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Version finale

42e législature, 1re session
(27 novembre 2018 au 13 octobre 2021)

Le mardi 9 mars 2021 - Vol. 45 N° 122

Étude détaillée du projet de loi n° 84, Loi visant à aider les personnes victimes d’infractions criminelles et à favoriser leur rétablissement


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Table des matières

Étude détaillée (suite)

Intervenants

M. André Bachand, président

M. Simon Jolin-Barrette

M. Marc Tanguay

Mme Kathleen Weil

Mme Christine Labrie

M. Louis Lemieux

Mme Véronique Hivon

Journal des débats

(Neuf heures trente-quatre minutes)

Le Président (M. Bachand) : Bonjour. À l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission des institutions ouverte.

La commission est réunie afin de poursuivre l'étude détaillée du projet de loi n° 84, Loi visant à aider les personnes victimes d'infractions criminelles et à favoriser leur rétablissement.

Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements?

La Secrétaire : Oui, M. le Président. M. Zanetti (Jean-Lesage) est remplacé par Mme Labrie (Sherbrooke).

Le Président (M. Bachand) : Merci beaucoup. Je vous rappelle qu'en fonction des mesures de distanciation physique énoncées par la Santé publique vous devez conserver votre place assise en commission. De plus, le port du masque de procédure est obligatoire en tout temps, hormis au moment de prendre la parole dans le cadre de nos travaux. Avant de débuter formellement, je vous informe que les votes pour ce mandat devront se tenir par appel nominal, et ce, jusqu'au 2 avril 2021.

Étude détaillée (suite)

Lors de la suspension de nos travaux le jeudi 18 février 2021, il a été convenu de suspendre l'étude des articles 3 à 9, de l'article 16, de même que l'amendement proposé par le ministre visant à remplacer l'article 16. Nos discussions portaient sur l'article 20 amendé du projet de loi. Interventions? M. le ministre.

M. Jolin-Barrette : Oui, bonjour, M. le Président. Un plaisir de vous retrouver depuis ces deux dernières semaines. D'entrée de jeu, je souhaite informer les collègues que, sur le site Greffier, il y aura un amendement. En fait, on va retirer l'amendement à l'article 16 pour le remplacer par un nouvel amendement. C'est une modification qui est mineure, suite aux commentaires de certains groupes que nous avons eus. Donc, on va enlever «menace de violence réelle», on va supprimer «réelle», ça sera le seul changement, mais on le fera, un dépôt officiel, tout à l'heure, à l'article 16.

Également, M. le Président... C'est ça. Donc, ce que je vous propose, pour les membres de la commission, c'est de terminer l'article 20 et ensuite de revenir à l'article 16 pour pouvoir étudier l'amendement.

Le Président (M. Bachand) : Parfait.

M. Jolin-Barrette : On est rendus à l'article 20, M. le Président, avec un amendement qui a été adopté, je crois.

Le Président (M. Bachand) : Effectivement. Interventions? M. le député de LaFontaine, s'il vous plaît.

M. Tanguay : Oui, M. le Président. Alors, j'aimerais savoir où est rendu le ministre dans sa collecte de données. Je ne lui ai pas envoyé un subpoena duces tecum, mais juste lui rappeler rapidement, 30 secondes, nous attendons toujours, s'il vous plaît, s'il vous plaît, les statistiques sur les rentes viagères, le nombre de victimes, le coût des rentes, l'évaluation, si le viager était resté dans 84, de un, de deux, réitérer la demande à l'IVAC, et vous avez eu copie de la lettre du 25 février, que nous avons envoyée, que j'ai signée et envoyée à vous, M. le Président, en copie, et aux collègues de l'opposition, donc les demandes à l'IVAC, le pourcentage des contre-expertises demandé par l'IVAC, la ventilation du 193 millions, au niveau des années, l'exonération quant à l'aide sociale, à savoir où en est la réflexion du ministre.

Alors, je voulais juste rappeler ça, en début de nos travaux, rapidement, M. le Président. Je ne sais pas si le ministre a déjà toute partie de ça.

M. Jolin-Barrette : Bien, en fait, pour la question des calculs, on est encore en train de travailler sur les hypothèses, parce que, dans le fond, ce que le député de LaFontaine demande, c'est d'avoir des hypothèses, des comparatifs, donc on va pouvoir lui revenir.

Pour ce qui est de l'exonération au niveau de l'aide sociale, il y a des travaux qui sont faits actuellement. Donc, on regarde pour... comme la discussion qu'on a eue. Ce que je peux vous donner d'entrée de jeu, c'est... Vous avez demandé, dans le fond, les aides financières qui allaient être données. Donc, on a préparé un tableau pour chacune des catégories des personnes victimes. Ça, on va pouvoir le faire parvenir au secrétariat de la commission où est-ce que, pour chacune des catégories des personnes, dans le fond, ce qu'on prévoit, ce qui va être prévu par règlement, ce qu'on va donner comme aide financière, notamment aide psychologique, remplacement de revenu, tout ça, ça, ça va nous aider pour la prochaine section pour qu'on ait en main... on sache de quoi on parle. Mais donc, pour la suite des demandes, on vous revient, là, parce que, dans le fond, ce qui est demandé par le député de LaFontaine, c'est de la création de scénarios, entre autres. Donc, on va vous revenir avec la différence avec la rente viagère versus le montant forfaitaire.

Le Président (M. Bachand) : M. le député LaFontaine, oui.

M. Tanguay : Bien, moi, j'étais sur l'impression que ce n'était pas la création qui était déjà existante. Les scénarios, notamment, quant à la rente viagère et à son impact avant et post-84, puis, la ventilation de 193, ça doit exister. Et les pourcentages de contre-expertise demandés par l'IVAC, ça, si le ministre peut mettre la main là-dessus, ça serait intéressant.

M. Jolin-Barrette : Ça, on va vérifier, mais, dans le fond, la différence entre rente viagère, montant forfaitaire, il faut créer des scénarios parce que ce n'est pas quelque chose qui existe, là. Dans le fond, là, la fin des rentes viagères, dans le fond, c'est un remplacement par l'indemnité forfaitaire, donc ça demande d'évaluer les différents scénarios. Donc, comme je vous le disais lors des séances précédentes, c'est vraiment propre à chaque personne. Dans le fond, chacune des situations de chacune des personnes qui peut présenter sa demande à l'IVAC, ça change en fonction de chacun des paramètres. Parce que vous comprendrez qu'il y a l'incapacité permanente de la personne, son pourcentage, l'âge auquel elle a. Ça fait que c'est pratiquement impossible d'avoir un seul... bien, en fait, ce n'est pas possible d'avoir un seul scénario qui dit : Voici la distinction entre les rentes viagères versus les sommes forfaitaires.

Donc, à certains moments, tout dépendamment de l'âge de la personne, tout dépendamment de la durée de l'incapacité, et tout ça, il y a plein de cas d'espèce. Alors, on est en train de travailler sur vous présenter quel est... en gros, les distinctions, mais ce n'est pas quelque chose qui est applicable à toutes les personnes victimes.

• (9 h 40) •

M. Tanguay : M. le Président, vous connaissez déjà, détrompez-moi si j'ai tort, le nombre de personnes bénéficiant de rentes viagères et le coût que ça représente annuellement.

M. Jolin-Barrette : Oui.

M. Tanguay : O.K. Donc, ça, ce tableau-là, cette information-là, on pourrait l'avoir.

M. Jolin-Barrette : Oui, oui.

M. Tanguay : J'étais sous l'impression que vous aviez affirmé que l'hypothèse avait été également demandée, vous aviez eu l'information quant à la poursuite de ces rentes viagères là sous l'égide du 84.

M. Jolin-Barrette : Bien, pas sous l'égide du 84, sous l'égide de l'ancien régime.

M. Tanguay : O.K. Ça fait que vous n'avez pas d'évaluation de ce que ça coûterait si on gardait les rentes viagères possibles sous 84.

M. Jolin-Barrette : Bien, c'est parce qu'il faudrait le calculer en fonction de toutes les nouvelles personnes victimes, entre autres, aussi. Donc, c'est exponentiel, donc c'est difficile d'évaluer tout ça. Mais on va travailler sur quelque chose puis on est en train de regarder ça.

M. Tanguay : O.K. Puis juste compréhension, donc, vous aviez dit, de façon plus globale, il était en rédaction, un tableau sur les différents aspects, puis je ne sais pas si je peux avoir plus d'information.

M. Jolin-Barrette : Dans le fond, ça, on va la transmettre au secrétariat.

M. Tanguay : Vous l'avez déjà? O.K.

M. Jolin-Barrette : On l'a déjà. Dans le fond, pour chacune des catégories de personnes victimes, vous allez avoir les aides qui sont envisagées, qu'on va donner à chacune des catégories de personnes victimes.

M. Tanguay : Puis on peut avoir ça ce matin, oui?

M. Jolin-Barrette : Oui.

M. Tanguay : O.K., merci.

Le Président (M. Bachand) : Mme la députée de Notre-Dame-de-Grâce.

Mme Weil : Excusez-moi, je me demande si c'était... On avait parlé d'un napperon ou d'un genre de schéma. Ce serait ça?

M. Jolin-Barrette : Oui. Ça va être un tableau, exactement.

Mme Weil : O.K., excellent.

Le Président (M. Bachand) : Merci. Donc, l'article 20, interventions? M. le député de LaFontaine.

M. Tanguay : Oui. À l'article 20, j'avais une discussion avec le ministre, et je vais remettre la main sur l'article 20. Vous savez, par rapport à la date de mars 1972, il y avait la possibilité pour nous de déposer un amendement qui ferait en sorte d'ajouter, dans le troisième alinéa de l'article 20, après les mots «en tout temps», «nonobstant la définition d'infraction criminelle à l'article 13,». Parce qu'on sait qu'à la définition de l'infraction criminelle à l'article 13 il y a ce mur : «Toute infraction prévue au Code [...] perpétrée [avant] le 1er mars 1972». Alors, ce qu'on dit à l'article 20 fait en sorte d'instaurer une imprescriptibilité qui fait écho de l'article 2926.1 du Code civil du Québec quant à trois types d'infraction : violence subie pendant l'enfance, agression à caractère sexuel ou violence conjugale, et ça, c'est imprescriptible, ça veut dire indépendamment du moment de la perpétration.

Donc, ce qu'on dit, c'est qu'on fait écho de 2926.1 du Code civil du Québec qui fait en sorte qu'il n'y a pas de mur au 1er mars 1972 dans le contexte du Code civil du Québec si vous voulez poursuivre au civil. Mais dans... Puis on fait copier-coller, on fait miroir dans l'IVAC, dans le régime de l'IVAC proposé, mais on conserve, par l'action de l'article 13, la définition de l'acte criminel, le mur du 1er mars 1972. Puis le ministre avait répondu par l'affirmative lorsque je lui avais posé la question : Donc, vous réalisez qu'il serait possible pour une personne, dont les faits reprochés datent du 1er mars 1971, de poursuivre au civil, oui, mais qu'il n'y aurait pas, le cas échéant, d'indemnisation en vertu de l'IVAC. Non, il n'y en aurait pas, effectivement.

Alors, si vous le permettez, M. le Président, j'aimerais déposer l'amendement. Puis la discussion... J'ai pas mal résumé mon intervention là-dessus, mais j'aimerais qu'on puisse statuer sur ça. Alors, il est rédigé. Je pense qu'il est en route.

Le Président (M. Bachand) : Parfait.

M. Tanguay : On peut peut-être suspendre, je ne le sais pas.

Le Président (M. Bachand) : Interventions sur... M. le ministre.

M. Jolin-Barrette : Bien, M. le Président, faisons le débat tout de suite, en attendant que l'amendement soit...

M. Tanguay : Bien, je peux peut-être vous le lire formellement, comme ça, ça serait fait.

Le Président (M. Bachand) : S'il vous plaît, oui. S'il vous plaît.

M. Tanguay : Alors, le dépôt en a été fait formellement. Alors, amendement, article 20 : Ajouter dans le troisième alinéa de l'article 20, après les mots «en tout temps», «nonobstant la définition d'infraction criminelle de l'article 13,». Voilà.

Le Président (M. Bachand) : Merci. M. le ministre.

M. Jolin-Barrette : Oui. Donc, peut-être, sur l'amendement, je comprends le souhait du député de LaFontaine, dans le fond, de rendre imprescriptible au-delà de 1972. Il faut comprendre que le fait de rendre imprescriptible, comme nous le faisons, à partir de 1972, c'est la date de création du régime, M. le Président. Donc, incidemment, le facteur de rattachement que nous avons pour l'imprescription rétroactive, c'est qu'on retourne jusqu'à 1972. Et ça, c'est important, M. le Président, parce qu'actuellement... En fait, jusqu'en 2013, le délai de prescription, c'était un an. Le ministre St-Arnaud a changé ça à deux ans en 2013. Et nous, ce que nous faisons, c'est que nous disons : Il n'y a plus de limite pour la prescription dans les cas d'agression sexuelle... bien, en fait, dans les cas de violence sexuelle, dans les cas de violence conjugale et de violence subie pendant l'enfance. Donc, peu importe, à partir de la sanction de la loi, à quel moment vous allez... il y aura survenance de l'infraction criminelle, il n'y aura plus de délai de prescription, plus jamais, dans ces trois catégories-là. Également, ce qu'on fait, c'est qu'on amène une rétroactivité, M. le Président, jusqu'en 1972. Ça veut dire, une victime qui a été agressée sexuellement en 1975, en 1980, en 1985, 1990, en 2005, elle pourra présenter sa demande à n'importe quel moment pour le futur. Alors, pourquoi la date de 1972? C'est la date de la création du régime par l'État québécois. Alors, c'est là que le choix a été fait, à l'époque, de dire : À partir de ce moment-là, on indemnise les personnes victimes. Alors, c'est cette date-là, on rétroagit à cette date-là, M. le Président, ce qui est une avancée significative.

Et le fait de rendre imprescriptible, M. le Président, ces trois catégories, violence sexuelle, violence conjugale, violence subie pendant l'enfance, ça représente la plus grande partie de l'investissement que le gouvernement du Québec fait, parce que ça représente une grande partie, violence conjugale, violence sexuelle, des infractions qui sont demandées, l'indemnisation qui est demandée à l'IVAC. Alors, c'est le plus gros des demandes qu'on a à l'IVAC, alors c'est pour ça que j'ai voulu les rendre... et c'est majeur et significatif, M. le Président.

Le Président (M. Bachand) : Merci. Interventions? Mme la députée de Sherbrooke, s'il vous plaît.

Mme Labrie : Est-ce que ça a été évalué, ce que ça représenterait comme dépense de mettre de côté la limite de 1972? Parce que, selon ma compréhension, les victimes d'avant 1972 qui demanderaient d'être indemnisées devraient encore vivre les conséquences, là, de l'agression qu'elles ont subie avant 1972 pour être indemnisées aujourd'hui. Donc, j'imagine que ça ne représente pas un nombre si grand que ça de victimes. Est-ce qu'il y a eu une évaluation de ça?

M. Jolin-Barrette : Je ne peux pas vous dire combien, effectivement, ça coûterait, mais ce sont des sommes considérables avant 1972.

Mme Labrie : Donc, ça a été évalué?

M. Jolin-Barrette : Bien, je crois que oui. Me Grenier, ça a été évalué? Ça a été évalué, oui, puis ça constitue des sommes considérables.

Mme Labrie : Est-ce que c'est possible de nous dire le montant puisque l'étude a été faite? Je serais curieuse de voir, tu sais, ça nous permettrait de prendre une décision...

M. Jolin-Barrette : Bien, c'est toujours des chiffres hypothétiques, mais ça représente des millions de dollars.

Mme Labrie : Des millions, comme 5 ou comme 800? Ce n'est pas la même chose. Si ça a été évalué, est-ce que vous pouvez juste nous le dire, là, le montant?

M. Jolin-Barrette : Des millions avec un «s», mais je ne peux pas précisément dire combien ça coûte, parce qu'il n'y a pas de facteur qui me permette de dire : Il va y avoir x nombres de victimes qui vont faire x nombres de réclamations. Ça fait que je ne voudrais pas m'avancer pour dire : Ça va être 15, ça va être 20, ça va être 30, ça va être 40 millions. Je ne peux pas vous le dire, cette information-là, ça dépend du nombre de victimes qui s'adresserait, mais ça représente des sommes considérables. Puis, pour l'État québécois, le fait de retourner à 1970, à la date de la création du régime, ça m'apparaît être une date qui est importante, et, bien entendu, je voudrais pouvoir indemniser rétroactivement l'ensemble des personnes victimes agressées sexuellement, qui ont subi de la violence conjugale ou de la violence subie pendant l'enfance. Ça serait mon désir, mais on travaille avec des paramètres, notamment, qui sont financiers. Et l'effort collectif de l'État québécois, avec la réforme que nous faisons actuellement, il est majeur, 193 millions de plus sur cinq ans.

Puis, dans le fond, le plus gros investissement du gouvernement du Québec est rattaché à ça, au fait qu'on rend ça rétroactif. Et surtout, puis là je ne l'ai pas mentionné tout à l'heure, mais, pour les personnes qui se sont fait dire — supposons qu'elles ont été agressées sexuellement, qui se sont adressées à l'IVAC entre 1972 puis aujourd'hui, bien, aujourd'hui, date de la sanction du projet de loi — qui se sont fait dire, juste par le seul écoulement du temps : Bien oui, on reconnaît que vous avez été victimes d'agression sexuelle, mais je suis désolé, vous n'avez pas présenté votre demande dans l'année que vous deviez le faire, donc on ne vous aide pas, ça, je dis : On revient sur cette décision-là, ce qui est une chose très rare en droit, très, très rare, puis on dit : On vous permet de réactiver votre dossier pour les trois prochaines années pour représenter une demande. Ça aussi, ça représente des sommes qui sont importantes, qui sont considérables. Mais j'ai bien entendu, notamment, le CRIPHASE, qui disait : Écoutez, on a beaucoup d'hommes qui ont été agressés sexuellement avant 1972. Je le sais, j'en suis conscient. Je fais le plus possible, le plus loin que je peux aller, c'est jusqu'à la création du régime en 1972.

Mme Labrie : Je comprends ça, c'est juste que c'est un peu contradictoire, parce que moi, j'ai demandé s'il y a une évaluation qui avait été faite. Le ministre m'a dit oui. Son collègue juste à côté a hoché la tête. Puis après ça je demande c'est quoi, l'évaluation... Puis je le sais que c'est une estimation. C'est sûr que personne ne peut savoir exactement combien de personnes puis combien ça va coûter, mais là on me dit oui puis, en même temps, on refuse de me donner ce chiffre-là. Je demande juste le chiffre, en fait, là. Je veux dire, je serais surprise que l'évaluation soit on pense que ça va coûter trop cher. J'imagine qu'il y a eu une évaluation, quand même, avec des montants. Est-ce que c'est seulement possible de nous en faire part, à combien ça a été chiffré, ce que ça représentait avant 1972? J'aimerais ça me donner un ordre de grandeur, là, de la raison... Je comprends que c'est des raisons financières pourquoi vous ne voulez pas aller là, mais c'est de quel ordre? Si vous l'avez évalué, pourquoi vous ne nous dites pas c'est combien?

• (9 h 50) •

M. Jolin-Barrette : Bien, parce que les chiffres, ce sont des hypothèses. Moi, je vous dis que c'est des sommes qui sont importantes. Puis, dans ce contexte-là, je ne les rendrai pas publiques, parce que ce sont des hypothèses qui ont cours, alors... Mais je peux vous dire que ce sont des sommes importantes. Juste le montant qu'on ajoute du 193 millions pour l'imprescriptibilité pour le futur, pour le passé aussi, ça témoigne de ce fait-là. Mais...

Mme Labrie : C'est juste que des sommes importantes, ça ne veut pas dire la même chose pour le ministre puis pour moi, là. Par exemple, hier, il pensait avoir annoncé des sommes importantes, là, pour l'impact de la pandémie sur les femmes, puis, à mon avis, ce n'était pas des sommes importantes. Donc, j'aimerais quand même avoir le chiffre. On le sait, que c'est une estimation, puis que ce sont des hypothèses, mais pourquoi on ne rendrait pas publique cette estimation-là en la présentant comme telle? Il y a des documents qui sont rendus publics, par exemple, sur les prévisions budgétaires, qui sont des estimations aussi, de croissance, je veux dire, ça arrive régulièrement qu'il y a des documents qui sont rendus publics, qui reposent sur des estimations puis pour lesquels on n'a aucun moyen de vérifier si ça va s'avérer comme données, mais on peut quand même les rendre publics, par transparence.

M. Jolin-Barrette : Je comprends, je comprends le désir de la députée de Sherbrooke, mais, comme je vous dis, à ce stade-ci, ce sont des hypothèses sur lesquelles je ne souhaite pas divulguer les chiffres, considérant le fait que ça constitue des hypothèses qui sont, en soi, élevées, mais je pense que le facteur de rattachement à 1972 est un bon facteur de rattachement. Puis l'autre élément aussi, c'est que, vous savez, on ignore le nombre de personnes qui ont été agressées sexuellement avant 1972 aussi.

Vous savez, déjà, actuellement, il y a des difficultés pour certaines personnes de dénoncer, alors qu'on fait tout en notre pouvoir pour transformer la façon dont ça se passe, pour améliorer l'accompagnement avec les personnes victimes. Alors, pré-1972 aussi, ce n'était pas la même dynamique du tout, du tout, du tout.

Le Président (M. Bachand) : Mme la députée de Sherbrooke.

Mme Labrie : C'est précisément la raison pour laquelle on devrait aussi aider ces gens-là, qui étaient dans un climat social, avant 1972, dans lequel c'était pratiquement impossible de dénoncer des violences sexuelles. Je ne m'explique vraiment pas, là, les arguments du ministre pour ne pas rendre public un chiffre, si le travail a été fait. Puis on nous confirme avec des hochements de tête qu'il a été fait, le travail, de l'évaluer. À ce moment-là, montrez-nous le travail qui a été fait, puis on pourra en juger, de ce que ça représente comme somme.

M. Jolin-Barrette : Moi, M. le Président, je ne peux pas communiquer un chiffre, alors que, sur ce chiffre-là, ça comprend potentiellement beaucoup de victimes qu'on n'a aucune idée. Alors, ça ne rendrait pas service de dire : Voici le montant, ou voici l'estimé, ou voici l'hypothèse.

Mme Labrie : ...plus aucune idée du nombre de victimes après 1972, puis ça ne nous empêche pas de prendre une décision quand même en choisissant 1972. Le ministre est assurément incapable, puis, moi non plus, je suis incapable de dire ce chiffre-là, combien il y aura de victimes depuis 1972 qui vont, tout d'un coup, démontrer de l'intérêt pour le nouveau régime, puis ça ne nous empêche pas d'agir quand même. Donc, ce n'est pas un argument valable de dire : On ne sait pas combien il y en aurait avant 1972, là.

Le Président (M. Bachand) : Merci. Interventions?

M. Jolin-Barrette : Je comprends l'argument de la députée de Sherbrooke. Je le comprends.

Le Président (M. Bachand) : Mme la députée de Sherbrooke.

Mme Labrie : Bien, c'est un manque de transparence déplorable, d'autant plus que le travail a été fait, on nous le dit. À limite, s'ils ne l'avaient pas fait, l'exercice, on pourrait leur demander de le faire. Ils pourraient décider de ne pas le faire. Mais, je veux dire, le calcul a été fait, il y en a eu une, une évaluation, il y a des fonctionnaires qui ont travaillé là-dessus, qui se sont affairés à chiffrer ce que ça pouvait représenter, puis là on refuse de nous rendre compte du fruit de ce travail-là. Ça a été quand même payé avec des fonds publics, cette évaluation-là. Comment ça se fait qu'on n'est pas capable de savoir à combien les fonctionnaires ont chiffré ce que ça coûterait pour rendre le régime accessible pour les personnes qui ont subi le crime avant 1972? Comment ça se fait qu'on n'a pas cette transparence-là de rendre public le travail qui a été fait par nos fonctionnaires avec des fonds publics? C'est quand même une information pertinente.

Le Président (M. Bachand) : Interventions?

M. Jolin-Barrette : Mais, M. le Président, je comprends les prétentions de la députée de Sherbrooke. Cela étant dit, considérant que ça amène plusieurs hypothèses, considérant que l'évaluation que nous pouvons faire en fonction de l'absence de victimes connues, on se retrouve avec certaines difficultés. Donc, c'est pour ça qu'on a fixé, au 1er mars 1972, la date — la date que le législateur québécois, à l'époque, a décidé de mettre en place le régime.

Mme Labrie : C'est très insatisfaisant.

Le Président (M. Bachand) : Merci, Mme la députée. M. le député de LaFontaine.

M. Tanguay : Non, ça va, M. le Président. J'ai eu l'occasion de faire mon argumentaire par rapport à cet amendement-là. Le fait de l'avoir déposé formellement va nous... va forcer tout le monde autour de la table à statuer formellement. On sait où loge le ministre. Moi, je pense que le fait d'expliquer pourquoi c'est ça, la date, on le sait, l'historique, le régime a commencé à cette date-là... mais on peut voir les choses telles quelles sont et se demander pourquoi, puis on peut les imaginer comme elles le seraient ou pourraient l'être, puis se dire : Pourquoi pas? Ça, c'est George Bernard Shaw dans une traduction libre.

Alors, j'aurais invité le ministre à suivre cet exemple-là, surtout que résonne encore, puis je terminerais là-dessus, M. le Président, résonne encore à nos oreilles le témoignage de cette dame qui, au nom de la CRIPHASE, Centre de ressources et d'intervention pour hommes abusés sexuellement dans l'enfance, est venue nous dire... puis on ne parle pas de milliers, mais on parlait quand même de quelques centaines. C'est la seule évaluation que l'on a. On n'aura pas les chiffres malheureusement. Mais je pense que ça vaut réellement la peine de faire sauter cette date-là, ce mur historique là, justement faire sauter ce mur historique là, pour donner pleine application de l'expression «imprescriptibilité». Voilà, M. le Président.

Le Président (M. Bachand) : Interventions sur l'amendement du député de LaFontaine? S'il n'y a pas d'autre intervention, nous allons procéder à sa mise aux voix. Mme la secrétaire.

La Secrétaire : Pour, contre, abstention. Pour les membres de l'opposition officielle, M. Tanguay (LaFontaine)?

M. Tanguay : Pour.

La Secrétaire : M. Jolin-Barrette (Borduas)?

M. Jolin-Barrette : Contre.

La Secrétaire : Pour les membres du groupe parlementaire formant le gouvernement, M. Lemieux (Saint-Jean)?

M. Lemieux : Contre.

La Secrétaire : Mme Hivon (Joliette)?

Mme Hivon : Pour.

La Secrétaire : M. Bachand (Richmond)?

Le Président (M. Bachand) : Abstention. Donc, l'amendement est rejeté. On retourne maintenant à l'étude de l'article 20 tel qu'amendé. M. le député de LaFontaine.

M. Tanguay : Oui. J'ai envoyé, M. le Président, puis vous voyez qu'il s'agit ici, donc de faire suite aux discussions que nous avons eues, et là je le dépose de façon plus formelle, un amendement à l'article 20. Je crois qu'il est déjà rendu sur Greffier. Je peux déjà, M. le Président, vous informer qu'il s'agit d'un amendement au début de l'article 20, qui fait, lui aussi, écho à la logique, aux avancées sociales qui ont été réalisées à l'intérieur de l'article 2926.1. C'est le 10 ans du début de 2926.1.

Alors, l'amendement ferait en sorte de faire passer de trois ans à 10 ans. La demande que qualification doit être présentée dans les trois ans qui suivent la connaissance. L'article, je l'ai ici... Ah! je ne l'ai pas encore. En tout cas, on pourrait peut-être suspendre, M. le Président. Je pourrais en faire la lecture puis, après...

Le Président (M. Bachand) : Si vous pouvez en faire la lecture, oui.

M. Tanguay : Pardon?

Le Président (M. Bachand) : Est-ce que vous l'avez devant vous?

M. Tanguay : Je ne l'ai pas devant moi.

Une voix : ...

• (10 heures) •

M. Tanguay : Ah! Attendez. Je l'ai peut-être ici. Ne bougez pas. Oui. Alors, M. le Président, l'amendement se lit comme suit : Article 20. Dans le premier alinéa de l'article 20, modifier «trois» par «10».

Donc, M. le Président, l'article se lirait comme suit :

«La demande de qualification doit être présentée dans les 10 ans qui suivent la connaissance, par la personne victime...»

Je finis là ma citation du premier alinéa de l'article 20. Pourquoi? Quelle est la logique derrière ça? 2926 fait en sorte que l'action en réparation — ça, c'est le Code civil du Québec, 2926.1 — l'action en réparation du préjudice corporel résultant d'un acte pouvant constituer, constituer une infraction criminelle se prescrit par 10 ans. Autrement dit, les recours civils, vous avez une prescription de 10 ans, si vous poursuivez en réparation d'un préjudice corporel suite à un acte qui pourrait constituer une infraction criminelle. Là, on est en plein, en plein, en plein dans le projet de loi n° 84, l'indemnisation des victimes d'actes criminels.

Donc, ce sont des gestes... ce sont exclusivement des actes criminels contre la personne qui, évidemment, ont résulté en des dommages. Ici, on parle de dommages corporels et psychologiques... psychiques, le nouveau terme. Alors, Code civil qu'on a amendé collectivement, puis on a déjà fait l'évolution historique, ça fait en sorte que vous avez un droit de poursuite civile de 10 ans. Là, au niveau de l'indemnisation, c'est trois ans. On pense qu'en toute cohérence, en toute logique, si c'est justifiable de pouvoir permettre une poursuite au civil selon un mode de prescription de 10 ans, nous croyons qu'il est tout aussi justifiable de permettre le dépôt d'une demande d'indemnisation dans la même période de 10 ans. Alors, voilà, M. le Président.

Le Président (M. Bachand) : Merci, M. le député de LaFontaine. Interventions? M. le ministre.

M. Jolin-Barrette : Oui, laissez-moi juste une seconde, j'essaie de... Donc, dans le premier alinéa de l'article 20, modifier «trois» par «10».

Donc, la demande de qualification doit être présentée dans les... ce serait dans les 10 ans qui suivent la connaissance, par la personne victime, du préjudice qu'elle subit en raison de la perpétration de l'infraction criminelle, ou dans les trois ans d'un décès dû à la perpétration d'une infraction criminelle, selon le cas. Alors, je vais vous demander de suspendre juste une seconde, M. le Président.

Le Président (M. Bachand) : Alors, nous allons suspendre les travaux quelques instants. Merci.

(Suspension de la séance à 10 h 01)

(Reprise à 10 h 02)

Le Président (M. Bachand) : À l'ordre, s'il vous plaît! La commission reprend ses travaux. C'était vraiment quelques instants. Alors, M. le ministre.

M. Jolin-Barrette : Oui, M. le Président. Je comprends ce qui est souhaité par le député de LaFontaine d'amener de trois ans à 10 ans le délai pour présenter une demande lorsque ce n'est pas imprescriptible, et le député de LaFontaine, à juste titre, fait la comparaison avec le Code civil du Québec, où, dans le cadre de 29.26, le délai est à 10 ans.

Il faut comprendre que, dans un premier temps, dans le Code civil du Québec, la demande, elle est faite à l'encontre de deux parties privées, généralement, ou de l'État, mais, en tant que partie privée, pour une faute qui a été commise, et donc ça fait en sorte que les parties privées... dans le fond, on donne un droit au citoyen de poursuivre la personne auteure du préjudice qui lui a été soumis.

Dans le cas du régime de l'IVAC, on est passé, historiquement, jusque... de 1972 à 2013, d'un délai d'une année... donc c'était une année, le délai, pour faire la demande. Ensuite, en 2013, le ministre St-Arnaud a fait passer d'un an à deux ans le délai, donc d'une année à deux ans. Et nous, ce que nous proposons avec l'article, c'est d'aller encore plus loin pour que les gens qui ont été victimes d'infractions criminelles aient trois ans pour présenter leur demande à l'IVAC. Le tout, et il ne faut pas l'oublier... et on l'a modifié en fonction... Avant, on parlait de l'incapacité, en fait, d'agir, maintenant, on va parler de moyens... bien, de moyens raisonnables, l'incapacité, en termes de... pour des motifs raisonnables, des motifs raisonnables, et donc on assouplit le critère de l'incapacité, en fait, d'agir, mais sur le délai de 10 ans, M. le Président, effectivement, nous maintenons une distinction avec le Code civil du Québec, c'est un régime d'indemnisation, l'IVAC, avec des fonds publics, donc à l'intérieur de trois ans, nous amenons ce délai.

Le Président (M. Bachand) : Merci. M. le député de LaFontaine.

M. Tanguay : Ce que j'avais trouvé intéressant, puis, des fois, en droit, on essaie de trouver une logique d'une règle de droit puis on réinvente souvent la roue dans son coin, mais, finalement, à un moment donné, on tombe sur une source, que ce soit une doctrine, que ce soit... évidemment, on prend pour acquis que ce n'était pas prévu dans la loi, que ce soit une jurisprudence, puis là le droit se développe, mais les concepts sont importants à définir.

Pourquoi la prescription? Et je le dis bien maintenant, c'est Michaël Lessard, Me Michaël Lessard est venu nous dire ça sert à quoi, la prescription. Essentiellement à trois choses : la stabilité des patrimoines et des relations juridiques, de un, de deux, éviter le dépérissement de la preuve et, trois, sanctionner la négligence des créanciers. Donc, le troisième, «sanctionner la négligence des créanciers», M. le Président, c'est que, c'est bien de valeur, mais si vous aviez une dette puis vous dites à tout le monde que vous avez une dette, vous avez une dette puis que vous ne poursuivez pas, bien, dans trois ans, on va dire : Ça suffit, vous aviez trois ans pour le faire, arrêtez de dire à tout le monde que vous avez une dette, puis vous aviez, en temps et lieu, l'occasion de déposer un recours puis de faire valoir vos droits, vous ne l'avez pas fait, bien, on va, socialement, s'attribuer une paix puis faire en sorte que votre recours va être prescrit après trois ans. Ça, ça participe également de la première justification qui est la stabilité des patrimoines et des relations juridiques. Être dans le «limbo», M. le Président... Parce qu'il n'y a pas de droits, de système de droits sans être humain, le droit, c'est très humain, alors la stabilité des rapports sociaux, souvent, des rapports familiaux, fait en sorte que l'épée de Damoclès d'une poursuite, à un moment donné, elle n'existe plus, vous n'êtes pas dans l'impossibilité, en fait, d'agir, vous pouvez poursuivre, bien, faites-le, puis si vous ne le faites pas après un certain délai, c'est parfait, on a compris, vous ne poursuivez pas, en tout cas, par fiction de droit, vous n'avez plus de recours. Alors, ce premier argument-là et le troisième, Michaël Lessard nous dit : «Dans le contexte des demandes relatives à une infraction criminelle, les premier et troisième arguments diminuent en importance, alors que le deuxième argument — le deuxième, c'est le dépérissement de la preuve — ne peut pas justifier que ce délai se limite à trois ans.»

Alors, la prescription, la logique de la prescription de trois ans, dans le contexte de 2926.1, dans les rapports sociaux, puis c'est ce à quoi le ministre faisait référence, les rapports privés, ça peut justifier, dans une poursuite en civil, mais, dans un régime d'indemnisation, si l'on permet une plus grande ouverture, je vais le dire de même, dans les poursuites privées, a fortiori, on devrait avoir une plus grande ouverture ou minimalement un écho pour du «un pour un» dans un régime d'indemnisation des victimes. Puis souvent le ministre, par rapport au dépérissement de la preuve, souvent, le ministre dit : Bien, on vous croit. Mais je le paraphrase, il ne dit pas ça de même, mais qu'il n'y a pas d'enquête, là, Gomery, là, sur la personne qui vient faire une indemnisation, il n'y a pas d'élément si juridique, si important de dépérissement de la preuve dans le contexte d'indemnisation de l'IVAC.

Alors, voilà pourquoi, M. le Président, nous croyons, comme Me Michael Lessard sur les fondements philosophiques du droit... puis il participait également du rapport lui-même, mais, également, l'Association des juristes progressistes le demandait également, celles et ceux qui oeuvrent avec des victimes, puis ça tient la route, je pense, M. le Président. Voilà.

Le Président (M. Bachand) : Merci. Interventions? M. le ministre.

M. Jolin-Barrette : Oui. Me Michaël Lessard.

M. Tanguay : J'ai dit «Michael» la dernière fois?

M. Jolin-Barrette : Oui.

M. Tanguay : O.K.

M. Jolin-Barrette : Vous le rebaptisez, M. le député de LaFontaine. J'entends très bien le député de LaFontaine, son argumentaire, je tiens juste à lui souligner que, pendant que sa formation politique était au pouvoir, ils ont laissé survivre également ce régime-là à l'effet que la prescription générale dans le code est de trois ans, dans le Code civil, mais que le régime de l'IVAC était d'une année à l'époque et, par la suite, de deux ans. Et, dans la période 2014‑2018, ils auraient eu l'occasion, par le biais de ma prédécesseure, d'augmenter ce délai-là, ce qui n'a pas été fait. Nous, on rajoute une année.

Donc, oui, il existe encore une dichotomie entre le 10 ans et le trois ans, mais il s'agit tout de même d'une avancée significative en ajoutant une année supplémentaire, mais je retiens des arguments du député de LaFontaine, il y a une dichotomie entre les deux, mais il faut comprendre que c'est un régime d'indemnisation, c'est distinct, c'est l'ensemble des Québécois qui paient, et, surtout, on assouplit le critère de l'impossibilité, en fait, d'agir, aussi, et là la majorité des infractions, que ce soit en violence conjugale et en matière de violence sexuelle, celles-ci ne seront pas prescriptibles. Ça, c'est important de le dire. Donc, essentiellement, on parle d'infractions, supposons, de voies de fait dans un événement x qui serait assujetti à un délai de trois ans.

Le Président (M. Bachand) : Mme la députée de Notre-Dame-de-Grâce...

M. Tanguay : Oui. Oui, oui.

Le Président (M. Bachand) : Ah! monsieur... Ça va?

M. Tanguay : Oui, tout à fait.

Le Président (M. Bachand) : M. le député de LaFontaine, pardon.

M. Tanguay : Rapidement. Le ministre dit : Sous les libéraux, ça se faisait de même. Il dit : Aujourd'hui, comme ministre, je fais la même chose. Ma question : Pourquoi il n'a pas été candidat libéral en 2018?

M. Jolin-Barrette : Bien, M. le Président, pour plusieurs raisons, pourquoi je n'ai pas été candidat à...

M. Tanguay : Mais assurément pas celle-là.

M. Jolin-Barrette : M. le Président, plusieurs, plusieurs, plusieurs. Avez-vous l'avant-midi, M. le Président?

M. Tanguay : Oui, puis, moi, je vais prendre le reste de la journée.

M. Jolin-Barrette : Pourquoi je ne veux pas être candidat libéral, il y en a plusieurs, mais, honnêtement, M. le Président, je ne voudrais pas blesser mes collègues de l'opposition officielle, que j'apprécie particulièrement. Cela étant, je n'ai pas, M. le Président, la versatilité des convictions de la cheffe de l'opposition officielle, alors c'est pour ça que je ne souhaite pas aller avec le Parti libéral.

Le Président (M. Bachand) : Merci, puis je vous rappelle qu'on est sur l'article 20. M. le député de LaFontaine, rapidement.

M. Tanguay : Oui, M. le Président, il faut faire attention de ne pas lancer de pierres dans une boutique de porcelaine parce que, côté versatilité, notre premier ministre a contribué largement.

• (10 h 10) •

Le Président (M. Bachand) : Merci. Merci, M. le député de LaFontaine.

M. Jolin-Barrette : M. le Président, entre quitter une formation politique existante et...

Le Président (M. Bachand) : Il n'y a pas un règlement sur la pertinence? Il n'y a pas personne qui veut en parler, présentement? O.K., rapidement, M. le ministre, s'il vous plaît.

M. Jolin-Barrette : ...et s'en aller, M. le Président, vers une nouvelle formation politique créée de toute part pour moderniser le Québec, changer le Québec, ce n'est pas comparable, du tout. Donc, la règle du latin, que mon collègue dit si bien, mutatis mutandis, ne s'applique pas dans ce cas-là, M. le Président.

Le Président (M. Bachand) : Merci. Donc, est-ce qu'il y a interventions sur l'amendement du député de LaFontaine? S'il n'y a pas d'autres interventions, nous allons procéder à sa mise aux voix. Merci. Mme la secrétaire.

La Secrétaire : Pour, contre, abstention. Pour les membres de l'opposition officielle, M. Tanguay (LaFontaine)?

M. Tanguay : Pour.

La Secrétaire : M. Jolin-Barrette (Borduas)?

M. Jolin-Barrette : Contre.

La Secrétaire : Pour les membres du groupe parlementaire formant le gouvernement, M. Lemieux (Saint-Jean)?

M. Lemieux : Contre.

La Secrétaire : Mme Labrie (Sherbrooke)?

Mme Labrie : ...

La Secrétaire : Mme Labrie (Sherbrooke), pouvez-vous répéter?

Mme Labrie : Pour.

La Secrétaire : Pardon. Mme Hivon (Joliette)?

Mme Hivon : Pour.

La Secrétaire : M. Bachand (Richmond)?

Le Président (M. Bachand) : Abstention. Donc, l'amendement est rejeté. Merci. Interventions sur l'article 20 tel qu'amendé? M. le député de LaFontaine, s'il vous plaît.

M. Tanguay : Oui, M. le Président, dans le contexte de nos débats sur le projet de loi n° 84, on parle beaucoup d'impacts financiers puis de budget. J'aimerais savoir, question de directives, si vous croyez pertinent, pour moi, de poser la question au ministre s'il a fait l'évaluation de l'impact du projet de loi n° 84 dans le contexte du budget de l'an 1 parce que le premier ministre pourrait facilement nous en parler. Merci.

Le Président (M. Bachand) : Interventions sur l'article 20 tel qu'amendé? Sur l'article 20 tel qu'amendé, M. le ministre.

M. Tanguay : Oui, l'article 20.

Une voix : ...

Le Président (M. Bachand) : M. le ministre.

M. Jolin-Barrette : Juste être sûr, M. le Président...

Le Président (M. Bachand) : C'est l'article 20 tel qu'amendé.

M. Jolin-Barrette : Oui. Est-ce que le député de LaFontaine pense, lui aussi, faire une conversion vers ses anciennes amours, M. le Président?

Le Président (M. Bachand) : Bon. Merci. Est-ce qu'il y a d'autres interventions sur l'article 20 tel qu'amendé? Mme la députée de Notre-Dame-de-Grâce, s'il vous plaît. Merci.

Mme Weil : Oui. Je n'ai pas pu participer, bon, il y a deux semaines, le jeudi, parce que j'ai été appelée ailleurs. Toute la définition de ce qu'on appelle maintenant «violence sexuelle», et j'ai compris que le ministre s'est prononcé mais... clairement, j'aimerais l'entendre parce que j'étais membre de la Commission sur l'exploitation sexuelle et, par rapport à la cohérence de la terminologie qu'on choisit, et de faire en sorte que ça soit bien connu, alors j'aimerais entendre le ministre, les vérifications qui ont été faites, peut-être, aussi, par rapport à cette notion d'exploitation sexuelle, et je rajouterais la traite des personnes pour les objectifs sexuels qui sont reconnus dans le Code criminel, évidemment, puis on a beaucoup parlé de cette cohérence avec le Code criminel, et là on utilise un langage, la violence sexuelle, je ne sais pas si c'est reconnu, en tant que tel, dans le Code criminel, et si on spécifie, dans le Code criminel, que ça inclut l'exploitation sexuelle et la traite. Alors, c'est juste pour être sûre que... j'entends bien les paroles et que ça se comprend que ça inclut l'exploitation...

M. Jolin-Barrette : M. le Président, je l'avais expliqué lors de la dernière séance, et c'est le sens de notre amendement, on a entendu les groupes de victimes qui sont venus nous dire : Bien, écoutez, le caractère... infractions à caractère sexuel, d'agressions à caractère sexuel, ça impliquait, selon certaines prétentions, le fait qu'il devait y avoir un geste d'agression, O.K. Pour être très, très clair et pour utiliser le vocable québécois, on a fait «violences sexuelles» pour être certain qu'il n'y a pas d'ambiguïté puis que les infractions, telles que décrites par la députée de Notre-Dame-de-Grâce, comme l'exploitation sexuelle, comme la traite de personnes, rentrent dans violences sexuelles. Donc, on utilise un terme plus englobant, plus large, pour ne pas qu'il n'y ait pas d'ambiguïtés. Donc, tout ce qui se rapporte aux violences sexuelles, même s'il n'y a pas d'agression sexuelle, ça va être couvert. Donc, exemple, le leurre d'enfants, ça constituerait une violence sexuelle même s'il n'y a pas d'agression physique au sens d'un touché, bien, on va le considérer comme une violence sexuelle qui va être imprescriptible et, surtout, à l'heure des nouvelles technologies, le leurre d'enfants se fait par ordinateur, supposons, on a tous vu des reportages où est-ce que ça dévaste les familles, alors, ça, c'est une nouvelle infraction, également, qu'on ajoute, hein, et ça veut dire que... Je pense, j'ai en tête l'hiver dernier — bien, pas l'hiver dernier — je pense, avant Noël, on avait un cas, là, d'une petite fille qui avait été victime de leurre d'enfants et ça avait eu des impacts sur les parents, la famille, tout ça. Alors, avec la réforme qu'on fait aujourd'hui, un, la petite fille, elle, va être indemnisée comme personne victime. Ensuite, ses parents vont être indemnisés également, vont être considérés comme des personnes victimes. Je crois qu'il y avait une fratrie aussi dans ce dossier-là. Alors, voici un bel exemple de ce que change le projet de loi n° 84. Un, violence sexuelle, on couvre ça, deux, c'est ajouté sur la liste, trois, ça devient imprescriptible et, quatre, l'entourage, la famille, va bénéficier du soutien de l'État relativement à ce type d'infraction là, ce qui n'était pas le cas.

Mme Weil : Juste par rapport à l'évolution du vocabulaire, hein, dans ce domaine qui évolue quand même assez rapidement, puis de moins en moins... en tout cas, c'est comment chaque juridiction s'adapte à ce langage. À l'international, on comprend l'exploitation sexuelle et la traite, c'est vraiment le langage, le vocabulaire qui est utilisé. Ici, au Québec, là, je pense que c'est peut-être dans le cadre de ce qui s'est passé dans les universités, avec la députée qui n'est plus députée d'Outremont, là, mais notre collègue qui était ministre à l'époque, et il y avait beaucoup de travaux, puis je pense que c'est là que vient peut-être le début de cette expression, «violences sexuelles», qui était plus englobante.

Je voulais savoir si vous aviez vérifié, par rapport au vocabulaire, et s'il y aura quelque chose qui va éclairer un peu le langage, parce qu'on est passés à une époque, il n'y a pas si longtemps, de viol, agression sexuelle, etc., et là je voudrais vraiment être sûre que tout le monde puisse comprendre. Vous, vous le dites ici, mais est-ce qu'il y a un endroit ou quelque part où on peut... ou est-ce que... Moi, dans les mémoires, je n'ai... je pense qu'on parlait plus de proxénétisme et on parlait... dans tous les mémoires que j'ai vus, je ne sais pas s'il y a un certain courant... ou on a bien expliqué que la violence sexuelle inclut l'exploitation ou est-ce que vous êtes le premier ministre à le dire clairement de cette façon dans le cadre de ce projet de loi?

M. Jolin-Barrette : Bien, si je ne m'abuse, je suis le premier à le dire clairement, que ça inclut ce type d'infractions là, parce que ces infractions-là n'étaient pas à la liste, alors c'est ça qu'on change, et ça, c'est extrêmement important, l'exploitation sexuelle, la traite de personnes, toutes les nouvelles infractions criminelles contre la personne, celles-ci qui ont un lien avec — de nature sexuelle — des violences sexuelles, donc elles sont couvertes. Donc, ça, c'est important de le dire pour les victimes.

Donc, à partir du moment de la sanction de la loi, là, voici, on élargit vraiment de beaucoup, et vous savez à quel point ça touche beaucoup, beaucoup, beaucoup de victimes qui sont des femmes. Et la réforme que nous faisons actuellement va faire en sorte de venir répondre, en grande partie, à des victimes de sexe féminin qui se retrouvaient, avec l'ancien régime... qui n'étaient pas indemnisées, qui n'avaient pas de soutien, et là elles vont être indemnisées, elles vont avoir du soutien, elles pourront demander à l'IVAC... Et surtout on... à 20, on en parlait tout à l'heure, de l'abolition de la prescription, c'est significatif. Et, comme société, c'est une avancée sociale importante de dire : On abolit la prescription.

Écoutez, j'étais en discussion avec mon collègue le ministre de la Justice française, la semaine dernière, et, pour faire suite à ce que le député de LaFontaine disait, en termes de prescription, là-bas, là, il y a des prescriptions de 10, de 20, de 30 ans en matière pénale, en matière criminelle, on n'est même pas en matière civile, on n'est même pas en matière d'indemnisation, là, c'est complètement autre chose, là. Les infractions criminelles, ici, là, il n'y a pas de délai, là, vous pouvez poursuivre votre agresseur... bien, la couronne peut poursuivre, il n'y a pas de délai, puis là on vient arrimer le volet indemnisation avec ça, puis le volet civil aussi, on l'a arrimé, mais la France, et ce n'est pas un jugement, ce n'est pas une critique, rien de tout ça. Mais ce que je veux dire... voyez-vous la différence entre les deux États-nations? C'est le jour et la nuit, là.

Mme Weil : Mais la rétroactivité, on en parlera. Donc, ça, c'est à partir du moment où le projet de loi sera adopté.

M. Jolin-Barrette : Oui.

Mme Weil : L'imprescriptibilité, on aura l'occasion d'en parler. En tout cas, je pense, c'était important que ce message soit bien circulé une fois que la loi est adoptée, et parmi les collègues aussi, parce qu'il y a plusieurs collègues du ministre membres du gouvernement qui sont impliqués dans la lutte contre l'exploitation sexuelle, la traite des personnes, notamment les corps policiers, donc la Sécurité publique. Merci.

Le Président (M. Bachand) : Merci. Mme la députée de Sherbrooke, s'il vous plaît.

Mme Labrie : Oui, mais c'est juste pour clarifier aussi que... parce que le ministre a utilisé un exemple, tout à l'heure, l'exemple du leurre d'enfants, donc il y a une situation qui a été médiatisée. Ma compréhension du projet de loi, c'est que, même si le ministre vient abolir la prescription pour tout ce qui est violences sexuelles, là, qui déborde d'agression sexuelle, ce qui est très bien, ceci n'est pas rétroactif. Donc, un enfant qui, aujourd'hui même, est victime de leurre d'enfants, bien, il ne sera pas admissible parce que ça va s'être passé avant l'adoption de la loi, c'est bien ça?

M. Jolin-Barrette : C'est à partir de la date de la sanction de la loi, donc, à partir du moment où les nouvelles infractions seront entérinées par le Parlement, effectivement, ça sera admissible. Donc, à juste titre, ce que la députée de Sherbrooke nous dit, il est vrai, donc, d'où l'importance d'adopter le projet de loi dans les meilleurs délais pour faire en sorte que ça s'applique aux victimes. Et j'entends déjà me dire : Bien, c'est simple, faites une disposition rétroactive à l'entrée en vigueur. Ce n'est pas si simple que ça, il y a plusieurs éléments qui rentrent en ligne de compte, mais on aura ce débat-là au moment des dispositions transitoires.

Le Président (M. Bachand) : Mme la députée de Sherbrooke.

Mme Labrie : Je trouvais ça important de le préciser parce que, dans l'exemple que le ministre a donné, il a dit : Cet enfant-là, ses parents seraient indemnisés.

M. Jolin-Barrette : ...en vigueur.

• (10 h 20) •

Mme Labrie : Ils ne le seront pas, ils l'auraient été si ça c'était produit après l'adoption de la loi, mais ils ne le seront pas. Je trouve ça dommage, parce que c'est un excellent geste qui est posé d'abolir la prescription pour tout ce qui est violences sexuelles, d'élargir, finalement, la compréhension de ce qui... De considérer autre chose que les agressions physiques dans la notion de violence sexuelle, c'est un excellent pas, mais c'est quand même regrettable de se limiter à le faire pour l'avenir, alors qu'on sait que les impacts sur les victimes peuvent être aussi grands. Il y a des victimes qui témoignent avec beaucoup d'éloquence d'impacts de certaines violences qu'elles ont subies qui, même s'il n'y a pas eu de contact, ça peut avoir des conséquences graves pour elles, je pense entre autres aux victimes d'un exhibitionniste, tu sais, qui allait poser des gestes devant une cour d'école, des victimes qui ont été témoins de ça, même s'il n'y a pas eu de contact physique, elles en subissent des préjudices. L'exemple du leurre d'enfants qui a été donné, c'est malheureusement trop courant, même s'il n'y a pas eu de contact, il y a des préjudices psychologiques importants. Donc, ce serait un geste d'autant plus beau si on était en mesure de reconnaître de manière rétroactive aussi cet...

Le Président (M. Bachand) : Merci. Interventions? Mme la députée de Notre-Dame-de-Grâce.

Mme Weil : Donc, si on regarde... C'est, un, deux, trois, le quatrième paragraphe de 20, donc : «La connaissance du préjudice correspond au moment où la personne victime prend conscience du lien probable entre son préjudice et la perpétration...» Donc, beaucoup va se jouer là, hein, j'imagine, surtout quand on parle d'exploitation sexuelle, et de traite, moins, mais l'exploitation sexuelle, souvent, ça arrive dans sa jeunesse. Et les témoins qui sont venus en commission, notre commission spéciale sur l'exploitation, des fois, ça pouvait prendre des années avant qu'ils comprennent l'impact, le préjudice. Elles pouvaient penser que c'était fait pour l'amour de son proxénète, parce que ces proxénètes peuvent passer deux, trois ans pour vraiment la séduire et l'emprisonner, mais, bon... Donc, cette personne-là... Il se peut qu'il y ait des victimes actuelles puis qui ne seraient pas admissibles à l'IVAC actuellement, même si elles sont victimes d'exploitation sexuelle, mais, lorsque la loi sera adoptée, elles prennent conscience du préjudice. Comment vous avez... Quand vous avez mis cet article-là, vous étiez au courant qu'il y a beaucoup de personnes qui peuvent... ça peut prendre des années avant de bien comprendre qu'est-ce qui s'est passé, ou ceux qui sont victimes à l'enfance d'agressions sexuelles évidemment, hein, des fois ça peut prendre vraiment des années, qu'ils comprennent qu'est-ce qui s'est passé dans leur...

M. Jolin-Barrette : Oui, c'est pour cette raison qu'on abolit la prescription pour les violences sexuelles, les violences subies pendant l'enfance et les violences conjugales. Donc, d'où mon désir de faire en sorte que l'horloge ne roule pas contre ces personnes victimes là.

Mme Weil : Et est-ce que c'est le fait... oui, c'est évident pour les enfants victimes, donc, de violences sexuelles, mais aussi de ces jeunes femmes — je vais enlever mon masque — ces jeunes femmes qui peuvent avoir 12... ou jeunes filles, 12, 13, 14 ans, c'est souvent des années plus tard qu'elles se rendent compte que c'était vraiment, ce qu'elles ont vécu, un crime, une agression. Donc, on reviendra sur la question rétroactivité éventuellement, mais je voulais juste que le ministre comprenne clairement qu'il y a beaucoup de gens qui sont dans cette catégorie, qui peuvent l'être, en tout cas.

M. Jolin-Barrette : Il y a beaucoup de gens qui sont dans cette catégorie, et c'est pour ça que j'ai souhaité qu'il y ait une commission spéciale sur l'exploitation sexuelle des mineurs à titre de leader du gouvernement en 2019, puis c'est pour ça que j'ai souhaité qu'on abolisse le délai de prescription avec le projet de loi n° 55, puis c'est pour ça que je rends imprescriptibles les violences sexuelles. Donc, je suis très conscient, et c'est pour ça que j'ai fait ce choix-là, puis que le gouvernement a fait ce choix-là, de faire en sorte d'abolir la prescription pour les infractions à caractère sexuel, bien, les violences sexuelles, les violences subies pendant l'enfance et la violence conjugale, mais, pour le reste du débat, on aura le débat sur la rétroactivité aux dispositions transitoires.

Mme Weil : Merci.

Le Président (M. Bachand) : M. le député de LaFontaine, s'il vous plaît.

M. Tanguay : Oui. Merci, M. le Président. Il est clair qu'à la fin de l'article 20, le dernier alinéa se lit comme suit : «Une demande de qualification vaut pour tout préjudice subséquent lié au même événement, tel que défini au troisième alinéa de l'article 42.» Oui, à 42, on va avoir un débat parce qu'il est très substantiel, soit dit en passant, l'article 42, puis on réfère ici au troisième alinéa qui définit un même événement, puis, essentiellement, il y a quatre facteurs : il y a l'infraction, qui peut être au singulier ou elle peut être au pluriel, il peut y en avoir plus, d'infractions, il y a le ou les auteurs, donc il y a l'infraction ou les infractions, le ou les auteurs, le concept de la même journée, puis le concept de manière continue pouvant être sur plus d'une journée — O.K., comme quatre concepts. On fera le débat à 42, mais, à 20, ici, quand on dit : «Une demande de qualification vaut pour tout préjudice subséquent lié au même événement», j'aimerais ça que le ministre nous donne... Moi, ce que j'ai en tête, c'est le cas où une personne a subi une infraction par un auteur x, une journée y, et qui, la même journée y, par un auteur z, subit une autre infraction. Mon point, c'est... parce que ce n'est pas simple à comprendre puis, à la fin de la journée, j'aimerais savoir si le ministre est d'accord avec moi sur l'affirmation suivante, c'est que... Puis on fera le débat sur 42 puis on va s'assurer, selon ce que le ministre va me dire là, d'orienter le débat sur 42, mais, à la fin de la journée, tout type de dommage, quelle que soit la source, tout type de dommage qui résulte d'une infraction criminelle sera compensé.

Le Président (M. Bachand) : M. le ministre.

M. Jolin-Barrette : ...au dernier alinéa de 20, là, c'est pour faire en sorte qu'en lien avec cet événement-là elle ne fasse qu'une seule demande, mais ça ne fait pas en sorte que, s'il y a d'autres événements, elle ne sera pas indemnisée. Il arrive un autre événement x, elle pourra être indemnisée pour un autre événement. Dans le fond, on regarde sa situation par rapport à l'événement.

M. Tanguay : Autrement dit, mon point : je trouve superfétatoire ce dernier alinéa-là, à 20, parce que je me dis, il y a un acte criminel indépendamment des auteurs, au singulier, au pluriel, indépendamment de la journée, de la continuité, indépendamment du type d'infraction qui, par ailleurs, se qualifie parce que c'est une infraction à la personne. Moi, je le trouve superfétatoire parce que je me dis : les conséquences, les préjudices, peu importe la source, sous les vocables que je viens d'énumérer, vont être évalués, puis il va être compensé, puis c'est ça, le principe. On ne dira pas à la personne : Bien, ça, ce dommage-là ne résulte pas du même événement, c'est un dossier différent ou ça... Vous comprenez? Parce que, si on commence à s'enfarger dans ces concepts-là, on risque d'être pris longtemps, là. Et je crois que la valeur de cet alinéa-là, c'est de créer des enfarges.

Le Président (M. Bachand) : Merci, M. le député. M. le ministre.

M. Jolin-Barrette : Bien, en fait, c'est en lien avec ce que le député de LaFontaine dit, c'est pour dire que la personne victime n'a pas à faire plusieurs démarches, donc on pourrait l'enlever. Dans le fond, c'est pour expliciter, c'est un volet pédagogique dans l'article, mais on peut le supprimer.

M. Tanguay : Parce que moi, M. le Président, je ne sais pas ce qu'en pensent mes collègues, mais, honnêtement, je trouve que ça amène un... Nos bonnes personnes qui vont administrer l'IVAC, là, je trouve que ça les met dans une disposition de dire : Ah! est-ce que ça découle ou pas de tel événement? Puis, si ça ne découle pas de tel événement, on va ouvrir un autre dossier, c'est ça que je lis.

M. Jolin-Barrette : C'est pour faire en sorte que les démarches de la personne soient limitées, que la personne n'ait pas à faire plusieurs demandes à l'IVAC.

M. Tanguay : Parce qu'il y a comme un facteur causal ici, puis je ne voudrais pas qu'on ait une analyse causale.

M. Jolin-Barrette : Bien, écoutez, comme je vous le dis, ça avait un volet pédagogique pour indiquer à la victime qu'elle n'avait pas besoin de faire plusieurs démarches, mais si vous me dites : Nous, on préfère qu'il soit retiré, moi, je n'ai pas d'enjeu, là, parce qu'on était au même endroit, là, là-dessus, là.

Le Président (M. Bachand) : M. le député de LaFontaine.

M. Tanguay : Moi, je... À moins qu'on me dise la valeur pédagogique, à moins qu'on me dise la valeur de clarification additionnelle, on fera le débat sur 42, mais je l'enlèverais, effectivement.

• (10 h 30) •

M. Jolin-Barrette : La personne, il faut qu'elle soit qualifiée, elle n'est qualifiée qu'une seule fois, on ne la requalifie pas. Mais, par la suite, au niveau des aides, c'est là qu'est évaluée son admissibilité aux aides, là.

M. Tanguay : Parce que c'est le concept...

M. Jolin-Barrette : Parce que vous comprenez, là, la différence entre qualification puis admissibilité aux aides, là. Qualification, vous êtes qualifié à titre de personne victime, puis, ensuite, on regarde en fonction de quels sont les préjudices que vous avez subis, voici les aides que vous allez avoir.

Le Président (M. Bachand) : Mme la députée de Notre-Dame-de-Grâce.

Mme Weil : Dans le sens de mon collègue de LaFontaine, ça pourrait être, en fait, un phénomène et non pas un événement. Quand on parle d'exploitation sexuelle d'un mineur, c'est plus un phénomène. Donc, la personne n'aurait pas à expliquer tous les événements qui auraient eu lieu dans sa vie, mais le phénomène... mais d'être victime d'un phénomène. Donc, ça arrive dans le sens d'enlever, parce que ce n'est pas vraiment un événement dans le cas d'exploitation sexuelle, c'est plusieurs événements avec plusieurs personnes.

Le Président (M. Bachand) : M. le ministre.

M. Jolin-Barrette : Bien, je vous confirme, M. le Président, qu'on peut le retirer, puis il n'y a pas d'enjeu. L'objectif, c'est qu'il n'y ait qu'une seule qualification. Ça fait que, si vous voulez, on prépare ça puis on le retire.

Le Président (M. Bachand) : Ça va? Alors, il va y avoir un amendement en préparation?

M. Jolin-Barrette : Oui.

Le Président (M. Bachand) : On va continuer l'étude de l'article 20 tel qu'amendé. Interventions? Est-ce qu'il y a d'autres interventions sur l'article 20 tel qu'amendé? Sinon... Oui, M. le ministre.

M. Jolin-Barrette : Bien, dans le fond, l'amendement va se lire, j'imagine, ainsi : Retirer le dernier alinéa...

Le Président (M. Bachand) : O.K. Alors, on va suspendre...

M. Jolin-Barrette : ...retirer le sixième alinéa de l'article 20 tel qu'amendé, M. le Président.

Le Président (M. Bachand) : Parfait, alors, on va suspendre quelques instants, M. le ministre.

(Suspension de la séance à 10 h 32)

(Reprise à 10 h 36)

Le Président (M. Bachand) : À l'ordre, s'il vous plaît! La commission reprend ses travaux. M. le ministre, s'il vous plaît.

M. Jolin-Barrette : Oui. Alors, M. le Président, je vais vous lire ça. Comme le disait le député de LaFontaine, je rafraîchis ma page et je vais pouvoir vous le lire dans quelques instants. Et voici, M. le Président. Alors, l'article 20. Retirer le sixième alinéa de l'article 20.

Le Président (M. Bachand) : Interventions sur l'amendement du ministre? M. le député de LaFontaine.

M. Tanguay : Ça va. Merci.

Le Président (M. Bachand) : Ça va? Est-ce qu'il y a d'autres interventions? Sinon, nous allons procéder à la mise aux voix. Mme la secrétaire, s'il vous plaît.

La Secrétaire : Pour, contre, abstention. M. Jolin-Barrette (Borduas)?

M. Jolin-Barrette : Pour.

La Secrétaire : Pour les membres du groupe parlementaire formant le gouvernement, M. Lemieux (Saint-Jean)?

M. Lemieux : Pour.

La Secrétaire : Pour les membres de l'opposition officielle, M. Tanguay (LaFontaine)?

M. Tanguay : Pour.

La Secrétaire : Mme Hivon (Joliette)?

Mme Hivon : Pour.

La Secrétaire : M. Bachand (Richmond)?

Le Président (M. Bachand) : Abstention. Donc, l'amendement est adopté. Est-ce qu'il y a d'autres interventions sur l'article 20 tel qu'amendé? Est-ce qu'il y a d'autres interventions? S'il n'y a pas d'autre intervention, nous allons procéder à la mise aux voix. Mme la secrétaire, s'il vous plaît.

La Secrétaire : Pour, contre, abstention. M. Jolin-Barrette (Borduas)?

M. Jolin-Barrette : Pour.

La Secrétaire : Pour les membres du groupe parlementaire formant le gouvernement, M. Lemieux (Saint-Jean)?

M. Lemieux : Pour.

La Secrétaire : Pour les membres de l'opposition officielle, M. Tanguay (LaFontaine)?

M. Tanguay : Abstention.

La Secrétaire : Mme Hivon (Joliette)?

Mme Hivon : Abstention.

La Secrétaire : M. Bachand (Richmond)?

Le Président (M. Bachand) : Abstention. Donc, l'article 20, tel qu'amendé, est adopté. Merci. M. le ministre, s'il vous plaît.

M. Jolin-Barrette : Avec votre permission, M. le Président, je reviendrais à l'article 16. Donc, j'avais déposé un amendement avant qu'on quitte pour les deux semaines. Et, à la demande des collègues des oppositions, on avait suspendu.

Et donc, avec votre permission, M. le Président, également, je retirerais l'amendement et je déposerais le nouvel amendement de l'article 16, qui vient faire en sorte de retirer «violence réelle» suite aux commentaires des différents groupes.

Le Président (M. Bachand) : Merci. Donc, on va y aller par étapes. Consentement pour suspendre l'article 20?

Des voix : ...

M. Jolin-Barrette : Ah! il est adopté.

Le Président (M. Bachand) : Consentement pour revenir à l'article 16?

Des voix : Consentement.

Le Président (M. Bachand) : Consentement pour réouvrir l'amendement à l'article 16?

Des voix : Consentement.

Le Président (M. Bachand) : Consentement pour réouvrir l'article 16?

Des voix : Consentement.

Le Président (M. Bachand) : O.K. Et consentement pour retirer l'article... l'amendement dans l'article 16?

Des voix : Consentement.

Le Président (M. Bachand) : M. le ministre, s'il vous plaît. Merci.

M. Jolin-Barrette : Alors, M. le Président, amendement à l'article 16 : Remplacer l'article 16 du projet de loi par le suivant :

«Aucune personne victime n'a droit à une aide financière en vertu du présent titre si elle a été partie à la perpétration de l'infraction criminelle dont elle est victime ou dont une personne visée au paragraphe 1° du premier alinéa de l'article 10 est victime ou si elle a contribué, par sa faute lourde, à l'atteinte de son intégrité ou au décès ou à l'atteinte à l'intégrité de cette personne, sauf :

«1° si la personne victime a été partie à la perpétration de l'infraction ou a contribué, par sa faute lourde, à son atteinte ou à l'atteinte ou au décès d'une autre personne parce qu'elle subissait de la violence ou une menace de violence;

«2° s'il s'agit d'un enfant de moins de 12 ans, d'un enfant inapte ou d'une personne inapte à la charge d'une personne victime décédée ou qui subit une atteinte à son intégrité en raison de la perpétration de l'infraction criminelle contre cette dernière.

«Le conjoint, le proche d'une personne victime ou le parent d'une personne victime majeure n'a droit à aucune aide financière prévue au présent titre si la personne victime décédée ou qui subit une atteinte à son intégrité en raison de la perpétration de l'infraction criminelle a été partie à la perpétration de cette infraction ou a contribué, par sa faute lourde, à l'atteinte à son intégrité ou à son décès. Toutefois, un tel conjoint, proche ou parent demeure admissible à une aide financière s'il subissait de la violence ou une menace de violence.

«Le présent article ne s'applique pas à une personne qui présente une demande en raison de la violence conjugale ou de la violence sexuelle dont elle est victime.»

• (10 h 40) •

Donc, l'amendement propose une réécriture de l'article 16 afin d'en faciliter la compréhension et d'apporter certaines précisions.

Ainsi, toute personne victime partie à l'infraction criminelle ou qui contribue à son atteinte ou à l'atteinte d'une autre personne ne pourrait bénéficier des aides financières prévues à la loi, sauf si elle a agi ainsi parce qu'elle subissait de la violence ou une menace de violence ou sauf si elle est un mineur de moins de 12 ans, un enfant inapte ou une personne inapte à charge.

Le parent d'une personne victime majeure décédée ou qui subit une atteinte à son intégrité n'aura pas droit aux aides financières si cette personne a été partie à la perpétration de cette infraction ou a contribué sa propre atteinte ou à son décès.

Le conjoint ou le proche d'une personne victime n'aurait pas droit aux aides financières si la personne victime décédée ou qui subit l'atteinte a été partie à l'infraction criminelle ou a contribué à sa propre atteinte ou à son décès.

Le présent article ne s'applique jamais dans les cas de violence sexuelle ou de violence conjugale.

À cet effet, l'amendement propose de remplacer l'expression «agression à caractère sexuel» par «violence sexuelle».

Certains groupes et experts entendus lors des consultations particulières ont souligné la nécessité de remplacer l'expression «agression à caractère sexuel» afin de tenir compte de l'évolution du concept.

Et, depuis 2016, le Gouvernement préconise une référence à la violence sexuelle, notamment dans le cadre de sa stratégie gouvernementale, afin d'y inclure la notion d'exploitation sexuelle.

De plus, cette notion d'agression sexuelle en matière criminelle implique nécessairement un contact physique.

Or, dans le cadre du présent projet de loi, les infractions qui seraient visées incluraient aussi celles qui, bien que de nature sexuelle, n'impliqueraient pas un contact physique à caractère sexuel comme la traite de personne, le leurre d'enfant ou les infractions relatives à la pornographie juvénile.

L'ensemble des modifications proposées par l'amendement visent à répondre aux commentaires reçus par plusieurs intervenants lors des consultations particulières.

Le Président (M. Bachand) : Merci beaucoup. M. le député de LaFontaine, s'il vous plaît.

M. Tanguay : Merci beaucoup, M. le Président. Alors, on... je pense que, sur le fond, c'est un bon amendement. Question de compréhension, je comprends la logique du premier paragraphe, là, c'est-à-dire le premier paragraphe au premier alinéa, si la personne victime a été, pendant la perpétration de l'infraction, ou a contribué, par sa faute lourde, à son atteinte ou à l'atteinte ou au décès d'une autre personne parce qu'elle subissait de la violence ou une menace de violence.

J'aimerais savoir... j'aimerais que le ministre puisse commenter l'importance, pour lui, et qu'est-ce que ça veut dire, dans des cas d'espèce, de retirer «réelle» à «menace de violence», «menace réelle de violence». Dans l'interprétation, puis on est législateurs, là, on a enlevé «réelle». Ça réfère à quoi, le fait de retirer ce «réelle», là?

M. Jolin-Barrette : Bien, en fait, certains groupes nous ont dit : Le fait d'avoir une menace réelle, c'était comme un fardeau supplémentaire. Mais, pour nous, c'est la même chose, c'est la menace de violence qui est admissible. Donc, certains groupes pouvaient prétendre qu'avec «menace de violence réelle», il fallait qu'il y ait un facteur de réalisation de la violence, donc, mais, lorsqu'on est en situation de menace, dans le fond, la menace n'est pas réalisée. Bien, en fait...

M. Tanguay : Imminente, peut-être.

M. Jolin-Barrette : Oui, mais c'est parce qu'on ne veut pas mettre un fardeau supplémentaire, c'est la menace qui est là, tu sais. Donc, dans le fond, pour des questions de clarification, on retire le terme pour l'élargir. Donc, lorsqu'il est question de menace de violence, ça va être couvert. L'utilisation du terme «menace de violence réelle» pouvait porter à croire, pour certaines personnes, que le fardeau, il était plus exigeant. Alors, c'est pour ça qu'on le retire.

M. Tanguay : Et puis je salue le fait de le retirer, parce qu'effectivement il aurait pu... il aurait été interprété, pas il aurait pu, il aurait été interprété de façon plus restrictive. Je soumets au ministre deux affirmations. On enlève — puis c'est lui-même qui me l'a inspiré — une menace réelle de violence, ça pourrait justifier pour un administrateur de l'IVAC : Bien, il n'y avait pas de menace imminente. Donc, on l'enlève l'imminence de la menace, ça, c'est un élément. Je ne sais pas si le ministre est d'accord avec ça.

M. Jolin-Barrette : Bien oui, puis, en fait, le caractère réel aurait été difficile, peut-être, à établir également. Parce que, vous savez, dans le fond, juste pour être indemnisé, à l'IVAC, là, on peut se baser — puis on a déjà eu ces discussions-là — juste sur le témoignage des victimes, hein? Tu sais, la demande, elle n'a pas besoin d'être corroborée. Alors, pour l'agent de l'IVAC, le fait de dire : C'était-tu réel, ou tout ça? Il n'y a pas nécessité pour lui de faire cette évaluation-là. Donc, c'est pour ça qu'on le retire. Mais oui, ça n'a pas besoin d'être imminent. Le fardeau de preuve pour être indemnisé, il n'est pas là. On veut juste la menace de violence. Donc, on assouplit.

M. Tanguay : Autre élément important, on enlève un caractère d'analyse, d'objectivité de la menace aussi en enlevant «réelle». On aurait pu se dire... Moi, si j'étais administrateur de l'IVAC, j'aurais pu dire : Bien, voyons donc! Vous avez pris ça pour une menace? Ce n'était pas réel. Non accordé, rejeté. Alors, en enlevant «réelle», j'aimerais que le ministre puisse peut-être me confirmer que c'est la menace, telle que perçue par la victime in concreto, et non pas telle qu'une personne normalement prudente, et diligente, et raisonnable, aurait pu la percevoir. C'est in concreto à la personne, si elle s'est sentie menacée, c'est ça qui va tenir la route.

M. Jolin-Barrette : Oui, sous réserve du fardeau de démonstration de 50 plus un. Dans le fond, là, pour l'infraction criminelle, là, tel qu'elle est... Lorsqu'on est indemnisé par l'IVAC, c'est la balance des probabilités, là. Donc, c'est le même régime qui s'applique, là.

M. Tanguay : Autrement dit, M. le Président, est-ce que le ministre peut nous affirmer et nous confirmer que ce sera des critères d'analyse subjectifs et non objectifs ici?

M. Jolin-Barrette : En fonction de la personne?

M. Tanguay : Oui.

M. Jolin-Barrette : La réponse est oui...

M. Tanguay : Parfait.

M. Jolin-Barrette : ...ça sera des critères subjectifs.

M. Tanguay : Parfait. Oui.

Mme Hivon : Juste une petite question de compréhension, parce que mon collègue parle qu'on a retiré «menace réelle» au 1°. «Menace réelle», moi, je ne sais pas si je n'ai pas le bon amendement, mais il est encore là.

Le Président (M. Bachand) : Parce qu'on a retiré l'amendement qui avait été déposé avant la suspension, alors on l'a retiré. Le ministre a déposé un nouvel amendement en enlevant le mot «réelle».

Mme Hivon : L'amendement, en cours sur Greffier, il est toujours là, mais je veux juste être sûre que je suis sur le bon.

Le Président (M. Bachand) : M. le ministre.

M. Jolin-Barrette : Bien, pour nous, juste faire...

Mme Hivon : Mais si le ministre me dit que, dans sa version, il n'y a plus ça...

M. Jolin-Barrette : C'est vrai, la version qui est sur Greffier, il y a «réelle».

Le Président (M. Bachand) : On va juste vérifier pour avoir la bonne version parce que ça veut dire qu'on a gardé la vieille version.

M. Jolin-Barrette : ...le premier paragraphe, là, donc, devrait se lire... À la fin, là, ça ne devrait plus être qu'«elle subissait de la violence ou une menace de violence», donc il n'y a plus une menace... il n'y a plus «réelle».

Mme Hivon : Je veux juste être sûre que... C'est très clair. C'est dit dans le micro. Je peux recéder la parole à mon collègue. Je voulais juste être sûre qu'on...

M. Jolin-Barrette : ...à la fin du deuxième alinéa aussi, effectivement...

Le Président (M. Bachand) : O.K. Il y a eu une petite erreur dans le dépôt dans le Greffier, mais la résolution... L'amendement est celui que le ministre a lu, alors il fait foi... Oui.

M. Tanguay : Question de compréhension. Donc, le cas du proxénétisme, là, vous savez, là, on vient couvrir la victime de proxénétisme. Est-ce que c'est par le truchement du paragraphe dont on vient de parler, le premier paragraphe de l'alinéa premier, ou par le truchement du dernier alinéa que la victime de proxénétisme, elle ne se fera pas reprocher une faute lourde? Ça, je pense que c'est clair. C'est ça qu'on veut. On veut que la victime de proxénétisme puisse ne pas se faire dire : Bien là, vous avez participé à de la prostitution, puis tout ça, faute lourde, vous n'êtes pas indemnisée. Non, non, non. Est-ce que c'est par le truchement du premier paragraphe, ou du dernier alinéa, ou les deux? Mais je douterais que la rédaction, là... vous vouliez dire deux fois la même chose, là.

M. Jolin-Barrette : C'est le dernier alinéa. Donc : «Le présent article ne s'applique pas à une personne qui présente une demande en raison de la violence conjugale ou de la violence sexuelle dont elle est victime.» Donc, ça constitue de la violence sexuelle. Mais, écoutez, elle pourrait le présenter aussi en vertu du premier alinéa de l'article 16, là : «Aucune personne victime n'a droit à une aide financière en vertu du présent titre si elle a été partie à la perpétration de l'infraction criminelle dont elle est victime ou dont une personne visée au paragraphe 1° du premier alinéa de l'article 10 est victime ou si elle a contribué, par sa faute lourde, à l'atteinte à son intégrité ou au décès ou à l'atteinte à l'intégrité physique de cette personne, sauf si la personne victime a été partie à la perpétration de l'infraction ou a contribué, par sa faute lourde, à son atteinte ou à l'atteinte ou au décès d'une autre personne parce qu'elle subissait de la violence ou une menace de violence.»

Des voix : ...

M. Jolin-Barrette : Oui, ça peut être les deux. Exemple, en cas d'agression sexuelle dans un contexte de prostitution, même si la personne faisait de la prostitution, elle serait exonérée.

M. Tanguay : Oui. Question de compréhension. Puis on a déjà joué... on a déjà... pas joué, on a déjà discuté de ces concepts-là, de proxénétisme et de violence sexuelle. Le ministre pourra peut-être, s'il vous plaît, rafraîchir ma mémoire. Le concept de violence sexuelle, c'est tel que rédigé à 2926.1, hein? C'est ça, c'est «violence sexuelle»?

M. Jolin-Barrette : Non. À 2926, c'est agression à caractère sexuel.

M. Tanguay : O.K., qui est moins large que violence sexuelle.

M. Jolin-Barrette : Bien, dans le fond, pour des questions d'interprétation et de clarification, on va désormais utiliser le terme «violence sexuelle».

M. Tanguay : Partout dans la loi?

• (10 h 50) •

M. Jolin-Barrette : Partout, dans la Loi sur l'indemnisation, c'est «violence sexuelle».

M. Tanguay : Même quand on fait référence à l'imprescriptibilité, on change «agression» par «violence sexuelle». Puis on a déjà adopté un amendement, à cet effet-là, jusqu'à maintenant, puis il y en aura peut-être d'autres. O.K., «violence sexuelle», le ministre est d'accord avec moi, c'est plus large qu'«agression à caractère sexuel», n'est-ce pas?

M. Jolin-Barrette : Bien, c'est le sens qu'on souhaite lui donner relativement aux commentaires des groupes, relativement également à la stratégie gouvernementale qui est en place depuis 2016. Alors, oui, pour éviter que la victime se fasse dire : Bien, écoutez, vous avez été victime de pornographie juvénile... alors, on ne veut pas que la personne victime se fasse opposer... dire : Bien, ce n'était pas une agression à caractère sexuel, à cause que le terme «agression» pourrait impliquer un contact, supposons, physique. On veut sortir de ça, alors c'est pour ça qu'on utilise «violence sexuelle», plus large.

M. Tanguay : O.K. On est lié, par définition, avec les expressions utilisées dans le Code criminel. Il y a «agression» dans le Code criminel. Y a-t-il... Puis je sais qu'on en a déjà parlé, mais on se remet dans le bain, là, il n'y a pas le concept de violence sexuelle, je crois, puis le ministre me détrompera si j'ai tort, n'est-ce pas?

M. Jolin-Barrette : Pas à ma connaissance, non.

M. Tanguay : Donc, ça, c'est québécois.

M. Jolin-Barrette : C'est québécois, notre façon d'être Canadien.

M. Tanguay : Oui, c'est ça, tout à fait, parce qu'aussi le ministre est un peu réfractaire à aller jouer dans les infractions criminelles, parce que... Mais là on se permet, on se permet une marge de manoeuvre qu'il faut saluer, «violence sexuelle». La question qui découle de cela, M. le Président : Est-ce que l'on peut... Où avons-nous une définition complète et où est-ce qu'on se ramasse, à quelque part, dans une loi, pour violence, là, sexuelle? Parce que moi, à ma première ligne de questions sur le proxénétisme, si ça, c'est québécois, «violence sexuelle», est-ce qu'à quelque part on a une définition de «violence sexuelle» à la québécoise, disant notamment que ça inclut le proxénétisme, ça inclut l'exemple qu'a donné le ministre, là, de la pornographie juvénile, et ainsi de suite, là?

M. Jolin-Barrette : Non, il n'y a pas de définition, dans la loi, sur «violence sexuelle», parce que ça fait état de trois concepts, hein, le premier concept étant la violence sexuelle, le deuxième concept étant la violence subie pendant l'enfance, puis le troisième concept, c'est de la violence conjugale. Donc, on couvre le plus large possible. Donc, une infraction criminelle de nature sexuelle va être considérée comme une violence sexuelle au sens de la Loi sur l'indemnisation des victimes d'actes criminels...

M. Tanguay : Donc...

M. Jolin-Barrette : ...mais — excusez-moi — au sens de la Loi visant à aider les personnes victimes d'infractions criminelles et à favoriser leur rétablissement, la nouvelle loi.

M. Tanguay : O.K. Là on arrive précisément... Puis je pense que le ministre, là, on a marché ensemble main dans la main, pas à pas, on revient à un débat qu'on a eu, la justification de définir «violences sexuelles» notamment, et là de les nommer. Le ministre a dit : Non, non, non, parce que, là, on joue dans le Code criminel, puis ce n'est pas notre vocation. Je le sais que ce n'est pas notre vocation jouer dans le Code criminel, mais c'est notre vocation d'écrire le projet de loi n° 84, et là, pas à pas, on y est arrivé. Puis je reviens à la même belle case où on dirait : Bien, avec une définition, pas exclusive mais inclusive, notamment, puis là on nomme les choses, pornographie juvénile... Il y a des rapports de collègues qui ont participé, de façon non partisane, et qui nommaient, dans la sphère législative québécoise, des réalités du XXIe siècle, avec les réseaux sociaux, et ainsi de suite, et de l'ouverture d'indemniser ces victimes-là.

Alors, j'invite le ministre, peut-être, à parfaire sa réflexion, et je le sais, que ce débat-là, on l'avait notamment eu à l'article 13 des définitions. Il me semble que ça serait pleinement justifié, puis là on ne serait pas... Moi, honnêtement, comme législateur, il y a 10 minutes, je me disais : O.K., «proxénétisme», c'est-tu dans violence sexuelle? Si c'était nommé, ce serait tellement plus simple.

M. Jolin-Barrette : La réponse à ça, c'est non, ce n'est pas plus simple. Puis, je suis convaincu que le député de LaFontaine ne veut pas aller dans cette direction-là, parce que, sur le long terme, O.K., le choix du législateur québécois, c'est toutes les infractions contre la personne. On sort de l'ancienne liste et on s'assure... Avec la liste restrictive des infractions criminelles, on arrive avec une nouvelle liste qui, dans le fond, n'est pas une liste en soi, qui est toutes les infractions contre la personne qui sont couvertes par le régime d'indemnisation québécois d'infractions criminelles.

Et ce qu'on dit, parallèlement à ça, on dit : Écoutez, en matière de faute lourde, tout ce qui se rattache à violence conjugale ou tout ce qui se rattache à violence sexuelle, ça ne peut pas vous être opposé. En matière de prescription également, ce qui est une violence sexuelle ou ce qui est une violence conjugale, une violence subie pendant l'enfance, toutes ces infractions-là, il n'y aura plus de prescription. Ça fait que le concept, il est large. Pourquoi il est large comme ça? C'est pour faire en sorte que ça va rentrer les infractions criminelles.

Si on fait une énumération de ces infractions-là, comme le propose le député de LaFontaine, ça signifie que, lorsque le Code criminel, supposons, serait modifié pour ajouter des infractions criminelles, si elles sont déjà identifiées précisément, il faudrait faire en sorte de venir modifier le corpus législatif québécois. Et ce que ça a pour effet, on pourrait se retrouver dans la même situation qu'on l'a été, durant les dernières années, par rapport à l'exploitation sexuelle et par rapport à la traite de personnes, où les gouvernements successifs n'ont pas réouvert la loi pour dire : C'est dans la liste. Et là le député de LaFontaine pourrait me dire : Non, mais vous pourriez mettre un «notamment».

M. Tanguay : Mais oui.

M. Jolin-Barrette : Mais je ne veux pas que ça soit interprété restrictivement, alors je veux le laisser d'une façon le plus large possible.

M. Tanguay : Là-dessus, M. le Président, l'article 10 de notre charte québécoise des droits et libertés utilise le «notamment» pour dire : Il n'y aura pas de discrimination. Puis c'est interprété de façon très large. Et le ministre l'a déjà dit : Cette loi-là a vocation d'être interprétée de façon large et libérale. Alors, le même usage de «notamment» à l'article 10 de la charte québécoise des droits et libertés, qui dit : Vous ne pourrez pas, notamment, discriminer, basé sur le sexe, l'âge, la grossesse, et ainsi de suite, est interprété de façon très, très large, et n'est pas limitatif, et pourrait même, pris et adapté dans le contexte du projet de loi n° 84, pourrait très bien faire place à d'éventuels amendements du Code criminel, et il coulerait de source, puisque que c'est déjà, tel que défini à l'article 13, qu'on est copié-collé avec le Code criminel, et que cette interprétation d'un «notamment», large et libérale, viendrait... aurait l'avantage et la valeur ajoutée de dire : Bon, on a mis «pornographie juvénile» là-dedans, c'est inclus, posez-vous plus la question.

Une fois que j'ai dit ça, je ne vois pas comment le ministre pourrait me dédire dans ce que je viens de dire, là, ça tient la route, là. Qu'il me dise : Il y a un défaut à votre structure là, ça tient la route, ce que je viens de dire là. Je veux dire, les amendements au Code criminel seraient, de facto, par le truchement de l'article 13, et ne seraient pas exclus par le «notamment» d'un article, en quelque part, définissant la violence sexuelle.

M. Jolin-Barrette : Bien, M. le Président, c'est distinct, notamment dans le mode d'application, par la Direction d'indemnisation des victimes d'actes criminels. Alors, je veux qu'il y ait le plus de souplesse et je veux que ça soit large. Alors, je le dis, et les propos du ministre sont clairs, toutes les infractions de nature sexuelle, de violence sexuelle, celles qui sont présentes et celles qui le seront dans le futur, vont entrer dans la définition de violence sexuelle. C'est pour ça que je ne veux pas faire une énumération.

Le Président (M. Bachand) : Mme la députée de Joliette, s'il vous plaît.

Mme Hivon : Oui. Je veux juste être certaine de bien suivre, là. Donc, «exploitation sexuelle», est-ce que ça fait partie des violences sexuelles?

M. Jolin-Barrette : Oui.

Mme Hivon : Pornographie juvénile?

M. Jolin-Barrette : Oui.

Mme Hivon : Traite de personnes?

M. Jolin-Barrette : Oui.

Mme Hivon : Donc, il n'y aura pas de prescription pour ça, non plus.

M. Jolin-Barrette : Il n'y aura pas de prescription.

Mme Hivon : Donc, toute cette nouvelle catégorie d'infractions, il n'y aura aucune prescription pour ça.

M. Jolin-Barrette : Pour les infractions de violence sexuelle, il n'y aura pas de prescription.

Mme Hivon : Parfait. Donc, partout, dans la loi, on va passer au vocabulaire de violence sexuelle.

M. Jolin-Barrette : Oui.

Mme Hivon : O.K.

Le Président (M. Bachand) : Merci. Mme la députée...

Mme Hivon : Moi j'avais une autre question sur un autre sujet...

Le Président (M. Bachand) : Oh! Allez-y, Mme la députée.

Mme Hivon : ...ça fait que, si on veut... Je ne sais pas si ma collègue voulait continuer.

Le Président (M. Bachand) : Oui, si vous êtes d'accord, peut-être... Mme la députée, est-ce qu'on est encore sur le même sujet?

• (11 heures) •

Mme Weil : Oui, globalement. Donc, «violence conjugale», parce qu'on avait eu beaucoup de débats au tout début du projet de loi, quand on parlait, donc, de... je pense que c'était l'article 10 notamment, mais les infractions, en tout cas, mentionnées, et le ministre a dit... Donc, mes collègues, d'ailleurs, de Sherbrooke et de Joliette, avaient plaidé pour une reconnaissance de la violence conjugale. Mais là on reconnaît la violence conjugale ici, dans cet article, puis évidemment le projet de loi va se lire dans son entièreté.

Et, en faisant des recherches, j'ai trouvé un document de l'INSPQ, et le ministre nous avait répondu que... il avait donné quelques exemples d'infractions. Et ça, c'est un document, bon, gouvernemental, en quelque sorte, qui mentionne que les infractions criminelles en contexte de violence conjugale, que ce n'est pas reconnu officiellement, et ils mettent une liste d'infraction qui est très utile : intrusion de nuit dans le contexte de violence conjugale, négligence criminelle causant des lésions corporelles et la mort, l'homicide, le harcèlement criminel, profération des menaces, les voies de fait causant des lésions corporelles, agressions armées et voies de fait graves, les agressions sexuelles causant des lésions corporelles, armées et agressions sexuelles graves, l'enlèvement, la séquestration, tenue des propos indécents au téléphone ou de faire des appels téléphoniques harassants, les méfaits — dans les méfaits, ils incluent justement le fait de détruire un bien, parce qu'on avait parlé des meubles dans le contexte de violence conjugale — l'intimidation, et la violation d'une ordonnance judiciaire, d'un engagement de ne pas troubler l'ordre public ou d'une ordonnance de probation, et ils ont mis un «notamment» dans cette liste parce qu'il pourrait y en avoir d'autres, mais c'est quand même une liste complète.

Je mentionne ça parce que c'est quand même un document qui existe dans le giron gouvernemental, globalement, pour reconnaître... qui ne donne pas nécessairement plus... bien, qui donne une certaine précision à la violence conjugale quand on cherche un remède.

Donc, l'IVAC, j'imagine, s'inspire peut-être déjà de cette liste-là ou va s'inspirer de cette liste-là dorénavant. Mais, les dommages, il y a certains éléments ici où ils auraient déjà été, comment dire, reconnus victimes. Le ministre l'élargit pour inclure violence conjugale, mais victime d'homicide, c'est-à-dire... ou de lésions corporelles graves, c'est déjà reconnu par l'IVAC.

M. Jolin-Barrette : Mais la réponse à ça, c'est oui. Oui, les personnes sont déjà reconnues, mais ce que nous faisons, c'est en termes d'imprescriptibilité. Donc, tout ce qui... ce qu'on...

Mme Weil : Oui, oui, tout à fait.

M. Jolin-Barrette : ...tout type d'infraction dans un contexte de violence conjugale seront imprescriptibles. Alors, le débat qu'on a eu, l'autre fois, avec la députée de Joliette, la députée de Sherbrooke, c'est relativement à... d'ajouter des éléments qui ne sont pas comme reconnus comme des infractions criminelles. O.K.? C'est la distinction que nous avons. Ce que j'avais expliqué, c'est que ce qui se retrouve dans la notion de violence conjugale, ce sont les infractions criminelles qui se déroulent dans le cadre de la violence conjugale, et donc tout ça devient imprescriptible. Donc, exemple...

Mme Weil : Je comprends.

M. Jolin-Barrette : Je vous donne un exemple concret, là, O.K.? Moi et M. Ferland, on n'est pas en couple. M. Ferland me frappe, l'infraction est prescriptible à l'IVAC par trois ans, trois ans après l'adoption de notre projet de loi. M. Ferland et moi, on est en couple. On est en situation de violence conjugale, il me frappe. Cette infraction-là devient imprescriptible parce qu'on est dans un contexte de violence conjugale, d'où la nuance. Donc, c'est cette distinction-là qu'on amène, même chose en matière d'infraction à caractère sexuel.

Mme Weil : Mon point, c'est surtout que, par rapport à la discussion qu'on a eue et l'ouverture de reconnaître la violence conjugale, le ministre a répondu que ce n'est pas une infraction qui est reconnue en tant que telle dans le code, mais il y a quand même des articles. La liste ici, qui est déjà reconnue par l'INSPQ, et il faudrait voir si l'IVAC s'inspire déjà de cette liste-là, par exemple, l'intimidation, parce qu'on avait beaucoup... les collègues avaient donné l'exemple d'intimidation. Et ce n'est pas une question de preuve. En termes d'évaluation par l'IVAC, ils ne vont pas jusqu'à exiger la preuve qu'exige un tribunal. Le ministre l'a bien dit.

Je dis ça parce qu'il faut interpréter, il faudra interpréter le projet de loi du ministre largement, et il y avait une préoccupation qu'on allait se... on n'allait peut-être pas l'interpréter de façon assez large pour inclure la violence conjugale. Mais là moi, je trouve qu'on vient de, comment dire, élargir de façon... Supposons que je voudrais entendre le ministre se prononcer, parce que toutes les affirmations du ministre seront utilisées pour interprétation, éventuellement, dans des cas qui seraient contestés ou pas acceptés par l'IVAC, mais, si on regarde cette liste-là, elle est très large. L'intimidation, par exemple, très, très large, et que le ministre reconnaît, dans l'article 16, que c'est la première fois qu'on voit le concept de violence conjugale, quand on lit, donc, le projet de loi et quand on lira le projet de loi, je ne parle pas de prescription ici, mais vraiment de reconnaître le phénomène de violence conjugale, on vient, par cet article, reconnaître le phénomène de violence conjugale. Donc, il va se... Cet article sera... en quelque sorte, viendra renforcer tous les articles d'indemnité, où on demande... au-delà de la prescription, pour évaluer la situation.

Alors, j'aimerais une confirmation du ministre, si c'est possible, parce que ce serait vraiment un pas en avant, je trouve. Parce que c'est la première fois, je pense bien, qu'on voit l'expression «violence conjugale» jusqu'ici dans le projet de loi. Est-ce que je me trompe?

Le Président (M. Bachand) : M. le ministre.

M. Jolin-Barrette : Bien, c'est sûr que ce qu'on fait, là, ensemble, là, malgré les critiques, là, qui, parfois, peuvent être fondées ou non fondées, ça dépend de comment on veut travailler, là, ce sont des avancées significatives qu'on fait dans le projet de loi n° 84, et, notamment, le fait de venir dire «la violence conjugale», on vient la nommer, on vient la rendre imprescriptible relativement aux infractions qui constituent de la violence conjugale. Donc, les infractions criminelles qui sont dans un contexte de violence conjugale seront imprescriptibles. Ça, c'est important de le dire. Donc, pour ça, c'est très clair, c'est une avancée significative.

Là où on avait la discussion, l'autre fois, c'était relativement au fait de venir définir ce que constitue la violence conjugale. On souhaitait, du côté de ma collègue de Joliette et du côté de la collègue de Sherbrooke, ajouter le fait qu'on peut être indemnisé pour de la violence conjugale, qui ne constitue pas une infraction criminelle. Et c'était là le point de désaccord, parce que, dans le cadre du projet de loi n° 84, ce sont des infractions criminelles qui sont indemnisables. C'était la distinction. Mais, oui, je suis d'accord avec vous, c'est une avancée significative, le fait que le législateur québécois vienne dire : Lorsqu'une infraction criminelle rentre dans le chapeau de la violence conjugale, c'est imprescriptible, et surtout ça ne peut pas vous être opposé, comme faute lourde, si vous étiez dans ce contexte-là. Pour les femmes, ça constitue une avancée significative.

Le Président (M. Bachand) : Mme la députée de Notre-Dame-de-Grâce, peut-être, oui.

Mme Weil : Juste pour finir, c'est le mot, donc, c'est l'expression qui est utilisée ici par le législateur qui doit avoir tout son sens, «qui présente une demande en raison de la violence conjugale». Et je pense que c'est ça, l'avancée. Et je le dis parce que je pense qu'il faudra interpréter ce projet de loi de cette façon, surtout suite... J'ai été très émue par le débat de mes collègues, je n'ai pas participé à cette commission spéciale, mais je plaide donc pour ça, et le ministre le confirme. Alors, c'est bien. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Bachand) : Merci. Mme la députée de Joliette, s'il vous plaît.

Mme Hivon : Oui. Bien, M. le Président, j'aimerais ça partager l'enthousiasme de ma collègue, mais, justement, ce qui est peut-être un peu trompeur, c'est que, là, le mot «violence conjugale» apparaît, mais on ne reconnaît pas la réalité, l'entièreté de la réalité de la violence conjugale. Donc, je ne referai pas le débat que nous avons eu de manière assez importante il y a trois semaines, mais je veux juste que ce soit bien clair dans nos débats que, s'il y a un méfait sur un bien à l'occasion d'un contexte de violence conjugale, on n'a toujours pas la réponse du ministre, à savoir qu'il va y avoir une indemnisation, donc... Parce qu'on a eu des témoignages de plaignantes qui sont allées au poste de police, on leur a dit : Non, malheureusement, ça ne représente pas ce que c'est.

Et, dans le projet de loi, ce sont les infractions contre la personne. Donc, je me souviens très bien de Julie Desrosiers, qui nous a dit : Il faudrait préciser. Si vous donnez un coup dans une porte puis que vous cassez une porte dans un contexte de violence conjugale, est-ce que cela va donner lieu à une possible demande? Parce qu'il y a une pression qui est mise, il y a un contexte de terreur qui est instauré. Moi, selon moi, la réponse est non parce que le ministre nous a dit que c'étaient les infractions contre la personne et qu'il n'ouvrait pas aux biens. Il a rejeté des demandes à cet égard-là.

L'autre élément sur lequel on a eu un grand débat, c'est la coercition psychologique, le fait, donc, d'empêcher quelqu'un de voir ses proches, le fait d'instaurer un climat de peur, le fait de confisquer des biens d'une personne, de contrôler ses clés, son téléphone. Tout ça, qui, en ce moment, selon le ministre, ne constitue pas, donc, une infraction, au sens du Code criminel, ne peut pas être reconnue et donner droit à une ouverture d'un dossier à l'IVAC. Donc, je veux juste qu'on soit clair, parce que, dans la compréhension des gens, des gens qui oeuvrent dans le domaine de la violence conjugale, ces réalités-là sont intrinsèques au contexte de violence conjugale.

Or, c'est bien qu'on écrive «violence conjugale» dans la loi, mais on est pris avec les autres restrictions qui apparaissent ailleurs dans la loi, qui parlent d'infraction criminelle contre la personne, donc, ça m'apparaît... c'est juste important de ramener cette précision-là, parce que, je le répète, on aurait pu franchir ce pas-là, et être des précurseurs au Québec, et reconnaître, donc, l'entièreté de la réalité de la violence conjugale. Et je pense que, s'il y a un moment où on devrait l'être, après tout ce qu'on voit dans les dernières semaines de féminicides, c'est bien maintenant. Parce que, vous savez, M. le Président, le meurtre d'une conjointe ou d'une ex-conjointe, ça n'arrive pas du jour au lendemain, aussi, il y a souvent eu tout un climat de terreur instauré avant. Et il me semble que ce serait grand temps qu'on reconnaisse.

• (11 h 10) •

Le Président (M. Bachand) : M. le ministre, s'il vous plaît.

M. Jolin-Barrette : Oui. Peut-être juste une nuance avec ce que vient de dire la députée de Joliette aussi, et on a eu cette discussion-là précédemment aussi, il faut se rappeler aussi que, maintenant, les infractions criminelles en matière de harcèlement et de menaces deviennent admissibles aussi. Alors, ça, c'est important de le dire, M. le Président. Donc, dans un contexte de violence conjugale aussi, ce sont les infractions qui sont ajoutées, alors, ça, je pense que c'est important de le dire aussi, et qui, par le fait même, vont permettre de rattraper certaines situations. Je tenais juste à le souligner aussi que c'est un ajout aussi, en termes de harcèlement et de menace.

Le Président (M. Bachand) : Merci, Mme la députée de Notre-Dame-de-Grâce.

Mme Weil : Oui. Évidemment, la proposition et la solution qui est proposée par ma collègue serait la meilleure, et dans le sens de le reconnaître de façon très transparente sans être obligé de faire le jeu des articles, un entre l'autre, un contre l'autre, Code criminel, la loi sur l'indemnisation, et la jurisprudence, et l'INSPQ. Mais, ceci étant dit... Parce que je veux que ça fasse partie, justement, de la transcription et que les déclarations du ministre... parce que ça serait... je plaide pour... c'est sur ce que plaide la ministre... la députée de Joliette, pour le reconnaître. Mais, ceci étant dit, l'article 430, là, du Code criminel, sur les méfaits, donc quiconque détruit ou détériore un bien... Et là on vient de reconnaître, donc, cet acte criminel dans un contexte de violence conjugale parce qu'on l'inclut dans cet article 16. Donc, par l'interprétation de la loi qu'on étudie, l'interprétation qui existe déjà dans des documents... Donc, «méfait», là, va loin et s'interprète dans un contexte de violence conjugale dans le cadre du Code criminel, en fait. Donc, quelqu'un qui mettrait, justement... Moi, j'essaie de voir comment tout s'imbrique. Donc, un mari violent qui viendrait détruire un meuble quelconque, ça serait reconnu, donc ça serait indemnisable, ou tout autre acte qui soit... Ça a bien été décrit il y a trois semaines, quand on a discuté, ce régime de terreur là.

M. Jolin-Barrette : Les infractions criminelles qui sont couvertes... On a déjà eu la discussion, là, les infractions criminelles qui sont couvertes, ce sont les infractions criminelles contre la personne, O.K.? Si, dans le cas d'une situation où il y a du harcèlement ou il y a des menaces... Chaque situation est une situation dans un cas d'espèce, et il y a deux choses, là. Le document de la collègue de Notre-Dame-de-Grâce, je ne l'ai pas vu, mais, entre un document de l'INSPQ puis, dans le fond, la réalité de la loi... Moi, mon souhait, c'est de faire en sorte, là, que, lorsqu'il y a une infraction criminelle contre la personne qui est perpétrée et qui... je vous donnais l'exemple de harcèlement et de menaces, parce qu'il y a plusieurs choses qui peuvent survenir dans cet événement-là, mais, dans le fond, la personne, dans un contexte de violence conjugale, cela sera imprescriptible.

Le Président (M. Bachand) : Mme la députée de Joliette, s'il vous plaît.

Mme Hivon : Donc, c'est un débat vraiment intéressant, et puis justement il faut aller au fond des choses, parce que la réponse à la question de la collègue, c'est non. C'est-à-dire que le méfait qui est mis dans la liste qui est faite là, à bon droit... parce que, oui, dans un contexte de violence conjugale, il peut y avoir des méfaits de produits sur des objets, mais ce n'est pas inclus, même si c'est, oui, quelque chose relatif à la violence conjugale dans le projet de loi pour l'IVAC. Donc, ça pourrait être reconnu comme une infraction criminelle, mais, puisqu'on est limité et que le ministre refuse d'inclure la notion de violence conjugale dans toute sa complexité aux infractions contre la personne, la réponse à la question, c'est que, si je me présente à l'IVAC pour un méfait dans un contexte de violence conjugale, vu que c'est reconnu comme une infraction contre les biens et non pas contre la personne, je ne pourrai pas avoir une indemnisation, je ne pourrai pas être soutenue et avoir de l'aide. Et je veux savoir si le ministre... Puis là, il va nous dire que, si, par ailleurs — je comprends toutes les nuances qu'il fait — si, par ailleurs, c'est joint à d'autres éléments et qu'on peut plaider que ça équivaut à du harcèlement, là, ça pourrait. Mais vous imaginez la complexité des choses pour la personne qui se présente et l'agent qui va devoir interpréter ça.

Alors, je réitère que je ne comprends pas pourquoi on n'accepte pas de reconnaître la violence conjugale, dans tout ce qu'elle implique, et où il y a parfois un mélange d'infractions contre la personne et contre les biens, mais dans un contexte où le but est d'instaurer un climat difficile. Et pourquoi on a eu tout ce débat-là l'autre fois et pourquoi Julie Desrosiers, qui est coprésidente du comité d'experts, est venue le dire clairement, qu'il faudrait considérer ça même si ce n'est pas vu comme une infraction contre la personne? C'est parce que, oui, ça fait intrinsèquement partie d'un contexte de violence conjugale.

Le Président (M. Bachand) : Merci. M. le ministre.

M. Jolin-Barrette : Oui, je comprends, M. le Président, on a déjà eu toute la discussion relativement au harcèlement, relativement, également, à «menace».

Le Président (M. Bachand) : Mme la députée de Notre-Dame-de-Grâce.

Mme Weil : À l'article 2, on parle de perte matérielle comme... Donc : «Aux fins du présent titre, est une personne victime toute personne physique qui, en raison de la perpétration d'une infraction criminelle, subit une atteinte à son intégrité ou une perte matérielle...» Donc, c'est reconnu comme acte qui serait indemnisable dans un contexte de violence conjugale, dans le contexte de méfait, par exemple?

M. Jolin-Barrette : Vous voulez avoir la définition de «perte matérielle»?

Mme Weil : Bien, toute perte matérielle... Je ne sais pas s'il y a une définition, mais...

Mme Hivon : ...de la personne. Puis, vu que c'est un méfait, ce n'est pas vu contre l'intégrité de la personne, c'est vu contre un bien. Ça fait que ça, même s'il y a une perte matérielle, ça ne s'appliquera pas.

M. Jolin-Barrette : Alors, «perte matérielle», M. le Président, est dans le titre II, donc dans la première section de la loi. Donc, ça, c'est relativement à l'aide aux victimes, pas au niveau de l'indemnisation, donc c'est séparé. Donc, ça signifie qu'une personne qui subit une perte matérielle va pouvoir bénéficier de l'accompagnement, du soutien psychologique, tout ça, de la part des CAVAC notamment, de l'accompagnement à la cour, mais ne bénéficie pas de l'indemnisation du régime d'indemnisation. Donc, c'est la première section.

Mme Weil : En tout cas, je pense qu'il y a beaucoup de clarifications à aller chercher, peut-être, entre... Parce que le fait d'invoquer la violence conjugale... Le législateur ne parle pas pour ne rien dire. Donc, on a reconnu la violence conjugale dans une loi qui concerne l'indemnisation des victimes d'actes criminels. Il faut que les gens comprennent bien le sens de cette terminologie puis il faut aussi que ça soit interprété largement.

En tout cas, je... pour l'instant... On verra s'il y a d'autres articles qui vont, dans l'étude du projet de loi... où cette notion de violence conjugale... Et je pense qu'on est tous très sensibilisés actuellement. Le moment est fort, d'ailleurs, pour avoir une bonne compréhension de ce que va et ne va pas faire le projet de loi et que, si on utilise l'expression «violence conjugale», il faut qu'il y ait un sens à cette expression qui serait cohérent avec la totalité du projet de loi. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Bachand) : Merci. Interventions? M. le député de LaFontaine, s'il vous plaît.

M. Tanguay : Oui. Merci, M. le Président. Merci, M. le Président. On ne refera pas le débat, mais force est de constater que «harcèlement», je prends cet exemple-là, je prends cet exemple-là de «harcèlement» en vertu du Code criminel, article 264, et, en 2021, après tous les rapports, les études, les analyses, les discussions qui ont eu lieu et les révélations, «harcèlement», 264 du Code criminel, dans son application, est beaucoup plus restrictif que le «harcèlement sexuel».

Et j'inviterais le ministre à aller consulter, si ce n'est pas déjà fait, là, l'Institut national de santé publique du Québec, l'INSPQ, qui a fait une trousse média sur les agressions sexuelles et en a une définition, qu'est-ce que le harcèlement sexuel, et ainsi de suite : «Un comportement à caractère sexuel non désiré, qui se manifeste de façon répétée, et qui a des conséquences néfastes sur la victime.»

Cette façon d'aborder de façon spécifique le harcèlement sexuel dans des contextes qui peuvent être, notamment, le lieu de travail, M. le Président, est beaucoup plus collée à la réalité et adaptée à ce qui constitue nos vies en 2021 que ne l'est l'article 264 du Code criminel, qui est très, très large, couvre toute forme de harcèlement criminel en vertu de 264 et qui a, dans son application — puis on avait eu des témoignages, notamment, auprès de personnes qui ont dû faire des déclarations à la police, et ainsi de suite — une interprétation qui est, somme toute, lourde et restrictive.

Alors, une fois qu'on a dit ça, de se coller à 264 pour ce qui est du harcèlement criminel et de l'appliquer à l'IVAC quand on parle de harcèlement sexuel, je pense, et je le dis en tout respect, que c'est réducteur d'une réalité nouvelle que l'on doit traduire, notamment dans le contexte de l'IVAC. Voilà.

• (11 h 20) •

Le Président (M. Bachand) : Merci. Interventions? Est-ce qu'il y a d'autres interventions sur l'amendement?

M. Tanguay : Sur l'amendement? Non.

Le Président (M. Bachand) : Alors, s'il n'y a pas... Oui, Mme la députée de Joliette.

Mme Hivon : Oui. Enfin, vous allez me permettre juste de redire que je pense que le ministre passe à côté d'une avancée qui pourrait être vraiment très importante pour les femmes du Québec qui sont victimes de violence conjugale, et ça enverrait un signal très fort qu'au Québec on a pris acte que la violence conjugale, ce n'est pas juste quand il y a des bleus sur le corps, mais que c'est toute une escalade de tension, de coercition dans un contexte conjugal. Alors, si le ministre peut continuer à réfléchir avec ses collègues puis à avancer sur cette question-là, on a encore des jours devant nous. Je ne doute pas que ces questions-là le touchent et, bien franchement, je pense qu'il y aurait matière à envoyer un réel signe d'espoir aux victimes de violence conjugale.

Ceci dit, je voulais juste comprendre, dans les exceptions, donc, dans l'amendement de l'article 16, on parle, au premier alinéa : «Si la personne victime a été partie à la perpétration de l'infraction ou a contribué, par sa faute lourde, à son atteinte ou à l'atteinte ou au décès d'une autre personne parce qu'elle subissait de la violence ou une menace de violence.» Donc, elle va être exclue, mais je me demandais juste pourquoi on réitère «par sa faute lourde». C'est-à-dire, c'est peut-être très juridique, mais c'est comme si on qualifiait quand même, malgré le contexte, qu'elle commet une faute lourde. Pourquoi on réitère ça alors que, dans le fond, elle est dans un contexte de violence ou de menace de violence? Est-ce qu'il faut vraiment dire qu'elle commette une faute lourde ou est-ce que ça ne remet même pas en cause le fait même qu'elle commette une faute lourde puisqu'elle est dans un contexte où elle n'a comme pas le choix de contribuer à la faute qui est perpétrée? Je ne sais pas si le ministre comprend où je veux en venir, là.

C'est que je me demande pourquoi on rajoute «par sa faute lourde». «Si la personne victime a été partie à la perpétration de l'infraction ou a contribué à son atteinte», il me semble que c'est suffisant. Parce que, là, je trouve que c'est comme si on est un peu en train de dire une chose et son contraire. Dans le fond, c'est comme si on continue à dire qu'elle a fait une faute lourde, mais que, dans tel contexte, donc dans le contexte où elle subissait de la violence ou une menace de violence, on va l'exonérer du fait de l'application de la faute lourde. Mais est-ce qu'en soi c'est même une faute lourde quand tu es dans un contexte ou tu n'as pas le choix d'être partie à la perpétration de l'infraction? Ça fait que je me demande juste la pertinence de garder la référence, dans le 1°, à «faute lourde».

Le Président (M. Bachand) : M. le ministre.

M. Jolin-Barrette : Bien, en fait, c'est nécessaire parce qu'on veut être très clair. Tu sais, même s'il y une... parce qu'une faute lourde, c'est plus grave qu'une simple faute, là, c'est vraiment, là, un geste significatif. Alors, on veut être très clair, là, avec le libellé de l'article que, même s'il y a une faute lourde, là, même s'il y a un facteur contributif très, très important, même si la personne est responsable, bien, elle va quand même pouvoir être indemnisée.

Mme Hivon : O.K., mais moi, je trouve que ça envoie un drôle de message parce que c'est comme si on va dire que la personne a commis une faute lourde. Puis moi, je ne suis pas convaincue qu'il y a même une... parce qu'il n'y a pas l'intention, il n'y a pas... je veux dire, la personne n'a pas le choix. Donc, est-ce que c'est même vraiment une faute lourde?

M. Jolin-Barrette : Bien, nous, on veut s'assurer de capter toutes les situations potentielles puis que ça soit très clair. Donc, même si c'était une faute lourde au moment de l'analyse du dossier, là, on veut être sûr qu'elle puisse être exonérée puis on peut être sûr que la personne, elle ne se fasse pas opposer la faute lourde.

Parce que le concept de base, là, de l'article, dans le fond, là, c'est, dans le fond, quand vous... Dans le fond, le régime d'indemnisation, c'est : on indemnise les victimes d'infraction criminelle. Ça, c'est la prémisse de base. Après ça, on dit, deuxième prémisse : Bien non, mais, si vous avez commis une faute lourde, par exemple, vous n'aurez pas droit au régime. Puis, on vient amener une exception, qu'on veut la plus claire possible, pour dire : Si vous avez commis une infraction criminelle ou si vous avez contribué par votre faute lourde, mais que vous étiez en circonstance de violence sexuelle ou de violence conjugale, ça ne s'oppose pas à vous, puis vous allez pouvoir être indemnisé. Donc, c'est pour ça qu'on le met clairement comme ça, qu'on vient nommer la faute lourde pour la personne.

Ça fait que, là, le principe de base, c'est : Vous êtes indemnisé. Sous principe, si vous faites une faute lourde, vous n'êtes pas indemnisé. Sauf qu'attention, si vous avez quand même commis une faute lourde, mais vous êtes en situation violence conjugale, violence sexuelle, vous allez tout de même pouvoir être indemnisé.

Mme Hivon : Ça va.

Le Président (M. Bachand) : Merci. Interventions sur l'amendement? M. le député de LaFontaine.

M. Tanguay : ...dans le fond, on est sur l'amendement qui remplace complètement l'article 16, puis après ça on va revenir sur l'article 16 tel qu'amendé. Alors, je suis au-delà du réel.

M. Jolin-Barrette : Restez avec nous.

M. Tanguay : Pardon?

M. Jolin-Barrette : Restez avec nous.

M. Tanguay : Oui, c'est ça. Inquiétez-vous pas, mon oeuvre ne fait que commencer.

M. Jolin-Barrette : Ah bien!

M. Tanguay : Ah bien! Qu'est-ce que tu veux répondre à ça?

M. Jolin-Barrette : M. le Président, il faut le dire d'abord, ça pourrait devenir le prochain slogan de campagne du député de LaFontaine.

M. Tanguay : Dans LaFontaine.

M. Jolin-Barrette : Dans LaFontaine. Laissez le député de LaFontaine poursuivre son oeuvre. Il paraît que ça permet de gagner des élections, ça. Ou Le député de LaFontaine donne à sa circonscription.

Le Président (M. Bachand) : Oui. Maurice Duplessis. Oui, monsieur...

M. Tanguay : Maurice Duplessis. Alors, on a tous écouté la magnifique série Maurice donne à sa province.

Alors, M. le Président, on parlait tantôt... puis je veux juste qu'on fasse le lien, je présume de la réponse, mais que le ministre le dise, ce serait d'autant plus clair, là, on parle... Bon, je reviens aux trois éléments imprescriptibles, il y a la violence conjugale, violence sexuelle et violence subie durant l'enfance. Il n'est pas nommé spécifiquement dans le dernier alinéa, mais l'exclusion du deuxième paragraphe, alinéa premier fait office de «violence subie durant l'enfance». Autrement dit, c'est là que je le vois, là.

M. Jolin-Barrette : Donc, dans le premier alinéa...

M. Tanguay : Premier alinéa, deuxième paragraphe. Donc, la personne n'est pas indemnisée, «faute lourde», sauf, deuxième paragraphe, «s'il s'agit d'un enfant de moins de 12 ans, d'un enfant inapte ou d'une personne inapte à la charge d'une personne victime décédée ou qui subit une atteinte à son intégrité en raison de la perpétration d'une infraction criminelle contre cette dernière». J'aimerais savoir : Est-ce que, ça, ça fait office de l'expression «violence subie durant l'enfance»? Parce que je ne le retrouve pas à la fin. Les trois vont toujours de pair, hein, violence conjugale, violence sexuelle et violence subie durant l'enfance. Si le ministre me dit par contre : Oui, «violence subie durant l'enfance» est couvert par ça, j'aurais peut-être des questions de compréhension pour savoir jusqu'à quel point c'est couvert pour le passé, là, tel que rédigé.

(Consultation)

Le Président (M. Bachand) : Merci. M. le ministre, est-ce que vous avez besoin de plus de temps? Ça va?

M. Jolin-Barrette : M. le Président, on est en train de faire la vérification, là, pourquoi ce n'était pas là, mais c'était l'intention, dans le fond, que la violence subie pendant l'enfance, elle ne soit pas... on ne puisse pas invoquer la faute lourde là-dessus. Alors, peut-être que, si le député de LaFontaine a d'autres questions, on va faire les vérifications puis...

M. Tanguay : Oui. Puis, là-dessus, je le rajouterais pour ne pas qu'il y ait d'ambiguïté, puis surtout que je ne suis pas sûr que «violence subie durant l'enfance», qui réfère évidemment au passé, à un passé imprescriptible, et ainsi de suite, est suffisamment couvert tel que défini. Ou, revirez ça de bord, si on le définit, des fois, on dit souvent... on se fait refuser des amendements en disant : Bien non, il ne faut pas le définir, parce que ça serait beaucoup plus ségrégué puis ça pourrait être interprété de façon limitative, ce que l'on ne veut pas. Je reprendrais cet argument-là, là, comme risque potentiel, et je le nommerais. Même si certains pourraient dire : Bien, c'est redondant, bien, je le nommerais pareil à la fin.

Le Président (M. Bachand) : Merci, M. le député. M. le ministre.

M. Jolin-Barrette : Oui. Bien, comme je vous disais, là, on est en train de faire des vérifications, là, relativement à tout ça. Donc, je pourrais prendre les autres questions en attendant.

Le Président (M. Bachand) : Ça va? Est-ce qu'il y a d'autres interventions sur l'amendement? M. le député de LaFontaine.

• (11 h 30) •

M. Tanguay : Oui. Merci beaucoup, M. le Président. Je reviens sur le concept de faute lourde puis je lis les pages 6 et 7, là, du mémoire de Michaël Lessard par rapport à la faute lourde. Le concept de faute lourde existait déjà à l'article 20 sur la loi sur l'aide ou de l'indemnisation... de la loi sur l'indemnisation. Le concept de faute lourde, ici, si on exclut... Parce qu'on l'exclut nommément de l'interprétation à donner à «faute lourde», le fait de dire... d'avoir participé à l'infraction, on l'exclut. Donc, «faute lourde», ça référerait, puis j'aimerais entendre le ministre là-dessus, par exemple, à une insouciance telle... ou à une mauvaise foi. Quel est le corpus jurisprudentiel qu'on conserve ici? «Faute lourde», on réfère à quoi? Je ne sais pas si le ministre a deux, trois exemples, parce que, quand vous me dites, normalement, en matière civile, «faute lourde»... Parce que c'est un concept surtout de... c'est l'application du principe, dans nos cours de droit civil, la théorie des mains propres, la théorie des mains propres fait en sorte que vous ne pouvez pas aller demander justice si vous avez participé à un méfait pour lequel vous demandez justice. Si vous avez été de mauvaise foi puis vous avez créé la faute reprochée à la partie adverse de mauvaise foi, ne venez pas dire que vous en avez subi un dommage, vous êtes la source initiale de cette faute-là. Donc, la faute lourde, en matière d'indemnisation des victimes d'actes criminels, je reprends l'exemple d'un contexte civil, lorsque vous avez une insouciance telle... ça, c'est la personne qui fait du ski, M. le Président, puis qui dévale les pistes de ski alpin puis qui ne respecte pas les règles de sécurité élémentaires, s'en va dans le bois de reculons, est en état d'ébriété, ainsi de suite, se frappe, bien, il n'y aura pas de responsabilité, c'est une insouciance, c'est une... Mais, dans le contexte d'indemnisation, est-ce qu'on voudrait faire grief, je le dis de même, à une personne qui aurait été insouciante? J'aimerais comprendre.

M. Jolin-Barrette : Mais les critères, c'est les critères de l'article 1474 du Code civil du Québec. Donc, il y a une faute lourde de la part d'une victime lorsque cette dernière a «un comportement qui dénote [...] une insouciance grossière et complète de la conséquence des actes qu'elle pose», laquelle «est à ce point probable et prévisible — et non seulement possible — qu'il [est] à peine croyable que la victime n'ait pas accepté, en agissant, le dommage qui s'est réalisé.»

Donc, en termes jurisprudentiels, là, sur la faute lourde avec l'IVAC, là, ils ont précisé la portée et la signification à donner à l'expression «faute lourde» au fil des ans. Ainsi, pour être indemnisé, il faut être une victime innocente, ne pas avoir contribué à son propre malheur, ne pas avoir démontré une insouciance ou... des conséquences de ses gestes. Le comportement de la personne qui réclame ne doit pas dénoter une attitude irresponsable ou téméraire compte tenu de la situation, et l'analyse doit être faite à partir de l'examen du comportement de l'individu pris dans son contexte d'ensemble. Chaque cas doit être analysé selon les circonstances propres à chacune des demandes de prestation. Donc, on se rattache aux critères du Code civil, plus la jurisprudence qui a eu cours, au cours des dernières années, sur la notion de faute lourde qui se retrouvait déjà dans l'ancienne loi sur l'IVAC.

M. Tanguay : Puis c'est juste dans le contexte, puis le ministre me comprend, dans le contexte civil, je comprends, théorie des mains propres, le ski de reculons, le soir, dans une piste pas balisée, puis c'est... puis là vous vous blessez, puis vous dites : Aïe! la montagne est responsable. Non. Mais dans le contexte d'indemnisation, je ne suis pas sûr que le concept de 1474 puis d'insouciance... puis, encore une fois, le ministre pourrait me dire... il pourrait peut-être me parler davantage du corpus jurisprudentiel, justement, dans l'application de l'IVAC, de faute lourde parce que, que ce soit une personne... on va dire : Bien, comment ça, tu es allée à tel endroit, sachant tous les signaux, et ainsi de suite, puis tu as été agressée sexuellement, par exemple? La personne aurait pu avoir fait preuve de... Là, on l'exclut avec violence sexuelle, oui, le ministre a raison de le dire, mais, même là, dans un contexte où tu as été réellement tête folle, insouciante de faire ça, dans le langage commun, on entend ça, on ne va pas indemniser, oui, mais, à la fin de la journée, elle est victime d'un acte criminel, c'est juste ce concept-là, je l'applique... je vis très bien avec en contexte civil, mais contexte criminel...

M. Jolin-Barrette : M. le Président, un membre d'un groupe criminalisé, c'est dangereux, il sait que ses amis, collègues de travail, membres de ce groupe criminalisé là, ils ne vont pas à l'église le dimanche chanter la messe, M. le Président, comme on dit, ce n'est pas des enfants de choeur, donc ils ne seront pas admissibles, M. le Président, parce que, nécessairement, si une infraction criminelle survient, on s'attend qu'avec ce groupe criminalisé là, une infraction criminelle survienne, alors ça ne sera pas couvert.

En réponse à la question du député de LaFontaine, dans le fond, le concept de base, c'est 1474, la faute lourde, c'est le volet civil qui a toujours été utilisé. Et la jurisprudence, ce qu'elle est venue nous dire, là, c'est que, pour être indemnisé, il faut être une victime innocente, ne pas avoir contribué à son propre malheur, ne pas avoir montré une insouciance des conséquences de ses gestes, le comportement de la personne qui réclame ne doit pas dénoter une attitude irresponsable ou téméraire, compte tenu de la situation, et l'analyse doit être faite à partir de l'examen du comportement de l'individu. Donc, comme dirait le député de LaFontaine, c'est in concreto, prise dans son contexte, et chaque cas doit être analysé selon les circonstances des demandes de prestations. Donc, c'est une analyse individualisée.

M. Tanguay : Oui, effectivement, l'exemple, là, du groupe criminalisé, c'est l'exemple classique qu'on reprend souvent, mais il n'en demeure pas moins que «faute lourde», au-delà de ce contexte-là que tout le monde comprend, demeurerait une potentielle épée de Damoclès.

Alors, c'était mes préoccupations par rapport à ça. On verra comment... jusqu'à maintenant, l'exemple classique, c'est les groupes criminalisés, de motards criminalisés, mais on sait que ça peut arriver à une personne qui ne participe pas dans un groupe de motards criminalisés puis qui pourrait se voir fermer la porte. Je veux juste m'assurer que la personne ne se fera pas reprocher un comportement qui l'empêcherait d'être indemnisée, même si ça faisait preuve d'une insouciance qui se qualifierait de faute lourde en matière de 1474, je ne me réconcilierais pas bien avec cette réalité-là si on fermait la porte à une personne... Oui, elle a été gravement insouciante, mais on va l'indemniser pareil, là.

M. Jolin-Barrette : Bien, je comprends, mais on ne va pas à l'encontre de ce que les tribunaux ont décidé et de l'ancienne disposition dans l'ancienne loi. Je pense que ça fonctionne bien dans la situation actuelle, d'autant plus qu'on vient notamment exclure, là, la violence sexuelle puis la violence conjugale.

Le Président (M. Bachand) : Merci. Interventions sur l'amendement?

M. Tanguay : ...réponse, M. le Président. On peut suspendre une minute, le temps qu'ils se parlent.

Le Président (M. Bachand) : On va suspendre quelques instants. Merci.

(Suspension de la séance à 11 h 37)

(Reprise à 11 h 40)

Le Président (M. Bachand) : À l'ordre, s'il vous plaît! La commission reprend ses travaux. M. le ministre, s'il vous plaît.

M. Jolin-Barrette : Oui. Alors, pourquoi «violences subies pendant l'enfance» ne s'applique pas? Dans un premier temps, il faut dire que les enfants de moins de 12 ans, ça ne s'applique pas au concept de faute lourde. On vient raccrocher un mineur qui serait victime de menaces, O.K., ça, c'est déjà exclu, quand il est susceptible d'avoir des... quand il fait quelque chose sous la contrainte ou sous une menace, il est déjà exclu. Par contre, on ne vient pas dire «violences subies pendant l'enfance» pour couvrir tous les cas de figure. Exemple, un jeune de 16 ans qui commettrait une infraction criminelle, qui est passible de poursuites criminelles, on n'exonère pas l'ensemble de la violence subie pendant l'enfance pour faire en sorte qu'il ne puisse pas être... sa faute lourde par rapport à une infraction propre, là, sur laquelle il n'est pas menacé, pour laquelle il n'est pas contraint, bien, il ne pourra pas invoquer la faute lourde. Donc, un jeune de 16 ans qui décide d'aller faire un vol, supposons, lui, il ne pourra pas invoquer la faute lourde.

M. Tanguay : Pourquoi, monsieur... Oui. Pourquoi le 12 ans? Pourquoi pas le 14 ans, par exemple?

M. Jolin-Barrette : Le 12 ans, c'est parce que...

Une voix :

M. Jolin-Barrette : Ah! à partir de 12 ans, ils sont poursuivis pour des infractions criminelles.

M. Tanguay : O.K. Il y a-tu... Il y a la Loi sur les jeunes contrevenants.

M. Jolin-Barrette : ...sur les jeunes contrevenants.

M. Tanguay : C'est ça, c'est la Loi sur les jeunes contrevenants, et jeunes contrevenants de 12 à 17 ans inclus.

M. Jolin-Barrette : C'est ça, exactement, 12 à 17.

M. Tanguay : O.K. Donc, on voit que nos trois qui vont toujours de pair, toujours en ayant en tête 2926.1, il y a, là aussi, un atermoiement, là. Violences subies dans l'enfance, mais en matière criminelle, Loi sur les jeunes contrevenants de 12 à 17 ans inclusivement, oui, vous êtes un enfant, vous n'êtes pas un adulte, mais vous n'aurez pas, entre guillemets, de passe-droit si vous avez commis un acte criminel. O.K. Maintenant, comment les deux régimes vont se marier? La Loi sur les jeunes contrevenants, comme telle, il y a des... Une infraction criminelle, lorsque vous participez à l'infraction criminelle, mais il y a différents qualificatifs aussi puis il n'y a pas de traitement criminel comme tel par des procédures, le but, c'est de réhabiliter l'enfant. Est-ce qu'on veut... Est-ce que tout geste... Parce que, là, il faudrait que j'aie relu, M. le Président, la Loi sur les jeunes contrevenants, là, mais mon point, c'est que ce n'est pas parce que vous vous qualifiez sur la Loi des jeunes contrevenants que l'on doit, de facto, fermer la porte à une indemnisation, parce qu'il y a toute une gradation. Alors, je ne voudrais pas qu'on fasse l'économie de cette réflexion-là, je ne sais pas si le ministre me suit, là.

M. Jolin-Barrette : Non, mais si la personne commet une infraction criminelle... O.K. Si le jeune contrevenant commet une infraction criminelle, il ne peut pas bénéficier du régime, là.

M. Tanguay : Et la Loi sur les jeunes contrevenants trouve application uniquement lorsqu'il y a un acte criminel comme tel de commis.

M. Jolin-Barrette : Je ne suis pas un spécialiste, mais on va vérifier.

Le Président (M. Bachand) : M. le député.

M. Tanguay : Oui, c'est ça. Bien, on vérifie. Parce que le ministre comprend mon point, si la Loi sur les jeunes contrevenants est d'application plus large que lorsque vous commettez un acte criminel, à ce moment-là, le fait de vous exclure de l'article 16 parce que vous êtes sous l'égide de la Loi sur les jeunes contrevenants, on élargit l'exclusion du jeune, là.

M. Jolin-Barrette : Non, mais il faut que ça constitue une infraction criminelle.

M. Tanguay : Exact, mais la Loi sur les jeunes contrevenants, est-ce qu'elle est plus large que les infractions criminelles?

M. Jolin-Barrette : Oui, mais, la base de tout ça, là, pour être indemnisé, là, ce n'est pas que vous êtes poursuivi en matière pénale, là, supposons, là, c'est le fait que vous subissez une infraction criminelle pour être indemnisé.

M. Tanguay : Oui, mais où c'est écrit, dans l'article 16, qu'il faut que ce soit un acte criminel...

M. Jolin-Barrette : Bien, parce que...

M. Tanguay : ...en vertu de l'article... du deuxième alinéa... du deuxième paragraphe de l'alinéa premier?

M. Jolin-Barrette : Non, mais pour être indemnisé, là, votre demande d'indemnisation, vous êtes une personne victime en raison de la commission d'une infraction criminelle, là, l'article 16 vient dire : Bien, vous êtes... Dans le fond, vous ne pouvez pas être indemnisé parce que vous avez commis une faute lourde. C'est ça, le régime d'exception, là, de l'article 16, là. Dans le fond, si vous commettez... Le principe de base de la loi, c'est : on vous indemnise si vous êtes une personne victime d'infraction criminelle. À 16, on vient dire : Si vous avez commis une infraction... Si vous avez commis une faute lourde, vous ne pouvez pas bénéficier du régime d'indemnisation relativement à une infraction criminelle sous réserve des exceptions qu'il y a à 1, 2, puis, par la suite, là, violence sexuelle, violence conjugale.

M. Tanguay : Ça, je peux comprendre le un pour un. Autrement dit, vous, à partir de 12 ans, si vous avez parti pris à l'infraction criminelle, vous êtes exclus. Ça, c'est clair, à partir de 12 ans, si vous avez parti pris à l'infraction criminelle, vous êtes exclus.

M. Jolin-Barrette : Si vous faites une faute lourde, vous êtes exclus à moins qu'elle ait été commise en raison de la contrainte ou des menaces.

Le Président (M. Bachand) : M. le député

M. Tanguay : Des contraintes ou menaces pour les 12 ans, je ne le vois pas, par contre.

M. Jolin-Barrette : Dans le fond...

M. Tanguay : Violences ou menaces, là, je ne le vois pas pour les 12 ans, par contre.

(Consultation)

M. Jolin-Barrette : Donc, à l'alinéa : «16. Aucune personne victime n'a droit à une aide financière en vertu du présent titre si elle a été partie à la perpétration de l'infraction criminelle dont elle est victime ou dont une personne visée au paragraphe 1° du premier alinéa de l'article 10 est victime ou si elle a contribué, par sa faute lourde, à l'atteinte à son intégrité ou au décès ou à l'atteinte à l'intégrité de cette personne, sauf :

«1° si la personne victime a été partie à la perpétration de l'infraction ou a contribué, par sa faute lourde, à son atteinte ou à l'atteinte ou au décès d'une autre personne parce qu'elle subissait de la violence ou une menace de violence;

«2° s'il s'agit d'un enfant de moins de 12 ans, d'un enfant inapte ou d'une personne inapte à la charge [de la] personne victime décédée ou qui subit une atteinte à son intégrité en raison de la perpétration d'une infraction criminelle contre cette dernière.»

O.K., juste si on revient, là, la Loi sur le système de justice pénale pour adolescents vise les infractions criminelles, ça, c'est le principe de base.

M. Tanguay : Exclusivement

M. Jolin-Barrette : Ce qu'on me dit, c'est exclusivement. Ensuite, si l'enfant a plus que 12 ans, c'est le paragraphe 1° qui s'applique, donc, «parce qu'elle subissait de la violence ou une menace de violence». Si la... O.K., suivez-moi, là, 16, paragraphe 1°, O.K., la personne victime a plus que 12 ans, O.K., elle a commis une faute lourde, donc un jeune de 14 ans a commis une faute lourde, mais il se retrouve dans la... puis, lui, il est victime aussi, là, dans le fond, il a commis une infraction criminelle, il l'a faite, faute lourde, là, il se retrouve comme personne victime aussi parce qu'il réclame à l'IVAC parce que c'est une personne victime : «1° si la personne victime a été partie à la perpétration de l'infraction ou a contribué, par sa faute lourde, à son atteinte ou à l'atteinte ou au décès d'une autre personne parce qu'elle subissait de la violence ou une menace de violence», donc elle est là, son exclusion.

Donc, si tu subis de la violence ou menace de la violence, tu avais 14 ans, puis l'adulte qui était avec toi, il dit : Viens, on va aller faire un dépanneur sinon je te frappe ou je te bats pour que t'ailles chercher l'argent au dépanneur, faire un hold-up, supposons, à ce moment-là, le mineur de 14 ans, même s'il a commis une infraction criminelle, sa faute lourde, c'est lui qui a commis le crime, il avait l'arme, puis tout ça, à ce moment-là, il va être exclu parce qu'il y avait une menace contre lui ou il subissait de la violence.

M. Tanguay : O.K. Ça fait que ça, c'est une précision importante. Le 12 à 17 ans inclusivement est couvert par le premier paragraphe du premier alinéa.

M. Jolin-Barrette : C'est ça.

M. Tanguay : Bon. Maintenant, puis il est là mon seul écueil, mon seul défi de compréhension, en ce qui me concerne, qui demeure, il y a toujours deux vocables, il y a parti pris à l'infraction criminelle, je participe au hold-up, je suis... bon, et faute lourde qui est autre chose qu'être partie à l'infraction criminelle, faute lourde, c'est deux concepts différents. Ma compréhension, c'est qu'on ne fait pas bénéficier au jeune de 12 à 17 ans, exclus par notre compréhension du deuxième paragraphe, on ne lui fait pas bénéficier du concept de faute lourde. Je comprends qu'on ne lui fasse pas bénéficier du concept, Loi sur le système de justice pénale pour adolescents, de la participation à l'infraction criminelle, mais je ne vois pas, en application du principe «violence subie pendant l'enfance», pourquoi on ne lui permettrait pas, à mon jeune de 12 à 17 ans qui aurait commis une faute lourde, d'être couvert pareil?

• (11 h 50) •

M. Jolin-Barrette : Non, c'est couvert par 1°, par paragraphe 1° : «si la personne victime a été partie à la perpétration de l'infraction — donc, qui commet le crime, O.K. — ou a contribué, par sa faute lourde — O.K. — à son atteinte ou à l'atteinte ou au décès d'une autre personne parce qu'elle subissait de la violence ou une menace de violence», vous l'avez là, votre violence.

Dans le fond, là, les deux cas d'espèce, là, que le député de LaFontaine illustre, là, je participe à l'infraction ou j'ai commis une faute lourde qui a contribué à la perpétration de l'infraction, les deux csas d'espèce sont là, sauf que je vais pouvoir exonérer tout ça puis bénéficier du régime parce que je subissais de la violence ou menace de la violence.

M. Tanguay : Je suis d'accord avec le ministre. Il y a... je suis d'accord avec sa lecture, tout à fait, par contre, je reviens au concept «violence subie pendant l'enfance», ce n'est pas violence subie pendant que vous étiez adulte, c'est : vous étiez mineur, violence subie pendant l'enfance, il y a un régime particulier, violence subie pendant l'enfance. Je suis prêt à vivre avec le fait qu'on exclut le jeune de 12 à 17 ans parce qu'il y a parti pris à une infraction criminelle, la loi fédérale, mais je ne lui aurais pas, au jeune de 12 à 17 ans... parce que violence subie pendant l'enfance, c'est un régime particulier, le jeune de 12 à 17 ans, je lui aurais permis, indépendamment d'une analyse menace ou violence, qui est une analyse chez les adultes, je lui aurais permis de s'exonérer, le cas échéant, de sa faute lourde, indépendamment de menace ou violence, puis d'être indemnisé.

M. Jolin-Barrette : Non, c'est parce que le critère, là, de «violence subie pendant l'enfance», là, c'est pour que, lui, il n'ait pas de délai de prescription. Dans le fond, l'enfant se fait battre, se fait agresser sexuellement...

M. Tanguay : Parce qu'il est mineur.

M. Jolin-Barrette : Oui, dans ce contexte-là, mais il faut comprendre qu'actuellement, là, la loi de l'IVAC, actuellement, là, elle faisait en sorte, là, que, dès que le parent, là, faisait une faute lourde, là, il venait disqualifier ses enfants pour bénéficier du régime de l'IVAC. Là, nous, on va venir amener une nuance entre ça, même si le parent subit... fait une faute lourde, ça ne va pas venir disqualifier ses proches parce qu'ils vont pouvoir être indemnisés, parce qu'eux aussi, tu sais, leur père, il décède ou leur père est blessé, tout ça, les enfants de la personne qui a commis la faute lourde, ils vont venir subir un préjudice. Ici, ils vont être considérés comme des personnes victimes, désormais, parce que ce n'est pas parce que votre père est un tout croche mais que ça a des impacts sur vous, sur votre famille, mais vous devez être exonéré... bien, ne pas être indemnisé complètement du fait de la faute lourde de votre aïeul, ça, c'est une première chose.

Donc, là, on devient plus généreux, dans le nouveau régime de l'IVAC, pour les enfants de la personne qui commet une faute lourde ou qui prend part à la perpétration d'une infraction, mais, pour l'enfant lui-même, là, dans le fond, en bas de 12 ans, il n'y a pas d'enjeux, en haut de 12 ans, s'il y a une menace ou s'il y a de la violence, s'il subissait de la violence, il va pouvoir tasser la faute lourde puis il va pouvoir tasser le fait qu'il a participé à l'infraction.

M. Tanguay : S'il y a menace, mais...

M. Jolin-Barrette : S'il y a violence ou s'il y a menace de violence.

M. Tanguay : Est-ce que l'on veut, puis là je comprends que le ministre, sa réponse, c'est non, est-ce que l'on veut qu'un enfant de 14 ans qui a commis une faute lourde, mais qui a été victime d'un acte criminel, lui, s'il n'y a pas présence de menace ou violence, on l'exclue de l'indemnisation? La réponse, ça va être oui, hein, on l'exclut.

M. Jolin-Barrette : Effectivement, on l'exclut de l'indemnisation.

M. Tanguay : Moi, ma philosophie, d'appliquer violence subie pendant l'enfance, parce que ça peut être autre chose qu'une violence à la maison, ça peut être violence... l'exemple du dépanneur, puis tout ça, ma façon d'appliquer violence subie pendant l'enfance, c'est un régime particulier parce que tu as moins de 18 ans, puis tout ça, puis le jugement, puis, ainsi de suite, je l'aurais exclu.

M. Jolin-Barrette : Bien, moi, je ne partage pas ça parce que vous commettez une infraction criminelle à 17 ans, ce n'est pas vrai que vous allez avoir...

M. Tanguay : Non, pas l'infraction criminelle, la faute lourde, il faut dissocier les deux, là.

M. Jolin-Barrette : Bien, vous participez avec une faute lourde...

M. Tanguay : Non, l'insouciance, oubliez... parce que c'est deux choses distinctes, je ne suis pas sûr, en tout respect, que le ministre voit la distinction.

M. Jolin-Barrette : Oui, oui.

M. Tanguay : C'est qu'il y a un mur de Chine entre «vous n'êtes pas couvert si vous participez à l'infraction», mur de Chine, ou si vous êtes tellement insouciant, 1474. Un jeune insouciant de 14 ans, j'aurais dit : Tu es couvert pareil même si tu as été insouciant. Puis, même s'il n'y a pas présence de menaces ou de violence parce que «violence subie pendant l'enfance», ça veut dire que tu as un régime particulier, puis on te laisse passer.

M. Jolin-Barrette : Oui, mais l'insouciance devrait être démesurée. L'insouciance devrait être démesurée, puis ce n'est pas des règles différentes qui s'appliquent relativement au régime. Tu sais, dans le fond, l'adolescent va être poursuivi, là, en matière criminelle, là, puis c'est analysé vraiment in concreto par rapport au cas de la personne aussi. Donc, il n'y a pas d'enjeu, là, là-dessus.

M. Tanguay : Puis dernier élément, je comprends le... le dernier élément, je vais le dire de même, là aussi, puis il n'y aura pas de rappel au règlement, on est à la remorque du fédéral, je veux dire, c'est une loi fédérale, la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents, ils ont mis ça à 12 ans, mais, au Québec, notamment, on sait qu'en vertu du Code civil, vous pouvez consentir à des soins à 14 ans, vous pouvez faire plein de choses à 14 ans, plein de choses à 16 ans également, permis temporaire de conduite, et ainsi de suite.

M. Jolin-Barrette : 16.

M. Tanguay : 16, c'était ça, 16. Là, on est à 12 ans parce qu'on fait copier-coller, on fait miroir avec la loi fédérale, tu sais, alors qu'on aurait pu dire 14 ans, qui semble, au Québec, être la norme, là. En tout cas, je lance la réflexion à cet effet-là.

Le Président (M. Bachand) : Interventions sur l'amendement? S'il n'y a pas d'autre intervention, nous allons procéder à la mise aux voix. Mme la secrétaire, s'il vous plaît.

La Secrétaire : Pour, contre, abstention, M. Jolin-Barrette (Borduas)?

M. Jolin-Barrette : Pour.

La Secrétaire : Pour les membres du groupe parlementaire formant le gouvernement, M. Lemieux (Saint-Jean)?

M. Lemieux : Pour.

La Secrétaire : Pour les membres de l'opposition officielle, M. Tanguay (LaFontaine)?

M. Tanguay : Pour.

La Secrétaire : Mme Hivon (Joliette)?

Mme Hivon : Pour.

La Secrétaire : M. Bachand (Richmond)?

Le Président (M. Bachand) : Abstention. Donc, l'amendement est adopté. Nous sommes maintenant à l'article 16 tel qu'amendé. Interventions? S'il n'y a pas d'autre intervention, nous allons procéder à la mise aux voix. Mme la secrétaire, s'il vous plaît.

La Secrétaire : Pour, contre, abstention, M. Jolin-Barrette (Borduas)?

M. Jolin-Barrette : Pour.

La Secrétaire : Pour les membres du groupe parlementaire formant le gouvernement, M. Lemieux (Saint-Jean)?

M. Lemieux : Pour.

La Secrétaire : Pour les membres de l'opposition officielle, M. Tanguay (LaFontaine)?

M. Tanguay : Pour.

La Secrétaire : Mme Hivon (Joliette)?

Mme Hivon : Pour.

La Secrétaire : M. Bachand (Richmond)?

Le Président (M. Bachand) : Abstention. Donc, l'article 16 tel qu'amendé est adopté. Merci. M. le ministre, s'il vous plaît.

M. Jolin-Barrette : Oui. Article 21, avec votre permission, je pense qu'on est rendus là, M. le Président : «Un enfant victime âgé de 14 ans ou plus peut présenter seul une demande de qualification.

«Lorsque le parent d'un enfant victime âgé de moins de 14 ans ou le titulaire de l'autorité parentale d'un tel enfant refuse ou néglige de faire la demande de qualification ou qu'il est l'auteur de l'infraction criminelle qui est à l'origine de la demande de qualification, une autre personne majeure peut présenter la demande pour cet enfant.»

L'article 21 prescrit que l'enfant victime âgé de 14 ans ou plus pourrait présenter seul sa demande de qualification.

La demande d'un enfant de moins de 14 ans serait généralement présentée par son parent ou par le titulaire de l'autorité parentale.

L'article 21 prescrit toutefois que lorsque ce parent ou ce titulaire de l'autorité parentale refuserait ou négligerait de faire la demande de qualification ou encore lorsqu'il serait l'agresseur de l'enfant, une autre personne majeure pourrait faire la démarche au nom de l'enfant.

Le Président (M. Bachand) : Merci beaucoup. Interventions? M. le député de LaFontaine.

M. Tanguay : Oui. M. le Président, on avait justement, quelle ironie, là, à l'article 21, on avait justement ce débat-là par rapport à 12 ans, 14 ans, 16 ans, puis là on voit une autre application au Québec de... Je comprends la loi fédérale, telle que faite, puis, à un moment donné, il faut être raccord avec le traitement des infractions criminelles. Au fédéral, ils ont mis ça à 12 ans, de 12 ans à 17 ans, pour être soulagés de la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents, mais, au Québec, si on avait besoin d'une preuve supplémentaire ou d'un exemple supplémentaire qu'au Québec, il y a quand même une protection pour les 12-13 ans qui fait en sorte qu'à 14 ans, vous avez un régime qui vous permet d'être un peu plus émancipé, ce qui veut dire, à l'inverse, puis le corollaire de ça, ça veut dire qu'on va vous protéger davantage, ayant 12 ans et 13 ans, là, on voit que c'est un élément, de façon très, très tangible, là-dessus.

«Lorsque le parent — deuxième alinéa — d'un enfant victime âgé de moins de 14 ans ou le titulaire de l'autorité parentale d'un tel enfant refuse ou néglige de [le] faire [...] qui est à l'origine de la demande [...] une autre personne majeure peut présenter la demande pour cet enfant.» Ici, on parle de qui, «une autre personne majeure»? J'imagine qu'il y a un lien particulier avec l'enfant, qui participe du conseil de famille ou...

M. Jolin-Barrette : Bien, en fait, on ne voulait pas faire en sorte de...

M. Tanguay : Pas un majeur significatif, autrement dit.

M. Jolin-Barrette : Bien, on ne voulait pas absolument que ce soit quelqu'un qui a la tutelle ou qui est l'autre parent, tout ça, on voulait faire en sorte qu'un majeur près de l'enfant puisse faire la demande pour lui. Donc, on ne voulait pas... on voulait avoir davantage de flexibilité.

Le Président (M. Bachand) : Merci beaucoup.

Compte tenu de l'heure, on suspend les travaux. Merci beaucoup.

(Suspension de la séance à 12 heures)

(Reprise à 15 h 42)

Le Président (M. Bachand) : À l'ordre, s'il vous plaît! Bon après-midi. La Commission des institutions reprend ses travaux.

Nous poursuivons l'étude détaillée du projet de loi n° 84, Loi visant à aider les personnes victimes d'infractions criminelles et à favoriser leur rétablissement.

Lors de la suspension de nos travaux, ce matin, nous étions rendus à l'étude de l'article 21. Interventions?

M. Tanguay : Oui.

Le Président (M. Bachand) : M. le député de LaFontaine, s'il vous plaît.

M. Tanguay : Oui, merci beaucoup, M. le Président. Alors, on en était à discuter, avec le ministre, de la dernière portion où, lorsqu'un parent d'un enfant victime... «Lorsque le parent d'un enfant victime âgé de moins de 14 ans ou le titulaire de l'autorité parentale d'un tel enfant refuse ou néglige de faire la demande de qualification ou qu'il est l'auteur de l'infraction criminelle qui est à l'origine de la demande de qualification, une autre personne majeure peut présenter la demande pour cet enfant.»

Alors, je comprends, pour garder ça dans les intérêts de l'enfant, pour garder ça le plus large possible, que l'on ne limite pas trop la qualification de la personne qui peut faire cette demande-là, peut présenter une telle demande. Donc, une personne majeure... Puis il n'y a pas lieu de dire : Bon, bien, il faut que ça soit une personne significative. Puis on donnait l'exemple peut-être, là, d'une voisine ou d'un voisin, à la limite. C'est ma compréhension, puis le ministre pourra peut-être la confirmer, que c'est très, très large, ça pourrait être le voisin ou quoi que ce soit.

Ma question, puis c'est important que ça soit dit à ces micros-ci, c'est qu'il n'y aurait pas lieu d'avoir, pour les administrateurs, administratrices de l'IVAC, une sorte de questionnement sur est-ce que c'est une personne significative?

Une voix : ...

M. Tanguay : Non, non, non. Si cette personne-là agit de bonne foi à sa face même, une personne qui est apte, évidemment, et qui le fait au nom de l'enfant dans ce contexte-là, bien, ça serait accepté, sans qu'il y ait un débat sur c'est-tu une personne significative, un parent, ou peu importe.

Le Président (M. Bachand) : M. le ministre, si vous permettez, rappeler à la commission que, sur Greffier, vous allez trouver, sur «documents distribués», le tableau des aides financières que le ministre nous a fait parvenir. Donc, c'est sur Greffier, juste un élément d'information. Merci. M. le ministre, s'il vous plaît.

M. Jolin-Barrette : Bien, effectivement, le critère, c'est une personne majeure qui peut faire la demande au nom de l'enfant. Donc, on souhaitait avoir de la flexibilité, et que ça ne soit pas nécessairement le tuteur ou le parent qui le fasse. Mais c'est rattaché... Quand on regarde l'alinéa deux, là : «Lorsque le parent d'un enfant victime âgé de moins de 14 ans ou le titulaire de l'autorité parentale d'un tel enfant refuse ou néglige de faire la demande de qualification», donc ça veut dire, dans un premier temps, c'est le parent ou le tuteur de l'enfant, O.K., le titulaire de l'autorité parentale. Donc, la première étape, ceux qui doivent faire la demande, c'est ces deux personnes-là... bien, ces trois personnes-là. Si elles ne le font pas, là, à ce moment-là, c'est une personne majeure qui peut le faire ou qui est l'auteur de l'infraction criminelle qui est à l'origine de la demande de qualification. Donc, c'est en deux étapes. S'il a moins de 14 ans, c'est le parent, le tuteur. Puis, s'il y a refus ou négligence, là, à ce moment-là, on passe à la personne majeure.

M. Tanguay : Puis, dans les aspects concrets, là, de la réalité triste que ça représenterait, là, autrement dit, qu'un enfant de moins de 14 ans est victime d'un acte criminel et que le tuteur ou le parent néglige de faire la demande ou est elle-même, cette personne-là, auteur de l'acte criminel, évidemment, va s'ensuivre... on conçoit que ça va se faire dans un contexte beaucoup plus large où là on va probablement remettre en question l'autorité parentale, on va peut-être déchoir une personne de l'autorité parentale. Il y aura des débats qui seront faits là-dessus.

Mon point, c'est que l'enfant qui se verrait octroyer, par exemple, des sommes d'argent, bien, ça va prendre un administrateur ou une administratrice. Alors, on s'entend qu'ici... article 21 ne pourra pas jamais vivre tout seul. Il y aura toujours un autre contexte où, probablement, la cour va être saisie. Parce que là, l'enfant, je veux dire, il est mal barré, là. Je veux dire, son tuteur, son parent néglige... Il y aura un contexte plus large. O.K. C'est quoi, l'intérêt de l'enfant? Puis, s'il n'y a pas de régime, on va lui en donner un spécifique, puis on pourra, le cas échéant, gérer des sommes d'argent en son nom, et ainsi de suite, là.

M. Jolin-Barrette : À titre d'exemple, supposons que la DPJ est impliquée, donc, à ce moment-là, la DPJ pourrait faire la demande pour l'enfant.

M. Tanguay : C'est bon.

Le Président (M. Bachand) : Merci. Interventions sur 21? S'il n'y a pas d'autre intervention... Oui, Mme la députée de Sherbrooke, s'il vous plaît.

Mme Labrie : Oui. On a porté à mon attention, dans un cas de demande d'IVAC, qu'une mère qui faisait une demande pour son enfant de moins de 14 ans devait fournir un rapport d'évaluation psychologique. Son enfant avait été victime, et le responsable de l'infraction criminelle était le père. Et le rapport qui était demandé par l'IVAC devait être signé par le père. Et donc ça posait problème. Ça posait problème à la mère de faire signer ce document-là d'expertise professionnelle par le père parce que c'était lui qui était à l'origine de l'infraction.

Donc, je me demande s'il n'y a pas une façon de prévoir que ça ne soit pas nécessaire, dans les cas où un des parents serait l'agresseur ou le responsable de l'acte criminel, que seulement la signature de l'autre parent puisse être demandée.

Le Président (M. Bachand) : M. le ministre.

M. Jolin-Barrette : Bien, effectivement, le cas que vous me relatez est préoccupant, là. Il faudrait vérifier véritablement la nature de la situation, là. Mais, bien entendu, lorsqu'il y a une demande qui est effectuée, elle est effectuée par le parent, donc ça n'a pas besoin d'être les deux parents conjointement, là, ou par le tuteur, ou par une autre personne majeure. Donc, il n'y a pas de processus de validation du rapport d'expertise, là, dans le fond, à partir du moment où la demande, elle est faite, elle est reçue.

Donc, c'est sûr que, si la députée de Sherbrooke a un cas concret à me soumettre qu'on peut regarder avec l'administration, je vais le regarder, s'il y a un enjeu, là, mais ce n'est pas supposé être la norme.

Mme Labrie : Donc, j'entends que, d'après le ministre, ça ne devrait pas être une demande qu'un membre du personnel qui administre l'IVAC de demander à un parent que l'autre parent signe aussi des documents, là, ça ne devrait déjà pas être une pratique qui a cours. Ça fait qu'on pourrait lui soumettre ce cas-là.

M. Jolin-Barrette : Bien, effectivement, vous pouvez me soumettre le cas. Bien entendu, si le parent est l'agresseur, ça n'a pas de bon sens, là, on s'entend.

Mme Labrie : Parfait.

M. Jolin-Barrette : Mais je vous invite à me soumettre le dossier.

Mme Labrie : Merci.

Le Président (M. Bachand) : Merci beaucoup. Est-ce qu'il y a d'autres interventions sur l'article 21? S'il n'y a pas d'intervention, nous allons procéder à sa mise aux voix. Mme la secrétaire, s'il vous plaît.

La Secrétaire : Pour, contre, abstention. M. Jolin-Barrette (Borduas)?

M. Jolin-Barrette : Pour.

La Secrétaire : Pour les membres du groupe parlementaire formant le gouvernement, M. Lemieux (Saint-Jean)?

M. Lemieux : Pour.

La Secrétaire : Pour les membres de l'opposition officielle, M. Tanguay (LaFontaine)?

M. Tanguay : Pour.

La Secrétaire : Mme Labrie (Sherbrooke)?

Mme Labrie : Pour.

La Secrétaire : Mme Hivon (Joliette)?

Mme Hivon : Pour.

La Secrétaire : M. Bachand (Richmond)?

Le Président (M. Bachand) : Abstention. Donc, l'article 21 est adopté. Merci beaucoup. M. le ministre, s'il vous plaît.

M. Jolin-Barrette : Oui, article 22, M. le Président. Et juste un complément d'information pour la députée de Sherbrooke, on me dit que la signature d'un seul parent suffit. Donc, je vous invite à...

Mme Labrie : Y compris pour d'autres documents que la demande officielle, là? Parce que, là, ce n'était pas pour la demande... ce n'était pas pour le formulaire de l'IVAC qu'on leur demandait ça, mais bien pour d'autres documents pour compléter la demande.

M. Jolin-Barrette : Théoriquement, ça devrait juste être un parent, mais je vous invite, encore une fois, à me faire suivre le dossier.

Mme Labrie : Parfait. Merci.

M. Jolin-Barrette : 22, M. le Président : «La qualification de la personne victime permet à cette dernière de demander l'une ou l'autre des aides financières à laquelle elle est admissible en vertu du présent titre.

«La personne victime qualifiée bénéficie d'une aide financière en vertu du présent titre dès qu'elle remplit les conditions pour être admissible à celle-ci.»

Cette disposition établit que la qualification d'une personne victime lui permet de demander les aides financières auxquelles elle a droit sous réserve qu'elle remplisse les conditions prévues pour obtenir ces aides.

Donc, on a vu, c'est un processus en deux étapes, M. le Président, où vous êtes qualifié, dans le fond, relativement à l'infraction criminelle, et, par la suite, il y a les aides financières.

• (15 h 50) •

Le Président (M. Bachand) : Merci, M. le ministre. M. le député de LaFontaine, s'il vous plaît.

M. Tanguay : Dans le langage courant, ne pourrions-nous pas, plutôt que de lire «de demander», de dire «se voir offrir»? Parce que j'ai comme l'impression que, si elle ne le demande pas, elle ne l'aura pas. Si elle dit : Bien non, ça ne se passera pas de même... Mais ne pourrions-nous pas, tout simplement. Un petit amendement : «La qualification de la personne victime permet à cette dernière de se voir offrir l'une ou l'autre des aides financières à laquelle elle est admissible», plutôt que «de demander»?

Le Président (M. Bachand) : M. le ministre, s'il vous plaît.

M. Jolin-Barrette : Bien, en fait, ce n'est pas une offre, tu sais, ce n'est pas... on n'offre pas quelque chose. Mais ce qu'on me dit, c'est qu'on pourrait utiliser, au lieu de «demander», «de bénéficier». On pourrait utiliser «bénéficier».

M. Tanguay : Oui.

Le Président (M. Bachand) : Donc, M. le ministre.

M. Jolin-Barrette : Alors, on va procéder à la rédaction de l'amendement. Merci. Et entre-temps, s'il y a d'autres questions, je peux y répondre.

Le Président (M. Bachand) : Merci. Est-ce qu'il y a d'autres questions sur l'article 22?

M. Tanguay : Puis, ceci dit, c'est correct, on va le laisser de même, l'article, mais je pense qu'on dit deux fois la même chose dans les deux alinéas, là. Donc : «La qualification de la personne victime permet à cette dernière de bénéficier de l'une ou de l'autre des aides à laquelle elle est admissible», donc la qualification permet de bénéficier, puis l'alinéa deux : «La personne victime qualifiée bénéficie d'une aide en vertu du présent titre dès qu'elle remplit...»

M. Jolin-Barrette : Mais c'est un synonyme, là, les deux, là, «demander», «bénéficier».

M. Tanguay : Oui, oui, oui. Non, mais ce n'est pas... je n'en suis pas sur... Puis je vais prendre «bénéficier», c'est parfait, là, je vais le prendre à l'alinéa un. Mais j'aurais cru qu'un seul des deux alinéas aurait pu faire le travail pour l'article 22. Mais c'est correct, on va le laisser de même. J'ai comme l'impression qu'on se répète, mais... puis pas par rapport à «demander» et «bénéficier». Mais, autrement dit, la qualification fait en sorte que tu y as accès. Je pense que c'est ça qu'on dit dans les deux. Mais c'est correct, on va le laisser de même, si ce n'est pas...

M. Jolin-Barrette : On va vous revenir avec une proposition, M. le député de LaFontaine, qui saura répondre à votre demande.

Le Président (M. Bachand) : Merci. Mme la députée de Notre-Dame-de-Grâce, s'il vous plaît.

Mme Weil : Juste une question. J'essaie de comprendre la différence entre le premier alinéa et le deuxième. Dans les deux cas, bon, la personne se qualifie, pourra bénéficier des aides, et c'est un peu ce qu'on dit dans l'autre aussi. Quelle est la différence entre les deux? Qu'est-ce qu'il y a de différent dans la proposition du deuxième alinéa?

M. Jolin-Barrette : Dans le fond, c'est descriptif, là. À l'alinéa un, ça dit la qualification, le processus de qualification de la personne victime. Donc, un coup qu'elle est qualifiée, ça lui permet, à cette dernière, de demander, ou de bénéficier, ou de se voir offrir l'une des aides financières à laquelle elle est admissible en vertu du présent titre. Ensuite, on dit : La personne victime qualifiée, donc celle qui a été victime, bénéficie d'une aide financière en vertu du présent titre dès qu'elle a rempli les conditions pour être admissible à celle-ci. Donc, il y a des conditions à respecter pour être admissible en fonction des différentes aides financières.

Je donne un exemple, le montant forfaitaire. On va voir que, dans le fond, la qualification fait en sorte que vous devenez... La première étape dans le processus, là, c'est : on vous qualifie comme personne victime, O.K.? Ce ne sont pas toutes les personnes victimes qui vont bénéficier d'un montant forfaitaire. À titre d'exemple la victime qui subit l'infraction, donc la victime directe, si on peut l'appeler, elle va bénéficier d'une indemnité forfaitaire. Par contre, un autre type de victime ne va pas nécessairement bénéficier d'aide financière, mais va bénéficier d'aide psychologique, donc c'est ça que ça signifie. Dans le fond, chacune des aides est qualifiée... Dans le fond, chacune des aides décrit quelles personnes victimes bénéficient de cette aide-là. Donc, le forfaitaire, il n'est pas offert à toutes les victimes. Exemple, le forfaitaire, il n'est pas offert à la personne significative. La personne significative va obtenir de l'aide psychologique, de l'aide financière psychologique, mais elle ne bénéficiera pas de l'aide... d'une somme forfaitaire. C'est ça, la distinction.

Le Président (M. Bachand) : Merci beaucoup. Interventions? M. le député de LaFontaine.

M. Tanguay : Là, on fait de la légistique. C'est le fun, on fait des beaux liens. Est-ce qu'on ne pourrait pas ajouter «sous réserve de l'article 71 de la présente loi», qui permet au ministre d'octroyer un versement préalable?

Le Président (M. Bachand) : M. le ministre, s'il vous plaît.

M. Jolin-Barrette : Non, ce n'est pas nécessaire. Ce n'est pas nécessaire parce que c'est au moment de la demande de qualification. Donc, on n'a même pas besoin d'attendre.

M. Tanguay : Mais c'est parce qu'ici ça dit : «La personne victime qualifiée bénéficie d'une aide financière en vertu [...] dès qu'elle remplit les conditions...» Alors, 71 fait un régime particulier, elle ne remplit pas nécessairement les conditions, parce que son dossier est en traitement, mais on va lui verser, en vertu de 71, un versement préalable. Alors, si c'est dit que 22 ne fait pas échec au versement préalable de 71, ce sera dit en ces micros, mais...

M. Jolin-Barrette : Non, parce que la personne, elle n'est même pas qualifiée quand vous êtes à 71.

M. Tanguay : C'est ça. Et elle n'est pas qualifiée, elle ne remplit pas les conditions, et elle peut recevoir un versement préalable. Or, 22 dit : Pour avoir un versement, tu dois te qualifier. Alors, ça aurait été juste le lien, là.

M. Jolin-Barrette : Non, mais je comprends ce que le député de LaFontaine dit, mais, dans le fond, le régime de 22, c'est quand qu'il y a une qualification. Là, le régime de 71, c'est quand il n'y a même pas de qualification.

M. Tanguay : Oui, mais 22, deuxième alinéa, une aide financière englobe nécessairement une aide financière versée à titre de versement préalable. Alors, 22 dit : Pour avoir une aide financière, ça, c'est assimilable à versement préalable, elle doit remplir les conditions. 71, c'est un régime, tu n'as pas besoin de remplir les conditions, tu as une aide financière sous le titre de versement préalable. Donc, il y a l'existence du principe puis de l'exception. J'aurais juste fait un lien avec «sous réserve de l'application de l'article 71», tout simplement.

M. Jolin-Barrette : Non, parce que c'est avant, ce n'est pas une exception au principe général, c'est avant même la qualification. C'est un régime qui est distinct.

M. Tanguay : Parce que l'article 70 et suivant, la décision du ministre, quand on dit «Décisions du ministre», c'est des décisions quant à la qualification de la personne victime.

M. Jolin-Barrette : Oui, sauf que dans le cadre de l'article 71, dans le fond, vous n'avez pas besoin de la décision du ministre sur la qualification de la personne.

M. Tanguay : C'est-à-dire que la personne, en vertu de 71, n'a pas à être qualifiée.

M. Jolin-Barrette : Exactement.

M. Tanguay : Bon. Et ça, c'est une exception à 22, 71.

M. Jolin-Barrette : C'est un régime distinct pour 71.

M. Tanguay : Bon, O.K., ça fait que j'aurais juste fait le lien. Si le ministre ne veut pas le faire, il n'y a pas de problème, mais j'aurais mis «sous réserve de l'article 71», parce que force est de constater que le dossier n'aura pas permis de qualifier la personne, et, contrairement à ce que dit 22, elle aura accès à une aide financière à titre de versement préalable.

M. Jolin-Barrette : Je comprends.

M. Tanguay : Ça aurait été bien écrit. Ça aurait été bon. Ça aurait été beau.

M. Jolin-Barrette : Mais je suis à l'aise avec la version qu'on a, M. le Président. Des fois, j'accepte, dans la majorité des cas, les suggestions du collègue de LaFontaine, mais, dans ce cas-ci, je suis à l'aise avec le libellé.

M. Tanguay : Puis peut-être qu'à 71 je pourrais dire «nonobstant l'article 22».

M. Jolin-Barrette : Bien, j'invite le collègue de LaFontaine à voir ma réceptivité, rendu à l'article 71.

M. Tanguay : Ça serait bien. Je ne sais pas si l'amendement est prêt, M. le Président.

Le Président (M. Bachand) : Je ne sais pas.

M. Jolin-Barrette : Donc, on va le déposer. Pour faire le... pour accéder à la demande du député de LaFontaine, nos juristes ont réécrit l'amendement... bien, en fait, l'article, et ça se lirait ainsi : Remplacer l'article 22 du projet de loi par le suivant :

«La qualification de la personne victime permet à cette dernière de bénéficier de l'une ou l'autre des aides financières à laquelle elle est admissible en vertu du présent titre dès qu'elle remplit les conditions prescrites.»

M. Tanguay : C'est bon.

Le Président (M. Bachand) : Merci. C'est sur Greffier. Merci. Interventions? Mme la députée de... Notre-Dame-de-Grâce, pardon.

Mme Weil : Oui. La question est pour le ministre. Donc, je sais qu'on ne fait pas avec 71, mais c'est deux articles qui se... il y a un certain lien. Est-ce que 71, c'est plus comme une situation d'urgence préalable, tout de suite, il faut accorder une aide quelconque, une aide financière, mais que, par la suite, il y aura quand même l'analyse de la qualification?

M. Jolin-Barrette : Oui. Dans le fond...

Mme Weil : O.K. Donc, c'est comme une étape qui vient avant la qualification.

M. Jolin-Barrette : Exactement.

Mme Weil : Donc, c'est sûrement d'urgence, c'est une situation d'urgence.

M. Jolin-Barrette : C'est pour sortir la personne de son milieu toxique.

• (16 heures) •

Le Président (M. Bachand) : Interventions sur l'amendement du ministre? S'il n'y a pas d'autre intervention, nous allons procéder à sa mise aux voix. Mme la secrétaire, s'il vous plaît.

La Secrétaire : Pour, contre, abstention. M. Jolin-Barrette (Borduas)?

M. Jolin-Barrette : Pour.

La Secrétaire : Pour les membres du groupe parlementaire formant le gouvernement, M. Lemieux (Saint-Jean)?

M. Lemieux : Pour.

La Secrétaire : Pour les membres de l'opposition officielle, M. Tanguay (LaFontaine)?

M. Tanguay : Pour.

La Secrétaire : Mme Labrie (Sherbrooke)?

Mme Labrie : Pour.

La Secrétaire : Mme Hivon (Joliette)?

Mme Hivon : Pour.

La Secrétaire : M. Bachand (Richmond)?

Le Président (M. Bachand) : Abstention. Donc, l'amendement est adopté.

On revient maintenant à l'article 22 tel qu'amendé. Est-ce qu'il y a d'autres interventions? S'il n'y a pas d'autre intervention, nous allons procéder à sa mise aux voix. Mme la secrétaire, s'il vous plaît.

La Secrétaire : Pour, contre, abstention. M. Jolin-Barrette (Borduas)?

M. Jolin-Barrette : Pour.

La Secrétaire : Pour les membres du groupe parlementaire formant le gouvernement, M. Lemieux (Saint-Jean)?

M. Lemieux : Pour.

La Secrétaire : Pour les membres de l'opposition officielle, M. Tanguay (LaFontaine)?

M. Tanguay : Pour.

La Secrétaire : Mme Labrie (Sherbrooke)?

Mme Labrie : Pour.

La Secrétaire : Mme Hivon (Joliette)?

Mme Hivon : Pour.

La Secrétaire : M. Bachand (Richmond)?

Le Président (M. Bachand) : Abstention. Donc, l'article 22, tel qu'amendé, est adopté. M. le ministre, s'il vous plaît.

M. Jolin-Barrette : Article 23, M. le Président : «Rien, dans la présente loi, n'affecte le droit de la personne victime qui a choisi de présenter une demande de qualification en vertu du présent titre de recouvrer de toute personne responsable du préjudice subi les montants requis pour équivaloir, avec l'aide financière reçue, à la perte réellement subie.»

Cette disposition réitère la possibilité pour la personne victime qui a bénéficié de la présente loi de poursuivre l'auteur de l'infraction criminelle pour obtenir la différence entre le montant qu'elle obtiendrait au terme de la poursuite et les montants qui pourraient lui être octroyés en vertu de la présente loi.

Cet article, combiné à l'article 28 qui sera proposé prochainement, précise que la personne victime qui choisirait la poursuite de son agresseur pourrait bénéficier des aides financières proposées par la présente loi pour les mêmes objets pour que la différence entre le montant qu'elle obtiendrait au terme de la poursuite et les montants qui pourraient lui être octroyés en vertu de la présente loi...

Donc, c'est la reprise de l'article 10 de la Loi sur l'indemnisation des victimes d'actes criminels.

Le Président (M. Bachand) : Merci. M. le député de LaFontaine, s'il vous plaît.

M. Tanguay : Oui. J'essaie de... Donc, la personne qui reçoit une indemnisation en vertu de l'IVAC... «De recouvrer de toute personne responsable du préjudice subi les montants requis pour équivaloir, avec l'aide financière reçue, à la perte réellement subie.» Que c'est ça? Dans le fond, ce qu'on veut dire, là, c'est qu'elle peut poursuivre pour le plein montant puis qu'on ne va pas lui déduire ce qu'elle a reçu de l'IVAC. C'est ça qu'on dit.

M. Jolin-Barrette : Dans le fond, c'est pour la... Dans le fond, si votre perte réelle, supposons, était à 100 000 $, puis que l'IVAC, supposons, vous indemnise à hauteur de 75 000 $, dans le fond, la personne peut poursuivre pour le 25 000 $ qui reste.

M. Tanguay : Et pas pour le 100 000 $.

M. Jolin-Barrette : Bien, si elle est poursuivie par le... pour la perte totale, elle n'aura pas une double indemnisation, elle n'aura pas l'indemnisation de l'État plus la totalité. Vous ne pouvez pas aller chercher, supposons, 75 000 $ de l'État plus un 100 000 $, ce qui ferait en sorte 175 000 $. Tu sais, supposons que votre perte réelle, c'est 100 000 $, là...

M. Tanguay : Je comprends.

M. Jolin-Barrette : ...ou prenons-le sur l'aide financière palliant la perte de revenus, O.K.? Une personne, là, qui travaille, là, nous, on vient pallier 90 % du revenu gagné, O.K.? Il lui manque 10 %, elle va se retourner contre l'auteur de l'infraction pour aller chercher le 10 %. Donc, ça... L'article 23 dit : Elle peut aller chercher le 10 %. Mais, par contre, si elle va chercher la totalité du remplacement, supposons qu'elle va chercher 100 % du remplacement de revenu, l'État ne l'indemnisera pas. Par contre, elle n'aura pas à être indemnisée par son 100 % plus un autre 100 %, là.

M. Tanguay : O.K. Là, il y a deux cas de figure. Normalement, l'IVAC va indemniser avant, selon les délais, là.

M. Jolin-Barrette : Oui, parce qu'on veut éviter que la victime, nécessairement, poursuive son... lui mettre le fardeau de poursuivre son agresseur.

M. Tanguay : C'est ça. Mais, si d'aventure elle le fait, l'IVAC ne pourra pas revenir, là, pour se faire rembourser, là?

M. Jolin-Barrette : Oui.

M. Tanguay : Ouch!

M. Jolin-Barrette : Bien, c'est un peu la même chose avec les autres régimes d'indemnisation. Exemple, supposons, en matière du... le «no fault», là, si vous choisissez une poursuite privée, vous n'avez pas une double indemnisation, là, c'est des fonds publics, là. L'État est là, et c'est pour ça qu'il y a un recours subrogatoire dans la loi, entre autres, pour faire en sorte que l'IVAC puisse aller poursuivre le fautif, la personne qui a commis l'infraction criminelle en lien avec l'indemnisation.

M. Tanguay : Oui. Le recours subrogatoire de l'article 27. Est-ce que la victime peut — on va faire de la procédure civile — peut se joindre à ce recours-là, pour l'excédent?

M. Jolin-Barrette : Bonne question. On va faire les vérifications.

M. Tanguay : Ça serait bon, ça serait bon. Parce que, si on parle, exemple, de pertes de revenus qui seraient substantielles, puis les pertes de revenus, par contre, ça va être selon des barèmes... Est-ce que la perte de revenus, ce n'est plus... Est-ce que c'est in concreto ou c'est selon des barèmes, les pertes de revenus?

M. Jolin-Barrette : Non, c'est 90 %...

M. Tanguay : Du revenu réel.

M. Jolin-Barrette : ...du revenu réel de la personne.

M. Tanguay : O.K. Il pourrait y avoir, dans certains cas... Et ça, c'est-tu trois ans ou cinq ans? Je sais qu'il y a un deux ans...

M. Jolin-Barrette : Dans le fond, c'est trois ans plus possibilité de renouveler pendant deux ans.

M. Tanguay : O.K. Puis ça, on le verra, la possibilité de renouveler, et le deux ans a toujours été... parce que... Puis donc, dans certains cas, ça pourrait être des sommes très substantielles. L'IVAC...

M. Jolin-Barrette : Vous comprenez, le principe, c'est, pour la victime, on dit : Ce n'est pas parce que vous êtes... Dans le fond, là, l'agresseur, là, on ne veut pas que lui puisse opposer le fait que... vous ne pouvez pas prendre un recours contre moi parce que vous avez déjà été indemnisé partiellement par l'IVAC. On dit à la victime : Vous pouvez aller chercher la balance qu'il y a là. Si vous allez chercher plus que la balance qui n'est pas indemnisée de votre perte réelle, à ce moment-là, bien entendu, la somme excédentaire que vous avez utilisée, que vous avez obtenue de la part de la cour contre la personne qui a commis l'infraction, à ce moment-là, oui, vous la remboursez à l'IVAC parce que vous avez déjà été indemnisé pour ce préjudice-là.

M. Tanguay : Et ça, c'est tous les chapitres pour lesquels on peut demander une responsabilité civile. Donc, perte de revenus, également, le remboursement de certains frais médicaux, et ainsi de suite. Alors, ça, ça s'ajoute. Si l'IVAC a payé tout ou partie de ces frais-là, ça pourra être déduit.

M. Jolin-Barrette : Parce que, dans le fond, là, supposons, si on parle de perte de revenus, là, la personne actuellement va avoir 90 % du salaire maximum assurable qui est à 83 500 $. Donc, le maximum que vous allez avoir, c'est 75 000 $, 78 000 $, là, à peu près, là, de revenus. Parce que supposons, là, que vous gagnez, là, 200 000 $ par année, O.K.? Le régime de l'IVAC, ce qu'il indemnise, son montant total, là, de revenu gagné, c'est 83 500 $, donc 90 % de 83 500 $. Mais, si vous, vous êtes...

M. Tanguay : Non. «Don't go there».

Des voix : ...

M. Jolin-Barrette : Vous êtes...

M. Tanguay : Employé.

M. Jolin-Barrette : ...employé d'une grande firme d'avocats et que vous gagnez plusieurs centaines de milliers de dollars, à ce moment-là, vous allez bénéficier... votre maximum, là, c'est 83 500 $. Mais, par contre, vous subissez une perte réelle sur votre salaire, là, sur le reste, ça fait que ça se peut que vous vous retourniez au civil pour le 100 000 $ qui manque de l'autre côté. À ce moment-là, l'article 23 dit que vous pouvez aller chercher la balance qui est là.

M. Tanguay : Et ça, c'est intéressant. Puis aussi on peut aller au-delà du trois ans à cinq ans, je veux dire, on peut faire la preuve devant la cour en droit civil que moi, je suis justifié d'obtenir une indemnisation, perte de revenus sur 10 ans, 15 ans. Ça va être un débat très particulier. Et là les années seront différenciées, je veux dire, vous serez subrogé pour les années que vous avez couvertes, l'année 1, l'année 2, l'année 3, peut-être jusqu'à 4, 5, mais, si la cour vous indemnise le 10 % que vous n'avez pas indemnisé plus le 100 % de l'année 6, 7, 8, bien ça, c'est des choses qui vont être différenciées.

Et, si, lorsque vous donnerez la réponse... je trouve ça intéressant, puis on pourra peut-être se poser la question, si le Code de procédure civile... parce que des fois, lorsqu'il y a le terme utilisé... Lorsqu'on veut se joindre à une action, il y a une demande qui est faite à la cour. Si vous, vous décidez, comme ministre, de dire : Bien, j'ai indemnisé monsieur, 90 % du salaire, ça représente donc, je ne sais pas, je dis n'importe quoi, 150 000 $, on poursuit, bien, que l'on s'assure qu'au Code de procédure civile il y ait une facilité pour la personne de faire une sorte de jonction d'instance ou d'être plus que mise en cause, d'être une partie demanderesse, de s'ajouter puis que les critères ne viennent pas réfréner la capacité pour une personne de demander une indemnisation qui pourrait, à la limite, être, en vertu de la charte québécoise des droits et libertés, là, les... en matière de droits moraux... C'est-tu ça, ce qu'on peut réclamer, là, par rapport à la charte québécoise des droits et libertés?

Alors, qu'il y ait une analyse qui ne soit pas limitative puis qui ne peut pas dire : Bien, vous, victime, vous avez été indemnisée. J'ai un recours du Procureur général qui est subrogeant en vertu de 27. Vous voulez poursuivre en plus pour des dommages punitifs en vertu de la charte québécoise. Là, c'est plus ou moins le même débat, je vous refuse... Qu'il y ait une certaine facilité pour que la victime se greffe.

• (16 h 10) •

M. Jolin-Barrette : Alors, j'ai la réponse, M. le Président. Oui, la personne victime peut faire une intervention et déposer une procédure avec des allégations supplémentaires pour l'excédent. Donc, elle pourrait se joindre au véhicule.

M. Tanguay : Et en vertu de quel article du code de procédure?

M. Jolin-Barrette : Bonne question. Moi, vous savez, j'ai fait... j'ai appris avec l'ancien code. Je vous aurais donné l'article de l'ancien code, là, mais...

M. Tanguay : Ah oui? Puis quel était-il?

M. Jolin-Barrette : Au conditionnel. Je vous aurais donné.

M. Tanguay : Moi, je vous essaierais 67 de l'ancien code.

M. Jolin-Barrette : 67? On va aller vérifier.

M. Tanguay : Plus ou moins 500 articles. Je dirais 67.

Le Président (M. Bachand) : Je vais passer la parole à la députée de Sherbrooke en attendant, s'il vous plaît. Mme la députée de Sherbrooke.

Mme Labrie : ...vous cherchez la réponse à cette question technique, je vous pose une question de néophyte en matière de droit, mais, quand on dit : «De recouvrer de toute personne responsable du préjudice», est-ce qu'on inclut là-dedans, par exemple, une organisation, je donne un exemple, une communauté religieuse, par exemple? Parce qu'on sait que les victimes peuvent poursuivre au civil l'agresseur directement, mais également une institution qui aurait été impliquée là-dedans aussi, par exemple, en permettant à l'infraction de se perpétuer.

M. Jolin-Barrette : Oui, dans le fond, en utilisant le terme «toute personne», «personne» comprend personne physique ou une personne morale. Donc, ça couvre...

Mme Labrie : Toutes les situations sont couvertes.

M. Jolin-Barrette : C'est ça.

Mme Labrie : Merci.

Le Président (M. Bachand) : Merci. Mme la députée de Notre-Dame-de-Grâce, s'il vous plaît.

Mme Weil : J'aurais une question en lien... Justement, je me demandais si je devais le soulever maintenant, mais, à la lumière de la question de ma collègue de Sherbrooke... Dans les recommandations de la commission sur l'exploitation sexuelle, une des recommandations, et c'est suite à des recherches que j'ai faites aux États-Unis, puis là je vois que l'Ontario vient d'adopter quelque chose de semblable... Pour les victimes d'exploitation sexuelle, ça peut prendre des années avant qu'elles se rendent compte, mais il y a eu surtout des plateformes d'hôtellerie, si on veut, où les gens ont témoigné de ce qu'il se passait, donc l'hôtel même. Maintenant, dans... beaucoup d'États, plusieurs États aux États-Unis sont responsables, mais ils ont vraiment établi une collaboration avec les hôtels et toutes plateformes comme Airbnb, etc., les motels aussi. Et donc ils leur ont donné l'obligation, premièrement, d'avoir un numéro d'urgence, un téléphone d'urgence si jamais... Et, s'ils voient qu'il y a 10 hommes — c'est vraiment comme ça que c'est expliqué — dans le couloir qui attendent, c'est sûr que les personnes à l'hôtel savaient ce qui se passait, donc on présume, donc, qu'ils sont de concours avec ça, ils ont fermé les yeux. Et les hôtels sont obligés de donner une formation. Ils disent que 90 % de ces activités se passent là et que finalement, dans ces États, Washington, l'Oregon et d'autres aussi, il y a un recours civil imprescriptible, parce que ça peut prendre longtemps avant que la femme... la jeune femme se rende compte de ce qui s'est passé. L'Ontario vient d'annoncer une réforme qui va dans ce sens-là, mais ils ont vraiment l'adhésion des hôtels de faire la promotion de la sécurité, la formation, etc., et peut-être un recours, je ne me rappelle plus.

Alors, nous, ce qu'on a fait, j'avise le ministre, parce que les gens ne voulaient pas aller... la commission, essentiellement, c'est une recommandation au ministère de la Justice, d'explorer cette possibilité-là. On se disait, on ne voulait pas se substituer au ministère de la Justice, au ministre de la Justice pour faire l'analyse. Mais je vous le dis parce qu'on est en train de parler justement de ces recours civils, et, pour l'exploitation sexuelle, ça serait vraiment un outil extraordinaire.

Et, depuis ce temps-là, dans ces États où ils le font, les hôtels font vraiment attention. Et là il y a même les camionneurs qui embarquent dans cette lutte contre l'exploitation, parce qu'eux sont souvent les premiers à le voir devant eux, et il y avait une série d'articles qu'on a vus dans le Globe and Mail la semaine dernière sur les camionneurs, etc., les routes où les jeunes filles du Québec font le trajet jusqu'en Alberta, parce que c'est là où le proxénète peut faire le plus d'argent. Donc, il y a beaucoup de gens qui, dans ce trajet, observent ces choses. Alors, je voulais sensibiliser le ministre, parce que c'est un recours civil.

Est-ce qu'il y a une substitution? Je ne crois pas, dans ce cas-là, mais ce serait au ministère de la Justice d'analyser dans le cadre de cette lutte contre l'exploitation sexuelle. Alors, ça pourrait être intéressant comme...

M. Jolin-Barrette : Oui. Bien, certainement, on va étudier la recommandation et ce qui se fait à l'étranger, et d'ailleurs il y a des travaux qui ont cours, là, avec ma collègue au Tourisme, parce qu'elle est responsable des hôtels. Alors, oui, je sais que c'est une des recommandations, puis on va l'étudier très certainement.

Mme Weil : O.K. Excellent.

Le Président (M. Bachand) : Merci. Interventions? M. le député de LaFontaine.

M. Tanguay : Oui. Il y a différentes écoles, puis je ne sais pas, du côté des gens qui accompagnent le ministre... Il y a l'intervention, 184 et suivantes, trouvées par Sophie Chateauvert, du Code de procédure civile actuel, l'intervention de tiers à l'instance. L'intervention est volontaire ou forcée. Puis là il y a des critères, L'intervention volontaire, 185 et suivants.

        L'ancien 67, moi, je trouve que ça serait... Ancien 67 — je ne sais pas c'est rendu quoi, le nouveau : «Plusieurs personnes, dont les recours ont le même fondement juridique ou soulèvent les mêmes points de droit et de fait, peuvent se joindre dans une même demande en justice. Cette demande doit être portée [en] Cour du Québec», si elle est compétente, sinon, en Cour supérieure, si c'est elle qui est compétente.

Est-ce qu'il y aurait moyen d'imaginer, puis ça, je trouve ça réellement intéressant, là, d'imaginer... D'abord, question : La personne... Par subrogation, je suis la victime, vous m'avez indemnisé trois ans de salaire. C'est 150 000 $. Moi, je prétends que j'ai des dommages au-delà de cela pour un 250 000 $ additionnel. Est-ce qu'il est déjà prévu que, si le ministre, en vertu du 27, est subrogé, je serai notifié pour dire : J'ai l'intention de poursuivre, parce qu'à quelque part... ou je vais juste le savoir quand vous allez m'envoyer un subpoena parce que vous allez vouloir que je témoigne à votre cause? Comment ça fonctionne?

M. Jolin-Barrette : Non, il faut juste faire attention, là. Exemple, dans les cas d'agression sexuelle, là, les groupes nous l'ont dit, il y a une sensibilité aussi, là, à savoir dans les choix que nous allons faire d'intenter des recours subrogatoires, là. Ça ne sera pas tous les dossiers qui vont faire l'objet de recours subrogatoires.

D'ailleurs, déjà, ce qu'on doit dire, c'est que l'IVAC ne fait presque pas de recours subrogatoires actuellement. Moi, je crois que les auteurs des infractions criminelles, à cause qu'ils ont soumis un préjudice, ils doivent être poursuivis, puis ce n'est pas uniquement à la collectivité à payer pour des gestes répréhensibles qui ont été posés. Ça, c'est le principe général.

Après ça, moi, j'ai le souci aussi de faire en sorte que, supposons, les victimes d'agression sexuelle, un, n'aient pas à témoigner en cour pour... Si elles choisissent de ne pas témoigner en cour, on ne veut pas les forcer à venir témoigner en cour. Je pense qu'il faut avoir beaucoup de considération pour la démarche de la victime d'agression sexuelle. Et donc, dans ce que vous dites, on ne fera pas venir témoigner une victime à la cour qui ne souhaiterait pas faire cela.

Puis je vous soumets l'exemple suivant : une personne victime d'agression sexuelle qui n'aurait pas fait de dénonciation à la police, qui vient chercher de l'aide à l'IVAC, qui viendrait indemniser à l'IVAC et qui fait le choix de ne pas faire une dénonciation à la police, bien, elle sera indemnisée, elle sera soutenue par l'IVAC, bénéficiera des différentes aides, soutien psychologique, tout ça, mais il ne faudrait pas, par la suite, dans son cas, alors qu'elle ne souhaite pas vivre l'expérience du système de justice, l'obliger à venir témoigner en cour dans le cadre d'un recours civil parce que l'État se retourne contre l'agresseur. Vous comprenez? Donc, l'utilisation du recours subrogatoire est vraiment à utiliser, je vous dirais, avec doigté, propre à chacune des situations des personnes victimes aussi. Donc, il ne faut pas que ce soit du mur-à-mur.

M. Tanguay : C'est sûr. M. le Président, j'ose espérer que le ministre se rappelle toutes les interventions que j'ai faites lors des auditions puis, jusqu'à maintenant, l'article par article, puis, justement, sur le beau débat qu'on va avoir sur l'article 7, puis le devoir de coopération, j'espère qu'il se rappelle tout ce que j'ai dit, que c'est dangereux, c'est excessivement délicat. Il va y avoir un long débat sur l'article 7, débat pertinent sur ce que ça implique dans les cas, notamment, d'agression sexuelle. Ici, évidemment, une fois qu'on a dit ça...

M. Jolin-Barrette : Juste, M. le Président, je... Voilà, pour éviter que le député de LaFontaine perde du temps, j'ai l'intention de retirer l'article qui a l'obligation de coopération...

M. Tanguay : L'article 7.

M. Jolin-Barrette : L'article 7, de l'amender.

M. Tanguay : Oui, mais... D'accord.

M. Jolin-Barrette : Ça fait que je tiens juste à le dire à la commission, j'ai entendu les gens en commission parlementaire. Puis, dans le fond, même s'il était là... pardon?

Une voix : ...

M. Jolin-Barrette : Même s'il était là, dans l'ancienne loi... dans le fond, en consultation, on a entendu les groupes puis, à juste titre, pour assurer que les groupes puis que les personnes victimes... en fonction de leur volonté, on va s'assurer de le retirer pour ne pas qu'il y ait d'ambiguïté.

• (16 h 20) •

M. Tanguay : Quand on sera rendu là, on pourra constater ça, M. le Président. Alors, mon point, ce n'est pas... Puis le ministre le dit, il y a lieu de pouvoir, dans certains cas, exemple... On n'est pas dans les cas d'agression sexuelle. Tout a été dit là-dessus, je veux dire, tout a été dit, là, on ne va pas obliger une personne puis, je veux dire, il n'y aura pas de subrogation pour obliger la personne à venir témoigner pour agression sexuelle. Je les exclus, ces cas-là, parce que c'est particulier. Puis préjudice subit dans l'enfance puis violence conjugale, exactement dans... Attention! Mais le cas d'une personne qui a mangé un coup de poing dans la face, une bataille de taverne, puis qui a perdu des revenus, puis qui est compensé, le ministre a tout à fait raison, puis je l'invite effectivement à ce qu'il peut y avoir des recours subrogatoires.

Puis ce n'est parce que ce n'est pas une agression sexuelle, ce n'est pas parce que ce n'est pas un préjudice subit à l'enfance ou violence conjugale que la personne aussi, ceci dit, M. le Président, pourrait dire : Bien, moi, je ne suis pas à l'aise pour être un témoin, ce serait parfaitement compréhensible. Mais, dans un cas où ça s'applique... et j'imagine qu'il y aura un doigté nécessaire à ça, mon point est encore bien plus technique que ça, lorsque le ministre, lorsque le Procureur général, avec les administrateurs de l'IVAC, vont dire : O.K., dans ce dossier-là, là, ça, c'est un cas type où on va aller en recours subrogatoire, que la victime soit notifiée en amont pour qu'elle puisse, en vertu de l'ancien 67 ou du nouveau 143, Code de procédure civile, se joindre à l'action dès le jour 1, sans qu'elle ait à payer un avocat pour faire une requête en intervention volontaire. C'est juste ça, qu'elle soit notifiée. Parce que vous, par la suite, vous allez avoir besoin du témoignage de la victime, fort probablement, fort probablement. Ce ne sera pas... En tout cas, le procureur, je peux vous le dire, le procureur, ça va être son premier témoin, s'il est capable de l'avoir, là, en cour de justice civile, là. Son premier témoin, ça va être la victime.

Alors, dans ce contexte-là, où ça se fait, selon la nature de l'infraction et tout ça, ça se fait très bien, tout le monde est à l'aise, parfait, on y va. Je voudrais juste m'assurer qu'on ait une boucle pour que la personne, en vertu de l'ancien 67 ou du nouveau 143, puisse se joindre et puisse, elle, parfaire, en collaborant avec... parce qu'elles sont codemanderesses, corequérantes, avec le PG, parfaire... donc rembourser l'État pour l'indemnisation donnée puis compléter son indemnisation pour l'extra qui n'a pas été compensé.

Mais ma question, M. le Président, si je peux me permettre...

Le Président (M. Bachand) : Oui, allez-y, monsieur.

M. Tanguay : ...parce que, si ce n'est pas ça, quand sera notifiée la personne indemnisée? Si ce n'est pas ça, quand sera notifiée, et comment, la personne indemnisée que le ministre fait un recours subrogatoire?

M. Jolin-Barrette : On est en train de faire les vérifications, là, pour vous répondre.

M. Tanguay : O.K. Parce que moi, je doute... La première nouvelle que je vais en avoir, si ce n'est pas écrit à nulle part, ça va être : Vous êtes invité... un subpoena, on aimerait ça vous interroger dans le cadre de tel procès. Il est clair que, peut-être, une administratrice ou un administrateur de l'IVAC va vous dire : Vous savez, dans votre dossier, je dois vous informer d'une chose — est-ce qu'elle est autorisée à le dire? Probablement que oui — je vous informe qu'on est sur le projet puis on va poursuivre votre agresseur. O.K. Puis qu'est-ce que ça implique pour moi? Bien, on va vous demander si vous voulez témoigner. Vous ne serez pas obligé, mais vous allez recevoir un subpoena. Ah! O.K. Donc, le train est déjà parti. Peut-être que j'aurais aimé ça, pas dans tous les cas, mais peut-être que j'aurais aimé ça me joindre parce que j'ai d'autres dommages, moi, là, là, surtout que, là, on enlève la rente viagère.

Le Président (M. Bachand) : Merci, M. le député. M. le ministre.

M. Jolin-Barrette : Mais, comme je vous disais, on fait des vérifications avec les spécialistes de la procédure du ministère de la Justice. Actuellement, il faut dire qu'il n'y a pas de recours subrogatoires qui sont entrepris dans l'ancienne loi.

M. Tanguay : Mais, quand même, ça existe. Puis je salue l'intention du ministre puis je pense que je ne le cite pas mal, que dans... je pense que c'est plus qu'hier moins que demain, là, la subrogation, là. Parce qu'effectivement le régime va être plus large, 4 000 nouvelles personnes indemnisées. Ce n'est pas tous des cas d'agressions sexuelles, et, même s'il y en a beaucoup, c'est la très grande majorité, c'est des cas qui concernent des violences sexuelles, conjugales ou à l'enfance. On les exclut. Mais, dans les cas... j'imagine que le ministre, s'il le met là... puis je trouve que c'est bien fondé aussi. Puis, dans l'économie de nos tribunaux, tant mieux si le Procureur général apporte son expertise puis sa compétence à un justiciable qui dit : Bien, moi, j'embarque, effectivement, parce que je sais que le ministre était bien, bien, bien généreux, mais il n'a pas été trop, trop généreux dans mon cas, ça fait que je veux... tu sais, faire le lien.

M. Jolin-Barrette : Oui, mais on fait le maximum.

M. Tanguay : O.K.

Le Président (M. Bachand) : Merci.

M. Tanguay : En attendant la réponse, on peut-tu suspendre?

M. Jolin-Barrette : Bien...

M. Tanguay : Ça, c'est quoi? C'est l'article 23, c'est ça? Parce que, s'il faut l'ajouter, peut-être on pourrait l'ajouter là.

M. Jolin-Barrette : Oui, on peut passer à 24 en attendant. C'est bon.

Le Président (M. Bachand) : C'est bon. Est-ce qu'il y a consentement pour suspendre l'article 23? Consentement. Merci. M. le ministre, s'il vous plaît.

M. Jolin-Barrette : «24. Une demande présentée en vertu de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles, de la Loi sur l'assurance automobile ou de la Loi visant à favoriser le civisme, refusée au motif qu'elle aurait dû être présentée en vertu du présent titre, est néanmoins réputée avoir été valablement présentée en vertu de celui-ci.»

Cette disposition assure qu'une demande présentée erronément en vertu d'un autre régime public prévu dans la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles, la Loi sur l'assurance automobile ou la Loi visant à favoriser le civisme ne constitue pas un motif pour refuser la demande en vertu de la présente loi. La disposition crée donc une présomption qu'une demande présentée erronément en vertu de l'une de ces lois serait réputée pour avoir été valablement présentée en vertu de la présente.

Donc, c'est la reprise de l'article 22, actuellement, de la Loi sur l'indemnisation des victimes d'actes criminels.

Le Président (M. Bachand) : Merci. M. le député de LaFontaine.

M. Tanguay : Et j'imagine, M. le Président, que, dans... parce que, par règlement, le ministre... Hier, on a eu un débat là-dessus, là, par rapport au langage simple et clair du formulaire. Je ne sais pas s'il s'en rappelle. C'est un débat...

M. Jolin-Barrette : Passionant.

M. Tanguay : ...passionnant. On a fait avancer le Québec, puis l'amendement a été refusé. On va s'assurer que le formulaire de l'un soit compatible par rapport au formulaire de l'autre. Parce qu'on parle de l'harmonisation des deux... des trois régimes, dans le fond, là, s'assurer que, dans la rédaction, ça puisse faire... ça puisse être suffisamment complet pour justement transiter vers d'autres régimes parce que, sinon, on passe à côté, sans qu'on ait à bonifier ou à compléter, parce que, là, je me suis trompé de régime, là, par le formulaire.

M. Jolin-Barrette : C'est ça, mais l'objectif de l'article est de dire, dans le fond, si vous avez présenté votre demande à la SAAQ au lieu de le présenter à l'IVAC, c'est compté comme si vous l'aviez présentée à l'IVAC.

M. Tanguay : C'est ça, mais mon point, c'est que, dans la rédaction du formulaire, pour que ce soit, considérant en vertu de 24, valablement présenté, il ne faudra pas qu'on me redemande : Vous vous êtes trompé de régime, on vous change, puis voici le formulaire dudit régime. Que ce soit un formulaire unifié pour les trois régimes, comme ça, on évite... bien, parce que c'est ça, c'est ça, la promesse de l'article 24. C'est la promesse de l'article 24.

M. Jolin-Barrette : Non, ce n'est pas ça.

M. Tanguay : Non, il n'y a pas de promesse?

M. Jolin-Barrette : 24, ça dit : Si vous l'avez présenté à la SAAQ par erreur, bien, c'est considéré comme si vous l'avez présenté à l'IVAC. Vous n'êtes pas pénalisé pour ça. Pour les formulaires associés, il faut que les formulaires soient simples. Mais ça se peut qu'il y ait des données qui soient demandées à la CNESST, à la SAAQ qui sont des renseignements différents de l'IVAC. Là, j'imagine que les formulaires doivent être similaires, mais il peut y avoir des particularités en fonction de chacun des régimes. Ça se peut que les renseignements à fournir ne soient pas les mêmes, là.

M. Tanguay : Donc, la promesse de 24, mais uniquement, le ministre pourra me dire : Non, il n'y a pas juste ça, mais uniquement pour la computation des délais.

M. Jolin-Barrette : Bien, ultimement, ça revient à une computation des délais à l'avantage de la personne.

M. Tanguay : Oui, je le sais.

M. Jolin-Barrette : C'est juste pour dire, si vous vous êtes trompé de porte, vous avez ouvert la mauvaise porte, vous avez cogné à la mauvaise porte, ce n'est pas grave, vous n'allez pas être pénalisé à cause de ça.

M. Tanguay : Ce n'est pas grave, uniquement en matière de computation de délais, mais ce n'est pas grave, mais vous allez remplir le bon formulaire, par exemple. Il y a une autre étape.

M. Jolin-Barrette : Bien oui, mais ce qui est normal aussi.

M. Tanguay : Bien, tel que je le lisais, «est néanmoins réputée avoir été valablement présentée», selon moi, c'est qu'il y avait également un dossier complet.

M. Jolin-Barrette : Non, mais, si l'IVAC... Oui, mais, si, à la SAAQ, ils ne demandent pas certains renseignements puis ils demandent d'autres renseignements qui sont nécessaires à l'indemnisation du régime, qu'à l'IVAC ils ont besoin de savoir autre chose, là, ce n'est pas la même chose, il y en a que c'est un accident d'automobile, l'autre c'est une infraction criminelle, ça se peut qu'il y ait des renseignements différents qui soient demandés. Ça fait que vous ne pouvez pas dire : Bien, écoutez, la demande que vous avez faite à la SAAQ, bien, elle est finale et complète, puis l'IVAC ne peut pas vous demander les renseignements qui vont, justement, vous permettre de vous indemniser adéquatement, là.

Le Président (M. Bachand) : J'aurais la députée de Sherbrooke, s'il vous plaît.

Mme Labrie : J'aimerais ça... J'essaie de visualiser des exemples, là, où ça va se produire que quelqu'un se trompe d'endroit pour adresser sa demande. Je ne sais pas si le ministre peut nous en donner puis nous dire à quel point ça arrive souvent, là, que des gens se trompent à ce point-là. Puis, si oui, il me semble que ça veut dire que l'information n'est peut-être pas claire, là, parce qu'effectivement on veut éviter que des gens remplissent tout un formulaire puis ensuite se fassent dire : Bon, bien, vous vous êtes trompé de porte, on ne tiendra pas compte de cette erreur-là pour le calcul du délai, mais voici le nouveau formulaire que vous devez remplir, qui est à peu près aussi long, là. Tu sais, c'est quand même... C'est bien qu'on ne tienne pas compte du délai, mais à quel point ça arrive souvent que les gens se trompent de porte? C'est quoi, les genres d'exemples où ça peut se produire?

M. Jolin-Barrette : Bien, ça ne doit pas arriver très, très souvent. J'essaie de penser... Tu sais, il y a peut-être des cas où des personnes se sont adressées à... bien...

Mme Labrie : Parce qu'on nous a donné en audition des exemples de gens qui pourraient préférer, par exemple, faire une demande à l'IVAC plutôt qu'à la CNESST parce qu'ils ne veulent pas que leur employeur soit informé, par exemple, de ce qui se serait passé sur le lieu de travail. C'est bon. Je vois des exemples comme ça, mais, à ce moment-là, c'est...

• (16 h 30) •

M. Jolin-Barrette : Oui, mais prenons le cas d'une infraction criminelle survenue en automobile. Là, à ce moment-là, c'est le régime de la SAAQ qui va couvrir.

Mme Labrie : Bien, à ce moment-là, la personne, elle ne s'est pas trompée.

M. Jolin-Barrette : Non, mais supposons qu'elle s'est adressée... Bien, le cas de l'infraction criminelle au travail, effectivement, c'est un bon régime... c'est un bon exemple. Donc, la demande doit être présentée à la CNESST. Je vous dirais...

Mme Labrie : Si on nous disait, par exemple, que certaines victimes préféraient que la demande soit à l'IVAC, même si ça pouvait être moins généreux, parce que ça n'impliquait pas de le déclarer à l'employeur, ce que certaines victimes préféraient... Bien, en tout cas, moi, je n'en trouve pas non plus, des exemples, là. C'est ça. J'imagine que cette disposition-là existe parce que ça répond à un besoin, mais...

Le Président (M. Bachand) : Merci. M. le ministre.

M. Jolin-Barrette : Bon. Prenons un cas d'exemple. Supposons, un livreur, O.K., qui se retrouve en pause, O.K., puis qui va acheter, supposons, un billet de... il va acheter un produit quelconque au dépanneur. Il se fait agresser, subit une infraction criminelle à ce moment-là. Alors, il n'est pas au travail. Il est dans une période de temps où il n'est pas en fonction, si je peux dire. À ce moment-là, lui, il aurait pu penser qu'il était au travail, il aurait présenté sa demande à la CNESST. Or, il aurait dû la présenter à l'IVAC parce qu'il n'était pas dans le cadre de ses fonctions.

Mme Labrie : O.K. Parfait. Donc... Mais ça doit être plutôt rare. Dans ce temps-là, on demande à la personne de recommencer le processus.

M. Jolin-Barrette : Bien là... Mais, en fait, là, ce qu'on dit... On lui dit : C'est à l'IVAC que vous devez aller, mais, par contre, votre délai, là, il n'est pas expiré. Dans le fond, c'est comme quand vous l'avez demandé à la CNESST, ça a mis fin au chrono de l'horloge, là. Donc, vous le présentez à l'IVAC. Exemple, là, vous le présentez, là, à deux ans, 11 mois. Votre dossier est reçu... traité après trois ans. Puis là on vous dit : Aïe! Ce n'est pas à la bonne place, c'était à l'IVAC. Donc là, ce qu'on va dire... On va prendre la demande. On va demander sûrement des renseignements supplémentaires pour compléter avec le bon formulaire, mais la personne ne se fera pas poser par l'IVAC... le fait de dire : Vous n'étiez pas au bon endroit.

Mme Labrie : Ça, c'est très bien. Je fais juste me demander comment on pourrait mieux accompagner les gens en amont pour leur éviter ça, tu sais. Même si on ne tiendra pas compte, là, de ce délai-là, c'est quand même un stress supplémentaire, un délai supplémentaire, au final, avant d'en avoir, de l'aide pour la personne qui n'a pas frappé à la bonne porte. Comment on peut s'assurer que les gens vont bien savoir à quelle porte frapper?

M. Jolin-Barrette : Bien, c'est sûr qu'il y a la publicité, il y a le renseignement aussi, mais, dans le projet de loi, on met une disposition maintenant qui va faire en sorte que, exemple, avec Montréal, on avait cet enjeu-là, avec le SPVM, à l'effet que, maintenant, toutes les victimes d'infractions criminelles vont recevoir, suite à la dénonciation, tu sais, à la police, supposons, dans le cas du dépanneur, ils vont recevoir une enveloppe qui dit : Vous avez été victime d'infractions criminelles, voici les services du CAVAC, voici les services de l'IVAC. On va pouvoir les rattacher comme ça.

Mme Labrie : Parfait. Merci.

Le Président (M. Bachand) : Ça va? Interventions sur 24? M. le député de LaFontaine.

M. Tanguay : Par rapport à la Loi visant à favoriser le civisme, est-ce que c'était déjà prévu dans la Loi sur l'indemnisation, ça, cette loi-là... ce régime-là?

M. Jolin-Barrette : Oui. L'article 22 se lisait ainsi : «Une demande valablement formulée en vertu de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles ou en vertu de la [Loi visant à favoriser le civisme] et refusée par la commission au motif qu'elle aurait dû être formulée en vertu de la présente loi est néanmoins réputée avoir été valablement formulée suivant celle-ci.» Donc, c'était l'article 22 de l'ancienne loi.

M. Tanguay : O.K. Et le civisme, la loi sur le civisme, ça, permet donc une indemnisation. Puis là, en lisant ça, puis je regarde la Loi visant à favoriser le civisme, c'est une personne qui... un sauveteur qui a subi, exemple, article 2, un préjudice ou, s'il en décède... C'est tout ce qui n'est pas du régime, hors de l'article 11 du 84, qui est le civisme dans un contexte d'acte criminel. Là, on parle du civisme dans un contexte qui n'est pas d'acte criminel. J'imagine que c'est là où les deux régimes se complètent.

Le Président (M. Bachand) : M. le ministre.

M. Jolin-Barrette : Mais oui, les deux régimes se complètent. Donc, si vous avez fait un acte sur le civisme, puis vous avez droit d'être indemnisé en vertu de cette loi-là, parce que c'est les mêmes aides, hein, qui sont formulées, donc, à ce moment-là, vous allez pouvoir bénéficier du régime de l'IVAC. Supposons que vous étiez un sauveteur, vous allez pouvoir bénéficier de la bonne loi, là. Dans le fond, c'est un régime d'indemnisation aussi qu'il y a à la loi sur le civisme.

Le Président (M. Bachand) : Merci. M. le député.

M. Tanguay : J'ai ici copie du mémoire — donc, merci pour la réponse — du Groupe d'aide et d'information sur le harcèlement sexuel au travail de la province de Québec inc., mémoire qui a été déposé à la commission. Et à la page 6 de leur mémoire, Les infractions criminelles, l'aide financière et la CNESST... «En ce sens, nous croyons que les personnes victimes d'une infraction criminelle à l'emploi devraient avoir le choix d'utiliser les recours qui s'ouvrent à elles selon la LATMP ou selon l'IVAC.» Et eux, là.. Puis le reste du mémoire faisait en sorte... «démontrer qu'elle a subi un événement imprévu et soudain», et ainsi de suite. Il pourrait arriver certains cas, notamment au niveau de la générosité d'un régime ou de l'autre ou... et eux le soumettent. J'aimerais savoir où le ministre loge-t-il par rapport à ça, où on offre le choix, toujours dans un contexte où une personne pourrait opter pour le système le plus généreux, entre guillemets, comme on a déjà, dans un autre amendement, fait écho à cela, par rapport aux aides financières qui se cumulaient, là. Est-ce que la porte est fermée en ce sens-là?

M. Jolin-Barrette : Votre question précise... La porte est fermée par rapport...

M. Tanguay : À ce qu'une personne puisse opter pour un régime ou l'autre si, d'aventure, elle pourrait se qualifier. Exemple, un acte criminel sur le lieu du travail.

M. Jolin-Barrette : Oui. Dans le fond, la LATMP a priorité. La Loi sur les accidents de travail et les maladies professionnelles a priorité. C'est un régime contributoire, contrairement à celui de l'IVAC.

M. Tanguay : O.K. Et ça, c'est... À quel endroit c'est inscrit, ça, qu'elle a priorité?

M. Jolin-Barrette : À l'article 59.

M. Tanguay : Du projet de loi n° 84. On va y aller. O.K. Ça fait qu'on pourra faire ce débat-là. Je faisais écho ici, M. le Président, donc, de ce regroupement, groupe d'aide, qui demandait la possibilité d'opter pour le régime le plus généreux, le cas échéant, mais on pourra faire le débat à 59, M. le Président. Mais j'entends qu'à ce stade-ci le ministre n'a pas l'intention d'aller en ce sens-là ou même d'amender 59, là.

M. Jolin-Barrette : Non.

Le Président (M. Bachand) : Merci. Interventions sur l'article 24? S'il n'y a pas d'autre intervention, nous allons procéder à la mise aux voix. Mme la secrétaire, s'il vous plaît.

La Secrétaire : Pour, contre, abstention. M. Jolin-Barrette (Borduas)?

M. Jolin-Barrette : Pour.

La Secrétaire : Pour les membres du groupe parlementaire formant le gouvernement, M. Lemieux (Saint-Jean)?

M. Lemieux : Pour.

La Secrétaire : Pour les membres de l'opposition officielle, M. Tanguay (LaFontaine)?

M. Tanguay : Pour.

La Secrétaire : Mme Labrie (Sherbrooke)?

Mme Labrie : Pour.

La Secrétaire : Mme Hivon (Joliette)?

Mme Hivon : Pour.

La Secrétaire : M. Bachand (Richmond)?

Le Président (M. Bachand) : Abstention. Donc, l'article 24 est adopté. Merci. M. le ministre, s'il vous plaît.

M. Jolin-Barrette : Oui. L'article 25 : «La demande de qualification interrompt la prescription, prévue au Code civil, de l'action de la personne victime en réparation de son préjudice jusqu'au jour où le ministre ou, selon le cas, le Tribunal administratif du Québec rend sa décision sur la demande.»

Cette disposition prescrit une interruption de prescription au Code civil dès que la demande de qualification serait présentée, et ce, jusqu'au jour où la décision définitive serait rendue relativement l'admissibilité de la personne à une aide financière.

Donc, c'est la reprise de l'article 2 de la loi sur... pardon, de l'article 12 de la Loi sur l'indemnisation des victimes d'actes criminels. Donc, c'est ça, c'est des délais qui sont prévus au Code civil, donc c'est l'interruption de la prescription.

Le Président (M. Bachand) : Merci. Interventions? M. le député de LaFontaine.

M. Tanguay : Oui. Donc, c'est... Le simple fait de déposer le formulaire interrompt la prescription...

M. Jolin-Barrette : Exactement.

M. Tanguay : ...indépendamment de sa recevabilité ou quoi que ce soit d'autre. Parfait. Et, en aucun cas, on pourra faire grief à une personne de l'avoir déposé hors prescription dans le cas de l'imprescriptibilité, là.

• (16 h 40) •

M. Jolin-Barrette : Dans les cas de violence sexuelle, de violence conjugale, et de violence subie pendant l'enfance.

M. Tanguay : Puis là vous allez dire...

M. Jolin-Barrette : Dans le fond, il n'y a plus de délai.

M. Tanguay : Il n'y a plus de délai. Dans le fond, il n'y a plus de délai. Dans le fond, on ne pourrait jamais, dans aucun cas d'espèce, on ne pourrait jamais faire grief, si on voulait être de mauvaise foi, d'une personne d'avoir déposé une demande d'indemnisation ayant fait perdre, exemple, le recours à une subrogation, là. Parce que, de deux choses l'une, c'est soit imprescriptible en vertu de 2926.1, on fait miroir, jusqu'à un certain point, dans la loi n° 84... Et le délai de trois ans pour déposer la demande, est-ce qu'il y a un miroir parfait entre cette prescription-là des recours civils qui est de trois ans et le trois ans pour déposer une demande? Est-ce que c'est la même analyse, les mêmes critères?

M. Jolin-Barrette : C'est la même chose.

M. Tanguay : C'est la même chose.

M. Jolin-Barrette : C'est un délai de trois ans de prescription, sous réserve que l'incapacité, en fait, d'agir a été élargie, et, dans le fond, votre délai de trois ans, ça devient une...

M. Tanguay : Motifs raisonnables.

M. Jolin-Barrette : ...des motifs raisonnables. Ça veut dire que le délai, il est plus flexible, donc vous pouvez excéder le délai de trois ans si vous avez des motifs raisonnables. On se souvient, on est parti de l'incapacité, en fait, d'agir. On est parti de deux ans incapacité, en fait, d'agir, et là on se retrouve à trois ans, plus motifs raisonnables, ce qui est un critère beaucoup plus bas pour bénéficier du régime d'indemnisation.

M. Tanguay : Et, dans le Code civil du Québec, pour être relevé du défaut d'avoir déposé un recours dans le délai prescrit, dans la prescription, c'est impossibilité, en fait, d'agir. Dans le Code civil, c'est ça? O.K.

Et donc ça veut dire, M. le Président — on sait que c'est l'ancien 12 — ça veut dire que moi, je suis victime d'un acte criminel, il y a deux ans et demi, je dépose une demande d'indemnisation à l'IVAC pour la personne qui est, selon mon témoignage, l'auteur de l'acte criminel, que je pourrais éventuellement poursuivre, pour cette personne-là, si, mettons, à trois ans moins une semaine, je dépose ma demande à l'IVAC, lui, il n'est pas sorti de l'auberge, là, la prescription est interrompue pour pouvoir le poursuivre au civil. C'est ça qu'il faut comprendre.

M. Jolin-Barrette : Qui poursuivez-vous, là?

M. Tanguay : Moi, je suis victime d'acte criminel il y a trois ans moins une semaine. Je dépose ma demande d'indemnisation à l'IVAC, puis j'ai l'intention, à un moment donné, de poursuivre. Mais ma prescription de trois ans pour mon litige civil, elle est interrompue, ma prescription, à ce niveau-là.

M. Jolin-Barrette : Ça suspend tant que la Direction de l'indemnisation des victimes d'actes criminels n'a pas déposé de demande... a statué sur votre demande. Mais, au-delà de ça, la disposition, pour votre recours civil, est de 10 ans, à 2926.1.

M. Tanguay : Oui. O.K.

M. Jolin-Barrette : Dans le fond, là, pour le régime public, là, il y a interruption de la prescription à partir du moment où vous déposez votre demande. Donc, c'est trois ans, votre délai pour l'IVAC, O.K.? Puis, à partir du moment où vous déposez, ça interrompt la prescription. Mais votre autre prescription, là, contre l'auteur de l'infraction, si vous prenez un recours, une demande civile à l'encontre de l'auteur de l'infraction, là vous tombez dans le régime de 10 ans, là. Votre délai de prescription, il est plus long, là, en matière civile.

M. Tanguay : «En réparation de son préjudice jusqu'au jour». Donc, l'interruption de 25 s'interrompt au jour où le ministre ou, selon le cas, le TAQ rend sa décision sur la demande...

M. Jolin-Barrette : Finale. C'est ça.

M. Tanguay : ...indépendamment de la nature de la décision, que ce soit accepté ou indemnisé, il y a fin de l'interruption.

M. Jolin-Barrette : Exactement. Ça suspend la prescription de nature civile. Donc, exemple, si vous présentez votre demande à l'IVAC, O.K., ça s'en va au tribunal, ça prend cinq ans, bien, votre prescription a été interrompue, sur votre recours civil aussi.

M. Tanguay : C'est-à-dire la prescription est de 10 ans. Mais là, dans le cas d'espèce où ma prescription est de 10 ans, puis à 10 ans moins une semaine, je dépose à l'IVAC...

M. Jolin-Barrette : Non, pas à l'IVAC. Vous êtes hors délai.

M. Tanguay : Là, je suis hors délai pour l'IVAC, mais je suis toujours dans mon délai pour le civil.

M. Jolin-Barrette : C'est ça, sous réserve que ce n'est pas une infraction imprescriptible.

M. Tanguay : Oui, les trois cas d'espèce, là, plus bas, de 2926.1. C'est là où un voit un petit peu la générosité, entre guillemets... c'est-à-dire, pas la générosité, mais la... Un peu plus facile d'étirer le délai, dans le contexte de l'IVAC, par rapport aux trois ans, parce que c'est «motif raisonnable». Puis le trois ans du Code civil, ou le 10 ans du Code civil, c'est impossibilité, en fait, d'agir. Là, on a une certaine malléabilité plus grande pour l'IVAC, mais, dans le contexte du 10 ans moins une semaine, je ne suis pas prescrit au civil, mais je suis prescrit à l'IVAC. Il y a comme un retour du balancier, là, et... O.K. C'est bon.

Le Président (M. Bachand) : Merci. Interventions sur l'article 25? S'il n'y a pas d'intervention, nous allons procéder à la mise aux voix. Mme la secrétaire, s'il vous plaît.

La Secrétaire : Pour, contre, abstention. M. Jolin-Barrette (Borduas)?

M. Jolin-Barrette : Pour.

La Secrétaire : Pour les membres du groupe parlementaire formant le gouvernement, M. Lemieux (Saint-Jean)?

M. Lemieux : Pour.

La Secrétaire : Pour les membres de l'opposition officielle, M. Tanguay (LaFontaine)?

M. Tanguay : Pour.

La Secrétaire : Mme Labrie (Sherbrooke)?

Mme Labrie : Pour.

La Secrétaire : Mme Hivon (Joliette)?

Mme Hivon : Pour.

La Secrétaire : M. Bachand (Richmond)?

Le Président (M. Bachand) : Abstention. Donc, l'article 25 est adopté. Merci. M. le ministre, s'il vous plaît.

M. Jolin-Barrette : Oui, M. le Président, pour l'article 26. Donc, l'article 26 : «Une personne victime qui a fait une demande de qualification doit, sans délai, aviser le ministre de tout changement de situation qui affecte sa qualification ou son droit à une aide financière ou qui peut [influencer] sur le montant d'une telle aide.

«La personne victime avise le ministre selon les conditions, les normes et les modalités prescrites par [...] règlement du gouvernement.»

Cette disposition assure qu'après le dépôt d'une demande de qualification le ministre soit avisé de tout changement dans la situation d'une personne victime qui serait susceptible d'avoir un impact quant à sa qualification ou à son droit à une aide financière.

Le Président (M. Bachand) : Merci. M. le député de LaFontaine.

M. Tanguay : Est-ce qu'il y a un article, dans la loi actuelle, sur l'indemnisation à cet effet-là ou c'est nouveau?

M. Jolin-Barrette : Dans la loi sur l'indemnisation?

M. Tanguay : Oui, actuellement.

M. Jolin-Barrette : Je n'ai pas de référence.

Des voix : ...

M. Jolin-Barrette : Pas dans la Loi sur l'indemnisation des victimes d'actes criminels, mais dans la Loi sur les accidents de travail et maladies professionnelles, il y a cette disposition-là.

M. Tanguay : O.K. Là, on harmonise les régimes dans ce contexte-là. Et, quand on dit «sans délai», c'est la même formulation, j'imagine, c'est «sans délai». «Sans délai», c'est dans les meilleurs délais, là, je veux dire. À partir de quand on peut faire grief à une personne de n'avoir pas agi suffisamment tôt, quand on dit «sans délai»? Parce qu'il va y en avoir, des délais.

M. Jolin-Barrette : Bien, «sans délai», c'est dans les meilleurs délais, là.

M. Tanguay : C'est ça.

M. Jolin-Barrette : C'est de façon contemporaine.

M. Tanguay : Et «de tout changement de situation qui affecte sa qualification ou son droit à une aide financière ou qui peut [influencer] sur le montant d'une telle aide», je ne sais pas si vous avez, en matière d'indemnisation, des exemples de ça.

M. Jolin-Barrette : Bonne question.

(Consultation)

Le Président (M. Bachand) : Merci. M. le ministre.

M. Jolin-Barrette : Oui. Prenons l'exemple d'une personne qui subit une atteinte, et elle fournit un rapport médical, et il y a un changement dans sa situation personnelle. On souhaite qu'elle avise l'IVAC relativement au rapport médical. Exemple, là, vous avez une évaluation, puis vous avez une incapacité temporaire de travailler, puis qui... Finalement, elle se réhabilite, elle devient consolidée, là. Bien, on lui demande de dire au ministre... bien, de dire au ministre, de dire au régime... on utilise le terme «ministre», là, mais on demande au régime de le dire à l'administrateur du régime que vous n'avez plus besoin de remplacement de revenu, là, vous êtes consolidé. Donc, on veut que, quand qu'il y a un changement, il faut qu'elle transmette l'information.

Le Président (M. Bachand) : Merci. J'aurais... O.K. La députée de Joliette, s'il vous plaît.

Mme Hivon : Merci. Je comprends pour la question de l'aide financière, ou ce que le ministre vient de dire, mais la qualification elle-même, est-ce qu'il y a des exemples de situation qui affecteraient sa qualification? Donc, tu te qualifies comme victime, puis après tu ne te qualifies plus.

M. Jolin-Barrette : Bien, supposons qu'il y avait des éléments par rapport à la faute lourde, tu sais, que la personne, elle n'a pas déclaré qu'elle a participé à l'infraction, ou qu'elle a commis l'infraction comme telle, puis que, là, je ne sais pas, là, elle est poursuivie, finalement, par la police, puis que, dans le fond, ça ne peut pas être une victime, c'est l'auteure de l'infraction, puis elle ne rentre pas dans les exceptions, elle devrait aviser le régime.

Mme Hivon : Donc, c'est elle qui doit aviser le régime dans ce cas qui, selon moi, est plutôt exceptionnel, là. J'essayais de voir s'il y avait des cas, peut-être, plus...

M. Jolin-Barrette : Il doit y avoir d'autres cas, c'est le premier cas que j'ai pensé.

Mme Hivon : ...parce que je le trouve un peu compliqué. Je ne suis pas sûre que la personne aviserait l'IVAC.

M. Jolin-Barrette : Supposons... Prenez un criminel honnête, là.

Mme Hivon : Dans l'hypothèse du criminel honnête qui se fait poursuivre par la police, mais qui va aller le dire à l'IVAC, oui. Mais mettons que vous auriez une hypothèse moins...

M. Jolin-Barrette : Non, mais ça doit exister. Ça doit exister, un criminel honnête, là, ce n'est pas tout le temps des cas de fraude, là.

Mme Hivon : Mais c'est que je me demande vraiment, si ce n'est pas une vue de l'esprit, là, la question d'affecter sa qualification.

Des voix : ...

Le Président (M. Bachand) : Merci. M. le ministre.

• (16 h 50) •

M. Jolin-Barrette : Bon. Effectivement, l'exemple que j'ai donné est un exemple particulier. C'est sûr qu'il n'y a pas beaucoup d'exemples sur la qualification, mais c'est un exemple applicable.

Mme Hivon : Vous avez des preuves? Il y a des gens qui vous ont dit que c'était un exemple applicable?

M. Jolin-Barrette : Bien, moi, je vous le dis, dans le fond, si la personne demande de l'aide à titre de victime puis que ce n'en est pas une, finalement, parce que c'est elle, l'auteure de l'infraction, si elle est honnête, elle devrait le dire. Bon, vous me direz...

Mme Hivon : Je pense que c'est plus l'État qui va dire qu'il y a eu une intervention puis une faute lourde. Je ne pense pas que la personne qui demande de l'aide...

M. Jolin-Barrette : Oui, mais je suis d'accord avec vous que, sur la qualification, il y a moins de cas d'espèce, il y a moins de cas d'espèce. Par contre, quand il y a un changement de situation, des renseignements supplémentaires, exemple, finalement, la personne victime, supposons, sur une voie de fait, au moment de la demande de qualification, elle ne connaissait pas l'auteur de l'infraction, supposons, là, une bataille de taverne, comme le relatait le député de LaFontaine, mais que, finalement, la victime apprend qui est l'auteur de l'infraction, bien, on souhaite que la personne victime indique et transmette ces renseignements-là à l'IVAC, notamment en prévision du recours subrogatoire. Donc, ça, ça serait un cas où on divulgue l'information au régime, à l'IVAC.

Mme Hivon : Bien, je comprends qu'il peut avoir une demande de divulguer des changements dans la situation, un préjudice qui, finalement, est peut-être moins grand que ce qui avait été évalué au départ, ça, je comprends tout ça, mais pour la qualification, vraiment, je trouve que de laisser ça inscrit comme ça, c'est particulier, parce que ça donne l'impression qu'on pourrait te retirer ton statut de personne qualifiée et que tu aurais l'obligation, toi, de dévoiler des informations. En tout cas, je trouve que c'est un peu... c'est une vue de l'esprit, je ne sais pas trop comment...

M. Jolin-Barrette : Mais, à la base, il pourrait arriver des situations où la personne n'est pas considérée comme une personne victime, finalement.

Mme Hivon : Mais ce n'est pas elle qui va, je veux dire, aller à l'IVAC pour dire : Considérez-moi plus comme victime. Je veux dire, je comprends qu'on se fie à la bonne foi des gens, là, mais c'est l'IVAC qui, dans son enquête, en viendrait à une conclusion différente.

M. Jolin-Barrette : Oui, mais prenons le cas où finalement la personne aurait fait une demande à l'IVAC, mais finalement c'est une victime de la route, elle pourrait aviser le régime, dire : Je suis indemnisée par la SAAQ.

Mme Hivon : ...parce que les régimes ne se parlent pas.

M. Jolin-Barrette : Parce que le régime applicable, c'est celui de la SAAQ.

Mme Hivon : Oui, mais il aurait fallu qu'elle soit qualifiée, dans un premier temps, donc jugée admissible, on se comprend, là, parce que là, on est dans un cas où, en cours de route, il faut qu'elle avise.

M. Jolin-Barrette : Non, mais pas nécessairement, elle n'est pas qualifiée encore. «Une personne victime qui fait une demande de qualification doit, sans délai, aviser le ministre de tout changement [dans sa] situation qui affecte sa qualification». Donc, elle pourrait être dans la demande de qualification.

Mme Hivon : O.K., mais on se comprend qu'à partir du moment... Enfin, c'est peut-être théorique, là, mais je trouve ça bizarre de faire référence à ça, parce qu'à partir du moment où elle fait sa demande, on va lui demander les circonstances. Et donc, si c'est arrivé dans un accident d'auto, elle ne pourra pas dire autre chose, initialement, que c'est arrivé dans un accident d'auto, là. Elle ne se réveillera pas trois mois plus tard, en disant : Ah! c'est vrai, je ne l'ai pas dit, c'était dans un accident d'auto. C'est peut-être juste que le ministre n'a pas d'exemples qui se sont déjà produits, là.

M. Jolin-Barrette : Oui, mais... Oui, bien, en fait, cette disposition-là n'existe pas présentement à l'IVAC, elle existe dans la LATMP. Mais le sens de l'article aussi, c'est pour qu'on puisse lui offrir les meilleurs éléments aussi par rapport à sa situation aussi, donc le fait qu'elle informe un changement en fonction de sa situation.

Mme Hivon : C'est ça. Je comprends pour les autres éléments, mais pour la qualification, malheureusement... Je comprends, en théorie, ce que le ministre dit, mais je trouve que ça ne trouve pas application dans la pratique. Donc, j'enlèverais ce bout-là, humblement, M. le Président.

Le Président (M. Bachand) : Merci. Mme la députée de Sherbrooke, s'il vous plaît.

Mme Labrie : Oui, je suis juste un petit peu confuse avec ce qui a été dit sur la faute lourde, là, parce qu'à mon sens c'est la responsabilité des administrateurs du régime de dire... d'évaluer s'il y a eu faute lourde, là. Ça ne sera pas, dans aucune circonstance, à la victime d'évaluer elle-même s'il y avait faute lourde.

M. Jolin-Barrette : Non, mais prenons l'exemple où la personne est l'auteure de l'infraction.

Mme Labrie : Bien, elle le sait.

M. Jolin-Barrette : Oui, mais supposons qu'elle ne le divulgue pas à la première occasion.

Mme Labrie : Oui.

M. Jolin-Barrette : Dans le fond, supposons qu'elle ne sait pas qu'elle ne peut pas être indemnisée parce qu'elle est l'auteure de l'infraction...

Mme Labrie : Disons, par exemple, un auteur de violence conjugale qui aurait subi une voie de fait par légitime défense, qui fait une demande pour avoir subi une voie de fait, puis qui ne déclare pas que c'était dans un contexte de violence conjugale, n'est-ce pas la responsabilité, quand même, du régime de vérifier ça avant?

M. Jolin-Barrette : Bien, c'est parce que, tu sais, nous, on est dans un contexte où on veut indemniser le plus de personnes victimes possible, ça, c'est le principe de base. On veut aussi faire en sorte qu'il y ait une certaine responsabilisation des citoyens aussi, tu sais. L'État, les citoyens donnent de l'aide à d'autres citoyens, mais on demande aussi aux citoyens de renseigner adéquatement. Donc, théoriquement, il faudrait porter ces informations-là à la connaissance du régime, c'est le sens de l'article. Il faut pouvoir indemniser les bonnes... les personnes réellement victimes qui sont admissibles au régime.

Mme Labrie : Oui, puis j'essaie, comme ma collègue, là, de réfléchir à des situations un peu particulières où la qualification changerait, là, puis, disons, un scénario probablement rare, mais, tu sais, qui peut se produire où quelqu'un fait la demande, en tant que père d'une victime, puis découvre que, finalement, bien, ce n'était pas lui, le père biologique, disons, là, de la victime, par exemple. Bon, là, il devrait aviser le régime que, finalement, il n'était pas tant le père, qu'il se qualifie plus comme proche, ou, tu sais, je veux dire... J'essaie de voir à quel point c'est pertinent, puis aussi, tu sais, c'est quoi qui va arriver si la personne ne le fait pas, tu sais, qu'est-ce qui est prévu si la personne ne le fait pas.

M. Jolin-Barrette : Bien, ultimement, l'idée, c'est de faire en sorte de renseigner le mieux possible le régime pour être indemnisé adéquatement aussi. Tu sais, c'est à l'avantage de la victime de donner un suivi en continu, et tout ça, puis c'est à l'avantage aussi du régime. Supposons que... Je reviens à l'histoire de taverne du député de LaFontaine. Bien, peut-être que le député de LaFontaine ne voyait pas son agresseur, mais, par la suite, il a reparlé à des témoins par la suite, puis il a su qui était l'agresseur, finalement. Donc, dans ce cas-là, on renseigne le régime sur qui était l'auteur de l'infraction.

Mme Labrie : Mais ça ne devrait rien changer au type d'aide qu'il reçoit, le fait qu'il sache c'était qui, l'auteur de l'agression ou pas.

M. Jolin-Barrette : Bien, dans ce cas-ci, non, mais, par contre, ça peut avoir un impact subrogatoire.

Mme Labrie : Puis qu'est-ce qui va arriver si la victime ne le fait pas? Qui va lui reprocher ça? Puis est-ce qu'elle va être accusée de fraude, par exemple?

M. Jolin-Barrette : Non, non.

Mme Labrie : C'est ça que je veux savoir : C'est quoi, l'impact? On le dit, la personne l'avise. Bon, si la personne ne l'avise pas, qu'est-ce qui arrive?

M. Jolin-Barrette : Bien, c'est dans son intérêt, c'est dans son intérêt d'aviser.

Mme Labrie : Mais si c'est dans son intérêt de ne pas aviser? Par exemple, quelqu'un découvre qu'il n'était pas vraiment le père biologique de la personne. Donc, il ne se qualifie plus vraiment comme père. Il se qualifierait peut-être comme proche, mais là, peut-être, que l'aide est moins intéressante comme proche que comme père. Puis là il ne le dit pas, disons qu'il ne le dit pas, donc...

M. Jolin-Barrette : Non, mais, attendez, là.

Mme Labrie : ...parce que ce n'est pas à son avantage. Bien, qu'est-ce qui va lui arriver si quelqu'un le découvre, qu'il n'a pas dit ça au régime?

M. Jolin-Barrette : Non, mais dans l'exemple que vous donnez, la filiation, elle est établie, là, comme... Ce que je veux dire, là, il y a un verrou de filiation, là. Quand vous êtes le père d'un enfant, là, le verrou de filiation s'applique après 24 mois, là. Donc, même si vous n'êtes pas le père biologique de l'enfant, vous demeurez son père au sens du Code civil quand même, là. Vous êtes le père avec l'autorité parentale, là.

Mme Labrie : Bon. Bien, moi, c'était le seul exemple de changement de qualification que je pouvais imaginer, là.

M. Jolin-Barrette : Il n'y a pas de lever de rideau, puis là votre situation change unilatéralement, tout ça, là. L'enfant, là, son père est son père.

Mme Labrie : Bon, ça fait que... disons qu'il n'y a pratiquement aucun exemple qu'on est capable d'imaginer, autour de la table, de changement de qualification, mais, dans tous les cas, il y aura des circonstances où la personne, il va y avoir un changement qui affecte, disons, son droit à une aide financière, qui peut influencer le montant, puis, dans certains cas, ça va être avantageux pour elle de le dire, puis je suis certaine que, dans ce temps-là, ils vont le faire, puis, dans certains cas, peut-être que ce ne sera pas avantageux de le dire, mais je veux savoir qu'est-ce qui va lui arriver si elle ne le dit pas.

M. Jolin-Barrette : Mais votre exemple... On a un bon point, par exemple, où... supposons qu'il est déchu de l'autorité parentale.

Mme Labrie : Après la...

M. Jolin-Barrette : Il arrive l'infraction, puis là la personne est déchue de l'autorité parentale. Donc, il a présenté sa demande. Donc, il ne peut pas être une personne victime, même s'il pouvait l'être. Donc, il ne devient plus qualifié. Donc là, ça affecte la demande de qualification.

Mme Labrie : Bon, puis mettons qu'il ne le dit pas?

• (17 heures) •

M. Jolin-Barrette : Bien là, il n'a pas droit au régime, relativement à ça, parce qu'il n'est plus admissible au régime.

Mme Labrie : Mais, s'il ne le dit pas?

M. Jolin-Barrette : Bien, s'il ne le dit pas, s'il ne le dit pas...

Mme Labrie : Non, mais il ne se passe rien, c'est ça que je comprends. Dans le fond, moi, je veux savoir est-ce qu'il s'expose à une... pas une poursuite, mais, disons, à...

M. Jolin-Barrette : Bien, l'IVAC va pouvoir lui réclamer les sommes.

Mme Labrie : O.K. donc, il s'expose à une accusation de fraude du régime, par exemple, ou quelque chose comme ça. Est-ce que c'est ça, là?

M. Jolin-Barrette : Oui, bien là, il va pouvoir... l'IVAC va pouvoir se retourner contre lui pour avoir les sommes, mais là, la fraude, en matière criminelle, c'est élevé aussi, là, le critère de fraude.

Mme Labrie : Pas nécessairement en matière criminelle, mais je veux dire, à ma connaissance...

M. Jolin-Barrette : En matière civile, l'IVAC va pouvoir se retourner pour lui réclamer les sommes.

Mme Labrie : O.K., ça fait que c'est ça, c'est ça, la conséquence finalement, c'est que...

M. Jolin-Barrette : Ça pourrait être ça.

Mme Labrie : Ça pourrait être ça, d'accord. Merci.

M. Jolin-Barrette : Mais on ne voudrait pas indemniser quelqu'un qui est déchu de l'autorité parentale.

Mme Labrie : Je comprends, là, je cherche juste savoir, puis ça a pris quand même plusieurs minutes avant qu'on finisse par me dire : Oui, ce qui va lui arriver, c'est ceci, on va demander le remboursement des sommes, puis éventuellement alléguer que c'est une fraude. C'est la réponse que je voulais entendre, mais ça n'avait pas l'air, d'emblée, si clair que ça parce que...

M. Jolin-Barrette : Ce n'est pas nécessairement une fraude, par exemple.

Mme Labrie : Non, non, bien, pas nécessairement, mais si elle ne l'a pas dit?

M. Jolin-Barrette : Mais, si elle ne l'a pas dit, elle n'était pas admissible au régime.

Mme Labrie : Mais, si elle a touché de l'aide et qu'elle n'a pas dit qu'elle n'était pas... qu'il y avait quelque chose qui la rendait inadmissible au régime...

M. Jolin-Barrette : Bien, encore faut-il qu'elle le sache.

Mme Labrie : O.K. Ça fait qu'à ce moment-là, il n'y aurait pas d'accusation de fraude qui pourrait être déposée contre la personne si elle ne... Elle pourrait prétendre ne pas avoir su que ça pouvait influencer son aide, ou quoi que ce soit.

M. Jolin-Barrette : Oui, bien là, on revient à toute notre discussion qu'on avait eu sur l'actus reus, la mens rea, tout ça. Dans le fond, pour que ça constitue une infraction criminelle, ça prend l'actus reus, la mens rea, en matière de fraude, là, là, on n'est pas dans l'IVAC, là, on est vraiment juste dans le Code criminel, là, mais, ce que je veux dire, l'IVAC pourrait demander la réclamation des sommes. Si, manifestement, il y avait un individu qui commettait une fraude organisée par rapport à l'IVAC pour être indemnisé, bien entendu, l'IVAC pourrait porter plainte à un corps de police puis enquêter sur un stratagème frauduleux, mais là on est rendus pas mal plus loin, là, comme ça se fait en matière d'aide sociale...

Mme Labrie : O.K. Je n'en parle pas nécessairement de cette manière-là, mais c'est juste que, tu sais, il y a des gens qui nous ont témoigné, par exemple, qu'en ce moment, quand ils déposent une demande, puis que le régime considère qu'ils ne sont admissibles, puis là qu'ils vont au tribunal pour discuter de cette question-là, ils se sentent comme s'ils étaient accusés d'essayer de frauder le système, quand ils sont devant le tribunal pour essayer de demander d'être indemnisés, puis que l'État plaide qu'ils ne devraient pas être indemnisés, puis que ce n'est pas vrai qu'ils ont été victimes, puis tout ça, eux, ils se sentent comme si on les accusait de fraude. Donc, moi, je ne parle pas nécessairement d'accusations formelles au criminel, de fraude, là, tout ça, ce n'est pas de ça que je parle, mais je veux plutôt dire, tu sais, devant le tribunal qui décide qui est admissible ou pas, puis combien d'aide ils reçoivent, ces gens-là se sentent accusés de fraude par l'État même si ce n'est pas techniquement ça qui est sur papier, là, c'est comme ça qu'ils se sentent.

M. Jolin-Barrette : Bien, deux choses, là, dans le fond, avec le projet de loi n° 84, là, il y a beaucoup de gens qui... Dans le fond, l'IVAC disait : Vous n'êtes pas admissible parce que vous n'êtes pas une personne victime. Beaucoup de cas, c'est ça. Là, maintenant, on change complètement le régime pour dire : On élargit la notion de personne victime. Donc, il y a beaucoup de gens, maintenant, qui vont être qualifiés comme personne victime parce qu'on a vu, plus tôt dans la loi, on élargit vraiment beaucoup.

Après ça... Parce qu'avant vous aviez victime directe ou rien pantoute, donc c'est pour ça que les gens contestaient puis c'est pour ça, notamment, ça fâchait les gens, pour dire : Bien, moi, j'ai subi une atteinte, j'ai subi un préjudice, donc je suis une personne victime. Donc, c'est pour ça qu'elles contestaient la décision de l'IVAC, pour dire : Bien, moi, je ne suis pas une... Pourquoi vous dites que je ne suis pas une victime? J'ai subi une atteinte. Ça fait que c'est pour ça qu'ils allaient à la cour, puis c'est sûr que, dans le cadre de l'application de l'ancienne loi, bien, la définition, elle était beaucoup plus stricte que ce que nous avons aujourd'hui, puis le régime n'était pas pensé pour dire : Bien, il y a la personne victime au centre qui est victime d'une infraction, mais toute sa cellule familiale autour aussi sont des personnes victimes à cause de la conséquence de l'infraction criminelle qui est commise à l'endroit de la personne victime directement, mais ça a des conséquences sur le conjoint, ça a des conséquences sur les parents, ça a des conséquences sur les enfants, ça a des conséquences sur les proches, sur la personne significative. Alors, tout ce noyau familial là, maintenant, va être considéré comme personne victime. Donc, moi, j'entrevois beaucoup moins de contestations parce que, dans le fond, les gens vont être... Justement, on adapte le régime à eux, ils vont être considérés comme des personnes victimes, puis, après ça, on va leur apporter des aides en fonction de la catégorie de victimes de laquelle elles sont.

Avant, c'était noir ou blanc, vous étiez personne victime ou rien pantoute, c'est pour ça qu'il y avait des contestations, puis c'est sûr que ce n'était pas agréable, pour les personnes victimes, de dire : Bien, il faut que je me batte contre l'IVAC, tout ça. Mais il faut comprendre la difficulté de l'ancienne loi, où la loi, c'était ça, puis c'est pour ça aussi qu'il y a des jugements en équité aussi, où est-ce que le juge, même si la loi disait x, il rendait une décision en équité parce qu'il disait : Bien, je vois bien que la personne a souffert, je vois bien que la personne, c'est une personne victime, alors je la déclare personne victime. Mais, au sens de la loi, au sens strict de la loi, ce n'était pas ça qui était visé par le législateur à l'époque, ça fait que c'est pour ça qu'ils ont, comme on dit, tordu la loi pour faire rentrer des personnes victimes dans la définition, alors qu'elles n'en étaient pas. Pas qu'elles n'en étaient pas, des vraies personnes victimes, elles n'en étaient pas au sens de l'ancienne loi. Alors, c'est pour ça qu'avec le nouveau régime on change la mentalité, on donne de l'accompagnement dès le départ, on qualifie les personnes qui ont été victimes avec des aides pour chacun, puis c'est pour ça qu'on élargit le bassin de personnes victimes.

Mme Labrie : Bien, ça, je le comprends très bien, puis probablement qu'il va y avoir effectivement moins de contestations, même s'il risque d'y en avoir encore, là, mais, dans le fond, moi, l'esprit de ma question, c'est ça, tu sais, une personne victime qui fait une demande de qualification, disons qu'elle est qualifiée, parce qu'on n'a pas beaucoup d'exemples où ça pourrait influencer la qualification, mais elle est qualifiée, elle a droit à de l'aide, puis, finalement, il se passe quelque chose, soit dans son dossier médical, ou dans je ne sais pas quoi d'autre du dossier qui change, et elle omet de le signaler aux administrateurs du régime, là, tu sais, je me suis fait répondre tout à l'heure que cette personne-là s'expose à se faire demander de rembourser les sommes. Est-ce que c'est vraiment ça qui va se passer ou elle va plutôt s'exposer à ce que ce soit contesté devant les tribunaux qu'elle n'a pas reçu les bonnes sommes? Si on lui demande unilatéralement par une lettre «Ah! bien, on s'est rendu compte que vous ne nous avez pas avisés de ceci, cela, on vous demande de rembourser les sommes», est-ce que cette personne-là va pouvoir contester?

M. Jolin-Barrette : Le régime, dans le fond... Lorsque l'État rend une décision, c'est couvert par la Loi sur la justice administrative. Donc, il y a un préavis de la décision, il y a la décision qui est rendue, on informe la personne... on appelle ça l'«administré», là, le citoyen, l'administré est informé des recours qu'il a à sa portée, le nombre de jours, tout est bien balisé, là, tous les régimes fonctionnent comme ça quand l'État rend une décision à l'encontre d'un individu.

Mme Labrie : Parfait. Donc, c'est ça qui va s'enclencher s'il advenait que quelqu'un, dans le régime, se rende compte qu'une personne a omis de signaler quelque chose alors que l'article 26 dit qu'il aurait fallu, ils vont l'aviser par écrit, l'informer de ses droits pour contester.

M. Jolin-Barrette : Oui. Puis, dans l'éventualité où, supposons, il y aurait l'article 106 aussi, qui est une disposition pénale... Et là ça dépend, parce qu'on n'est pas dans le cas d'une demande de qualification où est-ce que la situation de la personne change, puis c'est de bonne foi, tout ça, là. Ça, là, on est dans le cas de : «Commet une infraction et est passible d'une amende d'au moins 1 000 $ et d'au plus 5 000 $ quiconque, dans le cadre de la présente loi ou de l'un de ses règlements, fait une déclaration ou transmet un document alors qu'il sait ou aurait dû savoir que la déclaration ou le document contient un renseignement faux ou trompeur.»

Donc, quelqu'un qui abuse du régime volontairement, là, il y a une disposition pénale qui permet de le poursuivre.

Mme Labrie : Au civil.

M. Jolin-Barrette : Non, en matière pénale.

Mme Labrie : Ah! criminel. O.K., pénal...

M. Jolin-Barrette : Non, pas criminel, en matière pénale.

Mme Labrie : Excusez-moi, je...

M. Jolin-Barrette : Oui, bien, dans le fond, le criminel, c'est une infraction qui est prévue au Code criminel, qui est adopté par le Parlement canadien. En matière pénale... Dans le fond, le criminel est ici, le droit criminel est ici, ça fait partie du droit pénal, O.K., puis le droit pénal est par-dessus, englobe le droit criminel. Donc, nous au Québec...

Mme Labrie : Puis le civil, il est où dans le schéma?

• (17 h 10) •

M. Jolin-Barrette : C'est séparé puis c'est un autre volet.

Mme Labrie : Toutes les infractions pénales ne sont pas criminelles.

M. Jolin-Barrette : Exactement.

Mme Labrie : Merci, c'est beau.

M. Jolin-Barrette : Mais toutes les infractions criminelles sont pénales.

Mme Labrie : C'est beau.

M. Jolin-Barrette : Donc, c'est pour ça que le législateur québécois, pour faire respecter ses lois, peut insérer des dispositions de nature pénale. À la fin de pratiquement chacune des lois, il y a des dispositions pénales pour dire : Bien, si vous faites une fausse déclaration, si vous faites un renseignement trompeur ou vous avez... vous êtes passible de...

Mme Labrie : Je comprends.

Le Président (M. Bachand) : Merci. Mme la députée de Notre-Dame-de-Grâce.

Mme Weil : Je reviens un peu juste sur les codes, les types de codes, dont déchéance de l'autorité parentale, c'en serait un, c'est de voir, dans cette disposition, le sens des mots, donc... (Interruption) Oups! excusez-moi. Est-ce qu'il y a une différence entre... Donc, il y a sa qualification... «qui affecte sa qualification ou son droit à une aide financière ou qui peut influencer sur le montant d'une telle aide», donc c'est trois situations différentes. Donc, c'est son statut, qualification, statut quelconque, donc parent ou pas parent, déchéance, je ne sais pas, est-ce qu'il y a quelque chose qui aurait changé?

M. Jolin-Barrette : Son statut de victime.

Mme Weil : Son statut de victime. Son statut de victime. Le droit, qu'est-ce qui pourrait influencer le droit à une aide financière qui serait distincte de sa qualification?

M. Jolin-Barrette : Bien, c'est, exemple, il n'est pas un parent, il est un proche. Il n'est pas un témoin, il est un proche.

Mme Weil : O.K. Il n'aurait pas dit la vérité ou il aurait été confus par rapport à l'information qu'il aurait donnée dans la première... en première instance.

M. Jolin-Barrette : Ça pourrait arriver.

Mme Weil : Puis là il décide de dire la vérité, c'est un peu ça. «Qui peut influer sur le montant d'une telle aide», donc son état de santé, notamment.

M. Jolin-Barrette : Exactement.

Mme Weil : Et le règlement viendra vraiment juste précisément sur «avise le ministre selon les conditions, les normes et les modalités prescrites», donc c'est comment il devra aviser, sur le comment il devra aviser le gouvernement.

M. Jolin-Barrette : Exactement.

Le Président (M. Bachand) : M. le député de LaFontaine.

M. Tanguay : ...donc, à la fin de l'intervention du ministre, il a fait référence à l'article 106 et 107. C'est nouveau, ça, en matière d'IVAC, hein?

M. Jolin-Barrette : 106, 107?

M. Tanguay : Oui. Je ne le voyais pas, moi, en toute transparence, M. le Président, je ne voyais pas de clause de nature pénale pour... tant dans la loi de l'indemnisation que dans la loi de l'aide. Puis on détrompera si j'ai tort, mais c'est nouveau, ça : «Commet une infraction et est passible d'une amende d'au moins 1 000 $ [ou] d'au plus 5 000 $ quiconque, dans le cadre de la présente loi...» Parce que tantôt avec l'échange avec la collègue de Sherbrooke, quelles pourraient être les conséquences à 26, bien, les conséquences à 26, c'est : 106, il pourrait y avoir entre 1 000 $ et 5 000 $, «quiconque, dans le cadre de la présente loi ou d'un de ses règlements, fait une déclaration ou transmet un document alors qu'il sait ou aurait dû savoir que la déclaration ou le document contient un renseignement faux ou trompeur».

Évidemment, ça pourra s'appliquer, puis le ministre, je pense, l'a confirmé, ça pourra s'appliquer à 26, ça. Autrement dit, si vous ne corrigez pas le tir, vous savez que le document déposé il y a un mois, il n'est plus bon, là.

M. Jolin-Barrette : Bien, ça pourrait s'appliquer là ou à d'autres articles aussi.

M. Tanguay : Non, tout à fait, oui, oui, mais là ça pourrait s'appliquer. Pourquoi introduire ça? Pourquoi on en a besoin? On va le faire, là, à 106, 107, là. Pourquoi on a besoin de ça? On n'avait pas ça avant.

M. Jolin-Barrette : D'avoir une disposition pénale?

M. Tanguay : Oui.

M. Jolin-Barrette : Bien, il faut, entre autres, éviter... Dans le fond, pour assurer l'intégrité du régime, il faut s'assurer aussi d'avoir un levier, il faut s'assurer d'avoir... d'éviter des cas où il pourrait y avoir des individus qui soumettraient des demandes sachant qu'elles sont fausses et inavérées ou inexactes.

M. Tanguay : Est-ce qu'on règle un réel problème, là? Est-ce que le ministre a des cas où il y avait des statistiques qui disaient : Là, là, il y a pas mal plus de fraudes dans les dernières années, il faut 106, 107, là? On essaie-tu de régler un problème ou...

M. Jolin-Barrette : On va vérifier si on a des données là-dessus.

M. Tanguay : Vous allez vérifier? Excusez-moi...

M. Jolin-Barrette : Si on a des données sur le nombre... Bien, c'est difficile parce que la disposition n'était pas là, ça fait que...

M. Tanguay : Non, c'est ça. Ça fait que je me dis : On règle-tu un problème ou on en invente un puis on essaie de le régler?

M. Jolin-Barrette : Bien, dans tout régime public, hein, par rapport à l'État, c'est de l'argent public, donc il faut avoir les outils pour s'assurer que, s'il y a de l'abus dans un régime qui est l'argent des Québécois, bien, on ait des mécanismes pour faire en sorte d'éviter qu'il n'y ait pas de conséquences à commettre des gestes, des actions qui ne sont pas honnêtes.

M. Tanguay : En tout cas, on s'entend, mais on fera le débat à 106, 107, M. le Président, mais si les données... puis j'ai hâte de voir les statistiques et les données du ministère par rapport aux cas de fraude ou «aurait dû savoir que la déclaration ou le document contient un renseignement faux ou trompeur». Il faut toujours s'assurer aussi que la mise en application ou, en tout cas, ce qui sera fait de cela va tenir compte, je dirais ça de même, de citoyens et de citoyennes qui sont dans des situations qui, dans bien des cas, pour eux, pourraient être difficiles de savoir si... auraient dû savoir que la déclaration avait un renseignement trompeur, là, ou inexact, là, dans ces zones-là. Alors, on fera le débat à 106, 107, mais, dans l'intervalle, avant qu'on se rende à 106, 107, si on peut avoir les statistiques qui justifieraient cette nouvelle approche-là.

Le Président (M. Bachand) : Merci. M. le ministre.

M. Jolin-Barrette : Alors, en vertu de 119.9 de la loi sur l'indemnisation, on prévoit déjà des dispositions qui visent à faire en sorte : «Quiconque omet de produire une déclaration requise par la commission ou fait ou produit une déclaration fausse ou inexacte à la commission, ou est partie à une convention contraire à la présente loi ou viole une prescription de la présente loi ou d'un règlement, pour la violation desquels aucune peine n'est spécialement prévue, commet une infraction et est passible

«a) dans le cas d'un individu, d'une amende d'au moins 100 $;

«b) dans le cas d'une personne morale, d'une amende d'au moins 300 $.»

Donc, c'est un recours à la disposition pénale. Donc, c'est la Loi sur les accidents du travail. Et dans le cadre de la Loi sur l'indemnisation des victimes d'actes criminels, donc, le régime actuel, il y a une mesure de renvoi qui fait référence à cette disposition-là.

M. Tanguay : Là, le ministre m'a cité 119.9. Qu'il me rassure, il ne parle de la loi de 1993 qui n'est pas en vigueur, là?

M. Jolin-Barrette : Non, c'est l'ancienne loi...

M. Tanguay : Parce qu'il n'y a pas 119 articles, là, à la loi d'indemnisation, il y en a 25.

Une voix : ...sur les accidents du travail.

M. Jolin-Barrette : C'est ça. Donc, la Loi sur les accidents du travail qui date de 1930, c'est ça? C'est-tu 1930?

Une voix : ...

M. Jolin-Barrette : De 1931.

M. Tanguay : O.K. Bien, plus simplement, et ça, je le sais que ça...

Des voix : ...

M. Jolin-Barrette : Donc, le régime de l'IVAC, O.K., la loi sur l'IVAC, c'est l'article 15 : «Les dispositions de la Loi sur les accidents du travail (chapitre A-3), à l'exception du paragraphe 1° de l'article 3 qui ne sont pas incompatibles avec la présente loi s'appliquent, compte tenu des adaptations nécessaires.»

Donc ça, c'est dans la Loi sur l'indemnisation des victimes d'actes criminels, ça fait référence à la Loi sur les accidents du travail qui date de 1931. Donc, l'infraction pénale se retrouvait là-bas, 15.

M. Tanguay : C'est parce que là...

M. Jolin-Barrette : À l'article 119.9 de la Loi sur les accidents du travail. Donc, c'est un mécanisme de renvoi. Donc, il y avait une disposition pénale, mais vous conviendrez avec moi que les montants étaient peu élevés à l'époque.

M. Tanguay : Puis là j'essaie de trouver, j'ai le...

Le Président (M. Bachand) : Juste en attendant, Mme la députée de Sherbrooke, s'il vous plaît.

Mme Labrie : Oui. Bein, en fait, comme on vient de nous mentionner que la disposition existait déjà en lien avec l'autre loi, est-ce qu'on sait...

Une voix : On fait de l'historiographie législative.

Mme Labrie : Oui, c'est ça. D'ailleurs, ça ne devrait pas être possible qu'il y ait des lois qui n'aient pas... qui datent d'aussi longtemps sans...

M. Jolin-Barrette : Ah! mais il y en a plein.

Mme Labrie : Oui, je sais, ça me dérange.

M. Jolin-Barrette : Il y en a plein, écoutez, juste vous dire, puis je fais juste un aparté là-dessus, la loi préférée du député de LaFontaine, c'est la Loi constitutionnelle de 1867, puis elle date de plus longtemps que ça.

Mme Labrie : Oui, ça vaudrait la peine de la mettre à jour.

M. Jolin-Barrette : Ah! bien là, on part. Ça, on ne pensait pas avoir un beau mardi après-midi comme ça.

M. Tanguay : Il y a mise à jour puis il y a abrogation.

Mme Labrie : Un beau mandat pour vous. Je voulais juste savoir si on en a des... Est-ce qu'il y en a eu des cas où ça a été appliqué, là? Des dispositions pénales, est-ce que ça arrive souvent? Est-ce qu'on a des données là-dessus? C'est un peu ça que mon collègue demandait, là, mais puisqu'on vient de nous dire que ça existe, tu sais.

M. Tanguay : Alors, la DGIVAC nous dit qu'ils n'appliquent pas la disposition pénale.

Mme Labrie : Ils ne l'appliquent pas, mais là il la... on vient en créer ici, donc l'intention, c'est maintenant de l'appliquer.

M. Jolin-Barrette : Bien, en fait, c'est d'avoir l'outil pour l'appliquer. Ça ne veut pas dire qu'on va l'appliquer, mais, comme dans toute loi, c'est important d'avoir une disposition pénale parce que, si, à un moment donné, arrive une circonstance où il y a des cas qui n'ont pas d'allure, il faudrait l'appliquer.

Mme Labrie : Mais là il n'y avait jamais ça des cas qui n'avaient pas d'allure, parce qu'on nous dit qu'ils ne l'appliquaient pas.

M. Jolin-Barrette : Bien, écoutez, les montants d'amende, c'était 100 $ puis 300 $.

Mme Labrie : Donc, il y avait une estimation que ça ne valait pas la peine de faire des démarches pour ces montants-là, c'est ça? O.K.

Le Président (M. Bachand) : Merci. Interventions? M. le député de LaFontaine.

M. Tanguay : Oui, c'est ça, alors on pourra demander au ministre, c'est ça, les statistiques par rapport à...

M. Jolin-Barrette : Il y a... Ils ne l'appliquaient pas.

• (17 h 20) •

M. Tanguay : Ils ne l'appliquaient pas, mais les... O.K. Donc, ils ne «computaient» aucune statistique à cet effet-là, on est dans le noir total, là. S'ils ne l'appliquaient pas, mais, aujourd'hui, on veut l'appliquer, est-ce qu'on légifère sans avoir aucune statistique?

M. Jolin-Barrette : Bien non, mais, ce que je veux dire, on utilise un nouveau régime, donc on remplace un nouveau régime, il faut avoir une disposition pénale que, s'il y a des circonstances qui font en sorte que... ou il y a des événements qui nécessiteraient une disposition pénale, on puisse l'utiliser, c'est un outil à la portée du régime.

M. Tanguay : Donc, on l'appliquait puis ça existait en vertu de la loi. Là, ça va exister en vertu de la loi, mais, contrairement au régime actuel, le nouveau régime, le ministre annonce qu'on va l'appliquer, là.

M. Jolin-Barrette : Bien, ce n'est pas ça que je dis, je dis que, dans tout régime, notamment public, où il y a des fonds publics, c'est important d'avoir des dispositions de nature pénale qui, si les circonstances s'y prêtent... Parce que, vous savez, il y a toujours... Le choix d'entamer une poursuite pénale appartient au Directeur des poursuites criminelles et pénales, là, alors il faut évaluer au cas par cas, là, ce n'est pas parce qu'on fait une dénonciation qu'automatiquement ça entraîne une poursuite pénale, mais, moi, je pense que, comme responsable d'un régime, c'est important d'avoir des outils, si jamais il y a de la fraude ou si jamais il y a quoi que ce soit de problématique, bien, qu'il y ait une disposition pénale associée à ça.

Le Président (M. Bachand) : Mme la députée de Sherbrooke, s'il vous plaît.

Mme Labrie : Oui. Je veux juste revenir sur un commentaire que le ministre a fait concernant les montants qui étaient très faibles, là, à l'époque, dans les dispositions pénales qui n'étaient pas appliquées, justement, parce que les montants étaient trop faibles. Ça serait dommage pour lui que, dans quelques dizaines d'années, quelqu'un passe le même commentaire sur sa propre loi parce qu'il n'y a pas, à l'article 106, rien qui prévoit que ça va être indexé, ces montants-là. Donc, peut-être, d'ici à ce qu'on soit rendu à l'article 106, on pourrait réfléchir à un amendement pour prévoir que ce sera indexé.

Le Président (M. Bachand) : Merci. Interventions sur l'article 26? M. le député de LaFontaine.

M. Tanguay : Non, c'est ça, on fera le débat à 106, 107. Je suis certain qu'on va avoir de bons débats à 106, 107. Merci.

Le Président (M. Bachand) : Merci. S'il n'y a pas d'autre intervention, nous allons procéder à la mise aux voix. Mme la secrétaire, s'il vous plaît.

La Secrétaire : Pour, contre, abstention. M. Jolin-Barrette (Borduas)?

M. Jolin-Barrette : Pour.

La Secrétaire : Pour les membres du groupe parlementaire formant le gouvernement, M. Lemieux (Saint-Jean)?

M. Lemieux : Pour.

La Secrétaire : Pour les membres de l'opposition officielle, M. Tanguay (LaFontaine)?

M. Tanguay : pour.

La Secrétaire : Mme Labrie (Sherbrooke)?

Mme Labrie : Pour.

La Secrétaire : Mme Hivon (Joliette)?

Mme Hivon : Pour.

La Secrétaire : M. Bachand (Richmond)?

Le Président (M. Bachand) : Abstention. Donc, l'article 26 est adopté. Merci beaucoup. M. le ministre, s'il vous plaît.

M. Jolin-Barrette : Oui. 27, M. le Président. Donc, 27 : «Dès la présentation d'une demande de qualification, le ministre est de plein droit subrogé aux droits de la personne victime jusqu'à concurrence du montant qu'il pourra être appelé à lui verser. Il peut, en son nom ou en celui de la personne victime, continuer ou exercer une poursuite civile.

«Si la personne victime choisit de se prévaloir d'une aide financière prévue au présent titre, les ententes [et] les compromis qui peuvent intervenir entre les parties relativement à la poursuite civile ou au droit à [une] telle poursuite sont sans effet jusqu'à ce qu'ils aient été ratifiés par le ministre; le paiement du montant convenu ou adjugé ne peut être fait que de la manière que le ministre indique.

«La personne qui prive volontairement le ministre de son recours subrogatoire doit rembourser le montant de l'aide financière reçue du ministre. Ce dernier peut recouvrer cette dette dans les trois ans de la privation du recours.

«Un montant recouvré en vertu du présent article est versé au fonds consolidé du revenu.»

Donc, cette disposition prescrit une subrogation en faveur du ministre pour lui permettre de récupérer, auprès de l'auteur de l'infraction criminelle, toute somme qu'il paierait à une personne victime en vertu de la présente loi.

Et je crois que j'ai un amendement à déposer, et il se lit ainsi, M. le Président. Je crois qu'il vous sera communiqué par les Internet, M. le Président. Alors, l'amendement à l'article 27 : À l'article 27 du projet de loi :

1° remplacer, dans le premier alinéa, «poursuite civile» par «demande en justice»; et

2° remplacer, dans le deuxième alinéa, «la poursuite civile ou au droit à telle poursuite» par «une demande en justice ou au droit à telle demande».

Commentaires : L'amendement remplace l'expression «poursuite civile» par «demande en justice» afin de se conformer à la terminologie du Code civil.

Donc, l'amendement tel qu'intégré se lirait ainsi :

«27. Dès la présentation d'une demande de qualification, le ministre est de plein droit subrogé aux droits de la personne victime jusqu'à concurrence du montant qu'il pourra être appelé à lui verser. Il peut, en son nom ou en celui de la personne victime, continuer ou exercer une demande en justice.

«Si la personne victime choisit de se prévaloir d'une aide financière prévue au présent titre, les ententes ou les compromis qui peuvent intervenir entre les parties relativement à une demande en justice ou au droit à [une] telle demande sont sans effet jusqu'à ce qu'ils aient été ratifiés par le ministre; le paiement du montant convenu ou adjugé ne peut être fait que de la manière que le ministre indique.

«La personne qui prive volontairement le ministre de son recours subrogatoire doit rembourser le montant de l'aide financière reçue du ministre. Ce dernier peut recouvrer cette dette dans les trois ans de la privation du recours.

«Un montant recouvré en vertu du présent article est versé au fonds consolidé du revenu.»

Le Président (M. Bachand) : Merci. L'amendement est sur Greffier. Interventions? Mme la députée de Sherbrooke, oui.

Mme Labrie : Oui. Si je me souviens bien, ça, c'est un article pour lequel on a des gens qui nous ont dit, en commission, que ça pouvait inciter des victimes, notamment de violence conjugale, à ne pas se prévaloir du régime, parce que l'idée que l'agresseur pourrait être poursuivi, ça les... ça leur fait craindre d'en subir des représailles. Donc j'aimerais savoir ce que le ministre a à dire là-dessus. Moi, personnellement, ça me préoccupe, là, de voir qu'on ne prévoit rien par rapport à ça, surtout que je me souviens que le ministre a dit que c'était très rare qu'il se prévalait de ce droit-là ou même que ça n'arrivait pratiquement jamais si j'ai bien compris. Est-ce que c'est peut-être possible de prévoir une exception pour les situations de violence conjugale, pour s'assurer qu'on ne mettra pas les victimes dans une situation où elles pourraient craindre que, si elles demandent de l'aide au régime, leur ancien conjoint en sera avisé et que leur sécurité pourrait être compromise?

M. Jolin-Barrette : Oui. La réponse à cette question-là, c'est : je comprends l'insécurité des victimes relativement au recours subrogatoire. Et le recours va être utilisé avec la plus grande sensibilité, et je n'ai pas l'intention d'autoriser les recours subrogatoires qui vont impliquer les cas de violence conjugale et dans les cas d'agressions sexuelles non plus, dans les cas les plus limités.

Cela étant, je souhaite que la disposition soit là et autorise le ministre tout de même à avoir cet outil-là parce qu'il pourrait d'aventure y avoir des situations particulières où des personnes victimes nous diraient : Allez-y. Tu sais, ça pourrait arriver.

Puis l'autre élément aussi, à partir du moment où l'État indemnise les personnes victimes, le recours subrogatoire est là pour faire en sorte que le régime est supporté par l'ensemble des citoyens québécois aussi, donc c'est normal que l'État puisse utiliser le recours subrogatoire. Il était très, très peu utilisé, là, je pense que c'est 23 fois qu'il avait été utilisé depuis l'entrée en vigueur de la loi, le recours subrogatoire, puis, dans le fond, l'IVAC ne l'utilisait pas.

Alors, moi, j'ai l'intention de donner des lignes directrices sur dans quel cas est-ce qu'on va utiliser le recours subrogatoire, puis soyez certain, M. le Président, que, dans les cas d'agressions sexuelles, puis dans les cas de violence conjugale, il y aura des lignes directrices très particulières pour ne pas faire en sorte, justement, de créer une situation d'insécurité pour les victimes, mais je souhaite avoir la disposition dans le projet de loi pour pallier à toutes les circonstances éventuelles... Donc, c'est pour ça que je ne veux pas exclure d'emblée, dans la loi, les cas de violence conjugale et de violence sexuelle.

Le Président (M. Bachand) : Allez-y.

Mme Labrie : J'entends bien l'intention du ministre, est-ce qu'à ce moment-là on peut prévoir dans la loi que, dans les cas de ces types de violences là, qui sont des violences intimes particulières, ça prend l'autorisation de la victime pour intenter le recours? Donc, ça permettrait que la volonté du ministre soit respectée, que ça puisse toujours être possible, même pour des exceptions de ce genre de cas là, mais, avec l'autorisation de la personne, ça pourrait tout à fait arriver que quelqu'un dise : Allez-y, ça ne me dérange pas.

M. Jolin-Barrette : On va vérifier avec les équipes relativement à votre suggestion.

Mme Labrie : Merci.

Le Président (M. Bachand) : Merci. Interventions? Monsieur... Ça va?

M. Tanguay : Sur l'amendement, non. Après, il y en aura d'autres.

• (17 h 30) •

Le Président (M. Bachand) : O.K. Donc, est-ce qu'il y a d'autres interventions sur l'amendement? S'il n'y a pas d'autre intervention, nous allons procéder à la mise aux voix. Mme la secrétaire, s'il vous plaît.

La Secrétaire : Pour, contre, abstention. M. Jolin-Barrette (Borduas)?

M. Jolin-Barrette : Pour.

La Secrétaire : Pour les membres du groupe parlementaire formant le gouvernement, M. Lemieux (Saint-Jean)?

M. Lemieux : Pour.

La Secrétaire : Pour les membres de l'opposition officielle, M. Tanguay (LaFontaine)?

M. Tanguay : Pour.

La Secrétaire : Mme Labrie (Sherbrooke)?

Mme Labrie : Pour.

La Secrétaire : Mme Hivon (Joliette)?

Mme Hivon : Pour.

La Secrétaire : M. Bachand (Richmond)?

Le Président (M. Bachand) : Abstention. Donc, l'amendement à l'article 27 est adopté. Donc, retour à l'article 27 tel qu'amendé. M. le député de LaFontaine, s'il vous plaît.

M. Tanguay : Oui. M. le Président. Dans le cas des demandes en justice, bien, on aurait un amendement qui allait dans le sens du souhait qui a été exprimé. On pourrait l'envoyer par Greffier si vous pouvez suspendre une minute, là.

Le Président (M. Bachand) : Parfait. Voulez-vous en faire la lecture ou vous allez...

M. Tanguay : Je ne l'ai pas, là. Vous allez l'avoir sur Greffier, M. le Président.

Le Président (M. Bachand) : O.K. Alors, on va suspendre quelques instants. Merci.

(Suspension de la séance à 17 h 31)

(Reprise à 17 h 39)

Le Président (M. Bachand) : À l'ordre, s'il vous plaît! La commission reprend ses travaux. M. le député de LaFontaine, s'il vous plaît.

M. Tanguay : Oui, M. le Président. Alors, amendements en cours. Lorsque vous cliquez sur le lien, il y a une fenêtre qui s'ouvre, et vous pouvez lire ce qui suit, l'amendement. Article 27 : Ajouter, à la fin de l'article 27 du projet de loi, l'alinéa suivant :

«Le ministre doit obtenir le consentement de la personne victime si la subrogation concerne des cas de violence à caractère sexuel non consensuel, de violence subie dans l'enfance et de violence conjugale.»

Ça, ça fait écho à ce qu'est venue dire l'Association des juristes progressistes. Et c'est d'ailleurs la rédaction des juristes progressistes qui nous soumettaient cet amendement-là. Ça fait écho également aux préoccupations de Me Michaël Lessard qui, lui, demandait à ce qu'il y ait une subrogation possible sans consentement... pas qu'il disait sans consentement, mais il ne proposait pas sans consentement, mais lui disait : Il faudrait tenir compte du processus de guérison de la personne victime.

• (17 h 40) •

Alors, entre les deux préoccupations et les deux solutions, celle... la même préoccupation de Me Lessard qui disait : Bien, ajoutez le critère de guérison, processus de guérison de la personne victime, on préférerait la proposition, même préoccupation, mais proposition autre d'amendement de l'Association des juristes progressistes, et là, qui demandait carrément, puis c'est leur amendement, là, ce n'est pas le mien, c'est leur amendement, d'obtenir le consentement pour ces trois éléments-là. Ça a été également une préoccupation exprimée par le Regroupement des maisons pour femmes victimes de violence conjugale et les RQCALACS qui recommandaient également de faire en sorte que le droit de subrogation puisse être limité par rapport aux victimes en lien avec les victimes de violence sexuelle et de violence conjugale.

Alors, la rédaction, M. le Président, pourrait être autre également. On a considéré, mais ça, c'est la rédaction de l'Association des juristes progressistes, on aurait pu considérer, puis le ministre pourrait le sous-amender : «Le ministre doit obtenir le consentement de la personne victime si la subrogation concerne des cas de violence sexuelle», qui pourrait être encore plus large et faire... ne pas faire écho nécessairement à «non consensuel». Donc, ça pourrait être encore plus large. Alors, l'amendement de l'Association des juristes progressistes est sur la table. Et je sais que le ministre, suite à l'intervention de la collègue de Sherbrooke, devait faire des vérifications. On aimerait ça savoir s'il y a possibilité, dans ces cas très précis là, puis je sais qu'un peu plus tôt dans nos débats il a fait écho de la subrogation... puis dire : Bien, écoutez, par rapport aux violences à caractère sexuel, il va falloir être excessivement prudent, si c'est de l'intention du ministre à ce que cette prudence-là soit systématique, mais, si ce n'est pas dit dans la loi, on ne pourra pas prétendre à une application, à une prudence systématique.

En le mettant là, je pense que... Honnêtement, M. le Président, on a entendu les préoccupations des victimes, et des femmes, et des hommes qui représentent les victimes. Ça, c'est une épée de Damoclès. Puis, si ce n'est pas dans la loi, ça va demeurer une épée de Damoclès, une possibilité. Au-delà de l'application bienveillante qui en sera faite, ce sera une épée de Damoclès. Si c'est dit dans la loi, ouf! parfait, ça pourra m'aider à dénoncer, mais, si je ne dénonce pas, au moins, ça pourra m'aider à aller au niveau de l'IVAC et avoir cette assurance-là que je ne serai pas, par exemple, obligé d'aller témoigner, là.

Le Président (M. Bachand) : Merci beaucoup. M. le ministre, s'il vous plaît.

M. Jolin-Barrette : Oui. J'ai réfléchi à tout ça, j'ai consulté les équipes du ministère de la Justice également. Alors, en lien avec l'article 23, puis avec l'article 27, puis l'amendement qui est proposé par le député de LaFontaine, je ne l'inscrirai pas dans la loi. Par contre, ce qu'on va faire, c'est qu'on va mettre une directive de la part du Procureur général relativement au... des directives administratives relativement à ce qui doit être intenté ou non. Et également on va mettre une pratique pour que tous les cas... Dans le fond, avant d'entamer un recours subrogatoire, on va consulter la personne victime, donc pas juste en matière d'agression sexuelle, pas juste en matière de violence conjugale, mais pour tous les types de dossiers relativement aux infractions dans le cas d'un... quand on va exercer en recours subrogatoire. Là, on va y aller par voie administrative.

Le Président (M. Bachand) : M. le député.

M. Tanguay : Mais pourquoi ne pas le mettre dans la loi?

M. Jolin-Barrette : Parce qu'on pourrait se retrouver face à des situations où... exemple, dans un cas d'homicide, à qui est-ce qu'on demande l'autorisation d'entamer le recours subrogatoire ou non? Un homicide, en cas de violence conjugale, à ce moment-là, il y a plusieurs personnes victimes. Il y a la victime directe qui est décédée, ça fait qu'elle, elle ne peut plus émettre de consentement, mais, après ça, il y a plusieurs proches, il y a plusieurs personnes victimes. Avec la nouvelle loi, ça fait en sorte que vous allez avoir les enfants, les parents, qui vont être indemnisés, le proche significatif, le proche, les personnes significatives, donc l'ensemble du noyau aussi. Donc, ça amène ces questions-là aussi.

M. Tanguay : Mais comment ça serait plus facile de rédaction dans une directive que ce n'est pas facile ou suffisamment facile de rédaction dans la loi? Ça va être le même défi.

M. Jolin-Barrette : Bien non, mais parce qu'on va être face à des situations différentes où... dans le cadre où je souhaite avoir une certaine souplesse en tant qu'administrateur du régime, puis pour pouvoir s'ajuster également. Puis il va arriver certains cas où, si la victime n'est plus là, ou elle est disparue, ou quoi que ce soit, il faut avoir une certaine souplesse. Puis, dans le fond, ça ne se fait pas actuellement dans l'État québécois, mais je vais le faire par ligne directrice.

M. Tanguay : O.K. Le ministre a déjà annoncé son intention d'abolir, d'abroger l'article 7 du projet de loi n° 84. Ça veut donc dire que, dans tous les cas d'espèce, jamais, dans tous les cas d'espèce, puis le ministre pourra me détromper si j'ai tort ou confirmer, dans tous les cas d'espèce, jamais il ne sera exigé d'une victime, lorsque le procureur général utilise son pouvoir de subrogation, que la victime , dans tous les cas d'espèce, ne sera jamais obligée de témoigner dans le contexte de l'exercice d'une subrogation. J'ai essayé d'étirer autant que je pouvais, là. Le texto était trop long.

Le Président (M. Bachand) : M. le ministre.

M. Jolin-Barrette : Excusez-moi, pouvez-vous répéter?

M. Tanguay : Alors, est-ce que vous... Le ministre a annoncé, M. le Président, que l'article 7 va être abrogé...

M. Jolin-Barrette : Oui.

M. Tanguay : ...«devoir de coopération», tout ça. Donc, il n'y a plus d'interprétation. Or, «coopération», ça veut-tu dire... Parce qu'à un moment donné le ministre... Bien, ça ne voudra pas dire... ou il avait dit : C'est clair que «coopération», ça ne veut pas dire que vous devez aller dénoncer à la police, mais là... Bon. Alors, «coopération», ça voudra assurément... n'existera plus. Mais est-ce que ça veut dire, si on enlève le 7, et, à l'article 27, si ce n'est pas marqué, est-ce que le ministre est d'accord, puis de l'affirmer en nos débats présentement, que, dans tous les cas d'espèce, jamais une victime ne sera obligée de témoigner dans le contexte de l'utilisation par le Procureur général de son droit de subrogation?

Le Président (M. Bachand) : M. le ministre.

M. Jolin-Barrette : Bien, dans le fond, notre droit de subrogation, dans le fond, on va l'exercer, il n'y a pas d'obligation, avec la personne, de collaborer. Par contre, on va lui demander, avant d'entamer la poursuite : Voici, nous avons l'intention d'entamer une poursuite subrogatoire, quel est votre avis? On va vérifier avec la personne victime.

M. Tanguay : O.K. Et la personne pourrait, M. le Président... Parce qu'en matière civile, pas comme en matière criminelle... en matière criminelle, vous pouvez décider de ne pas témoigner si vous êtes la victime. Vous n'êtes pas obligé de témoigner au procès. Mais, en matière civile, si vous avez un subpoena, vous devez répondre aux questions, vous êtes obligé, sinon c'est «contempt of court», c'est outrage au tribunal.

Alors, quelle assurance avons-nous, dans tous les cas d'espèce, à part ce que dit le ministre, puis je suis prêt à prendre sa parole, là, mais, dans tous les cas d'espèce, une personne ne sera jamais obligée de témoigner dans un recours civil subrogatoire?

M. Jolin-Barrette : Bien, si la personne victime ne veut pas collaborer, on va évaluer les différentes options, parce que faire la preuve sans le témoin ou avec un témoin hostile, ce n'est pas très bonne idée.

M. Tanguay : O.K. Sans dire... O.K. Là, on peut mettre l'endiguement à deux niveaux. Je ne pense pas que l'on doive... Puis le ministre dit : Il y a des cas, au-delà de violence à caractère sexuel, conjugale, puis dans la jeunesse, il y a des cas de meurtre où ça peut être délicat, puis, effectivement, c'est plus large que ces trois aspects-là, plus large que l'amendement. Je ne pense pas que l'on puisse dire, puis mettre l'endiguement là, que l'on puisse dire : Bien, dans tous les cas d'espèce, ça va prendre le consentement, parce que, dans certains éléments, les gens pourraient donner... pas de consentement, puis, finalement, ça ne serait absolument pas justifié à sa face même. Mais est-ce que l'on peut mettre, dans la loi... c'est là où on pourrait mettre l'endiguement, que, dans l'exercice... Puis l'amendement pourrait être rédigé de même : «Dans un contexte d'exercice d'un pouvoir subrogatoire, en aucun cas la victime ne sera obligée de témoigner.» Est-ce qu'on pourrait le mettre dans la loi? Et là on est en aval du consentement, on est en aval, on est plus bas que le consentement.

M. Jolin-Barrette : Non.

Des voix : ...

M. Jolin-Barrette : Effectivement, à juste titre, on me rappelle qu'elle peut être assignée par l'autre partie. Donc, lorsqu'on va évaluer tout ça, pour aller récupérer les sommes, on va évaluer l'ensemble du dossier à la lumière de la personne victime.

M. Tanguay : Mais la loi pourrait pourrait faire en sorte que, dans ce contexte-là d'exercice de recours subrogatoire, l'autre partie ne puisse pas le convoquer.

M. Jolin-Barrette : Non, c'est la défense pleine et entière de la personne.

M. Tanguay : Parce qu'à un moment donné il faut le mettre dans la loi.

M. Jolin-Barrette : On se retrouve dans un recours civil où on empêcherait la personne de faire sa preuve, l'autre partie de faire sa preuve.

M. Tanguay : Oui. Alors, c'est pour ça...

M. Jolin-Barrette : Le recours subrogatoire, là, c'est pour ça que je vous dis qu'il faut l'utiliser avec parcimonie et dans des circonstances très particulières relativement à l'impact de la victime. Donc, on va analyser chacun des cas, il va y avoir des lignes directrices, puis on va analyser chacune des situations.

Le Président (M. Bachand) : J'aurais la députée de Sherbrooke, s'il vous plaît.

• (17 h 50) •

Mme Labrie : Bon, je vais revenir sur la question de l'exercice... du pouvoir subrogatoire, parce que, pour moi, le fait de témoigner, c'est autre chose, là. Je ne dis pas que c'est moins important, mais, je veux dire, c'est deux choses différentes, là. Une victime, en ce moment, on le sait, peut décider de ne pas porter plainte parce qu'elle ne veut pas que l'autre soit au courant qu'elle a porté plainte. C'est quelque chose qui arrive probablement tous les jours, là. Il y a des victimes qui ne portent pas plainte parce qu'elles ne veulent pas que l'autre sache qu'elles ont porté plainte. Elles ont peur pour leur vie sinon... pour leur vie ou pour toutes sortes d'autres types de représailles dont on a déjà discuté ici, notamment l'atteinte aux biens. Mais j'ai un problème avec ce que le ministre a dit parce que même si j'entends son intention, ce qu'il dit qu'il veut faire dans sa directive, c'est de consulter les personnes victimes, et consultation, c'est mieux que rien, là, mais on sait ce que ça vaut, là. Ça ne donne pas non plus le pouvoir à la personne victime de dire : Non, je ne veux pas que vous le fassiez. Est-ce que c'est possible d'avoir plutôt une directive qui va nécessiter l'autorisation de la personne victime? Parce que là, le ministre dit qu'il va envoyer la directive de consulter, mais une personne victime pourrait tout à fait dire : Je ne suis vraiment pas à l'aise, j'ai peur, puis quelqu'un pourrait quand même décider d'aller de l'avant, là. Si c'est juste une consultation de la personne victime, moi, je trouve ça problématique.

Le simple fait que ça ne soit pas écrit puis que la possibilité existe que ce pouvoir-là soit exercé, on le sait qu'en ce moment, les groupes nous l'ont dit, ça empêche des victimes d'aller chercher de l'aide. Ça fait que, si on ne l'inscrit pas dans la loi, puis si on fait juste dire, s'engager verbalement à ce qu'il y ait éventuellement une directive dans laquelle on va prévoir consulter, la possibilité théorique va toujours exister que le recours puisse être intenté sans que la victime y ait consenti. Puis ça, dans la mesure où on sait déjà que ça empêche des victimes de porter plainte, moi, je crains que ça va les empêcher d'aller chercher de l'aide aussi, puis ça ne favorisera pas leur rétablissement, alors qu'on partage tous ici cette intention-là.

Ça fait que moi, je m'inquiète quand même, même si je vois que le ministre est sensible à cet enjeu-là, là. Le problème va rester entier. Même avec l'engagement verbal qu'il prenait tout à l'heure, il va quand même y avoir des victimes qui vont craindre que ce recours-là soit exercé. Puis, en mon sens, c'est des craintes vraiment légitimes, là. On peut imaginer très facilement qu'une personne qui a commis de la violence envers une autre, qui se fait tout d'un coup poursuivre par l'État pour recouvrir des sommes en lien avec ça, pourrait tout à fait décider de se venger contre la personne qui est allée chercher... soit porter plainte ou soit chercher de l'aide au régime.

Ça fait que moi, je trouve que c'est des craintes très légitimes, je veux qu'on réponde à ces craintes-là, puis je ne suis pas convaincue que la réponse du ministre va permettre d'éviter ces situations-là.

Le Président (M. Bachand) : Merci. M. le ministre.

M. Jolin-Barrette : Oui. Bien, comme je le dis, j'entends très bien, et c'est pour ça que les lignes directrices que je vais donner relativement au procureur, puis, en plus, dans le cadre du rôle de Procureur général, dans le... donc c'est en lien avec le ministre de la Justice, ça va être très clair relativement aux modalités d'encadrement qu'il va y avoir relativement aux recours.

Et la démonstration, c'est que, depuis le début, il y a eu 23 cas, là, de recours subrogatoire, donc ce n'est pas quelque chose qui est toujours utilisé, même rarement, je vous dirais, parce qu'on indemnise des milliers de personnes aussi. Donc, on va s'assurer de faire en sorte que ça soit bien balisé et bien encadré, comme c'est le cas pour tous les autres recours de l'État.

Mme Labrie : Mais c'est que c'est déjà rarement, puis je le crois, là, le ministre quand il me dit ça, mais l'état actuel des choses, c'est qu'en ce moment même ça empêche des victimes de réclamer justement à cause de ça. Donc, le problème, il existe déjà, tu sais, je ne suis pas en train d'avoir peur d'un nouveau problème qui va se créer. On nous a dit que ça existait déjà des victimes qui disent : Ah! ça, j'ai trop peur de ça. Même si c'est extrêmement rare que c'est utilisé, il y a une crainte qui existe. Donc, le fait qu'on va seulement consulter les victimes, c'est un bel engagement, c'est mieux que rien, mais, pour moi, ça ne va pas effacer toutes les craintes.

Puis là, je veux dire, moi, je ne suis pas dans cette situation-là en ce moment, je présume, parce que je souhaite le mieux pour le ministre, que ce n'est pas son cas non plus, mais, je veux dire, une personne qui a vécu de la violence conjugale vit dans un état de terreur constante. Cette personne-là, la moindre possibilité que l'autre personne soit informée qu'elle a été chercher de l'aide puis qu'elle a dit avoir été victime de violence conjugale, cette personne-là vit dans un état de terreur qui fait que le simple fait que la possibilité existe, même si elle est infime, ça va lui faire craindre le pire, puis elle pourrait s'abstenir d'aller chercher de l'aide.

Le Président (M. Bachand) : Merci beaucoup. M. le ministre.

M. Jolin-Barrette : Oui. Je suis très sensible à ce que la députée de Sherbrooke, elle dit, mais la réalité, là, c'est qu'avec le régime, là, dans le fond, il y a... La députée de Sherbrooke parle beaucoup de la personne victime, supposons, la victime directe, mais il n'y a pas juste elle, là, dans le fond, maintenant, il y a toutes les autres personnes victimes aussi, donc qui vont amener des sommes importantes aussi pour l'État, aussi, donc, ce qui m'est proposé, dans le fond, par voie légale, ça devient difficile aussi. Donc, par les lignes directrices, on va pouvoir avoir cette souplesse-là de bien encadrer en fonction aussi de ce que les gens, sur le terrain, vont nous dire, les organismes, tout ça.

Donc, mon message, c'est que, je dirais, dans le fond, on va bien l'encadrer par le biais des lignes directrices. Puis ultimement, là, ultimement, les recours subrogatoires seront exercés par le ministre. Donc, c'est moi qui vais déterminer les modalités lorsqu'un tel recours va être pris, puis je peux vous assurer que je vais mettre en place des balises très claires.

Mme Labrie : Moi, je ne doute pas du tout du jugement là-dessus du ministre, puis d'ailleurs, on le voit, ça été appliqué très rarement, là. Ce n'est pas ça, ma crainte, ce n'est pas que le ministre, éventuellement, ou un autre ministre parte, là, puis enclenche ce recours-là trop souvent dans des circonstances qui pourraient être préjudiciables aux victimes. Ma préoccupation, c'est que les victimes, elles, elles sont dans un état de terreur, ça fait qu'elles craignent ça. Elles ne sont pas en train de se demander si le ministre va avoir un bon jugement, là, elles ont peur de tout, elles ont peur d'être tuées, constamment. Donc, c'est au-delà du bon jugement que pourrait avoir le ministre, puis ce n'est pas ça que je mets en doute ici, là, mais c'est vraiment... La possibilité théorique est problématique.

Puis j'entends quand le ministre dit, là : Il y a d'autres catégories de victimes. C'est vrai que c'est un enjeu. Moi, à mon sens, quand je demande ça, le consentement de la victime, avant d'entreprendre le recours, j'ai en tête la victime directe. Je ne sais pas si... Je sais que là, la notion de victime directe, indirecte, elle n'existe plus, mais peut-être que, dans ce cas particulier, on pourrait la ramener. Je comprends que ça ne demandera pas nécessairement le consentement de toutes les victimes, des proches, tout ça. Ce n'est pas ça que je souhaite nécessairement, mais, moi, j'ai en tête la victime directe quand je fais cette demande-là. Ça fait que peut-être qu'on peut ramener la notion juste pour cette question-là.

Le Président (M. Bachand) : M. le ministre, s'il vous plaît.

M. Jolin-Barrette : Je cherche une voie de passage, là, M. le Président. Je ne peux pas venir, dans la loi, précisément, tu sais, venir... ça prend le consentement de X, Y, Z, parce que ça demande un niveau de détail très important, là. Dans les lignes directrices qu'on va mettre en place, il y a plusieurs sous-modalités, plusieurs éléments. Je ne peux pas venir le mettre clairement comme ça, aussi simple que ça, dans la loi.

Ce qu'on pourrait faire, par contre, c'est mettre un amendement à l'article 27, qui dirait, dans le fond : «Le ministre adopte des lignes directrices et les rend publiques», donc, avec le niveau de détail requis. Ça, on pourrait faire un amendement là-dessus pour dire que, un, mon engagement de publier des lignes directrices... de prendre des lignes directrices, il est là. Les victimes vont savoir quelles sont les modalités associées aux lignes directrices, puis ça va venir à être détaillé, puis on va les rendre publiques.

Mme Labrie : C'est déjà un bon pas. Je dois dire que je pensais d'emblée que les lignes directrices seraient publiques, mais si on vient les inscrire dans la loi, c'est encore mieux.

Puis sur la question de se limiter à consulter les victimes, comme les lignes directrices, là, ça va être en dehors du projet de loi, est-ce qu'on peut mettre une notion, au niveau des lignes directrices, pour que la victime directe, ce ne soit pas juste la consulter, mais que ça prenne son autorisation? Quand ce sera des proches, par exemple, les parents, les enfants de la victime, on pourrait se contenter de la consultation, là, moi, je n'aurais pas de problème, mais quand il y a une victime directe qui est toujours en vie...

M. Jolin-Barrette : Bien, c'est parce qu'il y a plusieurs cas de figure, puis qu'on doit réfléchir à tout ça, sur les différentes modalités. Parce que, vous comprenez, on se retrouve dans un cas où la personne victime, elle est indemnisée avec l'argent de l'État, puis il y a une personne qui a commis une infraction criminelle qu'on veut aller chercher, O.K., pas dans toutes les circonstances, là, notamment en matière de violence conjugale, violence sexuelle, il y a des enjeux, mais il faut garder les modalités ouvertes. On va venir refermer ça par les différentes lignes directrices.

Mme Labrie : Je ne suis pas sûre de comprendre ce que la réponse veut dire. Dans le fond, moi, je... Ma question précise, c'est...

M. Jolin-Barrette : Oui, en fait, à la réponse précise, dans le fond, non, je ne souhaite pas dire : Ça prend absolument l'autorisation de la victime dans toutes les circonstances. On va peut-être venir dire dans les lignes directrices : Ça prend l'autorisation de la victime. Je ne ferme pas la porte à ça dans les lignes directrices, mais ça se peut qu'il y ait des situations d'exception, auxquelles je ne pense pas présentement, en lien avec le recours subrogatoire.

Mme Labrie : Donc, le ministre, il est prêt à ajouter un amendement, dans l'article 27, pour s'engager à rendre publiques des lignes directrices. Et il est prêt à envisager que, dans ces lignes directrices là, on puisse demander, dans certaines circonstances, l'autorisation de la victime. Mais assurément, dans tous les cas, il prévoit demander la consultation de la victime. Est-ce que je résume bien?

M. Jolin-Barrette : Oui.

Mme Labrie : Parfait.

Le Président (M. Bachand) : Merci. Mme la députée de Joliette, s'il vous plaît.

• (18 heures) •

Mme Hivon : Est-ce qu'à l'occasion du dépôt de cet amendement le ministre pourrait continuer à réfléchir pour mettre carrément dans la loi que, dans les cas de violence sexuelle et conjugale, c'est exclu, donc il n'y en aura pas, de subrogation? Parce que, si c'est ça, sa volonté, je ne vois pas pourquoi on attendrait des lignes directrices, parce que ça enverrait un message clair. Encore une fois, je pense qu'on a un gros travail à faire auprès des victimes de violence sexuelle et conjugale. Puis on le mettrait clairement, qu'il n'y a aucune ambiguïté par rapport à ça, puis ça serait écrit noir sur blanc dans la loi.

M. Jolin-Barrette : Bien, je peux continuer d'y réfléchir. Déjà, je cherche une voie de passage pour qu'on fasse des modalités... une piste de solution. Mais l'enjeu que je vous relate, c'est parce qu'il peut y avoir différentes circonstances. Ce n'est pas mon intention, à la base, qu'on prenne des recours subrogatoires pour la violence conjugale, violence sexuelle. Ça, c'est le premier élément. Mais il pourrait arriver certaines situations qu'à ce stade-ci je n'ai pas en tête, là, mais qui feraient en sorte qu'on devrait exercer un recours subrogatoire. Ça fait que vous comprenez, là, j'essaie, tu sais, mais je...

Mme Hivon : Je le sais, puis on travaille ensemble. Je veux juste soumettre mes arguments au ministre. S'il y en a eu 23 depuis que ça existe, c'est très peu, donc je ne vois pas quel serait le risque d'exclure d'emblée que, dans ces cas-là, il n'y en aura pas, de recours subrogatoire. Dans le sens où, je veux dire, même s'il y avait un cas hypothétique où ça pourrait peut-être être une bonne idée de le faire en matière de violence sexuelle et conjugale, même si je ne le vois pas, il me semble que ça ne serait pas la fin du monde que ce soit exclut d'emblée.

Le Président (M. Bachand) : M. le ministre.

M. Jolin-Barrette : Oui. Bien, ce qu'on me disait aussi, c'est possible aussi qu'il y ait des victimes qui souhaitent... un, il ne faut pas exclure le recours subrogatoire d'emblée parce que ça se pourrait que des victimes souhaitent aussi faire le recours subrogatoire pour se joindre à l'action aussi puis obtenir la compensation manquante de leur indemnité, comme le député de LaFontaine proposait, là, tantôt à 23, là. Puis, dans le fond, les commentaires que je fais là, je vais les verser à 23 aussi. Dans le fond, ce qu'on va faire, c'est qu'on va... le procureur, lorsqu'il va le prendre, le recours subrogatoire, il va consulter en vertu des lignes directrices, mais il va aussi informer la victime, à savoir si elle veut se joindre à un tel recours aussi.

M. Tanguay : ...

M. Jolin-Barrette : Non, pas dans la loi, ça va être dans les lignes directrices. Parce que, sinon, si c'est dans la loi, ça va devenir une intervention forcée. Donc, c'est ça, ça fait que la personne, tu sais, qu'il lui manque son 10 % sur le 90 % de revenus, elle pourrait vouloir se joindre aussi, même si c'est en matière d'agression sexuelle. Puis ça pourrait aussi participer au processus de guérison de la personne aussi.

Le Président (M. Bachand) : Mme la députée de Sherbrooke.

Mme Labrie : Je vais encore poser une question de personne néophyte en droit. Ça, le recours subrogatoire, c'est au civil?

M. Jolin-Barrette : Oui.

Mme Labrie : Donc, si la personne décide de se joindre au recours, elle est informée que le ministre veut exercer ce recours-là et on lui offre de se joindre, elle, est-ce qu'elle va le faire sans frais? Est-ce qu'elle va devoir payer des frais d'avocat pour se joindre à cette démarche-là ou ça va lui permettre d'avoir un recours civil qui s'exerce sans avoir aucune dépense à payer?

M. Jolin-Barrette : Non, les dépenses sont à sa charge.

Mme Labrie : Donc, si elle décide de se joindre au recours, les dépenses sont à sa charge.

M. Jolin-Barrette : Oui.

Mme Labrie : O.K...

Le Président (M. Bachand) : Merci. Interventions?

M. Jolin-Barrette : Dans le fond, l'État, là, avec l'IVAC, là, l'État vient offrir un soutien aux personnes victimes, vient offrir une indemnisation. L'État ne prend pas fait et cause à la cour pour le manque à gagner de la personne dans le cadre de son recours. Dans le fond, là, l'avocat de l'État, là, du PG, là, dans le fond, supposons, dans le cadre d'un recours subrogatoire, il va aller réclamer le 90 % du salaire, mais, si la victime veut avoir 10 %, parce qu'elle a subi son autre perte de 10 %, ça peut être à même ses propres avocats ou elle-même.

Mme Labrie : O.K. Là, j'essaie de concevoir parce que... comment ça va se passer, par exemple, l'exercice de tout ça, là, concrètement. Peut-être que le ministre peut m'éclairer, là. Disons, moi, je suis victime. Là, l'État décide d'aller chercher le 90 % du salaire qu'il me verse. Il m'informe de ce recours-là, il me dit : Est-ce que, Mme, vous voulez participer vous aussi en même temps pour aller chercher votre 10 % qu'il vous manque? Là, moi, je pense à ça. Je décide d'y aller. Je vais devoir m'embaucher un avocat pour aller faire une démarche. Dans le fond, ce que je ne comprends pas, c'est que j'avais compris qu'on allait offrir à la personne de se joindre au même recours. Pourquoi ça prend un avocat de plus pour aller chercher le 10 % de plus? Pourquoi ça ne peut pas juste être... tu sais, faire partie de la demande?

M. Jolin-Barrette : Parce que l'avocat de l'État représente l'État, puis la personne victime, c'est à titre personnel qu'elle fait sa demande.

Mme Labrie : Ça fait que ça va se passer quand même dans... Est-ce que ça va se passer dans le cadre d'un autre procès?

M. Jolin-Barrette : Non, dans le fond, quand on dit l'intervention, là, dans le fond, le Procureur général, dans le fond, va dire... Supposons, la personne, elle a reçu 50 000 $ en salaire. Le Procureur général va dire : Bien, je poursuis monsieur pour 50 000 $ parce que j'ai payé 50 000 $ à madame en indemnités de remplacement de revenu. Là, on va aviser madame pour prendre la demande devant la cour, dans le véhicule, là, la procédure. On va dire : Voici, on a l'intention de prendre procédure contre monsieur. On vous informe qu'on va exercer un recours subrogatoire. Voulez-vous vous joindre à l'action, à la poursuite? Et la madame, par elle-même ou par le biais de son avocat, va dire : Je joins le recours. Donc, elle devient intervenante et codemanderesse dans la même procédure judiciaire. Donc, ça va être joint dans la même demande. Donc, il va y avoir deux parties demanderesses dans le litige, dans cette procédure-ci. Donc, ça ne sera pas deux procès différents, ça va être le même dossier.

Mme Labrie : Puis c'est quoi, l'intérêt de la victime de faire ça?

M. Jolin-Barrette : De joindre au recours?

Mme Labrie : De se joindre au recours plutôt que d'y aller sur ses propres bases.

M. Jolin-Barrette : Bien, ça facilite la preuve, dans un premier temps. Tu sais, dans le fond, tout se déroule dans la même instance. Donc, un, c'est le même juge, ça évite de multiplier les différentes procédures, puis, dans le fond, la preuve qui est entendue, elle est entendue une fois par le juge. Donc, ça facilite le recours.

Puis on s'entend que le fait que le Procureur général, supposons, supporte... bien, prenne action, le gros de la demande, ça va être le Procureur général. Nous-mêmes, on va présenter les faits à la cour, on va présenter les allégués. Donc, la victime va dire : Bien, je suis d'accord avec ces allégués-là. Puis, tu sais, si le Procureur général fait la preuve, bien, c'est une démonstration que les événements sont survenus, que la preuve... qu'il y a lien de causalité. Et donc, pour la victime, à partir du moment où la preuve est démontrée puis qu'il y a un préjudice, que les faits sont allégués puis qu'ils sont démontrés, ils sont prouvés à la cour, bien là, elle, ce qu'elle a à prouver, c'est la portion de son préjudice.

Mme Labrie : Puis, disons, dans le cas d'un agresseur qui aurait quelques moyens financiers, mais peu, quand même, est-ce que ça va nuire à la victime, le fait que l'État lui demande 50 000 $, puis elle, elle demande 5 000 $, si la capacité de payer de l'agresseur n'atteint pas ces montants-là? Est-ce que ça va nuire à la victime de faire sa demande en même temps dans la même procédure?

M. Jolin-Barrette : Bien non. Mais, dans le fond, c'est mieux qu'ils obtiennent le jugement en même temps qu'après parce que, dans le fond, quand les créanciers saisissent la personne, ils paient ceux qui ont une créance envers lui.

Mme Labrie : Il va payer qui en premier?

M. Jolin-Barrette : Bien, en fonction de l'ordre des créanciers. Dans le fond, supposons, une personne qui saisit une autre personne, ça se fait selon l'ordre des créances. D'habitude, l'État passe pas mal avant, là.

Mme Labrie : Donc là, l'État va passer avant la victime.

M. Jolin-Barrette : Bien, si l'État décide d'exercer son jugement aussi.

Mme Labrie : Bien là, s'il a intenté le recours, il avait l'intention, j'imagine, d'aller chercher l'argent.

M. Jolin-Barrette : Bien, généralement, oui.

Mme Labrie : O.K. Ça fait que ça pourrait arriver quand même, là, que l'État fasse ça, que la victime paie un avocat pour se joindre, finalement, le jugement est favorable, puis là l'État passe en premier pour aller chercher l'argent disponible, puis, finalement, la victime...

M. Jolin-Barrette : Oui, mais le jugement de la victime demeure toujours là. Si jamais il n'y avait pas assez d'argent pour assez de monde, là, à ce moment-là, la personne va se mettre sur la protection, puis là les créanciers sont payés à x montant avec un arrangement, puis tout ça, là. Tu sais, c'est tellement de cas d'espèce différents que...

Mme Labrie : Je comprends, là, tu sais. Moi, je le vois, le scénario où il y a des victimes qui pourraient dire : Je suis à l'aise que l'État exerce le pouvoir subrogatoire, là, même dans des cas de violence conjugale, puis probablement que c'est possible, là, mais j'ai de la misère à voir à quel point il y a des avantages là-dedans pour la victime pour justifier de ne pas le mettre dans le projet de loi, qu'on exclut... Minimalement, là, moi, je... En fait, moi, ce que je veux, ce n'est pas d'exclure nécessairement ces situations-là, mais c'est d'exiger le consentement, c'est d'exiger absolument le consentement de ces victimes-là. Je ne suis pas convaincue des avantages, là, de ne pas le faire.

• (18 h 10) •

Le Président (M. Bachand) : Mme la députée de Notre-Dame-de-Grâce.

Mme Weil : Sur ce point-là, M. le Président, le cas de figure qui est donné par le Regroupement des maisons pour femmes victimes de violence conjugale, c'est vraiment ça qui est l'enjeu. Je vais attendre que...

Des voix : ...

Mme Weil : C'est important, là, parce que c'est vraiment le cas de figure. Et il n'y a pas un sou qui va... mais il n'y a pas... il y a des millions de dollars ne vaudraient pas la peine d'aller prendre des risques s'il n'y a pas de consentement de la femme.

Je vais vous donner l'exemple qui est donné par le Regroupement des maisons pour femmes victimes de violence conjugale : «Bien des victimes de violence conjugale, particulièrement celles qui n'ont pas dénoncé leur conjoint violent à la police, craindront les représailles de celui-ci si le procureur général les poursuit pour obtenir le remboursement des indemnités versées.» Ça, c'est le cas de la femme victime de violence conjugale qui n'aurait pas... Donc, l'IVAC l'indemnise, mais le mari, selon la preuve qui a été soumise à l'IVAC... mais elle n'aurait pas dénoncé le conjoint violent à la police. Ça, c'est le cas de figure qu'ils donnent. L'autre : «En ce qui concerne les victimes d'agressions sexuelles, plus particulièrement d'inceste, plusieurs ont besoin de soins, de support, voient leurs capacités affectées, mais ne veulent pas remuer publiquement les éléments de leur passé.» Leur conclusion : «Devant la probabilité [de] subrogation, ces femmes risquent de ne pas déposer de demande à l'IVAC. Comme nous l'avons dit, cela aurait, tout comme dans l'obligation de signaler le crime à la police et de collaborer avec les autorités, un effet discriminatoire certain pour ces femmes.»

Donc, face à ça, on ne peut pas prendre le risque. Un État ne pourrait prendre le risque de danger que ça peut représenter pour un mari violent qui voudrait s'en prendre... C'est justement le cas de figure que la députée de Sherbrooke a présenté. Je ne vois pas comment un État, en toute connaissance de cause, avec tout ce qu'on connaît, avec tout ce qu'on vient de vivre ces dernières semaines, le nombre de décès, de victimes de violence conjugale, avec le discours du premier ministre qu'on a entendu aujourd'hui... C'était passionné, il a dit : Plus jamais, plus jamais on ne prendra de chance ou de risques. Et voilà, on fait face, justement, à une situation de risque qui a été présentée en commission parlementaire. Je pense qu'il faut être bien conscient de ça, puis soit... qu'avant d'aller plus loin le ministre puisse y réfléchir, parce que moi, ça m'inquiète beaucoup, ça m'inquiète beaucoup qu'on aille de l'avant et d'attendre tout simplement, éventuellement, une directive qui ne serait pas suffisamment solide, selon moi, pour protéger une victime éventuelle.

Et il faut savoir que ces lois-là, elles doivent durer dans le temps. Les ministres vont changer, les gouvernements vont changer, mais la loi devrait rester permanente pour un certain temps.

Le Président (M. Bachand) : Juste un petit moment.

Une voix : ...

Le Président (M. Bachand) : Oui, mais vous devez prendre votre siège.

On va suspendre quelques instants. Merci.

(Suspension de la séance à 18 h 13)

(Reprise à 18 h 26)

Le Président (M. Bachand) : À l'ordre, s'il vous plaît! La commission reprend ses travaux. M. le ministre, s'il vous plaît.

M. Jolin-Barrette : Oui. Alors, M. le Président, je vous suggère de revenir à l'article 23, de suspendre l'article 27, pour qu'on puisse terminer l'étude de 23, puis par la suite on va revenir à 27 avec un amendement.

Le Président (M. Bachand) : Parfait. Donc, on va d'abord suspendre l'amendement. Consentement?

Des voix : Consentement.

Le Président (M. Bachand) : Consentement pour suspendre l'article?

Des voix : Consentement.

Le Président (M. Bachand) : Consentement pour revenir à 23?

Des voix : Consentement.

Le Président (M. Bachand) : Merci. M. le ministre, s'il vous plaît.

M. Jolin-Barrette : Donc, à 23, c'était : «Rien, dans la présente loi, n'affecte le droit de la personne victime qui a choisi de présenter une demande de qualification en vertu du présent titre de recouvrer de toute personne responsable du préjudice subi les montants requis pour équivaloir, avec l'aide financière reçue, à la perte réellement subie.»

Donc, essentiellement, le député de LaFontaine me disait... Qu'est-ce que vous me disiez, déjà?

M. Tanguay : Je vous disais que, de façon initiale, avant même que le recours soit signifié, qu'il soit notifié à la personne victime en... de laquelle, là, situation découle, là, le droit de subrogation, soit notifiée et de lui permettre de se joindre ab initio, dès le départ, à l'action, ce qui pourrait donc... de mettre son nom sur la procédure et... Voilà.

M. Jolin-Barrette : Oui. Donc, ce qu'on va faire, c'est que le procureur va aviser la personne victime du recours qu'on va prendre. Mais, dans tous les cas, notamment de violence sexuelle et violence conjugale, ça va prendre son consentement pour entamer...

M. Tanguay : Ça, c'est d'autre chose, on va le régler à 27.

M. Jolin-Barrette : À 27, c'est ça. Mais là, au niveau de l'intervention, on va y aller par voie administrative. On va aviser la personne qu'on a l'intention de prendre un recours et qu'elle pourra se joindre.

M. Tanguay : O.K., qu'on n'a pas dans la loi, c'est correct, mais, dans la directive, évidemment, qui va être publique, cette directive-là, est-ce qu'on va laisser le temps à la personne de pouvoir se joindre? On ne va pas juste lui dire : En passant, on va signifier puis déposer telle procédure lundi prochain, puis c'est vendredi... Est-ce qu'on pourra prévoir un délai raisonnable? Ça peut être un 10 jours ou un 30 jours, pour que la personne puisse dire : O.K., dans votre rédaction de procédure, que vous allez signifier... Parce que, de façon bien, bien, bien pratique, j'imagine qu'il va y avoir une seule signification parce qu'il y a union, en vertu de l'ancien 67, des recours. Il y a deux codemandeurs. Ça ne sera pas le Procureur général qui dit : Je poursuis pour ce que je vous ai payé, c'est mon intérêt juridique, vous, vous avez un intérêt juridique sur ce qui excède, ce que je vous ai payé, intérêt juridique distinct, ancien 67, il y a deux codemandeurs, mais que la directive fasse en sorte, deux choses, qu'il y ait un délai pour la personne d'élire... de dire : Oui, je veux faire... être codemandeur avec vous, corequérant, mais également que, par exemple, la signification, là, vous allez dire : Vous êtes pointu, mais c'est bien tangible qu'il va y avoir une seule signification faite par le Procureur général à la partie défenderesse qui va être valide pour le codemandeur, qui est la victime, là.

M. Jolin-Barrette : Mais là on va regarder les modalités dans les lignes directrices.

M. Tanguay : ...

M. Jolin-Barrette : Non, non, on va regarder les modalités dans les lignes directrices de tout ça, parce qu'il y a des enjeux aussi en termes de délai, supposons, pour la prescription. Tu sais, si jamais il arrivait qu'on était à la limite de la date de la prescription, le Procureur général va signifier, lui, même si l'autre personne n'était pas... n'est pas encore intervenue dans le dossier, là. Mais on va mettre en place des mécanismes pour rassurer tout le monde, pour qu'il y ait une bonne marche dans le cadre des recours subrogatoires.

• (18 h 30) •

M. Tanguay : Mais il y avait... Puis il y a un article, là, obscur du Code civil du Québec, puis je n'ai pas le bon numéro, mais ça ressemble à quelque chose comme 2468 ou 2460, qui fait en sorte que, puis ça, je l'avais découvert en pratique, si votre délai de prescription c'est demain matin, courrez à la cour, faites timbrer votre procédure, et vous avez un 60 jours additionnel pour signifier la personne. Alors, dans le fond, l'important, c'est de faire timbrer votre procédure, puis vous avez... Je pense que c'est 2468, Code civil de Québec, dans ces eaux-là. Mais effectivement... Alors, on n'ira pas dans ce niveau, mais l'objectif, c'est de faire en sorte de faciliter. Puis sur l'échange, puis je voulais intervenir, mais ça n'a pas adonné, avec la collègue de Sherbrooke, après ça la personne a son intérêt juridique, mais la personne pourrait décider de se représenter seule, donc... ou d'être avec... de nager avec le codemandeur, qui est procureur, une avocate ou un avocat qui va déposer la jurisprudence, et ainsi de suite. La personne pourrait se représenter seule et pourrait parfaire sa preuve de perte de revenus de ci, de ça. Donc, ça peut très bien se vivre comme n'étant pas une épée de Damoclès, de dire : Bien là, il faut que j'engage un avocat, et ainsi de suite, première des choses, et, deuxième des choses, est-ce qu'il y aurait possibilité, dans ce cas-là, de couvrir la personne par l'aide juridique, le cas échéant, en gardant les mêmes critères? Parce que je ne pense pas que ce soit couvert par l'aide juridique, ça, hein? Si la personne voulait avoir un... en demande de dommages et intérêts, est-ce que même c'est exclu spécifiquement? Mais on ne réglera pas, ça, là, mais ça pourrait être intéressant si, en vertu du seuil, la personne peut se qualifier, que ce soit couvert.

M. Jolin-Barrette : Bien, dans le fond, à l'aide juridique, je me rappelle mes jeunes années, il y a plusieurs critères, là, pour être admis. Donc, il faut que ça rentre dans les... je pense qu'il y a 9 ou 11 alinéas d'un article, pour être couvert. Donc, il faudrait que je vérifie. Je vais vérifier.

M. Tanguay : Donc, dans le fond...

M. Jolin-Barrette : Mais, dans le cadre du projet de loi n° 84, là, on ne change pas la Loi sur l'aide juridique, là.

M. Tanguay : Donc, dans le fond...

M. Jolin-Barrette : Bien que, bien que, et je l'ai bien noté dans le rapport sur la... comité d'experts sur l'accompagnement des victimes, on recommande de l'assistance juridique. Et je réfléchis à la mise en vigueur de tout ça.

M. Tanguay : Oui, O.K., donc, directives vont être données pour permettre à la personne, juste pour qu'on... directives vont être données. Évidemment, ces directives-là vont être publiées sur le site, donc ça va être des directives, évidemment, publiques et vont donner les délais nécessaires à la personne de se joindre pour pouvoir... O.K.

Est-ce que le ministre va, quand on va revenir à 27, le préciser qu'il va émettre des directives? Est-ce qu'on pourrait le préciser également ici? Je pense que oui, à 23, que de telles directives seront écrites, le cas échéant, pour permettre cela?

M. Jolin-Barrette : Si les directives vont être écrites?

M. Tanguay : C'est-à-dire, à 27, le ministre... je pense qu'on s'enligne à 27 pour un amendement qui va dire qu'il va y avoir des directives.

M. Jolin-Barrette : Bien là, on va faire un amendement qui dit que ça prend le consentement pour les victimes de violence sexuelle et de violence conjugale pour entamer un recours subrogatoire. Les lignes directrices, je vais les mettre par voie administrative.

M. Tanguay : O.K. Mais ce ne sera pas dit, à 27, qu'il y aura des lignes directrices qui seront écrites.

M. Jolin-Barrette : Non.

M. Tanguay : O.K. J'aurais fait miroir à ce niveau-là. Donc, c'est dans nos transcriptions, M. le Président, ça me va à ce moment-là.

Le Président (M. Bachand) : Merci. Autres interventions sur l'article 23? S'il n'y a pas d'autre intervention, nous allons procéder à la mise aux voix. Mme la secrétaire, s'il vous plaît.

La Secrétaire : Pour, contre, abstention. M. Jolin-Barrette (Borduas)?

M. Jolin-Barrette : Pour.

La Secrétaire : Pour les membres du groupe parlementaire formant le gouvernement, M. Lemieux (Saint-Jean)?

M. Lemieux : Pour.

La Secrétaire : Pour les membres de l'opposition officielle, M. Tanguay (LaFontaine)?

M. Tanguay : Pour.

La Secrétaire : Mme Labrie (Sherbrooke)?

Mme Labrie : Pour.

La Secrétaire : Mme Hivon (Joliette)?

Mme Hivon : Pour.

La Secrétaire : M. Bachand (Richmond)?

Le Président (M. Bachand) : Abstention. Donc, l'article 23 est adopté. Merci.

Consentement pour retourner à l'article 27 et à son amendement, bien sûr? Merci.

M. Jolin-Barrette : Article 27, M. le Président, suite aux discussions que nous avons eues hors et dans le micro... Je ne sais pas si on est dedans, là.

Le Président (M. Bachand) : Juste pour... Je sais que vous parlez d'amendement, M. le ministre, mais on a déjà un amendement qu'on doit prendre une décision.

M. Jolin-Barrette : Ah! c'est quoi, cet amendement-là?

Le Président (M. Bachand) : L'amendement du député de LaFontaine.

M. Jolin-Barrette : Ah! bien, ça, c'est sûr, qu'on vote contre, M. le Président.

Mme Hivon : Un peu d'égard, un peu d'égard.

M. Jolin-Barrette : Bien non, mais pour celui-là.

Le Président (M. Bachand) : Alors donc, vous pouvez quand même faire une intervention, M. le ministre, faire votre intervention si vous voulez, mais il faudrait d'abord régler la question de l'amendement.

M. Jolin-Barrette : Soit que le député de LaFontaine le retire ou on vote dessus.

M. Tanguay : Oui, alors... Donc, vous avez un amendement après, c'est ça?

M. Jolin-Barrette : Oui.

M. Tanguay : O.K. Je demande le consentement, M. le Président, pour retirer mon amendement.

Le Président (M. Bachand) : Consentement? Le consentement est donné. Merci beaucoup. M. le ministre, s'il vous plaît.

M. Jolin-Barrette : Donc, l'amendement que je vous propose, c'est : d'ajouter, à la fin de l'article 27 du projet de loi... Ajouter, à la fin de l'article 27 du projet de loi, l'alinéa suivant :

«Avant d'exercer le recours subrogatoire du présent article pour récupérer un montant qu'il a versé à une personne victime visée au paragraphe 1° du premier alinéa de l'article 10 qui a été victime de violence conjugale ou de violence sexuelle, le ministre doit obtenir le consentement de cette personne victime, sauf si cette personne est décédée.»

Donc là, on a les éléments sur le consentement de la personne victime. Donc, 10.1°, c'est la personne qui a subi l'infraction, donc c'est le consentement de cette personne-là. Et c'est ça, donc c'est la personne qui est toujours en vie. Et, si la personne est décédée, là, à ce moment-là, on n'a pas besoin d'avoir son consentement. Donc, ça reprend substantiellement ce qu'on a discuté.

Le Président (M. Bachand) : Merci. Est-ce que l'amendement est sur Greffier? Oui, il est sur Greffier.

Des voix : ...

Le Président (M. Bachand) : O.K. Il vient juste d'arriver, M. le député de LaFontaine. O.K., M. le député de LaFontaine, s'il vous plaît.

M. Tanguay : ...ici, «montant qu'il a versé à une personne — donc c'est la victime elle-même, évidemment — qui a été victime de violence conjugale ou de violence sexuelle». Je pense que l'on devrait ajouter «violence subie pendant l'enfance» parce que les trois vont toujours de pair, les trois font écho à des traumatismes et des personnes dans une vulnérabilité très certaine. Puis je ne vois pas comment on pourrait exclure les violences commises durant l'enfance dans cette nécessité de demander le consentement, surtout qu'on en a eu de nombreux témoignages, où c'était extrêmement difficile pour les personnes de sortir et de demander, dans ce contexte-ci, une indemnisation, là.

Le Président (M. Bachand) : M. le ministre.

M. Jolin-Barrette : Bien, en fait, dans le contexte de la violence subie pendant l'enfance, c'est une situation qui est différente, là. Ça n'empêchera pas un enfant de réclamer, à l'IVAC, la demande, là. Donc, on se retrouve plus... Ce qui était demandé par les groupes, c'était vraiment violence conjugale et violence sexuelle pour éviter de dénoncer.

M. Tanguay : Écoutez, M. le Président, le ministre, comme nous, a entendu tous les témoignages de victimes de violence pendant l'enfance. Je pense que ça participe de la même nature. Le consentement devrait être requis. Moi, M. le Président, je pense que c'est clair comme de l'eau de roche, je n'ai pas l'intention de faire plus de temps que ça. Je vais, par contre, déposer un sous-amendement, puis on va le voter. Ça peut... Puis le ministre peut voter en faveur, mais je l'ajouterais. Je ne veux pas faire du temps pour faire du temps, là, mais je l'ajouterais parce que je n'ai pas d'argument pour faire en sorte qu'on les exclut. Encore une fois, 2926.1, c'est imprescriptible, puis ça va de pair, c'est toujours les trois. Puis, même dans la loi, M. le Président, on ne les exclut pas. Puis le seul endroit où on semblait les exclure, bien, on ne les excluait pas, c'est le débat qu'on a eu par rapport aux jeunes contrevenants de 12 à 17 ans, puis ça s'expliquait. Mais là je ne vois pas comment on pourrait expliquer de les exclure.

Alors, je ne veux pas du temps pour faire du temps. J'ai dit ce que j'avais à dire. Je vais déposer un sous-amendement. On peut faire le débat sur l'amendement, mais j'aimerais avoir l'occasion de déposer l'amendement, puis qu'on le vote, le cas échéant, là-dessus.

Le Président (M. Bachand) : Parfait. Merci. M. le ministre, s'il vous plaît.

M. Jolin-Barrette : Oui. Bien, écoutez, je comprends M. le député de LaFontaine. C'est sûr que le critère, là, de dangerosité pour violence sexuelle, violence conjugale, il est davantage là. Violence subie pendant l'enfance, c'est le caractère... Dans le fond, la personne va réclamer beaucoup plus tard pour des violences envers, supposons, un tiers où, même là, on a la notion, par rapport aux parents... Dans le fond, avec l'exercice du consentement, c'est une situation qui est différente par rapport à la situation qu'on a présentement.

M. Tanguay : Dans ce que l'on veut protéger ou prévenir, M. le Président, c'est qu'une victime doive participer, témoigner, se remémorer une facette, une violence qui l'a affectée au plus profond de son être, tant en matière... Donc, ce n'est pas uniquement l'aspect de dangerosité, de représailles, parce qu'il y a un recours, oui, dans un contexte conjugal, violence sexuelle que l'on n'aurait potentiellement pas, mais ce n'est pas exclusif, systématiquement dans la violence à l'enfance, mais c'est la difficulté de se remémorer ça et de devoir faire face à ce... ou savoir, ne serait-ce que de savoir qu'un tel processus a lieu. Vous n'êtes pas là, mais on parle de vous. On parlait... Et les commentaires, je reviens là-dessus, tous les commentaires qui étaient faits, processus de guérison de la personne victime, je pense que ça participe également de la personne victime pendant l'enfance, puis ça peut être victime pendant l'enfance il y a 20 ans, il y a 30 ans, il y a 40 ans, M. le Président.

• (18 h 40) •

Le Président (M. Bachand) : Merci. J'aurais la députée de Notre-Dame-de-Grâce, s'il vous plaît.

Mme Weil : D'ailleurs, c'est le point que je faisais au ministre tantôt, et c'est exactement dans le sens de mon collègue de LaFontaine, c'est qu'ils disent : Pour les cas d'inceste, quand on pense à un enfant qui a vécu l'inceste pendant plusieurs années, c'est d'être obligé de remuer publiquement, c'est comme ça que c'est exprimé, plusieurs ont besoin de soins, de support, voient leurs capacités affectées, mais ne veulent pas remuer publiquement les éléments de leur passé. C'est...

M. Jolin-Barrette : ...ça, c'est violence sexuelle aussi, là.

Mme Weil : C'est ça, mais dans son enfance, donc...

M. Jolin-Barrette : Oui, mais une violence sexuelle, ça reste...

Mme Weil : Non, mais ce n'est pas la peur. Non, mais juste pour expliquer. Non, M. le ministre... M. le ministre, je l'ai dit tantôt, mais vous parliez avec d'autre monde. C'est qu'il y a deux cas de figure : la peur pour leur sécurité à cause d'un homme violent, mais ce n'est pas l'argument qui est donné dans ceux qui ont exprimé cette violence à l'enfance, là, c'est plus des cas comme l'inceste, et c'est comme ça que c'est exprimé. Et ce n'est pas la peur de quelqu'un qui pourrait les affecter, c'est que, pour leur guérison, ils ne veulent pas remuer publiquement ces souvenirs du passé. Donc, c'est deux cas de figure, mais qui ont été mis ensemble dans la plaidoirie des groupes qui sont venus en commission.

Le Président (M. Bachand) : Merci. M. le ministre, s'il vous plaît.

(Consultation)

Le Président (M. Bachand) : M. le ministre.

M. Jolin-Barrette : Dans tous les cas, M. le Président, on va avoir des lignes directrices qui vont venir encadrer le pouvoir de poursuite. Là, M. le Président, avec l'amendement que j'ai déposé, on amène une limitation du pouvoir de l'État d'entreprendre des recours subrogatoires. C'est une situation exceptionnelle, parce que je suis très sensible à la réalité violence sexuelle, violence conjugale, on fait une exception relativement à ça. Pour les lignes directrices, dans tous les cas, on va contacter... mais ça amène les autres cas d'exemple, M. le Président, aussi, où c'est pour ça qu'on ne va pas avec violence subie pendant l'enfance.

Le Président (M. Bachand) : Merci. M. le député de LaFontaine.

M. Tanguay : ...

Le Président (M. Bachand) : Le sous-amendement est sur Greffier.

M. Tanguay : Le sous-amendement est sur Greffier. Je pourrais vous en faire lecture. Je suis en train de rafraîchir. Ah! donc amendements en cours. Je comprends... J'ai compris. Alors, M. le Président, on va... Vous allez voir qu'on est... Je vais ajouter un mot qui n'est pas formellement dans le sous-amendement, puis je pense que ça peut faire office de... Il faut...

Alors, l'amendement... le sous-amendement : L'amendement, à l'article 27, est modifié par l'ajout, après les mots «du premier alinéa de l'article 10 qui a été victime», des mots «de violence». J'aimerais qu'on puisse ajouter manuellement, M. le Président «subie pendant l'enfance». Vous avez : «de violence pendant l'enfance». Il s'agit juste... Puis on peut le faire, là, vous avez les pouvoirs en vertu de l'article 2 du règlement, ajoutons manuellement : «de violence subie pendant l'enfance». Puis même Sophie va nous envoyer la version...

Alors, l'article se lirait de la façon suivante : «Avant d'exercer le recours subrogatoire du présent article pour récupérer un montant qu'il a versé à une personne victime visée au paragraphe 1° du premier alinéa de l'article 10 qui a été victime de violence subie pendant l'enfance, de violence conjugale ou de violence sexuelle, le ministre doit obtenir le consentement de cette personne victime, sauf si cette personne est décédée.»

Alors, c'est le sous-amendement, je n'ai pas à me répéter. Et voilà, M. le Président, c'est notre sous-amendement.

Le Président (M. Bachand) : Merci, M. le député. Interventions sur le sous-amendement? S'il n'y a pas d'autre intervention, nous allons procéder à la mise aux voix. Mme la secrétaire, s'il vous plaît.

La Secrétaire : Pour, contre, abstention. Pour les membres de l'opposition officielle, M. Tanguay (LaFontaine)?

M. Tanguay : Pour.

La Secrétaire : M. Jolin-Barrette (Borduas)?

M. Jolin-Barrette : Contre.

La Secrétaire : Pour les membres du groupe parlementaire formant le gouvernement, M. Lemieux (Saint-Jean)?

M. Lemieux : Contre.

La Secrétaire : Mme Labrie (Sherbrooke)?

Mme Labrie : Pour.

La Secrétaire : Mme Hivon (Joliette)?

Mme Hivon : Pour.

La Secrétaire : M. Bachand (Richmond)?

Le Président (M. Bachand) : Abstention. Donc, l'amendement est rejeté.

On revient donc à l'étude de l'amendement proposé par le ministre. Est-ce qu'il y a d'autres interventions? S'il n'y a pas d'autre intervention, nous allons procéder à la mise aux voix de l'amendement. Mme la secrétaire, s'il vous plaît.

La Secrétaire : Pour, contre, abstention. M. Jolin-Barrette (Borduas)?

M. Jolin-Barrette : Pour.

La Secrétaire : Pour les membres du groupe parlementaire formant le gouvernement, M. Lemieux (Saint-Jean)?

M. Lemieux : Pour.

La Secrétaire : Pour les membres de l'opposition officielle, M. Tanguay (LaFontaine)?

M. Tanguay : Pour.

La Secrétaire : Mme Labrie (Sherbrooke)?

Mme Labrie : Pour.

La Secrétaire : Mme Hivon (Joliette)?

Mme Hivon : Pour.

La Secrétaire : M. Bachand (Richmond)?

Le Président (M. Bachand) : Abstention. Donc, l'amendement, à l'article 27, est adopté.

Donc, on revient maintenant à l'étude de l'article 27 tel qu'amendé. Interventions? M. le député de LaFontaine, s'il vous plaît.

M. Tanguay : Vous allez m'excuser. Tout à l'heure je devrai quitter, j'ai un débat de fin de séance. Alors que le ministre ne le prenne pas personnel, parce qu'il a voté contre le sous-amendement.

M. Jolin-Barrette : ...ça aurait pu être une question en justice, puis le député de LaFontaine a choisi famille.

M. Tanguay : Oui, c'est ça. C'est ça, c'est ça, c'est ça. Parce qu'on a suffisamment de questions ici, M. le Président, puis tant qu'à ne pas avoir réponse au salon bleu, on aime autant ne pas avoir réponse ici, au salon... Non, ce n'est pas gentil.

M. Jolin-Barrette : Non, c'est vrai, ce n'est pas gentil.

M. Tanguay : J'aimerais savoir, le ministre avait parlé de directives, puis je croyais, je reviens là-dessus, là, je croyais qu'on pouvait le mettre dans la loi, que des directives allaient nécessairement être publiées quant à, par ailleurs, tous les autres cas. Parce qu'il y avait l'exemple du cas de l'homicide, où là ça pourrait effectivement être un facteur humain excessivement préoccupant et délicat. Et il est possible, selon certaines balises et directives qui vont venir, que le consentement soit, dans la pratique, dans les faits, demandé. Il y aurait lieu, il y aurait loisir de le mettre dans cet article-là. Pourrions-nous l'envisager?

M. Jolin-Barrette : Bien, en fait, on a déjà mis l'autorisation. Dans ce cas-ci, on va encore plus loin que les lignes directrices. Les lignes directrices, dans le fond, je vais les publier. Je vais faire les directives, la même chose que... Il y a des lignes directrices relativement au procureur. Alors, on va le faire d'une façon administrative, mais pas dans la loi.

M. Tanguay : Et les lignes directrices seraient davantage... pas de l'effet de demander le consentement, mais les lignes directrices seraient davantage de dire... d'informer la personne que le Procureur général a l'intention d'exercer son droit de subrogation, de un, de deux, et d'évaluer avec la personne victime l'à-propos, pour elle, de participer, le cas échéant, et elle pourrait décider de dire : Écoutez, moi, je suis bouleversée encore, je ne participerai pas et des lignes directrices qui vont tenir compte de ce témoignage-là à huis clos. Le ministre peut-il nous confirmer que les lignes directrices seraient en ce sens-là?

M. Jolin-Barrette : Oui, les lignes directrices vont être en ce sens-là, qui vont prévoir les différentes modalités : quand est-ce qu'on exerce un recours subrogatoire, ce dont on doit prendre en compte, l'opinion de la victime, la personne victime, les circonstances dans lesquelles... les différentes modalités aussi de la façon de joindre un recours, et puis l'ensemble des différents éléments.

Le Président (M. Bachand) : Merci. Interventions? S'il n'y a pas d'autre intervention, nous allons procéder à la mise aux voix. Mme la secrétaire, s'il vous plaît.

La Secrétaire : Pour, contre, abstention. M. Jolin-Barrette (Borduas)?

M. Jolin-Barrette : Pour.

La Secrétaire : Pour les membres du groupe parlementaire formant le gouvernement, M. Lévesque (Chapleau)... Non. M. Lemieux (Saint-Jean)? Pardon.

M. Lemieux : Pour.

La Secrétaire : Pour les membres de l'opposition officielle, M. Tanguay (LaFontaine)?

M. Tanguay : Pour.

La Secrétaire : Mme Labrie (Sherbrooke)?

Mme Labrie : Pour.

La Secrétaire : Mme Hivon (Joliette)?

Mme Hivon : Pour.

La Secrétaire : M. Bachand (Richmond)?

Le Président (M. Bachand) : Abstention. Donc, l'article 27, tel qu'amendé, est adopté. M. le ministre, s'il vous plaît.

M. Jolin-Barrette : Oui. Alors, à l'article 28, M. le Président. Et je vous annonce que j'aurai un amendement. Alors, l'article 28 : «La personne victime peut bénéficier de l'aide offerte au présent titre ou exercer une action civile contre toute personne responsable du préjudice qu'elle subit. Elle ne peut pas cumuler une aide en vertu du présent titre [ou] une somme adjugée [ou] perçue pour les mêmes objets, les mêmes séquelles ou les mêmes préjudices. Toute somme ainsi adjugée et perçue, soustraction faite des montants engagés pour obtenir celle-ci, est déduite de l'aide versée en vertu du présent titre ou est remboursée au ministre.

«La personne victime avise le ministre de toute somme adjugée, de toute somme perçue et de tout montant engagé visés au premier alinéa, à la suite de l'exercice d'une action civile.

«Cependant, si la somme ainsi adjugée ou ainsi perçue est inférieure au montant d'aide que la personne victime aurait pu obtenir en vertu du présent titre, cette dernière peut bénéficier, pour la différence, des aides prévues au présent titre en formulant au ministre une demande en ce sens dans l'année suivant la date du jugement; si l'infraction criminelle concernée en est une qui implique de la violence subie pendant l'enfance, une agression à caractère sexuel ou de la violence conjugale, cette demande peut être présentée en tout temps.

«La personne victime avise le ministre en vertu du deuxième alinéa ou formule la demande prévue au troisième alinéa selon les conditions, les normes et les modalités prescrites par le règlement du gouvernement.

«En outre, la personne victime qui, après avoir présenté sa demande de qualification, exerce une action civile contre toute personne responsable du préjudice qu'elle subit doit en aviser le ministre. Cet avis doit être [donné] au ministre par huissier aussitôt que possible dans l'instance, mais au plus tard 30 jours avant la mise en état de l'affaire; il doit être accompagné de tous les actes de procédure déjà versés au dossier. Le ministre devient alors, sans formalités, partie à l'instance et, s'il y a lieu, il peut soumettre ses conclusions sur lesquelles le tribunal doit se prononcer.»

Alors, l'article 28 réitère l'option, pour la personne victime, de bénéficier de la présente loi ou de poursuivre l'auteur de l'infraction criminelle dont elle est victime. Dans le cas où elle choisirait la poursuite, elle ne pourrait bénéficier des aides financières proposées par la présente loi, sauf pour la différence entre le montant qu'elle obtiendrait et les montants qui pourraient lui être octroyés en vertu de la présente loi.

En corollaire, le présent article prévoit l'obligation d'informer le ministre du choix de la personne victime, de même que tout montant qu'elle reçoit à la suite d'une poursuite.

Donc, on va ajouter, M. le Président, 15359 un amendement. À l'article 28 du projet de loi, remplacer :

1° dans les premier et deuxième alinéa, «action civile» par «demande en justice»;

2° dans le troisième alinéa, «une agression à caractère sexuel» par «de la violence sexuelle»; et

3° dans le cinquième alinéa, «action civile» par «demande en justice».

Donc, l'amendement remplace l'expression «action civile» par «demande en justice» afin de se conformer à la terminologie du Code civil.

L'amendement remplace également l'expression «agression à caractère sexuel» par «violence sexuelle» par concordance avec l'amendement proposé pour l'article 16.

Donc, essentiellement, M. le Président, c'est de la concordance pour l'amendement.

Le Président (M. Bachand) : Merci beaucoup. Interventions sur l'amendement? Il n'y a pas d'intervention sur l'amendement. Donc, s'il n'y a pas d'autre intervention, nous allons procéder à sa mise aux voix. Mme la secrétaire, s'il vous plaît.

La Secrétaire : Pour, contre, abstention. M. Jolin-Barrette (Borduas)?

M. Jolin-Barrette : Pour

La Secrétaire : Pour les membres du groupe parlementaire formant le gouvernement, M. Lemieux (Saint-Jean)?

M. Lemieux : Pour

La Secrétaire : Pour les membres de l'opposition officielle, Mme Weil (Notre-Dame-de-Grâce)?

Mme Weil : Pour

La Secrétaire : Mme Labrie (Sherbrooke)?

Mme Labrie : Pour

La Secrétaire : Mme Hivon (Joliette)?

Mme Hivon : Pour

La Secrétaire : M. Bachand (Richmond)?

Le Président (M. Bachand) : Abstention. Donc, l'amendement est adopté. On revient à l'article 28 tel qu'amendé, s'il vous plaît. Interventions? S'il n'y a pas d'autre intervention...

Mme Weil : ...du projet de loi, là. On a fini pour les amendements?

Le Président (M. Bachand) : Oui, là, maintenant, on est sur l'article...

Mme Weil : Sur l'article 28.

Le Président (M. Bachand) : ...amendé. Exactement.

Mme Weil : Amendé, oui. Donc, paragraphe... peut-être y aller paragraphe par paragraphe, là. Pendant les consultations, je pense qu'il n'y avait vraiment rien de particulier pour l'article 28. Donc, le premier alinéa, c'est vraiment d'assurer qu'il n'y a pas de cumul de type d'aide.

M. Jolin-Barrette : Bien, ma question, M. le Président, c'est est-ce que la députée de Notre-Dame-de-Grâce comme... veut vraiment poser des questions sur l'article 28, ou comme... parce que je viens de donner des explications.

Mme Weil : Vous voulez l'adopter sans en parler?

M. Jolin-Barrette : Bien, c'est vous, si vous avez des questions, parce qu'on dirait que vous cherchez des questions, là.

Mme Weil : Bien, c'est toujours intéressant... Bien, non, c'est que moi, je trouve que c'est toujours important d'avoir la vision. Donc, c'est sûr que le ministre a comme résumé, là, mais je ne sais pas si vous avez fait vos commentaires.

M. Jolin-Barrette : Oui.

Mme Weil : Oui.

M. Jolin-Barrette : Alors, l'objectif de l'article 28 est de faire en sorte, dans un premier temps, de donner...

Mme Weil : Bien, excusez-moi, M. le Président, là, M. le Président...

Le Président (M. Bachand) : Oui, je vous écoute.

Mme Weil : ...on a discuté de ce sujet bien important, là, aujourd'hui. Les interventions étaient très pertinentes au point où le ministre a apporté des amendements. Donc, là, mon collègue a quitté, donc je m'assure qu'on fait le même travail, que le ministre puisse s'exprimer. J'espère que ce n'était pas un commentaire sexiste quand même, oui?

M. Jolin-Barrette : Pardon, pardon, pardon?

Mme Weil : Bien, pourquoi moi?

M. Jolin-Barrette : M. le Président, je suis désolé, je pense...

Mme Weil : Pourquoi on m'attaque?

M. Jolin-Barrette : ...je pense, M. le Président...

Le Président (M. Bachand) : Non, Mme la députée...

Mme Weil : Non, mais pourquoi? Non, mais j'essaie de comprendre. Pourquoi est-ce que le ministre...

Le Président (M. Bachand) : S'il vous plaît, s'il vous plaît. C'est moi qui ai la parole, là. Mme la députée, juste faire...

M. Jolin-Barrette : Je pense, M. le Président, que vous devez rappeler à l'ordre...

Mme Weil : Bien, moi, je rappellerais à l'ordre le ministre.

Le Président (M. Bachand) : Mme la députée, juste faire...

M. Jolin-Barrette : ...puis demander à la députée de Notre-Dame-de-Grâce de s'excuser, de s'excuser.

Mme Weil : Je ne comprends pas pourquoi il remet en question le fait que...

Le Président (M. Bachand) : Mme la députée, je veux juste vous dire que j'ai entendu le ministre, et je vais être honnête avec vous, malheureusement, je ne peux pas concorder avec ce que vous venez de dire. Donc, je...

Mme Weil : Alors, pourquoi, soudainement... Alors, donc... Alors, je demande au ministre de ne pas présumer que j'essaie de faire du temps.

Le Président (M. Bachand) : Mais ce que je veux vous dire...

M. Jolin-Barrette : Je n'ai pas dit ça.

Mme Weil : Bien, c'est comme ça que je l'ai interprété.

Le Président (M. Bachand) : Mme la députée, s'il vous plaît! Ce que je vous dis...

Mme Weil : Un peu de respect de la part du ministre, là.

Le Président (M. Bachand) : ...la question du sexisme, là, je ne peux pas concorder avec vous sur cette question-là...

Mme Weil : D'accord. Je comprends, là, mais...

Le Président (M. Bachand) : ...après ça, sur l'argumentaire des stratégies parlementaires, ça, c'est une autre chose. Alors, je vous cède la parole, Mme la députée.

Mme Weil : D'accord. Donc, ce n'était pas sexiste, mais il n'y a pas de stratégie parlementaire, là.

M. Jolin-Barrette : Bien, M. le Président, moi, je pense que la députée de Notre-Dame-de-Grâce, là, devrait retirer son terme et s'excuser.

Le Président (M. Bachand) : Oui. Je vais écouter Mme la députée de Joliette.

Mme Hivon : Je veux juste dire que la collègue n'a pas accusé — je pense que c'est important de le dire — le ministre d'être sexiste, elle a soulevé une question. Et là je ne pense pas qu'il y a de nature, là, à demander des retraits de propos, et tout ça. Elle a posé la question, elle n'a pas dit : Le ministre est sexiste, là, à ce que j'ai compris.

M. Jolin-Barrette : Bien non, mais Véronique, c'est facile...

Mme Hivon : Pardon?

Le Président (M. Bachand) : Mme la députée de Joliette.

Mme Hivon : Non, non, mais je veux juste dire, revenons à nos discussions.

Le Président (M. Bachand) : Mme la députée de Joliette...

M. Jolin-Barrette : Moi, M. le Président, je vais vous dire une chose, M. le Président.

Le Président (M. Bachand) : Rapidement.

M. Jolin-Barrette : Je réponds à toutes les questions. J'ai lu l'article, j'ai lu les commentaires, et je tentais de trouver la question de la députée de Notre-Dame-de-Grâce, parce qu'il m'apparaissait qu'elle voulait que je relise l'article 28, et là, je ne voyais pas de question. Mais ça va me faire plaisir de répondre à toutes les questions.

Par contre, ce que je n'accepte pas, M. le Président, c'est affubler des allégations de sexisme, alors que, un, je réfute complètement ça, je donne le même traitement à tous mes collègues. Avec le député de LaFontaine, ça arrive qu'on a des passes d'armes, M. le Président, mais je respecte tous mes collègues hommes et femmes.

Et je trouve ça très bas ce que le Parti libéral fait depuis les derniers jours, et notamment la position de la députée de Notre-Dame-de-Grâce, qui, par ailleurs, qui, par ailleurs, a déjà été dans ma position. Et je trouve qu'entre collègues on se doit respect, puis je n'accepte aucunement ça, M. le Président. Alors, je peux réexpliquer l'article 28, si c'est le souhait de mes collègues, ça va me faire plaisir.

Le Président (M. Bachand) : Parfait. Alors, je vous demande de la grande prudence surtout avec tout ce qu'on discute depuis plusieurs jours, plusieurs semaines, et ce qu'on vit comme Québec, puis faire très attention aux commentaires. Alors, revenons, si vous êtes d'accord, avec le temps qu'il nous reste, à l'étude de l'article 28 tel qu'amendé, s'il vous plaît.

Mme Weil : Bien, je veux vraiment dire au ministre que je ne pense pas qu'il est sexiste...

Le Président (M. Bachand) : Parfait. C'est très apprécié.

Mme Weil : ...ça, je peux vous l'assurer. On vient de faire toutes sortes d'amendements, puis le ministre s'est montré très, très sensible à l'enjeu. J'étais choquée que, soudainement, on m'accuse de vouloir faire du temps ou... C'est comme ça que je l'ai compris, que j'ai essayé d'inventer des questions.

Ma réaction, c'est que c'est un article qui est long et dense. On vient d'avoir un débat intense sur autre chose, et ce n'est pas évident, en quelques secondes, de soudainement, bon, changer d'esprit, là. Bon, est-ce que...

Alors donc, j'y vais paragraphe par paragraphe, ça ne prendra pas longtemps, là, je voulais juste voir... Donc là, on est dans un article qui traite de cumul, hein, de cumul de recours. Donc...

M. Jolin-Barrette : En fait, l'objectif général de l'article est de faire en sorte de laisser le choix à la victime. Dans le fond, si elle-même, elle choisit de s'adresser à la cour... de poursuivre au civil son agresseur, dans le fond, on lui dit : Si jamais vous aviez droit, avec l'indemnité de la somme forfaitaire, à hauteur, supposons, de 50 000 $, O.K., mais que son préjudice réel, il est... bien, en fait, non, son préjudice, il est plus élevé... Dans le fond, elle aurait droit à 50 000 $ avec l'IVAC sauf qu'elle obtient de la cour, supposons, 40 000 $. Donc, pour le 10 000 $ qui reste, elle va pouvoir présenter une demande à l'IVAC puis se faire indemniser par l'IVAC.

Donc, au civil, elle va avoir ramassé son 40 000 $, mais l'IVAC lui donnait 50 000 $, donc il va y avoir compensation, puis elle va bénéficier du 10 000 $ suivant, relativement à ce montant-là.

Mme Weil : Ça, c'est le... pour le premier paragraphe, là?

M. Jolin-Barrette : Bien, «la personne peut bénéficier de l'aide offerte au présent titre ou exercer une action civile», donc là on lui laisse le choix, soit que vous présentez votre demande à l'IVAC, soit que vous allez au civil. Ça, c'est le principe de base, on laisse à la personne victime le choix. Ensuite : «...contre toute personne responsable du préjudice qu'elle subit. Elle ne peut pas cumuler une aide en vertu du présent titre et une somme adjugée ou perçue pour les mêmes objets, les mêmes séquelles ou les mêmes préjudices.» Donc la deuxième phrase, ça signifie qu'elle ne peut pas être payée des deux côtés. Donc, elle ne pourrait pas avoir le 50 000 $ de l'IVAC, plus le 50 000 $ de la personne... son agresseur. «Toute somme ainsi adjugée et perçue, soustraction faite des montants engagés pour obtenir celle-ci, est déduite de l'aide versée en vertu du présent titre ou est remboursée au ministre.» Donc là, on dit : Quand vous obtenez le montant de la cour, bien, c'est réduit de l'aide versée au niveau de la somme de l'IVAC, mais, par contre, vous réduisez les montants engagés pour obtenir celle-ci, donc les frais d'avocat, je présume.

Ensuite, le deuxième alinéa : «La personne victime avise le ministre de toute somme adjugée, de toute somme perçue [ou] de tout montant engagé visés au premier alinéa, à la suite de l'exercice d'une action civile.» Donc, ça, c'est l'obligation, pour la personne victime, de dire à l'administrateur du régime : Écoutez, moi, j'ai reçu tel montant. On l'oblige à le dire pour ne pas justement que l'IVAC ait indemnisé la personne, puis que, d'un autre côté, elle se retourne puis elle prend l'action civile, puis, dans le fond, elle se retrouve avec les deux montants. Il faut le divulguer à l'IVAC, le fait que vous avez été indemnisé à ce niveau-là.

Une voix : ...

Le Président (M. Bachand) : Merci beaucoup. Désolé, désolé. Compte tenu de l'heure, ajourne ses travaux sine die. Bonne soirée dans le calme. Merci.

(Fin de la séance à 19 heures)

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