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Version préliminaire

43e législature, 1re session
(début : 29 novembre 2022)

Cette version du Journal des débats est une version préliminaire : elle peut donc contenir des erreurs. La version définitive du Journal, en texte continu avec table des matières, est publiée dans un délai moyen de 2 ans suivant la date de la séance.

Pour en savoir plus sur le Journal des débats et ses différentes versions

Le mercredi 29 janvier 2025 - Vol. 47 N° 99

Consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 88, Loi modifiant la Loi concernant le régime de négociation des conventions collectives et de règlement des différends dans le secteur municipal


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Journal des débats

11 h (version non révisée)

(Onze heures vingt-cinq minutes)

Le Président (M. Bachand) :À l'ordre, s'il vous plaît! Bonjour, tout le monde. Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission des institutions ouverte.

 La commission est réunie afin de poursuivre les consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 88, Loi modifiant la Loi concernant le régime de négociation des conventions collectives et des règlements des différends dans le secteur municipal.

Avant de débuter, M. le secrétaire, y a-t-il des remplacements?

Le Secrétaire : Oui, M. le Président. Mme Maccarone (Westmount—Saint-Louis) est remplacée par Mme Cadet (Bourassa-Sauvé) et Mme Massé (Sainte-Marie—Saint-Jacques) est remplacée par Mme Labrie (Sherbrooke).

Le Président (M. Bachand) :Merci beaucoup. Donc, ce matin, on débute avec la Fraternité des policiers et policières de Montréal. Merci beaucoup d'être en Commission des institutions. Alors, je vous laisse la parole pour 10 minutes. Après ça, on aura un échange avec les membres de la commission. Merci encore d'être ici ce matin.

M. Francoeur (Yves) : D'accord. Bonjour, M. le Président. M. le ministre, députés, Mesdames, Messieurs membres de la commission, merci de nous recevoir. Je vais présenter les gens qui m'accompagnent. Bien, je suis président de la Fraternité des policiers et policières de Montréal et j'ai à mon extrême droite M. Jean-François Potvin, notre vice-président aux relations de travail, à ma droite M. Éric Vermette, vice-président exécutif, et à ma gauche Maître Jean-François Raymond, chef du contentieux de la fraternité. Et je tiens à mentionner aussi... Arrive un moment dans nos carrières où il est important de préparer la relève. Donc, je tiens à mentionner Maître Guillaume Rioux, derrière moi, qui a travaillé très fort au dossier. Donc, on vous remercie de l'opportunité de nous faire entendre.

Je vais vous présenter brièvement la fraternité. La fraternité représente les 4 500 policiers et policières de Montréal. C'est le plus grand syndicat de policiers municipaux au Québec, le deuxième au Canada et le cinquième en Amérique du Nord. Je pense que, médiatiquement, vous êtes conscients des réalités particulières aux policiers, policières de Montréal. La fraternité de... offre aussi des services à 5 000 policiers, policières retraités ainsi que des veuves.

Notre position, c'est que nous accueillons de façon très favorable le projet de loi, et on remercie le gouvernement. On a passé beaucoup de temps en commission parlementaire ici sous l'ère libérale Couillard, Coiteux, Moreau. Et, malgré que... je vais y revenir plus tard, mais qu'on leur avait dit à plusieurs reprises que différentes lois passées à l'endroit des travailleurs et travailleuses n'étaient pas constitutionnelles, il a fallu que les cours le reconnaissent plusieurs années ensuite.

Bien que nous appuyions sans réserve le présent projet de loi, nous recommandons quelques ajustements pour le bonifier, et probablement qu'à la période des questions j'aurai l'occasion de donner... on a entendu...

M. Francoeur (Yves) : ...les questions, les préoccupations du ministre hier par rapport à la médiation-arbitrage, et je pourrais donner des exemples concrets.

En 2016, lors des débats qui ont conduit à l'adoption de cette loi, la fraternité avait exprimé son opposition à la loi no 24 et avait formulé plusieurs mises en garde concernant notamment le remplacement du mécanisme d'arbitrage de différends par le Conseil de règlement des différends. Pour faire une histoire courte, aussi, dans le passé, les associations syndicales et les associations patronales, on s'assoyait ensemble. Habituellement, c'était pour cinq ans, mais habituellement c'était plus aux trois ans parce qu'il y a des arbitres... On faisait... on établissait ensemble une liste d'arbitres de différends, et il y en avait toujours qui quittaient la liste en chemin. Donc, je dois avoir participé quatre, cinq ou six fois à l'élaboration de la liste avec nos vis-à-vis de l'UMQ, des grandes villes, Montréal, Québec.

Donc, la réforme qui avait été entamée par le gouvernement dans le projet... pas dans le projet, dans la loi 24, avait pour effet d'écarter toute participation réelle des syndicats, qu'il s'agisse de leurs associations, de leurs centrales ou au niveau local, dans le processus de nomination des arbitres du Conseil de règlement des différends. D'ailleurs, c'est ce qui a été déclaré inconstitutionnel par la Cour supérieure et la Cour d'appel.

C'est en raison de l'interdiction de recourir à la grève que l'instauration d'un mécanisme véritable, efficace et impartial de règlement des différends revêt une importance capitale pour préserver l'équilibre des rapports de force entre les employés et leurs employeurs. L'interdiction pour les policiers municipaux du Québec de recourir à la grève depuis 1944 a soulevé d'importantes préoccupations. Entre 80 et 95, pas moins de six groupes de travail ou commissions se sont penchés sur cette question, suivies par le comité Therrien-Morency, mis sur pied par le ministère du Travail et le ministère de la Sécurité publique, et sur lequel j'ai siégé. Composé de représentants syndicaux et patronaux des milieux policiers et pompiers, ce comité  s'est réuni à sept reprises entre mai 2012 et septembre 2013 dans le but de trouver ensemble des pistes de solutions. Et effectivement on en est arrivé à un consensus.

• (11 h 30) •

Donc, dans cette optique, nos recommandations toucheront deux aspects. Tout d'abord, la médiation obligatoire, distincte de l'arbitrage prévu au Code du travail. La fraternité est persuadée que le projet de loi no 88 serait bonifié par la restauration du caractère volontaire de la médiation. C'est prévu au Code du travail, c'est-à-dire au choix conjoint des parties, même si, a priori, je l'expliquerai plus tard, mais nous, on pense que ça aura pour effet de rallonger indûment les délais avant une conclusion en arbitrage ou en négociation.

En effet, il semble peu approprié d'imposer une médiation obligatoire dans les 240 jours suivant le début de la phase de négociation entre les parties, à laquelle s'ajoutent jusqu'à 60 jours supplémentaires pour la phase de conciliation, comme le prévoit la version actuelle. Cette étape de négociation pouvant s'étendre jusqu'à plus de 300 jours, presque une année, semble peu justifiée dans le contexte policier, pompier. En effet, en cas d'impasse, le différend sera de toute façon réglé par le recours à l'arbitrage, un mécanisme déjà prévu pour assurer une résolution équitable des conflits. Comme il a été démontré dans les travaux de la commission Beaudry et du comité Boivin, l'exercice de la médiation obligatoire a déjà été tenté, mais son succès, à tout le moins mitigé, avait amené le législateur à retirer son caractère obligatoire avant l'adoption du projet de loi no 110. De plus, à la suite de cette médiation obligatoire, les questions demeurées en litige devront être soumises à un autre intervenant, soit un arbitre de différend. Cela alourdit le processus sans apporter de bénéfices concrets, tout en... pardon, en entraînant une augmentation significative des coûts.

Compte tenu de la culture de consensualisme qui prédomine depuis des décennies dans le processus de négociation, la fraternité recommande de rétablir le caractère volontaire de cette médiation, en conformité avec les conclusions issues du comité Boivin.

Et maintenant j'arrive à la médiation-arbitrage. L'autre volet de nos recommandations touche la...


 
 

11 h 30 (version non révisée)

M. Francoeur (Yves) : ...arbitrage. La fraternité estime encore une fois qu'il est essentiel de s'attarder aux conclusions du Comité Thérien-Morency. Les parties représentées au comité ont convenu de rendre obligatoire la médiation-arbitrage, qui était auparavant facultative avant l'adoption du projet de loi n° 110. Ce processus est moins formel, moins judiciarisé et moins coûteux qu'un arbitrage conventionnel de différend. Dans le cadre d'une médiation-arbitrage, l'arbitre pourrait finalement revêtir son rôle d'arbitre pour trancher une question sur laquelle il n'aurait pas réussi à amener les parties à un accord. Il pourrait alors rendre sa décision à partir des éléments factuels et des représentations qui lui auraient été présentées lors de la phase de médiation, sous réserve de toute preuve qu'une partie pourrait souhaiter soumettre dans le cadre d'une audition formelle.

Rappelons une fois de plus que l'arbitrage de différends est le processus des... est le procès... est le prolongement des négociations, et je peux vous dire, malgré... c'est ça, j'ai... J'ai quatre négociations de conventions collectives et trois de régimes de retraite pour les policiers et policières de Montréal, et, lorsqu'on arrive en arbitrage de différend, c'est un constat d'échec pour les parties. Il n'y a pas personne qui désire aller en arbitrage et faire trancher ses conditions de travail par une tierce partie.

Cette proposition, je le répète, a été retenue unanimement autant par les représentants du ministère du Travail, du ministère de la Sécurité publique, les principales villes, l'Union des municipalités du Québec et les principaux syndicats. Proposer la médiation-arbitrage n'est rien d'inédit, elle était déjà possible avant l'adoption du projet de loi n° 110 en 2016. En effet, elle avait été introduite dans le Code du travail en 1996. Je reviendrai aussi plus tard. Nous, on l'a vécu alors que ce n'était pas obligatoire en 2011-2012. La proposition de la fraternité d'introduire l'imposition d'une médiation-arbitrage obligatoire dans le projet de loi n° 88 s'inscrit parfaitement dans l'esprit de restauration et de remédiation voulu par ce projet de loi.

En conclusion, l'historique du régime de travail applicable aux policiers municipaux a fait l'objet au fil du temps d'une abondante législation et d'une tout aussi abondante analyse. L'encadrement juridique qui prévalait avant l'adoption de la loi n° 24 est le fruit d'une longue et patiente évolution, et la remise en question d'un tel encadrement s'est arrivée... s'est avérée périlleuse. Forte de ces conclusions, la fraternité estime que l'exercice en cours constitue une réponse appropriée à cette problématique. Nous invitons par ailleurs vous-mêmes, les élus, à saisir l'opportunité offerte par ce projet de loi afin de le parfaire dans le sens des consensus historiques. La fraternité est persuadée que les travaux et les recommandations du comité Thérien-Morency permettraient à la satisfaction de tous d'améliorer le processus de négociation dans le secteur municipal.

Enfin, au-delà de sa propre position, la fraternité tient à réaffirmer également son soutien à la Fédération des policiers municipaux du Québec, dont la perspective mérite également d'être explorée. Plus particulièrement, la fraternité partage l'avis de la fédération selon laquelle les plus petites associations policières ne seront pas en mesure d'assumer les coûts liés à l'arbitrage des différends. Elles se retrouveraient ainsi privées de ce mécanisme, qui constitue pourtant un prolongement essentiel des négociations en l'absence de droit de grève. Rappelons qu'un tel mécanisme est un droit fondamental, d'ailleurs, qui a été réitéré à trois reprises par la Cour suprême autour de janvier 2015. M. le Président, merci.

Le Président (M. Bachand) :Merci beaucoup, M. Francoeur. M. le ministre, s'il vous plaît.

M. Boulet : Oui. Merci, M. le Président. D'abord, merci, M. Francoeur, à votre équipe pour la préparation du mémoire, la qualité de sa présentation.

Juste pour essayer de simplifier, ce qu'on a dans le projet de loi n° 88, on a une médiation obligatoire, puis à défaut d'entente il y a un arbitre de différends. Ça, c'est la procédure classique qui est reconnue dans le Code du travail. On convient que, comme il n'y a pas de grève pour les policiers et pompiers, les pompières et pompiers, il y a une forme de compensation légale, c'est-à-dire, ça prend un mécanisme qui soit juste, indépendant...

M. Boulet : ...puis efficace, on s'entend là-dessus. Est-ce que je comprends... Parce que je n'ai pas eu le temps, on a reçu un peu tardivement la mémoire, mais vous, vous dites : À la place de la médiation obligatoire, il y a une médiation volontaire puis à la place de l'arbitre de différends, il y a ce que vous appelez une médiation arbitrale. O.K. Avant l'adoption, en 2016, de la Loi sur le régime de négos dans le secteur municipal, il y avait de la médiation volontaire. Puis, moi, ce que j'ai toujours constaté, c'est que c'était peu utilisé, avec des résultats plus ou moins tangibles. Avez-vous le même constat que moi?

M. Francoeur (Yves) : Non, pas du tout. La Fédération des policiers municipaux me disait hier que partout où ils ont entamé un processus de médiation arbitrage, avec l'arbitre de différends, qui devait suivre en termes de procédure, il n'y a jamais eu d'arbitrage de différends. Je ne peux pas vous dire le nombre par contre. Mais, nous, à Montréal, on a vécu en 2011-2012, vous avez peut-être connu l'arbitre - excusez, je m'adresse au président - M. le ministre a peut-être connu l'arbitre M. Serge Brault, Me Serge Brault. Bon. Nous, on l'a vécu en 2011-2012, alors qu'on était dans une impasse avec la ville de Montréal pour la convention collective 2011-2014. On a demandé l'arbitrage... les parties ont choisi Me Serge Brault, et on a débuté un processus de médiation qui a fait en sorte qu'on est arrivé à un règlement avant qu'il y ait l'arbitrage de différends.

M. Boulet : Donc, est-ce que vous avez fait la médiation avec Me Brault?

M. Francoeur (Yves) : Oui.

M. Boulet : Donc, ce n'était pas...

M. Francoeur (Yves) : Ce n'était pas obligatoire.

M. Boulet : ...c'était de la médiation arbitrale.

M. Francoeur (Yves) : Oui, c'était de la médiation...

M. Boulet : En fait, vous disiez : À défaut de succès de la médiation, il enlève son chapeau de médiateur puis il met son chapeau d'arbitre. 

• (11 h 40) •

M. Francoeur (Yves) : Tout à fait. Puis, à l'inverse, on a vécu, en 2008-2009, un arbitrage de différends formels avec l'arbitre, maître Jean Barrette, qui est maintenant retiré. Et, en 2008-2009, on a eu 41 jours d'auditions. Pour la connaissance de tout le monde, une journée d'auditions en arbitrage, ça nécessite d'une à deux journées de préparation. Les avocats... Autant, nous, on pourrait dire : Nous, on a des avocats à temps plein dans nos bureaux, mais, habituellement, pour les municipalités, c'est des avocats de bureau à l'externe. Et ces gens-là n'ont pas cinq jours de disponibles dans la même semaine. Donc, nous, l'arbitrage a duré 41 jours, sur une période de presque deux ans, avec un délibéré de six mois. L'arbitre, l'arbitre Barrette a rendu sa décision en juin 2010, et elle était échue au 31 décembre 2010. C'est pour ça que, nous, on a très peur du deux mois supplémentaires prévus au Code du travail.

Nous, on dit... On sait qu'on va finir, bien, on va finir en finalité, effectivement, on va finir devant l'arbitre. Donc, pourquoi ne pas commencer la médiation avec lui? Il y aura des gains. C'est certain que, plutôt que d'arriver avec toutes nos demandes devant un arbitre et faire 41 journées d'auditions... Je ne ferai pas pleurer personne. La Fraternité des policiers et policières de Montréal n'est pas dans la même situation que les petites associations municipales, mais nous, ça nous a coûté 1,5 million, ce processus-là.

M. Boulet : Est-ce que l'arbitre Jean Barrette avait un chapeau de médiateur avant de devenir arbitre?

M. Francoeur (Yves) : Non. Je crois...

M. Boulet : O.K. Donc, il ne faisait pas... 

M. Francoeur (Yves) : ...qu'il n'avait pas la formation. À ma connaissance, Me Serge Brault était un précurseur dans le domaine à ce moment-là.

M. Boulet : Oui, oui, oui, peut-être là, mais ce n'était pas le cas de Jean Barrette.

M. Francoeur (Yves) : Non.

M. Boulet : Évidemment, c'était à une époque aussi, puis sans entrer dans toutes les nuances, où on n'était pas à l'ère où on appliquait concrètement les enseignements de la Cour suprême du Canada dans la ville de Saskatchewan. Et ici, dans notre cas, vous le savez, l'absence ou l'interdiction du droit de grève constitue une entrave substantielle à l'exercice du droit d'association. C'est pour ça qu'il faut extrêmement être précautionneux dans le mécanisme qui nous permet d'aboutir à une convention collective de travail. Le processus d'arbitrage de différends que nous avons dans le code, il passe le test. La Cour suprême puis certains tribunaux ont reconnu que ça prenait certaines étapes obligatoires, que ce ne soit que volontaire puis qu'il n'y ait...

M. Boulet : ...qu'un processus de médiation arbitrable, peut-être que, dans certain cas, ça serait mieux, peut-être que, dans d'autres cas, ça serait pire aussi, M. Francoeur. Ça fait que c'est sûr que la procédure habituelle, c'est le Code du travail qui est le... la loi qui contient les règles générales, parce qu'il y a des régimes particuliers, dont un dans le secteur municipal. Et donc on permet que ces règles générales là puissent bénéficier aux policiers, pompiers, d'où la nécessité d'avoir une médiation obligatoire, à défaut de quoi, on va devant un arbitre. Ça revient... Le résultat est la même, sauf que le médiateur... C'est sûr que tout ce qui n'est pas volontaire risque de moins bien aller et dire que c'est volontaire, purement et simplement, souvent, ça donne un résultat qui peut être pervers, parce qu'une partie peut participer sans vouloir ou peut dire simplement : Il n'y en aura pas, de médiation, on va aller devant un décideur, ce qui, à mon avis, accroît le risque constitutionnel.

Mais je comprends ce que vous dites, vous dites, l'arbitre... Dans le fond, vous aimez mieux une personne qui fait toute la job, qui fait la job de médiation puis la job d'arbitre, plutôt que... Alors que moi, j'ai souvent vu des professeurs puis des spécialistes en négociation puis en arbitrage qui écrivaient beaucoup sur les enjeux éthiques d'être à la fois médiateur et arbitre. Et beaucoup refusent d'être à la fois médiateurs et arbitres au Comité consultatif du travail de la main-d'œuvre. Il y en a qui décide de ne pas être médiateur ou de faire la médiation, puis après ça tu te mets de côté, tu sais, il y en a qui veulent tout faire puis ils disent : Moi, je vais tout prendre. Mais je comprends très bien votre point, M. Francoeur, mais je me demandais juste... À l'époque où c'était volontaire, j'avais l'impression que c'était moins utilisé. Vous me dites : Ça l'était et, quand c'était utilisé, ça donnait des bons résultats.

Une voix : Ça aboutit.

M. Boulet : Ça fait que je ne vois pas d'empêchement à ce que ça devienne obligatoire plutôt que volontaire.

M. Francoeur (Yves) : Et la bémol que j'apporterais, c'est que le milieu policier et pompier est très particulier, on n'a pas le droit de grève. Nous...

M. Boulet : Bien oui.

M. Francoeur (Yves) : Puis on ne le veut pas, en passant, on ne veut pas le droit de grève, puis on comprend que ce serait tout à fait insensé. Sauf que nous, on fait des relations de travail à la journée longue, à l'année longue. Nos membres dehors, quand on est dans un processus de litiges avec nos vis-à-vis, en bon Québécois, trouvent le temps long. On fait des moyens de pression. La Fraternité des policiers et policières de Montréal s'est toujours assurée de faire des moyens de pression qui n'avaient aucune répercussion sur la sécurité des 2 200 000 citoyens et citoyennes de Montréal.

M. Boulet : ...ce que vous dites, oui.

M. Francoeur (Yves) : Ça, ça a toujours été prioritaire. Mais nous, le temps qu'on est en procédure, nos membres... Le temps qu'on est en procédure, nos membres se tournent les pouces dehors, puis on a l'impression qu'ils ne participent pas au processus. Donc, malgré le fait que... en tout cas, pour... je parle pour chez nous, quand on fait des moyens de pression, c'est encadré, c'est validé juridiquement par nos avocats, et, malgré ça, je ne vous cacherai pas qu'on intervient pour des initiatives personnelles, que les gens sont impatients quand t'es rendu à un an, deux ans puis trois ans, l'échéance de ta convention, puis tu n'en as pas une nouvelle. Donc, c'est pour ça que nous, on dit qu'on a... on a avantage à ce que le processus soit le moins long possible pour éviter ces initiatives-là.

M. Boulet : Totalement. Puis moi, j'endosse les motifs de la décision de la Cour dans votre dossier. Tu sais, en plus, il y avait un conseil de règlement des différends qui était composé de trois personnes.

M. Francoeur (Yves) : De trois personnes nommées par le gouvernement.

M. Boulet : Alors là, on va avoir un arbitre unique, à moins qu'il y ait une volonté d'avoir un assesseur, mais un arbitre unique choisi par les parties.

M. Francoeur (Yves) : C'est ça.

M. Boulet : Puis la liste des arbitres va être confectionnée avec votre collaboration. Ça fait que...

M. Francoeur (Yves) : Non, puis...

M. Boulet : J'apprécie beaucoup que vous souteniez le projet de loi. Je comprends, ce mécanisme-là, on peut diverger d'opinion là-dessus. Mais il y avait un autre point, Yves, que j'aurais aimé vous entendre, les frais liés au conseil de règlement des différends. Avez-vous un commentaire là-dessus? Il y en a qui nous disaient que ça pouvait être lourd. Évidemment, dans votre cas, ce n'est peut-être pas la même dynamique, là, mais, les frais liés à la mise en place d'un conseil de règlement des différends puis les honoraires, avez-vous des commentaires?

M. Francoeur (Yves) : Bien, comme je vous dis, ce n'est pas un enjeu pour nous. Nous, on a un contentieux de quatre avocats à temps...

M. Francoeur (Yves) : …dans nos bureaux spécialisés dans le milieu policier en relations de travail. Mais c'est certain que pour, tu sais, la Fédération des policiers municipaux, on… je vous dirais, vite de même, une dizaine d'associations entre 18 policiers et 60, et se répartir la facture de l'arbitre, de l'assesseur et de l'avocat, pour 18 à 60 personnes, effectivement, ça devient…

M. Boulet : …un peu plus lourd.

M. Francoeur (Yves) : Ça devient… bien, il y en a des plus grosses, là. Longueuil est à 600 policiers, Laval est à 600 policiers, Québec est à 800 policiers. Pour ces associations-là, c'est sûr que c'est moins un problème, là. Puis d'ailleurs, juridiquement, M. le Président, pour M. le ministre, c'est ce que mon procureur me disait : S'il y a une chose que la Cour d'appel a laissée, qui pourrait être attaquable, puis qu'il ne le sera pas par la Fraternité des policiers de Montréal, c'est cet aspect-là.

M. Boulet : Mais la cour a reconnu que c'était sain… qu'effectivement, n'a pas… n'est pas revenu là-dessus. O.K. C'est bien. Alors, moi, je vais compléter en… simplement vous remercier beaucoup de vous être déplacés, de vous être engagés, d'avoir collaboré avec nous. Si jamais il y a des points qu'on veut vérifier plus avant avec vous, nous le ferons. Merci beaucoup puis continuez votre beau travail. Puis effectivement, la clé c'est de régler avec diligence le plus rapidement possible.

M. Francoeur (Yves) : Exactement. C'est ça.

M. Boulet : On est tous… Guillaume, on est tous d'accord avec ça.

M. Francoeur (Yves) : Est-ce que, M. le Président, je peux rajouter un commentaire ou…

M. Boulet : C'est parce qu'Alexandre n'est pas là.

• (11 h 50) •

M. Francoeur (Yves) : O.K. pour le bénéfice de tout le monde, là, je pense que c'est important de savoir, là, je vais vous parler deux minutes de la liste des arbitres que l'on établissait ensemble au ministère du Travail. Puis c'en était drôle, là, mais on était des unions syndicales et les parties patronales, la ville de Québec, la ville de Montréal, l'UMQ, et, vous le savez…

M. Boulet : La FQM aussi.

M. Francoeur (Yves) : C'est ça. Et, vous le savez, il y a des avocats qui sont retenus… qui sont reconnus être patronal, puis des avocats qui sont reconnus être syndical.

M. Boulet : Ah! c'est nouveau, ça.

M. Francoeur (Yves) : C'est nouveau, ça. Et donc, et donc on s'assoyait avec les représentants du ministère du Travail, Mme la ministre Therrien, dans le temps, et là, il fallait établir une liste de 10 ou 15.

M. Boulet : Ça fait que c'était de la négo, hein?

M. Francoeur (Yves) : Bien oui, là, on arrivait à six ou sept, puis là je ne donnerai pas de noms, mais là vous allez avoir un M. Bernier, de l'UMQ, dire : Claude, sibolac, vous ne voulez pas lui parce que c'est un… il vient du milieu syndical, puis nous autres, on ne veut pas elle parce qu'elle vient du milieu patronal. Bon, bien là, on est juste à huit, ça en prend entre et 10 et 15. Ça fait que, là, nous autres, on va te concéder elle, mais tu vas nous donner lui, c'est comme ça que ça fonctionnait.

M. Boulet : Je comprends, je comprends très bien. Et ça, là, c'est la nature humaine. C'est issu du parcours personnel, professionnel, académique de chaque arbitre. C'est certain qu'il y en a qui ont des inclinaisons, mais j'en ai vu, M. Francoeur, qui ont travaillé pendant 20 ans dans le monde syndical, puis qui sont devenus des arbitres perçus comme étant propatronal. J'ai vu l'inverse, mais ça évolue. C'est quand même un processus qui garantit une forme d'objectivité puis d'impartialité. Ils ont quand même un code d'éthique. Ils sont quand même soumis à des requêtes en révision judiciaire. Donc, vous avez quand même une garantie qui est respectueuse des enseignements de la Cour suprême, là... Il y a tellement de barrières de protection que l'arbitre, qui est toujours d'un côté, à un moment donné, il se fait ramasser.

M. Francoeur (Yves) : Je suis tellement d'accord avec vous que je vais me permettre de nommer l'arbitre Bergeron, qui est dans nos… dans notre convention, nous, depuis 30 puis 35 ans, qui est en…

M. Boulet : André Bergeron,

M. Francoeur (Yves) : André Bergeron, que j'ai toujours adoré… lui, si tu lui amenais quelque chose qui n'avait pas d'allure, il rendait une décision comme quoi ça n'avait pas d'allure. Puis si tu lui amenais quelque chose qui avait du bon sens, il rendait une décision dans le bon sens. Puis c'est comme ça que ça devrait être tout le temps.

M. Boulet : Pour avoir pratiqué… pour avoir pratiqué en droit du travail, je ne vous contredirais pas, je le connais bien.

M. Francoeur (Yves) : C'est ça.

Le Président (M. Bachand) : Merci beaucoup.

M. Boulet : Merci…

Le Président (M. Bachand) : Merci. Mme la députée de Bourassa-Sauvé, s'il vous plaît.

Mme Cadet : Merci, M. le Président. Bonjour, M. Francoeur, bonjour à vous, messieurs. Merci d'être avec nous aujourd'hui. Je vais peut-être prendre la balle au bond, là, sur… en fait, votre anecdote, donc, de fin d'intervention sur la constitution des listes. En prenant en considération le commentaire du ministre donc sur peut-être la frilosité de certains… bon, de certains avocats formés pour être à la fois, donc, arbitre et médiateur, qui se disent : Ah! bien, peut-être que nous, ça va… on n'a pas nécessairement envie de jouer les deux rôles…

Mme Cadet : ...les deux rôles à la fois. Dans votre recommandation sur la médiation-arbitrage, est-ce que c'est un... est-ce que c'est un risque que vous avez pris en considération? Est-ce que vous dites... Est-ce que vous pensez qu'on va être... que vous seriez en mesure, avec cette proposition-ci, de combler, donc, les listes, donc, de 12 avocats... de 12 arbitres-médiateurs, là?

M. Francoeur (Yves) : Bien, moi, je pense que la Conférence des arbitres, depuis plusieurs années, fait des formations en médiation, donc je serais porté à penser qu'il y a beaucoup d'arbitres qui sont formés, mais, là-dessus, je vais laisser...

Mme Cadet : ...aussi qu'ils veulent jouer les deux... porter les deux chapeaux à la fois.

M. Francoeur (Yves) : Qui veulent jouer, qui veulent jouer. Mais je vais laisser Me Raymond.

M. Raymond (Jean-François) : Oui, si vous me permettez. Pour nous, on ne pense vraiment pas que c'est un enjeu. D'ailleurs, au niveau de la fraternité, on fait ce processus-là de médiation-arbitrage à même les griefs actuellement. Donc, on va sélectionner des... L'objectif de tout ça, là, c'est l'efficacité. On pense vraiment que c'est une matière de gestion de preuve qui est plus simple. De façon informelle, on peut faire de la preuve. Même s'il n'y a pas d'entente, la réduction des délais, des journées d'audiences, ça doit être une priorité. C'est un problème actuellement partout au Québec, dans toutes les instances. Nous, on pense qu'actuellement, dans l'arbitrage de différends, on a une proposition d'une solution de réduction des délais.

Mais un exemple, à la fraternité, des cas de harcèlement psychologique au travail, qu'on voit qui prennent énormément de ressources, de temps et de journées d'audiences parce qu'il y a beaucoup de preuves à faire, on va les débuter en matière... en médiation-arbitrage. Même s'il n'y a pas de règlement final, on pense que la matière informelle où les gens sont capables de se parler, de s'expliquer, de s'échanger de la preuve réduit considérablement. Ça fait que nous, on est même capables d'en trouver pour nos griefs. Alors, je ne pense pas qu'en 2025... compte tenu des formations de l'IMAQ, l'institut médiation et arbitrage, compte tenu de la Conférence des arbitres et de cette tendance à la médiation-arbitrage, je ne pense pas que c'est une problématique pour la confection d'une liste qu'on confectionnerait une fois que la loi serait donc mise, et donc on saurait que ces arbitres-là, ils doivent avoir une tendance à la médiation-arbitrage, au niveau de la confection.

Mme Cadet : Merci. Toujours, peut-être, Me Raymond, sur la question du risque constitutionnel, parce que, c'est vrai, vous avez nommé tantôt, M. Francoeur, donc, votre expérience avec Me Brault en 2011-2012. Donc, c'était donc, bon, avant l'arrêt Saskatchewan, donc, de la Cour suprême. Donc, le ministre posait un peu la question tantôt, je ne vous ai pas entendu sur votre appréciation du risque constitutionnel de l'obligation de médiation arbitrale.

M. Raymond (Jean-François) : Évidemment, on s'est battu, hein, pour contester constitutionnellement la loi 24. Alors, vous comprendrez qu'on pense qu'on fait une proposition qui est constitutionnelle, parce que la distinction en matière d'arbitrage, c'est que la légitimité du processus, elle vient du choix des parties. Donc, une fois que l'arbitre, qu'il ait son chapeau de médiateur ou son chapeau d'arbitre pour trancher la question, son indépendance, elle n'est pas garantie institutionnellement par les juges, mais par le consensualisme et le choix qu'on a, tant sur la liste, que la personne qu'on a dessus. Alors, c'est ça que la Cour d'appel rappelle en disant : L'institutionnalisation du processus, faites attention, ça fait des années et des décennies même que le processus, il fonctionne, parce que les parties patronales et syndicales s'entendent. Et, dans ce cas-ci, on s'entendrait sur le choix de l'arbitre. Je ne... Et, un, la fraternité ne considère pas qu'il y a un enjeu constitutionnel à enlever les processus de médiation. Et pourquoi on enlève le processus de médiation? Objectif de célérité et d'efficacité. Pourquoi? Parce que, dans le comité Boivin, on disait : Dans la mesure où les parties n'y vont pas volontairement, ce processus-là n'est pas efficace.

Donc, la position, c'est : Sélectionnons uniquement les éléments qui sont efficaces. Donc, si le volontariat le rend efficace, prenons-le, tout le monde veut s'entendre. Mais si ce n'est pas efficace, allons directement à l'arbitrage de griefs qui, a, lui aussi, par nature, une tendance à réduire les délais, même si on ne s'entend pas. C'est ça, la position, l'efficacité.

Mme Cadet : Vous avez parlé de consensualisme, M. Francoeur aussi y a fait allusion dans son exposé, de culture de consensualisme dans le milieu. Alors, justement, donc, je repose un peu la question, à savoir, donc : Pourquoi, pour vous, d'y aller avec la médiation arbitrage obligatoire, donc, serait une avenue plus intéressante que ce qui se retrouvait avant au Code du travail, donc, soit le choix entre l'arbitrage ou la médiation arbitrage selon ce que souhaitent les parties?

M. Raymond (Jean-François) : Oui. Donc, le consensualisme, on en dit, on en fait une clé. Le comité Thérien-Morency était, de façon consensuelle, d'accord avec cette médiation arbitrage obligatoire et tous les intervenants. Moi, j'étais là hier, tous les intervenants qui sont venus en commission parlementaire sont d'accord également. Alors, c'est un bel exemple de consensualisme. Il y a actuellement consensus entre les divers intervenants sur... ce mécanisme-là, il est plus intéressant. Et si on continue à faire les choses comme elles sont... Et le projet de loi, c'est bien, c'est vraiment une tentative d'amélioration. Mais si on fait les choses comme on fait actuellement... actuel.

M. Raymond (Jean-François) : ...il ne faut pas s'étonner qu'il n'y ait pas d'amélioration dans les délais. Alors, il faut à un moment donné pousser avec des méthodes alternatives, peut-être plus modernes, plus efficaces, pour tenter d'avoir des conventions collectives de façon plus rapide, tout le temps dans, évidemment, les garanties constitutionnelles qui sont dues au... en vertu de 2 d. Mais il faut essayer d'améliorer le processus, et je pense que c'est une belle tentative d'aller vers quelque chose de nouveau, que le milieu s'entend de façon consensuelle et qui va améliorer l'efficacité du processus.

Mme Cadet : Vous avez mentionné la célérité. M. Francoeur, tantôt vous disiez que vous êtes passé dans votre carrière à travers quatre cycles de négociation de conventions collectives. Donc, à ce moment-là, donc, c'était quoi, donc, le temps moyen de règlement de ces négociations-là?

M. Francoeur (Yves) : Bien, ça dépend toujours de la volonté des parties. Nous, quand on a fait appel à Serge Brault en 2011 ou 2012, la convention collective était échue depuis le 1er janvier 2011, puis on était dans un cul-de-sac. Et on a choisi Maître Brault. Et je peux vous dire que moi et mon vis-à-vis patronal de l'époque, on avait des discussions de corridor avec Maître Brault sur un sujet en particulier, puis Maître Brault pouvait nous dire : Moi, si j'étais vous, là, je me parlerais... Vous seriez mieux de vous entendre parce que vous ne seriez peut-être pas satisfaits de ma décision. Ça fait que nous, on est arrivés à un règlement là-dedans avant d'aller en arbitrage. Mais, si on avait procédé en arbitrage, moi, je suis convaincu qu'on n'aurait pas vécu 41 journées d'auditions comme on a vécu avec l'arbitre Barrette. Il y aurait eu du débroussaillage qui aurait été fait compte tenu du fait que c'est la même personne. Puis, habituellement, les parties, si on s'entend sur quelque chose en dehors, on ne le ramènera pas devant l'arbitre, là, surtout s'il a fait des commentaires.

Mme Cadet : O.K. C'est un... C'est un peu ma prochaine question. Donc, vous dites, donc... Parce que là, c'est ça, vous aviez nommé qu'avec Maître Barrette avant ça, en 2008, 2009, donc, vous aviez eu six mois de délibérations, 41 jours d'auditions. Donc, vous n'êtes pas du tout passés à travers ce processus qu'essentiellement vous avez réglé en phase de médiation avec Maître Brault, hein?

M. Francoeur (Yves) : Bien, c'est ça. Puis, quand l'arbitre Barrette a été nommé, là, je ne me souviens plus, mais je suis certain qu'on avait eu un an de négociation en arrière de la cravate, là, certain, là.

• (12 heures) •

Mme Cadet : Puis est-ce que, si vous aviez eu de la médiation? Parce qu'elle était facultative à ce moment-là. Donc, est-ce qu'il y avait eu un processus de médiation, une période de médiation de 60 jours?

M. Francoeur (Yves) : Non.

Mme Cadet : Non. Vous êtes allés directement en médiation, arbitrage. Donc, c'était le choix des parties?

M. Francoeur (Yves) : Non. On est allés directement en arbitrage.

Mme Cadet : O.K. Et puis vous disiez tantôt, je pense, je vous ai entendu, on parlait, donc, de célérité. Me Raymond, vous avez aussi dit, et vous l'avez réitéré dans votre exposé, M. Francoeur, vous disiez donc que c'était moins coûteux. Donc, pourquoi, selon vous, donc, le processus de médiation arbitrage serait moins coûteux que l'arbitrage, là... en fait, que ce qui est présenté dans le projet de loi, médiation obligatoire plus arbitrage?

M. Francoeur (Yves) : Bien, c'est parce que, si t'arrives... si tu ne t'entends pas en médiation puis tu arrives en arbitrage, là tu vas être obligé de faire une preuve plus étayée, une preuve par expert, que ce soit... en tout cas pour le milieu policier, que soit une preuve, je ne le sais pas, moi, un emploi de la force, si c'est des questions de CSST, une par des experts en santé et sécurité parce qu'on ne s'entend pas, une preuve économique par économistes et actuaires. Donc, quand tu judiciarises, tu complexifies et naturellement tu augmentes la facture.

Mme Cadet : Donc, pour vous, donc, c'est vraiment cette question-là, donc, de complexification du dossier puis d'avoir un nouvel... une nouvelle personne, un nouvel...

M. Francoeur (Yves) : Oui. Puis je reviens sur la célérité. Tu sais, nos gens sont de... sont de moins en moins patients. Donc, être pendant un an, 18 mois, deux ans en moyen de pression puis insatisfait parce que ça fait un an, 18 mois ou deux ans que tu n'as pas eu d'augmentation de salaire, ce n'est pas bénéfique ni pour les associations syndicales ni pour les employeurs.

Mme Cadet : O.K. Puis qu'est-ce que vous répondez à des associations ou à des groupements qui, eux, donc, pourrait, donc, se dire : Bien, nous, donc, la médiation arbitrage, on n'est pas certains que ça nous convient parce que, donc, l'interprétation que font les arbitres de notre situation n'est pas nécessairement toujours à notre avantage. Donc, comment est-ce que vous voyez cet argumentaire-là? Qu'est-ce que vous répondez?

M. Francoeur (Yves) : Bien, justement, encore plus. Si ce n'est pas... Excusez, j'ai perdu... Pouvez-vous répéter votre question, s'il vous plaît?

Mme Cadet : Oui. Bien, c'est ça, bon. Certains, pas ceux qui sont venus en commission parlementaire, mais donc il peut être entendu, donc, que certains groupes se disent que l'interprétation que font les arbitres n'est pas nécessairement, donc, toujours à leur avantage. Donc, pour eux, donc, la médiation arbitrage obligatoire, ce n'est pas nécessairement, donc, une avenue qu'ils privilégient. Donc, qu'est-ce que vous leur répondez par rapport à cet argumentaire-là?

M. Francoeur (Yves) : Bien, c'est justement dans la phase de médiation avant l'arbitrage, c'est là qu'informellement on n'est pas... Nous autres, ça... Nous autres, ça se passait dans notre bâtisse, la ville avait ses locaux, les nôtres, puis l'arbitre se promenait d'un...


 
 

12 h (version non révisée)

M. Francoeur (Yves) : ...à l'autre. Ça fait qu'on est capable de lui expliquer sans formaliser par experts, et tout ça, donc, puis je dis n'importe quoi, il y a 41 article dans notre convention collective, mais, si on allait devant l'arbitre avec 25 demandes sur 25 articles différents, c'est certain que, dans la période de médiation, avant l'arbitrage, c'est certain qu'on va en arriver là, puis, je ne sais pas, mais on va en avoir réglé six, huit, 10 ou 20, pour, le principe de l'entonnoir, rétrécir, ce qui va faire en sorte d'avoir moins de journées d'auditions, de raccourcir le processus et d'avoir une... plus rapidement.

Mme Cadet : Puis il n'y aurait pas plus de risques d'arbitrage...

Le Président (M. Bachand) :Merci...

Mme Cadet : O.K. Merci beaucoup.

Le Président (M. Bachand) :...députée de Sherbrooke, s'il vous plaît.

Mme Labrie : Merci, M. le Président. Ça m'a fait sourire, votre description du processus pour constituer la liste, parce que ça ressemble aux négociations... pour faire la liste d'invités en commission parlementaire. C'est vrai. Ça m'amène à vous poser une question sur... une fois que cette liste-là est faite, et donc qu'il y a dessus des noms qui plaisent plus à certaines parties que d'autres. Comment vous faites quand c'est le temps d'avoir recours à un arbitre ou un médiateur pour choisir dans quel ordre vous procédez? C'est en ordre, c'est au hasard sur la liste? Comment ça fonctionne?

M. Francoeur (Yves) : C'est... bien, les parties s'entendent. Je ne vous cache pas, le premier exercice, c'est de voir de la disponibilité. Parce que, si on regarde un arbitre qui est trop en demande puis qui n'a pas de... ou il n'a pas de disponibilité avant un an, ou il y a une journée par mois pendant un an, on ne s'embarquera pas, mais on discute avec nos vis-à-vis patronaux et on... ensemble on peut faire un choix de deux, trois, quatre et regarder, avoir des discussions plus poussées. Et, en bout de ligne, si on ne s'entend pas, c'est le ministre du Travail qui, auparavant, allait décider... Là, c'est-tu encore le Travail ou les Affaires municipales? C'est encore le Travail. C'est ça, le ministre du Travail va en nom. Vous en avez un, là, mais, je vais dire, ce qui est particulier aussi, peut-être en milieu policier, puis on n'est pas plus fins, on n'est pas plus bons que les autres, mais moi, je représente 4500 policiers. Je suis président depuis presque 20 ans, 20 ans au mois de novembre prochain. Et nous, à Montréal, on a entre 20 et 30 griefs par année pour 4 500 policiers. Et la plupart de nos griefs sont des questions de quantum, là, c'est-à-dire l'infraction vaudrait une journée de suspension ou un avertissement plutôt que trois ou cinq. Les... chez... en tout cas, à Montréal, pour les cols bleus, les cols blancs, le nombre de griefs se comptent en... non pas en centaines, mais en milliers. Ça fait qu'il y a une maturité, il y a une différence entre... dans... en milieu policier pompier qui n'est peut-être pas... qui n'est peut-être pas présente ailleurs.

Mme Labrie : O.K., ça fait qu'il n'y a pas de balise formelle sur comment on procède pour utiliser cette liste après qu'elle existe, mais vous vous entendez ensemble pour choisir.

M. Francoeur (Yves) : Bien, on n'a pas le choix de s'entendre. C'est toujours... des commissions parlementaires, mais c'est toujours ça, si on ne s'entend pas, il y a quelqu'un qui va le faire à notre place. Ça fait que tu mets de l'eau dans ton vin et tu choisis le moins pire.

Mme Labrie : Je comprends. Est-ce que, par rapport à la médiation-arbitrage, vous avez des exemples d'autres juridictions qui procèdent comme ça, ailleurs au Canada ou dans le monde?

M. Francoeur (Yves) : Je suis vice-président de l'association canadienne des policiers depuis une dizaine d'années, mais il n'y a pas de comparaison à faire parce qu'un gros arbitrage au Canada anglais, ça dure quatre jours. Habituellement, ça en dure plus deux, là, ça fait que c'est complètement, complètement différent, là, on ne peut pas faire de comparaison, non.

Mme Labrie : Ça fait que c'est une formule assez unique, là, en fait, que vous proposez ici.

M. Francoeur (Yves) : Oui.

Mme Labrie : Ce n'est pas en vous inspirant, nécessairement d'autres pratiques.

M. Francoeur (Yves) : Non.

Mme Labrie : O.K. Bien, ça fait le tour de mes questions. Je vous remercie.

Le Président (M. Bachand) :Merci. Merci beaucoup. M. le député de Jean-Talon, s'il vous plaît.

M. Paradis : Merci. Oui, on est très fort et très à l'avant-garde, au Québec, en matière de médiation et d'arbitrage, c'est vrai.

M. Francoeur (Yves) : C'est pourquoi il ne faudrait pas devenir un 51e État américain.

M. Paradis : Je ne vous le fais pas dire. Alors, si je résume, vous nous dites : Oui, on aime bien ce projet de loi, mais on vous invite, députés, à faire le pas additionnel en évitant la médiation obligatoire, mais en nous envoyant plutôt en médiation-arbitrage parce qu'il y a des recommandations unanimes du comité Therrien-Morency puis des recommandations aussi fortes du comité Boivin.

J'ai le goût de vous poser la question à l'envers : Pourquoi pensez-vous que, dans ce projet de loi là, on n'a pas fait, le ministre n'a pas fait ce pas additionnel? Qu'est-ce qui empêche d'y aller, alors que vous n'êtes pas les premiers à nous dire ça, là, depuis hier?

M. le Président, j'allais dire que la question s'adresse peut-être plus au ministre qu'à moi-même.

M. Paradis : On va la lui poser, mais de votre point de vue à vous?

M. Francoeur (Yves) : Mais, sérieusement, on...

M. Paradis : ...

M. Francoeur (Yves) : Mais sérieusement, on comprend qu'avec les décisions judiciaires, il y avait une presse. Ça pressait, qu'il y a des dossiers au Québec qui attendent peut-être et qu'il fallait effectivement, compte tenu de la décision du juge Granosik et de la Cour d'appel adopter une nouvelle mouture constitutionnelle rapidement. Mais je ne peux pas vous répondre plus que ça.

M. Paradis : Mais parce qu'on se prépare, là, pour nos échanges en commission parlementaire. Vous nous dites vous, vous avez vérifié puis vous êtes convaincus. C'est ce que vous avez répondu à notre collègue de Bourassa-Sauvé que vous êtes convaincu que votre proposition d'aller avec la médiation arbitrage serait parfaitement constitutionnelle, puis répondrait au test qui a été posé par les tribunaux.

M. Francoeur (Yves) : Effectivement.

M. Raymond (Jean-François) : Oui, mais effectivement, c'est ce qu'on répondait. Puis si, peut-être, je peux faire un peu de chemin. Moi non plus je n'attribue aucune intention à personne et je ne lirai pas dans aucune pensée, mais simplement ce que je peux vous dire, c'est qu'actuellement il s'est judiciarisé le processus des relations de travail au Québec. Il est extrêmement judiciarisé. On disait... on parlait de l'arbitrage de grief comme un mode de règlement informel. Mais qu'est-ce qui risque d'informel en arbitrage de grief si on a des interrogatoires, des contre-interrogatoires, des plaidoiries, des experts, des objections à faire trancher? Que reste-t-il de l'informel? Et c'est le pas qu'il faut faire, et je pense qu'on a besoin du législateur, dans ce cas-ci, pour nous aider à faire ce pas, à retourner. C'est un retour aux sources, à revenir à un mode de règlement informel.

Le Président (M. Bachand) :Merci beaucoup. Merci beaucoup d'avoir été avec nous ce matin. C'est très, très, très apprécié. On se dit à bientôt, hein pourquoi pas. M. Francoeur? Et puis sur ce...

M. Francoeur (Yves) : ...je ne parierais pas trop à votre place.

Le Président (M. Bachand) :O.K. Alors, sur ça, encore une fois, merci. Je vais suspendre les travaux quelques instants pour accueillir les prochains individus. Merci beaucoup encore.

Des voix :  Merci.

(Suspension de la séance à 12 h 10 )

(Reprise à 12 h 13 ) 

Le Président (M. Bachand) :À l'ordre, s'il vous plaît! Merci beaucoup. La commission reprend ses travaux. Il nous fait plaisir d'accueillir aujourd'hui Me Michel Coutu, docteur en droit, professeur émérite, École des relations industrielles, Université de Montréal et Me Julie Bourgault, docteure en droit, directrice, Département du droit, Université du Québec en Outaouais. Très belle région d'ailleurs. Alors, même si je viens de l'Estrie, j'ai habité longtemps en Outaouais...

Le Président (M. Bachand) :...alors même si je viens de l'Estrie, j'ai habité longtemps en Outaouais. Alors, merci beaucoup d'être avec nous. Alors, comme vous savez, vous avez 10 minutes de présentation. Après ça, nous aurons une période d'échange avec les membres de la commission. Donc, Maître Coutu, la parole est à vous.

M. Coutu (Michel) : M. le Président, M. le ministre, Mmes et MM. les députés, bien, en tout premier lieu, je tiens à remercier la commission de nous permettre d'exposer nos réflexions sur le projet de loi n° 88. Je suis accompagné… ça a été dit, mais je le redis, de mettre Me Julie Bourgault qui est directrice du département de droit de l'Université du Québec en Outaouais et elle a très largement contribué à la mise sur pied de ce nouveau département. Nous sommes tous les deux chercheurs membres du Centre de recherche interuniversitaire sur la mondialisation et le travail, le CRIMT, mais bien sûr, nous sommes ici à titre personnel.

Donc, le projet de loi n° 88 fait suite à l'arrêt de la Cour d'appel du Québec le 29 août dernier. Ce jugement est venu invalider, au titre d'inconstitutionnalité, certaines dispositions de la loi 24. Le gouvernement du Québec, et c'est tout à son honneur, a choisi de ne pas se… pardon, de ne pas solliciter l'octroi d'une permission d'appel la part de la Cour suprême, mais plutôt de modifier la loi pour se conformer aux jugements de la Cour d'appel.

Reprenons, sommairement, les quatre éléments de la loi 24 dont la validité conditionnelle a été évaluée par la Cour d'appel du Québec, c'est-à-dire le processus de nomination des arbitres de différends, les critères encadrant l'arbitrage, la durée minimale et obligatoire des conventions collectives et le partage des frais de l'arbitrage. Le projet de loi n° 88, se conformant aux exigences de base posées par la Cour d'appel du Québec, vise à modifier la loi 24, au regard du premier élément, la nomination des arbitres. Cependant, puisque le gouvernement invite l'Assemblée nationale à une révision générale de la loi, il nous faut considérer l'ensemble des… de ces questions litigieuses. Donc, l'analyse qui suit, découlant des développements contenus dans notre mémoire, obéit à trois considérants : tenir compte des leçons de l'expérience en matière de relations industrielles, des engagements internationaux du Québec au regard de l'Organisation internationale du travail, enfin, tenir compte du droit constitutionnel relatif à la liberté d'association, en ajoutant à cet égard la prise en compte de la Charte des droits et libertés de la personne du Québec, qui est malheureusement généralement laissée complètement de côté par la jurisprudence.

Donc, je commence avec le point un, processus de nomination des arbitres. Tel que prévu, actuellement, la loi 24, le processus unilatéral de nomination des décideurs en matière d'arbitrage… de règlement des différends était jugé par la Cour d'appel comme étant incompatible avec la liberté constitutionnelle d'association. Ça a été dit par… et redit par les divers intervenants devant la commission. Nous appuyons sur ce point, le projet de loi tel que présenté par le ministre du Travail, qui remédie de manière adéquate aux manquements identifiés par la Cour d'appel, hein, notamment tout ce qui concerne assurer la confiance des parties dans le processus d'arbitrage des différends.

Nous soulignons toutefois une dissonance. Si on regarde la loi dans son… la loi 24 dans son ensemble, et ce n'est peut-être pas voulu du tout, mais, si le projet de loi était… 88, il était adopté, bien, le processus de nomination des arbitres de différends ne serait pas le même suivant qu'on parle des policiers ou pompiers, ou celui des autres salariés qui sont visés par l'actuelle loi 24. En fait, ce qu'on se rend compte, c'est que les… ce qui nous paraît, c'est que les dispositions…

M. Coutu (Michel) : ...dispositions de la loi 24 ont été modifiées dans le sens voulu par le ministre du Travail en ce qui concerne les policiers et pompiers, mais que les anciennes dispositions de la loi 24, qui modifiaient quand même beaucoup ce qui existait avant en vertu du Code du travail, elles sont demeurées inchangées, ce qui fait que la nomination de l'arbitre des différends... Évidemment, c'est un arbitrage volontaire de différends, mais, quand même, la nomination de l'arbitre obéit à la volonté seule du ministre et suite à un comité de sélection qui est nommé, formé, désigné par le gouvernement. Donc, on ne retrouve pas ici les éléments de paritarisme, de confiance des partis, etc., sur lesquels insiste la Cour d'appel dans sa décision.

Deuxième élément. Les critères encadrant l'arbitrage. Je pense qu'il en a été très peu question à date devant la commission, il y a peut-être un groupe qui en a parlé, mais ça nous paraît néanmoins tout à fait important. La Cour d'appel, tout en soulignant l'insistance de la loi 24 sur les critères économiques, hein, c'est cinq critères sur huit à l'article 17 plus l'article premier de la loi 24, elle estime qu'il n'y a pas de véritable prédétermination en l'occurrence du résultat de la sentence arbitrale par ses critères, mais tout en se rapportant aux positions du Comité de la liberté syndicale du BIT, qui mentionne bien que les critères de l'arbitrage ne doivent pas être ou donner l'impression d'être prédéterminés en faveur d'une ou l'autre des parties. On notera ici qu'en Ontario, quant aux policiers en particulier mais aux pompiers aussi, c'est à peu près les mêmes critères qui sont... il y en a sept au lieu de huit, il y en a quatre sur sept qui sont dans la loi ontarienne, des critères économiques, fiscaux, etc. Bon. Ce qu'on se rend compte... Nous nous sommes rendu compte que la jurisprudence des arbitres est devenue très contradictoire dans l'application de ces critères. Il y a une tendance des arbitres qui dit : Le législateur ne parle pas pour ne rien dire. Il y a quatre critères sur sept qui sont économiques, donc ces critères prépondérants. Par contre, il y a une autre tendance chez les arbitres, possiblement majoritaires de ce que nous avons lu et des décisions qu'on a répertoriées. Il y a donc une autre tendance qui dit : Non, non, non, ce n'est pas hiérarchisé puis on procède, nous, suivant l'approche traditionnelle, c'est-à-dire équité externe, équité interne et enfin capacité de payer. Mais ce qui résulte de ça, c'est une certaine confusion quant à l'orientation de l'arbitrage. Et c'est de nature, bien sûr, suivant l'arbitre qui rend la sentence arbitrale, c'est de nature à créer du ressentiment chez l'une ou l'autre des parties. Donc, pour nous, ce serait important qu'au Québec on resserre les critères qui sont applicables de manière à éviter finalement ces divergences et cette confusion qui risquent fortement d'en résulter au niveau des arbitres.

• (12 h 20) •

Le Président (M. Bachand) :Me Coutu, il reste... il vous reste une petite minute, alors donc, je m'en vais peut-être d'accélérer parce qu'on va procéder à la période d'échange rapidement.

M. Coutu (Michel) : Bon, alors, bien, je vais céder la parole à... Et je m'excuse d'avoir oublié le délai. Je cède la parole, si vous permettez, M. le Président, à Me Bourgault.

Le Président (M. Bachand) :La minute est pas mal terminée, alors je vais demander au ministre s'il accepte qu'on prenne quelques minutes du temps gouvernemental pour permettre à Me Bourgault de faire une présentation.

M. Boulet : Oui, bien sûr.

Le Président (M. Bachand) :Parfait. Alors donc, Me Bourgault, peut-être rapidement, parce qu'on prend du temps d'échange de la part du ministre. Allez-y.

Mme Bourgault (Julie) : Je vais aller très rapidement. Donc, concernant la durée des conventions collectives, la Cour d'appel a considéré que c'est un enjeu crucial de la négociation collective...

Mme Bourgault (Julie) : ...non seulement parce qu'elle constitue en soi un objet de négociation, mais aussi parce qu'elle détermine les périodes de renouvellement des conventions collectives et d'accès au droit de grève ou, à défaut, à l'arbitre de différends.

En vertu du Code du travail, la convention collective, normalement, le régime général prévoit qu'elle doit être d'une durée de moins... d'au moins un an, mais depuis 1994, les parties peuvent convenir d'une durée qui est supérieure à trois ans. La sentence arbitrale, elle, elle est d'une durée d'au moins an et d'au plus de trois ans en vertu du régime général. L'important ici, c'est... demeure que la durée de la convention de la sentence soit déterminée par une entente entre les parties et non fixée arbitrairement par l'État. Certes, la Cour d'appel, soulignant la dissonance sur ce point de la loi 24 avec le régime général du Code du travail et estimant qu'il s'agit d'une ingérence dans le déroulement des négociations collectives, juge que cette ingérence-là ne comprenait pas la poursuite d'objectifs communs par les salariés concernés. Or, cette position-là est déjà en deçà des exigences des conventions 87 et 98 de l'OIT suivant lesquelles toute condition de travail, y compris la durée d'une entente collective, peut faire l'objet de la négociation et ne doit pas être exclue d'autorité du champ du négociable. Il ne fait pas de doute à cet égard que le législateur québécois, en adhérant expressément à ces deux conventions fondamentales de l'OIT en matière de liberté syndicale, s'est engagé à se conformer aux recommandations des organes de contrôle du Bureau international du travail dans le respect de la Constitution de l'OIT.

Finalement, nous saluons la volonté gouvernementale de se conformer à la décision de la Cour d'appel en modifiant la loi 24, principalement sur le processus de nomination des décideurs en cas d'arbitrage des différends. Nous sommes toutefois d'avis que l'Assemblée doit profiter de cette révision d'ensemble de la loi pour en écarter deux obstacles supplémentaires grevant le déroulement de la négociation collective dans le secteur municipal, soit les dispositions relatives aux critères entourant l'arbitrage ainsi que celles portant sur la durée des conventions collectives ou sentences arbitrales.

Nous émettons donc quatre recommandations, soit d'adopter le projet de loi tel que proposé en ce qui concerne le processus de nomination des arbitres de différends, d'harmoniser le processus de nomination de l'arbitre de différends quant aux autres salariés avec celui applicable aux policiers... pompiers municipaux, pardon, de manière à ce qu'il soit similaire et rencontre les exigences de paritarisme et de confiance des parties posées par la Cour d'appel dans sa décision, de revoir les critères encadrant l'arbitrage des différends de manière à éviter l'impression d'une prédétermination de l'arbitrage par des critères économiques prépondérants, et finalement d'harmoniser la durée obligatoire ou minimale des conventions collectives ou sentences arbitrales avec les dispositions du Code du travail, et ce, pour l'ensemble du secteur municipal.

Le Président (M. Bachand) :Merci beaucoup. Donc, M. le ministre, s'il vous plaît.

M. Boulet : Oui, merci, M. le Président. Merci, M. le professeur Coutu de même que Julie Bourgault, tous deux de la Faculté de droit de l'UdeM, de l'Université de Montréal, où certaines de mes consoeurs ont vraisemblablement étudié. Oui? Les deux, hein? O.K.

Une voix : ...

M. Boulet : Toi?

Une voix : ...

M. Boulet : Ah! vous êtes à l'Université du Québec en Outaouais, hein? O.K. Bien, bienvenue. Merci pour votre mémoire. Je vais peut-être être assez bref, là, mais c'est superintéressant, ce que vous avez fait comme commentaires.

Évidemment, quand vous référez à la possibilité d'harmoniser le processus qui est dans le projet de loi n° 88 aux autres salariés, évidemment, ça peut se réfléchir, mais souvenez-vous que les tribunaux ont confirmé la constitutionnalité des dispositions applicables aux autres secteurs, aux salariés des autres secteurs du municipal. Puis, comme vous savez, ici, il y a une particularité, les policiers, pompiers n'ont pas droit de grève, alors que les autres ont le droit de grève, là. Donc, c'est le commentaire que je voulais partager avec vous.

Le critère économique, ça aussi, vous savez que c'est jugé conforme par les tribunaux. Et ça réfère à la situation fiscale, à la politique de rémunération, aux augmentations qui ont été données aux employés de la fonction publique. Et, si on retirait ces critères économiques là, qui existaient d'ailleurs avant la loi de 2016, ça provoquerait une réaction... ça provoquerait une réaction terrible de la part des municipalités. Je pense que c'est bien établi, c'est bien analysé, et on n'est, à ce stade-ci, certainement pas...

M. Boulet : ...favorables à cette recommandation. Puis la durée de cinq ans, je comprends aussi les éléments que vous avez soulevés, mais le cinq ans, il existait aussi avant, et le cinq ans, c'est sûr que ça confère un impact significatif, une sécurité citoyenne et aussi une grande stabilité dans l'offre de services des villes et des municipalités de ce secteur-là.

Donc, c'est... en gros, c'est les trois recommandations qui m'apparaissaient les éléments clés, que je trouve tout à fait sensées, raisonnées, mais c'est l'avenue qu'on a empruntée pour les raisons que je viens de vous mentionner.

Alors, encore une fois, Maître Coutu, Maître Bourgault, merci beaucoup pour la qualité de votre présentation ainsi que de votre mémoire et de votre collaboration à nos consultations particulières. Merci beaucoup.

Le Président (M. Bachand) :Merci. Me Coutu, Me Bourgault, voulez-vous réagir?

M. Coutu (Michel) : Oui. Moi, je voudrais souligner... les réflexions du ministre sont tout à fait légitimes, évidemment, mais je voudrais souligner que, quand on dit : Bien, ça a été jugé correct par la Cour d'appel du Québec, l'Assemblée nationale, ce n'est pas... n'exerce pas une fonction juridictionnelle, elle exerce une fonction législative. Elle n'est pas liée par l'autorité des précédents qui marquent le travail des tribunaux, hein? Ce n'est pas parce que la Cour suprême du Canada a interprété l'entrave substantielle dans son deuxième volet, comme : Mais il faut prouver aussi une atteinte à la capacité d'agir collectivement... Ça ne s'applique pas à l'Assemblée nationale. L'Assemblée nationale, c'est un organisme politique qui est libre de ses choix, et nous encourageons, hein, je pense qu'on peut le dire comme ça, nous encourageons fortement l'Assemblée nationale à assumer ce rôle politique, ce qui peut dire... ce qui peut vouloir dire d'aller au-delà des décisions des tribunaux, pas seulement inconstitutionalité, mais aussi respect des normes internationales du travail, etc.

• (12 h 30) •

Le Président (M. Bachand) : Merci beaucoup. Merci. Mme la députée de Bourassa-Sauvé, s'il vous plaît.

Mme Cadet : Merci beaucoup, M. le Président. Bonjour, Pr Coutu. Bonjour, Me Bourgault. Merci pour votre présence aujourd'hui. Merci également pour votre volumineux mémoire qui nous aura permis d'avoir... en fait, d'effectuer, donc, plusieurs rappels historiques. Je suis juriste, mais je n'ai pas pratiqué en droit du travail. Donc, ça m'a permis d'avoir un tour d'horizon, période des débuts de la Confédération jusqu'à 1944 et la suite. Donc, merci beaucoup. Donc, vous alimenterez certainement nos réflexions.

J'ai cru comprendre de vos commentaires en amont que vous étiez à l'écoute des consultations particulières hier et un peu plus tôt aujourd'hui. Donc, j'aurais peut-être voulu vous entendre sur ce que nous avons entendu. Peut-être que votre expertise réussira, donc, à nous éclairer. Donc, sans surprise, donc, il a été question de... bon, de la médiation arbitrale obligatoire de la part de nombreux groupes. J'aimerais vous entendre, entendre vos réflexions là-dessus de façon générale et, ensuite, j'aurais des questions complémentaires.

M. Coutu (Michel) : Oui, peut-être que je peux débuter, puis Julie complètera. Concernant la médiation, hein, notre mémoire est orienté par les trois considérants que j'ai mentionnés, donc les impératifs qui découlent de l'expérience en matière de relations industrielles, les aspects constitutionnels et quasi constitutionnels et aussi les normes du droit international du travail. Je dirai, en accord avec ce qui a été dit par les intervenants sur ce sujet, que je ne vois pas de problèmes constitutionnels ou de normes du travail par rapport au choix de la formule de médiation. Que la médiation soit obligatoire, qu'elle soit facultative, que la médiation soit confiée à un intervenant et l'arbitrage à un autre intervenant ou qu'il y ait un médiateur arbitre, tout ça ne soulève pas de difficulté, à mon avis, du point de vue du droit du travail dans ses principes...


 
 

12 h 30 (version non révisée)

M. Coutu (Michel) : ...fondamentaux. Cela dit, on peut constater qu'en relations industrielles, en général, parce que j'ai consulté un certain nombre de documents sur l'arbitrage des différends, et l'opinion générale, c'est que, normalement, les deux intervenants sont des personnes distinctes. Ça veut dire qu'il y a une personne qui fait la médiation puis il y a une personne qui fait l'arbitrage, mais c'est l'opinion que je dirais majoritaire des spécialistes en relations industrielles, mais ce n'est pas du tout une règle inflexible. Et on dit toujours : Ce qui est important, cependant, c'est l'expérience pratique des milieux de travail, donc, dans le secteur et compte tenu des différents secteurs et des expériences différentes qui sont vécues dans ces secteurs.

Donc, les témoignages du côté des policiers et des pompiers me semblent mettre en exergue des préoccupations qui sont tout à fait importantes et légitimes de coûts, de célérité et d'efficacité. Nous, notre position, puisqu'il n'y a pas d'élément fondamental du droit du travail qui est touché et ce n'est certainement pas un enjeu de constitutionnalité, alors c'est d'en différer aux partis, syndicats de policiers, de pompiers et les municipalités, les villes, pour voir quelle est la meilleure formule, celle qui fait consensus aussi, c'est très important, très important, et suscite la confiance des partis. Donc, on n'a pas d'opinion précise, on laisse ça aux partis et qui ont une bien meilleure connaissance que nous des besoins dans les milieux de travail. J'ai dit cette fois-ci, c'est bon, c'est complet. Julie... Oups, c'est bon.

Mme Cadet : Merci beaucoup, Me Coutu. Donc, ça... donc toutes les options qui sont sur la table. Donc, celles qui sont présentes dans l'actuel libellé du projet de loi ainsi que, bon, les différentes moutures qui ont été présentées. Donc, ce sera, donc... à l'expertise des partis pour aller de l'avant avec la procédure qui leur convient.

Justement, donc, parlant, donc, de s'en remettre aux partis, dans... bien, hormis, donc, de ce qui nous a été soumis, en fait, ce que nous avons entendu en commission parlementaire, évidemment, donc, des mémoires, donc... déposés, je profite donc de votre expertise pour vous entendre sur, peut-être, donc... en fait, donc, la formation, donc, des arbitres. Donc, les groupes nous disent : Bien, ce serait... ça pourrait être intéressant, surtout dans le cas, donc, des plus petites municipalités, que les arbitres, donc, ils aient une formation sur les spécificités du milieu municipal. Est-ce que c'est quelque chose sur lequel vous vous êtes penchés?

M. Coutu (Michel) : Julie, est-ce que tu veux répondre à cette question? Alors, j'ai entendu les commentaires et je trouve que ça fait plein de sens. Les petites municipalités, on parlait aussi des gens qui oeuvrent à temps partiel, les pompiers, je pense, en particulier, ce n'est pas nécessairement les mêmes problématiques, ce n'est certainement pas les mêmes problématiques que dans les grandes villes. Donc, ça serait important qu'il y a une adaptation, hein, des normes, des possibilités pour rencontrer les attentes de ces milieux. Et j'en souligne une, nous n'avons pas... concernant le partage des coûts de l'arbitrage, on s'est dit d'accord avec le projet de loi en ce sens que, là encore, ce n'est pas une question qui soulève des problèmes constitutionnels ou de droit international, etc. Cependant, il y a dans la loi actuelle, la loi n° 24, hein, il y a la possibilité d'un programme d'aide gouvernementale. Et ça, ça nous apparaît très important quand même au niveau de l'accessibilité pour de petits groupes de salariés qui... pour lesquels l'accès à l'arbitrage est différent pour devenir théorique, dans le sens qu'ils n'ont pas les moyens de se payer, experts, etc. Il peut y avoir là un déséquilibre entre les parties, et moi, je pense qu'il faut absolument... enfin, c'est notre forte recommandation, que ce...

M. Coutu (Michel) : ...programme qui est prévu à la loi soit mis en œuvre avec des critères sérieux, parce qu'il y a une question de liberté d'association, quand même. Il peut y avoir des groupes de policiers qui ne veulent pas s'affilier à une fédération, indépendamment du fait que cette... la fédération des pompiers ne semble pas donner de l'argent au niveau local pour ces fins-là, mais, s'il y a un petit groupe de pompiers dans une petite municipalité, qui, lui, veut demeurer une entité autonome, c'est tout à fait conforme... c'est leur droit, en vertu de la liberté conditionnelle d'association, là, ils ne sont pas obligés de s'affilier à une fédération dans leur... dans leur secteur. Et là, ça va être très difficile d'accéder à... sur un pied de relative égalité à l'arbitrage des différends.

Mme Cadet : Merci. Autre question, donc, sur... encore une fois, donc, sur la thématique, donc, des plus petites municipalités, on nous a également, donc, fait parvenir, donc, le fait que, justement, donc, dans ces cas-là, donc, parfois, donc, les... les assesseurs ne... Puisque, bon, vous le dites, donc, on a une réalité, donc, à temps partiel, c'est ce qui nous a été communiqué. Parfois, donc, les assesseurs, donc, ne disposent pas nécessairement, donc, toujours de tous les outils. Est-ce que vous vous êtes penchés sur la question de l'assujettissement des assesseurs au Code de déontologie des assesseurs conciliateurs et agents de relation de travail et des enquêteurs du Tribunal administratif du travail? Qui est un code de déontologie, donc, qui existe, mais dans ces... dans le cas de ces négociations-ci, les assesseurs n'y sont pas assujettis. Est-ce que c'est une question qui a... sur laquelle vous vous êtes penchés?

M. Coutu (Michel) : Non, pas du tout. Je ne sais pas si Julie... Non plus. Donc, je préférerais qu'on ne se mette pas les pieds dans les plats. Et donc, non, on n'a pas regardé cet aspect-là.

• (12 h 40) •

Mme Cadet : Parfait. Et, peut-être, dernière question. Dans... Bien, en fait, donc, le projet de loi, donc, donnerait au ministre le pouvoir évidemment de nommer l'arbitre selon la mouture actuelle, à partir, donc, de la liste, si les parties, donc, ne s'entendent pas, donc, ce qu'on a... ce qui nous a été présenté. Puis c'est ce que se faisait avant. Le mémoire au Conseil des ministres, donc, précise un délai de 10 jours aux parties pour pouvoir s'entendre, pour dire : Bien, voilà, à partir de la liste, voici combien de... voici combien de temps... voici de combien de temps vous disposez pour pouvoir choisir une personne, si vous ne la choisissez pas à l'intérieur de ce délai-là, bien, ce sera au ministre de le faire. Donc, moi, je voulais voir un peu, donc, selon vous, donc, le délai de 10 jours, ce que vous en pensez aussi. Donc, le mémoire le précise, mais le projet loi ne le précise pas, donc savoir est-ce que c'est quelque chose qui devrait être précisé dans le projet de loi.

Le Président (M. Bachand) :Très rapidement. Il reste quelques secondes.

M. Coutu (Michel) : On n'a pas regardé non plus cette question-là parce qu'elle ne me semble pas poser de problèmes fondamentaux en droit du travail. On pourrait penser un délai plus long, mais je ne crois pas que ça, là, que ça...

Mme Cadet : ...pourrait être précisé dans le projet de loi. C'est ce que je comprends.

M. Coutu (Michel) : Voilà.

Mme Cadet : Merci.

Le Président (M. Bachand) :Merci beaucoup. Mme la députée de Sherbrooke, s'il vous plaît.

Mme Labrie : Merci, M. le Président. Dans votre mémoire, vous parlez de différents types d'arbitrage, arbitrage traditionnel ou de type offre finale. Dans votre lecture à vous, on se trouve devant quel type d'arbitrage avec ce qui est proposé ici?

M. Coutu (Michel) : Ah, c'est... de ce que j'ai vu, c'est l'arbitrage traditionnel et non pas les formules d'arbitrage très, très encadrées qui nous viennent de nos voisins du Sud et avec tous les risques que ça comporte, peut-être pas en soi, mais, quand on a d'un côté des critères qui sont très, très restreints et de l'autre, par exemple, un arbitrage des offres finales globales, ça s'est fait sous le gouvernement Harper, si je ne me trompe pas, bien, à ce moment-là, l'arbitre n'a quasiment pas le choix que de donner raison à la position patronale. Donc, il faut faire attention à ça. Mais là, je ne vois pas de problème de cet ordre avec le projet de loi n° 88. C'est une approche consensuelle traditionnelle.

Mme Labrie : Donc, vous ne voyez, pas d'inquiétude à ce niveau-là. Puis je comprenais de votre réponse à ma collègue tout à l'heure concernant la médiation arbitrage, en fait, que, bon, pour vous, ça relevait vraiment plutôt de l'intérêt des parties, là, d'opter pour ça. Nous, ce qu'on a entendu ici, c'était un consensus quand même, là, pour modifier la loi dans ce sens-là. Donc, vous voyez ça aussi favorablement, là...

Mme Labrie : ...il n'y a pas de... ça ne vous soulève pas de préoccupation.

M. Coutu (Michel) : Il n'y a pas de préoccupation juridique, constitutionnelle, etc., par rapport à ce choix. Il y a des avantages, certainement, mais il peut y avoir aussi... le point de vue contraire pourrait être défendu, mais nous, on s'en remet à l'expérience vécue des parties, qui ont connu les différentes formules, et à leur appréciation de la situation.

Mme Labrie : Parfait. Bien, je vous remercie.

Le Président (M. Bachand) :Merci beaucoup. M. le député de Jean-Talon, s'il vous plaît.

M. Paradis : J'aimerais parler de la question des critères sur lesquels la décision peut être fondée. Vous nous rappelez avec pertinence que le droit international a un rôle à jouer, particulièrement à la lumière de la Charte québécoise des droits et libertés. C'est un sujet important parce que certains disent que, dans l'ancien régime, ça favorisait une partie puis que, là, avec le nouveau régime, ça favorise peut-être l'autre partie. Vous nous dites... vous nous appelez à revoir ces critères-là pour faire attention de ne pas avoir l'air de prédéterminer des critères. Est-ce que vous pouvez préciser un peu votre proposition? Comment revoir ces critères-là?

M. Coutu (Michel) : Julie? Bon. Alors, ça me donnait le temps de réfléchir, mais bon, rapidement, je pense qu'il y a trois... il y a trois critères de base, hein : l'équité externe, l'équité interne et la capacité de payer et tous les autres critères économiques. Et, dans l'approche consensuelle de l'arbitrage, c'est l'arbitre qui va tenir compte de ces trois éléments mais va les pondérer entre eux. Vous avez vu, dans le mémoire, il y a une longue section sur ce qui s'appliquait quant aux policiers et pompiers avant 1996, et on voit que, quand même, les arbitres regardaient à fond plusieurs critères : l'indice des prix à la consommation, les augmentations salariales au niveau du secteur public, et tout ça était pondéré par l'arbitre.

Donc, on n'est pas contre, on n'est pas contre, du tout, le recours à des critères économiques, mais là le problème, c'est qu'on semble tellement insister là-dessus que ça peut donner l'impression d'un biais imposé à l'arbitrage, au processus arbitral.

M. Paradis : Donc, vous dites : Il peut y avoir des critères, mais là vous nous dites : Ils penchent peut-être trop d'un côté, et c'est ça qu'il faudrait revoir.

M. Coutu (Michel) : Bien, il y a cinq critères sur huit, plus l'article premier de la loi sur les principes généraux, qui insistent lourdement, très lourdement sur le respect des critères économiques, et ça, ça va certainement inciter des arbitres à tenir compte de l'économie comme facteur prépondérant.

Mme Bourgault (Julie) : Ça pourrait avoir un peu pour effet de diluer les autres critères, étant donné qu'il y en a énormément, de critères économiques. C'est un peu ce qu'on veut dire. Ce n'est pas qu'il faut... il ne faut pas retirer tout critère économique, mais plutôt le resserrer pour éviter de diluer les autres critères.

M. Paradis : Merci.

Le Président (M. Bachand) : Merci beaucoup. Me Coutu, Me Bourgault, merci infiniment d'avoir été avec nous en commission parlementaire, c'est très apprécié. Cela dit, avant de conclure les auditions, je procède au dépôt des mémoires des personnes et organismes qui n'ont pas été entendus lors des auditions publiques.

Et compte tenu de l'heure, la commission ajourne ses travaux sine die. Merci beaucoup. À très bientôt.

(Fin de la séance à 12 h 47)


 
 

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