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Version préliminaire

43e législature, 1re session
(début : 29 novembre 2022)

Cette version du Journal des débats est une version préliminaire : elle peut donc contenir des erreurs. La version définitive du Journal, en texte continu avec table des matières, est publiée dans un délai moyen de 2 ans suivant la date de la séance.

Pour en savoir plus sur le Journal des débats et ses différentes versions

Le mardi 19 novembre 2024 - Vol. 47 N° 94

Étude détaillée du projet de loi n° 73, Loi visant à contrer le partage sans consentement d’images intimes et à améliorer la protection et le soutien en matière civile des personnes victimes de violence


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Journal des débats

11 h (version non révisée)

(Onze heures cinq minutes)

Le Président (M. Bachand) :Bonjour, tout le monde. Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission des institutions ouverte. Très content de vous retrouver. La commission est réunie afin d'entreprendre l'étude détaillée du projet de loi n° 73, Loi visant à contrer le partage sans consentement d'images intimes et à améliorer la protection et le soutien en matière civile des personnes victimes de violence. Avant de débuter, M. le secrétaire, y a-t-il des remplacements?

Le Secrétaire : Oui, M. le Président. Un seul remplacement, Mme Bourassa (Charlevoix—Côte-de-Beaupré) est remplacée par Mme Picard (Soulanges).

Le Président (M. Bachand) :Merci beaucoup. Donc, on en est aux remarques préliminaires. M. le ministre, s'il vous plaît.

M. Jolin-Barrette : Oui, merci, M. le Président, c'est un plaisir de vous retrouver, de retrouver les membres de la commission sur le projet de loi n° 73, Loi visant à contrer le partage sans consentement d'images intimes et à améliorer la protection et le soutien en matière civile des personnes victimes de violence. Alors, on a tenu les consultations, on a entendu les groupes et on aura des amendements à déposer suite aux consultations, donc, amendements que j'ai fait parvenir aux membres de la commission hier soir, afin de faciliter les travaux de la commission.

C'est un projet de loi, M. le Président, qui est concret, qui touche un fléau, particulièrement chez les jeunes. Donc, un adolescent sur cinq a déjà reçu une image intime de quelqu'un qui n'y consentait pas. À l'ère des réseaux sociaux, des textos, des messages, d'Internet, de l'hypertrucage, je pense que c'est important d'agir dans notre sphère de compétence pour faire en sorte justement qu'on mette fin à ce fléau-là considérant le fait que ça peut avoir des conséquences dramatiques, ça peut briser des vies, le fait qu'une image nue ou d'une activité sexuelle soit diffusée. Alors, je pense que c'est important pour la réputation. La population réagit positivement au dépôt du projet de loi.

Et les autres mesures qu'on a dans le projet de loi, c'est notamment pour adapter la justice civile à la réalité des personnes victimes de violence sexuelle, violence conjugale, tout ce qu'on a fait dans le tribunal spécialisé pour faciliter le témoignage des personnes victimes. Mais on veut incorporer ça également en matière de justice civile et particulièrement en matière familiale. Donc, les paravents, l'obligation pour le juge d'accorder le télétémoignage à distance, sauf exception, le fait également de pouvoir être accompagné d'une personne qui soutient la personne victime, un chien d'assistance également. On touche à l'ordonnance civile de protection aussi, pour que ce soit beaucoup plus facile d'aller la chercher. On diminue le critère pour l'obtenir, donc basé sur la crainte relativement à l'obtention de l'ordonnance civile de protection. Également, un formulaire beaucoup plus simple que d'avoir une requête. Alors, différentes mesures du projet de loi, justement, afin d'assurer davantage de sécurité, davantage également un système de justice plus humain en fonction des besoins des personnes victimes pour qu'elles puissent livrer leur témoignage. Donc, sans plus tarder, M. le Président, on va être prêt à débuter l'étude détaillée.

Le Président (M. Bachand) :Merci, M. le ministre. M. le député de l'Acadie, s'il vous plaît.

M. Morin : Oui, bien sûr. Bonjour, M. le Président. Très heureux de vous retrouver. Bonjour, M. le ministre. Toutes les personnes qui vous accompagnent, les collègues de la banquette gouvernementale, je vous salue. Mes salutations également à ma collègue députée de Vaudreuil. C'est toujours une étape, je vous dirais, importante dans la vie d'un projet de loi, M. le Président, que de travailler à l'étude article par article, parce que c'est souvent à cette étape-là qu'on est capable, en tout cas, sous, de l'opposition, de faire des amendements pour bonifier le projet de loi. Dans ce cas-ci...

M. Morin :...le ministre nous a un peu devancés puisqu'hier soir on recevait certaines modifications suite aux consultations particulières. Et je l'ai dit et je vais le redire comment, pour moi, l'étape des consultations particulières est importante.

D'abord, je remercie toujours les groupes qui viennent témoigner devant la commission, parce que ces gens-là, évidemment, c'est des bénévoles, ils font ça souvent à la fin d'une journée, ils travaillent fort, mais ils y vont toujours avec leur expertise, leur savoir, et ils le font toujours, évidemment, avec bon cœur, permettez-moi de m'exprimer ici. Donc, c'est très important. Puis, souvent, souvent ça porte fruit parce que ça nous permet de bonifier des projets de loi qui, en bout de piste, seront là pour servir l'ensemble des Québécois et des Québécoises.

C'est un projet de loi qui est important, je l'ai dit, qui a été bien reçu, qui a même été diffusé d'une façon originale, je l'ai souligné. Certains professeurs l'ont accueilli très favorablement, mais souvent, souvent, tous les enjeux sont dans les détails ou dans la mise en application, dans la mise en œuvre. Et c'est évidemment bien sûr à ça que je vais veiller comme porte-parole de l'opposition officielle, bien sûr, en justice.

• (11 h 10) •

Cependant, je ne remets pas du tout en cause la pertinence du projet de loi, parce que récemment... et je prends quelques instants pour vous partager une expérience personnelle que j'ai vécue. Éducaloi nous invitait à aller dans des écoles, rencontrer des étudiants, écoles secondaires, puis leur parler de cas pratiques. Et je suis allé dans une école secondaire publique dans ma circonscription, où d'ailleurs j'ai fait mon secondaire, et j'avais évidemment identifié un cas où il y avait un partage d'images intimes sans consentement. Et je dois vous dire que ça a suscité beaucoup, beaucoup de débats. Ce n'est pas comme si les jeunes avaient dit : Ah oui, ça arrive? Non, non, ça, ils étaient vraiment au courant que ça arrivait. Mais ça, ça m'a rassuré, cependant, ils ont tous dit que c'est quelque chose qu'il ne fallait pas faire. Donc, ça, c'est quand même un pas dans la bonne direction, là, mais ça ne veut pas dire qu'un encadrement législatif ne sera pas nécessaire par ailleurs. Mais tout ça pour vous dire qu'il y a des dispositions, là, dans ce projet de loi qui touchent véritablement la vie des gens. Puis évidemment, vous comprendrez que, moi, mon travail, c'est de m'assurer que ces dispositions-là auront leur plein effet, leur plein potentiel, pour éviter que des victimes vivent ces situations-là. Alors, ça, c'est un élément important puis on va pouvoir en rediscuter avec M. le ministre quand on va regarder les différentes dispositions.

Mais le projet de loi ne vise pas que ça, il y a également d'autres dispositions en ce qui a trait notamment, bien sûr, à l'obtention d'une ordonnance pour empêcher le transfert ou l'échange d'images sans le consentement, mais il y a aussi d'autres mesures de protection, mesures de protection civile qui seraient incluses dans le Code de procédure civile. On aura évidemment l'opportunité d'en reparler, de voir comment ça va se matérialiser. Et il y a aussi des aides aux témoignages, ainsi que certains éléments du Code civil qui seront modifiés pour empêcher puis déclarer non pertinents certaines affaires qui pourraient comporter des allégations de violences sexuelles ou violences conjugales, puis s'assurer qu'il y a certains éléments qui sont donc non pertinents, puis que le tribunal devra tenir compte, parce qu'effectivement ça ne fait souvent que perpétuer des mythes, ce qui n'est pas quelque chose que l'on veut, bien sûr, dans notre système de justice. Alors, ça, je pense que c'est un élément important à souligner.

Cependant, autre élément aussi à souligner, et je vous disais que c'est souvent dans les détails qu'on voit véritablement la mise en œuvre d'un projet de loi et son véritable impact, c'est toute la question de la formation...

M. Morin : ...s'il n'y a pas des programmes de formation qui suivent, je crains que le projet de loi n'aura pas le plein effet, le plein impact que M. le ministre souhaite qu'il puisse avoir. Et ça, je tiens à le souligner, c'est un élément important. On aura l'occasion d'en reparler, mais vous savez, souvent, au niveau, bien sûr, des plaintes, au niveau des éléments de preuve, quand on parle, entre autres, de l'ordonnance civile de protection, des éléments à faire valoir, c'est important de former tous les acteurs du système de justice pénale pour s'assurer que les gens vont bien comprendre ce qui se passe et ils vont avoir une écoute attentive. Après ça, bien évidemment, éventuellement, le magistrat décidera, ça, c'est... ça fait partie du travail de la magistrature, il n'y a pas de souci. Mais autant au niveau des intervenants, qu'il y ait suffisamment de formation qui soit donnée.

Et l'autre élément que je tiens à souligner, parce que, ça, on en a parlé aussi, c'est toute la question des budgets qui vont venir avec la mise en œuvre du projet de loi. Et oui, c'est ça, l'argent. L'argent, c'est le nerf de la guerre. On en revient toujours à ça, et je dois vous dire que, présentement, moi, comme député de l'opposition, ce qui m'inquiète un peu, c'est que le gouvernement actuel ne semble pas nager dans les surplus. C'est un euphémisme. Donc, alors, comment ça va s'appliquer? Puis je vous le dis parce que, quand on a entendu Juripop, puis on aura l'occasion d'en reparler, mais quand on a entendu Juripop, qui nous ont dit : Écoutez, pour notre financement, pas de nouvelle, le 31 mars 2025, ça s'en vient. Juripop été identifié, et ce sont... ils ont une expertise dans ce domaine-là. Puis je me permets d'en parler parce que, bien, j'espère qu'à un moment donné ils vont avoir des bonnes nouvelles parce que, quand vous regardez le projet de loi, puis même au niveau de l'ordonnance qui peut être obtenue en urgence pour cesser ou prévenir le partage d'une image intime, il y a sûrement des gens qui vont être capables, dans notre société, de faire en sorte qu'ils pourront s'adresser directement à la cour, mais il y en a aussi sûrement plusieurs qui ne seront pas capables pour toutes sortes de raisons. Donc, ils vont avoir besoin d'accompagnement. Puis, si les organismes actuels n'ont pas le financement pour les aider, bien là, ça va devenir excessivement difficile. C'est la même chose avec l'ordonnance de protection parce que le projet de loi dit : Bien oui, c'est une ordonnance civile de protection, évidemment. Il y en a déjà une qui existe dans le Code criminel. Mais donc il va falloir que la personne en fasse la demande. Puis là, bien, est-ce qu'elle va le faire seule? Est-ce qu'elle va être accompagnée d'un avocat? Est-ce qu'elle va être accompagnée d'une intervenante, etc.? Donc, et mais là aussi, il va falloir des sous pour que ça fonctionne d'une façon efficace. Alors, ce n'est pas des détails, ce n'est pas directement dans le projet de loi, mais si les enveloppes financières n'arrivent pas avec, mais moi, je crains que malheureusement ce soit très difficile de le mettre en œuvre puis que le résultat, l'objectif qui est recherché par le législateur ne sera pas là. Donc, autant de choses dont on aura évidemment le bénéfice d'en discuter avec M. le ministre pendant l'étude article par article.

Moi, ce sont les éléments que je voulais faire ressortir d'emblée, M. le Président, pour mettre la table, pour qu'on puisse travailler, mais toujours en gardant à l'esprit ces éléments-là qui m'habitent, pour évidemment s'assurer que les personnes qui en auront besoin puissent avoir, bien sûr, les ressources et l'appui nécessaires pour que ça fonctionne rondement. Alors, je vous remercie, M. le Président.

Le Président (M. Bachand) :Merci beaucoup, M. le député de l'Acadie. Mme la députée de Vaudreuil, s'il vous plaît.

Mme Nichols : Oui. Merci, M. le Président. Alors, bien, je me permets d'abord de saluer l'ensemble des collègues et l'ensemble de l'équipe du ministre qui l'accompagne, mon collègue de l'Acadie et les autres oppositions.

M. le Président, le projet de loi n° 73, bien, c'est un projet de loi, on va se le dire, il y a... c'est un sujet qui est délicat, mais c'est un sujet qui mérite évidemment d'être traité. Je pense que l'ensemble des organismes...

Mme Nichols : ...les groupes qui sont venus en commission parlementaire nous l'ont dit, c'est un fléau. On le voit, il y a une problématique, entre autres avec le partage sans consentement d'images intimes. Donc, je trouve que c'est une excellente idée de l'aborder ici à l'Assemblée nationale. Et nous, en tant que législateurs, législatrices, en tant qu'élus, bien sûr, on peut rapporter des cas qu'on entend dans nos comtés, dans nos différents milieux.

C'était aussi très intéressant d'entendre... d'entendre les groupes et de lire les différents mémoires parce qu'on a entendu des groupes en commission parlementaire, mais il y a eu beaucoup de mémoires de déposées sur notre site, sur le site du Greffier, avec des commentaires, là, plus pertinents les uns que les autres, qu'il faut évidemment tenir compte dans la... dans la présente... dans le début de cette étude détaillée.

Tout de même, je partage un peu l'opinion du député de l'Acadie quant à la... quant à la mise en application du projet de loi. Comme je le dis, c'est un projet de loi important, la... la pertinence du projet de loi n'est aucunement, aucunement en doute. Au contraire, là même, on sent l'effervescence, là, des gens qui sont venus en commission parlementaire à traiter... à traiter du sujet. Cependant, ce n'est pas toujours aussi facile que ça de le mettre... de le mettre... de le mettre en application.

• (11 h 20) •

J'aimerais peut-être soulever les quelques... en fait, selon moi, là, les points pertinents, ou du moins ceux qui sont revenus, les inquiétudes. Le député de l'Acadie en a parlé, entre autres le formulaire, le formulaire à venir, la complexité du... la complexité du formulaire, le formulaire qui sera peut-être en ligne, ou même il y avait une comparaison avec la lourdeur avant quand on voulait dénoncer. Donc ça, évidemment, il faut en tenir compte. La demande d'accompagnement, plus d'accompagnement, d'inclure aussi.... d'inclure aussi les hyper trucages. Il y avait... Oui, nous on les a vus parce que le ministre a eu la gentillesse de nous déposer hier, là, les... certains amendements dans le projet de... dans le projet de loi, les trucages. Ah! oui, on l'avait... on l'avait couvert. On l'avait couvert au fur et à mesure. Mais du moins, je remercie quand même de nous avoir transmis d'avance... d'avance, les amendements. Ça, ça nous permet justement de... tu sais, ça facilite beaucoup notre travail, notre travail en tant que... en tant qu'opposition.

Tout de moins, l'applicabilité et la mise en application, ça semble difficile, la rapidité. La réaction des tribunaux aussi, ça a été soulevé par... par différents groupes, par... Mêmes il y avait des... certaines inquiétudes qui ont été soulevées par le Barreau. La réponse... la réponse en cas de non-respect des ordonnances, c'était aussi une préoccupation importante des différents groupes qui sont venus ici puis qui nous ont partagé... qui nous ont partagé tout ça. Puis évidemment, bien, il faut porter une attention particulière aux sentiments... en fait, au faux sentiment de sécurité que pourrait amener quand on traite ce genre de sujet là.

Alors, M. le Président, l'étude détaillée sera vraiment importante. Les oppositions... en fait, de mon côté, on fera notre travail afin de bonifier le plus possible le projet de loi et en portant à l'attention du ministre les... les différents arguments qu'on a entendus ou qu'on a soulevés dans les... dans les mémoires.

Le Président (M. Bachand) :Merci beaucoup, Mme la députée de Vaudreuil. M. le député de Saint-Jean, s'il vous plaît.

M. Lemieux : Merci beaucoup, M. le Président. Content de vous retrouver, ainsi que tous mes collègues, au retour d'une de ces semaines en circonscription qui a été particulièrement fertile, en tout cas dans mon cas. Ne vous inquiétez pas, je ne serai pas très long parce que je suis moi aussi très pressé d'étudier ce très beau et nécessaire projet de loi. La collègue disait : C'est délicat. Et j'ajoute mais nécessaire, un peu à l'exemple du collègue de l'Acadie qui disait que c'était pertinent. Non seulement je suis... Je partage avec lui cette opinion-là, mais l'ensemble de l'oeuvre de sa vision de la nécessité du projet de loi et même des exemples qu'il rapportait de sa visite en circonscription.

C'est effectivement un projet de loi qui est fondamental aujourd'hui. Il l'aurait peut-être été hier, mais pas il y a 5 ou 10 ans. C'est important de voir que le législateur s'intéresse aux choses qui sont contemporaines et, dans ce cas-ci, on ne peut pas dire que ce ministre ne fait pas œuvre utile. D'ailleurs, le projet de loi n° 73 qu'on va étudier, tout est dans le titre, Loi visant à contrer le partage sans consentement d'images intimes et à améliorer la protection et le soutien en matière civile des personnes victimes de violence, parce qu'on l'a bien compris pendant les consultations et en discutant de ce projet de loi...

M. Lemieux : ...il y a déjà des dispositions criminelles, mais là, pour faciliter les choses pour la plupart des citoyens, on va passer à des mesures civiles. Le ministre avait commencé, je ne sais pas si vous vous souvenez, les remarques préliminaires, lors des consultations particulières, en parlant... Il m'a volé les mots de la bouche, en fait, en parlant d'enthousiasme et de fierté. En tout cas, il est conséquent parce qu'en déposant ces amendements en liasse hier, il nous montre qu'il sait où il veut aller et où il est prêt... jusqu'où il est prêt à aller. Dans la mesure où les citoyens nous ont, en consultations particulières, bien exposé plein de choses, entre autres.... et moi, je retiens ça, M. le Président, le contrôle coercitif, avec les groupes de femmes, les maisons de femmes qui sont venus nous voir et qui nous ont expliqué l'importance grandissante... En fait, c'est omniprésent maintenant le contrôle coercitif qui est exercé par cette... ce n'est pas une habitude, mais cette façon de contrôler les gens, avec des photos comme ça. On fait du chantage en réalité, donc, pour moi, c'est très important.

Ce qui est important aussi, c'est de rendre à César ce qui est à Jules, comme j'aime dire, et de rendre au ministre de la Justice l'initiative louable de toujours penser aux victimes. Ça fait 6 ans que je suis en Commission des institutions, M. le Président, avec vous, et ça fait 6 ans que je vois passer des projets de loi où les victimes sont toujours la priorité et qui sont toujours dans la mire du ministre pour améliorer leur sort, pour faciliter leurs démarches, et, sans flagornerie, j'en suis très fier. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Bachand) :Merci beaucoup, M. le député de Saint-Jean. Donc, ça met fin aux remarques préliminaires. Y a-t-il des motions préliminaires?

M. Morin :Il n'y a pas de motion préliminaire de ma part, M. le Président, mais j'invoquerais l'article 245 du règlement pour qu'on puisse procéder à une étude article par article, s'il vous plaît.

Le Président (M. Bachand) :Merci. Avec plaisir. Donc, nous sommes, donc, rendus à l'étape de l'étude article par article du projet de loi. Comme l'article 1 du projet de loi édicte la Loi visant à contrer le partage sans consentement d'images intimes, nous allons procéder, comme le veut notre jurisprudence, c'est-à-dire que, par conséquent, les dispositions de la loi édictée seront étudiées de la même manière et de la même ordre que le seraient les dispositions prévues dans un projet de loi. Nous allons donc étudier et mettre aux voix chaque article de la loi édictée.

Je prends maintenant en considération l'article 1 du projet de loi. M. le ministre... d'abord faire la lecture du premier alinéa...

M. Jolin-Barrette : Oui, M. le Président.

Le Président (M. Bachand) :...de l'article 1 du projet de loi ainsi que l'article 1 du projet de loi édicté, s'il vous plaît.

M. Jolin-Barrette : Oui. Alors, la Loi visant à contrer le partage sans consentement d'images intimes, dont le texte figure au présent chapitre, est édictée.

Et l'article 1 : «La présente loi a pour objet de permettre à une personne de prévenir ou de faire cesser, de façon urgente et simple, une atteinte à ses droits fondamentaux, notamment le droit à la sauvegarde de sa dignité, de son honneur et de sa réputation et le droit au respect de sa vie privée, protégés par la Charte des droits et libertés de la personne et par le Code civil, résultant du partage sans consentement d'une image intime, considérant qu'un tel partage est susceptible de lui causer un préjudice irréparable, notamment en raison du risque de propagation de cette image par des moyens technologiques.»

Commentaire : Ce premier article de la loi en précise l'objet.

Le Président (M. Bachand) :Merci beaucoup. Donc, interventions? M. le député de l'Acadie.

M. Morin :Oui. Merci, M. le Président. Alors, M. le ministre, pour 1.1, quand il y a des groupes qui sont venus nous voir, notamment le CAVAC, il soulignait l'importance d'une campagne nationale pour informer les gens de la situation, de ce... en fait de cette possibilité-là qui va être offerte désormais aux victimes, ça leur semblait être essentiel. Est-ce que vous avez des éléments que vous voulez partager avec nous là-dessus?

M. Jolin-Barrette : Bien, dans toutes les réformes que nous faisons, il y a plusieurs éléments qui sont en... je vous dirais, en action. Le premier, quand qu'on dépose le projet de loi, il y a en effet, un, d'objectif législatif, mais également un objectif pédagogique aussi de sensibiliser la population à ce que l'on fait. Vous avez vu, quand qu'on a déposé le projet de loi, la technique de... médiatique que nous avons utilisée visait notamment à faire parler du projet de loi et à sensibiliser la population.

Donc, très certainement, suite à l'adoption du projet de loi et à l'entrée en vigueur du projet de loi, on aura des communications avec la population, notamment pour les renseigner sur le nouvel outil à leur disposition. On a des partenaires également, comme, juridiques, également le site Web, qui vise à donner de l'information juridique, par le biais des sites Web du ministère de la Justice aussi. Donc, comme on le fait fréquemment, lorsqu'on fait des réformes, il y aura des campagnes d'information pour informer la population eu égard à ces outils-là maintenant qui vont être disponibles. Parce que l'idée, c'est que ça soit simple, qu'ils puissent agir rapidement puis qu'ils puissent trouver l'information...

M. Morin : ...et j'imagine que, dans ces campagnes-là, il y aura une possibilité de s'adresser ou d'obtenir tous ces renseignements-là en ligne.

M. Jolin-Barrette : Bien oui, tout à fait, parce que l'objectif, là, c'est que le formulaire, on va le voir plus loin, sur l'ordonnance visant à faire cesser le partage d'images intimes ou la destruction, elle va être disponible au greffe du Palais de justice en papier, là, si une personne se présente physiquement, ça va être... ça va être disponible pour le remplir physiquement sur place, mais également en ligne sur le site Web du ministère de la Justice, d'avoir... de pouvoir remplir le formulaire en ligne avec l'endroit où on va pouvoir l'envoyer au juge pour qu'il soit saisi de la demande et qu'il puisse la traiter de façon urgente.

M. Morin : Donc, je comprends que le formulaire va être envoyé directement dans une boîte, après ça, qui va être réparti... ça va être le juge de garde ou ça va être au greffe...

M. Jolin-Barrette : Dans le fond, au greffe...

M. Morin : ...va l'envoyer au juge de garde. Comment ça va fonctionner?

M. Jolin-Barrette : Exactement, au greffe, ça va être envoyé au greffe, puis le greffe va l'envoyer au juge qui est de garde, puis, dans le fond, la Cour du Québec va organiser ses rôles puis les dossiers en fonction du juge qui est disponible. Parce qu'à la Cour du Québec vous avez des juges à tous les jours qui siègent, notamment également la fin de semaine. Et vous vous souviendrez que, dans le projet de loi n° 54 aussi, on a prévu désormais que les JPM vont avoir la juridiction en matière de comparution et d'enquête sur mise en liberté, notamment les fins de semaine. Donc, supposons que la demande rentre, la fin de semaine aussi, ils vont pouvoir traiter la demande, parce que si la Cour décide d'utiliser des juges de paix magistrat la fin de semaine, dans le projet de loi qu'on a devant nous, c'est le projet de loi n° 73, on vient modifier l'annexe cinq de la loi sur les tribunaux judiciaires, justement pour donner cette attribution-là également aux juges de paix magistrats. Donc, c'est soit des juges de la Cour du Québec, soit des JPM qui vont avoir la juridiction pour le faire. Donc, l'administration de qui traite la demande, ça, c'est le juge en chef, par son pouvoir d'assignation, qui le fait. Mais nous, on est en amont, formulaire envoyé au greffe, greffe au juge qui est de garde.

• (11 h 30) •

M. Morin : Parfait. Je vous remercie.

Le Président (M. Bachand) :Autres interventions? Mme la députée de Vaudreuil.

Mme Nichols : Oui. Merci, M. le Président. Dans la mémoire du Protecteur national de l'élève, ils reviennent beaucoup sur la notion de la conservation d'images intimes. Puis il suggère même, là, dans le titre, de rajouter le mot «conservation». Est-ce que ça pourrait être une suggestion?

M. Jolin-Barrette : Bien, ce que l'on veut, c'est contrer la diffusion puis le partage d'images intimes.

Mme Nichols : Eux, ce qu'ils suggèrent, c'est : Loi visant à contrer la création, la conservation et le partage. Dans le fond, c'est pour éviter qu'on... que quelqu'un conserve... conserve l'image.

M. Jolin-Barrette : Oui, mais à partir du moment où la personne menace de la diffuser, l'ordonnance est valide aussi. Donc, ce qui est... ce qu'on vise, c'est vraiment le partage, pas la conservation dans le cadre du projet de loi. Le partage, la diffusion.

Mme Nichols : Oui, mais ce n'était est pas dans le sens de conserver l'image, mais c'est au cas où quelqu'un conserverait l'image, là, c'est plutôt le contraire, là, pour ne pas que la personne conserve l'usage, mais eux ils mentionnaient de le... ils suggéraient, du moins, de le... tu sais, qu'on... qu'on l'aborde ou qu'on inclut en quelque part que la conservation n'est pas non plus... ils suggéraient même de le... de l'inclure dans le titre. Je me souviens, c'était une des recommandations, entre autres, du protecteur national de l'élève. Oui, c'est ça, les notions de création et de conservation d'images intimes.

M. Jolin-Barrette : Mais, en fait, la création, dans le fond, quand il y a consentement, c'est une création, là. On ne vient pas interdire la création puis la conservation d'images intimes, ce qu'on vient empêcher...

Mme Nichols : C'est le partage...

M. Jolin-Barrette : ...c'est le partage, la diffusion puis la menace de diffusion aussi.

Mme Nichols : O.K., mais je trouvais quand même intéressantes les notions... puis c'est sûr qu'il y en... ils l'élaborent un peu plus, là, dans leur... dans leur mémoire, là.

M. Jolin-Barrette : À six, paragraphe trois, l'ordonnance du juge aussi peut ordonner de détruire l'image aussi, en fonction de la demande. Donc, si, supposons, que c'est une menace, ou que quelqu'un possède l'image, bien, une personne peut s'adresser à la cour pour demander la destruction d'une image intime qui est en possession de quelqu'un.

Mme Nichols : Très bien. Merci.

Le Président (M. Bachand) :Autres interventions à l'article un? S'il n'y a pas d'autre intervention, est-ce que l'article un est adopté? Adopté. Merci, M. le ministre, s'il vous plaît.

M. Jolin-Barrette : Oui, article deux, M. le Président...


 
 

11 h 30 (version non révisée)

M. Jolin-Barrette : ...constitue une image intime toute image, modifiée ou non, représentant ou semblant représenter une personne soit nue ou partiellement nue, exposant ses seins, ses organes génitaux, sa région anale ou ses fesses, soit se livrant à une activité sexuelle explicite lorsqu'elle pouvait s'attendre de façon raisonnable à ce que sa vie privée soit protégée, que ce soit dans les circonstances de la création, de la captation, de l'enregistrement de cette image ou, le cas échéant, celle où elle est partagée.

Est assimilé à une image, aux fins de la présente loi, tout enregistrement visuel ou sonore ou toute diffusion en direct.»

Commentaires : Cette disposition propose une définition d'«image intime»... une définition d'«image intime», laquelle couvre toute représentation réelle ou truquée d'une personne dont certaines parties intimes sont exposées.

Le Président (M. Bachand) :Merci beaucoup. M. le député de l'Acadie.

M. Morin :...M. le Président. Est-ce que la définition... bien, en fait, la définition que vous avez ressemble un peu à celle de l'article 162.1 du Code criminel. Ce n'est pas agencé exactement de la même façon, mais les éléments sont à peu près tous là. Est-ce que vous croyez qu'avec cette définition-là, M. le ministre, vous allez faire en sorte que, si quelqu'un crée des images, ou modifie en partie avec de l'intelligence artificielle, ou place le corps nu de quelqu'un, mais avec l'image ou la figure d'une autre personne... est-ce que vous pensez que votre définition est assez large et que ça va couvrir tout ça? Je vous pose la question parce qu'il y a certains groupes qui en ont parlé, puis quand on... quand vous écrivez «notamment ses seins, organes génitaux, sa région anale ou ses fesses, bien, évidemment, si c'est une image qui est truquée, ce n'est peut-être pas ses seins, mais c'est des seins avec sa figure.

Donc, je voudrais juste m'assurer que la définition est assez large pour être capable, au fond, d'identifier toutes ces images fausses, ou en partie fausses, qui peuvent être créées maintenant avec la technologie.

M. Jolin-Barrette : Oui. Merci, M. le Président. Je remercie le député de l'Acadie pour sa question parce que c'est important de le spécifier dans le cadre de l'étude détaillée, puis il amène un bon point.

Alors, effectivement, oui, les images truquées, hypertruquées, donc où on prend... ou générées par l'intelligence artificielle sont couvertes par le libellé du projet de loi. Donc, lorsque, dans les termes du paragraphe 1... de l'alinéa 1, on indique «modifiée ou non, représentant ou semblant représenter», ces termes permettent d'inclure les images modifiées, les fausses images, incluant les hypertrucages et les images générées par l'intelligence artificielle. Donc c'est la même formulation qu'en Colombie-Britannique, qui couvre également le cas des hypertrucages, donc, en anglais, on dit les «deep fake». Donc, oui, notre libellé vise à couvrir ces différentes situations là.

Donc, exemple, la juxtaposition d'un visage avec des parties du corps réel d'une autre personne ou générées par l'intelligence artificielle constitue une image modifiée qui semble représenter la personne nue. Alors, avec notre libellé à la fois les hypertrucages, les images générées par l'intelligence artificielle sont couverts, donc ça constituerait une image intime qui est visée par la loi.

Et d'ailleurs, lorsqu'on a tenu les consultations, M. Trudel, Pierre Trudel, qui est professeur émérite au Centre de recherche de droit public de l'Université de Montréal, qui enseigne justement le droit de l'information puis du cyberespace, a souligné que l'article 2 définit l'image intime comme toute image, modifiée ou non. Donc, ça inclut une image qui pourrait avoir été modifiée soit par l'intelligence artificielle ou par d'autres procédés techniques. Ça englobe aussi le procédé par lequel on utilise le visage d'une personne pour l'intégrer dans une image qui n'a rien à voir avec la vraie personne et qui serait, par exemple, dans une activité à caractère sexuel ou pornographique. Donc, lui-même, aussi, sa lecture, puis c'est un expert dans le domaine avec... notre libellé couvre ;la situation d'hypertrucage ou d'image générée par l'intelligence artificielle. Ça fait que je pense que c'était important de le mentionner dans le cadre de l'étude détaillée de la loi pour dire que quelqu'un ne pourrait invoquer que ce n'est pas une image intime. On vient couvrir, dans un spectre très large, toutes formes d'images, véridiques ou non, qui vise à identifier une personne.

M. Morin :Oui, effectivement. Parce que, bien sûr, dans le cadre de nos travaux, ça pourrait servir, éventuellement, à interpréter la loi. Je voulais juste m'assurer que toutes ces circonstances-là allaient être couvertes, alors, ce que vous venez de préciser, et je vous en remercie.

Le Président (M. Bachand) :Interventions sur l'article 2? S'il n'y a pas d'autre...

Le Président (M. Bachand) :...est-ce que l'article 2 est adopté?

Des voix : Adopté.

Le Président (M. Bachand) :Adopté. M. le ministre, l'article...

M. Jolin-Barrette : Oui, M. le Président. Alors, l'article 3 :

«Constitue le partage d'une image intime notamment le fait de publier, de diffuser, de distribuer, de transmettre, de vendre, de communiquer ou de rendre accessible une telle image ou d'en faire la publicité.»

Commentaire : Cette disposition expose en quoi consiste le partage d'une image intime aux fins de l'application de la loi.

Le Président (M. Bachand) :Et je crois qu'il y a un amendement.

M. Jolin-Barrette : Ah oui! Excusez-moi.

Le Président (M. Bachand) :Un amendement, oui.

M. Jolin-Barrette : J'ai un amendement aussi, M. le Président. Donc, ajouter à la fin de l'article 3 de la Loi visant à contrer le partage sans consentement d'images intimes, proposé par l'article 1 du projet de loi, l'alinéa suivant :

«Toutefois, le partage nécessaire aux fins de l'administration de la justice n'est pas visé par la présente loi.»

Commentaire : Cet amendement propose l'ajout d'un alinéa créant une exception permettant la communication de la preuve entre notamment les enquêteurs, les procureurs des poursuites criminelles et pénales et les greffiers pour fins... pour les fins d'une affaire judiciaire portant sur l'image intime concernée.

Donc, on vient ajouter un paragraphe à la fin qui est présent dans d'autres lois également, justement parce qu'on génère... avec l'article 3, on vient dire quel est l'objet, notamment, du projet de loi, en quoi ça consiste, la diffusion ou le partage d'images intimes, mais, si on veut que les forces de l'ordre puissent faire leur travail, bien, il faut qu'ils puissent, eux, dans le cadre d'un dossier judiciaire, d'administration de la justice, d'enquête... qu'ils puissent être en mesure de partager, justement, l'image entre les intervenants du système de justice pour constituer un dossier.

• (11 h 40) •

Le Président (M. Bachand) :Merci. Donc...

M. Jolin-Barrette : Donc...

Le Président (M. Bachand) :M. le ministre, oui.

M. Jolin-Barrette : Exemple, dans le Code de procédure pénale, là, c'est l'article 194.1 : «Nul ne peut publier ou diffuser une information permettant d'identifier une personne âgée de moins de 18 ans contre laquelle une poursuite est tentée ou une telle personne lorsqu'elle agit comme témoin, sauf dans la mesure où la communication de l'information est nécessaire à l'administration de la justice ou à l'application d'une loi au Québec pourvu que, dans ce dernier cas, elle ne soit pas divulguée au Québec.» Donc, exemple, on a une... un article similaire dans le Code de procédure pénale.

Le Président (M. Bachand) :Merci. Donc, interventions sur l'amendement?

M. Morin : En fait, compte tenu de votre amendement, M. le ministre, puis je comprends l'objectif que vous recherchez, quand vous dites : «Toutefois, le partage nécessaire aux fins de l'administration de la justice n'est pas visé par la présente loi.», donc c'est assez large, selon vous, pour couvrir toutes les situations où, pour des fins, par exemple, d'application de la loi, qui n'est pas nécessairement l'administration de la justice, donc, on pourra partager des images intimes?

M. Jolin-Barrette : ...de la justice, c'est assez large. Dans le fond, ça provient d'une demande du DPCP justement pour que les procureurs puissent faire leur travail dans le cadre des dossiers.

M. Morin :Oui. Puis je suis... Écoutez, quand vous dites l'administration de la justice, si un corps de police partage l'information...

M. Jolin-Barrette : Ça fait partie.

M. Morin : ...clairement, ils font partie de l'administration de la justice. Si vous avez un corps d'enquête ou deux corps de police qui le partagent entre eux, est-ce que ce n'est pas plus l'application de la loi que l'administration de la justice?

M. Jolin-Barrette : Non, c'est l'administration de la justice parce que le corps de police qui, supposons, fait enquête, c'est dans le cadre du processus du système de justice, donc ça va venir les couvrir également. Si c'est aux fins d'enquête, ils ne se partagent pas des images juste pour se partager des images, il y a un objectif derrière cela au niveau de l'application de la loi puis de l'administration de la justice.

M. Morin : O.K. Donc, pour vous, c'est assez large?

M. Jolin-Barrette : Oui.

M. Morin : Parfait. Je vous remercie.

Le Président (M. Bachand) :...sur l'amendement? S'il n'y a pas d'autre intervention, est-ce que l'amendement à l'article 3 est adopté?

Des voix : Adopté.

Le Président (M. Bachand) :Adopté. Donc, interventions à l'article tel qu'amendé? S'il n'y a pas d'autre intervention, est-ce que l'article 3, tel qu'amendé, est adopté.

Des voix : Adopté.

Le Président (M. Bachand) :Adopté. Merci. M. le ministre, s'il vous plaît.

M. Jolin-Barrette : Oui. 4, M. le Président :

«Le consentement à la création, à la captation, à l'enregistrement ou au partage d'une image intime ne constitue pas une renonciation aux droits fondamentaux auxquels la personne qui a consenti est en droit de s'attendre dans d'autres circonstances.»

Commentaire : Cet article vise à ce que le consentement à la captation, à l'enregistrement ou au partage d'une image intime soit limité aux circonstances pour lesquelles il a été donné et ne puisse être interprété comme un consentement plus large ou général. Autrement dit, il permet à la personne qui consent à la distribution d'une image intime à un individu de néanmoins préserver son droit à la vie privée vis-à-vis toute autre personne à qui elle n'a pas consenti à distribuer l'image.

Le Président (M. Bachand) :Merci beaucoup. Donc, interventions? M. le député de l'Acadie.

M. Morin : Merci, M. le Président. Pour cette disposition-là, cet article-là, le Barreau du Québec avait un commentaire et le Barreau invitait le législateur à clarifier la rédaction de l'article pour en faciliter la lecture, la compréhension. En fait, il souhaitait que ce soit rédigé...

M. Morin :...d'une manière affirmative. On dit entre autres que ça serait peut-être plus évident qu'une personne ne consent que pour des fins spécifiques pour lesquelles le consentement est émis et pas pour une utilisation future non prévue. Donc, je me demandais si vous avez tenu compte de ça. Est-ce que vous croyez que la rédaction présentement est assez claire ou s'il n'y aurait pas lieu de la clarifier davantage?

M. Jolin-Barrette : Bien, écoutez, on a pris acte du commentaire du barreau, je le respecte. Cependant, pour moi, le libellé est assez clair, là, à l'article 4. La façon que les juristes l'ont rédigé, ça me convient tout à fait.

M. Morin :O.K. En fait, le Barreau soulignait que... c'est la page 4 de leur mémoire : «En rédigeant la disposition de manière affirmative, il serait plus évident qu'une personne ne consente que pour les fins spécifiques pour lesquelles le consentement est émis, pas pour une utilisation future non prévue... le partage, alors que l'image intime aurait dû demeurer privée.» On dit : «En outre, la disposition pourrait également prévoir une composante visant les droits et obligations de la personne qui fait le partage non consensuel d'une image intime, en précisant notamment que celle-ci ne peut invoquer sa liberté d'expression pour maintenir le partage et la communication de ces images.»

M. Jolin-Barrette : Bien, vous savez, moi, je le trouve très, très clair, notre amendement, et je trouve que le Barreau complexifie les choses.

M. Morin :Et donc avec cet article-là... très bien, donc c'est bon. Parfait. Je vous remercie.

Le Président (M. Bachand) :Merci. Mme la députée de Vaudreuil.

Mme Nichols : Merci, M. le Président. Je reviens toujours avec le Protecteur de l'élève, la notion de conservation d'images intimes. Est-ce que ça serait... J'ai compris, là... j'ai compris, dans les premiers articles, là, le ministre a expliqué en fait que c'était inclus. Ici, est-ce que ce n'est pas un endroit, justement, où on pourrait le spécifier, soit en disant que le consentement à la création, à la captation, à l'enregistrement, à la conservation ou au partage d'une image intime ne constitue pas une renonciation? Est-ce qu'on ne devrait pas ici ajouter le mot «conservation», conservation d'images intimes?

M. Jolin-Barrette : Mais ce que l'on vise surtout, c'est le partage dans le cadre de la loi, ce n'est pas la conservation. D'une façon détournée, la personne peut demander la destruction de l'image, parce qu'elle est en possession d'un individu, mais l'objet du projet de loi, c'est vraiment le partage. On ne rentre pas dans le stockage.

Mme Nichols : Oui, je le sais, mais vu qu'ici on parle entre autres de création, de captation, d'enregistrement, le mot «conservation» a peut-être une bonne place dans... Je comprends, là, puis je l'ai compris dans le... Tu sais, je trouvais que, dans la première partie, ça pouvait s'appliquer. Ici, je me disais que ça pourrait peut-être être un détail important à rajouter. Tu sais, on va dire... les gens vont dire : Bien oui, je l'ai détruit, l'image. Mais ça n'empêche pas qu'il va peut-être détruire l'image que tu viens de voir, mais il va peut-être, tu sais, en conserver une copie ou... Tu sais, je trouve que ça vient apporter quand même un point, une précision.

M. Jolin-Barrette : Bien, dans le fond, il serait en situation d'outrage par rapport à l'ordonnance. Il se retrouverait dans une situation où... supposons que le juge ordonne de détruire l'image, il se retrouverait en porte à faux avec... à ne pas respecter l'ordonnance. S'il y a une demande de destruction...

Mme Nichols : Oui, je comprends. Tu sais, je comprends la... puis je comprends qu'il y a une tranche parce que, tu sais, il est supposé avoir détruit l'image puis il contrevient à ce que le juge aura ordonné. À tout le moins, est-ce que ça n'est pas justement préciser que : Regarde, tu n'as pas le droit de la conserver?

M. Jolin-Barrette : Puis l'autre élément, c'est qu'exemple une image d'un mineur, c'est de la pornographie juvénile, ça fait que c'est une infraction criminelle aussi. Ça fait que, tu sais, sous le Protecteur de l'élève, les élèves sont mineurs.

Le Président (M. Bachand) :M. le député d'Acadie.

M. Morin :Oui. Je voulais simplement attirer l'attention de M. le ministre à l'article 5 qui et avoir ses commentaires. La Fédération des maisons d'hébergement pour femmes, quand elles ont déposé leur mémoire...

M. Jolin-Barrette : Est-ce que vous avez dit l'article 5? Vous êtes rendu à 5?

Une voix : ...

M. Morin :On est encore à 4, O.K., parfait. Bien, on va attendre, mais 5, ça s'en vient. Mais ceci...

M. Morin : ...ceci étant, mais merci. Oui, protecteur de l'élève. Donc, pour reprendre ce que ma collègue le député de Vaudreuil disait, donc c'est sûr que si la personne ne demande pas au juge de détruire l'image, la personne va pouvoir quand même la conserver. Tu sais, elle ne pourra pas la partager, mais elle pourrait quand même la garder, donc.

M. Jolin-Barrette : Mais l'article 4, il est là pour faire en sorte que, exemple, je consens à enregistrer une image et à la diffuser à vous, mais, par contre, 4 fait en sorte que je ne consens pas à ce que le député de l'Acadie la diffuse à la députée de Vaudreuil. Donc, le fait de consentir à un élément... parce que c'est permis, là, de diffuser des images intimes avec le consentement, là.

M. Morin : Exact.

M. Jolin-Barrette : Donc, si je consens, vous y consentez à recevoir mon image intime, ça va, on est dans une relation consensuelle, on est deux majeurs, vous n'êtes pas en situation de contrainte sur moi, ça me fait plaisir de vous en envoyer une, mais je ne consens pas à ce que la députée de Vaudreuil ait mon image, on n'est pas rendus là dans notre relation.

M. Morin : Et «en droit de s'attendre dans d'autres circonstances», ça peut viser quoi? Ça me semble être très large.

• (11 h 50) •

M. Jolin-Barrette : Mais ça permet à la personne qui consent à la distribution d'images intimes à un individu de néanmoins préserver son droit à la vie privée vis-à-vis de toute autre personne à qui elle n'a pas consenti. Donc, c'est le partage à d'autres. Exemple, vous imprimeriez la photo, vous la diffusez à la députée de Vaudreuil par texto, sur un site Web également. Donc, moi, mon consentement, il est à l'endroit de vous. Je consens à ce que le partage de mon image intime soit envoyé au député de l'Acadie, mais je préserve et je réserve mes droits à la diffusion de cette image-là sur d'autres plateformes. Donc, je ne consens pas à ça. Donc, l'article 4, il vient nous dire ça, là, consentement à la création, à la captation, à l'enregistrement ou au partage d'images intimes ne constitue pas une renonciation aux droits fondamentaux auxquels la personne qui a consenti est en droit de s'attendre dans d'autres circonstances. Ça veut dire, le fait que vous ayez une image intime de moi-même, je vous la diffuse à vous, j'y consens, mais ça ne veut pas dire qu'un coup que je vous la donne, automatiquement, vous dites : Ah, le député de Borduas me l'a envoyé, ça fait que je peux la diffuser sur Internet. Je ne lève pas mes garanties sur mes droits fondamentaux qu'une image intime de moi diffusée sur un site Internet ça pourrait porter atteinte à mon intégrité physique.

M. Morin : Oui, je comprends, mais le fait de dire, par exemple, que l'image intime ne constitue pas une renonciation aux droits fondamentaux, que la personne qui a consenti est en droit de s'attendre, point. Ça ne règle pas la question.

M. Jolin-Barrette : Mais dans d'autres circonstances, les circonstances autres, c'est que moi, je vous l'ai peut-être diffusé par message texte, mais, par contre, vous, vous la diffusez sur une autre plateforme, exemple sur Internet. Là, à ce moment-là, c'est une autre circonstance, ce n'est pas un... supposons, par texto que vous l'envoyez à la députée de Vaudreuil, vous faites, vous créez un lien Web puis vous dites à la députée de Vaudreuil : Allez voir ça, j'ai des images intéressantes à vous montrer. Alors, dans ce cas là, c'est non, ça prend mon consentement, et je ne renonce pas à mes droits fondamentaux à l'égard de cette seconde diffusion-là, parce que mon consentement est valide qu'à votre endroit.

M. Morin :Parfait. Je vous remercie.

Le Président (M. Bachand) :Mme la députée de Vaudreuil.

Mme Nichols : Je me permets juste d'ajouter que, je trouve, c'est encore plus pertinent après les explications, d'ajouter la conservation pour ne pas que l'intermédiaire, justement, tu sais, conserve les images.

M. Jolin-Barrette : Mais non, mais dans ce cas là, je consens à ce qu'il ait mon image. Quand je lui diffuse, je consens à ce qu'il l'ait. C'est comme implicite.

Le Président (M. Bachand) :Merci. Autres interventions à l'article 4? S'il n'y a pas d'autre intervention à l'article 4, est-ce que l'article 4 est adopté?

Des voix : Adopté.

Le Président (M. Bachand) :Adopté. M. le ministre.

M. Jolin-Barrette : 5. Et on aura un amendement, M. le Président. Une personne peut révoquer son consentement au partage d'une image intime. Toute personne à qui la révocation est communiquée doit s'abstenir de partager l'image intime et faire tout effort raisonnable pour rendre cette image inaccessible. À défaut, elle est responsable du préjudice résultant de l'accessibilité à cette image ou de son...

M. Jolin-Barrette : ...toutefois, la révocation n'est pas possible lorsque le consentement a été donné dans le cadre d'un contrat conclu à des fins commerciales ou artistiques, à moins que cette possibilité n'y ait été prévue.»

«Commentaires : Cet article prévoit les conditions de révocation du consentement au partage d'images intimes et les conséquences de cette révocation.

Et l'amendement : Insérer, à la fin du troisième alinéa de l'article 5 de la loi visant à contrer le partage sans consentement d'images intimes proposé par l'article 1 du projet de loi, «ou qu'il s'agisse d'un contrat d'adhésion».

Commentaires : Cet amendement exclut les contrats d'adhésion, par exemple, les conditions d'utilisation des réseaux sociaux, de l'exception au droit à la révocation du consentement. Donc, ça, ça fait suite aux commentaires que nous avons eus en consultations, justement pour faire en sorte que la situation du contrat d'adhésion, où est-ce... qu'on ne puisse pas se le faire opposer dans les conditions, tu sais, exemple, «toutefois, la révocation n'est pas possible lorsque le consentement a été donné que... dans le cadre d'un contrat conclu à des fins commerciales ou artistiques, à moins que cette possibilité n'y ait été prévue ou qu'il s'agisse d'un contrat d'adhésion. Donc, la révocation va être possible dans le cadre d'un contrat d'adhésion.

Le Président (M. Bachand) :Merci. M. le député de l'Acadie.

M. Morin :Oui. Je veux être juste bien, bien certain de bien comprendre. En fait, ce que ça dit, c'est que ça permet, bon, de révoquer le consentement. Donc, une personne pourrait changer d'idée, dire, à un moment donné : Oui, j'ai envoyé cette image intime, mais là je ne le veux plus. Donc, on vous envoie ça, puis là, bien, partagez-la pas. Maintenant... mais, bon, alors, évidemment, doit s'abstenir de la partager, bon.

Puis «faire tout effort raisonnable pour rendre cette image inaccessible», ça veut dire quoi? La barrer dans son ordinateur avec un mot de passe? Je veux dire... Parce que s'abstenir de la partager, oui, ça, c'est clair, il ne peut pas l'envoyer, mais là, s'il la laisse dans son ordinateur ou dans son téléphone, c'est-tu un effort raisonnable pour rendre l'image inaccessible, d'une part? Puis, d'autre part, la révocation, ça dit, n'est pas possible lorsque le consentement a été donné dans le cadre d'un contrat. Donc, j'imagine que quelqu'un qui, je ne sais pas, là, vous me corrigerez si je fais erreur, mais qui, dans le cadre d'un film, par exemple, doit tourner des scènes où on va voir des images intimes, bien, ça, à ce moment-là, ça peut être prévu au contrat. C'est ce que vise le dernier alinéa. Donc, ça, c'est des fins commerciales ou artistiques, donc ça doit être prévu, mais «ou qu'il s'agisse d'un contrat d'adhésion»... donc, un contrat d'adhésion pourrait couvrir ce scénario-là?

M. Jolin-Barrette : Dans le fond, premier et deuxième alinéas visent à dire : En tout temps, vous avez partagé une image intime, vous pouvez retirer votre consentement puis aller chercher une ordonnance pour faire en sorte que la personne cesse le partage et qu'elle la rend inaccessible, donc qu'elle la détruise, qu'elle la diffuse.

M. Morin :Oui. Ça, c'est clair.

M. Jolin-Barrette : Ça fait que ça, c'est le principe de base. Je vous envoie ma photo, député de l'Acadie, de consentement. Finalement, une semaine après, je réalise que...

M. Morin :Vous changez d'idée.

M. Jolin-Barrette : Je change d'idée.

M. Morin :Vous dites non.

M. Jolin-Barrette : Là, je vous dis : Voulez-vous... pouvez-vous la détruire? Vous me dites : Je la garde. Je m'en vais voir le juge, il vous envoie une ordonnance : destruction.

Le troisième alinéa vise la situation où la révocation n'est pas possible si vous avez donné votre consentement en raison du fait que c'est un contrat conclu à des fins commerciales ou artistiques, exemple, un film pornographique pour lequel vous êtes rémunéré. Donc, il y a un contrat, je suis un acteur d'un film pornographique, donc, théoriquement, je devrais avoir une partie de mon corps qui est nue, théoriquement, en fonction du scénario élaboré. Et là, à ce moment-là, bien, puisque j'ai consenti, c'est un contrat de nature commerciale ou artistique, c'est une œuvre. Bien là, à ce moment-là, je ne peux pas dire : Bien, je révoque mon consentement, parce que j'y ai consenti volontairement, dans un objectif commercial ou artistique, à moins que cette possibilité n'y ait été prévue. Alors, il pourrait y avoir dans le contrat une situation... dire, bien, je pourrais révoquer mon consentement à la diffusion. Alors, je tourne un film à des fins commerciales, mais il y a quand même une clause dans le contrat qui dit : Bien, l'acteur, le député de Borduas, en question pourrait décider de retirer son consentement à la diffusion de cette scène-là, de cette image-là. À ce moment-là, ça...

M. Jolin-Barrette : ...dans les paramètres contractuels, alors ça va être possible de retirer l'image intime. Il faut que la clause soit là, mais là on rajoute une exception.

M. Morin : Et tout ça à date, là, je le saisis très bien, mais c'est le contrat d'adhésion que je trouve étonnant.

M. Jolin-Barrette : Alors, le contrat d'adhésion, à moins que cette possibilité n'y ait pas été prévue ou qu'il... n'y ait été prévu, ou qu'il s'agit d'un contrat d'adhésion. Alors, supposons que c'est un contrat d'adhésion à des fins commerciales ou artistiques, O.K., puis que le contrat, il n'est pas négocié. C'est juste un contrat qui est imposé, ça constitue un contrat d'adhésion. Tu sais, voici, signez en bas puis toutes les clauses sont là, puis on se retrouve dans une situation où il n'y a pas de discrétion de la personne. Bien, à ce moment-là, cet... ce consentement-là, il n'est pas valide au sens... Il est valide, mais au sens où vous avez droit tout de même à la révocation parce que vous n'avez pas de négocier les paramètres et les termes du contrat. Donc, c'est Option consommateur qui nous... qui nous a souligné ça en commission. Exemple, sur des réseaux sociaux, supposons, quand vous décidez de vous inscrire sur un réseau... un réseau social, souvent c'est un contrat d'adhésion. Vous utilisez la plateforme, puis voici. Et là, ça dirait, supposons : Bien, si vous déposez une image intime dessus, bien, vous ne pouvez pas révoquer votre consentement.

Alors, dans ce cadre-là, puisque c'est un contrat d'adhésion, vous n'avez rien à dire pour l'utilisation de la plateforme, on prévoit précisément que vous allez pouvoir demander. Parce que, quand vous avez... vous n'avez pas négocié les termes du contrat. Donc, votre image intime pourra être retirée parce qu'il s'agit d'un contrat d'adhésion, parce que vous êtes... Dans un contrat d'adhésion, vous n'avez pas le choix de... d'accepter les conditions qui sont énoncées. Puis c'est comme si vous renonceriez sans véritablement un consentement complet à ce que votre image intime soit diffusée. Donc là, le législateur vient mettre un mécanisme pour dire : Bien, si c'est un contrat d'adhésion, puis vous ne l'avez pas négocié, vous n'aviez pas la possibilité de dire : On va se prévoir une clause pour dire : Bien, malgré le fait que je mets une image... une image où je suis nue, une image intime, bien là, à ce moment-là, le législateur dit : Bien oui, vous allez toujours avoir recours, vous allez pouvoir utiliser le recours de la Loi visant à contrer le partage d'images intimes, parce que la nature du contrat vous empêchait de le négocier.

• (12 heures) •

M. Morin : Parfait.

M. Jolin-Barrette : Ça fait que c'est ça que...

M. Morin : Donc, ça clarifie et... et, quant à moi, c'était effectivement important que ce soit clarifié dans le sens que vous venez de l'indiquer, parce que la nature même d'un contrat d'adhésion, et vous l'avez souligné, c'est que vous ne négociez pas, c'est adhésion, vous adhérez à toutes les clauses, on est dans un cas comme ça. Et donc... et là, j'essayais de voir quels pouvaient être les scénarios. Parce que j'imagine que dans le cas d'un film ou d'une émission de télé, habituellement, le contrat est toujours négocié. Donc, vous avez fait référence à des plateformes numériques où, là, il n'y a pas de négociation, la personne adhère avec le contenu ou pas, les conditions sont là, là, on ne peut pas les négocier.

M. Jolin-Barrette : Exactement. Prenons un exemple concret, supposons la plateforme... où il y a diffusion de contenu parfois explicite. Là, à ce moment-là, l'utilisation de la plateforme, c'est un contrat d'adhésion. Puis là, théoriquement, si on n'avait pas cette exception-là, la personne qui dirait : Bien, je ne veux plus que mon image intime soit utilisée, je vous demande de détruire l'image, bien, si c'est un contrat commercial ou à des fins artistiques, à ce moment-là, elle n'aurait pas le recours, parce que le contrat d'adhésion est comme... vous utilisez la plateforme, toutes les photos nous appartiennent maintenant. Donc là on vient de couvrir avec cette situation-là.

M. Morin : Puis ces plateformes-là, il peut y avoir un lien de rattachement, parce qu'elles sont en service ou elles sont accessibles au Québec?

M. Jolin-Barrette : Oui. Bien, en fait, l'ordonnance... vont pouvoir être signifiées aux entreprises qui... au Québec. Puis il y a des ententes aussi de réciprocité, puis tout ça. Donc...

M. Morin : Je vous pose la question parce qu'effectivement, si c'est un contrat d'adhésion, mais que la plateforme, je ne sais pas, moi, est un pays ailleurs, autre, je ne sais pas, en Asie, quelque part, là, vous demandez ça au juge de paix, il peut peut-être se poser la question s'il peut émettre l'ordonnance ou pas. Puis, s'il l'émet, bien là, vous allez signifier ça ou... woups! quelque part.

M. Jolin-Barrette : Bien, tout dépendant la juridiction dans laquelle c'est basé. Mais généralement, les gens qui font affaire au Québec ont une place d'affaires au Québec. Mais, avec le web, vous savez, certaines difficultés que nous avons... ça fait qu'avec certains États on a des ententes de réciprocité, avec d'autres, on n'en a pas. Alors, oui, ça amène une certaine difficulté, mais dans la mesure dont... qu'on est capable de faire par rapport aux...


 
 

12 h (version non révisée)

M. Jolin-Barrette : ...au web, bien, on va le plus loin possible.

M. Morin : O.K. Parfait. Je vous remercie.

Le Président (M. Bachand) :Autres interventions sur l'amendement? S'il n'y a pas d'autre intervention, est-ce que l'amendement est adopté?

Des voix : Adopté.

Le Président (M. Bachand) :Adopté. Donc, autres interventions sur l'article 5 tel qu'amendé? M. le député de l'Acadie.

M. Morin : Oui, dans... il y avait, dans le mémoire du protecteur de l'élève, à la page 9... 8, en fait, donc, c'est bien l'article 5, on parlait de disparité entre les notions utilisées dans les différentes mesures du projet de loi n° 73, qui pourraient occasionner des protections différentes selon la nature de l'usage illicite d'images intimes. Et on donne comme exemple : l'article 5 prévoit uniquement la possibilité de retirer le consentement en regard du partage d'une image intime, mais pas en ce qui a trait à sa création, sa captation, son enregistrement, sa conservation. On dit : Or, une personne devrait pouvoir également retirer son consentement à la création d'une image intime le représentant. Et il y avait également, dans le mémoire de... toujours au même article 5, on soulignait, à la page 3 : Or, alors même que seule la personne ayant initialement reçu le consentement au partage d'une image intime aura suffisamment de contexte pour évaluer la portée et la validité de toute révocation, il semble que toute personne, qu'elle soit physique ou morale, pourrait avoir des obligations de responsabilité quant au préjudice. Et on dit, en conclusion : Nous croyons que le régime de révocation du consentement devrait s'appuyer sur une relation bilatérale entre la personne qui a initialement donné le consentement et celle qui l'a initialement reçu. Donc, est ce que c'est des choses que vous avez considérées dans le cadre de la rédaction de l'article 5?

M. Jolin-Barrette : Mais nous, on est vraiment au niveau du partage des images intimes, pas au niveau de la création puis de la captation, parce qu'on ne peut pas gérer la création puis la captation d'une personne qui est là et qui accepte de capter et d'enregistrer. Alors, on est vraiment au niveau de la diffusion, du partage. Donc, c'est pour ça qu'on est avec ce libellé-là. Puis on va pouvoir obtenir une ordonnance pour détruire et également sur la menace de diffusion aussi, ça fait que, tu sais, à partir du moment où la personne est dans une situation où il y a une menace de diffusion, elle peut s'adresser à la cour pour faire détruire une image.

M. Morin : O.K. Et dans le mémoire de la Fédération des maisons d'hébergement pour femmes, il y a une réflexion en lien avec l'article 5. En fait, il proposait une présomption de faute lorsqu'il y a partage d'images intimes sans le consentement et ils proposaient de limiter la révocation aux clauses contractuelles et artistiques, mais là évidemment il y a le contrat d'adhésion. Puis on soulignait... eux autres, ils disaient : Une personne est réputée ne pas avoir donné son consentement au partage d'une image intime qui la concerne.

M. Jolin-Barrette : Mais là, il y a déjà la présomption de faute à l'article 21 de la loi. Alors, la présomption de faute est utile dans le cadre d'un recours en responsabilité civile, mais pas nécessairement pour une ordonnance urgente en cessation de la prévention. Donc, ça va être aux défendeurs maintenant à prouver que la personne consentait dans le recours en dommages-intérêts. Là, ce qu'on veut faire, c'est faire cesser la diffusion. Donc, on va voir plus loin le recours en responsabilité civile.

M. Morin :Parfait. Merci.

Le Président (M. Bachand) :Autres interventions à article 5 tel qu'amendé? S'il n'y a pas d'autre intervention, est-ce que l'article 5, tel qu'amendé, est adopté?

Des voix : Adopté.

Le Président (M. Bachand) :Adopté. M. le ministre, s'il vous plaît.

M. Jolin-Barrette : 6, M. le Président, un juge de la Cour du Québec ou un juge de paix magistrat peut ordonner, en cas de partage sans consentement d'une image intime ou de menace d'un tel partage, à toute personne qui détient ou qui a sous son contrôle une image intime, et ce dès la notification de l'ordonnance :

1 de s'abstenir de partager cette image;

2 de cesser tout partage de cette image;

3 de détruire cette image.

De même, ce juge peut ordonner à toute personne de désindexer tout hyperlien permettant d'accéder à cette image. Il peut en outre ordonner à toute personne de lui fournir toute information nécessaire ou utile en vue de faire cesser le partage d'une telle image, de prévenir ce partage, notamment toute information pouvant servir à identifier une personne ayant partagé une telle image ou menaçant de le faire, ainsi que prononcer toute autre ordonnance accessoire appropriée dans les circonstances.

Commentaires : Cet article prévoit l'ordonnance qui assurerait qu'on s'abstienne de partager une image intime ou qu'on cesse ce partage. Cette ordonnance serait rendue par un juge de la Cour du Québec ou un juge de paix magistrat.

Donc, on a à la fois...

M. Jolin-Barrette : ...la diffusion, on a à la fois la menace de diffusion, on a à la fois ce qui est possédé, supposons, dans le téléphone, messagerie, tout ça, mais on a également les hyperliens, donc sur Internet également.

Le Président (M. Bachand) :Merci. Interventions? M. le député de l'Acadie.

M. Morin : Merci, M. le Président. Donc, si on revient à l'exemple que vous avez souligné, par exemple, à... quand on parlait de l'article cinq et qu'on parlait de sites où les gens peuvent partager des images intimes, Donc une personne qui, dans un cas comme ça, retirait son consentement, ne voudrait plus qu'elle soit partagée et qu'il voudrait que l'image soit détruite, donc je comprends qu'à ce moment-là, quand vous dites : «Toute personne de désindexée», toute personne, ça inclut une société également?

M. Jolin-Barrette : ...ça inclut également une personne morale, toute personne, à la fois une personne physique ou une personne morale.

M. Morin : Donc, ça, ça va être couvert.

M. Jolin-Barrette : Oui.

• (12 h 10) •

M. Morin : O.K., parfait. Maintenant, ça, c'est pour l'ordonnance. Je comprends que, quand la personne demande l'ordonnance, est-ce que le juge... Puis j'imagine qu'il peut... Parce qu'après ça vous dites : «Il peut en outre ordonner de lui fournir toute information nécessaire ou utile.» Donc, est-ce que le... La personne qui demande l'ordonnance, est-ce que le juge peut communiquer avec elle? Il peut-tu demander des renseignements supplémentaires? C'est... Donc, ça, c'est... ça, c'est prévu.

M. Jolin-Barrette : Oui. Alors, le juge, à partir du moment où il reçoit l'ordonnance, il peut requérir des explications supplémentaires de la part de la personne victime, dont c'est l'image intime qui... qui se retrouve en diffusion. Alors, il a un pouvoir assez large pour pouvoir émettre l'ordonnance d'une façon appropriée, de requérir des renseignements supplémentaires. Cependant, si ce n'est pas nécessaire, le juge peut... En fait, c'est prévu qu'il rend son ordonnance dans son bureau, et le juge... dans son bureau, ça veut dire, pour les gens qui nous écoutent, ce n'est pas nécessaire nécessairement d'être en salle de cours. De toute façon, c'est à huis clos. Et ce qui est important de dire aussi, c'est que c'est sans la présence du défendeur, de la personne qui est visée, ou, s'il peut le faire hors la présence du défendeur, c'est une demande qui est visée directement. C'est ça. Ça fait qu'il peut... il peut, dès la réception de la demande, contacter la personne victime, puis lui demander des renseignements supplémentaires ou même convoquer une audience aussi. Il pourrait décider de convoquer une audience aussi. On laisse beaucoup de discrétion au juge, parce que, considérant la nature urgente, bien, il faut que le juge ait de la flexibilité. Par contre, ce n'est pas nécessaire que le défendeur ait été notifié de la demande au moment que le juge rend son ordonnance.

M. Morin : Sauf qu'évidemment il va falloir que l'ordonnance soit signifiée le plus rapidement possible si on veut qu'elle ait son plein effet, là.

M. Jolin-Barrette : Par la suite, mais au... avant le prononcé, ce n'est pas nécessaire. On peut le faire ex-parte sans la présence de la personne qui va être visée par l'ordonnance.

M. Morin :C'est... Oui, c'est ce que je comprends.

M. Jolin-Barrette : Mais le juge pourrait exiger que la personne vienne aussi, il pourrait dire : Bien, écoutez, je veux que votre demande d'ordonnance soit notifiée à la personne qui est visée par l'ordonnance, par la demande d'ordonnance.

M. Morin :Oui, exact. Maintenant, s'il y a des échanges comme ça et que ça se fait d'une façon numérique, le juge a un grief numérique, le juge a un greffe numérique où il va pouvoir déposer tous ces documents-là?

M. Jolin-Barrette : Bien, en fait, le juge va... Dans le fond, pour la personne victime, ça va pouvoir être possible de l'envoyer électroniquement, mais, par la suite, le juge a les renseignements de la personne, du demandeur. Donc, il va pouvoir le contacter par téléphone ou par courriel en fonction des moyens technologiques applicables.

M. Morin : Oui, sauf que si, par exemple, le juge veut avoir des renseignements supplémentaires, donc, il communique avec le demandeur, donc toutes ces informations-là, c'est... que ce soit par courriel ou autrement, c'est pertinent pour le dossier. Donc, ça, le juge, il va garder ça dans un dossier numérique, il va tout imprimer ça, il va laisser ça au greffe. Comment... comment ça va fonctionner?

M. Jolin-Barrette : Bien, ça va... ça va être un dossier judiciaire qui va être créé comme n'importe quel... n'importe quel autre dossier judiciaire. Donc, actuellement, on est encore papier, à part certains modules, avec l'excuse qu'on avance, mais éventuellement tout va être numérique.

M. Morin : Donc, dans un cas comme ça, évidemment, il faudrait imprimer les documents éventuellement puis déposer ça dans un dossier au greffe.

M. Jolin-Barrette : Exactement.

M. Morin : O.K. Et, une fois que l'ordonnance a été émise, est-ce que le...

M. Morin :...est-ce que le dossier est accessible au public en général?

M. Jolin-Barrette : Non.

M. Morin :O.K. Mais ça, on va voir plus loin une disposition à cet effet-là?

M. Jolin-Barrette : On va le voir plus loin.

M. Morin :O.K. Parfait. Il y a-tu d'autres choses?

Le Président (M. Bachand) :Mme la députée de Vaudreuil...

M. Morin :Bon. Toujours...

Le Président (M. Bachand) :Excusez-moi, M. le député.

M. Morin :Non, non, allez-y.

Le Président (M. Bachand) :Je vous reviens. Je vous reviens.

M. Morin :Il n'y a pas de souci.

Mme Nichols : ...peut-être juste, tu sais, pour ceux qui... ceux qui essaient de suivre, là, dans le fond, il va... il va y avoir un formulaire qui va être complété, qui va être envoyé au juge pour une ordonnance d'urgence, bien, soit un juge de la Cour du Québec ou un juge de paix magistrat, qui va... qui va recevoir la demande, qui va la traiter de façon urgente. Puis il n'a pas besoin de donner tout de suite... il n'a pas besoin de donner suite au demandeur. En fait, il n'a pas besoin... il peut aller chercher l'information qu'il veut, là, auprès du demandeur s'il a besoin d'information supplémentaire pour rendre son ordonnance. Mais ici on dit que c'est la personne qui détient, donc que c'est la personne qui va avoir l'image... qui va avoir l'image. Moi, c'est la partie notification, là, de l'ordonnance, là. Comment ça va être notifié à cette personne-là qui détient l'image? Ça va être selon l'information que le demandeur va avoir mise dans le formulaire ou selon l'information que le juge va être allé récupérer auprès du demandeur quand il va l'avoir...

M. Jolin-Barrette : Oui, ils vont le viser, ils vont dire, supposons : C'est le député de l'Acadie qui a l'image. Donc, ça va être notifié au député de l'Acadie, l'ordonnance de la cour, par le greffier du tribunal. Ça va être l'article 14 du projet de loi.

Mme Nichols : Oui, on va y arriver, on va y arriver, c'est certain, mais... bien... Puis je comprends, là, les points 1, 2, 3, là, s'abstenir de partager, cesser tout partage, détruire cette image, ça me convient, mais c'est la notification. La notification peut se faire en tout moment, la fin de semaine...

M. Jolin-Barrette : Oui. Bien, dans le fond...

Mme Nichols : ...le juge va pouvoir passer.

M. Jolin-Barrette : On va le voir à l'alinéa 2, «elle peut l'être par tout mode approprié qui permet de constituer une preuve de sa remise, soit notamment par l'huissier de justice, par l'entremise de la poste recommandée, par la remise en mains propres par un service de messagerie ou par un moyen technologique. Quel que soit le mode de notification utilisé, la personne qui accuse réception ou reconnaît l'avoir reçu est réputée avoir été valablement notifiée.» Ça fait qu'on met une présomption, ici.

Mme Nichols : O.K.

Des voix : ...

M. Jolin-Barrette : Oui, puis la notification est sans délai, donc c'est immédiatement.

Le Président (M. Bachand) :M. le député d'Acadie.

M. Morin :Oui. Dans le document qui a été présenté par... à 6, alinéa 1, quand on parle de «l'ordonnance à toute personne qui détient ou qui a sous son contrôle une image intime, de s'abstenir de la partager, de cesser tout partage ou de la détruire», ici, on souligne que, dans l'ensemble de la loi sur les images intimes, ça s'adresse donc à une personne sans condition. «Il semble que le type d'ordonnance soit conditionnel à la détention ou au contrôle de l'image, sans parler de l'utilisation peu fréquente que... ces expressions dans la législation québécoise et des différentes interprétations possibles, surtout en présence d'une chaîne d'intermédiaires, nous nous questionnons sur l'utilité même d'une telle condition puisque le juge responsable de prononcer l'ordonnance identifiera forcément la personne qui devra s'y soumettre, sans égard au rôle par rapport à l'image concernée.» Et puis, après ça, on dit, à 2 : «Une telle ordonnance de... désindexation pourrait être prononcée en même temps ou concurremment à une demande de désindexation effectuée en vertu d'une autre loi, comme à l'article 28.1 de la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé. Est-ce que c'est quelque chose que vous avez considéré?

M. Jolin-Barrette : Oui. Bien, en fait, vous savez, le recours en vertu de la loi sur les renseignements privés, il est disponible, mais c'est un recours qui est beaucoup plus long que ce qu'on voulait faire. Alors, c'est pour ça qu'on a... en fait, on crée la nouvelle loi. La loi pour contrer le partage d'images intimes, justement pour avoir davantage de flexibilité et que ça se fasse vraiment rapidement, contrairement à la loi sur le renseignement dans le secteur privé, avec la Commission d'accès à l'information. Ça peut prendre plusieurs mois avant d'arriver au bout avec une ordonnance.

Nous, on voulait avoir quelque chose de rapide, de flexible, qui était réactif, pour que dès qu'une personne... supposons, vous êtes à l'école secondaire, dès qu'une image intime commence à circuler, bien, qu'on puisse saisir le juge vraiment rapidement puis qu'il y ait une ordonnance qui soit émise d'une façon urgente, également. Donc, c'est pour ça.

Il existe un recours actuellement, mais il n'est pas adapté à la réalité de la situation, puis c'est pour ça également qu'on a décidé de passer par une ordonnance judiciaire, également, de la part d'un juge,  avec des sanctions qui sont importantes. Alors, oui, théoriquement, ça pourrait être une façon concurrente, mais nous, ce qu'on fait, c'est qu'on crée une ordonnance voie express, voie rapide, justement, considérant l'environnement numérique dans lequel on est...

M. Jolin-Barrette : ...chaque journée est importante.

M. Morin :Et je comprends que, pour ça, vous avez préféré identifier un juge de la Cour Québec ou un juge de paix un magistrat qu'un commissaire, par exemple, à la Commission d'accès à l'information qui pourrait éventuellement rendre une ordonnance, qui aurait pu faire rapidement aussi.

M. Jolin-Barrette : Exactement, on voulait une... Bien, écoutez, en fonction des paramètres qu'on avait, moi, je considère que c'était plus opportun que ça soit une ordonnance judiciaire qui relève d'un tribunal du ministère de la Justice puis que ça puisse rouler rondement.

M. Morin :O.K. En fait, donc, au fond...

M. Jolin-Barrette : Puis l'autre élément aussi, là, on a des juges de garde à tous les jours aussi. Donc, tu sais, ça, c'est important aussi. Déjà, ils entendent des demandes en matière de soins, en matière de comparution pour la détention, d'enquêtes sur mise en liberté, alors ça s'inscrit également dans les... je vous dirais, dans la flexibilité de la Cour du Québec puis de la disponibilité des juges, puis au niveau du bassin également de juges qu'on a. Tu sais, on a 333 juges à la Cour du Québec plus désormais 40 juges de paix magistrat, donc un bassin de près de 375 personnes qui sont en mesure de l'entendre.

M. Morin :Parfait. Bien. Il y avait aussi, dans le mémoire du réseau des CAVAC, à l'article 6, on est toujours au même article, ils étaient préoccupés par la capacité du système judiciaire de répondre et du temps de réponse, et ils étaient aussi préoccupés... puis ça, ça revient aux remarques préliminaires que je disais un peu plus tôt, ils s'interrogent sur les mécanismes administratifs mis en place pour assurer le traitement des demandes en dehors des heures ouvrables. Ils disent : Qu'en est-il pour une personne victime qui n'aurait pas accès au formulaire en ligne notamment? Comment ces mécanismes seront-ils publicisés pour en assurer une bonne connaissance du public? Donc, c'était une préoccupation pour les CAVAC, et on sait comment les CAVAC, évidemment, jouent un rôle important pour aider ces victimes-là. Vous en avez parlé un peu, mais pouvez vous nous en dire plus sur ce que vous allez mettre en place pour rassurer les CAVAC?

• (12 h 20) •

M. Jolin-Barrette : Oui. Bien, en fait, justement, le formulaire va être en ligne. Pour les gens qui n'auraient pas accès à Internet également, le formulaire va être disponible au greffe du palais de justice également physiquement. Puis, bien entendu, on va collaborer avec les CAVAC aussi qui reçoivent ce genre de personnes là et qui sont des partenaires importants dans le système de justice. Donc, fort probablement qu'une personne qui est victime d'une infraction comme celle-ci, bien, ils vont se retrouver au CAVAC.

Donc, l'autre point qui est important, c'est qu'on... là, ça rentre en vigueur six mois après la sanction de la loi. Ça fait que, pour le développement du formulaire, pour que ce soit en langage clair, on va consulter les groupes de soutien aux personnes victimes pour que ce soit... pour que l'utilisateur, ça soit simple pour lui, ça soit clair. Donc, on va consulter nos partenaires de soutien aux personnes victimes pour que le formulaire soit... qu'on s'entende sur un formulaire qui est clair pour les victimes.

M. Morin :O.K. Parfait. Et dans le mémoire sur l'Association nationale Femmes et Droit, ils s'interrogeaient sur la possibilité d'un troisième scénario où une victime pourrait demander une ordonnance en cas de risque avéré de partage. Est-ce que c'est quelque chose que vous avez considéré?

M. Jolin-Barrette : Bien, le risque avéré de partage, c'est comme une menace de partage. Donc, on vient couvrir cette situation-là également.

M. Morin :O.K.

Le Président (M. Bachand) :Mme la députée de Vaudreuil, s'il vous plaît.

Mme Nichols : Oui. Bien, puisqu'on était dans les disponibilités du formulaire, est-ce qu'on a pensé aussi à peut-être les rendre disponibles dans les écoles, bien que souvent les étudiants vont en ligne, là, mais rendre des formulaires disponibles dans différentes écoles?

M. Jolin-Barrette : Bien, écoutez, moi je suis ouvert à ça. C'est sûr qu'on va travailler avec la collaboration des personnes qui sont plus susceptibles, supposons, d'être victimes du partage d'images intimes. Ça fait que, c'est sûr, dans nos campagnes d'information, on a des partenaires aussi. Alors, c'est... Puis l'effet du projet de loi aussi, puis en réponse à la question du député de l'Acadie tout à l'heure, de pourquoi ne pas utiliser la loi uniquement sur les renseignements dans le domaine privé aussi, il y a un effet pédagogique aussi. Le fait d'avoir une loi en soi, c'est également de sensibiliser la population, sensibiliser les jeunes aussi à cette possibilité...

M. Jolin-Barrette : ...possibilité à ce recours-là. Alors, oui, avec l'ensemble des partenaires, notamment du réseau éducatif, on veut que ce soit diffusé puis que tout le monde soit au courant que ça existe. Puis, tu sais, ils sont habitués aussi dans les écoles que, si ça arrive... puis, tu sais, il y a déjà des cas en matière criminelle, ils font une plainte à la police rapidement. Mais en même temps, d'une façon corollaire, bien, on va pouvoir aller chercher l'ordonnance aussi en matière civile, là, rapidement pour faire cesser.

Mme Nichols : Parfait, merci. Puis...

M. Jolin-Barrette : Puis, si vous me permettez, l'aspect des dommages aussi est important, là. On va le voir à l'article 21 tantôt, tu sais, on crée une facilitation aussi, sur le fardeau de preuve à ce niveau-là, ça fait que, tu sais, le fait que tu puisses être tenu responsable financièrement aussi, ça amène une réflexion plus grande, ça.

Mme Nichols : Le titre du chapitre, c'est l'ordonnance urgente de cessation ou de prévention du partage d'une image... d'une image intime. Prévention, donc le... quelqu'un pourrait remplir le formulaire parce qu'il sait qu'il y a une image de lui à quelque part, là, puis il a peur que l'image circule. Donc, à titre préventif, il pourrait remplir le formulaire puis l'envoyer de façon urgente au juge, puis le juge pourrait intervenir d'avance sans que l'image... sans que l'image ait été diffusée, sans que l'image... tu sais, sans... bien, à titre préventif, là, c'est le mot «prévention».

M. Jolin-Barrette : Oui, préventif, mais, dans le fond, quand on est dans le cadre de la menace de diffusion, on se retrouve en termes de prévention, parce que l'image n'a pas été diffusée.

Mme Nichols : C'est ça, mais s'il n'y a pas de menace qui a été diffusée, mais que, tu sais, la personne le sait qu'il y a une image.

M. Jolin-Barrette : Bien oui, elle sait qu'il y a une image parce qu'il l'a partagée, mais, s'il a une crainte que l'image soit diffusée, c'est nécessairement parce qu'il y a une menace qu'elle risque d'être diffusée.

Mme Nichols : Oui, ou des fois on peut juste avoir... Maudine, je n'aurais pas dû partager cette image-là, ou tu sais... ou...

M. Jolin-Barrette : Mais là, on l'a vu à l'article précédent, où vous pouvez retirer votre consentement au partage. Ça fait que...

Mme Nichols : Mais c'est le... s'il y a une demande aussi, puis je pense que le Barreau en avait parlé aussi, là, les demandes d'annulation d'une telle ordonnance, c'est aussi les juges de la Cour du Québec puis les juges de paix magistrat qui vont les traiter.

M. Jolin-Barrette : Les juges de la Cour du Québec, pas les JPM, les juges de la Cour du Québec parce qu'on veut donner...

Mme Nichols : Oui, c'est compétence exclusive des juges...

M. Jolin-Barrette : Bien, dans le fond, pour l'émission, on permet JPM et Cour du Québec, mais si jamais pour l'annulation, là, c'est uniquement les juges de la Cour du Québec.

Mme Nichols : Parfait.

Le Président (M. Bachand) :M. le député de l'Acadie.

M. Morin :Et donc la personne qui voudrait révoquer son consentement, à ce moment-là va adresser sa demande directement à la personne qui détient l'image intime.

M. Jolin-Barrette : Oui.

M. Morin :Et c'est uniquement si la personne qui la détient refuse ou ne veut pas la détruire qu'il pourrait y avoir, à ce moment-là, une menace de partage.

M. Jolin-Barrette : Bien, on se retrouve dans cette... Bien, dans ce continuum-là, oui, il y a une menace. Je dis : Détruis ma photo ou je ne veux pas que la photo soit diffusée, la personne dit : Non, non, non. Bien là, à ce moment-là, implicitement, il y a une menace.

M. Morin :Ou que ça pourrait être aussi à 6.3 de détruire l'image?

Mme Nichols : Exactement.

M. Morin :O.K., parfait. Et j'imagine qu'à ce moment-là, dans un cas comme ça, il va falloir aussi que la personne envoie avec sa demande les courriels ou les demandes qu'elle a fait précédemment pour que le dossier... pour que le juge soit capable de statuer, là.

M. Jolin-Barrette : Effectivement. Puis on l'a vu, le juge a le pouvoir de demander des renseignements supplémentaires et même de tenir une audience pour faire la lumière là-dessus puis pour pouvoir avoir les renseignements nécessaires pour pouvoir prononcer son ordonnance.

M. Morin :Parfait.

M. Jolin-Barrette : Puis, dans le fond, il y a toujours une discrétion judiciaire, là.

M. Morin : Oui, oui, clairement.

M. Jolin-Barrette : Tu sais, le juge analyse le dossier.

M. Morin :Oui, oui, exact. Bien, comme dans n'importe quel dossier, il n'y a pas d'obligation de rendre l'ordonnance, là.

M. Jolin-Barrette : C'est ça.

M. Morin :Non, ça, c'est clair. Maintenant, évidemment, dans les cas où... puis on sait à quelle vitesse va l'Internet ces jours-ci, là, c'est sûr que si le juge décide de tenir une audience, ça va prendre quand même un peu de temps, il ne tiendra pas ça la journée même, là.

M. Jolin-Barrette : Bien, le juge est maître de son horaire, par contre, ça va aller beaucoup plus vite qu'en matière criminelle actuellement ou avec la Loi sur les renseignements dans le domaine privé, donc ça peut prendre plusieurs mois.

M. Morin :O.K., merci.

Le Président (M. Bachand) :Merci. Est-ce qu'il y a d'autres interventions à l'article 6? S'il n'y a pas d'autre intervention, est-ce que que l'article 6 est adopté?

Des voix : Adopté.

Le Président (M. Bachand) :Adopté. M. le ministre, s'il vous plaît.

M. Jolin-Barrette : L'article 7, M. le Président :

«Une telle ordonnance peut être demandée par la personne représentée sur l'image ou, lorsque cette dernière y consent ou que le tribunal l'autorise, par une autre personne ou par un organisme.

En cas de décès de la personne représentée sur l'image, l'ordonnance peut aussi être demandée par son conjoint ou par un proche parent ou...

M. Jolin-Barrette : ...ou par un allié.»

Commentaires : La demande d'ordonnance pour qu'on s'abstienne de partager une image intime ou qu'on cesse ce partage pourra être présentée par la personne directement concernée par l'image ou par un tiers autorisé par elle ou par le tribunal pour le faire.

Le Président (M. Bachand) :Merci. Le temps file rapidement. Interventions? M. le député d'Acadie.

M. Morin :Quand on dit un allié, ça peut être peu près n'importe qui. Comment vous l'identifiez, l'allié?

M. Jolin-Barrette : ...prévu au Code civil, alors...

Une voix : 125.

M. Jolin-Barrette : Oui, 125 du Code civil : prévoit que la déclaration de décès peut être faite soit par le conjoint du défunt, soit par un proche parent ou un allié, soit par... à défaut ou par toute autre personne. Allié se dit d'une personne unie à une autre par alliance. Donc, c'est dans la famille, un rapporté, comme on dit.

Le Président (M. Bachand) :Merci. Alors, compte tenu de l'heure, la commission suspend ses travaux jusqu'après les affaires courantes. Merci.

(Suspension de la séance à 12 h 29)


 
 

15 h 30 (version non révisée)

(Reprise à 15 h 41)

Le Président (M. Bachand) :À l'ordre, s'il vous plaît. Bon après-midi, tout le monde. La Commission des institutions reprend ses travaux.

On poursuit donc l'étude détaillée du projet de loi n° 73, Loi visant à contrer le partage sans consentement d'images intimes et à améliorer la protection et le soutien en matière civile des personnes victimes de violence.

Lors de la suspension de nos travaux cet avant-midi, nous en étions à l'étude de l'article 7 de la loi édictée proposée par l'article 1 du projet de loi. Est-ce qu'il y a d'autres interventions sur l'article 7? S'il n'y a pas d'autre intervention, est-ce que l'article 7 est adopté?

Des voix : Adopté.

Le Président (M. Bachand) :Adopté. Merci. M. le ministre, s'il vous plaît.

M. Jolin-Barrette : Oui. L'article 8, M. le Président, un mineur de 14 ans ou plus peut introduire seul la demande d'ordonnance ou consentir seul à ce qu'une personne ou un organisme l'introduise en son nom.

Commentaires : Un adolescent pourrait présenter seul sa demande d'ordonnance et consentir seul à ce qu'un tiers la présente.

Le Président (M. Bachand) :Merci beaucoup. Interventions sur 8? M. le député de l'Acadie.

M. Morin : Oui. Si vous avez retenu l'âge de 14 ans, M. le ministre, est-ce que c'est parce que, si mon souvenir est bon, dans le Code civil, à 14 ans, un mineur peut consentir à un traitement médical? Est-ce que je suis dans l'erreur, ou si vous faites un lien avec ça, ou...

M. Jolin-Barrette : Mais en fait c'est cohérent avec l'ensemble du corpus civil qu'on a, notamment dans le Code civil du Québec. Donc, un mineur de 14 ans et plus peut notamment consentir seul à des soins médicaux, effectuer un changement de nom, et la mention de sexe auprès du Directeur de l'état civil. Il est réputé majeur pour tous les actes relatifs à son emploi ou à l'exercice de son art ou de sa profession. Il peut s'opposer à la désignation d'un tuteur supplétif ou à son adoption et mettre fin aux relations personnelles avec ses grands-parents. Un mineur de 14 ans peut faire une demande seule à l'IVAC aussi, en tant que personne victime d'une infraction criminelle. Dans le fond, le partage d'images intimes, c'est une infraction criminelle aussi chez un mineur, parce que c'est de la pornographie juvénile aussi. Donc, par souci de cohérence, ça, on a choisi l'âge de 14 ans.

M. Morin : O.K. Parfait. Maintenant, si c'est une personne mineure de moins de 14 ans, à ce moment-là, c'est ses parents qui vont pouvoir présenter la demande? Il n'y a pas de mention comme telle, je pense, qui est faite dans le projet de loi, mais comment ça va fonctionner à ce moment-là?

M. Jolin-Barrette : La demande va être faite par le titulaire de l'autorité parentale ou par un organisme qui pourrait être autorisé par le tribunal.

M. Morin : Et, à ce moment-là, est-ce que... Parce qu'il n'y a pas de...

M. Morin :...il n'y a pas de mention comme telle. Donc...

M. Jolin-Barrette : Bien, c'est le...

M. Morin :...c'est le cadre général du droit qui s'applique à ce moment-là, et bon, quelqu'un... une personne qui a l'autorité parentale pourrait à ce moment-là présenter la demande?

M. Jolin-Barrette : Exactement. C'est dans le fond le régime général qui s'applique dans le Code de procédure civile.

M. Morin :À condition...

M. Jolin-Barrette : L'article 87 du Code procédure civile.

M. Morin :Oui, puis... mais...

M. Jolin-Barrette : Donc, les droits d'un enfant sont exercés par le titulaire de l'autorité parentale.

M. Morin :Sauf que dans ce cas-là, ce que ça voudrait dire, c'est que si par exemple le mineur a 13 ans puis qu'il a partagé une image intime, il va devoir en parler aux détenteurs de l'autorité parentale.

M. Jolin-Barrette : Effectivement.

M. Morin :Oui, puis peut-être que dans certains cas ça va être difficile, mais c'est comme ça que notre droit fonctionne. C'est ce que je comprends?

M. Jolin-Barrette : Bien, il y a une ligne qui est à 14 ans, puis je pense que c'est important aussi que les parents, même en haut de 14 ans, soient informés pour appuyer leurs jeunes.

M. Morin :Oui, sauf qu'à 14 ans, les parents pourraient ne pas être au courant.

M. Jolin-Barrette : Effectivement, à 14 ans, les parents ne... pourraient ne pas être au courant. Mais, dans tous les cas, il s'agit d'une infraction criminelle aussi, ça fait que...

M. Morin :Oui, clairement. Mais ça, on est d'accord, là.

M. Jolin-Barrette : Mais... Mais l'exercice de la... La demande d'ordonnance peut être formulée seule, effectivement, à partir de l'âge de 14 ans, ou quelqu'un de 14 ans peut mandater quelqu'un d'autre pour le faire en son nom.

M. Morin :D'accord.

Le Président (M. Bachand) :Mme la députée de Vaudreuil.

M. Morin :Oui.

Mme Nichols : Bien, peut-être juste pour faire du pouce sur le même sujet, là, quand on dit qu'il peut introduire seul la demande d'ordonnance, on s'entend que la demande d'ordonnance, c'est le formulaire, c'est-à-dire qu'il peut compléter seul le formulaire puis envoyer lui-même de façon autonome, là, ledit formulaire, soit en ligne, soit papier, mais il s'occupe de l'acheminer pour avoir l'ordonnance?

M. Jolin-Barrette : Exactement.

Mme Nichols : Parfait.

Le Président (M. Bachand) :Merci. M. le député d'Acadie.

M. Morin :Oui. Je voulais simplement attirer votre attention, M. le ministre... Dans le mémoire présenté par l'Association québécoise Plaidoyer-Victimes, à la page 3, il y a plusieurs préoccupations qui ont été soulevées, dont évidemment les conséquences pour les personnes victimes, adultes et mineures. Mais on souligne que la victime, lorsqu'elle est mineure, pourrait ressentir de la pression de la part de son entourage pour n'entamer que la démarche civile, pour éviter des conséquences pénales. Donc, l'AQPV dit qu'il n'est pas souhaitable de présenter cette ordonnance comme une alternative à une procédure criminelle et il est essentiel d'assurer que la personne victime soit adéquatement accompagnée dans ses procédures et qu'il importe qu'elle soit informée des diverses options existantes afin de prendre des décisions éclairées.

Donc, en fait, ça revient un peu à l'élément que je mentionnais ce matin quant à la... l'importance de la... de la formation et de l'accompagnement. Qu'est-ce que... Qu'est-ce que vous voyez comme mécanisme optimal pour s'assurer que ces gens-là seront bien accompagnés et qu'ils seront en mesure de bien comprendre les différentes options qu'ils ou qu'elles peuvent exercer?

M. Jolin-Barrette : Bien, on est dans une situation où, fort probablement... Bien, premièrement, il va y avoir de l'information sur nos pages Web, tout ça. On travaille avec les intervenants dans les écoles, le Directeur des poursuites criminelles et pénales, tout ça. Donc, quand arrive un tel événement, il y a souvent... que ça soit en matière criminelle ou en matière civile, il y a un environnement autour des... des jeunes, notamment, qui sont victimes de ça. Donc, soit qu'ils vont en parler à un intervenant à l'école, soit qu'ils vont en parler dans une ressource communautaire, tout ça, donc on va s'assurer que ce soit clair.

Mais, bien entendu, puis j'ai eu l'occasion de leur dire, à l'Association Plaidoyer-Victimes, lorsqu'ils sont venus en commission parlementaire, qu'effectivement l'un n'exclut pas l'autre, là. C'est un outil supplémentaire qu'on a pour agir à court terme, et le fardeau de preuve n'est pas le même non plus. Alors, moi, je les encourage à utiliser les deux recours, notamment. Et on parle, en bas de 18 ans, de pornographie juvénile, là, ça fait que ça, c'est fort important. Mais le... Nous, on agit vraiment sur la rapidité d'exécution du retrait de l'image, donc ça, c'est un recours précisément pour ça. Mais, effectivement, les deux recours peuvent être utilisés.

Puis l'autre point aussi, c'est qu'actuellement on a une centaine de dossiers par année, en matière criminelle, qui sont poursuivis, mais ça signifie qu'on... il y a... il y a peut-être des jeunes, actuellement, qui n'utilisent pas le recours en matière criminelle puis que le recours civil, qui est simple, qui est à leur portée, va être utilisé aussi pour faire désindexer l'image, que ça soit pour les... pour les adultes aussi.

M. Morin :C'est une hypothèse, effectivement, c'est... c'est peut-être le cas. Maintenant, quand quelqu'un, évidemment, dépose une dénonciation au niveau criminel...

M. Morin :...bien, c'est un agent de la paix ou de la police qui va faire l'enquête, qui va prendre, en fait, le dossier puis qui, éventuellement, va aller le déposer ici au directeur des poursuites criminelles et pénales. Donc, la victime est accompagnée, mais c'est le système, au fond, qui... parce qu'on est en pénal. Au niveau civil, bien, ça va être à la victime de poser des gestes, d'entamer le processus. Je comprends que c'est une procédure qui est quand même relativement...

M. Jolin-Barrette : Simple.

M. Morin :...simple. On est d'accord, mais, tu sais, il n'en demeure pas moins que si le jeune, la personne victime a 14 ans, envoie sa dénonciation, elle pourrait le faire toute seule, à un juge de paix. Le juge de paix y répond parce qu'il a besoin d'informations supplémentaires ou d'éléments de preuve supplémentaire, ce qui peut arriver, là. Là, la victime, si elle est toute seule, ça va peut-être être plus compliqué.

M. Jolin-Barrette : Bien, comme dans tout recours dans le Code civil du Québec, où on prévoit des droits civils pour des personnes de 14 ans et plus. Dans le fond, oui, il y a un environnement, il y a l'école, il y a tout ça, mais, dans un scénario idéal, lorsque ça arrive à un enfant de 14 ans, bien, il en parle aux titulaires de l'autorité parentale. On le souhaite.

M. Morin :Oui.

M. Jolin-Barrette : On le souhaite.

M. Morin :Exact.

M. Jolin-Barrette : Bien, on prévoit... C'est le cas d'exception. On prévoit que la demande peut être présentée seul, s'il y a des circonstances qui font en sorte que le mineur souhaite le présenter seul, même chose que des soins médicaux, ou autres.

M. Morin :Merci.

Le Président (M. Bachand) :Merci beaucoup. Autres interventions? Mme la députée de Vaudreuil.

• (15 h 50) •

Mme Nichols : Oui. Merci, M. le Président. Bon, la loi... Bien là, ce qu'on est en train de faire, on prévoit les recours pour les 14 ans et plus. Est-ce qu'il y a... En bas de 14 ans, c'est possible, mais il doit être accompagné d'un... par avocat ou par un adulte?

M. Jolin-Barrette : C'est le titulaire de l'autorité parentale qui prend la demande en son nom, l'ordonnance en son nom. Dans le fond, les mineurs de 14 ans et moins, leurs droits civils sont exercés par le titulaire de l'autorité parentale.

Mme Nichols : Ça fait que c'est le titulaire de l'autorité parentale qui va compléter ledit formulaire puis qui va faire la demande pour l'ordonnance.

Le Président (M. Bachand) :Est-ce qu'il y a d'autres interventions à l'article 8? S'il n'y a pas d'autre intervention, est-ce que l'article 8 est adopté?

Des voix : Adopté.

Le Président (M. Bachand) :M. le ministre.

M. Jolin-Barrette : «9. La personne qui demande une telle ordonnance doit, pour l'obtenir, déclarer :

«1° qu'elle est la personne représentée sur une image intime au sens de la présente loi ou qu'elle est autorisée à présenter la demande, notamment parce qu'elle a le consentement de cette personne;

«2° que cette image intime est partagée sans le consentement de la personne représentée sur l'image intime ou qu'une personne menace de partager une telle image sans son consentement;

«3° qu'elle demande que... qu'elle demande l'ordonnance prévue par la présente loi.

«Cette déclaration est réputée faite sous serment.

«Cette personne fournit également, si elle en a connaissance, toute information pouvant aider à prévenir ou à cesser le partage de l'image intime.»

Commentaires : Cet article prévoit les seuls éléments déclarés qui sont requis aux fins d'obtenir une ordonnance pour qu'on s'abstienne de partager une image intime ou qu'on cesse ce partage.

Le Président (M. Bachand) :Merci. Interventions? M. le député de l'Acadie.

M. Morin :En ce qui a trait à cet article, évidemment, la personne va devoir faire, comme c'est écrit ici, une déclaration, partager... en tout cas, décrire à tout le moins l'image pour qu'elle puisse être identifiée, j'imagine, puis qu'elle demande l'ordonnance. Encore là, on revient toujours au questionnement que j'avais. J'espère que les gens vont pouvoir, en tout cas, s'ils le désirent, être accompagnés, parce que ça ne sera peut-être pas évident pour tout le monde. Bien, en ce qui a trait à cette demande-là, j'aimerais attirer votre attention sur un document qui a été présenté, M. le Président, à la commission, mais par la commission de la santé et des services sociaux des Premières Nations du Québec et du Labrador, qui décrivent la réalité que vivent plusieurs membres des Premières Nations et donc soulèvent également les enjeux auxquels ils doivent faire face. Je pourrai en parler à nouveau à l'article le 10, mais on peut l'aborder d'emblée à l'article 9 du projet de loi. Parmi les constats et les recommandations, et je suis à la page 5 du rapport qui a été déposé. En fait, on l'a obtenu le 30 octobre 2024. Ce qu'il demande, en fait, c'est que l'accompagnateur choisi par la victime puisse l'accompagner tout au long du processus judiciaire, que ce soit lors de la rencontre ou des suivis, et on souligne, et je ferai également le même commentaire à l'article 10, bien, que la demande d'ordonnance urgente ou de cessation ou de prévention du partage...

M. Morin : ...peut-être demander au moyen d'un exposé présentant sommairement des faits allégués au moyen du formulaire établi, c'est ce que vous allez développer. Maintenant, pour les membres des Premières Nations, est-ce que ces formulaires-là vont être disponibles en anglais et en langues autochtones?

M. Jolin-Barrette : Je vais vous donner la réponse. Généralement, les formulaires... Je vous reviens avec la réponse.

M. Morin :Parfait. Je vous remercie.

Le Président (M. Bachand) :Autres interventions à l'article 9? S'il n'y a pas d'autre intervention, est-ce que l'article 9 est adopté?

Des voix : Adopté.

Le Président (M. Bachand) :Merci. M. le ministre, s'il vous plaît.

M. Jolin-Barrette : Article 10, M. le Président :

«La demande d'ordonnance peut être faite au moyen d'un exposé présentant sommairement les faits allégués ou au moyen du formulaire établi par le ministre de la Justice.

«Toute pièce justificative, le cas échéant, est produite au greffe de manière à assurer la confidentialité.»

Finalement, c'est «de manière à en assurer la confidentialité».

Commentaire. Cet article prescrit le moyen de demander une ordonnance pour qu'on s'abstienne de partager une image intime ou qu'on cesse de partager.

Le Président (M. Bachand) :Merci beaucoup. Donc, interventions à l'article 10? M. le député de l'Acadie, s'il vous paît.

M. Morin : Alors, bien, écoutez, je vais... Je vais répéter l'intervention que j'ai faite il y a quelques minutes concernant la réalité des Premières Nations et des Inuits, parce qu'évidemment, on parle comme tel de la demande d'ordonnance. Je rappelle également que dans le document qui nous a été envoyé, et c'est... et c'est malheureux, mais effectivement il y a de la violence conjugale, il y a des violences à caractère sexuel dans plusieurs villages ou dans les communautés autochtones. Donc, la Commission de la santé et des services sociaux des Premières Nations du Québec et du Labrador recommande dans son document qu'il y ait de la formation qui soit faite à l'effet qu'on tienne compte évidemment de la réalité des Premières Nations, mais qu'on puisse aussi établir une trajectoire de services entre le réseau de la santé et des services sociaux québécois et les services offerts par les Premières Nations pour assurer un filet de sécurité, offrir des services appropriés pour la victime et sa famille et garantir une continuité des services.

Je pose la question et j'aimerais que M. le ministre nous nous explique ce qu'il entend faire, parce que, je comprends, le projet de loi vise à permettre à une victime une intervention rapide, une demande rapide. Et c'est sûr que, dans les grands centres ou dans le sud du Québec, règle générale, là, les services fonctionnent assez bien, il y a de l'Internet, mais dans le Grand Nord ou dans les communautés reculées, il n'y en a pas. Donc, est-ce que vous avez pensé à des mécanismes particuliers pour accélérer le processus ou de la formation particulière qui tient compte des réalités des Premières Nations puis des Inuits au Québec, puis est-ce qu'il y aura une capacité d'adaptation pour qu'ils soient capables de recevoir les mêmes services?

M. Jolin-Barrette : Oui. Bien, le réseau Internet est quand même disponible pas mal partout, notamment par satellite. Donc, dans plusieurs communautés aussi le gouvernement du Québec a beaucoup investi d'argent. Puis on soutient annuellement avec plusieurs millions de dollars les différents organismes autochtones qui offrent des services à la population locale dans les différentes communautés, dans les différents villages aussi. Donc, ça va s'ajouter au panier de services qui est offert par ces organismes-là, à partir du moment où ça va être disponible. Et on finance les centres d'amitié autochtones quand on finance des groupes, des organismes de soutien aux personnes autochtones, notamment dans les différentes communautés. Notamment avec Makivik il y a des ententes de dizaines de millions de dollars pour le Nord-du-Québec. Alors, ce n'est pas différent des autres outils dans le système de justice québécois. Donc, l'ensemble des ressources sont à la disponibilité de tous les Québécois. Alors, ça va être comme ça également pour l'ordonnance de retrait d'images intimes et de cessation de partage d'images intimes.

M. Morin : Bien.

M. Morin : Mme la députée de Vaudreuil.

Mme Nichols : Oui. Merci, M. le Président. Bien, je reviens sur une préoccupation de plusieurs organismes, qu'ils ont manifestée, là, pendant les auditions en lien avec le fameux formulaire. Ils veulent être... Ils veulent participer à l'élaboration du formulaire. Puis le ministre semblait leur dire qu'il les consulterait. Ça fait que je veux juste m'assurer que le...

M. Jolin-Barrette : Vous voulez dire, exemple, les CAVAC, les organismes de soutien?

Mme Nichols : Oui, oui, ils sont venus ici puis ils ont...

M. Jolin-Barrette : On veut être consultés.

Mme Nichols : Ils ont levé le drapeau en disant : On veut être consultés. On veut...

Mme Nichols : ...veut que ça soit un... un formulaire simple, pas trop complexe, facile à remplir. Ça fait que je me fais un peu le porte-parole des différents groupes qui sont venus ici pour rappeler au ministre que leur porte était grande ouverte pour une collaboration en lien avec le futur formulaire.

M. Jolin-Barrette : Ça tombe bien, la mienne aussi. Les équipes du ministère ont déjà pris acte. On va les contacter quand qu'on va développer le formulaire pour prendre leur point de vue, leurs idées. Puis c'est comme ça qu'on va avec eux, notamment avec le tribunal spécialisé, on est en constante relation.

Mme Nichols : Très bien. Merci, M. le ministre.

Le Président (M. Bachand) :M. le député de l'Acadie.

M. Morin :...dans ce cas-là, M. le ministre, vous allez également, ainsi que votre ministère, consulter la Commission de la santé et des services sociaux des Premières Nations du Québec et du Labrador pour développer les formulaires afin de s'assurer que ça reflète leur réalité?

M. Jolin-Barrette : Moi, je suis très ouvert. On va les appeler.

M. Morin :Les appeler, ou les consulter, ou travailler en collaboration, ou juste les appeler?

M. Jolin-Barrette : Bien, ça inclut tout ça.

M. Morin :Très bien.

M. Jolin-Barrette : Lorsque vous faites un appel, vous consultez, vous travaillez en collaboration.

M. Morin :Excellent. Merci.

M. Jolin-Barrette : On ne fera pas juste laisser un message.

M. Morin :D'accord.

Le Président (M. Bachand) :Merci.

M. Morin :C'est noté.

Le Président (M. Bachand) :Autres interventions à l'article 10? S'il n'y a pas d'autre intervention, est-ce que l'article 10 est adopté?

Des voix : Adopté.

Le Président (M. Bachand) :Adopté. M. le ministre.

• (16 heures) •

M. Jolin-Barrette : Article 11 : «La demande d'ordonnance n'a pas à être notifiée au défendeur, à moins que le tribunal n'en ordonne autrement.»

Commentaires : Cet article dispense de l'obligation de notifier la demande de l'ordonnance pour qu'on s'abstienne de partager une image intime ou qu'on cesse ce partage afin que celle-ci puisse être traitée de manière urgente.

Donc, le principe de base, c'est que, lorsque je présente ma demande, je n'ai pas besoin de la notifier au défendeur... la demande d'ordonnance. Donc, elle est traitée ex-parte par le juge, à moins que le juge dit : Vous devez la notifier.

Le Président (M. Bachand) :Merci. Interventions? M. le député de l'Acadie.

M. Morin :J'attire votre attention, M. le ministre, à la page 13 du mémoire du Barreau du Québec, qui dit : Toutefois, la loi proposée confère au tribunal le pouvoir d'ordonner la notification au défendeur. Or, rien ne prévoit ce qui doit se produire ensuite. Est-ce que la partie demanderesse doit alors notifier sa demande au défendeur? Est-ce qu'une audition est tenue? La loi proposée laisse entendre que la plupart des demandes d'ordonnance seront instruites et jugées d'urgence hors de la présence des parties. Et là on suggère : Afin de clarifier comment le processus se déroulera dans un contexte exceptionnel où le défendeur doit être notifié, la loi proposée devrait prévoir que cette notification soit effectuée par le greffier afin d'éviter que le demandeur ait à interagir avec le défendeur. De plus, la loi proposée devrait aussi exiger qu'une telle décision du tribunal prévoie les modalités requises pour la suite du dossier, exemple la tenue d'une audience, la production d'observations... uniquement, etc. Est-ce que c'est des éléments que vous avez considérés? Est-ce que c'est des ajouts qu'on pourrait apporter à la loi pour clarifier le processus?

M. Jolin-Barrette :  Bien, on va le voir, là, notamment à l'article 14, là. À partir du moment où le tribunal émet une ordonnance, contrairement aux autres États fédérés au Canada, comme, supposons, la Colombie-Britannique, le fardeau n'est pas sur les épaules de la victime.

Donc, exemple, si vous êtes en Colombie-Britannique, ils ont une loi similaire à celle-ci, eux, c'est à partir du moment où elle obtient ordonnance, la personne, elle doit la signifier au défendeur. Donc, c'est elle qui paie l'huissier, ou le courrier, ou tout ça, puis c'est elle qu'il faut qui le signifie puis qui démontre par la suite que la personne l'a bien reçu. Si jamais elle ne le respecte pas, elle s'en va en outrage. Là, nous, ce qu'on fait, c'est qu'on simplifie la vie de la victime, qui a obtenu l'ordonnance, et donc ça sera le greffier du tribunal qui va le notifier. Donc, à partir du moment où la personne victime, elle obtient son ordonnance, bien c'est le tribunal qui s'en occupe, bien, le greffe du tribunal qui s'en occupe puis là qui la... qui la notifie au défendeur ou la personne qui est visée par la demande d'ordonnance. Puis, dans le fond, ce qu'on a prévu pour obtenir l'ordonnance, c'est vraiment un régime d'urgence. Donc, la demande, le formulaire est... est envoyé au juge, et là, le juge, lui, analyse ça. S'il a besoin de tenir une audience, il peut le faire, mais il n'est pas obligé. Donc, il peut rendre jugement sur le vu du dossier, dans le fond, dans son bureau, mais il pourrait, comme on l'a vu préalablement, requérir des informations supplémentaires de la part du demandeur. Il pourrait également requérir une audience puis il pourrait requérir également de notifier la demande au défendeur également. Mais, à prime abord, ce qu'on voulait, c'est un régime flexible, simple et ne pas imposer ces différentes obligations trop procédurales pour faire en sorte que, vu que c'est une question de temps, l'émission de l'ordonnance, c'est que le formulaire est rempli, ça tombe dans la boîte du juge, le juge analyse ça. Il peut émettre son ordonnance tout de suite, à moins qu'il dise «non, je veux que ça soit notifié, à moins qu'il dise «bien, je veux une audition formelle au palais, supposons, dans une salle de cours». Et là, par la suite, on va le voir, l'ordonnance est émise, puis...


 
 

16 h (version non révisée)

M. Jolin-Barrette : ...il y a un délai pour le défendeur qui est visé par l'ordonnance de venir contester l'ordonnance.

M. Morin :Merci.

Le Président (M. Bachand) :Autres intervention à l'article 11? S'il n'y a pas d'autre intervention, est-ce que l'article 11 est adopté?

Des voix : Adopté.

Le Président (M. Bachand) :Adopté. Merci, M. le ministre.

M. Jolin-Barrette : Oui, l'article 12 :

«La demande d'ordonnance est instruite et jugée d'urgence.

Elle peut être instruite hors la présence des parties.»

Commentaires : L'instruction à la suite d'une demande d'ordonnance pour qu'on s'abstienne de partager une image intime ou qu'on cesse ce partage procéderait de manière urgente et le jugement serait rendu de la même manière.

Ça fait que c'est ce que j'expliquais, dans le fond. Ça, ça peut être ex parte, ça se fait hors de la présence du défendeur, et même hors la présence du demandeur, parce qu'on dit : Elle peut être instruite hors la présence des parties.

M. Morin :Oui, exact. Donc, en fait, un demandeur pourrait envoyer sa demande, mettons par courriel. Le juge regarde ça. S'il est satisfait, il émet l'ordonnance, puis c'est tout.

M. Jolin-Barrette : Exactement.

M. Morin :O.K. Maintenant, pour la question de l'urgence, ça, j'imagine que c'est le juge en chef puis le greffe qui vont gérer ces demandes-là. Donc, ça va arriver dans une boîte ou une case spéciale ou un courriel spécial pour que ça soit envoyé rapidement au juge.

M. Jolin-Barrette : Effectivement. Donc, par «urgent», on entend le plus rapidement possible. Donc, les assignations relèvent de la magistrature, mais c'est comme l'équivalent d'un recours en injonction. Donc, ça doit être traité d'une façon qui est urgente. Donc, généralement, c'est... à tous les jours, on traite de ce genre de dossiers là, comme les gardes, les soins, comme les comparutions, comme les enquêtes sur mise en liberté.

M. Morin :Oui, sauf que, souvent, pour les injonctions, évidemment, il y a... tu sais, il y a une requête qui est envoyée, c'est envoyé au greffe, etc. Ça, des fois, cette demande d'ordonnance là, ça me fait un peu penser plus, peut-être à des demandes de mandat où le policier peut se présenter devant le juge de paix, puis quand le juge de paix est de garde, puis ça va fonctionner rondement, là. Donc, j'imagine que, pour la gestion de ça, parce que vous avez souligné qu'il y avait des juges de paix magistrat qui sont effectivement en devoir 24 heures sur 24, sept jours par semaine, donc il faut avoir un mécanisme pour que ces demandes-là soient évidemment portées à leur attention le plus rapidement possible.

M. Jolin-Barrette : Oui, bien, dans le fond, on va travailler avec la Cour du Québec à ce niveau-là. L'important, c'est que la demande soit traitée d'une façon qui est urgente. Donc, ce ne sera peut-être pas à 2 heures du matin dans la nuit, en fonction de ce que la cour va déterminer, en fonction de son organisation, mais ça va être d'une façon urgence, soit le plus rapidement possible. La volonté du législateur, c'est le plus rapidement possible.

M. Morin :O.K. Je vous remercie.

Le Président (M. Bachand) :D'autres interventions à l'article 12? S'il n'y a pas d'autre intervention, est-ce que l'article 12 est adopté?

Des voix : Adopté.

Le Président (M. Bachand) :Adopté. Merci. M. le ministre.

M. Jolin-Barrette : «13. L'ordonnance peut être prononcée à l'égard de toute personne même si son identité est inconnue du tribunal.

Commentaires : L'ordonnance pour qu'on s'abstienne de partager une image intime ou qu'on cesse de partager pourrait enjoindre à une personne même inconnue, du tribunal.

Le Président (M. Bachand) :Merci beaucoup. Donc, interventions à 13? M. le député de l'Acadie.

M. Morin :...porterais à votre attention, dans le mémoire du Barreau aux pages 13 et 14, où on disait : «Nous comprenons qu'à notre lecture du premier alinéa de l'article 13 in fine que cette situation vise les cas pour lesquels l'identité de la personne est inconnue, mais que des éléments permettent tout de même de procéder à la notification parce que le demandeur avait en sa possession une adresse courriel ou un numéro de téléphone cellulaire.» Il y a une référence à un arrêt de la Cour suprême, Morasse contre Nadeau-Dubois, qui conclut que, «dans le cadre d'un recours en outrage au tribunal, qu'une personne ne peut avoir l'intention de faire obstacle à une ordonnance s'il n'en a pas connaissance. Cette conclusion s'applique aussi, a fortiori, à une instance pénale en violation de l'ordonnance. Concernant ce facteur, nous nous interrogeons sur l'applicabilité d'une ordonnance à l'égard d'une personne dont l'identité est inconnue. La loi proposée semble d'ailleurs reconnaître cette problématique en ne permettant pas, contrairement au Code de procédure civile, la notification par avis public.» Est-ce qu'il y a des éléments là-dedans qui pourraient faire en sorte qu'on pourrait bonifier le projet de loi en ce sens là ou...

M. Jolin-Barrette : Bien, en fait, le Barreau, là-dedans, ignore ce que l'on vise notamment. Parfois, c'est possible de fournir des renseignements sans connaître l'identité de la personne, mais sur l'adresse URL ou le propriétaire de l'adresse IP, supposons. Donc, on met un libellé de... on a un libellé large à l'article 13, justement pour viser ce genre de situation là. Donc, URL d'un site Web, autre identifiant unique, compte utilisateur, adresse IP, adresse courriel. Donc, à l'aide de ces informations-là, l'ordonnance du juge, en plus de demander à l'intermédiaire Internet, donc, exemple, le fournisseur Internet ou l'intermédiaire Internet comme un site de... un site de consultation...

M. Jolin-Barrette : ...supposons pornographique, de retirer l'image aussi à travers ça. Donc, c'est possible sans connaître l'identité précise de l'individu. C'est monsieur...

M. Morin : X.

M. Jolin-Barrette : Ouais, c'est le cas de le dire, M. X. À ce moment-là, on peut faire en sorte de le notifier sans connaître son nom véritable...

Une voix : ...

M. Jolin-Barrette : Oui, ça peut être un pseudonyme aussi. Donc, l'article, il est là pour ça.

M. Morin : Oui. O.K. Maintenant, si quelqu'un utilise un ordinateur, que ça soit un portable, téléphone ou autre, à l'insu du propriétaire, qui a son mot de passe puis qui envoie par un ami, qui en partage, une image intime, là, à ce moment-là, comment vous allez faire pour... Vous allez émettre une ordonnance contre... Bien, si vous allez avec l'adresse IP, ça va être contre celui qui a l'ordinateur, mais ce n'est pas nécessairement lui qui va avoir partagé l'image intime, là. Comment vous allez faire, comment le tribunal va faire pour ordonner à la bonne personne?

M. Jolin-Barrette : Bien, c'est ça. Ce qu'on vise... Bien, premièrement, la personne, supposons qu'elle est visée par ça puis elle n'a pas de contrôle sur l'image, elle va pouvoir faire annuler l'ordonnance, tu sais, supposons que c'est le propriétaire de l'image. L'objectif, c'est d'avoir un libellé qui est large pour faire en sorte de viser, sans que ça soit nominatif, là, sur le nom de la personne, la personne effectivement qui a le contrôle effectif de l'image puis qui l'a diffusée. Donc, ça se peut que l'image, là, elle a été diffusée, supposons, par vous, puis ensuite par la députée de Vaudreuil, mais on ne connaît pas nécessairement le nom de la députée de Vaudreuil, mais on sait qu'elle a été diffusée par Mme 123X, supposons aussi. Ça fait qu'il faut être en mesure que l'ordonnance soit assez large pour qu'elle puisse viser aussi Mme 123X puis que, supposons, on a l'adresse courriel puis que ça puisse lui être notifié.

• (16 h 10) •

M. Morin : Oui, je comprends. Sauf que la personne à qui est rattachée une adresse IP ou une adresse courriel, il peut arriver que ce n'est pas nécessairement la personne qui utilise ce courriel. Ça fait que, là, la personne, donc, va devoir contester l'ordonnance, mais entretemps, c'est parce que l'ordonnance n'aura pas vraiment d'effet.

M. Jolin-Barrette : Oui, mais ce que l'on souhaite dans un premier temps... Règle générale, là, on est sur le principe général.

M. Morin : Oui.

M. Jolin-Barrette : La personne qui va diffuser l'image, généralement avec l'ordinateur, ça va être son ordinateur à l'adresse IP. Le cas que vous me soulevez, il est véridique, effectivement. À ce moment-là, il faut être en mesure... Bien, dans un premier temps, idéalement, on sait c'est qui. Mais quand on ne sait pas c'est qui, le texte amène une flexibilité pour le tribunal de ne pas identifier nommément et précisément qui est la personne, mais d'avoir cette ordonnance-là par rapport à cette image-là. Donc, si l'image, supposons, par la suite, qui se retrouve sur un site Internet qui est anonymisé, bien, la note... la notification à ce site Internet là, quand ils vont recevoir l'ordonnance, elle va s'appliquer à eux, même si le nom du propriétaire du site Web, il n'est pas identifié dans l'ordonnance.

M. Morin : Oui. Dans le cas du site Web, oui, effectivement, parce que le tribunal va pouvoir notifier, ou bien le responsable, ou le propriétaire, ou enfin, bref, le site Web. Alors, si... Alors ça, ça va.

M. Jolin-Barrette : Mais je vous donne un exemple souvent le fournisseur Internet va pouvoir être capté aussi comme ça, par le biais de l'ordonnance. Tu sais, exemple, supposons que l'image, elle roule...

M. Morin : Oui.

M. Jolin-Barrette : ...bien, l'ordonnance pourra être assez large pour couvrir le fournisseur Internet aussi pour dire : Bien, voici, cette image-là, il y a une ordonnance dessus. Bloquez-la.

M. Morin : O.K. Là, à ce moment-là, il faudrait que la victime le souligne dans sa demande d'ordonnance parce que le tribunal, lui, il ne le saura pas, là.

M. Jolin-Barrette : Bien là, on est à... C'est à l'article 6?

Une voix : ...

M. Jolin-Barrette : Oui, c'est ça. À l'article 6, là, qu'on a adopté, ils disent : «Il peut en outre ordonner à toute personne de lui fournir toute information nécessaire ou utile en vue de faire cesser le partage d'une telle image ou de prévenir ce partage, notamment toute information pouvant servir à identifier une personne ayant partagé une telle image ou menaçant de le faire.»

Ça fait que, dans le fond, le juge pourrait dire avant d'émettre son ordonnance : Toi, Vidéotron, toi Bell, toi Telus, dis-moi qui est derrière cette adresse IP là ou qui est derrière ce compte Vidéotron là, supposons? Ça fait que là, au fond, ça peut être des emails, ça peut être...

M. Morin : Là, oui, ça peut être autre chose, mais donc... Donc, le juge pourrait de son propre chef...

M. Jolin-Barrette : Peut requérir. Exactement.

M. Morin :...le demander.

M. Jolin-Barrette : Oui. Mais là on pense beaucoup en termes de sites Web, mais là...

M. Jolin-Barrette : ...partage des images intimes, aussi, c'est par message texte, messagerie.

M. Morin :Oui, mais j'ai aussi en tête le scénario du message texte ou du courriel, ou peu importe, là. Tu sais, quelqu'un prend un téléphone, ce n'est pas le sien, il trouve des images intimes, puis là il décide : Ah! c'est drôle, je vais les partager. Bien là, quand le propriétaire va ramasser son téléphone, il va dire : Oh! Oh! Oh! , ce n'était pas pour être partagé ça, là, là. Bien là, ça se promène. Là, la victime, elle n'est pas du tout, du tout d'accord. Ce que j'essaie de voir, c'est dans ces cas-là... parce que malheureusement ça arrive aussi. C'est un enjeu, là. Souvent l'enjeu, que ce soit en matière... puis ça arrive aussi en matière criminelle et pénale, là. Tu sais, c'est beau, on a des courriels, mais qui c'est qui était derrière le clavier, c'est plus compliqué.

Donc, je voudrais juste voir comment ça peut être efficace puis comment le tribunal va être capable de s'assurer qu'à un moment donné l'image intime, elle va arrêter de se promener.

M. Jolin-Barrette : À partir du moment où il y a une ordonnance émise par la cour puis que là il y en a un qui est signifié, bien, l'ordonnance pourra être signifiée aussi aux autres porteurs de l'image aussi. Tu sais, parce qu'on n'a pas besoin d'avoir une identification nominative sur l'ordonnance.

M. Morin :O.K. C'est bon. Je vous remercie.

Le Président (M. Bachand) :...autres interventions à 13? S'il n'y a pas d'autre intervention, est-ce que l'article 13 est adopté?

Des voix : Adopté.

Le Président (M. Bachand) :Adopté. M. le ministre.

M. Jolin-Barrette : 14, M. le Président :

«L'ordonnance est notifiée sans délai par le greffier du tribunal au défendeur ou à toute autre personne qui est visée dont l'identité ou un autre renseignement permettant la notification est connu au moment où l'ordonnance est prononcée.

«Elle peut l'être par tout mode approprié qui permet de constituer une preuve de sa remise, soit notamment par l'huissier de justice, par l'entremise de la poste recommandée, par la remise en mains propres par un service de messagerie ou par un moyen technologique.

«Quel que soit le mode de notification utilisé, la personne qui accuse réception du document ou reconnaît l'avoir reçu est réputée avoir été valablement notifiée.»

Commentaires : Cet article prévoit la notification du jugement qui ordonne qu'on s'abstienne de partager une image intime ou qu'on cesse ce partage.

Le Président (M. Bachand) :Merci beaucoup. M. le député de l'Acadie.

M. Morin :...je comprends que l'ordonnance du tribunal pourrait aussi être signifiée par un moyen technologique.

M. Jolin-Barrette : Oui.

M. Morin :Donc, le greffier pourrait... Si, par exemple, la victime qui fait la demande indique qu'elle sait... par exemple qu'elle connaît le nom de la personne ou son adresse, l'ordonnance pourrait être envoyée directement par, évidemment, un moyen technologique à l'adresse de la personne qui a diffusé l'image sans le consentement?

M. Jolin-Barrette : Oui.

M. Morin :O.K. Avec une preuve de signification.

M. Jolin-Barrette : Oui.

M. Morin :O.K.

Le Président (M. Bachand) :Autres interventions sur l'article 14? S'il n'y a pas d'autre intervention, est-ce que l'article 14 est adopté?

Des voix : Adopté.

Le Président (M. Bachand) :Adopté. Merci. M. le ministre.

M. Jolin-Barrette : 15, M. le Président :

«Dans les 30 jours de la notification de l'ordonnance, le défendeur ou toute autre personne qui y est visée peut en demander l'annulation en raison de l'insuffisance ou de la fausseté des allégations de la déclaration de la personne qui l'a demandée, notamment pour l'un des motifs suivants :

«1° que la personne représentée sur l'image n'avait pas d'attente raisonnable en matière de vie privée dans les circonstances où elle a été créée, captée, enregistrée ou partagée, notamment parce qu'il avait le consentement libre et éclairé de celle-ci dans ces circonstances;

«2° que l'image a été partagée à une fin d'information légitime du public sans excéder ce qui est raisonnable.

«La demande est présentée, par écrit, dans le district du tribunal qui a prononcé l'ordonnance, comme s'il s'agissait d'une demande en cours d'instance. Elle est instruite et jugée sans délai.

«La décision en annulation de l'ordonnance ne peut faire l'objet d'un appel que sur permission d'un juge de la Cour d'appel.»

Commentaires : Cet article prévoit le recours possible du défendeur visé par un jugement qui lui ordonne de s'abstenir de partager une image intime ou de saisir ce partage.

Le Président (M. Bachand) :M. le ministre, oui.

M. Jolin-Barrette : Oui. Alors... Bien, c'est ça, la décision est appelable uniquement sur permission.

Le Président (M. Bachand) :Merci. Donc, interventions? M. le député de l'Acadie.

M. Morin :Oui. Merci, M. le Président. Dans le libellé de 15, vous soulignez à 2° : «Elle est instruite et jugée sans délai» plutôt que «jugée d'urgence». C'est ce que vous avez utilisé à l'article 12. Donc, «sans délai», c'est comme immédiatement. C'est plus urgent que juger d'urgence? Pourquoi vous n'utilisez pas le même libellé.

M. Jolin-Barrette : Non, «urgent» est plus urgent que «sans délai». Sans délai, c'est dans les meilleurs délais?

M. Morin :O.K. Alors, pourquoi...

M. Jolin-Barrette : Parce que là ce n'est plus nécessaire que ça soit urgent parce que l'ordonnance est déjà émise, là...

M. Jolin-Barrette : ...puis le temps que ça soit débattu, bien, elle continue de s'appliquer.

M. Morin :Oui, sauf que si le défendeur qui est visé, lui, il estime que c'est faux, que ça ne devrait pas l'être, il va vivre avec l'ordonnance pendant un bout de temps, là, si ce n'est pas urgent.

M. Jolin-Barrette : Oui, mais c'est parce que c'est une image d'une personne nue, supposons, dans un acte sexuel. C'est pas mal plus important de ne pas la diffuser. Il n'y a pas... je ne pense pas qu'il y a urgence à continuer de diffuser une image. Tu sais, le fardeau de la preuve... bien, la balance d'inconvénients est beaucoup plus en faveur de la personne qui est toute nue sur la photo, qu'elle ne soit pas diffusée, que de la personne qui prétend avoir le droit de la diffuser puis de la partager.

Puis, tu sais, dans le fond, sur la question de l'urgence, là, c'est que ça nous permet d'appliquer l'article 82 du Code de procédure civile qui qui fait en sorte qu'une demande peut être entendue même le samedi ou un jour férié, par le juge désigné par le juge en chef pour assurer la garde. Donc, on n'a pas besoin de la même rapidité qu'en matière urgente.

Le Président (M. Bachand) :M. le député de Jean Lesage, s'il vous plaît.

M. Zanetti : Oui. Merci, M. le Président. Bonjour, tout le monde.

M. Jolin-Barrette : Bonjour.

M. Zanetti : J'ai une question par rapport à l'article 15, au premier alinéa, là, à 1, la fin de la phrase : «notamment parce qu'il avait le consentement libre et  éclairé de celle-ci dans ces circonstances». La question que je me pose, c'est : Est-ce que ça, ça signifie, par exemple, que le consentement libre et éclairé n'est pas révocable?

M. Jolin-Barrette : Non, mais on l'a vu, préalablement, dans les articles précédents, où une personne qui a consenti à l'image, dans le fond, peut révoquer son consentement...

M. Zanetti : Et cet article-là, donc, ne vient pas contredire ça.

M. Jolin-Barrette : ...non, à moins que ça soit prévu par voie contractuelle.

M. Zanetti : Je comprends.

• (16 h 20) •

M. Jolin-Barrette : Puis on l'a vu, là, s'il y une exception avec le contrat d'adhésion, même si c'est par voie contractuelle, vous pouvez aller... vous pouvez révoquer, dans le fond, le contrat d'adhésion, parce que ce n'est pas  vous avez négocié les clauses. Ça fait que, dans le fond, on est venu couvrir l'ensemble. Les seuls motifs pour lesquels vous ne pouvez pas, c'est dans le cadre... que vous ne pouvez pas révoquer, c'est dans le cadre d'un contrat de nature commerciale ou artistique où vous y avez consenti.

M. Zanetti : Donc, à quoi sert cette phrase-là, dans le fond, ce motif-là... À quoi sert tout le paragraphe : «Dans les 30 jours de la notification de l'ordonnance, le défenseur, ou toute autre personne qui est visée, peut en demander l'annulation en raison de l'insuffisance ou de la fausseté des allégations de la déclaration de la personne qui l'a demandé, notamment pour l'un des motifs suivants»? Donc, à quoi sert ce motif-là?

M. Jolin-Barrette : Mais parce que l'atteinte raisonnable, en matière de vie privée, est plus large qu'uniquement la question du consentement. Il pourrait y avoir une preuve à l'effet que le consentement n'a pas été révoqué. Tu sais, supposons, il dit : Bien non, le consentement n'a pas été révoqué jamais.

M. Zanetti : Mais là la personne pourrait dire : Là, je le révoque.

M. Jolin-Barrette : Effectivement. À partir de ce moment-là, son moyen de défense tomberait un peu.

M. Zanetti : Le défendeur, oui, serait comme un peu mal pris.

M. Jolin-Barrette : C'est ça.

M. Zanetti : O.K. Puis à quoi... Dans le fond, mais ma question demeure, c'est-à-dire que...À quoi sert cet article, dans le fond, ce paragraphe-là?

M. Jolin-Barrette : Excusez-moi, M. le député de Jean-Lesage, pouvez-vous répéter votre question?

M. Zanetti : Oui. Dans le fond, à quoi sert ce motif-là? Dans le fond, on met un motif selon lequel il peut annuler la demande de l'ordonnance. Alors, pourquoi venir mettre ce motif de demande? Ah! mais, dans le fond, qu'est-ce que vous dites, c'est qu'il peut dire : Ah! mais là, ça n'a pas été révoqué. Sauf que j'imagine que, si quelqu'un envoie une ordonnance pour arrêter ça, c'est parce qu'à quelque part il y a une révocation du consentement.

M. Jolin-Barrette : Oui, mais dans le cas... Supposons que vous êtes en matière de voie contractuelle, avec l'exception en matière, supposons, de contrat commercial ou de contrat artistique, là, à ce moment-là, il pourrait soulever ça, notamment, dans le fond, dans les exceptions.

M. Zanetti : Mais ça n'empêcherait pas quelqu'un de, à tout moment, comme c'est prévu précédemment, le projet de loi, de révoquer son consentement, sauf dans les limites que vous avez déjà... par rapport au contrat commercial.

M. Jolin-Barrette : Oui, exactement.

M. Zanetti : O.K. Parfait. Je comprends. Merci.

Le Président (M. Bachand) :Merci. M. le député de l'Acadie.

M. Morin :Oui, brièvement. Quand, à 15, on parle du district du tribunal, tribunal, bien, c'est la Cour du Québec. Alors, cette contestation-là va être en chambre civile ou en chambre pénale devant le juge de paix magistrat?

M. Jolin-Barrette : Dans le fond, c'est une juridiction qui est donnée à l'ensemble des juges de la Cour du Québec, donc les 333 juges et aux juges de paix magistrats. Donc, ça pourrait être, en matière civile comme en matière criminelle. Bien, en fait, normalement, ça va être en matière civile, sauf que votre juge de paix magistrat n'agit pas en matière... en chambre civile, il agit de garde, tout ça. Ça fait que la chambre n'est pas importante dans le cadre...

M. Jolin-Barrette : ...de ce litige-là. Exemple, supposons que le juge de disponible que vous avez, c'est un criminaliste, puis, lui, il est nommé à la chambre criminelle et pénale. Bien, il a quand même la juridiction sur un dossier de nature civile, introduit par cette loi-là. Il n'a pas besoin de siéger en chambre criminelle et pénale pour le faire parce qu'il le fait en son... en son bureau. Il peut le faire ex parte sans audience. Bien, pas à 30, là...

M. Morin : Oui.

M. Jolin-Barrette : ...pas à 30. Là, il va être dans une salle de cours.

M. Morin : C'est... Bon, écoutez, là on est à 15, l'article 15?

M. Jolin-Barrette : Oui. Excusez-moi, à 15. Je voyais le 30 jours. 

M. Morin : Oui, c'est ça. C'est parce que je voyais le 30 jours aussi puis là je me disais : On est juste à 15.

Bien, donc... Bien, ça, là, la contestation, elle va se faire dans une salle de cours. Elle ne sera pas dans son bureau.

Une voix : ...

M. Jolin-Barrette : Bon, ce qu'on me dit, c'est que... en chambre civile.

M. Morin : O.K.

M. Jolin-Barrette : Puis là il ne faut pas oublier que l'annulation, même si c'est un juge de paix magistrat qui l'a prononcé, ce n'est pas lui qui a juridiction sur l'annulation. Ça fait que le JPM peut le prononcer, mais s'il y a une demande d'annulation, ça va se retrouver uniquement devant un juge de la Cour du Québec.

M. Morin : O.K.

M. Jolin-Barrette : Et donc supposons que c'est un juge de la Cour du Québec, un criminaliste qui l'a émise, bien, lui... supposons qu'il décide d'entendre l'ordonnance d'annulation, il va quand même siéger en chambre civile. C'est ça? C'est ça.

M. Morin : O.K., puis c'est la procédure civile qui va s'appliquer.

M. Jolin-Barrette : Oui.

M. Morin : O.K. L'article ne dit pas... On en parle depuis tantôt, mais c'est clair que ça va être en chambre civile ou est-ce qu'on devrait l'indiquer, ou que...

M. Jolin-Barrette : En fait, les chambres, là, quand vous êtes nommé à la Cour du Québec, là, vous êtes... le décret de nomination... vous n'êtes pas nommé à une chambre. Dans le fond, sur l'affichage de poste, on dit : On ouvre un poste, supposons, à Montréal en chambre civile, O.K.? Ça fait que là la personne soumet sa candidature, elle est évaluée. Bien, moi, quand je le recommande au Conseil des ministres, là, il n'est pas recommandé comme juge la Cour du Québec en chambre civile parce qu'il y a un profil civiliste. Il devient juge de la Cour du Québec avec juridiction sur l'ensemble du territoire québécois. Puis là administrativement la cour ont organisé la cour en fonction de différentes chambres, puis, généralement, les juges sont affectés à une chambre. Bien, ça arrive qu'ils... Exemple, là, au Saguenay, c'est comme ça, en Abitibi aussi, ils sont multi chambres. Même à Rimouski, ils font les trois chambres.

M. Morin : Exact, ils font les trois chambres.

M. Jolin-Barrette : Ils font les trois chambres. Ça fait que le juge, il est fluide, je dirais ça comme ça. Ça fait que, même si vous avez un criminaliste qui est en chambre criminelle et pénale, puis c'est lui qui émet l'ordonnance, puis que, je ne sais pas, il fait le suivi de l'ordonnance, bien, il va se retrouver quand même à siéger en chambre civile, s'il voulait... il applique le droit applicable.

C'est un peu comme... Tu sais, nous, on... lorsqu'on fait les affichages de poste, on cible davantage les chambres, mais on ne serait pas obligés de le faire. Un peu comme à la Cour supérieure. Quand vous êtes nommé à la Cour supérieure, même si vous avez des... des spécialisations professionnelles, supposons, bien, il va entendre un dossier de familial, puis, après, un dossier d'arbre à ne pas couper, puis, ensuite, un dossier de municipalité.

M. Morin :Puis... Bon, puis, effectivement, dans certains districts, ils peuvent siéger au criminel, en divorce, bon, bref...

M. Jolin-Barrette : Bien, c'est ça, oui. Mais ça arrive que, dans les districts à plus fort volume, bien, ceux qui ont une expérience de criminaliste vont être... vont entendre les dossiers en criminel, à la chambre familiale. Supposons, à Montréal, bien, c'est plus des familialistes qui... Mais il y a une rotation.

M. Morin : O.K, je comprends. Bien. Et, à deux, parmi les motifs que le défendeur peut faire valoir, c'est «que l'image a été partagée à une fin d'information légitime du public sans excéder ce qui est raisonnable.» Et qu'est-ce que vous avez en tête avec cette exception-là.

M. Jolin-Barrette : Donc... Bon. C'est un moyen de défense, à l'article 36, alinéa un, paragraphe cinq, du Code civil du Québec. «Dans certaines circonstances, le droit à l'image ne peut être invoqué au détriment de la liberté de presse. Lorsqu'il existe un intérêt du public ou un souci d'information légitime du public à la diffusion de l'image, il ne serait pas nécessaire d'obtenir l'autorisation de la personne (manifestation ou événement public, personnalité publique). Il en serait de même lorsque l'utilisation de l'image d'une personne est incidente. L'évaluation de l'intérêt public est nécessaire lorsqu'il s'agit de déterminer si l'image d'une personne peut être captée ou publiée...

M. Jolin-Barrette : ...sans son consentement.

M. Morin : Là, on parle d'images intimes qui sont partagées sans le consentement. Ça fait que j'ai... Je comprends...

M. Jolin-Barrette : Mais l'expectative de vie privée d'une image intime d'une personne, supposons, nue dans un espace public dans le but de... Bien, prenons le cas, supposons, ici. L'ancienne députée de Marguerite-Bourgeoys, lors d'une conférence de presse ici, était au lutrin, à la salle Bernard- Lalonde, et une dame est venue se dévêtir à côté d'elle. Donc, c'était une Femen. Et là, bien, manifestement, il y a des photos qui ont été prises en lien avec la manifestation qui s'est déroulée à l'Assemblée nationale avec des inscriptions sur le corps de la dame en question. Alors, cette image-là a quand même été diffusée parce que les journalistes ont fait leur travail, ont pris une photo de l'information. Est-ce que cette information-là, qui a été... qui s'est retrouvée dans les médias, est une image intime, mais, alors que la personne volontairement s'est dénudée dans le but de passer un message public, l'expectative associée à la vie privée, elle est davantage limitée... puis l'information du public aussi milite en faveur de savoir qu'est-ce qui s'est passé?

M. Morin : Oui. Sauf que j'écoute attentivement votre exemple, mais quand je me ramène à 2 de l'article 1 du projet de loi, si j'ai bien lu, ça dit : «Constitue une image intime toute image modifiée ou non représentant ou semblant représenter une personne, soit nue ou partiellement nue, exposant ses seins, ses organes génitaux, sa région anale ou ses fesses, soit se livrer à une activité sexuelle explicite, lorsqu'elle pouvait s'attendre de façon raisonnable à ce que sa vie privée soit protégée.» Donc, dans votre exemple, la dame, elle ne pouvait pas s'attendre à ce que sa vie privée soit protégée, elle est dans une salle de presse puis il y a toutes des caméras partout. Donc, son but, c'est de passer un message politique. Ça fait que ça ne s'appliquerait pas?

• (16 h 30) •

M. Jolin-Barrette : Bien, c'est... c'est relatif. Il pourrait y avoir un débat. Elle, elle pourrait dire : Bien, moi, je ne consentais pas à ce que les journalistes de la Tribune de la presse prennent des photos de moi, moi, je fais ça dans le cadre de ma vie citoyenne. Puis tu sais, il pourrait y avoir ce type de débat là, là.

M. Morin :Oui. Sauf que quand on dit... Ah! mais, à ce moment-là, qu'est-ce qu'on entend par «pouvait s'attendre de façon raisonnable à ce que sa vie privée soit protégée»?

M. Jolin-Barrette : Écoutez, je ne suis pas derrière les motivations de la personne qui vient se dénuder à l'Assemblée nationale, mais c'est sûr, si vous êtes dans un endroit public nu, votre expectative de vie privée, elle diminue.

M. Morin : Elle diminue dangereusement. Bien, il me semble.

M. Jolin-Barrette : Bien, elle diminue.

M. Morin :C'est ça. Donc...

M. Jolin-Barrette : Mais au même titre que, supposons que... Je vais garder mon exemple.

M. Morin : D'accord. C'est parce que j'essaie de voir. À moins... Je ne sais pas. J'essaie de voir à quoi ça va s'appliquer : «que l'image ait été partagée à une fin d'information légitime du public sans excéder ce qui est raisonnable.» Ça fait qu'est-ce que... qu'est-ce que le législateur a en tête?

M. Jolin-Barrette : Bien, on pourrait se retrouver... Bien, on va suspendre juste un instant.

M. Morin : Oui. S'il vous plaît. Je vous remercie.

Le Président (M. Bachand) :On va suspendre quelques instants. Merci.

(Suspension de la séance à 16 h 33)


 
 

16 h 30 (version non révisée)

(Reprise à 16 h 40)

Le Président (M. Bachand) :À l'ordre s'il vous plaît. La commission reprend ses travaux. M. le ministre, on a hâte de vous entendre.

M. Jolin-Barrette : Oui. Alors, M. le Président, là, à l'article 15, on est en défense. O.K. Donc, c'est la personne contre qui est visée l'ordonnance, qui pourrait faire valoir ce moyen de défense là pour dire : Écoutez, l'image a été partagée pour une fin d'information légitime du public, sans excéder ce qui est raisonnable. Donc, la personne dit : Moi, je veux faire casser l'ordonnance parce qu'il y a une fin d'information légitime du public. Donc, c'est comme un équilibre qu'on a entre la protection du droit à l'image au niveau de la personne, de la vie privée, avec une balance de l'information du public.

Il pourrait y arriver certaines circonstances où c'est légitime que le public ait accès à certaines informations, à certaines photos, pour le bien de l'information du public. Et là on est dans des cas très, très isolés. Il y a déjà ce moyen de défense là qui est dans le Code criminel sur le partage des images intimes. On pourrait se retrouver dans une situation, supposons que, je ne sais pas, il y a un reportage d'une équipe d'enquête d'un média sur, supposons, une secte avec un gourou. Puis là il se retrouve lui-même à prôner, supposons, des valeurs d'endoctrinement puis de, je ne sais pas, là, de chasteté, et puis tout le kit. Puis là il se retrouve lui-même à partager des images de lui-même, à envoyer des images de lui-même qui seraient diffusées. Alors, dans le cadre du reportage, il pourrait être légitime d'exposer les actes et les agissements de cette personne-là.

Donc, c'est comme une balance rattachée à ça. Le principe général, c'est tout... où est-ce qu'il y a une expectative de vie privée. Il n'y a pas de partage d'images intimes. Cependant, lorsque l'image pourrait être partagée, à une fin d'information légitime du public sans excéder ce qui est raisonnable. Donc, exemple, une image qui serait flouée. Floutée? Flouée?

Une voix : Floutée.

M. Jolin-Barrette : Floutée. Et qui serait diffusée, supposons, dans les médias pour démontrer que ce qui a été prôné ou ce qui est dit, supposons, publiquement, bien, l'agissement est contraire à ce qui est véhiculé parce que le public a un droit à l'information. Donc, c'est comme ça aussi en Colombie-Britannique.

M. Morin : Au Manitoba également?

M. Jolin-Barrette : Oui.

M. Morin : Parfait. Merci.

Le Président (M. Bachand) :Autres informations? Autres interventions, pardon, sur l'article 15? S'il n'y a pas d'autre intervention, est-ce que l'article 15 est adopté?

Des voix : Adopté.

Le Président (M. Bachand) :Adopté. M. le ministre.

M. Jolin-Barrette : «L'ordonnance reste en vigueur malgré une demande d'annulation ou un appel, à moins que le tribunal en ordonne autrement.»

Commentaire. Cet article maintient l'effet de l'ordonnance, qu'on s'abstienne de partager une image intime ou qu'on cesse ce partage malgré le recours en contestation que présenterait une personne visée par l'ordonnance. Donc durant tout le long où la demande d'annulation, l'ordonnance continue de s'appliquer.

Le Président (M. Bachand) :Merci. Interventions...

Le Président (M. Bachand) :...sur l'article 16? S'il n'y a pas d'intervention, est-ce que l'article est adopté?

Des voix : Adopté.

Le Président (M. Bachand) :Adopté. M. le ministre.

M. Jolin-Barrette : «17. Malgré l'article 23 de la Charte des droits et libertés de la personne, l'audience se tient à huis clos et l'accès au dossier du tribunal est restreint. Cependant, lorsque toutes les autres parties sont majeures, le tribunal peut, dans l'intérêt de la justice, ordonner que l'audience soit publique et que certaines personnes ayant un intérêt légitime puissent accéder au dossier. Aucune personne ayant eu accès aux dossiers ne peut divulguer ni diffuser un renseignement qui... permettant d'identifier une partie à une instance, à moins que le tribunal ne l'autorise.»

Commentaires : Cet article prévoit que l'audition relative à une demande d'ordonnance pour qu'on s'abstienne de partager une image intime, qu'on cesse ce partage soit tenue à huis clos et que le dossier soit confidentiel, sauf si le tribunal en décide autrement. Donc, c'est un peu un accroc au principe de justice que la justice est rendue publiquement. Donc, considérant la nature du dossier et des images, concernant le caractère intime des photographies, des vidéos, et tout support, on dit : Bien, c'est huis clos, mais on donne une marge de manœuvre au tribunal, si, dans l'intérêt de la justice, il y a certaines parties qui peuvent être diffusées.

Le Président (M. Bachand) :Est-ce qu'il y a des interventions? M. le député de l'Acadie.

M. Morin :Oui, merci, M. le Président. Donc, il faudrait... Si, par exemple, pour toutes sortes de raisons, une victime voudrait que ce soit public, elle pourrait faire la demande à la cour, le tribunal pourrait l'accorder.

M. Jolin-Barrette : Exactement. Ou, s'il y avait un tiers qui disait... supposons, des journalistes qui disaient : Bien, on veut pouvoir accéder à une partie du dossier, ou quoi que ce soit, bien, ça prendrait une autorisation judiciaire pour le faire.

M. Morin :O.K. Alors donc, quand vous dites : L'accès aux dossiers du tribunal est restreint, bon, ça veut dire, évidemment, il y a certaines personnes qui ne peuvent pas y avoir accès, mais est-ce que c'est... il y a des personnes qui peuvent y avoir accès? Comment vous... comment vous évaluez ça, qui pourrait avoir accès, pas accès. Donc, ça dépend, le tribunal va rendre une ordonnance à chaque fois ou... Comment ça va fonctionner?

M. Jolin-Barrette : Bien, en fait, seuls les parties, les avocats et les notaires peuvent avoir accès.

M. Morin :O.K., mais ce n'est pas écrit dans le texte de loi, comme tel.

M. Jolin-Barrette : Donc, c'est l'article 16 du Code de procédure civile. «Lorsque l'accès aux dossiers ou à des documents est restreint, seuls peuvent les consulter ou en prendre copie les parties, leurs représentants, et les avocats et les notaires. Les personnes désignées par la loi et les personnes, dont les journalistes, ayant justifié un intérêt légitime sont autorisées par le tribunal, selon les conditions et les modalités d'accès que celui-ci fixe.» Donc, c'est le tribunal qui va venir déterminer qui a accès et les modalités. Donc, c'est pour éviter, encore une fois, d'imposer un fardeau sur la victime, de dire : Bien, moi, j'aimerais ça que ce soit une audience à huis clos. C'est le principe. D'office, c'est huis clos ou restreindre, sauf si le tribunal autorise autre chose.

M. Morin :Puis est-ce que, par exemple, un enquêteur pourrait avoir accès au dossier du tribunal? Est-ce qu'il est inclus là-dedans ou s'il va devoir faire une demande au tribunal pour obtenir une ordonnance?

M. Jolin-Barrette : Il va devoir... Oui, c'est... un tiers va devoir faire une demande. Il va devoir faire une demande.

Le Président (M. Bachand) :Interventions sur 17? M. le député d'Acadie.

M. Morin :Et, si jamais quelqu'un ne respectait pas l'ordonnance, à ce moment-là, il pourrait être passible d'un outrage ou si on s'en remet à la disposition du Code criminel qui dit que, si une ordonnance du tribunal n'est pas respectée, ça peut être une infraction pénale?

M. Jolin-Barrette : ...c'est prévu par la loi, si vous violez la disposition de la loi...

Des voix : ...

M. Jolin-Barrette : On va vérifier, on vous revient.

M. Morin :O.K. Merci.

Le Président (M. Bachand) : Autres interventions à 17? Mme la députée de Vaudreuil.

M. Jolin-Barrette : ...

Le Président (M. Bachand) :Oui.

M. Jolin-Barrette : La question, et c'est peut-être en deux volets, là, c'est, un, s'il y a une ordonnance du tribunal, tu sais, j'autorise juste celui-là... On vous revient.

M. Morin :Merci beaucoup.

Le Président (M. Bachand) : Mme la députée de Vaudreuil.

Mme Nichols : Oui. Merci, M. le Président. À l'article 17, Juripop avait émis, entre autres... avait émis un commentaire et recommandait que le dépôt d'une attestation confirmant que la personne s'était présentée à un...

Mme Nichols : ...aux personnes victimes, une personne, nonobstant son recours, peut élire domicile au cabinet de l'avocat qui la représente ou, à défaut, au greffe du tribunal, pour le huis clos, l'accès restreint à son dossier et la non-divulgation, la non-publication. Donc, tout ça, évidemment, est respecté dans la confidentialité de l'ensemble des données.

M. Jolin-Barrette : Oui, c'est ça. Mais ça, c'est dans le cadre de l'ordonnance civile de protection, pas dans cette ordonnance-là. Je pense leur commentaire, là, était... était sur...

Mme Nichols : Oui, leur commentaire, moi, je l'avais associé avec l'article 17. Bien, peut-être, je me suis... peut-être, je me suis trompée, mais je l'avais...

Une voix : ...

M. Jolin-Barrette : Oui, mais l'autre, c'est sur la loi sur la justice administrative.

Mme Nichols : Mais il y avait quand même un lien avec la... avec la confidentialité des données?

M. Jolin-Barrette : Mais, en fait, ils ont... les données sont confidentielles. On ne peut pas accéder aux données parce que c'est du huis clos puis le dossier est restreint. Ça fait qu'il y a juste la partie, l'avocat puis le notaire qui peut accéder au dossier. Les autres qui vont vouloir accéder au dossier vont devoir être autorisés par le tribunal.

Mme Nichols : O.K. O.K. Mais peut-être ça s'applique plus au...

M. Jolin-Barrette : À l'ordonnance civile de protection, qu'on va voir tantôt.

Mme Nichols : ...à l'ordonnance civile de protection, qu'on va voir plus loin.

Le Président (M. Bachand) :Merci. Autres interventions sur 17? M. le député de l'Acadie.

• (16 h 50) •

M. Morin : ...brièvement. Dans le mémoire du protecteur national de l'élève... J'imagine que, si jamais le protecteur voulait avoir accès, il sera obligé lui aussi faire une demande au tribunal...

M. Jolin-Barrette : Oui.

M. Morin : ...dans le cadre d'une enquête que lui pourrait devoir faire, là, en vertu de sa loi. Donc, il n'aura pas un accès, il n'y a pas d'exception pour lui non plus. Donc, il va devoir faire une demande au tribunal.

M. Jolin-Barrette : Pas au dossier judiciaire.

M. Morin : O.K.

M. Jolin-Barrette : À moins que la personne victime s'adresse directement à lui et lui transmette elle-même l'information.

M. Morin :Effectivement. Mais c'est parce qu'à ce moment-là il aura l'information.

M. Jolin-Barrette : C'est ça.

M. Morin : Donc, il va être... il va être capable de travailler, mais...

M. Jolin-Barrette : Non, mais... Non, mais il pourrait y avoir des informations que lui n'a pas puis qui se retrouveraient au dossier de la cour pour x, y raison. Là, à ce moment-là, il faudrait qu'il fasse la demande.

M. Morin : D'accord.

Le Président (M. Bachand) :Autres interventions à 17? S'il n'y a pas d'autre intervention, est-ce que l'article 17 est adopté?

Des voix : Adopté.

Le Président (M. Bachand) :Adopté. Merci. M. le ministre.

M. Jolin-Barrette : «18. Outre la sanction pour outrage au tribunal, quiconque néglige ou refuse de se conformer à une ordonnance de protection en vertu de la présente loi est passible d'une amende de 500 $ à 5 000 $ par jour dans le cas d'une personne physique ou, malgré l'article 231 du Code de procédure pénale, d'une peine d'emprisonnement maximale de 18 mois, ou des deux à la fois, et de 5 000 $ à 50 000 $ par jour dans les autres cas.

«En cas de récidive, ces montants sont portés au double.

«Il peut... Il ne peut y avoir cumul d'une poursuite pour outrage au tribunal et d'une poursuite visant la sanction pénale d'une infraction à une ordonnance visée par la présente loi survenue le même jour et fondée sur les mêmes faits.»

Commentaire : Cet article prévoit les conséquences du non-respect d'une ordonnance de s'abstenir de partager une image intime ou de cesser ce partage.

Le Président (M. Bachand) :Merci beaucoup. M. le député de l'Acadie.

M. Morin :Oui. Je vous remercie. Dans le... Mais, en fait, il y a deux éléments. Dans le cas d'une amende de 500 $ à 5 000 $ par jour pour une personne physique, bien, ça se peut qu'évidemment, la personne, ça lui prenne du temps, ça... il y a des jours qui peuvent se dérouler. Est-ce que le... dans un cas comme ça, le tribunal va évaluer la capacité de payer du défendeur?

M. Jolin-Barrette : Bien, c'est la... à la discrétion du tribunal. C'est lui qui regarde. Dans le fond, il y a une amende minimale, puis, dans le fond, là, ça devient une poursuite pénale. Ça fait qu'à ce moment-là c'est ce qui est réclamé par le poursuivant.

M. Morin : O.K. Bien. Dans le mémoire des CAVAC... Donc, les moyens ou les mécanismes mis en place en cas de non-respect, ça va être une infraction ou une ordonnance ou une poursuite qui va être faite par le DPCP? Comment ça va fonctionner, dans les faits?

M. Jolin-Barrette : Donc, dans un premier temps, c'est enquête des agents de la paix, donc, policiers, rédaction d'un rapport d'infraction général par l'agent de la paix, envoi du rapport d'infraction général au DPCP pour analyse du dossier et ensuite transmission du dossier au DPCP pour la signification du constat, puis il va y avoir un plaidoyer de culpabilité ou de non-culpabilité dans les 30 jours, puis, par la suite, supposons, plaidoyer de non-culpabilité et procès.

M. Morin : Mais je comprends également que le tribunal pourrait...

M. Morin :...décider d'utiliser son pouvoir d'outrage au tribunal pour punir.

M. Jolin-Barrette : Aussi.

M. Morin :Mais c'est cumulatif ou c'est un ou l'autre?

M. Jolin-Barrette : Bien, quotidiennement, ça ne peut pas être les deux : «Il ne peut y avoir cumul d'une poursuite pour outrage au tribunal...

M. Morin :C'est ça.

M. Jolin-Barrette : ...et d'une poursuite visant la sanction pénale d'une infraction à une ordonnance visée dans la présente loi survenue le même jour et fondée sur les mêmes faits.»

M. Morin :Donc, si le tribunal décide d'agir par outrage au tribunal...

M. Jolin-Barrette : Oui, il n'aura pas une amende pour la même journée.

M. Morin :Exact. Puis à ce moment-là...

M. Jolin-Barrette : Mais son ordonnance s'applique quotidiennement. Ça fait que, jour deux... Supposons, il y a outrage, jour un, bien, le lendemain, il pourrait être... il pourrait recevoir un constat d'infraction, parce que ce n'est pas la même infraction le lendemain.

M. Morin :Non, je comprends, mais ça pourrait être aussi un outrage le lendemain.

M. Jolin-Barrette : Ça pourrait être un outrage le lendemain.

M. Morin :Et à ce moment-là, la peine pour outrage, c'est celle que vous prévoyez là, ou c'est laissé à la discrétion du tribunal?

M. Jolin-Barrette : Bien, l'outrage, c'est prévu dans le Code de procédure civile, mais c'est des dispositions pénales qui s'appliquent. Donc, un outrage, c'est 500 $ à 5 000 $ dans les... oui, 500 $ à 5 000 $, puis personnes morales, c'est 5 000 $ à 50 000 $.

M. Morin :Pour l'outrage?

M. Jolin-Barrette : Oui.

M. Morin :Donc, c'est la même chose, c'est les mêmes...

M. Jolin-Barrette : Ah non! Ça, c'est pour les sanctions, excusez.

M. Morin :Oui, c'est ça.

M. Jolin-Barrette : L'outrage, dans le CPC, c'est combien?

Une voix : ...

M. Morin :Mais...

M. Jolin-Barrette : Il n'y a pas de bracket?

M. Morin :Non. Habituellement, c'est à la discrétion du tribunal. Donc, c'est...

M. Jolin-Barrette : Bon.

M. Morin :...c'est autre chose, là. Puis, dans un cas comme ça, c'est le tribunal...

M. Jolin-Barrette : Qui va déterminer.

M. Morin :Va déterminer. Mais...

M. Jolin-Barrette : Mais, en matière d'outrage, il peut même l'envoyer en prison. Pour un outrage.

M. Morin :O.K. Puis à ce moment-là, c'est le greffe qui va signifier la procédure pour outrage?

M. Jolin-Barrette : C'est qui qui va signifier?

M. Morin :Oui, et c'est ce que c'est... C'est parce que, là, c'est... ce n'est pas le juge, c'est le greffe qui va signifier l'ordonnance pour outrage puis qui va convoquer le défendeur devant le juge?

M. Jolin-Barrette : Ce ne sera pas long. Je peux répondre à une autre de vos questions en attendant.

M. Morin :Pas de souci. Il n'y a pas de souci.

Le Président (M. Bachand) :Est-ce qu'il y a d'autres interventions en attendant la réponse du ministre? On va attendre la réponse du ministre.

Une voix : ...

Le Président (M. Bachand) :On va suspendre quelques instants. Merci.

(Suspension de la séance à 16 h 56)

(Reprise à 16 h 59)

Le Président (M. Bachand) :À l'ordre, s'il vous plaît! La commission reprend ses travaux. M. le ministre.

M. Jolin-Barrette : Oui, alors... M. le Président. Alors, deux recours possibles. Le recours en outrage au tribunal par rapport à une ordonnance va être présenté par la personne victime si elle le souhaite, sinon, si l'ordonnance n'est pas respectée, elle peut décider aussi de porter plainte à la police, et là ça va se traduire par une infraction de nature pénale, donc un constat d'infraction. Et là ça peut être... de l'infraction, elle est quotidienne, comme l'outrage aussi peut être quotidien tous les jours. Cependant, le recours ne pourra pas être l'outrage et le constat d'infraction, l'infraction pénale, la même journée. Donc, exemple, on est... on est mardi, il y a une ordonnance qui est émise aujourd'hui, elle n'est pas respectée. La victime pourrait faire un recours en outrage au tribunal aujourd'hui, demain la... l'ordonnance n'est pas respectée, il va y avoir une plainte à la police, constat d'infraction, émise pour mercredi. Mais ça ne pourrait pas être les deux la même journée.

M. Morin : ...comprends très bien. Parce que votre disposition est claire, ça dit : «Il ne peut y avoir cumul d'une poursuite pour outrage au tribunal et d'une poursuite visant la sanction pénale.»

M. Jolin-Barrette : C'est ça.

M. Morin : Ça, c'est très clair. Cependant, moi, mon questionnement...

M. Jolin-Barrette : Oui, en...

M. Morin : Oui?

M. Jolin-Barrette : En outrage, c'est 10 000 $ max pour une personne physique, 100 000 $, pour une personne morale.

• (17 heures) •

M. Morin :D'accord. Mais si la victime décide de s'adresser au tribunal, en disant à la cour : Écoutez, votre ordonnance n'est pas respectée. Là, moi, j'ai la preuve que l'image a continué d'être diffusée, là, malgré votre ordonnance. Alors, à ce moment-là, c'est la victime...

M. Jolin-Barrette : C'est la personne victime.

M. Morin : ...qui fait la preuve? C'est la victime qui assigne le défendeur ou c'est le tribunal? Comment... Comment ça fonctionne?

M. Jolin-Barrette : Bien, les... C'est les règles associées à l'outrage au tribunal, donc c'est la victime qui les assigne. Donc, c'est sûr que l'outrage au tribunal est plus lourd pour la personne victime que, supposons, de faire une plainte en vertu de l'infraction pénale du non-respect de l'ordonnance.

M. Morin : Oui, clairement. Surtout, si la victime a 14 ans ou 15 ans, là, ça devient compliqué.

M. Jolin-Barrette : Oui. Puis là, quand on est en matière d'outrage au tribunal, le fardeau de preuve est celui qui est l'équivalent en matière pénale, donc, même si c'est un recours dans le Code civil.

M. Morin : Hors de tout doute raisonnable.

M. Jolin-Barrette : C'est ça.

M. Morin : O.K., mais ça serait à la victime, à ce moment-là, d'agir.

M. Jolin-Barrette : Exactement. Exactement. Mais, puisque c'est une ordonnance civile, on voulait quand même donner l'option à la personne victime que ça soit plus simple pour elle puis que ça ne soit pas elle qui est à prendre en charge cela, d'où le recours à la plainte, à l'infraction pénale, plainte à l'agent de la paix, ensuite processus avec le DPCP, pour ne pas lui imposer ce fardeau-là si jamais on ne veut pas que ce soit respecté.

M. Morin : Puis...

M. Jolin-Barrette : Donc, on... Je vous un comparatif avec l'ordonnance civile de protection de tantôt. L'ordonnance civile de protection, on l'a criminalisée en faisant en sorte d'enlever le recours en outrage au tribunal puis en passant par 720...

Une voix : 627.

M. Morin : 627 du Code criminel.

M. Jolin-Barrette : ...627. Ça fait que, là, ça fait en sorte qu'automatiquement on vient criminaliser l'ordonnance. Donc là, dans ce cas-ci, on lui offre deux choix, donc, ça devient une infraction pénale ou elle a son recours civil qui...

M. Morin : Sauf que ce que j'ai de la difficulté à saisir, c'est pourquoi, dans un cas... Parce qu'on parle dans les deux cas d'une ordonnance d'un tribunal, de toute façon. Alors, pourquoi, à 18, vous gardez l'outrage au tribunal ou une infraction pénale, mais, à l'autre disposition, qu'on va voir plus loin, en ce qui a trait à l'ordonnance civile de protection, vous avez exclu l'outrage au tribunal?

M. Jolin-Barrette : On l'a exclue parce que ça devient criminalisé. On la criminalise, l'infraction. Tandis que, dans ce cas-ci, il y a déjà une infraction criminelle associée au partage d'images intimes. Dans le fond, le partage d'images intimes, c'est déjà prévu au Code criminel, c'est déjà une infraction. Là, nous, ici, on est dans notre régime civil, mais on ne voulait pas juste faire en sorte que ça repose tout sur les épaules de la victime avec... si l'ordonnance n'est pas respectée, d'un recours en outrage, que ce soit la victime qui fasse le processus. Ça fait qu'on vient générer une infraction pénale associée à la loi, et donc ça va être la police puis le DPCP qui va s'en occuper. La différence avec l'ordonnance civile de protection, c'est que, si on avait maintenu l'outrage, on ne pouvait pas passer par 627 du Code criminel et on ne pouvait pas le criminaliser...


 
 

17 h (version non révisée)

M. Morin : ...mais au fond, vous optez pour deux régimes différents. Je comprends que, dans ce cas-ci, il y a déjà... il y a déjà une infraction au Code criminel, mais l'infraction à 127 n'est pas la même que le partage d'images intimes. Donc, ça pourrait être une option aussi. Ce n'est pas moindre et inclus... puis là, vous avez décidé de l'outrage…

M. Jolin-Barrette : Oui, mais, dans ce cas-ci, ça se prêtait mieux au quotidien, parce qu'on veut que la situation cesse. Tu sais, on veut arrêter. Donc, le fait d'avoir une amende pour dire, exemple : Je partage l'image intime, bien, tu reçois des amendes, tu risques d'obtempérer beaucoup plus rapidement. Tandis que l'ordonnance civile de protection, c'est un comportement délictuel qui est... qui menace la vie de la personne, là. Ça fait qu'on veut... Les conséquences sont importantes.

M. Morin : Oui, oui, c'est clair, mais les conséquences sont aussi importantes pour le partage d'une image intime sans le consentement.

M. Jolin-Barrette : Oui, puis le partage d'images intimes vise plus de monde aussi. Donc, les personnes morales, les personnes physiques aussi, la volumétrie est plus importante, ça fait qu'on va atteindre notre objectif avec le pénal.

M. Morin : Et l'outrage au tribunal.

M. Jolin-Barrette : Et l'outrage au tribunal, si c'est ce qui est choisi.

M. Morin : O.K. Je vous remercie.

Le Président (M. Bachand) :Est-ce qu'il y a d'autres interventions, à l'article 18? S'il n'y a pas d'autre intervention, est-ce que l'article 18 est adopté?

Des voix : Adopté.

Le Président (M. Bachand) :Adopté. Merci. M. le ministre.

M. Jolin-Barrette : 19, M. le Président : «Si une personne morale contrevient à une ordonnance prononcée en vertu de la présente loi, l'administrateur, le dirigeant ou le représentant de cette personne morale qui a ordonné ou autorisé l'accomplissement de l'acte ou l'omission qui constitue l'infraction, qui y a consenti, est partie à l'infraction et est passible de la même peine que cette personne morale.»

Commentaires. Cet article rend imputables les administrateurs, dirigeants ou représentants d'une personne morale qui contreviennent à une ordonnance de s'abstenir de partager une image intime ou de cesser ce partage.

Le Président (M. Bachand) :...interventions? M. le député de l'Acadie.

M. Morin : Un peu plus tôt, dans un autre article qu'on a vu, je vous ai posé la question, M. le ministre, à savoir si le mot «personne» incluait personne morale, vous avez dit oui, mais là, ici, vous utilisez une personne morale, ça fait qu'il y a une distinction entre les deux articles. Pourquoi... dans un cas où c'est une seule personne qui inclut les deux, mais ici vous prenez la peine de spécifier personne morale? Parce que vous voulez... vous voulez...

M. Jolin-Barrette : Bien, parce que ce qu'on...

M. Morin : ...viser l'administrateur.

M. Jolin-Barrette : Oui, pour pouvoir aller chercher l'administrateur, vous n'avez pas un administrateur d'une personne physique, ça fait que pour aller chercher l'administrateur, le dirigeant de l'entreprise, dans le fond, ça va s'appliquer uniquement dans le cas de la personne morale. Donc, on dit : Si la personne morale ne respecte pas, on va être capable aussi d'aller chercher la personne physique qui est derrière la personne morale, la personne physique qui est en situation d'autorité. Parce que, tu sais, dans le fond, si 123Québec Inc. qui diffuse l'image, bien, ce n'est pas possible de donner un constat d'infraction avec le... avec le régime général, sur le président, si ce n'est pas nommément inclus... nommément indiqué, parce que ce n'est pas lui à titre personnel qui a diffusé l'image, c'est la compagnie qui l'a diffusée, la corporation qui l'a diffusée. Ça fait que ça... on va aller chercher la personne à travers le voile corporatif de la personne, il fallait le mentionner.

M. Morin : Sauf que vous allez quand même devoir faire la preuve que l'administrateur était au courant puis qu'il l'a ordonné, là, ce n'est pas...

M. Jolin-Barrette : Oui.

M. Morin : C'est ça.

M. Jolin-Barrette : Oui, oui.

M. Morin : Et donc...

M. Jolin-Barrette : Bien, de cette personne morale qui a ordonné ou autorisé l'accomplissement de l'acte ou l'omission qui constitue une infraction ou qui y a consenti est partie à l'infraction et est passible...

M. Morin : C'est ça. Donc... donc, vous allez être obligé... la poursuite va être obligée de démontrer le consentement ou des actions qui ont été posées par l'administrateur pour consentir à la diffusion, finalement, de l'image intime.

M. Jolin-Barrette : Exactement.

M. Morin : Dans le cas de l'outrage au tribunal, c'est la victime qui va faire tout ça?

M. Jolin-Barrette : Pour l'outrage?

M. Morin : Oui, vous ne trouvez pas que c'est beaucoup?

M. Jolin-Barrette : Bien, c'est un recours de nature civile. C'est pour ça qu'on a le pénal. C'est pour ça qu'on est venu indiquer que le recours au pénal était ouvert, et là ça va être pris en charge par l'État, par le DPCP. Dans le fond, c'est multioptions.

M. Morin : Et donc... et la peine à ce moment-là... Parce qu'à 18 vous parlez de 505 000 $ par jour dans le cas d'une personne physique ou d'une peine d'emprisonnement...

M. Morin :...maximal, évidemment, vous ne pouvez pas mettre une compagnie en prison, ou de 5000 à 50000 par jour dans les autres cas. Donc, la personne morale, ce serait dans les autres cas?

M. Jolin-Barrette : La personne morale, ça va être 5000 à 50000, puis le dirigeant de la personne morale va être passible de la même peine aussi.

M. Morin :Oui, c'est ça. Donc, même si c'est une personne physique.

M. Jolin-Barrette : ...personne physique qui a la peine de la personne morale.

M. Morin :O.K. Et donc la personne morale, vous la visez à 18 par «dans les autres cas». Ce n'est pas indiqué «dans le cas d'une personne morale, 5 000 à 50 000».

M. Jolin-Barrette : Non, parce que, notamment, une... dans les autres cas, ça pourrait être une société en nom collectif, ça pourrait être une société en commandite, ça pourrait être une... Mais je pense qu'on a fait un amendement là-dessus dans le Code de procédure pénale, sur le fait que c'est assimilé. En tout cas...

M. Morin :Vous allez me revenir? Non?

M. Jolin-Barrette : Non, mais je pense que c'est Mme Vallée qui avait fait ça, à l'époque, une association, supposons, où est-ce que ces types... ces types de structures juridiques, là, désormais, sont assimilées à des personnes morales, tu sais, société en nom collectif, société en commandite, association. Mais tout ça pour dire que, dans tous ces cas-là, c'est une peine de personne morale qui s'applique, les autres cas.

• (17 h 10) •

M. Morin :O.K. Bien. Et donc je peux comprendre, à 19, quand quelqu'un autorise ou ordonne, mais vous visez aussi l'omission. Donc là, la personne va devoir... bien, en fait, la poursuite va devoir démontrer que l'administrateur aurait dû agir, mais qu'il ne l'a pas fait.

M. Jolin-Barrette : C'est ça. Exemple, il devait désindexer le lien puis il ne l'a pas fait. On continue.

M. Morin :O.K. Parce qu'il avait reçu, admettons, l'ordonnance du tribunal, puis il n'a rien fait avec.

M. Jolin-Barrette : C'est ça.

M. Morin :Donc, c'est comme... c'est comme de la négligence où il devait agir puis il n'a pas agi.

M. Jolin-Barrette : Bien, il n'a pas agi, c'est une omission d'agir. Dans le fond, il n'a pas fait le geste qu'il devait poser.

Le Président (M. Bachand) :Est-ce qu'il y a d'autres interventions à 19? Alors, s'il n'y a pas d'autre intervention, est-ce que l'article 19 est adopté?

Des voix : Adopté.

Le Président (M. Bachand) :Adopté. Merci. M. le ministre.

M. Jolin-Barrette : Oui. «20. Toute somme perçue à titre d'amende visée par la présente loi est portée aux crédits du Fonds affectés à l'aide aux personnes victimes d'infractions criminelles, institué en vertu de la Loi visant à aider les personnes victimes des infractions criminelles et à favoriser leur rétablissement.»

Commentaires : En vertu de cette disposition, le montant d'une amende sanctionnant le non-respect d'une ordonnance de s'abstenir de partager une image intime ou de cesser ce partage serait versé au Fonds affecté à l'aide aux personnes victimes d'infractions criminelles. Donc, ça s'en va au FAVAC.

Le Président (M. Bachand) :  S'il n'y a pas d'autre intervention, est-ce que l'article 20 est adopté?

Des voix : Adopté.

Le Président (M. Bachand) :Adopté. M. le ministre.

M. Jolin-Barrette : 21, M. le Président. «Une personne qui a partagé une image intime sans consentement ou qui a menacé de le faire est tenue de réparer le préjudice causé à moins qu'elle prouve n'avoir commis aucune faute.»

Commentaires : Cette disposition crée une présomption de faute à l'égard de toute personne qui a partagé une image intime sans consentement et qui a menacé de le faire. Donc là, on est dans le cadre de la responsabilité civile, donc on met une présomption de faute.

Le Président (M. Bachand) :Merci beaucoup. Interventions?

M. Morin :...CAVAC, à la page 8... O.K. Parfait. Ils trouvaient que c'était utile. Et donc, à l'article 21, «avec une personne», est-ce que vous visez aussi une personne morale?

M. Jolin-Barrette : Oui. Donc, c'est une personne physique ou une personne morale, ça couvre les deux...

M. Morin : ...sauf que, là, dans le cadre de la personne morale, voulez-vous aller rechercher la responsabilité des administrateurs au niveau civil?

M. Jolin-Barrette : Dans ce cas-là, la présomption incombe la personne morale, elle n'implique pas responsabilité des administrateurs.

M. Morin : O.K., donc au niveau pénal, vous voulez rechercher la responsabilité des administrateurs, mais pas au niveau civil.

M. Jolin-Barrette : Mais c'est parce qu'en matière pénale on veut que l'image cesse d'être diffusée, tandis qu'en matière civile c'est la réparation qu'on recherche, c'est une réparation financière. Donc, c'est les règles usuelles... c'est les règles qui s'appliquent en termes de responsabilité.

M. Morin : O.K., donc, au niveau civil, finalement, la société pourrait être reconnue responsable, et donc verser... mais pas des administrateurs personnellement.

M. Jolin-Barrette : Bien, à titre d'administrateur, une personne peut être visée aussi, là... Oui, le recours... le recours en responsabilité pourrait viser l'administrateur aussi à titre de personne physique. Tu sais, je pourrais poursuivre à la fois l'administrateur en sa qualité de personne physique puis à la fois la personne morale, si c'est elle qui a commis le geste.

Le Président (M. Bachand) :Merci. Autres interventions à l'article 21? S'il n'y a pas d'autre intervention, est-ce que l'article 21 est adopté?

M. Jolin-Barrette : Adopté.

Le Président (M. Bachand) :Merci. M. le ministre, s'il vous plaît.

M. Jolin-Barrette : 22 : «Malgré l'article 23 de la Charte des droits et libertés de la personne, l'audience se tient à huis clos et l'accès au dossier du tribunal est restreint. Cependant, lorsque toutes les parties sont majeures, le tribunal peut, dans l'intérêt de la justice, ordonner que l'audience soit publique et que certaines personnes ayant un intérêt légitime puissent accéder au dossier. Aucune personne ayant eu accès au dossier ne peut divulguer ni diffuser un renseignement permettant d'identifier une partie à une instance, à moins que le tribunal ne l'autorise.»

Commentaires. Cet article permet que l'audition d'une demande relative à la réparation d'un préjudice découlant du partage sans le consentement d'une image intime ou de la menace d'un tel partage, soit tenue à huis clos et que le dossier soit confidentiel. Donc, c'est un peu la même chose lorsqu'on fait la demande d'ordonnance et de contestation de la demande d'ordonnance. Le principe, c'est que c'est à huis clos, parce que théoriquement c'est les mêmes faits en litige qui se retrouvent là, mais sur autorisation du tribunal, ça peut être ouvert.

Le Président (M. Bachand) :Merci beaucoup. M. le député de l'Acadie.

M. Morin : O.K. Bien, en fait, dans le mémoire qui a été produit par... On souligne à la page deux que le régime pourrait susciter une incompréhension de la part des intermédiaires qui auraient pris, par exemple, toutes les mesures raisonnables pour donner effet au projet de loi n° 73. On dit, en fait : «En effet, cette loi établit à plusieurs reprises, notamment à son article 22, qu'un intermédiaire technique ne peut être tenu responsable des activités accomplies au moyen de ses services, sauf s'il a, de fait, connaissance de la réalisation d'une activité à caractère illicite et qu'il n'agit pas promptement pour faire cesser une telle situation.» On fait une référence à la loi de la Colombie-Britannique. Donc, est-ce qu'il y a des éléments que vous voulez rajouter suite à ce commentaire-là qui a été fait. On dit enfin : «Des intermédiaires techniques dans la continuité de nos lois actuelles et pour éviter qu'on leur impose des obligations actives de surveillance qui ne sont pas réalistes dans les circonstances.» Non?

M. Jolin-Barrette : Je suis correct avec mon texte.

M. Morin : Je n'ai pas d'autre question.

Le Président (M. Bachand) :S'il n'y a pas d'autre intervention, est-ce que l'article 22 est adopté?

M. Jolin-Barrette : Adopté.

Le Président (M. Bachand) :Adopté. L'article 23. M. le ministre.

M. Jolin-Barrette : Oui. «Le ministre de la Justice est responsable de l'application de la présente loi.»

Commentaires. Cet article confie au ministre de la Justice la responsabilité de la nouvelle loi.

Le Président (M. Bachand) :Merci. Interventions?

M. Morin : Non, je n'ai pas d'autre... Bien, en fait, la seule question que j'ai : Est-ce que M. le ministre a des réponses aux questions en suspend?

M. Jolin-Barrette : Voulez-vous qu'on suspende une seconde? On va me les donner.

Le Président (M. Bachand) :Oui. On va suspendre quelques instants. Merci.

(Suspension de la séance à 17 h 18)

(Reprise à 17 h 21)

Le Président (M. Bachand) :À l'ordre, s'il vous plaît! La commission reprend ses travaux. M. le ministre.

M. Jolin-Barrette : Alors, pour la première question, sur l'avocat, si jamais l'avocat contrevient au dossier restreint, dans le fond, diffuse l'information, c'est les règles déontologiques qui s'appliquent, puis il est passible, en vertu de son code de déontologie. Pour les autres personnes, là, à ce moment-là, c'est un outrage au tribunal.

Une voix : ...

M. Jolin-Barrette : Oui, l'avocat aussi pourrait avoir l'outrage.

M. Morin :Un outrage pour l'avocat également ou le notaire, ça...

M. Jolin-Barrette : Exactement, exactement. Mais en plus, les obligations déontologiques s'appliquent aussi, ça fait qu'il peut avoir des problèmes avec le syndic de son ordre. Votre deuxième question, à savoir si les formulaires sont disponibles, supposons, en anglais ou en langues autochtones, on rend disponibles certains formulaires. Souvent, avec les communautés autochtones, ce qu'on me dit, c'est qu'au ministère de la Justice, quand il y a des besoins qui sont exprimés, généralement en anglais, ça convient, mais, lorsqu'il y a des besoins exprimés par les communautés autochtones, pour certains types de formulaires traduits, bien, c'est rendu... ça peut être traduit, mais généralement l'anglais convient.

M. Morin :O.K. Parfait. Donc, il va y avoir cette possibilité-là pour... sur l'offre de service qui va être faite par le ministère.

M. Jolin-Barrette : Oui. Notre objectif, c'est que ça puisse être utilisé puis ça puisse être compris par les différentes communautés.

M. Morin :C'était aussi le sens de ma question, évidemment, plus vous avez une offre de service qui est large, plus vous risquez que des gens l'utilisent, ce qui est l'objectif de votre projet de loi finalement.

M. Jolin-Barrette : Oui, mais le principe de base, c'est l'exemplarité de l'État, en français, sous réserve de certaines exceptions.

M. Morin :Oui, ça, on est d'accord là-dessus. Le français est dans notre langue commune, ça ne fait pas d'exception. Mais, dans certains cas, évidemment, il faut aussi s'assurer, surtout en matière de justice, que les gens qui parlent en anglais aient accès aux services de justice également dans leur langue.

M. Jolin-Barrette : Mais je suis content que vous ayez dit langue commune.

M. Morin :Bien, ça fait longtemps que je le dis, M. le ministre.

M. Jolin-Barrette : Mais vous, vous le dites depuis longtemps, mais ce n'est pas tout le monde chez vous qui le dit.

M. Morin :Écoutez...

M. Jolin-Barrette : Normalement, vous dites langue officielle. Là, je suis content. 

M. Morin :...bien, je peux dire aussi langue officielle...

M. Jolin-Barrette : Non, mais ça c'est bon.

M. Morin :...mais, moi, j'aime bien langue commune.

M. Jolin-Barrette : Vous savez, le titre de mon projet de loi, c'était : Le français, langue officielle et commune du Québec.

M. Morin :À l'époque, dans une autre législature, que vous aviez fait adopter. Bon, c'est ça.

M. Jolin-Barrette : Oui, c'est ça, mais vous, vous auriez voté pour...

M. Morin :...ah! là, par exemple, là-dessus, M. le Président...

Le Président (M. Bachand) :...le titre, c'est une chose, là, mais...

M. Morin :Mais j'avoue, j'avoue que j'admire la façon dont M. le ministre amène ces choses. Mais je vais me garder une réserve. Très habile, mais je vais me garder une réserve là-dessus.

M. Jolin-Barrette : On jase, là, on jase.

Le Président (M. Bachand) :S'il n'y a pas d'autre intervention sur 23, est-ce que 23 est adopté?

Des voix : Adopté.

Le Président (M. Bachand) :Adopté. Merci. Est-ce que les intitulés des chapitres de la loi édictée sont adoptés?

Des voix : Adopté.

Le Président (M. Bachand) :Est-ce que le titre de la loi édictée est adopté?

Des voix : Adopté.

Le Président (M. Bachand) : Donc, finalement, est-ce que l'article 1, tel qu'amendé, est adopté?

Des voix : Adopté.

Le Président (M. Bachand) :Adopté. M. le ministre, s'il vous plaît.

M. Jolin-Barrette :  Oui. Alors, l'article 2, M. le Président :

L'annexe 5 de la Loi sur les tribunaux judiciaires est modifié par l'ajout, à la fin du paragraphe 1, de ce qui suit :

Prononcer les ordonnances prévues par la Loi visant à contrer le partage sans consentement d'images intimes... ouvre la parenthèse (indiquer ici l'année, le numéro de chapitre de la présente loi ainsi que le numéro de l'article de cette loi qui édicte la Loi visant à contrer le partage sans consentement d'images intimes), ferme la parenthèse.

Commentaires : Par concordance avec la disposition qui habilite un juge de paix magistrat à rendre l'ordonnance qui vise à assurer qu'on s'abstienne de partager une image intime ou qu'on cesse ce partage, la Loi sur les tribunaux judiciaires, qui confère l'ensemble des attributions des juges de paix magistrats est ajustée pour refléter cette nouvelle habilitation.

Donc, concrètement, on ouvre la Loi sur les tribunaux judiciaires pour modifier l'annexe 5 en concordance avec ce qu'on vient de faire dans la nouvelle loi sur le partage d'images intimes sans consentement.

M. Morin :...permettre, entre autres, aux juges de paix magistrats de pouvoir rendre ce type d'ordonnance là.

M. Jolin-Barrette : Exactement.

M. Morin :Et ça vise... ça vise uniquement les juges de paix magistrats?

M. Jolin-Barrette : Bien, en fait, c'est parce que, quand on vient conférer au juge de la Cour du Québec, dans la loi, ce pouvoir-là, c'est un pouvoir à la Cour du Québec, mais les juges de paix magistrats, contrairement aux juges de la Cour du Québec, leur compétence est listée à l'annexe 5 de la Loi sur les tribunaux judiciaires.

M. Morin :Et donc c'est pour ça que, pour un juge de la Cour du Québec, vous n'avez pas besoin, parce que la loi va le prévoir, le juge de paix magistrat ayant des pouvoirs un peu plus restreints... bien, vous devez le spécifier. Et c'est ce que 2 vise à faire. Merci.

Le Président (M. Bachand) :Merci. Est-ce qu'il y a d'autres interventions? S'il n'y a pas d'autre intervention, est-ce que l'article 2 est adopté?

Des voix : Adopté.

Le Président (M. Bachand) :Adopté. M. le ministre.

M. Jolin-Barrette : 3. L'article 58 du Code de procédure civile est modifié par la suppression, dans le deuxième alinéa et... d'«ordonnance de protection».

Commentaires : L'article 58 prévoit que la contravention à une injonction ou à une ordonnance constitue un outrage au tribunal. La modification vise à retirer la référence à une ordonnance de protection puisqu'une autre disposition du présent projet de loi... de ce type d'ordonnance ne puisse plus faire l'objet d'un outrage au tribunal. Ainsi, en l'absence de sanction particulière, l'article 127 du Code criminel s'appliquera.

Le Président (M. Bachand) :Merci beaucoup.

M. Jolin-Barrette : Donc, c'est ce que j'expliquais tout à l'heure, dans le fond, là, le régime pour l'ordonnance civile de protection ne sera plus un régime qui va être gouverné, en cas de non-respect par l'ordonnance, par une requête en outrage au tribunal, mais plutôt, par le biais de 127 du Code criminel, on va criminaliser le non-respect de l'ordonnance civile de protection, donc on doit le supprimer à l'article 58.

M. Morin :Et c'est la façon d'empêcher, effectivement, qu'il y ait un recours en outrage au tribunal.

M. Jolin-Barrette : C'est ça.

M. Morin :Donc, c'est cette façon-là que vous avez utilisée. D'accord. Merci.

Le Président (M. Bachand) :S'il n'y a pas d'autre intervention, est-ce que l'article 3 est adopté?

Des voix : Adopté.

Le Président (M. Bachand) :  Adopté. M. le ministre.

M. Jolin-Barrette : 4. L'article 69 de ce code est modifié par l'insertion, dans le deuxième alinéa et après «d'injonction provisoire» de «d'ordonnance de protection».

Commentaires : L'article 69 du Code de procédure civile permet au juge de prendre certaines décisions qui requièrent une intervention immédiate ou qui ne nécessitent pas d'enquête autrement qu'en audience, par exemple, en leur cabinet.

La modification vise à ajuster l'ordonnance de protection aux exemples de décisions qui requièrent une intervention immédiate ou qui ne nécessitent pas d'enquête.

Le Président (M. Bachand) :Merci beaucoup. Interventions? Interventions à l'article 4? S'il n'y a pas d'intervention, est-ce que l'article 4 est adopté?

Des voix : Adopté.

Le Président (M. Bachand) :Adopté. M. le ministre.

M. Jolin-Barrette : Article 5. L'article 509 de ce code est modifié par la suppression des deuxième et troisième alinéas.

Commentaires : L'article 509 du code de procédure prévoit le recours en injonction qui inclut l'injonction qui constitue une ordonnance de protection. La modification vise à retirer les alinéas de cet article qui traitent de l'ordonnance de protection puisque le présent projet de loi propose une nouvelle section consacrée à cette ordonnance.

Donc, on vient déplacer l'ordonnance civile de protection de l'injonction puis on vient en créer un recours d'ordonnance en soi.

Le Président (M. Bachand) :Merci beaucoup. Donc, interventions sur 5? S'il n'y a pas d'intervention, est-ce que l'article 5 est adopté?

Des voix : Adopté.

Le Président (M. Bachand) :Adopté. Merci. M. le ministre.

M. Jolin-Barrette : Oui. 6. Ce code est modifié par l'insertion, après l'article 515, du chapitre suivant :

Chapitre 1.1. L'ordonnance de protection

515. 1. L'ordonnance de protection est une ordonnance enjoignant à une personne physique de ne pas faire ou de cesser de faire quelque chose ou d'accomplir un acte déterminé en vue de protéger une autre personne physique qui craint que sa vie, sa santé ou sa sécurité ne soit menacée, notamment en raison d'un contexte de violence...

M. Jolin-Barrette : ...basée sur une conception de l'honneur, de violence familiale, conjugale ou sexuelle, d'intimidation ou de harcèlement.

«L'ordonnance de protection peut être demandée au moyen d'un exposé présentant sommairement les faits allégués ou au moyen du formulaire établi par le ministre de la Justice. Elle peut également être demandée si la personne craignant la menace y consent ou si le tribunal l'autorise par une autre personne ou par un organisme. La demande d'ordonnance de protection est réputée faite sous serment.

«515.2... Voulez-vous que je les lise un après l'autre, M. le Président?

Le Président (M. Bachand) :...lire au complet, puis après ça, on va y aller bloc par bloc, si ça vous... Parfait. Merci.

M. Jolin-Barrette : «515.2. La demande d'ordonnance de protection est notifiée à une autre partie avec un avis de sa présentation. Toutefois, le tribunal peut prononcer une ordonnance de protection d'une durée maximale de 10 jours sans que la demande ait été notifiée à l'autre partie. Une fois la demande notifiée, cette ordonnance peut, avant l'instruction au... être prolongée ou prononcée pour une période excédant 10 jours.

«515.3. La demande d'ordonnance de protection est instruite et jugée d'urgence. Elle est prononcée pour une durée maximale de trois ans et aux conditions déterminées par le tribunal. Elle peut être renouvelée, prolongée ou prononcée de nouveau.

«515.4. Le jugement prononcé à une ordonnance de protection est notifié sans délai par le greffier du tribunal aux parties, à toute autre personne qui y est identifiée et au corps de police du lieu où est domicilié le demandeur. Malgré le deuxième alinéa de l'article 133, il peut l'être par un moyen technologique.

«Les dispositions concernant l'outrage au tribunal ne s'appliquent pas à l'égard d'une personne qui contrevient à une ordonnance de protection.

«L'ordonnance de protection est exécutoire malgré contestation ou appel à moins que le tribunal en ordonne autrement.».

Commentaires. Cet article crée un nouveau chapitre du Code de procédure civile consacré à l'ordonnance de protection.

Donc, essentiellement, ce que nous avons fait, c'est qu'on est venus supprimer l'ordonnance civile de protection de la section sur l'injonction... donc, c'était alinéa 2°... de l'injonction à 509. Et on est venus, tout de suite après, créer un nouveau chapitre spécifiquement sur l'ordonnance civile de protection, pour la distinguer de l'injonction, considérant le fait qu'on est venus assouplir le critère pour obtenir une ordonnance civile de protection. Auparavant, c'était obtenu dans... notamment, dans un contexte de violence, par exemple, violence basée sur l'honneur, tout ça. Le critère était plus élevé que, désormais, dans la nouvelle, où c'est le critère de crainte. Donc, on n'a plus à faire la démonstration de la violence. Là, on est avec un critère de démonstration, qui est au niveau de la crainte de violence.

Donc, on vient abaisser le critère pour les personnes victimes. C'était une des critiques qu'on avait par rapport à la sous-utilisation de l'ordonnance civile de protection, parce que les victimes, dans le fond, le fardeau qu'elle devait démontrer c'était comme... la violence était avérée. Là, on diminue au niveau de la crainte.

Donc, on reprend l'article 509, on l'amène à 515.1, puis on vient préciser certaines modalités, notamment, qu'elle peut être instruite et jugée d'urgence dans le bureau, qu'elle peut faire... être ex parte pour 10 jours puis qu'elle peut être prolongée, également, par le juge, au-delà de 10 jours lorsqu'elle a été notifiée.

• (17 h 30) •

Le Président (M. Bachand) :Merci beaucoup. Je sais que vous avez un amendement pour 515.3.

M. Jolin-Barrette : Ah! bien oui.

Le Président (M. Bachand) :Voulez-vous qu'on le règle immédiatement?

M. Jolin-Barrette : Oui. 515.3. Remplacer, dans le deuxième alinéa de l'article 515.3 du Code de procédure, proposé par l'article 6 du projet de loi, «trois» par «cinq».

Commentaire. Cet amendement porte à cinq ans la limite à la durée d'une ordonnance civile de protection que peut déterminer le juge.

Donc, le CAVAC nous avait dit : On souhaiterait avoir cinq ans, donc, on va avec le CAVAC, on augmente de trois à cinq ans la limite de validité de l'ordonnance civile de protection.

Le Président (M. Bachand) :Merci. Intervention sur l'amendement? M. le député de l'Acadie.

M. Morin :Non, l'amendement, non.

Le Président (M. Bachand) :Donc, s'il n'y a pas d'intervention, est-ce que l'amendement, à l'article 6, est adopté?

Des voix : Adopté.

Le Président (M. Bachand) :Adopté. Donc, on en revient à l'article 6, précisément, le bloc 515.1. Interventions?

M. Morin :Oui. Alors, merci, M. le Président. Donc, la façon dont vous avez libellé l'ordonnance, est-ce que ça pourrait couvrir, selon vous, toute la question du contrôle coercitif?

M. Jolin-Barrette : Mais on est dans une situation où c'est une crainte «à une personne physique de ne pas faire ou de faire cesser quelque chose ou d'accomplir un acte déterminant afin de protéger une personne physique qui craint que sa vie, sa santé ou sa sécurité ne soit menacée, notamment en raison d'un contexte de violence basée sur une conception de l'honneur, de violence familiale, conjugale ou sexuelle, d'intimidation ou de harcèlement».

Donc, l'ordonnance civile de protection peut dire, si la personne craint pour sa vie, sa sécurité, elle peut être prononcée. Ça va être au tribunal à évaluer les modalités. C'est un critère... La crainte, là, va être évaluée en fonction d'un critère objectif et subjectif en fonction de la personne. Donc, la question uniquement de dire : Est-ce qu'il y a le contrôle coercitif? Ça dépend. Dans le fond, le contrôle coercitif est une des manifestations de la violence conjugale, supposons. Ça fait qu'on peut obtenir une ordonnance civile de protection basée sur la crainte...


 
 

17 h 30 (version non révisée)

M. Jolin-Barrette : ...associé à la violence conjugale...

M. Morin :...ou l'intimidation...

M. Jolin-Barrette : ...ou l'intimidation ou du harcèlement.

M. Morin :...ou le harcèlement. Donc, parce que ce n'est pas ma compréhension, et corrigez-moi si je fais erreur, mais ce n'est pas cumulatif, c'est un ou l'autre.

M. Jolin-Barrette : C'est un ou l'autre. Ça peut être cumulatif...

M. Morin :Donc, ça peut, exact.

M. Jolin-Barrette : ...mais le critère, là, c'est qu'il craint que sa vie, sa santé ou sa sécurité ne soit menacée. Il pourrait avoir un point... puis là on donne des exemples, notamment en raison d'un contexte de violence basé sur une conception de l'honneur, donc les infractions haineuses qu'on a mis il y a une couple d'années.

M. Morin :Exact.

M. Jolin-Barrette : ...bien, pas haineuses, basées sur l'honneur, donc sur la... sur des motifs religieux, supposons, ou culturel.

M. Morin :C'est ce qu'on a vu, il y a quelques années, ou culturel, effectivement.

M. Jolin-Barrette : C'est ça. Exemple, les...

M. Morin :Exact. Oui, merci. En fait, ce cas-là est effectivement très graves, parce que, là, il y a eu des décès, là.

M. Jolin-Barrette : De violences familiales, conjugales ou sexuelles, d'intimidation ou de harcèlement.

M. Morin :Donc, vous n'utilisez pas le mot «contrôle coercitif» comme tel, mais ma compréhension, c'est que, si une victime craignait, parce qu'on parle de crainte, donc craignait pour sa sécurité, parce que le conjoint exerce un contrôle, et qui fait en sorte qu'elle pourrait se sentir victime d'intimidation, ou que des demandes, par exemple, répétées de contrôle contribueraient à du harcèlement, elle pourrait obtenir une ordonnance de protection.

M. Jolin-Barrette : Oui, bien, dans le fond, tu sais, le contexte de violence, ça peut inclure des gestes qui sont de nature criminelle ou non criminelle. Donc, exemple, quand on est en matière de harcèlement, la notion de harcèlement ici n'est pas nécessairement celle du harcèlement criminel.

M. Morin :Exact. Donc, ça peut être... en fait, ça peut être un standard qui est peut-être moins élevé que le harcèlement criminel, avec un fardeau de preuve qui est moins élevé également.

M. Jolin-Barrette : C'est ça.

M. Morin :Donc... Parce qu'il y a... Bien, vous le savez sans aucun doute, vous savez, je pense... vous avez écrit à votre homologue le ministre fédéral de la Justice, il y a une étude... ou il y a des études qui sont faites pour peut-être éventuellement modifier le Code criminel pour qu'il y ait une infraction de contrôle coercitif au Code criminel. Je comprends qu'ici, en matière civile, vous n'utilisez pas l'expression comme telle, mais que, selon vous, donc, l'intention du législateur, ça pourrait être de couvrir ces situations-là également.

M. Jolin-Barrette : Oui.

M. Morin :O.K. Parfait. Je vous remercie. Et, dans... Il y a plusieurs groupes qui... en fait, qui ont écrit beaucoup sur cet article-là, je pense, entre autres, à la Fédération des maisons d'hébergement pour femmes. Eux, ils suggéraient d'élargir la définition de violence pour y inclure toutes les formes de violences sexospécifiques, non seulement les violences conjugales, sexuelles ou envers les enfants. Dans ce... Avec votre définition, si, par exemple, un conjoint craignait, mais pour la santé ou la sécurité de ses enfants... Admettons qu'on a un cas hypothétique, les gens sont séparés, ne vivent pas ensemble, mais il y a un des conjoints, finalement, qui utilise ses enfants pour faire de la pression sur l'autre de différentes façons, mettons, je ne sais pas, moi, les enfants. La semaine qu'il en a la garde, il est supposé faire telle chose, les amener chez le médecin, il ne fait pas, il ne le fait pas, il sait que ça va créer une pression sur l'autre conjoint.

Est-ce que, dans un cas comme ça, on ne fait pas une référence directement aux enfants? Est-ce que l'autre conjoint victime pourrait demander une ordonnance pour que ce comportement-là cesse?

M. Jolin-Barrette : Mais le critère associé à l'ordonnance civile de protection, c'est en vue de protéger une autre personne physique qui craint que sa vie, que sa santé ou sa sécurité ne soit menacée. Puis là la série d'exemples qu'on a, notamment en matière familiale, est présente. Donc, à votre question, il faut remplir le fardeau de preuve qu'il y a une crainte au niveau de la vie, de la santé, de la sécurité qui soit menacée. C'est ça, le critère. Les litiges de nature : Il n'amène pas les enfants chez le médecin, si ça ne rentre pas dans «craint sa vie, sa santé, sa sécurité», c'est une autre ordonnance, de la part du tribunal en matière familiale, qui s'applique, qui doit être recherchée. On ne peut pas utiliser l'ordonnance civile de protection pour les fins, pour lesquelles elle n'est pas déterminée. L'ordonnance de protection, ça le dit, l'ordonnance de protection associée à une crainte relativement à la vie, la santé, la sécurité...

M. Morin : ...Juripop a écrit beaucoup sur 515 entre autres. Et puis il y a d'autres... Il y a d'autres groupes aussi qui l'ont dit. En fait, ils craignaient que tout dépendant du nombre d'ordonnances. Compte tenu qu'on changeait les critères, on peut penser qu'il y aura plus de demandes qui vont être faites. Est-ce que les tribunaux vont avoir la capacité d'entendre et d'agir rapidement? C'est un élément soulevé par Juripop. Et Juripop recommandait aussi, puis je suis à la page 7 de leur mémoire, que l'article 515.1 précise qu'une ordonnance de protection peut être émise pour protéger une personne qui craint pour sa vie, sa santé ou sa sécurité, sans égard au délai écoulé depuis la première manifestation des faits à l'origine de cette crainte. Alors, est-ce que la façon dont c'est libellé présentement, vous pensez que ça peut évidemment couvrir cette situation-là?

M. Jolin-Barrette : Bien, il n'y a pas de délai pour entreprendre... pour entreprendre le recours...

Une voix : ...

M. Jolin-Barrette : ...mais il faut que la crainte... crainte qui est analysée, objective et subjectivement, là.

M. Morin : Donc il faut que...

M. Jolin-Barrette : C'est ça, mais dans le fond, il faut que la menace soit actuelle. C'est sûr que s'il est arrivé quelque chose il y a 10 ans, il n'y a pas crainte sur...

M. Morin : Non. 10 ans, c'est peut-être un peu loin, là, mais... Mais donc il faut qu'objectivement, donc, la personne, le décideur soit capable de se rattacher à des critères qui font qu'une personne raisonnable dans les circonstances en arrivait à penser qu'il y a une crainte puis qu'en plus il est convaincu que la personne qui vit la situation craint personnellement pour sa vie. Donc, il y a les deux éléments que le décideur va devoir évaluer pour émettre l'ordonnance.

• (17 h 40) •

M. Jolin-Barrette : L'analyse en deux critères, vous avez raison. Donc, c'est une analyse subjective du point de vue de la personne qui la demande et objective aussi. La crainte, elle est évaluée avec les deux critères. Dans le fond, c'est une crainte dans son contexte de la personne, mais aussi dans le portrait global. Donc, les deux. Ce n'est pas uniquement objectif. Le juge, quand il évalue ça, il doit prendre en compte de comment la personne, en fonction de son histoire, de son vécu, elle perçoit cet état de fait là qui l'amène à craindre. Tu sais, parce que si c'était uniquement un critère objectif, bien, le juge dirait : Bien... Bien non, là, manifestement, en fonction des faits qui sont devant moi, ce n'est pas une crainte objective, là. Il ne vous arrivera rien, mais en fonction, supposons, de l'histoire de Mme, en fonction de, elle, sa perception, ça peut être tout à fait légitime que, oui, elle craint. Donc, c'est une balance de l'analyse avec... C'est subjectif et objectif. Donc, le juge doit prendre tout ça en considération.

M. Morin : Et évidemment, parce qu'on est en matière...

M. Jolin-Barrette : Peut-être je pourrais rajouter...

M. Morin : Oui, bien sûr.

M. Jolin-Barrette : Une des raisons pourquoi on modifie l'ordonnance de protection, on change les critères, c'est justement pour que ça soit plus facile à obtenir pour la personne victime, puis notamment dans les recommandations que Juripop nous avait faites, le recours était peu utilisé parce que le fardeau était élevé. C'était comme la menace, elle est là. Donc, un coup que je suis vraiment menacé, bien là, je vais obtenir mon ordonnance civile de protection. Puis là on est un pas en avant pour dire : Bien, il y a des signes, des manifestations que je peux craindre pour ma sécurité d'une façon subjective, mais aussi objective. Donc, on est en amont de ça. Ça fait qu'on diminue le critère comme fardeau de preuve.

M. Morin : Oui, je comprends. Parce qu'en fait, vous... Vous parlez... En fait c'est libellé ou vous... L'article dit : «craint pour sa vie», non pas «est menacé».

M. Jolin-Barrette : C'est ça.

M. Morin : La crainte que la personne peut vivre, elle peut l'exprimer. Par contre... Et je comprends que vous voulez dégager ça du chapitre, en fait, qui traite des injonctions parce que vous voulez de la procédure fonctionne finalement plus rondement, que ça soit plus facile à obtenir, puis qu'on sorte de la procédure pour demander une injonction.

M. Jolin-Barrette : Bien, ça demeure assimilable à une injonction. Sauf que c'est un recours en soi, l'ordonnance civile de protection. Donc, en diminuant les critères, en l'amenant séparément dans un régime qui est distinct, avec des règles qui s'appliquent spécifiquement à l'ordonnance civile de protection, notamment sur la question de l'obtention ou du renouvellement et de la prolongation aussi. Ça fait qu'on crée un régime en soi sur l'ordonnance civile.

M. Morin : Donc, c'est comme un oui, sans...

M. Morin :...criminel ou au civil.

M. Jolin-Barrette : Ça ressemble à ça.

M. Morin :Ça ressemble à ça, oui...

M. Jolin-Barrette : ...c'est valable seulement une année.

M. Morin :Oui. Alors là, ici, bien, avec l'amendement qu'on vient... qu'on vient d'adopter...

M. Jolin-Barrette : Ça va être cinq ans.

M. Morin :...ça va être cinq ans, là, mais les critères... les critères ressemblent, finalement, à un 810.

M. Jolin-Barrette : ...de nature civile, sur la crainte.

M. Morin :O.K.

Le Président (M. Bachand) :Mme la députée de Vaudreuil.

Mme Nichols : ...parce qu'on en parlait, on parlait, entre autres, là, du fardeau de preuve quand on parle des... on fait référence à «qui craint que sa vie, sa santé ou sa sécurité». Le Barreau canadien avait... l'Association du Barreau canadien avait suggéré d'ajouter «raisonnablement» après «craint», ça fait que ce serait «qui craint raisonnablement que sa vie, sa santé ou sa sécurité»?

M. Jolin-Barrette : Oui, mais eux, ils étaient dans une perspective où c'était une crainte objective.

Mme Nichols : Ah oui, c'est vrai.

M. Jolin-Barrette : Alors, nous, on est sur une crainte, dans le fond, qui doit être analysée également de l'approche subjective. Donc, le Barreau canadien, ce qu'il nous recommandait, c'était moins favorable aux personnes victimes parce qu'en mettant «crainte raisonnable», c'est comme si c'était une crainte objective. Donc là, ils venaient enlever complètement le critère de crainte en droit civil, de la façon qu'il était analysé, où est-ce qu'il y a une crainte basée sur la subjectivité de la personne qui fait la demande. Ça fait que c'est moins favorable à la victime.

Mme Nichols : O.K., oui. Merci, je comprends, oui. Merci.

Le Président (M. Bachand) :M. le député d'Acadie.

M. Morin :Merci, M. le Président. Avec votre votre mesure... je comprends que vous la sortez de l'injonction, une injonction, on présente ça à la Cour supérieure. Donc, est-ce que c'est clair, avec le libellé actuel, que cette demande-là pourrait être présentée à la Cour du Québec?

M. Jolin-Barrette : C'est à la Cour supérieure que c'est présentable. Il faudrait l'indiquer si c'était à la Cour du Québec. C'est un recours de nature... oui, c'est retour de nature injonctive, donc c'est à la Cour supérieure.

M. Morin :O.K., donc en la sortant de l'injonction, vous ne voulez pas que ce soit... Parce que c'est... Oui, ça peut être de la nature d'une injonction, mais ce que je comprends, d'où mon parallèle avec le 810 criminel... c'est un peu différent, je comprends, mais 810, vous pouvez présenter ça devant un juge de la Cour du Québec. Donc, est-ce qu'il n'y aurait pas avantage, dans un cas comme ça, à le présenter devant un juge de la Cour du Québec ou à laisser le choix aux parties?

M. Jolin-Barrette : Bien, dans ce cas-ci, il a été déterminé que c'est similaire...  recours de nature injonctive, c'est similaire à une injonction. Donc, dans ce cas-là, il a été jugé préférable de continuer de confier cette responsabilité-là à la Cour supérieure, n'est-ce pas, Me Labrecque?

M. Morin :Donc, je comprends que, dans votre évaluation des risques... dans votre évaluation des risques, vous en arrivez à la conclusion que, même si vous le sortez de l'injonction, il y a quand même des parallèles à faire et donc ce serait plus sûr de laisser ça devant la Cour supérieure pour ne pas qu'il y ait des contestations qui feraient en sorte que le législateur va se ramasser dans un débat constitutionnel, à savoir quelle cour, puis ça va faire en sorte que l'ordonnance ne pourrait pas être utilisée rapidement?

M. Jolin-Barrette : Vous avez un bon raisonnement.

M. Morin :D'accord. Maintenant, devant la Cour supérieure, quel va être l'accompagnement qui va être donné aux victimes qui vont vouloir demander puis obtenir l'ordonnance? Parce qu'évidemment la procédure est plus... est plus formelle, là, puis vous voulez que ça se fasse rapidement, donc.

M. Jolin-Barrette : ...justement, on est détaché de l'injonction formelle, parce que, là, voyez-vous, dans 515, ce qu'on fait, c'est qu'on vient faire en sorte que les allégations peuvent être... peuvent être faites sommairement, et on vient créer un formulaire, également, un peu comme l'ordonnance pour faire cesser le partage d'images intimes. Là, on va avoir un formulaire simplifié qui va être beaucoup plus simple, pour faire en sorte que le juge puisse émettre l'ordonnance en fonction du formulaire, puis les victimes vont pouvoir uniquement remplir le formulaire, plutôt que faire une requête, avec la complexité associée à ça. Donc, l'émission du formulaire qui va être déposé, le juge va pouvoir se prononcer en fonction du formulaire. Puis, justement, vous vous souviendrez, les groupes sont venus aussi, puis on va travailler le formulaire avec eux, également, notamment les maisons d'hébergement, qui se retrouvent parfois dans la situation à accueillir des femmes qui craignent pour leur sécurité. Donc, pour que ça puisse être... Ça n'a pas besoin d'être 15 pages recto verso, avec les règles, tout ça, là. Ça fait qu'on va standardiser un modèle simple pour obtenir l'ordonnance civile de protection.

M. Morin :O.K. Et ça, vous allez le faire...

M. Morin : ...règlement.

M. Jolin-Barrette : C'est-tu par règlement? Non, mais c'est déjà dans la loi, là. On le dit, là. Le deuxième alinéa de 515.1 : «L'ordonnance de protection peut être demandée au moyen d'un exposé présentant sommairement les faits allégués ou au moyen du formulaire établi par le ministre de la Justice.»

M. Morin : Donc, vous n'aurez pas besoin d'un règlement pour déterminer les modalités du formulaire. À partir de cette disposition-là, vous allez être capable de le faire.

M. Jolin-Barrette : Exactement.

M. Morin : Et, je vais vous poser la même question que tantôt. Donc, pour les Premières Nations et puis les gens, évidemment, qui utilisent l'anglais, le formulaire va être aussi disponible en anglais et dans les langues des Premières Nations, si c'est nécessaire?

M. Jolin-Barrette : Même réponse.

M. Morin :Parfait. Excellent. Je vous remercie. Donc, effectivement, ça pourrait être fait au niveau d'un exposé sommaire des faits ou au moyen du formulaire. Donc, c'est... c'est un des deux. Mais j'imagine que votre formulaire va aussi permettre un exposé des faits, parce que le juge, il va falloir qu'il se penche sur quelque chose, là.

M. Jolin-Barrette : Bien entendu, mais il va y avoir certaines sections pour dire, bien, identification des parties, description des événements, description des faits, qu'est-ce qui est recherché.

M. Morin : O.K.. En fait, Juripop, d'ailleurs, c'est très intéressant, compte tenu de la question que je viens de vous poser, Juripop recommandait à la page huit que le formulaire établi par le ministre de la Justice fasse l'objet d'une coconstruction entre des organismes œuvrant directement auprès des personnes victimes, des juristes possédant l'expérience de première ligne auprès des tribunaux et des membres du ministère. Est-ce que vous avez l'intention de travailler en coconstruction avec ces groupes-là?

• (17 h 50) •

M. Jolin-Barrette : Bien, on va très certainement les consulter. Coconstruction... On va les consulter. C'est le ministère qui rédige, là, mais on va les consulter comme on fait dans nos différentes approches avec les différents groupes.

M. Morin : O.K. Et l'ordonnance de protection... parce que ça aussi, c'était une recommandation de Juripop à la page 9. Est-ce que ça va être couvert par la Loi sur l'aide juridique et la prestation des services juridiques?

M. Jolin-Barrette : Si vous êtes admissible financièrement, c'est déjà un service qui est ouvert... couvert.

M. Morin : Oui, sauf que Juriopop suggérait : «Sans égard aux revenus de la personne demanderesse et sans qu'il ne s'agisse d'une affaire en matière familiale.» Est-ce que vous allez vous rendre jusque-là?

M. Jolin-Barrette : Bien, actuellement, c'est ceux qui sont admissibles qui sont couverts par l'aide juridique.

M. Morin : Oui, oui, ça, clairement. Avez-vous l'intention d'étendre le programme à d'autres personnes?

M. Jolin-Barrette : Bien, le budget, généralement, est au mois de mars.

M. Morin :D'accord. Excellent. Mais on n'a pas de mise à jour cette semaine, sur le budget?

M. Jolin-Barrette : Bien, c'est jeudi, la mise à jour.

M. Morin : Oui, bien, c'est ça. Vous pourriez en parler à votre collègue, on ne sait jamais.

M. Jolin-Barrette : Je suis en constante communication avec mon collègue.

M. Morin : Excellent.

M. Jolin-Barrette : C'est quelqu'un à connaître quand vous êtes au gouvernement.

M. Morin : Je n'en doute pas un seul instant.

M. Jolin-Barrette : Tout le monde connaissait le député de Robert-Baldwin avant.

Le Président (M. Bachand) :Donc, est-ce qu'il y a d'autres...on pourrait revenir, hein, ce n'est pas formel... ce n'est formel. Alors, est-ce qu'il y aurait d'autres interventions à 515.1, pour l'instant? Donc, 515.2.

M. Morin : À 515.2, donc je comprends que le tribunal peut prononcer l'ordonnance de protection, mais pas plus que 10 jours sans que la demande ait été notifiée à l'autre partie. Exact? Donc...

M. Jolin-Barrette : Donc, si c'est ex-parte, sans que ce soit notifié, c'est 10 jours, mais par la suite, une fois que la demande est notifiée, donc «cette ordonnance peut, avant l'instruction, au fond, être prolongée ou prononcée pour une période excédant 10 jours.» Ça veut dire que je fais ma demande d'ordonnance civile de protection. Le juge dans son bureau rend l'ordonnance civile...

M. Jolin-Barrette : ...pour 10 jours, jour zéro, l'ordonnance, elle est signifiée, dans le fond, l'ordonnance émise par le... est signifiée. Puis là, après ça, bien, on pourrait se retrouver dans une situation où le tribunal...

(Interruption)

M. Jolin-Barrette : J'en suis jaloux, M. le député de l'Acadie.

Le tribunal pourrait aller au-delà de 10 jours après le moment où ça a été signifié... ça a été notifié, pardon.

M. Morin : O.K. Ça a été notifié.

M. Jolin-Barrette : Merci, le Parti libéral.

M. Morin : En fait, c'est l'opposition officielle au Parlement.

M. Jolin-Barrette : L'opposition officielle au Parlement.

M. Morin : Qui est aussi le Parti libéral. Ceci étant, donc, vous faites une différence entre «notifier» et «signifier».

M. Jolin-Barrette : Elle est notifiée. «Une fois la demande notifiée, cette ordonnance peut, avant l'instruction au fond, être prolongée ou prononcée pour une période excédant de jours.» Donc, exemple, supposons que le juge l'a émis une première fois, elle est notifiée, supposons à monsieur : Monsieur, approchez-vous pas à 100 mètres de Mme, O.K. Puis là, il conteste l'ordonnance, mais là, le temps que ce soit fixé au fond, en fonction des faits, le juge pourrait dire : Bien, écoutez, vous allez avoir votre audition au fond, mais en attendant, vous avez été notifié, vous le savez, je décide, en fonction des faits au dossier, qu'il n'y aura pas d'audience interlocutoire, puis que j'amène l'audience... j'amène la validité de l'ordonnance jusqu'au fond du dossier. Quand qu'il va y avoir un procès, je ne fais pas d'interlocutoire. On donne le pouvoir au juge de faire ça.

M. Morin : Donc le juge pourrait faire un interlocutoire?

M. Jolin-Barrette : En fait, lui, il peut décider de... un coup qu'il a mis son ordonnance civile de...

M. Morin : Son ordonnance, oui.

M. Jolin-Barrette : ...ordonnance civile de protection, cette ordonnance-là, elle est notifiée au défendeur, donc à la personne qui est visée par l'ordonnance civile de protection. Un coût qu'il... qu'elle a été notifiée, plutôt que de revenir comme une injonction devant la cour, formellement, puis de tenir une audition, le juge pourrait décider de prolonger l'ordonnance civile de protection pour, supposons 40 jours, le temps d'avoir l'audition au fond, supposons.

M. Morin :O.K. Dans le cadre justement de cette procédure-là, le Regroupement des maisons d'hébergement suggérait, c'est à la page sept de leur mémoire, que les victimes, évidemment, soient aidées et que le service Rebâtir puisse les accompagner, notamment dans la préparation de l'exposé des faits qui pourrait être présenté dans le formulaire. Est-ce que c'est quelque chose que vous avez l'intention de faire?

M. Jolin-Barrette : Bien, en fait, le service Rebâtir est là pour conseiller juridiquement 4 h en ligne téléphonique. Ça fait qu'ils peuvent donner des conseils sur une matière comme civile lorsqu'il y a présence de violence conjugale ou sexuelle pour dire : Bien, vous avez... voici comment ça fonctionne, une ordonnance civile de protection, avec le nouveau régime que l'Assemblée nationale est en train de mettre en place. Les personnes victimes peuvent appeler.

M. Morin : O.K., mais c'est pour 4 h, là.

M. Jolin-Barrette : C'est pour 4 h.

M. Morin : Donc, si la personne victime a besoin de plus de temps, à ce moment-là, elle retombe dans le régime général, c'est-à-dire, si elle est admissible à l'aide juridique, comme vous avez dit tout à l'heure, elle peut aller voir l'aide juridique, sinon il faut qu'elle aille voir un avocat.

M. Jolin-Barrette : Oui, sous réserve qu'il ne vous ferme pas la ligne à 4 h précises, là. Tu sais, dans le fond, là, à Rebâtir, quand vous avez des questions, ils répondent à vos questions puis ils ne regardent pas à 3 h 59 min 30 s, ils disent... ils ne vous disent pas : Il reste 30 secondes. Ça fait que c'est... c'est une moyenne de 4 h.

M. Morin : Je comprends. O.K...

Le Président (M. Bachand) :Merci. Donc on serait à 515.3.

M. Morin : ...votre amendement, on est rendus à cinq ans. Mais elle pourrait être renouvelée après le cinq?

M. Jolin-Barrette : Oui.

M. Morin : O.K. Puis, à ce moment-là, bien là, j'imagine qu'il faut... il faut présenter une nouvelle... nouvelle demande d'ordonnance parce qu'il faut toujours que la personne craigne pour sa vie. On revient au critère que vous avez à 515.1, là, qui devrait être démontré à nouveau. C'est comme ça que la procédure va fonctionner?

M. Jolin-Barrette : Hum-hum.

M. Morin : O.K.

M. Jolin-Barrette : Bien, supposons...

M. Jolin-Barrette : ...sur la base des mêmes faits pour laquelle elle avait été prononcée.

M. Morin :Oui, sauf que je vous avais dit qu'il y avait un critère objectif et subjectif. Il faut encore... Il faut que ces critères-là soient toujours présents.

M. Jolin-Barrette : Exactement.

M. Morin :Sinon, ça va tomber, là.

M. Jolin-Barrette : Exactement.

M. Morin :O.K. Je vous remercie.

Le Président (M. Bachand) :Merci. 515.4.

M. Morin :À 515.4, vous dites à la fin : «L'ordonnance de protection est exécutoire malgré contestation ou appel, à moins que le tribunal n'en ordonne autrement.» Donc, avec votre régime, la personne va s'adresser à la Cour supérieure, donc l'appel va être à la Cour d'appel?

M. Jolin-Barrette : Oui.

M. Morin :Est-ce que vous prévoyez un régime d'urgence, un seul juge, une formation de la cour au complet?

M. Jolin-Barrette : Bien, dans le fond, l'ordonnance, elle est émise.

M. Morin :Oui.

M. Jolin-Barrette : Ça fait que dans le fond, même si... Supposons que monsieur est visé par l'ordonnance civile de protection, monsieur n'est pas content, bien, l'ordonnance continue de s'appliquer jusqu'à tant que son audition à la Cour d'appel s'applique, à moins que la cour décide de... que ça ne soit pas applicable... dans le fond, qu'elle ne soit pas exécutoire.

M. Morin :Attendez. Donc, en fait...

M. Jolin-Barrette : C'est un... c'est un exécutoire nonobstant appel.

• (18 heures) •

M. Morin :Oui, c'est ça, donc... Donc, il faudrait...

M. Jolin-Barrette : Que la Cour d'appel...

M. Morin :...qu'il demande à la Cour d'appel, dans le cadre de sa requête, de faire en sorte que l'ordonnance ne soit pas exécutoire pendant l'appel, puis là, la Cour d'appel pourrait le décider. Mais sinon...

M. Jolin-Barrette : Exactement.

M. Morin :...ça va s'appliquer, là?

M. Jolin-Barrette : C'est ça.

M. Morin :O.K. O.K. Et ça peut être signifié ou envoyé par un moyen technologique?

M. Jolin-Barrette : Oui.

M. Morin :Vous revenez et vous... vous répétez à nouveau que les dispositions concernant l'outrage au tribunal ne s'appliquent pas, malgré le fait qu'on ait adopté 3, 4 et 5, qui disaient que ça... ça... ce n'était pas applicable? Parce que tout à l'heure, quand on a regardé 3, 4 ou 5, vous nous avez dit qu'effectivement vous le rédigiez de cette façon-là parce que vous ne vouliez pas que l'outrage au tribunal s'applique.

M. Jolin-Barrette : Oui, exactement.

M. Morin :Donc là, vous le dites à nouveau ici.

M. Jolin-Barrette : Ah oui! c'est ça, parce qu'on était à 58 avant.

M. Morin :Oui, exact.

M. Jolin-Barrette : Là, on l'enlève de 58...

M. Morin :O.K.

M. Jolin-Barrette : ...parce qu'on crée une entité... en fait, un régime en soi avec le chapitre. Donc, l'ordonnance civile de protection, il n'y a pas d'outrage pour ça...

M. Morin :C'est ça.

M. Jolin-Barrette : ...c'est par le biais de 127.

M. Morin :Exact, du Code criminel.

M. Jolin-Barrette : C'est ça, ça devient une infraction criminelle.

M. Morin :O.K. Parfait. Et vous laissez au tribunal la discrétion d'émettre les conditions que le tribunal juge opportunes. Donc, vous n'avez pas un article, par exemple, qui indique ce que le tribunal pourrait inclure dans l'ordonnance pour protéger la victime?

M. Jolin-Barrette : Non. C'est à la discrétion du tribunal, en fonction des particularités propres de la réalité. Qu'est-ce qui... Qu'est-ce qui cause sa crainte à sa santé, à sa vie, à sa sécurité? Bien, le tribunal va pouvoir prononcer des ordonnances en soi.

M. Morin :O.K. Parfait. Parce qu'il y a des groupes qui avaient suggéré des dispositions particulières, mais vous pouvez...

M. Jolin-Barrette : Ah oui, c'est vrai. L'ordonnance civile de protection ne s'applique pas juste en matière de violence conjugale, l'ordonnance civile de protection peut s'appliquer en fonction de troubles de voisinage, là.

C'est un... L'ordonnance civile de protection...

M. Morin :Oui, mais là...

M. Jolin-Barrette : ...elle est souvent perçue comme étant une ordonnance à l'encontre de la... pour protéger une personne victime de violence sexuelle ou de violence conjugale. Mais ça... Le libellé, il est large, là, donc il couvre toutes sortes de situations où une personne craint pour sa vie, sa santé et sa...

M. Morin :Oui. Bien, exact. À 515.1, ça peut dépasser...

M. Jolin-Barrette : Oui, une situation de harcèlement.

M. Morin :...la violence conjugale.

M. Jolin-Barrette : C'est ça, d'intimidation, de harcèlement, donc «qui craint que sa vie, sa santé ou sa sécurité ne soit menacée».

M. Morin :C'est ça. Donc, ça peut être un ensemble de circonstances.

M. Jolin-Barrette : Oui, c'est ça. Ça fait que l'ordonnance peut être variée. Donc, c'est... c'est comme l'équivalent d'un pouvoir injonctif. Donc, au niveau de l'ordonnance...


 
 

18 h (version non révisée)

M. Jolin-Barrette : ...des modalités qui sont présentées devant le tribunal, le tribunal va émettre son ordonnance civile de protection. Exemple, supposons que vous êtes mon voisin, je ne sais pas, là, je n'ai pas fait exprès de couper vos haies, là, puis que, là, vous me harcelez à tous les matins. Puis vous... vous venez sur mon terrain. Bien, vous faites du bruit, votre chien, il jappe puis il vient sur mon perron, je pourrais aller chercher une ordonnance civile de protection parce que vous me harcelez, pour que vous restiez chez vous.

M. Morin :Oui, effectivement. Sauf que... Et donc... donc vous ne voulez pas, par exemple, qu'il y ait des... qu'il y ait des critères comme ne pas... ne pas s'approcher de la victime, ou etc. Vous... parce que, là, en fait...

M. Jolin-Barrette : Le tribunal va pouvoir le faire. Il va pouvoir émettre en fonction des circonstances qui sont présentes dans le... dans les faits de la cause.

M. Morin : Oui, sauf que, si vous avez des victimes qui se représente seules, ça va peut-être... tu sais, en fait, ils pourront... ils ne pourront pas nécessairement le demander. Ça fait que ça va être au tribunal à agir. Tu sais, souvent, dans une requête, on demande... on a des demandes spécifiques, puis le tribunal les entérine après, là, tu sais, on le demande dans la requête, puis il rend l'ordonnance. Mais évidemment, quand on est des spécialistes en droit, ça va bien, là, mais pour les gens qui se représentent seul.

M. Jolin-Barrette : Mais dans le... dans le formulaire qu'on va travailler avec les organismes, on va déjà prévoir certains éléments qui vont pouvoir guider la personne qui présente la demande d'ordonnance civile.

M. Morin : O.K. Parfait. Je vous remercie.

Le Président (M. Bachand) :Merci. Est-ce qu'il y aura d'autres interventions sur l'article 6 tel qu'amendé? S'il n'y a pas d'autre intervention, est-ce que l'article 6 tel qu'amendé est adopté?

Des voix : Adopté.

Le Président (M. Bachand) :Adopté. M. le ministre, s'il vous plaît.

M. Jolin-Barrette : Oui, 7 : L'article 95 du code de procédure civile est modifié par l'ajout, à la fin, de l'alinéa suivant : «Peut élire domicile au cabinet de l'avocat qui le représente ou, à défaut, au greffe du tribunal la partie qui dépose au greffe une attestation confirmant qu'elle s'est présentée à un service d'aide aux personnes victimes reconnu par le ministre de la Justice en invoquant être victime de violence familiale, conjugale ou sexuelle de la part d'une partie ou d'un témoin à l'instance. L'adresse du domicile de cette partie et l'attestation sont confidentielles. Cette adresse ne peut être communiquée que sur autorisation du tribunal et uniquement si des motifs sérieux le commandent. Toutefois, l'adresse du domicile de cette partie accompagne le jugement lorsque la loi prévoit que celui-ci doit être notifié par le greffier à un officier public, à un ministère ou à un organisme public, ou figure sur les déclarations requises en vertu de l'article 444.»

Commentaires. L'article 95 de ce code prévoit les règles relatives à la mention du domicile d'une personne dans une procédure civile. Le nouvel alinéa permet de garder confidentielle l'adresse d'une personne victime en lui donnant la possibilité d'élire à domicile à l'adresse de son cabinet, de son avocat ou à l'adresse du tribunal.

Donc, un des enjeux que nous avions, c'est que, pour faciliter le témoignage des personnes victimes, on doit s'identifier à la cour puis on doit indiquer où on réside. Alors, ce qu'on veut faire en matière civile, c'est justement que, lorsqu'on est en matière de violence sexuelle, violence conjugale, la personne victime n'ait pas nécessairement à divulguer son adresse, donc qu'elle puisse élire domicile au greffe du tribunal ou chez son avocat...

Le Président (M. Bachand) :Merci beaucoup.

M. Jolin-Barrette : ...pour éviter que son adresse puisse se retrouver divulguée, notamment dans les documents qui vont à l'endroit souvent de son ex-conjoint.

Le Président (M. Bachand) :Merci.

M. Jolin-Barrette : Donc, c'est une demande des groupes.

Le Président (M. Bachand) :Interventions?

M. Morin : En fait, Juripop recommandait effectivement le dépôt d'une attestation confirmant que la personne s'est présentée à un service d'aide, elle peut élire domicile au cabinet de son avocat. Ils demandaient aussi... le CAVAC demandait d'élargir l'élection de domicile à un endroit autre que ceux prévus à cette disposition, mais évidemment sécuritaire pour des personnes qui résident à l'extérieur des grands centres. Donc, de la façon dont vous l'avez libellé, j'imagine que les gens, à ce moment-là, pourraient déposer au greffe leur adresse et ça assurerait leur sécurité, finalement.

M. Jolin-Barrette : Effectivement. Ils vont pouvoir le faire au greffe.

M. Morin : O.K. Parfait. Je vous remercie.

Le Président (M. Bachand) :Est-ce qu'il y a d'autres interventions? S'il n'y a pas d'autre intervention, est-ce que l'article 7 est adopté?

Des voix : Adopté.

Le Président (M. Bachand) :Adopté. M. le ministre.

M. Jolin-Barrette : 8, M. le Président : L'article 110 de ce code est modifié par l'ajout, à la fin du premier alinéa, de la phrase suivante : «Toutefois, la notification à une partie ayant déposé au greffe l'attestation visée à l'article 95... fait par un moyen technologique.»

Commentaires. L'article 110 du Code de procédure civile prévoit les règles de notification des actes de procédure. La modification vise à ce que toute notification à une personne ayant attesté être victime de violence se fasse par un moyen technologique...

Le Président (M. Bachand) :...Interventions? S'il n'y a pas d'intervention, est-ce que l'article 8 est adopté?

Des voix : Adopté.

Le Président (M. Bachand) :Adopté. M. le ministre.

M. Jolin-Barrette : «9. L'article 279 de ce code est modifié :

«1° par l'insertion, après le troisième alinéa, du suivant :

«"Le témoin, avec l'autorisation du tribunal ou la partie qui a déposé au greffe une attestation confirmant qu'elle s'est présentée à un service d'aide aux personnes victimes reconnu par le ministre de la Justice, en invoquant être victime de violence familiale, conjugale ou sexuelle de la part d'une partie ou d'un autre témoin à l'instance, peut témoigner à distance et être accompagné d'une personne qu'il considère apte à l'aider ou à le rassurer. De même, il peut être accompagné d'un chien spécialement formé pour l'assistance judiciaire et d'une personne responsable de celui-ci le cas échéant.";

«2° par l'ajout, à la fin du quatrième alinéa, de la phrase suivante : "Le tribunal peut également ordonner le témoignage en personne lorsqu'il estime que le témoignage à distance ne lui permet pas d'apprécier la crédibilité du témoin."»

Commentaires : L'article 279 du Code de procédure civile prévoit l'interrogatoire des témoins d'une instance. La modification vise à permettre le témoignage à distance d'une personne, partie ou témoin ayant attesté être victime de violence. De même, cette modification permet à la personne victime d'être accompagnée d'une personne qui lui est rassurante ou d'un chien formé pour l'assistance judiciaire.

• (18 h 10) •

Et on a un amendement qui est... amendement à l'article neuf : Remplacer le quatrième alinéa de l'article 279 du code de procédure civile proposé par le paragraphe un de l'article neuf du projet de loi... «témoigner à distance et être accompagné d'une personne qu'il considère apte à l'aider ou à la rassurer. De même, il peut être accompagné» par «à son choix témoigner à distance ou au moyen d'un dispositif permettant de ne pas voir cette partie ou témoin. Il peut aussi être accompagné d'une personne qu'il considère apte à l'aider ou à le rassurer. De plus, il peut être accompagné».

Commentaires : Cet amendement amène deux précisions, soit qu'il demeure possible de témoigner en personne avec un dispositif permettant à la personne victime de ne pas voir la personne qu'elle craint, tel qu'un paravent, et que la personne victime puisse, à son choix, bénéficier d'une ou des... plusieurs de ces mesures d'aide au témoignage. Donc, on est juste venus préciser l'article parce que c'était clair dans notre esprit, là, de... que la victime pouvait avoir le choix de témoigner derrière un paravent. Puis on a eu un commentaire d'un groupe, donc on voulait venir le spécifier. Parce que j'ai eu beaucoup de commentaires pour les victimes de violence conjugale où, ce qu'on met en place pour le tribunal spécialisé, ça fonctionne bien au niveau des paravents, le témoignage à distance, l'adaptation, mais qu'en matière civile puis qu'en matière familiale les mesures n'étaient pas toujours acceptées par le tribunal. Donc là, le législateur intervient très clairement pour dire aux tribunaux : Bien, voici, la personne qui a une attestation, qui est victime de violence sexuelle ou violence conjugale, elle a le droit de témoigner derrière un paravent, elle a le droit de ne pas voir le demandeur ou le défendeur, et elle peut témoigner à distance, le tout sous réserve de la... que le tribunal, s'il n'est pas en mesure d'apprécier la crédibilité, bien, il puisse faire témoigner la personne. Mais il y a des façons de s'assurer que la victime soit à l'aise pour témoigner. Donc, on veut rendre ça beaucoup plus orienté vers le fait que la victime soit à l'aise, qu'elle ne craigne pas de venir à la cour justement pour confronter son potentiel agresseur. Donc, l'idée, là, c'est vraiment d'adapter nos tribunaux civils, familiaux à la réalité des personnes victimes pour ne pas qu'elles refusent de venir à la cour ou qu'elles se disent : Je ne prendrai pas mon recours parce que le système de justice n'est pas adapté. Donc, on adapte, comme le tribunal en matière de violence sexuelle et conjugale, en matière civile. Puis ça faisait suite à la recommandation 145 du rapport Rebâtir la confiance, d'adapter justement l'aide au témoignage pour les personnes victimes.

Le Président (M. Bachand) :Merci.

M. Morin : ...

M. Jolin-Barrette : Oui...

M. Morin :Oui. Bien, vous êtes plus criminel, là, mais...

M. Jolin-Barrette : Oui, mais, sur l'aspect familial et civil, il en parlait aussi. Parce que souvent, on se retrouve avec des situations où il y a des enfants puis on se retrouve de toute façon en famille pour la garde, la pension, mais avant, on est passés au criminel, supposons, ou vice versa, là.

M. Morin : C'est ça. Parce que les deux peuvent malheureusement survenir en même temps, ou un peut donner naissance à l'autre... l'autre litige au recours. Maintenant l'article... le 9...

Le Président (M. Bachand) :...

M. Morin : Oui?

Le Président (M. Bachand) :Sur l'amendement, est-ce qu'il y a des interventions plus spécifiques sur l'amendement?

M. Jolin-Barrette : ...pour le paravent, notamment.

M. Morin : En fait... En fait, c'est le témoignage à distance, votre amendement. Il y a le paravent, la personne qui l'accompagne et le chien.

M. Jolin-Barrette : Oui. Bien, en fait, il était déjà là, le chien. C'est parce que c'est une reformulation. Ce qui manquait, c'était le paravent...

M. Morin :...donc, dispositif permettant de ne pas voir cette partie ou témoin.

M. Jolin-Barrette : C'est ça, oui. Puis on vient le clarifier, que c'est au choix de la personne aussi.

M. Morin :Oui, donc vous commencez avec «à son choix», mais la personne pourrait, par exemple, témoigner à l'aide d'un dispositif permettant de ne pas voir la partie et, en plus, être accompagnée d'un chien. Ce n'est pas exclusif...

M. Jolin-Barrette : Exactement.

M. Morin :...c'est cumulatif.

M. Jolin-Barrette : C'est cumulatif.

M. Morin :O.K. Non, je n'ai pas d'autre question.

Le Président (M. Bachand) :S'il n'y a pas d'autre intervention, est-ce que l'amendement, à l'article 9, est adopté? 

Des voix : Adopté.

Le Président (M. Bachand) :Donc, on revient à l'article 9 tel qu'amendé.

Des voix : ...

Le Président (M. Bachand) :M. le député de l'Acadie, vous avez la parole, oui. 

M. Morin :Oui. Mais est-ce que le ministre voulait ajouter  quelque chose?

M. Jolin-Barrette : ...

M. Morin :O.K. C'est bon. Alors, on y va. Merci, M. le Président. On continue. Donc, je comprends qu'à l'article 9, avec l'insertion qui est prévue ici, si la partie a déposé au greffe une attestation qui confirme qu'elle s'est présentée au service d'aide aux personnes victimes reconnues par le ministère, elle va pouvoir témoigner, avec un moyen que je qualifierais donc d'adapter, c'est-à-dire témoigner à distance ou à l'aide d'un dispositif qui permet de ne pas voir la partie. Et donc je comprends que, dans ce cas-là, le tribunal n'a pas de discrétion.

M. Jolin-Barrette : Mais le tribunal a une discrétion pour le témoignage en personne, s'il croit que cela l'empêchera d'apprécier la crédibilité de la personne.

M. Morin :C'est parce que vous dites, le témoin avec l'autorisation du tribunal. Ça fait que, moi,  la façon dont je le disais, c'est que ce premier cas de figure là., donc, oui, le témoin est là, donc il demande l'autorisation du tribunal de pouvoir utiliser un autre moyen pour témoigner, puis le tribunal lui donne la permission ou refuse parce que le tribunal veut apprécier la crédibilité du témoin. Mais, après ça, il y a le «ou». Donc, et ce n'était pas clair quand je l'ai lu, la partie qui a déposé au greffe une attestation. Est-ce que le tribunal pourrait lui dire : Oui, vous avez une attestation, mais je veux quand même vous entendre en personne, parce que je vais en avoir de besoin pour évaluer votre crédibilité.

M. Jolin-Barrette : La réponse à cette question-là, c'est oui. Donc, c'est la fin de l'article : «Le tribunal  peut également ordonner le témoignage en personne puisque... lorsqu'il estime que le témoignage à distance ne lui permet pas d'apprécier la crédibilité du témoin.» Oui, il pourrait avoir le paravent dans ce cas-là et pas voir l'auteur de la violence.

Dans le fond, ce qu'on voulait insérer, là, c'est qu'actuellement c'était une demande à la cour, actuellement, pour témoigner à distance. Puis ce qu'on me raconte, c'est que c'était peu accordé. Or, c'est un élément important, pour les personnes victimes de violence, de pouvoir témoigner à distance... puis ne pas témoigner dans la même salle.

Donc, on vient inverser un peu l'article, on dit, une personne qui a une attestation d'un organisme, qui est victime de violence sexuelle, violence conjugale, elle va pouvoir le faire. Donc, le principe général, c'est, lorsque j'ai mon attestation, je peux témoigner à distance ou dans une autre salle. C'est le principe de base. À la fin de l'article, on dit... on préserve, je vous dirais, une modalité que le tribunal a à sa discrétion pour vous dire: Bien, si c'est pour analyser la crédibilité, s'il n'est pas en mesure, lorsque la personne témoigne à distance, d'apprécier sa crédibilité, il peut refuser la demande. Mais là, à ce moment-là, il pourrait avoir le paravent. Mais ce que je veux dire, c'est qu'actuellement aussi, il pouvait renoncer... Le tribunal pouvait ne pas accorder le fait que la personne soit accompagnée d'un chien d'assistance, ça, on en a eu des cas, et il pouvait refuser également que la personne victime témoigne derrière un paravent.

Or, là, ça ne sera plus possible. Il va devoir le faire. Le seul élément où le tribunal a sa discrétion, c'est de dire : Bien, il faut que la personne témoigne dans la salle pour apprécier sa crédibilité. Mais si la personne victime veut témoigner derrière un paravent, elle va avoir le droit de témoigner derrière un paravent. Le tribunal ne pourra pas l'interdire de témoigner derrière le paravent. Il ne pourra pas l'empêcher d'être accompagnée d'une personne de confiance puis il ne pourra pas l'empêcher de venir avec un chien, comme on a au Tribunal spécialisé, pour l'aider dans... au niveau de son anxiété, son angoisse, pour livrer son témoignage...

M. Morin :...O.K., donc...

M. Jolin-Barrette : Donc, on part du principe de base qu'on donne tous les outils à la personne victime pour témoigner à distance : paravent, chien assistance, personne de soutien ou... pas personne de soutien, personne, accompagnatrices, chien de soutien. Donc, tout ça est offert à la personne victime, donc le tribunal est obligé de lui offrir, mais le seul moment où il peut dire : Vous n'allez pas témoigner à distance, c'est que... c'est : je ne suis pas en mesure d'évaluer votre crédibilité, vous allez devoir témoigner dans la salle de cour. Mais tout le reste des mesures s'applique.

M. Morin :O.K. Parfait, donc. Excellent. Puis, si le juge dit qu'il faut que la personne soit en présence, bien, évidemment, sa justification, c'était qu'il en a de besoin pour apprécier la crédibilité du témoin, il n'a pas à le justifier davantage.

M. Jolin-Barrette : Exactement. Mais c'est déjà un pouvoir qui est inhérent à la cour, actuellement, là, pour apprécier la crédibilité pour faire son travail, mais on vient baliser. Là, maintenant, ce n'est pas : non, non, je ne veux que vous soyez dans la salle de cour, puis ça va bien aller, là. Non. À partir du moment où... je vais féminiser, là, à partir du moment où Mme a une attestation, supposons, du CAVAC, bien, elle est en droit de demander au tribunal d'avoir toutes ces mesures de soutien au témoignage là, et ces mesures-là doivent lui être accordées par la cour. Et si elle demande de témoigner à distance puis que le tribunal dit : Bien non, pour votre... pour analyser votre crédibilité relativement à votre témoignage, je veux que vous témoigniez devant moi, bien là, elle va quand même pouvoir avoir le paravent, le chien, la personne de confiance avec elle, ce qui n'était pas le cas, actuellement.

M. Morin :Je comprends.

M. Jolin-Barrette : Donc, on a eu certaines difficultés dans certains districts.

• (18 h 20) •

M. Morin :D'accord. Bien là, c'est devant la Cour supérieure, ça, ça fait que j'imagine que si c'est devant la Cour supérieure... En fait, la déduction logique est à l'effet que ça devrait être devant la Cour supérieure, j'imagine, en tout cas.

Mais là je reviens à ma question que je vous posais puis le commentaire que j'ai fait au début. Les CAVAC vont avoir plus de personnel puis plus de budget pour être capables de rendre tous ces services-là? Parce que ça, il y a plusieurs groupes qui nous l'ont dit, sur papier, là, c'est... effectivement, c'est très bien, on est tous d'accord, mais s'ils ont les ressources actuelles, bien, ils ne seront pas capables, ils ne vont pas arriver. Puis avez-vous un programme pour que ces organismes-là puissent acquérir des chiens qui sont formés? Parce que ça non plus, ça n'arrive pas, il n'y aura pas une génération spontanée, à ce niveau-là, là

M. Jolin-Barrette : Bien, moi, je peux vous... Bien, en fait, premièrement, les services, les organismes comme ça ont l'habitude de fournir des attestations, donc, exemple, le CAVAC, sont habitués, notamment en matière de bail de logement, également en matière de... Vous vous souvenez, quand on a fait famille, là, sur le cas des psychologues, pour que quelqu'un puisse... que, supposons, une mère puisse amener son enfant pour des services psychologiques, donc, ça, on l'a couvert. Donc, ils sont déjà habitués, donc...

M. Morin :Oui, ils sont habitués, mais c'est parce que vous en rajoutez tout le temps.

M. Jolin-Barrette : Mais c'est souvent les mêmes clientèles qui sont déjà en matière criminelle. Donc là, on incorpore les outils qu'on a en matière criminelle à la cour civile. Parce que ce n'était pas normal que, quand vous alliez en matière criminelle sexuelle, supposons, pour une agression sexuelle ou une violence conjugale, vous ayez ces ces outils-là pour vous aider à témoigner, puis là, après ça, vous alliez chercher une passe alimentaire, ou une séparation, ou un divorce en Cour supérieure, puis là vous vous ramassiez à trois pieds de la personne, directement à témoigner pour dire pourquoi vous voulez la garde de l'enfant, alors que M. est juste à côté de vous.

M. Morin :Comprenez-moi bien, là, moi, j'en suis, là, mais ce que je dis, c'est que les ressources, évidemment, sont limitées. Moi, quand j'ai rencontré des gens qui font ce travail-là ou que je suis allé visiter des CAVAC, bien, ils sont tous d'accord, on n'est pas contre ça. Sauf qu'ils disent : À un moment donné, on n'a pas... des ressources, là, on n'en a pas, là, ou il n'y en a pas assez. Donc là, on en rajoute. Alors, c'était le commentaire que je faisais au départ. En théorie, c'est parfait, mais j'espère juste qu'en pratique ça va suivre.

M. Jolin-Barrette : Je peux vous garantir qu'on essaie de donner le maximum de ressources aux CAVAC.

M. Morin :D'accord.

M. Jolin-Barrette : Puis je pense qu'au cours des dernières années on a démontré que c'était important pour l'ensemble des Québécois.

M. Morin :Dans cette disposition-là, il y a une adaptation que... bon, évidemment, qui peut être physique, là, la présence d'un paravent, tout ça...

M. Morin : ...Est-ce que, si par exemple la personne, la victime se représente seule mais que l'autre partie se représente seule, est-ce que l'autre partie va, même s'il y a un paravent, va pouvoir interroger la victime ou si, dans des cas comme ça, il faut que ça soit quelqu'un d'autre? Parce qu'il y a une disposition semblable en matière criminelle, là, au niveau du contre-interrogatoire de la victime. Est-ce qu'il y a des dispositions semblables qui sont prévues?

M. Jolin-Barrette : Oui, on l'a déjà fait dans le projet de loi no 2, je crois, pour un même projet loi en matière familiale, l'avocat-écran. Donc, c'est déjà une mesure qu'on a incorporée. Et là tout le monde est admissible. Donc, il n'y a pas besoin d'admissibilité financière, c'est offert par l'aide juridique. C'est bien ça?

Une voix : ...

M. Jolin-Barrette : C'est ça.

M. Morin : O.K. Donc, à ce moment-là...

M. Jolin-Barrette : On est cohérent dans le temps.

M. Morin :Oui. Très bien. Non, c'est parfait. C'est parfait. Excellent. Et évidemment il y a plusieurs... La commission. Bon, il y a les mêmes... Je vais vous faire le même un commentaire qui a été fait par la Commission de la santé et des services sociaux des Premières Nations, en espérant que l'accès à un service de traduction et d'interprétariat va être disponible partout au Québec. La Fédération des maisons d'hébergement parlait aussi de la fragilisation et la vulnérabilisation des femmes non francophones ou celles qui vivent en milieu rural ou en situation de précarité. On parle ici d'angle mort. Donc, dans votre plan, est-ce qu'il va y avoir des mesures qui vont faire en sorte que ces personnes-là vont pouvoir avoir accès à tous ces services-là?

M. Jolin-Barrette : Bien, l'objectif, c'est de l'offrir à tous les citoyens en tout temps. Là, ce qu'on fait, c'est qu'on met un cadre législatif pour dire aux tribunaux : Quand vous êtes en matière civile, incluant en matière familiale, bien, on veut que ça soit beaucoup plus facile pour les victimes de violence sexuelle et de violence conjugale. Ça va de la confiance dans le système de justice de la part des victimes. Donc, ce qu'on a fait en matière criminelle, on l'amène également en matière civile. Donc, c'est sûr que nous, on veut que ça soit utilisé. Mais, tu sais, on finance des organismes par le biais de CAVAC, par le biais du SAJ. Donc, c'est sûr qu'on est toujours intéressés à ce que les gens soient bien accompagnés. Puis là vous parliez des personnes autochtones. Le ministère de la Justice finance beaucoup d'organismes autochtones à coût de plusieurs millions de dollars par année sur différents projets.

Donc, on est toujours preneurs dans la capacité financière que le ministère de la Justice a. Mais c'est quand même un changement de paradigme complet, là, dans le système de justice, là, ce qu'on fait depuis le tribunal spécialisé avec ça. Puis vous avez vu, ce sont notamment les recommandations proposées par Juripop sur le mandat qu'on leur avait donné en lien avec l'expertise qu'elles ont.

M. Morin :Exact. Au niveau... Parce que dans l'article 9 vous parlez d'une attestation confirmant que c'est un service d'aide aux personnes victimes reconnu par le ministère de la Justice. Donc, vous devez déjà avoir une liste, j'imagine, parce que... Est-ce qu'ils sont faits ou si vous allez refaire une liste avec des organismes qui vont être reconnus? Puis comment vous allez les déterminer? Puis est-ce que ça va être par règlement?

M. Jolin-Barrette : Oui, c'est par arrêté ministériel. Puis on va probablement prendre la même liste que normalement, là. Si, exemple, pour être exonéré, là, de la médiation, de la séance, là, sur la parentalité après la rupture d'une personne, là, vous êtes obligé d'aller chercher... C'est le papier rose, là. Vous êtes obligé d'aller chercher ça avant de pouvoir... que votre dossier chemine. Mais lorsqu'il y a violence conjugale, vous y assistez... vous pouvez être exonéré de l'attestation pour ne pas être dans le même... dans la même séance de formation que... que monsieur.

M. Morin : Donc, ça, ça va être fait aussi?

M. Jolin-Barrette : Oui.

M. Morin : O.K. Parfait. C'était une demande du Barreau du Québec qui recommandait au ministère de déterminer par règlement une liste d'organismes responsables pour offrir... Bon. Puis évidemment, est-ce qu'il va y avoir de la formation spécialisée qui va être offerte également? Parce que, ça aussi, c'est une recommandation du Barreau. Et comment vous allez déterminer... Est-ce qu'il va y avoir une formation spécialisée ou une habilitation pour les chiens d'assistance?

M. Jolin-Barrette : Bien là, on travaille avec Mira pour le tribunal spécialisé, notamment pour les chiens. Donc, la Sûreté du Québec également a des chiens. Donc, il y a peu... Il y a peu d'organismes qui...

M. Jolin-Barrette : ...des chiens d'assistance, notamment pour le tribunal. Mais on a un bon partenaire avec Mira. Là, on a deux chiens supplémentaires qui vont être livrés. Ça fait qu'éventuellement on souhaiterait avoir des chiens dans tous les districts judiciaires.

M. Morin : Oui. Bien, idéalement, si vous voulez que ce projet de loi là ait sa pleine mesure, c'est ce qui normalement devrait arriver, là. Avez-vous un échéancier ou un plan pour...

M. Jolin-Barrette : Bien, c'est parce que les chiens, ce n'est pas des machines. Tu sais, on en...

M. Morin : Exact.

M. Jolin-Barrette : On en avait un à Québec, puis il a dû être déclassé, qu'on dit, oui, déclassé, parce que, bon, le chien, au début, il était correct, mais c'est... émotivement, pour le chien, c'est beaucoup aussi, donc le comportement, tout ça. Bien... Donc, on travaille avec Mira. Il y en a qui vont être livrés cet automne ou au printemps. Oui, il y a cinq nouveaux sous peu qui vont commencer leur formation. Donc, on y va graduellement, mais on a un excellent partenariat avec la fondation Mira.

M. Morin : Puis ça, à ce moment-là, est-ce que vous avez des critères bien déterminés? Vous le faites par règlement, par décret ou vous faites confiance à Mira puis... Comment... Comment ça fonctionne?

M. Jolin-Barrette : Vous voulez dire pour les chiens d'assistance?

M. Morin : Pour les chiens, oui, c'est ça. Pour savoir... Parce que, tu sais, s'ils sont déclassés ou qualifiés, comment... comment vous procédez?

• (18 h 30) •

M. Jolin-Barrette : Non, bien, c'est Mira, les spécialistes là-dedans, ils sont habitués pour les chiens pour les personnes qui sont non voyantes, pour les chiens notamment d'accompagnement pour les personnes en situation d'autisme, supposons, les chiens d'assistance pour les personnes en situation de handicap aussi. Donc, ils sont vraiment habitués de travailler depuis des dizaines d'années avec les chiens. Donc, quand... quand on a regardé ça pour le tribunal spécialisé, bien, Mira s'est imposée parce que c'est les spécialistes. Mais on est ouverts à travailler avec d'autres organismes aussi, mais actuellement, au Québec, c'est pas mal eux les... je vous dirais, les leaders qui sont reconnus, qui sont les plus organisés, puis qui ont une capacité aussi de production, si je peux dire.

M. Morin : Oui, exact, parce qu'ils ont leur élevage également.

M. Jolin-Barrette : C'est ça.

M. Morin : O.K. Parfait. Ça va. Je vous remercie.

Le Président (M. Bachand) :Merci. Donc, s'il n'y a pas d'autre intervention à l'article neuf, tel qu'amendé, est-ce que l'article 9, tel qu'amendé, est adopté?

Des voix : Adopté.

Le Président (M. Bachand) :Adopté. M. le ministre.

M. Jolin-Barrette : Article 10 : «L'article 444 de ce code est modifié par l'ajout, à la fin, de l'alinéa suivant :

«"Les renseignements contenus dans ces déclarations sont confidentiels et sont recueillis uniquement pour l'application de la Loi facilitant le paiement des pensions alimentaires par l'Agence de revenu du Québec."»

Commentaires : L'article 444 du Code de procédure civile prévoit que les parties à une demande d'obligation alimentaire doivent fournir des informations, notamment par une déclaration déposée au greffe. Par cohérence avec l'article sept du projet de loi, la modification... les informations contenues dans la déclaration confidentielle et limite leur utilisation aux seules fins de l'application de la loi facilitant le paiement des pensions alimentaires.

Le Président (M. Bachand) :Merci beaucoup. Donc, intervention à l'article 10? M. le député de l'Acadie.

M. Morin : ...bien, en fait, donc quand vous parlez des renseignements contenus dans ces déclarations, vous faites référence aux déclarations et aux ordonnances ou vous parlez d'autres déclarations ici?

M. Jolin-Barrette : Non. Les déclarations pour la demande d'obligation alimentaire. Dans le fond, on doit indiquer les informations, puis là, on dit que c'est... c'est confidentiel. Par concordance avec l'article le sept, notamment sur la question l'information où on élit domicile.

M. Morin : Oui. D'accord.

M. Jolin-Barrette : Pour que ce ne soit pas accessible.

M. Morin : Qu'on a vu à 7.

M. Jolin-Barrette : C'est de la concordance.

M. Morin :Parfait. Je vous remercie.

Le Président (M. Bachand) :Merci. Est-ce qu'il y a d'autres interventions? S'il n'y a pas d'autre intervention, est-ce que l'article 10 est adopté?

Des voix : Adopté.

Le Président (M. Bachand) :Adopté. M. le ministre.

M. Jolin-Barrette : «L'article 445 de ce code est modifié par l'insertion, après "prescrit", de "sauf les déclarations requises en vertu de l'article 444."»

Commentaires : L'article 445 du Code de procédure civile prévoit la notification du parent... du parent demandeur à l'autre parent des documents accompagnant la demande de pension alimentaire. Par concordance avec la modification proposée à l'article 444 du code, article 10 du projet de loi, la présente modification vise à exclure des documents notifiés à l'autre parent la déclaration accompagnant la demande d'obligation alimentaire produite en vertu de cet article 444.

Le Président (M. Bachand) :Merci. Interventions? S'il n'y a pas d'intervention, est-ce que l'article 11 est adopté?

Des voix : Adopté.

Le Président (M. Bachand) :Adopté. M. le ministère.

M. Jolin-Barrette : Oui. L'article 12 : «L'article 1974.1 du Code civil du Québec est modifié par l'insertion, dans le troisième alinéa et après "qui, sur le vu" de "d'un jugement constatant une situation de violence ou".»

Commentaires : L'article 1974.1 permet la résiliation d'un bail de logement si la sécurité du locataire ou de son enfant est menacée en raison de violence. La résiliation survient après l'envoi d'un avis accompagné d'une attestation d'existence de violence. Cette attestation confirme que la résiliation du bail est la mesure appropriée pour assurer la sécurité du locataire ou de son enfant. Cette attestation est délivrée par le fonctionnaire désigné après qu'il a pris connaissance notamment de la déclaration du locataire. La modification vise à permettre au fonctionnaire de délivrer l'attestation après avoir pris connaissance d'un jugement constatant la violence.

Le Président (M. Bachand) :Merci beaucoup. Interventions?

M. Jolin-Barrette : Donc, ça répond à l'article... à la recommandation 135 du rapport Rebâtir la confiance...


 
 

18 h 30 (version non révisée)

Le Président (M. Bachand) :...merci. M. le député de l'Acadie.

M. Morin : Merci, M. le Président. Ici, vous faites référence ou vous parlez d'une situation de violence. Par contre, quand on a regardé un peu plus tôt l'article 515.1, là, on parle de violence basée sur la conception de l'honneur, violence familiale, conjugale, sexuelle, intimidation, harcèlement. Donc, est-ce que vous êtes prêts à considérer peut-être l'ouverture ou d'élargir le critère? C'était une recommandation qui a été faite par la Fédération des maisons d'hébergement pour femmes, à l'article... à la page 15, finalement, de leur mémoire, qui suggérait de reprendre un peu, finalement, la définition qu'on a vue un peu plus tôt à 515 en disant : «Un locataire peut résilier le bail en cours si, en raison d'un contexte de violence basée sur une conception de l'honneur, violence familiale, conjugale ou sexuelle, intimidation, de harcèlement, sa sécurité ou celle d'un enfant est menacée.»

Et, en fait, c'est un argument, une modification qu'ils proposaient, où ils disaient aussi plus tard : «L'avis doit être accompagnée d'une attestation d'un fonctionnaire ou d'un officier public désigné par le ministre de la Justice, qui, sur le but d'un jugement, constatant une relation de violence ou de la déclaration sous serment d'un locataire.» Donc, est-ce que c'est quelque chose que vous seriez prêt à considérer, donc, d'ouvrir? Parce que, là, on parle d'une situation de violence, mais ça pourrait peut-être aider le décideur à bien cerner les paramètres pour résilier le bail.

M. Jolin-Barrette : Vous avez, là, au premier alinéa, 1974.1, là : «Un locataire peut résilier le bail en cours si, en raison de violence sexuelle, de violence conjugale ou de violence envers un enfant qui habite le logement visé par le bail, sa sécurité ou celle de l'enfant est menacée. La résiliation prend effet...» Là, on se retrouve, là : «L'avis doit être accompagné d'une attestation d'un fonctionnaire ou d'un officier désigné par le ministre de la Justice qui, sur le vu d'un jugement constatant une situation de violence, de la déclaration sous serment.» Ça fait que vous l'avez, le rattachement avec la violence familiale, sexuelle ou...

M. Morin :Parfait. Merci. Une fois, évidemment, que le bail est résilié, il y a plusieurs organismes qui nous ont parlé aussi du financement des maisons d'hébergement, parce que c'est beau de résilier le bail, mais là, il faut que les gens, ils vivent ailleurs après. Donc, est-ce qu'il y a des programmes qui vont être prévus pour ça également?

M. Jolin-Barrette : Bien là, les maisons d'hébergement relèvent de ma collègue à la Condition féminine. On a mis énormément d'argent dans les maisons d'hébergement au cours des dernières années, plusieurs centaines de millions de dollars, vous vous souviendrez. Alors, les discussions ont cours entre ma collègue et les maisons d'hébergement.

M. Morin : D'accord, merci.

Le Président (M. Bachand) :Est-ce qu'il y a d'autres interventions? S'il n'y a pas d'autre intervention, est-ce que l'article 12 est adopté?

M. Jolin-Barrette : Adopté.

Le Président (M. Bachand) :Adopté. M. le ministre.

M. Morin : Oui. En fait, j'aimerais voir avec M. le ministre, parce que, là, on a ouvert le Code civil du Québec, et qu'on parle évidemment de situations de violence ou de violence familiale. Est-ce que M. le ministre serait ouvert à rajouter un article dans le Code civil, à 898.2? On a déjà eu évidemment, la discussion dans un autre projet de loi, mais, en ce qui a trait, en cas de séparation de corps ou de dissolution ou de nullité du mariage, ou de dissolution d'union civile, le partage ou l'attribution d'un... à un des conjoints ou au survivant à l'usage d'un animal.

M. Jolin-Barrette : Bien, écoutez, on a eu la discussion au mois de juin dernier là-dessus.

M. Morin :Oui. Exact.

M. Jolin-Barrette : Le ministère de la Justice...

M. Morin : Oui, je me souviens, il y a d'ailleurs le professeur Roy était là.

M. Jolin-Barrette : Oui, le ministère de la Justice a rencontré certains organismes de protection des animaux, mon cabinet aussi, mais on n'est pas encore prêt à revenir avec le fruit de nos réflexions là-dessus.

M. Morin :D'accord. Vous aviez montré une ouverture. Alors, c'était mon souvenir. Donc, je voulais profiter de... Parce que, vous savez, ce n'est pas tous les jours qu'on ouvre le Code civil, donc... Bien, on peut l'ouvrir pour le lire, mais l'ouvrir pour l'amender, c'est autre chose.

M. Jolin-Barrette : Bien, vous et moi, on le fait assez fréquemment, moi, je trouve, une couple de fois par année, là, puis on devrait faire ça, il reste deux ans, là. Bien, j'espère... Bien, alors, je ne suis pas prêt...

M. Jolin-Barrette : ...d'accord. Bien, vous pouvez me proposer l'amendement, vous pouvez le déposer si vous voulez, mais il va falloir encore travailler avec les équipes, là, parce qu'il y a des modalités associées à tout ça là.

M. Morin :Des modalités?

M. Jolin-Barrette : Bien, supposons, sur le partage d'un animal.

M. Morin :Oui. En fait, c'est ça, oui, sur la propriété ou l'usage de l'animal, compte tenu, évidemment, que ce n'est pas juste un bien, au sein du Code civil, puis qu'il y a des impératifs biologiques à cet effet là.

Le Président (M. Bachand) :M. le ministre.

M. Jolin-Barrette : Oui, bien, c'est ça. Comme je vous disais, c'est encore en analyse, parce qu'il y a des enjeux rattachés au démembrement du droit de propriété notamment.

M. Morin :De l'animal.

M. Jolin-Barrette : De l'animal. Notamment le fait que, désormais, un animal, ce n'est plus un bien.

M. Morin :Exact. C'est ce que je disais.

M. Jolin-Barrette : C'est doué de sentiments.

M. Morin :Tout à fait.

M. Jolin-Barrette : Mais, par contre, c'est le chapitre sur le droit des biens qui s'applique quand même, même s'il est doté d'émotions, de...

M. Morin :Oui. De sensibilité, d'émotions, oui.

M. Jolin-Barrette : De sensibilité, c'est ça. Alors, moi, j'ai de l'ouverture, mais je ne suis pas encore prêt. Ça demande... Ça peut paraître simple, mais c'est plus compliqué juridiquement.

M. Morin :D'accord. Est-ce que je peux vous demander une suspension, s'il vous plaît, M. le Président?

Le Président (M. Bachand) :Oui... quelques instants. Merci.

(Suspension de la séance à 18 h 40)

(Reprise à 18 h 45)

Le Président (M. Bachand) :À l'ordre, s'il vous plaît! La commission reprend ses travaux. M. le député de l'Acadie, s'il vous plaît.

M. Morin :...avant la suspension, on était en train de discuter avec M. le ministre de la possibilité de déposer un amendement. Je rappelle simplement que, pour les fins du Code civil, les animaux ne sont pas des biens, ils sont quand même dans le livre des biens, mais ce ne sont pas des biens, et qu'ils sont doués de sensibilité, et ils ont des impératifs biologiques, ce qui est évident.

C'est un dossier que je trouve quand même important. Je comprends que M. le ministre nous dit qu'il n'a pas encore statué, qu'il n'est pas encore prêt là-dessus. Maintenant, j'aimerais savoir, dans vos réflexions, est-ce que vous êtes en consultation avec différents groupes? Avez-vous, par exemple, parlé à la SPCA récemment, d'autres groupes? Vous êtes rendu à quel niveau puis quelle est la progression, finalement, de vos travaux là-dessus?

M. Jolin-Barrette : À votre question, oui, la SPCA a été rencontrée par le ministère de la Justice. On est en réflexion parce que ça amène des discussions. Quand quelqu'un est propriétaire, supposons, de l'animal, supposons qu'il serait accordé à l'autre personne, bien, c'est son droit de propriété qui serait transféré par le tribunal aussi. Donc, les enjeux sont quand même complexes pour un animal aussi, puis dans un contexte, supposons, de violence, puis c'était le chien de qui, c'était une copropriété? Alors, il y a beaucoup d'analyses à faire pour être sûr de bien faire les choses, puis que ça ne soit l'objet d'un litige supplémentaire non plus à la cour. Donc, on veut arriver avec une réflexion complète, puis on n'est pas rendu là.

M. Morin :Très bien. Alors, je vous remercie. Donc, à ce stade-ci, je ne vais pas déposer d'amendement, M. le Président, mais c'est un dossier que je trouve important. On a déjà eu des discussions, alors, je voulais revenir à la charge et voir où on en était rendu. Alors, on aura sûrement l'occasion d'en reparler. Je vous remercie.

Le Président (M. Bachand) :Merci beaucoup. Donc, M. le ministre, pour la suite des choses.

M. Jolin-Barrette : Oui, l'article... On était-tu à 13? Oui. Le Code civil du Québec est modifié par l'insertion, après l'article 2858, du suivant :

2858.1. Lorsqu'une affaire comporte des allégations de violences sexuelles ou de violence conjugale, sont présumés non pertinents :

1° tout fait relatif à la réputation de la personne prétendue victime de la violence;

2° tout fait relié au comportement sexuel de cette personne autre qu'un fait de l'instance et qui est invoqué pour attaquer sa crédibilité;

3° le fait que cette personne n'ait pas demandé que le comportement cesse;

4° le fait que cette personne n'ait pas porté plainte ni exercé un recours relativement à cette violence;

5° tout fait en lien avec le délai à dénoncer la violence alléguée;

6° le fait que cette personne soit demeurée en relation avec l'auteur alléguée de cette violence.

Tout débat relatif à la recevabilité en preuve d'un tel fait constitue une question de droit et se tient à huis clos malgré l'article 23 de la Charte des droits et libertés de la personne.

Commentaires : Le nouvel article crée, à l'égard d'une affaire civile dans laquelle est alléguée de la violence, une présomption de pertinence de certains faits en lien avec la réputation ou le comportement de la personne victime de cette violence.

Donc, l'idée, c'est les mythes et stéréotypes qui ne sont pas admissibles en preuve en matière criminelle, on voulait les incorporer également en matière civile pour faire en sorte qu'on ne puisse pas les utiliser également en matière civile à l'encontre d'une personne qui allègue être victime de violence sexuelle ou violence conjugale.

Le Président (M. Bachand) :Merci beaucoup. Donc, M. le député de l'Acadie.

M. Morin :Merci, M. le Président. Alors, est-ce que cette liste-là, elle est exhaustive ou pas?

M. Jolin-Barrette : Bien, en fait, c'est les principales règles qui se retrouvent en matière criminelle. Puis ça répond à la recommandation 146 du rapport Rebâtir la confiance, là, «modifier la règle de la pertinence de la preuve de manière à exclure l'introduction des limites et préjugés dans l'évaluation de la crédibilité de la victime d'agression...

M. Jolin-Barrette : ...violences conjugales, donc notamment la question du passé sexuel de la plaignante, 276 du Code criminel, l'abolition de la plainte spontanée, 275 du Code criminel, bon, on ne doit pas juger la crédibilité d'une personne... du moment du dévoilement de son comportement postérieur à l'agression, donc une décision de la Cour suprême R contre DD en 2000. Oui, ça fait que, dans le fond, on est venu colliger puis codifier dans le Code civil qu'on ne peut pas en tirer une inférence négative, là, du sens que sont présumés non pertinents ces faits-là, comportements sexuels antérieurs, comportements de la réputation, le fait qu'elle n'a pas porté plainte, le fait que la personne a soit demeuré avec l'auteur de la violence pour dire : Bien, dans votre recours en responsabilité civile, vous n'êtes pas crédible. S'il vous agressait, pourquoi vous êtes resté avec? Pour attaquer la crédibilité de la personne.

M. Morin :Bien, je vous remercie. Est-ce qu'à 1°, tel que le souligne Juriop, ce ne serait pas plus précis de parler de victime alléguée plutôt que de prétendue victime? Parce que ce qu'ils soulignaient, c'est que l'utilisation de prétendues victimes peut amener une victimisation secondaire.

M. Jolin-Barrette : En fait, à ça, c'est parce qu'on vise les témoins également. Donc, ça se peut que le témoin...

Une voix : ...

M. Jolin-Barrette : Oui, c'est ça. Ça fait que si c'est le témoin... En fait, c'est ça. Si c'est un témoin qui est là, ça va s'appliquer au témoin également. Tandis que si on avait dit «victime alléguée», dans le fond, on se retrouvait dans les allégations du dossier.

M. Morin :Bien, c'est-à-dire que, M. le Président, quand...

M. Jolin-Barrette : C'est ça. Dans le fond, la prétendue victime, là, ça comprend autant la personne qui est demandeur dans le dossier que le témoin qui vient témoigner aussi. On voulait être plus large qu'uniquement la personne qui fait la demande.

M. Morin :Puis, selon vous, si on utilise...

• (18 h 50) •

M. Jolin-Barrette : Parce que ça ne va pas nécessairement être allégué dans la procédure que le témoin a été victime. Tu sais, exemple, là, la personne qui fait la requête, O.K., elle, supposons que c'est la victime, elle est une victime, bien, ce qu'on met en place comme moyens de faits non pertinents s'appliquent aussi à la personne qui vient témoigner, qui n'est pas le demandeur, demandeur victime. Exemple, vous avez un témoin qui est victime, on veut que les règles de preuve associées à la personne qui vient témoigner, qui a été victime de violences sexuelles ou violences conjugales, s'appliquent aussi. Donc, ce n'est pas uniquement l'auteur de la demande, de la requête devant le tribunal, de l'action, dans le fond.

Je vous donne un exemple. Supposons que vous aviez Mme qui fait la demande, O.K., puis il y a un témoin qui vient témoigner, puis supposons que c'est un témoin qui a été agressé sexuellement, mais qu'il n'y a pas de chef de réclamation pour lui dans la requête, il n'est pas parti au litige, supposons, c'est l'enfant qui est agressé sexuellement, bien, on veut que ces antécédents-là ne lui soient pas opposables sur cette ligne de questions là. Dans le fond, on vient couvrir plus large. Le choix des mots, pourquoi on utilise «prétendue victime» et non pas «victime alléguée», c'est pour venir également couvrir le témoin qui viendrait témoigner dans cette cause là.

Le Président (M. Bachand) :M. le député de Jean-Lesage, s'il vous plaît.

M. Zanetti : Oui, merci, M. le Président. Au début de l'article, là, quand on dit : «Lorsqu'une affaire comporte des allégations de violence sexuelle ou de violence conjugale», pourquoi est-ce que vous n'avez pas décidé de mettre la formule de violence familiale, y compris conjugale, comme on le voit parfois ailleurs? Est-ce que c'est juste un oubli ou un choix conscient?

M. Jolin-Barrette : Bien, dans ces cas-là, c'est par rapport au témoignage de la personne qui vient. Dans le fond, les faits, on ne veut pas qu'elle puisse être questionnée en lien avec les cas...

M. Jolin-Barrette : ...de violence conjugale et de violence sexuelle. Exemple, sur le passé sexuel, ça touche véritablement la violence sexuelle, donc ce n'est pas un lien avec la violence familiale. C'est vraiment mythes et stéréotypes rattachés à une situation de violence conjugale ou à une situation de violence sexuelle. Exemple, une action en réparation... une action dommages et intérêts basée sur le fait que madame dit : Bien, vous m'avez causé des dommages physiques et psychologiques, je vous réclame, supposons, 100 000 $, à monsieur. Mais là, on ne veut pas que ça lui soit opposé, que ça... avec 5, le délai que ça a pris à dénoncer la violence alléguée en matière de violence conjugale. Tu sais, supposons qu'elle est restée pendant 10 ans avec lui, même s'il la battait, mais ce n'est pas un motif en matière civile pour dire : Bien, elle n'a pas de crédibilité parce que si je la battais, elle l'aurait dit plus rapidement, ça fait que, voyez-vous, elle ment, tu sais, pour attaquer la crédibilité de la personne.

M. Zanetti : Je comprends. Donc, c'est juste qu'au fond, ici, il ne peut pas y avoir rien par rapport à la violence familiale qui soit pertinent, là, dans le contexte, là. Ça ne pourrait pas arriver dans un contexte de violence familiale.

M. Jolin-Barrette : Bien, dans la jurisprudence, supposons, il n'y a pas de mythes ou stéréotypes reconnus par les tribunaux qui toucheraient la violence envers les enfants, à l'exception, supposons, de la violence sexuelle. Tu sais, quand qu'on parle de violence familiale, on vise la violence notamment envers les enfants.

M. Zanetti : Violence physique.

M. Jolin-Barrette : Oui.

M. Zanetti : Ou sexuelle.

M. Jolin-Barrette : Oui. Mais...

M. Zanetti : Mais là c'est couvert.

M. Jolin-Barrette : Oui, mais parce que normalement, tu sais, les mythes et stéréotypes envers l'enfant, on ne dira pas que l'enfant est resté là, c'est son parent, là. Tu sais, «que le fait que cette personne soit demeurée en relation avec l'auteur alléguée de cette violence», c'est son parent. Ça fait que c'est différent un peu.

M. Zanetti : Oui, C'est ça. Ça ne s'applique pas vraiment aux enfants.

M. Jolin-Barrette : C'est ça.

M. Zanetti : Je comprends ce que vous voulez dire. M. le Président, j'aimerais ça suspendre pour proposer un amendement.

Le Président (M. Bachand) :Parfait. Bien, on va suspendre quelques instants. Merci.

(Suspension de la séance à 18 h 56)


 
 

19 h (version non révisée)

(Reprise à 19 h 06)

Le Président (M. Bachand) :À l'ordre, s'il vous plaît! La commission reprend ses travaux. M. le député de Jean-Lesage, s'il vous plaît.

M. Zanetti : ...M. le Président. Alors, l'amendement se lit comme suit. Donc, il s'agit :

D'ajouter, à l'article 2858.1... 2858.1 du Code civil du Québec introduit par l'article 13 du projet de loi, au deuxième alinéa, après «sa crédibilité», «ou pour en déduire que cette personne est plus susceptible d'avoir consenti à l'activité à l'origine de l'allégation de la violence».

Donc, c'est... Est-ce que vous voulez que je lise l'article, tel qu'amendé? Je pense que ça va, hein? Alors, c'est... l'idée, c'est de... d'aller plus loin encore dans, disons, le fait d'écarter certains mythes qui peuvent être retenus contre quelqu'un. Et je pense que... bien, c'est une recommandation qui vient d'un mémoire qui a été vu en commission, puis je pense que ça vient... disons, ça va dans le sens, j'ai l'impression, de l'intention du ministre, mais plus loin encore, plus sûr. Je pense que ça pourrait être une... une bonne idée.

M. Jolin-Barrette : ...pouvez-vous, M. le Président, demander... bien, M. le député de Jean-Lesage, me l'expliquer davantage, «tout fait relié au comportement sexuel de cette personne autre qu'un fait de l'instance, et qui est invoqué pour attaquer sa crédibilité, ou pour en déduire que cette personne est plus susceptible d'avoir consenti à l'activité à l'origine de l'allégation de violence»? Je ne suis pas sûr de saisir.

M. Zanetti : Bien, c'est la question... tu sais, lorsque la question du consentement est remise en question, pour ne pas que des faits reliés au comportement sexuel puissent être utilisés pour dire, par exemple : Cette personne-là, elle a eu tel comportement, donc c'est sûr qu'elle a consenti à ça. Ou : Voyons donc, elle n'a pas consenti. Ou... Vous voyez, c'est comme...

M. Jolin-Barrette : Mais c'est déjà couvert par 2, dans le fond, «tout fait relié au comportement sexuel de cette personne».

M. Zanetti : Bien là, c'est pour... Ça ne peut pas être évoqué pour attaquer sa crédibilité, mais on rajoute une précision pour dire que ça ne peut pas non plus... Disons, elle fait jeter le doute sur le consentement ou l'absence de consentement qui est affirmé.

M. Jolin-Barrette : Mais là vous vous retrouvez en situation où, supposons... Là, on est en matière civile, là, mais si je fais le parallèle en matière criminelle, vous diriez : On ne peut pas... Dans le fond, s'il y a un doute sur la question du consentement, vous ne voudriez pas que ce soit un moyen de défense admissible?

M. Zanetti : Les comportements sexuels de la personne, comportements antérieurs, ne peuvent pas être utilisés comme un argument pour invalider...

M. Zanetti : ...ce qui est affirmé par rapport au consentement dans le cas précis. Ça va vraiment dans le même sens, sauf que ça vient... ça vient ici cibler quelque chose de plus large, que ça ne peut pas être utilisé pour attaquer sa crédibilité ni pour dire... dans le fond, elle a dû consentir à ça, malgré ce qu'elle dit aujourd'hui... personne.

M. Jolin-Barrette : Oui, mais «tout fait relié au comportement sexuel de cette personne, autre qu'un fait de l'instance, et qui est invoqué pour attaquer sa crédibilité», exemple quand je mettais mon pyjama rouge, c'est que je voulais avoir une relation sexuelle, O.K., à toutes les fois, c'était ça. Et là vous me dites, dans le fond... deux, là, ça couvre déjà ça, son comportement, dans le fond, antérieur, ça ne peut pas attaquer ma crédibilité. Là, vous, vous dites : Pour en déduire que cette personne est plus susceptible d'avoir consenti, vous dites : C'est plus fort si je mets mon pyjama rouge, ça voulait dire que je consentais à un rapport sexuel.

M. Zanetti : Bien, je pense que... en tout cas, je... l'exemple du pyjama rouge ne me parle pas vraiment, mais je veux dire, on pourrait dire... Bon, c'est parce que j'hésite à prendre des exemples précis, là, je ne suis pas non plus avocat dans ces matières-là, puis je n'ai pas vu une centaine de cas par rapport à ça, O.K.? Ce que ce que je vois ici, là, c'est que quelqu'un pourrait décider, pour dire : Cette personne-là dit qu'elle n'a pas consenti, mais, dans le fond, elle a sûrement consenti parce que, et insérer ici invoquer un comportement sexuel passé pour dire... pour alimenter sur la base de préjugés et de mythes, le fait que cette personne-là, dans le fond, sa défense n'est pas crédible. Peut-être je suis trop dans l'abstrait. Il faudrait que je trouve un exemple, mais je... ça m'apparait... c'est...

• (19 h 10) •

M. Jolin-Barrette : O.K. Bien, écoutez...

M. Zanetti : Ce que je vous propose, là, j'ai... c'est qu'en fait c'est que j'ai l'impression que, pour attaquer sa crédibilité... j'ai l'impression que ça ne couvre pas nécessairement ce qui est ajouté, que qu'est-ce qui est ajouté vient préciser pour être sûr, sûr, sûr.

M. Jolin-Barrette : Bien, c'est parce que ce que vous avez à 1, là, paragraphe 1 : «Tout fait relatif à la réputation de la personne prétendue victime de la violence», là, bien, son passé, sa réputation, c'est couvert, là, mais écoutez, je... comment je pourrais dire, j'apprécie l'effort, mais moi, je suis à l'aise avec le libellé que j'ai.

M. Morin : Si je comprends bien l'amendement qui est déposé par mon collègue, en fait, ça s'inspire de l'article 276.1 du Code criminel. Et dans les poursuites qui sont énumérées à 276.1, où on parle évidemment du consentement de la victime, ce que le code dit, c'est que le fait que le plaignant ait pu avoir une activité sexuelle avec l'accusé ou un tiers est inadmissible pour permettre de déduire du caractère sexuel de cette activité, qu'il est plus susceptible d'avoir consenti à l'activité à l'origine de l'accusation ou soit moins digne de foi. C'est ce que... c'est... en fait, c'est ce que l'Association nationale Femme et droits souligne dans leur mémoire. Mais j'ai posé des questions qui tournent autour de cet élément-là, M. le ministre, à ce qui a trait un et deux, pour savoir si c'était inclus. Et le ministre a répondu, là, mais je pense que c'est inspiré de... mais, comme il le souligne, de 276.1 du Code criminel, qui est un contexte qui est peut-être un peu différent, mais je laisse le soin à M. le ministre de décider, évidemment, là.

Le Président (M. Bachand) :Autres interventions? M. le député de Jean-Lesage.

M. Zanetti : Bien, au fond, je pense que c'est... dans l'interprétation du ministre, au fond, ce qui est ajouté là, est comme quelque chose de déjà sous-entendu par l'état actuel de l'article tel que vous l'avez présenté, ça me va. Mais je vais quand même demander le vote, là, puis je vais voter pour.

Le Président (M. Bachand) :...d'autre intervention, est-ce que l'amendement du député Jean-Lesage est adopté?

Des voix : Rejeté.

M. Zanetti : Bien, sur division.

Le Président (M. Bachand) :Sur division.

M. Zanetti : Bien, adopté.

Le Président (M. Bachand) :Adopté. Alors donc, merci beaucoup. M. le ministre, pour la suite des choses.

M. Jolin-Barrette : Mais l'amendement est rejeté...

Le Président (M. Bachand) :L'amendement est rejeté, oui, oui, est rejeté, oui, oui...

Des voix : ...

Le Président (M. Bachand) :Il est 19 heures, presque 14, c'est pour ça, là. O.K. Alors, donc…

M. Jolin-Barrette : ...voter 13?

Le Président (M. Bachand) :Donc, autres interventions sur 13? S'il n'y a pas d'autre intervention, est-ce que l'article 13 est adopté?

M. Jolin-Barrette : Adopté.

Le Président (M. Bachand) :Adopté. Alors donc, M. le ministre.

M. Jolin-Barrette : Oui. 14 : Ce code est modifié par l'insertion, après l'article 2874 du chapitre suivant : «Chapitre quatrième. De la preuve de certains faits. 2874.1 : Dans le cadre d'une action en réparation du préjudice...

M. Jolin-Barrette : ...résultant d'un acte constituant une infraction criminelle, le dépôt d'une copie du jugement de culpabilité de l'auteur de cette infraction passé en force de chose jugée suffit à faire la preuve de la faute.

Commentaires : Le nouvel article proposé vise à ce que le dépôt d'un jugement déclarant coupable l'auteur d'une infraction criminelle suffise à démontrer que ce dernier a commis la faute à l'origine d'une action en réparation du préjudice en lien avec cette infraction.

Le Président (M. Bachand) :Oui.

M. Zanetti : Je pensais qu'on votait, là, pour mon amendement. Mon amendement a été rejeté, mais, après ça, vous avez tout de suite demandé le vote sur l'article.

Le Président (M. Bachand) :J'ai demandé s'il y avait d'autres interventions sur l'article 13.

M. Zanetti : Ah! je ne vous ai pas bien compris, peut-être à cause de l'heure. J'avais un autre amendement à présenter.

Le Président (M. Bachand) :C'est parce que, là, l'article 13 est fermé, est adopté. Donc, ça prend un consentement pour le réouvrir.

M. Zanetti : Bien, on pourrait peut-être, par consentement...c'est-à-dire qu'on commence avec mon amendement sur l'article 13 demain.

Le Président (M. Bachand) :Mais parce que l'article 13 a été adopté.

M. Zanetti : Oui, je sais, mais peut-être que, là... de consentement, tout est possible.

Le Président (M. Bachand) :Mais, s'il y a consentement, on est...

M. Zanetti : S'il y avait possibilité... Je n'ai pas beaucoup...  Je ne suis pas beaucoup intervenu, je n'ai pas présenté d'amendement, hein, peut-être que ça serait un facteur facilitant.

Le Président (M. Bachand) :Mais, de toute façon, compte tenu de l'heure, la commission ajourne ses travaux sine die. Ça fait qu'on se voit demain. Merci beaucoup. Belle soirée.

(Fin de la séance à 19 h 15)


 
 

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