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Étude du projet de loi no 37
(Vingt heures 26 minutes)
Le Président (M. Boucher): À l'ordre,
messieurs!
La commission permanente de l'industrie et du commerce est réunie
pour étudier le projet de loi no 37, Loi constituant l'Institut national
de productivité.
Les membres de la commission sont: M. Ciaccia (Mont-Royal), M. Goulet
(Bellechasse), remplace M. Dubois (Huntingdon); M. Gosselin (Sherbrooke), M.
Perron (Duplessis) remplace M. Grégoire (Frontenac); M. Michaud
(Laprairie) remplace Mme Leblanc (Îles-de-la-Madeleine); M. Lefebvre
(Viau), M. Gagnon (Champlain) remplace M. Ouellette (Beauce-Nord); M. Raynauld
(Outremont), M. Shaw (Pointe-Claire), M. Tremblay (Gouin).
Les intervenants sont: M. Caron (Verdun), M. Godin (Mercier), M. Landry
(Fabre), M. Roy (Beauce-Sud), M. Samson (Rouyn-Noranda), M. Vaillancourt
(Orford).
Est-ce qu'il y a un rapporteur? M. le député de
Laprairie?
M. Michaud: Avec plaisir, M. le Président.
Le Président (M. Boucher): Le député de
Laprairie sera donc rapporteur. Adopté? M. le ministre.
Remarques préliminaires M. Rodrigue
Tremblay
M. Tremblay: M. le Président, nous avons adopté en
deuxième lecture le principe de la création d'un Institut
national de productivité. Effectivement, l'Assemblée nationale a
adopté à l'unanimité ce principe. Ce soir, il me fait
plaisir de présenter le projet de loi, article par article, et de le
débattre avec les membres de la commission de l'industrie et du
commerce.
Je rappellerais brièvement, M. le Président, que la
création de l'Institut national de productivité s'est faite
à la suite d'une consultation passablement intense avec les milieux
concernés.
En réalité, l'idée même de la création
d'un tel institut a pris naissance au sommet économique que le
gouvernement a tenu avec les agents économiques à La Malbaie au
printemps dernier, en 1977.
Les participants ont formulé le souhait que le Québec se
dote d'un instrument, d'une sorte d'ombudsman, afin de jouer le rôle de
catalyseur dans notre économie pour accroître la
productivité.
Or, vous vous rappelez, M. le Président, que nous avions
déposé, en décembre dernier, un premier projet de loi
créant l'Institut national de productivité, qui était le
projet de loi no 80. La fin de la session nous a empêchés de
procéder au-delà de la première lecture du projet de
loi.
Nous avons profité, par contre, des mois entre décembre
1977 et juin 1978 pour effectuer toute une série de consultations. Dans
le monde des affaires, la Chambre de commerce du Québec, le Conseil du
patronat du Québec et le Centre des dirigeants d'entreprises, ont
communiqué leurs commentaires au gouvernement et au ministre de
l'Industrie et du Commerce en particulier. D'autre part dans le monde syndical,
il y a eu des consultations faites par mon collègue, le ministre au
Développement économique, auprès de la
Fédération des travailleurs du Québec, de la Centrale des
enseignants du Québec et du Syndicat des fonctionnaires de la province
de Québec.
De plus, le Conseil consultatif du travail et de la main-d'oeuvre a
débattu le sujet en question et a aussi formulé des suggestions.
De sorte que nous avons modifié quelque peu le projet de loi initial,
c'est-à-dire celui qui avait été présenté en
décembre pour refléter certaines des recommandations qui nous ont
été faites suite au processus de consultation. Il va de soi, M.
le Président, qu'il était nécessaire de faire ce genre de
consultations, puisqu'un tel organisme va devoir, pour avoir une influence
réelle et déterminante sur la productivité et l'effort
économique au Québec, avoir la coopération des milieux des
affaires et des milieux syndicaux. (20 h 30)
L'aspect concertation de son action est très important et
découle aussi de la crédibilité qu'aura l'institut dans
ces milieux. Il est vrai que, dans le passé, on créait des
instituts au niveau fédéral qui pouvaient ressembler un peu dans
leurs fonctions à celui que nous créons présentement.
L'idée de concertation économique, par contre, est une
idée relativement neuve en Amérique du Nord. Elle existe depuis
de nombreuses années en Europe, où le degré de
solidarité économique entre les agents économiques est
beaucoup plus développé qu'il ne l'est en Amérique du
Nord.
Or, dans le cas du Québec, puisque nous avons un rattrapage
à faire sur le plan économique, puisqu'il va nous falloir, au
cours des prochaines années, peut-être répéter sur
le plan économique ce que nous avons fait au niveau culturel avec la
Révolution tranquille des années soixante et que nous nous
apprêtons à faire sur le plan politique, il va falloir faire sur
le plan économique des rattrapages, comme je le disais, et des efforts
qui vont exiger une solidarité dans l'action et une concertation dans
les objectifs et dans les moyens qu'il faudra prendre pour raffermir
l'économie du Québec, mettre en marche des moyens pour
reconquérir la place qui revient aux Québécois dans leur
économie et finalement devenir davantage chez soi dans l'économie
québécoise.
M. le Président, je voulais faire ces quelques remarques et je
ferais, avec votre assentiment, la proposition d'adoption de l'article 1 du
projet de loi no 37.
Le Président (M. Boucher): M. le député
d'Outremont.
M. Raynauld: Merci, M. le Président. Je vais m'en tenir
aux règles strictes de l'étude article par article et je vais
immédiatement m'arrêter à l'article 1. Cet article 1 donne
un nom à cet institut.
Le Président (M. Boucher): N'ayant pas appelé
encore l'article 1, est-ce que le député de Bellechasse aurait
des commentaires généraux sur le projet de loi?
M. Raynauld: II a proposé l'adoption de l'article 1.
Le Président (M. Boucher): Je n'ai pas appelé
l'article 1, étant donné qu'au début des commissions vous
pouvez faire des commentaires généraux avant de passer à
l'article 1.
M. Goulet: En ce qui me concerne, M. le Président, les
commentaires généraux ont été faits pas mal en
deuxième lecture. Il y a seulement au niveau des notes explicatives,
mais on y reviendra à l'article 20, sur les objectifs poursuivis
c'est 20 ou 21 où il manque un objectif fondamental, et on y
reviendra, à moins qu'on ne puisse pas se rendre à l'article 20.
Je n'ai pas consulté mon collègue d'Outremont la-dessus.
M. Raynauld: On peut siéger jusqu'à cinq heures
demain matin.
M. Goulet: Oui? Comme cela, on y reviendra à l'article 20.
Pas de problème.
Le Président (M. Boucher): Nous siégeons
jusqu'à minuit.
M. Michaud: ...
Le Président (M. Boucher): La commission doit terminer ses
travaux à minuit.
M. Goulet: Au niveau des commentaires, M. le Président, je
serais d'accord qu'on en vienne à l'article 1.
Le Président (M. Boucher): D'accord. Alors, j'appelle
l'article 1. M. le député d'Outremont.
Constitution et composition de l'institut
M. Raynauld: M. le Président, à l'article 1, je
voudrais m'inscrire en faux contre cette tendance que nous avons au
Québec de tout appeler national et je voudrais suggérer de
supprimer le mot, l'adjectif "national" dans le nom de cet institut de
productivité. Je pense que c'est un gonflement...
Le Président (M. Boucher): Est-ce qu'il s'agit là
d'une motion?
M. Raynauld: C'est une motion, M. le Président.
Le Président (M. Boucher): Vous allez la rédiger
pour qu'on puisse...
M. Raynauld: La motion est de retirer...
M. Tremblay: Vous voulez abolir l'Union Nationale aussi?
M. Raynauld: Non, l'Union Nationale est une union de
toutes...
M. Goulet: C'est la seule chose qui est nationale au
Québec actuellement.
M. Raynauld: C'est cela, c'est l'union. M. Goulet: C'est
l'union, justement.
M. Raynauld: Mais l'Institut national de productivité, je
trouve que c'est franchement...
Le Président (M. Boucher): M. le député
d'Outremont, avant de discuter du fond de la motion, je crois qu'à sa
face même, si vous voulez enlever un mot du nom de l'institution, cette
motion est recevable.
Je la reçois et vous pouvez discuter sur le fond.
M. Raynauld: Merci. M. le Président, je pensais qu'elle
était recevable. Je ne veux pas m'éter-niser sur ce point, mais
je voudrais quand même dire qu'ajouter des expressions de ce genre, c'est
du battage de bretelles, c'est vraiment un gonflement de colonisé qui,
en ce qui me concerne, me gêne beaucoup, parce que je trouve qu'on
insiste tellement avec des expressions de ce genre. Je trouve que ce n'est pas
une attitude d'adultes, ce n'est pas une attitude de personnes qui sont
vraiment sûres de leurs faits et on insiste pour mettre des expressions
comme celles-là pour tâcher de donner le change à quelqu'un
d'autre. On ne sait pas à qui, d'ailleurs, parce qui est-ce que
ça dérange, ajouter des expressions comme celles-là?
Je trouve qu'il vaudrait la peine de considérer
sérieusement la proposition d'amendement que je présente. Ce
n'est évidemment pas dans tous les cas que le gouvernement utilise ce
genre d'expression, mais il l'a fait pour la Société nationale de
l'amiante et sans doute pour d'autres organismes semblables. Franchement, je
trouve que ça n'ajoute absolument rien à la réalité
des choses. C'est vraiment le genre d'expression qui me gêne, dans le
sens où je l'ai dit tout à l'heure. C'est qu'on a vraiment l'air
de gens qui avons besoin d'affirmations, gratuites d'ailleurs, absolument
gratuites, de vocabulaire. Je trouve que ce serait une bonne occasion de
supprimer tout simplement l'adjectif et d'appeler cet institut, l'Institut de
productivité du Québec, par exemple, si on veut, même si,
dans la motion que j'ai présentée, j'ai enlevé le mot
"national".
Le Président (M. Boucher): Vous ajoutez quelque chose
à votre motion.
M. Raynauld: M. le Président, je n'ai pas l'intention ce
soir de vous faire toujours des
motions écrites. Je n'ai pas d'assistants de recherche pour les
préparer. Je voudrais plutôt qu'on essaie de s'entendre sur le
fond. Je m'aperçois que, si ça s'appelle seulement l'Institut de
productivité, ça fait un peu court. Alors, on pourrait l'appeler
l'Institut de productivité du Québec, par exemple. Il y a des
précédents. Il y a l'IREQ, l'Institut de recheche en
énergie du Québec, je pense.
Le Président (M. Boucher): M. le député
d'Outremont, est-ce que ce serait conforme à votre motion que de dire:
"Que l'article 1 soit modifié en biffant, à la deuxième
ligne dudit article, le mot "national " et en ajoutant, à la fin,
après le mot productivité, les mots "du Québec "?
M. Raynauld: Ce serait tout à fait exact, M. le
Président.
Le Président (M. Boucher): D'accord.
M. Raynauld: Cela exprimerait exactement mon intention. J'en fais
donc une motion en bonne et due forme. Comme je ne veux pas faire perdre le
temps de la commission inutilement, je vais m'arrêter ici.
Le Président (M. Boucher): Sur la motion de M. le
député d'Outremont, M. le ministre.
M. Tremblay: Je vois avouer, M. le Président, que
l'intervention du député d'Outremont me choque, me
déçoit, je dirais même me scandalise. Je déplore que
nous commencions notre discussion ce soir par ce genre de
démarche...
M. Raynauld: C'est l'article 1.
M. Tremblay: ... qui n'ajoute rien et qui est de nature
négative, surtout lorsqu'on étudie un projet pour créer un
Institut national de productivité.
J'ai mentionné tout à l'heure le besoin de
solidarité dont nous avions besoin au Québec présentement
et dont nous aurons davantage besoin dans l'avenir. J'indiquais indirectement
que, dans le passé, la tragédie des Québécois et
des francophones en Amérique du Nord a été le manque de
solidarité. On a voulu diviser les Québécois pour mieux
régner, pour mieux les satelliser, pour mieux les coloniser. Lorsqu'on
se rapproche d'une volonté nationale pour une action commune, une action
de solidarité, il y a encore des éléments dans notre
population qui voudraient fragmenter notre poids, notre force afin de permettre
aux autres, par contre, de se solidariser et de mieux nous contrôler.
Ce sont des éléments importants pour la croissance
économique. J'ai mentionné que plusieurs pays européens
avaient cette solidarité. Je pense qu'on a aussi cette solidarité
aux États-Unis. Je pense aussi que le Canada anglais, depuis quelques
années, depuis une décennie, développe une
solidarité, du moins en Ontario. Il y a une certaine solidarité
autour de Toronto comme pôle politique financier et
économique.
Je déplore que le député d'Outremont introduise un
élément semblable dans la discussion. C'est une mentalité
qui, finalement, est peut-être à la source même de nos maux
économiques au Québec. C'est fondamentalement une
mentalité de dépendance vis-à-vis des autres, un manque de
confiance en soi, un certain complexe d'infériorité qui a
toujours caractérisé notre population pour des raisons
évidemment structurelles. Nous avons été pendant longtemps
un peuple d'agriculteurs cantonnés après la conquête.
Lorsque nous sommes venus dans les villes, avec le phénomène de
l'urbanisation, nous avons trouvé le domaine du commerce et de
l'industrie occupé par des intérêts qui étaient
proches des conquérants. Il nous a fallu, pendant deux siècles,
pouce par pouce, reconquérir le terrain, premièrement, sur le
plan politique, parce qu'on était "défranchisé" dans la
plupart des domaines. Sur le plan économique, évidemment, cette
reconquête est encore très loin d'être
réalisée, puisque le député d'Outremont
devrait le savoir lui-même, il a déjà fait des
études les Québécois francophones ne
contrôlent que 20% de leur propre économie dans le secteur de la
fabrication et une bonne partie des ressources naturelles de notre territoire
sont utilisées à l'extérieur pour les
intérêts des autres et nous sont renvoyés
transformées, alors que nous avons un haut taux de chômage et que
nous aurions besoin, socialement, culturellement et politiquement, d'avoir des
ressources économiques plus abondantes.
Je déplore, M. le Président, cette attitude que l'on
retrouve surtout chez le Parti libéral du Québec, moins au niveau
de l'Union Nationale, quoique leur chef soit un ancien libéral qui ait
encore les mêmes attitudes, parfois oui, parfois non. Mais il y a un
élément de satellisation que je pense qu'il faut dénoncer.
Ceci est absolument légitime...
M. Goulet: Cela commence mal.
M. Tremblay: ... c'est peut-être le point central. On a
voulu faire croire aux Québécois que le fait de se tenir debout
était une position anormale et que c'était illégitime,
alors que tous les peuples, dans la solidarité internationale, doivent,
pour mieux contribuer à la richesse mondiale, faire des efforts maximaux
pour améliorer leur bien-être et en même temps
améliorer le bien-être de l'ensemble de l'humanité.
Or, nous au Québec, on a laissé le développement de
notre économie se faire par les autres et pour les autres. Je crois que,
si nous en sommes rendus au point de maturité où nous songeons
maintenant, même avec un gouvernement provincial, à nous doter
d'un Institut national de productivité, c'est parce qu'on commence
à réaliser qu'en économique, rien n'est gratuit et qu'il
nous faut occuper nous-mêmes la place qui est la nôtre. Comme le
disait l'abbé Groulx, "prendre sa place, ce n'est pas prendre la place
des autres". C'est tout à fait normal. C'est un signe de
maturité. Le fait que nous ayons la possibilité de créer
un Institut national de productivité, que les agents
économiques commencent à réaliser que chacun a une
contribution à faire dans le domaine de la productivité, je pense
que c'est une indication qu'au Québec, nous avons fait
énormément de chemin. (20 h 45)
M. le Président, au lieu de commencer une discussion sur la
création d'un institut, qui est quand même passablement important
dans l'évolution de la pensée économique et de la
pensée politique au Québec, au lieu de vouloir nous rapetisser
dans nos efforts, je pense qu'on devrait plutôt encourager cette prise de
conscience nationale des Québécois dans le fonctionnement de leur
économie, la responsabilité de chacun et de chacune des
Québécois et des Québécoises dans ce fonctionnement
et dans cette croissance, plutôt que d'adopter une attitude
négative.
Le Président (M. Boucher): Merci, M. le ministre. M. le
député de Bellechasse.
M. Goulet: M. le Président, je ne serai pas aussi cinglant
que le ministre, ni que le député d'Outremont, tout dépend
des propos qu'ils ont employés. Comme représentant de l'Union
Nationale, c'est entendu que le mot "national", je le trouve très beau,
quant au principe du mot "national". En ce qui nous concerne, nous, de l'Union
Nationale, je pense que, véritablement, on a toujours visé la
productivité. On ne s'en est jamais tellement tenu au contenant, mais
bien au contenu et surtout aux résultats. Je pense que c'est ce qui
compte. Notre parti étant reconnu comme un parti nationaliste, il va de
soi que le mot "national" dans le nom de cet institut, nous pouvons l'appuyer.
Maintenant, que l'institut s'appelle Institut national de productivité
ou Institut de productivité du Québec, je pense que ce qui
comptera surtout, ce seront les résultats que nous pourrons en obtenir.
Je ne vais pas plus loin dans ce débat, non pas que je ne veuille pas me
prononcer, mais je ne voudrais pas non plus être aussi cinglant que mes
deux prédécesseurs. Ce que nous visons surtout de notre
côté, c'est la productivité et les résultats.
Alors, que ça s'appelle Institut national de productivité
ou l'Institut de productivité du Québec, M. le Président,
je ne vois pas tellement la différence. En ce qui concerne le mot
"national", je l'aime bien, en tant que représentant d'un parti
nationaliste. On pourrait dire "Institut national de productivité du
Québec," ça contenterait peut-être les deux. J'y vais
là-dessus, M. le Président, et si j'ai à me prononcer sur
l'un ou l'autre des deux noms, je ferai savoir mon opinion lors du vote.
Le Président (M. Boucher): Merci, M. le
député de Bellechasse.
M. le député de Duplessis.
M. Perron: Merci, M. le Président. Moi, je peux dire que
j'abonde dans le même sens que le ministre, ainsi que certaines allusions
qu'a faites le député de Bellechasse en rapport avec le truc qu'a
entrepris le parti de l'Opposition officielle en ce qui a trait à
certains mots qui le chatouillent énormément.
Quand je parle de chatouillage, en tout cas. en ce qui a irait au
député d'Outremont, je ne comprends vraiment pas pourquoi il a
amené cette motion d'amendement. Lorsqu'il a dit que ça lui
semblait colonisé, je pense que c'est plutôt l'inverse qu'on est
en train de faire. Ayant toujours été colonisés, je pense
qu'il faut absolument démontrer notre entité nationale, il faut
absolument démontrer que ça donne quelque chose au Québec
que de s'identifier par des termes très précis, et s'il y a un
terme qui est précis au Québec, c'est bien le mot "national".
Pour moi cette identité québécoise a des buts et
des besoins très précis, qui proviennent surtout des besoins de
la société dans laquelle nous vivons. À moins que je ne me
trompe, le député d'Outremont a fait allusion à l'IREQ. Si
ma mémoire est bonne, l'IREQ ne fut pas créé, ne fut pas
fondé par une loi, mais bien par l'Hydro-Québec, par la
société elle-même. Cela n'a aucun rapport, sinon que le
gouvernement du temps était en accord parfait avec l'Hydro-Québec
lorsqu'elle a fondé cet institut. M. le Président, je termine
là-dessus en disant que je voterai sûrement contre cette motion du
député d'Outremont. Je pense que cela a été
charrier un peu que de commencer à jouer sur les mots en ce qui a trait
au projet de loi no 37.
Merci, M. le Président.
Le Président (M. Boucher): Merci. M. le
député de Duplessis.
M. le député de Laprairie.
M. Michaud: Merci, M. le Président. J'ai été
peiné d'entendre le député d'Outremont dire que le mot
"national" le gênait. Franchement, s'il y avait plus de personne ici,
dans l'assistance, ces personnes auraient été gênées
de vous entendre dire ça, parce que cela les aurait
dérangé énormément. Dans le passé, nous
avons beaucoup manqué de solidarité et de fierté, ce qui
en a porté quelques-uns à se coloniser. Il faut être fier
d'être Québécois et il faut être fier de la nation
québécoise, parce que, réellement, il existe une nation
québécoise, avec une langue, une culture, une manière de
vivre et pourquoi ne pas l'utiliser dans un institut national de
productivité? Je suis persuadé que cela n'enlèvera rien
à la productivité; s'il y a queique chose, cela va en ajouter,
parce que la majorité des québécois vont en être
très fiers. C'est pour ces raisons on pourrait en donner des
dizaines d'autres que je voterai contre cette motion.
Le Président (M. Boucher): Merci, M. le
député de Laprairie. M. le député d'Outremont,
votre réplique.
M. Raynauld: Oui, ma réplique sera très
brève. Il y a quelques mois, je suis allé à Toronto et
j'ai rencontré un ami qui a commencé à discuter avec
une autre personne sur le fait qu'à Toronto, depuis quelques
années, on mangeait de mieux en mieux, il y avait de bons
cinémas, il y avait maintenant du bon théâtre, de la bonne
musique; de plus en plus, Toronto devenait une ville civilisée et
prenait de l'avance sur Montréal. L'autre personne qui écoutait
cela, à un moment donné, a dit: J'y croirai lorsque vous cesserez
d'en parler. C'est le même problème qu'on a ici. L'affirmation,
elle doit être dans les faits, et l'affirmation, elle doit être
dans les réalités. Je pense que cela serait beaucoup mieux pour
nous qu'elle soit là plutôt que dans des affirmations purement
verbales. Je comprends que cela a une certaine valeur symbolique, mais, quand
je vous dis que cet Institut de productivité, c'est quand même un
institut de productivité du Québec, je ne prétends pas,
à ce moment-là, essayer de nier cette réalité. Mais
quand le ministre nous dit que c'est un facteur qu'on devrait rechercher, la
solidarité, vous savez qu'à l'heure actuelle, ce sont des mots
qui divisent. Ils n'unissent pas, ils divisent.
M. Perron: Est-ce que je peux poser une question?
M. Raynauld: Excusez-moi, cela fait seulement une minute que je
parle; je vais terminer. Enfin, le problème que cela me pose, c'est que
c'est inexact comme expression. Aussi longtemps qu'on fait partie d'un pays, on
ne peut pas réclamer pour soi-même qu'on crée des instituts
nationaux. Quand le Québec sera indépendant, si vous
réussissez à convaincre la population, cela sera exact de parler
d'instituts nationaux. Aussi longtemps qu'on n'est pas un pays
indépendant, c'est, j'ai dit cela tout à l'heure, une vantardise.
On affirme dans des mots. Je n'ai pas des objections fondamentales, mais
j'essaie de vous expliquer la raison pour laquelle cela me gêne.
M. Michaud: C'est une réalité.
M. Raynauld: C'est une réalité de l'avenir pour
vous. Ce n'est pas une réalité pour moi. Ce n'est pas une
réalité tout court. C'est inexact, à l'heure actuelle, de
parler d'organismes nationaux, lorsqu'on fait partie d'un pays. Alors, je le
dis, c'est une affirmation verbale et je préférerais qu'on fasse
des efforts pour faire des affirmations dans les faits et prendre la place qui
nous revient. Je suis le premier à réclamer cela, dans les mots,
dans les titres. Franchement, si c'est pour diviser les gens, pourquoi insister
continuellement? C'est cela qui arrive de plus en plus à l'heure
actuelle et c'est cela qui polarise l'opinion dans bien des cas.
M. Tremblay: M. le Président...
M. Raynauld: Je m'arrête là, M. le Président,
parce que je n'avais pas pensé qu'on passerait toute la soirée
là-dessus.
M. Tremblay: M. le Président, il y a quand même
quelques points à relever. Lorsque le dépu- té dit que
ceci divise, que le mot national pourrait diviser, je peux assurer les membres
de cette commission qu'après six à sept mois de consultations
à droite et à gauche, dans tous les milieux économiques du
Québec, c'est la première fois que j'entends quelqu'un mettre en
doute l'opportunité de mettre le mot "national" dans le nom de
l'institut. Il y a peut-être une petite minorité de gens au
Québec qui sont déracinés, qui se sentent mal à
l'aise de se sentir dans un Québec qui serait la concrétisation
de la nation des francophones en Amérique du Nord, mais, pour la
majorité de la population, ceci va de soi. L'Assemblée nationale
n'a pas été nommée par le gouvernement du Parti
québécois, elle a été nommée par le
gouvernement de l'Union Nationale, à ma connaissance, sous Daniel
Johnson, et lorsqu'on parle de le mettre dans les faits, le Québec
représente une nation au sens sociologique du terme, au sens culturel du
terme et, dans les faits, dans quelques années, ce sera confirmé
au sens politique aussi. M. le Président, on pourrait longuement
argumenter sur la notion anglaise du mot "nation", que l'on utilise à
toutes les sauces dans le Canada anglais présentement et la notion
française du mot "nation ". En ce qui me concerne, ma langue est la
langue française et j'utilise la notion française du mot "nation"
et c'est celle que l'on retrouve dans l'Institut national de
productivité.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Duplessis.
M. Perron: M. le Président, j'avais demandé au
député d'Outremont la permission de lui poser une question
lorsqu'il a fait un certain exposé en rapport avec Toronto. Je me
demande si le député d'Outremont ne devrait pas, lorsqu'il parle
d'affirmation dans les faits, se demander pourquoi s'enfarger dans des mots,
comme par exemple "national", ou essayer d'enfarger la loi avec des mots comme
celui-là qui, pour moi, a beaucoup d'importance; il aurait pu parler de
la constitution et de la composition de l'institut ou encore de la fonction,
des pouvoirs de l'institut lui-même.
M. Raynauld: On va y arriver.
M. Perron: Sûrement qu'on va y arriver, mais si vous parlez
de l'affirmation dans les faits, c'est là-dedans justement qu'on arrive
dans les faits. Ce n'est pas sur le changement d'un mot pour un autre.
M. Raynauld: Si c'est une question, la réponse est que,
pour moi, ce sont des mots. Les faits, c'est la réalité
économique, sociale et politique. En ce qui concerne
l'intérêt que je peux porter au fond du problème, vous
allez voir que j'ai beaucoup d'intérêt pour l'Institut de
productivité et on va arriver aux prochains articles très
bientôt.
Le Président (M. Boucher): Est-ce que les membres sont
prêts à prendre le vote sur cette motion? M. le
député de Bellechasse?
M. Goulet: Contre.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Duplessis?
M. Perron: Contre.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Laprairie?
M. Michaud: Contre, M. le Président.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Champlain?
M. Gagnon: Contre.
Le Président (M. Boucher): M. le député
d'Outremont?
M. Raynauld: Pour.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Gouin?
M. Tremblay: Contre.
Le Président (M. Boucher): La motion est donc
rejetée à cinq contre un. Sur l'article 1...
M. Tremblay: C'est le pourcentage qu'on va avoir au
référendum, M. le Président, si l'Union Nationale suit
vraiment ses origines.
M. Goulet: Pardon?
Le Président (M. Boucher): Est-ce qu'il y a d'autres
interventions sur l'article 1?
M. Goulet: Le Québec des réalités.
Le Président (M. Boucher): L'article 1 est
adopté?
M. Raynauld: Adopté. M. Goulet: Adopté.
Le Président (M. Boucher): Adopté. Article 2, M. le
ministre.
M. Tremblay: L'article 1 est adopté, M. le
Président?
Le Président (M. Boucher): Oui.
M. Tremblay: L'article 2, M. le Président, spécifie
que l'institut est une corporation au sens du Code civil, tout comme d'autres
types d'organismes que nous avons dans le gouvernement, soit le Centre de
recherche industrielle du Québec, ou la SDI, ou la Société
du parc industriel du Québec. Donc, c'est simplement une mesure de
concordance pour ce genre de société.
Le Président (M. Boucher): M. le député
d'Outremont?
M. Raynauld: Aucune objection.
Le Président (M. Boucher): Adopté?
M. Goulet: Adopté, M. le Président.
Le Président (M. Boucher): Adopté, article 3?
M. Tremblay: Encore là, M. le Président, il s'agit
d'un article prévoyant les droits et les privilèges de mandataire
du gouvernement exercés par l'institut. Il s'agit donc d'un article que
l'on retrouve dans la plupart des lois constituantes de sociétés
d'État.
M. Raynauld: Adopté.
Le Président (M. Boucher): Adopté?
M. Goulet: Adopté, M. le Président.
Le Président (M. Boucher): Article 4?
M. Raynauld: Adopté en ce qui me concerne.
Le Président (M. Boucher): Adopté. Article 5? M. le
député d'Outremont. (21 heures)
M. Raynauld: L'article 5 soulève des problèmes de
fond. Je pense que le ministre se rappellera que, dans le discours de
deuxième lecture que j'ai fait sur ce projet de loi, j'ai soulevé
la possibilité que cet institut soit un institut de type professionnel,
plutôt qu'un institut de type représentatif. Encore là, je
n'ai pas l'intention de faire un "filibuster " là-dessus, mais j'ai
regretté à ce moment-là, et je regrette de nouveau ici que
compte tenu du fait qu'il existe déjà d'autres organismes
représentatifs dans l'appareil gouvernemental québécois,
je pense en particulier au Conseil de planification et de développement
du Québec, qui est justement un organisme représentatif
formé de représentants du monde des affaires, de
représentants des syndicats, de représentants de comités
de développement régionaux et d'autres personnes, il me semblait
qu'un organisme comme celui-ci aurait pu être un institut de recherche,
ce qu'il veut être d'ailleurs. Mais il aurait été un
institut dirigé par des professionnels.
S'il s'agit de faire de la concertation, comme il semble que ce soit le
cas en vertu de l'article 20, cela me paraît faire double emploi avec un
organisme existant. À moins que le gouvernement nous dise aujourd'hui
qu'il veuille supprimer le CPDQ, il me semble qu'il y a vraiment un double
emploi, dans les circonstances présentes. Comme je suis en faveur d'un
institut de productivité, je pensais qu'une façon d'éviter
ce double emploi aurait été de former un institut qui aurait pu
avoir le même nombre de membres que nous avons ici, la même forme,
mais que le gouvernement aurait
été libre de choisir les gens, comme il l'entendait, sans
référence à des organismes représentatifs.
Je comprends qu'à ce stade-ci le ministre puisse résister
à cette suggestion, puisqu'il nous a dit, dans ses remarques
préliminaires, qu'il avait déjà fait des consultations
avec un certain nombre des organismes concernés par la création
de cet institut. Mais je veux tout de même mentionner qu'encore une fois,
parce qu'il existe d'autres organismes représentatifs auxquels il aurait
été facile de confier des tâches de concertation, il aurait
été fort préférable d'avoir un institut de
recherche, d'analyse, un institut indépendant du gouvernement,
indépendant des groupes de pression qui existent dans la
société et qui aurait pu faire des recommandations
peut-être plus objectives.
Encore une fois, non pas parce que je pense que c'est bon en soi, mais
parce qu'il existe d'autres organismes, à côté, dont on va
peut-être se départir, puisqu'on ne peut pas créer un
organisme comme celui-ci et en avoir deux ou trois autres à
côté et que les fonctions de ces organismes ne soient pas
affectées par la création d'un institut comme celui-ci.
Par conséquent, j'aurais donc préféré, quant
à moi, un institut qui aurait reflété davantage
l'expertise et cet organisme aurait pu, en tant qu'organisme d'expertise,
être en liaison avec des organismes représentatifs. Ou bien on
aurait pu penser, parce que le ministre y a fait allusion dans l'étude
des crédits du ministère, que même le Conseil de
planification et de développement du Québec pourrait être
élargi pour être transformé dans une espèce de
conseil économique et social.
S'il existe, à côté, un organisme qui est justement
représentatif de l'ensemble des intérêts de la
société, ce à quoi je crois, de l'autre côté,
cela nous donne une certaine liberté pour créer des organismes
d'une façon un peu différente.
Je ne sais pas, à ce stade-ci, M. le Président, si je veux
proposer un amendement en bonne et due forme, mais si j'en proposais un, ce
serait simplement dans le but d'arrêter l'article 5, après le mot
"gouvernement ", à la deuxième ligne, de façon à
laisser au gouvernement le soin de former ou de nommer les gens comme il
l'entend. Ce serait la façon la plus simple de refléter...
Le Président (M. Boucher): C'est un amendement
hypothétique. Vous attendez la réponse du ministre avant de faire
votre proposition?
M. Raynauld: Je pourrais attendre la réponse du ministre
avant d'en faire une proposition formelle.
Le Président (M. Boucher): M. le ministre.
M. Tremblay: Je vois que le député d'Outremont a
raison de souligner que l'article 5 peut soulever des interventions de fond,
puisqu'il s'agit d'un article qui est central dans le fonctionnement même
de l'institut.
Il est évident que recourir à l'aspect représen-
tatif pour la composition du conseil d'administration représente
certains dangers. Le député d'Outremont se réfère
sans doute aux expériences vécues par le Conseil
économique du Canada dont les 25 membres sont aussi nommés sur
une base représentative et qui a souffert dans son fonctionnement des
luttes qui ont surgi entre certains secteurs représentés au
conseil et le gouvernement.
Par contre, l'intervention du député d'Outremont va
justement dans le sens contraire des résultats des consultations que
nous avons eues avec les milieux des affaires et les milieux syndicaux, tout
particulièrement avec les milieux syndicaux. Les milieux syndicaux
auraient souhaité que les nominations de leurs membres soient faites par
eux-mêmes.
M. Raynauld: Je m'en doute.
M. Tremblay: J'ai résisté à cette
suggestion, puisque ceci aurait placé l'institut dans une position assez
inconfortable si, lors de frictions survenant dans le milieu économique
entre les patrons et les syndicats ou entre un des groupes et le gouvernement,
on s'était servi de ce contrôle sur les membres du conseil
d'administration de l'institut pour les retirer et ainsi paralyser,
peut-être, le fonctionnement même de l'institut.
Donc, première raison de garder une situation mitoyenne; nous
voulons que l'institut soit le plus indépendant possible dans son
fonctionnement et ne soit pas soumis, ni au diktat du secteur patronal, ni
à celui du secteur syndical, ni à celui du gouvernement.
Par contre, il ne s'agit pas d'un simple institut de recherche. Il
existe, dans notre société, des instituts de recherche
subventionnés directement ou indirectement par les fonds publics dans
les universités et auprès de certaines corporations. Il est
évident que ces centres de recherche devraient, comme on en trouve en
Allemagne, jouer un rôle plus important dans les débats publics
sur l'évolution de l'économie.
Il y a peut-être une certaine timidité dans les milieux de
recherche dans ce domaine. Ils devraient peut-être utiliser plus à
fond la crédibilité qui est la leur pour intervenir auprès
de l'ensemble de la population dans les débats économiques au
Québec. J'ai fait allusion au Centre de recherche en
développement économique de l'Université de
Montréal, au CD. Howe Research Institute et à d'autres centres de
recherche semblables.
Or, il s'agit ici plus que d'un centre de recherche. Il est
évident que c'est une des fonctions, mais ceci va devoir se faire en
collaboration avec les autres centres de recherche, parce qu'il ne faudrait pas
que ceci devienne uniquement un cénacle de recherche. Il est beaucoup
plus important, dans la conjoncture actuelle, que cet institut joue un
rôle d'ombudsman, de catalyseur de la productivité, un rôle
de leadership auprès des trois autres secteurs, gouvernemental, syndical
et patronal, pour que des actions concrètes soient prises pour
améliorer la productivité. L'aspect
initiative, l'aspect action, l'aspect coordination et l'aspect
concertation sont très importants dans le fonctionnement futur de
l'institut.
Pour ces raisons, M. le Président, il est important que les
milieux directement impliqués par cette préoccupation de
productivité, surtout au niveau des moyens, se mouille dans les
engagements qui découleront des résultats de recherche de
l'institut. Il ne faudrait pas que nous répétions les erreurs qui
ont été faites au niveau fédéral, soit avec le
Conseil national de la productivité au début des années
soixante et, par la suite, avec le Conseil économique du Canada,
où de très nombreuses études sont demeurées lettres
mortes parce que ni les gouvernements, ni les milieux concernés ne
voulaient prendre d'engagements publics pour vraiment corriger la
situation.
Donc, à cause de cet élément de coordination et de
concertation, le gouvernement juge sage d'être le dernier à nommer
les membres mais que ceci se fasse en consultation la plus étroite
possible avec les milieux concernés. Mais, si besoin était, le
gouvernement pourrait nommer les gens avec moins de consultations, s'il y avait
un manque de coopération. Le gouvernement se garde une marge de
manoeuvre. L'intention est là de consulter mais, si besoin était,
nous aurons toute la latitude pour que l'institut puisse quand même avoir
un conseil d'administration rempli et pouvant fonctionner, de sorte que je
demanderais au député d'Outremont peut-être d'accepter mon
argumentation et peut-être ne pas passer trop de temps à
rediscuter un amendement qui, je pense, irait un peu contre le principe
même du projet de loi que nous avons adopté en deuxième
lecture, puisque j'ai mis quand même passablement d'accent sur la
concertation en deuxième lecture et sur les éléments que
je viens de souligner.
Le Président (M. Boucher): M. le député
d'Outremont, désirez-vous faire votre amendement à ce stade-ci ou
si...
M. Raynauld: Non, je ne ferai pas d'amendement, mais je voudrais
peut-être, pour le bénéfice des membres de la commission,
dire très brièvement les dangers d'une formule comme celle-ci. Il
est évident que, lorsque l'on inscrit dans un projet de loi qu'on va
consulter des organismes, si ces organismes ne veulent pas coopérer, il
sera extrêmement difficile pour le gouvernement de passer outre. Ici, je
voudrais peut-être relater encore une fois très brièvement
ce qui s'est produit au Conseil économique du Canada.
Vous savez probablement qu'au Conseil économique, en 1976 ou
à l'automne 1975, je pense, les représentants des syndicats se
sont retirés du Conseil économique. Ils se sont retirés
sans démissionner de sorte que le gouvernement ne pouvait pas vraiment
en nommer d'autres. Ils se sont simplement retirés. Ils se sont
retirés pour la raison suivante: c'est que le Congrès du travail
du Canada était opposé au programme de contrôle des prix et
des revenus et ils se sont dit qu'ils allaient se retirer des deux ou trois
organismes qui fonctionnaient à ce moment-là et auxquels ils
participaient.
Or, dans ce débat, on savait partout que le Conseil
économique s'était opposé également à
l'application des contrôles des prix et revenus. Par conséquent,
nous n'étions pas en désaccord avec les membres
représentant le Congrès du travail du Canada et, pourtant, ils se
sont retirés.
Je voudrais aussi mentionner que la même aventure s'est produite
au Québec, avec le CPDQ. Je pense que c'était en 1971 ou en 1972.
La CEQ a affirmé qu'elle refusait de collaborer dorénavant avec
le gouvernement et elle s'est retirée de la plupart des organismes
auxquels elle participait, de sorte que le CPDQ a pu continuer à
fonctionner comme le Conseil économique a pu continuer à
fonctionner, mais vraiment avec une jambe de bois, avec vraiment des
difficultés considérables sur le plan de la
crédibilité et sur le plan de son travail lui-même.
Je pense que le ministre avait bien raison de mentionner qu'il y a un
danger considérable dans cette formule, même si le gouvernement a
le droit de les nommer, comme au Conseil économique, le gouvernement
nomme lui-même les gens, après consultation. C'est exactement la
même formule qu'il y a ici, après consultation. Mais il reste que
la dynamique d'une affaire comme celle-là est telle qu'un gouvernement
n'oserait pas passer outre, par exemple, à un organisme qui a
été représenté ici pendant quelques années.
Cet organisme pourrait dire: Nous, on ne participe plus, et le gouvernement
pourrait tout simplement le mettre de côté et dire: Vous ne voulez
pas collaborer, on va nommer d'autres personnes qui ne représenteront
pas du tout les mêmes milieux ou qui en représenteront d'autres.
Ni dans le cas du Québec, ni dans le cas du gouvernement
fédéral, le gouvernement n'a réagi de cette façon.
Il a plutôt subi les conséquences en sachant qu'il affaiblissait
ses propres institutions, dans les deux cas, sans qu'on trouve vraiment de
formule satisfaisante, aussi longtemps que les problèmes de fond qui
étaient à l'origine de ces problèmes n'ont pas
été résolus. (21 h 15)
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Bellechasse.
M. Goulet: Si je comprends bien, le député
d'Outremont ne fait pas son amendement?
M. Raynauld: Non.
M. Goulet: Je ne trouvais pas cela si bête qu'on
arrête la phrase après le mot "gouvernement", parce que, de toute
façon, c'est le gouvernement qui va nommer ces gens. Il y a
peut-être un danger, par exemple. S'il y a trois personnes du domaine
syndical, ce n'est pas assez explicite. Je donne un exemple: La CEQ peut
présenter une liste de trois noms, la FTQ, trois noms, la CSN, trois
noms. À ce moment, si le gouvernement décide d'élire telle
personne, il peut élire trois personnes du même organisme. Il me
semble qu'on aurait pu, à un moment donné, essayer de
diversifier cela, ou on peut, en tout cas, vouloir enlever les membres
d'un organisme. Par exemple, si on en veut à un organisme, le
gouvernement dit: On ne veut pas de gens de la CEQ. Il va pouvoir les balancer.
À ce moment, on aurait pu avoir une formule pour qu'il y ait au moins
les trois ou quatre plus grands syndicats...
M. Tremblay: M. le député, vous allez dans le sens
contraire. Vous voudriez encore geler davantage la procédure.
M. Goulet: Non, de toute façon, si on le met, c'est le
gouvernement qui le nomme, et les autres personnes également, le
gouvernement les nomme. Si c'est un gouvernement, à un moment
donné, qui est prosyndical ou propatronal, il pourra s'organiser pour
avoir la majorité, soit prosyndicale ou propatronale. À ce
moment, c'est le gouvernement, de toute façon, qui va
décider.
M. Tremblay: Cette affaire, normalement, n'est pas prosyndicale
et inversement, quel que soit le gouvernement, c'est en consultation.
M. Goulet: La liste sera de combien? Si on vous fournit une liste
de...
M. Tremblay: Normalement, on ne demandera pas des listes. On va
simplement proposer des gens, voir si les gens sont acceptables. On ne
commencera pas à demander des listes.
M. Goulet: À ce moment, vous ne pensez pas qu'il y aura
consultation comme lorsque cela a été le temps de nommer les gens
qui s'occupent de la loi 2. Le Parti québécois a dit: On nomme
notre gars qui va être président, et on a eu un peu de
consultation. L'Union Nationale a présenté son homme et, pour le
Parti libéral, cela a été la même chose. Cela a
passé comme cela.
M. Tremblay: Écoutez, c'est une "consultation", on ne dit
pas "nomination". Ce ne sont pas les groupes qui nomment, c'est le
gouvernement, mais il y aura consultation.
M. Goulet: Oui. mais à ce moment, c'est toujours le
gouvernement qui les nomme. Le gouvernement a la majorité en Chambre,
donc il voudra bien nommer les gens qui lui plaisent.
M. Tremblay: Oui, c'est lui qui a été élu et
qui doit répondre devant la population des fonds publics.
M. Goulet: C'est pour cela que l'idée du
député d'Outremont, il n'en a pas fait d'amendement, je n'en fais
pas non plus, mais je la trouvais tout à fait logique d'arrêter
là. Le gouvernement nomme ses gens tout simplement. Quant à moi,
cela va.
Le Président (M. Boucher): Adopté? Article 5,
adopté. Article 6?
M. Tremblay: L'article 6, c'est la continuation de l'article
5.
M. Raynauld: À l'article 6, je voudrais poser une question
au ministre. Pourquoi n'a-t-il pas retenu une formule légèrement
différente de celle-là, qui aurait consisté à dire
que le gouvernement nommait le président, le vice-président et
l'institut et qu'ils faisaient partie du conseil, qu'ils faisaient partie de
l'institut, plutôt que de prendre la formule où on a le
président et le vice-président parmi les membres de l'institut?
Il me semble que cela pose des restrictions inutiles. On n'a qu'à penser
à l'article qui suit, l'article 7. Il est évident que, pour
assurer une rotation, on est obligé d'avoir des gens qui sont
nommés pour deux ans, trois pour trois ans, trois pour quatre ans. Il me
semble que c'est une formule un peu lourde de dire: On va d'abord nommer les
membres, et après cela, on va choisir le président et le
vice-président parmi ces membres. Il me semble que cela aurait
été plus simple de dire: Le gouvernement nomme le
président, le vice-président de l'institut. Ils font
automatiquement partie des membres de l'institut. Il les aurait nommés
directement, comme je pense que c'en est l'intention ici. Il me semble que
cette formulation apporte des complications inutiles.
M. Tremblay: La volonté qui est reflétée
dans l'article 6, c'est une volonté de souplesse et de
flexibilité, parce que le président n'est pas
nécessairement un membre à temps plein de l'institut. Il y aura
un directeur général, qui va être un directeur à
temps plein, de sorte que le président, en toute probabilité,
sera à temps partiel, du moins, cela en laisse la possibilité. Il
est choisi parmi les membres. Évidemment, il y a d'autres articles qui
précisent le rôle du président, de sorte que nous ne voyons
pas de difficulté à le choisir parmi les membres.
M. Raynauld: Enfin, M. le Président, c'est le ministre qui
aura à administrer sa loi. Je soulève ce problème.
Peut-être que d'ici la troisième lecture il pourra y songer. Il me
semble qu'il y aurait des formules plus simples que celle-là, qui
éviteraient les problèmes qui vont être posés par
les mandats de l'article 7 qui va suivre.
M. Tremblay: Évidemment, le directeur
général a un mandat...
M. Raynauld: Non, je laisse de côté le directeur
général.
M. Tremblay: ... un peu plus ferme. Mais le président,
même si c'est quelqu'un qui a été nommé pour deux
ans, par exemple, peut être nommé de nouveau pour trois ans par la
suite. Il y a la phraséologie pour le démarrage de l'institut,
comme ça se fait tout le temps. On a une rotation de la durée des
premiers mandats, mais après le rodage des trois premières
années, tous les autres membres seront nommés pour un même
terme et le président pourra, lui aussi, être nommé de
nouveau. Rien n'empêche le gouvernement de nommer de nouveau le
président.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Bellechasse?
M. Goulet: Je n'ai pas de commentaires à l'article 6.
Le Président (M. Boucher): Pas de commentaires. Alors,
article 6, adopté?
M. Goulet: Adopté.
M. Raynauld: Adopté.
Le Président (M. Boucher): Article 7?
M. Raynauld: Adopté.
Le Président (M. Boucher): Adopté. Article 8?
M. Goulet: Je m'excuse...
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Bellechasse.
M. Goulet: Avant l'adoption de l'article 7, j'avais... On nomme
les gens pour deux ans, trois ans, quatre ans. Il y a une rotation. Le ministre
a bien dit, lorsqu'il parlait de l'article 6, qu'à l'article 7 quelqu'un
qui était nommé pour deux ans pouvait être
immédiatement nommé de nouveau pour trois ans, et ainsi de suite.
C'est possible?
M. Tremblay: Par la suite, oui. M. Goulet: Oui, par la
suite.
M. Tremblay: À la fin de son mandat.
M. Goulet: Cela peut vouloir dire qu'en dix ou quinze ans, nous
aurons toujours eu les mêmes membres sur... Cela pourrait arriver.
M. Tremblay: J'ai dit "peut". C'est comme les conseils
d'administration...
M. Goulet: D'accord.
M. Tremblay: ... des sociétés d'État. Ils
sont nommés de nouveau sur une base annuelle par le ministre
responsable, mais je ne les nomme pas ■ tous de nouveau.
Le Président (M. Boucher): L'article 7, adopté.
Article 8?
M. Raynauld: M. le Président, sur l'article 8...
Le Président (M. Boucher): M. le député
d'Outremont.
M. Raynauld: ... je voulais seulement poser une question.
Pourquoi y a-t-il des guillemets ou des parenthèses? C'est un nouvel
article?
M. Tremblay: C'est parce qu'il y a des implications
financières. Donc, la pratique, dans les projets de loi qui impliquent
des déboursés, c'est de souligner l'article par des crochets.
Je propose l'adoption de l'article [[8. M. le Président.
M. Raynauld: À l'article...
Le Président (M. Boucher): L'article 8, adopté?
M. Raynauld: Non, une minute!
Le Président (M. Boucher): Ah bon! M. le
député d'Outremont, sur l'article 8.
M. Raynauld: On dit, d'une part, que les membres ne sont pas
rémunérés, mais qu'ils reçoivent une allocation de
présence, en plus de leurs dépenses.
M. Tremblay: C'est un jeton de présence comme nous en
avons pour tous les conseils d'administration. À la SDI, par exemple, on
reçoit $100 par jour; au CRIQ, je crois que c'est $150...
M. Raynauld: J'ai toujours trouvé que...
M. Tremblay: On essaie de rationaliser ça dans le
gouvernement, parce qu'il y a des $100, $150...
M. Raynauld: Mais je trouve toujours cette formulation curieuse,
moi.
M. Goulet: Cela dépend de la productivité des
gars.
M. Raynauld: Ils ne sont pas rémunérés, mais
ils reçoivent une allocation de présence. C'est de la
rémunération, ça...
M. Tremblay: Ils ne reçoivent pas de salaire. M.
Raynauld: C'est ça que ça veut dire.
M. Tremblay: S'ils ne se réunissent pas, ils ne sont pas
rémunérés.
M. Raynauld: Non, je comprends ça.
M. Tremblay: Ils ne reçoivent pas de
rémunération comme les députés, M. le
Président, qui sont rémunérés. Ils ne sont pas
payés à l'heure.
M. Raynauld: Comme les ministres. Qu'ils travaillent ou qu'ils ne
travaillent pas, ils sont rémunérés.
M. Tremblay: Qu'ils travaillent ou qu'ils ne travaillent pas, ils
sont rémunérés. Mais quand ils travaillent jusqu'à
5 heures du matin comme ce matin, ça fait très peu l'heure, et
peut-être qu'une façon de revaloriser le travail des
députés serait de les payer à l'heure.
M. Goulet: Pourquoi comme ce matin? Cela fait toujours
très peu l'heure.
M. Raynauld: C'est qu'on viole le salaire minimum...
M. Tremblay: Vous les payez à la pièce.
M. Goulet: Le pire, c'est que le ministre du Travail était
là et qu'il n'a pas porté plainte.
Le Président (M. Boucher): Adopté?
M. Goulet: Adopté.
Le Président (M. Boucher): Article 9?
M. Raynauld: Adopté.
Le Président (M. Boucher): Adopté. Article 10?
M. Raynauld: Adopté.
Le Président (M. Boucher): Adopté. Article 11?
M. Raynauld: Adopté.
Le Président (M. Boucher): Adopté. Article 12?
M. Tremblay: II s'agit encore, M. le Président, d'un
article à incidence budgétaire, puisqu'on y précise que le
gouvernement peut fixer le traitement du directeur général. Il va
de soi, évidemment, puisqu'il s'agira d'un fonctionnaire.
M. Raynauld: M. le Président, pourquoi «son
traitement supplémentaire»? Si on fixe son traitement, pourquoi
faut-il qu'il ait un traitement supplémentaire?
M. Tremblay: II peut être déjà fonctionnaire.
M. Raynauld: Ah! D'accord.
Le Président (M. Boucher): Adopté. Article 13,
adopté?
M. Goulet: D'accord. Par le gouvernement, c'est correct.
Le Président (M. Boucher): Adopté. Article 14?
M. Goulet: D'accord.
M. Raynauld: M. le Président...
Le Président (M. Boucher): M. le député
d'Outremont.
M. Raynauld: Sur ce sujet-ci, il y a également une
question de fond qui est soulevée par cet article. Est-ce qu'il n'y
aurait pas lieu de penser, pour conserver l'indépendance de cet
institut, de soustraire le personnel de l'institut à l'application de la
Loi de la fonction publique? Cela en fait-il tous des fonctionnaires? Je
voudrais mentionner ici, une pratique je ne veux pas dire qu'elle doit
nécesairement servir d'exemple propre au Conseil
économique du Canada et, je pense, au Conseil économique de
l'Ontario aussi. Dans les deux cas, le personnel de ces conseils, même
s'il participe au régime d'assurances, au régime d'avantages
sociaux de la fonction publique, n'est pas considéré comme
fonctionnaire. En ce qui concerne les relations avec le Trésor, cela
implique une très grande indépendance de la part de l'institut.
Si ces gens ne sont pas des fonctionnaires, ils ne sont pas obligés, non
plus, de suivre les règles fixées par le Trésor et la
fonction publique en ce qui concerne les engagements, en ce qui concerne les
promotions; or, cela donne une très grande flexibilité. Quand on
veut un organisme indépendant, cela le range dans la catégorie de
ce qu'on disait tout à l'heure, de l'IREQ, de l'Hydro-Québec, de
SIDBEC et d'autres entreprises comme celles-là, qui, en fait, ne sont
pas soumises, non plus, à la Loi de la fonction publique.
Le Président (M. Boucher): M. le ministre.
M. Tremblay: Les propos du député d'Outremont sont
sensés, contrairement à sa première motion, M. le
Président, qui faisait un peu piètre figure. Le problème,
c'est plutôt un problème technique. En spécifiant que le
secrétaire et les autres membres du personnel sont nommés et
rémunérés selon la Loi de la fonction publique, il y a une
protection qui est accrue pour ses membres...
M. Raynauld: On ne veut pas justement.
M. Tremblay: Le problème, c'est que les membres du
personnel souhaitent avoir une protection. S'ils sont déjà
fonctionnaires, avant d'entrer à l'institut, ils veulent
préserver les droits qu'ils avaient, comme fonctionnaires, ils ne
veulent pas perdre leur permanence, leur salaire, etc., et la faculté de
revenir dans la fonction publique. S'ils proviennent de l'extérieur,
après un certain temps, ils veulent avoir les mêmes conditions qui
existent dans la fonction publique et veulent pouvoir aussi, peut-être,
être transférés dans la fonction publique, être
mutés dans la fonction publique.
Donc, nous ne croyons pas que cela diminue l'indépendance de
l'institut. Nous avons le CRIQ, par exemple, qui relève du ministre de
l'Industrie et du Commerce, qui n'est pas soumis à la Loi de la fonction
publique. Chaque année, il faut que ses membres viennent me voir, ils
font des comparaisons avec ce qui existe dans la fonction publique, ils me
persuadent facilement et je les soumets au Conseil des ministres pour
arrêté en conseil. Une complication de plus pour moi. L'apparence
serait
d'une plus grande indépendance si le personnel n'était pas
soumis à la Loi de la fonction publique...
M. Raynauld: ... une plus grande souplesse.
M. Tremblay: ... dans les faits... la souplesse va venir du
budget lui-même, l'importance du budget qu'on va octroyer à
l'organisme, lequel a énormément de souplesse dans l'utilisation
de son budget. Mais que la rémunération de ce personnel soit
laissée à la discrétion du conseil d'administration,
compte tenu de la très grande information qui circule dans les milieux
gouvernementaux, sachant fort bien ce que reçoivent les fonctionnaires
de même catégorie dans les autres services gouvernementaux, cela
enlève dans la pratique cette flexibilité qu'on voudrait voir.
(21 h 30)
M. Raynauld: M. le Président, je pense qu'il ne faut pas
voir cela en termes de salaires, parce que la pratique veut que les salaires
sont à peu près au même niveau. Les gens ne tolèrent
pas des différences quand ils exercent des fonctions similaires. Ce
n'est pas tellement là-dessus; c'est sur les procédures de
nomination, les procédures de promotion, et cela fait toute la
différence du monde sur le plan de l'efficacité d'une
organisation, d'une institution, si le président... Parce qu'il y a un
conseil d'administration après tout. Si on voulait vraiment le mettre
dans la Loi de la fonction publique, on n'a pas besoin d'un conseil
d'administration. Il y a un conseil d'administration, qu'il prenne ses
décisions, mais c'est surtout sur le plan, encore une fois, de la
flexibilité que cela donne au niveau des engagements, au niveau de la
compétence, du jugement que l'on peut faire de la compétence.
Passer à travers tout le processus de la fonction publique, cela peut
être très bon et cela peut être nécessaire lorsqu'il
s'agit d'une carrière pour une vie entière, mais un organisme
comme celui-ci sera bon si le personnel est mobile et s'il entre et s'il sort;
si on a besoin d'étudier un problème particulier, il faut qu'il
soit là pour six mois, non pas pour la vie entière. S'il est
là pour la vie entière, cela va être la mort de l'institut.
C'est pour cela que je pense à cela.
Le Président (M. Boucher): M. le ministre.
M. Tremblay: Si le député d'Outremont me le permet,
la raison pour laquelle nous avions mis l'article [[14, c'est que nous voulions
effectivement dégager le conseil d'administration de ces
considérations de salaire et de promotion, etc. Mais si les membres de
la commission sont d'accord, j'aimerais proposer un amendement qui serait le
suivant: Le secrétaire ainsi que les autres membres du personnel de
l'institut sont nommés et rémunérés selon des
effectifs, normes et barèmes approuvés par le gouvernement.
M. Raynauld: Par le gouvernement? Par le lieutenant-gouverneur en
conseil?
M. Goulet: M. le Président...
M. Tremblay: Ce sont des normes et barèmes de l'institut,
mais approuvés par le gouvernement, évidemment, parce que le
gouvernement fournit les fonds.
M. Raynauld: Je trouve que c'est...
M. Goulet: Est-ce que vous en faites un amendement tout de
suite?
M. Tremblay: Oui.
M. Goulet: À la suite de l'argumentation du
député d'Outremont, je pense qu'il voulait dire que le fait
qu'ils soient rémunérés selon la Loi de la fonction
publique... Ce n'est pas tellement là-dessus. Si vous vouliez
dégager le bureau de direction de cela, c'est surtout le mot
nommés , M. le ministre... Selon l'argumentation du député
d'Outremont, pour ce qui est de la rémunération, que ce soit fait
selon la Loi de la fonction publique, cela dégage le bureau
d'administration. C'est surtout pour la nomination. Si on a besoin de quelqu'un
pour six mois ou un an, selon ces...
M. Tremblay: Non, je me rangeais à l'argumentation du
député d'Outremont.
M. Goulet: C'était pour la nomination.
M. Tremblay: Étant donné que c'est un organisme qui
doit avoir passablement d'indépendance, un organisme qui va dire des
choses dures, parfois, il peut y avoir des difficultés à recruter
du personnel parce qu'il y a des normes dans la fonction publique, etc. Je me
suis rendu à mon argument. Si on donne au conseil d'administration le
soin de recommander ses normes au gouvernement, on le iui donne. On ne peut pas
le lui donner à moitié, les salaires non, les procédures,
oui. On lui donne la responsabilité acceptée par le
gouvernement.
Le Président (M. Boucher): L'amendement se lirait comme
suit...
M. Tremblay: Une minute, afin que mon sous-ministre
consulte...
Le Président (M. Boucher): Pour la rédaction de
l'amendement, d'accord.
M. Tremblay: M. le Président, je demanderais
peut-être qu'on passe à un autre article pour que les avocats du
contentieux vérifient les aspects du fonds de retraite, par exemple,
pour qu'on ne fasse pas d'erreur. Donc, on reviendra peut-être à
la toute fin sur cet article.
Le Président (M. Boucher): Alors, nous suspendons
l'article [[14 et nous passons à l'article 15.
M. Raynauld: M. le Président, étant donné
que je me souviens pas mal de la Loi du Conseil économique du Canada
vous m'excuserez de
revenir toujours à cela, mais c'est l'expérience que j'ai
eue pour régler le problème qui peut se poser sur le plan
légal, je me rappelle que, dans la loi fédérale, il y
avait un article plus loin qui disait: Le personnel du Conseil
économique du Canada fait partie ou touche les avantages sociaux de la
fonction publique. C'était quelque part. Il disait cela. On avait donc
un article 14 qui ressemble pas mal à celui que le ministre vient de
proposer, mais pour résoudre les autres problèmes, il y avait un
autre article.
M. Tremblay: J'ai l'article en question ici... M.
Raynauld: Oui.
M. Tremblay: ... du moins, c'était pour le Conseil
national de productivité; on disait: "sur les fonds affectés aux
travaux du conseil, les fonctionnaires et employés de ce dernier,
nommés ainsi que le prévoit le paragraphe 2, reçoivent les
traitements et sont remboursés des frais que fixe le conseil
après l'approbation du Conseil du trésor".
C'est une phraséologie qui ressemble étrangement à
celle que j'ai utilisée tout à l'heure. De toute façon, je
vais demander... Je suggérerais que l'on passe, parce que j'aimerais que
le contentieux vérifie et nous y reviendrons à la fin.
M. Raynauld: Je n'ai pas d'objection.
Le Président (M. Boucher): Article 15.
M. Raynauld: Article 15, ça va.
Le Président (M. Boucher): Adopté. Article 16.
M. Raynauld: Article 16, ça va.
Le Président (M. Boucher): Adopté. Article 17.
M. Raynauld: Adopté.
Le Président (M. Boucher): Adopté. Article 18.
M. Raynauld: Adopté, je suppose.
Le Président (M. Boucher): Adopté.
M. Raynauld: C'est nécessaire que ce soit approuvé
par le gouvernement? C'est nécessaire que ce soit approuvé par
les règlements? La régie interne, les pouvoirs d'un comité
exécutif, les pouvoirs de son personnel. Cela me paraît
inutile..
M. Michaud: Cela pourrait être lourd.
M. Tremblay: II s'agit d'un article de concordance avec tous les
autres organismes de ce type dans le gouvernement.
M. Raynauld: Cela va.
Le Président (M. Boucher): Adopté. Article 19.
M. Raynauld: Cela va.
Le Président (M. Boucher): Adopté. Article 20.
M. Raynauld: Non.
Le Président (M. Boucher): M. le député
d'Outremont.
Fonctions et pouvoirs de l'institut
M. Raynauld: Article 20. Quand on se met à examiner
l'article 20 attentivement, on s'aperçoit que l'institut a pour
objectifs d'informer la population et les agents économiques sur la
notion et l'importance de la productivité. D'abord, il y a deux
paragraphes pour dire ça. Il me semble que cela aurait été
plus simple si on avait dit: la notion de productivité, son importance,
ou quelque chose comme ça. Mais, en tout cas, je n'insisterai pas
là-dessus.
Un deuxième objectif est celui d'assurer une collaboration, une
concertation entre les agents économiques en matière de
productivité. On s'aperçoit donc qu'on ne demande pas à
l'institut de favoriser l'augmentation de la productivité et on ne
précise pas non plus si cet institut peut examiner des questions de
productivité dans tous les secteurs de la vie économique.
Alors, il me semble qu'il y aurait lieu d'envisager ici un amendement.
Mon collègue et moi avons rencontré les gens de la Chambre de
commerce de la province de Québec tout à l'heure et eux aussi
nous ont dit comme ça, en passant, qu'ils étaient surpris que
l'Institut national de productivité ne comporte pas d'objectifs un peu
plus précis que ça, qui impliqueraient une certaine
responsabilité de la part de l'institut dans ce qui va arriver à
la productivité.
En second lieu, j'y reviendrai encore tout à l'heure, à
l'article 21, j'ai cru comprendre peut-être que le ministre pourra
me rassurer de ce côté par le libellé d'un certain
nombre d'articles, qu'on envisageait d'examiner la productivité dans le
secteur privé et dans le secteur industriel principalement.
Personnellement, je trouve que c'est une restriction abusive. Ce n'était
peut-être pas l'intention du ministre; dans ce cas, il y aurait
peut-être lieu de le préciser.
M. le Président, simplement pour centrer l'attention sur des
choses précises, je pense que je vais proposer un amendement qui
ajouterait un paragraphe d) à l'article 20 et qui se lirait comme suit:
Paragraphe d) parmi les objectifs que doit poursuivre l'institut
"de favoriser l'augmentation de la productivité, tant dans le secteur
public que dans le secteur privé".
Je voudrais soulever un autre problème en relation avec l'article
20. Voulez-vous qu'on s'en tienne là pour l'instant, M. le
Président?
Le Président (M. Boucher): Oui, pour l'amendement;
étant donné que vous proposez un amendement, il faut en disposer
avant de continuer.
M. Raynauld: Très bien.
Le Président (M. Boucher): M. le ministre.
M. Tremblay: M. le Président, nous avons longuement
réfléchi aux considérations que soulève le
député d'Outremont. Dans les premières versions, nous
avions inclus la possibilité pour l'institut de faire des
recommandations sur tous les projets de loi, sur toute la réglementation
gouvernementale.
Ceci nous est apparu dangereux, compte tenu de la somme de
responsabilités que nous allions confier à cet institut. J'ai
devant moi le projet de loi créant le Conseil économique du
Canada. On a confié 18 fonctions à ce conseil économique
qui faisaient en sorte que le conseil était responsable de tout.
Finalement, si un organisme est responsable de tout, il n'est
responsable de rien. Dans la loi constitutive du Conseil économique du
Canada, le conseil est pratiquement responsable de l'élaboration de tous
les programmes d'action que le gouvernement aurait dû prendre dans le
domaine économique. J'ai ici l'article 9, le paragraphe b): Recommander
les programmes d'actions du gouvernement les plus propres, de l'avis du
conseil, et faciliter la réalisation des possibilités d'expansion
de l'économie.
Cela continue comme cela. Il y a 18 mandats. Au niveau de la
productivité, le maintien des relations harmonieuses au sein de
l'industrie. Le problème, lorsqu'il y a trop de mandats, M. le
Président, c'est que l'organisme ne peut pas les réaliser.
À ce moment-là, les critiques se lèvent et une
démoralisation s'empare d'un organisme semblable. C'est très
dangereux.
On a indiqué que ce n'était pas un nouveau gouvernement
qu'on voulait mettre sur pied, que ce n'était pas un nouveau Conseil du
trésor qu'on voulait mettre sur pied. On a mentionné qu'on
voulait lui confier $800 000 la première année et peut-être
une quinzaine de personnes. C'est évident qu'il y a des problèmes
de productivité à l'intérieur de l'appareil
gouvernemental, c'est évident qu'il nous faut pressurer les effectifs
pour obtenir un plus grand rendement. Mais le défi principal auquel nous
faisons face, c'est sur les marchés, dans la production de biens, un peu
moins dans la production de services, qui sont moins en concurrence avec les
produits importés.
C'est parce que notre performance au niveau des exportations, surtout
dans le domaine manufacturier, est tellement médiocre depuis une dizaine
d'années qu'il nous faut faire un effort pour augmenter la
productivité dans le secteur de la fabrication et dans le secteur
industriel.
C'est déjà un défi énorme. Il va falloir que
l'institut s'implique dans plusieurs secteurs en collaboration avec les agents
et joue un rôle de catalyseur. Je pense que ce mandat, s'il était
réalisé dans un premier temps et donnait des résultats
probants, encouragerait le gouvernement et la population à confier
à cet organisme des mandats un peu plus vastes.
Ma proposition est de faire un premier pas. Voyons ce que l'organisme
peut faire et on verra s'il peut contribuer à améliorer la
productivité dans le secteur public par la suite, en collaboration avec
le Conseil du trésor, etc.
Ceci n'empêchera pas et je le souligne, M. le
Président l'institut de faire des recommandations touchant le
secteur public qui sont de nature à augmenter la productivité
dans le secteur privé, surtout dans le secteur industriel. S'il y a des
réglementations gouvernementales qui sont hostiles à la
productivité dans le secteur privé, l'institut aura le devoir
moral de les souligner et de les mettre devant l'opinion publique ainsi que de
proposer au gouvernement des modifications.
Mais confier spécifiquement dans les fonctions et dans les
objectifs de l'institut le soin de se préoccuper de la
productivité dans le domaine public, M. le Président, je
n'oserais pas accrocher au cou de cet institut un pareil albatros dès le
départ.
M. Raynauld: Vous êtes d'un pessimisme extraordinaire.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Bellechasse. (21 h 45)
M. Goulet: M. le Président, en écoutant le
ministre, je me demande si l'institut ne sera pas fondé seulement
ce serait beaucoup, mais... sur la productivité du secteur de
l'industrie et du commerce. Je pense que c'est également la
préoccupation du député d'Outremont. Lors de mon discours,
en deuxième lecture, cela a été ma préoccupation.
Cela a été également la préoccupation de votre
collègue, le ministre d'État au développement
économique. En tout cas, il l'a fait savoir clairement à
Sherbrooke. Il faudrait qu'un objectif s'ajoute à cela, celui de mesurer
ou d'évaluer certains résultats quant à la
productivité, que ce soit au niveau de l'industrie et du commerce
seulement ou au niveau du secteur public. D'accord, ce seront peut-être
beaucoup de mandats à donner, mais même, comme le disait le
ministre, si c'était seulement cela qu'on vise, le niveau de l'industrie
et du commerce, il faudrait qu'on puisse l'évaiuer.
Ne pensez-vous pas que dans deux, trois, cinq ou six ans, on pourrait
demander à ces gens: Qu'est-ce que cela a donné au Québec
l'Institut national de productivité? Ils vont nous répondre:
Écoutez, nous, on a informé la population, on a fait
connaître l'importance et le rôle des différents agents
économiques, II faut favoriser la collaboration, etc., mais les
résultats? Il faudrait à un moment donné qu'on puisse
s'arrêter dans toute...
M. Tremblay: M. le Président...
M. Goulet: Si vous permettez, M. le Président. Dans toute
organisation, quelle qu'elle soit, il faut évaluer les résultats.
Je ne dis pas d'évaluer les résultats et la productivité
de toutes les entreprises, mais il faut savoir si cela a donné
quelque
chose. Si on ne veut pas le faire dans l'immédiat dans les
secteurs publics... il faut savoir ce que cela a donné.
Le ministre dit que c'est seulement un budget de $800 000 par
année au début, mais... Cela a été la
préoccupation. C'est la préoccupation de la Chambre de
commerce.
M. Tremblay: Me permettez-vous quand même un commentaire?
Cela répondrait un peu à votre préoccupation.
M. Goulet: Oui, certainement, monsieur.
M. Tremblay: II s'agit quand même d'une
société d'État semblable au CRIQ et à la SDI, qui a
besoin d'un budget annuel, qui, donc, lors de l'étude des crédits
du ministère de l'Industrie et du Commerce, va se soumettre au feu de la
discussion, de la critique et de l'investigation. Chaque année,
l'institut va devoir rendre compte devant l'Assemblée nationale et
devant la commission de l'industrie et du commerce, où tous les membres
de l'Assemblée sont représentés au niveau des partis
politiques, pour vraiment mesurer la productivité, entre guillemets, de
cet institut, en fonction des fonds qu'on lui aura confiés.
Par contre, on peut oiseusement discuter du type de productivité
que devrait avoir cet institut, mais, là, il ne faut pas jouer, je
pense, à la sémantique. Il est évident qu'on souhaite que
cet institut ait un impact, mais ce n'est pas un impact que l'on peut inscrire
à un bilan financier. Ce n'est pas une entreprise à but lucratif
que nous mettons sur pied, c'est une société de promotion et de
stimulation.
M. Goulet: M. le Président, pour conclure mon
argumentation, on peut évaluer la productivité de l'institut
lui-même. Cela va. Ce n'est pas tellement à ce niveau là
que je m'en tiens. C'est qu'à un moment donné l'institut puisse
évaluer la productivité de certains secteurs. Si on ne veut pas
aller dans le secieur...
M. Tremblay: C'est dans son mandat.
M. Goulet: Non, c'est renseigner et favoriser mais il faudrait
savoir, au bout de deux ou trois ans, au bout de l'année, si cela a
donné quelque chose.
M. Tremblay: Cela s'applique à l'article 21, M. le
Président.
M. Michaud: C'est dans les conditions. M. Tremblay:
À l'article 31 ?
M. Michaud: II ne faudrait pas mêler les fonctions avec les
objectifs, mais dans les fonctions, le paragraphe d), si on peut le nommer,
veut suggérer au gouvernement et aux agents économiques des
actions visant à accroître la productivité dans l'ensemble
des activités économiques ou dans un secteur
déterminé.
On dit aussi, au paragraphe c), de transmettre le résultat
d'étude et de recherche. Je crois que les fonctions et les objectifs
couvrent un peu nos préoccupations présentes.
M. Goulet: M. le Président, pour terminer, ce que je
voulais dire, c'est qu'à un moment donné il faut fermer la
boucle, dans tout organisme, pour connaître les résultats. C'est
ce que je voulais dire. Il faut savoir si cela donne quelque chose, oui ou non.
Il y aura l'étude des crédits. M. le ministre sait pertinemment
comment cela se passe, l'étude des crédits. Cela fait seulement
deux ans...
M. Tremblay: Cela se passe très bien ici. Vous
n'étiez pas à l'étude des crédits, cette
année...
M. Goulet: Du ministère de l'Industrie et du Commerce?
M. Tremblay: ... du ministère de l'Industrie et du
Commerce...
M. Goulet: Oui, mais...
M. Tremblay: Nous fournissons une foule de renseignements
le député d'Outremont peut en témoigner qui
permettent une discussion vraiment documentée sur les crédits que
nous adoptons.
M. Goulet: M. le Président, je n'ai pas assisté
à l'étude des crédits de l'Industrie et du Commerce, mais
à ceux d'autres ministères. En tout cas! L'évaluation des
résultats...
M. Tremblay: Le ministère de l'Industrie et du Commerce
est très productif.
M. Goulet: Pardon?
M. Tremblay: M. le Président, pour les raisons que j'ai
évoquées à l'endroit du député d'Outremont
et à l'endroit du député de Bellechasse, je recommanderais
que la commission refuse l'amendement proposé par le
député d'Outremont.
Le Président (M. Boucher): M. le député
d'Outremont.
M. Raynauld: M. le Président, est-ce que je pourrais quand
même poser une question au ministre? Est-ce qu'il ne trouve pas
surprenant qu'on ne mette pas parmi les objectifs de l'institut, de favoriser
l'augmentation de la productivité? Est-ce que ce n'est pas
extraordinaire un peu? On crée un institut, et on dit: C'est bien
évident que c'est parce qu'on veut augmenter la productivité de
l'économie québécoise, mais on ne le dit pas. Les
objectifs, c'est d'informer, faire connaître, favoriser la collaboration
et la concertation. Nulle part, on dit que c'est pour favoriser l'augmentation
de la productivité.
M. Tremblay: On l'a à l'article 21, où on
dit...
M. Raynauld: Oui, mais ce ne sont pas les objectifs.
M. Tremblay: ... de suggérer au gouvernement et aux agents
économiques des actions visant à accroître la
productivité.
M. Raynauld: C'est une fonction particulière, mais on ne
la retrouve pas dans les objectifs de l'institut. C'est quand même...
M. Tremblay; On le retrouve au paragraphe c), de favoriser la
collaboration et la concertation entre les agents économiques en
matière de productivité. Ce n'est certainement pas pour la
baisser.
M. Raynauld: Non, mais on ne dit pas pourquoi.
M. Tremblay: Cela va de soi.
M. Raynauld: En matière de productivité. Il va
falloir se méfier. Il y a des fois qu'on va faire de la concertation
pour baisser la productivité. Il faut se méfier.
M. Tremblay: Si vous acceptiez, je pourrais faire un amendement
au paragraphe c), pour indiquer "de favoriser la collaboration et la
concertation entre les agents économiques afin de favoriser
l'augmentation de la productivité".
M. Raynauld: Ce serait mieux.
Le Président (M. Boucher): Écoutez, il y a deux
amendements. Il va falloir en disposer d'un.
M. Tremblay: On va battre le mauvais, et on va passer au
deuxième.
M. Raynauld: Je le retire. M. Tremblay: D'accord.
Le Président (M. Boucher): Est-ce que vous faites motion
pour retirer votre amendement, M. le député d'Outremont? Motion
adoptée?
M. Raynauld: Adopté.
Le Président (M. Boucher): Sur la motion d'amendement de
M. le ministre, pourriez-vous nous donner le texte, s'il vous plaît?
M. Tremblay: L'article 20c se lirait comme suit: "De favoriser la
collaboration et la concertation entre les agents économiques afin de
favoriser l'accroissement de la productivité ".
M. Raynauld: Promouvoir.
Le Président (M. Boucher): II faudrait s'entendre sur une
formulation. "Afin de favoriser l'augmentation de la productivité".
M. Tremblay: Je m'excuse, "afin d'accroître la
productivité", ce qui est plus simple et plus productif.
Le Président (M. Boucher): II s'agirait de remplacer, dans
le dernier alinéa du paragraphe c) de l'article 20, les mots "en
matière de productivité" par les mots "afin d'accroître la
productivité".
M. Raynauld: Afin d'accroître la... M. Goulet: En
matière de...
M. Tremblay: Non, on enlève "en matière de
productivité" et on ajoute "afin d'accroître la
productivité".
M. Raynauld: D'accord.
Le Président (M. Boucher): Cette motion est-elle
adoptée?
Des voix: Adopté.
M. Raynauld: M. le Président, maintenant que cet
amendement est adopté, je voudrais soulever mon deuxième
problème. Ici encore, en deuxième lecture, j'ai soulevé la
difficulté que pouvait représenter la poursuite, en termes de
politique économique, d'un seul objectif, aux dépens d'autres
objectifs qui peuvent être tout aussi valables. J'ai également
mentionné que c'était la difficulté à laquelle
avait fait face le Conseil national de la productivité en 1961, et
qu'après une année ou deux d'expérience, le Conseil
national de la productivité avait cru nécessaire de recommander
au gouvernement, de modifier sa loi constitutive pour tâcher
d'élargir, et au moins, d'éclairer ce conseil sur la façon
dont il veut envisager des accroissements de productivité.
Il est évident, par exemple, qu'à l'heure actuelle, on
pourrait argumenter que la meilleure façon d'accroître la
productivité, c'est d'accroître la demande globale, parce qu'on
sait que s'il y a une croissance rapide, la productivité va monter plus
vite. Si on prend une approche comme celle-là, évidemment, ce
n'est plus micro-économique. Je serais à peu près certain
qu'on pourrait invoquer le fait que si l'institut allait vers cette voie, il
excéderait le mandat qu'il a reçu. Je me demande s'il n'y aurait
pas lieu, et là encore, pour faciliter les choses, plutôt que de
parler en termes généraux, si on ne pourrait pas envisager
là encore une fois, je voudrais peut-être avoir la réaction
du ministre avant d'en faire un amendement formel quelque chose comme
ceci, soit qu'à la fin de ces trois paragraphes, on mette un
point-virgule et qu'on ajoute "et ce, dans le contexte de la situation et de la
politique économique générale", quelque chose de ce genre,
pour que l'institut puisse examiner et étudier les questions de
productivité en ayant à l'esprit qu'il y a autre chose que la
productivité qu'il faut poursuivre.
II faut aussi poursuivre le plein emploi. Il faut aussi poursuivre les
objectifs de répartition de revenus pour avoir une société
un peu plus juste que celle qu'on a. Est-ce qu'on est capable de dire à
un institut: Vous allez poursuivre rien que cet objectif, rien d'autre. Alors,
je me dis: Sans aller jusque-là, sans aller jusqu'à
élargir tellement la boîte que, finalement, elle fait tout, je me
demandais si ajouter une phrase, un bout de phrase comme celui-ci n'aiderait
pas à la compréhension des objectifs que poursuivrait cet
institut.
M. Tremblay: M. le Président...
Le Président (M. Boucher): Alors, je retiens que le
député d'Outremont fera cet amendement après
l'intervention du ministre.
M. Raynauld: J'aimerais avoir la réaction du ministre
à cette citation.
M. Tremblay: Les propos du député d'Outremont, je
pense, sont quelque peu contradictoires dans le sens que, d'une part, ils
semblent indiquer que les objectifs ne seraient pas suffisamment nombreux,
parce que, en se référant à l'expérience du Conseil
national de la productivité à Ottawa et du Conseil
économique du Canada par la suite, on avait élargi les fonctions
du Conseil de la productivité. Donc, d'une part, il semblerait souhaiter
qu'on élargisse les fonctions et les objectifs de l'institut. D'autre
part, il souhaiterait que l'on limite quelque peu la notion de
productivité ou, du moins, la préoccupation qu'a l'institut, afin
qu'elle tienne compte du contexte de la situation et des politiques
générales. Donc, il y a certainement, du moins apparemment, un
élément de contradiction.
Je pense, M. le Président, qu'il n'est pas certain que ce ne fut
pas une erreur lorsque, en 1963, on a vraiment élargi le mandat du
Conseil national de la productivité à Ottawa pour en faire un
Conseil économique du Canada qui s'occupait finalement de toutes les
questions de croissance économique. On en a fait finalement un organisme
responsable de la croissance économique. Évidemment, la
croissance économique a, dans sa composante, la productivité,
mais a bien d'autres choses, les politiques sociales, les politiques
conjoncturelles, les politiques de main-d'oeuvre, évidemment, la
croissance de la population, la croissance des investissements, etc.
Donc, à mon avis, ce fut une erreur, et c'est ce qui a
amené, je pense, le Conseil économique du Canada à devenir
de plus en plus un organisme avec une incidence pratique mitigée, alors
qu'au niveau même de la productivité, il y aurait eu
énormément à dire et énormément à
faire s'il y avait eu concentration sur les moyens d'accroître la
productivité.
Donc, nous n'avons pas voulu lier les mains de l'institut en lui
indiquant d'avance quels étaient les moyens qu'il devait retenir pour
augmenter la productivité. Évidemment, ça relève de
sa compétence d'établir quels sont les moyens; dans un secteur
donné, ça pourrait être tel moyen, dans un autre,
peut-être un autre, et ceci n'exclut pas, évidemment, des
recommandations macro-économiques. Mais l'institut devrait consacrer une
bonne part de ses efforts, sans doute la majorité de ses efforts,
à l'aspect micro-économique de la productivité. Le grand
danger qui guette un institut semblable, c'est de se perdre dans les grandes
études macro-économiques et de devenir un ministère des
Finances qui s'occupe des grandes politiques et, là, cela n'exclut pas,
évidemment, une part de considérations de cet ordre. Mais si
jamais l'institut faisait de cette préoccupation sa préoccupation
principale, il serait double emploi avec des institutions déjà
existantes.
Donc, l'institut va devoir faire ce qui ne se fait pas
évidemment, la concertation elle-même ne se fait pas, parce qu'il
a très peu de mécanismes pour faire la concertation mais
aussi, fournir des renseignements crédibles aux partenaires
économiques et aussi à la population en général,
parce que la population joue un peu le rôle d'arbitre derrière les
partenaires pour les forcer à accepter des mesures qui accroissent la
productivité.
On a dit, par exemple, lors de la fermeture de certaines usines, l'an
passé, dans le domaine forestier, que certaines usines de pâtes et
papiers au Québec étaient vétustes, qu'on avait
retardé la modernisation, qu'on avait peut-être été
timoré dans ce domaine et que les travailleurs payaient cette incurie.
(21 heures)
D'autre part, on a souligné que peut-être les syndicats
dans leurs négociations ne se préoccupaient pas de leur moyen de
production, regardaient à court terme des avantages pécuniaires
et oubliaient qu'au bout de la ligne, on pouvait perdre de l'emploi et que dans
les responsabilités d'un syndicat, il y avait celle de se
préoccuper de négocier des améliorations dans la
capacité et la qualité du travail qui était
effectué avec les instruments de travail dont disposaient les
travailleurs.
Donc, M. le Président, je penche davantage du côté
de l'interprétation du député d'Outremont qui consiste
à orienter l'institut vers la micro-économique plutôt que
vers la macro-économique. Ma crainte, et c'est une crainte que nous
avons eue tout le long de l'étude de ce projet de loi, c'est de confier
trop d'objectifs, trop de fonctions à l'institut, qu'elle se lance dans
des grandes études de macro-économique qui sont les plus faciles
à faire. On le sait, c'est plus facile d'aller au niveau abstrait que
d'aller au niveau concret. C'est parce que nous voulons que cet institut soit
impliqué dans le concret, que je me refuserais à jouer sur des
articles additionnels qui viendraient, peut-être, soulever la
possibilité d'une fuite en avant.
Le danger avec un organisme semblable, c'est que voyant la
difficulté de cerner des problèmes concrets, on se laisse aller
à la facilité de la fuite en avant. Il faut qu'il y ait des
études macroéconomiques, mais je serais très
déçu qu'un institut comme celui-ci se cantonne dans ce
niveau-là. C'est pourquoi nous avons mis, à l'article 25, la
possibilité que l'institut reçoive des
mandats spécifiques de la part du gouvernement, par le truchement
du ministre de l'Industrie et du Commerce, parce que si jamais l'institut et
son conseil d'administration s'éloignaient un peu trop des
préoccupations concrètes de productivité, alors, je le
ramènerai à ces objectifs de fond. On pourrait avoir des
débats en Chambre, à l'Assemblée nationale, sur cette
question.
Le Président (M. Boucher): M. le député
d'Outremont.
M. Raynauld: Je dois peut-être réagir aux propos que
le ministre vient de prononcer. Je voudrais qu'il n'y ait pas de confusion. Je
pense, M. le Président, d'ailleurs, que je vais proposer l'amendement
que j'ai suggéré tout à l'heure. Je veux que cela soit
bien clair.
Le Président (M. Boucher): On va le rédiger, cette
fois-ci.
M. Raynauld: Je laisse donc l'article 20 tel qu'il est. Il n'est
pas question d'élargir le mandat pour le faire aller au-delà des
études de productivité. Les trois, a), b), c). La seule chose que
j'ajoute: " et ce, dans le contexte de la situation et de la politique
économique générale. " Je vais essayer d'expliquer
pourquoi je tiens à cet amendement. Je ne sais pas si le ministre se
rend compte aussi concrètement que moi, à cause de
l'expérience que j'ai eue dans cette...
Le Président (M. Boucher): Pourriez-vous
répéter votre amendement, s'il vous plaît?
M. Raynauld: "Et ce, dans le contexte de la situation et de la
politique économique générale."
Les objectifs que doit poursuivre l'institut sont d'informer, de faire
connaître, de favoriser et ce, dans le contexte de la situation
économique et de la politique économique
générale.
Je veux mettre un contexte. Je veux mettre une espèce de cadre de
références pour que ces études de productivité
soient faites correctement.
Maintenant, ce n'est pas là-dessus que je veux insister, je veux
insister sur le fait que cet institut, comme il est formé, repose sur
une concertation, sur un consensus, entre des représentants des
travailleurs et des représentants du milieu des affaires. Un consensus.
Cet institut ne fonctionnera pas, s'il n'y a pas consensus entre un consensus
général sur les questions qui vont être
étudiées. Un consensus sur des études de
productivité, j'en souhaite à cet institut-là. Je pense
que les intéressés vont s'apercevoir que c'est très
difficile d'obtenir un consensus sur des questions comme celles-là,
entre des représentants syndicaux et des représentants
patronaux.
M. Tremblay: En quoi votre amendement va-t-il accroître ce
consensus?
M. Raynauld: Oui, cela va accroître le consensus parce que
cela va permettre à des membres des syndicats, par exemple, de pouvoir
dire que ce n'est pas parce que les travailleurs sont paresseux que la
productivité est faible...
M. Tremblay: C'est évident.
M. Raynauld: ... c'est parce qu'il y a aussi un contexte
général qui fait que la productivité est faible. Avec un
amendement comme celui-ci, j'essaie de favoriser ce rapprochement entre les
parties. J'ai fait cela pendant cinq ans, essayer de rapprocher des parties,
même sur des choses bien plus générales, bien plus vagues
que cette histoire. Croyez-moi, ce n'est pas facile de faire cela. Je pense que
l'ambition que le ministre a, et qui est une ambition légitime, c'est
qu'il veut qu'on en arrive à la fin à ce qu'il y ait des gens qui
s'engagent dans des affaires comme cela. Je pense que le ministre l'a
mentionné tout à l'heure. Pour qu'ils s'engagent, il faut leur
donner au moins un climat propice. Sans rien du tout, j'ai bien peur que
l'institut ne fonctionne pas longtemps. J'ai bien peur qu'il ne fonctionne pas
longtemps parce que je crois que, tel que le projet de loi est
rédigé à l'heure actuelle, il va être très
exigeant pour les membres de l'institut.
Vous avez seulement à vous représenter concrètement
le président de la FTQ, le président de la CSN, le
président de la CEQ, qui vont discuter de l'autre côté avec
Pierre Desmarais II, ou avec Pierre Côté, président du
Conseil du patronat, pour vous imaginer que cela sera un peu difficile, autour
de la table, de s'entendre. Comment se fait-il que la productivité est
plus faible au Québec qu'en Ontario? Ils vont prendre l'industrie de la
pulpe et du papier et ils vont dire: Comment cela se fait-il que la
productivité est plus faible ici? Vous pensez que les gens vont
s'entendre facilement pour dire que c'est parce qu'il n'y avait pas assez
d'investissements, ou parce que ce sont les travailleurs qui ne travaillent pas
assez et qui veulent des congés à toutes les trois semaines, et
que les gens vont s'entendre là-dessus? Non, ils ne s'entendront pas.
Ils vont dire: Écoutez ce n'est pas seulement l'industrie des
pâtes et papiers qui est moins productive qu'aux États-Unis ou
qu'en Ontario, c'est également l'ensemble des industries.
Comment se fait-il que, dans toutes les industries, c'est moins
productif? C'est parce qu'il y a des facteurs qui vont au-delà des
industries particulières. Il y a autre chose qui fait que c'est moins
productif.
En ajoutant cet amendement-là, cela permet aux parties d'adoucir
un peu les aspérités de part et d'autre et peut-être de
faire fonctionner cet institut. Encore une fois, si je le fais comme cela,
c'est que je retiens l'intention du ministre de ne pas élargir le
mandat. C'est encore centré sur la productivité. Par
conséquent, c'est très différent de ce qu'on pouvait avoir
au Conseil économique. Mais j'ajoute un élément
adoucisseur qui va permettre aux parties de dire: Oui, c'est peut-être
vrai qu'on ne veut pas avoir des changements technologiques, mais ce n'est pas
seulement parce qu'on n'a pas voulu avoir les changements technologiques que la
productivité est faible. Il y a peut-être d'autre chose aussi.
Cela permet à l'institut de dire: Oui, il y a d'autre chose,
mais, finalement, on revient à l'affaire et on dit: Oui, il y a des
changements technologiques qui sont nécessaires et cela va impliquer
que, dans cinq ans, il va y avoir un peu moins d'emplois qu'il y en a
aujourd'hui dans cette industrie. Il faut amener les représentants des
syndicats à accepter ce point de vue parce qu'on sait que c'est
nécessaire et on sait qu'il va falloir que ce soit compensé par
une expansion de la demande globale. C'est l'intention de l'amendement.
M. Tremblay: M. le Président, je pense qu'il va de soi que
la préoccupation en matière de productivité s'inscrit dans
un contexte. Il est évident que l'institut doit se préoccuper de
la productivité au Québec, dans la situation où se trouve
l'économie québécoise, avec les retards qui existent au
niveau de la productivité, qui dépendent d'un certain nombre de
causes qui ne pourront pas toutes être corrigées du jour au
lendemain. Il me semble qu'il y a une certaine vérité de La
Palice dans l'amendement proposé, c'est-à-dire que cette
préoccupation doit s'inscrire dans le contexte de la situation de la
politique économique générale; bien sûr, dans le
contexte de la situation économique internationale. On traverse, depuis
1973, une crise d'ajustement du côté des coûts. Il est
évident que la productivité du Québec reflète ces
circonstances internationales.
Le fait qu'au niveau fédéral, le Conseil économique
du Canada n'ait pas eu l'importance qu'il aurait dû avoir fait que nous
avons accumulé un manque au niveau des politiques économiques,
des stratégies industrielles et des stratégies commerciales et
ceci pénalise l'économie du Québec. Donc, tous ces
facteurs constituent le contexte et le fait de le préciser
m'apparaît superflu.
Mais, maintenant, si les membres de la commission jugent que le fait
d'ajouter que l'évidence est souhaitable, loin de moi l'idée de
continuer un débat sur cette question. Si vraiment les membres de
l'Assemblée et surtout le député d'Outremont insistent,
j'accepterai l'amendement. Mais il me semble que c'est quelque peu superflu de
préciser que l'institut va devoir fonctionner dans un contexte de
politique économique et de situation économique existante. C'est
évident.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Bellechasse, sur l'amendement.
M. Goulet: M. le Président, le ministre est prêt
à l'accepter, mais j'aurais une certaine crainte, parce que l'institut
comme tel est formé pour favoriser et augmenter la productivité,
c'est le but ultime. Sans élargir tellement les cadres, on met des
adoucisseurs et je me demande si, en mettant des adoucisseurs, on n'ouvre pas
une porte, on ne crée pas une certaine barrière. Ces
barrières sont déjà existantes, les syndicats, le milieu
social, si vous voulez...
NI. Tremblay: M. le député, je pense que le point
qu'on a soulevé est assez important, parce qu'on a mentionné tout
à l'heure que l'institut devrait peut-être faire des
recommandations au gouvernement dans sa réglementation, dans sa
politique, si ça nuit vraiment à la productivité. En
ajoutant l'amendement du député d'Outremont, on dit que ça
doit se situer dans le contexte de la politique économique
générale, on laisse peut-être entendre que ce qui existe,
c'est fataliste, peut-être que ça devrait continuer d'exister.
Là, ça va peut-être à l'encontre de ce que le
député d'Outremont lui-même suggérait tout à
l'heure, que peut-être l'institut n'hésite pas à
recommander au gouvernement et au secteur public de contribuer à
l'augmentation de la productivité.
M. Goulet: Si vous permettez, il y a déjà des
barrières qui existent, les syndicats, le milieu financier. C'est
entendu que si on veut diminuer le chômage dans une province, on peut
s'attendre à ce que la productivité diminue également, si
on veut diminuer le taux de chômage, en proportion. Ce sera aux
syndicats, au ministère des Finances, au ministère des Affaires
sociales, au ministère du Travail, de se débattre, de
défendre leur cause. Mais je ne verrais pas que ce soit à
l'Institut national de productivité, son but ultime est d'augmenter et
de favoriser la productivité.
S'il fait un rapport et dit: J'ai un peu peur de ça, mais si le
ministre est prêt à accepter l'amendement, mais il y a une
certaine crainte. Je me demande si on n'ouvre pas une porte et qu'on dit: ton
but ultime, on peut le changer, ça dépend du contexte
économique, ça dépend de ci, ça dépend de
ça.
Le but premier de l'institut qu'on veut former, c'est de favoriser ou
d'augmenter la productivité. Les autres barrières, les autres
agents, le ministère du Travail, le ministère des Affaires
sociales, ces gens verront et argumenteront à un moment donné, si
l'institut fait un rapport ou demande des choses qui ne sont pas acceptables,
ce sera à eux à défendre ça.
Le Président (M. Boucher): M. le ministre. M. le
député de Champlain.
M. Gagnon: J'ai à peu près la même crainte
que celle que vient de manifester le représentant de l'Union Nationale,
c'est un peu ce que je craignais tantôt; j'ai l'impression qu'on ouvre
une porte à certaines défaites pour dire: Cela ne va pas mieux
que ça, c'est à cause d'un contexte comme ça, alors que
c'est peut-être le contexte qu'on veut changer au moins dans la mesure du
possible. Ensuite, c'est que la crainte que vous aviez, si on regarde l'article
21a, c'est justement le rôle de l'institut d'effectuer des études
de recherche sur la productivité.
Il ne faut pas lui donner un argument pour dire, au départ: on a
un argument pour ne pas avoir de productivité, mais c'est justement
l'institut qui doit faire ces recherches et trouver les solutions.
M. Tremblay: Si vous me permettez, il y aurait une solution, si
nous mettions, dans le préambule, l'amendement du député
d'Outremont, avec sa
permission, pour que la préoccupation d'augmentation de
productivité soit une préoccupation, compte tenu du contexte,
dans le fond, et non pas, par la suite, venant comme une défaite ou une
justification de la raison pour laquelle on ne réussit pas à
l'augmenter. (22 h 15)
C'est peut-être très subtil, mais on joue avec des
subtilités qui vont entraver le fonctionnement de l'institut. On
pourrait dire dans le préambule: Les objectifs que doit poursuivre
l'institut, dans le contexte de la situation et de la politique
économique générale, sont...
M. Raynauld: Je n'aurais pas d'objection à cela. Il se
pourrait que cela apparaisse, comme je l'avais formulé, comme une
limitation. Dans mon esprit, ce n'était pas une limitation. Si cela aide
en le mettant dans le préambule, je n'aurais pas d'objection à
cela.
Le Président (M. Boucher): Est-ce que vous faites motion
pour retirer votre motion?
M. Raynauld: Je vais retirer ma motion. Le Président
(M. Boucher): Adopté? M. Raynauld: Adopté.
Le Président (M. Boucher): Motion retirée. La
motion du ministre serait pour inclure, dans la première ligne de
l'article 20, et ce, dans le contexte de la situation et de la politique
économique générale, de poursuivre...
M. Tremblay: La première ligne de l'article 20 se lirait
comme suit: Les objectifs que doit poursuivre l'institut, dans le contexte de
la situation et de la politique économique générale, sont:
a) D'informer la population, etc.
Le Président (M. Boucher): Est-ce que cet amendement est
adopté?
M. Raynauld: Adopté.
M. Tremblay: M. le Président, je proposerais l'adoption de
l'article 20, tel qu'amendé.
Le Président (M. Boucher): Est-ce que l'article 20 est
adopté, tel qu'amendé?
M. Raynauld: Adopté.
Le Président (M. Boucher): Adopté. Article 21.
M. Tremblay: M. le Président, l'article 21 spécifie
les fonctions, mais ceci est en concordance avec l'article 20 et reflète
un peu les discussions que nous venons d'avoir.
M. Raynauld: M. le Président.
Le Président (M. Boucher): M. le député
d'Outremont.
M. Raynauld: Je voudrais poser une question. Je n'y tiens pas
absolument, mais je voudrais demander au ministre s'il aurait des objections
à enlever, dans le paragraphe a), les mots "notamment dans le secteur
industriel"? Est-ce que vous auriez objection à enlever les mots
"notamment dans le secteur industriel"?
M. Tremblay: Ceci a déjà été
soulevé.
M. Raynauld: Ce n'est pas absolument restrictif, un notamment,
mais je ne vois pas pourquoi l'institut ne ferait pas d'études sur la
productivité dans le système bancaire, ou dans le système
du commerce, par exemple. Pourquoi "notamment dans le secteur industriel"?
M. Tremblay: Parce que nous voulions mettre l'accent sur le
secteur de la fabrication, sans limiter, par contre, la prérogative de
l'institut d'aller dans le domaine bancaire. Mais là, il y a un certain
élément de priorité et nous ne voulons pas que l'institut
se lance dans tous les azimuts au début. C'est pour cela que nous avons
voulu indiquer, de façon souple, une certaine orientation de l'institut
au départ. Le secteur de fabrication devrait recevoir, au début,
du moins, une certaine préoccupation, notamment. C'est pour cela que
nous avons mis le mot "notamment".
M. Raynauld: Je n'insiste pas, mais...
M. Tremblay: Si le secteur tertiaire reçoit l'attention du
conseil d'administration, on pourra y aller aussi. Mais nous ne voudrions pas
qu'on exclue le secteur de fabrication au départ, puisque l'un des buts
de la création de l'institut, c'est vraiment de contribuer à
l'augmentation de la productivité dans le secteur de la fabrication pour
augmenter nos exportations et diminuer les importations où nous sommes,
pour les produits manufacturés, très vulnérables.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Bellechasse.
M. Goulet: M. le Président, je voudrais savoir du ministre
pourquoi, lorsqu'on a réimprimé le projet de loi 80, qui
s'appelle maintenant 37... Dans le projet de loi 80, à l'article 21c, il
y avait une phrase que j'aimais bien. Je citerai seulement la dernière
partie de cette phrase: "De mieux coordonner l'action gouvernementale en ce
domaine et de discuter avec les ministères concernés de
l'élimination des barrières inutiles qui entravent la
productivité".
J'aimais cette phrase, parce que dans l'industrie et le commerce, la
PME, c'est à peu près une des choses qu'elle nous dit, un paquet
de paperasses et barrières inutiles.
M. Tremblay: J'ai répondu à cette question tout
à l'heure. Moi aussi je l'aimais. Mais si on demandait a l'institut de
corriger toutes les lacunes dans le secteur public, cela nous prendrait un
monstre. Il n'est pas exclu pour l'institut de recom-
mander des modifications dans les réglementations, etc. Mais dans
l'article initial, comme vous venez de le lire, on demandait à
l'institut de suggérer les moyens de mieux coordonner l'action
gouvernementale.
Vous ne soupçonnez pas ce que cela prendrait comme pouvoir pour
que cet article ne demeure pas lettre morte. On aurait pu le mettre, mais, pour
que ce soit vraiment efficace de coordonner l'action gouvernementale, vous vous
imaginez qu'il faudrait que ce soit un superorganisme gouvernemental ayant
préséance sur le Conseil du trésor, par exemple, pour
coordonner l'action gouvernementale et discuter avec les ministères
concernés des barrières inutiles qui entravent la
productivité. Il y a 26 ministères, etc. L'institut va pouvoir
faire des recommandations, mais lui donner un mandat bien spécifique de
coordonner toute l'action gouvernementale? S'il se lance dans ce
domaine-là, il ne fera rien d'autre au niveau de la productivité,
certainement pas avec quinze personnes. Il faudra augmenter le budget et en
faire un Conseil du trésor avec 300 personnes. J'aimais cela au
début, mais, lorsqu'on a regardé les répercussions de
cela, à moins qu'on ait accepté que ce soit lettre morte
si c'est un voeu pieux, on joue avec les mots si on voulait que
coordonner l'action gouvernementale ait un sens, on créait une
superstructure gouvernementale qui venait s'ajouter aux structures existantes.
Il y avait dédoublement avec le Conseil du trésor, mais il y
avait peut-être aussi dédoublement avec le ministère de
l'Industrie et du Commerce, qui est quand même l'organisme qui se
préoccupe aussi de défendre les intérêts
économiques dans le secteur privé auprès du
gouvernement.
C'est la raison, M. le député; c'est mon albatros de tout
à l'heure. Je n'ai pas voulu surcharger l'institut avec trop
d'albatros.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Laprairie.
M. Goulet: C'est un argument.
Le Président (M. Boucher): Excusez-moi, vous n'aviez pas
terminé?
M. Goulet: Seulement quelques mots. Le Président (M.
Boucher): Allez-y.
M. Goulet: C'est parce que c'est un argument que nous avons
souvent, lorsque nous visitons les petites et moyennes entreprises. En tout
cas, dans le secteur privé, ces barrières-là, on nous en
parle souvent. En tout cas, je l'aimais. Je n'ai pas pensé si je vais en
faire un amendement, mais je l'aimais. Je n'étais pas tout seul à
l'aimer, le ministre l'a dit également.
M. Tremblay: En réponse à l'intervention du
député de Bellechasse, la première version de l'article 21
comportait un élément de préjugé à l'endroit
des actions gouvernementales et nous voulions être positifs. D'autre
part, l'institut devra se servir du ministère de l'Industrie et du
Commerce pour faire pousser ses idées à travers le gouvernement.
Nous ne voulions pas créer un autre ministère de l'Industrie et
du Commerce, à côté du ministère existant. Le
ministère de l'Industrie et du Commerce est quand même un
organisme qui a un poids dans le gouvernement et nous ne voulions pas que
l'institut prenne à sa charge de tout coordonner l'action
gouvernementale. Cela nous apparaissait, même s'il y a une certaine
logique qui n'est pas exclue par la phraséologie contenue dans le
paragraphe d) de l'article 21, un peu extravagant.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Laprairie.
M. Michaud: Si vous me le permettez, M. le Président, si
on voulait élargir complètement cela, cela prendrait quasiment un
ministère de la productivité à l'intérieur du
gouvernement et, si je peux parodier un peu, il faudrait quasiment que ce
ministère ait un ministre venant de l'Opposition, pour réellement
qu'il fasse un travail superefficace.
Là, si on parle de l'Institut national de productivité, je
pense que, si on lui donne cela comme fonction, ce serait peut-être faire
double emploi dans certaines fonctions. Je pense au vérificateur
peut-être que je me trompe parce qu'à l'intérieur de
chaque ministère, il y a le vérificateur interne, il y a le
Vérificateur général et, en plus de cela, il y a le
Protecteur du citoyen, si on va encore plus loin. Je pense que ce serait
peut-être trop au début. On en viendra peut-être à
cela dans quelques temps, mais, présentement, je crois que ce serait
peut-être aller trop loin, surtout pour la structure qu'on lui donne au
début.
Le Président (M. Boucher): M. le député
d'Outremont.
M. Raynauld: M. le Président, cette préoccupation
de mon collègue rejoint celle que j'avais au début, celle
d'être bien sûr que le secteur public serait quand même
touché par cet Institut national de productivité. Peut-être
que cela allait trop loin de dire qu'il fallait suggérer des actions
pour coordonner les ministères ou des choses semblables, mais il me
semble qu'il devrait y avoir une place quelque part dans ce projet de loi qui
dirait que l'institut a le droit, quand même, de regarder des actions
à l'intérieur du gouvernement, à l'intérieur des
ministères, pour voir si ce n'est pas là la source des
difficultés sur le plan de la productivité.
Il me semble que la préoccupation est bonne. Peut-être
qu'encore une fois, le libellé était peut-être excessif,
mais suggérer au gouvernement n'est pas suffisant, parce que cela ne
veut pas dire que cela va toucher le gouvernement. Qu'on suggère au
gouvernement et aux agents économiques des actions pour accroître
la productivité, cela va. Moi non plus, je n'ai pas de formulation qui
me vient à l'esprit,
mais il me semble qu'il y aurait eu moyen d'insérer quelque part
que ces actions pourraient viser à accroître la
productivité dans le secteur public.
M. Goulet: Je serais tenté de dire qu'on toucherait
à 50% du problème de la productivité au Québec.
C'est peut-être un chiffre gratuit, mais cela le dépasserait
peut-être. Non?
M. Tremblay: Dans l'article 21, paragraphe d), on parle de la
fonction de l'institut, qui peut suggérer au gouvernement et aux agents
des actions pour accroître la productivité dans l'ensemble des
activités économiques ou dans un secteur déterminé.
Je pense que cette phraséologie est suffisamment vaste, qu'elle permet
à l'institut de vraiment faire les recommandations qu'il juge à
propos à l'endroit du gouvernement, comme à l'endroit du secteur
privé. Plutôt que de préciser avec une phraséologie
qui est soit extravagante, soit le reflet des préjugés et qui
présume des causes du retard de la productivité, parce qu'ici on
parlait de barrières inutiles à la productivité, comme si
le gouvernement était une barrière inutile, mais comme a dit le
député d'Outremont, nous l'avons mis dans le préambule de
l'article 20. Il faut prendre le contexte que les gouvernements existent. On
peut bien argumenter avec notre collègue Friedman, de
l'Université de Chicago, que s'il n'y avait pas de gouvernement, cela
irait beaucoup mieux, mais c'est anarchique.
M. Raynauld: C'est vrai.
M. Tremblay: Parfois, le député d'Outremont se
rapproche de l'École de Chicago.
M. Goulet: Cela dépend de la sorte...
M. Tremblay: On sait bien qu'avec les problèmes sociaux,
les problèmes de pollution, les problèmes de gestion de
l'économie, de répartition de la richesse et de stabilité
sociale, les gouvernements doivent jouer le rôle d'arbitre et qu'on ne
peut pas laisser la société évoluer selon la loi de la
jungle. Ce contexte, on l'a mis dans le préambule. J'ai
été heureux de l'accepter, d'accepter la suggestion du
député d'Outremont. On l'a mis dans le préambule de
l'article 20. Je pense que l'article 21 donne suffisamment de dimension aux
fonctions de la société pour qu'elle puisse faire toutes les
suggestions voulues, quel que soit le secteur, pour améliorer la
productivité.
M. Raynauld: M. le Président, je ne voudrais pas insister
davantage sur cet aspect. Je voudrais en soulever un second. Il y a deux
façons de s'y prendre pour en tenir compte. Je voudrais d'abord exprimer
ma préoccupation. Ma préoccupation serait d'impliquer d'une
façon ou d'une autre l'Assemblée nationale. Une des raisons
peut-être que le ministre pense que c'est à cause du
député d'Outremont à mon avis, pour lesquelles le
Conseil économique du Canada n'a pas été aussi efficace
qu'il aurait dû l'être, c'est parce que les hommes politiques, qui
prennent ultimement les décisions, n'ont pas été
suffisamment touchés par les études et par les interventions, les
suggestions, les recommandations du Conseil économique du Canada. Je
cherche donc un moyen pour que l'Assemblée nationale soit saisie et
décide si elle veut faire un débat sur des recommandations qui
pourraient venir de l'institut. Je dis qu'il y a deux façons de le
faire.
M. Tremblay: Pourrais-je vous préciser, M. le
député d'Outremont, qu'à l'article 25 il y a de
prévu dans le projet de loi que tout mandat confié à
l'institut doit être déposé devant l'Assemblée
nationale et qu'il peut s'ensuivre, évidemment, un débat sur les
résultats à la suite? Dans les articles 27 et 28, je ne veux pas
présumer... (22 h 30)
M. Raynauld: Non.
M. Tremblay: ... mais puisqu'on parle de l'Assemblée
nationale, l'institut doit faire rapport à l'Assemblée nationale,
par le truchement du ministre de l'Industrie et du Commerce, et aussi,
évidemment, comme je l'ai souligné tout à l'heure, les
crédits annuels de l'institut doivent être étudiés
par l'Assemblée nationale.
M. Raynauld: Oui, mais on avait ça aussi. Les
études de crédits ne se prêtent pas du tout à ce
genre de débat auquel on songe. Une commission parlementaire qui porte
sur les crédits on sait comment ça se fait, l'étude des
crédits. On dit: Ce soir, à 18 heures, vous avez fini. Les gens
qui sont invités pour étudier les crédits ne sont pas les
mêmes personnes qui seraient invitées à participer à
un débat sur le fond. On avait exactement la même chose avec le
conseil économique.
Je ferai remarquer aussi qu'à l'article 27, c'est un rapport
d'activités. Je ne parle pas d'un rapport d'activités, je parle
de rapport sur le fond. Alors, je vais essayer, encore une fois, sans faire
d'amendement formel tout de suite, d'indiquer des modalités qui
pourraient peut-être rendre plus concrète la proposition, la
recommandation que je voudrais faire.
Une première possibilité serait de dire la chose suivante:
Au paragraphe c), ce serait de transmettre le résultat d'études
et de recherches et là, ajouter "à l'Assemblée nationale,
aux autres agents économiques intéressés dans le but de
susciter leur concertation et leur intervention en vue d'accroître la
productivité".
Vous voyez l'intention qui est là? Donc, l'institut transmet le
résultat de ses études à l'Assemblée nationale et
aux autres agents économiques, dans le but de susciter... Je trouve que
c'est déjà une bonne formule... L'Assemblée nationale?
Non, il pourrait y avoir... À ce moment-là, ça suivrait
les procédures habituelles. L'Assemblée nationale pourrait
certainement décider de ne rien faire. L'Assemblée nationale est
souveraine, mais s'il y avait un rapport comme ça qui était
déposé si les résultats étaient
déposés ça pourrait donner lieu, si on suit
l'esprit avec lequel je fais cette
recommandation, à un débat où on dirait:
Écoutez! Est-ce qu'on accepte cette analyse qui est faite, qui nous
vient de l'institut? Est-ce qu'il y a lieu, effectivement, de faire quelque
chose? Est-ce qu'il existe une concertation? Quelles sont les actions
nécessaires à entreprendre, etc.
M. Tremblay: M. le Président...
M. Raynauld: C'est une première possibilité, M. le
Président. Peut-être qu'il y en aurait une deuxième.
M. Tremblay: J'aimerais quand même parler sur le
principe...
M. Raynauld: D'accord.
M. Tremblay: M. le Président, je voudrais tout d'abord
souligner le fait qu'il est toujours intéressant d'avoir des
Québécois qui acquièrent une expérience dans un
autre gouvernement et qui reviennent au gouvernement du Québec pour
faire profiter ce gouvernement de leur expérience personnelle.
J'anticipe le jour où nous allons avoir un transfert assez substantiel
de hauts fonctionnaires qui oeuvrent présentement au niveau du
gouvernement canadien et qui vont venir renforcer la fonction publique
québécoise à la suite de leur expérience. Je pense
que nous allons avoir un gouvernement national qui va avoir de l'étoffe
lorsque nous allons recevoir le mandat de la population de vraiment constituer
un gouvernement national pour le Québec.
M. le Président, je comprends la préoccupation du
député d'Outremont. C'est extrêmement frustrant pour un
organisme gouvernemental de faire des études et des recommandations et
de voir ces recommandations ne pas être prises au sérieux par le
gouvernement et parfois même par la population. Je conçois que
cela peut être frustrant. Il est évident que si l'Assemblée
nationale ou le Parlement pouvait faire des pressions sur le gouvernement pour
qu'un institut ou un organisme gouvernemental ait davantage d'impact, cela est
un appui additionnel à celui que la population en général
ou les autres groupements dans la population peuvent accorder aux travaux de
l'institut.
Le problème avec cette attitude, je le retrouve souvent avec le
député d'Outremont, c'est que, finalement, il met en sourdine
tout le principe de la responsabilité ministérielle.
En définitive, les organismes gouvernementaux sont sous la
responsabilité du gouvernement. C'est le gouvernement qui est
responsable, devant l'Assemblée nationale, du bon ou du mauvais
fonctionnement de ces organismes, et c'est au gouvernement de répondre
de ces mandats devant l'Assemblée nationale.
Or, dans le cas de l'institut, il y a un ministre qui est responsable
devant l'Assemblée nationale, c'est le ministre de l'Industrie et du
Commerce. Ce n'est donc pas à l'institut ou à son directeur de
court-circuiter le ministre responsable, de court- circuiter le gouvernement et
d'aller directement devant l'Assemblée nationale se chercher des appuis
pour pressurer le gouvernement. Je comprends que, dans un système
présidentiel, avec un sénat ou une Chambre basse, etc., des
organismes semblables pourraient être appelés à
témoigner devant un comité sénatorial et ainsi devenir une
créature même d'une des Chambres du pouvoir législatif.
Dans notre système, les organismes gouvernementaux relèvent du
gouvernement qui est responsable devant l'Assemblée nationale et devant
la population. De la sorte, je pense, nous ne pouvons pas introduire ce genre
de réforme à la pièce de notre système de
responsabilité ministérielle, à l'occasion de
l'étude de ce projet de loi.
Je serais, pour ma part, favorable à ce système
présidentiel, je pense que notre système parlementaire
britannique de responsabilité ministérielle qui fonctionnait bien
lorsque les parlements se réunissaient quelques mois par année
pouvait subir l'accumulation du pouvoir législatif et du pouvoir
exécutif, mais on se rend bien compte que, surtout avec
l'expérience que je vis, présentement, comme ministre, que c'est
inhumain d'être à la fois en charge de l'exécutif et de
présider au législatif en même temps. Ce que je
souhaiterais, pour ma part, c'est que nous évoluions vers un
système de type présidentiel. D'ailleurs, c'est dans le programme
du Parti québécois. Il est évident que, lorsqu'il y aura
ces réformes parlementaires, il y aura possibilité d'avoir ce
genre de modification dans le fonctionnement de nos organismes.
Je pourrais, par contre, assurer les membres de cette assemblée,
de cette commission que c'est dans le mandat et dans la fonction même de
l'institut de diffuser ces résultats et ces recommandations et que,
personnellement, je n'ai pas d'objection à déposer en Chambre les
études et les recherches de l'institut, lorsque le directeur me les
communiquera. Mais je pense, qu'il appartient au ministre responsable de le
faire, et non pas à l'institut.
Le Président (M. Boucher): M. le député
d'Outremont, je voudrais préciser. Est-ce que vous en faites un
amendement, parce que vous aviez conditionné votre amendement à
la réponse du ministre. Allez-y.
M. Raynauld: Non, je n'en fais pas un amendement, je veux tout
simplement réagir à vos propos. Je maintiens que cela sera encore
une excellente idée, que cela ne touche absolument pas au système
parlementaire et je note aussi que le ministre réagit, comme tous les
ministres du monde. L'institut sera indépendant aussi longtemps que
l'institut ne viendra pas dire que, au ministère de l'Industrie et du
Commerce, cela ne va pas et que c'est là qu'il y a des problèmes.
Et les ministres étant comme cela, cela veut dire qu'aussitôt
qu'un institut fait des études et critique quelque chose, on va mettre
le rapport aux oubliettes et on va lui dire: Qu'il ne vienne pas nous
ennuyer.
M. Perron: C'était comme cela sous l'ancien gouvernement,
mais pas avec celui qu'il y a là en avant de vous.
M. Goulet: Vous verrez.
M. Raynauld: Vous risquez de trop parler. Ce n'est pas
l'expérience de seulement un gouvernement, c'est l'expérience de
plusieurs gouvernements.
M. Tremblay: M. le Président, l'institut a comme mandat de
diffuser les résultats des études; il ne peut donc ne pas le
faire; s'il reçoit une directive du ministre de l'Industrie et du
Commerce de ne pas les diffuser, c'est à lui à le faire. C'est
dans son mandat de dénoncer le ministre. Lequel sera le plus mal
placé dans l'opinion publique, l'institut ou le ministre?
M. Raynauld: Cela dépendra. M. Tremblay: Le
ministre.
M. Raynauld: Si l'institut fait bien son travail, ce sera
peut-être le ministre qui sera en tort.
M. Goulet: Et le budget sera peut-être coupé...
Le Président (M. Boucher): M. le député
d'Outremont.
M. Raynauld: Je n'avais pas terminé. Je voulais soulever
encore une autre possibilité, le temps passe et je voudrais aller me
coucher.
M. Michaud: Je vais vous faire une suggestion.
Le Président (M. Boucher): Est-ce qu'on pourrait
compléter sur le même sujet avec M. le député de
Bellechasse, qui veut faire une intervention plus tard?
M. Goulet: M. le Président, si des résultats sont
diffusés, il faudrait s'assurer qu'ils soient diffusés et
toujours diffusés, c'est parce qu'on en parle, à un moment
donné, aux agents économiques intéressés. Si cela
demeure seulement à ce niveau, soit, mais si cela est diffusé en
public, aux media et ainsi de suite, chaque rapport, à ce
moment-là, même si ce n'est pas déposé à
l'Assemblée nationale, vous savez ce que feront les journaux, les
journalistes etc., et par là, l'opposition; ils font leur travail. Si
c'est déposé en public et l'opposition quand je parle de
l'opposition, la presse peut être un genre d'opposition au gouvernement,
ainsi de suite ne fait pas son travail, même si c'était
déposé officiellement à l'Assemblée nationale, cela
ne passera pas non plus. Si un rapport bien éloquent dit telle chose,
imaginez-vous que les journaux vont s'en emparer, mais il ne faudrait pas que
cela demeure au niveau des agents intéressés.
Le député de Duplessis a soulevé un point. Il a
dit: Cela ne se fait plus. On se fait dire encore... M. le Président, je
ne voudrais pas ouvrir un débat, quand un rapport est fait par certains
ministères, on dit: Cela devrait aller à tel et tel endroit. On
se fait dire par des fonctionnaires: Malheureusement, politiquement, cela se
défend mal; si un rapport comme celui-là était sorti en
public, probablement qu'à l'Assemblée nationale, on pourrait
faire notre travail. Il ne faudrait pas que cela arrive. Si cela demeure au
niveau des agents intéressés... Il faudrait mettre le mot,
s'assurer que cela va dans le public. Diffuser, est-ce que c'est en public?
Oui.
Quand l'institut produit un rapport, il faudrait qu'il aille dans le
public. Par public, j'entends que le ministre peut en déposer une copie
à l'Assemblée et une copie à la presse, ainsi de suite.
À ce moment-là, que cela fasse l'affaire ou non, comme le disait
le député d'Outremont... Si, à un moment donné, le
rapport dit: Le problème est au niveau du ministère de
l'Industrie et du Commerce, j'ai peur que les crédits pour la prochaine
année soient diminués ou même abolis. Si vous permettez, le
point que le ministre a touché est très important parce que c'est
diffusé, mais il faudrait savoir à quel niveau. Le point
également qu'a touché le député d'Outremont, cela
dépend de ce qu'on diffuse.
M. Tremblay: M. le Président, lorsqu'on parle de diffuser,
cela veut dire faire connaître et publier, etc. Évidemment, on
pourra ouvrir un débat sur le droit du public à l'information.
Personnellement, j'y serais favorable et je pense que notre gouvernement l'est.
Un jour, on proposera certainement une loi dans ce domaine, pour inscrire dans
les lois l'obligation pour les gouvernements de diffuser justement les
documents. Que l'odieux de prouver qu'un document ne doit pas être rendu
public retombe sur le gouvernement. On a souvent la situation inverse, surtout
au niveau fédéral. Vous vous rappelez les déclarations de
l'ex-ministre des Finances, M. Turner, qui disait que 80% de ce que le
fédéral indiquait comme confidentiel n'avait aucune relation avec
la confidentialité.
Il y a des lois comme cela en Suède, qui exigent que le
gouvernement ou les ministères qui veulent garder confidentiels les
documents aillent devant un tribunal neutre pour prouver que
l'intérêt public exige que tel document soit gardé
confidentiel. Je pense qu'on a tendance à être trop porté
vers le secret dans les gouvernements et qu'on devrait peut-être avoir
une loi de l'accès du public à l'information. Mais ce n'est pas
avec cette loi qu'on va le faire. L'institut est un organisme passablement
indépendant du gouvernement et a comme mandat de diffuser les
résultats de ses études et de ses recherches. Et diffuser,
à mon sens, cela veut dire les faire connaître, selon son
jugement, à travers l'ensemble de la population, par les canaux, par les
media et demander au ministre responsable de les déposer devant
IAs-semblée nationale.
Le Président (M. Boucher): Sur le même sujet, M. le
député de Laprairie.
M. Michaud: Très brièvement, l'institut a pour
fonction de diffuser les résultats, et il ne faut pas oublier que, dans
les objectifs, il doit informer la population. Je crois qu'on couvre
globalement cette question.
M. Goulet: Ce que je voulais dire c'est que, si un rapport est
favorable, il va se promener sur toutes les tablettes, on va le trouver
partout, mais, à un moment donné, on peut le diffuser. Mais il
n'y a pas de date, quand pouvez-vous le diffuser?
M. Tremblay: Le vrai problème, M. le Président, ne
se produira pas tellement avec le gouvernement, quoique ce soit toujours
possible. Cela va être à l'intérieur du conseil
d'administration, lorsqu'il y aura un rapport défavorable soit envers
les syndicats, envers les patrons; peut-être que là, il y aura des
rapports minoritaires. Je pense que le député d'Outremont a connu
cela.
M. Goulet: Si je pouvais aller à mon bureau, je vous en
donnerais un exemple concret.
M. Tremblay: L'institut sortira l'étude, mais devra sortir
aussi le rapport minoritaire, en toute probabilité. Le projet de loi que
nous avons devant nous fait une obligation à l'institut de diffuser, de
faire connaître, de renseigner, d'informer. C'est dans son mandat et,
chaque année, lorsqu'on lui votera des crédits, s'il a
manqué à son devoir, le ministre responsable devra en subir les
conséquences. (22 h 45)
Le Président (M. Boucher): Sur le même sujet, M. le
député' de Duplessis.
M. Perron: M. le Président, j'ai justement la
définition du mot "diffuser" du dictionnaire Robert qui est très
québécois, le Petit Robert, et ça veut dire:
Répandre dans toutes directions. Si l'article en question
inquiète l'Opposition, je me pose des questions.
M. Goulet: C'est répandre à l'intérieur des
directions.
M. Raynauld: Regardez donc le mot "publier" dans le Petit Robert.
Pourquoi est-ce qu'on ne mettrait pas "publier" à la place de
"diffuser"?
M. Michaud: "Informer la population", ça couvre tout, et
à l'article 28, le ministre dépose le rapport de l'institut en
plus.
Une voix: Adopté.
Le Président (M. Boucher): Article 21. Adopté.
M. Raynauld: M. le Président...
Le Président (M. Boucher): M. le député
d'Outremont.
M. Raynauld: ... j'avais un autre problème que je voulais
soulever. Ici encore, pour être très bref, la suggestion que je
vais faire est la suivante: ce serait d'ajouter un paragraphe e) qui se lirait:
De soumettre un rapport périodique sur l'évolution de la
productivité québécoise.
Je pense que l'intention est évidente, c'est de forcer l'institut
à remettre des choses de façon périodique, c'est assez
général.
M. Tremblay: M. le Président, là encore, je pense
qu'on ajouterait indûment à l'institut des obligations que n'ont
pas d'autres organismes gouvernementaux; les années de calendrier, 365
jours, peuvent être considérées comme courtes ou longues.
C'est une convention et, habituellement, on demande à ces organismes de
fournir un rapport annuel de leurs activités qui est
déposé devant l'Assemblée nationale.
Demander de faire des rapports périodiques, ça veut dire
quoi? Étant donné que l'action de l'institut ne peut se mesurer
après quelques jours ou quelques semaines, c'est une action sur la
productivité, qui va dépendre des études ou des
recommandations. Parfois, il va y en avoir plusieurs, parfois, il y en aura
moins. Le point important est qu'on s'assure qu'une fois par année, on
ait un rapport détaillé des activités et que
l'Assemblée nationale en soit informée par le ministre tuteur. Je
ne vois pas pourquoi on ajouterait un amendement de cet ordre qui ne viendrait
qu'alourdir le fonctionnement de l'institut.
M. Raynauld: M. le Président, j'ajouterai simplement que
c'est possible que ce soit une obligation additionnelle, mais ça n'a
évidemment aucun rapport avec l'article 27 et le rapport des
activités. Je parle d'un rapport, appelez ça une étude, si
vous voulez, sur l'évolution de la productivité
québécoise.
M. Tremblay: Cela va de soi, c'est évident que sur la
productivité il doit fournir toutes sortes de renseignements. On dit
dans les objectifs: "Informer la population et les agents économiques
sur la notion de productivité dans la vie économique, faire
connaître l'importance" et, dans l'article 21: "transmettre les
résultats d'études et de recherches, diffuser les
résultats de ces études et recherches", etc.
C'est évident qu'il va falloir qu'il publie des données
sur la productivité, et pas une fois par année, peut-être
sur une base mensuelle. Par contre, à l'article 27, il y a le rapport
annuel, mais en plus, l'institut doit en outre fournir au ministre tout
renseignement qu'il requiert sur ses activités. C'est évident
qu'on peut avoir d'autres types, on peut même avoir des mandats
spécifiques sur certains...
M. Raynauld: ... ne mêlez donc pas ça, l'article 27,
ce n'est que de l'administration.
M. Tremblay: Non, il y a aussi le fait des mandats
spécifiques. Si l'institut, par exemple, ne
fournit pas un certain type de renseignements statistiques sur la
productivité dans un domaine, le ministre peut le demander. À
cause de toutes ces préoccupations, je ne vois pas en quoi leur demander
de soumettre un rapport périodique ajoute quelque chose de positif.
M. Raynauld: Je n'insisterai pas, je pense que même s'il
n'est pas là, l'institut aura l'autorité suffisante pour en
décider. Peut-être que l'institut décidera de faire un
rapport comme celui-là. Je n'insiste pas plus que ça, je pense
que cela aurait été utile de le marquer. Si le ministre n'en veut
pas, je ne veux pas prolonger inutilement le débat.
En ce qui me concerne, je suis prêt à adopter l'article
21.
Le Président (M. Boucher): Adopté. Est-ce que vous
voulez revenir immédiatement à l'article 14, à
l'amendement qui a été proposé par M. le ministre et qui
se lirait comme suit: Que l'article 14 soit modifié en
remplaçant, à la deuxième ligne du premier paragraphe,
après le mot "selon", tous les mots par les mots suivants: "Selon les
effectifs, les normes et les barèmes fixés par l'institut et
approuvés par le lieutenant-gouverneur en conseil.
M. Raynauld: C'est bien parfait.
Le Président (M. Boucher): Est-ce que cet amendement est
adopté?
M. Raynauld: Adopté.
M. Tremblay: M. le Président, tout à l'heure, je
proposerai...
Le Président (M. Boucher): Un instant, s'il vous
plaît! Est-ce que l'article 14 est adopté tel
qu'amendé?
M. Raynauld: Adopté.
M. Tremblay: M. le Président, tout à l'heure, je
proposerai, à l'article 32, un article de concordance pour tenir compte
du nouvel article 14 concernant les fonds de retraite.
M. Raynauld: M. le Président, est-ce que le
deuxième paragraphe de l'article 14 est supprimé? Il faudrait
aussi une modification de concordance.
M. Tremblay: Non, il est enlevé complètement.
Le Président (M. Boucher): Le deuxième paragraphe
de l'article 14 est biffé.
M. Tremblay: Puisqu'on ne fait plus référence
à la loi.
Le Président (M. Boucher): Cet amendement est
adopté aussi. On l'adopte en même temps que l'amendement.
M. Raynauld: D'accord.
M. Tremblay: Article 22, M. le Président.
Le Président (M. Boucher): Article 22, M. le
député d'Outremont.
M. Raynauld: Je voudrais juste vous poser une question. J'ai
été surpris de voir le paragraphe c). Comment se fait-il qu'on
peut autoriser l'institut à emprunter une somme de $1 million? Je n'ai
pas d'objection au paragraphe, mais je trouve cela surprenant dans le cas d'un
institut d'étude et de recherche comme celui-ci.
M. Tremblay: Le but, si je me le rappelle bien, c'est de
permettre à l'institut de s'acheter des meubles ou des biens immobiliers
pour fonctionner, mais ceci ne peut se faire sans l'autorisation du
gouvernement si cela dépasse $1 million. C'est pour donner une certaine
marge de manoeuvre, une certaine latitude à l'institut, dans le cadre du
budget qui lui est imparti...
M. Goulet: $800 000?
M. Tremblay: Pour la première année, S800 000, mais
cela peut augmenter. Qu'il n'y ait pas possibilité d'emprunter à
court terme auprès d'une banque pour s'acheter des meubles, en attendant
que son budget lui soit versé sans qu'il ait l'autorisation du
gouvernement...
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Bellechasse.
M. Raynauld: ... mauvaises pensées.
M. Goulet: Je voudrais avoir des explications du ministre sur le
paragraphe a).
M. Tremblay: Cela s'est produit dans le passé; certains
organismes ont fait des dépenses inconsidérées.
M. Raynauld: On pense au paragraphe a). Je disais que
c'était pour éviter les mauvaises pensées.
M. Goulet: Le paragraphe a): "conclure un accord avec tout
gouvernement ou organisme gouvernemental ". Je voudrais quelques mots
d'explication.
M. Tremblay: On ne veut pas que cet institut passe des ententes
avec des instituts étrangers impliquant des relations
intergouvernementales qui ne soient pas autorisées par le gouvernement.
C'est même le cas pour tous les ministères qui ne peuvent pas,
sans l'autorisation du ministère des Affaires intergouvernementales, ou
dans un gouvernement national, sans le ministère des Affaires
extérieures, faire des ententes internationales. Cet institut n'est pas
un gouvernement, c'est un organisme qui dépend du gouvernement.
M. Raynauld: Adopté.
Le Président (M. Boucher): Adopté? Un instant, s'il
vous plaît. M. le député de Bellechasse.
M. Raynauld: ... curieux. Évidemment...
M. Goulet: Je m'excuse. "Conclure un accord avec tout
gouvernement", on imagine que c'est un gouvernement étranger, quel qu'il
soit. Cela peut être celui d'une autre province. Mais un organisme
gouvernemental québécois est-il inclus là-dedans? Faut-il
qu'il ait l'autorisation quand même?
M. Tremblay: Oui, mais cela va être le ministre responsable
qui va faire les démarches auprès du ministre de qui
relève l'autre organisme pour que l'entente se fasse. Cela se fait
souvent présentement avec le CRIQ, par exemple, et d'autres organismes
gouvernementaux. C'est le ministre de l'Industrie et du Commerce qui
paraphe...
M. Goulet: À l'intérieur du même
gouvernement, c'est la même chose. D'accord.
M. Tremblay: Souvent, le BSQ fait des ententes confidentielles
avec certains ministères.
M. Goulet: Adopté, M. le Président.
Le Président (M. Boucher): Adopté. Article 23?
M. Raynauld: Adopté.
Le Président (M. Boucher): Adopté. Article 24?
M. Perron: Adopté.
Le Président (M. Boucher): M. le député
d'Outremont.
M. Raynauld: Adopté.
Le Président (M. Boucher): Adopté. Article 25?
M. Raynauld: Ce qu'il y a de curieux, c'est le mandat qui doit
être déposé devant l'Assemblée nationale, mais pas
le résultat.
Une voix: C'est ce que je disais tantôt.
M. Raynauld: Le mandat est déposé mais pas le
résultat.
M. Goulet: On revient à l'article 21. ... à
l'article 20, on ne parle jamais des résultats.
M. Tremblay: Par la suite, M. le Président, lorsqu'il y a
eu un mandat qui a été communiqué à
l'Assemblée nationale et qui est connu de tous, il est évident,
à diverses instances qu'il y aura des questions de soulevées
concernant les résultats, mais on ne peut pas présumer de la
durée qu'il faudra à l'institut pour remplir son mandat. Au moins
une fois par année, l'institut va devoir faire allusion au mandat que
lui auront confié le ministre et le gouvernement, sauf qu'il devra aussi
indiquer si le mandat a été réalisé ou non.
M. Goulet: Cela va peut-être faire comme certaines
questions au feuilleton.
M. Tremblay: On y répond aux questions au feuilleton,
même si cela coûte très cher au fonds public.
Une voix: Adopté.
Dispositions diverses
Le Président (M. Boucher): Adopté. Article 26?
M. Raynauld: Adopté.
Le Président (M. Boucher): Adopté. Article 27?
M. Raynauld: Adopté.
Le Président (M. Boucher): Adopté. Article 28? M.
le député d'Outremont.
M. Raynauld: Adopté.
Le Président (M. Boucher): Adopté. L'article
29?
M. Raynauld: Adopté.
Le Président (M. Boucher): Adopté. Article 30?
M. Raynauld: Adopté.
Le Président (M. Boucher): Article 31 ?
M. Perron: Adopté.
M. Raynauld: Adopté.
Le Président (M. Boucher): Adopté. Article 32? M.
le ministre, je crois que vous avez un amendement.
M. Tremblay: M. le Président, j'aimerais proposer un
nouvel article 32 et que l'article 32 actuel devienne l'article 33. Le nouvel
article 32 se lirait comme suit: "L'article 45 du régime de retraite des
fonctionnaires (statuts refondus, 1964, chapitre 14), tel que modifié
subséquemment soit de nouveau modifié pour y ajouter le
paragraphe suivant: Le directeur général et les employés
permanents de l'Institut". Voilà le nouvel article 32, M. le
Président. C'est un article de concordance avec l'amendement que nous
avont fait à l'article 14.
M. Raynauld: Je pense que cela va se suivre avec l'article
45.
M. Michaud: II faut avoir la foi.
M. Raynauld: II faut avoir la foi.
Le Président (M. Boucher): Est-ce que ce nouvel article 32
est adopté?
M. Perron: Adopté. M. Raynauld: Adopté.
M. Tremblay: C'est pour permettre en fait qu'ils
bénéficient du régime de pension des fonctionnaires.
Le Président (M. Boucher): Adopté. Une voix:
Est-ce un nouvel article? Une voix: Vous nous le donnez?
M. Tremblay: À l'article 33, maintenant, M. le
Président...
Le Président (M. Boucher): Le nouvel article 33...
M. Tremblay: "La présente loi entre en vigueur le jour de
sa sanction."
Le Président (M. Boucher): Que l'article 32 du texte
devienne l'article 33. Adopté?
M. Tremblay: Adopté. M. Perron: Adopté.
M. Raynauld: Adopté.
Le Président (M. Boucher): Le projet de loi no 37 Loi
constituant l'Institut national de la productivité est donc
adopté. Je pris le rapporteur de faire rapport à
l'Assemblée nationale au nom de la commission. M. le
député d'Outremont.
M. Raynauld: Je voudrais ajouter deux brefs commentaires. Dans le
premier, je voudrais féliciter le ministre d'avoir soumis un projet de
loi comme celui-ci à l'Assemblée nationale. Je pense
qu'au-delà des modalités d'application, cet Institut national de
productivité devrait s'avérer très utile. J'espère,
même si certains des amendements que j'ai proposés pour en
faciliter l'application n'ont pas été adoptés, que
l'institut parviendra à produire des études et à obtenir
la collaboration nécessaire des différentes parties
intéressées à la productivité pour que des actions
soient vraiment entreprises dans ce champ névralgique de
l'économie. (23 heures)
Ceci dit, je voudrais ajouter un deuxième commentaire. Je pense
que, pendant une bonne partie de la soirée, je n'ai pas réagi
tout simplement aux diverses suggestions qui ont été faites que
le Conseil économique n'était peut-être pas très
efficace et qu'il n'avait peut-être pas rendu tous les services qu'il
aurait pu rendre. Je voudrais dire, en terminant, que si je n'ai pas
relevé ces remarques, ce n'est pas parce que je les accepte. Je pense,
au contraire, que le Conseil économique du Canada a été et
est un organisme très utile, non pas parce que chacune de ses
recommandations est adoptée, mais il en ira de même de l'Institut
national de la productivité. Des organismes comme ceux-là sont
utiles, lorsqu'ils font prendre conscience à la populationn qu'il y a
certains problèmes, qu'ils modifient même de façon
insensible les mentalités. Je suis sûr que le Conseil
économique du Canada, depuis 1964, a fait évoluer les
mentalités au Canada de façon très sensible et de
façon considérable. Je pense que des organismes comme
ceux-là sont, pour cette raison, beaucoup plus efficaces qu'on ne le
croit lorsqu'on examine de façon superficielle si telle recommandation a
été suivie ou si telle autre n'a pas été
suivie.
Il faut rappeler que le Conseil économique, dans les deux
dernières années où j'ai été là,
publiait une étude par semaine. Je sais que le conseil a conservé
pendant les quinze ans qu'il a existé jusqu'à maintenant une
crédibilité considérable auprès des professionnels,
et auprès des économistes, en particulier, et il valait la peine
de mentionner cette évaluation globale que je fais très
brièvement. Je pense qu'il va en arriver de même de cet Institut
national de productivité. Je ne crois pas que le gouvernement va se
mettre à courir tout à coup pour appliquer les recommandations
d'un institut comme celui-ci, mais si cet institut parvient à
sensibiliser la population sur le fait qu'on ne peut pas obtenir tout ce qu'on
veut dans la vie, il faut quand même faire quelques efforts, il faut
quand même reconnaître qu'il y a des ressources limitées, et
je pense qu'il aura rendu un très grand service.
M. Tremblay: M. le Président...
Le Président (M. Boucher): Merci, M. le
député d'Outremont.
M. le député de Bellechasse. M. le ministre, je vous
reconnaîtrai pour le mot de la fin.
M. Goulet: M. le Président, je veux dire que je suis
heureux, comme je l'ai dit en deuxième lecture, qu'au Québec on
ait, enfin prochainement, si vous voulez, un projet de loi qui ose toucher au
coeur de notre malaise économique, en tout cas, en bonne partie, ce
malaise qui est identifié à la productivité. C'est le
temps, je pense, qu'on place le dossier économique au Québec au
premier plan des volontés politiques dans le but de répondre aux
attentes des Québécois et la productivité est un
problème que nous devrions être capables de régler.
On s'est donné au moins un outil et j'espère qu'avec cet
outil on pourra atteindre l'efficacité et augmenter la
productivité.
Je remercie le ministre, je remercie mon collègue d'Outremont et
vous, également, M. le Président.
Le Président (M. Boucher): Merci, M. le
député de Bellechasse.
M. le député de Laprairie.
M. Michaud: M. le Président, très rapidement pour
vous faire plaisir, c'est que je dois remercier tous les membres de cette
commission parlementaire pour leur collaboration. À plusieurs reprises,
je me suis plaint, moi, du manque de productivité...
M. Goulet: Soyez productif, voyons!
M. Michaud: ... à la fois en Chambre et en commission
parlementaire et je pense que, ce soir, nous avons prouvé qu'on pouvait
alimenter la productivité. Je demanderais à chaque membre de
chaque formation ici de pouvoir passer le mot à certains de nos
collègues, pour augmenter la productivité collectivement.
Pour terminer, j'aimerais remercier le ministre...
M. Goulet: On va battre le gouvernement si on augmente trop.
M. Michaud: J'aimerais remercier le ministre de l'Industrie et du
Commerce pour avoir présenté ce projet de loi qui, je crois,
entre dans la ligne du ministère de l'Industrie et du Commerce, qu'on
pourrait appeler le nouveau ministère de l'Industrie et du Commerce, qui
est de plus en plus productif.
Merci!
Le Président (M. Boucher): Merci, M. le
député de Laprairie.
M. le ministre, pour le mot de la fin.
M. Tremblay: M. le Président, je m'en voudrais de ne pas
remercier les membres de la commission et les députés qui ont
pris la parole depuis quelques minutes pour souligner la présentation du
présent projet de loi. Je les remercie. Je crois que c'est une marque
que le présent gouvernement veut s'attaquer aux problèmes de fond
de notre société et, dans le domaine économique, la
productivité en est un. Mais, rattaché à la
productivité, il y a tout l'élément de solidarité
et d'éducation dans le domaine économique que nous voulons
mousser par la présentation du présent projet de loi.
Loin de moi, par contre, M. le Président, l'idée de
critiquer indirectement le député d'Outremont par les
commentaires que j'ai formulés, très rapidement d'ailleurs,
à l'endroit du Conseil économique du Canada. Il est
évident que le Conseil économique du Canada a fait un travail de
géant dans le domaine de la recherche économique,
théorique et appliquée. Le député a
mentionné une publication hebdomadaire.
Au niveau quantitatif, il y a eu beaucoup de travail fait par le Conseil
économique du Canada, et au niveau qualitatif aussi. Le problème,
c'est qu'au niveau de l'efficacité et le député
d'Outremont l'a déjà reconnu les gouvernements, surtout le
gouvernement fédéral, n'ont peut-être pas porté
toute l'attention désirée aux sages conseils que lui formulait le
Conseil économique du Canada de sorte que le problème avec ce
conseil pouvait dépendre, en partie, de cette gamme d'objectifs et de
fonctions très vastes, mais dépendait aussi de la qualité
du personnel politique à Ottawa, qui n'a pas jugé bon de vrament
tirer profit des conseils, des suggestions et des recommandations du Conseil
économique. C'est un peu, peut-être, le drame du Conseil
économique à Ottawa; peut-être qu'il y a des contraintes
politiques, dans un demi-continent comme dans le Canada, qui se
reflètent dans l'efficacité de fonctionnement du gouvernement
fédéral, qui font en sorte qu'on ne peut pas prendre de
décision de fond sur l'orientation économique.
C'est parce que nous voulons nous doter de pouvoirs, au niveau du
gouvernement du Québec, pour agir dans le domaine économique, que
nous travaillons, nous, du Parti québécois et du gouvernement du
Parti québécois, pour briser ces inefficacités afin que
les cerveaux des hommes sages et des femmes sages de notre
société puissent retrouver, sous formes de recommandations
pratiques, intérinées par des lois et des mesures
gouvernementales.
M. le Président, je voudrais donc rendre hommage, très
rapidement, aux membres de cette commission. À une heure aussi tardive,
il est quand même 23 h 10, d'une longue journée, certains d'entre
nous avons siégé jusqu'à cinq heures du matin et d'autres
ont recommencé très tôt ce matin avec le travail des
commissions, avec le Conseil des ministres qui s'est réuni, ce matin,
aussi, or les députés de l'Assemblée nationale, les
députés de cette commission n'ont certainement pas honte du
travail qu'ils accomplissent au Parlement du Québec, et n'ont
certainement pas honte de leur productivité au profit de la
population.
M. le Président, je voudrais vous remercier d'avoir
présidé avec autant de patience à nos discussions,
discussions profondes et parfois abstraites. Il s'agit d'un projet de loi
important, même s'il ne représente pas de grosses sommes d'argent.
C'est peut-être un petit pas dans l'évolution de l'économie
du Québec, mais c'est certainement un grand pas dans la voie vers la
solidarité économique au Québec. Le fait que ce soit un
institut national, M. le Président, est un signe très
positif.
Le Président (M. Boucher): Merci, M. le ministre. En mon
nom personnel, je remercie tous les membres de la commission, surtout pour
l'atmosphère qui a prévalu, je pense que c'est différent
de ce qu'on vient de connaître.
La commission ajourne donc ses travaux sine die.
(Fin de la séance à 23 h 10)