les nouvelles générations — je le dis pour le député de Notre-Dame-de-Grâce — de Québécois et de Québécoises n'acceptent pas le principe qu'on est né pour un petit pain et n'acceptent pas d'être des locataires dans leur propre pays et dans leur propre économie. Vous pouvez essayer de nous ramener en arrière. Vous pouvez peut-être réussir à l'occasion d'élections, mais je pense que la tendance n'est pas dans ce sens-là. La tendance a commencé avec un gouvernement libéral en 1960. Elle n'a pas commencé avec nous. Elle a commencé avec la Révolution tranquille. Cette Révolution tranquille se poursuit présentement. Évidemment...

M. Scowen: Elle n'a pas commencé avec vous autres.

M. Tremblay: Non. Cela n'a pas commencé avec nous autres. Cela a commencé, par contre, avec notre premier ministre qui était ministre des Richesses naturelles à l'époque...

M. Scowen: Oui? C'est lui qui a commencé la Révolution tranquille tout seul?

M. Tremblay:... dans le gouvernement Lesage et il y avait des gens qui s'appelaient Paul Gérin-Lajoie et Eric Kierans qui se tenaient debout. Je dois dire que la position du Parti libéral du Québec présentement en termes économiques est passablement différente de ce qu'elle était dans le gouvernement Lesage et elle est très différente de ce qu'elle est dans le Parti libéral fédéral. On vient de passer une élection fédérale où le chef du Parti libéral national, pancanadien, parlait en faveur des sociétés d'État. Pétro-Canada, c'était le salut comme société d'État pour le Canada. Canadian Development Corporation, c'était le salut pour reprendre le contrôle de l'économie. Nous, on ajuste nos appareils ici à l'Assemblée nationale pour écouter les libéraux, pour voir s'ils ont une philosophie qui se ressemble un peu, qui est un peu cohérente et on nous dit: Les sociétés d'État, c'est terrible. Il faudrait abolir cela au plus vite; surtout quand elle sont francophones, elles ont une petite caractéristique qui fait mal. Les sociétés d'État pour le Canada anglais, c'est très bien pour combattre la mainmise américaine. C'est un signe de maturité politique...

M. Scowen: On n'a jamais dit cela.

M. Tremblay: ... un peu comme le Financial Post le disait après que le premier ministre Bennett de la Colombie-Britannique...

M. Scowen: On n'a jamais dit cela, jamais.

M. Tremblay: ...était intervenu pour empêcher l'achat de MacMillan Bloedel par Canadian Pacific Investments. C'était vraiment le geste d'un premier ministre qui se préoccupait de ses intérêts. Lorsque le gouvernement du Québec est intervenu pour empêcher qu'une des plus vieilles maisons financières établie au Québec depuis 1880 passe dans des mains étrangères — on sait combien les institutions financières sont l'instrument tellement précieux pour le développement économique — on a dit: C'est du nationalisme. C'est terrible. Autrement dit, la brebis galeuse dans...

M. Raynauld: ... MacMillan. C'est parfait. Très bien.

M. Tremblay: Les faibles... Il y a toutes sortes de fables de La Fontaine qui reflètent ce genre de préoccupations. On essaie donc de créer cette peur dans l'esprit des Québécois: Ne vous levez

pas. Restez tranquilles. Restez soumis. Restez dépendants même si vous contrôlez seulement 20% de l'économie au Québec dans le secteur manufacturier. Si vous essayez...

M. Scowen: La preuve, c'est Claude Morin.

M. Tremblay: N'utilisez pas votre gouvernement, laissez les forces du marché qui favorisent tellement les forts jouer et contentez-vous de cela. C'est le message qu'on entend. Je pense que c'est rendre un très mauvais service à la population du Québec que d'essayer de lui vendre cette salade, cette conjoncture de notre histoire, salade qu'on n'a jamais appliquée dans tous les autres pays industriels que je connais et qui ont connu un développement, en commençant par les États-Unis, qui se sont développés en se séparant justement de la Grande-Bretagne qui voulait absolument leur défendre par traité de fabriquer des vêtements et des tissus et qui voulait toujours importer leur coton.

Cela a commencé de cette façon aux États-Unis. Cela vient des États-Unis; ils produisaient du coton. La Grande-Bretagne, qui était le pouvoir impérial et qui dominait la colonie dépendante, les États-Unis, défendait l'établissement d'usines aux États-Unis pour fabriquer des tissus et des vêtements. C'est cela, les relations de domination entre une région ou un pays par rapport à l'autre. C'est pour cela que la première condition sine qua non pour qu'un pays se développe, c'est qu'on laisse aller ces forces vives, qu'on les libère des carcans qui les en empêchent. C'est l'histoire du monde depuis la révolution industrielle. Les pays qui se sont développés sont les pays qui ont brisé les carcans, qui ont libéré les forces vives. Ils se sont servis de leurs propres ressources, les ont transformées et ils sont devenus des pays prospères.

Cela se veut pour les petits pays comme la Suède, comme pour les grands pays comme les États-Unis. C'est la même problématique. Ce n'est pas une question de dimension du pays. C'est une question de forces autochtones qui sont libérées pour développer leur économie et qui ne cessent d'être "colonisées" — entre guillemets — ou dépendantes et assujetties à des intérêts d'autres centres de décision.

C'est une problématique dans toutes les théories de développement économique qui est élémentaire. Évidemment, elle est tellement importante. C'est comme un soleil: si on ne lui fait pas face, évidemment, on va aller dans les détails; on va passer des heures à argumenter sur tel détail, sur le taux d'investissement, passe de tant à tant, sur des choses semblables. Mais sur les grands paramètres du développement économique, on met cela de côté.

Je vais revenir tout à l'heure sur la question de Montréal, parce que le rapport Higgins-Martin-Raynauld ne date pas du Parti québécois. Les études de Charles Kindleberger de M.I.T. sur le déclin historique de Montréal ne datent pas du Parti québécois. On reviendra tout à l'heure sur ces questions de fond.

M. Scowen: Une promenade dans les rues.

M. Tremblay: C'est parce que votre traitement est tellement superficiel que je pense qu'il doit être démasqué et il doit être démasqué. C'est peut-être le plus grand service qu'on peut rendre à la population. Si mon passage en politique me permettait justement de démasquer ce genre d'interprétation politique primaire qu'on a tellement entendue dans le passé et qu'on essaie maintenant de nous resservir, je serais satisfait de moi-même, parce que je ne suis pas en politique à cause d'une fonction ou à cause d'intérêts politiques personnels, étant donné que je ne suis pas tellement partisan, attaché à la partisanerie politique. Mais au moins si, au niveau de cette problématique étrangère qui nous est imposée comme peuple, nous, les francophones en Amérique du Nord, on pouvait déchirer ce voile, je pense qu'on rendrait un service énorme à la population.

Donc, le député de Notre-Dame-de-Grâce...

M. Scowen: Et de l'emploi.

M. Tremblay:... revient avec sa vieille marotte sur les sociétés d'État. Ce qui me surprend, c'est que le député de Notre-Dame-de-Grâce était justement au ministère de l'Industrie et du Commerce, dans le bureau du ministre, à l'époque, il y a quelques années, responsable des sociétés d'État. Quand j'ai pris le ministère en main, je me suis rendu compte que les sociétés d'État fonctionnaient sans aucun contrôle au plan gouvernemental. Dans une société comme SIDBEC — parce que, tout à l'heure, il mentionnait la société SIDBEC — le conseil d'administration se renouvelait automatiquement sur la proposition du président, tout allait bien dans le meilleur des mondes. À la SGF, c'était la même chose. La SAQ était au ministère des Finances évidemment; c'étaient d'autres préoccupations que commerciales et industrielles qui existaient dans l'ancien gouvernement.

On vient me dire à moi, ministre de l'Industrie et du Commerce qui, depuis deux ans et demi essaie de mettre de la rationalité dans les relations entre le gouvernement et les sociétés d'État, d'écrire des lois un peu mieux faites que celles que vous avez écrites en mettant la notion de rentabilité dans le mandat. Quand...

M. Scowen: Sur un point, M. le ministre. Quand j'ai parlé tantôt des sociétés d'État, tout ce que j'ai dit — si vous vous rappelez bien — c'était que j'espère que, dans le contexte des sociétés d'État, vous allez définir les missions, que vous allez suivre les missions définies et voir à ce qu'elles soient rentables. Alors, ce sont les trois petits points que j'ai soulevés.

M. Tremblay: Mais, M. le Président...

M. Scowen: Vous semblez m'attaquer comme quelqu'un qui n'aime pas les sociétés d'État ou qui est contre. Vous avez même suggéré que même le Parti libéral était contre. Il faut rappeler

que c'est le Parti libéral qui a créé la plupart de ces entreprises et je ne suis nullement contre ces entreprises. Vous avez certainement le droit de parler de l'organisation, mais, s'il vous plaît, il ne faut pas m'attribuer une critique contre le principe des sociétés d'État. J'ai soulevé ces trois points seulement et je pense que vous êtes pas mal d'accord.

M. Tremblay: Je suis heureux de vous entendre et je vais relire votre discours de deuxième lecture sur la loi 7 pour voir si c'est vraiment cela que vous avez dit. J'avais compris le contraire.

M. Scowen: Oui, j'ai surtout parlé en deuxième lecture de vos principes sur l'économie.

Le Président (M. Laplante): M. le député de Notre-Dame-de-Grâce, on va laisser finir M. le ministre.

M. Scowen: ... qui étaient intéressants.

Le Président (M. Laplante): Je vous redonnerai la parole après.

M. Scowen: Oui. Très bien.

M. Tremblay: M. le Président, sur ce point précis, parce que le député de Notre-Dame-de-Grâce a commencé en disant: Le gouvernement est paresseux ou le ministre est paresseux. Je pense qu'il y avait une paresse sous l'ancien gouvernement. Le ministre de l'Industrie et du Commerce, avant mon arrivée, au cours du mandat libéral, avait fait adopter deux ou trois lois: une sur l'épaisseur des matelas, une autre sur le prix minimum du pain et, je pense, quelques petits amendements à la loi de la SDI.

Quand on vient me dire qu'on est paresseux après deux ans et demi, faites attention parce que cela peut vous retomber dans la face. C'est justement le contraire, je pense; on nettoie les écuries. Dans les sociétés d'État, si les lois avaient été un peu mieux faites, si on avait suivi d'un peu plus près les sociétés d'État, il n'y aurait pas eu le scandale qui est arrivé à Marine, parce que ce n'est pas arrivé sous notre temps, c'est arrivé sous votre temps en 1975. Dans le cas de SIDBEC, ce n'est pas nous qui avons donné le mandat d'un complexe sidérurgique intégré sans mentionner à quel coût, à quel prix. Ne soyez pas surpris qu'après on vous dise: Payez la note. C'était le mandat que vous avez...

M. Raynauld: Le Parti québécois était tout à fait favorable; il était bien d'accord et il poussait le gouvernement justement à faire cela.

M. Tremblay: Qui?

M. Raynauld: Le Parti québécois qui était dans l'Opposition dans ce temps-là. Relisez les débats; vous allez être...

M. Tremblay: C'est le gouvernement qui est au pouvoir qui est habituellement responsable.

M. Raynauld: Vous allez être édifié.

M. Tremblay: Je n'ai pas d'objection à être responsable moi-même. Lorsqu'on me sert ce genre de vieille marotte, je pense qu'il faut regarder les faits. Il y a d'autres disques usés qu'on nous sert. Je pense qu'il est bon de regarder cela aussi. On dit: Le Parti québécois au pouvoir est contre le secteur privé; c'est terrible, c'est un gouvernement qui est contre le secteur privé. C'est comme si on était une sorte d'ayatollah qui fusillerait les hommes d'affaires à chaque lundi matin et en nationaliserait un par semaine. Il y a seulement une entreprise dont on a dit qu'on allait prendre le contrôle parce que c'était une sorte de ... Il n'y a pas un pays africain qui était rendu aussi bas que nous à ce niveau-là. On nous creusait les trous dans l'amiante et on nous laissait les malades, pratiquement les morts, pour les enterrer dans les mêmes trous et on sortait la matière pour aller la transformer ailleurs. J'étais conseiller de plusieurs gouvernements africains. Le sol ne nous appartenait même pas. C'étaient même des anciennes lois qui permettaient de contrôler le sous-sol, non pas simplement le sol. Cela a été la seule intervention du gouvernement dans un domaine de matières premières. La Saskatchewan a fait cela il y a longtemps. Dans le cas de l'uranium, bien d'autres pays, le gouvernement canadien entre autres, exercent un contrôle très serré pour des raisons... Quand c'est fait par le gouvernement fédéral, c'est parfait, c'est excellent, mais que la brebis galeuse qui est du Québec ose vouloir copier nos chers amis anglophones pour renforcer son économie, cela est terrible, revenons au libre-échange. Vite, vite, vite, revenez au libre-échange. Laissez les forces jouer.

M. Scowen: On n'a jamais dit cela. On n'a jamais suggéré cela.

Le Président (M. Laplante): Vous répondrez tout à l'heure, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Scowen: Oui, M. le Président, mais il y a des limites.

M. Tremblay: On nous dit que le gouvernement est contre le secteur privé. Oui, cela vous fait mal, c'est évident, parce que je vous sers de nouveau vos arguments qui sont tellement simplistes que cela fait pleurer.

M. Scowen: Cela est simpliste parce que ce n'est pas vrai.

M. Tremblay: On dit: Le secteur privé est négligé. Qu'est-ce que l'on fait? Le secteur des pâtes et papiers, les 55 usines de pâtes et papiers au Québec, est-ce privé ou public? Je comprends

que Donohue contrôle un petit peu et que le gouvernement possède 43% des actions courantes dans Donohue et 53% des actions votantes, mais à part cela, c'est privé. Lorsqu'on a un programme d'aide à l'industrie des pâtes et papiers, n'aide-ton pas le secteur privé? Évidemment, ces gens font des profits comme ils n'en ont jamais fait dans leur histoire. Ils investissent aussi comme ils n'ont jamais investi dans leur histoire; l'an passé, $300 millions. Mais il faut faire attention à cela; ce n'est pas vrai; cela ne doit pas exister. Le Parti québécois ne peut pas encourager l'entreprise privée. Voyons donc, il y a quelque chose qui ne marche pas.

Dans le domaine des pêches maritimes, les 46 usines de transformation qu'on va aider dans notre plan de transformation des pêches...

M. Scowen: L'année passée, pour les pâtes et papiers, vous avez dit $300 millions?

M. Tremblay: Pour les pâtes et papiers, oui. M. Scowen: En investissement?

M. Tremblay: Oui, c'est un peu plus que cela; au moins $300 millions et peut-être $330 millions. Dans le domaine des pêches maritimes, on a un programme de $225 millions. Jamais un gouvernement auparavant... Il y en avait dans le passé, le gouvernement donnait une petite subvention, une petite sucrerie par ci par là pour garder l'industrie sur une base artisanale; maintenant, on y va de plain-pied, on met $225 millions. C'est une entreprise privée. C'est 4700 pêcheurs; c'est 2000 travailleurs d'usine. On parle des PME innovatrices; celles que j'ai mentionnées tout à l'heure sont toutes de l'entreprise privée. La loi 48 a baissé l'impôt de 50% pour les 6000 PME industrielles; ce sont des entreprises privées. Le programme d'innovation pour les meubles, les 760 fabricants de meubles au Québec, ce sont des entreprises privées. Les chaussures, c'est l'entreprise privée. Quand on abolit la taxe sur le textile, le vêtement, les meubles, les chaussures pour un an dans un cas et qu'on la maintient de façon permanente pour le textile, le vêtement et les chaussures, alors que notre ministre des Finances très francophone et très québécois voulait qu'on encourage l'industrie de l'automobile et l'industrie des radios fabriquées au Japon avec la même mesure, c'était l'entreprise privée aussi. (12 heures)

On a élargi la Loi de la SDI, même si vous avez fait des gorges chaudes quand on en a parlé. Au lieu d'en faire uniquement un instrument pour aider la grande entreprise internationale, on va pouvoir maintenant faire de la SDI l'instrument pour développer l'industrie du bois, par exemple, qui est la seule industrie francophone qu'on retrouve au Québec, la seule où on a plus de 50%...

M. Scowen: C'est pour les Québécois.

M. Tremblay: Je parle des Québécois franco- phones dans ce cas parce que votre collègue à côté a déjà fait des études pour montrer justement quelle était la mesure de notre taille.

M. Scowen: Qu'est-ce que cela veut dire?

M. Tremblay: On a élargi la possibilité pour la SDI d'aider le secteur privé dans les secteurs comme les scieries. On a énormément de petites scieries réparties sur tout le territoire. Le Parti québécois est contre l'entreprise privée? Il y a l'agriculture dont on veut développer les 45 000 petites entreprises agricoles. Ce sont des PME, je dirais que c'est de l'entreprise privée

Donc, on prend un exemple, un seul, on vous fait un bouc émissaire de cela et on fait la chasse au gouvernement. Chaque fois, à chaque discours, on essaie de créer une psychose. On dit: Ce gouvernement est contre l'entreprise privée. On baisse les impôts pour les entreprises. Les entreprises font les plus hauts bénéfices de leur histoire. On les aide en élargissant la SDI, etc. Probablement qu'il n'y a aucun gouvernement qui a aidé autant l'entreprise privée de façon active. Évidemment, il y a la loi de l'inertie en plus qui nous aide, mais on ne peut pas avoir uniquement la main de Dieu qui travaille contre nous. Il faut au moins avoir la loi de l'inertie de notre côté.

M. Scowen: Évidemment qu'on ne peut pas faire l'amour avec de l'argent.

Le Président (M. Laplante): À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Tremblay: L'amour avec de l'argent, vous me perdez, c'est un autre ministère.

M. Scowen: Cela ne marche pas.

M. Tremblay: Le ministère de l'amour est ailleurs.

M. Scowen: II n'était pas là en dépit de votre largesse. Il faut trouver d'autres moyens d'être aimé.

M. Tremblay: Ce doit être un des 37 ministères d'Ottawa. Je ne les connais pas tous. En tous les cas. Donc, quand on regarde toutes ces interventions du gouvernement favorables à l'entreprise privée, une seule est contre et les autres, on les met sous silence. On dit: Cette fois, c'est l'âne qui est allé dans le pré vert d'à côté, c'est le coupable de tous les maux. La fable de LaFontai-ne, vous la connaissez? L'âne était coupable. Le lion à Toronto n'est pas coupable. Le lion, qui était Trudeau pour Pétro-Canada et Canadian Development Corporation, ce n'était pas un socialiste. Il ne faisait pas peur aux capitalistes. C'était un homme qui travaillait pour le bien-être de sa nation, "nationhood building". Mais quand le gouvernement francophone du Québec ose vouloir toucher à la General Dynamics Corporation, "oh shame!"

M. Raynauld: M. le Président, question de règlement. Est-ce que le ministre pourrait cesser ses divagations? Vous parlez pour la galerie et vous seriez supposé vous adresser au président.

M. Tremblay: Je ne divague pas, je réponds justement à vos divagations.

M. Raynauld: Ce sont des divagations absolument épouvantables de la part d'un ministre. Je voudrais qu'il cesse parce qu'il va perdre le peu de réputation qu'il lui reste.

M. Tremblay: Je regrette, ma réputation je la comparerais à la vôtre n'importe quand. Ce sont justement vos divagations que je suis en train de décrire et lorsqu'on vous décrit le ridicule de la situation, cela vous fait sans doute honte et j'espère que vous avez honte. C'est déjà un départ.

Je reviens sur un autre traitement superficiel, sur deux traitements, un que je vais passer rapidement, c'est la question des investissements. Je vais y aller en prenant des atouts. En plus d'avoir la loi de l'inertie, je vais mettre la banque de mon côté, étant donné que la Bank of Montreal, c'est quelque chose de sérieux. Selon la Banque de Montréal, la croissance économique du Québec devrait être meilleure que celle du Canada en 1979. Je ne veux pas aller plus loin que cela.

M. Scowen: Simplement le réaliser.

M. Tremblay: Je prends le "Conference Board of Canada" dans le rapport d'avril 1979, à la page 8; "In 1978, goods production led by exceptional strength in manufacturing advanced much more rapidly in Quebec than nation wide", "nation wide" étant évidemment le Canada. Je reviens à un rapport, celui-là encore de la Bank of Montreal, Business Review, April 1979; "In fact, Quebec's manufacturing industries recorded a 20% increase in shipment in 1978 compared with 18% for Canada and 15% for Ontario."

Il y a tellement de faits qui démontrent que dans le domaine du secteur privé... tout à l'heure, on a dit: Ce doivent être des sociétés d'État. Dans le domaine de la fabrication, la SGF a investi seulement $10 millions l'an passé et SIDBEC très peu aussi.

On ne peut certainement pas dire que ce sont les entreprises publiques qui sont responsables du haut taux d'investissement dans le secteur de la fabrication. Donc, il faut conclure que c'est le secteur privé qui a investi au Québec et il investit plus au Québec que partout ailleurs. À moins qu'on ne nie les faits — et je sais qu'on essaie de nier les faits — mais je pense qu'on ne peut pas...

M. Raynauld: ... les chiffres en 1979, les intentions d'investir dans le secteur manufacturier.

M. Tremblay: Oui, dans le cas du Québec, cela va être 9,9%, en Ontario 6,1% et dans le reste du Canada, 8,9%.

M. Raynauld: Oui, oui, ce sont des grosses différences.

M. Tremblay: Oui, mais là on voudrait... M. Raynauld: C'est immense.

M. Tremblay: ... qu'on soit toujours deux fois plus vite que les autres.

M. Raynauld: C'est vous qui le faites pour 1978, vous passez votre temps à citer 1978.

M. Tremblay: Oui, mais même en 1979, nous allons à peu près 33% plus rapidement, 9,9% par rapport à 6,1% en Ontario.

Donc, sur la question des investissements, je ne voudrais pas prendre trop de temps, M. le Président, mais il est évident que le secteur privé au Québec se porte bien dans le domaine de la fabrication.

Maintenant, il y a un problème à Montréal et c'est un problème vraiment fondamental. Ce n'est pas en le traitant de façon superficielle qu'on va trouver les solutions. Je mentionnais tout à l'heure qu'en 1970 notre collègue, le député d'Outremont, avait participé à une étude avec deux autres collègues, Higgins et Martin, qui avaient écrit le rapport Higgins, Martin et Raynauld qui, justement faisait le constat du déclin de la situation relative de Montréal par rapport à Toronto. J'ai un autre collègue du M.I.T., Charles Kindleberger, qui a fait une étude aussi où il a comparé Halifax, Montréal et Toronto. Il s'est rendu compte qu'il y avait cette même dégradation: Halifax est morte comme centre financier et institutionnel depuis longtemps et Montréal, à partir des années trente, a commencé à dégringoler; cette dégringolade s'est poursuivie.

Un de mes autres collègues, André Ryba, avait fait une étude aussi qui montrait qu'en 1952, par exemple, le rapport des sièges sociaux entre Montréal et Toronto était égal à un indice de 120; 20 ans plus tard, en 1972, c'était coupé de moitié, c'était rendu à 64. Quand on vient nous servir ce genre de vieux disque usé, à savoir que ce serait depuis deux ans et demi qu'un parti pro-Québé-cois, comme celui de la Révolution tranquille des années soixante, est responsable de cela, je dois dire qu'on charrie grandement.

Évidemment, il y a un problème...

M. Scowen: Est-ce que vous me permettez une seule question?

M. Tremblay: Bien sûr.

M. Scowen: Est-ce que vous croyez que la situation économique à Montréal est devenue plus grave depuis l'arrivée au pouvoir du Parti québécois?

M. Tremblay: La situation n'est pas devenue plus grave à cause de l'arrivée du Parti québécois,

mais parce qu'on a fait des extravagances en 1976, lorsqu'on a créé artificiellement le plus gros boom de construction qu'on n'avait jamais eu dans la région de Montréal, au niveau des hôtels entre autres, au niveau des espaces à bureaux. De 1973 à 1976, il y a eu un grand nombre d'hôtels nouveaux de construits, en plus, évidemment, de l'effervescence qu'on a vue au niveau des Jeux olympiques, qui s'est même transférée dans les caisses électorales, d'après ce que je lis dans les journaux; donc il y a eu un boom artificiel accompagné, naturellement, d'un "dessoufflement" par après. Ce n'est nullement rattaché à l'élection d'un parti ou d'un autre. C'est un fait uniquement — il faut parler de l'effet de l'accélérateur dans le domaine de la construction rattaché à un effet d'accélération.

M. Scowen: En effet...

M. Tremblay: Maintenant, il y a un problème par contre — et c'est un fait — en ce qui concerne ce qu'on appelle la situation d'enclave de certaines activités institutionnelles à Montréal. En termes économiques, une enclave c'est lorsqu'il y a une activité économique qui n'est pas rattachée au reste de l'économie.

M. Scowen: Montréal?

M. Tremblay: Je ne parle pas de Montréal, mais de certaines activités qui sont assimilables à des activités d'enclave. On voit cela en pays en voie de développement, lorsque vous avez une compagnie minière qui vient développer une mine en Afrique, par exemple. On creuse un gros trou, on fait venir des travailleurs de l'étranger, tout le monde parle une langue différente de la population, la monnaie est souvent différente, les assurances sont faites dans le pays central, à la maison mère, les services de cadres, les services d'avocats, etc., de sorte qu'une fois l'activité sortie, il reste quelques retombées marginales, parfois secondaires, dans le pays, un certain effet positif sur la balance des paiements, mais le gros de l'effet, c'est que cela a été expatrié à l'étranger.

Il est évident que Montréal n'a pas été développée en majeure partie par l'élite économique francophone.

M. Scowen: Est-ce que cela a été développé par les Québécois?

M. Tremblay: Cela a été développé, comme Kindleberger, et le M.I.T. peut vous le démontrer, par un déplacement des activités financières d'Halifax vers Montréal. Donc, vous avez eu de grosses banques qui finançaient le commerce, etc., surtout des banques écossaises, qui se sont déplacées vers Montréal et qui, depuis une trentaine d'années, se déplacent vers Toronto. D'ailleurs, les compagnies d'assurance aussi ont fait cela à partir des années cinquante. Je me rappelle l'Atlantide Finance, en 1954, qui est déménagée vers Toronto. Le gouvernement canadien, ayant une philosophie de non-intervention, a laissé faire ce dépla- cement vers Toronto. On assiste maintenant à un début de déplacement vers l'Ouest; je pense que c'est une poussée qui est très lucide. (12 h 15)

Dans le cas du Québec, cela pose un problème, cela empire probablement le problème du fait que vous avez deux communautés linguistiques. La preuve que nous avons vraiment deux communautés linguistiques est qu'il y a quelques années le président de la Banque Royale, qui avait passé 40 ans à Montréal, avouait avec fierté qu'il ne parlait pas un traître mot de français. J'ai déjà vu en Afrique des Français de France qui se targuaient parfois de ne comprendre aucun mot des dialectes locaux, mais c'est symptomatique de quelque chose. C'est évident que si vous n'êtes pas intégré au niveau linguistique, les autres intégrations doivent être très difficiles à faire.

Donc, ceci pose un problème. Cela a posé un problème dans le temps de M. Duplessis, cela a posé un problème dans le temps de M. Lesage. Quand on parle des exodes d'entreprises, en 1970/71, la compagnie Bristol Myers s'est déplacée vers Toronto. Elle venait de Montréal-Nord. C'est dans le temps des libéraux.

M. Scowen: Pensez-vous que le nombre de déplacements a augmenté depuis l'arrivée au pouvoir du Parti québécois?

M. Tremblay: Je ne veux pas discuter à savoir si la vague a six pouces de plus haut, je regarde le problème.

M. Scowen: Pensez-vous que c'est plus élevé?

M. Tremblay: II y a un problème fondamental pour le Québec. Si, dans une structure politique et économique Est-Ouest, comme vous le disiez, on devient de plus en plus marginalisé géographiquement, à la frontière du marché commun canadien et des institutions politiques, qui sont surtout maintenant en Ontario — vous avez une concentration à Ottawa, qui est en Ontario, une concentration des banques, des compagnies d'assurance à Toronto — est-ce que le Québec, pour son développement économique, ne fait pas face à un problème fondamental? C'est là toute la question. Je pense que nous faisons face à un problème fondamental. Si nous continuons cette ancienne stratégie, qui dure depuis un siècle, nous allons être plus pauvres, nous allons avoir moins de population et nous allons être plus marginalisés que nous ne le sommes présentement. Il faut donc qu'il y ait des changements en profondeur, pas des changements à la marge, comme on dit, ce sont des changements structurels qui doivent se produire. Je pense que ces changements sont en marche, on va essayer de les ralentir, mais je pense que c'est nécessaire, parce que c'est la logique des faits qui parle plutôt qu'uniquement les voeux pieux et la philosophie.

M. Scowen: Est-ce que le ministre va dévoiler ces changements en profondeur qu'il a l'intention de faire dans le cours de l'étude de ses crédits?

M. Ouellette: L'indépendance, voyons! Un changement structurel, c'est l'indépendance du Québec!

M. Tremblay: Quand vous avez un budget, à Ottawa, qui est de $53 milliards, c'est près du budget, de toute l'économie du Québec. Le PNB du Québec est de $57 milliards pour cette année. Quand vous avez cette force de pouvoir d'achat dans un endroit comme Ottawa, c'est un pouvoir économique très fort. Toute la politique commerciale est concentrée à Ottawa. On a parlé tout à l'heure du GATT. Vous avez la politique monétaire qui est concentrée à Ottawa.

C'est pour cela que ça me fait rire quand je lis ce que dit M. Bourassa, c'est-à-dire que c'est terrible une union monétaire. On ne devrait jamais faire cela, il faudrait garder ce qu'on a présentement, une union monétaire sans avoir rien à dire. Mais une union monétaire où on aurait quelque chose à dire, c'est terrible; alors, n'y allons pas. Il se trouve qu'en ce qui concerne les unions monétaires, j'ai déjà été conseiller de pays qui étaient dans une union monétaire.

M. Scowen: En effet, le changement en profondeur que le ministre prévoit, c'est l'indépendance du Québec.

M. Tremblay: Laissez-moi parler et je vais vous le dire. Donc, quand vous avez une concentration dans un gouvernement qui est à l'extérieur du Québec, qui est contrôlé maintenant — on le voit de plus en plus — par d'autres que des Québécois et quand vous avez dans une capitale financière "nationale" — entre guillemets, "national" — une concentration du pouvoir bancaire, du pouvoir boursier, du pouvoir d'assurance, vous allez être une économie dépendante, vous allez recevoir les miettes de votre développement. Votre aluminium va être transformé ailleurs; votre minerai de fer va être transformé ailleurs; on transforme seulement un dizième de notre aluminium et l'Ontario transforme trois fois plus de notre propre aluminium; c'est transformé en Ontario. À cause de toutes sortes de politiques; évidemment, il y a la loi des mercis qui joue dans cela. À cause de bien des politiques... (12 h 15)

M. Scowen: ...

M. Raynauld: II n'y a pas de marché là-dedans.

M. Tremblay: Le marché joue aussi, c'est un des facteurs.

M. Raynauld: ... les marchés.

M. Tremblay: Je vais vous donner un autre facteur. Quand le gouvernement fédéral, l'an passé, a décidé d'effacer la dette de la Voie maritime du Saint-Laurent...

M. Raynauld: Voulez-vous qu'on parle de la voie maritime?

M. Tremblay:... c'était $825 millions. Évidemment, ceci permet de transporter le minerai de fer à Hamilton beaucoup moins cher, et ceci se répercute évidemment sur la capacité de SIDBEC, par exemple, de concurrencer sur le marché québécois. Il y a énormément de facteurs comme ceux-là qui doivent être harnachés pour éviter... Et je parlerais aussi de toute la structure des tarifs de transport ferroviaire. Je me rappelle que j'ai rencontré, il y a quelque temps, un président de compagnie de containers qui me disait ceci: Quand je prends un container à Halifax et que je l'envoie à Chicago, cela me coûte moins cher que de le prendre de Montréal à Chicago, à cause de la structure de subvention du gouvernement fédéral pour le transport ferroviaire.

M. Scowen: Les gens de l'Ouest indiquent que le tarif ferroviaire a favorisé l'Ouest.

M. Tremblay: Est-ce qu'on pourrait me laisser parler, je ne vous ai pas interrompu tout à l'heure.

M. Scowen: C'est une...

M. Tremblay: Je vous ai permis deux, trois questions, mais...

M. Scowen: Oui, je m'excuse.

M. Tremblay: Donc, je donne cela comme exemple. Il s'agit ici non pas de climat, à savoir si un ministre a dit qu'un gratte-ciel était francophone, ou anglophone, ou grec, n'importe quoi, mais ce sont...

M. Scowen: C'est le premier ministre qui le dit.

M. Tremblay: ... des facteurs structurels fondamentaux qui, lorsque vous ne les contrôlez pas — il y a certains facteurs qu'on ne peut pas toujours contrôler, les avantages comparatifs étant ce qu'ils sont — lorsqu'il y a des facteurs qui relèvent de la politique ou de l'institution, ces facteurs peuvent être changés par force humaine, par décision humaine, par décision gouvernementale. Un gouvernement qui abdique son droit de changer ce genre de conditions environnantes du développement économique se condamne, évidemment, à laisser le développement de son territoire être le résultat des décisions de compagnies étrangères ou de centres de décision provenant de l'extérieur.

Cela, je pense, est le drame du Québec. Il y a eu des exceptions dans notre histoire. Je remonte, par exemple, au premier ministre Gouin dont on voit la photo ici, en 1905. Ce que le premier ministre Gouin a fait, et c'est ce qui en fait un grand Québécois, je pense, pour qui on doit avoir une certaine admiration — c'est un premier ministre libéral, remarquez bien — c'est qu'il a posé des gestes qui ont fait qu'on a eu des papeteries au Québec.

Une voix: En 1907.

M. Tremblay: Dans mon livre, c'est 1905. Donc, en 1905, on a, par une loi du gouvernement du Québec, empêché que le bois du Québec sorte non transformé parce que de l'autre côté de la frontière, aux États-Unis et en Ontario, on transformait cela en papeterie. C'est la raison pour laquelle on a 56 usines de papier aujourd'hui, cela a commencé par cela. Cela a commencé par une décision d'un gouvernement. Sans cela, on serait encore des scieurs de bois en ce qui concerne cette industrie. Même si nos industries, les scieries, se portent bien présentement, je fais allusion à ce vieux cliché selon lequel les Québécois sont des scieurs de bois et des porteurs d'eau que ceci est vraiment une situation qui reflète la réalité des forces et qu'on doit s'en contenter.

Donc, c'est le début fondamental. Je suis certain que si on en parle ouvertement avec la population, on pourra comprendre quels sont les enjeux et quelles sont les solutions qui se rapprochent... Il ne s'agit pas de passer d'un extrême à l'autre. Je lisais récemment: Un des scénarios pessimistes, ce serait qu'on ferme toutes les frontières et qu'il n'y ait aucun commerce. C'est comme si Washington décidait demain de fermer les frontières entre le Canada et les États-Unis. Le Canada exporte 70% de ses produits vers les États-Unis et que les États-Unis n'exportent que 17% de leurs produits vers le Canada. C'est normal qu'un grand pays exporte une proportion plus faible de sa production vers l'extérieur qu'un petit pays; les petites économies sont par définition ouvertes, on sait cela. C'est pour cela qu'une économie comme la Suède avec sept millions d'habitants est une économie très ouverte, c'est par nécessité. Un petit pays, c'est un pays ouvert et le Québec est ouvert. Mais on peut raisonner par l'absurde et dire: Le Canada est indépendant et s'il ose vouloir contrôler son territoire judiri-quement et sa frontière, les États-Unis cesseront tout commerce avec le Canada. Il y aura tant de milliers d'emplois perdus aux États-Unis, tant de milliers au Canada, mais comme les États-Unis, c'est 17% de leur commerce, il y aura beaucoup moins d'emplois perdus, mais au Canada ce sera beaucoup plus d'emplois perdus. Ce genre de raisonnement, c'est un des arguments principaux qu'on utilise présentement pour faire peur au monde. Cela n'a aucun sens.

M. Raynauld: De faire peur au monde? M. Tremblay: Cela n'a aucun sens.

M. Raynauld: Cela dépend de ce que vous faites.

M. Tremblay: Jamais on a parlé de faire cela. Au contraire, le marché canadien en ce qui concerne l'économie du Québec est trop petit. On n'a jamais dit qu'il était trop grand. Il est trop petit. J'essaie de développer l'industrie pétrochimique. On veut établir à Montréal un centre pétrochimique et la seule façon de le faire, c'est avec le marché nord-américain. La seule façon d'avoir 600 000 tonnes de production de propylène, c'est de vendre jusqu'à Philadelphie. Impossible, d'autant plus que le gouvernement fédéral a investi à Sarnia des sommes énormes. De toute façon, on ne pourrait pas vendre là avec Canadian Development Corporation et... Donc, jamais le gouvernement du Québec... jamais la souveraineté-association ne signifie qu'on va fermer les frontières. Au contraire. Il faut avoir la possibilité de les ouvrir — comme le disait le député de Notre-Dame-de-Grâce — pour nous, notre marché, ce n'est pas Vancouver, à 3200 milles. Notre marché, c'est Boston qui est plus près de Montréal que Toronto...

M. Scowen: Une association avec les États-Unis?

M. Tremblay: Parlons-en des États-Unis. Dans le cas du GATT — si vous l'ignorez, je vais vous le mentionner — 90% des échanges commerciaux avec les États-Unis vont se faire en franchise. Donc, par définition, nous nous dirigeons de plus en plus vers des flux commerciaux qui seront davantage nord-sud et sud-nord qu'est-ouest et c'est...

M. Scowen: ... d'une association avec la Colombie-Britannique, si je comprends bien?

M. Tremblay: ... favorable au développement d'industries de transformation des matières premières du Québec parce qu'il est évident que, lorsqu'on transforme du minerai de fer ou de l'aluminium, il faut les transformer dans des usines de grande production. Il faut les transformer pour un grand marché. Le Canada, c'est un trop petit pays pour le Québec sur le plan économique. C'est un trop petit marché. C'est le seul marché parmi les pays industrialisés qui a moins de 100 millions d'habitants, et c'est la raison pour laquelle, l'an dernier, nous avons eu un déficit canadien de $12 milliards sur les produits finis.

Cela veut dire qu'on importait pour $12 milliards de plus qu'on exportait. C'est parce qu'on ne veut pas, nous, être cantonnés dans ce rôle de pourvoyeur de matières premières, qui fournit relativement peu d'emplois, que nous voulons reprendre en main nos leviers de développement économique, ici, au Québec, pour garder notre population future prospère. Quand on regarde les richesses du Québec, avec seulement 6 300 000 habitants, il faudrait être vraiment malhabile pour ne pas être capable de développer autant de richesses pour fournir du travail à tout le monde et avoir un minimum de vie élevé. Cela serait incroyable. Évidemment, si vous n'avez pas les instruments et que vous ne voulez pas les avoir...

Une voix: ... y va.

M. Tremblay: On y va, oui, mais...

Une voix: ...

M. Tremblay: Oui, cela s'en vient. M. Raynauld: ... à détruire tout cela.

M. Tremblay: À détruire. Quand vous regardez le revenu réel, le revenu personnel par habitant et qu'on rétrécit l'écart depuis deux ou trois ans, cela doit être encore la loi de l'inertie, je présume, aussi.

M. Raynauld: Pourquoi ne parlez-vous pas des transferts? C'est cela qui est responsable et vous passez votre temps à attaquer les transferts.

M. Tremblay: Les transferts, on en a parlé. Si vous voulez parlez des comptes économiques, on va en parler.

M. Raynauld: Vous passez votre temps à attaquer les transferts du fédéral et c'est pour cela que les écarts se rétrécissent.

M. Tremblay: Pas du tout! M. Raynauld: ...

M. Tremblay: Les impôts que nous envoyons à Ottawa nous reviennent diminués d'Ottawa.

M. Raynauld: Voyons donc!

M. Tremblay: C'est une des raisons pour lesquelles il y a une tendance déflationniste systématique à l'intérieur de l'économie du Québec. Le pouvoir d'achat ne revient pas à l'intérieur de l'économie. Comme on n'a pas de banque centrale, on n'a pas d'autres organismes, c'est la balance des paiements qui fait que la masse monétaire est réglementée à l'intérieur de l'économie du Québec. La raison pour laquelle il y a un taux de chômage systématiquement plus élevé...

M. Scowen: Le Québec indépendant aura sa banque centrale propre?

M. Tremblay: Je demanderais, M. le Président, de pouvoir terminer mon intervention.

Le Président (M. Laplante): À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Tremblay: La raison pour laquelle le taux de chômage au Québec est historiquement — c'était sous l'Union Nationale, sous les libéraux de Lesage, sous les libéraux de Bourassa, sous l'Union Nationale de Johnson, évidemment sous...

Une voix: Sous le Parti québécois.

M. Tremblay: ... nos membres aussi. Et systématiquement toujours plus élevé qu'en Ontario et que la moyenne canadienne, c'est à cause de ces facteurs-là. Cessons donc de dire que c'est un facteur nouveau que le taux de chômage soit élevé. Évidemment, il y a une interprétation — on peut la discuter — qui fait que c'est la structure politique canadienne, avec la structure des institutions économiques, qui fait que c'est cela. Je parle toujours d'une sorte d'entonnoir ou de soucoupe qui existe au Canada. Vous partez d'un taux de chômage de 18% à Terre-Neuve, vous aboutissez en Colombie-Britannique à 10%, 9 1/2%. La Colombie-Britannique, c'est un "pays" très riche. C'est riche la Colombie-Britannique. C'est près du marché de la côte ouest américaine: forêts, mines, etc. Mais c'est en Ontario, dans le creux, où le taux de chômage est plus bas.

Il n'y a pas une goutte de pétrole à Sarnia, en Ontario, il y a la plus grosse entreprise pétrochimique au Canada, parce que le gouvernement canadien a décidé que ce sera là. Il n'y a pas de minerai de fer dans le sud de l'Ontario, mais les plus grosses aciéries sont dans le sud de l'Ontario parce qu'on a fait en sorte que ce soit là. Le pacte de l'automobile, lorsqu'on l'a signé... Je parlais récemment au sous-ministre des Finances de l'époque, M. Reisman, et il disait: Jamais cela ne nous a traversé l'esprit d'essayer de voir à ce qu'il y ait une répartition régionale des investissements dans l'industrie de l'automobile; pour nous jamais. C'était le sous-ministre des Finances en titre en 1965, lorsqu'on l'a signé. On aboutit donc à une sorte de soucoupe et d'entonnoir. Tout ce qui est bon tombe dans le creux. C'est pour cela que le taux de chômage en Ontario est toujours plus bas qu'ailleurs. Il n'est pas systématiquement...

M. Scowen: C'est en Saskatchewan qu'il est le plus bas; l'Ontario vient en deuxième.

M. Tremblay: En Saskatchewan, c'est une situation particulière; c'est une économie agricole. Les économies agricoles, c'est évident qu'il y a moins de...

M. Scowen: Et l'Alberta?

M. Tremblay: Dans le cas de l'Alberta, ce sont des matières premières.

M. Scowen: Ce n'est pas tout à fait comme cela.

M. Tremblay: Prenez le taux de chômage, vous allez voir. Cela n'est pas d'une année; refaites le même calcul d'une année à l'autre et vous allez voir que c'est toujours une soucoupe et cela tombe toujours au milieu, une sorte d'entonnoir. Cela aide à faire comprendre. Évidemment, on peut faire des gestes et dire que cela n'a pas de sens, mais il n'y a rien qui dit en théorie économique...

M. Raynauld: Si vous forcez un peu l'entonnoir vous allez en recevoir.

M. Tremblay: II n'y a rien qui dit en théorie économique qu'une région ait systématiquement un taux de chômage plus élevé à moins qu'on nous dise: La mobilité des travailleurs est très

basse. Dans ce cas-là, on croirait que les Maritimes ont un taux de mobilité de la main-d'oeuvre très bas. Ce n'est sûrement pas pour des raisons linguistiques, etc. C'est comme en Gaspésie. Il y a autant de Gaspésiens à Montréal. Il y a autant de gens des Maritimes en Ontario qu'il y en a dans les Maritimes. Donc, la mobilité de la main-d'oeuvre ne résout pas du tout ce problème structurel. Au contraire. La plupart des études démontrent que cela tend à l'empirer, l'exode, étant donné qu'on sort les forces vives d'une région, qu'on sort du pouvoir d'achat, qu'au contraire, une économie qui s'en va dans ce sens s'en va vers un cercle vicieux, vers la pauvreté et la "désindustrialisa-tion." Si on veut éviter cela au Québec, il faut éviter de faire des raisonnements superficiels, de passer le blâme sur un nouveau gouvernement et d'essayer de s'en faire un bouc émissaire pour tous les maux de la terre.

Politique d'achat

Maintenant, j'en reviens rapidement à quelques commentaires qui ont été soulevés par le député de Huntingdon en ce qui concerne la politique d'achat et l'identification des produits. Je lui soulignerais que nous avons publié un petit livre qui s'appelle "Mille façons d'acheter québécois". Évidemment, au niveau des consommateurs en général, il est plus difficile de fournir suffisamment d'informations pour que cette information modifie substantiellement les achats. Notre effort, c'est au niveau des manufacturiers et des acheteurs institutionnels. Par exemple, pour les grands magasins, les grandes chaînes, il y a à peu près une quinzaine de personnes au Québec qui décident ce qui va dans la chaîne de magasins. Ce sont ces quinze personnes qu'il faut vraiment toucher et c'est pour cette raison qu'on a publié il y a quelques semaines la deuxième édition du Répertoire des produits québécois. Cela va directement dans leurs mains.

Pour tous les acheteurs dans les hôpitaux, dans les écoles; pour tous les architectes, les ingénieurs, c'est une information de base absolument essentielle. On fait des expo-profits aussi, où on regroupe les grands acheteurs institutionnels et on fait venir des producteurs des PME, pour essayer de voir si les produits dont ces acheteurs ont besoin peuvent être fournis par une entreprise qui peut-être ne produit pas assez de ces produits ou peut-être selon un mode ou une qualité qui n'est pas à point, mais pour permettre aux producteurs de s'adapter à la demande. C'est l'effort que nous faisons présentement. Nous avons essayé de faire ce que souhaiterait le député de Huntingdon, c'est-à-dire d'avoir une identification des produits québécois, mais, pour la raison que je vous ai donnée tout à l'heure... C'est que l'économie du Québec est très ouverte. On exporte, vers l'Ouest canadien, vers les États-Unis maintenant, des meubles ou des bottes ou n'importe quoi.

Évidemment, si vous indiquez "Fait au Québec", on ne sait jamais quand le produit va être vendu à l'extérieur ou au Québec, de sorte que, comme moyen de motiver le consommateur québécois, c'est un moyen qui n'est pas efficace.

Le Président (M. Laplante): M. le ministre, je vais vous arrêter là. Vous pourrez continuer à la prochaine séance. Les travaux sont ajournés sine die; nous attendrons l'ordre de la Chambre, cet après-midi.

Fin de la séance à 12 h 30

Reprise de la séance à 15 h 52

Le Président (M. Laplante): À l'ordre, s'il vous plaît! Reprise des travaux. La commission permanente de l'industrie et du commerce est réunie pour continuer l'étude du budget 1979/80.

Sont membres de cette commission: M. Dubois (Huntingdon), M. Gosselin (Sherbrooke), M. Grégoire (Frontenac), Mme Leblanc-Bantey (Îles-de-la-Madeleine), M. Lefebvre (Viau), M. Ouellette (Beauce-Nord), M. Raynauld (Outremont), M. Scowen (Notre-Dame-de-Grâce), M. Shaw (Pointe-Claire), M. Tremblay (Gouin).

Les intervenants sont: M. Gagnon (Champlain), M. Godin (Mercier), M. Goulet (Bellechasse), M. Landry (Fabre), M. Marchand (Laurier), M. Michaud (Laprairie), M. Perron (Duplessis), M. Samson (Rouyn-Noranda), M. Saint-Germain (Jacques-Cartier).

Lorsque nous avons ajourné nos travaux, à midi, la parole était au ministre de l'Industrie et du Commerce. M. le ministre.

M. Tremblay: M. le Président, si j'ai souvenance, nous discutions des modalités d'application de la politique d'achat à la suite de questions soulevées par le député d'Huntingdon et je pense aussi, par la suite, soulevées par le député d'Outremont. Je mentionnais que l'identification des produits était une question complexe au niveau du manufacturier parce que le Québec exportait beaucoup à l'extérieur et au niveau des détaillants à cause des frais qu'une segmentation des espaces de magasins amènerait s'il y avait besoin d'identifier des produits en fonction de leur provenance. Notre approche est moins pointilleuse que cela.

Le but de la politique d'achat c'est finalement de sensibiliser les acheteurs à faire appel aux fabriquants du Québec lorsqu'ils ont besoin de produits et nos études démontrent qu'au niveau des grandes chaînes, par exemple, lorsque qu'il s'agit des chaînes qui ont des centres d'achats ici au Québec, elles achètent pour environ 10% de plus au Québec qu'une chaîne qui a son centre d'achats à l'extérieur du Québec. Donc, nous nous contentons, dans la politique d'achat de sensibiliser les acheteurs à cet avantage de faire appel à des fabriquants du Québec. Je pense que l'impact réel de la politique d'achat porte sur ces aspects.

On a tendance à amplifier l'aspect préférence dans les achats et dans les prix. Je dois dire tout d'abord que le maximum que le service des achats, ou que l'Hydro-Québec, ou qu'un organisme parapublic peut payer pour un produit à contenu à 100% québécois, c'est 10%; c'est le maximum. Cela peut être beaucoup plus bas parce que les taux de contenus québécois sont plus bas. Au niveau des services des achats, les compilations qui ne sont pas hermétiques montrent que le coût de la préférence ne dépasse pas un demi pour cent du prix.

Ce qui compte, c'est la sensibilisation des acheteurs aux fournisseurs québécois et parfois c'était simplement par inertie — pour employer un terme qu'on a utilisé ce matin — ce qui faisait que certains bureaux d'ingénieurs, certains architectes ou certaines personnes établissent la normalisation des produits à acheter, c'était parfois par inertie qu'on faisait appel à un catalogue qui était imprimé à l'extérieur du Québec et on commandait tel produit, telle fenêtre qui était dans tel catalogue alors qu'on pouvait avoir de petits producteurs de fenêtres au Québec qui n'avaient pas de catalogue épais en couleurs, bien établi.

La conclusion des fonctionnaires qui travaillent dans l'application de la politique d'achat, c'est que ce fut là le résultat. Comme on le mentionnait tout à l'heure, est-ce qu'il ne faudrait pas avoir des chiffres bien précis pour montrer l'impact quantifié de la politique d'achat? Il est évident qu'au niveau des réseaux, par exemple, des écoles, des hôpitaux, même des municipalités qui sont absolument libres de l'appliquer sur une base volontaire, cette politique d'achat, puisque ce sont des organismes autonomes, il est difficile d'avoir des données bien précises.

Même si nous en avions, on peut se demander si ce serait souhaitable que nous pavoisions ce genre de résultats. Je pense au "Buy America Act", par exemple, aux États-Unis, qui oblige les organismes qui sont subventionnés par le gouvernement américain à acheter des produits américains même s'ils coûtent jusqu'à 50% — pas 10% — de plus qu'un produit importé. Jamais je n'ai vu de chiffres, évidemment, parce que ceci amènerait peut-être des représaiIles de part et d'autre. C'est la même chose pour certaines provinces qui appliquent des politiques d'achat; elles ne pavoisent pas les résultats à cause, justement, de cela.

On reviendra peut-être plus tard quand on discutera de l'élément politique d'achat, je pense qu'il y a un endroit dans le budget et j'aimerais que les fonctionnaires répondent à vos questions; je n'ai pas du tout d'objection à ce qu'ils répondent à toutes les questions. À mon niveau, c'est là que se trouve la position que j'aimerais vous communiquer.

M. le Président, je regarde dans mes notes concernant les sujets soulevés par le député de Huntingdon. Plusieurs touchaient les politiques du ministère de l'Agriculture et je suis assez dépourvu pour soulever cette question. Par contre, il y a une question qui a été soulevée par le député de

Huntingdon concernant l'augmentation des nouveaux emplois au Québec en 1978 et il se demandait si c'étaient surtout des emplois publics ou des emplois privés. Les renseignements que j'ai, c'est que, évidemment, il s'agit surtout d'emplois qui se sont accrus dans le secteur privé de l'économie. Évidemment, les chiffres que j'ai avec moi sont pour les quatre premiers mois de l'année 1979, je vais les donner sous toutes réserves, mais cela donne une indication.

Selon la classification des activités économiques, au cours des quatre premiers mois de 1979 par rapport à la même période de 1978, la construction a perdu 17 000 emplois. Les finances, l'assurance et l'immeuble, 11 000, l'administration publique, 3000, ainsi que l'agriculture, 3000. Par contre, les services commerciaux, les services personnels, les services communautaires, comptent 8000 emplois de plus; les transports, les communications et autres services publics, 26 000; la pêche, les forêts et les mines, 2000 et, enfin, le commerce, 23 000 et la fabrication, 33 000. Je pense que le point saillant pour l'année 1978, comme pour les autres premiers mois de 1979, c'est que le secteur de la fabrication au Québec est en pleine relance.

Mais dans la fabrication ce sont surtout des secteurs privés. Cela n'inclut pas l'Hydro-Québec, par exemple, cela, c'est dans les services publics. Mais la fabrication, à cause de la baisse du dollar et à cause de toutes les mesures que nous avons mises sur pied, les secteurs nous qui fonctionnent à plein, etc., le secteur manufacturier présentement est en bonne forme. Les pâtes et papiers fonctionnent à 100%. Même pour SIDBEC on m'a dit hier qu'il fonctionnait à 100%; malheureusement cela ne l'a pas empêché de faire des pertes. Le secteur manufacturier est en train de prendre une relance et on le voit dans les chiffres d'emploi: 33 000 au cours des quatre premiers mois. Il y a sans doute quelque chose de fort. (16 heures)

Pour ce qui est du gouvernement, depuis deux ans il essaie de mettre la pédale douce dans l'expansion de la fonction publique et dans l'expansion des budgets. On critique le gouvernement d'être un peu sévère dans le domaine des services, les hôpitaux etc., on essaie donc de comprimer les coûts. Cela n'est pas d'où provient le plus grand nombre d'emplois. Dans le domaine des écoles, par exemple, avec le ralentissement de l'accroissement du nombre des étudiants, l'emploi dans ce secteur tend à plafonner, même à se réduire. Dans le domaine des hôpitaux c'est un peu la même chose. Il y a peut-être au niveau des investissements de l'Hydro-Québec et de la baie James où il y a une augmentation. Mais je dirais que, règle générale, c'est dans le domaine privé que se produisent les augmentations d'emploi.

En ce qui concerne le cidre et le vin, on me dit qu'on va chercher les données sur cela. Je n'ai ici que les données pour le vin. Il y a une augmentation de 90% pour les vins fabriqués au Québec, pour la période de septembre 1977 au 31 mars 1978, une augmentation en volume de 90,87% et en valeur de 92,5%.

M. Dubois: C'est un moment où les présentoirs se sont remplis.

M. Tremblay: Bien sûr. Vins embouteillés par la Société des Alcools et vendus dans les épiceries, de septembre 1977 au 31 mars 1978, ce fut en volume une augmentation de 72,6% et en valeur de 88,9%. C'est compte tenu de ce qui se vendait dans les magasins de la Société des alcools.

M. Raynauld: C'est une augmentation dans l'ensemble des vins fabriqués au Québec.

C'est cela. À partir de zéro on peut avoir des pourcentages très élevés, d'après moi.

M. Scowen: ...

M. Tremblay: Pour le cidre, il faut comptabiliser ce qui a été vendu à la Société des Alcools et dans les chaînes, Steinberg, Dominion ainsi que dans les épiceries. Ils ne l'ont pas, mais quand ils l'auront; je vous le communiquerai.

Dans le cas G.M. Beauharnois — je l'ai dit hier en conférence de presse, on me posait la même question — l'entreprise n'a pas pris de décision, à savoir si elle doit aller dans l'aluminium à l'échelle qu'elle avait prévue, compte tenu du fait qu'elle essaie d'aller vers les moteurs diesel. Par contre, à l'automne le gouvernement américain doit statuer à savoir si les normes de pollution sont rencontrées par les moteurs diesel. Sujette à ces décisions, la dimension de l'usine même est en cause, c'est $400 millions ou $600 millions. C'est un des gros facteurs qui retarde. En ce qui concerne le gouvernement du Québec, on a tout fait au niveau des subventions, des conditions de travail, des aspects linguistiques. Toutes les conditions ont été réglées avec la compagnie, il n'y a plus rien qui achoppe.

Donc, c'est simplement une question de décision du conseil d'administration, mais il est évident que le Québec est en ligne, d'autant plus que dans le domaine de l'aluminium, je pense que le Québec va devenir de plus en plus l'endroit qui pourra soutenir n'importe quelle concurrence pour les coûts de l'aluminium brut et de l'aluminium en fusion à cause des coûts d'électricité qui deviennent de moins en moins élevés par rapport aux États-Unis.

Donc, à ce niveau, il y a une collaboration de la compagnie Alcan et si on n'a pas de coup de Jarnac, genre grosse subvention pour aller dans le sud de l'Ontario, on peut espérer que cela pourra être un déblocage important. Tant qu'une décision ne sera pas prise, personne ne pourra forcer un conseil d'administration à prendre une décision si toutes les données techniques ne sont pas en sa disposition.

Je pense que cela touche à la plupart des sujets qu'avait soulevés le député de Huntingdon. Le député d'Outremont avait soulevé cette question de politique d'achat, je pense y avoir répondu. En ce qui concerne les promesses, on parle de promesses, surtout d'intentions de politique, évidemment, j'en ai énuméré une catégorie que nous avons réalisée en deux ans et demi. Il faut réaliser autre chose, aussi, à l'Assemblée nationale. J'ai la loi 7 concernant la SDI, j'airais aimé qu'elle soit terminée le 17 mai, mais il y avait une partie de hockey, semble-t-il, et tout le monde voulait aller voir la partie de hockey.

M. Scowen: Cela pouvait avoir lieu avant la partie de hockey.

M. Tremblay: Avec la conséquence qu'on a parlé de tout et de rien et que le loi n'est pas encore adoptée.

M. Scowen: Avant, vous avez refusé.

M. Tremblay: Que voulez-vous que j'y fasse?

On parle d'une société de réorganisation industrielle. Nous travaillons aussi sur ce projet. Dans le discours inaugural, si vous vous rappelez bien, on a dit que le gouvernement avait l'intention de mettre sur pied de nouveaux mécanismes pour canaliser des épargnes vers la création de capitaux de risque pour les entreprises; ceci entre dans l'optique de réorganisation du secteur industriel. Comme il s'agit d'un projet très important, ce projet suit les étapes nécessaires, mais on y a fait allusion dans le discours inaugural.

En ce qui concerne la Société commerciale d'exportation pour les PME, là aussi, je l'ai mentionné, une société de commerce, c'est cela, une société d'exportation. Évidemment, le rapport de CEFECQ fait allusion à une société de commerce interne; cela, c'est une autre question. C'était dans le discours inaugural, le premier ministre a dit: Un organisme exclusivement consacré à la promotion des exportations des PME.

L'Institut de commerce international, c'est une vieille idée de l'ancien gouvernement. Je ne me rappelle pas l'avoir promis moi-même, je sais que le sous-ministre Chouinard avait travaillé longtemps sur cela. Là, c'est une question de priorité. En ce qui me concerne, une société commerciale d'exportation des PME vient avant une société d'éducation au niveau de commerce international.

La loi 48, on y reviendra tout à l'heure, je pense qu'il doit y avoir des données plus précises dans le document que je vous ai remis et qui pourra faire l'objet... Je soulignerai ici, sur la loi 48, qu'on a ajouté dans cette loi certaines dispositions que le ministère du Revenu avait demandé de rajouter à l'effet que le ministère du Revenu ne débloque les fonds pour une entreprise que si l'entreprise a acquitté toutes ses dettes à l'endroit du ministère du Revenu. Je vous avoue que cette disposition qui m'apparaissait technique à l'époque me crée quelques problèmes en ce sens que les entreprises sont presque continuellement en dette face au ministère du Revenu, pour des taxes d'affaires, pour des taxes de vente, pour des redevances trimestrielles, etc.

Il y a un aspect de "red tape" qui me fatigue comme ministre de l'Industrie et du Commerce, à savoir si on devrait amender la loi pour que, dès que l'entreprise a son certificat du ministère de

l'Industrie et du Commerce, les fonds soient d'office déposés, que le ministère du Revenu soit d'accord ou pas, et sortis, débloqués pour investissements ou si une procédure interne au ministère du Revenu pourra solutionner le problème. Je ne sais pas encore. Il est évident que ce genre de "red tape" — je pense que c'est le député de Huntingdon qui parlait de cela, je n'aime pas plus le "red tape" que vous — je vous garantis qu'un des plaisirs d'être ministre c'est de couper du "red tape", mais c'est comme des pieuvres, cela pousse naturellement. Ce n'est pas commun à notre gouvernement, c'est commun à tous les gouvernements. Surtout quand on a deux paliers de gouvernements, avec un ministère de la petite entreprise à Ottawa, des BFD, des SDI, je comprends que les petites entreprises parfois ne savent plus de quel côté se tourner. C'est pour cela qu'au moins j'essaie de décentraliser en régions. Si les institutions sont plus près des entreprises qu'elles doivent servir, on présume qu'il y aura moins d'intermédiaires. On peut toujours nous remercier d'essayer de rapprocher le gouvernement des usagers et non pas l'inverse.

Les indicateurs choisis. J'ai indiqué tout à l'heure le revenu par habitant, etc., il est évident que dans tous les indicateurs, le Québec ne gagne pas, mais sur les indicateurs principaux comme le produit national brut, l'an passé, je crois que l'augmentation était de 3%, l'augmentation réelle du PNB.

M. Raynauld: Vous aviez annoncé 3,4% pour 1978. Est-ce que c'est encore cela?

M. Tremblay: 3,4%.

M. Raynauld: II a sûrement été révisé vers... M. Tremblay: Je m'excuse, c'est 3,4%. M. Raynauld: Cela n'a pas été révisé?

M. Tremblay: C'était un niveau semblable à celui de l'ensemble du Canada, si je me rappelle bien, et par rapport aux pays de l'OCDE, c'était fort respectable, dans une période où il y a des difficultés économiques un peu partout et où, il faut le dire, une des composantes de notre revenu national, l'augmentation de la main-d'oeuvre n'est pas très rapide au Québec par rapport au reste du Canada où l'augmentation de la main-d'oeuvre est plus rapide. Je terminerai simplement en revenant sur ce que disait le député de Notre-Dame-de-Grâce concernant le climat des affaires. Je suis bien prêt à admettre que le climat constitue un des facteurs, je ne suis pas prêt à admettre que quand cela va bien, cela dépend de la loi de l'inertie et quand cela va mal cela dépend du gouvernement, surtout un gouvernement provincial qui n'a aucune influence sur les taux d'intérêt, la politique monétaire, la politique commerciale et bien d'autres choses, mais il y a une chose qui m'a frappé, c'est lorsqu'on a parlé du climat économique et politique avec le monde des affaires. Le député de Notre-Dame-de-Grâce, ce matin, utilisait des termes assez frappants. Il a parlé de folie pour dire que cela s'était amélioré. Je présume que M. Ghislain Dufour va être très heureux de se faire traiter de fou par le député de Notre-Dame-de-Grâce, parce que c'était justement dans la Presse du 16 janvier 1979, où M. Ghislain Dufour disait, après avoir fait une enquête auprès de 108 de ses membres: Le climat économique, social et politique s'est nettement amélioré dans la province de Québec.

M. Scowen: ... mauvais.

M. Tremblay: Le meilleur climat pour le patronat. Donc, si on regarde les chiffres — d'ailleurs, c'est mon collègue, le ministre du Travail qui les a bien soulignés — si on regarde les heures perdues pour raison de grève et de lock-out au Québec, vous vous rappelez il y a quelques années, en 1974/75, on avait l'impression qu'on était sur le bord d'une sorte de révolution au Québec, les lois n'étaient pas respectées, la Chambre de commerce faisait de grandes déclarations indiquant que si on ne revenait pas à ce genre de respect de la loi et de l'ordre, on s'en allait vers une désintégration économique et sociale.

Il y avait des grèves continuellement. Or, on se rend compte qu'il y a une chute dramatique dans les grèves au Québec. En 1976, c'étaient 6 459 260 heures perdues en grève et en 1978 c'était tombé à 1 785 730 heures, donc un rapport de pratiquement 1 à 4. Au Canada, par contre, il n'y a pas eu cette même chute. C'était élevé aussi en 1976 à cause des hauts taux du Québec, c'étaient 11 603 500 heures pour les grèves mais, en 1978 ce sont encore 7 392 820 heures perdues, alors que le Québec avait chuté beaucoup. Donc, la chute dans les heures perdues en grève au Canada dans son ensemble est pratiquement du à la chute qu'on a observée au Québec; une chute d'environ 4 millions d'heures et au Québec c'est à peu près cela.

Il faudrait faire une correction, ici on dit que ce sont les jours-homme perdus. Je ne veux pas élaborer trop longtemps sur cela, mais les journées perdues pour les grèves sont quand même une indication du climat social.

On en conviendra, à moins qu'on nous dise que le secteur de la fabrication est en pleine dégringolade. Mais là on pourrait dire que c'est la pression économique, l'augmentation du chômage qui fait que cela tombe. Mais on vient de voir que, dans le secteur de la fabrication, il y a eu 33 000 nouveaux emplois dans les quatre premiers mois de l'année; c'est en pleine relance. Dans le domaine des pâtes et papiers c'est à 100%; pour l'acier cela fonctionne à 100%; pour les meubles, pour le textile et les vêtements cela fonctionne à plein. Il y a moins de grèves. On peut toujours dire que cela dépend de la loi de l'inertie, tout cela.

Je pense que la concertation que le gouvernement a mise sur pied... On a tenu neuf minisommets. Évidemment, cela ne solutionne pas tous les problèmes le fait de mettre les chefs syndicaux et les chefs d'entreprise autour de la

même table avec le gouvernement. Mais cela les amène à se parler. Je pense qu'à Montebello, dans le cadre du sommet général — le député de Notre-Dame-de-Grâce et le député d'Outremont pourront en convenir — il y a eu des suggestions importantes. Je me rappelle avoir suggéré, pour une politique de main-d'oeuvre, que les parties se concertent avant de venir voir le gouvernement, qu'ils agissent un peu en adultes. C'était nouveau dans le climat du Québec, cette responsabilité, cette maturité dans les relations industrielles. Comme l'a dit le ministre du Travail, c'est évident qu'on a un Code du travail qui a besoin d'être arrondi dans les coins, il y a toutes sortes d'améliorations à venir, mais en ce qui concerne le climat, à moins d'être vraiment figé dans une vue très étroite des choses, une sorte d'interprétation dans un corridor idéologique très précis, il faut se rendre compte qu'au Québec, depuis quelques années — — c'est vrai qu'on partait de loin — il y a eu une amélioration dans la responsabilité des patrons et des syndicats. Cela n'est pas le paradis, mais on voit par les résultats en termes de journées perdues dans les grèves qu'il y a une amélioration.

M. Scowen: Quand vous parlez des jours perdus, je pense qu'il faut tenir compte qu'on était dans des conditions de lutte contre l'inflation. On a vu partout, au Canada et ici au Québec, une baisse dans les heures perdues en grève, qui correspondait avec votre élection, en grande partie due au fait que c'était, à toutes fins utiles, inutile de faire la grève pour les salaires. C'est quelque chose qu'on constatait dans tout le Canada.

M. Tremblay: Mais si cela était vrai, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce, on observerait la même chute dans les journées perdues pour les grèves, à la fois au Canada et au Québec. Je ne vois pas pourquoi la lutte anti-inflation aurait eu un impact uniquement concentré au Québec.

M. Scowen: Je voudrais que vous déposiez vos chiffres, parce que pour moi les chiffres ont baissé au Canada pour les deux années. (16 h 15)

M. Raynauld: Cela va jusqu'à quel mois?

M. Tremblay: On a les originaux, on va déposer les originaux.

M. Raynauld: Cela va jusqu'à quel mois? J'ai manqué cela tout à l'heure.

M. Tremblay: Toutes les années, c'est annuel.

M. Raynauld: C'était 1978, vous êtes arrêté à 1978?

M. Tremblay: 1978, oui.

M. Raynauld: Ah bon! Prenez donc les quatre premiers mois de 1979, la situation se détériore beaucoup, le pourcentage des jours-homme. En 1978, c'est exact, 24%, je l'ai ici; 24% des jours-homme perdus au Canada.

M. Marchand: Si le député d'Outremont me le permet, je voudrais que le ministre me renseigne davantage dans le domaine des heures-homme perdues en 1975/76 comparativement aux années subséquentes. Le ministre sait très bien qu'en 1974/75 il y a eu les fameuses grèves de la fonction publique, les grèves dans les hôpitaux, les grèves scolaires. Nous sommes actuellement en train d'avoir des conventions collectives avec la fonction publique et nous ne sommes pas certains de ce qui va arriver. Je ne souhaite pas que cela aille mal, excepté que les heures d'homme ouvrables...

Une voix: ...

M. Marchand: Non, pas nécessairement. Si cela fait votre affaire, je ne pense pas que cela fasse la mienne. Je vous dis, M. le ministre, que si vous enleviez ces heures et que vous calculiez les baisses d'aujourd'hui, vous n'arriveriez peut-être pas à de tels chiffres. Maintenant, vous savez que le chômage a énormément augmenté depuis ces années et, naturellement, quand il y a plus de chômeurs, il y a moins d'hommes en grève. Il y a tout ce calcul qu'il faut faire. Si on veut faire de la politique sur les heures ouvrables et sur les grèves on peut en faire, mais je pense que les chiffres qui sont là sont peut-être des chiffres véridiques. Je veux dire qu'il faut les analyser tels qu'ils sont.

M. Tremblay: Je conviens, M. le Président, qu'il y a différentes circonstances qui entourent un phénomène aussi global que celui-là. Il en demeure quand même que c'est un fait et qu'il s'agit de se croiser les doigts et d'espérer que la tendance continue. Évidemment, cela peut s'améliorer, comme vous dites, il y a eu des grèves assez rudes, il y a même eu des chefs syndicaux qui ont été mis en prison, etc. On peut retourner à un niveau semblable, mais je pense que ce serait malheureux pour la cohésion qu'on doit avoir dans une économie en période difficile où toutes les économies rencontrent une sorte d'agression en ce qui concerne les prix de l'énergie, quand vous avez les pays de l'OPEP qui augmentent les prix à volonté, pratiquement, à cause du fait que les sources alternatives coûtent tellement cher et que ceci frappe de plein front le secteur industriel, il y a une concurrence très forte entre les économies industrialisées. Les économies qui ont une cohésion interne ont plus de chances de passer à travers la crise que celles où on se bat sur le pont du bateau. C'est cette maturité que nous voulons, comme gouvernement, instaurer au Québec, au lieu d'avoir une approche purement conflictuelle où on se divise le gâteau, au plus fort la poche; nous voulons amener les entreprises, les entrepreneurs et les travailleurs, par le truchement de leur association, de leur syndicat, à se pencher sur les problèmes de fond, sur les investissements d'une entreprise. Je veux le faire dans le cas de

SIDBEC, par exemple, trois grèves et un lock-out dans le cas de SIDBEC en dix ans. À chaque fois qu'il y a une négociation, on débraye toujours. Comment voulez-vous qu'une entreprise maintienne des clients sûrs lorsque vous avez une source d'approvisionnement qui est toujours aussi instable?

M. Raynauld: C'est une société d'État, en passant.

M. Tremblay: C'est aussi le problème des grèves à l'Alcan, on a eu cela en d'autres endroits.

M. Raynauld: II y en a moins.

M. Tremblay: II faut dire qu'au niveau patronal, il faut faire attention, il ne faut pas trop mettre cela sur le dos... Je ne porte pas de blâme. Parfois, il y a une tendance, au niveau patronal, où nous sommes dans la cabine de pilotage et où les travailleurs sont du menu fretin, ils liront les annonces dans les journaux. Il y a d'autres pays comme en Allemagne, on a des équipes qui négocient, qui regardent les problèmes, qui trouvent des solutions, etc. Il est évident que plus on a de participation, plus on fait confiance aux gens, plus on a de réciproque en ce qui concerne la responsabilité. Je pense que cela va dans les deux directions.

C'est pour cela que dans les mini-sommets, le gouvernement a toujours tenté de laisser les syndicats et les entreprises essayer de dégager des consensus. Ce n'est pas facile, mais à Montebello, on a vu que cela se dégageait. Même le président de la centrale FTQ a dit: Lancer une entreprise, aujourd'hui, ce n'est pas facile. Tout de suite, quand un chef d'une centrale syndicale dit cela, il est un peu près de la réalité.

Par contre aussi, les associations patronales se sont dit: Des choses comme le pacte de l'automobile, est-ce qu'on va tolérer cela indéfiniment? Tout s'en va en Ontario, est-ce qu'on ne devrait pas prendre position nous aussi pour essayer d'avoir des retombées de transformation? On s'est tous réunis et on a envoyé une lettre, il y a quelques jours, à M. Trudeau. Malheureusement, on s'est trompé d'adresse, on va la réécrire à M. Clark pour dire qu'il faut... Tout le monde, les chefs syndicaux, les présidents de chambre de commerce etc., et on déposera cela à l'Assemblée nationale, d'ici quelques jours. C'est un début.

On ne peut sûrement pas reprocher au gouvernement de faire cela. On ne peut pas dire qu'il a résolu tous les problèmes. On part avec une mentalité qui était vieille et qui, à mon avis, est dépassée par les événements économiques que nous vivons présentement.

Nous allons revenir au cours de l'étude de chacun des onglets et de chacun des programmes du ministère sur chacun des points qui ont été soulevés ce matin et j'aimerais proposer l'adoption du programme numéro 1 du budget du ministère de l'Industrie et du Commerce.

Le Président (M. Laplante): M. le député de Champlain.

M. Gagnon: Merci, M. le Président. Vu que le ministre a répondu d'avance à la question que je voulais soulever, je ne voulais qu'amener le point que, lorsqu'on parle d'amélioration de climat social, ce n'est pas le temps de dire: II faudrait éliminer du décor tant de jours perdus par les grèves dans le secteur public ou parapublic. Cela fait partie du climat social. Lorsqu'on voit une diminution du nombre de jours perdus pour les grèves, soit passer de 4 à 1 ou de 5 à 1, c'est ce qu'est le climat social. Je voulais demander au ministre — il y a probablement répondu — si le rapport entre les sommets, les mini-sommets économiques et l'amélioration de ce climat social, cela peut, pour le ministère de l'Industrie et du Commerce, permette de faire un certain sondage et l'attribuer en bonne partie disons ou au fait qu'on a commencé à se parler entre syndicats, patronat et le gouvernement, si vous voulez, si c'est dû en bonne partie à ces sommets?

M. Tremblay: II est difficile d'identifier la contribution d'une des causes parmi d'autres causes, comme le disait le député de Laurier, à l'amélioration d'une situation. Mais je ferais une comparaison entre les sommets que le gouvernement du Québec a tenus et ceux que le Conseil économique du Canada, par exemple, a essayé de tenir. J'avais même participé avec le député d'Outremont à un sommet, au mois de décembre 1974 si je me rappelle bien.

Les neuf sommets sectoriels, par exemple, celui sur le textile, chaussures, vêtements, celui qu'on a tenu dans l'industrie des pêches, sont des sommets qui ont débouché sur du concret. En plus du concret, il y avait une sorte d'engagement moral des parties de contribuer à la solution plutôt qu'au problème. C'était déjà beaucoup, parce que souvent il y en a qui préfère contribuer aux problèmes plutôt qu'aux solutions. Je pense que cela se poursuit. Je regarde ces secteurs et ils ont l'air de bien aller.

Les deux grands sommets. Celui de La Malbaie, évidemment, c'était la première brisure de glace. La préparation ou la présentation de ce sommet étaient telles que c'étaient des monologues de chacun des agents. À Montebello, cela a été une atmosphère tout à fait différent à cause du nombre plus restreint des participants; la représentativité était plus grande. Leur autorité morale aussi était plus élevée et on a vu qu'ils pouvaient peut-être prendre plus de positions positives face aux problèmes qui étaient soulevés, soit les investissements, les relations de travail, etc., qu'au sommet de La Malbaie où là, on avait encore la tendance revendicatrice et accusatrice. C'était M. Steinberg qui était un capitaliste mauvais, c'était le chef syndical qui voulait tuer toutes les entreprises. On avait ce manichéisme primaire et infantile, mais c'était la brisure de glace. À Montebello, c'était l'ouverture, mais cela n'était pas

l'atmosphère qu'on a en Allemagne où les syndicats, le gouvernement et les entreprises se réunissent à huis clos pour prendre des engagements sociaux et économiques. Même ce qu'on a eu en Grande-Bretagne, je me rappelle quand le premier ministre Callaghan disait: Si on réussit à abaisser le taux d'inflation de tant et que les syndicats y contribuent, que les entreprises y contribuent, on va abaisser les impôts de tant. Ce genre de cohésion dans la lutte des problèmes économiques, tels l'inflation, le chômage, le sous-investissement, la basse productivité, on n'est pas encore rendu là. Mais je suis persuadé que tôt ou tard, il va falloir y arriver, parce que nos instruments normaux de contrôle de ces grands phénomènes conduisent à des situations socialement inacceptables.

On pourrait imposer les freins à la croissance financière et imposer une déflation et mettre tout le monde au pas en termes d'inflation, en termes d'augmentation salariale, en termes d'augmentation des prix, mais est-ce qu'on serait prêt à tolérer un taux de chômage qui irait en augmentant et que les jeunes surtout seraient les premiers à subir? Dans une conjoncture les taux de chômage sont suffisamment élevés. Donc, à mon avis, cela a été un début et je pense qu'au-delà des mesures concrètes et sectorielles que le gouvernement a prises, depuis deux ans et demi, c'est probablement l'innovation qui donnera les résultats les plus permanents dans l'approche des agents économiques, y compris le gouvernement, à la solution des problèmes économiques du Québec?

Le Président (M. Laplante): Le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Scowen: Je remercie le ministre de ces chiffres sur les jours-homme perdus. Je pense que vous verrez que traditionnellement en 1974/75 le Québec avait environ — j'ai calculé très vite — le tiers du total du Canada. En 1976, cela a monté à un peu plus que la moitié. En 1977, c'est descendu au Québec plus qu'ailleurs, mais en effet on est rendu finalement à notre tiers de nouveau et il reste à peu près le tiers en 1978. C'est clair que cela a baissé et j'ai l'impression que, tenant compte du fait que l'année 1976 était une année spéciale pour le Québec en ce qui concerne les grèves, la baisse a été à peu près la même partout. Pour moi, cela a été causé en grande majorité par Jean-Luc Pépin et ses commissaires.

Je voudrais poser une dernière question au ministre. C'est une question qui touche l'industrie de l'automobile et l'industrie aérospatiale. Le ministre a souvent soulevé la question. Il a même — s'il veut bien me permettre l'expression — charrié un peu à l'Assemblée nationale contre le fédéral en ce qui concerne la politique dans le domaine de l'industrie de l'automobile: C'est concentré en Ontario, Ford s'installe avec une nouvelle usine, ainsi de suite. C'est vrai nous n'avons que deux usines de voitures ici au Québec et une ne fonctionne pas pour le moment. Mais dans l'industrie aérospatiale j'ai l'impression que nous avons probablement 50%, peut-être un peu plus, du total du Canada, plus que l'Ontario. J'ai soulevé la question ce matin. Pour moi, s'il faut concentrer les industries, je préfère que l'automobile se concentre en Ontario et que nous retenions une forte présence ici, une domination si vous voulez, dans l'industrie aérospatiale qui a un avenir et une technologie certainement plus avancée. Je ne connais pas du tout les politiques du fédéral, mais s'il insiste pour maintenir un équilibre des forces dans tout le Canada, s'il nous donne le choix, je préfère, comme j'ai dit, l'aérospatial.

J'ai soulevé la question ce matin que nous étions en train de perdre, pour la première fois, qu'il y avait possibilité que nous perdions, qu'il y ait une première tentative de fuite d'une entreprise importante dans ce domaine. Comme vous le savez, pour mon péché, je suis devenu malheureusement expert dans ces questions de départ et je ne veux pas soulever le sujet d'une façon générale aujourd'hui, mais je pense réellement que cette première tentative de fuite de Pratt & Whitney, c'est quelque chose de très dangereux. Nous avons la base d'entretien d'Air Canada, nous avons Canadair, nous avons Rolls-Royce, nous avons toute une gamme de petits fournisseurs et moyens fournisseurs qui sont établis autour de Dorval et surtout à Montréal. C'est très important qu'on ne les perde pas.

Je veux suggérer, premièrement, que le ministre arrête d'insister d'une façon si forte pour le droit à notre pourcentage de production de voitures au Canada, parce que j'ai l'impression que si toutes les provinces commencent à réclamer une usine d'automobiles, nous n'aurons pas une industrie rentable. Deuxièmement, cela peut inciter les gens de l'Ontario à commencer à réclamer leur juste partie de l'aérospatial. Troisièmement, je veux demander au ministre, aujourd'hui ou au cours de l'étude des crédits, de nous dire ce qu'il entend faire, d'une façon personnelle et très directe avec les gens de Pratt & Whitney, leur parler, faire quelque chose pour que ces 500 ou 600 ingénieurs, chercheurs de la plus grande importance pour nous, ne commencent pas la fuite d'une industrie qui, pour moi, est primordiale. (16 h 30)

M. Tremblay: Évidemment, M. le Président, on pourrait peut-être attendre l'étude entreprise par la Direction générale de l'industrie pour répondre à ces questions; on pourra y revenir. En ce qui concerne l'automobile, évidemment, et l'aéronautique, ce sont deux domaines dont se préoccupe au plus haut point le ministère de l'Industrie et du Commerce. En ce qui concerne l'automobile, il y a peu de choses nouvelles à ajouter, si ce n'est qu'on fait une étude qui a été présidée par Fernand Martin du département de sciences économiques de l'Université de Montréal sur les retombées du pacte de l'automobile en ce qui concerne le Québec et l'impact sur les matières premières, les salaires, etc., et que nous allons rendre publique aussitôt que nous pourrons envoyer une première copie à M. Clark, dans quelques jours.

La concentration en Ontario, cela dépend de bien des facteurs, mais c'est quand même un fait que 97.5% des pièces sont fabriquées en Ontario et 90% de l'assemblage des voitures et des camions se fait en Ontario. Je vais vous donner un exemple dans le rapport Reisman qui est un très bon rapport. D'ailleurs, il a été très fortement attaqué par le milieu de l'Ontario, le rapport Reisman sur l'automobile, mais dans ce rapport, on proposait, par exemple, d'élargir le pacte de l'automobile pour couvrir les producteurs autres que nord-américains comme Fiat, Datsun, Toyota, et leur permettre de venir fabriquer des pièces d'automobiles au Canada en échange de quoi ils recevraient des entrées en franchise ou, du moins, diminuées au plan tarifaire pour leurs produits.

J'ai écrit moi-même au ministre Horner et au ministre Andras pour appuyer cette recommandation du rapport Reisman, que c'était excellent pour provoquer de nouveaux investissements dans le domaine industriel au Canada dans des secteurs de pointe, je pense à une entreprise française comme Peugeot qui, dans le domaine du plastique, des pièces en plastique, a déjà une avance technologique sur les nord-américains; il y a une possibilité d'association avec Chrysler, comme il y a eu une association entre Renault et American Motors. Cette recommandation a été mise sur les tablettes à Ottawa, à la suite de la demande de l'Association des fabricants de pièces d'automobiles en Ontario qui a dit: Donnez la même facilité et les mêmes concessions tarifaires aux fabricants ontariens, non pas s'ils viennent investir au Canada, mais s'ils viennent acheter des pièces des usines déjà existantes. Wo! Ce n'est pas du tout la même approche. Cela veut dire qu'il n'y aura pas de nouveaux investissements. Ce sera simplement une augmentation des activités des entreprises existantes. Or, elles sont toutes en Ontario.

On a dit: Cela n'a pas de bon sens, si vous faites cela, les 97.5% de concentration des pièces en Ontario, on ne pourra jamais disloquer cela et amener soit Peugeot, soit Chrysler au Québec, c'est toujours le même problème. On en a parlé aux ministres francophones du Québec qui étaient dans le cabinet fédéral, M. Lessard et M. Chrétien; on leur a dit: Essayez donc de faire quelque chose. Je ne sais pas si c'est M. Clark, maintenant, qui va devoir écouter le Québec.

M. Raynauld: C'est une recommandation du rapport Reisman.

M. Tremblay: Oui.

M. Raynauld: C'est aussi une recommandation.

M. Tremblay: Non, le rapport Reisman.

M. Raynauld: II y a une référence, il a même inventé un terme pour dire que c'étaient des gens qui seraient agents d'achat ou quelque chose du genre.

M. Tremblay: Importateurs désignés.

M. Raynauld: Importateurs désignés, et des importateurs désignés, c'était pour faire cela.

M. Tremblay: Non, c'est seulement la première interprétation que je viens de donner. Cela veut dire qu'ils sont désignés s'ils viennent investir et produire des pièces au Canada pour leur marché international. Supposons que Fiat vient faire une usine au Canada et au Québec pour faire des pièces de moteur; elle l'utilise dans ses usines en Amérique latine, en Italie, en échange de quoi elle pourra importer des voitures assemblées en Italie sans droits de douane au Canada et être admissible au pacte canado-américain de l'automobile aussi parce que c'était possible. Cela a commencé avec l'affaire de Volkswagen en Pennsylvanie. On leur a dit: Si vous voulez vendre des Volkswagen au Canada en franchise, vous allez venir fabriquer des pièces, parce que Volkswagen utilise beaucoup d'aluminium. On s'est dit: Avec Volkswagen, peut-être qu'on a une chance de les amener au Québec.

À Ottawa, les fabricants de pièces ontariens ont dit: Non, dites à Volkswagen que s'il achète des pièces de nos usines de l'Ontario, ils vont obtenir les mêmes concessions. C'est évident que Volkswagen n'a pas intérêt à venir établir une nouvelle usine qui coûterait peut-être $300 ou $400 millions, il préfère acheter des usines déjà existantes. C'est un point très important. Évidemment, on n'a pas lu cela dans les journaux du tout, mais c'est un des gros contentieux qui existent entre le MIC du Québec et le MIC fédéral.

Il faut absolument que le MIC fédéral résiste aux pressions de l'Association des fabricants de pièces de l'Ontario qui, elle, veut garder tout le gâteau. Il faut que les politiciens à Ottawa, il n'en reste pas beaucoup du Québec, mais parfois je préfère un bon politicien qui se tient debout que 75 qui dorment. Parfois j'avais l'impression que nos députés libéraux à Ottawa...

M. Raynauld: ... des conservateurs.

M. Tremblay:... sur le plan industriel, ne nous aidaient pas tellement. On va voir, on va juger par les résultats de toute façon. Je n'ai pas de préjugé dans un sens ou dans l'autre. Mais quand on regarde le MEER, dans le cas de la subvention de Ford, le MEER a donné en 1978 pour l'ensemble du Québec $40 millions de subventions à nos entreprises, selon la loi du MEER, $40 200 000 pour être précis.

En une seule "shot", comme on dit, il a donné une subvention de $40 millions à Ford. Dans un seul geste, dans une zone non désignée, il détruisait ce qu'il avait fait durant toute l'année, avec moult publicité dans les journaux. On voyait encore cela ce matin, je voyais cela dans une pleine page: Le MEER, $215 000 là, $216 000 là, $19 000. Où va-t-on avec cela? C'est le problème de l'industrie automobile, c'est un problème sérieux. Je pense qu'à Montebello tout le monde

était pas mal d'accord. Les membres de l'Opposition qui étaient là l'étaient sans doute. Maintenant, dans l'aéronautique...

M. Scowen: ...

M. Tremblay: Pardon?

M. Scowen: Nous n'étions pas à la table, nous n'étions pas tenus de parler.

M. Raynauld: On ne pouvait pas parler.

M. Tremblay: Non, mais il faut apprendre parfois que le silence est d'or.

L'aéronautique maintenant. Il est vrai que l'aéronautique est un des secteurs forts du Québec et c'est un secteur en pleine croissance. D'ici à quelques années, j'avais un document, je ne l'ai pas devant moi... c'est 2500... Je vais l'apporter une bonne journée pour le chef de l'Opposition.

M. Marchand: Vous en avez déjà eu des mauvaises.

M. Tremblay: Oh oui! Cela tourne, cela tourne. Non, cela n'a pas l'air...

M. Scowen: Très bien.

M. Tremblay: L'aéronautique, c'est une bonne industrie pour le Québec, on aura 2500 nouveaux emplois. C'est l'industrie de pointe. D'abord, l'Ontario en a déjà une bonne partie. Évidemment, il y a eu un accident historique qui a défavorisé l'Ontario. Le "Dash Seven", on pensait que cela allait être aussi favorable que le "Challenger" de Canadair. Le vent a tourné dans l'autre direction, ce qui fait que Canadair est en pleine croissance et que le "Dash Seven" ne se vend pas. Mais il y a une grande différence entre l'aéronautique et l'automobile.

L'aéronautique fait face à des marchés internationaux. L'automobile, c'est le marché du Québec. On consomme 27% à 28% de tout ce qui se vend d'automobiles et de pièces faites au Canada et on n'a pratiquement pas de production, pratiquement pas d'assemblage. Donc, dans l'aéronautique, il y a une grande composante internationale et on est concurrentiel. Évidemment, il y a un problème au niveau de la capacité de nos travailleurs spécialisés dans le domaine. Canadair a fait des annonces en Europe, en Grande-Bretagne pour aller en chercher. Remarquez bien que Ford aussi pour son usine en Ontario — on l'a souligné à l'Assemblée nationale — a fait la même chose. Quoique dans le domaine de l'automobile, les études qu'on a faites pour GM montrent qu'on a un réservoir de techniciens automobiles assez grand dans la région de Montréal. D'ailleurs, vendredi, on inaugure une usine d'autobus à Saint-Eustache qui a l'air de bien fonctionner pour le marché nord-américain.

Il y a le problème, dans l'aéronautique, d'avoir des ingénieurs spécialisés.

M. Scowen: Je comprends que M. Landry ne veut pas qu'on amène des ingénieurs de l'extérieur du pays pendant qu'il y a du chômage...

M. Tremblay: Non, non, vous pouvez déformer les paroles de n'importe qui, évidemment. Au contraire, on dit: Si la subvention de Ford visait à corriger le chômage dans la région de Windsor et qu'on se rend compte qu'il n'y a pas assez de travailleurs dans la région de Windsor, on sera obligé d'en chercher en Grande-Bretagne. Cela aurait été bien mieux d'essayer de favoriser cet investissement de Ford, d'autant plus que Ford n'a absolument rien au Québec, de l'amener au Québec. On avait déjà un réservoir de 8000 ou 9000 travailleurs spécialisés dans la région de Montréal qui étaient admissibles à des offres d'emplois dans l'industrie de l'automobile. C'est ce qu'on a dit. Il me semble que cette subvention est purement politique. La pression des ministres de l'Ontario voyant venir l'élection a été extraordinairement forte. J'ai rencontré personnellement le ministre Horner, je me rappelle, il m'a dit: Que feriez-vous à ma place?

M. Raynauld: Vous avez offert, ainsi que le gouvernement fédéral, les mêmes $40 millions pour permettre à Ford de venir au Québec qui a choisi d'aller en Ontario.

M. Tremblay: Non, il fallait...

M. Raynauld: C'est vrai ou cela n'est pas vrai?

M. Tremblay: Non, cela n'a pas été confirmé...

M. Raynauld: La combinaison des aides était disponible à la compagnie Ford en Ontario ou au Québec; c'étaient les mêmes montants.

M. Tremblay: Non, dans le cas de Ford, il aurait fallu que la loi du MEER...

Une voix: Est-ce vrai?

M. Raynauld: Ce sont mes informations.

M. Tremblay: ... s'applique automatiquement, puisque c'est la loi du Parlement fédéral.

M. Raynauld: Oui, oui.

M. Tremblay: Donc, il aurait fallu qu'il y ait quelque chose comme $45 millions qui soient admissibles à la subvention normale. Si on voulait donner des subventions discrétionnaires, on devait les offrir aux deux endroits. C'est le problème. On n'a pas voulu les donner pour le Québec.

M. Raynauld: Oui, mais si on offrait... M. Tremblay: C'est évident que si on... M. Raynauld: ... $40 millions...

M. Tremblay: ... prend une loi statutaire et qu'on donne une subvention de même valeur discrétionnaire, on annule la loi.

M. Raynauld: M. le Président, cela fait des mois que j'entends le ministre parler de cette histoire-là. Suivant mes informations, la fondation — je dis toujours la fondation, je ne sais pas pourquoi — la compagnie Ford pouvait recevoir $40 millions, qu'elle vienne au Québec ou qu'elle aille en Ontario. Je vous défie de me dire que ce n'est pas vrai. Dans la mesure où cela est vrai, que ce soit en vertu de la Loi du MEER ou que ce soit du MIC fédéral, à ce moment-là vous ne pouvez pas dire que c'est le gouvernement fédéral qui a fait cela. C'était disponible aux deux endroits...

M. Tremblay: Je vais vous contredire.

M. Raynauld:... et la compagnie Ford a choisi d'aller en Ontario. Est-ce que c'est exact ou si ce n'est pas exact?

M. Tremblay: Non, ce n'est pas exact. Je vais vous contredire. Le montant de $40 millions est un montant purement discrétionnaire qui a été négocié entre certains ministres du cabinet fédéral et des ministres du cabinet de l'Ontario une fin de semaine. Moi-même je l'ai appris par un appel téléphonique, je ne dirai pas de qui, un samedi à la maison, le montant était purement discrétionnaire. En ce qui concerne la Loi du MEER au Québec, c'est une loi, pour les investissements admissibles, c'est un maximum de 20%. On aboutit à un montant. Ce n'était pas $40 millions. C'était, je pense, moins que cela.

M. Raynauld: Vous ne me contredisez pas en disant cela.

M. Tremblay: Oui, je vous contredis, vous dites que les $40 millions étaient admissibles dans un endroit comme dans l'autre. Ce n'est pas vrai.

M. Raynauld: Ce n'est pas vrai?

M. Tremblay: Non, ce n'est pas vrai. Parce que dans un cas les $40 millions étaient un montant purement arbitraire et dans un autre cas il aurait fallu calculer la subvention selon la loi. Je ne sais pas. C'était peut-être...

M. Raynauld: Cela est tout à fait exact. Je sais que la question discrétionnaire vous préoccupe beaucoup. Ce que je vous dis c'est qu'il y avait $40 millions qui étaient disponibles également à la compagnie Ford si elle venait au Québec. Je vous demande si c'est vrai ou si c'est faux.

M. Tremblay: Sur les $40 millions c'est faux, parce qu'il faut avoir le montant pour calculer selon la loi. Évidemment, j'ai demandé que cette...

M. Scowen: Mais c'était combien, tout calculé?

M. Tremblay: ... subvention discrétionnaire s'applique aux deux provinces sans suspendre la loi du Parlement fédéral — évidemment, qu'elle s'ajoute à la subvention qui est prévue selon la loi, discrétion pour discrétion — et à cela on a dit: Non, on ne peut pas faire cela parce que... En égalisant les chances, comme évidemment Windsor est de l'autre côté de la rivière à Détroit et que déjà Ford était établie en Ontario, c'est évident qu'en égalisant les chances le Québec n'a rien à faire. C'est comme si on suspendait le ministère de l'Expansion économique régionale. Je pense que c'est la réalité.

M. Raynauld: Simplement pour le dossier, pour que ce soit bien clair, vous ne contredisez pas l'affirmation selon laquelle si la compagnie Ford était venue au Québec, elle aurait eu la même subvention ou à peu près la même subvention.

M. Tremblay: C'est très important. Ce n'est pas la même subvention. Cela aurait été une subvention dans le cadre de la loi régulière du ministère de l'Expansion économique régionale, et là...

M. Raynauld: Oui, mais je veux dire sur le plan du montant. Je parle du montant d'argent, à peu près du même ordre.

M. Tremblay: Cela aurait pu être comparable. Mais le point important c'est que cette subvention discrétionnaire a été taillée sur mesure pour que l'usine s'établisse à Windsor. Les $40 millions ont été négociés entre le gouvernement fédéral, les ministres de l'Ontario et le cabinet de l'Ontario pour l'avoir à Windsor. Ce sont les faits.

Puisqu'on est sur ce sujet-là, c'est un sujet très intéressant, ce qui a été le plus dommageable ce n'est pas tellement cela, la subvention Ford, parce que Ford ayant beaucoup d'usines dans le sud de l'Ontario avait une préférence à rester là, mais c'est au niveau de GM et des autres fabricants. Ils se sont dit: La loi canadienne du Parlement canadien pour la décentralisation d'industries, cela n'a pas l'air d'être vraiment ferme. Si on fait des pressions politiques, on va voir M. Davis, les ministres fédéraux dans le cabinet, on va s'organiser pour avoir une subvention quand même, même si la loi ne le prévoit pas.

D'ailleurs, je n'ai jamais compris où ils ont pris les $40 millions, parce qu'il n'y avait aucun programme dans les ministères fédéraux qui permettaient de verser les $40 millions, et aucune loi. J'aimerais le savoir. Je pose la question. D'où venaient ces $40 millions? Dans la petite caisse de quelqu'un? Je ne le sais pas, mais il n'y avait aucune loi qui permettait de verser... Cela a ouvert un contentieux avec le gouvernement américain parce qu'il y avait l'Ohio qui était en ligne. Évidemment, le gouvernement de l'Ohio a pris le téléphone, a téléphoné à M. Blumenthal aux États-Unis et il a dit: De l'autre côté, à Windsor, ils sont en train de nous jouer un petit... en train de nous passer un Québec, comme on dit. Parce que selon

les ententes du GATT et l'esprit des nouvelles négociations qui est encore dans le même sens, le gouvernement central peut verser, pour des fins de développement régional — comme en Europe aussi, on a un fonds de développement régional, une zone désignée — mais aller verser cela dans la zone la plus prospère de la région pour concurrencer l'autre zone de l'autre côté de la frontière, c'est défendu. Il peut même y avoir des tarifs temporaires de pénalités, si vous le faites. (16 h 45)

C'était la première réaction négative et c'est très sérieux pour le Québec, parce que cela a retardé certaines décisions. À Détroit, on s'est dit: Bien, maintenant ils vont se battre au-dessus de nos têtes. L'autre chose, c'est que GM, les gens de GM s'étaient toujours dit: Nous, on respecte la loi du pays, si on veut avoir une subvention, on va aller dans une zone désignée, ils ont fait tous leurs plans, tout cela. Là, à Détroit, ils se sont dit: Vous, au Canada, faites donc comme Ford, allez donc voir les politiciens, tordez donc quelques bras à Ottawa, parce qu'ils ont peur de ne pas se faire élire en Ontario, ils vont vous en donner des subventions. La loi du MEER, c'est pour la firme, c'est pour les discours, mais tordez donc quelques bras.

Il y a eu quelques faces longues, on s'est dit: C'est sérieux cette affaire de développement économique régional. Cela a eu un impact très négatif pour le Québec. Maintenant, quantifier cela, je ne le sais pas, mais c'est la pure vérité. Cela nous a été dit à plusieurs occasions.

Je reviens sur l'aéronautique, parce que c'était quand même un point important. Les usines d'aéronautique du Québec, comme je l'ai dit tout à l'heure, ce n'est pas la même chose que dans l'automobile, ce sont des marchés internationaux qui sont en pleine expansion présentement et qui, par conséquent, sont un point important, c'est pratiquement un des rares secteurs de pointe qu'on a au Québec. Il est évident qu'on a intérêt au Québec à maximiser ces secteurs de pointe. Je souhaiterais que dans les cégeps, par exemple, il y en a un à Chicoutimi, je pense, qui entraîne des gens pour le pilotage, et aussi pour les techniciens en aéronautique dans la région de Montréal, que nous encouragions nos jeunes à aller dans le secteur de l'aéronautique. Il y a un problème de recrutement présentement.

D'ailleurs, toutes les entreprises américaines dans le domaine de l'aéronautique fonctionnent à plein. Il y a Boeing qui a des contrats et qui ne sait pas quoi en faire. On a plusieurs petites entreprises, comme le soulignait justement le député de Notre-Dame-de-Grâce, qui sont des fournisseurs de grandes sociétés dans la région de Montréal.

La préoccupation que nous avons eue au ministère de l'Industrie et du Commerce, au cours de l'année qui vient de s'écouler, cela a été de placer le Québec dans une bonne position concernant le contrat de $2 300 000 000 que le gouvernement fédéral va devoir faire pour l'achat d'environ 150 avions de chasse. Nous avons rencontré chacune des cinq compagnies qui étaient en lice, maintenant il en reste deux. Il y a General Dynamics, une compagnie qu'on connaît bien et il y a MacDonald Douglas, le F-16...

M. Raynauld: ... très réceptif.

M. Tremblay: ... et le F18 A. Il est évident que selon un des contrats, une des compagnies sera retenue, compte tenu des affinités qu'elles ont avec certains — mais MacDonald Douglas est bien établie dans la région de Toronto, parce que vous vous rappelez cette grosse controverse dans les années 1968, 1969 pour l'achat du Caravelle contre DC9, le DC9 est allé à Toronto et MacDonald Douglas est bien implantée. D'ailleurs, les derniers tiraillements qu'on a eus dans le cabinet fédéral contre Air Canada, concernant le airbus ou le Boeing 767, c'était un peu semblable à cela, mais les journaux n'en ont pas tellement parlé. Tout de même, c'était cela, et le Québec était bien mieux placé avec le airbus évidemment.

Mais, comme disait Claude Morin, hier, il y a l'air d'avoir une constante au Canada, c'est qu'à chaque fois qu'il y a des grosses décisions comme cela, c'est toujours l'Ontario qui gagne. Il y a toujours une explication technique. Eastern Airlines aux États-Unis peut acheter 30 airbus, mais Air Canada acheter des airbus, il y a un caractère un peu francophone, en tout cas, on perd à chaque fois. On a perdu Caravelle, on a perdu l'airbus et je vous fais une prévision, mais il y a quelque chose qui me dit que dans le cas de MacDonald Douglas, ils vont trouver une question, même — qui est-ce qui est spécialiste ici dans les contrats des avions?

M. Raynauld: Faudrait faire du recrutement en Angleterre.

M. Tremblay: Le sous-ministre qui est en charge de ce dossier n'est pas ici. Mais on suit ce dossier. Moi-même, j'ai rencontré les groupes de chacune des compagnies qui suivent ces dossiers. Je me rappelle dans le cas du F14, qui était la compagnie où il y avait plusieurs retombées pour le Québec, on a mis le F14 de côté. On jugera l'an prochain, on verra où ont été ces $2 300 000 000. Mais, ce que je veux dire, c'est ceci: Que ce soit un gouvernement conservateur ou un gouvernement libéral à Ottawa, ce serait très important pour le Québec, qu'on ait une retombée au niveau de ces grands contrats. Vous vous rappelez, il y a quelque temps aussi, GM a eu un contrat de $180 millions pour des chars blindés, c'est allé dans le sud de l'Ontario, cela aussi. Il y a un contrat pour des camions militaires. On a travaillé très fort pour un des fabricants du Québec, un fabricant francophone entre autres, pour avoir ce contrat de camions militaires.

On n'en a pas tellement eu dans le passé, même si on remonte aux temps de C.D. Howe. Quand il était ministre de l'Industrie pendant la guerre, on a placé la plupart des usines lourdes en Ontario et nous, on avait les usines de munitions à Valcartier, sachant fort bien que le lendemain de

la guerre on n'avait pas besoin des fusées et des boulets de six pouces pour aller à la chasse aux canards. On a fermé les usines. On a transformé les autres, en Ontario, en usines de camions, etc. On a une pénurie de ce côté-là et cela se reflète dans les chiffres, sur les dépenses de contrats créateurs d'emplois du gouvernement fédéral. C'est un peu comme la poule et l'oeuf, évidemment. Si on ne passe pas de contrat, on n'a pas d'entreprises qui croissent et si on n'a pas les entreprises, on n'a pas les contrats. On peut toujours expliquer notre pauvreté de cette façon-là.

On devrait avoir, dans ce genre de gros contrats, une politique canadienne calquée sur le modèle du MEER, c'est-à-dire faire en sorte qu'il y ait une répartition régionale de certains de ces gros contrats et que cela n'aille pas toujours au même endroit. De toute façon, nous allons suivre très étroitement ces contrats. J'aimerais qu'au niveau des agents économiques, y compris même les membres de l'Opposition, on fasse certaines interventions parfois publiques pour dire que le Québec devrait peut-être avoir sa part.

Les gens des chambres de commerce maintenant, le Conseil du patronat, les représentants des syndicats à Montebello ont dit: C'est vrai, on regarde en Ontario, cela se bat entre les présidents de chambres de commerce, le maire, etc. Le maire de Windsor, c'était le principal propagandiste pour avoir l'investissement de Ford. Nous, à Montréal, on a commencé. M. Lamarre a commencé à s'occuper un peu de développement industriel. On commence à en parler. Ils m'ont même volé un sous-ministre. Mais c'est un peu en retard. Ce n'est pas seulement les Jeux olympiques qu'il faut avoir, c'est l'usine qu'il faut.

Comme je l'ai dit hier, dans le cas de SIDBEC, on a investi moins de $1 milliard, mais il y a 5300 emplois permanents. Au Stade olympique aujourd'hui, même si on y a mis $1 500 000 000, combien y a-t-il d'employés? Il y a quelques vendeurs de hot dogs et des joueurs américains. Cela détériore la balance des paiements! Ce n'est pas avec cela qu'on construit une économie riche.

M. Scowen: M. le Président, je sais qu'on ne peut pas obliger le ministre à répondre à nos questions, bien sûr...

M. Tremblay: Je peux répondre... n'importe quoi.

M. Scowen: J'ai posé des questions très précises. Nous sommes en train de perdre la première partie.

M. Tremblay: Cela ne sera peut-être pas dans le sens que vous souhaitez, mais je vais répondre.

M. Scowen: Si c'est une réponse, il ne comprend pas le sens de ma question. Mais je pense que je comprends très bien. Nous sommes en train de perdre la première partie de Pratt & Whitney. Je pense qu'il s'impose que quelqu'un de votre ministère s'occupe de cette question. D'après mes informations, la compagnie a accepté de remettre la décision jusqu'après les élections fédérales à la demande de Pierre De Bané, si je comprends bien, ou à la demande d'un ministre au moins. C'est imminent et ce sera la première perte d'une partie de notre industrie aérospatiale. Je vous remercie de votre tour d'horizon de l'industrie aérospatiale ainsi que l'énumération des grosses commandes qui peuvent venir. Tout ce que je veux vous dire, c'est que je pense qu'il s'impose que demain matin, vers 9 heures ou 9 h 30, quelqu'un appelle le président, M. Lowe, probablement, afin qu'on fasse quelque chose pour résoudre ce problème.

M. Tremblay: M. le Président, même si le député de Notre-Dame-de-Grâce m'a traité indirectement de paresseux ce matin, il se rend compte que je connais mes dossiers. En ce qui concerne M. Lowe, je mange souvent avec lui.

M. Scowen: Je ne comprends pas la question.

M. Tremblay: Vous dites: II y a une hypothèse qui est soulevée à savoir s'il va y avoir une certaine division de Pratt & Whitney qui peut s'établir dans le sud de l'Ontario, ils ont entre 5000 et 6000 employés présentement à Longueuil et cela fonctionne à plein là aussi. Ils ont le problème d'aller chercher des ingénieurs. Eux aussi vont en Grande-Bretagne. Ils ont essayé en France, ils ont fait de gros efforts en France. La même chose pour Canadair et l'autre aussi, Rolls-Royce. Donc, c'est une grosse compagnie très concentrée au Québec. Quand on voit le maquignonnage qui se fait au niveau des gros contrats comme celui de $2 300 000 000, peut-être qu'ils se sont dit: Ce serait peut-être bon d'avoir une petite usine en Ontario aussi, on pourrait avoir quelques ministres de l'Ontario qui travaillent pour nous.

Vous parlez en termes hypothétiques, vous dites qu'il peut y avoir une division qui s'ouvre en Ontario pour Pratt & Whitney. Il ne faut pas penser aussi que toute expansion d'une entreprise en aéronautique va toute se faire nécessairement au Québec. D'ailleurs, le gouvernement ne dicte pas aux entreprises tout ce qu'elles font. Tout ce que je dis, c'est que Pratt & Whitney est une compagnie en expansion, les moteurs qu'ils font, entre autres le moteur 100 qui est utilisé dans le F-16, et qu'ils vendent à Cessna.

J'ai assisté à la remise du 15 millième moteur à la compagnie Cessna, qui vient de Longueuil, le PT6, compagnie qui est bien implantée au Québec. Nous souhaitons qu'elle prenne encore une expansion plus grande.

Mais dire: On a entendu des rumeurs, peut-être qu'on va ouvrir une division en Ontario et on essaie de mettre cela sur le dos du gouvernement. On dit: Bien, ce doit être parce que le gouvernement est méchant. Il faut faire attention; chaque fois qu'il y a une décision administrative d'une compagnie qui ne va pas dans le sens du Québec, c'est toujours mauvais. On vit quand même dans l'esprit de la libre entreprise; il y a des diversifica-

tions d'investissements. Le marché a aussi ses droits, le marché politique a ses droits, je le reconnais. Quand je vois McDonnell Douglas se concentrer en Ontario, je me dis: Bien, c'est peut-être bon qu'on se rapproche aussi de certains concurrents.

Donc, il y a bien des facteurs qui entrent en ligne de compte et avant de pratiquement encourager ce genre d'hypothèse et de rumeur, comme si on souhaitait presque que cela se produise, essayons de dire avec nous qu'on doit encourager l'expansion de cette entreprise au Québec plutôt que de s'en servir comme bâton pour dompter le gouvernement et dire que le gouvernement est mauvais, etc.

Les relations de Pratt & Whitney avec mon ministère sont pratiquement quotidiennes. Moi-même, je rencontre souvent le président. Je ne fais pas une conférence de presse chaque fois, mais ce n'est pas vrai qu'il n'y a pas de bonnes relations entre le gouvernement et cette entreprise. Évidemment, c'est une entreprise à caractère anglophone, on sait tout cela, mais c'est le problème fondamental. Je ne peux pas soumissionner chaque jour.

Je proposais, M. le Président — et on va revenir sans doute sur certains points de façon plus précise à mesure qu'on va progresser parce que c'est quand même une brique à travers laquelle il faut passer... Le programme 1, élément 1, c'est un amas de programmes...

Le Président (M. Laplante): Un moment, s'il vous plaît, M. le ministre! Y a-t-il d'autres questions avant d'entreprendre les programmes?

M. Dubois: Je ferai une remarque, on pourrait dire que MacDonald-Douglas est bien boulonnée à Toronto.

Le Président (M. Laplante): Ah oui! Pas d'autres questions? Êtes-vous prêts à aborder les programmes? Je peux appeler le programme 1 ?

Gestion interne et soutien

M. Tremblay: Le programme 1, M. le Président, élément 1 ; cet élément de programme, Direction et soutien administratif du ministère, comprend le cabinet du ministre, le bureau des sous-ministres, le secrétariat de la commission permanente et interministérielle des achats et la direction de l'analyse et de l'évaluation des projets d'investissements étrangers chargée aussi de l'administration de la loi sur les stimulants fiscaux et, depuis le 15 mars 1979, de l'administration de la loi des SODEQ.

Les crédits demandés par cet élément de programme sont de l'ordre de $2 248 500 et l'augmentation qu'on y relève par rapport à l'an dernier, soit $309 800, est principalement due à la majoration du poste budgétaire traitements et salaires, tenant compte de la provision pour couvrir le manque à pourvoir de l'enveloppe des traitements de 1978/79 et les révisions de traite- ments et conventions collectives de travail de 1979/80. Pour le bénéfice des membres de la commission, les documents suivants ont été incorporés au cahier des crédits que le ministère a mis à leur disposition, à savoir, pour le secrétariat de la commission permanente et interministérielle des achats et la direction de l'analyse et de l'évaluation des projets d'investissements étrangers, un résumé des activités de l'an dernier et des priorités de ces unités administratives pour l'exercice 1979/80.

En ce qui a trait aux sociétés d'État rattachées au ministre, nous fournissons les renseignements sur la composition des membres du conseil d'administration des sociétés, à savoir: la Société des alcools, SIDBEC, la Société générale de financement, la Société de développement industriel, la Société du parc industriel du centre du Québec, la Société Inter-Port, le Centre de recherche industrielle du Québec, la Société du parc industriel et commercial de Mirabel. Avec tout cela rattaché à moi, M. le Président, comment pourrais-je être paresseux?

Le Président (M. Laplante): D'autres remarques sur votre programme? M. le député de Notre-Dame-de-Grâce. Avez-vous une remarque sur le programme 1?

M. Scowen: Oui, le cabinet du ministre. J'ai eu le plaisir de faire partie de ce cabinet il y a trois ans.

M. Tremblay: Cela s'est beaucoup amélioré depuis.

M. Raynauld: II a surtout beaucoup augmenté.

M. Scowen: En ce qui concerne le nombre de personnes, est-il plus grand depuis ce temps?

M. Tremblay: À votre place, nous avons un sous-ministre responsable des sociétés d'État parce que nous voulions dépolitiser les relations entre le ministère et les sociétés d'État; donc au lieu d'avoir un personnage politique comme vous l'étiez parce que vous étiez dans un cabinet ministériel, nous avons maintenant un sous-ministre.

M. Scowen: Depuis votre arrivée à ce ministère, combien de personnes y a-t-il?

M. Tremblay: Est-ce qu'on a les renseignements? (17 heures)

M. Raynauld: M. le Président, pourrais-je demander d'une façon un peu plus formelle...

Le Président (M. Laplante): M. le député d'Outremont...

M. Raynauld: ... au ministre sur le même sujet...

Le Président (M. Laplante): Sur le même sujet? D'accord.

M. Raynauld: Oui, sur le même sujet. Je voudrais demander d'une façon un peu plus formelle — ce qui est l'habitude dans les commissions parlementaires — d'avoir la liste des noms et des salaires de chacun des membres du cabinet?

M. Scowen: Et leurs fonctions.

M. Tremblay: Cela a-t-il été distribué ce matin? À tous les membres de la commission? Moi, j'en ai une copie quelque part. J'en ai une copie ici. Donc, je dépose une copie qui s'appelle...

Le Président (M. Laplante): Vous ne pouvez pas la déposer.

M. Tremblay: Non, mais je la mets sur la table.

Le Président (M. Laplante): Distribuez volontiers si vous voulez.

M. Tremblay: Je la mets sur la table. Le Président (M. Laplante): D'accord.

M. Tremblay: Liste du personnel politique affecté au cabinet du ministre de l'Industrie et du Commerce. Je la donne au député d'Outremont en main propre. Y a-t-il d'autres renseignements...

M. Raynauld: M. le Président, il y en a 26 indiqués dans le document.

M. Tremblay: C'est le personnel professionnel. Les autres, c'est le personnel administratif.

M. Raynauld: Le cabinet du ministre est composé de 26 personnes?

M. Tremblay: Ce sont des secrétaires, des classeurs. J'ai ici les 26 au complet. Donc, je dépose la liste des effectifs.

Le Président (M. Laplante): Vous la distribuez.

M. Tremblay: Je la distribue.

M. Scowen: Avons-nous tous des copies de cette liste?

M. Raynauld: Sur ce sujet, M. le Président, je voudrais mentionner que je fais aussi les crédits des Finances, du Revenu et du Conseil du trésor, il y a six personnes au cabinet du ministre des Finances, du trésor et du Revenu pour trois ministères...

M. Tremblay: Oui, mais nous avons 12 500 entreprises...

M. Raynauld: ... y compris les secrétaires.

M. Tremblay: Oui, un instantl Le ministère des Finances emprunte sur les marchés internationaux, etc. Nous avons 12 500 entreprises manufacturières. Nous avons à peu près...

M. Raynauld: Le ministre des Finances aussi.

M. Tremblay: ... 80 000 commerces. On a vu qu'il y a dix sociétés d'État qui relèvent de nous. Je crois que le ministère de l'Industrie et du Commerce, par les demandes qu'on a des députés, des régions, des commissaires industriels et tout cela, c'est le ministère le plus bombardé. En ce qui me concerne, j'ai l'impression d'être sous-équipé. Je dois moi-même faire énormément de travaux. Je pense — et le sous-ministre pourra en témoigner — que les sous-ministres ne chôment pas non plus. Ils ne sont pas paresseux non plus. D'ailleurs, un chef d'entreprise me disait à la réunion de la SGF vendredi passé: Depuis que vous êtes au ministère de l'Industrie et du Commerce, cela a l'air que tout le monde a la langue longue. Cela tire, cela tire et cela travaille fort. Je pense que c'est le cas. Tout le monde est utilisé à plein. Au cabinet du ministre, il n'y a certainement pas d'exédent, surtout avec le bureau de Montréal, parce qu'il faut dire que le ministère de l'Industrie et du Commerce est un peu un double ministère. Vous êtes à Montréal. Vous êtes à Québec. Et en plus, on a toutes les pêches maritimes qui sont une sorte de ministère. Cela a déjà été un ministère, les pêches maritimes, jusqu'en 1961, quand M. Gérard-D. Levesque a été nommé au ministère de l'Industrie et du Commerce. C'est comme cela que cela a cessé d'être un ministère et que c'est devenu une direction générale.

Quand vous ajoutez la politique d'achat, le ministère de l'Industrie et du Commerce, au plan économique, c'est pratiquement un gouvernement. Donc, quand vous gardez sept ou huit cadres professionnels, pour garder une interlocution, garder des relations fréquentes avec le personnel administratif, parce qu'on a quand même au-delà de 1500 employés, 15 maisons du Québec, des délégués commerciaux à travers le monde, cela prend tout notre petit change, le personnel politique, pour ne pas retarder les dossiers. Le SDI, entre autres. Seulement pour étudier les dossiers de la SDI parce que le ministre signe toutes les subventions — d'ailleurs, la loi vise à 'décharger un peu le ministre, tous les prêts, toutes les garanties de prêts — le vendredi soir, je passe trois quatre heures seulement à signer des subventions, des prêts, des lettres, etc. Il est évident que je ne peux pas tout écrire moi-même. Il faut qu'il y ait quelqu'un qui m'assiste.

M. Raynauld: M. le Président, on ne discute pas de cela du tout. On ne discute pas de l'importance du ministère. On discute du personnel politique. Les subventions, ce sont des décisions administratives. Ce sont les sous-ministres qui font cela et ils recommandent au ministre...

M. Tremblay: Non, non. Ces sociétés d'État relèvent du ministre.

M. Raynauld: Je comprends, mais...

M. Tremblay: Elles ne relèvent pas du ministère.

M. Raynauld: ... on parle de personnel politique. C'est un personnel politique. Ce n'est pas fait pour administrer un ministère, le personnel politique. C'est fait pour faire de la politique. C'est cela.

M. Tremblay: Cela dépend. Le mot politique peut être, comme le disait le chef du Parti libéral tout à l'heure, cela peut être bas ou cela peut être haut, la politique. Le fait que le ministre soit responsable des subventions, etc. Il faut regarder les dossiers avant de signer. Je ne signe pas les yeux fermés. Il est évident qu'il faut qu'il y ait quelqu'un qui ait passé à travers les dossiers auparavant.

M. Raynauld: J'espère que ces recommandations-là viennent du ministère.

M. Tremblay: D'ailleurs, le député de Notre-Dame-de-Grâce le sait.

M. Scowen: Normalement, c'est...

M. Tremblay: Comme le ministère est tellement plus gros maintenant qu'il ne l'était dans son temps, c'est compréhensible que...

M. Scowen: Avec les changements prévus dans la Loi de la SDI, combien de personnes dans votre cabinet pensez-vous pouvoir éliminer?

M. Tremblay: Aucune parce que présentement c'est le ministre qui fait le travail.

M. Scowen: Mais vous venez de dire que ce sont les membres de votre cabinet.

M. Tremblay: Oui, mais le ministre va continuer à signer toutes les subventions...

M. Scowen: Oui.

M. Tremblay: ... et toutes les...

M. Scowen: Oui, mais il y a deux minutes, on était en train de justifier les dépenses de votre cabinet.

M. Tremblay: Vous pouvez entrer dans cette question si vous voulez. Je n'ai pas l'intention de perdre mon temps...

M. Scowen: Est-ce qu'on a le droit de poser ces questions, M. le Président?

M. Tremblay: ... à discuter de cela.

Le Président (M. Laplante): Oui, vous avez le droit...

M. Scowen: Excusez-moi...

Le Président (M. Laplante): Si vous avez besoin de renseignements, c'est au ministre de répondre.

M. Scowen: Oui, mais je pense aux questions sérieuses.

Le Président (M. Laplante): II a le droit de répondre ou de ne pas répondre.

M. Tremblay: Est-ce qu'on pourrait vérifier quel était le personnel politique du MIC en 1975?

M. Scowen: Oui, je pense que ce serait une bonne idée. Moi, je ne le sais pas.

M. Tremblay: J'aimerais qu'on vérifie cela. J'aimerais savoir cela. Il y a eu beaucoup de nouvelles responsabilités à ce ministère-là depuis 1975. Le responsable du budget me dit qu'en 1975 c'était à peu près le même ordre de grandeur. Or, le ministère a pratiquement — je ne sais pas s'il a doublé... À considérer toutes les sociétés d'État et tous les programmes qu'elles ont, ce n'est pas l'épaisseur des matelas et le prix minimum du pain qu'on applique ici.

M. Scowen: M. le ministre, excusez-moi, mais d'après mes connaissances, il n'y a aucune...

M. Tremblay: Vous venez sur ce terrain-là.

M. Scowen:... responsabilité qui a été ajoutée depuis 1976.

M. Tremblay: Aucune responsabilité? M. Scowen: Qui a été ajoutée. Une voix: La Société des alcools.

M. Scowen: La Société des Alcools. Excusez-moi.

M. Tremblay: La Société des alcools, c'est seulement $500 millions. Cela n'est rien.

M. Scowen: C'est cela. C'est la seule.

M. Tremblay: L'Institut de productivité, cela n'est rien aussi. Le programme pour les secteurs mous, cela n'est rien aussi. Le plan quinquennal des pêches, évidemment, cela n'est rien. Les minisommets qu'on a tenus, il fallait les préparer, cela n'est rien. De mémoire. La politique d'achat, cela n'est sans doute rien. Les sociétés d'État, évidemment, il n'y avait pas du tout de problèmes là; le gouvernement en avait vraiment la charge et il avait des mécanismes de contrôle auprès des sociétés d'État qui étaient bien rodés, etc. Il n'y avait rien à faire là. C'est évident qu'il n'y avait rien à faire là. Donc, le ministre a pris une affaire tellement bien organisée, tellement rodée. On me

dit en plus que c'était à peu près le même nombre de personnes employées. On ne sait pas trop quand même.

M. Scowen: On ne veut pas blesser le ministre. On veut simplement poser des questions sur son cabinet.

M. Marchand: Ce sont des questions, M. le ministre. C'est l'étude des crédits et on a le droit de savoir combien de personnes...

M. Tremblay: II y a une façon de poser les questions sans accusation.

M. Marchand: ... travaillent, combien de personnes sont engagées.

M. Tremblay: On a déposé cela il y a quinze minutes.

M. Marchand: Oui, mais le ministre ne veut pas répondre.

Le Président (M. Laplante): Non, M. le député de Laurier, cela va bien. On les laisse parler tous les deux. Si vous voulez parler, je vais retenir votre nom et cela me fera plaisir de vous donner le droit de parole.

M. Marchand: Très bien.

Le Président (M. Laplante): D'accord?

M. Tremblay: Ces chiffres-là, M. le député de Laurier, ont été déposés il y a quelque quinze ou vingt minutes.

M. Scowen: On ne veut pas charrier. On va étudier la liste des membres du cabinet, si ce n'est pas trop vous demander.

M. Tremblay: II ne faut pas créer l'impression qu'il y a trop de personnel à l'emploi d'un gros ministère comme celui-là.

M. Scowen: Je veux vous poser une autre question, s'il vous plaît!

M. Raynauld: ... jugement. Ne vous énervez pas. On vous demande ce qu'est...

M. Tremblay: Je ne m'énerve pas.

Le Président (M. Laplante): Voulez-vous échanger tous les deux?

M. Tremblay: Je n'ai pas l'instinct du martyre facile.

M. Raynauld: Non, je sais cela.

Le Président (M. Laplante): M. le député de Notre-Dame-de-Grâce, c'est à vous. Lorsque vous aurez terminé, je donnerai la parole au député de

Huntingdon. Ensuite, ce sera au tour du député de Laurier et du député d'Outremont.

M. Scowen: Je veux passer à une autre question, au même élément, mais avant de la laisser de côté, je veux que vous nous assuriez... Vous semblez être assez sensible à ces questions au sujet de votre cabinet. Il n'y a rien à cacher, devons-nous comprendre?

M. Tremblay: Non, je ne suis pas sensible sur les questions au sujet du cabinet, mais je suis sensible sur ce genre d'accusation insinueuse à savoir que le ministre aurait trop de cadres professionnels alors que j'en ai sept ou huit.

M. Scowen: Non.

M. Tremblay: Alors que vous aviez à peu près le même nombre pour la grosseur du cabinet du ministère de l'Industrie et du Commerce en 1975. C'est à peu près la même chose qu'on a présentement avec une augmentation phénoménale des responsabilités. Donc, je n'ai pas d'objection à répondre à vos questions, mais cessez de poser une question sous forme d'accusation. Depuis quand avez-vous battu votre femme et des choses comme celle-là? Moi, je ne marche pas...

M. Scowen: Excusez.

M. Tremblay: ... sur ce genre de terrain.

M. Scowen: Vous ne m'avez pas rappelé à l'ordre jusqu'à présent, M. le Président...

Le Président (M. Laplante): Pas encore.

M. Scowen: ... sur la nature de mes questions?

M. Tremblay: II n'y a pas de danger.

Le Président (M. Laplante): Continuez à poser vos questions, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Scowen: Merci, M. le Président.

M. Tremblay: Vous pouvez choisir vos questions et je peux choisir mes réponses aussi, remarquez bien.

M. Scowen: Oui, je veux simplement savoir. C'est un élément chaud que ce cabinet. C'est bien sûr. Je pense que la deuxième question n'est pas difficile.

M. Tremblay: Là aussi c'est une forme d'accusation...

M. Scowen: Cela s'explique...

M. Tremblay: Ce n'est pas un élément chaud. L'année que peut-être que...

Le Président (M. Laplante): M. le ministre, je préférerais qu'il pose ses questions...

M. Tremblay: Vous disiez: Avez-vous quelque chose à cacher?

Le Président (M. Laplante): ... pour que vous puissiez y répondre par la suite. M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Tremblay: ... c'est comme poser la question: Depuis quand avez-vous battu votre femme? Il n'y a rien à cacher.

M. Marchand: Si vous l'avez battue, on ne veut pas le savoir.

M. Scowen: Les traitements augmentent de $325 000, le nombre des effectifs, il n'y a pas une seule augmentation. Je suis certain que l'explication est du côté droit mais peut-être que le ministre peut l'expliquer d'une façon un peu plus claire. Je suis certain que cette dernière personne ne gagne pas $324 000; c'est clair qu'il y a des augmentations normales, mais...

M. Tremblay: C'est toujours cette question de manque à pourvoir. Je demanderais au sous-ministre d'expliquer cela.

J'imagine que vous faites référence à un montant d'environ $300 000 qui se décompose en deux parties. La première est un manque à pourvoir relativement au précédent budget qui doit donc être compensé cette année, plus, évidemment, pour ne pas avoir le même problème l'an prochain, un montant de $151 000 pour les augmentations à venir.

M. Scowen: Je parle du $1 550 000 par rapport au $1 874 000. Cela entre là-dedans aussi.

M. Tremblay: Oui.

M. Scowen: D'accord... en effet, c'est $328 000.

M. Tremblay: C'est cela.

M. Raynauld: Le manque à pourvoir, c'est quoi au juste?

M. Scowen: C'est 20%.

M. Tremblay: C'est le déficit de l'an dernier qui était de $150 000. Les prévisions ne concordent pas toujours avec la réalité. Il manquait $150 000.

M. Scowen: Vous avez dépassé le budget de l'année passée de $150 000 avec vos dépenses actuelles.

M. Tremblay: Dépassé, c'est peut-être un jugement qualificatif.

M. Scowen: Quel mot voulez-vous choisir? Excéder?

M. Tremblay: J'aime beaucoup les mots manque à pourvoir.

M. Raynauld: Je voudrais comprendre. C'était cela le sens de ma question. M. le Président, si vous n'avez pas d'objection, elle est sur le même sujet, on continue sur la même chose.

Le Président (M. Laplante): Oui, si vous ne vous disputez pas tous les deux, je vais vous laisser aller.

M. Raynauld: Le manque à pourvoir, est-ce qu'il s'agit de crédits qui n'ont pas été votés pour payer les salaires de l'année passée ou est-ce autre chose?

M. Tremblay: Ce sont simplement des ajustements qui existent entre l'enveloppe qui est consentie ou évaluée par le Conseil du trésor en début d'année et le flottement qui peut exister entre les postes vacants ou les entrées et sorties de personnel. Il n'y a rien de...

M. Raynauld: Je veux savoir si ce sont des crédits qu'on adopte pour l'année 1978/79 quand on fait cela.

M. Tremblay: Mais oui. M. Raynauld: Oui?

M. Tremblay: Quand vous vous prononcez ici, c'est simplement pour expliquer l'écart qui existe entre $1 550 000 et $1 874 000. Il s'explique de deux manières: II faut effectuer premièrement un rattrapage parce qu'il y avait un manque à pourvoir l'an dernier qu'on a payé autrement en faisant les ajustements mécaniques requis en cours d'année, mais il faut quand même l'inscrire et l'ajouter au budget de l'année 1979/80 et, en même temps, prévoir des augmentations pour le poste des traitements; les conventions collectives feront sentir leurs effets pendant l'exercice sur lequel on est appelé à voter présentement.

M. Raynauld: II s'agit donc d'un manque à pourvoir relatif à l'année fiscale 1978/79.

M. Tremblay: Exact.

M. Raynauld: Donc, ce sont des fonds qui ont été dépensés mais qui n'avaient pas été votés.

M. Tremblay: Cet argent avait été effectivement voté mais pour augmenter l'enveloppe des

traitements, pour nous permettre, en fait, de payer $1 691 200, ce qu'on a fait en cours d'année, ce sont des virements entre les catégories de dépenses pour nous permettre, bien entendu, de faire face aux dépenses du poste "traitements" au cours de l'exercice 1978/79. On a diminué les catégories qui sont indiquées ici, les catégories 3, 4, 5 et 6, pour augmenter la catégorie des traitements et nous permettre d'assumer les dépenses sans pour autant augmenter le budget qui avait été voté pour cet élément de programme. On n'a pas excédé l'élément de programme.

Autrement dit, ce sont des ajustements mécaniques qui ont été faits en cours d'année à l'intérieur de l'enveloppe qui avait été attribuée par le trésor au ministère et qui a été dûment adoptée par cette commission l'an dernier lors de l'étude des crédits.

Un seul commentaire pour vous montrer comme c'est difficile pour un ministre de contrôler tout un ministère et de savoir quel est le vocabulaire utilisé; seulement pour comprendre cette terminologie, cela prend une demi-journée.

M. Raynauld: Oui, nous, nous avons une demi-minute.

M. Tremblay: C'est pour cela que cela me prend quelques aides.

M. Raynauld: Cela est conforme aux pratiques administratives?

M. Tremblay: C'est très conforme aux pratiques administratives.

M. Raynauld: C'est aussi conforme aux pratiques parlementaires? (17 h 15)

M. Tremblay: Oui, puisque les lois en vertu desquelles le ministère fonctionne, sont multiples, mais il y en a une qui est particulièrement importante, c'est la loi de l'administration financière et c'est à l'intérieur de ce cadre qui nous est donné par le Parlement que nous effectuons mensuellement, hebdomadairement ou même quotidiennement un ensemble d'opérations qui sont toutes plus vérifiées d'ailleurs les unes que les autres avant, pendant, après, et plutôt deux fois qu'une.

M. Raynauld: II y a combien pour cela? $150 millions que vous avez dit tout à l'heure?

M. Tremblay: $150 000.

M. Raynauld: $150 000, pardon.

M. Tremblay: Le budget du ministère a très peu augmenté cette année. Je pense que c'est moins que le taux d'inflation.

M. Raynauld: Je pensais que vous l'aviez souligné. De combien a-t-il augmenté?

M. Tremblay: Ce matin, dans mes notes, cela a augmenté de $6 millions.

M. Raynauld: C'est parce qu'il y a eu une réduction considérable parce qu'il y avait des éléments...

M. Tremblay: En tenant compte de ces postes de $25 millions et de $10 millions, cela fait une augmentation d'à peu près $6 millions sur quelque $110 millions, sur $104 millions, donc, c'est moins que le taux d'inflation. On n'exagère pas à l'Industrie et Commerce. On met l'accent sur la productivité et l'efficacité plutôt que sur les grandes dépenses.

M. Raynauld: Vous devriez commencer par votre bureau, il y a pas mal de monde.

M. Tremblay: C'est ce bureau qui tient les guides, qui empêche qu'on dépense trop ailleurs.

Le Président (M. Laplante): Les remarques sur le programme 1, M. le député de Huntingdon.

M. Dubois: À la politique d'achat, on indique ici $3 000 013 000 d'achats effectués par différents services. Ce sont les achats des différents ministères, des différentes institutions. Quand on parle de quelque $3 milliards, c'est le total des achats gouvernementaux et paragouvernementaux.

M. Tremblay: L'Hydro-Québec, voyez-vous, $1 000 000 113. Les autres sociétés d'État, tout cela; même le municipal est compris, donc $3 milliards.

M. Dubois: Dans certains achats, si le contenu est 100% québécois, le Service général des achats va payer jusqu'à 10% de plus au maximum pour un produit si le contenu est 100% québécois, c'est cela?

M. Tremblay: C'est cela.

M. Dubois: Par contre, dans d'autres secteurs comme les achats des hôpitaux, est-ce que c'est strictement incitatif parce qu'ils ne sont pas forcés d'acheter un produit québécois.

M. Tremblay: La question pharmaceutique est une négociation intéressante parce qu'il y a une liste des produits admissibles qui est établie par un comité de médecins, pharmaciens, etc., et c'est une liste d'à peu près 2400 produits. Cela nous cause un gros problème, présentement, parce que cette liste est tellement large que la majorité des produits provient de l'extérieur du Québec; l'Ontario et les États-Unis, alors qu'en Ontario, ils ont fait une liste de 700 produits et qu'ils ont une approche qui est encore plus stricte. Ils prennent les trois premiers soumissionnaires et pour les autres, c'est très difficile d'être qualifiés. Souvent, nos producteurs québécois ont beaucoup de diffi-

culté à se faire qualifier, à être inscrits sur la liste des 700 produits admissibles. Ils ne sont jamais assez bons. Ils ont toujours des problèmes. C'est un gros problème. Nous sommes assez naïfs dans ce domaine, je vous le dis bien franchement, au Québec les portes sont très grandes ouvertes. En Ontario ils contrôlent cela et vous avez des entreprises comme Bristol-Myers et d'autres compagnies, avec cette approche. J'aimerais peut-être faire un commentaire plus détaillé sur le pharmaceutique parce que j'ai demandé spécifiquement qu'on s'occupe de cela.

Mais le gouvernement doit faire appel à la bonne volonté des...

M. Dubois: J'ai indiqué au début de mes remarques préliminaires que si on était aussi protectionniste que l'Ontario l'est dans certains domaines, je pense que ce serait bon pour notre économie. On laisse assez à désirer dans certains domaines, quand même.

M. Tremblay: En fait de médicaments, c'est une liste qui est faite par un comité de pharmacologie — vous savez, le Conseil de pharmacologie — qui est basée sur la liste québécoise. La liste québécoise est basée sur des médicaments qui sont acceptés par le gouvernement fédéral. Autrement dit, c'est un critère de qualité uniquement et ce sont les mêmes produits qui font partie du programme canadien qui s'appelle QUAD qui sont automatiquement mis dans la liste des produits acceptés par la Régie de l'assurance-maladie.

Dans les hôpitaux, c'est sensiblement la même chose. Même si on applique la politique d'achat un peu plus rigoureusement, privilégiant dans certains cas les produits du Québec dans les médicaments, il n'en demeure pas moins que la liste est également acceptée par l'ensemble des pharmacies d'hôpitaux, les pharmaciens qui font les prescriptions dans les hôpitaux. Nous avons contacté les industries pharmaceutiques du Québec et elles nous demandent — c'est d'ailleurs ce qu'on va essayer d'entreprendre bientôt — de préparer plutôt une négociation avec l'Ontario, pas dans le but de fermer davantage le marché québécois, mais d'ouvrir davantage le marché ontarien parce que la production globale des produits pharmaceutiques — on n'entrera pas dans les détails... Dans les produits d'ordonnances, je pense que plus de 50% sont produits au Québec, de sorte que leur intérêt, semble-t-il — évidemment, nous sommes en discussion avec eux — serait qu'on demande à l'Ontario de se baser, comme nous, sur ce que le fédéral propose et, en conséquence, d'ouvrir davantage le marché ontarien.

Il y a aussi la façon d'acheter qui est différente en Ontario et qui a parfois pour effet d'éliminer des producteurs pendant un certain temps, parce qu'ils vont en soumission pour certains types de produits; donc, ils acceptent deux ou trois des plus bas soumissionnaires et à ce moment-là les autres fournisseurs sont absents pour une période assez longue sur le marché.

M. Dubois: Dans l'ensemble des produits pharmaceutiques, notre pourcentage de production, ici au Québec, n'est pas de 50%, à ce moment-là.

M. Tremblay: Sur les produits d'ordonnances, c'est-à-dire ceux qui font partie de la liste.

M. Dubois: Dans l'ensemble de tous les produits.

M. Tremblay: Si on parle de la liste... Pour les autres produits pharmaceutiques, cela devient pas mal plus compliqué. Pour le moment, on s'intéresse surtout aux produits d'ordonnances qui sont financés par le gouvernement, ceux qui sont sur la liste de la Régie de l'assurance-maladie et qu'on paie. Ceux qui sont dans les hôpitaux sont à peu près les mêmes; c'est quand même assez marginal les autres produits payés par le gouvernement.

M. Dubois: En ce qui a trait aux denrées, dans la politique d'achat, pour les hôpitaux ou les institutions, est-ce que c'est aussi incitatif? Il n'y a aucune spécification d'acheter les produits québécois?

M. Tremblay: II y a des directives qui ont été émises par les Affaires sociales avec les limites que ces directives peuvent avoir, compte tenu de l'autonomie de gestion des hôpitaux. Avec le ministère de l'Agriculture, on a relevé les progrès qui ont été faits dans ce domaine et on a les chiffres en ce qui concerne la progression, par exemple, de beaucoup de produits québécois dans l'alimentation des hôpitaux. Il y a le cas du poulet, le cas du jus de pomme, le cas d'un certain nombre de produits pour lesquels on a une production qu'on considère valable et de qualité au Québec, dont la croissance s'est avérée fort intéressante.

Étant donné qu'on a un plan quinquennal pour les pêches maritimes, ce serait bon que les hôpitaux fassent appel aux produits marins du Québec, aux crustacés. Je pense que le meilleur crabe au monde vient de la rivière au Renard, de la rivière au Tonnerre, mais on les appelle les crabes de l'Alaska. Les gens pensent que cela vient de l'Alaska; cela vient de la rivière au Renard et de la rivière au Tonnerre. Le homard, c'est la même chose, de sorte qu'il y a peut-être un effort... Dans le plan quinquennal, la commercialisation est importante et c'est peut-être un avantage que d'avoir mis la politique d'achat au ministère de l'Industrie et du Commerce. La Direction des pêches devrait travailler avec vous pour faciliter l'accès de nos produits sur les tables québécoises.

Pour l'alimentation, on a fait un catalogue spécial avec le ministère des Affaires sociales qui va plus loin que le répertoire — évidemment, cela s'inspire des mêmes choses — qui insiste également sur les distributeurs, les grossistes, qui ils sont, les marques de commerce des produits alimentaires du Québec. Les acheteurs ont besoin d'informations, étant donné qu'ils achètent beau-

coup par l'intermédiaire des grossistes, les fournisseurs. Pour les aider, on a mis à leur disposition les marques de commerce particulières ainsi que le nom des grossistes et de ceux qui sont les distributeurs de ces produits alimentaires de façon à faciliter le travail des acheteurs.

L'Association des grossistes du Québec collabore passablement étroitement avec le ministère de l'Industrie et du Commerce. Les grossistes se sont tellement regroupés qu'il en reste à peu près 23, si ma mémoire est bonne. Je dois dire qu'ils nous offrent une très grande collaboration. Le fait qu'on leur ait permis de distribuer les vins dans les 9000 épiceries a aidé aux relations avec les grossistes. Ils sont tellement satisfaits de cet arrangement qu'ils considèrent le ministre de l'Industrie et du Commerce comme un bon homme.

Une voix: Ne me dites pas cela!

M. Dubois: Est-ce que vous avez l'intention d'émettre des directives plus sévères quant aux produits alimentaires consommés dans les hôpitaux ou dans les autres institutions?

M. Tremblay: II faut faire attention. La politique d'achat, ce n'est pas une politique d'achat autocritique, politique d'achat que le ministère de l'Industrie et du Commerce impose. Chaque ministère est responsable de l'application des grandes lignes et des grandes normes de la politique d'achat.

Donc, la direction interministérielle des achats vise à fournir des renseignements. Je pense que c'est peut-être sa plus grande contribution: informer leurs acheteurs où sont nos produits au lieu d'aller ailleurs quand c'est disponible à des qualités et des prix comparables. Après cela, inciter les organismes, les ministères à appliquer la politique d'achat, sur une base de volontariat.

On me donne ici des chiffres sur la provenance des aliments dans les hôpitaux. On n'a pas beaucoup de progrès à faire. Les pommes fraîches à 97% viennent du Québec; les pommes de terres 58%, là il y a peut-être un effort; les oignons 70%; les carottes 95%; les choux 97%, le rutabaga — c'est quoi cela? C'est du navet — 96% des navets. Mais ce que je voudrais savoir, c'est qu'avant la politique d'achat quel était le pourcentage? On a cela quelque part?

M. Dubois: Pour ce qui est des oignons, nous sommes plus qu'autosuffisants. On dépasse 75% ici au Québec. Il n'y a aucune raison que nos institutions quand même...

M. Tremblay: Oui, mais vous savez qu'il y a une question de saison dans cela. C'est que parfois on produit beaucoup dans une saison et qu'on est obligé d'exporter, c'est naturel. Il y a d'autres saisons où on importe. C'est pour cela qu'on ne peut pas avoir...

M. Dubois: Ce sont des produits qu'on peut conserver d'une récolte à l'autre.

M. Tremblay: Tout à l'heure je vous ai donné des chiffres pour décembre 1978, en juin 1978, quand la politique d'achat n'était pas tout à fait en marche, les pommes fraîches c'était 80% en provenance du Québec; là on est présentement à 97%. Le jus de pomme on était à 82% et on est passé à 96%; les poulets on était à 82%, on est passé à 89%; le veau on était à 54%, on est passé à 71%. On voit que cela va dans la bonne direction.

M. Dubois: Je suis content d'apprendre cela, mais j'ai été bien déçu l'été dernier, au mois d'août, quand je me suis aperçu que deux grossistes québécois fournissaient de la laitue de la Californie.

M. Tremblay: À quelle date cela? M. Dubois: Au mois d'août.

M. Tremblay: Au mois d'août, en pleine période...

M. Dubois: En pleine récolte, ici au Québec où on hersait même des produit parce qu'ils ne se vendaient pas. Certaines institutions, pas toutes, consommaient de la laitue de la Californie qui valait quatre fois le prix de la nôtre, ici. C'est choquant...

M. Tremblay: Évidemment, la politique d'achat comme vous le savez M. le député d'Huntingdon, ne s'applique pas aux grossistes. Évidemment, quand je les rencontre je le leur dis...

M. Dubois: Non, je suis d'accord. Mais la consigne qu'on donne aux institutions devrait quand même être plus précise.

M. Tremblay: On fait appel évidemment aux chaînes d'alimentation, à leur contribution pour acheter des produits du Québec etc. Mais là, c'est vraiment purement volontaire. Si Steinberg ou Dominion décide d'acheter des pleins camions de laitues en provenance de la Californie, au mois d'août, je présume qu'ils ont de bonnes raisons. C'est une question de prix ou peut-être une question de volume. C'est peut-être un des problèmes, mais c'est la responsabilité du ministère de l'Agriculture de s'assurer qu'on ait des quantités de produits agricoles suffisantes pour satisfaire les chaînes, parce que les chaînes au Québec, on commence à en avoir. En plus de Dominion, Steinberg etc., vous avez des chaînes comme Provigo où cela va chercher dans les 500 magasins, les Métro c'est un autre 500, les Coop. Il y a de gros centres d'achats, des regroupements d'achats. Même si ce sont des indépendants, finalement, qui font la distribution, leurs achats sont regroupés. Ils n'achètent pas la laitue une à la fois. C'est un camion ou un wagon de chemin de fer. Souvent, je souhaiterais que la direction des achats, de concert avec le ministère de l'Agriculture, s'assurent que lorsque la demande se rencontre...

M. Dubois: Même...

M. Tremblay: Cela n'est pas à cause de la mauvaise foi des chaînes qui achètent à l'extérieur. Je ne présume pas que ce soit de mauvaise foi. Il doit y avoir des facteurs qui les incitent à faire cela.

M. Dubois: Mais je pense que les directeurs, en ce qui concerne les achats des institutions, ceux qui sont responsables des achats dans les institutions, devraient avoir l'oeil plus ouvert.

M. Tremblay: Je suis d'accord avec cela.

M. Dubois: On ne peut tout de même pas empêcher ce grossiste d'importer des produits de la Californie.

M. Tremblay: Je suis d'accord avec ce que vous dites. L'important c'est qu'il y a eu des progrès.

M. Dubois: D'accord.

M. Tremblay: Cela va rentrer un peu plus dans les moeurs de revendiquer parfois, de dire: Est-ce que les patates, aujourd'hui, viennent du Québec ou pas? On fait des efforts pour en avoir, s'il n'y en a pas, il n'y en a pas. Si on n'a pas fait d'effort... Il faut faire un petit effort, on va grossir, on va avoir des agriculteurs qui vont devenir de grosses entreprises. Ils vont investir et ils vont être capables d'approvisionner...

M. Dubois: Cela n'est pas être séparatiste que d'acheter chez nous, je pense? C'est du protectionnisme.

M. Tremblay: Je suis bien heureux de l'apprendre.

M. Dubois: Je ne suis pas séparatiste, mais je pense qu'être nationaliste c'est autre chose.

M. Tremblay: D'ailleurs c'est justement cela. Etre maître chez nous, être prospère, cela n'est pas de la division, cela n'est pas de la séparation, au contraire.

M. Dubois: II n'est pas nécessaire de se séparer pour acheter chez nous.

M. Tremblay: Non, d'accord. D'accord, il n'est pas nécessaire de se séparer. Mais il faut avoir les moyens de prendre des positions. Si on n'avait pas le gouvernement du Québec, on n'en aurait pas de politique d'achat.

M. Dubois: Espérons que cela va aller dans le bon sens.

Le Président (M. Laplante): M. le député de Champlain. (17 h 30)

M. Gagnon: Pour satisfaire le ministre, la loi 116 permet justement la syndicalisation et l'organisation des agriculteurs entre eux. Ils forment des plans conjoints pour satisfaire à la demande; cela va régler une partie des problèmes que le député de Huntingdon soulève. Il y a des fois où des organismes voudraient acheter des produits québécois, mais ils les retrouvent éparpillés. Tandis que la formation de plans conjoints, comme cela s'est fait dans le domaine des oeufs, permet de centraliser l'offre et de satisfaire mieux la demande.

La question que je vais poser a peut-être été posée cet avant-midi, alors que je n'étais pas là. À ce moment, on n'aura qu'à la laisser passer. On nous dit souvent que c'est beau de favoriser l'achat des produits québécois. Mais on nous pose la question, à savoir s'il n'y aurait pas possibilité par une loi ou par d'autres moyens d'intéresser les gens à identifier le produit du Québec. Je vois, par exemple, des entreprises chez nous qui marquent fabriqué au Canada, pas nécessairement au Québec. Le consommateur qui voudrait acheter le produit québécois... Est-ce qu'il y a des possibilités de l'identifier ce produit de façon qu'on puisse le retrouver sur le marché?

M. Tremblay: Je pense que le député de Huntingdon a soulevé ce point précis ce matin. J'ai essayé de lui donner une réponse. Je ne reviendrai pas sur les éléments de la réponse. Je mentionnerai simplement globalement que la plupart de nos entreprises manufacturières exportent à l'extérieur du Québec. Nos contacts avec elles nous ont appris qu'il serait difficile — on pourrait toujours les forcer, mais on n'est pas là pour ajouter du "red tape", comme le disait le député de Huntingdon - pour eux d'identifier les produits à la manufacture sans savoir au préalable où iront ces produits. Si cela va vers le marché québécois, peut-être y aurait-il un avantage commercial pour eux de le faire, mais si cela va à l'extérieur, il n'y a pas d'avantage évident, à moins que ce soit d'une qualité tellement grande que l'identification devient une sorte de marque de commerce intéressante. Nous réfléchissons à cette question. On a pensé faire une expérience pilote au niveau du détaillant. Il y en a deux par exemple. J'ai demandé à mes fonctionnaires: Essayez donc de regarder cela au niveau du meuble, étant donné qu'on est de grands fabricants de meubles; au niveau des pneus, on a trois fabricants de pneus au Québec et souvent ces fabricants ont des magasins qui vendent leur propre marque. Peut-être qu'une campagne d'achat de pneus au Québec aurait pu se faire en collaboration avec le ministère de l'Industrie et du Commerce. J'aurais été prêt à payer une partie des frais publicitaires pour une campagne semblable en collaboration avec les fabricants.

C'est en marche, mais il y a là encore ce problème de segmenter les produits, l'étiquetage. On ne veut pas surcharger les coûts de production non plus de l'entreprise et lui nuire. Mais nous sommes à l'affût d'une formule parce qu'il y a un

désir chez la population, je pense, d'encourager, de garder son pouvoir d'achats. C'est un patriotisme de bon aloi que d'essayer de garder l'activité économique sur place. Les deux copies de répertoire, comme je l'ai mentionné, pour les preneurs de décisions, les mille façons d'acheter québécois... Mais nous tenons à demeurer au niveau incitatif.

Je me suis, pour ma part, opposé à ce que nous forcions par réglementation une évolution dans ce sens, à moins que l'on me prouve qu'il y a mauvaise foi. Jusqu'à maintenant je n'ai pas l'impression qu'il y ait eu mauvaise foi.

M. Gagnon: Si on prend, par exemple, un produit comme le textile qui est fabriqué en bonne partie au Québec. Tout de même, c'est un produit québécois qui est connu ailleurs. Est-ce qu'il n'y aurait pas lieu que ce produit soit identifié comme étant un produit du Québec?

M. Tremblay: Oui, mais le problème, c'est qu'il n'y a rien qui ressemble plus à un rouleau de textile qu'un autre rouleau de textile. Tu ne sais pas au départ où il va aller ton rouleau de textile. Il faut établir qu'il y a vraiment avantage à l'estampiller, etc. Puisque nous parlons de textile, j'aimerais souligner rapidement que l'usine de Coteau-du-Lac, cette grosse usine de polyester, va maintenant entrer en opération et cela va créer quelque chose comme 300 emplois dans la région de Vaudreuil.

Ce qui compte, c'est le résultat. Identifier des produits uniquement pour le plaisir de les identifier, cela n'est peut-être pas... Si en les identifiant on créait d'avantage d'activités économiques, ce serait excellent. Mais si cela se révèle un désavantage pour l'entreprise ou pour le commerçant, il est évident qu'il devient illogique de forcer cette identification.

Cela paraît plus simple que ça ne l'est. Si c'était si facile que cela, toutes les expériences pilotes que j'ai demandées seraient... rapidement. Le ministère travaille et pour ma part, je serais très heureux si on trouvait une modalité qui satisferait tout le monde.

Le Président (M. Laplante): M. le député d'Outremont.

M. Dubois: Les Ontariens sont très réfrac-taires aux produits québécois, en partant.

M. Tremblay: Les obligations du Québec aussi. Ils ne veulent pas en acheter depuis longtemps, du temps de Jean Lesage...

M. Dubois: J'ai eu un cas précis dans le commerce, chez moi.

M. Raynauld: M. le Président, sur la politique d'achat, j'avais, l'année dernière, posé un certain nombre de questions. Ce matin, je suis revenu à la charge pour demander si des relevés avaient été préparés sur l'application de la politique d'achat.

L'année dernière — je ne voudrais pas trop insister — mais le ministre nous avait même dit qu'il y aurait des rapports trimestriels sur la politique d'achat.

M. Tremblay: Je ne me rappelle pas de cela. On peut sortir cela du journal des Débats.

M. Raynauld: Oui, c'est dans le journal des Débats et il y a quelqu'un qui a relevé cela.

M. Tremblay: C'est pour les sociétés d'État que j'ai annoncé qu'on aurait des rapports trimestriels, mais pour la politique d'achat...

M. Raynauld: Enfin, je n'en suis pas sur le trimestriel.

M. Tremblay: Je m'étais trop avancé.

M. Raynauld: Je serais très heureux s'il y avait un rapport annuel, parce qu'à l'heure actuelle, il n'y a rien du tout. Est-ce qu'il serait possible d'avoir au moins quelque chose, même si ce n'est pas trimestriel. L'année dernière, on a dit: II n'y a pas de statistiques, la politique commence. On avait accepté cela, mais cette année on n'est plus dans la même situation et ici dans le document nous avons deux chiffres représentant la proportion des achats québécois faits par l'Hydro-Québec et par le service général des achats. C'est tout ce que nous avons.

J'avais précisé, l'année dernière, et je le reprécise ici, il me semble que ce qui serait utile ce serait un rapport qui nous donnerait non seulement la proportion des achats québécois, mais qui nous donnerait aussi les exceptions qui sont faites à l'acceptation de soumissions publiques qui traduisent justement l'application d'une politique d'achat. Si le gouvernement dit: Nous donnons une prime de 10% aux producteurs québécois, dans quel cas est-ce que cela a été fait, quels sont les montants impliqués dans ces exceptions? Je pense qu'il ne suffit pas de savoir, pour l'Hydro-Québec ou pour le service général des achats, simplement le coût global qui peut être à 1% ou 2%. Je pense que c'est normal que ce soit comme cela, parce que je pense bien que, dans beaucoup de cas, quand on achète pour $225 millions au service général des achats, il doit y en avoir une bonne moitié, les trois quarts, peut-être 80% dont, de toute façon, même s'il n'y avait pas eu de politique d'achat, simplement parce que les producteurs du Québec sont compétitifs, les soumissions auraient été acceptées.

Ce que j'aurais aimé avoir ce sont les cas où la politique d'achat s'applique et qui par conséquent engendrent une activité additionnelle à ce qui se produirait s'il n'y avait pas de politique d'achat. C'est comme cela qu'on peut évaluer l'impact d'une politique et, malheureusement, dans les documents que nous avons, nous n'avons pas les informations nécessaires pour faire une appréciation de la politique d'achat. Je pense, encore une fois, que c'est indispensable. C'est une

politique importante du ministère et il me semble que nous devrions avoir les informations qui nous permettent, nous de l'Opposition, de faire une critique, un jugement de l'application de cette politique.

M. Tremblay: Sur cela, je pense, M. le Président, qu'il y a une question de principe et une question de fait. J'y ai fait allusion tout à l'heure, je pense, au début de l'intervention de la séance de cet après-midi. Il est évident que les règles et les modalités d'application de la politique d'achat doivent être connues et je pense qu'elles le sont passablement.

En ce qui concerne la divulgation des transactions, j'ai mentionné tout à l'heure que même si nous les avions — et nous ne les avons pas — je ne connais pas d'autre gouvernement qui publie un livre disant: Résultats de la politique d'achat, pour des raisons de représailles, entre autres, et des considérations semblables.

En ce qui concerne les faits, il y a des dizaines de milliers d'achats qui se font dans le réseau, et comme le ministère n'est pas un ministère de réglementation, mais seulement un ministère de suggestion, c'est seulement grâce à la bonne volonté des ministères et des organismes que les principes de la politique d'achat s'appliquent. Nous n'avons pas de loi et de mécanisme qui obligent les acheteurs à nous faire rapport.

Donc, on peut voir globalement dans quelle direction cela va. On a des chiffres sur le jus de pomme. Combien de caisses de jus de pomme ont été achetées à un prix légèrement plus élevé que le prix de marché nord-américain? J'ai l'impression que le sous-ministre n'a pas cette information-là. Est-ce que vous pouvez commenter cela?

Nous avons actuellement des informations disponibles qui portent à peu près sur 40%, près de 50%, de la masse des achats dont on parle ici. Le gros de cette information vient du service général des achats et des grandes sociétés d'État, à savoir l'Hydro-Québec, SIDBEC, la SAQ, ce qui représente près de $1 500 000 sur les $3 milliards d'information dont nous disposons. Nous avons constaté que le mode de collecte de l'information qu'on avait n'avait pas donné les résultats attendus et on a pris une méthode qui se rapproche de celle que vous aviez suggérée l'an dernier, à savoir d'échantillonner. Dans le secteur hospitalier, par exemple, on s'est entendu avec les Affaires sociales sur 17 hôpitaux considérés comme étant assez représentatifs qui ont des systèmes d'information informatisés pour leurs achats, leurs transactions. Nous avons fait modifier les programmes en question pour qu'ils tiennent compte de nos besoins.

Donc, on aura, a partir de là de l'information assez complète sur ce qui se passe dans le réseau hospitalier. On est en contact avec le ministère de l'Éducation pour faire à peu près la même chose au moins dans les deux réseaux, le primaire et le secondaire et le collégial, ce qui va porter, probablement, notre information à près de 60% de ce qui est possible. On a déjà eu des contacts importants avec la CECM notamment dans le sec- teur de l'éducation et je vous avoue que nos demandes leur pèsent lourd un peu, parce que c'est un système qui est déjà informatisé, qui est assez sophistiqué. Pourtant, si on peut en arriver à s'entendre avec la CECM, on va avoir un bon morceau.

Alors, c'est comme cela qu'on avance et il faut admettre que ce qu'on avait prévu, à savoir les questionnaires auxquels on répondait trimestriellement, n'a pas donné ce qu'on attendait pour toutes sortes de raisons. Il y a des problèmes d'organisation administrative qui sont propres à ces organismes-là aussi. Il y en a qui ont à peine une organisation qui s'occupe des achats, de sorte que, quand on veut ajouter par-dessus des demandes, c'est presque incompatible avec les modes d'opération.

Donc, globalement, c'est à peu près la situation. Actuellement, on a des informations sur près de 50%. Avec ce qu'on fait dans le réseau des Affaires sociales actuellement, on passera à 55% et avec l'Éducation à 60%, 65%. Après, il restera les municipalités et là c'est beaucoup plus incitatif.

M. Raynauld: Mais au service général des achats vous avez les informations.

M. Tremblay: II fournit déjà l'information et le...

M. Raynauld: Alors, vous ne pourriez pas fournir cette information à la commission?

M. Tremblay: C'est-à-dire que le rapport...

M. Raynauld: Le service général des achats est gouvernemental, c'est public.

M. Tremblay: II fait son propre rapport à la commission des travaux publics. Cela ne relève pas du ministre de l'Industrie et du Commerce.

M. Raynauld: C'est le ministre de l'Industrie et du Commerce qui est chargé de l'application de la politique d'achat.

M. Tremblay: Non. M. Raynauld: Non?

M. Tremblay: Pas de l'application. Chaque ministère est responsable de l'application. Nous sommes responsables de la coordination et de la conception, si vous voulez.

M. Raynauld: De la coordination.

M. Tremblay: Donc, le service des achats, dans le rapport annuel à la commission des travaux publics — je présume qu'il donne un rapport... Allez-y donc.

Je pourrais faire un commentaire général qui irait au moins partiellement dans le sens d'une réponse au député d'Outremont. Il s'est révélé, à

l'usage, que la politique d'achat n'avait pas autant d'importance sur l'utilisation de la marge de préférence que par la sélection de producteurs québécois qui sont jugés compétitifs, de telle sorte que le calcul mathématique qu'il apparaît très logique d'établir, soit le coût de la politique d'achat en mesurant combien cela a coûté de pourcentage de plus, en réalité, ne s'avère pas tellement fondé puisque c'est plutôt en invitant les manufacturiers québécois plutôt que les étrangers que la politique joue. À ce moment-là, évidemment, on ne peut pas mesurer quelle est la différence de prix qui est payée par l'institution qui fait l'achat en question. (17 h 45)

M. Raynauld: Et les institutions ne s'informent pas.

M. Tremblay: Mais dans les cas...

M. Raynauld: Si j'étais un gestionnaire, il me semble que...

M. Tremblay: Quelle aurait été la situation si nous n'avions pas eu de politique d'achat? Dans le passé, par inertie, comme je le disais tout à l'heure, on faisait appel à des catalogues pour producteurs étrangers et on oubliait le producteur à côté de chez nous, c'est une situation de fait. On essaie de changer cela maintenant. Comment mesurer cela? Comment mesurer le résultat? C'est bien difficile.

M. Raynauld: Franchement...

M. Tremblay: La façon de le mesurer, ce serait de voir le contenu québécois des achats. On a des chiffres sur cela. Est-ce qu'on peut les donner?

Globalement, les chiffres qu'on a, on peut les donner. J'ai préparé quelques données.

Le contenu québécois des achats, d'après ce qu'on me dit ici, pour $1 500 000 000 en 1978, soit 50% de tous les achats, cela impliquait un contenu québécois de l'ordre de 70%. Donc, c'est déjà une indication, mais j'aimerais savoir quel était le contenu québécois avant la politique d'achat.

Les méthodes de calcul du contenu québécois ont varié avec le temps. Mais les responsables du service général des achats — je ne veux pas parler en leur nom, mais je pense qu'on peut quand même le signaler à la commission — estiment qu'il y a eu un progrès très net dans l'intensification du contenu québécois. Dans le cas où la marge de préférence — j'aimerais ajouter un dernier commentaire là-dessus — a joué, parce que dans certains cas c'est arrivé, l'écart a été extrêmement faible et a tourné autour de 1%, de sorte que le coût a été très faible.

On est un peu dans la situation où on essaierait de mesurer le degré de sainteté où on est rendu. Évidemment, c'est toujours difficile et c'est toujours relatif. On sent que c'est mieux qu'avant. Mais on est plutôt...

M. Raynauld: C'est comme d'habitude, on est mieux qu'avant mais on ne sait pas combien cela nous coûte.

M. Tremblay: Mais on se sent bien quand même.

M. Raynauld: On le sent, c'est cela.

M. Tremblay: On sent que la situation change. Évidemment, on peut vouloir tout chiffrer, mais on parlait de paperasserie et de "red tape", comme on l'a dit tout à l'heure. On peut demander des rapports hebdomadaires, etc., aux organismes qui achètent ce qu'ils vont faire en vitesse, sur le bord de la table, ce qui aura une valeur statistique peu probante. Dans le fond pour avoir tous ces renseignements, il faudrait confier au bureau de la statistique du Québec par loi ou par réglementation quelconque le pouvoir d'obtenir ces renseignements, par arrêté en conseil ou par autre moyen. On n'est pas rendu à ce niveau.

M. Raynauld: Une autre façon de le dire c'est que vous n'êtes pas capable de prouver l'affirmation que vous faisiez quand vous êtes arrivé au pouvoir et ce que vous disiez comme gouvernement, vous M. le ministre et bien d'autres ministres aussi, comme le ministre d'État au développement économique, que la politique d'achat c'était l'instrument par excellence, que c'était pour nous sauver des millions et des millions de dollars. Vous n'êtes pas capable de prouver cela.

M. Tremblay: Un instant, un instant, c'est vrai que, quand on dit deux plus deux font quatre, c'est très précis. Mais quand on dit que A est plus grand que B et que B est plus grand que C, cela veut dire que A est plus grand que C. Le fait qu'avant...

M. Raynauld: C'est transitif.

M. Tremblay: Oui, c'est transitif, on est au niveau transitif ici. Donc, dans cette situation, quand vous achetiez — j'ai mentionné les chiffres tout à l'heure — votre veau à l'extérieur, vos patates à l'extérieur... Maintenant vous constatez qu'on en achète moins, il y a une présomption que c'est mieux pour les agriculteurs du Québec. Vous pouvez dire: Cela n'est pas assez chiffré, je ne crois pas. Je suis saint-Thomas, donnez-moi de vrais chiffres précis, Statistique Canada, etc. Je vous dis qu'on n'a pas besoin d'avoir tous les chiffres, pour voir une réalité. La réalité est là et le député de Huntingdon... je pense qu'on s'entendait tout à l'heure. Cela va dans la bonne direction.

M. Raynauld: Je réaffirme qu'on ne sait pas combien coûte cette politique. Je vais m'en tenir là jusqu'au moment où...

M. Tremblay: On le sait, M. le Président, c'est moins de un demi pour cent.

M. Raynauld: Si vous voulez vous référer à ce chiffre, un ou un et demi pour cent, j'aimerais savoir ce qu'est exactement ce chiffre. C'est l'excédent... c'est 1,5% de quoi?

M. Tremblay: Cela n'est pas 1,5% c'est un demi pour cent.

M. Raynauld: Un demi pour cent de quoi?

M. Tremblay: On se réfère à ce moment non pas à la politique dans son ensemble, mais à l'application, la pondération si vous voulez des prix. On a payé, dans les chiffres dont on a parlé tantôt, c'est-à-dire sur les 49%, les quelque 40% des informations connues, tout cela mis ensemble, la préférence nous a coûté à peu près un demi pour cent.

M. Raynauld: Autrement dit, vous prenez $1 500 000 000 et vous regardez les cas où le gouvernement ou les services en question n'ont pas appliqué une politique du plus bas soumissionnaire, et vous dites: l'excédent représente un demi de 1%, ce qui pourrait vouloir dire que si la politique d'achat a été telle qu'il y a eu, je ne sais pas, par exemple, 20% des soumissions, chacune de ces soumissions pouvait excéder de 10% ou de 20% un prix concurrentiel, mais lorsqu'on additionne tout...

M. Tremblay: Pas 20%, c'est 10%, le maximum.

M. Raynauld: C'est 10%, mais il y a le contenu québécois aussi, on ne sait pas combien il vaut.

M. Tremblay: Non, avec un contenu de 100%, c'est 10%; s'il y avait un contenu de 50%, ce ne serait pas plus de 5%. Le contenu et le pourcentage d'excédent de prix sont reliés. Donc, s'il y a un contenu de 10%, on ne peut pas exiger plus de 1% supplémentaire. Si vous achetez un produit qui a un contenu de 100% au Québec, le maximum d'écart de prix par rapport à un produit que vous achetez au Japon, c'est 10% au maximum. Pour le "Buy America Act", comme je l'ai dit tout à l'heure, c'est 50%.

M. Raynauld: Ce serait à vérifier.

M. Tremblay: Aux États-Unis. Oui, c'est appliqué.

M. Raynauld: C'est une loi, mais ce serait à voir si c'est 50%; cela me surprend beaucoup.

M. Tremblay: C'est 50%. Justement, à Genève, quand j'ai eu un dîner de travail avec l'ambassadeur américain, l'ambassadeur du Japon, l'ambassadeur du Canada et l'ambassadeur de la CEE, cela a été un sujet de discussion des plus animés. Aux États-Unis, on l'applique fortement. Vendredi, nous aurons une conférence de presse concernant l'usine d'autobus. Un des problèmes qu'a cette usine, c'est que le gouvernement américain donne des subventions aux municipalités américaines qui achètent des autobus. Là, on essaie de leur faire accepter — le bureau américain qui s'occupe de cela dit non — que 50% des autobus fabriqués au Québec ont un contenu américain, soit sous forme de profits d'une compagnie américaine, sous forme de pièces, etc., parce que c'est à peu près cela. Donc, cela s'applique aux États-Unis, c'est certain.

M. Raynauld: Simplement comme point de clarification, est-ce que le demi pour cent pourrait vouloir dire que, les soumissions ont excédé le prix du marché pour 10% des achats, qu'on a appliqué la règle de 10% au maximum...

M. Tremblay: C'est cela.

M. Raynauld: ... et qu'au total cela aurait pu nous donner 1%. C'est cela?

M. Tremblay: C'est cela.

M. Raynauld: C'est cela. Bon.

M. Tremblay: Dans les faits, cela semble être à peu près 0.5%.

M. Raynauld: À ce moment-là, cela voudrait dire que c'est sur 5% des achats, probablement, qu'on excède la marge d'à peu près 10%. Est-ce que ce serait cela ou est-ce beaucoup plus...

M. Tremblay: Je ne l'ai pas calculé, mais je pense que c'est moins que cela.

M. Raynauld: Moins que cela?

M. Tremblay: Je n'ai pas le chiffre précis.

M. Raynauld: Je suppose que ce n'est pas toujours 10%. C'est cela?

M. Tremblay: C'est très rare, ce n'est jamais 10%.

M. Raynauld: Jamais 10%. Mon dernier...

M. Tremblay: Je répète, M. le Président, que cet aspect du prix se révèle secondaire à l'application de la politique d'achat. Ce qui crée l'impact positif de la politique d'achat, c'est qu'on habitue les acheteurs à faire appel à un certain nombre d'entreprises du Québec, alors qu'autrement, par inertie ou par manque de volonté, on faisait souvent appel aux entreprises étrangères. Cette conscience de faire appel à nos manufacturiers est probablement le résultat le plus probant présentement. Comme vous le dites, quand vous avez quatre ou cinq fabricants du Québec qui soumissionnent, on n'est pas loin du prix du marché, à moins qu'il y ait collusion.

Dans la plupart des domaines, il y a plusieurs fabricants du Québec qui soumissionnent. La différence, c'est qu'on fait plus soumissionner maintenant les entreprises du Québec et un peu moins celles de l'extérieur dans certains cas.

M. Raynauld: M. le Président, je voudrais passer à un cas particulier qui se rapporte au répertoire. J'ai reçu une lettre d'une entreprise qui

se plaint de ne pas avoir été placée sur le répertoire. J'aimerais avoir les règles qui président au choix des produits. Quelles sont les restrictions qui s'appliquent pour qu'une compagnie ne puisse pas faire inscrire ses produits dans le répertoire québécois? Je peux être un peu plus spécifique, mais je ne peux l'être beaucoup parce que je n'ai pas eu le temps d'approfondir ce dossier. Je n'ai pas, d'ailleurs, envie...

M. Tremblay:...

M. Raynauld: Je peux vous la prêter tout de suite. Il s'agit d'une entreprise, apparemment, qui ne possède pas les équipements — elle est dans l'équipement sanitaire — en titre et qui ferait fabriquer des produits en dehors de son établissement principal ou propre et qui, par suite de cela, ne serait pas admissible à faire inscrire ses produits comme produits québécois.

M. Tremblay: Si je comprends bien, ils font assembler à l'extérieur du Québec des produits dont une partie viendrait du Québec; on mentionne 60%.

M. Raynauld: Non, les 60% se rapportent aux achats que l'entreprise fait ici.

M. Tremblay: Les achats généraux. M. Raynauld: C'est différent.

M. Tremblay: C'est tout un gros problème, la politique d'achat et l'inscription... je crois.

M. Raynauld: Autrement dit, je ne veux pas faire ici d'enquête particulière. Je voudrais tout simplement prendre cet exemple pour vous demander quelles sont les règles qui président au choix des produits. Vous devez avoir des règles.

M. Scowen: Je veux simplement aller un peu plus loin. Premièrement, j'ai reçu cette lettre moi aussi, c'est une compagnie que je connais très bien parce que j'ai été à un moment donné, dans exactement la même industrie. C'est une compagnie, comme la nôtre anciennement, qui avait toute une gamme de produits, papiers et produits sanitaires dont quelques-uns étaient fabriqués ici au Québec, quelques-uns étaient importés, quelques-uns étaient fabriqués de temps en temps au Québec et trois mois après à l'extérieur. Je vais prendre, par exemple, le savon; on peut l'acheter et faire l'emballage ici. La nature du contenu des produits change continuellement et à l'intérieur de la longue gamme de produits, il y a de petits produits et sous-produits qui sont fabriqués en partie ici au Québec ou emballés ici au Québec. Il y a toutes sortes de possibilités différentes qui sont toujours en train de changer. Je peux ajouter que j'ai reçu deux autres visites personnelles d'autres compagnies qui avaient le même problème, dans mon bureau de comté. Les deux ne voulaient pas aller plus loin que soulever la ques- tion, parce qu'ils étaient encore en négociation avec vous. Mais je pense qu'après avoir reçu une réponse de vous, au moins ce sera intéressant de voir les règles écrites, les règles que vous suivrez dans la décision que vous prendrez à savoir si oui ou non un produit est un produit québécois.

Le Président (M. Laplante): Je vais vous laisser, vu que cela amène une réponse assez longue...

M. Tremblay: Non, c'est une réponse de trente secondes...

Le Président (M. Laplante): Très courte, parce qu'il est 18 heures.

M. Tremblay: Je pense qu'on pourrait renvoyer la réponse technique à l'étude du programme portant sur le Centre de recherche industrielle du Québec qui assure la confection et la diffusion du répertoire. Globalement et en attendant qu'on arrive à ce programme, je vous signale qu'il s'agit évidemment d'une très vaste opération qui touche des milliers et des milliers d'entreprises. Les critères sont assez précis et je vois très bien ici ce dont il s'agit. C'est au fond attribuer la paternité de la production à l'une ou à l'autre des entreprises, parce qu'il me semble que ce soit fait en sous-traitance chez un manufacturier qui, lui, est très certainement identifié comme étant le responsable de cette production au Québec. Dans ce cas, la compagnie Wood voudrait sans doute être reconnue comme étant manufacturière alors qu'elle n'est pas propriétaire des équipements où, effectivement, la production industrielle est faite. C'est un problème technique que le CRIQ sera certainement en mesure de vous expliquer en long et en large quand on étudiera ce programme.

M. Scowen: Je voudrais revenir...

Le Président (M. Laplante): Non, les travaux de la commission sont suspendus jusqu'à 20 heures.

(Suspension de la séance à 17 h 59)

(Reprise de la séance à 20 h 14)

Le Président (M. Laplante): À l'ordre, s'il vous plaît! Reprise des travaux de la commission permanente de l'industrie et du commerce, pour l'étude des crédits de 1979/80. À la fin de la dernière séance le ministre venait de finir son intervention. Un député avait la parole. D'accord. M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

Recherche industrielle

M. Scowen: J'ai demandé, premièrement, entre autres, que vous déposiez les normes, les

règles du CRIQ qui sont en vigueur en ce qui concerne l'application et la nomination des compagnies et des produits dits québécois. Est-ce que c'est possible?

M. Tremblay: Dans le cadre du programme qui va traiter du Centre de recherche industrielle du Québec, qui est responsable de la confection du répertoire des entreprises manufacturières, effectivement.

M. Scowen: Concernant le groupe de tous les produits dits québécois, on peut avoir un document qui explique comment on décide si un produit est québécois ou non.

M. Tremblay: Bien sûr, parce que ce sont des règles qui ont été expliquées à toutes les compagnies qui ont été sollicitées afin de pouvoir être inscrites dans ledit répertoire. (20 h 15)

M. Scowen: La deuxième question que je veux poser à vous ou au ministre c'est: Est-ce que vous croyez qu'avec les règles qui existent actuellement il existe un certain pouvoir discrétionnaire pour les personnes du CRIQ ou pour les personnes de votre ministère, je ne sais pas qui, des fonctionnaires, de décider si oui ou non ce produit ou les produits de cette compagnie sont conformes aux normes, aux critères que nous avons établis. Est-ce qu'il y a une discrétion?

M. Tremblay: S'il existe une discrétion, je pense qu'elle est réduite à son plus strict minimum.

J'ajouterai que ce n'est certainement pas au niveau...

M. Scowen: Je pose la question parce que j'ai maintenant trois cas de compagnies où les personnes sont venues me voir en me disant que d'après elles au moins il y avait une certaine discrimination et je pense que, s'il existe même la moindre possibilité de discrimination, on doit avoir une façon, un moyen, une procédure d'appel soit au ministre, soit... je ne sais pas exactement où, mais je pense que cela s'impose, et je ne peux pas imaginer que vous ne puissiez créer des règlements et des critères, connaissant un peu comme je les connais les problèmes dont j'ai cité un exemple dans le cas de George Wood avec toutes les questions qui s'imposent. Pour moi, c'est évident, c'est presque inévitable qu'au moment de rendre une décision pour ou contre une compagnie ou un produit... Si le CRIQ ou le groupe qui détermine ces choses décide: Non, vous n'êtes pas Québécois, ou votre produit n'est pas québécois, qu'est-ce que le manufacturier ou la compagnie peut faire pour aller en appel à ce moment-ci?

M. Tremblay: Une des façons très simples de pouvoir en appeler serait de produire un document du bureau de Statistique Canada attestant qu'il est effectivement manufacturier et qu'il a des installations de productions manufacturières sur le territoire québécois. Je pense que cela résoudrait clairement le dossier.

M. Scowen: Est-ce qu'on peut dire que c'est la seule règle qui préside aux décisions? Par exemple, est-ce qu'il y a des compagnies sur la liste qui n'ont pas cette attestation?

M. Tremblay: Encore une fois, je pense qu'il serait plus avantageux de faire l'exercice en présence des gens qui ont la responsabilité technique et professionnelle de rédiger le répertoire et de rendre ces jugements. À ma connaissance, ils peuvent si peu être discrétionnaires que je ne pense pas qu'il y ait là vraiment matière à problème. Il y aura certainement, sur 10 000 ou 12 000 entreprises, des gens, peut-être quejques douzaines au Québec, qui s'estimeront lésés et leur cas sera certainement examiné au mérite, ne serait-ce que par appel auprès du conseil d'administration du CRIQ ou du ministre responsable de cet organisme devant l'Assemblée nationale, ou encore — si je comprends bien le sens des interventions qui ont été faites chez vous — auprès des membres de l'Opposition pour que leur cas soit évoqué en commission parlementaire. Je ne crois pas qu'il y ait vraiment de problème.

M. Scowen: Qui sont les gens qui ont ce pouvoir décisionnel?

M. Tremblay: C'est la direction du Centre de recherche industrielle du Québec.

M. Scowen: La direction générale?

M. Tremblay: Le président et le directeur général, sur recommandation du groupe qui effectue l'analyse technique des demandes qui sont faites, le tout étant placé sous la direction de M. Marcel Risi qui est un expert de très grande compétence, non seulement sur le plan québécois, mais également au niveau canadien. C'est un homme de grande expérience en la matière et je pense...

M. Scowen: Je veux vous signaler sur une base très honnête que la raison pour laquelle les deux compagnies que je n'ai pas nommées m'ont demandé de ne pas aller plus loin, c'est que ces compagnies croyaient que la décision était hautement politique.

M. Tremblay: Ah!

M. Scowen: Je pense — c'est possible que ce ne soit pas vrai — que ce serait important d'avoir au moins un document qui soit disponible pour tous les fournisseurs qui dirait: Si vous n'êtes pas satisfaits de la décision rendue par le président du CRIQ, vous pouvez aller... Je pense que c'est important que cet...

M. Tremblay: Je crois qu'il vaut mieux dissiper ce genre de psychose. Comme vous le dites, s'il y a certaines entreprises qui s'imaginent que

tout est décidé par le pouvoir politique, c'est complètement faux. Je me demande pourquoi on ne m'a pas envoyé de lettre à moi, le ministre, pour se plaindre, ou au président du CRIQ. Je comprends que le député de Notre-Dame-de-Grâce puisse servir d'intermédiaire, mais si on est pris avec une sorte de psychose, qu'on craint d'être victime de discrimination, alors que c'est justement le contraire... Je ne suis jamais intervenu, en ce qui me concerne, directement ou indirectement, soit pour faire ajouter ou pour faire retrancher une entreprise du répertoire.

M. Scowen: Je pense qu'il est important que soient connus les critères, la façon, la hiérarchie, si vous voulez.

M. Tremblay: Je pense que c'est très connu, mais il y a évidemment des gens qui vont critiquer la nature même des critères qui ont été reconnus.

M. Scowen: De toute façon, pour terminer parce qu'on a autre chose à aborder, je pense qu'il vous appartient premièrement de nous remettre les critères et deuxièmement un schéma des noms ou des titres des personnes qui ont le pouvoir de décision. Au moins, si on a ces renseignements, on peut répondre aux questions qui sont posées.

M. Tremblay: Lorsque nous allons étudier le programme 4, le budget du Centre de recherche industrielle du Québec, je vais demander au directeur de déposer les critères qu'il utilise pour l'introduction dans le répertoire des compagnies qui fabriquent au Québec et on identifiera le groupe et les responsables au CRIQ qui font les choix.

Le Président (M. Laplante): Y a-t-il d'autres interventions sur le programme 1? Programme 1, adopté.

M. Raynauld: II y a autre chose encore.

M. Scowen: J'ai deux derniers éléments à demander. Premièrement, avant de laisser l'affaire concernant le cabinet du ministre, est-ce que je peux demander que vous déposiez la liste des cadres pour l'année 1975. Vous avez dit ce soir que, d'après vous, cela n'est pas beaucoup changé. Je ne conteste pas ce fait, mais je pense que ce serait intéressant d'avoir une comparaison avant et après, c'est tout.

M. Tremblay: Les cadres et les salaires, tout cela?

M. Scowen: Oui, oui, la même chose. Mon salaire va apparaître là-dedans, je suis certain mais...

M. Tremblay: On va le déposer le document que vous me demandez, mais on vient de me confirmer qu'en 1975, c'était 28 personnes dans le cabinet du ministre. Or, dans notre cas c'est 26.

M. Scowen: Le dernier point que je voulais soulever, pour ma part — je ne sais pas si mon collègue a autre chose — touche la question que mon collègue a soulevée concernant la possibilité de chiffrer le succès de cette politique d'achat. Franchement, M. le ministre, avec les connaissances que j'ai des listes de prix et la complexité des listes de prix des compagnies officielles et officieuses, je pense que votre chiffre que vous avez calculé de 1%...

M. Tremblay: .5%...

M. Scowen: Cette chose-là, cela n'est pas impossible d'arriver avec un chiffre, mais je n'ai pas beaucoup confiance à cela.

M. Tremblay: ... de grandeur.

M. Scowen: Je suis plutôt porté à croire comme vous que le succès et le non-succès d'une telle politique d'achat est non chiffrable. Je soulève cette question, parce que ce que j'aimerais avoir de vous, ce soir, si c'est possible, c'est un engagement formel d'accepter ce principe dans vos déclarations à l'Assemblée nationale et vos déclarations dans les discours. Cela n'est pas suffisant de chiffrer la politique d'achat avec des chiffres que l'on voit ici ce soir. On touche des achats de $4 milliards et des choses comme celles-là qui vont impressionner la personne moyenne à cause de la grandeur mais qui franchement n'a pas de sens.

Je pense que si on peut accepter, ce soir, un traité de paix en ce qui concerne les chiffres, il serait bon que vous acceptiez ce soir devant tous vos fonctionnaires et devant tous les membres de l'Opposition de ne jamais plus essayer de chiffrer le succès ou non-succès de la politique d'achat. Pour ma part, je serais très content d'accepter votre opinion. Pouvez-vous faire cet engagement?

M. Tremblay: Je vois qu'on a des revirements dramatiques et spectaculaires. Le député d'Outremont aurait voulu qu'on lui donne ce chiffre à quatre décimales près et maintenant le député de Notre-Dame-de-Grâce nous dit un ordre de grandeur.

M. Scowen: C'est votre opinion.

M. Tremblay: Je ne suis pas ici pour prendre des engagements comme quoi je ferai telle chose ou je ne ferai pas telle chose. Je dirai ceci: Les fonctionnaires ont essayé, selon le meilleur de leur connaissance, de tracer un tableau descriptif de ce qui se passe et ils l'ont mis là. Je vais leur demander à chaque année, de me donner le maximum de renseignements. Je ne suis pas pour le minimum, je suis pour le maximum de renseignements.

Je suis d'accord avec vous, c'est un ordre de grandeur, il ne faut pas trop insister, mais comme vous vous en rendez compte, même si je suis le ministre responsable de la politique d'achat, on

parle rarement de la politique d'achat. Je crois plutôt qu'on applique une politique d'achat, plutôt que d'en parler trop. Et on essaie de l'appliquer, le mieux possible.

Il a des cas concrets où, parfois, on peut donner des indications. On me souligne par exemple le cas d'une usine d'assainissement des eaux dans l'ouest du Québec, où on a déplacé $8 millions de commandes, par la politique d'achat. Je pense que ce sont des cas concrets et on peut en parler. Et je ne m'engagerai certainement pas à ne pas en parler, n'en déplaise au député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Scowen: Je pense que si vous suivez la logique de votre opinion et que vous dites qu'on a déplacé un tel montant d'achat, il faut, avec les chiffres précis que vous acceptez de nous donner sur le coût de ce déplacement, en termes de toutes les données... En effet, c'est compliqué.

M. Tremblay: C'est ce que je viens de dire. On donne le maximum de renseignements, ni plus, ni moins.

M. Raynauld: M. le Président, le problème n'est pas là. Le problème est qu'au début de 1977, votre collègue, le ministre d'État au développement économique, quand il a parlé de la politique d'achat, a dit que cela valait de $300 000 000 à $400 000 000, au Québec.

M. Tremblay: Cela se défend.

M. Raynauld: Et dans la mesure où vous n'êtes pas capable d'apporter plus de chiffres que ceux que vous avez là, cela veut dire que vous n'êtes pas capable de prouver l'avancé qui a été fait. C'est ce que cela veut dire. À ce moment-là, on dit: Très bien. Vous n'êtes pas capable de prouver cela, on va l'accepter. Mais ce que je pense que mon collègue veut soulever, c'est qu'à l'avenir, on n'acceptera pas non plus d'autres déclarations du même genre si, en commission parlementaire, le gouvernement nous dit: On ne peut pas chiffrer l'impact de la politique d'achat pour le Québec. Mais avant qu'elle soit appliquée, la politique, c'est curieux comme il y avait des ministres qui étaient capables de chiffrer cela. C'était de $300 millions à $400 millions, si mon souvenir est bon. Je ne veux pas mettre mon siège en jeu là-dessus. Mais c'était de $300 millions à $400 millions, si ma mémoire est bonne.

L'année passée, j'ai essayé de savoir quel était l'impact de la politique d'achat. On a dit: C'est trop tôt, la politique vient juste de commencer. Cette année, on nous dit: Cela ne se chiffre pas, de toute façon, et ce n'est peut-être pas significatif.

Je n'ai pas d'objection à cette réponse, que ce ne soit pas significatif. Je n'ai pas d'objection. Mais à ce moment-là, si on n'a pas d'objection à cela, cela ne veut pas dire non plus qu'on va accepter dorénavant d'autres affirmations du même genre, disant que cela rapporte $300 millions, que cela rapporte $400 millions, et que cela rapporte tant d'emplois. C'est cela qu'on veut souligner.

Et en plus, je pense que dans la mesure où ce serait possible d'avoir des mesures, je préférerais en avoir, plutôt que de ne pas en avoir.

M. Tremblay: Je répète ce que je viens de dire. En ce qui concerne les cas concrets, on a en a discuté dans l'agriculture, avant le dîner. On peut avoir des résultats. On a fait des compilations. Pour le jus de pomme, c'était de tant de pourcentage et de tant de pourcentage. Pour l'image globale, on me dit que c'est à peu près 70%, le contenu québécois, pour les $1 500 000 000. C'est un renseignement qui veut dire ce qu'il veut dire. Je ne vois pas pourquoi on s'engagerait à dire: Si on ne donne pas tout, on tombe à rien. On va donner ce qu'on a.

M. Raynauld: M. le Président, la raison pour laquelle on pose des questions, c'est que, par exemple, ce soir, j'ai demandé à mon collègue le député de L'Acadie, qui a passé à travers les crédits du ministère de l'Éducation. Au ministère de l'Éducation, le ministre a répondu que si on ne savait pas exactement quel était l'impact de la politique d'achat, c'est que, vraisemblablement, il n'y en avait pas d'impact. Même avant la politique d'achat, qui était officiellement introduite par vous, cela se faisait déjà avant. Dans ce secteur-là... C'est le ministre, apparemment, qui a répondu cela. Je le tiens du député de L'Acadie. Là non plus, je ne peux pas vous citer la chose. Mais celle-ci a eu l'impression très nette que le ministre lui a dit: L'impact est très minime, parce que cela se faisait déjà avant. Les commissions scolaires, elles achetaient déjà au Québec, dans la mesure du possible. Et le réseau de l'éducation achetait au Québec. On ne sait pas exactement combien, on ne sait pas non plus aujourd'hui exactement combien, mais c'est minime. C'est ce que le ministre a répondu. (20 h 30)

Je n'ai pas non plus d'objection à ce qu'on nous réponde cela, mais, à ce moment-là, si c'est cela la situation, ne venez pas nous raconter dans un mois ou dans deux mois que la politique d'achat a été un instrument révolutionnaire d'intervention du gouvernement du Québec. C'est simplement cela.

M. Tremblay: Je comprends un peu la préoccupation des députés de l'Opposition libérale. C'est vrai qu'il y a une marge d'interprétation qui peut varier lorsqu'on dit qu'il y avait une politique d'achat, mais qu'elle était non officielle ou cachée. Il est possible qu'il ait existé avant des initiatives locales. Je sais qu'au service des achats, il y avait une certaine préoccupation — à l'Hydro-Québec, entre autres, il y en a déjà une — mais il n'y avait aucune politique centralisée du gouvernement avec des normes qui s'appliquaient à toutes les composantes.

M. Raynauld: C'est le sens commun. Le député de L'Acadie est l'ancienne présidente de la CECM. Elle a dit: Pensez-vous qu'on faisait exprès pour aller acheter les choses en Ontario? On n'était quand même pas si stupide que cela.

M. Tremblay: II ne s'agit pas de mettre en doute la bonne volonté que les gens avaient, mais je pense que mon sous-ministre de la politique d'achat pourrait en témoigner, le bon vouloir et la bonne volonté souvent ne suffisaient pas. On a cependant réussi à débloquer et à changer des habitudes qui, même si elles relevaient de la bonne volonté et de la bonne foi, n'étaient pas favorables aux entreprises du Québec.

Je pense qu'il faut illustrer ceci dans le secteur de l'éducation, par exemple. On va oublier un peu l'aspect préférentiel, parce que c'est un peu moins lourd dans la politique, je pense, qu'on voudrait que ce le soit. On a deux opérations, par exemple, en cours actuellement, qui visent à globaliser les achats dans le domaine informatique, l'ensemble des cégeps, dans un premier temps, l'ensemble du renouvellement du réseau des commissions scolaires, dans un deuxième temps. Évidemment, c'est la Fédération des cégeps, dans un cas, et la Fédération des commissions scolaires, dans l'autre, qui sont, si vous voulez, partie prenante à la table de négociation. On est intervenu auprès du ministère de l'Éducation pour avoir une globalisation, parce qu'on espère — évidemment, on ne peut juger de rien, qu'avec des contrats de cette ampleur, on pourra avoir certaines retombées économiques au Québec.

Cela ne veut pas dire que les gens des commissions scolaires ne voulaient pas acheter au Québec avant ou qu'ils ne cherchaient pas de retombées économiques, mais je pense que le fait est que la politique prévoit des procédures pour globaliser les achats. En tout cas, nous estimons que c'est une possibilité d'aller chercher beaucoup plus, ce qu'il n'était pas interdit de faire avant non plus, mais la politique a incité les gens à le faire et elle a finalement obtenu leur consentement.

Le Président (M. Laplante): D'autres questions?

Une voix: II y a beaucoup de questions qu'on peut soulever sur la politique d'achat, mais je pense que...

Le Président (M. Laplante): Oui, M. le député de Champlain.

M. Gagnon: À la suite de ce que le député d'Outremont...

M. Tremblay: Est-ce que vous êtes pour ou contre la politique d'achat? Je vous écoute parler. Parfois vous semblez dire: Cela existait avant, cela devait être bon. Dans un autre bout de phrase, cela a l'air de ne pas être bon. Pourriez-vous m'éclairer un peu, me donner votre position sur cela?

M. Raynauld: Cela n'a pas d'importance, étant donné qu'on n'est pas au pouvoir.

M. Tremblay: Ah bon! Vous cachez donc votre politique, vos philosophies?

M. Raynauld: On ne cache rien.

M. Scowen: On a des réserves sérieuses sur votre politique d'achat.

M. Tremblay: Vous parlez d'un type de philosophie économique qui n'est pas la même qu'on retrouve dans bien des bouches libérales, M. Scowen. C'est pour cela que j'aimerais peut-être que le député d'Outremont... C'est parce que, tout à l'heure, il semblait dire que cela s'appliquait... Même le député de L'Acadie aussi appliquait la politique d'achat à la CECUM. Maintenant, le député de Notre-Dame-de-Grâce me dit qu'il a des réserves très sérieuses. Est-ce qu'il critique le député de L'Acadie pour avoir appliqué une politique d'achat avant qu'on...

M. Scowen: Sur quoi?

M. Tremblay: Sur la politique d'achat.

M. Scowen: Sur la vôtre.

M. Tremblay: La nôtre n'est pas bonne, mais si elle était de quelqu'un d'autre, elle serait bonne?

M. Scowen: Non, je pense que si vous étiez prêts à nous écouter, vous pourriez améliorer la vôtre jusqu'au point où on pourrait l'approuver.

M. Tremblay: Avez-vous proposé une autre amélioration? On devrait peut-être essayer de quantifier un peu plus?

M. Scowen: Je ne sais pas jusqu'à quel point on va continuer le débat sur la politique d'achat, c'est la seule question que je me pose.

M. Tremblay: En n'importe quel temps.

M. Scowen: Est-ce qu'il y a des limites sur les crédits?

M. Gagnon: Oui, il y a possibilité que quelqu'un d'autre pose des questions ou donne des informations.

M. Scowen: Dans ce cas, si vous acceptez de ne pas mettre une limite à l'étude des crédits, personnellement, je serais prêt à entreprendre une étude sérieuse de la politique d'achat avec vous ici ce soir, mais si vous insistez sur une limite totale de dix heures sur l'étude des crédits, je pense que ce ne sera pas possible.

M. Tremblay: Ce n'est pas une nouvelle limite, elle a toujours existé.

M. Scowen: Dans ce cas-là...

M. Tremblay: II faut dire que notre commission sera très occupée d'ici la fin de juin, puisque nous allons avoir la semaine prochaine...

M. Marchand: II y a déjà eu 25 heures pour l'étude de crédits.

M. Tremblay: ... vous pouvez aussi, mais on parle de la limite légale. La commission va étudier le plan de reconversion de Marine. Donc, nous allons discuter sur cela. Nous allons avoir la Loi sur la SDI, la loi 7, qui va nous amener à rediscuter, et la Loi évidemment sur le crédit des pêches maritimes. Ce sont toutes des choses très intéressantes.

M. Raynauld: Vous allez être chanceux si vous vous rendez jusqu'à la fin de juin avec tout cela, si vous faites adopter tout cela.

M. Tremblay: Ce sont de bonnes lois. Si vous voulez faire de l'obstruction, évidemment, on ne les adoptera pas.

Le Président (M. Laplante): II faudrait revenir à l'étude des crédits. M. le député de Champlain, vous aviez des questions.

M. Gagnon: Je voulais seulement ajouter un mot, parce que je n'aime pas la façon dont le député d'Outremont a semblé vouloir dire tantôt que ce n'était pas significatif finalement, la politique d'achat, que c'était plutôt politique qu'autre chose. C'est ce que vous avez dit.

M. Raynauld: Ce n'est pas cela. J'ai dit que le ministre de l'Éducation avait dit que ce n'était pas significatif. Ne changez pas le sens de mes phrases.

M. Gagnon: Une chose est certaine. Même si ce n'est peut-être pas quantifiable, même si on ne peut peut-être pas donner les chiffres, on a seulement à faire le tour des comtés et aller visiter les industries de nos comtés. Vous allez vous rendre compte que notre politique d'achat jusqu'à maintenant a rendu des services énormes, les industriels nous le mentionnent. Ce n'est peut-être pas quantifiable actuellement, mais c'est un fait que c'est, de toutes les politiques que le gouvernement a votées depuis deux ans, un de celles qui ont le plus aidé les industriels de nos comtés. J'ai quelques industries en tête dont les propriétaires, les actionnaires m'ont mentionné que, maintenant, ils peuvent vendre à l'Hydro-Québec ou à certains organismes gouvernementaux ou paragouvernementaux, alors que, dans le passé, ils ne pouvaient absolument pas le faire. La politique d'achat chez nous, selon ces industriels, a été probablement la politique la plus efficace adoptée pour aider les industries.

Quand on essaie de montrer que c'est une politique qui n'est pas significative, c'est faux.

Le Président (M. Laplante): M. le ministre.

M. Tremblay: M. le Président, en commentant le commentaire du député de Champlain, avant de donner la parole au député de Bourassa, on doit certainement faire quelque chose de bien comme gouvernement, quand on voit l'emploi manufacturier augmenter au rythme auquel il s'accroît présentement. Pour répondre au député d'Outremont, c'est évident qu'on ne peut jamais dire que les emplois se sont accrus de 33 000 au cours des quatre premiers mois dans le secteur manufacturier à cause d'une politique, puisqu'on en a tellement de politiques présentement qui visent à favoriser le développement industriel. On peut peut-être dire que l'ensemble de ces politiques a certainement eu un impact positif.

Le Président (M. Ouellette): M. le député de Bourassa.

M. Laplante: Vous m'excuserez, je n'ai pas voulu prendre la parole là-bas. C'est l'habitude d'un président de commission, quand il a quelque chose à dire, de demander de se faire remplacer. Vous avez parlé tout à l'heure de la CECM, où j'ai été commissaire durant quatre ans. La politique de la CECM, à ce moment, était de suivre les normes du ministère par soumissions et d'aller au meilleur marché, quel que soit le produit de son origine. J'ai parlé avec M. Courcelles depuis l'élaboration d'une politique d'achat chez nous. C'est une grande difficulté à laquelle il a à faire face — cette année, je ne sais pas s'il doit encore y faire face — de suivre les politiques du gouvernement pour l'achat chez nous. Il y a certains produits qu'il serait obligé de payer un petit peu plus cher. Il y avait de bonnes perspectives dans ce que M. Courcelles me dit, pour essayer d'appliquer, non pas en entier, mais dans ses grandes lignes, l'achat chez nous. On sait que la CECM représente encore plusieurs centaines de milliers de dollars. Je conteste pas mal ce que le député de L'Acadie vous a dit tout à l'heure.

Le Président (M. Ouellette): M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Scowen: Avant de terminer le sujet des politiques d'achat, parce que le ministre a suggéré... De mon côté, j'étais contre. Je veux souligner deux points. Premièrement, durant mon séjour d'une année et demie à votre ministère, on a passé des heures et des heures sur cette question. La politique d'achat, ce n'est pas quelque chose qui est né le 16 novembre 1976. C'est quelque chose qui existait dans une forme ou l'autre bien avant que vous n'arriviez au pouvoir. J'ai participé à beaucoup de discussions et de débats là-dessus. De plus, M. le ministre, avant d'arriver dans le secteur public, j'étais un industriel. Je faisais partie d'une industrie qui faisait affaires avec les gouvernements. On fabriquait le papier de toilette qui est acheté par tous les gouvernements et toutes les commissions scolaires, etc. J'avais une certaine expérience de la façon possible de contourner la politique des gouvernements. Pour ces raisons, avec l'expérience que j'ai vécue au sein du secteur privé et au sein du ministère de l'Industrie et du Commerce, dans les politiques d'achat avant que

vous ne soyez dans le domaine politique, j'ai certaines réserves.

Si vous voulez discuter en détail une politique d'achat ce soir, je serai très content de le faire. Je pense que, finalement, c'est peut-être quelque chose qu'on peut discuter à deux ou à trois. C'est une chose compliquée, comme tout le monde le sait. Ce soir, vous avez dit qu'il faut que ce soit incitatif. C'est une révélation pour vous, je pense, depuis que vous êtes arrivé au pouvoir. Il y a toutes sortes d'éléments compliqués là-dedans. Pour moi, je pense que vous ne voulez pas que cette commission continue jusqu'à la fin de juin, on doit passer à d'autres sujets.

M. Tremblay: Je suis d'accord avec le député de Notre-Dame-de-Grâce. Évidemment, on pourrait passer beaucoup de temps et, comme il le souligne, nous allons avoir plusieurs sujets à discuter dans cette commission. C'est un bon signe que la commission de l'industrie et du commerce soit occupée. Mais j'accepte son invitation pour qu'après, on puisse prendre un café ensemble pour qu'il m'explique comment il s'y prenait pour contourner les politiques d'achat quand il était dans le secteur privé. C'est quand même intéressant pour moi comme ministre de l'Industrie et du Commerce.

M. Scowen: Je crois que c'est important de comprendre ces choses.

Le Président (M. Laplante): Êtes-vous prêts à adopter le programme 1 ?

M. Scowen: Non.

M. Raynauld: Non, dans le programme 1, il y a une autre section.

Investissements étrangers

Le Président (M. Laplante): La section des investissements étrangers.

M. Tremblay: Oui une autre... M. Raynauld: II y a encore...

M. Tremblay: Sur cela, je vais vous faire un court commentaire. Je soulignerais simplement les points saillants de la dernière année concernant la direction de l'analyse et l'évaluation des projets d'investissements étrangers.

Il y a peut-être un certain paradoxe ici. D'une part... Je m'en remets toujours un peu plus au député de Notre-Dame-de-Grâce qu'à celui d'Outremont. Je m'en tiens toujours à ses propos. Il y a de l'hostilité au Québec contre l'entreprise privée. Cela va mal, c'est terrible, et je regarde les demandes d'acquisition d'entreprises québécoises par des intérêts étrangers. En 1978/79, une augmentation de 39%. Cela a l'air que les entreprises étrangères se ruent vers le Québec pour être à l'intérieur du Québec. S'il y avait autant d'hostilité, il me semble que la logique serait qu'elles se rueraient pour ne pas entrer au Québec. Je regarde la provenance. 71% des demandes proviennent des États-Unis. Pourtant, c'est un pays anglophone, les États-Unis. Les compagnies américaines n'ont pas l'air d'avoir peur du Québec. Je regarde ça. Elles furent approuvées dans 77% des cas. Les pays d'Europe ont présenté 25% des demandes qui furent approuvées dans 96% des cas.

Le secteur de la fabrication est le plus visé par les investissements étrangers, 49%; le secteur du commerce, 30%. C'est déjà une indication. Cela, c'est pour les acquisitions d'entreprises.

En ce qui concerne la création de nouvelles entreprises, là encore, il y a un autre paradoxe. Cela augmente de 10% pour l'an passé par rapport à l'année précédente. Il y a 65 demandes de création de nouvelles entreprises de la part d'entreprises étrangères. Les pays d'Europe et des États-Unis ont présenté également 44% des demandes qui furent approuvées dans 80% des cas.

De deux choses l'une: Soit que le message que véhicule le député de Notre-Dame-de-Grâce est vrai, à savoir qu'il y a une hostilité fondamentale de la part du gouvernement contre l'entreprise privée et qu'être une entreprise étrangère au Québec et parler une langue qui n'est pas la langue française, c'est un handicap insurmontable et là, on s'attendrait qu'il y ait une absence de volonté des entreprises étrangères de venir au Québec; ou ce n'est pas vrai et les entreprises étrangères, américaines entre autres, ou européennes, considèrent le Québec comme une bonne terre d'investissements. Je pense que c'est la dernière interprétation.

M. Scowen: J'ai quelques questions sur les investissements étrangers. Je suis content que M. Descôteaux, qui est un expert là-dedans, soit ici ce soir, et M. Déry; M. Marier aussi...

M. Tremblay: ... directeur du CRIQ maintenant.

M. Scowen: Avec lui, on a de la matière pour un colloque là-dessus.

Premièrement, M. le ministre, je pense que, si je me rappelle bien, il y avait un tableau, l'année passée, et je pense que ce serait intéressant d'avoir certaines précisions sur ces chifres. Je peux vous demander de nous donner quelques détails, si vous pouvez prendre note. (20 h 45)

Premièrement, le nom des compagnies qui ont accepté, qui ont demandé... ce n'est pas dans un fond de tableau cette année; c'est un peu plus difficile à sortir, mais pour les acquisitions, si je comprends bien, il y a 80% de 133 ce qui veut dire à peu près 82 compagnies dont les acquisitions étaient approuvées pour l'année 1979. C'est correct? Est-ce qu'on peut avoir le nom de ces compagnies, le secteur et la valeur de l'investissement proposé? Est-ce qu'on peut avoir également les détails sur la mise en chantier? Ou, si vous voulez, non pas la mise en chantier, parce que c'est une

acquisition souvent, des actions. Est-ce que l'acquisition est réalisée? Parce que, de temps en temps, comme M. Déry le sait très bien, on approuve une acquisition qui ne se réalise pas. Alors, est-ce qu'on peut avoir les détails sur les 82 compagnies, les noms, le secteur et des explications, si cette acquisition a été faite ou non.

Deuxièmement, est-ce qu'on peut avoir un tableau qui nous indique le nombre de ces acquisitions par rapport aux années antérieures et aux autres provinces du Canada? En effet, est-ce qu'on peut avoir un tableau complet de l'investissement ou les demandes d'investissement et les réalisations ici au Québec, par rapport aux années antérieures et aux autres provinces? Je suis certain qu'ils sont disponibles, parce que si je me rappelle bien, ce sont des chiffres qui étaient...

M. Tremblay: D'accord.

M. Scowen: Ce renseignement nous permettra de voir vraiment si la bonne santé, le désir d'investir au Québec est aussi fort que vous le prétendez.

M. Tremblay: Sur ces deux points, M. le Président, quant à la liste des noms des entreprises impliquées, dès qu'elle sera rendue publique par l'agence fédérale de tamisage des investissements étrangers, nous pourrons la rendre publique. Donc, on peut vous faire une copie de la liste. En ce qui concerne le tableau depuis 1974, oui, nous avons ça aussi.

M. Scowen: Est-ce que cela a augmenté ou baissé?

M. Tremblay: Cela a augmenté par rapport à l'an passé, de 39%.

M. Scowen: Mais par rapport à 1975, 1976, ce sont des chiffres qui sont pour moi...

M. Tremblay: On peut répondre partiellement à cette question à plusieurs volets. On peut vous donner les nombres. Lorsqu'on parle d'acquisition d'entreprises, on peut vous donner la quantité de cas approuvés par le fédéral. Ce qu'on ne peut pas vous donner — on peut vous donner également la liste d'acceptation par le cabinet fédéral — c'est individuellement le montant des investissements, parce que ça présupposerait une recherche individuelle dans chacun des dossiers, parce que ces données sont sur ordinateur et les chercher individuellement, ça nous demande une recherche individuelle dans chacun des dossiers.

Au point de vue des réalisations, si on parle d'acquisition d'entreprises nous ne savons pas malheureusement si l'acquisition a eu lieu ou non. Ce qu'on peut dire, c'est que dans à peu près 85% à 90% des cas qui nous sont soumis par le fédéral, déjà, l'acquisition de l'entreprise est réalisée sous réserve de l'acceptation par le cabinet fédéral.

Donc, dans cette proportion, si l'acceptation est faite par le cabinet fédéral, on peut présuppo- ser que les transactions ont eu lieu. Mais quant aux 10% ou 15% qui restent, il nous est absolument impossible au point de vue des acquisitions de vous donner le résultat concret.

M. Scowen: mais...

M. Tremblay: M. le député de Notre-Dame-de-Grâce, si vous le permettez, la présomption chez les entreprises — là, j'ai une demande auprès de l'agence fédérale du tamisage des investissements étrangers — peut ne pas être un critère d'intention, cela me paraît un peu tiré par les cheveux.

Il est évident qu'une entreprise ne se lance pas dans ce processus en embauchant des avocats et en faisant des démarches et des transactions, sans refléter une intention ferme de sa part. Surtout lorsque l'on dit qu'il y a une augmentation de 39% des demandes d'acquisition à l'entreprise, c'est une indication importante, même s'il y a peut-être un certain nombre de transactions qui ne sont pas complétées. Je préfère présumer que toutes ces demandes ont été faites sur une base sérieuse, que ça reflète vraiment l'intention des preneurs de décisions et que c'est une sorte de vote de confiance dans l'économie du Québec.

M. Scowen: Au contraire, M. le ministre, je suis complètement d'accord avec vous qu'une demande est normalement sérieuse, mais, finalement, le moment de la vérité, c'est le moment où l'argent est dépensé et versé. Cela m'étonne énormément de vous entendre dire que ce n'est pas possible de savoir si les acquisitions ont été réalisées ou non, parce que, normalement, et le fédéral et le gouvernement du Québec ont les conditions qu'ils attachent à ces acquisitions qu'ils ont l'intention de poursuivre, de vérifier: si le nombre d'emplois promis a été créé, si les achats québécois ont été faits et ainsi de suite.

Si vous me dites ne pas avoir le moyen de savoir si les acquisitions ont été faites ou non, vous me dites en fait que vous n'avez pas la possibilité de poursuivre les conditions, de vérifier les conditions que vous avez appliquées à cet achat. Je trouve que c'est impensable.

M. Tremblay: Bon, il faut faire attention ici, M. le Président. On parle d'une loi adoptée par le gouvernement fédéral libéral. Le gouvernement du Québec se trouve à fournir un soutien, un appui à l'application de cette loi et a un personnel, au ministère de l'Industrie et du Commerce, pour formuler des avis à l'agence fédérale. Il n'est pas question pour nous de jouer un rôle policier et aller vérifier ensuite si telle entreprise a vraiment fait ce qu'elle disait dans un énorme document, souvent ce document a deux, trois et même quatre pouces d'épaisseur. Faisons-nous une idée. Ou on veut des interventions du gouvernement dans la vie des entreprises, que le gouvernement se mette le nez partout dans le fonctionnement des entreprises, ou on veut minimiser le "red tape". Je suis un peu d'accord qu'on devrait minimiser le "red tape", en autant qu'ils soumettent une application

et qu'on accepte, c'est à eux à poursuivre leurs transactions. On n'ira pas leur demander de rendre des comptes, à savoir si c'était vraiment douze employés qu'ils avaient dit et ils en ont engagé onze ou s'ils vont en engager treize. Cela nous prendrait une armée de bureaucrates pour faire tout ça.

M. Scowen: Vous ne poursuivez pas la réalisation des conditions que vous imposez?

M. Tremblay: Les conditions ne sont pas imposées par nous, c'est imposé par le gouvernement fédéral.

M. Scowen: Est-ce que je peux poser une autre question très simple? Est-ce que vous pouvez nous dire combien d'acquisitions et de créations de nouvelles entreprises par les étrangers ont été réalisées en 1978 au Québec?

M. Tremblay: Si vous voulez une réponse, je demanderais au gouvernement fédéral de vous la donner parce que ce sont eux qui ont à suivre annuellement les engagements pris par les compagnies.

M. Scowen: Si je comprends bien, vous me dites...

M. Tremblay: Pour notre besoin de promotion industrielle au ministère, nous faisons un suivi des créations des nouvelles entreprises, mais nous ne suivons pas les acquisitions d'entreprises.

M. Scowen: Ce que vous me dites, M. le ministre ou M. Déry, c'est que le ministère de l'Industrie et du Commerce du Québec n'est pas en mesure de dire, avec la loi FIRA et votre propre système à l'intérieur du ministère, à la population du Québec combien d'entreprises ont été acquises durant l'année 1978 par les étrangers et combien de nouvelles entreprises ont été réalisées par les étrangers.

M. Tremblay: Oui, on est en mesure. On a dit qu'on allait vous déposer les tableaux depuis 1974 sur l'économie du Québec. Il n'y a aucun problème, mais maintenant vous nous demandez des renseignements du gouvernement fédéral.

M. Scowen: Est-ce que vous pouvez vous engager à déposer...

M. Tremblay: Mais oui, je l'ai dit tout à l'heure, il n'y a pas de problème pour ça. Vous dites: On devrait avoir plus de renseignements sur cette loi fédérale, mais si on veut avoir deux gouvernements et que chacun a ses responsabilités, c'est au gouvernement fédéral à les fournir. Je présume que FIRA publie d'ailleurs un rapport annuel. C'est le gouvernement fédéral qui accorde les permis. La préoccupation du gouvernement du Québec — c'est la Direction de l'analyse et de l'évaluation des projets d'investissements étrangers qui en est chargée — c'est d'obtenir les avis sectoriels des retombées économiques de telles transactions de la part d'un ministère à l'intérieur d'un gouvernement ou de la part du ministère de l'Industrie et du Commerce, souvent, pour savoir si on doit recommander un avis favorable ou non.

On n'a pas d'autre responsabilité parce que nous n'avons pas de loi nous-mêmes qui nous permette d'utiliser une approche de monétariat auprès des entreprises.

Le Président (M. Laplante): Le député de Huntingdon, sur le même sujet.

M. Scowen: Je veux revenir avec une question, mais je pense que...

Le Président (M. Laplante): C'est parce que ça fait longtemps que le député de Huntingdon a demandé la parole et je pense que ce serait raisonnable de la lui accorder.

M. Dubois: Sur la même question, ça fait suite à votre demande de tout à l'heure. Au niveau des projets d'investissements étrangers qui se situent et se réalisent au Québec, est-ce que vous avez un tableau comparatif qui indiquerait quel pourcentage des projets réalisés au Canada qui se situeraient au Québec? En ce qui a trait à l'ensemble des projets d'investissements qui se réalisent au Canada, est-ce que vous avez un pourcentage qui indique combien se réalisent au Québec, par rapport à l'ensemble canadien?

M. Tremblay: On a un tableau qui nous donne des indications par rapport à l'Ontario et à l'ensemble canadien. On n'a pas de répartition provinciale.

M. Raynauld: Est-ce que c'est dans les tableaux que vous avez distribués?

M. Tremblay: Je ne sais pas jusqu'à quel point...

M. Dubois: S'il y a 200 projets...

M. Tremblay: On a comparé, pour suivre les années antérieures, le Québec, le Canada et l'Ontario et les différents... On n'a pas les provinces de l'Atlantique et les provinces de l'Ouest.

M. Dubois: J'aimerais savoir quel pourcentage reçoit le Québec comme investissements, face à l'ensemble canadien.

M. Tremblay: On ne l'a pas en montant.

M. Dubois: Vous l'avez seulement en projets.

M. Tremblay: En projets, oui, en nombre.

C'est un peu ça qui est paradoxal, c'est une loi qui vise à ralentir, du moins c'était l'intention du législateur à Ottawa, la prise de contrôle; parfois, on semble être ambivalent dans le sens où

on dit: Plus il y en a, mieux c'est, mais la loi a pour but de ralentir le nombre d'acquisitions. Je ne crois pas que ce soit nécessairement un signe de santé que notre "entrepreneurship" local ait tendance à abdiquer au profit de l'entrepreneur étranger. L'idéal, le dynamisme d'une économie, c'est qu'elle reprenne du terrain perdu, qu'on soit moins dépendant de l'étranger, du moins c'était... À moins que le genre de nationalisme du gouvernement libéral à Ottawa ait été complètement déplacé. Je pense que c'était l'intention...

Donc, je ne sais pas, le fait que ça augmente de 39% pour l'an passé, si ça signifie que l'économie du Québec se porte mieux ou pas, je ne le sais vraiment pas.

M. Raynauld: En ce qui me concerne, les 39%, je pose le problème de fond, ce que je préférerais avoir, c'est la fraction que représente cette augmentation de 39% dans l'ensemble du Canada. Puisqu'on interprète ces statistiques, comme le ministre l'a fait au tout début, en disant des entreprises: Voyez comme elles aiment venir au Québec, la proportion augmente beaucoup. J'attends de voir le rapport pour voir exactement ce qui en est de ce côté et voir exactement ce que le député de Huntingdon demandait.

M. Tremblay: On peut distribuer les chiffres bruts qui existent, vous ferez les commentaires que vous voudrez, sur ça.

M. Raynauld: C'est ça.

M. Tremblay: J'ajouterais sur cette question que c'est quand même une évolution des choses qui existe au Québec. On peut toujours se comparer à l'Ontario ou aux autres provinces...

M. Raynauld: II y a des éléments conjoncturels là-dedans, le ministre le sait très bien. Avant de donner des interprétations pour dire que les gens, comme le ministre d'État au développement économique l'a dit l'autre jour, que tout le monde était à nos pieds et qu'il se présentait en queue à la porte, on voudrait vérifier ça. Ce n'est pas autre chose.

M. Tremblay: Le ministre d'État au développement économique faisait allusion aux emprunts de l'Hydro-Québec dont les obligations se vendent très bien sur le marché international.

M. Raynauld: Tout à l'heure, M. le Président... peut-être qu'il n'a pas terminé.

M. Dubois: On a indiqué qu'on peut quantifier le nombre de projets qui se situent au Québec, mais ce n'est pas tellement indicateur des investissements qui se réalisent ici, étant donné qu'on ne peut pas vérifier les millions ou les centaines de milliards de dollars qui se rattachent aux investissements.

On peut recevoir des projets de moins d'envergure que l'Ontario ou d'autres provinces canadiennes.

M. Tremblay: Prenez un projet comme celui de Ford. Ford étant à l'étranger, dans une année, ça vous bousille une série de statistiques. (21 heures)

M. Dubois: Comme si vous en aviez 200 ou 300, possiblement; ça dépend si ce sont de petits projets.

M. Tremblay: En fait, de mémoire, avant que les tableaux nous arrivent, les acquisitions, c'est cumulatif, par exemple. Les acquisitions à l'entreprise, de 1974 à 1979, représentent, pour le Québec, environ $3 milliards d'actifs. Pour les nouvelles entreprises, c'est de l'ordre de $200 ou de $225 millions de nouveaux investissements.

M. Dubois: Est-ce que l'Ontario fournit des données sur la question d'entreprises qui seront...

M. Tremblay: Cela nous parvient du fédéral qui fait la répartition. Il faut attendre la publication de son rapport annuel pour en connaître la répartition géographique à travers le Canada.

M. Dubois: Et l'investissement en milliers de dollars?

M. Tremblay: C'est fait de façon à ne pas faire connaître les projets individuels. Alors, à ce moment, vous avez des chiffres par province qui n'apparaissent pas, mais qui apparaissent dans le total.

M. Dubois: D'accord.

M. Tremblay: M. le Président, je pense que c'est important de faire un autre commentaire. La loi FIRA, la Loi de tamisage des investissements étrangers, s'applique aux nouvelles entreprises étrangères qui viennent investir dans un nouvel investissement. Lorsque vous avez une entreprise étrangère qui est sur place et qui réinvestit ses profits — prenons Gulf Oil — ça ne passe pas par FIRA. C'est uniquement quand c'est une nouvelle entreprise.

Donc, on ne peut pas tirer des chiffres de FIRA, des conclusions sur la contribution des entreprises étrangères au volume des investissements, non. Je reviens à la marge de tout à l'heure. Quand il y a une tendance à ce qu'il y ait un plus grand nombre d'entreprises étrangères pour venir, ça veut dire qu'il y a des centres de décision qui semblent être favorablement acquis à aller dans une direction. C'est comme la loi de l'offre et de la demande. Si la demande est plus forte que l'offre, habituellement, le prix monte. Si l'offre est plus forte que la demande, les prix ont tendance à baisser.

Je présume qu'il y a une demande pour les entreprises et c'est pour ça que, parfois, nous recommandons que ne soit pas réalisée telle transaction, lorsqu'on se rend compte que ce n'est pas dans l'intérêt du Québec qu'une entreprise qui est en plein essor et qui a son marché soit vidé de ses forces vives et serve de véhicule à une entreprise étrangère qui vient se servir d'une entreprise en expansion.

M. Dubois: Pour ma part, j'ai terminé sur ce sujet particulier.

M. Raynauld: M. le Président, ma question avait trait aux investissements. J'avais compris tout à l'heure, de la part de M. Déry, qu'on n'avait pas de données sur les investissements, mais il y en a dans le tableau.

M. Tremblay: II y a des données sur les investissements.

M. Raynauld: Dans le tableau de l'année passée.

M. Tremblay: Ce que M. Scowen laissait sous-entendre, c'était le suivi des acquisitions, si réellement elles avait été faites dans les faits. C'est le fédéral qui peut nous le dire, parce que lui seul fait le suivi des dossiers, tandis que nous, nous faisons...

M. Raynauld: Mais il existe, pour la création de nouvelles entreprises, les statistiques que vous nous avez fournies de l'année passée...

M. Tremblay: Vous allez avoir le même genre, la même présentation.

M. Raynauld: On va avoir la même chose pour cette année. Alors, on va attendre d'avoir les rapports et on les regardera.

M. Scowen: Je veux simplement, si vous me le permettez M. le Président...

Le Président (M. Laplante): Le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Scowen: ... aller une dernière fois à ces chiffres. Je vais prendre l'acquisition seulement, M. Déry, parce que, pour moi, c'est le même principe dans les deux cas. Si je comprends bien, pour l'année 1978, vous aviez reçu du fédéral un total d'une centaine de demandes d'acquisition.

M. Tremblay: 108. M. Scowen: 103?

M. Tremblay: 108, alors qu'en 1977, c'était 78; en 1976, 71; en 1975, 52, et en 1974, 35.

M. Scowen: De ce nombre, 103 étaient résolues avant le 31 mars 1979. J'ai dit une centaine simplement pour simplifier les choses. Si je comprends bien, le Québec en a autorisé 82%.

M. Tremblay: Non, le fédéral.

M. Scowen: Normalement, la procédure qui existait il y a trois ans, c'était que le fédéral attendait la décision du Québec avant de rendre sa décision. Est-ce que c'est le système qui est encore en vigueur? Est-ce que le fédéral vous donne sa décision, quand il vous passe le dossier, ou est-ce qu'il attend votre décision avant de rendre la sienne?

M. Tremblay: Dans la majorité...

Le fédéral attend notre décision, sauf que le ministre Chrétien a changé la procédure en 1977, pour accélérer l'étude des dossiers impliquant des sommes de $2 millions et moins. Au lieu d'avoir, combien de semaines, pour les gros dossiers? Au lieu d'avoir deux mois, nous avions sept jours, pour donner un avis. Tout à l'heure, on parlait du cabinet politique du ministre. Il est évident que le ministre doit être en Chambre, doit être partout. Il n'a pas le temps d'étudier tous les dossiers de cet ordre en sept jours. Souvent, ce sont des décisions qui sont faites très rapidement, des avis qui ne sont pas aussi creusés, quand on a seulement sept jours — cela veut dire cinq jours de travail — pour donner un avis.

Donc, pour les petits dossiers, cela se fait très rapidement maintenant. Pour les gros, c'est l'ancienne formule, c'est-à-dire qu'on a deux mois et on peut demander qu'un dossier de moins de $2 millions, si on le juge suffisamment "sensitive", que ce soit deux mois. Quand on se rend compte que c'est dans le domaine culturel, ou quelque chose de semblable, on demande que ce soit deux mois.

Quand on dit 82% d'acceptation au gouvernement fédéral, cela doit refléter... Habituellement, et on pourra me corriger, on suit passablement nos avis.

M. Scowen: Est-ce que les 82% sont autorisés par le fédéral et par nous autres? Normalement, pour l'année passée, au moins, on n'avait pas de conflit important entre les deux gouvernements, on était d'accord.

M. Tremblay: C'est cela.

M. Scowen: Si je comprends bien, vous n'êtes pas en mesure de nous dire combien, dans les 82%, sont complétés, réalisés. Vous ne pouvez pas le dire?

M. Tremblay: Je voudrais, étant responsable de l'administration du ministère, souligner au député de Notre-Dame-de-Grâce que j'ai une personne et un tiers qui s'occupe de l'ensemble de cette question dans le ministère. Une personne, c'est-à-dire un professionnel, et le tiers, c'est le tiers du temps de M. Déry qui est le directeur de ce programme, mais qui a également deux autres programmes dont il doit s'occuper.

Lorsqu'une compagnie passe par l'ensemble de ces démarches auprès du gouvernement fédéral, pour faire un investissement ou acquérir une entreprise, bien sûr qu'elle est sérieuse et on présume qu'elle va aller au bout de sa démarche. C'est le gouvernement fédéral qui assure le suivi de l'opération.

Le but de la question était de savoir s'il y a convergence de vues entre le ministre de l'In-

dustrie et du Commerce du Québec et celui d'Ottawa. Je dirais que, en règle générale, oui. Et comme il n'y a pas de mauvaise nouvelle, c'est pas de nouvelle, cela va très bien.

M. Scowen: C'était une partie de ma question. À titre de suggestion seulement, je vais poser une deuxième question: Est-ce que je comprends bien que le Québec n'attache aucune condition à l'achat de ces compagnies? Pour les 82%, il n'y avait aucune condition rattachée?

M. Tremblay: Habituellement, on dit oui ou non. Il est possible que l'on dise un oui conditionnel. On dit: Oui, si telle activité au Québec était poursuivie, l'entreprise s'engage à poursuivre.

Maintenant, on a un employé et un tiers sur ce dossier. Il est évident qu'on se fie à la bonne foi de l'entreprise et à la capacité de l'agence fédérale de faire respecter ses conditions. Finalement, elle agit comme notre porte-parole, en quelque sorte. Si elle fait sienne la condition qu'on a posée, on présume qu'elle l'applique. On ne peut pas avoir deux gouvernements qui vont voir dans l'entreprise pour voir si les conditions sont réalisées. Il y a une division des tâches qui est efficace.

M. Scowen: Est-ce que vous me permettez une suggestion? Je suis assez nationaliste pour croire que si on prend tout le temps pour tamiser ces demandes, il s'impose qu'on poursuive pour savoir si elles sont réalisées et si les conditions rattachées, soit par le gouvernement fédéral, soit par nous autres, sont réalisées. Je pense que c'est important.

M. Tremblay: Cela ne relève pas d'une loi du Parlement du Québec. Cela relève du Parlement fédéral.

M. Scowen: Je comprends bien, mais c'est une suggestion.

M. Tremblay: Si vous avez une critique à formuler à l'endroit du gouvernement fédéral, je pense que cela va de soi. Mais ces gens ne sont pas ici pour répondre. Ils ne sont même pas nommés encore, les nouveaux ministres du nouveau gouvernement.

M. Scowen: Est-ce que je peux revenir une dernière fois au sujet des investissements étrangers? J'ai posé, au cours d'une question avec débat l'année passée, au ministre, les questions qui avaient pour but de connaître sa politique sur l'investissement étranger. Comme dans le cas de la politique d'achat, ce n'est peut-être pas le moment de demander une explication, mais est-ce que le ministre croit, dans la politique d'investissement étranger du gouvernement du Québec actuel, que ce chiffre de 82% autorisé dans le domaine des acquisitions et le nombre, en pourcentage de 35, dans le domaine des nouvelles entreprises, c'est trop ou trop peu?

M. Tremblay: Vous me posez une question d'opinion. Cela varie d'un cas à l'autre.

M. Scowen: Non, c'est une question de politique.

M. Tremblay: On ne peut pas se prononcer comme cela sur les pourcentages, parce que les décisions ne sont pas prises sur des pourcentages. Quand je prends une décision de dire oui ou non, ce n'est pas en fonction d'augmenter le pourcentage ou de l'abaisser. C'est parce qu'on étudie cas par cas et on se rend compte que, dans un domaine, les avis sectoriels sont que ce serait bon pour l'économie du Québec. Donc, on dit oui.

M. Scowen: La question, M. le ministre, est surtout celle-ci: Est-ce que vous pensez qu'on doit chercher plus d'investissements étrangers ici ou est-ce qu'on doit essayer de réduire le montant?

M. Tremblay: On a déjà discuté de cela lors d'une période...

M. Scowen: Je veux savoir votre politique sur l'investissement étranger.

M. Tremblay:... d'interventions qui portait justement sur cela, on en avait parlé pendant trois heures. Nous vivons présentement dans un contexte politique. Nous sommes soumis à une loi fédérale. Cette loi fait du cas par cas. C'était la politique de l'ancien gouvernement fédéral libéral. Il est possible qu'un nouveau gouvernement conservateur change cette politique, il est même possible qu'il abolisse FIRA, parce qu'il n'est pas tellement entiché de ce genre d'approche. Nous, on a déjà dit: Notre approche est plutôt une approche sectorielle plutôt que de cas par cas. Il y a certains secteurs, comme le domaine de la culture, où nos yeux s'ouvrent très grands et on regarde cela très attentivement. Si quelqu'un veut acheter le canal 10, s'il y a un Arabe qui arrive de l'Arabie Saoudite pour acheter le canal 10, on va regarder cela très attentivement. Le Crédit foncier va regarder cela très attentivement. Il y a des "sensitive areas" dans une économie, comme aux États-Unis, quand certains Arabes ont voulu acheter la Banque de Détroit, où vous avez vu une levée de boucliers. Ce sont nos forces vives dans une économie. On regarde cela par secteur.

Il y a certains autres secteurs, comme celui de l'automobile, où on ne se pose même pas de question. Le Canada n'a pas d'industrie automobile, en ce qui concerne la fabrication. On ne commencera pas à dire qu'on va essayer de tout développer, y compris l'automobile, et qu'on va commencer par GM. La porte est ouverte pour GM, pourvu qu'elle se conforme à notre environnement politique, social et linguistique. Évidemment, c'est un prérequis. Vous vous rappelez que l'ancien premier ministre Bourassa disait que GM devait fonctionner en français à Sainte-Thérèse. Cela lui a pris du temps. Cela s'applique présentement, cela fonctionne en français. On n'a aucune objection à

attirer ce genre d'investissements. On n'élaborera pas une politique plus précise tant qu'on n'aura pas la responsabilité d'adopter notre propre loi dans le domaine. Quand on en adoptera une, ce sera une loi intelligente, qui tiendra compte des exigences et de l'économie du Québec.

M. Scowen: Une petite dernière question, le programme officiel du Parti québécois vise à obliger les étrangers qui ont des investissements ici à réinvestir au moins 50% de leurs profits chaque année. Ils sont restreints à ne pas payer en dividendes aux sociétés mères plus que 50%, pour augmenter continuellement l'investissement étranger ici au Québec. Est-ce que le ministre est d'accord avec cette politique ou est-ce qu'il pense qu'on doit obliger plutôt les étrangers de payer les dividendes et de sortir les profits à l'extérieur du pays pour que l'investissement étranger ne s'accroisse pas énormément? Il y a ces deux politiques possibles. Une vise à accroître l'investissement étranger, et l'autre à le diminuer. Est-ce qu'il est complètement d'accord avec le programme officiel du Parti québécois?

M. Tremblay: II y en a plusieurs régimes de bananes semblables?

Il n'y a pas de grande philosophie derrière cela. Cela dépend du moyen que...

M. Scowen: Ces questions sont d'ordre pratique. Ce n'est pas philosophique, c'est pratique.

M. Tremblay: Cela dépend comment c'est fait. Quand vous dites qu'on peut encourager les entreprises à réinvestir, vous prenez un moyen fiscal, habituellement, les entreprises vont investir plus de 50% de leurs profits, mais cela dépend des occasions qui existent. Dans certains secteurs, elles ne pourront pas réinvestir des pourcentages élevés. Dans d'autres, elles vont investir pratiquement 100%. Dans le domaine pétrolifère, par exemple, les compagnies investissent tout ce qu'elles peuvent garder. Elles ne paient pas de dividendes. Ce sont les actions qui montent. Les actionnaires sont rémunérés sous forme de gains de capital. C'est l'approche pragmatique qui devrait prévaloir dans des cas semblables. (21 h 15)

M. Scowen: Vos fonctionnaires, ce soir, peuvent peut-être comprendre pourquoi je me sentais un peu frustré après trois heures de questions avec débat avec le ministre sur sa politique d'investissements étrangers.

M. Tremblay: Vous pouvez lancer les pelures de banane que vous voulez; je ne suis pas obligé de marcher dessus.

M. Raynauld: Non, et visiblement, vous n'êtes pas obligé non plus de suivre le programme du Parti québécois.

M. Tremblay: Des programmes, ça évolue. C'est une feuille de route. On n'a jamais dit qu'on suivait un évangile mot à mot, etc. Sans cela, un gouvernement serait pris dans une camisole de force.

M. Raynauld: On est heureux de l'apprendre.

M. Tremblay: On mettrait ça sur le pilotage automatique, on irait prendre une bière et on laisserait les lois s'écrire, etc. C'est parce qu'un gouvernement, c'est composé de personnes intelligentes et elles organisent les choses pour le bien de la société, avec une feuille de route, évidemment, une tendance, et la tendance du Parti québécois, évidemment, c'est de travailler aux meilleurs intérêts du Québec avant tout.

M. Raynauld: Là, c'est...

M. Tremblay: Sans travailler nécessairement contre les autres, mais priorité au Québec Le Québec d'abord, disait Daniel Johnson. La même chose pour nous. La même chose pour Jean Lesage.

M. Raynauld: Non, mais la question de mon collègue était de savoir ce que c'était de travailler aux meilleurs intérêts du Québec. Est-ce d'avoir plus d'investissements étrangers ou d'en avoir moins? C'était sa question.

M. Tremblay: Cela dépend. M. Raynauld: Cela dépend.

M. Tremblay: Cela dépend. On n'a pas de réponse...

M. Scowen: Votre politique est: Cela dépend.

M. Tremblay: On peut avoir des réponses simplistes, hermétiques, idéologiques, vraiment doctrinaires. Cela dépend.

M. Scowen: Sinon libérales.

M. Raynauld: Elles peuvent être libérales.

M. Tremblay: II y a des fois que c'est bon. On a dit: Dans certains secteurs ça peut être bon. Avec les automobiles, ce serait même très bon, parce qu'on est des Nord-Américains, etc. Dans le domaine de la télévision, on ne laisserait pas un de nos deux postes sous contrôle de Washington, de l'Arabie Saoudite ou de Londres. Alright? Ce n'est pas plus compliqué que ça.

M. Raynauld: M. le Président, j'aurais une dernière question sur ce sujet. On vient de nous distribuer des feuilles et, au début, tout à l'heure, le ministre a dit qu'il était évident, d'après les chiffres, qu'effectivement, les étrangers étaient très heureux de venir au Québec, puisqu'il y avait des augmentations très sensibles dans le nombre de demandes d'acquisitions. La raison pour laquelle je voulais avoir des chiffres avec le Canada, c'est

justement parce que ça confirme un peu l'impression que j'avais.

M. Tremblay: Le total pour toutes les années?

M. Raynauld: C'est sur les nouvelles entreprises en particulier. Si on regarde les années, 1975/76, c'est 23% de nouvelles entreprises étrangères qui sont venues au Québec; en 1976/77, c'est 18,9%; en 1977/78, c'est 15% et en 1978/79, c'est 13,7%. Donc, la proportion diminue et on devra, je pense, admettre que l'augmentation de 39%, c'est une information qui peut être exacte, mais qu'elle prête à confusion et ne prête certainement pas au genre de conclusion que le ministre a faite sur le vu de cette information. En proportion de ce qui se passe au Canada, la part du Québec diminue dans le total canadien.

En ce qui concerne les acquisitions d'entreprises, à ce moment-là, il y a une très forte... Je m'excuse. J'ai comparé 39% tout à l'heure. C'était une augmentation de 10% sur l'année précédente pour les nouvelles entreprises. Je vois que la part diminue. Les 30% se rapportaient aux acquisitions d'entreprises et, en ce qui concerne les acquisitions, la proportion est à peu près la même; elle a légèrement augmenté en 1978/79, 16,9% par rapport à 16,1% l'année précédente; 19,9% en 1976/77; 18,8% en 1975/76 et 26% en 1974/75. Donc, je pense que ceci est une information complémentaire à celle qui est donnée dans le livre et, justement, elle permet d'interpréter plus correctement la situation.

M. Tremblay: M. le Président, j'ajouterais aussi une autre interprétation. Je mentionnais tout a l'heure que c'était une augmentation au Québec d'une année à l'autre, donc, une tendance; je maintiens ce que je disais. Je regarde le tableau moi aussi. Au niveau maintenant des nouvelles entreprises, cumulativement, de 1975 à 1976, on se rend compte qu'au Québec, il y en a eu pour $186 900 000; en Ontario, pour $210 400 000. Quand on sait que l'économie de l'Ontario est pratiquement le double de celle du Québec, on se rend compte qu'au niveau des nouvelles entreprises, la valeur des investissements en capitaux étrangers est plus importante relativement au Québec qu'en Ontario. Bon!

Évidemment, on pourrait peut-être trouver d'autres interprétations. Globalement, je reviens à ce que je disais tout à l'heure. Le fait que s'accroissent les prises de contrôle par des entreprises étrangères, à mon avis, c'est un signe du manque de force et de vitalité de nos entreprises qui ont tendance à se vendre à des étrangers. Ce n'est pas nécessairement une indication d'une économie forte, je pense que c'est le contraire.

Mais, pour ce qui concerne l'inclination qu'ont des propriétaires d'entreprises étrangères ou des multinationales à venir acheter des entreprises sur place au Québec ou à investir de nouveaux capitaux, on se rend compte que cela ne baisse pas au Québec, que cela a tendance à augmenter. On peut dire que cela augmente plus ailleurs, mais cela augmente au Québec.

Pour ce qui concerne les nouveaux investissements de nouvelles entreprises, on se rend compte qu'il y en a pratiquement autant en valeur au Québec qu'en Ontario, alors qu'on s'attendrait qu'en Ontario, ce soit beaucoup plus grand. En tout cas, ce sont les faits et on vous a distribué les tableaux. Est-ce que le programme 1 est adopté?

Le Président (M. Laplante): M. le député de Huntingdon.

M. Dubois: La loi sur les stimulants fiscaux au développement industriel, c'est dans le programme 1 ? J'avais seulement une question.

Le Président (M. Laplante): Quelle loi, monsieur?

M. Dubois: C'est dans le programme 1, c'est la loi sur les stimulants fiscaux au développement industriel.

Le Président (M. Laplante): Cela fait partie d'un autre programme.

M. Dubois: C'est dans le même programme.

M. Tremblay: Seulement le premier programme représenterait un ministère ordinaire.

M. Dubois: C'est votre projet de loi 46, si je ne me trompe pas. Le projet de loi 47? Le projet de loi 48?

M. Tremblay: Si vous ajoutez justement les dix sociétés d'État dans le programme, vous avez un ministère, un gros à part cela.

M. Dubois: La seule question que j'avais là-dessus, c'est que je voulais savoir si cette loi-là s'applique aux petites et moyennes entreprises.

M. Tremblay: Uniquement aux petites et moyennes entreprises, c'est-à-dire, selon la définition légale, celles de 200 employés ou moins et des actifs de $7 500 000 ou moins.

M. Dubois: Ce n'est pas cela que je voulais savoir, M. le Président.

M. Tremblay: Un instant! Cela, c'est le premier volet de la loi. Le deuxième volet s'applique au développement régional, c'est-à-dire qu'il y a deux grandes régions, à l'exception de la région de Montréal, où il y a des subventions pouvant s'appliquer à des investissements pouvant atteindre jusqu'à $10 millions, et cela s'applique quelle que soit la dimension de l'entreprise.

M. Dubois: Avez-vous l'intention d'élargir le cadre de la loi?

M. Tremblay: Pardon?

M. Dubois: Est-ce que vous avez l'intention d'élargir le cadre de cette loi-là pour qu'elle

s'applique à des entreprises de plus grande envergure?

M. Tremblay: J'ai mentionné, cet après-midi, qu'il y a des procédures administratives surtout rattachées à la Loi du ministère du Revenu qui nous créent du "red tape" — vous voulez avoir mon opinion — que je n'aime pas tellement, mais c'est à cause de la Loi du ministère du Revenu... Évidemment, vous connaissez le ministère du Revenu, vous faites vos rapports d'impôt, vous savez qu'on ne discute pas trop avec vous.

M. Dubois: II peut amender sa loi.

M. Tremblay: Pour ce qui concerne l'élargissement de cette loi-là, je pense que c'est une loi qui est déjà assez généreuse. Les profits des compagnies canadiennes industrielles, on les a vus ce matin, sont de 68% d'augmentation dans le premier trimestre. Les profits se sont accrus l'an passé trois fois plus rapidement que les ventes. Il y avait une autre manchette où j'ai lu récemment une augmentation de 130% des profits. Les compagnies font de l'argent présentement. Les salaires ont ralenti dans leur augmentation. Une étude récente du Conseil économique du Canada montre qu'il y a eu un ralentissement dans les revenus réels. Les impôts des particuliers ont tendance à être élevés. La proportion des impôts payés par les corporations a tendance à diminuer par rapport aux impôts payés par les particuliers. Dans cette loi-là, quand on part tout de suite avec 50% de l'impôt autrement versable par un PME qui s'en va dans un fonds de relance, c'est déjà bien.

Évidemment, vous allez me dire que seulement le quart de ces impôts est payé au gouvernement du Québec et trois quarts à Ottawa. Il est évident que le principal élargissement de cette loi, pour nous, ce sera le soir du référendum où toutes les PME du Québec se trouveront à avoir trois fois plus de possibilités qu'elles n'en ont présentement de verser dans leur fonds de relance industrielle, parce que la même loi n'existe pas au fédéral. Les chiffres du gouvernement fédéral, le prochain gouvernement conservateur a promis, pendant la dernière campagne, de permettre un dégagement de $5000, je crois...

Une voix: Pour les PME.

M. Dubois: Je n'avais pas prévu que le ministre se rendrait jusqu'au référendum...

M. Tremblay: ... mais, le soir du référendum, ce sera payant pour les PME du Québec.

M. Raynauld: II n'y a rien qui vous empêche de hausser les impôts sur les corporations maintenant, faites-le. Comme le ministre des Finances passe son temps à se plaindre qu'en Ontario, c'est rendu à 14%, qu'il hausse donc les impôts sur les corporations à 14%. Qu'il cesse de se plaindre, il a le pouvoir de le faire.

M. Tremblay: Est-ce que c'est une suggestion? Est-ce que c'est souhaitable?

M. Raynauld: Non, je ne fais pas de suggestion, mais je vous dis de cesser de mettre cela sur le dos des autres; vous avez le pouvoir de le faire. Haussez les impôts si vous n'êtes pas contents.

M. Tremblay: Là, vous parlez comme M. Trudeau qui disait: À Ottawa, on taxe; taxez donc vous aussi.

M. Raynauld: C'est cela, exactement, parce que vous savez très bien que, le lendemain du référendum, il faudra encore que vous regardiez les taux d'impôt sur les corporations en Ontario.

M. Tremblay: C'est évident.

M. Raynauld: Vous ne pourrez pas les mettre plus élevés que là.

M. Tremblay: Je suis tout à fait d'accord, personne ne vous dit le contraire.

M. Raynauld: Alors, pourquoi vous amusez-vous à faire des enfantillages comme ça? De toujours dire on n'a que le quart de l'impôt, ce n'est pas avantageux pour les entreprises, ne dites donc pas ça.

M. Tremblay: Non, je suis d'accord avec vous que le niveau relatif des impôts est important, le problème c'est que le ministère de l'Industrie et du Commerce du Québec, pour nos entreprises, c'est l'endroit où l'on se dirige si on a un problème, mais quand on a un problème, on vient voir le ministre de l'Industrie et du Commerce à Québec ou à Montréal. Mais quand on a des impôts à payer, on prend la Transcanadienne et on s'en va à Ottawa. Il y a quelque chose qui ne marche pas, ce n'est pas logique que lorsqu'il y a des problèmes c'est un gouvernement qui les a, mais quand il y a de l'argent, il s'en va là-bas. Autrement dit, on établit des programmes comme cette loi-là, ça bonifie évidemment les bénéfices des sociétés, leur capacité de fonctionner, de faire des profits, mais lorsqu'elles réalisent des profits, elles paient des impôts, les trois quarts à Ottawa et un quart à Québec...

M. Dubois: M. le Président, j'aimerais que le ministre revienne à l'ordre, parce que ma question...

M. Tremblay: Ce n'est pas une question de savoir si les impôts au Québec doivent être plus élevés ou moins élevés qu'en Ontario. C'est évident que ça ne peut pas être tellement éloigné l'un de l'autre parce que ce sont des conditions d'opération. Ce qui est anormal, c'est que c'est un gouvernement qui perçoit les impôts et un autre qui solutionne les problèmes. Il va falloir réconcilier ça. Mettre un peu plus de logique dans ça.

M. Johnson en 1966 ou en 1967...

Une voix: ... résoudre les problèmes.

M. Tremblay:... demandait 100, 100, 100 pour les impôts, nous disons aussi 100, non pas 100, 100, 100, mais 100 pour tous les impôts au Québec. S'il faut payer des subventions pour maintenir un service commercial à Ottawa, des services communs de la Banque Centrale, quelques ambassades ou d'autres choses semblables, comme l'armée, on fera ça. Mais, au lieu de payer $53 milliards par le truchement d'impôts à Ottawa, on le paiera par subventions directes ou par transferts directs.

M. Dubois: Une chance que le Président n'est pas trop sévère, parce que vous avez dépassé de beaucoup le cadre du projet de loi 48.

M. Tremblay: Mais non on parle d'impôts pour les entreprises.

M. Dubois: 48, c'est un pont d'impôts qui s'applique pour l'aide aux petites et moyennes entreprises. Est-ce que vous avez des demandes de corporations...

M. Tremblay: Eaton ne veut pas perdre son marché.

M. Dubois: Est-ce qu'il y a des corporations qui dépassent le cadre du projet de loi qui vous demandent d'avoir un programme plus large? Avez-vous des demandes dans ce sens-là?

M. Tremblay: C'est évident que toutes les entreprises aimeraient bien être admissibles à la loi 48 et non pas s'appliquer seulement à la PME. Mais là, c'est une question de disponibilité fiscale, on ne peut pas avoir des responsabilités comme gouvernement et abolir les impôts en même temps. On n'a pas de Banque Centrale pour imprimer l'argent et...

M. Dubois: Je comprends, mais les retombées économiques d'un programme plus large, il serait peut-être valable de les étudier?

M. Tremblay: Non, je ne pense pas... M. Dubois: Vous ne pensez pas...

M. Tremblay: Outre la demande générale que les impôts sont toujours un peu plus hauts, il n'y a pas eu de demande spécifique pour faire passer ça de 50 à 75% par exemple.

M. Dubois: Non, je ne parle pas d'augmenter la participation, mais augmenter le cadre de la loi pour toucher les compagnies qui auraient $20 millions d'investissements au lieu de $10 millions dans certains secteurs.

M. Tremblay: Non, les seules représentations que l'on a pu avoir c'est des compagnies qui sont situées dans la zone de Montréal, y compris toute la banlieue de Montréal, qui ne sont pas des PME et qui ne peuvent pas bénéficier du deuxième volet de la loi, le dégrèvement fiscal. Celles-là, évidemment, ont fait certaines représentations. Elles essaient de participer au fonds, mais lorsqu'on les interroge sur leur caractéristique de PME, malheureusement elles ne peuvent pas répondre.

Il y a eu un élargissement sur cela en ce qui concerne la vallée de l'Outaouais. Nous avons modifié la loi pour... La vallée de l'Outaouais était partie intégrante de la région de Montréal. Or, nous avions demandé — j'avais demandé — au ministère de l'Expansion économique régionale fédéral de désigner la zone de l'Outaouais pour les fins du MEER. On a refusé parce qu'on a dit: Hawkesbury, Cornwall devraient être désignées aussi, par conséquent on ne peut pas vous désigner. C'est la même chose pour Vaudreuil, d'ailleurs et la ville de Hull, etc. Donc, on a élargi la loi pour permettre à la région de Hull d'être dans la zone 2. Pour essayer de pallier cet entêtement du MEER pour des raisons politiques frontalières, sacrifier en quelque sorte le développement industriel de la région de Hull et de la Gatineau. Il n'y a pas eu d'autres amendements.

M. Dubois: D'accord.

M. Raynauld: Le problème, si je peux poursuivre là-dessus, on dit une question de PME et des grandes entreprises, mais en ce qui concerne la deuxième partie de la loi, elle ne s'applique pas aux PME non plus à Montréal. La région 1 s'applique aussi? À Montréal?

M. Tremblay: Dans le deuxième programme, non. Dans le deuxième volet, le dégrèvement fiscal, ça s'applique à n'importe quelle entreprise manufacturière à l'extérieur qui fait des investissements à l'extérieur de la région métropolitaine de Montréal. Elle peut être située à Montréal et faire des investissements à l'extérieur de Montréal. (21 h 30)

M. Raynauld: Je comprends, mais pour des investissements à Montréal, ils ne sont pas admissibles.

M. Tremblay: S'ils ne sont pas PME. S'ils sont PME, ils peuvent utiliser le premier volet.

M. Raynauld: Oui, mais en vertu du deuxième...

M. Tremblay: Le deuxième volet ne s'applique pas dans la région de Montréal.

M. Raynauld: II ne s'applique pas du tout à la région de Montréal. Mais ça, ce serait une possibilité qu'il s'applique, non?

M. Tremblay: Oui, mais le problème, c'est que si vous le faites, tout l'aspect de décentralisation poursuivi par cette petite mesure — parce que cela ne peut pas avoir un impact mirobolant — pour compenser les désavantages de certaines

régions, comme la région de Sherbrooke par rapport à Montréal... Si on donne à Montréal les mêmes subventions qu'aux entreprises qui ne sont pas des PME, il n'y a pas ce stimulant d'aller se localiser dans une de ces régions.

Il faut dire que ce deuxième volet, c'est un peu ce qui existait dans l'ancienne loi qu'on a gardée, parce que cela pouvait parfois — pas tout le temps, mais parfois — déclencher un investissement en région, bonifier, renforcer la structure industrielle de certaines régions.

La loi porte principalement sur les PME pour leur permettre de se constituer un fonds de relance. Je dirais que cette loi va atteindre, si on peut mettre un terme au "red tape" au niveau du ministère du Revenu, sa vitesse de croisière quand les entreprises vont avoir cinq ans de dépôt dans le fonds. Parce que l'incitation à réinvestir est toujours présente, bien sûr, mais elle va devenir de plus en plus présente quand, après cinq ans, les dépôts faits il y a six ans vont devenir périmés. Il y a un roulement. La loi est permanente, mais l'entreprise qui dépose chaque année des fonds, si, après cinq ans, elle n'a pas retiré son argent pour investir selon les critères admissibles, elle perdra son argent.

Là, la pression pour investir va être très forte. Il y a une disposition dans la loi, lorsqu'on verra qu'il y a suffisamment d'argent dans les fonds, qu'il y a une réticence à investir, on peut donner des intérêts, bonifier ces fonds, les grossir. Mais comme on est encore au début de l'application de la loi, ce n'est pas encore mûr pour que nous l'utilisions à des fins contracycliques, en quelque sorte.

On me dit qu'au niveau du "red tape", il y a eu une amélioration, ça veut dire qu'il y a moins de "red tape"? Je me méfie tout le temps. On dit ici: "Le ministère du Revenu avait reçu de la part des corporations 1398 demandes de dépôt au fonds de relance industrielle pour $5 500 000", en tout cas ce sont des chiffres qu'on vérifiera. D'ailleurs, le ministère du Revenu est toujours un ministère qui n'est pas tellement agréable à "faire affaires avec", pour employer un anglicisme. Je préférerais que ce soit le ministère de l'Industrie et du Commerce qui ait la charge complète de ce programme. Un jour, on essaiera, à un moment de distraction du ministre du Revenu, de lui enlever ça.

M. Raynauld: Supprimez donc ça, ces autres ministères.

M. le Président, j'avais des questions qui se rapportaient à ça. J'ai trouvé que ce n'était pas très clair. J'aimerais qu'on m'explique de nouveau, qu'on me donne les chiffres, qu'on me les donne de façon à ce que je puisse comprendre. En vertu de la loi 48, fonds de relance industrielle, combien y a-t-il d'argent en dépôt au ministère du Revenu et est-ce qu'il serait possible de comparer ça aux prévisions qui avaient été faites lorsqu'on a adopté le projet de loi 48? Le ministre avait alors donné des chiffres, des estimations de ce que, par exemple, le trésor perdrait la première année, la deuxiè- me année, la troisième année, la cinquième année. La première année, c'était $8 millions et après ça, à la troisième année, c'était $24 millions; si je comprends bien, on est à la deuxième année. Combien est-ce que le trésor s'est trouvé à perdre?

Si je comprends bien la phrase qui est ici, en réalité, le ministère du Revenu aurait perdu $72 millions. La première année, les prévisions étaient pour $8 millions, mais je ne suis pas absolument sûr, c'était peut-être $5 millions, je ne m'en souviens pas. J'aimerais qu'on m'expique ça pour que je puisse comprendre, par raport à ce qu'on avait indiqué. Par ailleurs, avant d'aller à la réponse, dans les paragraphes qui précèdent, on fait référence à des investissements potentiels de $350 millions.

Est-ce que c'est cela? Ce sont des investissements projetés. Or, si mon souvenir est bon, je pense que le ministre n'avait pas prévu qu'il y aurait tant d'investissements projetés que cela. Comment concilier d'une part, à moins que je me sois trompé, si je me suis trompé on me corrigera, qu'on projette des investissements en plus grand nombre et en plus grand volume, on avait dit qu'on prévoyait à peu près $150 millions d'investissements par an. Là, on parle de $350 millions, par ailleurs, quand on arrive aux revenus, parce qu'il faut que l'argent sorte de là, on parle de $72 700 par rapport à $5 millions ou $8 millions.

M. Tremblay: Je doute que les $353 millions s'appliquent uniquement aux PME.

En fait, il ne faudrait pas mêler les paragraphes. Dans le premier paragraphe, on parle globalement de la loi qui a deux volets et vos $353 millions représentent les deux volets ensemble d'investissements projetés par les compagnies, au moment où elles nous demandent un certificat. Par la suite, on divise les deux volets de la loi pour parler individuellement de chacun. Si on prend le premier volet, il faut faire une démarcation à l'intérieur de ce volet qui s'appelle le programme de fonds de relance industrielle. Il y a deux facettes, il y a une partie de dépôt qui se fait au ministère du Revenu et il y a une demande de certificat qui se fait au ministère de l'Industrie et du Commerce. Dans le premier paragraphe du fonds de relance, pour aller jusque dans le bas de la page, on vous parle de la partie du ministère de l'Industrie et du Commerce, c'est-à-dire la demande de certificat et, à la page suivante, on vous parle du dépôt. Lorsque le ministre parlait de "red tape" tantôt, c'est assez facile à comprendre.

Le dépôt n'est pas considéré par le ministère du Revenu, le montant d'argent n'est pas considéré déposé dans le fonds tant que l'entreprise n'est pas cotisée. La cotisation de l'entreprise, contrairement à la cotisation de l'individu, se fait sur la base de l'année financière de l'entreprise et ceux qui ont été en affaires savent que cela prend un certain temps avant que la cotisation soit faite chez une entreprise contrairement à l'individu. Ce qui fait que les chiffres que vous avez à la page 3, dans le haut, qui vous indiquent la partie du dépôt

au ministère du Revenu, au 31 mars, ont été largement modifiés au 18 mai pour parler de dépôts de 350 compagnies, comparativement à 178 pour un montant déposé de $1 560 000 — c'est la moitié de l'impôt payé par les compagnies — comparativement à $588 500 dans le texte. Il y a 32 chèques émis comparativement à 12 et $167 000 comparativement à $72 000. On m'avise aujourd'hui que $4 560 000 seront déposés parce que les entreprises ont été cotisées, et que les chèques seront émis incessamment aux entreprises. Donc, le "red tape" diminue et l'efficacité s'améliore énormément de ce côté.

En ce qui concerne le ministère de l'Industrie et du Commerce, les octrois de certificats se font assez rondement et assez rapidement. Donc, la loi s'applique mais les chiffres comptabilisés sont retardés par cette procédure au ministère du Revenu qui exige une cotisation avant que les fonds soient versés dans les fonds de relance industrielle à chacune des entreprises. Donc, le processus est en marche, mais tout cela a pour résultat, effectivement, de retarder en quelque sorte les montants disponibles dans chaque fonds. C'est ce que j'appelle le "red tape".

Si vous voulez par rapport à l'échéancier prévu lors du dépôt de la loi; il n'est pas retardé.

M. Raynauld: Oui, mais une autre façon de le dire c'est que la loi a été adoptée en 1977, et en 1979 on n'a pas encore commencé.

M. Tremblay: Cela a été adopté au mois de juillet 1977.

M. Raynauld: Juillet 1977, cela fait deux ans et ce n'est pas commencé.

M. Tremblay: Un gouvernement, vous le savez bien, avant de mettre une nouvelle machine sur pied et de la roder... Cela prend déjà six mois pour trouver les meubles, six mois pour trouver le papier, il peut arriver quelque chose de nouveau dans les formules d'impôt, l'information, les comptables, etc. Un an et demi, ce n'est pas trop long pour l'application.

C'est une bonne moyenne.

C'est une bonne moyenne, mais j'aurais préféré que ce soit plus court que cela. Si c'était "once for all", un retard — pour employer un anglicisme — si ce délai n'était qu'une fois pour toutes, ce ne serait peut-être pas trop grave. Si je me rends compte que cela retarde continuellement et que cela s'accumule, il faudra agir. Comme je le disais cet après-midi, soit qu'on modifie la loi 48 carrément, soit qu'on trouve, dans le cadre du ministère du Revenu, une procédure expéditive pour passer à côté du "red tape". Je n'ai pas encore la réponse, mais c'est évident que je regarde cela attentivement et qu'on va agir si cela continue.

M. Raynauld: Mon interprétation selon laquelle les investissements commencent lorsque le trésor se trouve à verser des fonds est correcte — C'est cela? $167 000 ou...

M. Tremblay: Qu'est-ce que vous entendez par "les investissements commencent"?

L'investissement peut se produire, mais pour avoir le fonds auquel l'entreprise a droit, cela peut prendre du temps.

M. Raynauld: Oui, je comprends.

M. Tremblay: Ce sont des fonds que l'entreprise considère qu'elle aurait payés en impôts de toute façon. Donc, ce n'est pas cela qui va l'empêcher d'investir. Avec le temps, quand cela va s'accumuler, après cinq ans, ce sera une force à investir, $3 pour chaque $1 qu'elle va aller chercher. On ne peut pas dire que cela a eu un gros impact. La raison pour laquelle il y a eu un "boom" d'investissements industriels au Québec l'an passé et une augmentation de l'emploi, cela doit être dû à d'autres de nos programmes plutôt qu'à celui de la loi 48, mais on prépare l'avenir avec cela.

M. Raynauld: C'est cela, on en bénéficiera.

Le Président (M. Laplante): M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Tremblay: Ne vendez pas la peau de l'ours avant de l'avoir tué. Cela a été une mauvaise journée pour vous, aujourd'hui.

M. Scowen: J'aurais deux questions très précises à poser sur cette partie des crédits. La première, c'est simplement à titre d'information. Je veux demander au ministre et au président de la SDI... Une compagnie peut s'en remettre à cette loi ou à la Société de développement industriel, ou aux deux. Est-ce qu'il existe une possibilité de chevauchement? Je sais que la formule n'est pas du tout la même, mais...

M. Tremblay: Non, c'est complètement séparé. Une, c'est une loi qui donne le droit à une entreprise d'avoir ces dégagements fiscaux, c'est une chose.

M. Scowen: Et...

M. Tremblay: Les subventions, les prêts, les garanties de prêts de la SDI, ce sont des choses complètement séparées.

M. Scowen: II n'y a aucun chevauchement, aucun dédoublement entre les deux?

M. Tremblay: Non, il y en a un qui est un droit fiscal. L'autre, c'est une discrétion de subventions.

M. Raynauld: Non, on demande si ça peut doubler.

M. Tremblay: C'est évident, pour le même investissement, bien sûr.

M. Scowen: Cela peut doubler, et...

M. Tremblay: Cet argent, si l'entreprise se qualifie, ce n'est pas pour acheter un condominium en Floride, c'est un investissement admissible, c'est son argent, c'est son droit. D'ailleurs, on a fait un petit amendement pour être bien sûr que ça allait être cela. Il n'y a pas de problème. Évidemment, quand on demande une subvention à la SDI, il faut satisfaire à certains critères.

M. Scowen: Une compagnie qui profite de la loi 48 peut s'adresser à la SDI, c'est une chose complètement séparée.

M. Tremblay: D'accord.

M. Scowen: Voici la deuxième question que je veux vous poser, M. le ministre. Je m'intéresse beaucoup à la partie "D" de votre rôle, celui d'analyser et d'évaluer les résultats obtenus en fonction des objectifs visés par la loi. Je me demande si vous pourriez, ce soir ou demain matin, nous donner cette analyse et cette évaluation des résultats obtenus jusqu'ici afin que nous puissions savoir si cette loi a atteint ses objectifs, dans quel secteur, quel a été le succès, si cela a été utilisé surtout pour sauver les entreprises qu'on n'a pas pu sauver ou pour les relancer. L'analyse et l'évaluation basées sur votre rôle "D"? (21 h 45)

M. Tremblay: J'y ai passablement répondu. J'ai situé cela dans le contexte de cinq ans, comme le prévoit la loi, mais je reviendrai rapidement sur la dernière partie de votre commentaire, à l'effet que vous demandiez: Est-ce que la loi a sauvé les mauvaises entreprises? Le but de la loi, ce n'est pas de sauver les entreprises, au contraire, puisqu'un des reproches qu'on lui a faits, c'est qu'elle favorisait les entreprises qui réalisaient des profits. Par conséquent, elle voulait capitaliser sur les secteurs forts et les entreprises fortes, un peu comme la nouvelle loi de la SDI qui permettait de prêter ou de donner des subventions à des entreprises qui, tout en étant dans le secteur faible, sont elles-mêmes fortes.

Habituellement, on essaie de donner la meilleure avoine à nos meilleurs chevaux, aux chevaux qui courent plus vite. C'est un peu ce qu'on fait dans la loi 48. Mais le but poursuivi est d'augmenter le niveau général des investissements, en commençant par les PME, parce que le diagnostic est qu'on a au Québec une pénurie chronique d'investissements manufacturiers, et on n'a jamais eu la proportion des investissements manufacturiers au Québec, par rapport à l'ensemble du Canada, qui refléterait notre poids démographique au Canada qui est de l'ordre de 27% et que ceci a des conséquences néfastes au niveau de la productivité, de la structure industrielle, etc., et que nous devons travailler en ce sens. C'était une contribution dans ce sens.

Est-ce que ça va donner les résultats voulus? La tendance des résultats est inéluctable, mais je ne pense pas qu'au cours de l'année à moitié passée ce fut un facteur déterminant. Cela va plutôt être avec le temps, avec les années, que cet instru- ment pour les PME va prendre de l'importance, rajouté aux autres instruments, comme la SDI, la politique d'achats, PME innovatrice, Innovation chaussure, Innovation meubles et d'autres programmes semblables.

M. Scowen: Si je comprends bien, jusqu'ici, après deux ans, vous n'avez pas encore fait cette analyse et évaluation écrites que vous pouvez déposer. Est-ce que vous pouvez nous dire si vous avez l'intention de faire cela au cours de cette année?

M. Tremblay: On vous l'a donnée, l'évaluation. Cela ne fait pas deux ans. Sur papier, c'est un an et demi. On a expliqué qu'au niveau du ministère du Revenu, il y avait une procédure qui ralentissait les choses. On a expliqué également qu'il y a une nouvelle procédure au niveau des entreprises, des formules d'impôt, et que cela prenait du temps également. Dans le fond, c'est une loi qui démarre.

M. Scowen: Quand est-ce que vous pensez pouvoir commencer cette analyse et évaluation?

M. Tremblay: On fait l'analyse continuellement. On regarde les chiffres; on le sait. On ne paiera pas une compagnie de consultants pour nous dire ce qu'on sait. Mais on va voir, à mesure que ça va avancer, surtout lorsqu'on va atteindre les cinq ans et que les fonds vont commencer à disparaître et ne seront pas réinvestis. C'est là où la pression sur les entreprises va être très forte pour ne pas perdre cet argent au trésor public, parce qu'après cinq ans, les fonds pour chaque année retournent aux fonds consolidés.

M. Scowen: D'après vous, c'est la seule façon de réaliser votre rôle des...

M. Tremblay: Oui, on appelle ça le principe de la carotte. Vous savez, si vous perdez...

M. Scowen: Ce n'est pas une analyse et évaluation écrite du succès de cette loi.

M. Tremblay: Sur le PME, on en a 6000 qui sont admissibles théoriquement. De plus, le but de la loi... Même si ça fait seulement un an et demi, il y en a 3000 qui paient de l'impôt. Il y a des entreprises qui ne paient pas d'impôt, de toute façon. Sur les 3000, il y en a 1400 qui se sont classées, qui ont un certificat, qui accumulent de l'argent et qui vont s'en servir pour investir. Je me dis, quand même, que ça veut dire que le quart de toutes nos PME sont directement touchées par la mesure, ou la moitié de celles qui paient de l'impôt. Donc, on a quelque chose qui va laisser un petit feu sous les PME pour les encourager à investir. C'est avec le quart de l'impôt qu'elles paient; quand on aura les quatre quarts, ça fera l'unité et ça sera plus fort.

Le Président (M. Laplante): M. le député d'Outremont.

M. Raynauld: M. le Président, concernant SODEQ qui est un autre sujet qui vient tout de suite après, je voulais demander au ministre s'il pourrait nous faire une évaluation verbale — puisque les évaluations écrites...— des évaluations verbales sur les SODEQ et le jugement qu'il peut exercer à l'heure actuelle sur le succès ou la lenteur des développements en ce qui concerne les SODEQ et voir s'il considère que le régime actuel permet un développement optimal de ces banques d'affaires régionales comme on les a appelées.

M. Tremblay: Les SODEQ, comme on le sait, la loi a été passée en juin 1976 et les règlements au début de 1977, si je me rappelle bien. La loi prévoit que nous pouvons accorder dix permis d'exploitation pour les SODEQ. Il s'agit d'une nouvelle initiative, avec des obligations dans la loi assez restrictives, à savoir qu'elles doivent investir 70% de leurs fonds propres sous forme de capitaux de risque. Donc, il s'agit vraiment de banques, non pas de bas de laine, mais de risques, des prêts non garantis, du capital action, etc.

De plus, la loi oblige ces SODEQ à servir en quelque sorte de surveillants des PME. Après avoir prêté, tu dois fournir des services techniques à ces entreprises. Donc, ce qui se produit fréquemment, c'est que, dans une région, un groupe d'hommes d'affaires, souvent autour d'une caisse d'entraide économique, se réunit pour investir. Un des facteurs qui a ralenti peut-être la formation des SODEQ dans certaines régions, c'est une interprétation de la loi des caisses d'entraide économique, mais aussi l'autre loi sur les Caisses d'épargne, les caisses d'établissement, entre autres, à savoir que les caisses d'entraide économique régionales n'avaient pas le droit d'investir leurs fonds propres dans une SODEQ mais uniquement la fédération qui, elle, avait un excédent — je me rappelle, l'an passé, c'était $7 millions — donc, c'étaient des montants relativement petits et qui pouvaient évidemment aller appuyer un effort régional, à cause du fait que le ministère des Institutions financières, Corporations et Coopératives croyait que les caisses d'entraide économique avaient une vocation qui n'allait pas dans le sens du capital de risque non garanti, etc, et que ça prenait des fonds vraiment libres qui n'étaient pas gagés sur un dépôt ou sur des fonds garantis par la Loi du dépôt garanti qui puissent être utilisés dans les SODEQ.

Donc, ceci a ralenti certaines initiatives parce que bien des groupes qui avaient demandé des certificats temporaires comptaient sur une contribution d'une caisse d'entraide économique. Donc, pour obtenir leur premier million, parfois ça retardait. Donc, on se retrouve aujourd'hui avec deux SODEQ qui sont en opération, la Beauce Appa-laches, mais qui ne font que commencer à étudier les dossiers. Dans le cas de la Beauce Appalaches, on me dit qu'ils commencent, des prêts seront annoncés bientôt, etc. Sodecorn aussi, le groupe de Montréal.

Les groupes maintenant de l'est du Québec et du nord-ouest sont en train d'accumuler leur premier million. Actuellement, ils attendent le dépôt de la loi de l'épargne-actions pour voir ce qu'il y a dans la loi en question et continuer la souscription. Est-ce que la loi de l'épargne action s'applique aux investisseurs dans une SODEQ? Oui. Donc, il y a un dégrèvement fiscal de 25% prévu dans la loi de SODEQ, plus un autre dégrèvement... Cela devrait donc favoriser les SODEQ. Ensuite, il y en a une, deux, trois, quatre, cinq, six qui sont en formation, donc, les dix prévues par la loi sont en marche. Nous ne pouvons plus donner le feu vert à d'autres groupes à moins qu'un des six derniers décide de se retirer de la course.

La limite de dix était pour les 24 premiers mois de la loi à l'adoption du règlement. C'est-à-dire que je pense que le règlement a été adopté au début de juin 1977, donc au début de juin 1979. À partir de là, il n'y aura pas, pour le moment, de limite quant au nombre.

M. Raynauld: Dans le contexte de mes lectures sur le programme d'épargne-actions au Québec, j'ai lu beaucoup de littérature française. On a introduit en France, l'année dernière, un régime d'épargne-actions presque identique à celui du Québec, mais moins restrictif, puisqu'on peut acheter en France des actions sur le marché secondaire autant que sur le marché primaire.

M. Tremblay: Jusqu'à 5000 francs, je pense.

M. Raynauld: Jusqu'à 5000 francs, plus 500 francs pour les deux premiers enfants et, je pense, 1000 francs pour un troisième. C'est curieux, une politique familiale là-dedans, mais en tout cas. Cela peut donc aller jusqu'à 6000 francs.

M. Tremblay: Ce doit être un comité qui a écrit cette loi.

M. Raynauld: Cela doit. La chose intéressante cependant que j'ai remarquée dans le contexte des SODEQ, c'est que je pense que la moitié, sinon les trois quarts des placements qui ont été faits en France par des individus, en vertu de ce programme, l'ont été fait par les sociétés d'investissement. On les appelle les SIVAC, sociétés... je ne me rapelle plus le nom, SIVAC. Ce sont des sociétés d'investissement qui ressemblent beaucoup aux SODEQ ou à des formules de clubs de placement. Ce qui me frappe, c'est que ce serait beaucoup plus généreux si on appliquait intégralement le régime d'épargne-actions aux SODEQ. À ce moment-là, ce serait plus généreux, sous réserve de la limite 6000 francs ou $5000, lorsqu'il n'y a pas déjà de placement dans les régimes d'épargne-retraite. Je me suis demandé dans quelle mesure on pourrait étendre ou appliquer intégralement aux SODEQ ce genre de régime. M. Déry vient de dire qu'effectivement les SODEQ étaient admissibles à ce programme.

M. Tremblay: Oui, parce que les SODEQ ne sont pas des sociétés de placement. Les seules qui soient exclues, semble-t-il, d'après le discours

du budget, sont les' sociétés de placement et SODEQ n'est pas une société de placement, vu qu'elle apporte une aide à la gestion de l'entreprise dans son mandat, en plus du capital de risque.

M. Raynauld: Oui, mais on dit qu'il faut que ce soit coté en bourse. Les SODEQ sont cotées en bourse?

M. Tremblay: Non, il faut qu'il y ait 50 investisseurs. Pas nécessairement coté en bourse, il faut que vous soyez une société publique.

M. Raynauld: Non, mais dans le régime d'épargne-actions.

M. Tremblay: Non, 50, pas nécessairement en bourse. Il faut que vous soyez une société publique au sens de la Commission des valeurs mobilières, c'est-à-dire 50 actionnaires, pas nécessairement coté en bourse.

En France, c'est le minisre Monory qui a proposé cette loi, c'est un peu comme nos programmes d'épargne-retraite enregistrés. En France, ces 5000 francs placés, c'est un peu cela. Là-bas, on n'a pas de régime semblable. Trop de générosité, peut être très coûteux.

M. Raynauld: Quand j'ai pensé à faire le parallèle avec les SODEQ, franchement, je ne pen- sais pas que les SODEQ étaient admissibles au régime d'épargne-actions, et elles le sont.

M. Tremblay: Elles le sont.

Les SODEQ deviennent des instruments importants, pourvu qu'elles atteignent 50 actionnaires, pour pouvoir se qualifier à la nouvelle loi d'épargne-actions. De sorte qu'il y a 25% de dégrèvement à l'achat de l'action directement de l'impôt payable, et non pas du revenu imposable, mais de l'impôt payable, plus la disposition prévue dans la Loi sur l'épargne-actions. C'est ce qu'on croit comprendre pour le moment.

Le Président (M. Laplante): Sur ce, les travaux sont ajournés à demain, 10 heures. Est-ce que vous adoptez le programme 1 avant de finir?

M. Tremblay: L'élément 1. Il nous reste combien d'heures?

M. Scowen: Pour moi, des crédits aussi importants que ceux de l'Industrie et du Commerce... On devrait permettre 25 ou 30 heures, c'est l'économie, c'est l'année de l'économique.

Le Président (M. Laplante): Vous en discuterez entre vous, j'ajourne jusqu'à demain, 10 heures.

Fin de la séance à 21 h 57

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