Journal des débats de la Commission des institutions
Version préliminaire
43e législature, 1re session
(début : 29 novembre 2022)
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Le
jeudi 2 mai 2024
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Vol. 47 N° 70
Consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 56, Loi portant sur la réforme du droit de la famille et instituant le régime d’union parentale
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11 h (version non révisée)
(Onze heures vingt-huit minutes)
Le Président (M.
Bachand) :À l'ordre, s'il vous plaît!
Bonjour, tout le monde! Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la
Commission des institutions ouverte. La commission est réunie afin de
poursuivre les consultations particulières et auditions publiques sur le projet
de loi n° 56. Loi portant sur la réforme du droit de la famille et
instituant le régime d'union parentale. Avant de débuter, M. le secrétaire, y
a-t-il des remplacements?
La Secrétaire : Oui, M. le
Président. Mme Boivin Roy, Anjou-Louis-Riel est remplacée par Mme Lecours,
Lotbinière-Frontenac et M. Zanetti, Jean Lesage est remplacé par M.
Cliche-Rivard, Saint-Henri–Sainte-Anne.
Le Président (M.
Bachand) :Merci. Donc, il nous fait
plaisir d'accueillir notre premier groupe. Donc Maître Sylvie Schirm et Maître
Marie-Elaine Tremblay. Merci beaucoup d'être avec nous. C'est un grand, grand
grand plaisir. On s'excuse un petit peu du retard. Comme vous savez, les
travaux au salon bleu ont eu préséance. Alors, je vous laisse... commencer
votre présentation de 10 minutes. Après ça, on aura un échange avec les
membres de la commission. La parole est à vous. Merci.
Mme Schirm (Sylvie) : Parfait.
Alors, je suis Maître Sylvie Schirm, avocate qui pratique exclusivement en
droit de la famille, associée chez Schirm et Tremblay, avocats. Je suis
accompagnée de mon associée, Maître Marie-Elaine Tremblay. Notre cabinet œuvre
exclusivement en droit de la famille.
C'est toujours un honneur de pouvoir être
dans cet édifice si important et de participer aux rouages de la démocratie.
Une partie de notre travail en tant que plaideuse est d'interpréter la
législation existante. En participant à ce processus, nous espérons humblement
pouvoir l'influencer avant son existence. Nous tenons à remercier le ministre
de la Justice, Maître Simon Jolin-Barrette, pour avoir entamé et déposé le projet
de loi n° 56, une législation tant attendue depuis l'arrêt de la Cour
suprême dans l'affaire Éric contre Lola, et d'avoir eu le courage de le faire.
Nous sommes très conscientes de la
complexité de ce dossier. Les conjoints de fait représentent une vaste
diversité au Québec et tenter de remplir toutes les lacunes législatives n'est
pas une tâche facile. Nous connaissons également l'assiduité et le dévouement
du Dr Roy qui vous accompagne dans cette démarche et nous le saluons. Le seul
hic de cette réforme, c'est que mon livre sur les conjoints de fait est devenu
désuet. Dans le fond, tant mieux. Alors nous avons pris connaissance avec grand
intérêt des commentaires du ministre et nous accueillons...
Mme Schirm (Sylvie) : ...favorablement
l'objectif directeur choisi pour le projet de loi no 56, c'est-à-dire
assurer une plus grande stabilité aux enfants naissants hors mariage, dont on
sait que c'est 65 % au Québec, et ce, en cas de séparation de leurs
parents.
• (11 h 30) •
La réforme du droit de la famille est un
moment propice et souvent rare pour discuter des problématiques qui touchent
les familles québécoises lors de la rupture et d'envisager des solutions. Il a
été discuté depuis l'annonce de la réforme qu'une solution pourrait être la
possibilité de prévoir le paiement d'une pension alimentaire à titre de mesure
compensatoire pour le parent qui a fait des sacrifices durant l'union au bénéfice
d'un enfant. Nous comprenons que cela ne fut pas le choix du ministre et
soulignons également que cette solution envisageable ne fait pas non plus
l'unanimité au sein de notre cabinet, peut-être un écart de génération, mais
nous croyons important de soulever tous les points entourant la réforme, car il
est important de réfléchir et de discuter de toutes les possibilités
envisageables pour les familles québécoises. Vous trouverez les pour et les
contre dans notre mémoire. Bref, nous comprenons que cette option ne fut pas
retenue par le ministre.
Alors, je voudrais traiter maintenant de
la définition d'union parentale. En vertu du projet de loi,
l'article 521.20, une union parentale avec un parent marié ne se forme pas
tant qu'il n'y a pas de dissolution du mariage ou de l'union civile. Mais il
arrive souvent qu'une personne décide de refaire sa vie après sa séparation et
même avoir des enfants, le tout en étant encore mariée. On le voit souvent dans
nos dossiers. Dans certains cas, la personne n'entreprend pas des procédures de
divorce ou, si celles-ci sont contestées, le délai pour terminer les procédures
peut s'éterniser, d'autant plus que nous savons que notre système de justice
est pas mal débordé de ces temps-ci. Dans de telles circonstances, cela signifie
que les protections de l'union parentale ne sont pas offertes à ces
familles-là. Nous croyons donc qu'il y a lieu de prévoir que lorsque l'un des
conjoints est marié ou en union civile, l'union parentale se formera à compter
du dépôt de la demande introductive d'instance en divorce ou en dissolution de
l'union civile. Alors, cela permettra, parce que souvent les procédures ne sont
pas immédiatement prises pour toutes sortes de motifs et toutes sortes de
raisons, mais cela permettra donc que l'union parentale puisse quand même
débuter à un moment donné avec le dépôt d'une demande introductive d'instance.
En ce qui a trait au moment d'entrée en
vigueur, alors, on constate que les nouvelles dispositions ne s'appliqueront
qu'aux personnes qui deviendront pères et mères ou parents d'un même enfant
après le 29 juin 2025. Nous croyons qu'étant donné les changements
importants apportés par le projet de loi aux droits et obligations des
justiciables, il est important de préciser à compter de quelle date et en
fonction de quelles circonstances ces modifications entreront en vigueur. Nous
sommes très au fait de la polémique existant dans la communauté juridique au
sujet de cette décision de ne pas assujettir les enfants déjà nés au projet de
loi no 56, ayant pour conséquence d'en exclure les couples non mariés qui
sont aujourd'hui déjà parents d'un enfant et, par ricochet, exclure des enfants
nés avant le 29 juin 2025. Cette approche diffère de celle choisie par le
législateur lors de l'adoption du projet de loi no 146, soit la Loi sur le
patrimoine familial.
Nous comprenons ainsi qu'il soit difficile
pour la communauté juridique de comprendre la raison d'être de cette... de
cette date quant au contenu de l'article 45, lequel crée une catégorie
d'enfants distincte, soit ceux qui sont nés avant son entrée en vigueur. Je
tiens à souligner que cela ne signifie pas que les enfants ont des droits
distincts, mais quand même crée une catégorie différente. Nous comprenons aussi
que le législateur a pour désir de respecter les choix exercés par leurs
parents quant à leur type d'union. Ceci dit, si le législateur décidait de
revoir l'article 45 devant la polémique existant au milieu juridique et
d'assujettir les unions existantes avec enfants à ce projet de loi, nous croyons
que les effets du projet de loi devront alors remonter à la date de naissance
de l'aîné des enfants communs de ces conjoints de fait, par opposition à ne
créer des effets qu'à partir de la date d'entrée en vigueur. Nous croyons que
soumettre les unions existantes à deux types de...
11 h 30 (version non révisée)
Mme Schirm (Sylvie) : ...qui
se succéderaient dans le temps, un pour l'avant l'entrée en vigueur et l'autre
après, serait contre-productif et sans grande utilité. Alors, ce point est
effectivement un point de débat dans le milieu juridique. En ayant parlé avec
de nombreuses collègues, on avait des points de vue divergents face à ça, mais
la réalité est que cela risque de créer un différend entre les enfants.
En ce qui a trait à la... chapitre sur la
résidence familiale, qui est l'article 521.24, qui parle que les mesures
de protection de la résidence familiale qui sont déjà prévues au Code civil
subsistent pendant 30 jours qui suivent la fin de l'union, lorsque
celle-ci a pris fin par la manifestation expresse ou tacite de la volonté par l'un
ou l'autre des conjoints de mettre fin à l'union. On tient à vous souligner que
nous envisageons des défis au niveau de la preuve à faire pour établir la
manifestation expresse ou tacite de la volonté d'un des conjoints de mettre fin
à l'union. Alors, on voudrait souligner qu'au niveau preuve, il va y avoir une
certaine difficulté.
D'autre part, on croit que le délai de 30 jours
est fort insuffisant pour protéger les droits des conjoints et leurs enfants
suivant la rupture. S'il y a certains dossiers qui se règlent rapidement et
dans un délai court, ils ne constituent pas toujours la majorité des dossiers.
La rupture engendre un lot de soucis et une période de grands bouleversements.
Les négociations peuvent comprendre plusieurs points interreliés entre eux et
donc s'étirer sur plusieurs mois. Également, nous entrevoyons des difficultés
au niveau de la coexistence du projet de loi... de l'article 521.24 du
projet de loi et 521.28, c'est-à-dire un conjoint qui se voit octroyer l'usage
de la résidence familiale dont il n'a... ou dont il n'est pas propriétaire,
pourrait quand même faire face à la vente de la propriété par l'autre conjoint
30 jours après la rupture. Donc, le... quand il y a une résidence qui est
au nom d'un seul des conjoints.
Alors, pour éviter toute ambiguïté et
donner aux conjoints un temps convenable pour prendre position suivant la
rupture, nous croyons qu'il sera plus approprié que la protection prévue pour
la résidence familiale subsiste pendant 120 jours et toute période
additionnelle prévue par jugement rendu en vertu de 521.28. Donc, si un juge
accorde le droit d'usage de la résidence qui est au nom de l'autre conjoint, la
protection va quand même subsister jusque... pour toute période additionnelle
prévue par jugement, et qu'on n'appliquera pas seulement les 30 jours qui
sont prévus actuellement.
Bon, d'autre part, on parle aussi de l'article 521.27,
quand on... les demandes relatives à l'attribution de la propriété qui doivent
être faites au plus tard 30 jours après la fin de l'union. Je pense que
tout le monde dans le monde juridique a convenu que 30 jours, ce n'est
rien, c'est un délai... très, très court et presque impossible et insuffisant
pour faire une demande suite à la rupture devant les tribunaux. Alors, d'abord,
il faut se rappeler qu'on encourage les parties à négocier à l'amiable avant d'entreprendre
des procédures, ce qui peut prendre du temps. Ce délai est très peu réaliste
face au délai pour obtenir un rendez-vous à l'aide juridique ou même en
médiation. L'institution du patrimoine de l'union parentale entraînera
nécessairement des discussions entre les parties suivant la rupture au sujet
des biens. Si les parties s'entendent, ils procéderont à un partage à l'amiable
et décideront du sort des questions mentionnées à cet article sans recourir au
tribunal. Autrement, le tribunal sera saisi par l'un ou l'autre des conjoints.
Donc...
Le Président (M.
Bachand) :...merci beaucoup, on est déjà
rendus à la période d'échange, je m'excuse.
Mme Schirm (Sylvie) : Je m'excuse,
alors...
Le Président (M.
Bachand) :M. le ministre, pour une
période de 14 minutes, s'il vous plaît.
M. Jolin-Barrette : Merci, M.
le Président. Maître Schirm, Maître Tremblay, merci d'être présentes en
commission parlementaire et de venir vous... nous présenter votre mémoire. Vous
êtes des praticiennes du droit, vous l'avez dit (Interruption), pardon, vous l'avez
dit, vous pratiquez exclusivement en droit de la famille. Donc, vous avez une
expertise précise et depuis plusieurs années.
D'entrée de jeu, là, sur la question du 30 jours
pour la protection, l'attribution de la résidence familiale, vous nous suggérez
120 jours. Parce qu'en pratique, lorsqu'il y a séparation, le temps que
les gens puissent s'orienter, tout ça, ça prend quatre mois, là, selon vous.
Mme Schirm (Sylvie) : Bien,
si ce n'est pas quatre mois... mais c'est soit 120 jours ou le jugement
qui accorde l'usage, le jugement, parce qu'on trouve qu'il y a une petite...
une petite contradiction. C'est-à-dire que, par exemple, un juge ordonne, donne
l'usage à un des conjoints, mais, avec l'état actuel, l'autre...l'autre
conjoint, il peut vendre la résidence 30 jours...
Mme Schirm (Sylvie) : ...après.
Je comprends qu'ils vendent avec un droit d'usage, là. Ce n'est peut-être pas
la meilleure vente au monde, mais le fait demeure qu'il y a une certaine
contradiction qui s'y trouve.
M. Jolin-Barrette : ...la
protection de la résidence familiale et l'attribution plus que 30 jours.
Mme Schirm (Sylvie) : Oui.
Mme Tremblay
(Marie-Elaine) : C'est un minimum, en fait, qu'on suggère comme
120 jours. Puis c'est un petit peu aussi dans la même... C'est cohérent
avec les modifications qui ont été apportées à la Loi sur les droits de
mutation. Maintenant, on permet beaucoup plus de temps avant pour l'exemption,
là, pour qu'elle soit en vigueur entre les conjoints de fait parce que la
médiation puis les tentatives de règlement, c'est long. Ça peut...
• (11 h 40) •
M. Jolin-Barrette : ...financière
sur le fait que quand vous vendez à votre conjoint, vous ne payez pas la taxe
de mutation...
Mme Tremblay
(Marie-Elaine) : ...bienvenue, là...
M. Jolin-Barrette : ...puis
la taxe de bienvenue.
Mme Tremblay
(Marie-Elaine) : ...les frais de mutation. Maintenant, depuis 2020, je
crois, ça a été modifié. Maintenant, c'est beaucoup plus long. C'est des délais
à partir de la fin de la médiation ou à partir du jugement, parce que... Et
c'est dans cette ligne-là que nous, on se dit qu'un délai minimum de
120 jours serait plus adéquat.
M. Jolin-Barrette : Je
ferais... Je veux faire appel à votre expérience pratique, là. Dans le projet
de loi, on a fait en sorte qu'idéalement ça soit le même juge qui puisse suivre
les familles. Qu'est-ce que vous pensez de cette proposition-là?
Mme Schirm (Sylvie) : Ça,
ça dépend du jugement.
M. Jolin-Barrette : Vous
savez que vous n'êtes pas la première à me dire ça en commission parlementaire.
Puis je ne vous cacherai pas que ça soulève chez moi certaines inquiétudes
parce que, dans notre système de justice, lorsqu'on se présente devant le
tribunal, ça devrait être un traitement neutre, peu importe qui est assis sur
le banc.
Mme Schirm (Sylvie) : Ça,
c'est...
Mme Tremblay
(Marie-Elaine) : Mais c'est un...
M. Jolin-Barrette : Non,
non, je... Mais c'est parce que... Je vous le dis parce vous n'êtes pas la
première à me le dire depuis le début des consultations, là.
Mme Tremblay
(Marie-Elaine) : Mais les juges de première instance jouissent d'une
très grande discrétion. C'est là, je pense, que les différences peuvent
arriver, là. Je pense que c'est...
Mme Schirm (Sylvie) : Mais
en réalité, la proposition d'avoir un juge pour des cas peut-être plus
complexes, peut-être pas nécessairement pour tous les dossiers, mais pour les
dossiers où est-ce qu'on pense qu'on va revenir plus d'une fois. Que ça soit
pour la garde, la divulgation financière, le partage des biens, ça, c'est
certain, ça fait très longtemps, depuis que je suis en pratique, qu'on le
demande. Et pour toutes sortes de raisons, ce n'est pas arrivé. C'est... C'est
un bienfait. C'est quelque chose qui peut énormément aider puis aussi faire
comprendre aux justiciables, surtout s'il y a un justiciable qui a un
comportement un peu plus abusif que l'autre ou qui pense pouvoir utiliser ses
ressources financières pour écraser l'autre partie, on peut voir que, dans ce
cas-là, il va... il ou elle va savoir qu'ils sont sous surveillance d'un juge
qui va suivre le dossier. Alors, ce n'est pas une mauvaise idée du tout, et je
n'aurai honnêtement aucune objection à qu'on puisse avoir le même juge dans les
dossiers un peu plus complexes.
M. Jolin-Barrette : O.K.
Vous en avez un peu parlé, là, vous avez dit quelqu'un qui voudrait peut-être
écraser avec ses moyens financiers l'autre partie. On a mis des mesures en
matière de violence judiciaire. Qu'est-ce que vous pensez de ça?
Mme Schirm (Sylvie) : Bravo!
Mme Tremblay
(Marie-Elaine) : Excellent. Excellent.
Mme Schirm (Sylvie) : Excellent!
C'était requis.
M. Jolin-Barrette : Puis
pouvez-vous nous illustrer dans le cadre de votre pratique, là, qu'est-ce que
vous avez déjà vu par rapport à ça? Tu sais, là, que...
Mme Tremblay
(Marie-Elaine) : Bien, les conjoints de fait, par exemple, qui sont à
la cour, demandes de prestations compensatoires qui, aujourd'hui, sont un
enrichissement injustifié. Donc, la partie vulnérable financièrement a
extrêmement de difficulté à financer le recours. Et là il suffit pour l'autre
partie d'aller souvent à la cour. On va demander qu'elle soit expulsée de la
maison. Puis je dis «elle» parce que c'est encore, malheureusement, la majorité
du temps, la femme qui est la plus vulnérable, bien que ça change. Mais donc on
va demander qu'elle soit expulsée de la maison. On va l'essayer une fois, deux
fois, trois fois. On va aller s'obstiner pour le choix d'école, pour l'empêcher
de voyager. Ultimement, le jugement va être rendu, mais ultimement, à chaque
fois, c'est des frais. Et ce n'est pas dans tous les cas où on peut demander
une provision pour frais, là. À l'heure actuelle, c'est seulement pour les
matières alimentaires, et les tribunaux ne vont pas nécessairement avoir le...
cette violence-là en termes de... En droit de la famille, elle n'est pas
nécessairement perçue alors que, maintenant, le tribunal va avoir l'obligation
de le considérer. C'est parfait.
M. Jolin-Barrette : Sur
la question de la composition du patrimoine d'union parentale, on a le
patrimoine familial qui comprend, bon, les maisons, bien, les résidences, les
autos, les meubles, les... les régimes de retraite également, les REER, tout
ça. Dans le patrimoine de l'union parentale, il y a la résidence familiale, les
automobiles, les meubles, la résidence familiale. On a exclu les régimes de
retraite ou les fonds de pension et les REER. Qu'est-ce que vous pensez de
cette exclusion-là?
Mme Schirm (Sylvie) : En
fait, l'exclusion du fonds de pension et des REER, je peux comprendre pourquoi
on a fait ça, dans le sens que ce n'est pas nécessairement un actif qui va être
partageable immédiatement. Alors, si je prends un fonds de pension du RREGOP,
par exemple, qui sera partageable, ça va aller dans un CRI. Alors, la personne
ne peut pas nécessairement, sauf acheter une rente viagère, mais ne peut pas
immédiatement avoir accès. Donc, si on tient compte que les gens vont prendre
leur retraite à 65 ans, par exemple, c'est sûr que rendu là...
Mme Schirm (Sylvie) : ...ce
bien-là n'impacte pas sur la vie des enfants, parce que ces sommes-là ne sont
pas disponibles. Le REER, c'est presque la même chose, parce qu'on sait que...
c'est un REER, on a un impact fiscal sérieux. Alors, à notre avis, la question
des fonds de pension, des REER n'est pas une problématique qu'il ne soit pas
exclu. Dans la résidence secondaire, ça, on pourrait essayer de se
demander : Est-ce qu'on doit l'inclure ou non? Mais on considère aussi,
puis on a eu beaucoup de discussions au cabinet, que c'est... dans le fond,
qu'est-ce qu'on cherche, c'est de protéger le quotidien des enfants. C'est
quoi? La maison, les voitures, les meubles. Est-ce que la résidence secondaire
fait partie du quotidien? Pas nécessairement. Est-ce que c'est possible de
demander indirectement une compensation lors de la prestation compensatoire?
Oui. Est-ce que c'est encourager les gens de de comprendre c'est quoi, la
copropriété? Parce qu'on parle des résidences secondaires qui ne sont pas en copropriété.
Alors, je n'ai pas nécessairement une problématique là que c'est la résidence
secondaire ne soit pas dans l'union... dans le patrimoine de l'union parentale.
M. Jolin-Barrette : Peut-être
une sous-question là-dessus. Hier, ça nous a été soulevé. Supposons une famille
a un appartement à Montréal, c'est leur résidence familiale, O.K.? Mais la
famille a aussi... Bien, la famille... M., supposons, a un chalet, puis, à
chaque fin de semaine, ils sont au chalet. Donc, ils ne sont pas propriétaires
de la résidence familiale, mais il y a un chalet. Est-ce que, là, votre
réponse...
Mme Tremblay (Marie-Elaine) : Non,
elle ne diffère pas, la réponse, parce que l'idée, c'est qu'on dit : Il ne
faut pas... Comme vous l'avez bien dit, l'objectif, ce n'est pas de marier de
force les Québécois. L'idéal, c'est de protéger l'environnement immédiat de
l'enfant en cas de rupture. On le voit, là, Mme qui restait à la maison, qui
n'a pas de revenu. Demain matin, elle est sortie de la maison parce qu'elle ne
lui appartient pas. C'est ça qui va affecter l'enfant. Le fait qu'il n'ait pas
accès au condo en Floride, au chalet, l'enfant va toujours continuer d'y avoir
accès avec son autre parent, mais c'est l'immédiat qui est protégé. Et ça...
Selon nous, ça met en place les protections nécessaires pour l'enfant, sans
brimer la liberté contractuelle et sans forcer un mariage à des Québécois qui
n'en voudraient pas.
M. Jolin-Barrette : O.K.
Peut-être une dernière question avant de céder la parole à mes collègues.
Qu'est-ce que vous pensez du fait qu'on vient insérer une prestation
compensatoire dans le cadre du régime d'union parentale et qu'on permet une
provision, notamment pour frais en lien avec la prestation compensatoire?
Mme Tremblay (Marie-Elaine) : Bien,
la provision pour frais, c'est une merveilleuse idée parce que c'est un recours
qui est extrêmement onéreux et c'est malheureusement la partie financièrement
vulnérable. Donc, souvent on a un recours où on se dit, à l'heure actuelle, le
recours enrichissement injustifié pourrait avoir gain de cause, mais la partie
n'est juste pas capable de le financer. Alors, ça, pour pouvoir aller chercher
une compensation, c'est merveilleux. On salue vraiment cette disposition-là.
Le... Tout ce qui est la prestation
compensatoire qui est prévue, le seul problème qu'on a avec ça, c'est l'absence
de la méthode de calcul, en fait. Alors que ce que la Cour d'appel a fait, et
ça a été confirmé récemment encore, elle a intégré la façon de calculer la
valeur accumulée, là, la co-entreprise familiale. Et ce que nous, on considère,
c'est qu'on se dit : Bien, est-ce que véritablement... Parce qu'il faut...
il faut se rappeler que la valeur reçue, lorsqu'on compensera avec ce
calcul-là, ce sera toujours le moindre de l'enrichissement ou de
l'appauvrissement. Donc, j'ai entendu, là, d'autres... en commission
particulière, j'ai entendu des commentaires à l'effet que, par exemple, si une
ingénieure arrêtait de travailler, on pourra lui compenser son revenu
d'ingénieure. Non, parce que, si elle a gardé les enfants, l'enrichissement qui
a été reçu, c'est la valeur d'une gardienne ou d'une nanny. Donc, ce n'est pas
le salaire de l'ingénieur. Si moi, je gagne 500 000 $
et que j'arrête de travailler pour m'occuper de mon enfant, mais que la nanny
aurait eu 30 000 $
par année, le moindre des deux, c'est le 30 000 $
par année. Et ça, en ce sens-là, parce que la valeur accumulée, la
co-entreprise familiale, cette méthode de calcul là est importée dans notre
droit. dans... en jurisprudence par les tribunaux, ça a été confirmé par la
Cour d'appel, bien là, ça, ça représente un certain recul. Et donc il va y
avoir des conjoints de fait sans enfant qui vont toujours pouvoir bénéficier
d'une plus grande compensation. Évidemment, ça va toujours en lien avec
l'enrichissement, là, mais donc et souvent l'intention des parties, si je
demeure à la maison pour m'occuper des enfants, bien, ce n'est pas
nécessairement juste de me faire compenser parce que je n'ai pas travaillé,
c'est souvent une des intentions communes, un projet commun. Donc, le seul
bémol qu'on a, c'est ça. Est-ce qu'il n'y a pas une certaine régression au
niveau de la compensation financière qui, normalement, règle générale est
beaucoup moins importante lorsqu'on calcule avec la valeur reçue que la valeur
accumulée.
Mme Schirm (Sylvie) : On
tient compte, par exemple, qu'ici il y a patrimoine d'union parentale, par
exemple, alors que, dans le cas d'enrichissement injustifié, il n'y a rien,
jusqu'à date, les conjoints de fait n'avaient accès à aucun partage de quoi que
ce soit. Alors, c'est sûr que c'est considéré. On considère aussi qu'on... on
ne partagera pas deux fois le même bien dans ce contexte-là. Cependant,
effectivement, c'est un...
Mme Schirm (Sylvie) : ...un
certain recul qu'on constate. On comprend que c'est importé du common law, on
comprend les principes, mais on comprend aussi dans le... la vie de tous les
jours, dans nos dossiers, quel est l'impact que cela peut avoir.
Mme Tremblay (Marie-Elaine) : Parce
que même quand on parle de l'union parentale, normalement, c'est à la suite. Le
tribunal va constater l'enrichissement, ensuite il va dire : Parfait.
Quelle méthode de calcul est ce que j'emploie pour compenser, pour déterminer
l'indemnité? Et une fois que l'indemnité est déterminée, là, je vais déduire
les bénéfices déjà reçus par la personne qui demande l'indemnité. Donc, c'est
là que va entrer en ligne de compte l'union parentale. Si madame, dans mon
exemple, a déjà reçu la moitié de la maison, la moitié de la voiture, la moitié
des meubles, ça va être déduit. Donc, si déjà on part avec un calcul qui est
une valeur reçue, qui devrait être un calcul, déjà une indemnité plus petite,
et qu'en plus on déduit l'union parentale, le patrimoine, bien, c'est là que ça
nous inquiète.
• (11 h 50) •
Le Président (M.
Bachand) :Merci. Le temps file, il reste
deux minutes à Mme la députée de Charlevoix—Côte-de-Beaupré.
Mme Bourassa : Bon, je vais
devoir choisir dans mes questions. J'avais trop de questions à vous poser. Eh
bien, juste d'abord, un petit commentaire. Tu sais, tout à l'heure, vous disiez
que, bon, ça va s'appliquer en juin 2025, mais, et c'est mon cas, on a eu la
belle discussion avec mon conjoint, on va pouvoir quand même, les couples qui
ont eu des enfants avant cette date-là, adhérer à une procédure simplifiée, je
pense que c'est important aussi de le mentionner.
Mais rapidement, moi, je constate dans mon
entourage qu'il y a peu de gens qui ont des testaments et j'aimerais savoir,
selon votre pratique, est-ce que ça porte souvent à des situations
problématiques? Et le fait qu'on ajoute avec le... le p.l. la permission
d'hériter dans le cas où il n'y aurait pas de testament, qu'est ce que ça peut
faire comme différence?
Mme Schirm (Sylvie) : Écoutez,
je pense que le problématique qui existe et que ça soit au niveau du testament,
ou au niveau du contrat de vie commune, ou au niveau de l'organisation
financière du couple, c'est que les Québécois sont des romantiques et ils ne
veulent pas parler de rupture. Alors, organiser sa vie en tant que conjoint de
fait, financièrement ou légalement, ce n'est pas un réflexe naturel, ce n'est
pas quelque chose que les Québécois vont faire automatiquement. Alors, c'est
certain que le testament, c'est quelque chose qui est important de faire, je
pense qu'on le sait tous. Est-ce que tout le monde le fait? Non. Est-ce que
cela fait une certaine protection, au moins pour le conjoint, après... après un
an? On n'est pas en désaccord avec cette approche-là, mais on pense aussi que
qu'est-ce qui est vraiment important, je ne suis pas la seule à le dire, c'est
une campagne de sensibilisation. Puis essayer aussi de faire comprendre aux
gens : Vous devez prendre votre vie un peu en main et faire certains choix
ou en discuter, même si ce n'est pas ça que les gens veulent faire. C'est ça,
le gros défi. Ce n'est pas le fait qu'on ne donne pas d'informations, que ce
n'est pas accessible, que ça coûte trop cher, le fait, c'est que les gens ne
veulent pas en parler. Ils sont ensemble, ils sont heureux, ils ne veulent pas
nécessairement parler de la rupture. C'est ça qui le défi dans tout ça.
Mme Bourassa : Donc, ça fait
en sorte que vous, ce que vous avez vu, c'est arrivé quand même souvent qu'il y
a des gens qui n'avaient pas de testament, puis là, finalement, le conjoint ne
peut pas hériter, là, ça crée de la chicane, j'imagine.
Mme Tremblay (Marie-Elaine) : Ou
qui pensait être protégé, qui finalement ne l'était pas. Alors, cette
disposition-là, c'est une excellente nouvelle. Oui.
Le Président (M.
Bachand) :Merci beaucoup. Mme la députée
de Westmount Saint-Louis pour 8 min 49 s.
Mme Maccarone : Merci, M. le
Président. Bonjour, maîtres. Merci de votre présence aujourd'hui. Je sais que
vous allez nous aider à... à trouver une solution, parce que vous, vous avez
dit que vous avez eu beaucoup de débats à l'intérieur de votre cabinet. Puis,
comme vous avez constaté, si vous suivez les travaux, on a plusieurs
d'opinions.
Moi, je souhaite jaser avec vous par
rapport à la catégorie des enfants. Vous l'avez fait un peu une allusion lors
de vos remarques. Puis si, par exemple, je... je fais référence à la
présentation qu'on a eue de professeures Lavallée, Belleau, eux ils parlent de
les mieux protéger des parents mariés, les oubliés, ceux qui sont nés des
parents d'unions de fait avant le 31 juin 2025, et évidemment les enfants
qui sont nés lors de l'adoption du projet de loi n° 56, si ça reste
dans... dans sa forme actuelle. Je souhaite vous entendre là-dessus par rapport
à les solutions, parce que j'ai vu aussi dans vos recommandations, vous parlez
d'un patrimoine, le patrimoine et pension alimentaire, chose qui n'est pas
incluse dans le projet de loi. Puis, à l'intérieur de votre réponse, quand
vous... vous allez nous clarifier le sort des femmes aussi à l'intérieur de
ceci, parce qu'évidemment on ne peut pas négliger que la situation économique
de l'enfant est directement liée avec la situation économique du parent. Ça
fait que est-ce que nous sommes en train aussi de créer des catégories de... de
parents, de femmes entre autres? Parce qu'on sait que la situation n'est pas
nécessairement égalitaire pour les femmes en comparaison avec les hommes. C'est
quoi les recommandations? Que devons-nous faire pour s'assurer qu'on protège
autant les enfants que les femmes à l'intérieur d'une... des... peut-être
des... de bonifications, mais l'adoption de la loi?
Mme Schirm (Sylvie) : Mais je
pense qu'il faut aussi être conscient de la... du changement de notre société qui
évolue à une vitesse fulgurante à tous les niveaux. Mais quand je regarde la
situation en 1989, et je suis assez vieille pour m'en rappeler, là, c'est... je
me souviens très bien que toutes les renonciations au patrimoine familial, le
débat sur le patrimoine familial avait été fait, c'étaient dans des mariages
traditionnels. C'était des femmes qui, à l'époque, restaient à la maison...
Mme Schirm (Sylvie) : ...la
maison avec les enfants, M. travaillait. Mme n'était même pas sur le... sur le
marché du travail. On s'entend que les Québécoises, là, ils sont sur le marché
du travail. Ils... Cela a énormément modifié, et les femmes ne sont plus dans
cet état. Puis je ne dis pas que c'est... c'est parfait, mais je ne crois pas
qu'on a cet état de vulnérabilité qu'on avait en 1989, comparé à aujourd'hui.
Alors, je peux comprendre pourquoi... En même temps, à cause du fait que... du
refus des Québécois de se marier pour toutes sortes de raisons, parce qu'on
peut en parler longtemps sur les raisons, mais cela fait en sorte que les gens
ont fait d'autres choix. Et donc il faut quand même permettre, quelque part
dans tout ça, cette liberté contractuelle. On n'est pas contre ça. On n'est pas
contre le fait qu'on ne pense pas que toutes les femmes sont vulnérables, ce
n'est pas nécessairement le cas. Et on voit dans notre pratique de plus en plus
de dossiers où Mme gagne plus de sous que monsieur. Alors, il faut quand même
mettre tout ça dans le contexte.
Donc la pension alimentaire, c'était une
suggestion de... de... que moi et d'autres on a comme pensé au lieu d'un
patrimoine d'union parentale et au lieu d'une prestation compensatoire. Parce
que selon... selon moi et pas selon mon associée...
Mme Tremblay (Marie-Elaine) : Ce...
Ce n'est pas mon avis.
Mme Schirm (Sylvie) : C'est
ça. ...c'est plus simple. C'est plus simple, on connaît... C'est plus vite.
C'est plus... C'est une façon plus efficace, mais on comprend que ce n'est pas
le choix du législateur et on ne veut pas non plus empêcher de quelque façon que
ce soit l'avancement de ce projet de loi là ni le fait d'avoir une protection
quelconque pour les conjoints de fait.
Mme Maccarone : La liberté
contractuelle, on a aussi entendu parler beaucoup, pleinement, par des gens qui
passent une audition. La majorité des Québécois ne savent pas sur quel régime
ils sont mariés. Ils ne savent pas leurs droits ou la différence entre je suis
mariée ou je suis conjoint de fait, puis ils pensent qu'ils ont accès à les
mêmes droits puis les mêmes protections. Puis on a aussi entendu qu'il y a
seulement 4 % des Québécois qui ont eu recours à des contrats de vie
commune.
Alors, que devons-nous faire pour
s'assurer, si, mettons... Parce que vous aussi que vous parlez d'opting out,
par exemple, comme une mesure qui pourrait être mise en place. Comment
allons-nous s'assurer que les Québécois sont informés, puis, quand on parle de
la liberté contractuelle, bien, que vraiment que ça s'applique?
Mme Schirm (Sylvie) : Mais
la solution, c'est la consultation juridique. Alors, ici, dans le projet de
loi, on parle d'un retrait par acte notarié. Nous, qu'est-ce qu'on propose, et
c'est dans notre mémoire, c'est qu'il y ait forcément une consultation
juridique individuelle du couple, de chacun séparément, avant de faire quelque
retrait que ce soit, ou de quelque renonciation que ce soit du patrimoine de
l'union parentale. Et nous croyons que ce... ça, cela va forcer les gens aussi
à connaître leurs droits, parce qu'il n'y a rien comme une consultation
juridique pour qu'on puisse faire le tour de la question sur mesure de cette
personne-là, parce que pas toutes les familles sont pareilles, pas toutes les
situations sont pareilles. Et cela va leur donner les informations dont ils ont
besoin pour ensuite faire les choix. Je peux décider de renoncer à tout, mais
au moins j'ai eu l'information et le conseil, je l'ai fait en connaissance de
cause. On a vu les renonciations du patrimoine familial en étant annulé à cause
du fait... par des juges, là, par des jugements, à cause du fait qu'un... parce
que la personne n'avait pas eu une consultation juridique, ne connaissait pas
ses droits. Alors, c'est pour ça que c'est important qu'on puisse avoir cette
consultation-là dans le contexte du projet de loi qui existe.
Mme Maccarone : Mais
l'accessibilité de ceci?
Mme Schirm (Sylvie) : Aujourd'hui,
il y a l'aide juridique... il y a... il y a... il y a différentes façons de
rendre ça accessible, une consultation n'est... est souvent un très bon
investissement.
Mme Maccarone : Je souhaite
vous entendre par rapport à le 30 jours d'attribution de la résidence
familiale. Je sais que vous avez fait un peu référence. Vous parlez de
120 jours. Il y a autres personnes qui ont dit qu'on ne devrait pas
avoir... Me Kirouac, par exemple, zéro date. Je connais plein de familles qui
sont séparées et puis ils n'ont pas choisi une date... ou à cause de le sort de
l'enfant ou leur situation familiale, ils partagent la maison une semaine, une
semaine pour éviter de déplacer les enfants. Pourquoi 120 jours? Pourquoi
pas...
Mme Schirm (Sylvie) : Ça,
c'est pour la résidence, pour la protection de la résidence familiale, mais
pour le... l'autre article, là, qui prévoit le... Je ne veux juste pas dire
n'importe quoi, là. Les mesures de protection... attendez, c'est pour le...
c'est ça, 27, les demandes relatives à l'attribution de la propriété, du bail,
le droit d'usage, on demande 30 jours. Ça, c'est énormément, c'est
passé... c'est 30 jours, ce n'est rien. Et c'est ce... ce délai de 521.27
que nous, on demande d'annuler, qu'il n'y a aucun délai, comme c'est le cas
actuellement. Les gens ne sont pas forcés de prendre une demande de divorce,
ils ne sont pas forcés de faire une demande de garde ou de pension alimentaire.
Mme Maccarone : J'ai du temps
peut-être pour une dernière question. Il n'y a personne à date qui parle de...
Mme Maccarone : ...pour des
enfants en situation de handicap suite à une rupture pour des conjoints de
fait, qui sont peut-être majeurs. Devons-nous prévoir quelque chose? Je sais
que ça ne fait pas partie de ce que vous avez constaté dans votre mémoire, mais
moi, je souhaite être alimentée là-dessus. Qu'est-ce que nous devons faire pour
protéger le conjoint et les enfants?
Mme Schirm (Sylvie) : L'enfant
majeur handicapé a droit à une pension alimentaire...
Mme Maccarone : Même si...
Mme Schirm (Sylvie) : ...à
l'heure actuelle, à l'heure actuelle.
Mme Maccarone : Même si c'est
des conjoints de fait.
Mme Schirm (Sylvie) : Oui,
aucun changement.
• (12 heures) •
Mme Tremblay (Marie-Elaine) : Parce
que, quand vous parlez des différentes catégories d'enfant, il faut comprendre
que ce n'est pas vrai, ça ne crée pas des différentes catégories d'enfants. Les
enfants ont tous les mêmes droits. Si le traitement aux parents est différent,
selon le régime juridique qu'ils... auquel ils ont décidé de s'assujettir ou
non. Donc, moi, je ne suis pas d'accord à l'effet que ça crée des catégories
d'enfant différentes, je pense que, juridiquement, ce n'est pas vrai. Mais,
dans les faits, est-ce qu'un parent qui a un enfant handicapé... Là, il y a
plein de situations, on en voit plein nous-mêmes. On en a, des clients, dans
ces situations-là. Il y a beaucoup de subventions qui sont obtenues en fonction
de la garde. Il y a... il y a plusieurs modalités qui peuvent être mises en
place. Puis tous les frais additionnels, ce sont considérés un petit peu comme
des frais particuliers qui sont partagés entre les parents. Donc, si le parent
qui n'a pas la garde, entre guillemets, parce qu'il est majeur, la garde de ce
parent-là est très fortuné, bien, il va avoir des recours pour pouvoir avoir
accès à ces argents-là quand même. Donc, le projet de loi ne change rien à
cette situation-là.
Mme Maccarone : Et si le
diagnostic se passe, mettons, quand l'enfant a 17 ans, par exemple, est-ce que
c'est les mêmes...
Mme Tremblay (Marie-Elaine) : C'est
les mêmes règles, ça ne change rien. L'enfant devient indépendant
financièrement lorsqu'il atteint la majorité, à moins qu'il ait une raison de
ne pas l'être. Il est encore à l'école à temps plein, il a un problème de santé
mentale, un problème de santé physique, etc., auquel cas il demeure un enfant
dépendant.
Mme Maccarone : Votre opinion
sur le statut de conjoint de fait dans l'absence d'un enfant.
Mme Tremblay (Marie-Elaine) : Moi
je comprends... Je suis une une grande défenderesse... défendeuse... défenseuse
du droit cvil, de la liberté contractuelle et j'adhère au principe de ne pas
forcer le mariage entre des gens qui ne veulent pas se marier. Donc...
Le Président (M.
Bachand) :Merci, merci. Je dois céder la
parole au député de Saint-Henri-Sainte-Anne pour 2 minutes, 56.
M. Cliche-Rivard : Merci
beaucoup pour vos excellentes présentations, pour votre mémoire. J'ai une
petite question, un petit volet qui m'a attiré l'attention quand même sur les
déductions admises au patrimoine de l'union parentale. Vous en parlez dans
votre mémoire, si je ne m'abuse, là, sur le volet de la contestation
constitutionnelle possible. Pouvez-vous nous en glisser un mot?
Mme Schirm (Sylvie) : Bien,
s'il y a... en tout cas, ça, c'est les rêves des plaideuses, hein, on pense à
tous les litiges possibles, toutes les affaires qu'on peut plaider à la cour.
Alors, est-ce que... La question, c'est : Quand on est marié avec les
règles du patrimoine familial actuel, si on a des épargnes qui sont utilisées
pour l'achat d'un bien du patrimoine, on ne le récupère pas, hein? Alors, on ne
le récupère pas parce que ce n'est pas bien du patrimoine. Et ça a été plaidé,
tout le monde... tout le monde trouve ça injuste, mais peu importe, ça ne
marche pas. La loi est là, la cour d'appel a tranché là-dessus, on vit avec.
Alors, présentement, dans le projet de loi,
les conjoints de fai peuvent... Ces sommes-là sont exclues. Donc, si j'utilise
100 000 $ de mes épargnes pour acheter la résidence, bien, je vais la
récupérer. Alors, est-ce qu'il y a une certaine, puis on n'est pas des
constitutionnalistes, loin de là, mais est-ce qu'il y a une certaine
discrimination? Est-ce qu'un couple... Est-ce que quelqu'un qui se divorce peut
venir dire : Bien, moi, je souffre de ça... alors que les conjoints de
fait en bénéficient6 C'est possible.
Mme Tremblay (Marie-Elaine) : On
est d'accord avec le fait de permettre les épargnes comme déductions. C'est
juste qu'il faudrait arrimer le patrimoine familial.
Mme Tremblay (Marie-Elaine) : Je
comprends qu'il n'y a pas de changement au niveau des gens mariés, ni de
«opting out» du patrimoine, ni rien qui a été discuté dans le projet de loi.
Alors, on n'est pas allé plus loin que ça, mais on a soulevé : Est-ce que
c'est une possibilité? Peut-être.
M. Cliche-Rivard : Ça fait
que quelqu'un pourrait avoir un avantage de ne pas se marier puis de rester
dans l'union... dans l'union parentale, dans ce contexte-là. C'est ce que
vous...
Mme Tremblay (Marie-Elaine) : Uniquement
par rapport...
Mme Schirm (Sylvie) : Par
rapport à ça, c'est certainement un avantage, oui.
M. Cliche-Rivard : Exactement.
Puis là vous dites que maintenir la dualité ou la double existence pourrait
constituer une discrimination sur l'état matrimonial. C'est ce que vous
soumettez.
Mme Tremblay (Marie-Elaine) : Peut-être,
mais on voit un canevas où les gens pourront...
Mme Schirm (Sylvie) : On n'a
pas fait de recherches là-dessus. On n'est pas des avocats en droit
constitutionnel, c'est quelque chose à regarder. Mais est -e que c'est
possible, parce qu'il y a.... c'est quand même un écart entre les gens... les
conjoints de fait puis les gens mariés.
M. Cliche-Rivard : Il y a
l'affaire de votre 90 jours pour le «opt out». Vous dites que, dans l'année qui
suit la naissance de l'enfant, vous...
Mme Tremblay (Marie-Elaine) : On
dit que 90 jours, c'est trop court, la mère vient d'accoucher. C'est un moment
assez instable, assez vulnérable. On propose que ce soit fait dans les 12 mois.
Puis on propose aussi que cet article-là précise, parce que c'est permis de
soustraire une partie d'un bien, on propose que ça aussi, ce soit clair que ce
soi... que ça doit être fait par acte notarié.
M. Cliche-Rivard : Puis ça
doit être fait, selon vous...
Mme Tremblay (Marie-Elaine) : Parce
qu'à l'heure actuelle, la façon que nous, on lit l'article, c'est seulement si
on veut retirer le bien au complet...
M. Cliche-Rivard : Au complet
qu'il y a l'acte notarié...
Mme Tremblay (Marie-Elaine) : ...mais
si on voulait prévoir autrement, par exemple, ce ne sera pas 50-50, la maison,
ce sera 70-30. La lecture actuelle ne nous permet pas...
12 h (version non révisée)
Mme Tremblay (Marie-Elaine) : ...conclure
que ça prend un acte notarié. Alors, on pense que c'est important de le
préciser.
M. Cliche-Rivard : Merci
bien.
Le Président (M.
Bachand) :Merci beaucoup. M. le député de
Jean-Talon, pour 2 min 14 s, s'il vous plaît.
M. Paradis : Merci beaucoup
pour votre mémoire bien ciselé et les réponses que vous nous donnez aujourd'hui,
qui précisent un peu votre pensée. Et moi, je vais être un petit peu dans cette
optique-là. J'ai bien noté que, sur le moment d'entrée en vigueur du projet de
loi et son application, vous parlez d'un certain nombre d'hypothèses, avec une
illustration, mais vous ne semblez pas prendre position. Vous nous suggérez :
Si le ministre changeait d'avis, il devrait remonter à la date de naissance de
l'aîné des enfants communs déjà nés d'unions de conjoints de fait. Est-ce que
vous pouvez préciser un peu ce que vous pensez du moment d'entrée en vigueur de
la loi?
Mme Schirm (Sylvie) : Mais c'est
parce que c'est... C'est... La difficulté qu'on a, c'est le fait de dire :
Si on l'applique... C'est parce qu'on comprend les deux arguments. Et,
peut-être, c'est notre déformation professionnelle, là, mais de... c'est notre
travail, quand on prend un dossier, de penser qu'est-ce que l'autre partie va
venir nous dire. Alors, on voit les deux côtés.
Donc, est-ce que, d'un côté, on ne veut
pas imposer ce régime-là à des gens qui ont déjà des enfants, parce que c'est
une nouveauté? Et est-ce qu'on ne veut pas imposer ça parce qu'on veut leur
donner peut-être aussi le temps de s'organiser? Ça, c'est un argument qui est
valable. Est-ce que, d'autre part, on veut permettre à... Parce que je
comprends que l'exemple que nous avons donné, c'est en effet une problématique
avec deux enfants du même... des mêmes parents, mais à différents moments.
M. Paradis : Puis, si vous
préférez ne pas vous prononcer, là...
Mme Schirm (Sylvie) : Non,
non, c'est correct, mais...
M. Paradis : ...il n'y a pas
de problème. Mais c'est parce que je trouvais très intéressant la perspective
que vous ameniez... très intéressante, puis là j'ai bien entendu une des
dernières réponses de votre collègue, qui disait : Bien, on est en faveur
de la liberté contractuelle, de la préservation du droit civil, et vous
mentionnez bien que c'est une approche différente de celle, à l'époque, de la
loi n° 146. Donc, est-ce que vous préférez l'approche adoptée dans le projet de
loi ou l'approche de 146?
Mme Schirm (Sylvie) : Je
pense que ce n'est même pas là la... avec respect, c'est même... c'est... La
question n'est pas là. La question, c'est : Quelles sont les
problématiques qui vont surgir?
Mme Tremblay (Marie-Elaine) : C'est
comme ça qu'on l'a regardé, nous.
Mme Schirm (Sylvie) : C'est
comme ça qu'on le regarde.
Mme Tremblay (Marie-Elaine) : En
pratique, qu'est-ce qu'il pourrait y avoir comme problèmes?
Mme Schirm (Sylvie) : En
pratique, quelqu'un vient nous voir, c'est quoi qui va arriver? Alors, l'exemple
qu'on a donné dans le cas de figure, là, c'est justement ça. Quelqu'un qui a
deux enfants nés dans deux... à deux périodes différentes, est-ce qu'ils vont
avoir le même... Si la réponse, c'est que les enfants n'ont pas exactement
accès aux mêmes droits, alors on a un problème.
Le Président (M.
Bachand) :Sur ce, merci beaucoup d'avoir
été avec nous, ça a été un grand privilège.
Et je suspends les travaux quelques
instants. Merci.
(Suspension de la séance à 12 h 07)
(Reprise à 12 h 10)
Le Président (M. Bachand) :À l'ordre, s'il vous plaît! La commission reprend ses
travaux. Ça me fait plaisir d'accueillir nos prochains invités, non...
invités... pardon, dont Me Suzanne Pringle. Merci beaucoup d'être ici. Alors,
comme vous savez, vous avez 10 minutes de présentation. Après ça, on aura
une période d'échange avec les membres. Mais je vous inviterais d'abord à
présenter les gens qui vous accompagnent, s'il vous plaît.
Mme Pringle (Suzanne H.) : C'est
ce que j'allais faire. Alors, M. le ministre Jolin-Barrette est-il... oui,
est-il ici? Oui. M. le Président, membres de la commission, je vous présente
tout d'abord Me Stéphane Pouliot, qui est mon associé, et Me Aurélie Ouellette,
qui est une avocate chez Pringle et Associés, et je voulais que vous ayez trois
générations d'avocats. Je ne vous dis pas qui est qui.
Alors, je... Lors de la dernière grande
réforme en droit de la famille, en 1980, j'étais en première année de droit à
l'Université de Montréal. Je suis présentement dans ma 41 ᵉ année de
pratique. Le 5 février 2002, il y a 22 ans, les procédures familiales
et constitutionnelles du dossier que les médias ont appelé Éric et Lola, dans
lequel j'évolue depuis le début, étaient déposées. Le jugement de la Cour
suprême du Canada sur l'aspect constitutionnel a été rendu en janvier 2013.
Plusieurs promesses de divers politiciens ont été faites par la suite, mais
elles sont malheureusement restées lettre morte.
Je souligne votre courage, M. le ministre,
pour le troisième volet de la réforme du droit de la famille, puisque, bien que
nécessaires, les projets de loi de société comme celui-ci dérangent. Je suis
honorée d'avoir été convoquée pour vous transmettre mes commentaires sur le
projet de loi n° 56. Je prends cette responsabilité très au sérieux.
Je salue tout d'abord les nouvelles
dispositions très positives de ce projet de loi, soient la protection de la
résidence familiale des conjoints de fait vivant en union parentale durant
l'union et suite à la rupture, la création d'un patrimoine d'union parentale,
le choix de pouvoir s'exclure de ce patrimoine d'union parentale ou d'en
modifier le contenu, la possibilité de réclamer une prestation compensatoire
pour des conjoints de fait vivant en union parentale s'étant appauvri et
surtout, à cet égard aussi, la possibilité de pouvoir réclamer une provision
pour frais pour pouvoir exercer ce recours, et enfin l'octroi de
dommages-intérêts en cas de violence judiciaire et finalement, je fais un lien
entre ces deux-là, la recommandation que la juge en chef privilégie, la prise
en charge d'un dossier par un juge unique pour litiges... les litiges en droit
de la famille.
Le projet de loi n° 56 navigue entre
deux récifs, celui de protéger l'intérêt des enfants et celui de vouloir
respecter la liberté de choix et l'autonomie de la volonté de ceux qui sont
déjà conjoints de fait et ont choisi de ne pas être encadrés par les règles du
mariage. Nous comprenons que le projet législatif est de protéger l'intérêt des
enfants par la constitution d'un patrimoine d'union parentale ciblé et une
protection de la résidence familiale, auxquels s'ajoute une possibilité de
compensation pour le conjoint qui s'est appauvri durant l'union parentale en
cas de rupture.
Je me suis attardée sur la possibilité
d'atteindre ces objectifs législatifs en analysant les articles du projet de
loi, tels que rédigés. En lien avec le projet de loi... pardon, avec le projet
législatif choisi, je pense que certaines dispositions doivent être améliorées.
En voici quelques-unes : l'inclusion de toutes les résidences de la
famille dans la composition du patrimoine familial. Pour moi, il est clair que
la stabilité des enfants passe par tout leur milieu de vie, ceux où ils sont
normalement, où sont normalement leurs amis, leur milieu, leur sécurité, donc
la résidence familiale et les résidences secondaires.
Ensuite, la modification du délai de
prescription des droits de protection de la résidence familiale qui devrait
être allongé. Je sais qu'il y a eu beaucoup de discussions sur cette question,
mais nous avons écrit, dans notre mémoire, que ce devrait être un minimum de
six mois plutôt que 30 jours de la fin de l'union. La loi prévoit que les
protections accordées, selon 401 à 407 du Code civil, subsistent durant
30 jours. Avec respect, c'est extrêmement court.
Aussi, le délai obligatoire de
30 jours pour présenter les demandes relatives à l'attribution d'un droit
relatif à la protection de la résidence familiale devrait, à notre avis, être
révisé puisqu'en pratique ce délai...
Mme Pringle (Suzanne H.) : ...est
irréaliste et fera nécessairement perdre des droits. On a mis un petit tableau
intéressant, enfin, moi, je le trouve intéressant, qui vous explique pourquoi
il faut pratiquement compter le nombre d'heures pour être capable de présenter
une demande en 30 jours. À cet égard aussi, vous l'avez déjà entendu, on
devrait rendre plus claire la... l'expression «la manifestation expresse ou
tacite de la volonté par l'un ou l'autre des conjoints, de mettre fin à
l'union». Je veux juste vous dire que j'ai déjà fait un procès de trois jours
sur la notion de fin de l'union. Il faut que ce soit clair parce qu'il y a des
gens assez créatifs.
Et, sur le fond, je pense qu'il doit y
avoir une modification fondamentale quant au seul mode de calcul de la
prestation compensatoire prévue à l'article 521.46. Je m'explique.
Présentement, le recours pour réclamer une prestation compensatoire n'est
ouvert qu'aux gens, aux conjoints mariés. Le conjoint de fait, qui alléguait
avoir enrichi... Les conjoints de fait qui alléguaient avoir enrichi leur
conjoint, utilisaient jusqu'à maintenant les recours en enrichissement
injustifié pour obtenir une indemnité. Vous en avez entendu parler, je suis
presque la dernière, vous en avez entendu parler beaucoup. La jurisprudence a
grandement évolué au Québec, quant au recours en enrichissement injustifié,
mais une chose est maintenant acquise et certaine, et c'est que tant la Cour
suprême du Canada que la Cour d'appel du Québec s'entendent sur le fait qu'il
existe maintenant deux modes de calcul de cette indemnité.
Et voici comment ça fonctionne. Je vous
parle d'un côté pratique parce que c'est ce qu'on fait. Le tribunal entend tout
d'abord la preuve et décide s'il y a lieu à une indemnité en fonction de la
preuve devant lui. Et, toujours en fonction de cette preuve-là, il peut tout
d'abord choisir entre l'indemnité calculée en fonction de la valeur des
services rendus, celle qu'on appelait autrefois le quantum meruit, travail, par
exemple, de comptabilité pour une entreprise, ça vaut combien de l'heure, c'est
facile à calculer. La deuxième méthode est celle de la valeur accumulée. Elle
vise une situation où les conjoints ont fait la preuve d'avoir vécu dans une
situation qui se qualifie de coentreprise familiale à laquelle ils ont tous les
deux contribué. Alors, le juge peut établir la contribution proportionnelle du
conjoint à la richesse accumulée durant l'union grâce aux efforts conjugués des
deux conjoints. Et ça se... ça se qualifie en termes de pourcentage de cette
valeur-là. Ces situations-là visent souvent le cas où un des conjoints, souvent
la mère, occupe... s'occupe surtout des enfants, de tout ce qui est domestique,
dans le but de donner plus de temps au père pour développer une entreprise. Ils
contribuent, chacun à leur façon, à l'atteinte d'un projet commun, et souvent,
à la rupture, le conjoint enrichi se trouve à conserver une part
disproportionnée de cette richesse, ce qui devient inéquitable.
Sur cette question, je vous soumets
respectueusement que le projet de loi n° 56... l'objectif visé par le
projet de loi n° 56 n'est pas atteint... n'a pas atteint l'objectif qui
est visé, donc, pour compenser les situations de coentreprise familiale. Sur
cette question, le projet de loi n° 56 est pour moi un recul préjudiciable
aux conjoints de fait. C'était la plus grande avancée en matière de droits des
conjoints de fait à la rupture, et le projet de loi vient l'amputer.
Je donne un exemple clair, qui est dans
notre mémoire, que je reprends rapidement. Dans le dossier droit de la famille 20-18-78,
que j'ai plaidé à la Cour d'appel du Québec, le juge Mongeon, confirmé par la
Cour d'appel en 2020, reconnaît le droit de notre cliente à une indemnité et
reconnaît que les conjoints ont vécu dans une situation de coentreprise. Il juge
que l'appauvrissement de notre cliente équivaut à la contribution
proportionnelle apportée à la richesse de son conjoint de 20 % de la
valeur accumulée de 17 millions, ce qui donne une indemnité de, nette, on
n'ira pas dans les détails, de 2.4 millions. S'il n'avait pas eu recours à
cette deuxième méthode de calcul de la valeur accumulée, on aurait dû reprendre
tout ce que notre cliente a fait pour la famille, de prouver combien chaque
service rendu... de les décrire, de les démontrer, c'est l'ensemble des travaux
domestiques, s'occuper des enfants, des repas, de l'entretien de la maison, du
voiturage, des activités, des médecins, des écoles, des sports, et prouver
combien ça vaut, avec des experts, avec, évidemment...
Mme Pringle (Suzanne H.) : ...la
preuve que ça requiert, on revient des années-lumière en arrière, alors que les
conjoints eux-mêmes avaient décidé de vivre différemment. Il est... Il faut, à
notre avis, définir la question, cette notion d'appauvrissement et rétablir la
méthode de la valeur accumulée comme mode de calcul, parce qu'une mère
appauvrie, c'est un enfant appauvri. L'appauvrissement, dans cette situation,
pour notre cliente, c'est l'ensemble des efforts fournis à accumuler la
richesse d'un... pardon, de son conjoint et... Alors, il me semble juste,
équitable que l'indemnité qui servira à compenser l'appauvrissement devrait
s'arrimer à la valeur de la richesse en proportion de la contribution fournie
par cette personne-là.
• (12 h 20) •
Le Président (M.
Bachand) :Merci, Me Pringle... On est
rendu à la période d'échange. M. le ministre, s'il vous plaît.
Mme Pringle (Suzanne H.) : D'accord.
M. Jolin-Barrette : Oui. Me
Pringle, Me Pouliot, Me Ouellet, merci d'être avec nous pour participer aux
travaux de cette commission parlementaire là. Dans un premier temps, j'ai cru
déceler de votre mémoire que, dans un monde idéal, vous êtes d'accord avec le
fait que ce soit le même juge qui suit le dossier pour les justiciables.
Mme Pringle (Suzanne H.) : Je
suis tout à fait d'accord avec ça, puisque la notion de violence judiciaire,
premièrement, quand les gens commencent à parler de quelque chose, c'est parce
que, nous autres, on le voit depuis un moment, n'est-ce pas? Et il y en a
beaucoup, il y en a énormément. Et la seule chose que je vous dirai, puis mon
collègue va pouvoir ajouter quelque chose d'intéressant, je pense, là-dessus,
c'est que les ressources judiciaires sont telles que c'est tellement difficile.
Je comprends que la juge en chef se voit suggérer ça, mais j'ai de la
difficulté à voir que ça puisse se faire avec les ressources. Mais, Stéphane,
je pense que tu avais quelque chose.
M. Pouliot (Stéphane) : Et
c'est un point important pour moi à vous communiquer aujourd'hui, c'est que,
dans le projet de loi, le grand oublié est la protection de la jeunesse. Et la
violence judiciaire n'est pas seulement l'apanage à la Cour supérieure, mais à
la Cour du Québec également. Et il serait important, à notre avis, d'ajouter
également que ces dispositions-là s'appliquent en matière de protection de la
jeunesse, et évidemment qu'un seul juge puisse suivre le dossier du début
jusqu'à la fin.
M. Jolin-Barrette : Bien,
maître Pouliot, je note votre proposition. On va l'étudier parce que je trouve
que c'est une bonne proposition. Sur la question, justement, de la violence
judiciaire, là, pouvez-vous nous expliquer, dans le cadre de votre pratique, ce
que vous avez déjà constaté, vécu, observé, comment ça se manifeste?
M. Pouliot (Stéphane) : Ça se
manifeste dans un dossier où on est rendu à la cour presque à chaque deux
semaines, parce qu'une semaine on doit aller à la cour pour avoir le choix d'un
psychologue, parce que l'un des parents a fait une plainte à l'Ordre des
psychologues parce qu'il n'était pas d'accord avec le choix du psychologue.
Quand ce n'est pas le psychologue, c'est le dentiste. On veut aller en voyage,
c'est un feu roulant, on veut aller en voyage. On dit que le Mexique, c'est
dangereux. Cuba, c'est dangereux. Tous les pays sont dangereux. Toutes les
destinations sont dangereuses.
Et l'autre chose aussi, c'est que la
violence judiciaire, qu'est-ce qui est important de comprendre dans les
exemples, c'est qu'on demande plusieurs documents. Donc, on revient souvent à
la cour, on fait des interrogatoires. On nous livre des documents, des
centaines de pages. On nous livre des documents qui ne sont pas numérotés, qui
sont dans le désordre. Et ça, ça prend un juge attitré au dossier, parce qu'à
chaque semaine, quand on va se présenter en salle de pratique, c'est un nouveau
visage, c'est un nouveau juge, et le juge ne peut pas, qui est là, il est en
urgence. Imaginez une salle d'urgence dans un centre hospitalier, on règle les
urgences. On met un plasteur sur un problème. Donc, le juge qui est là, en salle
de pratique, ne peut pas arriver et prendre des décisions éclairées.
Mme Pringle (Suzanne H.) : Et
il ne connaît pas l'étendue de ce qui s'est fait.
M. Jolin-Barrette : Donc, que
ce soit en matière... lorsqu'il y a violence judiciaire, mais même pour des
dossiers réguliers, je vous le dis dans la mesure du possible aussi en fonction
des ressources disponibles, c'est un principe qu'on devrait tenter d'intégrer
dans notre droit familial ou en matière de protection de la jeunesse. Je sais
qu'en matière de protection de la jeunesse, ils essaient de le faire. Mais pour
le justiciable, c'est une bonne chose.
Mme Pringle (Suzanne H.) : Moi,
je suis tout à fait d'accord. Des fois, on n'est pas chanceux, mais c'est comme
ça.
M. Jolin-Barrette : Mais là,
vous savez, vous êtes peut-être la sixième ou la septième intervenante...
M. Jolin-Barrette : ...nous
dire : Quand on se présente à la cour, on n'a pas toujours le même
traitement. Donc, je...
Mme Pringle (Suzanne H.) : Ce
n'est pas ça que j'ai dit. J'ai dit : Des fois, on n'est pas chanceux. Et
ce que je veux dire par là, c'est, les gens étant des gens, des... l'homme
étant... j'utilise «homme», bon... il y a des gens qui ont beaucoup de
connaissances en droit de la famille, puis il y en a qui en ont moins, puis il
y en a qui le développent en arrivant, puis ils trouvent que c'est vraiment
intéressant, d'autres, moins.
J'ai déjà parlé... vous allez penser que
je suis un perroquet, là, mais j'ai déjà parlé souvent d'un tribunal unifié.
J'y reviens. Ce n'est pas dans mon mémoire, mais, je le dis tout le temps, il
me semble que ce serait quelque chose de tellement approprié, dans l'intérêt
non seulement des enfants, mais des justiciables et des avocats, des avocats
qui pratiquent dans ce domaine-là, et qui veulent que ça fonctionne, et que
leurs clients obtiennent satisfaction, obtiennent justice rapidement.
M. Jolin-Barrette : Avant
d'arriver au tribunal unifié en droit de la famille, vous dites : Écoutez,
des fois, on n'est pas chanceux. Est-ce que vous trouvez qu'il y ait... il
devrait y avoir davantage de formation, pour la magistrature, sur la question
du droit de la famille?
Mme Pringle (Suzanne H.) : Je
vais vous répondre par ce qui suit. C'est le pain et le beurre des juges, le
droit de la famille, parce que plus de 50 % des dossiers qui sont ouverts
dans les districts le sont en matière familiale. Et je pense, honnêtement,
qu'il y a certains juges en charge de la formation et ils y voient, en général.
Je n'ai pas été juge, et ça n'arrivera pas, et ceux que je connais qui le sont,
sont formés. Mais je pense qu'ils y voient, mais je ne sais pas à quelle
étendue. Mais il y a des notions, par exemple, disons, comme, certaines
notions, on doit les expliquer, comme la valeur accumulée. Ça a pris beaucoup,
beaucoup de ressources personnelles.
M. Pouliot (Stéphane) : Si
vous me permettez, je voudrais vous dire... Parce que vous nous parlez de la
formation des juges, mais vous avez les juges de la Cour du Québec en Chambre de
la jeunesse — tu sais, je veux dire, c'est les mêmes personnes, là,
qu'on parle — puis vous avez les juges en Cour supérieure. Donc,
quand on parle de formation, il faudrait peut-être que ces deux équipes de
juges là puissent se parler. Parce qu'en protection de la jeunesse, si on vient
à parler que l'autre parent ne paie pas la pension alimentaire, et que, moi, je
considère que c'est de la violence conjugale de ne pas payer sa pension
alimentaire, mais qu'on me dise en Cour du Québec, que ce n'est pas quelque
chose qu'on va parler et traiter en Chambre de la jeunesse, que c'est du
ressort de la Cour supérieure, je trouve qu'on se lance la balle, et ce sont
les enfants qui en subissent les contrecoups. Donc, une formation, oui, mais,
encore, un tribunal unifié, et il me semble qu'il y avait des budgets, à
Ottawa, pour ces tribunaux-là unifiés.
M. Jolin-Barrette : Excellent.
Sur la question de la composition du régime d'union parentale, résidence
familiale, je comprends, là, votre propos, que vous dites : On devrait
inclure toutes les résidences de la famille. Première sous-question :
Pourquoi? Et, également, êtes-vous à l'aise avec le fait que les régimes de
retraite, REER, fonds de pension, ne soient pas dans le régime d'union
parentale?
Mme Ouellet (Aurélie) : Oui,
donc, selon nous, toutes les résidences à l'usage de la famille, que ce soient
la résidence principale et les résidences secondaires, doivent être incluses.
On comprend, là, que le régime d'union... le patrimoine d'union parentale ne comporte
pas tous les mêmes biens que celui du patrimoine familial. On comprend aussi
les objectifs, là, qui sont visés, que ce soit, là, d'éviter que les enfants
issus de conjoints de fait subissent des contrecoups de la rupture de leurs
parents, puis leur assurer une stabilité, là, en cas de rupture. Selon nous, on
ne comprend juste pas l'exclusion des résidences familiales, parce que, selon
nous, c'est des biens qui sont à l'usage de la famille, c'est des biens qui
vont assurer une stabilité des enfants, là, en matière de rupture.
Si je peux répondre à votre deuxième
sous-question, là, par rapport aux fonds de retraite, ça, c'est une exclusion
que nous, on s'explique bien. Les fonds de retraite, là, ce n'est pas des biens
qui sont communément à l'usage de la famille, là, en soi, c'est des biens qui
sont plus propres aux époux. Par ailleurs, du moment que ces biens vont être
utilisés, là, bien souvent, les enfants vont être rendus autonomes, vont
être... vont avoir quitté la résidence. Donc, on est totalement en accord, là.
On comprend, avec... à la lumière des objectifs qui sont...
Mme Ouellet (Aurélie) : ...avec
le projet de loi, on comprend l'exclusion, là, des fonds de retraite, mais
c'est là que l'exclusion des résidences secondaires, on se l'explique un peu
moins, surtout quand on voit les objectifs, là, qui sont visés par le projet de
loi.
• (12 h 30) •
M. Jolin-Barrette : O.K.
Peut-être une dernière question, pour ma part, avant de céder la parole à mes
collègues parce que je sais que le député de Saint-Jean a des questions. Sur la
question de l'attribution et de la protection de la résidence familiale, vous
dites, le délai de 30 jours, il est trop court. Vous militez... je crois
avoir vu dans votre mémoire six mois pour la protection et l'attribution. C'est
ça?
Mme Ouellet (Aurélie) : Oui,
exactement, là. Selon nous, le délai de 30 jours, d'une part, pour... On
comprend, là, que les mesures de protection de la résidence familiale ne
peuvent pas subsister de manière, là, indéfiniment, par contre, selon nous, le
délai de 30 jours est court et ne permet pas, selon nous, de...
d'atteindre l'objectif pleinement, qui est visé par la disposition. On comprend
la disposition mais 30 jours est un délai très court pour que ces
protections-là subsistent. Selon nous, un délai de six mois, là, serait plus
raisonnable.
Puis je parlerais aussi du second délai de
30 jours, là, qui est prévu pour la présentation de la demande, là. Comme
on dit, on a fait un tableau, puis avec les règles de pratique puis les délais
de présentation de la demande, c'est impossible. Puis, selon nous, ça va créer
des iniquités entre les justiciables, même, tout dépendamment de est-ce que tu
représenté par l'aide juridique, un cabinet privé, les personnes qui se
représentent seules, c'est tous des délais, là, qu'il faudrait prendre en
compte. On a même soulevé des iniquités en fonction des différents districts
judiciaires, tout dépendamment de quand la Cour siège en différents districts.
À Montréal, par exemple, il y a de la Cour à tous les jours, on peut présenter
une demande beaucoup plus facilement que dans d'autres districts judiciaires,
où ça va être présentable une semaine sur deux. Donc, selon nous, le délai de
30 jours, là, favorise les iniquités entre les justiciables. Puis, selon
nous, de... d'avoir un délai plus grand, là, donc de six mois, va permettre que
ces protections-là soient adéquatement respectées, puis que le projet de loi
puis les objectifs, là, qui sont visés par le projet de loi soient atteints.
M. Jolin-Barrette : Excellent.
Je vous remercie pour votre présence en commission parlementaire.
Le Président (M.
Bachand) :Merci beaucoup. Alors, pour
3 min 25 s, M. le député de Saint-Jean.
M. Lemieux : Merci beaucoup,
M. le Président. Maître Pringle et les deux autres générations, merci pour
votre conviction et votre passion et surtout pour votre manière directe puis à
la hauteur de votre réputation, qui vous précède, évidemment. Ça fait du bien,
en commission parlementaire, de...
Et au risque de vous déplaire ou de vous
gêner, au lieu d'aller dans les articles et les détails légaux du projet de
loi, je veux vous parler de contexte. Parce que, je vous cite, puis je ne m'en
allais pas du tout, mais c'est quand vous l'avez dit que ça m'est revenu :
«Quand on commence à en parler, à parler de quelque chose, c'est parce que ça
fait longtemps que ça dure.» Et quelqu'un hier, j'oublie son nom, m'a
dit : Vous savez, en droit, on est toujours en retard dans les lois qu'on
fait par rapport à la réalité, puis en plus, dans le droit familial, c'est
encore plus long. Et, vous l'avez vous-même dit au début, votre perspective est
particulière à cause d'Éric et Lola, et tout le battage médiatique qui est venu
avec, que vous avez subi puis vécu puis compris. Puis je me demandais jusqu'à
quel point vous pourriez nous parler du fait que, puis ça fait un bout de temps
déjà, vous l'avez sûrement... ça a décanté, l'évolution de l'opinion publique.
Éric et Lola ont fait énormément pour faire discuter de et donc faire avancer
les idées là-dessus. Ça arrive périodiquement, mais on ne décide pas quand ça
arrive. C'est... Il y a des affaires comme ça qui s'emparent du monde. On est
rendus où, là-dedans, l'évolution de l'opinion publique, puis en parallèle,
forcément, du droit? Parce que c'est... une fois que l'opinion publique... Si
j'ai bien compris le principe, le droit est en retard parce que, quand vous
commencez à en parler, ça fait longtemps que ça dure.
Mme Pringle (Suzanne H.) : Oui.
Mais il y a comme des hoquets. En 2008... Non, en 2002, quand les procédures
ont été déposées, on a... il y avait eu comme deux pages dans un journal, et on
a obtenu, et c'était épouvantable, il y a trois enfants là-dedans, on a obtenu
que le dossier soit scellé, etc. Ça a été au... par mesure de protection. Les
gens en ont parlé, mais c'était juste de savoir c'est qui, lui, c'est qui,
elle, bon, ça. Mais, en 2008, quand on l'a plaidée à la Cour supérieure, ça...
il y a quand comme eu un petit hoquet. Puis là, les gens se parlaient, mais pas
tant que ça. Après la Cour suprême, ça s'est mis à parler un peu plus. Mais, ce
qui a le plus changé, ce sont les gens, pas l'opinion des gens. Là, les femmes
plus particulièrement ne sont en général pas dans la même situation qu'on était
en 2002, quand ces procédures-là ont été déposées, en 2008 puis en 2013, puis
surtout pas en 2024. J'ai des... On a fait des réunions, on a fait des vrais
remue-méninges de bureau où les jeunes avocates, pas mal plus jeunes que moi,
c'est-à-dire le tiers de mon âge, me disent des choses comme : Aïe! J'y
pense, là, ça me fait réfléchir...
12 h 30 (version non révisée)
Mme Pringle (Suzanne H.) : ...mais
moi, là, je travaille puis je... je vais... tu sais. Puis mes chums qui ont des
fonds de pension, etc., on ne veut pas toucher à ça. Puis je ne veux pas genrer
le débat, mais le débat n'est pas pour régler---puis ce n'est pas un jugement,
là--- n'est pas pour régler les difficultés du passé, les difficultés de 2002,
2004, 2008. Là, c'est pour ce qui s'en vient pour les conjoints de demain et
les femmes de demain. Et j'entends beaucoup plus parler, puis j'ai fait des vérifications,
de... du niveau de scolarisation des femmes qui s'augmente. Ça, c'est lié au
ministère de l'Éducation, peut-être. Mais... et celui des jeunes hommes qui
diminue. Et en même temps, ça va avoir un effet un jour, tout ça, là, mais les
femmes... j'ai été arrêtée à l'aéroport le lendemain de Tout le monde en
parle, le 1ᵉʳ avril dernier, puis il y a quelqu'un... il y a une femme
qui m'a dit : Moi, je vous ai vue, madame, puis je n'ai aucune idée c'est
quoi mon régime matrimonial. Où je trouve ça?
Le Président (M.
Bachand) :Merci... M. le député, s'il
vous plaît, pour 9 min 8 s.
M. Morin : En fait, M. le
Président, je céderais la parole à ma collègue la députée de Westmount—Saint-Louis.
Le Président (M.
Bachand) :O.K. Excusez, Mme la députée de
Westmount—Saint-Louis. Mme la députée.
Mme Maccarone : Merci. Merci
beaucoup pour votre présentation puis pour votre mémoire. Je souhaite continuer
sur le même angle parce que l'on a aussi entendu des... beaucoup de professeurs
qui nous partagent de la recherche qu'ils ont faite comme Pr Lavallée, Pr
Belleau, qui nous disent que 70 % des Québécois, quand même, souhaitent
avoir les mêmes protections, que ce soit des conjoints de... des conjoints de
fait, que...
Mme Pringle (Suzanne H.) : Ce
n'est pas ça que, moi, j'ai entendu...
Mme Maccarone : C'est bizarre
parce qu'eux, ils ont quand même du data qu'ils ont partagé avec nous. Ça fait
que moi, ce que je souhaite savoir peut être pour nous aider à comprendre.
Mme Pringle (Suzanne H.) : Oui.
Mme Maccarone : Parce que moi
je comprends aussi que ça se peut que c'est un mythe que les femmes sont
rendues à parts égalitaires en termes de salaire, de la façon de vivre, même
scolarité. Ça s'en vient, j'assure... j'en suis, ça s'en vient, mais on n'est
pas rendus là encore. Est-ce que nous devons prévoir des mesures de protection
pour des femmes, mettons en congé de maternité, ont fait une dépression
post-partum. Cette femme peut être pénalisée, par exemple, puis la pension
alimentaire, elle n'est pas prévue dans le projet de loi. Devons-nous mettre un
type de mesures de protection? Puis, dans votre réponse, pendant que vous
entraîne... vous êtes en train de réfléchir, que devons-nous faire pour des
conjoints de fait dans une situation où on n'a pas d'enfant? Est-ce que nous
devons aussi prévoir des mesures de protection pour les couples, les deux bords?
Ça peut être les deux bords, mais majoritairement, c'est des femmes qui sont
pénalisées.
Mme Pringle (Suzanne H.) : IL
y a plusieurs volets ici.
Mme Maccarone : Oui.
Mme Pringle (Suzanne H.) : Disons.
Ceux qui n'ont pas d'enfant, je ne sais pas si... Bien, vous avez vu mes deux
collègues qui étaient ici tantôt, qui viennent d'obtenir un jugement, il n'y a
pas un an, en matière d'enrichissement injustifié de deux personnes de même
sexe qui... et je l'ai cité dans mon mémoire, là, où ils ont obtenu une
compensation de 1,7 million presque entre gens où il n'y a pas d'enfant. O.K.?
Moi... moi, je... je pense que l'angle
qui... Moi, je me suis arrêtée au projet, au projet législatif tel que
présenté, et on n'a pas choisi de voir les conjoints de fait comme des gens en
union économique, même pas avec des enfants, complète au niveau de la... ce n'est
pas non plus une union qui... sous l'angle de la solidarité. Moi, je suis
honnêtement, c'est personnel, c'est... On en a beaucoup parlé au bureau, tu
sais, ça donne du remue-méninges, là. Je... je respecte la liberté, la liberté
d'action et la liberté de vivre selon des règles ou sans règles. Et les gens
non mariés généralement sont présumés avoir voulu ne pas se marier. S'il y a de
l'appauvrissement créé par une situation qui enrichit l'autre, ils peuvent être
compensés, n'est-ce pas? Et il y a aussi la possibilité de faire des contrats
de vie commune.
Mme Maccarone : Sauf qu'on a
compris que c'est à peu près 4 % des Québécois qui ont recours.
Mme Pringle (Suzanne H.) : Ça,
ça, je le sais. Mais ce que je vous dirais est ceci : Moi, je suis tellement
fervente d'une campagne, d'une campagne d'information continue là-dessus, mais
pas juste ça. Puis peut-être c'est ma génération, mais enfin, je pense, qu'il
devrait être obligatoire en secondaire V, de suivre un cours sur ses
droits et obligations. Vous savez, j'ai même un petit un petit-fils dans mon
environnement qui parle de ses droits, des fois ses droits, ses droits, c'est
toi. Je lui dis : Connais-tu, toi là, le mot «obligation» qui vient avec
un droit? Ça te dit-tu quelque chose...
Mme Pringle (Suzanne H.) : ...tu
sais, c'est-tu un concept que tu as déjà entendu, ça, mettons, tu sais?
Qu'est-ce que tu veux dire?, qu'il dit. Bien, c'est ça. Tu sais, l'idée que...
bien oui, tu sais, si tu as un enfant, que... Bien, ce n'est pas ça que je voulais!
Bien, c'est dommage. Voici les conséquences : il y a des droits, il y a
des obligations.
• (12 h 40) •
Mme Maccarone : Je suis
d'accord sur... Puis on parle aussi de comment le mettre à l'oeuvre pour
informer la population...
Mme Pringle (Suzanne H.) : Totalement,
totalement.
Mme Maccarone : ...parce
qu'on sait que la majorité de la population ne savent pas sous quel régime ils
sont mariés, puis ils pensent qu'ils ont accès aux mêmes droits s'ils sont...
union de fait ou mariés. Ça fait que c'est une grande surprise quand ils se
séparent.
Oui, allez-y. Il me reste très peu de
temps. J'ai autres questions pour vous.
M. Pouliot (Stéphane) : Oui.
Mais, si vous me permettez, premièrement, je pense que le projet de loi regarde
par... de l'avant, l'avenir. Donc, au lieu de parler de père et de mère, c'est
qu'il y a des personnes de même sexe qui ont des enfants. Donc, ce que le
projet de loi veut protéger, c'est les enfants, donc, et les questions de
savoir l'historique du passé, de protéger un sexe plus que l'autre... il
faut... Je pense que la réflexion qui a été faite par le projet de loi, c'est
de protéger l'enfant pour qu'il puisse bénéficier...
Donc, moi, j'ai... personnellement, j'ai
de la difficulté avec ce débat-là de... je... C'est l'enfant qu'on doit
protéger. Et les gens... Je comprends qu'il y a des campagnes d'information,
mais il y a une obligation. On nous enseigne souvent : Nul n'est censé
ignorer la loi. Il y a une... Donc, c'est un choix politique qui doit être fait.
Vous nous posez des questions, mais il y a un choix politique qui doit être
fait, à savoir : Est-ce que la société a besoin d'être protégée avec ces
dispositions-là?
Mme Maccarone : Je suis
d'accord.
M. Pouliot (Stéphane) : On
peut vous parler de qu'est-ce qui se passe, mais...
Le Président (M.
Bachand) :Mme la députée de
Westmount-Saint-Louis, oui.
Mme Maccarone : Oui. Je suis
d'accord, il y a un désaccord à quelque part...
M. Pouliot (Stéphane) : Oui.
Mme Maccarone : ...parce que,
oui, on devrait parler des parents, et non seulement les pères et les mères.
Mais, vous l'avez dit aussi, vous, dans vos remarques, que la situation
économique de l'enfant est directement liée aussi à la situation économique de
l'enfant. Puis ça fait 40 ans depuis qu'on n'a pas eu une réforme, puis ça se
peut qu'on va avoir un autre 40 ans depuis qu'on ne voie pas une autre réforme.
Alors, tu sais, on espère qu'on ne manque pas notre coup, puis, si on écoute le
Groupe de Treize puis le Conseil du statut de la femme, on a des accords.
Oui... je cède la parole.
Le Président (M.
Bachand) :M. le député de l'Acadie,
2 min 45 s
M. Morin : Merci, M. le
Président. Alors, bonjour. Merci, merci d'être là. Je vais continuer avec ce
que vous venez de dire, le projet de loi protège les enfants. Et je sais que
vous avez traité cet aspect-là dans votre mémoire, mais j'aimerais vous
entendre davantage. Le législateur a fait un choix avec le patrimoine d'union
parentale.
Mme Pringle (Suzanne H.) : Oui.
M. Morin : Puis, si on veut
véritablement protéger les enfants, personnellement, je comprends mal le choix
qui a été fait. Est-ce que vous pourriez...
Mme Pringle (Suzanne H.) : À
quel niveau?
M. Morin : Bien, c'est parce
qu'on semble définir, inclure certains biens, pas d'autres.
Mme Pringle (Suzanne H.) : Bien,
à notre... Nous, les résidences, c'est évident, parce qu'on se retrouve dans
une drôle de situation où les résidences secondaires ne sont pas incluses, mais
tous les véhicules automobiles qui servent à l'usage de la famille, dont les...
tu sais, les... tous les jouets, là, que je ne connais pas, là, qui sont au
chalet, etc., sont là-dedans, sont... même si c'est des résidences secondaires,
mais les résidences secondaires ne le sont pas.
Je comprends de votre question, si c'est
bien ça, que les... Pourquoi les REER et les fonds de retraite ne sont pas
inclus? Est-ce que c'est ça?
M. Morin : Bien, en fait, pas
uniquement ça, mais, tu sais, c'est que...
Mme Pringle (Suzanne H.) : Comme...
M. Morin : ...au niveau du
patrimoine d'union parentale, le législateur nous dit : La résidence
familiale... La résidence familiale... Bien, il y en a peut-être plus qu'une,
je ne sais pas. Il y a peut-être des résidences secondaires où la famille vit
aussi.
Mme Pringle (Suzanne H.) : C'est
ce que j'ai dit.
M. Morin : Il y a peut-être
des résidences familiales...
Mme Pringle (Suzanne H.) : Il
y a juste une résidence familiale, puis...
M. Morin : Oui. Puis là,
après ça, on parle uniquement des véhicules automobiles. Mais il peut y avoir
plein d'autres biens qui sont utilisés par la famille, puis ça ne semble pas...
on semble le restreindre aux véhicules automobiles.
Donc moi, ce que je vous demande...
Mme Pringle (Suzanne H.) : Bien,
qui servent à l'usage de la famille, il me semble, de mémoire.
M. Morin : Oui, exact. Oui,
c'est ça, les véhicules automobiles utilisés pour les déplacements de la
famille, c'est ça. Mais la famille, si on parle des enfants, peut-être que les
enfants, dans une famille, utilisent aussi avec la famille d'autres biens qui
ne semblent pas être couverts par l'union parentale. Alors, ce que je...
Mme Pringle (Suzanne H.) : Mais
ce sont les... La description que vous voyez là au niveau... si on parle juste
de la résidence, et des meubles meublants, et des effets de décoration qui les
ornent, c'est exactement la même... j'y vais de mémoire, là, mais c'est exactement,
il me semble, la même définition, et les véhicules de la famille... les
véhicules automobiles qui servent à l'usage de la famille...
Mme Pringle (Suzanne H.) : ...aussi,
tu sais, vous pouvez avoir un bateau de 150 pieds là-dedans, là, vous pouvez
avoir un avion, vous pouvez avoir un hélicoptère.
M. Morin : Oui, mais pour
prendre votre bateau de 150 pieds, est-ce qu'il serait inclus dans le
patrimoine d'union parentale?
Mme Pringle (Suzanne H.) : Dans...
Quand c'est décrit comme ça, en matière de patrimoine familial, c'est inclus.
M. Morin : Merci.
Le Président (M.
Bachand) :Merci beaucoup. M. le député de
Saint-Henri-Sainte-Anne, pour trois minutes trois secondes, s'il vous plaît.
M. Cliche-Rivard : Merci
beaucoup. On a eu des grandes discussions avec les notaires qui nous ont dit
qu'eux étaient très bien capables de faire la part des choses et nous dire
qu'ils n'avaient pas besoin d'aller chez les avocats chercher deux avis
juridiques indépendants. Pouvez-vous expliquer pourquoi vous, vous pensez
que...
Mme Pringle (Suzanne H.) : Alors,
moi, j'ai... Le 30 mars dernier, j'étais à un rendez-vous. Je sors, je
suis dans ma voiture, et j'entends le témoignage, que, je ne sais plus à quelle
page il est ici, et donc c'était trois jours après avoir lu pour la première
fois le projet de loi, et j'entends un notaire. Puis moi, j'ai absolument... Je
ne défends pas les notaires, les avocats, là, je suis... je vous présente ma
position. J'entends ce notaire qui dit : Ah! je vais vous conter une
anecdote, moi, j'avais des gens devant moi au niveau du... quand c'était le
temps du patrimoine familial, d'y renoncer, et là j'ai les deux devant moi, et
là ils me disent : Bien là, qu'est-ce qu'on fait? Bien, il dit : je
leur dis un petit peu qu'est-ce que c'est, le patrimoine familial. Je
paraphrase, évidemment. Et il dit : et là ils disent : Bien,
qu'est-ce qu'on fait? Bien, il dit à Mme : Bien, vous, vous ne devriez pas
vous retirer de ça, voyons donc. Il dit, tu sais : c'est bon pour vous.
Puis il dit : J'ai dit à M. : bien, vous, aïe, regarde... Excuse-moi,
l'inverse, il dit... il dit à Mme : Retirez... Non, c'est ça :
retirez-vous pas de ça. Puis il dit à M. : aïe! Vous, vous devriez vous
retirer de ça. Il dit : Moi, je suis impartial. Il dit : Là, je vous
dis ce que c'est, vous prenez votre décision. Allô!
Une voix : ...
Mme Pringle (Suzanne H.) : Je
trouve que ça ne marche pas. Lumière rouge! Ça n'a pas de bon sens. Et je pense
qu'on peut éviter les erreurs du passé, cette fois-là, en créant quelque chose
où on a un avis indépendant. Par exemple, c'est quoi l'inventaire des biens.
Puis, si vous êtes jeune puis vous n'êtes pas trop certain, bien, décrivez-les,
les biens. Il faudrait que ce soit impératif qu'il y ait quelque chose d'écrit
dire : Ça comprend ceci, ceci, ceci, puis, en bout de ligne, vous renoncez
à la valeur de ça, plus tard, ça, puis je l'ajoute pour faire un peu plus de...
En fait, je suis d'accord pour que ça se fasse aussi en patrimoine familial. Les
choses ont évolué, là. Les gens sont... J'ai des dossiers en deuxième,
troisième, quatrième union, vous avez sûrement déjà entendu parler de ça, là?
M. Cliche-Rivard : Ça existe,
oui.
Mme Pringle (Suzanne H.) : N'est-ce
pas? Il y a juste moi qui reste stable, ça fait que...
M. Cliche-Rivard : Très, très
intéressant. Puis on va continuer de suivre ça. Mais vous dites qu'on le
validerait comment, là? Tu sais, dans le sens où on demanderait... le notaire
verrait l'avis ou se satisferait de la...
Mme Pringle (Suzanne H.) : Soit
qu'on prévoit qu'il doit y avoir un avis indépendant qui soit fourni par des
avocats. Moi, je dis qu'il faut que ça soit des avocats spécialisés,
accrédités, je ne sais pas quoi.
M. Cliche-Rivard : En droit
familial.
Mme Pringle (Suzanne H.) : En
droit de la famille, ou que le formulaire, l'obligation, j'ai mis des exemples
de jugements où on explique ce qui n'a pas été expliqué, prévoit un contenu
obligatoire. Je ne sais pas comment, je n'ai jamais été notaire, mais on n'a
pas le choix que d'expliquer clairement, et honnêtement, de faire ça
directement devant son conjoint. On vient de nous dire que le monde ne veulent
pas parler d'argent. On voit ce qui est écrit dans le jugement que j'ai mis
dans le mémoire. Puis M. dit : Aïe! C'est moi qui a travaillé, là, si tu
penses que tu vas toucher à ça. Il faut... Il faut... Je suis d'accord avec la
façon de le faire, mais il y a une façon de le faire qui peut rejoindre
l'obligation d'information et de compréhension de ce qu'on signe. C'est ce que
je pense.
Le Président (M.
Bachand) :Merci. M. le député de
Jean-Talon, pour 2 min 19 s, s'il vous plaît.
M. Paradis : Deux minutes
19 s. On a des mémoires, des intervenants qui nous ont dit : le
patrimoine parental et la prestation compensatoire, grave recul par rapport à
la situation actuelle. On en a d'autres qui nous ont dit : bien non, parce
qu'en réalité le recours en prestation compensatoire puis l'enrichissement
justifié, ça se ressemble pas mal avec des décisions qui ont été citées. Vous,
vous nous dites... Bien, c'est ça, je voudrais bien comprendre ce que vous nous
dites. Vous dites : oui, c'est la méthode de calcul, je pense, de la
prestation compensatoire qui fait défaut.
Mme Pringle (Suzanne H.) : Oui.
M. Paradis : Vous nous
dites : il faudrait reconnaître la méthode de calcul du quantum meruit,
donc la valeur accumulée, la possibilité. Vous dites : il faudrait
codifier l'appauvrissement en matière de prestation compensatoire puis codifier
des présomptions. Est-ce que j'ai... Est-ce que j'ai bien...
Mme Pringle (Suzanne H.) : Ça
ressemble à ça, mais le petit début est juste... Il y a... Présentement, les
conjoints de fait qui ont un jugement en enrichissement injustifié ou une
demande d'indemnité ont deux méthodes de calcul possible : quantum meruit,
valeur accumulée. Le projet de loi enlève la valeur accumulée. Et, pour moi,
puisque l'angle du projet de loi, le projet législatif, était de compenser un conjoint
qui...
Mme Pringle (Suzanne H.) : ...appauvri,
on vient couper une série de situations qui visent, justement, des familles qui
vivent encore en co-entreprise familiale.
• (12 h 50) •
M. Paradis : Est-ce que je
comprends bien que, si on fait, dans le projet de loi, ces ajustements-là, vous
pensez quand même que la constitution du patrimoine parental...
Mme Pringle (Suzanne H.) : Que
les deux, additionnés...
M. Paradis : ...avec la
prestation, ça pourrait être...
Mme Pringle (Suzanne H.) : Les
deux, additionnés, rejoignent ce que je vois qui est l'objectif recherché par
le législateur, avec ce projet de loi.
M. Paradis : O.K., donc...
Mme Pringle (Suzanne H.) : C'est
au moins ça.
M. Paradis : ...bon véhicule,
approprié, mais avec des ajustements, qui sont ceux que vous proposez.
Mme Pringle (Suzanne H.) : Ah
oui! Ah oui! Définir l'appauvrissement, là... Vous n'avez pas idée de ce qu'on
va se faire plaider. Moi, je me suis fait plaider en 2020... Je finis
rapidement, M. le Président, je vous vois compter, en 2020, je me suis fait
plaider : Bien là, elle s'occupait du ménage, de la maison, des repas,
mais son rôle, comme mère, elle devrait en faire au moins moitié, on va... il
faudrait... M. le juge, ce n'est pas de la valeur accumulée, je ne suis pas
d'accord. Mais quand on va... en plus, quand on va calculer le quantum meruit,
c'est juste l'extra qui devrait être compensé, alors que le deal, l'ensemble.
L'intention réelle de ces gens-là, c'était : tu t'occupes de la famille au
complet pendant que je m'occupe de faire fructifier mon entreprise, de la
mettre sur pied, d'avoir vraiment un projet commun, et, plus tard, on va en
bénéficier tous les deux. Là, on était rendu à traiter de nourrice notre
conjointe puis savoir combien elle valait, comme nanny. Il faut le faire.
Le Président (M.
Bachand) :Merci beaucoup. Sur ce Me
Ouellette, Me Pouliot et, bien sûr, Me Pringle, merci infiniment d'avoir été
avec nous. C'est très apprécié.
Cela dit, la commission suspend ses
travaux jusqu'à 14 heures. Merci. À tantôt.
(Suspension de la séance à 12 h 52)
14 h (version non révisée)
(Reprise à 14 h 03)
Le Président (M.
Bachand) :À l'ordre, s'il vous plaît. Bon
après-midi. La Commission des institutions reprend ses travaux. On poursuit
donc les consultations particulières et auditions publiques du projet de loi n° 56, Loi portant sur la réforme du droit de la famille et
instituant le régime d'union parentale.
Alors, il nous fait plaisir d'accueillir
notre premier groupe, alors c'est les gens de l'Action des nouvelles conjointes
et des nouveaux conjoints du Québec, avec sa présidente, Mme Lise
Bilodeau. Alors, bienvenue. Et je vous... avant de débuter votre présentation,
peut-être présenter les gens qui sont avec vous. Et comme vous savez, vous avez
10 minutes, et, après ça, on aura une période d'échange avec les membres.
Merci beaucoup d'être avec nous aujourd'hui.
Mme Bilodeau (Lise) : Merci, M.
le Président. Alors, je vous présente à ma gauche Mathieu Santerre et à ma
droite, bien sûr, Louis Gabriel Thibault, qui vous rendra un petit témoignage
tout à l'heure. Alors je me présente, je suis la fondatrice et la directrice de
l'Action des nouvelles conjointes et nouveaux conjoints du Québec. L'ANCQ est
un organisme qui se préoccupe de la discrimination et des conditions de vie
médiocres de couples qui sont formés, le plus souvent d'hommes divorcés et
unième nouvelle conjointe. Nous soutenons près de 2 000 membres grâce
à des services d'écoute, d'aide et de références. Depuis sa création, l'ANCQ
oeuvre pour que les effets des pensions alimentaires perpétuelles... soient
atténués et amoindris. Leurs conséquences sur les nouveaux conjoints sont trop
souvent disproportionnées et nuisibles.
Dans un premier temps, nous tenons à
remercier les membres de la Commission des institutions. Nous sommes très
heureux de pouvoir aujourd'hui vous présenter nos observations et nos
recommandations concernant le projet de loi n° 56.
Nous sommes directement interpellés par ce projet de loi qui instaurera un régime
d'union parentale et des règles quant à la séparation des conjoints de fait qui
sont parents d'un même enfant.
Avant de plonger dans le vif du sujet,
peut-être permettez-moi de faire un portrait des problématiques actuelles que
rencontrent nombre d'hommes et de papas après une séparation. Comme vous le
savez, le Code civil du Québec, sur la base de la Loi sur le divorce fédéral,
prévoit une obligation alimentaire entre époux et conjoints unis civilement. Il
devient ainsi possible pour des époux ou des conjoints unis civilement de
demander le versement d'une pension alimentaire pour ex-conjoints lors d'une
séparation ou d'un divorce. Le tribunal décidera de la durée selon les facteurs
prévus au code. Mais notons que la tendance...
Mme Bilodeau (Lise) : ...que
la tendance de la jurisprudence est actuellement de favoriser largement
l'imposition de pensions alimentaires pour une durée indéterminée.
Pardonnez-moi.
De manière générale, nous estimons que ces
dispositions législatives permettent de faire payer à l'homme, la plupart du
temps, un mauvais karma qui n'en finit plus. En effet, les pensions
alimentaires à perpétuité engendrent très souvent de la détresse masculine, et
cette situation financière peut pousser certains hommes à la dépression et même
au suicide. L'ANCQ, nous ne comptons plus le nombre de courriels reçus ainsi
que les appels à l'aide au téléphone. Certains payeurs de pension alimentaire
ont même perdu leur emploi, mais doivent tout de même continuer à s'acquitter
de leurs obligations alimentaires. Ils vivent un véritable enfer. Des milliers
d'aînés se retrouvent d'ailleurs aussi dans cette position. Selon des données
inédites obtenues du Revenu Québec, 3 941 payeurs de pension
alimentaire étaient âgés de 65 ans et plus en date du 23 mars 2023 — pardonnez-moi
que je me retrouve dans mes feuilles, du loup, c'est ça.
De manière générale — c'est ça
ici — de manière générale, nous estimons que ces dispositions
législatives permettent de faire payer à l'homme, la plupart du temps, un
mauvais karma qui n'en finit plus. Du lot, 98... du lot 98 % sont des
hommes, le déséquilibre est réel. Cela témoigne de manière éloquente à quel
point les hommes sont trop souvent désavantagés par les pensions alimentaires à
durée indéfinie. Concrètement, cela se traduit par des conditions de vie
difficiles imposées aux nouveaux couples formés après une séparation du
patrimoine.
Pour les 65 ans et plus, le portrait
est bien plus sombre, les pensions alimentaires sans terme reviennent à payer
deux fois pour financer la retraite de son ancien conjoint, ce qu'on appelle
quotidiennement avec l'arrêt de Boston versus Boston, qui est un arrêt de la
Cour suprême, la double indemnité. Cette situation injuste pousse plusieurs
citoyens dans la pauvreté, avec toutes ses conséquences possibles sur le plan
de la santé physique et mentale.
C'est dans cette perspective que je vais
m'adresser à vous aujourd'hui. Le projet de loi n° 56 pourrait exacerber
la problématique que vivent beaucoup d'hommes. La prestation compensatoire
prévue en cas de séparation des adhérents au régime d'union parentale doit être
mieux encadrée pour éviter l'iniquité et la précarité accrue des ex-conjoints.
Bon nombre d'ex-conjoints divorcés sont déjà aux prises avec des paiements de
pension alimentaire sans terme. En cas de nouvelle séparation sous le régime
d'union parentale, l'ajout d'une prestation compensatoire pourrait être un coup
dur pour eux. Cela risquerait de mettre certains prestataires de pension
alimentaire dans une situation insoutenable de double indemnisation. On impose
donc des mesures contraignantes financièrement à des ex-conjoints qui n'ont
pourtant pas fait le choix de se marier. Nous comprenons que la prestation
compensatoire prend la forme d'un paiement forfaitaire en un versement. Reste
que, comme son objectif vise une indemnisation pour la durée de la relation, on
peut s'attendre à ce que le tribunal accorde un montant notable. Un ex-époux
qui peine déjà à arriver puisqu'il verse une pension alimentaire se retrouvera
dans une situation financière intenable. On vient donc compromettre la réussite
de sa vie future au profit de créanciers alimentaires et prestataires. Il est
donc nécessaire de mieux encadrer cette mesure pour qu'elle ne mène pas à une
généralisation de la détresse chez les ex-époux ou les ex-conjoints.
Avant de vous présenter nos
recommandations, permettez-moi de souligner ce qui apparaît à nos yeux comme de
bons coups du projet de loi n° 56. D'abord, nous sommes satisfaits de la
proposition voulant favoriser la prise en charge d'un dossier par un seul juge
de la Cour du Québec. Cela permettra une uniformité dans le traitement des
demandes. Puis nous soulignons l'imposition au juge... au juge de l'obligation
d'accorder des dommages-intérêts en cas de violence judiciaire. À nos yeux,
cela permettra d'éviter des abus de procédure.
Enfin, la proposition législative voulant
que le juge a l'obligation de tenir compte de l'historique des procédures entre
les parties, l'impact de la nature répétitive et litigieuse sur l'ex-conjoint
et l'équilibre des forces en présence est tout à fait louable. Selon nous,
cette mesure favorisera un usage juste du système judiciaire et découragera
ceux qui souhaitent utiliser les tribunaux comme un outil à leur avantage pour
épuiser et affaiblir l'autre partie.
• (14 h 10) •
Nous venons donc de vous présenter nos
observations et constats. Nous souhaitons maintenant vous partager nos
recommandations à l'égard du projet de loi n° 56 et quelques-unes de nos
natures... de nature, dis-je plus générales...
Mme Bilodeau (Lise) : ...celles-ci
s'inscrivent dans une perspective d'équité entre les conjoints, dans
l'administration de la justice. Elles visent à bonifier la proposition
législative actuelle pour qu'elle tienne davantage compte de la réalité des
payeurs de pension... des payeurs de pension alimentaire à perpétuité.
Et je termine. Recommandations. Concernant
le projet de loi no 56, précisément, nous recommandons l'ajout d'un... d'un
alinéa, qui ne se dit pas facilement, qui stipulerait qu'il doit être considéré
que le versement d'une prestation compensatoire peut avoir des effets
économiques notables sur le débiteur et l'entraîner dans une situation
d'iniquité et de précarité. Nous recommandons essentiellement une prestation
compensatoire allégée lorsque la situation financière du débiteur est précaire
et que les conséquences de l'allocation d'une pleine prestation seraient
déraisonnables à l'égard de sa situation. Cette possibilité se doit d'être
enchâssée dans la loi pour que les tribunaux puissent en tenir compte.
Nous recommandons aussi que le
gouvernement profite de sa réforme du droit de la famille pour apporter une
modification dans le mode de calcul des pensions alimentaires et de la
prestation compensatoire pour qu'elles soient basées sur le revenu disponible
de chaque parent, après prise en compte, évidemment, de l'allocation familiale,
et en tenant compte... de tous les enfants, ou bien qu'elles soient...
Pardonnez-moi.
De manière générale, nous recommandons que
le Code civil du Québec soit modifié afin que la durée maximale de la pension
soit fixée à l'ex-époux d'avance, sauf circonstances particulières, et que
cette durée maximale ne dépasse pas l'âge de la retraite, encore une fois, sauf
circonstances particulières.
Nous recommandons également au
gouvernement de mettre fin aux pensions alimentaires sans terme dans son projet
de loi prévu sur le sujet. Et puis je glisse un tout petit mot concernant la
possibilité que vous vouliez considérer de faire... tout simplement, mettre un
holà sur le permis de conduire, sur les payeurs de pension alimentaire
récalcitrants. Il faudrait penser que ces gens-là, ceux sur lesquels on
mettrait une saisie sur le permis de conduire... dites-vous bien que,
généralement, ces gens-là vivent de leur permis de conduire, et là on leur
créerait davantage un préjudice, plutôt que de les aider, tout simplement...
tout simplement à payer leur pension alimentaire.
Alors, sur ce, je vous remercie et j'en profiterais
pour vous présenter M. Louis-Gabriel pour faire son petit témoignage.
Le Président (M.
Bachand) :À moins de... Il reste une
petite minute, M. Thibault.
M. Thibault (Louis-Gabriel) :
J'ai quatre phrases, il n'y a pas de problème.
Le Président (M.
Bachand) :Allez-y.
M. Thibault (Louis-Gabriel) :
Oui. Alors, j'ai vécu la violence psychologique dans une relation, j'ai eu
recours aux services de la NCQ. Dans la vie, quand je rencontre un ange, je
reste collé dessus puis je la supporte. Ça fait qu'à ce titre, je suis
président de l'association depuis quelques années et je trouve ça important de
donner une voix à ceux qui n'en ont pas. Ça fait que ceux qui sont dans la rue
puis qui ont de la misère, bien, il faut que leurs droits soient défendus.
Voilà. C'est tout.
Le Président (M.
Bachand) :Merci beaucoup. Alors donc, on
est à la période d'échange avec les membres de la commission. M. le ministre,
pour 14 min 30 s.
M. Jolin-Barrette : Oui.
Merci, M. le Président. Mme Bilodeau, M. Santerre, M. Thibault, bonjour,
bienvenue à l'Assemble nationale. Merci de témoigner devant la Commission des
institutions.
D'entrée de jeu, peut-être un commentaire,
qui est plus une précision, dans le fond. Le projet de loi no 56 ne vise pas à
enlever des permis de conduire. Donc, ce n'est pas dans le cadre du projet de
loi no 56 que cette mesure-là, elle est prévue. Je sais que cela était annoncé
dans les mesures du budget, par contre, par mon collègue des Finances.
Mme Bilodeau, tout à l'heure, j'ai entendu
dire que vous appuyez la mesure relativement au fait que, dans l'idéal, ça soit
le même juge qui suive les dossiers à la cour. Pourquoi est-ce que vous appuyez
cette mesure?
Mme Bilodeau (Lise) : M. le
ministre de la Justice, vous savez, ça fait 25 ans que je suis sur le terrain.
Moi, mon travail consiste à recevoir ces gens-là. Je ne vous ai pas mentionné
tout à l'heure que nous avons deux avocats qui travaillent pour nous. Nous en
avons... deux civilistes et un criminaliste, on a un médecin puis on a un
thérapeute. Et pourquoi? Tout simplement, j'y tiens parce que j'ai trop lu de
jugements où, passez-moi l'expression, la guerre est prise, et on se sert trop
souvent, oui, je dis bien trop souvent, du système juridique, du système
judiciaire pour pénaliser l'autre quand ça ne fait pas notre affaire. Alors,
moi, je trouve que ce serait extraordinaire parce que, vous savez, les
procureurs, j'en ai qui travaillent avec moi puis qui me le disent : Vous
savez, Lise, quand on arrive devant un juge qui ne connaît rien, ça fait la
deuxième fois que je me présente, je recommence à zéro.
Moi, je trouve que vous avez eu une idée
géniale, M. le ministre de la Justice, parce que le même juge va toujours être
dans le dossier. Il va toujours être en mesure de savoir où elles sont rendues,
les procédures, qu'est-ce qui se passe, qu'est-ce qui arrive? Autrement, on
refait toujours la cause en passant de juge en juge. Alors, ça, je vous dis,
là-dessus, vous avez été absolument génial de penser à avoir un seul...
Mme Bilodeau (Lise) : ...le
juge pour juger une cause.
M. Jolin-Barrette : Je
comprends aussi que vous êtes en accord avec les mesures pour contrer la
violence judiciaire. De votre expérience, là, comment est-ce que ça se produit,
là, à travers l'expérience que vous avez? C'est quoi... Avez-vous des cas, des
cas vécus, supposons, d'abus en matière familiale à la cour?
Mme Bilodeau (Lise) : Quand
vous parlez des cas, comment ça se produit au niveau des perceptions de pension
alimentaire?
M. Jolin-Barrette : Bien, en
fait, en général, en fonction de votre expérience de la violence judiciaire, en
avez-vous déjà constaté...
Mme Bilodeau (Lise) : Oui,
oui, effectivement.
M. Jolin-Barrette : ...de la
violence judiciaire, parmi les gens que vous accompagnez?
Mme Bilodeau (Lise) : Bon,
écoutez, je ne nommerai aucun avocat, ça va de soi, vous comprenez bien
pourquoi. Mais, souvent, après 25 ans, je suis obligée de vous dire que j'en ai
vu passer une puis un autre. Vous savez, le jeu est dans les reports, vous êtes
un avocat, vous savez ce que c'est, on reporte, on reporte. Souvent, ce qui est
terrible, c'est que quand la dame, malheureusement, c'est ça, quand la dame
reçoit l'aide juridique, moi, mon client à côté «rush», passez-moi
l'anglicisme, parce que lui, il n'arrive plus à fournir. Vous savez, quand un
avocat se présente à la cour, c'est tout simplement des sous, puis il faut le
comprendre aussi. Alors, naturellement, c'est mon client qui doit payer tout
ça, ça devient extrêmement difficile. Et, souvent, c'est les guéguerres qui
n'en finissent plus sur, vous le savez, c'est sur la garde des enfants.
Pourquoi? Pas parce qu'on les aime, parce que ça rapporte. On va se disputer
sur les jours qu'on va les avoir. Alors, plus on a de jours, plus on a de
pensions alimentaires, ça va de soi, alors... Et ça n'en finit plus, c'est
reporté, c'est reporté pour toutes sortes de raisons.
Alors, après 25 ans, je peux vous
témoigner que c'est pour ça que je reviens encore en vous disant : Vous
avez été extraordinaires à penser de souhaiter qu'il n'y ait qu'un juge à cette
cause-là et non pas trois ou quatre qui recommencent toujours le dossier d'une
fois à l'autre.
M. Jolin-Barrette : O.K.
L'objectif du projet de loi est vraiment de mettre l'enfant au centre du
processus, notamment, supposons, pour les mesures de violence judiciaire, parce
que c'est les enfants qui sont pris souvent dans les chicanes entre les parents
puis qui subissent ça. Le patrimoine d'union parentale également, c'est pour
assurer une stabilité aussi financière à l'enfant. Les pensions alimentaires
demeurent pour les enfants, il n'y en a pas pour les anciens conjoints de fait
en union parentale.
À la lecture de votre mémoire, vous
critiquez beaucoup les pensions alimentaires qui sont...qui sont versées. Je
comprends qu'ils n'ont pas de date de fin. C'est bien ça? Quel est l'enjeu que
vous nous soulevez par rapport aux pensions alimentaires?
Mme Bilodeau (Lise) : Oui. Ce
qui arrive, c'est que, quand vous avez des enfants, bien sûr, il y a la table
de fixation de pension alimentaire et les montants sont calculés en fonction de
la table de pension... de fixation de pension alimentaire. Et, assez souvent,
ça ne se limite pas dans le temps, c'est que bon, on laisse aller les gens
puis, bon, les enfants grandissent. Ce n'est pas ici que je vais vous parler de
ce qui arrive avec les papas qui sont pris avec des... qui se multiplient et
qui paient des pensions alimentaires jusqu'à tant que le jeune homme a 28 ans.
Je n'ai pas juste un cas, j'en ai eu plusieurs. Mais ça nécessite quoi pour
arrêter la pension alimentaire? Ce n'est pas écrit nulle part dans le jugement.
Si le juge disait : Après ton cégep, tu dois avoir l'obligation de
résultat, tu dois faire ceci, tu dois faire cela, ce n'est jamais écrit. Alors,
pour que le papa ait un feeling de ce qui se passe au cégep ou à l'université
pour savoir s'il paie pour quelque chose ou s'il paie pour rien, il faut
retourner en cour puis il faut demander au juge d'inscrire ces choses-là sur le
jugement. Et puis, des fois, il faut retourner en cour pour demander la fin des
pensions alimentaires aux grands enfants.
Et encore, vous le savez, monsieur, que
c'est très dispendieux, ça varie toujours entre les 8 000 et les 10 000 $.
Et les papas, après avoir payé jusqu'à l'âge de 28 ans pour des pensions
alimentaires à deux jeunes filles, 26 et 28, l'argent, il n'y en a plus, mais
ça continue. Ça prend absolument le jugement d'un juge pour que ça s'arrête là
dans le temps.
M. Jolin-Barrette : Mais je
comprends qu'il peut y arriver certains cas d'exception, comme vous le relatez,
supposons, à l'âge adulte, mais notre droit est quand même... fait en sorte
que, quand on a des enfants, l'obligation, tant pour le père, que la mère,
c'est d'accompagner les enfants, puis l'obligation du parent de faire en sorte
que leurs enfants puissent s'épanouir, de pouvoir leur permettre de poursuivre
des études, de les amener dans la vie, de leur donner, dans le fond, un peu le
meilleur... de leur offrir le meilleur aussi. Je comprends que, parfois ça peut
être difficile avec des avec les enfants dans certaines familles, ou tout ça,
mais un des objectifs aussi, c'est que, quand on a des enfants, on a des
obligations envers nos enfants. La pension alimentaire, essentiellement, elle
est là pour ça, là.
Mais je comprends, vous, ce que vous
dites, c'est que la problématique à ça, c'est, quand l'enfant est majeur, il ne
faudrait pas avoir besoin de retourner devant le tribunal. Supposons qu'il a
fini, il a fini l'école, il a fini... supposons, il fait une technique au
cégep, il travaille, il a un emploi à temps plein, puis il n'est plus aux études,
puis il est autonome...
Mme Bilodeau (Lise) : Tout à
fait.
M. Jolin-Barrette : ...vous
dites : Il ne faudrait pas avoir besoin de retourner devant le tribunal
pour mettre fin à la pension.
• (14 h 20) •
Mme Bilodeau (Lise) : Vous
avez raison. Et, comme je vous disais, si le juge...
Mme Bilodeau (Lise) : ...dans
son jugement de première instance, à l'effet que, si tu vas au cégep, tu auras
une obligation de résultat, il faudra transmettre les notes à ton père, etc.,
parce que c'est toujours au père que ça se passe. Alors, moi, je pense qu'on
allégerait énormément la situation. C'est que le jugement est rendu. Oui, il y
a une pension alimentaire, mais ça s'arrête là. Alors là, les papas,
laissez-moi vous dire qu'ils en patinent un coup parce que les enfants
grandissent et puis ils n'ont pas cette obligation de résultat.
M. Jolin-Barrette : Mais il
n'y a pas juste les pères qui paient des pensions alimentaires, il y a...
Mme Bilodeau (Lise) : Je n'ai
pas sorti les statistiques concernant les mamans, mais M. Santerre pourra
peut-être vous glisser un mot là-dessus. Est-ce qu'il y a autant de mamans qui
paient des pensions alimentaires pour enfants?
M. Santerre (Mathieu) : Mon
Dieu!
Mme Bilodeau (Lise) : On
pourrait vous revenir là-dessus.
M. Santerre (Mathieu) : Tout
à fait. Tout à fait.
M. Jolin-Barrette : Mais
c'est ça, mais moi, je vous confirme qu'il y a beaucoup de femmes qui paient
beaucoup de pensions alimentaires. Et, dans le fond, je comprends qu'historiquement
il y avait peut-être davantage d'hommes qui en payaient, mais aujourd'hui, il y
a beaucoup, beaucoup de femmes qui paient des pensions alimentaires.
Alors, je crois comprendre que vous êtes
en accord avec le fait que, les conjoints de fait en union parentale, les
pensions alimentaires ne soient pas incluses. Qu'est-ce que vous pensez aussi
du fait qu'on permet aux gens de se retirer du régime d'union parentale?
Mme Bilodeau (Lise) : Pardonnez-moi,
j'ai mal entendu votre question.
M. Jolin-Barrette : Je
voulais dire : Que pensez-vous de l'autonomie de la volonté que l'on
maintient pour permettre aux gens de décider, s'ils ne souhaitent pas que le
régime d'union parentale s'applique à eux, de pouvoir aller chez le notaire
pour se soustraire?
Mme Bilodeau (Lise) : Je suis
totalement d'accord avec vous. Si les gens ne le veulent pas... Vous savez
qu'on est encore dans un Québec... je vais employer le mot, dans un Québec très
libre. Alors, moi, je pense qu'on devrait tout simplement aller dans ce
sens-là. S'ils ne veulent pas se soumettre à ce nouveau régime, vous l'avez
déjà évoqué d'ailleurs, on peut tout simplement aller chez le notaire et
remplir les documents en conséquence.
M. Jolin-Barrette : Oui.
Peut-être avant céder de la parole à mes collègues, je voulais juste vous dire
également que, sur le site du ministère de la Justice notamment, on a un guide
interactif pour outiller les gens et les renseigner sur comment mettre fin à la
pension alimentaire de votre enfant majeur ensemble. Donc, il y a des
mécanismes, puis il y a un guide interactif, puis il y a les gabarits, les
demandes d'annulation, tout ça. Donc, ce n'est pas toujours nécessaire
d'engager un avocat, d'aller à la cour, et tout le tralala.
Mme Bilodeau (Lise) : Il y a
le SARPA, oui, effectivement.
M. Jolin-Barrette : C'est ça,
effectivement. Donc, il y a des moyens déjudiciarisés, à partir du moment où
l'enfant a atteint sa pleine autonomie, de le faire pour faire en sorte de...
d'actualiser la situation où ils sont rendus dans la vie. Donc, il y a des
outils qui existent.
Mme Bilodeau (Lise) : Vous
avez raison, M. le ministre de la Justice, sauf que, les cas que je rencontre,
moi, j'en ai toujours un qui ne veut pas. C'est... C'est là ma complication. Si
l'enfant ne veut pas signer le document à l'effet qu'il n'en veut plus, de la
pension de papa, ou si la dame s'objecte à l'effet que, non, il n'en est pas
question, veux veux pas, le monsieur est obligé d'aller chercher le jugement du
juge.
M. Jolin-Barrette : Effectivement.
Mais là on se retrouve dans une situation où peut-être que les besoins sont
toujours présents pour l'enfant et qu'il n'a pas atteint sa pleine autonomie
encore.
Mme Bilodeau (Lise) : Ça se
plaide. Ça... Ça, c'est des choses qui se disent mieux entre avocats et devant
un juge qu'un papa, une maman que ça fait 15 ans qu'ils ne se sont pas parlé et
que l'enfant a plus ou moins connu le papa. Alors, ça devient compliqué.
M. Jolin-Barrette : Sauf
que... Puis j'arrête là-dessus, puis je cède la parole par la suite, là. Sauf
que, peu importe notre degré d'implication avec l'enfant, à partir du moment où
vous avez un enfant, vous en êtes responsable jusqu'à tant qu'il soit... qu'il
soit grand, qu'il soit autonome, là.
Mme Bilodeau (Lise) : Tout à
fait. Mais, encore là, il faut chercher l'équité, et c'est ce que je cherche
dans les cas que je rencontre.
M. Jolin-Barrette : Je
comprends. Mais c'est important que l'enfant soit bien outillé pour...
Mme Bilodeau (Lise) : Absolument.
Je n'ai aucune objection sur ça. Soyez assuré.
M. Jolin-Barrette : O.K.
Bien, écoutez, je vous remercie grandement pour votre passage en commission
parlementaire.
Mme Bilodeau (Lise) : Merci.
M. Jolin-Barrette : Puis je
vais passer la parole à mes collègues.
Le Président (M.
Bachand) :Merci. Mme la députée de
Laval-des-Rapides, s'il vous plaît.
Mme Haytayan : Merci, M. le
Président. Bonjour.
Mme Bilodeau (Lise) : Bonjour.
Mme Haytayan : Merci de
prendre le temps avec nous aujourd'hui. Mme Bilodeau, j'ai une question à vous
poser de la part de notre collègue, M. Mario Asselin, député de Vanier-Les
Rivières, qui est également votre député de l'ANCQ, qui souhaitait que je vous
demande d'élaborer un peu plus sur les pensions alimentaires éternelles que
vous évoquez puis sur lequel vous... sur lesquelles vous développez à la page
12 de votre mémoire. M. le ministre... En répondant à M. le ministre, vous
l'avez évoqué un peu, mais est-ce que vous pouvez élaborer davantage?
Mme Bilodeau (Lise) : Mais,
rapidement, je peux vous dire que la pension alimentaire à vie... J'ai donné
naissance à l'association avec ceci, les pensions alimentaires à vie. Je sais
que les gens qui sont avocats ici autour de la table vont me dire que c'est une
loi qui est fédérale, mais je le sais aussi. Je sais aussi que la pension
alimentaire à vie vient tout simplement pénaliser énormément la personne qui
la...
Mme Bilodeau (Lise) : ...bon.
On en a 3000, on a vérifié, à Québec, 3000 quelque monsieurs qui ont dépassé 65
ans et qui paient encore une pension alimentaire. Et quand on dit «à vie»,
c'est que c'est 78 ans aussi, parce que j'en ai eu un qui avait 78 ans, cette
année, qui payait une pension alimentaire. Alors, j'ai insisté, tantôt, j'ai
fait vite en vous disant : Je me suis toujours appuyée sur l'arrêt de la
Cour suprême, Boston versus Boston, qui dit qu'une pension alimentaire, qu'on
la paie après l'âge de 65 ans, après qu'on ait divorcé, c'est de la double
indemnité.
Alors, c'est là-dessus qu'on s'appuie pour
demander au gouvernement du Québec de nous aider fort, fort fort, de nous aider
énormément, même, pour faire... arriver à faire changer, bien sûr, cette loi au
niveau fédéral. Tout seuls, on n'y parvient pas, oubliez ça, mais je pense que,
si Québec nous tend la main, nous épaule, M. le ministre de la Justice peut
nous donner un sérieux coup de main... Je ne vous dis pas qu'on va réussir
demain, mais, moi, ça fait 25 ans que je le demande, parce que ça fait 25 ans
que j'entends des choses atroces et que j'ai entendu et non seulement entendu,
mais vu des choses atroces.
Alors, c'est pour ça que je vous
dis : Cette loi-là, il faut qu'elle soit changée, carrément. On est en
2024, ne l'oublions pas. Et qu'est-ce qui va se passer dans cinq ans? Dans cinq
ans d'ici, il y aura des dames qui paieront aussi ces pensions alimentaires à
vie. C'est ce qui s'en vient, là. Alors, il faut qu'il y ait une équité puis il
faut que ça cesse. Alors, pension alimentaire à vie, ça ne devrait même plus
exister en 2024.
Mme Haytayan : Merci. Merci
au nom de notre collègue, M. Asselin. Merci.
Le Président (M.
Bachand) :Mme la députée de Vimont.
Mme Schmaltz : Il me reste
combien de temps?
Le Président (M.
Bachand) :Trois minutes.
Mme Schmaltz : Ah! D'accord.
Parfait. Bonjour. Merci de votre présence à tous les trois. Le projet de loi
propose notamment d'étendre les mesures de protection des résidences familiales.
Est-ce que vous pensez que c'est une mesure essentielle pour assurer la
stabilité des enfants en cas, naturellement, de séparation de leurs parents?
Mme Bilodeau (Lise) : J'ai
perdu vos premiers mots, voulez-vous me les répéter s'il vous plaît?
Mme Schmaltz : J'ai dit que
le projet de loi proposait d'étendre des mesures de protection de résidences
familiales, et ensuite, je vous demandais...
Mme Bilodeau (Lise) : Alors,
le projet de loi, vous me dites que le projet de loi propose des mesures pour
étendre les protections au niveau des enfants. C'est ça, votre question? M.
Santerre, je vous laisse répondre.
M. Santerre (Mathieu) : Parfait.
Oui. Bien, écoutez, de la même manière que... L'association est tout à fait
confortable avec le principe du projet de loi, je pense que, de manière
générale, le point de vue est plutôt positif de ce côté-là. Sauf que ce qu'on
dit aussi, c'est de faire attention dans le contexte où il existe déjà
plusieurs situations de pension sans termes, même si ce n'est pas tous les cas,
bien sûr. Mais il faut faire attention aussi à l'interrelation avec la
prestation compensatoire qui pourrait s'en venir avec le projet de loi, parce
que, dans certains cas, ça pourrait aggraver des situations problématiques.
Mme Schmaltz : Lesquelles?
M. Santerre (Mathieu) : Bien,
une personne qui est déjà sans le sou, là je te laisserais peut-être élaborer.
Mme Bilodeau (Lise) : Bien,
écoutez, j'ai un cas, là, je peux vous le dire sans donner son nom. C'est un premier...
C'est un conjoint de fait qui a déjà eu deux enfants avec une première dame.
Bon, puis vous savez que les gens tombent en amour, j'aime bien l'expression
«fall in love». Et, avec la deuxième dame, bien, il vient d'avoir un deuxième
enfant. Alors, avec... Puis probablement qu'il est très jeune, mais il y aura
probablement une troisième dame avec lequel il aura un enfant. Alors là, ça en
fait, des enfants, là, ça en fait cinq, là.
Alors, c'est sûr que, comme je le disais
tout à l'heure à M. le ministre, la Justice, il ne faudrait pas oublier aussi
les enfants antérieurs dans les relations antérieures. Parce que dans votre
nouveau projet de loi, on devient, naturellement, de ce projet de loi là, du
moment qu'on a fait un enfant, on devient tributaire, on n'a pas le choix. Mais
il faudrait, quand on dira qu'il y aura une pension à payer pour cet enfant-là
puis qu'il y aura une compensation à donner, il faudra penser qu'antérieurement
le monsieur a butiné puis qu'il a eu des enfants, puis il ne faut pas les
ignorer, ces enfants-là.
Mme Schmaltz : Bien, c'est un
choix personnel aussi à la personne. On ne peut pas non plus... On ne peut pas
être responsable de ces choix...
Mme Bilodeau (Lise) : Oui, je
suis d'accord. Le gouvernement ne peut pas embrasser tout le monde. Ça, je suis
bien d'accord avec vous. Mais Il n'en demeure pas moins que souvent on me
reproche, dans mon association, qu'on ignore toujours les enfants du premier
lit. Alors, je suis consciente de ce que vous dites aussi. Alors, il faut...
Oui, s'il y a quelqu'un qui pense aux enfants, c'est bien moi. Alors, c'est
pour ça que je me dis qu'il faut pour être juste avec tous les enfants qui sont
là.
Le Président (M.
Bachand) :Il reste 20 secondes, Mme la
députée de Vimont.
Mme Schmaltz : Non. Ça va
aller. Je vous remercie.
Le Président (M.
Bachand) :Merci beaucoup. M. le député de
l'Acadie pour 20 minutes, 24, s'il vous plaît.
• (14 h 30) •
M. Morin : Merci, M. le
Président. Alors, bon après-midi, Mme Bilodeau, M. Santerre et M. Thibault.
J'ai quelques questions, bien sûr, directement en lien avec le projet de loi,
parce qu'il y a d'autres groupes qui nous ont donné évidemment leurs opinions.
J'attire votre attention sur l'article 521.22 du projet de loi, qui parle
évidemment de la fin de l'union parentale, et le législateur a utilisé les mots
«par la manifestation express ou tacite de la volonté». Certains groupes nous
ont dit que, bien, évidemment, c'était difficile de définir une... en fait, une
fin...
14 h 30 (version non révisée)
M. Morin : ...tacite. Donc,
quelle est... quelle est votre opinion là-dessus?
Mme Bilodeau (Lise) : Sur la
fin de l'union parentale?
M. Morin : Oui.
Mme Bilodeau (Lise) : Bien,
la fin en soi, ça dépend ce que vous voulez me faire dire. Est-ce que vous
voulez dire que le couple, après x années de vie commune, décide de se laisser?
Est-ce que c'est de cette question-là que vous me posez?
M. Morin : En partie, oui. En
fait, ce que je dis, c'est que le législateur souligne que cette union-là, elle
va prendre fin par la manifestation expresse ou tacite de la volonté des
conjoints ou de l'un des deux, et ça semble être une expression, en fait,
innovante de la part du législateur, ce qui pourrait entraîner éventuellement
des contestations judiciaires. Donc, je voulais savoir si vous avez réfléchi à
ça. Et quelle est votre opinion là-dessus?
Mme Bilodeau (Lise) : Je
pourrais toujours vous donner une opinion par écrit si vous le souhaitez, mais
verbalement, moi, je pense que... Vous le savez, nécessairement, que, si l'union
parentale se termine, il y aura... ça ne se fera pas. Je n'y crois pas.
Rarement ça va se terminer dans les bonnes grâces. Il y aura toujours conflit,
ça, c'est sûr et certain, et on va nécessairement aboutir devant les juges.
M. Morin : D'accord. Je
vous... Je vous remercie. Le législateur souligne aussi, à 521.27, que, dans le
cas de la fin de l'union parentale, en ce qui a trait, entre autres, à la
résidence, bien, les conjoints auraient 30 jours pour déposer une requête au
tribunal. Est-ce que vous trouvez que c'est trop court, 30 jours, dans votre
expérience?
Mme Bilodeau (Lise) : Pour
déposer une requête au tribunal pour demander?
M. Morin : Pour la fin de l'union
parentale en ce qui a trait au droit d'usage de la résidence familiale.
Mme Bilodeau (Lise) : C'est...
C'est compliqué ça aussi. J'aimerais peut-être vous donner une réponse par
écrit...
M. Morin : Par écrit.
Mme Bilodeau (Lise) : ...mais
30 jours... Laissez-moi vous dire, quand vous dites à quelqu'un : Tu
ramasses tes sacs et tu sors, 30 jours pour te retourner de bord, c'est
beaucoup. Je trouve que ce n'est pas suffisamment de temps, monsieur.
M. Morin : D'accord. Donc, ça
ne serait pas suffisamment.
Mme Bilodeau (Lise) : D'accord?
M. Morin : O.K., très bien.
Je vous... Je vous remercie. Dans la composition du patrimoine d'union
parentale, le projet de loi énonce certains biens, dont la résidence familiale,
c'est à l'article 521.30, les meubles à l'usage du ménage, les véhicules
automobiles utilisés pour les déplacements de la famille. Plusieurs groupes
nous ont dit que ce n'était pas suffisant puis que ça ne protégeait pas
nécessairement assez les enfants. Est-ce que vous avez une opinion là-dessus?
Est-ce que vous trouvez que c'est suffisant ou pas assez suffisant ou s'il y a
d'autres biens qui devraient être inclus?
Mme Bilodeau (Lise) : Vous
allez peut-être me trouver un peu spéciale, mais moi, je trouve que c'est
suffisant.
M. Morin : C'est suffisant?
Mme Bilodeau (Lise) : Oui.
M. Morin : O.K.
Mme Bilodeau (Lise) : Parce
que moi, je les vis, les drames, à tous les jours, et souvent les papas, parce
que c'est les papas que je représente et les nouvelles conjointes, repartent à
zéro. Que ce soit avec cette nouvelle loi là, que ce soient les conjoints de
fait ou que ce soient les gens mariés, quand il y a rupture, avec les temps qui
courent, on repart à zéro. Alors, quand vous me posez la question tout à l'heure,
30 jours pour se tourner de bord, monsieur, ce n'est pas beaucoup. Alors, moi,
j'espérais un peu plus large, qu'on donne un peu plus de temps à la personne à
se retourner. Et la même chose pour cette réponse-là que je vous fais. Je
voudrais qu'on soit...
M. Morin : Donc, ce serait...
pour ce qui constitue le patrimoine...
Mme Bilodeau (Lise) : C'est
suffisant.
M. Morin : ...ça serait
suffisant.
Mme Bilodeau (Lise) : Oui.
M. Morin : D'accord. C'est
bien. Le projet de loi permet aussi, à 521.33, aux conjoints en cours d'union
de se retirer d'un commun accord de l'application des dispositions du présent
chapitre, donc du patrimoine de l'union parentale. Il y a... Il y a des... Il y
a des notaires qui nous ont dit : Bon, par acte notarié, c'est... c'est
excellent, évidemment, c'est un acte authentique, mais un notaire peut très
bien conseiller les deux parties. Il n'y a pas de... Il n'y a pas de conflit,
il n'y a pas de souci. Il y a aussi des avocats qui nous ont dit : Non,
non, il faudrait absolument qu'il y ait deux conseillers juridiques
indépendants qui conseillent les parties.
Vous, dans votre expérience avec les gens
que vous rencontrez dans votre pratique, ça serait quoi, pour vous, la
meilleure façon de procéder pour obtenir un consentement libre et éclairé si un
des... un des conjoints se retire?
Mme Bilodeau (Lise) : Mais
moi, je pense que l'idée de garder le notariat, garder les notaires est
parfaite. Pourquoi rajouter une couche concernant les avocats, déjà là qu'on
est en train de vous dire que c'est difficile, les ruptures, parce qu'on doit
faire intervenir les procureurs? Il faudrait aller rechercher les procureurs
pour tout simplement nous conseiller. C'est encore des sous. Et naturellement
il faudra... Ce n'est pas juste s'entendre comme ça. Il faudra peut-être
entériner cette entente-là. Alors, pourquoi ne pas aller carrément chez un
notaire qui pourrait faire, passez-moi l'expression... anglicisme, faire la
job? Pourquoi pas?
M. Morin : D'accord. Je
vous... Je vous remercie. Tout à l'heure, vous avez souligné... vous avez parlé
de la prestation compensatoire qui est prévue dans le projet de loi, mais vous
avez fait référence à une prestation compensatoire allégée. Est-ce que vous
pouvez nous en dire plus sur votre concept de prestation compensatoire allégée?
Mme Bilodeau (Lise) : Bien,
écoutez, j'ai songé, comme tout le monde autour de la table, qu'il arrive une
rupture. Si M. le juge décide que, je ne sais pas, moi, l'individu ou la dame a
vécu 10 ans avec et elle a besoin d'une prestation compensatoire, je n'ai pas d'objection...
Mme Bilodeau (Lise) : ...ce
qui m'inquiète, c'est que le juge décidera. Alors, si le juge décide que ça
coûte 150 000 $, je me suis posé la question : Il va répartir ça
comment? Il va dire : En trois versements pendant un an. Mais l'individu
qui se fait dire, du jour au lendemain : Tu dois 150 000 $, puis
souvent ils ne sont pas très, très forts au niveau du crédit, bien, il va payer
ça comment? Alors, c'est là qu'arrive... c'est là que je vous disais qui
arrivent les drames que les hommes, tout simplement, font des dépressions puis
qu'ils commettent des choses pas très catholiques. Alors, il faut... c'est
là-dessus que j'insiste, il faut être attentif. Comment... comment on va
répartir les sommes? Et ces sommes-là, comment... comment elles vont être...
Est-ce que c'est une seule somme à payer en un seul coup ou bien c'est une
somme qui pourra tout simplement être répertoriée mensuellement? Vous n'en parlez
pas et on ne le sait pas. Alors, c'est la question que je vous posais, voilà.
M. Morin : Donc... donc, au
fond, votre... votre prestation compensatoire allégée, ce serait en lien avec
la façon dont...
Mme Bilodeau (Lise) : La
personne peut payer.
M. Morin : ...un débiteur
peut éventuellement payer ou défrayer le montant qui a été alloué. D'accord. Il
y a aussi des... des présomptions dans le projet de loi qui aident, évidemment,
à... Bien sûr, c'est l'essence même d'une présomption. Est-ce que vous avez
réfléchi à ça? Est-ce que vous pensez que c'est suffisant, ce n'est pas
suffisant, qu'on devrait les enlever?
Mme Bilodeau (Lise) : Voulez
-vous me répéter? Parce que j'entends mal avec... Ce n'est pas vous, c'est
plutôt... ces micros. C'est le début de votre phrase que je perds tout le
temps.
M. Morin : O.K. Non, bien,
c'est ça, c'est que le projet de loi, le législateur amène aussi certaines
présomptions pour établir certains éléments. Qu'est-ce que vous pensez des
présomptions qui sont dans le projet de loi?
M. Santerre (Mathieu) : Je
m'excuse, M. le député, vous parlez spécifiquement de quelle section ou quel
article?
M. Morin : Bien, en fait, il
y a, entre autres, dans le partage du patrimoine d'union parentale. Et, ce
matin, il y a aussi un groupe qui nous a parlé de ça, entre autres à 521.41,
«un conjoint peut, à compter de la fin de l'union, renoncer en tout ou en
partie au partage du patrimoine de l'union parental. Il ne peut y renoncer que
par acte notarié. La renonciation doit être inscrite au registre. À défaut
d'inscription dans un délai d'un an à compter du jour de la fin de l'Union, le
conjoint renonçant est réputé avoir accepté.» Donc, avez-vous réfléchi à ça?
M. Santerre (Mathieu) : Malheureusement,
on n'a pas entendu la présentation à laquelle vous faites référence, mais on
vous promet de vous revenir avec une réponse sur lesdites présomptions, M. le
député.
M. Morin : Merci. Merci
beaucoup. Ça termine mes questions, m. le Président. Je vous remercie.
Le Président (M.
Bachand) :M. le député de
Saint-Henri–Sainte-Anne pour 3 min 28 s, s'il vous plaît.
M. Cliche-Rivard : Merci
beaucoup. Bon, vous nous avez parlé de la pension alimentaire à durée
indéterminée, là. Vous avez dit... sans date butoir. Vous dites : Sauf
exception, vous parlez de l'âge de la retraite, là. J'aimerais ça vous entendre
sur le genre d'exceptions que vous verriez comme utiles, est-ce que...
Mme Bilodeau (Lise) : Concernant
les pensions alimentaires indéterminées.
M. Cliche-Rivard : Exact.
Mme Bilodeau (Lise) : Sauf
exception.
M. Cliche-Rivard : Vous
dites : À perpétuité, je pense.
Mme Bilodeau (Lise) : Quand
on met ça, c'est sûr qu'on suscite beaucoup d'interrogations. Il peut arriver
des cas dans cette vie-ci, pour des raisons x, y, z que, bon, vous avez affaire
à un mariage... à un mariage traditionnel, que ça fait 30 ans que les
couples sont ensemble, qu'il y a une rupture, que la dame est handicapée, que
la dame est malade, je n'ai pas objection à ce qu'on lui paie une pension
alimentaire. Maintenant, quand je dis : Avec exception, c'est certain que
je serais plutôt de celles qui... j'aime bien mon terme, qui allégeraient à
partir de l'âge de la retraite, du monsieur de 65 ans... qui pourrait alléger
cette pension alimentaire là pour lui donner, lui, la chance de vivre un peu.
Alors, c'est un peu dans ce sens-là que je vous disais ça, parce qu'il y a des
cas d'exception dans toute chose.
M. Cliche-Rivard : Mais vous
l'avez bien dit, là, c'était votre terme que j'utilisais, ce n'est pas le mien.
Je voulais juste être clair là-dessus. Il y a un volet aussi sur la violence
judiciaire, l'octroi de dommages-intérêts. Est-ce que vous avez une position
sur cette proposition-là?
Mme Bilodeau (Lise) : Bien,
écoutez, moi, j'ai été tellement contente quand j'ai lu que, franchement, on
décidait de faire quelque chose là-dessus. Vous savez, après 25 ans de
travail sur le terrain, j'en ai lu des jugements, j'en ai reçu des gens et j'en
ai vu des choses, j'en ai entendu. Je vous ai dit que je ne nommerai aucun
avocat, mais je suis de celles qui peuvent vous dire que ça existe vraiment. Ce
n'est pas tout simplement un conte de fées. Et le fait que M. le ministre de la
Justice ait décidé de cadrer les situations, les situations, bien sûr, de
rupture, je trouve que c'est un plus dans ma société. Soyez assurés de ça. Et
je ne parle pas à travers mon chapeau.
M. Cliche-Rivard : Et de
votre connaissance, là, est-ce que, bon, les victimes ou ceux qui se rendent
responsables de violences judiciaires...
Mme Bilodeau (Lise) : Qui
seront éventuellement poursuivis...
M. Cliche-Rivard : Ce sont
plus des hommes, ce sont plus des femmes, selon votre connaissance?
Mme Bilodeau (Lise) : Je
n'aimerais pas me poser sur le sexe, mais je devrais vous dire qu'on devrait
faire un suivi attentif sur ça. Parce qu'autrement, il n'y a pas d'équité, il
n'y a pas de justice.
• (14 h 40) •
M. Cliche-Rivard : Finalement,
sur le volet de l'application de la loi, je ne sais pas si vous étiez...
M. Cliche-Rivard : ...s'est
positionné là-dessus, à savoir, là, on parle de juin 2025. Donc il y a une
période quand même d'un an avant que ça ne rentre en vigueur. Aviez-vous fait
ou étudié la possibilité, là, pour les enfants qui sont nés maintenant, pour
les enfants qui naîtront après, pour le changement, est-ce que vous avez une
position sur...
Mme Bilodeau (Lise) : ...je
n'ai pas porté tellement attention sur ça, monsieur.
M. Cliche-Rivard : O.K. Vous,
vous... Avez-vous une position sur le fait que, bon, idéalement, il faudrait
que ça soit un programme ou disons une application la plus globale possible
avec le moins de régime transitoire possible, avec le plus d'application...
Mme Bilodeau (Lise) : Tout à
fait. Effectivement, c'est quelque chose qui viendrait tout englober sans qu'on
crée de précédent, soit d'un côté ou de l'autre.
M. Cliche-Rivard : Et bon,
vous avez parlé, puis M. le ministre en a fait mention, que ce n'était pas du
tout dans ce projet de loi qu'on traitait du permis de conduire, mais vous
aviez quand même un message à passer, si je ne m'abuse, là.
Mme Bilodeau (Lise) : Oui,
parce que la majorité des gens qui sont réfractaires à la pension alimentaire,
ce ne sont pas parce qu'ils sont mauvais payeurs. Hein, avec le temps, j'ai
l'expérience, souvent, c'est le manque, le manque d'éducation. Un manque
d'éducation m'amène à faire des petites jobines, passez-moi l'expression. Puis
nécessairement, j'ai un petit salaire. Puis il arrive ce qui arrive. On roule,
on roule. On a... Une année, on a une job, l'année suivante on en a une autre.
À travers tout ça, il faut s'ajuster parce qu'il y a des retards dans la
pension alimentaire. À un moment donné, le gars est sur l'assurance chômage
pendant six semaines, sept semaines, huit semaines, et il y a encore un trou.
Alors, il n'y arrive pas. Alors si, justement, on va saisir le permis de
conduire de ces gens-là, vous les mettez dans la bouette jusqu'aux oreilles,
c'est aussi simple que ça.
M. Cliche-Rivard : Dans un
cas où ce serait démontré, là, qu'il y a de la mauvaise foi
Mme Bilodeau (Lise) : Absolument.
M. Cliche-Rivard : Là, vous
n'avez pas d'enjeu.
Mme Bilodeau (Lise) : Bien,
écoutez, j'en reçois trop de monsieurs qui sont tous à bout de souffle. Ils ne
peuvent plus payer la pension alimentaire. Puis le ministère du Revenu, lui,
des excuses, il n'en veut pas. Il veut la pension alimentaire. Vous venez
saisir le permis de conduire parce que ça fait six mois qu'il ne paie pas. On
fait quoi? Il va retourner travailler comment? Mais la majorité, je vous l'ai
dit, ils gagnent leur vie avec leur permis de conduire. C'est pour ça que je
suis un peu plus cadré là-dessus.
M. Cliche-Rivard : Mais ça...
Ça, je l'entends, mais on peut imaginer d'autres situations où il y a
évidemment de la mauvaise foi à ne pas payer sa pension alimentaire.
Mme Bilodeau (Lise) : Je
voudrais vous dire, M., qu'il y a de la mauvaise foi, mais avec les
statistiques qu'on a été chercher, sur mon 9 % de bonhommes, excusez
l'expression, qui sont réfractaires à la pension alimentaire, est-ce que j'en
ai... est-ce que j'en ai 5 % qui pensent vraiment : Je ne la paie
pas?
M. Cliche-Rivard : O.K.
Pensez-vous que...
Mme Bilodeau (Lise) : C'est
parce que j'ai été chercher les statistiques.
M. Cliche-Rivard : Mais pour
ces gens-là vous seriez disposée à ce qu'il y ait...
Mme Bilodeau (Lise) : Écoutez,
je suis genre très humain, hein? Alors, je trouverais peut-être le moyen de les
faire travailler dans la société pour essayer de combler quelque chose comme
ça, des travaux communautaires. Enfin, bref, c'est plein de solutions, mais
je...
M. Cliche-Rivard : O.K. Ça
fait que vous êtes prête à quelque chose mais vous pensez que le permis de
conduire, ce n'est pas le moyen. Mais vous êtes prête à un malus là. Vous êtes
prête à faire quelque chose.
Mme Bilodeau (Lise) : Vous
avez tout compris.
M. Cliche-Rivard : Parfait!
Merci beaucoup.
Le Président (M.
Bachand) :Merci beaucoup. M. le député de
Jean-Talon, en 2 min 38 s, s'il vous plaît.
M. Paradis : Bonjour. Donc,
je comprends bien qu'au centre de ce que vous nous dites aujourd'hui, c'est un
ex-conjoint qui paie une pension à vie, se sépare de son nouveau, sa nouvelle
conjointe, puis là doit payer une prestation alimentaire... prestation
compensatoire, c'est trop. Il faudrait une prestation compensatoire allégée. Je
peux comprendre que vous le voyez un petit peu.... C'est ça que vous nous
dites, là, une compensation allégée ou moins contraignante. Ça, c'est la
perspective de l'ex-conjoint. Mais la nouvelle conjointe, elle, qui regarde ça
puis qui dirait : Bien, moi, j'ai... j'ai droit, selon les critères
établis par la jurisprudence, à une prestation compensatoire x. Puis là, on
dirait : oui, mais parce que M. avait une autre relation avant, elle va
être allégée. Comment vous réconciliez ça? Parce que moi, je suis très sensible
à ce que vous nous dites. Mais, s'il faut faire attention de ne pas corriger
l'inégalité dont vous nous parlez par une nouvelle inégalité, comment vous
conciliez ça, de la perspective de la nouvelle conjointe?
M. Santerre (Mathieu) : Simplement
un petit point. Ce qui est recommandé, puis on ne pourra pas vous le
transmettre par écrit également, là, mais c'est qu'on tienne compte de
l'ensemble des enfants dans l'établissement de la prestation compensatoire,
donc qu'on tienne compte de la situation financière objective. Il ne s'agit
surtout pas d'en désavantager un autre ou d'aller chercher un autre effet
pervers, là. Donc...
M. Paradis : ...cette
prestation compensatoire allégée, comment elle fonctionnerait pour que ça soit
équitable de ce côté-là mais équitable de ce côté-là aussi?
Mme Bilodeau (Lise) : Tu me
permets? Il faudrait tenir compte, bien sûr, je pense qu'on l'a dit dans le
document... il faudrait tenir compte, bien sûr, du salaire du monsieur. À un
moment donné, on n'a pas le choix, là, parce que c'est sur son salaire qu'on va
aller chercher les sous. Alors, il faudrait tenir compte de sa situation
financière, c'est le mot que je voulais vous dire. En tenant compte de sa
situation financière, il y a moyen d'être équitable. Vous vivez avec une
personne pendant quatre, cinq ans, vous savez très bien c'est quoi, sa
situation financière. Alors, si moi, je suis votre conjointe et que je décide
de vous laisser, et puis c'est bien de valeur, moi, je demande, je ne sais pas,
moi, 200 000 $, 300 000 $, puis quand je sais que l'autre à
côté, c'est un petit journalier, vous comprendrez bien que la balance, là... Ce
n'est pas parce que j'en veux aux femmes, loin de là... de moi, là, mais
comprenez-moi bien, ce que je veux, moi, c'est une équité. Alors, allons voir ce
qui se passe dans le portefeuille de M., allons voir si c'est raisonnable,
qu'il paie cette pension-là, puis, si c'est raisonnable, go, allons-y! Mais, si
on sait qu'en bout de piste il n'y arrivera pas puis que...
Mme Bilodeau (Lise) : ...ça va
être saisie après saisie, saisie après saisie, est-ce que... Justement, est-ce
qu'on est en train d'aider la justice? Non. Alors, c'est un peu ce que j'essaie
de vous dire, on... vous devriez tout simplement porter davantage attention à
ce que gagne la personne qui va, je dis bien «la personne», là, parce que ça
peut être une dame aussi... qui va payer cette prestation compensatoire. C'est
quoi, son portefeuille financier? Mais je pense qu'il faut aller jusque là.
Le Président (M.
Bachand) :Merci beaucoup. M. Santerre, M.
Thibault, Mme Bilodeau, merci beaucoup, merci infiniment d'avoir été avec nous.
Je suspends les travaux quelques instants
pour inviter notre prochain témoin. Merci.
(Suspension de la séance à 14 h 46)
(Reprise à 14 h 48)
Le Président (M.
Bachand) :À l'ordre, s'il vous plaît! La
commission reprend ses travaux. Il nous fait plaisir d'accueillir Me Robert
Leckey, titulaire de la Chaire Samuel Gale, de la Faculté de droit de
l'Université McGill. Merci infiniment d'être avec nous aujourd'hui. Alors,
comme vous savez, vous avez 10 minutes de présentation, après, on aura une
période d'échange avec les membres de la commission. Alors, maître, la parole
est à vous.
M. Leckey (Robert) : Merci de
m'avoir invité à vous adresser la parole. Permettez-moi de commencer par un peu
d'histoire. On parle souvent de l'autonomie et du choix comme des idées
centrales du droit familial. Ce sont des valeurs importantes, mais elles
doivent aussi s'inscrire dans la tradition québécoise de favoriser la
solidarité familiale et la protection des personnes vulnérables. Par exemple,
il est prétendu que les protections matrimoniales robustes sont réservées aux
couples qui choisissent le mariage.
• (14 h 50) •
Or, lorsque le législateur a renforcé le
droit matrimonial durant les années 80, une forte pression sociale
incitait la vaste majorité des couples à se marier sur une petite minorité
d'enfants... naissaient de parents non mariés. À l'époque, en créant le régime
de la résidence familiale et ensuite le patrimoine familial, le législateur
agissait donc au profit de presque tous les enfants. Mais la société... évolué
depuis, à un tel point que la majorité des enfants québécois ne bénéficient pas
entièrement du cadre protecteur du droit familial en raison du choix de leurs
parents. Cette situation aurait paru aberrante...
M. Leckey (Robert) : ...à vos
prédécesseurs. L'État a pour rôle et responsabilité de mettre en place un droit
familial qui n'exclut pas la majorité des enfants.
Je commence avec deux recommandations
qui... l'orientation générale du régime d'union parentale proposé dans le
projet de loi no 56. Première recommandation, le régime doit s'appliquer
immédiatement aux familles composées de conjoints de fait qui sont parents du
même enfant. Toutefois, dans sa mouture actuelle, le projet de loi propose une
application prospective. Ce choix n'est pourtant pas justifié. La prémisse de
la réforme est que la prise en charge de l'enfant commun par des conjoints de
fait représente un engagement sérieux. La réforme reconnaît que l'éducation de
tels enfants engendre souvent un déséquilibre économique. Si le patrimoine
d'union parentale vise à rectifier ce déséquilibre, pourquoi laisser de côté
les familles existantes? Pourquoi le souci de stabiliser la résidence familiale
des enfants ne bénéficierait-il pas à ceux qui sont déjà nés?
En 1989, le législateur a fait le choix de
l'application immédiate en instaurant le patrimoine familial. Le patrimoine
familial s'imposait ainsi aux mariages existants, sauf si les époux
s'entendaient pour y déroger dans les 18 mois suivant la réforme. Le
législateur a ainsi équilibré la justice économique et la protection des
personnes vulnérables par rapport à l'autonomie. Faute d'entente entre les deux
époux, le mariage était sujet au nouveau régime. Après tout, le législateur
agissait car il croyait sa réforme juste.
Deuxième recommandation, le patrimoine
d'union parentale devrait être identique au patrimoine familial du mariage.
Comme vous le savez, la proposition du patrimoine d'union parentale est calquée
sur le patrimoine familial des époux. Toutefois, le patrimoine d'union
parentale est moins protecteur pour trois raisons: le bassin de biens affectés
est plus restreint... Les déductions de la valeur à partager sont plus
importantes et les conjoints peuvent s'y soustraire. Du point de vue de l'accès
à la justice et de la connaissance du droit, il est indûment complexe
d'introduire un deuxième patrimoine dans le droit familial québécois. Un droit
simple et prévisible s'impose. De fait, les justiciables ne maîtrisent... pas
le droit matrimonial qui est en place depuis des décennies. Je vous conseille
donc fortement de favoriser la simplicité en utilisant le patrimoine familial
du mariage. Ce choix permettrait d'appliquer sans difficulté la jurisprudence
développée depuis 1989, renforçant ainsi la prévisibilité.
De toute manière, sur le fond, le
patrimoine familial du mariage est souvent mal compris. Il est parfois qualifié
de carcan, et l'on agite l'épouvantail de la peur de marier les couples par
force. Il est vrai que les époux ne peuvent y renoncer avant la fin du mariage.
Ne perdons toutefois pas de vue la souplesse du patrimoine familial. Ces effets
divergent vastement selon les circonstances du couple. Par exemple, pour le
couple composé de conjoints âgés, les résidences payées, les régimes de
retraite garnis, partager le patrimoine familial n'aurait aucun effet. Il
n'aurait pas de grands effets non plus dans le cas d'un couple dit moderne et
indépendant, lorsque les conjoints sont copropriétaires des résidences et
épargnent chacun pour leur retraite. En revanche, c'est lorsque les conjoints
s'enrichissent à deux vitesses durant l'union que le patrimoine familial fait
sentir ses effets.
Quant à la proposition d'union parentale
dans le projet de loi, cette union survient souvent à la suite de la prise en
charge de l'enfant commun. Dès lors que l'union parentale naît d'un tel
engagement sérieux, pourquoi donne-t-elle lieu à un patrimoine moins protecteur
que celui du mariage pour les conjoints vulnérables économiquement?
Ensuite, je vous fais part d'une autre
recommandation, celle-ci plus ambitieuse. Il s'agit de la reconnaissance d'une
obligation alimentaire entre...
M. Leckey (Robert) : ...avec
tous les conjoints de fait, avec ou sans enfants, durant leur union et sur une
base exceptionnelle après la rupture. En formulant cette idée, je ne m'inspire
pas des provinces du common law. Au contraire, je fais mienne la proposition
émise en 1978 par l'Office de révision du Code civil. L'idée a donc des racines
profondes au Québec.
Commençons par les justifications de
l'obligation alimentaire au sein de l'union parentale. Une pension alimentaire
au profit d'une conjointe peut viser, entre autres, à répartir les conséquences
économiques découlant du soin des enfants. Ces contrecoups peuvent survenir
tant durant l'union qu'après la rupture.
Commençons par le désavantage financier
encouru durant l'union. Même où est-ce que les deux parents s'impliquent dans
l'éducation de leurs enfants, l'un, ça désavantage souvent plus que l'autre.
Encore aujourd'hui, c'est fréquemment la femme. Ainsi, la mère se retire
temporairement du marché du travail afin de se consacrer aux enfants, elle
diminue ses heures, elle refuse des promotions ou n'en sollicite pas. Pendant
ce temps, les revenus de l'autre augmentent.
L'obligation alimentaire est importante
car les mesures proposées dans le projet de loi n° 56 ne peuvent
rééquilibrer ces conjoints lors d'une rupture éventuelle. Le patrimoine d'union
parentale aiderait seulement si le parent plus fortuné a investi ses revenus
supérieurs dans la résidence familiale. La prestation compensatoire, quant à
elle, n'aiderait la conjointe appauvrie que si elle peut prouver un lien causal
entre ses efforts et un enrichissement durable du patrimoine de l'autre.
Ensuite, rien dans les propositions ne
tiennent compte des répercussions économiques qui découleront des fonctions
parentales après la rupture. Pourtant, de nombreux conjoints de fait se
séparent alors que leurs enfants sont jeunes. Encore une fois, c'est fort
probablement la mère qui s'investit dans les tâches parentales à ses frais
après la fin de l'union.
Toutes ces raisons appuient ma proposition
de doter l'union parentale et, en fait, l'union de fait d'une obligation
alimentaire entre les conjoints... excusez-moi, de doter l'union parentale
d'une obligation alimentaire, mais cette obligation serait aussi appropriée
même dans les cas de conjoints de fait sans enfant commun, pour qui le projet
de loi ne propose rien. Après tout, la présence d'un enfant commun n'est pas le
seul déclencheur d'une interdépendance, voire un déséquilibre. Le législateur
québécois a déjà reconnu cet état de fait en assimilant les conjoints de fait,
avec ou sans enfants, aux époux dans les lois sociales et fiscales.
Je vous suggère qu'il est temps que le
droit familial s'adapte lui aussi à la réalité sociale des familles
québécoises. Il serait aussi prudent d'éviter de multiplier les distinctions
entre enfants afin de ne pas contrevenir à la garantie constitutionnelle
d'égalité. Je vous remercie.
Le Président (M.
Bachand) :Merci beaucoup, Maître, M. le
ministre, s'il vous plaît.
M. Jolin-Barrette : Oui.
Merci, M. le Président. M. Leckey, bonjour, merci de participer aux travaux de
la commission parlementaire relativement au projet de loi n° 56. D'entrée
de jeu, je voudrais vous demander quelles sont les mesures, à votre avis,
positives du projet de loi n° 56?
M. Leckey (Robert) : Merci,
M. le ministre. Moi, j'ai... de la prise en compte des procédures de caractère
abusif. C'est une proposition de modification au Code de procédure civile. Je
pense aussi la préférence envers la prise en charge d'un dossier par un seul et
même juge, qu'il s'agisse du Code de procédure civile ou de la Loi sur la
protection de la jeunesse. Je pense, ces mesures-là promettent fort d'améliorer
l'expérience pour les justiciables.
M. Jolin-Barrette : Le fait,
là, qu'un juge suive le dossier, là, du... le plus souvent possible, là,
qu'est-ce que ça va changer, selon vous, pour les justiciables? Quel est
l'avantage de faire ça, que ce soit le même juge qui... qui puisse avoir un
lien avec le dossier?
M. Leckey (Robert) : Dans un
contexte où la prise de décision doit être extrêmement ancrée dans les faits de
chaque famille, ça permet à... au décideur de connaître le bagage de la famille
au lieu de recommencer à zéro chaque fois le matin de l'audience, en
rencontrant les parties de zéro.
• (15 heures) •
M. Jolin-Barrette : O.K. Sur
la question de la violence judiciaire, là, vous dans votre... dans votre
expérience de chercheur, là, est-ce que ça a été documenté? Est-ce qu'il y a...
15 h (version non révisée)
M. Jolin-Barrette : ...la
doctrine à ce niveau-là par rapport à nos tribunaux québécois ou au Canada,
sur... en matière familiale, sur l'abus de procédure en matière familiale?
Parce que c'est relativement un concept qui a été récemment nommé dans un
jugement, la violence judiciaire, mais qu'en est-il des auteurs, de la
doctrine? C'est quoi... C'est quoi l'état de la réflexion relativement à la
violence judiciaire?
M. Leckey (Robert) : En fait,
je suis désolé, mais je n'ai pas des choses à partager avec vous sur ce
sujet-là.
M. Jolin-Barrette : O.K. Mais
vous trouvez que c'est une... c'est une bonne idée de venir renforcer les...
bien, en fait, les outils pour les juges afin de faire cesser la violence
judiciaire?
M. Leckey (Robert) : La
violence judiciaire, il y a déjà des déséquilibres, des rapports de force en
situation de litige familial, et parfois, des questions de santé mentale, des
déséquilibres financiers, donc c'est sûr que, souvent, une partie est plus en
mesure de multiplier les procédures que l'autre. Donc, pour moi, c'est logique
que le juge puisse en tenir compte, mais je n'ai pas des recherches
scientifiques au bout de mes doigts.
M. Jolin-Barrette : Il y a
quelques intervenants qui sont venus, au cours de la semaine, qui nous ont dit :
Écoutez, ça dépend devant qui on tombe, dans le fond, à la cour, le résultat va
véritablement varier. Il y a eu... Il y a eu beaucoup d'interventions
là-dessus, qu'on a entendues. Est-ce que, dans le cadre de l'analyse des
jugements en droit de la famille, vous constatez des disparités par rapport aux
différents jugements de nos tribunaux, relativement aux cas qui sont soumis
devant les tribunaux? Quelle est.... Quelle est votre analyse par rapport à ça,
du point de vue des jugements ou des dossiers que vous analysez?
M. Leckey (Robert) : C'est
sûr qu'il y a beaucoup de discrétion. Donc, la question, c'est quoi, l'intérêt
de l'enfant, dans un certain cas, c'est une question discrétionnaire. La
question, c'est quoi, la prestation compensatoire qui serait due à la fin de l'union,
c'est beaucoup plus discrétionnaire, par exemple, que si on partageait le
patrimoine familial. Donc, il faut être conscients que plus on nage dans la
discrétion, dans l'incertitude, plus il y a un risque de variation de la
décision, plus, il y a le risque de voir le procès long et coûteux, plus la
preuve requise serait volumineuse. Donc, si j'insiste, par exemple, que le
patrimoine familial s'impose dans ce contexte, au lieu de miser aussi fort sur
la prestation compensatoire, c'est conscient des aléas de la discrétion
judiciaire, de l'accès à la justice, de vos besoins. Ce sont... Vous aimeriez
diriger les gens, résoudre leurs problèmes peut-être par la médiation,
peut-être par d'autres moyens afin de désengorger les tribunaux, mais je
trouve, avec l'emphase de la prestation compensatoire dans le projet de loi, on
invite tout le monde à se présenter au Palais de justice pour que les juges
prennent une décision discrétionnaire concernant l'enrichissement au sein du
mariage ou d'une union parentale.
M. Jolin-Barrette : On nous a
amenés à quelques reprises l'idée d'un tribunal unifié en droit de la famille.
Quelle est votre opinion sur l'idée d'un tribunal unifié en droit de la
famille?
M. Leckey (Robert) : Le
tribunal unifié semble avoir porté ses fruits dans d'autres provinces, donc ça
simplifie déjà les instances où la famille doit se présenter. Donc, c'est sûr
que c'est quelque chose qu'on pourrait très bien étudier dans le contexte
québécois.
M. Jolin-Barrette : O.K.
Parlons justement, là, du patrimoine d'union parentale, là. Moi, je crois
comprendre que vous souhaiteriez que dans le patrimoine d'union parentale, ça
soit la même chose que dans le patrimoine familial.
M. Leckey (Robert) : Moi, je
crois que ce serait beaucoup plus simple. Et je ne vois pas, si on... si vous
dites que l'union parentale est quelque chose de sérieux, que les conjoints se
sont engagés en décidant ensemble de mener à terme leur projet parental, je ne
vois pas pourquoi on leur donnerait un patrimoine plus mince que celui des
époux.
M. Jolin-Barrette : Et qu'est-ce
que vous pensez de la possibilité de se retirer du patrimoine d'union
parentale?
M. Leckey (Robert) : Pour
moi, si on peut résumer, tous les conjoints monoparentaux sujets au patrimoine
avec la possibilité d'y déroger, je pense que ce serait peut-être un bon
compromis puisque ça nécessiterait une prise de décision éclairée. On saurait
au moins que chacun, que les deux conjoints se sentent entendus, aidés par un
professionnel juridique, idéalement, pas deux. On offrait plus d'assurance qu'ils
comprenaient la situation et qu'ils... qu'ils prenaient des choix. À l'instant,
on n'a pas l'impression que les gens connaissent leurs droits ni qu'ils
prennent beaucoup de décisions éclairées. Mais la possibilité de dérogation, je
crois, serait plus solide.
M. Jolin-Barrette : Donc,
juste pour être...
M. Jolin-Barrette : ...sûr que
j'ai bien saisi, parce qu'au début ça a coupé un petit peu, là, mais dans le
fond, vous, vous souhaiteriez qu'on prenne le patrimoine familial pour les
conjoints de fait, donc tout le contenu du patrimoine familial, mais vous
laisseriez la disposition qui permet de se retirer, de retirer certains biens ou
de se retirer complètement du régime. Est-ce que j'ai bien compris?
M. Leckey (Robert) : Je crois
que ce serait... ce serait beaucoup meilleur que ce qui est proposé dans le
projet de loi n° 56, je crois que ça représenterait un meilleur équilibre des
objectifs qui se trouvent franchement parfois en tension : protection,
justice économique puis respect de l'autonomie et du choix. Donc, je crois que
ça respecterait tout de même le choix des conjoints.
M. Jolin-Barrette : Et
pourquoi inclure les REER, les fonds de pension, les régimes de retraite?
M. Leckey (Robert) : Pourquoi
les inclure? Pour les époux, parce que c'est souvent en fait la source la plus
importante de la richesse du couple, c'est accumulé durant l'union, et, si l'un
des conjoints est en mesure de contribuer à son REER, c'est peut-être fort bien
ce... que c'est puisque l'autre paie les épiceries, l'autre paie les dépenses
liées au ménage, l'autre paie les frais de la garde des enfants. Durant
l'union, on ne trouve pas l'argent de nulle part. Donc, si l'argent d'un des
conjoints va dans le REER, c'est puisque l'autre, peut-être, contribue. Donc,
ce sont des biens au profit de toute la famille.
M. Jolin-Barrette : Mais vous
ne trouvez pas que dans, supposons, la contribution, là, au régime de pension,
au régime de retraite ou au REER, il y a là un choix aussi qui est individuel?
Parce vous n'êtes jamais obligé de contribuer. Vous n'êtes pas obligé de
contribuer à votre fonds de pension, vous n'êtes pas obligé de contribuer à
votre REER, vous n'êtes pas obligé de contribuer au régime de pension. La seule
exception...
M. Leckey (Robert) : On peut
s'obliger...
M. Jolin-Barrette : ...c'est
la Régie des rentes, où là c'est prélevé automatiquement, vous ne pouvez pas y
renoncer, puis, si vous êtes travailleur autonome, dans le fond, vous
doublez... bien, pas vous doublez, vous payez la partie de l'employeur aussi...
bien, pas tout à fait, là, mais vous mettez davantage d'argent. Mais je veux
vous entendre sur ce... Parce que ça n'a pas été beaucoup abordé, chez ceux qui
disent qu'on devrait les inclure, là, sur le fait qu'il s'agit tout de même
d'un choix de contribuer. Alors, qu'est-ce qu'on fait avec la personne qui
refuse de contribuer à son régime de retraite, si on l'inclut? L'autre conjoint
pourrait se retrouver désavantagé si elle, elle a choisi de contribuer, alors
que, même dans un couple, un des deux partenaires, lui, décide sciemment de ne
pas contribuer au régime de retraite. Qu'est-ce qu'on fait avec ça?
M. Leckey (Robert) : Bien,
votre question s'applique à tous les biens dans le patrimoine familial. On peut
décider de rester locataire toute sa vie au lieu d'acheter une maison, on peut
louer des meubles, on peut louer des voitures, on peut ne pas avoir de voiture.
On a fait le choix, le législateur, au moins avec le patrimoine familial, que
les gens, tant et aussi longtemps qu'ils sont en famille, agissent d'une
certaine manière pour le compte de la famille, puis, à la fin de cette
entreprise commune, on répartit les fruits de cette union. Et donc toutes ces
questions-là... Il n'y a jamais d'obligation d'acheter une maison ni un sofa,
mais on dit qu'on va partager néanmoins ces biens accumulés durant l'union.
M. Jolin-Barrette : Vous ne
trouvez pas que ce que l'on propose, justement de permettre aux gens de
rajouter des biens, que dans le fond c'est un filet de sécurité minimal qu'on
met en place, le régime d'union parentale, notamment au bénéfice des enfants,
et que les gens conservent et maintiennent leur liberté de choix? Ils ont
décidé de se marier. Maintenant, ensuite, ils ont décidé d'avoir des enfants,
supposons, sans se marier, mais là il n'y a rien qui les empêche de les
ajouter, les autres éléments, les REER, les fonds de pension, tout ça, si les
adultes qui décident d'avoir un enfant ensemble décident de les inclure aussi.
Vous n'aimez pas ça, cette approche-là de permettre aux gens de décider par
eux-mêmes?
M. Leckey
(Robert) :
Si
l'«opting out»... Si l'«opting in» fonctionnait, on aurait un taux de
conventions de vie commune beaucoup plus haut que ce qu'on a au Québec
actuellement. Donc, la réalité, c'est que les gens ne prennent pas cette étape,
soit ils ne connaissent pas le droit, soit ils ne sont pas du même avis, les
deux membres du couple. Mais, si vous comme législateurs prenez le choix de
société de promouvoir les familles, d'appuyer l'éducation de nos enfants, pour
moi, c'est logique que vous présumez, même si c'est sujet à interrogation, que
vous présumez que ceux et celles qui ensemble élèvent nos enfants cèdent un peu
afin de ne pas laisser l'un pour compte à la fin de l'union au sein de laquelle
les enfants ont été éduqués.
M. Jolin-Barrette : Je vous
remercie, M. Leckey, pour votre témoignage en commission parlementaire. Je vais
céder la parole à mes collègues. Un grand merci pour votre présentation en
commission.
Le Président (M.
Bachand) : Merci. Mme la députée de Laval-des-Rapides, s'il
vous plaît.
• (15 h 10) •
Mme Haytayan : Merci, M. le
Président. Bonjour, Me Leckey...
Mme Haytayan : ...merci pour
votre temps. Merci d'être avec nous cet après-midi. Sur le délai de 30 jours en
ce qui concerne les mesures de protection de la résidence familiale, qu'est-ce
que vous en pensez? Combien de jours seraient raisonnables, selon vous? Si vous
pouvez un peu élaborer sur la question.
M. Leckey (Robert) : Je
trouve 30 très court. Évidemment, les choses varient d'une famille à l'autre,
mais le moment où la rupture, vraiment, survient où éclate, on n'est pas
nécessairement en mesure de prendre des décisions logiques, avisées tout de
suite. Donc, 60, 90, je pense, quelque chose comme cela, serait beaucoup plus
raisonnable que 30. 30 peut écouler vraiment vite.
Mme Haytayan : Donc, 90 jours
serait plus raisonnable, selon vous?
M. Leckey (Robert) : 60 ou 90
jours.
Mme Haytayan : ...ou 90
jours.
M. Leckey (Robert) : ...meilleur
que 30.
Mme Haytayan : D'accord,
merci. Aussi, pouvez-vous développer sur l'importance de permettre aux
conjoints de fait en union parentale d'hériter en l'absence de testament?
M. Leckey (Robert) : C'est
sûr, je trouve que c'est une amélioration dans le droit. Est-ce que ça change
grand-chose dans la vie des gens? Je ne sais pas. Si déjà la maison est détenue
en copropriété entre deux conjoints, peut-être ils ont déjà réglé la maison. Si
des gens ont déjà un testament, ils l'auraient fait, donc, mais, dans le cas où
quelqu'un décède sans testament, c'est sûr que ça peut offrir une certaine protection
au veuf ou à la veuve.
Mme Haytayan : D'accord.
Merci. M. le Président, est-ce qu'il nous reste un peu de temps ou...
Le Président (M.
Bachand) :Oui. 3min 15s.
Mme Haytayan : Parfait. Je
vais continuer, puis Louis... Parfait. Côté prestation compensatoire, est-ce
que vous considérez que ça pourrait apporter plus de prévisibilité, de
visibilité pour... côté enrichissement injustifié?
M. Leckey (Robert) : De
remplacer l'enrichissement injustifié sur le régime des obligations par la
prestation compensatoire?
Mme Haytayan : Non, si vous
pensez que la prestation compensatoire pourrait apporter plus de prévisibilité
que l'enrichissement justifié... injustifié, pardon, pardon, injustifié,
excusez-moi.
M. Leckey (Robert) : Oui,
oui. Non, puisqu'il y a déjà quand même un corpus de la jurisprudence en
enrichissement injustifié qui s'est développé au fil des ans. Il y a aussi une
jurisprudence concernant la prestation compensatoire, mais celle-là était
développée dans le contexte du mariage, pour les gens qui ont un patrimoine
familial, qui sont sujets à la société d'acquêts, qui contribuent aux charges
du ménage. Donc, la jurisprudence des époux pour la prestation compensatoire ne
serait pas pertinente pour les conjoints d'union parentale. Donc, je crois
qu'on repart à zéro, avec de nouvelles règles qui ne sont pas celles du régime
du mariage ni celles de l'enrichissement injustifié tel que développé par les
tribunaux. Donc, je crois que ça... je ne vois pas la prévisibilité dans ces
propositions.
Mme Haytayan : Merci. C'est
tout pour moi.
Le Président (M.
Bachand) :Oui, il reste 1min 40 secondes,
M. le député de Saint-Jean.
M. Lemieux : Merci beaucoup,
M. le Président. Me Leckey, je vous écoutais avec le ministre, tout à l'heure,
et j'ai bien noté que vous avez... vous avez commencé en disant : C'est
déjà une loi, entre guillemets, en parlant du mariage et de la vie commune...
que la vie commune était fiscalement et socialement comparable et, à toutes
fins utiles, c'était la même chose pour les citoyens, donc pourquoi pas la
partie légale, juridique dans laquelle on s'adresse dans le projet de loi no
56?
Je vous ai écouté avec le ministre...
parce que vous voudriez la rétroactivité, puis, à la limite, vous voudriez
que...
M. Leckey (Robert) : Non,
excusez-moi, pas la rétroactivité, l'application immédiate.
M. Lemieux : ...enfants.
M. Leckey (Robert) : Immédiate,
donc aujourd'hui, pour l'avenir, mais je ne toucherais pas les choses faites,
du passé.
M. Lemieux : Ah! c'est déjà
mieux. On s'entend bien, à partir de ce bout-là, c'est déjà plus clair. Mais
vous voudriez que l'union parentale soit presque un copié-collé de ce qu'on a
maintenant pour des époux qui se séparent, en termes de processus.
Là où je voulais en venir, c'est qu'il y
en a qui disent qu'on va trop loin, il y en a qui disent que ça ne va pas assez
loin. À quelque part, vous ne pensez pas que tout ce qu'on fait, c'est de
s'ajuster à... je ne vais pas parler d'humeur populaire, mais de s'ajuster au
seuil de tolérance social québécois par rapport à ces questions-là? Et j'avoue
qu'on est en retard, là, ça fait déjà 20 ans qu'on attend pour ce bout-là, là.
Le Président (M.
Bachand) :Alors, maître, en quelques
secondes.
M. Leckey (Robert) : Moi, je
crois qu'on peut appliquer plusieurs morceaux du droit matrimonial en
permettant aux conjoints d'union parentale d'y déroger. Et donc ce serait déjà
une différence importante, mais les morceaux de base seraient déjà connus, ce
serait plus prévisible, côté jurisprudence, plus prévisible, côté du public...
M. Leckey (Robert) : ...et
donc ce serait déjà une grande amélioration.
Le Président (M.
Bachand) :Merci, Dr Leckey. Merci. M. le
député de l'Acadie, s'il vous plaît.
M. Morin : Merci, M. le
Président. Bonjour, Pr Leckey, merci d'être avec nous cet après-midi. Selon
vous, le projet de loi n° 56, est-ce qu'il crée des catégories d'enfants?
M. Leckey (Robert) : Oui,
c'est manifeste.
M. Morin : O.K. Alors...
M. Leckey (Robert) : Entre
collègues, on se dispute, s'il s'agit de trois, ou quatre, ou cinq catégories
d'enfants, mais, oui, ça en crée ou ça multiplie.
M. Morin : D'accord.
Maintenant, quand... Parce qu'on nous dit que son objectif principal, c'est
évidemment d'avoir comme point d'ancrage les enfants, améliorer la condition
des enfants dans le cadre d'une union... l'union de fait. Donc, au fond, ce que
vous suggérez, c'est qu'il n'y en ait pas, de catégories d'enfants. Puis vous
avez dit tout à l'heure que, pour vous, la date de 2025, c'était juste trop
loin. Donc, qu'il n'y a pas de rétroactivité, mais il devrait y avoir une
application immédiate de la loi.
M. Leckey (Robert) : Moi, je
crois qu'il faut avoir une application immédiate aux enfants qui sont déjà
vivants. On a un temps limité, mais je suis... je me soucie aussi des enfants
qui sont éduqués au sein d'une famille recomposée, donc qui ne tomberaient
jamais sous la proposition telle qu'elle est formulée. Je pense... Ça
m'inquiète aussi, qu'on... également. Ce serait pensable, qu'au moins les
protections de la résidence familiale s'appliquent à tous les ménages où les
enfants sont présents, ce serait... Si on voulait vraiment protéger les
enfants, on commencerait par ça.
M. Morin : Parce que... En
fait, vous avez... vous devancez un peu ma question que je voulais vous poser,
mais c'est... c'est correct. Mais en fait, ce que je comprends, c'est qu'avec
le projet de loi actuel l'union parentale se forme quand il y a des conjoints
de fait qui deviennent père et mère d'un même enfant. C'est l'élément qui crée
finalement cette union parentale. Avant, bon, il y a... il n'y a pas d'union,
les gens peuvent vivre ensemble, ce n'est pas une union parentale. Donc, vous,
ce que vous proposez, au fond, c'est que, dès qu'il y a des conjoints qui
vivent ensemble, parce qu'ils ont pu avoir des enfants avant, ce serait donc
qu'il se crée une union parentale qui a des... qui aurait des impacts pour
l'ensemble de leurs enfants.
M. Leckey (Robert) : Ce n'est
pas nécessaire, que tout effet juridique découle d'une union parentale. C'est
totalement possible simplement d'imposer certains effets juridiques sur la base
des faits. Donc, ce n'est pas nécessaire de mettre tout le monde en union
parentale afin de... d'aménager certains effets juridiques. On peut déclarer
que la présence d'un enfant rattache à sa maison certaines protections.
M. Morin : O.K. Donc, en
fait, en fait, vous, indépendamment de comment on peut définir l'union
parentale, ce que vous dites, c'est qu'entre la loi... idéalement, quand la loi
va devenir en vigueur et qu'il y a des enfants dans un couple, bien, les
enfants, s'il y a une rupture, devraient pouvoir bénéficier d'un patrimoine d'union
parentale.
M. Leckey (Robert) : Je parle
plus des protections de la résidence familiale que du patrimoine. Je pense que
c'est là, l'élément de base pour la protection de stabilité de l'enfant et, en
fait, c'est l'élément dans le projet de loi actuelle qui n'est pas sujet à la
dérogation.
M. Morin : Et est-ce que vous
le limitez à la résidence familiale seulement et pas aux autres composantes du
patrimoine?
M. Leckey (Robert) : On
mélange une chose. Même pour les époux, les protections de la résidence
familiale ne se rattachent qu'à la résidence familiale. Là, vous évoquez aussi
la question de la répartition de la valeur des résidences secondaires, qui est
une autre question.
M. Morin : O.K. Et... Bon, il
y a plusieurs personnes ou groupes qui nous ont dit : Écoutez, nous, la
question des fonds de pension, des REER, on ne veut pas toucher à ça, il faut
que ça reste rattaché à la personne, pas question de mettre ça ensemble. Bon,
vous, vous n'êtes pas de cet avis-là.
M. Leckey (Robert) : Moi, je
crois que, si les... du couple s'entendent, évidement ils peuvent s'y
soustraire. Mais moi, je crois que ce serait plus juste, si on croit vraiment
que l'union parentale représente le même sérieux à peu près du mariage, qu'on
le traite ainsi.
M. Morin : Puis est-ce que...
Tout à l'heure, vous avez parlé d'un «opting in». Est-ce que vous êtes plus
préférable à un «opting in» ou à un «opting out»?
• (15 h 20) •
M. Leckey (Robert) : Moi, je
crois que la dérogation est beaucoup plus juste puisque, si on... si on y
déroge, conseillé par un juriste indépendant, on prend des décisions... Il y a
plus de chance qu'on prenne une décision éclairée. Si simplement on n'y pense
pas durant 20 ans de vie commune, on n'a jamais nécessairement...
M. Leckey (Robert) : ...ce
moment de prise de décision et d'information.
M. Morin : Et est-ce que
vous... Parce que le projet de loi parle, évidemment, que ce soit fait par acte
notarié. Est-ce... Puis il y en a qui nous ont suggéré... oui, l'acte notarié,
c'est bien, c'est un acte authentique, mais on voudrait que, par exemple, les
conjoints puissent obtenir des avis juridiques indépendants en plus du notaire.
C'est quoi, votre point de vue là-dessus?
M. Leckey (Robert) : C'est
délicat dans ce sens que, plus on ajoute des conseils juridiques, plus on
augmente les frais. Mais c'est sûr que c'est fort complexe pour une seule...
une seule personne notaire à considérer les deux personnes dont les intérêts
sont fondamentalement en conflit. Très délicat, ça, en fait. Donc, ce serait
mieux côté information, côté... côté prise de décision éclairée si chacun était
avisé indépendamment.
M. Morin : Pour qu'évidemment
chaque conjoint puisse, avec un conseiller juridique... qui, en fait, pourrait
être un autre notaire, ce n'est pas obligé d'être... d'être un avocat, là, en
fait, mais d'établir son patrimoine individuel au complet puis voir quelles
seraient les conséquences éventuellement.
M. Leckey (Robert) : Oui.
M. Morin : Parfait. Je
vous... je vous remercie. Il y a des éléments qui sont inclus dans le
patrimoine d'union parentale. C'est à l'article 521.30 du projet de loi.
Est-ce que vous pensez que ce qui est inscrit là c'est suffisant ou si on
devrait en ajouter? Parce qu'on nous a parlé beaucoup, beaucoup des résidences
secondaires ou d'autres biens qui sont... qui ne sont pas là. C'est ma
compréhension.
M. Leckey (Robert) : Moi,
j'aurais tendance à suivre exactement la même définition de biens que celle
pour le patrimoine familial. Donc, j'y ajouterai la résidence secondaire, le
cas échéant, puis le fonds de retraite.
M. Morin : Parfait, merci. On
nous a parlé aussi que la fin de l'union parentale par manifestation expresse
ou tacite, ce n'était peut-être pas évident. C'est à 521.22. On nous a parlé
beaucoup, en fait, de ce qui s'appelle l'association de vie commune, qui est
déjà dans le Code civil. Pensez-vous que les législateurs à 521.22 devraient
reprendre ce qui existe déjà dans le Code civil ou laisser la rédaction telle
qu'elle est là, expresse ou tacite?
M. Leckey (Robert) : Je pense
ce serait mieux d'utiliser des concepts déjà développés, déjà connus, c'est
plus simple, plus sûr.
M. Morin : Parfait! Je vous
remercie. Vous avez aussi répondu à des questions de M. le ministre en ce qui a
trait à un tribunal unifié. Quand on parle d'union parentale, on va modifier le
Code civil. Quand on parle de la fin ou de la cessation de l'union parentale,
on est toujours dans le Code civil. Puis la Cour du Québec a déjà compétence en
matière de protection de l'enfant, en protection de la jeunesse. Pour le régime
d'union parentale, voyez-vous... voyez-vous un avantage à ce qui est, par
exemple, une chambre de la Cour du Québec qui traiterait tous ces dossiers-là?
Évidemment, pour le divorce, c'est une loi fédérale, là, c'est un peu
différent. Mais quand on parle de l'union parentale, c'est quoi, votre opinion
là-dessus? Y avez-vous... avez-vous pensé à ça?
M. Leckey (Robert) : Bien,
pour l'instant, la compétence... le chiffre, en fait, des biens en cause. Donc,
au-delà d'un certain montant, ça irait à la Cour supérieure, autrement à la
Cour du Québec. Pour moi, les questions sont très semblables à celles d'un
divorce. Donc, je ne vois pas pourquoi ça irait autrement, mais la question...
la grande question : Est-ce que qu'un tribunal unifié en matière familiale
s'impose pour tout le monde au Québec? Ça, c'est une autre question.
M. Morin : Oui, exact. Et ça,
ça existe dans d'autres provinces.
M. Leckey (Robert) : C'est ça
où les... pour lequel les juges sont nommés par le fédéral.
M. Morin : Pardon?
M. Leckey (Robert) : Les
juges sont nommés à ces tribunaux par le fédéral.
M. Morin : Oui. C'est ça.
Exactement. Alors, c'est ma compréhension. Dans les... unifiés, c'est... il y a
une cour qui s'occupe de l'ensemble. Et ils sont de compétence... en fait, ils
sont nommés par le fédéral, mais c'est une cour provinciale, en fait, gérée par
la province.
M. Leckey (Robert) : Exact.
M. Morin : O.K. Parfait. Je
vous remercie. Autre chose... ah! oui... vous nous... oui, il reste
59 secondes, merci, M. le Président. Vous nous avez fait parvenir, je
pense que c'est une disposition du Code civil qui avait été préparée par
l'Office de révision du Code civil à l'époque.
M. Leckey (Robert) : En 1978.
M. Morin : Oui, c'est ça.
Donc, c'est M. Crépeau qui travaillait avec une équipe de juristes à ce
sujet-là. Donc, déjà, à l'époque, il y avait une disposition qui traitait des époux
de fait. C'est ce que je comprends de...
M. Morin : ...la disposition
que vous nous avez envoyée.
M. Leckey (Robert) : On a
proposé une obligation alimentaire durant l'union, et sur une base
exceptionnelle après celle-ci.
M. Morin : C'est ça, et je
comprends que le projet de loi, actuellement, ne reprend pas ça.
M. Leckey (Robert) : On fait
beaucoup moins aujourd'hui que ce qui était proposé en 1978.
M. Morin : Parfait. Je vous
remercie beaucoup, Pr Leckey. Merci, M. le Président.
Le Président (M.
Bachand) :Merci beaucoup. M. le député de
Saint-Henri-Sainte-Anne, s'il vous plaît.
M. Cliche-Rivard : Merci
beaucoup. Merci, Professeur, pour votre présentation, vos articles aussi. Merci
pour la contribution au débat, très apprécié. Vous parlez de l'application
immédiate, évidemment, on l'a compris, pour ceux qui ont des enfants déjà,
donc, vous dites, mais je me demandais si vous étiez quand même en faveur du
«opt-out» pour ceux qui ont des enfants, donc, déjà, là, puis au moment de
l'application de la loi, puis, si oui, dans quel délai, et si vous prévoyez des
obligations minimales d'ordre public auxquelles ils ne pourraient pas
«opting-out» pour ceux qui ont déjà des enfants au jour de l'application.
M. Leckey (Robert) : Ah! ça
dépend dans quelle mesure vous suivez mes conseils à bonifier le projet de loi,
mais, si vous acceptiez tel quel, moi, je l'appliquerais quand même de façon
immédiate, avec une période d' «opting-out», par exemple, de 12 mois pour
les... ceux et celles qui vivent déjà en union de fait, avec des enfants.
M. Cliche-Rivard : Et est-ce
que vous feriez en sorte qu'il y a ait des obligations minimales, par exemple,
comme la résidence, pour laquelle on ne pourra pas déroger, là, qui vont rester
d'ordre public ou...
M. Leckey (Robert) : Tout à
fait. Oui, oui, oui. Si on se soucie des enfants, on doit se soucier des
enfants vivants aussi.
M. Cliche-Rivard : Puis
j'imagine que, pour les enfants, bon, puis pour les gens qui rentreront dans le
régime après l'application de la loi, donc, par exemple, tel quel, après juin
2025.... Dans ce cas-là, est-ce que vous leur octroyez aussi un délai
d'«opting-out» ou si c'est un «opting-out» continuel dans le temps, sans maximum
de temps?
M. Leckey (Robert) : ...ça
s'est déjà produit, dans le projet de loi, la possibilité de déroger, donc ce
n'est pas nécessaire d'avoir une période.
M. Cliche-Rivard : Ce n'est
pas nécessaire d'avoir une période.
M. Leckey (Robert) : C'est
possible de déroger. On peut déroger à tout moment, selon le projet de loi tel
qu'il est proposé.
M. Cliche-Rivard : Et vous
êtes d'accord, vous êtes d'accord avec cette position-là.
M. Leckey (Robert) : Moi,
j'ai choisi mes batailles. Moi, je pense... je peux accepter qu'on bonifie le
patrimoine d'union parentale puis... de dérogations. Pour moi, ce serait mieux
que de conserver quelque chose de très, très mince, tel qu'on a proposé,
actuellement. Situation parentale, peut-être, personnellement, j'opterais pour
un patrimoine familial obligatoire, mais je sais que ce serait fort du café
pour vous ou pour plusieurs des élus.
M. Cliche-Rivard : Parfait.
Dernier point, vous avez dit qu'on oubliait un peu, peut-être, les familles recomposées
sans enfant commun, qu'ils étaient un peu oubliés. Pouvez-vous juste préciser
votre pensée?
M. Leckey (Robert) : Oui, on
dit que l'objectif central du projet de loi, c'est les enfants, mais il y a
beaucoup d'enfants qui vivent au Québec avec papa puis la blonde de papa ou
avec maman ou le chum de maman. Et ces enfants-là n'auraient jamais des
protections proposées par le projet de loi no 56. Donc, moi, je pense qu'il
faut trouver une façon de reconnaître que ces familles-là aussi sont des cellules
au sein desquelles des futurs Québécois sont éduqués, élevés. On a un intérêt
social dans leur stabilité, de faire en sorte que ces parents-là ne soient pas
lésés par l'éducation des enfants. Mais, pour l'instant, on...
M. Cliche-Rivard : Et c'est
cette protection-là de la résidence familiale, que vous attachez à l'enfant, et
non pas à l'union, là, mais c'est ce volet-là ou s'il y a d'autres volets que
vous rattachez également?
M. Leckey (Robert) : ...dans
mes remarques de tout à l'heure, j'ai proposé une obligation alimentaire pour
tous les conjoints de fait. Évidemment, ça s'appliquerait dans le contexte des
familles recomposées aussi et ça... La stabilité du parent plus vulnérable
économiquement aiderait, évidemment, aux enfants. On ne peut pas séparer
totalement les enfants de leurs parents.
M. Cliche-Rivard : Parfait.
Merci beaucoup pour votre contribution.
Le Président (M.
Bachand) :Merci. M. le député de
Jean-Talon, s'il vous plaît.
M. Paradis : Merci. Bonjour.
Sur l'application immédiate à tous les enfants, des... on a eu des témoignages
et des mémoires qui nous rappellent qu'à l'époque de C-146, ça avait causé du
mécontentement et même des épisodes de violence conjugale, que d'y aller avec
l'application immédiate. Qu'est-ce que vous... qu'est-ce que vous en pensez?
M. Leckey (Robert) : C'est
complexe. Quoi qu'on fasse, il y a des situations de violence familiale, c'est
déjà criminel. Donc, moi, je n'ai pas trop tendance à dire : Il ne faut
pas faire ce qui est juste et raisonnable pour peur que les gens violent la
loi. Je pense... Est-ce qu'on peut bonifier les ressources qu'on offre aux
familles où il y a des cas de violence? Sans doute, mais, pour moi, ce ne
serait pas un motif pour ne pas procéder... avec une application immédiate.
• (15 h 30) •
M. Paradis : O.K., donc, mais
il y avait aussi l'aspect qu'il y avait déjà un projet familial en cours, d'un
couple qui disait : Voici, les règles qui s'appliquent à nous, puis là on
vient leur imposer des règles en cours de route. Là, j'imagine que vous
diriez : Oui, mais là il y a une possibilité de se retirer, à ce
moment-là...
15 h 30 (version non révisée)
M. Paradis : ...c'est ça?
M. Leckey (Robert) : Moi, je
ne proposerais pas qu'on puisse se retirer des protections de résidence
familiale mais des autres choses. Mais moi, je crois qu'il n'y ait pas d'absence
de choix totale dans le fait qu'on se trouve dans une vie commune de 15 ans
avec quelqu'un, parent de trois enfants. Il y a des multitudes de choix qui
nous amènent aux situations où on se trouve à ce moment.
M. Paradis : Très bien,
merci. J'ai compris du premier article, votre premier article d'opinion, là,
celui paru dans La Presse, que votre position, en réalité, c'est d'appliquer le
régime matrimonial à tous les conjoints, dans le cas des conjoints de fait, en
permettant d'y renoncer par consentement. C'est ça votre position?
M. Leckey (Robert) : Moi, je
parlais dans La Presse du patrimoine familial. Je n'évoquais pas la société d'accueil.
Mais moi, je trouve que, si le patrimoine familial est notre élément de base,
je ne vois pas pourquoi on le réduit pour l'union parentale.
M. Paradis : Votre position
semble notamment... Vous référez au fait que c'est... C'est que là, on serait
en train d'adopter un régime, celui proposé par le ministre, qui serait déjà
dépassé par les pratiques. Et là vous citez une étude de 2022, dont on a déjà
parlé plus tôt cette semaine. Mais la question qui était posée dans ce
sondage-là, sur lequel vous semblez vous baser, c'est : Est-ce que vous
voudriez qu'on confère les mêmes protections aux couples en... aux couples qui
sont... aux conjoints de fait en permettant un droit de retrait? Est-ce que
vous pensez que le résultat aurait été le même si on avait dit :
Voulez-vous qu'on impose les mêmes obligations?
M. Leckey (Robert) : Je ne
suis pas sociologue. Moi, je ne crois honnêtement pas que les gens choisissent
l'union de fait de façon éclairée puisqu'ils évitent les obligations du
mariage. Les données sont claires là-dessus. Les gens connaissent... Bien, d'abord,
les gens ignorent les détails du régime du mariage, puis la vie se passe, et il
n'y a souvent pas de moment clair où on fait des choix, on... Et donc moi, je
ne suis pas certain qu'il y aurait des différences selon votre question.
Le Président (M.
Bachand) :Merci beaucoup. Me Leckey,
merci beaucoup d'avoir été avec nous cet après-midi. C'est fort apprécié.
Et, sur ce, je suspends les travaux
quelques instants. Merci beaucoup.
(Suspension de la séance à 15 h 32)
(Reprise à 15 h 36)
Le Président (M.
Bachand) :À l'ordre, s'il vous plaît! La
commission reprend ses travaux.
Il nous fait plaisir d'accueillir Me
Suzanne Zaccour, directrice des affaires juridiques de l'Association nationale
Femmes et droit. Merci beaucoup d'être ici. Et, bien sûr, Me Michaël Lessard,
professeur de droit à l'Université de Sherbrooke.
Alors, merci beaucoup d'être avec nous cet
après-midi. Alors, je vous cède la parole pour un bloc de 10 minutes.
Merci.
Mme Zaccour (Suzanne) : Bonjour,
je suis Suzanne Zaccour, docteure en droit et directrice des affaires
juridiques pour l'Association nationale Femmes et droit.
M. Lessard (Michaël) : Et je
suis Michaël Lessard, avocat et professeur en droit à l'Université de
Sherbrooke.
D'entrée de jeu, nous saluons la volonté
des parlementaires et du ministre de la Justice de s'attaquer à la violence
judiciaire et de moderniser le droit de la famille québécois. Et nous vous
remercions d'avoir le privilège de vous... d'avoir l'occasion de... d'apporter
notre expertise en droit de la famille à l'étude de ce projet de loi.
Mme Zaccour (Suzanne) : Les
familles québécoises sont diverses, et, en tant que parlementaires, vous avez
la tâche délicate de mettre en place des règles à la fois assez robustes pour
venir en aide aux personnes et aux familles vulnérables et à la fois assez
souples pour éviter d'imposer des obligations inappropriées aux familles non
vulnérables ou qui n'en auraient pas besoin.
Et donc pour vous aider dans cette tâche
et pour illustrer l'impact de nos recommandations sur différentes familles
québécoises, nous utiliserons trois cas pratiques.
Donc, le premier, notre couple a, composé,
disons d'Arnaud et d'Alexandra pour bien s'en rappeler, c'est un couple dit
moderne, donc deux professionnels, leur salaire est comparable, leurs finances personnelles
sont séparées et les dépenses communes sont partagées moitié-moitié.
On sait déjà que plusieurs groupes et
expertes vous recommandent d'élargir le régime proposé afin d'y inclure une
obligation alimentaire conjugale. Et face à cette demande, peut-être êtes-vous
préoccupés par l'idée d'imposer des obligations financières à des couples qui
semblent égalitaires. Mais il faut comprendre une chose, même si Arnaud et
Alexandra y ont le droit, les tribunaux ne leur imposeront pas de pension
alimentaire. Pourquoi? Parce qu'une pension alimentaire entre conjoint et
conjointe n'est jamais automatique.
M. Lessard (Michaël) : Une
pension alimentaire ne peut être accordée que s'il existe à la fois un besoin
et une capacité de payer. Et, en plus, la pension doit être justifiée par un
fondement compensatoire, social ou contractuel.
Le fondement compensatoire, comme son nom
l'indique, compense des sacrifices financiers disproportionnés qui sont faits
dans la famille. S'il n'y a pas eu de sacrifice ou si les sacrifices sont
équivalents, il n'y aura pas de pension alimentaire. C'est le cas pour notre
couple égalitaire. Il n'y a rien à compenser. Donc, aucune pension ne serait
octroyée.
Pour ce qui est du fondement social, il
justifie une pension alimentaire uniquement en cas de précarité financière due
à l'échec de l'union. Encore une fois, ce n'est pas le cas pour Arnaud et
Alexandra.
Enfin, le fondement contractuel s'applique
si un conjoint ou une conjointe s'engageait à payer une pension alimentaire, ce
qui n'est pas le cas ici.
Bref, une pension alimentaire ne serait
ordonnée... ne serait pas ordonnée pour ce couple égalitaire. Voilà pourquoi il
n'y a pas de problème à élargir l'accès à une obligation alimentaire, quitte à
inclure certains couples qui n'en ont pas de besoin parce que la pension n'est
pas automatique, elle n'est accordée que lorsque cela est nécessaire en cas de
sacrifice, de précarité ou d'entente.
• (15 h 40) •
Mme Zaccour (Suzanne) : Et
ça, ça peut vous rassurer comme parlementaires, parce que vous pouvez vous
concentrer sur comment protéger les familles qui ont besoin de vous sans
crainte de pénaliser des couples...
Mme Zaccour (Suzanne) : ...couples
dits indépendants. Donc, on peut mettre de côté ce scénario un et parler des
familles qui ont le plus besoin de cette réforme. Donc, dans notre scénario B,
on a Benoît et Bernadette qui sont un couple dit traditionnel. Donc, c'est
Bernadette qui a fait les grands sacrifices, d'abord, lorsqu'elle a déménagé
dans une autre ville pour que Benoît accepte une promotion puis lorsqu'elle a
cessé de travailler pour s'occuper des enfants pendant une certaine période,
et, au moment de la rupture, le couple a des enfants qui ont un et trois ans.
Donc, cette situation schématisée, disons, de vulnérabilité, je pense, c'est en
quelque sorte la raison d'être de ce projet de loi. Donc, on peut examiner si
ce projet de loi va vraiment venir en aide à cette famille.
M. Lessard (Michaël) : Premièrement,
le partage du patrimoine parental offre un avantage limité. Contrairement à la
croyance populaire, ce n'est pas la valeur totale de la maison qui va être
séparée en deux, ce qui est séparé, c'est uniquement la valeur accumulée durant
les trois ans depuis la naissance du premier enfant. La maison de Benoît et
Bernadette étant fortement hypothéquée, ça offre qu'une faible valeur à
partager. On pourrait même supposer qu'ils sont locataires. Dans ce cas, il n'y
a aucune valeur habituellement qui serait partagée. Et donc, là, il faudrait
démontrer en quoi le projet de loi aide ce couple puisque, j'en suis sûr,
l'intention du projet de loi n'est pas uniquement d'aider les couples qui sont
propriétaires.
Deuxièmement, une prestation compensatoire
est peu probable, et, même si Bernadette pouvait l'obtenir, la prestation
compensatoire compenserait que les impacts passés de l'union puisque la
prestation compensatoire s'intéresse uniquement au capital déjà accumulé. Or,
dans le cas de Bernadette, les désavantages financiers causés par l'union se
feront sentir après la... après la séparation. Le retard accumulé dans sa
carrière, le soin aux enfants qu'elle continue d'assumer affecteront ses
revenus pendant les décennies à venir, mais ni la prestation compensatoire ni
le partage du patrimoine parental ne peut rectifier une iniquité dans les
revenus futurs, même si cette iniquité est directement causée par la vie
commune.
Mme Zaccour (Suzanne) : Donc,
un seul mécanisme du droit de la famille permet vraiment d'atténuer les impacts
postséparation de la vie commune et c'est l'obligation alimentaire. C'est
pourquoi on ne peut pas faire l'économie d'une obligation alimentaire dans un
régime moderne d'union parentale ou d'union de fait.
Par ailleurs, quant à nous, le régime
devrait s'appliquer aux couples qui ont déjà des enfants. Comme vous l'avez
déjà entendu, c'est ce que l'Assemblée nationale avait fait lorsqu'elle avait
appliqué le patrimoine familial aux couples déjà mariés lors de son adoption en
1989. Dans le fond, si le régime proposé est injuste, il faut l'ajuster et,
s'il est juste, pourquoi est-ce qu'on en exclurait des milliers de familles?
M. Lessard (Michaël) : Maintenant,
parlons brièvement des couples sans enfant. Le projet de loi tente de
distinguer les couples qui ont besoin d'un régime de protection et les couples
qui n'en ont pas besoin sur la base d'un seul et unique critère, avoir ou ne
pas avoir d'enfants. Cette distinction-là contient des angles morts. Certes,
avoir des enfants peut causer et cause souvent un déséquilibre dans le couple,
mais ce n'est pas la seule cause de déséquilibre.
Passons au scénario C, Charlie et Caroline
qui ont recours à la fécondation in vitro. Pendant des années, Caroline est à
l'hôpital plusieurs fois par mois, subit des interventions douloureuses de retrait
d'ovules qui nécessitent des congés de maladie. Elle vit des fausses couches à
répétition, donc un projet parental sans succès, mais non sans impact sur sa
capacité à occuper certains emplois. Caroline fait des sacrifices pour la
famille qui affecte sa situation financière à long terme, mais le régime de
l'union parentale ne lui est pas accessible. En cas de séparation, les
sacrifices financiers de Caroline pour la famille inégalée par Charlie ne
seront pas réparés.
Mme Zaccour (Suzanne) : Cet
exemple permet de comprendre que les objectifs de protection et de compensation
du projet de loi n° 56 s'appliquent aussi aux unions de fait sans enfant
commun et à une panoplie d'autres situations qui peuvent causer un déséquilibre
entre les conjoints, conjointes, comme par exemple lorsqu'une conjointe
s'occupe des enfants de son conjoint issu d'une autre union, sans les adopter,
ou lorsqu'un conjoint exerce du contrôle coercitif pour saboter le
développement professionnel de sa conjointe. Donc, il y aurait, encore une
fois, un déséquilibre causé par l'union et qui ne serait pas compensé.
Les mécanismes, de façon générale, du
droit de la famille s'adaptent à une diversité de situations. Certes, les
couples non mariés sont divers, mais les couples mariés le sont aussi. Et, en
matière de pension alimentaire en particulier, on peut faire confiance aux
tribunaux pour appliquer au cas par cas une justice individualisée plutôt que
de présumer que tout couple sans enfant n'a pas besoin d'un régime.
M. Lessard (Michaël) : Pour
terminer, je voudrais souligner que mon mémoire aborde trois recommandations
importantes, que j'expose brièvement, un, modifier le délai de 30 jours
pour bénéficier des protections de la résidence familiale après la séparation,
un délai qui semble irréaliste, deux, corriger une injustice en matière de
prescription...
M. Lessard (Michaël) : ...des
actions en réparation de préjudices causés par la violence conjugale, et trois,
traiter l'animal de la famille différemment des autres biens du couple. Sur ce
dernier point là, il serait cohérent que le Code civil, qui reconnaît déjà que
les animaux ne sont pas des biens mais des êtres doués de sensibilité, permette
aux tribunaux d'accorder la garde de l'animal en tenant compte de ses besoins.
Et on voit de plus en plus de dossiers devant les tribunaux où des parties
demandent justement une considération plus grande lors de la séparation de
l'unité familiale.
Mme Zaccour (Suzanne) : En
terminant, je prends aussi l'occasion pour souligner qu'en matière de réforme
du droit de la famille, ce n'est pas pour vous donner plus de travail, mais il
y a plus de 130 organismes féministes québécois qui réclament l'interdiction
des accusations d'aliénation parentale. Donc, je vais vous inviter à poursuivre
votre série de réformes en donnant suite à cette demande et je serai bien sûr
très heureuse d'en discuter davantage avec les membres de cette commission
après notre intervention ou à une autre occasion.
Le Président (M.
Bachand) :Merci infiniment. M. le
ministre de la Justice, s'il vous plaît.
M. Jolin-Barrette : Oui,
merci, M. le Président. Me Zaccour, Me Lessard, merci de participer aux travaux
de la commission. On se le disait hors micro, on se voit au minimum une fois
par année, au mois d'avril, mai, durant les trois dernières années, puisqu'il
s'agit du troisième volet de la réforme.
Vous me permettrez aussi, M. le Président,
peut-être de saluer les gens qui sont au fond de la salle. Je crois que c'est
des étudiants et des étudiantes. Alors, bonjour et bienvenue à l'Assemblée
nationale pour poursuivre les travaux parlementaires du... de la réforme du
droit de la famille qui... que ça faisait longtemps qu'on attendait qu'il y ait
une telle réforme sur le four, comme on dit.
Alors, écoutez, d'entrée de jeu, vous avez
abordé la question rapidement, là, de la violence judiciaire. J'aimerais vous
entendre là-dessus parce que ce n'est pas un concept qui a été souvent utilisé
par les tribunaux. Ça a été nommé une fois l'automne dernier, notamment. Nous,
on a fait le choix, vraiment, de véritablement le... venir le nommer pour
donner des outils supplémentaires aux juges pour contrer la violence
judiciaire, parce que les tribunaux ne doivent pas servir à cela.
Est-ce que, dans votre expérience, là, de
chercheurs notamment, vous avez recensé de... qu'est-ce que constitue la
violence judiciaire, là? Qu'est-ce que vous entendez comme... comme
spécialistes, là, du droit de la famille?
Mme Zaccour (Suzanne) : Mais...
effectivement, et on salue cet aspect du projet de loi, de ne pas seulement
condamner les abus de procédure, mais de préciser qu'il y a des situations de
violence judiciaire qui peuvent prendre plusieurs formes, notamment le recours
répété aux tribunaux. Et c'est pour ça qu'à chaque réforme, on est souvent là
pour vous dire : Des règles claires, des barèmes, des choses qui sont
faciles à prouver, des choses qui sont automatiques, généralement ça favorise
la partie qui a le moins de pouvoir dans le recours. Donc, des recours répétés,
des... du marchandage : Si tu... Si tu demandes une pension, je vais
demander la garde, ce genre de chose, et bien sûr quelque chose qu'on voit
énormément, les accusations d'aliénation parentale pour... ou des menaces de
telles accusations, dire : Si jamais tu dénonces à la police, si jamais tu
dénonces qu'il y a eu de la violence conjugale, je vais réclamer la garde ou le
temps parental avec l'enfant. Donc, ça, c'est certaines des formes de violence
judiciaire qu'on peut observer.
M. Jolin-Barrette : On insère
également dans le projet de loi une invitation, notamment au juge en chef, de
faire en sorte que... lorsque c'est possible, de prévoir que ça va être le même
juge qui doit... qui devrait idéalement suivre le dossier d'une famille en
matière de droit de la famille. Qu'est-ce que vous pensez de cette
proposition-là?
M. Lessard (Michaël) : Bien,
ça, ça me semble être une excellente idée. Je sais qu'il y a déjà des juges en
chef qui tentent de le faire ou des juges coordonnateurs, coordonnatrices qui
tentent de le faire. Donc, le fait que l'invitation soit clairement mise dans
la loi me semble favoriser cette pratique-là. Puis, dans le même sens, mettre
aussi... lier ça à une préoccupation par rapport à la violence judiciaire, en
plus de favoriser cette pratique-là, je pense que ça va aussi donner une sorte
d'électrochoc à la pratique où les juges ont quand même quelques outils qui
existent déjà, les outils contre les abus de procédure que vous venez préciser
existaient déjà, mais parfois on sent que les juges ont une certaine retenue.
Donc, le fait de suivre un certain dossier va rendre plus visible la violence
judiciaire et le fait de mettre le terme dans la loi va leur donner une
certaine légitimité pour utiliser les outils qui existent déjà.
M. Jolin-Barrette : Et quels
sont, selon vous, les avantages pour les justiciables? Tu sais, il y a la
question d'identifier les abus, mais est-ce qu'il y a d'autres avantages à ce
que ça soit le même juge qui suive idéalement le dossier de la famille?
• (15 h 50) •
M. Lessard (Michaël) : C'est
ça qui est vraiment intéressant avec ce qu'on voit dans le projet de loi n° 56,
c'est que les... bon, il y avait le mécanisme d'abus de procédure dont je viens
de parler, mais l'autre mécanisme qui est celui...
M. Lessard (Michaël) : ...de
la quérulence visait surtout à protéger l'administration de la justice, la
justice en tant qu'institution. Mais là, ici, ce qu'on voit, c'est notamment
une obligation, si ma compréhension du projet de loi est bonne, une obligation
d'octroyer des dommages et intérêts en cas d'abus de procédure à l'avantage de
la victime. Et donc ça, ça vient directement aider les justiciables qui, oui,
bénéficient des dommages, mais potentiellement faciliter l'accès à des avocats,
avocates qui, sachant qu'il est possible d'être rémunérés au travers de ces
dommages-là, seraient plus promptes à prendre ce dossier-là. Parce que ça
aussi, c'est un enjeu parfois d'accessibilité pour les justices... les victimes
de violence conjugale. C'est d'avoir des gens qui sont prêts à nous
représenter. Souvent, quand c'est des victimes qui ont peu de moyens, parfois,
ça peut être difficile.
M. Jolin-Barrette : O.K. La
base du projet de loi... On s'est notamment inspirés du rapport consultatif en
droit de la famille pour faire en sorte que le déclencheur, notamment, je vous
dirais... bien, en fait, la création de l'union parentale, ça soit la venue
d'un enfant, parce que c'est... Puis vous l'avez dit tout à l'heure, il peut y
arriver dans certaines circonstances que des conjoints soient liés ensemble par
toutes sortes de circonstances de la vie et qu'ils n'aient pas d'enfant, mais,
dans la vaste majorité des cas, un événement marquant pour les couples, c'est
notamment la venue d'un enfant. Je comprends que vous n'êtes pas en... bien,
vous n'êtes pas en désaccord avec le fait qu'un enfant amène des conséquences,
mais vous dites : Bon, bien, il y a autre chose aussi. Comment vous voyez
la perspective de l'autonomie, de la volonté des gens par rapport à ça? Parce
que... Tu sais, là, on est à la troisième journée des consultations. Il y a des
gens qui... qui étaient davantage dans votre lignée, pour dire : Bien non,
on devrait imposer, dans le fond, les mêmes règles que les gens mariés ou
conjoints de fait, il y en a d'autres qui disent : Attention! C'est un
juste équilibre, il y en a d'autres, même, qui nous ont dit : Ça va trop
loin, là, ce que vous... ce que vous faites. Donc, je voudrais vous entendre
davantage sur la perspective de l'autonomie versus l'imposition par l'État d'un
régime des mêmes règles du mariage, supposons.
Mme Zaccour (Suzanne) : Alors,
premièrement, je pense que, peut-être, l'éléphant dans la pièce, c'est que,
lorsqu'il y a des obligations à l'intérieur d'un couple, il y a toujours une
partie qui va être avantagée et une partie qui va être désavantagée à peu près
dans 100 % des cas. Donc, c'est sûr que ce n'est pas... ça ne va pas faire
plaisir à tout le monde, nécessairement, d'être soumis à ces obligations. Et je
ne vais pas insister sur la question empirique, parce que je pense que d'autres
ont déjà fait remarquer et que c'est incontestable, que les gens ne choisissent
pas leur façon d'organiser leur vie commune en fonction des conséquences
juridiques, donc quel choix, est-ce que ce choix existe, est-ce que ce choix
est fait. Les gens qui ne se marient plus, ça peut être pour des raisons
religieuses, ça peut être pour des raisons culturelles. Donc, parmi la panoplie
de choix qu'on pourrait protéger, est-ce que c'est vraiment un choix qui
existe? Ce que je dirais peut-être, c'est, encore une fois, quel choix et
quand?
Donc, en ce moment, une femme qui a peu de
revenus ou qui n'a pas de revenus pourrait se voir refuser ou diminuer des
prestations d'aide sociale ou des prestations d'une certaine assistance de
l'État parce que son conjoint de fait fait de l'argent. Donc, elle ne peut pas
recevoir de l'aide de l'État pas seulement parce qu'on suppose que son conjoint
va l'aider, son... on... c'est une... une présomption irréfragable. Donc,
l'État non seulement décide, pour la... pour la femme en union de fait, que les
revenus sont partagés et, d'un autre côté, ne le met pas... ne donne au
conjoint aucune obligation de partager ses revenus ou aucune obligation
alimentaire. Donc, c'est une dépendance financière forcée et c'est une
incohérence.
Alors, si vous dites : On va
délaisser le choix aux personnes en union de fait d'être indépendantes, dans ce
cas, il faut modifier toutes ces lois fiscales et sociales qui traitent... qui
ne donnent pas le choix aux personnes en union de fait et qui les forcent à
vivre dans une relation qui, aux yeux de l'état, est une union.
Donc, je pense que c'est d'une chose
l'autre, on ne peut pas prendre des lois qui pénalisent la partie vulnérable en
présumant qu'il y a un partage des revenus et, en même temps, dire : Il ne
pourrait... il ne peut pas avoir de partage de revenus, ça irait contre le
choix. Donc, je pense que c'est là où il y a un manque de cohérence et... et
qui peut être très dommageable lorsqu'il y a une situation de dépendance
financière, avec les conséquences qu'on connaît, que ça peut avoir sur,
notamment, les situations de violence, de contrôle.
M. Jolin-Barrette : D'un
autre côté, je vous dirais, la portée de la loi ne vise pas la même chose. On a
des lois à portée sociale, notamment la loi sur l'aide de dernier recours,
notamment pour l'aide sociale. Et, oui, il y a des règles et il y a des
mécanismes, mais il faut toujours se rappeler dans ces lois-là que c'est
l'ensemble de la collectivité qui assume le... l'investissement...
M. Jolin-Barrette : ...financier
de solidarité. Tandis que, lorsqu'on est dans un régime comme celui-ci, c'est
un... un régime de droit privé qui vient régir les rapports entre deux parties privées.
Donc, l'État n'est pas impliqué à ce niveau-là. Donc, c'est sûr que la liberté
aussi des choix des gens est importante dans notre régime. Mais je comprends ce
que vous me dites, vous me dites : On est un peu incohérents sur le point
de vue des lois à portée sociale versus le droit privé qu'on instaure. Vous
n'êtes pas les seuls à dire ça, mais il y a une partie aussi qui... qui, je
vous dirais, est justifiée à raison des... les choix individuels qui doit être
fait, puis c'est un équilibre.
Mme Zaccour (Suzanne) : Bien,
les choix individuels, quand il y a un couple de deux personnes qui ont... qui
ont peut-être des rapports de force différents, je pense que c'est quelque
chose à se demander. Bien sûr, on peut faire des choix, on pourra toujours faire
des choix. Et je ne pense pas que personne pense que les gens mariés ne font
aucun choix, tous les couples mariés se ressemblent et organisent leurs
finances de la même façon. C'est quel choix est-ce que l'État va permettre et
quel choix l'État va présumer? Parce que, dans le projet de loi, on ne voit pas
de régimes de type opt out pour les unions de fait sans enfant, on ne voit pas
un régime de type opt out de partage de revenus ou de société d'acquêts, et
dans... Ça pourrait être une façon de respecter leur choix tout en protégeant
les gens contre leur optimisme et leur inertie de penser que les couples ne se
séparent jamais, qu'il y a pas mal plus d'impact sur les choix des gens que le
Code civil, malheureusement.
M. Jolin-Barrette : Je vais céder
la parole à mes collègues. Mais un dernier commentaire, mais ça n'empêche pas
les gens d'adhérer aux protections qu'ils souhaitent. Il y a toujours ce...
cette possibilité-là.
Mme Zaccour (Suzanne) : Ça
n'empêche pas les gens d'adhérer... et... et si opt-in et ça n'empêche pas les
gens de se retirer, si c'est opt out Et ce qu'on voit, c'est que opt in ou opt
out, ça donne des résultats extrêmement différents, dans tous les domaines, pas
seulement dans les obligations familiales. Parce que ce qui détermine la
situation financière du couple, ce n'est pas tellement le choix, c'est
l'inertie, dans bien des cas. Donc, on peut choisir, on va faire une situation
où la situation par défaut, c'est une situation qui est bénéfique pour la
société, l'égalité des genres et l'équité sociale. Et, si les gens, ils... ils
ont vraiment... vraiment, ça les dérange, ils peuvent s'en enlever, ou on peut
dire : On va mettre une situation où on donne déjà plus de pouvoirs au
conjoint plus riche, et puis si la... le conjoint ou la conjointe plus pauvre
veut absolument être protégé, c'est elle, on la part en situation de
déséquilibre dans la négociation. Elle n'a aucun droit acquis avec lequel
négocier. Et puis c'est à elle de faire toutes ses démarches, comprendre le
droit, négocier, convaincre son conjoint plus... plus riche. Donc, je pense que
si le... une certaine liberté de choix peut être protégée dans les deux cas, et
s'il y a beaucoup de gens qui vont simplement se laisser guider par l'inertie,
autant y aller avec la solution qui est plus bénéfique non seulement pour les
familles, les conjointes, les victimes de violence et l'État qui aura... qui a
peut-être moins à financer des... de l'aide de dernier recours ou des maisons
d'hébergement, etc. À moins qu'on... il n'y a pas vraiment de raison, surtout
au regard des données empiriques qui disent que ce choix n'est pas communément
fait, compris ou fait de façon éclairée. Le prix semble fort à payer lorsqu'il
y aurait des... des façons beaucoup moins dramatiques, là, de protéger une
liberté de choix.
Le Président (M.
Bachand) :Merci. Mme la députée de
Charlevoix–Côte-de-Beaupré. Quatre minutes.
Mme Bourassa : Parfait. Je
vais commencer juste par un petit commentaire personnel pour votre exemple de
FIV. Je vous confirme que la ponction des hommes est également très douloureuse
et nécessite des congés et qu'un homme aussi peut avoir besoin d'un congé à la
suite de fausse couche.Question concernant... bien, à ce que je comprends, en
gros, vous étiez en défaveur du retrait, là, pour... comme vous dites, le bail
out pour l'union parentale, mais le fait d'avoir mis l'obligation que ça soit
corroboré par un notaire, une visite chez le notaire, que les gens peuvent
faire de manière individuelle, est-ce que ça ne vient pas assurer une
certaine... de s'assurer que le consentement est éclairé? Est-ce que, selon
vous, ce n'est pas justement une étape de plus qui fait en sorte qu'on est
encore plus vigilant?
• (16 heures) •
M. Lessard (Michaël) : Bien,
c'est... c'est sûr que les... les notaires, en ce sens-là... puis remplissent
un rôle qui est assez important pour éclairer les parties sur leurs différents
intérêts, puis il peut... il pourrait y avoir un débat, pour avoir écouté
quelques autres des intervenants, intervenantes avant nous, il peut y avoir un
débat à savoir si on devrait avoir une expertise indépendante ou non, mais peu
importe sur la... disons, la bonne formule ou le bon protocole pour prendre la
décision, ce qui nous semble important, c'est vraiment la situation de base, le
point de base par défaut qui nous intéresse. Et donc il semble que, si on met
en place un régime qui permet une option de retrait, et donc qui a, dans sa
structure, une avenue pour respecter la liberté...
16 h (version non révisée)
M. Lessard (Michaël) : ...contractuel
des parties, bien, à ce moment-là, il faut se demander c'est quoi, le point par
défaut qu'on veut. Et là, dans le contexte où on fait une réforme du droit de
la famille, en fait, le statu quo n'est pas, tout simplement, une donnée
inhérente, le statu quo va être un choix, et vous devez faire le choix de
savoir c'est quoi, le point par défaut. Est-ce que c'est l'absence de
protection dans certaines situations? Là, je pense surtout aux couples sans
enfants. Est-ce que c'est le point par défaut ou, le point par défaut, ça va
être on met les protections puis on permet aux personnes de se retirer sur la
base d'un mécanisme d'option de retrait?
Et donc, moi, il me semble qu'un principe
de précaution nous inviterait à mettre comme point par défaut la situation qui
met le plus de protection pour les parties vulnérables. Donc, effectivement, je
pense que vous avez bien souligné une avenue pour respecter la liberté des
gens, qui, pour nous, semble surtout utile dans le contexte où il n'y a pas d'enfant,
parce que, dans le contexte où il y a des enfants, comme le professeur Goubau
le disait hier, les enfants ne font pas ces choix-là. Donc, la question du
respect de la liberté contractuelle quand il y a un enfant est moins
convaincante, mais lorsqu'il n'y a pas d'enfant, effectivement, il semble y
avoir une avenue intéressante. La question c'est : Quel est le point de
défaut? Est-ce que c'est celui qui offre le plus de protection ou non?
Mme Bourassa : Puis vous avez
parlé, là, c'est ça... vous dites que l'interdépendance n'est pas
nécessairement uniquement avec l'enfant en commun, que, tu sais, il y avait ça
avant, mais il y a toujours la possibilité de se marier, également, là, bon. Je
sais qu'il faut être deux, pour ça, mais ça reste une possibilité, u sais. Dans
le sens que les couples ont ce pouvoir-là. Dans le cas d'un enfant, l'enfant n'a
pas son mot à dire dans l'union et dans ce qui va suivre par la suite, mais
deux adultes qui se marient ont le pouvoir de décider de leur futur.
Mme Zaccour (Suzanne) : Bien,
les gens peuvent faire toutes sortes de choix, mais le problème des unions de
fait, qui est un problème rencontré dans à peu près toutes les sociétés qui ne
sont pas très, très religieuses, et particulièrement au Québec... les gens ne
font pas ce choix. Donc, sachant que beaucoup de gens ne font pas ce choix de
se marier, et je ne suis pas sûre que l'État veut leur dire ça : Vous
voulez avoir une relation égalitaire, bien, mariez-vous. Mais pourquoi ne pas
donner un choix aux gens d'avoir soit le mariage soit l'union de fait? Pour
beaucoup de gens, le choix entre le mariage et l'union de fait comme choix religieux,
culturel, social est plus important que le choix entre qu'est-ce qui va aller
dans le patrimoine familial ou pas, qu'ils ne connaissent pas? Donc, en donnant
un régime d'union de fait, les gens... on entend, donc, si l'union de fait
copie le mariage, on donne moins de choix aux gens, mais peut-être qu'on donne
plus de choix aux gens parce que les gens peuvent choisir d'organiser leurs
relations comme ils l'entendent. Et puis ce n'est pas un hasard, on voit qu'au
Québec les gens se marient peu ou se marient moins qu'ailleurs, mais, quand
même, en s'assurant d'être protégés.
Le Président (M.
Bachand) :Merci... d'Acadie.
M.
Morin :Oui. Merci. Merci, M. le Président. Alors, bonjour, Pr
Lessard, Me Zaccour, merci d'être avec nous. Merci pour vos explications et
votre mémoire.
Première question. J'ai lu votre mémoire
avec attention, et il y a très peu de groupes ou d'experts qui nous ont parlé
des obligations et responsabilités conjugales. Vous le faites, dans votre
mémoire, aux pages 12 et suivantes. Il y a Me Tétrault qui en a parlé
brièvement, mais vous êtes vraiment... enfin, si on regarde l'ensemble des
gens, un peu dans une catégorie à part.
Le ministre disait que son projet de loi
vise avant tout à aider des enfants. Bon. Pourquoi, pour vous, c'est important,
puis quel serait... si jamais on voulait bonifier le projet de loi, quel serait
la meilleure façon, finalement, de le bonifier puis pourquoi c'est si important
qu'il y ait des obligations de responsabilité conjugales?
M. Lessard (Michaël) : Bien
oui, merci pour cette question que, justement, je n'avais pas eu le temps d'aborder
dans la présentation. L'objectif de cette section -à, c'était de révéler qu'en
fin de compte les obligations et les responsabilités qui sont inscrites
directement dans le Code civil, dans le contexte du mariage et aussi importées
dans le contexte de l'union civile, en fait, quand on analyse le projet de loi
no 56, viennent vraiment structurer toute la réflexion autour du projet de loi.
Pourquoi est-ce que ça peut devenir utile?
Bien, c'est que certains de ces éléments-là viennent établir à un niveau d'abstraction
un peu plus élevé, mais très clair, je crois, pour les justiciables, des
éléments qu'on tente de faire dans le projet de loi. Pourquoi je dis
"clair pour les justiciables"? C'est que, souvent, ces articles-là,
on va les lire, par exemple, durant la cérémonie du mariage pour qu'ils
frappent l'imaginaire. Pourquoi je dis qu'ils expliquent des éléments qu'on
trouve intéressants dans le projet de loi puis dans nos suggestions de
bonification? Bien, c'est que certains éléments, comme l'obligation de secours,
donc l'aide... l'aide matérielle, mutuelle au sein du couple, c'est vraiment ce
qui vient...
M. Lessard (Michaël) : ...pour
acquis dans le droit social, comme on l'a expliqué, qu'il y a une aide
matérielle, et c'est ce qu'on vous demande de venir concrétiser avec une
obligation alimentaire également.
Mais il y a certains éléments comme...
oui, Me Tétrault avait parlé, par exemple, de l'obligation de respect, qui nous
semble importante à asseoir dans le contexte où on veut... on veut lutter
contre la violence conjugale, la violence familiale. Mais il y a aussi
certaines obligations... et là ma mémoire m'échappe, mais je crois qu'une intervenante
avait soulevé l'obligation de contribuer équitablement aux charges du ménage,
et elle, elle liait ça avec le partage du patrimoine d'union parentale. Parce
qu'il est possible de demander un partage inégal du patrimoine d'union
parentale, comme il est dans le contexte du mariage possible de demander un
partage inégal.
Quand est-ce qu'on peut demander un
partage inégal? Il y a toute une série de situations dans lesquelles on peut le
faire, mais une de celles-là, c'est quand il y a une contribution qui est
foncièrement inégale aux charges du ménage, donc quelqu'un qui... par exemple,
un conjoint, une conjointe qui n'a aucunement apporté en termes de revenus ou
de travail domestique au... de contribution à l'entretien de la maison, à
l'entretien de la résidence, par exemple. Elle, elle nous dit... elle nous
disait : Si vous ne mettez pas l'obligation clairement, bien là, il va y
avoir des débats devant les tribunaux, comme il y a eu, semble-t-il, dans les
années 80-90, qui disent : Ah! bien, je demande un partage inégal
parce que quelqu'un a payé 70 % de la maison, quelqu'un d'autre,
30 %, etc. Et là les tribunaux ont pu couper court à ces débats-là, donc
qui engendrent des frais, qui engendrent de l'incertitude pour les
justiciables, couper court à ces débats-là en disant : Non, non, mais vous
aviez une obligation de contribuer équitablement aux charges du ménage et donc
à la formation ou au maintien du patrimoine. Et, si vous ne l'avez pas fait,
bien là, c'est votre responsabilité, mais il y avait une obligation, et donc on
peut faire un partage à parts égales dans la mesure où tout le monde a fait une
contribution en raison... en proportion de ses propres facultés.
Donc, ça, c'est un des exemples. Il y a
d'autres éléments qui... dont on pourrait discuter, mais...
M.
Morin :...
M. Lessard (Michaël) : Ah!
Oui. Pardon.
M.
Morin :Non, mais ça m'aide dans ma réflexion. Il y a un autre
élément que vous apportez que, personnellement, je trouve hyperimportant, mais
là vous êtes dans une catégorie unique, vous êtes à part, c'est à la
page 18, et c'est l'animal de la famille. Le Code civil a été modifié,
vous le savez, les animaux ne sont plus des choses, ils sont doués d'une
sensibilité, puis on voit malheureusement, là, dans des cas de séparation, tu
sais, il y en a qui essaient de se séparer les enfants, mais ils se séparent
l'animal de la famille aussi, et ça crée des drames. Ce projet de loi vise à
aider les enfants, mais, si l'enfant subit un traumatisme parce que les parents
se séparent ou il n'a plus accès à son animal... Donc, ça serait quoi, pour
vous, si on veut inclure ça, la meilleure approche? Vous citez la loi de la
Colombie-Britannique. Si on veut essayer de faire en sorte que ça fonctionne,
comment on devrait faire?
M. Lessard (Michaël) : Oui,
c'est vraiment un problème qu'on voit de plus en plus devant les tribunaux,
puis il y a différentes approches de solution qui avaient été envisagées. Le
professeur Roy, justement, avait suggéré, déjà en 2002, de réinterpréter l'article 410,
là, qui vise des protections des biens meubles de la famille, pour permettre
donc que l'animal, qui, à cette époque-là, était considéré un meuble au sens...
un bien meuble au sens du code, puisse être partagé autrement qu'en référence à
son titre de propriété. Malheureusement, ce n'est pas une option qui a été
reprise par les tribunaux.
Donc, des avenues de solution, ça pourrait
être d'aller modifier l'article 410, par exemple, et de venir directement
apporter cette précision-là, 410 qui est dans le contexte du mariage pour le...
pour les protections de la résidence familiale, mais que vous importez dans le
contexte de l'union parentale aussi avec les protections de la résidence
familiale. Par contre, ça exclut beaucoup d'autres types de relations qui ne
sont pas incluses dans l'union parentale et qui peuvent impliquer des enfants.
Puis, effectivement, des fois, on voit des juges qui sont sensibles et qui
voudraient que l'animal suive l'enfant dans sa garde partagée. Il y a
effectivement des juges qui font ce lien-là, mais qui sentent... se sentent
obligés de donner l'animal plutôt en fonction du titre de propriété. Mais 410
permet déjà de... d'attribuer un bien à quelqu'un autrement que par son titre
de propriété. Donc, spécifier 410 ou tout simplement ajouter un article qui
pourrait être au début du livre des biens, qui pourrait être au début du livre
de la famille, qui explique comment on pourra aménager la garde de l'animal.
• (16 h 10) •
Je sais que la SPCA de Montréal va vous
soumettre un mémoire qui fait une recension des différentes formules...
M. Lessard (Michaël) : ...la
Colombie-Britannique, qui est fort intéressante, mais aussi, on le voit dans
les juridictions de droit civil, comme en Suisse, comme en Espagne, des
dispositions qui permettent d'aménager la garde de l'animal en fonction de ses
propres besoins, sa propre réalité, plutôt qu'en fonction du titre de
propriété.
M. Morin : Et, vous avez
raison, on est privilégiés parce qu'on a l'expert québécois dans le domaine avec
nous. Je suis certain que M. le ministre aura une oreille attentive aux bonnes
suggestions du professeur Roy, parce qu'effectivement ça crée, pour l'avoir vu,
là, dans différents dossiers, ça crée effectivement un traumatisme chez... chez
l'enfant, bien sûr.
Autre élément, à la page 21,
prescription en cas de violence conjugale. Vous l'expliquez mais j'aimerais
vous entendre là-dessus, il nous reste deux minutes 22 s, là. Parce que
ça, c'est quelque chose qui aussi m'interpelle beaucoup. Alors, quelles...
quelles seraient vos recommandations là-dessus?
M. Lessard (Michaël) : Oui.
Donc, je peux faire court, ou plus court que ce que j'ai fait jusqu'à
maintenant. Donc, essentiellement, l'article 2926.1 rend imprescriptibles
les actions en réparation d'un préjudice lorsqu'il s'agit d'une violence
sexuelle, une violence conjugale ou une violence subie durant l'enfance. Par
contre, il doit s'agir d'un préjudice corporel. Et ça, ce que ça veut dire, un
préjudice corporel, c'est essentiellement lorsqu'il y a un contact ou certains
types de préjudices psychologiques qui relèvent du choc nerveux, qui sont
vraiment un seuil très important. Les autres catégories de préjudices, dans le
Code civil, c'est le préjudice moral et le préjudice matériel. Donc là, il y a
toute une panoplie de victimes qui ne peuvent pas bénéficier de
l'imprescriptibilité du recours, c'est-à-dire de l'absence de délai pour
poursuivre, donc c'est le... c'est le délai de base, le délai de trois ans,
pour intenter une action en réparation qui est... Et donc des préjudices
moraux, ça peut être le harcèlement, l'intimidation, les menaces de mort.
M. Morin : Quand... Je
m'excuse, je vous interromps parce qu'il nous reste une minute, là.
M. Lessard (Michaël) : Oui.
Je vous en prie.
M. Morin : Non, non, mais je
voudrais juste savoir, parce qu'on parle, puis c'est de plus en plus documenté,
toute la... toute la notion de contrôle coercitif. Donc, et ça peut être
effectivement quelque chose qui est exercé, mais ce n'est pas nécessairement de
la violence. Donc, est-ce que le préjudice moral, ça pourrait inclure le
contrôle coercitif?
M. Lessard (Michaël) : Ça
pourrait l'inclure, mais là, on a un autre problème. À 2926.1, c'est qu'il doit
s'agir d'une infraction criminelle, et donc le contrôle coercitif n'étant pas
criminalisé, certaines formes sont criminalisées, comme, par exemple, le
harcèlement, mais...
M. Morin : Oui, c'est ça, des
formes le sont, oui.
M. Lessard (Michaël) : Oui.
Mais il y a beaucoup, beaucoup d'angles morts, donc tant que... Et je sais
qu'il y a certains projets de loi, au fédéral, qui le proposent, mais tant
qu'il n'y a pas de criminalisation du contrôle coercitif, il va rester des
angles morts. Donc, à cet égard-là, il peut être possible de retirer l'exigence
de l'infraction criminelle aussi, à 2926.1, si on veut inclure toutes les
formes de contrôle coercitif.
M.
Morin :Parfait. Je vous remercie. Merci beaucoup, M. ministre.
Le Président (M.
Bachand) :Merci beaucoup. M. le député de
Saint-Henri-Sainte-Anne, s'il vous plaît.
M. Cliche-Rivard : Merci
beaucoup à vous deux. Vous faites bien d'en parler, de la criminalisation du
contrôle coercitif. Ça, c'est une question qui touche et qui intéresse beaucoup
le ministre de la Justice dans ses discussions avec ses homologues. Donc, au
plaisir de l'entendre bientôt sur cette question-là.
Est-ce qu'on oublie des familles dans le
projet de loi? Donc, des familles, disons, moins classiques, là, pour ne pas
utiliser ce terme, mais bon, la triparentalité ou ailleurs, les familles
recomposées, bref, est-ce que vous avez des inquiétudes sur ce volet-là?
Pour... On parle des enfants, là, je parle de ces enfants-là, principalement.
M. Lessard (Michaël) : Donc,
oui, j'ai, dans... lors de d'autres consultations puis de d'autres travaux,
j'avais mis de l'avant l'idée de... d'encadrer et de protéger des familles avec
plusieurs parents, notamment. Donc effectivement, tout ça semble sortir du
projet de loi parce qu'on exige essentiellement qu'il s'agisse d'une union de
fait, donc qui se fasse à deux, mais on exige aussi qu'il y ait deux liens de
filiation. Donc, il y a toutes sortes de situations de familles recomposées où
un enfant connaît seulement deux figures parentales, mais une seule des deux a
un lien de filiation avec l'enfant. Donc, pour le bénéfice du temps, je ne
voudrais pas donner trop d'exemples, mais le... si on veut s'intéresser...
M. Cliche-Rivard : Allez-y.
M. Lessard (Michaël) : Oui?
M. Cliche-Rivard : Non, non,
mais ça m'intéresse vraiment comme question.
M. Lessard (Michaël) : Oui.
Ah bien, vas-y.
Mme Zaccour (Suzanne) : Bien,
peut-être, je rajouterais aussi qu'on parle beaucoup de l'enfant, et c'est
noble, et personne n'est contre la vertu, de protéger les enfants, mais des
familles sans enfants, ça reste des familles aussi. Et de se préoccuper de la
pauvreté des enfants, c'est essentiel. Et se préoccuper de la pauvreté des
femmes, ce n'est pas superflu, ou des... ou des violences conjugales, etc.,
dans les... dans les familles sans enfants. Donc effectivement, il y a des...
je ne sais pas si on oublie des familles ou s'il y a des familles qui sont
exclues de ce projet de loi, mais certainement, on fait le choix de traiter des
gens qui habitent ensemble depuis 15, 20 ans comme des colocs, de dire ce
n'est pas des familles, et ce n'est pas... et les familles recomposées, etc.,
et ce n'est pas clair que ça... que ça suit vraiment la... les conceptions
modernes de c'est quoi, une famille, qui peut prendre toutes sortes de formes
recomposées, avec...
Mme Zaccour (Suzanne) : ...ou
sans enfant, avec un ou deux liens de filiation. Donc, c'est des familles qui
devraient aussi... sont en grand nombre, qui vivent des enjeux et qui c'est
peut-être la dernière chance d'une réforme de... de ce type du droit de la
famille, il ne faudrait pas laisser passer l'occasion de les protéger
également.
M. Lessard (Michaël) : Puis...
et puis il faut aussi ajouter que le critère d'être en union de fait oublie
certaines familles et parfois il y a des gens qui sont mariés, mais qui ne vont
pas nécessairement divorcer. Classiquement, on voudrait que des gens qui sont
mariés qui ne divorcent pas aient une séparation de corps, ne serait-ce que
pour régler leurs intérêts patrimoniaux. Mais là s'ils sont en séparation de
corps, techniquement ils sont encore mariés, donc exclus de la possibilité de
l'union parentale, mais il y a toutes sortes de personnes qui ne savent pas que
la séparation de corps existe, qui ne vont pas faire ce recours-là. Donc, même
chez les familles considérées plus traditionnelles, il y a toutes sortes
d'angles morts comme ça, et par l'exigence du lien de filiation, et par
l'exigence qu'il y ait une rupture avec les unions antérieures.
M. Cliche-Rivard : Merci
beaucoup pour votre temps aujourd'hui.
Le Président (M.
Bachand) :Merci beaucoup. M. le député de
Jean-Talon, s'il vous plaît.
M. Paradis : Merci beaucoup.
Bonjour. J'aimerais continuer dans la foulée de mon collègue de l'Acadie sur
l'animal de la famille. C'est une perspective assez unique que vous avez
amenée. Je suis allé voir votre papier dans lequel vous rappelez que c'est un
sujet délicat. Et je suis allé voir aussi l'article de... du Pr Roy dans lequel
il parle de la difficile interaction entre l'article 898.1 et
l'article 410 du Code civil et d'une certaine timidité des tribunaux en la
matière. C'est pour ça que j'aimerais vous ramener là, parce que vous nous
suggérez d'inclure dans ce projet de loi une disposition qui permettrait donc
de respecter la sensibilité et à satisfaire les impératifs biologiques de
l'animal. J'aimerais que vous en disiez plus un peu, compte tenu de votre
expertise et celle du Pr Roy sur mais comment ça va fonctionner à cause de
cette timidité des tribunaux à aller là. Puis ce n'est pas une question
accessoire, parce que vous l'avez dit, il y a beaucoup de litiges maintenant
devant les tribunaux où, à la fin, c'est la garde de Pitou et Minou qui fait
problème parce que c'est important pour le noyau familial. Comment ça
fonctionne, ça?
M. Lessard (Michaël) : Oui.
Donc, effectivement, c'est... on voit de plus en plus ces dossiers-là, et il y
a toutes sortes d'outils pour les tribunaux. J'ai l'impression que la timidité
qu'on voit présentement, c'est que les tribunaux se sentent vraiment liés par
le paradigme de la propriété, mais quand on lit les jugements, on voit déjà que
les juges sont sensibles à la réalité des animaux puis à la réalité de la
famille, donc ils vont souvent nommer l'animal, reconnaître qu'il est... qu'un
des deux conjoints est beaucoup plus attaché à l'animal ou que c'est l'enfant
qui est attaché à l'animal. On voit déjà donc que, dans l'évaluation de la
preuve, il y a une sensibilité à la réalité familiale, la réalité de l'animal.
Mais là ils se sentent piégés par le paradigme de la propriété, ils ne se
sentent pas légitimes d'utiliser 898.1 comme on propose de le faire. Donc,
c'est là où ça peut être intéressant d'avoir un article qui le permet
explicitement. Donc, ça, il serait possible d'avoir une série de... de facteurs
qui permet de, et on le voit, ça, en Colombie-Britannique, qui permet d'évaluer
comment on répond aux besoins de l'animal. Il y a ces facteurs-là dans la loi
de Colombie-Britannique, mais on voit même, au sein du droit québécois, dans la
Loi sur le bien-être et la sécurité de l'animal, on explique c'est quoi, les
impératifs biologiques et c'est quoi satisfaire aux impératifs biologiques. Qui
est capable de nourrir convenablement l'animal, de s'occuper d'avoir un
exercice, de s'occuper de la socialisation de l'animal également?
Mme Zaccour (Suzanne) : Et si
je peux me permettre d'ajouter quelque chose, ce n'est pas nécessairement
seulement au bénéfice de l'animal, parce que le paradigme de la propriété,
c'est moi qui ai payé pour l'animal, c'est mon chien, permet aussi à des
conjoints violents d'instrumentaliser l'animal pour poursuivre la violence
conjugale post-séparation, et je sais que c'est une préoccupation de beaucoup
de membres de cette commission, donc c'est au bénéfice de l'animal, de l'enfant
et des victimes de violence conjugale d'encore une fois d'arrimer la... la loi
à la manière dont la société québécoise perçoit déjà qu'un chien ce n'est pas
une chaise et que ce n'est pas juste de l'acheter et c'est tout, ce qui
explique la relation, là, avec ce chien-là ou un autre animal.
Le Président (M.
Bachand) :Merci beaucoup. Me Zaccour, Me
Lessard, merci beaucoup d'avoir été avec nous. Et on se dit à la prochaine.
Alors donc, sur ce, la commission ajourne
ses travaux au mardi 7 mai à 10 h 05. Merci beaucoup.
(Fin de la séance à 16 h 19)