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Question avec débat
(Dix heures treize minutes)
Le Président (M. Jolivet): La commission de l'industrie et
du commerce se réunit ce matin de 10 heures à 13 heures pour
discuter de la question avec débat du député d'Outremont
au ministre de l'Industrie et du Commerce sur le sujet suivant:
L'investissement dans la construction du Québec. Comme c'est la
première...
M. Raynauld: Pas l'investissement...
Le Président (M. Jolivet): L'investissement dans la
construction du Québec. C'est ce que j'ai.
M. Raynauld: C'est une erreur.
Le Président (M. Jolivet): C'est le journal des
Débats. Est-ce que c'est...
M. Tremblay: Oui, c'est ce que j'ai ici. M. Raynauld: Ce
n'est pas ça du tout...
M. Tremblay: Les investissements dans la construction.
M. Raynauld: Oui, mais c'était dans la région de
Montréal.
Le Président (M. Jolivet): Ce que j'ai à
l'appendice, le jeudi 12 octobre 1978, c'est bien l'investissement dans la
construction au Québec. On va vérifier.
M. Tremblay: M. le Président, j'ai aussi les affaires du
jour et c'est bien marqué: question avec débat en vertu de
l'article 174a du règlement: Commission permanente de l'industrie et du
commerce, question avec débat du député d'Outremont au
ministre de l'Industrie et du Commerce sur le sujet suivant: L'investissement
dans la construction au Québec.
M. Raynauld: M. le Président, je voudrais prendre ceci
sous réserve, la lettre qui a été envoyée au
président, je l'ai signée. Je suis convaincu que ce
n'était pas ça.
Je demanderais à quelqu'un d'aller chercher cette lettre
auprès de M. Jocelyn Pittre, au deuxième étage...
Le Président (M. Jolivet): On peut envoyer
quelqu'un...
M. Raynauld: ... la chercher et on pourrait prendre ça
sous réserve.
Le Président (M. Jolivet): De toute façon, c'est ce
que j'ai comme avis à l'appendice.
Le Président (M. Jolivet): Pendant qu'on vérifie,
étant donné que c'est la première rencontre que nous avons
depuis le mois de juin dernier, permettez-moi d'apporter certaines informations
concernant ce débat qui est un débat avec questions. Selon le
règlement, la première personne qui prendra la parole, c'est
d'abord la personne qui a posé des questions au ministre,
c'est-à-dire le député d'Outremont. La deuxième
personne à parler sera le ministre, ensuite le ministre et la personne
qui pose des questions ont le droit d'intervenir durant vingt minutes chacun.
Cependant, ce qu'on a utilisé comme procédure depuis le
début, prévoit que, une fois que le ministre aura donné sa
réponse aux questions du député d'Outremont, ce sera le
député de Huntingdon qui prendra la parole; ensuite, ce sera le
tour de chacun des membres autour de cette table, selon la demande. Je prendrai
en note le nom des personnes qui me demanderont ensuite d'intervenir. Je
demanderais au député d'Outremont de procéder
immédiatement.
Exposé du sujet
M. André Raynauld
M. Raynauld: Merci, M. le Président. Je dirai d'abord que
je regrette ce qui semble être un malentendu assez malencontreux dans mon
esprit et dans l'esprit de mes collègues du Parti libéral. Nous
avions voulu avoir une question ce matin sur la région
métropolitaine de Montréal. C'est une des principales raisons
pour lesquelles je suis moi-même le signataire de cette demande
d'interpellation et, en second lieu, on voulait que cette question, ce matin,
soit un peu plus circonscrite que d'habitude, de façon qu'on puisse au
moins tirer des conclusions un peu plus précises et plus claires que
dans les débats qui sont beaucoup plus généraux.
Comme nous l'avons dit tout à l'heure, nous obtiendrons cette
demande, mais je voudrais bien dire qu'en ce qui me concerne, j'ai
préparé des notes ce matin sur la région économique
ou métropolitaine de Montréal seulement.
Comme deuxième remarque préliminaire, je voudrais
m'excuser auprès du ministre si cette demande a pu l'importuner,
puisque, cette semaine, il a voulu retarder ce débat jusqu'à au
moins la semaine prochaine, à cause de certains autres engagements. Je
le remercie d'être venu. Si nous avons insisté, c'est, comme
j'essaierai de le montrer par la suite, à cause de la gravité de
la situation.
Dans un premier point, je vais d'abord essayer de démontrer que
la construction à Montréal dégringole et que la situation
économique liée à la construction se
détériore à un rythme extrêmement rapide. Pour
empêcher le ministre d'imputer cette chute à Ottawa, aux
Américains, aux Arabes du Moyen-Orient, je vais montrer que cette
dété-
rioration ne suit pas un cours normal. C'est une expression qui est
souvent employée ici depuis quelque temps et je vais essayer d'insister
pour montrer qu'il s'agit d'une conjoncture dans laquelle il y a des
éléments supplémentaires qui s'ajoutent à des
éléments qui sont, bien entendu, de mise et qui concernent des
situations à l'extérieur.
Le premier indicateur que je vais prendre, encore une fois en me
limitant toujours à la région métropolitaine de
Montréal, pour ce qui concerne le chômage, en 1977, c'est qu'on a
un taux de 9,4% dans la région économique no 6; en 1976, il
était de 7,1%. C'est donc une augmentation du taux de chômage de
32%, en une année. En 1978, pour les neuf premiers mois, l'augmentation
correspondante est de 11%. Pour la zone métropolitaine de
Montréal, on a également une augmentation du taux de
chômage, en 1977, de 36%.
Ce qu'il y a d'inhabituel dans ces chiffres et d'incontestable en
même temps, c'est, premièrement, que les fluctuations de ce taux
sont habituellement plus faibles dans une région comme Montréal,
qui a une économie plus diversifiée que des régions
où l'économie est fondée essentiellement sur des
ressources ou des milieux beaucoup plus restreints.
Or, cette année et l'année passée, on trouve tout
à coup que c'est à Montréal que les fluctuations du taux
de chômage sont le plus denses. C'est inhabituel, cela ne s'est pas
produit avant.
Je voudrais même ajouter qu'en 1977 encore, cette hausse de 35%
à 36%, c'est la plus haute de toutes les régions du
Québec; de toutes les régions économiques du
Québec, c'est dans la région économique de Montréal
que la hausse a été la plus rapide; c'est inhabituel.
Deuxièmement, ce qu'il y a d'inhabituel aussi, c'est qu'en même
temps que le chômage augmente évidemment considérablement
à Montréal, il a baissé, de façon
systématique, à Toronto pendant la même période.
En 1978, tous les mois, à Toronto, dans la zone
métropolitaine, le taux de chômage a diminué. Je peux vous
donner les chiffres pour les mois, à partir de mars, ainsi que ceux
d'avril, de mai, de juin, de juillet et du mois d'août. On a toujours une
baisse systématiquement, sauf un mois où cela a été
égal.
S'il existe une influence provenant de cette conjoncture internationale,
américaine, canadienne ou étrangère en
général, elle ne semble pas jouer dans le même sens qu'elle
jouait dans le passé; elle ne semble pas jouer non plus dans le
même sens entre Montréal et Toronto.
Le deuxième indicateur de difficultés à
Montréal est le logement. Pour ce qui concerne d'abord les permis de
bâtir, en 1976, on a eu une très forte augmentation, toujours dans
la zone métropolitaine de Montréal, sur 1975. On a eu une
augmentation de 84%. En 1977, on a eu une baisse de 31% et en 1978, une baisse
additionnelle de 35%. Voilà pour les permis de bâtir.
Pour les mises en chantier, dans la zone métropolitaine de
Montréal, le même phénomène essentiellement: en
1976, une très forte hausse, 104% dans les mises en chantier; en 1977,
une baisse de 11% et en 1978, une baisse de 30%. Pour 1978, ce sont les
premiers six mois, bien entendu. Il n'y a pas de prévision
là-dedans, je m'en tiens strictement à des faits établis.
Donc, une baisse dans les mises en chantier qui est considérable.
On peut dire, que même à l'intérieur de la zone
métropolitaine de Montréal, on trouve des chiffres encore plus
extraordinaires, comme par exemple, sur la rive sud où la baisse dans
les mises en chantier, pour les six premiers mois de 1978, est de 53,6%. Ici
aussi, il y a des choses inhabituelles. Ce qu'il y a d'inhabituel, c'est
l'ampleur des fluctuations. C'est la brutalité avec laquelle la chute
s'effectue, une brutalité qui ne semble pas être expliquée
par les phénomènes habituels liés soit à des
fluctuations dans les taux d'intérêt, soit à des
fluctuations dans le taux d'inoccupation, par exemple. Le taux d'inoccupation
est à la hausse, bien sûr, depuis 1976, mais je ne sais pas encore
le taux d'inoccupation global pour la région de Montréal; c'est
3,4% à l'heure actuelle ou à peu près. Donc, le taux
d'inoccupation n'est pas encore extravagant. On se demande comment il se fait
que les mises en chantier font une chute aussi brutale. C'est inhabituel.
Ensuite, il y a un phénomène nouveau également,
c'est le taux d'inoccupation qui s'applique aux logements neufs qui sont
construits, par exemple, depuis sept à dix-huit mois. Je compare ici
avril 1978 à avril 1977, un an avant, le taux d'inoccupation est
passé de 9% à 21%. Sur les logements neufs de six mois et moins,
le taux d'inoccupation est passé l'an dernier de 54% à 73%. Donc,
il se passe quelque chose. Le taux global d'inoccupation n'est pas tellement
élevé. On dirait que les constructeurs ont contribué
à mettre des logements en chantier, et tout à coup, il y a eu une
espèce de cassure entre les attentes des entrepreneurs et les
prévisions des constructeurs, probablement en 1975 ou 1976, et ce qui
s'est passé par la suite. Il y a eu quelque chose qui s'est passé
pour que, tout à coup, on ait une baisse aussi considérable des
permis de bâtir et des mises en chantier et qu'on ait des taux
d'inoccupation nettement en déséquilibre et qui sont
extrêmement élevés pour les logements neufs et relativement
faibles pour l'ensemble du stock de logements.
La réponse, à mon avis, à cette question, tient en
partie à l'émigration de la population depuis l'élection
du Parti québécois. On a des chiffres là-dessus. Je les ai
déjà cités plusieurs fois, mais je les rappelle simplement
pour mémoire. En 1977, on a eu des sorties nettes de population au
Québec qui ont été à peu près deux fois et
demie celles de 1976. Je ne pense pas qu'on puisse dire ici que ça suit
son cours normal. 73 000 sorties, 26 000 entrées, pour des sorties
nettes de 47 000 en 1977; l'année précédente,
c'était 18 000 sorties nettes. En 1975 c'était pourtant
une année de récession les sorties nettes ont
été de 12 000. Donc, je répète, 47 000 sorties
nettes en 1977, 18 000 en 1976, 12 000 en 1975. Je dis qu'il y a quelque chose
non seulement d'inhabituel là-dedans, mais c'est absolument
exceptionnel. La
seule réponse qu'on a trouvée à ce genre de
phénomène de la part du gouvernement a été
d'invoquer l'année 1970.
J'avoue, là-dessus, que j'ai rarement entendu une raison aussi
mauvaise, puisqu'on sait très bien ce qui s'est passé en 1970 et
je ne sais pas si le Parti québécois veut continuer à
établir des comparaisons entre l'année 1970 et l'année
1977. À mon avis, ça lui fait une belle jambe que d'invoquer
l'année 1970.
Le troisième indicateur, les contrats de construction. Les
contrats de construction en 1977 ont baissé de 14% dans la zone
métropolitaine de Montréal. Bien sûr, on parle toujours,
quand on arrive à la construction, des fameux Jeux olympiques de 1976.
Si les Jeux olympiques ont pu expliquer les pourcentages de baisse en 1977,
est-ce qu'ils expliquent encore les pourcentages de baisse de 1978? Parce qu'en
1978, pour les six premiers mois, la baisse dans les contrats de construction,
c'est 35% sur 1977, et ça, ce n'est pas une année de Jeux
olympiques, 1977; une baisse de 35% qui s'ajoute à la baisse de 14% de
l'année précédente.
Les baisses de 1978 se retrouvent partout, sauf dans les contrats du
gouvernement, toujours pour les six premiers mois. Le secteur
résidentiel, moins 27%; secteur commercial, moins 67%; secteur
industriel, moins 38%; génie civil, moins 40%. Il y a le secteur
institutionnel qui, effectivement, est le secteur public, plus 25%, ce qui
donne au total, moins 35%. Ce qu'il y a d'inhabituel ici, c'est encore que, par
rapport à Toronto, Montréal régresse; quant à
Toronto, la ville progresse.
Les contrats de construction ont augmenté de façon
systématique à Toronto jusqu'en mai 1978. Il semble y avoir eu
une chute en juin. On a apporté des corrections dans les statistiques,
je suppose qu'on est au courant de cela, et cela rend les comparaisons plus
difficiles en ce qui concerne le mois de juin 1978 puisqu'on a corrigé
les données jusqu'à une couple d'années
précédentes, comme il arrive souvent. Quoi qu'il en soit, je
pense qu'il est très clairement établi que la zone
métropolitaine de Toronto a progressé de façon
considérable depuis deux ans, tandis qu'à Montréal, on a
régressé.
Il y a aussi une chose inhabituelle, c'est que les chutes dont on parle,
de 35%, dans les contrats de construction, c'est évidemment en dollars
courants. Il faut bien se rappeler que, par rapport à 1975, l'inflation
a déjà coupé à peu près 25%; en dollars de
même niveau, l'inflation a augmenté d'environ 25%. Donc, quand on
voit une baisse de 35% en chiffres réels et en termes d'emplois, pour la
main-d'oeuvre, c'est beaucoup plus considérable que cela, parce que cela
coûte plus cher aujourd'hui pour faire le même travail que
c'était le cas en 1975 ou en 1976. (10 h 30)
Le quatrième indicateur, ce sont les heures de travail dans la
construction. Pour les six premiers mois de l'année 1978, les heures
travaillées ont diminué de 18% par rapport aux six premiers mois,
toujours, de l'année 1977. En 1977, elles avaient aussi diminué.
L'OCQ, dans son bulletin du 8 septembre, présente un graphique qui
illustre assez bien l'évolution des heures travaillées dans
l'industrie de la construction. Le ministre Landry, à l'Assemblée
nationale, a voulu nous monter un clocher; il y en a un clocher. Le clocher est
effectivement en 1976; il n'y avait pas seulement les Jeux olympiques, il y
avait aussi autre chose qui se passait à Québec en 1976.
Mais la montée des heures travaillées dans la construction
a été régulière; j'ai des chiffres jusqu'en 1971.
Cela a monté de façon tout à fait régulière
jusqu'en 1976 pour l'agglomération montréalaise, et on voit la
chute, depuis 1976, une chute considérable dans les heures
travaillées, de sorte qu'on se retrouve, aujourd'hui, avec quand
même une population et une main-d'oeuvre un peu plus grande que celle que
nous avions auparavant et on se retrouve au niveau des heures
travaillées de 1972.
Donc, on est rendu en 1978 et là on a reculé au lieu
d'avancer. On a reculé de six ans, on est rendu au taux de 1972. Je
pense qu'on n'a pas besoin d'être très éloquent pour
montrer ce qu'une telle évolution peut représenter de
catastrophique pour la région de Montréal. Je n'ai pas le chiffre
pour le nombre d'emplois en tant que tel. J'ai les heures travaillées,
soit 18% de baisse en 1978, mais on peut imputer 1000 heures de travail par
employé et, si on projette cela sur une année pour 1978, c'est
douze millions d'heures de travail de moins pour 1978. Cela représente
12 000 emplois qui auraient été détruits dans l'industrie
de la construction en 1978 et 6000 pour les premiers six mois. Donc, ce sont
6000 pertes d'emploi qui sont déjà enregistrées, en plus
de celles de l'année dernière, et 12 000 sur une base annuelle.
En somme, quatre indicateurs qui démontrent jusqu'à quel creux on
en est rendu. Un taux de chômage en augmentation de 32%, construction de
logements en baisse de 35% et contrats de construction en baisse de 35%, des
heures travaillées en baisse de 18%, soit 12 000 emplois de moins pour
1978.
J'en viens maintenant, M. le Président, à mes questions
plus particulières que je ferai précéder, comme le
règlement le permet, d'un bref préambule. Les décisions
d'investir ou de se déplacer se prennent suivant un certain nombre de
critères de rentabilité attendue. Cette rentabilité
attendue est basée à la fois sur les débouchés
ce qu'on peut vendre et sur les coûts de production. Or,
les débouchés au Québec se rétrécissent
suite à l'immigration nette dont j'ai parlé tout à
l'heure, qui est absolument dramatique, et à des hausses de revenu
réelles plus faibles que cela a été le cas au cours des
années passées. De l'autre côté, les coûts de
production augmentent suite à des politiques économiques et
sociales du gouvernement auxquelles je ferai allusion tout à l'heure,
politiques relatives à la fiscalité ou à la
réglementation. En outre, il faut admettre que l'affirmation du
Québec, qui était essentielle et qui est encore essentielle, a
été accompagnée dans les années soixante
d'excès odieux, sinon révoltants. Par conséquent, il ne
faut pas se surprendre si l'incertitude...
si le climat s'est détérioré en partie avant
l'arrivée du Parti québécois au pouvoir. Mais cela fait
partie du même phénomène, même si je ne veux en
aucune façon associer le Parti québécois à ce qui a
pu se passer avant qu'il ne naisse bien entendu. Si je mentionne ces
éléments, c'est pour exprimer ma profonde conviction qu'on peut
faire quelque chose, que le gouvernement doit faire quelque chose pour rajuster
son tir et ses politiques, de façon à stopper ces tendances qui
se sont exprimées jusqu'à maintenant. Ce n'est pas à moi
qu'on va faire avaler la couleuvre de l'inévitabilité des
glissements vers l'Ouest, pas plus que l'inévitabilité de
l'indépendance du Québec. Il n'y a rien d'inévitable. Je
pense qu'un gouvernement, avec les outils que le gouvernement du Québec
possède à l'heure actuelle, est capable, a en main les outils
nécessaires pour corriger ces tendances et les faire se retourner en
faveur du Québec. Encore faut-il qu'on puisse les appliquer.
Alors, à partir de là, je passerai mainenant directement
aux questions. Premièrement, je voudrais faire allusion au comité
permanent de coordination des travaux de construction qui est une des
réponses que le gouvernement fournira pour montrer sa diligence à
apporter des solutions au problème. Je dirai là-dessus que la
création de ce comité est une excellente idée et je pense
bien que je ne révélerai que des secrets de polichinelle si je
dis que l'idée est venue, à l'origine, du Conseil
économique du Canada, que si le rapport Cliche contient une
recommandation sur la stabilisation des dépenses de construction et si
l'OCQ également a inclus une recommandation à cet égard,
c'est parce que j'ai été partie à des conversations et
à des consultations nombreuses à cet égard. Par
conséquent, je ne suis pas étranger aux recommandations qui ont
pu être faites par ces deux commissions.
M. Tremblay: M. le député, est-ce que vous diriez
que vos recommandations ont plus de chances d'être acceptées par
le gouvernement du Québec que par celui d'Ottawa?
M. Raynauld: J'arrive tout de suite à ça. Parce
que, premièrement, je voulais justement demander au ministre pourquoi il
n'avait pas élargi la composition de ce comité pour y inclure les
sociétés d'État. Parce que, dans le rapport du conseil
économique...
M. Tremblay: ... ministères de tutelle.
M. Raynauld: Ce sont des ministères de tutelle, mais ce
sont des sociétés d'État qui ont l'initiative, qui
prennent des décisions...
M. Tremblay: Pas pour leur plan de développement.
M. Raynauld: Sur les décisions d'investir, je pense bien
qu'ils doivent quand même avoir une certaine autonomie.
M. Tremblay: C'est décidé par le gouvernement et
par le ministre des tutelles.
M. Raynauld: Ce que vous me dites, c'est que les
sociétés d'État n'ont aucune autonomie dans le domaine des
investissements.
M. Tremblay: ... elles ont beaucoup d'autonomie,
l'Assemblée voudrait qu'elles en aient moins. Nous avons eu un
débat sur cela cette semaine.
M. Raynauld: En tout cas... Ou bien les sociétés
d'État ont une certaine autonomie, à ce moment-là,
j'aurais aimé qu'elles fassent partie du comité; ou bien elles
n'en ont pas du tout. Si elles n'en ont pas du tout, je suis heureux de
l'apprendre.
En second lieu...
M. Tremblay: Si vous voulez raisonner par l'absurde, allez-y,
mais vous êtes absurde vous-même.
M. Raynauld: En second lieu, je me suis demandé pourquoi
il n'y avait pas eu une décision de principe sur l'objectif à
suivre et à atteindre par la formation de ce comité. En fait,
pour le comité, on dit simplement que son objectif général
est de réduire les fluctuations dans l'industrie de la construction et
qu'il faut également assurer une certaine coordination entre tous les
ministères concernés et toutes les autorités qui prennent
des décisions. Mais il n'y a pas là-dessus d'objectif
fixé, de sorte que c'est un autre comité d'étude et je
pense que là où on en était rendu, après les
études faites sur le sujet par le conseil économique, mais aussi
par l'OCQ, par le rapport Cliche, je pense qu'il aurait été temps
qu'on aille plus loin que ça et qu'on dise, dès maintenant, qu'il
est opportun aux yeux du gouvernement de fixer des taux de croissance
réguliers quelques années à l'avance, notamment pour le
logement social, qui est une grande source de fluctuation et qui continuera de
l'être aussi longtemps qu'on n'aura pas décidé de
régulariser ces dépenses-là.
Le Président (M. Jolivet): M. le député, je
ne voudrais pas vous interrompre, mais comme vous avez débuté
à 10 h 20 et qu'il est 10 h 40, normalement votre temps de 20 minutes
est écoulé. Cependant, compte tenu de l'usage établi
à l'intérieur de ces commissions avec débat, si on est
d'accord pour le laisser terminer, et que le ministre ait le même temps
de réponse à ces questions, compte tenu que c'est l'interlocuteur
privilégié, je pense qu'on pourrait s'accorder sur cela?
D'accord?
M. Raynauld: Merci, M. le Président.
En principe, je suis d'accord sur la création de ce comité
permanent, mais, dans la pratique, j'ai bien peur que ce soit un autre
comité d'étude et qu'on ne puisse pas prendre vraiment d'action
concrète avant deux ou trois ans, ce qui serait
évidemment trop tard pour que le gouvernement actuel puisse
agir.
Deuxième point: la fiscalité. Je pense que le ministre
sera d'accord que la fiscalité est très importante pour
déterminer les perspectives de rentabilité des entreprises,
très importante dans les coûts de production. À cet
égard, je voudrais lui demander ce que le gouvernement a fait pour
alléger le fardeau fiscal au Québec, de façon à
changer les règles fondamentales de décisions qui font justement
que les investisseurs, dans la région de Montréal en particulier,
ne sont plus intéressés.
Je voudrais, bien sûr, mentionner que, de son côté,
personnellement, le ministre a introduit des crédits d'investissement.
Je lui demande combien de ces crédits sont en banque, à l'heure
actuelle, au nom des investisseurs. Je lui demande combien d'investissements
ont été entrepris dans la région de Montréal, sur
la base de cette loi, combien d'emplois ont été
créés. C'est que, l'année passée, quand cette loi a
été introduite, c'était un des principaux instruments
auxquels le gouvernement voulait recourir pour stimuler l'investissement, je
lui demande donc combien il y en a.
En revanche, même si le gouvernement a introduit des
crédits d'investissement pour les petites et moyennes entreprises, il a
relevé les impôts sur les successions de cinq à sept fois.
Il a relevé les impôts sur les dividendes, il a relevé
cette année l'impôt sur le revenu des contribuables, de sorte que
tous les contribuables qui gagnent au moins $18 000 et plus paient des
impôts supérieurs aux impôts des mêmes contribuables
en Ontario, et cette différence dans l'impôt est
considérable. 15% à 20% d'impôts plus élevés
au Québec qu'en Ontario, ce n'est pas pour faciliter les
décisions des investisseurs. Cela relève les coûts en
salaires des entreprises de 5% à 8% dans les entreprises de cadre.
Ensuite, après avoir réclamé l'indexation des
tables d'impôt à grands cris, comme parti, l'avoir
réintroduite dans le programme, le ministre l'annonce maintenant pour
dans quinze mois. Cela fera donc quinze mois plus 24, puisque cela fait
à peu près 24 mois que ce parti est au pouvoir, cela fera trois
ans et trois mois, et je pense qu'il n'y a plus personne, aujourd'hui, qui y
croit, qui s'attend que le gouvernement remplisse cette promesse.
M. Tremblay: Est-ce à croire, M. le député,
que vous acceptez la mesure que le ministre Chrétien a mise de l'avant
au mois d'août, d'envoyer des chèques directement à la
population plutôt que de rembourser le gouvernement du Québec pour
les sommes qu'il avait injectées dans les industries
traditionnelles?
M. Raynauld: Premièrement, ceci n'a rien à voir.
Deuxièmement, si le gouvernement du Québec, avec l'appui de
l'Opposition à l'Assemblée nationale, avait poursuivi
plutôt que de commettre la bourde qu'il a commise d'aller dire au
gouvernement fédéral qu'il pouvait faire ce qu'il voulait,
peut-être que le gouvernement du Québec l'aurait, cet argent,
aujourd'hui.
M. Tremblay: L'Assemblée nationale a toujours
été unanime sur le fait de demander au gouvernement
fédéral de faire une entente avec le gouvernement du
Québec et non pas de faire de l'électoralisme en diminuant des
chèques avant une élection anticipée.
M. Raynauld: C'est cela, et c'est le ministre des Finances qui a
dit au gouvernement fédéral qu'il pouvait faire ce qu'il
voulait.
Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! S'il
vous plaît! revenez au débat.
M. Raynauld: Ensuite, sur cette question des impôts, je
m'en voudrais de ne pas ajouter une question sur une étude que le
gouvernement est censé avoir entreprise sur les salaires des cadres.
J'aimerais bien qu'il fasse part aux membres de cette commission des
résultats de cette étude. Le ministre Landry en a parlé
à plusieurs reprises, je sais qu'elle existe. Je ne sais pas cependant
pas si elle est terminée, mais je sais qu'elle existe.
Troisièmement, les sièges sociaux. Je pose une question
très simple au ministre à ce sujet: Les sièges sociaux
quittent-ils ou non? Ce n'est pas compliqué comme question. Partent-ils
ou non? Parce que, d'une part, on entend plusieurs ministres se
référer au chantage et au "bluff" des entreprises, ce qui laisse
croire qu'elles ne quittent pas. Si c'est du chantage, elles ne quittent pas.
D'autre part, on entend les ministres aussi déplorer le
déplacement des activités vers Toronto ou vers l'Ouest, depuis au
moins cent ans. Ce que je demande, c'est de quel côté le
gouvernement se place. Dit-il que c'est du chantage? Si c'est du chantage, les
sièges sociaux ne partent pas ou, s'ils partent, ce n'est pas du
chantage et il faudrait peut-être trouver une raison.
Sur les sièges sociaux, là aussi il est censé
exister une étude. Or, je suppose que le ministre va la déposer
ce matin. Puisque le ministre en a parlé, hier, si le ministre
d'État au développement économique commence à dire
à l'Assemblée nationale ce que cette étude contient, il
est dans les droits des parlementaires de connaître la base sur laquelle
il fait ses affirmations et de savoir si les chiffres qu'il cite sont vrais ou
faux.
M. Tremblay: Vous parlez du ministre d'État au
développement économique?
M. Raynauld: Le ministre d'État au développement
économique qui, hier, nous a dit sur les sièges sociaux: Je n'ai
pas l'étude, mais on a un rapport d'étapes. Dans cedit rapport,
on nous dit qu'ii n'y a pas plus de 600 employés qui partent. Je dis:
C'est contraire aux droits des parlementaires que d'être
confrontés à des affirmations comme celle-là qu'ils ne
peuvent vérifier. C'est cela que je dis. Ou bien on en parle, et on
dépose l'étude, ou bien on n'en parle pas.
Quatrième question. Je vais essayer d'aller un peu plus vite,
mais j'ai beaucoup de questions.
M. Tremblay: Vous vouliez être très restreint dans
vos interventions. Maintenant, vous faites une revue globale de
l'économie, je ne m'y retrouve plus, finalement.
M. Raynauld: C'est très simple, j'essaie...
M. Tremblay: Vous partez de la construction à
Montréal. Vous êtes rendu aux sièges sociaux, la
fiscalité.
M. Raynauld: Oui, quant à la construction à
Montréal, j'ai essayé d'établir que la situation
était grave et, deuxièmement, j'essaie de voir quels sont les
outils que le gouvernement a à sa disposition pour la corriger. Ce n'est
pas très vaste. Quels sont les outils qu'il a?
M. Tremblay: II y a quand même une certaine
incohérence.
M. Raynauld: Je sais déjà les réponses que
le ministre va nous donner. Au moins, vous me ferez l'honneur de
m'écouter, ce sont les arguments que vous avez utilisés.
Le Président (M. Jolivet): M. le député,
j'ai été large un peu jusqu'à maintenant, si vous
êtes prêt...
M. Raynauld: M. le Président, je n'ai pas objection
à arrêter, j'en ai pour trois jours.
Le Président (M. Jolivet): C'est pour cette raison
que...
M. Raynauld: Cela ne m'ennuie pas, je pourrai continuer un peu
plus tard, parce que je pense qu'on pourra avoir encore un peu de temps pour
discuter. Je pourrai continuer à poser mes questions. J'en avais encore
cinq ou six.
Réponse du ministre M. Rodrigue
Tremblay
Le Président (M. Jolivet): C'est parce que je voulais
éviter justement que vous passiez le reste de la journée à
poser des questions et que personne ne puisse y répondre. M. le
ministre, vous avez environ trente minutes pour répondre.
M. Tremblay: Trente minutes, évidemment...
Le Président (M. Jolivet): Vous aurez d'autres...
M. Tremblay: Oui, mais je pense que le député
d'Outremont a parlé durant plus de trente minutes.
Le Président (M. Jolivet): Non, M. le ministre. Il a
commencé à 10 h 20 et, si vous regardez l'horloge, actuellement,
il est près de 10 h 50. C'est donc trente minutes.
M. Tremblay: Oui, mais il est plus facile de poser des questions
évidemment et cela prend moins de temps que de fournir des
réponses. Je pense que cette Opposition est très forte sur les
questions, et elle voudrait prendre les mesures pour éviter que le
gouvernement fournisse les réponses. J'ai l'impression qu'elle se bouche
les oreilles, lorsqu'il est temps d'entendre les réponses. Les
réponses, nous les avons. Je les ai, comme membre du gouvernement. Je
les ai, comme économiste aussi. Je vais en faire la
démonstration. (10 h 45)
Le Président (M. Jolivet): Avant de continuer, M. le
ministre, il y a quelque chose que j'ai oublié de faire tout à
l'heure. Compte tenu que c'est une commission avec débat sans quorum, je
pense qu'il est cependant normal de nommer les personnes présentes, ici
à cette commission: M. Ciaccia (Mont-Royal), M. Dubois (Huntingdon), M.
Gosse-lin (Sherbrooke), M. Grégoire (Frontenac), M. Lefebvre (Viau), M.
Raynauld (Outremont) et M. Tremblay (Gouin).
M. Tremblay: M. le Président, je suis un peu perplexe
devant les arguments et l'approche du député d'Outremont, parce
que, d'une part, il argumente que l'ordre de l'Assemblée nationale n'est
pas conforme à ses souhaits, dans le sens qu'il aurait voulu que cet
ordre ne porte pas sur les investissements dans la construction au
Québec, mais uniquement sur les investissements dans la région de
Montréal et, par la suite, quelque vingt minutes plus tard, il nous dit
qu'il a préparé, pour trois jours de débat sur la gamme de
l'ensemble des problèmes et des politiques économiques que l'on
retrouve au Québec. Donc, j'ai l'impression que l'on veut soulever ici
beaucoup de poussière, jeter de la poudre aux yeux et peut-être
mettre un peu le ministre dans l'embarras. On lui donne des indications. Il se
prépare dans un sens, mais on lui dit: On s'en va dans l'autre sens.
S'il essaie de répondre dans un sens, on va lui dire: Ce n'était
pas cela, on a posé à la fin des questions qui étaient
beaucoup plus vastes. Je crois que ce genre de tactique, surtout dans un
débat qui est limité, ne m'apparaît pas conforme aux
objectifs de la poursuite de la vérité et des faits, parce qu'il
s'agit vraiment ici de l'opération que nous poursuivons,
c'est-à-dire de regarder très froidement la
réalité, de faire le partage de la petite politicaillerie, des
réalités et des politiques qui sont en marche.
Je voudrais, pour ma part, à cause de ce phénomène,
m'attarder sur les points que je juge les plus importants, parce qu'il y a des
points secondaires et il y a des points qui sont fondamentaux.
Tout d'abord, et le député y a fait allusion au
départ, j'avais aujourd'hui convoqué la haute direction d'une des
plus grosses sociétés d'État du Québec, la
société SIDBEC, de même que je devais rencontrer le conseil
d'administration de
SIDBEC pour discuter justement de problèmes rattachés
à cette société d'État. Comme nous avons un Conseil
spécial des ministres vendredi prochain, c'était pratiquement la
seule occasion que j'avais pour les deux prochaines semaines de le faire.
J'avais demandé au député d'Outremont, au whip, M.
Lamontagne et au chef de l'Union Nationale s'ils acceptaient de reporter cette
interpellation d'une semaine, de manière à me permettre de
remplir mes engagements comme ministre responsable de SIDBEC. Ceux-ci m'avaient
accordé leur accord, mais, à la dernière minute, le leader
parlementaire, M. Lavoie, selon sa vieille habitude j'ai appris cela
depuis deux ans par tracasserie à l'endroit du leader du
gouvernement, je présume, s'est retiré et a dit: C'est
impossible, on ne peut pas, etc.
Je me demande comment on peut reprocher au gouvernement de ne pas avoir
une surveillance et un contrôle plus étroits sur les
sociétés d'État, lorsqu'on refuse à un ministre
responsable, sur des problèmes qui sont très importants, de
remettre une interpellation. Cette procédure d'interpellation, et je le
mentionne ici, parce qu'on l'ignore, est une vieille mesure qui existait sous
la IVe République française, alors qu'il n'y avait pas de
période de questions à l'endroit des membres du gouvernement.
Voulant prendre une partie du système britannique, qui amenait les
ministres à être redevables devant l'Assemblée nationale,
on avait instauré le système de l'interpellation.
Dans notre cas, lorsqu'il s'est agi de réduire la période
hebdomadaire des sessions de quatre à trois jours, l'Opposition a
exigé qu'elle ait une quatrième journée où elle
puisse faire de l'interpellation, de sorte qu'on se retrouve avec une partie de
l'ancien système français sous la IVe République, qui a
été abolie évidemment par la Ve. Donc, nous sommes en
retard d'une république, dans ce domaine. Nous avons gardé aussi
la période des questions avec toutes les autres périodes de
débat que nous avons à l'Assemblée nationale. Nous en
avons eu jeudi dernier en huit sur la construction justement. De la sorte, il
m'a semblé qu'ayant discuté de la construction pendant une
journée à l'Assemblée nationale, il y a huit jours, ayant
discuté pendant deux journées entières du contrôle
et de la surveillance de la société d'État, il aurait
été de la plus simple courtoisie, de la part du leader
parlementaire, M. Lavoie, de retarder cette session d'une semaine. Lorsque le
député d'Outremont a dit que ça pressait tellement qu'il
fallait absolument discuter de cette question aujourd'hui, je pense qu'il a
fait rire tout le monde.
M. Raynauld: ...
M. Tremblay: Cela ne veut pas dire que le problème de la
construction n'est pas un problème sérieux, mais le retarder
d'une semaine, par rapport aux obligations qu'avait le ministre, je pense que
c'est assez risible.
Maintenant, j'en viens à la question de la construction, qui est
un phénomène économique global et qui touche,
évidemment, en grande partie, au ministère de l'Industrie et du
Commerce, dans le sens que les investissements industriels et commerciaux sont
une part importante des investissements dans ce secteur; mais c'est un secteur
qui touche énormément à d'autres secteurs
économiques, étant donné que les investissements
résidentiels, les investissements gouvernementaux, publics, parapublics,
bien d'autres considérations comme les conditions de travail ont une
incidence importante sur la construction. Il est évident que, comme
ministre de l'Industrie et du Commerce, je m'en préoccupe et je m'en
préoccupe énormément aussi comme économiste.
Par contre, à titre de ministre de l'Industrie et du Commerce, je
n'ai pas les lunettes noires que porte le représentant de l'Opposition,
parce qu'il fait beaucoup d'allusions au fait que, par rapport à
l'Ontario et à Toronto, nous serions en très mauvaise posture. Je
n'ai pas les mêmes informations que lui.
Dans le domaine industriel et commercial, qui est celui qui me
préoccupe le plus, et surtout dans le domaine de la fabrication, on sait
que cette année sera une des meilleures années d'investissements
au Canada pour une économie régionale. Ce sont les
prévisions qui sont faites par Statistique Canada auprès des
entreprises elles-mêmes; elles ne sont pas faites, donc, par quelques
agences. Mais ces investissements... Un investissement, évidemment,
implique souvent de la construction et il y aura une augmentation
prévue, cette année, de 18,7% des investissements de fabrication
au Québec, alors qu'il y aura une baisse de 3,5% en Ontario et une
augmentation pour l'ensemble du pays de 6,5%. Lorsqu'on dit que le
Québec, comme économie, n'a pas un pouvoir d'attraction au plan
industriel, évidemment, lorsque vous avez des gouvernements d'un autre
ordre qui donnent des subventions comme celle qui a été
accordée à la société Ford pour aller dans le sud
de l'Ontario, alors que ce n'était pas une zone désignée,
ce genre de politique peut ralentir les avantages comparatifs et les attraits
naturels qu'a l'économie du Québec, mais lorsqu'on dit que
l'économie du Québec n'a pas un potentiel économique
important, je pense qu'on se trompe grandement.
Je fais allusion simplement, avant d'entrer dans le détail, dans
l'argumentation, à des informations qui sont, je pense, connues de la
population et qui, par conséquent, doivent rendre l'intervention du
député d'Outremont un peu curieuse. Je pense que les journalistes
eux-mêmes le savent. Je lisais simplement le 7 octobre, c'est tout
récent Montréal bat Toronto, constructions
résidentielles. L'article donne les chiffres, que nous avons
vérifiés, qui sont exacts et je lis simplement l'article qui est
relativement court: "Les pisse-vinaigre, qui parlent sans cesse du
déclin de Montréal par rapport à Toronto, devraient
parfois consulter les chiffres avant de jouer aux prophètes de malheur.
Montréal bat encore Toronto là, je souligne que Toronto a
une population beaucoup plus grande que celle de Montréal pour le
nombre de mises en chantier d'habitations par région urbaine. Cela,
c'est la Société centrale d'hypothèques et de logement
du
fédéral qui le dit. 10 832 mises en chantier à
Montréal contre 10 795 à Toronto, pour la période de
janvier à juin 1978. Alors que Toronto, donc, est beaucoup plus grand
comme population que Montréal, pour les six premiers mois de
l'année, la construction résidentielle est plus forte à
Montréal qu'à Toronto".
M. Grégoire: Cela dénote la confiance des
investisseurs; les maisons individuelles, c'est ce qui donne une
propriété et il y en a beaucoup plus...
M. Tremblay: Je pense que M. Clark a eu une bonne idée
d'instaurer une mesure fiscale pour encourager la propriété dans
son programme, ce qui dénote qu'il a peut-être plus d'imagination
économique de ce côté-là qu'ailleurs.
Je lisais aussi un autre titre, récemment: Le marché
immobilier québécois demeure des plus prometteurs. Ce n'est pas
un francophone de Québec, comme dirait notre chanteur national, c'est
Rod. Quesnel, directeur des ventes de la succursale de Beaconsfield du
Montréal Trust et président de la Chambre d'immeuble de
Montréal.
J'ai aussi, un tableau dans le domaine commercial, des bâtiments
commerciaux, et j'aimerais faire distribuer ce tableau, M. le
Président...
Le Président (M. Jolivet): C'est fait, M. le ministre.
M. Tremblay: On y montre, si on prend la base de 1971, parce que
c'était vraiment la première année d'un gouvernement
libéral, au Québec, et si on considère les investissements
pour les édifices à bureaux, les hôtels, les centres
commerciaux, etc...
M. Raynauld: Une année de récession.
M. Tremblay: Qu'est-ce que vous croyez que 1977 et 1978 sont, M.
le député?
M. Raynauld: C'est 1975, votre année de récession;
là, on est en reprise.
M. Tremblay: II faut faire attention; c'est que le cycle de
construction en Ontario n'est pas le même que celui au Québec,
à cause, justement, des constructions inhabituelles qui ont
été... Je vais revenir sur ce thème parce que vos
recommandations au Conseil économique du Canada, M. le
député d'Outremont, sont appliquées par un gouvernement
rationnel. Vous avez dû venir ici justement pour faire accepter vos vues
parce qu'à Ottawa, le Conseil économique, on ne l'écoute
pas; vous le savez bien.
Donc, dans le tableau, on montre qu'en 1971, si on prend l'indice de
100, au Québec, pour ces constructions, nous sommes rendus en 1978, pour
les premiers mois à 154, un indice de 154. À Toronto, si on prend
un indice de 100, ils ont baissé à 85. Quelle région
baisse et quelle région monte dans le domaine commercial?
Évidemment, on va parler, tout à l'heure, des investissements
publics; cela est une autre affaire. Mais, dans le domaine privé,
laissons de côté les quelques institutions financières qui
agissent, pour des raisons institutionnelles et politiques. En effet, le
président de la Sun Life a déjà avoué qu'il faisait
de la politique avec les intérêts économiques des
actionnaires, ce qui, dans l'opinion de Galbraith, est tout à fait
contraire à une responsabilité sociale que tout administrateur
d'une compagnie doit avoir, c'est-à-dire la rentabilité des
investissements et non pas la satisfaction personnelle des administrateurs au
plan moral ou au plan politique.
Au niveau du secteur privé au Québec, le ministre de
l'Industrie et du Commerce, en reconnaissant que...
M. Raynauld: M. le Président, est-ce que le ministre
pourrait donner les mêmes chiffres à partir de 1976, 1977 et 1978,
pour les chiffres qu'il vient de citer, plutôt que de se rapporter
à 1971?
M. Tremblay: Le tableau comprend de 1971 à 1978. Il est
distribué.
M. Raynauld: Oui, mais il a les chiffres pour 1977?
M. Tremblay: Oui, mais je ne suis pas ici pour citer chacun de
ces chiffres en vingt minutes.
M. Raynauld: Vous verriez que c'est du temps du Parti
libéral que cela a augmenté, pas du temps du parti
québécois, cela fait toute la différence du monde.
M. Tremblay: Je présume que les cycles économiques
sont la quittance du Parti libéral et vous savez bien que je vais en
venir à la question des investissements publics parce que le grand
problème, au Québec, a été le manque de
planification dans les investissements, qui ont été procycliques.
Cela veut dire que, quand cela va bien dans la construction, les gouvernements
poussent dans la bonne direction et, quand cela va mal, ils poussent dans la
même direction, ce qui, en termes économiques vous
l'avouerez comme économiste canadien est absolument stupide.
Quand on a un gouvernement provincial qui commence à mettre de l'ordre
dans cela, grâce au comité que nous avons mis sur pied le 6
septembre, je pense que, du côté d'Ottawa, on devrait
féliciter le gouvernement du Québec pour être un
gouvernement qui met un peu d'ordre dans la planification des projets
d'investissement et non pas venir le critiquer. Il devrait, en toute
honnêteté, se tourner vers le gouvernement fédéral
et dire vraiment ce qu'il pense publiquement, et non pas simplement
privément, parce que je suis certain qu'il a été
relativement déçu...
M. Raynauld: Je l'ai dit publiquement et, en ce qui vous
concerne, vous n'avez formé qu'un comité d'étude...
M. Tremblay: Vous n'aviez pas de micro devant vous aussi
facilement. J'ai fait allusion hier,
en Chambre, justement, à cette question des investissements
publics. J'aimerais déposer une étude qui confirme une
étude semblable qui avait été faite par le Conseil
économique du Canada, en 1974, mais qui a maintenant été
mise à jour. Je répète, par exemple, que, dans
l'étude du Conseil économique du Canada, qui était
présidée, à l'époque, par le député
d'Outremont, le député disait, à la page 182 du rapport du
conseil: "Pour une croissance plus stable de la construction, le Conseil
économique du Canada recommande que les dépenses publiques... ont
donc contribué à accentuer le cycle de la construction
plutôt qu'à l'atténuer."
Je dis que le député soulignait qu'on devait justement
corriger cette situation et je pense, si on veut dépasser un peu la
petite partisanerie, qu'on doit donc regarder ce phénomène qui
est vraiment particulier. (11 heures)
Je voudrais distribuer l'étude du Centre de recherche en
développement économique, un centre que M. le
député d'Outremont connaît bien puisqu'il en a
été le fondateur et, tous deux, nous avons été
impliqués dans les recherches de ce centre qui est un des meilleurs que
nous ayons au Québec, effectivement.
Cette étude porte sur les coûts de la main-d'oeuvre au
Québec et la situation concurrentielle de l'industrie de la
construction. Aux pages 15 et 16, on a le coeur du problème dans
l'industrie de la construction au Québec et qui pose le défi que
nous avons ici, au Québec, pour le gouvernement comme pour les
gouvernements municipaux et, j'espérais aussi, le gouvernement
fédéral, mais dans le cas du gouvernement fédéral,
on sait maintenant qu'il y a une certaine dérive au plan
économique et qu'un leadership économique, à ce stade-ci,
est très difficile à obtenir. Donc, on dit, dans cette
étude, "que les fluctuations importantes qu'a connues l'industrie de la
construction au Canada se reflètent au niveau canadien par le fait qu'on
a montré que les trois paliers de gouvernement n'ont été
que faiblement responsables, soit pour 25%, de l'instabilité dans
l'industrie de la construction dans l'ensemble du Canada et cela pour la
période de 1951 à 1970. Par contre, au Québec et
c'est là qu'est tout le drame du Québec, jusqu'à un
certain point l'instabilité de l'industrie de la construction, au
cours de la période de 1960 à 1976, est largement due au
comportement des dépenses publiques".
J'ouvre une parenthèse pour dire qu'à cause du fait que
l'industrie privée, malgré le fait que nous serions en "branch
economy" au Québec je vais revenir tout à l'heure aux
questions fiscales même si les gouvernements mettent de l'avant
des programmes de stimulation fiscale des investissements privés, il y a
toujours eu, depuis que les statistiques existent, un sous-investissement
privé au Québec. Comme ministre de l'Industrie et du Commerce, je
suis en train de m'appliquer à mettre sur pied des programmes qui vont
répondre à cette instabilité chronique du Québec,
mais les pouvoirs publics ont dû prendre un peu la relève pour
maintenir l'emploi. Mais en ce faisant, avec les programmes de construction
d'écoles, les routes, l'Hydro-Qubec, l'électricité,
l'Expo, l'aéroport de Mirabel, le métro, les Jeux olympiques, ce
sont tous des gros investissements publics qui sont décidés un
peu de façon discrétionnaire et qui n'ont pas, par
conséquent, la même permanence qu'ont les projets privés
qui, eux évidemment, suivent, comme le député d'Outremont
l'a mentionné, une logique des choix de décision en fonction de
critères économiques.
Or, tous ces projets ont accentué l'instabilité au
Québec et ont, par conséquent, déséquilibré
tout le marché de la construction et ont créé des
situations tellement instables que nous avons eu besoin d'une commission royale
d'enquête pour essayer de mettre de l'ordre au niveau de la construction
il s'agit de la commission d'enquête Cliche parce que les
travailleurs eux-mêmes ne savaient plus où se retrouver avec des
fluctuations tellement grandes. Je voudrais déposer un autre tableau qui
fait partie d'une étude un peu plus complexe, un peu plus longue, qui
s'appelle "L'évolution des investissements en nouvelles constructions",
et je m'en réfère à l'annexe 14 de ce tableau
est-ce qu'il est possible de le distribuer où on voit vraiment
cette différence causée par les investissements publics dans
l'instabilité de la construction, entre l'Ontario, le Québec,
l'agglomération de Montréal et l'agglomération de Toronto.
Je prends simplement les années 1975, 1976 et 1977. Il s'agit ici des
mises en chantier du secteur privé domiciliaire. Dans
l'agglomération de Toronto, en 1975, c'était 26 457; en 1976,
c'était 26 555; en 1977, 27 918. Dans l'agglomération de
Montréal, par contre 26 702 en 1975, mais en 1976, 37 531 et cela est
baissé de nouveau en 1977, au même niveau que c'était
auparavant, 27 193.
Donc, on voit là qu'il y a un impact fluctuant tellement plus
grand à Montréal et au Québec je ne cite pas les
chiffres du Québec parce que ça prendrait trop de temps
mais on voit qu'il y a une grande fluctuation. On voit que le niveau de
construction est à peu près identique, 27 000 mises en chantier,
entre Montréal et Toronto. Malgré le fait, je le
répète, que Toronto ait une population beaucoup plus grande que
celle de Montréal.
M. Raynauld: Ces gens-là ne se logent donc pas?
M. Tremblay: Ils se logent peut-être dans des
édifices en hauteur, parce que Toronto est devenu un petit New York,
vous savez.
M. Ciaccia: Dans des tentes.
M. Tremblay: II y a aussi le phénomène, en 1976,
avec ces gros investissements qui étaient
représentés...
M. Raynauld: C'est seulement dans le domaine domiciliaire, des
petites unités de logement, ça ne comprend pas tout le
logement?
M. Tremblay: Dans le 14.
M. Raynauld: Ah bon! d'accord.
M. Tremblay: Évidemment, il y a d'autres annexes dans
cette étude. Mais en 1976, on s'est retrouvé avec
l'investissement dans les Jeux olympiques et le début d'une
grève, je pense que c'était en septembre et octobre. De sorte que
cette grève ayant été anticipée, nous avons eu, en
1976, un boom dans la construction domicilaire, où cela a plus que
doublé au Québec, par anticipation.
Nous avons un tableau, ici, qui montre le nombre d'unités de
logement mises en chantier au cours des deux premiers trimestres selon les
régions métropolitaines. À Montréal, en 1975, il y
avait eu 9865 mises en chantier; en 1975, c'était un gouvernement
libéral, alors. Cela avait été une baisse par rapport aux
années précédentes qui était environ de 11 000 ou
12 000. En 1976, à cause du phénomène que j'ai
mentionné, et à cause de l'effervescence qui se produisait dans
le marché de la construction, les salaires étaient très
élevés avec les Olympiques, vous vous rappelez, on payait du
temps double et du temps triple dans la construction. La commission Malouf a
vraiment démontré quel était pratiquement le
désordre qui existait dans ce marché.
En 1976, les constructeurs privés ont mis 20 140 nouvelles
unités de logement en chantier. Évidemment, c'était une
augmentation de plus de 100%. L'année suivante, c'est retombé
à 15 000 et, en 1978, à 10 000, 11 000; c'est à peu
près le niveau normal. On compare des situations qui montrent qu'il y
avait quelque chose d'inhabituel en 1976. Quand le député
d'Outremont, pour faire de l'épate, prend cette année-là
comme base de référence, il prend le haut de la montagne qui est
insoutenable et il peut démontrer, avec des pourcentages, n'importe
quoi. Parce qu'il a fait état tout à l'heure de
pourcentage...
M. Raynauld: Pas n'importe quoi.
M. Tremblay: ... d'augmentation du chômage. S'il avait pris
l'augmentation du chômage en Ontario, il serait arrivé à
peu près au même pourcentage. Il ne se serait pas
énervé pour rien. L'augmentation du taux de chômage
à Montréal, il disait tout à l'heure que c'était
36%, de septembre 1976 à septembre 1978. Je regarde le chômage en
Ontario, en septembre 1976, désaisonnalisé, 5,7%; en septembre
1978, désaisonnalisé, 7,5%. Je l'ai calculé rapidement
tout à l'heure, ça fait 32% d'augmentation.
Quand le député d'Outremont dit qu'en Ontario, ça
marche et qu'au Québec, ça ne marche pas parce que, semble-t-il,
il y a un gouvernement qui prend les affaires en main, il fait rire le monde.
J'ai montré tout à l'heure des chiffres prouvant que
Montréal est en avance sur Toronto dans la construction des mises en
chantier, etc. Il faut cesser de croire les propagandes que certains des
adversaires du Québec véhiculent. Il va falloir qu'il y ait un
peu plus de responsabilité de la part de l'Opposition officielle,
surtout devant la caméra maintenant. C'est reproduit parfois à
Toronto et on sait comment les journaux de Toronto n'hésitent pas
à faire du sabotage contre le Québec quand c'est
nécessaire.
M. Raynauld: M. le Président, question de
règlement.
M. Tremblay: II n'y a pas de question de règlement.
Le Président (M. Jolivet): II n'y a pas de question de
règlement.
M. Raynauld: Question de privilège, alors M. le
Président.
M. Tremblay: II n'y a pas de question de privilège non
plus.
M. Raynauld: L'article 99 s'applique. Je n'accepterai pas qu'on
me range dans la catégorie des adversaires du Québec, M. le
Président, je ne l'accepterai pas.
Le Président (M. Jolivet): M. le
député...
M. Raynauld: Je ne suis pas un adversaire du Québec...
Le Président (M. Jolivet): M. le député, je
m'excuse.
M. Raynauld: ... et je n'accepterai pas ces affirmations...
Le Président (M. Jolivet): M. le député, je
m'excuse.
M. Raynauld: ... qu'il y ait des questions de règlement ou
qu'il n'y en ait pas.
Le Président (M. Jolivet): Le seul moyen de pouvoir...
M. Tremblay: Je n'ai pas dit...
M. Raynauld: C'est ce que vous avez dit.
Le Président (M. Jolivet): M. le députél Le
seul moyen que vous avez, c'est, lors de la fin de l'intervention du ministre,
que vous pouvez faire une intervention dans ce sens ou encore, si c'est une
question de règlement, vous pouvez la soulever à
l'Assemblée nationale.
M. Tremblay: M. le Président, je n'ai pas dit que le
député était contre le Québec, j'ai dit
simplement...
M. Raynauld: Vous avez fait une association, c'est ce que vous
avez dit: II faut que l'Opposition officielle soit plus responsable...
Le Président (M. Jolivet): M. le député, a
l'ordre! À l'ordre!
M. Raynauld:... et juste avant, vous avez dit: II ne faudrait pas
croire les adversaires du Québec. C'est une association que vous
faites!
M. Tremblay: ... et cela est tout juste. Dans le domaine
économique, je vous donne l'exemple suivant: au mois d'avril dernier,
les journaux de Toronto ont publié des renseignements confidentiels, qui
avaient évidemment filtré des milieux politiques d'Ottawa et de
Toronto, concernant les subventions que pouvaient octroyer le gouvernement
fédéral et le gouvernement du Québec à la
Société General Motors. Cette information avait pour but,
évidemment, de mettre le gouvernement fédéral dans une
situation difficile, sachant fort bien qu'il y avait des élections
partielles qui s'en venaient, afin de le forcer à créer un
précédent et à mettre en sourdine la Loi du
développement régional et à accorder une subvention
spéciale à la société Ford au sud de l'Ontario.
Ce genre de sabotage, parce qu'il s'agit vraiment de sabotage de type
politique économique, est très néfaste à
l'économie du Québec. J'ai déjà expliqué en
Chambre que, ce faisant, on mettait en péril les intérêts
économiques du Québec et on créait un contentieux, une
guerre commerciale avec les États-Unis, qui menaçait justement
l'investissement sur lequel on dévoilait des renseignements
confidentiels.
Je pourrais revenir sur cette question plus tard, mais on sait que
certains journaux à Toronto et certains articles qui ont
été publiés dans Barren's par exemple, aux
États-Unis, originaient de Toronto et qu'il y a à Toronto une
tendance à décrier le Québec, à cacher les vraies
potentialités du Québec. Évidemment, c'est de bonne
guerre. Quand cela est repris, de bonne foi ou de mauvaise foi,
évidemment, il est très difficile de le dire, par des membres de
l'Opposition, ceci contribue à faire de l'Opposition une sorte de
cinquième colonne dans les milieux de Toronto, je ne peux pas dire le
contraire.
M. Raynauld: M. le Président, une question de
règlement. Je vais demander au ministre de retirer ses paroles. Je
n'accepte pas qu'on puisse dire que je suis une cinquième colonne au
Québec.
Le Président (M. Jolivet): M. le député, je
m'excuse...
M. Raynauld: Je n'accepterai pas cela, M. le
Président.
M. Tremblay: Disons que le Parti libéral est une
succursale du Parti libéral d'Ottawa.
M. Raynauld: Je ne suis pas une cinquième colonne et je
n'accepterai jamais cela de la part du ministre de l'Industrie et du Commerce.
Jamais!
M. Tremblay: Vous acceptez cela, parce que cela a toujours
été accepté!
Le Président (M. Jolivet): M. le député, je
voudrais quand même rectifier des choses qui sont importantes. Selon
l'article 100, tant qu'un député a la parole, aucun
député ne doit l'interrompre. Si vous avez des choses à
rectifier, vous avez le droit, selon l'article 96, à la fin du discours,
d'intervenir, mais, pour le moment, je vous demanderais de permettre au
ministre de continuer son intervention.
M. Tremblay: M. le Président, pour revenir à la
situation de l'industrie de la construction au Québec, et en
référence à l'étude que j'ai déposée,
faite par le CRDE, cahier no 16, on a démontré que les
gouvernements passés ont été une source
d'instabilité très grande dans cette industrie au Québec,
qu'ils ont eu une action procyclique, c'est-à-dire que, lorsque le
secteur privé était en croissance, ils lançaient de grands
projets pour l'accentuer, créant une surchauffe inflationniste qui,
évidemment, augmentait les coûts de construction. Lorsqu'il y
avait un ralentissement, le secteur public, plutôt que d'être
à l'avant-garde de l'industrie, était à la suite, à
la remorque du secteur privé et ralentissait lui aussi, créant
énormément de chômage et d'instabilité. On a aussi
démontré qu'en bonne gestion économique, un gouvernement
ne doit pas se comporter comme une entreprise privée, il doit stabiliser
l'économie, amenuiser les fluctuations, stabiliser l'emploi, etc. Les
gouvernements passés, par faiblesse, par ignorance ou par
incompétence, ne l'ont pas fait et cela est bien démontré
dans l'étude des économistes.
Ce qui est pire, lorsqu'on regarde maintenant dans l'industrie de la
construction, ce sont les décisions du gouvernement
fédéral. J'ai dit tout à l'heure et je peux y
revenir que le gouvernement du Québec prend des mesures
concrètes présentement, pour stabiliser ces investissements, les
coordonner et les planifier. Le gouvernement fédéral a
annoncé des coupures dans ses investissements au Québec. Le
ministère des Finances du Québec évalue que, dans le
domaine des investissements, l'an prochain, il y aura une coupure d'environ
$269 millions. On sait que, présentement, il y a un ralentissement dans
la construction, surtout à Montréal, et le député
d'Outremont a raison, par rapport à l'ensemble du Québec, parce
que c'était là où on avait eu cette surchauffe des Jeux
olympiques, les monuments ostentatoires qui coûtent des milliards ne sont
pas à Gaspé, mais à Montréal. Il n'est pas
surprenant que ce soit là où les choses sont en effervescence. On
coupe au Québec c'est l'intention du gouvernement
fédéral $269 millions. Dans l'assurance-chômage
aussi, on va couper $81 millions. On va couper sur les dépenses des
consommateurs.
En coupant sur les investissements, puisque souvent il y a des projets
conjoints, le gouvernement du Québec sera forcé lui-même de
ralentir ses investissements. Prenons l'exemple de l'investissement de LaPrade.
Le Bureau de la statistique du Québec qui est sous ma
responsabilité, en collaboration avec le ministère des Finances
et le ministère responsable du développement écono-
mique, fait des simulations pour voir comment ces coupures dans les
investissements fédéraux au Québec, cette année,
vont avoir un impact sur l'emploi au Québec l'an prochain. Je ne peux
malheureusement pas, comme je l'avais indiqué hier, déposer cette
étude, puisqu'il reste encore certaines simulations à terminer.
Tout ce que je puis dire, c'est que ces coupures, qui sont vraiment
procycliques, vont créer plusieurs milliers de chômeurs au
Québec l'an prochain. Je dirais même que ce sera supérieur
à 10 000 chômeurs, ce qui va venir neutraliser la politique que le
gouvernement du Québec avait mise de l'avant dans les secteurs
traditionnels, en abolissant la taxe de vente, qui allait créer à
peu près 12 000 emplois. Donc, lequel des deux gouvernements joue un
rôle cyclique et anticyclique, au Québec, sur l'économie?
Il y en a un qui essaie de stabiliser l'économie du Québec et il
y en a un autre qui essaie de la déstabiliser. C'est cela le fond du
problème et, comme économiste, je m'insurge contre cette
incompétence à l'intérieur du Québec de l'action du
gouvernement fédéral. Lorsque la construction est en baisse,
c'est le temps de la stimuler; ce n'est pas le temps de la couper. Il n'y a pas
un économiste qui vaut son sel qui va argumenter le contraire.
Nous en avons une démonstration ici. Ce ne sont pas des
théories, c'est la réalité que nous vivons. Nous vivons
cette réalité comme gouvernement provincial et parce qu'on est
encore un gouvernement provincial. Même si le député
d'Outremont préfère venir discuter de ces problèmes au
Québec, parce qu'il sent bien que c'est peut-être l'endroit
où il faut en discuter, tôt ou tard, il va falloir qu'on
récupère, par contre, les politiques pour qu'on ne fasse pas que
discuter ici, mais que, lorsqu'on parle de politiques économiques, on
puisse avoir des instruments découlant de ce Parlement et de ce
gouvernement pour les appliquer. Il va falloir, tôt ou tard que l'on
règle ce problème. Deux capitaines dans le même bateau, un
qui nous amène à la dérive, l'autre qui veut nous garder
dans le sillon central, dans le chenal, qui de ces deux gouvernements devrait
avoir les pouvoirs? Qui devrait être au contrôle? C'est cela tout
le problème.
Si M. le député d'Outremont veut faire comme l'ancien
député de Notre-Dame-de-Grâce, changer d'idée en
cours de route, qu'il aille discuter de ces problèmes à Ottawa,
ils en ont peut-être besoin. Mais, pour ce qui nous concerne, on
connaît les problèmes, mais on ne fera pas qu'en discuter. On va
proposer des solutions concrètes pour les résoudre, pour que nos
enfants n'aient pas encore à débattre les mêmes
problèmes dans 25 ans ou dans 30 ans.
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre, je suis
obligé de vous interrompre, compte tenu que vos trente minutes sont
écoulées, et de demander au député de Huntingdon
d'entreprendre...
M. Tremblay: M. le Président, je demanderais votre
indulgence, parce que j'ai été très...
Le Président (M. Jolivet): Je ne peux pas.
M. Tremblay: Vous savez que, dans la procédure de
l'interpellation, ce sont le membre de l'Opposition et le ministre qui ont un
droit privilégié de parole. Le député
d'Outremont...
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre, je voudrais
vous interrompre tout de suite, parce que vous n'avez malheureusement, à
ce niveau, pas tout à fait raison, compte tenu que l'on prévoit
par les règlements que, d'abord, l'interpellateur a un droit de parole
prioritaire, étant celui qui parle le premier. Vous avez le droit de
réplique et, ensuite, nous devons passer à une autre personne.
Compte tenu que j'ai donné à chacun trente minutes de discussion,
il est bon de permettre à d'autres intervenants de le faire maintenant,
quitte à conserver vos réponses pour les prochaines questions.
Donc, c'est le député de Huntingdon qui a maintenant la parole
pour une période de vingt minutes.
Autres interventions M. Claude Dubois
M. Dubois: Merci, M. le Président. Je serai passablement
bref, parce que je n'en ai même pas pour vingt minutes. Il s'agit pour
moi de faire état des problèmes tels que je les vois. Je pense
qu'au-delà de toutes les statistiques que nous pouvons
énumérer aujourd'hui, il y a un but à atteindre, c'est
d'améliorer la performance de la construction au Québec.
Les suggestions que j'ai à émettre sont très
claires et précises. Elles s'adressent au ministre de l'Industrie et du
Commerce, assurément, mais aussi à celui du Travail, ainsi qu'au
ministre délégué au développement
économique, mais plus particulièrement, je crois, au ministre du
Travail, responsable de l'Office de la construction au Québec, enfin, et
surtout, à nos grands syndicats ouvriers responsables de la
qualité et de l'efficacité de la construction. Je crois qu'un
étalage de statistiques, à ce moment-ci, est tout à fait
inutile, car nous savons tous que cette dégringolade de la construction
ne sera pas réglée pour autant par des tableaux et des
données techniques. Il faut aller plus profondément dans ce
dossier.
M. le Président, je demanderais à cette commission, et ce,
au nom du groupe parlementaire que je représente, d'aller sans plus
tarder à la source des vrais problèmes de la construction. Je
crois fermement que le coeur de ce problème repose sur des constats
reconnus, particulièrement la violence sur les chantiers de
construction, les demandes salariales exorbitantes des syndicats et la
productivité de l'ouvrier québécois.
Sachez bien, M. le Président, que mon intervention ne se veut pas
politique. Elle l'est quand même un peu, dans la mesure où nous
devons éclairer positivement ce débat. La tendance socialisante
du présent gouvernement n'aide pas non plus le secteur dynamique de
cette société à jouer un rôle efficace. Son attitude
de "wait and see" se com-
prend parfaitement. Elle entraîne une baisse d'investissements qui
crée automatiquement un chômage chronique. Lorsque l'on sait qu'un
ouvrier au travail provoque un effet d'entraînement sur trois autres
ouvriers dans tous les secteurs du travail, la situation déjà
mauvaise devient encore plus pénible.
L'interventionnisme d'État se justifie toujours jusqu'à un
certain point. Cette limite est très difficilement identifiable, j'en
conviens, mais lorsque le gouvernement hésite ou se refuse à
regarder la construction comme un secteur primordial au Québec et qu'il
tente d'intervenir sans s'attaquer aux problèmes de la
productivité et de la paix syndicale, alors, son intervention est
carrément irresponsable.
Nous demandons au gouvernement et, à travers lui, aux grandes
centrales syndicales, de tenter un effort, une démarche énergique
qui inciterait les ouvriers québécois à une
productivité accrue, là où c'est possible, et, en
même temps, une qualité de travail qui fait, je crois, grand
défaut ici, au Québec. Je n'ai personnellement jamais entendu un
chef syndical, à quelque échelon que ce soit de la
hiérarchie syndicale, demander à ses hommes d'accroître la
productivité là où c'est humainement possible. Le
défi actuel des ouvriers de la construction, c'est de s'engager dans la
bataille de la compétition. Un souci compétitif serait, je crois,
une des solutions aux problèmes de cette industrie.
Lancer l'économie québécoise sur le chemin de la
réussite passe par la volonté compétitrice des membres de
cette société. N'est-ce pas là ce que le Dr Laurin
lançait dernièrement dans son livre blanc, dans lequel il faisait
état que nous devrions conserver au Québec nos créateurs?
À ce que je sache, il n'y a pas que les artisans qui soient des
créateurs, mais aussi tous ceux qui oeuvrent, par leur travail, à
bâtir le Québec. Dans cette optique, un bailleur de fonds aussi
bien qu'un ouvrier et qu'un administrateur sont autant de créateurs dans
cette société au Québec.
Je demande au ministre de l'Industrie et du Commerce et au gouvernement
d'avoir la volonté politique de poser des gestes concrets et de
s'impliquer directement dans le dossier des investissements dans la
construction au Québec.
Merci, M. le Président.
Le Président (M. Jolivet): Merci. M. le ministre.
M. Tremblay: M. le Président, je remercie le
député d'Huntingdon pour son intervention, sur le thème
que nous discutons. Évidemment, je ne peux être d'accord avec
certains pronostics rapides qu'il a posés, selon lesquels notre
gouvernement avait une approche, au plan économique, qui était
socialisante. Je pense qu'au plan social nous voulons créer une
société humaine, mais nous voulons aussi garder le stimulant et
la motivation du secteur privé. Nous l'avons bien démontré
par des gestes concrets, depuis deux ans, lorsque le
député d'Outremont y a fait allusion nous avons
adopté la loi 48, qui abaissait de 50% les impôts pour les petites
et les moyennes entreprises pourvu qu'elles se créent des fonds de
relance industrielle. Ce n'était pas une mesure socialisante. C'est une
mesure pour renforcer le secteur privé. Lorsque nous avons mis en marche
les SODEQ qui avaient été votées par la loi du mois de
juin 1976, mais qui n'étaient pas en marche, nous aurions pu les
modifier. Nous avons créé ces banques de développement
régional pour les petites et les moyennes entreprises, pour le secteur
privé. Dans le secteur de l'alimentation, lorsque je demande à la
Société des alcools, qui est un monopole d'État, de
laisser les 9000 épiceries distribuer des vins aux consommateurs, ce
n'est pas une mesure centralisatrice et socialisante. C'est une mesure qui
vise, justement, à décentraliser l'économie et à
donner au secteur privé une part plus large de l'activité
économique. Nous avons eu le courage de le faire, nous. Les anciens
gouvernements étaient socialisants par défaut, sans philosophie,
sans cohérence.
Dans notre cas, nous sommes pour la logique économique et nous
sommes pour la décentralisation. Nous avons décentralisé
les pêches, par exemple, pour amener ça à Gaspé,
près des pêcheurs, dans leur milieu. Par contre, lorsqu'il y a des
imperfections dans le fonctionnement des marchés et Dieu sait si,
au Québec, à cause de notre passé historique, de notre
passé politique, il y a des imperfections dans le fonctionnement des
marchés des capitaux, il y a des imperfections dans le fonctionnement
des entreprises, à cause de notre statut de "branch economy", le statut
de satellisation aux plans commercial et industriel, il y a des imperfections
là, c'est la fonction d'un gouvernement, c'est défendu par
toute la théorie économique, de corriger ces imperfections et, de
cette façon, on accroît le bien-être de la population. C'est
ça, notre approche. C'est une approche économique que nous avons.
Une approche rationnelle, cohérente, qui n'est pas perturbée par
des intérêts particuliers sous forme de...
M. Raynauld: ... perturbée par les faits.
M. Tremblay: Oui, c'est plutôt vous, je pense...
M. Raynauld: Ce n'est pas perturbé par les faits?
M. Tremblay: Votre politique, c'est plutôt: "Don't bother
us with the facts ". Notre politique, on part des faits, justement.
M. Raynauld: Oui...
M. Tremblay: On part des vrais problèmes...
M. Raynauld: La grande logique.
M. Tremblay: ... et on propose des solutions qui sont à la
mesure des problèmes. C'est ça qui vous...
M. Raynauld: La grande logique, oui.
M. Tremblay: ... rend un peu perplexe et vous
décontenance.
M. Raynauld: ...
M. Tremblay: Lorsqu'il s'agit d'un petit problème, on
prend une petite solution, mais lorsqu'il s'agit d'un gros problème, on
prend une grosse solution.
Je ne veux pas commencer d'autres débats, mais lorsqu'il s'est
agi, justement, de transférer à l'entreprise privée les
vins aux épiceries, qui est une mesure justement d'entreprise
privée et de marché, on ne s'est pas fié à quelques
gros bailleurs de fonds électoraux pour nous empêcher d'agir. Ce
genre de pragmatisme économique, que certains gouvernements appliquent
sous le couvercle du libéralisme et du laisser-faire, ce n'est souvent
que la défense d'intérêts privés en se servant d'un
instrument de l'État, et ceci, je pense, est de l'histoire
passée. Les gouvernements sont là pour défendre
l'intérêt général, pour défendre
l'intérêt public et faire face aux problèmes qu'eux seuls
peuvent solutionner lorsqu'il s'agit de problèmes de nature sociale, de
nature économique qui dépassent les capacités de chacun
des intervenants, chacun des agents dans l'économie.
C'est ce que nous avons fait dans le secteur de la construction. C'est
un bon exemple. Il y avait une anarchie dans ce secteur qui créait une
instabilité sociale et une instabilité syndicale. La violence, ce
n'est pas nous. C'était dans le temps des libéraux qu'il y avait
de la violence et des grèves qui duraient longtemps dans un secteur. Le
juge Cliche, de regrettée mémoire, a fait une étude
objective et les gouvernements l'ont appliquée. (11 h 30)
Nous voulons aller plus loin, maintenant, nous voulons stabiliser les
investissements dans ce secteur et je ne reviens pas sur ce point. Je pense que
le député de Huntington a soulevé un point très
important lorsqu'il a parlé de la productivité. Ce n'est pas
à moi, et je pense que le député est d'accord avec moi,
qu'il dira que la productivité est très importante. Nous en avons
amplement discuté lorsque nous avons présenté le projet de
loi sur l'Institut national de productivité qui, en soi, ne sera pas une
solution au problème, mais va permettre d'apporter une certaine
concertation sur ce plan. Il y a un problème de productivité dans
la construction au Québec.
Lorsque vous gâtez un secteur comme on l'a gavé avec des
projets publics financés à même les impôts et les
endettements comme on l'a fait avec les Jeux olympiques ou avec les
éléphants blancs, tous ces éléphants blancs
gouvernementaux qu'on a faits pour soutenir artificiellement l'économie,
comme on le faisait au temps du Moyen-Âge ou au temps des pharaons alors
qu'on construisait des pyramides pour tenir en occupation les soldats entre
deux guerres, quand, en 1978 ou en 1976, on en est encore rendu à ce
primitisme des politiques économiques, après 2000 ou 3000 ans;
quand on est rendu là et qu'on crée de l'instabilité comme
on l'a fait, évidemment, cela se reflète sur la
productivité, avec des coûts qui sont très
élevés. Les coûts, au Québec, dans la construction,
sont trop élevés. Il y a une responsabilité sociale et
économique de la part des agents dans ce milieu, y compris le
gouvernement, au premier titre, évidemment.
Vous avez parfaitement raison, M. le député, j'aurais
aimé que le député d'Outremont soulève un
problème technique et important comme celui-là, plutôt que
de se lancer sur l'inévitabilité du placement vers l'Ouest, de
l'indépendance et des choses semblables. C'est un problème
sérieux. L'étude du professeur Rabeau démontre que, si on
fixe des coûts de construction en haute conjoncture, en basse
conjoncture, l'ajustement par les quantités va être plus fort et
que ceci est dangereux. Je pense, pour ma part, que les chefs syndicaux et les
gouvernements aussi doivent se pencher sur ces questions. La question de la
productivité est extrêmement importante et ce n'est pas seulement
en parlant de la productivité qu'on va résoudre les
problèmes, mais c'est une des questions fondamentales.
Je n'accepte pas l'interprétation du député
lorsqu'il dit que le gouvernement a une approche de "wait and see";
évidemment, c'était dans son texte, mais je ne crois pas vraiment
qu'il croie cela. Le gouvernement, avec les moyens qu'il a, avec l'endettement
avec lequel nous avons pris le gouvernement du Québec il y avait
quand même un endettement avec un déficit de $1 milliard a
dû financer ce déficit, aussi, des Jeux olympiques, le refinancer
récemment encore, pour que cela ne coûte pas trop cher. Le
gouvernement fédéral avait certes envoyé la reine
d'Angleterre et le premier ministre du Canada inaugurer les jeux mais lorsqu'il
s'agissait de financer le déficit, on disait: Mes petits
Québécois, mes petits Montréalais, lavez la vaisselle
sale! C'est ce qu'on a dit en 1976 et on ose venir nous dire, maintenant, qu'on
ne fait pas des efforts suffisants. Ce sont pratiquement des fables de La
Fontaine qui sont rééditées présentement. La
victime est coupable, on dirait que les Québécois sont toujours
coupables, ce sont toujours les autres qui ont raison, ce sont toujours les
autres qui ont les arguments et les solutions alors que les libéraux ont
toujours mis de l'avant les objectifs politiques avant les objectifs
économiques. C'est cela la vérité.
Quand le premier premier ministre du Canada, M. MacDonald, a dit que:
"Canada is the triumph of politics over economics", damn, he was right. Nous,
il faut arrêter de se faire manipuler soit à partir des reines
d'Angleterre ou à partir de certains rois-règnes qu'on envoie
à Ottawa.
M. Raynauld: Faites la même chose que MacDonald.
M. Tremblay: ... et qui échangent nos votes pour des votes
du sud de l'Ontario. C'est cela, le fond du problème et on ne peut pas
l'escamoter indéfiniment. Il n'est pas dans mes responsabilités
de proposer des réunions sur la productivité, genre mini-sommet.
Mous avons tenu des mini-
sommets sur les pêcheries, sur les textiles, etc. À la
suite de votre intervention, M. le député, je m'engage à
suggérer au ministre du Travail de peut-être tenir un mini-sommet
sur la productivité dans la construction. Je pense qu'objectivement il y
a un problème concret qui ne peut pas être réglé par
des lois, des décrets ou par les gouvernements. Il faut faire appel
à une certaine concertation économique des agents dans le
milieu.
Ayant participé à cinq mini-sommets, je suis en mesure de
dire que cette approche, même si elle est très onéreuse
pour les ministres, parce qu'elle implique beaucoup de préparation et
beaucoup de temps, de consultations, etc., donne des résultats concrets.
Dans les pêches maritimes, nous avons mis de l'avant un plan quinquennal
qui aboutit, qui aboutira très bientôt dans le prochain budget.
Dans les textiles, il y a toutes sortes de programmes et d'engagements de la
part des agents qui en ont découlé. Dans le secteur de la
production, je pense qu'il serait très souhaitable qu'on regarde ces
faits, non pas dans une perspective de partisanerie et de petite politique,
mais dans une perspective objective de personnes qui veulent contribuer
à la solution et non pas être partie du problème. Faire
partie du problème, n'importe qui le peut, c'est très facile.
Souvent, en politique, on se laisse aller et on aboutit à faire partie
du problème plutôt que de faire partie de la solution. Mais je
pense que les gens au Québec, les syndicats, les entreprises, le
gouvernement, les individus, les Québécois, les
Québécoises veulent participer ardemment aux solutions et non pas
aux problèmes.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Mont-Royal, vous avez 20 minutes.
M. John Ciaccia
M. Ciaccia: Merci, M. le Président. Je voudrais, dans mon
intervention, M. le Président, restreindre mes remarques à
l'industrie de la construction à Montréal. J'aurais osé
espérer que le ministre, au lieu de prendre la tactique de changer de
sujet parce que, M. le Président, c'est ce que le ministre
faisait au lieu de...
M. Tremblay: M. le Président, si on commence à
lancer des accusations semblables, alors que le député
d'Outremont a soulevé tous les sujets de la terre...
M. Ciaccia: M. le Président, là, c'est un autre...
Est-ce que j'ai le droit de parole, M. le Président?
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre. M. Tremblay:
... de me faire mettre en boîte.
M. Ciaccia: Je n'ai pas interrompu le ministre. Je demanderais la
même courtoisie.
M. Tremblay: Vous ne m'avez pas interrompu mais vous lancez une
fausse accusation que je n'accepte pas. C'est le député
d'Outremont qui a soulevé tous les problèmes.
M. Ciaccia: J'aurais préféré qu'au lieu
d'insulter ses collègues, s'il avait répondu vraiment aux
problèmes qui ont été soulevés, les vrais
problèmes qui ont été soulevés par...
M. Tremblay: Je regrette, M. le Président, mais je n'ai
insulté aucun collègue.
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre, vous aurez le
droit de répondre dans votre intervention dans quelques minutes.
M. Tremblay: II ouvre la bouche et ses deux premières
phrases sont des invectives. Parlez donc des vrais problèmes, comme le
député de Huntingdon l'a fait.
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre. M. le
député de Mont-Royal.
M. Ciaccia: M. le Président...
M. Raynauld: C'est ce que vous avez fait tout à
l'heure.
M. Ciaccia: Oui. Quand on ne touche pas aux vrais
problèmes de votre ministère, vous êtes prêt à
répondre, mais quand on touche aux vrais problèmes de votre
ministère, vous tournez cela en insultes et vous semblez avoir
reçu des injures.
Le Président (M. Jolivet): M. le
député...
M. Tremblay: Parlez des problèmes de mon ministère.
Soulevez les problèmes industriels et commerciaux et on va en
discuter.
M. Ciaccia: M. le Président, je connais les tactiques du
ministre de l'Industrie et du Commerce. Ce n'est pas la première fois
que je participe à une commission parlementaire avec lui.
Le Président (M. Jolivet): M. le député,
vous avez bien commencé en disant que vous vouliez tout à l'heure
parler des problèmes de la construction à Montréal. S'il
vous plaît, veuillez continuer dans ce sens.
M. Ciaccia: Exactement, M. le Président. Je voudrais
aborder ce problème de l'industrie de la construction à
Montréal avec, peut-être, une approche différente de celle
de mes collègues qui ont parlé, de façon juste, des
statistiques et de la perte des emplois. Je voudrais porter à votre
attention le fait que, premièrement, avant d'aller dans les services
publics, avant d'aller dans la fonction publique et dans la vie publique, je
faisais partie d'un bureau d'avocats, j'étais associé senior dans
un bureau d'avocats à Montréal qui était le plus grand
bureau d'avocats se spécialisant dans le domaine de la construction et
de l'immeuble. Avant que je fasse partie de ce bureau, j'étais
directeur des services immobiliers, j'étais conseiller juridique
d'une des plus grandes compagnies, au Québec, qui était
directement impliquée dans le domaine de la construction et dans le
domaine de l'immobilier, la compagnie Steinberg's. Je voudrais porter à
l'attention du ministre certains faits pratiques, certaines conditions qui
existent dans l'industrie de la construction à Montréal et lui
demander s'il peut nous donner des solutions puis nous dire ce qu'il va faire
pour arrêter ce désastre qui se passe à Montréal. Le
député d'Outremont a signalé que l'activité de la
construction était réduite depuis 1972; si on regarde les
prévisions pour le reste de l'année, cela s'en va être
encore pire. Si on parle aux syndiqués, aux représentants des
syndicats, ils vont nous dire que le chômage dans cette industrie n'a pas
augmenté de 35%, mais existe à 35%, d'après leurs
estimations.
Je voudrais porter à l'attention du ministre un mémoire
qui a été soumis il y a un an aujourd'hui, au ministre
d'État au développement économique, par la
Fédération de la construction du Québec, la Corporation
des maîtres mécaniciens en tuyauterie du Québec, la
Corporation des maîtres électriciens du Québec,
l'Association des constructeurs de routes et grands travaux du Québec,
l'Association provinciale des constructeurs d'habitations du Québec et
l'Association de la construction de Montréal et de Québec.
Ces organismes étaient très préoccupés de ce
qu'ils voyaient, de ce qui arrivait dans le domaine de la construction. Ils se
sont référés à certaines statistiques dans les
investissements privés et publics au Canada, Statistique Canada; ils ont
dit: "Ces statistiques émanent d'une enquête sur les intentions
d'investissement du secteur privé et du secteur public qui s'effectuent
en fin d'année et son rajustées à l'occasion d'une
enquête menée au milieu de l'année." Ils présentent
les statistiques prévues et, en fait, ce n'est pas ça qui est
arrivé. Ils donnent certains chiffres; je n'ai pas besoin de vous donner
tous les chiffres qui sont contenus dans le mémoire, mais la conclusion
était que cette activité était sensiblement moindre que
celle de l'année dernière et moindre que les statistiques
prévues.
Ils disent: "Le même rapport semble indiquer que la construction
d'édifices à bureaux continuera d'augmenter, mais il est bien
évident qu'en réalité, tel ne sera pas le cas". Alors, il
y a la question des prévisions par Statistique Canada et, après
un certain temps, en 1977, ils ont vu que ces prévisions ne se
réaliseraient pas. Ils ont fait certaines suggestions. Parce qu'ils sont
directement impliqués dans cette industrie, ils ont fait des
prévisions pour les prochaines années. Ils ne voient pas une
relance, un recommencement des activités avant 1980, d'après tout
ce qu'ils voient, d'après tout ce qui se passe ici au Québec.
Ils disent: "Si nous ne sommes pas en mesure d'affirmer le
bien-fondé de ces prévisions à long terme plutôt
pessimistes, nous voudrions être assurés de la création
d'un climat qui, dans la mesure du possible, soit générateur
d'investisse- ments dans notre industrie et qui entraînera une
utilisation plus entière qu'à l'heure actuelle des ressources, de
la main-d'oeuvre et de l'entreprise.
Alors, le message que l'industrie donnait au ministre je
l'inviterais à faire des commentaires quand j'aurai terminé mon
intervention et à répondre aux demandes de ceux qui ont
préparé ce mémoire était que les
difficultés qui existent dans l'industrie dépendent d'un climat
d'investissement qui manque à Montréal. Ces gens ont dit au
ministre: "Avant tout, il est essentiel de prendre les mesures
nécessaires à l'augmentation des investissements
privés."
Plus loin, ils disent encore: D'après nos membres, il est clair
que des investissements d'une grande valeur pour l'industrie de la construction
ont été perdus à une époque où l'industrie
en aurait besoin, pertes qui résultent d'une évaluation
défavorable de la situation qui prévaut au Québec de la
part des investisseurs".
M. le Président, il semble y avoir un grand malaise à
Montréal dans cette industrie, qui est un indicateur d'autres
industries. Je ne ferai pas un tour d'horizon et je n'essaierai pas de
mélanger les cartes comme l'a fait le ministre en parlant des vins qui
sont vendus par la Société des alcools, en parlant du
système de la commission parlementaire de ce matin...
c'est-à-dire en parlant de tout, excepté du sujet dont on devrait
parler ce matin.
La conclusion de ce mémoire, c'était qu'à cause
d'une attitude attentiste, des intentions fermes d'investissement ont
été remises à plus tard, les investisseurs ayant
décidé de réévaluer la situation. J'inviterais le
ministre à nous donner une réponse à ce problème,
le problème que tout le monde attend. Pour lui donner certains chiffres,
parce qu'on semble jeter les chiffres à gauche et de tous les
côtés, je vais prendre un secteur spécifique, le secteur
commercial d'édifices à bureaux. (11 h 45)
M. le Président, le taux d'inoccupation dans le secteur
commercial, pour les édifices à bureaux de classes A, B et C. Je
divise cela en trois classes. La classe A comprend les édifices comme
Place Ville-Marie, Place Victoria; les autres, ce sont des édifices
moins luxueux et moins grands. Le taux global d'inoccupation est 9,5%. Il
existe 25 200 000 pieds carrés à Montréal
d'édifices à bureaux. Si on examine la condition dans d'autres
villes du Canada et des États-Unis, nous voyons que le taux
d'inoccupation, un peu plus ou un peu moins, ce n'est pas le vrai
problème, cela se compare.
Alors, quand on dit que le taux d'inoccupation est le même
à Montréal qu'à Toronto à Toronto, il y a 43
millions de pieds carrés et le taux d'inoccupation est de 6,7 à
9,5%. Si on regarde à Calgary, c'est le moins élevé, il
n'y a que 1,9% de taux d'inoccupation sur 12 millions de pieds carrés
d'édifices à bureaux. Mais l'important, ce n'est pas le taux
d'inoccupation, c'est: Quels sont les projets en planification et en voie de
construction? C'est là le malheur de Montréal. Il n'y en a pas de
grande envergure à Montréal dans le secteur privé. Je ne
voudrais pas qu''on commence à changer le débat et
citer la Place Guy-Favreau et l'investissement du fédéral
et blâmer le fédéral pour ci et blâmer le reste du
monde pour autre chose. Il n'y a pas d'édifices d'envergure à
bureaux planifiés à Montréal.
Si on regarde les autres villes, à Calgary, en planification ou
en construction, il y a 7 millions de pieds carrés. À Toronto, il
y en a 2 200 000. 2 200 000, parfois les chiffres ne veulent pas dire
grand-chose cela représente trois édifices comme
l'édifice de la CIL, boulevard Dorchester à Montréal. Ce
sont des projets d'envergure et qui amènent un investissement, de
l'emploi, du travail. Je pourrais vous donner la liste de plusieurs grandes
villes, que ce soit aux États-Unis ou au Canada où, au
moins, il y a des projets de planification, des projets du secteur privé
qui sont en construction.
À Montréal, cela n'existe pas. Quelle est l'attitude, M.
1e Président, des investisseurs? On ne dit pas qu'on va essayer
d'attirer des investissements provenant de l'extérieur du Québec.
Ce n'est pas ce que je dis. Ou bien on devrait attirer des investissements des
États-Unis ou du reste du Canada. Le problème c'est le manque de
confiance de ceux qui sont ici, parce que le taux d'inoccupation des
années précédentes aurait justifié la planification
et la construction d'autres édifices, mais cela n'existe pas. Cela se
reflète aussi dans les chiffres. Pour l'édifice commercial, les
permis de construction, de janvier à juin de cette année, c'est
50 millions. Ce sont les chiffres de Statistique Canada. Quand on voit que
l'année précédente, c'était 191 millions pour toute
l'année et si on compare cela à Toronto, de janvier à juin
1978, ont voit que c'est 248 millions. C'est cinq fois plus
élevé.
C'est vrai que si globalement on voit les investissements publics,
privés, certains chiffres peuvent être équivalents, mais si
on divise cela, si on va dans les secteurs particuliers où vraiment cela
fait du tort au Québec, à Montréal, on voit que c'est un
désastre. Dans le secteur industriel, pour les premiers six mois de
cette année, c'est $26 millions quand, pour toute l'année
dernière, c'est encore baissé, c'était $106 millions. Et
les premiers six mois de cette année, à Toronto, c'est $67
millions.
Ce sont des secteurs clefs, le commercial et l'industriel et s'il n'y a
pas d'activité dans ces deux secteurs-là, que voulez-vous qu'il
arrive pour le reste de l'année? Comment voulez-vous que cette industrie
puisse continuer? Et je ne parle pas d'études, de coordination et de
stabilisation, je parle de projets actuels actifs.
M. le Président, les investisseurs se demandent: qu'est-ce que ce
gouvernement va faire pour nous? Ce n'est pas seulement de dire: Si vous
replacez vos investissements, vous allez avoir une déduction de 50% sur
vos impôts. Ce n'est pas seulement à ce niveau, c'est au niveau
global. Il y a une crainte dans toutes vos politiques. Il y a une crainte et il
faut le dire. Qu'est-ce que cela va représenter pour l'avenir? Je ne
veux pas que le ministre s'engage dans toute une explication de la loi sur les
droits successoraux, mais cette loi, à Montréal, va avoir un
impact pire que la loi 101 dans les droits de succession, de la façon
dont c'est rédigé. Les gens craignent cela.
Les investisseurs vont placer leur argent à des endroits
où ils se sentent sécurisés. Même le mémoire
auquel je me suis référé a porté cela à
l'attention du gouvernement. Il dit: Si le Québec n'est pas prêt
à donner des garanties fondamentales aux investisseurs, il y a plusieurs
autres endroits en Amérique du Nord et dans le monde qui le sont. Ils
sont prêts à donner ces garanties, mais ce sont des garanties
plutôt d'une approche dans vos politiques, ce n'est pas de relancer des
projets publics, c'est dans l'entreprise privée, dans cette industrie
qu'il faut que le ministre nous dise ce qu'il va faire.
Je vais vous donner un exemple très spécifique et je
demanderais des commentaires au ministre. C'est tragique, ce qui se passe. Il y
a deux compagnies, à Montréal, Francon et la compagnie Miron. Je
voudrais que le ministre essaie de me répondre, s'il est au courant de
ce qui se passe dans cette industrie, parce que Francon, Miron, Demix est un
indicateur de toute l'industrie de la construction. Francon a eu des mises
à pied de 2000 personnes depuis un an et demi. Le ministre est-il au
courant de cela? Il y avait deux ateliers de garage, avec 280 employés;
aujourd'hui, il y en a 17. Miron, une compagnie fondée au Québec
par des Canadiens français du Québec, vient de fermer sa division
de construction. Elle a fermé sa division de construction et elle va
terminer seulement les contrats en cours. Elle ne recommencera pas.
Connaissez-vous les implications de cela? Je voudrais avoir des commentaires du
ministre. À part cela, il y a eu des mises à pied. Normalement,
en 1975, il y avait grosso modo 2500 employés chez Miron. Cela
comprenait les permanents et les saisonniers. Aujourd'hui, cela a
été réduit à 600 employés.
Il y a sur les terrains de Miron soixante camions qui n'ont même
pas de plaques d'immatriculation cette année, parce qu'il n'y a pas de
travail. Cela représente $2000 par camion et cela représente $22
000 approximativement par chauffeur de camion. Pouvez-vous évaluer la
portée économique d'un tel geste, d'un tel
événement? J'ai entendu dire et je dis au ministre que si ces
conditions persistent, Miron va fermer ses portes dans un an. C'est basé
sur des faits.
Le ministre a-t-il entendu dire, par exemple, que Miron est en train de
mettre en vente une assez forte partie de ses équipements? Ainsi, la
compagnie Les Mir, fondée en 1965, je crois, a fermé ses portes,
très récemment. Cela a entraîné la mise à
pied de 500 employés à 700 employés. Il y a eu une vente
à l'enchère d'équipement lourd de construction, au mois de
septembre, une vente de $3 millions. 12% seulement de cet équipement est
resté au Québec, 88% a été acheté par des
Américains. Savez-vous l'implication de tout cela, M. le ministre? Cela
veut dire que ces emplois sont partis. Quand des compagnies d'envergure comme
Francon, comme Miron, comme Les Mir mettent en vente de l'équipement
lourd, cela veut dire qu'elles ne voient pas d'avenir 'dans les prochaines deux
ou trois années. Il va y
avoir une autre vente à l'enchère au mois de novembre. Je
ne sais pas évidemment, si la même chose va se produire, parce
que...
La tragédie de cela, si je peux le signaler au ministre, c'est
que cela a pris 25 ans pour bâtir cette industrie au Québec.
Auparavant, il n'y avait que de petits entrepreneurs, il n'y avait que de
petits contrats. Ils ne pouvaient pas réaliser les gros contrats qui
existent aujourd'hui. Cela s'est bâti sur une période de 25 ans.
On est en train de détruire cette industrie. On est en train de la
démantibuler. On retourne aux conditions qui existaient il y a 25 ans
dans cette industrie. Si, par hasard, dans trois ou quatre ans, on va
recommencer les contrats d'envergure de $30 millions, $40 millions ou $50
millions, il n'existera pas une entreprise au Québec qui pourra accepter
ces contrats.
M. le Président, vous me faites signe que je dois terminer. Je
vais brièvement conclure en disant que la situation, M. le ministre, est
non seulement sérieuse, elle est grave, avec des implications non
seulement pour ceux qui sont directement impliqués dans l'industrie,
mais pour l'ensemble de Montréal et pour l'ensemble du Québec.
Savez-vous les implications financières qui découleront de la
perte de cette industrie? Montréal représente, pour les taxes du
Québec, un montant assez élevé.
Je voudrais savoir de la part du ministre, ce qu'il va suggérer
de concret. Quelle réponse, quel geste concret a-t-il posé durant
la dernière année devant les objections et les
préoccupations de l'industrie qui a porté le mémoire
à l'attention du ministre d'État au développement
économique?
Je voudrais demander, spécifiquement sur les fabriques de ciment
à Montréal, ce qu'il entend faire pour s'assurer que cette
industrie ne sera pas détruite, mais qu'elle pourra continuer à
vivre d'une façon rentable, ce qui représente un problème
non seulement au point de vue économique mais au point de vue humain.
Savez-vous combien de gens sont mis à pied? Après 25 ou 30 ans de
travail, ils ne pourront pas trouver un autre emploi. Quand l'équipement
sort du Québec, ce sont des emplois qui quittent le Québec. On
n'exporte pas l'équipement, on exporte les ressources humaines.
Je crois que c'est plus important que des objectifs politiques; on
traite ici de la vie des gens à Montréal, qui ne savent plus quoi
faire. Je demande quelle solution le ministre peut apporter.
Le Président (M. Jolivet): Après l'intervention du
ministre, les deux prochains intervenants seront M. le député de
Frontenac et M. le député d'Outremont. M. le ministre.
M. Tremblay: J'ai écouté attentivement M. le
député de Mont-Royal. J'ai remarqué un mélange
d'analyse entrecoupée de mots comme "désastre", "tragique", etc.,
de sorte que je vais à la fois essayer de répondre aux vrais
probèmes, et je reviendrai sur ce refrain qui est devenu la marque de
l'Opposition libérale, refrain de défaitisme, etc.
Je prendrai le dernier point qui a été soulevé,
concernant les cimenteries. Il est évident qu'avec leffervescence de
1975-1976, il y a eu énormément de routes on a construit
énormément d'autoroutes, l'aéroport de Mirabel et les Jeux
olympiques on a même vu à la commission Malouf qu'on avait
recouvert de plusieurs pieds de ciment, un stationnement qui avait
coûté énormément cher. Évidemment, on
utilisait le ciment 24 heures par jour. Il y a eu une effervescence quant
à la demande de ciment. Si le député de Mont-Royal et si
ses électeurs sont d'accord pour qu'on commence à entrecouper
Mont-Royal d'autoroutes, on peut en construire d'autres, mais il faudrait qu'on
le dise...
M. Ciaccia: ... comme toujours. Répondez donc aux
questions.
M. Tremblay: C'est un point. Dans le domaine des
investissements...
M. Ciaccia: En 1974, il n'y avait pas d'Olympiques et, en 1975,
il n'y en avait pas non plus...
M. Tremblay: Je vous ai écouté attentivement...
Le Président (M. Jolivet): M. le
député...
M. Ciaccia: Dans le domaine de la construction, il n'y a rien
à voir avec les Olympiques. Vérifier donc vos dossiers. (12
heures)
Le Président (M. Jolivet): M. le député! M.
le député!
M. Ciaccia: Cette division est fermée aujourd'hui.
M. Grégoire: ... le silence, vous tantôt!
M. Ciaccia: Oui, mais quand on entend ça, on a notre
voyage!
Le Président (M. Jolivet): À l'ordre! À
l'ordre! À l'ordre! M. le député! M. le ministre.
M. Tremblay: On parle de cimenteries, M. le Président, et
une cimenterie, habituellement, ça manufacture du ciment, M. le
Président, et du ciment, c'est utilisé où, M. le
Président? C'est utilisé dans des monuments comme dans le stade
olympique...
M. Ciaccia: ... entre vos deux oreilles.
M. Tremblay: ... qui en a été gorgé de
tonnes, de tonnes et de tonnes, 24 heures par jour. Cela va dans des
aéroports comme l'éléphant blanc de Mirabel et ça
va aussi dans les autoroutes. On sait où ça va, le ciment. Ce
n'est pas dans des perrons...
M. Ciaccia: Cela va à la baie James aussi. C'est un
éléphant blanc, la baie James?
M. Tremblay: La baie James, ça marche, M. le
Président. L'Hydro-Québec a des projets d'investissement de $2
milliards, $3 milliards par année.
M. Ciaccia: Malgré ça, ces cimenteries vont
fermer.
M. Raynauld: Le gouvernement n'a pas d'éléphant du
tout, ni blanc, ni noir.
M. Ciaccia: Vos éléphants blancs, où
sont-ils?
M. Tremblay: Identifiez donc les éléphants qu'on a
mis sur place? Dans tous les cas, si vous voulez jouer ce petit jeu...
M. Ciaccia: Non, je veux des réponses, pas de la
politicaillerie. Je n'en ai pas fait quand je vous ai parlé. Je vous ai
donné des statistiques.
Le Président (M. Jolivet): M. le député!
M. Ciaccia: Répondez donc!
Le Président (M. Jolivet): M. le député,
s'il vous plaît!
M. Tremblay: Pour vous répondre techniquement, le ciment
de la baie James est fait sur place. Il ne vient pas de Montréal. Si
vous voulez qu'on loue les avions de Québecair pour envoyer du ciment de
Montréal à la baie James, faites donc une motion en Chambre et on
la débattra. Cela montrera votre connaissance technique de
l'industrie.
M. Ciaccia: Cela montre le sérieux de vos réponses
aussi.
M. Tremblay: Oui. C'est à la suite de votre intervention
loufoque que je souligne ce point-là.
Donc, c'est évident qu'il y a eu une effervescence dans ce
domaine. J'avais distribué, pour revenir à un point connexe, le
tableau I, qui montrait que, dans les investissements pour les centres
commerciaux et les édifices à bureaux, il y a eu un boom en
1975-1976, qui était, par rapport à 1971 il n'y avait
quand même pas beaucoup d'années de différence...
M. Raynauld: Cela marchait en 1975. M. Ciaccia: Oui,
ça marchait en 1975.
M. Tremblay: ... des 118%, alors qu'à Toronto, en Ontario,
c'était 27%. Depuis ce temps, en Ontario comme au Québec, il y a
eu un ralentissement. C'est évident, quand les édifices à
bureaux... On sait bien que, dans l'effet d'accélérateur dans le
domaine des investissements comme ceux-ci, il y a un boom et un cycle de
retrait.
M. Ciaccia: Si les 70 000 personnes étaient restées
à Montréal, est-ce que...
M. Tremblay: Est-ce que vous pouvez me permettre de
répondre?
M. Ciaccia: ... cela aurait affecté...
Le Président (M. Jolivet): M. le député,
tout à l'heure, vous m'avez posé la question, à plusieurs
occasions, sur le fait des interventions à l'intérieur d'un
discours d'une personne. Bon! L'article 100, s'il vous plaît!
M. Tremblay: Dans ce domaine-là, évidemment,
l'effervescence... Comme je l'ai dit tout à l'heure, les gouvernements
et l'entreprise privée se sont lancés dans une sorte
d'effervescence, par rapport à l'Ontario, qui était incroyable.
C'est évident qu'ils ont acheté de nouveaux camions et de
nouvelles cimenteries.
Je me rappelle, après la construction de la ligne DEW dans le
Grand-Nord, qu'il y avait eu une vente d'équipement, parce que mon
père, mon cher monsieur, est un entrepreneur, et j'ai appris à
conduire les camions à l'âge de douze ans. Vous ne me montrerez
pas la différence entre un camion et un bulldozer. Il y avait eu une
vente, évidemment, comme après tout grand chantier... Je
présume qu'après la construction des pyramides, il y a eu
quelques instruments...
M. Ciaccia: ... les Egyptiens, maintenant? M. Tremblay:
... qui étaient en excédent.
M. Ciaccia: Les Egyptiens ne sont jamais entrés dans le
portrait, c'est leur faute.
M. Tremblay: ... et à moins qu'on propose qu'on continue
dans la foulée...
M. Ciaccia: On va aller voir Sadate.
M. Tremblay: ... qu'ayant fait un stade de $1 milliard, on en
fasse un deuxième et un troisième pour garder les camions en
activité...
M. Raynauld: II n'a rien de mieux à proposer.
M. Ciaccia: Oui, vous n'avez rien de mieux à proposer?
M. Tremblay: Oui, mais il faudrait que le gouvernement
fédéral cesse de couper les investissements dans la construction.
Cela, c'est une autre chose.
M. Ciaccia: Bon!
M. Raynauld: Faites donc les vôtres, les
investissements.
M. Tremblay: C'est une autre chose. M. Ciaccia: C'est la
faute du fédéral.
M. Tremblay: On va faire le Centre des congrès...
M. Ciaccia: II y a eu des hausses et des baisses avant, mais ils
n'ont jamais vendu d'équipement. Maintenant...
Le Président (M. Jolivet): M. le député,
vous manquez à votre parole.
M. Ciaccia: ... ils vendent l'équipement.
Le Président (M. Jolivet): M. le député,
vous manquez à votre parole.
M. Ciaccia: Comment expliquez-vous ça? Le
Président (M. Jolivet): M. le député!
M. Tremblay: Donc, j'ai déjà distribué des
tableaux et j'inviterais le député à
réfléchir sur cela, au lieu de se lancer dans des grandes
diatribes.
Il y a un autre tableau que je n'ai pas distribué. J'aimerais le
distribuer maintenant, parce que, encore là, le vieux refrain qu'on a
entendu tellement souvent: C'est bon à Toronto, ce n'est pas bon ici,
ça va mal, etc.
Je regardais un rapport de Southam Building, une firme de Toronto, qui
donne, dans l'industrie de la construction, la valeur des permis pour le mois
de juin 1978. Il compare juin 1978 et juin 1976.
En juin 1976, c'était le gouvernement Bourassa qui était
au pouvoir. Or, à ma connaissance, on s'apprêtait à faire
l'ouverture des Jeux olympiques. On avait acheté un long tapis rouge
pour que la reine d'Angleterre vienne les inaugurer.
Or, Southam dit: Dans le résidentiel, maintenant, dans la
région de Montréal parce qu'on parlait de la région
de Montréal tout à l'heure...
M. Ciaccia: ... pas les complexes?
M. Tremblay: ... dans la région de Montréal, il y a
une augmentation, en juin 1978, par rapport à juin 1976, de 118% des
valeurs de permis. Bon! Ce n'est pas si mal! Dans le domaine commercial, une
augmentation de 196,7%; dans l'industriel, il y a une baisse de 86%, par
rapport à juin; dans l'institutionnel, une augmentation de 83,9% et,
dans le génie civil, une augmentation de 228%. D'accord. Sur une base
mensuelle, il y a des accidents aléatoires, mais c'est quand même
"Southern Building Report". Je le donne simplement pour ce que cela vaut; cela
vaut ce que cela vaut, mais c'est quand même une indication de plus que
les choses ne sont pas dans le sens du refrain qu'on l'a dit.
Je prends une autre référence sur l'évolution, sur
les faits, parce que l'attitude de "do not bother me with the facts" est de
parler de camions, de dire que les camions ont été vendus. Mais
ils n'ont pas été vendus en Ontario, avez-vous remarqué,
vous dites qu'ils ont été vendus aux États-Unis.
Peut-être qu'il faut construire un stade olympique.
M. Ciaccia: Je n'ai pas dit en Ontario, j'ai dit: Ils ont
quitté le Québec. Ce sont des emplois qui ont quitté le
Québec.
M. Tremblay: Vous avez dit qu'ils ont été vendus
aux États-Unis.
M. Ciaccia: Oui, aux États-Unis, exactement. Ne m'accusez
pas de dire qu'ils n'ont pas été vendus en Ontario.
M. Tremblay: Non, mais je vous dis qu'ils n'ont pas
été vendus en Ontario.
M. Ciaccia: J'ai dit spécifiquement qu'ils ont
été vendus aux États-Unis; 88% de cet équipement,
au mois de septembre, ont été vendus aux États-Unis et 12%
sont restés au Québec.
M. Tremblay: J'ai ici la revue Statistique-Canada, qui s'appelle
"Investissements privés et publics au Canada ", perspectives 1978,
catalogue 61-205 annuel. À la page 42 et à la page 43, on
constate que les immobilisations dans le secteur manufacturier, qui
relève de ma juridiction... M. le député de Mont-Royal a
dit: Le ministre de l'Industrie et du Commerce pourrait-il nous dire ce qu'il a
fait? Je ne commencerai pas à énumérer tous les gestes que
j'ai posés en un an et demi, j'en ai fait plus qu'en quinze ans
l'ancienne administration. On a même eu un débat spécial
sur cela et M. le député d'Outremont était d'accord.
M. Ciaccia: ... pour l'industrie de la construction.
M. Tremblay: En région métropolitaine de
Montréal, dans le domaine de la fabrication, par rapport à la
région de Toronto, pour la première fois, selon les statistiques
dont nous disposons, les immobilisations "capital expenditures", en millions de
dollars, pour la région de Montréal, en 1978, vont être
supérieures par rapport à Toronto. En 1976, par exemple,
c'était $104 800 000 à Montréal et à Toronto,
c'était $141 200 000. En 1977, c'était $113 300 000 à
Montréal, $176 700 000 à Toronto. Mais, en 1978, l'année
où les mots "désastre", "tragique", parce qu'ils s'adressaient au
ministre de l'Industrie, tout à l'heure...
M. Ciaccia: Est-ce que c'est la réponse que vous avez
donnée à l'industrie de la construction à
Montréal?
M. Tremblay: Voulez-vous cesser de faire de la
démagogie?
M. Ciaccia: Non, je vous demande si c'est cette réponse
que vous avez donnée, aux mémoires présentés le 13
octobre 1977.
M. Tremblay: Voulez-vous cesser de faire de la démagogie?
En 1978, $125 800 000 à Montréal, dans la région
métropolitaine, pour les immobilisations, à Toronto, $126 100
000. C'est la première fois que Montréal dépasse Toronto
au plan des immobilisations industrielles dans le secteur de la fabrique.
Revenons-en un peu à ce refrain. C'est un refrain, c'est un
ballon qu'il faudra crever, il faudra
crever ce refrain défaitiste: Cela va mal au Québec, c'est
un désastre, c'est tragique, cela n'a pas de bon sens... On chasse les
sorcières pour faire peur aux Québécois, c'est une
stratégie pour faire peur aux Québécois.
M. Ciaccia: Défendez-vous en niant les faits et en portant
des accusations.
M. Tremblay: Je vais vous en donner des faits si vous voulez
écouter.
M. Ciaccia: Dans l'industrie de la construction...
Le Président (M. Jolivet): M. le député,
s'il vous plaît, cela a bien été jusqu'à maintenant.
Il faudrait continuer.
M. Ciaccia: Cela va continuer.
M. Tremblay: Je vais vous en donner des faits. La compagnie
Lester B. Knight & Associates Corp. a fait une étude, un sondage
pour le compte du Comité canado-américain de la Chicago
Association of Commerce and Industry, groupe d'hommes d'affaires qui ne sont
pas des rêveurs. Ils ont fait une étude très récente
qui démontre que les tendances du marché et les
possibilités économiques constituent et de loin le
principal facteur qui influence les projets d'investissements au Canada, avec
64% des réponses; suivent l'attitude des gouvernements canadiens et la
disponibilité des matières premières avec 12% chacun, le
taux de change du dollar canadien avec 6%, le coût de l'énergie
avec 3% et les frais de transport avec 3%. C'est ici que je vous demande
d'écouter, M. le député de Mont-Royal, M. le
député d'Outremont, M. Ryan et tous les autres qui se
promènent dans le décor, je vous demande d'écouter.
M. Ciaccia: Vous n'en faites pas, vous, de la démagogie.
Vous donnez des leçons.
M. Tremblay: Par contre, 2% des 49 compagnies interrogées,
des multinationales, soit une seule société du Mid-Est, a
indiqué que la situation politique québécoise lui a fait
mettre la pédale douce sur ses projets d'expansion. Une sur 49,2%, et
c'est sur ces 2% que l'Opposition officielle base toute son argumentation pour
empêcher les Québécois de progresser.
M. Ciaccia: Ce n'est pas moi, c'est le mémoire qui vous a
été présenté l'année dernière, M. le
ministre; ce n'est pas moi qui vous ai dit cela.
M. Grégoire: Ce n'était pas censé
d'arrêter, cela? Il me semble qu'on a été poli
vis-à-vis du député de Mont-Royal, tout à
l'heure.
M. Tremblay: Si on a un débat sur le
référendum avec ce genre d'argument de petit étage et
d'arrière-cour, vous avez besoin d'être illuminé et de
parler souvent à des voix dans le firmament, parce que vous n'irez pas
loin. Fiez-vous donc aux faits, les faits sont ceux-ci. C'est la conjoncture
économique qui a le plus d'impact sur l'activité
économique, sur les décisions économiques. La situation
politique avec un gouvernement responsable comme on en a un au Québec,
comme on n'en a jamais eu sur le plan économique, un gouvernement qui
stabilise l'économie au lieu de la déstabiliser, qui amène
la paix sociale, qui pousse de l'avant les PME en abaissant les impôts de
50%, toutes des mesures à saveur économique d'une grande logique
économique. Les hommes d'affaires eux-mêmes disent: Ce n'est pas
cela qui nous amène à investir. C'est pour cela que
Montréal dépasse Toronto pour les investissements en fabrication
cette année, pour la première fois. Des villes comme Sudbury sont
en train de fermer en Ontario. Je ne dis pas que le gouvernement de l'Ontario
ne fait pas son possible, c'est un gouvernement provincial, mais c'est un autre
problème à Ottawa, on le sait. Donc, ce refrain là
on parle du secteur privé, je ne parle pas des entreprises
d'État. Ce n'est pas un sondage auprès des entreprises
d'État c'est auprès des multinationales qui font affaires
au Canada et au Québec, fait par une compagnie de sondage
américaine. On ne pourra pas dire que c'est le ministre de l'Industrie
et du Commerce du Québec qui essaie de dorer la situation. Regardez les
faits. Ils disent: II y a 2% de nos entreprises qui peuvent modérer
leurs investissements au Québec pour des raisons politiques. Est-ce
qu'on va cesser, du côté de l'Opposition, de mettre de l'avant des
bonshommes de paille comme ceux-là pour faire peur aux
Québécois? Est-ce qu'on va cesser? Je vous le demande.
M. Ciaccia: Montrez nous où sont les investissements.
M. Tremblay: Pour l'intelligence du débat, je vous demande
de cesser d'essayer de faire peur aux Québécois pour les
maintenir dans une situation de dépendance historique.
M. Raynauld: M. le Président, est-ce que la
démagogie du ministre va cesser? Je voudrais bien qu'il réponde
aux questions.
M. Tremblay: Oui, c'est "don't bother me with the facts". Quand
ce sont des faits, c'est de la démagogie. Évidemment, quand on se
lance dans les grandes harangues pour faire peur, basées sur aucun fait,
là c'est de la haute justification libérale et
intellectuelle.
M. Raynauld: La dépendance, faire peur au monde, ce n'est
pas de la démagogie.
M. Ciaccia: On vous a donné des faits.
M. Tremblay: Mais lorsqu'on regarde les faits, objectivement,
provenant de Statistique Canada, des compagnies multinationales, des agences de
sondage américaines, là: "Don't bother me with the facts".
Là, c'est de la démagogie. Si vous
voulez discuter à ce niveau-là, discutez donc tout
seuls.
M. Ciaccia: Est-il menteur! Je n'ai jamais vu un menteur...
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Frontenac.
M. Ciaccia: Vous n'avez plus de faits à nous donner?
M. Gilles Grégoire
M. Grégoire: M. le Président, j'entendais des
chiffres depuis 10 heures ce matin. On nous a innondé de chiffres, mais
il reste des faits. On parle de diminution de la construction. Il y avait
pourtant une belle grosse construction à LaPrade, une usine d'eau
lourde. Ce n'est pas le gouvernement du Québec qui l'a
arrêtée. Ce n'est pas le gouvernement du Québec qui la
boycotte. Il y a un contrat de signé. On viole sa signature, le
gouvernement fédéral ne respecte pas sa signature, il viole
l'entente signée et conclue. Je n'ai pas encore entendu le
député d'Outremont ou le député de Mont-Royal lever
les masses en l'air. Je ne les ai pas entendus critiquer...
M. Tremblay: Non.
M. Grégoire: ... leur protecteur d'Ottawa. M. le
député de Mont-Royal, vous êtes peut-être de
Montréal, je ne suis pas de Montréal et j'ai le droit de parler
pour tout le Québec, parce que Montréal fait partie du
Québec et on est des citoyens québécois.
M. Ciaccia: Ne me reprochez pas...
M. Grégoire: On peut parler de la construction dans tout
le Québec, je crois, et c'est ce qu'indique la motion.
M. Ciaccia: Ne me reprochez pas de ne pas en avoir parlé,
je vous ai dis que je parlerais de Montréal.
M. Grégoire: Si vous voulez restreindre les débats
à Montréal, retournez à Montréal, mais je crois
qu'on doit parler de tout le Québec. Qu'est-ce qui s'est produit, par
exemple? Le gouvernement fédéral avait besoin d'environ $40
millions ou $50 millions pour le donner à Ford et Ottawa prend l'argent
de LaPrade et le donne à Ford pour que Ford s'installe en Ontario et
fasse un développement de construction de $500 millions.
M. Tremblay: C'est cela. Fédéralisme rentable.
M. Grégoire: Levez les masses, M. le député
d'Outremont.
M. Tremblay: Ou abaissez les masques.
M. Grégoire: Pourquoi ne protestez-vous pas, M. le
député de Mont-Royal?
M. Ciaccia: Aucune question.
M. Grégoire: Pourquoi restez-vous muet tout à coup.
Pourquoi fermez-vous vos boîtes quand vous voyez Ottawa prendre l'argent
après avoir violé son entente...
M. Ciaccia: Pourquoi ne donnez-vous pas les vraies raisons?
M. Grégoire: ... sa signature, à LaPrade, prendre
l'argent de là et le donner à Ford, une compagnie
américaine, pour que Ford s'installe en Ontario plutôt qu'au
Québec. Vous ne dites plus rien et cela, ce sont des faits. C'est un
fait, ce n'est pas un chiffre.
M. Ciaccia: Les mêmes subventions étaient
disponibles pour le Québec.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Mont-Royal, je pense que ma patience est quand même à bout quant
à vos interventions. Je vous demande, s'il vous plaît... (12 h
15)
M. Grégoire: C'est un fait, ce n'est pas un chiffre, M. le
Président. On peut faire dire bien des choses à des chiffres,
j'entends donner des chiffres depuis tantôt, ça se contredit les
uns les autres, il reste tout de même des faits. Je vais vous donner un
autre fait. La construction dans le domaine des voies ferrées. Vous
dites que le service de trains de banlieue de Montréal est foutu, fini,
mauvais; le Canadien National ne veut plus se servir de ça. On demande
au gouvernement du Québec d'y mettre $50 millions. Expliquez-moi donc
comment il se fait qu'au cours des dix dernières années, Ottawa a
dépensé dix fois plus pour la construction et la
réparation des voies ferrées du Canadien National en Ontario
qu'au Québec, dix fois plus; expliquez-moi donc pourquoi.
Expliquez-moi donc pourquoi surtout vous ne levez plus les masses en
l'air et vous ne protestez plus contre les agissements d'Ottawa. Ce sont des
faits, dix fois plus venant d'Ottawa, dépensés dans l'Ontario
qu'au Québec et vous ne protestez pas. Non, c'est bien, ça vient
d'Ottawa. Pourquoi est-ce qu'il y a toujours de la discrimination quand il
s'agit du Québec?
Comme l'a si bien dit c'est la plus belle phrase que j'ai
entendue depuis longtemps le ministre de l'Industrie et du Commerce en
Chambre, il n'y a pas tellement longtemps, le Québec serait capable de
s'en sortir tout seul en concurrence ou en compétition avec l'Ontario
mais s'il faut que le Québec se batte à la fois contre l'Ontario
et contre le gouvernement fédéral en même temps, ils sont
tous les deux dans la même poche, ça ne marche plus. C'est bien
évident. Et vous ne protestez pas.
Je vais vous donner un autre fait. J'ai cité des chiffres en
Chambre, il y a moins de sept ou huit mois, dans le domaine du prêt
agricole. Quand Ottawa consent des prêts agricoles, évidemment
l'argent sert aussi en partie à la construction, sous forme de
porcheries ou d'étables ou pour des ouvriers de la construction qui
travaillent sur des pépines pour faire du drainage ou des choses du
genre. Comment se fait-il que, sur tous les prêts agricoles consentis par
Ottawa, Québec n'a eu que 4% l'an dernier, d'après le dernier
rapport de la Société de crédit agricole? Il y en a eu une
partie de tous ces prêts. J'ai déjà des chiffres plus
exacts, en 1965, sur $200 millions en prêts agricoles consentis dans
l'ensemble du Canada par le gouvernement fédéral, il y en avait
$1 million au Québec et $199 millions dans les neuf autres
provinces.
Ce n'était pas pour encourager la construction d'étables,
de porcheries ou mettre des ouvriers aux travaux de construction avec leurs
pépines pour faire du drainage, pour creuser des fossés ou pour
améliorer la situation de la construction. Vous ne levez plus de masses,
là! Ce ne sont pas des chiffres, ce sont des faits vécus. Vous ne
levez plus les masses, vous ne protestez plus. Vous êtes
gênés, vous ne voulez même plus écouter, vous parler
entre vous autres, parce que vous n'avez plus de réponses à
ça.
Vous avez raison. Au lieu de rougir, vous vous retournez et vous vous
voilez la face. Ce sont des faits, ça.
M. le Président, je les entends parler de coûts de
construction, on parle de coûts de construction, ça coûte
cher. Je vais vous donner un fait, pas un chiffre, mais un fait dans les
coûts de construction. Comment se fait-il que, pour la première
fois depuis vingt ans, malgré la période d'inflation qu'on
traverse, les coûts de construction de voirie, cette année, ont
diminué? Pour la première fois, au ministère des
Transports, on a été tout surpris de voir que les soumissions
sortaient plus basses que l'an dernier pour les mêmes travaux. Comment se
fait-il que, sur la route 112, dans mon comté, les coûts de
construction ont diminué? Savez-vous pourquoi?
M. Raynauld: Oui, parce qu'il n'y en a plus.
M. Grégoire: Je vous demande bien pardon. Il y a eu dix
fois plus de travaux de voirie dans mon comté qu'il n'y en a jamais
eu.
M. Raynauld: Dans votre comté à vous, oui.
M. Grégoire: Oui, monsieur.
M. Raynauld: Oui, mais pas dans les nôtres.
M. Grégoire: Mais savez-vous pourquoi, alors qu'il y en a
encore beaucoup, savez-vous pourquoi les coûts de construction ont
diminué? Je vais vous donner un fait. Parce que les entrepreneurs ne
sont plus obligés de soustraire à la caisse électorale du
parti.
M. Raynauld: Ah, c'est ça! Voilà, voilà!
M. Grégoire: Quand l'entrepreneur n'est plus obligé
de prendre...
M. Tremblay: C'est cela.! M. Raynauld: Ah bon!
M. Grégoire: ... quand l'entrepreneur n'est plus
obligé de prendre 6% ou 7% pour les glisser à la caisse
électorale...
M. Raynauld: Je suis content d'entendre ça.
M. Grégoire: ... les prix baissent. Cela a un effet
avantageux, tout à coup, ce changement. Avant, à quoi
assistait-on? Quand c'était un gouvernement bleu, il n'y avait que les
entrepreneurs bleus qui avaient le droit de souscrire et ils s'entendaient
comme larrons en foire et ça s'enrichissait. On se souvient de ça
dans le temps de Duplessis, l'entrepreneur rouge n'était pas un bon
entrepreneur, il ne soumissionnait pas. Dans le temps des libéraux, il
n'y avait que les libéraux qui soumissionnaient. Mais aujourd'hui, plus
de favoritisme, plus de discrimination, là, les bleus soumissionnent
contre les rouges et les rouges contre les bleus, il y a une vraie
compétition et ils ne sont plus obligés de souscrire à la
caisse électorale.
M. Tremblay: Le libre marché, le libéralisme.
M. Grégoire: Là, les prix baissent. M. le
Président, quand les coûts de construction se mettent à
baisser comme cela, cela augure bien pour l'avenir. Pour là
première fois en 1978, cela a été ainsi, les baisses des
coûts de construction des travaux de voirie.
M. Tremblay: Le député d'Outremont a dit que
c'était complètement cinglé. Est-ce qu'il voudrait revenir
à l'ancien système de patronage?
M. Raynauld: C'est un cirque.
M. Tremblay: Vous voudriez revenir à l'ancien
système dans le secteur de la construction, où il fallait
donner...
M. Grégoire: Comme si vous l'aviez changé. Le
Président (M. Jolivet): Messieurs!
M. Tremblay: J'aimerais bien le savoir, et le premier ministre
aussi, si ce n'est pas changé, on va prendre des mesures.
Le Président (M. Jolivet): Messieurs, la parole est au
député de Frontenac. Je pense qu'il veut continuer.
M. Raynauld: C'est très bon.
M. Grégoire: Ce n'est pas ce que je dis qui est un
cirque.
M. Tremblay: La vérité choque et cela fait mal.
M. Raynauld: On n'a pas besoin de parler nous autres.
M. Grégoire: C'est que là, vous êtes rendus
dans vos derniers retranchements. Venez donc nier que les coûts de
construction n'ont pas baissé cette année dans le domaine de la
voirie au Québec.
M. Raynauld: II n'y a pas de patronage là! M. Tremblay:
Prouvez-le donc!
M. Grégoire: Oui, enfin, il y a un système de
soumissions réelles où les entrepreneurs, qu'ils soient bleus ou
qu'ils soient rouges... quand il en vient un dans mon bureau, au début
ils venaient nous voir et nous disaient: Est-ce qu'on va pouvoir avoir des
contrats quand même? Je disais: Bien sûr, c'est le prix et la
qualité. Pas d'autre considération. Je ne veux même pas
savoir s'ils sont rouges ou bleus. C'est fini ce temps-là. Ils se sont
mis à concurrencer les autres. Il n'y en a pas un je leur ai
assez dit clairement qui a osé venir offrir quelque chose au
député de Frontenac, parce qu'on sait que cela ne s'accepte plus
ces affaires-là. S'il y en a qui veulent souscrire...
M. Raynauld: Ils trouvaient que cela ne valait pas la peine.
M. Grégoire: ... à la caisse électorale du
parti, pas à la caisse électorale du mouvement, ils n'ont plus le
droit de donner des montants comme avant et les compagnies n'ont plus le droit
d'en donner et elles n'ont plus le droit d'en glisser sous la table. Au-dessus
de $100 il faut que cela soit par chèque. Et je peux vous dire que sur
quatre qui en ont offert, on les a refusés tous les quatre, même
selon les normes régulières de financement des partis politiques
en vertu de la nouvelle loi qui limite le plafond à $250. On les a
refusés tous les quatre et on leur a retourné leur argent. Tous
les quatre.
Alors, aujourd'hui les prix sont plus bas dans la construction, dans la
voirie et avec la compétition qui existe, les prix sont plus bas. M. le
Président, on parle également des sièges sociaux on
a dit qu'ils quittent oui, il y a eu la Sun Life. Mais la
réaction du Québec, moi je l'ai trouvée absolument saine,
absolument sensationnelle, absolument formidable, lorsque le ministre des
Finances a produit les chiffres montrant que la Sun Life investissait ailleurs
au Canada, en Ontario ou dans l'Ouest, les sommes ramassées ici au
Québec, à même l'argent des Québécois. J'ai
eu un exemple bien typique lorsque la société Allstate Insurance
Company of America, une succursale, une division de Sears-Roebuck des
États-Unis, a demandé, en 1963, au gouvernement
fédéral, une charte pour venir vendre de l'assurance ici au
Québec. Allstate Insurance Company of America n'est pas venue ici
construire des usines, n'est pas venue ici acheter de l'outillage ou installer
de l'outillage, puis une usine et produire, non. Les représentants ont
loué un bureau, ils ont payé le compte du téléphone
et des agents à commission. S'ils ne vendent pas de prime, pas de
commission, s'ils vendent des polices d'assurances, des commissions. Ce ne sont
pas de gros investissements pour Allstate, c'est une succursale comme les
autres.
Je me suis énormément opposé à cela, dans le
temps. Cela a passé quand même, c'était vos grands
frères d'Ottawa qui étaient au pouvoir là-bas. Allstate
Insurance est venue. Elle a ramassé les primes de A, B, C, D; de M. Z,
M. X, Mme Y, Mlle P ou A, ou je ne sais trop qui. Au bout de six ans, Allstate
Insurance Company of America, au nom de Sears-Roebuck, mettait la main sur les
plus gros établissements commerciaux au Canada, sur Simpsons-Sears et,
à même notre argent, une compagnie américaine devenait
propriétaire des plus grands établissements commerciaux au
Canada.
M. Tremblay: Indépendance économique.
M. Grégoire: Nous, on se laissait faire, on prenait des
primes dans cette compagnie et elle prenait notre argent pour prêter
à Sears-Roebuck qui achetait Simpsons-Sears et les plus gros
établissements commerciaux.
Est-ce qu'on devenait propriétaires, nous autres? Non, on
donnait, on prêtait notre argent aux Américains pour qu'ils
viennent nous acheter.
M. Tremblay: ...
M. Grégoire: Commerce de l'argent, le plus payant qui
soit.
Les compagnies d'assurance. Sun Life faisait la même chose avec
les fonds des citoyens du Québec. On dit qu'il n'y a pas assez
d'investissement au Québec; je pense bien, les compagnies d'assurance
venaient ramasser notre argent. Que ce soit les banques, les compagnies
d'assurance comme la Sun Life, ou autres, $500 millions de nos primes
perçues au Québec étaient investis en Ontario ou
ailleurs.
M. Raynauld: M. le Président, peut-on continuer de parler
sur n'importe quoi ou va-t-on parler sur le sujet?
M. Grégoire: Je pensais que c'était vous qui aviez
parlé de sièges sociaux.
M. Tremblay: On parle de sièges sociaux, c'est
vous-même qui avez soulevé le sujet.
M. Raynauld: Oui, la Sun Life, la vente aux Américains,
etc., c'est pertinent au débat?
Une voix: Vous n'avez pas parlé de sièges sociaux
tout à l'heure?
Le Président (M. Jolivet): M. le député, je
pense que le député a le droit de parler sur la
façon dont il entrevoit les problèmes dont vous faisiez
mention au niveau de la construction. Je pense qu'il est tout à fait
conforme au règlement de le laisser parler.
M. Grégoire: Les sièges sociaux de compagnies qui,
en déménageant, ne déménagent rien sauf des
classeurs, des papiers et de la paperasse, qui ne déménagent rien
sauf nos primes d'assurance en même temps, ce n'est pas la plus grande
richesse d'un pays, quand elles se conduisent en mauvais citoyens en
investissant ailleurs les montants perçus ici, mais les sièges
sociaux de compagnies, par exemple, comme les mines d'amiante à
Thetford, que ces gens essaient de déménager, qu'ils essaient de
déménager le trou de la mine, qu'ils essaient de
déménager les tas de résidus, qu'ils essaient de
déménager la mine, ils vont s'apercevoir que c'est plus dur,
parce qu'on a la richesse naturelle ici. Mais, même là, ils n'ont
jamais réussi à exploiter cela à notre profit. Il faut au
moins commencer à dire un mot sur les sièges sociaux pour que ces
gens se conduisent en bons citoyens québécois et qu'ils voient
à développer, au profit des citoyens québécois, la
richesse naturelle du Québec. On ne pourra peut-être pas forcer
Ford à venir s'installer au Québec plutôt qu'en Ontario,
surtout lorsque Ottawa se met du côté de l'Ontario, mais
l'aluminium à bon marché, cela provient du Québec et on
aurait dû au moins avoir le droit de continuer l'exploitation de nos
richesses naturelles non seulement dans la fabrication de l'aluminium à
l'état brut, mais de poursuivre le développement industriel
jusqu'à l'industrie secondaire et la transformation de notre aluminium
en produits finis, que ce soit en moteurs ou en pièces d'automobiles.
C'est cela qu'Ottawa a empêché de faire à partir d'une
richesse naturelle qui existe ici, l'électricité à bon
marché pour la transformation de l'aluminium, et c'est contre toute la
logique, tout le bon sens...
M. Raynauld: Parlez-nous donc de GM et de Bombardier.
M. Grégoire: Pour GM, on verra.
Le Président (M. Jolivet): Vous avez eu la chance de poser
vos questions.
M. Grégoire: Pour GM, il n'y a pas eu encore de
réponse.
Le Président (M. Jolivet): M. le député
d'Outremont.
M. Grégoire: Le ministre peut-il répondre?
M. Raynauld: C'est à lui que je pose la question.
M. Grégoire: M. le Président, je n'ai pas fini mon
intervention.
M. Tremblay: Tout de suite, je peux le dire,
GM va ouvrir une usine ce mois-ci, à Sainte-Eustache, qui va
créer 705 emplois directs et indirects et produire des autobus pour tout
le Canada et pour l'Amérique du Nord dans les prochaines années.
C'est jusgement un exemple d'un gouvernement qui s'occupe de ses affaires et
qui fait du développement industriel.
M. Grégoire: M. le Président, je n'ai pas fini mon
temps.
Une voix: Cela achève, par exemple.
Le Président (M. Jolivet): Non, c'est simplement pour vous
dire qu'il reste une demi-heure au débat. Je pense qu'il est cependant
logique de permettre les deux dernières interventions, celle du
député d'Outremont qui a quand même une forme de droit
privilégié et celle du ministre. Si vous me le permettiez, on
pourrait, à ce moment-là, permettre à chacun... Puisque le
député d'Outremont m'avait demandé au moins un quart
d'heure de possibilité pour qu'on puisse...
M. Grégoire: Je termine seulement en une minute, parce que
je crois avoir établi mon point. C'est vrai que tout ne va pas
parfaitement, c'est vrai qu'il y a des choses à améliorer, mais,
si mes bons amis d'en face, au lieu de toujours essayer de blâmer le
gouvernement du Québec qui fait son possible et qui réussit
très bien, au lieu de toujours essayer de faire la chasse aux
sorcières, en disant que c'est épouvantable en cherchant à
semer la crainte et en cherchant à développer... Vous relirez "La
calomnie", M. le député d'Outremont. Vous écouterez cela
à nouveau, si vous aimez le moindrement les extraits des opéras
de Rossini. Vous relirez "La calomnie" où on essaie tranquillement,
graduellement, d'estampiller quelque chose dans le front d'un gars, sans dire
positivement que c'est cela, mais en tournant tellement autour du pot qu'on en
arrive à prendre pour des réalités ce qui n'est pas
vrai.
M. Raynauld: Je voulais justement vous donner cela.
M. Grégoire: Essayez donc de vous conduire en bons
citoyens québécois. Au lieu de semer la crainte, cherchez donc
plutôt à voir où sont les troubles. J'ai cité des
fautes qui existent au gouvernement d'Ottawa. Levez les masses en l'air aussi
fortement vis-à-vis de votre grand frère d'Ottawa que vous le
faites, à l'heure actuelle, en semant la crainte dans le Québec.
Au lieu d'avoir deux poids, deux mesures, essayez donc d'être plus
impartial, essayez donc d'être plus honnête dans vos observations,
essayez donc d'être plus juste, essayez donc d'être plus
réel, plus impartial, au lieu de faire de la petite politicaillerie,
même de la vulgaire politicaillerie, comme on vous entend faire des fois,
alors que vous avez l'intelligence voulue pour aller plus loin que la
politicaillerie. Vous avez des diplômes, vous êtes
compétent, essayez donc de vous en servir pour mettre tout
cela au service du Québec au lieu de le mettre au service du
dénigrement comme vous le faites depuis longtemps. Je vous laisse la
parole, si vous voulez répondre là-dessus, mais je pense que les
faits que je vous ai donnés méritent que vous vous justifiiez sur
ce point.
Le Président (M. Jolivet): Merci. Comme je le disais tout
à l'heure, il reste deux intervenants. Compte tenu du "fair play" qu'on
s'était donné tout à l'heure, c'est-à-dire une
demi-heure chacun, au départ, je pense qu'il serait logique qu'on donne
à chacun quinze minutes pour terminer, ce qui permettrait de
dépasser de quelques minutes 13 heures, si vous me le permettez. Cela
va?
M. le député d'Outremont. (12 h 30)
Discussion générale
M. Raynauld: Merci, M. le Président. Je pense qu'on vient
d'assister à un spectacle qui ne fait pas honneur à la
qualité et à la responsabilité que nous avons comme
parlementaires. J'ai rarement vu un cirque pareil. On nous accuse d'à
peu près tous les maux. Si on n'appelle pas cela des insultes, je ne
sais pas comment on peut appeler cela. On s'est même fait servir des
appels à notre honnêteté, ce qui vient d'être fait
par le député de Frontenac, comme si nous étions
malhonnêtes, que nous ne voulions pas servir les intérêts du
Québec. Je pense que ces affirmations sont tout d'abord des
affirmations, purement gratuites, et par surcroît insultantes, et qui ne
font pas avancer le débat d'un seul pouce.
En ce qui concerne l'analyse de la situation, je crois qu'il est
incontestable je ne pense pas que le ministre ait répondu
à ces questions, à ces faits que j'ai apportés que,
dans la région de Montréal, la situation se
détériore, qu'il y a eu des baisses dans la construction de
logements, la construction non résidentielles, les heures de travail, ce
sont des rapports de l'OCQ. En ce qui concerne les autres statistiques qui
viennent d'être citées par le ministre, j'ai ici un journal, le
Daily Commercial News, sur la construction, où on dit ici, et je cite:
"Non residential buildings construction in the first half of 1978 in
Montréal was down 47% from the year earlier half, and engineering was
down 40% for a general decline of 44% in contracted award value." Cela confirme
les chiffres que j'avais présentés, qui étaient de l'ordre
de moins de 35% depuis les six mois de l'année dernière. Je pense
que ceci est incontestable.
En ce qui concerne les politiques, parce que je pense que c'est à
cela que nous voulons arriver, même s'il y a des divergences sur une
statistique ici et une statistique là, je pense que, si nous voulons
faire avancer le débat, nous devons essayer...
M. Tremblay: Ce sont les contrats de construction que vous venez
de mentionner.
M. Raynauld: La valeur des contrats de construction.
M. Tremblay: Oui.
M. Raynauld: C'est exact, je pense.
M. Tremblay:... parce que nous, c'est à Statistique
Canada. Il peut y avoir d'autres firmes.
M. Raynauld: Vous avez cité Southam News. Ceci vient
également de Canada Data Division of Southam Business Publication.
M. Tremblay: Nous, c'est à Statistique Canada, catalogue
64-201.
M. Raynauld: Oui, mais cela venait de Southam News, pour une
partie de ce que vous avez donné. Les divergences qui existent, je pense
qu'elles pourraient être identifiées très facilement. Dans
un des cas que vous avez cités, vous avez parlé
d'investissements. C'étaient les intentions d'investir, qui comprenaient
les équipements et la machinerie. Ce n'était pas seulement la
construction. Dans un autre cas, vous avez parlé du secteur
manufacturier. C'était une partie seulement, à ce moment, des
investissements. Je pense que, dans tous les cas, il serait très facile
de relever les divergences, parce qu'au fond je crois qu'il n'y en a pas. La
vérité, c'est que la situation s'est effectivement
détériorée considérablement depuis un an ou un an
et demi à Montréal.
Dans d'autres cas, vous avez également cité des
statistiques, M. le ministre, qui se rapportent à l'ensemble du
Québec, mais la situation, pour l'ensemble du Québec, je le
reconnais, est meilleure que la situation à Montréal. C'est
justement pour souligner des choses que le député de Frontenac a
dites tout à l'heure, la situation va plus mal à Montréal
que dans des régions basées sur des ressources naturelles.
À l'heure actuelle, on n'a jamais contesté ce fait.
Au-delà, encore une fois, de l'analyse de la situation, je pense qu'on
veut essayer de voir quelles sont les politiques qui peuvent être mises
en oeuvre pour corriger cette situation et essayer de dépasser le
terrorisme verbal du ministre de l'Industrie et du Commerce, lorsqu'il se sent
attaqué.
Sur le plan des politiques, je voudrais parler ici de son
ministère, il y a eu un programme de relance qui s'appelle OSE et qui
prétend avoir fait beaucoup pour la région de Montréal.
J'ai fait des calculs qui montrent que, dans la région de
Montréal, pour le ministère de l'Industrie et du Commerce, il
s'agit ici dans ce programme, en fait, pour résumer, de $2 millions
versés, de $12 millions sous forme de prêts. J'aimerais, s'il
pouvait, encore une fois, dépasser le stade des insultes, qu'il
réponde...
M. Tremblay: Je regrette, là! Sous le couvert, d'un ton
très bas, on lance des insultes...
M. Raynauld: J'aimerais qu'il réponde... Oui, je
reviendrai là-dessus, M. le ministre...
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre, vous aurez
l'occasion de répondre...
M. Raynauld: Non, je ne lance pas d'insultes.
M. Tremblay: Pouvez-vous quand même poursuivre un
débat sans, justement, accuser les autres de lancer des insultes?
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre...
M. Tremblay: ... qui était elle-même une
insulte?
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre, vous aurez la
chance de répondre tout à l'heure.
M. Raynauld: Je reviendrai sur les mots que vous avez
employés tout à l'heure, M. le ministre. Pour l'instant, je
voudrais essayer d'obtenir quelques réponses aux questions que j'ai
posées et que je pose maintenant. Je demande, sur ce point si les
prêts qui sont avancés dans le cadre du programme OSE sont des
dépenses gouvernementales au même titre que le paiement d'une
subvention, par exemple? Parce que, dans le cas du ministère de
l'Industrie et du Commerce, dans le programme OSE, pour Montréal, il
s'agit de $2 millions, je pense, d'argent vraiment versé et de $12
millions sous forme de prêts. Moi, suivant les concepts que j'ai, je n'ai
jamais été capable d'assimiler un prêt remboursable au taux
d'intérêt du marché, souvent, à travers la SDI en
particulier, je n'ai jamais pensé qu'on pouvait compter ça comme
des dépenses du gouvernement provincial, du gouvernement du
Québec. C'est ce que j'ai trouvé dans le programme OSE pour la
région de Montréal et, en ce qui concerne son propre
ministère, celui de l'Industrie et du Commerce. Si...
M. Tremblay: Puis-je vous demander de quel programme il s'agit,
parce que la SDI a environ huit programmes...
M. Raynauld: Tous les programmes de l'Industrie et du Commerce
qui sont mentionnés dans le rapport OSE. C'est très facile; il y
en a seulement une page.
M. Tremblay: Vous savez que le programme OSE ne couvre que deux
programmes de la SDI et non pas les huit.
M. Raynauld: Oui, je parle du programme OSE, ici, quand je dis
ça.
M. Tremblay: Oui.
M. Raynauld: Je parle du programme OSE et, à
l'intérieur du programme OSE, qui est le grand programme de relance du
gouvernement, il y a $12 millions de prêts d'indiqués pour la
région de Montréal...
M. Tremblay: C'est pour la petite entreprise de moins de 20
employés.
M. Raynauld: Si vous voulez les détails, il y a trois
activités, je pense, qui sont incluses là-dedans, mais ce sont
toutes des activités qui sont relatives au ministère de
l'Industrie et du Commerce dans le programme OSE. Il n'y en a pas d'autres.
M. Tremblay: Voulez-vous que je donne une petite réponse
rapide?
M. Raynauld: On a fait la somme...
M. Tremblay: Je pense que ça va éclairer le
débat.
Dans le programme OSE, il n'y a que deux programmes. Un programme de
$7,5 millions pour la petite entreprise manufacturière de moins de 20
employés, avec des prêts non garantis qui, normalement, ne sont
pas accordés à cause du trop grand risque. Donc, c'est un
prêt, même s'il comporte une clause de remboursement qui est
pratiquement un prêt-subvention, parce qu'on s'attend que le taux de
perte soit relativement élevé puisqu'aucune institution bancaise
n'ose prendre ce genre de risque.
L'autre programme, lui, touche très peu la région de
Montréal ou, du moins, beaucoup moins parce qu'il touche à
l'industrie du meuble, de la chaussure, des textiles et du vêtement, un
programme de $15 millions pour les industries traditionnelles pour des
prêts de dernier recours avant que les contingentements imposés
aux importations aient leur impact. Donc, il s'agit vraiment de deux programmes
relativement limités dans l'ensemble de la gamme des programmes de la
Société de développement industriel.
M. Raynauld: Je n'ai jamais mis en question les activités
totales de la SDI. Je parle du programme de relance OSE, et ça comprend
l'activité 2, par exemple, accélération de projets
d'investissements privés, telle que rapportée dans le rapport;
l'activité 3, l'expansion de la PME innovatrice; l'activité 4,
financement de la petite entreprise manufacturière, et l'activité
5, aide au secteur traditionnel.
Là-dedans, il y a $12 millions, je le dis bien, qui sont
présentés dans le rapport comme étant des prêts.
C'est pour ça que je vous ai posé la question. Ce sont des
prêts et pourtant, ces $12 millions de prêts, à ma
connaissance, sont additionnés dans les rapports du programme OSE comme
étant des contributions financières du gouvernement du
Québec à certains endroits et comme dépenses du
gouvernement du Québec à d'autres endroits. Je pense que...
M. Tremblay: M. le député, il s'agit de
prêts-subventions.
M. Raynauld: De prêts? Si ce sont des prêts, je pense
que c'est beaucoup exagérer l'importance de la contribution du
gouvernement du Québec et, si je le dis, ce n'est pas pour le critiquer,
c'est
pour illustrer que, dans le cadre du programme OSE et de votre
ministère, M. le ministre, vous ne faites pas grand-chose pour la
région de Montréal. Je voudrais enchaîner là-dessus
pour dire que ceci, en partie en réponse aux déclarations
du député de Frontenac en ce qui concerne le programme
MEER, à Montréal, parce que nous parlons de Montréal
autant que possible, vous n'êtes pas sans savoir que le gouvernement
fédéral a déclaré Montréal zone
désignée, qu'il l'avait déjà fait auparavant...
M. Tremblay: C'est une zone spéciale pour six
secteurs.
M. Raynauld: Zone spéciale, excusez-moi. Dans le cadre de
ce programme, il y a des investissements attendus sur trois ans, jusqu'en 1980,
de $300 millions; il y a des subventions pas des prêts de
$70 millions...
M. Tremblay: Attendues.
M. Raynauld: ... attendues, et au 1er juillet 1978, le
gouvernement fédéral a déjà versé $10 400
000 pour 81 projets dans la région de Montréal. La question que
je poserai là-dessus c'est: Est-ce que ce n'est pas déjà
beaucoup plus que ce que le gouvernement provincial a fait dans la
région de Montréal dans le programme OSE...
M. Tremblay: C'est un quart de la subvention à Ford en
Ontario.
M. Raynauld: ... et est-ce que, si on prend le programme dans son
ensemble de $70 millions, le député de Frontenac n'aurait pas pu
mentionner cela aussi, pour faire contrepoids aux exemples qu'il a
donnés où le gouvernement fédéral a offert des
fonds en Ontario? Je pense que là-dessus, M. le Président...
M. Grégoire: En un mot, quand Ottawa fait 10 au
Québec, il fait 50 en Ontario.
M. Raynauld: M. le Président, est-ce que je pourrais
continuer à parler?
M. Grégoire: II prête 50, il subventionne 50 en
Ontario pour 10 au Québec.
Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît, M. le
député.
M. Raynauld: Est-ce que je pourrais continuer? Je pense
qu'à citer des exemples particuliers, on n'en finira jamais. Je crois
que, pour ma part, en ce qui concerne Montréal, le gouvernement
fédéral a déjà fait plus que ce que le gouvernement
québécois fait dans le cadre de son programme de relance
économique et c'est pour cela que je crois que c'est cela qui est
important. Il faut cesser d'être infantile et de toujours accuser tout le
monde de tous les maux; il faut voir qu'est-ce que ce gouvernement qui, quand
même, perçoit 50% des impôts perçus au Québec,
peut faire par sa propre contribution. Quand vous voyez que le gouvernement
fédéral est capable d'en faire plus pour Montréal avec la
moitié des fonds quand il a l'ensemble du pays, je pense qu'il y a une
question où le ministre du commerce essaie de nous la faire voir.
Sur ce programme, je ne peux pas m'empêcher de penser que le
programme OSE, en ce qui concerne l'ensemble du programme, soit un simple
programme bidon, un écran de fumée, que ce sont des
clôtures que l'on met pour cacher les terrains vacants à
l'arrière, parce qu'il n'y a rien. Là-dessus, je voudrais
simplement citer ce que le ministre responsable au développement
économique a dit pour montrer jusqu'à quel point ce n'est qu'une
opération de propagande, une opération publicitaire. Je voudrais
demander au ministre s'il est d'accord avec une affirmation comme
celle-là. "Ces résultats là, il a donné des
milliers d'emplois, évidemment, j'en ai fait le calcul, mais je n'ai pas
le temps de les donner ce matin ont sans doute contribué pour une
part importante à la baisse spectaculaire du chômage
observée en juillet: 11,4% à 10,5%, alors même que OSE
atteignait son rythme de croisière ".
Je pense que là, le roi est nu parce qu'à ce
moment-là, si c'est vrai et si le ministre prend crédit de cette
baisse du taux de chômage pour le mois de juillet au Québec et
qu'il impute cela à OSE, qu'est-ce qu'il va dire pour le mois
d'août? Au mois d'août, le taux de chômage est repassé
de 10,6% à 11%. Est-ce que OSE avait perdu sa vitesse de
croisière? Est-ce que OSE avait perdu sa puissance à créer
les emplois? Je pense que c'est une blague invraisemblable que d'aller dire des
choses pareilles, d'aller dire que OSE a pu réduire le taux de
chômage de près d'un point au cours d'un seul mois. Je pense qu'on
a la mesure...
M. Tremblay: Une question de privilège, M. le
Président...
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre,
malheureusement...
M. Tremblay: On attaque le ministre au développement
économique en le citant alors qu'il est absent. Je pense que si le
député d'Outremont voulait avoir une discussion sur le programme
OSE, il devrait interpeller le ministre d'État au développement
économique.
M. Ciaccia: Vous n'avez pas fait ia même chose pour M.
Jean-Noël Lavoie?
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre...
M. Ciaccia: Vous n'avez pas fait la même chose pour le
leader parlementaire, M. Jean-Noël Lavoie, à l'appel de cette
commission?
Le Président (M. Jolivet): Messieurs, vous grugez dans le
temps du député d'Outremont et il lui reste deux minutes selon
l'entente.
M. Raynauld: Alors, je veux dire, M. le Président...
M. Tremblay: Je ne peux pas accepter qu'on accuse un ministre
absent.
M. Raynauld: Je n'accuse pas un ministre absent, c'est un rapport
public qui est déposé. Vous pouvez le lire, c'est en page 6 du
volume I.
M. Tremblay: Mais le ministre n'est pas ici pour vous
répondre. (10 h 45)
M. Raynauld: Si vous voulez contredire, vous n'avez qu'à
contredire. J'ai la source de la publication ici. Vous pouvez le
défendre vous-même, si vous le voulez. Mais à ce
moment-là, faites-le. Vous avez toute liberté de le faire, si
vous voulez. Simplement, je souligne que c'est une affirmation absolument
gratuite, une affirmation risible. J'en suis donc à me demander si tout
le reste de l'opération OSE n'est pas encore une autre opération
publicitaire, comme je l'ai dit tout à l'heure. (12 h 45)
Enfin, je voudrais mentionner que je n'ai quand même pas
reçu de réponse aux questions précises que j'avais
posées pour ce qui concerne, par exemple, la loi 48, une loi qui a
été votée à l'initiative du ministre de l'Industrie
et du Commerce.
M. Tremblay: Vous n'avez pas dit que vous vouliez discuter de
cela, M. le député. Vous avez dit que c'était la
construction à Montréal.
M. Raynauld: Oui, c'est la construction à Montréal,
mais c'est tout à fait pertinent, puisqu'il s'agit du poids fiscal des
entreprises et qu'il y a eu une réduction dans le poids fiscal pour les
petites et moyennes entreprises.
M. Tremblay: Si vous me l'aviez dit, j'aurais apporté les
renseignements. Je m'excuse, mais je n'étais pas au courant que vous
vouliez discuter de cela.
M. Raynauld: Je n'ai pas pu avoir de réponse à
cette question, pour savoir dans quelle mesure ceci avait contribué...
Comme le ministre aime bien faire de grandes déclarations sans justement
avoir les preuves à l'appui, j'aurais aimé qu'il nous donne les
preuves à l'appui quant à cette loi 48 qui est la sienne, pour
montrer combien d'investissements ont été mis dans les PME
à Montréal, combien ont été créés. Je
pense que la réponse aurait été fort intéressante
à entendre.
Le Président (M. Jolivet): J'aimerais, M. le
député, que vous concluiez.
M. Raynauld: Je conclus, M. le Président. Je ne voudrais
pas conclure sur une note pessimiste, mais sur... Oui, sur une note pessimiste,
pour ce qui me concerne...
M. Grégoire: Je vous ai deviné.
M. Ciaccia: On n'a pas le choix avec ce gouvernement.
M. Raynauld: ... sur le genre de débat que nous pouvons
avoir dans cette enceinte. Nous avons entendu le ministre de l'Industrie et du
Commerce nous parler de roi nègre, de faiblesse, d'ignorance et
d'incompétence, de défaitisme, de cinquième colonne,
d'adversaires du Québec, du sabotage et même de politicaillerie
d'arrière-cour.
Je voudrais vous dire que ce genre de vocabulaire, c'est ce dont
beaucoup de gens dans ce gouvernement aiment nous accuser. C'est du terrorisme
verbal. Quand le ministre nous parle d'un refrain, s'il y a un refrain dans le
Québec depuis deux ans, c'est bien celui-là, c'est d'accuser tout
le monde d'être des saboteurs de l'économie du Québec,
chaque fois que l'on veut poser des questions sur ce que le gouvernement du
Québec fait pour essayer d'améliorer la situation. On nous dit
aussi qu'on véhicule des slogans. Je n'accepte pas cette accusation, je
ne l'accepterai jamais. De la part d'un ministre comme celui de l'Industrie et
du Commerce, qui est responsable justement de l'activité
économique, comment ne peut-il pas voir là qu'il manque gravement
à ses responsabilités? Parce que c'est ce discours qui fait que
l'économie du Québec ne va pas bien à l'heure actuelle.
C'est justement quand le ministre de l'Industrie et du Commerce accuse tout le
monde d'être des saboteurs et qu'il nous accuse d'être une
cinquième colonne; il y a quand même des limites à accepter
ainsi des insultes. C'est ce discours qui est responsable en grande partie, en
dépit de toutes les mesures que le gouvernement pourrait prendre, s'il
n'abandonne pas ce discours, accuser les gens d'être des saboteurs et des
cinquièmes colonnes, il ne sera jamais possible de corriger la situation
économique du Québec. Il faudrait peut-être finir par
comprendre cela aussi. C'est ce que je trouve inacceptable quand on fait des
débats. On essaie d'avoir des débats. Je ne pense pas avoir
insulté le ministre...
Le Président (M. Jolivet): Je ne voudrais pas vous
interrompre, mais, s'il vous plaît, ça fait déjà
deux minutes et demie...
M. Raynauld: Oui, j'achève, M. le Président, j'en
ai pour 30 secondes.
Le Président (M. Jolivet): D'accord.
M. Raynauld: Je voulais simplement terminer en disant que, si
nous sommes des politicailleurs d'arrière-cour, M. le ministre de
l'Industrie et du Commerce est un paon dans l'arrière-cour.
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre, vous avez le
dernier droit de parole. Comme prévu, 15 minutes, cela fait
jusqu'à 13 h 5, vous n'êtes pas obligé de prendre tout
votre temps cependant.
M. Tremblay: Je voudrais tout le prendre, étant
donné que c'est mon anniversaire de naissance et que le
député d'Outremont vient de me faire un cadeau...
Le Président (M. Jolivet): Bonne fête, M. le
ministre.
M. Grégoire: Bon anniversaire, M. le ministre.
M. Tremblay: Je déplore qu'on termine un débat
à ce niveau, on descend dans l'arrière-cour. On est même
descendu dans la cour à poulets.
M. Raynauld: C'est ça, c'est ça.
M. Tremblay: C'est vraiment le genre de choses qu'il faut
déplorer. On vient de dire qu'il y a du terrorisme, que le gouvernement
fait du terrorisme. C'est quand même incroyable, on renverse les choses
et on veut maintenant accuser le gouvernement de faire ce que vous faites
depuis un an et demi, deux ans, du terrorisme économique, faire peur.
Chaque fois que vous ouvrez la bouche en Chambre, c'est pour essayer de dire
qu'il y a de l'incertitude au Québec, que ça va mal, etc. Vous
voulez maintenant renverser les choses. Je comprends que vous ayez un peu honte
d'aller devant la population, avec un pareil programme. Je comprends. Mais je
n'irai pas à ce niveau-là.
Évidemment, j'avais utilisé certains termes à la
suite de l'intervention de M. Ciaccia qui utilisait les mots "désastre
", etc.
M. Ciaccia: À Montréal...
M. Tremblay: C'était simplement pour rétablir les
faits. De toute façon, je n'ai pas l'intention de poursuivre sur ce
plan, M. le Président. Par contre, je reviendrai au fond du débat
et à la raison pour laquelle nous sommes ici ce matin. Le
député d'Outremont, avant sa dernière incartade, vient de
dire: Si le ministre avait amené des données sur la loi 48, etc.,
cela aurait été intéressant. Alors qu'il nous avait dit
qu'il voulait maintenir le débat sur la construction à
Montréal, alors que l'ordre de la Chambre était sur la
construction pour l'ensemble du Québec, évidemment, il faut se
brancher. Si on veut prévenir le ministre... On ne m'a pas
prévenu qu'on allait discuter de tout le ministère de l'Industrie
et du Commerce, du programme OSE, des sièges sociaux, le taux de
chômage en général, etc.; il y avait tellement de questions
auxquelles je n'ai pas pu répondre... Je n'ai pas pu répondre
à ces questions en détail, faute de temps.
Mais si on m'avait prévenu, je serais venu... Dans le fond, je
pense que le député d'Outremont a vraiment montré la vraie
justification de cette interprétation et, comme je l'ai dit au
début, cela aurait pu être retardé d'une semaine,
étant donné que j'avais une réunion très importante
avec les dirigeants de SIDBEC ce matin. La vraie raison était de faire
la démonstration il l'a dit lui-même tout à l'heure
qu'Ottawa, à Montréal, fait plus que Québec. Le
député d'Outremont est un député du Parlement du
Québec. Il a fait des études au Conseil économique du
Canada pour faire des recommandations économiques, dans le domaine de la
construction comme dans d'autres, au gouvernement fédéral. Elles
n'ont jamais été acceptées et je pense qu'elles n'ont
jamais été comprises, parce qu'il avait de bonnes
recommandations; la preuve, c'est que nous en mettons une sur pied. Au niveau
du commerce, on est pas mal sur la même longueur d'onde.
Mais venir ici, ce matin, démontrer, après la panique du
gouvernement fédéral au cours du mois d'août, qui a
annoncé des coupures à droite et à gauche, on ne savait
plus dans quelle direction cela allait; les ententes interprovinciales, on les
mettait au panier, on reniait tous les engagements; on donnait des subventions
spéciales, par contre, alors qu'il n'y a aucun programme. D'ailleurs,
ces gens ne le savent pas, ils vont prendre $40 millions pour Ford, il n'y a
aucun programme, aucune loi qui leur permet de le faire; certains
fonctionnaires fédéraux l'ont dit, devant ces décisions
prises à l'aveuglette par les ministres, pour des raisons purement
politiques, ils sont désemparés. Alors, devant cette chose, le
député d'Outremont choisit de terminer son intervention en disant
qu'il était venu ici pour démontrer que, effectivement, Ottawa
était vraiment conscient des besoins de l'industrie de la construction
à Montréal et y faisait beaucoup plus que le gouvernement du
Québec.
Il y a là une contradiction énorme, puisque, comme je l'ai
mentionné au début, l'étude que nous avons fait faire par
le BSQ montre que les coupures d'investissement du gouvernement
fédéral au Québec vont être tragiques dans une
période de basse conjoncture. Donc, venir démontrer que le
gouvernement fédéral fait énormément de choses, je
ne m'y comprends plus. Mais je comprends, on va peut-être dire qu'il ne
faut pas se préoccuper des faits, mais je pense qu'un gouvernement qui
coupe les dépenses d'investissement au Québec
présentement, alors que l'industrie de ta construction, à la
suite du party des Olympiques, est en plein ralentissement et cela est
vrai le fait que Montréal ait présentement un taux de
croissance dans l'industrie de la construction moins intéressant que
celui du reste du Québec, il n'y a personne pour nier cela, c'est
évident. On ne peut pas avoir des parties chaque jour. On ne peut pas
construire des monuments ostentatoires et improductifs en empruntant des
milliards chaque jour, je comprends, parce que les impôts deviendraient
insupportables.
À Montréal, c'est un des problèmes, avec ces
parties improductifs qu'on se paie et qui ne créent pas d'emplois; une
fois que le stade est construit, il y a quelques joueurs de football qu'on
importe des États-Unis, quelques joueurs de baseball qu'on importe des
États-Unis encore. Cela ne crée pas beaucoup d'emploi, $1,5
milliard de dépenses. Et on nous donne comme exemple et je trouve
cela vraiment ridicule, d'un ridicule consommé, et je parle comme
économiste on nous donne comme exemple que c'est pour raffermir
une éco-
nomie. Grands dieux, grands dieux! Je vais retourner à
l'Université de Montréal pour enseigner un peu plus aux
prochaines générations, parce que si on a encore les mêmes
générations de politiciens qu'on a eues depuis 100 ans, avec des
théories semblables de soutien de l'activité économique
c'est vraiment triste pour notre peuple. C'est vraiment triste! Je pensais
qu'on avait fait un peu de progrès.
Heureusement, je pense, que le gouvernement est au pouvoir, on n'est pas
dans l'Opposition, on peut donc au moins ne pas refaire les mêmes erreurs
que les gouvernements passés ont faites. Mais, c'est quand même
triste il me reste quelques secondes avant de terminer Le
député d'Outremont a fait l'intervention, ce n'est pas vous qui
l'avez fait, ayez-donc la politesse de me laisser terminer...
M. Ciaccia: Je vous ai demandé si vous me permettriez une
question...
M. Tremblay: Non, je ne vous le permets pas, parce qu'on s'en va
rencontrer le président de la Chambre dans quelques minutes. Donc, dire
qu'Ottawa, le député d'Outremont se faisant le porte-parole
d'Ottawa, le gouvernement...
M. Raynauld: Je l'attendais celle-là.
M. Grégoire: C'est parce que vous le saviez.
M. Raynauld: Le porte-parole d'Ottawa, ah! cela, c'est bon.
M. Tremblay: Vous avez dit vous-même qu'un de vos buts,
c'était de démontrer...
M. Ciaccia: Ne répondez pas à mes questions, mais
portez d'autres accusations.
M. Tremblay: ... qu'Ottawa était plus... On relira le
journal des Débats, si vous voulez.
M. Raynauld: Oui, relisez-le.
M. Tremblay: Vous voulez démontrer qu'Ottta-wa a fait plus
à Montréal qu'à Québec.
M. Raynauld: Le programme MEER, le contestez-vous?
M. Tremblay: Le programme MEER, parlons-en du programme MEER!
Parlons-en du programme MEER!
M. Raynauld: $70 millions.
M. Tremblay: Mon collègue, le ministre Lessard, à
Ottawa, pour qui j'ai beaucoup de sympathie parce qu'il passe un mauvais quart
d'heure au cabinet, a même dit qu'il va se révolter si Ottawa fait
la même chose que pour Ford et donne une subvention à GM pour
aller en Ontario. Il a dit qu'il allait se révolter.
Il est passablement exaspéré lui-même de cette
maudite politicaillerie qu'on fait à Ottawa sur le dos du Québec.
J'ai beaucoup de sympathie pour le ministre Lessard, un chic type de la
région de Chicoutimi. Il a annoncé, à la suite, la
désignation de Montréal comme zone spéciale. Ce n'est pas
une zone désignée, c'est une zone spéciale, seulement pour
six secteurs d'ailleurs. L'année passée, pour la première
année, il y a eu $10 millions de subventions, le quart d'une seule
subvention pratiquement illégale sur le plan international pour Ford qui
était de $40 millions. Là, on vient me donner ici, ce matin,
à moi, ministre de l'Industrie et du Commerce, un exemple, cet exemple
du MEER comme étant une contribution formidable du gouvernement
fédéral à la relance de l'industrie à
Montréal. Mais alors, il ne faut pas rire des gens, quand
même.
M. Raynauld: Vous, c'est $2 millions.
M. Tremblay: Non, vous êtes malhonnête. J'utilise le
mot "malhonnête" sciemment. Je vous ai expliqué tout à
l'heure qu'à la SDI, les deux petits programmes qu'on a d'en haut, ce
sont les deux programmes les plus petits du ministère de l'Industrie et
du Commerce. Là, vous revenez encore à la charge pour faire de la
démagogie. J'appelle cela comme cela. Vous savez fort bien que la SDI
investit $200 millions pour l'ensemble du Québec, par année, ce
ne sont pas les $7 millions que j'ai mentionnés tout à l'heure et
les $15 millions pour l'industrie traditionnelle. Là, vous voulez
encore, dans les dernières minutes, jeter de la poudre aux yeux.
M. Raynauld: Votre programme OSE.
M. Tremblay: Votre programme OSE, si vous voulez interpeller le
ministre responsable, vous l'interpellerez.
M. Raynauld: Vous avez osé...
M. Tremblay: Je suis responsable de la SDI et je vais vous dire
que vous n'avez pas le droit de me lancer des faussetés comme cela
à la dernière minute, alors que je ne peux pas réagir.
Mais, finalement je pense que le député de Frontenac a
touché juste et cela va dans la suite des grandes lignes de
l'étude du BSQ, de l'impact de la coupure des investissements
fédéraux au Québec sur l'emploi c'est que les
sociétés d'État et le gouvernement fédéral,
de tout temps mais là, cela s'intensifie pour des raisons
électorales dépensent très peu de leurs
dépenses créatrices d'emplois au Québec. Dans les comptes
économiques, pour les années 1961 à 1976, cela a
été démontré cela n'a jamais
été nié par personne que seulement 16,3% en moyenne des
dépenses créatrices d'emplois, pour les investissements, les
emplois, etc., du gouvernement fédéral se produisaient au
Québec, alors qu'on a 27% de la population canadienne. Cela ne touchait
pas aux sociétés d'État.
Évidemment, si vous introduisez le CNR, comme l'a fait
très justement le député de Frontenac, des chemins de fer,
on n'en a pas construit beaucoup au Québec. Évidemment, on s'est
servi des impôts du Québec pendant un siècle, dit-on, mais
cela a commencé après l'Acte d'Union en 1840 pour financer le
développement des chemins de fer de l'Ouest canadien, et on faisait
payer à nos pauvres cultivateurs du temps le développement des
chemins de fer dans l'Ouest. C'est irréfutable. Des économistes
comme Faucher, comme Lamontagne dans le temps, des historiens comme Brunet et
d'autres l'ont bien démontré. Quand vous parlez du CNR,
même encore aujourd'hui, le CNR vient de construire une de ces tours de
prestige au centre de Toronto. Ce n'est pas une entreprise privée
à Toronto, le CNR, la tour qu'il a construite, cette tour de prestige.
Le gouvernement fédéral est non seulement procyclique dans
l'industrie de la construction au Québec, ce qui est absolument
irresponsable au plan économique, mais au plan du développement
industriel au Canada, il renforce les plus forts et affaiblit les faibles. La
tour du CN, avec des fonds publics, on fout cela à Toronto,
évidemment, du fait que c'est le centre du marché canadien
où il y a le plus d'activités de construction. Au lieu de
diversifier cela, on fourre cela à Toronto. Des sociétés
d'État, il y en a 330 à Ottawa. On en a découvert quatre
récemment qui...
M. Raynauld: En même temps, on faisait Radio-Canada
à Montréal, à ce moment. Dites-le donc aussi, en
passant.
M. Tremblay: Une tour de prestige du CN, mais, par contre,
lorsqu'il s'agit de maintenir des services de trains, passez cela au
gouvernement du Québec. Faisons payer cela par le trésor public.
Les poubelles, envoyons cela à Québec, qui va taxer, alors
qu'Ottawa a un budget de $47 milliards cette année. C'est à peu
près le produit national brut du Québec. C'est quand même
incroyable, il faut regarder les faits. C'est le produit national brut du
Québec qu'a Ottawa. On a un déficit qui va être au moins de
$12 milliards aux comptes nationaux, et peut-être plus encore. On fait
très peu au Québec de dépenses créatrices
d'emplois, on les coupe, au contraire. LaPrade, évidemment. Il y a eu
des pressions du ministre de l'Énergie de l'Ontario pour que ce projet
soit bloqué, comme dans le cas de la taxe de vente, comme dans le cas de
Ford. C'est encore la même maudite affaire. L'Ontario a deux
gouvernements. Il a le gouvernement qui lui est propre et il a celui qui est
à Ottawa. Ottawa est non seulement l'Ontario, physiquement et
géographiquement, il l'est au niveau des politiques et c'est
irréfutable. (13 heures)
L'exemple de LaPrade est vraiment scandaleux, parce que le gouvernement
du Québec, avait eu moult hésitations, avant de passer au
nucléaire. C'est sous la pression du gouvernement fédéral
que nous sommes allés dans le nucléaire et avons garanti que
Gentilly III allait être construit. Vous vous rappelez le débat?
Or, après avoir fait...
M. Raynauld: ... les deux... Amen.
M. Tremblay: ... un contrat en bonne et due forme pour maintenir
ce chantier important, alors qu'on avait tellement donné à Chalk
River, alors que le fédéral avait subventionné pendant
trente ans le développement de l'industrie de l'uranium, la recherche et
tout en Ontario, avec Chalk River, il y avait une petite miette qui s'appelait
LaPrade.
Ils veulent nous enlever même les miettes. Ils veulent même
venir nous enlever les miettes. Si ce n'est pas dégueulasse! Alors qu'on
prend nos impôts, non seulement les sociétés d'assurances
viennent siphonner le Québec pour aller développer le reste du
Canada avec nos impôts, et ça se fait depuis l'Acte d'Union,
ça, depuis 1840. On peut le démontrer. Cela a été
tellement étayé. J'ai même écrit un livre qui
s'appelle "L'économie québécoise" où c'est bien
étayé encore.
M. Raynauld: Pardon?
M. Tremblay: "L'économie québécoise".
M. Raynauld: Vous avez écrit un livre, vous?
M. Grégoire: ...
M. Tremblay: Pour les...
M. Raynauld: C'est une collection d'articles, ça. Ce n'est
pas un livre que vous avez écrit.
M. Tremblay: Oui, je suis l'éditeur...
M. Raynauld: Non, ce n'est pas ça, là, de
nouveau... Soyez précis à cet égard. "L'économie
québécoise", c'est une collection d'articles...
M. Tremblay: Une collection, justement... M. Raynauld: ...
dont vous n'êtes pas l'auteur.
M. Tremblay: ... avec des articles qui démontrent
justement ce que je dis. J'ai mentionné tout à l'heure plusieurs
auteurs.
M. Raynauld: Ah bon! Cela, c'est différent! M.
Tremblay: Et, si vous voulez avoir... M. Raynauld: Vous n'êtes
pas l'auteur.
M. Tremblay: ... de mes livres, allez consulter les autres...
M. Raynauld: Lequel autre? Bouchette...
M. Tremblay: ... livres.
M. Raynauld: Errol Bouchette, peut-être?
M. Tremblay: Pourquoi ne le consultez-vous pas, Errol
Bouchette?
M. Raynauld: Je l'ai consulté et je me suis aperçu
que j'avais lu Errol Bouchette, pas Rodrigue Tremblay. C'est encore un livre
qui est à votre nom, ça?
M. Tremblay: Bon! Avez-vous d'autres interventions...
M. Raynauld: Oui, j'en aurais d'autres, mais je ne les dirai
pas.
M. Tremblay: ... de cette... J'en aurais aussi. M. Raynauld:
C'est parce que c'est vous qui...
M. Tremblay: Si vous voulez commencer à lancer ce genre de
choses, vous êtes sur un terrain peut-être plus mouvant que vous
pensez.
Donc, lorsqu'on dit qu'on vient...
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre, je tiens
à vous avertir qu'il vous reste une minute.
M. Tremblay: Oui, mais là, on vient de m'interrompre
à droite et à gauche...
Le Président (M. Jolivet): Je le sais, mais il
reste...
M. Raynauld: Donnez-lui une minute de plus.
M. Tremblay: Donc, on vient couper les dépenses alors que
non seulement le gouvernement fédéral prend des fonds pour aller
les investir ailleurs qu'au Québec, mais, en plus, on a des compagnies
financières qui ont toujours fait cela, et lorsqu'un gouvernement du
Québec commence à se préoccuper de ce problème, on
crie aux grands maux. C'est terrible! C'est terrible de se préoccuper de
cela. Vous créez de l'incertitude. Voyons donc! Cessez donc de respirer!
Vous faites peur à nos maîtres! Ne bougez pas trop vite. Il faut
faire attention. Laissez donc les choses aller lentement comme elles ont
toujours été. C'est beaucoup plus sécurisant, etc.
Je pense que ce genre de débat, finalement, parce que sous
prétexte, comme le député d'Outremont l'a bien
mentionné, que ce n'était pas pour discuter de l'industrie
à Montréal, parce que lui-même a soulevé tous les
problèmes des sièges sociaux jusqu'à la contribution
d'Ottawa, en passant par l'inévitabilité ou la
non-inévitabilité de l'indépendance, etc.. Il a
soulevé tout ça dans sa première intervention. Donc, ce
n'était pas une provocation, c'était lui qui soulevait tout
ça. Il est évident que c'était vraiment un
prétexte, et je pense que s'ils veulent continuer à aller sur ce
plan, moi, je suis tout à fait d'accord et je serais d'accord pour qu'on
amène les caméras ici, parce que, finalement, c'est le bon sens
qui démontre que ce genre de petit argument... Il parlait tout à
l'heure de terrorisme. C'est vrai. C'est vraiment du terrorisme que de faire
peur aux Québécois. Progager les mythes de toute notre
histoire... Certains rois nègres, pour maintenir leur position de
privilège, font véhiculer au profit de nos vrais
maîtres...
Si on veut continuer comme cela, je suis tout à fait d'accord; et
des commissions comme celle-là, je suis prêt à en faire
chaque vendredi. Évidemment, on ne pourra pas me critiquer de ne pas
m'occuper des sociétés d'État, mais je suis prêt
à le faire chaque vendredi, parce que finalement je pense que
l'intervention du député de Frontenac le démontre aussi
cela revient à la question de s'occuper de nos affaires dans le
domaine économique. Si nous nous en occupons, avec un gouvernement comme
celui que nous avons qui, au lieu de déstabiliser l'économie, la
stabilise, je pense qu'on va commencer à avancer au lieu de se
référer toujours à d'autres qui, je pense cela
commence à être de plus en plus clair essaient plutôt
de nous déstabiliser et de nous démotiver.
Le Président (M. Jolivet): Merci, M. le ministre, merci
à tous les intervenants de ce matin. La séance est
terminée.
(Fin de !a séance à 13 h 5)