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Version finale

31e législature, 3e session
(21 février 1978 au 20 février 1979)

Le vendredi 13 octobre 1978 - Vol. 20 N° 167

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Question avec débat - L'investissement dans la construction au Québec


Journal des débats

 

Question avec débat

(Dix heures treize minutes)

Le Président (M. Jolivet): La commission de l'industrie et du commerce se réunit ce matin de 10 heures à 13 heures pour discuter de la question avec débat du député d'Outremont au ministre de l'Industrie et du Commerce sur le sujet suivant: L'investissement dans la construction du Québec. Comme c'est la première...

M. Raynauld: Pas l'investissement...

Le Président (M. Jolivet): L'investissement dans la construction du Québec. C'est ce que j'ai.

M. Raynauld: C'est une erreur.

Le Président (M. Jolivet): C'est le journal des Débats. Est-ce que c'est...

M. Tremblay: Oui, c'est ce que j'ai ici. M. Raynauld: Ce n'est pas ça du tout...

M. Tremblay: Les investissements dans la construction.

M. Raynauld: Oui, mais c'était dans la région de Montréal.

Le Président (M. Jolivet): Ce que j'ai à l'appendice, le jeudi 12 octobre 1978, c'est bien l'investissement dans la construction au Québec. On va vérifier.

M. Tremblay: M. le Président, j'ai aussi les affaires du jour et c'est bien marqué: question avec débat en vertu de l'article 174a du règlement: Commission permanente de l'industrie et du commerce, question avec débat du député d'Outremont au ministre de l'Industrie et du Commerce sur le sujet suivant: L'investissement dans la construction au Québec.

M. Raynauld: M. le Président, je voudrais prendre ceci sous réserve, la lettre qui a été envoyée au président, je l'ai signée. Je suis convaincu que ce n'était pas ça.

Je demanderais à quelqu'un d'aller chercher cette lettre auprès de M. Jocelyn Pittre, au deuxième étage...

Le Président (M. Jolivet): On peut envoyer quelqu'un...

M. Raynauld: ... la chercher et on pourrait prendre ça sous réserve.

Le Président (M. Jolivet): De toute façon, c'est ce que j'ai comme avis à l'appendice.

Le Président (M. Jolivet): Pendant qu'on vérifie, étant donné que c'est la première rencontre que nous avons depuis le mois de juin dernier, permettez-moi d'apporter certaines informations concernant ce débat qui est un débat avec questions. Selon le règlement, la première personne qui prendra la parole, c'est d'abord la personne qui a posé des questions au ministre, c'est-à-dire le député d'Outremont. La deuxième personne à parler sera le ministre, ensuite le ministre et la personne qui pose des questions ont le droit d'intervenir durant vingt minutes chacun. Cependant, ce qu'on a utilisé comme procédure depuis le début, prévoit que, une fois que le ministre aura donné sa réponse aux questions du député d'Outremont, ce sera le député de Huntingdon qui prendra la parole; ensuite, ce sera le tour de chacun des membres autour de cette table, selon la demande. Je prendrai en note le nom des personnes qui me demanderont ensuite d'intervenir. Je demanderais au député d'Outremont de procéder immédiatement.

Exposé du sujet

M. André Raynauld

M. Raynauld: Merci, M. le Président. Je dirai d'abord que je regrette ce qui semble être un malentendu assez malencontreux dans mon esprit et dans l'esprit de mes collègues du Parti libéral. Nous avions voulu avoir une question ce matin sur la région métropolitaine de Montréal. C'est une des principales raisons pour lesquelles je suis moi-même le signataire de cette demande d'interpellation et, en second lieu, on voulait que cette question, ce matin, soit un peu plus circonscrite que d'habitude, de façon qu'on puisse au moins tirer des conclusions un peu plus précises et plus claires que dans les débats qui sont beaucoup plus généraux.

Comme nous l'avons dit tout à l'heure, nous obtiendrons cette demande, mais je voudrais bien dire qu'en ce qui me concerne, j'ai préparé des notes ce matin sur la région économique ou métropolitaine de Montréal seulement.

Comme deuxième remarque préliminaire, je voudrais m'excuser auprès du ministre si cette demande a pu l'importuner, puisque, cette semaine, il a voulu retarder ce débat jusqu'à au moins la semaine prochaine, à cause de certains autres engagements. Je le remercie d'être venu. Si nous avons insisté, c'est, comme j'essaierai de le montrer par la suite, à cause de la gravité de la situation.

Dans un premier point, je vais d'abord essayer de démontrer que la construction à Montréal dégringole et que la situation économique liée à la construction se détériore à un rythme extrêmement rapide. Pour empêcher le ministre d'imputer cette chute à Ottawa, aux Américains, aux Arabes du Moyen-Orient, je vais montrer que cette dété-

rioration ne suit pas un cours normal. C'est une expression qui est souvent employée ici depuis quelque temps et je vais essayer d'insister pour montrer qu'il s'agit d'une conjoncture dans laquelle il y a des éléments supplémentaires qui s'ajoutent à des éléments qui sont, bien entendu, de mise et qui concernent des situations à l'extérieur.

Le premier indicateur que je vais prendre, encore une fois en me limitant toujours à la région métropolitaine de Montréal, pour ce qui concerne le chômage, en 1977, c'est qu'on a un taux de 9,4% dans la région économique no 6; en 1976, il était de 7,1%. C'est donc une augmentation du taux de chômage de 32%, en une année. En 1978, pour les neuf premiers mois, l'augmentation correspondante est de 11%. Pour la zone métropolitaine de Montréal, on a également une augmentation du taux de chômage, en 1977, de 36%.

Ce qu'il y a d'inhabituel dans ces chiffres et d'incontestable en même temps, c'est, premièrement, que les fluctuations de ce taux sont habituellement plus faibles dans une région comme Montréal, qui a une économie plus diversifiée que des régions où l'économie est fondée essentiellement sur des ressources ou des milieux beaucoup plus restreints.

Or, cette année et l'année passée, on trouve tout à coup que c'est à Montréal que les fluctuations du taux de chômage sont le plus denses. C'est inhabituel, cela ne s'est pas produit avant.

Je voudrais même ajouter qu'en 1977 encore, cette hausse de 35% à 36%, c'est la plus haute de toutes les régions du Québec; de toutes les régions économiques du Québec, c'est dans la région économique de Montréal que la hausse a été la plus rapide; c'est inhabituel. Deuxièmement, ce qu'il y a d'inhabituel aussi, c'est qu'en même temps que le chômage augmente évidemment considérablement à Montréal, il a baissé, de façon systématique, à Toronto pendant la même période.

En 1978, tous les mois, à Toronto, dans la zone métropolitaine, le taux de chômage a diminué. Je peux vous donner les chiffres pour les mois, à partir de mars, ainsi que ceux d'avril, de mai, de juin, de juillet et du mois d'août. On a toujours une baisse systématiquement, sauf un mois où cela a été égal.

S'il existe une influence provenant de cette conjoncture internationale, américaine, canadienne ou étrangère en général, elle ne semble pas jouer dans le même sens qu'elle jouait dans le passé; elle ne semble pas jouer non plus dans le même sens entre Montréal et Toronto.

Le deuxième indicateur de difficultés à Montréal est le logement. Pour ce qui concerne d'abord les permis de bâtir, en 1976, on a eu une très forte augmentation, toujours dans la zone métropolitaine de Montréal, sur 1975. On a eu une augmentation de 84%. En 1977, on a eu une baisse de 31% et en 1978, une baisse additionnelle de 35%. Voilà pour les permis de bâtir.

Pour les mises en chantier, dans la zone métropolitaine de Montréal, le même phénomène essentiellement: en 1976, une très forte hausse, 104% dans les mises en chantier; en 1977, une baisse de 11% et en 1978, une baisse de 30%. Pour 1978, ce sont les premiers six mois, bien entendu. Il n'y a pas de prévision là-dedans, je m'en tiens strictement à des faits établis. Donc, une baisse dans les mises en chantier qui est considérable.

On peut dire, que même à l'intérieur de la zone métropolitaine de Montréal, on trouve des chiffres encore plus extraordinaires, comme par exemple, sur la rive sud où la baisse dans les mises en chantier, pour les six premiers mois de 1978, est de 53,6%. Ici aussi, il y a des choses inhabituelles. Ce qu'il y a d'inhabituel, c'est l'ampleur des fluctuations. C'est la brutalité avec laquelle la chute s'effectue, une brutalité qui ne semble pas être expliquée par les phénomènes habituels liés soit à des fluctuations dans les taux d'intérêt, soit à des fluctuations dans le taux d'inoccupation, par exemple. Le taux d'inoccupation est à la hausse, bien sûr, depuis 1976, mais je ne sais pas encore le taux d'inoccupation global pour la région de Montréal; c'est 3,4% à l'heure actuelle ou à peu près. Donc, le taux d'inoccupation n'est pas encore extravagant. On se demande comment il se fait que les mises en chantier font une chute aussi brutale. C'est inhabituel.

Ensuite, il y a un phénomène nouveau également, c'est le taux d'inoccupation qui s'applique aux logements neufs qui sont construits, par exemple, depuis sept à dix-huit mois. Je compare ici avril 1978 à avril 1977, un an avant, le taux d'inoccupation est passé de 9% à 21%. Sur les logements neufs de six mois et moins, le taux d'inoccupation est passé l'an dernier de 54% à 73%. Donc, il se passe quelque chose. Le taux global d'inoccupation n'est pas tellement élevé. On dirait que les constructeurs ont contribué à mettre des logements en chantier, et tout à coup, il y a eu une espèce de cassure entre les attentes des entrepreneurs et les prévisions des constructeurs, probablement en 1975 ou 1976, et ce qui s'est passé par la suite. Il y a eu quelque chose qui s'est passé pour que, tout à coup, on ait une baisse aussi considérable des permis de bâtir et des mises en chantier et qu'on ait des taux d'inoccupation nettement en déséquilibre et qui sont extrêmement élevés pour les logements neufs et relativement faibles pour l'ensemble du stock de logements.

La réponse, à mon avis, à cette question, tient en partie à l'émigration de la population depuis l'élection du Parti québécois. On a des chiffres là-dessus. Je les ai déjà cités plusieurs fois, mais je les rappelle simplement pour mémoire. En 1977, on a eu des sorties nettes de population au Québec qui ont été à peu près deux fois et demie celles de 1976. Je ne pense pas qu'on puisse dire ici que ça suit son cours normal. 73 000 sorties, 26 000 entrées, pour des sorties nettes de 47 000 en 1977; l'année précédente, c'était 18 000 sorties nettes. En 1975 — c'était pourtant une année de récession — les sorties nettes ont été de 12 000. Donc, je répète, 47 000 sorties nettes en 1977, 18 000 en 1976, 12 000 en 1975. Je dis qu'il y a quelque chose non seulement d'inhabituel là-dedans, mais c'est absolument exceptionnel. La

seule réponse qu'on a trouvée à ce genre de phénomène de la part du gouvernement a été d'invoquer l'année 1970.

J'avoue, là-dessus, que j'ai rarement entendu une raison aussi mauvaise, puisqu'on sait très bien ce qui s'est passé en 1970 et je ne sais pas si le Parti québécois veut continuer à établir des comparaisons entre l'année 1970 et l'année 1977. À mon avis, ça lui fait une belle jambe que d'invoquer l'année 1970.

Le troisième indicateur, les contrats de construction. Les contrats de construction en 1977 ont baissé de 14% dans la zone métropolitaine de Montréal. Bien sûr, on parle toujours, quand on arrive à la construction, des fameux Jeux olympiques de 1976. Si les Jeux olympiques ont pu expliquer les pourcentages de baisse en 1977, est-ce qu'ils expliquent encore les pourcentages de baisse de 1978? Parce qu'en 1978, pour les six premiers mois, la baisse dans les contrats de construction, c'est 35% sur 1977, et ça, ce n'est pas une année de Jeux olympiques, 1977; une baisse de 35% qui s'ajoute à la baisse de 14% de l'année précédente.

Les baisses de 1978 se retrouvent partout, sauf dans les contrats du gouvernement, toujours pour les six premiers mois. Le secteur résidentiel, moins 27%; secteur commercial, moins 67%; secteur industriel, moins 38%; génie civil, moins 40%. Il y a le secteur institutionnel qui, effectivement, est le secteur public, plus 25%, ce qui donne au total, moins 35%. Ce qu'il y a d'inhabituel ici, c'est encore que, par rapport à Toronto, Montréal régresse; quant à Toronto, la ville progresse.

Les contrats de construction ont augmenté de façon systématique à Toronto jusqu'en mai 1978. Il semble y avoir eu une chute en juin. On a apporté des corrections dans les statistiques, je suppose qu'on est au courant de cela, et cela rend les comparaisons plus difficiles en ce qui concerne le mois de juin 1978 puisqu'on a corrigé les données jusqu'à une couple d'années précédentes, comme il arrive souvent. Quoi qu'il en soit, je pense qu'il est très clairement établi que la zone métropolitaine de Toronto a progressé de façon considérable depuis deux ans, tandis qu'à Montréal, on a régressé.

Il y a aussi une chose inhabituelle, c'est que les chutes dont on parle, de 35%, dans les contrats de construction, c'est évidemment en dollars courants. Il faut bien se rappeler que, par rapport à 1975, l'inflation a déjà coupé à peu près 25%; en dollars de même niveau, l'inflation a augmenté d'environ 25%. Donc, quand on voit une baisse de 35% en chiffres réels et en termes d'emplois, pour la main-d'oeuvre, c'est beaucoup plus considérable que cela, parce que cela coûte plus cher aujourd'hui pour faire le même travail que c'était le cas en 1975 ou en 1976. (10 h 30)

Le quatrième indicateur, ce sont les heures de travail dans la construction. Pour les six premiers mois de l'année 1978, les heures travaillées ont diminué de 18% par rapport aux six premiers mois, toujours, de l'année 1977. En 1977, elles avaient aussi diminué. L'OCQ, dans son bulletin du 8 septembre, présente un graphique qui illustre assez bien l'évolution des heures travaillées dans l'industrie de la construction. Le ministre Landry, à l'Assemblée nationale, a voulu nous monter un clocher; il y en a un clocher. Le clocher est effectivement en 1976; il n'y avait pas seulement les Jeux olympiques, il y avait aussi autre chose qui se passait à Québec en 1976.

Mais la montée des heures travaillées dans la construction a été régulière; j'ai des chiffres jusqu'en 1971. Cela a monté de façon tout à fait régulière jusqu'en 1976 pour l'agglomération montréalaise, et on voit la chute, depuis 1976, une chute considérable dans les heures travaillées, de sorte qu'on se retrouve, aujourd'hui, avec quand même une population et une main-d'oeuvre un peu plus grande que celle que nous avions auparavant et on se retrouve au niveau des heures travaillées de 1972.

Donc, on est rendu en 1978 et là on a reculé au lieu d'avancer. On a reculé de six ans, on est rendu au taux de 1972. Je pense qu'on n'a pas besoin d'être très éloquent pour montrer ce qu'une telle évolution peut représenter de catastrophique pour la région de Montréal. Je n'ai pas le chiffre pour le nombre d'emplois en tant que tel. J'ai les heures travaillées, soit 18% de baisse en 1978, mais on peut imputer 1000 heures de travail par employé et, si on projette cela sur une année pour 1978, c'est douze millions d'heures de travail de moins pour 1978. Cela représente 12 000 emplois qui auraient été détruits dans l'industrie de la construction en 1978 et 6000 pour les premiers six mois. Donc, ce sont 6000 pertes d'emploi qui sont déjà enregistrées, en plus de celles de l'année dernière, et 12 000 sur une base annuelle. En somme, quatre indicateurs qui démontrent jusqu'à quel creux on en est rendu. Un taux de chômage en augmentation de 32%, construction de logements en baisse de 35% et contrats de construction en baisse de 35%, des heures travaillées en baisse de 18%, soit 12 000 emplois de moins pour 1978.

J'en viens maintenant, M. le Président, à mes questions plus particulières que je ferai précéder, comme le règlement le permet, d'un bref préambule. Les décisions d'investir ou de se déplacer se prennent suivant un certain nombre de critères de rentabilité attendue. Cette rentabilité attendue est basée à la fois sur les débouchés — ce qu'on peut vendre — et sur les coûts de production. Or, les débouchés au Québec se rétrécissent suite à l'immigration nette dont j'ai parlé tout à l'heure, qui est absolument dramatique, et à des hausses de revenu réelles plus faibles que cela a été le cas au cours des années passées. De l'autre côté, les coûts de production augmentent suite à des politiques économiques et sociales du gouvernement auxquelles je ferai allusion tout à l'heure, politiques relatives à la fiscalité ou à la réglementation. En outre, il faut admettre que l'affirmation du Québec, qui était essentielle et qui est encore essentielle, a été accompagnée dans les années soixante d'excès odieux, sinon révoltants. Par conséquent, il ne faut pas se surprendre si l'incertitude...

si le climat s'est détérioré en partie avant l'arrivée du Parti québécois au pouvoir. Mais cela fait partie du même phénomène, même si je ne veux en aucune façon associer le Parti québécois à ce qui a pu se passer avant qu'il ne naisse bien entendu. Si je mentionne ces éléments, c'est pour exprimer ma profonde conviction qu'on peut faire quelque chose, que le gouvernement doit faire quelque chose pour rajuster son tir et ses politiques, de façon à stopper ces tendances qui se sont exprimées jusqu'à maintenant. Ce n'est pas à moi qu'on va faire avaler la couleuvre de l'inévitabilité des glissements vers l'Ouest, pas plus que l'inévitabilité de l'indépendance du Québec. Il n'y a rien d'inévitable. Je pense qu'un gouvernement, avec les outils que le gouvernement du Québec possède à l'heure actuelle, est capable, a en main les outils nécessaires pour corriger ces tendances et les faire se retourner en faveur du Québec. Encore faut-il qu'on puisse les appliquer.

Alors, à partir de là, je passerai mainenant directement aux questions. Premièrement, je voudrais faire allusion au comité permanent de coordination des travaux de construction qui est une des réponses que le gouvernement fournira pour montrer sa diligence à apporter des solutions au problème. Je dirai là-dessus que la création de ce comité est une excellente idée et je pense bien que je ne révélerai que des secrets de polichinelle si je dis que l'idée est venue, à l'origine, du Conseil économique du Canada, que si le rapport Cliche contient une recommandation sur la stabilisation des dépenses de construction et si l'OCQ également a inclus une recommandation à cet égard, c'est parce que j'ai été partie à des conversations et à des consultations nombreuses à cet égard. Par conséquent, je ne suis pas étranger aux recommandations qui ont pu être faites par ces deux commissions.

M. Tremblay: M. le député, est-ce que vous diriez que vos recommandations ont plus de chances d'être acceptées par le gouvernement du Québec que par celui d'Ottawa?

M. Raynauld: J'arrive tout de suite à ça. Parce que, premièrement, je voulais justement demander au ministre pourquoi il n'avait pas élargi la composition de ce comité pour y inclure les sociétés d'État. Parce que, dans le rapport du conseil économique...

M. Tremblay: ... ministères de tutelle.

M. Raynauld: Ce sont des ministères de tutelle, mais ce sont des sociétés d'État qui ont l'initiative, qui prennent des décisions...

M. Tremblay: Pas pour leur plan de développement.

M. Raynauld: Sur les décisions d'investir, je pense bien qu'ils doivent quand même avoir une certaine autonomie.

M. Tremblay: C'est décidé par le gouvernement et par le ministre des tutelles.

M. Raynauld: Ce que vous me dites, c'est que les sociétés d'État n'ont aucune autonomie dans le domaine des investissements.

M. Tremblay: ... elles ont beaucoup d'autonomie, l'Assemblée voudrait qu'elles en aient moins. Nous avons eu un débat sur cela cette semaine.

M. Raynauld: En tout cas... Ou bien les sociétés d'État ont une certaine autonomie, à ce moment-là, j'aurais aimé qu'elles fassent partie du comité; ou bien elles n'en ont pas du tout. Si elles n'en ont pas du tout, je suis heureux de l'apprendre.

En second lieu...

M. Tremblay: Si vous voulez raisonner par l'absurde, allez-y, mais vous êtes absurde vous-même.

M. Raynauld: En second lieu, je me suis demandé pourquoi il n'y avait pas eu une décision de principe sur l'objectif à suivre et à atteindre par la formation de ce comité. En fait, pour le comité, on dit simplement que son objectif général est de réduire les fluctuations dans l'industrie de la construction et qu'il faut également assurer une certaine coordination entre tous les ministères concernés et toutes les autorités qui prennent des décisions. Mais il n'y a pas là-dessus d'objectif fixé, de sorte que c'est un autre comité d'étude et je pense que là où on en était rendu, après les études faites sur le sujet par le conseil économique, mais aussi par l'OCQ, par le rapport Cliche, je pense qu'il aurait été temps qu'on aille plus loin que ça et qu'on dise, dès maintenant, qu'il est opportun aux yeux du gouvernement de fixer des taux de croissance réguliers quelques années à l'avance, notamment pour le logement social, qui est une grande source de fluctuation et qui continuera de l'être aussi longtemps qu'on n'aura pas décidé de régulariser ces dépenses-là.

Le Président (M. Jolivet): M. le député, je ne voudrais pas vous interrompre, mais comme vous avez débuté à 10 h 20 et qu'il est 10 h 40, normalement votre temps de 20 minutes est écoulé. Cependant, compte tenu de l'usage établi à l'intérieur de ces commissions avec débat, si on est d'accord pour le laisser terminer, et que le ministre ait le même temps de réponse à ces questions, compte tenu que c'est l'interlocuteur privilégié, je pense qu'on pourrait s'accorder sur cela? D'accord?

M. Raynauld: Merci, M. le Président.

En principe, je suis d'accord sur la création de ce comité permanent, mais, dans la pratique, j'ai bien peur que ce soit un autre comité d'étude et qu'on ne puisse pas prendre vraiment d'action concrète avant deux ou trois ans, ce qui serait

évidemment trop tard pour que le gouvernement actuel puisse agir.

Deuxième point: la fiscalité. Je pense que le ministre sera d'accord que la fiscalité est très importante pour déterminer les perspectives de rentabilité des entreprises, très importante dans les coûts de production. À cet égard, je voudrais lui demander ce que le gouvernement a fait pour alléger le fardeau fiscal au Québec, de façon à changer les règles fondamentales de décisions qui font justement que les investisseurs, dans la région de Montréal en particulier, ne sont plus intéressés.

Je voudrais, bien sûr, mentionner que, de son côté, personnellement, le ministre a introduit des crédits d'investissement. Je lui demande combien de ces crédits sont en banque, à l'heure actuelle, au nom des investisseurs. Je lui demande combien d'investissements ont été entrepris dans la région de Montréal, sur la base de cette loi, combien d'emplois ont été créés. C'est que, l'année passée, quand cette loi a été introduite, c'était un des principaux instruments auxquels le gouvernement voulait recourir pour stimuler l'investissement, je lui demande donc combien il y en a.

En revanche, même si le gouvernement a introduit des crédits d'investissement pour les petites et moyennes entreprises, il a relevé les impôts sur les successions de cinq à sept fois. Il a relevé les impôts sur les dividendes, il a relevé cette année l'impôt sur le revenu des contribuables, de sorte que tous les contribuables qui gagnent au moins $18 000 et plus paient des impôts supérieurs aux impôts des mêmes contribuables en Ontario, et cette différence dans l'impôt est considérable. 15% à 20% d'impôts plus élevés au Québec qu'en Ontario, ce n'est pas pour faciliter les décisions des investisseurs. Cela relève les coûts en salaires des entreprises de 5% à 8% dans les entreprises de cadre.

Ensuite, après avoir réclamé l'indexation des tables d'impôt à grands cris, comme parti, l'avoir réintroduite dans le programme, le ministre l'annonce maintenant pour dans quinze mois. Cela fera donc quinze mois plus 24, puisque cela fait à peu près 24 mois que ce parti est au pouvoir, cela fera trois ans et trois mois, et je pense qu'il n'y a plus personne, aujourd'hui, qui y croit, qui s'attend que le gouvernement remplisse cette promesse.

M. Tremblay: Est-ce à croire, M. le député, que vous acceptez la mesure que le ministre Chrétien a mise de l'avant au mois d'août, d'envoyer des chèques directement à la population plutôt que de rembourser le gouvernement du Québec pour les sommes qu'il avait injectées dans les industries traditionnelles?

M. Raynauld: Premièrement, ceci n'a rien à voir. Deuxièmement, si le gouvernement du Québec, avec l'appui de l'Opposition à l'Assemblée nationale, avait poursuivi plutôt que de commettre la bourde qu'il a commise d'aller dire au gouvernement fédéral qu'il pouvait faire ce qu'il voulait, peut-être que le gouvernement du Québec l'aurait, cet argent, aujourd'hui.

M. Tremblay: L'Assemblée nationale a toujours été unanime sur le fait de demander au gouvernement fédéral de faire une entente avec le gouvernement du Québec et non pas de faire de l'électoralisme en diminuant des chèques avant une élection anticipée.

M. Raynauld: C'est cela, et c'est le ministre des Finances qui a dit au gouvernement fédéral qu'il pouvait faire ce qu'il voulait.

Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! S'il vous plaît! revenez au débat.

M. Raynauld: Ensuite, sur cette question des impôts, je m'en voudrais de ne pas ajouter une question sur une étude que le gouvernement est censé avoir entreprise sur les salaires des cadres. J'aimerais bien qu'il fasse part aux membres de cette commission des résultats de cette étude. Le ministre Landry en a parlé à plusieurs reprises, je sais qu'elle existe. Je ne sais pas cependant pas si elle est terminée, mais je sais qu'elle existe.

Troisièmement, les sièges sociaux. Je pose une question très simple au ministre à ce sujet: Les sièges sociaux quittent-ils ou non? Ce n'est pas compliqué comme question. Partent-ils ou non? Parce que, d'une part, on entend plusieurs ministres se référer au chantage et au "bluff" des entreprises, ce qui laisse croire qu'elles ne quittent pas. Si c'est du chantage, elles ne quittent pas. D'autre part, on entend les ministres aussi déplorer le déplacement des activités vers Toronto ou vers l'Ouest, depuis au moins cent ans. Ce que je demande, c'est de quel côté le gouvernement se place. Dit-il que c'est du chantage? Si c'est du chantage, les sièges sociaux ne partent pas ou, s'ils partent, ce n'est pas du chantage et il faudrait peut-être trouver une raison.

Sur les sièges sociaux, là aussi il est censé exister une étude. Or, je suppose que le ministre va la déposer ce matin. Puisque le ministre en a parlé, hier, si le ministre d'État au développement économique commence à dire à l'Assemblée nationale ce que cette étude contient, il est dans les droits des parlementaires de connaître la base sur laquelle il fait ses affirmations et de savoir si les chiffres qu'il cite sont vrais ou faux.

M. Tremblay: Vous parlez du ministre d'État au développement économique?

M. Raynauld: Le ministre d'État au développement économique qui, hier, nous a dit sur les sièges sociaux: Je n'ai pas l'étude, mais on a un rapport d'étapes. Dans cedit rapport, on nous dit qu'ii n'y a pas plus de 600 employés qui partent. Je dis: C'est contraire aux droits des parlementaires que d'être confrontés à des affirmations comme celle-là qu'ils ne peuvent vérifier. C'est cela que je dis. Ou bien on en parle, et on dépose l'étude, ou bien on n'en parle pas.

Quatrième question. Je vais essayer d'aller un peu plus vite, mais j'ai beaucoup de questions.

M. Tremblay: Vous vouliez être très restreint dans vos interventions. Maintenant, vous faites une revue globale de l'économie, je ne m'y retrouve plus, finalement.

M. Raynauld: C'est très simple, j'essaie...

M. Tremblay: Vous partez de la construction à Montréal. Vous êtes rendu aux sièges sociaux, la fiscalité.

M. Raynauld: Oui, quant à la construction à Montréal, j'ai essayé d'établir que la situation était grave et, deuxièmement, j'essaie de voir quels sont les outils que le gouvernement a à sa disposition pour la corriger. Ce n'est pas très vaste. Quels sont les outils qu'il a?

M. Tremblay: II y a quand même une certaine incohérence.

M. Raynauld: Je sais déjà les réponses que le ministre va nous donner. Au moins, vous me ferez l'honneur de m'écouter, ce sont les arguments que vous avez utilisés.

Le Président (M. Jolivet): M. le député, j'ai été large un peu jusqu'à maintenant, si vous êtes prêt...

M. Raynauld: M. le Président, je n'ai pas objection à arrêter, j'en ai pour trois jours.

Le Président (M. Jolivet): C'est pour cette raison que...

M. Raynauld: Cela ne m'ennuie pas, je pourrai continuer un peu plus tard, parce que je pense qu'on pourra avoir encore un peu de temps pour discuter. Je pourrai continuer à poser mes questions. J'en avais encore cinq ou six.

Réponse du ministre M. Rodrigue Tremblay

Le Président (M. Jolivet): C'est parce que je voulais éviter justement que vous passiez le reste de la journée à poser des questions et que personne ne puisse y répondre. M. le ministre, vous avez environ trente minutes pour répondre.

M. Tremblay: Trente minutes, évidemment...

Le Président (M. Jolivet): Vous aurez d'autres...

M. Tremblay: Oui, mais je pense que le député d'Outremont a parlé durant plus de trente minutes.

Le Président (M. Jolivet): Non, M. le ministre. Il a commencé à 10 h 20 et, si vous regardez l'horloge, actuellement, il est près de 10 h 50. C'est donc trente minutes.

M. Tremblay: Oui, mais il est plus facile de poser des questions évidemment et cela prend moins de temps que de fournir des réponses. Je pense que cette Opposition est très forte sur les questions, et elle voudrait prendre les mesures pour éviter que le gouvernement fournisse les réponses. J'ai l'impression qu'elle se bouche les oreilles, lorsqu'il est temps d'entendre les réponses. Les réponses, nous les avons. Je les ai, comme membre du gouvernement. Je les ai, comme économiste aussi. Je vais en faire la démonstration. (10 h 45)

Le Président (M. Jolivet): Avant de continuer, M. le ministre, il y a quelque chose que j'ai oublié de faire tout à l'heure. Compte tenu que c'est une commission avec débat sans quorum, je pense qu'il est cependant normal de nommer les personnes présentes, ici à cette commission: M. Ciaccia (Mont-Royal), M. Dubois (Huntingdon), M. Gosse-lin (Sherbrooke), M. Grégoire (Frontenac), M. Lefebvre (Viau), M. Raynauld (Outremont) et M. Tremblay (Gouin).

M. Tremblay: M. le Président, je suis un peu perplexe devant les arguments et l'approche du député d'Outremont, parce que, d'une part, il argumente que l'ordre de l'Assemblée nationale n'est pas conforme à ses souhaits, dans le sens qu'il aurait voulu que cet ordre ne porte pas sur les investissements dans la construction au Québec, mais uniquement sur les investissements dans la région de Montréal et, par la suite, quelque vingt minutes plus tard, il nous dit qu'il a préparé, pour trois jours de débat sur la gamme de l'ensemble des problèmes et des politiques économiques que l'on retrouve au Québec. Donc, j'ai l'impression que l'on veut soulever ici beaucoup de poussière, jeter de la poudre aux yeux et peut-être mettre un peu le ministre dans l'embarras. On lui donne des indications. Il se prépare dans un sens, mais on lui dit: On s'en va dans l'autre sens. S'il essaie de répondre dans un sens, on va lui dire: Ce n'était pas cela, on a posé à la fin des questions qui étaient beaucoup plus vastes. Je crois que ce genre de tactique, surtout dans un débat qui est limité, ne m'apparaît pas conforme aux objectifs de la poursuite de la vérité et des faits, parce qu'il s'agit vraiment ici de l'opération que nous poursuivons, c'est-à-dire de regarder très froidement la réalité, de faire le partage de la petite politicaillerie, des réalités et des politiques qui sont en marche.

Je voudrais, pour ma part, à cause de ce phénomène, m'attarder sur les points que je juge les plus importants, parce qu'il y a des points secondaires et il y a des points qui sont fondamentaux.

Tout d'abord, et le député y a fait allusion au départ, j'avais aujourd'hui convoqué la haute direction d'une des plus grosses sociétés d'État du Québec, la société SIDBEC, de même que je devais rencontrer le conseil d'administration de

SIDBEC pour discuter justement de problèmes rattachés à cette société d'État. Comme nous avons un Conseil spécial des ministres vendredi prochain, c'était pratiquement la seule occasion que j'avais pour les deux prochaines semaines de le faire. J'avais demandé au député d'Outremont, au whip, M. Lamontagne et au chef de l'Union Nationale s'ils acceptaient de reporter cette interpellation d'une semaine, de manière à me permettre de remplir mes engagements comme ministre responsable de SIDBEC. Ceux-ci m'avaient accordé leur accord, mais, à la dernière minute, le leader parlementaire, M. Lavoie, selon sa vieille habitude — j'ai appris cela depuis deux ans — par tracasserie à l'endroit du leader du gouvernement, je présume, s'est retiré et a dit: C'est impossible, on ne peut pas, etc.

Je me demande comment on peut reprocher au gouvernement de ne pas avoir une surveillance et un contrôle plus étroits sur les sociétés d'État, lorsqu'on refuse à un ministre responsable, sur des problèmes qui sont très importants, de remettre une interpellation. Cette procédure d'interpellation, et je le mentionne ici, parce qu'on l'ignore, est une vieille mesure qui existait sous la IVe République française, alors qu'il n'y avait pas de période de questions à l'endroit des membres du gouvernement. Voulant prendre une partie du système britannique, qui amenait les ministres à être redevables devant l'Assemblée nationale, on avait instauré le système de l'interpellation.

Dans notre cas, lorsqu'il s'est agi de réduire la période hebdomadaire des sessions de quatre à trois jours, l'Opposition a exigé qu'elle ait une quatrième journée où elle puisse faire de l'interpellation, de sorte qu'on se retrouve avec une partie de l'ancien système français sous la IVe République, qui a été abolie évidemment par la Ve. Donc, nous sommes en retard d'une république, dans ce domaine. Nous avons gardé aussi la période des questions avec toutes les autres périodes de débat que nous avons à l'Assemblée nationale. Nous en avons eu jeudi dernier en huit sur la construction justement. De la sorte, il m'a semblé qu'ayant discuté de la construction pendant une journée à l'Assemblée nationale, il y a huit jours, ayant discuté pendant deux journées entières du contrôle et de la surveillance de la société d'État, il aurait été de la plus simple courtoisie, de la part du leader parlementaire, M. Lavoie, de retarder cette session d'une semaine. Lorsque le député d'Outremont a dit que ça pressait tellement qu'il fallait absolument discuter de cette question aujourd'hui, je pense qu'il a fait rire tout le monde.

M. Raynauld: ...

M. Tremblay: Cela ne veut pas dire que le problème de la construction n'est pas un problème sérieux, mais le retarder d'une semaine, par rapport aux obligations qu'avait le ministre, je pense que c'est assez risible.

Maintenant, j'en viens à la question de la construction, qui est un phénomène économique global et qui touche, évidemment, en grande partie, au ministère de l'Industrie et du Commerce, dans le sens que les investissements industriels et commerciaux sont une part importante des investissements dans ce secteur; mais c'est un secteur qui touche énormément à d'autres secteurs économiques, étant donné que les investissements résidentiels, les investissements gouvernementaux, publics, parapublics, bien d'autres considérations comme les conditions de travail ont une incidence importante sur la construction. Il est évident que, comme ministre de l'Industrie et du Commerce, je m'en préoccupe et je m'en préoccupe énormément aussi comme économiste.

Par contre, à titre de ministre de l'Industrie et du Commerce, je n'ai pas les lunettes noires que porte le représentant de l'Opposition, parce qu'il fait beaucoup d'allusions au fait que, par rapport à l'Ontario et à Toronto, nous serions en très mauvaise posture. Je n'ai pas les mêmes informations que lui.

Dans le domaine industriel et commercial, qui est celui qui me préoccupe le plus, et surtout dans le domaine de la fabrication, on sait que cette année sera une des meilleures années d'investissements au Canada pour une économie régionale. Ce sont les prévisions qui sont faites par Statistique Canada auprès des entreprises elles-mêmes; elles ne sont pas faites, donc, par quelques agences. Mais ces investissements... Un investissement, évidemment, implique souvent de la construction et il y aura une augmentation prévue, cette année, de 18,7% des investissements de fabrication au Québec, alors qu'il y aura une baisse de 3,5% en Ontario et une augmentation pour l'ensemble du pays de 6,5%. Lorsqu'on dit que le Québec, comme économie, n'a pas un pouvoir d'attraction au plan industriel, évidemment, lorsque vous avez des gouvernements d'un autre ordre qui donnent des subventions comme celle qui a été accordée à la société Ford pour aller dans le sud de l'Ontario, alors que ce n'était pas une zone désignée, ce genre de politique peut ralentir les avantages comparatifs et les attraits naturels qu'a l'économie du Québec, mais lorsqu'on dit que l'économie du Québec n'a pas un potentiel économique important, je pense qu'on se trompe grandement.

Je fais allusion simplement, avant d'entrer dans le détail, dans l'argumentation, à des informations qui sont, je pense, connues de la population et qui, par conséquent, doivent rendre l'intervention du député d'Outremont un peu curieuse. Je pense que les journalistes eux-mêmes le savent. Je lisais simplement — le 7 octobre, c'est tout récent — Montréal bat Toronto, constructions résidentielles. L'article donne les chiffres, que nous avons vérifiés, qui sont exacts et je lis simplement l'article qui est relativement court: "Les pisse-vinaigre, qui parlent sans cesse du déclin de Montréal par rapport à Toronto, devraient parfois consulter les chiffres avant de jouer aux prophètes de malheur. Montréal bat encore Toronto — là, je souligne que Toronto a une population beaucoup plus grande que celle de Montréal — pour le nombre de mises en chantier d'habitations par région urbaine. Cela, c'est la Société centrale d'hypothèques et de logement du

fédéral qui le dit. 10 832 mises en chantier à Montréal contre 10 795 à Toronto, pour la période de janvier à juin 1978. Alors que Toronto, donc, est beaucoup plus grand comme population que Montréal, pour les six premiers mois de l'année, la construction résidentielle est plus forte à Montréal qu'à Toronto".

M. Grégoire: Cela dénote la confiance des investisseurs; les maisons individuelles, c'est ce qui donne une propriété et il y en a beaucoup plus...

M. Tremblay: Je pense que M. Clark a eu une bonne idée d'instaurer une mesure fiscale pour encourager la propriété dans son programme, ce qui dénote qu'il a peut-être plus d'imagination économique de ce côté-là qu'ailleurs.

Je lisais aussi un autre titre, récemment: Le marché immobilier québécois demeure des plus prometteurs. Ce n'est pas un francophone de Québec, comme dirait notre chanteur national, c'est Rod. Quesnel, directeur des ventes de la succursale de Beaconsfield du Montréal Trust et président de la Chambre d'immeuble de Montréal.

J'ai aussi, un tableau dans le domaine commercial, des bâtiments commerciaux, et j'aimerais faire distribuer ce tableau, M. le Président...

Le Président (M. Jolivet): C'est fait, M. le ministre.

M. Tremblay: On y montre, si on prend la base de 1971, parce que c'était vraiment la première année d'un gouvernement libéral, au Québec, et si on considère les investissements pour les édifices à bureaux, les hôtels, les centres commerciaux, etc...

M. Raynauld: Une année de récession.

M. Tremblay: Qu'est-ce que vous croyez que 1977 et 1978 sont, M. le député?

M. Raynauld: C'est 1975, votre année de récession; là, on est en reprise.

M. Tremblay: II faut faire attention; c'est que le cycle de construction en Ontario n'est pas le même que celui au Québec, à cause, justement, des constructions inhabituelles qui ont été... Je vais revenir sur ce thème parce que vos recommandations au Conseil économique du Canada, M. le député d'Outremont, sont appliquées par un gouvernement rationnel. Vous avez dû venir ici justement pour faire accepter vos vues parce qu'à Ottawa, le Conseil économique, on ne l'écoute pas; vous le savez bien.

Donc, dans le tableau, on montre qu'en 1971, si on prend l'indice de 100, au Québec, pour ces constructions, nous sommes rendus en 1978, pour les premiers mois à 154, un indice de 154. À Toronto, si on prend un indice de 100, ils ont baissé à 85. Quelle région baisse et quelle région monte dans le domaine commercial? Évidemment, on va parler, tout à l'heure, des investissements publics; cela est une autre affaire. Mais, dans le domaine privé, laissons de côté les quelques institutions financières qui agissent, pour des raisons institutionnelles et politiques. En effet, le président de la Sun Life a déjà avoué qu'il faisait de la politique avec les intérêts économiques des actionnaires, ce qui, dans l'opinion de Galbraith, est tout à fait contraire à une responsabilité sociale que tout administrateur d'une compagnie doit avoir, c'est-à-dire la rentabilité des investissements et non pas la satisfaction personnelle des administrateurs au plan moral ou au plan politique.

Au niveau du secteur privé au Québec, le ministre de l'Industrie et du Commerce, en reconnaissant que...

M. Raynauld: M. le Président, est-ce que le ministre pourrait donner les mêmes chiffres à partir de 1976, 1977 et 1978, pour les chiffres qu'il vient de citer, plutôt que de se rapporter à 1971?

M. Tremblay: Le tableau comprend de 1971 à 1978. Il est distribué.

M. Raynauld: Oui, mais il a les chiffres pour 1977?

M. Tremblay: Oui, mais je ne suis pas ici pour citer chacun de ces chiffres en vingt minutes.

M. Raynauld: Vous verriez que c'est du temps du Parti libéral que cela a augmenté, pas du temps du parti québécois, cela fait toute la différence du monde.

M. Tremblay: Je présume que les cycles économiques sont la quittance du Parti libéral et vous savez bien que je vais en venir à la question des investissements publics parce que le grand problème, au Québec, a été le manque de planification dans les investissements, qui ont été procycliques. Cela veut dire que, quand cela va bien dans la construction, les gouvernements poussent dans la bonne direction et, quand cela va mal, ils poussent dans la même direction, ce qui, en termes économiques — vous l'avouerez comme économiste canadien — est absolument stupide. Quand on a un gouvernement provincial qui commence à mettre de l'ordre dans cela, grâce au comité que nous avons mis sur pied le 6 septembre, je pense que, du côté d'Ottawa, on devrait féliciter le gouvernement du Québec pour être un gouvernement qui met un peu d'ordre dans la planification des projets d'investissement et non pas venir le critiquer. Il devrait, en toute honnêteté, se tourner vers le gouvernement fédéral et dire vraiment ce qu'il pense publiquement, et non pas simplement privément, parce que je suis certain qu'il a été relativement déçu...

M. Raynauld: Je l'ai dit publiquement et, en ce qui vous concerne, vous n'avez formé qu'un comité d'étude...

M. Tremblay: Vous n'aviez pas de micro devant vous aussi facilement. J'ai fait allusion hier,

en Chambre, justement, à cette question des investissements publics. J'aimerais déposer une étude qui confirme une étude semblable qui avait été faite par le Conseil économique du Canada, en 1974, mais qui a maintenant été mise à jour. Je répète, par exemple, que, dans l'étude du Conseil économique du Canada, qui était présidée, à l'époque, par le député d'Outremont, le député disait, à la page 182 du rapport du conseil: "Pour une croissance plus stable de la construction, le Conseil économique du Canada recommande que les dépenses publiques... ont donc contribué à accentuer le cycle de la construction plutôt qu'à l'atténuer."

Je dis que le député soulignait qu'on devait justement corriger cette situation et je pense, si on veut dépasser un peu la petite partisanerie, qu'on doit donc regarder ce phénomène qui est vraiment particulier. (11 heures)

Je voudrais distribuer l'étude du Centre de recherche en développement économique, un centre que M. le député d'Outremont connaît bien puisqu'il en a été le fondateur et, tous deux, nous avons été impliqués dans les recherches de ce centre qui est un des meilleurs que nous ayons au Québec, effectivement.

Cette étude porte sur les coûts de la main-d'oeuvre au Québec et la situation concurrentielle de l'industrie de la construction. Aux pages 15 et 16, on a le coeur du problème dans l'industrie de la construction au Québec et qui pose le défi que nous avons ici, au Québec, pour le gouvernement comme pour les gouvernements municipaux et, j'espérais aussi, le gouvernement fédéral, mais dans le cas du gouvernement fédéral, on sait maintenant qu'il y a une certaine dérive au plan économique et qu'un leadership économique, à ce stade-ci, est très difficile à obtenir. Donc, on dit, dans cette étude, "que les fluctuations importantes qu'a connues l'industrie de la construction au Canada se reflètent au niveau canadien par le fait qu'on a montré que les trois paliers de gouvernement n'ont été que faiblement responsables, soit pour 25%, de l'instabilité dans l'industrie de la construction dans l'ensemble du Canada et cela pour la période de 1951 à 1970. Par contre, au Québec — et c'est là qu'est tout le drame du Québec, jusqu'à un certain point — l'instabilité de l'industrie de la construction, au cours de la période de 1960 à 1976, est largement due au comportement des dépenses publiques".

J'ouvre une parenthèse pour dire qu'à cause du fait que l'industrie privée, malgré le fait que nous serions en "branch economy" au Québec — je vais revenir tout à l'heure aux questions fiscales — même si les gouvernements mettent de l'avant des programmes de stimulation fiscale des investissements privés, il y a toujours eu, depuis que les statistiques existent, un sous-investissement privé au Québec. Comme ministre de l'Industrie et du Commerce, je suis en train de m'appliquer à mettre sur pied des programmes qui vont répondre à cette instabilité chronique du Québec, mais les pouvoirs publics ont dû prendre un peu la relève pour maintenir l'emploi. Mais en ce faisant, avec les programmes de construction d'écoles, les routes, l'Hydro-Qubec, l'électricité, l'Expo, l'aéroport de Mirabel, le métro, les Jeux olympiques, ce sont tous des gros investissements publics qui sont décidés un peu de façon discrétionnaire et qui n'ont pas, par conséquent, la même permanence qu'ont les projets privés qui, eux évidemment, suivent, comme le député d'Outremont l'a mentionné, une logique des choix de décision en fonction de critères économiques.

Or, tous ces projets ont accentué l'instabilité au Québec et ont, par conséquent, déséquilibré tout le marché de la construction et ont créé des situations tellement instables que nous avons eu besoin d'une commission royale d'enquête pour essayer de mettre de l'ordre au niveau de la construction — il s'agit de la commission d'enquête Cliche — parce que les travailleurs eux-mêmes ne savaient plus où se retrouver avec des fluctuations tellement grandes. Je voudrais déposer un autre tableau qui fait partie d'une étude un peu plus complexe, un peu plus longue, qui s'appelle "L'évolution des investissements en nouvelles constructions", et je m'en réfère à l'annexe 14 de ce tableau — est-ce qu'il est possible de le distribuer — où on voit vraiment cette différence causée par les investissements publics dans l'instabilité de la construction, entre l'Ontario, le Québec, l'agglomération de Montréal et l'agglomération de Toronto. Je prends simplement les années 1975, 1976 et 1977. Il s'agit ici des mises en chantier du secteur privé domiciliaire. Dans l'agglomération de Toronto, en 1975, c'était 26 457; en 1976, c'était 26 555; en 1977, 27 918. Dans l'agglomération de Montréal, par contre 26 702 en 1975, mais en 1976, 37 531 et cela est baissé de nouveau en 1977, au même niveau que c'était auparavant, 27 193.

Donc, on voit là qu'il y a un impact fluctuant tellement plus grand à Montréal et au Québec — je ne cite pas les chiffres du Québec parce que ça prendrait trop de temps — mais on voit qu'il y a une grande fluctuation. On voit que le niveau de construction est à peu près identique, 27 000 mises en chantier, entre Montréal et Toronto. Malgré le fait, je le répète, que Toronto ait une population beaucoup plus grande que celle de Montréal.

M. Raynauld: Ces gens-là ne se logent donc pas?

M. Tremblay: Ils se logent peut-être dans des édifices en hauteur, parce que Toronto est devenu un petit New York, vous savez.

M. Ciaccia: Dans des tentes.

M. Tremblay: II y a aussi le phénomène, en 1976, avec ces gros investissements qui étaient représentés...

M. Raynauld: C'est seulement dans le domaine domiciliaire, des petites unités de logement, ça ne comprend pas tout le logement?

M. Tremblay: Dans le 14.

M. Raynauld: Ah bon! d'accord.

M. Tremblay: Évidemment, il y a d'autres annexes dans cette étude. Mais en 1976, on s'est retrouvé avec l'investissement dans les Jeux olympiques et le début d'une grève, je pense que c'était en septembre et octobre. De sorte que cette grève ayant été anticipée, nous avons eu, en 1976, un boom dans la construction domicilaire, où cela a plus que doublé au Québec, par anticipation.

Nous avons un tableau, ici, qui montre le nombre d'unités de logement mises en chantier au cours des deux premiers trimestres selon les régions métropolitaines. À Montréal, en 1975, il y avait eu 9865 mises en chantier; en 1975, c'était un gouvernement libéral, alors. Cela avait été une baisse par rapport aux années précédentes qui était environ de 11 000 ou 12 000. En 1976, à cause du phénomène que j'ai mentionné, et à cause de l'effervescence qui se produisait dans le marché de la construction, les salaires étaient très élevés avec les Olympiques, vous vous rappelez, on payait du temps double et du temps triple dans la construction. La commission Malouf a vraiment démontré quel était pratiquement le désordre qui existait dans ce marché.

En 1976, les constructeurs privés ont mis 20 140 nouvelles unités de logement en chantier. Évidemment, c'était une augmentation de plus de 100%. L'année suivante, c'est retombé à 15 000 et, en 1978, à 10 000, 11 000; c'est à peu près le niveau normal. On compare des situations qui montrent qu'il y avait quelque chose d'inhabituel en 1976. Quand le député d'Outremont, pour faire de l'épate, prend cette année-là comme base de référence, il prend le haut de la montagne qui est insoutenable et il peut démontrer, avec des pourcentages, n'importe quoi. Parce qu'il a fait état tout à l'heure de pourcentage...

M. Raynauld: Pas n'importe quoi.

M. Tremblay: ... d'augmentation du chômage. S'il avait pris l'augmentation du chômage en Ontario, il serait arrivé à peu près au même pourcentage. Il ne se serait pas énervé pour rien. L'augmentation du taux de chômage à Montréal, il disait tout à l'heure que c'était 36%, de septembre 1976 à septembre 1978. Je regarde le chômage en Ontario, en septembre 1976, désaisonnalisé, 5,7%; en septembre 1978, désaisonnalisé, 7,5%. Je l'ai calculé rapidement tout à l'heure, ça fait 32% d'augmentation.

Quand le député d'Outremont dit qu'en Ontario, ça marche et qu'au Québec, ça ne marche pas parce que, semble-t-il, il y a un gouvernement qui prend les affaires en main, il fait rire le monde. J'ai montré tout à l'heure des chiffres prouvant que Montréal est en avance sur Toronto dans la construction des mises en chantier, etc. Il faut cesser de croire les propagandes que certains des adversaires du Québec véhiculent. Il va falloir qu'il y ait un peu plus de responsabilité de la part de l'Opposition officielle, surtout devant la caméra maintenant. C'est reproduit parfois à Toronto et on sait comment les journaux de Toronto n'hésitent pas à faire du sabotage contre le Québec quand c'est nécessaire.

M. Raynauld: M. le Président, question de règlement.

M. Tremblay: II n'y a pas de question de règlement.

Le Président (M. Jolivet): II n'y a pas de question de règlement.

M. Raynauld: Question de privilège, alors M. le Président.

M. Tremblay: II n'y a pas de question de privilège non plus.

M. Raynauld: L'article 99 s'applique. Je n'accepterai pas qu'on me range dans la catégorie des adversaires du Québec, M. le Président, je ne l'accepterai pas.

Le Président (M. Jolivet): M. le député...

M. Raynauld: Je ne suis pas un adversaire du Québec...

Le Président (M. Jolivet): M. le député, je m'excuse.

M. Raynauld: ... et je n'accepterai pas ces affirmations...

Le Président (M. Jolivet): M. le député, je m'excuse.

M. Raynauld: ... qu'il y ait des questions de règlement ou qu'il n'y en ait pas.

Le Président (M. Jolivet): Le seul moyen de pouvoir...

M. Tremblay: Je n'ai pas dit...

M. Raynauld: C'est ce que vous avez dit.

Le Président (M. Jolivet): M. le députél Le seul moyen que vous avez, c'est, lors de la fin de l'intervention du ministre, que vous pouvez faire une intervention dans ce sens ou encore, si c'est une question de règlement, vous pouvez la soulever à l'Assemblée nationale.

M. Tremblay: M. le Président, je n'ai pas dit que le député était contre le Québec, j'ai dit simplement...

M. Raynauld: Vous avez fait une association, c'est ce que vous avez dit: II faut que l'Opposition officielle soit plus responsable...

Le Président (M. Jolivet): M. le député, a l'ordre! À l'ordre!

M. Raynauld:... et juste avant, vous avez dit: II ne faudrait pas croire les adversaires du Québec. C'est une association que vous faites!

M. Tremblay: ... et cela est tout juste. Dans le domaine économique, je vous donne l'exemple suivant: au mois d'avril dernier, les journaux de Toronto ont publié des renseignements confidentiels, qui avaient évidemment filtré des milieux politiques d'Ottawa et de Toronto, concernant les subventions que pouvaient octroyer le gouvernement fédéral et le gouvernement du Québec à la Société General Motors. Cette information avait pour but, évidemment, de mettre le gouvernement fédéral dans une situation difficile, sachant fort bien qu'il y avait des élections partielles qui s'en venaient, afin de le forcer à créer un précédent et à mettre en sourdine la Loi du développement régional et à accorder une subvention spéciale à la société Ford au sud de l'Ontario.

Ce genre de sabotage, parce qu'il s'agit vraiment de sabotage de type politique économique, est très néfaste à l'économie du Québec. J'ai déjà expliqué en Chambre que, ce faisant, on mettait en péril les intérêts économiques du Québec et on créait un contentieux, une guerre commerciale avec les États-Unis, qui menaçait justement l'investissement sur lequel on dévoilait des renseignements confidentiels.

Je pourrais revenir sur cette question plus tard, mais on sait que certains journaux à Toronto et certains articles qui ont été publiés dans Barren's par exemple, aux États-Unis, originaient de Toronto et qu'il y a à Toronto une tendance à décrier le Québec, à cacher les vraies potentialités du Québec. Évidemment, c'est de bonne guerre. Quand cela est repris, de bonne foi ou de mauvaise foi, évidemment, il est très difficile de le dire, par des membres de l'Opposition, ceci contribue à faire de l'Opposition une sorte de cinquième colonne dans les milieux de Toronto, je ne peux pas dire le contraire.

M. Raynauld: M. le Président, une question de règlement. Je vais demander au ministre de retirer ses paroles. Je n'accepte pas qu'on puisse dire que je suis une cinquième colonne au Québec.

Le Président (M. Jolivet): M. le député, je m'excuse...

M. Raynauld: Je n'accepterai pas cela, M. le Président.

M. Tremblay: Disons que le Parti libéral est une succursale du Parti libéral d'Ottawa.

M. Raynauld: Je ne suis pas une cinquième colonne et je n'accepterai jamais cela de la part du ministre de l'Industrie et du Commerce. Jamais!

M. Tremblay: Vous acceptez cela, parce que cela a toujours été accepté!

Le Président (M. Jolivet): M. le député, je voudrais quand même rectifier des choses qui sont importantes. Selon l'article 100, tant qu'un député a la parole, aucun député ne doit l'interrompre. Si vous avez des choses à rectifier, vous avez le droit, selon l'article 96, à la fin du discours, d'intervenir, mais, pour le moment, je vous demanderais de permettre au ministre de continuer son intervention.

M. Tremblay: M. le Président, pour revenir à la situation de l'industrie de la construction au Québec, et en référence à l'étude que j'ai déposée, faite par le CRDE, cahier no 16, on a démontré que les gouvernements passés ont été une source d'instabilité très grande dans cette industrie au Québec, qu'ils ont eu une action procyclique, c'est-à-dire que, lorsque le secteur privé était en croissance, ils lançaient de grands projets pour l'accentuer, créant une surchauffe inflationniste qui, évidemment, augmentait les coûts de construction. Lorsqu'il y avait un ralentissement, le secteur public, plutôt que d'être à l'avant-garde de l'industrie, était à la suite, à la remorque du secteur privé et ralentissait lui aussi, créant énormément de chômage et d'instabilité. On a aussi démontré qu'en bonne gestion économique, un gouvernement ne doit pas se comporter comme une entreprise privée, il doit stabiliser l'économie, amenuiser les fluctuations, stabiliser l'emploi, etc. Les gouvernements passés, par faiblesse, par ignorance ou par incompétence, ne l'ont pas fait et cela est bien démontré dans l'étude des économistes.

Ce qui est pire, lorsqu'on regarde maintenant dans l'industrie de la construction, ce sont les décisions du gouvernement fédéral. J'ai dit tout à l'heure — et je peux y revenir — que le gouvernement du Québec prend des mesures concrètes présentement, pour stabiliser ces investissements, les coordonner et les planifier. Le gouvernement fédéral a annoncé des coupures dans ses investissements au Québec. Le ministère des Finances du Québec évalue que, dans le domaine des investissements, l'an prochain, il y aura une coupure d'environ $269 millions. On sait que, présentement, il y a un ralentissement dans la construction, surtout à Montréal, et le député d'Outremont a raison, par rapport à l'ensemble du Québec, parce que c'était là où on avait eu cette surchauffe des Jeux olympiques, les monuments ostentatoires qui coûtent des milliards ne sont pas à Gaspé, mais à Montréal. Il n'est pas surprenant que ce soit là où les choses sont en effervescence. On coupe au Québec — c'est l'intention du gouvernement fédéral — $269 millions. Dans l'assurance-chômage aussi, on va couper $81 millions. On va couper sur les dépenses des consommateurs.

En coupant sur les investissements, puisque souvent il y a des projets conjoints, le gouvernement du Québec sera forcé lui-même de ralentir ses investissements. Prenons l'exemple de l'investissement de LaPrade. Le Bureau de la statistique du Québec qui est sous ma responsabilité, en collaboration avec le ministère des Finances et le ministère responsable du développement écono-

mique, fait des simulations pour voir comment ces coupures dans les investissements fédéraux au Québec, cette année, vont avoir un impact sur l'emploi au Québec l'an prochain. Je ne peux malheureusement pas, comme je l'avais indiqué hier, déposer cette étude, puisqu'il reste encore certaines simulations à terminer. Tout ce que je puis dire, c'est que ces coupures, qui sont vraiment procycliques, vont créer plusieurs milliers de chômeurs au Québec l'an prochain. Je dirais même que ce sera supérieur à 10 000 chômeurs, ce qui va venir neutraliser la politique que le gouvernement du Québec avait mise de l'avant dans les secteurs traditionnels, en abolissant la taxe de vente, qui allait créer à peu près 12 000 emplois. Donc, lequel des deux gouvernements joue un rôle cyclique et anticyclique, au Québec, sur l'économie? Il y en a un qui essaie de stabiliser l'économie du Québec et il y en a un autre qui essaie de la déstabiliser. C'est cela le fond du problème et, comme économiste, je m'insurge contre cette incompétence à l'intérieur du Québec de l'action du gouvernement fédéral. Lorsque la construction est en baisse, c'est le temps de la stimuler; ce n'est pas le temps de la couper. Il n'y a pas un économiste qui vaut son sel qui va argumenter le contraire.

Nous en avons une démonstration ici. Ce ne sont pas des théories, c'est la réalité que nous vivons. Nous vivons cette réalité comme gouvernement provincial et parce qu'on est encore un gouvernement provincial. Même si le député d'Outremont préfère venir discuter de ces problèmes au Québec, parce qu'il sent bien que c'est peut-être l'endroit où il faut en discuter, tôt ou tard, il va falloir qu'on récupère, par contre, les politiques pour qu'on ne fasse pas que discuter ici, mais que, lorsqu'on parle de politiques économiques, on puisse avoir des instruments découlant de ce Parlement et de ce gouvernement pour les appliquer. Il va falloir, tôt ou tard que l'on règle ce problème. Deux capitaines dans le même bateau, un qui nous amène à la dérive, l'autre qui veut nous garder dans le sillon central, dans le chenal, qui de ces deux gouvernements devrait avoir les pouvoirs? Qui devrait être au contrôle? C'est cela tout le problème.

Si M. le député d'Outremont veut faire comme l'ancien député de Notre-Dame-de-Grâce, changer d'idée en cours de route, qu'il aille discuter de ces problèmes à Ottawa, ils en ont peut-être besoin. Mais, pour ce qui nous concerne, on connaît les problèmes, mais on ne fera pas qu'en discuter. On va proposer des solutions concrètes pour les résoudre, pour que nos enfants n'aient pas encore à débattre les mêmes problèmes dans 25 ans ou dans 30 ans.

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre, je suis obligé de vous interrompre, compte tenu que vos trente minutes sont écoulées, et de demander au député de Huntingdon d'entreprendre...

M. Tremblay: M. le Président, je demanderais votre indulgence, parce que j'ai été très...

Le Président (M. Jolivet): Je ne peux pas.

M. Tremblay: Vous savez que, dans la procédure de l'interpellation, ce sont le membre de l'Opposition et le ministre qui ont un droit privilégié de parole. Le député d'Outremont...

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre, je voudrais vous interrompre tout de suite, parce que vous n'avez malheureusement, à ce niveau, pas tout à fait raison, compte tenu que l'on prévoit par les règlements que, d'abord, l'interpellateur a un droit de parole prioritaire, étant celui qui parle le premier. Vous avez le droit de réplique et, ensuite, nous devons passer à une autre personne. Compte tenu que j'ai donné à chacun trente minutes de discussion, il est bon de permettre à d'autres intervenants de le faire maintenant, quitte à conserver vos réponses pour les prochaines questions. Donc, c'est le député de Huntingdon qui a maintenant la parole pour une période de vingt minutes.

Autres interventions M. Claude Dubois

M. Dubois: Merci, M. le Président. Je serai passablement bref, parce que je n'en ai même pas pour vingt minutes. Il s'agit pour moi de faire état des problèmes tels que je les vois. Je pense qu'au-delà de toutes les statistiques que nous pouvons énumérer aujourd'hui, il y a un but à atteindre, c'est d'améliorer la performance de la construction au Québec.

Les suggestions que j'ai à émettre sont très claires et précises. Elles s'adressent au ministre de l'Industrie et du Commerce, assurément, mais aussi à celui du Travail, ainsi qu'au ministre délégué au développement économique, mais plus particulièrement, je crois, au ministre du Travail, responsable de l'Office de la construction au Québec, enfin, et surtout, à nos grands syndicats ouvriers responsables de la qualité et de l'efficacité de la construction. Je crois qu'un étalage de statistiques, à ce moment-ci, est tout à fait inutile, car nous savons tous que cette dégringolade de la construction ne sera pas réglée pour autant par des tableaux et des données techniques. Il faut aller plus profondément dans ce dossier.

M. le Président, je demanderais à cette commission, et ce, au nom du groupe parlementaire que je représente, d'aller sans plus tarder à la source des vrais problèmes de la construction. Je crois fermement que le coeur de ce problème repose sur des constats reconnus, particulièrement la violence sur les chantiers de construction, les demandes salariales exorbitantes des syndicats et la productivité de l'ouvrier québécois.

Sachez bien, M. le Président, que mon intervention ne se veut pas politique. Elle l'est quand même un peu, dans la mesure où nous devons éclairer positivement ce débat. La tendance socialisante du présent gouvernement n'aide pas non plus le secteur dynamique de cette société à jouer un rôle efficace. Son attitude de "wait and see" se com-

prend parfaitement. Elle entraîne une baisse d'investissements qui crée automatiquement un chômage chronique. Lorsque l'on sait qu'un ouvrier au travail provoque un effet d'entraînement sur trois autres ouvriers dans tous les secteurs du travail, la situation déjà mauvaise devient encore plus pénible.

L'interventionnisme d'État se justifie toujours jusqu'à un certain point. Cette limite est très difficilement identifiable, j'en conviens, mais lorsque le gouvernement hésite ou se refuse à regarder la construction comme un secteur primordial au Québec et qu'il tente d'intervenir sans s'attaquer aux problèmes de la productivité et de la paix syndicale, alors, son intervention est carrément irresponsable.

Nous demandons au gouvernement et, à travers lui, aux grandes centrales syndicales, de tenter un effort, une démarche énergique qui inciterait les ouvriers québécois à une productivité accrue, là où c'est possible, et, en même temps, une qualité de travail qui fait, je crois, grand défaut ici, au Québec. Je n'ai personnellement jamais entendu un chef syndical, à quelque échelon que ce soit de la hiérarchie syndicale, demander à ses hommes d'accroître la productivité là où c'est humainement possible. Le défi actuel des ouvriers de la construction, c'est de s'engager dans la bataille de la compétition. Un souci compétitif serait, je crois, une des solutions aux problèmes de cette industrie.

Lancer l'économie québécoise sur le chemin de la réussite passe par la volonté compétitrice des membres de cette société. N'est-ce pas là ce que le Dr Laurin lançait dernièrement dans son livre blanc, dans lequel il faisait état que nous devrions conserver au Québec nos créateurs? À ce que je sache, il n'y a pas que les artisans qui soient des créateurs, mais aussi tous ceux qui oeuvrent, par leur travail, à bâtir le Québec. Dans cette optique, un bailleur de fonds aussi bien qu'un ouvrier et qu'un administrateur sont autant de créateurs dans cette société au Québec.

Je demande au ministre de l'Industrie et du Commerce et au gouvernement d'avoir la volonté politique de poser des gestes concrets et de s'impliquer directement dans le dossier des investissements dans la construction au Québec.

Merci, M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): Merci. M. le ministre.

M. Tremblay: M. le Président, je remercie le député d'Huntingdon pour son intervention, sur le thème que nous discutons. Évidemment, je ne peux être d'accord avec certains pronostics rapides qu'il a posés, selon lesquels notre gouvernement avait une approche, au plan économique, qui était socialisante. Je pense qu'au plan social nous voulons créer une société humaine, mais nous voulons aussi garder le stimulant et la motivation du secteur privé. Nous l'avons bien démontré par des gestes concrets, depuis deux ans, lorsque — le député d'Outremont y a fait allusion — nous avons adopté la loi 48, qui abaissait de 50% les impôts pour les petites et les moyennes entreprises pourvu qu'elles se créent des fonds de relance industrielle. Ce n'était pas une mesure socialisante. C'est une mesure pour renforcer le secteur privé. Lorsque nous avons mis en marche les SODEQ qui avaient été votées par la loi du mois de juin 1976, mais qui n'étaient pas en marche, nous aurions pu les modifier. Nous avons créé ces banques de développement régional pour les petites et les moyennes entreprises, pour le secteur privé. Dans le secteur de l'alimentation, lorsque je demande à la Société des alcools, qui est un monopole d'État, de laisser les 9000 épiceries distribuer des vins aux consommateurs, ce n'est pas une mesure centralisatrice et socialisante. C'est une mesure qui vise, justement, à décentraliser l'économie et à donner au secteur privé une part plus large de l'activité économique. Nous avons eu le courage de le faire, nous. Les anciens gouvernements étaient socialisants par défaut, sans philosophie, sans cohérence.

Dans notre cas, nous sommes pour la logique économique et nous sommes pour la décentralisation. Nous avons décentralisé les pêches, par exemple, pour amener ça à Gaspé, près des pêcheurs, dans leur milieu. Par contre, lorsqu'il y a des imperfections dans le fonctionnement des marchés — et Dieu sait si, au Québec, à cause de notre passé historique, de notre passé politique, il y a des imperfections dans le fonctionnement des marchés des capitaux, il y a des imperfections dans le fonctionnement des entreprises, à cause de notre statut de "branch economy", le statut de satellisation aux plans commercial et industriel, il y a des imperfections — là, c'est la fonction d'un gouvernement, c'est défendu par toute la théorie économique, de corriger ces imperfections et, de cette façon, on accroît le bien-être de la population. C'est ça, notre approche. C'est une approche économique que nous avons. Une approche rationnelle, cohérente, qui n'est pas perturbée par des intérêts particuliers sous forme de...

M. Raynauld: ... perturbée par les faits.

M. Tremblay: Oui, c'est plutôt vous, je pense...

M. Raynauld: Ce n'est pas perturbé par les faits?

M. Tremblay: Votre politique, c'est plutôt: "Don't bother us with the facts ". Notre politique, on part des faits, justement.

M. Raynauld: Oui...

M. Tremblay: On part des vrais problèmes...

M. Raynauld: La grande logique.

M. Tremblay: ... et on propose des solutions qui sont à la mesure des problèmes. C'est ça qui vous...

M. Raynauld: La grande logique, oui.

M. Tremblay: ... rend un peu perplexe et vous décontenance.

M. Raynauld: ...

M. Tremblay: Lorsqu'il s'agit d'un petit problème, on prend une petite solution, mais lorsqu'il s'agit d'un gros problème, on prend une grosse solution.

Je ne veux pas commencer d'autres débats, mais lorsqu'il s'est agi, justement, de transférer à l'entreprise privée les vins aux épiceries, qui est une mesure justement d'entreprise privée et de marché, on ne s'est pas fié à quelques gros bailleurs de fonds électoraux pour nous empêcher d'agir. Ce genre de pragmatisme économique, que certains gouvernements appliquent sous le couvercle du libéralisme et du laisser-faire, ce n'est souvent que la défense d'intérêts privés en se servant d'un instrument de l'État, et ceci, je pense, est de l'histoire passée. Les gouvernements sont là pour défendre l'intérêt général, pour défendre l'intérêt public et faire face aux problèmes qu'eux seuls peuvent solutionner lorsqu'il s'agit de problèmes de nature sociale, de nature économique qui dépassent les capacités de chacun des intervenants, chacun des agents dans l'économie.

C'est ce que nous avons fait dans le secteur de la construction. C'est un bon exemple. Il y avait une anarchie dans ce secteur qui créait une instabilité sociale et une instabilité syndicale. La violence, ce n'est pas nous. C'était dans le temps des libéraux qu'il y avait de la violence et des grèves qui duraient longtemps dans un secteur. Le juge Cliche, de regrettée mémoire, a fait une étude objective et les gouvernements l'ont appliquée. (11 h 30)

Nous voulons aller plus loin, maintenant, nous voulons stabiliser les investissements dans ce secteur et je ne reviens pas sur ce point. Je pense que le député de Huntington a soulevé un point très important lorsqu'il a parlé de la productivité. Ce n'est pas à moi, et je pense que le député est d'accord avec moi, qu'il dira que la productivité est très importante. Nous en avons amplement discuté lorsque nous avons présenté le projet de loi sur l'Institut national de productivité qui, en soi, ne sera pas une solution au problème, mais va permettre d'apporter une certaine concertation sur ce plan. Il y a un problème de productivité dans la construction au Québec.

Lorsque vous gâtez un secteur comme on l'a gavé avec des projets publics financés à même les impôts et les endettements comme on l'a fait avec les Jeux olympiques ou avec les éléphants blancs, tous ces éléphants blancs gouvernementaux qu'on a faits pour soutenir artificiellement l'économie, comme on le faisait au temps du Moyen-Âge ou au temps des pharaons alors qu'on construisait des pyramides pour tenir en occupation les soldats entre deux guerres, quand, en 1978 ou en 1976, on en est encore rendu à ce primitisme des politiques économiques, après 2000 ou 3000 ans; quand on est rendu là et qu'on crée de l'instabilité comme on l'a fait, évidemment, cela se reflète sur la productivité, avec des coûts qui sont très élevés. Les coûts, au Québec, dans la construction, sont trop élevés. Il y a une responsabilité sociale et économique de la part des agents dans ce milieu, y compris le gouvernement, au premier titre, évidemment.

Vous avez parfaitement raison, M. le député, j'aurais aimé que le député d'Outremont soulève un problème technique et important comme celui-là, plutôt que de se lancer sur l'inévitabilité du placement vers l'Ouest, de l'indépendance et des choses semblables. C'est un problème sérieux. L'étude du professeur Rabeau démontre que, si on fixe des coûts de construction en haute conjoncture, en basse conjoncture, l'ajustement par les quantités va être plus fort et que ceci est dangereux. Je pense, pour ma part, que les chefs syndicaux et les gouvernements aussi doivent se pencher sur ces questions. La question de la productivité est extrêmement importante et ce n'est pas seulement en parlant de la productivité qu'on va résoudre les problèmes, mais c'est une des questions fondamentales.

Je n'accepte pas l'interprétation du député lorsqu'il dit que le gouvernement a une approche de "wait and see"; évidemment, c'était dans son texte, mais je ne crois pas vraiment qu'il croie cela. Le gouvernement, avec les moyens qu'il a, avec l'endettement avec lequel nous avons pris le gouvernement du Québec — il y avait quand même un endettement avec un déficit de $1 milliard — a dû financer ce déficit, aussi, des Jeux olympiques, le refinancer récemment encore, pour que cela ne coûte pas trop cher. Le gouvernement fédéral avait certes envoyé la reine d'Angleterre et le premier ministre du Canada inaugurer les jeux mais lorsqu'il s'agissait de financer le déficit, on disait: Mes petits Québécois, mes petits Montréalais, lavez la vaisselle sale! C'est ce qu'on a dit en 1976 et on ose venir nous dire, maintenant, qu'on ne fait pas des efforts suffisants. Ce sont pratiquement des fables de La Fontaine qui sont rééditées présentement. La victime est coupable, on dirait que les Québécois sont toujours coupables, ce sont toujours les autres qui ont raison, ce sont toujours les autres qui ont les arguments et les solutions alors que les libéraux ont toujours mis de l'avant les objectifs politiques avant les objectifs économiques. C'est cela la vérité.

Quand le premier premier ministre du Canada, M. MacDonald, a dit que: "Canada is the triumph of politics over economics", damn, he was right. Nous, il faut arrêter de se faire manipuler soit à partir des reines d'Angleterre ou à partir de certains rois-règnes qu'on envoie à Ottawa.

M. Raynauld: Faites la même chose que MacDonald.

M. Tremblay: ... et qui échangent nos votes pour des votes du sud de l'Ontario. C'est cela, le fond du problème et on ne peut pas l'escamoter indéfiniment. Il n'est pas dans mes responsabilités de proposer des réunions sur la productivité, genre mini-sommet. Mous avons tenu des mini-

sommets sur les pêcheries, sur les textiles, etc. À la suite de votre intervention, M. le député, je m'engage à suggérer au ministre du Travail de peut-être tenir un mini-sommet sur la productivité dans la construction. Je pense qu'objectivement il y a un problème concret qui ne peut pas être réglé par des lois, des décrets ou par les gouvernements. Il faut faire appel à une certaine concertation économique des agents dans le milieu.

Ayant participé à cinq mini-sommets, je suis en mesure de dire que cette approche, même si elle est très onéreuse pour les ministres, parce qu'elle implique beaucoup de préparation et beaucoup de temps, de consultations, etc., donne des résultats concrets. Dans les pêches maritimes, nous avons mis de l'avant un plan quinquennal qui aboutit, qui aboutira très bientôt dans le prochain budget. Dans les textiles, il y a toutes sortes de programmes et d'engagements de la part des agents qui en ont découlé. Dans le secteur de la production, je pense qu'il serait très souhaitable qu'on regarde ces faits, non pas dans une perspective de partisanerie et de petite politique, mais dans une perspective objective de personnes qui veulent contribuer à la solution et non pas être partie du problème. Faire partie du problème, n'importe qui le peut, c'est très facile. Souvent, en politique, on se laisse aller et on aboutit à faire partie du problème plutôt que de faire partie de la solution. Mais je pense que les gens au Québec, les syndicats, les entreprises, le gouvernement, les individus, les Québécois, les Québécoises veulent participer ardemment aux solutions et non pas aux problèmes.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Mont-Royal, vous avez 20 minutes.

M. John Ciaccia

M. Ciaccia: Merci, M. le Président. Je voudrais, dans mon intervention, M. le Président, restreindre mes remarques à l'industrie de la construction à Montréal. J'aurais osé espérer que le ministre, au lieu de prendre la tactique de changer de sujet — parce que, M. le Président, c'est ce que le ministre faisait — au lieu de...

M. Tremblay: M. le Président, si on commence à lancer des accusations semblables, alors que le député d'Outremont a soulevé tous les sujets de la terre...

M. Ciaccia: M. le Président, là, c'est un autre... Est-ce que j'ai le droit de parole, M. le Président?

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre. M. Tremblay: ... de me faire mettre en boîte.

M. Ciaccia: Je n'ai pas interrompu le ministre. Je demanderais la même courtoisie.

M. Tremblay: Vous ne m'avez pas interrompu mais vous lancez une fausse accusation que je n'accepte pas. C'est le député d'Outremont qui a soulevé tous les problèmes.

M. Ciaccia: J'aurais préféré qu'au lieu d'insulter ses collègues, s'il avait répondu vraiment aux problèmes qui ont été soulevés, les vrais problèmes qui ont été soulevés par...

M. Tremblay: Je regrette, M. le Président, mais je n'ai insulté aucun collègue.

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre, vous aurez le droit de répondre dans votre intervention dans quelques minutes.

M. Tremblay: II ouvre la bouche et ses deux premières phrases sont des invectives. Parlez donc des vrais problèmes, comme le député de Huntingdon l'a fait.

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre. M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: M. le Président...

M. Raynauld: C'est ce que vous avez fait tout à l'heure.

M. Ciaccia: Oui. Quand on ne touche pas aux vrais problèmes de votre ministère, vous êtes prêt à répondre, mais quand on touche aux vrais problèmes de votre ministère, vous tournez cela en insultes et vous semblez avoir reçu des injures.

Le Président (M. Jolivet): M. le député...

M. Tremblay: Parlez des problèmes de mon ministère. Soulevez les problèmes industriels et commerciaux et on va en discuter.

M. Ciaccia: M. le Président, je connais les tactiques du ministre de l'Industrie et du Commerce. Ce n'est pas la première fois que je participe à une commission parlementaire avec lui.

Le Président (M. Jolivet): M. le député, vous avez bien commencé en disant que vous vouliez tout à l'heure parler des problèmes de la construction à Montréal. S'il vous plaît, veuillez continuer dans ce sens.

M. Ciaccia: Exactement, M. le Président. Je voudrais aborder ce problème de l'industrie de la construction à Montréal avec, peut-être, une approche différente de celle de mes collègues qui ont parlé, de façon juste, des statistiques et de la perte des emplois. Je voudrais porter à votre attention le fait que, premièrement, avant d'aller dans les services publics, avant d'aller dans la fonction publique et dans la vie publique, je faisais partie d'un bureau d'avocats, j'étais associé senior dans un bureau d'avocats à Montréal qui était le plus grand bureau d'avocats se spécialisant dans le domaine de la construction et de l'immeuble. Avant que je fasse partie de ce bureau, j'étais

directeur des services immobiliers, j'étais conseiller juridique d'une des plus grandes compagnies, au Québec, qui était directement impliquée dans le domaine de la construction et dans le domaine de l'immobilier, la compagnie Steinberg's. Je voudrais porter à l'attention du ministre certains faits pratiques, certaines conditions qui existent dans l'industrie de la construction à Montréal et lui demander s'il peut nous donner des solutions puis nous dire ce qu'il va faire pour arrêter ce désastre qui se passe à Montréal. Le député d'Outremont a signalé que l'activité de la construction était réduite depuis 1972; si on regarde les prévisions pour le reste de l'année, cela s'en va être encore pire. Si on parle aux syndiqués, aux représentants des syndicats, ils vont nous dire que le chômage dans cette industrie n'a pas augmenté de 35%, mais existe à 35%, d'après leurs estimations.

Je voudrais porter à l'attention du ministre un mémoire qui a été soumis il y a un an aujourd'hui, au ministre d'État au développement économique, par la Fédération de la construction du Québec, la Corporation des maîtres mécaniciens en tuyauterie du Québec, la Corporation des maîtres électriciens du Québec, l'Association des constructeurs de routes et grands travaux du Québec, l'Association provinciale des constructeurs d'habitations du Québec et l'Association de la construction de Montréal et de Québec.

Ces organismes étaient très préoccupés de ce qu'ils voyaient, de ce qui arrivait dans le domaine de la construction. Ils se sont référés à certaines statistiques dans les investissements privés et publics au Canada, Statistique Canada; ils ont dit: "Ces statistiques émanent d'une enquête sur les intentions d'investissement du secteur privé et du secteur public qui s'effectuent en fin d'année et son rajustées à l'occasion d'une enquête menée au milieu de l'année." Ils présentent les statistiques prévues et, en fait, ce n'est pas ça qui est arrivé. Ils donnent certains chiffres; je n'ai pas besoin de vous donner tous les chiffres qui sont contenus dans le mémoire, mais la conclusion était que cette activité était sensiblement moindre que celle de l'année dernière et moindre que les statistiques prévues.

Ils disent: "Le même rapport semble indiquer que la construction d'édifices à bureaux continuera d'augmenter, mais il est bien évident qu'en réalité, tel ne sera pas le cas". Alors, il y a la question des prévisions par Statistique Canada et, après un certain temps, en 1977, ils ont vu que ces prévisions ne se réaliseraient pas. Ils ont fait certaines suggestions. Parce qu'ils sont directement impliqués dans cette industrie, ils ont fait des prévisions pour les prochaines années. Ils ne voient pas une relance, un recommencement des activités avant 1980, d'après tout ce qu'ils voient, d'après tout ce qui se passe ici au Québec.

Ils disent: "Si nous ne sommes pas en mesure d'affirmer le bien-fondé de ces prévisions à long terme plutôt pessimistes, nous voudrions être assurés de la création d'un climat qui, dans la mesure du possible, soit générateur d'investisse- ments dans notre industrie et qui entraînera une utilisation plus entière qu'à l'heure actuelle des ressources, de la main-d'oeuvre et de l'entreprise.

Alors, le message que l'industrie donnait au ministre — je l'inviterais à faire des commentaires quand j'aurai terminé mon intervention et à répondre aux demandes de ceux qui ont préparé ce mémoire — était que les difficultés qui existent dans l'industrie dépendent d'un climat d'investissement qui manque à Montréal. Ces gens ont dit au ministre: "Avant tout, il est essentiel de prendre les mesures nécessaires à l'augmentation des investissements privés."

Plus loin, ils disent encore: D'après nos membres, il est clair que des investissements d'une grande valeur pour l'industrie de la construction ont été perdus à une époque où l'industrie en aurait besoin, pertes qui résultent d'une évaluation défavorable de la situation qui prévaut au Québec de la part des investisseurs".

M. le Président, il semble y avoir un grand malaise à Montréal dans cette industrie, qui est un indicateur d'autres industries. Je ne ferai pas un tour d'horizon et je n'essaierai pas de mélanger les cartes comme l'a fait le ministre en parlant des vins qui sont vendus par la Société des alcools, en parlant du système de la commission parlementaire de ce matin... c'est-à-dire en parlant de tout, excepté du sujet dont on devrait parler ce matin.

La conclusion de ce mémoire, c'était qu'à cause d'une attitude attentiste, des intentions fermes d'investissement ont été remises à plus tard, les investisseurs ayant décidé de réévaluer la situation. J'inviterais le ministre à nous donner une réponse à ce problème, le problème que tout le monde attend. Pour lui donner certains chiffres, parce qu'on semble jeter les chiffres à gauche et de tous les côtés, je vais prendre un secteur spécifique, le secteur commercial d'édifices à bureaux. (11 h 45)

M. le Président, le taux d'inoccupation dans le secteur commercial, pour les édifices à bureaux de classes A, B et C. Je divise cela en trois classes. La classe A comprend les édifices comme Place Ville-Marie, Place Victoria; les autres, ce sont des édifices moins luxueux et moins grands. Le taux global d'inoccupation est 9,5%. Il existe 25 200 000 pieds carrés à Montréal d'édifices à bureaux. Si on examine la condition dans d'autres villes du Canada et des États-Unis, nous voyons que le taux d'inoccupation, un peu plus ou un peu moins, ce n'est pas le vrai problème, cela se compare.

Alors, quand on dit que le taux d'inoccupation est le même à Montréal qu'à Toronto — à Toronto, il y a 43 millions de pieds carrés et le taux d'inoccupation est de 6,7 à 9,5%. Si on regarde à Calgary, c'est le moins élevé, il n'y a que 1,9% de taux d'inoccupation sur 12 millions de pieds carrés d'édifices à bureaux. Mais l'important, ce n'est pas le taux d'inoccupation, c'est: Quels sont les projets en planification et en voie de construction? C'est là le malheur de Montréal. Il n'y en a pas de grande envergure à Montréal dans le secteur privé. Je ne voudrais pas qu''on commence à changer le débat et

citer la Place Guy-Favreau et l'investissement du fédéral et blâmer le fédéral pour ci et blâmer le reste du monde pour autre chose. Il n'y a pas d'édifices d'envergure à bureaux planifiés à Montréal.

Si on regarde les autres villes, à Calgary, en planification ou en construction, il y a 7 millions de pieds carrés. À Toronto, il y en a 2 200 000. 2 200 000, — parfois les chiffres ne veulent pas dire grand-chose — cela représente trois édifices comme l'édifice de la CIL, boulevard Dorchester à Montréal. Ce sont des projets d'envergure et qui amènent un investissement, de l'emploi, du travail. Je pourrais vous donner la liste de plusieurs grandes villes, que ce soit aux États-Unis ou au Canada — où, au moins, il y a des projets de planification, des projets du secteur privé qui sont en construction.

À Montréal, cela n'existe pas. Quelle est l'attitude, M. 1e Président, des investisseurs? On ne dit pas qu'on va essayer d'attirer des investissements provenant de l'extérieur du Québec. Ce n'est pas ce que je dis. Ou bien on devrait attirer des investissements des États-Unis ou du reste du Canada. Le problème c'est le manque de confiance de ceux qui sont ici, parce que le taux d'inoccupation des années précédentes aurait justifié la planification et la construction d'autres édifices, mais cela n'existe pas. Cela se reflète aussi dans les chiffres. Pour l'édifice commercial, les permis de construction, de janvier à juin de cette année, c'est 50 millions. Ce sont les chiffres de Statistique Canada. Quand on voit que l'année précédente, c'était 191 millions pour toute l'année et si on compare cela à Toronto, de janvier à juin 1978, ont voit que c'est 248 millions. C'est cinq fois plus élevé.

C'est vrai que si globalement on voit les investissements publics, privés, certains chiffres peuvent être équivalents, mais si on divise cela, si on va dans les secteurs particuliers où vraiment cela fait du tort au Québec, à Montréal, on voit que c'est un désastre. Dans le secteur industriel, pour les premiers six mois de cette année, c'est $26 millions quand, pour toute l'année dernière, c'est encore baissé, c'était $106 millions. Et les premiers six mois de cette année, à Toronto, c'est $67 millions.

Ce sont des secteurs clefs, le commercial et l'industriel et s'il n'y a pas d'activité dans ces deux secteurs-là, que voulez-vous qu'il arrive pour le reste de l'année? Comment voulez-vous que cette industrie puisse continuer? Et je ne parle pas d'études, de coordination et de stabilisation, je parle de projets actuels actifs.

M. le Président, les investisseurs se demandent: qu'est-ce que ce gouvernement va faire pour nous? Ce n'est pas seulement de dire: Si vous replacez vos investissements, vous allez avoir une déduction de 50% sur vos impôts. Ce n'est pas seulement à ce niveau, c'est au niveau global. Il y a une crainte dans toutes vos politiques. Il y a une crainte et il faut le dire. Qu'est-ce que cela va représenter pour l'avenir? Je ne veux pas que le ministre s'engage dans toute une explication de la loi sur les droits successoraux, mais cette loi, à Montréal, va avoir un impact pire que la loi 101 dans les droits de succession, de la façon dont c'est rédigé. Les gens craignent cela.

Les investisseurs vont placer leur argent à des endroits où ils se sentent sécurisés. Même le mémoire auquel je me suis référé a porté cela à l'attention du gouvernement. Il dit: Si le Québec n'est pas prêt à donner des garanties fondamentales aux investisseurs, il y a plusieurs autres endroits en Amérique du Nord et dans le monde qui le sont. Ils sont prêts à donner ces garanties, mais ce sont des garanties plutôt d'une approche dans vos politiques, ce n'est pas de relancer des projets publics, c'est dans l'entreprise privée, dans cette industrie qu'il faut que le ministre nous dise ce qu'il va faire.

Je vais vous donner un exemple très spécifique et je demanderais des commentaires au ministre. C'est tragique, ce qui se passe. Il y a deux compagnies, à Montréal, Francon et la compagnie Miron. Je voudrais que le ministre essaie de me répondre, s'il est au courant de ce qui se passe dans cette industrie, parce que Francon, Miron, Demix est un indicateur de toute l'industrie de la construction. Francon a eu des mises à pied de 2000 personnes depuis un an et demi. Le ministre est-il au courant de cela? Il y avait deux ateliers de garage, avec 280 employés; aujourd'hui, il y en a 17. Miron, une compagnie fondée au Québec par des Canadiens français du Québec, vient de fermer sa division de construction. Elle a fermé sa division de construction et elle va terminer seulement les contrats en cours. Elle ne recommencera pas. Connaissez-vous les implications de cela? Je voudrais avoir des commentaires du ministre. À part cela, il y a eu des mises à pied. Normalement, en 1975, il y avait grosso modo 2500 employés chez Miron. Cela comprenait les permanents et les saisonniers. Aujourd'hui, cela a été réduit à 600 employés.

Il y a sur les terrains de Miron soixante camions qui n'ont même pas de plaques d'immatriculation cette année, parce qu'il n'y a pas de travail. Cela représente $2000 par camion et cela représente $22 000 approximativement par chauffeur de camion. Pouvez-vous évaluer la portée économique d'un tel geste, d'un tel événement? J'ai entendu dire et je dis au ministre que si ces conditions persistent, Miron va fermer ses portes dans un an. C'est basé sur des faits.

Le ministre a-t-il entendu dire, par exemple, que Miron est en train de mettre en vente une assez forte partie de ses équipements? Ainsi, la compagnie Les Mir, fondée en 1965, je crois, a fermé ses portes, très récemment. Cela a entraîné la mise à pied de 500 employés à 700 employés. Il y a eu une vente à l'enchère d'équipement lourd de construction, au mois de septembre, une vente de $3 millions. 12% seulement de cet équipement est resté au Québec, 88% a été acheté par des Américains. Savez-vous l'implication de tout cela, M. le ministre? Cela veut dire que ces emplois sont partis. Quand des compagnies d'envergure comme Francon, comme Miron, comme Les Mir mettent en vente de l'équipement lourd, cela veut dire qu'elles ne voient pas d'avenir 'dans les prochaines deux ou trois années. Il va y

avoir une autre vente à l'enchère au mois de novembre. Je ne sais pas évidemment, si la même chose va se produire, parce que...

La tragédie de cela, si je peux le signaler au ministre, c'est que cela a pris 25 ans pour bâtir cette industrie au Québec. Auparavant, il n'y avait que de petits entrepreneurs, il n'y avait que de petits contrats. Ils ne pouvaient pas réaliser les gros contrats qui existent aujourd'hui. Cela s'est bâti sur une période de 25 ans. On est en train de détruire cette industrie. On est en train de la démantibuler. On retourne aux conditions qui existaient il y a 25 ans dans cette industrie. Si, par hasard, dans trois ou quatre ans, on va recommencer les contrats d'envergure de $30 millions, $40 millions ou $50 millions, il n'existera pas une entreprise au Québec qui pourra accepter ces contrats.

M. le Président, vous me faites signe que je dois terminer. Je vais brièvement conclure en disant que la situation, M. le ministre, est non seulement sérieuse, elle est grave, avec des implications non seulement pour ceux qui sont directement impliqués dans l'industrie, mais pour l'ensemble de Montréal et pour l'ensemble du Québec. Savez-vous les implications financières qui découleront de la perte de cette industrie? Montréal représente, pour les taxes du Québec, un montant assez élevé.

Je voudrais savoir de la part du ministre, ce qu'il va suggérer de concret. Quelle réponse, quel geste concret a-t-il posé durant la dernière année devant les objections et les préoccupations de l'industrie qui a porté le mémoire à l'attention du ministre d'État au développement économique?

Je voudrais demander, spécifiquement sur les fabriques de ciment à Montréal, ce qu'il entend faire pour s'assurer que cette industrie ne sera pas détruite, mais qu'elle pourra continuer à vivre d'une façon rentable, ce qui représente un problème non seulement au point de vue économique mais au point de vue humain. Savez-vous combien de gens sont mis à pied? Après 25 ou 30 ans de travail, ils ne pourront pas trouver un autre emploi. Quand l'équipement sort du Québec, ce sont des emplois qui quittent le Québec. On n'exporte pas l'équipement, on exporte les ressources humaines.

Je crois que c'est plus important que des objectifs politiques; on traite ici de la vie des gens à Montréal, qui ne savent plus quoi faire. Je demande quelle solution le ministre peut apporter.

Le Président (M. Jolivet): Après l'intervention du ministre, les deux prochains intervenants seront M. le député de Frontenac et M. le député d'Outremont. M. le ministre.

M. Tremblay: J'ai écouté attentivement M. le député de Mont-Royal. J'ai remarqué un mélange d'analyse entrecoupée de mots comme "désastre", "tragique", etc., de sorte que je vais à la fois essayer de répondre aux vrais probèmes, et je reviendrai sur ce refrain qui est devenu la marque de l'Opposition libérale, refrain de défaitisme, etc.

Je prendrai le dernier point qui a été soulevé, concernant les cimenteries. Il est évident qu'avec leffervescence de 1975-1976, il y a eu énormément de routes — on a construit énormément d'autoroutes, l'aéroport de Mirabel et les Jeux olympiques — on a même vu à la commission Malouf qu'on avait recouvert de plusieurs pieds de ciment, un stationnement qui avait coûté énormément cher. Évidemment, on utilisait le ciment 24 heures par jour. Il y a eu une effervescence quant à la demande de ciment. Si le député de Mont-Royal et si ses électeurs sont d'accord pour qu'on commence à entrecouper Mont-Royal d'autoroutes, on peut en construire d'autres, mais il faudrait qu'on le dise...

M. Ciaccia: ... comme toujours. Répondez donc aux questions.

M. Tremblay: C'est un point. Dans le domaine des investissements...

M. Ciaccia: En 1974, il n'y avait pas d'Olympiques et, en 1975, il n'y en avait pas non plus...

M. Tremblay: Je vous ai écouté attentivement...

Le Président (M. Jolivet): M. le député...

M. Ciaccia: Dans le domaine de la construction, il n'y a rien à voir avec les Olympiques. Vérifier donc vos dossiers. (12 heures)

Le Président (M. Jolivet): M. le député! M. le député!

M. Ciaccia: Cette division est fermée aujourd'hui.

M. Grégoire: ... le silence, vous tantôt!

M. Ciaccia: Oui, mais quand on entend ça, on a notre voyage!

Le Président (M. Jolivet): À l'ordre! À l'ordre! À l'ordre! M. le député! M. le ministre.

M. Tremblay: On parle de cimenteries, M. le Président, et une cimenterie, habituellement, ça manufacture du ciment, M. le Président, et du ciment, c'est utilisé où, M. le Président? C'est utilisé dans des monuments comme dans le stade olympique...

M. Ciaccia: ... entre vos deux oreilles.

M. Tremblay: ... qui en a été gorgé de tonnes, de tonnes et de tonnes, 24 heures par jour. Cela va dans des aéroports comme l'éléphant blanc de Mirabel et ça va aussi dans les autoroutes. On sait où ça va, le ciment. Ce n'est pas dans des perrons...

M. Ciaccia: Cela va à la baie James aussi. C'est un éléphant blanc, la baie James?

M. Tremblay: La baie James, ça marche, M. le Président. L'Hydro-Québec a des projets d'investissement de $2 milliards, $3 milliards par année.

M. Ciaccia: Malgré ça, ces cimenteries vont fermer.

M. Raynauld: Le gouvernement n'a pas d'éléphant du tout, ni blanc, ni noir.

M. Ciaccia: Vos éléphants blancs, où sont-ils?

M. Tremblay: Identifiez donc les éléphants qu'on a mis sur place? Dans tous les cas, si vous voulez jouer ce petit jeu...

M. Ciaccia: Non, je veux des réponses, pas de la politicaillerie. Je n'en ai pas fait quand je vous ai parlé. Je vous ai donné des statistiques.

Le Président (M. Jolivet): M. le député! M. Ciaccia: Répondez donc!

Le Président (M. Jolivet): M. le député, s'il vous plaît!

M. Tremblay: Pour vous répondre techniquement, le ciment de la baie James est fait sur place. Il ne vient pas de Montréal. Si vous voulez qu'on loue les avions de Québecair pour envoyer du ciment de Montréal à la baie James, faites donc une motion en Chambre et on la débattra. Cela montrera votre connaissance technique de l'industrie.

M. Ciaccia: Cela montre le sérieux de vos réponses aussi.

M. Tremblay: Oui. C'est à la suite de votre intervention loufoque que je souligne ce point-là.

Donc, c'est évident qu'il y a eu une effervescence dans ce domaine. J'avais distribué, pour revenir à un point connexe, le tableau I, qui montrait que, dans les investissements pour les centres commerciaux et les édifices à bureaux, il y a eu un boom en 1975-1976, qui était, par rapport à 1971 — il n'y avait quand même pas beaucoup d'années de différence...

M. Raynauld: Cela marchait en 1975. M. Ciaccia: Oui, ça marchait en 1975.

M. Tremblay: ... des 118%, alors qu'à Toronto, en Ontario, c'était 27%. Depuis ce temps, en Ontario comme au Québec, il y a eu un ralentissement. C'est évident, quand les édifices à bureaux... On sait bien que, dans l'effet d'accélérateur dans le domaine des investissements comme ceux-ci, il y a un boom et un cycle de retrait.

M. Ciaccia: Si les 70 000 personnes étaient restées à Montréal, est-ce que...

M. Tremblay: Est-ce que vous pouvez me permettre de répondre?

M. Ciaccia: ... cela aurait affecté...

Le Président (M. Jolivet): M. le député, tout à l'heure, vous m'avez posé la question, à plusieurs occasions, sur le fait des interventions à l'intérieur d'un discours d'une personne. Bon! L'article 100, s'il vous plaît!

M. Tremblay: Dans ce domaine-là, évidemment, l'effervescence... Comme je l'ai dit tout à l'heure, les gouvernements et l'entreprise privée se sont lancés dans une sorte d'effervescence, par rapport à l'Ontario, qui était incroyable. C'est évident qu'ils ont acheté de nouveaux camions et de nouvelles cimenteries.

Je me rappelle, après la construction de la ligne DEW dans le Grand-Nord, qu'il y avait eu une vente d'équipement, parce que mon père, mon cher monsieur, est un entrepreneur, et j'ai appris à conduire les camions à l'âge de douze ans. Vous ne me montrerez pas la différence entre un camion et un bulldozer. Il y avait eu une vente, évidemment, comme après tout grand chantier... Je présume qu'après la construction des pyramides, il y a eu quelques instruments...

M. Ciaccia: ... les Egyptiens, maintenant? M. Tremblay: ... qui étaient en excédent.

M. Ciaccia: Les Egyptiens ne sont jamais entrés dans le portrait, c'est leur faute.

M. Tremblay: ... et à moins qu'on propose qu'on continue dans la foulée...

M. Ciaccia: On va aller voir Sadate.

M. Tremblay: ... qu'ayant fait un stade de $1 milliard, on en fasse un deuxième et un troisième pour garder les camions en activité...

M. Raynauld: II n'a rien de mieux à proposer.

M. Ciaccia: Oui, vous n'avez rien de mieux à proposer?

M. Tremblay: Oui, mais il faudrait que le gouvernement fédéral cesse de couper les investissements dans la construction. Cela, c'est une autre chose.

M. Ciaccia: Bon!

M. Raynauld: Faites donc les vôtres, les investissements.

M. Tremblay: C'est une autre chose. M. Ciaccia: C'est la faute du fédéral.

M. Tremblay: On va faire le Centre des congrès...

M. Ciaccia: II y a eu des hausses et des baisses avant, mais ils n'ont jamais vendu d'équipement. Maintenant...

Le Président (M. Jolivet): M. le député, vous manquez à votre parole.

M. Ciaccia: ... ils vendent l'équipement.

Le Président (M. Jolivet): M. le député, vous manquez à votre parole.

M. Ciaccia: Comment expliquez-vous ça? Le Président (M. Jolivet): M. le député!

M. Tremblay: Donc, j'ai déjà distribué des tableaux et j'inviterais le député à réfléchir sur cela, au lieu de se lancer dans des grandes diatribes.

Il y a un autre tableau que je n'ai pas distribué. J'aimerais le distribuer maintenant, parce que, encore là, le vieux refrain qu'on a entendu tellement souvent: C'est bon à Toronto, ce n'est pas bon ici, ça va mal, etc.

Je regardais un rapport de Southam Building, une firme de Toronto, qui donne, dans l'industrie de la construction, la valeur des permis pour le mois de juin 1978. Il compare juin 1978 et juin 1976.

En juin 1976, c'était le gouvernement Bourassa qui était au pouvoir. Or, à ma connaissance, on s'apprêtait à faire l'ouverture des Jeux olympiques. On avait acheté un long tapis rouge pour que la reine d'Angleterre vienne les inaugurer.

Or, Southam dit: Dans le résidentiel, maintenant, dans la région de Montréal — parce qu'on parlait de la région de Montréal tout à l'heure...

M. Ciaccia: ... pas les complexes?

M. Tremblay: ... dans la région de Montréal, il y a une augmentation, en juin 1978, par rapport à juin 1976, de 118% des valeurs de permis. Bon! Ce n'est pas si mal! Dans le domaine commercial, une augmentation de 196,7%; dans l'industriel, il y a une baisse de 86%, par rapport à juin; dans l'institutionnel, une augmentation de 83,9% et, dans le génie civil, une augmentation de 228%. D'accord. Sur une base mensuelle, il y a des accidents aléatoires, mais c'est quand même "Southern Building Report". Je le donne simplement pour ce que cela vaut; cela vaut ce que cela vaut, mais c'est quand même une indication de plus que les choses ne sont pas dans le sens du refrain qu'on l'a dit.

Je prends une autre référence sur l'évolution, sur les faits, parce que l'attitude de "do not bother me with the facts" est de parler de camions, de dire que les camions ont été vendus. Mais ils n'ont pas été vendus en Ontario, avez-vous remarqué, vous dites qu'ils ont été vendus aux États-Unis. Peut-être qu'il faut construire un stade olympique.

M. Ciaccia: Je n'ai pas dit en Ontario, j'ai dit: Ils ont quitté le Québec. Ce sont des emplois qui ont quitté le Québec.

M. Tremblay: Vous avez dit qu'ils ont été vendus aux États-Unis.

M. Ciaccia: Oui, aux États-Unis, exactement. Ne m'accusez pas de dire qu'ils n'ont pas été vendus en Ontario.

M. Tremblay: Non, mais je vous dis qu'ils n'ont pas été vendus en Ontario.

M. Ciaccia: J'ai dit spécifiquement qu'ils ont été vendus aux États-Unis; 88% de cet équipement, au mois de septembre, ont été vendus aux États-Unis et 12% sont restés au Québec.

M. Tremblay: J'ai ici la revue Statistique-Canada, qui s'appelle "Investissements privés et publics au Canada ", perspectives 1978, catalogue 61-205 annuel. À la page 42 et à la page 43, on constate que les immobilisations dans le secteur manufacturier, qui relève de ma juridiction... M. le député de Mont-Royal a dit: Le ministre de l'Industrie et du Commerce pourrait-il nous dire ce qu'il a fait? Je ne commencerai pas à énumérer tous les gestes que j'ai posés en un an et demi, j'en ai fait plus qu'en quinze ans l'ancienne administration. On a même eu un débat spécial sur cela et M. le député d'Outremont était d'accord.

M. Ciaccia: ... pour l'industrie de la construction.

M. Tremblay: En région métropolitaine de Montréal, dans le domaine de la fabrication, par rapport à la région de Toronto, pour la première fois, selon les statistiques dont nous disposons, les immobilisations "capital expenditures", en millions de dollars, pour la région de Montréal, en 1978, vont être supérieures par rapport à Toronto. En 1976, par exemple, c'était $104 800 000 à Montréal et à Toronto, c'était $141 200 000. En 1977, c'était $113 300 000 à Montréal, $176 700 000 à Toronto. Mais, en 1978, l'année où les mots "désastre", "tragique", parce qu'ils s'adressaient au ministre de l'Industrie, tout à l'heure...

M. Ciaccia: Est-ce que c'est la réponse que vous avez donnée à l'industrie de la construction à Montréal?

M. Tremblay: Voulez-vous cesser de faire de la démagogie?

M. Ciaccia: Non, je vous demande si c'est cette réponse que vous avez donnée, aux mémoires présentés le 13 octobre 1977.

M. Tremblay: Voulez-vous cesser de faire de la démagogie? En 1978, $125 800 000 à Montréal, dans la région métropolitaine, pour les immobilisations, à Toronto, $126 100 000. C'est la première fois que Montréal dépasse Toronto au plan des immobilisations industrielles dans le secteur de la fabrique.

Revenons-en un peu à ce refrain. C'est un refrain, c'est un ballon qu'il faudra crever, il faudra

crever ce refrain défaitiste: Cela va mal au Québec, c'est un désastre, c'est tragique, cela n'a pas de bon sens... On chasse les sorcières pour faire peur aux Québécois, c'est une stratégie pour faire peur aux Québécois.

M. Ciaccia: Défendez-vous en niant les faits et en portant des accusations.

M. Tremblay: Je vais vous en donner des faits si vous voulez écouter.

M. Ciaccia: Dans l'industrie de la construction...

Le Président (M. Jolivet): M. le député, s'il vous plaît, cela a bien été jusqu'à maintenant. Il faudrait continuer.

M. Ciaccia: Cela va continuer.

M. Tremblay: Je vais vous en donner des faits. La compagnie Lester B. Knight & Associates Corp. a fait une étude, un sondage pour le compte du Comité canado-américain de la Chicago Association of Commerce and Industry, groupe d'hommes d'affaires qui ne sont pas des rêveurs. Ils ont fait une étude très récente qui démontre que les tendances du marché et les possibilités économiques constituent — et de loin — le principal facteur qui influence les projets d'investissements au Canada, avec 64% des réponses; suivent l'attitude des gouvernements canadiens et la disponibilité des matières premières avec 12% chacun, le taux de change du dollar canadien avec 6%, le coût de l'énergie avec 3% et les frais de transport avec 3%. C'est ici que je vous demande d'écouter, M. le député de Mont-Royal, M. le député d'Outremont, M. Ryan et tous les autres qui se promènent dans le décor, je vous demande d'écouter.

M. Ciaccia: Vous n'en faites pas, vous, de la démagogie. Vous donnez des leçons.

M. Tremblay: Par contre, 2% des 49 compagnies interrogées, des multinationales, soit une seule société du Mid-Est, a indiqué que la situation politique québécoise lui a fait mettre la pédale douce sur ses projets d'expansion. Une sur 49,2%, et c'est sur ces 2% que l'Opposition officielle base toute son argumentation pour empêcher les Québécois de progresser.

M. Ciaccia: Ce n'est pas moi, c'est le mémoire qui vous a été présenté l'année dernière, M. le ministre; ce n'est pas moi qui vous ai dit cela.

M. Grégoire: Ce n'était pas censé d'arrêter, cela? Il me semble qu'on a été poli vis-à-vis du député de Mont-Royal, tout à l'heure.

M. Tremblay: Si on a un débat sur le référendum avec ce genre d'argument de petit étage et d'arrière-cour, vous avez besoin d'être illuminé et de parler souvent à des voix dans le firmament, parce que vous n'irez pas loin. Fiez-vous donc aux faits, les faits sont ceux-ci. C'est la conjoncture économique qui a le plus d'impact sur l'activité économique, sur les décisions économiques. La situation politique avec un gouvernement responsable comme on en a un au Québec, comme on n'en a jamais eu sur le plan économique, un gouvernement qui stabilise l'économie au lieu de la déstabiliser, qui amène la paix sociale, qui pousse de l'avant les PME en abaissant les impôts de 50%, toutes des mesures à saveur économique d'une grande logique économique. Les hommes d'affaires eux-mêmes disent: Ce n'est pas cela qui nous amène à investir. C'est pour cela que Montréal dépasse Toronto pour les investissements en fabrication cette année, pour la première fois. Des villes comme Sudbury sont en train de fermer en Ontario. Je ne dis pas que le gouvernement de l'Ontario ne fait pas son possible, c'est un gouvernement provincial, mais c'est un autre problème à Ottawa, on le sait. Donc, ce refrain — là on parle du secteur privé, je ne parle pas des entreprises d'État. Ce n'est pas un sondage auprès des entreprises d'État — c'est auprès des multinationales qui font affaires au Canada et au Québec, fait par une compagnie de sondage américaine. On ne pourra pas dire que c'est le ministre de l'Industrie et du Commerce du Québec qui essaie de dorer la situation. Regardez les faits. Ils disent: II y a 2% de nos entreprises qui peuvent modérer leurs investissements au Québec pour des raisons politiques. Est-ce qu'on va cesser, du côté de l'Opposition, de mettre de l'avant des bonshommes de paille comme ceux-là pour faire peur aux Québécois? Est-ce qu'on va cesser? Je vous le demande.

M. Ciaccia: Montrez nous où sont les investissements.

M. Tremblay: Pour l'intelligence du débat, je vous demande de cesser d'essayer de faire peur aux Québécois pour les maintenir dans une situation de dépendance historique.

M. Raynauld: M. le Président, est-ce que la démagogie du ministre va cesser? Je voudrais bien qu'il réponde aux questions.

M. Tremblay: Oui, c'est "don't bother me with the facts". Quand ce sont des faits, c'est de la démagogie. Évidemment, quand on se lance dans les grandes harangues pour faire peur, basées sur aucun fait, là c'est de la haute justification libérale et intellectuelle.

M. Raynauld: La dépendance, faire peur au monde, ce n'est pas de la démagogie.

M. Ciaccia: On vous a donné des faits.

M. Tremblay: Mais lorsqu'on regarde les faits, objectivement, provenant de Statistique Canada, des compagnies multinationales, des agences de sondage américaines, là: "Don't bother me with the facts". Là, c'est de la démagogie. Si vous

voulez discuter à ce niveau-là, discutez donc tout seuls.

M. Ciaccia: Est-il menteur! Je n'ai jamais vu un menteur...

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Frontenac.

M. Ciaccia: Vous n'avez plus de faits à nous donner?

M. Gilles Grégoire

M. Grégoire: M. le Président, j'entendais des chiffres depuis 10 heures ce matin. On nous a innondé de chiffres, mais il reste des faits. On parle de diminution de la construction. Il y avait pourtant une belle grosse construction à LaPrade, une usine d'eau lourde. Ce n'est pas le gouvernement du Québec qui l'a arrêtée. Ce n'est pas le gouvernement du Québec qui la boycotte. Il y a un contrat de signé. On viole sa signature, le gouvernement fédéral ne respecte pas sa signature, il viole l'entente signée et conclue. Je n'ai pas encore entendu le député d'Outremont ou le député de Mont-Royal lever les masses en l'air. Je ne les ai pas entendus critiquer...

M. Tremblay: Non.

M. Grégoire: ... leur protecteur d'Ottawa. M. le député de Mont-Royal, vous êtes peut-être de Montréal, je ne suis pas de Montréal et j'ai le droit de parler pour tout le Québec, parce que Montréal fait partie du Québec et on est des citoyens québécois.

M. Ciaccia: Ne me reprochez pas...

M. Grégoire: On peut parler de la construction dans tout le Québec, je crois, et c'est ce qu'indique la motion.

M. Ciaccia: Ne me reprochez pas de ne pas en avoir parlé, je vous ai dis que je parlerais de Montréal.

M. Grégoire: Si vous voulez restreindre les débats à Montréal, retournez à Montréal, mais je crois qu'on doit parler de tout le Québec. Qu'est-ce qui s'est produit, par exemple? Le gouvernement fédéral avait besoin d'environ $40 millions ou $50 millions pour le donner à Ford et Ottawa prend l'argent de LaPrade et le donne à Ford pour que Ford s'installe en Ontario et fasse un développement de construction de $500 millions.

M. Tremblay: C'est cela. Fédéralisme rentable.

M. Grégoire: Levez les masses, M. le député d'Outremont.

M. Tremblay: Ou abaissez les masques.

M. Grégoire: Pourquoi ne protestez-vous pas, M. le député de Mont-Royal?

M. Ciaccia: Aucune question.

M. Grégoire: Pourquoi restez-vous muet tout à coup. Pourquoi fermez-vous vos boîtes quand vous voyez Ottawa prendre l'argent après avoir violé son entente...

M. Ciaccia: Pourquoi ne donnez-vous pas les vraies raisons?

M. Grégoire: ... sa signature, à LaPrade, prendre l'argent de là et le donner à Ford, une compagnie américaine, pour que Ford s'installe en Ontario plutôt qu'au Québec. Vous ne dites plus rien et cela, ce sont des faits. C'est un fait, ce n'est pas un chiffre.

M. Ciaccia: Les mêmes subventions étaient disponibles pour le Québec.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Mont-Royal, je pense que ma patience est quand même à bout quant à vos interventions. Je vous demande, s'il vous plaît... (12 h 15)

M. Grégoire: C'est un fait, ce n'est pas un chiffre, M. le Président. On peut faire dire bien des choses à des chiffres, j'entends donner des chiffres depuis tantôt, ça se contredit les uns les autres, il reste tout de même des faits. Je vais vous donner un autre fait. La construction dans le domaine des voies ferrées. Vous dites que le service de trains de banlieue de Montréal est foutu, fini, mauvais; le Canadien National ne veut plus se servir de ça. On demande au gouvernement du Québec d'y mettre $50 millions. Expliquez-moi donc comment il se fait qu'au cours des dix dernières années, Ottawa a dépensé dix fois plus pour la construction et la réparation des voies ferrées du Canadien National en Ontario qu'au Québec, dix fois plus; expliquez-moi donc pourquoi.

Expliquez-moi donc pourquoi surtout vous ne levez plus les masses en l'air et vous ne protestez plus contre les agissements d'Ottawa. Ce sont des faits, dix fois plus venant d'Ottawa, dépensés dans l'Ontario qu'au Québec et vous ne protestez pas. Non, c'est bien, ça vient d'Ottawa. Pourquoi est-ce qu'il y a toujours de la discrimination quand il s'agit du Québec?

Comme l'a si bien dit — c'est la plus belle phrase que j'ai entendue depuis longtemps — le ministre de l'Industrie et du Commerce en Chambre, il n'y a pas tellement longtemps, le Québec serait capable de s'en sortir tout seul en concurrence ou en compétition avec l'Ontario mais s'il faut que le Québec se batte à la fois contre l'Ontario et contre le gouvernement fédéral en même temps, ils sont tous les deux dans la même poche, ça ne marche plus. C'est bien évident. Et vous ne protestez pas.

Je vais vous donner un autre fait. J'ai cité des chiffres en Chambre, il y a moins de sept ou huit mois, dans le domaine du prêt agricole. Quand Ottawa consent des prêts agricoles, évidemment l'argent sert aussi en partie à la construction, sous forme de porcheries ou d'étables ou pour des ouvriers de la construction qui travaillent sur des pépines pour faire du drainage ou des choses du genre. Comment se fait-il que, sur tous les prêts agricoles consentis par Ottawa, Québec n'a eu que 4% l'an dernier, d'après le dernier rapport de la Société de crédit agricole? Il y en a eu une partie de tous ces prêts. J'ai déjà des chiffres plus exacts, en 1965, sur $200 millions en prêts agricoles consentis dans l'ensemble du Canada par le gouvernement fédéral, il y en avait $1 million au Québec et $199 millions dans les neuf autres provinces.

Ce n'était pas pour encourager la construction d'étables, de porcheries ou mettre des ouvriers aux travaux de construction avec leurs pépines pour faire du drainage, pour creuser des fossés ou pour améliorer la situation de la construction. Vous ne levez plus de masses, là! Ce ne sont pas des chiffres, ce sont des faits vécus. Vous ne levez plus les masses, vous ne protestez plus. Vous êtes gênés, vous ne voulez même plus écouter, vous parler entre vous autres, parce que vous n'avez plus de réponses à ça.

Vous avez raison. Au lieu de rougir, vous vous retournez et vous vous voilez la face. Ce sont des faits, ça.

M. le Président, je les entends parler de coûts de construction, on parle de coûts de construction, ça coûte cher. Je vais vous donner un fait, pas un chiffre, mais un fait dans les coûts de construction. Comment se fait-il que, pour la première fois depuis vingt ans, malgré la période d'inflation qu'on traverse, les coûts de construction de voirie, cette année, ont diminué? Pour la première fois, au ministère des Transports, on a été tout surpris de voir que les soumissions sortaient plus basses que l'an dernier pour les mêmes travaux. Comment se fait-il que, sur la route 112, dans mon comté, les coûts de construction ont diminué? Savez-vous pourquoi?

M. Raynauld: Oui, parce qu'il n'y en a plus.

M. Grégoire: Je vous demande bien pardon. Il y a eu dix fois plus de travaux de voirie dans mon comté qu'il n'y en a jamais eu.

M. Raynauld: Dans votre comté à vous, oui.

M. Grégoire: Oui, monsieur.

M. Raynauld: Oui, mais pas dans les nôtres.

M. Grégoire: Mais savez-vous pourquoi, alors qu'il y en a encore beaucoup, savez-vous pourquoi les coûts de construction ont diminué? Je vais vous donner un fait. Parce que les entrepreneurs ne sont plus obligés de soustraire à la caisse électorale du parti.

M. Raynauld: Ah, c'est ça! Voilà, voilà!

M. Grégoire: Quand l'entrepreneur n'est plus obligé de prendre...

M. Tremblay: C'est cela.! M. Raynauld: Ah bon!

M. Grégoire: ... quand l'entrepreneur n'est plus obligé de prendre 6% ou 7% pour les glisser à la caisse électorale...

M. Raynauld: Je suis content d'entendre ça.

M. Grégoire: ... les prix baissent. Cela a un effet avantageux, tout à coup, ce changement. Avant, à quoi assistait-on? Quand c'était un gouvernement bleu, il n'y avait que les entrepreneurs bleus qui avaient le droit de souscrire et ils s'entendaient comme larrons en foire et ça s'enrichissait. On se souvient de ça dans le temps de Duplessis, l'entrepreneur rouge n'était pas un bon entrepreneur, il ne soumissionnait pas. Dans le temps des libéraux, il n'y avait que les libéraux qui soumissionnaient. Mais aujourd'hui, plus de favoritisme, plus de discrimination, là, les bleus soumissionnent contre les rouges et les rouges contre les bleus, il y a une vraie compétition et ils ne sont plus obligés de souscrire à la caisse électorale.

M. Tremblay: Le libre marché, le libéralisme.

M. Grégoire: Là, les prix baissent. M. le Président, quand les coûts de construction se mettent à baisser comme cela, cela augure bien pour l'avenir. Pour là première fois en 1978, cela a été ainsi, les baisses des coûts de construction des travaux de voirie.

M. Tremblay: Le député d'Outremont a dit que c'était complètement cinglé. Est-ce qu'il voudrait revenir à l'ancien système de patronage?

M. Raynauld: C'est un cirque.

M. Tremblay: Vous voudriez revenir à l'ancien système dans le secteur de la construction, où il fallait donner...

M. Grégoire: Comme si vous l'aviez changé. Le Président (M. Jolivet): Messieurs!

M. Tremblay: J'aimerais bien le savoir, et le premier ministre aussi, si ce n'est pas changé, on va prendre des mesures.

Le Président (M. Jolivet): Messieurs, la parole est au député de Frontenac. Je pense qu'il veut continuer.

M. Raynauld: C'est très bon.

M. Grégoire: Ce n'est pas ce que je dis qui est un cirque.

M. Tremblay: La vérité choque et cela fait mal.

M. Raynauld: On n'a pas besoin de parler nous autres.

M. Grégoire: C'est que là, vous êtes rendus dans vos derniers retranchements. Venez donc nier que les coûts de construction n'ont pas baissé cette année dans le domaine de la voirie au Québec.

M. Raynauld: II n'y a pas de patronage là! M. Tremblay: Prouvez-le donc!

M. Grégoire: Oui, enfin, il y a un système de soumissions réelles où les entrepreneurs, qu'ils soient bleus ou qu'ils soient rouges... quand il en vient un dans mon bureau, au début ils venaient nous voir et nous disaient: Est-ce qu'on va pouvoir avoir des contrats quand même? Je disais: Bien sûr, c'est le prix et la qualité. Pas d'autre considération. Je ne veux même pas savoir s'ils sont rouges ou bleus. C'est fini ce temps-là. Ils se sont mis à concurrencer les autres. Il n'y en a pas un — je leur ai assez dit clairement — qui a osé venir offrir quelque chose au député de Frontenac, parce qu'on sait que cela ne s'accepte plus ces affaires-là. S'il y en a qui veulent souscrire...

M. Raynauld: Ils trouvaient que cela ne valait pas la peine.

M. Grégoire: ... à la caisse électorale du parti, pas à la caisse électorale du mouvement, ils n'ont plus le droit de donner des montants comme avant et les compagnies n'ont plus le droit d'en donner et elles n'ont plus le droit d'en glisser sous la table. Au-dessus de $100 il faut que cela soit par chèque. Et je peux vous dire que sur quatre qui en ont offert, on les a refusés tous les quatre, même selon les normes régulières de financement des partis politiques en vertu de la nouvelle loi qui limite le plafond à $250. On les a refusés tous les quatre et on leur a retourné leur argent. Tous les quatre.

Alors, aujourd'hui les prix sont plus bas dans la construction, dans la voirie et avec la compétition qui existe, les prix sont plus bas. M. le Président, on parle également des sièges sociaux — on a dit qu'ils quittent — oui, il y a eu la Sun Life. Mais la réaction du Québec, moi je l'ai trouvée absolument saine, absolument sensationnelle, absolument formidable, lorsque le ministre des Finances a produit les chiffres montrant que la Sun Life investissait ailleurs au Canada, en Ontario ou dans l'Ouest, les sommes ramassées ici au Québec, à même l'argent des Québécois. J'ai eu un exemple bien typique lorsque la société Allstate Insurance Company of America, une succursale, une division de Sears-Roebuck des États-Unis, a demandé, en 1963, au gouvernement fédéral, une charte pour venir vendre de l'assurance ici au Québec. Allstate Insurance Company of America n'est pas venue ici construire des usines, n'est pas venue ici acheter de l'outillage ou installer de l'outillage, puis une usine et produire, non. Les représentants ont loué un bureau, ils ont payé le compte du téléphone et des agents à commission. S'ils ne vendent pas de prime, pas de commission, s'ils vendent des polices d'assurances, des commissions. Ce ne sont pas de gros investissements pour Allstate, c'est une succursale comme les autres.

Je me suis énormément opposé à cela, dans le temps. Cela a passé quand même, c'était vos grands frères d'Ottawa qui étaient au pouvoir là-bas. Allstate Insurance est venue. Elle a ramassé les primes de A, B, C, D; de M. Z, M. X, Mme Y, Mlle P ou A, ou je ne sais trop qui. Au bout de six ans, Allstate Insurance Company of America, au nom de Sears-Roebuck, mettait la main sur les plus gros établissements commerciaux au Canada, sur Simpsons-Sears et, à même notre argent, une compagnie américaine devenait propriétaire des plus grands établissements commerciaux au Canada.

M. Tremblay: Indépendance économique.

M. Grégoire: Nous, on se laissait faire, on prenait des primes dans cette compagnie et elle prenait notre argent pour prêter à Sears-Roebuck qui achetait Simpsons-Sears et les plus gros établissements commerciaux.

Est-ce qu'on devenait propriétaires, nous autres? Non, on donnait, on prêtait notre argent aux Américains pour qu'ils viennent nous acheter.

M. Tremblay: ...

M. Grégoire: Commerce de l'argent, le plus payant qui soit.

Les compagnies d'assurance. Sun Life faisait la même chose avec les fonds des citoyens du Québec. On dit qu'il n'y a pas assez d'investissement au Québec; je pense bien, les compagnies d'assurance venaient ramasser notre argent. Que ce soit les banques, les compagnies d'assurance comme la Sun Life, ou autres, $500 millions de nos primes perçues au Québec étaient investis en Ontario ou ailleurs.

M. Raynauld: M. le Président, peut-on continuer de parler sur n'importe quoi ou va-t-on parler sur le sujet?

M. Grégoire: Je pensais que c'était vous qui aviez parlé de sièges sociaux.

M. Tremblay: On parle de sièges sociaux, c'est vous-même qui avez soulevé le sujet.

M. Raynauld: Oui, la Sun Life, la vente aux Américains, etc., c'est pertinent au débat?

Une voix: Vous n'avez pas parlé de sièges sociaux tout à l'heure?

Le Président (M. Jolivet): M. le député, je pense que le député a le droit de parler sur la

façon dont il entrevoit les problèmes dont vous faisiez mention au niveau de la construction. Je pense qu'il est tout à fait conforme au règlement de le laisser parler.

M. Grégoire: Les sièges sociaux de compagnies qui, en déménageant, ne déménagent rien sauf des classeurs, des papiers et de la paperasse, qui ne déménagent rien sauf nos primes d'assurance en même temps, ce n'est pas la plus grande richesse d'un pays, quand elles se conduisent en mauvais citoyens en investissant ailleurs les montants perçus ici, mais les sièges sociaux de compagnies, par exemple, comme les mines d'amiante à Thetford, que ces gens essaient de déménager, qu'ils essaient de déménager le trou de la mine, qu'ils essaient de déménager les tas de résidus, qu'ils essaient de déménager la mine, ils vont s'apercevoir que c'est plus dur, parce qu'on a la richesse naturelle ici. Mais, même là, ils n'ont jamais réussi à exploiter cela à notre profit. Il faut au moins commencer à dire un mot sur les sièges sociaux pour que ces gens se conduisent en bons citoyens québécois et qu'ils voient à développer, au profit des citoyens québécois, la richesse naturelle du Québec. On ne pourra peut-être pas forcer Ford à venir s'installer au Québec plutôt qu'en Ontario, surtout lorsque Ottawa se met du côté de l'Ontario, mais l'aluminium à bon marché, cela provient du Québec et on aurait dû au moins avoir le droit de continuer l'exploitation de nos richesses naturelles non seulement dans la fabrication de l'aluminium à l'état brut, mais de poursuivre le développement industriel jusqu'à l'industrie secondaire et la transformation de notre aluminium en produits finis, que ce soit en moteurs ou en pièces d'automobiles. C'est cela qu'Ottawa a empêché de faire à partir d'une richesse naturelle qui existe ici, l'électricité à bon marché pour la transformation de l'aluminium, et c'est contre toute la logique, tout le bon sens...

M. Raynauld: Parlez-nous donc de GM et de Bombardier.

M. Grégoire: Pour GM, on verra.

Le Président (M. Jolivet): Vous avez eu la chance de poser vos questions.

M. Grégoire: Pour GM, il n'y a pas eu encore de réponse.

Le Président (M. Jolivet): M. le député d'Outremont.

M. Grégoire: Le ministre peut-il répondre?

M. Raynauld: C'est à lui que je pose la question.

M. Grégoire: M. le Président, je n'ai pas fini mon intervention.

M. Tremblay: Tout de suite, je peux le dire,

GM va ouvrir une usine ce mois-ci, à Sainte-Eustache, qui va créer 705 emplois directs et indirects et produire des autobus pour tout le Canada et pour l'Amérique du Nord dans les prochaines années. C'est jusgement un exemple d'un gouvernement qui s'occupe de ses affaires et qui fait du développement industriel.

M. Grégoire: M. le Président, je n'ai pas fini mon temps.

Une voix: Cela achève, par exemple.

Le Président (M. Jolivet): Non, c'est simplement pour vous dire qu'il reste une demi-heure au débat. Je pense qu'il est cependant logique de permettre les deux dernières interventions, celle du député d'Outremont qui a quand même une forme de droit privilégié et celle du ministre. Si vous me le permettiez, on pourrait, à ce moment-là, permettre à chacun... Puisque le député d'Outremont m'avait demandé au moins un quart d'heure de possibilité pour qu'on puisse...

M. Grégoire: Je termine seulement en une minute, parce que je crois avoir établi mon point. C'est vrai que tout ne va pas parfaitement, c'est vrai qu'il y a des choses à améliorer, mais, si mes bons amis d'en face, au lieu de toujours essayer de blâmer le gouvernement du Québec qui fait son possible et qui réussit très bien, au lieu de toujours essayer de faire la chasse aux sorcières, en disant que c'est épouvantable en cherchant à semer la crainte et en cherchant à développer... Vous relirez "La calomnie", M. le député d'Outremont. Vous écouterez cela à nouveau, si vous aimez le moindrement les extraits des opéras de Rossini. Vous relirez "La calomnie" où on essaie tranquillement, graduellement, d'estampiller quelque chose dans le front d'un gars, sans dire positivement que c'est cela, mais en tournant tellement autour du pot qu'on en arrive à prendre pour des réalités ce qui n'est pas vrai.

M. Raynauld: Je voulais justement vous donner cela.

M. Grégoire: Essayez donc de vous conduire en bons citoyens québécois. Au lieu de semer la crainte, cherchez donc plutôt à voir où sont les troubles. J'ai cité des fautes qui existent au gouvernement d'Ottawa. Levez les masses en l'air aussi fortement vis-à-vis de votre grand frère d'Ottawa que vous le faites, à l'heure actuelle, en semant la crainte dans le Québec. Au lieu d'avoir deux poids, deux mesures, essayez donc d'être plus impartial, essayez donc d'être plus honnête dans vos observations, essayez donc d'être plus juste, essayez donc d'être plus réel, plus impartial, au lieu de faire de la petite politicaillerie, même de la vulgaire politicaillerie, comme on vous entend faire des fois, alors que vous avez l'intelligence voulue pour aller plus loin que la politicaillerie. Vous avez des diplômes, vous êtes compétent, essayez donc de vous en servir pour mettre tout

cela au service du Québec au lieu de le mettre au service du dénigrement comme vous le faites depuis longtemps. Je vous laisse la parole, si vous voulez répondre là-dessus, mais je pense que les faits que je vous ai donnés méritent que vous vous justifiiez sur ce point.

Le Président (M. Jolivet): Merci. Comme je le disais tout à l'heure, il reste deux intervenants. Compte tenu du "fair play" qu'on s'était donné tout à l'heure, c'est-à-dire une demi-heure chacun, au départ, je pense qu'il serait logique qu'on donne à chacun quinze minutes pour terminer, ce qui permettrait de dépasser de quelques minutes 13 heures, si vous me le permettez. Cela va?

M. le député d'Outremont. (12 h 30)

Discussion générale

M. Raynauld: Merci, M. le Président. Je pense qu'on vient d'assister à un spectacle qui ne fait pas honneur à la qualité et à la responsabilité que nous avons comme parlementaires. J'ai rarement vu un cirque pareil. On nous accuse d'à peu près tous les maux. Si on n'appelle pas cela des insultes, je ne sais pas comment on peut appeler cela. On s'est même fait servir des appels à notre honnêteté, ce qui vient d'être fait par le député de Frontenac, comme si nous étions malhonnêtes, que nous ne voulions pas servir les intérêts du Québec. Je pense que ces affirmations sont tout d'abord des affirmations, purement gratuites, et par surcroît insultantes, et qui ne font pas avancer le débat d'un seul pouce.

En ce qui concerne l'analyse de la situation, je crois qu'il est incontestable — je ne pense pas que le ministre ait répondu à ces questions, à ces faits que j'ai apportés — que, dans la région de Montréal, la situation se détériore, qu'il y a eu des baisses dans la construction de logements, la construction non résidentielles, les heures de travail, ce sont des rapports de l'OCQ. En ce qui concerne les autres statistiques qui viennent d'être citées par le ministre, j'ai ici un journal, le Daily Commercial News, sur la construction, où on dit ici, et je cite: "Non residential buildings construction in the first half of 1978 in Montréal was down 47% from the year earlier half, and engineering was down 40% for a general decline of 44% in contracted award value." Cela confirme les chiffres que j'avais présentés, qui étaient de l'ordre de moins de 35% depuis les six mois de l'année dernière. Je pense que ceci est incontestable.

En ce qui concerne les politiques, parce que je pense que c'est à cela que nous voulons arriver, même s'il y a des divergences sur une statistique ici et une statistique là, je pense que, si nous voulons faire avancer le débat, nous devons essayer...

M. Tremblay: Ce sont les contrats de construction que vous venez de mentionner.

M. Raynauld: La valeur des contrats de construction.

M. Tremblay: Oui.

M. Raynauld: C'est exact, je pense.

M. Tremblay:... parce que nous, c'est à Statistique Canada. Il peut y avoir d'autres firmes.

M. Raynauld: Vous avez cité Southam News. Ceci vient également de Canada Data Division of Southam Business Publication.

M. Tremblay: Nous, c'est à Statistique Canada, catalogue 64-201.

M. Raynauld: Oui, mais cela venait de Southam News, pour une partie de ce que vous avez donné. Les divergences qui existent, je pense qu'elles pourraient être identifiées très facilement. Dans un des cas que vous avez cités, vous avez parlé d'investissements. C'étaient les intentions d'investir, qui comprenaient les équipements et la machinerie. Ce n'était pas seulement la construction. Dans un autre cas, vous avez parlé du secteur manufacturier. C'était une partie seulement, à ce moment, des investissements. Je pense que, dans tous les cas, il serait très facile de relever les divergences, parce qu'au fond je crois qu'il n'y en a pas. La vérité, c'est que la situation s'est effectivement détériorée considérablement depuis un an ou un an et demi à Montréal.

Dans d'autres cas, vous avez également cité des statistiques, M. le ministre, qui se rapportent à l'ensemble du Québec, mais la situation, pour l'ensemble du Québec, je le reconnais, est meilleure que la situation à Montréal. C'est justement pour souligner des choses que le député de Frontenac a dites tout à l'heure, la situation va plus mal à Montréal que dans des régions basées sur des ressources naturelles. À l'heure actuelle, on n'a jamais contesté ce fait. Au-delà, encore une fois, de l'analyse de la situation, je pense qu'on veut essayer de voir quelles sont les politiques qui peuvent être mises en oeuvre pour corriger cette situation et essayer de dépasser le terrorisme verbal du ministre de l'Industrie et du Commerce, lorsqu'il se sent attaqué.

Sur le plan des politiques, je voudrais parler ici de son ministère, il y a eu un programme de relance qui s'appelle OSE et qui prétend avoir fait beaucoup pour la région de Montréal. J'ai fait des calculs qui montrent que, dans la région de Montréal, pour le ministère de l'Industrie et du Commerce, il s'agit ici dans ce programme, en fait, pour résumer, de $2 millions versés, de $12 millions sous forme de prêts. J'aimerais, s'il pouvait, encore une fois, dépasser le stade des insultes, qu'il réponde...

M. Tremblay: Je regrette, là! Sous le couvert, d'un ton très bas, on lance des insultes...

M. Raynauld: J'aimerais qu'il réponde... Oui, je reviendrai là-dessus, M. le ministre...

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre, vous aurez l'occasion de répondre...

M. Raynauld: Non, je ne lance pas d'insultes.

M. Tremblay: Pouvez-vous quand même poursuivre un débat sans, justement, accuser les autres de lancer des insultes?

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre...

M. Tremblay: ... qui était elle-même une insulte?

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre, vous aurez la chance de répondre tout à l'heure.

M. Raynauld: Je reviendrai sur les mots que vous avez employés tout à l'heure, M. le ministre. Pour l'instant, je voudrais essayer d'obtenir quelques réponses aux questions que j'ai posées et que je pose maintenant. Je demande, sur ce point si les prêts qui sont avancés dans le cadre du programme OSE sont des dépenses gouvernementales au même titre que le paiement d'une subvention, par exemple? Parce que, dans le cas du ministère de l'Industrie et du Commerce, dans le programme OSE, pour Montréal, il s'agit de $2 millions, je pense, d'argent vraiment versé et de $12 millions sous forme de prêts. Moi, suivant les concepts que j'ai, je n'ai jamais été capable d'assimiler un prêt remboursable au taux d'intérêt du marché, souvent, à travers la SDI en particulier, je n'ai jamais pensé qu'on pouvait compter ça comme des dépenses du gouvernement provincial, du gouvernement du Québec. C'est ce que j'ai trouvé dans le programme OSE pour la région de Montréal et, en ce qui concerne son propre ministère, celui de l'Industrie et du Commerce. Si...

M. Tremblay: Puis-je vous demander de quel programme il s'agit, parce que la SDI a environ huit programmes...

M. Raynauld: Tous les programmes de l'Industrie et du Commerce qui sont mentionnés dans le rapport OSE. C'est très facile; il y en a seulement une page.

M. Tremblay: Vous savez que le programme OSE ne couvre que deux programmes de la SDI et non pas les huit.

M. Raynauld: Oui, je parle du programme OSE, ici, quand je dis ça.

M. Tremblay: Oui.

M. Raynauld: Je parle du programme OSE et, à l'intérieur du programme OSE, qui est le grand programme de relance du gouvernement, il y a $12 millions de prêts d'indiqués pour la région de Montréal...

M. Tremblay: C'est pour la petite entreprise de moins de 20 employés.

M. Raynauld: Si vous voulez les détails, il y a trois activités, je pense, qui sont incluses là-dedans, mais ce sont toutes des activités qui sont relatives au ministère de l'Industrie et du Commerce dans le programme OSE. Il n'y en a pas d'autres.

M. Tremblay: Voulez-vous que je donne une petite réponse rapide?

M. Raynauld: On a fait la somme...

M. Tremblay: Je pense que ça va éclairer le débat.

Dans le programme OSE, il n'y a que deux programmes. Un programme de $7,5 millions pour la petite entreprise manufacturière de moins de 20 employés, avec des prêts non garantis qui, normalement, ne sont pas accordés à cause du trop grand risque. Donc, c'est un prêt, même s'il comporte une clause de remboursement qui est pratiquement un prêt-subvention, parce qu'on s'attend que le taux de perte soit relativement élevé puisqu'aucune institution bancaise n'ose prendre ce genre de risque.

L'autre programme, lui, touche très peu la région de Montréal ou, du moins, beaucoup moins parce qu'il touche à l'industrie du meuble, de la chaussure, des textiles et du vêtement, un programme de $15 millions pour les industries traditionnelles pour des prêts de dernier recours avant que les contingentements imposés aux importations aient leur impact. Donc, il s'agit vraiment de deux programmes relativement limités dans l'ensemble de la gamme des programmes de la Société de développement industriel.

M. Raynauld: Je n'ai jamais mis en question les activités totales de la SDI. Je parle du programme de relance OSE, et ça comprend l'activité 2, par exemple, accélération de projets d'investissements privés, telle que rapportée dans le rapport; l'activité 3, l'expansion de la PME innovatrice; l'activité 4, financement de la petite entreprise manufacturière, et l'activité 5, aide au secteur traditionnel.

Là-dedans, il y a $12 millions, je le dis bien, qui sont présentés dans le rapport comme étant des prêts. C'est pour ça que je vous ai posé la question. Ce sont des prêts et pourtant, ces $12 millions de prêts, à ma connaissance, sont additionnés dans les rapports du programme OSE comme étant des contributions financières du gouvernement du Québec à certains endroits et comme dépenses du gouvernement du Québec à d'autres endroits. Je pense que...

M. Tremblay: M. le député, il s'agit de prêts-subventions.

M. Raynauld: De prêts? Si ce sont des prêts, je pense que c'est beaucoup exagérer l'importance de la contribution du gouvernement du Québec et, si je le dis, ce n'est pas pour le critiquer, c'est

pour illustrer que, dans le cadre du programme OSE et de votre ministère, M. le ministre, vous ne faites pas grand-chose pour la région de Montréal. Je voudrais enchaîner là-dessus pour dire que — ceci, en partie en réponse aux déclarations du député de Frontenac — en ce qui concerne le programme MEER, à Montréal, parce que nous parlons de Montréal autant que possible, vous n'êtes pas sans savoir que le gouvernement fédéral a déclaré Montréal zone désignée, qu'il l'avait déjà fait auparavant...

M. Tremblay: C'est une zone spéciale pour six secteurs.

M. Raynauld: Zone spéciale, excusez-moi. Dans le cadre de ce programme, il y a des investissements attendus sur trois ans, jusqu'en 1980, de $300 millions; il y a des subventions — pas des prêts — de $70 millions...

M. Tremblay: Attendues.

M. Raynauld: ... attendues, et au 1er juillet 1978, le gouvernement fédéral a déjà versé $10 400 000 pour 81 projets dans la région de Montréal. La question que je poserai là-dessus c'est: Est-ce que ce n'est pas déjà beaucoup plus que ce que le gouvernement provincial a fait dans la région de Montréal dans le programme OSE...

M. Tremblay: C'est un quart de la subvention à Ford en Ontario.

M. Raynauld: ... et est-ce que, si on prend le programme dans son ensemble de $70 millions, le député de Frontenac n'aurait pas pu mentionner cela aussi, pour faire contrepoids aux exemples qu'il a donnés où le gouvernement fédéral a offert des fonds en Ontario? Je pense que là-dessus, M. le Président...

M. Grégoire: En un mot, quand Ottawa fait 10 au Québec, il fait 50 en Ontario.

M. Raynauld: M. le Président, est-ce que je pourrais continuer à parler?

M. Grégoire: II prête 50, il subventionne 50 en Ontario pour 10 au Québec.

Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît, M. le député.

M. Raynauld: Est-ce que je pourrais continuer? Je pense qu'à citer des exemples particuliers, on n'en finira jamais. Je crois que, pour ma part, en ce qui concerne Montréal, le gouvernement fédéral a déjà fait plus que ce que le gouvernement québécois fait dans le cadre de son programme de relance économique et c'est pour cela que je crois que c'est cela qui est important. Il faut cesser d'être infantile et de toujours accuser tout le monde de tous les maux; il faut voir qu'est-ce que ce gouvernement qui, quand même, perçoit 50% des impôts perçus au Québec, peut faire par sa propre contribution. Quand vous voyez que le gouvernement fédéral est capable d'en faire plus pour Montréal avec la moitié des fonds quand il a l'ensemble du pays, je pense qu'il y a une question où le ministre du commerce essaie de nous la faire voir.

Sur ce programme, je ne peux pas m'empêcher de penser que le programme OSE, en ce qui concerne l'ensemble du programme, soit un simple programme bidon, un écran de fumée, que ce sont des clôtures que l'on met pour cacher les terrains vacants à l'arrière, parce qu'il n'y a rien. Là-dessus, je voudrais simplement citer ce que le ministre responsable au développement économique a dit pour montrer jusqu'à quel point ce n'est qu'une opération de propagande, une opération publicitaire. Je voudrais demander au ministre s'il est d'accord avec une affirmation comme celle-là. "Ces résultats — là, il a donné des milliers d'emplois, évidemment, j'en ai fait le calcul, mais je n'ai pas le temps de les donner ce matin — ont sans doute contribué pour une part importante à la baisse spectaculaire du chômage observée en juillet: 11,4% à 10,5%, alors même que OSE atteignait son rythme de croisière ".

Je pense que là, le roi est nu parce qu'à ce moment-là, si c'est vrai et si le ministre prend crédit de cette baisse du taux de chômage pour le mois de juillet au Québec et qu'il impute cela à OSE, qu'est-ce qu'il va dire pour le mois d'août? Au mois d'août, le taux de chômage est repassé de 10,6% à 11%. Est-ce que OSE avait perdu sa vitesse de croisière? Est-ce que OSE avait perdu sa puissance à créer les emplois? Je pense que c'est une blague invraisemblable que d'aller dire des choses pareilles, d'aller dire que OSE a pu réduire le taux de chômage de près d'un point au cours d'un seul mois. Je pense qu'on a la mesure...

M. Tremblay: Une question de privilège, M. le Président...

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre, malheureusement...

M. Tremblay: On attaque le ministre au développement économique en le citant alors qu'il est absent. Je pense que si le député d'Outremont voulait avoir une discussion sur le programme OSE, il devrait interpeller le ministre d'État au développement économique.

M. Ciaccia: Vous n'avez pas fait ia même chose pour M. Jean-Noël Lavoie?

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre...

M. Ciaccia: Vous n'avez pas fait la même chose pour le leader parlementaire, M. Jean-Noël Lavoie, à l'appel de cette commission?

Le Président (M. Jolivet): Messieurs, vous grugez dans le temps du député d'Outremont et il lui reste deux minutes selon l'entente.

M. Raynauld: Alors, je veux dire, M. le Président...

M. Tremblay: Je ne peux pas accepter qu'on accuse un ministre absent.

M. Raynauld: Je n'accuse pas un ministre absent, c'est un rapport public qui est déposé. Vous pouvez le lire, c'est en page 6 du volume I.

M. Tremblay: Mais le ministre n'est pas ici pour vous répondre. (10 h 45)

M. Raynauld: Si vous voulez contredire, vous n'avez qu'à contredire. J'ai la source de la publication ici. Vous pouvez le défendre vous-même, si vous le voulez. Mais à ce moment-là, faites-le. Vous avez toute liberté de le faire, si vous voulez. Simplement, je souligne que c'est une affirmation absolument gratuite, une affirmation risible. J'en suis donc à me demander si tout le reste de l'opération OSE n'est pas encore une autre opération publicitaire, comme je l'ai dit tout à l'heure. (12 h 45)

Enfin, je voudrais mentionner que je n'ai quand même pas reçu de réponse aux questions précises que j'avais posées pour ce qui concerne, par exemple, la loi 48, une loi qui a été votée à l'initiative du ministre de l'Industrie et du Commerce.

M. Tremblay: Vous n'avez pas dit que vous vouliez discuter de cela, M. le député. Vous avez dit que c'était la construction à Montréal.

M. Raynauld: Oui, c'est la construction à Montréal, mais c'est tout à fait pertinent, puisqu'il s'agit du poids fiscal des entreprises et qu'il y a eu une réduction dans le poids fiscal pour les petites et moyennes entreprises.

M. Tremblay: Si vous me l'aviez dit, j'aurais apporté les renseignements. Je m'excuse, mais je n'étais pas au courant que vous vouliez discuter de cela.

M. Raynauld: Je n'ai pas pu avoir de réponse à cette question, pour savoir dans quelle mesure ceci avait contribué... Comme le ministre aime bien faire de grandes déclarations sans justement avoir les preuves à l'appui, j'aurais aimé qu'il nous donne les preuves à l'appui quant à cette loi 48 qui est la sienne, pour montrer combien d'investissements ont été mis dans les PME à Montréal, combien ont été créés. Je pense que la réponse aurait été fort intéressante à entendre.

Le Président (M. Jolivet): J'aimerais, M. le député, que vous concluiez.

M. Raynauld: Je conclus, M. le Président. Je ne voudrais pas conclure sur une note pessimiste, mais sur... Oui, sur une note pessimiste, pour ce qui me concerne...

M. Grégoire: Je vous ai deviné.

M. Ciaccia: On n'a pas le choix avec ce gouvernement.

M. Raynauld: ... sur le genre de débat que nous pouvons avoir dans cette enceinte. Nous avons entendu le ministre de l'Industrie et du Commerce nous parler de roi nègre, de faiblesse, d'ignorance et d'incompétence, de défaitisme, de cinquième colonne, d'adversaires du Québec, du sabotage et même de politicaillerie d'arrière-cour.

Je voudrais vous dire que ce genre de vocabulaire, c'est ce dont beaucoup de gens dans ce gouvernement aiment nous accuser. C'est du terrorisme verbal. Quand le ministre nous parle d'un refrain, s'il y a un refrain dans le Québec depuis deux ans, c'est bien celui-là, c'est d'accuser tout le monde d'être des saboteurs de l'économie du Québec, chaque fois que l'on veut poser des questions sur ce que le gouvernement du Québec fait pour essayer d'améliorer la situation. On nous dit aussi qu'on véhicule des slogans. Je n'accepte pas cette accusation, je ne l'accepterai jamais. De la part d'un ministre comme celui de l'Industrie et du Commerce, qui est responsable justement de l'activité économique, comment ne peut-il pas voir là qu'il manque gravement à ses responsabilités? Parce que c'est ce discours qui fait que l'économie du Québec ne va pas bien à l'heure actuelle. C'est justement quand le ministre de l'Industrie et du Commerce accuse tout le monde d'être des saboteurs et qu'il nous accuse d'être une cinquième colonne; il y a quand même des limites à accepter ainsi des insultes. C'est ce discours qui est responsable en grande partie, en dépit de toutes les mesures que le gouvernement pourrait prendre, s'il n'abandonne pas ce discours, accuser les gens d'être des saboteurs et des cinquièmes colonnes, il ne sera jamais possible de corriger la situation économique du Québec. Il faudrait peut-être finir par comprendre cela aussi. C'est ce que je trouve inacceptable quand on fait des débats. On essaie d'avoir des débats. Je ne pense pas avoir insulté le ministre...

Le Président (M. Jolivet): Je ne voudrais pas vous interrompre, mais, s'il vous plaît, ça fait déjà deux minutes et demie...

M. Raynauld: Oui, j'achève, M. le Président, j'en ai pour 30 secondes.

Le Président (M. Jolivet): D'accord.

M. Raynauld: Je voulais simplement terminer en disant que, si nous sommes des politicailleurs d'arrière-cour, M. le ministre de l'Industrie et du Commerce est un paon dans l'arrière-cour.

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre, vous avez le dernier droit de parole. Comme prévu, 15 minutes, cela fait jusqu'à 13 h 5, vous n'êtes pas obligé de prendre tout votre temps cependant.

M. Tremblay: Je voudrais tout le prendre, étant donné que c'est mon anniversaire de naissance et que le député d'Outremont vient de me faire un cadeau...

Le Président (M. Jolivet): Bonne fête, M. le ministre.

M. Grégoire: Bon anniversaire, M. le ministre.

M. Tremblay: Je déplore qu'on termine un débat à ce niveau, on descend dans l'arrière-cour. On est même descendu dans la cour à poulets.

M. Raynauld: C'est ça, c'est ça.

M. Tremblay: C'est vraiment le genre de choses qu'il faut déplorer. On vient de dire qu'il y a du terrorisme, que le gouvernement fait du terrorisme. C'est quand même incroyable, on renverse les choses et on veut maintenant accuser le gouvernement de faire ce que vous faites depuis un an et demi, deux ans, du terrorisme économique, faire peur. Chaque fois que vous ouvrez la bouche en Chambre, c'est pour essayer de dire qu'il y a de l'incertitude au Québec, que ça va mal, etc. Vous voulez maintenant renverser les choses. Je comprends que vous ayez un peu honte d'aller devant la population, avec un pareil programme. Je comprends. Mais je n'irai pas à ce niveau-là.

Évidemment, j'avais utilisé certains termes à la suite de l'intervention de M. Ciaccia qui utilisait les mots "désastre ", etc.

M. Ciaccia: À Montréal...

M. Tremblay: C'était simplement pour rétablir les faits. De toute façon, je n'ai pas l'intention de poursuivre sur ce plan, M. le Président. Par contre, je reviendrai au fond du débat et à la raison pour laquelle nous sommes ici ce matin. Le député d'Outremont, avant sa dernière incartade, vient de dire: Si le ministre avait amené des données sur la loi 48, etc., cela aurait été intéressant. Alors qu'il nous avait dit qu'il voulait maintenir le débat sur la construction à Montréal, alors que l'ordre de la Chambre était sur la construction pour l'ensemble du Québec, évidemment, il faut se brancher. Si on veut prévenir le ministre... On ne m'a pas prévenu qu'on allait discuter de tout le ministère de l'Industrie et du Commerce, du programme OSE, des sièges sociaux, le taux de chômage en général, etc.; il y avait tellement de questions auxquelles je n'ai pas pu répondre... Je n'ai pas pu répondre à ces questions en détail, faute de temps.

Mais si on m'avait prévenu, je serais venu... Dans le fond, je pense que le député d'Outremont a vraiment montré la vraie justification de cette interprétation et, comme je l'ai dit au début, cela aurait pu être retardé d'une semaine, étant donné que j'avais une réunion très importante avec les dirigeants de SIDBEC ce matin. La vraie raison était de faire la démonstration — il l'a dit lui-même tout à l'heure — qu'Ottawa, à Montréal, fait plus que Québec. Le député d'Outremont est un député du Parlement du Québec. Il a fait des études au Conseil économique du Canada pour faire des recommandations économiques, dans le domaine de la construction comme dans d'autres, au gouvernement fédéral. Elles n'ont jamais été acceptées et je pense qu'elles n'ont jamais été comprises, parce qu'il avait de bonnes recommandations; la preuve, c'est que nous en mettons une sur pied. Au niveau du commerce, on est pas mal sur la même longueur d'onde.

Mais venir ici, ce matin, démontrer, après la panique du gouvernement fédéral au cours du mois d'août, qui a annoncé des coupures à droite et à gauche, on ne savait plus dans quelle direction cela allait; les ententes interprovinciales, on les mettait au panier, on reniait tous les engagements; on donnait des subventions spéciales, par contre, alors qu'il n'y a aucun programme. D'ailleurs, ces gens ne le savent pas, ils vont prendre $40 millions pour Ford, il n'y a aucun programme, aucune loi qui leur permet de le faire; certains fonctionnaires fédéraux l'ont dit, devant ces décisions prises à l'aveuglette par les ministres, pour des raisons purement politiques, ils sont désemparés. Alors, devant cette chose, le député d'Outremont choisit de terminer son intervention en disant qu'il était venu ici pour démontrer que, effectivement, Ottawa était vraiment conscient des besoins de l'industrie de la construction à Montréal et y faisait beaucoup plus que le gouvernement du Québec.

Il y a là une contradiction énorme, puisque, comme je l'ai mentionné au début, l'étude que nous avons fait faire par le BSQ montre que les coupures d'investissement du gouvernement fédéral au Québec vont être tragiques dans une période de basse conjoncture. Donc, venir démontrer que le gouvernement fédéral fait énormément de choses, je ne m'y comprends plus. Mais je comprends, on va peut-être dire qu'il ne faut pas se préoccuper des faits, mais je pense qu'un gouvernement qui coupe les dépenses d'investissement au Québec présentement, alors que l'industrie de ta construction, à la suite du party des Olympiques, est en plein ralentissement — et cela est vrai — le fait que Montréal ait présentement un taux de croissance dans l'industrie de la construction moins intéressant que celui du reste du Québec, il n'y a personne pour nier cela, c'est évident. On ne peut pas avoir des parties chaque jour. On ne peut pas construire des monuments ostentatoires et improductifs en empruntant des milliards chaque jour, je comprends, parce que les impôts deviendraient insupportables.

À Montréal, c'est un des problèmes, avec ces parties improductifs qu'on se paie et qui ne créent pas d'emplois; une fois que le stade est construit, il y a quelques joueurs de football qu'on importe des États-Unis, quelques joueurs de baseball qu'on importe des États-Unis encore. Cela ne crée pas beaucoup d'emploi, $1,5 milliard de dépenses. Et on nous donne comme exemple — et je trouve cela vraiment ridicule, d'un ridicule consommé, et je parle comme économiste — on nous donne comme exemple que c'est pour raffermir une éco-

nomie. Grands dieux, grands dieux! Je vais retourner à l'Université de Montréal pour enseigner un peu plus aux prochaines générations, parce que si on a encore les mêmes générations de politiciens qu'on a eues depuis 100 ans, avec des théories semblables de soutien de l'activité économique c'est vraiment triste pour notre peuple. C'est vraiment triste! Je pensais qu'on avait fait un peu de progrès.

Heureusement, je pense, que le gouvernement est au pouvoir, on n'est pas dans l'Opposition, on peut donc au moins ne pas refaire les mêmes erreurs que les gouvernements passés ont faites. Mais, c'est quand même triste — il me reste quelques secondes avant de terminer — Le député d'Outremont a fait l'intervention, ce n'est pas vous qui l'avez fait, ayez-donc la politesse de me laisser terminer...

M. Ciaccia: Je vous ai demandé si vous me permettriez une question...

M. Tremblay: Non, je ne vous le permets pas, parce qu'on s'en va rencontrer le président de la Chambre dans quelques minutes. Donc, dire qu'Ottawa, le député d'Outremont se faisant le porte-parole d'Ottawa, le gouvernement...

M. Raynauld: Je l'attendais celle-là.

M. Grégoire: C'est parce que vous le saviez.

M. Raynauld: Le porte-parole d'Ottawa, ah! cela, c'est bon.

M. Tremblay: Vous avez dit vous-même qu'un de vos buts, c'était de démontrer...

M. Ciaccia: Ne répondez pas à mes questions, mais portez d'autres accusations.

M. Tremblay: ... qu'Ottawa était plus... On relira le journal des Débats, si vous voulez.

M. Raynauld: Oui, relisez-le.

M. Tremblay: Vous voulez démontrer qu'Ottta-wa a fait plus à Montréal qu'à Québec.

M. Raynauld: Le programme MEER, le contestez-vous?

M. Tremblay: Le programme MEER, parlons-en du programme MEER! Parlons-en du programme MEER!

M. Raynauld: $70 millions.

M. Tremblay: Mon collègue, le ministre Lessard, à Ottawa, pour qui j'ai beaucoup de sympathie parce qu'il passe un mauvais quart d'heure au cabinet, a même dit qu'il va se révolter si Ottawa fait la même chose que pour Ford et donne une subvention à GM pour aller en Ontario. Il a dit qu'il allait se révolter.

Il est passablement exaspéré lui-même de cette maudite politicaillerie qu'on fait à Ottawa sur le dos du Québec. J'ai beaucoup de sympathie pour le ministre Lessard, un chic type de la région de Chicoutimi. Il a annoncé, à la suite, la désignation de Montréal comme zone spéciale. Ce n'est pas une zone désignée, c'est une zone spéciale, seulement pour six secteurs d'ailleurs. L'année passée, pour la première année, il y a eu $10 millions de subventions, le quart d'une seule subvention pratiquement illégale sur le plan international pour Ford qui était de $40 millions. Là, on vient me donner ici, ce matin, à moi, ministre de l'Industrie et du Commerce, un exemple, cet exemple du MEER comme étant une contribution formidable du gouvernement fédéral à la relance de l'industrie à Montréal. Mais alors, il ne faut pas rire des gens, quand même.

M. Raynauld: Vous, c'est $2 millions.

M. Tremblay: Non, vous êtes malhonnête. J'utilise le mot "malhonnête" sciemment. Je vous ai expliqué tout à l'heure qu'à la SDI, les deux petits programmes qu'on a d'en haut, ce sont les deux programmes les plus petits du ministère de l'Industrie et du Commerce. Là, vous revenez encore à la charge pour faire de la démagogie. J'appelle cela comme cela. Vous savez fort bien que la SDI investit $200 millions pour l'ensemble du Québec, par année, ce ne sont pas les $7 millions que j'ai mentionnés tout à l'heure et les $15 millions pour l'industrie traditionnelle. Là, vous voulez encore, dans les dernières minutes, jeter de la poudre aux yeux.

M. Raynauld: Votre programme OSE.

M. Tremblay: Votre programme OSE, si vous voulez interpeller le ministre responsable, vous l'interpellerez.

M. Raynauld: Vous avez osé...

M. Tremblay: Je suis responsable de la SDI et je vais vous dire que vous n'avez pas le droit de me lancer des faussetés comme cela à la dernière minute, alors que je ne peux pas réagir. Mais, finalement — je pense que le député de Frontenac a touché juste et cela va dans la suite des grandes lignes de l'étude du BSQ, de l'impact de la coupure des investissements fédéraux au Québec sur l'emploi — c'est que les sociétés d'État et le gouvernement fédéral, de tout temps — mais là, cela s'intensifie pour des raisons électorales — dépensent très peu de leurs dépenses créatrices d'emplois au Québec. Dans les comptes économiques, pour les années 1961 à 1976, cela a été démontré — cela n'a jamais été nié par personne que seulement 16,3% en moyenne des dépenses créatrices d'emplois, pour les investissements, les emplois, etc., du gouvernement fédéral se produisaient au Québec, alors qu'on a 27% de la population canadienne. Cela ne touchait pas aux sociétés d'État.

Évidemment, si vous introduisez le CNR, comme l'a fait très justement le député de Frontenac, des chemins de fer, on n'en a pas construit beaucoup au Québec. Évidemment, on s'est servi des impôts du Québec pendant un siècle, dit-on, mais cela a commencé après l'Acte d'Union en 1840 pour financer le développement des chemins de fer de l'Ouest canadien, et on faisait payer à nos pauvres cultivateurs du temps le développement des chemins de fer dans l'Ouest. C'est irréfutable. Des économistes comme Faucher, comme Lamontagne dans le temps, des historiens comme Brunet et d'autres l'ont bien démontré. Quand vous parlez du CNR, même encore aujourd'hui, le CNR vient de construire une de ces tours de prestige au centre de Toronto. Ce n'est pas une entreprise privée à Toronto, le CNR, la tour qu'il a construite, cette tour de prestige. Le gouvernement fédéral est non seulement procyclique dans l'industrie de la construction au Québec, ce qui est absolument irresponsable au plan économique, mais au plan du développement industriel au Canada, il renforce les plus forts et affaiblit les faibles. La tour du CN, avec des fonds publics, on fout cela à Toronto, évidemment, du fait que c'est le centre du marché canadien où il y a le plus d'activités de construction. Au lieu de diversifier cela, on fourre cela à Toronto. Des sociétés d'État, il y en a 330 à Ottawa. On en a découvert quatre récemment qui...

M. Raynauld: En même temps, on faisait Radio-Canada à Montréal, à ce moment. Dites-le donc aussi, en passant.

M. Tremblay: Une tour de prestige du CN, mais, par contre, lorsqu'il s'agit de maintenir des services de trains, passez cela au gouvernement du Québec. Faisons payer cela par le trésor public. Les poubelles, envoyons cela à Québec, qui va taxer, alors qu'Ottawa a un budget de $47 milliards cette année. C'est à peu près le produit national brut du Québec. C'est quand même incroyable, il faut regarder les faits. C'est le produit national brut du Québec qu'a Ottawa. On a un déficit qui va être au moins de $12 milliards aux comptes nationaux, et peut-être plus encore. On fait très peu au Québec de dépenses créatrices d'emplois, on les coupe, au contraire. LaPrade, évidemment. Il y a eu des pressions du ministre de l'Énergie de l'Ontario pour que ce projet soit bloqué, comme dans le cas de la taxe de vente, comme dans le cas de Ford. C'est encore la même maudite affaire. L'Ontario a deux gouvernements. Il a le gouvernement qui lui est propre et il a celui qui est à Ottawa. Ottawa est non seulement l'Ontario, physiquement et géographiquement, il l'est au niveau des politiques et c'est irréfutable. (13 heures)

L'exemple de LaPrade est vraiment scandaleux, parce que le gouvernement du Québec, avait eu moult hésitations, avant de passer au nucléaire. C'est sous la pression du gouvernement fédéral que nous sommes allés dans le nucléaire et avons garanti que Gentilly III allait être construit. Vous vous rappelez le débat? Or, après avoir fait...

M. Raynauld: ... les deux... Amen.

M. Tremblay: ... un contrat en bonne et due forme pour maintenir ce chantier important, alors qu'on avait tellement donné à Chalk River, alors que le fédéral avait subventionné pendant trente ans le développement de l'industrie de l'uranium, la recherche et tout en Ontario, avec Chalk River, il y avait une petite miette qui s'appelait LaPrade.

Ils veulent nous enlever même les miettes. Ils veulent même venir nous enlever les miettes. Si ce n'est pas dégueulasse! Alors qu'on prend nos impôts, non seulement les sociétés d'assurances viennent siphonner le Québec pour aller développer le reste du Canada avec nos impôts, et ça se fait depuis l'Acte d'Union, ça, depuis 1840. On peut le démontrer. Cela a été tellement étayé. J'ai même écrit un livre qui s'appelle "L'économie québécoise" où c'est bien étayé encore.

M. Raynauld: Pardon?

M. Tremblay: "L'économie québécoise".

M. Raynauld: Vous avez écrit un livre, vous?

M. Grégoire: ...

M. Tremblay: Pour les...

M. Raynauld: C'est une collection d'articles, ça. Ce n'est pas un livre que vous avez écrit.

M. Tremblay: Oui, je suis l'éditeur...

M. Raynauld: Non, ce n'est pas ça, là, de nouveau... Soyez précis à cet égard. "L'économie québécoise", c'est une collection d'articles...

M. Tremblay: Une collection, justement... M. Raynauld: ... dont vous n'êtes pas l'auteur.

M. Tremblay: ... avec des articles qui démontrent justement ce que je dis. J'ai mentionné tout à l'heure plusieurs auteurs.

M. Raynauld: Ah bon! Cela, c'est différent! M. Tremblay: Et, si vous voulez avoir... M. Raynauld: Vous n'êtes pas l'auteur.

M. Tremblay: ... de mes livres, allez consulter les autres...

M. Raynauld: Lequel autre? Bouchette...

M. Tremblay: ... livres.

M. Raynauld: Errol Bouchette, peut-être?

M. Tremblay: Pourquoi ne le consultez-vous pas, Errol Bouchette?

M. Raynauld: Je l'ai consulté et je me suis aperçu que j'avais lu Errol Bouchette, pas Rodrigue Tremblay. C'est encore un livre qui est à votre nom, ça?

M. Tremblay: Bon! Avez-vous d'autres interventions...

M. Raynauld: Oui, j'en aurais d'autres, mais je ne les dirai pas.

M. Tremblay: ... de cette... J'en aurais aussi. M. Raynauld: C'est parce que c'est vous qui...

M. Tremblay: Si vous voulez commencer à lancer ce genre de choses, vous êtes sur un terrain peut-être plus mouvant que vous pensez.

Donc, lorsqu'on dit qu'on vient...

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre, je tiens à vous avertir qu'il vous reste une minute.

M. Tremblay: Oui, mais là, on vient de m'interrompre à droite et à gauche...

Le Président (M. Jolivet): Je le sais, mais il reste...

M. Raynauld: Donnez-lui une minute de plus.

M. Tremblay: Donc, on vient couper les dépenses alors que non seulement le gouvernement fédéral prend des fonds pour aller les investir ailleurs qu'au Québec, mais, en plus, on a des compagnies financières qui ont toujours fait cela, et lorsqu'un gouvernement du Québec commence à se préoccuper de ce problème, on crie aux grands maux. C'est terrible! C'est terrible de se préoccuper de cela. Vous créez de l'incertitude. Voyons donc! Cessez donc de respirer! Vous faites peur à nos maîtres! Ne bougez pas trop vite. Il faut faire attention. Laissez donc les choses aller lentement comme elles ont toujours été. C'est beaucoup plus sécurisant, etc.

Je pense que ce genre de débat, finalement, parce que sous prétexte, comme le député d'Outremont l'a bien mentionné, que ce n'était pas pour discuter de l'industrie à Montréal, parce que lui-même a soulevé tous les problèmes des sièges sociaux jusqu'à la contribution d'Ottawa, en passant par l'inévitabilité ou la non-inévitabilité de l'indépendance, etc.. Il a soulevé tout ça dans sa première intervention. Donc, ce n'était pas une provocation, c'était lui qui soulevait tout ça. Il est évident que c'était vraiment un prétexte, et je pense que s'ils veulent continuer à aller sur ce plan, moi, je suis tout à fait d'accord et je serais d'accord pour qu'on amène les caméras ici, parce que, finalement, c'est le bon sens qui démontre que ce genre de petit argument... Il parlait tout à l'heure de terrorisme. C'est vrai. C'est vraiment du terrorisme que de faire peur aux Québécois. Progager les mythes de toute notre histoire... Certains rois nègres, pour maintenir leur position de privilège, font véhiculer au profit de nos vrais maîtres...

Si on veut continuer comme cela, je suis tout à fait d'accord; et des commissions comme celle-là, je suis prêt à en faire chaque vendredi. Évidemment, on ne pourra pas me critiquer de ne pas m'occuper des sociétés d'État, mais je suis prêt à le faire chaque vendredi, parce que finalement — je pense que l'intervention du député de Frontenac le démontre aussi — cela revient à la question de s'occuper de nos affaires dans le domaine économique. Si nous nous en occupons, avec un gouvernement comme celui que nous avons qui, au lieu de déstabiliser l'économie, la stabilise, je pense qu'on va commencer à avancer au lieu de se référer toujours à d'autres qui, je pense — cela commence à être de plus en plus clair — essaient plutôt de nous déstabiliser et de nous démotiver.

Le Président (M. Jolivet): Merci, M. le ministre, merci à tous les intervenants de ce matin. La séance est terminée.

(Fin de !a séance à 13 h 5)

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