Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.
Etude des crédits du ministère de
l'Immigration
(Quinze heures cinquante-sept minutes)
Le Président (M. Boucher): A l'ordre, s'il vous
plaît!
La commission permanente de l'immigration est réunie pour
étudier les crédits du ministère de l'Immigration pour
l'année 1979/80.
Les membres de la commission sont M. Alfred (Papineau), M. Ciaccia
(Mont-Royal), M. Couture (Saint-Henri), M. Lacoste (Sainte-Anne), M. Laplan-te
(Bourassa), M. Lefebvre (Viau), M. Le Moignan (Gaspé), M. Marchand
(Laurier), M. Martel (Richelieu).
Les intervenants sont M. Bellemare (Johnson), M. Blank (Saint-Louis), M.
Boucher (Rivière-du-Loup, comme président); M. Caron (Verdun), M.
Charron (Saint-Jacques), M. Lessard (Saguenay), M. Marcoux (Rimouski), M.
Samson (Rouyn-Noranda), M. Vaugeois (Trois-Rivières).
Comme rapporteur officiel, M. Lefebvre (Viau)?
M. le ministre, pour les remarques préliminaires à
l'étude des crédits.
Remarques générales M. Jacques
Couture
M. Couture: Merci, M. le Président, je souhaite la
bienvenue à tout le monde. Je voudrais, au préalable,
présenter les membres de l'équipe de l'Immigration qui sont ici
présents. M. Florian Rompré est à un
téléphone d'urgence, il va arriver d'une minute à l'autre,
il sera ici, à ma droite; M. Yves Miron, chef de cabinet, Mme Nicole
Geoffroy, attachée de presse, M. Luc Martin, sous-ministre adjoint, M.
Marcel Cloutier, sous-ministre adjoint, M. Régis Vigneault,
sous-ministre adjoint, M. Jean-Marie Roy, directeur à l'information
vous pouvez peut-être vous montrer un peu, cela peut être
utile quand les gens ont affaire à vous Me Michel Jarry,
directeur des services juridiques, M. Michel Dagenais, directeur des services
administratifs, M. Normand Lemay, chef du service financier, M. Paul
Charbonneau, qui était chef du service financier, et Mme Claire
Thivierge, à la direction des communications.
M. le Président, il est heureux que nous puissions chaque
année, au printemps parce que c'est toujours au printemps
profiter de cette commission permanente de l'immigration pour poursuivre notre
réflexion commune sur les objectifs, les orientations et les actions
menées dans la sélection et l'adaptation des nouveaux membres de
notre société québécoise. J'ai d'autant plus de
plaisir à être ici avec vous aujourd'hui que l'immigration a
été au premier plan de l'actualité cette année, et
presque toujours en fonction de bonnes nouvelles. Je vous en rappelle
quelques-unes. Je vous annonçais, l'année derniè- re, que
nous venions de signer avec le gouvernement du Canada une entente accordant des
pouvoirs réels au Québec en matière d'immigration. Mais il
restait à sanctionner cette entente par une loi et c'est maintenant
chose faite, la loi 77 et ses règlements sont entrés en
vigueur.
Ensuite, le gouvernement a réglé le problème des
allocations versées à certaines catégories d'immigrants
ainsi qu'aux stages dans les COFI, qui se voyaient soudain privés de
cette allocation à cause des restrictions budgétaires du
gouvernement fédéral. Ce règlement marquait le nouvel
essor des COFI. Le ministère a aussi fait beaucoup parler de lui en
menant une action vigoureuse en faveur des réfugiés, ceux du
Hai-Hong en particulier. Ses actions sont telles qu'elles ont forcé le
gouvernement du Canada à bouger. Pour marquer la prise en main des COFI
et sensibiliser du même coup la population locale au sort des
réfugiés récemment arrivés, les COFI, suite
à ma demande, ont lancé l'opération de rapprochement, qui
a connu beaucoup de retentissement dans les milieux concernés. (16
heures)
Mais il serait intéressant de connaître le cheminement de
ces actions et je vais essayer de le faire brièvement. La loi 77
proclamée le 13 décembre dernier, donnait effet à
l'entente Couture-Cullen, signée le 20 février 1978.
Dorénavant, le Québec a le pouvoir de sélectionner les
ressortissants étrangers désireux de s'établir sur son
territoire de façon permanente ou temporaire. Les règlements qui
établissent la grille de sélection des candidats à
l'immigration ont également été adoptés. La grille
est établie en fonction de critères, tels que la situation de
l'emploi au Québec, l'âge, la formation professionnelle et les
connaissances linguistiques des ressortissants. Dans les cas de
détresse, dont les réfugiés, ces critères peuvent
être assouplis.
La loi 77 prévoit également la création d'un
conseil consultatif de l'immigration. Ce conseil a été
effectivement mis sur pied en décembre dernier après une longue
et fructueuse consultation auprès des diverses communautés
ethniques. Les quinze membres qui le forment ont d'abord été
choisis pour leur connaissance de l'immigration et du milieu
québécois autant que pour leurs qualités personnelles et
leur représentativité ethnique, sociale et professionnelle. Le
président de ce comité, M. Mounir Rafla, est d'origine
égyptienne, actuellement directeur général du CEGEP
Ahuntsic; il est aussi le porte-parole officiel de la maison d'Egypte.
Travailleuse sociale dévouée, Mme Thérèse
Benguerel est directrice je nomme les membres et je dis un peu ce qu'ils
font parce que cela peut être utile de les connaître davantage
du centre d'aide aux immigrants et elle possède une vaste
expérience à l'accueil des immigrants. Bien connu dans la
région de l'Estrie, M. Jean-Roch Bilodeau est professeur de
géographie et membre du service d'aide aux Néo-Canadiens dans
Sherbrooke.
Fort de l'expérience qu'il a acquise en Afrique, M. Laurier
Bonhomme est conseiller au service d'accueil aux voyageurs immigrants et
directeur fondateur du centre d'information et de recherche pour immigrants. M.
Jules Nadeau, journaliste bien connu, a enseigné en Chine et agit comme
interprète au ministère. Natif de l'Ukraine, M. Roman Serbyn est
professeur d'histoire à l'Université du Québec, à
Montréal. M. Paul Dejean, président de la communauté
chrétienne des Haïtiens de Montréal, milite depuis de
longues années pour la défense des droits de ses compatriotes.
C'est à M. Amadeu DeMoura, Portugais d'origine, qu'on doit l'existence
de radio centre-ville et de la télévision communautaire
portugaise.
Pour sa part, Mme Irène Formaris est membre fondateur de l'Union
des travailleurs grecs. Très engagé dans les organismes
latino-américains du Québec, M. Anselmo Leonelli est né au
Chili, il est membre de l'exécutif de la maison culturelle
Québec-Amérique latine. M. Mayer Levy, qui vit au Québec
depuis 1965, est le directeur du bulletin du cercle juif et le directeur des
relations communautaires du Congrès juif canadien. Professeur à
l'Université Laval M. Ngoc Dinh Nguyen est membre de l'exécutif
de l'Association des Vietnamiens du Québec. Mme Sheila McLeod-Arnopoulos
a signé plusieurs articles sur la situation des immigrants et
s'intéresse en particulier au problème des femmes immigrantes.
Avocat d'origine italienne, M. Giuseppe Sciortino connaît bien les
problèmes des réfugiés politiques et de la main-d'oeuvre
immigrante. Enfin, M. Gino Silicani est né en Italie, ancien directeur
général de l'adaptation au ministère de l'Immigration, il
est actuellement membre du comité interculturel et interconfessionnel du
Conseil supérieur de l'éducation.
Cette équipe exceptionnelle me conseille déjà sur
diverses questions reliées à l'immigration, à l'adaptation
des immigrants, à leur nouveau milieu d'accueil, ainsi qu'à la
conservation des coutumes ethniques. Je me félicite de ce choix. Un des
règlements afférents à la loi 77 venait également,
à point nommé, régler le problème soulevé
dans les COFI par les restrictions budgétaires fédérales.
Son règlement touchant les services d'adaptation et de formation
linguistique articule les modalités qui permettent aux immigrants non
admissibles, aux termes de la réglementation fédérale, de
recevoir du gouvernement du Québec, les allocations qu'ils touchaient
auparavant du gouvernement du Canada. En somme, la loi 77 reflète la
préoccupation du ministère de l'Immigration du Québec de
servir les objectifs et les besoins de la société
québécoise tout en privilégiant le principe de la
réunification des familles, d'une part, et, d'autre part, le souci de
jouer un rôle humanitaire au plan international.
Il est encore trop tôt pour évaluer l'impact qu'a
l'application de cette loi sur les activités courantes du
ministère. Mais il est indiscutable que depuis le mois de janvier, le
nombre des personnes accueillies à notre siège social du 355 rue
McGill a facilement passé du simple au double, illustrant même,
par le fait, la présence concrète du ministère
auprès des immigrants. D'autre part, nous avons ouvert de nouveaux
bureaux à l'étranger, à Hong Kong, à Caracas et
à Lisbonne pour être mieux en mesure de répondre à
la demande dans ces régions du globe.
Ceci dit, c'est sans aucun doute la question des réfugiés
qui a le plus contribué à mettre le Québec, pendant
plusieurs semaines, à l'avant-scène de l'actualité. Mais
il est bon de rappeler ici que la décision de mon ministère
d'accueillir les quelque 200 réfugiés du Hai Hong n'avait rien
à voir avec un geste impromptu ou improvisé. Bien au contraire,
la possibilité qu'a eue le Québec de se porter rapidement au
secours de ces réfugiés est due au fait que nous nous
préoccupons depuis les tout premiers jours de mon entrée au
ministère, de cette question toute particulière des
réfugiés. Pour ne nous en tenir qu'aux actions menées en
leur faveur au cours des quinze derniers mois, mentionnons, entre autres, le
colloque que tenait en mars 1978, le comité consultatif, et qui portait
sur le thème "Les réfugiés et le Québec, une
nouvelle responsabilité."
Quelques semaines plus tard, je demandais à quelques-uns de mes
hauts fonctionnaires d'amorcer les travaux pouvant mener à
l'élaboration d'une politique cohérente pour les
réfugiés. Pendant que ces travaux s'effectuaient, je me rendais
à Genève pour y rencontrer des représentants du
Haut-Commissariat aux réfugiés. A mon retour, le 17 mai 1978,
j'annonçais que le Québec était disposé à
accueillir 50% des prisonniers politiques argentins admis au Canada. En
juillet, le Québec recevait seize familles sud-vietnamiennes
réfugiées de la mer qui nous arrivaient du Kenya où elles
avaient été accueillies temporairement.
En octobre, je créais au sein du ministère le poste de
secrétaire délégué auprès des
réfugiés. Au cours du même mois, j'annonçais que le
Québec était disposé à accueillir 200
réfugiés chiliens. Ces individus commencent à entrer
régulièrement. Puis novembre et le drame du Hai Hong. Ce drame
mobilise tous les esprits et tous les coeurs. Le Québec est en mesure
d'agir rapidement. Je dépêche un conseiller de mon
ministère à bord de ce cargo qui est amarré au large de la
Malaisie. Son mandat: accélérer l'arrivée au Québec
de 200 réfugiés vietnamiens qui vivent à bord dans des
conditions indescriptibles.
Cette mission est la sixième effectuée au cours de
l'année dans le sud-est asiatique en vue de venir en aide aux
réfugiés de la mer. La célérité avec
laquelle le Québec peut agir dans ces circonstances lui vaut d'assumer
officiellement le leadership de l'opération canadienne et la population
québécoise dans tout cela accueille avec chaleur les nouveaux
arrivants. Des centaines de coups de téléphone sont reçus
au ministère. On offre emplois, hébergement, mobilier,
vêtements. Donc, ça mobilise beaucoup de monde.
Voilà pour nos actions passées. Mais au chapitre des
réfugiés, que nous réserve la nouvelle année? Nous
continuons de l'avant. Le secrétaire délégué aux
réfugiés, je devrais dire la secrétaire
déléguée aux réfugiés parce qu'elle est
mainte-
nant nommée en poste à la suite du concours, c'est Mme
Louise Gagné-Rebello, elle est entrée en fonction au début
de ce mois. Mme Gagné nous vient de la Commission pour la protection de
la jeunesse. Elle siège également au Comité international
de l'enfant, où elle agit en tant que conseiller auprès des
groupes d'immigrants dans le cadre de l'Année internationale de
l'enfant. Membre du conseil d'administration de la Ligue des droits de la
personne et de l'Association Québec-Chili, elle compte à son
actif une vaste expérience de travail au sein de plusieurs organismes
à vocation internationale.
Mme Gagné poursuivra les travaux déjà entrepris et
préparera la toute nouvelle politique de parrainage et de compagnonnage
des réfugiés dont j'annoncerai les détails ces jours-ci.
En gros, cette politique, selon la formule de parrainage collectif: un groupe
ou une société d'au moins cinq personnes s'engage
légalement à assumer pendant un an la responsabilité du
logement, de l'aide matérielle et l'établissement d'un ou de
plusieurs réfugiés.
Pour sa part, le ministère s'engage à subventionner ce
groupe ou cet organisme.
Quant à la formule compagnon, elle vise à inciter les
organismes bénévoles québécois
dévoués à des oeuvres d'entraide sociale à
s'engager moralement à soutenir et à guider les
réfugiés tout au long de leur première année de vie
en terre québécoise. Ces deux programmes permettront de stimuler
et de canaliser la générosité de la communauté
québécoise à l'égard des réfugiés.
D'autre part, mon ministère est également en train de
préciser les contours d'une politique qu'on pourrait provisoirement
intituler: Accueil des petites villes aux réfugiés. Cette
nouvelle politique veut favoriser l'enracinement des réfugiés
dans des villes de moindre dimension que les grands centres tels que
Montréal, Sherbrooke, Hull, Trois-Rivières et Québec et
repose sur le postulat que les municipalités de taille moyenne sont
aussi bien sinon mieux préparées à l'accueil des
réfugiés à cause de leur meilleure capacité
d'intégration.
Les variables qui président au choix de ces villes sont: le
logement, l'emploi, le transport, les ressources communautaires, les services
d'éducation linguistique et autres structures scolaires et, bien
sûr, l'attitude de la communauté.
Déjà des actions allant dans ce sens ont été
menées à Granby et à Valleyfield et l'on peut d'ores et
déjà prévoir le succès éclatant de cette
initiative. Au total, le Québec a accueilli plus de 1500
réfugiés en 1978, soit 27% des réfugiés
acceptés par le Canada et 11% du total de l'immigration
québécoise pour cette année.
Nous nous sommes engagés à recevoir 3500 autres
réfugiés en 1979, soit 7% du total de l'immigration.
Pour conclure ce chapitre ajoutons que nous serons bientôt en
mesure d'annoncer officiellement notre participation, à l'occasion de
l'Année internationale de l'enfant, à des projets touchant les
enfants réfugiés dans le monde. Ces projets sont
considérés comme prioritaires par le Haut- commissariat des
Nations Unies pour réfugiés qui souhaite favoriser
l'établissement d'enfants réfugiés dans leur continent en
répondant à leurs besoins primaires et essentiels. Pour nous,
c'est une belle occasion de manifester concrètement notre
solidarité avec tous les réfugiés du monde. J'aurai le
plaisir de proposer dès demain notre participation à ce programme
et de lancer un appel à la population québécoise pour
l'inciter à y contribuer.
J'ajouterai, en terminant sur ce chapitre, que notre
préoccupation du sort des réfugiés dans le monde
s'accompagne de nos efforts de participation à la défense des
droits de la personne qui, souvent, sont si étroitement liés
à la condition des réfugiés. Une collaboration
particulière avec l'organisme Amnistie internationale nous permet de
rester informés de ces problèmes et de faire à l'occasion
les représentations nécessaires auprès des gouvernements
ou d'organismes. Notre intention pour l'année en cours est de
sensibiliser davantage notre population à cette dimension comme
témoignage additionnel de notre ouverture sur le monde.
Abordons, si vous le voulez bien, un autre volet de notre action, celui
de l'adaptation. L'année dernière, à pareille date, nous
vous faisions part d'une nouvelle politique d'action concertée qui
visait à inciter les organismes intéressés à
l'immigration à travailler toujours plus étroitement avec le
ministère, dans la poursuite de ses objectifs d'adaptation et
d'intégration des immigrants à la communauté
québécoise.
Cette politique visait également deux objectifs secondaires:
Celui de dépolitiser l'octroi de subventions et celui de
reconnaître, de facto, le rôle de partenaires
privilégiés du ministère que jouent les groupes et
associations ethniques préoccupés par les questions
d'immigration.
Cette politique maintenant pratiquée depuis un an a donné
des résultats plus que satisfaisants et nous nous proposons
évidemment de la poursuivre tout en la raffinant. Bien sûr, les
programmes d'aide financière sont l'aspect le plus voyant de cette
politique. Ces programmes ne font pas de cadeaux. IIs ne visent qu 'à
soutenir et à appuyer concrètement les groupements ou
associations qui partagent les objectifs d'intégration et d'adaptation
du ministère.
Tous les groupes sont admissibles pour peu qu'ils soient à but
non lucratif, qu'ils soient représentatifs du milieu, qu'ils soient
gérés efficacement, qu'ils puissent compter sur les ressources du
milieu qu'ils représentent et, finalement, qu'ils évitent le
chevauchement des services déjà offerts, notamment par les
services gouvernementaux.
Les programmes d'aide financière sont au nombre de quatre. Le
premier, le programme d'aide au fonctionnement des organismes, apporte une aide
financière au fonctionnement d'organismes ou de groupes offrant des
services pour les immigrants ou organisant des activités d'adaptation.
Ce programme a distribué, au cours des douze derniers mois, une somme
totale de $535 000 répartie entre 44 organismes. Vous trouverez la liste
en annexe de votre cahier.
Le deuxième programme, l'aide aux activités d'adaptation,
offre une aide financière ou technique à des organismes ou
groupes qui veulent organiser des activités de rencontres entre
Québécois d'origines diverses. Par le biais de ce programme, nous
avons versé, au cours de I'exercice financier qui vient de
s'écouler, une somme de $90 000 pour un total de 35 activités
diverses qui contribuent à une plus grande intensité et
variété d'échanges entre les participants.
Le troisième programme, intitulé "Programme
d'activités ethniques, "offre une aide financière et/ou technique
aux organismes et aux groupes ethniques qui souhaitent conserver, mettre en
valeur ou faire connaître leur culture propre à la
communauté québécoise. Nous y avons consacré,
l'année dernière, une somme de $75 000 pour financer la
réalisation de 65 projets.
Le dernier programme d'aide financière s'adres-se à tous
les organismes qui offrent aux jeunes des communautés ethniques des
cours de langue ou de culture d'origine. Cette année, le
ministère a repris entièrement l'administration de ce programme
qu'il partageait avant avec le Conseil des classes ethniques du Québec.
Nous avons consacré $124 000 à l'enseignement de langues
étrangères à plus de 15 000 étudiants. Vous
trouverez au chapitre des subventions tous les détails concernant ces
programmes.
Pour ce qui est de l'année en cours, nous prévoyons
majorer de 14% les sommes affectées à nos quatre programmes
d'aide, pour atteindre un total de $999 000.
Nous ne saurions parler d'adaptation sans évoquer les travaux
importants qui se font dans les COFI. L'an dernier, à pareiIle date,
nous vous disions notre volonté d'élargir I'influence des COFI,
d'élargir leur mandat au-delà de l'enseignement du
français, afin qu'ils deviennent des véritables centres
d'intégration. Cela se fait, et de belle façon. Quantité
de nouvelles activités et de nombreux services ont été mis
à la disposition de la clientèle des COFI qui, elle-même,
s'est élargie. Je pense que vous en avez entendu largement parler dans
vos milieux.
Parmi ces activités, on retrouve les cours sur mesure qui tentent
de répondre aux besoins spécifiques de chacune des
communautés ethniques et de se rapprocher davantage de sa
clientèle. En moins d'un an, ces cours ont connu un essor remarquable
puisque, à Montréal seulement, près de 300 classes ont
été formées. Dans trois COFI de province, on a
déjà réuni 52 groupes d'étudiants. Nous pourrions
bientôt être aussi en mesure d'offrir des services sociaux
élargis et des services d'emplois dans certains COFI.
Toute cette effervescence qui anime notre réseau de COFI
j'annonce une nouvelle, vous aimez cela, des nouvelles atteindra son
point culminant cette année, alors que nous ouvrirons un nouveau COFI
dans l'Est de Montréal.
Nous ne saurions laisser ce sujet sans mentionner au passage
l'opération de rapprochement. L'automne dernier, mon ministère a
voulu, à la fois promouvoir sa politique d'action concertée et la
vocation élargie des COFI en organisant dans ceux- ci une
opération dite de rapprochement. Cette opération qui visait
à faire se mieux connaître et apprécier les COFI et les
quartiers dans lesquels ils sont implantés a connu un succès
inespéré, succès qui prouve hors de tout doute que les
Québécois sont fort bien disposés à l'endroit de
nos clientèles dans les COFI et qu'ils ne demandent pas mieux, les
circonstances aidant, à apprendre à mieux connaître ces
nouveaux Québécois.
Dans ce même ordre d'idées, j'aimerais vous annoncer une
autre nouvelle. J'aimerais vous annoncer l'ouverture prochaine d'un bureau
d'information, doublé d'un centre de rencontres et d'activités
d'adaptation que mon ministère est actuellement à mettre sur
pied. Ce centre, situé sur la rue Saint-Laurent, au nord de Laurier,
donc au coeur d'un quartier je ne sais pas si c'est dans le comté
du député de Saint-Louis, je ne pense pas...
M. Blank: C'est dans le comté de Mercier. (16 h 15)
M. Couture: Donc au coeur d'un quartier où se
côtoient quotidiennement des Québécois d'anciennes et de
nouvelles origines ne sera pas un autre COFI mais plutôt un lieu
où pourront fraterniser, de façon tout à fait informelle,
les Québécois de toutes origines. Ce sera essentiellement aussi
un lieu de communication, d'information et d'échanges de toutes
sortes.
Si les faits et projets que je viens d'évoquer indiquent notre
désir et notre volonté de voir se fixer de plus en plus de liens
entre Québécois de toutes origines, je voudrais signaler que nous
avons cette même volonté de multiplier les efforts de concertation
entre tous les intervenants reliés à l'immigration en
commençant évidemment par les différents ministères
du gouvernement.
Au cours de l'année qui vient de s'écouler, nous avons
fait des représentations auprès des ministères dans les
champs d'activités qui atteignent les immigrants: les Affaires sociales
qui se préoccupent d'adoptions internationales, l'Education qui touche
les étudiants étrangers, les Communications qui s'adressent aux
media ethniques ainsi que la Justice, les Affaires intergouvernementales,
l'Agriculture, l'Industrie et le Commerce, le Travail et la Main-d'Oeuvre.
Récemment, je faisais une représentation auprès
d'un comité de travail du ministère de la Fonction publique qui
prépare, grâce peut-être à notre intervention, des
recommandations au ministre sur les moyens à prendre pour faciliter
l'accès des immigrants à la fonction publique. Je veux m'assurer
que les immigrants seront dorénavant jugés selon les mêmes
critères que les autres Québécois, qu'ils pourront
participer à tous les concours de recrutement et qu'une fois
établis dans leurs fonctions, ils pourront obtenir la permanence
aussitôt qu'ils auront demandé ou obtenu leur citoyenneté
canadienne.
C'est dans cette même perspective de concertation et de
coopération que le ministère de l'Immigration participe avec le
ministre d'Etat au développement culturel à la tenue d'une
série de
colloques avec les communautés ethniques sur la politique
culturelle du gouvernement.
Favoriser l'adaptation et l'intégration des nouveaux venus au
Québec, cela se fait même bien avant que ceux-ci aient posé
le pied dans leur nouvelle patrie. Nous en avons pour preuve les travaux que
mène avec compétence et célérité notre
direction du recrutement et de l'établissement. Au cours de
l'année écoulée, cette direction a publié un guide
des immigrants entrepreneurs-investisseurs, réalisé des
enquêtes sur la situation de l'emploi au Québec, trouvé du
travail à plus de 1000 immigrants et vu à faire confirmer un
poste temporaire ou permanent pour plus de 5000 autres. Elle continue de
développer des relations de travail fonctionnelles avec tous les
ministères à vocation économique.
Par ailleurs, elle prépare actuellement des missions de
recrutement et d'information en Europe et dans le sud-est asiatique dans le but
de susciter l'intérêt des entrepreneurs qui seraient susceptibles
de venir investir au Québec.
Notre tableau récupéré capitulatif des actions
menées en faveur de l'adaptation des immigrants serait bien incomplet si
je n'abordais pas les actions menées en faveur des travailleurs
immigrants.
Dans le cadre du programme d'aide financière du ministère
prévoyant des subventions pour les travailleurs immigrants, près
de $200 000 ont été accordés au cours de la
dernière année financière à divers organismes
préoccupés de cette situation. Mais, il fallait faire davantage.
Aussi, n'ai-je point hésité à créer un nouveau
poste au sein de mon ministère, celui de secrétaire
délégué au travail des immigrants. L'année
dernière, je l'annonçais d'ailleurs. Le concours pour combler ce
poste a été ouvert et, d'ici quelques mois, le candidat choisi
sera connu.
Toutefois, comme il était important que notre programme d'aide
aux travailleurs immigrants démarre rapidement, j'ai retenu les services
d'une personne-ressource qui, en attendant que le poste soit comblé, est
mon mandataire auprès des travailleurs immigrants. Son rôle
s'apparente dans une certaine mesure à celui d'un ombudsman. Il agit
comme intermédiaire entre les organismes concernés et le
ministère et cherche à corriger des situations inadmissibles en
présentant au ministère des recommandations. Le ministère
peut, dès lors, intervenir et interviendra auprès des autres
ministères pour apporter les correctifs nécessaires ou
auprès d'autres organismes.
Je dois dire que ce secrétaire délégué a
reçu partout un accueil exceptionnel depuis son entrée en
fonction et que les milieux concernés n'ont cessé de manifester
leur intérêt à son travail.
Déjà, la CSN et la FTQ travaillent à la mise sur
pied d'un projet de services permanents aux travailleurs immigrants. En outre,
elles affecteront chacune une personne-ressource chargée de
répondre aux demandes des travailleurs immigrants au sein de leur
centrale. Au cours de l'été, on prévoit aussi organiser
une session intensive de rencontres entre des représentants des
principales ethnies et des associations populaires intéressées
à ce sujet dans le but d'établir un programme d'actions
concertées et de créer une structure permanente habilitée
à faire des représentations au nom des travailleurs immigrants,
et tout cela grâce à l'animation de mon ministère.
Ce poste de secrétaire délégué est donc de
toute première importance et je veux pouvoir atteindre les objectifs que
je me suis fixés pour l'année 1979/80 qui sera, au
ministère tout au moins, l'année des travailleurs immigrants.
Mais le ministère seul ne peut faire des miracles évidemment.
Heureusement, il compte des alliés. Il y a un mois à peine, la
Fédération des travailleurs du Québec organisait, en
collaboration avec mon ministère, un colloque important sur la situation
des travailleurs immigrants. A cette occasion, je me suis engagé
formellement à travailler en étroite collaboration avec les
centrales syndicales en vue d'informer les travailleurs immigrants de leurs
droits et à faire tout en mon pouvoir pour favoriser leur bonne
intégration aux milieux de travail.
Je tiendrai promesse. A ce chapitre, j'ajoute que nous songeons à
mettre sur pied un comité interethnique pour les travailleurs immigrants
à l'instigation du secrétaire délégué et en
collaboration avec le Conseil consultatif.
Ce colloque a été intéressant à plus d'un
titre. Il nous est apparu, tout au long de ces assises, que les intervenants,
quasi à l'unanimité j'aimerais bien que mes amis de
l'Opposition libérale écoutent, parce que c'est important
souhaitaient que le Québec récupère du gouvernement
canadien leurs amis tout ce qui lui reste de contrôle sur
son immigration et tout particulièrement les secteurs de l'accueil et de
l'adaptation. C'est d'ailleurs dans cette perspective que je rencontrais
récemment mon homologue canadien, M. Cullen jusqu'à nouvel
ordre en vue d'amorcer ce processus de récupération. J'ose
croire, comme par le passé, que ces négociations se feront avec
l'appui unanime des membres de cette commission. Je peux même dire,
presque en primeur vous avez encore des nouvelles que,
grâce au dynamisme et à l'initiative que nous affichons en ces
matières là-dessus, nous sommes, une fois de plus,
très différents des autres provinces du Canada; je pense que
c'est un bon exemple de la différence entre le Québec et le reste
du Canada notre dossier se présente très bien. Le
gouvernement fédéral semble disposé à donner suite
à nos revendications sur la perspective de récupération de
l'accueil et de l'adaptation. Toutes les actions entreprises ou amenées
en faveur des travailleurs immigrants, des réfugiés, des
immigrants tout court, que ce soit au plan de l'accueil, de l'adaptation ou de
l'intégration, ne peuvent connaître d'aboutissement heureux sans
que la population du Québec, dans son ensemble, ne soit
sensibilisée aux questions reliées à l'immigration et
à ses avantages. Je pense qu'on est tous unanimes là-dessus.
Depuis longtemps, la preuve est faite. L'insertion harmonieuse des
nouveaux Québécois dans leur société d'accueil
dépasse largement les ca-
dres gouvernementaux. Il faut, au contraire, utiliser tous les
mécanismes existants, surtout ceux qui sont le plus près de la
vie, des problèmes de chaque jour. C'est donc en toute connaissance de
cause que nous avons eu l'année dernière et que nous aurons
encore cette année, parmi nos priorités, les communications.
L'année dernière, en plus de vaquer à ses
occupations courantes, notre direction des communications s'est employée
à structurer son équipe de communicateurs et à
élaborer une campagne de sensibilisation qui s'échelonnera sur
une période de trois ans. Cette année, le premier volet de notre
campagne touchera prioritairement les corps intermédiaires, les
organismes gouvernementaux et paragouvernementaux. Les mass media seront
utilisés, eux, dans le but d'informer la population
québécoise du rôle que joue le ministère de
l'Immigration au sein du gouvernement, ainsi que des grandes orientations de
ses politiques. Tout cela en vue de préparer chaque
Québécois à mieux remplir son rôle de participant
actif à l'insertion des immigrants dans leur nouveau milieu d'accueil,
car c'est une responsabilité commune que nous devons tous assumer.
Sur ce, je termine mon exposé. L'étude des crédits
de mon ministère que nous allons maintenant entreprendre vous permettra
de mieux cerner ce qui vient d'être dit et vous permettra de
dégager aisément nos grandes priorités qui seront, en
1979/80: les travailleurs immigrants, la politique d'accueil dans les villes de
moyenne envergure, l'épanouissement de nos COFI, nouvelle
manière, notre programme de parrainage et de compagnonnage des
réfugiés et, pour conclure, notre grande campagne de
sensibilisation.
Croyez-le ou non, tout cela se fera sans augmenter tellement nos
ressources humaines et financières. C'est dire que nos fonctionnaires
méritent nos plus cordiaux remerciements pour l'énorme
tâche qu'ils ont abattue, ainsi que pour celle qu'ils se proposent
d'abattre. Je me félicite particulièrement de l'esprit dynamique
qui anime mon ministère. Ce dynamisme est !e fruit évident des
motivations profondes de nos fonctionnaires et c'est tout à leur
honneur. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Boucher): Merci, M. le ministre. M. le
député de Mont-Royal.
M. John Ciaccia
M. Ciaccia: Merci, M. le Président. J'aimerais dire
quelques mots d'introduction d'ordre généra! sur le bilan du
gouvernement dans le domaine de l'immigration, avant d'aborder l'étude
des crédits et de chaque programme des crédits. A la suite des
politiques économiques et linguistiques un peu compliquées du
gouvernement du Farti québécois, et maintenant par les nouvelles
politiques d'immigration, à la suite de l'entente Cullen-Couture, il y a
eu certains changements qui se sont produits dans notre société,
dans notre économie, non seulement au niveau économique, mais
aussi au niveau démographique, il y a eu un exode, un départ
d'une certaine partie de la population, un départ de certains capitaux.
Je pense que tout le monde est assez bien documenté. Je n'ai pas besoin
de donner les chiffres au ministre à ce sujet. Ce qui rend les questions
démographiques et la dépopulation encore plus graves, c'est que
l'immigration, qui représente un certain espoir pour l'avenir, a subi
une baisse très importante, beaucoup plus que celle de l'ensemble du
Canada. Pour 1977, le Canada a connu une baisse dans son immigration de 23%,
tandis que le Québec a connu une baisse vraiment sérieuse de
34%.
On peut constater par ces chiffres, par ce taux de croissance
négatif, que le Québec est maintenant en déclin tant en
termes démographiques qu'en termes même économiques. Il ne
suffit pas de dire que ces chiffres désastreux représentent des
tendances totalement hors du contrôle du gouvernement actuel, parce que,
dans d'autres provinces canadiennes, on n'a pas l'évidence d'un tel
déclin. Seul le Québec a la distinction d'avoir un taux de
croissance négatif dans sa population.
Ce qui rend le tableau québécois de l'immigration encore
pire, c'est que le nombre des immigrants investisseurs, c'est-à-dire les
gens qui apportent un atout direct et concret à l'économie
québécoise a diminué même beaucoup plus que la
baisse globale du taux d'immigration, et, en effet, si on examine les chiffres,
les données et les faits concernant l'immigration au Québec, on
trouve beaucoup trop souvent que la réalité de ce qui se produit
n'est pas tout à fait conforme aux déclarations du ministre. On
trouve qu'il y a parfois beaucoup plus de publicité que de
résultats concrets. Permettez-moi d'en donner quelques exemples.
Prenons d'abord le cas des immigrants investisseurs. Vous avez fait
référence, M. le ministre, plusieurs fois, au fait que cette
catégorie d'immigrants est la plus souhaitable et que vous feriez tout
votre possible pour recruter telles personnes qui pourraient apporter des
investissements au Québec. Il y a eu d'autres déclarations du
ministre où il était en faveur de l'immigration en disant que les
immigrants n'enlèvent pas les emplois, mais créent plutôt
des emplois. Je suis entièrement d'accord avec lui. Mais, selon certains
chiffres, en 1976, les capitaux créés par l'immigration au
Québec étaient presque 26% du total pour l'ensemble du Canada. On
voit que ces chiffres, en 1977, après une année de gouvernement
du Parti québécois, accusent un pourcentage de seulement 16%.
L'année dernière, en 1978, après deux ans de
gouvernement du Parti québécois, les capitaux créés
par l'immigration n'étaient que 11% du total canadien. J'ai
littéralement peur de savoir, je crains de savoir le pourcentage pour
1979. Pour un ministre, je pense, qui veut favoriser toute immigration par
toutes les catégories de la population, je pense que c'est un
échec et c'est un échec grave dans sa politique.
Continuons. Le ministre nous dit toujours que l'immigration est un atout
pour tous les Québécois
et il va sans dire que, sur ce point, je suis 100% d'accord, même
plus, si possible. Néanmoins, sous son gouvernement, le Québec a
connu une baisse dans son taux d'immigration, c'est probablement la plus grave
de toute son histoire. Je me demande donc ce qu'il faut croire, les
déclarations du ministre ou la triste réalité des
chiffres, qui sont quasi tragiques et qui ne correspondent pas du tout, je
pense, aux intentions que le ministre nous donne dans son exposé et dans
les déclarations qu'il fait à la population.
Un autre sujet que le ministre a abordé souvent, c'est qu'il veut
effacer tout ordre de discrimination dans le domaine de l'immigration. Encore
une fois, je me trouve en accord avec ses affirmations, mais, quand je vois les
applications, on trouve que ce n'est pas tout à fait conforme encore aux
réalisations et aux intentions du ministre. En effet, dans la grille de
sélection, je crois qu'elle comporte une discrimination. Quand on a
discuté le projet de loi no 77, nous avions tenté d'y faire
inclure une clause qui était incluse dans l'entente Cullen-Couture, que
vous avez signée, selon laquelle il n'y aurait pas de discrimination.
Vous avez refusé catégoriquement d'inclure cette clause. (16 h
30)
Maintenant on voit ici, dans la grille de sélection, que vous
êtes réceptif à une interprétation qui peut
être discriminatoire. On voit que c'est presque impossible pour les
immigrants non francophones, à moins que ce soient des catégories
de réfugiés, soit qu'ils ne soient pas francophones ou qu'ils ne
soient pas adaptables, d'après vos critères, et ça peut
ouvrir la porte à une discrimination. Nous n'avons pas une politique
d'immigration dont les critères de sélection donnent une occasion
égale à tous les gens de n'importe quelle origine de venir
s'établir au Québec. Si on veut une société
ouverte, si on veut une société pluraliste, si on veut
éliminer toute discrimination, je crois que votre grille de
sélection devrait être changée parce que, question
d'adaptation, question de politique linguistique, selon les lois des autres
ministères, celles du gouvernement et même les dispositions dans
votre loi d'immigration, c'est clair qu'une personne qui vient au Québec
doit apprendre le français et il y a des mesures, des obligations
à cet égard.
Une fois que cette obligation est là pour tous les immigrants qui
viennent de n'importe quel pays, je crois que ça devrait satisfaire les
exigences de notre société quant aux matières
linguistiques et ne pas créer de discrimination à la source pour
vraiment fermer la porte à une série de catégories
d'immigrants de toutes les parties du monde.
Le ministre nous a souvent parlé de la solidarité à
l'endroit des gens de pays en voie de développement. Encore une fois, ce
sont de belles intentions, mais c'est son gouvernement qui a augmenté
les frais de scolarité de ces personnes et ce geste risque de constituer
un véritable blocus à l'endroit des pays
sous-développés Je sais bien que le ministère de
l'Education vient d'annoncer un nouveau programme pour subventionner des
étudiants étrangers qui viennent faire leurs études au
Québec. Si c'était une condition sans restriction, les gens de
tous les pays pourraient venir étudier au Québec, sur le
même plan que les Québécois et là encore sans
discrimination. Ils doivent maintenant passer par fa sélection du
ministère de l'Education.
Je ne doute pas que, comme résultat, nous allons avoir moins
d'étudiants de certains pays et, certainement, connaissant les
politiques du gouvernement, cela va affecter certaines institutions
plutôt que d'autres au lieu d'avoir toutes ces institutions ouvertes
à tout le monde. On a l'impression, en empêchant les gens de
venir, en augmentant les frais de scolarité et, après cela, en
donnant des subventions, que vous voulez introduire des matières
politiques dans ce domaine. Si vous aviez éliminé
complètement, vous pourriez dire: Le raisonnement, c'est que ce sont les
contribuables du Québec qui paient l'instruction et on ne veut pas payer
l'instruction des étrangers. A un certain niveau, je ne l'accepte pas,
mais d'autres provinces l'ont fait, c'est peut-être justifiable.
Quand vous instituez cette politique de dire que les gens en dehors du
Québec ne peuvent pas venir étudier ici aux frais des
Québécois et, après cela, que vous faites des exceptions,
vous ouvrez la porte à l'arbitraire, à la discrimination. Quel
critère allez-vous utiliser pour déterminer qu'un tel va obtenir
une subvention, et un autre n'en obtiendra pas? Vous laissez la porte ouverte
à des accusations de discrimination et vous allez avoir beaucoup de gens
et beaucoup d'institutions au Québec qui ne seront pas heureux des
décisions que le ministre de l'Education prendra.
Vous avez parlé du cas des ouvriers immigrants exploités
et le ministère y a fait référence pendant le
récent colloque organisé par la FTQ sur le sort de ces
immigrants. D'après les rapports des journaux, vous avez une liste. On a
fait état d'un palmarès de compagnies qui sont les pires
employeurs, d'après vos mots, les vrais exploiteurs.
Mais je crois que si vous avez cette liste, cela n'est pas assez de
dire: Ces gens-là ne devraient pas exploiter les immigrants. Je suis
d'accord avec vous, personne ne devrait être exploité dans notre
société et surtout pas une classe qui ne peut pas se
défendre. Ce sont de nouveaux arrivés, ils ne connaissent pas nos
lois, ils ne savent pas comment se protéger et ils ont besoin d'une
attention toute particulière de votre ministère. Je vous le dis:
Cela n'est pas assez de dire: J'ai une liste. Si vous l'avez cette liste, au
nom de ces immigrants, au nom de ces travailleurs immigrants, publiez-la afin
que la lumière soit faite et que ces gens puissent être
protégés suite à la publicité que vous pourriez
faire dans ce domaine.
Une autre situation, c'est le cas des médecins immigrants. Si
vous vous en souvenez, il y a plus d'un an, j'avais posé certaines
questions à l'Assemblée nationale, en Chambre, soulevant les
problèmes particuliers des médecins immigrants
et vous vous étiez montrés réceptifs, vous
partagiez les mêmes soucis, les mêmes problèmes et
inquiétudes que j'avais. Je vous dirais que c'est une politique
certainement quasi-discriminatoire du ministère des Affaires
sociales.
Depuis ce temps, la commission des droits de l'homme a recommandé
ceci et je cite la Presse du 10 juillet au nom de
l'équité et de la justice: La commission propose que tous ceux
qui sont actuellement engagés dans l'engrenage bénéficient
en effet d'une garantie selon laquelle ils pourront terminer leur internat ou
leur résidence sous réserve, bien sûr, des exigences
qualitatives. C'est d'après la Presse du 10 juillet 1978, c'était
la recommandation de la commission des droits de la personne.
Avec ce jugement pour l'appuyer, est-ce que le ministre peut nous dire
s'il a expédié... qu'est-ce qu'il a fait dans ce domaine? Est-ce
qu'il a fait des représentations? Est-ce qu'il a insisté
auprès du ministère des Affaires sociales pour que cette
discrimination cesse et que ces gens ne subissent pas les problèmes qui
leur ont été imposés par le ministère des Affaires
sociales?
Un autre point, c'est que le ministre nous a promis de faciliter
l'engagement des Québécois, des groupes ethniques dans la
fonction publique. Je sais qu'il a parlé de certaines démarches
qu'il a faites, mais je crois qu'en termes de pourcentage de la population par
rapport au pourcentage de la fonction publique, cela n'a pas fait...
d'après les informations, il n'y a encore eu aucun effet et il n'y en a
pas eu un grand nombre. Je ne pense pas que le ministre va prendre la position
de dire que ces gens ne sont pas qualifiés. Je connais trop le ministre,
cela n'est pas son genre d'adopter une telle position. Mais il faudrait avoir
des mesures plus concrètes pour appuyer un peu plus l'action du
gouvernement et assurer que les déclarations du ministre se
concrétisent et que le gouvernement agisse dans ce domaine qui est un
domaine assez important, parce que cela concerne la
représentativité, l'administration des programmes et souvent cela
représente l'aide que ces gens pourraient avoir dans leurs relations
avec le gouvernement.
Tout cela pour dire, quant à toutes les actions et
déclarations du ministre, que ces groupes d'immigrants, ces groupes
ethniques, les minorités ont besoin d'une action concrète. Ils
ont besoin d'un ministre qui va agir, non seulement ils ont besoin d'un
spécialiste dans le domaine des relations publiques... C'est cela les
conclusions qu'on va tirer, soit que vous avez de bonnes relations publiques
avec les groupes ethniques, vous leur dites toutes sortes de belle choses; ce
qu'ils veulent entendre, vous le leur dites. Je suis persuadé que
vous-mêmes croyez sincèrement à ce que vous dites. Mais je
ne sais pas et je ne suis pas convaincu que votre gouvernement appuie les
intentions que vous avez et je ne vois que très peu d'actions
concrètes dans plusieurs de ces domaines qui donnent vraiment effet aux
déclarations que vous faites.
Durant les débats sur le projet de loi 77 on vous avait
demandé pourquoi ne pas avoir une vraie politique? Quelle est votre
politique d'immigration? La position que vous avez prise: Cela va venir plus
tard. Je crois que la population a le droit de savoir maintenant, le plus
tôt possible, quelle est votre politique dans le domaine de
l'immigration. Il n'y a aucune raison de retarder. Je pense que dans votre
esprit vous connaissez les principes, les besoins, les critères, vous
savez ce dont le Québec a besoin et je crois que ce serait important
pour la population qu'elle le sache. Quelle est votre politique sur
l'immigration? Pourquoi attendre à plus tard? Je trouve que c'est
difficile de comprendre vos réticences à produire une vraie
politique d'immigration. Est-ce parce que vous ne voulez pas créer des
vagues de protestations avant le référendum? Peut-être la
population n'accepterait pas votre politique? Je ne sais pas. C'est
l'impression que vous nous donnez. Vous dites: Ecoutez, on va attendre
après parce que si vraiment je dis à la population ce que je veux
pour le Québec, elle va être tellement choquée de mes
propos qu'elle ne les acceptera pas. On vous demande d'enlever cette
inquiétude de la population, dites-nous quelle est votre vraie politique
et je peux vous assurer que si elle est bonne, si elle est ouverte, on va
l'appuyer.
Les mesures que vous avez introduites, l'entente Cullen-Couture, on l'a
appuyée. Si nous ne sommes pas d'accord avec certaines mesures que nous
croyons discriminatoires, que nous ne croyons pas dans l'intérêt
du Québec, dans l'intérêt de notre société,
alors on va les porter à votre attention et on va s'y opposer.
En terminant mes remarques générales, M. le
Président, je voudrais que le ministre je ne doute pas de ses
bonnes intentions de vouloir vraiment prendre certaines mesures dans le domaine
de l'immigration, mais je doute que le gouvernement ait la volonté
politique de le faire cesse de nous dire qu'il va
récupérer plus et plus de pouvoirs du fédéral. Ce
n'est pas le problème, ce n'est pas ça qui empêche les
immigrants de venir au Québec. Ce n'est pas ce qui nous empêche
d'avoir une vraie politique. Vous avez un droit de veto dans l'entente
Cullen-Couture. Que voulez-vous de plus? Je voudrais que vous vous attaquiez
aux vrais problèmes du ministère de l'Immigration, les vrais
problèmes de la question des investisseurs immigrants, la question de la
baisse de la population, et vous avez les pouvoirs d'après ladite
entente pour résoudre ces problèmes. Ce sont mes remarques pour
le moment.
Le Président (M. Boucher): Merci, M. le
député de Mont-Royal. M. le député de
Gaspé.
M. Michel Le Moignan
M. Le Moignan: Merci, M. le Président. En écoutant
les remarques préliminaires du ministre et comme il s'annonçait
comme un messager de la bonne nouvelle qui nous a confié beaucoup de
primeurs, dans un moment de distraction, je me croyais dans la nuit de
Noël annuncio vobis caudio manum...
M. Blank: Qui va prêcher à l'autre?
M. Le Moignan: Le ministre nous annonce de grandes nouvelles et
même des primeurs. Cela nous réjouit un peu à condition que
cela se concrétise évidemment avec le temps. J'aurais simplement
quelques brèves remarques, suite aux propos du ministre et aux remarques
également du député de Mont-Royal.
On a mentionné le projet de loi 77 qui fait suite à
l'entente Cullen-Couture. Il y a un point sur lequel j'espère que le
ministre va nous éclairer on l'a mentionné
également assez souvent c'est le pointage de la grille de
sélection des immigrants. Il me semble que dans le passé cette
question-là comportait des points encore obscurs et ce serait le temps,
dans une commission parlementaire, de nous apporter un peu plus
d'éclairage. (16 h 45)
On a également traité de l'intégration des
immigrants, de leur adaptabilité dans notre milieu et si on distribue
encore des points pour les qualités personnelles de ceux qui viennent,
c'est bien normal qu'on fasse une très bonne sélection, la
motivation des immigrants qui nous arrivent et, ensuite, leur connaissance du
Québec. Grâce à vos missions à l'étranger,
là où vous avez pour charge de recruter ces immigrants, j'imagine
qu'ils sont déjà informés non seulement des dispositions
de la loi 101 sur la langue officielle mais de toutes les autres conditions de
climat, d'adaptation, de possibilités de travail et surtout,
peut-être, de la sympathie qu'ils devront nécessairement trouver
ici, en sol québécois.
J'aimerais bien savoir sur quoi on peut se baser pour évaluer et
pour vérifier la connaissance du Québec de la part d'un
immigrant, si tel est le cas.
Si on regarde aussi le domaine qui concerne la langue, il y a deux
points, je pense, qui sont donnés pour la connaissance de l'anglais,
tandis que dix points sont attribués pour la connaissance du
français, français langue de la majorité, langue des
Québécois. Ici encore, il y a peut-être un ajustement
à faire on sait qu'il y a beaucoup d'immigrants qui ne
connaissent pas du tout le français pour leur faciliter
l'accès, l'implantation, l'adaptation au Québec. Il y a la
question des enfants, qui devront normalement s'intégrer à
l'école française, à l'école de la majorité.
Mais, pendant ce temps-là, il y a les parents, qui ont peut-être
quelques vagues notions de français, et encore, dans bien des cas, c'est
très pauvre, c'est très rudimentaire. Je pense bien que le
ministre, dans le processus d'intégration, prévoit certainement
des clauses où ces enfants vont recevoir aussi des cours en langue
anglaise, pour établir le contact normal entre l'école et la
famille.
Et comme on a parlé tout à l'heure de l'année de
l'enfant, je pense bien qu'à ce moment-là, si les immigrants
entrent au Québec en nombre inférieur à celui des autres
années, le désir, l'intention du gouvernement, c'est certes de
les attirer chez nous. Pour cela, la question de langue, je me demande si ce
n'est pas une des causes qui expliquent une diminution très
marquée au cours de 1978. On a peut-être fait peur aux immigrants
à l'étranger. Ce sont des points d'interrogation. Le ministre
pourra peut-être confirmer ces choses-là dans sa réplique
ou les rejeter. Quoi qu'il en soit, je pense que cela a été un
élément très essentiel. Je ne parle pas des facteurs
économiques, je ne parle pas des autres facteurs.
Pour cette évaluation de la connaissance des langues, ici encore,
de façon claire et nette, sur quoi se base-t-on pour expliquer aux
futurs immigrants la façon dont ils auront à s'implanter ici, en
milieu québécois? On a parlé des COFI tout à
l'heure. Je comprends que c'est très important. Il y en a
déjà un certain nombre. Vous allez en installer d'autres, surtout
dans les grands centres. C'est tout à fait normal et naturel. Il serait
peut-être important de savoir aussi que, dans son intégration,
l'immigrant est porté à se diriger vers Montréal, de
préférence, ceux qui demeurent au Québec, j'entends.
Est-ce qu'il y en a beaucoup qui viennent dans les villes de Québec, de
Sherbrooke, de Hull, tous ces centres où on peut leur offrir de l'emploi
et du travail?
Vous avez mentionné et je crois que c'est un geste
très humanitaire le fait que le Québec ait reçu en
1978 environ 1500 immigrants venant de pays en difficulté, que ce soient
les Chiliens, les Vietnamiens, ou d'autres. Est-ce qu'il y a un certain
pourcentage qui a été attiré par les campagnes? Ou bien,
est-ce que c'est toujours l'éternel et même problème, qu'on
vienne dans les villes, et si la ville peut leur offrir de l'emploi, peut leur
offrir des débouchés, c'est normal qu'on les garde dans les
villes.
Je sais que, du côté des campagnes, c'est peut-être
difficile mais, dans les régions agricoles, par exemple, vous avez
peut-être des ouvriers agricoles qui viennent d'autres pays. Ce serait
intéressant de connaître ce point-là.
Quant à l'apport économique, je n'insiste pas. Je voulais
en parler, mais le député de Mont-Royal a insisté sur
l'aspect négatif de l'apport économique. Je ne touche pas
à cela du tout, mais je sais que les immigrants nous apportent non
seulement leur argent dans bien des cas, mais nous recevons des techniciens,
des spécialistes, des professionnels, des médecins, des
ingénieurs ou des personnes de cette catégorie.
Du côté des étudiants, je sais très bien que
le gouvernement a diminué le montant des bourses ou des subventions,
mais, d'un autre côté, quand nous manquons de spécialistes
au Québec, je crois que le ministère de l'Immigration, de concert
avec le ministère de l'Education, devrait peut-être faire des
études dans le moment pour garder ici au Québec beaucoup
d'immigrants. On rencontre des fois des Vietnamiens, des Libanais ou d'autres
qui étudient ici et qui tombent en amour avec le Québec ou avec
le Canada et qui voudraient
demeurer ici. Je pense qu'un système, à ce
moment-là, soit de bourses conventionnelles pourrait nous permettre de
combler les effectifs, puisque souvent on fait appel à la main-d'oeuvre
spécialisée dans beaucoup de secteurs de notre activité
économique. C'est pour cela que des régions
d'établissement des immigrants, grosso modo, de façon sommaire,
seraient peut-être intéressantes, parce qu'il s'est fait un
développement... il faut l'admettre, la xénophobie est en train
de disparaître un peu au Québec. On sait qu'anciennement ce
n'est peut-être pas disparu entièrement un immigrant
était mal vu, très mal vu, était mal accepté, mais
aujourd'hui, je pense qu'un immigrant se sent chez lui, s'adapte plus vite et
devient Québécois aussi de façon plus rapide.
On a parlé de publicité, de publicité dans le sens
de l'information. On pourrait peut-être utiliser des slogans, dire aux
immigrants, par exemple: "On s'attache au Québec."
M. Couture: On leur dit.
M. Le Moignan: II est déjà usé dans le sens
de l'automobile, mais si, au Québec, au lieu de dire qu'on se
détache, qu'on s'attache au Québec, l'immigrant finirait par
comprendre que le Québec est sa patrie, qu'il veut demeurer au
Québec. Ce serait peut-être un bon genre de publicité.
J'aimerais que le ministre nous dise, peut-être tout à
l'heure... Il y a eu une baisse. Nous admettons qu'elle n'a pas commencé
avec le Parti québécois, admettons cela, mais je pense qu'elle
est plus prononcée depuis deux ans, l'entrée des immigrants au
pays.
J'aimerais savoir si, au cours des cinq ou dix dernières
années... Vous avez des chiffres, il y en a dans votre... Ici, j'en ai
vu des chiffres. Le Québec ou le Canada, c'est la porte d'entrée
et, après que les immigrants ont obtenu souvent leur citoyenneté
canadienne, ils traversent la frontière et ils deviennent citoyens
américains. Je ne sais pas si on a réussi à mettre un
frein à cet exode des immigrants. Je ne parle pas seulement d'eux, parce
qu'il y a beaucoup de Canadiens aussi, de Québécois qui s'en vont
en Floride, qui ouvrent des établissements, qui gardent leur statut de
canadiens, mais qui, en somme, transportent leurs capitaux. J'en connais des
dizaines, au moins dix ou douze de la Gaspésie même. Je ne parle
pas des centaines qui viennent d'ailleurs. Cela devient inquiétant. Il
faut donc remplacer ces gens-là par des immigrants.
J'aurais peut-être d'autres petits points. J'ai parlé de la
réaction des milieux québécois face à
l'arrivée des immigrants et j'aimerais que vous nous disiez un mot de
votre programme d'enseignement des langues d'origine, le programme PELO, je
crois, comme on l'appelle et, ensuite, les travailleurs, les étudiants.
Je voudrais savoir combien d'immigrants sont entrés, en 1976, 1977,
1978, combien entrent et combien sortent. Je vais terminer là dans ces
remarques générales, M. le Président.
Le Président (M. Boucher): Merci, M. le
député de Gaspé.
M. le député de Saint-Louis.
M. Blank: M. le Président, peut-être avec la
permission de la commission...
Le Président (M. Boucher): Comme intervenant, M. le
député de Saint-Louis, vous avez le droit.
M. Harry Blank
M. Blank: O'accord, j'ai seulement trois choses à
souligner. Une, en général, une chose tellement pratique... Comme
vous le savez, dans mon autre métier, je suis très proche de la
Loi de l'immigration. C'est la Loi de l'immigration fédérale et
provinciale. Comme avocat, depuis le 15 avril, depuis l'entrée en
vigueur de l'entente Cullen-Couture, je peux donner un chiffre, mais pas exact,
près de 75% des gens qui se présentent au fédéral,
doivent se présenter après ou avant à l'Immigration du
Québec. On sait qu'à Montréal je parle strictement
de Montréal pour le moment il y a deux grands bureaux
d'immigration fédérale où, à mon avis, il y a
environ 75 agents d'immigration qui s'occupent de ces gens. Comme je l'ai dit,
75% de ces cas sont référés à l'Immigration du
Québec. En chiffres ronds, cela prend une soixantaine de fonctionnaires
de l'Immigration québécoise pour faire le même travail que
les autres. Je sais qu'à ce moment, le nombre des effectifs est loin de
60. Par hasard, je peux dire qu'en ce moment, il y en a peut-être une
quinzaine qui occupent des emplois qui doivent être occupés par
60. Il y a deux choses que vous pouvez faire: Ou vous devez arrêter vos
autres programmes et référer des agents d'immigration de toutes
sortes de programmes à ces programmes où on a besoin de
fonctionnaires de l'Immigration pour prendre soin de ces personnes, ou vous
demanderez un budget supplémentaire pour engager d'autres effectifs,
parce que maintenant, le côté pratique de l'affaire Cullen-Couture
est ici.
Franchement, je vois qu'on aura un blocage terrible s'il n'y a pas
quelque chose qui se fait immédiatement; il ne faut pas attendre le
prochain budget, parce qu'actuellement, à mon avis, dans certaines
sections de ce service, il y a des retards de six à sept semaines, et
parfois, dans la vie humaine, parce que l'Immigration, ce n'est pas seulement
une question de dollars. Ce sont des personnes, des vies humaines. Parfois, un
retard de six ou sept semaines, c'est trop long. Je ne blâme pas le
ministre, au contraire. Je veux appuyer le ministre et le ministère pour
avoir plus de fonds ou un moyen de transférer des fonds d'une section
à l'autre de façon à avoir une section où l'on
puisse occuper ces gens, parce qu'en deux semaines environ, du 15 avril
jusqu'à maintenant... Comme je l'ai dit, dans quelques sections, vous
êtes six semaines en retard. D'ici un mois, ce sera pire.
Je ne sais pas ce que le ministre entend faire, mais j'espère que
dans sa réponse, il va nous dire
que parce que c'est du côté pratique, il y a cette chose:
Les certificats de sélection, l'approbation de demandes des visas
d'étudiants, des visas d'emploi, la question financière du
parrainage. Tout cela maintenant passe par l'immigration de Québec.
Aussi, vous faites quelque chose que je trouve très bon. Les gens qui
sont obligés d'aller à l'extérieur pour faire leur demande
pour entrer au Canada, vous donnez, dans certains cas, des certificats de
sélection avant qu'ils ne sortent du Canada pour aller là. Je
trouve cela très intéressant. Cela peut aider des gens, comme
mentionnait le député de Gaspé, qui sont ici, qui aiment
le pays, qui veulent retourner, mais suivant les règlements
fédéraux actuels, ils doivent quitter le pays, mais au lieu
d'attendre des mois et des mois à l'extérieur où cela
coûte très cher pour avoir ce certificat de sélection,
s'ils tombent dans les critères les critères, je laisse
mes confrères en discuter, je parle seulement du côté
pratique je pense qu'au moins on devrait faire quelque chose
immédiatement pour régler cette situation; sinon on va tomber
dans une situation incroyable. Je pense qu'à un moment donné,
votre établissement sur la rue McGill, dans le comté de
Saint-Louis, ne sera pas assez grand pour prendre soin de tous ces gens.
Peut-être qu'on devrait faire l'inverse de l'extérieur,
peut-être un grand édifice provincial et des représentants
fédéraux chez nous pour faire fonctionner cette affaire plus vite
et d'une façon plus commode. Ce sont mes questions sur ce point. (17
heures)
La deuxième chose, quand on a discuté du projet de loi no
77, j'ai été heureux de trouver que, suivant l'entente
Cullen-Couture, la définition du réfugié, au
Québec, était plus large que celle du fédéral,
parce que celle du fédéral tombe seulement dans la convention de
Genève et c'est parfois très difficile pour des gens de tomber
exactement et, pour entrer comme réfugié fédéral,
c'est tout un processus incluant une enquête d'expression. On doit
commencer avec une enquête d'expression avant de pouvoir demander le
statut de réfugié. Il y a beaucoup de cas pitoyables, qui sont
vraiment des réfugiés, mais qui ne tombent pas dans cette
définition très stricte. J'ai pensé que le Québec,
avec la largesse qu'on avait donnée à cette définition
dans la loi, ferait quelque chose pour ces réfugiés et j'ai
déjà envoyé des gens au bureau
d'Immigration-Québec. On a dit: La question des réfugiés,
à l'intérieur du Québec, ce n'est pas de nos affaires;
vous devez aller au fédéral.
Je pense qu'on doit trouver un moyen pour que le Québec prenne le
plein pouvoir sur les réfugiés, avec la définition qu'on a
dans notre loi pour des gens qui sont au Québec. Je ne sais pas comment
on doit le faire, peut-être que c'est très technique, mais il y a
un problème.
La troisième chose, c'est un cas particulier; comme vous le
savez, dans le comté de Saint-Louis et dans le comté de Mercier,
il y a beaucoup de Portugais. Il y a des Portugais qui, à mon avis, sont
des réfugiés d'une certaine classe. Le minis- tre, durant la
visite ici, à Montréal, de la fille de l'ancien président
Allende c'était la fille ou la femme?
M. Couture: Sa fille.
M. Blank: Sa fille a mentionné qu'il donnait des
instructions spéciales à ses agents en Argentine pour donner un
appui à des réfugiés chiliens qui sont en Argentine
à ce moment-ci.
Au Portugal, vous avez un grand nombre de gens qui viennent du
Mozambique et de l'Angola, qui ne sont pas considérés comme
réfugiés par le gouvernement canadien parce qu'ils portent tous
des passeports portugais. Ils peuvent rester au Portugal, mais ces
gens-là n'ont aucun lien direct avec le Portugal. Ils sont de
deuxième, troisième et quatrième générations
en Angola et au Mozambique. Le Mozambique et l'Angola étaient,
jusqu'à récemment, des colonies portugaises et ces gens ont des
passeports portugais. Mais ils sont vraiment des réfugiés. Ils
sont partis de l'Angola et du Mozambique, ils ont été
chassés, quelques-uns d'entre eux, du Mozambique et de l'Angola et ils
se sont sauvés au Portugal où il n'y a absolument rien à
faire. A mon avis, ils sont des réfugiés. Au moins, le ministre
peut les considérer comme réfugiés ou, en deuxième
lieu, donner les mêmes instructions à l'agent du Québec
à Lisbonne de donner un appui spécial à ces gens du
Mozambique et de l'Angola qui veulent immigrer au Québec. Comme le
ministre le sait, la communauté portugaise n'a aucun problème
d'intégration à la vie collective du Québec. S'il y a un
groupement qui s'est acclimaté, qui a appris la langue, les coutumes et
la culture, c'est le groupe portugais et ces gens sont des immigrants de
première classe. Il y a tout un réservoir d'immigrants au
Portugal qui viennent du Mozambique et de l'Angola qu'on peut facilement
intégrer au Québec en répondant aux besoins de ces gens.
J'espère que le ministre donnera les mêmes instructions aux agents
du Québec à Lisbonne que celles qu'il a données aux agents
du Québec en Argentine.
Merci.
Le Président (M. Boucher): Merci, M. le
député de Saint-Louis. M. le ministre.
M. Couture: Oui, je vais faire quelques réponses, dans ma
réplique, à certaines interrogations. Je remercie les membres de
la commission, du côté de l'Opposition, de leur
intérêt à ces questions.
Le député de Mont-Royal a parlé d'un exode de la
population et des capitaux depuis que le Parti québécois est au
pouvoir. Je pense que je ne reviendrai pas sur la question de l'exode des
capitaux. Il me semble qu'à l'Assemblée nationale, c'est devenu
presque un feuilleton et mes collègues, et surtout le ministre d'Etat au
développement économique, apportent toujours des réponses
extrêmement pertinentes auxquelles on pourra se
référer.
Sur l'exode de la population c'est vraiment une primeur
intéressante, je pense je veux dire ceci: Depuis plusieurs mois,
depuis deux ans, on a dit que les sorties du Québec étaient
considérables, qu'elles étaient plus importantes que partout au
Canada. Je viens d'avoir les chiffres de 1978. En 1977, cela avait donné
lieu à des questions de l'Opposition, parce que le nombre était
quand même pas mal important, il y avait eu 72 029 sorties.
C'était peut-être à cela que faisait allusion le
député de Mont-Royal en parlant de l'exode de la population.
C'était quand même moins qu'en 1970, alors qu'il y en avait eu 73
811, mais ce n'est pas pour nous réjouir d'autant.
Je dois dire que les derniers chiffres que nous avons pour 1978
je suis certain que l'Opposition va se réjouir avec moi prouvent
que la performance s'améliore puisque nous sommes tombés à
59 656 sorties, c'est-à-dire que nous sommes en bas de la moyenne...
M. Ciaccia: II y en a moins qui sortent?
M. Couture:... du Québec depuis 1962, ce qui fait presque
seize ans. En 1978, nous sommes en bas de la moyenne de ces seize
dernières années, moyenne qui se situait à 9,7%. Nous en
sommes à 9,5% pour 1978. Je pense que c'est de nature à nous
réjouir d'autant plus que nous rejoignons à ce moment-là
les chiffres qu'on avait dans les années passées. Il y a toujours
eu un nombre de sorties assez important peut-être pour les raisons qu'a
évoquées le député de Gaspé. C'est un fait
qu'il n'y a pas seulement les immigrants qui sortent, il y a évidemment
des Québécois de vieille souche qui s'en vont du Québec.
Je pense que c'est surtout à eux que faisait allusion le
député de Mont-Royal. J'ai les derniers chiffres et je pense
qu'on doit tous s'en réjouir. L'année dernière, il y a une
amélioration considérable et cela donne, je pense, une indication
pour les années à venir.
Je vois dans ceci le fait que notre société
québécoise, par toutes sortes de mesures apportées par le
gouvernement actuel, est plus intéressante pour les gens qui sont ici.
Cela maintient davantage notre population. De toute façon, il y a un
redressement de la situation et je n'insiste pas.
M. Blank: Est-ce que le ministre peut nous donner une copie de ce
tableau?
M. Couture: Oui, on va vous la donner avec plaisir.
M. Blank: II peut en faire faire des photocopies.
M. Couture: Oui, certainement. On a parlé de la baisse de
l'immigration. C'est évident qu'il y a une baisse de l'immigration au
Québec, surtout depuis les deux dernières années. Il y a
eu une baisse dans tout le Canada. La même baisse au Québec se
retrouve partout au Canada, c'est dans l'ensemble du Canada. Pour
l'année 1977, le total au Canada était de 114 914; le total est
tombé à 85 637 en 1978. Ce qui est important, pour
répondre à la question, c'est que le pourcentage du Québec
est tombé à 14 109 l'an passé, mais on est quand
même à 16,5% de l'ensemble du Canada. Cela rejoint et c'est
même supérieur aux pourcentages de quelques années
passées. En 1972, c'était 14%; en 1973, c'était 14,5% pour
l'immigration au Canada. En 1974, c'était 15,3%; en 1975, c'était
14,9%. En 1976, cela a été une grosse année, du moins par
rapport aux autres provinces du Canada, cela a été 19,5%; en
1977, 16,7% et en 1978, 16,5%. On a baissé, mais cela a baissé
partout.
Donc, la proportion, finalement, l'écart n'est pas tellement
différent par rapport aux autres. Tout le monde sait pourquoi cela a
baissé, c'est qu'en Amérique la conjoncture économique
n'est pas tellement bonne dans l'ensemble. Il y a des situations
économiques qui se redressent dans des pays européens qui
étaient nos principales sources d'immigration. Je pense que tout le
monde comprend cela.
Au sujet des immigrants investisseurs, là, le
député de Mont-Royal a touché un point sensible, auquel
nous sommes sensibles aussi. Je dirai quand même ceci: II y a eu une
baisse trop importante des entrepreneurs investisseurs au Québec
l'année dernière, mais cette baisse s'explique aussi par la
baisse de la population. C'est évident que dans un volume X de
population, si ce volume baisse, nécessairement la proportion des
entrepreneurs investisseurs qu'on retrouve dans un certain groupe de gens en
destination du Québec baisse proportionnellement. Ce qu'il faut retenir,
c'est que la proportion des entrepreneurs investisseurs par rapport à la
population qui entre au Québec d'une année à l'autre ne
varie pas tellement.
Par ailleurs, suite à c'est peut-être la
réponse qu'attend le député de Mont-Royal cette
baisse qui est alarmante, le raisonnement qu'on doit faire est le suivant:
Vu qu'il y a cette baisse de l'immigration, essayons au moins d'avoir un
peu plus d'entrepreneurs investisseurs parce que la conjoncture
économique s'y prête moins, ayons un fort volume d'immigration, et
je dois annoncer à cette commission parlementaire une nouvelle politique
pour les entrepreneurs investisseurs qui nous permet d'escompter pour les
prochaines années un redressement de la situation. Je veux
évidemment vous faire grâce des détails de cette politique,
mais je veux vous dire globalement qu'il y aura formation de conseillers en
immigration à l'étranger qui recevront une préparation un
peu plus précise par rapport au recrutement des entrepreneurs
investisseurs. Il y aura une publicité accrue à l'étranger
pour recruter ces entrepreneurs investisseurs. Nous avons déjà un
guide de l'immigrant entrepreneur investisseur qui vient de paraître, il
n'y a pas longtemps, qui est très bien fait et qui présente une
série de données qui permettent quand même d'attirer ces
entrepreneurs investisseurs.
Notre service d'entrepreneurs investisseurs prépare des missions
dans le monde pour aller
recruter cette clientèle. Il y en a une qui va partir
prochainement dans le sud-est asiatique. Nous allons organiser une concertation
avec les autres ministères et les agences à vocation
économique pour les sensibiliser aussi à cette approche et,
finalement, nous allons assouplir c'est peut-être cela qui est le
plus intéressant pour ces clients entrepreneurs investisseurs ce
qu'on pourrait appeler la bureaucratie pour venir éventuellement au
Québec. Il y a, par exemple, des voyages de prospection qui sont
prévus, de préétablissement, des stages, ce qui est
nouveau. Nous allons faciliter la possibilité de stages d'entrepreneurs
investisseurs au Québec. C'est difficile de dire à quelqu'un
à l'autre bout du monde: Venez avec $500 000, $50 000, $100 000 ou $200
000 vous installer. Parfois, on aime bien non seulement faire un voyage, mais
aussi faire un stage dans une entreprise connexe à son métier ou
à ce qu'on a comme capital pour se familiariser avec cela et prendre une
décision.
Je crois que ces mesures actives vont redresser la situation. Je pense
que c'est une réponse à la préoccupation que je partage
avec le député de Mont-Royal là-dessus.' Ce n'est pas la
baisse la plus grave de l'histoire de l'immigration. Je voudrais quand
même rappeler ce qui a été dit par le député
de Mont-Royal. C'est inexact de dire que c'est la baisse la plus grave de
l'histoire de l'immigration au Québec cette année.
La baisse de l'immigration tout le monde en conviendra est
presque une attitude raisonnable de la part de la société
québécoise. Nous avons déploré, tout le monde
ensemble, que dans les années passées le
fédéral, en changeant sa loi, a aussi répondu à
certaines de ces questions il y a eu beaucoup trop d'entrées
d'immigrants en territoire canadien et québécois mal
sélectionnés. Il y avait des gens qui ne restaient pas sur place
donc, il y avait des sorties; l'Etat, la collectivité assumait
des sommes pour l'accueil d'immigrants qui ne restaient pas, donc
c'était des pertes sèches et il y avait aussi une mauvaise
coïncidence des demandes des immigrants selon le marché du
travail.
Je pense que notre taux de 14 000 de l'an dernier a été
bas, mais cela a peut-être été une façon pour nous
de rééquilibrer davantage l'entrée des immigrants selon
les besoins du marché du travail et selon la capacité
d'adaptation de la population québécoise. Pour l'année
prochaine, nous avons fixé le chiffre à 18 000 et 20 000 si
possible je vais finir et vous pourrez prendre des notes en
étant beaucoup plus précis dans la sélection, beaucoup
mieux préparés pour les accueillir et en ayant une série
d'interventions qui vont davantage aider ces arrivées. Je pense qu'on va
se stabiliser.
Pour enchaîner tout de suite sur la politique de l'immigration du
Québec je pense que c'était la question centrale il
est évident que je n'en ai pas parlé dans mon préambule
parce que cette politique se prépare. Je l'ai dit lors de la
présentation de la loi 77, nous avons déjà mis sur pied au
ministère depuis deux mois, sous la direction du sous-ministre Luc
Martin qui est ici, un groupe de travail pour préparer la
problématique d'une politique de l'immigration du gouvernement du
Québec. (17 h 15)
Nous aurons des étapes aussi à franchir,
c'est-à-dire que ce groupe de travail, d'ici quelques semaines, avant
juin, va me présenter un peu l'échéance, les chapitres
à débattre, les questions qui sont soulevées par cette
politique possible du gouvernement du Québec en matière
d'immigration.
Nous voulons aussi je veux arriver au Conseil des
ministres assez prochainement pour lui demander de donner à un
comité interministériel de ministres un mandat de travail pour
une politique de population. C'est mon intention aussi dans les prochains mois
de demander au conseil consultatif ils ont déjà cette
commande-là, mais cela sera précisé après la
problématique présentée par le sous-ministre Martin
de travailler à la cueillette de tout ce qu'on a comme politique
d'immigration et de nous donner un avis sur l'élaboration plus
articulée de cette politique.
Tel que je l'ai promis lors de la présentation du projet de loi
77, c'est mon intention d'ici deux ans d'élaborer et de préparer
une véritable grande loi de l'immigration, une charte de l'immigration
du Québec. Pour répondre plus directement à ce que le
député de Mont-Royal demandait, il y a un groupe de travail en
place, il y a des échéances prévues, il y a un mandat au
Conseil des ministres qui sera donné là-dessus, il y aura
d'autres ministres qui se pencheront sur la question, il y a le conseil
consultatif et peut-être éventuellement il y aura une commission
parlementaire, si nécessaire, à l'automne on verra
pour proposer à l'Assemblée nationale un certain nombre de
propositions là-dessus.
Je continue rapidement. Sur la discrimination, je ne retiens pas
vraiment les remarques du député de Mont-Royal. Je pense, au
contraire, que la pratique que nous avons à l'immigration depuis que
l'entente est en vigueur et aussi de notre façon d'agir dans l'accueil
ou l'adaptation des immigrants contredisent carrément et totalement
toute insinuation de discrimination à l'immigration, au ministère
de l'Immigration et au gouvernement du Québec.
On parlait de la solidarité au Tiers-Monde et on opposait cela
à la politique sur les étudiants étrangers. Le
député de Mont-Royal a presque donné la réponse en
faisant état justement de cette nouvelle politique proposée par
le ministre de l'Education. Je le réfère aux détails de
cette politique où il verra que justement le volet qu'on attendait
évidemment, avec ce qu'on avait donné comme directive ou
ce qu'on a imposé aux étudiants étrangers
dernièrement, il y a quelques mois, en leur imposant les charges pour
leurs études, etc., comme on fait en Ontario et dans d'autres provinces
pour équilibrer peut-être cette politique-là...
parce que c'est évident qu'on était tous témoins que les
portes grandes ouvertes sans aucune restriction aux étudiants
étrangers
favorisaient nécessairement les étudiants riches des pays,
surtout des Etats-Unis, et les étudiants riches des pays du Tiers Monde.
Je crois que ce que le gouvernement a fait était sage, mais par ailleurs
pour aider des étudiants étrangers qui en ont besoin, une
politique a été élaborée. Je vois ici qu'on a
déjà, en 1978/79,176 bourses de données, ce qui totalise
$450 000. Il y a tout un système de bourses, de dépannage et
d'aide. Il y aura aussi des ententes, selon le mandat confié au
ministère de l'Education, avec des pays du Tiers Monde pour aider un
certain nombre d'étudiants étrangers.
Je continue. On parlait des compagnies qui exploitent. Au lieu de
dénoncer des compagnies qui exploitent, j'aime autant, avant je
pense qu'on conviendra que c'est plus prudent et que c'est plus honnête
aussi essayer de réparer sur place l'exploitation. C'est pour
cela qu'on a un secrétaire délégué. C'est pour cela
qu'on a des rencontres avec les centrales syndicales. C'est pour cela qu'on
intervient auprès de la Commission des droits et libertés de la
personne. Je ne suis pas certain, mais j'espère que le
député de Mont-Royal est d'accord là-dessus.
Sur les médecins immigrants, il attendait une réponse; je
peux lui en donner une aujourd'hui à ce propos. En effet, j'ai fait
plusieurs représentations là-dessus à mon collègue
des Affaires sociales et il m'a assuré on l'a vu à l'usage
que chaque cas était étudié au mérite.
Effectivement, grâce à notre intervention et grâce aux
dossiers que nous avons acheminés au ministère des Affaires
sociales je dois dire aussi en collaboration avec le Collège des
médecins praticiens nous avons réglé un certain
nombre de cas.
Il y a maintenant onze postes nouveaux autorisés pour les
médecins immigrants qui étaient en instance, qui attendaient
l'occupation de ces postes; des postes, évidemment, d'internes dans les
hôpitaux. Je retiens quand même les remarques du
député de Mont-Royal pour élargir davantage et,
grâce à son soutien et au soutien de tous les membres de cette
commission, je pense qu'on pourra sans doute faire davantage.
En ce qui a trait à la fonction publique, on a donné des
réponses; il y a déjà les colloques qui vont être
engagés prochainement un peu partout au Québec qui ont des
ateliers sur les immigrants et la fonction publique. Je suis certain que cela
va permettre un déblocage réel parce que je suis d'accord avec
vous que dans l'ensemble du gouvernement, la proportion d'immigrants dans la
fonction publique est, évidemment, beaucoup trop minuscule, sinon
ridicule. Je dois quand même dire qu'à notre ministère, on
a un bon rapport parce que dans nos COFI, on a presque 35% d'immigrants.
M. Giasson: Au moins.
M. Couture: II faut donner l'exemple. Je viens de nommer un
directeur des communications qui est un Romain, d'origine italienne.
M. Giasson: Ce n'est pas un ghetto dans le gouvernement; tous les
membres des groupes ethniques vont travailler pour le ministère de
l'Immigration et il n'y en aura pas dans les autres ministères.
M. Couture: Ce qui se passe c'est qu'on en forme plusieurs et ils
vont ensuite travailler dans d'autres ministères. Je pense que c'est une
bonne stratégie.
Pour terminer les remarques en réponse au député de
Mont-Royal...
M. Blank: II n'y en a pas dans la haute administration.
M. Couture: II va y en avoir. Je dois conclure pour le
député de Mont-Royal que, contrairement à ce qu'il a dit,
les faits illustrent les paroles dans bien des cas. Je crois qu'il n'y a pas
seulement eu des paroles, il y a eu des créations de postes, il y a eu
des programmes nouveaux, enfin, il y a eu, je pense, des interventions directes
et j'ai répondu, à mon avis, de façon satisfaisante
à ces interrogations.
Le député de Gaspé a semblé, à
première vue, entériner assez bien l'ensemble du rapport et je me
félicite d'ailleurs du soutien presque inconditionnel de l'Union
Nationale depuis deux ans sur nos politiques d'immigration parce qu'ils ont
confiance, avec raison.
M. Le Moignan: C'est vous autres.
M. Couture: Les remarques que le député de
Gaspé a apportées sur la grille quand il dit qu'il y a des points
obscurs, il n'y a rien d'obscur parce que tout est écrit, tout est
public. S'il veut plus directement nous demander quelque chose
là-dessus, je me ferai un plaisir de répondre mais, par rapport
à la langue, je pense qu'il a insisté davantage sur les points
accordés à la langue, il se demandait si les critères sur
la langue auraient eu une incidence sur la baisse de l'immigration en 1978. Je
dois dire que, justement, en 1978, notre grille ne s'appliquait pas. Elle a
commencé à être opérationnelle seulement depuis le
début de 1979, donc, elle n'a eu aucun effet. On n'a pas de chiffres
dans les rapports que j'ai. J'ai demandé à nos conseillers de nos
bureaux de Londres, entre autres, parce que c'est un bureau test: Est-ce que la
nouvelle grille québécoise décourage les gens, est-ce que
cela empêche de braves Anglais de venir au Québec? On m'a
répondu tout à fait dans la négative; au contraire, je
pense que les Anglais... En fait, on m'a raconté des cas d'Anglais de
Londres qui voulaient venir au Québec étant bien informés,
sachant quelle était la société québécoise,
quelles étaient les règles du jeu. Cela n'a pas diminué du
tout les demandes de ce côté.
M. Le Moignan: Je n'ai pas parlé du tout des Anglais.
M. Blank: Ce sont tous des séparatistes
écossais?
M. Couture: Vous n'avez rien contre les Ecossais,
j'espère, vous parlez des Anglais?
M. Ciaccia: Je n'ai pas parlé des Anglais moi, c'est vous
qui parlez des Anglais, pas moi.
M. Couture: On a aussi parlé d'immigration ailleurs
qu'à Montréal. Je peux dire, peut-être pour satisfaire le
député de Gaspé, qu'à ce sujet j'ai les chiffres
suivants... Je pense qu'il faisait surtout allusion aux mouvements de
réfugiés qui sont venus dans les derniers mois qui venaient tous
à Montréal et qui allaient peu ailleurs; il y en a 250 à
Sherbrooke, 250 à Trois-Rivières, 350 à Hull, 400 à
Québec et, par notre nouvelle politique des petites villes, je pense que
cela nous permettra à ce moment-là je vais employer un mot
un peu barbare de démétropoliser l'immigration,
l'adaptation des immigrants et de les faire un peu vivre, rayonner en dehors
des grandes villes.
Le député de Gaspé parlait aussi des
étudiants. Est-ce qu'on peut en garder un certain nombre? Le
député de Saint-Louis a rappelé justement que les gens qui
n'avaient pas le statut d'immigrant, qui voulaient ou qui aimeraient rester au
Québec avaient des facilités maintenant, avant de retourner dans
leur pays, de se préparer et de passer leur examen.
Par ailleurs, faire des démarches pour garder ici les
étudiants étrangers qui ont de bonnes connaissances, de bonnes
compétences, je ne suis pas tout à fait d'accord avec cette
politique parce que c'est une façon de vider, bien souvent, les pays du
Tiers Monde des cerveaux dont ils ont besoin. Il faut être très
prudent là-dessus.
Le député de Saint-Louis disait, et en effet je pense
qu'il a touché un point concret dont nous-mêmes depuis quelque
temps sommes bien conscients et nous prenons des mesures en conséquence,
je pense qu'il attend aussi des réponses là-dessus... C'est un
fait et on comprendra qu'on attendait l'application de l'entente pour
vérifier quel sera le volume de demandes, quelle sera la circulation des
candidats, etc., et comment nos bureaux pourront répondre à ces
nouvelles demandes. On a attendu quelques semaines pour faire cette
vérification et, à l'usage, on s'aperçoit que c'est
engorgé. Il y a un engorgement inadmissible actuellement à nos
services et nous allons prendre dans les plus brefs délais des mesures
pour répondre à certains problèmes.
D'ailleurs, dès lundi prochain, au début de la semaine
prochaine, nous avons convenu qu'on pourrait en bas même distribuer des
formules, surtout aux garants des parrainés pour qui c'est purement une
formalité, pour que cela se fasse rapidement. J'ai fait une demande
précise à mon collègue, le ministre des Finances et
président du Conseil du trésor, pour rapidement engager plusieurs
occasionnels dans les plus brefs délais, parce que si on passe par la
filière ordinaire cela prendra du temps, et je peux assurer le
député de Saint-Louis que nous-mêmes sommes conscients que
ce n'est pas possible de réclamer des pou- voirs et de prétendre
offrir les services aux immigrants qui étaient donnés auparavant
par le fédéral, si on ne peut pas donner la même
qualité de services.
Je suis très préoccupé par cela et la seule
explication que je peux vous donner, c'est qu'il fallait quand même avoir
un certain rodage de l'entente et des demandes pour savoir à quoi s'en
tenir.
On a parlé d'un réfugié sur le territoire
québécois. Je suis très heureux de la remarque du
député de Saint-Louis. C'est peut-être, dans l'histoire de
notre gouvernement, la première fois qu'un député de
l'Opposition libérale nous pousse dans le dos pour avoir un peu plus de
pouvoir du gouvernement fédéral. J'ai noté l'heure et j'ai
noté le jour. J'en suis ravi. En effet, je pense que ie gouvernement
fédéral devrait nous donner ce pouvoir quant aux
réfugiés sur le territoire québécois. Pour les cas
d'identification de réfugiés sur le territoire
québécois, que le gouvernement québécois puisse
traiter ces cas.
Quant à nos amis Portugais, je pense que ce sont les amis du
député de Saint-Louis, ce sont mes amis, ce sont les amis de bien
des gens parce qu'ils s'adaptent d'une façon merveilleuse à la
société québécoise. Le bureau de Lisbonne que nous
avons ouvert est une bonne réponse à ce problème et je
suis d'accord avec lui, nous avons peut-être un effort
supplémentaire à faire là-dessus.
M. Blank: Un effort supplémentaire particulièrement
pour les gens de la Mozambique et de l'Angola.
M. Couture: D'accord.
Le Président (M. Boucher): Est-ce qu'on est prêt
à passer à l'adoption du programme 1 ?
M. Ciaccia: L'élément 1?
Etablissement des immigrants
Le Président (M. Boucher): L'élément 1, s'il
y a des questions.
M. Ciaccia: On a des questions.
M. Le Moignan: J'aurais une question d'ordre
général.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Gaspé.
M. Le Moignan: Quand on regarde les chiffres des entrées
et des sorties depuis 1962, cela a commencé à 8% pour les sorties
et cela s'est maintenu sensiblement jusqu'en 1970; en 1970, on sait que cela a
été une année difficile, cela a augmenté un peu.
Maintenant, les études que vous avez faites à ce jour, est-ce que
c'est dû à l'instabilité politique du Québec
vis-à-vis des immi-
grants, vis-à-vis des problèmes de souveraineté et
de tout ce que vous voulez? Il y avait un pourcentage de sorties anciennement,
mais depuis 1970 la perception que l'immigrant a, lui, de l'avenir du
Québec, sa crainte de voir le Québec se séparer du Canada,
est-ce que cela peut expliquer qu'il s'en va dans les autres provinces
canadiennes ou est-ce qu'il y en a qui retournent dans leur pays d'origine? (17
h 30)
M. Couture: Est-ce que le député de Gaspé
pourrait m'expliquer pourquoi en 1966, quand le parti de l'Union Nationale a
pris le pouvoir, il y a eu un saut à 10,5?
M. Le Moignan: Ils ont eu peur de la publicité
libérale à ce moment. Ensuite, ils se sont aperçus que
Johnson avait de l'allure.
M. Couture: Je pense que c'est une excellente réponse
à laquelle je souscris. Dans bien des cas, il y a des campagnes de peur
qui, effectivement, n'ont pas chassé les immigrants qui étaient
ici, mais ils ont chassé des Québécois de vieille souche
aussi, surtout peut-être dans le milieu anglophone. De fait, on voit au
cours de certaines périodes dans ce tableau que lors des changements de
gouvernement, il y a une espèce de fluctuation. C'est à cause de
quoi? C'est peut-être à la suite de campagnes électorales
qui charriaient un peu trop drôlement et qui faisaient peut-être un
peu trop appel aux peurs des gens qui ont sans doute engendré ce genre
de départs. C'est difficile de faire une bonne évaluation des
causes de ces départs.
Mais, je peux vous dire ceci, c'est que la proportion d'immigrants et de
Québécois de vieille souche qui partent, on ne la connaît
pas. On sait globalement à travers des statistiques canadiennes à
tous les cinq ans par le rencensement, à un moment donné, qu'il y
a tant d'immigrants qui sont encore au Québec. Sachant qu'il y en a tant
qui sont entrés par les voies normales, d'une année à
l'autre comme immigrants, et sachant le nombre de ceux qui étaient
là avant, on peut plus précisément savoir le chiffre de
ceux qui seraient arrivés et de ceux qui seraient partis. J'ai
demandé justement ces jours-ci à mon ministère, à
mes services, de raffiner notre évaluation là-dessus et de
chercher les causes de cela, surtout en ce qui me concerne je pense que
c'est ma responsabilité immédiate ce qui
m'intéresse plus précisément c'est que les immigrants qui
arrivent au Québec, avec les sommes d'argent qui sont
dépensées par l'Etat, par la collectivité, les efforts que
nous faisons pour qu'ils soient accueillis, enfin devraient rester au
Québec, ne pas passer quelque temps et ensuite s'en aller ailleurs.
C'est dans ce sens que je vais chercher peut-être à raffiner nos
instruments pour, éventuellement, pouvoir davantage maintenir ces
présences d'immigrants.
Mais, généralement, il ne faut quand même pas
prendre panique. On est dans une époque de grande mobilité, je
pense que tout le monde l'admettra, on n'est plus au XIXe siècle, c'est
vraiment une ère de grande mobilité, même pas seulement
interprovinciale, mais internationale. Il y a beaucoup de gens qui, pour des
raisons purement humaines, veulent aller vivre ailleurs un bout de temps et ils
s'en vont. Cela s'ajoute à ce nombre. Je pense que ce n'est pas,
actuellement... Revenir à peu près à la moyenne des
années qu'on a connues depuis 1962, c'est un bon signe, cela montre
qu'on arrive à un rythme normal.
M. Ciaccia: Un instant, M. le Président, il ne faudrait
pas que...
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Mont-Royal.
M. Ciaccia: Je suis heureux que le ministre nous ait fourni les
chiffres, parce que je ne donne pas la même interprétation. C'est
bien beau de parler d'une moyenne entre 1962 et 1978, mais regardons les faits.
En 1962, il y avait un solde migratoire interprovincial de plus de 3159, alors
on a bénéficié, on a eu 3000 personnes de plus qui se sont
établies au Québec que celles qui sont parties. Si on examine
c'est la dernière colonne qui est importante la moyenne,
cela ne nous aide pas beaucoup. Sur vingt ans, la moyenne on va tous
être morts aussi cela ne nous aidera pas. Regardez en 1962 le
nombre d'entrées qui est de 46 000, le nombre de sorties 43 000; alors
on a bénéficié de 3000 personnes. En 1962, c'était
une administration libérale. Si vous voulez faire un peu de
politique.
M. Couture: Qui venait de faire nationaliser
l'électricité.
M. Ciaccia: II était député libéral,
à ce moment. Regardez en 1978 la différence. Le nombre
d'entrées a baissé de 46 000 à 25 000. Vous pouvez faire
en seize ans la moyenne...
M. Couture: On est toujours interprovincial.
M. Ciaccia: Oui, interprovincial, ce sont les chiffres que vous
nous avez fournis.
M. Couture: II y a une explication pourquoi les gens entrent
moins.
M. Ciaccia: Je n'ai pas fini, laissez-moi finir. Il y a 25 000
qui sont entrés et 59 000 qui sont sortis. Cela veut dire qu'en plus du
gain de 3000 de plus en 1962, nous avons une perte de 34 000. C'est
sérieux cela. Si vous regardez 1962 à 1978, les seules
années où ce chiffre de 34 000 était plus -
élevé, c'était en 1970. C'est vous-même qui avez
mentionné cette année, on le voit.
Je ne veux pas rappeler les événements de 1970 et les
problèmes qu'on a connus. Je ne voudrais pas faire le parallèle
entre la crise de 1970 qui a causé certains problèmes et dire que
la venue du Parti québécois au pouvoir c'est la même chose
qu'en 1970. J'espère que ce n'est pas ce que vous nous dites.
En 1977, il y a une perte encore, 46 000 de moins que l'autre
année. C'est à la suite de la venue du Parti
québécois au pouvoir.
M. Couture: On perd ce qui a été
évoqué par le Parti libéral aussi.
M. Ciaccia: C'est bien beau de toujours blâmer les autres.
En 1970, le Parti libéral était au pouvoir. Qui a fait les peurs?
La population a réagi à la suite des
événements.
M. Couture: Le Parti libéral a joué ces
cartes-là en 1976.
M. Blank: Le Parti libéral... c'est cela?
M. Ciaccia: La seule raison pour laquelle vous ramenez ces
chiffres pour les spécifier, c'est qu'il n'y a pas de moyenne. La
moyenne de 18 000 que vous venez de citer, ce n'est pas pertinent du tout.
Regardez la tendance, regardez... La moyenne ne nous aide pas.
M. Couture: Je suis d'accord sur cela. Ce n'est peut-être
pas nécessaire d'aller...
M. Ciaccia: II ne faut pas créer l'impression que c'est
normal, que tout le monde s'en va. Ce n'est pas normal que le monde s'en aille.
Les gens s'en sont allés quand il y avait des problèmes. Il y en
a eu en 1970 et il semble y en avoir maintenant.
M. Couture: II y en a eu en 1966 aussi. Il y en a eu en 1965 et
il y en a eu en 1969.
M. Ciaccia: Pas de cet ordre-là, jamais! En 1966, pour
votre information, cela a été une perte de 15 000. De 15 000
à 41 000 et à 46 000, il y a une "moses" de
différence.
M. Couture: Je pense qu'il y a un point que vous n'avez pas du
tout évoqué.
M. Ciaccia: Votre chef de cabinet vient de vous souffler quelque
chose. Qu'est-ce qu'il vous a dit? Il est bien politisé, lui. Il fait de
la politique quotidiennement.
M. Couture: Non, je l'avais depuis longtemps. Les entrées
au Québec, c'est ce qui fait que le solde migratoire est si haut ou si
bas. On regarde le chiffre des entrées et le chiffre des sorties et on
fait la différence, l'écart. C'est un fait, je l'admets
volontiers, qu'actuellement ce sont les gens des autres provinces du Canada qui
auraient le goût de venir vivre au Québec... C'est cela la
migration interprovinciale.
M. Ciaccia: Mais là ils n'en ont plus le goût.
M. Couture: Je vais vous dire ceci. Actuellement, c'est beaucoup
plus important de regarder le chiffre des sorties que le chiffre des
entrées pour la raison suivante: Dans notre société
québécoise, par un certain nombre de mesures, par une
volonté politique, c'est évident qu'en bâtissant une
société francophone, en donnant un visage français au
Québec, évidemment, pour nos amis anglophones des autres
provinces du Canada, c'est plus difficile de venir vivre dans cette
société. Cela demande plus d'efforts.
Je crois que c'est presque inévitable. C'est écrit dans le
ciel que, dès que le Québec a manifesté cette
volonté politique de créer une société francophone,
les anglophones des autres provinces y ont vu moins d'attraits. Avant, les
anglophones de Toronto venaient à Montréal, ils n'avaient aucun
problème, ils étaient aussi chez eux à Montréal
qu'ils l'étaient à Toronto; c'était la même chose
pour les gens de Winnipeg.
Ce qui m'intéresse davantage, c'est qu'il y a eu quand même
26 000 entrées en 1977 et 25 000 en 1978; il y a quand même un
nombre important de gens des autres provinces qui viennent encore au
Québec. Ce qui m'apparaît plus important, c'est de regarder les
sorties. Est-ce qu'on est capable de donner le goût aux gens de rester
dans cette société-là, de vivre, de participer avec nous,
de développer l'avenir du Québec avec nous? Cela
s'améliore. Je ne sais pas si le député de Mont-Royal se
réjouit ou non que cela s'améliore, mais moi je me réjouis
que cela s'améliore.
M. Ciaccia: Cela s'améliore, oui, mais...
M. Couture: C'est un fait que si les entrées diminuent,
notre solde migratoire interprovincial est plus important, mais c'est à
nous de corriger cela par une politique d'immigration internationale en
favorisant d'autres entrées d'autres types je pense que c'est
cela une politique de population pour effectivement corriger les failles
que nous pouvons corriger à ce titre-là et façonner la
société québécoise dont on a besoin. Je pense qu'on
ne doit vraiment pas dramatiser cela, c'est tout à fait normal.
M. Ciaccia: M. le Président, premièrement...
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Mont-Royal.
M. Ciaccia:... je n'accepte pas la déclaration, les
remarques du ministre selon lesquelles les gens s'en vont parce qu'on veut
créer une société francophone. C'est un mythe.
M. Couture: Non, ce que j'ai dit, je regrette-Question de
privilège, si je peux en faire une.
M. Ciaccia: Un instant, laissez-moi finir! Non, il n'y a pas de
question de privilège.
M. Couture: Ce n'est pas ce que j'ai dit, M. le
Président.
Le Président (M. Boucher): S'il vous plaît! M. le
ministre...
M. Ciaccia: D'accord, je vais vous laisser spécifier.
M. Couture: J'ai parlé au titre des entrées. Je
n'ai pas parlé du tout des départs, en parlant d'une
société francophone. J'ai dit que c'est normal, que c'est tout
à fait normal et même il faut s'étonner qu'il y en ait
tellement encore des cela veut dire qu'on est intéressant
autres provinces du Canada, qui sachant que c'est plus forçant de venir
ici au Québec, maintenant, quand on vient de l'Alberta...
M. Blank: M. le Président, vous êtes sûr de
votre affaire...
M. Couture:... j'ai la parole... et du Manitoba... M. Blank:
Vous avez interrompu...
M. Ciaccia: Oui, vous m'avez interrompu, c'est pour cela que vous
avez la parole. Je suis trop poli pour vous.
Le Président (M. Boucher): Si vous me le permettez, M. le
député de Mont-Royal, vous avez permis au ministre de
s'expliquer. Est-ce que vous avez terminé, M. le ministre?
M. Couture: Enfin, vous me comprenez; je vous laisse aller. Je
termine immédiatement, en disant que c'est plus difficile pour les
personnes des autres provinces du Canada de rentrer au Québec. C'est
très intéressant qu'il y en ait, quand même, un aussi grand
nombre. Progressivement, je crois, justement, que ce type d'association que
nous voulons faire avec le reste de Canada, ces bonnes relations que nous
voulons garder avec le reste du Canada, nous allons les maintenir et en
développer le volume.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Mont-Royal.
M. Ciaccia: Comme je vous le disais, M. le Président,
c'est un mythe de dire que c'est parce qu'on veut le fait français au
Québec que le gain ou la perte augmente. Si vous regardez les chiffres
de 1966 à 1970, ils sont beaucoup plus élevés que 1962
à 1964. Après cela, il y a eu une baisse de pertes. Si vous
regardez les chiffres de 1971 à 1975, la perte était moindre,
très minime: $12 000, $14 000. Alors, elle a diminué et il y
avait autant une volonté du Parti libéral de 1970-1976
même dans ses actes de faire une société
francophone. Le fait français au Québec...
M. Couture: La société bilingue...
M. Ciaccia: ... un instant... c'est quelque chose qui a
évolué depuis des années. Cela n'a pas commencé en
1976, novembre 1976. Mais la perte, par exemple, de la population
regardez les chiffres où il n'y avait pas une administration
libérale; c'est curieux... quand l'administration libérale
était là, la perte est devenue moindre.
M. Blank: 1974 and 1975 there was bill 22.
M. Ciaccia: Exactement, regardez le projet de loi, la loi 22.
C'était assez dramatique aussi pour les anglophones. Regardez ce qui est
arrivé en 1974 et 1975; les pertes n'étaient pas là, elles
ont baissé. Ce n'est pas cela, ce sont les autres politiques du
gouvernement. Vous venez de mentionner: c'est le séparatisme du
gouvernement, le chômage de plus de 300 000 personnes, le fait que vous
fermez les écoles anglophones à la communauté anglophone.
Il y a une série de politiques du gouvernement qui ont fait perdre la
confiance et la certitude et les chiffres sont assez dramatiques. Je suis
très heureux que vous nous ayez fourni ce tableau 2 parce que je
ne l'avais pas mais je vous dis que la population devrait les regarder
et venir à en tirer ses propres conclusions.
M. Couture: On va donner des explications là-dessus, mais
justement, actuellement...
M. Blank: ... durant le régime libéral.
M. Couture:... cela devient rassurant et il faut regarder
l'avenir avec confiance. Je n'insiste pas là-dessus parce que, au niveau
des entrées...
M. Ciaccia: Vous êtes confiant... Votre gouvernement ne
sera pas au pouvoir à l'avenir, c'est pour cela que vous les regardez
avec confiance. Je suis d'accord avec vous; on va se rétablir
normalement, la perte va baisser et on va accroître le
gouvernement...
M. Couture: ... on se reverra dans 25 ans... vous allez redonner
un Québec anglophone et ils vont tous revenir ici.
M. Ciaccia: Je n'accepte pas cette remarque. La langue qu'on
emploie ici est française et même la communauté anglophone
l'a acceptée; ce n'est pas correct de dire cela.
M. Couture: Je veux quand même insister sur le fait que...
Je retire mes paroles, M. le Président.
M. Ciaccia: J'espère, oui, parce que ce n'est pas correct
de dire cela.
M. Couture: Mais c'est un fait quand même que le
gouvernement libéral était plus attrayant pour des anglophones de
Toronto, de Winnipeg, de l'Alberta, et de Colombie-Britannique. Peut-être
que pour nous, dans le sens suivant que cela demande plus d'effort maintenant
de partir d'une province anglophone et venir dans un Québec qui affiche
d'une façon aussi claire ses couleurs d'un Québec
français. J'en reste là comme explication.
M. Ciaccia: Vous avez droit à vos opinions, mais j'ai
droit aux miennes et j'ai une série d'autres politiques qui sont causes
de cette perte.
Le Président (M. Boucher): Est-ce que
l'élément no 1 est adopté?
M. Ciaccia: Non, s'il vous plaît; j'avais d'autres
questions. Peut-être qu'on pourrait...
Le Président (M. Boucher): Est-ce que vous l'adoptez tout
simplement en bloc...
M. Ciaccia: Oui, on posera les questions...
Le Président (M. Boucher): Alors, on l'adoptera en bloc
une fois que les discussions auront lieu. D'accord.
M. Ciaccia: On parlait des grilles de sélection, des
critères de sélection... dans un document comme vous avez fourni,
des règlements sur la question d'adaptabilité. Vous avez:
qualités personnelles: 15 points; motivation: 5 points; connaissances du
Québec: 2 points. Vous référez pour établir
si un ressortissant étranger possède des qualités
personnelles de motivation susceptible de faciliter son adaptation, un
fonctionnaire à l'immigration pose des questions orales simples,
à partir d'un document approuvé par le ministre, permettant
d'évaluer les indicateurs; et vous donnez une liste d'indicateurs.
Est-ce que vous avez une copie de ce document? (17 h 45)
M. Couture: Nous ne l'avons pas ici, mais en tout temps, on
pourra vous le fournir.
M. Ciaccia: Est-ce que vous pourriez nous en...
M. Blank: Une copie à chacun.
M. Couture: Certainement. Je voudrais vous faire remarquer,
à ce sujet-là, que c'est un document qui a été
préparé par des spécialistes. Ce n'est pas nous qui avons
politiquement dit: II faudrait demander telle ou telle chose. Ce sont des
spécialistes de l'université qui nous ont suggéré
un certain nombre de questions.
M. Ciaccia: On va l'étudier.
M. Blank: On va l'étudier et voir si les propos du
ministre sont conformes au document.
M. Couture: Parfait.
M. Ciaccia: On parlait des investisseurs immigrants. J'ai
certains chiffres ici et peut-être que le ministre pourrait donner
quelques informations sur les propos qu'il a tenus quant à la politique
pour attirer plus d'investisseurs immigrants. J'ai les chiffres de 1976,
1977, 1978 et ces chiffres sont compilés, ce sont des demandes pour
accepter l'immigration. On voit qu'en 1976, il y avait eu 480 entrepreneurs; en
1977, cela avait baissé à 217 au Québec et en 1978, cela a
baissé à 90. Les chiffres comparables totaux au Canada
étaient en 1976 de 1980, en 1977 de 1047 et en 1978 de 436.
M. Couture: Dans tout le Canada.
M. Ciaccia: Oui.
M. Couture: II y a eu une baisse très notable.
M. Ciaccia: Oui, il y a eu une baisse au Canada aussi, une baisse
notable, mais en pourcentage, en 1976, on avait pu attirer 25,2% en nombre. Je
parle des nombres seulement. En 1977/78, 20,7% et 20,6%, mais dans les capitaux
créés, on voit une baisse encore plus remarquable. Le pourcentage
qu'on avait je vais vous donner le chiffre que j'ai au
Québec, en 1976 $104 millions, en 1977 $33 millions, en 1978 $16
millions. Au Canada, pour les mêmes années, en 1976 $409 millions,
en 1977 $205 millions et en 1978 $146 millions. Alors, il y a eu une baisse
globale au Canada. Les pourcentages sont intéressants. En 1976, au
Québec, on attirait 25,6% des capitaux créés qui se
comparaient relativement au nombre d'entrepreneurs. Mais en 1977, ce chiffre
est tombé à 16% et en 1978, il est tombé encore à
11%. Cela veut dire qu'à un moment donné, on pouvait attirer
notre pourcentage qui est un peu l'équivalent de la population au
Québec. Là, on est tombé à 11%. Le ministre a
mentionné qu'il y avait des politiques qui pouvaient...
M. Couture: Des mesures.
M. Ciaccia: Des mesures. Est-ce que vous pourriez préciser
un peu plus et dire quelles mesures vous entendez prendre pour essayer
d'attirer plus d'investissements?
M. Couture: Je serais porté à vous demander de
déposer votre... Je ne sais pas si vous voulez déposer votre
document. J'ai l'impression qu'on n'a pas les mêmes chiffres. En 1977/78,
quelle somme d'investissements avez-vous retenue?
M. Ciaccia: Les capitaux créés en 1977?
M. Couture: Oui.
M. Ciaccia: J'ai $33 millions.
M. Couture: Au Québec?
M. Ciaccia: Au Québec. Au Canada, $205 millions.
M. Couture: On n'a pas les mêmes chiffres, M. le
Président. Je voudrais vous demander une directive. Quand on n'a pas les
mêmes chiffres, qu'est-ce qu'on fait, M. le Président?
Le Président (M. Boucher): II n'y a pas de
dépôt de document à la commission.
M. Couture: Je suis porté à faire confiance
à nos services là-dessus. Vous avez dans votre cahier, le
document qui vient de nos services, qui, à mon avis, est le plus
exhaustif.
M. Ciaccia: Un instant.
M. Couture: En 1977-1978, il y a eu 194 cas, $69 487 000, 1116
emplois créés, 718 personnes de familles immigrantes
établies. Il y a eu 187 cas en progrès, qui normalement
rebondissent l'année suivante, pour $40 775 000 et 400 cas en
prospection. Enfin, vous avez le détail dans ce tableau.
En 1978-1979, nous avons 140 cas pour $36 millions d'investissements.
Donc, ce sont des chiffres pas mal plus importants que ceux que le
député de Mont-Royal nous a apportés.
Pour justifier les chiffres du député de Mont-Royal,
peut-être que vous avez les années civiles et que nous avons les
années financières. C'est possible. Je retiens qu'il y a eu une
baisse qu'on ne trouve pas tellement intéressante. Ce n'est pas une
baisse dramatique par rapport au reste du Canada, mais c'est une baisse quand
même qui fait mal un peu et c'est la raison pour laquelle on a des
mesures... vous me demandez des détails. Bien, cela me fait plaisir de
vous en apporter quelques-uns.
Dans les mesures prévues pour l'année à venir, les
conseillers en immigration, en poste à l'étranger,
évidemment, constituent le premier point de contact. Je
répète un peu ce que j'ai dit en ajoutant certaines choses, sans
doute. Nous proposons que ces conseillers de service à l'étranger
et ceux du service aux entrepreneurs investisseurs soient appelés
à participer à des séminaires tenus par le
ministère de l'Industrie et du Commerce à l'étranger. Je
pense que c'est lui qui a l'expertise concernant cette approche pour les
entrepreneurs investisseurs. Il est également proposé que des
agents d'immigration participent à ces colloques, conférences et
sessions d'information visant à faire connaître davantage à
l'étranger l'intérêt du Québec. Donc, par des
séminaires, par de l'information, par de la publicité,
effectivement, il devrait y avoir plus d'entrepreneurs investisseurs.
Avant de l'oublier, en 1976, on signalait que cela avait
été assez important, je dois dire que les Libanais se sont
exilés pour des raisons évidentes, la guerre civile qui a
commencé au Liban. Il y a bon nombre de Libanais dans ces années,
à partir de 1976, qui sont venus au Québec avec des capitaux.
Cela a peut-être à ce point de vue-là haussé ces
chiffres qui, maintenant, ne coïncident plus avec ce qu'on a comme
entrées de ce type d'entrepreneurs investisseurs.
Deuxième mesure, la publicité. Nous disons que des outils
publicitaires vont être réalisés rapidement pour
créer un climat d'accueil positif. Il y a un guide de l'immigrant qui
existe et il y aura un feuillet pour faire mieux connaître ce service
à l'étranger, qui est en préparation. On veut amorcer un
programme de publicité à l'étranger j'espère
que là-dessus on aura l'accord unanime de la commission, même s'il
y en a qui sont réticents à la publicité
grâce à l'utilisation de revues et de publications
spécialisées, etc.
Cn veut aussi vous savez qu'il y a un programme
fédéral de visites de journalistes étran- gers et le MIQ y
participe régulièrement nous-mêmes organiser,
inviter des journalistes étrangers économiques pour dire un peu
dans quel domaine les immigrants pourraient investir au Québec.
Troisième mesure, des missions. Il est recommandé de
mettre sur pied des missions de conseillers du service aux immigrants
entrepreneurs investisseurs visant à seconder, à appuyer ou
à compléter le travail du conseiller en poste à
l'étranger. Ces gens qui partent en mission, sur un certain nombre de
candidats déjà connus... parce que nos conseillers à
l'immigration, reçoivent des gens, des candidats à
l'étranger qui arrivent dans les bureaux et qui disent: Je voudrais
immigrer au Canada ou au Québec j'ai un peu de capital
j'aimerais investir, etc. Qu'est-ce qu'on fait? Le conseiller à
l'immigration, à ce moment, informe notre bureau de Montréal et
il y a un certain nombre de candidats connus qui s'ajoutent et, après
cela, on envoie quelqu'un en mission pour les rencontrer et les préparer
à cette venue.
Une quatrième mesure, la concertation avec les ministères
et agences à vocation économique. Là-dessus, cela a
peut-être été un peu faible dans le passé. Nous
voulons systématiquement avoir des relations suivies avec, entre autres,
l'Agriculture, l'Industrie et le Commerce, les Richesses naturelles, le
Tourisme, la Chasse et la Pêche et l'OPDQ.
Comme je vous l'ai dit, en terminant tout à l'heure, on veut
assouplir notre façon d'accueillir les entrepreneurs investisseurs, par
exemple, en organisant des stages ici, etc. Je crois que ce sont des mesures
qui devraient faire sentir leurs effets dans les prochains mois.
M. Ciaccia: Je voudrais faire remarquer au ministre que les
chiffres, même ses chiffres à lui de 1978/79, de $36 millions,
c'est encore moins, c'est presque la moitié de l'année
dernière. L'année dernière je prends vos chiffres
que vous avez fournis, $69 millions il y a eu une chute assez
considérable. Mais c'est encore moins que l'année 1976/77...
M. Couture: Bien sûr, mais il faut comprendre...
M. Ciaccia: Si on projette ces montants, on va arriver de moins
en moins.
M. Couture: En 1975/76, c'était $26 millions. En 1974/75,
c'était $10 millions.
M. Ciaccia: Je ne sais pas comment ces chiffres ont
été compilés...
M. Couture: Ils ont été compilés comme tous
les autres.
M. Ciaccia: Sur quelle base, mais il semble avoir une chute assez
remarquable. Il y avait une tendance qui allait en montant, de 1974 à
1976 et là, cela s'en va à l'inverse.
M. Couture: Je vous dis que, quand même, il y a des
années assez récentes, comme 1974-1975, il y a eu seulement $10
millions et en 1975/76, seulement $26 millions. En 1978/79, on a $36 millions.
On m'apporte un chiffre que le fédéral, en 1976, avait pour $400
millions et ils sont tombés à $207 millions en 1977, une baisse
de 50%.
M. le Président...
M. Ciaccia: Mais notre baisse à nous...
M. Couture: Je serais porté à dire qu'actuellement,
cela reflète un peu cette tendance qui est inquiétante dans tout
le Canada et c'est la raison pour laquelle nous avons des mesures pour corriger
la situation.
M. Ciaccia: Cela a baissé dans tout le Canada, mais nous
avons baissé de pourcentage encore plus. A un moment donné, on
avait 25%...
M. Couture: Non, c'est de $36 millions à $69
millions...
M. Ciaccia:... des investissements et là, on est
tombé à 11%.
M. Couture: Je voulais vous dire que par rapport au Canada, entre
l'année 1977 et 1978, la baisse est du même ordre au Québec
qu'elle l'est pour l'ensemble du Canada. Vous avez $69 millions à $36
millions, et eux, ils ont de $400 millions à $207 millions. A moins que
mes connaissances en mathématiques soient nulles, je ne vois pas quelle
différence il y a entre les deux types de chiffres.
M. Ciaccia: Je ne pense pas qu'on puisse finir avant 18 heures,
M. le Président.
M. Couture: On peut prolonger un peu, si vous voulez.
M. Ciaccia: J'ai une question sur les...
Le Président (M. Boucher): Prolongez-vous après 18
heures pour pouvoir terminer ou est-ce que vous escomptez qu'on va revenir
à 20 heures?
M. Ciaccia: Je ne voudrais pas passer à la hâte
certains articles. Je ne sais pas si le...
M. Le Moignan: J'aurais quelques questions à poser
également. Alors, il va falloir revenir à 20 heures.
M. Couture: On est à votre disposition.
Le Président (M. Boucher): Est-ce que nous ajournons?
M. Ciaccia: Juste une question avant d'ajourner. Vous avez
mentionné que onze postes ont été...
M. Couture: ... supplémentaires, oui.
M. Ciaccia: D'après un article dans le journal La Presse
assez récent, il y aurait 33 médecins étrangers
réduits à vivre du chômage. Sur les onze postes, est-ce que
vous allez faire d'autres représentations, qu'allez-vous faire pour les
autres nombres? Il me semble que ce ne soit pas suffisant, ces onze postes.
M. Couture: II faut dire quand même ceci: on les traite cas
par cas, parce que quand on dit 33 médecins en chômage, c'est
possible, mais il y a des cas où les qualifications exigées ici
au Québec je pense bien qu'une société a le droit
d'avoir un certain nombre d'exigences comme qualifications pour certains
cas, les candidats médecins ne remplissent pas ce genre d'exigences.
Mais c'est notre attitude, actuellement, que quand un médecin immigrant
fait appel à notre ministère pour ouvrir un dossier aux fins
d'étude, pour faire certaines représentations auprès du
ministère des Affaires sociales, nous le faisons volontiers et cela
marche très bien à ce point de vue.
Le Président (M. Boucher): La commission suspend ses
travaux jusqu'à 20 heures.
Suspension de la séance à 18 heures
Reprise de la séance à 20 h 5
Le Président (M. Boucher): A l'ordre, messieurs!
Lorsque nous avons suspendu nos travaux à 18 heures, nous en
étions au programme 1 il n'y en a qu'un du
ministère de l'Immigration. M. le député de Gaspé,
vous aviez demandé la parole. Allez-y!
M. le député de Mont-Royal, est-ce que vous voulez
continuer vos questions, parce que j'avais donné la parole au
député de Gaspé?
M. Ciaccia: J'aurais d'autres questions, mais...
M. Le Moignan: Je préparerais les miennes pendant ce
temps-là.
M. Ciaccia: Je pense que je vais en poser.
Le Président (M. Boucher): Allez-y!
M. Ciaccia: Pour revenir à une question qu'on a
déjà soulevée. M. le ministre, vous avez parlé des
effectifs dans la fonction publique. Vous avez dit que vous faites votre
possible pour assurer que les membres des minorités soient
représentés. Est-ce que vous vous êtes fixé des
objectifs? Combien de personnes aimeriez-vous voir placées dans la
fonction publique? La meilleure façon de voir s'il y a du
progrès, c'est de se fixer certains objectifs avec un délai. Et
ensuite, on peut juger.
M. Couture: Avez-vous terminé votre question?
M. Ciaccia: Oui, c'est ma question.
M. Couture: Premièrement, il y a un comité
interministériel qui est en fonction actuellement, qui travaille sur les
objectifs, la possibilité ou les moyens à prendre pour attirer
les demandes des immigrants. C'est comme chez les anglophones. Il a
été un temps où il n'y avait pas tellement de
sollicitation de ces milieux pour entrer au service de la fonction
publique.
D'une part, ce comité interministériel existe et doit
faire rapport... Est-ce qu'ils ont un délai? Dans quelques semaines,
disons à l'automne, il devrait donner un rapport là-dessus.
M. Ciaccia: Cela, c'est le comité
interministériel.
M. Couture: C'est le comité interministériel.
M. Ciaccia: Mais vous-même, comme ministre de
l'Immigration?
M. Couture: Quel est mon objectif?
M. Ciaccia: Oui, quel est votre objectif à vous?
M. Couture: Mon objectif, c'est d'arriver à un pourcentage
qui puisse satisfaire les milieux ethniques. Là-dessus, une fois que le
comité aura remis son rapport, je le proposerai au Conseil consultatif
de l'immigration qui pourra me donner un avis, afin de savoir si c'est
suffisant ou non. Je peux vous lire maintenant que je m'engage à
entériner assez facilement les recommandations du conseil
consultatif.
M. Ciaccia: Vous n'avez pas fixé de pourcentage
vous-même?
M. Couture: Je n'ai pas de pourcentage de fixé, parce que
je n'ai pas la connaissance suffisante des besoins et des pourcentages
souhaitables. Je ne l'ai pas. Je ne suis pas suffisamment éclairé
pour vous donner un chiffre.
M. Ciaccia: Par exemple, à Ottawa, il y a eu un programme
pour rectifier le déséquilibre qu'il y avait dans la fonction
publique. Les objectifs qui ont été fixés, c'était
le pourcentage représenté dans la population. Je crois que c'est
une façon de le faire.
M. Couture: Idéalement, cela peut être cela.
M. Ciaccia: Est-ce que ce serait le même objec:if que vous
vous fixeriez? Autrement dit, si 12% de la population est composée de
groupes ethniques, en excluant les Anglo-Saxons, allez-vous /ous fixer, comme
objectif, dans la fonction publique, 12% des membres venant des groupes
ethniques?
M. Couture: II faut faire attention à une chose, c'est
qu'il y a beaucoup de Québécois de nouvelle souche, pour toutes
sortes de raisons, qui ne veulent plus être identifiés comme
venant de milieux ethniques, mais qui sont quand même dans la fonction
publique ou qui veulent pénétrer dans la fonction publique.
Etablir un pourcentage ou un niveau, cela peut être un peu faussé.
C'est la raison pour laquelle je veux m'appuyer sur les recommandations des
milieux concernés, en particulier sur mon instrument de consultation
qu'est le Conseil consultatif de l'immigration.
C'est évident que, si c'est un pourcentage qui traduit un peu
l'importance des milieux ethniques, ce serait le mieux.
M. Ciaccia: En commission, vous avez déjà dit: Je
peux vous assurer qu'il y aura des corrections prochainement. C'était
lors de la dernière commission parlementaire sur l'étude des
crédits. Savez-vous, les années passent très
rapidement.
M. Couture: II y a eu des corrections. J'ai commencé
à mon ministère. J'imagine qu'une bonne façon de corriger
des choses, c'est de faire le ménage dans sa propre maison.
M. Ciaccia: Oui, c'est un bon commencement.
M. Couture: On a des chiffres assez intéressants à
ce point de vue là.
M. Ciaccia: Je ne veux pas m'éterniser là-dessus.
Je voudrais procéder à d'autres éléments des
crédits. Vous avez un élément pour des subventions dans
votre cahier, dans les détails que vous avez donnés. Quels sont
les critères que vous établissez pour ces subventions?
M. Couture: Je ne sais pas si votre question est
terminée.
M. Ciaccia: Oui, M. le ministre.
M. Couture: Je ne sais pas si vous avez pris connaissance du
document qui élabore en long et en large les critères et les
conditions pour recevoir des subventions. C'est évident, et on est tous
d'accord pour dire qu'on ne donne pas de l'argent à des contribuables
comme cela dans certaines conditions et sans certaines balises. Cette politique
d'action concertée que vous avez dans votre cahier, à l'onglet
divers, vers la fin, vous donne tous les critères. Je vais vous donner
les critères généraux d'admissibilité. Pour
être admissible à l'un ou plusieurs de ces programmes, tout groupe
qui demande une subvention doit répondre aux critères suivants:
premièrement, être sans but lucratif; deuxièmement, ne pas
être un parti politique donc, le Parti libéral du
Québec ne peut pas être subventionné ou une
association autorisée au sens de la section V de la Loi régissant
le financement des partis politiques et modifiant la Loi électorale;
troisièmement, être représentatif de son milieu;
quatrièmement, être géré efficacement et être
en mesure de démontrer sa capacité
d'assurer l'exécution de ses projets avec compétence;
cinquièmement, accepter de divulguer éventuellement les autres
sources de financement dont il dispose, évidemment, pour ne pas faire
des chevauchements et pour qu'il n'y ait pas de surenchère;
sixièmement, pouvoir compter sur les ressources du milieu qu'il
représente; septièmement, éviter la duplication des
services déjà offerts et, notamment, les services
gouvernementaux. C'est un peu les critères généraux qui
encadrent assez bien notre politique de subvention.
M. Ciaccia: On parle de critères pas mal
généraux, comme vous dites. Parmi les demandes que vous obtenez,
quel est le pourcentage à qui vous accordez des subventions? Autrement
dit, quel est le montant global et quel est le montant des demandes?
M. Couture: Je dois vous dire que cela ne surprendra personne que
les demandes excèdent énormément les réponses. (20
h 15)
M. Ciaccia: Oui, c'est normal.
M. Couture: De toutes les demandes qu'on reçoit, on a
peut-être pour $1 500 000 de demandes et on répond à peu
près à 50% du montant des demandes. C'est en
général, comme moyenne.
M. Ciaccia: II n'y a jamais de critères politiques quand
vous...
M. Couture: On s'en garde bien!
M. Ciaccia: Cela n'entre pas du tout dans les
considérations?
M. Couture: Ce n'est jamais arrivé à ma
connaissance. C'est tellement vrai que...
M. Ciaccia: Connaissant votre désir ardent et votre
sincérité vraiment de poursuivre vos objectifs politiques
séparatistes, et vous croyez au séparatisme...
M. Couture: Oui, on sépare tout ce qu'on a.
M. Ciaccia: Vous n'êtes pas comme certains de votre
gouvernement qui sont séparatistes, indépendantistes,
"associationnistes", on ne sait plus quel nom leur donner. Vous, je peux dire
clairement que vous êtes séparatiste. Alors, connaissant votre
sincérité, connaissant vos objectifs politiques, je me demande si
vous êtes capable de séparer vos objectifs politiques de vos
décisions d'accorder ces subventions.
M. Couture: M. le Président, je suis en effet
séparatiste dans le sens suivant: Tout l'argent que j'ai pour les
subventions, je le sépare entre tout le monde.
M. Ciaccia: Ah, c'est...
M. Couture: C'est tellement vrai... M. Ciaccia: C'est une
réponse...
M. Couture:... qu'on cherche à dépolitiser les
subventions que j'ai moi-même, comme ministre, qui a remplacé les
prédécesseurs que vous connaissez... je pense qu'il en est
passé plusieurs du gouvernement libéral précédent,
d'ailleurs, qui ont fait, je pense, de bonnes "jobs". Ce sont eux qui,
directement, envoyaient la lettre pour dire à tel organisme: Voici, moi,
ministre de tel parti, etc., je vous donne tant d'argent pour faire tel
travail.
Moi, j'ai trouvé que ce n'était pas bon, ça, pour
des raisons bien simples plutôt profondes que simples soit
que, à la longue, dans les milieux ethniques, si le pouvoir politique
direct est l'instrument pour donner une série de subventions dans
notre ministère, on en donne beaucoup il pourrait y avoir un
lobbying dangereux. Il pourrait se passer ce que vous avez insinué et
j'ai pris la décision de confier à mes services le soin
d'administrer la politique. La politique, évidemment, je l'ai
acceptée, je l'ai élaborée, etc. Une fois qu'elle a
été fait, je l'ai envoyée aux services et je leur ai dit:
Administrez ça. Vous avez vos critères. Vous avez des demandes.
Servez-vous des critères et répondez oui ou non, selon les
demandes. A ce point de vue-là, je pense que c'est un progrès
considérable.
M. Ciaccia: Une fois que les critères que vous avez
mentionnés sont admis et qu'un organisme répond à ces
critères, comment décidez-vous du montant de la subvention, que
se soit $10 000, $20 000...?
M. Couture: On a une enveloppe globale pour chaque programme. Le
programme d'aide au fonctionnement des organismes totalise à peu
près $536 000, je crois, $535 000, je me suis trompé de
$1000, pour une série d'organismes. Nos fonctionnaires ont
à tenir compte de toutes les demandes qu'ils reçoivent et de
celles qui sont attendues, parce que nos services de relations avec les groupes
ethniques connaissent bien les milieux et savent que tel milieu,
éventuellement, pourra faire une demande. Alors, il y a ce souci d'un
partage équitable de l'enveloppe budgétaire entre de nombreux
organismes. Evidemment, ça diminue peut-être le montant
demandé.
Il y a aussi, dans la subvention elle-même, ce souci de tenir
compte de l'expérience de l'organisme et de son efficacité. Il y
a peut-être une part qu'on pourrait qualifier de difficile à
établir où il pourrait y avoir une partie qui semblerait
arbitraire, mais je pense que ça arrive dans très peu de cas et
c'est tellement vrai qu'à ce titre j'ai rarement de plaintes des groupes
là-dessus. Je sais que, dans l'ensemble, les gens connaissent les
règles du jeu, ils connaissent notre budget et ils sont largement
satisfaits de ce que nous faisons.
M. Ciaccia: Avez-vous augmenté, depuis que vous avez
assumé la responsabilité du ministère,
les montants de subventions qui étaient autrefois accordés
à ces groupes minoritaires?
M. Couture: Le budget a été augmenté depuis
que nous sommes en place, en effet.
M. Ciaccia: De combien?
M. Couture: II a été augmenté,
réellement, de plusieurs centaines de milliers de dollars; il a
été augmenté de $350 000. Je m'en réjouis parce que
les demandes étaient tellement nombreuses et l'organisation des milieux
ethniques est de plus en plus structurée. Quand on les considère
comme des partenaires parce qu'il y a une certaine philosophie qui s'est
dégagée depuis que nous sommes au pouvoir, là-dessus
nous voulons que le gouvernement joue un certain rôle, mais nous
reconnaissons et nous sommes ravis de considérer que les groupes et les
associations ethniques ont un rôle important à jouer dans leur
communauté et c'est à titre de partenaires que nous reconnaissons
ce rôle. Une fois que les gens sont habitués à prendre
conscience que nous-mêmes, au gouvernement, établissons ce genre
de contrat de services, finalement, avec les communautés ethniques, il y
a eu un accroissement de demandes, mais il faut s'en réjouir, parce que
cela partage les responsabilités et du gouvernement et des milieux
ethniques.
M. Ciaccia: Vous venez de dire que vous reconnaissiez que les
différents groupes ethniques jouent un rôle important dans leur
communauté; pas textuellement, mais grosso modo, c'est ce que vous avez
dit. Quand vous avez nommé le Conseil consultatif de l'immigration, vous
ne les avez pas consultées, ces associations.
M. Couture: M. le Président, excusez-moi, si je souris un
peu, mais probablement que le député de Mont-Royal est
très mal informé et ça me fait plaisir de l'informer ce
soir, s'il ne le savait pas.
Dois-je rappeler que quand le premier comité consultatif a
été mis en place, son premier mandat était celui-ci? C'est
difficile de nommer des représentants des communautés ethniques,
il y en a 650 à peu près, des associations dans les milieux
ethniques.
M. Ciaccia: Vous ne les avez pas consultées quand vous
avez nommé le conseil la première fois.
M. Couture: J'y arrive. Vous me donnez toujours la parole, M. le
Président?
Le Président (M. Boucher): Oui, M. le ministre.
M. Couture: Dans la nomination du premier comité
consultatif, en effet, il y avait eu une consultation qui avait
été un peu rapide, mais je trouvais important de remettre sur
pied ce comité consultatif qui avait été abandonné
par le gouver- nement libéral précédent. Je ne sais pas si
le gouvernement libéral précédent donnait peu d'importance
à cet instrument de consultation, mais il avait été
laissé en plan. J'ai dit: C'est important qu'il soit remis sur pied et
j'ai nommé rapidement ses membres en leur donnant un premier mandat,
surtout, évidemment, à la suite de critiques justifiées
des milieux. Ils ont dit: On n'a pas été assez consulté.
J'ai dit: Vous venez d'être nommés, d'ici un an, donnez-moi une
stratégie, une technique, une approche, une façon de consulter
les milieux ethniques pour qu'au prochain comité consultatif, qui est
devenu le conseil consultatif, nous puissions avoir un mécanisme
acceptable pour nommer les futurs membres. C'est ce qu'ils ont fait. Il y a eu
à temps plein, pour l'information du député de Mont-Royal,
un agent de relations extérieures engagé au ministère qui
a fait pendant plusieurs mois, de juin à décembre, des
consultations. Il est allé dans toutes les parties du Québec, il
a rencontré tous les groupes ethniques, il a reçu au-delà
d'une centaine de recommandations des milieux ethniques pour dire: Nous, on
aimerait avoir telle personne sur ce conseil consultatif etc. C'est à la
suite de ces consultations que j'ai nommé les membres actuels. Leur
nomination a eu beaucoup d'effets heureux dans les milieux ethniques. J'ai
reçu énormément de félicitations, d'expression de
satisfaction face au choix de ces membres.
M. Ciaccia: II y a différentes manières de faire de
la consultation. Cela aurait été plus crédible je
ne dirais pas plus "crédibile" de consulter les
différentes associations avant de nommer le premier conseil, parce que
vous nommez le conseil d'après vos intentions, d'après vos
critères et, après cela, c'est facile de dire: On a fait de la
consultation. Vous êtes toujours ouvert à des critiques, à
savoir que vous nommez sur le conseil des gens qui sont plutôt favorables
au point de vue du ministre que représentatifs du point de vue des
groupes immigrants. Quand vous dites que je suis mal informé, je suis
très bien informé que vous faites des campagnes de
publicité, des tournées dans tous ces milieux, votre chef de
cabinet est très actif, cela je le sais.
Je me pose des questions à savoir si ces gens-là sont tous
vraiment représentatifs du milieu immigrant. Cela, par exemple, on
pourrait démontrer que ce n'est pas exactement représentatif, ce
sont des gens pour lesquels c'est plus facile de dire qu'ils ont
été nommés par le ministre, c'est vous qui avez la
décision finale et je crois qu'en terme de crédibilité
cela aurait été préférable si le conseil
consultatif avait été originalement nommé après
consultations.
M. Couture: M. le Président, me permettez-vous simplement
d'ajouter un complément et d'insister sur le fait suivant: Tous les
membres du conseil consultatif actuel, sauf le président, et je pense
qu'on comprendra que pour la nomination d'un président, le ministre peut
avoir un choix plus libre qui déborde les recommandations qui vien-
nent des milieux... Sauf le président, tous les membres du
conseil consultatif...
M. Ciaccia: J'écoute!
M. Couture: Je veux que vous écoutiez parce que c'est
important. Tous les membres du conseil consultatif actuel ont été
choisis dans des listes proposées par les communautés ethniques,
donc, c'est complètement faux, mais complètement faux, inexact,
je ne trouve pas de vocabulaire...
M. Ciaccia: Le fait qu'ils ont composé des listes ne
prouve rien. Enfin...
M. Couture: Ils ont été proposés par les
communautés ethniques elles-mêmes, après plusieurs mois de
consultations; donc, c'est faux.
M. Ciaccia: Dans un autre ordre d'idées,
brièvement, avant que je ne cède la parole... Si mon
collègue de l'Union Nationale me le permet, vous avez l'entente
Cullen-Couture, et maintenant l'administration devrait retomber sur le
ministère du Québec quant à son application, l'admission
et une foule d'autres mesures. Quand je regarde et je crois que le
député de Saint-Louis a déjà soulevé cette
question les effectifs et le budget de votre ministère, par
exemple: employés permanents, je vois qu'il y a moins d'employés
permanents en 1979/80 qu'il y en avait l'année dernière.
Supposément les fonctions de votre ministère augmentent et les
effectifs baissent. Je vais citer un exemple d'une situation qui a
été portée à mon attention. Vous pouvez corriger
les faits s'ils ne sont pas tels qu'ils m'ont été
rapportés, mais à Granby, par exemple, suite à la
suggestion de l'année dernière du député de
Saint-Louis d'admettre les réfugiés vietnamiens qui
étaient sur la grande mer en bateau, vous avez posé un geste
très humanitaire en les acceptant au Québec.
Mais, très récemment, il y a à peu près un
mois, un groupe de ces réfugiés a été envoyé
par votre ministère à Granby. Premièrement, il n'y avait
pas de COFI à Granby, parce qu'il n'y avait pas d'immigrants à ce
moment-là et peut-être qu'il n'y avait pas la
nécessité d'en avoir. Mais l'accueil des réfugiés a
été laissé entre les mains du ministère
fédéral. Les déboursés pour tout le
nécessaire pour les accommoder pendant la période de transition,
jusqu'à ce que ces gens obtiennent des emplois, c'était à
la charge et aux coûts du gouvernement fédéral. Le
fonctionnaire du gouvernement fédéral l'a su le soir avant, ou la
journée avant, seulement à quelques jours d'avis. Les
fonctionnaires du ministère de l'Education ne connaissaient même
pas le nombre de personnes qui devaient aller à Granby. Il y en a qui
disaient que c'était 87, il y en a d'autres qui disaient que
c'était 50. Le ministère de la Main-d'Oeuvre
québécois n'était pas du tout au courant.
Est-ce que ces faits sont exacts? Est-ce que vous avez une planification
pour recevoir ces gens? C'est beau de poser le geste de recevoir les
réfugiés. Mais, par la suite, si on n'a pas les fonds
nécessaires, si ce sont des budgets du gouvernement
fédéral, si ce sont des fonctionnaires du gouvernement
fédéral qui doivent les recevoir et les accommonder pendant la
période de transition qui peut durer un an au moins, je me demande quel
est le rôle du ministère de l'Immigration. Il aurait fallu qu'il
institue un COFI immédiatement. Ces gens ont pris certains fonds et ont
mis en place les mécanismes du COFI. (20 h 30)
Si ces renseignements ne sont pas exacts, cela me ferait plaisir de
connaître les renseignements exacts du ministre.
M. Couture: L'opération de Granby était l'une de
nos premières opérations d'accueil des réfugiés
dans les petites villes. Je suis allé moi-même à Granby
accueillir ces réfugiés qui étaient dans un motel de la
place, en attendant de trouver des logements.
Le rôle du ministère de l'Immigration du Québec a
été très intéressant dans ce cas-là.
Evidemment, je serais porté à dire que vous avez raison sur
certains points en disant que cela s'est fait vite. Cela s'est fait vite, parce
que, par définition, l'arrivée des réfugiés, ce
sont des gens qui sont dans des situations dramatiques et qui sont
envoyés par le fédéral de l'extérieur. Même
si notre conseiller en immigration renconre ou donne le feu vert sur les
candidats qui viennent au Québec, c'est le fédérai qui
organise les voyages à l'étranger de ces réfugiés
vers le Québec. Parfois, il en arrive des nombres considérables
et on est averti souvent très tard, à la dernière minute,
qu'il en arrive 60, 150, 200, etc.
Dans le cas de Granby, en effet, il est arrivé un contingent, la
semaine précédente, de 67, quelque chose comme cela. 188, mais on
en a envoyé à Granby à peu près 70, oui. Il en
était arrivé 190 la veille, non pas la veille, la semaine
précédente ou la semaine courante, comme cela et, rapidement,
nous avons été obligés d'organiser l'accueil de ces
réfugiés-là, parce que, le Québec, même si au
niveau des budgets, ce n'est pas lui qui dépense l'argent pour le
vêtement, le logement, etc., nous avons quand même un rôle
que je trouve intéressant et primordial. Nous organisons les services.
C'est payé par le fédéral, mais c'est nous qui organisons
un peu une série de services, qui mettons en place des choses, je
pourrais dire le meilleur mot, qui animons les organismes, les ressources
communautaires pour l'accueil de ces réfugiés.
A Granby, le maire lui-même a pris l'initiative, sachant qu'on
voulait envoyer des réfugiés à Granby. Il était
enthousiaste. Il a dit: On est organisé pour cela On a des industries
ici. Cela nous fait plaisir de le faire. Il a mobilisé toute la
population. Il m'a invité lui-même. Ce n'est pas moi qui me suis
imposé à Granby. Il a dit: Je voudrais que vous veniez
officiellement accueillir avec moi les réfugiés. Il y avait toute
une ville qui était mobilisée, même si ce fut rapide, pour
l'accueil de ces réfugiés.
Je crois en effet qu'il y a peut-être eu des problèmes
logistiques au niveau des organismes comme les Centres de main-d'oeuvre,
etc.
M. Ciaccia: Qui paie pour ces réfugiés, par
exemple, avant qu'ils n'obtiennent des emplois?
M. Couture: Avant qu'ils obtiennent des emplois et avant qu'ils
aient un logement, c'est le fédéral. Evidemment, c'est le
fédéral.
M. Ciaccia: Ah!
M. Couture: Actuellement, nous négocions et je pense que
cela s'annonce assez bien. Nous demandons au fédéral ceci. Lors
de l'opération du Hai Hong, on a eu de M. Cullen et de toute son
équipe, beaucoup d'hommages et de félicitations disant que notre
équipe d'accueil à l'Immigration-Québec est vraiment
très bien préparée à ce genre d'opération.
Ils savent que, comme nous sommes plus proches de la population, nous sommes
peut-être mieux préparés à faire ce genre
d'accueil.
M. Ciaccia: Cela n'avait pas l'air d'être le cas à
Granby, ce ne sont pas les nouvelles que nous avons eues.
M. Couture: A Granby, si vous me dites, à un moment
donné...
M. Ciaccia: Les budgets fédéraux. Vous y êtes
allés, je crois, mais le seul représentant que vous aviez
était une personne qui faisait la traduction, un interprète. Tout
le reste...
M. Couture: Non, les services d'accueil du ministère de
l'Immigration ont organisé l'accueil à Granby. Nos services ont
organisé cet accueil et ont coordonné les ressources
communautaires. Au niveau du COFI, il n'y en a pas, mais quand il n'y a pas de
COFI, nous faisons des contrats avec les commissions scolaires. A Granby,
effectivement, nous avons fait un contrat avec la commission scolaire de la
place je ne sais pas comment elle s'appelle pour dire: Vous allez
donner des cours de français à ces réfugiés. Je
retiens que, de fait, cela s'est fait vite. C'est comme en plein hiver, quand
votre voisin, qui a une famille de six enfants, passe au feu, et qu'ils
arrivent à trois heures de la nuit chez vous, vous n'êtes pas
suffisamment informé pour bien les accueillir, mais ils viennent de
passer au feu. Alors, c'est difficile de dire: On aurait aimé mieux
être informé qu'il y aurait un feu à trois heures de la
nuit chez mon voisin. L'arrivée des réfugiés...
M. Ciaccia: Non, ce n'est pas exactement la même situation.
Vous aviez annoncé il y a trois mois que vous en acceptiez...
M. Couture: Non, c'est arrivé il y a une semaine.
M. Ciaccia:... un certain nombre. Il me semble que ce n'est pas
quelque chose qui est arrivé à la dernière minute. Vous le
saviez. C'est votre décision même d'accepter ces gens.
M. Couture: Oui, mais on ne sait jamais le nombre. C'est cela le
problème, d'ailleurs, avec le fédéral actuellement. On ne
sait jamais le volume prévu ou, du moins, retenu par le Québec.
On dit: On en reçoit 3500 dans l'année qui vient, mais on ne le
sait jamais du fédéral. Parfois, on le sait la veille par
télex: Sur les 3500, on vous en envoie 150. On va en avoir 600 d'ici
juin. C'est la raison pour laquelle je crois que ce serait peut-être
intéressant que vous adressiez au fédéral ce genre
de...
M. Ciaccia: Pour mettre en application et administrer l'entente
Cullen-Couture...
M. Couture: Couture, c'est moi!
M. Ciaccia: Oui, c'est vous et je ne veux pas vous en enlever le
mérite. Comment cela se fait-il que vous ayez moins d'effectif
aujourd'hui et que vous obteniez plus de contrôle sur l'immigration?
C'est difficile à comprendre.
M. Couture: Oui, c'est difficile à comprendre dans les
chiffres globaux. Il faut dire une chose: II y en a trois de moins.
M. Ciaccia: Ils ne faisaient rien avant, ces gens?
M. Couture: On est là pour vous répondre, mon cher
député, à travers le président. Il y en a trois de
moins dans l'effectif du ministère, mais il y en a plus à
l'accueil et il y en a plus dans les services afférents à
l'entente. C'est ce qu'il faut retenir. Sans cela, ce serait évidemment
incompréhensible. Je peux vous dire qu'il y en a sept de plus au service
à l'étranger à l'extérieur; il y en a cinq de plus
au recrutement, à l'établissement ici au Québec par
rapport à l'entente, du personnel de plus; il y en a quatre de plus
à l'adaptation. Il y en a un de plus à l'administration et
à la recherche mais cela, cela concerne moins l'entente
à l'accueil, on en a quatre de plus.
M. Ciaccia: Tous ces plus arrivent à moins deux!
M. Couture: A moins deux. C'est parce qu'il y a des transferts de
personnel. Dans les COFI, à cause de la décision de vos
amis...
M. Ciaccia: C'est comme le budget de votre ministre des Finances,
il réduit les impôts et les taxes augmentent.
M. Couture: Je vais répondre en ce qui concerne mon
ministère.
M. Ciaccia: Une sorte de logique ministérielle!
M. Couture: A cause de vos amis... Est-ce que j'ai la parole, M.
le Président?
Le Président (M. Boucher): M. le ministre.
M. Couture: A cause de la décision de vos amis d'Ottawa,
les libéraux fédéraux et le gouvernement libéral
fédéral, qui ont coupé...
M. Ciaccia: C'est la faute du fédéral.
M. Couture: ... les subventions aux stagiaires de nos COFI,
à un moment donné, nous avons dû prendre la relève,
mais il y a eu une période où il y avait nécessairement
moins d'étudiants qui venaient aux COFI et on prévoyait aussi
qu'il y en aurait moins à cause de cette décision. Dans
l'élément concernant la formation, il y a eu un certain nombre de
postes qui ont été transférés à d'autres
services.
M. Ciaccia: J'ai une autre question, si vous me permettez, avant
que je cède la parole à mon collègue. Vous avez ouvert un
bureau à Marseille, je crois.
M. Couture: Ah non! il n'est pas ouvert.
M. Ciaccia: Vous n'avez pas ouvert un bureau à
Marseille?
M. Couture: II n'y en aura pas, non plus.
M. Ciaccia: Je vois dans la "direction des services à
l'étranger, Marseille, deux postes".
M. Couture: Oui, c'est une prévision qui n'est pas encore
réalisée.
M. Ciaccia: Ah! Est-ce que c'était votre intention d'en
ouvrir un?
M. Couture: C'était notre intention de partager le
personnel qui était à Paris, de prendre une partie du personnel
qui était à Paris et de l'envoyer à Marseille.
M. Ciaccia: Est-ce qu'il y a un consulat canadien à
Marseille?
M. Couture: Non, oui, il y a un consulat canadien. Je pensais que
vous disiez un consulat québécois, non, il n'y en a pas. Pas
encore.
M. Ciaccia: Vous prenez la même attitude avec les groupes
ethniques? C'est ça qui me préoccupe. Dans votre esprit, vous
l'avez déjà faite, la séparation.
M. Couture: Non, mais je pensais que vous faisiez des
projections, sachant quel sera l'avenir du Québec.
M. Ciaccia: Non, parce que je prends les propos que vous aviez
tenus à la dernière commission parlementaire. Vous disiez que
c'était dans vos intentions d'utiliser les mêmes locaux ou les
mêmes services que les consulats canadiens, parce que nous sommes encore
un pays.
M. Couture: Ce sont des ententes...
M. Ciaccia: On est encore un pays...
M. Couture: De toute façon, c'est impossible...
M. Ciaccia: Oui, vous avez dit: C'est mon intention d'ouvrir des
bureaux d'Immigration-Québec et de prendre avantage des ambassades
canadiennes. A Marseille, je crois qu'il y a un consulat canadien. Avez-vous
postulé auprès du gouvernement français pour avoir un
bureau à part ou un bureau séparé?
M. Couture: En ce qui concerne Marseille, je dois vous dire que
le dossier est en suspens, en négociation et, de toute façon, ce
n'est pas possible pour nous, à l'étranger, d'ouvrir quelque
bureau que ce soit sans une entente préalable avec le gouvernement
fédéral pour les raisons que vous connaissez et ce genre
d'entente ou de négociation se fait par le ministère des Affaires
intergouvemementales.
M. Ciaccia: Mais, est-ce que vous avez essayé d'avoir un
bureau séparé à Marseille et avez-vous demandé la
permission au gouvernement français?
M. Couture: A Marseille, nous ne sommes même pas rendus
là.
M. Ciaccia: Oui, mais, écoutez, vous n'êtes pas
rendus là. Alors, comment puis-je interpréter dans votre cahier
"direction des services à l'étranger, effectifs autorisés,
1978/79, Marseille, deux postes"? C'est autorisé.
M. Couture: Oui, mais c'est encore en négociation. C'est
autorisé, mais ce n'est pas encore réalisé.
M. Ciaccia: Est-ce votre intention de partager les bureaux avec
le consulat canadien?
M. Couture: Oui, c'est notre intention, et si Marseille ne
réussit pas, on essaiera ailleurs.
Le Président (M. Boucher): Merci, M. le
député de Mont-Royal. M. le député de
Gaspé.
M. Le Moignan: M. le Président, j'aurais simplement
quelques points à toucher.
Le ministre, cet après-midi, dans son introduction d'ouverture, a
mentionné la préparation d'une politique de parrainage collectif
pour les réfugiés. Etant donné cette préparation
qui se dessine à l'horizon, je ne lui demande pas d'entrer dans tous les
détails, mais est-ce qu'il pourrait nous donner, en
général, quelques brides pour nous situer peut-être
davantage?
M. Couture: Oui, je vais vous donner des brides. Dans nos
règlements actuels, qui ont été publiés dans la
Gazette officielle, il est prévu, d'ailleurs un peu à l'image des
règlements fédéraux sur cette question, que des organismes
sans but
lucratif ou cinq citoyens pourraient demander une accréditation
pour parrainer des réfugiés. C'est public depuis la parution dans
la Gazette officielle. C'est un parrainage qui rejoint un peu ce qui se passe
au fédéral où, effectivement, des gens qui veulent prendre
en charge pendant un an des réfugiés, peuvent, par une
accréditation demandée au gouvernement fédéral,
pour le moment, au gouvernement québécois, éventuellement,
peuvent, dis-je, avec un accord avec le gouvernement fédéral
demander eux-mêmes d'ajouter des réfugiés. C'est ça
qui est intéressant. Cela déborde le volume prévu de
réfugiés qu'on accepterait cette année, parce que les
volumes d'immigration et les volumes de réfugiés sont
décidés à l'avance, avant le commencement d'une
année. (20 h 45)
En ce qui concerne 1979, pour le Québec, nous avons dit au
fédéral, qui nous le demandait c'est dans la loi
fédérale, nous sommes obligés de leur donner un volume
que nous étions prêts à aller jusqu'à 20 000
immigrants et que nous étions prêts à accepter 3500
réfugiés. Le parrainage permettrait à des groupes,
à des paroisses ou à des citoyens qui se réunissent de
dire: Nous, on veut faire venir des réfugiés de tel et tel pays,
on s'accrédite, on reçoit le feu vert du gouvernement et on prend
en charge ces réfugiés pendant un an; on s'engage
complètement, au niveau du logement, des dépenses, etc., à
les prendre en charge.
M. Le Moignan: Parmi tous ces réfugiés, on a
parlé tout à l'heure de l'accueil, on a mentionné Granby.
Evidemment, le Québec défraie une partie et le
fédéral en défraie une autre. Je crois qu'il y avait
beaucoup d'orphelins là-dedans, si ma mémoire est bonne. Il n'y a
pas d'orphelins qui sont venus au Québec, pas tellement?
M. Couture: Si vous voulez le savoir...
M. Le Moignan: Est-ce qu'il y avait des enfants orphelins?
M. Couture: Les cas d'orphelins parmi les réfugiés
qui sont déjà arrivés ou qui devraient arriver sont assez
peu nombreux. Quand ce sont des orphelins, il y a toujours la procédure
d'adoption ou de prise en charge de certains Québécois avant
qu'ils arrivent. Ce qui se passe bien souvent, c'est qu'il y a des mineurs qui
n'ont plus leurs parents, mais qui ont leurs oncles, leurs tantes; ils ont
encore le réseau familial qui les prend en charge. On pourrait dire
qu'il y a environ une dizaine d'orphelins dans tous ceux qui sont
arrivés.
M. Le Moignan: Parmi tous ces gens en détresse qui n'ont
pas demandé à venir au Canada, qui auraient été
prêts à aller n'importe où, là où un accueil
leur serait réservé, vous avez constaté... Cela fait
déjà quelques mois qu'ils sont ici, est-ce que leur moral est
bon, est-ce que l'acclimatement... Est-ce qu'il y a des problèmes,
est-ce qu'ils demandent à retourner chez eux?
Est-ce qu'ils sont placés, est-ce qu'ils ont trouvé des
emplois?
M. Couture: Je dois dire que j'ai des contacts réguliers
avec ces milieux, avec plusieurs groupes de réfugiés, et je suis
assez surpris. Probablement par le fait je pense que, humainement, cela
se comprend que ce sont des gens, surtout ceux du sud-est de l'Asie, qui
ont tellement souffert, qui ont manqué de tellement de choses,
l'arrivée dans un pays aussi libre où ils mangent trois fois par
jour, où ils ont des vêtements, où ils ont un accueil du
milieu, où ils sont pris en charge... Les gens sont vraiment
impressionnés par cette nouvelle situation et ils s'adaptent très
rapidement.
On dit même qu'à la première année de leur
arrivée ce sont les chiffres que j'ai 70% d'entre eux
trouvent un emploi. C'est quand même assez extraordinaire. Je pense que,
humainement, cela se comprend et psychologiquement aussi; ce sont des gens qui
ont été pendant des mois et des mois dans des camps de
réfugiés, qui ont souffert beaucoup, ils ont acquis un
entraînement physique et moral assez spécial, assez exceptionnel,
ils ont beaucoup de détermination et de courage. Je pense que,
facilement, ils sont prêts à faire beaucoup de sacrifices pour
trouver une place au soleil et ils le font.
M. Le Moignan: Vous avez mentionné, dans vos
prévisions pour l'année en cours, environ 20 000 immigrants et
3500 réfugiés. Ceci est fait d'après une étude
parce qu'on sait qu'on peut en caser 20 000 et non pas 50 000. C'est un peu une
question d'offre et de demande, dans un certain sens. Mais s'il arrivait une
autre catastrophe vous avez dit tout à l'heure que ce
n'était pas limité une invasion, les
réfugiés pourraient aller à 5000, par exemple, à
7000 ou 8000, et cela se discute avec le fédéral, toujours.
M. Couture: C'est-à-dire que 20 000 immigrants, c'est le
maximum, cela inclut les 3500. On prévoit à peu près 18
000 pour l'an prochain. On a dit au fédéral qu'on pourrait aller
jusqu'à 20 000, selon les circonstances, mais que la capacité
d'accueil du Québec, son absorption des immigrants et des
réfugiés incluse, selon la conjoncture économique, permet
d'affirmer que ça pourrait être acceptable, à cause de
l'expérience passée.
Au fond, ce n'est pas un chiffre au hasard qu'on lance. Ce chiffre a
été identifié à la suite de certaines
études, de la connaissance de ces milieux, de l'expérience de
gens qui ont vécu cette situation, de statistiques des années
passées, de la capacité d'accueil des Québécois, de
la possibilité d'intégration de certains groupes d'immigrants.
C'est un peu une série de facteurs qui nous permettent de dire: Rendu
à tel chiffre, c'est possible pour le Québec non seulement de les
absorber facilement, mais aussi c'est une chose que les
Québécois méritent de connaître que cela
devienne un apport économique positif.
Par exemple l'année passée, je vais prendre l'année
1977-1978 c'est très bref, mais je pense
que comme cela va être inscrit au journal des Débats pour
les Québécois qui veulent s'informer là-dessus c'est
intéressant il y a eu 17 500 immigrants au Québec. Au
point de vue de l'apport économique, cela a apporté $97 millions,
une moyenne de $5400 par personne. Chez les investisseurs, cela a donné
$39 millions; on pourrait ajouter $30 millions, parce que ces investisseurs ont
emprunté $30 millions pour leurs investissements, donc cela totalise $70
millions. Il y a eu création de 1116 emplois et une création
indirecte d'un demi-emploi par travailleur, en sachant qu'il y en a à
peu près 70% qui trouvent un emploi.
Je pense que c'est intéressant de dire que sur une année
où il y a eu 17 500 immigrants au Québec, il y a quand même
pas mal de millions de dollars qui sont entrés par cette immigration. 17
500 consommateurs de plus, cela fait marcher davantage la machine
économique, et, par le fait que 70% de ces immigrants se sont
trouvé un emploi, à cause d'une bonne sélection, à
cause d'une bonne connaissance du marché du travail, ils ont
contribué largement, je pense que tout le monde est d'accord en
commission pour le dire ceux qui ont suivi un peu l'immigration
globalement, c'est toujours un facteur positif.
Il faut le répéter souvent: l'entrée des
immigrants, des réfugiés, quand on regarde ce qu'ils deviennent
une fois qu'ils sont entrés, n'est pas une charge à la
collectivité. Au contraire, c'est un apport économique, c'est un
apport humain et c'est un apport culturel.
M. Le Moignan: De tous ces immigrants, vous avez touché
l'exploitation, comme on la faisait jadis, en leur donnant des salaires
inférieurs. Est-ce qu'il y a des normes de surveillance pour que ces
immigrants reçoivent au moins un salaire normal, décent, qui leur
permette de vivre ou est-ce qu'on peut encore les exploiter en les payant sous
la table?
M. Couture: Oui, on peut encore les exploiter. On peut exploiter
tout le monde d'ailleurs, pas seulement les immigrants même les
Québécois. Il y a la loi des normes du travail qui est
heureusement passée par notre gouvernement, qui apporte des
améliorations à ce titre. Il y a la nouvelle commission des
normes du travail qui aura un personnel supplémentaire pour surveiller
l'application de ces lois. Les immigrants qui arrivent au Québec sont
soumis à toutes les lois du Québec, donc ils sont aussi fragiles
que les autres Québécois et, plus fragiles, parce qu'ils sont
moins bien équipés évidemment au niveau de la langue, au
niveau des connaissances du milieu.
Mais c'est mon intention, surtout avec la création du poste de
secrétaire délégué aux travailleurs immigrants et
aux contacts qu'on a avec toutes les centrales et tous les organismes, de
surveiller de très près afin que les travailleurs immigrants
aient les mêmes conditions de travail que les autres
Québécois et restent à l'écart des exploitations
possibles. Il y en aura toujours. Là-dessus, quand même, on
essaiera d'être vigilant.
M. Le Moignan: Pour en revenir aux statistiques, sur 20 000, par
exemple, qui peuvent entrer au pays, votre sélection doit être
assez rigoureuse, assez sévère. Est-ce que vous en refusez
beaucoup parmi ceux qui demandent à entrer au pays? Avez-vous des
statistiques ou bien si cela se fait de concert avec le fédéral
ou c'est le provincial?
M. Couture: Dans ce qu'on pourrait appeler le volume de demandes
d'immigrants pour le territoire québécois qui pouvait aller
jusqu'à 100 000, évidemment on en refuse au delà de... il
y a 50% qui ne passent pas la présélection, c'est-à-dire
qui n'ont pas les points de base pour avoir droit à une entrevue. C'est
probablement le tiers qui est accepté au Québec, de toutes les
demandes.
M. Le Moignan: J'aurais encore deux questions. Quand vous parlez
d'activités parapédagogi-ques, il y a un budget pour ça,
ça comprend en même temps les activités sociales
d'intégration, de COFI, d'adaptation, c'est une enveloppe globale qui
résume un peu l'ensemble de leur vie.
M. Couture: C'est ça. Je ne sais pas à quel
élément vous faites allusion directement, mais dans les
activités d'adaptation, dans nos COFI on a de l'animation
socio-culturelle. Il y a une série d'activités qui sont
organisées à travers notre ministère pour favoriser les
contacts entre nouveaux arrivants et québécois de vieille souche,
ça se fait par les COFI. Il y a aussi une série de subventions
qui sont données à des groupes qui font ces
activités-là.
M. Le Moignan: Là où il n'y a pas de COFI par
exemple.
M. Couture: Là où il n'y a pas de COFI
évidemment.
M. Le Moignan: J'aurais une dernière question. Vous avez
à peu près dix ou douze postes de services à
l'étranger. J'ai cru comprendre que vous les logez dans des ambassades
canadiennes la plupart du temps? Vous n'avez pas de maison du Québec
à certains endroits où vous avez vos fonctionnaires?
M. Couture: Jusqu'à nouvel ordre, quand il y a une
délégation générale du Québec, ils logent
dans les délégations générales du Québec.
Ailleurs, quand il n'y a pas de présence du gouvernement du
Québec par une délégation générale, ces gens
logent dans les ambassades canadiennes avec une identification
québécoise. A l'avenir, nous sommes en train de trouver un
protocole d'entente ça va se faire dans certains cas
où l'Immigration-Québec sera à part de l'ambassade
canadienne, mais identifiée comme telle, en collaboration étroite
avec l'ambassade du Canada.
M. Le Moignan: Une dernière question. Vous avez fait un
choix de pays. Pourquoi n'avez-vous pas choisi dix autres pays où vous
auriez aimé
attirer des immigrants? Est-ce qu'il y a une raison spéciale pour
laquelle on va dans tel et tel pays, alors qu'il y a peut-être un autre
pays plus pauvre où les immigrants pourraient nous apporter beaucoup?
Quels sont les critères qui déterminent...
M. Couture: II y a deux critères principaux. D'une part,
le flux des demandes, c'est-à-dire qu'il faut quand même
répondre aux demandes. Dans les pays occidentaux, les pays d'Europe, il
y a beaucoup de demandes d'immigration et ne serait-ce que pour répondre
à la demande, je pense que notre responsabilité est d'avoir une
présence là.
Le deuxième critère, c'est le choix politique ou le choix
culturel du Québec en matière d'immigration. C'est une
façon aussi d'attirer les immigrants ou de recruter des immigrants en
étant présent dans ces pays-là. C'est la raison pour
laquelle, entre autres, j'ai décidé d'ouvrir à Lisbonne
parce que l'immigration portugaise était bonne pour le Québec
à mon avis. D'une part, il y a beaucoup de demandes et, d'autre part, ce
sont des latins qui apprennent facilement le français, qui s'adaptent
très bien à notre collectivité. Ces choix-là sont
perçus comme ça. A Hong Kong, on a ouvert pour tout le sud-est
asiatique, parce qu'il y a énormément de demandes, qu'il y a tout
le problème des réfugiés actuellement et c'est toute
l'Asie.
On a essayé d'être présent dans toutes les parties
du monde, avec possibilité d'effectuer des missions là où
on n'est pas présent rapidement et facilement.
M. Le Moignan: ... l'Allemagne, mais je pense qu'il y a tellement
d'ouvrage chez eux qu'ils n'ont pas besoin de chercher des
débouchés à l'étranger.
M. Couture: On a un bureau à Bruxelles qui couvre
l'Allemagne.
M. Le Moignan: II couvre l'Allemagne. Merci.
Le Président (M. Boucher): Merci, M. le
député de Gaspé. Est-ce qu'il y a d'autres questions? M.
le député de Mont-Royal.
M. Ciaccia: M. le Président, l'année
dernière, lors de la commission sur l'étude des crédits
pour le ministère de l'Immigration, je crois que vous aviez dit qu'une
étude sur l'exode des immigrants avait été
commandée. Premièrement, je ne pense pas qu'il y ait un exode
d'immigrants au Québec, quoique dans les 72 000, je ne dis pas qu'il n'y
a pas d'immigrants, mais je n'ai pas l'impression qu'il y en a beaucoup, je
n'aime pas même donner l'impression qu'il y a un exode d'immigrants ou
que le gouvernement donne cette impression. Avez-vous complété
cette étude et si oui, est-ce que vous pouvez la rendre publique?
M. Couture: Elle est sous presse actuellement. Ce sera connu
rapidement.
M. Ciaccia: Vous n'êtes pas en mesure d'en
dévoiler...
M. Couture: Non, je n'ai pas eu le contenu encore. (21
heures)
M. Ciaccia: Dans la campagne de rapprochement du Québec,
vous avez annoncé un programme de rapprochement entre les groupes
ethniques et la société québécoise. Est-ce que la
plupart des montants que vous avez dans cette campagne sont
dépensés parmi les groupes ethniques? Vous devez avoir certains
fonds pour cette campagne de rapprochement. Est-ce que la majorité de
ces fonds sont dépensés dans les communautés
ethniques?
M. Couture: La campagne de rapprochement a été
essentiellement faite à travers nos COFI. Par extension,
évidemment, tous les groupes qui reçoivent des subventions du
ministère et il y en a beaucoup font du rapprochement. Ils
en font continuellement. On leur donne des subventions pour cela. Mais la
campagne qui a été bien identifiée comme
opération rapprochement du ministère du Québec,
c'est fait par notre ministère et par les COFI.
M. Ciaccia: M me semblerait que les groupes ethniques, les
groupes d'immigrants, veulent se rapprocher, il n'y a pas de problème.
Je ne pense pas qu'il y ait de réticence de leur part à se
rapprocher. Même les plaintes sont que, dans plusieurs cas, il n'y a pas
d'égalité entre eux et les autres groupes de notre
société. Ce ne sont pas eux qui ne veulent pas se rapprocher. Ils
le voudraient bien. C'est le reste de la société,
peut-être, qui ne comprend pas ce qui se passe dans ces groupes
ethniques, dans ces groupes d'immigrants, et qui ne connaissent pas
quelques-unes des données que vous venez de citer, à savoir que,
sur 17 000 immigrants, le nombre d'emplois qui sont créés, le
montant des investissements...
Ne croyez-vous pas que, pour que ce soit vraiment effectif, une campagne
de recrutement, ce n'est pas au niveau des groupes ethniques qu'il faut
dépenser cet argent, mais dans une campagne dans le reste de la
société? Il faudrait que les montants soient
dépensés pour sensibiliser notre société au
rôle et à l'importance de tout ce que les groupes d'immigrants
peuvent apporter au Québec. Par exemple, je me réfère
à une annonce que vous avez placée dans le journal...
M. Couture: Très belle d'ailleurs.
M. Ciaccia: Luigi Veneziano, Comte, assisté de Pierre
Simard. Je trouve que c'est très bien, parce que cela donne un message
à la population. C'est la population qui a besoin de ce message. Ce ne
sont pas les groupes ethniques. Est-ce que vous pourriez, dans vos budgets, au
lieu de dépenser de l'argent pour ce programme de rapprochement parmi
les groupes ethniques je ne dis pas que les groupes ethniques n'ont
pas
besoin de fonds, ce n'est pas cela que je dis essayer de mettre
plus l'accent sur la sensibilisation du reste de la société? Et,
en plus, au lieu de les passer seulement dans les journaux parce que, de
moins en moins, il semble que les media électroniques ont pris plus
d'importance dans la population que les journaux est-ce que vous
pourriez accentuer ces messages non seulement dans les journaux, mais
également dans les media électroniques?
M. Couture: M. le Président, je suis très heureux
d'entendre le député de Mont-Royal. Je viens d'avoir un appui
exceptionnel du député de Mont-Royal à
l'élément 3, pour l'année à venir,
c'est-à-dire la grande campagne de publicité que nous allons
organiser dans les media électroniques, justement pour rejoindre les
objectifs bien énoncés par le député de
Mont-Royal.
En effet, je pense qu'il faut aller un peu plus loin. Il faut
sensibiliser les Québécois à l'importance de
l'immigration, à son apport positif à la société
québécoise. C'est l'objet de cette campagne de publicité
qui sera nettement axée sur la sensibilisation de toute la population
québécoise et on sait à quel point les media
électroniques ont de l'influence, parce que c'est vu par tout le monde
sur l'importance de l'immigration, de son apport parmi nous et de la
contribution qu'elle apporte à la société
québécoise.
Je remercie avec enthousiasme le député de Mont-Royal de
ses commentaires, parce qu'il appuie... Je pense que l'élément 3
vient d'être accepté spontanément par le
député de Mont-Royal. C'est un peu dans ce sens-là que ces
montants sont affectés.
M. Ciaccia: Oui, je vous appuie sûrement pour des
programmes que je crois franchement dans l'intérêt non seulement
des immigrants et des groupes ethniques, mais aussi dans l'intérêt
de la société en général, parce que, si on a des
préjugés et si on n'a pas vraiment un aperçu de ce qui se
passe... C'est une nécessité. On a vécu, on a grandi.
Notre prospérité est due partiellement au fait qu'on a obtenu,
qu'on a pu obtenir de l'immigration au Québec. Si on coupe cela, je
pense que toute la société va en souffrir.
Malheureusement, ce ne sont pas tous les Québécois qui
comprennent cela, parce que, pour une raison ou pour une autre, ils n'ont pas
tous eu l'occasion d'avoir la vraie information sur l'immigration au
Québec et ce que cela peut représenter. Je n'ai aucune
hésitation à vous appuyer dans des programmes qui ont du bon
sens. On fait opposition seulement quand on voit que vous allez trop ioin et
que ce n'est vraiment pas dans l'intérêt de toute la
population.
D'autre part, je pense qu'il y aurait moins de tendance... Je vais aussi
être assez franc avec vous. Quand on dépense de l'argent, on a un
peu de questions à se poser. Dans le contexte actuel, quand vous
dépensez de l'argent dans les milieux ethniques, dans les milieux
immigrants, on se pose toujours la question: Quand le faites-vous pour des fins
politiques et quand le faites-vous vraiment... Je pense qu'honnêtement on
peut se poser cette question-là. Je ne connais pas la réponse
pour chaque dollar que vous dépensez; lequel sera politique et lequel
sera vraiment pour faire bénéficier les groupes qui le
reçoivent? Cette tentation-là sera diminuée en
dépensant de l'argent pour sensibiliser la population en
général et je pense qu'il y a un grand besoin de le faire.
M. Couture: Je pense que la meilleure réponse que je peux
vous donner à cette préoccupation... Si vous étiez de ce
côté-ci, moi de l'autre côté, je poserais
peut-être le même genre de question. La meilleure réponse
que je peux vous apporter, c'est celle-ci: C'est que, au ministère de
l'Immigration, c'est tellement important pour nous de conserver la confiance
des communautés ethniques, la crédibilité du
ministère. On est le gouvernement de tout le monde et c'est le
ministère de tout le monde, quel que soit le choix qui a
été fait le 15 novembre 1976. Je pense qu'on est tous d'accord
là-dessus. C'est tellement important pour nous, si on veut faire un
travail efficace, de conserver...
M. Ciaccia: Je suis heureux d'entendre que vous êtes le
ministère de tout le monde, parce que, parfois, j'ai l'impression que
vous n'êtes pas le gouvernement de tout le monde. Je suis heureux de voir
que vous voulez être le ministère de tout le monde.
M. Couture: C'est aussi le gouvernement de tout le monde.
Regardez toutes les mesures sociales, les mesures à tous les niveaux qui
ont été prises depuis le 15 novembre 1976 par ce gouvernement
dans tous les ministères. Les Québécois le disent. C'est
tellement vrai que, dans Jean-Talon et dans Argenteuil, il y a une grosse
majorité de Québécois qui sont satisfaits du gouvernement,
parce qu'ils s'identifient à ce gouvernement-là qui est leur
instrument. Ils savent que c'est leur instrument de développement.
M. Ciaccia: On verra mardi, on verra lundi soir.
M. Le Moignan: 18 heures.
M. Couture: Pour nous, au ministère de l'Immigration, la
façon d'être efficace et d'avoir de bons contacts avec les
communautés ethniques, de faire un bon travail avec elles, c'est de
garder cette confiance-là. Je pense que, jusqu'à nouvel ordre,
les milieux, là-dessus, sont vigilants et peuvent... On n'a reçu
aucun reproche à ce point de vue-là, à savoir que nous
avions de sombres desseins partisans dans nos interventions.
M. Ciaccia: Excusez-moi, je n'ai pas exactement entendu votre
dernière phrase.
M. Couture: De sombres desseins...
M. Ciaccia: Non, avant cela. Vous avez reçu très
peu de...
M. Couture: Très peu de critiques. J'ai dit très
peu. C'est un euphémisme, je n'en ai pas reçu du tout. On n'a pas
eu...
M. Ciaccia: Vous ne les entendez pas, ne dites pas que vous ne
les avez pas reçues.
M. Couture: Evidemment, si vous fréquentez seulement le
Club de réforme, peut-être que...
M. Ciaccia: Non, je parle de Montréal, je ne parle pas du
Club de réforme à Québec.
Sur un autre sujet, vous avez des quotas établis pour le nombre
d'immigrants que vous allez admettre au Québec l'année prochaine.
Pour déterminer ces quotas, je crois bien que vous devez étudier
les besoins économiques, les besoins démographiques. Comment
faites-vous exactement pour établir qu'on va avoir 20 000 personnes,
qu'on va en avoir 17 000? Comment arrivez-vous à ce
chiffre-là?
M. Couture: La question doit aussi se poser au niveau canadien,
parce que le gouvernement canadien, depuis des années, établit
des quotas. Il ne faut pas se le cacher. Il y a quand même une part un
peu inconnue dans notre évaluation, c'est-à-dire qu'on se base
beaucoup sur des statistiques. On se base sur la situation économique.
On se base sur le marché du travail. On arrive à un chiffre qui
est plus ou moins vrai, mais que l'usage nous permet de corriger, si
nécessaire. C'est tellement vrai que, pour l'an prochain, j'ai dit 18
000 en espérant 20 000. C'est possible qu'en cours de route... Faisons
l'hypothèse que la situation se dégrade tellement que je corrige
mon chiffre, que je dise: Ce n'est pas possible d'aller jusque-là. Ou
bien que la situation s'améliore tellement, comme je le prévois,
qu'on puisse dire: Je pense qu'on pourrait en accepter plus, parce que le
marché du travail s'élargit, etc. Selon les demandes qu'on a
à l'étranger, cela coïncide avec les offres qu'on a ici. Un
chiffre qui est donné un an d'avance est toujours éclairé
par des situations passées, par une situation donnée à ce
moment, qui peut être ajusté en cours de route.
M. Ciaccia: Sur un autre sujet, est-ce que la question des
infirmières immigrantes est résolue?
M. Couture: Pourquoi? Est-ce qu'il y a un problème chez
les infirmières immigrantes?
M. Ciaccia: Ne me dites pas qu'il va falloir vous mettre au
courant de votre dossier. Il y avait un problème, et je veux savoir s'il
y en a encore un. Il y avait un problème quant aux tests linguistiques,
à l'assouplissement de l'Office de la langue française. On avait
demandé la possibilité de faire des stages. L'autre
problème, à partir de leur demande, elles devaient attendre 90
jours...
M. Couture: Oui, je sais ce à quoi vous faites allusion.
Je pensais que vous parliez de celles qui arriveraient, qui étaient
sélectionnées à l'étranger.
Pour répondre un peu à ce problème, nous avons mis
sur pied des cours sur mesure pour les infirmières immigrantes en
sachant c'est peut-être ce problème que vous soulevez
que beaucoup d'entre elles échouaient à leurs examens et
il fallait beaucoup de temps avant qu'elles ne soient acceptées par
l'Office de la langue française. Nous avons organisé des cours
sur mesure. Jusqu'à nouvel ordre, à moins qu'on me prouve le
contraire, on dirait que la situation s'est améliorée
considérablement. Semble-t-il que notre intervention dans ce domaine a
aidé au moins à résoudre un certain nombre de
problèmes. Il y a des cours sur mesure. Il n'y en avait pas avant.
Là, on a vu que pour ce groupe de clientèle... On fait cela avec
bien d'autres clientèles aussi.
Aux COFI, on prend un groupe de gens spécialisés et on
leur prépare un cours sur mesure pour les aider, par un vocabulaire
donné, par des mots techniques, à passer l'examen.
M. Ciaccia: Alors, il n'y a pas eu d'assouplissement de
l'examen.
M. Couture: C'est...
M. Ciaccia: Vous essayez des rencontres...
M. Couture: On n'a pas besoin d'assouplir l'examen si elles sont
mieux préparées à le passer.
M. Ciaccia: Cela dépend des intentions des parties. C'est
une autre question sur la liste des entrepreneurs qui exploitent les
travailleurs immigrants. Je peux comprendre par votre approche que vous ne
voulez pas agir d'une façon irresponsable. Je peux comprendre cela,
donner une liste...
M. Couture: Faire un show.
M. Ciaccia: Oui. Parfois, la liste est exacte ou non. Il faudrait
toujours donner l'occasion de corriger la situation. Pour donner cette occasion
de corriger la situation, est-ce que vous pouvez donner un délai et
dire: Ecoutez, j'ai la liste? Si la situation n'est pas corrigée avant
telle date, je vais publier la liste, parce qu'autrement, il n'y a pas de
pression. Ces entrepreneurs peuvent croire que c'est de la publicité qui
est faite maintenant et le ministre va oublier cela. Est-ce que vous avez
l'intention de dire: Ecoutez, je veux que la situation soit rectifiée
dans tant de jours ou de mois. Je vais faire une enquête à la fin.
Je vais demander des renseignements. Si ce n'est pas rectifié, je vais
publier cette liste. (21 h 15)
M. Couture: Je pense que la menace existe, c'est une
épée de Damoclès sur certaines entreprises et il y a des
entrepreneurs qui ont tendance à me croire sur parole, parce qu'ils ont
constaté dans le passé que j'étais plutôt un homme
de parole.
M. Ciaccia: Mais vous n'avez pas fixé de délai et
dit: Ecoutez, si...
M. Couture: Non, ce n'est pas nécessaire. On leur donne la
possibilité de se corriger avec une intervention qu'on met en place.
M. Ciaccia: M. le Président, je n'ai plus d'autres
questions à poser au ministre. J'espère qu'il va prendre en
considération et qu'il va prendre au sérieux les remarques que
nous avons faites. J'avais dit au début de mon intervention qu'il
faisait de bonnes "public relations", c'est un bon publiciste pour le
ministère, mais vous allez être d'accord avec moi que les groupes
d'immigrants, les groupes ethniques et les minorités ont besoin de plus
qu'un publiciste au Québec. Ils ont besoin d'actions concrètes et
j'espère que le gouvernement va appuyer cela et que vous allez pouvoir
convaincre votre gouvernement d'agir dans tous les différents
ministères, Fonction publique, concernant toutes les différentes
mesures que vous proposez, parce que je crois que c'est très important
pour les immigrants et pour toute notre société.
Le Président (M. Boucher): Merci. M. le ministre.
M. Couture: M. le Président, un dernier mot. Je voudrais
remercier les membres de cette commission de leur participation active et
positive à ces travaux et je me réjouis de cet apport. Je pense
que, dans notre démocratie, il est essentiel, important d'écouter
les avis de toutes les tendances, de tous les groupements, de tous les partis
politiques, et ça nous aide, peut-être, d'une cer- taine
façon à améliorer nos programmes.
M. le Président, je suis heureux de terminer cette étude
des crédits en disant que c'est notre intention ferme de nous orienter
pour l'année prochaine et les années suivantes à donner
aux immigrants et aux milieux ethniques le maximum de services et la meilleure
des qualités dans ces services.
M. Ciaccia: Ne faites pas de propagande dans ces milieux, parce
qu'on va vous suivre, je vous l'assure. On va vous suivre de près.
M. Couture: Je sais que vous me suivez. Vous êtes toujours
derrière moi dans les réunions.
Le Président (M. Boucher): Alors...
M. Couture: On est invité par les mêmes groupes, que
voulez-vous?
Adoption du programme
Le Président (M. Boucher): Le programme 1,
éléments 1, 2, 3, du ministère de l'Immigration est-il
adopté?
Des Voix: Adopté.
Le Président (M. Boucher): Adopté. Les
crédits du ministère de l'Immigration sont donc adoptés.
Je prie le rapporteur d'en faire rapport au nom des membres de la
commission.
La commission ajourne ses travaux sine die.
Fin de la séance à 21 h 18