Journal des débats de la Commission des institutions
Version préliminaire
43e législature, 1re session
(début : 29 novembre 2022)
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Le
mardi 21 novembre 2023
-
Vol. 47 N° 49
Consultations particulières et auditions publiques sur le rapport de mise en œuvre du Code d’éthique et de déontologie des membres de l’Assemblée nationale 2015-2019 intitulé: Incursion au cœur du code d’éthique et de déontologie: de la théorie à la pratique
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9 h 30 (version non révisée)
(Neuf heures trente-et-une minutes)
Le Président (M.
Bachand) :Bonjour, tout le monde! Bon
matin! Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission des
institutions ouverte. Je vous souhaite encore une fois la bienvenue.
La commission est réunie afin de procéder
aux consultations particulières et auditions publiques sur le rapport de mise
en œuvre du code d'éthique et de déontologie des membres de l'Assemblée
nationale 2015-2019, intitulé Incursion au cœur du code d'éthique et de
déontologie, de la théorie à la pratique.
Avant de débuter, Mme la secrétaire, y a t
il des remplacements?
La Secrétaire : M. le
Président, M. Morin (Acadie) est remplacé par M. Derraji (Nelligan); et M.
Zanetti (Jean-Lesage), par M. Leduc (Hochelaga-Maisonneuve).
Le Président (M.
Bachand) :Merci beaucoup. Cela dit, le 3 décembre
2010, l'Assemblée nationale a adopté à l'unanimité un code d'éthique et de déontologie
des membres de l'Assemblée nationale. Lors de la 41ᵉ législature, conformément
à l'article 114 du code, la Commission des institutions avait étudié le
premier rapport de mise en œuvre pour la période 2011-2014.
Aujourd'hui, conformément à la motion
adoptée par l'Assemblée nationale et à l'article 114 du Code d'éthique et
de déontologie, la commission des Incisions entreprend l'étude du rapport sur
la mise en œuvre du code pour la période 2014-2019.
Nous allons débuter par les remarques préliminaires,
puis nous entendrons les personnes et organismes suivants : l'Institut d'éthique
appliquée de l'Université Laval, mais nous débuterons avec la Commissaire à l'éthique
et à la déontologie, Mme Ariane Mignolet.
Cela dit, nous sommes maintenant aux
remarques préliminaires. Alors, je suis prêt à reconnaître un député de parti
gouvernemental, M. le député de Saint-Jean, pour 6 minutes. Merci.
M. Lemieux : Merci beaucoup, M.
le Président. Salutations. Et content de retrouver, après cette semaine à
circonscription, nos collègues autant de l'opposition que de la partie
gouvernementale.
Je dois dire que c'est un mandat un peu
particulier qu'on aborde qui va nous changer de notre menu quotidien en
commission parlementaire, qui est celui de l'étude des projets de loi.
Remarquez qu'aujourd'hui les gens qui sont familiers avec nos travaux vont
reconnaître la procédure des consultations particulières. On en a pour toute la
journée et une partie de la soirée, on verra.
Mais effectivement, c'est un mandat
particulier que celui d'entendre et ensuite d'accoucher d'un rapport de cette
commission sur un rapport qui a été déposé le 5 décembre 2019 par la Commissaire
à l'éthique et à la déontologie qu'on va être capable d'entendre et avec qui on
va pouvoir avoir des échanges au cours des deux prochaines heures.
D'ailleurs, la date du dépôt du rapport
est un peu l'éléphant dans la pièce dans les circonstances, M. le Président,
vous allez en convenir, considérant la ligne du temps, pour l'appeler comme ça,
de ce qui s'est passé. Ce rapport-là a été déposé, donc celui qu'on va étudier
ensemble, le 5 décembre 2019. Bon. On conviendra ensemble que les travaux
parlementaires prenaient fin à ce moment-là, ont repris fin janvier 2020. Sans
faire une ligne du temps exhaustive, vous aurez compris qu'avec la COVID, avec
les mesures COVID, avec ce qui s'est passé après, on se retrouve aussi à la fin
de tout ça, à l'été 2022, pour des élections en octobre 2022. On a repris
les travaux de cette législature, la 43ᵉ, le 29 novembre 2022, et la
session a pris fin le 10 décembre. Comptez le nombre de jours, ça nous
laissait 10 jours de travaux.
Donc, et vous l'avez dit, et c'est
important de le noter, selon l'article 114 du code, le commissaire doit
faire un rapport à tous les cinq ans sur la mise en œuvre du code et sur l'opportunité
de le modifier. Et il nous faut donc absolument étudier ce rapport qui date, je
le rappelle, du 5 décembre 2019, avant que le prochain soit déposé.
D'ailleurs, je soupçonne que la commissaire
et son équipe ont déjà beaucoup de travail d'accompli pour ce prochain rapport.
C'est pour ça que je parlais d'un éléphant dans la pièce, dans la mesure où on
parle de choses qui datent déjà pas mal, et au moment où la commissaire était
en train d'écrire et de penser, si ce n'est pas encore écrit, à comment elle va
écrire ce qu'elle va écrire dans son prochain rapport, ça va nous placer dans
le contexte de pouvoir suivre pour le prochain rapport, et ça nous rafraîchit
la mémoire pour celui-ci qu'avec mes collègues, j'ai bien hâte... dont j'ai
bien hâte de discuter, pas seulement avec le commissaire, mais avec les autres
groupes et représentants qui vont venir discuter et échanger avec nous au cours
de la journée. Merci, M. le Président.
Le Président (M.
Bachand) :Merci beaucoup. M. le député de
Nelligan, pour 3 min 36 s, s'il vous plaît.
M. Derraji : Merci, M. le
Président. M. le Président, bonjour aux collègues de la partie du gouvernement,
puis mon collègue aussi. J'aimerais, au tout début, saluer les équipes de l'Assemblée
nationale, donc secrétariat de la commission, la régie, le service de
transcription, ceux et celles qui travaillent pour nous aider.
Nous sommes très heureux d'être ici ce
matin afin d'effectuer les consultations particulières sur le rapport de mise
en œuvre du Code d'éthique et de déontologie des membres de l'Assemblée
nationale. J'ai cru comprendre que mon collègue était en train de justifier
quelque chose par rapport à l'étude de ce rapport. J'ai... je tiens juste à
rappeler que nous sommes en train d'étudier un rapport avec trois ans, 11 mois
et cinq jours de retard. 1 436 jours de retard. Donc, il y a une limite de
tout mettre sur la pandémie, il y a une limite, parce que, même pendant la pandémie,
M. le Président, nous étions capables de fonctionner avec des travaux en mode
virtuel. Mais je tiens juste à rappeler que nous étudions... en fait, que le
rapport que nous étudions a été déposé à l'Assemblée nationale le
5 décembre 2019. Le 16 décembre, 11 jours plus tard, le député
de LaFontaine, mon collègue, a déposé une lettre à l'attention de la commission
afin qu'elle se saisisse du mandat prévu par l'article 114 du Code d'éthique et
de déontologie des membres de l'Assemblée nationale. Nous sommes ici, le
21 novembre 2023, afin d'entreprendre l'étude de ce rapport de mise
en œuvre, près de quatre ans après son dépôt, M. le Président. Ce n'est pas du
tout sérieux. Je l'ai mentionné, c'est 1 436 jours de retard.
M. le Président, le rapport dont nous
sommes saisis aujourd'hui couvre uniquement la période entre 2015 et 2019.
Comment pouvons-nous entreprendre une réflexion rigoureuse sur notre code
d'éthique alors que le gouvernement de la CAQ occulte une partie de l'histoire?
M. le Président, le prochain rapport de mise en oeuvre de la commission à
l'éthique doit être présenté au plus tard le 1er janvier 2025.
Aujourd'hui, pour saluer le travail de la commissaire, je pense que le
gouvernement doit prendre un engagement ferme sur le délai d'étude du prochain
rapport. Si on suit la même logique, le rapport qui risque d'être déposé en
2025, et si je rajoute trois ans, on risque de l'étudier en 2028, sinon, 2029.
Je ne pense pas que ce sera le souhait de Mme la commissaire à l'éthique. Il
est temps que la CAQ se conforme au code d'éthique des membres de l'Assemblée
nationale. Il n'existe pas un régime d'exception pour les caquistes, et il faut
le prendre...
Le Président (M.
Bachand) :...s'il vous plaît. Merci.
M. Derraji : Oui, pas de
problème. Mais, comme je vous le dis, M. le Président, nous avons devant nous
un exemple concret de l'étude d'un rapport qu'on aurait dû étudier lors de la
dernière législature. Malheureusement, après quatre ans de retard, on manque
beaucoup de rapports. Il y avait pas mal de travail que la commissaire a fait,
et, malheureusement, on ne va pas l'étudier.
Donc, j'espère que tout au long de ces
consultations qu'on va avoir avec la commissaire et les autres groupes qu'on va
recevoir, qu'au bout de la ligne les recommandations de la commission vont
aller dans le sens qu'on veut tous, à savoir renforcer le code d'éthique. Et le
code d'éthique, il est là pour qu'on le suive, pour qu'on le respecte et pour
que notre institution soit respectée. Alors, M. le Président, très hâte à
échanger avec les groupes, très hâte à échanger avec les autres collègues
membres de cette commission, mais, encore une fois, je tiens à le rappeler que
nous avons une déception par rapport à la lenteur avec laquelle le gouvernement
a donné suite au rapport, que... Je tiens à rappeler, il a été déposé le
5 décembre 2019 et, quatre ans plus tard... trois ans, 11 mois, cinq
jours, c'est presque quatre ans... je vais dire, presque quatre ans... on
l'étudie quatre ans plus tard. Je pense que ce n'est pas sérieux et j'espère
que, pour le prochain rapport, on va se conformer dans les délais. Alors,
merci, M. le Président.
Le Président (M.
Bachand) :Merci. M. le député de
Hochelaga-Maisonneuve, pour 1 min 30 s, s'il vous plaît.
M. Leduc : Merci, M. le
Président. Bonjour, tout le monde, Me Mignolet. Moi aussi, je ne peux que
déplorer la lenteur avec laquelle on a eu le réflexe collectif, je dirais, de
vous inviter ici en lien avec le rapport. Je salue mes collègues, la députée de
Mercier et le député de Jean-Lesage, qui, en février dernier, avaient demandé,
là, de pouvoir entendre Mme Mignolet. Ça a pris du temps, mais, bon, mieux vaut
tard que jamais, comme on dit. Donc on va essayer d'approcher la journée avec
un peu de positivisme, même si, quand même, ça aurait dû être fait beaucoup
plus tôt, et je souscris à l'ensemble des propos de mon collègue qui vient de
s'exprimer. Je veux aussi saluer mon collègue Vincent Marissal, le député de
Rosemont, qui est toujours en rémission suite à son opération, que je remplace
aujourd'hui. Donc, j'espère qu'il nous écoute, peut-être. Si c'est le cas, on
le salue, et il vous salue sûrement aussi, j'imagine, je sais que vous
entretenez des bons rapports avec lui. Voilà, merci beaucoup.
• (9 h 40) •
Le Président (M.
Bachand) :...alors, on va débuter les
auditions. Alors, je souhaite la bienvenue à la Commissaire à l'éthique et à la
déontologie, ainsi qu'à son équipe. Alors, je vous rappelle que vous disposez
de 20 minutes pour votre exposé. Après, nous procéderons à la période d'échange
avec les membres de la commission. Alors, bienvenue, encore une fois, et la
parole est à vous. Merci.
Mme Mignolet (Ariane) : M. le
Président, Mmes et MM. les...
Mme Mignolet (Ariane) : ...membres
de la Commission des institutions. Je tiens d'abord à vous remercier de
l'occasion qui m'est offerte d'échanger avec vous sur le second rapport sur la
mise en œuvre du code d'éthique et de déontologie des membres de l'Assemblée
nationale, déposé, comme vous venez de le mentionner, le 5 décembre 2019. Les
22 recommandations qu'il contient découlent, entre autres, des réflexions
suscitées par l'application du code au quotidien et des défis rencontrés dans
la mise en œuvre de certaines dispositions. Avant de débuter, je vous présente
les deux personnes qui m'accompagnent aujourd'hui, Mme Catherine Durepos, à ma
droite, secrétaire générale et directrice des affaires administratives et
institutionnelles, ainsi que Maître Geneviève Geneau, à ma gauche, avocate. Je
tiens aussi à remercier tous les membres de mon équipe, présents et passés,
pour leur appui dans la préparation de ce rapport.
Incursion au cœur du code d'éthique et de
déontologie, de la théorie à la pratique, couvre la période du 1ᵉʳ janvier 2015
au 15 novembre 2019. Il s'agit d'un important travail de réflexion visant à
faire le pont entre l'idéal recherché par les parlementaires au moment où le
code a été adopté et la pratique quotidienne de l'encadrement, de l'éthique et
de la déontologie dans le milieu politique du Québec. L'idéal visé est un juste
milieu entre l'indépendance dont les élus doivent bénéficier dans l'exercice de
leurs charges et le respect des principes fondamentaux en matière de prévention
des conflits d'intérêts. Ainsi, il ne s'agit pas de rendre les règles plus ou
moins strictes, mais plutôt de donner au commissaire des outils lui permettant
de mieux exercer le mandat qui lui est confié, dans le but de maintenir la
confiance des citoyens envers leurs élus et leurs institutions.
L'institution du commissaire s'inscrit
dans la volonté d'une politique plus intègre dans la société québécoise. C'est
dans cette optique que le code a été adopté il y a maintenant près de 13 ans.
Depuis son adoption, plusieurs autres jalons ont été posés afin d'affermir
cette culture d'éthique et d'intégrité. À titre d'exemple, la Loi sur l'éthique
et la déontologie en matière municipale a été modifiée en 2021 afin d'intégrer
notamment l'interdiction pour les élus municipaux de se comporter de manière à
porter atteinte à la dignité et à l'honneur de leurs fonctions et l'obligation
de suivre une formation en éthique et déontologie en matière municipale une
fois par mandat.
Le domaine de l'éthique et de la
déontologie dans les milieux politiques et parlementaires évolue constamment.
Le contexte est d'ailleurs un élément central dans l'application des
dispositions du code. Chaque situation étant unique, il est nécessaire de
trouver un équilibre dans l'appréciation des règles en fonction des
circonstances particulières, sans pour autant procéder à du cas par cas, de
manière à assurer une certaine prévisibilité des règles qui vous sont
applicables.
Pour réaliser sa mission, qui est de
veiller au respect et à la mise en œuvre du code, le commissaire agit essentiellement
par le biais de la prévention et des enquêtes. J'aimerais d'abord vous exposer
aujourd'hui les principales réflexions découlant de notre rôle préventif, puis
j'aborderai ensuite celles découlant de notre rôle d'enquête. Bien entendu, ce
rapport fait état de plusieurs autres recommandations visant à améliorer
l'efficacité de l'institution, et je serai disponible pour échanger sur chacune
d'entre elles.
Abordons pour commencer les
recommandations liées au rôle préventif du commissaire. Le code fait état des
valeurs, des principes éthiques et des règles déontologiques qui encadrent la
conduite des membres de l'Assemblée nationale. Pour résumer, ces dernières et
ces derniers doivent, dans l'exercice de leur charge, agir exclusivement dans
l'intérêt public. Pour les accompagner en ce sens, le bureau du commissaire met
l'accent sur la prévention. En effet, il m'apparaît primordial d'agir en amont
de manière à prévenir les situations de conflit d'intérêts.
Toutefois, un élément central et indispensable
d'une prévention adéquate des manquements déontologiques n'est actuellement pas
prévu au code, il s'agit de la formation obligatoire. La connaissance et la
juste compréhension par les membres de l'Assemblée nationale des règles qui
leur sont applicables sont essentielles puisqu'elles leur permettent de porter
un regard plus critique sur une situation donnée, d'identifier plus rapidement
ce qui pourrait engendrer un problème éthique ou déontologique et, le cas
échéant, nous consulter à ce sujet. De plus, ces formations sont l'occasion
d'établir un premier contact, de se familiariser avec le code et de répondre à
plusieurs questions, initier une collaboration fructueuse entre les élus et le
personnel du commissaire. Cependant, pour le moment, ces formations ne sont pas
obligatoires et elles ont parfois lieu alors que le mandat des élus est déjà
bien entamé ou qu'une situation à risque est déjà avérée.
C'est pourquoi il m'apparaît essentiel que
le code soit modifié de manière à prévoir l'obligation pour les élus, comme
c'est le cas pour les élus municipaux depuis 2021, de participer à une
formation adaptée à leur fonction dans les six mois du début de leur mandat et,
par la suite, à au moins une reprise pour chaque mandat subséquent. Il est très
important que les élus soient sensibilisés le plus rapidement possible...
Mme Mignolet (Ariane) : ...qui
sont souvent les premiers et les mieux informés d'une situation potentielle de
conflit d'intérêts les concernant et de ce fait les mieux placés pour la
prévenir.
Depuis le... le début de la 43e
législature, le commissaire propose une offre bonifiée de formation,
s'adressant autant aux députés qu'aux membres de leur personnel politique. Elle
porte sur le code ainsi que sur les dispositions applicables au personnel
politique. D'autres concernent les thématiques précises comme les conflits
d'intérêts ou l'utilisation des biens et services de l'État, entre autres
choses.
Depuis la mise en place de cette offre de
formation donnée fréquemment et de façon cyclique, à la faveur d'une démarche
plus proactive, nous constatons une augmentation de la participation aux
formations sur une base individuelle. Alors qu'au cours de la première année de
la 42e législature une vingtaine d'élus avaient suivi une formation, nous en
sommes à 47 un an après le début de la 43e législature. Le nombre de membres du
personnel politique ayant suivi au moins une séance de formation est également
fort encourageant. Nous remarquons par ailleurs que ces formations
sensibilisent les députés et les membres de leur personnel aux règles qui leur
sont applicables et nous permettent de les accompagner d'ailleurs souvent
immédiatement après une séance de formation.
L'action du commissaire porte-t-elle ses
fruits? Dans une certaine mesure, oui. Est-ce suffisant? Certainement pas. Je
maintiens donc plus que jamais ma recommandation et celle de mon prédécesseur
de rendre la formation obligatoire.
Par ailleurs, les deux dernières élections
générales m'ont amenée à faire certains constats, dont quelques-uns sont en
lien avec le volet préventif des activités du commissaire. Durant la période
électorale de 2018 et encore lors des dernières élections générales de 2022,
certaines personnes qui souhaitaient se porter candidates ont contacté le
commissaire afin d'obtenir un éclairage sur les règles qui leur seraient
applicables dans l'éventualité où elles étaient élues. Considérant les
conséquences importantes dans les sphères personnelle, professionnelle et
familiale qu'engendre le fait d'accéder à la fonction de député, voire de
ministre, il me semble tout à fait légitime qu'un candidat souhaite s'enquérir
de l'impact de l'application du code à son égard.
Cependant, actuellement, en vertu de l'article 87
du code, seuls les députés peuvent présenter une demande d'avis formel au
commissaire. Ainsi, je crois qu'il serait souhaitable que le code soit modifié
de manière à ce qu'il soit possible de rendre des avis formels aux personnes
qui souhaitent se porter candidates, selon certains critères déterminés par le
commissaire, afin qu'une analyse plus complète de leur situation particulière
soit effectuée.
Lors de la campagne électorale de 2022, le
commissaire a produit un document d'information destiné aux personnes qui
songent à se porter candidates, qui a été joint au formulaire de déclaration de
candidature transmis par Élection Québec. Ce document présente notamment les
principes éthiques et les obligations déontologiques qu'elles devront respecter
si elles sont élues et les effets que ceux-ci pourraient avoir sur elles-mêmes
et sur les membres de leur famille. Or, il demeure que seul un avis du
commissaire permettrait aux candidates et aux candidats de prévoir des mesures
particulières adaptées à leur situation personnelle qu'ils devront
éventuellement mettre en place pour se conformer au code. Encore trop d'élus
réalisent au lendemain de leur élection les impacts des règles énoncées par le
code sur leur vie et sur celle des membres de leur famille immédiate.
Par ailleurs, depuis plusieurs années, le
commissaire constate certains enjeux d'application du code relatif aux
expériences passées des élus. En effet, les dispositions du code encadrant les
conflits d'intérêts rendent parfois difficile pour les députés et ministres de
concilier leurs expériences passées et leur charge de représentant des
citoyens. En ce sens, je souhaite mettre de l'avant une recommandation du
rapport qui vise à mieux l'adapter à la réalité des élus en ce qui concerne
l'article 25 du code. L'objectif de celui-ci n'est pas d'empêcher
quiconque de s'engager en politique active et de contribuer à l'avancement de
notre société. La variété des profils des membres de l'Assemblée nationale est
une richesse pour notre démocratie et elle est souhaitable pour le bénéfice de
l'ensemble de la population. C'est dans cet esprit que j'ai recommandé de
modifier l'article 25 du code afin que les députés ayant un intérêt
financier particulier puissent s'exprimer sur une question débattue à cet égard
dans la mesure où ils déclarent publiquement cet intérêt sans toutefois avoir
le droit de vote sur la question.
• (9 h 50) •
Actuellement, l'article 25 oblige les
députés qui ont un intérêt personnel et financier distinct de celui de
l'ensemble des députés ou de la population à se retirer des débats à l'égard
d'une question dont l'Assemblée nationale ou une commission dont ils ou elles
sont membres est saisie, question pour laquelle ils peuvent détenir une
expérience significative. Or, le profil social, professionnel ou
entrepreneurial peut-être un élément crucial que les députés ont mis en
évidence en campagne électorale et sur lequel ils entendent fonder leur action
en tant que parlementaires. Puisque ces derniers se font notamment élire sur la
base de cette expérience, les citoyens peuvent parfois percevoir la contrainte
prévue à l'article 25 comme étant un obstacle au devoir de représentation
des élus.
J'estime qu'il est nécessaire...
Mme Mignolet (Ariane) : ...nécessaire
d'avoir un meilleur équilibre entre le privilège de la liberté de parole dont
disposent les élus, les attentes des citoyens qu'ils et elles représentent et
la transparence nécessaire pour prévenir les risques de conflits d'intérêts.
Ma volonté est de permettre cette meilleure
représentation des intérêts de la population et de toutes les sphères
d'activité de la société. En ce sens, j'insiste sur le fait que cette
recommandation suit l'esprit du code et qu'il ne s'agit pas d'un recul
déontologique. Cette mesure favoriserait même une plus grande transparence. En
effet, à l'heure actuelle, un député qui a un intérêt personnel, financier
distinct dans une situation donnée ne se présentera tout simplement pas à la
séance de l'Assemblée ou de la commission parlementaire en question, il n'a
donc pas à déclarer son intérêt. La modification proposée nécessiterait que les
élus divulguent son intérêt publiquement pour pouvoir participer aux
discussions dans le cadre d'un projet de loi notamment. Il serait également
souhaitable, au bénéfice de tous, que les déclarations publiques de conflits
d'intérêts faites en vertu de cet article soient compilées dans un registre
public administré par le commissaire.
J'aborderais maintenant certaines
recommandations en lien avec les activités d'enquête du bureau du commissaire,
lesquelles visent à faire la lumière sur des situations pour lesquelles il y a
des motifs raisonnables de croire à un manquement et de statuer sur l'absence
ou la présence de manquements. Il s'agit donc d'une dimension coercitive
puisqu'elle permet la recommandation de sanctions lorsqu'au terme d'une enquête
il est établi qu'un comportement n'est pas conforme au code. L'enquête est
actuellement le seul moyen dont dispose le commissaire pour intervenir, même en
cas de manquement avéré, et pour lequel il n'y a aucune clarification à
apporter.
Ceci m'amène à vous parler de la
recommandation selon laquelle le commissaire devrait pouvoir imposer une
pénalité plutôt que de recourir au processus d'enquête régulier dans certains
cas bien spécifiques. En effet, une enquête est un processus qui nécessite un
investissement en temps et en ressources. De plus, l'Assemblée nationale doit
passer nécessairement au vote lorsqu'une sanction est recommandée à un élu pour
qu'elle soit applicable.
Or, dans les cas où le manquement au code
est d'ordre administratif ou technique, par exemple lorsqu'il est question d'un
retard dans la production d'une déclaration d'intérêts, de l'absence d'une
déclaration de don ou dans d'autres situations précises, le processus d'enquête
peut sembler lourd, coûteux et disproportionné. Dans un souci d'efficacité de
la mise en œuvre du code, le fait de permettre les pénalités administratives à
l'égard de certains manquements entraînerait un effet dissuasif.
Enfin, je note que de telles pénalités
sont d'ailleurs prévues dans certaines lois relatives aux conflits d'intérêts
ailleurs au Canada.
Par ailleurs, il importe d'apporter...
d'aborder, pardon, la possibilité pour le commissaire de recommander une
sanction à un élu lorsqu'un manquement au code a été commis. Alors que
l'interprétation du code et la détermination du manquement... d'un manquement à
celui-ci relèvent exclusivement du commissaire, l'application d'une sanction
demeure la prérogative de l'Assemblée nationale en vertu de ses privilèges
parlementaires. Le commissaire ne peut que recommander, le cas échéant,
l'adoption d'une telle sanction.
Or, l'Assemblée nationale se prononce
actuellement sur le rapport d'enquête dans son entièreté. Il s'agit là d'une incohérence
puisque, lorsqu'un rapport d'enquête ne comporte pas de recommandation de
sanction, les membres de l'Assemblée nationale n'ont pas à se prononcer à ce
sujet. À cet égard, je rappelle l'importance de maintenir un équilibre entre la
mission de l'institution du commissaire, la confiance du public et les droits
des parlementaires. Enfin, de respecter... afin, pardon, de respecter
l'économie du code et ainsi réaffirmer l'indépendance de l'institution, je
propose que le code soit modifié afin de prévoir que le vote des membres de
l'Assemblée nationale ne porte que sur la recommandation de sanction.
Enfin, j'insiste sur une dernière
recommandation relative aux enquêtes du commissaire, il s'agit de la protection
des témoins et des lanceurs d'alerte. Le travail de surveillance du commissaire
peut être réalisé grâce à de l'information communiquée par des citoyennes et
des citoyens ainsi que des personnes qui se trouvent dans l'entourage des élus
et qui, pour cela, doivent avoir confiance dans les mécanismes en place. Ces
personnes portent à mon attention certains faits, peuvent être appelées à jouer
un rôle dans les enquêtes. Il est donc nécessaire d'obtenir la pleine
collaboration de tous les témoins.
Or, l'actuel système québécois de
protection des lanceurs d'alerte instauré dans les dernières années ne protège
pas les personnes qui font des divulgations ou qui témoignent devant le
commissaire. Il s'agit, à mon avis, d'une lacune majeure affectant le
fonctionnement de l'institution. En effet, les actes répréhensibles qui
pourraient être commis par des membres de l'Assemblée nationale ne sont pas
couverts ni par la loi facilitant la divulgation des actes répréhensibles à
l'égard des organismes publics ni par le règlement facilitant la divulgation
d'actes répréhensibles à l'égard de l'Assemblée nationale. C'est pourquoi je
recommande que le code soit modifié de manière à interdire les mesures de...
Mme Mignolet (Ariane) : ...ou
des menaces de représailles à l'endroit d'une personne qui communique des
renseignements au commissaire ou qui collabore à une vérification ou une
enquête.
J'ai abordé aujourd'hui certaines des
recommandations présentées dans le rapport de mise en œuvre qui, à mon sens,
soulèvent des questions importantes sur lesquelles vous devriez, à titre de
législateurs, vous pencher. Le rapport fait état de plusieurs autres réflexions
importantes que je n'ai pu aborder ici compte tenu du temps limité dont nous
disposons. Par ailleurs, il est possible que vous souhaitiez, dans une optique
de révision du code, vous pencher sur d'autres enjeux, en plus de ceux contenus
au rapport rédigé il y a quatre ans. À ce propos, vous n'êtes pas sans savoir
qu'en vertu du code je dois remettre mon prochain rapport dans un an, soit au
plus tard le 1ᵉʳ janvier 2025. Vous comprendrez que mes réflexions en vue de sa
rédaction sont déjà entamées et qu'une étude de ce dernier, en temps opportun
par votre commission, vous permettra d'y être associés.
Comme je l'ai déjà indiqué, l'utilisation
des médias sociaux par les élus et les membres de leur personnel politique
soulève certains enjeux sur lesquels je souhaite me pencher. Je réfléchis par
ailleurs également au concept de dignité de la fonction, qui ne se limite pas
uniquement à l'exercice de la charge, comme c'est maintenant le cas au Sénat du
Canada et au palier municipal. Il s'agit là de deux sujets sur lesquels j'ai
l'intention de soumettre des recommandations dans ce prochain rapport.
Je souhaite terminer mon allocution aujourd'hui
en vous parlant de confiance. Ultimement, c'est à vous que revient la tâche de
bâtir un lien de confiance avec la population et d'œuvrer à le maintenir. Vous
vous êtes dotés d'outils et d'institutions pour vous accompagner et vous aider
à tendre vers cet objectif. À la base, et le Journal des débats de
l'étude détaillée du projet de loi n° 48 est éloquent à cet égard, le code se
voulait un outil pour maintenir la confiance des citoyens à l'égard des
parlementaires, et il est, à mon sens, crucial que cet idéal ne soit pas perdu
de vue. Il est de votre responsabilité d'utiliser cet outil à bon escient. Le
risque d'instrumentalisation n'est jamais très loin. Or, l'instrumentalisation
d'une institution ne saurait correspondre à ce que la population s'attend de
ses représentants et peut miner de façon irréversible la confiance dont doivent
jouir nos institutions démocratiques. L'intégrité des membres de l'Assemblée
nationale est une composante essentielle du lien de confiance, lien fragile,
s'il en est un, entre la députation et les citoyens qu'elle représente.
Je suis tout à fait consciente que les
discussions que nous aurons aujourd'hui et que celles que vous pourriez avoir à
la suite de ces consultations particulières sont fort sensibles, puisqu'elles
concernent directement la manière dont vous exercez votre charge et pour
laquelle vous jouissez, en vertu de la Loi sur l'Assemblée nationale, d'une
entière indépendance. Sensibles, également, car elles interpellent plusieurs
aspects de votre fonction d'élu avec lesquels vous devez composer au quotidien,
à savoir les attentes élevées de vos commettants, les contraintes de temps et
de ressources, les lignes de parti, les causes profondes qui sont le socle de
votre engagement politique ou encore les sacrifices que l'exercice de la
politique active a requis de vous et de vos familles. Il est donc vrai qu'il
n'y a pas de bon moment ou de contexte parfait pour aborder ces questions,
d'autant qu'il peut toujours s'en dégager, à tort ou à raison, une impression de
vouloir alléger ses obligations.
Mais le code d'éthique et de déontologie
dont nous traitons aujourd'hui est bien plus qu'un code de conduite ou qu'une
simple loi, c'est avant tout une institution que vous avez voulu neutre,
impartiale et indépendante. Pour preuve, vous avez jugé opportun que le
Commissaire à l'éthique et à la déontologie, contrairement aux autres personnes
désignées, soit nommé par l'adoption d'une motion présentée conjointement par
le premier ministre et le chef de l'opposition officielle. S'il est une loi
dans le corpus législatif québécois qui vous concerne intimement, c'est bien le
Code d'éthique et de déontologie des membres de l'Assemblée nationale. C'est
pourquoi il importe que sa mise en œuvre et les réflexions entourant sa révision,
et pas uniquement aujourd'hui, soient vastes, régulières, exhaustives et
qu'elles se fassent de façon collaborative et transpartisane.
En terminant, je réitère mon ouverture à
discuter de vos préoccupations et vous offre à mon entière collaboration pour
la suite du processus d'étude de ce rapport. Merci, M. le Président. Je suis
maintenant prête à répondre à vos questions.
Le Président (M.
Bachand) :Merci beaucoup, Mme la
Commissaire. Alors, je me tourne vers la partie gouvernementale pour un premier
bloc d'échange.
M. Lemieux : Combien de
temps, M. le Président?
Le Président (M.
Bachand) :Pour 49 minutes. Mme la
députée de Charlevoix–Côte-de-Beaupré.
• (10 heures) •
Mme Bourassa : Oui. Bonjour,
bon début de journée. Écoutez, juste avec mes questions, on pourrait faire la
journée entière. Je vais en laisser un peu à mes collègues. Je vais commencer
par quelque chose que vous n'avez pas abordé présentement. Vous parliez d'un
examen préliminaire dans un délai de 15 jours ouvrables afin de déterminer
si une enquête s'impose. On sait que ce sont les députés qui peuvent demander
une enquête. Vous pouvez initier également une enquête. J'aimerais vous
entendre là-dessus. Pourquoi est-ce que vous êtes arrivée à cette...
10 h (version non révisée)
Mme Bourassa : ...réflexion-là.
Est-ce que c'est parce que le préjudice peut être très important pour quelqu'un
quand une enquête est ouverte, même si ça ne va pas nécessairement se terminer
par des sanctions? Donc, qu'est ce qu'une enquête préliminaire permettrait?
Mme Mignolet (Ariane) : Je
vous remercie. Donc, effectivement, cette recommandation, elle est inspirée de
ce qui se fait ailleurs, notamment au fédéral. En matière d'enquête, les
dispositions qu'on retrouve dans le code, donc les articles 91 et
suivants, ne sont pas très, très claires quant à la possibilité de faire des
vérifications avant une enquête. Donc, l'article 91 prévoit que, donc, un
député qui a des motifs raisonnables de penser qu'il y aurait un manquement au
code peut faire une demande d'enquête. Dans ces cas-là, il y a donc... à moins
qu'il n'y ait pas de motifs raisonnables, l'enquête se fait. Et même si par la
suite, quand je commence l'enquête et que je me rends compte peut-être que la
demande n'était pas fondée, il y a un article qui prévoit que je peux y mettre
fin et l'indiquer dans mon rapport. Mais c'est clair qu'il y a déjà tout le
processus d'enquête qui est enclenché à ce moment-là. Et comme je l'ai dit, c'est
un processus qui est effectivement... qui peut être lourd, et que, oui, il y a
des impacts, tout à fait.
Je pense que ça serait intéressant d'avoir,
lors de toute demande, une période fixe qui permette clairement au commissaire
de faire une vérification préliminaire pour voir s'il y a lieu de faire une
enquête. Et ce n'est pas parce qu'il peut y avoir des motifs raisonnables, mais
simplement parce qu'on n'a pas accès à toute l'information. Et une simple
vérification avec ce pouvoir d'enquête... de ce pouvoir de vérification,
pardon, clair permettrait dans un délai de dire : Bon, bien, oui, il y a
matière à ouvrir l'enquête et je l'ouvre. Non, il n'y a pas matière, voici
pourquoi je ne l'ouvre pas.
Mme Bourassa : J'ai vu
également, bon, dans le rapport qu'en 2018, 2022, donc les années électorales,
il y a beaucoup plus d'enquêtes. Et là vous vouliez baliser, justement, je
pense, quatre mois avant, avant les élections, à date fixe. Donc,
expliquez-nous qu'est-ce qui vous a amené à proposer ça puis qu'est-ce que vous
proposez concrètement?
Mme Mignolet (Ariane) : Oui.
Là, vous m'amenez dans la recommandation qui fait... qui suggère de ne pas
pouvoir présenter une demande d'enquête pour un député dans les quatre mois qui
précèdent le scrutin. En fait, ça, c'est vraiment une recommandation... C'est
vraiment une recommandation qui... je dirais, qui découle un peu... c'est un
effet des élections à date fixe, hein? Je veux dire, avant ça, quand on ne
savait pas exactement, il y avait toujours une période où on pouvait se douter
que ça s'en venait. Mais ce calendrier fixe fait état premièrement qu'on rentre
dans une période pré-électorale assez... on le voit tout de suite quand on
rentre dans cette année-là, et je voulais éviter le plus possible... On sait
que quand on embarque dans cette période pré-électorale, les tensions sont
parfois plus grandes. Il y a un peu plus de partisanerie. Je pense que je ne
choque personne en disant ça...
Mme Bourassa : Éviter l'instrumentalisation.
Mme Mignolet (Ariane) : Éviter
l'instrumentalisation, justement. Et, évidemment, je ne pense pas... je ne dis
pas que je ne peux pas commencer d'enquête, ce que je demande, c'est que les
demandes ne pourraient pas être faites. Mais si, à mon initiative, il y avait
quelque chose qui justifiait le début d'une enquête, je pourrais toujours le
faire. Mais, effectivement, je pense que d'arrêter ça... J'ai dit quatre mois.
Si vous vous demandez pourquoi quatre mois, c'est un petit peu parce que tant
qu'à moi, ça correspond à la fin de la période de travaux de juin avant...
parce que, là, on rentre vraiment dans l'été où la campagne est presque bien
entamée.
Mme Bourassa : On a combien
de temps?
Le Président (M.
Bachand) :Il reste 45 minutes.
Mme Bourassa : Bon, on va
continuer. On va rester dans la période électorale. Vous parliez justement d'une
possible collaboration avec le DGEQ pour faire de la sensibilisation. Vous avez
dit que cette année, bien, aux dernières élections, il y a eu de l'information
avec le formulaire de candidature. Est-ce que... Clairement, ce n'est pas
suffisant. Comment ça pourrait s'articuler quelque chose d'obligatoire, qu'on
soit sûr que les candidats aient l'information et qu'ils la lisent vraiment?
Mme Mignolet (Ariane) : Bon,
je pense qu'il y a plusieurs choses qui peuvent se faire. Moi, j'ai pensé à
cette solution avec ce partenariat avec le DGEQ. C'est une très bonne chose qu'on
ait déjà la pochette. Je pense que, comme je n'ai pas accès aux personnes qui
souhaitent se porter candidates, donc, évidemment, je pense que, dans un
premier temps, d'obtenir la permission... Ça fait que le code puisse me
permettre que ces personnes qui souhaitent être candidates puissent nous
appeler et recueillir un avis formel...
Mme Mignolet (Ariane) : ...sur
leur situation, c'est une chose. Mais l'autre chose, je pense que ça revient
aux partis politiques de bien expliquer, de bien présenter, quand ils vont
recruter des candidats. Je pense que ça, c'est essentiel, puis ça, ça relève
des partis politiques. Je me suis toujours montrée très ouverte avant les
élections avec tous les partis pour dire : Si vous avez des questions à
l'approche de recrutement des candidats, n'hésitez pas. Mais je pense qu'au
préalable, c'est à peu près la seule chose qui peut être faite.
Mme Bourassa : Et, quant à la
formation obligatoire, vous disiez, là, que la 42e législature, il y a,
quoi, une vingtaine de personnes, puis, la 43e, il y a 47 personnes
environ qui ont suivi la formation. On a eu une formation justement sur
l'adaptation aux changements climatiques, transpartisane, est-ce que c'est ce
que vous avez en tête quand vous parlez d'une formation en déontologie et en
éthique? Est-ce que ce serait en personne ou... Pour ma part, bien, je me
permets un commentaire, quand c'est internet, peut-être qu'on porte un peu
moins attention. On a tellement de formations sur internet, on clique, on
clique, peut-être qu'en personne avec des experts, quand on explique, ce serait
plus porteur. Est-ce que c'est ça que vous aviez en tête?
Mme Mignolet (Ariane) : Oui.
Dans un premier temps, je pense que non, ce ne serait pas le format. Bon, je ne
sais pas exactement le format de la formation en gestion climatique que vous
avez ou qui s'adresse à tout le monde. Moi, je vise vraiment une formation, et
vous l'avez bien dit, en mode synchrone, c'est-à-dire avec interaction, avec
soit en visio, des fois, quand... mais avec quelqu'un, quelqu'un qui engage
avec vous. Et je pense que ça devrait être adapté aux fonctions. Et je pense
que ce genre de formation est beaucoup plus... Beaucoup mieux reçue, et on en
profite plus quand vous êtes séparés par groupes parlementaires, et parce que
les gens osent plus poser des questions. Donc, je ne souhaite pas faire... Il
peut y avoir un volet qui s'y prête, c'est-à-dire, je ne sais pas, moi, un
volet, on pourrait penser, sur l'éthique de manière générale, l'éthique des
valeurs, peut-être que tout le monde ensemble... Mais je pense que ça doit être
adapté non seulement aux fonctions exactes, donc qu'il y a vraiment des... tu
sais, quand on est ministre, quand on est député, quand on a des fonctions
parlementaires, je pense que, quand on est dans l'opposition ou au
gouvernement, il y a des enjeux différents, et je pense que ces formations-là
devraient y répondre et devraient être en personne, engageant, en tout cas,
avec quelqu'un en vrai. Peut-être qu'il peut y avoir d'autres formations par la
suite, des petites formations plus précises sur des sujets, qui peuvent être
faites en ligne, mais il faut que le premier contact, je pense, soit en
personne, et rapidement.
Mme Bourassa : Il y avait un
bout que j'ai...
(Interruption)
Mme Bourassa : Oui? O.K. Il y
avait un bout que j'ai moins saisi. Quand vous parliez de pénalité
administrative proposée quand il y a un manquement, par exemple un document qui
a oublié d'être fourni ou qui n'est pas adéquat, ça serait quoi, la différence?
C'est... vous parlez d'une... pas d'une pénalité financière. Ça serait quel
type de...
Mme Mignolet (Ariane) : Oui,
ce seraient des pénalités financières. C'est à ça que je fais référence, des
pénalités administratives. On le voit ailleurs. Et ce n'est pas...
Mme Bourassa : Comme un SAP,
comme une sanction administrative pécuniaire ou...
Mme Mignolet (Ariane) : Oui,
quelque chose comme ça. C'est-à-dire pour... c'est parce que souvent, le seul
moyen qu'on a, si, par exemple, quelqu'un oublie de faire une déclaration de
don, ou la déclaration des intérêts est en retard, je n'ai pas de moyens.
L'objectif, ce n'est pas de mettre des sanctions dès que ça a des retards, dès
qu'il y a le moindre retard, c'est d'avoir cette possibilité-là, qui existe
ailleurs au fédéral et je ne sais plus dans quelle... quelques... en Alberta,
notamment, je pense, et c'est pour inciter à produire les documents que le
commissaire demande dans les temps. C'est-à-dire, déclaration des intérêts, ce
n'est pas grave, si je fais un rappel, mais je ne ferais pas une enquête, je ne
vais pas déclencher une enquête parce que quelqu'un est en retard, même s'il
est très, très en retard. Je vais faire beaucoup de rappels, des déclarations
de dons. Il y a plusieurs... Si je demande expressément un document, il y a
quelques points qui pourraient tomber sous ce coup-là, parce que ce n'est pas tellement...
Une enquête, c'est fait pour faire la lumière sur une situation, mais on
s'entend que la déclaration en retard, si... J'ai beau faire plein, plein de
rappels, et qu'elle n'arrive pas, bien, je ne vais pas faire une enquête, il
n'y a pas de lumière à faire sur cette situation-là, il y a un retard, c'est
tout.
Mme Bourassa : Donc, ça
permettrait d'alléger, premièrement, votre travail, mais le processus aussi.
C'est l'alourdir pour rien, présentement.
Mme Mignolet (Ariane) : Oui.
Bien oui, exactement, exactement.
Mme Bourassa : Et ça, est-ce
que ça serait facilement implantable?
Mme Mignolet (Ariane) : oui,
je pense que oui, mais il faut que le code le prévoie. Mais je ne peux pas me
donner ce pouvoir de pénalité là toute seule, ça, c'est bien évident, mais il
faut que le code le prévoit. Mais évidemment, oui, c'est... Ça se fait ailleurs
et c'est... ça se...
• (10 h 10) •
Mme Bourassa : Et là j'essaie
de regarder ma feuille, mais il y avait la question du vote des élus lorsqu'il
y a une sanction qui est applicable. Vous, vous proposez une modification.
Qu'est-ce que vous proposez?
Mme Mignolet (Ariane) : En
fait, je propose une clarification dans le texte de cet article-là, qui, en
fait, à l'heure actuelle, on dit que lorsque le rapport du commissaire comporte
une recommandation de sanction, donc à la... il y a un manquement qui a été...
Une conclusion de manquement et pour laquelle on recommande une sanction,
l'Assemblée doit adopter...
Mme Mignolet (Ariane) : ...rapport
pour que la sanction devienne applicable. Je souhaite juste que le libellé de
l'article reflète ce que c'est vraiment, parce que, dans les faits, le vote, il
est sur la sanction, parce que ça permet à la sanction de s'appliquer ou pas
et... Je donne un exemple, c'est--dire que, quand j'en viens à une conclusion
de manquement, il n'y a pas de vote. Donc, c'est juste pour refléter le fait
que le vote ne devrait avoir lieu que sur la recommandation de sanction, qui
sont parmi les privilèges de l'Assemblée, de décider, et, moi, j'ai entière...
j'ai l'exclusivité en matière d'interprétation des règles, des conclusions de
manquement. Ça, ça appartient, c'est l'indépendance de l'institution, et de
libeller ça pour que ce soit plus clair.
Mme Bourassa : Je vais poser
une question puis, après ça, je vais laisser mes collègues, je reviendrai s'il
y a du temps. Je voulais juste... Vous parliez d'aviser le chef d'un groupe
parlementaire lorsqu'il y a une enquête. Donc, j'imagine que ce n'est pas le
cas, présentement. Je pense que c'était... attendez, la recommandation 6.
Donc... que le chef d'un groupe parlementaire soit avisé par le commissaire du
déclenchement d'une enquête concernant un député de son groupe. Comment ça se
passe, présentement, puis pourquoi est-ce que vous ajoutez ça? Est-ce que
c'est... Quels avantages on aurait à aviser les chefs?
Mme Mignolet (Ariane) : Tout
ce qui touche les enquêtes est confidentiel. Quand il y a une demande d'enquête
qui vient d'un parlementaire concernant un autre parlementaire, dans la
majorité des cas, le député demandeur rend publique cette demande, donc il n'y
a pas d'enjeu, c'est public, tout le monde le sait. Mais, quand je commence une
enquête à mon initiative, ce n'est pas forcément public, et je ne le rends pas
public, à moins que ça le soit, que le député... Et, à ce moment-là, donc, je
reviens quatre ans en arrière, je réalisais, à ce moment-là, qu'il peut y avoir
des cas où il y a des enquêtes qui touchent un membre de l'Assemblée, mais on
sait qu'une enquête sur un membre de l'Assemblée peut avoir un impact sur le
groupe parlementaire. Et je me disais : Il me semble que c'est important
que le chef de ce parti-là soit avisé si son député ne le dit pas. Mais, quand
je me suis préparée pour revenir ici, donc... pour venir ici aujourd'hui, là...
Je ne peux pas dire que c'est une recommandation phare, d'accord, hein, on peut
le dire, hein, comme ça. Donc, ça, c'est vraiment... c'était, à ce moment-là,
je me disais : Ça peut être intéressant, ce n'est pas un enjeu pour
l'institution, on va dire ça comme ça.
Mme Bourassa : Parfait. Merci
beaucoup. Je vais laisser la place à mes collègues.
Le Président (M.
Bachand) :Merci. Mme la députée de
Vimont, s'il vous plaît.
Mme Schmaltz : Merci, M. le
Président. Merci de votre présence ce matin. En fait, vous m'avez titillée,
tantôt, en lien avec les constats que vous avez faits, notamment avec... Vous
avez passé rapidement parce que je pense que vous ne vouliez pas l'intégrer ou
peut-être que j'ai mal compris, c'est l'utilisation des réseaux sociaux par les
élus. Quand vous mettez ça de l'avant, est-ce que, selon vous, il pourrait y
avoir des manquements à l'éthique du fait que les élus soient présents sur les
réseaux sociaux, se confient, peu importe, là, je veux dire, écrivent, ça peut
être très large, là, je ne veux pas rentrer dans le détail, là, mais qu'est-ce
que vous avez remarqué?
Mme Mignolet (Ariane) : Bien,
je peux répondre?
Une voix : Allez-y.
Mme Mignolet (Ariane) : Merci.
Vous avez entendu ça tantôt dans mon allocution, je vous indiquais que c'est un
sujet sur lequel je me penche, mais pour lequel je ne suis pas prête à tirer
des conclusions. Ma réflexion commence. Elle a débuté, je vous dirais, l'année
dernière, peut-être même un petit peu avant. Quand le code a été adopté, là, on
s'entend que les médias sociaux, ce n'était pas tellement autant... il n'y
avait pas autant de... ce n'était pas un enjeu autant, hein, on se remet il y a
13 ans, il y a de ça 13 ans, ce n'était pas un enjeu qui pouvait affecter, il
n'y avait pas une utilisation si répandue.
Maintenant, c'est un incontournable dans
la vie, et incluant la vie des parlementaires et des membres du personnel
politique, pour rejoindre vos citoyens, pour communiquer vos... Ça c'est... Je
ne remets pas du tout en cause et ce n'est pas du tout l'objet de ma réflexion
de dire : On ne peut pas utiliser les réseaux sociaux. Ce n'est pas là
qu'on est, mais j'ai remarqué, notamment quand on arrive dans l'année électorale,
les contenus des sites de médias sociaux deviennent plus partisans et là il y a
certaines réflexions qui, par exemple... Parce qu'on dit souvent...
Mme Mignolet (Ariane) : ...c'est
important de ne pas créer la confusion et de bien séparer les activités qui
sont liées à l'exercice de votre charge et d'autres activités qui relèvent soit
de votre sphère privée ou partisane. Comme vous avez le code s'applique dans
l'exercice de votre charge, permet une utilisation des biens et services de
l'État pour l'exercice de votre charge, ce qui exclut les activités partisanes.
Donc, à un moment donné, on constate que des fois, et plus on arrive près d'une
période électorale, plus le contenu se mélange en quelque sorte et c'est
difficile de faire la part des choses. Est-ce le député de ma circonscription,
est-ce le ministre Untel de tel secteur qui s'adresse à moi? Est-ce le premier
ministre qui... ou c'est le chef du parti, de tel parti ou un autre, ou c'est
la députée qui se... sortante qui va... qui va se représenter pour son...
Et c'est là où il peut y avoir certains
enjeux. Si une personne s'est abonnée à une page en disant : Moi, je veux
savoir, je m'abonne toujours à la page de mon député ou du premier ministre
parce que je souhaite avoir des informations sur le gouvernement, ce que le
gouvernement met de l'avant et l'exécute, etc. Et puis, donc, je m'abonne. Et à
un moment donné, ce que je reçois, c'est du contenu partisan. Et je n'ai
peut-être pas, je ne me suis peut-être pas abonné pour ça.
Donc, il y a une réflexion qui se fait
ici, mais qui se fait ailleurs, un peu partout. Donc, je consulte beaucoup
mes... mes collègues, mes homologues ailleurs au Canada, et il y a certaines
directives qui existent déjà ailleurs, notamment pour les ministres, de ne pas mélanger
leurs comptes, les contenus qui sont liés à leur charge, à leur fonction et,
d'un autre côté, des activités pour faire la promotion d'une activité de
financement ou pour faire un, etc.
Mme Schmaltz : J'ai une
petite question, disons. Vous parlez de la période électorale et l'utilisation
des réseaux sociaux ou l'utilisation des réseaux sociaux juste quand on...
Bien, en fait durant le mandat.
Mme Mignolet (Ariane) : Écoutez,
c'est l'utilisation des médias sociaux au sens large. Ce que j'ai... Ce que
j'ai mentionné, c'est que quand on arrive près de la période électorale, c'est
généralement là qu'il y a le plus de risque de confusion, c'est à ce moment-là
que les contenus commencent à être un peu plus partisans en vue de l'élection
qui s'en vient. Donc, il peut y avoir des enjeux de confusion, d'utilisation
des biens et services de l'État, qui n'ont... Est-ce qu'on a... On parle d'une
page qui est liée, une page de député ou c'est ma page de candidat de... Donc,
c'est ce genre de... d'enjeu là.
Mme Schmaltz : Parce
qu'en règle générale, lorsqu'on devient candidat, on n'est plus
techniquement...
Mme Mignolet (Ariane) : Oui,
mais là, là, vous parlez de la période stricto sensu électorale...
Mme Schmaltz : Exactement.
Oui, c'est ça.
Mme Mignolet (Ariane) : ...alors
que moi, je parle de dès le début de l'année déjà électorale, ça commence
tranquillement. Mais c'est sûr qu'en période électorale, vous êtes des députés
sortants, mais...
Mme Schmaltz : Je sais.
Ma collègue m'interpelle parce qu'elle veut poser une question...
Le Président
(M. Bachand) :Oui. Mme la députée de
Charlevoix-Côte-de-Beaupré...
Mme Bourassa : Juste
dans votre réflexion, il ne faut pas oublier, par exemple, quelqu'un qui a été
agent immobilier ou n'importe quoi, et qui s'est créé une communauté sur les
réseaux sociaux, qui s'est fait connaître comme ça, il y a des gens qui la
suivaient avant. Maintenant, c'est sa page qui continue à la suivre. Par
exemple, elle était journaliste avant. Elle avait une page de journaliste. Elle
est devenue agente immobilière. Elle a transformé sa page agente immobilière,
devenue députée. Tu sais, il y a des gens qui la suivent depuis des années
parce que Facebook existe depuis des années. La page est aussi liée à la
profession de la personne. Donc, je pense que ça va avec la fluctuation de son
rôle de députée. Il y a une période où cette personne-là doit se vendre, doit
se faire connaître. Et ça sert, tu sais. Maintenant, on sait que les campagnes
électorales ont changé. Ce n'est plus que du téléphone, ce n'est plus que du
porte-à-porte. C'est une façon de rejoindre l'électorat et de rejoindre un peu
des gens qu'elle connaît. Donc, je serais intéressée à la réflexion derrière
ça, mais je pense que c'est une utilisation des réseaux... des réseaux sociaux,
même en campagne électorale. Peut-être qu'un message en haut, dire, à afficher
en campagne ou, tu sais, de préciser que ça pourrait être partisan. Mais
n'empêche que ça fait partie du travail de députée d'être en campagne si elle
veut être élue. Donc, je fais juste dire de faire attention parce que, tu sais,
la page peut être la page, depuis très longtemps, de cette personne pour son
niveau professionnel.
• (10 h 20) •
Mme Mignolet (Ariane) : Je...
Oui, je peux... Je suis... Je suis tout à fait consciente de ça. C'est
simplement que... Puis vous faites bien de mentionner une autre activité qui
n'était pas liée à la... aux élections, là, par exemple, parler de quelqu'un
qui avait une... une autre... une autre fonction avant et que ça suit, c'est...
C'est intéressant, ce que...
Mme Mignolet (Ariane) : ...ce
que vous amenez. C'est évident que ça fait partie des réflexions et des enjeux
qui nous sont soulevés, avec qui on a déjà échangé un petit peu avec certaines
personnes. Mais il y a aussi... Je pense qu'il y a... Ailleurs, on le voit à
certains endroits, ce n'est pas toujours facile ce dont je vais parler dans le
sens où on peut imaginer, proposer peut-être... il peut y avoir différentes
pages. Et je sais que vous allez me dire : Il y en a beaucoup. Bien là, je
n'ai pas le temps de gérer plusieurs pages. Mais c'est évident que si vous
maintenez la même page... Donc, il y a des gens qui se sont peut-être abonnés
justement à vous parce que vous étiez agente immobilière, parce que vous êtes
ministre de... je ne sais pas, de l'agriculture, etc. Et là... Tous mes
exemples sont fictifs. Et là parce que vous vous intéressez au domaine, mais
pas forcément parce que vous êtes en accord avec les opinions ou le groupe
parlementaire avec lequel est formé le gouvernement actuellement. Mais ça... le
nombre d'abonnés qui vous suit parce que vous êtes ministre, parce que vous
êtes députée de la circonscription de... en publicité, quand après ça, vous
voulez joindre le plus de gens possible pour passer votre message qui peut être
partisan... bien, ça a une valeur quand même, là. Puis si vous prenez... Ce
n'est pas des gens qui se sont dit : Moi, je veux recevoir des publicités
pour le groupe...
Mme Bourassa : ...
Le Président (M.
Bachand) :Merci beaucoup. ...la députée
d'Anjou—Louis-Riel, s'il vous plaît.
Mme Boivin Roy : Merci
beaucoup, M. le Président. Merci, Mme la commissaire pour la présentation ce
matin. Je pense qu'effectivement il y a un travail de réflexion de fond qui a
été fait sur les années 2015 à 2019. Vous nous parlez de l'application du
code au quotidien. Évidemment, l'équilibre que vous devez établir et que nous
devons tous établir entre l'indépendance des députés, et également le respect
des règles du code, et que ce n'est pas nécessairement facile d'avoir cette
prévisibilité-là, puisqu'évidemment les situations se présentent de cas par
cas. Mais on ne doit pas faire une étude de cas par cas bien qu'il y a des
éléments particuliers dans chacun des dossiers, alors c'est là aussi un
exercice que vous avez à soupeser pour éviter justement qu'il y ait des
situations, des manquements et qu'on souhaite avoir une prévention adéquate. Je
pense que c'est un exercice intéressant, de voir s'exercer la mission du code,
mais à la fois l'indépendance des députés et la protection du public. Donc tout
ça ensemble est une tâche complexe au quotidien, ce qui m'amène à avoir pour
vous si j'ai le temps, bien sûr, cinq questions et un commentaire.
Alors, ma première question est
relativement aux formations que vous nous avez parlé dans la
recommandation 1. Donc, vous proposez que les formations qui sont
actuellement non obligatoires le deviennent et soient intégrées dans le code et
bien sûr dans la pratique des élus. Alors, je vais vous... Ma question en fait
va vous proposer les deux axes. D'un côté, est-ce que vous pensez vraiment que
les formations obligatoires peuvent atteindre leur objectif
lorsqu'effectivement il peut y avoir des particularités dans des cas? Est-ce
que d'un côté ce ne serait pas mieux que les élus, lorsqu'ils vivent des
situations, vous contactent pour un avis du Commissaire à l'éthique sur une
situation donnée? Alors ça, c'est... côté du Pendulum.
Et de l'autre côté du Pendulum, est-ce que
vous pensez qu'une formation à l'intérieur d'un mandat de quatre ans est
suffisante? Et je vous dis ça sur la base de mon passé personnel, en tant
qu'élue municipale, où j'avais suivi toutes les formations qui étaient
disponibles en éthique et en déontologie. Et je peux vous dire que les
situations... nombreuses situations peuvent se présenter à l'intérieur d'un
mandat de quatre ans et on a besoin de revenir par nous-mêmes, de manière
indépendante, relire les règles du code pour se rafraîchir la mémoire. Alors,
de l'autre côté du Pendulum, est-ce que vous pensez qu'une formation en début
de mandat est suffisante à l'intérieur d'un même mandat? C'est ma première
question...
Mme Mignolet (Ariane) : Merci.
Je vous remercie aussi d'arrêter et de me permettre de répondre question par
question, sinon j'aurais dû prendre tout en note.
Donc, je pense que le premier volet de
votre question, la formation, oui, c'est extrêmement pertinent. Et
effectivement en éthique, déontologie ce n'est jamais tout blanc ou tout noir,
tout est question de contexte, et en même temps c'est... on ne veut pas...
donc, chaque cas d'espèce est important. Mais oui, c'est fondamental. Mais
évidemment ça ne remplace...
Mme Mignolet (Ariane) : ...pas
les demandes d'avis qu'il peut y avoir. En fait, plus il y a de formation, plus
les personnes visées par les règles sont formées, même plus on a de demandes
d'avis. L'objectif d'une formation, c'est de susciter des réflexes, notamment,
c'est de présenter des enjeux et de dire voici les situations dans lesquelles
vous devriez... il devrait y avoir une petite lumière rouge qui s'allume. Oh!
dans des cas comme ça, je pense que... Donc, c'est surtout ça, c'est pour
instaurer en quelque sorte ce que j'appelle le réflexe éthique, et ça, c'est nécessaire
parce qu'on n'a pas toujours l'impression... On arrive en poste et on se
dit : Bien, je suis une personne raisonnable, j'ai des bonnes valeurs,
j'ai des bons réflexes, je viens d'un milieu qui avait beaucoup de questions
d'éthique déontologique. Ça va. Et on se pense protégé. Mais l'enjeu n'est pas
tant là. L'enjeu, il est que le code a des des, des dispositions très précises
dans certains cas et demande une action très précise. Et si on ne sait pas
qu'est-ce qu'elle est, bien, on ne peut même pas anticiper le fait de
dire : Je devrais consulter le bureau du commissaire. Donc, je pense que,
oui, la formation est fondamentale et elle ne remplace pas les avis. C'est
deux... ça fait partie du... on est toujours en prévention, mais ça se complète.
Pour moi, c'est fondamental.
Est-ce qu'une formation maintenant, au
début du mandat, est suffisante? La réponse est non. Moi je vous parle d'un
minimum. D'accord? Le minimum. Je pense que quand on arrive à l'Assemblée, on
devrait avoir des bases, des bases pour justement avoir le réflexe et ne pas
attendre qu'une situation problématique se pose pour consulter, parce que des
fois il peut être trop tard, parce qu'on ne l'a pas vu venir, mais qu'un
collègue l'a vu ou qu'un journaliste l'a vu venir, par exemple. Et là, il est
un peu tard pour entamer l'échange, mettons, avec mon bureau.
Donc l'objectif, c'est que ça prend une
formation obligatoire en début de mandat. Ça n'exclut pas qu'il puisse y avoir
beaucoup de professions. On a des heures de formation continue, hein, tout au
long de. Donc, il peut y avoir un module de base, il peut y avoir des modules
complémentaires sur des situations précises, sur des petits points précis au
fil du temps. Je pense qu'au minimum une formation obligatoire en commençant, c'est
la base, mais ça n'exclut pas plus.
Mme Boivin Roy : Merci
beaucoup pour votre réponse. Alors, je comprends bien qu'il y a cette
complémentarité entre les formations de base et puis les avis au Commissaire à
l'éthique. D'ailleurs, je souligne la qualité des formations qui sont
disponibles présentement pour les élus. Merci beaucoup pour la variété et aussi
la qualité de vos professionnels qui offrent ces formations-là.
Pour ma deuxième question, je vais faire
référence à votre recommandation 2, alors que vous parlez du fait que les
parlementaires réfléchissent à l'opportunité de rendre publiques, dans un
registre, certaines mesures prises pour prévenir des situations de conflit
d'intérêts. Est-ce que vous pouvez nous en dire davantage? Tout à l'heure, vous
nous avez parlé de l'objectif ultime de l'article 25, qui amène notamment
à une meilleure représentation des citoyens, une plus grande transparence de
manière générale. Mais lorsqu'on parle d'un registre, concrètement, à quoi
pensez-vous dans le détail, là, des informations qui seraient divulguées?
Mme Mignolet (Ariane) : Alors,
cette recommandation, elle vise vraiment à une plus grande transparence,
d'accord, des intérêts dont les élus pourraient avoir face... face aux
citoyens. Donc, quand on est contacté, notamment quand on est dans le processus
d'accompagnement d'un élu ou d'un ministre et qu'il nous dit : Bon, bien
voici, j'ai telle situation, j'ai des intérêts dans telle entreprise ou ma
conjointe dans tel domaine, etc. Peu importe, il peut y avoir une variété de
sujets pour lesquels on demande notre avis et pour lesquels on dit : Mais
voici... voici ce qu'il faudrait faire, vous allez prendre, par exemple, un
engagement. Si on parle d'un ministre, vous allez prendre un engagement auprès de
votre sous-ministre, auprès du premier ministre, vous allez demander
explicitement de ne pas être présent lors des séances du Conseil des ministres
qui parle de ce sujet. Vous allez aviser votre sous-ministre ou votre directeur
de cabinet de ne jamais vous amener les dossiers qui sont liés à telle ou telle
entreprise parce que ma conjointe ou mon conjoint est là. Donc, ce sont des
exemples de ce qu'on appelle un peu des processus mis en place pour éviter les
conflits d'intérêts.
• (10 h 30) •
Mais ce genre d'information, peut être pas
dans tout, mais ce genre d'information, il y en a une grande partie qui, je
pense, serait intéressante que ce soit rendu public pour la connaissance des
citoyens, de le savoir...
10 h 30 (version non révisée)
Mme Mignolet (Ariane) : ...de
ne pas simplement... d'être au courant que tel député, tel ministre, il y a
tels enjeux, ils ont... ils ont une... l'information et aussi surtout l'information
qu'il y a eu des démarches pour se prémunir contre les conflits d'intérêts,
parce que, sinon, on ne le sait pas, puis, après ça, il y a des... il y a des
questions, on entend parler de, puis là on fait des vérifications, et ça peut
amener la... la personne visée à se retrouver dans le centre d'une... d'une
espèce... d'un tourbillon médiatique ou je ne sais pas, alors que cette
personne-là a pris les mesures qu'on lui a demandé de prendre. Et je pense qu'en...
en matière de transparence, ça serait une bonne chose que ce soit connu, sauf
des cas exceptionnels, évidemment.
Mme Boivin Roy : Parfait.
Merci beaucoup. Ma troisième question. Sur la recommandation 8, alors que vous
parlez... bien, en fait, ma collègue a déjà abordé... sur la question, là, des
pénalités administratives pour éviter, là, justement qu'il y ait des
manquements, est-ce que de vos... J'imagine que, lorsque vous faites cette
analyse, vous regardez les meilleures pratiques à travers le monde et puis,
bien sûr, à travers les provinces et au fédéral. Est-ce que l'effet dissuasif
est démontré comme étant concluant?
Mme Mignolet (Ariane) : De
par mes collègues au Canada qui ont cette possibilité, c'est oui, la réponse
est oui. Et les autres collègues qui n'ont pas cette possibilité-là, il y en a
beaucoup qui souhaiteraient... qui souhaiteraient l'avoir, ça facilite les
choses, et l'effet dissuasif qui reste quand même, je dois dire, dans tous les
cas, à la discrétion du commissaire, c'est-à-dire ce n'est pas automatique,
O.K., ce n'est pas parce qu'il y a un retard d'un jour qu'il y a... je veux
dire, mais que le commissaire, quand il l'estime nécessaire, se dit :
O.K., là ça fait, ça fait huit fois que j'essaie, ça fait quatre semaines...
bon, qu'il puisse y avoir cette possibilité-là. Mais évidemment on parle de...
de gestes administratifs techniques parce que... par exemple, l'obligation de
donner... d'informer le commissaire de tout changement significatif, la
déclaration de don. On pourrait penser que, si jamais la commission devient...
la commission... la formation devient obligatoire, que si elle n'a pas été
tenue dans... Il peut y... Tout ce qui est des... des petits... pas
manquements, mais en tout cas, des gestes qui sont demandés, qui sont requis
par le code mais qui ne nécessitent pas... Je veux dire, moi, je ne ferais pas
une enquête pour ça, là, je veux dire, c'est clair, mais je pense que ça
permettrait peut-être de justement faire en sorte qu'on ait un peu plus de
déclarations de don, faire en sorte que... parce qu'on ne peut pas être partout
non plus, on ne surveille pas... on n'a pas... on n'a pas d'équipe de
surveillance, ce n'est pas... ce n'est pas l'objectif non plus, mais je pense
que ça permettrait... ça permettrait d'avoir peut-être moins de... de relance à
faire auprès de certains retardataires et d'inciter à déclarer les dons, des
choses comme ça.
Mme Boivin Roy : Très bien,
merci beaucoup. Ma quatrième question pour vous est relativement à la
recommandation 13. Alors que vous parlez, là, de la question des situations de
harcèlement dans le code, à la page 63 vous nous dites : «Il pourrait être
pertinent que le commissaire soit avisé de toute plainte fondée à l'encontre d'un
membre de l'Assemblée nationale en vertu de la politique de l'Assemblée
nationale.» Moi, ma question pour vous, c'est : A contrario, quelle est
votre réflexion sur la manière d'encadrer tout le processus?
Vous savez, peut-être avez-vous été
informée de l'émission Enquête la semaine dernière, qui présentait, là,
des situations où des élus sont, eux, harcelés par des citoyens, citoyennes,
entre autres un élu municipal qui s'était fait intimider, qui avait eu... qui
avait subi de la violence physique, etc. Ce soir, à l'agora, il y aura la
présentation du film Je vous salue salope. Bref, il y a toutes sortes de
situations qui démontrent des difficultés qui sont vécues par les élus
présentement alors qu'on a différentes crises, là, qu'on doit... on doit
rencontrer et on doit répondre... par rapport aux citoyens, aux citoyennes.
Alors, dans l'autre sens, là, comment
prévoyez-vous aider les élus, justement, qui, eux aussi, peuvent être victimes
de situations? Est-ce que c'est quelque chose qui pourrait être intégré dans le
code sur la manière dont on pourrait être accompagné lorsque ce sont les élus
qui, eux, vivent des situations de harcèlement?
Mme Mignolet (Ariane) : Alors,
dans le cas que vous m'exposez, je vois difficilement comment... Le code s'applique
vraiment aux élus et aux membres de leur personnel. Donc, c'est plus dans
cette... dans ce... ce forum-là, dans... dans cet écosystème-là dans lequel on
a réfléchi la situation du harcèlement. Je n'ai pas de pouvoir...
Mme Mignolet (Ariane) : ...contre
des citoyens. Donc, je ne pense pas... je ne pense pas que ce soit la vocation
du code de pouvoir. Par contre, j'imagine que... et je vous avoue, bien
humblement, je n'ai pas été vérifier cet aspect-là dans la politique sur le
harcèlement, là, qui existe à l'Assemblée nationale. Est-ce que vous êtes
protégés via cette politique-là? Peut-être. Mais la question du harcèlement,
telle qu'elle a été présentée dans le rapport sur la mise en œuvre, concerne
vraiment des situations qui impliquent des membres de l'Assemblée nationale ou
des membres de leur personnel politique.
Mme Boivin Roy : Je vais
préciser ma question.
Mme Mignolet (Ariane) : D'accord.
Mme Boivin Roy : Est-ce que
vous pensez qu'un encadrement serait nécessaire dans la manière dont les élus
choisissent de se défendre face à des situations qu'ils peuvent vivre de
harcèlement?
Mme Mignolet (Ariane) : Certainement.
Je ne sais pas si le code est le meilleur endroit, par exemple, mais
certainement.
Mme Boivin Roy : Parfait.
Merci pour la réponse. Dernière question pour vous, et, en fait, c'est une
question, mais, en même temps, un souhait. Vous nous avez parlé, tout à
l'heure, de la dignité de la fonction, un domaine que vous souhaitez explorer
dans le prochain rapport qui nous sera remis l'année prochaine. Évidemment, on
voit le cynisme de la population, depuis des années, là, à l'égard des élus. Et
ce concept de dignité de la fonction, le respect de l'institution en soi, est
une valeur que nous partageons tous, je pense, tous paliers confondus. Et
évidemment, lorsqu'il se passe quelque chose, quelconque palier, quelconque
situation, ça rejaillit sur l'ensemble des élus, et on doit, tous ensemble,
collectivement, viser à ce meilleur équilibre et les valeurs mêmes que vous
partagez dans le code. Est-ce que vous pouvez nous en dire un petit peu plus,
davantage, sur où vous souhaitez aller lorsque vous parlez du concept de la
dignité de la fonction?
Mme Mignolet (Ariane) : Je
vous remercie pour cette question. Oui, effectivement, c'est un sujet que je
pense qui est très important. Les limites du code actuel, et je l'avais
également soulevé dans ma recommandation qui portait plus sur le harcèlement,
la possibilité... j'avais recommandé, à ce moment-là, la possibilité d'élargir
éventuellement le spectre d'application du code en allant un petit peu plus
large que le strict exercice de la charge, parce que, justement, il y a des
situations qui se produisent et qui rejaillit sur toute la classe politique,
tous partis confondus, l'institution de l'Assemblée nationale. Et je pense que
c'est important de prévoir ça. Et, la tendance que j'observe, on s'en va vers
là, de la même façon que... même la question du harcèlement, que vous avez
évoquée il y a quelques instants. La tendance, c'est qu'on va vers... on sort
du... en fait, on fait de certaines situations comme la dignité de la fonction
au sens large, l'honneur de la fonction, les questions de harcèlement, on sort
du comportement de... du domaine plus éthique, on en fait une règle
déontologique, là, qui peut être sanctionnable et qui... Donc, comme ça a été
fait pour les élus municipaux, notamment, vous avez adopté cette pièce
législative. Moi, je pense que c'est fondamental aussi qu'on explore ça.
• (10 h 40) •
Puis qu'est-ce que ça veut dire, la
dignité, l'honneur de la fonction? Je peux vous dire, il y a des... comment
dire, on voit ça dans d'autres spectres, dont notamment la déontologie
professionnelle, il y a des exemples, mais je pense que ce qui va constituer
vraiment un écart, une atteinte à la dignité de la fonction de député, de
ministre, mes réflexions vont certainement, sans aucun doute, vous inclure pour
déterminer ce que c'est. Je ne pense pas qu'il ne m'appartienne à moi seule de
venir déterminer qu'est-ce qui est acceptable. C'est ça qui est un petit peu
difficile quand on parle des valeurs et des principes éthiques dans le code,
parce que c'est quand même... c'est vaste, et la... certaines valeurs comme le
respect des institutions, comme veiller ou voir au bien-être socioéconomique
des Québécois, ça ne veut pas dire la même chose pour un élu de vos formations
politiques respectives. Donc, je pense que c'est quelque chose qu'il va
falloir... et qui évolue constamment quand... si jamais on va vers là, bien, il
faudra voir aussi où la... les attentes de la population sont rendues par
rapport à ça aussi. Ça fait que c'est quelque chose que je ne ferai pas en vase
clos.
Mme Boivin Roy : Mme la
commissaire, merci beaucoup...
Mme Boivin Roy : ...pour
l'échange.
Le Président (M.
Bachand) :Merci. M. le député de
Saint-Jean, pour huit minutes.
M. Lemieux : Merci, M. le Président...
pour votre candeur et la largeur de la palette de vos commentaires, qui sont,
quand il est question de dignité de la fonction, de médias sociaux, de
confiance... qui sont plus qu'importants, c'est fondamental. Je suis sorti des
médias en disant que le cynisme ambiant était devenu lourd, pour entrer dans un
monde politique, où il n'est pas juste lourd, le cynisme ambiant. Alors,
d'entendre votre vision de la chose, ça me donne déjà hâte de lire votre
prochain rapport, bon.
Et justement, pour garder ça large, vous
avez parlé tantôt de réflexe éthique, et j'ai allumé là-dessus, c'est à la
mode, le réflexe ci, le réflexe ça, mais ce n'est pas juste à la mode, c'est
important parce qu'il y a plusieurs références dans votre rapport, dans vos
commentaires aussi, sur... mais plus dans le rapport, sur le changement de
culture au Québec vis-à-vis les principes de déontologie et d'éthique. Et je me
demandais si vous avez l'impression qu'on est encore en rattrapage, le code a
11 ans, sauf erreur, si on est encore en rattrapage, si on est passé date, si
on a encore raison d'être fiers de ce qu'il y a là-dedans. Pas dans la marge,
là, parce que, dans la marge, on peut s'entendre sur un paquet de choses que
vous avez recommandées, puis je vais y venir, mais au sens large. Est-ce qu'on
est à la mode ou on est dépassés, nous autres, ici, là?
Mme Mignolet (Ariane) : Le
Québec a été la dernière province au Canada à se doter d'un code d'éthique pour
les membres de l'Assemblée nationale, les ministres. Alors, ce fait-là fait en
sorte que, quand on l'a fait, quand le législateur s'y est penché, bien, il
avait beaucoup d'exemples, hein, on a été prendre partout, on a été regarder ce
qui se faisait ailleurs, le comité qui avait été mis en place, etc., les
recommandations qui ont été faites là-dedans, il y a eu des consultations...
avant même, je pense, le dépôt du projet de loi, des consultations pour le
projet de loi, tout ça. Donc, on s'est inspiré de ce qui se faisait ailleurs,
ce qui fait que, moi, quand je suis arrivée en poste, donc, en 2017, et que
j'ai rencontré mes homologues canadiens, moi, ce que j'entendais, c'est :
Wow! Vous êtes vraiment chanceux, au Québec, vous avez un code qui est très,
très avancé, on est envieux des dispositions, tout ça, donc. Puis ça, c'était
en 2017. Donc, ça fait six ans.
Donc, je ne pense pas qu'en six ans le
code est devenu désuet, là, on n'est pas dépassés. Par contre, on est dans on
le voit, puis même depuis l'adoption du code, il y a eu une grande montée, on
on l'a vu dans plusieurs domaines, d'autres institutions, d'autres législations
qui ont vu le jour en matière d'intégrité publique au sens large, on est dans
cette voie-là, et il est nécessaire... Je pense que la volonté du législateur
d'inscrire cette révision aux cinq ans est primordiale. Surtout en début, comme
ça. On peut dire : Ça fait bientôt 13 ans, mais on s'entend qu'on est un
bébé institution, là, dans l'écosystème. Donc, on est encore en développement,
et je pense que c'est important de le revoir régulièrement, de ne pas avoir
peur de requestionner tout pour s'assurer que ça reflète toujours les attentes
des citoyens et ça reflète toujours ce qu'on attend de vous et ce qu'il est...
et de bien prévenir, en même temps, de maintenir la confiance, mais de vous
assurer une certaine flexibilité, une certaine indépendance dans l'exercice de
vos fonctions.
L'objectif, ce n'est pas que vous ne
puissiez plus rien faire, que vous ayez peur de faire... de jouer votre rôle,
c'est de mettre en place des outils qui vous permettent... C'est un délicat
équilibre, hein, qu'il faut maintenir en tout temps, et je pense que cette
révision périodique est absolument nécessaire, parce que, même ce qui est
acceptable... ce qui était acceptable il y a cinq ans commence à l'être moins,
et, etc., puis donc c'est nécessaire, mais ça ne veut pas dire qu'il n'est pas
bon, qu'il est désuet, mais il faut toujours rester à la page.
M. Lemieux : Merci beaucoup
du cadrage. Sauf erreur, il me reste moins de quatre minutes, M. le Président.
Merci beaucoup. Au niveau préventif, parce qu'en a parlé, mais je veux revenir
là-dessus parce que, pour moi, c'est fondamental, vous avez un lien avec le DGE
qui vous permet d'alimenter une certaine...
M. Lemieux : ...on va
s'entendre que c'est très peu quand on arrive comme candidat, là, les piles de
papiers qui arrivent du DGE, là, puis surtout que c'est du chinois pour la
majorité des candidats, puis c'est leur machine qui s'en occupe. Alors, le
candidat devenu député, il ne l'a probablement pas vu passer. Et pourtant, il
me semble que c'est là que c'est le plus important. Quand vous dites : On
en a eu 47 sur 125, je ne vous dirais pas que c'est un gros score pour la
43 ᵉ législature, là. Et, sous-entendu, j'entends que ce n'est pas juste
pour les députés, c'est pour le public, c'est pour les équipes, c'est pour le
personnel, c'est pour l'intérêt public, parce que c'est ce que c'est. Donc,
dans le fond, vous êtes un peu... pas frustré, mais un peu mal placé pour
dire : Bien, je ne peux pas faire de publicité comme le Protecteur du
citoyen en fait, ou comme la Commission des droits de la personne peut en
faire. Puis, en même temps, c'est ça que ça prendrait pendant la période
électorale, mais là, c'est le DGE qui a tout le tapis devant lui. Mais il y a
sûrement moyen de faire plus que ce qu'on fait en ce moment avec le DGE pour
aller chercher et capter l'intérêt et la connaissance des presque
1 000 personnes qui sont susceptibles quelques semaines plus tard de
devenir candidat. Moi, pour moi, ça, ça m'apparaît clair, clair, clair.
Pour la suite des choses, une fois rendu,
je vous dirais que je me suis inscrit, je fais partie des 47, merci beaucoup,
mais ça reste fastidieux dans le sens que c'est vraiment le un à un qui est le
plus payant. On a tous des questions personnelles et on oublie trop souvent
qu'une fois qu'on vous a interpellé et que vous nous répondez : C'est la
loi, c'est-à-dire qu'à partir de là, on est en confiance.
Plus tard, je parlerai avec la
jurisconsulte parce que j'ai hâte de voir ce qu'elle pense de ce qu'elle est en
train de devenir dans le contexte. Il me reste à peine... pour que vous
puissiez répondre, il reste à peine une minute et demie. Je vous laisse choisir
votre réponse, mais j'aurais aimé ça entendre... parmi les trois questions que
je me posais, j'aurais aimé ça entendre quelque chose au sujet de la
jurisconsulte.
Mme Mignolet (Ariane) : O.K.,
bien, je vais commencer par là, parce que sinon...
Le Président (M.
Bachand) :...
Mme Mignolet (Ariane) : Donc,
écoutez, on a constaté... Depuis mon arrivée, j'ai constaté, avec les
prédécesseurs de la jurisconsulte actuelle, donc, il y avait Me Beaudoin et Me
Lebel, donc, avec qui j'ai eu le plaisir de collaborer un petit peu... Quand le
code a été adopté, je pense que l'objectif n'était pas de... Le rôle du
jurisconsulte a perduré. Je pense qu'au début, il y avait probablement des
craintes de se dire : Bien, moi j'ai un peu peur peut-être d'aller
téléphoner à la commissaire qui a un rôle d'enquête, qui a deux chapeaux.
Est-ce que moi, quand je vais appeler, elle va utiliser ça pour... du côté
enquête? Et tranquillement... Et puis les députés étaient habitués à avoir le
rôle de jurisconsulte, il existait par le passé. Mais tranquillement, ce qui
s'est fait, c'est que les gens ne consultent plus le jurisconsulte, donc... Et,
de un, ça me dit que les gens ont de plus en plus confiance en l'institution,
et ça me rassure. Je mets un paquet énorme... pour moi, c'est la prévention,
l'accompagnement qui est prioritaire dans mon mandat. Ça, pour moi, c'est
essentiel. La députée, un peu plus tôt, l'a souligné que mon équipe était très
présente dans l'accompagnement, et je suis ravi de ce lien de confiance. Et
surtout, je pense que l'élément clé, c'est que les avis que pourrait rendre la
jurisconsulte ne lient pas le commissaire.
Le Président (M.
Bachand) :Merci beaucoup. M. le député de
Nelligan, pour 36 min 45 s, s'il vous plaît. M. le député.
M. Derraji : Merci, M. le
Président. Bonjour. Merci pour votre présence. Merci pour le rapport détaillé
avec pas mal de recommandations. J'aimerais bien vous entendre sur le délai que
l'Assemblée nationale... je l'ai mentionné tout à l'heure dans mes remarques
préliminaires que c'est presque quatre ans. Qu'est-ce que vous en pensez qu'on
étudie votre rapport quatre ans plus tard?
• (10 h 50) •
Mme Mignolet (Ariane) : Écoutez,
moi, j'ai fait mon bout de chemin, j'ai fait mon travail, ce qui était requis.
J'ai déposé ce rapport-là qui contient beaucoup de recommandations. Le reste,
ça vous appartient. Je ne suis pas... Est-ce que j'aurais souhaité pouvoir
venir en débattre avec vous avant? La réponse, c'est oui, bien évidemment. Ça,
je ne peux pas vous dire autre chose. Maintenant, je ne contrôle pas cette partie-là.
Je me réjouis d'avoir l'occasion de le faire aujourd'hui. C'est certain que, ce
faisant, je vais attendre avec grand intérêt de voir les recommandations ou de
voir les discussions qui sortiront après ça et de voir ce que vous avez pensé
et ce que vous recommandez suite à mes recommandations. Par contre, le fait que
j'en prépare un actuellement pour...
Mme Mignolet (Ariane) : ...bientôt,
somme toute, dans un an. Vous comprendrez que pour travailler un rapport comme
ça, c'est presque demain matin. Donc moi, ce que je souhaite à ce moment-ci,
c'est sûr, c'est que les réflexions que vous aurez là-dessus vont me guider un
peu aussi, puis voir un peu... Je vais écouter avec intérêt ce qui se... les
échanges qui auront lieu avec les restes des personnes qui viendront vous
parler. Mais c'est sûr que, quand on fait ces recommandations-là, c'est parce
qu'on vise... on vous propose de faire certaines modifications comme
législateur au code. Mais c'est certain qu'aujourd'hui je me présente devant
vous. Si vous me dites : Suite à ça, est-ce qu'on peut changer le code, et
qu'il y a un projet de loi qui est présenté en février prochain, bien, je vous
dirais : Oui, c'est bien, mais j'aurais aimé ça peut être attendre le
prochain rapport pour que, quand vous allez modifier le code, vous prendrez en
compte tout. Parce que si on modifie le code au printemps prochain, bien, six
mois plus tard, je vais vous proposer peut-être d'autres choses. Ça fait que ça
rend l'exercice un peu...
M. Derraji : Un peu, un
peu... Vas-y.
Mme Mignolet (Ariane) : Un
peu, je ne sais pas trop. C'est comme un exercice, marcher sur des oeufs où on
ne sait pas trop... je ne sais pas qu'est-ce qui... qu'est-ce que je souhaite,
pardon, qui... Si vous m'aviez entendue il y a deux ans, je vous aurais
dit : Puis regardez, je suis prête à, tout de suite... S'il y a un projet
de loi qui se prépare, allons-y, on va on va le travailler ensemble.
Maintenant, c'est sûr que si vous me dites : Il y a un projet de loi qui
va... le gouvernement a choisi de présenter un projet de loi pour étude, bien,
je vais être un petit peu entre deux. Je vais me sentir pressée d'accoucher de
ma réflexion qui commence pour les prochaines recommandations.
M. Derraji : Oui. Mais je
pense que vous avez la réponse. Moi je ne voulais pas vous poser cette
question, mais j'ai vu mes deux collègues, ils ont... Ils ont posé des
questions sur le prochain rapport. Ce que je trouve dommage, c'est qu'on ne va
pas l'aborder. Je peux même... On peut parce qu'ils ont abordé pas mal de
questions, c'est très pertinent. En fait, c'est ce qu'on vit présentement, et
je ne veux pas vous ramener sur l'utilisation des pages Facebook, on a vu même
des conférences de presse du premier ministre sur sa page et non pas celle...
sur celle du gouvernement. Il n'y a aucune recommandation qu'on va étudier sur
ça aujourd'hui. Aucune, zéro. J'ai devant moi un, deux, trois, quatre, cinq,
six, sept, huit, neuf, neuf rapports depuis 2019 jusqu'à aujourd'hui.
Abstraction faite aux commentaires que vous avez vus, constatés depuis le dépôt
de votre rapport, c'est là, je me dis... et je sais que vous êtes prudente,
c'est bon, mais ça ne devrait pas être le cas. C'est une leçon. On ne peut plus
attendre quatre ans pour étudier un rapport, vous lier les mains pour un autre
rapport qu'on risque d'étudier, si on suit la même logique, en 2028. Ça veut
dire que vos recommandations pour l'année prochaine, quand est-ce qu'elles
seront applicables. Et c'est là où je veux vous écouter et vous entendre, parce
que je peux passer une heure. La collègue l'a dit, vous avez tellement de
bonnes recommandations, et j'ai des questions sur chaque recommandation. Mais
ce que vous nous dites aujourd'hui, c'est que même si on a l'intention et le
gouvernement l'intention de déposer un projet de loi, je ne pense pas que c'est
bon, parce que votre rapport, on doit l'attendre en 2025.
Donc, devant cette situation, pas parce
qu'on ne peut pas faire abstraction à tout cela, dans un monde idéal, parce que
j'en suis sûr et certain que vous avez déjà des idées en tête, vous avez vu
beaucoup de choses, il y a des rapports, il y a des blâmes, il y a des votes,
il y a des choses qui se ressemblent un peu. Je les ai notées. Mais si on veut
prendre les derniers... les quatre dernières années, ça serait quoi votre
suggestion?
Mme Mignolet (Ariane) : Je ne
suis pas tout à fait sûre de comprendre votre question, c'est-à-dire depuis le
dépôt du rapport.
M. Derraji : Oui, depuis le
dépôt du rapport, vous avez un, deux, trois, quatre, cinq, six, sept, huit,
neuf. J'ai les dates et j'ai les noms. Je pense que vous les connaissez par
cœur. Dans chaque rapport, il y avait des recommandations. Il y a des
recommandations qu'on trouve même dans presque le rapport déposé en 2019. Ce
que nous sommes en train d'étudier, c'est le rapport qui date de 2019. Là, vous
dites que, si le gouvernement veut aller avec un projet de loi, ce n'est pas
sûr que je vais être prête pour la prochaine année. Çça veut dire qu'on doit
attendre notre rapport de 2024 et l'étudier et étudier les recommandations.
Mme Mignolet (Ariane) : Peut
être clarifier, je me suis peut être mal exprimée. Ce n'est pas que je ne serai
pas prête s'il y a un projet de loi, je serai... j'y participerai évidemment
avec... Et ce n'est pas que ça m'empêchera de présenter le rapport, c'est juste
que je me dis : Les réflexions...
Mme Mignolet (Ariane) : ...qui
ont suivi le dépôt de ce rapport. Comme vous dites, oui, il y a eu plusieurs
rapports d'enquête, il y a eu aussi... on a progressé en matière
d'accompagnement, de... on a présenté plusieurs lignes directrices pour
clarifier des choses, mais c'est certain que, oui, dans un monde idéal, je me
dis que ce serait préférable d'attendre le dépôt du prochain pour envisager une
modification du code.
M. Derraji : C'est excellent.
Ça, pour moi, ça répond exactement à ma question. Donc, votre suggestion, si le
législateur envisage un changement, ce que vous ne suggère aujourd'hui, c'est
attendre le dépôt du prochain rapport?
Mme Mignolet (Ariane) : Oui,
et de l'étudier rapidement. Je pense que si on se revoit dans un an et demi, on
aura le portrait global de mes recommandations sur... basé sur mon expérience
de...
M. Derraji : J'apprécie. Et
c'est là où ça me ramène à ma deuxième question. Vu ce qui s'est passé, qu'il y
avait quatre ans d'attente et il n'y a personne qui était préparé, j'ai entendu
les commentaires que pandémie, pas pandémie, mais le Parlement a continué à fonctionner.
Et ce n'est pas vrai que nous, on n'a pas démontré de l'intérêt. Je vous ai dit
que 11 jours plus tard, nous avons interpellé le gouvernement pour statuer
sur une date pour étudier. On n'a pas donné suite à notre lettre.
Maintenant, est-ce que vous voyez d'un bon
oeil une recommandation de la commission qu'on s'engage à étudier le prochain
rapport soit dans un délai raisonnable? Et s'il y a un délai raisonnable,
est-ce que pendant le mandat actuel de la 43e législature, si on... si le gouvernement...
ou si on envisage un dépôt de loi, la commissaire veut qu'on étudie son
rapport, idéalement, dans la première année du dépôt, deuxième année, c'est
quoi l'idéal pour vous? Et je comprends que ce n'est pas votre responsabilité,
c'est notre responsabilité, nous, mais vous, dans un monde idéal, vous
travaillez tellement fort avec des rapports d'enquête, avec des
recommandations, à un certain moment, c'est plate qu'on ne voie pas ça avancer.
Mme Mignolet (Ariane) : Écoutez,
de mon point de vue, c'est évident que je ne peux pas vous dire autre chose que
ce code, c'est... son objectif, c'est vous accompagner dans l'exercice de votre
charge. C'est quelque chose qui vous concerne, je l'ai dit tantôt intimement.
Donc, c'est sûr que, comme Commissaire à l'éthique et à la déontologie, ce que
je souhaite, c'est d'avoir la possibilité d'avoir plus d'échanges avec vous
là-dessus. Je veux dire, une fois aux cinq ans, c'est un minimum, ça aussi,
mais je pense que tout le monde y gagnerait si on avait des... la possibilité
d'échanger sur des notions qui vous concernent, sur les valeurs, sur les... je
veux dire, c'est des choses que je ne peux pas faire seule. Puis, je veux dire,
donc, je l'ai dit aussi tout à l'heure, moi, je souhaite que tout ce qui
concerne le code puisse faire l'objet de discussion vaste, exhaustive, mais
surtout de manière collaborative et transpartisane. Et là, quand vous me
demandez de répondre à la question quand est-ce que vous voulez... je veux
dire, je souhaite, évidemment, je veux dire, c'est le fruit des réflexions que
je vous propose, que vous y réfléchissez, mais je connais aussi la réalité, le
contexte. Je veux dire, si je suis appelée à venir en commission débattre de
questions comme ça, qui vous touchent tous, 10 jours après le dépôt d'un
rapport controversé d'enquête, je ne suis pas sûre que ce soit le bon moment
non plus. Donc, il faut un... voilà, un moment propice.
M. Derraji : Je ne veux pas
vous poser cette question, mais vous me donnez le goût. Donc, il y a deux
rapports en attente, est-ce que vous attendez que la commission passe pour les
déposer?
Mme Mignolet (Ariane) : Je
vais vous répondre à cette question que tous mes rapports sont faits de manière
diligente et dès qu'ils sont terminés, je les envoie à la présidence pour
dépôt.
• (11 heures) •
M. Derraji : Je ne peux pas
m'empêcher parce qu'il y a deux rapports qu'on attend, et on va les attendre,
Mme la commissaire.
Je vais revenir à cette question parce que
je trouve, quatre ans, c'est beaucoup. Tout à l'heure, quand vous avez évoqué
les réseaux sociaux, j'en suis sûr et certain que les collègues autour de la
table ont beaucoup de questions, moi-même, mais je vous... je tiens à le
rappeler, que c'est plate faire deux élections et ne pas prendre en considération
les recommandations, parce que votre réflexion a commencé depuis 2019, on vient
de terminer 2022, vous avez vu ce qui s'est passé, ça a été soulevé par
plusieurs personnes...
11 h (version non révisée)
M. Derraji : ...l'achat de
publicité Facebook pour des conférences de presse, une page Facebook, et je
sais de qui je parle, je parle de la page Facebook du premier ministre, qui,
dans un temps record, est devenu la source informationnelle de 8 millions de
Québécois. La même page qui a été utilisée pendant la pandémie est devenue la
source d'information pour une campagne électorale par la suite. Je n'ai pas
prévu aller là, mais je vous ai vu répondre à mes collègues. Est-ce que c'est
sur ces enjeux que vous êtes en train de réfléchir?
Mme Mignolet (Ariane) : Je
réfléchis de façon globale à tous les enjeux qui sont soulevés qui concernent l'utilisation
des médias sociaux, tant par les élus que les membres de leur personnel. J'ai
déjà clarifié certaines choses à cet égard pour les membres du personnel en
produisant des lignes directrices un petit peu avant la dernière campagne, où j'aborde
certaines questions aussi, mais je ne souhaite pas aujourd'hui faire référence
à des cas particuliers comme vous venez de mentionner, mais vous dire que c'est
des enjeux sur lesquels je me pencherai.
M. Derraji : O.K., mais vu l'importance
de ces enjeux, j'imagine que vous avez des attentes à l'égard du prochain
rapport. Le prochain rapport ne doit pas être tabletté. C'est pour cela que je
dois revenir à ma question première : C'est quoi, pour vous, le moment
idéal d'étudier vos recommandations une fois déposées? Parce que je veux bien
étudier les recommandations de 2019, qui couvrent, et je tiens à le rappeler,
2012, corrigez-moi, si ma mémoire est bonne, 2012 à 2018.
Mme Mignolet (Ariane) : Non,
ça... 2015 à 2019.
M. Derraji : 2015 à 2019.
Donc, nous sommes en train de parler des rapports de 2015, de 2016, 2017. Pas
besoin de rappeler que le public a été pas mal interpellé par vos enquêtes et
vos rapports d'enquête au courant de la 42ᵉ et même la 43ᵉ.
Je répète ma question : C'est quoi,
selon vous, le meilleur timing, si je peux utiliser le timing, d'étudier vos
prochaines recommandations et de passer à un changement si jamais il y a des
changements, par projet de loi?
Mme Mignolet (Ariane) : O.K.
Il y a plusieurs choses. Je ne suis pas certaine de voir le lien que vous
faites dans votre question. Peut-être que c'est moi qui ne la comprends pas
M. Derraji : Ce n'est pas
grave, je vais le répéter parce que, tout à l'heure, vous avez dit...
Mme Mignolet (Ariane) : Non,
mais le lien entre les rapports d'enquête que je dépose...
M. Derraji : Non, parce que
les rapports d'enquête, il y a eu des recommandations. Moi, j'ai devant moi
neuf rapports, mais j'aimerais bien que... En commission on va en parler, on va
émettre des recommandations, mais je trouve qu'il y a des recommandations que
vous nous invitez à les interpréter en fonction du code, il y a des
améliorations, il y a des choses. Je trouve juste que... est-ce qu'on peut les
incorporer? Parce qu'ils ne faisaient pas partie du rapport, ces constats que
vous avez constatés, depuis le 3 décembre 2019 et jusqu'à la dernière enquête,
c'est... dernier rapport, c'est le 11 septembre 2023, concernant le ministre de
la Justice.
Donc, cette liste, il y avait des
recommandations. Quand vous faites un rapport d'enquête ou vous déposez un
rapport, il y a des recommandations qui viennent avec chaque rapport. Moi, je
les ai lus, c'est très important, parce ce qu'il y a de la bonne information
que... vous nous invitez à les prendre en considération.
Mme Mignolet (Ariane) : Oui,
mais, dans ces rapports d'enquête, il y a... ça arrive qu'il y ait une
recommandation pour... qu'il y ait des recommandations pour aborder les choses
d'une certaine manière. Ce n'est pas toujours des recommandations qui sont
liées à des modifications qui sont souhaitées dans le code, par exemple, là. J'invite
à la prudence, il y a certaines... je peux, je peux recommander de mettre en
place des processus pour... mais ce n'est pas forcément des des modifications
que... ça ne veut pas dire que tout ce qui est dans les rapports d'enquête
risque de se retrouver dans le prochain rapport de mise en œuvre, là, pas du
tout. Souvent, c'est une interprétation que je fais d'un article, je viens
préciser les critères dans la jurisprudence qui s'instaure, du commissaire,
mais ce n'est pas des... ça, c'est l'évolution normale de la jurisprudence et
ce n'est pas... ça n'a pas lieu d'être dans le rapport sur la mise en œuvre, en
tout cas, pas tous, certainement.
Mais c'est sûr qu'un rapport d'enquête, la
façon dont ça fonctionne, tout ce que j'ai à dire sur le rapport, c'est un
petit peu... un peu comme un jugement. Je ne m'exprime pas à côté de ça, je ne
viens pas compléter, je ne viens pas expliciter davantage. Toute la
justification qui se trouve dans mes rapports fait foi du raisonnement...
Mme Mignolet (Ariane) : ...Et
de ce qui s'est passé. Donc, je ne viens pas, par la suite, je ne... Il n'est
pas prévu que j'en discute ou que je vienne expliciter davantage sauf s'il y a
un enjeu particulier qui va faire l'objet peut-être d'une rubrique d'un
éventuel rapport sur la mise en œuvre, le prochain. Mais ce n'est pas... Ça ne
fait pas... Dans la préparation d'un...
(Interruption) ...pardon, d'un rapport sur
la mise en œuvre, je regarde... ce n'est pas les rapports d'enquête, je ne fais
pas forcément suite à tous les rapports d'enquête. Ce n'est pas parce qu'il y
avait des recommandations ou des appels à la prudence ou des choses comme ça
que ça invitait à des modifications ou des réflexions plus larges, certains,
certainement, mais vraiment pas tous.
M. Derraji : O.K. Je vais
passer au rapport qu'on a devant nous. Et, encore une fois, je vous remercie
pour la qualité des recommandations. Je vais revenir sur la formation
obligatoire. Pensez-vous, parce que la plupart des élus, il y a toujours des
séances de formation obligatoire, pensez-vous que l'emphase sur le code, la
formation sur le code d'éthique doit être renforcée? La plupart des élus qui
viennent, chacun a une expérience de travail. Il y a des organisations où il y
avait un code d'éthique à suivre, mais parfois, pas au même degré, et je dis,
je pèse mes mots, au même degré. Toujours, un code, on doit le suivre, mais par
la suite, peu importe l'élu, bonne volonté, l'interprétation de la charge
publique qui vient avec la fonction, peu importe la fonction parlementaire,
élu, ministre, adjoint parlementaire, peu importe, pensez-vous qu'il doit être
renforcé?
Mme Mignolet (Ariane) : La
formation que je propose de rendre obligatoire, je pense évidemment que cette
formation doit être... J'ai répondu un petit peu tout à l'heure à la question
de votre collègue, mais il y a comme une base, je pense, qui est nécessaire et
qui doit être adaptée à votre réalité, aux fonctions que vous occupez à
l'Assemblée nationale. Je ne sais pas si ça répond à votre question ou si j'ai
mal saisi votre question. Renforcer. Nous, on offre... Pour l'instant, on
offre... Les formations qu'on offre, on a des formations qui sont... Qui
portent sur l'ensemble du code et on a des formations sur mesure, on a des
formations par sujets thématiques. Ce qui est important, c'est que tout le
monde qui accède à la fonction de député puisse avoir un minimum de formation
pour être capable d'avoir le réflexe de se dire : Woups! Attention, quand
je vais dans cette direction, oh! Je n'avais pas pensé à ceci, il va falloir
que je consulte, pour avoir les réflexes, un minimum de réflexes, de prudence,
et de consulter notre équipe.
M. Derraji : Oui, c'est
excellent. Et vous mentionnez des filtres anti-conflit d'intérêts,
Recommandation deux. Vous dites que les parlementaires réfléchissent à
l'opportunité de rendre publiques, dans un registre, certaines mesures prises
pour prévenir des situations de conflit d'intérêts. Je comprends la notion de
cette... je dirais, l'importance de la recommandation, et même le sens de la
recommandation, mais pourquoi vous voulez insister à ce que ça soit rendu
public dans un registre? Est-ce que c'est parce que vous avez déjà suggéré
certains filtres, et la personne n'a pas suivi les filtres ou les
recommandations, et par la suite, on se ramasse à courir derrière ou... C'est
quoi le but de les rendre publiques? Si jamais la personne a eu une discussion
avec vous, vous avez proposé un filtre, vous avez proposé, vous avez des
suggestions, pourquoi vous insistez à les rendre publiques?
Mme Mignolet (Ariane) : Par
souci de transparence, d'information pour les citoyens. C'est essentiellement
ça. Ce n'est pas tant parce que je pense qu'elles ne sont pas mises de l'avant,
c'est parce que je pense qu'elles sont d'intérêt public, probablement pas
toutes, mais ça permet une meilleure transparence.
M. Derraji : Avez-vous un
exemple en tête?
• (11 h 10) •
Mme Mignolet (Ariane) : Bien,
écoutez, moi, j'ai un exemple. Prenons un cas fictif de... Un membre du conseil
exécutif, qui, pour x raisons, que ce soit en raison d'intérêts personnels ou
d'intérêts d'un membre de sa famille immédiate ou je ne sais pas, ne doit pas
être mêlé à un dossier ou à une entreprise en particulier. Bien, on va
recommander à cette personne-là de... Dans un premier temps, de mettre en place
des mesures pour que l'information n'arrive pas à lui, donc d'informer son
sous-ministre, d'informer le secrétaire général du gouvernement, le premier
ministre, son chef de cabinet, pour que des mesures soient mises en place, et
comme ça, bien, ça lui évite d'être... De... Que ces informations soient
portées à sa...
Mme Mignolet (Ariane) : ...connaissance,
et je pense que c'est d'intérêt... pas toute, hein, soit dit en passant, pas
toute, mais quand c'est le cas, comme ça, ça permet de dire : Bien, voyez,
moi, j'ai ça, mais sachez que j'ai mis en place des mesures, c'est public.
Voilà, c'est... ça permet.
M. Derraji : Donc, dans un
monde idéal, vous faites votre rencontre... D'ailleurs, je vous remercie, parce
que moi, j'ai eu pas mal d'avis. C'est très rassurant, avoir un avis, même si
j'aime plus un avis écrit, verbal, ça, j'aimerais bien vous entendre, parce que
c'est un stress. Je parle au nom de personne, je parle en mon nom. Parfois, je
veux avoir un écrit. C'est très rassurant. Et je ne remets en aucun doute
l'expertise de vos équipes. Très bien accompagné, parfois, parce qu'on veut
être plus blanc que blanc, mais parfois les paroles s'envolent et les écrits
restent. C'est ma devise dans la vie.
Pourquoi, pourquoi on ne donne pas un avis
écrit? Il faut se battre pour l'avoir. Je dis «se battre» entre guillemets
parce que vous réussissez toujours, mais de facto, si vous me donnez un avis
verbal, je sais, c'est rapide, mais il y a toujours un doute : Est-ce que
je fais la bonne chose? Un avis écrit me rassure. Un, je l'imprime, je le lis,
je le relis. Qu'est-ce que vous en pensez?
Mme Mignolet (Ariane) : Bien,
j'espère... ça m'inquiète si vous me dites que vous deviez vous battre pour en
avoir un. Je vais parler à mon équipe, là, je suis un peu inquiète.
M. Derraji : Non, non, non,
j'ai dit «entre guillemets» parce que «battre», ce n'est pas se battre dans le
sens «se battre», mais je me suis senti dans l'obligation d'avoir deux options :
un avis verbal ou écrit, mais, dans n'importe quel cas, on veut toujours être
bien protégé. Quelqu'un nous pose la question : Écoutez, j'ai déjà fait
mes vérifications, j'en avais... Je ne vais pas leur dire : Appelez la
commissaire, elle va vous donner un avis verbal, j'ai l'avis écrit.
Mme Mignolet (Ariane) : Bien,
écoutez, ça, c'est vraiment laissé à l'appréciation de chacun. Il y a des
situations qui sont peu problématiques et pour lesquelles, je veux dire, on
nous appelle, cinq minutes après c'est réglé. Est-ce que c'est... C'est quelque
chose qui... Est-ce que je peux aller à tel événement? Ça se passe demain.
Merci, au revoir. C'est réglé. Je peux accepter ou pas ce don? Bon, il y a
cette facilité et cette rapidité. Je pense que toute personne qui appelle au
bureau pour être accompagnée va l'être très rapidement. Ça, je m'assure de ça.
Mais ce n'est pas tout le monde... Vous
indiquez que vous préférez avoir un écrit, et c'est tout à fait valable, et on
le conseille nous-mêmes dans certaines situations plus... ou, par exemple,
quand on sait que c'est quelque chose qui risque de sortir dans les médias, qui
risque... ou quand on nous appelle : Écoutez, j'ai vraiment besoin de ça
puis je veux l'écrit parce que je veux pouvoir le montrer. C'est... C'est tout
à fait ça.
Mais je veux vous rassurer que, quand vous
appelez au bureau du commissaire et que vous parlez à quelqu'un de l'équipe de
la prévention et qu'il vous donne un avis, cet avis, il n'est pas... il ne vaut
pas moins qu'un avis écrit, et tout ce qu'on vous dit, on prend des notes de,
quand même... tu sais, je veux dire, on prend des notes sur ce qui a été dit.
Si vous rappelez dans trois ans : Souvenez-vous, je vous avais parlé...
Absolument. On a une note d'entretien au dossier. Donc, il ne faut pas
s'inquiéter. Oui, c'est... c'est moins facile de dire : J'ai contacté,
j'ai contacté, je ne peux pas vous le montrer, mais... puis c'est tout à
fait...
M. Derraji : Mais je vais
juste... je vais vraiment le préciser. Je ne mets pas... Je vous le dis, très
bien accompagné, les conseils sont là, l'écoute, elle est là. C'est plus une
perception personnelle d'être plus rassuré par un... un écrit. Je ne dis pas
que les valeurs... que les paroles qu'on entend ou qu'on nous partage, ce n'est
pas la même chose qu'un écrit, c'est juste une perception d'être beaucoup plus
rassuré par un avis écrit et non pas verbal. Mais je le dis, en aucun cas... il
y a toujours de l'écoute et de l'accompagnement.
Je continue dans la logique des filtres.
Donc, la rencontre est faite, vous suggérez les filtres anti-conflit
d'intérêts, oui, filtres anti-conflit d'intérêts, vous suggérez que ça soit
public pour plus de transparence, mais là, un peu plus loin, et c'est là où...
en fait, j'aime la logique, recommandation 8, vous dites que «le code soit
modifié de manière à permettre au commissaire d'imposer une pénalité pour le
défaut de respecter certaines obligations prescrites par le code». Pénalité,
c'est la première fois que ça arrive. Pourquoi la commissaire veut qu'on lui
donne le pouvoir d'imposer des pénalités et quels genres de pénalités vous avez
en tête? Et, si c'est oui, avez-vous étudié quelques exemples de pénalités?
Mme Mignolet (Ariane) : Alors,
d'abord, pour vous rappeler, j'ai fait cette recommandation, mais elle a été
faite par mon prédécesseur dans le rapport sur la mise en œuvre 2011-2014, donc
qui a été présenté en 2015, et la commission des institutions...
Mme Mignolet (Ariane) : ...avait
étudié le rapport de mon prédécesseur, avait accueilli favorablement cette
recommandation-là. Et, oui, on a regardé, notamment, ce qui se fait ailleurs,
et, par exemple, il y avait des modalités, les sujets sur lesquels ça aurait pu
être quelque chose, une omission ou un refus de répondre pour fournir un
document. Ça peut être défaut d'aviser le commissaire de s'être retiré d'une
séance, comme l'article 25 le prévoit. On peut penser à la... si jamais il y a
une obligation de formation dans un certain délai, défaut d'aviser le commissaire
d'un changement significatif dans sa déclaration d'intérêt. Donc, c'est ce
genre de pénalités là, de sujets pour lesquels on propose une pénalité, qui,
comme je l'ai mentionné, se fait à certains autres endroits.
M. Derraji : Mais depuis que la
recommandation a été acceptée, est-ce que vous vous étiez fait interpeller à
imposer une pénalité ou non?
Mme Mignolet (Ariane) : Mais
il n'a pas été mis en oeuvre, hein? Ça n'a pas été... Il n'y a pas eu de projet
de loi qui a donné suite au rapport de la Commission des institutions qui a
étudié le dernier rapport.
M. Derraji : Oui, c'est
excellent.
Mme Mignolet (Ariane) : Donc,
moi, je n'ai toujours pas le pouvoir et moi, je ne...
M. Derraji : Oui, mais vous
le souhaitez, parce que...
Mme Mignolet (Ariane) : Oui.
M. Derraji : O.K., excellent.
Mais là, maintenant, c'est à nous de déterminer la pénalité. O.K., donc, vous,
vous ne voulez pas jouer dedans, quel type de pénalité, dans quel type de...
Vous n'avez pas de suggestion...
Mme Mignolet (Ariane) : Bien,
je pense que... Bien, en fait, ce qui se fait ailleurs, c'est, généralement,
une pénalité qui est associée, par exemple, à un maximum, c'est-à-dire, par
exemple, soit une... il y a toujours une pénalité, par exemple, par jour de
retard, des frais comme ça, ou avec un maximum «de», des choses comme ça.
Évidemment, si la commission le souhaite, je peux toujours vous envoyer les
informations pertinentes de ce qui se fait ailleurs, le détail, par la suite.
M. Derraji : Oui. Si ça ne
vous dérange pas, oui. Ça, c'est intéressant.
Mme Mignolet (Ariane) : On va
vous l'envoyer.
Le Président (M.
Bachand) :...merci.
M. Derraji : Recommandation
9, vous insistez beaucoup sur les lanceurs d'alerte et interdire des mesures de
représailles. On se comprend que cette recommandation 9 date de 2019. Vous
pensez que c'est le cas même dans la période qu'on ne couvre pas aujourd'hui,
que c'est toujours la même chose?
Mme Mignolet (Ariane) : Bien
oui.
M. Derraji : Vous comprenez
c'est quoi, la suite. C'est que vous étiez obligée... pas obligée... vous étiez
amenée à faire d'autres enquêtes. Et vous pensez qu'il y avait — je
pèse mes mots — des mesures de représailles sur certaines personnes?
Mme Mignolet (Ariane) : Je
pense que... Je ne discuterai, évidemment, pas de cas particuliers, mais je
pense... pas «je pense», je l'affirme qu'il y a des cas où des personnes ne
souhaitaient pas témoigner, ne souhaitaient pas collaborer à l'enquête parce
qu'elles avaient peur de représailles. Et, dans un cas comme ça, moi, je ne
peux pas... J'ai le pouvoir de forcer quelqu'un à témoigner, et tout ça, mais
si je ne peux pas protéger la personne, je ne la forcerai pas à témoigner.
M. Derraji : Oui. Ça veut
dire que... Vous êtes en train de me dire que, pour certains rapports
d'enquête, vous étiez comme obligée de ne pas interpeller certaines personnes
et avoir encore davantage d'informations, parce que ces personnes risquaient
quelque chose, notamment par rapport à l'autre... à leur vie ou à des mesures
disciplinaires?
Mme Mignolet (Ariane) : Je ne
dis pas que ces personnes risquaient quelque chose. Je ne peux pas en être
certaine. Je pense que certaines personnes avaient peur. Et j'ai dû,
effectivement, me passer de certains témoignages, que ce soit... pas forcément
pour des enquêtes qui ont été... qui ont fait l'objet de rapports. Ça peut être
des enquêtes qui n'ont pas eu lieu en raison de ça.
• (11 h 20) •
M. Derraji : Oui. Les
dernières années... je reste toujours dans les enquêtes et je sais que vous
prenez votre temps, vous faites le tour de la question... pensez-vous qu'en
fonction de ce que vous avez entre les mains vous êtes capable de mener une
enquête de A à Z avec ce que vous avez entre les mains? Dans un monde idéal,
pour aller plus en détail, est-ce que la commissaire a l'ensemble des données,
expertises autour de la table? Je ne parle pas de la chasse au faisan, je parle
d'enquêtes beaucoup plus complexes, où vous fouillez davantage, avec plus
d'informations et d'informateurs.
Mme Mignolet (Ariane) : Vous
parlez en termes de ressources?...
M. Derraji : ...uniquement aux
ressources, mais aussi de pouvoir d'enquêter. Le pouvoir d'enquêter, il est
limité. Vous pensez qu'aujourd'hui vous avez l'ensemble des ressources pour
mener une enquête? Sur un sujet où vous dites : Misère que... si j'avais
telle ou telle chose, là, je vais aller jusqu'au bout, et probablement mon rapport
serait autrement que le rapport que je viens de déposer.
Mme Mignolet (Ariane) : Je
pense que j'ai tout ce qu'il faut pour mener les enquêtes que je mène. Je n'ai
jamais... je n'ai pas déposé de rapport en me disant : Je suis... j'aurais
pu aller plus loin, ce n'est pas ça, non. Si je dépose un rapport, c'est parce
que j'ai été au bout du dossier que j'avais devant moi, et, si je n'ai pas les
ressources ou la compétence dans un sujet très, très pointu, j'ai toujours la
possibilité d'engager quelqu'un à l'externe pour m'appuyer dans certains
dossiers, le cas échéant.
M. Derraji : O.K.
Recommandation 13 : Que les parlementaires réfléchissent à la question de
l'encadrement des situations de harcèlement par le code. Il y a un extrait dans
la page 54. D'abord, le code ne prévoit pas de disposition propre à la question
du harcèlement. Donc, vous nous suggérez... c'est quoi votre suggestion par
rapport au présent rapport?
Mme Mignolet (Ariane) : C'est
que la question du harcèlement, mon prédécesseur avait évoqué cette question
aussi, et la réponse de la Commission des institutions avait été, à
l'époque : On vient d'adopter une politique sur le harcèlement, donc votre
recommandation n'est peut-être plus pertinente. Je l'ai refaite parce que je
pense que la pertinence est encore d'actualité parce que la politique contre le
harcèlement ne vise absolument pas les mêmes objectifs que le code et qu'une
politique contre le harcèlement vise à faire cesser le harcèlement, à y mettre
un terme ou à le prévenir. On est souvent, pas exclusivement, dans des
situations de relations de travail, mais le code, c'est un objectif
d'exemplarité. Et la tendance qu'on voit maintenant, quand on regarde le Sénat
du Canada, on regarde en France, tout ça, la tendance est même de faire de la
question du harcèlement un manquement déontologique. C'est-à-dire qu'à partir
du moment où une situation de harcèlement est avérée et, par exemple, qu'elle
vise un élu de l'Assemblée nationale, bien, ça devient automatiquement un
manquement déontologique, et c'est la tendance qu'on voit. Donc, c'est pour ça
que j'ai recommandé à nouveau, je l'ai fait en 2019, mais elle est encore
d'actualité, actuellement.
M. Derraji : Recommandation
14, il reste deux minutes : Que le code soit modifié de manière à
permettre à un député qui a un intérêt personnel et financier... de la
population de prendre part aux débats sans droit de vote. Comment vous
envisagez l'application de telles modifications du code pour permettre aux
députés ayant des intérêts distincts de participer aux débats parlementaires
sans voter? Il y a plusieurs décisions qui passent au Conseil des ministres.
C'est quoi les assurances et les garanties de transparence? Et des débats en
commission parlementaire, où, autour de la table, on peut débattre de l'aide
aux PME, autour de la table, il y a pas mal de propriétaires de PME... je donne
des exemples fictifs, on procède à des votes. C'est quoi votre suggestion?
Mme Mignolet (Ariane) : En
fait, cet article-là est quand même très particulier et il est interprété
restrictivement, là, je veux dire, si une mesure qui est débattue, c'est une
mesure qui est large, qui touche de manière générale un sujet, ça ne posera
peut-être pas d'enjeu, mais moi, ce que je recommande, c'est que, c'est ça, il
y a certaines personnes qui s'engagent en politique et qui ont fait campagne en
disant : Bien, écoutez, moi, j'ai l'expérience de terrain, je suis là, je
suis parmi vous, j'ai telle expérience, je suis agriculteur, je suis... peu
importe, et, moi, je vais porter votre voix à l'Assemblée nationale. Puis on
arrive à l'Assemblée nationale, puis qu'est-ce que, moi, je viens leur
dire : ah bien, non, tu ne peux pas parler là-dessus. C'est ce que je veux
éviter.
Il y a une... Les citoyens s'attendent...
ils ont voté pour quelqu'un, et on s'attend, par son expérience... et il y a
une espèce d'empêchement. Moi, je pense que cette expertise doit être... doit
pouvoir s'exprimer si on a voté pour quelqu'un, pour qu'il aille défendre,
justement, principalement certains intérêts ou... qu'il représente, il doit
pouvoir s'exprimer.
Par contre, je suis tout à fait d'accord
pour dire qu'il ne devrait pas voter, mais il devrait pouvoir dire :
Voici, je viens, oui, j'ai cette expérience, oui, je possède des intérêts dans
tel... dans ma ferme ou dans je ne sais quoi, et, maintenant, je vous parle de
mon expérience. À la fin, voici, c'était mon expérience, je me retire pour le
vote...
M. Derraji : ...ministre...
M. Derraji : ...impliqué en
économie dépose un projet de loi pour promouvoir l'économie, il ne doit pas
voter, même s'il déclare...
Mme Mignolet (Ariane) : Non,
mais ça, je parle... L'article 25, c'est des situations bien spécifiques,
là.
M. Derraji : Oui.
Mme Mignolet (Ariane) : Si un
ministre propose une politique qui s'applique de manière large, il n'y a pas
forcément d'enjeu à chaque fois, là. Mais moi, je parle de sujets bien précis,
là, de...
Le Président (M.
Bachand) :Merci beaucoup. Merci. M. le
député d'Hochelaga-Maisonneuve, pour 12 min 15 s, s'il vous
plaît.
M. Leduc : Merci, M. le
Président. Rebonjour. Vous ne serez peut-être pas surprise du sujet sur lequel
je vais vous amener, à savoir la rémunération des élus. Je vois un sourire,
donc la surprise est gâchée. Bien, ma question d'abord est très simple :
Avez-vous écouté les échanges alentour du projet de loi n° 24 de juin
dernier?
Mme Mignolet (Ariane) : Le
projet de loi n° 24, c'est-à-dire le projet... la loi qui a modifié vos...
M. Leduc : Exact.
Mme Mignolet (Ariane) : ...au
printemps dernier. Écoutez, dans mon rapport, il y a une recommandation qui
fait état, là, d'un souhait d'avoir un comité indépendant qui puisse se pencher
sur ces questions de conditions de travail et rémunération qui touchent les
élus. C'est une situation un peu particulière parce qu'ailleurs, dans d'autres
endroits, il y a des exemples, hein? Dans d'autres législations au Canada, il y
a des exemples de comités indépendants dont les décisions sont exécutoires, et
il y a également... De l'autre côté du spectre, il y a certains qui ont des
dispositions qui énoncent clairement que les députés... Ne constituent pas un
intérêt personnel pour les députés, leurs conditions de travail, leur
rémunération, c'est-à-dire qu'ils excluent ça de la notion d'intérêt personnel
pour permettre les débats là-dessus. Donc, il y a vraiment les deux.
Et ce qu'il y a, c'est que le code, moi,
ce que je trouve, c'est que l'article 25 justement dont on parlait il y a
deux secondes, prévoit explicitement que quand on a un intérêt personnel
financier distinct de la population ou de la députation, on ne peut pas
s'exprimer. Mais dans ce cas-là, comme ça vous concerne tous, ça vise toute la
députation, l'article 25 ne s'applique pas, et je pense que cet article
là, la façon dont il est rédigé, je pense qu'on le voulait un peu, un pendant à
ce qu'on trouve dans d'autres législations et qui permet de discuter.
Sauf que la façon dont le code est bâti,
on reste quand même avec les articles phares, c'est-à-dire les articles 15
et 16 du code qui dit qu'on ne peut pas favoriser ses intérêts personnels et
qu'on ne peut pas laisser un intérêt personnel influencer son indépendance de
jugement. C'est des articles phares en matière de conflits d'intérêts, et on
est là avec ces articles.
Donc, c'est évident que je pense que les
débats qui entourent ça, puis je l'ai exprimé, j'ai dit que je pense qu'il y
a... ça... Je pense que les recommandations qui avaient été faites à l'époque
du rapport L'Heureux-Dubé est qu'on puisse avoir un comité indépendant. Je
pense que c'est important. Je pense que c'est ce qu'on s'attend. Je pense que
les expectatives de la population, de ce qu'on entend, je pense que c'est ce
vers quoi on doit tendre. Mais le code n'est pas fait, n'est pas bâti pour que
je mette l'ensemble de la députation en manquement, là. Ça fait que je
comprends tout à fait que le...
M. Leduc : ...
Mme Mignolet (Ariane) : Non,
non, mais c'est ça. Mais je comprends tout à fait que, oui, il y a un enjeu,
puis, oui, je répète que je pense que ça prendrait un comité indépendant et
qu'au minimum quand on adopte des modifications comme ça qui nous touchent,
bien, si on... si au moins on les repoussait à la législature suivante, ils
n'ont pas d'application pendant la législature actuelle ça enlèverait beaucoup
de perceptions de conflits d'intérêts puisqu'on n'est jamais sûr d'être réélu à
la prochaine législature.
M. Leduc : À la
page 106, vous... je reprends un peu ce que vous venez de dire, tu sais.
«À ce sujet, j'ai fait mienne la recommandation du numéro 31 du Comité
consultatif indépendant. Je pense qu'on fait référence à L'Heureux-Dubé ici,
qui dit : «Le comité recommande que l'Assemblée nationale envisage la
création d'un comité indépendant permanent doté de pouvoirs décisionnels en
matière de conditions de travail des députés.»
Si je relis votre recommandation 21,
à la page 107, «qu'un mécanisme indépendant soit instauré afin de
déterminer les conditions de travail des membres de l'Assemblée nationale».
• (11 h 30) •
La question que je vous posais à
l'instant, c'était voir si vous aviez écouté les échanges qui avaient eu lieu
pendant la commission. Puis la raison pour laquelle je pose la question, c'est
que le ministre de la Justice et moi, en l'occurrence le leader parlementaire
du gouvernement qui chapeautait le projet de loi, on avait un désaccord sur la
nature de l'exercice qui était en cours. Lui soutenait grosso modo, là, si je
reprends ses arguments, que c'était un comité indépendant puis que c'était
grosso modo exécutoire parce que nous l'exécution, nous...
11 h 30 (version non révisée)
M. Leduc : ...moi, je plaidais
plutôt que, bien, si c'est nous qui l'exécutons, c'est donc qu'il n'est pas
exécutoire en soi. Je pense que ma version est un peu plus proche peut-être de
l'esprit, en tout cas, de ce qu'était L'Heureux-Dubé, que vous reprenez.
Alors, est-ce que, vous, dans votre
vision, dans ce que vous recommandez à 21, il faudrait vraiment qu'il n'y ait
pas... que les députés n'aient pas à se... à se mouiller, en quelque sorte,
puis à pétrir la pâte d'un projet de loi pour que ça soit vraiment décisionnel
et exécutoire? Est-ce que vous comprenez un peu ma question?
Mme Mignolet (Ariane) : Oui,
je pense, mais, écoutez, dans le... la façon dont, je crois, la loi sur l'Assemblée
nationale est faite... je pense qu'à l'heure actuelle, avec les dispositions
qui sont actuelles... je pense que vous n'avez pas le choix de les... de tenir
un vote là-dessus. Dans un monde idéal, je pense qu'effectivement ça serait
bien de ne pas l'avoir, mais, s'il y avait la constitution d'un comité
indépendant qui... pas juste pour régler une situation particulière mais qui
est sur les conditions de travail, un peu comme le rapport L'Heureux-Dubé, qui
a regardé l'ensemble des conditions de travail et qui est mandaté. Peut-être
que ça peut être automatique, c'est-à-dire qu'à chaque début de législature il
y a... il y a un rapport du comité, il y en a, certaines législations que j'ai
vues, qui ont ça, là, c'est... c'est vraiment de manière régulière qu'on s'y
penche. Et puis, s'il y a une disposition qui est déjà prévue, qui dit :
Bien, quand le comité indépendant dépose un rapport, bien, ça devient... ça s'applique.
Et, même si vous devez tenir un vote dessus, dans la mesure où c'est clair que
vous ne faites... vous n'avez pas le pouvoir de modifier ce rapport-là puis que
ça devient... c'est quand même déjà... c'est déjà quelque chose de... de bien.
Puis, à défaut de ça, comme je le dis, de repousser à une prochaine
législature, ça enlève, quant à moi, beaucoup de risques de conflits d'intérêts.
M. Leduc : Oui. C'est ce qu'on
avait essayé de faire, notamment dans l'étude détaillée, sans succès, de la
part de mes... des mes collègues d'en face et d'à côté, malheureusement. Mais,
O.K., une autre question, alors, sur le caractère indépendant. Le rapport qui
avait été utilisé par le gouvernement pour procéder au projet de loi était un
rapport de trois personnes, dont deux ex-députés, des ex-collègues que j'ai eu
la chance de côtoyer, comme j'ai siégé à la précédente législature, puis il y a
des gens dans l'espace public qui questionnaient justement le degré de distance
entre le député sortant puis le fait qu'il proposait un rapport. Est-ce que,
selon vous, il y aurait lieu d'avoir une distance plus grande ou est-ce que c'est :
une fois qu'on n'est plus là, on n'est plus là puis on pourrait comme se
prononcer puis on... et on peut donc avoir ce titre-là d'indépendant, même si
ça fait à peine quelques mois qu'on n'est plus dans notre fonction?
Mme Mignolet (Ariane) : Je
pense que le fait d'avoir sur ce comité-là quelqu'un ou des personnes qui
connaissent le travail d'un parlementaire, certainement, du côté pratique, ce n'est
pas négatif, là. Maintenant, je veux dire, ça dépend toujours à quel moment. Si
cette personne-là... Si, dans les conditions qui sont débattues, si le mandat
du comité est de regarder l'ensemble des conditions et que ça peut toucher les
sommes qui... que quelqu'un peut toucher en quittant le... quand il n'est plus
député, bien, on peut peut-être avoir un enjeu de... mais, a priori, le fait d'avoir
été un parlementaire n'est pas un obstacle pour moi.
M. Leduc : Même si ça fait
quelques mois à peine, ce n'est pas un... O.K. Pas de problème. Dans les
échanges que j'avais avec le ministre, où je mettais au jeu des arguments, là,
disant que c'est un peu malaisant, comme élu, de voter là-dessus, etc., il me
renvoyait l'exemple inverse en disant : Bien là, M. le député d'Hochelaga,
vous êtes leader parlementaire de votre groupe parlementaire puis vous avez
voté et négocié une entente de début de législature qui comprenait des
nouvelles fonctions, notamment, bien, de leader parlementaire, celles que j'occupe
en ce moment, qui viennent avec des bonus, là, de certains pourcentages, puis
il disait que, donc, moi, j'étais aussi en conflit d'intérêts d'avoir négocié
ça et d'avoir voté ça. C'est un argument qui m'avait un peu surpris. Est-ce qu'il
a une bonne piste en soumettant ça, le ministre, ou est-ce qu'au contraire on
était plus dans une joute... une joute politique où là tous les arguments
peuvent être utilisés?
Mme Mignolet (Ariane) : Écoutez,
je n'aime vraiment pas rentrer dans les cas particuliers, donc je vais m'abstenir.
Mais je pense que les... je ne pense pas que les discussions autour d'un... de
vos indemnités, de vos conditions de travail, c'est sûr que c'est... je pense
que c'est un petit peu différent que ce qui est voté, les enveloppes pour
vos... vos groupes respectifs, mais je ne suis pas... je ne me suis pas du tout
penchée là-dessus, donc je préfère m'abstenir.
M. Leduc : Pas de souci.
Peut-être une dernière question sur ce thème-là. La semaine dernière, on a
appris que nos collègues du... de la partie gouvernementale avaient peut-être
eu une réflexion...
M. Leduc : ...a posteriori sur
l'augmentation automatique qui est intégrée avec les pourcentages similaires,
là, de la fonction publique, les cadres de la fonction publique, et que là
considérant xy raisons dont on n'a pas eu les détails, mais ce n'est pas
important, bref, il serait en mesure de vouloir proposer de suspendre cette
hausse-là, pas nécessairement la hausse générale, bien sûr, qu'on a connue en
juin dernier, mais la hausse automatique du pourcentage du secteur public et à
la rapporter plus tard. Et là on n'est pas tout à fait au parfum de comment ça
va se faire, mais si d'aventure il y avait un projet de loi qui était déposé,
est-ce que ce projet de loi là qui viendrait rouvrir, on imagine, la loi de la
même façon que le précédent de juin dernier l'a fait? Est-ce qu'il viendrait
encore une fois jouer dans ce film-là qu'on espère voir terminer ou, en tout
cas, ne plus se reproduire? Une série qui se prolonge, puis on aimerait que ce
soit l'épisode final où on n'a toujours pas de comité indépendant, est-ce qu'on
devrait éviter ce genre de scénario là? Puis je comprends que la loi actuelle
le permet, hein, ce n'est pas ça ma question, c'est juste... je veux juste
comprendre que si on veut se fier à votre recommandation, si on veut aller plus
loin sur votre recommandation numéro 21 qui fait suite à celle de Mme
L'Heureux-Dubé et de son comité, là, il y a quelques années, est-ce qu'on
devrait éviter le chemin d'un projet de loi à nouveau?
Mme Mignolet (Ariane) : Mais
je pense que, je veux dire, c'est... la réflexion que j'avais il y a quelques
mois est la même, là, je veux dire, mais ça vaut pour dès qu'on discute des
conditions de travail dont vous... du salaire ou de l'indemnité que vous pouvez
toucher, puis la réflexion était aussi valable en je ne sais plus exactement quelle
année, il y a peut-être deux, trois ans, je ne sais plus, peut-être un peu plus
quand un projet de loi a été adopté pour palier l'imposition du fédéral sur
certaines allocations, la réflexion était la même à ce moment-là aussi, dès
qu'on touche à ça. C'est ma réflexion.
M. Leduc : Donc, même si
l'objectif de fond rejoint un peu ce que vous disiez tantôt, à savoir qu'on
voudrait suspendre jusqu'au prochain mandat cette hausse automatique là, même
si on pourrait être d'accord sur le fond; sur la forme, le fait de passer de
nouveau par un projet de loi, ça serait à éviter, idéalement.
Mme Mignolet (Ariane) : Mais
je pense que, dès qu'on se met les mains dedans pour jouer dans les conditions
de travail, mon opinion est la même.
M. Leduc : Parfait. Merci.
C'est très clair.
Le Président (M.
Bachand) :30 secondes.
M. Leduc : 30 secondes?
Mon Dieu, je vous les offre. Est-ce qu'il y a un sujet que vous auriez voulu
aborder et que vous n'avez pas eu le temps d'aborder aujourd'hui?
Mme Mignolet (Ariane) : Non,
je vous remercie. C'est bien. En terminant, peut-être juste... Moi, ma
recommandation phare, je l'ai toujours dit, c'est la formation. Si je termine
avec ça, je terminerais avec ce mot-là. Je vous remercie.
M. Leduc : C'est bien, ça.
Le Président (M.
Bachand) :Sur ce, Mme la commissaire, et
à vos équipes, merci beaucoup d'avoir été avec nous ce matin, c'est très, très
apprécié. Et sur ce, je suspends les travaux quelques instants. Merci.
(Suspension de la séance à 11 h 38)
(Reprise à 11 h 42)
Le Président (M.
Bachand) :À l'ordre, s'il vous plaît. La
commission reprend ses travaux.
Il nous fait plaisir d'accueillir les
représentants de l'Institut d'éthique appliquée de l'Université Laval. Alors,
merci beaucoup d'être avec nous.
Je vous rappelle que vous disposez de
10 minutes de présentation. Après ça, on aura une période d'échange avec
les membres de la commission. Donc, je vous invite d'abord vous présenter, puis
à débuter votre exposé. Merci beaucoup.
M. Jacob (Steve) : M. le
Président, Mmes et MM les membres de la commission, merci pour cette
invitation. Donc, nous sommes les représentants de l'Institut d'éthique
appliquée de l'Université Laval. Je suis Steve Jacob, professeur en sciences
politiques à l'Université Laval, et je suis accompagné de Jordan Mayer, qui est
étudiant à la maîtrise en droit et membre du Barreau de Québec, qui m'a aidé à
préparer le mémoire qu'on vous a soumis pour les travaux de cette commission.
Donc, les consultations particulières,
c'est une occasion de réfléchir à l'encadrement éthique du milieu politique
québécois et également de faire un bilan de la mise en œuvre du Code à la
lumière des travaux scientifiques les plus récents, et de formuler des recommandations
visant à renforcer une culture politique sensible à l'éthique. Les réflexions
qui sont contenues dans le mémoire que nous avons présenté sont notamment
tirées d'un ouvrage qu'Éric Montigny et moi avons publié sur les cadeaux et les
dons offerts aux élus de l'Assemblée nationale. Donc, on a eu l'occasion de se
pencher sur le code d'éthique au concret et de voir comment les membres de
l'Assemblée nationale s'en saisissaient. C'est une recherche qui a été réalisée
dans le cadre des travaux de la Chaire sur la démocratie et la session
parlementaire de l'Université Laval.
Tout d'abord, un constat, c'est que
l'engagement des élus envers l'intégrité et le développement d'une culture
politique sensible à l'éthique occupe une place grandissante dans la gouvernance
de nombreux États à travers le monde. Les citoyens et citoyennes ont des
exigences élevées à l'égard de la probité et de l'intégrité dans la conduite
des affaires publiques. Les élus ont pris la mesure de l'importance de
l'éthique et de l'intégrité et ils sont conscients qu'aux yeux du public, leur
réputation, c'est un bien précieux qui pourrait être mis à mal rapidement avec
un comportement inapproprié.
Le changement de culture, il ne s'est pas
fait d'une manière spontanée, c'est le fruit d'une longue évolution. Et le code
et son institutionnalisation, par la création du Commissaire à l'éthique et à
la déontologie, offre un cadre de référence commun aux élus. Néanmoins, ce
qu'on a pu observer dans les travaux, c'est que la sensibilité éthique varie en
fonction des expériences individuelles. Cette sensibilité, elle est alimentée
par plusieurs considérations : la peur de la controverse, la
sensibilisation aux enjeux et leur importance, la réalité du suivi de la
conduite des élus par les journalistes, et la connaissance, parfois la
confusion ou la méconnaissance, des règles en matière d'éthique.
Et donc dans les travaux, en s'appuyant
sur ce que l'on a pu observer, on a pu distinguer différents types de profils
parlementaires en lien avec l'éthique qui va des puritains en passant par les
serviteurs, les profiteurs et les intrépides, davantage en matière d'éthique.
Je ne vais pas m'attarder sur l'ensemble de ces profils. Ce que l'on observe
quand on regarde l'institutionnalisation de l'éthique, c'est qu'en réponse à
cette perte de confiance citoyens envers les responsables politiques et les
institutions démocratiques, il y a des politiques de confiance qui vont être
adoptées, mises en œuvre et qui vont comporter des éléments de nature
déontologiques ou éthiques. Et l'ensemble normatif qui combine les effets des
multiples instruments légaux réglementaires vise à assainir les mœurs
politicoadministratives et sa forme, ce que l'on peut qualifier d'un système
d'intégrité public.
Ce système d'intégrité publique au Québec,
il a vu le jour depuis plusieurs années, et c'est surtout au début des
années 2000 que se sont multiplié les efforts en vue d'édifier un système
d'intégrité publique qui va reposer sur la complémentarité de l'action de
plusieurs institutions ou organismes de surveillance ou de contrôle, dont le
commissaire à l'éthique et à la déontologie.
Néanmoins, avec l'accumulation des
institutions, des législations, des réglementations, il convient de
s'interroger pour savoir si l'action est suffisamment coordonnée et cohérente
pour atteindre les objectifs qui sont recherchés en matière d'éthique et de...
M. Jacob (Steve) : ...intégrité.
L'image que j'utilise par rapport à cette accumulation de règles et
d'institutions, si vous avez la dent sucrée, c'est davantage le mille-feuille;
la dent salée, c'est davantage la lasagne. Donc, on a une accumulation de
couches et on ne sait pas si l'ensemble à la fin peut être digeste. Plusieurs
auteurs se sont prononcés au cours des dernières années en faveur d'une
meilleure coordination institutionnalisée des organismes en matière d'intégrité
publique, et donc on souhaite éviter cette fragmentation, ce travail en vase
clos.
Donc, à cet égard, la première
recommandation que nous avons formulée témoigne d'un souci d'adopter une
approche systématique préventive en matière d'éthique et d'intégrité, qui vise
à davantage coordonner, intégrer l'action des organismes de surveillance et de
contrôle qui œuvrent en matière d'intégrité publique.
Ensuite, dans le mémoire, nous vous
présentons un bilan des 10 ans de l'entrée en vigueur du Code d'éthique et
de déontologie en ayant pu observer tout d'abord qu'il y a de réels changements
de pratiques qui ont pu être observés, et ces changements pratiques, ils doivent
être consolidés.
Un autre élément qui ressort des travaux
de recherche qu'on a pu réaliser, c'est que, avec l'encadrement éthique, est
venue une forme d'instrumentalisation de l'éthique parlementaire à des fins
partisanes, vous en avez discuté dans les échanges avec la commissaire. Et ce
que l'on observe, c'est que l'éthique parlementaire vise à certains moments à
attaquer, discréditer l'intégrité des membres d'autres formations politiques,
et le commissaire à l'éthique risque dans ce cas d'être instrumentalisé
lorsqu'un élu va procéder à une demande d'enquête basée sur des motifs
partisans. Et donc, dans ce contexte, l'éthique devient une munition politique.
Et cette situation, elle est préjudiciable dans la mesure où l'exagération et
le signalement d'apparence d'inconduite à des fins partisanes alimentent le
cynisme de la population à l'égard de l'ensemble des élus.
La politisation de l'éthique, c'est aussi
un risque lors du dépôt d'un rapport d'enquête recommandant une sanction. Et, à
ce sujet, nous jugeons important de recommander une modification au code pour
éviter que l'indépendance du Commissaire à l'éthique soit compromise. Il y a
plusieurs scénarios qui pourraient être envisagés, soit de confier au
Commissaire à l'éthique le pouvoir d'imposer une sanction, soit de confier au
Commissaire à l'éthique la réalisation de l'enquête et de recommander une
sanction en cas de manquement. Et cette recommandation serait confirmée ou
rejetée soit par un comité d'éthique ou par la présidence de l'Assemblée
nationale. Ou alors de confier au Commissaire à l'éthique la réalisation de
l'enquête, et, en cas de manquement, la sanction appliquée serait déterminée
par un comité en éthique ou par la présidence de l'Assemblée nationale.
Toujours dans un souci d'éviter le plus possible
l'instrumentalisation de l'éthique, nous jugeons que la cinquième
recommandation du rapport sur la mise en œuvre devrait être considérée avec
grand intérêt. La possibilité de faire des vérifications préliminaires avant
d'ouvrir une enquête permettrait de simplifier le processus administratif du
Commissaire à l'éthique, mais aussi d'éviter des potentielles attaques reposant
sur des motifs partisans. Par contre, on peut avoir quelques réserves sur les
recommandations d'aviser le chef du groupe parlementaire quand une enquête est
ouverte.
Un autre constat à l'égard de la mise en
œuvre du code, c'est la méconnaissance, la confusion des règles, et donc ici,
j'insiste sur le besoin de formation. On voit qu'il y a un accroissement de
législation, de réglementation qui s'impose. Il y a un besoin de formation, qui
est important, de sensibilisation aux enjeux éthiques. Le Commissaire à
l'éthique propose une offre de formation qui est riche et diversifiée aux élus
mais aussi au personnel politique. Or, trop peu de personnes assistent à ces
formations. C'est pour ça que nous appuyons la recommandation de rendre
obligatoires les formations au Code d'éthique et de déontologie. Et cette
recommandation, elle pourrait être élargie logiquement au personnel politique,
parce que, dans les travaux qu'on a pu mener, on s'est rendu compte que le
personnel politique jouait un rôle important en matière de prévention et
d'accompagnement des élus dans certaines situations. De même, l'offre de
formation, elle pourrait être accrue pour d'autres publics cibles pertinents,
tels que les donateurs réguliers ou encore les candidats et les candidates aux
élections générales ou partielles.
• (11 h 50) •
Dans le bilan de la mise en œuvre du code,
ce qu'on observe aussi, c'est les interactions que vous avez avec le
Commissaire à l'éthique. En ayant fait la recherche, on était un peu les
confidents des membres de l'Assemblée nationale et d'anciens membres de
l'Assemblée nationale. Toutes et tous mettent en évidence le rôle de conseiller
impartial des élus en matière de...
M. Jacob (Steve) : ...déontologie
et d'éthique. L'obtention d'avis et de conseils sur l'interprétation du code
répond à un besoin concret des élus qui se questionnent sur leur propre
situation personnelle en regard des dispositions du code. Et, comme il était
mentionné ce matin, l'avis écrit confère l'immunité à un élu qui a procédé à la
demande. Mais, dans certains cas, des élus soulèvent la difficulté d'obtenir
une réponse tranchée de la part du Commissaire à l'éthique, qui doit s'assurer
de gérer des cas complexes en posant beaucoup de nuances. Et donc, à cet égard,
certains élus expriment un inconfort de ne pas avoir une réponse tranchée sur
certaines situations qu'ils peuvent vivre. En effet, les exemples d'interprétation
du code, qui sont rendus dans les avis du CED permettent d'alimenter cette
réflexion éthique, mais, dans beaucoup de situations, ces avis écrits, ils sont
inaccessibles. Donc, je parle d'une sorte de jurisprudence cachée par rapport à
cette situation, qui pourrait être utile pour davantage mettre en évidence les
cas à envisager.
Pour conclure, et je vais m'arrêter
là-dessus, je vous encourage vivement à maintenir vivant et à faire évoluer le
code, donc à prévoir des moments de réflexion sur les modifications à apporter
pour que ce code reflète l'évolution de la société québécoise. Je vous
remercie.
Le Président (M.
Bachand) :Merci infiniment. Donc, on va
débuter la période d'échange du côté gouvernemental. Du côté gouvernemental?
M. Lemieux : Oui.
Le Président (M.
Bachand) :M. le député de Saint-Jean,
allez-y.
M. Lemieux : M. le Président.
Bonjour, messieurs, merci beaucoup. Vous avez été le premier mémoire reçu.
Alors, vous avez été le premier mémoire lu. Content de vous retrouver
maintenant pour en discuter avec vous. Vous avez rajouté le mot « instrumentalisation » en parlant de la
recommandation numéro cinq, de mémoire. « Que
soit modifié de manière à prévoir que le commissaire, après avoir reçu une
demande en vertu de l'article 91, procède à un examen préliminaire dans un
délai de 15 jours ouvrables afin de déterminer si une enquête s'impose. » Ça semblait tomber sous le
sens. Pourquoi, à l'époque, ils n'ont pas écrit le code comme ça? Je ne sais
pas. Peut-être parce qu'on voulait donner un privilège supplémentaire aux
députés de pouvoir dénoncer. Mais vous, vous êtes allés jusqu'à dire :
Attention, c'est de l'instrumentalisation potentielle. Est-ce qu'on perd
quelque chose si on fait ça? Je comprends qu'on ne peut plus instrumentaliser,
mais est-ce qu'on y perd au change?
M. Mayer (Jordan) : Je ne
sais pas si je comprends bien votre question, mais je pense que, dans l'optique
de notre mémoire, c'était davantage d'aller un peu dans le même sens que le Commissaire
à l'éthique le prévoit, c'est-à-dire que la vérification devient une option
pour diminuer les coûts, les ressources associées aux enquêtes, mais aussi
l'opportunité de laisser l'expertise du commissaire se déployer dans la
vérification.
M. Lemieux : Moi, je suis
d'accord, puis je trouve que c'est logique et conséquent. Je pense qu'on aurait
dû l'écrire comme ça pour commencer, mais, une fois qu'il faut le changer, je
me demande ceux qui ne seraient pas d'accord, est-ce qu'on... sans prêter des
intentions, ce qu'on ne peut surtout pas faire ici, c'est la pire chose qu'on
puisse faire. Mais est-ce que cette dimension d'instrumentalisation est la
seule... le seul problème ou il y a d'autres problèmes potentiels, là, si on
l'écrit comme vous le suggérez là, et comme la commissaire le demande aussi?
M. Jacob (Steve) : Bien, pour
répondre à cette question, ça peut régler une partie du problème. Néanmoins, la
question de l'instrumentalisation, elle est permanente. Donc, il y a... Ça doit
se travailler à différents niveaux par rapport à la sensibilisation des élus à
l'éthique, par rapport à l'utilisation que l'on va faire des dispositions du
code. Parce que, quand on regarde dans l'histoire du code, dès son entrée en
vigueur, dans les jours qui ont suivi, immédiatement, il y a déjà eu une
demande d'enquête. Donc, ça offre des munitions politiques dans la joute
parlementaire. Ça peut être de bonne guerre, mais il faut aussi être conscient
des répercussions que ça peut avoir sur l'ensemble de la population plus
largement.
M. Lemieux : J'allais y
venir, parce que, pour moi, la confiance et le cynisme ambiant, c'est une
phobie. Mais je reviens, parce que j'ai un passé journalistique, et là où je
trouvais qu'il y avait une arme un peu nucléaire dans la dimension où on dit
que c'est effectivement de l'instrumentalisation, c'est que la manchette, après
qu'un député demande officiellement à ce qu'on fasse une enquête, elle va
automatiquement être faite, puisque c'est la seule voie possible pour la
commissaire. Donc, la manchette, ce serait quoi? La Commissaire à l'éthique
déclenche une enquête sur...
Alors, là où je veux en venir, c'est que
la manchette était toujours... Bien sûr, on déclenche une enquête, mais ça ne
veut pas dire qu'il y a plus de matière au moment où on la déclenche qu'au
moment où elle a été demandée. La matière est à venir...
M. Lemieux : ...Donc,
dans ma vision journalistique des choses et donc médiatique de l'utilisation de
ce potentiel outil d'instrumentalisation, on vient court-circuiter ça, ce qu'on
n'avait pas vu au moment où on a écrit le code. Je vous suis? Je vous
comprends? Et vous m'avez compris aussi. Parfait!
Je reviens à cette dimension de la
confiance parce que c'est, me semble-t-il, et j'en parlais avec la commissaire,
c'est, me semble-t-il, ce dont on a le plus besoin. Puis c'est vrai aussi dans
mon passé médiatique, les médias et les politiciens ne sont pas très loin dans
le fond du baril, mettons. Et c'est triste parce que c'est la confiance qui est
au cœur de tout ça. Et c'est cette capacité de combattre le cynisme qui est
plus qu'en bien... qui est rendu à bout... à bout de souffle, là.
Est-ce que ce code-là, dont nous
disposons, est suffisamment transparent pour le commun des mortels qui n'est
jamais venu ici et qui n'écoute pas les nouvelles tant que ça? Est-ce qu'on en
fait assez pour dire qu'il y a un code dont on nous a dit tout à l'heure qu'au
moment où on l'a adopté il était sur la coche, comme on dit chez nous? Il a des
défauts. On va essayer de les corriger. Mais est-ce qu'on a raison de
s'enorgueillir de ce code -à? Est-ce qu'on devrait s'en vanter davantage?
M. Mayer (Jordan) : Bien
là, je pense... Je pense, si je peux me permettre, le code en soi est une très
bonne avancée. Je pense qu'on peut regarder un peu partout, puis Me Mignolet en
parlait tout à l'heure, le code a été adopté en dernier, oui, mais a été adopté
en fonction d'autres exemples sur la scène canadienne, sur la scène
internationale. Encore est-il que, bon, la confiance, c'est un grand concept.
C'est beaucoup, une question d'apparence. Donc, on souhaite que les élus
soient, dans l'esprit du public, comme les personnes les plus intègres
possibles. Ça va de soi. Mais c'est sûr que, c'est un peu ce qu'on met dans notre
mémoire, c'est qu'on souhaite que le code continue d'évoluer et qu'il y ait un
mécanisme, peut-être, de révision qui permette de le faire évoluer davantage.
Je tiens à attirer votre attention,
peut-être, sur l'exemple britannique, qui est quand même un exemple intéressant
parce que, bon, le système constitutionnel est similaire au nôtre. Au-delà de
ça, bien, c'est un système qui fait intervenir plusieurs acteurs en termes
d'intégrité publique. Donc, il y a un organisme indépendant pour la question du
harcèlement, un organisme indépendant aussi qui est sensiblement pareil au
commissaire à l'éthique, mais aussi un organisme, un comité d'éthique, puis
c'est ce qu'on recommande. Donc, je pense qu'il y a quand même un souci de
faire évoluer le code, repenser peut-être la coordination des différents
acteurs ou la structure institutionnelle en place. Mais pour répondre à votre
question, donc, oui, le code en soi est excellent, et je pense qu'il ne faut
pas oublier quand même la mesure qu'il doit continuer d'évoluer.
M. Lemieux : Permettez,
M. le Président, que je jette un coup d'œil du côté de la banquette, si
quelqu'un...
Le Président
(M. Bachand) :Mme la députée de
Vimont.
M. Lemieux : Merci.
Mme Schmaltz : Vous avez
mentionné tantôt, pour garantir l'indépendance du commissaire à l'éthique, le
fait d'avoir des outils supplémentaires comme pouvoir donner des sanctions ou
certaines pénalités. Quand vous parlez de sanctions, pénalités, qu'est ce que
vous voyez?
M. Mayer (Jordan) : Bon,
dans le mémoire, ce qui était dit, si je ne me trompe pas, bon, en termes de
pénalité, évidemment, le commissaire parlait tout à l'heure des SAP, des
sanctions administratives pécuniaires. C'est une possibilité. Évidemment, ce
n'est pas... Ce n'est pas une sanction parfaite. Il y a toujours des écueils à
chacune des sanctions possibles, mais ça peut être une forme d'incitation,
d'effet dissuasif, un peu, pour certaines conduites ou certaines pratiques. Je
pense que ce que le code prévoit, c'est davantage de donner la possibilité au
commissaire à l'éthique d'avoir recours à ce type de sanction là, mais ça ne
devient pas une fin en soi. Donc, il faut que ça reste une sanction qui est
possible, qui est laissée à la discrétion de l'institution, mais ça doit être
une sanction pour permettre justement de se conformer le plus possible au code
d'éthique.
• (12 heures) •
Mme Schmaltz : Est-ce
que vous pensez que le fait d'avoir... d'introduire des sanctions va... Je ne
veux pas employer le terme «améliorer», mais va redonner une certaine confiance
au sein de la population? Parce que tantôt on a parlé beaucoup d'image, on a
parlé de plusieurs caractéristiques, là, en lien, justement, avec le fait de
mettre ça de l'avant. Vous pensez que ça va aider l'image?
M. Mayer (Jordan) : C'est
quand même, je ne sais pas si...
M. Jacob (Steve) : L'enjeu
derrière la question de ces sanctions, c'est surtout de permettre à la
commissaire d'avoir tous les outils pour que l'ensemble des dispositions du
code soient mises en œuvre. Et donc, si on est certain que la commissaire
dispose de tous les outils pour que le code soit mis en œuvre, ça peut
permettre d'augmenter la confiance. Néanmoins, en termes de causalité...
12 h (version non révisée)
M. Jacob (Steve) : ...dans
cette relation, ce n'est... ce... ce n'est pas un seul petit instrument qui va
être ajouté qui peut avoir de... de grands effets, c'est... c'est l'ensemble de
l'œuvre qu'il faut... qu'il faut regarder.
Mme Schmaltz : Est-ce que ça
va permettre à ce moment-là à l'élu de recevoir la réponse tranchée dont... il
attend? Vous l'avez mentionné tantôt, souvent, l'élu n'a pas de réponse
tranchée de la part du commissaire. En imposant des sanctions, est-ce qu'on va
rejoindre justement cette... cette demande d'avoir cette réponse-là qui est
tranchée?
M. Jacob (Steve) : Bien,
la... la question de la... de la... de la sanction, ici, porte davantage sur le
fait que certaines dispositions de... du code ne seraient pas respectées par un
élu... notamment le fait de ne pas transmettre des... des documents. Donc, ça,
c'est quelque chose qui pourrait se.. se faire assez... assez rapidement. L'autre
élément, quand je parlais des... des avis qui sont transmis par le... le
commissaire, qui sont les... les avis écrits qui contiennent les
interprétations du code, c'est davantage sur des... des éléments pour outiller
les membres de l'Assemblée nationale, les élus de... de l'Assemblée nationale,
parce que j'utilise le... le terme de... de jurisprudence cachée, pas... pas...
pas que la... la commissaire souhaite cacher la jurisprudence, mais parce que,
par la nature des... des avis et de la confidentialité, ils ne... ils ne sont
pas... ils ne sont pas rendus publics, et je pense qu'il faudrait réfléchir à
un moyen de pouvoir, sur la base de la jurisprudence, en... en... en accumulant
un certain nombre de... de dossiers de cas qui concernent certains avis de...
du code, certaines... certains articles du code, pardon, qu'on puisse dire :
Bien, dans ce cas-là, voici comment on peut interpréter cette dimension, et, je
l'ai vu avec les... les dons et avantages, les interprétations sont très, très
variables d'un... d'un élu à l'autre, certains vont être plus rigoureux que...
que d'autres, et, dans... dans certains cas, il y a aussi une méconnaissance
des... des dispositions de... du code. Donc, c'est... c'est... c'est là-dessus
où je... où je pense qu'il faut trouver un moyen de pouvoir vous... vous
outiller pour pouvoir appliquer le... le code en... en vous... en mettant un...
un maximum d'informations à votre disposition.
Mme Schmaltz : D'où la
formation obligatoire, dans le fond.
M. Mayer (Jordan) : D'où la
formation obligatoire.
Mme Schmaltz : Est-ce que j'ai
du temps? Il y a encore...
Le Président (M.
Bachand) :...
Mme Schmaltz : Oui? Ah! je
pensais qu'il y avait... qu'il y avait mon collègue. Justement, j'aimerais ça,
revenir à... à la formation obligatoire, incluant donc le personnel politique,
parce que, selon les recherches, vous vous êtes rendu compte que, si le
personnel politique est informé au même titre que le député, on peut éviter à
ce moment-là, peut-être, quoi, certains dérapages, peut-être du fait que la
personne peut être nouvelle aussi, puis que... qu'on ne maîtrise pas encore
complètement toutes les règles, là, entourant ces fonctions.
Quand on parle de... de formation, vous la
voyez à quel niveau? Est-ce que c'est une formation qui se donne, comme on l'a
mentionné, en début de mandat, c'est une formation qui doit être revue à chaque
année? C'est quel genre de formation?
M. Jacob (Steve) : Par
rapport aux... aux formations, les... à... à l'heure actuelle, les... les
développements en termes de... de pédagogie sont assez rapides. Donc, je pense
que c'est une... une formation qui doit être régulière, avec des... quelques
piqûres de... de rappel, si je peux utiliser la... l'expression, sur des... à
des... à des moments clés par rapport à des situations particulières.
Mais je voudrais revenir sur la... la
question du... du personnel politique, parce que le personnel politique, c'est...
et... et notamment le... le personnel de... de cabinet, si on pense à... à des
ministres, ce sont des...des personnes qui sont là pour accompagner les...
les... les ministres et aussi pour, entre guillemets, les... les protéger. Et
donc, à certains moments, eux peuvent avoir davantage de temps pour pouvoir obtenir
de l'information et s'assurer que les élus vont avoir le... le comportement qui
est... qui est approprié.
Mme Schmaltz : J'imagine que
vous avez étudié la question à savoir quelle est la différence entre la
transparence et, à un moment donné, près du voyeurisme, là. Parce que c'est
bien d'être transparent, je n'ai aucun problème là-dessus. Mais, à un moment
donné, est-ce qu'on n'est pas un peu, de l'autre côté, à tout, tout dire de soi
puis, d'une certaine façon, s'afficher et d'être un peu... c'est ça, un peu du
voyeurisme obligé, là?
M. Jacob (Steve) : Oui. Bien,
sans... sans nécessairement parler de... de voyeurisme, mais, en... en
reprenant les... les travaux sur les... les dons et avantages, beaucoup de...
de cadeaux qui sont... pas la... l'extrême majorité des cadeaux qui sont
offerts aux élus sont de nature complètement désintéressée. Néanmoins, certains
élus vont préférer refuser tous les cadeaux qui peuvent leur être offerts
plutôt que de dire : Bien, je vais peut-être mal interpréter une règle,
donc je... je préfère être... instaurer une politique de zéro cadeau pour que
mon nom ne figure pas dans le registre des déclarations des... des dons et
avantages si c'est un montant supérieur à... à 200 $. Donc, c'est un peu
comme si le... ce registre apparaît comme une... une liste de la honte pour...
pour certains élus disant : Moi, je ne veux pas figurer là-dedans, donc je
vais refuser tous les... tous les cadeaux, alors que dans certains cas ça
respecte le... le... le... l'esprit et le... et le texte de... de... des
articles du code...
Mme Schmaltz : ...il y a
toujours la perception, hein, puis la perception, en politique, on sait que
c'est...
Le Président (M.
Bachand) :M. le député de Saint-Jean, il
reste trois minutes.
M. Lemieux : Merci, M. le
Président. Vous avez deviné ma question. Vous avez... j'ai lu dans votre
mémoire que vous aviez, puis vous y avez fait allusion tout à l'heure, vous
avez catégorisé les députés puritains, entre autres, bon, vous avez, donc,
j'imagine, travaillé à partir d'entrevues avec des députés sur leur perception.
Est-ce que vous avez été capable de faire vraiment une bonne différence entre
l'éveil ou la capacité pour un nouvel élu... Et je vais vous dire tout de suite
où je m'en vais avec ça, c'est qu'on a parlé tout à l'heure de travailler en
amont avec des candidats, déjà, avant de travailler avec des députés élus.
Est-ce qu'il y a une grosse différence, vous pensez, entre la perception et les
attentes d'un candidat, et puis des élus que vous avez rencontrés, et ceux qui
étaient nouvellement élus, qui ont eu la surprise de dire : Ah oui, je ne
peux pas faire ça? Est-ce que ça... Parce que j'adore le titre de votre... du
travail que vous avez fait, «Ce n'est pas un cadeau», là, c'est un bon titre,
et c'était en collaboration avec la commissaire, je comprends, mais mettez-nous
dans le coup un peu aussi de cette étude-là, par rapport à vos conclusions.
M. Jacob (Steve) : Par
rapport à cette dimension, je pense que c'est important effectivement de
pouvoir transmettre un certain nombre d'informations sur les obligations qui
existent à l'égard des élus, pour que les candidats et candidates prennent leur
engagement de se porter candidats à une élection en toute connaissance de
cause, ce qui n'est sans doute pas le cas, actuellement, et effectivement
certains et certaines élues peuvent, au moment de leur entrée en fonction, se
rendre compte qu'il y a plusieurs choses qui leur sont imposées.
Et, dans les travaux que j'ai pu réaliser,
plusieurs élus ont mentionné le fait que ça va très vite. Donc, on doit se
familiariser au travail parlementaire en même temps que de devoir apprendre les
dimensions d'éthique, en même temps que de devoir apprendre d'autres enjeux. Et
donc il y a un tsunami d'informations qui arrivent au même moment. Et donc
c'est de se dire, mais comment est-ce qu'on peut faire en sorte qu'on va
pouvoir distiller les informations en lien avec le code à différents moments
pour que ça soit le plus pertinent et le plus utile pour les membres de
l'Assemblée nationale?
Le Président (M.
Bachand) :Moins d'une minute.
M. Lemieux : Oui. Sur la
question du jurisconsulte, vous voyez comment, vous, une adaptation avec
l'arrivée du commissaire? Et là les rôles vont se réajuster, parce que ce que
vous avez noté tout à l'heure, je considère que c'est hyperimportant, le
jurisconsulte a beau vous dire quoi que ce soit, ça ne compte pas, pour le
commissaire. C'est ce que le commissaire vous a dit qui est important, en tout
cas, pour l'éthique.
M. Jacob (Steve) : Oui, tout
à fait. Puis ça, c'est un enjeu important qui revient dans la recommandation,
de regarder l'ensemble des outils et des mécanismes. Et peut-être que, dans
certains cas, ça peut être nécessaire de dire : Bien, cette fonction-là
n'est plus... elle est remplie par une autre institution, et peut-être qu'il
faut soit supprimer cette institution ou alors réfléchir à son mandat exclusif,
qu'il ne serait pas en train de se superposer avec le mandat et la mission d'un
autre organisme.
M. Lemieux : Merci,
messieurs.
Le Président (M.
Bachand) :Merci beaucoup. M. le député
d'Hochelaga-Maisonneuve, pour 4min15s, s'il vous plaît.
• (12 h 10) •
M. Leduc : Bonjour, beau
bouquin, je l'ai parcouru. Je veux vous entendre sur la dépolitisation. Je
comprends où vous voulez aller, mais je me questionne en même temps sur notre
rôle de député, qui est un rôle de contrôle du gouvernement aussi, tu sais.
Puis il y a peut-être une espèce de... pas une contradiction, mais il y a
peut-être une synthèse à aller chercher entre ce que vous soulignez avec
justesse, parce que c'est vrai que des fois ça devient une espèce d'arme...
cartouche politique, ou, en tout cas, une arme politique qu'on brandit, les
oppositions, par rapport au gouvernement, mais je ne sais pas si vous avez
aussi réfléchi au fait que c'est à double tranchant. C'est arrivé, dans le
passé, où on demande une enquête sur quelque chose, mais que l'enquête,
finalement, blanchit complètement le ministre en question. Puis là c'est là où
le parti qui a demandé l'enquête, qui a l'air un petit peu... qui rentre le
caquet bas, mettons, dans son caucus, tu sais. Mais est-ce que le simple fait
qu'on ait demandé enquête, c'est déjà un peu une espèce de tache envers le ou
la ministre? Bon, je comprends où vous voulez aller, mais je me demande s'il
n'y a pas moyen de faire les deux, à savoir davantage encadrer ça ou davantage
donner de pouvoirs, mais permettre quand même au député de le faire parce que
ça reste, je pense, un outil important de débat public et d'intérêt public que
les députés qui sont les deux mains dans la politique puissent lever le
drapeau.
Puis dernière question, avant de vous
laisser aller pour le temps qui reste, sentez-vous ou pensez-vous que...
J'aurais peut-être dû lui poser la question tantôt, que la commissaire à
l'éthique, elle se sent l'obligation de répondre positivement à chacune de nos
demandes, les députés d'opposition, quand on fait : Je demande enquête...
M. Mayer (Jordan) : …oui.
Bien, peut-être pour répondre à votre première question, c'est sûr que les
députés ont un rôle à jouer. Ça va de soi, c'est assez essentiel. Puis
maintenant, c'est de trouver le juste milieu entre que, oui, les demandes
d'enquête sont faites, puis la commissaire peut enquêter de son initiative
aussi, mais ça ne doit pas nécessairement devenir une fin uniquement partisane.
Donc, ça doit... il doit quand même y avoir un intérêt public derrière ça,
parce qu'évidemment on va vers l'ultime but de la confiance du public, donc ça
doit passer par ça.
Je donne l'exemple du cas britannique au
Royaume-Uni, donc c'est un commissaire à l'éthique un peu similaire aux
fonctions. Une fois que c'est passé devant le Commissaire à l'éthique,
maintenant, il y a une instance parlementaire avant même la Chambre des
communes, avant même la chambre de l'assemblée qui se prononce sur les
résultats d'enquêtes et ensuite qui propose soit une sanction ou qui décide de
ne pas donner suite. C'est un juste milieu, selon moi, entre la partie plus
parlementaire de la chose et la partie davantage expertise éthique ou expertise
de l'institution. Donc, peut-être... oui, effectivement, il y aurait peut-être
un juste milieu à trouver. Je pense que les réflexions sont intéressantes puis
il y aurait matière à faire évoluer peut-être la réflexion encore davantage.
Mais, oui, je pense que la question se soulève. Encore est-il que l'Institution
du commissaire à l'éthique a un rôle névralgique à jouer dans cette
perspective-là. On essaie de trouver jusqu'où la politique peut aller, mais
donc, je pense que, oui, il y aura peut-être un juste milieu à avoir.
M. Leduc : Sur le fait que la
commissaire se sentirait obligée de répondre à chacune de nos demandes, est-ce
que c'est votre impression?
M. Jacob (Steve) : Bien, je
ne peux pas parler au nom de la commissaire, mais je pense que c'est important
que les demandes d'enquête existent et soient... la question sur
l'instrumentalisation est principalement sur le fait qu'on va faire des
demandes d'enquête par rapport à anciennement d'un manquement éventuel. C'est
aussi par rapport à l'utilisation qui peut être faite ensuite d'un rapport par
rapport au moment où l'Assemblée est amenée à voter sur l'ensemble du rapport,
sans distinguer la question du manquement et de la sanction qui est, en gros, à
prendre ou à laisser et ce qui peut laisser introduire cette logique partisane
au moment du vote sur le rapport.
M. Leduc : Donc, il faudrait
éviter le vote ou trouver un moyen qu'il n'y ait pas de vote? Comment vous
voyez ça?
M. Jacob (Steve) : Ce qu'on
suggère dans le rapport, c'est de dire... de se questionner sur ce mécanisme
pour que, soit, le commissaire ait un pouvoir d'imposer à sanction, ou alors de
distinguer clairement l'identification du manquement et l'association de la
sanction, qu'on distingue les deux.
M. Leduc : C'est ça, qu'il y
ait plus de pouvoir pour appliquer la sanction. D'accord, merci.
Le Président (M.
Bachand) :Merci beaucoup. Alors, M. le
député de Nelligan, pour 12 min 45 s, s'il vous plaît.
M. Derraji : Merci, M. le
Président. J'arrive au bon moment. On dirait que c'est coordonné. Merci.
Bonjour. Je tiens à m'excuser. Je n'ai pas entendu vos minutes d'intervention,
mais j'ai lu avec grand intérêt votre rapport. Première question, c'est par
rapport au délai de l'étude du rapport que nous avons eu depuis 2019. C'est
quoi votre interprétation de l'étude de ce rapport?
M. Jacob (Steve) : Bien là,
je vais me lancer là-dessus. Avant de travailler sur les questions d'éthique
publique, je travaillais aussi sur les questions d'évaluation et de gestion de
la performance. Et en matière de l'évaluation, dans certains cas, il existe des
lois puis ça pourrait être le... si vous ouvrez la loi, ça peut être une
occasion de prévoir un délai à partir duquel, lorsqu'un rapport est reçu, bien,
il doit être débattu au sein d'une commission. Il y a toutes sortes de clauses
évaluatives qui peuvent exister, comme aussi le fait de dire : Bien, on va
remettre... réouvrir la loi au bout d'un certain temps, puisque le code
d'éthique, ce n'est pas une loi qui devrait être figée, donc ça permettrait de
la rendre.
M. Derraji : Je vais vous
ramener à la page 6. Vous dites : Bien que l'adoption du code et de
son institutionnalisation par la création du CLD offre un cadre de référence
commun aux élus. La sensibilité éthique varie en fonction des expériences
individuelles. La relation des élus avec l'éthique parlementaire est différente
pour chacun. Pouvez-vous élaborer? Est-ce que je peux comprendre qu'il y a un
peu d'éthique élastique?
M. Jacob (Steve) : Bien, ce
qu'on a pu... ce qu'on a observé, puis c'est ce qu'on mentionne, c'est qu'il va
y avoir des manières d'interpréter le code qui vont varier en fonction des
personnes, en fonction...
M. Jacob (Steve) : ...de leur
sensibilité éthique et, dans certains cas, certains élus vont avoir une vision
plus restrictive du code, une vision très, très précise, et d'autres vont
considérer que, si on va jusqu'à la figure des intrépides dont on parle dans le
mémoire, que les questions éthiques ne sont pas véritablement pour eux ou elles
et que c'est davantage une question légale qui va uniquement s'appliquer.
Donc, je ne parlerais pas d'éthique
élastique, mais simplement le fait qu'à certains moments on ne va pas percevoir
les enjeux de la même manière, en fonction de son parcours professionnel, en
fonction des formations que l'on a pu avoir, en fonction des situations que
l'on a pu vivre ou de ce que va nous dire notre entourage politique.
M. Derraji : Oui, mais c'est
là où votre réflexion est intéressante, mais je veux vraiment aller au fond des
choses parce que vous êtes en mesure de décrire trois types : les
intrépides, les serviteurs et les profiteurs. C'est ce que vous faites dans la
page 7, en se basant sur un livre, ce n'est pas un cadeau, et vous dites,
vers la fin : D'abord, la sensibilité à l'éthique des membres de
l'Assemblée nationale varie en fonction de leurs personnalités et leurs
expériences individuelles, voire du contexte dans lequel ils évoluent. Vous
êtes en train de nous dire qu'on doit prendre le type de personnalité des trois
parce qu'au bout de la ligne on veut que tout le monde suit le code et suit les
règles. On ne peut pas, aujourd'hui, adapter le code si tu intrépide, ou
serviteur, ou profiteur. Je pense que ce n'est pas votre souhait ni le souhait
de personne autour de la table. Mais ça serait quoi, votre suggestion, prenant
en considération que les trois personnalités existent?
M. Jacob (Steve) : Bien, il y
a quatre profils, il y a les puritains, serviteurs profiteurs et intrépides.
(Interruption) Pardon.
Des voix :...
M. Jacob (Steve) : Désolé.
Donc, cette typologie, elle permet de regarder la manière dont les élus vont
effectivement appliquer, interpréter le code. Je ne dis pas qu'on doit avoir
des codes différents par rapport aux profils de parlementaires, je dis qu'à
partir du moment où on va... ce qu'on observe, on met en place un code, les
élus vont se l'approprier différemment. On peut regarder, par exemple, par
rapport au fait que certains élus vont suivre la formation ou ne pas la suivre,
actuellement, ça démontre un élément par rapport à cette sensibilité à
l'éthique. Le fait que les cadeaux, les dons et avantages ne soient pas
interdits, aujourd'hui, dans le code, mais que, néanmoins, des parlementaires
vont dire : Moi, je n'accepte aucun don et avantage, ça montre qu'on peut
interpréter et se comporter de différentes manières par rapport à
l'interprétation du code.
M. Derraji : Mais je ne dis
pas qu'il faut adapter le code, le code est là pour tout le monde. Mais ce que
vous ramenez quand même, c'est que, oui, le code, il est là, mais vous
constatez qu'il y a trois types de personne, et que, écoutez, je... «Les
profiteurs, pour leur part, donnent préséance à leur intérêt personnel au
détriment de l'intérêt public. Ils sont prêts à accepter des conduites jugées
discutables et s'en remettent au jugement de leurs collègues pour apprécier
leur propre conduite.» C'est quand même fort, je vous le dis. C'est votre
opinion, mais moi, je veux juste comprendre. Si on dit qu'il y a trois types
de... je dirais, de Personne ou de profil, c'est juste, je veux mieux
comprendre la réflexion derrière.
• (12 h 20) •
M. Mayer (Jordan) : Oui.
Bien, je pense que l'effort de typologie, c'est davantage pour amener un peu
aux recommandations qu'on propose dans le mémoire, c'est-à-dire que la
formation obligatoire, c'est une façon aussi de s'adapter. Puis c'est le grand
paradoxe, en fait, d'un code de déontologie et d'éthique. Le code se veut
général, les règles sont générales, mais les cas sont particuliers. Donc, les
sensibilités de chacun, évidemment, sont différentes, parce qu'on a tous un
vécu, des horizons différents avant même d'arriver en politique. Je pense que
c'est un peu l'opprobre du code d'éthique, mais donc, ça amène vers les
recommandations de l'obligation de formation continue puis aussi... On n'en a
pas parlé encore, mais la recommandation qu'on propose dans le mémoire sur une
façon peut-être de rendre publics les avis du commissaire tout en respectant
les données sensibles ou confidentielles, d'essayer de trouver une façon de
permettre aux élus d'avoir le plus d'outils en leur possession pour avoir une
réflexion éthique sur leur conduite.
M. Derraji : ...une formation
adaptée au départ. D'ailleurs, vous avez assisté à l'échange tout à l'heure
avec Mme la Commissaire. C'est que la formation obligatoire doit prendre en
considération les trois types de profil que vous faites dans votre analyse...
M. Jacob (Steve) : ...oui,
tout à fait. Puis l'enjeu, quand on a réalisé des entrevues avec des
parlementaires et les anciens parlementaires, certains parlementaires étaient
capables de me réciter presque par cœur les articles du code qui concernant les
cadeaux et d'autres parlementaires, quand je leur demandais s'il fallait qu'il
existe un registre public des cadeaux, ils me disaient : Bien, on n'en a
pas besoin, alors que ça existe. Je posais une question sur la question de la
transparence, et certains ne savaient même pas qu'il y avait une obligation de
déclarer des cadeaux d'un montant supérieur à 200 $. C'est là où je parle
de cette différence par rapport à cette sensibilité à l'éthique. Et l'objectif,
c'est de ramener tout le monde vers le centre par rapport aux comportements et
aux règles qui sont attendues en matière d'éthique et de déontologie.
M. Derraji : O.K. Dans la
page 11, vous parlez : Nous nous questionnons sur la pertinence de
maintenir les services d'un jurisconsulte en matière de déontologie et
d'éthique, dans un souci de coordonner les actions et les mandats des
organismes... en matière d'intégrité publique le mandat conjoint du
jurisconsulte et du CED peut poser un problème, car il existe une possibilité
de confusion au sujet de l'interprétation du code, comme le mentionne le CED
dans son rapport sur la mise en œuvre.
M. Mayer (Jordan) : Oui,
bien, en fait, je pense qu'on a eu l'occasion de soulever le point tout à
l'heure. Dans un souci de coordination de différents acteurs en intégrité
publique, c'est sûr que ça peut poser un enjeu d'avoir des chevauchements de
compétences puis d'avoir des chevauchements entre différentes institutions.
Donc, c'est soumis dans notre mémoire. C'est de réfléchir peut-être à la
pertinence d'avoir toujours recours aux services d'un ou d'une jurisconsulte,
tout en ayant la possibilité d'avoir des avis auprès du Commissaire à
l'éthique. Donc, je pense que le mémoire parle un peu de lui-même, c'est-à-dire
que, malgré l'excellent travail des jurisconsultes à l'Assemblée nationale, le
mandat a évolué avec le temps. Et puis je tiens par ailleurs à dire, je pense
que c'est en 2008, le jurisconsulte de l'époque souhaitait que sa fonction
devienne le Commissaire à l'éthique et qu'elle disparaisse. Donc, je pense
qu'il y a quand même un souci depuis plusieurs années qu'il y ait une
coordination de ces différents acteurs, quitte à peut-être supprimer une
fonction.
M. Derraji : Vous parlez
beaucoup de l'instrumentalisation de l'éthique parlementaire à des fins
partisanes. Pour ne pas tomber dans ce sens... et, vous avez vu et entendu tout
à l'heure, Mme la commissaire est très sensible à ce sujet... ce serait quoi,
votre suggestion?
M. Jacob (Steve) : Bien, la
principale suggestion, piste de réflexion, c'est d'identifier les moyens pour
que l'indépendance, l'impartialité de la commissaire continue à être préservée
et de regarder à quel moment les risques d'instrumentalisation sont les plus
grands. On parlait tout à l'heure, avec un de vos collègues, des demandes
d'enquête, et je signalais le fait que demander une enquête, ce n'est pas
nécessairement une instrumentalisation. Néanmoins, quand on le voit dans le
rapport, et quand on regarde les demandes d'enquête, quand on voit qu'à
quelques jours d'une élection un élu demande une pléthore d'enquêtes auprès de
la commissaire, on peut se questionner sur l'intention réelle. Et le point, à
mon avis, majeur, c'est l'ensemble... et c'est quelque chose qui n'avait
peut-être pas été anticipé au moment de l'adoption du code, mais c'est
l'ensemble des débats qui entourent les rapports d'enquête avec la
recommandation d'une sanction. On l'a vu dans l'histoire récente, tous ces
rapports ont, bien souvent, fait l'objet d'actions, de discussions qui peuvent
miner l'indépendance et l'impartialité de la commissaire à l'éthique.
M. Derraji : Je veux juste
comprendre, parce que déposer une demande d'enquête, c'est tout à fait légitime
si on se base sur le code, là, vous ne remettez pas ça en cause. Comme la commissaire
a le droit de refuser l'enquête si elle la juge non recevable. J'essaie juste
de comprendre c'est quoi, le problème que... utilisée pendant une durée proche
d'une campagne électorale. Vous voulez aller plus en profondeur par rapport à
la réflexion? Je ne vois pas le lien.
M. Jacob (Steve) : Bien, le
lien, c'est qu'on a pu observer que la période de la campagne électorale peut
être un moment peut-être propice pour certains, de chercher à jeter le
discrédit sur d'autres membres ou d'autres formations politiques. Donc,
l'objectif derrière, et ça, ça rejoint la possibilité...
M. Jacob (Steve) : ...Octroyer
des pouvoirs d'enquête préliminaire, c'est que ça permettrait très rapidement
de pouvoir voir si on peut se rendre compte qu'il n'y a pas de... pas lieu
d'aller plus loin dans la demande d'enquête.
Le Président (M.
Bachand) :40 secondes, M. le député.
M. Derraji : Bien, vous
voulez parler des formations, mais je pense que vous avez pas mal insisté.
Rendre la formation obligatoire pour tout le monde, élus, personnel, ça, vous
êtes d'accord? J'aurais aimé vous entendre sur les médias sociaux, mais
brièvement.
Le Président (M.
Bachand) :15 secondes...
M. Jacob (Steve) : Bien, je
pense qu'on a entendu des premières pistes de réflexion ce matin. Je n'ai pas
eu l'occasion...
M. Derraji : Mais vous, vous
en pensez quoi?
M. Jacob (Steve) : Je pense
que ça doit être... Il y a sans doute une nécessité à encadrer et à baliser cet
enjeu.
Le Président (M.
Bachand) :Merci beaucoup. Merci beaucoup
d'avoir été avec nous.
Sur ce, la Commission suspend ses travaux
jusqu'après les avis touchant les travaux des commissions. Merci.
(Suspension de la séance à 12 h 27)
15 h (version non révisée)
(Reprise à 15 h 17)
Le Président (M.
Bachand) :Bonjour, tout le monde! La
commission des institutions reprend ses travaux.
On poursuit donc les consultations
particulières et auditions publiques sur le rapport de mise en œuvre du code d'éthique
et de déontologie des membres de l'Assemblée nationale 2015-2019, intitulé :
Incursion au cœur du code d'éthique et de déontologie : de la théorie à la
pratique.
Cet après-midi, nous entendrons les
personnes et organismes suivant : Le Cercle des ex-parlementaires. Mme Martineau,
professeure d'éthique organisationnelle, le Commissaire au lobbyisme.
Nous allons débuter avec Me Deschamps,
jurisconsulte de membres de l'Assemblée nationale. M. Deschamps, merci
beaucoup d'être avec nous. Alors, comme vous savez, vous avez 10 minutes
de présentation, puis, après ça, on aura une période d'échange de 50 minutes
avec les membres de la commission. Donc, la parole est à vous.
Mme Deschamps (Marie) : Je
vous remercie beaucoup, M. le Président, et je salue, Mmes les députées, MM.
les députés. Je ne prendrai probablement pas toutes mes 10 minutes pour ma
présentation. J'ai trois petits points à vous faire valoir. Mais je tiens d'abord
à dire que je vous remercie de me donner l'occasion de vous rencontrer et de
contribuer dans la mesure de ce que je peux vous apporter, donc de contribuer à
vos travaux.
Alors, j'ai trois petits points. Le
premier, c'est une remarque sur le plan social. Vous aurez remarqué qu'on a
fait grand état récemment de la majorité des femmes à la Cour suprême. En
regardant la composition de votre comité, j'ai constaté qu'il y avait des
précédents dans la branche législative du gouvernement. Alors, je salue la
majorité féminine dans vos travaux. Alors, c'était mon premier point, qui est
un petit clin d'oeil social à l'évolution de notre société.
Le deuxième point a trait à... Je veux
faire un petit peu un retour en arrière sur la fonction de jurisconsulte. D'abord,
comme vous l'avez probablement vu au cours de vos précédents travaux, la
fonction de jurisconsulte a été créée en 1982, donc ça fait plus de 40 ans.
Je suis la sixième jurisconsulte, la première femme, mais quand même la sixième
jurisconsulte. Vous avez eu de très, très éminents juristes, certains qui ont
eu des termes très prolongés, e pense à l'ancien juge Albert Mayrand qui...
dont les écrits sont encore cités dans les décisions. Alors donc, cette
institution là a quand même de l'âge. Elle a subi un énorme changement, en fait
un changement fondamental lorsque le code d'éthique et de déontologie a été
adopté en 2010 et mis en vigueur en 2011.
• (15 h 20) •
Alors, à ce moment-là, le fondement de la
compétence du jurisconsulte, qui était auparavant dans la loi sur l'Assemblée
nationale, s'est retrouvé dans le code d'éthique et de déontologie. Et, à ce
moment-là, j'ai lu quand même une partie des travaux qui ont donné lieu ou qui
ont précédé l'adoption du code. Et, à ce moment-là, les députés se sont
interrogés sur le maintien de la fonction de jurisconsulte. Je suis consciente
qu'ils ont pris une décision qui leur revenait. Maintenant, au cours de l'évolution,
au cours de la vie, de ce chevauchement entre la possibilité pour le
commissaire de donner des avis qui eux étaient protégés et la possibilité...
Mme Deschamps (Marie) : ...et
pour le jurisconsulte de, lui aussi, donner des avis. Mais un modus operandi
s'est établi et s'adapte, je ne sais pas si ça a débuté sous maître Bisson,
mais, certainement, au cours du mandat de Me Jean-Louis Beaudoin. Et le modus
operandi s'est poursuivi au cours du mandat de Me Lebel, avec qui je me suis
entretenue avant même d'avoir à donner les premiers avis. Alors donc, selon ce
modus operandi là, le jurisconsulte, lorsqu'il reçoit une demande, explique les
différentes options qui s'offrent aux députés et explique aussi certains des
avantages du fait que l'avis puisse être donné avec une garantie de... avec une
certaine protection prévue par le code. Et, selon l'expérience, il n'y a pas eu
de cas où les jurisconsultes ont été appelés à donner des avis qui étaient
susceptibles d'entrer, je ne dirais pas en conflit, mais de prêter à
interprétation. Si, par exemple, un député obtenait deux avis, et que les
gens... il y aurait eu une mauvaise communication, par exemple, entre le jurisconsulte
et la Commissaire à l'éthique. Alors, ce modus operandi là a fonctionné depuis
plusieurs années, et c'est cette pratique-là que je respecte moi-même.
Alors j'en viens à mon troisième point qui
est... J'ai lu aussi le rapport qui est devant vous pour étude, et, dans ce
rapport-là, il y a une recommandation qui vous invite à étudier ou qui invite
l'Assemblée nationale à étudier ou à revoir le rôle du jurisconsulte. Alors, il
est évident que ça demeure une décision politique. Je respecte la décision des
députés, en 2010, lorsqu'ils ont décidé de maintenir le poste. Alors, il y a
différentes options qui s'offrent. Une des options, c'est de limiter ou de
prévoir que seul le Commissaire à l'éthique puisse donner des avis; une autre
des options est de maintenir le statu quo; et une troisième option pourrait
être de, plus ou moins, mettre en pratique le modus operandi qui s'est établi.
Et, suivant cette option-là, le jurisconsulte ne serait appelé à donner des
avis que lorsque la Commissaire à l'éthique en ferait la demande.
Alors, ça pourrait être une option plus
souple que ce qui est déjà prévu par le code, parce que la commissaire peut
déjà, elle-même, nommer, faire nommer un commissaire ad hoc. Mais ça pourrait
être des circonstances encore plus souples que celles qui peuvent présentement
donner lieu à la nomination d'un commissaire ad hoc. Alors, ça complète les
commentaires préliminaires, et il me fera plaisir de répondre à toutes vos
questions.
Le Président (M.
Bachand) :Merci beaucoup, Mme Deschamps.
Alors, Mme la députée d'Anjou-Louis-Riel, s'il vous plaît!
Mme Boivin Roy : Merci
beaucoup, M. le Président. Merci pour vos commentaires très appréciés. Et puis
on entend votre appréciation sur la gent féminine au niveau des députés de l'Assemblée
nationale. Donc, nous aussi, sommes bien fiers. Question pour vous donc, vous
nous dites qu'en 2010 il y avait le maintien du poste qui avait été décidé à ce
moment-là. On a à nouveau la question, devant nous, en 2023, avec les trois
options que vous nous proposez. Alors, pour vous, plus précisément...
Mme Boivin Roy : ...quelle est
votre opinion entre l'option deux et l'option trois? Est-ce que vous avez une
préférence et si c'est possible de le justifier? Merci.
Mme Deschamps (Marie) : Oui.
Alors, je pense que le statu quo n'est pas très souhaitable pour deux raisons.
D'abord, moi, j'aime la clarté, et, pour les députés, qu'il y ait deux
institutions, si je peux dire l'institution du jurisconsulte, c'est
l'institution de la Commissaire à l'éthique, qui ont des compétences égales
pour donner des avis, ça peut créer une confusion. Selon moi, c'est mieux que
les députés aient un parcours plus clair, dire : Oui, la première
institution où on s'adresse, c'est la Commissaire à l'éthique. Et je dois dire
aussi qu'il y a une relation de confiance qui s'établit et je ne trouverais pas
souhaitable qu'il y ait des raisons qui ne sont pas formelles ou qui ne sont
pas transparentes pour lesquelles les gens voudraient s'adresser soit à un jurisconsulte
soit à la Commissaire à l'éthique. Moi, je favorise la clarté d'un parcours et
donc, entre deux et trois, entre l'abolition... pas l'abolition, mais le
maintien pur et simple, si c'est ça, votre question, et, une option où est-ce
que la fonction pourrait être maintenue, mais seulement lorsque le Commissaire
à l'éthique en ferait la demande, il me semble que, pour les députés, ça serait
un parcours beaucoup plus clair.
Mme Boivin Roy : Merci
beaucoup pour votre réponse. Peut-être une dernière question très rapide.
Est-ce que vous pensez qu'à ce moment-là... si tenté que c'était la troisième
option qui était retenue, est-ce que vous pensez qu'il y aurait lieu d'avoir
des méthodes de communication qui seraient aussi claires que ce que vous
souhaitez dans le choix de l'option pour que les gens puissent bien comprendre,
justement, là, le processus à suivre?
Mme Deschamps (Marie) : Oui,
en fait, si... Du côté du député, à mon avis, les députés devraient, en premier
lieu, se rendre au bureau de la commissaire, comme je vous dis, elle est là en
permanence, elle est accessible, et ce serait de la responsabilité de la
commissaire de déterminer la raison pour laquelle le jurisconsulte pourrait
être appelé à intervenir. Et ça pourrait être des raisons très larges. Il y
a... Par exemple, elle pourrait se retrouver devant une situation où il y a un
surcroît de demandes, donc des situations qui ne sont pas déjà prévues où
est-ce qu'elle peut donner... nommer un commissaire ad hoc, et ça pourrait être
aussi des situations semblables, et ça pourrait devenir une situation où elle
n'aurait plus besoin de nommer des commissaires ad hoc.
Mme Boivin Roy : Très bien.
Merci beaucoup.
Le Président (M.
Bachand) :Interventions du côté gouvernemental?
M. le député Saint-Jean.
M. Lemieux : Oui. On est
rendu à combien de temps, M.?
Le Président (M.
Bachand) :Il vous reste 20 minutes.
• (15 h 30) •
M. Lemieux : Merci, M. le
Président. Bonjour, Maître Deschamps. Si vous voulez, dans l'intérêt et pour la
curiosité des députés qui siègent ici, mais dans l'intérêt du public qui, si
tentait, s'intéresse à la chose, je veux juste reculer un tout petit peu, parce
qu'on est rentré avec vous dans le vif du sujet en pays de connaissance, tout
le monde comprenait, mais j'aime ça rétropédaler un tout petit peu. Alors,
Maître Deschamps, si je vous disais, tout à l'heure, pendant les autres
consultations, on s'est fait dire que la grosse différence, si le député que je
suis, il va cogner à votre porte puis s'il décide de ne pas aller cogner à
votre porte pour un problème d'éthique puis qu'il va cogner à la porte de la
commissaire, en sortant de chez la commissaire, il y a une entente, entre
guillemets, de compréhension qui est garantie par rapport à ce qu'elle nous dit
comme opinion qu'on peut faire ou qu'on ne peut pas faire, puis on part de là
avec une assurance que j'appelle, moi, la garantie. Si on va vous voir, on va
avoir un aussi bon service, j'en suis certain, mais on part pas de garantie, si
j'ai bien compris.
Mme Deschamps (Marie) : Exactement.
M. Lemieux : C'est la seule
différence? Point d'interrogation.
Mme Deschamps (Marie) : Bien,
c'est-à-dire...
15 h 30 (version non révisée)
Mme Deschamps (Marie) : ...que
c'est la seule différence juridique. Cependant, en pratique, la commissaire,
elle, elle est intégrée dans tout un processus où est-ce qu'elle d'autres
mécanismes que juste les avis. Elle a, par exemple, toute une section qui fait
de l'information. Alors, je vois quand même un état où la commissaire, elle
dispose d'un plus grand réseau, d'un plus grand accès à toute sa jurisprudence
à elle. Alors, je vois quand même des avantages dans le fonctionnement, à se
diriger vers la commissaire à l'éthique.
M. Lemieux : De toute
évidence, maître, vous ne cherchez pas de clients, mais, en même temps, c'est
parce que ce n'est pas tout ce que vous faites, comme jurisconsulte.
Apprenez-moi un peu ce que c'est qu'une jurisconsulte ou un jurisconsulte. Vous
êtes la sixième, vous?
Mme Deschamps (Marie) : Oui.
Alors, la jurisconsulte donne des avis aux députés en matière d'éthique, mais
la jurisconsulte, aussi, est appelée à donner des avis au Bureau de l'Assemblée
nationale en vertu du Programme d'assistance juridique aux députés et aux
anciens députés.
M. Lemieux : Et autres tâches
connexes ou ça s'arrête là?
Mme Deschamps (Marie) : Bien,
écoutez, autres tâches connexes, là... vérifier, c'est les deux tâches...
M. Lemieux : C'est les deux
gros mandats.
Mme Deschamps (Marie) : Oui,
exactement, parce qu'un est dans le code d'éthique, l'autre est dans la Loi sur
l'Assemblée nationale, alors... Bien, c'est-à-dire, oui, une des tâches
connexes, c'est lors du dépouillement du vote.
M. Lemieux : D'accord. Ce
matin, on s'est rendu compte que la commissaire actuelle est probablement déjà
en train d'écrire son rapport pour la prochaine étape, parce que ça datait déjà
de plusieurs années, ce rapport qu'on étudie, mais ça a le bénéfice aussi de
nous montrer 10 ans, et même un peu plus, derrière. On a eu toutes sortes de
discussions. Il y en a une en particulier, moi, qui a attiré mon attention, c'est
au sujet de la capacité, et j'ai même été voir la commissaire, je le confesse,
en sortant avant le lunch pour dire : Bien, c'est-tu ça ou ce n'est pas
ça? Puis il y a comme une espèce... ce n'est pas un vide juridique, mais il y a
une question d'interprétation. À partir du moment où un député dépose une
demande d'enquête, la commissaire a un certain droit de regard sur la capacité
qu'elle a de faire enquête ou pas, mais ce n'est pas aussi clair que ce qui
nous est proposé dans le rapport qu'on a, à savoir de procéder à l'analyse d'opportunité
de tenir une enquête ou non, qui serait plus claire en termes de procédure.
Et ça ouvre la porte, évidemment, à cette
hypothèse qu'on a entendue qu'il y avait une certaine instrumentalisation, dans
la mesure où, à chaque fois qu'un député demande une enquête, c'est presque
automatique, et ça fait grand bruit, et ça fait de la médiatisation, et
finalement, et l'enquête doit procéder et on sent qu'il pourrait y avoir
instrumentalisation partisane. Est-ce que vous êtes avec moi sur ce que je
viens de dire ou je me suis planté quelque part là-dedans... ou on pense, on
comprend la même chose?
Mme Deschamps (Marie) : J'ai
cru comprendre, d'après les rapports que j'ai lus, parce qu'évidemment je ne
suis pas... je n'ai lu de projet de rapport pour les années écoulées depuis
2019, 2018, mais, même d'après les recommandations de ce rapport-là, je
comprends qu'en période électorale il y a tendance à utilisation de mécanismes
à des fins qui ne sont peut-être pas prévues initialement par le code.
M. Lemieux : D'accord. Je
voudrais vous amener maintenant sur tout ce qu'on a discuté ce matin, parce que
c'est au cœur du sujet et c'est la première recommandation de la commissaire,
la formation. Il fut une époque où il y avait plus d'avocats qu'autre chose à l'Assemblée
nationale. Maintenant, en tout cas, au gouvernement, il n'y en a pas tant,
puis, de l'autre côté de la Chambre, je pense qu'il n'y en a pas tant non plus.
Est-ce que la formation sur le code, qui est quand même très frais, là, il a à
peine une douzaine d'années... est-ce que, pour vous, ça fait partie de ce que
devrait être la priorité des députés que nous sommes quand on arrive, d'apprendre
ce code-là, et est-ce...
M. Lemieux : ...a fortiori, on
devrait imposer de la formation aux députés.
Mme Deschamps (Marie) : Absolument.
Selon moi, la formation en éthique devrait être obligatoire. Mais, comme vous
savez, j'ai une formation juridique, et je suis très favorable à la formation
des avocats, et je suis très favorable à la formation en éthique. Et je peux
vous dire que c'est avec plaisir que je prends comme avocate, depuis ma
retraite de la magistrature, je prends la formation et je suis très soucieuse
de toujours prendre la formation en éthique malgré toute l'expérience que je
peux avoir accumulée. J'ai 71 ans, j'ai eu toutes sortes d'expériences et,
malgré tout, je pense que la formation, ça doit être la formation continue.
Donc, à plus forte raison, la formation en éthique, selon moi, lors d'une
première activité comme député devrait être obligatoire et ça devrait être
aussi obligatoire d'avoir de la formation continue.
M. Lemieux : Et pour le
personnel des députés aussi? Parce que généralement un nouveau député arrive
avec du nouveau monde, entre guillemets. Est-ce que ce qu'on peut dire que ça
va de soi que son personnel subisse aussi, entre guillemets, une formation?
Mme Deschamps (Marie) : Ça
dépend de quel personnel on parle, là. Le personnel qui a une marge de
manoeuvre puis qui a un contact direct avec le public, oui. Le personnel qui...
dont toutes les activités sont surveillées ou si quelqu'un n'est jamais appelé
à, par exemple, à signer une lettre, parce que toutes les lettres sont signées
par quelqu'un d'autre, alors je dirais que dans tous les cas où il y a, je ne
veux pas dire risque, là, mais exposition à des interactions avec le public
dans le cadre des responsabilités du député, la réponse est oui.
M. Lemieux : Parce qu'il n'y
a pas juste... les temps ont bien changé, il n'y a pas juste qu'il y a moins
d'avocats qu'il y en avait assis au salon bleu, il y a aussi que l'éthique et
la déontologie prennent de plus en plus en plus de place. Et si vous voulez,
même si vous ne me la demandez pas, je vais vous le dire : Si vous voulez
mon opinion, c'est parce qu'on a une crise de confiance qui est de plus en plus
importante, autant pour les médias que pour la classe politique, et qu'on a
tout intérêt à marcher les fesses serrées comme on dit.
Donc, comment on fait pour raccommoder
tout ça ensemble? On est arrivé, on a été une des dernières provinces, un des
derniers gouvernements à se donner un code il y a une douzaine d'années, Mme la
commissaire m'a dit ce matin que, quand on l'a obtenu, tout le monde
disait : Oh, wow, vous êtes bien équipé, c'est le dernier qu'on... qui est
créé, il est super bon. Mais il demande à être perfectionné, c'est ce qu'on est
en train d'essayer de considérer. On fait comment? Est-ce que notre code est à
la hauteur à vos yeux? Puis est-ce que c'est par là que ça doit forcément
passer, ce problème de confiance qui, de toute évidence, est réel, mais
correspond à une crise peut-être plus large que juste les députés, là, mais qui
englobe beaucoup l'éthique et la déontologie un peu partout dans le monde, là.
• (15 h 40) •
Mme Deschamps (Marie) : C'est
sûr qu'adopter une loi ne règle pas la solution si les gens l'ignorent,
premièrement, et, deuxièmement, ça ne couvre pas toutes les situations qui sont
susceptibles de soit de faire perdre la confiance du public, soit de la
rehausser.
Je pense qu'une des façons de rehausser la
confiance du public, c'est la transparence. Alors, puis on ne peut pas
s'attaquer à tous les aspects de la fonction du député, mais certainement le
fait qu'il y ait des diffusions de vos activités en comité, le fait qu'il y ait
des divulgations proactives, là, à défaut d'un meilleur mot, des communications
qui sont faites par les députés, des activités qu'il y a dans les bureaux des
membres de l'exécutif. Selon moi, la transparence est un des grands moyens qui
est à la disposition des députés...
Mme Deschamps (Marie) : ...l'exécutif
pour contribuer à rehausser la confiance dans l'institution parlementaire.
M. Lemieux : ...Alors,
j'ai quelques questions rapides pour vous parce qu'on arrive un petit peu au
bout et puis je voudrais quand même vous entendre sur des choses qu'on va
forcément considérer. La première, c'est ce registre dont parle la commissaire
dans son rapport qui permettrait à... et l'idée, justement, à cause de la
transparence, mais à cause la confiance du public qui dit un élu se fait élire
en disant : Moi, je connais ça, je vais aller vous régler ça. Mais rendu
au parlement, il connaît tellement ça qu'il a les deux mains et la langue liées
parce qu'il ne peut pas se prononcer sur certaines questions parce qu'il est en
conflit d'intérêts. La suggestion qui nous est proposée, c'est de dire, bien,
il pourrait déclarer sans conflit d'intérêts, participer aux conversations,
mais ne pas voter. Moi je trouve ça novateur et je trouve ça intéressant. Vous?
Mme Deschamps (Marie) : Je
pense que cette recommandation, qui a été faite par Mme Mignolet, avait
aussi été faite par son prédécesseur. Et j'avais trouvé que c'était assez
créatif parce que ça permet à quelqu'un d'apporter de l'information tout en ne
permettant pas que, s'il y a intérêts, ça fasse pencher la balance. Cependant,
je vois tout de même un risque de, je ne dirais pas d'influence indue, mais que
la voix de cette personne-là, qui a un intérêt, porte plus fort que quelqu'un
qui n'a pas d'intérêt. Alors c'est l'espèce de tension entre l'expérience,
l'apport objectif que la personne peut apporter et l'intérêt qui peut prendre
le second rang, même dans le cadre d'une discussion. Alors c'est, je pense, la
raison pour laquelle souvent dans les institutions, on ne permet même pas à la
personne de contribuer aux discussions. Même on va souvent demander à la
personne de se retirer de la salle pendant les discussions pour éviter ou pour
favoriser une plus libre discussion. Alors, pour répondre à votre question ou à
votre commentaire, oui, c'est très créatif, mais ça devrait être fait avec
beaucoup de prudence.
M. Lemieux : ...pas
toujours facile d'écrire ça dans une loi.
Mme Deschamps (Marie) : C'est
vrai.
M. Lemieux : Mais ça
montre aussi qu'il n'y a jamais de solution parfaite et que l'équilibre,
particulièrement en éthique, est à la base de tout. Dites-moi, pour protéger
les personnes qui communiquent des renseignements. Puis là, on ne parle pas de
vous, mais on parle de la commissaire, on parle de... on n'est pas dans le
lanceur d'alerte, mais quelqu'un qui n'est pas à l'aise de venir dévoiler des
choses par crainte de représailles. On est en 2023. On essaie de les protéger à
tous égards, lanceurs d'alertes, partout. Est-ce qu'on aurait besoin d'ajuster
le code à cet égard-là?
Mme Deschamps (Marie) : Je
ne peux pas dire que j'ai bien réfléchi à la question, mais quelqu'un qui se
rend chez la commissaire devrait être protégé. Son... Sa... La confidentialité
devrait être inhérente à la fonction de la commissaire, et on ne devrait pas
avoir besoin de ce mécanisme-là. Et si un tel mécanisme devait être créé, il
devrait être limité pour les cas où, je dirais, accidentellement, il y a un
élément qui a été rendu public, malgré toute la confidentialité et la prudence
qui entourait la communication avec la commissaire. Encore là...
M. Lemieux : Je vous
lis...
Des voix : ...
M. Lemieux : Ça va.
C'est bon. Merci beaucoup. Je vous lis recommandation 16 qui fait partie du
rapport qu'on est en train de considérer : Que le code soit modifié de
manière à ce que le commissaire puisse autoriser le député à partager... à
participer à un marché avec le gouvernement, un ministère ou un organisme
public, pourvu que l'importance de l'intérêt ou les circonstances entourant la
conclusion de ce marché ne permettent vraisemblablement pas la collusion ou
une...
M. Lemieux : ...influence
indue aux conditions que le commissaire fixe. Morale de l'histoire, Maître,
pensez-vous qu'il serait intéressant que la commissaire. J'aime mieux dire « la », dans les circonstances, là, même la... on dit
« le », que la commissaire ait plus
de marge de manœuvre afin de tenir compte des situations particulières des
élus?
Mme Deschamps (Marie) : Bien,
je n'avais pas lu cette recommandation-là comme voulant dire qu'elle était
limitée dans le type de circonstances. Si on pense à une plus longue
énumération, moi, je ne suis pas favorable aux longues énumérations de type
Code criminel. Je suis plus favorable à une utilisation d'un terme général qui
lui laisserait une grande marge de manœuvre, et une grande marge de manœuvre
pour lui permettre d'imposer les critères les plus stricts avant d'autoriser
la... un acte qui pourrait à première vue être susceptible de pas
nécessairement rehausser la confiance du public.
M. Lemieux : J'aurais pu vous
poser la même question au regard de la recommandation 17 : « Que le code soit modifié de
manière à accorder la discrétion au commissaire d'autoriser un marché entre une
entreprise privée dans laquelle un membre du Conseil exécutif détient un
intérêt et le gouvernement, un ministère ou un organisme public aux conditions
que le commissaire détermine. »
Mme Deschamps (Marie) : Aux
conditions que le commissaire détermine, je trouve ça assez... assez général,
parce que ça lui permet de tenir compte de toutes les circonstances qui peuvent
être pertinentes et aussi d'être suffisamment rigoureuses et restrictives pour
que la confiance du public soit protégée.
M. Lemieux : Voilà, on est
toujours dans la confiance du public, dans l'équilibre puis dans le gros bon
sens, même si on n'est pas des avocats, le gros bon sens a sa place, là.
Mme Deschamps (Marie) : Exactement.
M. Lemieux : Je termine en
vous demandant si vous faites partie de celles qui voient d'un bon œil que,
lorsque le... on vote, les députés votent au bleu, au salon bleu, pardon, sur
une résolution et une motion pour blâmer un député, entériner en quelque sorte
une sanction, qu'on le fasse seulement sur la sanction plutôt que sur le
rapport qui mène à cette sanction-là. Est-ce que, pour vous, ça fait une
différence ou c'est tout pareil? Pas en théorie, là, en pratique, parce que je
sais que ce n'est pas tout pareil.
Mme Deschamps (Marie) : Non,
non, non, c'est ça, mais, selon moi, un député ne peut pas faire abstraction
des circonstances. Alors, limiter ça à la sanction, c'est un petit peu miner la
responsabilité du député dans son vote.
M. Lemieux : Merci beaucoup,
Maître Deschamps. Je vous souhaite une bonne fin de journée et je vous laisse
aux bons soins des oppositions.
Le Président (M.
Bachand) :Merci beaucoup. M. le député de
Nelligan pour 18 minutes 22 secondes, s'il vous plaît.
M. Derraji : Merci, M. le
Président. Bonjour, Maître Deschamps, merci pour votre présence et les
clarifications. Je vais juste commencer par une première question avant d'aller
parler de votre rôle. Combien d'avis vous avez formulé, si je peux dire, les
deux dernières années ou bien si vous avez une idée sur la 42 ᵉ
législature?
Mme Deschamps (Marie) : J'ai
été nommé en avril 2023, donc ça ne fait pas très longtemps et j'ai été appelée
à donner des avis en vertu de la loi sur...en fait, du régime de protection
juridique, et j'ai été appelée à donner un avis verbal où j'ai été interpellée
de façon dont... je ne dirais pas, impromptue, mais j'ai été interpellée pour
donner un avis verbal, sommaire dans une circonstance où la personne n'était
pas en mesure de rejoindre la commissaire.
• (15 h 50) •
M. Derraji : Vous dites que
la personne n'était pas... Ça veut dire, là, on parle d'un élu.
Mme Deschamps (Marie) : On
parle d'un député.
M. Derraji : D'un député qui
n'était pas en mesure de rejoindre la Commissaire à l'éthique. Et...
Mme Deschamps (Marie) : Parce
qu'il y avait une situation d'urgence.
M. Derraji : O.K. Et du
moment qu'il y avait cette urgence, le député ou la députée vous a appelé pour
avoir un avis.
Mme Deschamps (Marie) : Exactement.
M. Derraji : O.K. Je lis le
rapport de la Commissaire à l'éthique et à la déontologie, page 34, et je
comprends que le rapport parle d'une ancienne période. Mais il disait : « En terminant, il faut préciser
que les services-conseils du jurisconsulte de l'Assemblée nationale ne sont
aujourd'hui presque...
M. Derraji : ...plus utilisé,
comme nous l'a indiqué ce dernier, mais on parle de quelqu'un qui était avant
vous, très peu d'avis ont été demandés au cours des deux dernières années. Mais
on s'entend, il faut lire le rapport dans son contexte. On ne parle pas de
vous, on ne parle pas de la dernière période.
Pourquoi il y a peu d'avis, selon vous?
Là, vous me dites que, quand même, depuis votre nomination, il y a quand
même... on vous a interpellée en situation d'urgence et il y avait un autre
avis que vous avez formulé. Et là, au niveau du rapport de la Commissaire à
l'éthique, on dit qu'il y a peu d'avis. Comment vous pouvez expliquer?
Mme Deschamps (Marie) : D'accord.
Il y a deux... il y a une nuance à établir. Quand je vous ai dit que j'ai
fourni des avis en vertu du régime de protection, ça appartient aux juristes en
vertu de la loi... au jurisconsulte, pardon, en vertu de la Loi sur l'Assemblée
nationale. Ce ne sont pas des avis qui relèvent du code de déontologie.
Pour l'autre situation d'urgence, c'était
vraiment très ponctuel et, en principe, et ça été confirmé par Me LeBel, qui m'a
précédée, compte tenu du fait que lorsqu'un député, ou une députée, je devrais
dire les deux, consulte le jurisconsulte, celui-ci, d'abord, invite la personne
à se diriger ou à s'adresser à la Commissaire à l'éthique.
Et cela s'explique par, selon moi, le fait
que la Commissaire à l'éthique a maintenant établi son autorité, elle a une
présence beaucoup plus grande que celle du jurisconsulte, elle est nommée en
priorité ou, je dirais, de façon très visible dans le code d'éthique. Alors, je
comprends que les députés vont s'adresser à elle en tout premier lieu.
M. Derraji : O.K., excellent.
Merci pour les clarifications. Je vais revenir à votre présentation pour parler
et clarifier le rôle que vous jouez à l'intérieur de l'institution, à l'intérieur
du Parlement. Vous avez dit, vous proposez... D'ailleurs, je veux juste
clarifier quelque chose. Vous êtes contre le statu quo, ça, on l'a bien
compris.
Mme Deschamps (Marie) : Oui.
Moi-même, je pense que, pour les députés, il faut qu'ils sachent... il faut
qu'il y ait un ordre, il faut que ce soit clair.
M. Derraji : Oui, c'est
excellent, donc il faut que ça soit clair, mais, qui dit clarification dit
aussi... Vous savez, je ne sais pas, si on va faire un sondage, si tout le
monde est au fait de votre rôle, exactement, je ne prétends rien, mais
pensez-vous que l'ensemble des personnes qui auront à vous poser... ou
contacter pour un avis, est-ce qu'elles savent où ils sachent... est-ce qu'ils
savent un peu le rôle que vous jouez ou que vous avez la possibilité de jouer?
Mme Deschamps (Marie) : Mon
rôle... Bien, si quelqu'un me consulte, c'est qu'il a entendu parler du
jurisconsulte et, s'il a cherché ma compétence, il s'est retrouvé dans le code
de déontologie... oui, dans le code de déontologie. Alors, dans le code de
déontologie, c'est clairement dit que le jurisconsulte peut donner des avis.
Alors, c'est sûr que le député peut savoir ça. Là où je dis qu'il y a un besoin
de clarification, c'est que la commissaire peut aussi donner des avis, alors le
député peut dire...
M. Derraji : Alors, oui, et
c'est là où je veux vous ramenez, c'est là où je veux ramener, c'est excellent.
Donc là, on se ramasse avec deux options, la Commissaire à l'éthique vous. Vous
deux, vous avez le droit de donner des avis. Là, on le voit très bien, qu'au
niveau de la page 34, ce que la commissaire à l'éthique et la déontologie
mentionne... «Considérant que l'avis du jurisconsulte ne lie pas le
commissaire, ce dernier pourrait conclure à un manquement au code dans un cas
où le jurisconsulte déduirait l'inverse. De plus, le jurisconsulte n'a pas
accès à la jurisprudence et aux interprétations du commissaire dans le cadre de
ses fonctions. Cette situation est préoccupante, tant du point de vue de la
prévisibilité, du droit, que de la crédibilité de ces deux institutions.»
J'aimerais bien savoir, est-ce que vous partagez tout ce qui a été dit ici,
c'est clair, et vous êtes à l'aise avec ce constat?
Mme Deschamps (Marie) : Je
suis...
Mme Deschamps (Marie) : ...je
suis d'accord que c'est un avantage immense d'avoir accès aux interprétations
antérieures de la commissaire et de son prédécesseur. Ceci dit, ça n'a pas
toujours été le cas. Pour ce qui est de la prévisibilité, c'est un avantage
parce qu'il y a une espèce de cohérence. Ça ne veut pas dire que le
jurisconsulte est complètement démuni, mais, tout de même, il y a un grand
avantage au fait que le député sache qu'il y a une cohérence dans les
interprétations.
M. Derraji : Et c'est
justement, c'est sur cette cohérence que vous avez... Vous avez beaucoup
insisté au début sur clarifier le rôle pour éviter la confusion.
Mme Deschamps (Marie) : Exactement.
M. Derraji : O.K. Si je vous
demande, dans un monde idéal, pour clarifier le rôle et éviter la confusion,
vous êtes d'accord, la porte d'entrée première pour le député doit être la
commissaire ou vous?
Mme Deschamps (Marie) : Oui,
la commissaire.
M. Derraji : La commissaire Dans
le cas où le député veut faire affaire avec vous et demandez un avis, avez-vous
un exemple pour justement éviter la confusion, avoir plus de prévisibilité, à
ne pas tomber dans... que comme ce qui a été dit, un avis et un avis qui dirait
l'inverse?
Mme Deschamps (Marie) : Il y
a différents mécanismes. Si, par exemple, les députés de l'Assemblée nationale
désiraient maintenir le chevauchement ou les voies parallèles, il pourrait y
avoir différents mécanismes qui pourraient être mis en place, mais il n'y a
aucun de ces mécanismes qui pourraient être... donner la même prévisibilité. Et
je pense, par exemple, à une possibilité de partage de jurisprudence sans que
ce soit un partage des opinions, parce que la confidentialité doit être
maintenue, mais un partage d'interprétation type qui pourrait être mis à la
disposition du jurisconsulte.
M. Derraji : Oui. Vous avez
beaucoup insisté sur le parcours, le parcours. Et, vous savez, au niveau de
l'Assemblée nationale, il y a toujours, toujours des nouveaux élus, tant mieux
parce que ça, c'est une très bonne chose pour le Parlement, je me mets dans la
place de quelqu'un qui vient d'arriver. Ce n'est pas facile naviguer à
l'intérieur de l'institution, déjà comprendre comment ça marche, le Parlement,
et les commissions parlementaires, et tout le reste, c'est beaucoup, beaucoup
de travail et ça prend du temps, par la suite naviguer avec la Commissaire à
l'éthique, naviguer avec l'ensemble des partenaires... moi, j'ai des
partenaires, c'est les... c'est des partenaires de l'institution qui nous
aident, qui aident les élus à bien faire leur travail. Quand vous parlez d'un
parcours, la commissaire a beaucoup insisté sur la formation obligatoire...
d'ailleurs, je tiens juste à le mentionner, que notre formation, que ce soit
les élus et même les employés du bureau de comté, c'est rendue obligatoire sur
la formation. Ce n'est pas une question de choix, c'est vraiment obligatoire,
mais, quand vous parlez d'un parcours, c'est quoi, le parcours idéal pour
éviter justement qu'un élu, après quelques mois, se ramasse à justement éviter
cette incohérence qu'on risque d'avoir? Je sais que la volonté c'est ne pas
avoir cette incohérence, mais c'est quoi, le parcours idéal, selon vous?
• (16 heures) •
Mme Deschamps (Marie) : Quand
vous parlez de parcours, je ne suis pas sûre que j'ai utilisé exactement cette
façon-là.
M. Derraji : Bien, vous avez
dit «clarté d'un parcours», vous avez dit «clarifier le rôle», «revoir le rôle
de jurisconsulte», «éviter la confusion» et vous avez dit que la première à
consulter, c'est la Commissaire à l'éthique.
Mme Deschamps (Marie) : Oui,
alors c'est... donc le...
M. Derraji : Mais maintenant
vous dans ce rôle...
Mme Deschamps (Marie) : Comment
je...
M. Derraji : Oui, je vais
juste... je vais terminer. Vous, à l'intérieur de ces services, comment on peut
dire que la jurisconsulte est nécessaire dans ce parcours? Si l'élu doit faire
affaire avec la Commissaire à l'éthique, vous venez de le mentionner, si c'est
fait avec la commissaire à l'éthique, votre rôle, vous voulez intervenir à quel
moment?
Mme Deschamps (Marie) : Je
voudrais qu'il soit clair que je ne propose pas, je présente des options à
votre commission. Je ne suis pas là pour défendre le rôle du jurisconsulte si
c'est votre choix de ne maintenir que la fonction de la commissaire...
16 h (version non révisée)
Mme Deschamps (Marie) : ...et
avec une large possibilité d'avoir recours à des commissaires ad hoc, ce sera
votre décision, et je n'ai rien à dire.
M. Derraji : Non, non, mais
vraiment, je ne suis pas là. Vraiment, ma question, ce n'est pas... Non, non,
non. Je vais clarifier. Me Deschamps, ma question ne vise pas ce que vous venez
de me dire. J'essaie juste de comprendre «clarifier le rôle». Parce que, comme
vous dites, «clarifier le rôle», je veux bien le comprendre aussi. Et je sais
que ça nous revient, si on veut maintenir telle ou telle chose, aller avec les
recommandations dans un projet de loi, amender un projet de loi, si jamais le
gouvernement veut aller de l'avant avec un projet de loi. J'essaie juste de
comprendre, parce que j'ai devant moi une recommandation de la commissaire, et
je n'essaie pas de vous faire dire des choses que vous ne voulez pas, que «les
parlementaires réfléchissent à l'opportunité de maintenir les services de
conseil en matière d'éthique et de déontologie du jurisconsulte.» C'est ça, la
recommandation que j'ai de la part de la commissaire.
Mme Deschamps (Marie) : Oui,
oui. Alors, la commissaire, en mots polis, elle vous dit : Abolissez la
fonction avis du jurisconsulte.
M. Derraji : Oui. C'est...
Vous faites l'interprétation comme ça, c'est votre droit. Moi, j'essaie de
comprendre le parcours. Vous avez dit que le statu quo n'est plus tenable,
clarifiez les rôles. Je reste convaincu, c'est pour cela que j'ai la chance de
vous avoir en face de moi, le rôle de la jurisconsulte, il était là depuis
plusieurs années, ça veut dire que ça répond à un besoin. Moi, c'est ce
besoin-là que je veux entendre aujourd'hui de votre part.
Mme Deschamps (Marie) : O.K.
Le besoin, il existait certainement avant 2011. Et c'était la fonction. Il n'y
avait pas de commissaire à l'éthique. Depuis 2011, il y a une espèce de
chevauchement qui est créé, qui, selon moi, n'est pas souhaitable. Alors, je
vous suggère que vous avez le choix entre... Je vous ai donné trois options, et
une des options, c'était d'abolir la fonction du jurisconsulte, comme la la
commissaire le dit poliment à la recommandation quatre, l'autre option, c'est
de maintenir le statu quo, qui n'est pas ce que je suggère, et une troisième
option, c'est de prévoir un rôle... Je ne suis pas sûre que l'expression
française décrit bien, mais subsidiaire, c'est-à-dire, on s'adresse d'abord à
la commissaire et, si, pour quelque raison, la commissaire a besoin d'un référé
au jurisconsulte ou souhaite un référé au jurisconsulte, c'est cette troisième
option où le jurisconsulte agit de façon subsidiaire, mais après que la
commissaire ait eu l'occasion de se prononcer. Et je vous soumets que c'est ce
qui correspond, c'est ce qui se rapproche le plus à... Au vécu depuis plusieurs
années.
M. Derraji : O.K. excellent.
Là, on avance. On va oublier l'option un, on va oublier l'option deux, on va se
concentrer sur l'option trois. Donc, vous voulez que la porte d'entrée soit la
commissaire à l'éthique. Et c'est... La commissaire à l'éthique est le juge
pertinent de référer la personne, pour quelque raison, à vous?
Mme Deschamps (Marie) : Exactement.
M. Derraji : Oui. Si on peut
dire, avez-vous une idée sur les quelques raisons, c'est quoi les raisons,
selon vous, où vous jugez pertinent que la commissaire vous réfère des
personnes?
Mme Deschamps (Marie) : O.K.
Il y a... La commissaire à l'éthique, on doit le noter, a la possibilité de
donner des... De nommer des commissaires ad hoc. Les circonstances sont
énumérées. Si la commissaire à l'éthique désire avoir une plus large marge de
manœuvre, elle pourrait vouloir simplement référer au jurisconsulte.
M. Derraji : O.K. Merci, Me
Deschamps, pour votre présence et les clarifications concernant votre rôle.
Merci. Très apprécié.
Mme Deschamps (Marie) : Ça me
fait plaisir.
Le Président (M.
Bachand) :Merci. M. le député d'Hochelaga-Maisonneuve,
pour autour de huit minutes.
M. Leduc : Merci, M. le
Président. Bonjour, bonjour.
Mme Deschamps (Marie) : Bonjour,
M. le député.
M. Leduc : Toujours content
de recevoir des témoins. D'abord, je ne sais pas si, vous, dans votre fonction
de jurisconsulte, vous avez quelque chose à dire par rapport à la suggestion de
Maître Mignolet, là, sur la question de la rémunération des élus, où est-ce qu'elle
souscrit à la recommandation, là, de la juge L'Heureux-Dubé, là, de son rapport
d'il y a quelques années, à savoir que ça devrait être un comité indépendant exécutoire.
Est-ce que vous avez, dans votre fonction de jurisconsulte, une opinion à ce
sujet...
Mme Deschamps (Marie) : ...oui,
je suis favorable à ce que ce soit une institution indépendante qui fixe la...
les conditions. Je suis sûrement influencée par mes précédentes fonctions comme
juge. Et je dois vous dire que ça été... ça a été une évolution positive qui a
favorisé le... d'abord l'indépendance, un aspect de l'indépendance des juges,
mais aussi le respect aussi de... des montants qui étaient fixés parce que ce
sont des tiers indépendants, il y a toutes sortes de représentants sur cette
commission-là, sur ce comité-là.
M. Leduc : Donc, idéalement,
si on avait à rouvrir cette loi-là dans un avenir proche ou moins proche, on
pourrait migrer vers un système vraiment indépendant, bon, dont les modalités
seraient à définir, vous seriez favorable à ça. O.K. Merci de votre...
Mme Deschamps (Marie) : Tout
à fait.
M. Leduc : ...de votre
clarification. J'aimerais vous entendre aussi sur le groupe qui vous a précédée
ce matin, là, de l'Université Laval, le professeur et son... et son adjoint,
son étudiant, sur la question de la dépolitisation des demandes d'enquête.
Est-ce que, dans votre fonction aussi, vous constatez... est-ce que vous faites
le même constat qu'eux, à savoir que, des fois, les élus, on peut, à juste
titre parfois ou même maladroitement, politiser les demandes d'enquête en
éthique?
Mme Deschamps (Marie) : Je
dois vous dire que je n'ai pas d'expérience là-dessus. Tout ce que j'en sais,
c'est ce que j'ai lu dans le rapport. Alors, je ne peux pas dire que ma
contribution serait très... que je peux... je ne peux pas apporter de... de
commentaire pertinent outre que ce que je lis... ce que j'ai lu. Donc, je suis
une observatrice de ce point de vue là.
M. Leduc : D'accord.
L'échange qu'on... Je ne sais pas si ça avez réussi à entendre l'échange qu'on
avait, là, avant le dîner, à savoir que, dans le fond, c'est... est-ce que
c'est les élus qui doivent demander les enquêtes à la commissaire. Des fois, on
le fait dans le cas d'un dossier politique, on le fait à travers une lettre, on
le fait à travers un tweet même des fois sur les réseaux sociaux. Est-ce que
c'est aux élus de faire ça? Est-ce que c'est aux élus de... vous avez eu un
échange tantôt, peut-être, de trancher ces choses-là à travers des votes? Donc,
ce que je comprends, c'est que, sur cet aspect-là, vous gardez une certaine
réserve?
Mme Deschamps (Marie) : C'est
aussi que je n'ai pas de... de commentaire pertinent à vous faire valoir.
M. Leduc : Je comprends.
Mme Deschamps (Marie) : Je ne
peux pas... Je ne connais pas assez le domaine, là, pour pouvoir avoir une
contribution aux travaux.
M. Leduc : Il y a des gens
qui suggèrent de... d'attacher, en quelque sorte, ou du moins de... d'élargir
la fonction de la commissaire avec une commission, hein, de la faire travailler
avec une commission. On fait référence des fois à une commission comme celle
qui se passe au Royaume-Uni, là, à la Chambre des communes là-bas, où est-ce
qu'il y a un nombre de députés, il y a un nombre de gens de la société civile
qui sont là aussi puis que c'est eux et elles qui doivent un peu trancher les
rapports pour sortir les élus de cette... de ce rôle-là, qui peuvent être...
qui peut être inconfortable parfois. Est-ce que c'est un chemin sur lequel on
doit s'engager?
Mme Deschamps (Marie) : Là,
vous parlez au niveau de l'approbation des rapports et de la... et des
sanctions.
M. Leduc : Exact.
• (16 h 10) •
Mme Deschamps (Marie) : Tout
ce qui peut apporter une perception de plus grande indépendance, selon moi,
c'est une voie qu'on doit sérieusement étudier, et dépolitiser l'approbation
des rapports, dépolitiser toute la question d'éthique est certainement
souhaitable.
M. Leduc : Puis est-ce qu'il
y a un chemin à privilégier plutôt qu'un autre dans cet objectif de
dépolitiser?
Mme Deschamps (Marie) : ...vous
me parlez du modèle des... du Royaume-Uni. Ils sont... sont souvent bien en
avant de plusieurs autres pays pour favoriser l'indépendance, là, j'ai
plusieurs exemples qui me viennent en mémoire, mais il y a certainement une
étude à faire des différents moyens qui sont utilisés, pas seulement au
Royaume-Uni, mais dans d'autres pays, pour s'assurer que toutes les questions
d'éthique ne soient pas manipulées à des fins politiques.
M. Leduc : Il me reste
quelques minutes. J'aime ça, des fois, offrir aux gens qui viennent nous voir
le temps pour voir s'il y a des aspects qu'on n'a pas abordés aujourd'hui puis
que vous aimeriez, vous, mettre au jeu pendant qu'on est tout ouïe.
Mme Deschamps (Marie) : Malheureusement,
j'étais en réunion...
Mme Deschamps (Marie) : ...je
n'ai pas eu l'occasion de vous écouter. Et puis j'ai fait ma préparation en
lisant les précédents débats sur le code, et en lisant le rapport... Mais donc
j'étais là ici pour répondre à vos questions. Ça me fait bien plaisir de
contribuer à vos travaux. Et, si vous avez d'autres questions à me poser, je
serai heureuse de revenir pour pouvoir répondre à vos questions.
M. Leduc : Donc, pas de point
varia pour vous aujourd'hui.
Mme Deschamps (Marie) : Non
merci...
M. Leduc : Ça marche
Mme Deschamps (Marie) : ...en
fait, non.
M. Leduc : Merci bien.
Mme Deschamps (Marie) : Alors,
merci de m'avoir offert cette possibilité-là.
M. Leduc : Ça me fait
plaisir.
Le Président (M.
Bachand) :Alors, Me Deschamps, merci
infiniment d'avoir été avec nous cet après-midi. Sur ce, la commission suspend
ses travaux quelques instants. Merci beaucoup encore.
(Suspension de la séance à 16 h 12)
(Reprise à 16 h 16)
Le Président (M.
Bachand) :À l'ordre, s'il vous plaît! La commission
reprend ses travaux. Alors, il me fait plaisir d'accueillir Me Jean-François
Routhier, Commissaire au lobbyisme du Québec. Merci beaucoup d'être avec nous
cet après-midi.
Alors, comme vous savez, vous avez 10
minutes de présentation. Alors, je vous cède la parole, peut-être, en débutant,
présenter les gens qui vous accompagnent. Merci beaucoup, M. le commissaire...
M. Routhier (Jean-François) : ...Merci,
M. le Président, Mmes et MM. les députés membres de la Commission des
institutions. Donc, j'occupe, depuis le 17 octobre 2017, la fonction
de Commissaire au lobbyisme du Québec, une autre personne désignée par
l'Assemblée nationale pour un mandat de cinq ans, qui a été renouvelé en avril
dernier. Et je suis accompagné, cet après-midi, par Mme Émilie Giguère, qui est
secrétaire générale et directrice des affaires institutionnelles et de
l'administration de Lobbyisme Québec, à ma droite, et Mme Isabelle Bélanger,
adjointe exécutive à la direction de notre institution.
Le commissaire et l'organisation que je
dirige, sous l'appellation Lobbyisme Québec, ont pour fonction d'assurer le
respect de la Loi sur la transparence et l'éthique en matière de lobbyisme et
du Code de déontologie des lobbyistes. Notre rôle : assurer la
surveillance, et le contrôle, et promouvoir la transparence et la saine
pratique des activités de lobbyisme exercées auprès des titulaires de charges
publiques, dont les députés, des institutions parlementaires, gouvernementales
et municipales.
En premier lieu, je vous remercie, évidemment,
de nous offrir l'opportunité de participer à vos travaux concernant le Rapport
sur la mise en oeuvre du code d'éthique et de déontologie des membres de
l'Assemblée nationale 2015-2019. Je vais me prononcer aujourd'hui sur certaines
des recommandations qui sont formulées dans le rapport de la commissaire à
l'éthique et je vais me limiter aux éléments de ce rapport pour lesquels nous
jugions pouvoir apporter un éclairage d'intérêt pour les travaux de votre
commission.
D'emblée, il m'apparaît important de
souligner à quel point le travail de votre commission sera important pour
permettre, tant à la commissaire Mignolet qu'à moi-même, d'atteindre les
objectifs légitimes de nos régimes d'encadrement, soit promouvoir et maintenir
la confiance des Québécois dans leurs institutions publiques, en faisant en
sorte que les meilleures pratiques d'intégrité soient appliquées dans les plus
hautes sphères décisionnelles et législatives de l'État. Car les citoyens du
Québec ont besoin que leurs élus et dirigeants montrent l'exemple et
s'astreignent aux standards les plus élevés en matière d'intégrité publique, de
transparence et d'éthique.
Nous souhaitons aborder, spécifiquement,
quatre des recommandations de la commissaire, soit les recommandations
n° 1, 9, 10.a et 15, en plus de vous informer sur certains aspects
complémentaires que nous avons jugés d'intérêt pour vos travaux.
La recommandation n° 1, soit
l'introduction d'une formation obligatoire en matière d'éthique pour l'ensemble
des élus assujettis, nous paraît essentielle et, possiblement, la plus
importante de ce rapport. Nous suggérons, considérant les liens évidents entre
les régimes administrés par la Commissaire à l'éthique et le régime
d'encadrement du lobbyisme dont je suis chargé, qu'une telle formation
comprenne l'ensemble des principaux aspects des deux régimes. Un rapport publié
en 2022 par l'Organisation de coopération et de développement économique,
l'OCDE, recommande d'ailleurs l'instauration d'un régime de formation visant
les multiples exigences éthiques et de transparence adoptées pour les élus et
autres titulaires de charges publiques au Québec. Ce rapport fait également
état de la nécessaire collaboration de tous les acteurs voués à la transparence
et à l'éthique au sein de l'État, pour en promouvoir les meilleures pratiques.
C'est pourquoi nous espérons que la commission appuiera la recommandation
n° 1 afin de rehausser le niveau de connaissance des membres de
l'Assemblée nationale et de leur personnel quant au rôle qu'ils ont à jouer dans
la préservation de l'intégrité publique et pour développer aussi leurs réflexes
face aux enjeux auxquels ils sont confrontés.
Concernant la recommandation n° 9,
portant sur l'application du régime de protection des lanceurs d'alerte aux
membres de l'Assemblée nationale, nous désirons souligner que le régime
québécois en matière de protection des lanceurs d'alerte, mis en place en 2016
par la Loi facilitant la divulgation d'actes répréhensibles à l'égard des
organismes publics, est certainement l'un des plus importants régimes de
protection adoptés par l'État au cours de la dernière décennie. Ce type de
protection est un élément central d'une saine démocratie, car il favorise la
divulgation d'actes jugés répréhensibles tout en protégeant ceux qui deviennent,
bien souvent, la seule source d'information pour aider les gardiens de
l'éthique, tels la commissaire à l'éthique ou, encore, le Protecteur du
citoyen, à accomplir leur mandat. Nous croyons donc qu'il est fondamental que
toutes les strates décisionnelles de l'État soient assujetties à un tel régime,
afin de préserver la confiance du public et de protéger adéquatement les
personnes qui dénoncent des actes répréhensibles au sein de l'appareil
étatique. Il nous apparaît donc essentiel que les élus et leur personnel soient
également assujettis à ce régime.
• (16 h 20) •
Concernant la recommandation n° 10.a,
qui vise le maintien de l'application du code d'éthique en période électorale,
nous croyons que le vide juridique créé par la dissolution de l'Assemblée
nationale lors du déclenchement d'une élection, qui entraîne aussi la perte de
statut de titulaires de charges publiques par les députés sortants, n'est pas
souhaitable...
M. Routhier (Jean-François) : ...conservant
le statut de titulaires de charge publique pendant la période électorale, nos
élus demeureraient en tout temps assujettis à des règles éthiques qui
renforcent la confiance des citoyens. Au surplus, ils continueraient également
de bénéficier de la protection que leur accorde notamment le code de
déontologie des lobbyistes dans le cadre des représentations d'intérêts dont
ils pourraient faire l'objet pendant la campagne électorale. Et ces
représentations demeureraient elles-mêmes transparentes par le maintien de
l'exigence de leur publication au Registre des lobbyistes, aujourd'hui appelé
Carrefour lobby Québec.
Je rappelle aux membres de cette
commission qu'en vertu du code de déontologie des lobbyistes, ceux-ci doivent
tenir compte de l'intérêt public, agir avec honnêteté et intégrité et éviter de
vous placer dans une situation où vous seriez amenés à contrevenir aux normes
éthiques qui vous sont applicables. Il nous semble, par conséquent, bénéfique
que les obligations imposées aux représentants d'intérêts par notre loi et par
son code de déontologie subsistent pendant une campagne électorale, cela
devenant un gage de transparence pour l'ensemble des parties prenantes.
Enfin, la recommandation numéro 15 porte
sur un enjeu d'interprétation qui s'avère plus technique et nous croyons que le
rapport de la commissaire exprime bien les effets involontaires du
chevauchement des obligations prévues aux deux paragraphes de son article 60.
Nous jugeons néanmoins important de clarifier que l'enjeu soulevé par la
commissaire est essentiellement dû à la rédaction même de l'article 60 et que
le risque de confusion avec les prescriptions de notre loi sur le lobbyisme est
faible, considérant que celle-ci n'est pas applicable dans la très grande
majorité des situations où un élu demeure titulaire d'une charge publique après
avoir quitté sa fonction de député. Nous avons tout de même cru opportun
d'apporter certaines clarifications dans notre mémoire concernant l'application
des règles d'après mandat prévues à la loi, en espérant qu'elles sauront donner
un éclairage suffisant aux membres de cette commission.
En ce qui concerne plus spécifiquement le
fondement de la recommandation de la Commissaire à l'éthique pour cette
recommandation numéro 15, nous jugeons effectivement que les obligations
combinées des deux paragraphes de l'article 60 engendrent des restrictions trop
importantes, alors qu'un élu continue d'œuvrer au sein et pour le compte de
l'État. Dans les faits et dans certaines circonstances, ces restrictions
deviennent quasi impossibles à mettre en œuvre et nous suggérons qu'une
réflexion soit effectuée pour clarifier l'application de ces dispositions au
bénéfice de toutes les parties prenantes.
La deuxième partie de notre mémoire traite
de deux points additionnels qui relèvent de liens importants entre le code
d'éthique et la Loi sur la transparence et l'éthique en matière de lobbyisme.
Le premier concerne l'absence de règles d'après mandat et de restrictions concernant
les activités de lobbyisme pour les députés sortants qui n'ont pas été membres
du Conseil exécutif. De telles obligations existent, notamment pour les élus
municipaux, mais notre loi n'en prévoit pas pour les députés de l'Assemblée
nationale n'ayant pas occupé de charge ministérielle. Plusieurs juridictions au
Canada prévoient de telles restrictions, et nous invitons donc les membres de
cette commission à considérer cet aspect dans les recommandations qui seront
formulées à la suite de vos travaux.
Le dernier point que je souhaite soulever
vise à rappeler aux membres de la commission qu'il existe un lien juridique
fondamental entre le code d'éthique et la Loi sur la transparence et l'éthique
en matière de lobbyisme. Alors que nous avons trop souvent déploré que notre
loi ne comporte pas d'obligation spécifique qui exige des titulaires de charge
publique qu'ils la mettent en œuvre, le code d'éthique des membres de
l'Assemblée nationale crée, à travers son article 61, une obligation non
équivoque pour les membres du Conseil exécutif ainsi que l'ensemble des
institutions dont ils sont responsables d'intervenir lorsqu'ils constatent une
contravention aux règles établies aux articles 59 et 60 du code d'éthique.
Concrètement, cela voudrait dire, par exemple, que le ministre des Finances
doit s'assurer que la direction et le personnel de la Caisse de dépôt et
placement du Québec et de Revenu Québec refusent de traiter avec une personne
agissant en contravention des articles 59 et 60 du code d'éthique ou encore que
le ministre de l'Économie, de l'Innovation et de l'Énergie s'assure de la même
chose pour Investissement Québec et Hydro-Québec, pour ne nommer que ceux-là.
Et, bien que ça peut paraître excessif que
chaque membre du Conseil exécutif assure personnellement le respect de ces
dispositions, malgré la rédaction de l'article, nous croyons que le
gouvernement pourrait exiger la mise en place de politiques qui permettraient
de respecter ces obligations, incluant la vérification des inscriptions au
Registre des lobbyistes et la dénonciation des manquements constatés en regard
de la loi que nous administrons. La désignation de répondants ministériels en
matière de lobbyisme nous apparaît la voie la plus appropriée pour concrétiser
les visées de telle politique, et même si cette désignation ne s'est pas encore
formellement concrétisée au palier gouvernemental, nous constatons qu'il y a un
intérêt...
M. Routhier (Jean-François) : ...notamment
par les grandes municipalités qui ont déjà emboîté le pas en nommant des
répondants en lobbyisme. Nous vous soumettons respectueusement que la
commission pourrait formuler une recommandation à cet égard au gouvernement.
Ceci complète donc mon allocution. Et je
vous assure, évidemment, de notre disponibilité pour répondre à toutes vos
questions.
Le Président (M.
Bachand) :Merci beaucoup, M. le
Commissaire. Mme la députée de Charlevoix-Côte-de-Beaupré, s'il vous plaît!
Mme Bourassa : Oui. Bonjour.
Bon après-midi.
M. Routhier (Jean-François) : Bonjour.
Mme Bourassa : Merci de vous
prêter à l'exercice.
Le Président (M.
Bachand) :...17 minutes, total, du côté
gouvernemental. Merci.
Mme Bourassa : Parfait. Donc,
je vais en laisser aussi pour mes collègues. Je veux juste savoir, quand vous
parlez des députés sortants qui ne sont pas soumis aux mêmes règles après leurs
mandats, que les ministres par exemple, vous vous dites : Il faudrait
peut-être que ça soit encadré. Est-ce que vous mettriez les mêmes règles,
justement, que les ministres considèrent qu'on n'a pas les mêmes... la même
influence et peut-être les mêmes contacts, les mêmes positions, qu'est-ce que
vous voyez comme restrictions?
M. Routhier (Jean-François) : Alors,
effectivement, il existe une certaine modulation des obligations, par exemple,
les directeurs de cabinet ont une période de restriction d'un an, alors que...
pardon, les membres de l'Exécutif ont une restriction de deux ans. Alors, on
pourrait peut-être penser à une modulation de même nature, comme il existe dans
d'autres juridictions comme je le mentionnais. Il y a d'autres juridictions au
Canada qui ont prévu ces types de règle d'après-mandat, par exemple, pour les
députés sortants. Je pense que le délai est une chose qui peut être discutée et
la nature aussi de l'interdiction.
Ce que nous, on a proposé... Dans la
réforme de la loi, on a fait différentes propositions pour réformer notre loi.
C'était aussi de donner au commissaire, en fait, un certain pouvoir
d'évaluation ou de dispense qui permettrait de regarder une situation dans
toute sa complexité et de prendre une décision pour ajuster à la baisse, par
exemple, des obligations qui deviendraient trop contraignantes.
Mme Bourassa : Donc, du cas
par cas.
M. Routhier (Jean-François) : C'est-à-dire,
je pense que ça prend une règle générale, disons, un an, mais par la suite,
dans certaines circonstances, il pourrait y avoir des aménagements ou encore
des permissions particulières qui pourraient être accordées selon certains
critères, toujours dans le bénéfice de l'intérêt public.
Mme Bourassa : Je vous
demanderais également des précisions concernant le déclenchement des élections.
Donc, vous avez dit que, puisqu'un député n'est plus législateur au moment de
la dissolution du Parlement, qu'on tombe candidat aux prochaines élections ou
simplement député sortant, qu'est-ce que vous aimeriez, au niveau de la loi,
qui change? Parce que si le statut change, en fait, il faudrait avoir accès
aussi, encore, à nos locaux de fonction. Comment on peut être encore député,
être soumis au Code d'éthique sans avoir les responsabilités, peut-être, les
privilèges qui viennent avec le fait d'être député?
M. Routhier (Jean-François) : Alors,
il existe... On n'a pas fait une étude complète, on est reparti essentiellement
de la recommandation de la Commissaire à l'éthique. Je pense qu'il y a une
réflexion à faire sur le statut, par exemple, des députés sortants. Évidemment,
les membres de l'Exécutif continuent d'être visés, et donc ce n'est pas les ministres,
par exemple, qui sont visés par cette disposition-là. Le simple fait de
maintenir un statut de titulaire de charge publique, ou encore, comme ça se
fait dans d'autres juridictions, de le redonner rétroactivement, c'est qu'on
est face à un député qui est un député sortant qui se représente et qui faisait
peut-être partie du gouvernement dans certaines circonstances. Évidemment, les
représentations d'intérêts, le lobbyisme qui peut se faire en campagne
électorale peut amener une certaine... un certain questionnement de la part des
citoyens. On pense que, dans la mesure où ces représentations-là, par exemple,
continueraient d'être transparentes, parce qu'obligatoirement inscrites au
registre des lobbyistes, on favoriserait la confiance des citoyens également.
• (16 h 30) •
Et on continue, comme je le mentionnais,
de protéger le député contre des... en fait, de favoriser des actes qui sont
bien accomplis par les lobbyistes en campagne électorale. Quant à l'ensemble,
évidemment, des conséquences, bien, il y a beaucoup d'éléments qui relèveraient
davantage d'une étude du côté de l'Assemblée nationale et du fonctionnement des
bureaux des députés. Nous, ce qu'on mentionne essentiellement, c'est que la
perte de ce statut de titulaire de charge publique fait en sorte qu'il y a un
vide juridique présentement et donc qu'il n'y a pas de protection. Il n'y a pas
non plus de transparence des activités de lobbyisme qui sont accomplies en
période électorale.
Mme Bourassa : Si on regarde
ça sous cet angle-là, est-ce que les candidats devraient également être soumis
à cette règle-là, ou, du moins, peut-être avoir de l'information? On parlait
tout à l'heure avec le DGEQ d'une formation de l'information qui pourrait être
transmise de cette manière-là.
M. Routhier (Jean-François) : Encore
là, il y a peut-être une distinction à faire entre quelqu'un qui était, à la
veille d'une élection, un titulaire de charge publique, et donc toutes les
activités lobbyistes qu'on faisait, auprès de cette personne-là, devaient être
publiques et rendues publiques...
16 h 30 (version non révisée)
M. Routhier (Jean-François) : ...et
une personne qui n'a jamais été titulaire d'une charge publique encore, tout ça
est une question de réflexion. Ce qu'on souligne, c'est que ce vide juridique
là n'est peut-être pas souhaitable, il ne semble pas souhaitable non plus du
point de vue de l'application du code d'éthique, et que donc, dans la mesure où
cette réflexion se fait par la commission sur la poursuite du statut de
titulaires de charges publiques. Évidemment, nous, on souhaiterait ça pour
pouvoir couvrir également la portion qui relève évidemment de la Loi sur la
transparence et l'éthique en matière de lobbyisme.
Mme Bourassa : J'ai une
dernière question, et elle est facile. Je pense que tout le monde s'entend pour
dire que la formation serait une bonne idée, qu'il faut mieux informer, mieux
outiller les élus face aux enjeux éthiques. Qu'est-ce que vous mettriez dans
cette formation-là puis quelle forme elle devrait prendre selon vous?
M. Routhier (Jean-François) : J'en
fais... Je partage les commentaires qui ont été déjà formulés que ces
formations sont généralement très, très, très utiles quand elles sont données
soit par caucus ou par groupe parlementaire, parce que ça permet d'avoir des
questions spécifiques et un débat un peu plus soutenu. Je pense que ces
formations-là devraient peut-être s'étaler. On sait que votre horaire et les
charges de députés sont énormes, et donc la commissaire prévoit, dans les six
mois, par exemple, de l'entrée en fonction. On aurait le même genre de
proposition à faire. Il y a déjà des formations qui sont données par l'Assemblée
nationale, malheureusement, l'assistance à ces formations-là n'est pas très
importante du côté des députés. Par contre, je dois souligner que, du côté
gouvernemental, du côté des cabinets politiques, il y a quand même une hausse
de l'intérêt pour la formation, et ils sont les premiers gardiens aussi, donc
ils ont cet intérêt, je pense, à protéger.
L'autre élément, c'est ce qui me semble le
plus important aussi, c'est la fonction de répondants. Parce que ces personnes
pourraient faire partie d'un réseau que nous allons former, que nous allons
tenir informé et qui pourrait répondre à des questions plus spécifiques en
cours de mandat.
Mme Bourassa : Merci.
M. Routhier (Jean-François) :
Fait plaisir.
Le Président (M.
Bachand) :Merci beaucoup. Mme la députée
d'Anjou Louis Riel.
Mme Boivin Roy : Merci
beaucoup. Merci à vous pour la présentation. Je comprends, là, de votre...
bien, de vos propos également de votre mémoire, que le commissaire au lobbyisme
a été interpellé à plusieurs reprises auprès des instances de l'Assemblée
nationale afin de formuler des avis en lien avec le code d'éthique en 2009, en
2016 et à nouveau aujourd'hui. Alors, merci d'être présent dans cet échange et
cette discussion.
J'aimerais revenir sur les commentaires de
ma collègue relativement aux règles d'après mandat et la recommandation 15
relativement aux députés non membres du Conseil exécutif. Vous parlez de
modulation des obligations. Évidemment, je comprends que vous vous inspirez des
meilleures pratiques dans le domaine, mais est-ce que vous tenez compte
également de la jurisprudence relativement aux clauses de non-concurrence? On
comprend, là, que les trois éléments qui sont regardés sont la nature de l'interdiction,
la distance et la durée. Alors, est-ce que vous êtes sensible à l'opinion des
tribunaux sur le sujet, qui, évidemment, est très élaboré puisque c'est un
sujet qui a fait couler beaucoup d'encre au cours des années puis, bien sûr,
les positions semblent avoir un effet d'entonnoir de plus en plus? Est-ce que c'est
quelque chose que vous considérez dans votre réflexion?
M. Routhier (Jean-François) : Alors,
j'espère bien comprendre votre question. Les clauses de non-concurrence sont
généralement appliquées lorsque, par exemple, un employé ou un associé va
quitter un cabinet pour une autre fonction. Et, oui, il y a eu des jugements
qui ont probablement déterminé que ces clauses étaient exorbitantes et
empêchaient la personne de faire son travail. Dans notre cas, évidemment,
considérant que les clauses... en fait, les règles d'après mandat sont
clairement établies dans une loi et que ces restrictions-là sont applicables...
En fait, je dirais, partout au Canada, il existe de telles clauses de
restriction d'après mandat. Et d'ailleurs, il faut bien comprendre que la
restriction n'est pas entière. La restriction, c'est d'accomplir directement
des activités de lobbyisme, ce qui n'empêche pas de se retrouver un emploi,
même dans un cabinet-conseil par ailleurs, si la personne ne fait pas elle-même
des activités de lobbyisme, si elle ne va pas rencontrer, par exemple, des élus
ou des titulaires de charges publiques.
Donc, à ce jour, on n'a pas été confronté
à une contestation des règles d'après mandat. Oui, certains députés m'ont déjà
fait part personnellement de leur mécontentement face à la durée, par exemple,
de deux ans. Ma réponse a été : Écoutez, deux ans, c'est deux ans au
Québec, c'est sept ans au fédéral. Alors, il faut aussi regarder les choses en
perspective...
M. Routhier (Jean-François) :
...en fonction des les autres juridictions.
Mme Boivin Roy : Vous
parlez également d'une année, possiblement, aussi, là.
M. Routhier
(Jean-François) : En ce qui concerne... Bien, de faire une distinction
entre un député sortant qui n'a jamais été membre du Conseil exécutif et les
ministres ou les membres du Conseil exécutif puisqu'ils n'ont pas eu accès
nécessairement à la même nature d'information. On pourrait même dire que les
députés membres du gouvernement pourraient avoir des exigences plus grandes du
gouvernement actuel, pourraient avoir des exigences plus grandes que les
députés de l'opposition. Ce sera peut-être à votre commission de faire des
recommandations là-dessus. C'est clair que nous, on réfléchit à ça dans le
cadre d'une éventuelle réforme de la loi.
Mme Boivin Roy : Très
bien. Donc, vous répondez à ma question sur le parallèle qui peut être fait à
certains niveaux. Vous nous parlez... En fait, vous souhaitiez apporter un
éclairage d'intérêt sur les recommandations 1, 10a et 15. J'aimerais quand
même vous entendre sur les recommandations 2 et 8, la création d'un
registre et également la mise en place de pénalités administratives.
M. Routhier
(Jean-François) : Ah! D'accord. Alors, bien, en ce qui concerne la
création d'un registre public, je vous dirais que de façon générale, je prône
toujours parce que c'est mon rôle, c'est le rôle de notre organisation, la transparence
la plus absolue. Et donc je comprends de la recommandation numéro 2 que ce
serait lorsque des restrictions ou lorsque des règles ont été établies à
l'égard d'un député de lui permettre de faire certaines choses, dans la mesure
où ces restrictions-là sont rendues publiques dans un registre public. Alors...
Et j'ai entendu évidemment tout à l'heure aussi un commentaire à l'effet qu'un
tel registre pourrait être mal perçu. Les registres sont généralement très mal
perçus au Québec. Je peux vous dire que le registre des lobbyistes est un de
ceux-là. Cela dit, oui, moi, j'approuverais évidemment ce type de... Parce que
je crois peu aux interdictions lorsque l'enjeu est un enjeu de transparence. Je
pourrais vous faire un parallèle avec, par exemple, la rémunération, par
exemple, des lobbyistes. Lorsqu'ils font des activités, on exige la
rémunération, et on leur interdit présentement de faire des activités de
lobbyisme un pourcentage selon le gain qui serait accompli. Alors que peut-être
qu'on devrait réfléchir à ça et dire : Bien, plutôt que d'interdire cette
action-là, on devrait divulguer le pourcentage. Ça va amener un éclairage
différent. En ce qui concerne la deuxième, la numéro 16, je crois...
Mme Boivin Roy : La
numéro 8.
M. Routhier (Jean-François) :
La numéro 8. Rappelez-moi, pardon.
Mme Boivin Roy : Sur les
pénalités. La mise en place de pénalités...
M. Routhier
(Jean-François) : Oui, les pénalités administratives. Voilà. Alors, ça
fait plusieurs années. En 2019, en fait, quand on a déposé notre énoncé de
principe, encore en 2022, quand l'OCDE a déposé son rapport, nous prônons un
changement radical d'orientation de la Loi sur la transparence et l'éthique en
matière de lobbyisme, qui devrait davantage être une loi axée sur les pénalités
ou sur les sanctions administratives. Parce qu'on est dans des délais, on est
dans du dépôt, de la fourniture d'information. Je pense que c'est à ça que la
commissaire fait référence en matière de sanctions administratives, pécuniaires
pour favoriser la conformité. Ces régimes-là ont démontré qu'ils avaient des
effets positifs. Et donc je soutiendrais également cette recommandation.
Mme Boivin Roy : Merci
beaucoup.
M. Routhier
(Jean-François) : Ça me fait plaisir.
Le Président (M. Bachand) :M. le député de Saint-Jean.
M. Lemieux : Pour quatre
minutes, si je comprends bien.
Le Président
(M. Bachand) :Exactement.
• (16 h 40) •
M. Lemieux : Voilà. On a
le même chronomètre. Me Routhier, c'est très clair. Merci beaucoup et merci
d'être là. Il reste quatre minutes. Alors, je vais me concentrer sur ce que
vous avez dit qui était le plus important, mais ce qui a pris le moins de temps
dans votre présentation, l'information. Et j'ai cru comprendre, corrigez-moi si
je me trompe, que vous avez un plan de deux pour un, là, pour nous autres, là,
avec la commissaire à l'éthique. Est-ce que vous avez déjà discuté de ce que ce
pourrait être? Pas dans le détail. On va leur dire ci, dire ça, mais sur l'idée
de travailler ensemble dans le cadre d'une formation qui se... qui
s'adresserait aux caucus des nouveaux élus et des anciens aussi, puisque dans
l'objectif d'une formation permanente, il y a quand même, surtout s'il y a des
changements au code, il y a des choses à revoir puis à corriger. C'est déjà
dans les cartons entre vous et la commissaire?
M. Routhier
(Jean-François) : Non. En fait, je... C'est-à-dire qu'on n'a pas
discuté spécifiquement de ça. C'est déjà arrivé à quelques reprises qu'on ait
été invités à donner des formations de façon conjointe. Et essentiellement on
ne peut pas tout regrouper à l'intérieur d'une seule formation, comme je le
disais. Par contre, il y a des sujets qui sont communs. D'une part, par
exemple, les règles d'après mandat, d'autre part, bon, en ce qui concerne, par
exemple, les dons ou autres avantages. Bien, il y a la contrepartie du côté
aussi lobbyiste qui ne peut inciter un titulaire de charge publique à
contrevenir à ses...
M. Routhier (Jean-François) : ...à
ces règles éthiques. Donc, il y a quand même plusieurs éléments
complémentaires, je dirais, entre nous. Et il y a eu, à travers le temps, d'une
collaboration qui a toujours été étroite entre le Commissaire à l'éthique et le
Commisaire au lobbyisme. Donc, c'est essentiellement aussi pour optimiser le
temps et les échanges avec les députés.
M. Lemieux : En parlant
d'optimiser le temps, il me reste deux minutes. Je vais vous donner le temps de
répondre à ma dernière question, de toute évidence. C'est sur la formation,
mais avec la commissaire à l'éthique, ce matin, on parlait des résultats de ces
offres de formation en ligne, depuis un peu plus d'un an, qui ne cassait pas
des briques, là, mais qui était quand même meilleure que la 42 ᵉ. Je me
suis abonné à votre page d'information infolettre patati patata que je reçois
maintenant, je ne dirais pas que vous êtes dans mes indésirables, mais vous
êtes un désirable souvent difficile à trouver dans le lot de tout ce qui rentre
dans nos boîtes, mais vous n'avez pas offert de formation, vous, aux députés,
comme ça, de la même façon que... avec le même genre de programme? En tout cas,
s'il y en a, c'est rentré dans mes désirables parce que je ne l'ai pas vu
passer. En avez-vous, de la formation continue pour les députés?
M. Routhier (Jean-François) : Alors,
oui, on a de la formation continue. En fait, d'abord et avant tout, tous les
cabinets, tous les partis politiques qui nous approchent pour organiser une
formation, on le fait. J'en donne d'ailleurs une demain spécifiquement à la
demande. Et on l'ajuste en fonction du temps qui nous est donné. Donc, du point
de vue des cabinets, du point de vue des partis politiques, chaque fois que
cette demande-là est faite, on a une offre, je dirais, sur mesure.
Maintenant, on a aussi plusieurs
formations à date fixe qui sont offertes à chaque année. On en a au moins
quatre qui sont offertes au grand public, aux titulaires de charges publiques
et aux lobbyistes. On a donné en fait plus de 70 formations au cours de la
dernière année. Donc, notre offre est... oui, ne fait peut-être pas partie du
lobbyscope, mais j'en prends note.
M. Lemieux : Merci. Merci
beaucoup.
Le Président (M.
Bachand) :Merci beaucoup. M. le député de
Nelligan, pour 12 minutes 45 secondes, s'il vous plaît.
M. Derraji : Merci, M. le
Président. Merci pour votre présence, rapport et analyses et aussi merci à...
tu sais, en lien avec votre disponibilité. Je sais que notre formation
politique a demandé une formation. Je l'ai mentionné au début, ça va... c'est
obligatoire pour les membres du personnel politique au sein de l'ensemble de...
gérer des cabinets de circonscription et même, je pense, au niveau de l'aile
parlementaire. Et donc, merci beaucoup pour vos services et surtout le contenu,
ça va nous aider beaucoup à bien faire votre travail.
Je vais aller directement, règles d'après
mandat, recommandation 15. Vous avez dit : « Le commissaire au lobbyisme appuie cette
recommandation, donc la recommandation 15, et formule certaines
observations additionnelles. »
Je vous ai entendu tout à l'heure parler de... ma collègue vous a posé cette
question. Et vous dites : « Le
commissaire au lobbyisme appuie donc la recommandation qu'un ancien membre du
Conseil exécutif puisse communiquer, intervenir auprès d'autres entités de
l'État, dans la mesure où il demeure un titulaire d'une charge publique, il
agit dans le cadre de ses fonctions; 3 : Il n'effectue aucune activité de
lobbyisme auprès de ces entités en dehors de ses fonctions. »
Et, quand vous avez lu cette
recommandation, et vous avez formulé certaines observations additionnelles,
pourquoi... où vous voulez en arriver? Je ne veux juste pas... au niveau de...
pratico-pratique au niveau de la fin de mandat, qu'est-ce qu'il vous... C'est
quoi, l'élément déclencheur qui vous a poussé à avoir ces certaines
observations additionnelles?
M. Routhier (Jean-François) : Alors,
bien, il y a vraiment deux choses distinctes ici. La recommandation
numéro 15 de la Commissaire à l'éthique est un enjeu technique d'interprétation
de son... de son article 60, qui fait en sorte, en fait, que le ministre,
je donne un exemple, le ministre de l'Environnement, en fait, était un député,
donc il était ministre de l'Environnement, quitte sa fonction de député, quitte
sa fonction de ministre de l'Environnement et devient sous-ministre de
l'Environnement le lendemain. Théoriquement, en vertu de l'article 60, il
est empêché de discuter avec les personnes avec qui il a eu des rapports
importants au cours de son mandat, dans l'année qui précède. Il est devenu le
sous-ministre de son propre ministère. Alors, on est face à une situation où ça
devient impossible d'appliquer les deux paragraphes de cet article-là. Et donc
ce que je mentionne à l'égard de la recommandation numéro 15, c'est que,
oui, je...
M. Routhier (Jean-François) : ...je
pense que ça mérite une clarification parce que, dans les faits, c'est presque
impossible d'appliquer ces paragraphes-là sans arriver à une conclusion qui est
incohérente. Par contre, ce que j'amène dans la seconde partie de notre
mémoire, c'est que ces articles 59 et 60 créent une obligation claire pour
les membres de l'exécutif de s'assurer que les infractions qui sont prévues ou
infraction, si vous voulez, ou les manquements qui sont prévus aux articles 59
et 60 doivent, s'ils sont constatés, être obligatoirement divulgués et ils
doivent prendre des actions pour empêcher justement. Et, quand on est dans
l'article 60 même...
M. Derraji : Empêcher quoi?
Désolé.
M. Routhier (Jean-François) : Bien,
en fait, je n'ai pas... Les articles ici, là, on parle à 59 d'agir pour le
compte d'autrui à l'égard de la même procédure. «Agir pour le compte d'autrui»,
l'interprétation qu'on en fait, c'est faire des activités de lobbyisme. Donc,
si quelqu'un fait des activités de lobbyisme, qu'on... à l'encontre de cet
article-là ou encore du deuxième paragraphe de l'article 60, le ministre
qui est au courant de cette contravention doit intervenir et doit empêcher
cette activité. Alors, c'est... Mais ce sont vraiment deux choses distinctes.
Là, je n'ai vraiment pas... Comme je vous disais, c'est assez technique comme
application, mais essentiellement c'est dans le cas où on est face à un
lobbyiste, donc une personne qui ferait des activités de lobbyisme et qui... ça
amènerait, ces activités-là, à une contravention à 59 ou 60. Alors, le ministre
responsable doit intervenir, et on dit ici : «...s'abstenir de traiter
avec cette personne dans le cadre d'une procédure», donc doit interdire qu'on
fasse affaire avec ce lobbyiste. Alors, ça crée une obligation qui est... qui
va au-delà, en fait, de ce que la Loi sur la transparence et l'éthique en
matière de lobbyisme édicte via le code d'éthique des députés.
M. Derraji : O.K. Merci.
Partie deux, je pense que c'est dans la même... le même contexte, vous
dites : «Observations et commentaires additionnels du commissaire au
lobbyisme.
«Concernant l'absence de restriction
d'après-mandat pour les députés non-membres du Conseil exécutif.»
Vous dites : «Le code ne contient
aucune restriction d'après-mandat pour les députés non-membres du Conseil
exécutif alors qu'elle en prévoit pour un maire, un président d'arrondissement,
un préfet, un président du conseil d'une communauté métropolitaine ou un membre
du comité exécutif d'une municipalité ou une communauté»... En fait, ça
s'applique partout. Pour plusieurs paliers, vous mentionnez le palier
municipal, mais il y a aussi des règles qui existent ailleurs au Canada pour
les députés sortants, et vous mentionnez plusieurs autres provinces. Pourquoi,
selon vous, c'est important d'élargir aussi aux députés non membres du Conseil
exécutif? Là, vous parlez, partie gouvernementale ou bien vous ciblez tout le
monde, tous les élus?
• (16 h 50) •
M. Routhier (Jean-François) : Ah!
Donc, en fait, présentement, ce qu'on cible, c'est l'ensemble des députés par
cette recommandation d'y réfléchir. Parce qu'une personne qui a siégé à
l'Assemblée nationale et qui devient au lendemain, en fait, lobbyiste, par
exemple, au sein d'une organisation qui fait des activités de lobbyiste, ça
peut miner la confiance du public, ça peut amener un questionnement du public à
l'égard des liens privilégiés que ce député pourrait avoir, même s'il n'a pas
été au pouvoir. Cela dit, cette obligation-là devrait fort probablement être
modulée en fonction, justement, du fait que la personne était peut-être au
gouvernement ou encore dans une opposition. Mais reste qu'il existe... Nous, on
tend toujours à faire valoir les meilleures règles d'éthique pour l'ensemble
des élus, et donc on pense que cette obligation pourrait s'étendre à l'ensemble
des élus. Si c'est valable pour les maires et les conseillers municipaux,
peut-être que c'est valable également pour les députés.
M. Derraji : Mais j'essaie
juste de voir... Parce que je comprends où vous voulez en arriver, mais comment
un député qui n'était pas membre du conseil exécutif ou même député de
l'opposition vous le mettez au même niveau d'information pour ne pas exercer
une activité de lobbyisme?
M. Routhier (Jean-François) : C'est-à-dire
que je ne le mets pas au même niveau d'information. Ce que je mentionnais,
c'est que, dans cette réflexion-là, il devrait y avoir une modulation quant à
l'étendue des obligations ou des restrictions et la durée d'une telle
restriction en fonction...
M. Routhier (Jean-François) : ...potentiellement
du fait que la personne était au parti gouvernemental ou dans une opposition.
M. Derraji : Oui. Et là vous
le considérez dans une durée, genre, si on élargit pour les députés non membres
du conseil exécutif, donc ça veut dire l'ensemble de la députation, en fait,
tous les députés qui n'étaient pas ministres, peu importe le titre du député.
Dans les autres provinces, parce que, désolé, je ne suis pas au courant de ce
qui se fait ailleurs, dans les autres provinces, est-ce qu'il y a un délai pour
qu'ils puissent, si jamais ils le veulent, ils le souhaitent, exercer d'autres
activités de lobbyisme? Est-ce qu'il y a un délai ou...
M. Routhier (Jean-François) : Il
y a toujours des délais à ces restrictions, il y a toujours des... et elles
peuvent varier d'une juridiction à l'autre. Je vous donnais l'exemple tout à
l'heure du fédéral qui est... dont les délais sont beaucoup plus élevés qu'au
Québec. Ou encore même au Québec, un membre de l'exécutif va avoir une
restriction de deux ans alors qu'un directeur de cabinet va avoir un an. Mais
donc ces délais-là peuvent être modulés, ils peuvent être modulables également.
Et ce qu'on propose, nous, dans une réforme de la loi, c'est que le commissaire
ait aussi un pouvoir de dispense, en tout ou en partie, en fonction de
l'intérêt public et de certains critères, pour justement amener une modulation
supplémentaire lorsque les circonstances le justifient.
M. Derraji : O.K. Donc, si on
comprend vraiment votre analyse, c'est vous suggérez aux membres de la
commission de suivre un peu ce qui se fait ailleurs dans les autres provinces
et qu'il y ait une modulation, on se comprend, le ministre, deux ans, les chefs
de cabinet des ministres, un an. Donc, selon vous, ça ne peut pas être en bas
d'un an, minimum un an comme les autres chefs de...
M. Routhier (Jean-François) : Je
n'ai pas fait de recommandation quant à la durée prévue.
M. Derraji : O.K. Un peu plus
loin, vous mentionnez que... Oui, vous parlez beaucoup de l'imputabilité des
institutions publiques à l'égard de la mise en oeuvre et vous dites :
«Dans le respect des valeurs véhiculées par le code d'éthique, nous suggérons
respectueusement que la meilleure façon de satisfaire à cette responsabilité
impérative serait d'exiger que tous les ministères, organismes et autres
institutions parlementaires et gouvernementales, que l'ensemble des cabinets
adoptent une politique claire et mettent en place des mesures de gouvernance
interne permettant de se conformer à cette obligation». C'est la page 9.
O.K. Pouvez-vous juste élaborer un peu?
M. Routhier (Jean-François) : Bien,
essentiellement, ce que je mentionne à l'article... en fait, dans cette
section, c'est que les obligations qui sont imposées aux membres de l'exécutif
en vertu de cet article 60 sont exorbitantes. On ne peut pas demander à un
ministre de s'assurer que tous les employés d'Hydro-Québec et d'Investissement
Québec suivent ces règles-là et que, dès lors qu'il serait informé d'un
manquement, qu'il agisse personnellement comme ministre. Alors, ce qu'on
propose, nous, c'est que ce soit des règles de gouvernance et des politiques
qui soient établies au sein des institutions pour s'assurer qu'il y a un suivi,
pour s'assurer notamment qu'il y a des répondants. Et il y en a plusieurs
ministères qui ont déjà adopté ce type de politique et même désigné des
répondants. On a des répondants aussi qui sont nommés au niveau municipal dans
les cinq plus grandes villes du Québec. Alors, ce qu'on propose plutôt, c'est
un accompagnement à l'interne, mais des politiques claires qui disent qu'est-ce
qu'on fait lorsqu'il y a des activités de lobbyistes et qu'est-ce qu'on fait
lorsqu'on constate une contravention au code d'éthique tel que prévu à cet
article.
M. Derraji : O.K.
Le Président (M.
Bachand) :...
M. Derraji : ...
Le Président (M.
Bachand) :...
M. Derraji : O.K. Je n'ai pas
eu l'occasion de vous poser la question sur les formations obligatoires. Je
l'ai mentionné, quand un député arrive, il y a tellement de choses à apprendre
et, tant mieux, il y a un renouvellement de la classe politique. C'est excellent.
Et dans un parcours idéal, vous, à la lumière de ce que vous avez entendu,
aussi les recommandations de la commissaire, obligatoire la première année, les
premiers mois, qu'est-ce que vous en pensez?
M. Routhier (Jean-François) : Je
vous dirais que, pour plein de raisons, obligatoire dans les premiers mois du
mandat, parce que parmi les premières choses qu'un député va apprendre en
arrivant à l'Assemblée nationale, c'est que plusieurs représentants d'intérêts
vont tenter de le convaincre de prendre des décisions et que la Loi sur la
transparence et l'éthique en matière de lobbyisme va s'appliquer.
M. Derraji : Oui, c'est
excellent. Merci beaucoup.
Le Président (M.
Bachand) :Merci. M. le député
d'Hochelaga-Maisonneuve pour 4 min 15 s.
M. Leduc : Merci. Bonjour,
M. Routhier. Bonjour, monsieur.... les gens qui vous accompagnent.
C'est vrai que c'est un choc la première
fois qu'on se fait approcher par des lobbyistes quand on devient un élu. Ça
m'est arrivé dans le précédent mandat.
Vous parlez des lanceurs d'alerte.
M. Routhier (Jean-François) : Oui.
M. Leduc : Pouvez-vous nous
expliquer un peu votre position à ce niveau-là?
M. Routhier (Jean-François) : Essentiellement,
ma proposition est de suivre la recommandation de la Commissaire à l'éthique,
que les membres...
M. Routhier (Jean-François) : ...
de l'Assemblée nationale soit également assujetti, ou c'est-à-dire que les
personnes qui souhaitent divulguer des actes répréhensibles soient également
protégées au sein de l'institution qu'est l'Assemblée nationale, comme elles
sont protégées dans le reste de l'État. Je propose essentiellement de mettre en
œuvre la recommandation de la commissaire, puisque ces personnes ont un apport
important, évidemment, dans les enquêtes, et, bien souvent particulièrement
chez nous, si on n'a pas de divulgation, si on n'a pas de dénonciation, on a
aucune façon de savoir s'il y a des manquements qui ont été commis. Et donc que
les personnes qui dénoncent ces situations-là aient le même régime de
protection que dans l'ensemble de l'État, même si ces actes ou ces... ont été
commis à l'Assemblée nationale ou à l'intérieur d'un cabinet, par exemple, de
l'Assemblée nationale.
M. Leduc : Ça nécessiterait
une ouverture de la loi, révision de la loi?
M. Routhier (Jean-François) : Honnêtement,
je ne sais pas dans quelle mesure. Je crois que, par l'entremise d'une
modification du code de déontologie, ce serait possible d'assujettir, mais je
pense qu'il y a aussi une réflexion sur la loi, l'actuelle loi concernant la
divulgation d'actes répréhensibles, et que, donc, dans cette modification-là,
si elle devait avoir lieu, que ce changement pourrait être apporté.
M. Leduc : On a parlé
beaucoup de formation, vous en parlez aussi, vous dites qu'il devrait y avoir
un volet sur le lobbyisme, là, d'intégré. J'ai manqué le bout... est-ce que
vous considérez, vous aussi, que ça devrait être obligatoire, cette
formation-là?
M. Routhier (Jean-François) : Absolument,
M. Leduc : ...obligatoire à
l'intérieur de la formation obligatoire?
M. Routhier (Jean-François) : Bien,
en fait, je souhaitais partager la formation, notamment avec la Commissaire à
l'éthique, parce qu'il y a beaucoup de sujets qui sont communs, qui sont conjoints
et qu'on travaille beaucoup ensemble sur différents sujets. Évidemment, on a
chacun aussi notre réseau, mais ça me paraît tout aussi important que les
députés soient au courant des obligations ou des règles entourant le lobbyisme,
également.
M. Leduc : Donc, ça pourrait
être une formation conjointe, éventuellement.
M. Routhier (Jean-François) : Ça
pourrait être une formation conjointe, dans la mesure où les députés ont ce
souhait et le temps de le faire.
M. Leduc : Ah! mais là,
au-delà du souhait, si vous dites que c'est... si c'est obligatoire, qu'on le
souhaite ou pas, il faudrait y passer, mais je pense que ça serait bénéfique de
toute façon. Combien de temps il me reste, M. le Président?
Le Président (M.
Bachand) :Une minute.
M. Leduc : Est-ce qu'il y a
un aspect, M. Routhier, que vous auriez voulu aborder avec la minute qui nous
reste, qu'on n'a pas eu le temps de parler, dans votre rapport?
M. Routhier (Jean-François) : Bien,
essentiellement, vous remercier, parce que c'est un privilège pour nous, comme
personnes désignées aussi, de pouvoir s'adresser à vous en commission. Ce n'est
pas une occasion qui nous est présentée souvent... Et vous assurer que nous
sommes là, comme comme des gardiens, en fait, et des institutions qui
souhaitent la transparence, qui souhaitent l'éthique et renforcer la confiance
des citoyens envers les institutions. Donc, n'hésitez pas à faire appel à nous
si vous avez besoin de nous.
Le Président (M.
Bachand) :Merci beaucoup, M. le
commissaire. Merci infiniment d'avoir été avec nous cet après-midi. Sur ce, je
suspends les travaux quelques instants. Merci.
(Suspension de la séance à 16 h 59)
17 h (version non révisée)
(Reprise à 17 h 03)
Le Président (M.
Bachand) :À l'ordre, s'il vous plaît! La
commission reprend ses travaux. Il me fait plaisir d'accueillir Mme Martineau,
professeure d'éthique organisationnelle aux HEC de Montréal. Alors, encore une
fois, merci d'être avec nous. Alors, vous connaissez les règles, un petit 10 minutes
de présentation, après ça, on aura une période d'échange avec les membres de la
commission. Donc, la parole est à vous.
(Visioconférence)
Mme Martineau (Joé T.) : Merci
beaucoup. Donc, d'emblée, j'aimerais remercier la Commission des institutions
de m'avoir invitée à partager avec vous mes observations sur le rapport de la
mise en œuvre du code d'éthique et de déontologie des membres de l'Assemblée
nationale pour les années 2015-2019.
Déjà, j'aimerais souligner l'importance du
travail du commissaire à l'éthique et à la déontologie et de son équipe et
les... évidemment, les efforts majeurs, là, qui ont été mis dans ce rapport et
les réflexions vraiment pertinentes qui sont transmises dans le rapport. J'ai
trouvé qu'il y avait un niveau de réflexion qui était extrêmement intéressant.
J'ai trouvé le rapport, qu'il était clair et qu'il donnait une compréhension
détaillée du rôle qui est joué par le commissaire, mais aussi de l'utilisation
du code d'éthique et de déontologie, mais aussi que le rapport va au-delà d'une
description, finalement, de ce qui s'est passé dans les années 2015 à
2019, mais aussi des enjeux et du futur, finalement, là, comment entrevoir la
suite et le travail sur... Pour faire évoluer à la fois l'institution du
commissaire à l'éthique, mais aussi le code d'éthique et de déontologie des
membres de l'Assemblée nationale.
Je dirais que, de façon générale,
évidemment, l'éthique et la déontologie à l'Assemblée nationale se sont
développées récemment. On pourrait dire que ça fait quand même déjà 12 ans,
13 ans maintenant, donc depuis 2010, c'est ce que j'ai compris à travers
le rapport, et donc ça fait 12 ans, mais, 12 ans, c'est quand même assez
récent, là, dans notre histoire, et donc c'est une institution qui est quand
même récente et qui est en développement. Donc, on le voit bien dans le
rapport, qu'il y a du travail énorme qui a été fait dans la dernière décennie,
mais qu'il reste du travail à faire pour vraiment institutionnaliser les
pratiques en matière d'éthique et de déontologie auprès des membres de l'Assemblée
nationale, mais aussi d'aller vers cette transformation culturelle à laquelle
la commissaire nous invite dans la conclusion du rapport, c'est-à-dire de
transformer, finalement, d'infuser peut-être, je dirais, la l'éthique dans la
culture de travail des députés, ce qui reste encore à faire, selon la lecture
du rapport.
Bien, ça m'a interpelée, cette
transformation culturelle. Parce que je dirais que ce n'est pas la
transformation culturelle des organisations et des institutions afin de mieux
intégrer ce souci d'éthique et de favoriser un réflexe éthique de la part des
députés, mais que ce soit dans d'autres types d'organisations aussi, là. Des entreprises
privées, des organisations publiques, des organisations, des institutions
gouvernementales, elles font toutes face à cette transition culturelle d'intégration
d'un plus grand souci d'éthique et de transformation des...
Mme Martineau (Joé T.) : ...pratiques
et du travail, finalement, pour s'assurer que, finalement, l'éthique, elle
est... devient un réflexe. C'est ce qui guide le travail dans tous ses aspects
et non pas seulement dans une perspective un peu légaliste, déontologique
seulement, c'est-à-dire surveiller et contrôler le travail, mais aussi
inspirante en matière d'éthique, c'est-à-dire l'éthique, oui, il y a cet aspect
contrôle qui est souvent lié à la déontologie, mais la perspective sur
l'éthique, elle nous amène à davantage réfléchir sur ce qui est la nature même
et l'essence même de la mission et... de la mission, que ce soit dans une
institution publique ou dans des entreprises privées, dans lesquelles
j'interviens aussi.
Donc, cette transformation culturelle,
elle a été... elle est rendue complètement nécessaire depuis deux... je dirais,
deux décennies qui ont été marquées, tant dans les entreprises privées que dans
les organisations publiques ou les institutions gouvernementales, par
différentes problématiques. On a eu des scandales, corruption, collusion. On a
eu aussi des enjeux dans les entreprises privées de fraude, etc. Donc, cette
transformation, elle est... elle est cruciale et elle est... on ne peut y
échapper, c'est-à-dire que toutes les institutions et les organisations doivent
y faire face et donc ont ce même souci de mieux intégrer l'éthique et la
déontologie, notamment dans ses pratiques. Et c'est tout à fait, donc,
d'actualité et ça nécessite qu'on y mette vraiment les efforts afin de
favoriser la confiance du public, notamment dans les institutions québécoises.
Donc, je me permets, d'une part, dans mon
intervention, de souligner tout le travail accompli depuis 2010 par les deux
commissaires, mais aussi de souligner, de mettre en lumière aussi ce qui reste
à faire, à continuer d'améliorer cette institution qu'est celle du commissaire
à l'éthique et aussi du code de... d'éthique et de déontologie de l'Assemblée
nationale.
Donc, voici quelques observations ou
points cruciaux sur lesquels je crois qu'il va falloir réellement travailler.
Premièrement, bien, évidemment, je ne peux que déplorer que les recommandations
du rapport de 2015, notamment celles... les 12 sur lesquelles les membres de la
commission étaient... sont tombés d'accord et avaient recommandé n'aient pas
été appliquées depuis... depuis ces années et donc qu'il y ait encore des
recommandations qui manquent... qui n'ont pas été appliquées, notamment aussi
sur la commission d'enquête sur l'octroi et la gestion des contrats publics
dans l'industrie de la construction. Donc, on se dit... on peut... on ne peut
que déplorer que ces recommandations n'aient pas été suivies et mises en place.
Donc, j'enjoins vraiment la commission et
l'Assemblée nationale à faire suite au rapport présent, celui qui nous est
soumis, le 2015-2019, afin qu'il ne soit pas tabletté, mais qu'on prenne
vraiment connaissance et qu'on prenne ces recommandations comme des
recommandations qui sont extrêmement importantes pour favoriser la confiance du
public, et on n'est pas en surplus... J'interviens souvent sur le sujet de la
confiance des organisations et des institutions, et on ne peut pas dire qu'on
est en surplus de confiance dans... dans notre société, dans les organisations
de façon générale. Donc, pour générer cette confiance-là, il est très important
de s'assurer à la fois d'une transparence, mais aussi du suivi des
recommandations.
• (17 h 10) •
Évidemment, il est noté dans le code...
dans le rapport, mais aussi, pour moi, ça me saute aux yeux, un code d'éthique
qui n'a pas été révisé depuis 10 ans, c'est beaucoup trop long. Donc, on
recommande la révision quand même assez régulière d'un code d'éthique ou de...
code de déontologie. Et évidemment, en 10 ans, il s'est passé un nombre de
choses dans notre société, dans le travail des parlementaires, dans le travail
des députés, qui évolue, mais aussi qui est soumis à d'énormes pressions et à
un impératif de transparence qui était peut-être moins présent il y a déjà
encore 10 ans. Donc, je crois qu'il va falloir s'atteler à la révision de ce
code d'éthique afin d'y intégrer notamment les recommandations qui sont... qui
sont soulignées par la commissaire.
La recommandation première du rapport qui
vise à intégrer dans le code, donc, une obligation de formation en éthique et
déontologie pour les membres de l'Assemblée nationale me paraît cruciale,
extrêmement importante pour la suite. On voit le nombre quand même un peu
famélique d'élus qui ont été formés depuis les 10 dernières années, du moins
depuis l'établissement du code d'éthique, est quand même assez... ce sont des
chiffres qui sont... qui sont très, très faibles. Et donc, pour ma part,
c'est... je trouve, cet aspect est un peu inquiétant. On s'attendrait à ce que
tous les élus soient formés rapidement après leur élection, après leur
assermentation, en matière...
Mme Martineau (Joé T.) : ...d'éthique
et de déontologie. Cette formation permettrait déjà de mieux sensibiliser et de
mieux faire connaître la fonction d'éthique et déontologie du commissaire, à la
fois les aspects déontologiques, mais aussi les aspects d'éthique, qui sont
tellement importants à souligner, les valeurs qui sont au cœur même du travail
des députés. Elle pourrait davantage sensibiliser sur les règles liées aux dons
et aux avantages, ce qui semble être un enjeu, là, souligné dans le rapport, et
aussi sur l'utilisation responsable des budgets et les allocations qui sont
alloués aux députés. Donc, tout ça pourrait être vu dès le départ, dans cette
formation, et donc, pour moi, c'est une recommandation qui est majeure.
Ensuite, la recommandation sept, dans le
rapport, qui vise à ce que le code soit modifié de manière à ce que l'Assemblée
nationale ne soit appelée à se prononcer que sur la recommandation de sanction
et non pas sur l'évaluation éthique et déontologique qui a été faite par le
commissaire et son équipe, m'a particulièrement interpelée. En fait, pour moi,
cette recommandation me paraît être le symptôme d'une difficulté, par la
commissaire, à bien jouer son rôle de façon indépendante et touche donc un enjeu
important de pouvoir et de légitimité de l'institution. Si, à chaque fois
qu'une recommandation est discutée par l'Assemblée nationale, et ça, quand on
renverse les recommandations... bien, là, ce que j'ai compris, c'est qu'on
renverse parfois l'évaluation même qui a été faite de la situation, on
décrédibilise et on délégitimise l'institution même de la... de Commissaire à
l'éthique et à la déontologie. Et, pour moi, c'est un enjeu important, puisque
cette institution en vient à jouer seulement un rôle symbolique, seulement, ce
qui peut diminuer grandement, là, pour moi, la confiance du public dans les
institutions parlementaires, et donc c'est très important. Je trouve que cette
recommandation, elle est importante, c'est-à-dire, je comprends que l'Assemblée
nationale peut avoir une prérogative sur la sanction, à évaluer la sanction,
mais pas l'évaluation éthique du dossier qui a été faite suite à une enquête.
Finalement...
Le Président (M.
Bachand) :Merci, Mme Martineau. On
est déjà rendu à la période d'échange, désolé. Alors, Mme la députée de
Charlevoix-Côte-de-Beaupré, s'il vous plaît.
Mme Bourassa : Bien, je
vais rebondir, en fait... Bonjour, bonjour. Enchantée.
Mme Martineau (Joé T.) : Bonjour.
Mme Bourassa : Je vais
rebondir sur ce que vous venez juste de dire. Parce que, oui, le fait que la
commissaire a évoqué que les élus devraient seulement se prononcer sur les
sanctions proposées, mais ça ne donne pas trop de pouvoir à une seule personne,
justement, parce que la commissaire n'est pas non plus à l'abri soit d'une
mésinformation ou je ne sais pas. Le fait qu'il y ait d'autres personnes qui se
prononcent sur des enjeux aussi importants que celui de l'éthique... Vous ne
trouvez pas que c'est donner beaucoup de pouvoir à une seule personne, si ce
n'est pas débattu ou étudié en Chambre?
Mme Martineau (Joé T.) : Bien,
c'est-à-dire que, bon, premièrement, la commissaire à l'éthique travaille
sûrement... Oui, elle fait une évaluation. Si vous l'avez mise en place, si les
gens l'ont choisie pour sa compétence, il faut faire confiance à la compétence.
Et il faut aussi faire confiance à l'indépendance d'une personne neutre pour
évaluer les questions d'éthique et de déontologie. Mais si, à chaque fois qu'on
fait... bien, donc j'imagine que vous mettez pas mal de ressources là-dedans,
puis que cette personne, la commissaire, doit mettre beaucoup de ressources et
de temps et d'énergie avec son équipe, à faire des enquêtes, à faire des
évaluations de situation, etc., et si, à la fin de cette évaluation, bien,
l'Assemblée nationale rejette, finalement, l'évaluation même, c'est qu'on
rejette le travail qui est fait. C'est-à-dire qu'on décrédibilise complètement
l'institution et on délégitimise le travail qui est fait par la commission.
Pour ma part, c'est assez problématique parce qu'on se dit : alors,
pourquoi avoir un commissaire à l'éthique et à la déontologie si, finalement,
on ne lui fait pas confiance pour traiter ces enjeux.
Mme Bourassa : Parfait.
J'aimerais aussi vous entendre sur la formation. Là, on a entendu pas mal tout
le monde là-dessus jusqu'ici. Vous avez utilisé le mot... une formation
obligatoire, que ça serait crucial, que c'est inquiétant, présentement, que les
gens ne la suivent pas nécessairement. Et vous avez fait ce que j'ai demandé à
plusieurs personnes, vous avez nommé, justement, les éléments qui seraient
intéressants à mettre dans cette formation-là, notamment, les allocations, les
budgets, la gestion responsable, les dons. Justement, que devrait contenir, là,
la formation de base? Est-ce qu'on met tout en même temps? Ça peut être lourd,
justement, quand un élu entre. Je me donne exemple, 31 ans, première fois à
l'Assemblée nationale, beaucoup d'informations. Est-ce que ça devrait être fait
par phases, est-ce que ça devrait être à tous les ans, comme... Et ça joint
aussi votre point sur la révision du code, est-ce qu'on révise aussi la
formation. Comment vous voyez ça?
Mme Martineau (Joé T.) : Alors,
une formation en éthique et en... bien, déjà, d'emblée, ce que je répondrais,
c'est qu'il y a comme... il y a...
Mme Martineau (Joé T.) : ...il
y a deux grandes fonctions, là, de ce code éthique. Il y a, à la fois, cette
fonction préventive, culturelle, établir les grandes valeurs qui devraient guider
le travail des députés, et une fonction de contrôle, hein, c'est-à-dire
s'assurer qu'on est capables de détecter des problématiques, des situations où
le code n'est pas suivi et d'éventuellement sanctionner, potentiellement, s'il
y a vraiment un enjeu, là, de comportements ou de décisions qui seraient
contraires au code d'éthique et de déontologie.
Donc, l'éthique et la déontologie, ce
n'est pas exactement la même chose non plus, hein, et donc il devrait y avoir,
pour ma part... Est-ce que c'est exactement la même formation, le même moment?
Et je pense que l'aspect éthique est extrêmement important à intégrer, d'une
part, parce qu'il est au coeur, je pense... je le dis, il est au coeur de cette
vocation, de cet appel à servir le public. C'est-à-dire que, si on s'en va en
politique, si on... c'est parce qu'on a à coeur l'intérêt public, et on veut
servir la population du Québec, et donc, si on veut faire ça, c'est que...
c'est-à-dire, on doit être mû de valeurs, on doit être motivé par des valeurs
qui sont au centre du fameux code d'éthique dont on parle aujourd'hui. Donc, de
rappeler ça, parce qu'en fait on peut interpréter tous les comportements, tous
les règlements qui sont plutôt déontologiques au regard de ces valeurs-là.
Donc, de parler de ces valeurs-là, de les remettre de l'avant, pour moi, c'est
central, et c'est... on devrait commencer par là.
Aussi, pour rappeler — puis je
le fais toujours dans tous les types d'organisations — que la
fonction d'éthique et de conformité ou déontologie, elle a, à la fois, un
rôle-conseil, mais aussi un rôle de contrôle, et de voir que, finalement, on
peut travailler ensemble. Il faut entrer dans un dialogue avec les gens qui
sont responsables de l'éthique, pour ne pas, justement... des fois, les gens
ont tendance à vouloir les éviter, parce qu'ils les associent trop au
contrôle... pour pouvoir, justement, jouer un rôle de contrôle... pardon,
inspirant, et de conseil, davantage.
Donc, je dirais que, pour moi, oui, tout
ça, ça devrait rentrer dans une formation. Je comprends que ça peut être lourd.
J'entendais tantôt un de vos collègues vous dire qu'il y a beaucoup à
apprendre, puis vous le disiez vous-même lorsque... Et j'imagine qu'il y a
beaucoup à apprendre, mais, pour ma part, je pense que, s'il y a quelque chose
à apprendre qui est crucial dès le départ, ce sont les aspects d'éthique et de
conformité, ne serait-ce que pour donner confiance, mais aussi, pour partir sur
un bon départ, là.
Mme Bourassa : Parfait. Bien,
merci beaucoup.
Le Président (M.
Bachand) :Merci. Mme la députée de
Vimont, s'il vous plaît.
Mme Schmaltz : Merci, M. le
Président. Bonjour. Tantôt, vous avez mentionné qu'il faut assurer
l'indépendance de la commission, j'imagine, en lui donnant plus de pouvoirs,
vous l'avez mentionné. Quelles sortes de pouvoirs la commission devrait avoir
pour, justement, assurer de son indépendance et, surtout, s'assurer que son
constat n'est pas remis en cause?
Mme Martineau (Joé T.) : Bien,
alors, ce que j'ai compris dans la lecture du rapport, c'est qu'elle est déjà
identifiée comme... la commission est déjà identifiée comme une personne...
comme neutre et elle a déjà le pouvoir de recommander. Donc, elle n'a pas le
pouvoir de sanctionner, mais elle a le pouvoir de recommander. Déjà, de s'en
tenir à ce pouvoir-là et de l'officialiser... C'est-à-dire qu'elle a le pouvoir
de recommander. Après, je vois bien que c'est la prérogative de l'Assemblée
nationale que de discuter sur les recommandations qui sont faites par la
Commissaire à l'éthique et à la déontologie, mais, après, ça devient chose
publique, c'est-à-dire qu'après ça revient à l'Assemblée nationale que de dire,
bon, tu sais, ça, ça a été recommandé, mais on va... on ne veut pas aller dans
le sens de la recommandation.
Moi, ce qui m'inquiète, c'est quand on dit
qu'on va rejeter, finalement, les constats, c'est-à-dire rejeter l'enquête de
l'institution ou du commissaire. À ce moment-là, pour moi, je me dis, bien, ça
devient... je suis désolée de le dire comme ça, mais une mascarade, là.
Pourquoi on fait tout ça? Pourquoi on met de l'argent, et des ressources, et du
temps là-dedans si, finalement, ça ne sert absolument à rien? C'est de l'argent
public dépensé pour rien.
• (17 h 20) •
Donc, pour s'assurer, finalement, le bon
fonctionnement de l'équipe du Commissaire à l'éthique et à la déontologie, il
faut lui donner cette neutralité-là pour reconnaître qu'elle a droit de
faire... bien, elle ou il a le droit de faire cette évaluation et cette
recommandation-là. Il faut les choisir en conséquence et leur donner les
coudées franches pour pouvoir faire les recommandations, puis, après ça, ne pas
remettre en question, tout le temps, le travail. En fait, pour moi, c'est une
question de légitimité.
Mme Schmaltz : Pensez-vous
qu'elle peut sanctionner, qu'elle pourrait sanctionner?
Mme Martineau (Joé T.) : Alors,
il y a différents cas de figure dans différents pays, mais, bon, mon expertise,
elle est beaucoup au niveau organisationnel, là, aussi, dans les entreprises,
notamment, là. Dans certaines entreprises, oui, dans certaines organisations,
là, tout dépendant comment c'est... la gouvernance est...
Mme Martineau (Joé T.) : ...est
structurée, elles peuvent sanctionner, mais ce que je vois davantage, c'est
souvent la recommandation, un pouvoir de recommandation, avec pas
nécessairement un pouvoir de sanction sur tous les cas nécessairement. Je ne
m'avancerais pas plus là-dessus, parce que je pense qu'un pouvoir de
recommandation, c'est déjà important, s'il est respecté, c'est-à-dire, s'il est
respecté, ce qui est supposé d'être, je pense, dans la façon de fonctionner
actuellement. Donc, si on s'en tient à un pouvoir de recommandation, pour moi,
ça serait déjà de respecter la recommandation, puis le fonctionnement, et le
travail de la commission. Ça serait déjà un bel avancement.
Mme Schmaltz : Dernière
petite question. Tantôt, vous parliez d'une révision régulière du code. Pour
vous, c'est quoi, régulier, est-ce que ça annuel, c'est aux cinq ans? C'est
quoi, de faire cette révision du code?
Mme Martineau (Joé T.) : Bien,
alors, habituellement, quand on établit une nouvelle politique, et je ne parle
pas nécessairement dans une politique publique ou une politique
organisationnelle, ou même une politique dans une entreprise privée... la
première révision, est habituellement plus rapide, c'est-à-dire, souvent, on va
mettre en place une politique et, après, on va dire : Bon, bien, on va la
réviser dans deux ans parce qu'on veut... on va la faire vivre, là, pour
s'assurer comment que ça fonctionne, et, après ça, on fait la révision rapide.
Après ça, souvent, les organisations en font, des révisions, qui peuvent aller
aux cinq ans, cinq ans, et même à 10 ans, une fois qu'on... Une fois qu'on en
est arrivé à un niveau qui est fonctionnel, ça peut être des révisions mineures
aussi, là, je vous dirais. Mais je pense qu'au début d'une nouvelle politique,
on se doit de la réévaluer plus rapidement qu'aux 10 ans, et là, bien,
peut-être que ça serait une bonne idée que de réviser ça aux cinq ans au
minima.
Mme Schmaltz : O.K., merci.
Je ne sais pas si j'ai des collègues...
Le Président (M.
Bachand) :Merci. M. le député de
Saint-Jean.
M. Lemieux : Combien de
temps, M. le Président?
Le Président (M.
Bachand) :7min 29s.
M. Lemieux : Merci beaucoup.
7min 25 s. Bonjour, Mme Martineau.
Mme Martineau (Joé T.) : Bonjour.
M. Lemieux : On a compris, en
discutant avec la commissaire tout à l'heure, que les codes, c'est un peu comme
les ordinateurs dans le temps, Pentium 1, Pentium 2, Pentium 3, Pentium 4,
c'est-à-dire qu'aussitôt que tu as le nouveau, c'est plus gros, c'est le
meilleur, c'est plus bon, comme disait ma fille, mais, au final... Et on a fait
des jaloux, il y a 12 ans, quand on a sorti ça, on a fait des jaloux. Et puis
là bien, il faut l'ajuster.
Et c'est un peu ce que vous étiez en train
de nous dire, d'entrée de jeu, quand vous avez dit : Bien, ça ne fait pas,
quand même, si longtemps que ça, 12 ans, c'est encore relativement nouveau,
mais ce qui est nouveau aussi pour les Québécois, puis on est quand même les
125 représentants des Québécois, c'est cette attirance-là vers... C'est
tendance. Je ne dirais pas que c'est une mode, l'éthique, là, mais c'est
très... une tendance lourde en ce moment, c'est comme un refuge. Et, pour nous,
c'est un refuge important à cause de la crise de confiance, il y a comme une
espèce de crise de confiance, je l'appelle l'espèce de cynisme ambiant qui fait
en sorte qu'à un moment donné on ne sait plus à quel saint se vouer, puis
l'éthique devient un gage de capacité d'avoir une représentation.
Je voulais vous entendre sur la partie
inspirante de l'histoire. C'est un mot que vous avez souvent en bouche pour
parler de ce que ça doit faire, un code, et de comment ça doit percoler dans la
pratique quotidienne des gens qui le respectent. Puis ce réflexe éthique dont
vous parlez, qui est une autre affaire, que je décode, chez les spécialistes,
que le réflexe éthique, c'est comme la saveur du mois, là, c'est devenu... ça,
c'est à la mode, il faut avoir le réflexe éthique, ça dépend de son code puis
ça dépend de la connaissance du code. Donc, tout est dans tout. Ça fait une
grande question parce que j'espère une grande réponse pour que vous m'ameniez
là où il faut qu'on s'en aille, dans le détail. Il y a des recommandations
qu'on a, il y en a qu'on connaît, il y en a... on a entendu, mais c'est plus...
Ce que je vais chercher, dans ma question, pour votre réponse, c'est vraiment
l'ambiance de toute l'histoire au moment où on va s'asseoir puis on va regarder
dans le code.
Mme Martineau (Joé T.) : O.K.,
bien, alors, bien, merci pour la question, c'est une grande question, comme
vous disiez, avec d'autres questions à l'intérieur. Déjà, d'emblée, je peux
vous dire, même si plusieurs, même si certains observateurs parlent d'une mode
par rapport à l'éthique, on peut dire que l'éthique, là, c'est une branche de
la philosophie qui est appliquée, une réflexion sur ce qui est bien, hein, une
réflexion sur le bien commun, qu'est-ce qu'on doit faire, quelles décisions on
doit prendre pour le bien commun. Et ça, je pense que, déjà, les philosophes de
l'Antiquité nous parlaient évidemment d'éthique, si je vous ramène à vos cours
de philo au cégep, de Platon à Aristote. Donc, la discussion sur l'éthique, ça
existe depuis toujours, depuis qu'on réfléchit et depuis que les humains
s'organisent aussi en société. Et donc c'est sûr que ça a été mis de l'avant
avec tous les scandales...
Mme Martineau (Joé T.) : ...qu'on
a vécus dans les 20 dernières années principalement. Et donc cette crise
de confiance que vous mentionnez, elle ne sort pas de nulle part, hein, elle
sort de différentes situations, de différentes évolutions de notre société qui
font que, oui...
Et vous avez raison de le dire, que
l'éthique devient parfois un refuge. Pourquoi? Parce que les gens sont en
manque de repères, en manque de repères sur quelles sont les valeurs sur
lesquelles on doit s'entendre dans notre société, et ces repères-là, bien, ils
sont donnés par l'éthique. Et l'éthique, peut-être que, oui, on en parle
davantage dans les milieux publics, dans les milieux organisationnels, mais ça
a toujours été là. On appelait ça différemment ou c'était intuitif. C'est
simplement que maintenant c'est beaucoup plus formalisé. C'est-à-dire que ces
intuitions-là, qui étaient des intuitions de personnes qui voulaient mener une
bonne vie, qui voulaient prendre les bonnes décisions puis faire une bonne job,
maintenant elles sont formalisées dans des codes. Et ces codes-là, ce code-là,
bien, ça peut être très utile ou ça peut ne rien faire du tout, là, si on
laisse ça tabletté, bon, c'est juste... ça reste un bout de papier. Pour que ça
devienne utile et pour que ça fasse du sens pour le travail, que ce soit dans
une entreprise, que ce soit dans une institution publique, il faut que ce
code-là, ces valeurs-là, elles soient infusées dans la culture d'une
organisation, et que ça aille de soi, et que ce ne soit pas juste le code qui
institue cette pression-là chez les gens, mais que ce soit les pairs, les
façons de travailler, la culture ambiante et que ce soit... tout ça, ça soit...
ça aille dans la même direction.
Et ce réflexe éthique là, bien, c'est...
finalement, c'est quoi, au-delà d'être ce que vous mentionnez comme étant un
peu un mot à la mode, c'est de se dire : Bien, j'ai une décision à
prendre, j'ai un... j'ai une décision qui est devant moi ou j'ai un dilemme
aujourd'hui par rapport à une situation, je prends un pas de recul puis je me...
je réfléchis aux valeurs qui sont supposées guider mon... mon travail. Et ça,
c'est un réflexe de se dire : Ah! il me semble qu'il y a quelque chose qui
ne va pas, peut-être, dans la situation, c'est... c'est tout simplement ça, le
réflexe éthique, au lieu de ne pas prendre le temps. Puis c'est normal, on est
pressé par le temps, les parlementaires, les gens en organisation, tout le
monde, hein, qui travaille est pressé par le temps. L'accélération de ce
rythme-là a été vécue par tout le monde. Mais ce réflexe-là de réfléchir à...
d'avoir ce souci et cette préoccupation pour l'éthique, ça devrait être... ça
devrait être une préoccupation majeure, là, pour... à la fois pour l'Assemblée
nationale et toutes les organisations du Québec.
M. Lemieux : Et ça l'est
justement. On est en train de voir comment on met le caramel dans la Caramilk,
parce que ce qu'on essaie de faire, c'est de rendre ça encore plus efficace. Il
y a des recommandations, la commissaire nous en a fait. Il y a plein de témoins
qui... de consultation, comme vous, qui viennent nous aider. Mais, au premier
chapitre, quand on pense à l'institution du Parlement, de l'Assemblée
nationale, il y a énormément de petits détails. Alors, il ne faut pas se
laisser obnubiler non plus par un petit détail. Tout à l'heure, vous avez parlé
de cadeaux, d'autres parlent d'autres points qui les... qui les concernent,
mais ce que vous venez de faire comme introduction à l'éthique dans les
dernières minutes de votre réponse, ça me ramène à la première... première
demande que la commissaire a, c'est : quelle que soit la formatrice et
quel que soit le programme, c'est la formation qui va faire la différence. Il
faut sensibiliser parce que chacun arrive avec un bagage différent. Il y a une
jeune femme de 31 ans qui arrive des médias. Il y a un vieux de
62 ans qui arrive des médias. On arrive tous les deux avec un bagage
différent, puis des attentes différentes, puis une façon différente de vouloir
faire les choses. Donc, pour vous, c'est la clé, c'est... comme tout ce qu'on
s'est fait dire aujourd'hui, c'est la formation?
Le Président (M.
Bachand) :Quelques secondes seulement,
Mme Martineau, oui.
Mme Martineau (Joé T.) : Pour
moi, c'est la clé. Cette formation, cette sensibilisation-là, elle doit être
dès le départ, après l'élection ou l'assermentation, elle doit être régulière
aussi.
Le Président (M.
Bachand) :Merci beaucoup. M. le député de
Nelligan pour 12 minutes 45 secondes, s'il vous plaît.
• (17 h 30) •
M. Derraji : Merci, M. le
Président. Merci, Mme Martineau, pour votre exposé et les commentaires très
pertinents par rapport au code... au code que nous sommes en train de...
d'étudier. J'ai écouté votre intervention et j'aimerais bien vous poser une
petite question par rapport au rapport que nous sommes en train d'étudier. Je
l'ai mentionné ce matin, je ne sais pas si vous... vous avez eu le temps de...
de suivre nos travaux ce matin, ce rapport a été déposé le 5 décembre 2019. On
l'étudie presque après 1 436 jours, en fait, si je peux dire, pour
être beaucoup plus précis, trois ans, 11 mois, cinq jours, je peux
arrondir, quatre ans plus tard. La commissaire à l'éthique, ce matin, était en
train de nous dire qu'elle est... qu'elle a déjà commencé sa réflexion par
rapport au prochain rapport qui risque d'arriver l'année prochaine. On s'entend
que...
17 h 30 (version non révisée)
M. Derraji : ...ce n'est pas
banal, hein? C'est un code qui est extrêmement important. C'est un code, si on
ne le suit pas, c'est l'image de l'institution démocratique qu'on représente, à
savoir le Parlement, mais aussi notre rôle en tant qu'élu. Ma question est très
simple : Vu la situation exceptionnelle de ces quatre ans, ça serait quoi,
selon vous, la recommandation pour le prochain rapport? Pour celui-là, c'est un
peu trop tard. On l'étudie quatre ans plus tard, mais, pour le prochain, c'est
quoi, vos conseils par rapport à l'étude d'un rapport qu'on se donne, qu'on a
déjà reçu, ça fait quand même quatre ans?
Mme Martineau (Joé T.) : Bien,
c'est intéressant que vous me posiez cette question-là parce que je me suis
posé la question moi-même, je me suis dit : Mais ça fait quatre ans que ça
a été déposé, ce rapport-là. Soit ça a pris deux ans pour l'écrire, ou soit ça
fait vraiment très longtemps qu'il est déposé. Donc, c'est ce que je comprends
qui est arrivé. Ça fait très longtemps qu'il est déposé. Vous avez raison de le
souligner, je pense que c'est trop long. C'est... Bon, j'imagine que la
commission si on doit avoir énormément de travaux à mener. Mais, quand on pense
à l'aspect central quand même du code de déontologie ou eidétique des parlementaires,
mais aussi de l'importance de maintenir la confiance et la transparence envers
cette institution-là, pour moi, c'est important... ça serait important d'y voir
plus rapidement, là, tu sais.
Et donc, quand un rapport, un tel rapport
est déposé, surtout s'il y a des problématiques qui sont identifiées... moi, je
pense qu'il y a des problématiques qui ont été identifiées dans le rapport, que
l'on... que j'ai étudié et qui auraient dû être vues avant trois ans et demi,
là. Et donc c'est important, ne serait-ce que parce que... et il y a des enjeux
à traiter puis à améliorer rapidement. Oui, ça devrait être vu, du moins, j'oserais
penser, au moins dans l'année qui suit le dépôt d'un rapport.
M. Derraji : O.K. C'est
excellent. C'est là où je voulais vous ramener. Parce que, selon vous, on ne
peut pas déposer un rapport qui touche une période quand même qui date
depuis... moi, je n'étais pas là, c'est... Ça nous a été confirmé ce matin, si
ma mémoire, elle est bonne, 2015-2016, ou 2016, 2017, 2018. Nous sommes en 2023
et... parce que, comme nous sommes en commission qui étudie ce rapport, pour
vous, la recommandation la plus juste, c'est qu'une fois le rapport est déposé,
la moindre des choses, il faut l'étudier pendant le mandat ou l'année en cours
et passer à l'action au niveau des recommandations.
Mme Martineau (Joé T.) : Bien,
bien sûr, parce que, vous voyez... Puis ce que vous disiez tantôt, j'imagine,
on a vécu une pandémie pendant trois ans depuis, qui ont été... que ça, ça a
été déposé, ce fameux rapport-là, qui était avant la pandémie, j'imagine, donc,
toutes les problématiques qui ont pu être liées aussi en matière d'éthique, il
y en a eu, des enjeux aussi avec cette transformation-là. Ça fait que, oui, il
faut y voir plus rapidement, il faut y voir, je me dirais, dans l'année suivant
le dépôt.
M. Derraji : O.K. Oui, merci
pour cette recommandation, parce que j'y tiens et on va la mettre dans nos
recommandations aussi, parce que je pense qu'on ne peut plus, en tant que parlementaires,
quand la commissaire dépose un rapport, prendre autant de temps. La moindre des
choses, c'est qu'avant de se lancer dans une nouvelle élection, au moins
prendre en considération les dernières recommandations pour qu'on puisse tous
évoluer ensemble, ça touche l'éthique, ça touche la rigueur, ça touche des
enjeux sérieux au niveau de l'institution. Et je pense que tout le monde autour
de la table veut juste bien faire, mais en suivant notre code. Merci beaucoup.
Vous aussi, vous êtes pour rendre
obligatoire les formations, que ce soit au niveau du commissaire à l'éthique,
je ne sais pas si vous avez suivi le dernier groupe, commissaire au lobbyisme
aussi, donc, pour vous, il faut la rendre obligatoire, les deux?
Mme Martineau (Joé T.) : Je
suis catégorique là-dessus. Il faut que la formation soit obligatoire. Tantôt,
votre collègue, autre député l'a mentionné, les gens viennent... les députés
viennent de différents milieux, de différentes générations, de différentes...
de différentes industries. Ils ont travaillé dans différentes fonctions et ils
sont porteurs de fonctions de travail... de façons de travailler qui peuvent
être très différentes de celle de l'Assemblée nationale, et on doit s'entendre
sur les valeurs qui sont au coeur du travail dès le départ.
M. Derraji : Oui, la
formation obligatoire, selon vous, uniquement les élus ou le staff politique
aussi, que ce soit en circonscription ou au niveau des cabinets ministériels?
Mme Martineau (Joé T.) : C'est
intéressant, parce que ça a été souligné dans le rapport. Je pense que, bien,
de toute façon, minimalement, tous les élus devraient être formés et ils
devraient être formés aussi, avoir un rappel à chaque mandat, c'est-à-dire à
chaque fois qu'ils sont réélus. Par contre, le personnel qui tourne autour
doivent aussi avoir cette préoccupation et cette... ce souci-là pour que tout
le monde presse dans la même direction et non pas qu'il y ait des...
finalement, des conflits dans les équipes, ou du moins des pressions qui
peuvent être vécues par les élus qui, eux, sont au courant des règles et des
gens de leur staff, par exemple, puisque vous...
Mme Martineau (Joé T.) : ...pourraient
avoir... être moins sensibilisés à ces enjeux-là. Donc, oui, idéalement, ce
sont des... Il devrait avoir aussi une formation qui soit généralisée à
l'ensemble du personnel.
M. Derraji : O.K. Je vais
vous ramener à une autre recommandation, c'est la recommandation deux, que les
parlementaires réfléchissent à l'opportunité de rendre publiques, dans un
registre, certaines mesures prises pour prévenir des situations de conflit
d'intérêts, filtre anticonflit d'intérêts. Vous me suivez?
Mme Martineau (Joé T.) : Oui,
je l'ai ici, oui.
M. Derraji : Oui. Qu'est-ce
que vous en pensez?
Mme Martineau (Joé T.) : Alors,
c'était... Finalement, si je me souviens bien, je le reformule, là, peut-être
c'était une recommandation pour s'assurer que certaines recommandations soient
rendues publiques, pour s'assurer, finalement, qu'il y ait un registre qui
puisse lister, finalement, les situations et les recommandations qui ont été
faites pour qu'on progresse, finalement, pour qu'on avance sur les résolutions.
Je pense que ça pourrait être intéressant d'anonymiser, si c'est possible,
hein? Des fois, par contre, les recommandations, ça peut mettre un peu en
lumière les gens et ça peut... Je dirais, dans certaines situations, dans
certaines organisations, lorsqu'on va faire un registre, on peut identifier, il
y a une identification qui est possible des situations qui fait que certaines
personnes peuvent être... avoir un désincitatif à vouloir divulguer des
situations parce qu'elles ont peur qu'il y ait comme une publicisation,
finalement, d'une situation fâcheuse dans laquelle ils se sont ramassés. Donc,
il faut s'assurer, s'il y a un tel registre, qu'on maintient l'anonymat des
personnes... ou des personnes qui ont été visées par ces recommandations-là.
M. Derraji : Oui, mais, pour
vous, les filtres anticonflits d'intérêts, un, c'est nécessaire pour prévenir
des situations de conflit d'intérêts, mais, le rendre public, vous avez des
réticences.
Mme Martineau (Joé T.) : Bien,
c'est-à-dire que, pour le rendre public, il faut s'assurer qu'on rend public...
on n'a pas les noms des personnes qui sont... et donc il faut s'assurer
vraiment pour que ça ne devienne pas un désincitatif à divulguer des
situations. Est-ce que vous me suivez? C'est-à-dire que, si on a un registre
qui est très précis de recommandations, d'évaluation, de situations, on peut
avoir un enjeu où les gens ont peur de divulguer des situations de conflit
d'intérêts. Parce qu'on s'entend, un conflit d'intérêts, par définition, on
n'est pas... on n'a rien fait de mal, là, tout le monde a des intérêts dans la
vie et tous les députés en ont, là, je suis certaine, mais c'est une question
plutôt de savoir qu'est-ce qu'on fait. Est-ce qu'on va agir en situation de
conflit d'intérêts, et donc est-ce qu'on divulgue et est-ce qu'on est
transparent par rapport à la situation?
M. Derraji : Mais vous ne
pensez pas que, si c'est rendu public, ça va juste augmenter la perception que,
justement, la personne a tout mis en place pour éviter une situation
d'apparence de conflit d'intérêts et d'être en conflit d'intérêts? Je comprends
ce que vous voulez dire, mais le but, ce n'est pas... Ce n'est pas un crime
déclarer un conflit d'intérêts, ça se fait, ça se fait, ce n'est pas mauvais,
au contraire, là, mais...
Mme Martineau (Joé T.) : C'est
très bien même, c'est tout à fait bien de le déclarer. Ce que je veux dire,
c'est que c'est... et peut-être que c'est une incompréhension sur le registre,
mais, si on est sur les registres des sanctions, par exemple, ou des
recommandations de sanctions, c'est là où ça peut être la plus difficile en termes
de... de rendre le tout si on peut identifier les gens. Tu sais, quand on fait
des rapports, actuellement, sur l'éthique dans des différentes organisations,
on fait des rapports annuels qui nous indiquent, finalement, ce qu'on a traité
comme plaintes, par exemple, ce qu'on a traité mais façon très anonyme. Mais,
dans le cas où vous que vous identifiez maintenant, c'est plutôt un registre où
on a une déclaration publique des intérêts qui amène plus de transparence,
c'est ce que je comprends, là, où on amène plus de transparence. Et c'est sûr
que tout ce qui amène plus de transparence est mieux pour la confiance du
public.
• (17 h 40) •
M. Derraji : Je vais juste
vous ramener sur une autre information que nous avons eue sur les lanceurs
d'alerte. Et, vous avez vu, la commissaire, ce matin, insistait beaucoup,
commissaire... au lobbyisme aussi, ils disaient qu'ils cherchaient davantage de
protection pour les lanceurs d'alerte pour protéger l'intégrité de tout le
processus. Que des gens disent non parce qu'ils ont peur, ça limite un peu le
champ d'intervention de la commissaire, mais aussi ça ne donne pas l'assurance
nécessaire à la personne qui aimerait parler, par peur, par crainte.
Mme Martineau (Joé T.) : Oui,
bien, en fait, c'est la dernière intervention que j'avais à faire tantôt,
lorsque j'ai dépassé un petit peu mon 10 minutes, il me restait une
intervention sur cette recommandation neuf sur la protection des divulgateurs.
Pour moi, c'est vraiment important de protéger les gens qui veulent divulguer
des situations...
Mme Martineau (Joé T.) : ...maintenir
la confiance et aussi faire cette transformation culturelle dont on parle
depuis tantôt, c'est-à-dire s'assurer que, maintenant, ça devienne un réflexe,
ça devienne une... on est témoin d'une situation, on a de l'information par
rapport à une situation spécifique et que ce soit naturel que les gens
divulguent des situations qui sont contraires à l'éthique, et donc de protéger
les divulgateurs contre toute forme de «retaliation», de conséquences
négatives, là, par rapport à leur carrière, par rapport à la situation. Ça
contribuerait à favoriser ce changement culturel et la confiance.
M. Derraji : Oui. Merci
beaucoup, à moins que... si vous voulez ajouter quelque chose. Merci beaucoup
pour votre intervention, c'était très clair. Merci beaucoup. Je ne sais pas si
vous voulez ajouter quelque chose. Il me reste une minute. Sinon, bien, merci
pour votre...
Mme Martineau (Joé T.) : Bien,
j'ajouterais peut-être que je vous remercie d'avoir fait appel à moi pour cette
commission, et puis j'espère que j'ai pu a aidé un petit peu à amener quelques
lumières là-dessus.
M. Derraji : Très apprécié.
Le Président (M.
Bachand) :Et ce n'est pas terminé, il
reste encore le député d'Hochelaga-Maisonneuve pour 4 min 15 s. M. le député.
M. Leduc : Merci, M. le
Président. Bonjour, Mme Martineau. D'abord, sur la rémunération des élus,
je ne sais pas si vous avez entendu quelques échanges plus tôt aujourd'hui.
Avez-vous une opinion à ce sujet?
Mme Martineau (Joé T.) : Bon,
bien, alors je ne l'ai pas abordé dans mon 10 minutes, mais j'y ai
réfléchi. Je réfléchissais à cet aspect-là. En fait, je n'ai pas entendu les
échanges qui ont été faits aujourd'hui et je n'ai pas pu assister à tous les
travaux de la commission. Cela dit, c'est vrai que dans le contexte d'une
organisation publique, qui est soucieuse de maintenir le lien de confiance avec
la population, que les parlementaires soient juges et parties, donc dans une
situation, donc, pour établir leur propre salaire, ça peut miner un petit peu
la confiance, à mon avis. Et je trouve que la recommandation qui est faite par
la commission — elle n'est pas très précise, là, dans le document — c'est-à-dire
d'instituer quelque chose, finalement un mécanisme neutre, pour réfléchir aux
conditions salariales, elle est bienvenue. C'est à dire, bon, elle devrait être
précisée puis c'est probablement à l'Assemblée nationale à trouver ce
mécanisme, cette façon de fonctionner pour s'assurer que, oui, un parti au
pouvoir qui aurait une majorité ne puisse pas, justement... les parlementaires
eux-mêmes décider de leur propre traitement salarial, puisque je pense que c'est
un enjeu. Et je ne parle pas de la dernière augmentation salariale qui a été
donnée pour les parlementaires, parce que, bon, je pense que tout le monde
s'entend sur le fait qu'il y avait un rattrapage à faire. Est-ce que c'était le
bon moment et le bon choix? Bon, c'est une autre question. Mais mon
intervention, elle est seulement sur la neutralité, là, la vision de la
neutralité par rapport à la population du Québec qui peut se dire : Bon,
bien, ils se votent eux-mêmes leur propre salaire, donc ça peut miner la
confiance du public.
À mon avis, s'il y avait une commission
neutre ou un mécanisme qui, finalement, pour assurer davantage de neutralité,
qui assurerait finalement aussi une forme de veille, hein, sur les salaires, le
traitement salarial, les conditions salariales des députés par rapport à
d'autres pays, d'autres provinces, etc., et qui pourrait amener ça de façon
neutre, je pense que ça serait très bienvenu.
M. Leduc : Merci.
Pourriez-vous nous donner... Est-ce que vous connaissez, en fait, des
exemples... Parce que vous parlez de modernisation continue de notre code
notamment puis il y a d'autres personnes qui ont évoqué ça aujourd'hui, comment
on fait puis, tu sais, c'est quoi, les délais pour revisiter tout ça? Est-ce
que vous, vous connaissez des exemples d'organisations qui ont des processus
de, j'oserais dire d'amélioration continue ou de modernisation continue? Et si
oui, lesquels ils ont choisi?
Mme Martineau (Joé T.) : Bien,
c'est sûr que les organisations... Vous avez une organisation d'une grande
complexité, là, aussi, qui est... et qui se doit, par sa nature, d'être
consultative, là. Donc, vous avez... contrairement à... dans certaines
entreprises privées, hein, on a pas nécessairement... On va mettre à jour le
code d'éthique ou ces procédures-là de façon un peu «top down», là, mais c'est
un peu plus compliqué dans le type de... dans une organisation publique ou dans
une institution gouvernementale. Donc, évidemment, il y a une forme de lourdeur
qui peut s'installer si on... lorsqu'on fait la révision d'un code d'éthique,
parce qu'on veut consulter, on veut s'assurer, finalement, d'une forme de
participation dans ce travail-là.
Cela dit, en tout cas, de ma part, le
travail de la commissaire à l'éthique est quand même déjà complet, il y a une
base de travail déjà là, qui est, pour ma part, de grande qualité pour pouvoir
améliorer ce fameux code d'éthique. Et donc sur la base de recommandations, ça
pourrait se faire de façon régulière et pas trop de façon assez... Je veux dire,
c'est sûr que ça...
Mme Martineau (Joé T.) : ...ça
prend un certain temps, ça prend les ressources et ça prend la consultation,
mais il y a déjà une base de travail qui est tellement importante qu'à mon avis
ça se fait assez bien. Ça devrait être fait de façon plus régulière. Là, déjà,
déjà là, ça fait 10 ans, là, c'est le temps de le faire, mais après ça,
peut-être aux 5 à 10 ans encore.
M. Leduc : Parfait.
C'est bon. Merci.
Le Président (M.
Bachand) :Merci beaucoup.
Mme Martineau, merci beaucoup d'avoir été avec nous, c'est un grand
plaisir.
Cela dit, je suspends les travaux quelques
instants. Le prochain groupe est déjà branché. Merci. À tantôt.
(Suspension de la séance à 17 h 47)
(Reprise à 17 h 48)
Le Président (M. Bachand) :La commission reprend ses travaux. Alors, il me fait
plaisir d'accueillir les représentantes du Cercle des ex-parlementaires de
l'Assemblée nationale du Québec. Alors, j'ai la présidente, Mme Dionne.
Alors, Mme Dionne, je vous laisse la parole. Merci beaucoup d'être avec
nous. Puis je vous inviterais à présenter les gens qui vous accompagnent.
(Visioconférence)
Mme Dionne
(France) :Oui. Bonjour, M. le Président.
C'est un plaisir d'être avec vous cet après-midi. Qui m'accompagnent, deux ex-parlementaires
bien connues, Manon Blanchet, députée de Crémazie, 1998-2003, et secrétaire du
conseil d'administration du Cercle, et Agnès Maltais, ex-députée de Taschereau,
1998 à 2018, et administratif au sein de notre conseil d'administration.
Alors... et moi-même, Francis Dionne, ex-députée de Kamouraska-Témiscouata de
1985 à 1997, et je suis présidente du conseil d'administration du Cercle des
ex-parlementaires. Alors, merci de nous avoir invitées à venir, à participer à
cette audition sur le rapport de mise en œuvre du code d'éthique et de
déontologie des membres de l'Assemblée nationale. C'est important de faire cet
exercice-là. Et nos représentations comporteront, après quelques observations
préliminaires, des commentaires sur certaines recommandations du rapport, non
pas toutes, en ne retenant que celles qui nous semblaient les plus appropriées.
Nous espérons que ces quelques commentaires aideront les législateurs et les
législatrices actuels à éclairer les enjeux qui gravitent autour du code d'éthique
et de déontologie des élus.
Depuis maintenant 30 ans, le Cercle
des ex-parlementaires de l'Assemblée nationale du Québec regroupe les hommes et
les femmes qui ont été membres du Parlement dans le but de favoriser la
promotion des institutions parlementaires du Québec et la diffusion
d'informations sur le parlementarisme et la démocratie. En somme, nous sommes
des bénévoles qui souhaitent continuer de partager notre expertise et notre
expérience accumulées pendant notre séjour à l'Assemblée nationale, avec les
parlementaires actuels et futurs dont vous êtes.
Les objectifs de notre organisme, qui
compte actuellement près de 470 membres, sont de mettre les connaissances
et l'expérience des ex-parlementaires de l'Assemblée au service de la
démocratie parlementaire, défendre et représenter les intérêts des
ex-parlementaires québécois et favoriser l'esprit de solidarité entre ces
derniers, promouvoir les relations entre les ex-parlementaires et les
parlementaires actuels de l'Assemblée, servir l'intérêt public et, bien sûr,
favoriser le rayonnement des institutions démocratiques au moment où les enjeux
sont tellement grands à travers le monde.
• (17 h 50) •
Le cercle travaille également pour aider
et accompagner les députés sortants, que ce soit par choix ou suite à une
défaite électorale. En effet, nous avons un comité sur la vie après la
politique qui prend contact avec les parlementaires qui annoncent quitter, mais
également pour tendre la main à celles et à ceux qui ont perdu leurs élections.
Ce travail s'effectue en collaboration avec l'Assemblée nationale. Dans le
cadre des prochaines élections générales, le cercle compte être plus proactif
et plus présent.
Le Cercle des ex-parlementaires a pris
connaissance avec vif intérêt du rapport sur la mise en œuvre du code d'éthique
et de déontologie. Dans un premier temps, nous souhaitons souligner que ce code
contribue à accroître la confiance des citoyens à l'égard des élus de
l'Assemblée nationale. Dans les dernières années, les questions d'éthique et de
déontologie des parlementaires ont défrayé les manchettes des journaux, et le
Cercle est heureux de constater que la commission des institutions poursuit son
travail d'amélioration...
Mme Dionne
(France) :...en étudiant le rapport de
mise en œuvre de ce code d'éthique.
Les ex-parlementaires cumulent énormément
d'expériences très diverses qui ont été vécues des deux côtés de la culture
partisane. Malgré le peu de temps que nous avons eu pour nous réunir et
débattre des recommandations de ce rapport, nous avons eu la chance d'entendre
des ex-parlementaires ayant vécu soit l'expérience du dépôt d'une demande
d'enquête, soit d'avoir subi les conséquences d'être sous la loupe de la
commissaire ou de ses prédécesseurs. Premièrement, dans un article publié en
2021, la Commissaire à l'éthique mentionnait qu'en éthique et en déontologie,
chaque cas est différent : «On ne pourra jamais prévoir tous les cas de
figure dans les articles du code. Il faut laisser une souplesse, et c'est ce
que je demande.» Le cercle appuie le besoin de souplesse demandé par la
commissaire. Même si nous avons la ferme conviction que les demandes d'enquête
doivent continuer à être publiques et commentées publiquement, nous pensons
qu'à chaque fois que l'on apprend qu'un parlementaire commet un impair, cela
affecte l'image que la population québécoise a du niveau de probité de
l'Assemblée nationale, Le cercle souhaite également vous sensibiliser au fait
qu'il est important de tenir compte de l'expérience des parlementaires sortants,
qui ont souvent accumulé une bonne connaissance de l'appareil gouvernemental et
de son fonctionnement. Leur expertise peut être d'une grande valeur une fois
qu'ils ont quitté la vie politique, et ceux-ci... ceux-ci pourraient poursuivre
leur carrière en occupant des postes en soutien à l'État. Les règles de
l'après-mandat doivent être flexibles pour celles et ceux qui n'ont pas occupé
des postes de ministre, pour qui il y a donc moins de conflits d'intérêts
potentiels en lien avec le poste occupé précédemment.
La recommandation n° 1. La première
recommandation du rapport a attiré l'attention du cercle, qui appuie la mise en
place d'une formation obligatoire. Nous suggérons même que cette formation soit
faite et qu'elle devienne obligatoire également pour le personnel politique
œuvrant dans les cabinets et dans les bureaux de circonscription. De plus, le
cercle recommande que cette formation soit aussi offerte au moins une fois par
année à l'ensemble des élus et du personnel politique.
Recommandation n° 3. Nous croyons que les
législateurs et les législatrices doivent réfléchir sérieusement à adopter
cette recommandation. Les élus peuvent croire que leur situation ne les met pas
en place... en situation de conflit d'intérêts et, par conséquent, ne pas
vouloir en référer à la commissaire. De plus, leur chef peut apprendre... peut
apprendre une situation grave concernant le ou la membre de son caucus et
vouloir s'informer auprès de la commissaire sans alarmer outre mesure l'élu.
Cela peut aussi devenir un instrument de négociation pour mettre fin à une
situation déplaisante pour tous et toutes et aussi éviter une crise.
Recommandation n° 5. Le déclenchement
d'une enquête est une chose grave, probablement plus grave qu'il n'y paraît de
prime abord, quand le code a été étudié puis adopté. Les répercussions d'une
annonce de déclenchement d'enquête sont immédiates. Les partis s'en emparent,
souvent de façon partisane, les médias transmettent l'information à tous les
Québécoises et les Québécois et les chefs parlementaires doivent alors se
positionner : l'élu visé doit-il ou doit-elle demeurer dans le caucus ou
au Conseil des ministres, selon le cas? L'élu a aussi des employés, et un
bureau de circonscription, et un cabinet à gérer. Ces employés vivent la crise
avec le ou la parlementaire. Par ailleurs, si la présence grandissante des
médias sociaux est un outil qui peut permettre la diffusion d'idées politiques,
on y voit aussi une floraison d'insultes, d'injures et de menaces qui
pourrissent la vie de l'entourage du politique. La famille de l'homme ou de la
femme politique est affectée par tout ce branle-bas entourant la nouvelle d'un
déclenchement d'une enquête et le vit difficilement. Si le résultat de
l'enquête est qu'il n'y avait pas matière à enquêter, jamais cela n'effacera le
doute qui s'insinue dans toutes les couches de la société. Dans le cas d'une
enquête de la commissaire, comme dans le cas d'une enquête policière, la
présomption d'innocence est souvent malmenée.
C'est pourquoi nous croyons qu'il est
raisonnable de permettre à la commissaire de procéder à une enquête
préliminaire dans un court délai de quatre jours ou de 14 jours, au maximum. Ce
délai ne doit pas être utilisé en toutes circonstances, bien sûr. et doit être
le plus court possible, car, dès le dépôt d'une demande d'enquête, la rumeur
circulera et affectera l'élu en question ainsi que son entourage.
Recommandation n° 6. Pour les raisons
précédemment édictées, ayant toujours en tête qu'un ou une élue est quasiment
automatiquement membre d'un caucus et que les chefs parlementaires sont tenus
responsables de la probité de leur caucus et questionnés systématiquement au
déclenchement d'une enquête, nous...
Mme Dionne
(France) :...nous appuyons cette
recommandation.
Recommandations 10a et 10b. Pour le
cercle, les recommandations 10a et 10b devraient tenir compte que les élus
continuent à aider les citoyens de leur circonscription pendant la période
électorale. À cet effet, l'utilisation de l'adresse courriel de l'Assemblée
nationale peut être utilisée, car cette adresse est affichée dans la section
Contacts de sa biographie publiée en ligne sur le site de l'Assemblée
nationale. Donc, il est important de ne pas porter un blâme à un ou une député
qui a utilisé cette adresse.
Recommandations 11 et 12. Le cercle appuie
ces recommandations, mais suggère que le rapport précise s'il s'agit des
candidats officiels ou de tous les candidats. De plus, le cercle est d'avis que
si ce code continue d'être appliqué durant les campagnes électorales, les
enquêtes qui pourraient en découler devront être souples et adaptées afin
d'éviter des accusations partisanes et d'entacher la réputation de celles ou de
ceux qui se présentent ou se représentent aux élections.
Voilà, M. le Président, l'ensemble des
commentaires qu'il semble opportun pour le Cercle des ex-parlementaires de
l'Assemblée nationale de soumettre à la Commission des institutions. Nous
espérons que ceux-ci seront utiles à la réflexion et au débat et nous vous
remercions et vous présentons nos salutations les plus cordiales, M. le
Président, et à tous les parlementaires autour de la table à la commission.
Alors, nous sommes prêts pour répondre à vos questions.
Le Président (M.
Bachand) :Et vous êtes bonne, Mme Dionne,
droit sur le 10 minutes. Alors, bravo! Alors, Mme la députée de
Charlevoix-Côte-de-Beaupré, s'il vous plaît.
Mme Bourassa : Bonjour. Je
suis très contente de pouvoir bénéficier de votre expertise aujourd'hui. Vous
avez abordé un point qui, pour moi, était l'une des recommandations de la
commissaire très importantes, qui est l'enquête préliminaire. Pour avoir
travaillé dans les médias, j'ai vu que, quand on déclenche une enquête, quand
il y a un doute sur l'intégrité d'une personne, ça peut faire les manchettes.
La rectification peut être en page 117, dans le bas d'un encadré. Alors, oui,
il peut effectivement y avoir eu des conséquences très graves, vous l'avez
mentionné, pas seulement pour l'élu, pour son entourage, sa famille, son
personnel politique.
Alors, j'aimerais vous entendre,
justement. Vous avez dit qu'autour de vous, il y avait des gens qui ont déjà eu
affaire au commissaire. Quel est l'impact du déclenchement d'une enquête et à
quel point l'enquête préliminaire pourrait peut-être baliser tout ça?
Mme Dionne
(France) :Écoutez, d'une part, je
pourrais dire que c'est pour ça qu'on pense que, qu'il y ait une préenquête,
là, un 14 jours pour faire l'exercice en tant que tel, ce n'est pas long, en
tant que tel, mais ça peut tellement protéger, effectivement. Je pense que vous
avez d'ailleurs récemment vu, dans la Presse, il y a un ex-parlementaire, M.
Surprenant, qui vient de décrire un livre qui relève, en fin de compte, tout ce
qu'il a vécu, et sa réputation a été entachée, elle est entachée depuis le
début de l'enquête, et pour se retrouver dans une situation, quelques années
plus tard, avoir... Je pense qu'il y a une correction qui est apportée
aujourd'hui, qui est portée par... et qu'on a connue dans les médias. Mais,
pendant tant d'années, cet ex-parlementaire a vécu ça, et c'est difficile,
alors je pense que... Et c'est pour ça que nous, on trouve que c'est très
important. Et je ne sais pas si mes collègues ont peut-être un commentaire à
ajouter sur cet élément-là, mais, pour moi, je le trouve primordial. Agnès? Mme
Maltais? Ton micro.
Le Président (M.
Bachand) :On ne vous entend pas, Mme
Maltais, votre micro est fermé.
Des voix : ...
Mme Maltais (Agnès) : Oui,
bonjour. Si je peux ajouter quelque chose, c'est qu'on a effectivement discuté
avec des parlementaires qui ont vécu la situation où ils ont été, à la fin,
blanchis. Mais le choc sur la famille, du fait... et non seulement blanchis,
mais il n'y avait probablement pas matière à enquête, seulement, le choc sur la
famille, le choc sur l'entourage est énorme. En fait, ce parlementaire-là
travaille ne s'en est à peu près jamais remis, jamais remis, là, c'est sérieux.
• (18 heures) •
Écoutez, quand il y a déclenchement d'une
enquête, il y a quasiment... souvent sortie du caucus parce que le chef est
sous pression et ça entame sa crédibilité, de tout le caucus. Alors,
imaginez-vous, il n'y a même pas matière à enquête, vous êtes sorti d'un
caucus, les médias discutent sur votre cas, dans votre circonscription, vous
allez faire l'épicerie avec votre famille, des gens discutent. C'est très
lourd. Il faut que ça demeure grave, une enquête de la commissaire. Je pense
que c'est quelque chose qui doit résonner encore très fort, ce n'est pas pour
enlever cette résonance-là, mais se donner, je dirais, la chance, comme groupe,
vous êtes les députés, d'éliminer le cas où il y aurait véritablement une
innocence évidente. Pour la commissaire, ce serait bien, ce serait très bien.
Mais on ne...
18 h (version non révisée)
Mme Maltais (Agnès) : ...la
présidente du cercle nous a précisé qu'il est important que le 14 jours ne soit
pas un automatisme. Parce que même le 14 jours d'une enquête, on va appeler ça,
enquête préliminaire, là, ou étude préliminaire du sujet d'enquête va être
difficile à vivre. Mais, au moins, si, rapidement, la commissaire dit, après
trois jours : Non, il n'y avait pas matière à enquête, le dommage va être
beaucoup, beaucoup moins grand que d'attendre la fin d'une enquête. Mais de
garder le 14 jours non pas comme un plancher, mais d'en faire un maximum pour
que, s'il n'y a pas matière à enquête, qu'on le sache rapidement.
Mme Bourassa : Et ce nouveau
processus là — moi, j'aime mieux «étude préliminaire» parce que quand
on dit «enquête», effectivement, on pense tout de suite à une enquête pour
faute — devra être accompagné d'une communication très claire aux
yeux du public, de dire : Bon, bien, le commissaire a une phase tampon où
il peut se faire une tête sur le sujet avant de dire si, oui ou non, il
enquête. Ça va être important de publiciser ça aussi.
Mme Dionne
(France) :Oui, Mme la députée de
Charlevoix, je pense, oui, comme outil, mais c'est important que, pendant les
14 jours... je ne pense pas que c'est important pour la commissaire de dire
publiquement qu'elle procède à ça. Ces 14 jours là, c'est pour elle, c'est pour
le député et c'est pour le chef du parti. Alors, le président du caucus, en
tant que tel... Bon. Et alors, ça, c'est important pour... Et c'est là où je
pense que ça doit se faire rapidement, avec beaucoup de diligence, beaucoup de
prudence, mais ça donnerait une marge de manœuvre, là, pour que tout le monde
réagisse du mieux possible aussi.
Mme Bourassa : Une dernière
question, parce que mes collègues, je suis certaine qu'ils ont aussi plein de
questions. Vous parliez du fait qu'un député sortant, pour l'instant, n'a pas
les mêmes contraintes qu'un ministre au titre du conflit d'intérêts, là, avec
son futur emploi. Tout à l'heure, on a des gens qui nous parlaient peut-être d'un
an pour un député versus deux ans pour un ministre, tu sais, des restrictions.
Vous, vous l'avez fait, vous vous êtes sorties de la politique, est-ce que c'est
difficile de se tenir loin justement de ce qu'on a connu quand on a pataugé
dans ce monde-là aussi longtemps? Si on met des restrictions pour les députés
qui n'ont pas été ministre, est-ce qu'il pourrait y avoir un certain danger, de
difficultés de se replacer?
Mme Dionne
(France) :Bien, d'une part, il ne faut,
quand même pas, se cacher, là, du fait qu'un député ayant perdu ses élections,
en tant que tel, bon, il y a toujours une période d'un an où, je pense, on a
convenu à l'Assemblée nationale qu'il y avait quand même une compensation qui
était accordée. Mais, en même temps, ce qu'il ne faut pas oublier, c'est qu'un
député qui a perdu ses élections, celui qui décide de ne pas se représenter, c'est
une chose, mais un député qui a perdu ses élections dans un comté, et c'est
toujours difficile, parce que c'est un leader, un député dans un comté, que ce
soit un député urbain ou un député en région. Et, quand il perd ses élections,
ça veut aussi dire qu'il y a un nouveau député qui reprend le leadership.
Alors, il y a des situations difficiles qui sont vécues, en tant que tel, et
ça, on ne peut pas se le cacher, il y en a qui, s'il y avait un travail
permanent dans le passé comme enseignant, c'est plus facile de retourner à l'enseignement.
Mais ce n'est pas tout le monde qui sort d'un emploi rémunéré ou protégé pour y
retourner par la suite.
Alors, je pense que c'est là où il faut
être très prudent en tant que tel, mais, en même temps, cet ex-parlementaire,
il a une connaissance de l'appareil gouvernemental assez extraordinaire.
Écoutez, dans un comté urbain, c'est peut-être un petit peu plus limité, mais
si vous comptez dans un comté rural où tu touches à presque tous les ministères
du gouvernement, parce qu'il y a des sites, alors il a une connaissance. Et, si
le député a fait un neuf ans, 10 ans, ou s'il a fait plus de temps, c'est
devenu un expert. Alors, ce qu'on en dit, nous, c'est de dire... puis que ce
soit au Conseil exécutif ou dans différents ministères et, s'il y a des gens
qui sont disponibles, sont intéressés à travailler pour le gouvernement, bien,
qu'ils puissent le faire en tant que tel. C'est ce que c'est non partisan. Il
faut que ça se respecte de cette façon-là. Mais il y a des connaissances
importantes.
Et, comme on est en pénurie de main-d'œuvre
partout dans le moment, je pense que d'avoir des gens d'expérience qui sont
capables, justement, d'aider les citoyens parce que... les entreprises, les
OBNL, parce qu'ils les ont faits pendant pendant cinq ans, pendant 10 ans,
pendant 15 ans, bien, ça ne s'oublie pas le lendemain matin, ça ne se perd pas.
Et je pense que ça vaut la peine, pour la population, de pouvoir en profiter et
que les positions soient aussi ouvertes aux ex-parlementaires.
Mme Bourassa : Merci
beaucoup.
Le Président (M.
Bachand) :Merci. Autres interventions...
Le Président (M.
Bachand) :...du côté gouvernemental. M.
le député Saint-Jean, 8 min 34 s.
M. Lemieux : O.K. Merci, M.
le Président. Bonjour, mesdames, presque bonsoir. D'abord, merci beaucoup de
contribuer comme ça à nos réflexions et d'avoir travaillé sur ce rapport qui
date déjà de quelques années pour qu'on puisse éventuellement le réactualiser.
Vous savez que la commissaire va présenter un nouveau rapport au plus tard dans
un an et quelques jours, donc, forcément, ça va bouger. Et votre perspective
est intéressante et elle est importante.
Avant de poser ma question, je voulais
renchérir sur ce que ma collègue disait au sujet des médias. Effectivement, ça
n'effacera jamais le doute; ce que vous nous disiez au sujet de quelqu'un qui
se retrouve, entre guillemets, dans l'actualité à cause d'une enquête. Puis de
la même façon, la vision du public à l'égard de cette personne-là, non
seulement elle va rester flouée ou, en tout cas, elle va rester entachée, mais
les médias eux-mêmes ne rapporteront jamais autant qu'il n'y a rien eu que le
doute qu'il y avait quelque chose. Bon.
Une fois qu'on a dit ça, ce n'est quand
même pas si clair que ça. Moi, aujourd'hui, j'ai essayé de suivre d'un témoin à
l'autre, ce n'est quand même pas si clair que ça. La commissaire a une certaine
marge de manoeuvre pour répondre dès qu'un député dépose une plainte, en
disant... en demandant une enquête, en disant : Bien, à mon avis, il n'y a
pas matière à enquête. Mais, c'est très flou puis c'est très peu... dans le
code bien défini, et donc c'est pour ça qu'elle nous demande de pouvoir aller
avec cette étape-là préliminaire, entre guillemets. Et effectivement je vous
entendais dire : Oui, puis c'est juste pour elle, là, entre guillemets,
personne d'autre ne va savoir ça. Mais vous connaissez bien trop la politique
pour savoir que, quand un parti demande qu'on enquête sur l'autre, bien, c'est
parti, à partir de là, là, puis là arrivera ce qui pourra. Mais au moins il y
aura cette capacité de la commissaire, en dedans de quelques jours, de
dire : Oui, non, ou on verra. Phrase célèbre.
Bon. Je vous voulais vous entendre au
sujet de la souplesse. J'ai écrit ce mot-là en vous entendant dès le départ,
quand vous avez parlé de souplesse. Et il y a effectivement, même si ce n'est
pas des recommandations que vous avez ciblées comme étant quelque chose sur
lequel vous vouliez parler, mais il y a quand même la recommandation
numéro 16, numéro 17, où la commissaire demande d'avoir un pouvoir un
peu plus discrétionnaire, bien là, je vulgarise, là, mais d'être capable
d'intervenir auprès d'un député qui... ou même d'un ministre qui se retrouve
avec une plainte, mais qu'elle considère que, bien, le gros bon sens aurait
peut-être sa place qui n'est pas nécessairement dans le code, alors elle
demande de la souplesse. Puis je me demandais, quand vous avez commencé à
parler de souplesse, si c'est à ce genre de choses dont vous parliez.
Mme Dionne
(France) :Écoutez, je vais laisser
peut-être mes collègues répondre à ça, parce qu'au niveau de la souplesse, là,
j'ai... elles sont peut-être plus expertes, là, en tant que tel, que je peux
l'être. Agnès peut-être? Ton micro, oui, oui, oui.
Mme Maltais (Agnès) : Oui,
oui. J'ai eu peu de temps pour étudier ceci. Donner de la souplesse, écoutez,
on n'a pas beaucoup commenté, on n'a pas beaucoup discuté de cet article-là en
groupe. C'est clair que d'habitude, quand la commissaire demande de la
souplesse, je pense qu'elle doit vous présenter peut-être les... de façon à ne
pas évoquer, non, mais les raisons pour lesquelles elle le demande. En général,
c'est assez sérieux quand la Commissaire à l'éthique demande de la souplesse.
Mais je pense que Manon a peut-être plus participé que moi aux discussions
entourant cet article-là.
• (18 h 10) •
Mme Blanchet (Manon) : Bien
oui et non. Bonjour, tout le monde. Mais enfin je pense que, de façon générale,
un rapport sur le code d'éthique, il y a toujours place à la souplesse pour un
peu tous les articles ou pour tout le code parce que, comme vous le dit
vous-même, M. le député, à un moment donné, effectivement, il y a aussi le gros
bon sens, et je pense que la commissaire le témoigne rapidement, là, dans les
échanges, dans les lettres, là, qu'il y avait en début de rapport, c'est aussi
pour s'adapter à toutes les situations possibles parce que comme... et Mme la
Présidente le disait justement d'emblée dans un article, elle disait : On
ne peut pas... il n'y a pas de... c'est tout du cas par cas, comme on dit, on
ne peut pas faire du mur-à-mur. Donc, je pense que la souplesse doit être là
tout au long non seulement de la rédaction du code, mais dans son application
également, je pense qu'on n'a pas le choix d'y aller avec ça.
M. Lemieux : Effectivement,
c'est très particulier d'imaginer que ce sont...
M. Lemieux : ...des cas
particuliers puis qu'en même temps...
Mme Dionne
(France) :Il faut que ça remplisse.
M. Lemieux : ...il n'y a pas
de codes qui peuvent codifier tout ça. Mais justement il y a, à la recommandation
numéro deux... parce que tout le monde parle de la numéro un... d'accord, bon,
mais la numéro deux, «que les parlementaires réfléchissent à l'opportunité de
rendre publiques, dans un registre, certaines mesures prises pour prévenir des
situations de conflits d'intérêts», ça, c'est intéressant dans la mesure où,
bon, il faudrait que ce soit anonymisé, et il y a peut-être juste vous, Mme
Maltais ou Mme Blanchet, qui dirait : Ah! c'est mon cas, ça, puis personne
ne va le savoir, mais ils l'ont pris comme exemple. Parce qu'effectivement il y
a comme une espèce de jurisprudence qui pourrait s'installer, s'il y avait un
répertoire, un registre, où on pourrait dire : Bien, il y a eu telle sorte
de cas, telle sorte de situation, ce n'est pas exactement comme moi, mais je
comprends que la décision, à ce moment-là, ça a été celle-ci. Parce que, la
majorité du temps, quand on va voir la commissaire, on ressort de là avec son
petit bonheur sous le bras en disant : O.K., si je ne fais pas ça, je vais
être correct ou... Alors, ça, c'est le genre de truc qui devient un petit peu
plus délicat, là, parce que peut-être que vous allez vous reconnaître dans
trois ans si jamais il y a un registre, là.
Mme Dionne
(France) :Mais, M. le député, moi,
j'aimerais... Oui, on parle de souplesse, mais, en même temps, rappelez-vous la
recommandation un, sous laquelle on parle de dire de façon... des formations
obligatoires, et ce n'est pas pour rien. C'est parce que, tu sais, on peut,
oui, avoir de la souplesse parce qu'il y a différents cas puis ce n'est pas
facile, mais, en même temps, ce que nous, on recommande, c'est qu'il y ait une
formation obligatoire non seulement aux députés, en tant que tel, mais aussi au
personnel. Ça fait que, quand on parle de situations délicates où la
commissaire à l'éthique doit intervenir, en tant que tel... Bon.
Alors, si, parce qu'on est plus rigoureux
sur les formations qu'on donne puis qu'on donne à... puis nous, on recommande à
chaque année parce que, dans un cabinet de ministre ou un cabinet de député,
alors, il y a des changements. Alors donc, il faut, à un moment donné, que tout
le monde soit sur la même longueur d'onde, et c'est ça qui fait qu'on fait de
la... on fait... on prévient les problèmes, en tant que tel, donc, puis on met
plusieurs personnes... plus qu'une personne vigilante, parce que ça bouge vite
dans un bureau de comté, ça bouge vite dans un cabinet. Alors, vous le savez.
Alors donc, c'est pour ça que nous, on dit que cette formation-là doit être
obligatoire et répétée de façon annuelle pour justement, là, avoir une
rigueur...
M. Lemieux : Donnez-moi
juste...
Mme Dionne
(France) :...de plus en plus grande...
M. Lemieux : Donnez-moi juste
une dernière minute parce que je veux absolument... on aurait dû commencer par
ça parce que vous êtes spécialistes dans l'après-mandat, nous, on ne l'est pas,
et c'est important parce que, là, tout à l'heure, le commissaire au lobbyisme
et la commissaire à l'éthique ont des intentions par rapport à ce que ce
pourrait être pour les députés, ce qui n'était pas vraiment le cas, c'était
pour les ministres seulement. Vous en avez parlé tout à l'heure, mais vous
voyez ça d'un bon oeil qu'on resserre? Tant qu'à être plus éthiques, soyons-le
jusque là?
Le Président (M.
Bachand) :Rapidement, Mme Dionne.
Mme Dionne
(France) :Mais que les... Les
recommandations sur l'éthique, tu sais, pour être vigilant, il y en a peut-être
qui sont déjà bonnes puis qui ne sont pas présentées dans les... dans tous les
cabinets puis dans tous les bureaux de circonscription, là. Alors, il y a déjà
ça. Alors, si on doit les... en ajouter, moi, je n'ai pas de problème. Je n'ai
pas de problème avec ça parce qu'on est rendus en 2023, et il y a des
situations qui n'étaient pas là quand ça a été développé, puis que là,
maintenant, ça peut être amélioré.
Alors, nous, ce qu'on dit, c'est
qu'essayons que tout le monde soit plus prudent, soit plus vigilant dès le
départ puis de façon annuelle pour qu'effectivement on se retrouve avec moins
de situations qui doivent aller au commissaire à l'éthique. Alors, si la... Mme
la commissaire a congé parce qu'il ne se passe rien pendant six mois, bien,
tant mieux...
M. Lemieux : Tant mieux.
Mme Dionne
(France) :...tant mieux, en tant que tel.
M. Lemieux : Merci beaucoup,
mesdames. Le président me fait des gros yeux. Merci, mesdames.
Le Président (M.
Bachand) :Merci. Non, non. Alors, M. le
député de Nelligan, pour 12 minutes 45 secondes. M. le député, s'il vous plaît.
M. Derraji : Merci, M. le
Président. Chères collègues, merci. Merci de venir en commission. Merci pour
votre analyse. Merci pour la lettre. Je vais terminer mes mercis. Merci de
prendre le temps de venir nous éclairer et de nous faire part de vos
recommandations. Très, très apprécié, chères collègues.
J'ai plein de questions. Je vais reposer
la question de mon collègue parce que ça touche quelque chose que le
commissaire au lobbyisme nous a dit, qu'il voulait élargir. Sa recommandation,
c'est que... pour l'après-mandat, pour les députés non membres du conseil
exécutif. Ça veut dire que, présentement, les ministres ne peuvent pas exercer
un mandat de lobbyisme pendant deux ans, les chefs de cab, un an. Il nous
propose de l'élargir à l'ensemble de la députation, partie gouvernementale et
aussi les oppositions. Qu'est-ce que vous en pensez?
Mme Dionne
(France) :Vous... Est-ce que vous dites
qu'élargir à deux ans pour tout le monde, chefs de cabinet, ex-parlementaires,
comme les ministres qui doivent respecter le deux ans... est-ce que c'est ça,
votre question?
M. Derraji : Non, ce qu'il
disait, c'est qu'à la...
M. Derraji : ...dans les
autres provinces canadiennes et que même chez nous, l'après-mandat, ça touche
les maires, présidents d'arrondissement, préfets, président du conseil de la
communauté métropolitaine, membres du comité exécutif d'une municipalité ou
d'une communauté métropolitaine. Ce qui nous a proposé, c'est que la
restriction d'après-mandat doit dorénavant inclure les députés non membres du
Conseil exécutif, ça veut dire pas uniquement les ministres, l'élargir à
l'ensemble de la députation. J'ai posé la question : Est-ce que c'est
uniquement au niveau du gouvernement? Non, c'est l'ensemble des députés.
Donc...
Une voix : ...
M. Derraji : Et,
présentement, les chefs de cab, c'est un an, les ministres, c'est deux ans.
Donc, j'aimerais bien vous entendre sur cette recommandation.
Mme Maltais (Agnès) : Écoutez,
on n'a pas discuté beaucoup de cette recommandation-là, mais vous avez entendu
la présidente du Cercle. Tantôt, elle a transmis l'impression que nous avons
tous que le député a beaucoup de difficultés ensuite. Un député qui n'a pas de
métier dans la fonction publique, ou qui n'est pas dans le monde de l'éducation,
par exemple, ou professeur à l'université, ce n'est pas si simple se replacer
après. Je vais vous dire, je vais être bien franche, là, un des endroits où on
récupère bien les députés, je dirais, c'est souvent, justement, dans des
ressources de stratégie, de lobbying, et tout ça, parce que le député a une
connaissance fine de l'organisation gouvernementale. Mais est-ce que le député
a dans les mains le même type d'informations qu'a un chef de cabinet ou un
ministre? Mais pas du tout, pas du tout, sauf les députés qui parfois vont
avoir des mandats spéciaux. Je vais vous dire un nom, André Drolet, du député,
dans Limoilou, de Jean-Lesage, avait eu un beau mandat sur les PME. Là, il
avait eu accès au ministère, mais c'était un mandat bien précis et bien particulier.
Il y a parfois des députés qui reçoivent des mandats pointus, mais jamais, au
grand jamais, des députés n'ont accès aux informations qu'on les chefs de
cabinet ou les ministres. Alors, moi, j'ai peur qu'on les charge trop. Ce n'est
pas pour rien qu'ils ont été écartés. À l'époque, j'étais là lorsqu'on avait
parlé du code d'éthique, on disait de protéger quand même l'avenir des députés.
Je ne sais pas si France veut rajouter quelque chose. Parce que c'est le sens
que tu disais, je pense que ce n'est pas si simple, la vie d'après-mandat.
Mme Dionne
(France) :Oui, effectivement, et on a
eu... je pense que vous avez vu à la télévision, je pense, c'est au
printemps... D'ailleurs, on a... il y a une journaliste de Radio-Canada qui a
fait des entrevues avec certains ex-parlementaires qui n'avaient pas trouvé...
qui trouvaient leur vie après la politique assez difficile, d'adaptation
difficile. Alors donc, c'est une chose, mais, quand même, on doit reconnaître
que les députés, en tant que tel... et je prends les commentaires d'Agnès
Maltais, en tant que tel, tu sais, ils sont partout à travers le Québec, en
tant que tel, et ils ne veulent pas nécessairement être lobbyistes, mais ils
ont acquis, pendant tant d'années, une connaissance. C'est pour ça que pourquoi
qu'on leur dirait : Bien, pendant deux ans, vous ne pouvez pas être un
lien avec le gouvernement. Je trouve ça tout à fait inadmissible, moi, pour ma
part, parce qu'on parle des compétences et des aptitudes, en tant que tel, pour
aider même le gouvernement lui-même puis... et la seule chose, c'est toute la
question de l'éthique. Quand un ex-parlementaire prend un mandat pour le
gouvernement et il était à l'opposition, c'est sûr que, si... il doit respecter
le code d'éthique, en tant que tel, et de non-partisan, et ça, ça se comprend
très bien. Mais j'aurais beaucoup de misère à trouver... à penser qu'un
ex-parlementaire on lui dirait : Maintenant, ce n'est plus un an, c'est
deux ans.
• (18 h 20) •
M. Derraji : Oui. Non, mais
c'est... Merci beaucoup. En fait, je voulais vraiment... parce que tout à
l'heure j'ai essayé de poser la question, je ne peux pas avoir mieux que trois
ex-collègues pour nous parler d'une réalité. Et je vous remercie parce que
moi-même, j'ai été extrêmement touchée de voir le reportage. Il y avait une
collègue avec qui j'ai collaboré les quatre dernières années. C'est très
difficile, la vie après. Et vous êtes là maintenant, je serai là dans quelques
années. Donc, il faut faire attention. Mais je voulais absolument avoir l'heure
juste avec vous. Ça a été une proposition sur la table, mais vous êtes mieux
placé de nous dire si on doit aller de l'avant ou pas avec cette
recommandation. Donc, c'est très clair.
Recommandation trois : Que les
parlementaires réfléchissent à l'opportunité de prévoir, dans certaines
circonstances, un processus de consultation du commissaire par les chefs des
groupes parlementaires — vus avez déjà levé un drapeau rouge — doivent
réfléchir sérieusement à adopter cette recommandation. Pouvez-vous nous dire...
M. Derraji : ...c'est quoi,
les choses que vous voyez que c'est dangereux, ou à la limite, on ne doit en
aucun cas aller de l'avant avec ces recommandations?
Mme Dionne
(France) :Écoutez, je pense que...
peut-être Agnès, tu t'es penchée un peu plus sur ce dossier-là. Je te laisse...
Mme Maltais (Agnès) : En
fait... oui, merci, France. En fait, on était plutôt d'accord avec la
recommandation, bien que nous croyons que le chef peut parfois poser des
questions à la commissaire. Il est... Le chef est redevable de la probité, de
l'honnêteté et de l'intégrité de son caucus devant la population, via les
médias, les médias questionnent les chefs à l'instant même où il se passe... il
y a une... un indice de manque d'éthique, en quelque part, sur un député. Alors
que le chef...
M. Derraji : ...
Mme Maltais (Agnès) : Oui,
oui, doivent réfléchir sérieusement à l'opportunité d'accepter cette
recommandation, à l'adopter, parce que le processus de sélection du commissaire
par les chefs des groupes pourrait permettre, par exemple, qu'un chef qui
réalise qu'un député est dans une situation dangereuse et qu'il veut le
convaincre de sortir de cette situation-là, bien, avec un avis du commissaire,
le chef peut s'asseoir avec le député et puis lui dire : Écoute, jeune
homme ou jeune femme, il faut que tu sortes de cette situation-là, parce que
sinon on va avoir un problème. Tu as un problème d'éthique ou on va avoir un
problème médiatique. Donc, c'est important.
M. Derraji : Merci pour les
clarifications. Vous voulez utiliser l'autorité morale du chef pour avoir un
effet de levier de négociation. C'est ce que vous... par la suite. Cela peut
aussi devenir un instrument de négociation pour mettre fin à une situation
déplaisante pour toutes et tous et ainsi éviter une crise. Donc, que l'avis
soit communiqué au chef de la formation politique pour que, par la suite, lui,
il parle avec le député ou la députée concernée.
Mme Maltais (Agnès) : Oui,
mais aussi qu'un chef puisse faire... appeler la commissaire et dire :
J'ai un député qui... que je crois avoir un problème, un problème d'éthique,
est-ce que je peux te demander ton opinion? Que ce ne soit pas le député qui le
demande directement, ce qui était dans le premier code, ce qui était prévu,
mais que le chef des parlementaires puisse consulter la Commissaire sur la
situation d'un de ses députés pour ensuite parler à ce député et lui
dire : Écoute, tu dois mettre fin à cette situation-là, c'est mauvais pour
toi, c'est mauvais pour nous, c'est mauvais pour le parti, c'est mauvais pour
l'Assemblée nationale.
Parce qu'écoutez on se retrouve ici devant
une situation où ce que nous... dont nous faisons la promotion, c'est la
prévention. C'est-à-dire que, si le député quitte une situation où il est en
conflit d'intérêts ou manque d'éthique, grâce à cet avis de son chef via le
commissaire, bien, c'est intéressant pour tout le monde. On évite une crise, on
évite une médiatisation d'une mauvaise situation qui ensuite va pousser le
député à sortir puis qui va enclencher tout ça. Autrement dit, si ça peut
prévenir plutôt que guérir, c'est très bien.
M. Derraji : Oui, c'est
excellent, c'est très clair. Merci beaucoup pour les clarifications.
Recommandations cinq. Je vous ai entendues, tout à l'heure, parler du
déclenchement d'une enquête. Oui, c'est une chose grave. Oui, il y a des
répercussions. Et le collègue l'a très bien mentionné, c'est que l'effet du
déclenchement de l'enquête... et on s'entend que l'enquête, la commissaire
quand il juge recevable l'enquête, et il déclenche une enquête. Ce n'est pas...
c'est un début de processus, ce n'est pas la fin du processus, mais, une fois
le processus terminé, il y a deux cas de figure ou trois cas de figure. Mais on
dirait que l'emphase, elle est beaucoup plus sur la première phase, à savoir
l'ouverture d'enquête.
Vous, vous êtes à l'extérieur, maintenant,
vous observez tout ce qui se passe. J'imagine, vous avez vu passer plusieurs
enquêtes. C'est quoi, votre interprétation? Si on veut vraiment que le
processus soit respecté, que la commissaire ou que les personnes ou la
commissaire elle-même peut déclencher une enquête, elle a tous les droits de
déclencher une enquête, n'a pas besoin que les parties lui demandent de faire
enquête, vous, comment vous voyez tout cela?
Mme Dionne
(France) :En fait, quand on regarde la
recommandation cinq, elle se termine en tant que telle, on expose effectivement
tous ceux qui sont affectés par l'enquête en tant que telle. Puis je pense
qu'on a... Il y a des exemples que vous avez dû voir, là, du passé, où il y a
des enquêtes qui ont été... tu sais, c'est difficile pour tout le monde en tant
que tel...
Mme Dionne
(France) :...et c'est pour ça qu'on
parlait du délai de 14 jours, qui nous semblait raisonnable en tant que
tel, pour prévenir. Nous autres, c'est toujours un peu ça, hein, pour...
effectivement, s'il y a des choses à faire en tant que telles, de pouvoir
prévenir dans un délai de 14 jours maximum. Tu sais, on est prudents,
compte tenu de l'impact maintenant des médias sociaux à travers le Québec.
Alors, ça, c'est... Et vous savez, il y a des conclusions qui sont positives,
d'autres qui sont négatives, alors, quand on a fait un processus en tant que
tel... Et vous savez, c'est dur pour les gens, alors c'est pour ça qu'on
dit : Bien oui, il faut... il ne faut pas... il ne faut pas ne pas le
faire, mais peut-être d'avoir un... être étapistes, si on veut, un petit peu,
pour permettre de protéger tous les gens et de s'assurer que la vérité est là,
autour de la table, hein?
M. Derraji : Merci, encore
une fois, à vous trois. Le temps qu'il me reste est terminé, mais je vais
prendre les quelques minutes qu'il me reste pour remercier les collègues, vous
remercier. Mais je veux aussi, conformément à l'article 176 de notre
règlement... Je demande à ce que, d'ici la fin de la semaine, vous réunissiez,
M. le Président, la commission en séance de travail pour déterminer les
observations et surtout les recommandations à la lumière de l'ensemble des commentaires
que nous avons reçus tout au long de la journée. Merci beaucoup, chers
collègues. Merci à vous trois.
Des voix : Merci.
Le Président (M.
Bachand) :Merci. Donc, effectivement,
vous serez convoqués à une rencontre de... Séance de travail très bientôt.
M. le député d'Hochelaga-Maisonneuve, pour
4 min 15 s.
M. Leduc : Merci, M. le
Président. Je souscris à la proposition de mon collègue de l'opposition, c'est
une bonne idée. Salutations à nos trois ex-élues. Je me rappelle que la
formation qui m'avait le plus marqué quand j'ai été élu pour la première fois
en 2018, c'était la formation en fin de journée où est-ce qu'on avait
d'ex-députés qui venaient nous parler de leur vie, conciliation
travail-famille, pas trop boire d'alcool dans les 5 à 7 où on est invités, et
des choses comme ça. En tout cas, c'était vraiment une belle formation puis ça
m'avait vraiment marqué. Alors, je salue votre implication dans ce... dans
notre vie parlementaire à nous.
Je ne sais pas si le Cercle des
ex-parlementaires a une position sur le fameux débat alentour de la
rémunération des élus. Vous avez peut-être entendu les débats qu'il y a eus
plus tôt aujourd'hui ou les échanges en lien avec la recommandation, là, de
Maître Mignolet, là, à savoir qu'il devrait y avoir un comité indépendant
exécutoire. Je ne sais pas si le Cercle a une position là-dessus?
Mme Dionne
(France) :Écoutez, je pense que quand...
On a vu tout ce qui s'est passé quand vous avez travaillé, justement, à la
révision des salaires en tant que tels, puis des indemnités. On vous a suivis
de près. Parce qu'il y a quand même l'expérience passée, et je pense que le
rapport qui a été préparé en fonction des recommandations, c'étaient deux
ex-parlementaires qui étaient là. Alors, c'est certain que, peut-être, si ça
avait été un juge, peut-être que, pour avoir fait les mêmes recommandations, ça
serait différent.
Mais il n'en demeure pas moins que nous,
ce qui nous importait de le plus en tant que tel, c'était un autre élément dont
on n'a pas pu parler en tant que tel, c'est les pensions des ex-parlementaires.
Parce qu'à ce niveau-là il y a un historique, hein? Il y a une partie des
ex-parlementaires toujours vivants qui ont eu indexation totale, une partie qui
ont indexation seulement si l'inflation est de plus de 3 %, et par la
suite, il y a eu aussi d'autres éléments qui ont été ajoutés, par la suite.
Donc, nous, notre mention, c'est une question d'équité. Alors, on se dit :
quand on a été ex-parlementaire, et, quel que soit le moment en tant que tel,
je pense que... et il y a des ex-parlementaires, vous savez, qui n'ont que leur
pension d'ex-parlementaires, et ça doit être très difficile, ces temps-ci. Mais
cette année, pour la première fois, l'indexation a été donnée à ceux qui
n'avaient pas d'indexation dans le passé. Alors, vous comprenez que nous, c'est
beaucoup plus notre préoccupation. Je sais que des parlementaires actuels, les
partis politiques ont fait leur travail avec diligence et, bon, alors il y a eu
un choix qui a été fait, une décision. Mais nous, notre préoccupation était
beaucoup plus au niveau de l'équité des pensions des ex-parlementaires.
• (18 h 30) •
M. Leduc : Je comprends.
Donc, pas de position formelle sur le mode à suivre par rapport à la révision
de la rémunération?
Mme Dionne
(France) :En fait, je pense que vous
êtes... Si j'ai bien compris, vous avez... Les prochaines augmentations vont
être au même moment que des... les cadres supérieurs de la fonction publique.
M. Leduc : Ça, c'était déjà
dans la loi. Ça fait... C'était déjà dans la loi.
Mme Dionne
(France) :bon, c'était déjà là, donc,
bon, alors c'est comme ça. Je pense que...
M. Leduc : O.K. Parfait. Sur
la... j'ai été bien sensible à votre argumentaire sur les demandes d'enquête
puis l'impact que ça peut avoir sur les élus en cours, sur leur famille, sur
leur environnement, leur... J'essaie de réfléchir, tu sais, au-delà de...
Est-ce que c'est une culture? Est-ce que vous pensez que la commissaire, le ou
la commissaire se sent obligé de répondre à chacune des demandes d'enquête...
18 h 30 (version non révisée)
M. Leduc : ...qui peuvent
provenir des oppositions. Est-ce qu'elle ne pourrait pas avoir le droit de
dire, bien, cette demande-là, prima facie, elle me semble un peu farfelue ou
manque de substance, et écarter la demande d'enquête? Est-ce que vous pensez qu'elle
se sent obligée de dire oui à tout ce qu'on lui propose de faire?
Mme Dionne (France) :Je vais laisser ma collègue Agnès, peut-être, répondre,
parce qu'elle a travaillé un peu, dans le passé, sur le code d'éthique, là.
Mme Maltais (Agnès) : Je ne
crois pas que la commissaire se sente obligée. Elle a une énorme
responsabilité. Je pense aussi que, quand les députés déposent une demande d'enquête,
ils sont sérieux. Je vous dirais que la commissaire a noté aussi qu'avant les
élections il en était tombé, parfois, beaucoup, ce qui est peut-être un signe
de période plus difficile à vivre, médiatiquement, pour les enquêtes. Mais ce
que je note, surtout, de la recommandation, c'est qu'elle demande une enquête
préliminaire. Là, on n'est pas entrés dans les détails, mais c'est sûr que, si
tu fais une enquête préliminaire, tu peux aller chercher des documents, tu peux
rencontrer le député. Tu n'es pas en processus d'enquête, mais tu as déjà,
comme, l'approbation de l'Assemblée nationale et des députés pour commencer la
discussion. Et peut-être que la discussion va s'arrêter très vite. Mais avant d'aller
chercher des documents, puis tout ça, bien, la commissaire doit donc se mettre
en branle, avoir un mandat d'enquête.
C'est pour ça que l'enquête... On dit
«enquête préliminaire», mais ce serait une étude préalable du cas avant de
faire une enquête. Si c'était bien inscrit, mieux inscrit dans le code, elle
pourrait peut-être le faire de façon un peu plus formelle, sans ameuter encore,
là, la place publique. Moi, je pense qu'il y a... elle cherche un intermédiaire
qui permettrait de bien comprendre le dossier, mais de ne pas être déjà en
processus d'enquête. On trouve que ça a bien de l'allure.
Le Président (M.
Bachand) :Merci beaucoup. Alors, on
termine nos auditions avec vous, mesdames. Ça a été un grand privilège. Merci d'avoir
participé aux travaux de la commission.
Et, compte tenu de l'heure, la commission
ajourne ses travaux au jeudi 23 novembre 2023, après les avis
touchant les travaux des commissions, où elle va entreprendre un nouveau
mandat. Merci beaucoup, à bientôt, au revoir.
(Fin de la séance à 18 h 34)